(Onze heures quarante-trois
minutes)
Le Président (M. Bachand) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour et
bienvenue. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 21, Loi
sur la laïcité de l'État.
Avant de débuter, Mme
la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne) est remplacée par Mme David (Marguerite-Bourgeoys);
M. Tanguay (LaFontaine) est remplacé par Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis);
Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce) est remplacée par Mme Montpetit (Maurice-Richard); M. Fontecilla (Laurier-Dorion)
est remplacé par M. Zanetti (Jean-Lesage); et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Étude détaillée (suite)
Décision de la présidence sur la question de règlement
sur la recevabilité d'un sous-amendement
Le Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup. Au moment d'ajourner nos
travaux, hier soir, nous en étions à un sous-amendement déposé par le député de
Jean-Lesage à l'article 6 du projet de loi. La recevabilité
du sous-amendement y a été soulevée. Je suis maintenant prêt à rendre ma
décision.
L'amendement du ministre vise à introduire la définition des signes
religieux à l'article 6, qui interdit le port de signes religieux par certaines personnes dans l'exercice de leurs
fonctions. L'amendement précise également deux critères permettant
de déterminer qu'un objet donné est un signe religieux.
Le sous-amendement,
quant à lui, vise à insérer les mots «selon la personne qui le porte» et «par
la personne qui le porte» aux premier et deuxième paragraphes de l'amendement.
Le député de Chapleau
estime que le sous-amendement est irrecevable au motif qu'il dénature l'amendement
proposé. Le député de Jean-Lesage estime quant à lui que le sous-amendement est
recevable puisqu'il précise la nature de l'amendement.
Afin
de statuer sur la recevabilité d'un sous-amendement, la présidence doit tenir compte de l'ensemble
des critères prévus par le règlement de l'Assemblée nationale et la
jurisprudence. Ces règles de base sont notamment codifiées aux articles 197 et 244 du règlement. De même,
l'article 200 du règlement mentionne que les sous-amendements sont soumis aux mêmes règles de recevabilité que les amendements.
Ainsi, un sous-amendement ne doit pas nier, dénaturer ou écarter l'amendement.
Tel
que le stipulait le président de l'Assemblée
nationale, M. Michel Bissonnet,
dans une décision de 1999, c'est le propre
d'une motion d'amendement d'apporter des changements. Il a été décidé à
plusieurs reprises que ces changements pouvaient être importants, pourvu
qu'ils ne dénaturent pas la motion.
La motion de sous-amendement,
dans le cas présent, vise à préciser et à modifier l'amendement. La motion de sous-amendement n'écarte pas, ne nie pas et ne dénature pas la
motion principale. En effet, le sous-amendement
du député de Jean-Lesage vient préciser la définition d'un signe religieux
contenue dans l'amendement.
Par ailleurs, je vous
rappelle que, dans le doute, la présidence doit chercher à favoriser le débat
plutôt qu'à le restreindre. En conséquence, je déclare le sous-amendement recevable.
Interventions sur le sous-amendement?
M. le député de Jean-Lesage, s'il vous plaît.
M. Zanetti : Bien,
je remercie beaucoup la présidence et aussi le secrétariat de la présidence
pour leur travail. Je pense que c'est une décision importante.
Donc,
voilà, comme c'était mentionné, au fond, ce sous-amendement-là vise à préciser
quelque chose, et ce que ça vise à
préciser, c'est, en fait, le caractère subjectif de la définition du signe
religieux, qui est déjà, au fond, le caractère de la définition actuelle. La définition actuelle, dans
son premier point, dit que tout objet religieux qui est considéré... qui
est en lien avec des convictions
religieuses, bien, c'est un article qui, en fait, fait référence à la
subjectivité, au jugement de la personne. Alors, nous, on dit... on
précise, en fait, l'amendement en allant dans le même sens en disant, bien, «de
la personne qui le porte».
Et,
dans le deuxième, bien là il y avait une ambiguïté. Il y avait très
certainement une décision subjective qui était là parce que ça réfère à
toute personne raisonnable et son sens commun. Alors, étant donné que, sur la
terre, toutes les personnes raisonnables qui
ont un sens commun n'ont pas nécessairement toujours le même jugement sur
toutes les choses en tout temps, ça pourrait causer un problème
d'interprétation important. Alors, pour clarifier, au fond, l'agent jugé personne raisonnable qui portera le jugement sur
chaque cas, on pense utile ici que ce soit, en fait, la personne la
mieux placée pour porter ce jugement-là,
c'est-à-dire la personne qui, elle-même, porte un signe dont certains peuvent
penser qu'il est religieux et dont d'autres pourraient penser qu'il n'est pas
religieux.
Alors, c'est vraiment ça, le sens de
l'amendement. Je pense que ça peut amener des clarifications qui vont
rendre plus facile l'applicabilité du projet
de loi. Et puis je dis tout ça en soulignant quand même que ça ne fait pas
qu'on est d'accord avec l'interdiction des signes religieux, mais, au
moins, je pense que, tant qu'à le faire, faisons-le avec une définition qui va
amener le moins d'injustices possible.
Le
Président (M. Bachand) : Interventions? M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Bien, M. le Président, je pense que le député de Jean-Lesage part sur des
fausses prémisses, notamment relativement au
deuxième critère parce que c'est un critère objectif. Ça a été défini,
notamment dans Hypothèques Trustco Canada
contre Canada par la Cour suprême. Lorsqu'une disposition prévoit un critère objectif,
le libellé de la disposition prévoit simplement une évaluation objective.
L'évaluation, elle est objective par la personne raisonnable. C'est un critère
reconnu en droit.
On
fait appel au caractère raisonnable, ce qui indique qu'il faut envisager
objectivement s'il est raisonnable de considérer qu'aux yeux de la
personne raisonnable... C'est un des critères avérés dans la jurisprudence.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Intervention, M. le député
de Jean-Lesage, s'il vous plaît.
M. Zanetti : Quel groupe de personnes inclut le concept ou
exclut le concept de «personne raisonnable»? Par exemple, qui ne serait pas une
personne raisonnable et qui ne pourrait pas juger du caractère religieux ou
référant à une religion d'un certain symbole?
Le
Président (M. Bachand) : Intervention? M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Le critère, c'est aux yeux d'une personne raisonnable. C'est avéré. Comme je
l'ai dit, c'est M. et Mme Tout-le-monde. Auparavant, on disait : Aux
yeux de l'homme de la rue. C'est le critère d'analyse qui est invoqué.
C'est un critère qui est courant.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Jean-Lesage, s'il
vous plaît.
M. Zanetti :
Je comprends que c'est courant. Je comprends que ça puisse être utilisé dans
des jugements. Mais en même temps je pose la
question pour être sûr de comprendre les implications concrètes de tout ça.
Est-ce qu'au fond tout le monde au Québec est une personne raisonnable?
Le
Président (M. Bachand) : Intervention? M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est aux yeux de la personne raisonnable.
Il y a une présomption que les gens sont raisonnables. Donc, c'est le
critère reconnu par la jurisprudence au niveau du caractère d'objectivité.
Le
Président (M. Bachand) : Intervention, M. le député de
Jean-Lesage, s'il vous plaît.
• (11 h 50) •
M. Zanetti :
Alors, si tout le monde au Québec est raisonnable, tout le monde devrait
spontanément avoir la même opinion
sur ce qui constitue un signe religieux, si ça fonctionnait. Mais la réalité,
je ne pense pas que le ministre va pouvoir contredire ça, c'est que ça
n'est pas tout le monde au Québec qui s'entend sur le caractère religieux de
tous les signes possibles. Et la preuve de
ça, bien, on l'a entendue en auditions publiques, c'est que Mme Fatima Houda-Pepin,
à qui on ne pourrait très certainement pas refuser l'adjectif de personne raisonnable, bien, cette personne-là
nous dit : Le hidjab, par exemple, ce n'est pas un symbole religieux, et puis il y a
d'autres personnes qui disent : Le hidjab est un symbole religieux.
Alors,
on voit bien que le critère «toute personne raisonnable», ça entraîne deux
interprétations qui peuvent être complètement opposées sur un signe pour... en tout cas, religieux, je ne sais pas, un signe pourtant très communément connu de tous. Alors, c'est là que je pense qu'on
peut affirmer très clairement que ce n'est pas objectif parce que
ça ne dépend pas d'un objet extérieur
à la personne qui juge, c'est une décision qui réfère à la subjectivité d'une
personne, si raisonnable soit-elle. Et l'expérience empirique, là, nous
montre qu'il n'y a pas d'universalité dans le jugement que portent toutes les
personnes raisonnables du Québec quant à savoir si tel signe est religieux ou
pas.
Alors, au fond, je
peux peut-être préciser une question par rapport à ça pour le ministre, c'est
que... Comment va-t-on évaluer si la
personne raisonnable jugeant du caractère religieux ou pas d'un certain
symbole... Comment évaluer, entre deux
personnes qui ont des jugements opposés, laquelle aura raison? Laquelle de ces
deux personnes-là raisonnables, par ailleurs, aura raison?
Le
Président (M. Bachand) : Merci, M. le
député. Interventions?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bon, revenons sur quelques éléments, M. le Président. Mme Houda-Pepin a dit : En droit musulman, ce n'est
pas considéré comme un signe religieux. En droit musulman. O.K.? Là, M. le
Président, ici, là, à l'Assemblée
nationale du Québec, là, c'est les
lois du Québec qui s'appliquent, hein, puis c'est la
Constitution canadienne qui
s'applique, les normes édictées à la
fois par le Parlement fédéral et par l'Assemblée nationale du Québec ici. O.K.? Ce sont les normes qui sont
édictées par les parlementaires québécois et par les parlementaires canadiens.
Là, j'espère
que tout le monde ici, en commission, est d'accord
avec ça, qu'au Québec puis au Canada ce n'est pas le droit musulman qui s'applique, c'est le droit québécois
puis le droit canadien. Là-dessus, M.
le Président, est-ce que je peux
avoir un consentement de la part des membres de la commission? Je pense que
oui. Bon, tout le monde est d'accord. Partons
de là, O.K.? Nous, on vient faire en sorte qu'en droit canadien et en droit
québécois, O.K., en droit québécois, on vient interdire le port de
signes religieux pour certaines fonctions prévues à l'annexe II.
J'ai déposé
un amendement en guise d'ouverture pour les partis d'opposition pour faire
cheminer le projet de loi sur la
laïcité parce que c'était une des critiques des collègues des oppositions. Le
député de Jean-Lesage, M. le Président, lorsqu'il attaque le
critère de la personne raisonnable, il attaque l'ensemble du corpus juridique
qui existe au Québec et au Canada. Ça a été
défini par la jurisprudence. C'est dans nos lois. Dans le Code civil, on y fait
référence à plusieurs endroits. Je
donne un exemple, 1436 du Code civil : «Dans un contrat de consommation ou
d'adhésion, la clause illisible ou incompréhensible pour une personne
raisonnable est nulle si le consommateur ou la partie qui y adhère [y trouve]
préjudice...» En droit civil, ça existe.
En santé et
sécurité au travail, l'article 36, Loi sur la santé et sécurité au travail :
«...qui pourraient raisonnablement être considérés comme attribuables à
ces jours...»
À plusieurs endroits dans le corpus, ça a été
défini. Ça a été défini par la Cour suprême, en quoi ça consistait. Alors, M. le Président, je comprends que les
collègues de Québec solidaire ont été élus pour faire la révolution, mais
notre système de normes va s'appliquer ici...
Le Président
(M. Bachand) : Attention, M. le ministre, là! Attention,
le ministre, s'il vous plaît!
Mme David : ...faire une
question de règlement, M. le Président.
Le Président
(M. Bachand) : Oui, allez-y, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, écoutez, je
pense...
Une voix : Bien là, ça s'en
venait bon.
Une voix : Ce n'est pas une
insulte.
Mme David :
Non, non, mais il pourra continuer, puis on en fera d'autres questions de
règlements. Mais je pense que,
vraiment, là, parler de révolution, là, il a parlé de droit islamique tout à
l'heure, je pense que c'est nettement exagéré pour Québec solidaire.
Le Président
(M. Bachand) : ...
M. Jolin-Barrette : Je vais
faire attention, M. le Président. Je me suis emporté, mes excuses au député de Jean-Lesage.
Le Président
(M. Bachand) : Merci. Continuez, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mes
excuses.
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
si le député de Jean-Lesage...
Le
Président (M. Bachand) :
Oui, oui, non... Non, M. le ministre... Parce que le ministre s'est excusé, c'est
parfait. Allez-y, M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Bon, alors, M. le Président, on fonctionne
à travers un système de normes qui ont été définies, notamment au niveau du critère de la personne
raisonnable. Or, ce qu'on incorpore dans la loi, O.K., c'est la définition de ce que
constitue un signe religieux selon le sens commun, et on vient indiquer par la
suite des critères qui sont alternatifs, que j'ai expliqués hier, et je
vais les réexpliquer pour le bénéfice des membres de la commission aujourd'hui.
Premier
critère, M. le Président, c'est une analyse subjective. La personne ayant une
croyance sincère, telle que définie
par la jurisprudence, c'est-à-dire la personne qui croit que le port d'un signe
religieux, le port d'un objet représente, pour elle, un signe religieux, dans son for intérieur, la personne qui
porte cet objet-là se dit : Moi, je le porte parce que ça constitue un signe religieux. La personne
elle-même qui porte le signe, pour elle, c'est un signe religieux. Donc, c'est
visé, il est interdit de porter cet objet.
Le deuxième
critère, qui n'est pas cumulatif, hein, c'est le critère de l'objectivité.
Est-ce qu'aux yeux de M. et Mme Tout-le-monde, est-ce qu'aux yeux de la
personne raisonnable ça réfère à un signe religieux? C'est un critère d'objectivité. La
majorité des lois québécoises, et notamment l'interprétation des lois
québécoises, font référence à une analyse
objective des choses et non pas à une analyse subjective. En matière de
religion pour, supposons, les accommodements, le critère est un critère subjectif, ce que nous insérons dans
l'article, mais, en plus, nous mettons un critère objectif pour
davantage de clarification aux yeux de tous.
Alors, je
pense que l'article est très bien construit. Et, si on acceptait l'amendement
du député de Jean-Lesage, ça aurait pour effet de mettre les deux
critères selon une analyse subjective, ce que nous ne souhaitons pas.
Le Président
(M. Bachand) : Le député de Jean-Lesage, s'il vous plaît.
M. Zanetti :
Bon, plusieurs choses. D'abord, au sujet de la révolution, bien, des
révolutions, au Québec, on en a fait une
ou presque, là, la Révolution tranquille. Ce n'est pas une mauvaise chose, et
je pense que, s'il y a quelque chose dont la planète entière a besoin et
avec laquelle on est en accord, c'est bien une révolution au moins démocratique
et au moins verte.
Le Président (M. Bachand) :
Faites attention, M. le député, là! Le ministre...
M. Zanetti : Oui. Non, je
faisais juste une parenthèse.
Le
Président (M. Bachand) :
S'il vous plaît... Oui, mais, si vous pouvez la fermer, la parenthèse, ça
serait très apprécié. Merci beaucoup.
M. Zanetti :
Parfait. Bien, c'est ça, c'était terminé. Je ne pensais pas partir longtemps
là-dessus, là. Je comprends que ce n'est pas l'objet de nos discussions,
mais je rebondissais.
Donc,
qu'est-ce qui arrive, j'ai une question bien simple, puis après ça je vais
développer davantage sur la question, là, de personne raisonnable parce
que... bon, puis du droit musulman ou, en tout cas, du débat théologique
possible là-dedans, là. Mais, si, par
exemple, une personne, très concrètement, là, dit : Ce signe-là que je
porte n'est pas religieux, mais qu'après ça toute personne raisonnable
dit : Ça réfère à une appartenance religieuse, lequel des deux critères va
s'appliquer, selon la définition qui est là?
Est-ce que ça va être : O.K., ce n'est pas un signe religieux, tu peux le
porter? Ou est-ce que ça va être : Ah!
on ne te croit pas. Toute personne raisonnable pense que ça réfère à une
appartenance religieuse, donc tu n'as pas le droit de le porter.
Qu'est-ce qui va... quel critère va dominer l'autre en cas de contradiction des
deux critères?
Le Président
(M. Bachand) : Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, les critères sont alternatifs et
non pas cumulatifs. Donc, si vous rencontrez l'un des deux critères, ça
constitue un signe religieux. Et revenons sur la question...
M. Zanetti : Donc...
Le Président
(M. Bachand) : Ça ne sera pas long, M. le député, M. le
ministre va terminer sa réponse.
M. Jolin-Barrette : ...la
question de la révolution démocratique que le député de Jean-Lesage souhaite
faire. Écoutez, M. le Président, moi, je pense qu'on fonctionne dans une
démocratie, mais j'aimerais entendre le député de Jean-Lesage nous dire qu'il a
été élu dans un système non démocratique. Est-ce que c'est ce qu'il nous dit?
Le
Président (M. Bachand) :
Je vous rappelle, en tout respect, messieurs, le ministre et M. le député, que
nous sommes sur le sous-amendement à
l'article 6 du projet de loi n° 21. Alors donc, je comprends le fonctionnement,
mais, s'il vous plaît, peut-être juste
revenir sur l'essentiel, tant pour vous, M. le ministre, bien sûr, que pour le
député de Jean-Lesage.
Donc, M. le
député de Jean-Lesage avait une question à vous poser. Pouvez-vous répondre,
s'il vous plaît, sur la question des critères?
M. Jolin-Barrette : Ah! j'ai
déjà répondu, M. le Président.
Le Président
(M. Bachand) : Parfait. M. le député de Jean-Lesage.
• (12 heures) •
M. Zanetti :
Je vais utiliser toute la discipline que je contiens pour résister à l'envie de
partir sur ce débat, que j'espère qu'on aura un jour et qui est très
important, par ailleurs, sur la question de la démocratie.
Par ailleurs,
si je comprends bien, dans le fond, la personne, elle dit : Ce n'est pas
un signe religieux que je porte, selon
moi. Si toute personne raisonnable, en tout cas, cette personne-là, là, qui ne
s'entendent pas toutes ensemble, mais une personne, au moins, considérée personne raisonnable, une, elle pense que
ça réfère à une appartenance religieuse, donc, si je comprends bien, la personne se verra interdite de
porter ce signe-là. C'est ce que je conclus. Vous me direz si ce n'est pas ça.
Mais, sur la question
de toute personne raisonnable, et tout ça, on a parlé de droit musulman. Tu
sais, le droit musulman, c'est un droit
divin, puis nous, on ne fonctionne pas, au Québec, selon le droit divin.
Mais, dans des conceptions de droit divin, les débats juridiques, entre
guillemets, sont des débats essentiellement théologiques qui relèvent de l'interprétation d'une révélation. Et les débats, justement,
qui visent à identifier de façon objective ce qu'est un signe religieux sont
des débats d'ordre théologique.
Alors,
moi, j'ai le sentiment qu'on est dans un piège, à définir la définition du
symbole religieux dans le cadre de ce projet
de loi là à l'article 6.
Pourquoi? Parce que, si on le définit vraiment objectivement en
disant : Celui-là, il en est un, celui-là,
il n'en est pas. Si on fait une liste, on porte un jugement théologique, alors
qu'on est supposé être laïc. Ce serait une contradiction de plus, là,
avec le Dieu est mon droit qui écrit là, avec la masse, le sceptre du salon
bleu et tous les symboles qui nous font parfois penser qu'on est dans une
église. Bien, ce serait une contradiction de plus.
Par
ailleurs, si on laisse ça au jugement de la personne raisonnable, est-ce que,
dans le fond... O.K., je vais poser la question autrement. Le ministre peut-il m'assurer que toute personne raisonnable
va avoir la même opinion sur qu'est-ce qui
constitue un signe religieux ou pas dans l'application de son projet de loi?
Est-ce qu'il peut affirmer avec certitude que toute personne raisonnable
dirait la même chose?
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, moi, je veux qu'on revienne sur
l'assertion que le député de Jean-Lesage fait. Il dit : Écoutez, les
signes religieux, ça relève du droit divin. Ça relève du droit musulman.
Écoutez, au Québec, là, le droit musulman ne s'applique pas, O.K.?
Ça va être les lois québécoises qui vont s'appliquer...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette :
C'est les lois québécoises qui vont s'appliquer...
M. Zanetti :
...prête des intentions. On est en train de sous-entendre que je suis en faveur
de l'application du droit musulman au Québec, là. C'est quand même assez
ridicule.
Le
Président (M. Bachand) : ...vous avez dit. M. le ministre,
continuez, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, le droit qui
s'applique ici, c'est le droit qui est voté à l'Assemblée nationale du Québec. C'est légitime, pour les
parlementaires québécois, d'interdire le port de signes religieux pour
les personnes en situation d'autorité telles
qu'elles sont définies à l'annexe II : juges, policiers, agents de
service correctionnel, procureurs, enseignants, directeurs d'école.
C'est ce qu'on fait dans le cadre du projet de loi.
Les
critères que nous avons mis, c'est un critère subjectif. Si la personne porte
un objet et elle considère que c'est un signe religieux, bien, c'est interdit. Dans son for intérieur, la
personne dit : Cet objet-là, pour moi, c'est un signe religieux, ce n'est pas possible de le porter dans le cadre
de ses fonctions durant la prestation de travail si elle est un juge, un
policier, un agent correctionnel, un procureur, un directeur d'école ou un
enseignant.
Si
aussi une personne raisonnable considère que l'objet porté par un individu
constitue un signe religieux, ce n'est pas permis de le porter dans le
cadre de leurs fonctions pour la prestation de travail si on est juge,
policier, agent correctionnel, procureur, directeur d'école ou enseignant.
Le critère objectif
est présent dans énormément de lois québécoises. Ça a été défini notamment par
la Cour suprême. La définition du
dictionnaire relativement à personne raisonnable : «Personne fictive qui
sert de modèle objectif pour l'analyse de la conduite d'une personne
afin de déterminer si elle a commis une faute qui pourrait engager sa
responsabilité civile ou pénale.
«Modèle
auquel se réfère la loi lorsqu'il y a lieu d'analyser la conduite d'une
personne. En matière contractuelle, personne qui se comporte avec bon
sens et d'une manière réfléchie lorsqu'elle contracte avec une autre.
«Personne ayant la
faculté de penser, de porter un jugement et d'agir conformément à des
principes.
«Exemple. On peut
signifier un acte introductif d'instance au domicile du défendeur en laissant copie
à une personne raisonnable qui y réside.»
M.
le Président, l'ensemble de notre droit, c'est basé sur ces concepts-là.
L'évolution a été définie. Le Code civil du Québec, qui est l'assise
législative du droit civil au Québec, fait référence à de nombreuses reprises à
la personne raisonnable. Est-ce dire, M. le Président, que tous les juristes de l'État qui ont travaillé sur la révision du
Code civil du Bas-Canada depuis les
années 60, je crois, hein, ça a pris des années et des années, avec le
livre sur... le chapitre sur la famille
en 1980, avec le nouveau code qui est entré en vigueur en 1994, avec tous les
parlementaires, tous les ministres de la Justice successifs de partis politiques différents, c'étaient des gens
qui étaient dénués de bon sens en insérant ce critère-là dans le Code civil du Québec et en l'insérant dans
multiples autres lois? Est-ce que tous les parlementaires, tous les gens
qui ont précédé, M. le Président, le député
de Jean-Lesage, et moi-même, et tous les parlementaires ici, est-ce qu'ils
étaient dénués d'intelligence et de gros bon
sens? Je ne le crois pas. Ce n'est pas ma prétention. Et je pense que, quand on
fait un travail comme le nôtre, on doit se
référer, notamment, au corpus législatif, à ce qui a été fait, aux années d'histoire,
aussi, dans la rédaction des lois. Et c'est précisément ce que nous faisons en
ayant un critère subjectif et un critère objectif qui, d'ailleurs, est avalisé,
à titre d'exemple, par la Cour suprême du Canada. Alors, M. le Président, je ne
peux pas être plus clair que ça.
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Jean-Lesage,
après j'ai la députée de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît.
M. Zanetti :
L'idée ici n'est pas de remettre en question la légitimité du concept de toute
personne raisonnable en toutes
circonstances. Ma critique est très simple, très circonscrite, là, au présent
cas : l'application de ce critère-là sur la définition du signe
religieux. C'est de ça, là, que je parle. Je ne parle pas de rien d'autre. Je
ne parle pas de toutes les personnes qui nous ont précédés, qui avaient bien du
bon sens, puis je ne parle pas de toute personne raisonnable en général,
qu'elle soit fictive ou réelle.
Je comprends
que votre définition légale de la personne raisonnable, c'est une personne
fictive, je comprends très bien ça.
Dans le concret, par contre, et c'est le concret qui nous intéresse ici, il y a
des questions auxquelles le ministre refuse
de répondre parce qu'elles sont difficiles, j'en conviens, mais ce n'est pas
une excuse pour ne pas répondre. Il faut ces réponses-là parce que, si lui, il n'y répond pas aujourd'hui,
d'autres seront pris pour en assumer la responsabilité plus tard, et ce
ne sera pas plus facile pour eux. Alors, je pense qu'il vient de la
responsabilité du ministre d'assumer ça, d'assumer ses responsabilités et de
répondre clairement.
La question à
laquelle il n'a pas répondu encore, puis je comprends qu'il n'y réponde pas
parce qu'il ne peut pas répondre quelque chose qui va dans le sens de
défendre son affaire, mais, concrètement, là, même si une personne raisonnable, en théorie, c'est une personne
fictive, etc., concrètement, les personnes qui vont juger de ça, ce sont des
vraies personnes, et ce sont des vraies
personnes tout à fait raisonnables. Mais il y a beaucoup de personnes tout à
fait raisonnables au Québec qui n'ont
pas, sur l'identification de certains signes religieux, la même opinion. Et ça
va causer un problème très, très, très concret.
Et là ma
question au ministre, c'est juste de dire : Reconnaît-il que deux
personnes tout à fait raisonnables, en position de devoir appliquer sa
loi prochainement, pourront avoir des interprétations différentes concernant ce
qu'est un signe religieux ou pas?
Le Président
(M. Bachand) : Merci, M. le député. M. le ministre, s'il
vous plaît.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, le critère, c'est un critère
objectif. À l'origine dans le projet de loi, j'ai proposé le sens commun, le sens courant, qui, moi, me
satisfait. Dans un signe d'ouverture, on apporte une définition pour
satisfaire, notamment, le député de
Jean-Lesage et, M. le Président, on met deux critères, soit l'un, soit l'autre,
pour s'assurer de faire en sorte qu'on sache ce que constitue un signe
religieux.
Hier, le député
de Jean-Lesage voulait faire passer un quiz aux membres de cette commission. Je
n'ai pas accepté, M. le Président,
parce que, présentement, on fait de la législation. Il y a un corpus, il y a
des règles qui s'appliquent en matière d'interprétation. Et c'est très
clair qu'avec le critère objectif nous répondons à ces questions-là.
Le Président
(M. Bachand) : Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys,
s'il vous plaît.
• (12 h 10) •
Mme David : Oui. Merci, M. le Président. Je vais continuer, donc, sur le deuxième alinéa de
l'amendement, et on parle de,
justement... on emploie le mot «soit raisonnablement considéré» comme référant
à une appartenance religieuse, et c'est
exactement de cela dont le ministre parle. Alors, j'ai une question pour le
ministre. On parle de gens raisonnables qui vont appliquer raisonnablement un critère qui référerait à une
appartenance religieuse. Il y a certainement un consensus dans cette Assemblée nationale à l'effet que le premier
ministre est quelqu'un de raisonnable. Or, ce même premier ministre,
et je le cite, a convenu que la définition
incluse dans la pièce législative, la définition, donc, proposée dans l'amendement
du ministre, je répète donc, que la définition incluse dans la pièce législative
est perfectible, et j'ouvre la parenthèse : «On va...» Pas la parenthèse, la citation, les
guillemets : «On va définir exactement dans le projet de loi, on va l'améliorer si c'est nécessaire.» Et le ministre est
resté muet sur la religiosité d'un jonc de mariage.
Nous sommes exactement
au coeur de l'enjeu de l'article 6. Nous sommes exactement
au coeur de questions que se pose le premier ministre, M. le ministre.
Et il n'est pas capable, il est incapable de répondre lui-même à la question :
Est-ce que le jonc de mariage fait partie, d'une façon raisonnable, comme se
référant à une appartenance religieuse? Et, si le premier ministre n'est pas capable de répondre et dit : On va définir exactement
dans le projet de loi, ce n'est peut-être pas un quiz, mais
c'est au moins une liste, ce sont des précisions que le premier ministre veut avoir. Et, si le premier
ministre veut avoir ces précisions, je demande au ministre s'il accepte, très
humblement, de répondre et de préciser, pour son premier ministre, quels sont, justement,
les, raisonnablement, gestes, parures, bijoux, accessoires qui peuvent être
considérés comme référant à une appartenance religieuse.
Le Président
(M. Bachand) : Merci, Mme la députée.
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Le critère objectif, il est très clair,
c'est aux yeux de la personne raisonnable. Alors, pour répondre à la question de la députée
de Marguerite-Bourgeoys, les alliances, comme je l'ai toujours
dit, et vous pourrez retourner à la conférence de presse, ne sont pas
visées comme étant un signe religieux.
Le Président
(M. Bachand) : Mme la députée, s'il
vous plaît.
Mme David : C'est quand
même intéressant parce que
vous êtes resté muet tout à l'heure. Le premier
ministre n'est pas resté muet, il a dit que le projet de loi était certainement
perfectible, on pouvait l'améliorer, il fallait définir exactement. Donc, pour l'ensemble
des citoyens, je comprends que vous allez donner une liste qui inclut puis
une liste qui exclut, parce qu'en ce moment même, là, depuis que le
premier ministre a fait sa déclaration, il doit y avoir pas mal, pas mal
de milliers de personnes mariées qui ont un
jonc, qui se sont échangé les joncs de mariage à l'église en se faisant
leurs voeux et qui se disent : Bon, bien, ça y est,
je vais aller me faire enlever le jonc que je n'ai pas enlevé depuis
35 ans. Et, M. le ministre, ça
correspond pas mal à la petite croix que la grand-mère a donné au collègue, au
cousin, à un ou à l'autre, qu'il porte depuis 35 ans.
Alors,
on va essayer d'aller dans la cohérence. Mais je comprends que le ministre a en
tête une liste précise de ce qui est
religieux et de ce qui ne l'est pas. Nous le demandons. Il appelle ça un quiz.
En tout respect, j'appelle ça une liste qui est demandée elle-même par
le premier ministre.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, le premier ministre n'a pas dit
ça, hein? Je pense qu'il ne faut pas interpréter les propos du premier ministre. Alors, c'est très clair. Si on le cite,
on le cite adéquatement et on ne lui prête pas d'intentions non plus.
Ça, je pense que c'est très important.
Deuxièmement, M. le
Président...
Le
Président (M. Bachand) : Oui. Excusez-moi, M. le ministre.
Oui, Mme la députée.
Mme David :
Je vais déposer l'article, si c'est nécessaire. Il est écrit : «On va
définir exactement dans le projet de loi — "exactement",
c'est pas mal exact, ça — on
va l'améliorer si c'est nécessaire.»
Document déposé
Le
Président (M. Bachand) : Pour dépôt. Merci. M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Donc, comme je le disais, M. le Président, les
alliances ne sont pas visées par le projet de loi. Je l'ai dit dès le
dépôt du projet de loi, en conférence de presse, le 28 mars dernier, et ça
a toujours été très clair, que les alliances n'étaient pas visées.
Alors,
le Parti libéral ne souhaite pas qu'on interdise le port de signes religieux
pour les personnes en situation d'autorité
dans le cadre de leurs fonctions. Ça, c'est très, très, très clair. Comme on
dit, là, c'est «crystal clear», très clair. Et le Parti libéral va tout
faire en sorte pour que le projet de loi ne soit pas adopté d'ici la fin de la
session. M. le Président, à...
Mme Montpetit :
M. le Président, appel au règlement.
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre, vous savez que
vous prêtez des intentions, là.
Mme Montpetit :
Voilà.
M. Jolin-Barrette :
Faites très attention, s'il vous plaît. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.
Mme Montpetit :
Mais j'aimerais quand même ça intervenir là-dessus. M. le Président, on
travaille ici. Je veux juste rappeler au ministre qu'il nous a convoqués
pour l'étude détaillée il y a une semaine seulement. On travaille en collaboration, on travaille avec diligence, comme
l'ensemble des députés qui sont assis de ce côté-ci. J'aimerais ça que
le ministre ne nous prête pas d'intentions
par rapport à la suite des choses. On lui a dit qu'on est disposés à travailler tant et aussi longtemps
qu'il le souhaitera pour améliorer son projet de loi.
Le
Président (M. Bachand) : Merci, Mme
la députée. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, le projet de loi sur la laïcité de l'État, le Parti libéral n'en veut pas. Ça,
là, M. le Président, c'est très, très clair. Le Parti libéral ne veut pas
interdire le port de signes religieux pour les juges, pour les policiers, pour les agents de services
correctionnels, pour les procureurs, pour les enseignants et pour les
directeurs d'école. M. le Président, c'est
leur position, ils la présentent. Ils l'ont d'ailleurs présentée depuis 2008.
Et qu'est-ce que les Québécois ont
dit? Les Québécois ont dit qu'ils souhaitaient que leur gouvernement interdise
le port de signes religieux pour les personnes qui sont visées dans le
cadre du projet de loi, uniquement, M. le Président, uniquement durant la
prestation de travail.
Les Québécois, ils
veulent aussi, M. le Président, que les services publics soient donnés et reçus
à visage découvert. Ça, M. le Président, je
pensais que le Parti libéral était d'accord avec ça. Mais plus on avance dans
le cadre du projet de loi, plus je me dis : Hum! À la vitesse où ça
avance, je ne suis pas convaincu que le Parti libéral souhaite réellement qu'on
exige que les services publics soient donnés et reçus à visage découvert.
Mme Montpetit :
M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la députée de Maurice-Richard,
s'il vous plaît.
Mme Montpetit : Je vais être
obligée de référer encore à l'article 211. Le ministre nous prête des
intentions. Je comprends qu'il essaie de
faire du temps. Nous, on essaie de travailler de façon constructive puis
d'avancer. Il sait très bien qu'on a passé une loi à visage découvert, vous le savez très bien.
Est-ce qu'on peut en revenir à l'objet de nos échanges, s'il vous plaît?
Si le ministre a terminé, moi, j'ai d'autres interventions à faire.
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre, vous avez la parole. Vous
connaissez bien les règlements.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, ce qui est très
clair, c'est qu'on souhaite aller de l'avant avec le projet de loi sur la laïcité de l'État. Et la
population québécoise aussi souhaite qu'on règle cette question-là. Alors,
moi, je le dis pour la fin et la conduite de nos travaux, la suite de nos
travaux, il n'en revient qu'au Parti libéral et à Québec solidaire de décider
si le projet de loi sur la laïcité est adopté ou non.
J'ai répondu de façon intelligible à la députée
de Marguerite-Bourgeoys à l'effet que les alliances ne sont pas visées par le projet de loi. J'ai expliqué au
député de Jean-Lesage ce qu'est le critère objectif. Mais, à un moment
donné, M. le Président, il faut vouloir
comprendre aussi les termes de la loi, il faut faire preuve de l'analyse qui
existe dans les autres lois existantes, M. le Président. C'est comme ça
que ça fonctionne.
Le Président
(M. Bachand) : Oui, madame...
Mme David :
...quand même, ça confirme que ça prend une liste parce que, si son premier
ministre, la personne qui est en tête
du gouvernement, ne sait pas quoi répondre à la question sur l'alliance, et que
le ministre lui-même reste muet devant
les journalistes pas plus tard que ce matin, puis que le premier ministre
répond qu'il va falloir aller exactement dans la liste, mais, écoutez, je pense que ça prend une liste et ça prend...
de poursuivre nos discussions sur ça parce qu'imaginez s'il y a cette différence de connaissances,
appelons ça comme ça, sur la bague de mariage, imaginez le pauvre
responsable de l'application de la loi, comme le disait le député de Jean-Lesage
tout à l'heure.
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, j'invite la députée de Marguerite-Bourgeoys à regarder la conférence
de presse que j'ai faite le 28 mars
dernier, à laquelle j'indique que les alliances ne sont pas visées.
28 mars, 28 avril, 28 mai, et là on est rendu le
12 juin, deux mois et demi que je l'ai dit, M. le Président, deux mois et
demi.
Le Président
(M. Bachand) : Mme la députée de...
M. Jolin-Barrette : Alors, voyez-vous, M. le Président, on est dans
une situation où ça fait deux mois et demi qu'on a traité de cet
argumentaire-là du Parti libéral.
Le Président
(M. Bachand) : Mme la députée de Maurice-Richard,
s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Deux mois
et demi, c'est 75 jours.
• (12 h 20) •
Mme Montpetit :
Je vous remercie, M. le Président. Bien, je ferai quand même noter au ministre
que, malgré que ces intentions-là ou ces définitions-là semblent, pour
lui, être claires dans sa tête, le premier ministre du Québec, le premier ministre du Québec, qui, j'imagine, a eu
plusieurs discussions et échanges et avec son ministre et au Conseil des
ministres sur comment va s'appliquer la loi et ce qui est un signe religieux, a
quand même dit, pas plus tard qu'il y a une demi-heure, qu'il n'était pas en
mesure de spécifier si une alliance était, oui ou non, un signe religieux.
Donc, ça démontre... Quand le chef de l'État
n'est pas capable de répondre à l'application, à comment sera appliquée une loi
qui est en train d'être discutée, et c'est le fondement, c'est le coeur de ce projet
de loi, ça démontre toute l'incongruité et toute l'imprécision du projet.
Et ce que le premier ministre a mentionné, puis
je vais le reciter parce qu'on nous a dit que ce n'était pas ce qu'il avait dit, je vais le reciter exactement,
il a dit : «On va définir exactement dans le projet
de loi, on va l'améliorer si
c'est nécessaire.» Ce projet de loi est perfectible. Et on vous annonce déjà qu'il
y aura des amendements qui seront déposés de
notre part pour venir circonscrire davantage ce qu'est un signe religieux parce que,
quand même le premier ministre du Québec mentionne
que le projet de loi est perfectible, et qu'il n'est pas clair, et que la
définition d'un signe religieux ne l'est pas à ce stade-ci, je pense que le ministre
devrait se mettre en mode écoute. Il n'a pas voulu écouter, pendant les
consultations, il devrait écouter à tout le moins le premier ministre...
Le Président
(M. Bachand) : Mme la députée de Maurice-Richard, s'il vous plaît! S'il vous plaît!
Une voix : ...
Le
Président (M. Bachand) :
Oui, vous prêtez des intentions au ministre. Alors, il faut faire attention, là, dans
ce vous dites aussi, s'il vous plaît. Vous connaissez les règlements, là. Alors
donc, Mme la députée, s'il vous plaît.
Mme Montpetit : ...je continue. La semaine dernière, le ministre
nous parlait de la définition de «signe religieux», il parlait de sens
commun, il a refusé de répondre à l'ensemble des questions qu'on lui a
demandées, à savoir ce qu'était...
Une
voix : ...
Mme Montpetit : Je ne prête pas des intentions, je vous ai posé
des questions très claires la semaine dernière, à savoir si un symbole où il est écrit «Dieu»
est un signe religieux, je n'ai pas eu de réponse. Je lui ai demandé...
Une voix :
...
Mme Montpetit :
Ah! bien, est-ce que vous souhaitez me répondre?
Le
Président (M. Bachand) : Écoutez...
Mme Montpetit :
Est-ce que c'est un signe religieux?
Le
Président (M. Bachand) : Est-ce que
vous pouvez...
Mme Montpetit :
Non, non, mais j'aimerais avoir une réponse, et le ministre...
Le
Président (M. Bachand) : Donc, vous posez une question au
ministre? Parfait.
Mme Montpetit :
...dit dans le micro que ce n'est pas vrai. Est-ce que je pourrais avoir une
réponse?
M. Jolin-Barrette : Vous avez dit : Le ministre a refusé de
répondre à mes questions, ce qui est faux, ce qui est faux. Je vous
invite à aller lire les débats parlementaires.
Mme
Montpetit : Alors, les débats parlementaires, ce que vous m'avez dit,
ce que vous avez répondu aussi au député de
Jean-Lesage, vous avez dit mot pour mot la même chose, vous avez dit : Je
refuse de participer à un quiz. Je ne
répondrai pas. On n'est pas au Cercle. C'est ce que vous avez
répondu à chacune des questions que je vous ai posées pour venir
clarifier ce qu'était un signe religieux. Et le premier ministre, avec les
propos et la mêlée de presse qu'il a faite,
ce qu'il vient confirmer, c'est que ce n'est pas clair. Et, quand on a
l'intention d'interdire le port de signes religieux, ça doit à tout le
moins reposer sur la prémisse que c'est possible et que c'est facile d'identifier
ces signes religieux.
Et le ministre, hier,
en déposant hier, à minuit moins une, là, on va s'entendre, on est à trois
jours de la fin de la session... Et je veux
juste le réitérer pour que ce soit bien clair, on a commencé les travaux
d'étude détaillée mardi dernier. Ça
fait à peine une semaine qu'on a commencé l'étude détaillée. On travaille en
collaboration, on est prêts à mettre tout le travail qu'il faut pour faire avancer ce projet de loi. Le ministre a
l'air de trouver ça très drôle. On a très bien compris qu'il voulait
brimer des libertés individuelles avec un bâillon, on a très bien compris ça...
M. Jolin-Barrette :
M. le Président! M. le Président!
Le
Président (M. Bachand) : Là, là, écoutez-moi bien, là! Là,
je vous avise...
M. Jolin-Barrette :
Ça, c'est une question de règlement.
Le
Président (M. Bachand) : M. le
ministre, s'il vous plaît! Là, je vous avise, là, vous vous êtes...
Mme Montpetit :
Vous n'avez pas une équipe pour les faire?
Le Président
(M. Bachand) : S'il vous plaît, Mme
la députée de Maurice-Richard!
Une voix :
...
Le Président (M. Bachand) : C'est moi qui ai la parole, s'il vous plaît! O.K.? S'il
vous plaît! Vous connaissez
les règlements, vous êtes des parlementaires. Vous étirez la sauce pas mal. Je
vous demande sincèrement, pour le projet important
qu'est le projet de loi n° 21, qu'on soit pour ou contre, de faire attention
à ce que vous dites et de la manière que vous le dites, s'il vous plaît,
pour la bonne marche des travaux. Mme la députée, vous avez la parole.
Mme Montpetit :
Je vais reformuler les propos. On a bien compris qu'il était possible et
envisageable qu'il y ait un bâillon pour terminer ce projet de loi, le premier ministre l'a dit, le ministre l'a dit. Nous, on
réitère le fait qu'on est disponibles pour continuer de travailler...
Des voix :
...
Le Président (M. Bachand) : S'il
vous plaît! S'il vous plaît! Alors, M. le ministre... Ça ne sera pas long, M. le député de Chapleau. M. le ministre, s'il
vous plaît.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, la députée de
Maurice-Richard me prête des mots que je n'ai jamais dits, jamais. Alors, si elle fait son travail sérieusement, qu'elle utilise
les citations appropriées et exactes dans le cadre des propos qu'elle
tient ici, en cette commission, mais qu'elle n'induise pas les parlementaires
en erreur ici.
Le Président
(M. Bachand) : Et je vous rappelle que nous sommes au
sous-amendement du député de Jean-Lesage sur l'amendement du ministre à l'article 6. Et, encore une fois, je vous
demande d'être extrêmement prudents dans vos propos, s'il vous plaît. Il en va de la crédibilité du travail de tous et
chacun ici. Mme la députée de Maurice-Richard, s'il vous plaît.
Mme Montpetit : Bien, écoutez,
je ne peux qu'être heureuse si, en mentionnant le mot «bâillon» et «projet de loi n° 21», je lui prête des intentions et que ce ne sont pas ses intentions. C'est parfait pour la suite des
choses. Donc, nous, on est prêts à continuer de travailler. C'est ce que
je veux dire.
Donc, en
déposant cet amendement-là à minuit moins une de la fin des travaux ou
peut-être pas à minuit moins une, finalement,
s'il a l'intention de continuer de travailler, parce que je pense que c'est
utopique, avec l'heure qu'il nous reste aujourd'hui et le peu d'heures
qui sont convoquées demain, puis vendredi, on ne sait pas pour le moment, de
savoir si on pourra...
Le Président
(M. Bachand) : M. le député de Chapleau, s'il vous plaît.
M. Lévesque (Chapleau) : ...
Le Président
(M. Bachand) : Écoutez, bien, c'est parce que vous êtes...
mais...
Mme Montpetit :
Bien, sur le projet de loi, je ne peux pas être plus pertinente que ça, là. Je
vous remercie, là.
Le Président
(M. Bachand) : En même temps, vous savez tous et toutes
que, là, nous sommes... on fait le travail
parlementaire. On ne peut pas présumer ici d'une fin, là, ou d'un début. Alors,
je vous demande juste de demeurer dans le coeur du projet de loi. On a
des sous-amendements, des amendements. Vous avez annoncé que l'opposition
officielle aurait des amendements. Alors donc, s'il vous plaît, alors peut-être
que d'autres... Je suis convaincu que les membres
de la commission seraient intéressés à voir vos amendements éventuellement.
Donc, pour ça, il faut avancer.
Alors, je
vous invite bien sûr à faire attention à vos propos, s'il vous plaît. Mme la
députée de Maurice-Richard, vous avez la parole.
Mme Montpetit :
Avec plaisir. J'essayais juste de rassurer le ministre, qui semblait avoir des
inquiétudes. Donc, mon intention
était de le rassurer sur la suite des choses par rapport à nos intentions pour
que nos intentions soient claires.
Donc, en
déposant... puis je reste, là, je reste sur la question de l'importance de
venir préciser ce qu'est un signe religieux.
Il y avait un flou juridique, c'est ce qui a été soumis à plusieurs reprises
pendant les consultations, par l'absence de définitions claires. Ce qui a été souligné à plusieurs reprises pendant
les consultations, c'est que ça laissait place à des interprétations complètement arbitraires de la
loi, que ça transférait sur les gestionnaires de terrain, qui sont, disons-le,
des administrateurs assez peu outillés quand
on a un premier ministre, justement, qui, lui-même, a une lecture qui n'est
pas celle... la même que celle de son
ministre par rapport à ce qui est un signe ou non. Mais il n'en demeure pas
moins que, malgré le dépôt de cet
amendement, ce n'est pas plus clair. On n'a pas plus et davantage de lignes
directrices par rapport à ce qu'est un signe religieux.
Et je veux
juste mentionner que le fait de ne pas avoir des lignes directrices claires...
et on le sait, que l'objectif très avoué du gouvernement, leur objectif,
c'est de clore le débat sur la laïcité au Québec. Mais le fait de ne pas avoir
de définition plus claire que celle qu'elle est va laisser place à
interprétation litigieuse.
Et je comprends bien que le ministre ne souhaite
pas répondre quand on lui pose une question sur ce qu'est un signe religieux de
façon précise, mais le problème que ça pose est exactement celui qu'on a vu. Ma
collègue de Marguerite-Bourgeoys l'a
mentionné, il y a des gens aujourd'hui qui se sont fait dire par le premier
ministre : Oui, il est possible qu'une alliance soit interprétée ou
pas comme un signe religieux.
Est-ce qu'on va se retrouver dans une situation
aussi... puis je le porte à l'attention de cette commission et du ministre, s'il veut bien nous répondre, à un cas
comme en France, en 2015, après la loi sur la laïcité, d'une collégienne
qui a été interdite d'entrer dans ses cours parce que la jupe longue qu'elle
portait a été considérée par les administrateurs, directeurs d'école, comme un
signe religieux? C'est à ça que ça nous expose. Ça nous expose à des
interprétations discrétionnaires, à des
interprétations litigieuses qui vont être faites, qui vont se faire sur le dos
de citoyens, s'il n'y a pas des lignes directrices et s'il n'y a pas une
liste beaucoup plus claire qui est déposée par le ministre.
Le Président
(M. Bachand) : Interventions? M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, il reste en masse de temps pour
adopter le projet de loi d'ici vendredi, en masse de temps. Je l'ai dit à de multiples reprises, ça dépend
uniquement du Parti libéral du Québec puis de Québec solidaire,
uniquement de leur volonté.
La
volonté du gouvernement du Québec, elle est très ferme, elle a été annoncée dès
le 18 octobre, dès la formation du
gouvernement. Il n'en revient qu'au travail des élus du Parti libéral et de
Québec solidaire pour qu'on puisse adopter un projet
de loi sur la laïcité de l'État, un projet de loi qui est extrêmement
important, extrêmement important pour la société québécoise.
Et
ce n'est pas parce que, durant des années, il n'y a rien qui s'est passé que le
Québec doit rester dans une situation de
statu quo dans lequel le Parti libéral souhaite maintenir le Québec. Ça, je
n'accepterai pas ça, et notre gouvernement n'acceptera pas ça, M. le
Président.
• (12 h 30) •
Le
Président (M. Bachand) : O.K. Alors, je vous rappelle que
nous sommes sur le sous-amendement. Intervention sur le sous-amendement?
M. Jolin-Barrette :
On peut voter?
Le
Président (M. Bachand) : J'attends... Non. Oui, Mme la
députée, excusez-moi, de...
M. Jolin-Barrette : Westmount—Saint-Louis.
Le Président (M. Bachand) : ... — merci beaucoup, M. le ministre — Westmount—Saint-Louis, s'il vous plaît.
Mme Maccarone :
Merci, M. le Président. Moi, je veux aborder un peu la question vis-à-vis le
scolaire, les commissions scolaires, étant donné que c'est un peu mon
expérience. Puis j'ai entendu aussi les intervenants de la Fédération des commissions scolaires du Québec,
l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec. Et j'aimerais savoir : Est-ce que le ministre
pense que, si on demande à un directeur d'école aujourd'hui si sa définition
soutient l'application de sa loi, répond
vraiment à une façon pour lui d'intervenir comme directeur ou directrice
d'école... Puis je demande cette question-là parce que, si je révise un
peu la position de la Fédération des commissions scolaires...
M. Lévesque
(Chapleau) : ...sous-amendement, là, la pertinence actuellement, là.
J'aimerais ça soulever la pertinence.
Mme Maccarone :
Oui. Bien, si vous...
Le Président (M. Bachand) : ...je vais laisser aller la députée, s'il vous
plaît. Merci, M. le député de Chapleau. Mme la députée, s'il vous plaît.
Mme Maccarone :
Merci. Je vais essayer d'aller plus rapidement à mon point, là. Merci. Oui,
non, je parle vraiment à ce sujet-là pour le sous-amendement...
Le
Président (M. Bachand) : Vous avez la parole.
Mme Maccarone :
...parce que, si on parle vraiment d'interprétation puis on dit qu'un
directeur, une directrice d'école,
c'est eux qui sont en charge de leurs écoles, puis, mettons, eux, ils disent
que ça ne répond pas à leurs valeurs, je questionne l'idée d'un critère
objectif parce que... Exemple, l'Association des commissions scolaires
anglophones du Québec, ils disent : «De
notre point de vue, le projet de loi n° 21 est superflu, [inutile] source
de discorde, ne reflète pas les valeurs que nous enseignons à nos élèves
et empiète sur les droits constitutionnels de la communauté anglophone.»
