(Quinze heures deux minutes)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon
après-midi et bienvenue. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Comme vous le savez très bien, je demande à toutes
les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
Rappel du mandat : La commission est réunie
afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 32, la Loi visant
principalement à favoriser l'efficacité de la justice pénale et à établir les
modalités d'intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en appel.
Avant de débuter, M. le secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Lachance (Bellechasse) est remplacée par M. Bussière
(Gatineau); M. Lafrenière (Vachon) est remplacé par M. Girard (Lac-Saint-Jean);
M. Lamothe (Ungava) est remplacé par Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice); Mme Lecours
(Les Plaines) est remplacée par M. Allaire (Maskinongé); M. Lemieux
(Saint-Jean) est remplacé par M. Tremblay (Dubuc); M. Martel
(Nicolet-Bécancour) est remplacé par Mme Grondin (Argenteuil); M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est remplacé par M. Nadeau-Dubois (Gouin); et M. LeBel (Rimouski) est
remplacé par Mme Hivon (Joliette).
Étude détaillée (suite)
Le
Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Au moment d'ajourner nos travaux, à la dernière séance, nous en
étions à l'étude de l'article 6 du projet de loi. Interventions sur
l'article 6? M. le député de Gouin était...
M. Tanguay : Oui, c'est
ça...
Le Président (M.
Bachand) : ...avait pris la parole à ce moment-là, mais...
M. Nadeau-Dubois : Non, ça va.
Le Président (M.
Bachand) : Ça va, M. le député de LaFontaine?
M. Tanguay :
Je peux laisser le collègue de Gouin parce que c'était... Sinon, je peux
relancer la balle au jeu, mais, si tu veux, je... La discussion que nous
avions...
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Oui, M. le Président. La discussion que nous avions, puis c'est le collègue de
Gouin qui, je crois, l'avait pour beaucoup initiée, c'était la
compréhension, je pense, sous deux angles, du nouvel article 20.2. Le
premier, lorsque l'on dit, en substance, là, que la signification peut être
faite à un moyen technologique lorsque la partie qui est poursuivie, la partie intimée, lorsque la partie
consent à donner une adresse, un moyen technologique, on peut lui signifier
à ladite adresse. Il y avait deux aspects sur lesquels on aimerait avoir des
précisions de Mme la ministre.
Le premier
aspect, c'est : Est-ce que ce consentement-là est révocable? Est-ce que je
peux, dans une instance... parce que, dans une instance, il peut y avoir plus
d'une signification. Il y a la signification du constat d'infraction, par
exemple, mais il peut y avoir
d'autres procédures à l'intérieur d'une instance avant le jugement final. Si
moi, une fois que je suis devant le juge pour la première fois, je dis :
Oui, je consens, ou je le communique sans être devant le juge, je consens à
être signifié à cette adresse
courriel là... est-ce que je peux, par la suite, s'il y a deux, trois autres
actes de procédure qui sont signifiés, est-ce
que je peux dire : Bien, écoutez, pour x raison, qui pourrait participer
du fait que mon adresse n'est plus valide, je ne consens plus à ce que
signification me soit faite à cette adresse-là? Donc, il y avait un premier
questionnement.
Il y avait un
deuxième questionnement, puis ça, le collègue de Gouin était là-dessus aussi : Est-ce que, si l'instance
est fermée, je suis reconnu coupable ou je
ne suis pas reconnu coupable, un an après... un an après, la procureure au
dossier veut me signifier une
procédure, une nouvelle procédure, est-ce
qu'elle peut aller dans l'ancien
dossier puis dire : Ah! il avait accepté d'être signifié sous cette
adresse courriel là? Est-ce qu'elle le peut sans que j'exprime mon consentement
de facto signifié en utilisant l'adresse donnée dans le vieux dossier tout
simplement?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Je vais passer la
parole à mon expert.
Le Président (M.
Bachand) : Consentement? Maître. C'est parce que je veux juste... Vous connaissez bien maintenant la procédure comme il faut de la commission
parlementaire. Vous identifier, s'il vous plaît.
M. Roy
(Vincent) : Oui. Alors, Vincent Roy, avocat au ministère de la Justice.
Ce
qui est important de préciser, c'est que le consentement, oui, on peut
comprendre que la personne ne va peut-être
pas utiliser toujours la même adresse
Internet dans le courant de sa vie. Donc, au moment où le poursuivant va
déposer son acte, il va vouloir
prouver qu'il y a eu signification. Le juge va demander c'est quoi, la preuve
du consentement. Donc, si c'est de dire qu'il y a
10 ans j'ai réussi à le signifier par là, peut-être que le juge va se
poser des questions.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine,
oui.
M. Tanguay :
Est-ce qu'on peut le préciser? Peut-être que le juge... Je ne voudrais même pas
que le juge se pose la question,
puis surtout si ça fait 10 ans, mais ne prenons pas un exemple de
10 ans, parce que je pense, dans ce cas-là, c'est évident que le juge ne le permettrait pas.
Mais si c'est dans un autre dossier, il
y a six mois, un an, peut-être
même un dossier plus récent, lorsque
c'est deux dossiers différents, peut-être même dans des districts différents, ça peut
arriver, est-ce qu'on peut
avoir une précision?
Et, M. le Président, ce
qui est dit ici est important, parce qu'il en va de l'interprétation qui sera
donnée ou pas à la disposition. Je veux
dire, il y a des avocats, avocates, des procureurs qui vont vouloir se
gouverner en connaissance de l'intention
du législateur qui va être exprimée au moment où on se parle, là, ici. Alors,
moi, je pense... Ma compréhension, c'est
que c'est dossier par dossier. Puis on ne peut pas présumer, parce que ça a été
accordé dans un autre dossier, que le consentement se poursuit dans le dossier
suivant, de un. Et de deux, je ne suis pas sûr que c'est rassurant de dire que
le juge pourrait constater ou
pourrait décréter que je considère que la signification est valide, parce que,
dans l'autre dossier, ça avait été donné comme consentement puis ça
n'avait pas été contesté. Donc, à sa face même, je la déclare validement
signifiée, la procédure. Je pense que c'est... Je trouve qu'on est dans des
zones de dangerosité.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel :
Bien, avec beaucoup de respect, avec tout le respect que je dois à mon
collègue, je ne partage pas son opinion. Je pense que c'est une mesure... il
faut se remettre à la base, c'est une mesure de signification qui ne dispensera
jamais la personne qui signifie de prouver
la réception et de prouver que l'adresse est active. Et on pourra toujours
retirer le consentement par la suite.
Et
quand on parle de la première partie, là, la signification, donc, si elle est
connue ou dans la mesure où cette adresse active, si elle est connue, bon,
c'est sûr que, si on a une adresse connue dans un document précédent ou dans un
dossier précédent, la tendance va
être de s'en servir, mais il faudra toujours prouver au juge qu'elle est active
et prouver la réception. Donc, il n'y
a aucun préjudice pour la personne qui pourra toujours, dans le futur, ne pas
consentir à ce qu'on transmette à cette adresse.
Alors, je comprends
les remarques de mon collègue. Je ne partage pas ses inquiétudes et je n'ai pas
la même interprétation. Je pense que c'est
tout à fait approprié puis qu'il n'y a pas de préjudice pour la personne. C'est
une question de pouvoir faciliter les procédures. Puis on est toujours
dans l'optique aussi de préparer le terrain pour la modernisation de l'accès à la justice qui va, soit dit en
passant, être quant à moi une mesure d'accessibilité qui ça s'avérer profitable
pour le citoyen. Mais dans ce cas-ci
on parle de la signification de procédure. Et on doit quand même... Ça ne
dispense pas personne de prouver la réception pour enclencher des
conséquences envers le citoyen.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Mme la députée
de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Weil :
Oui, j'aurais une question. Donc, le sens des mots «dans la mesure où cette
adresse est active au moment de
l'envoi», est-ce que ça, ça veut dire donc qu'il y a une obligation à celui qui
va ou celle qui va signifier de vérifier que l'adresse est active essentiellement?
Mme LeBel :
Bien, l'objectif étant que la... Pardon, M. le Président. L'objectif étant que
la procédure en question se rende et
qu'il y aura une obligation... Il y a toujours une obligation de prouver
réception, mais effectivement la notion d'adresse active va retomber sur
les épaules de la personne qui s'en sert, là.
Mme Weil :
Autre question. Et dans la liste, parce qu'il y a toute une section sur
signification, 26 dit : «Celui qui signifie un acte de procédure en atteste la signification.» Donc, c'est
ça qui vous donne un confort par rapport aux procédures, c'est-à-dire
que cette personne devra de toute façon attester.
• (15 h 10) •
Mme LeBel :
Absolument. Il faut lire toutes ces mesures-là dans leur ensemble, hein? C'est
sûr que, là, on les étudie une par une, puis c'est correct, c'est la façon de
faire. C'est pour ça qu'à un moment donné on parlait, dans un article
précédent, que ce sont les principes
généraux. On a établi les principes généraux de l'ouverture vers les technologies, si je peux le dire comme ça, puis dans
les cas de figure... sont précisés dans les articles suivants.
Mais
il faut toujours lire les articles dans leur ensemble, et effectivement on est dans un moyen de transmission, mais ça ne dispense pas de toutes
les autres règles de prouver la réception avant qu'il y ait
des conséquences qui soient... qui en
découlent pour la personne qui est dûment signifiée. Donc, le «dûment» demeure
une notion qui n'est pas évacuée parce qu'on introduit une nouvelle technologie.
Donc, à l'article 11,
qui est 27.1, pour compléter ma remarque sur le fait qu'il faut lire les
dispositions dans leur ensemble, M. le Président, à l'article 11, on va bien parler de 27.1, qui va venir également,
encore une fois, si vous voulez, je vais le dire de cette
façon-là, resserrer l'entonnoir. Peut-être que ce n'est pas la bonne expression, mais vous
voyez ce que je veux dire.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions sur l'article 6? M. le député
de LaFontaine, oui.
M. Tanguay : Oui. C'est quoi,
une adresse active?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, c'est une adresse
qui fonctionne, j'imagine.
M. Tanguay : Qu'est-ce qu'une
adresse qui fonctionne? Bien, c'est parce...
Mme
LeBel : Bien, c'est une adresse de courriel où je n'ai pas un retour
du serveur qui me dit : Votre message n'a pas été délivré. Donc, il y a la première notion d'adresse active.
J'imagine qu'en matière de technologie, ça va pouvoir évoluer, cette notion-là.
Là, je vous parle avec mes connaissances d'aujourd'hui, mais on ouvre pour
plusieurs années, donc il y aura peut-être
d'autres notions, mais une adresse active, c'est une adresse qui est valable,
qui est valide et qui, par définition de base, se rend à un
destinataire.
Maintenant,
ça ne prouve... Encore une fois, ça ne dispensera pas de prouver que la
personne qui reçoit... de même qu'une
adresse physique, là, il y a plusieurs niveaux de signification, vous le savez.
Il y a le niveau de signification en main propre, il y a le niveau de signification à une personne qui atteste
qu'elle va le remettre à quelqu'un, il y a le niveau de la boîte aux
lettres qui, pour différents types de procédure, peut être satisfaisant ou non,
dépendamment de ce qui découle d'une signification.
Donc, bien,
on pourra parler d'une adresse qui se rend à son destinataire ou, à tout le
moins, qui est fonctionnelle. Mais là
s'arrête le commentaire que je vais faire à ce sujet-là, parce qu'on pourra...
les tribunaux aussi pourront la définir en fonction du moyen
technologique qui est utilisé.
M. Tanguay :
Je vous soumets un élément qui démontrerait que l'adresse est active. C'est si
on était capable de faire la preuve que la personne reçoit, et répond,
et réplique via cette adresse-là. Alors, ça, ce serait une adresse active. L'adresse n'est pas tellement active, que son
utilisateur. Donc, l'adresse active, c'est qu'on peut démontrer devant la juge
ou le juge que la personne reçoit et répond usuellement via cette adresse-là et
qu'on peut établir le lien d'identité de la personne qui est de l'autre côté de
l'écran, derrière le clavier et qui est active, la personne est active.
Si on n'a pas
cette démonstration-là, je soumets, M. le Président, à Mme la ministre, que son
exemple de dire : Bien, si on
envoie un courriel et qu'on n'a pas un message qui nous dit que le courriel n'a
pas été délivré, je soumets que ça serait trop ténu pour faire la preuve
que l'inférence que l'on doit en tirer, c'est qu'elle est active.
Je poursuis, une adresse pourrait être... c'est
comme une boîte postale. Je veux dire, si vous n'allez pas relever le courrier, ça va s'accumuler, ça va s'accumuler,
ça va s'accumuler. Une adresse... et je serais curieux de savoir combien
qu'il y a de millions, M. le Président,
d'adresses, peut-être même des milliards, là, d'adresses courriel qui ont été
abandonnées, je veux dire, qui ne
sont pas actives. Vous n'aurez donc pas un message... dire : Le message ne
s'est pas rendu. Le message se sera rendu, mais il n'aura pas été
effectivement porté à la connaissance de la personne qu'on vise.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Je reviens sur ma
préoccupation que j'ai émise la dernière fois qu'on a discuté de cet article-là, parce qu'on est actuellement, au Québec, plongés dans un débat important,
un vaste débat sur le vol d'identité, sur le vol de données. Je pense
que c'est pour ça que les oppositions, on a des questions sur ces
dispositions-là, parce qu'il y a eu des
événements récemment dans l'actualité où on a vu, tu sais, des données
personnelles être largement... disons, faire l'objet de fuites.
Et ça pose
la... Et, quand on étudie un projet de loi sur l'utilisation des moyens
technologiques, donc du Web, pour transmettre
des informations de la nature dont on discute, qui sont des informations
sensibles, ça pose quand même des questions importantes.
Puis le collègue
de LaFontaine parlait de l'exemple du courriel qui est probablement, en effet, le moyen technologique le plus fréquent, je présume. Par
contre, on a parlé, la dernière fois qu'on s'est rencontré puis qu'on a discuté
de cet article-là, également de possibilité
de signification par les médias sociaux. Et donc là, la question de qu'est-ce
qu'est une adresse active, ça
nécessite, je pense, d'autres explications de la part de la ministre. Disons,
par exemple... Prenons mon propre exemple, là. Moi, il y a, à mon nom, presque
une dizaine de comptes sur Facebook. Il y en a seulement deux qui sont réellement les miens, mon compte personnel
puis ma page de personnalité publique comme député. Qu'est-ce qui... Et
il y a des précédents de signification par Facebook, on en a discuté la
dernière fois.
Donc, même question que mon collègue, mais
appliquée à un autre cas d'espèce. Qu'est-ce qui permet de définir une... Qu'est-ce qui permet de considérer
qu'une messagerie d'un compte Facebook est active dans la mesure où n'importe qui peut être derrière ces pages-là,
même si ça porte le nom, officiellement, de la personne à qui on veut signifier
une procédure?
Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme
la ministre.
Mme LeBel :
Je vais faire un parallèle. Bon, pour ce qui est des informations sensibles, je
veux rassurer tout le monde, on est dans un
univers où on avait même... un mode de signification permis était la
publication dans les journaux. Donc, on n'est pas dans le domaine des
informations sensibles, on est dans le domaine de la transmission.
Bon,
là, on parle de transmission. Qu'est-ce qu'une adresse active? Bien, je pense
que c'est... je vais faire le parallèle avec une adresse physique. Déjà,
de prouver l'existence de l'adresse... Quand je signifie à une adresse, il faut
déjà que je sois capable de prouver que
l'adresse existe, ce qui ne veut pas dire que la personne qui habite à cette
adresse — je vais
faire un parallèle avec une adresse physique — est la personne que je tente de
rejoindre. Et je pourrais rejoindre un Gabriel Nadeau-Dubois... je m'excuse de
le... mais à une adresse x, puis ce n'est pas vous qui est à cette adresse-là nécessairement. Donc, mais la première étape,
c'est de prouver que, à tout le moins, l'existence de l'adresse. Donc, en
termes électroniques, l'adresse active est une adresse qui est
existante.
Maintenant, comme je
le disais tantôt, ça ne... il faut aussi que la personne accepte de recevoir,
il y a des étapes. Il faut aussi que je
sois, comme personne qui signifie... parce qu'il y a des choses qui découlent
de la signification, hein? Il y a des étapes subséquentes, et, pour les
franchir, il faut que je franchisse l'étape de la signification dûment
signifiée. Donc, d'établir que l'adresse est
active ou d'utiliser une adresse active, c'est une chose, mais il faut encore
une fois, après ça, que j'établisse
que la personne à l'autre bout que je tente de rejoindre est la personne que je
tente de rejoindre réellement, et ensuite ça ne m'empêche pas de... ça
ne me dispense pas d'établir que la personne l'a reçu. Donc, ce n'est pas le
fait d'établir que l'adresse est active ou
non, mais, si elle n'est pas active déjà, que je n'ai pas franchi cette
étape-là, bien, je ne suis pas capable de franchir les deux autres
étapes, là.
Donc,
ça va... Je vais vous... M. le Président, avec beaucoup de respect, ça va être
l'ampleur de mes commentaires là-dessus, parce qu'on pourrait sur
plusieurs cas de figure, mais l'idée, derrière ça, je fais le parallèle avec une
adresse physique, c'est que l'adresse soit existante, et, en domaine
électronique, une adresse existante, c'est une adresse active.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de
Gouin, oui.
M.
Nadeau-Dubois : Donc, la ministre m'a dit : une adresse active,
c'est une adresse qui a une existence, tout comme une adresse postale active
est une adresse qui a une existence. Par contre, dans le cadre d'une
communication technologique comme par
un réseau social comme Facebook, comment on établit que la personne est la
bonne personne alors que c'est justement
dans un monde où, par définition, il y a une multiplication des identités
virtuelles? Comment ça peut être établi?
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
• (15 h 20) •
Mme
LeBel : Mais, s'il y a
un doute, le poursuivant va probablement utiliser un autre moyen de
signification que le moyen technologique. Donc, il ira probablement par un
moyen physique ou par huissier, qui est le moyen traditionnel. Mais, si
on passe par le moyen technologique de base... puis je peux vous le dire pour
faire un parallèle avec mon ancienne vie, c'est-à-dire qu'on... souvent, on
procédait par mode de courrier, et beaucoup d'envois qui n'avaient pas nécessairement des courriers recommandés,
les personnes se présentaient physiquement à la cour, donc admettaient
réception des papiers, et là on pouvait continuer parce que la
signification avait été faite dûment.
Donc,
dans le doute, bien, le poursuivant ou la personne qui signifie va probablement
passer à un autre moyen de signification qui lui permet de l'établir si le
moyen utilisé n'a pas permis... soit que la personne a reçu, confirmé réception
et dit : Bien, je suis bien la personne
que vous cherchez — étonnamment,
ça arrive, là — je suis bien
la personne que vous cherchez, je
serai là, à la cour, ou par un... On parle de constat d'infraction. On va
retourner un plaidoyer de non-culpabilité, va retourner un plaidoyer de culpabilité. Je vais faire un parallèle
avec les constats d'infraction qu'on a tous reçu, en matière de sécurité routière, une fois ou l'autre dans
notre vie. Donc, il y a des moyens où la personne va accepter signification, si
je peux le dire, de ces termes-là. Dans...
Mais,
par la suite, on n'élimine pas tous les moyens du Code de procédure pénale qui
existent présentement puis qui ont des degrés de certitude différents, là,
comme l'huissier, qui est en main propre, ou l'agent de la paix, qui atteste en
main propre.
Bien,
si le poursuivant n'est pas en mesure de faire la preuve de la signification à
la satisfaction de... à un niveau de satisfaction de la cour, bien, on
ira avec... comme on le fait déjà traditionnellement, c'est-à-dire qu'on passe
des fois par la poste. Si c'est dans la
boîte aux lettres, la personne ne se présente pas, bien souvent, le juge
ordonne un moyen de signification différent.
Donc,
les autres moyens de signification demeurent, là. Ce n'est pas la fin des
haricots, là, si je peux prendre ça, c'est juste d'ouvrir les possibilités et
de permettre... Probablement que dans beaucoup de cas ça va être très simple,
ça va se faire de façon fluide.
L'adresse va être active, la personne va l'accepter, il n'y aura pas de
problème, puis s'il y a un problème, bien, le poursuivant ne sera pas en
mesure...
Souvent, quand on dit
que ce n'est pas signifié, c'est parce que la personne ne se présentera pas à
la date du constat, exemple, n'aura pas fait
de plaidoyer de non-culpabilité, ou n'aura pas plaidé coupable, peu importe.
Bien là, le poursuivant, s'il veut passer l'étape subséquente, il devra
prouver signification, puis, s'il n'arrive pas à le faire en vertu du moyen
technologique à la satisfaction de la cour, les standards ne sont pas
baissés, là. Bien, il devra... comme on le fait dans d'autres cas, le juge ordonnera une nouvelle signification en
vertu d'un nouveau moyen, puis on le fera, là. Mais c'est juste... Ce
n'est pas la fin, là, de tout.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : M. le Président, question de compréhension de texte,
on dit, au deuxième alinéa de 20.2 : «Cependant, la signification
par un tel moyen n'est admise à l'égard de la partie non représentée...» Donc,
la partie non représentée, c'est la partie qui se représente seule, qui n'a pas
d'avocat ou d'avocate qui le représente.
Alors, deuxième alinéa : «Cependant, la
signification par un tel moyen n'est admise à l'égard de la partie non
représentée que — il
y a deux options — si
elle y consent ou qu'un juge l'autorise.»
Est-ce à
dire, compréhension de texte, que le premier alinéa est uniquement pour les cas
de figure où la partie est représentée par avocat?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Si vous me donnez
30 secondes, s'il vous plaît...
Le Président (M.
Bachand) : O.K. Mme la ministre, oui.
Mme
LeBel : ...effectivement, mais je n'ai pas... Écoutez, c'est sûr et
certain qu'à partir du moment... puis on pourra peut-être plus le
comprendre pour la suite des procédures.
Si la personne nous dit : Je ne veux pas
être signifiée à cette adresse-là, puis je veux être signifiée autrement, puis elle n'est pas représentée par avocat, bien,
on ne pourra pas le faire. Si la personne... et sinon, bien, le procureur ou le
poursuivant, dans s ce cas-ci, devra demander la permission au juge, là. Mais
c'est difficile de prévoir tous les cas de figure aujourd'hui.
M. Tanguay : C'est important,
ce qu'on dit là, parce que ça peut défaire beaucoup de noeuds, M. le Président,
si l'on considère que pour la personne qui
n'est pas représentée par avocat... parce que, quand vous êtes représenté par
avocat ou avocate, c'est clair que, là, l'avocat, l'avocate est actif dans les
réseaux sociaux. On peut même signifier les procédures civiles par
télécopieur puis tout ça.
Mais
j'aimerais avoir l'assurance, donc, que la compréhension qu'on doit avoir du
texte, c'est qu'une personne qui n'est pas représentée par avocat, deux
choses l'une, il va falloir qu'elle y consente ou que le juge l'autorise.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme
LeBel : Moi, le seul
commentaire que je vais faire à mon collègue, là, c'est que l'article doit
effectivement se lire dans son ensemble puis c'est... Les deux alinéas sont
interreliés, mais, tu sais, je reviens à la base, là. Un poursuivant a comme intention que la documentation, le constat
se rende. Donc, s'il y a quoi que ce soit, un doute, il va procéder par
un autre moyen de signification.
On est en
train de vouloir élargir les possibilités, puis ça ne sera pas au détriment des
défendeurs potentiels parce qu'il y a... On demeure toujours dans l'esprit où
c'est une transmission de document, ça devient une signification. Pour
que ça devienne une signification, il faut
avoir la certitude ou la preuve qu'elle est reçue, et, à partir de ce
moment-là, bien, si les gens ne sont
pas représentés par avocat, bien, ils retireront leur consentement, ou, s'ils
ne se présentent pas, le juge l'autorisera mais...
M. Tanguay :
M. le Président, c'est tellement important ce qu'on dit là. Parce que la
ministre a dit : Il va falloir, une fois la signification ou la
tentative de signification effectuée... La ministre a dit : Il va falloir
avoir la preuve ou la certitude — je la cite — que la procédure a été
effectivement reçue.
Or, le
troisième alinéa établit un fait qui ne peut être contredit. Il est réputé...
la signification est réputée faite le jour de la transmission. Alors,
vous êtes pieds et poings liés, à ce moment-là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci, M. le député. Mme la ministre.
Mme
LeBel : Bien, je pense qu'il faut lire l'article comme il est là.
Donc, la signification par un tel moyen — c'est le premier alinéa — ne pourra être admise, la partie non
représentée, que si elle y consent ou si le juge l'autorise.
Donc, probablement que, si on n'est pas capable
d'obtenir le consentement au préalable, quand on parle du premier envoi, si on veut, puis qu'il n'y a pas d'avocat au dossier, parce
que ça arrive que des gens ont plusieurs
dossiers, malheureusement, successifs, puis on a un avocat au dossier
qui représente la partie, bien, le poursuivant devra faire la demande au juge pour qu'il lui autorise au
départ pour enclencher toute la notion de l'alinéa un, l'adresse
active, etc. Donc, je n'irai pas... Je ne peux pas en dire plus que ça,
là.
M. Tanguay : Mon point, M. le Président, ce n'est pas
mettre la ministre en boîte, là, c'est juste une affaire... un
élément de compréhension.
Puis je vais même lui... Moi, si j'étais à sa
place, là... Je vais lui suggérer les deux réponses à ma question puis je m'en déclarerais satisfait. Ma première question...
Puis la deuxième, c'est correct, je... Elle était au travail, donc elle n'a
pas entendu ma deuxième question,
mais je vais me soumettre moi-même la réponse, puis elle a juste à me donner 100 % ou 0 %.
Première
question. Moi, je prends pour acquis, à la lecture de 20.2, qu'une personne qui
n'est pas représentée par avocat, quand on parle de signification par
moyen technologique, il y a deux seules voies, soit elle va consentir à recevoir la signification
par moyen technologique ou le juge va l'autoriser au préalable. Mais c'est ma
lecture très simple de cet article-là. Puis, si j'étais à sa place, je
dirais : Oui, vous avez la bonne compréhension. Est-ce que ça répond?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel :
Je ne dis pas oui parce que vous me le suggérez, mais je dis oui parce qu'on
est d'accord.
M. Tanguay :
Puis la deuxième, j'ai lancé un écueil, puis je vais me répondre à moi-même,
puis elle pourra me le dire si c'est... ça va aller plus vite comme ça.
Je vais faire les questions et les réponses, ça va être reposant.
La
signification est réputée faite le jour de la transmission. Ai-je raison de
croire que la signification n'est pas réputée être effectivement faite? Parce qu'on ne peut pas présenter une preuve
d'un fait qui est réputé. On le prend comme il est, puis c'est vérité. Mais c'est plutôt, la
signification est réputée faite à un jour, à un moment dit. Puis je vois que la
personne à votre droite semble opiner
du bonnet. Donc, le fait réputé n'est pas que la signification a été
effectivement faite, mais c'est que signification est réputée avoir été
faite le jour de l'envoi.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel :
Ça ressemble pas mal à ça, oui.
M. Tanguay :
Alléluia!
Le
Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Weil :
Bien, parce que j'ai été beaucoup dans... que les versions anglaise et
française soient les mêmes, puis moi, je ne veux pas rentrer là-dedans, mais je
remarque une différence dans la manière que c'est écrit. Je trouve que la
version française est juste un peu plus
claire, que celui qui reçoit cette signification l'accepte, on utilise le mot
«accepte». La version
anglaise : «Service by technological means is made by sending the
proceeding to the address provided by the addressee for the receipt of the proceeding.» «Provided», on ne sait pas quoi dans le temps.
Dans la version française, on dit vraiment : «où il accepte de le
recevoir». On a un peu plus...
Donc,
peut-être que ceux qui font la traduction pourraient regarder, parce qu'on
pourrait dire «where the addressee accepts
to receive the proceeding», qui ferait cette notion de consentement peut-être
plus claire, parce que les deux versions sont équivalentes en droit,
dans le sens de valeur. C'est bien écrit, ce n'est pas le... La syntaxe est
belle, mais...
Mme LeBel :
...je comprends, je comprends.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre, oui.
Mme LeBel :
Oui, je comprends tout à fait. Puis, si vous permettez, on va faire venir...
pour être capables de s'assurer
qu'effectivement il y a une concordance sur ce qu'on vient de discuter sur
l'article en français. Effectivement, on pourrait, à première vue, penser que, dans un cas, on aurait pu dire
«l'adresse fournie», qui est «provided», puis «acceptée», donc on...
Mme Weil :
...version anglaise.
Mme LeBel :
Bien, c'est ça, alors qu'on est... Mais on va s'assurer qu'on a de la
concordance, ce qui est l'exercice. Mais, si vous permettez, on pourra,
au niveau de la version anglophone, là, mettre un...
Mme Weil :
Il y a des experts pour ça.
Mme LeBel :
Exact, oui, je ne me lancerai pas là-dedans.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il
vous plaît.
M. Nadeau-Dubois :
Le député de LaFontaine a posé une partie de la question que je souhaitais
poser sur la notion de transmission, parce que dans le... Si on fait,
par exemple, un envoi par poste recommandée, c'est très facile, le moment de la
transmission. Dans le domaine des moyens technologiques, c'est une notion qui
peut être plus floue. La ministre a répondu
que ce qui attestait de la transmission, c'est le moment de l'envoi. Or, il
peut arriver, pour plusieurs raisons technologiques, que la réception
soit... qu'il y ait un grand délai. Il peut y avoir un bogue informatique
quelconque.
Est-ce
qu'elle confirme que ce qui atteste, pour elle, la transmission, c'est le
moment de l'envoi et que, donc, si oui, il peut s'écouler énormément de temps
avant qu'il y ait une signification réelle puis que ce soit reçu?
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
M. Nadeau-Dubois : Parce qu'on
dit «la signification est réputée faite le jour de la transmission», ça me semble très exigeant comme critère, dans la mesure
où, si on procédait par huissier, par exemple, ce n'est pas le moment où on envoie l'huissier, c'est le moment où l'huissier signifie
à la personne quand elle la rencontre. Pourquoi, dans le cas du moyen
technologique, ce serait réputé dès le moment de l'envoi?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
• (15 h 30) •
Mme LeBel :
Parce que c'est une des façons de
marquer le moment de la transmission, ce qui n'empêche pas, dans un cas où il y a
un décalage marqué entre la transmission puis la réception, de la façon dont
vous l'avez... à la personne qui va...
parce que, s'il y a des délais qui sont... Il y a la
signification, O.K., c'est une chose, puis il y a... souvent,
dans certains actes, il y a des délais qui commencent à être computés à
partir de là, ce qui n'empêchera pas la personne de venir marquer le moment de la réception et d'en faire une preuve. Mais
on s'est, pour ça, collé, entre
autres, sur le cadre juridique des technologies de l'information à l'article 31,
qui dit qu'un document technologique est présumé transmit lorsque le geste qui marque le début de son
parcours vers l'adresse active... qui est le moment de la transmission.
Mais
ça n'empêchera jamais quelqu'un de venir dire : Aïe! — en bon français — «by the way», je vais vous... vous me l'avez supposément envoyé... bien, vous me
l'avez envoyé il y a 10 jours, mais j'en ai pris connaissance
hier ou avant-hier. Donc, quand il y aura des délais... mais il n'y a
pas toujours des délais associés à ça, mais ça arrive.
M.
Nadeau-Dubois : Sauf que ce n'est pas écrit «présumé fait le jour»,
c'est écrit «réputé fait le jour». Ce n'est pas qu'on présume qu'elle a été
faite le jour, ce qu'on... c'est réputé que ça a été fait. Donc, c'est beaucoup
plus fort. C'est un terme beaucoup plus fort.
Une voix :
...
M.
Nadeau-Dubois : On me chuchote qu'on ne peut pas faire de preuve
contraire. C'est réputé fait le jour de la transmission... qu'on ne devrait pas
dire que c'est plutôt présumé fait le jour de la transmission? Parce que
vous... La ministre elle-même, dans sa
réponse, a utilisé le verbe «présumer», ce qui est une chose, parce qu'on peut
faire la preuve contraire par la
suite. On pourrait faire la preuve par la suite que, non, il n'y a pas eu de
signification, alors que là, réputé fait, c'est beaucoup plus fort.
Mme
LeBel : Oui, merci. Je m'excuse, M. le Président. Au même titre qu'une
présomption, si elle n'est pas irréfragable à l'intérieur même de
l'article, elle peut être renversée. Donc, je n'y vois pas de... honnêtement,
je n'y vois pas de problème à ce stade-ci.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin, oui, allez-y.
M.
Nadeau-Dubois : On me dit qu'en fait «réputé», c'est justement une
présomption qui ne peut pas être renversée, qui est irréfragable.
Une voix :
...
M.
Nadeau-Dubois : C'est la définition même de «réputé». C'est ce qui
fait la différence entre les deux notions, entre «réputé» et «présumé». Donc,
est-ce qu'on ne devrait pas ici présumer du fait... on pourrait présumer que ça
a été fait le jour de la transmission, mais qu'on ne peut pas... ça ne peut pas
être réputé?
