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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 2 avril 2019 - Vol. 45 N° 15

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 6, Loi transférant au commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à la prise d’une poursuite pénale


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Table des matières

Remarques préliminaires

Mme Sonia LeBel

M. Marc Tanguay

M. Harold LeBel

M. Guy Ouellette

Auditions

Association québécoise des lobbyistes (AQL)

Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Alliance des cabinets de relations publiques du Québec (ACRPQ)

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

Commissaire au lobbyisme

Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles (TRPOCB)

Mémoires déposés

Autres intervenants

M. André Bachand, président

Mme Kathleen Weil

M. Mathieu Lévesque

M. Alexandre Leduc

M. Louis Lemieux

M. Denis Lamothe

Mme Lucie Lecours

*          M. Michel Binette, AQL

*          M. André Légaré, idem

*          M. Jonathan Gagnon, idem

*          Mme Martine Hébert, FCEI

*          M. Stéphane Forget, FCCQ

*          Mme Kathy Megyery, idem

*          Mme Vicky Boudreau, ACRPQ

*          M. Alain Madgin, idem

*          M. Benjamin Laplatte, CPQ

*          M. Jean-François Routhier, Commissaire au lobbyisme

*          Mme Doris Provencher, TRPOCB

*          Mme Mercédez Roberge, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Bachand) : Alors, bienvenue. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et vous demande, comme vous le savez bien, à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de vos appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et audiences publiques sur le projet de loi n° 6, Loi transférant au commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale.

Avant de débuter, M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est remplacé par M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Alors, ce matin, nous débuterons par les remarques préliminaires et, par la suite, nous entendrons l'Association québécoise des lobbyistes et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

Donc, pour les remarques préliminaires, j'invite la ministre de la Justice à faire ses remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposez de 5 min 34 s.

Mme Sonia LeBel

Mme LeBel : Alors, merci, M. le Président. Merci à tout le monde d'être ici ce matin. Je dois vous avouer que je suis assez excitée d'entrer dans ce processus-là qui, pour moi, en tant que juriste, est un processus très privilégié, donc celui de légiférer, si on veut, et celui qui nous est dévolu comme membres de l'Assemblée nationale. Et je dois avouer que c'est celui qui, à prime abord, m'attire beaucoup parce que je pense qu'on a une très grande responsabilité qu'on partage de façon commune. Et je sais, pour l'avoir vécu un peu, de façon parcellaire, que le travail qui se fait ici, en commission parlementaire, est un travail sérieux, qui est pris au sérieux par tous les membres de la commission, peu importe le côté de la table du côté où on se trouve. Et, pour moi, je vais vous avouer que c'est très excitant d'entrer avec vous ce matin et de faire mes débuts, là, officiels dans ce type de processus. Alors, merci à tout le monde d'être là.

On commence ce processus-là sur la loi, on l'a dit, transférant au Commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre et aussi adressant le délai de prescription appliquant la prise de poursuite pénale. On priorise pour l'instant... Notre gouvernement entend prioriser ces deux modifications essentielles à la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme parce qu'on pense que c'est une première étape à, peut-être, une réforme qui sera faite. Mais, ce matin, il n'agit, donc, que de transférer la responsabilité du registre et de modifier, si on veut, la prescription aux poursuites pénales.

Ce sont deux modifications qui constituent, comme vous le savez, et certains de mes collègues le savent encore mieux que moi, des demandes qui ont été exprimées par le Commissaire au lobbyisme, de longue date, et je pense que c'est un premier pas essentiel vers une réforme, mais, entre autres, vers une agilité, si on veut, du Registre des lobbyistes, agilité et modifications qui ont été demandées depuis longtemps. Vous le savez, le registre a été confié au registraire, à l'époque, pour des raisons pratiques, parce qu'il était... le conservateur avait déjà l'expertise nécessaire pour tenir ce genre de registre. Mais, au fil des ans, on a vu surgir certains problèmes reliés au partage des responsabilités, entre autres, et peut-être à l'agilité qu'avaient les lobbyistes à s'inscrire à tel registre. Et on espère que, par ce transfert, on pourra justement arriver à la mise en place d'une nouvelle plateforme, et c'est ce dont on pourra discuter également ce matin.

Quant au délai de prescription, je ne vous le cacherai pas, que j'en ai une certaine connaissance. Il y a eu effectivement des discussions qui ont été faites sur le fait que ce délai de prescription, compte tenu de la nature des enquêtes et des infractions qui se trouvent à la loi actuelle, que le délai d'un an qui était présent ou qui est présent dans la loi actuelle n'est pas suffisant pour permettre l'enquête et le dépôt d'accusations. Et il est malheureux, là, qu'au Québec la justice ne suive pas son cours pour de simples délais de prescription, surtout dans des matières où on sait que les enquêtes sont plus longues et plus ardues à faire.

Donc, on est conscients que plusieurs groupes viendront porter leur point de vue ce matin et cet après-midi, c'est essentiel. Nos discussions sont essentielles. Je sais que vous aurez... Certains auront des points de vue qui seront proactifs pour ce qu'on pourrait faire dans le futur dans cette réforme. Ça va nous faire également plaisir de vous entendre sur ces points de vue là, mais il faudra également restreindre et focusser peut-être nos débats sur l'objet du projet de loi comme vous aurez, tous et chacun, l'occasion de vous exprimer en temps et lieu sur une réforme éventuelle du registre ou de la loi, si on veut, sur le lobbyisme comme telle. Donc, sur ce, je vais passer la parole à mes collègues. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme la ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle, le député de LaFontaine, à faire ses remarques préliminaires, pour une durée maximale de 3 min 43 s. M. le député.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, bonjour à vous. Merci de présider nos travaux. Puis, je dois vous le dire, je vais le dire publiquement, M. le Président, je trouve que vous faites un très bon travail. Alors, merci d'être là, et de présider nos travaux de façon impartiale, puis de faire en sorte que les échanges aient lieu.

Saluer Mme la ministre. Heureux d'être la personne avec laquelle, entre autres, mes collègues autour de la table, elle aura son baptême de projet de loi. Alors, très heureux. Et je ne sais pas si je dois utiliser cette expression-là depuis le dépôt du projet de loi sur la laïcité, mais on me l'aura pardonné. Saluer les collègues également de la banquette ministérielle, de l'opposition officielle et des groupes d'opposition, et également le député indépendant, les députés indépendants, qui ont un rôle à jouer en ce Parlement, et on aura l'occasion peut-être, dans d'autres contextes aussi, de s'assurer qu'ils jouent ce rôle-là, qu'ils aient voix au chapitre.

M. le Président, moi, je ne vais pas m'éterniser sur l'objectif, aujourd'hui, qui est d'entendre des gens qui ont à travailler dans un contexte de lobbyisme. Et, aujourd'hui, le projet de loi n° 6 fait un peu écho, oui, de la recommandation 37, Charbonneau, oui, comme l'a bien dit Mme la ministre, a, entre autres, comme objectif de modifier le délai de prescription, de un, et, de deux, également de confier au Commissaire au lobbyisme la gestion du registre. Sur le fond des choses, nous croyons que ce sont là des avancées, et peut-être aussi dans le contexte du projet de loi, le 12 juin 2015, dépôt du projet de loi n° 56, qui ratissait beaucoup plus large, et, des fois, l'expression populaire trouve sa validité dans nos travaux : Qui trop embrasse mal étreint. Alors, faire un bout de chemin aujourd'hui, nous en sommes, nous y serons.

Nous aurons, j'en suis persuadé... Avec la ministre de la Justice, ça risque d'être davantage Wimbledon que dans d'autres commissions. Autrement dit, on parle deux minutes, on soulève une question qu'on présume intelligente et fondée parce qu'on a des sources; la balle, elle va nous la renvoyer. La balle, elle ne roulera pas à fond de terrain, ce qui fait en sorte qu'on va passer du temps beaucoup plus efficace, et quand, face à la solidité des arguments, on est capable de faire la part des choses et de faire avancer la commission... Et ça, j'en suis convaincu, intimement convaincu que Mme la ministre ait également... dans ce contexte-là, qu'elle s'inscrit dans cet état d'esprit là.

Alors, bons travaux, chers collègues. Heureux d'être ici présent et heureux d'entendre nos invités. Merci, M. le Président.

• (10 h 10) •

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. J'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition et député de Rimouski à faire ses remarques préliminaires pour une courte période de 56 secondes. M. le député, s'il vous plaît.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Bonjour, tout le monde. Bon, bien, je suis content d'être ici, là, participer, j'ai toujours aimé travailler en commission comme ça. Et pour avoir siégé ou participé aux séances du Bureau de l'Assemblée nationale pendant des années, j'ai vu évoluer le Commissaire au lobbyisme, les besoins, j'ai vu évoluer ça, et je suis très heureux de participer avec vous, maintenant, à moderniser puis à améliorer encore le service qu'on pourra donner. Le Commissaire au lobbyisme, c'est important, ça fait qu'il faut y mettre du temps, et on va le faire, comme il faut, comme on le fait d'habitude. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. J'invite maintenant le député indépendant et député de Chomedey à faire ses remarques pour une durée maximale de 50 secondes. M. le député.

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : Il faut vraiment qu'on soit succinct, M. le Président. Mme la ministre, on est très heureux de participer avec vous à votre premier projet de loi. Vous allez voir que la Commission des institutions, c'est celle qui siège le plus, pour l'avoir présidée pendant de nombreuses années. Et parce qu'on parle des institutions du Québec, que ce soit avec la loi sur le lobbyisme, je pense que ça va de soi, c'est une loi qui n'a pas été revue depuis 2002, c'est une première étape. J'étais très heureux de vous entendre dire que c'est une première étape. J'ai comme l'impression aussi que plusieurs des gens qui sont ici aujourd'hui vont venir nous dire : Oubliez-nous pas pour une seconde étape. Et on espère tous que cette seconde étape là, dépendant de la réflexion, oui, M. le commissaire, et où vous êtes, Mme la ministre, se fera rapidement parce que je pense qu'on a besoin d'actualiser cette loi-là à 2019. On se souviendra du contexte de la loi, en 2002, et je pense qu'on a besoin... les gens ont besoin d'être rassurés parce qu'il y a tellement de monde... et on a tellement galvaudé le terme «lobbyisme» que ça fait peur à bien du monde. Ça fait que je pense qu'on va tous travailler la main dans la main. Merci, M. le Président.

Auditions

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. Nous allons débuter nos auditions. Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise des lobbyistes. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis, après, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Encore une fois, bienvenue. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. À vous la parole.

Association québécoise des lobbyistes (AQL)

M. Binette (Michel) : Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Mon nom est Michel Binette. Je préside les destinées de l'association depuis 2017. Je suis aujourd'hui accompagné de deux vice-présidents, le premier vice-président, M. André Légaré, et M. Jonathan Gagnon. Mme la ministre, merci. M. le Président, merci, et chers membres élus, merci d'avoir accepté de nous entendre ce matin.

Donc, nous profiterons du fait que nous sommes les premiers à ouvrir ces consultations particulières aujourd'hui pour faire un peu d'éducation et de sensibilisation. Et vous nous en excuserez, si ce que vous allez entendre ce matin est quelque chose qui est familier pour vous, mais on réalise beaucoup, à l'association, que, dans notre mandat, nous avons ce mandat d'image, de redorer l'image, nous avons ce mandat d'expliquer à la population ce qu'on fait comme travail au quotidien, ce que font les lobbyistes-conseils, les lobbyistes d'organisation, les lobbyistes d'entreprise, comme travail, et ça va sûrement servir pour tous ceux qui vont nous suivre aujourd'hui. Donc, cette mission d'éducation, elle fait partie de notre mission quotidienne.

Sans plus tarder, je céderais la parole à notre premier vice-président, qui, lui, est un pionnier parce que c'est lui qui a cofondé l'Association québécoise des lobbyistes, en 2008, alors, quelques années après l'adoption de la première loi 2002. M. André Légaré.

M. Légaré (André) : Merci. Bonjour. Alors, l'Association québécoise des lobbyistes a été créée en 2008, dans la foulée de la commission parlementaire sur le lobbyisme. À l'époque, une véritable consultation auprès de plusieurs lobbyistes a démontré l'intérêt de ceux-ci à se regrouper à travers une association, qui se présente devant vous aujourd'hui.

La mission que s'est donnée l'Association québécoise des lobbyistes consiste à promouvoir, favoriser et faire connaître la pratique... faire reconnaître, pardon, la pratique professionnelle des relations gouvernementales au Québec. Pour ce faire, les principaux objectifs de l'AQL sont de regrouper et représenter les professionnels exerçant le lobbyisme en vue de faire reconnaître leur professionnalisme et leur contribution à l'évolution de notre société, exercer un leadership dans la reconnaissance et l'observance de pratiques éthiques en matière de lobbyisme, promouvoir et favoriser l'instauration de pratiques d'excellence dans l'exercice du lobbyisme, contribuer à la formation de nos membres et de la relève ainsi qu'au perfectionnement des professionnels oeuvrant dans le domaine, éduquer et sensibiliser la population, les titulaires de charges publiques, les organisations et les entreprises à la pratique et à l'importance du lobbyisme dans nos sociétés démocratiques, favoriser la coopération et les échanges avec les associations professionnelles du domaine des affaires publiques ainsi qu'avec d'autres associations professionnelles dans le monde, encourager et participer au débat de société faisant valoir l'apport du lobbyisme dans le maintien d'un climat social harmonieux et dans l'exercice de la démocratie.

En ce qui concerne les valeurs de l'association, l'AQL favorise la pratique éthique du lobbyisme. En adhérant à l'AQL, ses membres s'engagent à exercer leurs activités de lobbyisme avec honnêteté, diligence et intégrité, dans le respect de ses valeurs et de ses règles déontologiques ainsi que dans le cadre fixé par la législation encadrant la pratique du lobbyisme au Québec.

Aujourd'hui, l'AQL est le principal regroupement représentatif des lobbyistes au Québec, avec un membership d'une centaine de membres issu des lobbyistes-conseils, des lobbyistes d'organisation et des lobbyistes d'entreprises. Je vous remercie.

M. Binette (Michel) : Merci, M. Légaré. Pour faire un peu de chemin avec ce qu'il vient de nous présenter comme mission, comme valeurs à l'Association québécoise des lobbyistes, on a évidemment — on parlait de problème d'image — on a à vous dire que l'image que les citoyens se font des lobbyistes est l'image de 770 lobbyistes-conseils. Au registre des lobbyistes, il y a tout près de 14 000 personnes qui sont inscrites, 9 309 d'entre eux sont des lobbyistes d'entreprise et 3 680 personnes sont des lobbyistes d'organisation. 770 sont des lobbyistes-conseils. L'image que se font les citoyens, c'est l'image du lobbyiste-conseil. Comme un avocat, bien, on se fait l'image d'un avocat qui fait du litige au palais de justice ou qui plaide devant les tribunaux, ça représente 10 %, bien, pour les lobbyistes, les lobbyistes-conseils, c'est 6 % qui sont des lobbyistes-conseils. Alors, pour aller plus loin, je vais céder la parole à Jonathan Gagnon pour vous tracer un portrait du lobbyisme et de la légitimité au Québec... ce que l'on recherche, pardon.

M. Gagnon (Jonathan) : Merci beaucoup. Bonjour à tous et à toutes. En effet, prendre le temps quand même de favoriser une connaissance, une compréhension, je dirais, partagée du phénomène du lobbyisme au Québec parce que, trop souvent, le concept de lobbyisme est associé à des histoires particulières, pour ne pas dire douteuses ou scandaleuses, alors que la profession, bien sûr, ou cette pratique-là réfère à quelque chose de beaucoup plus noble que cela.

D'ailleurs, pour avoir une approche plus objective de la chose, on peut se référer à la loi québécoise sur l'éthique et la transparence en matière de lobbyisme, qui décrit en fait ce qu'est, justement, l'activité de lobbyisme, c'est-à-dire une communication auprès de titulaires de charges publiques dans l'objectif d'influencer leurs décisions, lors des communications, que ce soit des rencontres, des correspondances de différentes natures auprès de titulaires de charges publiques. On entend par là, bien sûr, vous tous, élus de l'Assemblée nationale, mais également du personnel de cabinet politique ou encore des fonctionnaires, afin d'influencer des décisions, que ce soit dans le cadre de développement de projets de loi, projets réglementaires, l'obtention de permis, d'autorisations de toutes sortes ou encore de subventions. Avouons que, lorsqu'on le regarde objectivement, il n'y a rien de scandaleux là-dedans, au contraire, c'est une façon, en fait, de contribuer à une prise de décisions éclairée parmi les acteurs politiques et administratifs.

On peut même aller plus loin en évoquant, en fait, que le lobbyisme est même inhérent à nos sociétés démocratiques pluralistes puisqu'en effet il y a une variété d'acteurs d'intérêt qui cohabitent dans nos sociétés, des intérêts parfois même contradictoires, hein, le patronat, le syndicat, les groupes environnementaux, les groupes de défense de droits sociaux, etc., et, dans nos sociétés démocratiques, tous ces organismes-là ont droit, un droit reconnu, d'accéder aux instances gouvernementales afin de faire entendre et de défendre leurs points de vue. Il est donc juste de dire que le lobbyisme est inhérent aux sociétés démocratiques, ce n'est pas juste un mal nécessaire. Puis ça, ce n'est pas rien qu'un spin de lobbyiste, c'est une réalité qui s'observe dans les faits.

Maintenant, pour qu'il soit perçu comme étant légitime, le lobbyisme doit s'appuyer sur deux choses fondamentales : premièrement, un cadre clair, prescrit par les autorités et qui détient même des outils pour s'assurer du respect de ce cadre-là. À cet égard, la prolongation du délai de prescription qui est prévu dans le projet de loi, on ne peut que le saluer, l'applaudir puisqu'effectivement les fautifs doivent être arrêtés, doivent comparaître, en fait, et faire face à la loi. La loi doit être respectée, bien évidemment. Également, pour être perçu comme légitime, le lobbyisme se doit de se faire dans la transparence et, en fait, le corrélat de cette transparence, dans notre système, en fait, c'est le fameux registre des lobbyistes, qui est également l'objet du projet de loi, donc, pour le rapatrier sous le Commissaire au lobbyisme.

Un registre qui, par contre, doit-on le dire, puis je pense que c'est comme ça qu'on va terminer l'explication complète de ce qu'est le lobbyisme, un registre qui présente une partie de la réalité vécue, au Québec, du lobbyisme, puisqu'au lendemain de l'adoption de la loi, en 2002, il y a eu un règlement qui a quand même décidé d'extraire de sous la responsabilité de la loi certains groupes, par exemple, des organismes dont la majorité sont constitués de membres à but non lucratif. Donc, souvent, on a une perception que le lobbyisme n'est que le propre d'intérêts économiques et pécuniers alors que, dans les faits, c'est tout un ensemble d'acteurs qui communiquent auprès de fonctionnaires, d'élus ou de cabinet ministériel afin de faire cheminer leurs réflexions. C'est important de garder ça à l'esprit, je pense, pour avoir une vision complète de ce qu'est la réalité du lobbyisme dans nos institutions. Merci beaucoup.

• (10 h 20) •

M. Binette (Michel) : Maintenant, pour en venir un peu sur le projet de loi lui-même, bon, M. Gagnon l'a dit, sur la question de la prescription, l'Association québécoise des lobbyistes est tout à fait d'accord avec cette modification, donc on ne s'éternisera pas sur le sujet.

Maintenant, on est aussi très d'accord avec le fait que le commissaire puisse rapatrier la responsabilité du registre. Pourquoi? Parce que plus de 50 % des problèmes que rencontrent les membres de notre association ou les lobbyistes au Québec, c'est un problème avec le registre lui-même, à l'inscription elle-même, c'est-à-dire que les gens trouvent que c'est complexe. On veut parler de simplification, de convivialité. Alors, on sait que ça décourage des gens qui font des communications d'influence d'avoir à passer à travers l'inscription au registre des lobbyistes. Donc, on ne peut que saluer cet objectif de transférer le registre du conservateur vers le commissaire, et de rajeunir la plateforme technologique parce qu'elle est certainement depuis très longtemps désuète. C'est compliqué, c'est complexe. Et je vous dirais que, dernièrement, dans les derniers mois, il y a de ces fois où on enregistre un mandat, un nouveau mandat, et ça peut prendre jusqu'à deux semaines et trois semaines avant d'avoir le mandat enregistré. Ce n'est pas simple, on est dans les dédales administratifs et, selon nous, c'est quelque chose qui décourage certaines personnes même de s'inscrire, en disant... et je l'ai vécu, des gens qui m'ont dit : Peux-tu t'inscrire pour moi? Parce que, là, ça fait trois semaines, un mois que je suis là-dedans, c'est compliqué, c'est complexe. Alors, si on retient une chose, simplification, convivialité et, maintenant, je pense que la balle sera dans le camp du commissaire pour la suite.

Maintenant, je termine là-dessus, M. le Président, avec une série de recommandations que l'AQL veut proposer aux parlementaires. Alors : que les parlementaires adoptent le principe du projet de loi n° 6 qui vise principalement le transfert du registre des lobbyistes au commissaire et l'ajustement du délai de prescription; qu'il soit inscrit dans la loi que la gestion du registre par le commissaire doit viser la simplicité afin d'en faciliter le respect; que soit spécifié dans les principes de la loi que l'inscription au registre est gratuite afin de protéger l'accès de la société civile aux institutions; que les modalités de tenue du registre que le commissaire a l'intention de proposer soit dévoilé avant l'adoption du projet de loi, une fois le projet de loi adopté, en plus d'être l'objet d'une période de consultation publique; que les modalités de la tenue du registre par le commissaire soient étudiées par une commission compétente de l'Assemblée nationale, comme l'a été le Code de déontologie des lobbyistes; et, finalement, que le délai de mise en vigueur de la loi soit réduit à 18 mois afin d'accélérer la transition et les travaux informatiques correspondants.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. On va débuter maintenant la période d'échanges. On va débuter avec le groupe du parti ministériel. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous. Merci.

Mme LeBel : Oui, merci. Merci, M. le Président. Je vais commencer peut-être de façon un peu plus large, pour, après ça, cibler le projet de loi comme tel.

Vous avez mentionné, effectivement, puis je pense qu'on le voit bien dans la société, cette espèce de connotation péjorative qu'a le terme «lobby» ou «lobbyiste», et ce, malgré l'existence, déjà, du registre depuis plusieurs années, qui est un outil de transparence — en tout cas, qui se veut un outil de transparence. Vous reliez le fait que ça perdure à quoi exactement?

M. Gagnon (Jonathan) : Bien, différentes choses. Évidemment, on s'entend que l'actualité ramène aux citoyens, en fait, une partie de la réalité, qui peut être interprétée par certains comme l'ensemble de la réalité du lobbyisme. Et, bien sûr, c'est notre travail quotidien que de tenter de contrebalancer cette perception partielle là, puisqu'elle n'a rien, en fait, de fidèle à la réalité.

Évidemment, le fait que la réalité québécoise fasse en sorte qu'il n'y a qu'une partie des activités de lobbyisme qui doivent être rendues publiques, par l'entremise du registre, contribue également à cette perception-là, qu'il n'y a que des intérêts économiques et pécuniers qui s'expriment auprès des gouvernements, alors que ce n'est pas du tout le cas. C'est une partie de la pratique et je... nous croyons, en fait, qu'on aurait intérêt — ce n'est pas l'objet de ce projet de loi là, bien sûr, mais éventuellement — à considérer, en fait, un élargissement à davantage de groupes, pour que les Québécois puissent aussi avoir une vision plus complète de celles et ceux qui exercent des activités de lobbyisme auprès du gouvernement.

Mme LeBel : Bon, vous avez entièrement raison, c'est quelque chose qu'on devra... Bon, c'est une question qui flotte sur la table, on n'a pas à apporter de réponses. Ce n'est pas ce projet de loi là qui va y apporter une réponse, vous avez tout à fait raison, et on aura l'occasion, et je veux rassurer tout le monde, d'en discuter abondamment si le cas se présente éventuellement.

J'aimerais peut-être... Par rapport au registre lui-même, est-ce que vous pensez que le fait de transférer justement la gestion du registre et peut-être de mettre en place une nouvelle plateforme pourrait contribuer à améliorer cette réputation-là, et je m'explique, dans le sens où, avec un registre peut-être plus convivial, plus simple, le citoyen aura peut-être plus d'accès? Parce que je pense que le niveau de transparence qu'on doit avoir au niveau gouvernemental est pour le citoyen, à la compréhension du citoyen. Est-ce que vous pensez que ça pourrait... que ça va pouvoir aider ou contribuer à cette...

M. Binette (Michel) : Nous en sommes convaincus. Nous en sommes convaincus, puisque c'est un irritant, et je pense que je ne me trompe pas en disant que plus de 50 % — et le commissaire, je pense, avait fait un sondage là-dessus — plus de 50 % des irritants pour les gens qui naviguent avec le registre est relié à l'inscription au registre et à sa complexité. Alors, nous, on pense que si la plateforme technologique est améliorée et qu'on facilite... tu sais, puis faciliter ne veut pas dire nécessairement de rendre le travail des lobbyistes-conseils moins transparent. Faciliter veut dire : si, au lieu de me prendre six jours ou sept avant... ou si cette communication avec le registre pour enregistrer un mandat, que je le fais du premier coup parce que c'est expéditif, puis parce que c'est clair et puis parce que c'est transparent, on est convaincus, effectivement, que ça va remplir l'objectif.

M. Gagnon (Jonathan) : Et, si je peux me permettre de compléter, c'est certain, en fait, que ça va permettre aux citoyens d'avoir une vision plus claire plus simplement de la réalité, mais il faut encore garder à l'esprit que ce sera une partie de la réalité du lobbyisme à laquelle le citoyen aura accès. Je pense que c'est important de toujours le garder à l'esprit.

Mme LeBel : Quant à moi, c'est bien compris. Maintenant, si on y va de façon peut-être plus particulière, vous avez mentionné, par le passé, encore aujourd'hui, effectivement, que le registre actuel avait plusieurs lourdeurs administratives, que c'était contre-productif, entre autres, qu'il y avait des complications administratives, donc, indues, des difficultés du point de vue de la personne qui doit s'enregistrer. Peut-être, pour illustrer votre propos, pouvez-vous nous donner quelques exemples de ces complications-là, de cette lourdeur administrative, s'il vous plaît?

• (10 h 30) •

M. Binette (Michel) : Absolument. Je vous donne un exemple facile, que l'on vit au quotidien, la plupart des membres chez nous. Lorsque l'on veut enregistrer un nouveau mandat, et, comme lobbyistes-conseils, on en enregistre plusieurs parce que, comme lobbyistes-conseils, on représente plusieurs clients, donc, lorsqu'on enregistre un mandat, et que nous sommes en attente de recevoir une réponse ou une acceptation de l'enregistrement du mandat, et qu'on veut simultanément enregistrer un autre mandat, on ne peut pas entrer dans le système, parce que le système nous dit : Vous avez déjà un mandat qui est en étude. Attends que ça soit enregistré ou confirmé, puis là tu pourras rentrer à nouveau dans le système pour enregistrer un nouveau mandat.

Et là vous comprenez que ça semble bête, ça semble dire : Bien, vous attendrez, mais on a des délais, selon la loi, c'est-à-dire qu'un lobbyiste-conseil a 30 jours pour enregistrer un mandat puis un lobbyiste d'entreprise a 60 jours. Et là on peut tout simplement devenir en infraction, et évidemment ce n'est pas le souhait puis ce n'est pas... il n'y a personne qui souhaite être en infraction avec la loi, mais l'exercice et la plateforme ne nous permettent pas, par exemple, d'enregistrer deux mandats simultanément. Ça, c'est un des exemples.

Par exemple, lorsqu'on fait, deux fois par année, un exercice... Il y a un exercice de renouvellement de l'inscription puis il y a un exercice de... le deuxième exercice... il y en a deux par année...

Une voix : ...

M. Binette (Michel) : Mise à jour annuelle, voilà. Je cherchais le terme, merci. Donc, mise à jour annuelle, donc. Et, lorsque, par exemple, il y a un nouveau gouvernement et qu'on change l'appellation de certains ministères, le registre ne fait pas la mise à jour des noms de ministère. Donc, si on est enregistré sous un mandat pour un ministère qui a changé de nom, il faut nous-mêmes repasser à travers tous les mandats pour venir changer le nom du ministère, parce qu'ils nous viennent... le registraire nous dit que ça n'existe plus, ça, ce... C'est administrativement hyperlourd et c'est ce que nos membres nous disent : S'il vous plaît, essayons de faire ça plus simple. Et on a l'exemple du fédéral qui... L'inscription est facile, elle est expéditive, elle est rapide. Donc, ce n'est pas parce que ça ne se fait pas. Je pense que ça fait partie des exemples.

Mme LeBel : Je vais peut-être relever au bond une des choses que vous avez dites. Ça me préoccupe un peu, ce que vous... À moins que j'aie mal compris, là, vous me corrigerez. Est-ce que vous me dites que dans la structure actuelle administrative du registre, il pourrait se trouver qu'un lobbyiste se retrouve en infraction avec la loi sur la transparence pour des raisons administratives, là? C'est ce que vous nous dites?

M. Binette (Michel) : Pourrait.

Mme LeBel : Pourrait?

M. Binette (Michel) : Pourrait, parce que je pense que...

Mme LeBel : C'est un potentiel.

M. Binette (Michel) : Je vous donne un exemple. Je me prends en exemple. Je fais du ping-pong, si vous me permettez l'expression, avec le registre pour enregistrer un mandat, et là on me revient, on me dit que le mandat est trop large. On me dit : Il faut qu'il soit plus spécifique. On me demande le numéro du lot du terrain en question pour un changement de zonage, et là, de fil en aiguille, ma première communication est commencée depuis un certain temps, et, au moment où je finis par obtenir la confirmation de l'enregistrement du mandat, on est le 31e ou 32e jour. Je suis en infraction puisque j'ai 30 jours pour enregistrer. Et, par surcroît, je reçois un avis, et là on me dit : Vous êtes en retard, mais cette fois-ci on va passer, mais, tu sais, faites attention.

Alors, on pourrait... on n'a pas encore vu d'exemple, puis je pense que, là-dessus, le commissaire... Parce que c'est lui, finalement, qui, au bout du compte... Le registre va l'informer de ça, de cet état de fait, et c'est le commissaire qui, lui, a par la suite la responsabilité de nous envoyer une lettre pour nous dire qu'on est en retard. Mais, jusqu'à maintenant, on n'a pas vu d'exemple, mais on pourrait.

Mme LeBel : O.K. Vous avez parlé que ce transfert de responsabilité là, présentement, parce qu'on parle de transfert de responsabilité, naturellement, l'objectif avoué est aussi de mettre en place une plateforme plus conviviale et plus simple. Vous l'avez mentionné, vous avez mentionné que c'était essentiel. Je pense également comme vous que la transparence est un objectif, mais qu'il faut fournir des outils qui sont plus agiles — c'est un terme assez commun maintenant et populaire en matière d'informatisation et de virage technologique, l'agilité des plateformes — qui peuvent aider, naturellement doivent être un support à la transparence et non pas une contrainte.

Vous avez parlé d'autres exemples ailleurs, comme au fédéral. Pouvez-vous nous expliquer un peu, même si ce n'est pas l'objet du projet de loi, vers quoi on pourrait tendre en matière de simplicité et de convivialité?

M. Gagnon (Jonathan) : Bien, en fait, j'ai le goût de reprendre un exemple souvent apporté par le commissaire lui-même. On le sait, en fait, souvent, les délais sont liés avec l'approbation du libellé qui va venir préciser en fait, ce sur quoi on intervient comme lobbyistes, et c'est souvent ce qui fait l'objet, en fait, de va-et-vient avec les instances qui vont devoir approuver le libellé.

De pouvoir avoir une application simple au bout du pouce qui permettrait, en fait, dès qu'on arrive à une rencontre, par exemple, de pouvoir faire une première inscription préliminaire pour s'assurer, en fait, que ce soit rapidement rendu public, quitte à ce que, par la suite, il puisse y avoir des demandes de précision qui soient apportées pour venir préciser, bien sûr, ce sur quoi on veut travailler, bien, ça favoriserait une transparence plus rapide pour nous assurer, en fait, de répondre, de respecter les cadres prévus par la loi. Bien sûr, les précisions qui reviendraient par la suite pourraient venir, en fait, ajuster l'information, mais c'est certain que d'avoir déjà un outil qu'il serait possible d'utiliser sur les appareils mobiles serait déjà une très grande avancée. Actuellement, essayez d'aller faire l'exercice avec l'outil actuel puis vous m'en direz des nouvelles. Vous allez vous faire bien du plaisir.

Mme LeBel : Bien, peut-être aussi pour... dans le cadre d'illustrer, parce que je pense que c'est un peu l'objet, de comprendre pourquoi c'est nécessaire, ce transfert-là, qu'est-ce qui se passe dans l'état actuel des choses? Bon, mettons que vous avez inscrit un mandat, tout va bien, vous avez réussi à inscrire votre mandat, les personnes qui sont concernées par ce mandat-là, et que, dans le cadre d'une rencontre, vous rencontrez une autre personne, vous lui parlez d'un autre mandat qui n'est pas inscrit, parce que vous n'avez pas eu le temps de le faire, vous avez profité de l'occasion pour discuter d'un sujet d'intérêt pour un des groupes que vous représentez — en toute légitimité, là, je ne prétends pas que ce n'est pas légitime — mais que l'ordre des choses a fait en sorte que vous n'étiez peut-être pas encore inscrit ou ce mandat-là ne l'était pas, de quelle façon que ça fonctionne dans l'état actuel des choses? Est-ce que c'est compliqué?

M. Binette (Michel) : Bien non, ce n'est pas compliqué, parce que la loi, actuellement, prévoit que l'on a 30 jours après la première communication d'influence pour enregistrer le mandat.

Il y a un phénomène qui se produit présentement, avec lequel on n'est pas en total désaccord, mais... Lorsqu'on communique avec les cabinets ministériels ou avec les élus, que ce soit au niveau provincial ou même municipal, il y a plusieurs, maintenant, administrations qui nous demandent l'espèce d'inscription au préalable en nous disant... en ayant le réflexe de nous demander : Est-ce que vous avez enregistré votre mandat au registre? Et là de nous dire... bien, si on dit que c'est en voie de l'être, bon, d'accord. Dans certains cas, ce n'est pas encore fait, et là on nous répond : Bien, quand ce sera fait, vous recommuniquerez avec nous.

Alors, présentement... et est-ce que la nouvelle loi éventuelle pourrait modifier cet état de fait? On ne le sait pas, mais présentement ça nous arrive de voir des gens d'avoir un réflexe de nous dire : Avant de vous rencontrer, on veut que vous enregistriez le mandat. Donc, la réponse à votre question est même si... Et ce qu'on dit à ces gens-là : Vous savez qu'en vertu de la loi on a 30 jours après la première communication d'influence pour enregistrer le mandat. Alors, évidemment, si ça arrive, et qu'on change de sujet, puis que le sujet n'est pas celui qui était enregistré, on va le modifier ou on va aller enregistrer un nouveau mandat au registre.

Mais, vous imaginez, à chaque fois, quand ça nous vient dans la tête d'enregistrer un nouveau mandat, il y a comme une espèce de paranoïa, pour nous, qui fait que... Wow! O.K., là, ça y est, on recommence.

Mme LeBel : ...une plateforme plus conviviale, on pourrait imaginer qu'au sortir de la rencontre, sur votre téléphone cellulaire, vous êtes à même de faire cet ajustement-là et presque simultanément.

M. Binette (Michel) : On est en train de voler le punch au commissaire, parce que le commissaire, c'est lui qui nous l'a donnée, l'idée, en nous disant : Je rêve, un jour, que, lorsque vous allez sortir d'une rencontre, au sortir d'une rencontre, vous puissiez prendre votre appareil mobile et que vous puissiez enregistrer un premier mandat rapidement, quitte, comme disait mon collègue, à le modifier ou le bonifier, mais au moins, par transparence, dès que je suis entré sur mon téléphone, j'ai réussi à enregistrer le mandat.

Mme LeBel : Je pense, ça va quand même réjouir le commissaire que vous partagiez son rêve. On saura...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Binette (Michel) : Bien, je ne voudrais pas prendre toute sa présentation de ce soir pour... voler ses punchs, comme on dit.

Mme LeBel : Non, mais je pense que ça va répondre un peu à une de vos recommandations, c'est d'avoir l'occasion de discuter, donc, avec le commissaire, des améliorations technologiques qu'il entend faire. Parce que vous serez... en tout cas, vos groupes que vous représentez seront l'usager, et je pense que vous avez eu, là, une occasion, à tout le moins, de faire valoir un de vos points de vue.

Je vais peut-être, en terminant, parce que je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, aller sur des points particuliers. Vous avez parlé de la gratuité. Vous avez, je pense, dû noter que l'article 18 du projet de loi rayait, donc, de l'article 66, la possibilité d'imposer des frais. Donc, je ne sais pas si vous en aviez pris conscience, mais la gratuité, effectivement, devient l'objectif de cette transformation, et c'est prévu dans le transfert. Donc, compte tenu qu'on va le faire... en tout cas, l'objectif, c'est de le faire par des moyens technologiques. Le coût du... La manipulation du papier devient donc obsolète.

• (10 h 40) •

M. Binette (Michel) : Nous étions dans un réflexe de prudence pour dire : On ne veut pas que les lobbyistes fassent les frais, parce qu'on le sait que toute cette réforme-là va coûter des sous, et on ne voudrait pas que les lobbyistes en fassent les frais.

Mme LeBel : Parfait. Alors, c'est bien noté. Et, quand vous parlez — en terminant, il ne nous reste pas beaucoup de temps — que la gestion doit viser la simplicité et le respect, on l'a bien compris, mais vous parlez de l'inscrire dans le projet de loi. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?

M. Binette (Michel) : Reconnaître la légitimité, et je sais qu'il y en a d'autres qui vont le faire aujourd'hui, et d'ailleurs ceux qui vont nous succéder, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante l'ont écrit dans leur mémoire, et on est d'accord avec ça. Reconnaître la légitimité devrait être enchâssé dans la loi, dans le préambule de la loi. Et évidemment, si l'exercice que vous faites avec l'adoption du projet de loi n° 6 en est un pour simplifier, il faudrait retrouver le mot «simplification et simplicité» quelque part dans son préambule ou dans ses articles.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Je me tourne maintenant vers l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Bien, merci à vous d'être présents aujourd'hui pour nous apporter votre éclairage.

Point important, on sait que le diable est dans les détails, et puis, lorsque l'on parle de modalités de tenue du registre, vous, vous voulez avoir voix au chapitre. Et j'imagine... puis vous avez donné quelques exemples où, bien, vous enregistrez un mandat qui est en traitement, et là vous êtes dans le registre actuel, vous ne pouvez pas en enregistrer un autre tant que ce premier mandat là n'est pas terminé, tant que son traitement n'en est pas terminé. Donc, ça, c'est un exemple que vous avez donné.

Est-ce que vous avez listé, parce que votre mémoire, et puis merci de nous l'avoir communiqué, n'en fait pas mention, listé et communiqué au législateur, mais également au Commissaire au lobbyisme, ou est-ce que c'est votre intention, justement, votre liste de souhaits réellement très tangible et très concrète qui va permettre d'améliorer le prochain registre? Est-ce que vous en avez, vous, une liste exhaustive? Parce que vous le vivez depuis plusieurs années sur le terrain, et ça, ce serait une mine d'or d'information, je crois. Est-ce qu'elle existe, cette...