Alors,
le directeur d'école, il a un enseignant qui vient à l'école, puis cette
personne-là porte une kippa. Et on dit que,
suite à mes valeurs, moi, je trouve que — avec un sous-amendement — pour moi, ça ne répond pas à mes
valeurs. Alors, je dirais que, oui, c'est
correct que ce professeur-là porte une kippa parce que, de ma définition, ça
rejoint quelque chose qui est
objectif, qui est neutre, qui est visible pour mes élèves. Puis je trouve que
c'est une bonne affaire pour mes élèves,
surtout que c'est un enseignant qui est en train d'enseigner le cours
d'éthique, culture et religion. Une kippa, c'est un article religieux. Alors, je questionne si cette personne est
vraiment outillée pour répondre aux questions, de dire : Oui, moi, je vais déterminer que c'est bien, ce n'est
pas bien, parce qu'on sait que moi, je pense qu'ils ne sont pas outillés
pour appliquer ce projet de loi, pour appliquer même l'article.
Alors,
je questionne vraiment qu'est-ce qu'on va faire dans une école. Une personne
raisonnable, la définition d'un signe religieux, c'est vraiment flou
pour eux de déterminer qu'est-ce qui est acceptable pour eux. Un professeur, peut-être, qui porte une barbe, qui est sikh,
est-ce qu'on va lui demander de se raser? Quelqu'un qui rentre à l'école,
un professeur, ils ont des «tattoos», est-ce qu'on va leur demander de... Une
enseignante qui porte une jupe puis elle a un
«tattoo» d'une croix à côté de sa cheville, est-ce que, là, elle n'aura plus le
droit de porter des jupes parce qu'il va falloir absolument qu'elle se
cache?
Puis
j'amènerais ça aussi à l'idée de... le verbal. Parce qu'on parle aussi des
signes religieux, mais est-ce que c'est un signe religieux si, mettons, quelqu'un dit : Oh mon Dieu? Est-ce
qu'on va leur empêcher de s'exprimer aussi? Est-ce que c'est la
considération de ça?
Peut-être
c'est drôle. C'est juste que je parle en leur nom parce que mon inquiétude,
c'est vraiment comment que ça va être
interprété parce qu'ils n'ont vraiment pas d'outil pour aller vers l'avant,
pour dire : Bien, ça, c'est une application de la loi. Ça, ce n'est pas une application de la
loi. Surtout que, dans les commissions scolaires, on sait qu'ils sont en
train, vraiment, d'enseigner l'éthique,
culture, religion, des idées vraiment de partout dans le monde pour l'idée de
compréhension, de visibilité, de
multiculturalisme, d'interculturalisme, de tout ça. Alors, comment est-ce
qu'ils vont aller vers l'avant à l'application de ceci?
Le Président (M. Bachand) : Merci,
Mme la députée. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette :
Bon, merci, M. le Président. On n'est pas vraiment sur le sous-amendement du
député de Jean-Lesage, mais je vais quand même répondre parce que j'ai rarement
l'occasion de rencontrer la députée de Westmount—Saint-Louis. Puis ça me fait
plaisir qu'elle assiste à nos travaux. D'ailleurs, il y a eu des consultations sur le projet de loi n° 21. Je suis convaincu
qu'elle a pris connaissance de l'ensemble des mémoires de tous les
intervenants qui sont venus, et je suis
convaincu aussi qu'elle a lu le projet
de loi et qu'elle saisit la portée de
tous les articles, notamment celui de l'article 6, lequel
on étudie présentement, qui indique le port d'un signe religieux, et on parle
d'un objet.
Alors,
première clarification dans les propos de la députée de Westmount—Saint-Louis, un «tattoo», ce n'est pas le port d'un objet. Donc, comme je l'ai
dit dès le 28 mars dernier, je suis convaincu que la députée de Westmount—Saint-Louis
a écouté ma conférence de presse aussi, un «tattoo» n'est pas visé.
Deuxièmement, la députée de Westmount—Saint-Louis nous dit : Les valeurs, on ne partage pas ces valeurs-là, hein? Dans le projet de loi, ce qui est
prévu, c'est la laïcité de l'État. Je voudrais savoir deux choses. Est-ce
que la députée de Westmount—Saint-Louis est en faveur de la laïcité de l'État? Que la laïcité de l'État s'applique
aux écoles publiques?
Mme Maccarone :
...au gouvernement, c'est vraiment... c'est votre projet de loi.
M. Jolin-Barrette :
C'est important de le savoir, là. Êtes-vous en faveur de la laïcité de l'État?
Une voix :
M. le Président...
Le
Président (M. Bachand) : Oui, bien, il faudrait juste
faire attention, là...
Une voix :
...des appels de personne.
Le Président (M. Bachand) : Il faut juste faire attention, là. Vous pouvez
poser les questions si vous voulez, mais, à ce moment-là, ça devient plus une
affirmation, là. Est-ce que vous avez terminé votre réponse, M. le ministre?
M. Jolin-Barrette :
Bien, première réponse, je souhaite savoir si la députée de Westmount—Saint-Louis
est d'accord avec le principe de la laïcité
de l'État et les quatre principes qui soutiennent la laïcité
de l'État tels que définis aux articles 1, 2 et 3, que la laïcité de
l'État s'applique aux institutions gouvernementales, judiciaires.
Mme Maccarone :
... article 6 puis ce qu'on est en train de discuter.
M. Jolin-Barrette :
Oui, ça a un lien parce que vous... Oui, parce qu'on a parlé de valeurs.
Vous avez parlé de valeurs?
Mme Maccarone :
Moi, je ne parlais pas de mes valeurs puis je parlais des valeurs de
l'Association des commissions scolaires
anglophones du Québec, je parlais de la position de la Fédération des
commissions scolaires du Québec,
qu'eux ils disaient que, mettons, si on revient à l'article
6... les lignes directrices portant sur l'application de la définition d'un signe religieux afin
d'accompagner les organismes dans l'application de la présente loi. Moi, je sais qu'ils ne
seront pas bien outillés pour aller vers
l'avant à l'application de ceci parce
que c'est subjectif. Ce n'est pas objectif puis ça ne rentre pas dans leurs valeurs. Je ne parlais pas de mes valeurs
personnelles, je ne parlais pas des valeurs de ma formation politique,
je parlais vraiment au nom des intervenants qui sont venus en commission
parlementaire pour partager leur opinion vis-à-vis votre projet de loi.
Puis,
eux, qui... on disait qu'ils ne sont pas en accord avec ceci parce qu'ils disent que ça va vraiment contre
leurs valeurs. Puis ça serait très difficile,
non, impossible pour eux d'appliquer ce projet de loi. Même qu'il y avait deux
commissions scolaires qui ont dit qu'elles n'iront pas vers l'avant avec
l'application de ce projet de loi. Puis je ne
sais pas comment, eux, ils vont mettre ça en vigueur. C'est pour ça, la
question... Elle est où, la liste de définir ça va être quoi, comment, puis qu'est-ce qui est objectif,
qu'est qui est raisonnable, qu'est-ce qui n'est pas raisonnable? Ils
vont se retrouver dans une situation vraiment,
vraiment difficile, puis il y aura des écarts d'une école envers l'autre école,
une commission scolaire envers l'autre
commission scolaire. Les commissions scolaires dans la région de Montréal vont
avoir une vision totalement différente des commissions scolaires, peut-être, en
région.
Alors,
j'aimerais vraiment savoir si le ministre pense que les commissions scolaires,
les directeurs d'école sont bien outillés pour l'application de ce
projet de loi puis cet article.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, la députée de Westmount—Saint-Louis vient de dire que certaines
commissions scolaires anglophones ne
veulent pas appliquer la loi. Je veux savoir, la députée de Westmount—Saint-Louis, est-ce qu'elle invite et
est-ce qu'elle encourage les commissions scolaires à ne pas appliquer la loi?
Mme Maccarone :
Non...
M. Jolin-Barrette : J'aimerais
que ça soit noté.
Une voix :
211.
Le Président
(M. Bachand) : Oui. Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît.
Mme David :
Bien écoutez, je pense je commence à lire un peu, effectivement, dans l'esprit
du ministre et je trouve que ce n'est
pas tout à fait raisonnable, et il le sait très bien, ses yeux parlent
d'eux-mêmes, à quel point il essaie de prendre chaque parole de la
députée, chaque expression pour la retourner et dire : Ah! je vais poser
cette question-là. J'aurais pu prévoir...
Des voix : ...
Mme David :
Et ce n'est pas gentil et ce n'est pas correct parce que, honnêtement, je pense
que la députée n'a jamais voulu
insinuer ce que vous lui prêtez comme propos, que les commissions scolaires
anglophones vont désobéir civilement.
Le
Président (M. Bachand) :
Écoutez, là, vous êtes toutes des gentes personnes, alors donc, soyez assurés
de ça. Cela dit, je vous demande encore une
fois d'être extrêmement prudents dans vos propos. Je ne sais pas si c'est le
beau temps à l'extérieur ou la fin de la session parlementaire qui, un jour, va
arriver, mais je vous demande d'être extrêmement prudents, de ne pas prêter
d'intentions. Alors donc, est-ce que vous aviez terminé, M. le ministre?
• (12 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Bien, M. le
Président, moi, je veux savoir si la députée de Westmount—Saint-Louis
cautionne les propos des commissions scolaires anglophones, qui disent qu'ils ne veulent pas appliquer la
loi, ou va-t-elle soutenir l'application de la loi?
Mme Maccarone : Moi, je
partageais leur position. Je partageais leurs propos. Je n'ai pas dit que
c'était un «endorsement», ce n'est pas du
tout ça que j'ai dit, puis je n'ai pas dit que j'étais en accord, en désaccord.
Moi, je parle en leur nom, je partage leur position parce que c'est important
que le ministre est au courant de la situation pour les commissions scolaires,
les écoles, puis que, si, mettons, ils disent qu'ils ne vont aller vers l'avant
avec l'application du projet de loi, ça veut
dire pour eux... c'est parce que c'est une difficulté. Ce n'est pas une
question de ma position ou la position de ma formation politique du
tout. C'est vraiment que, pour moi, c'est un cri d'alerte, pour moi, c'est...
ce qui signifie pour moi, c'est de
dire : Qu'est-ce qu'on veut faire? On sait que ce serait impossible pour
nous de mettre ceci en application. Alors, comment qu'on va outiller les
directeurs, les directrices d'école pour l'application de ceci?
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je veux des clarifications. La députée de
Westmount—Saint-Louis
refuse de dire si elle va soutenir l'autorité de l'application de la
loi. C'est fondamental. Comme députée à l'Assemblée nationale, ici, moi, je veux savoir si... est-ce qu'elle va indiquer aux
institutions publiques qui doivent respecter la loi ou va-t-elle les
encourager à ne pas appliquer la loi. C'est
fondamental, et elle refuse de répondre à cette question-là. D'ailleurs, elle
dit : Je ne dis pas que je suis
pour, je ne dis pas que je suis contre. C'est dans ses propres propos qu'elle
vient de faire dans son intervention. Est-ce qu'elle invite les
commissions scolaires à ne pas respecter la loi qui sera votée validement par
l'Assemblée nationale du Québec?
Le Président (M. Bachand) :
J'avais la députée de Bourassa-Sauvé qui m'avait demandé...
Des voix : ...
Le Président
(M. Bachand) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille : Bien, je
voudrais juste revenir sur...
Une voix : ...
Mme Robitaille : Pardon?
Une voix : ...
Le Président
(M. Bachand) : ...députée de Maurice-Richard,
s'il vous plaît.
Mme Montpetit :
Le ministre a joué au même jeu la semaine dernière, il m'a posé la même
question. La réponse, elle est très claire,
nous l'avons déjà répondue publiquement. Je lui ai répondu ici jeudi, il peut
la reposer 12 fois s'il veut. La
réponse, elle est très claire : Jamais notre formation politique ne va
inviter à la désobéissance. Il peut la reposer demain, ce soir. La
réponse, elle demeure la même. Je ne sais pas c'est quoi, ce petit jeu-là. S'il
veut demeurer constructif, le ministre, qu'il réponde à nos questions, puis on
va être capable d'avancer sur son projet de loi.
Le Président (M. Bachand) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Une voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : Rapidement, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Moi, là, pour continuer à avancer, M. le
Président, là, dans le cadre du projet de loi, je veux m'assurer, là, que les personnes qui ont été élues
par la population québécoise soutiennent l'application d'une loi qui a
été votée ou qui sera votée à l'Assemblée
nationale. C'est grave, là, ce que la députée de Westmount—Saint-Louis vient de nous dire. Elle n'est
pas capable de confirmer qu'elle n'invitera pas les commissions scolaires à ne
pas appliquer la loi. Honnêtement, M. le
Président, la députée de Maurice-Richard nous dit : Ah! ma formation politique, c'est
clair. Ce n'est pas clair pour la députée de Westmount—Saint-Louis,
M. le Président.
Des voix :
...
Le
Président (M. Bachand) : ...vous portez...
M. Jolin-Barrette :
On a des députés à l'Assemblée nationale...
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre!
M. Jolin-Barrette : ...qui ne sont pas capables de nous dire s'ils
vont faire respecter la loi, puis ils veulent que les institutions...
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre, vous avez...
M. Jolin-Barrette :
...gouvernementales appliquent la loi.
Le
Président (M. Bachand) : ...vous prêtez des intentions.
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, honnêtement, ce n'est pas des choses qui sont acceptables.
Le
Président (M. Bachand) : ...
Mme Montpetit :
...M. le Président, j'aimerais ça pouvoir intervenir. Le ministre prête des
intentions à ma collègue. Ça fait trois fois
qu'on lui dit. Il peut continuer. J'aimerais ça que vous le rappeliez à
l'ordre. Il prête des intentions à ma
collègue. Elle n'a pas dit ça. La réponse est très claire. Est-ce qu'on peut
continuer à avancer sur son projet de loi ou il veut continuer de prêter
des intentions de cette façon-là? Ce n'est absolument pas constructif.
Le Président (M. Bachand) : Je vous demande de faire extrêmement attention
pour une... quoi, une 10e fois, à peu près, que je vous demande de faire
attention? Alors donc, écoutez, je vais encore une fois vous demander d'être extrêmement prudent dans le choix de vos propos.
Et je cède la parole à la députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Mme Robitaille :
Alors, je... En fait, ma question est au député de Jean-Lesage. J'aimerais
qu'il nous aide un peu à... Bien, je
pensais que ça serait peut-être une bonne idée de revenir au sous-amendement.
Toute cette question... En fait, si je
comprends bien, vous dites, et je pense au deuxième alinéa, vous parlez de...
Tout tourne autour de cette question de raisonnabilité, «raisonnablement considéré». Alors, votre ajout, «selon
la personne», réglerait, si je comprends bien, ce problème de
raisonnabilité. C'est ce que vous dites?
Le
Président (M. Bachand) : M. le député de Jean-Lesage, s'il
vous plaît.
M. Zanetti :
Oui, parce qu'en clarifiant la personne qui devra porter le jugement à savoir
s'il s'agit d'un signe religieux, en
le mettant de façon claire, on réduit les injustices possibles. On évite toutes
les situations où quelqu'un pourrait se
voir interdire un signe sans qu'il ne soit religieux ou encore toutes les situations
où la personne ne se verrait pas interdit un signe qui serait religieux, et puis là, bien, ça serait tant mieux
pour elle, mais, en même temps, ça créerait une iniquité dans l'application de la justice. Alors, en clarifiant la personne, au lieu de laisser ça à
toute personne raisonnable dont on présume,
de façon cavalière, puis même le ministre n'est pas capable de dire que ça n'arrivera pas
ce genre de situation...
Le
Président (M. Bachand) : Attention, monsieur! Attention à
vos mots, M. de Jean-Lesage. «Cavalier», «cavalière» n'est pas...
M. Zanetti : Non, non, mais, je veux dire... O.K. Que
le ministre refuse d'affirmer... je comprends. Que le ministre d'affirmer qu'il est impossible que deux
personnes raisonnables aient sur ce sujet des jugements différents, tu sais, je
m'excuse, je voulais le dire comme ça,
alors... Je reviens au début de ma phrase. Ce que je veux dire, c'est qu'on va
éviter ces situations-là dans lesquelles la formulation actuelle va nécessairement
nous amener. On va clarifier qui pose le jugement. Et, en ce sens-là, on ne peut pas
choisir une meilleure personne pour poser ce jugement-là que la personne
qui porte elle-même le signe en question.
Elle est la mieux placée pour déterminer, c'est ce que fait l'alinéa
1°, s'il s'agit d'un signe
religieux. Et puis on évite la possibilité que des personnes, par
ailleurs tout à fait raisonnables, aient une opinion qui ne soit pas conforme à la
réalité, ce qui n'est pas impossible, étant donné que toutes les opinions sont
là parmi toutes les personnes raisonnables sur ce sujet, puis que ça crée ainsi
des injustices.
Le
Président (M. Bachand) : Députée de Bourassa-Sauvé,
s'il vous plaît.
Mme Robitaille : Justement parce
que ce critère raisonnable, bien,
ici, prend toute son importance et justement dans un souci de cohérence,
je me demandais, moi... J'entends le député de Jean-Lesage, mais j'aimerais
entendre le ministre. Dans un souci de cohérence, j'ai ma collègue ici, de Westmount—Saint-Louis, qui nous dit : Bien, moi, je crains pour les directeurs d'école qui vont devoir
appliquer ça parce que c'est raisonnable pour quelqu'un,
c'est raisonnable pour la personne
qui porte le signe religieux, il y a une certaine... dans sa tête, elle a une
conception de ce qui est raisonnable, le directeur d'école en a une
autre, le directeur d'école de l'école voisine en a peut-être une autre aussi.
Est-ce que le ministre
pourrait nous dire un peu comment on pourra assurer une certaine cohérence de
cette raisonnabilité? Parce qu'évidemment ce n'est pas tous les
directeurs d'école qui sont au fait de la jurisprudence que le ministre nous a citée, ce n'est pas tous les
directeurs d'école qui ont les connaissances du ministre. Alors, comment il
peut rassurer les gens qui nous écoutent,
les directeurs d'école qui nous écoutent, peut-être les directeurs de
département, de contentieux du
gouvernement provincial, du gouvernement du Québec? Comment il peut les
rassurer de cette cohérence-là? Est-ce qu'ils vont avoir des outils?
Est-ce qu'ils vont être accompagnés? Je ne sais pas, est-ce qu'ils vont avoir
une formation pour être plus sensibles à ça?
Mais qu'est-ce qu'on va faire pour assurer le souci de cohérence de ce
concept de raisonnabilité pour ces gens-là qui ne sont pas des juristes, là?
Le
Président (M. Bachand) : Merci, Mme la députée. M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Intéressant, intéressant, M. le Président.
Écoutez, la députée de Westmount—Saint-Louis nous a parlé des valeurs, de la façon dont ça va être appliqué, elle
refuse d'indiquer, également, qu'elle va soutenir l'autorité et
l'application de la loi...
Une voix :
...
• (12 h 50) •
M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'arrive à la question de la
députée de Bourassa-Sauvé et, en même temps, la question de la députée de Westmount—Saint-Louis. Écoutez bien, à la commission
scolaire English-Montréal, savez-vous quoi?
Il y a un code d'éthique pour les commissaires. Saviez-vous ça?
L'article 5.1.2, qu'est-ce qu'il dit, le code éthique? Il dit : «Le commissaire exerce sa fonction avec
indépendance, intégrité et de bonne foi dans l'intérêt de la commission
et de la population desservie par la
commission. Il agit avec prudence, diligence, honnêteté, loyauté et assiduité
comme le ferait en pareilles circonstances une personne raisonnable et
responsable.»
M. le Président,
la commission scolaire English-Montréal prend le même critère, dans son propre
code de déontologie pour ses commissaires scolaires, que ce que j'insère dans
la loi. Avant moi, la commission scolaire English-Montréal le fait. C'est le
guide qui gouverne le code d'éthique et de déontologie des commissaires
scolaires.
C'est
bizarre, M. le Président, c'est correct pour le code d'éthique des élus des
commissions scolaires anglophones de
English-Montréal. J'imagine que la députée de Westmount—Saint-Louis et la députée de Bourassa-Sauvé vont
me dire que les commissaires scolaires de
cette commission scolaire là respectent leur code d'éthique et de déontologie,
hein? On s'entend. Comme commissaires
scolaires, ils devraient respecter. Puis, pour le respecter, ils vont respecter
l'article 5.1.2, qui fait référence à
la personne raisonnable. Or, si les commissaires scolaires, M. le Président,
sont capables d'interpréter l'article 5.1.2 du code d'éthique et de
déontologie des commissaires scolaires en fonction du critère de la personne raisonnable, je pense, M. le Président, qu'ils
sont capables de faire la même interprétation dans le cadre d'une loi.
Mais ça, c'est un questionnement que j'ai, comme ça, M. le Président.
Alors, j'aimerais que
la députée de Westmount—Saint-Louis,
M. le Président, nous dise : Est-ce que les commissaires scolaires, est-ce que les gens de la commission scolaire
sont capables d'appliquer le même critère qui se retrouve dans leur code
d'éthique et de déontologie, oui ou non?
Le
Président (M. Bachand) : Interventions? Mme la députée
Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone :
Merci, M. le Président. Avant d'intervenir, je veux juste rassurer le collègue
qu'il ne faut jamais encourager des
désobéissances civiles parce que je sais qu'il est vraiment inquiet. Puis, je
ne veux pas que ça devienne vraiment
un cas parce que, c'est ça, moi, je suis ici pour discuter du projet de loi n° 21, mais, apparemment, le ministre, il veut vraiment parler
d'autre chose. Alors, il me fait plaisir de confirmer.
M. Jolin-Barrette :
Ça touche l'application du projet de loi.
Mme Maccarone : Puis, oui, en effet, c'est important pour les
commissions scolaires d'appliquer les codes d'éthique, puis, oui, on parle des personnes raisonnables. En
effet, c'est superimportant, la loi, sauf qu'on ne parle pas des signes
religieux...
Des voix : ...
Mme Maccarone :
Bien, on ne parle pas des signes religieux. On ne parle pas du tout de la même
façon. On ne parle pas de l'application où on va demander aux gens,
peut-être, d'enlever un signe religieux. On ne demande pas, exemple, de se
distinguer chez les personnes qui portent des signes religieux, que ce soit
vrai ou faux. Ce n'est pas du tout ça qui rentre dans le code d'éthique des
commissions scolaires. Ce n'est pas comme ça qu'il se procède. Ce n'est pas de
ça qu'il parle.
Maintenant, on veut... il va falloir qu'eux,
toutes les commissions scolaires, les 72 commissions scolaires de la
province du Québec, il va falloir qu'elles changent leur code d'éthique pour
appliquer les règlements qui étaient inscrits
à l'intérieur du projet de loi n° 21, puis je le sais parce que ce serait impossible
pour eux, les directions d'école, de déterminer
ce qui est raisonnable, pas raisonnable, parce qu'ils ne sont pas outillés. Il
manque des définitions, il manque de l'information,
sinon, peut-être il va falloir qu'eux, ils changent leur code d'éthique pour
dire «personne raisonnable» puis la détermination.
Peut-être ce serait ça, parce que ce serait impossible parce que le
gouvernement ne fournit pas assez de détail et de définitions pour, eux,
de faire ce qu'ils ont à faire au sein des commissions scolaires.
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, les propres critères que se sont
donné les commissions scolaires, c'est des mauvais critères? Ils ne sont
pas capables d'appliquer leurs propres critères? M. le Président, on nous
dit : Ah! ils sont capables...
Mme Maccarone : ...des paroles
dans ma bouche. Ce n'est pas du tout ça que j'ai dit.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président...
Mme Maccarone :
Moi, ce que je lui ai dit, c'est qu'ils ne sont pas outillés pour aller vers
l'avant. Alors, si le ministre, il ne
veut pas se prononcer sur ça va être quoi, les définitions, c'est à lui de
répondre, ce n'est pas à moi puis ce n'est
pas à la commission scolaire à répondre. Les commissions scolaires sont là pour
essayer d'éduquer nos enfants, nos élèves
le mieux possible. Ils ont des codes d'éthique pour s'assurer qu'ils vont être
en mesure d'avoir une équité dans leur réseau, M. le Président.
Je trouve ça vraiment désagréable que le
ministre est en train de dire que ça se peut qu'eux, ils vont aller vers l'avant, puis ils vont être contre la loi, puis
qu'ils ne pourront pas appliquer leur propre loi. On parle vraiment qu'ils
ne sont pas outillés pour faire une modification, peut-être, à leur code
d'éthique suite à ce projet de loi puis cet amendement.
Le Président
(M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, la députée nous a dit, pas dans
cette intervention-ci, la précédente, qu'ils appliquaient leur code d'éthique et de déontologie, mais que la loi,
c'était différent, que la loi, là, elle, elle ne trouverait pas application. Non, non. M. le Président, s'ils
sont capables d'appliquer un code d'éthique et de déontologie qui fait
référence à la personne raisonnable, bien, moi, je pense que les commissions
scolaires anglophones sont capables d'appliquer
aussi une loi qui fait référence à la personne raisonnable et aux critères
d'objectivité parce que, nécessairement, dans le code d'éthique, ça fait référence au critère d'objectivité,
comme j'ai fait référence. J'avais la discussion avec le député de Jean-Lesage. C'est reconnu dans notre
droit. Et, si ça s'applique dans un code d'éthique et de déontologie,
bien, c'est normal que ça s'applique dans
une loi. Et, M. le Président, les lois qui sont votées à l'Assemblée nationale
s'appliquent à l'ensemble du territoire
québécois et doivent être respectées par l'ensemble des institutions
gouvernementales, incluant les commissions scolaires anglophones.
J'aurais souhaité davantage de vigueur,
davantage de...
Une voix : ...
Le Président
(M. Bachand) : Attention, M. le ministre!
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, j'émets des souhaits, j'émets des souhaits.
Une voix : ...
Le Président
(M. Bachand) : Non, vos souhaits sont pas mal plus des
intentions. Il faut faire très attention.
M. Jolin-Barrette : Mais, vous
savez, M. le Président, quand on souhaite fort, fort, fort, parfois...
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : O.K., M. le
Président, je vais revenir sur la question des valeurs parce que la députée de Westmount—Saint-Louis me parlait, tout à l'heure, des valeurs.
Or, on semble prioriser les valeurs multiculturalistes, du côté du Parti
libéral. Or, au Québec, je pensais que le concept que nous avions en termes de
valeur, c'était l'interculturalisme, comme était soutenu dans le rapport
Bouchard-Taylor.
Alors, je voudrais savoir, de la part
du Parti libéral, est-ce
qu'ils sont en faveur de
l'interculturalisme comme modèle d'organisation de la société québécoise
ou du multiculturalisme.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille :
Oui. Bien, j'aimerais qu'on revienne à nos moutons. J'aimerais qu'on revienne
au sous-amendement. J'entends toutes ces questions de
raisonnabilité. J'en suis, on veut que ce soit raisonnable, mais qu'est-ce
qui arrive... J'imagine qu'on ne voudrait
pas d'interprétation déraisonnable, j'en comprends. Si, en bout de
ligne, l'interprétation du directeur d'école
est déraisonnable pour la personne, qu'est-ce que la personne peut faire? Qu'est-ce
qu'elle pourra faire, la personne, si elle considère que c'est déraisonnable?
Et c'est important de le savoir, là.
Le
Président (M. Bachand) : Merci
beaucoup, Mme la députée. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, le critère... le deuxième
critère, qui est non cumulatif, qui est alternatif, c'est l'interdiction
du port de signes religieux, hein? Et, pour savoir ce que constitue un signe
religieux, c'est un objet si, aux yeux de la
personne raisonnable, il y a une appartenance religieuse. C'est très clair,
très, très clair. On retrouve ce genre de critère là à de multiples
reprises dans les différentes lois, M. le Président.
Je
sais que le Parti libéral souhaite tourner autour du pot, tourne très bien autour
du pot, tourne très bien, mais le pot, il est là et il est très clair.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé,
s'il vous plaît.
Mme Robitaille :
Je pense que c'est tout à fait légitime, pour les gens qui nous écoutent, de
savoir, si la personne qui est visée
considère que c'est déraisonnable pour elle, quel recours cette personne-là va
avoir. Est-ce qu'elle va aller au Tribunal
du travail? Qu'est-ce qu'elle va faire? Je pense que c'est important, dans le
cadre de la loi, de savoir qu'est-ce qui
arrive, quel recours les gens vont avoir si jamais le directeur d'école juge
qu'un anneau, un jonc, c'est religieux puis c'est un signe religieux, puis la personne veut contester. Où est-ce
qu'elle va? Qu'est-ce qu'elle fait? Est-ce que la personne, le responsable de l'école ou du département
aura... ça sera final, sa décision? C'est quoi, les recours? J'aimerais
entendre le ministre là-dessus.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
On le verra, dans le cadre de l'étude du projet de loi, dans les articles qui
s'en viennent, notamment l'article 12. Alors, si vous voulez avoir la
discussion à l'article 12, on peut se rendre jusqu'à l'article 12.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la
députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Mme Robitaille :
Bien, on parle quand même de raisonnabilité. Alors, qu'est-ce qui arrive quand
c'est déraisonnable?
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : ...M. le Président, c'est celui de la personne
raisonnable. C'est un critère de nature objective, hein? On a deux critères. Le premier critère, c'est la
personne elle-même. Le deuxième critère, c'est le critère de la personne raisonnable tel que je l'ai défini, ce que
constitue un signe religieux raisonnablement, aux yeux de la personne
raisonnable.
Le
Président (M. Bachand) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé,
rapidement.
Mme Robitaille :
Il y a quand même un flou autour de ce qui est raisonnable pour le simple
directeur d'école ou, en tout cas, la personne qui va devoir interpréter
ça. Est-ce qu'il y aura des lignes directrices? Est-ce qu'il y aura...
Qu'est-ce qu'il va y avoir pour assurer la cohérence de l'interprétation de ce
qui est un signe religieux?
Le
Président (M. Bachand) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair, c'est le sens
commun, le sens courant qui s'applique aux yeux de la personne raisonnable. Et ça, je pense que c'est fondamental, de
faire en sorte que, pour certains postes, dans certaines fonctions, pour la période durant la prestation de
travail, le port de signes religieux soit interdit : les juges, policiers,
agents de services correctionnels, procureurs, directeurs d'école et
enseignants.
Et je vous
rappellerais, M. le Président, que la bonne foi de tous et chacun se présume.
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Alors, merci beaucoup pour
votre contribution.
La commission suspend
ses travaux jusqu'à 19 h 30 où elle va poursuivre un autre mandat.
Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 13 heures)