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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 20 août 2020 - Vol. 45 N° 84

Ministère du Conseil exécutif, volet relations avec les Québécois d'expression anglaise


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Table des matières

Relations avec les Québécois d'expression anglaise

Discussion générale

Documents déposés

Intervenants

M. André Bachand, président

M. François Legault

M. Gregory Kelley

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Pascal Bérubé

Note de l'éditeur : La commission a aussi siégé en matinée et en soirée pour l'étude des crédits du ministère de la Justice. Le compte rendu en est publié dans un fascicule distinct.

               Les crédits du volet Jeunesse du ministère du Conseil exécutif ont été étudiés à la Commission des relations avec les citoyens le même jour.

Journal des débats

(Dix heures)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon matin, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de, bien sûr, éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude volet Relations avec les Québécois d'expression anglaise des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2020‑2021. Une enveloppe de 30 minutes a été allouée pour l'étude de ces crédits.

Avant de débuter, y a-t-il des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lamothe (Ungava) sera remplacé par M. Poulin (Beauce-Sud); Mme Lecours (Les Plaines), par M. Skeete (Sainte-Rose); M. Lemieux (Saint-Jean), par M. Provençal (Beauce-Nord); M. Martel (Nicolet-Bécancour), par Mme Blais (Abitibi-Ouest); Mme Ménard (Laporte), par M. Kelley (Jacques-Cartier); M. Fontecilla (Laurier-Dorion), par M. Nadeau-Dubois (Gouin); et M. LeBel (Rimouski), par M. Bérubé (Matane-Matapédia).

Relations avec les Québécois d'expression anglaise

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Nous allons donc procéder aux échanges entre les groupes d'opposition et le premier ministre par blocs d'environ quatre à 19 minutes pour permettre à chaque groupe d'opposition d'écouler graduellement son temps de parole. Le temps d'échange inclut, bien sûr, les questions et les réponses.

Discussion générale

M. le député de Jacques-Cartier, vous avez maintenant la parole. Merci.

M. Kelley : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, M. le premier ministre. Je veux juste rapidement dire : On peut avoir un débat sur la gestion de la pandémie, mais je veux juste dire merci à tout le travail que vous avez fait, aussi votre chef de cabinet, aussi la fonction publique du Québec, parce que, je sais, c'est... aucune personne autour de cette table n'a pensé, en 2018, qu'on va être responsables de gérer une pandémie. Alors, je veux juste dire merci pour tout le travail que vous avez fait.

Nous n'avons pas beaucoup de temps, alors j'espère que je vais poser des questions courtes, puis on va avoir des réponses pas mal courtes aussi. Et je veux commencer où nous avons terminé l'année passée, dans l'étude des crédits. Vous avez dit, vers la fin... vous avez commencé de parler des différents groupes des communautés d'expression anglaise, des groupes communautaires qui existent au Québec, vous avez dit — le Black Community Resource Centre : «...il y a une communauté noire — et je vous cite — anglophone qui [...] a des taux de chômage élevés. Et [c'est vrai, il y a des vrais défis].»

Alors, je veux juste... après tout le Black Lives Matter Movement, je veux juste savoir, vous, comme premier ministre, et vous, comme le ministre responsable pour les Communautés d'expression anglaise, pas votre adjoint parlementaire, M. Christopher Skeete, député de Sainte-Rose, qui fait beaucoup de travail sur le terrain, mais vous, est-ce que vous avez parlé avec les leaders des communautés noires anglophones pour savoir c'est quoi, leurs préoccupations et leurs enjeux et si — je sais, ce n'est pas facile de faire ça en personne — au minimum, un appel téléphonique avec certains leaders...

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Oui, M. le Président. D'abord, bienvenue à tous les représentants des différents partis puis aux fonctionnaires qui travaillent, entre autres, sur le dossier des rapports avec les communautés anglophones.