Mme LeBel :
Si vous me permettez, on va suspendre.
Le
Président (M. Bachand) : On va suspendre quelques instants.
Merci infiniment. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
15 h 33)
(Reprise à 15 h 41)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il
vous plaît! Merci. La commission reprend ses travaux.
Mme la ministre,
s'il vous plaît, sur l'article 6.
Mme
LeBel : Oui. Alors, comme je
suis tout à fait ouverte, j'apprécie tous les commentaires, puis
qu'on réfléchit quand on discute, je
voulais m'assurer qu'il n'y ait pas d'ambiguïté.
Je ne partage pas nécessairement les interprétations, mais je pense que, comme l'objectif et l'intention
n'étaient pas qu'il y ait une difficulté ou une ambiguïté sur une... le fait
que la présomption ou le type de présomption
qui semble ainsi établie soit... ne puisse pas être renversée par la
personne...
Parce
qu'on peut... on pensait également qu'il peut y avoir un décalage entre l'envoi
et la réception électronique par rapport
à la réception réelle. Moi-même, je plaide coupable, je ne suis pas celle qui
prend mes courriels le plus régulièrement possible... le moins régulièrement
possible, même, je dirais.
On va
proposer l'amendement suivant, M. le Président. J'essayais de voir comment on
se sent quand on fait du temps, puis
c'est agréable finalement. Donc, je propose l'amendement suivant à l'article
6 : Au troisième alinéa de l'article 20.2 du Code de procédure
pénale, proposé par l'article 6 du projet de loi, remplacer «réputée» par
«présumée».
Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement proposé par
la ministre? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M.
Nadeau-Dubois : C'est une excellente idée que cet amendement, d'autant
plus qu'à l'article 2847 du Code civil, on peut lire que «la présomption légale est celle qui est spécialement attachée par la loi
à certains faits; elle dispense de toute autre preuve
celui en faveur de qui elle existe.
«Celle qui concerne des faits
présumés est simple et peut être repoussée par une preuve contraire; celle qui concerne
des faits réputés est absolue et aucune preuve ne peut lui être opposée.»
Donc, l'amendement vient en effet
corriger la situation, parce que ça va au moins permettre de faire la preuve
contraire, si on souhaite la faire. Donc, c'est un excellent amendement.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement? S'il
n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement à
l'article 6 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Interventions sur l'article 6? S'il n'y a pas
d'autre intervention... M. le député de LaFontaine, oui? Allez-y.
M. Tanguay :
Dernière question, vraiment dernière question pour boucler la boucle. Donc, la
personne qui, au deuxième alinéa, n'est pas
représentée par avocat, et qui y consent, ou qu'un juge l'autorise,
pouvons-nous comprendre — compréhension de texte — que si la personne consent, elle pourrait
retirer ce consentement-là? Parce que qui dit acte de consentement dit
par définition que le consentement ne peut être ad vitam aeternam.
Alors, est-ce
que c'est la compréhension de Mme la ministre que la personne pourrait, le cas
échéant, retirer son consentement, ce qui obligerait, pour faire la...
encore une fois, pour faire la signification, par moyen technologique, la
partie poursuivante pourrait faire la signification par n'importe quel autre
moyen, là, et que si la personne retire son consentement
pour les moyens technologiques, la partie poursuivante pourrait, en demandant
l'autorisation au tribunal, de le faire néanmoins par moyen
technologique.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : Bien, effectivement, parce que si elle n'y consent pas ou
qu'elle retire son consentement, la seule option demeure l'autorisation
du juge.
Le Président (M.
Bachand) : Merci.
Des voix : ...
Le Président (M.
Bachand) : O.K. Là, on avait la question de la traduction. Oui,
Mme la ministre?
Mme
LeBel : Oui, on a quelqu'un qui pourra... sera mieux adéquat que moi
pour répondre à cette question-là, donc...
Le Président (M.
Bachand) : On va le faire immédiatement?
Mme LeBel : Oui, absolument.
Le Président (M.
Bachand) : Parfait.
Mme
LeBel : Peut-être juste... On est en train de la mettre au parfum.
Est-ce que vous pensez qu'on peut peut-être suspendre, juste pour
s'assurer qu'on a...
Le
Président (M. Bachand) :
Oui, on va suspendre quelques instants pour s'assurer de bien répondre à la
députée de Notre-Dame-de-Grâce. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 45)
(Reprise à 15 h 53)
Le
Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Merci
beaucoup. Alors, Mme la ministre, sur la question...
Des voix : ...
Le
Président (M. Bachand) : S'il vous plaît! Sur la question de la version anglaise, je vous laisse aller. Il y avait
une...
Mme LeBel :
Oui, bien, je vais peut-être laisser peut-être ma collègue la reformuler, parce
qu'au niveau de la question anglophone... la version anglophone...
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Weil : ...et vraiment je laisse aux soins de ceux qui
sont experts là-dedans,
«service by technological means is made by sending the proceeding to the
address provided by the addressee for their»... O.K. Donc, «where the addressee accepts to receive the proceedings».
Mme LeBel : En anglais, ce n'est pas
ça qui est écrit.
Mme Weil : Non, c'est «by the addresse
for the receipt of the proceedings», donc, «service by technological means is made by sending the proceedings to the
address provided by the adressee for the receipt of the proceedings». Alors,
«when did he provide it?» Ce serait «where
proceed to the address, where the adressee accepts to receive the proceedings».
Mme LeBel : Donc, je vais peut-être
laisser...
Mme Weil : Bien, à moins que vous insistiez pour que ça se
fasse. En même temps, moi, je laisse vraiment le soin de
ceux qui sont experts.
Le Président (M.
Bachand) : O.K. Vous soulevez un point,
mais vous soulevez les gens... O.K.
Mme Weil : Je ne veux pas me
substituer à ceux qui ont l'expertise linguistique pour le faire.
Mme LeBel : L'objectif était de
sensibiliser.
Mme Weil : C'est ça.
Mme LeBel : Est-ce que vous
considérez que, comme on a écouté puis on s'est sensibilisé, on va...
Mme Weil : J'aime bien cette
notion d'accepter...
M. Tanguay : Je crois que madame
veut dire quelque chose, sinon on...
Le Président (M.
Bachand) : Oui. Juste vous identifier, s'il vous plaît. Merci.
Mme Dawson (Kathryn-Anne) : Oui.
Kathryn-Anne Dawson, je travaille au Secrétariat de la législation.
Mme Weil : Oui, c'est ça.
Bonjour.
Mme Dawson (Kathryn-Anne) : Bonjour.
Alors, dans le fond, juste pour comprendre votre question que vous demandez, pourquoi on n'a pas la notion de «accepts to receive the
documents» dans la traduction du projet
de loi en ce moment... C'est ça?
Mme Weil : Pas tellement pourquoi
on ne l'a pas, parce que la première lecture, je trouvais ça très, très clair en anglais et très bien écrit. C'est que je
trouvais que c'était important de traduire la sensibilité qui avait été amenée
par le député de Gouin dans le sens de consentement, parce qu'on parle d'un enjeu important, là, de
signifier aux gens, etc. Donc, je trouvais qu'on pouvait renforcer la version,
parce que je trouvais que la version française était plus claire à cet égard,
dans le contexte où beaucoup de questions
sur consentement... Est-ce que qu'il était vraiment conscient que la version
française était plus forte?
Alors, c'est tout simplement ça. C'était une
occasion de renforcer l'anglais en même temps.
Mme Dawson
(Kathryn-Anne) : Mais il y
aurait toujours la possibilité, si vous acceptez de faire un amendement pour le texte anglais pour ajouter cette notion-là. On l'a, entre autres, dans la loi sur le cadre technologique des informations. On l'a, cette notion-là
dans le texte anglais. Alors, il n'y
a pas de problème à ce qu'on le
rajoute dans notre projet de loi.
Mme Weil : Excellent. Merci.
Mme Dawson (Kathryn-Anne) : On
pourrait juste faire un amendement.
Mme LeBel : ...la procédure la plus
adaptée, mais c'est noté. Ça vous convient? Parfait. Merci.
Le Président (M.
Bachand) : Ça va? Autres interventions sur l'article 6 tel
qu'amendé? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 6,
tel qu'amendé, est adopté?
Des
voix : Adopté.
Le Président (M. Bachand) : Adopté. Je vous rappelle qu'on avait l'article 3
qui était suspendu. Est-ce que c'est le désir de la commission de
revenir à l'article 3 ou d'aller à l'article 7?
Mme LeBel :
3, s'il vous plaît.
Le Président (M. Bachand) : Consentement pour l'article 3? On retourne à l'article 3.
Mme la ministre, s'il
vous plaît.
Mme
LeBel : Oui. Alors, je pense...
je veux juste... Oui. Mon collègue avait fait un commentaire... de l'opposition officielle avait fait un commentaire sur une demande de l'association des procureurs municipaux, je pense, concernant... On avait, bon, discuté de l'article 3 comme
tel, mais on avait fait une demande qui disait que les municipalités désiraient
qu'on modifie le deuxième alinéa de l'article 14 du code pour être modifié
par l'insertion «à la suite de dispositions spécifiques» par «une loi ou un
règlement municipal».
Écoutez,
je ne suis pas... je vais vous avouer que les modifications qu'on se propose de
faire à l'article 14 — on en a discuté en abondance — visent à permettre au défendeur de renoncer
à la prescription acquisitive à l'égard de la poursuite. La prescription
appartient au défendeur. Cette position, donc, va aider naturellement les défendeurs
à négocier avec le poursuivant et leur
donner plus donner de chances, en tout cas, on l'espère, d'arriver un règlement
ou plus de possibilités de règlement.
La recommandation que
l'association des procureurs nous fait fera en sorte, en pratique, pour effet
de permettre aux municipalités de déterminer
eux-mêmes des délais de prescription qui pourraient être différents d'une cour
à l'autre. À ce stade-ci, M. le Président,
pour moi, ce n'est pas... l'objectif de cet article-là, ça dépasse grandement
d'avoir des délais de prescription différents d'une cour à l'autre. Je pense
que ce n'est pas approprié et je pense que ça demanderait une étude plus
approfondie pour donner aux municipalités un tel pouvoir, là. Je ne suis pas...
en toute transparence, là, moi, je ne suis
pas à l'aise pour aller dans cette direction-là. Je pense que l'objet de
l'article 14, c'est vraiment de donner plus de pouvoirs au défendeur, c'est-à-dire un pouvoir de négociation. Puis
j'aimerais qu'on ne donne pas nécessairement de pouvoir aux municipalités à ce stade-ci sans qu'on en fasse une étude
plus approfondie, puis je ne pense pas qu'on a eu l'occasion de discuter
de ce point-là de cette façon-là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de
LaFontaine, oui.
M.
Tanguay : Oui. Donc, je veux juste comprendre l'argument de la
ministre. Donc, autrement dit, là, on est dans le deuxième alinéa, l'objectif
de l'article 3 du projet de loi n° 32 est d'ajouter un troisième
alinéa. Là, on était, à la demande de l'Association des procureurs de
cours municipales, sur un amendement à l'alinéa deux, qui n'est pas visé
par l'article 3 du projet de loi. Alors, on dit «toutefois, à l'égard
d'une disposition spécifique»... eux voudraient qu'on ajoute «à une loi ou un
règlement municipal». Là, il faudrait, j'imagine, par concordance, dire «la loi
ou le règlement municipal peut fixer un
délai différent ou fixer le point de départ de la prescription à la date de la
connaissance» parce que... Donc, il y a comme deux objectifs. L'objectif
de l'article 3 est différent de l'objectif de l'Association des procureurs
des cours municipales. Si j'ai bien compris, ce sont deux objectifs, là,
différents. Alors, je comprends que l'article 3 du projet de loi vise à
permettre à une personne, nonobstant le fait que ce soit prescrit, d'avoir une
entente pour une infraction moindre. Ça, c'est l'objectif de l'article 3,
ça, c'est une chose qu'on met de côté. Ce que je comprends du commentaire,
donc, de Mme la ministre, M. le Président, c'est qu'on ne voudrait pas, à
l'égard d'une disposition spécifique, on ne
voudrait pas... «toutefois, à l'égard d'une disposition spécifique, la loi peut
fixer un délai différent». Là, on ajouterait... la loi, c'est la loi
québécoise, c'est l'Assemblée nationale. Là, ça aurait pour effet de
dire : «Toutefois, à l'égard d'une disposition spécifique d'une loi ou
d'un règlement municipal, ladite loi ou le règlement municipal peut prévoir un délai différent.» Autrement dit, comme
la ministre dit, c'est qu'on pourrait avoir autant, là, de différents délais
de prescription selon la municipalité qui aurait pu, par règlement... C'est ce
qu'il faut comprendre, là.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
• (16 heures) •
Mme LeBel :
L'objectif est de permettre au défendeur de renoncer à une prescription. On est
dans un objectif différent. L'objectif de la demande de l'Association des procureurs
des cours municipales est de pouvoir fixer des points de départ
différents, et ça a déjà été refusé par la cour, parce qu'on a dit qu'ils
n'avaient pas le pouvoir habilitant. C'est d'ailleurs la cause de Landry c.
Municipalité régionale qui est citée dans la chose.
Donc,
ils veulent se... les municipalités veulent avoir un pouvoir habilitant pour
permettre de fixer des points de départ
de prescription différents, ce qui est complètement en dehors de l'objectif qu'on poursuit avec l'article 14
et l'amendement, et, à ce stade-ci, je ne pense pas... on
n'ira pas dans cette direction-là.
M.
Tanguay : ...par
ailleurs d'y aller, là, si on avait voulu le faire. Mais je suis d'accord
avec la ministre, moi, je suis d'accord avec elle, je ne
pense pas qu'on doit aller là. Mais ce n'est pas parce que ce n'est pas l'objectif
de l'article 3 qu'on
n'aurait pas pu, tant qu'à avoir l'article 14 devant nous, aller amender le deuxième
alinéa, là. On aurait peut-être
eu un débat sur la recevabilité, parce que ça ajoute un principe au projet de loi, mais je n'en suis pas là. Je suis d'accord avec elle, comme disait ma
collègue, de ne pas avoir de patchwork puis d'avoir de différents délais, en
bon français. C'est bon. Moi, ça me va.
J'avais échappé
l'idée, M. le Président, qu'il était suspendu, le 3. Il l'était? O.K.
Le
Président (M. Bachand) : Oui.
M. Tanguay :
Ça me va.
Mme LeBel :
Pour répondre, justement, à cette question.
M. Tanguay :
C'est bien.
Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'article 3? S'il n'y a
pas d'autre intervention, est-ce que l'article 3 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Bachand) : Adopté. Nous
sommes maintenant à l'article 7. Mme la ministre.
Mme LeBel :
Avec bonheur, M. le Président.
Article 7 :
L'article 21 de ce code est remplacé par le suivant :
«21.
La signification par agent de la paix ou huissier se fait par la remise de
l'acte de procédure au destinataire. Elle peut aussi être faite à sa
résidence, en remettant l'acte à une personne qui paraît apte à le recevoir.
«Si
le destinataire est une personne morale, la signification peut être faite à son
siège, à l'un de ses établissements ou
à l'établissement d'un de ses agents par la remise de l'acte à l'un de ses
administrateurs, dirigeants ou agents ou à une personne qui a la garde
des lieux. Elle peut aussi être faite, peu importe le lieu, par la remise de
l'acte à l'un de ses administrateurs, dirigeants ou agents.
«La signification
peut également être faite par la remise de l'acte à la personne désignée par le
destinataire ou à une personne qui a la
garde du domicile élu de celui-ci inscrit au registre des entreprises. Si le
destinataire n'a ni résidence, ni
siège, ni établissement, ni agent ayant un établissement au Québec, la
signification peut être faite par la remise de l'acte, y compris ceux
mentionnés à l'article 19.1, au procureur qui le représente.
«Si l'acte de
procédure ne peut être remis, celui qui fait la signification constate ce fait
avec l'indication du lieu, de la date et de
l'heure et laisse l'acte de procédure dans un endroit approprié, sous pli
cacheté ou sous une autre forme propre à en assurer la confidentialité.
La signification est réputée avoir été effectuée à cette date, sauf si une
peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration d'une infraction.»
Oui, je vais lire le
commentaire, commentaire sur cette disposition — j'aurai un amendement
à proposer : Cette disposition reprend essentiellement l'article 21
actuel. Toutefois, on y précise à quel endroit un acte de procédure peut être
signifié par agent de la paix ou par huissier et à qui il peut être remis de
façon à faciliter la signification. Ainsi, la signification d'un acte de
procédure destiné à une personne physique peut être faite à sa résidence en le remettant à une personne qui paraît apte à le
recevoir. Si le destinataire est une personne morale, la signification peut
être faite à son siège, à l'un de ses établissements, à l'établissement
d'un de ses agents par la remise de l'acte à un de ses dirigeants, administrateurs ou agents ou à une personne qui a la garde
des lieux. Elle peut aussi être faite en mains propres, peu importe le
lieu, à l'un de ses dirigeants, administrateurs ou agents.
Cette
disposition permettra également de signifier un acte de procédure à la personne
désignée par le destinataire ou à son domicile élu; si le destinataire n'a ni
résidence, ni siège, ni établissement, ni agent ayant un établissement au
Québec, au procureur qui le représente.
Enfin, cette disposition prévoit que, si l'acte de procédure ne peut être
remis, l'huissier ou l'agent de la paix qui avait fait la signification
constate ce fait et laisse l'acte de procédure dans un endroit approprié sous pli cacheté ou sous une autre forme propre à
en assurer la confidentialité pour permettre au destinataire d'en prendre
connaissance. La signification sera ainsi
réputée avoir été effectuée à cette date, sauf si une peine d'emprisonnement
est réclamée pour la perpétration d'une infraction.
J'aurais un
amendement à proposer, M. le Président, à l'article 7 :
À
la fin du quatrième alinéa de l'article 21 du Code de procédure pénale,
proposé par l'article 7 du projet de loi, remplacer «une peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration
d'une infraction» par «l'emprisonnement du destinataire est réclamé».
Dans l'article proposé par le projet de loi, l'exception prévue à la présomption de signification a une portée beaucoup
trop restreinte. Elle ne vise pas tous les cas où un document est signifié à un
destinataire qui risque d'être emprisonné. À titre d'exemple, l'article 52 du Code de procédure pénale prévoit la signification d'un préavis d'une
demande de révision d'une ordonnance de mise en liberté d'un témoin
arrêté en vertu d'un mandat d'amener. Le libellé actuel ne vise pas ce cas puisque l'emprisonnement ne découle pas de la
perpétration d'une infraction. L'amendement proposé vise à élargir la portée de l'exception afin de viser tous les cas où un
document est signifié à un destinataire qui risque d'être emprisonné dans le
but de protéger ses droits.
Le
Président (M. Bachand) : On va suspendre quelques instants, s'il
vous plaît. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 06)
(Reprise
à 16 h 09)
Le Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Merci. La commission reprend ses travaux. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il
vous plaît.
M.
Tanguay : Oui, merci beaucoup,
M. le Président. Je ne sais pas si la ministre
peut nous l'expliquer en ses mots. Je
vais y aller de ma compréhension qui est imparfaite, là. On dit : La
signification est réputée avoir été effectuée à cette date, donc il y a
une conséquence qui... il y a une conclusion qui a des conséquences qui ne sont
pas anodines.
On
veut ajouter un atermoiement à cette conséquence-là qui peut être lourde de
sens. La signification est réputée avoir été effectuée à cette date sauf... Et
là ma perception, puis elle me corrigera, là, ce qu'il y avait d'écrit avant semblait plus large. L'exception semblait plus large
lorsque l'on disait «une peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration d'une infraction». Ça me semblait plus large comme
exception à la conséquence grave que l'exception plus limitative, à mon
sens, à la conséquence grave, qui est... sauf si l'emprisonnement du destinataire
est réclamé.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
• (16 h 10) •
Mme LeBel : Bien, je vais renverser votre compréhension parce
que c'est le contraire, là. D'ailleurs, l'exemple que j'ai donné dans ma lecture de l'article 52 du Code de procédure pénale, qui prévoit qu'il y a une conséquence, un
préavis d'une demande de révision d'une ordonnance de mise en liberté
d'un témoin arrêté en vertu d'un mandat d'amener, il pourrait y avoir une peine d'emprisonnement à la clé. Elle n'est pas
suite à la perpétration d'une infraction. Donc, l'intention est d'élargir, et il y a quelques cas de figure
après, bon, qui nous ont été... qu'on a réalisés par la suite.
Parce
que l'intention de base était de faire en sorte que, comme il y a... c'est
réputé être signifié, qu'il n'y ait pas de conséquence quand il y a de l'emprisonnement à la clé était de
couvrir cette catégorie-là. Et ce qu'on fait, c'est qu'on élargit à certaines
catégories pour être capables de couvrir tous les cas où il y a, je vais le
dire comme ça, de l'emprisonnement à la clé, là. Et c'est vraiment l'intention que ça soit au bénéfice du
défendeur. Oui, plus large, l'intention que ça soit plus large, là, et
ça couvre plus de cas de figure qui n'étaient pas couverts par le fait que ça
doit découler de la perpétration d'une infraction. Alors donc, dès que le
destinataire fait face à un potentiel d'emprisonnement, il devrait être
couvert, là.
M. Tanguay : Autrement
dit, je vais le dire en mes mots, les
cas de figure sont plus nombreux, d'emprisonnement potentiel, si ce
n'est pas exclusivement suite à la perpétration d'une infraction.
Mme LeBel :
Voilà. On veut élargir la portée.
M. Tanguay :
O.K. Je comprends.
Le Président (M. Bachand) : S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que
l'amendement à l'article 7 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M. Bachand) : Adopté. On retourne maintenant à l'article 7
adopté... amendé, pardon. Interventions? M. le député de Gouin, s'il
vous plaît.
M. Nadeau-Dubois :
Merci, M. le Président. Le texte actuel du code parle, au premier alinéa, d'une
personne raisonnable. Le nouveau texte parle
d'une personne qui paraît apte à recevoir la signification. Est-ce que la
ministre peut nous expliquer la différence entre ces deux formulations?
Le
Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. Mme la ministre.
Mme LeBel :
Je vais laisser parce que... connaissance.
Le
Président (M. Bachand) : Me Roy, oui.
M. Roy
(Vincent) : Donc, la différence entre les deux, c'est qu'on
est allés chercher le même critère qu'il y a de prévu dans le Code de procédure civile. Le but, c'est de
s'assurer qu'il n'y aura pas de significations qui vont échouer simplement
parce que la personne n'habite pas dans la résidence. Par exemple, si on a
signifié quelque chose au père d'une
famille, sa fille qui n'habite plus chez lui, qui est en visite, mais qui est, par ailleurs, apte... en fait, qui ne réside pas là, bien, le nouveau critère permettrait de signifier à cette
personne-là pour qu'elle remette à son père plutôt que de faire échouer
la signification. C'est la même chose en matière civile.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois :
Ça, je comprends que ça répond à l'expression «qui y habite», qui est retirée
dans le nouveau texte. Par contre,
entre une personne raisonnable puis une personne qui paraît apte, je présume
qu'on ne change pas ces mots-là juste
pour des simples questions esthétiques de concordance. Il doit y avoir, sur le
fond, une différence entre la notion de personne raisonnable et la
notion de personne qui paraît apte à recevoir. Quelle est cette différence?
Le Président
(M. Bachand) : Merci. Me Roy, voulez-vous un petit peu de temps
pour revoir ou...
M. Roy (Vincent) : En fait,
c'est qu'à la base toute personne est présumée apte, donc c'est plus facile de penser que quelqu'un est apte. On voit la
personne, c'est un critère qui est plus facile à
concrétiser. Puis, pour ce qui est de... plus particulièrement ici, les
huissiers en matière civile, c'est là qu'ils ont un gros lot de signification,
si on veut, c'est le critère habituel sur lequel ils sont habitués de
juger si la personne à qui ils remettent un document peut le recevoir. Donc, c'est vraiment... oui, la cohérence,
mais pour s'assurer qu'en pratique il
n'y a pas de distinction à faire,
bon, en civil, je suis apte, mais, en matière pénale, je ne suis pas
raisonnable. Donc, c'est vraiment pour uniformiser le tout.
M. Nadeau-Dubois : Je vous pose une question sur le fond. Sur le
fond, qu'est-ce qu'une personne qui paraît apte à recevoir, puis en quoi
ça, c'est différent d'une personne raisonnable sur le fond?
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Me Roy, oui.
M. Roy
(Vincent) : Donc,
l'aptitude, c'est vraiment la capacité d'une personne à poser des actes
juridiques. C'est vraiment un concept global qu'il y a
en droit versus la raisonnabilité, qui est plus au niveau... on pourrait dire,
mental si la personne est raisonnable, est capable de bien agir. C'est vraiment
plus un côté moral que juridique.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin.
M.
Nadeau-Dubois : Est-ce que,
par exemple... parce
que j'essaie toujours...
Je présume toujours qu'on ne change pas des mots juste pour faire des commissions parlementaires. Je
présume que c'est parce qu'il y a des... Je suis sûr que tout le
monde aime ça être ici, mais, je veux
dire, j'imagine qu'il y a des raisons juridiques derrière ça puis qu'il y a
un argumentaire.
Donc, vous
passez de «personne raisonnable» à «personne qui paraît apte». Est-ce que
c'est... Prenons un exemple, quelqu'un qui a un problème de santé mentale. Est-ce que
cette personne-là est apte à recevoir avec la formulation actuelle... qui a un problème de santé mentale assez grave,
là, pas un problème de... tu sais, un problème de santé mentale lourd. Est-ce que ça qualifie cette personne comme
étant une personne qui paraît apte à recevoir?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : Il y aura des cas
d'espèce où l'huissier sera à même de juger de l'aptitude, dans le sens où vous
la prononcez présentement, de la personne, mais il y a effectivement
une...
Bon, il y a
une volonté, un, de concordance. L'huissier qui fait un acte de signification
en vertu du Code civil ou en vertu du Code de procédure pénale va
avoir maintenant le même critère pour son jugement au niveau
de l'aptitude.
Mais
l'aptitude, elle est globale également. L'aptitude et la capacité de recevoir... Il y a
un exemple que je peux vous donner justement dans l'
arrêt Godbout c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2016. La cour...
C'était une personne raisonnable, si on
veut. On est allé dans le domicile d'un défendeur. Pour une raison que
j'ignore, c'était un collègue de travail qui était sur les lieux, qui a reçu la
réception. Aux yeux du huissier, c'est une personne raisonnable, on peut
penser, mais n'habitait pas là, et par la suite il était possible au défendeur
de dire : Écoutez, ça n'a pas été signifié dûment parce que cette personne-là n'habite même pas chez moi et ne l'a
pas remis. Donc, elle n'avait pas l'aptitude ou la capacité de recevoir.
Donc, en
vertu du critère de la cour... c'était en matière civile. En vertu du critère
de l'aptitude à recevoir, il a été jugé qu'un collègue de travail qui se
trouvait sur les lieux, alors en absence de la personne qui l'a reçu, n'était
pas apte à recevoir, alors que je pourrais penser qu'en vertu du critère
pénal c'est une personne raisonnable, là.
Donc, il y a une question de concordance, c'est
vrai, mais il y a une question aussi de s'assurer que la personne qui est sur
les lieux a toutes les aptitudes nécessaires pour prendre signification pour le
tiers.
Il y aura
l'aptitude au sens où vous la prononcez, mais «paraît apte», ça sera... devenir
le jugement du huissier, et il devra venir l'établir s'il y a quelqu'un qui le
conteste, cette aptitude-là. Naturellement, il y aura toujours une preuve à
faire.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois : Autre question
similaire. On parle, au dernier alinéa, que la signification... si l'acte de
procédure ne peut être remis, là, celui qui fait la signification constate ce
fait et peut laisser, donc, l'acte de procédure dans un endroit approprié.
D'abord, première question : Qu'est-ce qui définit un endroit approprié?
Puis ensuite sous une autre forme propre... donc
«sous pli cacheté ou sous une autre forme propre à en assurer la
confidentialité». Qu'est-ce qu'une autre forme propre à en assurer la
confidentialité?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Encore une fois, c'est
pour permettre d'ouvrir... Bon, l'endroit approprié, ça dépend des cas de
figure, ça dépend du domicile, ça dépend comment c'est fait. Est-ce qu'on est
dans un bloc-appartements, devant une maison?
Est-ce qu'il y a une boîte aux lettres? Est-ce qu'il y a une fente dans la
porte ou c'est une boîte aux lettres régulière? Je veux dire, tous les cas de figure sont possibles, mais l'endroit,
encore une fois, approprié sera laissé au jugement du... en
l'occurrence, ça peut être l'huissier, là, on parlait du huissier, mais on ne
limitera pas ça, et devra, s'il est contesté, cet endroit approprié là,
il y a une preuve qui doit être faite. «Sous pli cacheté», bien, c'est la façon
de le faire qui est plus traditionnelle, mais encore une fois, ça peut prendre
toutes sortes de formes tant que la confidentialité est assurée.
Donc, il ne faut
pas... il faut penser qu'on veut ouvrir, dans les moyens de signification, mais
les standards demeureront les mêmes, là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.
• (16 h 20) •
M.
Nadeau-Dubois : Justement, on veut ouvrir, puis je pense qu'il y a peu
de gens qui s'opposent à ce qu'en théorie on
ouvre, mais je serais capable de comprendre ce sur quoi on vote. Et, quand on
dit «une autre forme propre à en assurer
la confidentialité», j'essaie de penser à ce que ça pourrait être, puis je ne
vois pas... j'imagine que, si on a employé cette formulation-là dans le
projet de loi, on avait une intention.
J'aimerais
savoir c'est quoi, cette intention-là. Qu'est-ce qu'on veut rendre possible,
avec cette expression-là, qui n'était pas possible à l'heure actuelle? Puisque si on le précise, je présume qu'il y a
une raison. Moi, j'aimerais connaître la raison qui... J'aimerais ça
connaître l'intention de la ministre avec cette formulation-là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel :
L'intention est de donner plus de possibilités de signification sans toutefois
compromettre la confidentialité. La forme de
base de la confidentialité, c'est un pli cacheté. C'est ce qu'on retrouve puis
c'est ce qu'on connaît.
Maintenant, on
pourrait imaginer une situation où l'huissier est arrivé à un endroit, constate
l'absence, n'avait pas sur lui de quoi
fournir un pli cacheté, mais qu'il y
a une boîte aux lettres qui est
barrée, qui est verrouillée, dans laquelle on est capable de glisser une enveloppe, mais seul le propriétaire l'atteint. C'est un cas de figure,
mais il faut permettre, à ce moment-là,
d'éviter que... surtout quand on parle... en région, là, que l'huissier soit
obligé de retourner à son bureau chercher une enveloppe cachetée, parce
que ce jour-là peut-être qu'il n'en avait pas ou qu'il a oublié d'en amener
une, il constate l'absence.
Mais l'idée de base
est toujours d'ouvrir sans compromettre, et c'est pour ça qu'on parle de «toute
autre forme propre à en assurer la
confidentialité». Donc, de base, on présume que le pli cacheté rencontre ces
critères-là, mais on permet d'autres formes, toujours avec le critère de base,
l'assurance de base que ça en assure la confidentialité. C'est ça qui est
important.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin.
M. Nadeau-Dubois :
Il faudrait que ce soit une forme qui n'est pas le pli cacheté, mais qui assure
de manière similaire au pli cacheté une
forte confidentialité. Donc, la ministre donne l'exemple d'une boîte aux
lettres qui est fermée. Il me semble que ça, c'était déjà couvert par la
notion d'endroit approprié. En tout cas, c'est parce que je... On passe quand
même d'un article où il y a deux alinéas à un article beaucoup plus touffu où
il y a beaucoup plus de texte. Je pense que
c'est raisonnable d'essayer de comprendre exactement chacune des notions
nouvelles qui est intégrée ici, à quoi ça réfère.
Je
reprends ma première question, l'endroit approprié, lui... la ministre me dit,
ça va être à la discrétion du huissier. Est-ce qu'elle peut donner quand
même des exemples de c'est quoi, son intention, elle, dans l'utilisation de la
notion d'«endroit approprié»?
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. Mme la
ministre.
Mme LeBel :
L'endroit approprié est différent de la notion de confidentialité.
D'ailleurs,
pour répondre à votre première question, on aurait pu se limiter à dire «dans
un endroit approprié sous une forme
propre à en assurer la confidentialité», ce qui aurait inclus également le pli
cacheté, parce que le pli cacheté est reconnu comme étant maintenant une forme
qui satisfait cette notion de confidentialité là. On a gardé la notion de pli
cacheté pour ramener cette notion-là. Probablement que les tribunaux jugeront
en fonction de ce standard-là pour les autres formes, mais ce sera au
tribunal de juger si la forme qui a été utilisée était propre à en assurer la
confidentialité.
L'endroit
approprié est différent, pourrait être aussi de la notion de la confidentialité
mais est différent. Si je laisse l'enveloppe cachetée au grand vent sur le
perron versus je la mets entre les deux portes pour m'assurer qu'elle est
bien appropriée puis qu'elle va rester en place ou qu'elle ne sera pas
nécessairement trouvée ou prise par n'importe qui... Donc, il y a deux notions
qui sont différentes, qui pourraient, dans un cas de figure, se rapporter aussi
à la même notion, mais... ou je pourrais
aussi la mettre dans un endroit approprié, mais qu'on juge que ma
confidentialité, parce que je n'étais pas sous pli cacheté, n'était pas
suffisante mais appropriée parce qu'elle était à un endroit où on pouvait la
trouver.
Donc,
je ne veux pas que mes commentaires limitent les cas de figure pour les
tribunaux, mais je pense qu'il faut comprendre que la notion d'endroit
approprié et la notion de confidentialité peuvent être deux notions similaires mais
également différentes dans un cas de figure donné.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député, ça va? M. le député
de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay : Je voulais
juste demander à la ministre, M. le Président... Je me rappelle, là, à
l'époque, d'avoir vu ça en matière civile, donc de matière de signification
civile. Le quatrième alinéa de l'article 21 proposé, ce dont on vient de parler,
là : «Si l'acte de procédure ne peut être remis, celui qui fait la
signification constate ce fait avec l'indication du lieu, la date, l'heure et laisse l'acte de procédure dans un endroit
approprié sous pli cacheté, là, propre à en assurer la confidentialité.» Ça, dans la mouture actuelle,
là, non amendée par le projet de loi n° 32, du Code de procédure pénale,
je... c'est nouveau, je crois, en matière pénale, il n'y a pas de
pendant de cela ailleurs.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Je vais
permettre... si vous permettez.
Le Président (M.
Bachand) : Me Roy.
M. Roy (Vincent) : Alors, c'est
un peu une nouveauté, mais en pratique c'est ce qui était fait.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député.
M. Tanguay : C'est
une... O.K., c'est une nouveauté. Vous dites : En pratique, c'est ce qui
était fait. J'imagine qu'il y avait donc des débats à savoir est-ce que
la signification a été effective ou pas, là. Là s'ouvrait tout un... des débats
pour la valeur, l'effectivité de la signification.
M. Roy
(Vincent) : Oui, ce n'est
pas exclu que ça peut arriver, mais c'était aussi pour être un petit peu plus pédagogique dans la façon que l'huissier fait son travail. Il faut
savoir que l'huissier, c'est un professionnel qui est encadré par des normes de pratiques. Donc, il y a déjà une
façon de procéder, mais ici, dans la loi, on vient le préciser pour avoir un
côté pédagogique.
M. Tanguay : C'est un bon point que vous soulevez. Est-ce qu'il y a un code de pratique d'huissier
qui prévoyait ces éléments-là, là, la
façon? Est-ce qu'il y a un code de bonne conduite ou code de bonne pratique
pour un huissier, code de déontologie ou je ne sais pas, qui leur
préciserait ça?
Le Président (M.
Bachand) : Me Roy.
M. Roy
(Vincent) : En fait, je ne peux pas... N'étant pas huissier, je ne
peux pas me prononcer sur l'ensemble des règles de pratique des huissiers, sauf que ce qu'on considère, c'est que
c'était la façon habituelle de procéder puis c'est ce qui est accepté
par les tribunaux.
M. Tanguay :
Et est-ce qu'en matière civile... Je pense que c'est la même rédaction qu'au
Code de procédure civile, c'est exactement la même...
M. Roy (Vincent) : Oui, c'est
exactement la même rédaction.
M. Tanguay :
Ce qui ne veut pas dire, ceci dit, qu'une fois que vous ayez... parce que je
l'avais vécu en matière civile... ce
n'est pas parce que vous avez... C'est un mode de signification qui est faible,
en bout de piste, là. Pour avoir, par exemple, un jugement par défaut, là,
jugement ex parte, vous devez... la personne qui va juger voudra à coup
sûr s'assurer que la personne a un
minimum... la personne qu'elle s'apprête à condamner au civil, par exemple, là,
c'est au pénal, a eu... va vouloir tester l'effectivité de la
signification.
Alors, ça, ça
n'empêchera pas le juge ou la juge de ne pas accorder de jugement par défaut.
Ce n'est pas parce que c'est ça que... Donc, autrement dit, dans le Code de
procédure pénale, il y a toujours... puis j'aimerais ça, peut-être, que vous me l'indiquiez... un endroit qui fait en
sorte qu'un juge ne serait pas pieds et poings liés par ça en disant :
Bien, c'est signifié, je n'ai pas de discrétion pour rendre un jugement
par défaut, par exemple.
Le Président (M. Bachand) :
Mme la ministre.
Mme LeBel : Ce n'est pas
l'intention.
M. Tanguay : C'est bon.
Merci.
Le
Président (M. Bachand) :
Autres interventions sur l'article 7? S'il
n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 7, tel qu'amendé,
est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci beaucoup. Article 8,
madame... Oui?
Mme
LeBel : Si vous me
permettez, M. le Président, avec votre permission, compte tenu de l'amendement qui a été adopté à l'article tel qu'on vient d'adopter par la
suite, il y aura, par rapport à la question d'emprisonnement... je vais demander la
permission de rouvrir l'article 4, parce
qu'après coup, là, il y a un amendement similaire qui doit être fait au
niveau de la notion d'emprisonnement qu'on a discuté dans l'amendement et...
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y aurait consentement pour qu'on
retourne à l'article 4 et le rouvrir? Consentement. Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Donc, compte tenu du consentement,
je demanderais... je déposerais l'amendement suivant à l'article 4, M. le
Président :
À la fin du troisième alinéa de
l'article 20 du Code de procédure pénale proposé par l'article 4 du
projet de loi, adopté tel qu'amendé,
remplacer «une peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration d'une
infraction» par «l'emprisonnement du destinataire est réclamé».
Et je verserais les commentaires que j'ai faits
sur l'amendement de l'article précédent. Ce sont pour les mêmes raisons,
c'est-à-dire d'élargir la portée de l'article au bénéfice du défendeur.
Le
Président (M. Bachand) :
Est-ce que vous aimeriez une suspension ou... Je pense, la compréhension semble
être globale. M. le député de LaFontaine?
M. Tanguay : Ça me va, ça me
va.
Le
Président (M. Bachand) : Ça
va? Donc, s'il n'y a pas d'intervention, j'aimerais savoir si l'amendement est
adopté.
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Est-ce que l'article 4, nouvellement
amendé, est adopté?
Des voix : Adopté.
Le
Président (M. Bachand) :
Adopté. Merci beaucoup. Donc, on retourne à l'article 8. Mme la ministre,
s'il vous plaît.
Mme
LeBel : Encore une fois, je ne veux pas toujours vous contredire, mais
on pourrait peut-être faire l'amendement, la traduction de l'article 6 compte tenu qu'on n'a pas... pour fin
de précaution, puis on pourra faire un débat ultérieur sur les façons de
procéder, mais, pour s'assurer que l'amendement est bien fait puis que ce n'est
pas une notion qui a été touchée dans
l'article 6, avec votre permission, on pourrait faire adopter... je
pourrais déposer l'amendement sur la version anglaise, si tout le monde
y consent.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement?
Une voix : Consentement.
Le Président (M.
Bachand) : Consentement. Donc, on va déposer l'amendement et on
va suspendre quelques instants. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 29)
(Reprise à 16 h 32)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît!
Merci. La commission reprend ses travaux.
Mme la ministre, l'amendement pour la version
anglaise de l'article 6.
Mme LeBel : O.K. Alors, merci,
M. le Président. Compte tenu des discussions qu'on a eues tantôt, avec votre
permission, j'ai déposé l'amendement suivant à l'article 6 :
Modifier l'article 6 dans la version anglaise du projet de loi en remplaçant dans le premier alinéa de
l'article 20.2 du Code de procédure pénale, «provided by the addressee for
the receipt of the proceeding, or the address that is
publicly known as the address where the
addressee receives documents» par «indicated by the addressee as the address
where the addressee accepts the
receipt of documents, or at the address that the addressee
publicly represents as the address where the addressee
accepts the receipt of documents».
C'est comme un «tongue
twister», cette affaire-là.
Mme Weil : Donc, la
version française dit «l'acte de procédure où il accepte de le recevoir». Ici,
c'est «accepts like any document»,
mais on parle de «the proceedings». So, «accepts to receive the documents»,
c'est très différent. Donc, c'est précisément par rapport à l'acte de
procédure en question, alors qu'en anglais ils l'ont mis au pluriel.
«Accepts the receipt of documents»,
ça pourrait être n'importe quel document. Il faut attacher le document
«to the receipt ot the proceedings», comme ils l'ont fait en français,
l'acte de procédure, il accepte de...
Le
Président (M. Bachand) : Mais en français on parle de «les documents».
Mme Weil : Le recevoir. La signification par l'article...
L'article dans le projet
de loi, là, «où il accepte de le
recevoir».
Le Président (M.
Bachand) : O.K. On va suspendre quelques
instants? Oui.
Mme LeBel : Oui, absolument.
(Suspension de la séance à 16 h 34)
(Reprise à 16 h 47)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, maintenant,
avec votre accord... on avait travaillé sur une modification, un amendement à l'article 6, mais le travail
se continue. Ça fait qu'avec votre accord, on va continuer à
l'article 8. Ça va? Alors, article 8. Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Oui, merci, M. le
Président.
L'article 8 : Ce code est modifié par
l'insertion, après l'article 22, du suivant :
«22.1. La
signification par avis public est faite avec l'autorisation d'un juge. Elle
peut aussi être faite par l'huissier qui a tenté sans succès de
signifier l'acte de procédure à son destinataire et qui a constaté ce fait,
sauf si une peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration d'une
infraction.
«La signification par avis public se fait par la
publication d'un avis enjoignant au destinataire de récupérer l'acte de procédure à l'endroit indiqué dans
l'avis dans les 30 jours de la publication. L'avis fait mention de
l'autorisation du juge ou de la tentative de signification de
l'huissier.
«La publication est faite par un moyen
susceptible de joindre le destinataire, telle la publication dans un journal distribué dans la municipalité de la dernière
adresse connue du destinataire, sur le site Internet d'un tel journal, sur un
site Internet reconnu par arrêté du
ministre de la Justice ou par affichage au greffe du tribunal. La publication
dans un journal sur support papier est faite une seule fois et celle sur
un site Internet ou au greffe est faite pendant 30 jours.
«La
signification est réputée avoir eu lieu à l'expiration du délai indiqué dans
l'avis pour récupérer l'acte de procédure.»
Cette
disposition, M. le Président, introduit des règles pour encadrer la
signification d'un acte de procédure par avis public. Actuellement, pour
utiliser ce moyen de signification, une demande d'autorisation doit être
présentée à un juge en vertu de
l'article 24 du Code de procédure pénale. L'autorisation d'un juge sera
toujours requise pour utiliser ce mode de
signification. Toutefois, l'huissier qui a tenté sans succès de signifier un
acte de procédure à son destinataire et qui a constaté ce fait pourra utiliser
ce moyen de signification pour rejoindre le destinataire, sauf si celui-ci
risque une condamnation et une peine d'emprisonnement.
La signification par avis public pourra être
faite par affichage au greffe du tribunal comme c'est le cas en vertu de la pratique actuelle. Elle pourra aussi être
faite dans un journal sur support papier distribué dans la municipalité de la
dernière adresse connue du destinataire sur le site Internet d'un tel journal
ou sur un site Internet reconnu par arrêté du ministre de la Justice. Le
destinataire, donc, disposera de 30 jours pour récupérer l'acte de
procédure. À l'expiration de ce délai, la signification sera réputée
avoir eu lieu.
Mon amendement proposé, M. le Président, donc, à
l'article 8 : À la fin du premier alinéa de l'article 22.1 du Code de procédure pénale, proposé par l'article 8 du projet de loi,
remplacer «une peine d'emprisonnement est réclamée pour la perpétration
d'une infraction» par «l'emprisonnement du destinataire est réclamé».
Encore une fois, M. le Président, je ne referai
pas les mêmes commentaires. C'est la même chose que pour l'article... 3?
• (16 h 50) •
Des voix : 4.
Mme
LeBel : 4 et 7, pardon, que
nous avons réouverts. Et ce sont pour les mêmes objectifs d'élargir la portée
au bénéfice du défendeur ou de la personne qui reçoit signification.
Le
Président (M. Bachand) :
Parfait. Donc, on a déjà, je pense, eu de bons échanges sur le type
d'amendement. Alors, sur l'amendement
à l'article 8, est-ce qu'il y a des interventions? C'est beau, ça va.
Alors, sur l'amendement à l'article 8, est-ce que l'amendement est
adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Nous sommes maintenant à des interventions
sur l'article 8 amendé. Interventions? M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
La première question... Alors, nouvel article 22.1 : «La signification par
avis public est faite avec l'autorisation
d'un juge. Elle peut aussi être faite par l'huissier qui a tenté sans succès de
signifier l'acte de procédure...» Et, si on parle de... peu importe la tentative, quand on
dit «a tenté sans succès»... Donc, première question, a tenté une seule fois
sans succès? Et qu'entend-on par «a tenté
sans succès»? Exemple, s'est présenté à la maison, puis la personne était
absente? J'imagine qu'il doit y avoir une gradation là-dessus.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. Mme la ministre.
Mme
LeBel : Oui, absolument. Quand on parle du fait que la signification
pour l'huissier est permise, là, dans les situations, dans le cas de
figure, on en a parlé tantôt, quand on... du fait qu'il note l'absence et qu'il
note l'impossibilité de signifier. Donc, il
faut qu'il y ait une impossibilité. Il faut qu'on comprenne que la
signification par avis public a toujours été le dernier recours, demeure le
dernier recours. Mais, encore une fois, on vient d'élargir la façon de le
faire, mais on parle encore d'une signification de dernier recours, là.
M. Tanguay : Autrement dit,
c'est ça, sans succès... parce que j'essaie juste de voir les cas d'espèce.
L'article que l'on a adopté, là, à
l'article 7, le nouvel article, la nouvelle mouture de 21, on prévoyait
selon moi ce qui était un insuccès.
Autrement dit, dernier paragraphe, dernier alinéa, si l'acte de procédure ne
peut être remis à... celui qui fait la signification constate ce fait à l'heure
et l'acte de procédure... sous pli cacheté, sous forme propre à en assurer
la confidentialité... Autrement dit, il le laisse là, à quelque part. Pour moi,
ça, c'était un insuccès.
Est-ce que ça, ça pourrait être un cas d'espèce
qui pourrait dire : Bon, bien, je ne me contente pas de cela et je fais
une signification par avis public en vertu de 22.1? Est-ce que ça pourrait être
un élément qui pourrait amener 22.1?
Mme LeBel : Bien, c'est plutôt pour
dans les cas de figure que je vous dirais, dans... parce qu'il y a quand même
eu une signification en vertu du précédent article. C'est plutôt le cas où un
voisin indiquerait que la personne est
déménagée, qu'on n'a plus aucune adresse pour la rejoindre, qu'on n'a pas ni
d'adresse active ni rien et qu'on en est rendu au fait où c'est impossible de
signifier que ce qu'on a comme information en termes d'adresse n'est pas
disponible. Donc, ce serait
probablement plus dans ces cas de figure là, où l'huissier pourrait dire :
Bien, écoutez, moi j'ai fait toutes les recherches nécessaires
d'adresse. L'adresse que j'ai, je me suis rendu, j'ai eu l'information que la
personne est déménagée, ou elle n'habite plus là, ou ce n'est pas la bonne
adresse que j'avais au dossier, je n'en ai pas d'autre.
Donc, ce serait dans ces cas de figure là où on
en arrive vraiment à un cas de dernier recours, mais on permet au huissier qu'il... on pourrait permettre au
poursuivant de demander l'autorisation d'un juge dans plusieurs cas de figure,
mais on permet aussi au huissier qui s'est
rendu au bout de ses démarches et qui n'est pas capable de signifier, de le
faire au moment où il a constaté naturellement ce fait-là, là.
Mais on
exclut encore une fois le cas où des peines d'emprisonnement pourraient être à
la clé de tout ça, pour justement faire en sorte que la signification qui
pourrait... de laquelle pourrait découler une peine d'emprisonnement, ce ne
sont pas ces cas de figure là.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député.
M. Tanguay :
Donc, c'est ça, puis je prends bonne note, là, comme elle dit, Mme la
ministre... la compréhension que l'on doit avoir de cela. Puis on parlait
tantôt des règles de bonne pratique pour les huissiers. Ça ne serait pas parce
que, première tentative lundi à 10 heures, je cogne à la porte, personne
ne répond, oups! avis public. Je veux dire, ça ne tiendrait pas la route, là. Puis je prends pour acquis
qu'évidemment ça ne serait pas jugé valide en temps et lieu par la suite,
lorsqu'on voudrait, exemple, procéder par défaut.
Dans le Code de procédure civile, à l'article
136, in fine, dans le contexte des notifications par avis public, on disait au deuxième alinéa : «La publication
est faite en français sur un site Internet pendant au moins 60 jours ou une
seule fois dans un journal sur
support papier.» Donc, déjà là, on parlait, site Internet, 60 jours versus
30 jours. J'aimerais voir s'il y avait une réflexion faite
là-dessus, ce premier chapitre là.
Le Président
(M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la ministre.
Mme LeBel : Il y avait déjà une pratique... Il y avait déjà une
possibilité, il y a déjà une possibilité dans le code actuel de... Il y
avait déjà une possibilité — pardon, je vais finir par le trouver — de
demander la signification par avis public,
l'autorisation au juge. Dans la pratique, les délais qui étaient accordés pour
le juge, dans ces modes de signification là, c'était 30 jours. Donc, pour le Code de procédure pénale, même, on
s'est arrimé à la pratique qui se faisait déjà, les autorisations
d'affichage, là, sur des sites par les juges étaient de 30 jours.
M. Tanguay : Et dans le Code de procédure civile, à 136, on
dit : «La publication sur un site
Internet pendant au moins
60 jours». Pourquoi ne pas avoir 60 jours ici aussi, par analogie au
Code de procédure civile, la publication? Donc, le deuxième 30 jours, le troisième alinéa, sur un site Internet ou un greffe est fait pendant 30 jours, pourquoi n'aurions-nous
pas 60 jours?
Le Président
(M. Bachand) : Merci, M. le député.
Mme la ministre.
Mme LeBel :
Présentement, là, dans la pratique actuelle, les gens, ils n'avaient aucune
balise pour la publication d'un avis public sur un site Internet.
C'était autorisé par les juges, et, dans la pratique, les juges jugeaient que
30 jours, c'était
suffisant, donc, en droit pénal. C'est balisé dans le Code de procédure civile,
ça ne l'était pas en droit pénal au niveau du délai. Donc, on est simplement
venu encadrer ce que les juges ont jugé suffisant. Il y a des fois où on
demandait moins, il y a des fois on demandait plus, et le juge accordait
30 jours dans la pratique, la tendance, en droit pénal. On pourrait s'arrimer, mais on l'a déjà dit précédemment, on
ne peut pas... ce n'est pas nécessaire de s'arrimer partout, tout le temps,
exactement. Mais ce qui se donnait dans la pratique en procédure pénale, quand
les juges autorisaient une telle signification, c'était 30 jours. Donc,
on a voulu se coller à la pratique actuelle et la codifier.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député.
M. Tanguay :
C'est ça. C'est sûr qu'on n'a pas besoin de s'arrimer pour s'arrimer, mais
c'est juste... D'autant plus que les conséquences pénales peuvent, dans
plusieurs cas, être plus lourdes que les conséquences civiles. C'est pour ça que j'aurais peut-être aimé le 60 jours
pour Internet. Je pourrais peut-être comprendre qu'en matière de publication
dans un journal, il y a un coût lié à ça pendant la durée, puis le fait que le
journal est peut-être plus visible ou je ne sais pas quoi. Mais Internet,
60 jours, considérant les conséquences qui ne sont pas moindres, je ne
sais pas si la ministre peut considérer de donner 60 jours. Je
connais...
Je
comprends son point, là, la pratique, c'était... la pratique nous dit
30 jours en matière pénale, mais le 60 jours en matière civile, si
c'est réellement le cas, paraît d'autant plus... Je ne veux pas diminuer les
droits, j'aime mieux le 60 jours que le 30 jours. Mais a-t-elle
considéré de l'amender pour Internet, 60 jours?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la
ministre.
Mme LeBel :
Bon, non seulement la pratique l'avait jugé, l'a jugé, les juges l'ont jugé
adéquat, le 30 jours, mais je vais vous
rappeler qu'en procédure pénale toute poursuite pénale se prescrit par un an,
ce qui n'est pas nécessairement le
cas en droit civil. Donc, déjà, quand on... On ne parle pas juste de la
signification, on parle de l'infraction, l'infraction commence à courir à la
date de l'infraction et non pas à la date de la signification du constat. Donc,
si on ajoute un 60 jours... et
là il faut penser que, quand on en est rendus à utiliser ce moyen-là, c'est
parce que d'autres moyens ont été essayés, donc il y a d'autres délais
qui se sont écoulés.
Donc,
on fait face quand même à une prescription en matière pénale qui n'existe pas
en matière civile nécessairement, en tout cas pas de cet ordre-là. Et, comme
les tribunaux ont déjà eu à trancher sur la notion de 30 jours, parce
qu'il y a des fois où on a déjà plaidé 60 jours,
il y a des gens qui plaidaient moindre, et que les tribunaux, dans la pratique,
ont jugé que, dans les circonstances en matière pénale, le 30 jours
faisait le travail, et compte tenu de la procédure pénale et du délai de prescription qui court au moment de la
perpétration de l'infraction, je vous dirais que ça a été considéré, mais qu'on
va... de notre point de vue, le 30 jours est suffisant.
M. Tanguay :
M. le Président, est-ce que la jurisprudence ou la pratique d'accorder
30 jours se faisait dans des contextes
majoritairement où c'était demandé par l'huissier ou la partie qui veut
signifier à un juge ou une juge, sans avoir nécessairement essuyé des insuccès,
où c'était le même contexte? Autrement dit, la signification par avis public,
lorsqu'il y avait demande d'autorisation, le fruit qui était essentiellement
30 jours, est-ce que les demandes faites au juge qui faisaient naître, dans la plupart des cas, 60 jours comme
étant la période suffisante, est-ce que c'était dans des contextes où il y avait eu plusieurs tentatives de
signification ou c'était dans des contextes où ça pouvait être une demande
faite même sans avoir fait de tentative, là?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
• (17 heures) •
Mme LeBel :
Ça se faisait en vertu de l'article 24. Présentement, ce n'est pas fait
par l'huissier, c'était fait par le
poursuivant, mais ça pouvait être suite aux démarches du huissier. Naturellement, dans l'argumentaire du poursuivant, les démarches faites par
l'huissier pouvaient faire partie, et ce que ça dit, c'est «si les
circonstances l'exigent».
En
pratique, c'est quand on a épuisé les autres moyens, en pratique. Donc, on a
tenté par la poste, ça revient, les voisins ont dit que ça a déménagé, on a
tenté par huissier. Mais, si les circonstances
l'exigent, on a quand même une portée plus large puis on pouvait penser,
mais il faut... c'est pour ça qu'il y a une autorisation pour le juge. C'est au
juge de sous-peser si les autres moyens qui
sont prévus, on peut... pas les contourner, mais les éliminer pour passer au
moyen qui est d'exception. Mais ça a
toujours demeuré, dans la pratique, un moyen d'exception et, dans ces cas-là,
la pratique est que le juge accordait 30 jours, quand on parle
d'affichage sur un site Internet naturellement, parce que la publication dans
un journal, c'est toujours une fois... papier.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député.
M.
Tanguay : Dans l'article 136 du Code de procédure civile,
on ouvrait, on conservait, c'est le cas, on conserve la possibilité à la toute
fin, si les circonstances
l'exigent, la publication peut être faite à plus d'une reprise ou faite
également en anglais. Si la circonstance l'exige,
la publication peut être faite à plus d'une reprise. En quoi c'est un choix
conscient de la ministre de ne pas mettre, dans 22.1, cet élément-là, cette
possibilité-là, 136 in fine du Code de procédure civile? Autrement dit, 136, Code de procédure civile, dans
le contexte du deuxième alinéa : «La publication est faite en français, sur un site
Internet pendant au moins 60 jours ou une seule fois dans un journal sur
support papier; si les circonstances l'exigent,
la publication peut être faite à plus d'une reprise ou faite également en
anglais.» Est-ce que, si on tentait de le reproduire dans 22.1...
qu'est-ce qui fait en sorte que la ministre ne l'a pas reproduit ?
Le Président (M. Bachand) : Mme la
ministre.
Mme LeBel :
Quand la signification est faite suite à l'autorisation d'un juge, le juge aura
toujours l'autorité ou la discrétion de le
faire. Mais je vais vous rappeler toujours qu'on est en matière pénale, qu'il y
a des délais de prescription et que, dans le cas où on en parle, là, on
est... c'est l'huissier qui va venir établir qu'il a pris tous les moyens puis qu'il
n'y avait pas... Donc, il y aura une exigence, de la part des huissiers,
d'établir qu'il a tout tenté.
Mais
quand on parle de l'autorisation d'un juge, à ce moment-là, le juge pourrait
toujours le dire, le... Mais, dans la pratique
en droit pénal, il y a toujours le délai de prescription d'un an à compter de
la perpétration de l'infraction, et ça n'a rien à voir avec la
signification. Donc, il faut tenir ça en compte, et c'est ce qui a été soupesé.
M.
Tanguay : Je vous suis dans le cas de la juge ou du juge qui,
en l'espèce, va déterminer ce qui va se passer. Mais, dans le deuxième cas
d'espèce, 22.1, la signification par avis public est faite avec l'autorisation
d'un juge, point. Là, on met ça de côté. Tout le reste : «Elle peut aussi
être faite par l'huissier qui a tenté sans succès...» N'aurions-nous pas,
comme législateurs, ne serions-nous pas bien fondés, comme législateurs,
d'indiquer par un amendement que, dans le deuxième
cas d'espèce... où l'huissier qui a tenté, puis qui n'a pas besoin de
l'autorisation du juge, pourrait être amené à se poser la
question : si les circonstances l'exigent, la publication pourrait être
faite à plus d'une reprise?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel :
Oui. Peut-être, je vais vous demander de suspendre.
Le
Président (M. Bachand) : Oui. Alors, nous allons suspendre
quelques instants, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à
17 h 04)
(Reprise à 17 h 11)
Le Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Merci. La
commission reprend ses travaux. Mme la ministre,
s'il vous plaît.
Mme LeBel : Faisant suite aux discussions, M.
le Président, qu'on vient d'avoir
avec mes collègues de l'opposition, je suis prête à proposer l'amendement
suivant à l'article 8 :
Modifier
l'article 8 du projet de loi par l'insertion dans le troisième alinéa de
l'article 22.1 du Code de
procédure pénale, après
«30 jours» de «; si les circonstances l'exigent, l'application peut être
faite à plus d'une reprise».
Le
Président (M. Bachand) : Interventions? M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Moi, ça me
va, M. le Président. Pour cet amendement-là, là, ça nous va.
Mais ma collègue... Oui, Kathleen... pardon, de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Weil :
Notre-Dame-de-Grâce, oui.
Le
Président (M. Bachand) : La députée de Notre-Dame-de-Grâce,
oui.
Mme
Weil : Oui. La
question... je présume de la réponse, mais dans le Code civil, on spécifie bien en anglais, là.
Ça a peut-être... je ne sais pas, la
rédaction, peut-être, à l'origine, ça remonte à très loin, où on pensait
nécessaire d'indiquer en anglais,
mais j'imagine qu'il y a une présomption que, bon, évidemment, c'est quelqu'un
qui habite... on sait que sa résidence,
c'est dans un quartier anglophone ou une communauté anglophone, on va le faire
en anglais, si on veut rejoindre la
personne. Est-ce que c'est parce que l'origine de la disposition dans le Code
civil est là depuis beaucoup plus longtemps qu'on ne le spécifie pas?
M. Tanguay :
...2014.
Mme Weil :
Ah bon! Bien, ce serait quelque chose à vérifier.
Mme
LeBel : Bien, je vous dirais que, présentement... Merci... Désolée, M.
le Président. Dans la pratique, la sensibilité linguistique est déjà
prise en compte. Donc, si le juge, une fois qu'il autorise ou si, bon, il le
fait, ça va être fait dans l'anglais. Ça se fait déjà dans la pratique.
Mme Weil :
C'était juste pour savoir. Mais c'est quand même récent, donc...
Mme LeBel :
Mais je parle en droit pénal, là, tu sais, je n'ai pas...
Mme Weil : Mais
c'est sûr, si on veut rejoindre la personne, c'est évident qu'il faut réfléchir
à cet élément-là pour la transcription, donc c'est important de le dire.
Le Président (M. Bachand) : Merci. Autres interventions sur l'amendement?
S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement à
l'article 8 est adopté?
Une voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : Oui, excusez, M. le député.
Des voix :
Adopté.
Le Président (M. Bachand) : Adopté. O.K. Interventions sur l'article 8
amendé? M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M.
Nadeau-Dubois : J'ai envie de poser à nouveau la question que j'avais
posée au sujet de l'utilisation ici du terme
«réputé» dans la mesure où on l'a corrigé plus tôt dans le projet de loi. Ici,
on va signifier par avis public sur un site
Web par exemple ou dans un journal, et, à partir de ce moment-là, la
signification va être réputée avoir eu lieu, donc il ne sera même pas possible
pour le destinataire de faire une preuve que ça n'a pas été signifié. Est-ce
que les raisons pour lesquelles on a
modifié cette formulation-là plus tôt ne sont pas aussi pertinentes dans le cas
qu'on a sous les yeux actuellement?
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel :
On n'est pas dans la même étape, on n'est pas le même contexte que tout à
l'heure, où on en a discuté effectivement.
Et on parlait d'une transmission électronique et on parlait de faire partir le
délai au moment de la transmission. Donc, on a adopté «présumé» pour
être capable de voir la différence.
Mais
ici on est vraiment dans le dernier rempart, là, dans le dernier recours. Il
faut comprendre, et je le redis, que la signification par avis public,
ce n'est pas le premier moyen qui est utilisé dans tous les cas, là. En
pratique, si on n'a pas épuisé tous les
moyens, on a épuisé beaucoup de moyens autres de le faire, donc c'est très
clairement assumé, le terme «réputé»,
dans cette option-là, comme ça apparaît d'ailleurs déjà dans le Code civil
également pour le dernier recours, alors...
Le
Président (M. Bachand) : Député de Gouin.
M.
Nadeau-Dubois : Donc, si je comprends bien, c'est vraiment parce que
c'est le dernier recours qu'ici on veut que ce soit réputé comme ayant
été fait. Est-ce que je comprends bien? O.K.
Dans ce cas, je me
demande si on n'aurait pas dû, puis je sais que l'article est adopté, mais
modifier l'article 7 de la même manière
qu'on a modifié l'article 6, puisque, dans le cas de l'article 7,
on n'est pas en dernier recours. Et le président
me permettra de dire quelques mots, même si on a adopté l'article,
parce que, là, on parle d'un acte de procédure qui
est... bien, d'une signification qui est faite, par exemple, parce qu'on le
laisse dans un endroit approprié.
Donc, la ministre me
donnait, par exemple, l'exemple d'une enveloppe laissée entre deux portes pour
être sûr qu'elle ne s'envole pas. À partir du moment où on a laissé
l'enveloppe, donc, entre deux portes, la signification serait réputée avoir été
effectuée. Est-ce que, puisque là on n'est pas dans le dernier recours, puis on
est quand même dans un cas où l'enveloppe peut être laissée simplement dans une boîte aux lettres ou même,
comme la ministre me disait, entre deux
portes, est-ce que là on ne devrait pas avoir la prudence d'inscrire «présumé»
pour au moins permettre à une personne par la suite de faire une preuve que la
signification n'a pas été faite ou qu'elle n'a pas reçu, parce qu'il y a
eu des circonstances qui peuvent être multiples, là, on pourrait
s'amuser à donner bien des exemples, puis que ça n'a pas été fait? Par
exemple, que la personne avait
quitté, elle était en vacances, je ne sais pas, il y a mille et une raisons
qui pourraient faire en sorte que
cette signification-là n'a pas été effective, qu'elle ne s'est pas rendue au
destinataire. Et là, avec la formulation que j'ai sous les yeux, elle
serait réputée avoir été effectuée et non pas présumée.
C'est
exactement... je fais, en ce moment, exactement
le même argument que pour l'article 6. Donc, je pense que ça vaudrait la
peine de l'envisager.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme
LeBel : Bon, on ne réouvrira
pas l'article 7, mais je vais quand même
fournir un commentaire. Dans le cas de l'article dont on vient de
parler, c'est parce que c'est le dernier recours. Dans ce cas-ci, c'est fait
par un professionnel qui a un code de déontologie. Donc, la
notion de «réputé», ici, va demeurer.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député.
M.
Nadeau-Dubois : Bien,
j'aimerais comprendre c'est quoi, la différence avec l'article 6.
Je veux juste vraiment, sincèrement,
comprendre c'est quoi, la différence. Dans l'article 6, c'était pertinent.
Pourquoi ça ne l'est pas pour le 7?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : Écoutez,
dans le cas de l'article, je vais mêler... dans l'article 8
qu'on vient de faire, c'est celui-là... non, celui du dernier du
recours...
Le Président (M.
Bachand) : C'est 8.
Mme LeBel : C'est 8. Bon, dans le
cas de l'article 8, c'est parce que c'est l'avis public, c'est un avis de
dernier recours, c'est à l'expiration du délai de 30 jours. Bon, parfait.
Dans le cas
de l'article 7, qui est l'article précédent, c'est
parce que c'est fait par un professionnel. On parle d'un huissier, là, ce n'est pas par n'importe qui, donc c'est fait par un professionnel
qui a un code de déontologie. Donc, il
y a une réputation de, je dirais... je pense,
c'est parce que c'est fait par un professionnel. C'est limité aux huissiers, là, il faut
le dire, là, ce n'est pas... Oui, c'est des
gens qui ont des serments, des gens qui ont un code de déontologie, donc, dans
ce cas-là, la notion de «réputé»...
Puis, encore une fois, on est dans un cas où, quand il le fait, c'est
parce qu'il ne peut pas le rejoindre autrement.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député.
M.
Nadeau-Dubois : Oui, on
porte à mon attention quand même une jurisprudence, la Banque de Montréal contre Medina, où il y avait eu
signification par huissier que ça avait été laissé justement sur place à son
domicile. Monsieur avait fait la preuve que,
finalement, il n'était pas présent sur les lieux, avait toute une série de
motifs, là, puis le tribunal avait pris la peine d'écrire que, oui, la
signification était valide, mais qu'il fallait qu'elle soit effective puis
qu'en vertu des arguments et des explications qui étaient fournis par monsieur,
bien, dans ce cas-là, la signification n'était pas effective. Est-ce qu'en
inscrivant dorénavant «réputé», est-ce qu'on ne va fermer cette porte-là qui
était ouverte auparavant pour que quelqu'un
fasse la preuve que la signification n'a pas été effective? Est-ce qu'on ne
vient pas refermer cette porte-là qui était, par le passé, ouverte?
Le
Président (M. Bachand) :
...à l'article 8, mais je laissais quand même
le député de Gouin, parce que je trouvais qu'il y avait un
lien avec 8, mais je ne voudrais pas, à moins qu'il y ait un consentement de...
si on passe beaucoup de temps sur l'article 7,
on va le rouvrir, si vous êtes consentants, sinon on va devoir continuer sur l'article 8.
Donc, je ne sais pas si, Mme la ministre, vous avez un commentaire sur l'article
8.
• (17 h 20) •
Mme
LeBel : Oui. Je vais d'entrée de jeu, en tout cas... on ne réouvrira pas, mais on ne consentira pas à
réouvrir, mais je ne peux pas commenter l'article... la jurisprudence
que vous venez de me lire. Il faudrait que je la lise, il faudrait que
je regarde. Mais il y aura toujours la possibilité de quelqu'un, au bout du
compte, de demander une rétractation de jugement
et d'alléguer le fait qu'au départ cette signification-là, qui était réputée
faite, n'a pas été faite ou n'a pas été reçue. Mais, à un moment donné, il faut qu'on permette à l'État de signifier. Et
là on parle d'un professionnel qui a un code de déontologie et, dans ce
cas-là, on est quand même dans une certaine notion de dernier recours, qui
n'est pas le dernier de l'avis
public, mais là où l'huissier, pour qu'il soit capable de faire ça, il faut
qu'il ait tenté plusieurs choses, là. Donc, je pense que je vais
limiter mes commentaires à ça, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin, peut-être un dernier
commentaire sur l'article 7.
M. Nadeau-Dubois : Je pense que ça
aurait été plus cohérent d'y aller avec «présumé». Dans la mesure où on est dans un cas où ça peut carrément être laissé,
comme le ministre l'a dit, entre deux portes, il me semble que... parce que
la rétractation de jugement, ça vient plus
loin dans le processus, là. On devrait permettre au destinataire de faire la
démonstration que la signification n'a pas été effective.
Ceci étant dit, s'il n'y a pas de consentement
pour réouvrir l'article 7, je ne parlerai pas pour ne rien dire, mais
c'est juste que j'ai le sentiment très, très fort qu'on aurait... ça aurait été
plus cohérent de garder la notion de «réputé», pour, en effet, ce qui est le dernier recours, puisque là ce qu'on fait,
c'est... on dit : C'est parce que c'est le dernier recours. Finalement, l'autre étape d'avant, c'est aussi un
peu un dernier recours. Il me semble que, si c'est un dernier recours, c'est un
dernier recours, si ce ne l'est pas, ce ne l'est pas. Je suis vraiment juste
ici dans une attitude constructive, s'assurer que ce qu'on adopte est cohérent. Si la ministre maintient son refus
d'ouvrir l'article 7, c'est sa décision puis son droit le plus strict, mais vraiment, dans un esprit purement
constructif, je trouve qu'on aurait mieux fait de rendre cohérent
l'article 6 et l'article 7, garder la notion de «réputé» pour
ce qui est réellement le dernier recours.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup, M. le député. Interventions sur l'article 8? M. le député
de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay :
Oui, merci beaucoup, M. le Président. Honnêtement, je n'ai pas la solution,
mais je pense que c'est une préoccupation légitime, et elle nous a été
inspirée... ça ne faisait pas partie de leur mémoire, mais elle nous a été inspirée par les gens, les premiers que l'on a
entendus, l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en
santé mentale du Québec, O.K.?
Dans leurs
commentaires... Puis honnêtement, on parle de l'humain. Oui, il y a la
procédure, il y a... on parle de l'humain, on parle de dossiers pénaux, pas des
dossiers civils. Eux faisaient écho d'une réalité avec laquelle leurs membres,
les gens avec lesquels ils interagissent... eux ont à travailler avec ça au
niveau plus que réputationnel, au niveau dignité humaine, perception. En matière pénale, on peut
facilement être ostracisé, et eux disaient avoir, dans leurs commentaires — je paraphrase,
là, je ne présente... pas avoir le verbatim — avoir une sensibilité puis une préoccupation
que, dans des dossiers donnés, s'il
est signifié publiquement que monsieur, madame X fait face à de telles
accusations, et on tente de le signifier par un avis public, que ce soit
ostracisant puis que...
Est-ce qu'autrement
dit... Puis si j'avais... je n'ai pas d'amendement rédigé, mais dans le
contexte où l'avis public est
autorisé par le juge ou l'avis public est effectué par l'huissier, est-ce qu'on
ne pourrait pas ajouter la notion de : il est pris en compte? Ajouter la
notion qu'il est pris en compte, avant de procéder, soit par décision du juge
ou par décision de l'huissier, il est
pris en compte de l'impact réputationnel — as-tu la déontologie, là? — de l'impact réputationnel, de l'impact
ostracisant?
Je vous donne
un exemple. Dans le contexte du code de déontologie des huissiers, on dit, par
exemple : Outre ce qui est prévu à l'article 12 de la loi sur les
huissiers, la conduite du huissier doit être empreinte d'objectivité, respect,
modération, dignité. À 4, on
dit : L'huissier doit, dans l'exercice de sa profession, s'abstenir d'agir
de manière à embarrasser, humilier, mépriser. Je le sais que c'est dans
le code de déontologie des huissiers, mais dans l'article, mouture générale de
la loi, n'y aurait-il pas lieu... puis moi,
honnêtement, là, ce n'est pas pour faire des amendements pour faire des
amendements, là, mais moi... ça peut
quand même avoir des impacts dans la vie des gens qu'un avis public dans le
journal soit publié, que tel individu, on tente de lui signifier telle
procédure, qui peut par ailleurs être ostracisante.
Y aurait-il
lieu, puis je termine là-dessus, de mettre cette préoccupation-là dans
l'article 22.1 où, dans les deux cas d'espèce, par le juge ou par décision
du huissier, la signification par
avis public est effectuée en tenant compte de l'impact potentiel négatif
et de l'ostracisme qui pourrait en découler?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : Votre préoccupation est légitime, mais ce que l'article dit...
naturellement, on est rendu au dernier recours quand on est
rendu dans l'avis public, naturellement. C'est parce
que les huissiers, en règle générale,
on va avoir... on va être passé par
l'huissier, là, de façon pratico-pratique. On passe rarement d'une façon à
l'avis public... même jamais, je
dirais, à l'avis public, sans être passé par la signification que j'appelle
«traditionnelle» du huissier. Mais ce que vous devez comprendre, c'est que ce
n'est pas l'acte de procédure qui est publié dans l'avis public, c'est le fait
qu'un acte de procédure doit être
signifié, et ça enjoint la personne à aller récupérer l'acte de procédure.
Donc, il n'y a pas d'information. Il y a, naturellement,
l'information qu'il y a un acte de procédure, parce qu'à un moment donné, il
faut quand même donner un avis de quelque
chose, mais il n'y a pas de contenu factuel, là. Ça ne donne pas d'information
sur le type... j'allais dire d'accusation, mais ce n'est pas le bon terme,
là... de type d'infraction.
M. Tanguay : Bien, je trouve
ça intéressant, ce que dit Mme la ministre, puis ça comblerait ma
préoccupation, ça y répondrait. Donc, on
peut prendre pour acquis que, dans tous les cas d'espèce, les articles
et la définition ou la nature de l'acte,
en vertu de quelle loi, quelle infraction il lui est reproché de ta, ta, ta,
c'est uniquement : un acte de procédure doit être signifié à
monsieur, madame. Allez le récupérer selon telle procédure, là. O.K.
Mme LeBel : En gros.
M. Tanguay : O.K. Donc, on a
cette assurance-là que ça se fait comme ça.
Mme
LeBel : Oui. La
signification par avis public, c'est fait par l'application d'un avis
enjoignant au destinataire de récupérer l'acte à l'endroit indiqué dans l'avis,
dans les 30 jours de la publication, donc. Et pratico-pratique, il
n'y a pas de mention, de précision sur la nature, là, dans le sens que vous le
demandez.
M. Tanguay : C'est bon.
Le Président (M.
Bachand) : Autres interventions sur l'article 8 amendé?
Oui?
M. Tanguay : M. le
Président, c'est peut-être
parce que, pour avoir fait des recours collectifs, quand il y a
des avis... ça, ça coûte cher, parce
que vous avez une page, puis vous
avez tout, mais je sais qu'on n'est pas en... Non, pas en matière de recours collectif, c'est bon.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Est-ce que l'article 8, tel
qu'amendé, est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci beaucoup.
Article 9. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme
LeBel : Merci, M. le Président. Article 9 : L'article 24 de ce code est
modifié par le remplacement, dans le deuxième alinéa, de «Le» par
«Lorsque l'autorisation d'un juge est requise en vertu de la présente section,
le».
Cet article
propose une modification de concordance pour tenir compte de l'introduction des
articles 20.1 et 20.2 de Code de procédure pénale par les articles 6
et 8 du projet de loi.
Le Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup. Interventions? S'il n'y a
pas d'intervention sur l'article 9, est-ce
que l'article 9 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci beaucoup.
Article 10. Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le Président.
Article 10 : L'article 27 de ce code est modifié :
1° par
l'insertion, dans le premier alinéa et après «recommandée,», de «par un service
de messagerie ou par un autre porteur,»;
2° par
l'ajout, à la fin du premier alinéa, de la phrase suivante : «À défaut,
une déclaration de l'expéditeur attestant l'envoi et faisant référence à
l'état de livraison ou de réception tient lieu d'attestation de
signification.»;
3° par la suppression du deuxième alinéa.
La
modification apportée, M. le
Président, par le premier paragraphe de cette disposition permet d'établir la
règle de preuve liée à l'utilisation d'un service de messagerie ou d'un autre
porteur pour signifier un acte de procédure en matière pénale.
La modification proposée par le deuxième
paragraphe vise à pallier aux situations où l'avis de réception ou de livraison ne peut pas être produit. La
modification apportée par le troisième paragraphe de cette disposition permet
d'assurer la concordance avec les
modifications apportées par l'article 4 du présent projet de loi à
l'article 20 du Code de procédure pénale. En effet, la poste prioritaire est
maintenant comprise dans la notion de poste recommandée. Il n'y a plus lieu
de prévoir des règles de preuves particulières par l'utilisation de la poste
prioritaire.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Intervention, M. le député de LaFontaine?
M. Tanguay :
Oui, M. le Président. En vertu de... «lorsque signification est faite par
poste», est-ce qu'elle doit être autorisée, petite question facile,
cette signification-là?
Mme LeBel : ...des moyens courants
utilisés, mais...
M. Tanguay :
Dans un des moyens courants utilisés. Est-ce qu'elle est applicable... est-ce
qu'elle est possible pour tout type d'acte de procédure?
Le Président (M.
Bachand) : Juste vous...
M. Tanguay : Autrement dit,
il y a un...
Le
Président (M. Bachand) :
Juste vous le rappeler, parce que des fois les micros restent ouverts, alors
donc, c'est... Je sais que vous avez
des petits conciliabules, là. Juste faire attention. Le technicien fait son possible,
là, mais il ne peut pas faire de miracle, malheureusement. Mme la
ministre.
Mme LeBel : Pouvez-vous juste
terminer? Je m'excuse, j'ai perdu la dernière...
• (17 h 30) •
M. Tanguay : Je n'ai pas
l'article. On va le retrouver à un endroit où... puis je pense que ce n'est
même pas un article que l'on touche dans le
projet de loi n° 32, mais il y avait une distinction selon... il y avait
une distinction, tel type de
signification ne peut pas être utilisée pour des actes introductifs d'instance,
des ci, des ça, là. Je pourrais vous
retrouver l'article, mais une telle distinction n'est pas applicable
pour signification par poste, là, de l'article 27 ou...
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
M. Tanguay : Donc, c'est pour
tout type de... Tu l'as-tu, 136?
Mme
LeBel : Oui. C'est un
code... C'est un des moyens de signification, j'allais dire... pas de base, là,
mais... C'est quoi, le terme?
Une voix : ...
Mme LeBel : Courant. Oui, je cherchais
le terme «courant». Merci.
M. Tanguay : Donc, tout acte... On résume, M. le Président. En vertu de l'article 27, tout acte de procédure en matière pénale, peu importe sa nature, peut, de
façon régulière, sans autorisation d'un juge, être fait à la manière de l'article 27.
C'est ce qu'on doit comprendre.
Mme LeBel : Absolument. C'est ça, la
réponse est oui, même...
Le Président (M. Bachand) : ...article 10?
S'il n'y a pas d'autre... M. le député de Gouin, pardon.
M.
Nadeau-Dubois : Qu'est-ce qu'on signifie par «service de messagerie ou
un autre porteur»?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : ...simplement pour
être sûr que tous les cas de figure sont représentés. Ça pourrait être FedEx,
ça pourrait être Postes Canada, ça
pourrait être... C'est pour être sûr que le moyen plus traditionnel est
représenté, là. Je pense que... Je n'ai pas en tête d'exemple
plus...
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Gouin.
M.
Nadeau-Dubois : Bien, c'est juste parce que je... La notion de poste
recommandée, aussi datée peut-elle nous
apparaître aujourd'hui, avait l'avantage de référer quand même
à un service d'État où il y a une certaine garantie au niveau du service, notamment de la traçabilité de
la poste recommandée, le fait qu'il y
a une signature, en bout de compte,
qui atteste de la réception.
Là, on vient élargir,
puis c'est l'esprit de l'opération en général. Ça, c'est une chose, mais là on
vient dire «ou par un autre porteur»,
donc... J'essaie de voir à quel service on peut faire allusion puis est-ce qu'il y a des garanties similaires au niveau du sérieux puis du
professionnalisme de la démarche.
Mme LeBel :
Tout à fait. C'est pour ça que je faisais référence, dans mes commentaires, à l'article
20. Vous vous rappellerez que dans l'article 20, à l'article 4 du projet de loi,
on a introduit ou on a... l'article 20, tel qu'il a été adopté présentement, la
signification au moyen de la poste recommandée, d'un service de messagerie ou
de tout autre porteur... Donc, cette notion-là est là, mais on vient préciser
que l'envoi est considéré comme un envoi recommandé lorsque la réception ou la livraison est attestée. Donc, il y a
cette garantie-là, elle est dans l'article 20. On n'a pas besoin de la
reprendre. Une fois que cette notion-là est définie, bien, elle suit, là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, oui.
M.
Nadeau-Dubois : Donc, ce qui
atteste de la réception, c'est la signature de la personne qui reçoit et...
Mais, dans le fond, ma préoccupation, ici, là, c'est juste qu'on s'assure qu'il y a,
comment dire... une entreprise privée pourrait développer, je ne sais
pas, des services, puis comment on s'assure que, quand la réception est
faite...
En
fait, c'est ça, parce qu'on parle d'avis de réception où, selon le cas,
l'avis de livraison tient lieu d'attestation, mais il n'y a pas de
notion ici de signature par la personne. Est-ce que ça, c'est à l'article 20?
Mme LeBel :
Oui, la notion de signature est à l'article 20.
Le Président (M. Bachand) : Autres commentaires, interventions sur l'article 10?
S'il n'y a pas d'autre intervention... Oui, M. le député, oui.
M. Tanguay :
...concordance par rapport à l'actuel article 23. Quand on parle d'acte de
procédure signifié hors Québec, l'article 23 dit qu'on peut le faire par la poste. Là,
on pourrait me dire : Oui, mais l'article 23 vivait déjà en présence de
l'actuel 27, alors à l'article 23, on n'est pas lié par 27. L'article 23
n'a pas le formalisme de 27. C'est ce que l'on doit comprendre,
j'imagine, puis il n'y a pas de... il n'y aurait donc pas eu d'enjeu.
Parce que
là mon point... Je revire ça de bord. L'article 27, on vient l'actualiser. 27, c'est par
courrier recommandé, la signification par poste recommandée. À l'époque, ça...
bien, à l'époque... Le futur 27 amendé parlait aussi de recommandé, mais l'article 23
du Code de procédure pénale parlait d'une signification par la poste à
l'étranger. Il faut comprendre qu'ici on
n'est pas lié. 23 n'est pas lié par 27, autrement dit. Ça peut être fait par
poste ordinaire, puis ça demeure, à ce moment-là, un élément à
démontrer.
Autre
élément, M. le Président, je voulais juste m'assurer de bien comprendre,
là. La signification... l'article 20, justement, du collègue de Gouin : «La signification au moyen de poste recommandée,
d'un service de messagerie...» Donc, l'amendement à 27, tel qu'on le
propose, n'a pas d'impact sur l'article 20 que l'on a adopté en
adoptant l'article 4, là. Il y a concordance entre les deux, là?
Une voix :
C'est la suite.
M. Tanguay :
C'est la suite. C'est bon.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Autres interventions? S'il n'y
a pas d'autre intervention sur l'article 10, est-ce que l'article 10
est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Bachand) : Adopté. Merci
beaucoup.
Article 11. Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Merci,
M. le Président. Article 11 :
Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 27, des
suivants :
«27.1.
Lorsqu'une signification est faite par un moyen technologique, l'expéditeur
doit conserver les renseignements qui permettent d'établir la date,
l'heure et les minutes de la transmission ainsi que sa provenance et sa
destination.
«Ces renseignements tiennent lieu d'attestation
de signification.
«27.2.
Lorsqu'une signification est faite par avis public, une copie de l'avis, avec
mention de la date ainsi que du mode ou du lieu de publication, tient
lieu d'attestation de signification.»
Ça ne sera pas long, M. le Président. Donc,
commentaires concernant l'article 27.1, qui est ainsi introduit par l'article 11 :
Cette disposition introduit les règles de preuve liées à la
signification par moyen technologique. Elle énonce les renseignements qui
doivent être conservés pour prouver qu'il
y a signification, quel que soit le
moyen ou le mécanisme utilisé.
Les commentaires relatifs à l'article 27.2,
M. le Président : Cette disposition introduit les règles de preuve liées à
la signification par avis public. Donc, elle énonce également les informations
qui doivent être fournies pour prouver qu'il y a lieu de... qu'il y a eu
signification, pardon.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions sur l'article 11? M. le
député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Je reviens sur une conversation qu'on avait eue un
peu plus tôt, bien, lors de notre première séance avec Mme la ministre. Je reviens avec la Loi concernant le cadre juridique des
technologies de l'information, loi, de mémoire, de 2001, qui prévoit, justement,
lorsque signification est faite par un moyen
technologique, elle doit conserver les renseignements... La Loi concernant le
cadre juridique des technologies de l'information
vise majoritairement... à l'époque, visait, en 2001, telle qu'elle a été
rédigée, mais, je veux dire, ça, ça fait 18 ans, visait à
préciser de quelle manière nous pourrions, devant un juge ou une juge, faire la
preuve de l'intégrité d'un processus
technologique et d'être capables de démontrer... bon, bien, à sa face même, en
l'absence de preuve contraire, je prends
pour acquis que l'intégrité des documents technologiques est assurée. Et ça, ça
participe... ce n'est pas exclusivement au niveau de la signification,
mais ça participe de cette pensée de peut-être... cette nécessité de revisiter
l'entièreté de cette loi-là.
Alors, j'aimerais savoir si la ministre a eu
l'occasion de vérifier en son ministère pour voir si effectivement mandat avait été donné, pas par elle mais par son
ministère, au professeur — si tu peux retrouver l'article, là — au professeur qui aurait été... de
l'Université de Montréal, qui aurait été... M. Vincent Gautrais.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel :
Bien, il y a effectivement un mandat qui a été donné, on a déjà eu l'occasion
d'en discuter, là. J'avoue que je ne...
M. Tanguay : ... à
l'époque, puis c'est correct, là...
Mme LeBel : C'est peut-être mon
souvenir qui...
M. Tanguay :
...la ministre n'était pas au courant du mandat qui aurait été donné par le
ministère de la Justice, et l'objectif, c'était de voir est-ce
qu'effectivement mandat a été donné. C'était dans Droit-Inc, je crois, droit
de... c'était quelque chose...
Mme
LeBel : Bien, peut-être... donnez-moi deux minutes, suspendre. On va
revérifier, mais je sais que l'information a été, oui, obtenue depuis...
Le Président (M.
Bachand) : Parfait. Alors, nous allons suspendre quelques
moments. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 39)
(Reprise à 17 h 40)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission
reprend ses travaux. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui, merci, M. le
Président. Avec votre permission, on pourrait peut-être permettre à la personne
qui est à ma gauche de répondre, puis ce sera peut-être plus précis, à ce
moment-là, que ce que je pourrais transmettre.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.
Alors, veuillez vous identifier, s'il vous plaît.
Mme Robert (Marie-Christine) :
Bonjour. Marie-Christine Robert, avocate, ministère de la Justice.
Pour répondre
à la question, en effet, il y a un mandat qui a été confié au Pr Vincent
Gautrais de l'Université de Montréal
pour produire, pour le ministère, un rapport d'application sur la Loi
concernant le cadre juridique des technologies de l'information. Le but de ce mandat-là, de cette
étude, c'est d'analyser la loi un peu avec son application dans les dernières années, voir c'est quoi, peut-être, les choses qui
manquent, les choses qui devraient peut-être être modifiées, donc c'est vraiment au niveau de l'application, puis étant
donné... plusieurs fois ça a été mentionné que la loi est, jusqu'à présent, un
peu mal utilisée, mal connue par la communauté juridique.
Donc, on a
confié... en fait, le ministère a confié cette étude-là à Vincent Gautrais, qui
est un expert en la matière, en droit
des technologies de l'information, pour savoir justement qu'est-ce qui manque,
qu'est-ce qu'il y a à changer, les points positifs, les faiblesses.
C'est une étude qui est en cours de réalisation présentement.
M. Tanguay :
Question, oui, puis merci beaucoup d'éclairer notre lanterne. Est-ce qu'il est
de la compréhension du ministère et du Pr Gautrais que ça participera d'une
réflexion plus globale, notamment ce qui est devant nous présentement,
27.1, lorsqu'on parle signification par un moyen technologique, voici comment
on peut en établir la preuve, preuve de transmission,
provenance et tout ça? Est-ce que sa réflexion est plus globale, je prends pour
acquis que oui, que stricto sensu la
simple loi comme telle? Parce que, là, on vient jouer pour beaucoup, là, puis ce
n'est pas anodin, avec des concepts qui découlent des nouvelles
technologies, technologies de l'information.
Le Président (M.
Bachand) : Oui, allez-y. Allez-y, madame, pardon.
Mme Robert
(Marie-Christine) : Oui, l'étude, c'est vraiment dans l'entièreté,
c'est vraiment plus global. Le mandat, ce n'est pas nécessairement sur les
articles... oui, les articles précis, mais aussi dans la globalité d'où est-ce
qu'on est rendu aujourd'hui, en 2019,
et le fait que c'est une loi qui a été adoptée en 2001 avec tout l'avènement
des nouvelles technologies. Donc, oui, c'est un mandat un peu plus
global.
M. Tanguay : Dernier
commentaire, parce qu'effectivement on retrouve application de cette loi-là qui
est dans notre Code de procédure pénale
annoté, 2019, la fameuse loi concernant, dont on parle, le cadre juridique des
technologies de l'information, avait
trouvé écho dans une jurisprudence citée, non seulement à l'article 61,
auquel on a fait référence lors de notre première séance, mais également
dans l'article 24, les articles qui sont relatifs à la signification.
Alors, j'imagine aussi que, donc, dans un cas
d'espèce, signification, ce qui nous intéresse tous, on a bien, bien hâte — dernière question — donc de voir le fruit de son travail. Est-ce
qu'il y a un échéancier, j'imagine, que vous pouvez nous communiquer?
Mme Robert
(Marie-Christine) : L'étude est en cours de réalisation, le mandat a
été donné pour 2020, donc dans les prochains mois, on espère.
M. Tanguay : Livraison en
2020, O.K. C'est bon. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Bachand) :
Autres questions? Merci infiniment. Merci beaucoup. Interventions sur
l'article 11? Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député
de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay :
Quel sens devons-nous ou quel terme... On dit, 27.1, «ces renseignements
tiennent lieu d'attestation de signification». Pourquoi ne parle-t-on
pas de preuve de signification?
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme
LeBel : Oui. C'est parce que c'est déjà la terminologie qui est
utilisée, entre autres... J'essaie de trouver le...
Une voix : ...
Mme
LeBel : Oui, parce que c'est déjà la terminologie qui a été utilisée,
entre autres, à l'article 26 et 27, donc on parle d'attestation.
M. Tanguay :
O.K. Donc, attestation, signification, donc attester de, c'est faire la preuve
de, c'est des synonymes. C'est ça? C'est de l'économie générale, O.K.
Le
Président (M. Bachand) :
Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 11? S'il n'y a pas
d'autre intervention, est-ce que l'article 11 est adopté? M. le
député, oui, de LaFontaine.
M. Tanguay : M. le Président,
lorsque... 27.1, «lorsqu'une signification est faite par un moyen
technologique, l'expéditeur doit conserver les renseignements qui permettent
d'établir la date, l'heure», alors on ne précise pas les renseignements, c'est à la personne qui désire
faire la preuve ou attester de... Il n'y a aurait pas lieu, ici, de préciser
l'intention du législateur, ou c'est tout élément qui pourrait être, le
cas échéant, jugé suffisant ou pas?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : On précise la nature des renseignements qui doivent être
conservés, mais on ne précise pas le support.
M. Tanguay :
Le véhicule, oui.
Mme LeBel : Le véhicule, c'est ça.
Le
Président (M. Bachand) :
Merci. Ça va? Autres interventions?
S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce
que l'article 11 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci beaucoup.
Article 12. Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme
LeBel : Oui. M. le Président, à l'article 12, si vous permettez, je vais vous demander de
suspendre et qu'on reprenne son étude
après les articles 62, 64 et 65. Ce sera plus facile pour la
compréhension, parce qu'il y a des modifications qui est faite au Code de procédure civile et ce
sera plus facile pour tout le monde si on accepte de le faire de cette façon-là.
Il y a une relation. Donc, on pourrait passer à l'article 13, avec le
consentement.
Le Président (M.
Bachand) : Oui. On va suspendre quelques instants. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 17 h 45)
(Reprise à 17 h 47)
Le Président (M.
Bachand) : ...travaux. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Oui, c'est beau. Vous demandiez le consentement, il y a consentement de notre
part, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) :
Est-ce que ça va pour le consentement pour suspendre l'article 12? Merci
beaucoup.
Article 13. Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le Président.
Article 13 : L'article 42 de ce code est modifié :
1° par la suppression, dans le paragraphe 1°, de
«ou prioritaire»;
2° par le
remplacement, dans le texte anglais du paragraphe 2°, de «warrant of arrest»
par «warrant for witness».
Commentaires :
Cette disposition apporte une modification de concordance au premier paragraphe
étant donné que la poste prioritaire est maintenant considérée comme de la
poste recommandée en raison des modifications apportées à l'article 20 du Code de procédure pénale par
l'article 4 du projet de loi, puis elle corrige également une imprécision
dans le texte anglais du deuxième paragraphe où il est question d'un
mandat d'amener un témoin, et non pas d'arrestation.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Interventions? Pas d'autres interventions?
Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 13 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M.
Bachand) : Adopté. Merci beaucoup.
Article 14. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui. Alors, merci, M. le
Président.
Un petit peu de même nature,
article 14 : Les articles 43, 44 et 45 de ce code sont modifiés
par le remplacement, dans le texte anglais, de «warrant of arrest» by «warrant
for witness», partout où cela se trouve.
L'article 14 proposé, qui modifie le texte
anglais des articles 43 à 45, est une demande du Service de traduction de l'Assemblée nationale. Les modifications visent
d'ailleurs à remplacer l'expression «warrant of arrest» par «warrant for
witness», afin de traduire adéquatement le mandat d'amener le témoin, qui n'est
pas un mandat d'arrestation.
Le Président (M.
Bachand) : Commentaires, interventions sur l'article? Oui,
allez-y, madame...
Mme Weil : ...comprendre d'où
vient cette confusion? Est-ce qu'à l'origine, c'est ça ou...
Le Président (M.
Bachand) : Oui, allez-y, madame.
Mme Dawson (Kathryn-Anne) : Oui,
bonjour. Kathryn-Anne Dawson du Secrétariat à la législation.
Alors, dans
le fond, le projet de loi rajoute la notion de... plus loin dans les articles
subséquents, on rajoute la notion de mandat d'arrestation dans la loi
sur le... dans le Code de procédure pénale. Et, dans le Code de procédure
pénale, présentement, le mandat d'amener est
traduit en anglais par «warrant of arrest», mais là, en ajoutant le mandat
d'arrestation, on s'est rendu compte qu'on avait
un problème parce qu'on avait «warrant of arrest», puis on l'aurait eu pour
«mandat d'amener» et pour «mandat
d'arrestation». Alors, on a fait la distinction, on a corrigé, «warrant of
arrest» pour le changer pour «warrant for witness». Oui, c'est ça, alors
c'est ça.
Le
Président (M. Bachand) : O.K. Donc, M. le député, oui.
M. Tanguay :
Il est plus juste de traduire «mandat d'amener» par «warrant for witness».
Mme Dawson
(Kathryn-Anne) : Parce qu'on parle d'amener un témoin.
M.
Tanguay : Et, à l'inverse, comment allons-nous retrouver en
français la notion, en anglais, de «warrant of arrest»? Est-ce que...
Mme Dawson
(Kathryn-Anne) : Dans les nouveaux articles?
• (17 h 50) •
M.
Tanguay : Non, dans
l'actuelle mouture du Code de
procédure pénale, est-ce que... On vient d'établir que «warrant of
witness» est le pendant de «mandat d'amener». Est-ce que «warrant of arrest»
est le pendant de quelque autre...
Mme Dawson
(Kathryn-Anne) : Ça va être de «mandat d'arrestation»...
M. Tanguay :
Mandat d'arrestation.
Mme Dawson
(Kathryn-Anne) : ...qu'on va rajouter dans les articles plus loin.
M.
Tanguay : O.K. Il y aura d'autres corrections à faire. O.K. Et
ça, ceci dit, peut-être, à la ministre de la Justice...
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : Juste pour préciser, il va y avoir d'autres corrections, mais,
je dirais, même à 17, 18, de la même nature. Je vous l'annonce tout de suite, mais on les fera quand on sera rendus
là. Mais ce n'est pas... c'est que la notion de... on propose, dans le projet de loi, d'introduire une
notion de mandat d'arrestation, dans le Code de procédure pénale, qui n'était
pas là avant.
Et
là, maintenant, parce qu'on introduit cette notion-là, il est important de
faire... parce qu'en français, il n'y a pas de confusion, c'est «mandat d'arrestation» et «mandat d'amener» de... un
témoin. On voulait juste... on fait la distinction et là on corrige, là, un petit peu avant d'arriver
à l'introduction de la notion de mandat d'arrestation, mais c'est parce qu'on
va introduire la notion de mandat
d'arrestation dans le code pénal, en tout cas, on l'espère, après discussions
productives avec vous.
M.
Tanguay : O.K. On pourra voir ça, auquel cas on reviendra pour
détricoter, si jamais... là-dessus. O.K. Merci.
Le
Président (M. Bachand) : Autres interventions sur 14? Est-ce
que l'article 14 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Bachand) : Adopté. Merci beaucoup.
Article 15. Mme
la ministre.
Mme LeBel :
Si vous me permettez un nouvel aparté, puis je vais le proposer à mes
collègues, 17 et 18 sont exactement de la
même nature. On peut les faire immédiatement, si vous pensez avoir des
questions pour la jurilinguiste qui est maintenant disponible, ou on peut
attendre, si vous pensez que la réponse qu'on vient de vous fournir va vous
satisfaire. Mais c'est également... c'est exactement de la même nature, là.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, oui.
M. Tanguay :
C'est de la même nature, et la ministre peut-elle nous indiquer, pour qu'on
puisse statuer sur sa demande, à quel endroit on va parler de la substantifique
moelle de ces concepts-là, à quel article?
Mme LeBel :
Du mandat d'arrestation?
M. Tanguay :
Oui, le concept.
Mme
LeBel : ...mais je cherche la correspondance avec le projet de loi.
Article 27 du projet de loi, où on se propose d'introduire la
notion de mandat d'arrestation, d'entrer dans la notion de mandat de...
M. Tanguay :
O.K. Et, dernière question, d'ici à 27, nous avons 17 et 18 que nous
pourrions... sur lesquels on...
Mme LeBel : 18 et 19, qui
de... non, 17 et 18, qui demandent le même genre de nuance entre mandat
d'arrestation et mandat d'amener, «warrant for witness» en anglais.
M. Tanguay :
O.K. Et après ça on est bons sur ce concept-là jusqu'à 27, là.
Mme
LeBel : Je pense que oui, mais je vous propose de le faire, parce que
la jurilinguiste... Mais on peut attendre, si vous pensez que votre
préoccupation a été...
M.
Tanguay : Non, non. Ça nous va. Ça nous va qu'on puisse passer,
M. le Président, à la demande de... que, de consentement, on traite de
17, 18 maintenant, nous, ça nous va.
Mme LeBel :
Puis on reviendra à 15.
Le
Président (M. Bachand) : À 15. Ça va? Donc, nous allons aller
directement à 17, 18. Après ça, nous allons revenir à 15. Consentement?
Des voix :
Consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Parfait. Article 17.
Mme LeBel :
Donc, l'article 17 : L'article 49 de ce code est modifié par le
remplacement, dans le texte anglais, de «warrant of arrest» par «warrant for
witness». Et ce sont, naturellement, les mêmes commentaires.
Le
Président (M. Bachand) : Interventions? Ça va? Est-ce que
l'article 17 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Bachand) : Adopté. Merci.
Article 18. Mme
la ministre.
Mme
LeBel : Alors, l'article 18 : L'article 51 de ce code
est modifié par le remplacement, dans le texte anglais du deuxième
alinéa, de «warrant of arrest» par «warrant for witness».
Et je vais demander,
encore une fois, de verser mes commentaires précédents sur cet article.
Le
Président (M. Bachand) : Interventions sur l'article 18?
Ça va? Est-ce que l'article 18 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Bachand) : Adopté. Merci beaucoup.
Et on retourne
maintenant à l'article 15. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel :
Merci, M. le Président. Un petit instant, merci.
L'article 15 :
L'article 46 de ce code est modifié :
1°
par le remplacement, dans le texte anglais — bon, on est dans la même nature, pour une
partie — de ce
qui précède le paragraphe 1° du premier alinéa, de «warrant of arrest»
par «warrant for witness»;
2° par l'ajout, à la
fin du premier alinéa, du paragraphe suivant :
«4° si l'arrestation
a été effectuée dans une maison d'habitation au moyen d'un mandat ou d'un
télémandat d'entrée, permettre à ce témoin
et, le cas échéant, au responsable des lieux de prendre connaissance du mandat
ou, s'il n'est pas en possession de ce mandat, leur permettre d'en
prendre connaissance dans les plus brefs délais.»
L'article
proposé est une modification de concordance avec l'introduction au Code de
procédure civile du mandat d'entrée tel que proposé par l'article 27 du
projet de loi. Donc, on est encore un petit peu en avance de l'article 27,
encore une fois. La modification du texte anglais, ce sont les mêmes
commentaires que précédemment, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur
l'article 15? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M.
Tanguay : M. le Président, je veux juste bien comprendre.
Alors, à 46.4°, on ajoute un quatrième paragraphe à 46, on parle de «si l'arrestation a été
effectuée dans une maison d'habitation au moyen d'un mandat ou d'un télémandat d'entrée, permettre à ce témoin et, le cas échéant, au responsable des
lieux de prendre connaissance du mandat ou, s'il n'est pas en possession de ce mandat, leur permettre
d'en prendre connaissance dans les plus brefs délais.» On a beaucoup
parlé avec les groupes, en consultations, d'une nouvelle possibilité,
là — l'article
m'échappe, on pourra m'aider — d'entrer dans des résidences privées,
là. C'était à quel article?
Mme LeBel :
C'est à l'article 27, je pense, justement.
M. Tanguay :
C'était l'article 27. O.K.
Mme
LeBel : Oui, qui va être l'article 94.1, éventuellement, du Code de
procédure pénale.
M.
Tanguay : Et l'article
27, je ne sais pas si la ministre a déjà... peut nous annoncer, parce que,
là, on traite déjà de l'article 27, si elle aura substantiellement des
modifications, des amendements à l'article 27, parce
qu'il y a eu beaucoup de questionnements.
Là, je ne voudrais
pas, autrement dit, moi-même être pieds et poings liés en adoptant une... Avec
le quatrième paragraphe, on dit «au responsable des»... ou, s'il n'est pas
en possession de ce mandat... Là, on fait référence à un drapeau rouge. Est-ce que la nature des... Je vais être plus précis. La nature des
amendements que la ministre a en tête pour 27 requiert-il une modification,
un amendement à 46.4?
Mme
LeBel : Non, parce que,
dans la nature des amendements, il y aura... la nation d'un mandat d'entrée va demeurer
dans le... On va introduire une notion de
mandat d'entrée. Les discussions étaient sur les modalités, les critères, etc.
Donc, on pourra discuter, mais la notion de mandat d'entrée demeurera.
Donc, ce qu'on fait à
l'article 46, par le biais de l'article 15, c'est d'ajouter une obligation
supplémentaire, c'est-à-dire d'exhiber le mandat d'entrée ou de le produire le plus rapidement possible. Mais la notion de mandat d'entrée va
demeurer dans le Code de procédure pénale, parce que ce n'était pas la notion
même qui était discutée, c'étaient les modalités.
M.
Tanguay : O.K.
Est-ce que j'ai raison de penser qu'il s'agira, le cas échéant, d'une... il
s'agirait d'une nouveauté dans le Code de procédure pénale que de faire
des entrées sans mandat?
Une voix :
Sans mandat d'entrée.
M. Tanguay :
Sans mandat d'entrée.
Mme
LeBel : On vient d'ajouter
une notion supplémentaire d'obtenir un mandat d'entrée dans des
circonstances particulières qui n'existent
pas dans le code. Et on pourra en parler plus à l'article 27, où on va
introduire la notion, mais on vient d'ajouter une notion supplémentaire
d'autorisation judiciaire, là.
Le Président (M. Bachand) : Interventions? Le temps file. Ça va? Est-ce qu'il y a
des... Je ne veux pas vous pousser, là, avec le temps qui file, là. Ce
n'est pas ça, mon but.
M. Tanguay :
J'aurais besoin d'une suspension, M. le Président, là. Je ne sais pas si vous
voulez... On pourra peut-être suspendre, tu sais, on pourrait peut-être régler
ça, même dans le peu de temps qu'on a.
Le
Président (M. Bachand) : O.K. Alors, on va
suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 58)
(Reprise à 18 heures)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il
vous plaît! Il y a des conversations qui se déroulent. Le temps, malheureusement,
file.
Alors donc, compte
tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.
Merci.
(Suspension de la séance à
18 h 01)
(Reprise à 19 h 33)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre s'il
vous plaît! Bon début de soirée.
La Commission des
institutions reprend ses travaux. Comme vous le savez bien sûr, je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la petite sonnerie
de leurs appareils électroniques.
Je
vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi
visant principalement à favoriser l'efficacité de la justice pénale et à
établir les modalités d'intervention de la Cour du Québec dans un
pourvoi en appel.
Avant
de débuter, j'aurais besoin d'un consentement pour permettre au député de
Vachon de remplacer la députée de Bellechasse pour le reste de la
séance. Est-ce qu'il y aurait consentement?
Des voix :
Consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Consentement. Alors, Mme la
députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Weil :
Oui, M. le Président. Je vous demanderai si ce serait possible de suspendre
quelques minutes.
Le Président
(M. Bachand) : Parfait. Alors, je vais suspendre quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à
19 h 34)
(Reprise à 19 h 37)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Lors
de la suspension de nos travaux cet après-midi, les échanges portaient sur
l'article 15. Y a-t-il des interventions? M. le député de Gouin, s'il
vous plaît.
M.
Nadeau-Dubois :
...informellement avant notre suspension, mais je proposerais à la ministre
qu'on suspende 15, le temps qu'on se
rende à l'article 27 qui va introduire le mandat d'entrée. Comme ça on
sera peut-être mieux informés pour nos discussions sur
l'article 15.
Le
Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement, Mme la
ministre?
Mme LeBel :
Absolument.
Le
Président (M. Bachand) : Parfait. Il y a consentement? Donc,
l'article 15 est suspendu. Article 16.
Mme
LeBel : Si vous me permettez, M. le Président, je vais prendre
l'occasion de l'article 16 pour vous faire une demande de
suspension de plusieurs articles en blocs. Ce sont les articles qui, à l'instar
de l'article 15 et de l'article 27, correspondent au mandat d'entrée.
Je dois dire que j'ai
encore quelques vérifications à faire, j'ai des choses que je veux proposer ou,
en tout cas, il y a des décisions que j'ai à
prendre, puis il y a de nouveaux éléments qui nous sont parvenus, qui font en
sorte que j'ai besoin d'un temps de réflexion pour être à même de faire
une... prendre une décision réfléchie ou d'avoir une discussion réfléchie avec mes collègues. Ça implique un
groupe d'articles, je peux peut-être proposer de les suspendre tout de suite,
et on pourra, par contre, à ce moment-là, quand on arrivera dans le bloc mandat
d'entrée à une autre séance, parce que, de
toute façon, malgré l'optimisme qui m'habite, je ne pense pas qu'on passe à
travers le projet de loi ce soir, on pourra les faire à un autre moment.
Donc, ce serait...
bon, 15 est déjà suspendu, il s'agirait des articles 16, 21, 22, 23, 24,
27, complémentaire 58. C'est des articles qui ont tous rapport, soit par
concordance, soit pour le coeur, au mandat d'entrée, la notion de mandat d'entrée. Alors, on pourra les traiter dans un
autre bloc, si vous le permettez puis s'il y a consentement de mes collègues.
Une voix :
...
Mme
LeBel : 15 est déjà fait, mais je vais les faire en bloc : 15,
16, 22... excuse-moi. 15, 16, 21, 22, 23, 24, 27 et 58.
Le
Président (M. Bachand) : Interventions? M.
le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Oui. Moi,
je n'ai pas de... si c'est pour améliorer l'efficacité de nos travaux, je
n'ai aucun problème. Est-ce que, par
contre, on pourrait s'entendre que, lorsque nous allons aborder ce groupe
d'articles là, qu'on puisse débuter par, je crois, qu'on me détrompe si
j'ai tort, mais par... l'article le plus substantiel serait le 27, j'imagine?
Mme LeBel :
Bien, je crois que c'est 27, mais je peux vous en...
M. Tanguay :
Ça pourrait être notre porte d'entrée à ce moment-là.
Mme LeBel :
Mais je peux m'engager à ce qu'on commence par celui qui est le plus
substantiel, oui.
M.
Tanguay : Plutôt
que de recommencer à 16, qu'on commence par 27, puis après ça, on verra, quitte
à partir du 27 à un autre puis...
Mme
LeBel : Compte tenu qu'on avait déjà ramené 15 après 27, il n'y a pas de problème avec ça, si tout le monde est
d'accord, naturellement.
M. Tanguay :
Consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.
Merci beaucoup.
Donc,
l'article 19, Mme la ministre, on l'avait adopté... juste vous rappeler qu'on
avait adopté les articles 17 et 18 avant la suspension.
• (19 h 40) •
Mme
LeBel : Merci. L'article 19, M. le Président. Alors : L'article 72
de ce code est modifié :
1°
par le remplacement, dans le premier alinéa, de «ses noms et adresse, s'il ne
les connaît pas» par «son nom, sa date de naissance et son adresse ou qu'elle
lui présente une pièce d'identité sur laquelle sont inscrits ces
renseignements»;
2° par le
remplacement du deuxième alinéa par le suivant :
«L'agent
qui a des motifs raisonnables de croire que cette personne ne lui a pas déclaré
ses véritables nom, date de naissance
et adresse ou qu'elle lui a présenté
une fausse pièce d'identité ou une pièce d'identité qui ne lui appartient pas
peut exiger de cette personne qu'elle lui fournisse des renseignements
additionnels permettant de confirmer son identité.»
Le commentaire qui se
rapporte à l'article principal est le suivant : Est proposé, pour
permettre à un agent de la paix qui a des
motifs raisonnables de croire qu'une personne a commis une infraction, d'exiger
de cette personne qu'elle lui déclare sa date de naissance ou qu'elle lui
présente une pièce d'identité permettant de confirmer son identité. Cette
modification permettra de renforcer la
preuve de l'identité de la personne arrêtée et de prévenir qu'une personne
donne de fausses informations et qu'une poursuite soit intentée contre
un tiers innocent.
J'aimerais introduire
un amendement, M. le Président. Article 19 : À l'article 19 du projet
de loi, qui modifie l'article 72 du Code de procédure pénale :
1°
supprimer, dans le paragraphe 1° et après «sa date de naissance et son
adresse», «ou qu'elle lui présente une pièce d'identité sur laquelle
sont inscrits ces renseignements»;
2°
supprimer, dans le paragraphe 2° et après «date de naissance et adresse», «ou
qu'elle lui a présenté une fausse pièce d'identité ou une pièce
d'identité qui ne lui appartient pas».
L'amendement
proposé retire les modifications apportées par le projet de loi qui
permettaient à un agent de la paix ayant des motifs raisonnables de croire
qu'une personne a commis une infraction d'exiger qu'elle lui présente une pièce
d'identité. Cette notion est retirée.
Cet amendement donne
suite aux préoccupations exprimées lors des consultations particulières par le
Barreau du Québec et l'Association
québécoise des avocats et avocates de la défense concernant le fait que cette
disposition puisse avoir pour effet d'exiger qu'un citoyen ait en sa
possession en tout temps une pièce d'identité.
Il
donne également suite aux préoccupations de l'Association des juristes
progressistes, notamment celle concernant le fait que ces modifications
augmenteraient le potentiel de vérification arbitraire.
Enfin,
il donne suite à un commentaire de la CDPDJ de ne pas adopter les dispositions
proposées par le projet de loi concernant l'exigence de la pièce d'identité.
Ce
qui demeure ou ce qu'on garde comme notion, c'est que, présentement... je vais
hors script, mais présentement, dans
l'article actuel, un policier, pour faire une identification, peut demander le
nom et adresse. Les préoccupations des policiers
quant aux fausses identifications, aux constats qui sont signifiés à des
mauvaises personnes ou, en tout cas, des mauvaises identifications,
demeurent. En introduisant la notion d'avoir la capacité de demander la date de
naissance en plus du nom et de l'adresse, on
vient répondre à la préoccupation des policiers d'avoir une identification plus
précise, donc d'éliminer les erreurs d'identification, mais on retire
toute la notion, qui était problématique, d'exiger une carte d'identité, qui avait, à tort, et je le dis,
l'impression... donnait l'impression qu'on créait une infraction de ne pas
avoir sa carte d'identité, donc enlève la notion de la carte d'identité ou de
l'effet potentiel collatéral, qui n'était pas l'effet que je pense que le projet
de loi avait, mais que je comprends les préoccupations d'avoir fait que les
gens doivent se présenter avec une
carte d'identité en tout temps, mais on introduit juste un élément
supplémentaire d'identification. À la notion de nom et d'adresse, on ajoute la date de naissance pour
avoir une plus grande précision dans l'identification. Mais, dans l'essentiel,
l'article demeure le même qui est celui au Code de procédure pénale
actuellement.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Est-ce que vous
désirez une suspension ou ça va? Ça va?
M. Tanguay :
Oui. Je peux prendre la parole, si vous me la confiez.
Le
Président (M. Bachand) : O.K. M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Oui. Alors, dans deux temps... D'abord, en premier
temps, bien, je salue l'ouverture dont fait preuve Mme la ministre en déposant
l'amendement aux préoccupations qui étaient exprimées. Alors, le fait de
retirer l'obligation de produire une pièce d'identité sur laquelle sont
inscrits ces renseignements répond, je crois, en partie aux préoccupations.
Il demeure un élément
aussi, et j'aimerais peut-être entendre la ministre là-dessus sur sa
compréhension, mais, au-delà de sa
compréhension des outils dont les policiers disposent, peut-être nous faire un
état des lieux. Notre compréhension était à l'effet que la personne, on la
lui... on lui demande, tel que libellé, 72, de fournir son nom et son adresse.
Là, en ajoutant son nom, son adresse et sa
date d'identité, ai-je raison de croire que les policiers, policières ont
l'outil nécessaire? En faisant une
recherche, dans leur voiture, sur l'outil qu'ils ont pour identifier, ils
pourront coupler le nom, l'adresse, date de naissance, et tout de suite,
dans le fond, savoir que c'est effectivement cette personne-là et avoir
beaucoup d'information? Alors, j'aimerais
que la ministre puisse nous dire si elle sait ou pas que cet outil-là existe,
et peut-être, le cas échéant, nous préciser quels renseignements sont
disponibles dans les autos-patrouilles pour les policiers.
Mme
LeBel : Alors, M. le Président, l'avantage de travailler en équipe, c'est d'avoir souvent des gens qui
sont plus aptes à répondre. Alors, je vais demander au député de Vachon
s'il peut peut-être voir et répondre à cette question pour mon
collègue.
M. Lafrenière : Oui, absolument. Merci, M.
le Président. En ajoutant la notion
de date de naissance, ça va permettre aux
policiers, justement, d'aller faire une double interrogation, c'est-à-dire soit dans la banque de la Société
de l'assurance automobile du Québec pour les gens qui ont vraiment
un permis de conduire, d'un côté, et, de l'autre côté, dans la banque aussi...
le registre criminel. Si la personne a un dossier criminel, elle est
recherchée, ils vont pouvoir le voir, c'est clair.
Le problème,
présentement, avec 72, c'était que c'étaient le nom et l'adresse seulement.
Alors, pour un policier, de faire une
recherche par nom et adresse, c'était très difficile. Alors, la date de naissance
vient clarifier qu'on a bel et bien la bonne personne devant nous.
M.
Tanguay : Je m'en
excuse, j'ai manqué le début, puis c'est de ma faute. Donc, il y a
deux... Essentiellement, dans les voitures de police, il y a... Puis là
on parle du SPVM ou de façon...
M.
Lafrenière : Il faut faire attention quand... Oh! excusez. Là, je
tombe dans un échange.
M. Tanguay :
Non, il n'y a pas de problème. Oui, c'est correct. Non, allez-y, allez-y.
M.
Lafrenière : Il faut juste faire attention parce que ce n'est pas
une... avant de faire une généralité, là, une généralisation
de tout ça. Dans certains véhicules de certains services de police, ceux qui
ont accès au CRPQ, au Centre de renseignements policiers du Québec, il y
a deux banques. Il y a la Société de l'assurance automobile du Québec pour ceux
qui ont un permis de conduire, et, pour ceux qui ont des infractions
criminelles, qui ont déjà eu un dossier criminel, ce n'est pas le cas pour
personne ici, là on se retrouve avec le dossier criminel, le DPE.
Alors,
c'est deux banques possibles, mais vous comprenez qu'une personne qui n'a pas
de permis de conduire, qui n'a jamais été accusée au criminel ne se
retrouverait pas dans aucune de ces deux banques-là.
On
vient de donner un outil supplémentaire au policier pour vérifier que la
personne qui est devant lui, celle qui a fait une infraction, c'est bel
et bien la bonne personne avec le nom auquel il s'identifie.
C'est
pour ça, l'élément date de naissance devient important pour scinder... Nom et
adresse, pour mettre ça très clair,
M. le député, si on fait une recherche par nom et adresse, c'est pratiquement
impossible. Ça prend absolument la date de naissance dans les deux
banques.
Le
Président (M. Bachand) : ...député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M.
Tanguay : Oui. Donc,
je comprends qu'évidemment la personne avec un permis de conduire, on va
pouvoir... Et permis de conduire... donc la photo est disponible, de la
personne, dans ce système-là, CRPQ?
M.
Lafrenière : Ma réponse
honnête avec vous : malheureusement pas. Comme vous le savez, il y a
une demande qui a déjà été faite dans le passé pour que les photos
soient enlevées du registre de la Société de l'assurance automobile du Québec.
Alors, elle est présente sur votre permis de conduire, mais elle n'est pas
présente dans la banque de données. Je vous dis «malheureusement pas»
pour un but d'identification, vous comprenez.
M.
Tanguay : O.K.
Puis c'est correct. Le collègue, il dit : malheureusement pas, mais là-dessus
je peux vous dire qu'on ne loge peut-être pas à la même enseigne. Moi, je pourrais peut-être...
L'objectif, donc... Et dossier criminel, même chose,
il n'y a pas de photo.
Dans
le fond, ce que le policier, policière aura comme confirmation, c'est que la
personne lui a dit que monsieur X
à telle adresse et en telle date de naissance, ça concorde. Mais, à la fin de
la journée, ça pourrait ne pas être la personne qui est devant vous
comme policier.
M.
Lafrenière : Je ne veux pas donner toute la recette aux gens qui ont
des mauvaises intentions, mais je vous rappellerai
que, sur votre permis de conduire, il
y a votre grandeur et la couleur de
vos yeux. C'est un élément de plus pour le policier pour s'assurer qu'on a la bonne personne devant nous, puis il y a
d'autres éléments qu'on va vérifier avec des... que les policiers vont
vérifier avec des questions pour s'assurer que c'est la bonne personne.
M.
Tanguay : Donc, merci
beaucoup, puis on pourra peut-être échanger. Donc,
SPVM, c'est sûr qu'ils l'ont, selon votre...
M.
Lafrenière : Oui. Puis juste mettre ça clair, c'est parce que vous
faisiez référence à un ordinateur dans le véhicule.
Les terminaux véhiculaires, c'est sûr pour le SPVM. Tous les services de police
au Québec y ont accès, dans le pire des cas, par téléphone,
c'est-à-dire à distance avec un répartiteur. On va
l'identifier, ils vont avoir la confirmation, donc l'adresse — ils
vont pouvoir confirmer que c'est la bonne adresse — la description de la
personne, et, dans le cas d'un dossier
criminel, il y a d'autres éléments aussi physiques, cicatrices ou
d'autres choses comme ça, pour s'assurer que la personne, exemple, qui serait recherchée par un mandat, c'est bel
et bien la bonne personne qu'on a devant nous. Et, dans les deux cas,
pour mettre ça très clair pour vous, il n'y a pas de photo.
M. Tanguay :
Il n'y a pas de... Pardon?
M.
Lafrenière : Il n'y a pas de photo.
• (19 h 50) •
M.
Tanguay : O.K. On
peut voir, M. le Président... puis merci beaucoup au collègue de Vachon de nous donner ça, mais on peut voir qu'il y a
un arbre qui cachait peut-être la forêt, là, en ce qu'on retire, oui, puis
je salue la ministre pour ça, c'est un pas dans la bonne direction, on
retire l'obligation de produire une pièce d'identité qui pourrait, le cas
échéant, avoir une photo, j'en
conviens, mais, lorsque l'on garde l'ajout nom, adresse, mais on ajoute date de
naissance, là, beaucoup plus qu'une pièce d'identité, on peut avoir
énormément d'informations sur la personne pour nous permettre de
l'identifier.
Alors, les griefs, entre guillemets, les bémols
qui ont été exprimés quant à la production obligatoire d'une pièce d'identité demeurent et sont même, je vous dirais,
galvanisés, si l'on exige que la personne nous donne la date de naissance,
parce que... et je fais écho de tout ce qui a été dit, mais précisément de
l'Association des juristes progressistes qui nous disait, à la
page 7 : «La common law considère que décliner son nom et son adresse
est suffisant. Lorsqu'une personne a l'obligation de s'identifier à un agent de la paix, la date de
naissance n'est en effet pas une information requise pour engager une poursuite contre un défendeur. Elle est
extrinsèque au processus pénal qui se soucie uniquement
de viser une personne identifiée et de pouvoir communiquer à la personne
en cas de besoin.»
Ici, M. le Président, ce qui était donc, oui,
pièce d'identité, on le retire parce que là il y a peut-être un danger de profilage, mais là, si on ajoute la date de
naissance, je vous dirais, bien plus qu'une pièce d'identité, dont les
informations sont très limitées, là on a accès à tout un univers de
renseignements et d'information qui peut parfois être intrusif parce que... Encore une fois, rappelons-nous du
contexte, là. L'agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu'une
personne a commis une infraction peut exiger qu'elle lui déclare... et là c'est
l'écueil, puis on ne vise pas les policiers, policières, M. le Président, qui auront toujours agi de bonne
foi puis qui agissent de bonne foi. Lorsqu'on parle de danger de profilage,
c'est d'arrêter une personne, de pouvoir prétendre qu'il a un motif
raisonnable... dans certains cas, ce n'est pas justifié, donc c'est ça, la définition même du profilage, et là,
en exigeant la date de naissance, bien là, on a accès à tous ces
renseignements-là.
Question peut-être à la ministre ou au collègue
de Vachon : La personne qui refuse de donner autre chose que sa date de naissance, ou lorsque vous vous rendez
compte que le nom, adresse, date de naissance, ça ne concorde pas, ou si
vous avez un motif... le policier, comment il... qu'est-ce qui se passe par la
suite?
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Vachon, s'il vous plaît.
M.
Lafrenière : Si vous me permettez, je vais répondre à votre question
puis je vais revenir sur votre interrogation générale aussi. Alors, oui, par la
suite il peut y avoir arrestation pour une personne qui refuserait de
s'identifier ou qui donne un faux nom.
Je vais me permettre une petite parenthèse un
instant, parce que je sais que ça vous intéressait beaucoup aussi, le dossier de chez Desjardins. Vous vous rappelez,
on était ensemble dans les audiences qu'on a eues, les gens qui sont venus
nous parler de Desjardins, et on a des
collègues aussi de l'opposition qui ont fait entendre des gens qui s'étaient
fait voler leur identité et qui disaient à quel point c'était horrible
d'essayer de retrouver son identité. Je pense qu'aujourd'hui, si je peux me permettre ce commentaire important pour
nos victimes, une personne qui se fait passer pour vous, qui reçoit des constats d'infraction à répétition... il y a même
des gens qui se sont retrouvés avec des mandats d'arrestation contre eux parce
qu'une personne avait subtilisé leur identité. Je pense que ce qui est ciblé
aujourd'hui, c'est de s'assurer que la personne
qu'on a devant nous, c'est bel et bien la personne qui s'est identifiée, pour
s'assurer que, je ne sais pas, quelqu'un d'autre avec un nom de Gabriel Nadeau-Dubois qui pourrait s'identifier,
et se faire passer pour lui, et accumuler des constats, alors un point qui est
important pour être capable de retrouver qui c'est. Puis n'oubliez pas, on
parle, dans un cas, d'une infraction.
Ce n'est pas une intervention aléatoire, c'est une personne qui aurait commis
une infraction. On veut s'assurer que la personne qui est devant nous,
c'est bel et bien la bonne personne.
Et je peux vous dire, pour avoir fait ce
métier-là pendant 26 ans, que des gens qui vont de la supposition de
personnes, qui se font passer pour quelqu'un d'autre, il y en a énormément et
ça a des conséquences incroyables. Imaginez-vous un instant, quelqu'un se
ferait passer pour vous, accumule des constats, ne les paie pas, mandat d'arrêt
par la suite, vous vous présentez aux
douanes, vous vous faites interpeler, arrêter. Et c'est ce qu'on s'est fait
présenter dans le débat sur
Desjardins, des gens qui avaient perdu leur identité, d'autres s'étaient fait
passer pour eux. Ça a des conséquences qui sont très néfastes.
M. Tanguay : Là-dessus, M. le
Président, oui, il touche un point, mais on ne peut pas le généraliser à tous
les cas de vol d'identité, parce que la
personne a une identité qui lui est propre, va décliner la vraie. Mais ça ne
veut pas dire que par ailleurs elle
n'a pas usurpé l'identité de monsieur X, de monsieur Y, et ainsi de
suite. Autrement dit, il ne s'agit pas là, M. le Président, en tout
respect, d'un filet par lequel systématiquement nous prendrions celles et ceux
qui auraient volé l'identité de
tiers. Parce qu'on prend pour acquis que, si je suis un voleur d'identité, vous
m'interpelez, force est de constater que je ne vais pas vous donner l'identité
de quelqu'un d'autre que j'aurais fraudé en prenant son identité. Je vais vous
donner mon identité, puis vous ne verrez rien, là.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Vachon.
M.
Lafrenière : Si je peux me permettre, vous avez raison que le nec plus
ultra était la carte d'identité, et, pour d'autres raisons aujourd'hui, on se
dit que peut-être qu'on va causer plus de préjudices que de bien. En donnant la
date de naissance, on se rajoute une façon
de plus pour les agents de la paix de confirmer que c'est bel et bien la bonne
personne. Si vous me dites :
Est-ce que c'est 100 %?, vous avez raison que non. La meilleure chose,
c'était la carte d'identité, mais ça cause d'autres préjudices. C'est pour ça
qu'en ajoutant la date de naissance, ça me permet, dans des systèmes qui
existent déjà, de m'assurer que vous êtes
bel et bien la personne que vous prétendez d'être, sinon je vais vous
dire que moi, c'est Ian Lafrenière, je reste sur la rue Fabre. Et vous
avez raison, je peux dire n'importe quoi, mais en plus il n'y a aucun outil
pour vérifier que c'est vrai. Alors, je vais être obligé de prendre pour
acquis que c'est vrai.
Et,
je vais terminer avec ça, M. le député, tantôt vous avez dit : Les gens de
la cour, les procureurs nous ont dit que ça causait un problème de donner la
date de naissance. Mais dans tout dossier de cour, la date de naissance de l'individu
est mentionnée, on s'en sert pour
l'identifier correctement. Alors, je pense que c'est le même système qui
s'applique ici. On veut s'assurer que
la personne qui est interpelée, c'est bel et bien la personne qui va avoir un
constat et non pas quelqu'un d'autre.
Le
Président (M. Bachand) : O.K. J'ai Mme la ministre aussi.
Mme
LeBel : Il faut revenir à la
base, M. le député. Mon collègue de Vachon l'a bien dit, tout ça
s'enclenche à partir du moment où l'agent de la paix a des motifs
raisonnables et probables de croire qu'une infraction a été commise. Et,
écoutez, si l'infraction a été commise... si une infraction est commise par une
femme qui s'identifie comme étant Sonia
LeBel à telle adresse, avec telle date de naissance, et que dans les systèmes
ça permet de confirmer que je suis bien qui je prétends être par mes
noms, ma date de naissance et mon adresse, et qu'on retrouve dans les banques
de données qu'il y a aussi un mandat d'arrestation contre moi, bien, je
m'excuse, mais on ne peut pas... ce n'est pas une question de créer des infractions contre les gens, c'est de
s'assurer que la personne qui est devant moi, pour laquelle j'ai des motifs
raisonnables et probables de croire qu'elle a commis une infraction, quand elle
s'identifie, parce qu'elle doit s'identifier pour
l'émission du constat, elle me donne la bonne identité et que je ne fais pas en
sorte d'envoyer un constat d'infraction à une mauvaise personne ou de
créer un préjudice à quelqu'un qui n'a pas commis d'infraction et qui va
recevoir ledit constat. Donc, c'est simplement...
Et on comprenait parfaitement
bien les préoccupations qui étaient émises, mais, dans la carte d'identité, la vraie préoccupation, c'était le fait qu'on
prétendait... je veux dire, on prétendait, mais on a quand même répondu à cette
préoccupation-là, on prétendait qu'on venait créer une infraction
supplémentaire de ne pas avoir de carte d'identité sur soi et on prétendait qu'on obligeait par le fait
même, de façon indirecte, à tout citoyen du Québec de se promener avec des
papiers d'identité. Vous vous souviendrez, on a eu l'exemple de la personne qui
fait du jogging, là, tu sais.
Donc, l'idée... on a
entendu cette situation-là, bien que je continue à réitérer que ce n'était pas
le cas, parce que je veux être bien sûre
que, un, ce n'était pas l'intention. Je considère que ce n'était pas le cas.
Mais, comme l'objectif poursuivi était de s'assurer que la personne
qu'on a devant nous est bien celle qu'elle prétend être, bien, on considère, à ce stade-ci, que l'ajout de la date de naissance
vient nous donner une information supplémentaire — parce que, souvent, c'est par plusieurs informations, hein, où on dit
qu'on peut s'assurer de l'identité d'une personne — vient répondre à cet objectif tout en
restant prudent sur les conséquences potentielles du premier objectif,
c'est-à-dire la carte d'identité, qui était,
pour reprendre les termes de mon collègue de Vachon, le nec plus ultra en
matière d'identification, parce que l'objectif, c'était d'identifier et
non pas de profiler. On a entendu les commentaires.
Mais il faut répondre
tout de même à la préoccupation, et c'est un cas réel, c'est un fait vécu au
quotidien, des constats d'infraction qui sont émis au nom de la mauvaise
personne parce qu'il y a eu des suppositions de personne et qu'à partir du moment où je donne un nom et une
adresse et que le policier n'a pas des motifs raisonnables de croire que je lui
ai menti, il ne peut pas passer à la seconde étape. Donc, on lui donne une
information supplémentaire, mais toujours... c'est toujours enclenché
pas parce que je t'ai vu passer dans la rue puis ça me tente de te poser la
question, parce que j'ai des motifs, comme
agent de la paix, raisonnables et probables de croire que tu as commis une
infraction, qui est quand même un certain degré d'intervention qui
demande un certain niveau, là. Je veux dire, ce n'est pas des soupçons, ce n'est pas : Je pense que, je ne sais pas, tu
as l'air d'avoir commis une infraction. J'ai des motifs raisonnables et
probables de croire que tu as commis une infraction, la personne devant moi.
Maintenant, vous devez, personne, vous identifier pour que je puisse
émettre mon constat d'infraction.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin, s'il vous
plaît. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
• (20 heures) •
M.
Nadeau-Dubois : L'article 19, dans son état original, avait été
grandement critiqué. Puis d'abord je veux saluer quand même... bien, pas quand même, je veux saluer l'amendement de la
ministre, qui a tenu compte de ces commentaires-là, parce qu'ils étaient en effet inquiétants, puis
c'est de bonne... c'est tout à son honneur d'avoir entendu et d'avoir fait un
amendement d'entrée de jeu. Ça vient, cet
amendement-là, retirer une partie, une bonne partie du malaise énorme qui avait
été créé par l'article 19 initialement.
Par contre, je pense
qu'il n'est pas complètement disparu, ce malaise-là, puis je m'explique. Dans
son mémoire, l'AJP nous rappelait quand même
quelque chose d'important. Elle nous rappelait que le droit à la vie privée,
qui est protégé constitutionnellement, bien, de ce droit-là découle
aussi un droit à la non-divulgation de l'identité puis un droit qui, comme tous les droits, n'est pas absolu, là, et
que donc il fallait, au cas par cas, à chaque fois qu'on empiète sur ce droit,
avoir des bonnes raisons de le faire comme... et, quand on a des bonnes raisons
de le faire, on peut le faire, bien sûr.
Et
c'est un peu dans ce sens-là que j'aimerais entendre la ministre, parce que,
même s'il ne s'agit plus de fournir une carte, mais seulement une date de
naissance, on fait quand même un pas de plus dans ce qu'on demande au citoyen
qui est interpelé de fournir comme
informations. Donc, de ce point de vue là, on empiète un peu plus sur ce droit
à la vie privée. Ce n'est pas un péché nécessairement, mais ça doit être
justifié quand même pour des bonnes raisons. Et moi, ce que j'aimerais entendre de la part de la ministre, c'est des
justifications sur cet empiétement-là. Qu'est-ce qui fait que, dans la
situation actuelle, que c'est nécessaire puis que c'est dans l'intérêt
public que d'aller dans cette direction-là?
Puis je pense que, pour
initier cette discussion-là avec la ministre, ma première discussion serait de
dire... ma première question serait
d'essayer de cibler c'est quoi, le problème actuellement? Quel est
actuellement... Est-ce qu'il y a un problème grave, majeur de mauvaise
identification quand on donne des constats d'infraction en matière pénale?
Est-ce qu'on peut nous donner des chiffres, par exemple, pour venir quantifier
ce phénomène-là? Parce que, pour qu'on
prenne une décision éclairée sur la pertinence d'ajouter la date de naissance,
je pense que c'est une première question intéressante. Jusqu'à quel
point est-ce qu'on vient répondre à un problème qui est réel? Est-ce qu'on a
quantifié ce problème-là? Est-ce qu'on est en mesure de nous dire quelle est
son ampleur? Parce que je ne doute pas que ça puisse arriver, mais est-ce que ça arrive à un point tel que ça nécessite cet
amendement législatif là? C'est ça, ma question : Est-ce qu'on a
des chiffres pour quantifier le problème des mauvaises identifications, et je
précise, dans le cadre de constats d'infraction de nature pénale?
Le Président
(M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel :
Je vais fournir la première partie de la réponse puis je vais demander à mon
collègue le député de Vachon peut-être d'aller sur la deuxième partie.
En première partie, je vous dirais que, de façon
générale, la bonne raison ou la justification qui permet de faire, je reprends
les termes sans les adopter, de mon collègue, de l'accroc à ce droit à la vie
privée, si on veut, c'est justement les motifs raisonnables et probables de
penser que la personne a commis une infraction.
Ceci étant dit, pour ce qui est de la nécessité
terrain, si on veut, je vais peut-être laisser mon collègue le député de Vachon de répondre un peu, effectivement, sur
les difficultés, présentement, pratiques qu'on a pour identifier des gens qui, à la base, revenons à la base, là, qui ont
commis des infractions, c'est-à-dire où on a atteint le niveau des motifs
raisonnables et probables de commettre des infractions. On n'est pas au
niveau du citoyen qui se promène sur la rue, à qui on peut demander. Au Québec,
on ne peut pas interpeler un citoyen sans raison, sans motif pour lui demander
son nom, son adresse, sa date de naissance.
On évacue ça. Donc, on est dans le créneau supplémentaire de la partie
restreinte de citoyens envers
lesquels on a des bonnes, bonnes, très bonnes, motifs raisonnables et
probables, raisons de penser qu'ils ont commis une infraction, et
l'objectif, c'est de leur délivrer un constat d'infraction.
On a parlé de
signification tantôt, là, puis de moyens de significations, de modes de signification,
encore faut-il savoir à qui signifier, hein? Donc, ça, c'est... il faut
juste recadrer la discussion dans cet ensemble de personnes là. Maintenant, il y a, avec les outils qui sont là,
c'est-à-dire actuels, date de naissance et adresse, des problèmes réels
d'application pratique et des conséquences réelles sur des citoyens qui
ne sont pas dans la catégorie des gens visés, c'est-à-dire le citoyen innocent, qui n'a rien fait, qui reçoit un
constat d'infraction parce qu'on a mal identifié, à la base, la personne qui
avait des motifs raisonnables et probables.
Puis mon collègue peut peut-être vous donner plus de détails au niveau de la
pratique.
Le Président
(M. Bachand) : M. le député de Vachon, s'il vous plaît.
M. Lafrenière :
Oui. J'ai bien entendu votre question, collègue de Gouin, concernant les
chiffres puis je ne ferai pas semblant, je n'ai pas de chiffres de supposition
de personnes. Je vais vous parler de cas vécus cependant puis je vais
prendre un petit peu l'exemple qu'on a vécu
avec les gens de Desjardins, qui nous ont expliqué à quel point c'était
difficile de retrouver leur identité et tout ça.
Ce que je
peux vous dire, c'est des conséquences qui sont horribles. Vous pouvez vous
imaginer, vous êtes avec la petite famille... puis je l'ai vécu à Montréal, les
gens me disaient : Ils traînaient tous tout avec eux. Ils avaient leurs
passeports, ils avaient tout ce qui existait de carte d'identité pour
dire : Je sais ce que vous pensez, vous pensez que je suis une personne qui est recherchée, parce que je
me fais interpeler souvent, et quand j'identifie, parce qu'il y a une personne
qui utilise mon identité, voici qui je suis. Puis elle sortait toutes les
feuilles puis elle était désespérée, parce qu'à chaque fois qu'elle passait aux douanes, ça sonnait. Partout où elle allait
puis qu'elle s'identifiait, ça sonnait. Pour elle, c'est une conséquence. Vous allez me dire, c'est une
personne, puis j'en ai vu plusieurs dans ma carrière, mais pour cette
personne-là c'est horrible, les conséquences
que ça amenait, parce qu'un simple petit événement comme passer aux douanes se
transformait en calvaire pour elle. Pardonnez-moi l'expression. Première
chose.
Deuxième des
choses, tout à l'heure, j'ai répondu au collègue de LaFontaine puis je vais me
permettre de rajouter un élément, parce que j'ai oublié de vous dire
quelque chose, collègue de LaFontaine, puis c'est important. Vous avez parlé... on a parlé des banques de données
ensemble tout à l'heure, donc la Société de l'assurance automobile du Québec et
la banque criminelle aussi. Il y a un élément hyperimportant à vous mentionner
devant cette commission, un policier qui interroge ces banques-là, ça
laisse une trace. Alors, si moi, comme policier, j'interroge votre nom, votre
prénom, votre date de naissance qui se rajoute à ça avec l'adresse, ça laisse
une trace par la suite, et, comme policier, avec la déontologie policière, si j'ai fait une intervention... si
j'ai décidé d'aller dans une banque pour aucun motif valable, je peux perdre
mon emploi, puis il y a des policiers qui ont perdu leur emploi aussi.
Alors, vous avez tantôt évoqué le profilage
racial, tu sais, des interventions qui ne seraient peut-être pas justifiées.
Comme gestionnaire policier, ce que j'étais quand j'ai quitté, ça me
permettrait de savoir si mes agents, les gens
qui travaillaient pour moi ont fait des interpellations qui étaient
fondées ou pas. Si vous me donnez juste votre nom, votre prénom, votre adresse,
il y a un constat qui va être écrit, mais je n'ai aucune trace physique dans
la banque de données. Avec l'interrogation qui va être faite, et ça, je
ne vous dirai pas pendant combien de jours ça reste, mais c'est très longtemps, le policier pourrait être dans le pétrin s'il
l'a fait pour des mauvais motifs. Ça
fait que ça nous donne une
raison de plus de vérifier les interrogations qui sont faites.
Et, je reviens à la base,
ça nous permet de s'assurer que la personne qui est devant nous, c'est vraiment
la personne qui a fait l'infraction, pour éviter ce que je vous disais tout à
l'heure, collègue de Gouin, d'avoir une personne qui n'a pas absolument rien à
se reprocher. Puis, on va être honnêtes entre nous autres, souvent, c'étaient
des gens de la même famille, hein, des
frères, des gens proches, qui ne s'aiment pas nécessairement, puis c'est le
frère qui a pris l'identité. Mais ces personnes-là, je vous dis, quand on les rencontrait, on
parlait d'une personne qui a perdu son crédit, mais une personne
qui se fait supposer son identité, qui se la fait voler, c'est horrible, les
conséquences. C'est horrible parce qu'il sait que son frère a une vie criminelle, il se
fait passer pour lui puis il dit... en avance, là, tu l'interceptes, puis il
dit : Je vous le dis, vous allez trouvez de quoi dans le... Ce n'est pas
moi. Ce n'est pas moi, c'est mon frère, je le sais. Mais ça prenait une demi-heure, une heure. Mais, pensez, il
est avec sa petite famille puis lui, écoute, il est désespéré de voir que
ça lui arrive encore une fois.
Alors, c'est des conséquences qui sont vraies.
Je ne vous arriverai pas avec des chiffres, mais, du côté humain, c'est une
conséquence qui est vraiment fâcheuse pour une personne qui n'a absolument rien
à se reprocher. Puis je vous répète encore une fois que pour un policier, lorsqu'on fait une interrogation, une vérification avec nom, prénom, date de naissance dans un système, ça laisse
une trace et ça nous permet, comme gestionnaire, de s'assurer que l'intervention
policière a été faite pour des bonnes raisons aussi.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Bien, je ne m'attendais pas à avoir un PowerPoint
avec des statistiques sur 20 ans pour qu'on me démontre à quel
point ça a été un problème, là. Je voulais quand même qu'on essaie de
quantifier ce phénomène-là. Puis, en même temps, j'écoute le collègue
de Vachon, il nous dit : Quand ça arrive, c'est
horrible. Bien sûr, je suis d'accord, absolument, c'est en
effet un des maux de notre siècle qui, malheureusement, va aller en augmentant.
Par contre, est-ce que... Et là je pose une question
qui est un peu torrieuse, mais c'est le genre de question qu'il faut poser dans un forum comme celui-ci. Est-ce
que le fait d'ajouter la date de naissance va vraiment nous permettre
d'empêcher ces situations-là? Est-ce que la balance des bienfaits et des
inconvénients est en faveur des bienfaits? Dans la mesure où, pour prendre
l'exemple du collègue de Vachon, si quelqu'un vole l'identité de son frère, il
a son nom, son adresse, il a des bonnes chances aussi de connaître sa
date de naissance. Et, si c'est quelqu'un de proche, il y a des bonnes chances de connaître sa date de naissance.
Puis, si c'est quelqu'un qui a fait l'objet d'un vol d'identité, minimalement,
disons, substantiel et complet, c'est parmi les premières données qui sont
volées, elles aussi.
Donc, encore une fois, si on essaie de faire
l'équilibre entre ce qu'on fait comme empiètement sur la vie privée par rapport au gain d'efficacité qu'on a sur le
plan de l'administration de la justice puis des interpellations policières,
est-ce qu'en ajoutant la date de naissance on fait vraiment un gain
significatif de l'autre côté? Parce qu'on fait clairement une avancée... on
fait clairement un empiètement pour... énorme, mais quand même, on fait un
empiètement sur le plan de la vie
privée. Est-ce qu'on a vraiment un gain significatif de l'autre côté? Je pose
la question parce que la date de naissance, ce n'est pas le numéro d'assurance
sociale. Puis déjà le numéro d'assurance sociale aussi, ça finit
malheureusement souvent par circuler.
Mais est-ce
que la date de naissance... Est-ce qu'on donne vraiment un outil qui va faire
la différence ou est-ce qu'en fait on va se retrouver dans la même
situation, donc, autant ou à peu près autant de constats d'infraction donnés à
des tiers innocents et on aura, malgré tout, empiété sur la vie privée des
gens?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
M. Nadeau-Dubois : Est-ce
que... Puis peut-être compléter rapidement... Désolé.
Le Président (M.
Bachand) : Allez-y, M. le député.
M. Nadeau-Dubois :
Est-ce qu'on est en mesure, encore une fois, peut-être, de nous le quantifier
ou de nous le démontrer?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel :
Dernière partie de la question, la réponse est non. On n'a pas de chiffre puis
on n'est pas en mesure de vous le quantifier.
Toutefois,
on l'a dit tantôt, on l'a écartée, la possibilité... la façon, je ne dirais pas
à toute épreuve, parce qu'il n'y a
jamais rien à toute épreuve, d'identifier, c'est la carte d'identité. Pour
toutes les raisons qu'on a discutées, on a écarté cette hypothèse-là.
La réponse
est oui. Est-ce qu'on va faire... Est-ce qu'on va tout régler avec la date de
naissance? Non. Est-ce que le gain est significatif? Nos expériences
combinées... je vous réponds que oui, le gain va être significatif. Maintenant,
est-ce que tous les cas de figure, est-ce qu'on peut passer encore plusieurs minutes
à imaginer des cas de figure qui... La réponse est oui. Il y en aura d'autres,
il y en aura encore, des identifications qui seront erronées. Il y en a
encore... Il y en aura encore, des constats qui seront remis à la
mauvaise personne.
Mais je suis convaincue et je considère que ce
que vous nommez l'empiètement est justifié parce que le gain sera significatif et que ça demeure tout de même
un empiètement qui se justifie, parce
que je combine tout ça avec le fait que cette demande-là est enclenchée au
départ par l'obtention par le policier ou l'agent de la paix d'avoir des motifs
raisonnables et
probables de croire que la personne a commis une infraction. Déjà au
départ, ça nous donne ça, une porte d'entrée pour faire un empiètement sur la
vie privée, tel que vous le nommez, puis je reprends toujours
vos termes.
Maintenant, nom et adresse, c'est quand même
des choses beaucoup plus communes, que je suis capable d'obtenir beaucoup
plus facilement, de connaître beaucoup plus facilement que l'effet combiné du nom, de
l'adresse et de la date de naissance.
Maintenant, ça va-tu tout régler? La réponse est non. Est-ce que
le gain est significatif sur le terrain? La réponse est oui.
• (20 h 10) •
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin. Oui, M.
le député de LaFontaine après.
M.
Nadeau-Dubois : Ça fait quelques
fois que la ministre, avec raison, dit qu'on n'est quand même
pas dans le domaine des interpellations totalement arbitraires ou
aléatoires, puis c'est vrai. C'est dans les cas où il y a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été
commise. Par contre, on est dans le domaine des infractions pénales
puis on a eu des exposés assez convaincants, je trouve, sur la nature de
ces infractions-là qui sont données. Puis j'ai ressorti le mémoire, un des mémoires
qui nous a été présenté, où on faisait un tableau de — c'est
le mémoire de la Clinique droits devant — un tableau des infractions pénales parmi les
plus communes, là, dans leur travail quotidien d'accompagnement qu'ils
font ici, dans la ville de Québec.
Et on parle
quand même d'infractions du genre se coucher ou s'étendre sur un banc, sur un
siège ou sur le sol, s'asseoir sur le sol ou occuper la place de plus d'une
personne, gêner ou entraver la circulation des piétons et des véhicules automobiles en se tenant immobile, en rôdant ou en
flânant et refuser sans motif valable de circuler, piéton traitant avec
l'occupant d'un véhicule.
Donc, ce sont
des infractions, j'en conviens, je ne dis pas que ce ne sont pas des
infractions, mais on est quand même dans le domaine d'infractions qui sont
relativement bénignes. Et c'est d'ailleurs pour ça que c'est pour ce type
d'infractions là que, plus loin dans
le projet de loi, on instaure des voies de déjudiciarisation, parce qu'on juge
notamment que c'est le genre d'infractions qui n'ont pas un niveau de
gravité telle que ça devrait être traité toujours de manière judiciaire.
Donc, puis écoutez, je pourrais en dire d'autres
là. Obtenir ou tenter d'obtenir un voyage sans avoir acquitté son droit de passage, émettre un bruit audible à
l'extérieur. Donc, quand on parle de qu'est-ce qui justifie l'empiétement,
la ministre m'a répondu à deux
reprises : Bien, il faut quand même que ce soit des gens qui ont commis une
infraction. J'ai envie de répondre : oui, mais ici on parle
d'infractions qui sont relativement bénignes, et donc le seuil, en fait, il
n'est vraiment pas si haut que ça.
Puisque si un policier, une policière cherche,
souhaite interpeler une personne, par exemple, parce qu'on serait malheureusement dans un cas de profilage, c'est
des infractions qui donnent quand même pas mal d'outils pour le faire, là. Il y a beaucoup de portes d'entrée, là. Donc,
le seuil, il n'est pas si élevé que ça. Et est-ce que justement, considérant
que cette relative
facilité, appelons ça comme ça, de décerner, bien, de décerner un
constat d'infraction, est-ce que ça, ça ne milite pas justement en faveur d'une approche plus prudente où on
dit : bien, on n'a pas besoin d'empiéter encore plus sur la vie
privée en demandant la date de naissance?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Il ne faut pas confondre
la gravité de l'infraction avec le seuil que le policier doit atteindre. Que l'infraction soit mineure, selon nos termes ou
notre évaluation, ou plus grave, le seuil des motifs raisonnables et probables
qui établit cette infraction-là demeure le même. Donc, il n'y a pas un seuil
plus bas à atteindre parce qu'une infraction est
considérée comme étant plus mineure, que ce soit dans le Code de procédure
pénale ou dans le Code criminel. Donc, il ne faut pas confondre la nature de l'infraction et le seuil de certitude
que cette infraction-là a été commise que le policier doit atteindre
avant d'enclencher.
Donc, ceci
étant dit, tout ça est pour éviter aussi, un, les fausses identifications, les
suppositions de personnes et aussi éviter que le policier ait à passer à des
étapes subséquentes comme l'arrestation sans mandat pour identifier la personne,
l'amener au poste, puis après ça être
capable de l'identifier, puis la relâcher quand il l'a identifiée à sa
satisfaction. Il y a aussi tout un...
Il y a une chose qui s'enclenche aussi quand le policier est sur le bord de la
rue, entre guillemets, là, n'a pas eu la certitude qu'il a la bonne
personne, il ne peut pas émettre son constat.
Et tout ça,
ce n'est pas plus approprié d'avoir à arrêter une personne sans mandat, de
l'amener au poste, de s'assurer de son identification pour un constat
d'infraction pour une infraction que vous qualifiez de mineure. Encore une
fois, je vais réitérer le fait que le droit
pénal est beaucoup plus vaste que toutes les infractions, et le Code de
procédure pénale doit aussi répondre à toutes les autres infractions,
mais le seuil des motifs raisonnables et probables de croire n'est pas moins élevé ou plus élevé en fonction de la
gravité de l'infraction. Je ne veux pas avoir... Ce n'est pas de la
condescendance, là, mais j'ai plaidé
ça pendant 27 ans, là. Je vous le dis, le seuil n'est pas moins élevé des
motifs raisonnables et probables.
Oui,
l'infraction à la clé est peut-être d'une gravité moindre, mais le seuil que le
policier... de certitude ou de motif que le policier doit atteindre
demeure le même. C'est plus difficile à expliquer plus que ça, là.
Le Président (M.
Bachand) : Je vais revenir à vous tantôt, M. le député de
Gouin. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay : M. le Président,
l'article 72, tel que rédigé, devrait normalement nous prémunir contre un
fléau que l'on voit notamment au SPVM, qui
s'appelle le profilage racial. La loi des dernières années, mise en place,
exige d'un agent de la paix qu'il ait
des motifs raisonnables de croire qu'une personne à commis une infraction.
C'est motifs raisonnables et probables. Ça, M. le
Président, là, c'est en vigueur depuis les dernières années, et ça, ça devrait
normalement nous prémunir contre un
fléau qui est le profilage racial. Or, le profilage racial, c'est justement la
mauvaise façon de faire qui ferait en sorte que, dans certains cas, et ça
a été documenté, des agents, des policiers, policières n'ont pas
de motif raisonnable et probable et vont demander à une personne de
s'identifier, vont l'interpeler.
Et on a vu, M. le Président, on a vu une couverture médiatique tout à fait récente. En août
dernier, un rapport a été déposé.
Une coalition réunissant des élus et des organismes de défense des droits des
minorités autochtones demandait au gouvernement
du Québec de décréter un moratoire
sur les interpellations policières de routine. Et là les experts, rapport
déposé sur le cas du SPVM, ont entre autres constaté que les femmes autochtones ont 11 fois plus de risque d'être
interpelées par les policiers que les
blancs. Les noirs, quant à eux, sont 4,2 fois plus à risque, alors que les
personnes arabes ont pour leur part deux fois plus de chances d'être
interceptées sur la rue par la police.
Et on dit une statistique, là... on en a des
chiffres, parce que j'ai cru comprendre que la ministre ne pouvait pas nous donner un chiffre du nombre de constats
d'infraction délivrés à une mauvaise personne, à une personne dont
l'identité... elle nous a donné la
mauvaise identité. On a émis un constat d'infraction puis là, woups, ça
rebondit. On se rend compte que la
personne, elle nous a menti. J'en suis, ça peut arriver, mais ce n'est même pas
documenté, ça. Par
contre, si on dit : On veut régler ça qui n'est pas documenté,
mais on veut en rajouter une couche d'intrusion lorsque l'on dit que ça existe,
c'est documenté, le profilage...
Le profilage,
c'est : Moi, je suis policier. Je n'ai pas de motif raisonnable et
probable. Je vous interpelle, je fais un contrôle de routine. Je vous demande de vous identifier. Là, je vous
exige... J'ajoute à l'intrusion dans la vie privée nom, adresse, mais date de naissance. Et là je vais
savoir tout de suite si, par malheur, vous m'avez menti. Là, vous
commencez à être pas mal dans le
trouble. Et sachant que socialement, M.
le Président, lorsqu'il
y a un profilage, il y a... lorsqu'il y a interpellation sans motif raisonnable
et probable, il y a nécessairement une réaction de la personne qui pourrait, le
cas échéant, donner la mauvaise identité et, ce faisant, pourrait se mettre encore
plus dans le trouble, alors que la bougie d'allumage aura été un
profilage racial.
On dit que
d'après le rapport, août 2019, les interpellations de routine ont augmenté de 143 % entre 2013 et
2017. Et on voit qu'il y a, comme en Nouvelle-Écosse et en Ontario, il y a des
organismes qui demandent à la ville de Montréal et par extension au gouvernement du Québec de s'inspirer de l'Ontario et
Nouvelle-Écosse, qui ont réglementé et suspendu, dans le dernier cas,
les pratiques d'interpellation policière de routine. Ça, c'est un élément.
Mais lorsqu'on parle de profilage racial, M. le
Président, encore une fois je reviens sur un extrait du mémoire du Barreau en
cette commission qui, en page 4... et ça, ça m'avait réellement frappé
puis je l'avais souligné, je cite le Barreau :
«En ce qui concerne les dérapages potentiels découlant de pouvoirs pouvant être
largement interprétés dans la loi, nous
faisons nôtres les enseignements de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt R.
c. Bain de 1992.» Et l'on cite... le Barreau cite le jugement de la Cour
suprême : «Malheureusement, il semblerait que chaque fois que le ministère
public se voit accorder par la loi un pouvoir qui peut être utilisé de
façon abusive, il le sera en effet à l'occasion. La protection des droits fondamentaux ne devrait pas être fondée
sur la confiance à l'égard du comportement exemplaire permanent du
ministère public, chose qu'il n'est pas possible de surveiller ni de
maîtriser.» Fin de la citation.
• (20 h 20) •
Alors, vous avez la Cour suprême qui nous dit...
il participe, en tout respect, M. le Président, d'un certain angélisme de dire qu'on est tout à fait justifiés, comme
législateurs, d'augmenter les pouvoirs des corps policiers. Ici, là, on dit,
dans Bain 92 du ministère public, en
se disant, de facto et nécessairement, ces pouvoirs-là seront utilisés de
manière bienveillante et tout à fait conforme.
Or, ce qui
est documenté, M. le Président... et il y a même la Commission des droits de la
personne et droits de la jeunesse
qui, sur son site Internet, définit, de façon juridique, ce qu'est le profilage
racial, c'est : «Action prise pour des raisons de sûreté, de sécurité ou
de protection du public par une ou des personnes en situation d'autorité. Cette
action vise une personne ou un groupe
de personnes, selon des facteurs d'appartenance réelle ou présumée, telles la
race, la couleur, l'origine ethnique
ou nationale, ou la religion. L'action posée sans motif réel ou soupçon
raisonnable expose la personne visée à un examen et à un traitement
différentiel.»
Donc, je
résume, d'un côté, l'on dit : On a besoin de ce pouvoir accru là pour les
policiers qui pourront, de façon beaucoup plus performante — et
moi, je vous dirais intrusive, par définition, si c'est plus performant, c'est
plus intrusif dans la vie des gens — pourront vérifier l'identité d'une personne.
Nous désirons, c'est ce que la ministre dit, donner ce pouvoir
accru là aux policiers, parce que nous voulons régler le cas où de fausses
identités sont données et des constats d'infraction
non justifiés sont envoyés. On veut éliminer ça. Or, ce n'est pas documenté, on
n'a aucune statistique. Ça, c'est d'un
côté de la balance. De l'autre côté de la balance, ce qui est documenté, c'est
quand on donne plus de pouvoirs nommément aux policiers.
De façon
très, très générale, M. le Président, les policiers, policières agissent très
bien. On leur lève notre chapeau. Mais
il existe un pourcentage documenté de cas où il y aura un profilage racial. On
va vous demander, pour des raisons non justifiées
de motif raisonnable et probable, on va vous demander de vous identifier et là
on va être encore plus intrusif. Et, je
veux dire, la commission des droits de la personne et de la jeunesse a recensé
énormément d'analyses, de statistiques qui font en sorte que même,
parfois, le Tribunal des droits de la personne va dire : Bien, dans ce
cas-là, il y a matière à dénonciation, à
condamnation. Et même la ministre de la Sécurité publique, M. le Président,
à une question qui était posée en
Chambre, il y a quelques semaines, l'a reconnu, il y a un défi. Je reviens avec
Montréal, je suis déjà de Montréal, mais ça se passe aussi
dans certaines autres municipalités, personne n'est à l'abri de cela.
Alors,
coûts-bénéfices, d'un côté, on dit : On va donner plus de pouvoirs aux
policiers puis on risque d'être plus intrusifs
dans la vie des gens qui font l'objet de profilage racial, qui est documenté,
mais parce qu'on veut régler un cas de
faux constat d'infraction qu'on ne documente pas puis dont on ne connaît pas le
nombre. Moi, je pense, M. le Président, qu'en tout respect, à moins que la ministre et le
collègue de Vachon arrivent avec d'autres arguments, c'est là où on loge.
C'est là où on loge. On aura l'intention, le
cas échéant, à moins qu'on nous détrompe, de déposer un amendement à
l'article 19 pour retirer la
date de naissance sur ces prémisses-là. Puis, encore une fois, j'aimerais que
l'on me détrompe, parce que, oui, on
veut une force policière qui soit efficace, M. le Président, mais si c'est
juste pour empêcher des constats d'infraction, dont on ne connaît pas le nombre, qui ne sont pas
fondés, versus rajouter sur l'épée de Damoclès et l'intrusivité qu'on fait dans
la vie des gens par le profilage racial, qui est une réalité sociologique à
Montréal, entre autres, puis on a posé une question en Chambre aussi
là-dessus la semaine passée, bien, moi, je demeure à être convaincu. Voilà.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. J'avais le député de
Vachon, s'il vous plaît.
M.
Lafrenière : La ministre veut commencer.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme
LeBel : Oui, merci, M. le député de Vachon. Je vais commencer par un
petit... Bon, première des choses, je pense qu'on peut tous partir de la
prémisse que quelqu'un qui commet une infraction doit se faire donner un
constat, il doit donc être identifié. Donc, on part de cette prémisse de
base là. Ce n'est pas un pouvoir qu'on donne aux policiers, c'est un outil d'identification qui existe déjà, auquel
on ajoute un élément pour préciser l'identification. C'est important de le
préciser. Ceci étant dit, tout à fait sensible
avec les préoccupations qui ont été émises par le Barreau et la CDPDJ.
D'ailleurs, la majorité de ces
préoccupations-là découlaient du fait de l'exigence apparente d'avoir une pièce
d'identité sur soi en tout temps et,
de fait, qu'on créait potentiellement une infraction de ne pas avoir la pièce
d'identité. Donc, toute cette préoccupation-là découlaient de cette
exigence-là que nous avons retirée.
Ceci
étant dit, les problèmes que vous
dénoncez, que vous soulignez, que vous pointez du doigt sont des problèmes
qui ont été reconnus et auxquels on doit effectivement trouver une solution, mais ce n'est pas un problème de la loi, ce
n'est pas un problème de l'outil, c'est un problème de certains individus qui
l'appliquent. Il faut trouver des solutions, mais
ça ne veut pas dire que parce qu'il y
a des individus qui font des
arrestations qui ne sont pas... Je vais y aller au sens large, là, qui font des interventions qui ne sont pas
justifiées au sens de la loi, qu'il faut, pour ça, éliminer les outils qui se
trouvent dans la loi, parce qu'il faut qu'il y ait des outils d'intervention
pour les policiers, et on part de la prémisse de base que quelqu'un
qui a commis une infraction doit être identifié pour qu'on lui remette son
constat. Donc, c'est ça, la prémisse de base, et, sur ce, je vais laisser
mon collègue le
député de Vachon compléter.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de
Vachon, s'il vous plaît.
M.
Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Collègue de LaFontaine, j'ai bien entendu vos commentaires puis je veux juste vous
rassurer, moi, je ne vois pas de pouvoir supplémentaire à un policier, là. Le
pouvoir d'interpeler est déjà là, puis
là on mélange deux choses, là, les interpellations
au hasard... les interpellations sur le terrain sans infraction, c'est une
chose, mais là on ne parle pas de ça, mais pas du tout, aujourd'hui.
La
personne a commis une infraction, elle doit s'identifier. Et vous dites :
C'est des cas comme ça, au hasard, c'est des... on se rend compte qu'on a émis
un constat à une mauvaise personne. Je veux juste corriger ça tout de
suite : on ne s'en rend pas compte, le constat est émis, et c'est
la personne qui vit avec ça. Puis là je vais m'adresser à Mme Aubry, qui est venue la semaine passée, c'est les gens de
Québec solidaire qui l'avaient invitée pour venir nous parler de ce qu'elle
vivait comme calvaire. Ce n'est pas une statistique, c'est une dame qui vit
avec ces conséquences-là et, pour elle, c'est dévastateur de voir qu'elle s'est
fait avoir pour son crédit, pour plusieurs choses.
Alors, moi, ce que je
voudrais juste... terminer puis vous rassurer, ce n'est pas un pouvoir
supplémentaire. La personne a fait une
infraction, elle s'identifie. J'ai entendu votre commentaire quand vous avez dit :
C'est extrêmement invasif de demander
la date de naissance. Si vous avez ouvert un compte Facebook récemment, vous
avez donné votre date de naissance aussi. Alors, ce qu'on dit... la personne
fait une infraction, commet une infraction, donne son nom. Vous n'êtes pas obligé de mettre la bonne, vous avez raison,
mais c'est demandé pareil. Vous ne vous êtes pas fait passer pour quelqu'un
d'autre. Donc, ça permet d'identifier la personne.
Et
je voulais répondre aussi au collègue, tout à l'heure, de Gouin qui
demandait : Est-ce que l'ajout de la date de naissance va vraiment nous permettre d'identifier
la bonne personne? Exemple, c'est mon frère, c'est sûr que, si vous êtes
vraiment malchanceux, vous êtes des frères jumeaux, même grandeur, même couleur
de yeux... bien, ça, se retrouve dans
le dossier aussi, alors ça nous permet de savoir, des fois, si la personne se
fait passer pour quelqu'un d'autre, parce que, dans votre dossier de
conducteur, si vous avez un permis de conduire, il y a votre grandeur, la couleur
des yeux, qui nous permettent d'identifier la personne. Et, si vous avez commis
un acte criminel, là, c'est beaucoup plus large, c'est beaucoup plus grave
aussi. Acte criminel, on va même se retrouver avec des caractéristiques
physiques comme des cicatrices, qui nous
permettent de s'assurer que la personne qui est devant nous, c'est bel et bien
la personne qui a commis le crime. Et là c'est quelqu'un qui a fait un
crime.
Et je vous donne
l'exemple, je reviens à mon exemple de tout à l'heure, ma personne qui a vécu
une supposition de personne, qui dit :
M. l'agent, je sais, là, il y a un mandat, mais ce n'est pas moi, c'est mon
frère, et tout ça. Rapidement, il y avait une histoire de cicatrice dans
le visage, puis on a bien vu que ce n'était pas elle, mais pas du tout, du
tout, alors ça a aidé, dans le cas présent.
Ça arrive. Ce que je vous ai dit tout à l'heure, on ne s'est pas présentés avec
des statistiques de supposition de personnes, mais ça existe. Ce sont
des crimes, mais ça existe.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois :
Oui. Bien, la supposition de personnes, peut-être, est un crime, mais là on est
dans le cas d'infraction pénale ici. Donc,
les gens qu'on interpelle, c'est pour des... au départ, c'est pour des
infractions pénales, et non pas pour des crimes, quand même, petite
précision. Puis encore une fois, quand on parle de l'exemple de la dame qui a été victime de vol d'identité, en effet,
mais cette dame-là, la personne qui a volé son identité a sa date de naissance
et bien d'autres informations. Donc,
encore une fois, ma question demeure, c'est-à-dire : Est-ce que la date de
naissance va... le fait que le policier puisse la demander va, en soi,
permettre d'identifier plus exactement? Je ne suis pas encore convaincu
de ça.
Une réaction
aussi à ce que la ministre disait tout à l'heure. Je me suis peut-être mal
exprimé quand j'ai dit que le seuil
n'était pas le même. En effet, le seuil du motif raisonnable de croire, il est
le même dans tous les cas d'espèce. Par contre, ici, il s'applique à des infractions qui sont plus faciles à
donner que d'autres, hein? Prenons l'exemple de l'infraction pour avoir émis un bruit audible à l'extérieur.
C'est une infraction qui est plus facile à donner que d'autres qu'on pourrait
imaginer, et c'est ce que je voulais dire en disant : C'est plus simple,
c'est plus facile pour un agent de la paix de procéder à une infraction dans ce cas-là et donc, bien sûr,
que le seuil reste motif raisonnable de croire. Mais si c'est motif raisonnable
de croire qu'il a émis un bruit audible à
l'extérieur, c'est relativement facile à décerner comme constat d'infraction.
C'est ce que je voulais dire.
Tout à l'heure, la ministre a dit quelque chose
de sage, elle a dit : Il ne faut pas lire alinéa par alinéa, il faut lire l'article au complet puis le comprendre dans sa totalité. Et c'est en effet sage et c'est ce que
j'ai fait dans le cas de l'article 72, à l'heure actuelle. L'article 72, dans son texte actuel, dit en
effet qu'un agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu'une personne a commis une infraction peut
exiger qu'elle lui déclare ses nom et adresse, et ensuite, au deuxième alinéa,
on dit : «L'agent qui a des motifs raisonnables de croire que cette
personne ne lui a pas déclaré ses véritables nom et adresse — donc,
il y aurait un doute qu'on a affaire à quelqu'un ici qui a volé l'identité d'un autre — peut,
en outre, exiger qu'elle lui fournisse des renseignements permettant
d'en confirmer l'exactitude.»
Est-ce que la
date de naissance fait partie des renseignements qu'un agent de la paix peut demander en vertu du
deuxième alinéa de l'article 72 actuellement?
• (20 h 30) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre.
Mme LeBel : La réponse, c'est oui,
mais encore faut-il qu'au moment où on ne fournit que le nom et l'adresse, le policier ait sur place un motif... ait des
impressions, en tout cas, les motifs raisonnables et probables. Je pense
que le deuxième alinéa dit également de croire que ce n'est pas le bon
nom et la bonne adresse, et, dans la quasi-majorité des cas, le policier n'est pas en mesure de le faire sur place. Donc, s'il
peut, d'entrée de jeu, exiger la date de naissance, bien, il va
y avoir déjà une réduction, si on veut, des identifications sur place qui
seront erronées, dans le sens où on l'a dit.
Ceci étant
dit, M. le Président, je pense et je crois sincèrement que l'amendement
proposé répond aux préoccupations entendues
à la consultation. On est très sensibles aux préoccupations qui sont soulevées
par nos collègues et, pour notre part, bien, on va être prêts à passer
au vote. Je n'aurai pas d'autre commentaire.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, M.
le Président. Bien, là-dessus, sur
son dernier commentaire, pas celui qu'elle est prête à passer au vote, où
là-dessus je ne serai pas d'accord avec elle, mais sur l'avant-dernier aussi,
quand elle... puis je ne veux pas... je paraphrase, là, que c'est ce... elle fait écho de ce qu'elle a entendu,
de ce que nous aurions entendu lors des consultations. Encore une fois, je reviens sur l'Association des
juristes progressistes, où eux disaient : La date de naissance n'est pas
une information requise. Et eux, dans
ce contexte-là, le Code de procédure
pénale ne devrait pas servir d'outil
de contrôle d'identité, un outil de contrôle d'identité, et on fait référence
aussi... Le droit à la non-divulgation de son identité est un démembrement du
droit à la vie privée, l'article 8 de la charte canadienne. Et en
l'espèce, M. le Président, on vient ajouter, et c'est ce à quoi je faisais
référence quand on parlait de la vie privée, l'invasion de la vie privée,
encore une fois.
Quand vous constatez, études à l'appui... et
j'ai un article ici, là, M. le Président, Les visages du profilage, 22 novembre 2019, dans La Presse, Les
visages du profilage, et on a ici des gens, des hommes, des femmes, jeunes,
plus âgés qui ici, dans plusieurs de
ces cas-ci, participent de la communauté haïtienne, en sont issus, en sont
membres, M. le Président, et qui
témoignent qu'eux ont eu à faire face à des contrôles d'identité, à des
vérifications. Il y en a un ici, Renzel Dashington, qui dit, et je le cite : «Quand tu es blanc, ils
te demandent : Savez-vous pourquoi je vous arrête? Et quand tu es noir,
ils te demandent : Où est-ce que vous allez?» Et c'est des cas tout à fait
documentés, M. le Président.
Donc, c'est une mesure intrusive,
qui en rajoute une couche dans un contexte où on a un problème de profilage, puis on pourrait dire : Oui, mais sur lot, on
a un problème de profilage, vous exagérez. Non, parce que le profilage, quand
il est documenté comme il l'est, quand il préoccupe beaucoup notre Commission
des droits de la personne et des droits de
la jeunesse, quand ça découle du respect à la vie privée et à la
non-discrimination, article 10 de la charte québécoise des droits
et libertés, article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, de
ne pas être interpelé basé sur la couleur de votre peau ou d'autres motifs, il
est clair, M. le Président, que ça se faisait sous le 72, qui demande un motif
raisonnable, et que ça continuera à se faire
sous le même 72, sous on demande des motifs raisonnables, sauf que là on va
pouvoir vous demander votre nom, adresse et date de naissance.
Et ce
qui est sous-entendu là-dessus, M. le Président, c'est que, si par malheur vous
êtes interpelé, et là on va en rajouter une couche, et que là il est démontré
que vous avez un dossier criminel, il peut arriver que certaines personnes qui font l'objet de profilage
racial aient eu un passé criminel, aient un dossier criminel, ou pénal, ou autre. Là, il y aura des
analyses, M. le Président, et c'est notre crainte, qui pourront, par la suite,
dire : Bien là, on vient d'embarquer dans une logique, une spirale négative qui va faire
encore... encore plus faire en sorte qu'une personne qui est interpelée sans
fondement par un policier, et parce qu'elle participe, entre autres, de la
communauté haïtienne, et qu'il fait, après vérification, système
informatique à l'appui, qu'il a déjà fait l'objet d'infractions pénales ou
peut-être même criminelles, là, on vient d'en rajouter
une couche dans un contexte où, encore une fois, M. le Président... Moi, mon
comté, c'est Rivière-des-Prairies. On n'est pas loin de Montréal-Nord,
on n'est pas loin des événements avec Villanueva et tout le contexte que ça
s'est fait.
Oui, on a socialement
cheminé depuis, mais moi, dans mon comté, j'ai un groupe qui s'appelle Équipe
R.D.P., que peut-être le collègue de Vachon connaît, qui sont des intervenants
de rue tout à fait spécifiques et, avec les policiers communautaires, qui
essaient de rapprocher les deux réalités, pour qu'on puisse éliminer des actes
de profilage qui, ultimement, M. le
Président, dans certains cas, quand on parle des actes de profilage, bien, on
parle de gestes basés sur une distinction qui n'aurait pas raison
d'être, sur des éléments, sur une discrimination raciste. Et ça, ça existe.
Alors,
dans ce contexte-là, et je crois que vous me faites signe, M. le Président,
honnêtement, là, on ne m'a pas convaincu de cela. Je pense qu'il serait même
mieux à propos, peut-être même en disant : Oui, le gouvernement va utiliser
sa majorité puis on va voter l'amendement de
l'article 72... Vous me direz combien de temps il me reste, M. le Président.
Ce n'est pas parce que je ne veux pas faire du temps, c'est parce que c'est un
point important.
Le Président (M. Bachand) : Non, non, non, mais... Non, non, c'est important
pour... Une minute et demie à peu
près.
M. Tanguay :
Pardon?
Le
Président (M. Bachand) : 1 min 30 s.
M. Tanguay :
Puis on va le voter. Moi, je vous informe déjà qu'on va voter contre, parce
qu'on n'a pas été convaincus. Dans ce
contexte-là, si on nous disait, du gouvernement : D'accord, on va utiliser
notre majorité, on va ajouter la date
de naissance, mais on va faire écho de ce qui est requis, demandé par les élus
de Montréal — moi, je
suis un élu de Montréal — les élus de Montréal au niveau municipal, où
le conseil municipal demande aussi au gouvernement du Québec d'adopter une loi pour encadrer les interpellations
policières à l'échelle de la province... Si on le couplait, ça, avec ça puis
qu'on avait un réel plan de match... puis on
entend encore la ministre de la Sécurité publique dire : Oui, c'est un
problème, ça existe, puis il faut s'y
attaquer, bien, déjà là, on serait peut-être dans une zone un peu plus
confortable. Mais ce que je vois, c'est juste un côté où on va ajouter
des pouvoirs.
Encore une fois,
l'immense majorité des policiers et policières font un travail remarquable et
contre lequel on n'a rien à dire, mais force
est de constater qu'il y en a quelques-uns, puis ça a été documenté en nombre
suffisant pour que ce soit déclaré comme étant, puis le mot n'est pas trop,
M. le Président, n'est pas trop fort, un fléau. C'est un fléau, un fléau
qui existe, qui a un impact non seulement
sur ces personnes, de visage du profilage, mais qui a un impact sur leurs
familles, leurs proches, leur
communauté, qui sont, M. le Président, nos proches, notre famille, notre
communauté, parce que moi, je représente Rivière-des-Prairies, puis ça
existe.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Gouin,
s'il vous plaît.
M.
Nadeau-Dubois : J'aimerais poursuivre sur l'échange que j'ai eu tout à
l'heure avec la ministre. On parlait de... Je parlais de l'article 72 actuel qui permet déjà de demander la date de
naissance... En fait, c'est ce dont la ministre... c'est ce qu'a clarifié la
ministre pour moi puis elle m'a répondu également quelque chose d'intéressant.
Elle m'a dit : Mais il faut des
motifs raisonnables de croire qu'au départ, l'identité qui a été fournie, nom,
adresse est douteuse ou n'est pas la bonne. Il faut des motifs
raisonnables de croire que les informations n'ont pas été les bonnes.
Puis
j'ai envie de me retourner vers le collègue de Vachon, qui l'a fait bien plus
souvent que moi, interpeler des gens pour des constats d'infraction, et j'ai
envie de demander : Dans la pratique policière, c'est quoi, les indices? À
partir de quand est-ce qu'un policier a des
motifs raisonnables de croire que le nom et l'adresse qu'on lui a fournis ne
sont pas exacts? Qu'est-ce qui permet
de franchir ce seuil-là, ce qui nous permet donc ensuite de demander, une fois
qu'on a passé ce seuil-là, ça déclenche le deuxième alinéa puis on peut passer à
demander des renseignements supplémentaires? Parce que ça me semble être
une information essentielle pour juger de la pertinence ou non d'ajouter la
date de naissance.
Est-ce
que c'est facile ou pas pour un policier, à l'heure actuelle, de passer au deuxième
alinéa de l'article 72 et de dire : J'ai des doutes sérieux,
je vais vous demander de me donner d'autres renseignements? Ça me semble être
une information vraiment importante pour prendre une décision. Donc, j'aimerais
que la ministre ou le collègue de Vachon me réponde : À partir de quel
moment un agent de la paix juge qu'il y a des motifs raisonnables de croire que
cette personne-là ne lui a pas déclaré ses véritables nom et adresse?
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
Vachon, s'il vous plaît.
• (20 h 40) •
M.
Lafrenière : Merci, M. le Président. Je vais y aller avec un exemple,
un exemple fort simple. C'est sûr que quand vous vous présentez à moi,
vous me donnez votre nom, votre adresse, je n'ai pas vraiment de motif de
douter de ces informations-là, à moins que ça soit une adresse qui est très peu
crédible.
Cependant,
avec l'accès aux bases de données, comme je mentionnais tout à l'heure, bien
là, je peux contre-vérifier et voir, justement, si cette information-là est
bonne, si votre grandeur est bonne, les yeux sont de la bonne couleur et
tout. Là, je serais en mesure de m'assurer que c'est la bonne personne. C'est
le genre d'exemple que je vous donnerais.
M. Nadeau-Dubois : Est-ce
qu'on peut faire la recherche dans la base de données seulement avec nom et
adresse, et donc aller voir ça, les yeux, les cheveux et la grandeur?
M.
Lafrenière : La réponse est non.
M.
Nadeau-Dubois : Il faut absolument la date de naissance. Donc, si...
M.
Lafrenière : M. le Président, je vais terminer en disant que des
Robert Côté, il y en a plusieurs au Québec.
M.
Nadeau-Dubois : C'est un exemple, j'imagine. Peut-être un peu moins de
Gabriel Nadeau-Dubois.
M.
Lafrenière : Il y en a juste un qu'on connaît bien. Je parlais ici,
pas dans la police.
M.
Nadeau-Dubois : Non, pas dans la police, non. Ça fait le tour pour
moi. Merci.
Le Président (M. Bachand) : Merci, monsieur. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'amendement proposé par la ministre à
l'article 72? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à
la mise aux voix. Est-ce que l'amendement à l'article 72 est adopté?
M. Tanguay :
Sur division.
Le
Président (M. Bachand) : Sur division?
M. Tanguay :
Sur division.
Le Président (M. Bachand) : Adopté sur division. Merci. Nous sommes
maintenant de retour à l'article 72 amendé. Interventions?
M.
Tanguay : J'aimerais, M. le Président, suspendre. J'aimerais
déposer un amendement à l'article 72 tel qu'amendé.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Nous allons suspendre
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à
20 h 41)
(Reprise à 20 h 48)
Le
Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission reprend ses travaux.
M. le député de LaFontaine,
vous avez la parole. Merci.
M. Tanguay :
M. le Président, j'aimerais déposer l'argument... j'aimerais déposer l'amendement
suivant : L'article 72 du Code de procédure pénale modifié par
l'article 19 du projet de loi est modifié par :
1° la suppression au
premier alinéa des mots «sa date de naissance»;
2° la suppression au
deuxième alinéa des mots «date de naissance».
Et,
M. le Président, l'amendement qui est proposé ici fait écho, encore une fois, puis je ne veux pas répéter tout ce que j'ai dit par rapport à cela, mais fait écho de l'énorme préoccupation qui est exprimée notamment par l'Association des juristes
progressistes. Et je vais citer un autre extrait, en page 8 de leur
mémoire : «Permettre aux agents de la paix d'exiger la date de naissance d'une personne en matière pénale augmente
le risque de répression des personnes marginalisées, particulièrement lorsqu'elles
sont dans un état de crise ou d'intoxication qui limite leur habilité à se
souvenir de cette information dans le
contexte du stress d'une interaction policière, et des personnes qui ont un
statut d'immigration précaire, qui
dans certains cas n'ont même pas de date de naissance claire. Notons que ces
personnes sont également moins susceptibles d'avoir avec elles une carte d'identité.» Ça, c'était l'autre aspect. Ça, c'est un contexte particulier et réel
auquel font état l'association... les juristes progressistes, membres de
l'association du même nom.
Encore une fois, M.
le Président, l'objectif, ce n'est pas de ne pas permettre aux policiers et
policières d'avoir un outil supplémentaire
parce que, quand ça va bien, ça va bien, mais, quand ça ne va pas bien et qu'il
y a des cas de profilage racial, M. le Président, c'est l'intrusivité,
si vous me permettez l'expression, dans la vie personnelle des gens.
Et
je vais prendre l'analogie suivante, M. le Président. Si moi, je suis policier,
et je suis en tort, puis je fais, en vous arrêtant, en vous interpelant,
M. le Président, parce que vous êtes noir... Si moi, je suis policier,
vous êtes noir, je vous interpelle, puis je
ne suis pas correct, je fais du profilage racial, je n'ai pas de motif
raisonnable de croire que vous avez commis une infraction, et que je
vous demande, avec ce nouveau pouvoir là : Donnez-moi votre nom, adresse,
date de naissance, puis vous restez à ma disposition...
• (20 h 50) •
Une voix :
...
M. Tanguay : Oui, mais là il
pourra le faire quand j'aurai fini de parler.
Le Président (M. Bachand) : Oui, je vous
écoute, M. le député, oui.
M.
Lévesque (Chapleau) : Donc,
à vrai dire, ça aurait pour effet de supprimer, dans le fond, l'article en tant
que tel et de retourner au précédent article 72. Donc, il n'est pas
recevable.
Le Président (M. Bachand) : Je comprends votre point d'ordre, mais, avec
votre accord, je crois que je laisserais quand même le député
de LaFontaine... parce que, dans les explications, souvent, d'un amendement ou d'un sous-amendement, on
peut comprendre le sens. Alors donc, je retiens, je vais vous revenir à vous,
mais je vais céder la parole au député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Merci, M. le Président. Alors, je reprends mon exemple. Je suis policier, M. le Président, vous êtes
noir, je ne suis pas correct, je fais du
profilage racial. Ça existe, c'est documenté.
Je vous demande... Je vous interpelle, je vous arrête sur la rue, je vous demande de vous identifier. Je ne suis
pas correct, je n'ai pas de motif raisonnable de croire, je fais sur profilage parce que vous êtes noir,
puis ce n'est pas correct. Je vous demande de vous identifier, je n'ai pas de
motif raisonnable de croire que vous avez commis une infraction.
Là, je vous dis, en
plus de ça : Vous allez me donner votre nom, date de naissance et adresse.
Vous demeurez à ma disposition, je vais dans
l'auto de police ou peu importe, je vérifie ces éléments-là et là je constate,
M. le Président, alors que vous êtes sous mon pouvoir puis que vous ne devriez
pas l'être, tiens, tiens, tiens, par ailleurs, vous avez telle infraction,
telle infraction, telle infraction, tel
dossier criminel pour lequel vous avez purgé votre peine, tel ci, tel ça. Là,
M. le Président, je peux-tu vous dire que, là, vous êtes embarqué au niveau
deux, au niveau supérieur de motifs qui peuvent amener des dérapages.
On
n'est pas là pour le je ne sais pas combien, 99 % des cas que les
policiers et policières... mon argument n'est pas pour le 90 % et plus,
même très nettement plus, des policiers et policières qui ne font pas de
profilage. Mais dans les cas où c'est
documenté, et ils le font, est-ce que je peux vous dire que, si je vous ai
interpelé sur la rue parce que vous étiez noir et qu'en plus, dans la logique tordue que j'ai, et raciste, je vous
demande de vous identifier et que je vois que vous avez un passé pénal
et criminel, je peux-tu vous dire que l'histoire n'arrêtera pas là?
C'est
un drapeau rouge, M. le Président, que nous brandissons. C'est un drapeau,
surtout, que l'on ne vient pas, au
niveau du gouvernement, dans la proposition qui nous est faite ici, on ne vient
pas coupler ce pouvoir accru là d'intervention et d'intrusion dans la vie privée avec une politique gouvernementale ou
une mesure gouvernementale qui ferait écho à ce qui a été demandé très, très récemment par bon nombre d'élus municipaux
de Montréal à la lumière d'un rapport d'août 2019 sur la réalité du profilage racial au SPVM. Et, en
ce sens-là, M. le Président, je pense que l'amendement qui est posé fait
écho à cela.
Je
demeure... Encore une fois, je ne suis pas contre donner des outils à notre
force policière, mais lorsque le remède pourrait avoir des effets pervers tels
qu'ils surpassent les effets bénéfiques soupçonnés, parce que ce n'est pas
documenté... Ce qu'on veut corriger, c'est les cas où les quelques — je
peux me permettre de dire «quelques», parce qu'on ne nous a pas fourni le nombre — les quelques cas où un constat d'infraction
aura été posté à la mauvaise personne parce qu'on nous avait donné le mauvais nom, mauvaise adresse,
bien, à ce moment-là, on ne peut pas faire autrement que de dire : Bien,
le mal que l'on tente de...
c'est-à-dire le bien que l'on tente de créer surpasse le mal très, très
potentiel et documenté qui va... comme législateurs, c'est à nous de se
poser ces questions-là, qui va nécessairement en découler.
Alors, sur
l'amendement, M. le Président, ce sont les représentations que j'ai à faire.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je reconnais le député
de Chapleau, s'il vous plaît.
Question de règlement sur la
recevabilité d'un amendement
M.
Lévesque (Chapleau) : Merci beaucoup. Donc, comme je disais tout à
l'heure, je vais, dans le fond, soulever le critère de recevabilité,
article 197, là.
Si
on reprend, dans le fond, l'article 72, précédemment... donc si on le lit,
là : Par le remplacement, dans le premier alinéa, de «ses nom et adresse s'il ne les connaît pas», donc ça, c'est
l'article tel que nous le connaissons, actuellement, et donc ce qu'on voudrait ajouter, donc, «son nom, sa
date de naissance, son adresse»... donc, en retirant sa date de naissance,
on revient à l'article précédent, donc
l'article qui est, dans le fond, existant, ça aurait un effet de supprimer les
changements. Et donc on ne peut pas
faire indirectement, là, ce qu'on voudrait faire directement. Donc, voilà, donc
on soulève la recevabilité.
Le
Président (M. Bachand) : Parfait. Alors, je vais suspendre et
je vais vous revenir rapidement. Merci. Oui...
M. Tanguay :
...demander une décision écrite, s'il vous plaît.
Le
Président (M. Bachand) : Bien sûr. Merci beaucoup. On suspend.
(Suspension de la séance à
20 h 55)
(Reprise à 21 h 31)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend
ses travaux. Merci.
Décision de la présidence
Je vais
maintenant rendre ma décision concernant la recevabilité de l'amendement
proposé par le député de LaFontaine à l'article 19.
L'amendement
du député aurait pour effet de supprimer, au premier alinéa, les mots «sa date
de naissance» et, au deuxième alinéa,
les mots «date de naissance». Or, considérant l'amendement précédemment adopté,
ce nouvel amendement aurait pour effet d'annuler les changements proposés par
l'article 19 à l'article 72 du Code de procédure pénale,
rendant l'article 19 inutile. Si les
députés souhaitent maintenir l'article 72 du code inchangé, notre
jurisprudence parlementaire indique qu'ils
peuvent simplement voter contre l'article proposé. Je vous réfère notamment à
la décision 197/35. L'amendement est donc irrecevable.
Pour ce qui
est de rendre une décision écrite, ma décision sera transcrite au Journal
des débats, qui fait état, par ailleurs, de l'ensemble de nos
débats.
Nous
retournons maintenant à l'article 19, s'il vous plaît. Interventions? Mme
la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.
Mme Weil : Vous savez,
M. le Président, j'ai écouté mon collègue, c'est sûr qu'en relisant le mémoire
de l'Association des juristes progressistes
et la revue de presse, bon, Les visages... le dossier du profilage, ça
suscite chez moi une inquiétude
que... Je n'avais pas mis les deux ensemble nécessairement. Puis, quand on lit,
bon, le paragraphe où ils disent... Vraiment,
on est juste, évidemment, sur la date de naissance. Je comprends tous les
arguments de la ministre, que ça permet de mieux savoir qui est la
personne. Mais, je pense, c'est le contexte dans lequel une intervention...
d'imaginer le genre de contexte et, je
pense, c'est ce dossier du profilage racial qui, je pense, nous a tous rendus
malades. Mais on sait, on connaît des
gens qui ont vécu ça. Ce n'est pas la première fois qu'on voit des dossiers
comme ça. C'est des dérapages épouvantables entre le policier et cette personne généralement tout à fait innocente
et qui ne peut pas comprendre. Son seul défaut, c'est d'avoir la peau
noire. Et on connaît des gens qui ont vécu cette situation.
Et alors je
vais relire le paragraphe, donc, de l'Association des juristes
progressistes : «Permettre
aux agents de la paix d'exiger la date de naissance d'une personne en matière
pénale augmente le risque de répression des personnes marginalisées,
particulièrement lorsqu'elles sont dans un état de crise ou d'intoxication qui
limite leur habileté à se souvenir de cette
information dans le contexte du stress d'une interaction policière et des
personnes qui ont un...» Ils parlent aussi de ceux qui ont un statut
d'immigration précaire, et je connais
bien ces genres de situation, qui, dans certains cas, n'ont même
pas de date de naissance claire.
Essentiellement,
le risque, c'est que... Bon, actuellement, le système fonctionne bien. Moi, ce
que je comprends bien, c'est que, dans les autres provinces, ça pourrait être
peut-être confirmé par la ministre, on ne demande pas la date de naissance dans le code pénal, mais en tout cas...
Quoi qu'il en soit, ici, ils nous disent : Faites attention. Mais c'est
surtout ce risque de dérapage entre le policier... dans l'intervention même,
alors que, dans le projet de loi de notre ancienne collègue Stéphanie Vallée, n° 168, je crois
bien, on n'avait pas inclus à ce moment-là, donc, les... tous ceux qui ont
préparé le projet de loi ne pensaient pas nécessaire de mettre la date
de naissance.
Et je dois
dire que j'ai bien écouté mon collègue, mais c'est vrai, alors là le policier
commence à regarder. Déjà, il y a un biais, là. Je pense qu'il faut prendre pour
acquis que la plupart des policiers il n'y a pas de problème, mais il
pourrait y en avoir un, on l'a vu. On ne peut pas faire semblant que ça
n'existe pas, on a vu le dossier et les rapports de la Commission des droits de
la personne sur ce sujet. Et donc là, déjà, la personne qui, comment dire, qui
est arrêtée par le policier et dans un état
quelconque pourrait tout simplement être complètement innocente aussi de tout,
mais les relations sont tendues.
Alors, dans la balance des inconvénients — c'est
un peu comme ça, je pense, que je le mettrais — moi, je sens vraiment qu'il
faut être prudent. Ça m'inquiète. Ça m'inquiète actuellement. Dans le contexte
actuel, tant qu'on ne puisse pas trouver des
solutions pour des meilleures relations entre la police et ces personnes
marginalisées, ça m'inquiète.
Personne ne
pourra dire absolument blanc ou noir — excusez-moi le jeu de mots, là — que, nécessairement, il y aurait des problèmes, mais est-ce que c'est vraiment un
outil si nécessaire, alors que ça risque de créer des tensions additionnelles
et ce dérapage? Et je pense que c'est vraiment ça que j'ai entendu dans la
plaidoirie et en relisant, donc, leur mémoire.
L'autre chose
que je dirais... Le Barreau, il va aussi sur ce sujet, mais voici les experts.
Ces juristes-là travaillent avec ce monde-là marginalisé. Ils
connaissent ces cas, ils les connaissent très, très bien, M. le Président.
Alors, je ne
sais pas si la ministre... si on pourrait peut-être même suspendre cet article
pour qu'on puisse continuer dans l'heure qu'on a, qu'on réfléchisse
collectivement à cette question dans le contexte dans lequel... le contexte
qu'on connaît et peut-être faire des petites
recherches. Les autres provinces, qu'est-ce qu'ils font, puis est-ce qu'on a
vraiment besoin, actuellement, aujourd'hui d'inclure ça dans ce projet
de loi qui, par ailleurs, va chercher un grand consensus?
J'aimerais
qu'on puisse y réfléchir deux, trois fois avant de mettre un pouvoir
additionnel, alors que ça ne semble pas être nécessaire. Ça suscite chez
moi une inquiétude.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M.
Nadeau-Dubois : Je trouve intéressante la proposition de ma collègue
de l'opposition officielle dans la mesure où en effet il y a cette question qui est pertinente : Est-ce que
ça existe ailleurs? Comment c'est utilisé ailleurs? Quel est le bilan,
s'il y en a eu, de ces dispositions-là, si elles existent ailleurs?
Je pense
qu'une suspension de l'article permettrait aussi de répondre à la première
question que j'ai posée au tout début de ma première intervention,
c'est-à-dire : Est-ce qu'on est en mesure de faire un portrait du problème
auquel on dit, puis je
le crois, auquel on dit vouloir répondre en matière d'efficacité des
interventions policières, en matière d'envoi de constats d'infraction
aux mauvaises personnes? Je pense que prendre la mesure de ce problème-là puis
le...
J'accorde
une grande crédibilité au témoignage, puis au vécu du collègue de Vachon, puis,
en général, aux témoignages qu'ils
nous ont faits, mais d'avoir des indicateurs objectifs qui nous permettraient
de prendre la mesure de ce problème-là, qui nous permettraient empiriquement de le mesurer, je pense que ce
serait souhaitable pour justement faire cette... être en mesure, comme parlementaires, comme législateurs,
de faire cette balance des bienfaits puis des inconvénients pour voir si
ici on est devant une situation où c'est
justifié empiriquement, objectivement de procéder à un empiétement
supplémentaire sur le droit à la vie
privée puis le droit à la non-divulgation de l'identité, qui est un droit qui
est reconnu, qui n'est pas sans exception, bien sûr, mais qui est quand
même reconnu par la Cour suprême.
Je pense que ces informations-là nous
permettraient de mieux... d'avoir un jugement plus avisé sur l'article puis de prendre une décision plus promptement puis
basée sur des faits plus que sur des
témoignages. Et je fais confiance à tout le monde, mais je ne peux pas m'empêcher de rappeler que, lors des consultations particulières, j'avais posé la même question grosso modo
au représentant du Service de police de la ville de Québec, qui était aussi à
la tête de l'association des chefs de
police. Je lui avais posé la même question : Êtes-vous capable de nous dire
empiriquement, là, objectivement
à quoi ça correspond, ce phénomène de
constat d'infraction, puis c'est envoyé à la mauvaise personne? Puis je n'avais
pas eu de réponse, à cette époque-là,
non plus. Ça fait que mes interrogations puis mes inquiétudes sont entières, à
ce stade-ci, de mon côté aussi.
• (21 h 40) •
Le
Président (M. Bachand) :
Merci. Est-ce qu'il y a intervention du côté ministériel? Parce que j'ai cru
comprendre qu'on a une demande de la députée de Notre-Dame-de-Grâce d'aller
chercher le... de demander s'il y a un consentement pour suspendre l'article 19. Alors donc, est-ce
qu'il y a un consentement pour suspendre l'article 19? Pas de
consentement. Merci. Intervention? M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay : Ce qui est
demandé, je pense que... puis j'étais sur l'impression... j'aurais eu tort
d'avoir cette impression-là que la ministre aurait consenti à cette demande
qui, je crois, est tout à fait raisonnable. On a devant nous le Code de procédure pénale, on a un projet de loi
n° 32 qui découlait du projet de loi n° 168, qui avait fait lui-même
l'objet de plusieurs analyses, poids
et contrepoids, et proposait beaucoup, beaucoup de choses qui sont pour
beaucoup, beaucoup reprises dans le projet de loi n° 32 que nous
présente la ministre. Le projet de loi n° 168 n'avait pas eu le temps
d'être adopté. Là on a le 32 devant nous. Un
élément qui ne figurait pas dans le 168 et qui figure dans le 32, c'est l'ajout
de cette obligation-là... oui, la
ministre a reculé sur «pièce d'identité», mais il n'en demeure pas moins qu'il
y a le pendant de ça, la date de
naissance, et c'était un écueil, inutile d'y revenir, qui avait été
soulevé par l'Association des juristes progressistes, qui est un grand,
grand point d'interrogation.
Le Barreau a lui-même fait le combat, M. le
Président, sur ce qui était identifié comme étant trop intrusif, la carte
d'identité. Or, honnêtement, puis je l'en remercie, le collègue de Vachon est
venu témoigner de ce que sont les implications de divulguer à un policier non
seulement nom, adresse, mais la date de naissance, l'impact que ça a et le flot d'information qu'il a par les systèmes
informatisés, qui sont d'autant plus intrusifs, complets qu'une simple carte
d'identité. M. le Président, ça, je vous le soumets, parce que, du bout
des doigts, vous aurez des informations, entre autres, reliées à votre code... à votre passé criminel, pénal et
ainsi de suite, plusieurs, plusieurs, plusieurs informations qu'une carte, par
exemple, d'assurance soleil n'aurait pas
contenu à sa face même, photo et le nom permettraient de minimalement les
identifier. Le Barreau avait soulevé le drapeau rouge, on le retire.
Ce que le
Barreau n'avait pas précisément énoncé, c'était... et peut-être reconnu,
c'était toute l'inclusivité qu'a la date de naissance par les systèmes
informatiques. Puis c'est paradoxal, M. le Président, parce qu'un peu plus tôt,
dans le projet de loi, on avait... on vient
traiter, en termes de signification, comme de quoi c'est plus efficace. La
signification par un moyen
technologique, c'est beaucoup plus efficace, beaucoup plus rapide, puis on peut
être plus performant par rapport à cela. Bien, c'est sûr que les
systèmes informatiques, lorsque je donne mon nom, mon adresse et ma date de
naissance, vous allez avoir mon pedigree
pénal, criminel et ainsi de suite sur le bout des doigts. C'est plus efficace,
c'est plus direct et plus complet qu'une simple carte d'identité. Or,
«carte d'identité», si tu as un problème, on le retire, mais on garde la date de naissance, M. le Président, comme étant
un élément qui serait moindre. Or, je vous le soumets, s'il n'est pas égal,
il est pire que la carte d'identité. Si le retrait de la carte d'identité était
justifié, a fortiori le retrait de la date de naissance, l'obligation de produire sa date de naissance
l'est à cause du témoignage du collègue de LaFontaine... de Vachon, je ne veux pas l'insulter, M. le Président, collègue de
Vachon qui nous dit, du bout des doigts, on peut avoir une foule de
renseignements que jamais ne vous permettra d'avoir une carte
d'identité.
Alors, une
fois qu'on a dit ça... J'ai eu l'occasion de vous reciter, M. le Président,
l'arrêt Bain, dérapages potentiels. On demande à la ministre de prendre le
temps de la réflexion. On vient de suspendre, ma foi, une dizaine... à peu
près, là, huit, 10 articles pour des raisons de commodité dans nos
travaux. Là, on ne suspendrait pas un article qui viendrait, M. le Président, à
tout le moins, et je ne pense pas qu'on pourrait dire que ce que l'on vous soulève
est totalement déraisonnable, et totalement
injustifiable, et que c'est une pure perte de temps, parce que ça fait écho
d'une réalité qui est le profilage, qu'on vient de documenter.
Ça fait écho
de témoignages qu'on a reçus, notamment l'Association des juristes
progressistes. Notre argumentaire, M. le Président, je pense, tient la route,
je crois, mériterait une réflexion additionnelle... et faire en sorte, entre
autres, de vérifer une information.
Et ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce y a fait référence : Qu'est-ce qu'il
se passe dans les autres provinces? Je ne sais pas si la ministre peut répondre
à cette question-là. Peut-être que ce serait un début de réponse.
Le Président
(M. Bachand) : Interventions?
M. Tanguay :
Est-ce que la ministre veut intervenir, M. le Président?
Le
Président (M. Bachand) :
Je regarde, et il semble... il n'y a pas d'autre intervention du côté
ministériel à ce stade-ci.
M. Tanguay : O.K. Mais,
avec votre permission, je vais continuer.
Le Président
(M. Bachand) : Oui. Allez-y, M. le
député.
M. Tanguay : Alors,
ma question aurait été de savoir qu'est-ce qui se passe dans les autres
provinces. Force est de constater qu'on n'a pas de réponse.
Je ne veux
pas présumer puis je prends pour acquis que, si la ministre avait
l'information, elle nous la donnerait, qu'elle ne nous cache pas d'information, parce qu'elle est honnêtement
constructive et de bonne foi. Alors, on aurait aimé avoir l'information pour
mieux guider nos travaux, parce que moi, M. le Président, je suis législateur,
je suis membre de l'opposition officielle et je n'ai pas les ressources de la
ministre, je n'ai pas, derrière moi, le ministère de la Justice. Lorsqu'on
me pose la question, bien, pour pouvoir
légiférer... puis je pense qu'on a un apport constructif, positif et tout à
fait raisonnable dans ce qui vient bonifier le projet de loi. Il y a des
amendements qui ont été acceptés de part et d'autre.
Moi, ce que
j'ai comme information, c'est que la common law, et j'ai comme information que
la procédure pénale, dans les autres provinces est déterminée beaucoup par la
common law, bien, on considère que, pour
la common law, décliner son son nom
et son adresse est suffisamment
lorsqu'une personne a l'obligation de s'identifier à un agent de la paix. Et
j'ai une référence. M. le Président,
j'ai deux références à vous donner. L'information que j'ai, c'est que c'est en
vertu d'un jugement de 1979 de la Cour suprême — excusez
du peu — Moore
contre la Reine, où on nous dit... on ne parle pas de date de naissance, on parle de nom et adresse est
suffisant. Et j'ai également un article de 1950, TheLaw Quaterly
Review, page 465, sous la plume de Glanville L. Williams, Demanding
Name and adress, qui est au même effet que le jugement ultérieur de la Cour suprême en 1979. J'ai ces deux
sources-là. J'ai l'Association des juristes progressistes qui nous
disent : La date de naissance
n'est en effet pas une information requise pour engager une poursuite contre un
défendeur. Puis on parle des provinces ici qui sont évidemment dans un
régime de common law par définition.
Alors, à sa face même, ne sachant pas ce qui se
passe ailleurs, on n'a pas ce bénéfice-là. Mais, M. le Président, si d'aventure, puis la ministre pourra me
détromper, mais si d'aventure, à la face de ce que je viens de vous dire, j'ai
une forte présomption, je suis fortement justifié de présumer que ça n'existe
pas dans aucune autre province, qu'on me détrompe si j'ai tort, pourquoi, nous, nous viendrions le
mettre, constatant qu'on a un enjeu de profilage puis constatant que ça va
venir l'exacerber?
Pourquoi, je vous le demande, M. le Président.
Pourquoi ce n'était pas dans le 168, qui n'a pas été adopté dans la dernière
législature, qu'on a tout repris, mais qu'on est allé ajouter ça dans les
derniers mois, visiblement depuis la présentation
du projet de loi? Moi, j'ai plus que jamais, M. le Président, une préoccupation
surtout quand on nous dit que l'écueil
que l'on veut régler ici, c'est les cas non documentés, on ne connaît pas le
nombre, des constats d'infraction qui sont envoyés à des adresses et des noms
qui sont faux. On ne sait même pas le nombre. Ça, M. le Président, je vous
soumets bien humblement, et la
ministre en est parfaitement consciente, j'en suis convaincu, que cet
article-là, je vais vous faire une prédiction, puis on pourra
peut-être... je fais une prédiction, il va être contesté devant les tribunaux.
Ça va se
rendre jusqu'en Cour suprême, puis moi, mon petit doigt me dit que, quand les
juges de la Cour suprême vont analyser ça et ils vont regarder tous les
critères, tous les arguments juridiques, sociologiques étayés, démontrés,
lorsqu'ils vont tous les mettre dans la
balance contre cet argument-là, contre cette modification-là, cette exigence
inédite en common law canadienne de donner sa date de naissance, lorsqu'ils
vont mettre tous ces éléments-là du côté droit de la balance et que, du côté gauche, ils vont mettre le
poids infime, non déterminé et, semble-t-il, non déterminable des quelques constats d'infraction envoyés aux mauvaises
adresses, je peux-tu vous dire que l'audition ne sera pas longue. Je peux-tu
vous dire, M. le Président, qu'à cette lumière-là, à la lumière de ce que je viens
de vous dire là, si d'aventure le gouvernement use de sa majorité
parlementaire, on ne fera pas de la bonne législation. Puis je ne pense pas
qu'on est là autour de la table pour faire de la mauvaise législation puis ne
pas se poser les bonnes questions.
Je ne demanderai pas à la ministre si elle a eu
un avis juridique concernant cela, mais, chose certaine, aussi justifiable
considérait-elle, lorsqu'elle a déposé le projet de loi, que la carte
d'identité, c'était une bonne affaire puis que
la date de naissance, c'était une bonne affaire, on a vu que la carte
d'identité, ça a pris le bord tantôt,
puis c'est bien parfait, on la salue pour ça, mais que là, à mi-chemin,
la date de naissance, ça tient la route.
Qui plus est, M. le Président, encore une fois,
quand le collègue de Vachon nous dit : carte d'identité, on peut la laisser de côté, parce qu'avec la date de
naissance, on en a encore bien plus d'informations pour les corps de police comme la ville
de Montréal, qui ont accès, au bout
des doigts, à des systèmes d'information... Donc, les systèmes d'information, c'est les permis de conduire
et les dossiers criminels. Alors, du bout des doigts, c'est comme si la
personne traînait avec elle son dossier criminel en bout de piste.
Alors, on ne
me demande plus ma carte d'identité, mais, en me donnant la date de naissance, tout de suite, il y a quoi? Il y a tout et même plus que le permis de conduire. Ils checkent la
carte d'identité. Je ne demande plus le permis de conduire, je n'en ai même
plus besoin. Donne-moi ton nom, ton adresse, date de naissance, M. le Président,
puis j'aurai beaucoup plus d'informations que si je te demandais ton permis de conduire.
Ça, je ne le demande plus, je n'en ai même
plus besoin. Juste avec l'ordinateur puis ces trois données-là, bingo, j'ai
accès à ton permis de conduire, check. Je ne demande
plus de carte d'identité, je n'en ai même plus besoin. Donne-moi nom, adresse, date de
naissance, puis j'ai, au bout des doigts, ton dossier criminel.
Aurions-nous mis, M. le
Président, dans cet article-là, nom, adresse, permis de conduire? On aurait dit
non, on avait un permis de conduire.
Aurions-nous mis, dans cet article-là, nom, adresse et ton dossier criminel, le cas échéant? On dit : Bien non, c'est bien trop intrusif, à raison. Ça aurait
été encore bien plus, vous me permettrez l'expression, scandaleux,
entre guillemets, si nous avions amendé pour ajouter cela. On enlève les cartes
d'identité.
Alors,
l'argument que je fais ici, M. le Président, c'est un argument a fortiori. A
fortiori, on enlève les cartes d'identité. A fortiori, il faudrait enlever également la date de naissance. Et je
comprends, M. le Président, qu'on n'aura pas le bénéfice de la réflexion. Je le
déplore en tout respect. Il est du loisir de la ministre d'utiliser la majorité
parlementaire, mais j'aurais aimé ça
que l'on puisse mettre, M. le Président, au service de notre Commission des
institutions, qui analyse cette importante pièce législative, que nous
aurions pu mettre non seulement le luxe, qui n'en est pas un, de la réflexion
et du temps de réflexion, mais également
l'entièreté des ressources du ministère de la Justice qui nous aurait permis
d'avoir réponse à ces questions-là :
Qu'est-ce qui se passe dans les autres provinces canadiennes? Force est de
constater que le gouvernement va utiliser
sa majorité, puis vous ne serez pas surpris de comprendre qu'à la lumière de
cela, encore une fois, on ne nous a pas convaincus puis on va voter
contre l'amendement... l'article.
• (21 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous
plaît.
Mme Weil :
Mais c'est sûr que, juste en regardant rapidement, il y a beaucoup, beaucoup
qui a été écrit là-dessus au Canada,
et ça s'appelle des «street checks», et c'est toujours associé beaucoup, en
fait, au profilage racial. Et il y a, et c'est bien indiqué dans juste ce que j'ai lu, ça, c'est sans faire les
vraies recherches, que les personnes ne sont pas obligées de réponses. Elles ne sont pas obligées de
répondre aux questions dans un «street check», c'est comme ça qu'ils
l'appellent.
Moi, je sais
bien que, quand on est ministre puis qu'on amène un projet de loi, il y a, dans
le mémoire qu'on présente, une section de comparaisons avec les autres
provinces. L'information est là et ce serait très, très important, très important de savoir qu'est-ce qui se passe dans
les autres provinces pour nous donner un degré d'assurance qu'on ne va pas trop loin et qu'on est dans la norme. On se
compare aux autres provinces, pourquoi? Parce que les provinces canadiennes
se ressemblent beaucoup en matière de droit
pénal, certainement, et en santé, en éducation, etc. C'est des systèmes comparables,
vous le savez, M. le Président, vous qui avez été au gouvernement fédéral, vous
savez bien comment ça fonctionne.
Donc, la
ministre a ça en main. J'imagine que, dans le mémoire, on faisait une
comparaison. Généralement, c'est ça. Moi, je rappelle, dès qu'il y avait des
dispositions pénales, on voulait tous savoir comment ça se passe dans les
autres provinces. On veut savoir si on est
dans la norme, si on est progressiste ou moins progressiste, si on a des
progrès à faire. Moi, je pense que
c'est, honnêtement, pour donner un degré d'assurance qu'on est en train de faire
une bonne loi. Je ne comprends pas pourquoi la ministre, elle n'est pas
ouverte à faire un peu... nous ramener des réponses pour la prochaine séance. C'est juste un article, on pourrait aller
très vite sur le reste. Je suis inquiète par rapport à ça. Moi, je n'aimerais
pas savoir que nous, le Québec,
soudainement, on a mis une disposition qui n'est pas dans la norme canadienne
et que peu de provinces ont. Mais, si
elle me dit que, oui, l'Ontario l'a fait, bon, Manitoba, ça me donne... O.K.,
«fine», là, je comprends, on n'est peut-être pas, comment dire, des
rogues. On est dans la norme.
Et c'est juste
ça, et on est tous de bonne volonté. Et moi, je trouve que c'est un enjeu qui
touche des droits constitutionnels, qui pourrait, mon collègue l'a dit,
qui pourrait être contesté. C'est un risque, et moi, je ne me sens pas à l'aise de prendre ce risque. Je ne me sens
pas à l'aise de dire... bon, même, juste voter contre puis ne pas prendre ça
plus au sérieux que ça. Et je vous dis, j'ai
été... Je sais que j'ai suivi le débat, mais ça fait quand même quelques mois,
quand on avait fait les
consultations, et on était beaucoup sur les cartes d'identité. Mais là mon
collègue a soulevé cette autre question, et, d'après une lecture rapide, il semblerait que ce n'est pas la norme
de demander l'âge, parce qu'avec l'âge, on est capable de voir tout. Et, si on a une relation de conflit
avec l'officier... parce que l'exemple qu'ils donnent dans les «street check»,
c'est généralement dans un contexte de personne fragilisée déjà,
souvent, c'est le profilage racial, déjà il y a relation tendue.
Alors, je
n'en dirai pas plus, mais je plaide avec la ministre, parce que ça va très
bien, très, très bien. C'est une ministre extrêmement raisonnable, qui comprend bien les choses, maîtrise bien ses
dossiers, de nous donner juste un peu de temps chacun pour faire... et
des juristes qui pourraient nous dire... nous rassurer. C'est essentiellement
ça.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de Vachon, s'il vous plaît.
M.
Lafrenière : Oui, merci, M. le Président. Écoutez, on a bien entendu
les collègues de l'opposition. J'aimerais cependant mettre des choses au
clair, parce que j'arrive d'un monde de faits, puis, je pense, c'est important
de dire des faits, pas aller dans des
généralisations. On est très à l'écoute de ce que vous avez dit. Cependant, il
y a des choses qui ont été dites, qui
sont inexactes, que je voudrais corriger. En aucun temps, M. le collègue de
LaFontaine, j'ai dit qu'on n'a pas besoin du permis de conduire. On a
bien plus d'information qu'une date de naissance. Je pense, pour les gens qui
nous écoutent, les policiers qui nous écoutent savent très bien que c'est
n'importe quoi. Ce n'est pas vrai, ça.
Une voix : ...
M. Lafrenière : Non, vous avez dit
que j'ai même sous-entendu, tantôt, que c'était bien mieux juste la date de
naissance, ce n'est pas vrai, un.
Deuxièmement, vous avez parlé de profilage.
C'est vrai, c'est un enjeu qui est important, puis il ne faut pas le mettre de côté, mais on parle bien
d'interpellation, et je pense qu'on a amalgamé deux choses. Cependant, à la
lumière de tout ce que vous avez dit, on est à l'écoute, on va suspendre
l'article 19. Alors, on vous a bien entendu.
Cependant,
je trouve ça important de partir sur une bonne prémisse. Il y a des choses qui
ont été dites, je vous le dis encore une
fois, là, ce n'est pas vrai. Ça a été généralisé, et ce n'est pas vrai que les
policiers font tous du profilage, alors il faut être très prudent là-dedans. Il
faut être prudent là-dedans, mais on vous dit : On va le suspendre parce
qu'on écoute. On entend très bien ce que vous nous avez dit, alors
suspendons l'article 19.
Le
Président (M. Bachand) : Parfait. Est-ce qu'il y a consentement
pour suspendre l'article 19?
M. Tanguay :
Consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Consentement.
M.
Tanguay : Article 212, M. le Président, du règlement.
J'aimerais corriger, suite à l'intervention, et je le fais immédiatement
après les faits de mon collègue, pour rectifier deux éléments, si vous
m'accordez la parole. Parfait.
Le
Président (M. Bachand) : Oui, allez-y, M. le député de... C'est
important, oui. Allez-y.
M.
Tanguay : Alors, on n'est pas sur le temps d'aucun article, là.
212, je vais le faire brièvement. Et si c'est son interprétation, ce
n'était pas du tout qu'est-ce que je voulais dire, sur son premier point de
deux, que je laisse entendre qu'il avait
affirmé que le permis de conduire... comme il l'a affirmé, là, que le permis de
conduire, il avait dit qu'il le mettait de côté parce qu'il n'en avait pas de besoin parce qu'il avait encore
bien plus d'information avec le système informatique. Si c'est sa compréhension, ce n'est pas ça, ce que
j'ai voulu dire. Il s'agit soit d'une mauvaise expression de ma part ou
d'une mauvaise compréhension de la sienne, mais je voulais rectifier ce
fait-là.
Deuxième
élément, M. le Président, puis je ne veux pas me chicaner avec mon collègue de
Vachon, mais de laisser entendre que nous aurions pu insinuer que,
j'ouvre les guillemets, tous les policiers font du profilage racial, fermez les
guillemets, ça, M. le Président, c'est fort
de café. Combien de fois vous m'avez entendu dire que c'est une infime
minorité? À un moment donné, tantôt,
même, je me suis dépatouillé avec 99 %, 90 %. Bref, la très...
l'immense majorité de tout cela, des
policiers, policières, font un excellent boulot, puis on n'est pas en train
d'être préoccupés par cette immense majorité là, mais par les quelques-uns qui ont pu se rendre coupables de profilage
racial. Ça, laisser entendre qu'on dirait que tous les policiers, policières sont susceptibles, ont fait
ou pourraient faire du profilage racial, c'est totalement faux, M. le
Président, puis je tiens à rectifier ça.
Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député de LaFontaine. Je vous
rappelle que, d'emblée, tout le monde est
de bonne foi ici. Je pense, c'est important. Alors donc, nous allons continuer.
Nous serons maintenant rendus à l'article 20. Mme la ministre.
Mme
LeBel : Oui, merci, M. le Président. Pour des fins de cohérence et de
concordance, l'article 20 et l'article 19 sont intimement liés, donc,
et, compte tenu de la décision de l'article 19, je vais vous demander
d'également suspendre l'article 20.
Et ce sera la même chose pour l'article 26, là, parce que ce sont des principes
qui se retrouvent dans un et l'autre, et la décision qu'on prendra dans
un va avoir des conséquences sur 20 et 26.
• (22 heures) •
Le Président (M. Bachand) : O.K. Donc, ça serait consentement pour suspendre
19, 20 et 26. Consentement? Merci.
M.
Nadeau-Dubois : Est-ce que qu'on peut me donner un instant? 19, 20 et
26... juste y jeter un oeil avant de prononcer les mots magiques.
Le
Président (M. Bachand) : ...le consentement, M. le député de
Gouin, j'avais compris qu'on l'avait.
M.
Nadeau-Dubois : J'aurais quand même juste voulu voir...
Le Président (M. Bachand) : Non, mais c'est parce que je regarde globalement,
là, mais si vous voulez prendre le temps... Est-ce que ça va pour
l'instant?
M.
Nadeau-Dubois : J'essaie
juste de lire la chose avant de prononcer le mot «consentement». Je pense que
c'est une bonne pratique. Et là je l'ai lu, alors consentement.
Le
Président (M. Bachand) : Écoutez. Parfait.
Merci. Il y a consentement.
Mme LeBel :
Est-ce que vous pouvez nous dire à quel article nous sommes?
Le
Président (M. Bachand) : 21. Non, parce que, là, je n'ai pas ma
liste de ceux qui sont suspendus, là.
Mme
LeBel : Oui, attendez une
minute. On serait à 25, je pense, mais je veux juste m'en assurer. Donc, 21,
22, 23, 24 ont été suspendus précédemment pour un autre motif. Donc, on
serait potentiellement à 25. Est-ce que c'est le cas?
Une voix : ...
Le Président (M. Bachand) : Non, non. Je pense qu'on en a assez suspendu pour la soirée, alors on va... Alors,
nous sommes à l'article 25.
Mme LeBel : Mais il y en a 160, il
nous en reste quelques-uns.
Le
Président (M. Bachand) :
Oui, oui, je sais. Alors, s'il vous plaît, article 25, Mme la ministre,
s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le Président.
Article 25 : À l'article 89.1 du Code de procédure pénale...
Non, ça, c'est l'amendement. J'ai commencé à l'envers, excusez-moi. Mon Dieu!
Comment ça j'ai deux amendements?
Article 25 : Ce code est modifié par
l'insertion, après l'article 89, des suivants :
«89.1. La
personne arrêtée qui est tenue de comparaître en vue de sa mise en liberté peut
le faire en personne ou par un moyen technologique que le juge estime
approprié et autorise.
«Toutefois, dans ce dernier cas, le consentement
du poursuivant et de la personne arrêtée est nécessaire si des témoignages
doivent être rendus lors de la comparution et s'il est impossible pour cette
dernière de comparaître par un moyen technologique lui permettant ainsi qu'au
juge de se voir et de communiquer simultanément.
«89.2. Un
juge peut, avant ou lors de la comparution de la personne arrêtée en vue de sa
mise en liberté, sur demande de cette
personne ou du poursuivant, ajourner les procédures et renvoyer celle-ci en détention
dans un établissement de détention, par mandat de renvoi sous garde.»
L'article 89.1, le présent alinéa de
l'article proposé permettra à une personne arrêtée de comparaître en vue de sa mise en liberté par un moyen technologique que
le juge estime approprié et autorise. Le deuxième alinéa de l'article proposé
exige le consentement du poursuivant et de la personne arrêtée si le témoignage
doit être rendu lors de la comparution et
s'il est impossible pour la personne arrêtée de comparaître par un moyen
technologique lui permettant ainsi qu'au juge de se voir et de
communiquer simultanément.
L'article 89.2, commentaires :
L'article proposé permettra à un juge, avant la comparution d'une personne arrêtée en vue de sa mise en liberté ou au moment
de sa comparution, d'ajourner les
procédures et de renvoyer cette personne par mandat de renvoi sous garde
en détention dans un établissement de détention.
Maintenant, j'ai deux amendements. Pourquoi?
Une voix :
...
Mme
LeBel : Je comprends, excusez-moi. Je m'excuse, j'avais deux amendements, mais j'en ai pour
deux articles, donc deux amendements à proposer.
Premier amendement à l'article 25 qui
concerne l'article 89.1 :
À l'article 89.1 du Code de procédure
pénale, proposé par l'article 25 du projet de loi :
1° insérer, dans le premier alinéa et après
«peut le faire en personne ou», de «consentir à le faire»;
2° remplacer le deuxième alinéa par le suivant :
«La comparution par un moyen technologique doit permettre au défendeur, s'il
est représenté par un avocat, de communiquer en privé avec lui.»
Sur 89.1, cet amendement-là proposé donne suite
à un commentaire du Barreau du Québec qui fait référence au nouveau paragraphe 2.1 de
l'article 800 du Code criminel. Ce paragraphe prévoit que le consentement de la
personne arrêtée est requis pour la comparution par un moyen
technologique. Il prévoit aussi que l'accusé représenté par avocat doit avoir
la possibilité de communiquer en privé avec celui-ci. Ça devrait répondre à
cette préoccupation-là.
Est-ce que je peux proposer tous les amendements,
finalement?
Le Président (M.
Bachand) : Oui, allez-y.
Mme LeBel : Article 25, qui,
lui, correspond... l'amendement correspond pour la portion de 89.2 de...
M. Tanguay : Est-ce qu'on
peut y aller un amendement à la fois?
Le Président (M.
Bachand) : Si vous êtes d'accord, M. le député de LaFontaine,
c'est parce que, vu que c'est le même article 25, c'est deux amendements,
mais on va, bien sûr, y aller un amendement, parce qu'il peut y avoir un impact
global sur l'article 25.
M. Tanguay : Juste pour
savoir, parce que, là, l'objet du débat ne sera pas les deux en même temps, ça
va être d'abord lui, mais là on nous le communique...
Le Président (M.
Bachand) : Non, c'est ça.
Mme LeBel : Non, mais
l'article 25 introduit deux articles, puis j'ai un amendement pour chacun
des articles.
M. Tanguay : O.K. Parfait.
Mme LeBel : Article 25 : À
l'article 89.2 du Code de procédure pénale proposé par l'article 25 du projet
de loi, supprimer, après «un juge peut»... «avant ou»?
Ah! je supprime les deux.
Excusez-moi.
Supprimer, après «un juge peut», «avant ou».
Donc, on supprime les mots «avant ou» qui se trouvent après «un juge peut».
Commentaires : L'amendement proposé vient
corriger une erreur dans l'article 89.2 introduit par l'article 25 du
projet de loi. Cet article s'inspire du paragraphe 1° de l'article 516 du
Code criminel qui prévoit la possibilité de se présenter devant un juge avant la comparution, soit pour l'enquête sur
remise en liberté. Or, l'étape de l'enquête sur remise en liberté
n'existe pas en droit pénal. Donc, en vertu de l'article 89 du Code de
procédure pénale, un défendeur doit comparaître
dans les 24 heures de son arrestation. En vertu de l'article 92 du Code de
procédure pénale, le juge devant qui comparaît une personne arrêtée la
met en liberté, à moins qu'il ne soit convaincu que la détention de cette personne
est justifiée.
Le Président (M.
Bachand) : Alors, je vais suspendre quelques instants.
D'accord? Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 22 h 06)
(Reprise à 22 h 12)
Le
Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous serons maintenant à l'amendement, le premier amendement qui a été déposé
par la ministre à l'article 25, pour modifier l'article 89.1. Interventions
sur le premier... M. le député de Gouin, s'il vous plaît.
M. Nadeau-Dubois : Amendement intéressant
de la part de la ministre qui retient un des commentaires du Barreau sur la comparution par visioconférence.
Par contre, le Barreau en faisait deux. Il disait : Il y a deux... Il
parle de garanties juridiques
applicables à la comparution par visioconférence. L'amendement de la ministre
intègre le deuxième commentaire, qui est celui qui est relatif à la
possibilité pour la personne de communiquer avec son avocat.
Le premier
des deux commentaires du Barreau, par contre, était relatif à la... Disons, le
Barreau cite l'article 715.24 du
Code criminel qui spécifie que le tribunal ne peut autoriser la comparution par
visioconférence que s'il est convaincu, le tribunal, que l'accusé pourra comprendre la nature de la procédure et
que ses décisions seront volontaires. Ça s'applique lorsque l'accusé est
enfermé en prison. C'est vraiment une question d'information. Je me demande
pourquoi la ministre a retenu le second commentaire du Barreau et pas le
premier.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui. Bien, je peux
répondre à cette question-là, effectivement, parce qu'on considère qu'à ce
stade-ci le droit à l'avocat, les garanties juridiques sont prévues, sont déjà
prévues dans les chartes et peuvent rassurer ce
fait-là. L'article 715.24 du Code criminel auquel le Barreau fait
référence codifie une fonction inhérente au juge de toute façon, qu'il
applique déjà. Donc, pour nous, on est convaincus ici qu'il n'y a pas de
problème au niveau des garanties juridiques.
Pour ce qui est de ce qu'on a ajouté comme
amendement, effectivement, la possibilité... je pense que c'est l'article qui prévoit la possibilité...
l'amendement, d'avoir un entretien privé avec son avocat, qui n'est
effectivement pas prévu. Je pense que
ça, il faut le prévoir. Donc, on est convaincus, à ce stade-ci, que ça va
répondre à une préoccupation que le Barreau a émise, là.
Le Président (M.
Bachand) : Interventions? M. le député de LaFontaine?
M. Tanguay : Oui, merci,
M. le Président. Alors, on voit bien,
puis on salue l'amendement 89.1, le premier alinéa, «consentir à le
faire». Donc : La personne arrêtée qui est tenue de comparaître en vue de
sa mise en liberté peut le faire en personne ou consentir à le faire par un
moyen technologique.
Le deuxième
alinéa est remplacé par ce qu'on vient de voir, là, l'article 800,
parenthèse 2.1, Code criminel, en
tout cas, la substance de cela :
s'il est représenté par un avocat, communiquer en privé... Qu'arrive-t-il, puis
c'est probablement parce que
je n'ai pas pratiqué dans ce domaine de droit là, pour une personne qui, lors
de la comparution, n'est pas représentée par
avocat et désirerait l'être? J'imagine qu'il pourra y avoir suspension de la
comparution puis ça sera après qu'elle ait eu le bénéfice de rencontrer
un avocat ou une avocate.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Bien, pratico-pratique,
la réponse est oui à ça. Je veux dire, si on exige la présence d'un avocat, on
va lui fournir, et là, ça, ça va s'enclencher, naturellement.
M. Tanguay : Et dernière
question de compréhension, M. le Président, dans l'ancien... dans le deuxième
alinéa que l'on veut remplacer, de 89.1, il
y avait le concept de s'il y a nécessité d'avoir des témoignages. Est-ce que
l'on doit comprendre, par l'amendement
qui est proposé à 89.1, que, dans tous les cas de figure, qu'il y ait ou pas
des témoignages, mais là, s'il y a
des témoignages, en toute espèce de cas, ça va requérir le consentement de la
personne qui doit comparaître?
Le
Président (M. Bachand) : Mme la ministre.
Mme LeBel : Donnez-moi... Il va
falloir que je...
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce que vous aimeriez suspendre? On va suspendre
quelques instants, oui.
Mme LeBel : Bien oui, parce que ça
m'oblige à faire une petite lecture, là, puis d'être sûre de bien comprendre
votre question.
Le Président (M.
Bachand) : Parfait. On suspend quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 22 h 16)
(Reprise à 22 h 22)
Le Président (M.
Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci
beaucoup. La commission reprend ses travaux. Mme la ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Oui. Compte tenu
des discussions que nous avions, M. le Président, et du temps qui reste, et du temps que ça nous prendrait pour préparer un amendement
nécessaire pour rencontrer ces discussions, je vais vous
demander d'ajourner à ce moment-ci.
Le Président (M.
Bachand) : Est-ce qu'il y aurait consentement
pour que la commission ajourne ses travaux?
Des voix : Consentement.
Le Président (M.
Bachand) : Donc, la commission ajourne ses travaux sine die.
Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 22 h 23)