(Dix
heures une minute)
Le Président
(M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 170, Loi
modernisant le régime juridique applicable aux permis d'alcool et modifiant
diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Merlini (La Prairie) est remplacé par M. Drolet (Jean-Lesage); M. Reid (Orford) est remplacé par M. Tanguay (LaFontaine);
et M. Jolin-Barrette (Borduas) est remplacé par M. Spénard (Beauce-Nord).
Auditions
(suite)
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Ce matin, nous entendrons les organismes suivants : tout d'abord, l'Association
canadienne des vinificateurs artisanaux et le Conseil canadien du commerce de
détail.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association canadienne des vinificateurs artisanaux. Je vous rappelle que
vous avez 10 minutes pour votre présentation, par la suite suivra une période
d'échange avec les trois groupes parlementaires. Donc, dans un premier temps,
bien vouloir vous identifier, et par la suite vous pourrez commencer votre
présentation.
Association
canadienne des vinificateurs artisanaux (ACVA)
M. Brodeur
(Gaétan) : Merci, M. le Président, et bonjour, mesdames et messieurs
de la commission. Je me présente, Gaétan
Brodeur, agissant comme lobbyiste-conseil pour l'Association canadienne des
vinificateurs artisanaux. Et je suis
accompagné ce matin par M. Frank Raposo, qui est ici à titre de directeur
principal de l'Association
canadienne des vinificateurs artisanaux.
Alors,
dans un premier temps, permettez-moi de vous exprimer la reconnaissance
et la satisfaction de l'ensemble des
membres de l'ACVA, et principalement des détaillants québécois, face à la
reconnaissance, par ce projet de loi, du statut
de centre de vinification, reconnaissance que cette industrie
a tellement sollicitée au cours des 15 dernières
années.
Alors,
cela dit, passons à une revue sommaire du document qui a été préparé à
l'intention des membres de
cette commission. L'Association canadienne des vinificateurs artisanaux, l'ACVA,
est une association cherchant à promouvoir et à protéger les intérêts des détaillants,
fabricants et fournisseurs au Canada. L'ACVA représente les intérêts
de ses membres dans ses discussions avec les divers gouvernements,
autant au niveau fédéral que provincial. L'association s'engage également
à promouvoir les diverses législations fédérales et provinciales qui permettront à l'industrie
de la vinification artisanale de
s'épanouir. L'ACVA regroupe parmi elle la majorité des détaillants et
exploitants de centres de vinification au Québec et dans la grande majorité
des autres provinces canadiennes, ainsi que certains des principaux producteurs
et distributeurs de trousses de vinification
au Québec et au Canada. Au Québec, on peut noter que les membres de l'ACVA,
à eux seuls, représentent environ 85 % des parts de marché du vin
artisanal ou de fabrication domestique.
Un
bref historique de la vinification domestique ou de la vinification artisanale
au Québec. Alors, l'industrie de la vente au
détail des trousses de vinification est présente depuis plusieurs décennies sur
le marché québécois, et une industrie mieux structurée et
professionnelle s'est développée au milieu des années 90. Au même moment,
le statut légal des grossistes et
détaillants était reconnu par le gouvernement du Québec avec la mise en place
des permis de grossiste et de détaillant
de matières premières et d'équipement qui sont sous l'égide et l'administration
de la Régie des alcools du Québec.
Au
cours des 15 dernières années, nous avons assisté au Québec à l'émergence
de centres de services orientés vers la vinification personnelle et
communément appelés centres de vinification. Ce type d'exploitation a vu le
jour principalement dans le but d'assister
tous les clients vinificateurs qui, pour des raisons pratiques, ne pouvaient
plus ou ne désiraient plus fabriquer
leur vin directement à la maison. À la base, ce concept se voulait et se veut
toujours similaire aux autres modèles
d'exploitation reconnus existant dans plusieurs autres marchés au Canada. En
dépit de l'absence de clarté et d'encadrement
relativement à la légitimité de ce type d'exploitation au Québec, l'industrie
et ses membres se sont donc efforcés, avec les années, de développer et
de supporter fortement un modèle d'affaires structuré et doté d'une forme d'autoréglementation éprouvée qui fournissait aux
exploitants un cadre d'exploitation professionnel et fiable pour tous
ceux qui le désiraient.
Dans le cadre
des diverses représentations effectuées par l'ACVA au cours des cinq dernières
années, l'objectif principal de l'association a toujours été d'assurer la mise en place d'une réglementation adaptée aux réalités sociales et économiques
et permettant ainsi de modifier le statut actuel de détaillant en matières
premières et équipement afin d'y intégrer la notion d'exploitant de centre de
vinification.
Les pages qui
suivent contiennent des éléments factuels qui méritent qu'on s'y arrête. Parmi
ceux-ci, on retrouve entre autres... en 1996, on retrouve l'intégration de la notion
de permis de grossiste et de détaillant de matières premières et d'équipement dans la Loi sur les permis
d'alcool du Québec. En 2001, date charnière, on retrouve
l'intégration et la reconnaissance du
statut d'exploitant autorisé de vinerie libre-service dans le cadre de l'article
15 de la Loi de 2001 sur l'accise et
des règlements connexes. Cette reconnaissance permettait spécifiquement de reconnaître l'existence et d'assurer l'émission de licences
de vinerie libre-service aux exploitants québécois qui en faisaient la demande.
Également,
au cours de ces années, on retrouve une reconnaissance légale et un encadrement structuré du statut de vinerie
libre-service effectués par plusieurs provinces canadiennes : Ontario,
Colombie-Britannique, Île-du-Prince-Édouard,
Nouveau-Brunswick, Saskatchewan, Nouvelle-Écosse et Manitoba. Et permettez-moi d'ajouter qu'il y a un peu plus d'une semaine le gouvernement
de l'Alberta a déposé un projet de loi, le projet de loi n° 16, afin,
entre autres, d'assurer la reconnaissance du
statut de centre de vinification dans cette province. Or, le tout devrait se
concrétiser d'ici la fin de l'année, ce
qui va augmenter le nombre de provinces reconnaissant le statut de centre de
vinification à huit ou à neuf, c'est selon le cas. Et par la suite vous trouvez la nomenclature de tous les lois et
règlements relatifs au statut de centre de vinification au Canada. On en
retrouve huit ou neuf à ce moment-ci.
Sur la page
suivante, le graphique qu'on retrouve sur la page suivante démontre le nombre
d'exploitants de centres de
vinification qu'on retrouve dans chacune des provinces canadiennes pour vous
donner une idée de la disparité entre les provinces principales qui ont reconnu depuis longtemps le statut de centre
de vinification et le Québec. Alors, on retrouve, entre autres, l'Ontario, à 508 exploitants;
la Colombie-Britannique, à 263; le Québec, à 89; et les provinces
maritimes, à 76 — en augmentation depuis l'acceptation du
statut de centre de vinification dans ces provinces; et la Saskatchewan, à
26.
En termes de
normes de qualité et de code de conduite, on retrouve au Québec l'existence et
l'application d'un code de conduite
responsable et autoréglementé qui a été éprouvé en Ontario et en
Colombie-Britannique et qui a servi de base dans la plupart... de
l'élaboration des réglementations subséquemment mises en place dans les autres
provinces canadiennes, entre autres la
Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et le Manitoba. Également, il serait
intéressant de noter qu'il
existe — et elles
sont appliquées — des normes
précises de contrôle de qualité chez les producteurs et fournisseurs de
trousses de vinification, en conformité avec la Loi sur les aliments et
drogues, la Loi sur l'emballage et l'étiquetage et la Loi sur les produits
agricoles au Canada, et ce ne sont là que quelques-unes.
Un des éléments essentiels supportant la
reconnaissance du statut de centre de vinification est évidemment la compétitivité des détaillants québécois versus les
détaillants exploitants des provinces limitrophes. Alors, contrairement
au Québec, les provinces voisines de
l'Ontario et du Nouveau-Brunswick reconnaissent le statut de centre de
vinification, ce qui encourage les
commerçants de ces provinces à rechercher activement la clientèle des
consommateurs québécois, et ce qui contribue ainsi à priver l'économie
québécoise d'emplois, de taxes et de revenus significatifs, tout en freinant
significativement le potentiel de croissance de ces détaillants québécois.
• (10 h 10) •
Au niveau des
taxations et des impacts économiques et politiques, les trousses de
vinification et de brassage sont déjà
assujetties à la TVQ applicable sur les fournitures de raisins ou de
concentrés. Il est à noter que le Québec demeure à ce jour la seule province canadienne où les matières
premières utilisées pour la fabrication domestique de vin sont
assujetties exclusivement à une taxe de
vente provinciale. Par contre, on doit noter qu'au niveau des frais de service
facturés dans les centres de
vinification au Québec, ces frais de service là sont déjà assujettis à la TPS
et à la TVQ. On retrouve également des
objectifs économiques et politiques qui sont influencés par une reconnaissance
élargie de cette industrie, dont la création d'emplois, l'augmentation de diverses sources de revenus pour le
gouvernement québécois et les municipalités, un encadrement approprié et
un contrôle accru, ainsi que des pratiques de développement durable.
Au niveau des
enjeux, l'ACVA soumet les différents enjeux et recommandations sous quatre
principaux volets : la disponibilité des produits et services liés
à la vinification artisanale, l'intégrité des produits et services associés à
la vinification, l'origine et la qualité de
ces produits et services, ainsi que les normes de contrôle applicables au
secteur de la vinification artisanale
au Québec. Les recommandations faites par l'association et ses membres, la
reconnaissance du statut de centre de
vinification et de brassage permettraient à la fois de sécuriser les
détaillants québécois désireux d'investir dans la croissance de ce secteur d'activité et surtout de rassurer les
nombreux consommateurs québécois adeptes de ce concept de vinification artisanale, leur offrant ainsi la possibilité de
concevoir eux-mêmes les vins destinés à leur consommation personnelle dans un environnement contrôlé et adapté à
leurs besoins, et ce, à l'intérieur d'un cadre structuré et responsable.
Tel que
précédemment mentionné, l'ACVA a toujours supporté et promu un code de conduite
responsable pour le bénéfice de ses
membres. Il serait souhaitable que l'organisme de contrôle qui sera responsable
de l'administration et du contrôle de
ces permis, en l'occurrence la RACJ, considère l'utilisation de ce code dans
l'élaboration d'un programme de contrôle mieux défini. Un tel programme
a toujours été grandement soutenu dans toutes les autres provinces où une
réglementation spécifique a été mise en place.
En conclusion, l'ACVA
croit fermement que les éléments suivants devraient être considérés dans le
cadre du rapport de la commission et de
l'approbation subséquente du projet de loi n° 170 lié à la modernisation
entourant la Régie des alcools du
Québec : tel que libellé dans le projet, il est primordial que le statut
de centre de vinification et de brassage soit reconnu par la mise en
place d'un permis spécifique à ce type d'exploitation et également par
l'élaboration de conditions d'exploitation
appropriées dans un cadre réglementaire flexible et structuré; deuxièmement, la reconnaissance et l'encadrement réglementaire du statut de centre de vinification permettront aux
détaillants québécois d'offrir aux consommateurs québécois des produits et services de qualité dans un environnement sécuritaire responsable, et ce, dans un contexte moderne mieux adapté aux réalités
sociales, économiques d'aujourd'hui; et troisièmement, la reconnaissance et l'encadrement du statut de centre de vinification et de l'esprit d'entreprise qui y est associé contribueront assurément à générer de nombreuses opportunités de création d'emplois, de développement économique et de nouvelles sources de revenus pour la
province de Québec.
Dans
ce sens, nous jugeons donc primordial que le gouvernement poursuive dans
ses intentions de moderniser le cadre
réglementaire et opérationnel entourant la Régie des alcools du Québec
afin de garantir aux consommateurs québécois l'intégrité et la qualité des produits et services destinés à la
vinification artisanale et d'assurer le plein développement de cette
industrie qui demeure embryonnaire au Québec. À l'opposé de la situation que l'on retrouve
ailleurs au Canada, les consommateurs sont mieux renseignés qu'ils ne
l'ont jamais été et exigent des produits et services de qualité
équivalente à ce que l'on retrouve ailleurs
au Canada et qui sauront répondre pleinement à leurs besoins actuels en termes
de vinification artisanale. Alors, je vous remercie de votre attention.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation.
Nous allons maintenant débuter les échanges avec le gouvernement. M. le
ministre, pour 14 min 30 s
M. