L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des institutions

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des institutions

Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mercredi 17 février 2021 - Vol. 45 N° 120

Étude détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. André Bachand, président

M. Éric Caire

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Marc Tanguay

M. Mathieu Lévesque

M. Martin Ouellet

M. Gaétan Barrette

*          M. Jean-Philippe Miville-Deschênes, Secrétariat à l'accès à l'information et à la réforme des
institutions démocratiques

*          Témoin interrogé par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente minutes)

Le Président (M. Bachand) : Alors, bonjour à tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection de renseignements personnels.

Avant de débuter, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Barrette (La Pinière); M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par M. Nadeau-Dubois (Gouin); Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Ouellet (René-Lévesque).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Sur ce, je vous rappelle qu'en fonction des mesures de distanciation physique énoncées par la Santé publique vous devez conserver votre place assise en commission. Si vous souhaitez vous déplacer ou changer de place, un page devra désinfecter votre place. De plus, le port du masque de procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de prendre la parole dans le cadre de nos travaux.

Lors de l'ajournement de nos travaux, la semaine dernière, les discussions portaient sur l'amendement proposé par le député de Gouin à l'article 12. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, merci, M. le Président. Content de retrouver les collègues, c'est une tradition du mercredi, maintenant, pour parler de ce projet de loi important.

Une voix : ...

M. Nadeau-Dubois : Pardon?

Une voix : ...

M. Nadeau-Dubois : Oui, bien, je... Le leader adjoint a des meilleurs contacts que moi à cet égard. Alors...

Une voix : ...

M. Nadeau-Dubois : Moi, je fais la présomption qu'il a des meilleurs contacts que moi, mais c'est à lui de le confirmer ou de l'infirmer.

J'ai déposé un amendement, quand on s'est quittés, qui porte sur une question qui est centrale, la définition de ce qu'est une donnée sensible ou un renseignement personnel sensible. Je pourrais refaire le plaidoyer que j'ai fait à mon amendement précédent. J'ai précédemment fait un amendement qui avait comme objectif de préciser ce qu'est un renseignement personnel, parce que cette définition-là, c'est ce que beaucoup de groupes nous ont dit en consultations particulières, devait être modernisée à l'aune des nouvelles avancées technologiques.

L'amendement que j'ai déposé la semaine dernière et dont on discute aujourd'hui a été rédigé dans le même esprit, c'est-à-dire comment, comme législateurs, mettre sur pied une définition des données sensibles qui nous permette... bien, qui dure dans le temps et qui protège les citoyens et citoyennes. Parce que, on le sait, les avancées technologiques ont permis de procéder à toutes sortes de combinaisons de renseignements personnels, à toutes sortes de traitements de ces données, ce qui permet de générer des nouvelles données, notamment des données qui sont sensibles.

Il y a notamment le Barreau du Québec et la Commission d'éthique en science et technologie qui nous invitaient à faire ce travail-là, à préciser de quoi est-ce que le législateur parle quand il parle de données sensibles. On avait commencé un peu l'échange à la dernière... la dernière fois qu'on s'est vus, puis le ministre et les gens qui l'accompagnent parlaient beaucoup du travail des tribunaux, là, de la jurisprudence, qui a permis de définir en partie cette notion de renseignement sensible.

Par contre, il m'apparaît important de ne pas laisser complètement à la discrétion des tribunaux ce genre d'élément là parce que c'est des éléments de définition de base de notre régime juridique de protection des renseignements personnels, parce que ce n'est... bien, parce que je pense que c'est le rôle, dans une société démocratique, des élus et du législateur que de mettre les bases de ce genre de concept là que les tribunaux auront, par la suite, le loisir d'interpréter. Donc, c'est l'objectif de mon amendement.

Dernier commentaire pour bien l'expliquer, puis je le répète parce qu'on l'a dit seulement la semaine dernière, et le temps a passé, la liste que je propose, la liste, on pourrait dire, de types de données ou de types de renseignements personnels que je propose, elle n'est pas tirée de mon chapeau. C'est, en fait, une référence aux motifs interdits de discrimination qui sont prévus à l'article 10 de notre charte québécoise des droits et libertés de la personne. Et le raisonnement auquel nous invitaient beaucoup de gens qui sont venus témoigner en commission parlementaire, c'était de dire : Bien, puisque ce sont des motifs interdits de discrimination, n'est-ce pas là une base objective, base rationnelle sur laquelle démarrer la discussion pour définir qu'est-ce qui est un renseignement sensible? Parce qu'en ce moment la définition est pour le moins générale, voire imprécise.

Donc, nous avons simplement repris les motifs interdits de discrimination qui sont à la Charte des droits et libertés de la personne et nous y avons ajouté un élément, c'est-à-dire les caractéristiques biométriques, dans la mesure où ce n'est pas prévu à la Charte des droits et libertés de la personne, mais ça fait partie des renseignements qui sont jugés sensibles par beaucoup de gens qui sont venus nous voir en commission parlementaire. Et c'est déjà un type de renseignement qui est... qu'on retrouve ailleurs dans la législation, c'est-à-dire dans la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information.

Donc, voilà le raisonnement, M. le Président, qui nous mène à déposer cet amendement-là. J'aimerais savoir ce que le ministre en pense et où il est prêt à aller pour qu'on précise ensemble. Et je précise que la liste que je dépose est non exhaustive, hein, on dit «dont, à titre d'exemple», donc c'est clairement une liste qui est non exhaustive. J'aimerais savoir ce qu'il en pense et... s'il n'est pas d'accord avec moi, qu'il serait judicieux de préciser la définition de renseignement personnel sensible avec une liste comme celle-ci qui est non exhaustive.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui, merci, M. le Président. Bien, écoutez, sur le fond, M. le député de Gouin et moi sommes d'accord, effectivement. Ceci étant dit, quelques commentaires.

D'une part, ce n'est pas parce qu'un renseignement peut être un motif de discrimination que ça en fait un renseignement sensible. Par exemple, l'âge ou le sexe sont des motifs de discrimination mais ne sont pas considérés comme des renseignements sensibles. Donc, l'idée de calquer... les principes de la charte sont difficilement transposables sur la définition de renseignement sensible.

Parce qu'il faut bien comprendre, M. le Président, que l'objectif n'est pas de lutter contre la discrimination à cet article-ci mais bien d'établir un régime de protection qui est cohérent avec la valeur de l'information. Et c'est pour ça, par exemple, qu'on va dire que ça prend un consentement express, contrairement à un renseignement personnel, où il y aura des situations où le consentement peut être implicite. Dans ce cas-ci, ça ne fonctionne pas.

Je pourrai aller plus loin et dire que, même au niveau de la protection des systèmes d'information, la donnée qui serait sensible devra jouir d'une protection qui est supplémentaire à, par exemple, un renseignement qui serait peu sensible ou pas sensible du tout. Et là on se ramasse avec... Des fois, on va se ramasser avec l'inverse de ce qu'on veut.

Et je rappelle à mon collègue qu'il y a aussi une volonté... et je sais que, là-dessus, on est à la même enseigne, une volonté de transparence, une volonté d'être capable de donner accès à l'information. Et quelquefois on va se trouver avec l'effet contraire. Donc, un renseignement qui n'est pas sensible, au sens de la définition qu'on a ici, mais qui pourrait devenir un motif de discrimination va donc devenir un renseignement sensible, et donc sa publication, qui pourrait être tout à fait légitime, voire souhaitable, ne sera plus permise parce que là il faudra le protéger d'une façon particulière parce qu'on aura donné cette... on aura fait cette transposition-là qui ne se fait pas.

Et, au final, on amène quand même une notion... Puis je peux comprendre qu'au premier abord ce n'est peut-être pas évident, mais on avait eu cette discussion-là avec le député de La Pinière sur des renseignements qui suscitent un haut degré d'attente raisonnable. Ce n'est pas un concept qu'on amène avec le projet de loi n° 64, on l'avait dans le projet de loi n° 14, et 14 s'est inspiré de ce qui se faisait aussi ailleurs dans la législation. Donc, il y a comme une espèce de ligne directrice qui s'établit.

Et c'est là-dessus où je dis au député de Gouin que la définition, telle qu'elle est là, au niveau juridique, en tout cas, pour avoir parlé avec nos juristes... Puis aucun problème, là, je laisserai compléter la réponse si le député de Gouin n'est pas satisfait de la mienne, là, sans problème, mais, au niveau des juristes, la définition actuelle, elle est satisfaisante au sens où elle précise quand même cette notion-là, et il y a une jurisprudence qui s'établit et qui va continuer à s'établir.

Et aussi, plus tard, avec le consentement des collègues, on va permettre à la CAI d'émettre des lignes directrices, donc de venir préciser ça par des lignes directrices sans donner à la loi, peut-être, une espèce de déséquilibre dans l'interprétation qu'il faut faire de ce qu'est un renseignement sensible. Donc, pour ces raisons-là, je pense que la définition actuelle demeure la meilleure option.

• (11 h 40) •

Le Président (M. Bachand) : Interventions? M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : La raison pour laquelle les intervenants qui sont venus en commission parlementaire nous alertaient sur l'importance de préciser ce qu'est un renseignement sensible, c'est parce qu'il y a des pratiques qui existent dans la société où des renseignements qui, en vertu de l'amendement que je présente, seraient considérés comme sensibles qui, actuellement, sont utilisés avec, mettons, légèreté.

On parlait, la semaine dernière ou l'autre d'avant, d'entreprises... et là je sais que je prends volontairement un exemple dans le secteur privé, on est ici dans le secteur public, mais le ministre me pardonnera de prendre les premiers exemples qui me viennent en tête, des entreprises qui vont faire une utilisation d'un renseignement comme, par exemple, le fait que quelqu'un est enceinte. Et ça va être utilisé pour faire du profilage en matière de publicité. Il y a même... Et c'est documenté comme pratique, on infère à partir de certains renseignements, notamment l'historique de navigation, qu'une personne est enceinte, on fait du profilage commercial à cette personne-là, et il y a même eu des cas où des entreprises modifiaient les prix pour profiter de cette situation puis profiter du fait qu'on avait prédit, grâce à un traitement automatisé des données, grâce à des algorithmes d'intelligence artificielle, le fait que cette personne-là était enceinte. D'ailleurs, l'état de grossesse, là, est mentionné explicitement dans l'amendement que je présente.

Comment faire, avec ce projet de loi, pour que ces pratiques-là soient mieux encadrées, puis même, dans l'exemple que je donne, carrément interdites, parce qu'on devrait... Puis, si c'est un motif, en vertu de la charte... si c'est un motif interdit de discrimination, on ne devrait pas modifier nos pratiques commerciales ou le prix qu'on présente au consommateur en fonction de ça. Donc, comment s'assurer que les entreprises ou les organismes publics traitent ce type de donnée là avec toute la réserve puis la prudence que ce genre de donnée là implique par leur nature même, au-delà du contexte puis au-delà de comment on les utilise?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Je vais répondre au député que je pense qu'on a, puis avec sa notable contribution... on a déjà répondu à une partie de cette question-là, notamment en modifiant la définition de ce que c'est, un renseignement personnel. Maintenant, on dit : Un renseignement personnel, ce qui permet d'identifier une personne physique directement ou indirectement. Donc, tout ce qui est inférence va tomber... permet l'inférence va tomber sous le coup des renseignements personnels. Donc, il y a quand même un régime de protection qui est assuré par le traitement des renseignements personnels qui va être amené par le projet de loi, qui n'existait pas, notamment la notion du consentement explicite pour chaque finalité.

Donc, les situations où une entreprise pourrait collecter des renseignements personnels, d'une part, cette définition-là, maintenant, elle est plus englobante avec les modifications qu'on a faites. Et ensuite, si je collecte des renseignements personnels sur vous, puis on a eu cette discussion-là avec le député de LaFontaine, avec un certain humour, là, où on s'est rendu compte...

Puis j'ai vécu, d'ailleurs, cette expérience-là, M. le Président, je suis allé magasiner avec mon fils, cette fin de semaine, pour son 18e anniversaire. Mal m'en a pris, parce qu'ils vont tous magasiner dans les mêmes boutiques, hein? Ça fait que tu as des boutiques, il n'y a personne, puis tu as des boutiques, tu as des listes... En tout cas, bref, mais tout ça pour dire qu'arrivé à la caisse pour payer un article la personne à la caisse demande l'adresse de courriel. Je dis non, bien non, bien non, pourquoi? Et là de répondre : Parce que maintenant on n'imprime plus de facture, on les envoie par courriel. Ah! O.K., alors je vous donne mon consentement si vous envoyez ça exclusivement pour la facturation. Alors, ça, c'est une finalité qui m'a été exprimée et pour laquelle je donne mon consentement en disant : Si c'est pour m'envoyer une facture, c'est parfait, mais, pour toute autre utilisation, vous ne pouvez pas.

Donc, en adoptant 64, on vient de comprendre que là il y a un consentement pour une finalité. Et toute autre finalité qui pourrait... pour lesquelles on prendrait ce renseignement-là, que j'ai fourni, par exemple, monter des listes d'appel, du télémarketing, il n'y a pas de consentement, il n'y a pas de consentement.

Mais je le rappelle... Puis je comprends l'objectif du député de Gouin, je partage son objectif, je pense que nous nous attaquons à cette situation-là avec ce qui a été fait puis avec d'autres articles aussi, qui sont à venir, M. le Président, là, il y aura d'autres articles sur le consentement puis d'autres... On va parler des évaluations relatives aux facteurs à la vie privée, on va parler de la vie privée par défaut. Il y a d'autres mesures qui s'en viennent, M. le député, mais déjà on a adressé une partie de ce problème-là, c'est-à-dire, on a mis... on met en place les premières briques d'une solution.

Ce à quoi je nous mets... Ce contre quoi je nous mets en garde, c'est qu'en donnant... en transposant l'idée de la discrimination dans le projet de loi, on vient de donner une notion de renseignement sensible à des renseignements qui, par leur nature, ne le sont pas. Donc, il n'y aura pas d'attente raisonnable, il n'y aura pas un haut degré d'attente raisonnable de vie privée. Donc là, on va donner comme deux définitions contradictoires à un même renseignement. Donc, votre âge, pour votre âge, il n'y a pas... pour le mien, oui, mais, pour le vôtre, non, il n'y a pas... non, mais, blague à part, il n'y a pas de haut degré d'attente raisonnable, c'est un renseignement qui peut être communiqué puis pour lequel le niveau de préjudice, par le renseignement lui-même, n'est pas nécessairement élevé.

Par contre, ça peut être un motif de discrimination, surtout à mon âge, surtout à mon âge, puis là je le dis très sérieusement. Je veux dire, un homme de 55 ans qui se cherche un emploi, ça se peut que ça soit plus difficile que pour un homme de 25 ans. Puis je dis homme, mais ça peut être femme. Alors, ça peut être un motif de discrimination. Ça ne fait pas de ce renseignement-là un renseignement sensible par sa nature.

En fait, c'est contre ça que les juristes nous mettent en garde. Et c'est la raison pour laquelle la définition que nous mettons dans le dernier alinéa de l'article est une définition qui peut sembler large mais qui, dans le contexte de ce qu'on est en train d'établir dans le corpus législatif, donc en reprenant cette idée-là de degré d'attente raisonnable en matière de vie privée, va donner finalement une définition à travers les lignes directrices, la jurisprudence, va donner une... va circonscrire les renseignements qui devraient être sensibles aux renseignements qui, de par leur nature, sont sensibles.

Puis là je vais juste compléter ma réponse, parce que le député de Gouin amène... rajoute les caractéristiques biométriques qui, à leur face même, sont des renseignements, je dirais, même ultrasensibles, là. On ne fera pas des catégories, là, mais c'est extrêmement sensible, à tel point que c'est déjà encadré. L'utilisation, le stockage, la communication, la suppression, c'est déjà encadré dans la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, loi qui est si chère au coeur du député de LaFontaine mais qui prévoit... et qu'on va modifier, d'ailleurs, hein, dans cette loi-ci, là, on va quand même ajouter des éléments sur la communication à la Commission d'accès à l'information, et pour laquelle la Commission d'accès à l'information a déjà des prérogatives très importantes quant à ce qu'on peut faire avec ça.

Donc, voilà, c'est pour ça, M. le Président, je pense que la définition actuelle peut sembler large, mais je pense qu'elle ne l'est pas tant que ça, à cause du fait que ça suscite un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée et qu'il y a déjà une jurisprudence qui se met en place, qui va continuer à se mettre en place.

Puis je vous dirais aussi, pour conclure, que, quand les commentaires... c'est que les commentaires qui ont été faits l'ont été, faits. La notion de permettre à la CAI d'émettre des lignes directrices n'était pas dans le projet de loi, donc c'est une notion que nous allons amener qui vient, encore une fois, je pense, là, permettre à la CAI d'avoir cette souplesse et cette flexibilité pour peut-être venir préciser les zones d'ombre qui pourraient être laissées par la définition actuelle.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin.

• (11 h 50) •

M. Nadeau-Dubois : Le ministre dit que... prend l'exemple de l'âge pour argumenter qu'il y a peut-être, dans l'amendement que je propose, un risque d'être trop rigide, moi, c'est comme ça que je comprends, ou, en tout cas, pas assez flexible, ce qui est un peu deux manières de dire la même chose. Et il me dit : L'âge, ça ne devrait pas être considéré comme un renseignement sensible parce que ça ne suscite pas d'attente raisonnable... un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée. Ça, c'est l'opinion du ministre, c'est...

Dans le fond, sur quelle base objective est-ce qu'on peut affirmer que... Puis là je prends l'âge, là, mais, tu sais, on pourrait prendre l'état civil, la couleur. Sur quelle base est-ce que le ministre dit : Ça, ça ne génère pas un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée? Parce que moi, je pourrais dire : Bien, il me semble que, par contre, la grossesse ou, mettons, l'origine nationale... Moi, je pourrais argumenter que, dans beaucoup de circonstances, ces deux types d'information là suscitent un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée. Donc, qu'est-ce qui... C'est quoi, le critère pour discriminer, puis je le dis sans jeu de mots, ce qui génère un haut degré raisonnable... un haut degré d'attente raisonnable et ce qui ne génère pas un haut degré d'attente raisonnable?

M. Caire : En fait, c'est parce qu'on a ici deux principes qui ne peuvent pas être confondus, qu'on ne devrait pas confondre. Premièrement, c'est parce que le collègue aborde ces questions-là sous la base de la discrimination. Et il n'y a aucun doute, aucun doute, que l'âge, la couleur peuvent être des motifs de discrimination. Par contre, un renseignement personnel, un renseignement sensible, donc un renseignement personnel sensible, c'est un renseignement dont la publication amène, par exemple, un préjudice grave. Donc, le fait que mon âge... que je communique mon âge me cause un préjudice grave, à l'exclusion, bien sûr, de ce qu'on appelle la discrimination, qui est déjà encadrée par la charte des droits et libertés et qui ne doit pas être un motif. Donc, je peux communiquer mon âge, mais ça ne doit pas faire en sorte que je suis victime de discrimination. Je ne sais pas si le député voit la nuance.

Et donc, quand on parle d'un renseignement sensible, c'est un renseignement dont la communication, dont l'utilisation, dont la façon de le stocker informatiquement va amener des mesures de protection supplémentaires. Je dois avoir des contraintes de sécurité supplémentaires sur ces renseignements-là parce qu'ils sont sensibles. Et le fait de communiquer... le simple fait de communiquer ces renseignements-là peut causer un préjudice grave.

Si je communique votre numéro d'assurance sociale, on peut penser qu'il y a un préjudice grave. Si je communique votre âge, le préjudice ne peut pas être de la même ampleur, parce que la situation fait en sorte que... Puis toujours pas dans un contexte de discrimination, je ne le place pas dans un contexte de discrimination. Parce que le simple fait de communiquer votre âge ne veut pas dire que vous allez être discriminé, ce n'est pas automatique. Et il y a des situations où communiquer votre âge est tout à fait pertinent.

Mais les renseignements sensibles, de par leur nature, s'ils sont communiqués, là il y a une attente, c'est ce qu'on appelle une attente raisonnable à la vie privée. Je prends votre numéro d'assurance sociale, bien oui, là, c'est clair que je prends vos informations bancaires, numéro de carte de crédit, le numéro CVS, la date d'expiration. Avec ça, je peux fabriquer une fausse carte puis vous monter un solide compte de banque, là, solide compte de banque, là, avec votre identifiant, mot de passe, question secrète, si je peux accéder à vos informations bancaires, je peux aller vous négocier un prêt de 10 000 $ en cinq minutes. C'est un préjudice grave. Avec votre âge, oui, c'est vrai, effectivement, il pourrait y avoir discrimination, mais il pourrait, ce n'est pas automatique. Puis sinon, bien, votre âge, quel préjudice grave, je ne peux pas vous voler votre identité juste avec l'âge, là, ce n'est pas possible, je ne peux pas...

Alors, c'est ça, c'est pour ça que... Puis, encore une fois, là, Me Miville-Deschênes a toujours l'opportunité de cogner dans la fenêtre si je suis en train de dire n'importe quoi, mais la sensibilité d'une information et le fait que ce soit ou que ça pourrait potentiellement être un motif de discrimination sont deux choses différentes.

M. Nadeau-Dubois : C'est une discussion très importante. Le ministre utilise l'exemple du vol d'identité, puis c'est un bon exemple, pour dire : De ce point de vue là, du point de vue d'un vol d'identité, le numéro d'assurance sociale est plus sensible que l'âge. Du point de vue du vol d'identité, c'est vrai, mais moi, je l'invite à considérer un autre point de vue, celui de la discrimination, en disant : Si un renseignement peut être source de discrimination... Et la carte de crédit, le simple numéro de carte de crédit en soi ne peut pas être utilisé, ça ne peut pas être utilisé pour discriminer quelqu'un. On pourrait dire le dossier de crédit, mais le numéro de carte lui-même, là, le numéro, le CVS, la date d'expiration, ça, en soi, ça ne peut pas avoir... ce n'est pas un renseignement personnel dont l'utilisation peut générer une discrimination en vertu de la charte.

La liste que je présente, ce sont des renseignements personnels qui, du point de vue, en effet, là, du vol d'identité, on pourrait se dire : C'est pas mal moins sensible qu'un numéro de carte de crédit, mais, du point de vue des effets discriminatoires potentiels, ils sont beaucoup plus sensibles, et, je répète, là, du point de vue des effets discriminatoires potentiels de ces renseignements-là.

D'ailleurs, c'est pour ça que, dans le cahier fourni par le ministre, où on explique les articles, on peut lire : «La détermination de la sensibilité [du] renseignement dépend du contexte, mais il est généralement reconnu que les renseignements relatifs à la santé, aux finances, à l'origine raciale ou ethnique, aux convictions politiques ou religieuses, à la vie sexuelle ou à l'orientation sexuelle d'une personne constituent des renseignements sensibles.» Donc, il y a à la fois les exemples que le ministre me donne, les renseignements relatifs aux finances, mais il y a aussi... Ça recoupe quand même pas mal, en tout cas à plusieurs égards, l'amendement que je présente, c'est-à-dire les renseignements relatifs à la santé, origine raciale ou ethnique, convictions politiques ou religieuses.

Donc, il y a comme deux types de raisonnements, puis je ne suis pas prêt à dire que le raisonnement que je vous présente est sans faille, absolu et la vérité de révélation divine, mais il me semble qu'il y a là quand même un critère à considérer pour définir ce qui est sensible ou pas comme renseignement. Il y a le critère d'est-ce que ça peut permettre un vol d'identité, est-ce que ça suscite un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée, ça, c'est un critère. Puis il est pertinent, ce critère-là, puis c'est pour ça que mon amendement ne propose pas d'effacer ce critère d'est-ce que ce renseignement-là suscite un haut degré d'attente pour la vie privée. Et c'est un critère pertinent.

Moi, je lance l'idée, je soumets l'hypothèse, puis, encore une fois, je ne le fais pas juste par plaisir, là, il y a deux organisations crédibles qui sont venues nous en parler en commission parlementaire, je lance l'idée qu'un autre critère à utiliser pour définir ce qu'est une donnée sensible, ça pourrait être les faits potentiellement discriminatoires. Puis ce n'est pas, quant à moi, deux critères qui s'opposent. C'est deux critères qui sont tous les deux valides puis qui peuvent, selon les circonstances et selon le contexte, être tous les deux utiles.

Parce que là on... Puis on peut tomber dans l'échange d'anecdotes ou d'exemples, mais, tu sais, l'âge, il y a des circonstances, oui, ça peut être utilisé comme donnée pour faire de la discrimination. Et donc, du point de vue de l'effet discriminatoire potentiel, il y a une sensibilité supplémentaire à l'âge par rapport au numéro de carte de crédit. Le ministre, lui, a une perspective qui est différente et que moi, je juge complémentaire à la mienne, c'est de dire : Oui, mais du point de vue de la vie privée, c'est plutôt le numéro de carte de crédit qui est plus sensible que l'âge.

Donc, encore une fois, je prends le temps de l'expliquer pour montrer que c'est deux perspectives différentes sur la notion de sensibilité du renseignement. Puis moi... Puis plus je discute avec le ministre, plus ça m'apparaît clairement, il me semble que ça ne s'oppose pas. Il me semble que c'est complémentaire et qu'il y a sans doute moyen, dans le projet de loi, d'intégrer cette question-là.

• (12 heures) •

Puis le ministre parlait de l'importance de... Tu sais, le ministre disait : S'il y a divulgation de l'âge, ça a moins d'impact sur la vie privée, notamment pour un potentiel vol d'identité, que la divulgation, par exemple, d'un numéro de carte de crédit. L'autre réponse que j'aurais pour lui, c'est qu'il n'y a personne qui dit que les renseignements sensibles doivent être cadenassés à quintuple tour et jamais, jamais, jamais utilisés, jamais, jamais, jamais pour rien. Je pense qu'il y a, par exemple, plutôt un consensus sur le fait que même des données de santé, si elles sont bien traitées, bien conservées, bien anonymisées, peuvent servir, par exemple, à des projets de recherche. Moi, j'ajouterais : dans un contexte qui n'est pas commercial, dans un contexte vraiment d'avancement de la connaissance, pas dans un contexte où on veut faire du profit avec ces données-là.

On y viendra, à ce débat-là, en temps et lieu, mais il n'y a personne qui dit que, par essence, les renseignements personnels doivent être inutilisables. Mais il s'agit de dire : Puisqu'ils sont sensibles et puisque leur utilisation peut générer des effets discriminatoires, il faut les encadrer par un cadre juridique différent, spécifique, notamment en matière de consentement, mais pas seulement.

Il est là, mon raisonnement. Est-ce que l'effet discriminatoire potentiel de renseignements personnels ne devrait pas être pris en compte dans la définition de ce qu'est un renseignement sensible? Puis peut-être que le ministre a une partie de la réponse, peut-être que les gens qui l'accompagnent aussi... ont aussi une partie de la réponse, ce que je me demande. Et je pose la question en toute candeur : Est-ce que les tribunaux n'ont pas eu un avis là-dessus, notamment?

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Caire : Oui. Merci, M. le Président. Bien, en fait, on revient au débat, au débat de fond qui est de dire : La discrimination est une chose que l'on interdit par la charte des droits et libertés et, bon, différentes législations qui arrivent là-dessus. Mais je réitère qu'un renseignement qui peut amener à de la discrimination n'est pas nécessairement un renseignement qui est sensible. Sensible au sens où sa simple diffusion cause un préjudice à la personne à qui appartient le renseignement comme tel.

Et, quand on parle d'un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée, ce qu'on dit, dans le fond, c'est ça, c'est : Est-ce que cette information-là... Est-ce que la communication ou une mauvaise utilisation de cette information-là amène un préjudice important à ma vie privée? Puis on ne parle pas de discrimination, là. On ne parle pas de discrimination, on parle de... Et c'est là où je ramène les exemples que j'ai donnés à mon collègue, le fait qu'on diffuse, ou le fait que je me fasse voler ma date d'anniversaire, parce que c'est de ça dont on parle, là, ou le fait qu'on communique dans un malheureux courriel au mauvais destinataire ma date d'anniversaire, est-ce qu'il y a, là, pour moi, un préjudice grave? En soi, non. En soi, non. Le fait qu'on tente d'obtenir ma date d'anniversaire, je ne sais pas pour quelle raison on pourrait faire ça, là, que ce soit diffusé, est-ce qu'il y a un préjudice pour moi? Non. Bien, pas nécessairement. Je dis non. Ce n'est pas vrai. Pas nécessairement. Ce n'est pas... En soi, le renseignement en soi ne porte pas ce gène-là, si j'ose m'exprimer ainsi. Est-ce que je peux être discriminé sur la base de mon âge? Oui, bien sûr. Est-ce que je peux être discriminé sur la base que j'ai des cheveux blancs? Bien oui. Est-ce que je peux être discriminé sur la base du fait que je suis une femme ou je suis... j'appartiens à une minorité culturelle? Bien sûr que oui, bien sûr que oui. Mais est-ce que ce renseignement-là, en soi, est porteur de préjudice quant à la vie privée? Bien non, pas nécessairement. Donc, c'est pour ça qu'on parle de la notion d'un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée.

Et là je vais amener mon collègue dans l'autre univers, parce qu'il dit : Ça ne veut pas dire qu'on ne peut plus s'en servir. Il a raison. Mais ça veut dire que s'en servir devient beaucoup plus compliqué, parce qu'on ne manipulera pas des renseignements sensibles comme on va manipuler des renseignements personnels, comme on va manipuler des renseignements généraux. On s'entend. Je prends un exemple au hasard. Le nombre de lampadaires au Québec, on met ça sur le site donneesquebec.ca, là. C'est une donnée ouverte. Il n'y a pas de protection particulière à mettre autour d'une information comme celle-là. On s'entend qu'un renseignement personnel, oups! ça, c'est moins... Tu sais, c'est... Ça, on ne mettra pas ça sur le site de données ouvertes du Québec, là, on s'entend. Puis des renseignements sensibles, on en met une couche de plus. On en met une couche de plus.

Alors, la mobilité de l'information demeure quand même quelque chose d'important, et c'est pour ça qu'on amène la notion de renseignements sensibles versus renseignements personnels, versus tous les autres renseignements qu'il peut y avoir. Et la protection dont ces renseignements-là vont... dont ils vont faire l'objet va être en conséquence, va être en conséquence. Alors, s'il n'y a pas une attente, un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée, bien, M. le Président, je veux dire... Puis, si on va... Puis je vous donne un exemple. Je donne un exemple à mon collègue. On va sur la page Facebook, on met des photos de l'anniversaire de notre fils, de notre fille, de nous-mêmes. Puis cette semaine, je regardais, justement, sur Twitter, les bonnes fêtes dont on fait... Puis, d'ailleurs, je joins mes voeux à ceux... en retard, mais bon, à ceux de mes collègues pour le chef du troisième groupe d'opposition. C'est sur Twitter. Sa date d'anniversaire est sur Twitter. Il y a-tu un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée quand on met une information comme celle-là sur Twitter? Je pense que non. Tu sais, ça ne peut pas difficilement être plus public que ça, là.

Alors, M. le Président, comprenez-vous que, si on en fait un renseignement sensible, oh! là, on a un problème, là. Je fais quoi avec ça, là? Comment je gère ça?

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin. Après, j'ai le député de LaFontaine.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Oui, après ça, à vous, M. le député. Désolé.

M. Nadeau-Dubois : Je pourrais aussi prendre la décision personnelle de mettre mon code génétique entier sur les médias sociaux puis, si je le divulgue moi-même, je le divulgue moi-même. Je sais qu'on est capable d'avoir une conversation sérieuse là-dessus, ça fait que restons sur des exemples... Parce que, sinon, je veux dire, c'est vrai que moi, je peux... Quiconque peut diffuser n'importe quel renseignement volontairement sur à peu près n'importe quoi. Puis, si moi, je décide de publier l'ensemble de mes problèmes de santé, c'est toujours bien la décision que j'ai prise, puis les gens en feront ce qu'ils veulent. Ça fait que... Bon.

M. Caire : C'est vrai.

M. Nadeau-Dubois : Puis je ne veux pas insister inutilement, ça fait que je vais poser une question bien, bien, bien simple, là. Tu sais, moi, l'argument que je présente, c'est l'effet potentiellement — potentiellement, pas assurément, pas à tout coup, pas c'est sûr que ça va être utilisé — pour faire de la discrimination. L'argument que je présente, c'est l'effet potentiellement discriminatoire. Ne devrait-il pas être un des critères qu'on utilise pour définir un renseignement sensible? Je pose cette question-là, et le ministre me répond toujours : Oui, mais ça peut peut-être faire de la discrimination, mais ça ne génère pas un degré d'attente... un haut degré d'attente pour la vie privée. Puis là moi, je pourrais faire l'argument inverse puis dire : Oui, mais ça génère un haut degré d'attente pour la vie privée, mais ça ne peut pas créer de discrimination.

Ça fait que ce que j'essaie d'argumenter, c'est qu'on n'a pas à choisir entre les deux puis que les deux critères peuvent être pertinents pour définir ce qu'est un renseignement sensible. Ça fait que, moi, au lieu de me redonner les exemples qu'il m'a déjà donnés, puis là moi, je pourrais redonner les mêmes exemples que j'ai donnés, puis là on peut danser longtemps. Ma question, puis peut-être que les gens qui accompagnent le ministre peuvent aussi m'aider à trouver la réponse à cette question-là, c'est : Pourquoi évacuer l'effet potentiellement discriminatoire comme critère pour définir ce qu'est un renseignement sensible?

M. Caire : Puis je vais laisser Me Miville-Deschênes compléter, là, parce qu'un renseignement qui peut être un motif de discrimination peut être un renseignement qui a un caractère plus large, voire public, et donc qui n'est pas un renseignement sensible. Puis je vais laisser Me Deschênes, avec la permission de la commission.

M. Nadeau-Dubois : Mais juste là-dessus, mais c'est qu'il n'est pas un renseignement sensible en vertu de la définition actuelle. Mais moi, je propose de transformer la définition. Est-ce que ça, c'est... Pourquoi est-ce que cette... Parce que, dans le fond, le ministre me dit : En vertu de la définition d'un renseignement sensible selon laquelle est un renseignement sensible ce qui génère des hautes attentes en matière de vie privée, l'âge, puisqu'il ne génère pas des hautes attentes en matière de vie privée, n'est pas sensible. Mais là c'est parce qu'on est en train d'avoir un débat sur la définition même de ce qu'est un renseignement sensible. Donc, sa réponse ne peut pas s'appuyer sur la définition que je souhaite changer, sinon, on est condamnés à ne jamais se comprendre, et ce n'est pas ce que je souhaite.

Alors, comment on fait pour avoir le débat sur la définition même du renseignement sensible? Puis peut-être qu'il y a des décisions des tribunaux que je ne connais pas qui répondent à cette question-là. Est-ce que l'effet potentiellement discriminatoire ne pourrait pas être ajouté à ce qu'est un renseignement sensible? C'est ça, vraiment, le fond de ma question.

• (12 h 10) •

M. Caire : Parce qu'un renseignement qui a un caractère public, par définition, ne peut pas être un renseignement sensible. Un renseignement sensible, c'est un renseignement que vous allez protéger, c'est un renseignement dont vous allez tenter de restreindre la communication. Or, le fait que je sois un homme n'est pas un renseignement que je peux protéger. Je veux dire, c'est assez évident que je suis un homme. Donc, je peux être discriminé là-dessus. C'est évident que je suis un homme d'un certain âge. On me regarde, on le voit, ce n'est pas un renseignement que je peux protéger. Pour des personnes qui sont membres d'une communauté visible, bien, cette situation-là, elle est évidente. Ce n'est pas un renseignement sensible.

Et je prenais le numéro d'assurance sociale parce que mon numéro d'assurance sociale, il n'est pas écrit dans mon front. Si je ne le communique pas, vous ne l'aurez pas. Vous ne l'aurez pas. Le fait que je parle français, j'ouvre la bouche, c'est assez évident. Ce n'est pas quelque chose... Ce n'est pas... Puis, de toute façon, ce n'est pas un renseignement que, par sa nature, je devrais cacher.

Or, la discrimination, c'est une chose. Le renseignement sensible, un renseignement dont la communication doit être restreinte, dont la diffusion doit être restreinte, c'est une autre chose. On parle de deux choses différentes qu'on ne doit pas mettre dans le même plat. C'est la raison pour laquelle... Puis je vais laisser Me Miville-Deschênes compléter, il semble être impatient de nous adresser la parole. Donc, avec le consentement de la commission...

Le Président (M. Bachand) : Consentement des membres?

M. Caire : Je comprends la préoccupation de mon collègue. Je lui dis juste qu'on met deux choses dans le même plat qui n'ont pas d'affaire dans le même plat. Ça ne veut pas dire que la discrimination n'est pas quelque chose qu'on ne doit pas combattre, ce n'est pas ça, là, mais un renseignement personnel, c'est quelque chose dont je ne veux pas qu'il soit communiqué, d'où le principe de vie privée. Ça m'appartient, c'est ma vie privée, c'est mon jardin secret. Donc, des renseignements qui ont un caractère public ou évident ne sont pas, par définition, des renseignements secrets qui appartiennent à mon jardin privé, à ma vie privée. Puis je vais laisser Me Deschênes me contredire.

Le Président (M. Bachand) : Donc, avec le consentement des membres, Me Miville-Deschênes.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, la discussion souligne, selon moi, l'importance de maintenir une définition contextuelle, parce qu'effectivement, dans la définition même d'un renseignement sensible, on dit que, «par sa nature [...] ou en raison du contexte de son utilisation [...] de sa communication, il suscite un haut degré...»

Donc, la nature du renseignement peut faire en sorte que ça suscite un haut degré d'attente raisonnable, mais le contexte d'utilisation n'est pas exclu non plus. Donc, une utilisation qui aurait une finalité, parce que, souvent, la discrimination, c'est de la façon dont on utilise un renseignement qui aurait une finalité, là, discriminatoire, bien, c'est pris en considération au sein même de cette définition-là. Donc, l'âge d'une personne, dans certains contextes, pourrait être considéré comme un renseignement qui suscite un haut degré d'attente raisonnable. De là l'importance, selon moi, de conserver une approche très contextuelle, parce qu'on ne peut pas, dans une loi, dire : Ceux... Ces renseignements-là vont être sensibles puis ceux-là, ils vont l'être... ne le seront pas. Parce que ça dépend des critères donnés par la Cour suprême, des attentes de la personne et du contexte d'utilisation notamment.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je vais demander, d'entrée de jeu, à mon collègue de Gouin, de me pardonner, parce que je vais appuyer son amendement. Alors, ceci étant dit, la liste des noms, mais des fois ce n'est pas un gage, ce n'est pas bien reçu.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Tanguay : Je vais la repratiquer. M. le Président, je vais la repratiquer. Je regardais la face du ministre, je me demandais quelle face qu'il faisait en arrière, mais je n'ai pas de rétroviseur. Il est caché. C'est bon.

Des voix : ...

M. Tanguay : Ah! c'est bon. Bref, la discussion... puis effectivement c'est une discussion importante, et on est au coeur de ce qu'on veut protéger. Je comprends ce que le ministre dit lorsqu'il dit : Bien, mon âge, c'est évident, mon sexe et ainsi de suite.

Deux choses. J'aimerais dire oui, mais ça revient à : Est-ce que ça suscite un haut degré d'attente raisonnable? Est-ce qu'il y a une attente raisonnable? Si je ne divulgue pas ma date d'anniversaire sur les réseaux sociaux, si je garde ça privé, si je... On sait que la date d'anniversaire peut parfois être utilisée pour le vol d'identité, date d'anniversaire. Alors, il y a tout l'aspect... Puis le ministre pourra me dire : Bien, oui, c'est pour ça qu'on l'a mis dans la loi. On va y aller au cas par cas. Si l'attente... Et si je mets ma date d'anniversaire pour me faire souhaiter bonne fête par les 12 personnes qui me suivent, je la rends publique. Bien, à ce moment-là, il n'y a plus d'expectative, il n'y a plus d'attente raisonnable. Ça, je le comprends. Par contre, dans certains cas, il y aura une attente raisonnable. Ça ne sera pas publié, puis c'est réellement du cas par cas. Le fait de les nommer aurait eu le bénéfice de dire : Bien, ça, notamment, ça peut... Oui, que c'est hautement sensible et que l'utilisation fautive, soit pour voler l'identité ou pour discriminer... On est rendu au fruit de l'arbre empoisonné. On peut débattre là-dessus, mais l'objectif, c'est qu'il n'y ait pas d'arbre empoisonné, que ça ne soit pas utilisé puis détourné.

Est-ce que le ministre... Puis on discutait, là, pour faire avancer les choses, parce que c'est trop général, c'est trop vague puis qu'il y a trop... peut-être la donne trop facilement, puis qu'on ne peut pas généraliser sur le sexe, sur la couleur, et ainsi de suite. Le ministre ne reconnaît-il pas... Puis on est allé chercher deux choses. L'article 10 de la charte québécoise des droits et libertés de la personne ne comprend pas «caractéristiques biométriques», qui revient dans l'amendement du collègue de Gouin, puis ce n'est pas sans raison. C'est parce que «caractéristiques biométriques», on est là plus que jamais. On parle, ici, des traits physiques, comportementaux, puis les systèmes biométriques, par exemple, le visage, les empreintes digitales, la voix d'une personne. On est là en 2021.

Ne reconnaît-il pas que, là, on pourrait le nommer dans une courte liste? On jase, là. Droit, à titre d'exemple... Dont, à titre d'exemple, les caractéristiques biométriques. Et, M. le Président, l'autre élément qui revient, je pense que c'est dans les articles 90 du projet de loi, des renseignements de santé. Donc, notamment des caractéristiques ou mesures biométriques, c'est ça, les mots utilisés ailleurs dans la loi, et des renseignements de santé. Est-ce que le ministre pourrait reconnaître que ça... Là, on commence à préciser des éléments. Puis, si le collègue de Gouin veut en rajouter... Mais mon point, puis je termine là-dessus, je ne veux pas être trop long, c'est que ça vaut la peine de nommer, dans certaines lois, du notamment, pour qu'on ait une idée de quoi on parle. Ce n'est pas exclusif, mais ça, ça envoie le bon signal.

Surtout qu'on va en reparler, de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, on vient juste changer un 60 jours dans l'article 45 de la loi, là. Il est important, mais la loi fait quoi, 50, 60 articles. Puis je vais lire assidûment le rapport qui, de mémoire, en page 13, dit : «Si la [loi] a été adoptée il y a près de 20 ans, il faut pourtant constater que [le] texte n'a pas encore été intégré par une bonne partie de la communauté juridique.» Ça revient à ce qu'on disait, que ce soient des praticiens, des plaideurs, des juges, peu importe. Alors, on va avoir un gros ménage à faire là-dessus. Et loi d'il y a 20 ans, je viens de me rendre compte que, crime! elle n'est pas appliquée par les praticiens, mais ils étaient visionnaires, il y a 20 ans, on parlait, dans cette loi-là, de mesures biométriques. Alors, O.K., peut-être qu'elle était trop jeune.

M. Caire : Puis elle est d'actualité, hein? Vous la lirez, là, M. le député.

M. Tanguay : Oui, mais il va falloir la dépoussiérer. Ça fait qu'elle avait... Elle avait les bons outils?

M. Caire : Mais ce bout-là, il est solide, là.

M. Tanguay : Elle avait les bons outils.

M. Caire : Oui. Oui.

M. Tanguay : C'est comme si on avait un outil de guerre dans les années 60, rayon laser, mais là on ne savait pas comment ça marchait, puis tout ça. Puis là, woups! en 2020, bien là, O.K., oui, là, on va utiliser ça. Alors, je lance l'idée. C'est l'amendement du collègue de Gouin. On va en disposer, mais le ministre pourrait-il, pour ces raisons, concevoir que nous pourrions, avec le collègue de Gouin, là, puis je ne sais pas ce qu'il en pense, d'ajouter «notamment, des caractéristiques ou mesures biométriques et des renseignements de santé», puis on pourrait en rajouter d'autres, faire de quoi, là? Oui.

Le Président (M. Bachand) : Merci.

M. Caire : Rapidement, là, M. le Président, je rappelle au collègue un argument que j'ai servi pour d'autres amendements. J'entends ce que le collègue de LaFontaine dit. Il est évident pour moi que les caractéristiques biométriques sont des renseignements sensibles, que les renseignements de santé sont des renseignements sensibles. Puis je veux juste que, comme parlementaires, comme législateurs, on se conscientise, là, puis Me Miville-Deschênes nous a déjà mis en garde contre ça parce que, par interprétation, on pourrait en arriver à la conclusion que des renseignements sensibles sont les renseignements de même nature.

Puis là je veux aller chercher un petit peu de l'argumentaire de mon collègue de Gouin, parce qu'il est... il y a des renseignements qui sont des motifs de discrimination et qui peuvent être des renseignements sensibles, qui se regroupent, pas parce qu'ils sont des motifs de discrimination, mais par le fait qu'ils sont sensibles par leur nature même, par le fait qu'ils sont relatifs à ma vie privée et que, tu sais, dans la théorie des ensembles, là, l'intersection fait en sorte qu'ils sont aussi des motifs de discrimination.

Et donc, si on avait cette précision-là, la crainte qui est exprimée, puis je vais laisser Me Miville-Deschênes expliquer, mais c'est que l'interprétation qui pourrait être faite serait que les renseignements sensibles doivent être de même nature. Puis là on vient peut-être d'avoir l'effet contraire de ce qu'on veut, c'est-à-dire trop limiter la capacité du tribunal à inclure et l'amener plutôt à exclure. Donc, je soumets ça respectueusement à la commission. M. le Président, avec le consentement des collègues, je laisserais peut-être Me Miville-Deschênes élaborer sur le concept.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui, bien, je pense, ça a été bien résumé, en fait, là, de... Puis vous avez compris qu'on est...

Une voix : ...

• (12 h 20) •

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Vous aurez compris que je suis plutôt favorable au maintien de la définition contextuelle à cause, notamment, de ce risque-là de dire : Bon, on nomme «biométrie», on nomme «de santé», est-ce qu'a contrario, puisque c'est des renseignements qui sont de même nature, quand même on touche beaucoup aux caractéristiques, là, je dirais, physiques ou physiologiques de la personne... Là, est-ce que, si on tombe dans les renseignements financiers, comment dire, le fardeau pour démontrer qu'ils sont sensibles va être plus important? Est-ce que ça va être plus difficile pour un organisme ou pour les tribunaux de reconnaître d'autres renseignements sensibles? Donc, toute énumération comporte ce risque-là, là, je dirais.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Bien, il y aurait lieu... Puis je suis en train de réfléchir, puis effectivement c'est un argument qui tient la route. Si vous me demandez, M. le Président : Qu'est-ce que vous voulez manger?, puis je vous dis : Bien, j'aimerais ça manger des pommes puis des oranges, vous allez dire : O.K., il est dans les fruits, là. Puis je dis : Bien, notamment. Comment ça il n'y a pas de viande? Il n'y a pas... Bien, je comprends.

Par contre, y aurait-il lieu, puis je réfléchissais à ça en vous écoutant, messieurs, d'avoir une catégorie autre? Parce que la liste pourrait ne pas s'arrêter là : caractéristiques biométriques, caractéristiques reliées à la santé, de même que toutes autres caractéristiques intrinsèques à la personne. C'est quelque chose qui pourrait ramasser l'ensemble de l'oeuvre de l'article 10 de la charte, là, toujours analysé selon le contexte puis l'expectative qui découle de source. Si je mets ma date de naissance sur mon Facebook, je n'ai plus d'expectative, là. Alors, y aurait-il moyen, puis peut-être... Je l'ai considéré, on en a parlé, Sophie pourrait en être témoin, je dis : Sophie, on met-tu à ça, tu sais, Revenu Québec, là, tu sais, toutes les informations financières? Puis on l'a considéré. Puis on aurait pu le mettre. Puis là on toucherait pas mal à quatre gros domaines : biométrique, santé, quelque chose qui dirait Revenu Québec, là, parce que, si vous avez, M. le Président, mon avis de cotisation, vous avez tout, là. Vous avez mon nom, mon adresse, mon numéro d'assurance sociale, mon âge. C'est l'enfer. Alors, ça, on pourrait le mettre plus, selon le contexte, des caractéristiques qui relèvent de l'intégrité de la personne.

M. Caire : Bien, M. le Président, si je peux me permettre, puis je lance le... On jase, là, aux collègues. Ça se pourrait-tu qu'on essaie de trop, trop bien faire? Dans le sens où on a une définition, je pense, qui donne quand même des balises, on a entendu Me Miville-Deschênes nous expliquer le contexte juridique, puis à ça on va rajouter, puis je le souligne aux collègues, on va rajouter, quand même, la possibilité pour la Commission de l'accès à l'information d'émettre des lignes directrices.

Donc, éventuellement... puis mon collègue de LaFontaine est plus expérimenté que moi en droit, mais je pense que ça ne sera pas possible. Il y aura toujours des zones d'ombre dans les lois, puis je pense que le législateur doit être suffisamment clair dans son intention pour que les tribunaux et ceux qui ont interprété les lois puissent le faire en respectant l'esprit de ce qu'on veut faire. Puis je pense que l'esprit de ce qu'on veut faire, il est quand même clair. La lettre de la loi nous amène, je pense, aussi proche que possible de l'objectif, puis là on donne les moyens à la CAI, à la Commission d'accès à l'information, on lui donne les moyens d'émettre des lignes directrices qui vont venir préciser ces zones d'ombre là qu'on essaie, nous, de préciser en incluant, dans la loi, des éléments qui vont peut-être avoir l'effet contraire de ce qu'on recherche, à savoir trop restreindre ou orienter la définition dans une zone où la loi ne devrait pas aller.

M. Tanguay : Vous permettez?

M. Caire : Oui.

M. Tanguay : Bien, un moment donné, il va falloir que ça soit dit à quelque part. Ça va être-tu par un bulletin de la Commission d'accès à l'information? Parce qu'un moment donné il y a quelqu'un qui devra dire : En passant, là, le législateur a parlé. À cause du «notamment», les pommes, les oranges, je n'arrive pas avec la viande. Oui, mais tu parlais de fruits. Je comprends le législateur à ce niveau-là. Mais, à un moment donné, on jase aussi, là, on n'est pas en train de renoncer à l'amendement, mais il va falloir que la Commission d'accès à l'information le dise clairement : En passant, en vertu de l'article 12 du projet de loi n° 64, caractéristiques biométriques, là, ça, drapeau rouge; dossiers Revenu Québec, drapeau rouge; et dossiers Santé, drapeau rouge.

Il va falloir que ça soit dit, parce que ça, à sa face même... Si vous me dites : À sa face même, Marc, rouler à 130 sur la 20, là, c'est une vitesse excessive, à sa face même, je ne peux pas te dire si, selon la température... Des fois, 95, c'est excessif quand il fait mauvais. Rouler à 95 sur la 20 quand il fait mauvais, là, c'est fou comme braque. Mais, quand c'est en plein été, beau soleil, à 95, vous allez vous faire dépasser par la majorité. Alors, sais-tu quoi? Mais il va falloir, au-delà de ça, mon point, que la Commission d'accès à l'information dise : Cassez-vous pas la tête, quand c'est biométrique, quand c'est Santé, quand c'est Revenu, c'est drapeau rouge. Ça ne veut pas dire que vous ne pouvez pas rien faire, mais il va falloir que ça soit dit.

M. Caire : C'est sensible... C'est beau. On s'entend.

M. Tanguay : Hautement sensible. Puis il va falloir que ce soit dit. Si vous ne voulez pas le dire là, il va falloir que ça soit dit à quelque part.

M. Caire : Bien, c'est ce que le député de Gouin disait, puis il a raison. Ce n'est pas parce qu'on dit que c'est un renseignement sensible qu'on dit que ça ne peut plus être utilisé pour aucune circonstance. Ce n'est pas ça. Mais, en même temps, il faut être conscient que, quand on dit «un renseignement est sensible», on rend son utilisation pas mal plus ardue, puis c'est ce qu'on veut à cause de la nature du renseignement.

Mais moi, je vais laisser Me Miville-Deschênes nous expliquer, peut-être, s'il y a déjà une jurisprudence qui existe là-dessus, si les tribunaux se sont déjà prononcés. Je sais que, dans le cas des caractéristiques biométriques... la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, sur ce volet-là, je pense qu'elle est solide. On vient l'améliorer avec le fameux 60 jours. Mais déjà la CAI a un pouvoir de prescription, là. C'est ça, hein? Ils peuvent prendre des dispositions, ils peuvent enquêter, ils peuvent interdire l'utilisation, ils peuvent restreindre l'utilisation, ils peuvent forcer la destruction d'une banque d'informations biométriques. Donc, ils ont vraiment déjà beaucoup de pouvoirs, de par la loi, sur la question de l'utilisation des marqueurs biométriques. Donc, l'inclure dans la loi, pour moi, viendrait... Ça serait redondant, dans le sens où il y a déjà une loi qui leur donne, à la CAI... qui donne déjà des pouvoirs très, très élaborés. Puis j'invite les collègues... C'est l'article 40, hein?

M. Nadeau-Dubois : 44.

M. Caire : 44. Merci. Merci, M. le député de Gouin. Je constate que M. le député de Gouin l'a lu plus récemment que moi. Mais c'est quand même très clair. On vient aussi ajouter les 60 jours, avec la loi, où la volonté de constituer une telle banque doit être communiquée à CAI. Donc, il faut comprendre que c'est une obligation de dire à la CAI : J'entends constituer une telle banque. Donc, il y a déjà... Sur ça, il y a déjà des pouvoirs qui sont clairs, qui sont bien, bien assis, bien établis. Puis je ne sais pas, là, puis je vais laisser Me Miville-Deschesnes... Il y a peut-être déjà, là... Dans la jurisprudence, il y a peut-être déjà un cadre qui se dessine, là, sur qu'est-ce qui représente un renseignement sensible.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui. Juste avant, je voulais mentionner que l'exemple des pommes puis des oranges, c'était un excellent exemple pour refléter la règle d'interprétation.

M. Caire : Ça non plus... qui disent ça.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Non, mais je trouve... J'aurais dû l'utiliser moi-même. Je vais peut-être le réutiliser. Par rapport aux renseignements sensibles, bien, évidemment, les tribunaux ont déterminé, là, que les renseignements biométriques et de santé étaient sensibles. La commission d'accès, dans son rapport quinquennal notamment, donne des exemples qu'on a déjà parlé, là, origines raciales, ethniques, croyances, renseignements concernant la santé et la vie sexuelle, financiers, notamment ceux... bien, ceux qui sont fournis aux fins d'impôt. Mais, malgré ça, je pense qu'on s'entend tous un peu sur qu'est-ce que... quels sont les renseignements qui sont généralement considérés comme sensibles, mais, malgré ça, je pense que c'est important de garder une définition contextuelle qui va évoluer, parce que peut-être que des renseignements de santé pourraient... Certains renseignements de santé pourraient être, comment dire, considérés comme non sensibles aujourd'hui ou dans quelques années. Donc, on sait un peu de quoi on parle. La commission a déjà quand même résumé ce type de renseignement là, les tribunaux aussi, mais je demeure d'avis, là, que la définition contextuelle est... serait à retenir, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, mais il vous reste 1 min 15 s, là.

• (12 h 30) •

M. Nadeau-Dubois : Oui, oui. J'ai peu de temps, mais le collègue de LaFontaine a soit lu dans mes pensées, soit bien écouté ce que je disais, parce que... ou les deux, parce que j'avais un deuxième amendement dans ma manche, portant sur la question des caractéristiques biométriques pour la raison suivante. Il m'apparaît que ces données-là, à leur face même, quel que soit le contexte, sont... puis quelle que soit leur utilisation, puis le ministre semblait le dire, lui aussi, tantôt, elles sont, par leur nature même, des données sensibles, je ne... Et c'est vrai aujourd'hui. Ça me semble vrai dans l'avenir également. Pourquoi ne pas, au moins, mettre... envoyer le signal? Si les tribunaux l'ont déjà dit en plus, bien, raison de plus pour venir l'inscrire dans la loi comme législateur et donner le la en disant : Les données biométriques, c'est, par essence même, une donnée sensible?

Est-ce qu'il n'y aurait pas, là, un terrain d'entente avec le ministre pour que, et j'ai bien compris, là, sans se lancer dans toute l'énumération des motifs de discrimination, on mette au moins une espèce de plancher en disant : Les données biométriques, à leur face même, dans leur essence même, peu importe le contexte et l'utilisation, ça, là, c'est sensible? Et ça envoie le message aux organismes publics, dans le cas qui nous occupe, que, ça, il faut redoubler de prudence parce que c'est des données qui, fondamentalement, sont sensibles. Je ne sais pas ce que le ministre pense de ça.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui, bien, je ne sais pas. J'évaluerai l'amendement au libellé. Mais, moi, écoutez, là, si ça peut faire avancer le débat, compte tenu de tout ce que Me Miville-Deschênes vient de nous dire, compte tenu de ce qu'on sait, compte tenu d'est-ce qu'on veut prendre le risque que...

Le Président (M. Bachand) : Je m'excuse de vous interrompre, on va suspendre la commission parce que le député de René-Lévesque doit se rendre à l'Assemblée pour enregistrer son vote.

Alors, on va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

(Reprise à 12 h 40)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : M. le Président, je vous demanderais, s'il vous plaît, une suspension quelques instants.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Alors, on suspend. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 41)

(Reprise à 12 h 47)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. La commission reprend ses travaux. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement du député de Gouin? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Ouellet (René-Lévesque)?

M. Ouellet : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement du député de Gouin est rejeté. Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Oui. M. le Président, j'aimerais déposer un nouvel amendement. S'il n'a pas été reçu, on peut peut-être suspendre, le temps qu'il le soit.

Le Président (M. Bachand) : On va suspendre, oui, quelques instants. Merci beaucoup. Alors, on suspend quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 48)

(Reprise à 12 h 52)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. J'aimerais déposer un nouvel amendement, amendement à l'article 12. Donc : Insérer, dans le dernier alinéa de l'article 59 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par le paragraphe 3° de l'article 12 du projet de loi, et après «nature», «notamment médicale, biométrique ou autrement intime,».

À tout seigneur, tout honneur, M. le Président, c'est un amendement qui a été travaillé de manière, disons, collaborative, de manière consensuelle avec les équipes du ministre, avec l'aide également du député de LaFontaine, qui nous a inspiré, voire, en fait, proposé l'ajout du terme «notamment». Donc, un travail collégial dont l'objectif est de venir préciser que les renseignements médicaux, biométriques ou autrement intimes sont, quel que soit le contexte de leur utilisation... et aujourd'hui et pour l'avenir, ils sont, par nature, considérés comme des renseignements sensibles. Je pense que c'est un seuil minimal qu'il est important d'inscrire dans la loi. C'est ce que vient faire l'amendement que nous avons préparé ensemble, et donc j'invite mes collègues à l'adopter.

Le Président (M. Bachand) : Merci.

M. Nadeau-Dubois : Et à le commenter, bien sûr, et à le définir en discutant.

Le Président (M. Bachand) : Intervention, M. le ministre?

M. Caire : Ça va, M. le Président. Je joins ma voix à celle du député de Gouin et suis prêt à voter cet amendement-là, qui m'apparaît répondre aux prérogatives et aux préoccupations qui ont été exprimées.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Évidemment, on est pour l'amendement puis on va voter pour, mais je voudrais juste prendre quelques minutes, là, puis... «Intime», ça vient d'où ça, «intime»? Est-ce qu'on est raccord avec le corpus? Parce que, là, on est dans les renseignements personnels, on parle d'une notion d'intime...

M. Caire : Je vais laisser Me Miville-Deschênes répondre à la question de mon collègue.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, s'il vous plaît.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui, bien, on prend vraiment une... je vous dirais — comment dire? — une définition, en quelque sorte, de la Cour suprême, là, qui a justement dit que ces renseignements-là, dans l'analyse de l'atteinte à la vie privée, en vertu de la charte, que les renseignements biométriques, médicaux et autrement intimes, là, sont considérés comme des renseignements sensibles, donc.

M. Tanguay : O.K. Vous n'avez pas la cause?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Je peux vous la transmettre, là, oui.

M. Tanguay : O.K. Parfait. O.K. Donc, la Cour suprême a statué récemment, j'imagine, dans les dernières années?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Récemment? Il faudrait que je vérifie. 2012, entre autres, 2012, là. C'est Cole, 2012, Cour suprême, 53.

M. Tanguay : Parfait. Et, nous, est-ce que c'est une nouveauté, «intime», dans notre corpus législatif? Je n'ai pas fait légis, là, cité, j'aurais pu, là, LégisQuébec, là, mais... «Intime», je pense que c'est la première fois qu'on intégrerait cet enseignement de la Cour suprême.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Je n'ai pas la réponse. C'est sûr qu'on se colle à la définition de la Cour suprême. Est-ce qu'il est déjà dans le corpus? Là, il faudrait que je vérifie.

M. Tanguay : O.K. Non, mais comme de quoi que, des fois, on peut innover. Puis, vous savez, M. le Président, que nous ne sommes pas, dans les oppositions, avares d'innovation, alors on est heureux de pouvoir inaugurer une lancée où on va pouvoir innover, là, «going forward».

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de La Pinière, s'il vous plaît.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je sais qu'on ne peut pas le faire, mais je peux le faire pour moi-même, là, je vais souligner mon absence dans la partie préalable du débat, je n'étais pas là, mais je suis content de voir que mon collègue qui était là se sent interpelé aussi par le mot. Quand je suis parti, là, pour aller parler au salon bleu, on ne parlait pas d'intimité, et là on le met.

Là, je comprends que mon collègue a posé une question sur d'où ça vient. Mais on peut-tu avoir un petit peu plus de précision, là? Je comprends que la Cour suprême a rendu une décision, donc la Cour suprême, elle, a établi une nouvelle chose. Est-ce que je peux comprendre ça ou dois comprendre ça? Et est-ce que la Cour suprême le définit un peu plus? Parce qu'intime, là, disons que c'est peu et beaucoup en même temps, là. Si on pouvait avoir un exemple, là...

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, lorsque la Cour suprême détermine s'il y a eu une fouille abusive au sens de l'article 8 de la charte, elle fait une analyse contextuelle qui prend en considération à la fois l'attente de la personne puis l'attente d'une personne raisonnable, là, un critère plus objectif. Puis elle a établi, dans le fond, que des renseignements qui tendent à révéler des détails intimes sur le mode de vie, les choix personnels des individus sont des renseignements pour lesquels il y a une attente raisonnable en matière de la vie privée.

Pour les exemples concrets, il faudrait que je vous revienne, là. Mais c'est vraiment le lien avec la sphère d'intimité, je dirais, là. Dans le fond, c'est un renseignement qui est lié à la sphère de l'intimité de l'individu.

M. Barrette : O.K. Là, je ne veux pas refaire le débat, là, je ne veux pas refaire le, disons, 45 minutes, une heure que vous avez fait, là. Mais l'intimité, ça demeure, en partie, potentiellement, un jugement personnel. Une personne peut considérer une chose qui est intime pour elle, mais qu'une autre personne, pour la même chose, ne considérerait pas. C'est vraiment aussi peu qu'autant... parce que plus vague que ça, là, c'est impossible, là. Ça veut dire que moi, là, je pourrais... Est-ce que je pourrais, par exemple, devant la cour, dire à la cour : Oui, oui, une minute, là, ça, ce renseignement-là, là, pour moi, là, c'est très intime, là, c'est ma fibre, là, là?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, dans les décisions de la Cour suprême, effectivement, l'attente de la personne qui est concernée est prise en considération. Donc, le caractère sensible ou intime du renseignement puis l'attente raisonnable en matière de vie privée dépendent notamment de la personne qui fait l'objet, dans ce cas-là, d'une fouille abusive, et aussi, deuxième critère qui est plus objectif, de l'attente d'une personne raisonnable placée dans une situation similaire. Donc, c'est effectivement un des aspects de cette définition-là, là.

M. Barrette : Mais là je comprends de la réponse, M. le Président, que la notion d'intimité est liée à une fouille, mais est-ce que c'est lié uniquement à ça? Je vais prendre un exemple grossier, là. Ceux qui considèrent que leur adresse est intime, dans le temps qu'il y avait des annuaires téléphoniques, pouvaient ne pas voir leur nom et leur adresse dans l'annuaire. Bon, là, je prends un exemple trivial, là. Ça, c'est la perception des gens vis-à-vis ce qu'ils considèrent intime. Là, on a une notion de Cour suprême qui provient d'une fouille, bien là, je comprends, mais, à l'extérieur d'une fouille, ce que je considère intime, moi, ce que je vais avoir... puis la question ultime, c'est : Qui a préséance sur la notion d'intimité, c'est l'individu ou c'est la loi? Puis, si la loi n'est pas claire, ce ne sera pas l'individu? En tout cas, c'est de même, là. Non, non, mais je veux dire, maître, c'est vous le juriste, éclairez-nous, votre témoignage sera envoyé à la Cour suprême.

Le Président (M. Bachand) : ...Me Miville-Deschênes?

M. Barrette : Oui, oui, il faut qu'il ajoute quelque chose, M. le Président, c'est une question que je pose, là.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui. Bien, c'est intrinsèque à cette définition-là et aussi, effectivement, à l'analyse de la Cour suprême de prendre en considération le point de vue de la personne. Puis je vais prendre l'exemple de l'adresse. L'adresse d'une personne victime de violence conjugale va être autrement plus intime pour elle, et ça va être généralement reconnu, que l'adresse de toute autre personne. Donc, effectivement, étant donné que c'est du cas par cas en fonction notamment de l'attente de la personne, il y a un aspect subjectif, là, qui est appelé à évoluer puis qui est peut-être difficile comme ça quand on regarde la définition à cerner, là. Et ça va être, entre autres, le rôle de la Commission d'accès, dans le cas de l'application de cet article-là, dans ses lignes directrices, de clarifier au mieux qu'il peut et de faire évoluer cette notion-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 14 h 30. Merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 14 h 34)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi. La Commission des institutions reprend ses travaux.

Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels.

Lors de la suspension cet avant-midi, nous étions rendus à l'étude de l'amendement du député de Gouin. Interventions? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Bien, je peux peut-être laisser le temps aux collègues de s'installer, parce que je... Même si on avait, comment dire, composé cet amendement ensemble, je pense qu'il y a quand même des questions pertinentes qui étaient posées, au moment où on a suspendu nos travaux, sur la définition... bien, sur... oui, voilà, sur le sens de la notion d'intimité, en fait, le mot «intime», qui apparaît dans l'amendement que nous avons collégialement rédigé.

Alors, je me demandais si, pendant la suspension, il y avait eu, je le présume, ça a été le cas, les vérifications, peut-être une réponse des juristes qui sont avec nous aujourd'hui, à savoir exactement, parce que je pense que c'étaient des questions très pertinentes, là... C'est quoi, cette notion-là? Y a-tu des références ailleurs? Qu'est-ce que ça veut dire? Qu'est-ce que ça ne veut pas dire?

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, s'il vous plaît.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui. Bon, juste un retour. Dans le fond, l'article 59 définit la notion de renseignement personnel sensible en faisant le lien, en fait, avec une définition qui est déjà reconnue par la Cour suprême, qui dit que c'est en raison du contexte d'utilisation qu'un renseignement... ou de sa communication qu'un renseignement suscite un haut degré d'attente raisonnable en matière de vie privée.

Bon, il y avait un souhait de nommer certains renseignements qui, de par leur nature, impliquent un haut degré d'attente en matière de vie privée. Le souci qu'on avait, c'est : si on fait une énumération, on ne voudrait pas que l'énumération de certains termes limite la portée générale de la définition qui précède. Donc, c'était la raison pour laquelle on proposait de dire, oui, «médicale, biométrique ou autrement intime».

Les renseignements intimes, le terme «intime» provient... Dans le corpus législatif québécois, là, il y a deux occurrences dans la loi sur l'impôt, mais je dirais qu'ils ne sont pas dans le même contexte. Le terme «intime» nous provient de la Cour suprême, qui dit, quand ils considèrent si une fouille est abusive au sens de l'article 8 de la charte, ils considèrent notamment, quand ils regardent le renseignement concerné, si ça tend à révéler des détails intimes sur le mode de vie et les choix personnels des personnes. Notamment, l'historique de navigation serait un exemple de renseignement, un bloc de renseignements qui peut être considéré comme intime parce qu'il révèle vraiment des choix personnels, là, de la personne concernée.

Maintenant, pourquoi cette définition-là est pertinente, cette approche-là, qui est fondée sur la charte canadienne puis qui est en lien avec les fouilles et perquisitions abusives, est pertinente? Bien, dans les deux cas, on détermine que soit la fouille est abusive parce que ce type de renseignement là suscite un degré d'attente en matière de vie privée... Et, dans notre cas, on dit : La protection doit être plus élevée parce que ce même type de renseignement là suscite également un degré d'attente en matière de vie privée.

La Commission d'accès à l'information, dans son rapport quinquennal de 2016, le dernier, à la page 87, elle-même, quand elle recommande de prévoir un consentement exprès pour l'utilisation ou la communication des renseignements personnels sensibles, elle nous dit que, bon, «le droit au respect de la vie privée, [ça évolue] en considérant l'expectative de vie privée» et elle-même désigne... pas désigne, mais fait référence à des décisions de la Cour suprême. Donc, elle reconnaît, comme on le propose dans le projet de loi, que cette approche-là, cette définition-là, qui découle de la charte canadienne, est tout aussi, là, pertinente, dans le contexte de la loi sur l'accès, pour déterminer la sensibilité d'un renseignement et la nécessité d'avoir un consentement exprès.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de La Pinière, s'il vous plaît.

M. Barrette : Oui, M. le Président, merci, parce que, simplement... Ça ne me dérange pas, là, ce n'est pas un problème, mais c'est moi qui avais la parole en finissant, et j'avais un échange avec maître... c'est Miville-Deschênes, hein?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Exact.

M. Barrette : Ce n'est pas Dechêne, hein, c'est Deschênes?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Deschênes.

M. Barrette : Parce que les Miville-Dechêne que je connais, c'est des Miville-Dechêne.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Depuis plus de 300 ans.

M. Barrette : Il y en a plusieurs. Et j'étais sur un échange, M. le Président, qui était... Puis j'avais souligné le fait que je n'avais pas participé, là, à l'heure précédente, là. Mais, comme je constate que tout le monde a quand même certaines interrogations sur le sens du mot, bien, moi, je m'interroge si, à ce moment-là, il est pertinent d'ajouter ce mot dans l'amendement en question.

Je précise ma pensée, M. le Président. J'ai écouté, ce matin, ce que Me Miville-Deschênes disait et ce qu'il vient de dire. Le fil conducteur... D'abord, le mot «intime» est un peu une espèce de nouveauté qui vient de la Cour suprême. Dans notre cursus... dans notre corpus législatif, pas cursus, mais, dans le corpus législatif, il apparaît une fois dans un autre dossier. À la Cour suprême, il y a comme un précédent. Ce n'est peut-être pas le bon mot, là, mais ce n'est pas un mot législatif d'usage courant. Et le fil conducteur de tous les commentaires qui sont faits à date, que j'entends, là, est à l'effet que le mot «intime» est sujet à interprétation, il n'est pas blindé dans sa définition.

Alors, ça, moi, je me demande si ça, dans un amendement qu'on souhaite être précis, si d'ajouter ce mot-là, qui est de nature imprécise, est une bonne idée. Je comprends le fond, hein, puis je ne conteste pas le fond qui est... sur lequel on s'appuie pour arriver avec ce mot-là. Je pense, moi, aux conséquences ultérieures.

• (14 h 40) •

Et là ça m'amène à la question que je pose au ministre et potentiellement à Me Miville-Deschênes. Ce mot-là, qui est apparemment sujet à interprétation, n'ouvre-t-il pas la porte à ce que des individus disent, requièrent d'une organisation privée, publique : Oui, bien, ça, pour moi, c'est intime, là, vous ne divulguerez pas ça, alors qu'on veut être précis dans la loi, là? Et là on amène un mot qui est sujet à interprétation. Puis là on va me répondre : Oui, mais il faut le prendre en contexte. Oui, bien, moi, je vais vous répondre : Peut-être qu'à un moment donné le mot va se ramasser devant un juge, puis le juge va dire : Ce n'était pas clair, et puis je donne raison à la personne.

Je ne veux pas empêcher qu'il y ait une protection des renseignements personnels, là, ce n'est pas ça que je veux faire, il ne faut pas se méprendre sur mon commentaire, mais ce mot-là, comme il est sujet à interprétation, puis on le voit là, maintenant, est-ce qu'il n'ouvre pas la porte à des revendications juridiques qui, elles, vont faire des petits et faire le contraire, essentiellement, de ce que l'on veut faire?

Je reprendrai à mon compte le propos du ministre, qu'on a eu dans une séance précédente : Est-ce que c'est un mot qui peut emprisonner certaines données, que la donnée, là, dans ce que l'on veut faire avec, là, on va la paralyser, c'était le mot que le ministre a utilisé, parce que, là, c'est sujet à interprétation? Est-ce qu'on ne fait pas ça, là, actuellement? Moi, j'ai l'impression qu'on fait ça.

Puis je termine là-dessus, M. le Président, le ministre ou Me Miville-Deschênes va répondre, je ne suis pas du tout contre le fond qui nous mène à proposer ça ou qui mène le collègue de la deuxième opposition à proposer ça, au contraire, mais n'allons-nous pas trop loin? Ne prenons-nous pas un risque législatif inutile en introduisant un mot de conception, disons... pas vague, là, mais, disons, insuffisamment bien cerné?

M. Caire : M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : ...avant de laisser Me Miville-Deschênes répondre, je vais quand même préciser que, d'entrée de jeu, j'ai invité les collègues à cette prudence à laquelle nous convie le député de La Pinière en laissant la formulation, tel que prévu à l'article, telle quelle. Et c'est sous l'incitation du député de LaFontaine, le collègue du député de La Pinière, et du député de Gouin qu'on a travaillé cet amendement-là, mais moi, je suis tout à fait d'accord avec le député de La Pinière. Laissons la définition telle quelle parce qu'elle permet, justement, une interprétation des tribunaux, avec la possibilité, pour la Commission d'accès à l'information, de déposer des lignes directrices. Je pense que ça... En tout cas, moi, c'est ce que j'ai dit d'entrée de jeu, je pense que ça fait le travail. On veut travailler puis respecter la prérogative du législateur, donc écouter les collègues, mais là ça devient un peu compliqué parce que le collègue de La Pinière nous demande une chose qui va à l'encontre de ce que le collègue de LaFontaine nous a demandé, là.

M. Barrette : Non. M. le Président, si vous me le permettez, là, je vais m'inscrire en faux là-dessus. Mon collègue... J'étais là, là. Là, je peux témoigner de ce que j'ai entendu. Le collègue de LaFontaine a lui aussi, tantôt, en fin de séance, exprimé ses interrogations sur la portée de la signification du mot «intime». Bon, c'est vrai que je catalyse dans le sens de l'amplification de l'interrogation, c'est correct, j'accepte ça, mais ce n'est pas vrai que je suis en contradiction avec mon collègue de LaFontaine. Il a posé lui-même cette question-là, je la pose d'une façon différenciée, on va dire, mais ça va dans le même sens.

M. Caire : D'accord. Là-dessus, je vais laisser Me Deschênes répondre.

M. Barrette : Un bon point.

M. Caire : La question sur l'aspect juridique.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, s'il vous plaît.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, dans son interprétation, la Cour suprême, pour déterminer s'il y a une attente raisonnable de vie privée ou s'il y a une sphère d'intimité, elle considère les attentes d'une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances, là. Je sais que c'est un critère qui est utilisé dans différentes interprétations, là, mais, donc, il y a un aspect objectif dans cette évaluation-là qui ne peut pas simplement dépendre de l'opinion de la personne concernée. Bon... Voilà. Je vais me contenter de l'aspect juridique, je pense.

M. Barrette : Bien, voilà. Pour moi, M. le Président, c'est une belle démonstration que ça pose problème, parce que, si c'est juste ça, la réponse, qui finit par «voilà», c'est parce qu'il n'y a pas de... disons qu'il n'y a pas... disons que l'argumentaire... Puis là ce n'est pas un reproche, puis il ne faut pas le prendre mal, là, c'est juste que, manifestement, on ne peut pas plaider pendant une heure de temps sur le fait que c'est blindé, cette signification-là, là. Parce que, quand c'est blindé, là, normalement, là, un juriste va pouvoir disserter pendant une heure sur la chose.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, je vais juste compléter, parce qu'en fait je pense que le législateur se trouve devant deux choix si on conserve cette définition-là. Premier choix : «autrement intime», avec, peut-être, une sphère d'incertitude qui est quand même encadrée par les décisions de la Cour suprême. Deuxième choix : seulement nommer le médical, le biométrique. Et là, pour reprendre, parce que je pense que l'exemple était très bon, si on parle... dans l'énumération de «médicale, biométrique», c'est comme si on disait : Tu ne peux pas amener de nourriture, sauf des pommes, des bananes puis des fraises. Donc là est-ce que c'est possible que l'interprétation de «nourriture» soit limitée aux fruits et légumes? C'est possible. Mais là je laisse le législateur déterminer ce qu'il préfère entre ces deux options, dont aucune n'est peut-être parfaite.

M. Barrette : Évidemment, à ce moment-là, M. le Président, Me Miville-Deschênes nous amène à faire un choix entre mettre le mot ou ne pas le mettre. Ce n'est pas le législateur qui va décider, là, de ce que le mot va décider... va vouloir dire ou non, là, c'est : on met le mot ou on ne le met pas.

M. le Président, je vais donner quelques exemples pratiques de ma vie passée, ma vie passée étant une vie que j'ai passée dans des débats d'accès à l'information, et vous allez trouver ça intéressant.

La question que je pose aujourd'hui, M. le Président, elle est simple : Est-ce que ça ouvre la porte à ce qu'un individu, sur la base de... Je vais reformuler ma question. À la case départ, on parle d'attente raisonnable d'une personne. O.K. Est-ce qu'il est raisonnable pour une personne de s'attendre à ce que tel élément de sa vie, que lui considère comme étant intime, qu'elle soit, entre guillemets, protégée, protégée dans le sens : elle ne circulera pas. Ma question, elle est là. Est-ce que ça ouvre la porte à ça?

Je postule que oui, à tort ou à raison. Je pose la question. Si c'est potentiellement oui, je pense que c'est un mot de trop. Les autres mots dans l'amendement, ils sont... Plus clair que ça, là, c'est assez difficile. Alors, je n'ai pas de problème avec ça. La partie «intime» me pose problème.

Et là je vais où je voulais aller, M. le Président, je vais vous raconter des histoires. Moi, là, l'accès à l'information, là, je suis là-dedans depuis 1996, O.K., à cause du monde duquel je viens. Alors, moi, là, quand on a commencé à permettre... Le ministre, là, lui, il le sait, il l'a entendue à peu près 50 fois, l'histoire que je vais conter, mais pas précisément les détails qu'il va entendre. Il fut un temps, là, au Québec, où il fallait avoir un consentement explicite pour faire circuler une information médicale d'un pavillon à un autre, au CHU de Québec, là, entre les cinq hôpitaux, au CHUM de Montréal. Ça a été réglé avec le temps, ça a pris des années, O.K.?

Alors, dans cette période-là, là — écoutez bien ça, vous allez aimer ça, là — il y a des gens qui se sont levés pour dire : O.K. J'accepte que la donnée de mon dossier médical circule, mais pas telle donnée. Je donne un exemple très simple. Moi, là, je n'ai aucun problème à ce que mon dossier circule, mais moi, je veux que personne ne sache, là, je ne veux pas que ça circule que j'ai fait une dépression majeure. Moi, là, vous pouvez envoyer tout, tout, tout de ma donnée, là, il n'y a pas de problème, là, mais non, non, ça, là, ça, ça reste là, je ne veux pas que ça circule. Parce que cette personne-là, elle, considérait que ça, c'était trop intime, c'était trop... Ce n'était pas le mot que cette personne-là utilisait. Je l'ai entendu, là, je l'ai entendu même de médecins : Moi, j'ai fait une dépression majeure, là, puis je ne veux pas que ça circule d'un pavillon à l'autre, parce que c'est ma donnée.

Alors, ces gens-là... À ce moment-là, on a eu ce débat-là, là. On l'a eu, ce débat-là, ça a pris, bien, bien, bien du temps à régler. Alors, mon point, il est là, là. À partir du moment où on met un mot qui est ouvert à interprétation, quelqu'un peut se lever, et moi, je l'ai vécu, je ne peux pas vous prendre d'exemples dans d'autres domaines, mais je pourrais en imaginer qui vont se lever puis dire : O.K., là, ça, cette donnée-là, là, elle est intime, et mes attentes sont telles que je ne veux pas que ça circule.

Alors, dans un discours où on parle d'attente raisonnable, est-il possible qu'un juge dise : Oui, c'est vrai, là, ça, là, c'est vrai que cette donnée-là, là, ce n'est pas nécessaire qu'elle circule?

Et là je vais plus loin, O.K.? Moi, je suis untel, je suis suivi dans un hôpital, et là je vais dans l'autre hôpital, puis là je vais me faire traiter, là, pour un ongle incarné. Maintenant, si je reçois le dossier du patient, normalement, là, si c'est le dossier dans mon hôpital, le médecin qui me suit, l'infirmière qui me suit va voir que, dans le dossier, j'ai fait une dépression majeure, parce que ça fait partie des antécédents et, dans les antécédents, c'est toujours, toujours écrit. Alors là, la personne va dire : Non, non, non, regarde, là, moi, je m'en vais là me faire traiter pour un ongle incarné, là, vous n'avez pas besoin de savoir que j'ai fait une dépression majeure. Bien, ça, il y a peut-être un juge qui va dire : Non, c'est vrai, il a raison. Cette information-là, elle est très importante pour lui, elle est plus qu'intime, elle est ultra-intime et donc elle ne circulera pas.

Là, vous allez me dire que je tire... je coupe les cheveux en quatre. C'est plate, là, mais c'est parce que je peux vous donner des exemples encore plus spectaculaires de cas vécus qui ont rendu la progression de tout ce qui est régie et l'accès à l'information difficile. Ça a été long et pénible. Et là, aujourd'hui, on est dans un système qui marche mieux. Y a-t-il lieu aujourd'hui de prendre un risque de revenir potentiellement en arrière en mettant un mot qui ouvre la porte à une interprétation et, conséquemment, une contestation?

Ce n'est pas pire, hein? Je peux continuer comme ça pendant une demi-heure, si vous voulez, là.

• (14 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : Bien, cela dit, pour information, il vous reste un peu moins de 10 minutes. Alors, M. le ministre.

M. Barrette : Donc, vous ne le voulez pas, M. le Président.

M. Caire : Ceci étant dit, on sait que le député de La Pinière est capable. Maintenant, est-ce que c'est souhaitable? Ça, c'est une autre question.

Mais, plus sérieusement, j'entends ce que le député de La Pinière dit. Il sait que lui et moi, on est de la même école sur cette question-là. Dans le contexte spécifique de l'amendement, je réitère que la partie ministérielle aurait souhaité qu'on garde l'article tel que libellé. Le mot «autrement intime» a été ajouté à la notion de «notamment médicale et biométrique» parce que, de l'avis des juristes, on mettait la barre trop haute, et les... Et c'est même l'exemple du député de LaFontaine, qui a parlé de... sur un repas, de dire : Bon, bien, mettons, je veux des fruits, je veux des oranges, je veux des bananes, de dire : Bien, ça laisse entendre que ce que je souhaite ou ce que j'entends par «repas», ce sont des fruits, donc d'avoir une interprétation trop restrictive.

Puis, je veux dire, le mieux est l'ennemi du bien, là. Moi, je nous ai invités, comme parlementaires, à être quand même prudents sur le fait de vouloir être trop spécifiques, pas assez spécifiques. Moi, je... On discute.

Le député de La Pinière dit : Bien, est-ce qu'on peut enlever le mot «intime»? O.K. Sauf que, si on fait ça, on dit «notamment médicale, biométrique», les juristes nous disent : L'interprétation va être trop restrictive, ça va donner... parce qu'on va vouloir s'assurer d'avoir des éléments interprétatifs de même nature, juridiquement. Juridiquement, ça veut dire que, si les renseignements ne sont pas de même nature qu'un renseignement médical et/ou biométrique, donc relié à la personne physique, les tribunaux pourraient interpréter qu'en dehors de ça ce ne sont pas des renseignements sensibles, ce qu'on ne veut pas, hein, ce qu'on ne veut pas, parce qu'un numéro d'assurance sociale, on l'a dit, c'est un renseignement sensible mais qui n'est pas relié à des attributs physiques, et donc d'où la définition d'«autrement intime».

Mais là le député de La Pinière dit : Oui, mais c'est trop large, ça pourrait nous amener à... C'est vrai, c'est vrai. J'ai dit ça de plusieurs amendements des collègues, j'ai dit que ça pourrait nous amener dans une zone où on exclurait ou on inclurait des choses qu'on ne veut pas.

Alors, je vais me ranger... Je vais voir avec les collègues comment eux veulent traiter l'amendement. Personnellement, je considère encore que la définition de l'article telle que libellée, c'est encore la meilleure option. Maintenant, là, je vous avoue que je ne sais pas trop comment traiter ça, là.

Le Président (M. Bachand) : Intervention, M. le député de La Pinière?

M. Barrette : Oui. Moi, je... Là, il faudrait que... C'est une question juridique, là, c'est les juristes qui vont répondre à ça. Moi, j'ai toujours compris, dans les textes que l'on déposait, sur le plan législatif, que le «notamment» ne qualifiait rien, ouvrait la porte à autre chose. Le «notamment», là...

M. Caire : Pas nécessairement.

M. Barrette : Hein?

M. Caire : Pas nécessairement

M. Barrette : Non, le «notamment», par définition, il ouvre la porte, là. La réponse, c'est oui, à ça, là.

M. Caire : Pas nécessairement.

M. Barrette : Bien là, les juristes, là...

M. Caire : Mais, si je peux me permettre, puis je vais laisser Me Miville-Deschênes le confirmer, mais, à deux reprises, les juristes sont intervenus à cette commission pour dire que, quand on mettait un «notamment», ça pouvait amener une interprétation de l'article en fonction des éléments qui suivaient le «notamment» pour... dans le sens où il faudrait, donc, des éléments de même nature.

M. Barrette : Celle-là...

M. Caire : Ce qui veut dire...

M. Barrette : Oui.

M. Caire : Juste pour compléter. Juste... Et donc de même nature. Donc, le «notamment», suivi de «médicale [et] biométrique», qui sont clairement des attributs physiques, donc qui répondent à un individu mais dans son univers physique, la crainte que nous avions puis le pourquoi il y avait un «autrement intime», c'était de dire qu'il faudrait éviter que la cour l'interprète en disant : Bon, bien, voici ce que le législateur veut, ou pense, ou souhaite, c'est que des renseignements qui sont sensibles doivent avoir une connotation qui se rattache aux attributs physiques d'un individu.

Puis là je vais laisser Me Miville-Deschênes me contredire s'il le souhaite, mais c'est ça que j'avais compris et c'est la raison pour laquelle on évitait d'aller dans ces eaux-là. Ou alors on y allait mais en ajoutant un «autrement intime» pour s'assurer de ne pas limiter à la question des attributs physiques l'interprétation d'un renseignement sensible.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, c'est exactement la règle, là, en... ejusdem generis. Mon latin n'est pas parfait, mais c'est une règle d'interprétation qui est quand même bien connue et appliquée par les tribunaux lors de l'interprétation d'une définition dans laquelle il y a une énumération.

M. Barrette : Bon, alors donc, à ce moment-là, ça vient confirmer le fait qui m'inquiète, à savoir que c'est ouvert à une interprétation, je dirais, maximale. Puis là je reviens à la... Non, au sens où, au sens où... Maximale dans le sens de ce qu'intimité veut vouloir dire. Et, depuis le début, le fil conducteur, du moins le mien, là, c'est qu'une personne, parce que ça a été dit à plusieurs reprises, une personne pourrait considérer, ou même un juge... qu'une personne a raison de considérer que telle ou telle chose est plus... est vraiment plus... elle est intime, alors que, dans le texte qui a été amendé à date, moi, je trouvais que c'était suffisant. Maintenant, là, ça me conforte dans ma position.

M. Caire : M. le Président, je veux juste comprendre. Quand il dit «le texte», le député de La Pinière fait référence à quel amendement? Là, c'est ça que...

M. Barrette : J'ai peut-être raté un bout, par exemple, là.

M. Caire : Là, je voudrais juste qu'il précise, peut-être, pour qu'on ait un référent, tout le monde, là.

M. Barrette : Là, au moment où on se... Non, c'est parce que j'en ai peut-être raté un bout. Là, l'énumération n'est plus là, hein, c'est ça?

M. Caire : Non, on a...

M. Barrette : On peut-tu suspendre un instant, M. le Président?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, ça va? On va suspendre quelques instants?

M. Caire : Bien oui, sauf que, là, on refait les débats, là. C'est un peu plate, là.

M. Barrette : Non, non, non, tu vas comprendre.

Le Président (M. Bachand) : On va suspendre quelques instants.

M. Caire : Oui, oui.

Le Président (M. Bachand) : On verra. O.K.

M. Caire : Bien, oui. Correct.

Le Président (M. Bachand) : Merci.

(Suspension de la séance à 14 h 58)

(Reprise à 15 h 01)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! O.K., les travaux vont recommencer. Alors, on est «on the record», comme on dit. M. le ministre.

M. Caire : Bien, je pense que c'est correct, M. le Président. Je ne sais pas si les réponses qu'on a données au député de La Pinière sont à sa satisfaction, mais, si c'est le cas, je serais prêt à voter. Personnellement, je serais prêt à voter l'amendement.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Bon, alors, M. le Président, moi, j'ai fait mon point, là, il n'était pas dirigé spécifiquement vers le ministre, il était dirigé aussi vers les collègues. Là, on a eu les échanges qu'on devait avoir. Comme on l'a... Comme on peut en conclure, là, il y a une ouverture, là. Est-ce qu'elle est raisonnable à l'interprétation ou non? Bon, un juge, à un moment donné, il jugera. C'est tout.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement du député de Gouin? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Barrette (La Pinière)?

M. Barrette : Abstention.

La Secrétaire : M. Ouellet (René-Lévesque)?

M. Ouellet : Abstention.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement du député de Gouin est adopté. Donc, on revient à l'article 12 tel qu'amendé. Interventions? Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 12 tel qu'amendé? Sinon, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Barrette (La Pinière)?

M. Barrette : Abstention.

La Secrétaire : M. Ouellet (René-Lévesque)?

M. Ouellet : Abstention.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 12, tel qu'amendé, est adopté. M. le député de René-Lévesque, s'il vous plaît.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'aurais un amendement à l'article 12.1. Il a déjà été transmis aux membres de la commission sur Greffier.

Le Président (M. Bachand) : Alors, il est sur Greffier, et alors donc vous pouvez en faire la lecture, s'il vous plaît, M. le député.

M. Ouellet : Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. Article 12.1 : Insérer, après l'article 12 du projet de loi, le suivant :

12.1. Cette loi est modifiée par l'ajout, après l'article 59.1 de la loi, du suivant :

«[5.9.2.] Un organisme public ne peut communiquer un renseignement personnel à des fins lucratives pour lui ou celui qui reçoit ce renseignement.»

Le Président (M. Bachand) : Est-ce que...

M. Ouellet : Je peux aller à l'explication, oui.

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît, oui.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, avec cet amendement, M. le ministre, ce qu'on essaie de faire, c'est de circonscrire dans la loi cette... cette interdiction, pardon, de tout organisme public de vendre des renseignements personnels.

On a eu le débat peu avant les fêtes et on a eu, même, deux discours : le ministre de la Santé, pour lui, c'était une fin de non-recevoir, et le ministre de l'Économie, à un certain moment, on a pu entendre que ça serait «winner» de vendre nos informations à des pharmaceutiques.

Donc, je ne présume pas de la mauvaise ou de la bonne volonté des deux personnes issues du gouvernement. Je ne présume pas non plus de la bonne ou de la mauvaise volonté des gouvernements subséquents, mais j'ai une certitude, par exemple, c'est que personne ne voudrait voir ses données personnelles vendues à des entreprises privées à titre commercial.

Donc, je pense qu'avec cet amendement nous pourrions circonscrire dans la loi cette interdiction qui pourrait donner beaucoup de garantie et d'assurance aux gens du Québec, notamment tant qu'à la valeur qu'on pourrait donner et l'appât que pourraient représenter les renseignements personnels aux entreprises privées. Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui, merci, M. le Président. Bien, l'amendement pose différents problèmes. Le premier, c'est... En fait, ce n'est pas un problème, le premier, c'est un état de fait, à savoir que, sauf disposition législative express, il n'est pas permis de vendre... Et c'est important, la notion de vente versus communiquer. Donc, il n'est pas permis de vendre des renseignements personnels, je vous dirais même, de façon plus large, des données du gouvernement du Québec, pour un ministère ou un organisme.

Par contre, il existe effectivement, dans différentes ententes contractuelles, une possibilité que des renseignements soient communiqués et que la finalité de ces ententes-là soit lucrative. Hydro-Québec, SAAQ, SAQ sont dans une disposition comme celle-là. Et là l'amendement, tel que libellé, viendrait empêcher ça, ce qu'on ne souhaite pas, ni le député de René-Lévesque ni moi. C'est pour ça que, tel que libellé, je veux dire, l'amendement ne nous amène pas là où on le souhaite, je pense. Et, au contraire, ça pourrait poser un problème sérieux pour notamment les entreprises du gouvernement.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de René-Lévesque, s'il vous plaît.

M. Ouellet : Oui, est-ce que vous pourriez me donner un exemple? Vous faites référence à Hydro-Québec, là, que vous me dites que, si on met ça, ça va nuire ou pénaliser Hydro-Québec. J'aimerais peut-être que vous...

M. Caire : Bien, je veux dire, il peut y avoir... dans des ententes contractuelles, il peut y avoir transmission d'information. L'entente contractuelle ayant une fin lucrative, la transmission de l'information est donc à des fins lucratives par extension.

C'est parce que ce que le député de René-Lévesque ne veut pas, puis ça... puis qu'il me corrige si je me trompe, c'est qu'un ministère ou un organisme prenne des informations qu'il a en sa possession, les vende. Donc, je prends l'information, je me mets une liste de clients, une liste de... pensons à n'importe quelle information, renseignements personnels, et là je les vends à une entreprise de télémarketing. Là, je prends l'exemple le plus patent, là, bon. Ce que le député de René-Lévesque ne veut pas, c'est qu'on fasse ça, mais ça, ça ne peut pas se faire dans le contexte actuel. À moins d'une disposition spécifique, on ne peut pas faire ça, on ne peut pas faire ça.

Par contre, il arrive qu'Hydro-Québec, il arrive que la SAAQ, il arrive que la SAQ vont signer des ententes, que ces ententes-là présupposent qu'il y a des informations qui sont échangées entre les partenaires. Le but du contrat étant lucratif, par extension, l'échange d'information amène cet aspect lucratif là, qui serait, donc, interdit par l'amendement qui est proposé par mon collègue, ce que mon collègue ne souhaite pas. Mon collègue ne souhaite pas nuire aux activités légitimes des entreprises de l'État et/ou des ministères et organismes.

Ce que le collègue ne veut pas, c'est qu'on prenne de l'information qu'on a collectée à des fins, que cette information-là soit vendue à des tiers et que le but de la transaction soit l'information vendue à ce tiers-là, comme une liste de clients, comme une... Et ça, ça, on ne veut pas ça, mais ça, ça ne peut pas se faire dans le contexte actuel.

M. Ouellet : Dites-moi, M. le ministre, dans ce cas-là, est-ce que le ministre de l'Économie était dans l'erreur lorsqu'il avait affirmé qu'on pourrait vendre des données à des compagnies pharmaceutiques ou communiquer des données à des compagnies... pharmaceutiques, pardon, qui auraient une volonté d'en tirer un bénéfice qui serait, au final, lucratif, là?

M. Caire : Bien, au-delà du choix de mots, sur lequel on pourra effectivement avoir un débat, l'idée de ça, c'était la recherche, c'était de parler de la recherche. Et ça, on va le voir plus tard. Il y a des articles qui traitent de ça, dans quel contexte, puis circonscrire l'utilisation des données pour des motifs de recherche, puis c'est ce qu'on va faire plus tard.

Parce que ça, il y a peut-être effectivement un flou existentiel qui mérite d'être bien cadré. Donc... Puis ça, là-dessus, je pense qu'on a déjà, dans la loi, des dispositions qui sont intéressantes. Il y aura toujours lieu de le travailler, mais l'idée était de dire : Rendons disponibles ces informations-là pour la recherche, pour faire avancer la recherche. C'était ça qui était le plan général. Bon, ça, le choix des phrases, le choix des mots, on pourra avoir des discussions, mais...

Puis ça, je pense que personne ne souhaite qu'on empêche la recherche, je pense qu'on a tous... Puis, dans le contexte de pandémie, ça surligne encore plus cette nécessité-là. Et ça, on va adresser cette question-là plus tard dans le projet de loi.

• (15 h 10) •

M. Ouellet : Si je comprends bien, M. le ministre, ce que vous me dites, c'est : L'amendement en question pourrait restreindre, exemple, la SAQ de contracter avec une firme tierce, justement, son programme de fidélisation. Parce que, tu sais, la SAQ a des données à travers les transactions.

M. Caire : La carte Inspire.

M. Ouellet : Carte Inspire, c'est ça. Ça fait que, si on adoptait l'amendement tel quel, ce que vous me dites : Faisons attention, ça serait limitatif dans le cas d'activités lucratives comme la SAQ ou...

M. Caire : Lucratives au bénéfice de l'État, on s'entend, on s'entend.

M. Ouellet : Oui, oui, pas au bénéfice d'un autre tiers.

M. Caire : Non, non, c'est ça.

M. Ouellet : O.K. À part... Parce que, là, c'est comme des sociétés d'État, je comprends, là, c'est peut-être le terme «public» qui est peut-être trop large. Ce qu'on cherchait surtout à circonscrire, c'est qu'en aucun cas on ne puisse, dans un ministère, vendre des données à un tiers qui pourrait les exploiter de façon lucrative. Là, vous me dites : Faisons attention, il y a des domaines qui en ont besoin, comme la SAQ.

M. Caire : Non, c'est ça, on ne les vend pas, là. Je veux être clair, là, on ne vend pas des...

M. Ouellet : On les communique.

M. Caire : Dans le cadre d'une entente contractuelle, on pourrait... on peut communiquer ça. C'est, justement, la nuance, la subtile nuance que j'amène. On ne peut pas vendre des données à un tiers, et la donnée étant le centre de la... L'objet de la transaction, c'est de vendre des données à un tiers. Je prends toujours mon exemple, la RAMQ qui décide de prendre une liste des usagers de la RAMQ puis de vendre ça à une entreprise de télémarketing, ça ne se peut pas, ça ne se peut pas.

Ce qui doit être fait puis ce qui doit être mieux encadré, c'est l'utilisation et la communication des données dans des protocoles de recherche. Puis, ça, on va le voir plus tard, on va l'encadrer. Ce que l'amendement vise, cette finalité-là, elle existe déjà, à savoir : on ne peut pas vendre des données à de l'entreprise privée comme nature de la transaction, on ne peut pas faire ça.

Ce que l'amendement va faire, puis là je me répète, mais je veux juste être sûr que c'est bien clair, c'est, justement, de faire en sorte que, là, dans le cadre d'une entente contractuelle qui va se faire notamment au bénéfice d'une entreprise de l'État, donc au bénéfice de la collectivité, là, cet amendement-là pourrait avoir pour effet de rendre ça pas possible.

Le Président (M. Bachand) : J'ai le député de La Pinière, si vous permettez.

M. Ouellet : Ah oui! Oui, il n'y a pas de problème, oui, oui.

Le Président (M. Bachand) : Oui. M. le député de La Pinière, s'il vous plaît.

M. Barrette : Bon, écoutez, ça, c'est un... Tout ce débat-là me touche personnellement, parce que c'est un dossier que j'ai piloté lorsque j'étais dans ma fonction précédente.

M. Caire : Je sais.

M. Barrette : Pardon?

M. Caire : Je sais.

M. Barrette : Oui, alors je veux faire une intervention qui se veut informative, tout simplement. Je comprends le fond et l'intention de l'amendement proposé par le collègue de René-Lévesque. Étant donné qu'on fait référence à une chose, je vais en profiter, là, parce que là j'ai une tribune, je vais l'utiliser, ma tribune. Alors, est-ce qu'il est possible d'utiliser nos données dans un esprit lucratif ayant des ramifications économiques globales pour le Québec? La réponse est oui. Est-ce qu'on peut faire ça en protégeant la donnée? La réponse est aussi oui. Et c'est ça qu'il faut comprendre, là.

J'ai... Moi, pendant quatre ans, et les gens le savent, ça a été évoqué, mais ça n'a pas été retenu, j'ai effectivement travaillé avec l'industrie pharmaceutique pour leur donner accès à des données mais pas comme ils voulaient, pas comme ils voulaient. Ce que l'industrie pharmaceutique veut, c'est de partir avec la donnée. J'ai toujours refusé ça. Je soupçonne que le gouvernement actuel refuserait ça aussi.

M. Caire : Tout à fait.

M. Barrette : Et je soupçonne aussi que les oppositions refuseraient ça aussi.

M. Caire : Tout à fait.

M. Barrette : C'est un soupçon...

M. Caire : Vous n'êtes pas trop à risque, M. le député de La Pinière, vous n'êtes pas trop à risque.

M. Barrette : Pas trop risqué, oui. Par contre, est-il possible de créer une interface, une interface qui ferait en sorte que la donnée soit lucrativement accessible pour l'industrie en échange, par exemple, d'investissements, ainsi de suite? Je reviens là-dessus dans un instant. La réponse à ça, c'est oui. C'est quoi, la façon de le faire? C'est facile, on a une interface contrôlée par l'État qui répond à des questions formulées par l'industrie. Et ça, c'est... Et c'est l'État qui gère la question, la gestion de la donnée et la réponse. Ça reste là.

Et pourquoi l'industrie pharmaceutique veut faire ça? Parce que la donnée clinique à long terme, et particulièrement la donnée génétique, est aujourd'hui, dans l'industrie pharmaceutique, le nerf de la guerre pour le développement et la production des médicaments. Au moment où on se parle, je n'ai pas pu le faire, mais, en fin de mandat, là, chaque grand joueur pharmaceutique du Québec se cherchait un hub, permettez-moi l'anglicisme, un endroit pour investir, avec leur intelligence artificielle, leur Bengio, leur ci, leur ça, et manufacturer. Le deal était là. Et l'enjeu, c'est d'avoir accès à l'analyse de la donnée longitudinale.

Et je vais vous donner la clé de l'affaire. C'est qu'au Québec on a une caractéristique fondamentale, comprenez bien ce que je vais dire, là, nous sommes le seul et unique endroit au monde, à l'exception de la Nouvelle-Zélande, qui a une population captive. Puis elle est captive parce qu'on ne bouge pas. Alors, si vous avez vécu aux États-Unis une fois dans votre vie, là, bien, dans le milieu de travail où vous avez été, là, bien, les gens venaient des 50 États. Au Québec, là, nous, on naît au Québec puis, pour nos raisons culturelles, linguistiques, et ainsi de suite, là, on vit au Québec génération après génération, après génération. Ça, là, pour l'industrie pharmaceutique, là, ce n'est pas du bonbon, c'est Noël. Tout le monde veut avoir ça.

Puis on a une donnée. Alors, ça, ça veut dire qu'on peut dire à une compagnie, là : Vous allez investir chez nous, vous allez poser une question à la base de données, c'est nous qui allons gérer la donnée, puis on va vous donner la réponse. Ça, ça se fait. Ça se monnaie, c'est rentable pour la province, c'est rentable pour la société, et c'est protecteur pour le citoyen, et c'est donc lucratif.

Alors, c'est sûr que, dans un contexte comme ça, là, si on empêche, par la finalité lucrative, de faire ça, on nuit à la société québécoise. Et le débat là-dessus, là, a été mal fait, c'est plate, là, mais c'est comme ça, mais il est possible, là... Puis là je vais prendre une image, là. Nous sommes les serveurs de la RAMQ, là, O.K., là. Il n'y a pas une compagnie qui va entrer ici... Il n'y a pas une compagnie qui va sortir d'ici avec une clé USB avec des données ni encore un disque dur, mais la compagnie qui va poser une question à nous, qui sommes les serveurs : O.K., on va la traiter, votre question, là, puis voici la réponse, mais vous n'avez rien, vous n'avez pas de donnée, vous n'avez pas de code génétique, vous n'avez pas de dossier médical, vous n'avez pas ça, mais vous avez la réponse à votre question, par exemple. Et, nous, notre valeur, on l'a utilisée pour le bénéfice de la société.

Alors, ça, ce que je viens de raconter là, là, on le fait pour les chercheurs, mais on ne le fait pas pour l'industrie, mais on peut le faire en protégeant la donnée. Fin de mon éditorial. J'espère que ça vous aura été utile.

Le Président (M. Bachand) : Très utile. Merci beaucoup. Interventions? M. le député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Oui. «Un organisme public ne peut communiquer un renseignement personnel à des fins lucratives pour lui ou celui qui reçoit ce renseignement.» Ce que le député de La Pinière vient de nous exposer, c'est que ça, actuellement, n'existe pas, mais ça peut exister, c'est ça que je comprends. Et, si ça peut exister, il nous a exposé de quelle façon ça pourrait exister en ayant une interface qui nous démontre que la donnée est maintenue et détenue par le propriétaire, mais la réponse ou le besoin édicté par le client en question peut lui être fourni, puis ça, ça peut être anonymisé, là. C'est ce que j'ai compris.

Je comprends, M. le ministre, que vous y voyez un risque. Vous me dites, tout à l'heure... vous m'avez dit, tout à l'heure, pardon, qu'on va traiter la partie de la recherche plus tard. Je vais être honnête avec vous, je n'ai pas terminé toute l'élaboration et, je vous dirais, l'évaluation de chacun, puis vous nous remettez aussi des amendements qui nous permettent d'apprécier aussi l'évolution du projet de loi en question.

Donc, j'aurais une proposition à vous faire, de suspendre l'amendement 12.1, de faire le point jusqu'à tant qu'on soit à la recherche, et, si effectivement, suite aux discussions que nous aurons et à l'adoption des... pardon, des articles reliés à la recherche, ça circonscrit ce que je cherchais à faire, bien, on revient, puis on bat l'amendement, tout simplement, ou je le retire, mais je voudrais peut-être me garder l'opportunité de le garder encore ouvert avant de voir les discussions que nous aurions sur la partie recherche. Est-ce que ça, ça serait satisfaisant?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Caire : Bien, dans la mesure où ça... effectivement, 12.1 n'a pas pour effet de suspendre l'étude des autres articles, M. le député, je n'ai effectivement aucun problème avec ça.

M. Ouellet : Donc, on demandera le consentement pour revenir à 12.1, traiter de l'amendement, puis, après ça, on... O.K.

Le Président (M. Bachand) : Est-ce que, donc, il y a consentement, si je comprends bien, pour suspendre l'étude de l'amendement créant le nouvel article 12.1?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, nous sommes rendus à l'article 13. M. le ministre, s'il vous plaît.

• (15 h 20) •

M. Caire : Oui, merci, M. le Président. Donc, l'article 13 se lit comme suit : L'article 60 de cette loi est modifié :

1° par le remplacement, dans le troisième alinéa, de «doit refuser de» par «ne doit pas»;

2° par la suppression, dans le quatrième alinéa, de «par suite d'une demande faite».

Donc, l'article 60 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels est modifié afin de confirmer qu'une communication faite en vertu de l'article 59 de cette loi n'a pas à être précédée d'une demande.

Le Président (M. Bachand) : Interventions? Est-ce qu'il y a des interventions? Une fois, deux fois. S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Barrette (La Pinière)?

M. Barrette : Pour.

La Secrétaire : M. Ouellet (René-Lévesque)?

M. Ouellet : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 13 est adopté. M. le député de René-Lévesque, s'il vous plaît.

M. Ouellet : C'est à mon tour?

Le Président (M. Bachand) : Oui.

M. Ouellet : Oui. J'aurais un amendement à l'article 13.1, M. le Président. Il a été transmis à la commission, je crois.

Le Président (M. Bachand) : Il est sur Greffier.

M. Ouellet : Oui, parfait.

Le Président (M. Bachand) : Si vous voulez en faire la lecture, s'il vous plaît, M. le député.

M. Ouellet : Oui, c'est un petit peu long. Article 13.1 : Insérer, après l'article 13 du projet de loi, le suivant :

Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 16.1, des suivants :

«61.2. Un établissement d'enseignement doit, sans égard au consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement personnel à une personne qui a été victime, de la part de la personne concernée, de harcèlement ou de violence à caractère sexuel au sens de la Loi visant à prévenir et combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur (chapitre P-22.1) ayant fait l'objet d'une plainte ou d'un signalement, lorsque le renseignement personnel est la sanction, incluant ses détails ou modalités, ou encore l'absence de sanction appliquée à la personne concernée.

«61.3. Un établissement d'enseignement doit communiquer à tous les membres de son comité permanent établi en application de l'article 7 de la Loi visant à prévenir et combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur (chapitre P-22.1) tout renseignement qui concerne l'existence, les détails, le traitement, l'issue et les sanctions corollaires d'une plainte, d'un signalement ou d'un renseignement relatif à du harcèlement ou à une violence à caractère sexuel au sens de cette loi, sans égard au consentement de la personne visée par la plaine, le signalement ou le renseignement.

«Malgré le premier alinéa, l'identité de la victime des comportements visés par la plainte, le signalement ou le renseignement ne peut être communiquée au comité permanent sans le consentement de cette dernière.

«61.4. Lorsqu'est jugée fondée la plainte, le signalement ou le renseignement traités en application de la Loi visant à prévenir et combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur (chapitre P-22.1), l'établissement d'enseignement peut communiquer les renseignements qui s'y rapportent, sans le consentement de la personne concernée, dans les cas qui suivent :

«1° à un établissement d'enseignement et à toute personne qui y oeuvre en vue d'assurer la sécurité des étudiants et étudiantes, des membres du personnel ou de toute autre personne fréquentant cet établissement d'enseignement;

«2° à un organisme ou une entreprise qui fait la demande lorsque la personne concernée travaille, étudie ou fait du bénévolat au sein de cet organisme ou de cette entreprise, ou lorsque la personne concernée a communiqué une demande pour y travailler, étudier ou faire du bénévolat.»

Le Président (M. Bachand) : Vous avez des commentaires additionnels?

M. Ouellet : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Donc, cet amendement-là n'est pas le fruit du travail de l'équipe totale de recherche du Parti québécois mais nous a été soumis par un groupe qui a fait des représentations, notamment en déposant un mémoire au projet de loi n° 64, Québec contre la violence sexuelle, et est tout à fait raccord avec une lettre ouverte qui a été écrite dans La Presse+ le 9 février 2021 : Les victimes ont le droit de savoir.

Donc, concrètement, cet amendement pourrait permettre, à l'intérieur même de l'ouverture du projet de loi n° 64, à corriger une aberration pour les victimes d'agression sexuelle, à savoir que, lorsqu'il y a plainte et qu'il y a sanction ou pas, les victimes peuvent connaître si, effectivement, ça a eu lieu. C'est demandé par les victimes, mais c'est demandé parce que c'est un trou à l'intérieur de la loi, parce que ça touche exclusivement le secteur de l'enseignement supérieur. Donc, pour nous, je pense qu'il est tout à fait approprié.

On a eu le débat lors de la commission sur les violences sexuelles. Il y a des commissions qui se continuent pour le tribunal spécialisé pour offrir aux victimes une façon différente de pouvoir faire valoir leurs droits et de faire le cheminement nécessaire pour se rendre à la plainte et avoir condamnation. Nous croyons qu'avec cette disposition ça serait un pas supplémentaire que le législateur devrait faire, notamment sur les campus universitaires, pour permettre aux victimes qui ont porté plainte de connaître quelle a été les conséquences par rapport aux gestes qu'elles ont subits mais à l'acte qu'elles ont fait, c'est-à-dire de porter plainte et d'aller un peu plus loin.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le ministre.

M. Caire : Oui, M. le Président, je vais demander une courte suspension, parce que là je prends connaissance, évidemment, de l'amendement qui est proposé par mon collègue puis j'aimerais, évidemment, avant de commenter, là, être capable d'en mesurer tous les tenants, et aboutissants, et les impacts, là. Donc, si vous me permettez, je prendrais quelques minutes.

Le Président (M. Bachand) : Juste avant de suspendre, le député de La Pinière aimerait prendre la parole. S'il vous plaît, M. le député.

M. Barrette : Juste une question de directive, M. le Président. Je suis peut-être mal informé, mais j'ai ouï-dire que peut-être que nos collègues de la deuxième opposition avaient aussi un amendement. Est-ce que c'est la même chose ou... Parce que, si on est pour débattre du même sujet, c'est juste... Dans la suspension, on verra, là, c'est juste pour faciliter les travaux, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin, oui, allez-y.

M. Nadeau-Dubois : Nous avions, en effet, un amendement à faire également. C'était le même, donc on ne le dédoublera pas, on peut étudier celui du collègue de René-Lévesque.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Merci beaucoup.

Donc, nous allons suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 27)

(Reprise à 15 h 38)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît. La commission reprend ses travaux. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Caire : ...on se retrouve, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, vous avez la parole.

M. Caire : Oui. Merci, M. le Président. Bon, plusieurs choses à dire, M. le Président. Sur le fond, l'idée de communiquer la sentence à une victime, pour nous, c'est clair que c'est oui. Il n'y a pas de... évidemment, quelqu'un qui aura reçu... qui aura fait l'objet d'une plainte, plainte qui aura été analysée, qui aura été trouvée fondée, qui aura donné lieu à des sanctions, que ces sanctions-là soient communiquées à la victime, il n'y a pas d'enjeu pour nous, c'est oui.

Un établissement d'enseignement qui communique à ses membres... Bon, là, il y a peut-être une technicalité d'ordre juridique, du sens où, ce que les juristes me disent, c'est que, communiquer, ça implique deux organismes distincts. Donc, évidemment, un établissement qui communique à ses membres, ce n'est pas une communication au sens juridique qu'on peut lui donner, puis ça ne pose pas d'enjeu parce que, dans l'état actuel des choses, ça peut se faire. Ça peut se faire à l'intérieur d'un même établissement. D'ailleurs, le député de La Pinière avait bien saisi cette subtile nuance, c'est ce qui l'a amené à changer la notion d'établissement et à permettre une communication plus large, initiative que je que salue, d'ailleurs, mais, bon, c'est un autre débat. Donc, pour cet aspect-là, ça ne pose pas de problème, puis je vous dirais que ça pourrait évidemment réitérer un principe qui est déjà possible.

• (15 h 40) •

Le troisième élément pose un peu plus de problèmes du point de vue de la charte, et... puis, je le dis en toute candeur aux collègues, on n'a pas un avis formel du ministère de la Justice, mais les juristes du ministère de la Justice ont soulevé des doutes quant au fait que cette disposition-là pourrait passer le test des tribunaux pour la raison simple que c'est une sanction qui est administrative et que les conséquences sont... pourraient être — je vais le mettre au conditionnel — pourraient être disproportionnées, compte tenu qu'on ne parle pas ici d'un processus judiciaire au sens strict du terme où il y a eu une accusation devant un tribunal, où il y a une présomption d'innocence, où il y a une preuve hors de tout doute raisonnable, etc. Cet élément-là pourrait faire en sorte que le tribunal invalide la disposition la jugeant inconstitutionnelle. Ça, c'est... je vous donne, là, l'explication que j'en ai à ce jour.

La suggestion qui est faite par... puis que je vous fais, que je vous transmets, c'est que la loi en question, de toute façon, est une loi qui relève du ministère de l'Éducation, qui... pour lequel un rapport d'application doit être déposé l'année prochaine et qui devra amener des modifications législatives. Puis je le dis, là, de façon très transparente, je n'ai pas... je ne ferai pas une bataille épique pour qu'on ne modifie pas la loi sur l'accès à l'information, mais il serait préférable, de l'avis des juristes, qu'on modifie la loi particulière et qu'on mette ces dispositions-là dans la loi particulière. Et la loi d'accès à l'information, elle, spécifie que des renseignements peuvent être communiqués, des renseignements personnels peuvent être communiqués, lorsque c'est dans le but d'appliquer une loi au Québec. Donc, dans le cadre de l'application d'une loi, la loi d'accès prévoit que ces dispositions-là, qui seraient intégrées dans cette loi particulière là, s'appliqueraient. Donc, cette communication-là se ferait en respect de la loi d'accès à l'information, ce qui amènerait une logique et une... ce serait plus logique et plus cohérent de le faire de cette façon-là, dans l'idée de respecter le corpus législatif québécois et dans l'idée aussi que la loi d'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels est une loi plus générale et que la loi sur la prévention des crimes à caractère sexuel est une loi plus particulière, et donc, ces dispositions-là relevant de cette loi-là, elles seraient plus... il serait plus logique de les intégrer à cette loi-là. Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Oui. Puis je pourrai passer la parole, après ça, au collègue de Gouin. Donc, si je vous entends bien, vous ne voyez pas beaucoup de problèmes avec la modification à 61.2 et à 61.3, à part quelques modifications, puis vous voyez un enjeu avec 61.4, dont vous faites référence avec la charte, qui pourrait effectivement être contesté en cour et que la personne qui aurait la contestation aurait gain de cause. C'est ce que j'ai compris.

M. Caire : Tout à fait.

M. Ouellet : Ce que vous nous invitez à faire... c'est que ces articles-là ne devraient pas, à votre avis, être inscrits dans cette loi, mais ces mêmes libellés-là pourraient être inscrits lors d'une autre refonte dans une autre loi, qui est celle sur, puis corrigez-moi, là, sur l'enseignement supérieur, qui va venir...

M. Caire : Le titre exact, Me Miville-Deschênes l'a, c'est la loi sur la...

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur.

M. Ouellet : O.K. Et ça, elle est... cette révision-là est en rédaction?

M. Caire : C'est-à-dire qu'il y a un rapport d'application, la loi a été mise en application, il y a un rapport d'application qui est attendu l'année prochaine, qui va amener un certain nombre de recommandations et qui pourrait... qui va amener la réouverture de la loi, et donc des modifications de la loi. Et ces dispositions-là étant essentiellement reliées ou découlant directement de cette loi-là, il serait préférable de les imbriquer dans la loi en question.

M. Ouellet : Je ne présume pas de la mauvaise foi du gouvernement, mais je n'ai pas de certitude tant qu'à cette réelle solution potentielle de voir le jour. Je ne sais pas qu'est-ce qu'il va se passer dans un an, plein de prérogatives peuvent arriver... que cette loi-là ne soit pas déposée, puis un nouveau cycle parlementaire puisse commencer. Bref, je me demande, M. le ministre, bien honnêtement, si ce serait possible quand même d'adopter ces deux dispositions-là en attendant qu'on fasse le travail, et, lorsque le travail sera fait, elle pourrait, puis on pourrait en convenir avec les légistes, être devenue nulle parce qu'elle serait inscrite au bon endroit. Mais je pense aux victimes, présentement, là.

M. Caire : M. le Président, il y a une idée qui germe dans ma tête, c'est rare, mais ça arrive. Si on me permettait de suspendre, je vais aller demander un conseil juridique puis je vais peut-être avoir une proposition à faire. Mais je vais écouter le député de Gouin avant.

Le Président (M. Bachand) : Oui, juste avant, M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : C'est un dossier qu'on a suivi de près également, à Québec solidaire, et il faut être clair sur une chose. La loi n° 151 sur la prévention des violences sexuelles dans les établissements d'enseignement supérieur, en effet, il y a un rapport qui est prévu, il pourrait, au conditionnel, y avoir une révision de la loi par la suite.

Par contre, ce qui empêche, à l'heure actuelle, aux établissements d'enseignement de divulguer l'existence d'une sanction et la nature de la sanction aux victimes, ce n'est pas cette loi-là. C'est la loi sur l'accès à l'information, à son article 59, qui dit, et je cite : «Un organisme public ne peut communiquer un renseignement personnel sans le consentement de la personne concernée.» Donc, le verrou que les victimes nous demandent de faire sauter, il est dans la loi sur l'accès à l'information, il n'est pas dans la loi sur la prévention des violences sexuelles dans les établissements d'enseignement supérieur. Et là je massacre peut-être le nom de la loi en question, j'utilise le concept de la loi.

Donc, c'est la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels qu'il faut modifier, parce que c'est là qu'on dit... Parce que l'existence d'une sanction, c'est un renseignement personnel, et, en ce moment, l'article 59 dit aux établissements d'enseignement : Vous ne pouvez pas communiquer ce renseignement-là, donc le régime de confidentialité s'applique aux établissements d'enseignement supérieur. Ce que le collectif Québec contre les violences sexuelles nous demande, voire nous implore de faire, c'est de faire sauter ce verrou-là dans la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics, donc dans la loi qu'on est en train d'étudier en ce moment.

C'est pour ça que je pense que l'occasion de régler cette injustice, nous l'avons en ce moment. Je pense qu'il ne faut pas la laisser passer dans la mesure où, la modification législative, c'est dans la loi qu'on est en train de modifier en ce moment qu'il faut la faire. Et je... qui sait ce que l'avenir nous réserve, qui sait s'il y aura même une loi pour moderniser le régime de plaintes dans les établissements d'enseignement supérieur sur les violences sexuelles?

Donc, le problème qu'il faut résoudre, qui est un problème de transparence, là... Dans le fond, les victimes nous disent : On porte plainte, mais, vu qu'on ne sait jamais ce qu'il se passe avec notre plainte, comment avoir confiance dans le processus? Puis ça, pour les victimes de violences sexuelles, tu sais, c'est une règle de base, là, mais pour donner confiance à ces personnes, et ce sont, en grande majorité, des femmes, dans le processus, cette lettre et ce mémoire... parce qu'ils ont également déposé un mémoire, là, le collectif Québec, sur le projet de loi n° 64, le collectif Québec, contre les violences sexuelles, dans leur mémoire, ils nous le disent également, là, pour que les victimes aient confiance dans le processus, c'est ici qu'il faut intervenir dans la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Puis ce qu'ils demandent, dans le fond, c'est : Faites une exception spécifique pour les établissements d'enseignement supérieur pour rectifier l'angle mort dans le régime de plaintes actuel. C'est leur argumentaire, j'ai essayé de le résumer pour qu'on soit tous un peu sur le... au même niveau de compréhension d'exactement quel est l'enjeu ici, parce qu'on est plusieurs à être nouveaux dans ce projet de loi là, mais ils ont été assez vocal, puis, oui, je pense qu'on a avantage à entendre leur appel.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Caire : Comme je le disais précédemment, M. le Président, si les collègues autorisent une courte suspension, je vais tester une idée du point de vue juridique, et, dépendamment du résultat de ma consultation, je reviendrai avec des propositions.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Alors, je suspends les travaux quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 49)

(Reprise à 15 h 52)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Caire : Oui. Alors, M. le Président, après consultation des juristes, j'ai une proposition à faire au collègue. De la même façon qu'il y a des amendements, plus tard, qui vont venir modifier la LGGRI, ce que je vous propose, c'est de déposer des amendements qui vont modifier la loi sur les crimes à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement. À 92, on pourrait introduire, dans cette loi-ci, l'article 92.1, juste avant de commencer les études sur les articles de la loi sur le privé, où on viendrait intégrer, donc, dans la loi particulière, le principe de communication des sanctions aux victimes, et avec... en retravaillant le libellé sur la diffusion ou l'accès aux renseignements pour les comités.

Ça nous permettrait aussi d'aller chercher un avis sur la constitutionnalité du troisième élément, sur les sanctions, communiquer les sanctions. Donc, on pourrait aller chercher un avis formel, à savoir est-ce que ça passe le test des tribunaux ou non, et on viendrait... Donc, on n'attendrait pas qu'il y ait un rapport d'application. On le ferait, nous, ici, dans cette commission, donc ce serait fait à la satisfaction des victimes. Évidemment... je vous offre évidemment qu'on collabore à la rédaction de tout ça pour que ça se fasse à la satisfaction de tout le monde, mais dans le respect de notre corpus législatif.

Et la loi actuelle, dans son libellé, dit bien qu'un renseignement personnel peut être communiqué lorsque c'est dans le cadre de l'application d'une loi. Et donc, en le mettant dans l'application de la loi en question, la loi d'accès va autoriser... Donc, le verrou dont parlait le collègue de Gouin saute. Il n'y a plus de verrou pour communiquer le renseignement en question, puisque c'est prévu dans une loi, et donc que, dans le cadre de l'application d'une loi, ça peut être fait, la loi le spécifie. Et cette loi-là, on va garder la cohérence, parce qu'on va mettre ces dispositions-là dans la loi qui a été adoptée pour... à cette fin. Et on va le faire maintenant. Comme ça, il n'y aura pas de flou existentiel, à savoir est-ce que l'année prochaine on va le faire ou on ne le fera pas. On va le faire, on va le faire dans cette commission-ci, mais en l'écrivant dans la loi qui est prévue à cet effet. C'est la proposition que je fais aux collègues.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : On m'a... J'ai entendu que c'est à l'article 21 du projet de loi, du projet de loi, qu'on vient introduire l'idée selon laquelle, je cite, là : «Un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée», et là, c'est ça, l'enjeu dont on discute en ce moment, là, puisqu'il est question de divulguer une sanction sans le consentement de la personne qui serait visée par la sanction. Donc, faisons l'hypothèse : Un professeur — puis je vais prendre cet exemple-là parce que c'est un exemple qui est arrivé et qui arrive, là — un professeur qui fait l'objet d'une plainte, plainte qui est fondée, s'ensuit une sanction, et donc la volonté du collectif Québec contre les violences sexuelles, c'est de permettre que cette sanction-là soit communiquée à la victime, même si le professeur en question, dans l'exemple que j'utilise, s'y oppose. Donc, je ferme la parenthèse, à l'article 21 du projet de loi, on vient introduire l'idée qu'un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement personnel à toute personne ou tout organisme lorsque cette communication est nécessaire à l'application d'une loi au Québec, et lorsque cette communication — et là, premier point — est prévue expressément par la loi. Donc, si je comprends bien, ce que le...

M. Caire : Si je peux me permettre, M. le député, si je peux me permettre...

M. Nadeau-Dubois : Bien sûr.

M. Caire : Nous allons proposer un amendement qui va retirer ces dispositions-là, à l'effet que ça soit prévu expressément, à la demande du Barreau et à la demande des ordres professionnels. Donc, même si ce n'est pas prévu... puis le libellé actuel de l'article 67 de la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels prévoit le premier alinéa que vous avez lu.

M. Nadeau-Dubois : Bien, en fait, en ce moment, ça dit que ce soit prévu ou non par la loi.

M. Caire : C'est ça, c'est ça. Que ce soit prévu ou non, si c'est dans le cadre de l'application d'une loi, un renseignement personnel peut être communiqué sans le consentement de la personne. Donc, ça, c'est la disposition actuelle. Il y a cette disposition dans la loi, mais, quand on sera rendus à l'article 21, je vous proposerai un amendement, parce que, à la lumière des suggestions qui nous ont été faites, on en est arrivés à la conclusion que le libellé actuel était plus satisfaisant, donc on retirerait l'article 21. Donc, ça vient renforcer le fait que ce que le député de Gouin dit, la réponse à cette question-là, c'est oui, compte tenu que cette communication-là, elle va être mise dans la loi que nous amenderons ensemble, loi dont le nom m'échappe moi aussi et dont vous m'excuserez de ne pas avoir le libellé exact, mais cette loi particulière, appelons-la la loi particulière, donc la communication de la sanction à la victime, nous allons le prévoir dans la loi particulière. La diffusion ou la communication, je ne sais pas quel terme il faut utiliser, mais, en tout cas, communication des renseignements au comité sera prévue aussi. Donc, on va venir renforcer ce principe-là, que le comité a accès à cette information et aux renseignements personnels inhérents à la communication.

Le dernier élément, ça va nous donner le temps d'aller chercher un avis formel sur la constitutionnalité ou les enjeux constitutionnels, parce que, comme législateur, on n'a pas envie de voir une loi déboutée devant la cour parce qu'on n'aura pas respecté la charte. Donc, on va essayer d'éviter ça. Ceci étant, on va aller chercher un avis puis on pourra travailler collectivement, comme législateur, sur la base de cet avis-là, est-ce qu'on le fait ou non. Il en reviendra à nous de le décider, mais, au moins, ce sera sur un avis juridique formel dont je vous ferai part.

Mais, minimalement, dans la loi actuelle, nous allons apporter ces deux modifications-là, et donc, dans ce sens-là, répondre positivement à la demande qui nous est faite, en toute cohérence avec le corpus législatif qui est mis en place.

M. Nadeau-Dubois : Et là j'essaie juste de bien cerner puis comprendre les intentions du ministre, là, sans présumer de je suis-tu d'accord ou pas, là. Ce que le ministre nous dit, c'est que, si on vient modifier, dans la loi qui régit les plaintes en matière de...

M. Caire : ...celle-là, crime à caractère sexuel.

M. Nadeau-Dubois : ...de geste à caractère sexuel, ce n'est pas des crimes, là, parce que ce n'est pas criminel, mais des actes à caractère... tu sais, des violences à caractère sexuel, je comprends qu'il nous dit qu'il n'y aura pas d'interaction avec la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et que, si on vient faire, plus loin, la modification à la loi particulière sur les violences à caractère sexuel, il n'y a rien dans la loi actuelle sur l'accès aux documents des organismes publics ni dans la loi bientôt modifiée qui va faire obstruction...

M. Caire : Tout à fait. Puis, si je peux...

M. Nadeau-Dubois : ...à la divulgation des renseignements aux plaignantes.

M. Caire : Je peux, M. le Président...

M. Nadeau-Dubois : Moi, c'est... dans le fond, parce que c'est ça, l'objectif de l'opération, ça fait que je veux juste m'assurer qu'on s'entend tous, qu'on a le même objectif puis qu'on va y arriver, puis qu'il n'aura pas d'embûche juridique ou d'interaction qui vont faire en sorte qu'on va rater l'objectif.

• (16 heures) •

M. Caire : On a le même enjeu, on a le même objectif, mais on veut juste le faire au bon endroit, de la bonne façon. Et la finalité, elle est celle que le député de Gouin souhaite, c'est-à-dire que les victimes vont pouvoir avoir cette information-là sur les sanctions qui auront été imposées à la personne qui fait l'objet de la plainte, que le comité va avoir accès aux informations, aux renseignements personnels qui vont être nécessaires, évidemment, à son travail, et éventuellement un avis qui va nous dire si le troisième élément nous donne une garantie satisfaisante de passer le test des tribunaux ou non, et, à ce moment-là, comme législateurs, on aura une décision à prendre sur : Est-ce qu'on prend le risque de le mettre, quitte à voir cette loi-là déboutée?

M. Nadeau-Dubois : Puis l'enjeu de potentielle anticonstitutionnalité, on s'entend, c'est pour 61... ce qui est actuellement formulé...

M. Caire : 61.4, ce qui serait le...

M. Nadeau-Dubois : ...ce qui est actuellement formulé comme 61.4 dans l'argument du...

M. Caire : Oui, c'est ça.

M. Nadeau-Dubois : ...dans l'amendement du collègue, là.

M. Caire : Oui, oui.

M. Nadeau-Dubois : Les deux premiers...

M. Caire : Il n'y a pas d'enjeu.

M. Nadeau-Dubois : ...il n'y a rien à l'horizon...de problème?

M. Caire : Non.

M. Nadeau-Dubois : O.K.

M. Caire : Non, non, non. Puis on le ferait à... On ferait un 92.1.

M. Nadeau-Dubois : Je comprends bien les intentions du ministre. Je regarde ça.

Le Président (M. Bachand) : Intervention, M. le député de René-Lévesque?

M. Ouellet : Je suis assez satisfait. C'est assez complexe comme situation vécue par les victimes. C'est assez complexe de faire des lois. Je trouve que... Collectivement, je pense qu'on va trouver la façon de satisfaire les demandes des victimes mais que le tout se tienne de façon cohérente pour que ce que les victimes réclament puisse être obtenu. Et ce que les législateurs souhaitent, c'est que ça soit facilement compréhensible et accessible. Ça serait le souhait de tous.

Donc, est-ce que c'est 81.2, 83? Rendu là, M. le ministre, on choisira le bon moment, mais, assurément, je ne voudrais pas rater ce moment-là, et je pense que les autres collègues aussi. C'est fondamental si on réussit à faire ça dans cette loi-là. Ça a été demandé, voulu, et je pense qu'on peut tous s'en satisfaire lorsque ça sera adopté. Merci.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Juste pour qu'on travaille bien tout le monde ensemble, là, j'aurais... Puis c'est l'amendement du collègue, je ne veux pas en décider le sort, ce sera ultimement sa décision, mais peut-être qu'on pourrait non pas battre, mais simplement suspendre l'amendement pour...

Je vais vous avouer, là, nous, on va vouloir rentrer en contact avec les organisations qui représentent les victimes et qui ont fait les représentations à la commission pour... parce que je pense que ça peut être intéressant de savoir aussi ce que ces organisations-là en pensent, de la voie qui est proposée par le ministre.

Donc, peut-être que, pour que tout le monde se sente consulté dans cette opération-là et écouter en premier lieu les organisations qui parlent pour les victimes, on pourrait suspendre l'amendement. Comme ça, il reste sur la table. On poursuit l'étude du projet de loi. On procédera, à 92.1, aux modifications proposées par le ministre, puis, si jamais il y avait imbroglio, si jamais on ne s'entendait plus, si jamais on nous disait que c'était la mauvaise solution, bien, l'amendement sera toujours là. On pourra en redébattre et le revoter si jamais embûche il y avait en cours de route. Je pense que ça sécuriserait notamment les organisations qui sont à l'origine de cet amendement-là. Puisque c'était leur proposition d'abord qui nous amène à en discuter, je pense qu'on pourrait faire ça.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre

M. Caire : Ça ne me dérange pas. M. le Président, je n'ai pas... Compte tenu du fait que 13.1, un peu comme on a fait à 12.1, n'interfère pas dans un article, donc on peut continuer les études des articles. Mais je veux rassurer les collègues, je veux rassurer les organismes, l'intention, elle est ferme, puis je comprends le petit bémol, mais... pas d'enjeu.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de... René-Lévesque, pardon.

M. Ouellet : Après autant de bonnes suggestions... Entre leaders, on a quand même développé certaines affinités. Donc, le député de Gouin lit un peu dans ma tête.

M. Caire : Je suis juste un adjoint.

M. Ouellet : Et le leader adjoint est adjoint dans ma tête présentement. Effectivement, on va suspendre l'amendement, prendre le temps de faire les travaux, communiquer avec les groupes qui ont préparé le mémoire pour être certains qu'on fasse un tour de roue complet. On a la chance de régler une problématique qui avait de fâcheuses implications sur la vie des victimes, bien, on va prendre le temps de faire ça adéquatement, et correctement, et de façon collégiale. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, je comprends qu'il y a consentement pour suspendre l'amendement créant l'article 13.1? Consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement. M. le ministre, article 14.

M. Caire : Merci, M. le Président. Donc, l'article 14 se lit comme suit :

Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 63.2, des suivants :

«63.3. Un organisme public doit publier sur son site Internet des règles encadrant sa gouvernance à l'égard des renseignements personnels. Ces règles doivent être approuvées par son comité sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels.

«Elles peuvent prendre la forme d'une politique, d'une directive ou d'un guide et doivent notamment prévoir les rôles et les responsabilités des membres de son...»

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît! Parce qu'on vous entend, c'est pour ça. Désolé. O.K. M. le ministre, pardon.

M. Caire : Donc : «...tout au long...» Je disais : «...prévoir les rôles et les responsabilités des membres de son personnel tout au long du cycle de vie de ces renseignements ainsi qu'un processus de traitement des plaintes relatives à la protection de ceux-ci. Elles incluent une description des activités de formation et de sensibilisation que l'organisme offre à son personnel en matière de protection des renseignements personnels.

«Ces règles incluent également les mesures de protection à prendre à l'égard des renseignements personnels recueillis ou utilisés dans le cadre d'un sondage, dont une évaluation de :

«1° la nécessité de recourir au sondage;

«2° l'aspect éthique du sondage compte tenu, notamment, de la sensibilité des renseignements personnels recueillis et de la finalité de leur utilisation.

«63.4. Un organisme public qui recueille par un moyen technologique des renseignements personnels doit publier sur son site Internet et diffuser par tout moyen propre à atteindre les personnes concernées une politique de confidentialité rédigée en termes simples et clairs. Il fait de même pour l'avis dont toute modification à cette politique doit faire l'objet.

«Un règlement du gouvernement peut déterminer le contenu et les modalités de cette politique et de cet avis.

«63.5. Un organisme public doit procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée de tout projet de système d'information ou de prestation électronique de services impliquant la collecte, l'utilisation, la communication, la conservation ou la destruction de renseignements personnels.

«Aux fins de cette évaluation, l'organisme public doit consulter, dès le début du projet, son comité sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels.

«Cet organisme public doit également s'assurer que ce projet permet qu'un renseignement personnel informatisé recueilli auprès de la personne concernée soit communiqué à cette dernière dans un format technologique structuré et couramment utilisé.

«63.6. Le comité peut, à toute étape d'un projet visé à l'article 63.5, suggérer des mesures de protection des renseignements personnels applicables à ce projet, telles que :

«1° la nomination d'une personne chargée de la mise en oeuvre des mesures de protection des renseignements personnels;

«2° des mesures de protection des renseignements personnels dans tout document relatif au projet, tel un cahier des charges ou un contrat;

«3° une description des responsabilités des participants au projet en matière de protection des renseignements personnels;

«4° la tenue d'activités de formation sur la protection des renseignements personnels pour les participants au projet.

«63.7. Un organisme public qui a des motifs de croire que s'est produit un incident de confidentialité impliquant un renseignement personnel qu'il détient doit prendre les mesures raisonnables pour diminuer les risques qu'un préjudice soit causé et éviter que de nouveaux incidents de même nature ne se produisent.

«Si l'incident présente un risque qu'un préjudice sérieux soit causé, l'organisme doit, avec diligence, aviser la commission. Il doit également aviser toute personne dont un renseignement personnel est concerné par l'incident, à défaut de quoi la commission peut lui ordonner de le faire. Il peut également aviser toute personne ou tout organisme susceptible de diminuer ce risque, en ne lui communiquant que les renseignements personnels nécessaires à cette fin sans le consentement de la personne concernée. Dans ce dernier cas, le responsable de la protection des renseignements personnels doit enregistrer la communication.

«Malgré le deuxième alinéa, une personne dont un renseignement personnel est concerné par l'incident n'a pas à être avisée tant que cela serait susceptible d'entraver une enquête faite par une personne ou par un organisme qui, en vertu de la loi, est chargé de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois.

• (16 h 10) •

«Un règlement du gouvernement peut déterminer le contenu et les modalités des avis prévus au présent article.

«63.8. Pour l'application de la présente loi, on entend par "incident de confidentialité" :

1° l'accès non autorisé par la loi à un renseignement personnel;

2° l'utilisation non autorisée par la loi d'un renseignement personnel;

3° la communication non autorisée par la loi d'un renseignement personnel;

4° la perte d'un renseignement personnel ou toute autre atteinte à la protection d'un tel renseignement.

«63.9. Lorsqu'il évalue le risque qu'un préjudice soit causé à une personne dont un renseignement personnel est concerné par un incident de confidentialité, un organisme public doit considérer notamment la sensibilité du renseignement concerné, les conséquences appréhendées de son utilisation et la probabilité qu'il soit utilisé à des fins préjudiciables. L'organisme doit également consulter son responsable de la protection des renseignements personnels.

«63.10. Un organisme public doit tenir un registre des incidents de confidentialité. Un règlement du gouvernement peut déterminer la teneur de ce registre.

«Sur demande de la commission, une copie de ce registre lui est transmise.»

Alors, M. le Président, je... ce très court et très peu substantiel article...

Le Président (M. Bachand) : Vous avez des amendements aussi...

M. Caire : Oui, j'ai des amendements. Bien, en fait, est-ce que je commence par les explications de l'article pour ensuite présenter les amendements, M. le Président?

Le Président (M. Bachand) : Oui. Et puis ce qu'on va faire après, on pourra décider si on y va article introduit par article introduit pour être certains qu'on puisse avoir une étude plus détaillée de l'article 14. M. le ministre.

M. Caire : Parfait, M. le Président. Donc, explication : cet article introduit l'article 63.3 à 63.10 à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

63.3. Cet article prévoit que tout organisme public doit publier sur son site Internet des règles encadrant la gouvernance à l'égard des renseignements personnels en plus de prévoir la forme et le contenu de celles-ci.

63.4. Cet article prévoit qu'un organisme public qui recueille par un moyen technologique des renseignements personnels doit publier sur son site Internet et diffuser par tout moyen propre à atteindre les personnes concernées une politique de confidentialité rédigée en termes simples et clairs. Il prévoit également que toute modification à cette politique doit faire l'objet d'un avis et que les modalités de cette politique et de cet avis peuvent être prévues par règlement.

63.5. Cet article prévoit qu'un organisme public doive procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée de tout projet de système d'information ou de prestation électronique de services impliquant la collecte, l'utilisation, la communication, la conservation, la destruction des renseignements personnels.

Aux fins de cette évaluation, l'organisme doit consulter son comité sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Il doit également s'assurer que le projet permette qu'un renseignement personnel informatique recueilli auprès de la personne concernée soit communiqué à cette dernière dans un format technologique structuré et couramment utilisé.

63.6. Cet article prévoit que le comité sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels peut, à toute étape d'un projet de système d'information ou de prestation électronique de services visé à l'article précédent, suggérer des mesures de protection des renseignements personnels applicables à ce projet, telles que certaines mesures qu'il énumère.

63.7. Cet article prévoit qu'un organisme public qui a des motifs de croire que s'est produit un incident de confidentialité impliquant un renseignement personnel qu'il détient doit prendre les mesures raisonnables pour diminuer les risques qu'un préjudice soit causé et éviter que de nouveaux incidents de même nature ne se produisent.

Il prévoit également que, si l'incident présente un risque qu'un préjudice sérieux soit causé, l'organisme doit, avec diligence, aviser la commission et toute personne concernée par un renseignement personnel impliqué. Enfin, il prévoit que l'organisme peut aussi aviser toute personne ou tout organisme susceptible de diminuer le risque de préjudice, à certaines conditions.

63.8. Cet article définit, pour l'application des nouvelles dispositions de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels introduites par le projet de loi, le terme «incident de confidentialité».

63.9. Cet article prévoit que, lorsqu'un organisme public risque qu'un préjudice soit causé à une personne dont un renseignement personnel est concerné par un incident de confidentialité, il doit considérer notamment la sensibilité du renseignement concerné, les conséquences appréhendées de son utilisation et la probabilité qu'il soit utilisé à des fins préjudiciables, en plus de consulter son responsable de la protection des renseignements personnels.

Finalement, 63.10. Cet article prévoit qu'un organisme public doit tenir un registre des incidents de confidentialité et que, sur demande de la Commission d'accès à l'information, une copie de ce registre lui soit transmise. Il prévoit, enfin, que la teneur de ce registre peut être déterminée par règlement du gouvernement.

Et, comme vous l'avez mentionné, M. le Président, il y aura, à cet article, des amendements, histoire de simplifier un peu tout ça.

Donc, premier amendement que nous déposons, c'est : à l'article 63.5 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 14 du projet de loi :

1° insérer, dans le premier alinéa et après «tout projet», «d'acquisition, de développement et de refonte»;

2° ajouter, à la fin de... l'alinéa suivant :

«La réalisation d'une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée en application de la présente loi doit être proportionnée à la sensibilité des renseignements concernés, à la finalité de leur utilisation, à leur quantité, à leur répartition et à leur support.»

Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Comme je disais tantôt, si vous êtes d'accord, on va y aller par les nouveaux articles introduits, donc... Parce que je regarde le député de Gouin... Effectivement, c'est quelque chose. Alors, on serait... Et on votera lorsque tout sera... tous les articles introduits seront discutés. Donc, on serait à 63.3. Interventions?

M. Tanguay : Là, M. le Président, là, on est sur l'amendement du ministre?

Le Président (M. Bachand) : Non. On va y aller par... Là, on a lu globalement tous les nouveaux articles introduits, les amendements aux différents articles, mais, si vous êtes d'accord, on irait par chacun des nouveaux articles qui sont introduits.

M. Caire : Ah! O.K. O.K. Donc, j'ai lu prématurément l'amendement à 63.5.

Le Président (M. Bachand) : Non, ça donne l'information générale. D'ailleurs, les amendements sont sur Greffier.

M. Tanguay : O.K. Ça fait que, là, on n'est pas sur l'amendement du ministre, là.

M. Caire : On est sur 63.3.

Le Président (M. Bachand) : Non, on va y aller par chacun des nouveaux articles introduits, si vous êtes d'accord.

M. Tanguay : O.K. Juste pour ma gouverne, parce que c'est important qu'on soit à la même page... Et le secrétariat évalue à combien de temps pour l'ensemble de l'article 14?

Le Président (M. Bachand) : On m'informe... 180 minutes, excluant, bien sûr, amendements et sous-amendements.

M. Tanguay : O.K. Je voudrais juste qu'on ne soit pas saucissonnés, une fois qu'on dit : Bon, bien, O.K., on est prêts à passer à 63.4, qu'on ne dit pas : Bien là, non, 63.3... tu sais, qu'on le prenne globalement.

Le Président (M. Bachand) : Bien, c'est ça, c'est qu'on va y aller par les nouveaux articles introduits, mais l'enveloppe globale demeure.

M. Tanguay : Demeure. O.K. Je comprends.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : La globalité, à la fin.

M. Tanguay : Puis, à 63.5, là, on ira avec l'amendement du ministre, puis...

Le Président (M. Bachand) : Exactement, exactement. Ça va?

M. Caire : O.K. Oui, je suis allé vite un peu sur l'amendement, je pense.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Merci. Donc, interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. Bien, je peux partir le bal, M. le Président, si on peut appeler ça un bal. «Un organisme public doit publier sur son site Internet les règles encadrant sa gouvernance à l'égard des renseignements personnels.» Et c'est là qu'on voit... Je me rappelle de la discussion que nous avions eue à l'article 1 par rapport à l'article 8 de la loi, où on disait : Le comité prend vie à 63.3 puis à 63.5. C'est là où le comité, dont on a abondamment parlé, prend vie. On dit : «Ces règles doivent être approuvées par son comité sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels.»

J'aimerais voir un peu comment le ministre voit... Parce que... qu'on me détrompera, il y avait peut-être... si j'ai tort, c'est la première fois qu'on parle qu'on constitue le comité dans la loi. Il y avait peut-être des comités informels qui se faisaient, mais là on formalise par le comité. Donc, la rédaction n'est pas au comité, mais le comité doit approuver cette rédaction-là. Donc, j'imagine qu'il va y avoir des minutes du comité qui va l'approuver ou... Il faut formaliser un petit peu ça, parce que, s'il l'approuve...

M. Caire : Oui. Bien, dans l'opérationnalité des choses, là, je suis un peu embêté, là. Est-ce que... Mais j'imagine que le comité va se gouverner, j'imagine, en fonction... même s'il n'a pas d'obligation, en fonction du code Morin, là. Il y a comme une façon de procéder, il y a des minutes, il y a un secrétaire.

M. Tanguay : Oui, mais mon point, c'est juste : Si le comité ne l'a pas approuvé, comment on pourrait dire : Ah! le comité l'a approuvé, il ne l'a pas approuvé? Parce que le haut responsable, il est au bat, tu sais.

M. Caire : Oui, oui, oui, je comprends, je comprends.

M. Tanguay : Alors, il faut juste savoir...

M. Caire : C'est quoi, la trace pour démontrer que le comité l'a approuvé.

M. Tanguay : Oui, pour dire : Aïe! Ça n'a même pas été... Parce que, si ça n'a pas été approuvé, il est dans le trouble.

M. Caire : Oui, tout à fait.

M. Tanguay : Alors, ça prend une trace.

M. Caire : Puis c'est une bonne question. Je ne sais pas si... Me Miville-Deschênes, dans la pratique actuelle, s'il y a quelque chose qui vient définir par quel moyen le comité doit signifier son approbation. Je comprends que l'approbation, elle est requise par la loi, mais comment cette approbation-là doit se signifier? Il y a-tu quelque chose dans la pratique?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, je dirais, présentement, les comités, en vertu du règlement, sont consultés sur différents projets, puis je vois... dans la pratique, ce que j'ai vu, c'est le procès-verbal, là, du comité, là, ou le compte rendu, plutôt, là, qui fait foi de ce qu'il s'est passé au sein du comité lors de la réunion, donc... Puis c'est par ce moyen-là qu'à ma connaissance, là, il y a des décisions qui sont prises, dont, je suppose, celle qui va être obligatoire, là, c'est-à-dire d'approuver les règles de gouvernance.

M. Tanguay : O.K. Donc, il y aurait des procès-verbaux de rencontres?

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, procès-verbaux... Des comptes rendus, du moins.

M. Tanguay : Oui, c'est ça, des comptes rendus.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Je ne sais pas si c'est procès-verbaux, mais oui, effectivement, là, pour...

M. Tanguay : Autrement dit, le comité, on sait déjà, c'est formel. On sait que le comité, ils sont trois, ils sont cinq ou ils sont huit, on le sait. Puis étaient présents à la rencontre... une sorte de compte rendu, étaient présents à la rencontre ces six membres-là des huit. Puis, j'imagine, s'ils sont trois... Je ne veux pas trop formaliser, je ne veux pas qu'on s'enfarge dans les fleurs du tapis, mais, s'ils sont trois, ils vont dire : Bon, bien, on n'est pas assez, sans parler de quorum. Puis, à un moment donné, quand ils vont être un chiffre substantiel, sur huit, s'ils sont cinq et plus, ils vont se faire un petit compte rendu, ils vont s'envoyer ça par courriel, puis, après ça, qui ne dit mot consent, j'imagine que... Voici le guide, tel que discuté, qui sera publié la semaine prochaine. Puis, j'imagine, c'est ça qu'on a en tête, parce que c'est important que le haut responsable... Puis je sais que la CAI va tout préciser ça, mais qu'on l'ait, ce point-là, pendant une minute, ce n'est pas vain. J'imagine que ça pourrait être minimalement ça.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, de mon expérience, il y a toujours eu, que ce soit ce comité-là ou d'autres types de comités, là, minimalement structuré, un ordre du jour puis un compte rendu après, qui est validé par les membres, pour s'assurer que ça reflète bien l'objet des discussions, là.

M. Tanguay : Parfait. Après ça, M. le Président, elle dit : «Elles peuvent prendre — donc on parle de règles — la forme [de] politique, [...] directive ou [...] guide et doivent notamment prévoir les rôles et les responsabilités des membres de son personnel tout au long du cycle de vie de ces renseignements ainsi qu'un processus de traitement des plaintes relatives à la protection de ceux-ci.» Il y a beaucoup de stock dans cet article-là.

Le processus de vie, est-ce 63.1 auquel on réfère ici, où on parle de «renseignements [...] collectés, utilisés, communiqués, conservés [...] détruits»? Le cycle de la vie. Hein, on a tous eu des enfants qui ont écouté Walt Disney puis on a tous la chanson en tête. Bien, c'est 63.1, le cycle de la vie?

• (16 h 20) •

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Effectivement.

M. Tanguay : O.K. Ça, c'est toujours raccord, parce que je voyais «collectés, utilisés»... Parce que, là, on fait... Je ne dis pas qu'on fait du neuf avec du vieux, ce n'est pas ça, mais c'est 2006, puis, quand même, la rédaction de 2006 du cycle de la vie, on n'y touche pas.

M. Caire : Non, il est...

M. Tanguay : Il est correct?

M. Caire : Oui, oui.

M. Tanguay : O.K. Parfait. Donc : «Elles peuvent prendre...» Et ça... Communiquer sur le site Internet... Donc, l'objectif, M. le ministre, c'est de faire en sorte que les gens...

M. Caire : Sachent.

M. Tanguay : ...sachent aussi, par rapport à la collecte... pourront savoir... pourront dire : Aïe! Moi, j'ai eu cette expérience-là avec cet organisme public là puis, écoute, je ne me rappelle plus quand est-ce qu'ils m'ont demandé mon consentement. Mais là va voir... Ah! O.K., ça, papi, papa. Ils vont pouvoir être instruits de comment se gère...

M. Caire : D'une part. Et, d'autre part, s'assurer aussi que l'organisme respecte les règles qu'il se sera données à lui-même. Donc, pour la personne qui voit ses renseignements personnels être collectés, utilisés, bon, le cycle de vie dont on parle, et qui se pose la question : Mon Dieu! Ils pouvaient-tu faire ça?, bien, non seulement il y a la loi, mais il y a aussi les règles de l'organisme, que l'organisme se donne quant à l'utilisation des renseignements personnels.

M. Tanguay : Puis là c'est intéressant parce que, je veux dire, tout est dans tout, un peu plus tôt, sur l'amendement du collègue de René-Lévesque, du Parti québécois, on faisait référence à la loi n° 151 sur les violences sexuelles dans les... et, à l'article 3 de cette loi-là, on exigeait et on... c'est exigé, ils avaient jusqu'en septembre 2019, que les universités, enseignement supérieur, se dotent de politiques. Là, on est dans la même...

M. Caire : Dans la même logique.

M. Tanguay : ...je ferme la parenthèse, dans la même logique.

M. Caire : Tout à fait, absolument.

M. Tanguay : On ne leur dit pas : Vire à gauche, vire à droite, mais : Faites de quoi puis publiez-le.

M. Caire : Et l'obligation de le mettre et de le rendre public via le site Internet de l'organisme.

M. Tanguay : Quand on dit : «Ces règles incluent également les mesures de protection à prendre à l'égard des renseignements personnels [requis] ou utilisés dans le cadre d'un sondage, dont une évaluation de», je trouvais ça un peu particulier, qu'on aborde le sujet un peu, je dirais... Ce n'est pas dans le «core business» de faire des sondages, mais on adresse le point des sondages ici, là. Il y a un enjeu?

M. Caire : Oui, puis je vous dirais que sondages, vous avez raison, ce n'est pas dans le «core business», mais, en même temps, je vous donne... Puis peut-être, par extension, puis là-dessus je ne veux pas m'avancer, mais, quand on fait une consultation aussi, qu'on recueille des renseignements personnels, que ce soit sur le site qu'on a, du gouvernement du Québec, il peut arriver qu'on demande aux citoyens qui y participent des renseignements personnels. Et donc, à partir de là, bien, je pense qu'il faut qu'on puisse appliquer la loi, même dans ce contexte-là.

M. Tanguay : O.K. Parce que c'est... on... c'est comme si on parlait d'un immense édifice que l'on veut construire puis qu'on précise : Bien, je veux que, dans la pièce 148, il y ait des poignées en argent. C'est comme si on mettait quelque chose de plus précis. Je trouvais ça un peu particulier.

Question très, très générale : Ça, ça couvre le régime des renseignements que l'organisme a par rapport aux citoyens, citoyennes, je dirais, justiciables, ou utilisateurs du service public, ou bénéficiaires du service public mais aussi aux employés de l'organisme public?

M. Caire : Oui, oui, oui.

M. Tanguay : Ça s'adresse à tout ce qui s'appelle renseignements personnels, que ça soit mon directeur technique ou Mme X dans son dossier?

M. Caire : Oui, absolument.

M. Tanguay : O.K. Et c'est peut-être dans un autre article, puis c'est la dernière question que j'aurais sur 63.3, puis je vais peut-être y revenir un peu plus tard, il est dit à quelque part, puis, excusez-moi, je l'ai peut-être manqué : Ça, c'est... Une fois que le comité l'a approuvé, c'est, avant publication, j'imagine, envoyé à la CAI pour être adoubé, béni.

M. Caire : La CAI n'a pas à l'approuver, par contre.

M. Tanguay : Non?

M. Caire : Non, ce n'est pas dans le processus.

M. Tanguay : Elle va-tu le voir passer à quelque part? Ce serait peut-être le fun qu'elle le voie passer.

M. Caire : Bien, c'est sûr que la CAI aura toujours le droit... puis c'est inhérent à sa loi, la CAI a toujours le pouvoir de faire des vérifications, de valider, de s'assurer que la loi est appliquée. Donc, c'est un pouvoir que la CAI a déjà. Donc, évidemment, si, d'entrée de jeu, une règle allait à l'encontre de la loi, c'est clair que la CAI a un pouvoir d'intervention.

M. Tanguay : Oui, mais est-ce que... puis je lance la question, puis je vais terminer là-dessus pour l'instant, sur 63.3, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de se poser la question? Puis, si on ne le met pas dans la loi mais qu'au moins on indique clairement la CAI... Moi, j'aimerais ça que la CAI les voie passer, parce qu'ils vont avoir des... et que l'on dit que l'on partage les meilleures pratiques, pour ne pas que chacun, dans son silo, réinvente la roue aussi, à quelque part.

M. Caire : Oui, j'entends le député. Ceci étant dit, je vous dirais un peu naïvement, dans l'objectif, peut-être, de protéger la CAI... Parce qu'on lui en demande beaucoup, là, on lui amène pas mal de...

M. Tanguay : Mais ça va être de la grosse CAI, là, qui s'en vient, là. C-A-I, pas la caille...

M. Caire : Oui, oui. Oui, puis j'adore le... Je ne sais pas si les gens ont vu le geste du député de LaFontaine...

M. Tanguay : Non, ils ne l'ont pas vu, c'est vous qu'ils ont vu. Ce n'est pas bon, ça.

M. Caire : Ça va coûter cher. Non, mais, sérieusement, moi, je pense que le fait que la CAI ait la possibilité, ait le pouvoir de le faire... à partir de là, je dis : Bon, bien, laissons à la CAI le soin de décider si elle veut le faire, quand est-ce qu'elle veut le faire, comment elle veut le faire. Puis, en plus, là, n'oublions pas, hein, la CAI va avoir le pouvoir d'émettre des lignes directrices. Donc, elle reçoit aussi une certaine autorité dans l'encadrement, là, qu'elle veut voir, alors...

M. Tanguay : Puis on sait comment ça va finir. Dans les crédits du ministre responsable, il va se faire dire par les oppositions : Ils n'ont pas assez de ressources.

M. Caire : Ils n'ont pas assez d'argent.

M. Tanguay : Mettez plus d'argent, plus de monde, c'est épouvantable.

M. Caire : Plein de pouvoirs, pas de moyen de les utiliser.

M. Tanguay : Rapport du Vérificateur général.

M. Caire : Jamais l'opposition ne va faire une affaire de même, voyons donc.

M. Tanguay : Puis jamais le ministre n'y donnera suite.

M. Caire : Puis jamais le ministre ne va dire : Bien, ils ont de l'argent, ils ont de l'argent en masse, il n'y a pas de problème. Ça n'arrivera pas, ça.

M. Tanguay : C'est bon.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président.

M. Caire : Il s'empêche de rire.

M. Nadeau-Dubois : Je ne m'empêche pas de rire. J'ai un masque...

M. Caire : C'est vrai.

M. Nadeau-Dubois : ...alors le ministre ne peut pas savoir si je riais, si je tirais la langue. Il est complètement dans le noir à cet égard.

J'ai une préoccupation connexe à celle de mon collègue de LaFontaine, mais je vais y arriver par un chemin différent. À 63.4, quand il est question de la politique de confidentialité, et on va y arriver dans quelques instants, ne me réprimandez pas, M. le Président, on donne au gouvernement le pouvoir de faire un règlement pour déterminer le contenu et les modalités de cette politique et de cet avis.

À 63.3, quand il est question des règles de gouvernance, on ne prévoit pas une telle habilitation réglementaire...

M. Caire : À 63 point...

M. Nadeau-Dubois : À 63.4, on peut lire : «Un règlement du gouvernement peut déterminer le contenu et les modalités de cette politique...» Donc, la politique de confidentialité et de cet avis.

M. Caire : Oui.

M. Nadeau-Dubois : O.K. Donc, on habilite le gouvernement par règlement à...

M. Caire : À standardiser.

M. Nadeau-Dubois : Oui, voilà. On le fait pour ça. À 63.3, il est question des règles de gouvernance en matière de renseignements personnels, et là on décide de ne pas donner le pouvoir au gouvernement de procéder par règlement.

Ma question : Pourquoi est-ce qu'on le fait à 63.4 et pas à 63.3? Sous-question : Ne serait-il pas pertinent de le faire aux deux endroits? Puisque, si c'est pertinent pour la politique de confidentialité et l'avis qui en découle, pourquoi ce ne serait pas pertinent de le faire également pour les règles encadrant la gouvernance en matière de renseignements personnels? Parce qu'il y a un choix qui a été fait dans un cas, puis, dans l'autre cas, le choix... c'est un choix différent qui a été fait, à moins que je lise vraiment très, très, mal.

M. Caire : Non, non, mais donnez-moi 30 secondes. Tout le monde veut me parler en même temps, puis c'est...

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

• (16 h 30) •

M. Caire : Je m'excuse, M. le député, parce que c'est toujours agréable de vous écouter, mais, en même temps, de voir que chaque côté... Tu sais, les gens se leurrent souvent. On a deux oreilles, mais c'est comme s'ils ne comprenaient pas que c'est tout connecté sur le même cerveau, enfin... Alors, voilà.

Bien, écoutez, oui, mais, si vous regardez la loi, la loi actuelle, 63.2, il y a déjà des choses qui sont prévues, qui sont en lien avec 63.3, comme nous l'expliquait, d'ailleurs, le député de LaFontaine, tout à l'heure, avec 63.1, 63.2, c'est un peu le même principe. À 63.4, là, on amène le fait que l'organisme public qui recueille par des moyens technologiques des renseignements personnels... qu'il doit publier sur son site. Donc là, c'est dans le contexte spécifique où on utilise des moyens technologiques.

M. Nadeau-Dubois : Je ne suis pas certain d'avoir compris la réponse du ministre. Parce que je lisais l'article 63.2 auquel il faisait référence, où on dit qu'«un organisme public — il y a des exceptions — [...] doit protéger les renseignements personnels en mettant en oeuvre les mesures édictées à cette fin par règlement du gouvernement».

M. Caire : C'est ça.

M. Nadeau-Dubois : Or, on le réitère à 63.4, dans le projet de loi. Je ne suis pas certain d'avoir compris pourquoi c'est pertinent de le faire à 63.4, alors que ça vient après 63.2, tout autant que 63.3 vient après 63.2.

M. Caire : Oui, mais 63.4, ce qu'on dit, c'est qu'«un organisme public qui recueille par un moyen technologique des renseignements personnels doit publier sur son site Internet et diffuser par tous [les moyens propres] à atteindre les personnes concernées une politique de confidentialité...»

M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est parce que, si l'argument pour ne pas l'avoir inclus à 63.3, c'est que c'est déjà prévu à 63.2, l'argument me semble...

M. Caire : Non, je comprends, mais...

M. Nadeau-Dubois : Ça serait tout aussi valide, donc, que ce n'est pas nécessaire de l'écrire à 63.4, alors qu'il m'apparaît que, si on veut une certaine forme d'uniformisation en matière de politique de confidentialité pour les organismes publics, pourquoi n'aurait-on pas la même volonté d'uniformisation puis pourquoi ne pas l'affirmer aussi clairement dans le cas des règles de gouvernance prévues à 63.3.

M. Caire : C'est juste qu'à 63.4 vous avez une nuance qui est le fait que vous passez par un moyen technologique. Donc, c'est en conséquence du fait que vous passez par un moyen technologique pour collecter des renseignements personnels, alors que vous devez voir à 63.3... Non?

M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est que j'entends ce que le ministre me dit, mais, moi, ce que je comprends... quand je lis, à 63.4, que le gouvernement peut déterminer le contenu et les modalités de cette politique et de cet avis, ce que je lis comme intention, c'est qu'il y ait un certain cadre imposé par le gouvernement pour qu'il y ait une uniformité puis qu'on ne se retrouve pas avec des organismes publics qui ont des politiques de confidentialité qui n'ont rien à voir les unes avec les autres. Alors, moi, il m'apparaît... et je trouve que c'est une bonne affaire.

Alors, je dis : Pourquoi, quand vient le temps, pour les organismes publics, de publier des règles encadrant sa gouvernance à l'égard des renseignements personnels... Et on dit... On précise que ces règles-là doivent être approuvées par son comité sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Pourquoi ne pas prévoir légalement que, ces règles-là, le gouvernement se donne le droit par règlement d'en donner les... tu sais, d'en établir le cadre, par exemple? Donc, on pourrait ajouter qu'un règlement du gouvernement peut déterminer le contenu et les modalités de ces règles.

M. Caire : C'est parce que, si vous regardez 63.2, donc, on donne le pouvoir d'établir le cadre et la protection par règlement. 63.3, c'est les règles encadrant la gouvernance des données. Ça va, donc, ce pouvoir-là, vous l'avez, là.

Par contre, quand vous arrivez à 63.4, vous venez spécifier ce que ces... lorsque vous faites une collecte de données par des moyens technologiques. À ce moment-là, de façon spécifique, sur la collecte puis en utilisant un moyen technologique, vous pouvez vous donner un cadre réglementaire. L'autre, c'est une gouvernance générale, 63.1, 63.2 et 63.3 sont... s'appliquent. Puis, à 63.4, c'est parce que vous dites : Bien là, si vous utilisez... C'est des règles de gouvernance générale. C'est quand vous arrivez à 63.4, là, vous dites : Bien, si vous vous connectez par un moyen technologique... On est dans une spécificité qui peut amener un règlement propre à cette spécificité.

M. Nadeau-Dubois : C'est parce que... Je ne veux pas qu'on fasse...

M. Caire : Mais c'est... L'objectif du collègue est atteint, là. À 63.3, on ne dit pas que le gouvernement ne peut pas intervenir. On dit que 63.2 couvre cette possibilité-là, tandis qu'à 63.4, là, vous arrivez avec un moyen technologique pour la collecte de renseignements. Donc là...

M. Nadeau-Dubois : Je ne suis pas juriste, mais, si on le prévoit comme disposition générale à 63.2, ça s'applique à l'ensemble des cas spécifiques. Pourtant, là, on vient...

M. Caire : Bien, c'est parce que, là, vous parlez de... C'est parce que vous parlez de vos règles de gouvernance à 63.3. À 63.4, vous parlez de la collecte de données par moyen technologique, ce n'est pas...

M. Nadeau-Dubois : Non, mais c'est parce que la réponse que me donne le ministre, je ne la comprends pas. Parce qu'il me dit : On n'a pas besoin de le préciser, que le gouvernement peut, par règlement, déterminer le contenu ou les modalités des règles de gouvernance, parce qu'on en a déjà le pouvoir en vertu de 63.2. Bien, c'est parce qu'en vertu de ce même argument-là on pourrait dire : 63.4, c'est juste un cas spécifique sous la règle générale, et donc le pouvoir prévu à 63.2, il existe aussi pour la politique de confidentialité prévue à 63.4.

Si le 63.2, c'est la règle générale, puis que 63.4, c'est le spécifique, ma compréhension de ce genre d'affaire là, c'est que, donc, on n'aurait pas besoin de le préciser. Puis c'est pour ça... Je ne cherche pas le trouble, je pose la question, parce que je me dis : Si c'est prévu là, pourquoi ne pas le prévoir ailleurs aussi pour s'assurer que, dans les deux cas, le gouvernement puisse uniformiser les pratiques au sein des organismes publics?

M. Caire : Parce que, dans l'interprétation qu'on en fait, 63.2 couvre les cas de 63.3, puis, dans le cas de 63.4, on parle d'une collecte par des moyens technologiques, donc on vient le préciser.

M. Nadeau-Dubois : O.K. J'ai vraiment de la... Peut-être que je m'exprime mal.

M. Caire : Ou moi.

M. Nadeau-Dubois : Peut-être qu'un juriste pourrait nous aider à comprendre la situation.

M. Caire : Bien, je vais laisser Me Miville-Deschênes compléter la réponse.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes, s'il vous plaît.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui. En fait, 63.3, c'est... il prévoit les règles dont doit se doter l'organisme public pour encadrer la gouvernance, la collecte, l'utilisation, la conservation, comment de temps je vais conserver chaque catégorie de renseignements. Donc, avec 63.2, effectivement, il y a un pouvoir réglementaire qui permet au gouvernement, s'il veut agir sur un de ces aspects-là, pour limiter une collecte, une conservation, etc. Ça lui permet d'établir un règlement qui va prévoir certaines dispositions en matière de tout ce qui touche le cycle de vie du renseignement. Donc, on considère que c'est possible de prévoir un règlement pour ça.

Là, quand on tombe à 63.4, c'est... Dans le fond, la politique de confidentialité, c'est : Qu'est-ce qui va être... Quelle information va être transmise au citoyen lors d'une collecte? Quelle information on va lui donner? Ça fait qu'on ne considérait pas que c'était une règle de protection tant que ça, mais c'est vraiment l'information qui est communiquée à la personne. Puis, dans ce contexte-là, on trouvait nécessaire de prévoir un pouvoir réglementaire pour qu'il n'y ait pas de doute sur le fait qu'on puisse, dans un règlement, déterminer avec précision les renseignements ou la façon que les renseignements sont communiqués à la personne.

M. Nadeau-Dubois : O.K. Donc, la différence, ce n'est pas tant la question du moyen technologique que le pouvoir réglementaire qui est donné en vertu de 63.2, c'est pour ce qui a trait à la protection des renseignements personnels. Et vous me dites : 63.4, ce n'est pas un article qui porte sur la protection des renseignements personnels tant que sur la communication au sujet de la protection des renseignements personnels.

Parce que, la politique de confidentialité, je comprends que c'est la manière dont on communique au public nos pratiques en matière de protection des renseignements personnels, donc... mais j'ai... C'est parce que ça me semble ténu comme distinction, tu sais.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Je comprends, mais la politique de confidentialité, c'est vraiment... ça contient notamment les renseignements, l'information qu'on doit à tout prix communiquer à la personne avant de collecter. On doit lui dire à quel point je collecte, à qui je vais les communiquer. Bon, c'est à 65, là, qu'on va voir les différentes informations qui doivent être transmises. Donc, afin d'assurer une uniformisation, si on le souhaite, si le gouvernement le souhaite, de ces politiques-là, on a mis un pouvoir réglementaire.

• (16 h 40) •

M. Nadeau-Dubois : Et vous me dites que ça, 63.2 ne le permettait pas déjà.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, on voulait se l'assurer. Il faut être transparent, on voulait s'assurer d'avoir ce pouvoir réglementaire là puis on trouvait que c'était mieux de l'écrire plutôt que... puisque ce n'était pas nécessairement une règle liée, tu sais, à l'utilisation, ou à la conservation, ou à la communication au sein de l'organisme public.

M. Nadeau-Dubois : Puis c'est les règles plus en termes de collecte. Parce que, dans la politique de confidentialité, là, il pourrait y avoir des informations relatives à ce que vous venez de mentionner. Parce que, dans le fond, si vous avez trouvé important de le spécifier pour 63.4, ce avec quoi je suis d'accord, hein, comprenons-nous bien, je me dis pourquoi ne pas avoir le même niveau de ceinture et bretelles à 63.3 pour que ce soit bien clair pour tout le monde que le gouvernement puisse le faire. Et là la réponse, c'est que 63... on ne s'en assure pas là parce qu'on est déjà sûr, mais je ne suis pas... la réponse... Ce que je ne comprends pas de la réponse, c'est pourquoi on est si sûr d'avoir le pouvoir réglementaire là et que vous nous dites : On était moins sûr de l'avoir pour la politique de confidentialité.

Il me semble, on ne prend pas de chance, on écrit dans les deux articles que le gouvernement peut, par règlement, uniformiser les pratiques puis on s'assure, comme ça, dans les deux cas, que le pouvoir est bel et bien là. Puis il me semble que, dans le fait de l'inclure à 63.4, il y a comme une reconnaissance de la part du ministre que c'est pertinent de s'en assurer. Donc, ça me questionne sur pourquoi on n'a pas eu le même niveau de... pourquoi on ne cherche pas à atteindre le même niveau de certitude à 63.3.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, pour être transparent, c'est que, lors de la rédaction, on n'avait pas le projet... même si je maintiens qu'on pourrait le faire, bien, on n'avait pas le projet d'avoir un règlement qui encadrait vraiment les règles de gouvernance. Donc... Puis c'est la raison pour laquelle on a... On pense qu'on peut le faire, mais on n'avait... on ne sentait pas le besoin de l'écrire spécifiquement à 63.3, puis aussi parce que... Bien, on n'avait pas le projet parce que les règles sont assez... elles peuvent être assez disparates puis elles peuvent être assez complètes, là. Donc, on n'avait pas de projet réglementaire.

M. Nadeau-Dubois : O.K. Bon, bien, je comprends mieux, dans le fond, la... je comprends mieux la... La raison, dans le fond, c'est que vous me dites : Pour ce qui est de la politique de confidentialité, on s'enligne... il y a une volonté d'uniformiser puis de procéder par règlement, alors que, pour 63.3, c'est moins dans les intentions, donc on n'a pas senti le besoin d'écrire le pouvoir réglementaire. Je prends note de ça. Je ne sais pas s'il y a des collègues qui veulent intervenir. Je vais continuer à penser à cette question parce que, voilà, ça me fait réfléchir.

Le Président (M. Bachand) : Alors, comme vous savez, c'est assez flexible, quand même... par article introduit. Donc, si vous voulez revenir sur un autre article, il n'y a pas de problème. Alors donc, s'il n'y a pas d'autre intervention sur 63.3...

M. Tanguay : Oui, bien, 63.3, pour faire écho, juste pour appuyer ce que disait mon collègue. Le Barreau est venu nous dire ça, à 63.3, je cite le Barreau, page 4 de leur mémoire : «Toutefois, nous croyons qu'il est nécessaire de prévoir une habilitation réglementaire afin de permettre au gouvernement d'adopter un règlement dictant un contenu minimal encadrant ces règles.» Sans tout répéter, effectivement, souvent, on va dire, dans l'opposition : Ah! bien là, le ministre prévoit trop de choses par règlement, il est au pouvoir, mais là, rendu là, je pense que c'est de nature à un règlement. Puis je voulais juste faire écho, M. le Président, à ce que proposait le Barreau, puis auquel... élément auquel je souscris, de le dire dans la loi.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre? Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Tanguay : Dans 63.4, parce qu'on est à 63.3, on parle de rédiger en termes simples et clairs. N'aurions-nous pas pu rajouter ça, dans... de qualifier «termes simples et clairs», dans 63.3 aussi? Ou, puis tant mieux si c'est ça, vous allez me dire : Bien, 63.3 vient assaisonner l'interprétation de 63.3, puis il faut que ce soit des termes simples et clairs, mais il me semble qu'on est pas mal dans le contexte de technologie, là, ce qui n'est pas le cas de 63.3.

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Oui, en fait, la distinction, c'est que 63.4 vise à informer la personne concernée. Donc, il y avait une importance... tout comme lors du consentement, c'était important d'être simple et clair. 63.3, les règles de gouvernance, c'est à l'interne, c'est les règles dont on se dote, avec les employés notamment, pour s'assurer que la communication, la collecte... on respecte tout ce que la loi prévoit. Donc, c'était moins nécessaire de prévoir cette clarté-là compte tenu qu'on ne s'adresse pas aux citoyens. Oui, on le met sur le site Internet, mais on s'adresse, en premier lieu, aux membres de l'organisme public.

M. Tanguay : Ah! je n'avais pas catché ça. Moi, je pensais que 63.3 était aussi dirigé vers le public que 63.4 puis que la seule distinction, c'est que 63.4, c'était ce qui était collecté par moyen technologique, puis 63.3, c'est toute la balance de ce qui est détenu et collecté, qui reste, quand même, en 2021, énormément d'informations. Je voyais un lectorat équivalent à 63.3 qu'à 63.4, autrement dit, d'où l'importance d'avoir ça en termes simples et clairs.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, l'objectif premier de 63.3, c'est vraiment les règles, notamment, je vais vous donner l'exemple des activités de formation, donc c'est les règles dont on veut... Un organisme public ou une entreprise qui se responsabilise, elle va s'assurer que la protection des renseignements personnels s'inscrive dans les activités quotidiennes de l'organisation. Puis, pour ce faire, elle va adopter des règles, notamment sur... bon, ça peut être sur les sondages, dans le cas d'un accident de confidentialité, qui va agir à quel moment, des règles sur la conservation. Donc, c'est des règles qui s'appliquent au sein de l'organisation et qui visent, en premier lieu, le personnel de l'organisation.

Par contre, puisque ces règles-là, c'est quand même les renseignements personnels des citoyens, bien, de là l'obligation de le rendre accessible sur le site Internet, mais il faut faire une distinction avec la politique de confidentialité qui, elle, a comme premier objectif d'informer le citoyen, quand on collecte ses renseignements, d'à quelle fin je les collecte puis les éléments de 65, là, je suis un peu.. à quelle fin je les collecte. On donne aussi le nom du responsable de la protection des renseignements personnels, à qui je vais les communiquer. Donc, il y a différentes informations qu'on a l'obligation de transmettre au citoyen pour s'assurer d'avoir un consentement éclairé.

M. Tanguay : Est-ce qu'il est possible... Je pense que oui, mais nous ne pouvons pas, je crois, exclure que des organismes collectent autrement que par moyen technologique plusieurs renseignements personnels. À ce moment-là, la politique qu'ils devraient publier serait celle du cadre de 63.3, n'est-ce pas? Première des choses, est-ce que ça se peut, vous allez me dire, des organismes publics qui ne collectent pas de renseignement par moyen technologique ou de façon minimale, minoritaire?

M. Caire : Oui, ça se peut.

M. Tanguay : O.K.

M. Caire : Je vous dirais presque malheureusement, mais oui, ça se peut.

M. Tanguay : O.K. Alors, une fois qu'on a dit ça, leur politique, il faut qu'elle s'adresse... pas par... il faut que ce soit la politique de 63.3, à ce moment-là. Donc là, eux autres, s'ils en donnent un nombre substantiel, il faut que je parle à mon monde de façon simple et claire.

M. Caire : Mais là on est à l'interne, là.

M. Tanguay : O.K., mais la politique... Vous collectez des renseignements. Je vais avoir une politique qui va m'être adressée, si c'est par moyen technologique, à 63.4, mais, si vous collectez des renseignements, je pourrais-tu avoir, sur vote site Internet, une politique qui va m'instruire aussi sur votre façon de gérer ça?

M. Caire : Bien, en fait, la politique que l'organisme va publier à 63.3 va être destinée à tout le monde mais va définir les règles de gouvernance, donc les règles qui vont régir l'organisme : Je vous informe de mes règles de gouvernance, mais c'est mes règles de gouvernance qui régissent mon organisme.

M. Tanguay : Me Miville-Deschênes, je pense que vous voulez ajouter.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Bien, je vais juste faire un lien, parce qu'on va y venir plus tard, mais l'article 17 du projet de loi modifie l'article 65, qui dit : Lors d'une collecte, automatiquement, on doit informer la personne du nom de l'organisme, là, pour qui la collecte est faite, les fins, caractère obligatoire ou facultatif de la demande, les moyens par lesquels les renseignements sont recueillis, le cas échéant, si c'est communiqué hors Québec, le cas échéant, s'il y a... Donc, ça va être plus tard, mais donc, aussitôt qu'il y a une collecte, tu as une obligation d'information, mais, si elle est par moyen technologique, là l'article qui s'ajoute, en quelque sorte, c'est l'article 63.4 sur la politique de confidentialité, mais, même si on n'est pas par moyen technologique, on a toujours une obligation d'information du citoyen, sauf exception.

M. Tanguay : O.K. Question générale. Moi, fait vécu, là, j'ai envoyé par la poste, à cause de la COVID, un avis de renouvellement. J'avais une lettre préaffranchie à la RAMQ, Régie de l'assurance maladie du Québec, ma carte-soleil est à renouveler. Je ne donne pas la date précise de naissance parce que, de un, je ne veux pas vous créer l'obligation de me souhaiter bonne fête, puis de m'envoyer un cadeau, puis des fleurs, puis une boîte de chocolat, mais, de deux, aussi parce que je veux que mon expectative de confidentialité demeure hautement sensible.

M. Caire : Un haut degré de... raisonnable.

Une voix : ...

M. Tanguay : Intime, intime. Une fois que j'ai dit ça, est-ce que le traitement... Puis, si le ministre n'a pas... parce qu'il n'est pas là, dans... Le traitement de mon formulaire, et c'étaient trois, quatre questions, je cochais, cochais, cochais, j'imagine que ça, c'est un traitement qui est automatisé, et ça, c'est un traitement que l'on peut considérer comme un moyen technologique, ou on va dire : Ces informations-là, ce n'est pas via un moyen technologique?

M. Caire : Bon, déjà, que vous soyez obligé d'envoyer un formulaire à la RAMQ...

M. Tanguay : À cause de la COVID, sinon il aurait fallu que je me présente en personne.

M. Caire : Ce qui n'est pas beaucoup plus rassurant, ceci étant. Bon, écoutez, un jour, un jour, on découvrira Internet, mais, bon, en attendant, est-ce que le traitement... Bien, d'abord, en partant, si on vous envoie un formulaire, est-ce qu'il y a quelqu'un, à l'autre bout... Ce que vous voulez dire, c'est : Est-ce qu'il y a une saisie de données qui se fait dans un...

M. Tanguay : Parce que c'est un formulaire standard, puis il doit y avoir un système, j'imagine. Il n'y a pas personne qui fait ça manuel, un scan...

• (16 h 50) •

M. Caire : Oui, il y a une saisie de données qui se fait dans un système informatique, un scan.

M. Tanguay : Puis ça, j'imagine que ce serait un moyen technologique.

M. Caire : Bien, en fait, l'information, je ne l'ai pas collectée par un moyen technologique, là. Si je prends le mot «collecter» au sens propre du terme, la collecte, je ne l'ai pas faite par un moyen technologique.

M. Tanguay : Ce n'est pas Internet.

M. Caire : La saisie, rendu là, ce n'est plus une collecte, là, mais je ne sais pas, je vais juste valider avec Me Miville-Deschênes. Parce que, dans ma perspective à moi, si je vous demande une information, vous me l'envoyez, ça, c'est la collecte. Donc, je vais chercher cette information-là. Ça, ça s'est fait par un moyen mécanique et qui n'était pas technologique, là. Après ça, la saisie... Et je me garderai de commenter ce que je pense de tout ça, mais, ceci étant, le reste, ça ne relève pas de la collecte, ça relève du traitement que je fais de l'information.

M. Tanguay : Moi, tant que j'ai ma carte, tant que j'ai ma carte.

M. Caire : Non, non, mais, entre vous puis moi, là, M. le député, on va sur Internet, puis ça fait pareil, là.

M. Tanguay : Ah! oui, c'est sûr.

M. Caire : Tu sais, c'est comme... En tout cas, mais c'est correct, je suis content que vous m'en parliez, parce que je saurai quoi faire en sortant d'ici.

M. Tanguay : C'est bon, O.K.

Le Président (M. Bachand) : Interventions? M. le député...

M. Tanguay : Je ne sais pas si Me Miville... Il était invité à réagir, sinon...

Le Président (M. Bachand) : Me Miville-Deschênes.

M. Miville-Deschênes (Jean-Philippe) : Non, mais je confirme que la collecte doit avoir lieu sur un moyen technologique. Donc, si on collecte d'une autre façon, puis après on l'intègre dans une base de données, ou quoi que ce soit, 63.4 ne s'appliquerait pas, là.

M. Caire : Parce que, rendu là, c'est un traitement de l'information, ce n'est plus une collecte. C'est la façon dont je traite l'information.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je vais déposer un amendement. On peut suspendre, le temps de le faire circuler?

Le Président (M. Bachand) : Oui, on suspend quelques instants. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 52)

(Reprise à 16 h 56)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je dépose donc un amendement à l'article 4 :

Ajouter, à la suite du troisième alinéa de l'article 63.3, proposé par l'article 14 du projet de loi, l'alinéa suivant :

«Un règlement du gouvernement peut déterminer le contenu et les modalités de ces règles.»

Ça fait suite à mon échange avec le ministre un peu plus tôt. L'objectif ici est de s'assurer, oui, que le gouvernement ait le pouvoir de dicter par règlement un contenu minimal pour encadrer les règles qui sont prévues à l'article 63.3, notamment par volonté d'uniformisation et pour s'assurer qu'on puisse ramener à l'ordre des organismes publics qui ne répondraient pas aux standards minimaux en la matière. Voilà. Je n'ai pas envie de m'étendre inutilement, parce que j'en ai longuement discuté un peu plus tôt avec le ministre.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Caire : Bien, je n'ai pas d'enjeu, M. le Président, la seule question que je me pose, c'est sur le libellé. Est-ce qu'on le met à la fin de l'article 63.3 ou à l'alinéa suivant, là? Je veux être sûr qu'il va être à la bonne place, mais sinon, moi, je n'ai aucun problème, M. le député, à ce qu'on l'ajoute, là.

M. Nadeau-Dubois : Mon intention était de le mettre à la toute fin de 63.3.

M. Caire : Oui, mais est-ce que c'est le résultat du libellé? C'est ça, ma question. Parce qu'on dit : Ajouter, à la suite du troisième alinéa de l'article 63.3, proposé par l'article 14, l'alinéa suivant. Le troisième alinéa, un, deux, trois, moi, c'est... Le troisième alinéa, c'est :«Ces [règlements] incluent [...] les mesures de protection à prendre à l'égard des», mais les paragraphes 1° et 2° font partie de l'alinéa, donc, techniquement, il serait à la fin. J'ai-tu une bonne lecture?

M. Nadeau-Dubois : À la suite ou à la fin, là.

M. Caire : Paragraphes 1° et 2°, là, ça, ça fait partie du troisième alinéa? Donc, il serait vraiment à la suite. Donc, parfait. Oui, oui.

Le Président (M. Bachand) : Interventions? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Merci beaucoup. Interventions sur 63.3 ou 63.4? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur 63.4?

M. Tanguay : Non, c'est correct, c'est beau à date, là, mais on pourra... on n'est pas forclos, tu sais, on pourra...

Le Président (M. Bachand) : O.K. À 63.5, on avait un amendement, donc on doit procéder à l'étude de l'amendement avant. Peut-être, M. le ministre, si vous pourriez relire l'amendement.

M. Caire : Le relire?

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît.

• (17 heures) •

M. Caire : Oui, M. le Président, avec plaisir. Donc, à l'article 63.5 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 14 du projet de loi :

1° insérer, dans le premier alinéa, après «tout projet», «d'acquisition, de développement et de refonte»;

2° ajouter, à la fin, l'alinéa suivant :

«La réalisation d'une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée en application de la présente loi doit être proportionnée à la sensibilité des renseignements concernés, à la finalité de leur utilisation, à leur quantité, à leur répartition et à leur support.»

M. le Président, peut-être quelques explications par rapport au premier paragraphe. Donc, quand on vient, dans le fond, préciser que... On dit, actuellement, bon, «tout projet» : «Un organisme public doit procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée de tout projet de système d'information...» Cette notion-là est beaucoup trop large, beaucoup trop large. Ça veut dire que je fais une mise à jour de mon système, c'est un projet, je fais une évaluation, alors que, dans le fond, je ne viens pas modifier les fondements du système. Je déploie, par exemple, un système de gestion à plusieurs modules. Chaque module peut représenter un projet, mais d'un même système pour lesquels il y aura une évaluation.

Donc, c'est qu'on va forcer des évaluations dans beaucoup trop de cas où ce ne sera pas nécessaire parce que, dans le fond, l'évaluation globale aura été faite. Donc, c'est pour ça qu'on parle d'acquisition, de développement ou de refonte. Donc, c'est pour venir préciser, là, que, s'il y a une altération, modification significative, changement technologique du système, à ce moment-là, effectivement, il faut faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Mais, sinon, dans les mises à jour, dans l'entretien de système, dans ce qui est le cycle de vie normal d'un système, ce n'est pas nécessaire et ça devient excessif.

De plus, on vient ajouter l'alinéa : «La réalisation d'une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée en application de la présente loi doit être proportionnée...» Parce qu'actuellement, M. le Président, cette notion-là, on ne la précise pas, si bien que, si je déploie... Moi, je suis un petit organisme, je déploie un petit système qui collecte peu de renseignements personnels ou je suis le réseau de la santé, puis je viens complètement revoir mon dossier, la façon de gérer les dossiers des patients de façon numérique; dans les faits, rien ne m'indique que je n'ai pas à faire le même niveau d'évaluation.

Alors, on vient préciser que, bien non, tu sais, c'est sûr qu'il faut quand même que ce soit proportionné. Si vous faites une refonte ou la mise... le déploiement d'un système extrêmement important qui va travailler avec énormément de renseignements personnels, voire de renseignements sensibles, versus un petit système qui va donner des services à la population puis qui collecte très peu de renseignements personnels, bien, il faut que l'évaluation soit proportionnelle. Vous n'engagerez pas les mêmes experts, vous n'aurez pas le même niveau de granularité dans l'évaluation, les mêmes perspectives, l'évaluation des mesures de protection.

Donc, ça vient, dans le fond, dire que, oui, on veut une évaluation dans tous les cas, mais que, cette évaluation-là, il faut quand même qu'elle soit proportionnelle à ce que vous allez faire comme système, comme utilisation, comme collecte, comme gestion des renseignements personnels. Voilà l'objectif de cet amendement, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : J'ai plusieurs questions sur 63.5 d'abord, et là j'essaie d'intégrer, au commentaire que je souhaitais faire, l'amendement que le ministre vient de faire. Il nous dit, dans sa version amendée... et là, on est sur l'amendement, hein? Oui, c'est ça, et je pense que c'est valide quand même comme préoccupation. L'amendement dit : Insérer, dans le premier... le ministre nous dit : «Tout projet», ça peut vouloir dire trop de choses, donc il faut que ce soient des projets d'acquisition, de développement ou de refonte. J'entends bien ses arguments, qui m'apparaissent justifiés, là. Qu'en est-il des systèmes existants?

M. Caire : Est-ce que la question, c'est : Y a-t-il un effet rétroactif de la mesure?

M. Nadeau-Dubois : Bien, le Barreau, dans son mémoire, évoquait cette préoccupation-là en disant que tout nouveau projet soit soumis à ces critères-là, c'est une bonne chose, qu'en est-il des systèmes existants? Comment est-ce qu'on s'assure qu'ils soient à jour? Est-ce qu'il n'y a pas lieu de penser à une disposition transitoire pour que les organismes publics analysent les systèmes d'information et de prestation électroniques de service pour voir s'ils sont conformes aux nouvelles exigences de la loi?

M. Caire : En fait...

M. Nadeau-Dubois : Parce que, sinon, on pourrait dire : Toute nouvelle initiative, là, disons-le comme ça, là, pour encadrer tout projet d'acquisition, de développement ou de refonte, on va dire toute nouvelle initiative. Mais qu'en est-il de ce qu'il existe en ce moment?

M. Caire : Bien, en fait, je vous dirais : La mesure va s'appliquer aux nouveaux projets, d'une part parce que, si on avait un effet rétroactif, on parle probablement de centaines ou voire de milliers de systèmes pour lesquels on demanderait une évaluation, ce qui serait un travail colossal que nous n'avons ni les ressources financières, ni les ressources humaines, ni une ressource matérielle pour exécuter. Soyons très, très honnête, très transparent, M. le député.

Ensuite, parce que, dans leur application au quotidien et dans le respect de la loi actuelle, ces systèmes-là ont été modifiés, ont fait l'objet de mises à jour, et, dans certains cas, vont faire l'objet d'un remplacement parce qu'on a, je vous dirais, excusez l'anglicisme, mais on a un «legacy» quand même important au gouvernement du Québec, qui devra éventuellement être géré pour des nouveaux systèmes.

Donc, je pense que d'avoir un effet rétro serait excessif, déraisonnable, contre-productif. Et je vais même aller peut-être un peu plus loin, parce que je vous dirais qu'actuellement dans l'utilisation des renseignements personnels de nos systèmes, justement parce que c'est des systèmes qui sont implantés, qui sont déployés, qui sont utilisés, rien ne nous indique la nécessité de procéder de cette façon-là.

Par contre, pour un nouveau système, vous comprendrez que le principe de la nouveauté fait en sorte qu'effectivement, là, il faut s'assurer que ces systèmes-là vont répondre aux normes que nous implantons présentement. Et, même au niveau de la sécurité, là, des systèmes, là, c'est plus largement que ça, là, puis il y a différentes notions aussi qu'on va amener ici, pour lesquelles les technologies qui sont en place ne seraient probablement même pas compatibles quand on parle d'avoir une sécurité à la vie privée par défaut. Je veux dire, il y a des systèmes pour lesquels c'est inapplicable, tout simplement.

M. Nadeau-Dubois : Je comprends les contraintes bien pratico-pratiques, là, très concrètes, là, puis l'ampleur de la tâche que ça représenterait dans l'ensemble des organismes publics, là.

Je me permets quand même de relancer le ministre, parce que, tu sais, on adopte un nouveau régime de protection des renseignements personnels, notamment parce qu'on sait que le régime actuel, il ne protège pas suffisamment... notamment, il y a d'autres motivations, mais notamment parce qu'il ne protège pas suffisamment les citoyens et citoyennes. Et là on dit : Dorénavant, les organismes publics, quand vous allez avoir des projets de système d'information ou de prestation électronique de services, qui impliquent de collecter puis d'utiliser des renseignements personnels, vous allez devoir faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Donc, on va, à chaque nouvelle initiative, disons ça comme ça, faire cette évaluation-là, puis je pense qu'on a tous comme objectif que, ce faisant, progressivement, on renforce la protection des renseignements personnels puis de la vie privée des Québécois et des Québécoises.

Puis je sais qu'on ne peut pas penser du jour au lendemain à ce que tous les organismes publics fassent une telle évaluation, mais est-ce que... je le répète, là, moi, je parlais de dispositions transitoires, ça fait que... mettre un certain nombre d'années, par exemple, octroyer un délai pour y arriver, pour s'assurer que... Parce que les données personnelles qui sont dans ces systèmes-là, là, les plus vieux, là, elles ne sont pas moins importantes...

M. Caire : Non, mais...

M. Nadeau-Dubois : ...pour les Québécois, Québécoises que les nouvelles données qui seront collectées par les nouveaux systèmes. Puis les citoyens puis les citoyennes dont les données sont stockées en ce moment ou traitées dans des systèmes du passé n'ont pas moins de droits à la vie... Tu sais, il me semble qu'ils ont le droit à la même protection.

• (17 h 10) •

M. Caire : Oui, tout à fait.

M. Nadeau-Dubois : Puis là, évidemment, je suis conscient que je fais un argument de principe, puis le ministre me répondait avec des arguments plus du point de vue de : Est-ce que c'est possible de le faire? Mais je pense que l'argument de principe, quand même, est valide, puis je me demande s'il n'y a pas moyen de trouver une voie de passage. Parce que les gens dont les données sont conservées dans des systèmes qui sont plus datés, je comprends que, du jour au lendemain, on ne refera pas l'histoire. Tu sais, ils ont le droit au même niveau de protection que les citoyens et citoyennes dont les données vont être collectées dans les prochaines années sous le nouveau régime, tu sais.

M. Caire : Oui, oui. Mais, M. le Président, je veux être clair, là, mon argument est circonscrit aux évaluations. Là où je suis tout à fait le député, c'est sur l'application de la loi, là, comprenons-nous bien, là. Sur l'application de la loi, on devra se conformer à la loi. La 63.5 nous parle des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée. C'est là où je vous dis : Faire des évaluations pour les systèmes qui sont en place, qu'on connaît, donc qu'on connaît les forces, les faiblesses, les tenants, les aboutissants, c'est là où je vous dis : L'effort et les ressources que ça demanderait, ce n'est pas justifié.

Ceci étant dit, les dispositions de la loi sur la protection des renseignements personnels, la communication des renseignements personnels, l'utilisation, la destruction, ça, la loi va s'appliquer, là. Anciens systèmes, nouveaux systèmes ou systèmes futurs, la loi va s'appliquer, là. Je veux être bien clair sur le fait qu'on... c'est strictement sur la base des évaluations que, là, je pense qu'il serait contre-productif d'avoir un effet rétroactif.

M. Nadeau-Dubois : Je concède que j'ai... et pour faire l'argument de principe, j'ai élargi un peu le propos, là. Néanmoins, en effet, sur la question spécifique de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, pourquoi est-ce que c'est si contre-productif que ça que de ne serait-ce que se prêter à l'évaluation pour, par la suite, tu sais, apporter des correctifs? Tu sais, de toute façon, le ministre concède que ça va nécessiter toute une révision des pratiques dans l'ensemble des organismes publics une fois que la loi, si elle est adoptée, entre en vigueur.

Rendu là, en quoi le simple fait de faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée pour les systèmes existant, c'est un fardeau? Parce que, déjà, il va y avoir un fardeau, c'est un peu ce que j'essaie de dire, déjà, il va y avoir un fardeau, même significatif. Beaucoup de pratiques vont devoir être revues. En quoi le fait de procéder à cette évaluation-là serait la goutte qui ferait déborder le vase et que, là, ça deviendrait insoutenable pour les organismes publics que de, dans un délai donné, on dise aux organismes publics : Bien, faites ces évaluations-là dans un délai x pour mieux connaître les forces et les faiblesses de vos systèmes? Est-ce que c'est l'objectif d'une évaluation comme celle-là?

M. Caire : Oui. C'est parce que...

M. Nadeau-Dubois : Tu sais, je ne vois pas en quoi c'est un fardeau qui devient, là, si énergivore, si chronophage, si coûteux en ressources, alors que, de toute façon, il y a plein d'autres ajustements qui vont devoir être faits dans les organismes publics.

M. Caire : Parce que ces connaissances-là, de par l'utilisation du système, normalement, vous les avez, vous les connaissez, vous avez les impacts, les forces, les faiblesses, vous les connaissez, du système. La raison pour laquelle on le fait pour un nouveau système, c'est qu'il n'y a pas cette utilisation-là qui vient nous donner... Là, on a l'information par la pratique, par l'utilisation, donc faire l'évaluation va nous donner une information qu'on possède déjà. Et là on va quand même monopoliser des ressources financières, humaines, matérielles pour faire ces évaluations-là, pour se faire dire des choses qu'on sait déjà, qu'on devrait savoir déjà, parce qu'on les utilise, les systèmes.

Alors qu'un nouveau système, bien, lui, vous ne pouvez pas prétendre connaître ses impacts, parce que vous ne l'avez pas utilisé, vous ne l'avez pas implanté... même, dans certains cas, vous ne l'avez même pas encore développé. Alors là, vous ne pouvez pas prétendre que vous les connaissez. Donc, c'est pour ça qu'on dit : Dans ce cas-là, vous faites une évaluation.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de...

M. Caire : C'est parce qu'il y a une notion de prévoir dans l'évaluation puis prévoir quand vous utilisez, tu sais, c'est... Je ne sais pas si je suis clair, mais c'est parce qu'on les utilise, les systèmes, on le sait, là, c'est quoi, les facteurs relatifs à la vie privée puis les impacts.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Bien, je suis le ministre, mais je suis pas mal d'accord avec mon collègue de Gouin. Moi... puis je vais vous dire, très candidement, moi, je pensais qu'une fois que la loi sera en vigueur, moi, je pensais qu'il allait y avoir, justement, une évaluation, que les hauts dirigeants vont être notifiés de leurs responsabilités nouvelles. Parce que là, on resserre, on resserre tous les boulons de la machine. Puis les standards actuels, ne serait-ce que sur l'aspect... on parle de cycle de la vie, l'utilisation des renseignements personnels. Autrement dit, moi, j'aimerais ça, si j'étais haut responsable... puis comme législateur, j'aimerais ça que le haut responsable ait l'obligation... Puis j'aurais cru que c'est à 63.5 qu'on aurait pu le faire, à moins qu'on me dise : Non, non, c'est... Qu'il fasse une évaluation. O.K., parfait, là, on a des standards... là, gang, là, on a des standards bien plus sévères.

Moi, j'aimerais ça savoir qui a accès à tel renseignement personnel, tu sais, qu'il y ait une évaluation. Parce que, souvent, dans les organisations, quand il y a des fuites, c'est parce que tout un chacun ou trop de monde ont accès à l'information, puis, pfft! ça part. Comment ça? Ça vient d'où, ça? Même, dans certaines organisations policières, ça a l'air qu'il y en a qui ont... il y en a trop qui ont accès à l'information. Mais ça, c'est un autre dossier, puis je referme la parenthèse parce que... Partez-moi pas là-dessus, M. le Président. C'est juste des dossiers d'enquête puis des fiches signalétiques, pas grave. Moi, je referme la parenthèse. Je suis ultrapétiteur. Alors, ça a fait du bien. J'en aurais pris plus, mais ce n'est pas grave.

Alors, ceci étant dit...

M. Caire : Ça s'en vient.

M. Tanguay : Ah oui?

M. Caire : ...

M. Tanguay : Il dit : Ça s'en vient. Oups!

Mais j'aurais cru qu'il y avait une telle évaluation, parce que le haut dirigeant devrait normalement avoir l'obligation... Puis on pourra lui donner un délai, six mois... je ne sais pas, trois mois, six mois, pour qu'il fasse cette évaluation-là, qu'il... Parce qu'on s'entend que, le jour... À l'heure actuelle, 100 % de tout ce qui est renseignements personnels n'est pas touché par 63.5. Le jour de la sanction par le lieutenant-gouverneur puis d'entrée en vigueur de la loi, 100 % de tous les renseignements personnels ne seront pas touchés par 63.5. Peut-être que, trois mois après, ça va être 2 %, 3 %, 4 %. Peut-être qu'un an, deux ans après, ça va être 8 %, 10 %.

Mon point... À moins qu'on me dise : Non, c'est déjà prévu qu'il y ait... basé sur les nouvelles obligations du haut dirigeant, qu'il y ait une sorte d'inventaire qui soit fait. Nous, on a quoi? Puis peut-être que 63.5 est peut-être trop lourd. Mais on pourrait-tu avoir un article qui dit : Dans les six mois... ça ne devrait pas être un an, normalement, là, il faut qu'il se revire sur le 10 cents, là, le haut dirigeant doit faire une évaluation en regard des impératifs de la loi, de la conformité de ces systèmes quant à la protection du cycle de la vie? Une fois que j'ai dit ça, je lui laisserais la latitude.

Peut-être 63.5 qui est trop lourd, mais je pense que le ministre me comprend. Tu sais, moi, j'aimerais ça qu'il se pose la question. Parfait, on a ça, ça, ça, savez-vous que c'est hautement sensible? Puis on a qualifié, à matin, «hautement sensible». Parfait. Qui a accès à ça? J'aimerais ça qu'il... Il faut qu'il pose la question. Qui a accès à ça? Wow! La liste est longue. Lui, là, pourquoi? Ou elle, pourquoi? Ah oui? Bon, bien, elle n'a plus accès à ça, là, tu sais, qu'on resserre la patente.

M. Caire : Mais j'entends le collègue, puis je ne suis pas... je ne dis pas que je suis en désaccord, c'est juste que, quand on parle d'un système d'information, ces informations-là, on les possède déjà. Par la pratique, on les possède déjà. Donc, le plus haut dirigeant peut savoir ça. Comment on a géré les permissions? Comment on a géré les excès? Comment on gère la communication? C'est quoi, les enjeux de sécurité qu'on a avec notre système? Où est-ce qu'on stocke? Etc. Comment on stocke? Dans quel contexte on stocke les informations? Tout ça, on le sait par la pratique.

Ce qu'on ne veut pas avec un nouveau système, c'est ça, c'est de dire : Bien, on va le déployer puis, par la pratique, on verra c'est quoi, les impacts sur les facteurs relatifs à la vie privée. Mais là c'est le cas. Donc, l'information, on la possède.

Donc, si on met cette obligation-là, rétroactive, là, on va prendre des ressources humaines, financières, matérielles, puis on va dire aux gens : Bon, je sais qu'on le sait, mais la loi dit qu'on doit quand même faire l'évaluation. Et je vous dirais qu'en la matière on ne nage pas dans l'excès, là, en termes de ressources financières, matérielles et humaines, là, au niveau TI, là, on ne nage pas dans l'excès.

Donc, d'aller de par les organismes publics, leur dire : Ce que vous avez en plus, je vais vous demander de l'utiliser pour aller collecter une information que vous avez déjà, on veut-u ça?

• (17 h 20) •

M. Tanguay : Mais moi, je ne vois pas ça trop lourd, M. le Président. Quand on dit : «...une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée», si ça tient la route, ça peut ne pas scléroser l'organisme pendant six mois, là. Je veux dire, une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée des systèmes d'information ou de prestation électronique, de collecte, utilisation, je lui demanderais une évaluation en regard de la loi des facteurs relatifs à la vie privée, puis il fera son rapport. Je ne veux même pas lui dire : Fais ci, fais ça, fais ci, fais ça, ça me prend au moins un rapport de 150 pages. Fais l'évaluation, déclare-toi satisfait, puis trompe-toi pas, parce que tu es haut responsable puis tu es responsable. Je lui donnerais ça. Parce que, sinon, revirez ça de bord, M. le Président, revirez ça de bord, sinon, je n'ai pas... on est en train de dire qu'il n'a pas l'obligation pour 100 % des données qu'il y a là.

Puis Dieu sait qu'on veut améliorer la patente parce que le passé n'était pas garant suffisamment de l'avenir, c'est ça que je voudrais couvrir. Parce que là on est en train de lui dire qu'il n'y a pas d'obligation pour 100 % de ses données à l'heure actuelle.

M. Caire : Bien oui, mais, en même temps, M. le Président, je réitère, là, on va aller chercher une information qu'on possède déjà.

M. Tanguay : Puis peut-être qu'on gère mal, en regard de la loi.

M. Caire : Normalement, M. le Président, puis là, écoutez, je ne peux pas présumer de... mais, normalement, là, sur cette question-là... Puis, d'ailleurs, on avait... quand on a adopté 14, on a amené cette notion-là d'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée pour les projets en développement. On était bien d'accord que... bien, on était bien d'accord, on n'a pas abordé la question, ça fait qu'on n'était pas ni en accord ni en désaccord, on n'a pas abordé la question de rendre ça rétroactif.

On comprend que, cette obligation-là, elle nous oblige à nous poser la question, lorsqu'on procède à un nouveau projet, à un projet... Puis là, justement, l'amendement vise à circonscrire un peu, là, la notion de «tout projet», justement, parce qu'on se dit : Bien là, on ne veut pas obliger les organismes publics à faire des évaluations relatives aux facteurs... voyons, des facteurs relatifs à la vie privée pour tout et rien dans les nouveaux projets. Ça fait qu'on circonscrit ça en disant : Bon, bien, O.K., on va s'adresser juste aux projets d'acquisition... bien, juste... aux projets d'acquisition, de développement et de refonte. Puis là le législateur viendrait dire : Mais nonobstant ça, nonobstant le fait qu'on dit : acquisition, développement, refonte, là, on rajouterait «et tout ancien système». Bien non.

C'est justement... c'est parce que, ces informations-là, on les possède. Ce qu'on veut, c'est que, quand on planifie un projet, que, dans la planification de ce projet-là, les facteurs relatifs à la vie privée, on en tienne compte et que les impacts du projet sur les facteurs relatifs à la vie privée, on ne les apprenne pas par la pratique, par le déploiement, puis là on déploie le système puis on dit : Hé, tabarouette! Aïe! C'est vrai, on n'avait pas pensé à ça. Puis là, woups! il y a une faille ici, puis il y a un problème là, puis il y a une permission qui n'a pas d'allure là, puis... ou il y a une communication entre deux systèmes qui ne devrait pas se faire ou...

Alors, c'est vraiment de dire : On veut prévoir ces impacts-là. On veut les mitiger à la genèse du projet, mais, pour les systèmes existants, l'information, on la connaît, on le sait, là. Ça fait que, de refaire une évaluation, c'est d'aller chercher une information qu'on connaît. Puis ça, bien, il y a un coût en ressources humaines, en ressources financières, en ressources matérielles. Il y a un coût à payer pour aller chercher des informations qu'on a déjà. C'est ça que moi, je dis au collègue : Écoutez, on ne peut pas faire ça, là, on est à contresens de ce que l'amendement vise à faire, parce que, justement, on se disait : L'amendement, bien non, dans les nouveaux projets, il vise trop large. Puis là on vise encore plus large en se disant : Bien, on va rendre ça rétroactif. Eh non!

Le Président (M. Bachand) : ...député de LaFontaine. Après ça, j'ai le député de La Pinière.

M. Tanguay : Oui, rapidement. Le ministre... puis on jase, là, je reviens à ce que je disais, 63.5 est peut-être trop lourd, mais je vivrais très bien avec un article qui dirait : Un organisme public doit s'assurer de la conformité de ses systèmes d'information et de prestation électronique de services, impliquant collecte, blablabla, en regard des obligations de la présente loi. Je lui demanderais... Je n'y dirais même pas : Va te chercher une évaluation des facteurs. L'organisme, puis je dirais même... Là, le ministre pourrait me dire, puis je lui donne une partie de la réponse, le ministre pourrait me dire : Mais on l'a fait au tout début, tout début, à l'article 8, «la personne ayant la plus haute autorité au sein [de l']organisme public veille à y assurer le respect [...] de la présente loi». Il pourrait dire : Il est là.

D'accord, mais j'aimerais ça que, de façon proactive, on dise : En regard de la loi, une évaluation quant à la conformité des systèmes d'information et prestation électroniques soit effectuée. Quitte à mettre dans les six mois, hein, mais qu'il fasse une évaluation. Qu'on lui donne, autrement dit, puis je termine là-dessus, au-delà de l'obligation générale de dire : Oui, il l'a déjà, l'obligation de s'assurer que la loi, elle est respectée, donc protéger... mais qu'il fasse cette évaluation de conformité là sans lui en dire plus. Là, je lui dirais : N'oublie pas, hein, c'est toi, la haute... Félicitations! C'est toi, la haute autorité. Félicitations! Tu as beaucoup de responsabilités en vertu de la loi. Fais cette évaluation de conformité là. Puis je le sortirais de 63.5, là. Je ne voudrais pas paralyser rien, là, ni personne, là.

M. Caire : Bien, rapidement, je veux dire, le député de LaFontaine a répondu à sa propre question. Je veux dire, il est de la responsabilité du plus haut dirigeant de s'assurer que la loi est appliquée et qu'elle est respectée. Donc, sur la conformité, puis pas juste des systèmes d'information, de tous ses processus, il va devoir s'assurer que la loi est respectée. Et donc de lui donner une obligation à l'égard de faire une évaluation, bien, on a un peu la même discussion qu'on avait avec le député de La Pinière. Je ne lui dirai pas comment il doit faire, mais je vais lui dire qu'il doit le faire. Il doit s'assurer que la loi est respectée, que la loi est appliquée.

C'est vrai pour ses systèmes d'information, c'est vrai pour les autres processus administratifs inhérents à son organisation, mais, dans le cas qui nous préoccupe, plus spécifiquement de 63.5, une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée dans le cas d'un système existant ne nous apprend rien de ce qu'on connaît déjà et va coûter quand même des efforts, des sous et des ressources. Ça fait que, tu sais, ce qu'on veut, c'est prévoir. Ce qu'on veut, c'est dans nos nouveaux... Puis c'est pour ça qu'on parle, quand on parle d'acquisitions, quand on parle de développement, quand on parle de refonte, là, ils amènent... là, il y a des éléments de risque qui sont nouveaux, qui sont inhérents à la nouveauté de ce qu'on est en train de faire et qui méritent qu'on fasse une évaluation pour s'assurer qu'on a pris compte de ça.

Mais, dans les systèmes qu'on opère depuis des années, bien, on les connaît, ces informations-là. Puis, à la limite, non seulement on les connaît, mais les correctifs ont été apportés.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de La Pinière, s'il vous plaît.

M. Barrette : Si je suis à l'extérieur puis que je suis les débats, je ne peux pas comprendre ce qui se discute. Impossible.

Pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, est-ce que le ministre peut nous expliquer, avec un exemple, là, en quoi constitue l'exercice d'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée?

M. Caire : Bien, c'est le débat qu'on a eu dans le projet de loi n° 14, M. le Président.

M. Barrette : Juste pour rappeler aux gens exactement ce que le ministre ferait s'il avait, là, là, à évaluer des facteurs relatifs à la vie privée pour de l'existant, une situation existante.

M. Caire : Pour un nouveau système?

M. Barrette : Non, une situation existante.

M. Caire : ...je ne comprends pas la question du tout.

M. Barrette : ...la question, elle est très simple, là. Ceux qui nous suivent, là, l'évaluation de la vie privée, il n'y a personne qui comprend ce que ça veut dire.

M. Caire : Oui, ça, je peux comprendre ça.

M. Barrette : O.K. Ça, c'est très clair.

M. Caire : On s'est dit la même affaire dans 14...

M. Barrette : Voilà. Et là, actuellement, il y a un débat sur la pertinence ou non d'appliquer cette règle-là, ce qui est existant versus à ce qui est à venir, parce que, là, on est dans un article de «à venir», et ça, c'était 14, puis on s'entendait là-dessus.

M. Caire : Oui.

M. Barrette : Et là, aujourd'hui, le ministre nous dit, M. le Président, que ça coûterait trop cher, ça serait trop compliqué. Bon, je pose la question parce que, bon : Évaluer les facteurs relatifs à la vie privée, là, ça veut dire quoi quand, à 63.5, on nous dit que «une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée est un processus qui sert à identifier les exigences légales à respecter et les risques en matière collecte, d'utilisation, de communication, de conservation ou de destruction de renseignements personnels»? Quand on lit ça, on lit : C'est les mesures à prendre pour protéger les renseignements personnels.

Alors là, on nous dit... mais, quand on lit évaluer «les facteurs relatifs à la vie privée», ça ne donne pas l'impression... ça n'a pas une saveur de protection. On ne sent pas, là, qu'on pose un geste pour protéger. C'est quoi, ça, les risques? Qu'est-ce qu'on fait, là, exactement? Alors que, quand on regarde l'explication, c'est vraiment la protection. On s'entend?

M. Caire : Oui.

• (17 h 30) •

M. Barrette : Bon. C'est vraiment la protection. Alors, si on dit qu'on ne peut pas le faire pour le passé, là, on peut avoir l'impression, là... celui qui nous écoute ou celle qui nous écoute peut avoir l'impression qu'on va avoir un régime de protection qui va être très bon pour le prospectif et moins bon pour le avant. C'est juste ça. Moi, je me mets à la place de ceux qui nous écoutent, là, puis je me dis : Coudon, est-ce qu'on va avoir un système qui va avoir une force pour ce qui va se mettre en place et une faiblesse pour ce qui est existant? Puis c'est important comme question, parce que, si c'est ça, la résultante, bien, ce n'est pas une bonne nouvelle. Puis je suis sûr que ce n'est pas ça.

M. Caire : Non.

M. Barrette : Mais j'aimerais bien en avoir la certitude, parce que la réponse du ministre, c'est que ça serait trop compliqué, faire cette évaluation-là. Bon. À la suite de ça... Je veux juste finir ma question. À la suite de ça, bien, comme les systèmes, on va dire ça comme ça, là, comme les systèmes gouvernementaux sont là presque pour une demi-éternité, c'est une ironie...

M. Caire : Demi-éternité.

M. Barrette : ...on se demande quand est-ce que l'existant va bénéficier des mêmes règles de protection que ce qui va être collecté dans le futur. Alors, c'est sûr qu'avec un exemple pratico-pratique peut-être que les gens comprendraient qu'ils vont... que leurs données dans les systèmes, les «legacy», comme le dit le ministre, là, les systèmes existants vont bénéficier des mêmes niveaux de protection de données que ceux du futur, parce que, là, quand on écoute ça, là, on a l'impression que ça ne sera pas le cas.

M. Caire : Bien, oui, tout à fait, mais ce que je dis, en fait, c'est que cette évaluation-là... Puis je vais donner un exemple, parce que je crois comprendre que c'est ce que le député de La Pinière m'invitait à faire, donner un exemple précis. On fait du stockage de données actuellement au gouvernement du Québec sur des serveurs classiques sur site. Donc, chacun a ses serveurs, collecte sa donnée, la stocke sur site. Le gouvernement du Québec se tourne vers une nouvelle technologie qui s'appelle l'infonuagique. Donc, on n'est plus sur site, on est en mode délocalisé.

Alors, ce qu'on va faire, ce qu'on veut faire, ce qu'on doit... Parce que, sur site, on les connaît, les enjeux. On connaît les enjeux de sécurité, le mode de stockage, les protections, les accès, les permissions, comment on gère tout ça, à qui, selon quel régime, qui a l'autorité de faire ça, les niveaux d'accès d'administrateur à utilisateur, etc. On le sait, ça. C'est connu, on fait ça depuis des années, puis il n'y a pas nécessairement d'enjeu méconnu par rapport à ça. Par rapport à l'infonuagique, là, on se dit : Oh! attends un peu. Ça marche comment, cette patente-là? Ma donnée, elle s'en va où, elle voyage comment, elle est accessible à qui, elle est gardée par qui, elle est protégée comment? Donc là, on se dit : O.K. Là, je vais faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée parce que je dois trouver une réponse à ces questions-là. Et, comme l'a souligné le député de La Pinière, quant à la collecte, l'utilisation, la communication, la conservation ou la destruction de mes renseignements personnels, ça fonctionne comment?

Donc là, on s'en va dans un nouveau projet pour lequel il y a des inconnues et pour lequel je dois faire une évaluation parce que, compte tenu qu'on parle de renseignements personnels, je ne peux pas accepter qu'il y ait des inconnues. Je dois aller chercher des réponses à ces questions-là, et c'est là où je dois faire une évaluation. Mais aller chercher des réponses qu'on a déjà et utiliser des ressources humaines, financières et matérielles pour ça, c'est là où je dis au collègue : Bien non, on ne peut pas aller là. Ce n'est pas une bonne idée, parce qu'on a les réponses à ces questions-là.

Puis, là-dessus, je salue l'intervention du député de La Pinière, très sincèrement, parce qu'effectivement ces questions-là qu'on se pose sont relatives à la protection qu'on va offrir à nos renseignements personnels en regard de ce qui est dans l'explication de 63.5. Et c'est pour ça qu'on dit : Non seulement on veut circonscrire que ce n'est pas dans tous les projets, parce qu'il y a des projets pour lesquels j'aurai fait cette évaluation-là, et dans le cycle de vie d'un système, bien, les conditions ne changeront pas, la technologie ne sera pas...

Donc, mon système de stockage actuel, là, que je fasse passer mon serveur, son système d'exploitation, de la version I à la version II, ça ne change rien, là. Tu sais, je suis dans le même environnement. Donc, je ne referai pas une évaluation pour ça parce que je n'amène pas une inconnue. Je n'introduis pas quelque chose de nouveau qui amène un élément de risque que je ne connais pas, pour lequel je n'aurai pas fait l'évaluation.

C'est pour ça qu'on dit que ça ne peut pas être «tout projet». C'est pour ça qu'on dit : «dans le cas d'une acquisition». Si c'est une acquisition, c'est sûr que je ne connais pas le système. Bien, en tout cas, je ne le connais pas parfaitement, je ne l'ai pas utilisé. Si je fais un développement, bien évidemment, c'est un développement, donc c'est nouveau. Si je fais une refonte, une refonte, par définition, il y a des chances que j'aille vers une nouvelle technologie. Et donc, là, il y a des chances que j'amène un élément nouveau pour lequel je devrai aller chercher les réponses aux questions qui sont posées.

Mais, dans le cas d'un système que j'ai déjà ou pour lequel je fais une évolution normale du système, c'est là où trop, comme c'est... trop, c'est comme pas assez. C'est pour ça qu'on propose l'amendement qu'on propose et c'est pour ça que je dis, de le rendre rétroactif, bien, ça nous amène dans un univers encore pire que «tout projet», là.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de La Pinière.

M. Barrette : Bien, je remercie le ministre pour sa réponse. Je pense que les gens nous comprennent mieux, comprennent mieux. Mais ça soulève quand même une question, qui, elle, coûte des sous ici. Ça, ça veut dire que...

M. Caire : C'est non.

M. Barrette : Oui, parce que...

M. Caire : Non parce que, si ça coûte de l'argent, c'est non.

M. Barrette : Oui, c'est non, si ça coûte de l'argent.

M. Caire : Par les temps qui courent, en tout cas, je peux vous dire que c'est pas mal ça.

M. Barrette : Donc, ça signifie, ça, que, pour être valide comme argumentaire, ça signifie que les systèmes en cours, là, qui ont un certain âge ou, pour certains, ça signifie qu'ils ont suivi la révolution technologique, ça veut dire qu'ils sont à date. Moi, je peux... Puis, là, je...

M. Caire : Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Barrette : Bien, c'est... Oui, c'est implicite.

M. Caire : Non, non, non.

M. Barrette : C'est vrai que le ministre n'a pas dit ça, M. le Président, il a tout à fait raison, il n'a pas dit ça.

M. Caire : Non, je n'ai pas dit ça. Puis, je ne le dirai pas non plus.

M. Barrette : Il a dit même, je vais le citer : S'ils ont suivi la révolution technologique. Et, évidemment, c'est... Le «si» signifiait que, certainement, qu'ils ne l'ont pas tous suivie.

M. Caire : Non. Bien, en fait... En fait...

M. Barrette : Et ça, ça veut dire... Et là je vais juste terminer mon commentaire, M. le Président. Ça veut dire que les données qui sont emmagasinées dans un système d'archivage qui précède ce que l'on fait aujourd'hui pourraient technologiquement ne pas pouvoir nous garantir les mêmes niveaux de sécurité que ce qui est à venir parce que les niveaux de sécurité de ce qui est à venir pourraient — puis là je mets tout ça au conditionnel — exiger une technologie qui soit plus moderne. Là, je vais traumatiser le ministre, puis il le sait déjà, là...

M. Caire : C'est déjà fait aussi.

M. Barrette : Oui, je sais. Mais on a des systèmes encore en DOS, là, qui sont utilisés dans certaines sections de certains de ces ministères.

M. Caire : Oui, oui.

M. Barrette : On s'entend que, la protection de ces données-là, en DOS, par les technologies modernes, est impossible.

M. Caire : Je ne commenterai pas, mais c'est ça.

M. Barrette : Voilà.

M. Caire : En fait, on a des systèmes qui sont tellement vieux que je pense qu'il n'y a plus personne qui est capable de les hacker de toute façon.

M. Barrette : Ah! bien ça, c'est un point de vue qui est intéressant...

M. Caire : Oui.

M. Barrette : ...que même le hackeur ne puisse pas rentrer dedans.

M. Caire : Le hackeur, il se dit...

M. Barrette : C'est quand même intéressant.

M. Caire : Le hackeur, en fait, a l'impression qu'il est face à une technologie tellement complexe, qu'il n'a jamais vu ça. Il se dit...

M. Barrette : C'est ça. Alors, revenons à Windows 1.0.

M. Caire : Oui, tout à fait. DOS... DOS...

M. Barrette : Comme ça, on va être... À DOS... Non, non, mais je veux dire, ça existe. Le ministre, je pense, il le réalise. Mais conséquemment il y a quand même aujourd'hui des impossibilités. On ne peut pas dire, aujourd'hui, qu'avec l'adoption de la loi toutes les données dans tous les systèmes vont pouvoir être protégées au même niveau technologique, avec le même niveau technologique.

M. Caire : Je suis obligé de répondre par l'affirmative, M. le Président.

M. Barrette : Bon, c'est tout. Bien, c'était... Merci de la franchise. C'est toujours apprécié parce que le ministre est toujours le même, ça tombe bien. Alors, voilà. Et je comprends aussi que refaire le passé serait une aventure milliardaire au pluriel.

M. Caire : Oui. Et périlleuse.

M. Barrette : Et périlleuse, oui. Oui.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Nadeau-Dubois : Oui. Merci, M. le Président. Dans les arguments du ministre, j'ai entendu, à quelques reprises : les systèmes existants, là, on les connaît, on les utilise. Donc, par la pratique, on connaît comment qu'ils marchent et donc on n'a pas besoin de faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Moi, c'est comme ça que je synthétiserais l'argument du ministre. J'essaie de faire honnêtement.

Mais pourtant l'histoire récente est pleine d'exemples de dysfonctionnement. Il y a eu des cas de fuite de renseignements importants dans certains organismes publics dans les dernières années. Donc, on les connaît, mais on ne les connaît pas tant que ça, là. S'il y a autant de problèmes, c'est qu'on ne les connaît peut-être pas parfaitement, puis c'est que les vulnérabilités de ces systèmes-là, en matière de protection de renseignements personnels puis de risques pour la vie privée, la connaissance n'est pas si parfaite, sinon on ne ferait pas de projet de loi. Tout irait bien dans le meilleur des mondes.

• (17 h 40) •

Donc, l'argument de dire : On connaît les systèmes parce que, par la pratique, on les utilise, donc on sait déjà tout ce qu'il y a à savoir sur leurs forces et leurs faiblesses, donc c'est superflu de faire une évaluation des facteurs à la vie privée... des facteurs relatifs à la vie privée, il ne me convainc pas pleinement. Donc, j'aimerais ça que le ministre me réponde là-dessus. Tu sais, si on les connaît si bien que ça, bien, on devrait connaître l'ensemble de leurs vulnérabilités, on aurait dû les colmater, et il n'y aurait pas de problème.

Ça fait que, si on impose cette nouvelle obligation-là de faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, c'est parce qu'on juge que c'est une bonne pratique à avoir quand on met sur pied un système d'information ou de prestation de services électroniques. C'est une bonne pratique de faire cet exercice formel officiel pour prendre la mesure des vulnérabilités de ces systèmes-là, tu sais. Puis ça, si c'est une bonne pratique pour les nouvelles affaires qu'on va développer, pour les nouveaux systèmes qu'on va mettre en place, se donner un délai qui de six mois, qui d'un an pour prendre la peine de faire l'exercice pour les systèmes existants, ça m'apparaît être une bonne idée, une bonne pratique. Et surtout, je pense qu'on peut faire l'hypothèse que, ce faisant, on va découvrir des choses que peut-être on ne savait pas sur les systèmes existants puisque, si on savait déjà tout ce qu'il y a à savoir, il n'y aurait jamais de fuite, il n'y aurait jamais de problème.

Donc, pourquoi ne pas donner cet objectif aux organismes publics, disons sur six mois ou un an, puis je lance des chiffres comme ça pour alimenter la discussion, en disant : Faites l'exercice au moins de vérifier. Puis, si on les connaît si bien, de un, l'exercice ne sera pas si chronophage et, de deux, il pourrait quand même, cet exercice-là, nous révéler certaines vulnérabilités que, par la suite, on colmaterait au bénéfice de tout le monde. Donc, moi, c'est l'argument de «on les connaît» qui m'accroche, parce qu'il me semble que, si on les connaissait si bien, on n'aurait pas les problèmes qu'on a eus dans les dernières années.

M. Caire : En fait, c'est parce qu'on parle de deux choses qui ne sont pas totalement les mêmes au sens où, quand on parle, par exemple, d'une vulnérabilité dans un système d'information, ce n'est pas une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qui va nous permettre de les détecter. Ce qu'on va faire, à ce moment-là, et ce qu'on fait, on va se doter d'outils qui, eux aussi, deviennent de plus en plus performants, on va faire des balayages, donc on va essayer de détecter, effectivement, ces vulnérabilités-là, technologiques, par des balayages, on va faire des tests d'intrusion, on va faire des simulations d'attaques pour voir comment le système réagit. Donc, il y a un certain nombre de choses qui sont du ressort, par exemple, du Centre gouvernemental de cyberdéfense pour s'assurer que, technologiquement, nos systèmes sont cyberrésilients.

Quand on fait une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, comme on le dit, c'est vraiment au moment où comment le système... comment on procède avec le système pour la collecte, comment le système va travailler pour le stockage, comment le système va travailler pour la communication, donc dans ce qu'il fait. Là, on peut faire une évaluation de comment il va faire ça de façon, comment je dirais ça, ce qu'il est censé faire et dans le respect de nos lois. Est-ce qu'il respecte nos lois? Est-ce qu'il respecte la loi sur la protection des renseignements personnels dans sa façon de faire?

Là, je vais reprendre mon exemple, puis je sais que le député de Gouin va être extrêmement intéressé par mon exemple. On s'en va en infonuagique, puis on va le voir plus tard, on va regarder notre projet de loi plus tard. Est-ce que l'infonuagique me donne la garantie que la protection de mes renseignements personnels va respecter ma loi? Alors, qu'est-ce qu'il faut que je regarde? Bon, il faut que je regarde c'est quoi, le régime législatif ou c'est quoi, les ententes contractuelles, c'est quoi, les lieux de stockage, c'est quoi, les politiques des entreprises en matière de protection des renseignements personnels, etc., etc., etc. Donc là, je suis capable de faire une évaluation sur les facteurs relatifs à la vie privée.

Ensuite, technologiquement, je peux faire des... Comme je vous disais, ça, c'est vraiment ce que l'évaluation fait au regard, comme disait le député de La Pinière, de la protection qui est garantie par la loi. Maintenant, est-ce que le système est robuste? Est-ce qu'il va résister à tel ou tel type d'attaque? Est-ce qu'il y a des failles dans ses ports de communication? Est-ce que je suis capable d'intercepter une communication, de mettre du code malicieux là-dedans, etc., un cheval de Troie? Ça, ce n'est pas une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qui va me dire ça, c'est vraiment la pratique, c'est vraiment les connaissances informatiques qui vont me permettre de vérifier la qualité du système de ce point de vue là.

M. Nadeau-Dubois : Je sais tout ça. Et, d'ailleurs, j'ai utilisé le terme «vulnérabilité» dans son sens large, hein? Quelqu'un qui ne devrait pas avoir accès, dans l'organisme, à un certain type de renseignement en vertu de la loi et qui y a accès, ce n'est pas une vulnérabilité technologique. Mais, au sens large de la notion de vulnérabilité, c'est une vulnérabilité...

M. Caire : Oui, oui, je comprends.

M. Nadeau-Dubois : ...de l'organisme public en matière de protection des renseignements personnels. Puis c'est en ce sens-là que j'entendais vulnérabilité, parce que je voulais utiliser un terme général pour dire une faiblesse, en fait, en matière de protection des renseignements personnels, puis c'est... Et la faiblesse n'est pas... elle ne peut pas... elle n'est pas nécessairement technologique, le ministre en conviendra.

M. Caire : Tout à fait.

M. Nadeau-Dubois : Ça peut être quelqu'un qui a une autorisation qu'il ne devrait pas avoir.

M. Caire : Processus.

M. Nadeau-Dubois : Un système qui stocke plus longtemps que ce qu'il devrait en vertu de ce qu'il est possible dans la loi.

M. Caire : Tout à fait, voilà. Bon exemple.

M. Nadeau-Dubois : Donc, c'est peut-être les deux exemples que je donnerais : des autorisations d'accès qui n'ont pas lieu d'être, du stockage qui se fait pendant trop longtemps. Appelons ça des faiblesses ou des vulnérabilités, des irrégularités. On peut choisir le terme qu'on veut. Ce qui m'apparaît évident, c'est qu'on ne peut pas exclure que ça, ça existe, à l'heure actuelle, dans les organismes publics. Même si les systèmes sont connus et existants...

M. Caire : Moi, je dirais que oui, par exemple.

M. Nadeau-Dubois : ...ça m'apparaîtrait...

M. Caire : Ah! je dirais que oui, par exemple.

M. Nadeau-Dubois : ...périlleux de faire l'hypothèse qu'il n'y a aucune de ces faiblesses-là qui existe, à l'heure actuelle, dans aucun des systèmes utilisés par aucun des organismes publics, là.

M. Caire : Non, mais...

M. Nadeau-Dubois : Ça m'apparaîtrait vraiment téméraire même de faire une hypothèse comme celle-là. Donc, pourquoi ne pas dire : Six mois, un an après l'adoption de la loi, les organismes publics doivent faire une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée pour constater que, s'il y a des fragilités ou des vulnérabilités de l'ordre de celles dont je viens de parler, bien, qu'on puisse y remédier. C'était l'esprit de mon questionnement, qui, en effet, n'est pas d'ordre technologique plus que d'ordre de la protection de la vie privée. Pourquoi ne pas le prévoir? Puis, peut-être, c'est quoi, les informations que le ministre a que moi, je n'ai pas sur le caractère coûteux en ressources d'un tel exercice, plus que ce qui va déjà être coûteux dans la modernisation de la loi qu'on fait à l'heure actuelle?

M. Caire : Bien, c'est difficile d'avoir une évaluation de coût parce que... Mais on peut penser que ça va quand même monopoliser des ressources. Ça va monopoliser du matériel, ça va, donc, monopoliser des ressources financières.

Sur la question ou le commentaire de mon collègue, oui, je pense qu'on peut relativement dire qu'au regard de ce que 63.5 prévoit, je pense que l'état de situation, sans dire que c'est parfait, là, ce n'est pas ça que je dis, mais de là à dire que ça nécessiterait une espèce de rétroaction générale, pour moi, ça serait non justifié. Alors, ce qui est, actuellement, je dirais, tout à fait justifié, c'est le regard qu'on peut poser sur nos capacités technologiques. Ça, oui, là, c'est sûr. On vient d'en parler avec le député de La Pinière, ça fait que je ne me dédirai pas, là. Mais, sur ce qui relèverait de ce qu'on s'attend d'une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, oui, moi, je suis capable de dire au député de Gouin que je pense qu'actuellement on remplirait les normes nécessaires, on aurait l'information... on collecterait une information qu'on a déjà. Et, s'il y a des... S'il y a des gestes à poser, ils ne sont pas de cette nature-là.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

• (17 h 50) •

M. Tanguay : Oui, juste pour peut-être essayer de trouver une façon de trouver une voie de passage. Évidemment, M. le Président, là, l'objet du débat, c'est l'amendement du ministre à l'article 14, mais nous considérerons l'opportunité lorsqu'on sera rendu là, mais mon commentaire et l'annonce que je fais s'inscrivent dans le débat puis dans mon 20 minutes sur l'amendement du ministre pour essayer de trouver une solution.

J'aimerais ça que le ministre réfléchisse à la chose suivante puis, si l'on ne pouvait pas avant 63.5, à 63.4.1, juste avant 63.5, d'avoir un article qui pourrait dire... Parce que ça serait réellement là, là, où ça serait pertinent qu'il m'écoute, je sais qu'il m'écoute, là, mais que je vais essayer de... «Un organisme public doit, dans les six mois de la sanction de la loi, s'assurer de la conformité à la présente loi de tout système d'information ou de prestation électronique de services impliquant la collecte, l'utilisation, la communication, la conservation et la destruction de renseignements personnels.» Point. Je ne lui demande pas de consulter de comité, je ne lui demande pas de faire une analyse des technologies structurées ou couramment utilisées. Je ne lui demande pas de... Je lui demande juste que, dans les six mois...

Il est dit, dans la loi, qu'on rehausse les standards. Puis, comme disait le collègue de Gouin, si on fait une loi, ce n'est pas parce que tout est parfait, c'est parce qu'il y a des problèmes passés qui nous justifient de faire avancer le Québec. Bien, je lui demanderais, dans les six mois, de s'assurer — puis ça peut être un an, mettons six mois puisque le ministre dit qu'il les connaît, ses systèmes — de la conformité des systèmes d'information et de prestation électroniques. Puis je ne lui dis pas comment faire, je ne lui dis pas comment marcher, mais qu'il s'assure de ça. Puis, si la CAI vient dire : Aïe! Vous êtes-vous assuré de ça? Oui. Parfait, trompe-toi pas. Parfait. Puis, sinon, c'est comme s'il était dédouané pour le passé. Je le sais, qu'il va me dire : Il y a l'article 8. On en a parlé, mais je lui donnerais une obligation proactive de s'assurer de la conformité. Sinon, si l'obligation proactive... Alors, j'aurai l'occasion de le proposer. Le ministre pourrait dire : Non, je vais voter contre, puis tout ça. Mais je l'invite. Ce n'est pas contraignant puis — j'ai appris un mot — ce n'est pas chronophage. Puis, je dis, il ne faut surtout pas que je dise sarcophage, parce que j'aurais...

M. Caire : Ce n'est pas tout à fait pareil. Surtout en regardant comme ça, là. Ça...

M. Tanguay : Mais peut-être que les systèmes actuels...

M. Caire : Quand tu t'appelles Caire puis que tu te fais parler de sarcophage, là, tu commences à le prendre personnel un peu, là.

M. Tanguay : Bien, vous avez dit 55 ans, ce matin?

M. Caire : Bientôt 56.

M. Tanguay : Ça fait qu'on est loin de cela. Quelle date?

M. Caire : Mon chum Toutankhamon.

M. Tanguay : O.K. C'est ça. Mais, quand on regarde les systèmes informatiques actuels, peut-être qu'on s'approche du sarcophage, mais... Alors, qu'on y pense, M. le Président, on a des momies dans la fonction publique. À bas les momies! Alors, 63.4.1, hein : «Un organisme public doit, dans les six mois, s'assurer de la conformité des systèmes d'information.» Point. C'est dit. C'est ma contribution à la planète.

M. Caire : Je ne suis pas à l'aise, M. le Président. Je ne suis pas à l'aise, parce qu'il y a des implications, là, à ce qu'on dit, à ce qu'on fait, puis à ce qu'on met dans la loi. Puis déjà... Déjà, M. le Président, là, il faut être honnête, je pense qu'autant les organismes publics que nos entreprises privées nous appellent à la prudence, parce qu'on amène une série de contraintes.

Bon. Puis il y aura peut-être quelques assouplissements, justement. Puis l'idée, c'est d'aller vers ces assouplissements-là, parce que, là, personnellement, puis je le dis en tout respect pour les collègues, là, puis je veux être bien respectueux dans les... Parce que j'entends les préoccupations des collègues, puis c'est fait avec plein de bonnes intentions puis dans l'objectif d'avoir la meilleure loi possible, là, je n'en doute pas 30 secondes, mais on va imposer un fardeau à nos ministères, à nos organismes qui ne se justifie pas, là. On ne va pas améliorer la situation en faisant ça, on va juste leur mettre plus sur les épaules pour pas plus de résultats dans le sens de ce qu'on veut.

Puis c'est pour ça qu'on amène l'amendement. C'est, justement, pour dire : Attendez un peu, là. Parce qu'au départ, là, c'était tout projet, sans distinction de sexe, de race ou de religion, «let's go», on fait une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Puis c'est justement parce qu'on s'est rendu compte que c'était exagéré, là, qu'on faisait des évaluations à tout vent, là, pour n'importe quoi. Puis, nous autres, comme législateurs, puis je l'ai dit dans un autre contexte, là, puis... mais ça s'applique. Comme législateurs, on peut sortir d'ici en se disant : Aïe! On a fait une bonne job, là. Puis, tu sais, ça va faire des évaluations, toi, chose, là. L'industrie de l'évaluation va être en explosion.

Mais, à la fin de la journée, on a-tu amélioré la vie de nos concitoyens? On a-tu fait en sorte que les renseignements personnels vont être mieux protégés? Ou on a juste pelleté un fardeau de plus dans notre administration, dans nos organismes publics? Parce que, comprenons-nous bien, on parle de nos organismes publics. On leur a-tu pelleté un fardeau de plus pour pas plus de résultats? Puis, malheureusement, ma réponse à cette question-là, c'est oui. C'est oui.

Alors, déjà, on amène la notion d'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qu'on avait amenée dans 14, dans un contexte très circonscrit. Là, maintenant, on élargit cette obligation-là peut-être trop. En fait, moi, je pense, trop. Là, on veut ramener ça un peu en se disant : Bon, bien, O.K., là, acquisition, développement, refonte. Puis ça devrait couvrir pas mal toutes les situations. Puis je ne suis vraiment pas à l'aise par l'effet rétroactif, puis je ne suis vraiment pas à l'aise par le fait que, même si on le dit d'une autre façon, on va dire à nos administrateurs : Faites des évaluations, toujours dans l'application de la loi, là, faites des évaluations de vos systèmes actuels, alors qu'on leur dit : Tu te dois de faire appliquer la loi, tu te dois de faire respecter la loi, c'est une obligation qu'on vient ajouter. Donc, à partir de là, prends les moyens que tu veux, là, mais la loi, il faut qu'elle s'applique et il faut qu'elle soit respectée.

Puis, tu sais, qui trop embrasse mal étreint, là, je l'ai entendu cette semaine au bleu, là, c'est... Je pense que c'était ça, puis on pourrait rajouter l'adage le mieux est l'ennemi du bien. Là, je pense qu'on en fait trop, là. Je pense qu'on en fait trop. Je pense que l'amendement, justement, vise à dire : Wo! Attends un peu, là. En fait, les deux... les amendements, parce qu'il y a aussi la proportionnalité de la chose, qu'on amène, là, qui est... que les collègues ne contestent pas, d'ailleurs, et j'en suis fort aise... Mais moi, je pense que, dans le contexte actuel, on amène déjà une obligation, on amène déjà une responsabilité supplémentaire, une sensibilité, une responsabilisation par rapport au projet de système d'information, puis, avec l'amendement, je pense qu'on vient circonscrire ça à la bonne étape.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, pour paraphraser dans les adages, Jean Lapierre : Il ne faut pas être, dans l'histoire, les éléphants qui vont accoucher d'une souris morte.

Une voix : ...

M. Tanguay : Non, je me rappelle, c'est Jean Lapierre...

M. Caire : Jean Lapierre.

M. Tanguay : ...avec ses célèbres chroniques qu'on écoutait tous religieusement tous les matins, puis qui donnaient le ton, puis que c'était réellement... 63.4.1, un nouvel... Mon point, c'est que, moi, quand j'écoute ça... Si demander que les organismes se conforment à la loi, c'est créer une obligation qu'on ne veut pas, je demande au ministre : Que c'est qu'on fait là?

M. Caire : Bien, ce n'est pas... ce n'est pas... On ne dit pas qu'on ne veut pas que les organismes se conforment à la loi. On fait plus que ça, parce que ça, c'est 8 qui l'amène, qui dit au plus haut dirigeant : Tu fais appliquer la loi, tu fais respecter la loi puis tu mets en place les moyens qu'il faut pour que ça soit respecté.

M. Tanguay : Et l'amendement touche les... Oui.

M. Caire : Mais, juste, juste pour terminer, c'est parce que l'élément, ce n'est pas avec ça que je... Je veux dire, c'est sûr que je suis en accord avec ça. C'est l'élément d'évaluation. Donc là, ça prend une évaluation pour tous les systèmes d'information en regard des applications de la loi. Donc, là, là, on va créer... D'abord, on va créer, O.K., une évaluation. Je fais quoi, comme évaluation? C'est quoi, les paramètres d'évaluation? C'est quoi, les critères? Je me base sur quoi? Puis je la vois, là, je la vois arriver, M. le Président, là, j'ai... Je joue dans ce film-là, là. Là, ça va être, O.K., là, les ministères et organismes, bon, O.K. J'évalue quoi? J'évalue ça comment? C'est quoi, les critères? Comment je sais que je me conforme ou que je ne me conforme pas? Qui décide que je me conforme ou que je ne me conforme pas? Puis là on va bâtir... Six mois? Juste le questionnaire, ça va être ça, six mois, là. Juste le formulaire d'évaluation, ça va être ça, six mois, là. Puis ça va être un comité à temps plein qui va faire ça. Puis là, après ça, qui fait l'évaluation? Ça me prend quoi, comme compétences? Qui va signer ça? Qui sera responsable de ça, de cette évaluation-là, que c'est conforme, pas conforme? Ayoye! Non, non, je...

• (18 heures) •

M. Tanguay : Mais, M. le Président...

M. Caire : Ça paraît simple, là, dans la loi, là, mais dans la vraie vie, là, ouf!

M. Tanguay : Que ça peut être complexifié à l'extrême, j'en suis, puis que c'est un risque, puis que probablement que... mais, pour ne pas que ça arrive, on ne va pas leur demander, puis ils ne le feront pas. C'est juste ça. Puis les systèmes actuels sont ceux qui nous ont justifié d'embarquer dans le projet de loi n° 64 puis de dire : Eh! là on va se mettre à niveau. C'est aussi bébête que ça, moi, mon raisonnement. Qu'est-ce qu'on fait là? Je repose la question.

M. Caire : Bien, je redis au collègue : On amène une notion nouvelle dans le projet de loi, là. Puis je sais que je suis tannant avec ça, là, mais, pour moi, elle est fondamentale. Puis on a quand même passé pas mal de temps, puis c'était tout à fait justifié, sur l'article 1, justement, parce qu'on s'est dit : Aïe! Ça, c'est un des articles fondateurs de la loi, la loi va être accotée là-dessus, sur ces principes-là. Puis on a pris le temps de le regarder, puis c'était justifié, c'était correct de le faire. Parce que je suis d'accord avec le collègue de LaFontaine, c'est un article majeur sur lequel il y a beaucoup de choses qui reposent, dont ce qu'on est en train de faire là.

Le premier dirigeant, il est responsable de faire appliquer la loi, il est responsable qu'on respecte la loi, et donc dans toutes ses facettes. Parce que là on parle des systèmes d'information, mais l'ensemble de ces processus, ce n'est pas juste des processus d'information. Même si 63.5 s'adresse aux systèmes d'information, bien, c'est l'ensemble qui devra être conforme à la loi.

Donc, on l'a dit en partant, c'est la première chose qu'on a affirmée, puis on a... en plus, on a mis le doigt dans la face du premier dirigeant en disant : Non seulement ça, mais c'est toi qui es responsable de ça. Puis on a même eu un débat extrêmement pertinent sur l'imputabilité, on s'est assuré, à micro ouvert, que tout le monde comprenait que c'est lui qui est imputable. Ça fait que, si ces systèmes échouent, bien, il en répondra, il en répondra.

M. Tanguay : J'essayais de vendre ma salade au ministre en disant : Non, c'est juste la conformité, puis ça peut être «light», puis ça peut être... mais là il ne l'achète pas, ma salade. Ça fait que là je vais le dire de même, de toute façon, il ne l'achète pas, ma salade, ça fait que regarde, que le pont saute, il sautera. Sur cet article-là, parce que ça va bien, il ne faut pas sauter de pont, là.

Mais je vais le dire de même : Moi, là, M. le Président, à la fin du débat sur le projet de loi n° 64, je ne peux pas croire qu'il n'y aura pas d'évaluation, dans nos organismes publics, des systèmes contenant des renseignements personnels actuellement. Moi, je ne peux pas croire ça. Puis, si vous me dites : Non, non, croyez-le, bien, je le mettrais dans la loi, mais on ne le mettra pas dans la loi parce que ça serait impraticable, tout ça, mais je ne peux pas croire ça. Puis j'avais peut-être ce fol espoir, mais je ne peux pas croire ça, que ça ne se fera pas, que ça ne sera même pas demandé, puis je leur demanderais.

Puis le ministre a sûrement raison, puis je me fie sur son expérience, là, que ça peut partir dans toutes les directions puis ça peut, dans certains organismes, scléroser, puis ils parlent que de ça pendant un an. Bien, il y a peut-être d'autres questions à se poser, mais je ne peux pas croire qu'on ne va pas... Puis là, là, je n'ai plus de salade à vendre. Je disais : Ah! c'est soft, c'est soft. Bien là, là, ce n'est pas soft, là, je leur demanderais six mois, un an, on peut en parler : Trouvez où est-ce qu'il est, le nord, puis où est-ce qu'il est, le sud, mais faites une évaluation puis assurez-vous de la conformité. Là, j'en rajoute une couche, de toute façon il n'ajoutera pas mon amendement. Je demanderais une évaluation. Puis, s'ils sont sclérosés, je me poserais d'autres questions qui relèvent du Conseil du trésor. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Contre.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Donc, oui, intervention, M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Si vous me donnez une minute, il est déjà écrit, je vais quand même le déposer, puis on va le voter. Puis je pourrai réutiliser ça sur l'adoption finale. Je suis transparent.

M. Caire : Absolument.

M. Tanguay : On peut-tu suspendre une minute? C'est...

Le Président (M. Bachand) : Oui, oui, on va suspendre quelques instants. Merci beaucoup, M. le député.

(Suspension de la séance à 18 h 05)

(Reprise à 18 h 25)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, j'aimerais déposer l'amendement à l'article 14 suivant : Insérer, après l'article 63.4 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, proposé par l'article 14 du projet de loi, l'article suivant :

«63.4.1. Un organisme public doit dans les six mois de la sanction de la loi, procéder à une évaluation quant à la conformité à la présente loi, de tout système d'information ou de prestation électronique de services impliquant la collecte, l'utilisation, la communication, la conservation ou la destruction de renseignements personnels.»

Alors, M. le Président, je n'ai pas besoin de... On en a parlé longuement. Moi, je pense que ce qu'on fait là, c'est, de façon très, très, très majoritaire, puis encore pour plusieurs années, par rapport aux systèmes et aux renseignements personnels qu'ils contiennent déjà en place à l'heure où on se parle... Je pense qu'on ne peut pas passer à côté de l'occasion de leur dire : Vous allez faire une évaluation. Six mois, c'est-tu trop court? Ça peut être un an. Le ministre, s'il veut modifier, je suis bien ouvert.

Mais, moi, par rapport à ce qu'on fait là, c'est... l'important, c'est qu'il fasse l'évaluation, qu'il trouve une façon de le faire, parce que c'est ça qui nous amène, autour de la table, à dire : Bien, il faut resserrer collectivement la protection des renseignements personnels.

Puis là on est dans le domaine public. Dans le domaine privé, il y aura d'autres débats. On ne veut pas non plus scléroser puis paralyser nos entreprises privées. Elles auront des obligations, mais, tout ça, dans un contexte autre. Là, je suis dans le domaine public, je leur exigerais cela. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le ministre.

M. Caire : Non, bien, M. le Président, je pense que j'ai bien fait valoir mon point sur ces questions-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement du député de LaFontaine? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise...

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Oui, M. le député de Gouin, pardon.

M. Nadeau-Dubois : Quand même, pour rendre à César ce qui appartient à César, c'est un amendement que je vais appuyer. J'avais préparé une formulation différente mais pour atteindre le même objectif, donc ça m'apparaît un amendement bien intéressant. J'avais... Ça fait suite, de toute façon, aux discussions qu'on a eues tous les trois, alors je vais l'appuyer.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? Donc, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Caire (La Peltrie)?

M. Caire : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)?

M. Lévesque (Chapleau) : Contre.

La Secrétaire : M. Nadeau-Dubois (Gouin)?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Merci. Alors, nous sommes de retour à 63.5. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : Continuons sur l'article 63.5. Dans son mémoire, le Barreau soulève une question qui m'apparaît pertinente, celle du caractère public des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée. Le ministre a fait le choix, encore une fois, lorsqu'il a rédigé le projet de loi avec son équipe, de ne pas requérir que l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée soit rendue publique. Pourquoi a-t-il fait ce choix? Commençons comme ça.

Le Président (M. Bachand) : Rapidement, M. le ministre, s'il vous plaît. Merci.

• (18 h 30) •

M. Caire : Oui, bien, parce que, M. le Président, il y a une question... En fait, c'est une question de sécurité, essentiellement, et par le fait que ce qu'on veut, dans le fond, par l'évaluation, c'est de s'assurer que, dans le déroulement du projet, on comprenne les impacts relatifs à la vie privée et qu'on s'assure que ces impacts-là sont mitigés, voire corrigés, dans le projet qui est à venir.

Maintenant, de les rendre publics ne dédouanera pas... ou de ne pas les rendre publics, je devrais dire, ne dédouanera pas l'organisme de s'assurer qu'en fonction de l'évaluation qui aura été faite le système va répondre aux obligations légales qui sont imposées par la loi et va faire en sorte qu'il y a peut-être des informations relatives à la sécurité de l'information qui ne seraient pas rendues publiques et, donc, qui seraient de nature à désavantager l'organisme public.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le ministre.

Sur ces mots, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 18 h 31)

Document(s) associé(s) à la séance