M. Binette (Michel) : La liste n'existe pas. Dans les faits, en fait, nous prenons part aux activités du comité consultatif du Commissaire au lobbyisme afin d'alimenter la réflexion. Dans ce forum-là et dans les échanges qu'on peut avoir à l'extérieur du forum, on a souvent exprimé, en fait, le souhait d'avoir une idée plus concrète de ce qu'il souhaite apporter aux modifications afin de réduire l'incertitude que cela peut quand même représenter pour les praticiens que nous sommes. Mais non, nous n'avons pas établi de liste claire. Toutefois, bien évidemment, les travaux qui auront à être exercés prochainement est certainement un travail qu'on aura à compléter.

M. Tanguay : Et c'est pour ça, justement... parce qu'évidemment, moi, ce qui me préoccupe, c'est que vous ayez voix au chapitre. C'est pour ça que vous demandez que les modalités de tenue du registre que le commissaire a l'intention de proposer soient dévoilées avant l'adoption du projet de loi, donc avant l'adoption du projet de loi, c'est très bientôt, ça, donc qu'elles soient dévoilées. On aura l'occasion de lui poser la question si de telles modalités sont déjà pas mal toutes rédigées. Et également que les modalités de tenue du registre soient étudiées par une commission compétente de l'Assemblée nationale, comme l'a été le code de déontologie des lobbyistes.

Je pense que vous voulez réellement que l'on ne manque pas, puis j'aimerais vous entendre là-dessus, que l'on ne manque pas, encore une fois, le diable est dans les détails, cette belle occasion là d'avoir un transfert de connaissances puis qu'on ait un débat sur les modalités qui peuvent, dans certains cas, avoir un impact très tangible sur votre pratique.

M. Binette (Michel) : Le projet de loi n° 6 délègue le pouvoir réglementaire de la ministre au commissaire pour cet aspect-là. Par prudence et non pas par manque de respect pour le commissaire, nous, on dit : On voudrait participer à l'élaboration et on lui fait confiance, mais comment pourrions-nous participer à la mise en place et quels seront les détails que lui va prendre ou les moyens que lui va prendre pour simplifier cette utilisation du registre?

Et, comme à l'article 37 de la loi de 2002, il avait été prévu que, pour le code de déontologie des avocats, qui devait être subséquemment adopté, l'article 37 de la loi de 2002 dit qu'il y a des consultations publiques avec la population pour déterminer à quoi ressemblerait le code de déontologie qui, nous, à l'époque... maintenant nous régit et qui, évidemment, nous impactait, et c'est la même chose pour la future plateforme technologique et le futur registre refondu.

M. Tanguay : Tout à fait. Et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qu'on va entendre, si je ne me trompe pas, tout de suite après vous, elle demande à ce que ce soit le gouvernement qui conserve le pouvoir réglementaire. Vous, vous dites, à la limite, puis je veux bien vous comprendre, c'est une bonne chose que ce soit le commissaire qui l'ait, parce que peut-être un peu plus, je vous dirais... vous n'avez pas un cadre réglementaire qui a des règles d'adoption avec des délais, et ainsi de suite.

Donc, vous voulez, et corrigez-moi si j'ai tort, mais la manière de vous interpréter, c'est de dire : Non, c'est correct, le commissaire, parce que lui aura toute la latitude de le faire dans des délais peut-être un peu plus efficaces, puis ce n'est pas péjoratif par rapport au processus réglementaire, mais d'avoir cette efficacité-là de délai et, sur le terrain, d'être capable de modifier, d'améliorer...

Donc, vous, réellement, vous voyez ça comme une bonne chose que ce soit le commissaire, en ce sens-là?

M. Gagnon (Jonathan) : C'est totalement acceptable. Il faut reconnaître que le commissaire, bien sûr, a une compréhension empirique de la réalité qui s'exerce sur le terrain, qui peut l'amener à vouloir apporter des modifications qui sont souhaitables. Pour nous, toutefois, la clé, bien sûr, c'est tout l'aspect de la consultation des praticiens, pour nous assurer qu'ultimement l'outil ne soit pas qu'une complexification, mais une simplification de la chose.

M. Tanguay : Tel que le prévoit le projet de loi n° 6, est-ce que la consultation est suffisamment encadrée et demandée par le commissaire ou est-ce que vous aimeriez que ce soit plus explicitement dit dans la loi actuelle, ou dans le projet de loi n° 6, que le commissaire doit consulter puis vous laisser un minimum de délai pour avoir votre opinion là-dessus? Est-ce que vous souhaiteriez, je ne sais pas si vous avez une réflexion là-dessus, encadrer, dans le bon sens du terme, pour avoir une efficacité puis avoir votre son de cloche, la possibilité pour le commissaire de prendre son crayon puis de modifier les règles?

M. Gagnon (Jonathan) : On ne saurait si bien dire, évidemment, qu'il puisse y avoir une trace écrite, comme de quoi, en fait, les modifications qui seront apportées doivent l'être, en fait, de concert avec les parties prenantes.

M. Tanguay : Et vous la retrouvez, cette garantie-là, dans le projet de loi n° 6 ou non?

M. Binette (Michel) : Bien, moi, à la lecture que j'en fais, je ne la retrouve pas. Cette précision serait claire et viendrait dire : en collaboration et en consultation. Encore une fois, c'est la prudence qui nous incite à proposer cette mesure-là.

M. Tanguay : Pour bien faire les choses, ce qui est proposé dans le projet de loi n° 6, c'est de faire en sorte que son application... puis, je veux dire, il y a des semaines où on ne voit pas des projets de loi avec un délai d'application de 30 mois. Vous, vous dites : Il faudrait le ramener à 18 mois. Autrement dit, se donner un cadre un peu plus restreint. Vous, vous jugez, donc que 18 mois, c'est suffisant, mais également je pense que ça participe de votre appel à dire : Brav! Modernisez-le, on veut un registre encore plus efficace, puis vous avez hâte à ce qu'il voie le jour.

Donc, pour vous, 18 mois, j'aimerais vous entendre là-dessus. C'est important parce que vous avez hâte, là.

M. Binette (Michel) : On est très conscients que le délai de 30 mois qui était indiqué dans la loi, il nous apparaît un peu long. Puis on veut respecter aussi toute cette démarche que le commissaire... dans laquelle il va être impliqué dans les prochains mois.

On a mis 18. Donc, tu sais, si on retient ce qu'on souhaite, c'est qu'on souhaite que ça se fasse le plus rapidement possible, parce que vous avez compris qu'on a des enjeux importants puis qu'on va... ça va être un «win-win situation». On va vous aider à nous aider et que tout le monde... il y aura plus de transparence quand ce nouveau registre sera mis en place. Donc, on souhaite que ça se fasse le plus rapidement possible. On a mis 18 dans notre recommandation, on parle de 30.

M. Tanguay : Merci. J'ai une dernière question, M. le Président. Après ça, je vous demanderais de céder la parole, s'il vous plaît, à ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce.

Dernière question, point qui a été soulevé par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, l'article 5 du projet de loi modifie l'article 21 à l'effet que, lorsqu'il y a des incongruités, lorsqu'il y a des manques à l'inscription, selon un délai raisonnable, c'est l'article 21 de la loi qui le dit, vous pouvez le corriger. Là, le projet de loi dit : Bien, vous devrez apporter les correctifs dans les 10 jours. Ce que la fédération propose, c'est dans les 30 jours. Avez-vous une réflexion à cet effet-là?

M. Binette (Michel) : C'est un délai qui est court. Chaque délai... Eh bien, nous, on se dit : Si le commissaire remplit son objectif de rendre ça plus simple, 10 jours, ça devrait être correct. Mais, si c'était demain matin... tu sais, on n'en a pas assez, 10 jours, c'est certain. Donc, je vois, moi, cette présentation-là, puis je vais les laisser vous l'expliquer, mais je comprends très bien ce qu'ils disent.

Nous, ce qu'on dit : On va laisser le commissaire faire le travail puis on va lui donner le bénéfice du doute que la réforme va rendre ça plus simple, l'inscription, plus simple, et, dans ce contexte-là, bien, 10 pourrait être suffisant, 15 pourrait être le milieu ou 20 serait le milieu, mais vous... Moi, je comprends pourquoi la FCECI propose ça... FCEI, pardon, parce que cet organisme-là a une soixantaine de mandats d'enregistrés au registre, tu sais. C'est probablement l'organisme au Québec qui a le plus de mandats d'enregistrés.

• (10 h 50) •

M. Tanguay : ...si le registre, et on le souhaite, est amélioré quant à son efficacité, quand ça va bien, ça va bien. Alors, quand ça va bien, ça peut être bien plus court que 10 jours, mais, dans le contexte actuel, peut-être qu'un 10 jours, c'est peut-être... le train ne va peut-être pas à ce rythme-là. Je vais, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : ...Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, il vous reste 1 min 30 s.

Mme Weil : Bien, d'abord, je veux saluer plusieurs personnes ici avec qui j'ai eu l'occasion de travailler et aussi remercier la ministre d'amener ce projet de loi rapidement. J'ai été vraiment impressionnée quand j'ai vu que c'était inscrit qu'on allait l'étudier, parce qu'à titre de ministre de la Justice, ça remonte loin. Déjà, on parlait de ça en 2008, 2009, mais aussi, avec le nouveau commissaire, on avait beaucoup échangé. Je lui avais dit de garder espoir, que le jour viendrait rapidement. Donc, je remercie la ministre et je ne m'étais pas rendu compte que c'était son premier projet de loi, alors on va certainement collaborer.

Surtout, j'entends votre cri du coeur, la complexité de ce registre, et le commissaire avait fait état de cette complexité. Je comprends aussi la question du 18 mois ou du 30 mois, parce que, juste dans le dossier de l'immigration, à quel point l'informatique et les nouveaux systèmes, les nouvelles plateformes, c'est très compliqué. Alors, je pense qu'on va laisser aux experts faire leurs recommandations, on aura l'occasion...

Le préambule, j'ai saisi ça rapidement — il me reste peut-être trois secondes — qu'il y aurait un préambule qui vient peut-être, ce que vous demandez, confirmer la légitimité de cette pratique. C'est bien ce que je comprends de l'échange, et on aura l'occasion d'en parler avec la FCEI. J'en suis. J'en suis, je pense que c'est très important. D'ailleurs, quand on parle à ceux des entreprises ou d'autres qui ont fait du lobbyiste, ils disent à quel point ils sont soulagés dès qu'ils sont inscrits. Tout est transparent, tout est clair, et c'est une libération. Et que les gens doivent comprendre ça, ça permet de... à tout le monde de travailler ensemble.

Donc, je n'ai pas de question sauf pour vous dire merci de votre présentation et merci à tous ceux qui travaillent fort pour que ce registre soit transféré et voit le jour avec le commissaire. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme la députée. Je vais céder... c'est juste...

M. Binette (Michel) : ...si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : ...ce ne sera pas long, M. Binette. Je vais céder la parole au représentant du troisième groupe d'opposition. M. le député de Rimouski, pour votre information, le bloc que vous avez est de 2 min 43 s.

M. LeBel : Merci. D'abord, j'aimerais saluer M. Légaré parce que je me souviens de lui quand il a commencé les travaux pour créer l'association. On le voyait souvent au Parlementaire parler avec du monde, essayer de mettre ça en place, et ce n'était pas évident parce qu'on taillait dans du neuf. Et je voulais vous saluer puis souligner tout le travail que vous avez fait.

Ce que je comprends, c'est que vous voulez aller rapidement, mais j'essaie de comprendre aussi... Vous dites que le registre... que les modalités que le commissaire veut mettre au registre soient développées... dévoilées avant l'adoption du projet de loi, puis vous voudriez que ces modalités-là soient étudiées par une commission qui pourrait accueillir des gens ou venir en...

J'essaie de voir la mécanique. Ça peut être bien long, là. Ça veut dire que, là, on arrête d'étudier le projet de loi, on regarde les modalités, on reconvoque la commission, on réinvite des gens pour parler des modalités. Quand on a fini tout ça, on revient sur le projet de loi. J'essaie de voir la mécanique de tout ça pour s'assurer que ça fonctionne puis que ça va dans le même sens que vous voulez.

M. Binette (Michel) : Tout ça peut effectivement paraître plus complexe et... ou assez complexe, mais je pense que ce que l'on recherche, c'est de s'assurer qu'on aura couvert tous les points et que le commissaire... peut-être que, si le commissaire s'engage à nous faire part de ce qu'il envisage comme changements, on n'aura peut-être pas besoin de faire une commission mais, à tout le moins, l'idée qui sort, qui émane de cette recommandation-là, c'est vraiment de dire... de s'assurer que ce qui va être apporté comme changements dans le fonctionnement quotidien... parce qu'il n'y a pas que la plateforme, tu sais. Alors, il y a les informations qu'on doit fournir à cette plateforme-là.

Alors, je pense que l'idée est qu'on souhaite être consultés, comme représentants des lobbyistes et utilisateurs du registre, sur ce qu'il envisage de modifier pour, tu sais, apporter un complément d'information ou même l'aider à progresser dans sa réflexion.

M. LeBel : Je comprends bien que, vous, vous dites : Il faudrait un peu suspendre les travaux de l'adoption du projet de loi, suspendre un peu pour que vous puissiez consulter les modalités. C'est un peu ça que je comprends.

M. Binette (Michel) : Bien, écoutez, je ne crois pas qu'on souhaite que ça s'éternise et qu'on suspende, mais je pense que les travaux de la commission ici vont durer une journée. On n'est pas sur un projet de loi d'étude par article qui va prendre trois mois et demi parce qu'il y a 300 articles. Mais, à tout le moins, peut-être que... On souhaite effectivement aller rapidement, que ce projet de loi progresse rapidement.

Maintenant, sur les modalités, est-ce qu'on doit suspendre ou est-ce qu'on peut s'engager à faire cette consultation-là rapidement avant que la commission poursuive?

M. LeBel : Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Bachand) : Malheureusement, il ne vous reste plus de temps, M. le député de Rimouski. Alors, je vais céder la parole au député de Chomedey pour 2 min 30 s. M. le député, s'il vous plaît.

M. Ouellette : Bonjour, messieurs. Toujours un plaisir. Je joins ma voix à celle de mon collègue de Rimouski pour remercier M. Légaré. Si on est ici à matin puis si on commence avec vous dans ce projet de loi là, bien, prenez-la quand ça passe, je pense que vous avez une grande part là-dessus.

Pour compléter ce que mon collègue de Rimouski mentionnait, que, suite à la consultation publique, les modalités du registre soient étudiées par une commission parlementaire, ça s'est fait déjà, on se souviendra, en 2012, sur le projet de loi n° 6 avec Mme la députée de Taschereau. C'était un projet de loi sur le travail, où, suite aux consultations, les explications avaient été fournies par Mme la ministre aux parlementaires. Et, dans ce cas-ci, ça pourrait être par le Commissaire au lobbyisme aux parlementaires, justement, pour voir si on était à la bonne place pour les bonnes choses.

Vous êtes très succinct dans vos recommandations. Et de 30 mois à 18 mois, je pense qu'on a eu la discussion, on l'aura nous aussi en commission. Je pense que ça augure bien pour l'ouverture. Mme la ministre nous a mentionné ce matin que c'est une première étape, le registre. Et je pense que plusieurs de vos interrogations... Vous êtes le premier, vous ne pouvez pas vous ajuster, là. Ça va être ceux qui vont suivre qui vont s'ajuster à vous autres. Je pense que le commissaire est tout ouïe à vos commentaires, à vos recommandations.

Et sûrement que vous aurez une grande partie de réponse dans sa présentation de ce soir, qui devrait être très rassurante. Je pense qu'une des grandes qualités que le commissaire a démontrée depuis son entrée en fonction, c'est cette transparence-là et cette volonté de moderniser la loi, qui date de 2002 et qui a vraiment besoin d'un petit coup de balai ou d'un petit coup d'époussetage.

Ça fait que... Merci de vos commentaires, et je vous dirai que, dans l'étude détaillée de ce projet de loi, on sera très attentifs à vos recommandations. Puis commencez déjà à vous préparer pour la deuxième étape, que Mme la ministre nous a gentiment annoncée. Plus vite que vous allez être prêts et que vous allez lui faire sentir que vous êtes prêts, bien, qui sait, on pourra peut-être regarder ça avant l'ajournement de la session.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député de Chomedey. C'est tout le temps qu'on avait. MM. Binette, Légaré, Gagnon, merci beaucoup de votre contribution aux travaux de la commission.

Cela dit, je vais suspendre les travaux quelques instants pour donner la place aux prochains témoins. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 59)

(Reprise à 11 h 3)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux.

Je souhaite maintenant la bienvenue à la représentante de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.

Alors, bienvenue. Je vous invite à vous présenter, même si on vous connaît, et à commencer votre exposé. Bienvenue à la commission.

Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)

Mme Hébert (Martine) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je me présente, Martine Hébert, vice-présidente principale et porte-parole nationale à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

M. le Président, distingués membres de la commission, d'abord, je tiens à vous remercier de nous donner l'opportunité aujourd'hui de discuter, là, du projet de loi n° 6 qui transfère au Commissaire du lobbyisme... au lobbyisme, c'est-à-dire, l'inscription, là, au registre des lobbyistes et toute la responsabilité du registre.

En tant qu'organisme de défense des intérêts des PME, la FCEI est inscrite, évidemment, hein, au registre des lobbyistes. On cumule, d'ailleurs, environ, là, plus d'une soixantaine de mandats. On a déjà détenu le record de 86 mandats inscrits, actifs au registre des lobbyistes. C'est quelque chose, donc, que nous connaissons très bien.

Moi-même, en tant que lobbyiste aussi, j'ai vécu différents chapeaux de lobbyiste-conseil et de lobbyiste d'organisation. J'ai été parmi les premières inscrites au registre des lobbyistes en 2002. Alors, je peux vous parler de toute l'histoire et de comment c'était au début jusqu'à aujourd'hui. J'ai aussi eu l'honneur de cofonder l'Association québécoise de l'AQL, des lobbyistes, avec M. Légaré, que je salue aussi, qui s'est bien investi dans l'association aussi après mon départ. Je suis aussi l'auteure de deux ouvrages sur le lobbyisme, le livre Les secrets du lobbying  Ou l'art de bien se faire comprendre du gouvernement, de même qu'un ouvrage qui vient tout juste d'être publié, qui est le manuelpour les relations publiques à l'UQAM, aux Presses de l'Université du Québec à Montréal. Donc, j'ai enseigné aussi le lobbyisme, alors c'est un sujet que je connais très bien et je suis ravie de pouvoir être ici pour en parler, pour en parler et en fait pouvoir démontrer aussi qu'il s'agit d'une activité tout à fait légitime et nécessaire dans une démocratie.

Alors, d'abord et avant tout, M. le Président, il faut rappeler que c'est un droit, le lobbyisme, ce n'est pas... non seulement une possibilité, mais c'est un droit, dans une société démocratique, qui est inscrit, d'ailleurs, dans plusieurs législations. À cet égard-là, je vous signalerais par exemple que le premier amendement à la Constitution américaine fait justement mention, là, du droit à la pétition ou le droit des citoyens de se rassembler pour demander des choses au gouvernement. Il en va de même de la charte québécoise des droits et libertés et il en va de même aussi dans la loi, d'ailleurs, la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, qui consacre la légitimité du lobbyisme, de même que la loi fédérale, qui, elle, va encore plus loin lorsque, dans son préambule, elle décrit quatre principes : la liberté d'accès aux institutions de l'État est une importante question d'intérêt public; le lobbyisme auprès des titulaires de charges publiques est une activité légitime; il est souhaitable que les titulaires d'une charge publique et le public puissent savoir à qui se livrent des activités de lobbyisme; et le système d'enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas faire obstacle à la liberté d'accès aux institutions de l'État.

Et c'est dans cette foulée-là, M. le Président, que j'accueille quand même favorablement, très favorablement, le projet de loi qui est déposé ici parce que ça vise à faciliter, justement, l'entrave actuelle, là, qui existe dans le système bicéphale actuel, qui est posée à l'inscription des lobbyistes et des mandats au registre des lobbyistes, parce que c'est un système qui est éminemment complexe.

M. le Président, je pense que c'est important de rappeler aussi que le lobbyisme... on doit, oui, avoir une certaine transparence par rapport aux activités de lobbyisme, mais c'est important de rappeler que le lobbyisme, c'est très, très loin de la corruption et du patronage et que, dans une démocratie, c'est nécessaire aussi pour permettre l'évolution de la société. Pensons, par exemple, aux droits des femmes, qui émanent, justement, des activités de lobbyisme qui ont été effectuées par les suffragettes à l'époque. Pensons à nombre de grandes réalisations au Québec, que ce soit en matière économique, sociale, santé, communautaire, ou autre, qui ont toutes... qui émanent toutes, justement, des pressions, hein, et des représentations que font différents groupes, avec des positions parfois polarisées et dans lesquelles le gouvernement tranche, mais que tous ces groupes-là font auprès des gouvernements. Je pense que le projet de loi n° 6 doit s'apprécier à la lumière de ces faits-là, M. le Président, et non pas à la lumière de l'image parfois sulfureuse, là, que certains tentent de donner à l'activité de lobbyisme.

Donc, je vous dirais que, dans un premier temps, on a donc recommandé, et dans la foulée de ce que je viens de vous dire, que, dans le but de garantir que les lobbyistes ne voient pas leurs activités légitimes entravées par des exigences trop lourdes, incohérentes ou arbitraires de la part du législateur, comme c'est le cas dans la législation fédérale, où c'est inscrit, on propose... dans le fond, on recommande d'inscrire ces principes-là, qui sont dans la loi fédérale, de les transposer dans la loi québécoise et de profiter du l'opportunité du projet de loi n° 6 pour apporter des amendements soit dans le préambule de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme ou encore dès son premier article.

Il en va de même aussi qu'on souhaite évidemment que... on souhaite que ce transfert-là, ça se matérialise, effectivement, en allègement des modalités, et ça, dans le but non seulement de garantir le droit d'exercice du lobbyisme sans entrave, comme on le souhaiterait, comme la loi fédérale le fait et comme les chartes le garantissent, mais également aussi dans le but, si vous voulez, là, de simplifier le processus, d'ailleurs, dans la foulée des actions que le gouvernement entreprend, là, en matière d'allègement administratif et réglementaire. Alors, ça aussi, on souhaiterait que ce soit inscrit soit dans le préambule ou au tout premier article de la loi, que le projet de loi n° 6 vise notamment, hein, dans le cadre du transfert, là, à simplifier la procédure dans le but d'en favoriser notamment une meilleure observance et dans le but aussi d'assurer que le droit au lobbyisme, là, n'est pas compromis par des procédures administratives qui viendraient le contraindre. Alors, voilà.

• (11 h 10) •

Au niveau de la révision des décisions du commissaire, maintenant, on constate, M. le Président, que dans le système actuel, là, il y a, en tout cas à notre avis, de ce qu'on en comprend, trop peu de mécanismes extrajudiciaires qui permettent, là, de pouvoir effectuer des révisions. On souhaiterait donc que le projet de loi n° 6 soit l'occasion aussi d'inclure, si vous voulez, la possibilité pour les lobbyistes, un peu comme ça se fait dans d'autres instances, comme à Revenu Québec, par exemple, où on peut, au sein, là, maintenant, de la Cour des petites créances, je pense... où on pourra avoir droit à une représentation sur les litiges fiscaux. Donc, un peu ce qu'on voit à l'instar... dans d'autres organisations, qu'on puisse... que les lobbyistes, là, puissent recourir à une instance neutre, indépendante, qui n'est pas un tribunal, dans le cas d'une décision, là, du commissaire avec laquelle ils ne seraient pas d'accord. On a édicté dans notre mémoire une série de recommandations. Ça peut être le Protecteur du citoyen, ça peut être la Commission des droits de la personne, peu importe, on n'est pas attachés à l'institution. Et j'avoue que je fais davantage confiance, là, à la judicieuse considération de la ministre, elle est assez connaissante en la matière, pour proposer une institution qui sera la plus appropriée. Mais, pour nous, ce mécanisme-là, par exemple, semble incontournable.

On aurait souhaité également que le projet de loi n° 6, M. le Président, soit une occasion de clarifier la notion de ce que ça veut dire «pour une partie importante» de ses fonctions. Dans la loi, on dit qu'est considérée comme un lobbyiste qui doit s'inscrire au registre au sens de la loi une personne qui exerce «pour une partie importante» de ses fonctions. Et ça, la fameuse partie importante de ses fonctions, ça a été quand même interprété de façon différente, je vous dirais, même par les commissaires qui se sont succédé. Alors, le premier commissaire avait interprété ça... c'était monsieur... Bien, bref, peu importe son nom. Le premier commissaire au lobbyisme qui a été nommé, il a interprété ça d'une façon. Là, celui qui est arrivé par après, feu M. Casgrain — d'ailleurs, toutes mes sympathies à sa famille et à ses proches — a interprété ça d'une autre façon. Donc, pour vous montrer que ce n'est tellement pas clair que même les commissaires, entre eux autres, se sont dédits dans les déclarations qu'ils ont faites ou dans les avis d'interprétation. Je pense que ce serait le lieu ici, M. le Président, le projet de loi n° 6, pour clarifier cette notion-là et de mettre une fois pour toutes, là, la même notion qu'on a au fédéral, c'est-à-dire la notion du 20 %, là, de son temps. Je vous ai mis la notion complète, là, le libellé complet dans le mémoire.

Au niveau des pouvoirs réglementaires du commissaire, malgré toute la confiance et la déférence que nous avons pour monsieur le commissaire actuel, vous savez, je pense qu'il est impératif que le législateur prenne des mesures nécessaires pour maintenir la confiance des assujettis et du public envers l'encadrement des activités de lobbyiste. Pour ce faire, et en toute déférence, il nous apparaîtrait préférable que le législateur prenne soin d'éliminer toute perception d'arbitraire ou encore toute apparence d'intérêt institutionnel lors de la conception de la réglementation et des règles administratives, là, qui gouvernent ledit encadrement. On se rappellera, donc, qu'en donnant beaucoup de pouvoirs, si vous voulez, réglementaires au commissaire, je vous dirais, on le place dans une position de juge et partie.

Par ailleurs, vous savez, le gouvernement a une politique d'allègement réglementaire qui est quand même assez robuste, qui fait figure même, à l'échelle canadienne, je vous dirais, de modèle. Et il faut savoir que le commissaire n'est pas lié à cette politique-là d'allègement réglementaire, alors que le gouvernement l'est. Et donc, si on veut s'assurer que l'ensemble de la réglementation respecte les orientations de cette fameuse politique, il serait, donc, encore une fois préférable de dévolure les pouvoirs réglementaires, là, davantage au gouvernement qu'au commissaire.

Sur l'exactitude des données, maintenant, relativement au transfert du registre, nous, on est préoccupés, M. le Président, parce qu'on veut s'assurer que les lobbyistes auront l'assurance que, lors du transfert, l'intégralité, l'intégrité et l'exactitude des données qui seront transférées sont de la responsabilité de l'organisme qui va les transférer. Nous, on n'a aucun contrôle sur le processus de transfert, on n'aura aucun mot à dire sur comment les choses vont se faire. Mais je constate que le projet de loi veut nous rendre responsables d'assurer l'exactitude de quelque chose sur laquelle on n'a pas le contrôle. Alors, je pense que ces dispositions-là devraient être amendées pour que cette obligation-là soit conférée aux instances qui sont responsables du transfert.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme Hébert. Nous allons débuter la période d'échange avec le bloc dédié au gouvernement. Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : Merci. Merci, M. le Président. Plusieurs choses, plusieurs choses intéressantes dans votre mémoire. Merci. Plusieurs choses, par contre, qui pourraient faire l'objet d'une prochaine discussion dans le cadre d'une réforme éventuelle de la loi. Parce que je pense que... je retiens à repréciser, à réitérer, puis on a déjà eu ces conversations-là, vous le savez, qu'il s'agit d'une première étape vers autre chose, et ce n'est pas parce qu'on ne prend pas en considération vos commentaires extrêmement pertinents et judicieux à cette étape-ci que ce ne sera pas fait ultérieurement. Donc, je vous en remercie.

De façon peut-être plus précise, sur ce qui concerne le projet de loi n° 6, vous n'avez exprimé ni dans vos commentaires ni dans votre mémoire aucun commentaire sur la modification du délai de prescription pour les infractions pénales, en tout cas une catégorie d'infractions pénales. Parce que je tiens à préciser, je ne l'ai pas fait d'entrée de jeu, que l'infraction d'entrave, si je peux la nommer comme ça, va demeurer à un an, une infraction qui, moi, je peux vous dire, se justifie par le fait que c'est une infraction qui a beaucoup moins de difficultés de preuve qu'une autre infraction. Et c'est pour cette raison qu'on a décidé de faire la part des choses, parce que je suis d'avis qu'on ne doit pas jouer de façon indue dans nos prescriptions de notre Code civil, qu'on doit jalousement protéger parce qu'elles ont un fondement, les prescriptions en droit civil.

Donc, on a décidé d'augmenter, donc, comme vous le savez, la prescription à trois et sept ans — trois ans, de la connaissance, et sept ans, le maximum du moment de la perpétration de l'infraction — pour des raisons de difficulté d'établir la preuve, souvent, et le fait qu'on n'arrivait pas à déposer des accusations en temps opportun. Qu'en pensez-vous, de cette modification-là?

Mme Hébert (Martine) : Mme la ministre, j'entends votre souci, là, au niveau des délais de prescription puis vos objectifs. La seule chose que je me demande, c'est : Dans l'applicabilité de tout ça, est-ce que les lobbyistes ne s'en retrouveront pas lésés?

Je vous donne juste un exemple. Dans le système actuel, là... Puis, quand on parle de sept ans, là, c'est long, sept ans, hein? Se rappeler tout ce que tu as fait il y a sept ans, les courriels que tu as envoyés, les communications que tu as eues, qu'est-ce qui s'est dit exactement lors d'une réunion, etc., c'est quand même un délai, là, qui est très long. Et, pour faire du lobbying depuis les 20 dernières années, je vais vous dire que c'est quand même assez complexe, puis on n'est pas toujours en train de noter dans un petit calepin, là, tout ce qui s'est dit exactement et de garder des preuves, d'une part.

Par ailleurs, vous savez que le problème, c'est que le nom... à chaque fois qu'il y a un remaniement ministériel, le nom des ministères et des institutions visés change, hein, et donc on est obligés d'aller changer ça sur le registre, nous autres, à chaque fois. Donc, il se peut que, par exemple, le commissaire me reproche une infraction pour un mandat actif, aujourd'hui, que j'effectue, je donne un exemple, auprès de la CNESST, mais là il va pouvoir me poursuivre pour une infraction qui a été commise il y a six ans, avant la création de la CNESST, et là il ne retrouvera pas la CSST, qui était l'organe auprès duquel on... Et là il va-tu me mettre en infraction parce que la CNESST... et que la CSST a été effacée? Parce que le registre nous oblige d'aller supprimer les anciennes institutions pour le remplacer par le nom des nouvelles.

Alors, voyez-vous un petit peu, là, tout l'imbroglio? En tout cas, moi, je ne suis pas juriste, là, puis je fais confiance aux parlementaires qui sont ici pour prendre les bonnes décisions, mais moi, je vous dis que, si on s'en va dans un système comme ça, compte tenu de la complexité actuelle de la chose, compte tenu du système dans lequel on est, ça risque de poser beaucoup de problèmes, et le justiciable lobbyiste se retrouve... risque de se retrouver lésé de par le fonctionnement même de tout le système.

Mme LeBel : Donc, peut-être pour faire un peu de pouce là-dessus, ne pensez-vous pas justement que le projet de loi, donc, prévoit également le transfert de la gestion du registre au Commissaire au lobbyisme, va pouvoir... Et ce transfert-là, on l'a dit d'entrée de jeu, n'est pas... nécessairement pour avoir un registre plus simplifié puis convivial, ne vient pas, justement, adresser vos préoccupations de cette... complexité — pardon, je m'enfarge dans des mots simples ce matin — de cette complexité-là d'inscription, ou de modification, ou d'adaptation, si on veut, des données contenues au registre, à la réalité de vos activités?

Mme Hébert (Martine) : Bien, écoutez, je le souhaite vivement, mais, je vais dire, comme Thomas, je n'ai pas mis mes doigts dans les trous, hein? Vous me permettrez, avec ce que je vis depuis 2002, mon registre, de ne pas douter de la bonne foi, de l'intention réelle de toutes les personnes impliquées. Mais connaissant l'informatique, hein, qu'on connaît tous, on voit beaucoup plus de projets informatiques, là, qui connaissent... j'appelle ça des dos d'âne, que de réussites. Alors, dans cette perspective-là, je vous dirais que peut-être ce serait opportun dans un deuxième temps, si vraiment... puis je mettrais peut-être cette disposition-là sur la glace.

Et vous avez parlé d'un deuxième temps, tantôt, c'est peut-être une disposition que j'apprécierais dans le cadre de la révision de la loi et non pas dans le cadre, là, d'un transfert administratif, comme c'est le cas ici. Parce que, là, on est dans le cas d'un transfert administratif, puis là on veut, woups! modifier des procédures sans qu'on ait vu le réel bénéfice et sans qu'on voie si ça marche. On ne le sait pas encore, on ne le sait pas encore, si ça va marcher. Et, si ça ne fonctionne pas puis qu'on a fait la modification, on risque d'être dans le trouble.

• (11 h 20) •

Mme LeBel : Je vais d'ailleurs... Mais est-ce que je comprends que... Bon. Je comprends vos craintes, je comprends que, compte tenu de l'état actuel du registre, il risque d'y avoir certaines complexifications et que vous trouvez le délai de sept ans peut-être trop long ultimement. Mais est-ce que... Et je vous repose la question parce que ça ne fait pas l'objet de votre mémoire, donc je veux avoir vraiment votre opinion là-dessus. Êtes-vous par contre en défaveur de modifier comme telle la prescription, parce qu'un an c'est quand même très court pour ce genre d'infraction là, ou c'est plutôt le sept ans qui fait problème, selon votre opinion?

Mme Hébert (Martine) : Je vous dirais, Mme la ministre, que je ne suis pas à l'aise de vous donner un... de vous dire que je suis en faveur de ce qui est proposé là dans le cadre du projet de loi actuel. Moi, ce que je dis... Vous l'avez bien dit tantôt, hein, il y a d'autres dispositions, il y a d'autres choses qui seront appréciées, vous l'avez dit, dans une deuxième étape que vous nous avez annoncée. Moi, je pense qu'avant de savoir si le registre fonctionne vraiment, si ce qu'on est en train de faire aujourd'hui fonctionne vraiment on devrait peut-être remettre à un peu plus tard, là, certaines dispositions qui peuvent avoir des impacts, mais qui sont vraiment liées à la réussite du projet qu'on a à l'étude aujourd'hui. Je pense que ce serait plus sage de remettre cela à plus tard.

Mme LeBel : Merci. Alors, bien, on va en profiter pour entrer peut-être dans le coeur du projet de loi n° 6. On en parle depuis tantôt, on en a parlé avec l'association qui vous a précédée, mais j'aimerais entendre votre point de vue terrain et aussi le point de vue de vos membres, et des illustrations, un peu. Vous dites d'ailleurs, dans votre mémoire, que le registre devrait être simplifié, les procédures administratives et la réglementation relative au processus d'inscription. Peut-être nous aider à comprendre parce que moi, j'aime bien fonctionner par exemples et par illustrations. Qu'est-ce qui est si compliqué que ça, maintenant, et qui milite, justement, en fonction... en faveur de simplifier... en faveur telle de simplifier qu'on me demande même de l'inscrire dans le préambule de la loi que c'est l'objectif de la loi? Donc, donnez-nous peut-être des exemples pour illustrer l'état actuel, et peut-être par la suite, bien, j'irais avec une deuxième question, mais on pourra voir comment on peut arriver à vos objectifs.

Mme Hébert (Martine) : Je vais vous donner un exemple très concret, Mme la ministre. C'est une excellente question, je vous remercie d'ailleurs pour votre question. Aujourd'hui, par exemple, tantôt, là, quand je vais sortir d'ici, supposons que je retourne à mon bureau puis je dis : Bon, tel mandat, j'avais mis une date de fin; finalement, non, finalement, on l'a clos aujourd'hui, donc je mets une date de fin à mon mandat. Bien là, je suis obligée de mettre la date de fin de mon mandat, de renvoyer l'ensemble de mon inscription au registre pour qu'ils l'examinent, pour une prépublication. Ils vont me renvoyer ça, et c'est seulement une fois qu'ils me l'ont renvoyé que, là, il faut que je retourne dans mon fichier pour aller supprimer mon mandat. Autrement dit, je mets fin à mon mandat aujourd'hui, mais je ne peux pas le supprimer dans la même opération. Je suis obligée de retourner là-bas, de le retourner, de le recevoir...

Alors, tout ça, là, pendant tout ce temps-là... Puis là, moi, comprenez que mon travail, ce n'est pas de rester assise à mon bureau, les deux pieds sur mon bureau, à attendre que le registre me revienne avec les questions qu'ils peuvent avoir ou encore avec... Donc, il peut s'écouler beaucoup de temps, là. Donc, entre tout ça, là, c'est deux opérations pour une même chose qui aurait dû se faire comme ça.

Même chose, je vous ai parlé tantôt, là, dans chacun des mandats... Et, quand vous avez 67, 70 mandats d'inscrits au registre, là, puis que, là, il y a un remaniement ministériel, vous êtes obligé de repasser chacun des mandats pour aller supprimer le nom de l'ancienne institution et ajouter la nouvelle institution, qui se fait aussi en deux opérations de clics informatiques, là. Donc, dans chacun, chacun des mandats, vous êtes obligé d'aller voir : le ministère de l'Économie, là, il s'appelle-tu encore ministère de l'Économie ou il s'appelle ministère de l'Économie, de l'Innovation et de la, la, la? Donc, s'il y a le «de l'Innovation et du» la, la, la qui a été rajouté, il faut aller retirer ministère de l'Économie comme institution et ajouter.

Donc, ça, là, c'est toutes des choses... Chaque année, on est obligés de faire un renouvellement de l'inscription, alors que pourtant la loi nous dit : Si tu effectues des changements dans ton lobby, tu es obligé d'aller changer le mandat dans les 30 jours de la date de la commission, là, de... pas de l'infraction, mais de l'acte que tu as posé. Donc, pourquoi qu'on est obligés de faire un renouvellement annuel puis qu'on est obligés de tout repasser les mandats un par un, puisque de toute façon la loi nous oblige, dans les 30 jours, à aller faire les modifications?

Alors, ce sont toutes, si vous voulez, des... Sans compter aussi que, dans le libellé du mandat... Et moi, je connais le régime fédéral, Mme la ministre, là, c'est pas mal moins compliqué au fédéral, même s'il y a plus d'informations qu'il faut mettre, c'est beaucoup moins compliqué. Dans le libellé du mandat, si vous n'inscrivez pas... vous ne pouvez pas inscrire, par exemple, «représentation afin que le gouvernement modifie la Loi sur les normes du travail». Vous ne pouvez pas écrire ça comme ça, ça va être refusé systématiquement. Il faut que vous écriviez «représentation afin qu'une orientation soit prise en vue que le gouvernement modifie la Loi sur les normes du travail». Si vous n'avez pas le petit bout de phrase «en vue qu'une orientation soit prise», ils vont vous le refuser systématiquement parce que la loi dit que c'est des représentations en vue qu'une orientation soit prise en vue d'une modification législative.

Donc, c'est tatillon à ce point-là, à l'heure actuelle, et c'est ça qu'on vit, même si je dois quand même préciser que le personnel du registre fait un travail fantastique. Mais que voulez-vous? On est dans un système, là, où on est pris dans une gestion bicéphale, où on se fait dire : Bien, c'est le Commissaire au lobbyisme qui veut ça. Puis là le commissaire, on lui parle, puis il dit : Bien non, on n'a jamais demandé ça. Donc, je pense que ces quiproquos-là ou ces situations-là qui sont occasionnées par la gestion bicéphale actuelle, là, pourraient... en tout cas, on souhaite vivement, là, qu'ils soient éliminés avec la gestion, là, centralisée au sein du Commissaire au lobbyisme.

Mme LeBel : ...je vous entends bien. Dans le fond, ce que vous me dites, pour résumer, c'est que la forme ne doit pas prendre le dessus sur le fond et doit être au service du fond. Et là je comprends que les entraves sont telles que quelquefois ça peut même vous empêcher de progresser adéquatement. Avant de revenir avec d'autres questions, M. le Président, je peux peut-être... je sais que mon collègue le député de Chapleau aurait peut-être sur cette question-là...

Le Président (M. Bachand) : M. le député de Chapleau. Il reste quatre minutes au bloc.

M. Lévesque (Chapleau) : ...merci beaucoup, M. le Président, Mme la ministre. Bonjour. J'aimerais peut-être faire un peu de pouce sur ce que vous avez dit, justement, là. Vous parlez de complexité. Vous parlez dans votre mémoire, là, qu'un délai de 10 jours est insuffisant, là, pour l'inscription, vous voudriez qu'on reste avec le 30 jours. Mais, si c'était simplifié, vous avez parlé du fédéral, est-ce que ça serait quand même envisageable pour vous, là, le 10 jours qui serait proposé pour l'inscription ou pour les changements?

Mme Hébert (Martine) : Moi, je trouve que c'est prématuré à ce stade-ci de mettre un délai comme ça alors qu'on ne sait pas quelle va être la lenteur ou la rapidité du système qu'on va mettre en place. Je pense que c'est hasardeux à ce stade-ci d'aller mettre un délai de 10 jours. Tout le reste, je vous signale que le reste des obligations dans la loi sont toutes soumises à des délais de 30 ou de 60 jours.

Et, connaissant le système actuel, 10 jours, là, ça, ça veut dire que moi, là, une personne comme moi, qui est le plus haut dirigeant, parce que je le suis toujours aussi en même temps... N'oubliez pas que c'est le plus haut dirigeant qui est responsable. Ça veut dire que, moi, il faut que je sois à mon bureau, que j'aie le temps d'être à mon bureau, de m'assurer d'aller faire la modification, de m'assurer que... Là, quand ça arrive au registre, eux autres, il faut qu'ils le traitent, là, il y a un délai de traitement, ça fait qu'ils ne me reviendront pas nécessairement dans l'heure qui suit, là, ils peuvent me revenir deux, trois jours plus tard. Mais ça ne veut pas dire que moi, je vais être au bureau deux, trois jours plus tard quand ils vont me revenir, là. Ma job, c'est de faire des représentations extérieures, donc je ne suis pas constamment assise à mon bureau, comme je disais tantôt, à attendre que le registre m'appelle.

Alors, c'est sûr que, dans une perspective comme ça, je pense qu'un délai de 10 jours c'est très, très, très court, puis il va vraiment falloir que le système, là, soit super, superperformant, ce qui... en tout cas à ce stade-ci, là, on ne peut pas ni confirmer ni infirmer.

M. Lévesque (Chapleau) : Maintenant, l'hypothèse d'une application hyperperformante, vous seriez ouvert... ouverte, c'est-à-dire, aux 10 jours?

Mme Hébert (Martine) : Moi, je pense qu'à ce moment-là on pourra discuter quelque chose comme ça aussi dans une approche plus cohérente et cohésive en regard de l'ensemble des autres délais dans la loi. Et je suggérerais peut-être, encore une fois, de déférer cette question-là dans la deuxième étape que suggérait avec justesse la ministre tantôt.

M. Lévesque (Chapleau) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) : Mme, la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : ...du peu de temps, là, qu'il nous reste peut-être pour adresser, là, la question du 60 jours pour la vérification de vos données, peut-être contextualiser un peu ce que... Dans le fond, le transfert des données entre le registre actuel et le futur registre, pour des raisons de cohérence technologique, je vais le dire comme ça, devra se faire à la main. Donc, il y avait plusieurs... il y avait peu de choix qui s'offraient dans cette perspective-là de changement d'outils, c'est-à-dire ou bien de demander aux lobbyistes de refaire les inscriptions une à une ou bien de leur demander tout simplement de vérifier celles qu'on aura faites dans le transfert.

Dans cette optique-là, parce qu'il faut... Je comprends votre question d'imputabilité, mais, malgré tout, le 10 jours s'appliquera, c'est-à-dire que si le commissaire décide de ne pas... remarque une irrégularité, le 10 jours s'appliquera également pour faire les modifications. Mais, dans le contexte où on doit faire un transfert et qu'ultimement les conséquences pénales vous seront, comme lobbyiste, attribuables, il fallait se trouver une solution pour s'assurer de la conformité de ces données-là et, à tout le moins, de l'exactitude et du fait que ce soient encore des mandats actifs aussi parce que ça pourrait... on pourrait théoriquement transférer des mandats qui ne sont plus actifs.

Qu'est-ce que vous avez à proposer dans la perspective où il faut valider ce transfert-là? Donc, soit qu'on le fait faire par les lobbyistes et on recommence à zéro, soit qu'on procède à un certain transfert et qu'on donne un certain délai pour s'assurer de la conformité pour qu'après ça le second registre reprenne ses activités, je vais le dire comme ça, reprenne vie de façon complète, là. Dans cette optique-là, qu'est-ce que vous proposez?

• (11 h 30) •

Mme Hébert (Martine) : La première chose, Mme la ministre, je vous dirais qu'il faut s'assurer que le transfert, à ce moment-là, ne vise que les mandats actifs. Parce que, si vous prenez une personne comme moi, là, vous allez me faire travailler pendant un mois. Depuis 2002, là, j'en ai eu, des mandats. Donc, il faut que ça ne vise que les mandats actifs. Mais là ça nous ramène à votre délai de prescription de tantôt. Où est-ce qu'on va trouver les informations, si, là, le commissaire doit revenir sept ans en arrière pour me poursuivre ou parce que j'ai supposément commis une infraction? Ça fait qu'il va falloir voir c'est quoi, les implications là-dessus, aussi, et quel sera l'accès, l'accès des lobbyistes aux données passées des mandats qui ne sont plus actifs, mais qui pourraient être assujettis à un litige de la... avec le commissaire. Donc, ça, c'est une bonne question.

Moi, je vous l'ai dit tantôt, moi, je pense, cette responsabilité-là devrait revenir au commissaire. Mais, si jamais vous décidez de ne pas aller dans ce sens-là, ce que je ne souhaite pas, au moins que ça concerne les mandats actifs, s'assurer que le conservateur du registre aussi transmette aux lobbyistes une copie complète et exhaustive, conviviale, facilement utilisable, sous format papier et informatique, hein, de l'ensemble de leurs inscriptions avant, parce que, là, moi, j'ai des notes, j'ai une copie de ce que j'ai d'inscrit au registre, là, mais je veux savoir... Au moment du transfert, il faut que le conservateur me fasse parvenir à moi une copie, là, de mon dossier facilement utilisable, compréhensible, et que ce soient ces mêmes informations là qui se retrouvent, dans le fond, dans le nouveau système.

Moi, je suggérerais que... Comme on n'a pas de contrôle, nous, sur comment va se faire le transfert des données, bien, je suggérerais plutôt que ce soient les instances responsables de ce transfert-là qui doivent s'assurer de reprendre ligne par ligne et de faire cette vérification-là, tout en nous ayant transmis, au préalable, à nous, là, une copie de notre dossier pour s'assurer qu'en cas de litige ou qu'en cas de problématique on puisse avoir, nous, un comparatif. Mais je pense que ça serait peut-être le... Si vous donnez ça aux lobbyistes, j'augmenterais probablement le délai à 90 jours parce que dites-vous bien aussi que le système, ce ne sera plus pareil, là. Ce qui est marqué sur la page un de 162 de mon inscription à moi, là, ce ne sera plus les mêmes informations. Ça fait que je vais être obligée de... Ça va être un travail de moine d'effectuer tout ça. C'est pour ça que je vous le dis, là, on est quand même... ce ne sera pas simple.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je me tourne maintenant vers l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Hébert, d'être ici avec nous aujourd'hui, puis de nous faire part de vos commentaires, et de votre réflexion, et de votre expertise, je dirais, parce que vous êtes qualifiée comme témoin experte, je pense, dans n'importe quelle cour de justice, le cas échéant, en la matière, pour l'avoir vécu sur le terrain en 2002 et avoir déjà écrit deux ouvrages.

J'aimerais... parce que c'est une question importante puis, moi, ça m'interpelle. Au niveau du délai de prescription, dans le rapport Charbonneau, la recommandation 37 demandait à ce que ce soit, donc, trois ans et sept ans. Donc, à trois ans de la connaissance... à partir du début... à partir de la connaissance d'une potentielle infraction, le délai est de trois ans, et on ne peut excéder sept ans de la perpétration de l'infraction. On soulignait, dans le rapport Charbonneau — j'aimerais vous entendre là-dessus — que l'Agence du revenu du Québec bénéficie d'un délai de prescription de huit ans pour les infractions en matière de fraude fiscale. Et là où aussi on doit conserver beaucoup de documentation, c'est, entre autres, au niveau des déclarations de revenus. J'aimerais vous entendre là-dessus, quant à ce qui se passe déjà, par ailleurs, puis en prenant cet exemple-là de l'agence du revenu, qui est de huit ans. Vous ne trouvez pas que sept ans — je me fais un peu l'avocat du diable, là, vous me voyez venir, là — c'est justifié?

Mme Hébert (Martine) : Absolument, oui, c'est une bonne question, effectivement. Je vous signalerais, M. le député, que, dans le cas de Revenu Québec, c'est assez facile, hein, parce que, dans un litige fiscal, on a à présenter des pièces justificatives. Donc, on a des factures qu'on doit garder, hein? Donc, c'est matériel, là, ce n'est pas de l'appréciation, ce n'est pas : J'ai dit quelque chose ou je n'ai pas dit ça de cette façon-là. On n'est pas dans une conversation, par exemple, qui s'est tenue entre deux personnes. On n'est pas dans le cas non plus d'une poignée de main qui s'est serrée ici, dans le corridor de l'Assemblée nationale, pour dire : Ah! bonjour, qu'est-ce que vous faites ici aujourd'hui? Ah! bien, justement, M. le député, je voulais... je suis venu vous parler de tel dossier. On n'est pas dans ce type d'événement là.

Dans le cas de Revenu Québec, là, c'est tangible. Il y a des factures, il y a des contrats. Tu trouves tes... Tu leur donnes tes factures, tu leur donnes tes contrats, tes rapports TPS, TVQ, etc. C'est du papier, c'est tangible, alors que, dans l'appréciation des activités de lobbyisme, on est dans de l'intangible, hein? On a toujours... Il y a quand même des pièces justificatives, là, des courriels, des échanges de courriels, des lettres, et tout ça, mais il y a aussi tout ce qui se passe autour de ça, qui est dans le dialogue, dans la rencontre verbale, qui n'est pas nécessairement du tangible, là, comme ce qu'on retrouve à Revenu Québec. Ça fait que c'est pour ça...

Puis je me disais... Je comprends bien aussi que c'est important de donner suite aux recommandations de la commission Charbonneau. J'en conviens. Je me demande juste est-ce que... Vu qu'on n'est pas dans l'appréciation globale, là, on n'est pas dans l'analyse de... on n'est pas dans la révision de l'ensemble de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, on était vraiment sur une partie un peu plus administrative, là, je me demandais si on ne devrait pas déférer ce débat-là ultérieurement pour peut-être mieux baliser aussi quels sont les éléments de preuve, par exemple, qui seront exigés, tu sais, qui pourront être exigés ou qui devront... et, comme ça, pour que les lobbyistes sachent davantage qu'est-ce qu'ils sont tenus de garder justement comme information.

Et à ce moment-là, tu sais, c'est pour ça que je vous dis que, dans un cadre global, on pourrait avoir une approche un peu plus systémique de la chose, de dire : On veut bien donner suite... mais en même temps qu'on donne aux lobbyistes aussi des outils pour savoir, eux, ce qu'ils doivent garder, pendant ce sept ans-là, qui est susceptible justement de leur être demandé ou de faire partie, là, des éléments qui seront appréciés par le commissaire.

M. Tanguay : Puis merci pour votre distinction. Effectivement, ce n'est pas mécanique, ce n'est pas un document Excel et ce n'est pas une déclaration de revenus. Puis merci d'apporter cette nuance-là. Si, d'aventure, nous décidions de modifier le délai de prescription, plan B, que suggéreriez-vous ou vous n'avez pas réflexion là-dessus ce matin?

Mme Hébert (Martine) : Bien, ce que je suggère, à ce moment-là, c'est qu'on donne des indications, à savoir, dans le délai, là... puis, tu sais, dans le fond, qu'est-ce qu'on doit fournir comme preuve parce que, si on laisse libre cours à... en tout cas, qu'on nous donne des indications un peu plus précises, là, à savoir sur quoi... ou qu'on définisse, c'est-à-dire, le type d'infraction qui est de prescription par sept ans, là, tu sais, parce que moi, je peux être en infraction... J'ai déjà vu un commissaire qui avait émis un avis d'infraction parce qu'un lobbyiste avait justement mis fin à son mandat, mais avait oublié de le supprimer. Il ne l'avait pas supprimé dans le délai prescrit par la loi, à compter de la fin du mandat. Alors, vous comprenez qu'il va falloir peut-être baliser, définir quelles sont les infractions, là, qui sont assujetties aux sept ans de prescription versus celles du un an, là.

M. Tanguay : Et croyez-vous que dans les avis, le cas échéant, que le commissaire pourrait émettre, il pourrait justement faire une réflexion là-dessus et éclairer celles et ceux qui utilisent le registre quant à justement le niveau de preuve qui, le cas échéant, serait... Est-ce que, donc, on peut prendre ça comme une invitation qu'on pourrait faire au commissaire à étayer sa réflexion et ce à quoi il s'attend? Parce que le niveau de prévisibilité doit être là, ce qui n'est pas le cas. Alors, aimeriez-vous... jugeriez-vous que ce serait suffisant que le commissaire le fasse par des avis?

Mme Hébert (Martine) : J'aurais le goût de vous dire : On va vous en faire, nous, des avis, plutôt que le commissaire. Mais il faudrait que ce soit fait avec l'ensemble des parties parce qu'il ne faut pas que le commissaire, tout ça, lui... et là qu'on se ramasse à avoir à remplir un paquet de paperasse ou avoir à remplir un paquet de registres pour satisfaire aux conditions. Donc, moi, c'est pour ça que je dis : Il y a encore beaucoup de réflexion à faire autour de cette question-là. Et moi, je suis prête à travailler avec le commissaire. D'ailleurs, je suis sur son comité consultatif. Donc, je suis prête à travailler avec le commissaire, là, pour définir certains paramètres à ces égards-là, et c'est pour ça que je dis que c'est peut-être prématuré, à ce stade-ci, dans ce projet de loi ci, surtout qu'on n'est pas dans un contexte global, là, de la loi, donc, d'analyse globale de l'ensemble de la loi puis des répercussions que ça peut avoir, tout en ayant le souci de donner suite à la recommandation de la commission Charbonneau. Mais est-ce qu'on donne suite à cette recommandation-là dans le bon forum? C'est la question que je me pose.

M. Tanguay : Et ce que vous proposez là est en ligne — puis on doit y être sensible — directe avec l'importance que vous voudriez voir ajouté, dans le préambule puis dans l'article 1, peut-être, même, un principe à l'effet que le lobbyisme, ça existe. C'est une profession qui est noble puis c'est un droit.

Mme Hébert (Martine) : C'est un droit.

M. Tanguay : Et, en ce sens-là, l'aspect réputationnel, également, si la loi est beaucoup trop sévère ou n'est pas suffisamment claire... Lorsqu'on fait face justement à des poursuites, il y a un aspect réputationnel, et là on va complètement à l'encontre... dire : Bon, encore... Qu'est-ce qu'on va dire au Tim Hortons? On va dire : Encore un autre qui s'est fait pogner, hein? Puis ça, il faut briser cette perception-là.

J'ai deux angles maintenant, puis je veux, je pense, laisser du temps à ma collègue également, en amont et en aval. Donc, le pouvoir réglementaire du commissaire, dans ce contexte-là, vous le dites... le pouvoir réglementaire, vous dites : Juge et partie devraient avoir un apport d'une diversité de points de vue. Si lui fait les lois... les règlements, pardon, et, le cas échéant, veille à leur application, vous y voyez là, là, un gros drapeau rouge, là. Et également vous le conjuguez ou vous l'apprêtez à la sauce allègement réglementaire, par ailleurs, aussi. Alors, vous, ce serait carrément de donner ce pouvoir-là, de le donner au gouvernement, donc, comme un pouvoir réglementaire normal qui est déjà encadré et balisé et qui permet des consultations et des délais.

• (11 h 40) •

Mme Hébert (Martine) : Absolument, puis qui permet aussi d'avoir une diversité de points de vue, ne serait-ce que de la part de l'ensemble des membres du Conseil des ministres, etc., parce que... Et pas que je n'ai pas confiance au commissaire, là. Comprenez-moi bien, j'ai tout à fait confiance au commissaire, avec qui, d'ailleurs, on a d'excellentes relations. Mais, je vous dirais, vous savez, les individus passent, mais les lois et les règlements, on reste pris avec. Donc, il faut faire attention.

Et, dans ce sens-là, moi, je dis aussi... Le gouvernement a une politique d'allègement réglementaire qui comporte la règle du un pour un, qui fait qu'à chaque fois qu'on impose un nouveau règlement aux entreprises on doit en retirer un de nature équivalente. Donc, le commissaire, c'est quoi, les règlements qu'il va retirer, là, lorsqu'il va en imposer un nouveau? Donc, moi, dans cette perspective-là, qui est toute une politique qui est adoptée par décret, à laquelle le gouvernement s'est lui-même assujetti... Alors, ça serait important que, donc, le pouvoir réglementaire revienne au gouvernement. On assurerait aussi un meilleur contrôle. Vous savez, comme je vous dis, ce n'est pas une marque de non-confiance envers le commissaire actuel, au contraire, mais les individus changeant avec le temps... On connaît tous la fable de La Fontaine, la grenouille qui voulait se faire plus grosse que le boeuf, et on sait ce qui lui est arrivé.

M. Tanguay : Oui. Rapidement, parce qu'il reste peu de temps, vous parlez d'un pouvoir d'appel et vous dites : Peut-être que la Protectrice du citoyen ou le commissaire des droits de la personne... Excusez mon ignorance, mais est-ce qu'on ne pourrait pas l'envoyer au TAQ, Tribunal administratif du Québec, qui aurait déjà une procédure en place?

Mme Hébert (Martine) : Ça dépend si le lobbyiste est obligé de payer pour se faire représenter, là. C'est ça, mon problème, c'est que je cherchais un forum, dans le fond, où les lobbyistes qui ne sont pas d'accord avec une décision du commissaire puis qui veulent en appeler, mais de façon à ne pas judiciariser, là, un paquet de dossiers pour rien, qu'ils puissent, à tout le moins, là, avoir un recours... ou qu'il juge aussi même qu'il est traité de façon peut-être non équitable par le bureau du commissaire.

Moi, je me suis déjà fait appeler par le bureau du commissaire pour me faire dire : Mme Hébert, vous avez dit telle affaire dans le journal ce matin, on n'a pas vu de mandat d'inscrit au registre là-dessus. Je dis : Bien, voyons donc... Donc, on vérifiait ce que je disais dans les médias le matin, c'est arrivé il y a quelques années, puis on m'appelait pour me dire qu'est-ce que j'avais dit dans les médias le matin, ce n'était pas inscrit au registre. Ça fait que, tu sais, à un moment donné, là, après deux, trois fois, j'aurais aimé ça, là, à un moment donné, dire : Écoutez, là, à 87 mandats d'inscrits, on peut-u s'entendre qu'à peu près tout ce que je dis, là, c'est sûr, sûr, sûr que c'est quelque part dans un mandat, c'est juste que vous n'avez pas lu mes 87 mandats.

Donc, d'avoir une instance neutre comme ça, où on peut être représenté et faire des représentations, là, dans des cas comme ça ou dans des cas de désaccord avec le commissaire, je vous dirais que ce serait très, très, très bienvenu et nécessaire.

Le Président (M. Bachand) : 30 secondes, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Donc, en cinq secondes, vos recommandations... Bon, vous avez cet aspect d'alléger le processus administratif, mais vous soulignez bien que les principes qui sont bien édictés, par exemple, dans la loi fédérale, ce serait bien de les mettre carrément... parce que moi, je trouve que ces principes, oui, ils sont très clairs. Alors, vous dites, les deux... il y a deux objectifs, essentiellement, d'éducation publique... Pour l'article 21, actuellement, le délai, c'est un délai qui est déterminé par le conservateur, et on modifie pour le 10 jours. Vous, vous dites : On est dans une période de transition. C'est ça que je comprends. D'ailleurs, souvent, dans beaucoup de lois, actuellement, surtout avec des plateformes informatiques, on l'a vu beaucoup en immigration, il y a cette période de transition. Alors, je pense qu'il va falloir ravoir des discussions, peut-être, entre tous les experts, le commissaire aussi, de voir comment on peut, dans la loi, traduire cette période de transition qui est totalement imprévisible actuellement. Est-ce que ça va prendre six mois, ou deux ans, ou trois ans? On ne le sait pas. Donc, de ne pas pénaliser m... Et, c'est vrai, 10 jours a l'air très court.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme la députée. Avant de passer la parole au troisième groupe d'opposition, j'aurais besoin du consentement de la commission pour ajouter cinq minutes à l'heure prévue de la fin de séance. Alors, on a pris un petit, léger retard. Consentement? Alors, M. le député de Rimouski, s'il vous plaît.

M. LeBel : Merci. J'ai combien de temps, moi, là? Le cinq minutes n'est pas à moi?

Le Président (M. Bachand) : Vous me posez une question, là, vous, là.

M. Ouellette : C'est dans le cinq minutes.

Le Président (M. Bachand) : 2 min 43 s.

M. LeBel : Merci. Il y a deux ans ou trois ans, on avait travaillé sur un projet de loi ensemble, puis j'avais eu une lettre de vous me félicitant du travail que j'avais fait et je trouvais ça intéressant. Indépendantiste, c'est proche des groupes sociaux. J'avais une lettre de la Fédération canadienne des entreprises. Je l'avais affichée dans mon bureau. Ça avait été bien drôle.

Mais, dans votre communiqué, vous dites, puis je répète ce que mon collègue vient de dire : «Ce dernier se retrouve dans une position de juge et partie en tant que régulateur. Il est chargé de concevoir les règlements qu'il applique. Il est important de maintenir la confiance...» Puis là vous dites que ça devrait être le gouvernement qui ferait tout ça. Les gens qui sont passés avant vous ont proposé une formule que les modalités soient déposées avant, qu'on puisse les étudier en commission, on peut se consulter, que ces modalités-là soient déposées avant l'adoption du projet de loi. Est-ce que vous pensez que ça pourrait être une alternative?

Mme Hébert (Martine) : C'est parce que le processus réglementaire, en fait, il ne prévoit pas nécessairement de commission parlementaire. Le processus réglementaire prévoit, à ma connaissance, là, une prépublication. Là, les groupes, tout ça, peuvent... Mais c'est dans le cheminement du projet de règlement, en fait, où ça apporte une diversité de points de vue aussi parce qu'à ma connaissance, dans le processus réglementaire, il y a le Conseil des ministres, quand même, qui est informé aussi. Donc, comprenez-vous qu'il y a tout un processus, là? C'est sûr que, si on laisse le processus au commissaire, on devra avoir à inscrire nommément un processus de consultation un peu plus costaud que ce qu'il y a dans le processus réglementaire. Mais nous, on juge que ce n'est pas nécessairement la bonne approche à prendre parce que ça ne s'inscrit pas en cohésion avec la politique gouvernementale et avec la volonté, d'ailleurs, exprimée par le premier ministre lui-même, en matière d'allègement réglementaire.

M. LeBel : Ça fait que vous aimez mieux que tout ça soit donné au gouvernement et que ça passe par le Conseil des ministres, les mémoires, et tout ça, les comités ministériels?

Mme Hébert (Martine) : Tout à fait, oui, parce que ça assure davantage de protection, et on s'assure comme ça aussi d'une meilleure cohésion avec la politique d'allègement réglementaire dont je vous ai mentionné tantôt.

M. LeBel : Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.

M. Ouellette : Merci. Merci, Mme Hébert. C'est toujours agréable de... Écoutez, il y a ceux qui écrivent l'histoire puis il y a ceux qui la content. Vous, vous l'avez écrite. Aujourd'hui, vous êtes très bien placée pour la conter.

Je ne peux pas être en désaccord avec le petit drapeau que vous nous levez en disant : Il ne faut pas tout centraliser à la même place, à la même personne, parce qu'on l'a vu dans d'autres cas et dans d'autres institutions, il y a effectivement des commissaires qui ont abusé de leur pouvoir sans aller en reddition de comptes. Donc, je pense que le fait que vous nous en parliez, ça va sensibiliser les parlementaires.

J'écoutais vos commentaires puis je me disais... Bon, on parle de 30 mois pour la mise en place du registre. Mme la ministre a ouvert en disant ce matin que c'est une première étape. On aura une deuxième étape de révision. Est-ce que je me trompe de penser qu'avant de penser à une deuxième étape de révision, installons comme il faut l'étape qu'on est en train de faire, regardons les tenants et les aboutissants et après on pensera à faire une révision de la loi de 2002 ou ça peut se faire simultanément?

Mme Hébert (Martine) : Bien, c'est sûr que moi, je trouve que ce serait préférable d'attendre de voir les résultats de la première étape parce que, par exemple, si vous voulez... Si le législateur décide qu'il veut rajouter des informations que les lobbyistes doivent inscrire dans leur mandat, bien, il va falloir voir qu'est-ce que ça représente, là, au niveau du système, en termes de fardeau administratif supplémentaire, là. Si on ne sait pas si le système marche, si on n'a pas coupé partout ailleurs dans les délais, si on n'a pas facilité les transactions, etc., bien, on risque d'en ajouter, d'en ajouter, d'en ajouter.

Puis à un moment donné on sait ce qui va arriver, là. Plus on va rendre ça complexe et difficile, plus on brime le droit au lobbyisme, parce que je dis bien et je répète, là, c'est un droit, donc un droit fondamental, et qui est consacré aussi par les chartes, donc, et même la Constitution américaine aussi. Donc, c'est un droit. Et donc on va entraver l'exercice de ce droit-là inutilement. Puis on ne facilitera pas non plus l'observance et la transparence, en bout de ligne, parce que plus on met ça complexe, plus on va décourager le monde de s'inscrire et plus... parce qu'on va renforcer le coût d'opportunité, si vous voulez, de s'inscrire versus celui de se faire prendre. Donc, plus ça va être compliqué, pire ça va être. Alors, moi, je dirais : Première étape, allons-y avec le technique. Nous ça rendons comme ça. Puis, après ça, la deuxième étape, on sera en mesure d'évaluer pleinement ce qu'il faut changer dans la loi actuelle.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. C'est tout le temps qu'on a. Merci beaucoup de votre contribution, Mme Hébert.

Je suspends les travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 49)

(Reprise à 15 h 38)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci et bienvenue. La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande bien sûr à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

On rappelle le mandat. Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 6, Loi transférant au commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale.

Cet après-midi, nous entendrons la Fédération des chambres de commerce du Québec, l'Alliance des cabinets de relations publiques du Québec et le Conseil du patronat du Québec.

Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc, comme c'est la coutume, à vous présenter et à débuter votre exposé. Et, encore une fois, bienvenue.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

M. Forget (Stéphane) : Merci beaucoup. Merci de nous recevoir aujourd'hui. Stéphane Forget, P.D.G. de la fédération. Je suis accompagné de Kathy Megyery, qui est vice-présidente Stratégie et Affaires économiques à la fédération.

Tout d'abord, peut-être me permettre de rappeler brièvement le rôle de la fédération pour certains d'entre vous, peut-être, qui nous connaissez un peu moins. La fédération, c'est à la fois... fédération, donc qui regroupe et fédère les 132 chambres de commerce partout sur le territoire québécois, et nous sommes aussi la chambre provinciale, donc plus de 1 100 entreprises qui sont directement membres de la fédération, ce qui fait que, globalement, nous représentons 50 000 entreprises à travers le Québec. Évidemment, nous sommes aussi... nous avons de nombreux mandats actifs au Registre des lobbyistes, compte tenu de notre rôle et de notre vocation.

• (15 h 40) •

Le projet de loi n° 6 vient notamment transférer au Commissaire au lobbyisme du Québec la responsabilité du registre des lobbyistes, et nous pensons que ce changement est tout à fait logique. À ce chapitre, nous sommes en accord avec les grands principes retrouvés dans le projet de loi proposé par la ministre de la Justice.

Avec ce transfert de responsabilités, il faudra évidemment s'assurer de la protection des renseignements dans ce transfert-là. Nous sommes en faveur de la transparence, mais il va de soi, en tout cas pour nous, qu'il est essentiel d'éviter toute forme d'alourdissement réglementaire au processus d'inscription au Registre des lobbyistes. De notre point de vue, les changements proposés doivent éviter une bureaucratie excessive, et la loi doit être révisée dans une perspective d'allègement réglementaire pour toutes les catégories de lobbyistes. D'ailleurs, l'analyse réglementaire de l'ancien projet de loi n° 56, déposé en 2015, démontrait combien les coûts reliés à l'enregistrement étaient alors sous-estimés, parce qu'il y a des coûts en temps, en énergie aussi, à compléter ces documents-là.

Nous présentons, à l'intérieur de notre mémoire, nos recommandations en deux temps. Dans un premier temps, nous souhaitons un cadre législatif qui soit plus approprié. Parmi nos propositions, nous croyons qu'il faut encadrer de manière beaucoup plus équitable les activités de lobbyisme provenant des OSBL. Il serait judicieux que l'encadrement des pratiques de lobbyisme au Québec se fasse davantage de façon différenciée entre les organismes offrant des services directs à la population et ceux faisant de la représentation directe auprès des titulaires de charge publique.

Nous sommes également préoccupés de voir que les activités de vente réalisées par des individus oeuvrant à leur propre compte ou pour des entreprises privées continuent à être confondues avec ce qui est défini comme des activités de lobbyisme. Ainsi, une activité de vente réalisée dans le cadre réglementaire actuel ne devrait pas être présumée comme étant la recherche d'un contrat qui en diffère de l'essence.

Dans le même ordre d'idées, une irrégularité législative a fait en sorte d'assujettir tout le personnel du réseau de la santé à la loi. Tous les employés du réseau, soit près de 270 000 personnes, qu'ils soient cadres, salariés ou professionnels, sont devenus, en 2015, par l'adoption de la loi n° 10 de l'époque, titulaires de charge publique au sens de la loi. Cette situation crée un alourdissement indu du fardeau administratif pour nos entreprises et va à l'encontre des orientations et des politiques visant à l'allègement réglementaire et, de notre point de vue, s'éloigne aussi des objectifs de la loi.

Nous croyons sincèrement que l'encadrement des contrats publics par la Loi sur les contrats des organismes publics et la Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics sont déjà bien suffisants pour protéger l'intérêt public et délimiter le carré de sable dans lequel les choses doivent se faire. Pour ces raisons, voilà, de notre point de vue, l'opportunité d'apporter un correctif rapidement. Le projet de loi n° 6 donne l'occasion de revoir en profondeur le contexte de l'application, et il nous apparaît clair que ce cadre législatif n'est absolument pas approprié pour les activités de vente ou de suivi des produits et équipements vendus dans un contexte de service à la clientèle.

Nous croyons important de profiter de ces changements législatifs aussi afin de s'assurer autant que possible de l'uniformité de l'interprétation de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme entre les conseillers juridiques. Nous avons entendu des situations où les parties prenantes se sont vues confier de directives divergentes entre les conseillers juridiques, évidemment chez le conservateur actuellement et éventuellement chez le commissaire, à la suite d'ajout ou de changement de mandat. Cela amène une confusion quant à l'interprétation des actions à effectuer pour les parties prenantes.

Maintenant, l'article 5 du projet de loi n° 6 vient exiger du lobbyiste d'apporter des corrections requises par le commissaire dans un délai de 10 jours advenant, et j'ouvre les guillemets, qu'«une déclaration ou un avis ne contient pas tous les renseignements requis, contient une erreur ou n'est pas présenté dans la forme ou selon les modalités prescrites». Puisque cette situation peut se produire régulièrement chez bon nombre de lobbyistes, l'article 5 nécessite, de notre avis, quelques clarifications que nous exposons dans notre mémoire. Mais, à titre d'exemple, il serait approprié que les lobbyistes puissent disposer d'un délai plus raisonnable pour procéder aux modifications.

Maintenant, concernant la divulgation publique d'informations confidentielles, l'article 11 du projet de loi n° 6 prévoit un remplacement à l'article 50 de la loi qui amène, là aussi, un certain questionnement. Il est écrit : «Lorsqu'il accorde une mesure de confidentialité, le commissaire procède à l'inscription de la déclaration présentée, mais s'assure de la confidentialité des renseignements visés par la mesure.

«Lorsque la mesure vient à échéance, les renseignements visés deviennent accessibles au public.»

En vertu de quelles considérations la mesure de confidentialité vient à échéance, selon le commissaire, et qu'il peut déterminer seul que la nature du dossier n'est plus confidentielle? Est-ce qu'il est prévu, par exemple, d'avoir obligatoirement l'autorisation de l'entreprise et/ou du lobbyiste avant la divulgation publique des informations de nature confidentielle? De notre point de vue, il serait nécessaire d'apporter des précisions, à l'intérieur du projet de loi, sur le processus menant à la divulgation publique des informations de nature confidentielle, tout en s'assurant d'obtenir l'autorisation du lobbyiste ou de l'entreprise pour procéder. Le commissaire devrait avoir l'obligation, de notre point de vue, de consulter toutes les parties impliquées avant de procéder à ladite divulgation au public des informations, d'obtenir leur autorisation et que cette mesure soit clarifiée, comme je le mentionnais, dans le projet de loi.

En deuxième lieu, puisque le projet de loi n° 6 prévoit un transfert des responsabilités du registre au commissaire, ce changement représente une belle opportunité d'améliorer significativement l'utilisation de la plateforme numérique d'enregistrement des activités de lobbyisme, notamment dans le cas du formulaire électronique d'inscription. Effectivement, la structure actuelle de cette plateforme amène, à notre avis, son lot d'irritants pour un bon nombre d'utilisateurs. Sans entrer dans tous les détails, vous trouverez, en annexe de notre mémoire, une série de recommandations que nous vous faisons. Celles-ci portent notamment... et je veux juste vous citer quelques exemples : la navigation entre les mandats, les changements aux noms des ministères suivant une élection ou d'un nouveau conseil des ministres, le changement manuel de la date de fin dans certaines rubriques, la numérotation des mandats et l'ajout de fonctionnalités pratiques.

En terminant, dans le contexte du présent projet de loi, il est nécessaire de rappeler que le lobbyisme est une activité légitime, comme il est défini à l'article 1 de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Les informations présentées par les lobbyistes peuvent être très utiles aux élus, les titulaires de charge publique, dans leur prise de décision afin de notamment maximiser la compréhension d'enjeux qui peuvent être légitimement méconnus ou mécompris. Dans une lettre ouverte de mai 2018, le Commissaire au lobbyisme, Me Routhier, disait, et je cite : «Afin d'assurer que les usagers bénéficient d'un registre adapté à la réalité d'aujourd'hui, simple, moderne et efficace, il est nécessaire de lancer rapidement un projet de refonte des systèmes qui le supportent et de leur interface», dis-je. C'est dans cette optique que la fédération présente ses recommandations pour atteindre ces principes recherchés par le commissaire et, j'en suis certain, par l'ensemble des élus. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Donc, je me tourne vers la partie... le gouvernement pour la période d'échange. Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : Oui, merci. Merci pour ce résumé de votre mémoire et merci pour votre mémoire, effectivement. Je vais me permettre de dire, d'entrée de jeu, qu'il y a plusieurs points, par contre, qui pourraient s'adresser à une seconde étape de réforme, parce que, comme je l'ai mentionné ce matin, ce sont des questions essentielles sur lesquelles nous serons amenés, dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, à réfléchir. C'est exact, et votre point de vue est bien compris et bien noté. Mais on aura l'occasion, et vous aurez l'occasion, je vous en rassure, d'en rediscuter, et on pourra évoluer vers autre chose.

Mais pour l'instant, quand on parle du transfert, ce matin, du Registre des lobbyistes, peut-être que je commencerai par vous demander... À l'instar de la FCEI, vous n'avez pas fait de remarque sur le délai de prescription, parce que c'est... On reviendra sur la première étape, qui est le transfert, et quelques petits points que je voudrais discuter avec vous.

Vous n'avez pas fait de remarque sur le délai de prescription. Est-ce que je dois en comprendre que le fait de vouloir ramener ce délai de prescription à trois ans et sept ans, c'est-à-dire trois ans de la connaissance et sept ans de l'acte, pour les raisons qui ont déjà été mentionnées, c'est-à-dire d'être capable d'établir la preuve de telles infractions... D'ailleurs, je mentionnais ce matin en votre absence que c'est justement aussi la raison pour laquelle, en matière d'entrave, on n'a pas modifié le délai de prescription. En tout cas, ce n'est pas l'intention du projet de loi actuel, parce que c'est une infraction qui, de par sa nature, a moins de difficulté de preuve, si on veut, ou d'établissement, ou d'enquête. Donc, est-ce que vous avez peut-être une opinion là-dessus, brièvement?

• (15 h 50) •

M. Forget (Stéphane) : En fait, ça n'a pas fait l'objet de plusieurs discussions parmi les gens chez nous. Cela étant dit, on a eu des commentaires sur le sept ans en se disant, évidemment : Est-ce que le sept ans est peut-être un peu long, compte tenu de la nature du travail de lobbyisme?

Alors, je dirais que, sur le trois ans, il n'y a pas eu vraiment de commentaires. Sur le sept ans, par ailleurs, il y a eu quelques commentaires à l'effet, est-ce que ce n'est pas un peu long, compte tenu que... puis je sais que ça a été discuté ce matin, mais je vais reprendre le même exemple, ministère du Revenu, c'est une autre chose, ça. Les preuves sont souvent différentes, les documents ne sont pas les mêmes. Donc, est-ce que le sept ans... est-ce qu'il pourrait y avoir une réflexion, de votre côté, sur la période de sept ans? Mais, sur le trois ans, on n'a pas eu de commentaire à cet égard-là.

Mme LeBel : Et quelles sont vos craintes ou, en tout cas, la crainte de vos membres par rapport à la période de sept ans?

M. Forget (Stéphane) : Bien, souvent, on parle de conversations, d'échanges, de discussions. Est-ce que le souvenir ou la façon qu'on a pu noter des choses peuvent être de la même... être aussi simples à se rappeler, à retenir? Donc, c'est ce genre de commentaires là que nous avons reçu concernant la période de sept ans.

Mme LeBel : Merci beaucoup. Peut-être revenir avec quelques points qui touchent plus, là, effectivement, le transfert du registre au Commissaire au lobbyisme. Vous avez parlé du délai de 10 jours — j'allais dire 10 ans, ça va bien. Alors, vous avez parlé du délai de 10 jours, le délai de 10 jours qui est celui où le commissaire, s'il signale une erreur ou une correction à faire, est le délai dont le lobbyiste bénéficiera.

Vous avez parlé également que ça prendrait peut-être un délai plus raisonnable. Vous pensez à quel type de délai? Parce qu'on doit comprendre, puis vous serez d'accord ou non avec moi, avec la prémisse suivante : il doit y avoir un délai pour se conformer. Donc, à quoi vous pensiez quand vous pensiez à un délai plus raisonnable? Aviez-vous une idée plus précise?

M. Forget (Stéphane) : Bien, je vous dirais, tout d'abord, il y a deux groupes qu'on avait en tête. Nous, dans un premier temps, on a de nombreux mandats. Vous pouvez imaginer qu'on peut être, par moments, en train de corriger, ou d'améliorer, ou de changer un certain nombre de mandats. On n'a pas 12 personnes chez nous qui s'occupent de faire cela. Donc, par moments, il peut y avoir beaucoup de congestion. Donc. d'avoir un peu plus de temps, c'est une chose.

Après ça, il y a ceux qui ne le font pas souvent, ont peu d'expérience et qui pourraient se retrouver dans une situation où le 10 jours peut être un peu court pour leur donner le temps de bien comprendre, de saisir, de consulter. Et, même, je vais vous donner un exemple fort simple, là. Je vous ai parlé de 132 chambres de commerce chez nous, là, il y en a très importantes, comme Montréal, et d'autres très petites. On a des appels des fois, en se disant : Qu'est-ce que je dois faire?, etc. Donc, il faut leur répondre.

Alors, 10 jours, c'est trop court; 10 ans, c'est trop long. Mais est-ce qu'un délai d'une trentaine de jours, par exemple, disons entre 15 et 30 jours, est-ce qu'on pourrait avoir... Ça nous permettrait certainement de mieux s'ajuster et, après ça, de faire en sorte que quand on a ce délai-là, quand on arrive au terme du 30 jours où on doit être inscrit, bien, qu'on ne soit pas pénalisé parce qu'il y a un délai qui s'ajoute, parce qu'on doit corriger telle ou telle situation.

Mme LeBel : O.K. Est-ce que vos craintes sont basées, puis je pense que poser la question est presque y répondre, mais vos craintes sont-elles basées sur le fait... sur le registre actuel — j'essaie de m'exprimer correctement, là — sur la difficulté d'inscription ou la longueur d'inscription, compte tenu de la forme actuelle du registre? Est-ce que votre évaluation de l'insuffisance du 10 jours est basée là-dessus?

Et, dans un second temps, en prenant pour acquis ou tenant pour acquis qu'une des conséquences du transfert ou un des objectifs du transfert est justement de permettre au Commissaire au lobbyisme de créer peut-être une plateforme beaucoup plus conviviale, est-ce qu'on ne pourrait pas penser, à ce moment-là, que le délai d'un ordre de grandeur de 10 jours serait plus approprié, effectivement?

M. Forget (Stéphane) : Bien, j'ai envie de vous dire que tant que nous ne l'aurons pas essayé, ça va être difficile de vous dire si 10 jours est suffisant. C'est certain que c'est complexe, là... bien, pas que c'est complexe, c'est que c'est compliqué et un peu ardu de travailler dans le registre actuel, mais je pense qu'au-delà de la mécanique, il peut y arriver par moments que ce soit le temps et la disponibilité de la personne qui doit faire la correction qui peut être un enjeu.

Alors, je pense que la mécanique est une chose, mais il y a aussi le temps requis pour faire le travail, pour être disponible pour faire ce travail-là. Donc, on a un peu plus de temps. Je pense que malgré une amélioration, ce ne serait pas de trop.

Mme LeBel : O.K. Mais si je peux... Je vais peut-être pousser un peu plus loin pour voir, avec vous, l'argumentaire. Si le délai de 30... Je pense que c'est un délai de 30 jours. Pas je pense, c'est un délai de 30 jours actuellement pour inscrire un mandat.

Donc, pouvons-nous penser que, quand on parle d'un correctif à un mandat... parce qu'on ne parle pas de s'inscrire et de faire le travail au complet, mais souvent, c'est sur la base d'une erreur ou d'une irrégularité qui aura été signalée par le commissaire et, dans le fond, c'est un délai où on demande au lobbyiste de corriger le mandat pour le rendre plus adéquat à ce qui se fait dans la réalité. Ne pensez-vous pas, à ce moment-là, qu'on doit quand même être en deçà du 30 jours de base pour s'inscrire, là?

M. Forget (Stéphane) : Bien, c'est pour ça que je vous disais : est-ce que c'est 15 jours? Est-ce qu'on se rend jusqu'à 30 jours? Je pense qu'il y a certainement un équilibre entre les deux, et parfois aussi c'est une compréhension du mandat. Il faut le retravailler, le réécrire, le revalider. On revient et... bon, puis des fois il y en a plusieurs concomitants. Alors, il y a cette réalité-là aussi.

Donc, je comprends l'idée, le principe, mais je vous dis par expérience que d'avoir un délai un peu plus long serait certainement une façon d'améliorer le processus.

Mme LeBel : La FCEI nous a souligné également un autre aspect de délai. Ils nous ont parlé ce matin... Comme vous savez, dans le projet de loi, au niveau de la transition, les données seront transférées par le gouvernement, si on veut, d'un registre à l'autre. Une fois que la plateforme du Commissaire au lobbyisme sera en place, il y a un délai de 30 mois pour ce faire. Ça pourrait être moins, mais le délai maximum pour mettre en place le nouveau registre est de 30 mois, en tout cas, ce qui est prévu dans le projet de loi. Et, suite à ça, nous, on donne, dans le projet de loi, un délai de 60 jours pour les gens qui sont inscrits au registre pour vérifier la qualité du transfert, si on veut, ou la conformité des données qui ont été transférées au mandat. Naturellement, on parle des mandats actifs, là.

Qu'est-ce que vous en pensez de ce délai de 60 jours là pour s'assurer de la conformité du transfert?

M. Forget (Stéphane) : Bon, je vais vous donner un exemple. On a plus de 60 mandats, là, actuellement au registre. Alors, évidemment, vous comprenez que ça va demander un travail précis pour s'assurer qu'il ne manque rien, que tout est là, que le transfert a été bien fait. Bon, je pense que 60 jours... à 60 mandats, est-ce qu'on aura assez de temps pour s'assurer que tout est là, puis qu'il ne manque rien, puis qu'il n'y a pas d'erreur? C'est sûr que, si c'est quelqu'un qui a peu de mandats, c'est peut-être plus simple.

Écoutez, on n'a pas eu de grande réflexion là-dessus. J'aurais juste... J'ai envie de vous dire qu'à 60 mandats, est-ce que ce sera suffisant pour s'assurer qu'il ne manque rien? Parce qu'après ça on ne veut pas avoir une conséquence parce qu'il y a quelque chose qui n'aurait pas été transféré. Je me dis : Est-ce qu'on devrait se donner la chance qu'il ne manque rien? Est-ce qu'on devrait se dire : Donnons-nous un peu plus de temps pour valider tout cela puis qu'on ait les contacts nécessaires, par exemple, avec le commissaire, au besoin?

Alors, j'ai tendance à vous... Il faudrait que je demande à nos spécialistes chez nous qui font ça au quotidien, là, mais, ce matin, on avait 74 mandats, là. Alors, quand il va se mettre à faire le tour, est-ce qu'en 60 jours... Je ne sais pas si je vais pouvoir le dégager à temps plein pour faire ça pendant 60 jours.

Mme LeBel : Mais, vous savez, on est peut-être confrontés à peu de solutions. Quand on passe d'un registre à un autre, il y a deux façons... en tout cas, j'imagine, deux façons, à moins que vous pourriez m'en suggérer une troisième, de faire. Soit qu'on fait le transfert des données et on demande naturellement de vérifier, parce qu'on ne veut pas prendre l'odieux d'avoir peut-être mal transféré, et ultimement le lobbyiste étant potentiellement redevable, mais il y avait aussi l'option de redemander une réinscription.

Alors, peut-être que, si vous avez... peut-être pas aujourd'hui, mais, si vous avez une réflexion à faire là-dessus, on serait très intéressés d'avoir votre opinion, naturellement.

M. Forget (Stéphane) : Je vais me permettre un exemple. Je vous ai parlé du réseau de la santé. Je vous ai parlé des entreprises qui, tout d'un coup, quand tous les fonctionnaires du réseau de la santé ont été assujettis en 2015, un certain nombre d'entreprises ont dû inscrire plusieurs de leurs employés pour aller faire du travail dans les hôpitaux, notamment, qui n'a rien à voir avec le lobbyisme, mais ils ont dû le faire. Ces gens-là doivent inscrire des mandats.

Alors, je fais juste imaginer la charge de travail. Je fais juste imaginer la charge de travail pour ces personnes-là, à ce moment-ci, de devoir revalider ou de réinscrire tous ces mandats-là. Ça ne m'apparaît vraiment pas une avenue qu'il faut choisir.

Mme LeBel : Peut-être profiter de l'occasion... adresser peut-être un autre point que vous avez souligné, les notions de confidentialité. Ma compréhension est que, dans la loi actuelle, c'est un mécanisme similaire qui existe. Est-ce que vous avez vécu des difficultés du type que vous soulevez? Vous soulevez des craintes par rapport à la confidentialité. Qui sera tributaire de ça? Est-ce qu'on devra consulter les entreprises? Est-ce que vous avez vécu, dans le cadre du registre actuel, avec cette notion de confidentialité là, des problèmes?

M. Forget (Stéphane) : Je n'ai pas d'exemples qui nous ont été fournis par les entreprises. Je peux cependant vous dire que la préoccupation, c'est que, bien qu'un mandat pourrait être complété, c'est possible qu'il y ait encore des données qui doivent demeurer confidentielles. Alors, c'est là, la préoccupation des gens. Je pourrais faire une petite recherche puis vous transmettre l'information, le cas échéant. Mais la préoccupation, c'est que ce n'est pas parce qu'un mandat est terminé que, tout d'un coup, tout pourrait devenir naturellement public, là.

Mme LeBel : Donc, idéalement, qu'est-ce que vous suggérez ? Qu'est-ce qui devrait...

• (16 heures) •

M. Forget (Stéphane) : Bien, c'est qu'avant que ça devienne public, que les gens qui ont fait l'inscription et qui sont dans la portion confidentielle puissent être consultés par le Commissaire au lobbyisme en disant : Votre mandat arrive à terme. Un certain nombre d'informations ont été considérées de nature confidentielle, sont-elles encore aujourd'hui... doivent-elles demeurer de nature confidentielle ou y a-t-il un préjudice potentiel à ce qu'on les rende publiques? Je pense que ce serait de bon aloi de consulter les gens qui ont demandé à ce que ce soit de nature confidentielle parce que, comme je vous dis, pour des raisons de compétition, pour toutes sortes de raisons autres, bien, peut-être qu'un certain nombre d'informations devraient demeurer confidentielles. Pour un projet qui ne voit pas le jour, par exemple, à ce moment-ci, je pourrais revenir plus tard et on pourrait... une série d'idées pourraient nous venir à l'esprit, là.

Mme LeBel : O.K. Peut-être... Plusieurs de vos prédécesseurs qui ont témoignés ce matin soulignent effectivement... la FCEI a parlé de réputation sulfureuse, a parlé de mauvaise réputation au niveau du lobbying, et vous partagez, je comprends, la même préoccupation. Est-ce que vous ne pensez pas qu'une facilitation, une meilleure compréhension, un registre plus convivial — je vais le dire comme ça parce que, pour moi, c'est peut-être des notions qui sont entrelacées — un registre plus convivial, plus facile de consultation et pour le citoyen... que d'accès ou d'entrées de données pour le lobbyiste ne pourrait pas aider justement à cette ventilation ou cette aération-là de la profession?

M. Forget (Stéphane) : Bien, je crois que oui. En fait, assurément que ça va simplifier la vie. Moi, depuis le début, je dis toujours, l'objectif du registre, c'est d'améliorer la transparence, pas d'alourdir les processus. L'idée, ce n'est pas de faire en sorte que les lobbyistes ne puissent pas faire le travail qu'ils doivent faire, mais de faire en sorte que ce soit connu, que ce soit public, évidemment, lorsque ce n'est pas dans la portion confidentielle. Donc, je pense que, oui, mais j'ajouterais que c'est beaucoup dans le discours qu'on voit la différence, c'est, oui, dans les processus, mais aussi dans le discours, comment on va parler, comment on va interpréter le rôle des lobbyistes.

On a parlé de l'article 1, tantôt, de la loi, je pense qu'il faut rappeler que c'est légitime, que c'est, dans bien des cas, pertinent et nécessaire. Donc, il y a le processus, il y a la transparence, il y a le fait que ce soit plus facile, mais aussi le discours qu'on utilise pour parler des gens qui font ce métier-là.

Mme LeBel : Je vais profiter, là, du temps qu'il me reste pour solliciter votre expertise d'usager. Quelles seraient les améliorations essentielles que vous verriez à la nouvelle plateforme, là? On a parlé des irritants de l'ancienne, mais qu'est-ce que vous voyez comme améliorations essentielles de la nouvelle plateforme?

M. Forget (Stéphane) : Bien, j'aurais quelques détails techniques. Je pourrais vous dire... Je vais vous donner un exemple. J'aurais envie de vous dire, pour débuter, qu'on devrait, dans la réflexion future, puis je pense que le commissaire a ça déjà à l'esprit, il a déjà commencé, il a déjà fait plusieurs rencontres, que les usagers puissent travailler de pair avec lui dans l'amélioration de cela, bon, autant les grands usagers... Et là j'ai souvent à l'esprit ceux qui l'utilisent peu ou rarement. Pour eux aussi, c'est très compliqué, même un peu inquiétant parce qu'on ne veut pas contrevenir à la loi.

Je vous donne des exemples simples, là. Le ministère qui change de nom. Et là on repart, on doit nous-mêmes repartir, et tous nos mandats... Et je recule, des mandats qui datent déjà de cinq ans, six ans, là, où le nom du ministère était vraiment autre. Il faut tout refaire.

Un autre exemple : les mandats sont numérotés. Je veux savoir... je veux revenir sur tel mandat pour faire une correction ou autres. Il faut que je m'amuse à faire le tour des mandats pour trouver celui dont je veux parler ou sur lequel je veux travailler. Les retours en arrière... Il y a toutes sortes d'exemples où ce n'est pas facile d'usage.

L'autre chose, c'est moins dans la mécanique que dans la volonté ou dans le souhait que les conseillers, les gens qui vont... les conseillers juridiques qui vont intervenir aient des lignes directrices pour qu'on... finalement on dise la même chose. Parce qu'il arrive que, si on passe d'un conseiller à l'autre, on n'ait pas la même interprétation du mandat sur lequel nous travaillons. Alors, ça, je pense que d'avoir aussi une uniformité, ce serait bien.

Je vous donne un exemple simple : nous, maintenant, on nous a dédié un conseiller qui s'occupe de nous plus particulièrement. Et, depuis ce temps-là, le processus a été simplifié de beaucoup, parce qu'il comprend ce qu'on fait, on finit par avoir toujours la même interprétation, et notre travail se fait beaucoup plus facilement.

Donc, il y a techniquement des choses... Des changements de dates à la fin de mandat : Est-ce qu'un mandat qui est en cours... Est-ce qu'à la fin de notre année fiscale on doit remettre à jour tous les mandats qui sont actuellement en cours? Donc, il y a un certain nombre de choses. Mais, bien franchement, je pense que, si on réussit à s'asseoir avec le commissaire, les grands utilisateurs et les moins grands utilisateurs, je suis convaincu qu'on va arriver à quelque chose qui va être facile d'usage et qui va répondre aux objectifs de transparence — et d'allègement réglementaire pour nous.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je me tourne maintenant vers l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Merci d'être là, merci pour votre participation à nos délibérations, à notre discussion collective sur le projet de loi n° 6. Donc, bienvenue à votre Assemblée nationale. Beaucoup de petites choses, donc ce n'est pas des... beaucoup donc de petites questions assez précises. Ce matin, on a eu entre autres le débat, puis je viens de lire, puis je vais l'avouer, pour la première fois, là, l'article 57 de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. On parlait d'une procédure d'appel allégée, d'une décision rendue par le commissaire. L'article 57 dit : «Le lobbyiste visé par la décision du commissaire peut, sur demande signifiée à ce dernier, interjeter appel de cette décision devant un juge de la Cour du Québec.»

Ce matin, ce qui était proposé entre autres, c'était quelque chose d'un peu plus souple, de moins coûteux, et, en termes de délais... On connaît les délais parfois inhérents à la justice. Vous, êtes-vous à l'aise, avez-vous une expérience, ne serait-ce que chez vos membres, de cette procédure où l'on peut en appeler d'une décision du commissaire ou est-ce que vous trouvez bonne l'idée de peut-être avoir une procédure d'appel un peu plus allégée? Et on référait, entre autres, à la Protectrice du citoyen, qui pourrait alors... Quelle est votre réflexion là-dessus?

M. Forget (Stéphane) : On est d'accord avec un processus allégé.

M. Tanguay : Oui? Ça représente quoi, pour qu'on sache, en termes de coûts et de temps? L'appel ne suspend pas, en plus, l'exécution de la décision. Donc, si c'est une radiation, c'est une radiation, donc la personne perd son gagne-pain dans certains contextes. En termes de coûts et de délais, pouvez-vous nous exprimer un peu ça représente quoi... Cour d'appel?

M. Forget (Stéphane) : Malheureusement, là, je n'ai pas de chiffres à l'appui, mais on pourrait certainement faire l'exercice, puis l'évaluer, puis vous le transmettre...

M. Tanguay : Bien d'accord avec ça. Mais est-ce qu'il n'y aurait pas une... Parce que, si, par exemple, à moins que vous identifiiez un autre officier de l'État, une autre institution, si c'est la Protectrice du citoyen, croyez-vous qu'elle pourrait avoir l'expertise à l'interne pour renverser telle décision, le cas échéant?

M. Forget (Stéphane) : Bien, j'imagine que, le cas échéant, si c'était dirigé vers la Protectrice du citoyen, elle pourrait s'adjoindre des gens qui auraient une certaine spécialité en la matière, là. Je pense qu'on pourrait envisager cela, si tel était le cas.

M. Tanguay : Il y a un comité consultatif qui a été mis sur pied, là, je pars de Laval et je remonte, donc, comité consultatif sur les règles d'encadrement du lobbyisme. Là, le projet de loi fait en sorte que le commissaire sera l'entité qui va rédiger les règlements, les modalités. Avez-vous une expérience par rapport à ce comité consultatif là? Est-ce que vous aimeriez qu'en plus de l'article nouveau, 66.1, qui établit la procédure par laquelle le commissaire va établir de façon réglementaire — mais c'est lui qui va le faire — les modalités visées par le registre, puis là il y a le délai de consultation, 45 jours, mais il décide puis il les publie, puis là, ça a force de loi, est-ce que vous aimeriez voir de façon un peu plus formelle dans la loi une interaction nécessaire avec un comité — on entendait Mme Hébert ce matin, peut-être vous — puis avoir un spectre suffisamment large pour, de façon assez directe, là, influencer dans le bon sens du terme, dans le sens noble du terme, le commissaire, lorsqu'il aura à rédiger des règles qui va vous impacter?

M. Forget (Stéphane) : Bien, en fait, oui, je pense que de pouvoir consulter les gens qui oeuvrent dans ce secteur-là, je pense que ça serait une bonne chose. Assurément, qu'il y ait un comité en place, ça serait très bien. Ceci dit, j'ai envie de vous dire aussi que, sauf tout le respect que j'ai pour le commissaire, nous, on est d'avis qu'un processus réglementaire serait bien... beaucoup mieux encadré si, comme en général, le processus réglementaire passe par le Conseil des ministres.

Il y a un processus de consultation bien établi, plus clair et qui donnerait aussi une certaine distance au commissaire au lobby par rapport à ses projets de règlement. Donc, qu'il consulte, qu'il soit à même d'élaborer les projets de règlement qu'il doit mettre en oeuvre, mais que ce soit inclus dans le processus réglementaire gouvernemental traditionnel, je pense que c'est un processus qui est bien établi, qui est connu, qui donne le temps aux parties de s'exprimer. Et, de notre point de vue, ce serait probablement une mécanique logique.

• (16 h 10) •

M. Tanguay : Tout à fait, vous avez raison de le souligner, ça a été souligné ce matin, vous y faites également écho, qu'il y a... Puis tout le monde est de bonne foi, on présume de la bonne foi, puis on en est assurés, mais un peu... L'expression est peut-être un petit peu trop lourde, on va en trouver une autre, mais juge et partie, parce que tu fais les règles et tu les appliques, tu sanctionnes. Et là il y a peut-être lieu d'avoir une réflexion là-dessus, puis vous y faites écho. Ce n'est pas anodin et, en ce sens-là, c'est... à ce stade-ci, il y a des semaines où on ne l'ouvrira pas, cette loi-là, alors c'est l'occasion de se poser ce type de question là.

Vous avez piqué ma curiosité quand vous avez parlé d'un écueil qui est né par le projet de loi n° 10. J'avais siégé à l'époque sur le projet de loi n° 10, je présidais la CSSS, où là on a rendu assujettis, donc, les acteurs du domaine de la santé. On aurait tenté, par le projet de loi n° 20, sur lequel j'ai siégé également, de corriger le tout, mais finalement l'amendement n'a pas été retenu. Ça me surprend, ça, de façon... Donc, de façon tangible, comment pourriez-vous exprimer la lourdeur que ça a créée sur le registre? Et il me semble que, si c'était si évident que ça, on a passé à côté, là, puis j'y étais, mais expliquez-moi ça parce que...

M. Forget (Stéphane) : Bien, l'amendement a été rejeté parce que ce n'était pas le projet de loi dont on parlait, l'amendement ne concordait pas avec le projet de loi sur lequel vous travailliez à ce moment-là. Mais je vais laisser ma collègue Kathy Megyery vous donner deux, trois exemples très concrets de l'impact de cette irrégularité-là, là, si je peux dire.

Mme Megyery (Kathy) : Oui, merci. Juste profiter de cette occasion pour souligner, au fond, vraiment l'impact que ça a sur des industries comme les industries de technologies de l'information, technologies médicales, l'industrie pharmaceutique, puis je vais vous donner un exemple rapide sur l'industrie pharmaceutique. Les représentants commerciaux dont le travail est d'aller dans les hôpitaux, par exemple, pour expliquer les nouvelles études cliniques, pour optimiser l'utilisation des médicaments, ces gens-là parlent à des professionnels de la santé sur des médicaments approuvés, et doivent s'enregistrer comme lobbyistes dans le cadre de ce travail. Et c'est la même chose, par exemple, un technicien qui vient faire des travaux dans un laboratoire pour arranger l'équipement, il peut venir en contact avec des professionnels de la santé. Et donc, pour les entreprises, il y en a, des compagnies pharmaceutiques, pour ne pas prendre de risques justement, elles vont enregistrer tous leurs représentants commerciaux, mais qui sont encadrés par d'autres lois et dont le travail n'est pas du tout, du tout de promouvoir ou de faire du lobbying, mais tout simplement de faire soit de la formation ou du service après-vente.

M. Tanguay : O.K. Bien, merci de nous éveiller à cette réalité-là. Également, dans le projet de loi, j'aimerais ça que vous me donniez des exemples tangibles. Lorsque l'on parle de l'article 11 du projet de loi n° 6 et de la confidentialité des renseignements, vous dites... «Lorsque la mesure vient à échéance, les renseignements...» C'est la loi qui parle, là, le projet de loi : «Lorsque la mesure vient à échéance, les renseignements visés deviennent accessibles au public.» Je vous lis : «En lisant ces lignes — page 6 — on se questionne à savoir en vertu de quelle considération la mesure de confidentialité vient à échéance selon le commissaire...» Éclairez ma lanterne, on parle de quoi, ici, de façon tangible? Avez-vous un exemple?

M. Forget (Stéphane) : Un projet de développement, par exemple, ou une organisation, une entreprise va aller expliquer son projet, va vouloir un mandat précis pour rencontrer un certain nombre de titulaires de charges publiques, va s'entendre avec le commissaire sur le fait que ça doit demeurer confidentiel pour un certain nombre de critères. À l'expiration du mandat, ça ne veut pas dire que le projet est complété, ça ne veut pas dire que le projet va se réaliser prochainement, etc., donc, il faudrait qu'on s'entende sur le fait que les renseignements en question ou les informations en question puissent être rendus publics plutôt que de demeurer confidentielles. Donc, c'est un exemple typique de cela où il pourrait avoir un appel de propositions puis qu'il y aurait différentes entreprises qui pourraient être en compétition et vont vouloir conserver la confidentialité. Ce genre de projet là, où on veut s'assurer, à terme, si les informations de nature confidentielle doivent le demeurer, bien, qu'il y ait une autre discussion avec le commissaire et qu'on ne fasse pas en sorte qu'à la fin du mandat tout, automatiquement, devienne de nature publique. Donc, c'est une préoccupation, on veut s'assurer que cela n'arrive pas.

M. Tanguay : Je comprends votre préoccupation, mais telle que rédigée, lorsqu'on dit : Le commissaire, lorsqu'il accorde une mesure de confidentialité, lorsque la mesure vient à échéance, mais lui peut juger, justement, qu'au-delà... Vous dites : Non, si le mandat est terminé, il ne peut pas... la mesure ne peut pas aller au-delà de la fin du mandat. C'est ce que vous dites?

M. Forget (Stéphane) : Ce qu'on dit c'est que quand le mandat est terminé, ça ne veut pas dire que les informations de nature confidentielle peuvent devenir publiques à ce moment-là. Ce n'est pas parce que le mandat de lobbying est terminé que les informations peuvent nécessairement être de nature publique.

M. Tanguay : ...là-dessus, mais en quoi le commissaire ne pourrait pas le considérer et vous dire... Qu'est-ce qui l'empêche, dans les faits, de vous dire : Votre mandat est terminé, mais vous avez raison, ça reste confidentiel.

M. Forget (Stéphane) : C'est ce qu'on souhaite. C'est ce que nous souhaitons.

M. Tanguay : C'est ce que vous souhaitez, mais qu'est-ce qui l'empêcherait, dans la loi? Parce que vous demandez une modification au projet de loi. Qu'est-ce qui l'empêche, dans la rédaction actuelle de l'article 50 ou du nouvel article 50? Qu'est-ce qui empêche ça?

M. Forget (Stéphane) : Nous, ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas suffisamment clair dans le projet de loi actuel pour s'assurer que ces choses-là n'arrivent pas. Donc, ce qu'on souhaite, c'est un éclaircissement à cet égard-là.

M. Tanguay : O.K. Mais ce n'était pas rédigé de façon à ce que la loi nous dise que, quand le mandat est terminé, de facto, l'information devient publique, mais on veut juste que, dans l'exercice de sa discrétion, que ça soit clairement dit que ce n'est pas parce que le... Autrement dit, ce n'est pas un facteur, là. Entre vous et moi, là, c'est un facteur lorsque vous l'inscrivez et vous ne voulez pas que ça soit public, mais ce n'est pas parce que ce n'est plus inscrit que ce n'est pas un facteur, l'importance que ça demeure confidentiel.

M. Forget (Stéphane) : Et on devrait consulter les entreprises ou les lobbyistes concernés avant d'aller de l'avant, le cas échéant.

M. Tanguay : Merci beaucoup, merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) : Merci infiniment. Je me tourne maintenant vers le député d'Hochelaga-Maisonneuve pour un autre bloc de période d'échange. Cette fois-ci, vous avez 2 min 43 s, M. le député. Merci.

M. Leduc : Merci, M. le Président. Rebonjour. On s'est vus dans une autre commission parlementaire il y a à peine quelques semaines, des habitués du parlement.

Des gens qui vont précédés tantôt, de l'association des lobbyistes, proposaient qu'avant que la nouvelle plateforme soit mise en ligne, en fait, mise en place, qu'il y ait une commission qui étudie cette plateforme-là. Est-ce que c'est quelque chose qui vous rejoint?

M. Forget (Stéphane) : Bien, nous, ce qui nous rejoint, c'est que la nouvelle plateforme soit le plus simple d'opération possible, qu'on n'alourdisse pas le processus bureaucratique ou réglementaire. Donc, que les gens puissent être consultés avant, comme je le disais précédemment. Même dans l'élaboration, moi, je nous verrais plus être consultés avant que la plateforme arrive à terme, qu'au début du processus, qu'on ait des discussions ensemble, autant les grands utilisateurs que ceux qui l'utilisent très peu fréquemment, pour que le processus d'élaboration de la nouvelle plateforme se fasse avec les utilisateurs. Je pense que c'est ça qu'on devrait avoir à l'esprit. Puis, pour avoir eu l'occasion de rencontrer le commissaire par le passé, je pense que c'est certainement dans sa volonté de fonctionner comme ça.

M. Leduc : Est-ce que, pour les gens qui utilisent la plateforme, qui ont à s'enregistrer, c'est à peu près unanime, à votre connaissance, cette idée-là de réduire les exigences ou est-ce qu'au sein même de la communauté des utilisateurs de la plateforme, il peut y avoir des divergences d'opinions, comme des gens qui voudraient mettre plus d'informations, par exemple?

M. Forget (Stéphane) : Je ferais une nuance. Les gens ne nous ont pas parlé de réduire les exigences, mais de faire en sorte qu'on simplifie le processus et qu'on ait de l'allègement sur le plan réglementaire, et non pas d'alourdir le processus. Donc, je pense que les gens sont conscients qu'il y a des exigences requises, mais on pourrait trouver une façon que ce soit plus simple et moins laborieux.

M. Leduc : Si on va peut-être un peu plus dans les détails, justement, qu'est-ce qui serait une plateforme qui serait malheureusement, à vos yeux, inefficace, puis qu'est-ce qu'on pourrait faire pour l'éviter?

M. Forget (Stéphane) : Ah! j'aurais envie de vous dire la plateforme actuelle, qui est un bel exemple. Puis il y a une série de propositions qu'on fait dans notre mémoire. C'est souvent très technique, là. Tout d'abord, de la façon qu'on va travailler, de passer d'un mandat à l'autre, d'avoir un outil de recherche pour rapidement avoir accès à notre mandat, que, quand c'est le temps de changer le nom d'un ministère parce que c'est un nouveau gouvernement, que ça puisse se faire autrement que de défiler tous les mandats et d'aller à la main faire le processus, que la relation avec les conseillers, qui seront dorénavant au commissaire, qu'il y a une interprétation similaire du mandat. Quand on passe d'un conseiller à l'autre, que ça ne change pas, qu'un dise que c'est favorable, et l'autre dise que ce n'est pas favorable. Donc, c'est ce genre d'usage de la plateforme et d'allers-retours, qu'on souhaite voir simplifier.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. M. le député de Rimouski, s'il vous plaît.

M. LeBel : Merci, M. le Président. Bonjour. Moi, ce qui m'intrigue, c'est votre paragraphe, là, sur la nature des différents OSBL. Parce que, bon, comme je viens d'une région... Vous dites : Il y a des organismes plus petits qui... puis ils sont gérés de la même façon. J'aimerais ça... Puis en plus vous faites allusion aux organismes communautaires, aux microentreprises. Vous dites qu'il faut mieux encadrer... encadrer de manière plus équitable. J'aimerais savoir un peu ce que... qu'est-ce que vous envisagez, comme...

• (16 h 20) •

M. Forget (Stéphane) : Bien, je pense qu'il faut... Puis le projet de loi n° 56, précédemment, avait ouvert sur cela, je pense qu'il faut repenser qui ou quelle organisation doit être considérée comme une organisation qui fait du lobby. Je vais parler pour chez nous, la petite chambre de commerce, qui fait à peu près... qui ne fait pas vraiment de lobby, doit-elle avoir les mêmes règles, les mêmes restrictions qu'une organisation comme la nôtre, qui fait ça au quotidien? Est-ce qu'un organisme... Parce qu'on pense que les OBNL doivent être inclus dans la loi parce qu'il y a des OBNL qui font du lobby et qui sont actuellement exclus.

À l'opposé, le risque, c'est qu'en incluant tout le monde on fasse en sorte qu'il y a des organismes d'aide directe aux citoyens — je pense à un OBNL qui fait... qui est dans la popote roulante, par exemple, ou autres — qui ne devraient pas être inclus dans... d'avoir la responsabilité de faire ce travail-là. D'autres organismes, puis je vais le dire ouvertement, certains organismes de défense environnementale, qui actuellement est exclu, alors que c'est leur travail au quotidien de faire du lobby — de façon correcte, là, je ne critique pas le travail qu'ils font — bien, pourquoi eux ne devraient pas s'inscrire au registre? Donc, c'est sûr que la ligne... Ça va prendre une réflexion. La ligne n'est pas simple à tirer, à dessiner, mais, cela dit, je pense qu'il faut ouvrir à davantage d'OBNL, mais en protégeant ceux et celles qui font du service direct à la population. Je ne sais pas si je m'exprime clairement pour vous.

M. LeBel : ...mais c'est... quand on parle, je ne sais pas... Vous avez ouvert sur les groupes d'environnement, bon, sur Greenpeace ou ces grandes...

M. Forget (Stéphane) : Par exemple.

M. LeBel : Bon. Mais chez nous il y a des petits groupes, là, comme les groupes de bassins versants ou des... Ce que vous dites : On devrait être capable de différencier ces groupes-là.

M. Forget (Stéphane) : Oui, mais c'est pour ça qu'on vous a parlé d'OBNL qui donnent des services directs à la population.

M. LeBel : C'est quand même des petits groupes en région qui défendent... qui vont défendre des droits, mais, dans le fond, c'est un peu ça que vous dites. C'est la même chose pour... Prenez le cas des chambres de commerce, les plus petites chambres de commerce, c'est un peu la même chose par rapport aux groupes communautaires, là.

M. Forget (Stéphane) : Il y a, de toute évidence, une réflexion à se faire à cet égard-là, parce qu'on pense qu'actuellement c'est beaucoup trop limité, mais, en même temps, lorsqu'on ouvre, il faut faire attention pour ne pas pénaliser des gens qui... Les conséquences seraient importantes d'être obligé d'être assujetti à cela, là, au même titre que ce que je vous exprimais tantôt, actuellement, dans le réseau de la santé. Alors, il y a ça à faire comme éclairage.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs dames. Deux minutes, ça passe très vite, donc deux petites questions. Et je pense que vous n'êtes pas le seul, les organismes qui sont venus ce matin ont une certaine préoccupation sur la centralisation des pouvoirs au niveau du commissaire. Même s'il est très bon puis même s'il y a à peu près toutes les qualités pour un commissaire, là, il n'en demeure pas moins qu'on a des exemples très récents que la centralisation des pouvoirs amène une moindre reddition de comptes puis amène des fois certaines décisions. Et je suis content que vous nous l'ayez partagé.

D'entrée de jeu, ce matin, la ministre a parlé aussi d'une deuxième étape de refonte d'une vieille loi de 2002. Sauf que, dans l'entrée en vigueur du registre, on parle de 30 mois. Moi, je trouve ça trop long. Sûrement que, dans votre réflexion... On nous a parlé de 18, on nous a parlé de 30. Est-ce qu'on entreprend déjà la seconde phase ou on attend que le registre soit bien installé avant de le moderniser?

M. Forget (Stéphane) : Bien, nous, on pense qu'on pourrait... de notre point de vue, on pourrait enclencher la réflexion sur la deuxième phase, ne pas attendre le 30 mois parce que, dans le fond, il y a des choses à l'intérieur de ça qui sont distinctes, là. Le processus, le registre, c'est une chose, puis je pense que c'est une bonne nouvelle qu'on améliore ça rapidement. En même temps, on pourrait entamer la réflexion parce qu'il y a beaucoup d'irritants qui mériteraient d'être considérés plus tôt que tard.

M. Ouellette : O.K. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je vous remercie infiniment de votre contribution, c'est très apprécié. Avant de suspendre les travaux pour quelques instants, on a commencé avec un petit retard. Alors, j'aurais besoin de votre consentement pour poursuivre les travaux jusqu'à 18 heures. Ça va? Merci beaucoup.

Donc, on suspend les travaux quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 24)

(Reprise à 16 h 27)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Merci.

Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Alliance des cabinets de relations publiques du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis après nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à débuter votre exposé. Encore une fois, bienvenue.

Alliance des cabinets de relations publiques du Québec (ACRPQ)

Mme Boudreau (Vicky) : Bonjour. M. le Président, les députés, Mme la ministre, merci de nous recevoir.

Je me présente, Vicky Boudreau, je suis chef de la direction et cofondatrice de Bicom, une agence pancanadienne de relations publiques, et également j'assure les fonctions de présidente de l'Alliance des cabinets de relations publiques depuis juillet dernier. Je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue Alain Madgin, de Citoyen. Alain représente l'ACRPQ au sein du Comité consultatif sur des règles d'encadrement du lobbyisme, également.

Je vais donc débuter avec une courte présentation de l'alliance. Fondée en 1998, l'Alliance des cabinets de relations publiques du Québec recoupe les plus importants cabinets de relations publiques du Québec. Elle a pour mission d'assurer la qualité des services, le respect des normes éthiques, le développement et le rayonnement de la profession. Je suis contente de compter... que nous puissions compter aujourd'hui 16 membres autour de notre table, qui représentent les plus importants cabinets de la province. Nos membres arborent le sigle de qualité A plus, décerné après un examen rigoureux et indépendant de leurs pratiques d'affaires. L'alliance exerce également un leadership dans la reconnaissance et l'observance des principes d'intégrité et de responsabilité qui encadrent les pratiques commerciales et professionnelles des entreprises offrant des services en relations publiques. C'est à ce titre que l'Alliance des cabinets de relations publiques du Québec représente les lobbyistes-conseils oeuvrant dans la plupart des grands cabinets de relations publiques de la province. Nous vous remercions d'avoir pris connaissance de notre mémoire. Permettez-moi de vous en résumer les principaux points.

Premièrement, nous tenons à souligner que l'alliance des cabinets de relations publiques du Québec est favorable au projet de loi n° 6. Les membres de l'alliance font la promotion et appliquent des standards de la plus haute qualité au sein de leur entreprise, tant dans leurs pratiques professionnelles que commerciales, et nos membres s'engagent à donner des services professionnels et exécuter les mandats qui leur sont confiés dans le respect de la loi, de l'exactitude des faits, de la vérité et de l'intégrité, et ce, tant pour le bénéfice de leurs clients que dans l'intérêt du bien commun.

• (16 h 30) •

Pour l'ACRPQ, cette volonté dans la recherche de la transparence doit également signifier une simplification des processus qui rendent possible cette transparence. Nous sommes donc d'avis que les institutions doivent édicter des règles qui contribuent au maintien et à l'amélioration de la transparence pour la population. À titre d'exemple, inscrire un mandat dans le Registre des lobbyistes devrait être une activité conviviale et simple, comme on l'a mentionné plusieurs fois plus tôt aujourd'hui, plutôt que de générer une lourdeur pouvant constituer un frein ou une barrière à cette transparence recherchée.

En ce qui a trait au transfert de la responsabilité du registre, nous saluons ce transfert du registre et, à cet égard, nous formulons le souhait que ce transfert permette une meilleure compréhension de la réalité quotidienne que vivent les personnes exerçant des activités de lobbyisme. Par exemple, au cours des derniers mois, nous avons vécu certaines situations où les délais étaient extrêmement longs. Ce genre de situation n'est pas sans générer des inquiétudes chez les lobbyistes, qui agissent en toute bonne foi, de se conformer, en fait, aux règles en vigueur.

Nous sommes également favorables à la standardisation d'un délai de 10 jours pour apporter les corrections requises lors d'une déclaration. D'ailleurs, il est à espérer que les nouvelles inscriptions ou modifications de mandat seront beaucoup plus simples et pratiques pour les lobbyistes. À l'heure actuelle, malheureusement, bon nombre, voire la majorité des inscriptions qui sont faites sont refusées lors de la première inscription. Ainsi, nous formulons la recommandation que les nouvelles modalités soient simplifiées en ne compromettant jamais les principes de transparence qui guident nos actions.

En ce qui a trait à la confidentialité de certains règlements... de certains renseignements, pardon, à propos de l'article n° 10, notre compréhension est à l'effet que désormais une prolongation ne pourra plus être renouvelée afin de protéger la confidentialité de certains renseignements. Nous comprenons l'esprit de ces modifications et nous partageons l'objectif du gouvernement de favoriser une des plus grandes transparences des mandats de lobbyisme. Toutefois, dans certains cas exceptionnels, le renouvellement d'une prolongation pourrait s'avérer nécessaire afin de ne pas compromettre la réalisation de certains mandats et pour assurer la confiance des clients envers le registre.

Quant aux délais de prescription, pour l'ACRPQ, les délais de trois ans et de sept ans apparaissent raisonnables. En effet, il s'agit d'une période laissant suffisamment de temps pour documenter les dossiers tout en invitant le poursuivant à agir avec célérité. Toutefois, ce moment permet également la protection de la réputation personnelle dans les cas où aucun acte répréhensible n'aurait été posé.

Quant aux dispositions transitoires et finales, l'article 25 du projet de loi prévoit que, dans les 60 jours suivant la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, le lobbyiste-conseil ou, dans le cas d'un lobbyiste d'entreprise ou d'un lobbyiste d'organisation, le plus haut dirigeant de l'entreprise ou du groupement doit s'assurer que les renseignements contenus dans ses déclarations et ses avis apparaissant au registre sont exacts, complets et à jour. Il doit, le cas échéant, les compléter ou les modifier dans le même délai.

Nous souhaiterions clarifier l'intention du législateur à l'égard de cet aspect prévu au projet de loi. En effet, nous serions ravis, quoique très étonnés, que le nouveau registre soit entièrement fonctionnel en seulement 60 jours suivant l'entrée en vigueur de la loi. Ainsi, il apparaît que, pour les lobbyistes, cela représentera une charge de travail supplémentaire que de devoir réviser l'ensemble de leurs inscriptions dans l'ancien registre et probablement de devoir refaire le même exercice lors de la mise en service du nouveau registre. D'ailleurs, un délai de 60 jours semble très court pour pouvoir procéder à cette obligation supplémentaire.

En conclusion, l'ACRPQ souscrit et salue les grands principes contenus dans le projet de loi n° 6. Toutefois, il convient de rappeler que le projet de loi précédemment déposé en matière de lobbyisme était beaucoup plus large et s'apparentait davantage à une véritable réforme. Il convient d'admettre qu'aujourd'hui cette loi mérite d'être modernisée et surtout simplifiée. En ce sens, nous encourageons le gouvernement à poursuivre dans cette voie. D'ailleurs, une récente entrevue du Commissaire au lobbyisme semblait encourageante : possibilité de mise à jour du registre en temps réel, possibilité également d'imposer des amendes, révision des activités d'influence devant être déclarées, autant d'éléments qu'il faudrait bien évidemment analyser en profondeur, mais qui semblent être porteurs d'espoir pour les lobbyistes.

En terminant, Me Routhier mentionnait, notamment lors d'une entrevue à Radio-Canada en décembre, ça devrait être aussi simple d'inscrire un mandat au registre que de payer son stationnement avec une application mobile. Le Commissaire au lobbyisme peut compter sur l'appui de l'ACRPQ dans cette démarche. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme Boudreau. Je me tourne maintenant vers Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : Oui, merci. Merci de votre présence. Merci de votre contribution à notre réflexion.

Je vais peut-être vous poser une petite question d'entrée de jeu puis je vous demande à l'avance de pardonner peut-être mon incompréhension. Et ça ne se veut pas quelque chose d'insultant, mais peut-être m'expliquer un peu, de façon un peu plus précise, la différence entre l'alliance et l'association des lobbyistes, l'Association québécoise des lobbyistes et l'alliance, que vous représentez, des cabinets de relations publiques. Est-ce que je comprends qu'à l'intérieur de vos membres, il y a une portion qui font du lobbyisme-conseil, mais ce n'est pas nécessairement tous vos membres qui sont visés par la loi?

Mme Boudreau (Vicky) : Non. En fait, l'Alliance des cabinets de relations publiques représente les agences de relations publiques qui évoluent dans différents secteurs. Certains de nos membres concentrent leurs activités dans ce qui a trait plus au marketing d'influence, à l'événementiel, aux relations publiques avec des produits de consommation par exemple, alors que certains de nos membres font des pratiques de lobbyisme. Certains de nos membres sont également membres de l'autre association, donc l'un n'exclut pas l'autre.

Mme LeBel : O.K. Donc, la nuance, c'est que vous ne représentez pas exclusivement des gens ou ne regroupez pas exclusivement des membres qui pratiquent des activités qui pourraient être visées par la loi. C'est exact?

Mme Boudreau (Vicky) : Exactement.

Mme LeBel : O.K. Parfait. Merci. Quelques petites remarques ou questions. Naturellement, vous êtes favorable, naturellement, au délai de... bien, vous l'avez dit, vous êtes favorable au délai de 10 jours qui est prévu à l'article 5 du projet de loi, le délai de 10 jours qui est le délai pour apporter les corrections requises à une déclaration lorsque le commissaire signale une irrégularité, je vais le dire de cette façon-là.

Est-ce que votre accord pour le délai de 10 jours ou votre acceptation de ce délai-là est lié à la question de simplifier, justement, le registre par contre?

Mme Boudreau (Vicky) : ...délai-là est acceptable dans la mesure où le processus est simplifié, en effet.

Mme LeBel : O.K. Donc, j'ai une bonne compréhension de penser que vous liez effectivement ce délai de 10 jours là à la notion de simplification du processus d'inscription au registre, parce que, dans l'état actuel des choses, est-ce que je comprends que le délai de 10 jours vous apparaîtrait peut-être un peu court? Je vois votre collègue qui fait signe de la tête. Ce n'est pas fini, non, non. C'est fini.

Mme Boudreau (Vicky) : Je vais laisser mon collègue...

M. Madgin (Alain) : Si j'étais cynique, ce que je ne suis pas, je vous dirais que, si tout le monde au gouvernement nous répond en dedans de 10 jours, ça va nous faire plaisir aussi de répondre en dedans 10 jours. Mais ceci étant dit, il faut absolument qu'on trouve une façon de simplifier et de rendre la chose tout à fait facile d'utilisation, parce que dans notre quotidien, quand on a plusieurs inscriptions, on s'occupe de ça. On a cette préoccupation-là, mais je vous avoue que, depuis un certain temps, même moi, qui suis inscrit depuis le début, ça fait 28 ans que je fais ce métier-là, j'ai comme une crainte d'agir, et c'est très mauvais.

Il faut absolument que le système soit plus convivial, plus facile d'utilisation. Puis je ne peux pas croire qu'on va procéder à ces améliorations-là et qu'on n'aura pas la chance de pouvoir faire des choses beaucoup plus simplement. Puis, dans ce cadre-là, on est d'accord avec le 10 jours, si et seulement si la facilité est au rendez-vous.

Mme LeBel : Donc, ma compréhension du fait que vous liez ça, justement, à la simplification du registre est exacte à ce moment-là.

M. Madgin (Alain) : Très exacte.

Mme LeBel : Parfait. Vous parlez, bon, je vais passer... je vais en profiter pour parler peut-être du processus de simplification. Peut-être me donner un exemple ou deux de ce que vous considérez comme étant très lourd ou difficile dans la plateforme actuelle.

M. Madgin (Alain) : Bien, ma collègue, elle ne fait pas ça, ce métier-là, de son quotidien. Je vais vous dire que, dans 100 % des cas, moi, je le dis très simplement, mes demandes sont refusées.

Je vais vous donner d'autres exemples. Parfois, on crée des coalitions pour parler d'un sujet, il y a un premier groupe qui va s'inscrire, puis qu'on va utiliser le même modèle pour inscrire d'autres groupes qui participent à la campagne, mais dans... l'approbation n'est pas la même. Alors, il faut simplifier non seulement le processus, mais également donner des lignes de conduite très claires sur quelles sont les normes qui devraient être appliquées au niveau de l'acceptation du libellé de nos inscriptions. Si on fait la même chose... Moi, j'ai des inscriptions différentes entre celles de mes clients et les miennes. Alors, ça n'a peu ou pas de logique.

Dans la façon également de rendre ça plus convivial, bien, on sait que la plateforme elle-même n'a pas été conçue, le commissaire nous l'a expliqué très clairement. Alors, dans la prochaine étape, on vit d'espoir, on espère que tout ça va être beaucoup plus simple d'utilisation et même de modification, parce que je pense qu'actuellement, techniquement, c'est très, très difficile de faire avancer les choses, là, avec la plateforme actuelle.

Mme Boudreau (Vicky) : Et, si je peux me permettre, il y a tellement d'avancées avec tout le UX, la façon de... l'expérience de l'utilisateur des sites Internet aujourd'hui que c'est un exercice qui peut facilement... tout est relatif, mais qui peut être investigué avec toute l'information que vous êtes en mesure de collecter avec les utilisateurs comme M. Madgin ici.

Mme LeBel : J'aurai probablement un autre petit point que je vais vouloir aborder avec vous, mais mon collègue le député de Saint-Jean aurait peut-être une précision à faire, M. le juge, je vais lui passer...

M. Lemieux : Avec votre permission, M. le Président. Merci beaucoup.

Une voix : ...

• (16 h 40) •

M. Lemieux : Oui, oui, oui. Merci beaucoup. Oui, justement, parlons-en, de la plateforme parce que j'avais noté au passage la citation de Me Routhier au sujet de... Inscrire un mandat, aussi simple que payer avec une application son stationnement. J'avais noté aussi votre réaction à l'époque, ça disait : «Le Commissaire au lobbyisme peut compter sur l'appui fort de l'ACRPQ dans cette démarche». Je voulais qu'on en parle de l'application éventuelle, je vous la souhaite, parce qu'on a entendu ce matin des histoires d'horreur, puis on n'a pas fini, j'imagine, par rapport à la plateforme actuelle.

Alors, au lieu de me raconter des histoires d'horreur, parlez-moi de beauté. De quoi vous avez besoin? Qu'est-ce qu'il fait qu'elle ait, cette plateforme-là, pour répondre à vos attentes et puis au bonheur de tout le monde, là?

M. Madgin (Alain) : Bien, c'est un peu... On pourrait... Tout ça peut être très... C'est presque de... Avec, maintenant, les nouveautés, l'intelligence artificielle, le choix des mots, quand on utilise... Nous, on est sur la plateforme Google au bureau. Google me permet, me propose des libellés quand j'écris un courriel, me propose de transférer automatiquement une adresse courriel, quand je peux le faire... quand j'écris à quelqu'un puis de l'inscrire. Il y a toutes sortes de nouveautés techniques qui nous permettent maintenant d'avoir une utilisation beaucoup plus simple.

Une chose est sûre, pour l'utiliser sur une base régulière, n'importe quoi d'autre va être meilleur. Mais ceci étant dit, ce n'est pas de la faute du commissaire actuel, puis on se remet dans le contexte, là, on était en gestion de crise. Là, le gouvernement avait pris des décisions pour régler des problèmes à ce moment-là. J'y étais, j'étais un observateur intéressé et j'étais le premier à reconnaître que c'était une très bonne chose parce que ça légitimait notre travail de toute façon.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député d'Ungava, s'il vous plaît.

M. Lamothe : Bonjour. Vous avez mentionné tantôt qu'après 28 années, vous avez une crainte d'agir. Vous voulez dire quoi?

M. Madgin (Alain) : Oui, parce que c'est d'une complexité... Tu sais, moi... On fait des blagues entre lobbyistes, m'entendre, c'est une avocate qui est au registraire. C'est parce que, là, on est rendus là.

Là, le système, avec l'application également qu'on a parlé amplement, là, de tous les gens qui ne devraient pas être inscrits au registre, qui sont des représentants pharmaceutiques ou autres dans les hôpitaux, tout ça embourbe le système puis ça fait en sorte qu'il y a des délais importants. Mais, en même temps, je dis ça, on...

Moi, là, j'ai vécu une expérience. Cet automne, j'ai fait une inscription, elle m'a été refusée. La deuxième fois, elle m'a été refusée. Moi, là, je veux m'inscrire, c'est mon métier, tout le monde sait que je fais ça. J'arrive ici, les gens... certains d'entre vous me connaissent, d'autres vont me connaître. Je fais ça professionnellement et tout est en oeuvre pour ne pas que je m'inscrive ou que ça soit compliqué, alors que ça devrait être l'inverse.

Puis nos prédécesseurs ici l'ont bien exprimé, imaginez les gens qui font ça à l'occasion, aucun intérêt. Moi, j'ai commencé, il fallait aller chez un notaire, aller chercher une clé pour se faire reconnaître pour notre signature électronique, puis tout ça. C'était d'une complexité que seul le gouvernement est capable de faire. Mais, la prochaine étape, il faut absolument qu'on trouve un moyen que même les gens qui ne font pas ça de leur métier, mais qui doivent interagir avec le gouvernement, aient la simplicité et la facilité, et que tout le monde dise : Voyons, inscris-toi, c'est facile. Là, actuellement, quand les gens me posent la question, ma réponse n'est pas tout à fait ça.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Oui. Sur une autre question, la question de la confidentialité des renseignements, vous dites, et vous avez dit, et vous écrivez dans votre mémoire, en ce qui concerne l'article 10, celui qui vient modifier l'article 49 de la loi actuelle : «...notre compréhension est à l'effet que désormais, une prolongation ne pourra plus être renouvelée afin de protéger la confidentialité de certains renseignements.»

Qu'est-ce qui vous fait croire à ça dans la modification? Parce que ma compréhension, c'est qu'on n'abolit pas la ligne de l'article 49 qui dit qu'une prolongation peut, compte tenu des adaptations nécessaires, être renouvelée conformément aux dispositions du présent article. Est-ce que vous avez une compréhension différente de l'article en question?

M. Madgin (Alain) : Si on s'est trompé, tant mieux. Il faut juste être bien clair dans tout ça, là.

Mme LeBel : Mais je voulais m'assurer qu'on avait une compréhension similaire. Donc, de toute façon, dans le fond, vous nous signalez cette crainte-là. Si elle n'est pas exacte, tant mieux.

M. Madgin (Alain) : Tant mieux.

Mme LeBel : Parfait. Vous parlez que vous comprenez l'esprit de cette modification, que vous partagez l'objectif du gouvernement. Dans l'état actuel des choses, là... parce que, moi, ma compréhension, c'est qu'on ne change pas le régime actuel au niveau de la confidentialité. On transfère cette responsabilité-là au commissaire, naturellement, compte tenu que c'est lui qui aura cette responsabilité-là. Est-ce que, dans l'état actuel des choses, vous avez vécu des problèmes par rapport à la notion de confidentialité, dans l'état de la loi actuelle, là?

M. Madgin (Alain) : Moi, en... Ça fait maintenant, quoi, 17 ans que la loi existe. Une fois, j'ai demandé un avis de confidentialité. Je ne pense pas que ce soit une pratique très courante, là, parce que c'est contraire à l'esprit de la loi. Mais dans ce cas-là, moi, c'était un dossier... puis qui s'est terminé, puis que, si l'interdiction était levée, ça n'avait pas d'implication. Mais je pense que nos prédécesseurs ici, aujourd'hui, devant vous sont venus expliquer que dans certains cas... Puis ça peut peut-être m'arriver, là, dans le mois prochain, puis que ça ne m'est pas arrivé encore, puis qu'on sera très heureux d'avoir une certaine forme de confidentialité, surtout à cause de la concurrence, surtout les entreprises publiques qu'on représente. C'est «publiques» dans le sens listées, cotées en bourse, et tout ça, là.

Il y a beaucoup, beaucoup de... Il y a un caractère hautement confidentiel, parfois, des données que nous possédons. Tu sais, nous autres, on est comme des conseillers politiques privés, puis les gens nous confient des informations extrêmement sensibles et qui pourraient avoir une incidence importante sur le cours de leurs affaires.

Mme LeBel : Si on parle maintenant des dispositions transitoires, la disposition de 60 jours à laquelle vous faisiez référence, vous aviez certaines craintes en disant qu'un délai de 60 jours semblait très court, craintes ou plutôt espoirs. Si on pouvait mettre le registre en place en 60 jours, je comprends, mais... et vous demandiez certaines clarifications.

Si je pars de la prémisse suivante... Présentement, dans le projet de loi, ce qui est mentionné, c'est que le Commissaire au lobbyisme, avec le conservateur, auront un délai de 30 mois pour procéder à la mise en place du nouveau registre et au transfert des données. Le projet de loi entrera en vigueur à la fin de ce délai-là de 30 mois, et là c'est là que le 60 jours embarque, et le 60 jours, dans l'esprit du projet de loi, est là pour permettre justement aux lobbyistes qui sont enregistrés de vérifier la conformité des données qui ont été transférées.

Qu'est-ce que vous pensez, à ce moment-là, si je vous l'explique de cette façon-là? Donc, 30 mois pour mettre en place le nouveau registre, la nouvelle plateforme et faire le transfert, et là mise en vigueur, et 60 jours, mais le 60 jours étant pour vérifier que les données qui ont été transférées du registre actuel à la nouvelle plateforme sont toujours d'actualité, donc le mandat, le fait que le mandat est actif et que les informations sont les bonnes.

À ce moment-là, est-ce que le délai de 60 jours vous paraît plus approprié?

M. Madgin (Alain) : Ce qu'on a voulu exprimer, puis ce n'est peut-être pas aussi clair que ça, c'est que notre crainte, c'est qu'à la mise en oeuvre de la nouvelle loi la... Parfois, tout le système n'est pas parfaitement rodé. Et là c'est le syndrome Phénix, hein? On n'arrête pas quelque chose tant que l'autre n'est pas en marche et qu'il y ait eu nombreuses inscriptions. Et il y a deux, trois dossiers au gouvernement, en informatique, qu'on a lus dans les journaux, bon, on ne croit pas tout ce qui est marqué dans les journaux, mais qui nous montrent que, parfois, il y a eu des problèmes de mise en oeuvre et des choses comme ça.

Et, ceci étant dit, on pense que nous, le 60 jours post 30 mois... Bien, le vrai post 30 mois, peut-être que la loi devrait être même... Je pense qu'on peut faire ça en dedans de 30 mois, là, personnellement. Puis peut-être que c'est 24 mois plus six mois puis que, là, on donne du temps aux gens pour se mettre à jour et vérifier les données.

Là où le bât blesse, ce n'est pas nous autres qui est déjà inscrit. On est déjà inscrits. Alors, donnez-nous du temps pour faire ce travail-là, parce que, dans la vraie vie, là, on fait des inscriptions, mais on fait aussi du travail, puis on a beaucoup de gens à servir, et on en est bien heureux. Mais 60 jours, 90 jours... Je pense que tout l'esprit de loi, de s'assurer de la conformité, si on donne un délai un peu plus grand, on n'enlèvera pas aucune prémisse à la loi qui dit que ceux qui s'inscrivent... La transparence, c'est pour ceux qui font ce métier-là et qui s'inscrivent. Le problème, c'est ceux qui ne s'inscrivent pas. Alors là, on ne règle pas le problème en 60 jours ou 90 jours, mais ça, c'est un autre débat.

• (16 h 50) •

Mme LeBel : Mais juste pour être sûre de bien vous comprendre... Je pense qu'il me reste un peu de temps. Pour être sûre de bien vous comprendre, le délai, que ce soit 60 jours, comme vous l'avez dit, ou 90 jours, de mon point de vue à moi, c'est un délai de flottement, hein? C'est un délai où la nouvelle plateforme ne pourra pas être complètement en vigueur, parce qu'on ne pourra se fier... tant que la conformité n'aura pas été vérifiée, des renseignements, on ne pourra pas se fier à ce qui est inscrit dans l'optique de contraventions, ou de corrections, ou, en tout cas, de sanctions parce que...

Donc, qu'est-ce que vous suggérez pour pallier à ce problème-là? Parce que, si on donne six mois, ça veut dire que c'est six mois où on ne peut pas se fier à la nouvelle plateforme, là, parce qu'on n'aura pas fait la vérification de la conformité des éléments qui ont été transférés d'une plateforme à l'autre. Donc, qu'est-ce que vous suggérez peut-être pour pallier à cette...

M. Madgin (Alain) : Alors, vous, vous êtes sûre et certaine que le transfert ne sera pas parfaitement fait entre les deux plateformes. Alors, ça, c'est la prémisse que vous nous donnez aujourd'hui, là. Alors, s'il faut se réinscrire, on se réinscrira, mais je ne peux pas croire que, dans la planification de tout ça, on ne réussira pas à transférer des données informatiques d'une base de données à une autre. Et, si c'est un problème, il va falloir... il faut nous donner du temps pour faire ces révisions-là, parce que je ne pense pas que le nombre d'employés chez le commissaire va être bien différent au registraire actuellement, puis on va avoir un certain délai, je pense, à... Parce que, là, vous allez avoir tout le monde en même temps qui doit vérifier chacune de ses inscriptions. Moi, j'en ai 15 puis je vais perdre le sommeil de savoir que j'en ai juste 15 à vérifier. Il y en a qui en ont 78, puis 50, puis 60.

Alors, je pense qu'on est un peu inquiets pour ces affaires-là. On n'est pas inquiets sur la transparence, on est juste un peu inquiets sur les transferts informatiques puis ces choses-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, merci pour votre temps, de venir nous apporter votre éclairage à nos débats.

J'aimerais ça vous inviter à continuer sur votre lancée. C'est quoi, les informations? Parce que moi, les quelques fois où je l'ai consulté, j'avais le nom du lobbyiste, j'avais les personnes visées puis j'avais un paragraphe qui expliquait le mandat. L'inscription à faire, là, il m'en manque-tu un bout à part ces trois affaires-là?

M. Madgin (Alain) : Il y a cinq étapes. À chacune des étapes... Tu sais, la base du système informatique date de 2000 ou 1998, là. Alors, c'est comme si on était sur Lotus Notes encore aujourd'hui à essayer de rentrer des données binaires, là. Tu sais, le système fait en sorte qu'on doit passer à travers chacune des étapes, on ne peut pas revenir en arrière. Si on se trompe, il y a un enjeu au niveau du système. Moi, il m'est arrivé que le système «freeze», là...

Une voix : Gèle.

M. Madgin (Alain) : ...gèle devant nous, et tout ça. Il faut soumettre, même au niveau... Pour quelqu'un qui ne s'inscrit pas régulièrement, il y a cinq étapes à la fin. On peut le soumettre, on peut le soumettre... on peut l'imprimer, l'envoyer par fax, on peut le soumettre temporairement pour approbation. Là, je ne me souviens pas des deux autres, là.

C'est fait comme si on était en présence de gens qui ne voulaient pas s'inscrire. Il n'y a rien de convivial dans le système. Mais ça, le système, c'est une chose. Moi, je peux vous... Si le système me rend la tâche plus facile, je vais vous dire quelle chemise je vais porter à mon prochain meeting, si vous voulez. Moi, tout ce que vous voulez savoir sur moi, je vais vous le dire, mais rendez-moi la tâche facile.

M. Tanguay : Je comprends. Est-ce que vous inscrivez également... Je pense qu'il y a un tel registre au niveau fédéral, je crois. Est-ce que vous faites... Vous n'êtes pas...

M. Madgin (Alain) : Oui, mais je suis déjà assez occupé avec vous.

M. Tanguay : Bon, c'est bon, puis on va vous garder pour nous autres. Au cours, donc, des derniers mois, nous avons vécu certaines situations où les délais étaient extrêmement longs. Donc, selon votre témoignage, c'est davantage dû aux mécanismes, à l'informatique, plutôt qu'au manque de ressources personnelles, clarté des indications, tout ça.

M. Madgin (Alain) : Bien, clarté des... L'un des enjeux, je l'ai soulevé tout à l'heure, c'est l'interprétation que chacun des individus, qui doit approuver ou non une inscription, donne au langage très sectaire, parce que c'est... Nous autres, là, tu sais, on parle dans notre secteur, on se comprend entre nous, on sait ce qu'on a à faire. Puis là vous demandez probablement à un employé qui ne sait pas trop, trop ce qu'on fait. Je suis certain qu'il y a de la formation à l'interne puis ces choses-là, mais c'est d'une logique implacable qu'on transfère ça aux gens du commissaire.

Les gens, nos commissaires, c'est ça, leur travail, c'est de gérer la transparence des lobbyistes. Alors là, on devrait avoir beaucoup plus de chances d'être mieux compris et interprétés dans la façon d'approuver ou non des libellés. Puis croyez-moi, là, je ne pense pas qu'on essaie, nous, comme lobbyistes-conseils, de cacher des choses. On dit ce qu'on a à faire. Souvent, on nous demande, dans l'interprétation à l'inscription, de nous dire quelle va être la résultante. Ma réponse est toujours la même : Si je le savais, les gens ne m'engageraient pas. Je ne le sais pas, ce que ça va résulter. Laissez-moi la chance de présenter des dossiers, d'expliquer, de demander au gouvernement de légiférer ou de non légiférer, de réglementer ou de ne pas réglementer sur un sujet en particulier, puis je vais vous donner la résultante. Alors là, on est un peu dans un «catch-22», là.

M. Tanguay : Est-ce que si, comme nous le propose la ministre par le projet de loi n° 6, on passe donc d'un système déficient à la Ferrari, ça, ça ne changera pas, les questions d'interprétation du contenu?

M. Madgin (Alain) : Moi, je vous le dis, là, je pense que tout ça va changer parce que ça va être à l'intérieur du bureau du commissaire. Le bureau du commissaire, ça fonctionne. C'est de s'assurer que tous les moyens sont mis en place pour que les gens s'inscrivent. Alors, il va y avoir... puis là je ne connais pas... puis à la décharge du registraire, là, je ne sais pas comment ça marche actuellement au niveau de la formation, mais lui, en plus, il est registraire de toutes sortes d'autres affaires qui ne sont pas dans mon secteur.

M. Tanguay : ...Mme Jean, elle nous écoute.

M. Madgin (Alain) : Oui. Je la remercie, elle m'a sauvé la vie à plusieurs reprises.

M. Tanguay : Bon, alors, on la salue puis on la remercie.

M. Madgin (Alain) : On la remercie.

M. Tanguay : Mais je suis content, donc, de voir que, oui, on peut avoir la Ferrari, mais, oui, les gens vont parler le même langage, puis il y aura une certaine standardisation. Parce qu'effectivement, si vous représentez, puis c'est un peu le but de votre travail, un domaine moindrement complexe qu'on a besoin d'avoir un intermédiaire qui est le lobbyiste pour aussi vulgariser ça, bien, il faut s'entendre sur les termes. C'est un peu votre expertise également.

Puis je suis content de savoir également qu'on pourra avoir, au sein, le cas échéant, du Commissaire au lobbyisme, cette expertise-là de dire : O.K., on va parler le même langage puis on va vous faciliter la tâche, en quelque sorte. Puis il faut... évidemment, pour que le registre soit digne de ce nom et fasse ce pour quoi on le met sur pied, il faut qu'il y ait minimalement de clarté, puis de correspondance des termes, puis de... qu'est-ce qu'on veut communiquer.

On disait, puis on n'a pas besoin de s'éterniser là-dessus, mais, à l'heure actuelle, autre commentaire, bon nombre, voire la majorité des inscriptions qui sont faites sont refusées lors de la première inscription. Donc, ça participe de ça également, de faire en sorte que... Vous disiez : Je ne peux pas reculer, je ne peux pas... Alors, à un moment donné, vous êtes pris, là, dans ce système-là.

M. Madgin (Alain) : Oui, bien, ça, c'est deux choses par contre. Quand l'inscription est systématiquement refusée, je pense qu'il y a place à interprétation, puis tout ça. Mais moi, quand j'indique à des gens qui sont nouveaux dans le secteur : Là, il faut que tu t'inscrives parce que tu vas avoir des interactions avec des détenteurs de charges publiques, et je dois leur dire qu'ils ont de grandes chances et de ne pas s'en faire si leur première inscription est refusée, parce que les gens... c'est plate de voir que tu as fait la démarche, tu as inscrit la même chose que ce que ton lobbyiste-conseil t'a recommandé d'écrire et qui est... toi, tu es refusé puis que l'autre est accepté. Ça, c'est un peu tannant.

M. Tanguay : Et, vous, c'est votre quotidien. Puis je reprends la balle au bond, quand vous avez parlé de l'article 28, le 30 mois, autrement dit, que tout ça va être mis en place... 30 mois après... C'est deux ans et demi après l'adoption de la loi. Deux ans et demi, ça peut être long longtemps. Donc, vous, vous invitiez à réduire le plus possible ce...

M. Madgin (Alain) : Qui suis-je, moi, pour dire aux gens d'aller plus vite?

M. Tanguay : Bien, vous êtes un usager... Je vous en prie.

M. Madgin (Alain) : Non, mais ça, écoutez, si ça prend 30 mois, puis on a le meilleur système au monde parce qu'on veut avoir la meilleure loi au monde, qu'on a le meilleur système au monde, j'en suis, je vous suis, et je suis très heureux, et on va se réinscrire aux 30 mois. Mais, je veux dire, laisser perdurer entre deux systèmes, ce n'est jamais bon.

M. Tanguay : Vous parliez, quant au délai de prescription, vous... donc, vous en êtes satisfaits. Le délai de trois ans et de sept ans apparaissent raisonnables. Autrement dit, de la connaissance d'une potentielle infraction, il y a un délai de trois ans, mais, si d'aventure, la connaissance de cette infraction, ladite infraction aurait été commise au-delà de sept ans, il y a prescription. Donc, ça, vous ne trouvez pas ça trop long? Certains nous ont dit, entre autres ce matin, que ce n'est pas un dossier, par nature, du ministère du Revenu, ce n'est pas un page Excel, ce n'est pas des déclarations dont on a la mathématique des choses. C'est : Te rappelles-tu, il y a quatre ans, d'avoir croisé untel et te rappelles-tu de lui avoir dit ça ou ça?

Vous, est-ce que vous avez une préoccupation de dire : Bien, quand même, trois ans, sept ans, on fait... on allonge de beaucoup le délai de prescription. Si d'aventure, on vient me questionner sur quelque chose qui s'est passé il y a cinq ans... Y voyez-vous, vous, un écueil potentiel, de dire : Bien là, la preuve... je vais avoir de la misère à me défendre parce que je n'ai pas tout conservé ça, là. Est-ce que vous avez une préoccupation là-dessus?

• (17 heures) •

M. Madgin (Alain) : Oui, bien sûr, parce que nous, la seule chose qu'on a dans notre carrière, c'est notre réputation. Alors, le danger de ça, c'est de voir notre réputation affectée par une décision qui pourrait être éventuellement cassée ou non prise, et tout ça. On en a, des exemples où, administrativement parlant, il y a des gens... Le commissaire a déjà émis des communiqués de presse qui annonçaient que quelqu'un était en infraction d'un délai. Quand quelqu'un est déjà inscrit puis qu'on ne sait pas si ça a été causé par la machine ou par son délai à lui ou à elle, il y a des dangers avec ça parce que ça pourrait être repris de façon malveillante par des gens.

Quant au délai, vraiment, on n'a pas voulu se pencher spécifiquement là-dessus parce que c'est de nature... combien de temps ça prend au DPCP pour faire son étude, son analyse puis s'assurer que tout ça est en bonne et due forme. L'autre chose, c'est que, pour ceux et celles qui s'inscrivent et qui suivent la loi, je ne vois pas pourquoi un délai supplémentaire devrait être problématique et comme une épée de Damoclès. Moi, je voudrais bien qu'on se penche sur les «fly-by-night», puis les gens qui ne s'inscrivent pas, et qui causent un tort souvent irréparable à une profession, somme toute, assez noble, à mon humble avis.

M. Tanguay : Et, d'autant plus que, telle que rédigée, la loi l'appelle. Donc, s'il y a une décision du commissaire, vous êtes radié un an, vous en appelez. Normalement, la règle, c'est que l'appel ne suspend pas l'exécution de la peine. Alors, ça, c'est votre gagne-pain. C'est votre réputation. C'est votre gagne-pain. Évidemment, vous pouvez le demander à la Cour du Québec, si vous en appelez, la permission que ça soit suspendu, à moins que le juge n'en décide autrement, mais donc ce n'est pas anodin.

Rapidement, il me reste quelques secondes. L'aspect, encore une fois, trop fort, mais ça résume bien, juge et partie, le commissaire qui fait les règles puis le commissaire qui vous enquête puis qui vous sanctionne, êtes-vous à l'aise avec ça?

M. Madgin (Alain) : C'est l'institution, puis l'institution, c'est des gens qui la composent. Le problème de ce genre de règle là, c'est que, si on est bien d'accord avec le commissaire ou la commissaire du moment, ça va bien aller. Ça dépend du prochain ou de la prochaine et ça peut... Tu sais, il faut, dès maintenant, mettre tout en oeuvre pour que tout ça soit le plus conciliable possible, bon, puis être juge et partie, ce que j'ai appris, il y a fort longtemps, sur les bancs de l'université, ils m'ont dit que ça ne marchait pas.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Merci. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.

M. Leduc : Bienvenue. Content de vous entendre. N'étant pas un praticien comme vous, là, et un utilisateur de ce système-là, j'ai des questions plus techniques sur comment ça fonctionne. Vous avez dit que la majorité des inscriptions ne sont pas acceptées lors de l'inscription initiale. Pouvez-vous m'en dire un peu plus?

M. Madgin (Alain) : Bien, je ne peux pas vous dire plus que, quand j'inscris un mandat, c'est assez rare que le premier libellé... Ce qu'on libelle, on inscrit... On a un espace, là, assez restreint, sur la page 3 du formulaire, 2 ou 3, là, d'inscrire le libellé. Ce libellé-là, il est rarement accepté la première fois. Puis pourtant ce n'est pas parce qu'on ne fait pas un effort de choisir les bons termes. Puis on fait ça régulièrement, mais ça, en même temps, je veux faire attention. Je ne veux pas mettre trop l'emphase là-dessus, où... si les gens ont des règles à l'interne, qu'ils doivent suivre certains critères, qu'ils doivent voir... C'est sûr qu'ils ont des critères afin d'apprécier... Peut-être que, si on nous les communiquait plus clairement... Puis je pense qu'on va régler une bonne partie de ce problème-là en ayant un seul interlocuteur.

M. Leduc : Est-ce que l'éventuelle nouvelle plateforme, ça va être suffisant, à votre avis, ou il y a d'autres choses qui pourraient être faites pour améliorer la situation?

M. Madgin (Alain) : Mais la situation, elle n'est pas mauvaise, là. Il y a des milliers et des milliers d'inscriptions. Ça doit être bon signe. Moi, je n'ai pas entendu, dans ma pratique, personne dire : Ah non! Moi, je ne m'inscris pas, ce n'est pas de leurs affaires. Ce n'est plus comme ça. C'était comme ça au début. On est rendus dans une autre étape. On est rendus à l'étape où les gens veulent s'inscrire, reconnaissent les élus et la fonction publique, reconnaissent le rôle et le travail qu'on fait. Donnez-nous la chance de le faire le plus facilement possible et de façon la plus conviviale possible pour que ce... Mais que ce soit facile d'utilisation et qu'on respecte les règles, c'est deux choses. Les règles peuvent être très bien respectées dans un concept où l'inscription informatique est rendue plus facile puis... Bon, là, les organismes changent de nom. Ça fait que, là, il faut retourner, c'est un, comment on dit ça, «scroll down»?

Une voix : Un menu déroulant.

M. Madgin (Alain) : Un menu déroulant. Voyez-vous, les gens de com, c'est extraordinaire. On va dans le menu déroulant, puis là on s'aperçoit que l'organisme en question, avec qui on n'interagit peut-être pas sur une base très régulière, a changé de nom. Alors, il faut changer. Alors, on retourne au formulaire. Tout ça devrait être fait... Ce n'est pas notre décision de changer le nom d'une organisation avec laquelle on interagit.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je vais donner la parole maintenant au député de Rimouski, s'il vous plaît.

M. LeBel : Oui, merci. Bonjour. Tantôt, c'était un peu spécial, dans votre échange avec la ministre, là, vous avez semblé être surpris, là. Vous avez dit : Bien, il va falloir se réinscrire, ça va...

M. Madgin (Alain) : Non, non, je ne suis pas surpris.

M. LeBel : Non? C'était comme ça que vous voyiez ça? Mais quel impact que ça peut donner? Puis on n'a pas pu entendre la réponse de la ministre, là, mais c'est quoi, l'impact que ça peut donner, pour vous, de tout réinscrire?

M. Madgin (Alain) : Bien, tout réinscrire, moi, je... Dans 30 mois, combien je vais en avoir? Je ne le sais pas, là, mais, si j'en ai une vingtaine à réinscrire, c'est assez long. Mais peut-être que ça sera plus long, peut-être que ça va être très simple de se réinscrire. À l'évidence, on veut améliorer les choses, mais donnez-nous... Il faut faciliter les choses. C'est un exercice très louable. C'est la loi. On s'y conforme. On n'a aucun problème avec ça. On en fait la promotion auprès de nos clients. Mais il faut que ce soit facile. Et nos inscriptions actuelles, de grâce, devraient être transférées. Qu'on les vérifie, c'est parfait, mais là je ne peux pas croire qu'on va être obligés de recommencer. Mais, apparemment, on n'est même pas capables de faire des paies et on est en 2019. Non, mais c'est un autre niveau de gouvernement, mais, tu sais, je veux dire, ça devrait fonctionner tout seul.

M. LeBel : Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Messieurs dames, merci d'être là. Je veux peut-être prendre une petite minute de mon temps parce que c'était important, les interrogations de nos invités tantôt. Et, Mme la ministre, vous n'aviez plus de temps, mais vous aviez une réponse du bout des lèvres qu'on voudrait entendre. Puis je pense que les gens qui suivent nos travaux se questionnaient, justement, à 30 mois, pourquoi le 60 jours, puis c'est quoi, la difficulté, parce que, de la façon dont nos invités l'ont dit, je pense que ça nécessite, Mme la ministre, un petit éclaircissement de votre part.

Mme LeBel : Bien, je vous remercie. Effectivement, j'ai comme un non-verbal assez criant quelquefois. Vous avez bien su le lire. Et merci beaucoup de cette occasion.

Effectivement, bon, le 30 mois... Naturellement, c'est un maximum, le 30 mois. On souhaite tous que ça se fasse de façon plus rapide. Mais je pense qu'on revient plus au 60 jours. Et vous m'avez interpelée en disant : Est-ce que vous présumez que les transferts des données seront non valides? Ce n'est pas ça... Telle n'est pas la question. Le problème, et vous l'avez bien soulevé, le système actuel étant sous une forme plutôt archaïque, le transfert des données devra se faire de façon manuelle entre les deux registres, donc entre l'ancienne plateforme et la nouvelle plateforme. Donc, il n'est pas pour nous de dire qu'on présume que les données seront non valides, mais je ne peux certainement pas demander au Commissaire au lobbyisme de déposer des accusations de non-conformité en présumant que le transfert est valide. Donc, pour des fins de...

Une voix : ...

Mme LeBel : Merci. Mon Dieu! Je pense que je l'ai dit...

Le Président (M. Bachand) : Il vous reste une minute, M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Non, mais...

Le Président (M. Bachand) : Non, mais allez-y, parce qu'on a quand même des témoins ici. Alors, vous n'avez de pas de questions pour nos témoins?

M. Ouellette : Non. Je voulais entendre la réponse. Je pense qu'elle est plus importante que ma question.

Le Président (M. Bachand) : Mais c'est parce que, là, il y a des respects de témoins. Alors, s'il n'y a pas d'autre question pour les témoins, je vous remercie beaucoup de votre collaboration.

Et nous allons suspendre les travaux pour quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 9)

(Reprise à 17 h 12)

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît, la commission va reprendre ses travaux.

Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Conseil du patronat du Québec. Je vous rappelle...

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Merci, messieurs dames. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis après nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter et à débuter votre exposé. Encore une fois, bienvenue.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

M. Laplatte (Benjamin) : Merci, M. le Président. Bonjour à tous. Merci, Mme la ministre. Merci aux députés de nous recevoir. On a répondu à l'invitation que vous nous avez faite, là, de réagir à ce projet de loi n° 6, un projet de loi, somme toute, assez léger, assez technique. Mais c'était une tribune importante, pour nous, pour pouvoir revenir sur certains éléments qui ont trait peut-être davantage à la loi sur le lobbyisme. Je vais l'appeler comme ça, puisque son nom est un peu plus long, là, pour faciliter les échanges. Et je vais revenir, donc, sur la loi sur le lobbyisme au cours de mon propos, et certainement dans les périodes de questions. Puis ce que... C'est une loi sur laquelle on a plusieurs dispositions qu'on voudrait voir améliorées à terme. On comprend bien que ce n'est pas nécessairement l'endroit. Ça fait que soyez indulgents puisque ça va dépasser de la portée du projet de loi n° 6.

Mais ce qu'on en comprend, à la lecture du projet de loi, c'est qu'on voit là une première pierre à un édifice un peu plus long qui va nous amener à, oui, la modernisation du registre dans l'ordre des choses, mais, à plus longue échéance, certainement, un projet de refonte de la loi que le gouvernement, sous la recommandation de l'ancien commissaire, avait tenté à travers le projet de loi n° 56. Et on l'estime parce que c'était un projet de loi qui amenait des choses éminemment complexes à comprendre, à traduire avec certaines sensibilités qui ont trait à la réputation malheureusement parfois péjorative des activités de lobbyisme. C'est un projet de loi qui a avorté. Ça ne veut pas dire que les questions qui se posaient en amont de ce projet de loi n° 56 n'étaient pas, pour autant, légitimes.

Je reviens aux propos, suite à ce préambule du projet de loi n° 6, avec quelques remarques générales. On invite les parlementaires que vous êtes à adopter le projet de loi n° 6, évidemment, dans son grand principe... à dire qu'on est évidemment favorables au transfert de la responsabilité de l'administration du registre au commissaire pour la raison qu'on espère que ça facilitera à terme une modernisation du registre, dont vous avez abondamment, j'en suis persuadé, entendu parler aujourd'hui. On a pu entendre aussi quelques échanges. Vous voyez là que c'est un point assez névralgique que la modernisation du registre, dont j'ai envie de dire que c'est un peu comme le yéti. C'est une promesse longtemps tenue, mais malheureusement jamais livrée. C'est comme le yéti. Tout le monde en a entendu parler, mais personne ne l'a jamais vu. Et ne pas sous-estimer à quel point la modernisation de ce registre est un élément critique. On est en 2019. Vous utilisez tous certaines plateformes numériques. On vit à l'heure de la mobilité. Et, pour quiconque a pu travailler avec ce registre, avec cet outil, en se connectant sur le site qui est dédié, peut aisément et rapidement constater à quel point l'outil est obsolète.

Donc, remarques générales. Pour nous, il est important que le projet de loi n° 6 facilite puis accélère rapidement cette entreprise de modernisation du registre, évidemment, en conférant au commissaire les ressources qui vont lui être nécessaires à cet effet, qu'elles soient financières ou humaines.

Aussi, à travers ce transfert de responsabilité, on espère grandement qu'il puisse y avoir un regroupement de compétences, notamment au niveau des conseillers juridiques, là encore pour faciliter le service aux clients. Vous me permettrez d'utiliser le terme «clients» ici puisque, selon nous, pour que ce projet de modernisation soit une réussite, il faut basculer en mode orientation client, parce que, comme vous l'avez entendu, c'est un registre qui est éminemment complexe, avec des processus, des procédés qui sont lourds sur le plan administratif, des fois, des allées et venues avec les conseillers juridiques du conservateur et un gros manque de convivialité, que ce soit au niveau de l'interface du registre comme tel qui est destiné aux utilisateurs, mais aussi ce qui en sort et qui doit être accessible au grand public.

Donc, à cet effet, on vous propose, dans notre section «remarques particulières» de notre mémoire, quelques recommandations pour apporter des correctifs afin d'en arriver à une plateforme beaucoup plus conviviale et beaucoup plus dynamique, ce qui va finir par servir autant l'intérêt public que l'intérêt des clients du futur commissaire, c'est-à-dire les trois catégories de lobbyistes assujetties : les lobbyistes d'organisation, les lobbyistes-conseils et les lobbyistes d'entreprise.

Un mot, par contre, avant de passer à des remarques particulières concernant les délais de prescription et leur rallongement. On comprend les motivations qui sont sous-jacentes à un accroissement de ces délais de prescription de trois à sept ans, et le CPQ ne s'y oppose pas. On veut toutefois... Quand on entend parler de ces choses-là, là, puis du cas de la direction des poursuites criminelles et pénales, il faut aussi ramener qu'en bout de ligne ce dont on parle, là, c'est surtout des pénalités financières ou des pénalités administratives, là, de ce dont... selon il est question au premier abord, donc, de garder quand même dans l'esprit de la loi qu'à la fin il faut garder quand même une certaine juste proportion des choses quant aux conséquences, là, des manquements. Donc, cela dit, on souscrit à ce rallongement de délai de prescription. Est-ce que le délai devrait être de cinq ans? Il arrive un moment où il va falloir vivre un peu avec ces modifications-là. Et on estime que, dans le temps, il y a certainement des choses sur lesquelles on pourra revenir dans le futur.

• (17 h 20) •

Cela étant dit, il faut revenir... Et est-ce que ce serait de nature à un amendement dans le projet de loi n° 6, mais à l'esprit que la loi, c'est un droit? C'est même l'expression de notre vigueur démocratique. La représentation d'intérêts, la communication d'influence, c'est quelque chose de hautement souhaitable dans une société. C'est une activité qui est légale, qui est légitime. Et tout système démocratique doit pouvoir favoriser l'accès à nos institutions. Donc, tout projet de modernisation, de transfert de responsabilité, dans le cas du commissaire, et des modalités qui devront être dévoilées quant à une nouvelle utilisation de ce futur registre modernisé ou même une éventuelle refonte de la loi doit garder à l'esprit cette primauté du droit qu'est l'exercice du lobbyisme ou de la représentation d'influence, et, à cet égard, de diminuer le plus possible toute forme de... on ne pourra pas parler d'entraves, mais d'éléments qui seraient de nature à complexifier ce droit-là, d'autant qu'il existe aujourd'hui, je dirais, une face visible et invisible à l'iceberg qu'est le lobbyisme au Québec, la face visible étant tous les organismes assujettis, versus les organismes actuellement non assujettis, pour lesquels la loi sur la transparence en matière de lobbyisme ne s'applique pas. Chose certaine, avec un registre modernisé puis un certain nombre de procédures simplifiées, il y aurait certainement fort à gagner, dans cet exercice d'acceptabilité sociale, que de réussir, à terme, à assujettir des organismes qui, aujourd'hui, échappent à ce devoir de transparence collectif.

Quelques mots rapidement en matière, parce que j'en ai parlé, là, d'allègement réglementaire administratif, des choses qui pourraient être envisagées quand on parle de convivialité.

Alléger la liste des titulaires de charges publiques et la mettre à jour automatiquement, c'est quelque chose qui ne se fait pas. Sachez-le, lorsqu'il y a un changement de gouvernement, un changement de dénomination d'un ministère, d'un organisme, bien, croyez-le ou non, mais, dans le registre, ce changement-là ne se fait pas automatiquement. Donc, il appartient à l'utilisateur de ce registre d'aller chercher, dans la liste des titulaires de charges, là, quels sont ceux qui auraient été sujets à un changement, simplifier aussi les informations exigées qui sont relatives à la description des mandats.

Uniformiser les pratiques et les interprétations des conseillers juridiques responsables de l'accompagnement des utilisateurs, ça ne repose pas, ça, uniquement sur la modernisation technologique du registre, mais plus un travail qu'on espère que le commissaire pourra faire avec ses nouvelles ressources en charge d'accompagner les utilisateurs, parce qu'il arrive à l'occasion que, pour un même mandat déclaré, tu reçois deux avis juridiques vraiment différents. À cet égard, rappeler... je ne tomberai pas dans le détail, mais que le Québec a adopté une politique, qui nous est chère, sur l'allègement réglementaire. Il est important aussi de garder à l'esprit que, sans rien sacrifier à la transparence, il est possible d'alléger certaines redondances existantes dans les processus administratifs, et cette chose-là, pour satisfaire à cette politique de l'allègement réglementaire, il s'agit de la garder en perspective.

Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) : Merci infiniment. Nous allons passer à la période d'échange. Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : Oui, merci. Merci, messieurs, de votre présence. Je n'ai pas eu l'occasion d'aller vous saluer avant qu'on commence notre session. Alors, j'en profite pour vous saluer encore plus officiellement. Merci d'être là et merci de votre apport. Les remarques, c'est toujours constructif.

Et on veut donc améliorer le plus possible le projet de loi, projet de loi, comme vous l'avez si bien mentionné, qui a un seul objectif... plutôt deux, je vous dirais, deux objectifs. À ce stade-ci, c'est de transférer effectivement le registre sous la gouverne du commissaire... et qui s'adresse également au délai de prescription. Donc, nous notons, effectivement, bien vos remarques sur le futur, et sur la réforme, et les mises en garde que vous nous faites. Et je tiens à rassurer tout le monde, et je l'ai dit d'entrée de jeu, et je l'ai dit à chaque groupe qui se présente, que, dans la suite de tout ça, s'il y a une réforme supplémentaire à faire à la loi comme telle ou aux modalités comme telles, vous serez, nécessairement, comme toujours, les bienvenus, et on verra à vous consulter de façon encore plus précise sur ces modalités-là.

Je comprends donc que, sur la question du transfert elle-même, vous êtes favorables en autant justement que ça apporte une simplification du registre, hein? J'ai vu que, bon, dans le mémoire actuel, vous vous êtes prononcés en faveur, mais ça date de longtemps. Déjà, en 2008, vous plaidiez pour des modalités et des règles plus simples pour les modalités d'enregistrement du registre. En juin 2016, également, vous avez bien mentionné, dans un écrit, une lettre ouverte publiée à La Presse, si je ne m'abuse, que moderniser l'outil technologique qui sert actuellement à administrer le registre ne serait pas un luxe. Et là ce sont mes mots pour la fin de la phrase. Donc, quel est... Peut-être, de façon plus précise... ou qu'on en discute un peu plus précisément, quelles sont les modernisations que vous souhaiteriez voir apparaître? Le commissaire est là. Il peut nous entendre. Donc, on y va de façon plus technique, là, sur la modernisation...

M. Laplatte (Benjamin) : Oui, certainement. En fait, je vais revenir simplement sur l'expression que vous avez utilisée : Ce n'est pas un luxe. Non seulement ce n'est pas un luxe, mais cette modernisation devrait même être un préambule, selon nous, à tout exercice, là, de refonte de la loi actuelle sur le lobbyisme. Ça ne veut pas dire qu'on ne pourrait pas entamer des réflexions à cet égard. Mais, pour nous, ce serait une erreur que de commencer par revenir avec un projet de loi qui viendrait, là, faire des réformes à la loi actuelle sans qu'on n'ait vu l'ombre d'une modernisation du registre.

Concernant les améliorations, la mobilité, la célérité de la formation, là, advenant une déclaration, aujourd'hui, on est aussi... C'est aussi bête qu'être esclave d'un P.C. pour administrer le registre. Nous, en tant qu'utilisateurs, on estime que c'est quelque chose qui pourrait être grandement apprécié que de le permettre pour différentes plateformes mobiles, cellulaires et ce genre de choses là. J'ai parlé tantôt, puis je vais le répéter, quand même, de l'automatisation de la liste de la titulaire des charges publiques lorsque celle-ci vient à changer. Mais il y a même une redondance si vous allez examiner le registre, là, dans la liste des titulaires de charges. À un moment donné, il y a des organismes qui relèvent de certains ministères pour lesquels le registraire nous encourage même à faire référence au ministère plutôt qu'à l'organisme sous la responsabilité de ce même ministère. C'est dire qu'il y a donc une couche stratigraphique d'organismes qui pourrait peut-être être élaguée afin d'en arriver à une liste de titulaires de charges qui soit réduite, ce qui faciliterait d'autant la convivialité du registre.

C'est un exemple. Il y en aurait d'autres. Lorsque, par exemple, vous procédez à un renouvellement annuel, dans l'état actuel des choses, si vous procédez à la modification d'un mandat que vous avez déjà déclaré dans le passé, si la modification est à ce point substantielle, bien, il faut carrément supprimer ce mandat et en recréer un nouveau. C'est peut-être quelque chose qui est rébarbatif.

Enfin, il faut savoir que, pour des organisations comme les nôtres, la représentation d'intérêts, c'est le coeur de notre mission. Il peut arriver qu'avec mon collègue Pietro on travaille... on cherche, du moins, à travailler simultanément dans le registre. Aujourd'hui, la plateforme ne le permet tout simplement pas. Donc, Pietro va enregistrer son brouillon, et moi, après, je vais devoir me reloguer avec mon code utilisateur pour travailler par-dessus le brouillon de Pietro pour pouvoir ensuite l'envoyer au registraire. Vous pouvez imaginer que, si Pietro et moi n'avons pas la chance d'être au bureau en même temps ou sommes en déplacement, bien, on retarde d'autant le délai d'intervention, et on a un délai de 10 jours, d'ailleurs, qui est prescrit pour revenir sur des demandes de modification, raison pour laquelle on vous demanderait aujourd'hui de porter ce délai de 10 jours à 30 jours parce qu'actuellement le système est à ce point fastidieux que, même pour des organisations avec du personnel dédié, ça deviendrait éventuellement difficile de rencontrer ce délai de 10 jours là.

Alors, des exemples, il y en a plusieurs et il y en aurait beaucoup. Et vous en avez entendu beaucoup aujourd'hui. Mais c'est la raison aussi pour laquelle on vous soumettait humblement une recommandation, c'était de mettre sur pied un comité représentatif d'utilisateurs pour accompagner le commissaire dans la prochaine phase de ses travaux, qui vise à identifier les nouvelles modalités reliées à la tenue du registre. Le commissaire a déjà pu, et puis la ministre aussi, s'appuyer sur les travaux d'un comité consultatif. C'est très bien. Là, le comité consultatif ou un comité consultatif élargi à travers un groupe de travail pourrait certainement accompagner judicieusement le commissaire et le ministère dans l'exercice de modernisation et réunir autant les contraintes qui sont vécues par les utilisateurs que les missions ou les visions auxquelles vous aspirez.

Mme LeBel : Parfait. J'ai deux de mes collègues qui auront des questions. Je vais m'assurer de leur laisser un petit peu de temps à la fin, M. le Président, si vous le permettez.

Mais, pour poursuivre peut-être sur le délai de prescription, vous mentionnez, donc, être, bon, généralement favorables à un allongement du délai de prescription actuel, qui est d'un an, si je ne m'abuse. Par contre, vous me faites une remarque qui est peut-être intéressante, mais je veux avoir peut-être un peu plus de précision. Vous dites qu'«il nous apparaît donc important d'en appeler ici à la juste mesure des choses et au caractère raisonnable des sanctions administratives et des pénalités financières envisagées». Le p.l. n° 6 n'envisage pas de faire la modification des sanctions, envisage tout simplement d'allonger les délais de prescription permettant, donc, de déposer un constat d'infraction. Pouvez-vous me préciser un peu qu'est-ce que vous voulez dire par ça?

• (17 h 30) •

M. Laplatte (Benjamin) : En fait, bien, c'est de revenir à la vocation première du registre, parce que c'est souvent tentant d'approcher, au Québec, du moins, les questions de lobbyisme à travers un angle assez coercitif ou punitif, alors que, selon nous, la vocation du registre, c'est aussi de... au bénéfice du public, bien sûr, mais de mettre en lumière la légitimité de certaines représentations, mais aussi de se servir d'outils éducatifs pour informer autant les titulaires de charge que les utilisateurs eu égard à leurs responsabilités ou des situations qui peuvent être à risque et ainsi maintenir une culture de la probité, au Québec, de la représentation d'intérêts ou la communication d'influence.

Donc, ce n'est pas de perdre de vue que, quand on parle beaucoup de délais de prescription, de délais de conformité ou ce genre de chose, c'est qu'en bout de ligne le registre a été créé aussi pour, oui, baliser les règles d'un point de vue déontologique, de saines pratiques, etc., mais aussi pour favoriser une culture de la représentation ouverte, transparente et, j'ai envie de dire, décomplexée. Bon, j'ai parlé tantôt de la face cachée de l'iceberg, peut-être qu'on pourra en revenir dans la période de questions, mais c'est quelque chose qui doit être valorisé. Et d'ailleurs ça fait aussi partie de la mission du commissaire que cette promotion, là, de ce qu'est le lobbyisme et, je dirais, sa valeur dans toute société démocratique.

Mme LeBel : Et donc je comprends et je dois déduire de votre propos qu'il faut mettre fin à toute sanction pénale, mais qu'il faut rétablir un juste équilibre, peut-être, et de procéder également à la promotion, si on veut, et la valorisation du fait de s'inscrire, de la transparence et du lobbyisme. C'est ce que je comprends.

M. Laplatte (Benjamin) : Exactement. Et, par le fait même, vous avez aussi clarifié une petite zone d'ombre, dans le p.l. n° 6, en ce qui a trait effectivement aux pénalités. Vous nous avez aujourd'hui apporté une vision qu'on n'avait pas nécessairement pu apprécier à travers la réalité, des fois, là, d'un projet de loi, et ça nous rassure. Puis, au passage, je veux aussi saluer, là, le fait que votre administration semble instaurer une culture de la gratuité ou une espèce d'universalité de l'accès au registre qui est, pour nous, quelque chose à valoriser effectivement et à renforcer.

Mme LeBel : Parfait.

Le Président (M. Bachand) : Oui. Est-ce qu'il y a d'autres demandes? M. le député d'Ungava, s'il vous plaît.

M. Lamothe : Bonjour. Le mot «transparence» est revenu souvent aujourd'hui. Vous avez dit qu'avec un allègement de la loi ça favorisera une meilleure transparence. Vous avez dit ça tantôt. Vous voulez dire... peut-être un exemple ou peut-être m'éclairer là-dessus, là.

M. Laplatte (Benjamin) : J'ai envie de dire que, de façon empirique, puis ce n'est pas la science qui parle, mais plus vous allez en mettre en place, des procédures, des processus qui sont complexes, et plus ça va être tentant pour certaines personnes de vouloir s'en émanciper, O.K., soit de façon mal intentionnée, et je pense que ça, ce cas-là est réglé, soit par paresse, ou déni, ou mauvaise compréhension de la loi puis des conséquences de ne pas s'y conformer. À cet égard-là, on part d'une prémisse, c'est que d'alléger ces processus-là va peut-être inciter davantage de personnes à s'y conformer, mais aussi davantage de personnes à les comprendre. C'est le calcul que l'on fait.

Et aussi on parlait de transparence, puis là, bien, je reviens à la couche invisible de l'iceberg, c'est qu'il ne faut pas perdre de vue que si, aujourd'hui, le mot «lobbyisme», l'expression «lobbyisme» a une connotation à ce point péjorative dans l'espace public, dans la conversation publique, c'est parce que, si vous allez dans le registre des lobbyistes, ce que vous allez voir, c'est des représentations pour des contrats, pour des subventions, des modifications réglementaires, et ce genre de chose là, mais toujours avec une intention qui est pécuniaire ou dirigée vers les affaires ou un intérêt économique. Alors que, si vous allez voir, là, dans le détail, la description de certains mandats dans certaines organisations, bien, on est assez proche du bien commun dans le libellé de certains mandats. Or, il y a, aujourd'hui, beaucoup d'organisations très, très actives en matière de communications d'influence, auprès de titulaires de charge publique, mais pour lesquelles aujourd'hui ne s'applique pas cette loi-là. Donc, c'est un déficit de transparence, selon nous, aussi.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée des Plaines, s'il vous plaît.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le Président. Merci d'être ici aujourd'hui pour nous éclairer et nous pister sur votre vision du projet de loi n° 6. Parlant d'éclairage, vous mentionnez que, dans l'esprit de revoir, de réexaminer la loi sur le lobbyisme, il faudrait clarifier l'interprétation de l'expression «pour une partie importante de ses fonctions». Vous n'êtes pas le seul à nous avoir mentionné ce petit extrait du projet de loi. Selon vous, quelle serait une bonne représentation?

M. Laplatte (Benjamin) : Je vous dirais que c'est peut-être simpliste, mais une bonne représentation serait... si on regarde, par exemple, comment ça fonctionne au niveau du fédéral, bien, c'est le volume horaire, là, de travail, vraiment, qui est consacré à l'activité de lobbyiste dans une organisation.

Nous, on le dit, puis on l'assume, et on en est fiers, l'essence même de notre mission, c'est la représentation d'intérêts. Donc, à cet égard-là, je veux dire, on est un organisme assujetti. Mais un OSBL, par exemple, dont la mission est de représenter des intérêts x et y qui ne seraient pas nécessairement pécuniers ou qui ne seraient pas nécessairement économiques, donc un organisme non assujetti, reviendrait répondre peut-être à la définition que la représentation d'intérêts, la communication d'influence est son activité principale. Donc là, bien, ajoutez un deuxième critère à l'effet que, bien, c'est un organisme qui mériterait d'être assujetti à la loi.

Donc, je pense que c'est simplement le... à un moment donné, c'est quelque chose qui se vérifie aussi très bien, là, quelle est, en vérité, là, le volume de tes affaires ou le volume de tes activités qui sont consacrées à la représentation d'intérêts.

Mme Lecours (Les Plaines) : Donc, se coller un peu plus sur ce que le fédéral fait ou... en termes de temps, en termes de pourcentage?

M. Laplatte (Benjamin) : Alors là, attention! J'ai cité le fédéral, oui, c'est quelque chose qui pourrait être regardé. Mais, dans l'esprit, là, où on se retrouve, c'est-à-dire modernisation du registre, poser les jalons d'une réflexion qui nous mènerait peut-être vers une modernisation de la loi sur le lobbyisme, je pense que c'est important de regarder aussi outre-frontière, ce qui se fait puis quelles sont les pratiques qui peuvent aussi nous inspirer. Alors, je n'ai pas de réponse plus précise que ça pour vous aujourd'hui, mais quel beau mandat à confier au commissaire que de regarder ce qui se fait à l'international.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la ministre, s'il vous plaît.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Il reste deux... trois minutes, pardon.

Mme LeBel : Merci. Sous un autre ordre d'idées, on parle de la procédure de transfert des données au commissaire. Vous indiquez dans votre mémoire qu'il importe de donner une garantie aux utilisateurs du maintien de l'intégralité des informations contenues dans leurs dossiers, advenant, donc, un transfert, et vous suggérez, donc, le cas échéant, pour garantir cette intégrité des données là, de vous fournir une copie papier ou sur demande, une copie sur demande avant une quelconque manipulation.

Le projet de loi actuel prévoit un délai de 60 jours pour les... je vais les appeler les clients ou les utilisateurs du registre, pour employer vos termes, les utilisateurs du registre, pour vérifier la conformité des données transférées d'un registre à l'autre. Je dois vous expliquer d'entrée de jeu que l'arrimage entre les deux systèmes ne peut pas se faire de façon automatique. Donc, le transfert devra se faire de façon manuelle, ce qui explique en grande... en partie le délai de 30 mois maximal qui est imparti pour le faire. Est-ce que vous pensez que ce délai de 60 jours là, dans l'éventualité où on vous fournirait peut-être également une copie, pourrait être suffisant pour s'assurer, justement, de l'intégralité des données ou de l'actualité des données, là?

M. Laplatte (Benjamin) : La copie, ça semble être une évidence, mais c'est la garantie pour le client — et puis je veux revenir, pourquoi je parle de client tantôt — de préserver telle intégrité de nos renseignements puis des données accumulées. Donc, effectivement, je pense que c'est quelque chose qui serait tout à fait salutaire, là, en termes de principe de précaution.

Quant aux durées de 60 jours, j'ai envie de vous dire, Mme la ministre, que... On parle, là, au Québec, là, d'intelligence artificielle, on a une grappe industrielle là-dessus, on parle du virage à l'économie numérique, de digitalisation de nos processus. On serait quand même surpris d'entendre qu'au Québec, pour fusionner deux bases de données ou transférer une base de données vers un nouvel administrateur système, on ne sera pas capables de procéder avec un haut niveau de garantie de qualité du transfert des données. Je vous dirais qu'on avance là-dessus plutôt avec confiance, sans être naïfs, mais... Puis là je ne voudrais pas avoir l'air cynique, mais nous, au Conseil du patronat, quand même, on estime que si on n'est pas capables de réaliser avec succès ce transfert d'information là, bien là, on a un problème avec l'ensemble des outils informatiques de l'État.

Le Président (M. Bachand) : Mme la ministre, il reste une minute.

Mme LeBel : Donc, non, mais j'ai bien... j'ai précisé, d'entrée de jeu, justement, que, compte tenu du registre, qui date des années 2000, de la forme sous lequel il est et la nouvelle plateforme vers laquelle on espère migrer, qui sera beaucoup plus adéquate au niveau technologique, j'ai bien précisé d'entrée de jeu que le transfert devra se faire de façon manuelle. Donc, le 60 jours, dans le fond, c'est pour, de façon légale, s'assurer que pendant ce 60 jours là l'usager n'est pas... ne fera pas face à certaines sanctions parce qu'on a un flottement dans la garantie des données. Donc, moi, ce que je vous demande : Est-ce que 60 jours pour s'assurer de la fiabilité des données, pour s'assurer également que vous n'êtes pas indûment sous constat d'infraction, est-ce que vous pensez que c'est suffisant?

Le Président (M. Bachand) : Très rapidement, s'il vous plaît.

• (17 h 40) •

M. Laplatte (Benjamin) : C'est quelque chose qui me semblerait, a priori, raisonnable, là. Le 60 jours, c'est le délai qu'on consacre actuellement pour un renouvellement annuel. Mais, là encore, ça dépend des problèmes qui sont en cause, là. Si on a tout perdu puis qu'il faut tout retranscrire, l'exercice est passablement plus laborieux que le renouvellement annuel dont on parle. Mais on va faire confiance aux informaticiens.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

Mme Weil : Oui. Bonjour. Merci beaucoup de votre présence. On voit que vous avez une grande expertise en la matière. J'aimerais peut-être revenir, j'avais un peu la même réaction que la ministre, sur le délai de prescription, vos commentaires. Donc, vous dites, d'une part... Parce qu'on comprend que le projet de loi profite pour finalement procéder aux transferts, hein, des données, donc, au commissaire. Et ça fait longtemps qu'on en parle. Et donc le projet est mûr, et c'est très bien. Mais on parle... en même temps, on donne suite à la recommandation de la commission Charbonneau sur les prescriptions.

Et je voulais savoir, dans vos deux paragraphes où vous parlez de ça, vous dites : «L'allongement du délai de prescription en matière pénale répond à une demande...» Ensuite : «Cette prolongation du délai donnera plus de temps...» Vous comprenez tout ça, mais vous dites... vous ne vous opposez pas, donc vous êtes d'accord avec la recommandation de la commission Charbonneau, donc, maximum de sept ans. C'est bien ce que vous dites? O.K. Parce qu'on a eu des discussions avec d'autres organismes, ce matin, j'ai peut-être posé certaines questions par rapport à ça, donc je voulais juste être sûre que vous êtes en accord. Mais vous dites : Ce n'est pas l'esprit de l'objectif premier de la loi. Vous semblez être inquiets qu'on parle de ces deux choses en même temps, alors que l'objectif du transfert et de s'inscrire, c'est un objectif noble de transparence, d'imputabilité, etc.

Alors, on a eu l'occasion, avec la FCEI, d'en parler ce matin — ce matin, je pense bien, oui, c'était ce matin — et qui s'inspirait du projet de loi fédéral, où on inscrit des principes dans un préambule, dans un effort d'éducation. Parce que c'est vrai qu'il y a eu quand même une évolution de la pensée publique par rapport au lobbyisme, mais que c'était une occasion de dire : Voici les principes, et que c'est bien de s'inscrire, et pour ceux qui s'inscrivent, c'est une libération, finalement, parce que tout est clair et transparent. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion... Bien, peut-être, si vous connaissez bien la loi fédérale, qu'est-ce que vous en pensez?

Donc, les principes... Je vais trouver peut-être sa recommandation. Donc, c'est une... «Le lobbyisme est nécessaire à l'évolution des sociétés.» Puis les grands principes, c'est : «...liberté d'accès aux institutions de l'État est une importante question d'intérêt public; le lobbyisme auprès des titulaires d'une charge publique est une activité légitime — vous comprenez un peu l'esprit; il est souhaitable que les titulaires d'une charge publique et le public puissent savoir qui se livre à des activités de lobbyisme», etc. Donc, j'ai l'impression que c'était un peu... vous allez dans ce sens-là, c'est-à-dire que ça vous inquiétait qu'on ait un durcissement, un peu, de la question de la prescription ou qu'on mêle ça dans ce projet de loi, alors que c'est un projet de loi pour faciliter et devenir, en bon français, «user-friendly» pour, hein, les lobbyistes. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur votre intention ici dans ce paragraphe sur les délais de prescription. Vos commentaires.

M. Laplatte (Benjamin) : Oui. Bien, merci pour la question. On y a partiellement répondu tantôt. Peut-être qu'on aimerait revenir sur l'évocation que vous avez faite, là, du... bien, de la reconnaissance, au niveau fédéral, de ce droit-là. Et implicitement ce qu'on entend, c'est : Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait se retrouver dans un amendement, en partie préambule? Nous, au CPQ, on y serait éminemment favorables. Ça, c'est quelque chose qu'on n'a pas écrit dans le mémoire, mais, en nous relisant, c'est entre les lignes, puisqu'effectivement il y aurait lieu, dans l'exercice qu'on fait, peut-être, de faire ce renforcement positif là, effectivement.

Mme Weil : Oui. Parce qu'on a eu quand même des discussions à quel point ça peut être déplaisant, tout ça, alors que, qu'on touche à ça... Bon, la ministre, aussi, on a eu des échanges un peu sur... on trouvait ça intéressant. Alors, je voulais juste voir, parce que vous avez quand même une grande expérience, ça pourrait faire d'une pierre deux coups, dans un sens aussi, une certaine sensibilisation.

Pour le délai pour apporter des correctifs, donc, vous n'êtes pas les seuls à demander, donc, une extension, un délai plus long de 30 jours qui serait acceptable. Est-ce que vous pourriez peut-être en parler un peu, sur ce délai pour apporter des correctifs? Parce que ce matin on a parlé, d'une part, que c'était très court, mais aussi, je pense que c'est la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante... ne sachant pas exactement comment cette plateforme va fonctionner, donc, c'est sûr qu'il y a comme une transition. Difficile de savoir quel serait le délai raisonnable, mais, quoi qu'il en soit, elle trouvait que 10 jours, c'était un peu court. Mais si vous pouviez expliquer, donc, votre recommandation à cet égard.

M. Laplatte (Benjamin) : La motivation en arrière de cette proposition d'amendement est somme toute la même, c'est que l'histoire récente et vieillissante et notre expérience d'utilisateurs nous amènent à accueillir avec enthousiasme cette démarche de modernisation, mais le scepticisme n'est jamais très loin. Donc, devant la difficulté de pouvoir présumer de l'efficacité future de ces nouvelles dispositions, de ces nouvelles modalités là, on nous invite tout simplement à la prudence.

Et puis le délai de 30 jours qui n'est pas proposé, selon nous, là, il n'est pas futile ou exagéré parce que c'est le délai de 30 jours que vous retrouvez qui fait déjà référence, là, dans certaines modalités, là, qui ont trait au registre actuel, là, qu'il s'agisse d'un avis de modification, ce genre de choses là. Les gens se sont habitués, c'est bête à dire, mais les gens se sont habitués à ce délai de 30 jours là, tu sais? Tu raisonnes assez simplement, tu sais que tu es soit dans du 60 jours, dans ton avis de renouvellement annuel, ou dans ton 30 jours dans un avis de modification. On reste sur le 30 jours, le temps que toute cette communauté, cette nouvelle communauté d'utilisateurs là s'adapte au changement. À cet égard-là, nous, on trouvait ça raisonnable, comme proposition, 30 jours.

Mme Weil : Merci. Pas d'autre question.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Merci beaucoup. Merci à vous.

Le Président (M. Bachand) : M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.

M. Leduc : Merci, M. le Président. Merci d'être venu aujourd'hui. Vous êtes un des rares organismes qui évoquent la question des ressources qui vont être allouées au commissaire pour gérer ce nouveau mandat. Est-ce que je comprends que vous avez des craintes par rapport au fait qu'il reçoit cette nouvelle charge là, mais qu'il n'aura pas nécessairement les ressources nécessaires pour appliquer efficacement ce mandat?

M. Laplatte (Benjamin) : Deux choses. Un élément qui est positif, à travers le regroupement des compétences... Donc, quand on parle de ressources, ce sont aussi des ressources humaines dont on parle. Après, en ce qui en trait, je dirais, aux ressources pécuniaires, c'est l'Assemblée nationale qui devra disposer dorénavant. C'est ce qu'on comprend, à moins qu'on ait mal compris certains éléments du p.l. n° 6. Il est certain que, pour réussir ces changements-là, la clé, c'est la ressource.

Donc, oui, on ose l'aborder parce que toute entreprise de réorganisation ou de modernisation, de simplification ne pourra pas se faire efficacement et avec un niveau de satisfaction de la part des utilisateurs si le commissaire ne peut pas compter sur le soutien de l'Assemblée nationale pour l'appuyer dans cette nouvelle mission. Donc, il nous apparaissait important de le rappeler. La fin justifie les moyens, vous me direz, mais aussi, c'est qu'il ne peut pas y avoir de miracle, là, sans les ressources adéquates.

M. Leduc : Est-ce que le commissaire, à vos yeux, a une forme de responsabilité d'information envers les lobbyistes qui font soit une déclaration initiale ou qui font des renouvellements de mandats? Évidemment que le lobbyiste doit lui-même aller s'informer sur comment le faire, mais est-ce que, selon votre perception des choses, le commissaire a lui-même une obligation de vous aider, de vous accompagner là-dedans?

• (17 h 50) •

M. Laplatte (Benjamin) : Définitivement. En fait, le commissaire est déjà en charge de promouvoir le lobbyisme, l'activité de la représentation d'intérêts, là, auprès des parties prenantes. Dans le contexte où le commissaire se retrouverait en charge du registre, c'est sûr qu'à terme il serait certainement bienvenu qu'il puisse y avoir une déclaration de services aux utilisateurs, de sorte à... À un moment donné, ce qui est bon pour minou vaut pour pitou, là. Je vais parler du principe d'imputabilité, là, vous m'excuserez, mais autant les titulaires de charges publiques sont imputables, autant les utilisateurs et les lobbyistes assujettis sont imputables. Quand on hérite d'une responsabilité... C'est certain qu'il faudra prévoir un mécanisme d'imputabilité à l'égard du commissaire dans la livraison de ces services.

Et c'est là où — merci pour la question, je vais revenir à cette orientation client — avec les responsabilités doivent aussi venir, selon nous, des principes qui seraient légitimes de reddition de comptes quant à la performance des services rendus par le commissaire au niveau des délais de traitement, au niveau de la célérité de certaines réponses, de la qualité de ses interventions, de ses conseillers juridiques auprès des utilisateurs, surtout dans la perspective que, collectivement, on y gagne. Si on veut améliorer la transparence au Québec et l'étendre à d'autres organisations qui ne sont actuellement pas assujetties, j'y reviens, bien, tu sais, oui, ça prend de la simplification, mais ça prend aussi, à un moment donné, des mécanismes pour faire en sorte d'apprécier la performance d'un système.

Là, ce qu'on cherche à faire, aujourd'hui, c'est améliorer la performance d'un système. Donc, oui, ça prend un mécanisme de reddition de comptes, puis, oui, ça prend un mécanisme d'imputabilité au niveau du commissaire. Et ça prend aussi un mécanisme d'appel, auquel on n'a pas pu réfléchir à ce stade-ci, mais pour permettre aux utilisateurs, à un moment donné, de revenir sur un avis qui aura été rendu par le commissaire, pour lequel un utilisateur pourrait se sentir lésé. C'est des choses qui sont tout à fait légitimes quand on parle de services...

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Rimouski, s'il vous plaît.

M. LeBel : Oui. Bien, bonjour. Pour revenir à la question de mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, c'est vrai que par rapport aux ressources... Mais ce que, peut-être, pas tout le monde sait, c'est que le Commissaire au lobbyisme vient faire des présentations au Bureau de l'Assemblée nationale pour demander des ressources. Ça fait que c'est beaucoup là que ça se fait.

Je reconnais le député de Nicolet-Yamaska, qui est au Bureau de l'Assemblée. Je ne sais pas s'il y en a d'autres aussi, mais, je pense, ça serait assez intéressant que les membres du Bureau de l'Assemblée aient pu entendre ce qui s'est dit aujourd'hui. Puis ça aurait peut-être pu nous... On passera le mot puis on passera les rapports.

Mais moi, il est 17 h 50, j'ai quasiment le goût de vous lancer dans une question philosophique en partant. Vous avez juste une minute pour répondre. Vous avez dit : «De plus, la portée a, avec le temps, créé deux castes d'acteurs dans la conversation publique en plus de cristalliser deux visions de la représentation d'intérêt...» C'est une belle phrase. Que c'est que vous avez voulu dire?

M. Laplatte (Benjamin) : Je suis revenu au moins trois fois sur l'allégorie de l'iceberg. Quand je parle de cristallisation, ce n'est pas compliqué. Retenez qu'au-dessus de la ligne de flottaison vous avez le mauvais lobbyisme et, en bas de la ligne de flottaison, vous avez le bon lobbyisme. Ce que je veux dire par là, c'est que la loi réglemente des organismes au lieu de réglementer des pratiques, et on en est rendu, avec les années, à dire que, bien, il y a un bon lobbyisme au Québec, celui qui prône l'intérêt commun, le bien public, et le mauvais lobbyisme qui prône les intérêts économiques ou pécuniers. Je pense que cette espèce de dichotomie aujourd'hui n'a aucun sens. Ça dépasse l'entendement, ni plus ni moins.

M. LeBel : Bien, on va aller souper là-dessus.

Le Président (M. Bachand) : Alors, merci beaucoup pour votre contribution à la commission.

Celle-ci va suspendre ses travaux jusqu'à 19 h 30 ce soir. Merci infiniment.

(Suspension de la séance à 17 h 53)

(Reprise à 19 h 31)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. La Commission des institutions reprend ses travaux. Comme vous le savez, je vous demande bien sûr d'éteindre toutes les sonneries de vos appareils électroniques, s'il vous plaît. Merci beaucoup.

Alors, nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 6, Loi transférant au commissaire au lobbyisme la responsabilité du registre des lobbyistes et donnant suite à la recommandation de la Commission Charbonneau concernant le délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale.

Ce soir, nous entendrons le Commissaire au lobbyisme et la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles.

D'abord, je souhaite la bienvenue aux représentants du Commissaire au lobbyisme. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes de présentation, puis nous procéderons à la période d'échange. Alors, je vous invite donc à vous présenter et à débuter votre exposé, et bienvenue.

Commissaire au lobbyisme

M. Routhier (Jean-François) : Merci beaucoup. Alors, M. le Président, Mmes et MM. les députés membres de la Commission des institutions, mon nom est Jean-François Routhier. Depuis le 17 octobre 2017, je suis Commissaire au lobbyisme du Québec, une personne désignée par l'Assemblée nationale pour un mandat de cinq ans, ayant pour fonction d'assurer le respect de la loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme et du code de déontologie des lobbyistes.

En premier lieu, je tiens à remercier la commission de nous offrir l'opportunité de participer à ses travaux concernant le projet de loi n° 6. Je vous assure de ma plus grande collaboration et de celle de mon équipe pour répondre aux questions de la commission et éclairer les membres de façon objective sur les éléments qui relèvent de la mission du Commissaire au lobbyisme.

Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Émilie Giguère, directrice des communications et du service à la clientèle, qui pilotera le projet de la nouvelle plateforme, éventuellement, si le projet était adopté, Mme Isabelle Bélanger, qui est attachée à la direction et qui agit un peu comme notre whip en chef pour la refonte de la loi, et M. Jean Dussault, secrétaire général de notre institution.

Comme vous le savez, le Commissaire au lobbyisme et son équipe ont pour mission de promouvoir la transparence et la saine pratique des activités de lobbyisme exercées auprès des titulaires de charges publiques, des institutions parlementaires, gouvernementales et municipales, et d'assurer la surveillance et le contrôle des activités de lobbyisme au Québec. C'est donc avec enthousiasme que nous participons aujourd'hui aux auditions tenues par la commission concernant ce projet de loi. Le résultat concret de ce projet, s'il est adopté, est attendu, depuis notre institution, depuis de très nombreuses années.

En premier lieu, en confiant la responsabilité du registre au commissaire, nous pourrons créer une nouvelle plateforme moderne et efficace pour toutes les parties prenantes. Cet outil, qui vise à concrétiser la transparence des activités de lobbyisme dans une nouvelle ère des communications, sera repensé, modernisé et simplifié en s'inspirant des plateformes et d'applications conviviales comme celles des médias sociaux. L'expérience utilisateur sera au coeur de notre vision. Le développement d'une nouvelle plateforme qui tient compte des besoins de tous les utilisateurs nous apparaît depuis longtemps l'un des facteurs de réussite et de modernisation du régime d'encadrement des communications d'influence au Québec. Elle sera, en quelque sorte, la locomotive qui devrait nous mener collectivement vers un régime plus simple, clair, pertinent et efficace.

En second lieu, quant au prolongement du délai de prescription, cet élément apporte des améliorations importantes pour l'ensemble des parties prenantes, la correction d'une anomalie dans notre loi, l'expression d'une volonté claire d'assurer la cohérence avec d'autres régimes similaires au Québec et une meilleure capacité pour notre organisation et notre partenaire, la Directrice des poursuites criminelles et pénales, d'accomplir notre travail respectif de surveillance et de sanction des infractions à la loi de façon plus efficiente.

Ces deux volets constituent l'essence du projet de loi n° 6, dont vous êtes saisis, et sont fondamentaux. Ils rejoignent également les volontés exprimées par mes prédécesseurs et par les ministres responsables de la loi, au cours des années, pour améliorer notre régime d'encadrement. Je remercie donc le gouvernement et la ministre de la Justice d'avoir donné suite rapidement à notre demande de procéder avec ces changements à la loi, dans l'attente d'une réforme plus globale. À ce sujet, comme je m'y suis engagé, je proposerai ce printemps un énoncé de principe fondé sur les meilleures pratiques nationales et internationales, considérant le contexte québécois. Par cette démarche, je souhaite alimenter la réflexion des parlementaires sur l'avenir de notre régime d'encadrement du lobbyisme et humblement tenter de mener vers un consensus à cet égard.

Je tiens finalement à remercier tous les parlementaires et les intervenants avec qui nous avons eu le plaisir d'échanger depuis le début de mon mandat pour leur contribution à notre réflexion et leur ouverture à discuter des enjeux reliés à la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Ces rencontres nous ont démontré l'appui aux changements proposés par le projet de loi n° 6 ainsi que l'intérêt, surtout l'intérêt, envers la transparence et le sain exercice des communications d'influence au Québec. Nous avons pu entendre les représentations effectuées devant la commission depuis ce matin et constatons que la plupart des intervenants est favorable aux modifications proposées par le projet de loi, tout en exprimant certaines inquiétudes que nous devrons nécessairement considérer. Nous avons également entendu le message porté par ces intervenants quant aux besoins des utilisateurs et aux bénéfices attendus du nouveau système. Notre priorité ira à satisfaire ces besoins, et nous y arriverons par la mise en oeuvre de notre vision.

Quelques observations sur le projet de loi en particulier. Nous avons déposé un mémoire auprès de la commission afin de consigner nos observations, et, sous réserve des questions que vous pourriez avoir ou souhaitez aborder avec nous, je vais me limiter à quelques éléments que nous avons mis en relief, dans ce mémoire, sans reprendre évidemment en détail les commentaires du mémoire. D'entrée de jeu, je tiens à préciser, et je sais que la ministre l'a fait à plusieurs reprises, que ce projet de loi ne vise pas à réformer l'encadrement du lobbyisme au Québec ni à étendre la portée de la loi actuelle. Il s'agit, pour le premier volet, d'un projet de loi de nature technique, qui vise le transfert de la responsabilité du Registre des lobbyistes, dans le but de le remplacer par une plateforme technologique moderne, et, pour le second volet, d'un ajustement au délai de prescription des infractions pénales, conformément aux recommandations de la commission Charbonneau.

Concernant le transfert du registre, je tiens à souligner les éléments suivants. Pour des motifs de mise en oeuvre très rapide, en raison du contexte d'adoption de la loi, en 2002, l'administration du régime a été confiée à deux entités distinctes, le commissaire et le conservateur, que je salue, dont les missions, bien que complémentaires, ne visaient pas nécessairement les mêmes finalités et ne relevaient pas de la même autorité. Dans le premier cas, l'Assemblée nationale, et dans le second cas, le ministre de la Justice. Cette double administration a créé de la confusion auprès des parties prenantes — vous avez entendu des commentaires à cet effet aujourd'hui — tout en limitant notre capacité, comme Commissaire au lobbyisme, d'apporter les améliorations technologiques et techniques au registre, au fil des années. Plusieurs éléments du processus d'inscription, de traitement des mandats, vous en avez encore une fois entendu parler longuement aujourd'hui, ont nui à la diffusion en temps opportun des activités de lobbyisme. Ces facteurs sont devenus, en bout de piste, les principales sources de critiques contre le régime actuel, comme l'ont souligné plusieurs intervenants devant cette commission. Depuis 2002, tous les rapports déposés aux autorités ont recommandé de confier l'administration du registre au commissaire, selon ce qui existe dans la majorité des juridictions canadiennes, et il est, à notre avis, urgent de remplacer le registre par une nouvelle plateforme qui permettra de maintenir l'adhésion au régime et de favoriser un meilleur respect de la loi.

• (19 h 40) •

Notre vision de la future plateforme, que je pourrai élaborer davantage plus tard, et reproduite en annexe de notre mémoire, fait déjà l'objet de travaux de consultation avec le service des registres de l'État, avec lequel nous travaillons depuis 2017. Nous croyons donc être en mesure de construire une nouvelle plateforme dans un délai raisonnable qui changera l'expérience utilisateur.

Par ailleurs, le projet de loi n° 6 prévoit que le commissaire devra conclure une entente avec son partenaire actuel, le conservateur, afin d'assurer le transfert et la sauvegarde des données actuellement contenues au registre. Nous avons établi depuis très longtemps une très bonne collaboration avec le conservateur et sommes assurés d'en arriver à un transfert harmonieux, efficace et sécuritaire des données. Nous sommes déjà à déterminer les paramètres de cette entente, que nous souhaitons conclure dans les meilleurs délais.

Enfin, le pouvoir du commissaire d'adopter les modalités de tenue du registre, tel que prévu par le projet de loi, nous permettra de déployer notre vision d'un outil de communication simple, clair, efficace, qui favorise la transparence en temps opportun des activités de lobbyisme. Il me fera plaisir d'illustrer plus concrètement de telles modalités, si vous le souhaitez, et de faire surtout la distinction avec un véritable pouvoir réglementaire.

Concernant le prolongement du délai de prescription des infractions pénales, je me limiterai à ce qui suit : le régime actuel ne permet pas au commissaire et à la Directrice des poursuites criminelles et pénales d'assurer une surveillance et une sanction adéquates des infractions de la loi. La Directrice des poursuites criminelles et pénales nous a confirmé son appui au prolongement du délai. Ce délai de prescription est le plus court dans l'ensemble des juridictions canadiennes et incohérent avec des régimes similaires du corpus législatif québécois. Il n'a pas bien servi les intérêts des Québécois car il a freiné, au cours des années, la capacité du commissaire et du DPCP d'entamer de nombreuses poursuites pénales parce qu'il était déjà expiré ou le serait vraisemblablement avant le dépôt de poursuites. Et cette situation, finalement, a fait l'objet de nombreux commentaires et critiques au fil des années, et notamment on nous a dit que le commissaire manquait de dents. Alors, c'est un peu l'objectif de cet allongement du délai, de nous permettre d'avoir les moyens requis pour accomplir notre mission. Enfin, évidemment, les mêmes rapports produits par les ministres responsables ont recommandé d'augmenter ce délai de prescription.

En conclusion, nous recommandons l'adoption des dispositions du projet de loi n° 6 dans leur intégralité concernant le transfert de la responsabilité du registre et l'allongement du délai de prescription applicable à la prise d'une poursuite pénale. Je vous remercie de votre attention, et évidemment nous sommes à votre disposition pour toute question.

Le Président (M. Bachand) : Merci infiniment. Nous allons débuter la période d'échange. Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : Alors, merci, merci, M. le commissaire, merci aux gens qui vous accompagnent d'être ici, avec nous ce soir, surtout pour ce projet de loi qui vous concernera naturellement directement et qui fera en sorte de vous passer le ballon, là, pour la suite des événements.

Vous l'avez bien dit, et bien fait de le préciser, je le reprécise encore, effectivement, ce projet de loi là, ce ne sont que les premiers jalons, c'est une... avec une portée beaucoup plus technique. Nous avons entendu plusieurs groupes — vous étiez présents ce matin — qui nous font part de plusieurs autres préoccupations qui pourront, j'en suis certaine, être regardées pour vous et peut-être soulignées, ou soulevées, ou répondues, ces attentes-là, ces préoccupations-là, dans une réforme plus globale et dans des énoncés de principe qu'on aura le plaisir de lire au printemps, quand vous aurez déposé votre rapport.

Ceci étant dit, peut-être relever quelques petites choses qui sont... dans ce que vous venez de dire, de votre mémoire, vous avez mentionné effectivement que ce transfert-là, concernant le registre... Le registre a soulevé beaucoup de commentaires sur les délais de traitement, la complexité du processus d'inscription, la validation préalable des mandats et la désuétude, entre autres technologique, du registre. On comprend l'historique de l'instauration du registre et pourquoi l'endroit où il est maintenant a été choisi à l'époque. Maintenant, on est, je pense, 18 ans plus tard, si je ne me trompe pas, 2018, effectivement, 18, 19 ans plus tard, donc je pense qu'il est, depuis longtemps, fort pertinent de se poser la question. Ce qui m'interpelle particulièrement, c'est que vous dites que, bon, les différents facteurs que je viens de nommer sont les principales sources de critiques, naturellement, mais que vous vous adressez à l'urgence de revoir en profondeur le modèle opérationnel du registre dans le but de maintenir l'adhésion des parties prenantes au régime d'encadrement et de favoriser le respect de la loi. Est-ce que vous craignez que, si ce projet de loi ne va pas de l'avant et si on ne procède pas, justement, à ce transfert-là... est-ce que vous craignez une sorte de désengagement?

M. Routhier (Jean-François) : Dans les faits, je pense qu'il y a déjà un certain désengagement et que toutes les communications qui, légalement, devraient être inscrites au registre ne le sont pas nécessairement, que la complexité du processus d'inscription peut décourager des personnes de le faire, particulièrement, et vous avez eu plusieurs témoignages aujourd'hui, particulièrement des gens qui ne le font pas souvent ou qui ne sont pas équipés, qui n'ont pas les ressources nécessaires aujourd'hui pour faire ce travail. Dans certains cas, même, il est possible que des gens déposent des mandats et finalement ne les complètent jamais. On fait ce suivi-là de façon hebdomadaire, c'est-à-dire des mandats qui ont été déposés en projet et qui n'ont jamais été publiés au final. Alors, dans certains cas, il y a peut-être des mandats qui ne sont tout simplement pas inscrits.

Je pense qu'il faut revoir un peu la façon dont on réfléchit aux activités de lobbyisme. On vous a parlé aussi de changer l'image. Il est évident que, si le registre est convivial, facile d'accès et qu'on est en mesure d'accélérer grandement le processus d'inscription, on va favoriser une meilleure adhésion. Et, pour nous, c'est un peu la stratégie qui est mise de l'avant, c'est-à-dire que, pour contrer, si vous voulez, les critiques et ce désengagement potentiel là face à la transparence des communications d'influence, on souhaite avoir une plateforme qui va vraiment être très, très efficace et facile d'accès.

Mme LeBel : Alors, je vais prendre la balle au bond sur ce que vous venez de dire, parce qu'on en a effectivement discuté avec les groupes qui sont passés devant nous depuis ce matin, cette espèce de démonisation de la profession de lobbyiste a été soulevée. Et je comprends, donc, que la mise en place d'un encadrement, naturellement, c'est pour des raisons de transparence et non pas pour lancer un message que ce n'est pas bien de faire du lobby. Je pense que ce n'est pas l'objectif. On a soulevé aussi cette question-là : Qu'est-ce que vous pensez peut-être de préciser ça dans le préambule de la loi ou est-ce que vous pensez que l'article 1 de la loi actuelle ne fait pas le travail? Est-ce qu'on devrait aller plus de l'avant pour redorer... je n'aime peut-être pas ce terme-là, mais redorer en quelque sorte cette profession ou, en tout cas...

M. Routhier (Jean-François) : Bien, écoutez, je vais vous citer, en fait, le projet de loi n° 6, son objectif, est un projet de loi technique et un projet de loi pour allonger la prescription. Je vous ai promis, et nous allons tenir promesse, nous allons déposer un diagnostic complet de la loi ainsi qu'un énoncé de principe avant la fin de la session parlementaire, idéalement avant. Et on est dans les derniers milles de ce travail-là. On a travaillé depuis un an, on a rencontré des dizaines et des dizaines d'intervenants, des élus, des titulaires de charges publiques, des lobbyistes, on a un comité aviseur qui nous accompagne là-dedans, on a fait affaire avec des experts à l'externe, on a lu à peu près tout ce qui s'est écrit en matière de lobbyisme dans le monde dans les dernières années et on a fait appel à la chaire de l'Université Laval pour faire une recherche complètement indépendante sur différents éléments. Je pense que, oui, très clairement, il faudrait affirmer davantage la légitimité du lobbyisme, mais ça fait partie d'un tout, à mon avis.

Il y a bien d'autres éléments dont on pourrait discuter, et évidemment ça me fera plaisir de vous en parler, mais je pense que ce n'est pas le forum, dans ce projet de loi, d'aller faire des modifications, par exemple, au préambule de la loi actuelle parce que, ce faisant, oui, on va atteindre un meilleur... un objectif qui est tout à fait louable, mais on ne réglera pas tous les enjeux de l'encadrement du lobbyisme au Québec. Et ce ne sont pas que des changements de cette nature-là qui vont rendre, comment je dirais, sa noblesse au lobbyisme. On a besoin peut-être de faire un exercice beaucoup plus complet.

Mme LeBel : Parfait. Donc, revenons effectivement à nos moutons et parlons du transfert du registre. Plusieurs... bon, la majorité des groupes se sont prononcés en faveur, naturellement, de ce transfert-là, plusieurs des raisons étant celles que vous avez énoncées, naturellement, dans votre énoncé, dans votre mémoire : les difficultés techniques, technologiques, le manque de facilité d'accès au registre. Et beaucoup des groupes favorables nous ont mentionné également que cette... qu'ils espéraient... Parce qu'à moins que je me trompe, nulle part, dans le projet de loi, il n'y a une obligation de moderniser le registre. On parle d'un transfert. Donc, ils ont souhaité que ce transfert-là et ce transfert de données, donc, d'un registre à l'autre, d'une plateforme à l'autre mènent nécessairement à une modernisation, une simplification. Est-ce que ça fait partie, effectivement, de vos intentions, bien que le projet de loi ne le mentionne pas?

• (19 h 50) •

M. Routhier (Jean-François) : Alors, je pourrais vous confirmer qu'il n'est aucunement question de reprendre la technologie actuelle. Au contraire, on va vouloir développer une technologie qui est complètement différente. On veut que les gens perçoivent les activités de lobbyisme comme un dialogue. Oui, il y a un dialogue citoyen qui doit être libre, mais il y a aussi un dialogue avec les représentants de l'État, avec les titulaires de charges publiques. Et on regarde ce qui se fait aujourd'hui, je vous donne mon exemple fétiche, vous allez sur LinkedIn, vous allez sur des plateformes, que ce soit Facebook ou d'autres, où on voit cet échange. Et je pense qu'en créant un régime différent, axé vraiment sur de l'information qui est facile à inscrire, facile à trouver et avec des listes déroulantes, on a donné énormément l'exemple aujourd'hui concernant la liste des ministères et organismes, sachez que c'est clairement une des choses qu'on va faire, on va s'assurer que la liste des ministères et organismes se mettra à jour toute seule, mais ce n'est pas tout. Évidemment, je vous invite à regarder la vision qu'on a énoncée de la future plateforme. Le simple fait qu'on utilise le terme plateforme dans la loi m'apparaît quand même intéressant, mais, s'il faut absolument préciser qu'on aura un régime simple et efficace, je n'ai pas d'objection parce que c'est clairement notre objectif, et c'est ce qui est exprimé aussi dans notre vision à la toute fin de notre mémoire.

Mme LeBel : Merci. Plusieurs ont émis également la préoccupation du fait que la ministre, dans le projet de loi, vous transfère un certain pouvoir réglementaire ou abdique un certain pouvoir réglementaire au bénéfice du Commissaire au lobbyisme, entre autres celui justement de régler les modalités du registre. En ce que je pense qu'il faut dire, d'entrée de jeu... que le pouvoir qui est transféré au commissaire n'est pas de fixer les demandes de ce qui doit apparaître dans le registre, mais plutôt la forme et non pas le fond, je vais le dire de cette façon-là.

Dans le projet de loi actuel, on prévoit qu'en cas d'exercice de ce pouvoir qui est transféré au commissaire, 45 jours, sur le site Internet, de consultation, donc, qui viendrait, si vous voulez, se calquer un peu sur la consultation réglementaire, mais, on s'entend, dans une forme beaucoup plus simplifiée, semblait soulever quelques préoccupations pour les groupes qu'on a entendus. Peut-être en deux temps, il y a la plateforme, le transfert de la plateforme A, c'est-à-dire la plateforme actuelle, le registre actuel, à la plateforme B, celle qui va faire l'objet du transfert vers lequel on va transférer les données. Pensez-vous ou aviez-vous l'intention de consulter, de façon différente ou plus que le 45 jours prescrit par la loi, les groupes qui sont les usagers, si on veut, du système pour tester un peu avec eux ce que vous entendez faire et voir si ça répond à leurs attentes et à leurs besoins effectivement?

M. Routhier (Jean-François) : Alors, écoutez, là-dessus, c'était déjà dans nos plans à nous, mais on n'a pas écrit ça nulle part, d'avoir un comité aviseur qu'on souhaite composer d'utilisateurs. Donc, on parle évidemment, de lobbyistes actifs, on parle aussi de titulaires de charges publiques, on parle aussi de journalistes. Donc, on souhaiterait avoir un comité comme celui-là qui va nous accompagner. Oui, on parle des modalités, mais je pense qu'on doit être accompagnés depuis le tout début de la construction de plateforme pour s'assurer qu'on rencontre cette obligation qu'on se met de répondre aux besoins des utilisateurs. Alors, nous allons avoir... en fait, nous allons souhaiter avoir un tel comité aviseur. On a déjà un comité consultatif qui nous accompagne dans plusieurs modifications, on va maintenir ce comité-là, mais on souhaitera aussi avoir un comité plus technique, un comité aviseur plus technique, pour, si vous voulez, les paramètres, le paramétrage de la future plateforme.

C'est un peu la même chose pour les modalités. Mais, si vous me permettez, concernant les modalités et ce qui est prévu par le projet de loi, très honnêtement, nous ne percevons pas ça comme étant un pouvoir réglementaire. D'une part, on a insisté pour que le pouvoir réglementaire qui est prévu présentement à l'article 66 de la loi demeure un pouvoir réglementaire du gouvernement et qu'il maintienne l'ensemble des modalités du pouvoir réglementaire.

La deuxième chose, c'est qu'on a accepté, sans aucun problème, des mesures qui confèrent une beaucoup plus grande transparence aux modalités tenues du registre que ce qui était fait à l'époque. Présentement, les modalités de tenue du registre sont émises par le conservateur sous forme d'avis, sous forme de bulletins. Alors, on n'est même pas dans un pouvoir réglementaire. Alors, je ne voudrais pas qu'on se mêle dans, disons, la nature technique des règlements versus modalités, mais il ne faut pas oublier qu'on a un projet de loi, il y a des dispositions et il y a la loi actuelle. Je ne peux pas, par exemple, aller au-delà de ce qui est prévu aux articles 9 et 10 de la loi, dans l'information qui est exigée, à moins qu'un règlement du gouvernement vienne modifier ces éléments-là. Par contre, les modalités, ce sont des aspects techniques, des aspects de transfert de données, des aspects... comment entrer l'information dans le nouveau registre. On est beaucoup plus dans des modalités administratives et techniques, que dans un pouvoir réglementaire d'ordonner des choses et de sanctionner sur cette base-là.

Reste que je ne peux pas, aujourd'hui, puisqu'on n'a même pas, évidemment, ce pouvoir-là, vous dire quelles seraient les modalités qui seraient adoptées et encore moins vous les présenter avant la sanction du projet de loi puisque, s'il faut attendre ce moment-là, ça veut dire qu'on aura construit la plateforme. Ça veut dire qu'on ne pourra pas avoir une sanction avant un très, très long moment. Je pense que ce n'est pas ce qui est souhaité par les utilisateurs.

Mme LeBel : Bon, peut-être rapidement, vu qu'il me reste deux minutes, on a parlé de beaucoup de choses, mais on a parlé entre autres du 10 jours, le 10 jours pour se conformer à un avis d'irrégularité, je vais l'appeler comme ça, de façon générale. Qu'en pensez-vous, sur ce qui a été dit par rapport à ça? Vous l'avez entendu comme moi.

M. Routhier (Jean-François) : Dans notre vision du nouveau registre, on ne pas de validation a priori des mandats. Ça, ce que ça veut dire, c'est que l'information peut être publiée en temps réel. Au moment où le lobbyiste inscrit son mandat, cette information-là devient instantanément disponible au citoyen sous forme peut-être préliminaire, avec un certain délai pour venir modifier cette information-là. Ce que ça veut dire, en bout de piste, c'est que, nous, ce qu'on souhaite, c'est une plateforme qui ne nécessitera pas, même pas les 10 jours pour faire la mise à jour de l'information et qui va surtout pouvoir informer en temps réel la personne lorsqu'elle rédige son mandat ou après un certain délai qui va pouvoir avoir des fonctionnalités, si vous voulez, de notification, comme on en voit partout dans les outils informatiques qu'on utilise à tous les jours. Donc, ces notifications-là vont pouvoir informer la personne qu'il y a des manquements dans l'information à son mandant, et il pourra les corriger. Est-ce que le délai de 10 jours est suffisant? Je crois que oui. S'il y avait un enjeu réel, je ne pense pas que l'objectif, non plus, c'est de sanctionner sur les premiers mois ou les premiers éléments qui vont ressortir, une fois qu'on va avoir une nouvelle plateforme.

Le Président (M. Bachand) : 30 secondes pour conclure. M. le député d'Ungava, vous avez 30 secondes.

M. Lamothe : Je n'aime pas me répéter, sauf que, je l'ai dit tantôt, le mot «transparence» revient souvent. Vous êtes en poste depuis 18 mois. Est-ce que c'est un problème?

M. Routhier (Jean-François) : Non. Très honnêtement, je ne crois pas que la transparence est un problème. C'est un, comment je dirais, c'est un bien précieux dont il faut s'occuper. Et on va perdre de la transparence, on perd de la transparence, notamment à cause de notre outil qui est censé, hein, si vous voulez, incarner la transparence au Québec. Mais les citoyens ne le consultent pas, et les gens le trouvent trop difficile à utiliser. Alors, on va y perdre si on ne s'en occupe pas, mais je ne pense pas qu'on a un réel problème de transparence, dans le cadre du projet de loi n° 6. En plus, ce n'est pas ça, véritablement, dont on souhaite discuter. Ce sera vraiment dans le cadre de la refonte où on pourra se questionner beaucoup plus longuement sur ces éléments-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je me tourne vers le député de LaFontaine. S'il vous plaît.

M. Tanguay : Merci beaucoup. Merci beaucoup au Commissaire au lobbyisme d'être présent ainsi que les personnes qui l'accompagnent. Vous parlez, donc, d'une nouvelle, évidemment, plateforme technologique dans votre mémoire. Avez-vous une analyse des coûts? Ça engagerait quels coûts? De quoi parlons... De combien parlons-nous?

M. Routhier (Jean-François) : En fait, depuis 2017, on a collaboré avec le secteur des registres de l'État qui est au ministère du Travail, Emploi et Solidarité sociale. À l'époque, c'était dans le cadre du projet de loi n° 56, où on a monté une étude d'opportunité pour la réalisation d'une nouvelle plateforme. On est repartis de cette base-là il y a quelques mois. On est en train de faire la mise à jour de cette étude. Et les coûts qui sont avancés présentement... En fait, il y a différentes étapes à franchir dans la construction d'une nouvelle plateforme. Les coûts, présentement, qui sont avancés, sont de l'ordre de 480 000 $ pour, si vous voulez, réaliser une étude de projet complète où on va avoir identifié les solutions technologiques et, ensuite, un développement de la plateforme qui pourrait varier entre 1,4 et 2,3, ou 2,8 millions de dollars, 2,8 millions étant la tranche supérieure qui avait été annoncée dans l'étude d'opportunité de 2016, en fait, qu'on est en train de remettre à jour.

• (20 heures) •

M. Tanguay : Et est-ce qu'un le délai de 30 mois tient la route? Est-ce qu'il n'y a pas moyen de faire ça plus court?

M. Routhier (Jean-François) : En fait, on nous offrait 36 mois, et j'ai insisté pour réduire à 30 mois pour être certain de donner un signal clair aux gens qu'on n'avait pas l'intention de s'éterniser sur la construction de cette nouvelle plateforme. Et, en plus, nous avons la capacité... en fait, le gouvernement a la capacité de mettre en oeuvre cette plateforme-là bien avant en adoptant un décret qui mettra en oeuvre les dispositions. Je trouve simplement qu'il faut véritablement se donner le temps de le faire. Ça fait 17 ans ou, en tout cas, à tout le moins 12 ans qu'on réclame le transfert du registre. Il y a énormément de travail à faire. Je pense que ça mérite qu'on prenne le temps de le faire.

Notre objectif est en deçà du 30 mois, c'est évident, mais ce serait probablement une perte de temps des parlementaires que de revenir, de rouvrir cette loi-là s'il nous en manquait un, par exemple.

M. Tanguay : Vous dites : On vous proposait 36 mois. Qui vous proposait 36 mois?

M. Routhier (Jean-François) : Bien, c'est-à-dire que, dans les versions originales du projet de loi, on a pu voir 36 mois. Je pense que c'est ce qui était prévu aussi peut-être dans le projet de loi n° 56. Nous, on a souhaité avoir le 30 mois, en termes de durée, pour la construction de la nouvelle plateforme pour donner un message quand même qu'on n'était pas dans le trois ans. On était beaucoup plus dans deux ans et demi en termes de délai.

M. Tanguay : Et la ministre l'a dit à quelques reprises, il y avait une procédure de transfert des données à la main. Autrement dit, on ne va pas bâtir sur la vieille plateforme, mais on partirait d'une plateforme neuve, comme une fondation. Quand la fondation est saine, le reste de la bâtisse va être droit et sain. Donc, vous confirmez que ce serait, ni plus ni moins, quasiment à la main que les données seraient transférées d'une plateforme à l'autre?

M. Routhier (Jean-François) : Non. En fait, je pense que, bon, c'est une image, évidemment, qu'on peut se donner. Ce ne sera pas simple, parce qu'il y a certaines données du registre actuel qu'on n'est pas capables de lier entre elles. Les lobbyistes d'entreprise, avec les mandats... et les entreprises représentées, elles ne sont pas intégrées pleinement.

Il y a une grande partie de l'information qu'on pense être en mesure de transférer, parce qu'on obtient déjà la banque de données du registre sur une base SQL, là, en termes technologiques, et on est capable d'extraire des informations de cette base de données là. Donc, il y a très clairement une partie des données auxquelles on va avoir accès directement et qu'on pourrait intégrer.

La difficulté, c'est qu'on ne connaît pas encore la nouvelle plateforme, on ne sait pas comment elle va accueillir ces données-là. On ne sait pas non plus comment on voudra organiser cette information-là, parce que, présentement, vous avez un très long texte de mandat. Comment on va vouloir disséquer cette information-là pour qu'elle soit conviviale, qu'elle soit facile à lire?

Donc, si vous voulez, les paramètres de la nouvelle plateforme vont être très importants dans cette décision et dans cette faculté de transférer aisément les données. Mais, s'il faut véritablement embaucher des gens pour compléter ce travail-là pendant quelques mois, on le fera pour s'assurer que toute l'information sera transférée.

M. Tanguay : Est-ce que... donc, faire du pouce sur ce que vous venez de dire. Est-ce qu'il est déjà acquis que de l'expertise externe sera requise et embauchée?

M. Routhier (Jean-François) : Dans l'état actuel des choses, on a embauché quelques ressources internes. Évidemment, puis certains vous l'ont souligné, nous relevons de l'Assemblée nationale. Nous sommes donc financés par l'Assemblée nationale, et on ne pourra pas réaliser ce projet-là si l'Assemblée nationale ne nous accorde pas les ressources nécessaires pour y arriver. On aura nécessairement besoin d'avoir recours à des experts. On fait déjà affaire avec le service... le secteur des registres de l'état. On va voir, au cours des prochains mois, comment on doit compléter cette expertise-là pour concrétiser la plateforme.

M. Tanguay : Oui. Bien, je trouve ça intéressant de voir également jusqu'à quel point on a l'expertise à l'interne ou il faut nécessairement aller à l'externe, là, puis engager des firmes. S'il faut le faire, des fois, il faut le faire, puis on est assuré d'avoir les meilleures personnes.

Donc, cette plateforme, au niveau de la faire fonctionner, est-ce que déjà vous prenez pour acquis que des aides aux lobbyistes qui voudront s'inscrire... Donc, pour la faire vivre, est-ce que l'on devra engager — la faire mieux vivre, peut-être — des ressources supplémentaires?

M. Routhier (Jean-François) : Oui, tout à fait. En fait, la plateforme devra venir avec certaines ressources. Si on se fonde sur le rapport annuel qui a été déposé par le conservateur, il y a à peu près neuf ETC, si vous voulez, en langage... qui sont présentement employés à faire fonctionner le registre. Est-ce qu'on... Alors, c'est un peu... Ce qu'on a présenté dans nos prévisions budgétaires, c'est entre huit et 10 employés qui seront affectés au registre. Il y a toute la portion construction, évidemment. Ensuite, il y a toute la portion service à la clientèle, et c'est là qu'on aura besoin d'un support à plus long terme. Alors, ça ne veut pas dire des ressources embauchées demain matin pour construire. On va avoir accès à différentes autres ressources, mais on va en avoir besoin certainement à plus long terme pour donner le service clientèle pour... si vous voulez, qui est déjà accordé et assuré par le conservateur. Donc, nécessairement, oui, des ressources additionnelles seront nécessaires.

M. Tanguay : Je veux laisser du temps — puis je vous remercie pour vos réponses — à ma collègue de poser quelques questions.

Dernière question. Vous avez entendu un peu ce qui a été dit aujourd'hui par rapport à tout le secteur santé des gens qui, peut-être par mégarde, p.l. n° 10, p.l. n° 20, auraient été inclus, puis que c'était plus ou moins l'intention du législateur. Quelle est votre idée par rapport à ça? On se disait que ce n'était pas réellement l'intention du législateur d'inclure toutes ces personnes et que ça alourdissait le système. Y voyez-vous là, nous, s'il faut le faire, une occasion de fermer cette porte-là?

M. Routhier (Jean-François) : Bien, encore une fois, je vais vous donner un peu la même réponse que j'ai donnée à la ministre tout à l'heure. Je pense que ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 6 et je pense que cette réflexion-là mérite d'être faite de façon beaucoup plus globale, parce qu'on peut se questionner aussi sur le fait que le secteur de l'éducation n'est pas visé par la loi, que ces deux secteurs-là ont été exclus en 2002 et qu'aujourd'hui, oui, la santé a été ramenée dans ce giron-là, alors qu'on a des élus du secteur de l'éducation qui ne sont toujours pas visés par la loi.

Donc, est-ce qu'en faisant ça, est-ce qu'en faisant ce débat-là sur la santé aujourd'hui on ne vient pas outrepasser un peu le mandat du projet de loi n° 6? Et cette réflexion-là aussi, je pense qu'elle doit aller plus loin. Il faut se questionner sur les activités. Donc, j'aurais tendance à faire ça dans un deuxième débat.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, il vous reste deux minutes.

Mme Weil : Peut-être, je vais continuer là-dessus, parce que vous avez, tout de suite au début, parlé d'énoncé de principe peut-être que vous pourriez faire. Donc, l'idée, c'est lorsqu'on parlait, est-ce qu'il faudrait rajouter des éléments dans le préambule... parce que je pense que l'idée, c'était, parce qu'on parle de s'enregistrer, justement, du registre, peut-être c'est l'occasion de dire : C'est une bonne chose, pourquoi c'est une bonne chose.

Mais ce que vous dites, et on comprend, c'est beaucoup plus vaste et large. Et donc il faudrait peut-être faire une réflexion beaucoup plus large, mais qu'on ne perde pas de vue, peut-être, ces genres d'énoncés qui font partie de la vision, parce qu'il faut sensibiliser la population par rapport à l'exercice de lobbyisme, c'est tout à fait légitime, etc.

Donc, c'est un peu... Donc, si je comprends bien, vous voulez comme engager, comme, une discussion peut-être plus large pour réfléchir? C'est ça? Énoncé de principe, peut-être expliquer ce que vous avez en tête.

M. Routhier (Jean-François) : Oui, tout à fait. Dans les faits, ce qu'on souhaite déposer, c'est un diagnostic de notre loi. Et c'est un de vos collègues ici qui nous a proposé de faire cet exercice-là. Et donc, on a fait ce diagnostic-là et on va déposer, en même temps, un énoncé de principe. Cet énoncé de principe là est fait sur la base de nos recherches. À travers le monde, quelles sont les meilleures pratiques d'encadrement du lobbyisme? Où est-ce qu'on doit vraiment mettre le doigt? Qu'est-ce qu'on doit viser par un encadrement du lobbyisme en 2020? En 2002, il y avait certains éléments; en 2020, où est-ce qu'on en est rendus, nous, au Québec, comme société? Comment on souhaite se positionner?

Alors, l'idée d'avoir une plateforme aujourd'hui et qui va évoluer en même temps qu'on pourrait avoir cette discussion-là sur une réforme de la loi, peut-être qu'on arrivera finalement à avoir et une nouvelle plateforme, et une nouvelle loi en même temps. Ce serait le monde idéal. Alors, on vous a parlé de mon rêve ce matin, ça en fait partie.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.

M. Leduc : Merci, M. le Président. Merci d'être venu nous parler ce soir. D'abord rebondir sur la question de l'inclusion des OBNL, OSBL, dépendamment, là, dans une éventuelle nouvelle réflexion. Je comprends que vous nous préparez un diagnostic qui serait publié dans les prochaines semaines. Est-ce qu'il va contenir une recommandation de votre part quant à l'inclusion ou pas des OBNL?

M. Routhier (Jean-François) : En fait, le diagnostic et l'énoncé de principe, notre objectif, c'est de le déposer directement à l'Assemblée nationale, donc de rendre public l'ensemble de ces travaux — en fait, on va le déposer probablement au président de l'Assemblée nationale qui pourra le partager avec l'ensemble des députés — et de demander que ces éléments-là soient étudiés en commission, qu'on ait véritablement un échange et une discussion.

L'encadrement des OBNL, dont on a fait largement état aujourd'hui, n'est, selon moi, qu'un des éléments qui doivent faire l'objet de cette discussion-là.

M. Leduc : Vous, vous allez faire une recommandation en ce sens? Parce que...

• (20 h 10) •

M. Routhier (Jean-François) : C'est-à-dire que notre énoncé de principe vise à non pas faire une recommandation claire au... parce qu'on n'est pas dans un projet de loi non plus. Ce qu'on vise à faire, c'est susciter cette discussion-là, et, oui, on va vous faire part de quelles sont les meilleures pratiques d'encadrement du lobbyisme à travers le monde. Ça couvrira, en fait, qui sont les lobbyistes. Ça couvrira aussi quelles sont les activités de lobbyisme qui sont pertinentes.

Donc, c'est vraiment dans cet esprit-là qu'on va vouloir vous amener. Et, oui, on aura la chance évidemment, bien, j'espère, en fait, d'en débattre et d'entendre toutes les parties intéressées.

M. Leduc : Avez-vous une idée du nombre de personnes en ce moment qui exercent des activités de lobbying au Québec sans être inscrites au registre, un pourcentage par rapport à ceux qui le sont?

M. Routhier (Jean-François) : J'aimerais beaucoup, mais non.

M. Leduc : Une estimation, peut-être?

M. Routhier (Jean-François) : Aucune espèce d'idée. En fait, si on regarde notre registre, présentement, il semble contenir autant d'informations, de mandats que dans l'État... en fait, qu'à Washington. Alors, on peut penser qu'à Washington il y a beaucoup d'activités de lobbyisme. Il y a beaucoup de mandats dans notre registre, aujourd'hui, qui peut-être ne devraient pas y être inscrits et beaucoup d'autres qui devraient peut-être y être inscrits. Et, si... en fait, ce sont des éléments de notre diagnostic où il faut se questionner et savoir quels sont les véritables mandats, quelles sont les véritables activités de lobbyisme, donc aussi beaucoup de questions d'interprétation.

Mais je peux simplement vous dire que la notion de partie importante dans la loi actuelle est un enjeu réel. Elle a été décriée depuis très longtemps parce qu'elle n'est pas claire. Je ne crois sincèrement pas que d'arriver avec un pourcentage, comme le fédéral, à 20 %, comme ça vous a été mentionné aujourd'hui, est la meilleure façon d'y arriver non plus, parce que ce n'est pas vrai que c'est facile à évaluer. Et ça veut dire aussi qu'on accepte d'emblée, comme société, que 20 % des activités de lobbyisme ne sont pas transparentes. Mais ça fait partie, je pense, du débat plus large qu'on devra avoir. Je me ramène toujours, évidemment, au transfert du registre et aux sanctions pénales.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît.

M. Ouellette : Merci, M. Routhier et les gens qui vous accompagnent. Je suis un peu... je ne dirais pas sceptique, mais je vais dans le sens de la question de mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. On va travailler sur un projet de loi, le projet de loi n° 6, qui va amener une nouvelle plateforme. On ne sait pas vraiment si on a toutes les inscriptions, si on n'a pas toutes les inscriptions. À partir du moment où on travaille sur une nouvelle plateforme, ça va être difficile qu'on puisse intervenir. On en a pour maximum 30 mois, ça pourrait aller à 24 mois. Vous nous arriverez, dans les prochaines semaines, avec un rêve, une vision idéaliste de vers quoi on devrait aller.

Ça pourrait-u arriver que, dans le champ, les gens se disent : Bon, mais qu'ils se fassent une idée, là, bon, on s'inscrira ou on attendra la nouvelle plateforme. Ça a l'air d'être bien trop compliqué, puis, de toute façon, on ne le sait pas, puis ils n'ont pas l'air à le savoir si on est inscrit ou on n'est pas inscrit. Rassurez-moi.

M. Routhier (Jean-François) : Écoutez, c'est un bon mandat, quand même, que vous me donnez. Je pourrais vous dire simplement que, même s'il n'y avait pas de réforme de la loi, même si on ne rediscutait pas des activités de lobbyisme puis la définition de la santé, de l'éducation, des OBNL, etc., même si ça ne se faisait pas, et d'ailleurs ça ne s'est pas fait depuis 17 ans, je pense qu'il faut quand même transformer notre plateforme pour avoir un outil qui est véritablement efficace et qui va permettre la transparence véritable des activités de lobbyisme.

Notre loi actuelle, elle n'est pas si mauvaise que ça. On s'est questionné à savoir : Est-ce qu'on peut l'améliorer? Mais il y a de très bonnes choses dans notre loi actuelle. Le fait qu'on vise les municipalités, qu'il n'y ait qu'une seule institution qui relève de l'Assemblée nationale, ça, c'est un des éléments, je vous dirais, qui m'a interpelé cet après-midi, de voir cette espèce de méfiance ou de crainte par rapport au pouvoir qu'on allait donner au Commissaire au lobbyisme. Nous sommes une personne désignée, on relève directement de l'Assemblée nationale. Je pense qu'il y a là, en tout cas, à mon avis, de quoi rassurer, mais, même si on n'y arrivait pas à faire cette réforme de la loi, je pense que ça demeure impératif. On se donne un outil moderne pour, à tout le moins, mettre en oeuvre la loi actuelle.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Sur ces bonnes paroles, je vous remercie encore une fois de votre travail, votre exposé aujourd'hui.

Je vais suspendre les travaux pour quelques instants pour accueillir le prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 20 h 15)

(Reprise à 20 h 17)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Alors, la commission reprend ses travaux.

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Alors, s'il vous plaît! Merci. Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et puis, par après, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.

Je vous invite donc à vous présenter et à débuter votre exposé, en vous souhaitant toujours la bienvenue.

Table des regroupements provinciaux d'organismes
communautaires et bénévoles (TRPOCB)

Mme Provencher (Doris) : Oui. Alors, bonjour. Bonsoir, c'est vrai, il est quand même un peu tard.

Alors, Doris Provencher. Moi, je travaille à l'association des groupes — je vais le dire une fois, je ne le répéterai pas — l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec ou L'AGIDD-SMQ, et membre du conseil exécutif de la table des regroupements provinciaux et bénévoles.

Mme Roberge (Mercédez) : Mercédez Roberge, coordonnatrice de la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles. On dira la table, pour la suite des choses.

Mme Provencher (Doris) : Oui, c'est cela. Alors, dans un premier temps, bien, merci à la commission de nous accueillir. On est votre dessert, si on a bien compris, hein? À cette heure-là, vous êtes... Oui. Ça fait qu'on va essayer de ne pas trop vous endormir.

Alors, la table des regroupements provinciaux, elle regroupe 44 organismes nationaux dont la principale mission, en grosse majorité, c'est la santé et les services sociaux. Mais nous sommes ici ce soir à titre de porte-voix d'un regroupement d'organismes, qui s'appelle Mon OSBL n'est pas un lobby, qui regroupe différents organismes qui viennent de différents secteurs à travers le Québec, depuis plusieurs années. Donc, nous sommes leur porte-voix.

Au niveau de... On va y aller un peu mélangé dans notre mémoire. On veut saluer, premièrement, la décision de la ministre de ne pas avoir inclus la question de l'assujettissement des OSBL dans le projet de loi n° 6. On veut par contre nous assurer que, de un, ce n'est pas dans le projet de loi n° 6, mais que ça ne sera pas dans d'autres projets de loi non plus, concernant la question du lobbyisme. Et donc notre intervention, on peut l'appeler une intervention préventive, hein, pour dire... parce que pour... Il y en a, entre vous, qui ne connaissent pas la grande et la petite histoire du Mon groupe n'est pas un lobby, qu'est-ce qui s'est passé, pourquoi les positions. Donc, c'est aussi pour ça qu'on est venus vous rencontrer.

Je vous amènerais peut-être à la page 12 du mémoire. Ce sont nos recommandations. On les a divisées comme en trois parties. Les trois premiers... les trois premières, pardon, recommandations, on les a appelées le thème «acharnement», hein? C'est vraiment pour dire... parce que ma collègue va vous parler un peu plus de ce qui s'est passé. Donc, il y a vraiment... on est ici pour dire : On ne veut pas y être, et on le réitère, et on le répète. Les recommandations 4 et 5, nous sommes insécures. On a besoin que vous nous sécurisiez, parce qu'entre autres le projet de loi n° 56 on a appris quasiment par hasard qu'il était mort au feuilleton, donc personne... Donc, on a besoin de sécurité, et les recommandations 6 et 7, bien, c'est, bien sûr, de vous réitérer comment c'est important pour nous la consultation sur les différents documents qui sont en lien avec le lobbyisme.

Alors, maintenant, je passerais la parole à ma collègue Mme Roberge pour qu'elle vous raconte... Il était une fois...

• (20 h 20) •

Mme Roberge (Mercédez) : Oui. Alors, il était une fois un projet de loi n° 80, avant même la loi en 2002, qui, pour nous, est important à souligner parce que, dans le projet de loi n° 80, qui a précédé l'adoption de la loi qui a été adoptée en 2002, il y avait déjà l'exclusion des OSBL qui étaient formés majoritairement d'organisations qui étaient aussi des OSBL, donc. Et, dans la loi adoptée en 2002, il y a déjà eu... il y avait déjà la mention qu'un règlement accompagnerait la loi pour préciser cette exclusion-là, mais, en même temps, ça crée de la confusion. C'est pour cette raison-là aussi qu'on vous l'amène aujourd'hui.

Le règlement qui nous exclut, nous, les OSBL qui sont formés d'autres OSBL ou de personnes qui ne défendent pas des intérêts privés, c'est inscrit dans le règlement, donc dans le paragraphe 11 particulièrement, du règlement relatif aux champs d'application de la loi. Mais ce qui est intéressant, important aussi de se rappeler, c'est que le législateur, selon les mots mêmes du ministre de la Justice, Jacques P. Dupuis, en 2007, disait que le législateur ne voulait pas viser les associations ou groupements qui s'occupent de promouvoir les causes d'intérêt commun susceptibles de profiter à la collectivité, en matière environnementale, par exemple, par opposition à ceux qui défendent l'intérêt économique de quelques personnes ou groupes de personnes. Ces mots-là sont très importants pour nous.

Ce qu'on a assisté depuis l'adoption de la loi, en 2002, c'est une série de tentatives du gouvernement, mais aussi du Commissaire au lobbyisme par les propositions qu'il déposait dans ses rapports, de ramener à l'avant-scène l'assujettissement de tous les OSBL, ce à quoi nous nous sommes opposés, et nous n'étant pas seulement à la table, mais également les organisations qui ont porté le nom du groupe Mon OSBL n'est pas un lobby.

Et on identifie trois grandes tentatives : en 2008, par un rapport du commissaire; en 2012, par un deuxième rapport du commissaire; et, en 2015, par le projet de loi n° 56. Lors de chacune de ces consultations-là, le message qui a été livré était très clair : Ce n'est pas une bonne idée d'assujettir tous les OSBL à la loi sur le lobbyisme. Mais malgré ces consensus-là, et là je parle de consensus de l'ordre de 75 %, même 94 % des mémoires de 2012 disaient : Non, ce n'est pas une bonne idée, ça va dénaturer la loi et en plus grande proportion encore lors de la consultation que le commissaire a menée sur le projet de loi n° 56 en 2016.

Le message a toujours été très clair, c'est contre-productif d'assujettir tous les OBSL à la loi. Ça ne remplit pas les objectifs de la loi et ça n'apporte pas... ça cause davantage de problèmes que ça en règle. Les interventions qui ont été faites par la table et par le groupe Mon OBSL n'est pas un lobby ont mobilisé énormément de personnes. On a déposé une pétition, en 2015, avant le dépôt du projet de loi, qui réunissait 8 500 signataires sur un sujet que, vous le savez comme nous, n'est pas très populaire auprès de la population, n'est pas très connu. Avant ça même, une lettre signée de 1 105 signataires, dont 680 organisations, avait été déposée au ministre Jean-Marc Fournier préventivement, avant même le projet de loi n° 56, pour dire : Ne nous assujettissez pas.

Alors, ces messages-là sont répétés et répétés à chaque occasion, et c'est pour ça qu'aujourd'hui on revient. On revient en parler pour que cesse une fois pour toutes ce que nous appelons de l'acharnement. Les entraves au droit d'association, la liberté d'expression, seraient graves si les OSBL et... tous les OSBL étaient assimilés à des lobbyistes.

Vous avez, dans le mémoire, le détail de chacune de ces péripéties, de cette saga-là, donc on n'y reviendra pas dans le détail. La raison pour laquelle on vient en parler dans le cadre de l'analyse du projet de loi n° 6, c'est pour éviter que vous croyiez que ce serait une bonne idée d'intégrer, de faire d'une pierre deux coups à l'intérieur du projet de loi n° 6. Non, ce ne serait pas une bonne idée, nous sommes ici pour vous le dire.

On est aussi assez préoccupés étant donné, évidemment, ce qu'on a vécu au niveau des tentatives par les rapports du commissaire, donc par d'autres voies que par la voie législative, à certains égards du projet de loi n° 6, notamment la question du transfert du pouvoir réglementaire. On constate effectivement que le pouvoir réglementaire d'exclure ou non des personnes ou organismes, donc le paragraphe 2° de l'article 66 de la loi, reste inchangé, et nous sommes ici pour vous demander de le garder sous contrôle gouvernemental absolument, ce paragraphe-là.

On a quand même certaines inquiétudes quant au retrait des paragraphes 3°, 4° et 5° de l'article 66 qui, en combinaison avec d'autres articles de la loi, font en sorte de donner au commissaire une manière de faire des modifications aux modalités qui échappent aux règles habituelles des règlements, les règles habituelles régies par, par exemple, le dépôt dans la Gazette d'une annonce qu'il y aura modification, ensuite d'un 45 jours pour réagir et ensuite d'une annonce du résultat. Tout ce qu'on a comme... Tout ce que la population a, à ce moment-là, pour voir quels sont les effets des modifications qui seraient apportées aux modalités, bien sûr, mais une modalité, ça peut quand même être important, c'est d'avoir la chance de consulter le site du commissaire au bon moment et après, oui, de le voir une fois adopté dans la Gazette. Alors, au niveau de la transparence des décisions gouvernementales, on trouve que c'est une occasion ratée.

On veut aussi tout simplement vous rappeler que, pour nous, l'importance... le commissaire a parlé de l'énoncé de principe qu'il allait déposer. C'est, pour nous, très important qu'il y ait une consultation parlementaire sur ces documents-là, parce qu'on le sent bien, ils vont influencer le contenu de la phase deux, de la phase dont la ministre parle, d'une refonte en profondeur. Alors, ce ne seront pas des documents qui seront à prendre à la légère, nous le savons, et on demande dès maintenant qu'il y ait une consultation parlementaire large, qui va entendre les principaux intéressés.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Juste parce qu'on a fini le temps, maintenant, on serait dans la période d'échange. Alors, Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme LeBel : Bien, merci, M. le Président. Merci, M. le Président. Bien, je vais peut-être vous donner justement l'occasion de prendre quelques minutes pour terminer, naturellement, toujours en ayant en tête que vos remarques sont de nature préventive, parce que je tiens à dire d'entrée de jeu que ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 6. L'objet du projet de loi n° 6 va au transfert du registre, le transfert de la gestion du registre et sur les questions de prescription. Mais, compte tenu que vous n'avez pas eu le temps de terminer et que je veux vous laisser l'occasion de finir votre pensée, je vais vous donner quelques minutes sur mon temps.

Mme Provencher (Doris) : Oui. Je vous remercie infiniment. Non, mais c'est juste que je voulais, par rapport à l'insécurité et par rapport à l'information qui a de la misère à circuler... juste un exemple. Dernièrement, il y a des organismes, dans une région donnée, qui voulaient rencontrer leur député, et elles se sont fait dire : Êtes-vous enregistrés au registre du commissaire... des lobbyistes? Alors, l'information que cette personne avait d'un bureau de député était à l'effet que, pour rencontrer, il fallait absolument être inscrit. Alors, je pense qu'il faudrait mettre ça au clair avec tout le monde, là, qu'on est... le projet de loi n° 56 n'existe plus. Alors donc, première des choses.

Deuxième des choses, pour conclure, en fait, ce que je voulais vous dire, en fait, ce qu'on est venus vous dire aussi, c'est que ce projet de loi n° 56 et la question du lobbyisme a créé beaucoup d'inquiétudes mais beaucoup de mobilisation et beaucoup de solidarité, même des groupes locaux, parce que c'est une question quand même assez complexe et assez pointue. Il y a eu une mobilisation de l'ensemble des organismes par rapport à ce projet de loi. Et cette insécurité, et cette peur-là, et cette volonté de ne pas être inscrit étaient partout, dans tous les secteurs et toutes les... qu'on parle de groupes locaux, régionaux, nationaux. Et je veux vous dire que, si... bien sûr, ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 6, mais on sait qu'il va y avoir une refonte. Encore une fois, je me répète, je suis désolée, on sera encore là pour la refonte s'il y a lieu. Merci.

• (20 h 30) •

Le Président (M. Bachand) : Mme la ministre.

Mme LeBel : Oui. Je veux vous rassurer, c'est avec plaisir. D'ailleurs, j'ai rencontré la table, précédemment, et c'est avec plaisir que je rencontrerai la table et qu'on entendra la table sur la réforme peut-être plus globale qui risque... bien, pas «qui risque», qui va nous être proposée par le Commissaire au lobbyisme, avec les énoncés de principe qu'on attend, au printemps, et la réflexion plus large sur le régime de la loi sur le lobbyisme, donc, de façon plus large.

Peut-être pour adresser quelques petits points que vous avez mentionnés ou dire de façon plus claire, l'affirmer de façon plus claire, effectivement, vous avez parlé de l'article 18 du projet de loi, qui vient modifier l'article 66 de la loi actuelle, qui édicte que le gouvernement peut, par règlement, faire certaines choses. Je sais que vous aviez certaines inquiétudes, à savoir : Est-ce que, par cette modification, le gouvernement abdiquait son pouvoir d'instaurer les modalités? Je pense qu'il est important effectivement de comprendre que ce n'est pas sur la forme, mais sur le fond que le Commissaire au lobbyisme aura maintenant plus d'agilité. D'ailleurs, le type d'alinéa qui est aboli, c'est celui qui dit, entre autres, de «prescrire les supports et [les] modes de transmission des déclarations et [des] avis de modification», de «prescrire en fonction du support et du mode de transmission utilisés[...], les droits exigibles», donc les frais. On a aboli les frais, parce que, présentement, il y a des frais pour l'inscription papier au registre. Donc, il n'y aura plus de frais d'inscription au registre.

Donc, effectivement, vous avez raison de le souligner, le gouvernement se garde la prérogative d'exclure des personnes ou organismes de l'assujettissement à la loi. Est-ce que j'ai raison de comprendre, simplement pour que vous pouviez clarifier votre propos là-dessus, même si c'est préventif, que présentement vous êtes assujettis à la loi, mais exclus par le biais du règlement que je viens de mentionner, par le biais de l'article 2 qui édicte par règlement que vous ne l'êtes pas? Donc, de par... Je vais peut-être préciser ma question. Si on regarde la définition de la loi actuelle, vous tombez sous la définition, mais, par le biais de l'article 66.2, par règlement, vous êtes présentement exclus de l'assujettissement à la loi actuelle.

Mme Roberge (Mercédez) : Bien, oui et non parce que, même dans la loi de 2002, il y avait... la préparation du règlement était déjà là. L'ébauche du règlement... le contenu du règlement était déjà inscrit dans le projet de loi n° 2. Donc, il y a deux messages contradictoires dans la loi.

Et c'est un peu ça, aussi, comme ça qu'on explique l'inconfort des lobbyistes inscrits, devant ce massage double là. La loi dit que le règlement s'applique, et, pour nous, la loi nous exclut en vertu du règlement. Donc, nous considérons que tous les OSBL ne sont pas inscrits, que les seuls OSBL qui sont inscrits sont ceux qui sont... Bon, on définit dans le... Il y a plus de définition, bien sûr, que ce que je vais dire, mais, en regard de notre propos, les OSBL qui réunissent une majorité d'organisations qui ne sont pas des OSBL ou qui sont des... ou de personnes qui représentent des entreprises, ce sont donc...

On peut penser comme exemple à une association de marchands. L'association de marchands est un OSBL, mais ses membres n'en sont pas. Alors, cette association de marchands, d'après la loi et le règlement, est assujettie à la loi. Cet exemple-là n'est absolument pas la réalité de la grande majorité des organismes sans but lucratif qui sont composés majoritairement et même exclusivement d'autres OSBL ou de personnes qui sont là pour défendre une cause et non pour promouvoir un produit, un service, quel que soit le sujet.

Alors, on dit que cette information-là doit circuler plus largement. Les groupes ont vu passer le projet de loi n° 56, se demandent encore... nous contactent encore, à la table, pour avoir l'heure juste. Ce n'est pas normal. Il n'y a pas eu de message clair ni de la part du gouvernement ni de la part du commissaire pour dire : Finalement, le projet de loi n° 56, on oublie ça, on reste... le statu quo demeure. Ce message-là n'a pas été envoyé. Nous sommes les seuls à le dire, et ce n'est suffisant, alors, surtout dans...

Et là, même par rapport au dépôt du projet de loi n° 6, nous avons transmis des messages aux OSBL en leur disant : N'ayez crainte, ce projet de loi n° 6 là ne nous touche pas, on va s'assurer que ça demeure ainsi. Mais autrement on avait des communications : Qu'est-ce que c'est que ce projet de loi? Est-ce que le gouvernement revient encore? Parce qu'on a vécu plusieurs époques d'acharnement. Ça laisse des traces dans nos histoires.

Mme Provencher (Doris) : On est en choc post-traumatique.

Mme LeBel : C'est tout à fait très clair, et votre propos est bien compris. Maintenant, peut-être pour recentrer le débat... Et, encore une fois, je ne veux pas qu'on y voie comme un désintérêt de la part du gouvernement, mais plutôt comme le fait que ce n'est pas l'objet du projet de loi actuel. Et c'est un peu la raison que vous avez... vous nous avez remerciés de ne pas avoir inclus l'assujettissement, mais ce n'est pas l'objet du projet de loi actuel. Donc, il ne faut pas y lire quoi que ce soit par rapport à ça, parce que l'objet est le transfert et les délais de prescription. Je me dois quand même de vous poser la question, puisque vous êtes ici, dans les consultations particulières : Avez-vous une position sur le fait que le rejet soit maintenant transféré du conservateur au Commissaire au lobbyisme?

Mme Roberge (Mercédez) : On peut comprendre que, pour des raisons administratives, il y a des raisons logiques de fonctionnalité là-dedans. Ce qu'on souligne, cependant, et on l'a souligné en remettant en valeur la question du pouvoir réglementaire qui quittait les mains du gouvernement pour aller dans les mains du commissaire, d'une autre manière, c'est qu'actuellement, dans la loi, avec le... il y a différents paliers : le gouvernement, le conservateur, le commissaire. Donc, il y a comme différents moments où il y a des... pas des vérifications, mais, en tout cas, il n'y a... Personne ne peut avoir de geste spontané dans cette histoire-là.

Et on vous appelle à une vigilance, dans le transfert des pouvoirs, pour s'assurer que ces pouvoirs-là ne mènent pas directement ou indirectement à des décisions qui affecteraient des pouvoirs qui devraient relever du gouvernement, notamment celui d'assujettir ou pas les OSBL. Et, là-dessus, que notre exclusion actuelle soit due à un règlement, ça nous fragilise également. Alors que, dans le projet de loi n° 80, avant la loi, c'était clair. C'est devenu confus après. Et on souhaite que... S'il y a quelque chose qu'on souhaite, par rapport à la refonte de la loi prochaine, c'est que l'exclusion des OSBL, de manière plus claire, soit inscrite dans la loi et non dans un règlement qui va... Sinon, vous perpétuez le message double et l'information qui n'est pas complète.

Mme LeBel : Est-ce que je comprends de vos commentaires que vous avez la crainte que, dans le projet de loi actuel, qui vise, je tiens à vous rassurer, que... de transférer la gestion du registre au Commissaire au lobbyisme, et non pas les modalités — les modalités étant qui peut être assujetti ou non — et les critères qui doivent être remplis pour être transparent, je comprends, c'est que vous nous mettez en garde parce que vous avez des craintes que peut-être que ce transfert-là cache peut-être un transfert de pouvoirs plus grands? Est-ce que je comprends ce que vous me dites?

Mme Provencher (Doris) : C'est peut-être un grand mot, «cache», là, ce n'est peut-être pas dans ce terme-là. Sauf que, je dirais, chat échaudé, un peu. Alors, c'est dans la mesure où on dit... C'est sûr qu'au niveau administratif puis au niveau d'organisation c'est probablement... ce qui est proposé est beaucoup plus simple et, probablement, relève d'une logique implacable. Mais ce qu'on dit en même temps : c'est dur pour nous de se prononcer parce que, vu qu'on ne veut pas être assujettis, donc, on ne veut pas... Vous voyez, c'est un peu dur de se prononcer.

Nous, ce qu'on dit, ce qu'on souhaite, c'est que, oui, que le commissaire puisse faire son travail peut-être de manière plus facile. Mais ce qu'on dit aussi : Comme législateurs, on vous demande de garder quand même un oeil un peu, en quelque part, là, dans le processus. C'est ça qu'on dit.

• (20 h 40) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de Chapleau, s'il vous plaît.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Bonjour. Merci, M. le Président. Peut-être pour recadrer un petit peu, là, on a entendu le commissaire, qui voulait mettre en place, dans le fond, une nouvelle plateforme peut-être plus simple, plus efficace. Avez-vous une opinion sur cette nouvelle plateforme et qu'est-ce que ça devrait contenir?

Mme Roberge (Mercédez) : On n'est pas ici pour venir commenter le contenu de la nouvelle plateforme ni les questions qui sont à remplir. On souhaite s'assurer que les décisions qui sont prises face à cette plateforme-là soient prises avec du recul, avec un regard global, pour qu'il n'y ait pas de glissement entre les pouvoirs.

Mme Provencher (Doris) : Mais ce que je voulais vous dire aussi, si vous permettez de... par rapport à... C'est vrai qu'on ne peut pas se prononcer sur quelle forme il doit prendre, est-ce qu'il doit... Par contre, c'est bien évident que... Je ne sais pas si, dans cette plateforme — j'imagine — il y a une partie où ceux qui s'inscrivent doivent décrire leur mandat, hein? C'est ça, le...

Vous savez, un mandat, pour un OSBL, ça dure toute la vie de l'OSBL. Par exemple, je donne un exemple comment qu'on ne peut s'inscrire là-dedans. Par exemple, nous, je vais donner l'exemple d'où moi je travaille, en santé mentale, il y a des dossiers que ça fait 25 ans qu'on a, et je pense qu'ils sont encore là, malheureusement, pour les 25 prochaines années. Donc, on ne fitte pas là-dedans. Alors, c'est bien dur de vous dire qu'est-ce qu'on devrait y retrouver ou pas, là, ça, c'est... Désolée.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Autres questions du côté ministériel, parti ministériel? Ça va? Merci. Alors, je me tourne vers l'opposition officielle. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Oui. Bonjour, mesdames. C'est vraiment intéressant. Parce que c'est sûr qu'il y a plusieurs d'entre nous qui sommes ici depuis quand même assez longtemps, et ce n'est pas facile pour tout le monde de suivre tout ce qui s'est passé dans ces débats.

Alors, vous amenez un chapitre important de cette histoire, mais vous avez certainement entendu le commissaire, ce soir, dire : Non, non, non, nous, on ne veut pas être responsables du règlement, nous, c'est les modalités qui nous... Vous avez entendu le commissaire, donc ça devrait au moins vous rassurer de ça.

Mais, je pense que moi, ce que j'aimerais savoir, c'est, dans la documentation... Parce que vous avez vraiment toute la trace d'une... en tout cas, et si, dans un contexte, le commissaire a parlé d'un énoncé, éventuellement, ou des consultations, etc. Parce qu'il y a eu plusieurs commissaires aussi, pendant cette période de temps, et même M. Casgrain qui avait parlé à un moment donné : Non, il faut faire une autre... une réflexion. Et lui-même voulait faire une nouvelle réflexion. Donc, c'est dans l'air de vouloir repenser les choses, recadrer, etc. Donc, je pense que vous allez être interpellés, à un moment donné, lorsque cette grande discussion sera relancée.

Vous avez, ici, je n'ai pas tout regardé, je n'ai pas eu le temps de lire toutes les annexes, mais les annexes... C'est quoi, la source de ce que vous... Bon, j'imagine, vous pensez... genre de confusion, en tout cas, vous avez bien expliqué le genre d'OSBL qui représente des organismes à profit. Mais eux, ils ne font pas de profits, c'est un OSBL, et ceux qui travaillent... comme vous le dites, une mission de vie, on sait tous ce que ça veut dire. Où est le... est-ce que vous êtes capables, dans vos annexes, de nous indiquer qu'est-ce qu'on pourrait lire pour bien comprendre la source de tout ça, de cette... comment les OSBL... ou cette perception? Est-ce que c'est la loi n° 56 ou c'est avant ça? Vous aviez parlé tantôt de la loi et du règlement. Et peut-être mieux expliquer ou nous expliquer la source qui va peut-être jusqu'en 2002. Ça remonte à 2002?

Mme Roberge (Mercédez) : Oui. En fait, dans l'annexe I, vous avez des articles de la loi et le paragraphe 11 du règlement relatif au champ d'application de la loi.

Une voix : ...à la page 13.

Mme Roberge (Mercédez) : À la page 13. C'est là que se trouve la base de la logique, qu'on trouve encore intéressante. La logique étant : ce n'est pas que le statut d'OSBL, mais aussi la composition de l'OSBL. Parce que l'exclusion dont on parle est de dire que sont exclus les OSBL dont la composition... Mais c'est une espèce de double négatif, là, la manière dont le règlement est rédigé, ce n'est pas la meilleure manière de le faire. Mais, dans d'autres termes, ça dit que les OSBL exclus sont ceux qui sont majoritairement composés d'organismes qui sont également des OSBL ou de personnes qui ne représentent pas des intérêts privés. Les autres sont des OSBL assujettis à la loi.

L'association des marchands, dont je vous parle, c'est un OSBL qui devrait être assujetti à la loi. Ses interventions, en bout de ligne, sont pour les profits de ses membres, qui sont des marchands, qui sont là pour être des marchands, alors que c'est tellement différent lorsque ce sont des organisations qui sont là pour promouvoir des causes, pour défendre la population, pour sensibiliser la population sur des enjeux sociaux et où la notion de profit et de bénéfice n'apparaît pas.

Lorsque, comme table, ou comme regroupement, ou comme groupe communautaire de base, ou comme OSBL de loisirs, peu importe... fait des interventions auprès d'un titulaire de charge publique, que ce soit pour l'organisme de loisirs, pour avoir davantage de temps de glace à l'aréna, auprès du maire, ou une organisation qui réclame du gouvernement un salaire horaire de 15 $ minimum de l'heure, ce n'est pas l'organisme ni la personne et encore moins la personne qui fait la démarche qui en retire un bénéfice quelconque. Et cette notion-là, elle est dans le libellé du règlement, qui dit... et aussi dans l'esprit de la loi, dans l'extrait que je vous ai lu du rapport de 2007 du ministre, à l'époque, Jacques P. Dupuis, que sur... l'idée que l'objectif de la loi de 2002... Il faut se souvenir aussi que c'était à la suite... ou en pleine finale, en fait, du scandale des commandites, juste avant la commission Gomery. Alors, il y avait là un besoin, là, de la population de voir ce qui ne serait pas vu autrement, de voir les tractations qui se faisaient derrière des portes closes.

D'accord, mais les OSBL et les groupes communautaires qui font des interventions, ça n'a rien à voir avec ce type d'intervention là. Il n'y a jamais eu de scandale à notre égard, ceci dit en passant. Alors, pour nous, le libellé de ce règlement-là porte l'essence même de la différence entre faire des interventions pour des intérêts privés ou pour le bien d'une communauté et qui fait l'intervention, non seulement selon sa charte, mais aussi selon sa composition.

Mme Weil : Vous dites qu'il y a des membres... Il reste combien de... Il reste... Vous avez des appels des gens qui ne savent pas que, oui, c'est mort au feuilleton, hein? Donc, c'est très discret, il n'y a pas d'annonce, il n'y a pas de publication disant qu'un projet de loi est mort. Donc, je vois un problème, un problème là. Vous le vivez, c'est-à-dire que vous avez encore des organismes qui sont inquiets. Là, le commissaire est là, la ministre est là, nous sommes là, on vous entend, alors, il y a une trace de cette discussion. Mais je vous dis honnêtement, c'est la première fois que je vois... Peut-être que vous l'avez déjà fait ici, en commission parlementaire, vous avez tracé tout l'historique, comme vous avez fait ce soir.

Mme Roberge (Mercédez) : Pas encore...

Mme Weil : Bon, c'est un document intéressant.

Mme Roberge (Mercédez) : ...sur note site Web, oui.

Mme Weil : Bien, en tout cas, je pense que la ministre peut-être, aussi, mais, moi, ça clarifie beaucoup de choses pour moi aussi. Parce que, quand on n'a pas personnellement mené un dossier, comme ministre, on ne sait pas, des fois... On a entendu des choses, par exemple, oui, des bénévoles qui travaillaient pour des conseils d'administration d'hôpitaux, par exemple. Il y avait beaucoup de discussions, à l'époque du projet de loi n° 56, et tout le monde se posait la question : Qui est assujetti, qui ne l'est pas? Mais le commissaire a parlé d'un énoncé, d'une réflexion, etc., pour... bien, je pense, pour saisir l'occasion de clarifier ces notions-là. Malheureusement, on aurait peut-être voulu entendre le commissaire après vous, mais on pourrait éventuellement lui poser des questions pour voir son point de vue et la trace historique de tout ça, aussi, le nouveau commissaire, quand même, relativement nouveau... Non, janvier 2018, à peu près...

Une voix : Novembre.

• (20 h 50) •

Mme Weil : Novembre, donc après, après tous ces événements, là, on pourrait dire ça. Donc, c'est bien important. Mais moi, je pense qu'il y a quelque chose à faire publiquement, là, je pense, peut-être de clarifier la situation. Parce que, si vous, vous avez des appels, constamment, où les gens ne savent pas... ce n'est pas sain, ce n'est pas bon et ce n'est pas bon pour le concept de lobbyisme non plus, alors qu'il y a confusion. Puis justement on veut faire en sorte que ce soit transparent. On amène donc un transfert du registre au commissaire pour que ce soit quelque chose d'accessible, facile à utiliser puis, bon, rigoureux, etc. Puis là il y a cette zone grise qui flotte autour.

Mme Roberge (Mercédez) : Si je peux me permettre, là-dessus, le cas qu'on relève... qu'on soulève dans le mémoire, d'un organisme qui s'est fait demander, comme condition à rencontrer la députée, s'il était enregistré, ce groupe-là a été assez fonceur pour aller chercher de l'information puis pour, après ça, retourner vers l'attaché politique en disant : Non, je n'ai pas à m'inscrire. Mais nous, ça nous pose, comme question, c'est : Combien de groupes ont abandonné la démarche? Combien d'autres titulaires de charge publique, peu importe le niveau, bureau de circonscription, appareil de l'État, fonctionnaire, peu importe, combien d'autres croient que c'est une exigence, alors que ce n'en est pas une? Et ça, c'est très mauvais pour la démocratie, c'est très mauvais pour le droit d'association.

Mme Provencher (Doris) : Moi, si je peux me permettre, je voudrais rajouter... qui est dedans puis qui est un petit peu à l'extérieur. Parce qu'il y a un mot que, Mme la ministre, vous avez nommé, tantôt : la démonisation de lobbyisme. Ouh! c'est mauvais, c'est méchant, et tout. Je veux que ça soit clair : ce n'est pas notre position. C'est juste qu'on dit que ce n'est pas nous, ce n'est pas notre but, nos fonctions, le... On ne s'y reconnaît pas. Qu'il y ait des lobbyistes qui fassent le travail, qui font très bien leur travail, c'est une chose. C'est que, nous, ça ne nous concerne pas. Ce n'est pas qu'on veut les démoniser, qu'ils sont méchants, mais c'est que ce n'est pas nous.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.

M. Leduc : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux, merci d'être là. J'aimerais aussi continuer sur la question de l'assujettissement éventuel. C'est un débat auquel j'avais participé, dans mon ancien rôle, là, à mon ancien travail dans une centrale syndicale, alentour du projet de loi n° 56. On s'y était d'ailleurs rencontrés à ce moment-là. Et un des arguments qui étaient souvent utilisés, c'était qu'il fallait que les groupes et les lobbyistes plus professionnels puissent se battre à armes égales. C'était l'argument qu'on lisait partout. Et là, bon, là, on répondait à ça : Oui, mais là, qu'est-ce qu'on fait avec les tout petits groupes?

Vous avez parlé des gens qui vont se battre pour un terrain ou du temps de glace. Tantôt, le président de la Fédération des chambres de commerce disait : Moi, je ne veux pas assujettir les soupes populaires du coin de rue, tu sais? Il voulait juste parler des grandes... Greenpeace. Mais ma question est donc la suivante : Comment on pourrait faire pour commencer à disséquer, avec une loi ou des définitions, de manière à faire en sorte d'inclure éventuellement des grands groupes, mais d'exclure des petites soupes populaires de la... Est-ce que c'est possible, selon vous, ou est-ce que, de toute façon, on s'enligne dans des détails qui sont contradictoires de toute manière?

Mme Roberge (Mercédez) : En fait, non, nous, on ne voit pas ça possible, de déterminer... de départager les gros des petits. Ça ne fait pas sens. En quoi un organisme est gros? C'est en fonction de son budget? C'est en fonction de son nombre d'employés? C'est en fonction de son taux de dérangement, de sa capacité de déranger les pouvoirs? C'est un peu ça qu'on sent, parfois, lorsqu'on a... On nous donne des exemples de : Oui, mais il faudrait bien assujettir un tel organisme ou un tel autre. Et, comme par hasard, ce sont toujours des organisations qui sont dérangeantes. La loi ne peut pas faire une liste, à la fin, des organisations spécifiquement à assujettir. J'espère que non. Ça n'a pas de sens.

La seule voie qu'on voit, nous, c'est le statut du groupe et sa composition, le statut d'OSBL et une composition. Et, s'il y a des organisations qui ont le statut d'OSBL et qui ne devraient pas l'avoir, c'est au Registraire des entreprises de faire le travail, ce n'est pas à la loi sur le lobbyisme de le faire. C'est un autre problème. Parce qu'on se fait aussi dire ça : Oui, mais il y a de faux OSBL. Bien, que ce problème-là se règle là où il doit se régler.

On a senti dans le passé, beaucoup, que l'objectif ultime, c'était d'assujettir les organisations dérangeantes, on les nommait comme... on les entendait nommer comme étant les grosses organisations, et que, dans le fond, bien, que ça attrape au passage, dans le filet, des petits organismes qui ne devraient pas l'être. À des moments, on a entendu... on a senti que ce n'était pas un enjeu, que c'était le prix à payer. Non, c'est un prix trop cher à payer. Il y a 60 000 OSBL au Québec. C'est la majorité de ceux-là, là, qui sont pour l'instant non inclus dans la loi.

Et là on parle de toutes sortes d'enjeux, de toutes sortes de causes, de toutes sortes de fonctionnements, on peut... Et tout ce monde-là a le même statut légal : OSBL. Il n'y a pas de sous-catégorie, alors, outre la considération des intentions, la considération de la composition, donc avoir des intentions pécuniaires ou ne pas en avoir. On est un OSBL, donc en général on n'a pas d'intention pécuniaire.

Mme Provencher (Doris) : Non, on n'en a pas.

Mme Roberge (Mercédez) : C'est un fait.

Le Président (M. Bachand) : ...si vous voulez. C'est parce que je dois donner la parole au député de Chomedey. S'il vous plaît, M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Merci. Bonjour, mesdames. Je vous écoutais parler, puis le mot «Commissaire au lobbyisme», je pense, vous rend l'épiderme très sensible par rapport à toutes sortes d'expériences que vous avez pu avoir par le passé.

Mais je vous dirai qu'à la lecture de votre mémoire vous m'avez encouragé parce qu'à la page 11 je me suis demandé, à vous écouter et avec les groupes qu'on a eus aujourd'hui, bien, j'ai dit : Probablement que le commissaire, avant de faire un diagnostic des meilleures pratiques puis avant d'informer les parlementaires et l'Assemblée nationale, parce que son rapport va être déposé à l'Assemblée nationale, donc, il va être très transparent, bien, sûrement qu'il va les rencontrer. Puis vous m'avez donné la réponse, à la page 11, qu'il vous a rencontrées. Puis je vais un petit peu plus loin, puis vous me dites que vous pensez que vous avez été compris, puis vous espérez que ça ne soit pas temporaire. Ça, vous m'encouragez en disant ça.

Puis vous allez encore un petit peu plus loin dans vos mesures préventives puis vous espérez que ça ne sera pas... si jamais il y a des discussions, là. Et vous l'avez écrit à l'avant-dernier paragraphe : «Nous souhaitons [...] que le gouvernement et le commissaire abandonnent [les] projets visant à assimiler tous les OSBL à des lobbyistes.» Et je vous suis. Puis je pense qu'on est plusieurs à vous suivre ici, que ceux qui n'ont pas d'affaire à s'appeler des OSBL ne devraient pas s'appeler des OSBL et donc qu'il y aurait une réorganisation ou qu'il y aurait un réalignement qui devrait être fait de ceux qui ne sont pas là pour le bien des communautés et des causes desservies. Et je pense que votre message, il est très clair.

Mais laissons la chance au coureur, on a un nouveau coureur, là, qui s'en vient avec un diagnostic, qui vous a rencontrés puis qui, je pense, a réussi à vous convaincre que vous avez été compris. Et on sera là. Puis je pense que la ministre l'a mentionné aussi, ce soir, on sera là dans les mesures préventives pour vous accompagner, pour être sûrs que vous ne serez pas pénalisés dans son diagnostic, parce qu'on aura d'autres opportunités.

Le Président (M. Bachand) : Sur ce, Mme Roberge, Mme Provencher, merci beaucoup de votre témoignage.

Mémoires déposés

Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires d'organismes qui n'ont pas été entendus lors des audiences publiques : d'abord, la Commission d'accès à l'information du Québec, un mémoire conjoint aussi des Sociétés canadiennes de technologies médicales et du Médicaments novateurs Canada.

La commission ayant accompli son mandat, j'ajourne ses travaux sine dei. Merci beaucoup.

Une voix : Sine die!

Le Président (M. Bachand) : Sine die! Sine die!

(Fin de la séance à 20 h 59)

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