Effectivement, les relations avec la communauté noire et avec la communauté noire anglophone posent des défis spéciaux — d'ailleurs, mon adjoint parlementaire a remis une aide de 150 000 $ à l'organisme Black Community Resource Centre — parce qu'au-delà de ce qu'on fait, là, avec notre groupe pour contrer le racisme, avec les groupes qui sont responsables de la défense des droits des anglophones, il y a une situation qui est spéciale pour la communauté noire.

Bon, vous allez comprendre qu'avec l'année qu'on vient de vivre, avec la pandémie, je n'ai pas rencontré beaucoup de groupes au cours de la dernière année, mais mon adjoint parlementaire, député de Laval... Sainte-Rose, de Sainte-Rose, donc, à Laval, a rencontré beaucoup de groupes et puis me transmet... puis on se rencontre régulièrement pour travailler sur différents changements. Mais je m'attends à ce que, aussi, le groupe qui est sous la responsabilité de Nadine Girault et de Lionel Carmant me remette, au cours des prochains mois, des recommandations, qu'on va appliquer rapidement.

M. Kelley : Parfait, merci pour la réponse. M. le Président, j'ai un document, ça a été fait par le West Island Black Community Association, avec plusieurs recommandations, alors je pense que ça peut vraiment aider tout le travail que vous faites. Alors, je soumets ça pour transmettre au premier ministre et à son chef de cabinet, le député de Sainte-Rose, pour, tout à l'heure, votre information.

Prochaine question, je veux maintenant parler de gestion de la pandémie en termes des communications en anglais. Je sais, M. le premier ministre, après que vous avez eu une discussion avec notre ancien leader de notre formation politique, M. Arcand, puis plusieurs groupes communautaires qui ont demandé que vous prendre la parole en anglais pendant vos points de presse quotidiens, vous avez commencé de faire ça. C'était très, très important. Vous savez aussi, également, qu'un document a été envoyé à tous les Québécois, qui était juste en français. Ça a été corrigé après, une couple de semaines après, qu'il était correct.

Mais je veux juste savoir, pour l'avenir, s'il y a une deuxième vague, s'il y a un changement énorme avec le virus, est-ce que des directives ont été mises en place, au ministère des Services... excusez-moi, le ministère de la Santé et des Services sociaux pour s'assurer que ça n'arrive pas, s'il y a un envoi massif comme ça encore, on va s'assurer que les documents sont disponibles en anglais rapidement? Parce que, oui, c'est sûr, beaucoup des personnes peuvent regarder en ligne, mais il y a des aînés — je pense particulièrement à eux autres — il y a des personnes qui n'ont pas l'accès à l'Internet chez eux, qu'il y a un besoin, vraiment, de cette information, et, normalement, c'est les personnes les plus vulnérables à la COVID. Alors, je veux savoir si vous avez mis en place des directives claires pour s'assurer que ça n'arrive pas encore.

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre, s'il vous plaît.

M. Legault : Oui. Concernant les relations puis les communications du gouvernement avec les anglophones, il y a des lois qui existent, des règlements, et, compte tenu de l'urgence de la pandémie, de la situation exceptionnelle, on a choisi d'aller plus loin que ce qui est prévu dans les lois et les règlements. Bon, est-ce qu'on le fera pour une deuxième vague? Ça dépendra de l'ampleur de la deuxième vague. Mais une chose qui est certaine, c'est que les lois, les règles vont être appliquées. Donc là, dans ce cas-ci, on a choisi d'envoyer des documents... puis j'ai choisi aussi, durant mes points de presse quotidiens, d'avoir une partie en anglais, même si ce n'était pas requis par la loi puis les règlements. Si jamais il y avait une autre urgence de l'ampleur de ce qu'on a connu ce printemps, bien, on va le refaire, mais ce sera au cas par cas.

Le Président (M. Bachand) : Député de Jacques-Cartier, s'il vous plaît.

M. Kelley : Merci. Merci pour la réponse. Je vais continuer sur la même thématique, mais sur un différent jour, et ça touche les élèves anglophones. Pendant la pandémie, le ministère de l'Éducation a commencé de produire les outils pour des enfants chez eux, à la maison, et je pense que les capsules qui ont été faites pour Télé-Québec, pour les enfants, bien, c'était fait juste en français, on n'a pas eu des capsules qui étaient faites pour les élèves anglophones chez eux. Je pense que, aussi, un petit peu, le cours en ligne pour les enseignants à TELUQ, c'est une version en ligne, c'était seulement en français, et aussi, le matériel scolaire à distance, le ministère a seulement fait ça en français, puis on demandait à des commissions scolaires de traduire ça à leurs frais.

Alors, je veux juste s'assurer qu'on regarde nos élèves anglophones puis on regarde le contenu qui est fait et produit par le ministère de l'Éducation, que tout est fait et tout est beau pour nos enfants, parce que je pense que ça, c'est très important. S'il y a une autre deuxième vague, si les élèves sont obligés de retourner chez eux, les outils qui existent pour nos enfants francophones vont exister pour nos enfants et élèves anglophones aussi.

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Oui. Écoutez, ce qui est arrivé... puis je pense qu'on est tous d'accord avec ça, on ne pouvait pas prévoir l'ampleur de ce qui est arrivé, donc on n'avait pas prévu donner des... ou mettre en place des capsules, pour Télé-Québec, pour les enfants qui étaient à la maison. Notre priorité pour la rentrée, c'est vraiment que les enfants francophones et anglophones soient à l'école. Je veux dire, on va tout faire, sauf s'il y a un risque important pour leur santé, pour qu'ils soient à l'école. Donc, on a, évidemment, là, réagi face à l'urgence. Si jamais il y avait une deuxième vague aussi importante, on pourrait regarder, effectivement, pour avoir du matériel médiatique, là, pour les anglophones, mais là vous allez comprendre que, dans les circonstances, on n'a pas eu le temps de le faire.

Le Président (M. Bachand) : M. le député.

M. Kelley : Merci. Je vais continuer sur la thématique des écoles, puis je veux parler des commissions scolaires. Votre ministre a pris l'engagement, dans les médias, de respecter des droits de la communauté anglophone. On a passé par un bâillon, une décision du gouvernement et, malheureusement, on n'a pas eu la chance d'étudier les articles qui ont touché les commissions scolaires anglophones. Mais je veux juste savoir... On est rendus en cour, on sait qu'une première décision a été rendue sur certains éléments, mais est-ce que vous êtes prêts de peut-être regarder avec la communauté s'il y a une façon de régler ça hors cour, faire quelque chose qu'on ne dépense pas l'argent sur les avocats, mais on trouve une solution, puis, vraiment, quelque chose de «winner-winner» pour la communauté anglophone?

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

• (10 h 10) •

M. Legault : Bon, écoutez, vous savez très bien qu'en campagne électorale on a été très clairs, on a répété à plusieurs reprises que les commissions scolaires, et qu'elles soient francophones ou anglophones, disparaîtraient, seraient remplacées par des centres de services, entre autres, où il y aurait un comité avec des représentants, comme actuellement, de la population, des parents. On a eu des discussions avec la communauté anglophone puis on a fait des compromis pour la communauté anglophone. Je pense que, du côté francophone, il y avait une large majorité des francophones québécois qui souhaitaient l'abolition des élections scolaires. Du côté anglophone, c'est difficile à évaluer, mais il y avait une partie de la communauté anglophone qui souhaitait garder des élections scolaires. Donc, ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait un compromis en disant : Les représentants des parents, de la population vont continuer d'être élus par l'ensemble de la population anglophone.

Nous, on est convaincus que la loi n° 40 est, juridiquement, bien fondée. Bon, là, il y a eu un jugement non pas sur le fond, mais sur le fait qu'on devait suspendre la loi temporairement, le temps de l'étudier sur le fond. Bon, nous, on n'est pas d'accord avec cette décision-là, même si ce n'est pas sur le fond, de suspendre la loi n° 40, donc on va contester, on va aller en appel. Et nous, on considère qu'on a déjà fait des compromis en permettant une élection générale pour les représentants des parents.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier, s'il vous plaît.

M. Kelley : Et juste une autre question sur le sujet, M. le premier ministre : Est-ce que vous avez des inquiétudes concernant le fait que des groupes francophones hors Québec ont décidé d'appuyer des commissions scolaires anglophones, parce qu'eux autres craignent pour les enjeux pour leur droit, et leur droit partout dans le pays, de garder leurs commissions scolaires?

M. Legault : Oui, bien, écoutez, je peux comprendre qu'il y a peut-être des appuis ailleurs dans les autres provinces, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'on a eu un appui clair le 1er octobre 2018, et cet appui, entre autres, était pour notre proposition d'abolir les élections scolaires. Donc, je pense que ce qui se passe au Québec doit être décidé par les Québécois. Si les francophones des autres provinces choisissent d'autres voies, bien, c'est leur choix, hein?

Le Président (M. Bachand) : M. le député.

M. Kelley : Maintenant, je veux poser une question concernant des élections scolaires, parce que vous avez décidé de garder ça comme un compromis. Les élections arrivent vite, c'est à la fin de septembre, puis, présentement, juste avec la pandémie puis la rentrée scolaire, tout le travail qui doit être fait dans le contexte d'une pandémie, c'est sûr que les commissions scolaires et, quand même, les centres de services sont un petit peu débordés avec cette question-là. Est-ce que, pour vous... parce que je sais que vous aimez des propositions, est-ce que vous êtes prêt de reporter les élections en 2021 et regarder l'option de jumeler ça avec des élections municipales? Peut-être, ça, ça va être une façon d'augmenter le taux de participation et aussi s'assurer que des élections sont un succès. Parce que, comme vous avez dit, c'était un compromis qui a été fait, le comité comprend qu'ils aient des élections et on veut s'assurer, tout le monde, que ça marche très bien puis que ça fonctionne bien.

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Bien, M. le Président, la proposition de jumeler le moment des élections scolaires avec les élections municipales, c'est une proposition qui est dans l'air depuis longtemps. Quand j'étais ministre de l'Éducation, il y avait des personnes qui proposaient ça. Il peut y avoir des bons côtés, des mauvais côtés, on peut mélanger, aussi, les deux élections, les deux enjeux. Je continue de comprendre que c'est très difficile pour les commissaires, là, qui sont candidats aux élections scolaires à bien faire connaître leur plan de match, leur programme. Ce n'est pas simple, on parle de grands territoires, et c'est pour ça qu'on souhaitait abolir les élections scolaires puis de concentrer les élections autour des conseils d'établissement de chaque école, qui pourraient élire leurs représentants, on trouve que c'est plus logique. Mais, à la demande des représentants des groupes anglophones, on a accepté de faire un changement.

Maintenant, pour ce qui est de la date des élections scolaires, déjà, les élections scolaires ont été reportées. Bon, vous savez ce qui se passe avec English-Montréal, il y a des endroits où on est dus pour un petit changement pour, au moins, une validation auprès de la population. Donc, pour l'instant, on garde le cap sur cet automne.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député.

M. Kelley : Parfait, merci beaucoup. Une autre question, M. le premier ministre, c'est concernant un projet de loi que j'ai déposé, le 590, pour rendre les cours de français gratuits à tout le monde sur le territoire du Québec, c'est une modification à la Charte de la langue française. Est-ce que vous êtes prêt à parler avec votre leader parlementaire pour mettre ça sur l'agenda pour la rentrée parlementaire?

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Écoutez, d'abord, je veux vous féliciter, parce que je trouve que c'est un excellent projet de loi, le projet de loi n° 590. Puis mon adjoint parlementaire a fait la tournée de plus d'une centaine de groupes anglophones, puis la recommandation qui revenait le plus souvent, c'est d'offrir davantage de cours de français aux anglophones; pas aux allophones, pas aux nouveaux arrivants, aux anglophones qui sont ici depuis longtemps. Évidemment, là, ça me fait plaisir d'entendre ce genre de proposition, parce qu'on souhaite que le français soit la langue officielle au Québec, qu'elle soit parlée par le plus de personnes possible.

Donc, déjà, on travaille. Est-ce que ce sera par le projet de loi n° 590 ou par des cours? Mais je peux vous dire que, pour ce qui est des objectifs, c'est la priorité numéro un que j'ai entendue, du côté des groupes anglophones, de donner des cours de français aux anglophones de souche, si je peux dire, là, pas seulement les nouveaux arrivants.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Parfait. And, of course, when we do end up coming to the language discussion, I know you have an action plan that's in the works, maybe some modifications, these things do bring out some stresses and worries in the English-speaking community.

Alors, avec votre plan d'action que votre leader va déposer, votre ministre responsable de la Langue française, est-ce que vous avez un message, pour les communautés anglophones, concernant qu'est-ce que vous voulez faire? Parce qu'on est tous d'accord, il y a un droit de travail en français, il faut valoriser la langue française, mais je veux juste savoir si vous avez un message pour les communautés anglophones, aujourd'hui.

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Oui. Bien, écoutez, le Québec... Je suis en train de lire un livre, là, sur Montréal, 1933, puis je vois comment Montréal, les entrepreneurs qui ont démarré des commerces, il y en a beaucoup que ce sont des anglophones. Les anglophones sont au coeur de l'histoire du Québec, puis ils ont des droits qui sont historiques, puis on va les respecter. Les anglophones ont le droit d'avoir des services de santé en anglais, les anglophones ont le droit d'avoir des services d'éducation en anglais, donc tous ces droits vont être respectés.

Maintenant, il y aura toujours un défi, du côté du français, dans une Amérique du Nord anglophone, de s'assurer que le français demeure, entre autres, à Montréal. Donc, la loi 101 a été écrite il y a longtemps, a besoin d'être réactualisée, c'est ce qu'on va faire. Bien, vous avez vu un rapport, comme moi, récemment, qui disait que 60 % des entreprises à Montréal exigent l'anglais pour les nouveaux employés. Ce n'est pas acceptable pour moi. Puis ce n'est pas une question d'être pour ou contre les anglophones, c'est une question de survie pour le français. Donc, je pense qu'il y a un équilibre, mais je veux rassurer les anglophones, les droits historiques vont être protégés. Et puis, moi, ce que j'entends, là... j'ai rencontré, pendant, entre autres, mes vacances, beaucoup d'anglophones qui me disaient : On est contents de ce que vous faites en éducation, en santé, en économie. C'est ça qui sont les priorités des anglophones au Québec.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Merci pour la réponse, M. le premier ministre. Je n'ai pas beaucoup de temps, alors je vais essayer de poser deux questions.

La protection des médias anglophones du Québec, c'est très important. On n'aime pas avoir nos nouvelles de Toronto. Je ne veux pas que c'est CBC et CTV Toronto qui donnent, nous, des nouvelles de juste le reste du Canada. L'information de nous, l'information ici, à l'Assemblée nationale, est importante pour les anglophones du Québec. Alors, je veux juste s'assurer que, dans vos plans, de continuer d'appuyer les médias des hebdos en région, que le Montreal Gazette, le Sherbrooke Record puis tous les autres sont pris en considération. Et je sais qu'il y a une responsabilité pour le gouvernement fédéral, aussi, de s'assurer que CBC fait sa part ici, il fait un excellent travail, mais il faut toujours lutter pour cette partie de la responsabilité, le gouvernement fédéral aussi. Alors, ça, c'est un enjeu qui est important.

Puis, dernière chose, c'est sur la fonction publique. Je veux juste savoir si vous avez mis en place des programmes, avec le secrétariat, pour augmenter le taux des anglophones dans la fonction publique. Travailler avec McGill, travailler avec, quand même, l'Université de Montréal, travailler avec Concordia et Bishop's University pour faire un recrutement actif, pour chercher des anglophones, puis dire : Vous êtes capables de travailler ici, à Québec, comme un fonctionnaire, comme votre sous-ministre adjoint, M. Floch, que c'est possible, et une excellente opportunité pour les anglophones du Québec.

Le Président (M. Bachand) : 10 secondes, M. le premier ministre, 10 secondes.

M. Legault : Bien, écoutez, on a aidé les médias anglophones quand on a aidé l'ensemble des médias, donc ça inclut les médias comme The Gazette. Puis, dans la publicité gouvernementale qu'on a faite au cours des derniers mois, on a mis beaucoup d'argent, puis on en a mis du côté anglophone. Je pense que ça a aidé aussi à augmenter les revenus puis protéger l'existence de ces médias.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le premier ministre. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

• (10 h 20) •

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je salue le premier ministre, le député du gouvernement, les députés des oppositions, l'ensemble du personnel qui est présent.

J'ai seulement cinq minutes, alors je vais y aller de questions brèves. Je fais confiance au premier ministre pour y aller de réponses brèves puis je vous fais confiance à vous, M. le Président, pour nous rappeler à l'ordre si jamais l'un de nous oublie ces règles.

J'aimerais parler au premier ministre d'un sondage qui est sorti en mai dernier, qui indiquait que les Québécois et les Québécoises d'expression anglaise sont considérablement plus inquiets que les Québécois et Québécoises qui parlent français de contracter le coronavirus ou qu'un membre de leur famille contracte le coronavirus. À l'époque, le premier ministre s'était fait poser cette question et il avait expliqué ces statistiques en blâmant les médias anglophones, particulièrement un journaliste de La Gazette, qui, disait-il à l'époque, était responsable de cette anxiété chez les anglophones du Québec. Trois mois plus tard, est-ce que le premier ministre maintient cette explication-là? Et j'espère que non. Alors, dans ce cas, qu'est-ce qui explique, selon lui, que les anglophones québécois sont plus inquiets que les francophones au niveau de la pandémie de COVID-19?

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Bon, je vais être prudent, pas faire choquer les gens autour de moi, là, mais, écoutez, j'ai parlé d'Aaron Derfel, journaliste à The Gazette. D'abord, je dois dire, j'adore Philip Authier, de The Gazette, qui fait un travail extraordinaire, O.K.? Si vous regardez les tweets, O.K., ou les articles d'Aaron Derfel, j'ai calculé au moins 10 articles différents où M. Derfel m'accusait d'avoir menti, directement ou indirectement. Bon, évidemment que je ne suis pas d'accord avec M. Derfel. Je pense que, de façon générale, les articles qui sont publiés par The Gazette, qui est le journal qui est peut-être le plus lu, sont objectifs, sont bien faits, mais je trouve que M. Derfel, là... Puis je vous invite à aller voir les tweets de M. Derfel, là, des six derniers mois, là, faites, un soir, l'exercice d'aller voir, puis je pense que même les gens de l'opposition vont trouver que ça penche pas mal toujours du côté que tout ce que fait le gouvernement n'est pas bon.

Bon, est-ce que c'est la seule raison? Non. Probablement qu'il y a d'autres raisons qui expliquent que les anglophones sont plus craintifs. Évidemment, les anglophones écoutent plus CNN, ils écoutent plus les médias américains, qui sont très négatifs à l'égard de M. Trump. Donc, il y a probablement d'autres explications.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.

M. Nadeau-Dubois : J'aimerais entendre le premier ministre sur ces autres explications, parce que, Twitter, dans mes souvenirs, il y a une très faible minorité de la population québécoise qui est abonnée à ce réseau social. Respectueusement, ça me semble un peu court, comme explication, de dire : Il y a quelques tweets et quelques articles, même une dizaine, qui expliquent des statistiques aussi fortes, puis je rappelle au premier ministre que ces statistiques-là sont valides à Montréal et à l'extérieur de Montréal.

Le premier ministre, il le sait, je n'ai pas besoin de lui dire, il est premier ministre de tous les Québécois et Québécoises, même les gens, au Québec, qui parlent en anglais. Au lieu de blâmer les médias, peut-il nous dire, dans sa gestion de crise, qu'est-ce qu'il va faire de mieux pour la deuxième vague pour que les Québécois puis les Québécoises qui parlent anglais soient rassurés? Parce que les dernières statistiques qu'on a, c'est que ces gens-là ne sont pas rassurés.

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : Bon, je pense bien, là, que le cochef de Québec solidaire n'est pas en train de me proposer de parler ou de faire plus de points de presse seulement en anglais, là. Donc, déjà, je suis allé plus loin que la loi puis les règlements en gardant une partie de mes interventions en anglais.

Je rappelle qu'Aaron Derfel n'est pas seulement sur Twitter, c'est le journaliste santé du journal The Gazette, qui est très lu. Puis je reviens sur l'explication que je donnais tantôt. Je suis certain que le cochef de Québec solidaire écoute CNN, écoute les médias américains, puis parfois, avec raison, on est très durs à l'égard de la gestion de Donald Trump, et ça inquiète la population. Ça inquiète la population américaine, ça inquiète aussi la population québécoise anglophone qui écoute CNN et les médias américains.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. C'est tout le temps pour ce bloc. M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : M. le Président, M. le premier ministre, chers collègues, cinq minutes, trois questions. D'abord, est-ce que le premier ministre considère que la communauté anglophone québécoise, considérant son poids démographique, est bien servie et financée en matière de services de santé et universitaires?

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre, s'il vous plaît.

M. Legault : Oui, je pense qu'en matière de santé... Je regarde McGill, le CUSM, je regarde les services qui sont donnés dans les régions plus anglophones... Bon, je pense qu'en Outaouais il y a besoin d'un agrandissement ou d'un nouvel hôpital, je pense qu'en Estrie il y a du travail à faire du côté des hôpitaux, mais, de façon générale, je pense que la communauté anglophone est bien servie du côté des services de santé.

Le Président (M. Bachand) : M. le député, s'il vous plaît.

M. Bérubé : Très bien. Je dirais même au premier ministre que, considérant son poids démographique, elle est très bien servie.

Alors, je vois, là, qu'il y a d'autres projets qui sont à l'étude. Commissions scolaires, assez particulier. Alors, le premier ministre a pris un engagement d'abolir les élections scolaires, d'abolir les commissions scolaires, mais le problème, c'est qu'il crée deux régimes distincts de gouvernance dans le réseau de l'éducation selon la langue. Alors, les francophones, eux, ils ne peuvent pas élire leurs représentants, mais les anglophones, oui, parce qu'ils sont sensibles à ça, eux. Le taux de participation n'est pas beaucoup plus élevé, puis le premier ministre a évalué ça, il a dit : Oui, les anglophones, ils veulent ça, on va leur donner. Donc, deux poids, deux mesures dans notre nation. On accorde aux anglophones le droit de choisir leurs représentants, notamment par crainte qu'ils contestent la loi — ce qu'ils font, de toute façon — puis on dit aux francophones : Pour vous, ce n'est pas important. Ça m'apparaît hasardeux comme jugement parce que ça ouvre la porte à d'autres enjeux de même nature. On va pouvoir faire des distinctions sur la base linguistique au Québec en 2020. Moi, je trouve ça très particulier. Alors, comment le premier ministre explique que c'est bon pour les anglophones, de choisir leurs représentants, mais pas pour les francophones?

Le Président (M. Bachand) : M. le premier ministre.

M. Legault : O.K. D'abord, moi, je suis quelqu'un de très pragmatique, je regarde les faits puis j'essaie d'écouter la population. Quand on regarde les élections scolaires du côté francophone, le taux de participation est autour de 5 %. Quand on regarde le taux de participation du côté anglophone, il est autour de 20 %. Donc, il y a quand même une réalité qui est différente.

Quand on parle avec les groupes impliqués, il y a une majorité de francophones qui ne souhaitent pas d'élections scolaires, puis il y a une majorité, je pense, d'anglophones qui souhaitent des élections scolaires. Donc, moi, je pense que le rôle d'un gouvernement, c'est d'écouter la population, puis on donne aux francophones ce qu'ils veulent, on donne aux anglophones ce qu'ils veulent. Moi, je ne vois pas pourquoi le chef du PQ s'opposerait à ça.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Je pense que ce que le premier ministre dit aux francophones, c'est qu'il fait l'évaluation qu'une majorité de représentants de la communauté anglophone demandent ça, mais une très forte majorité des anglophones ne vont pas plus voter aux élections scolaires. Alors, lui, il fait le choix, pour accommoder la communauté anglophone... puis c'est bon pour vous de choisir vos représentants, mais pas pour les francophones.

Autre dossier. Sa ministre présidente du Conseil du trésor a dit, ce matin, que les dossiers qu'on retrouvait au projet de loi n° 61, le défunt projet de loi n° 61, c'était négociable. Alors, je vais lui parler du collège Dawson, collège anglophone le plus populeux au Québec, près de 8 000 étudiants. Et là ils ont fait une demande — et le seul cégep qui a réussi à s'inscrire dans le projet de loi n° 61, c'est le collège Dawson — pour l'agrandissement de 800... qui permettra l'accueil de 800 étudiants de plus.

Alors, je vais lui citer son ancien collègue Joseph Facal, avec qui il a eu l'occasion d'échanger, notamment aux origines de la Coalition avenir Québec. Il considère qu'on finance notre propre assimilation, que les transferts linguistiques, dans un écosystème fragile à Montréal, font en sorte de favoriser le passage d'étudiants francophones dans un cégep anglophone, et c'est encouragé par un symbole très fort, qui est celui de choisir le collège Dawson dans ces circonstances. Le Mouvement Québec français, Joseph Facal, l'ensemble des chercheurs sérieux sur ces questions-là, on partage la même opinion que le premier ministre envoie un message inquiétant sur les transferts linguistiques. Alors, je lui pose la question : Est-ce qu'il veut maintenir cette priorité-là pour le collège Dawson? Est-ce qu'il considère qu'il y ait davantage de francophones qui aillent étudier en anglais à Dawson, à Montréal?

Le Président (M. Bachand) : C'est 10 secondes, M. le premier ministre, désolé.

M. Legault : O.K. Bien, M. le Président, j'ai été au Parti québécois, puis c'est un sujet qui ne fait pas l'unanimité. Est-ce que les francophones devraient avoir le droit d'aller au cégep en anglais? Je sais qu'il y a beaucoup de péquistes qui pensent que oui, il y en a d'autres qui pensent que non. Est-ce qu'il devrait y avoir un équilibre, une limite? Ça va faire partie de ce qu'on va regarder avec le projet de loi qui va être déposé par le ministre.

Documents déposés

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Cela dit, en terminant, je dépose les réponses aux demandes de renseignements de l'opposition ainsi que deux documents dont a fait état la cheffe de l'opposition officielle, hier, à la séance de mercredi.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 11 h 30, où elle va entreprendre l'étude du volet Lutte contre l'homophobie et la transphobie des crédits budgétaires du portefeuille de Justice. Nous serons à la salle Pauline-Marois. Merci, tout le monde, merci.

(Fin de la séance à 10 h 30)

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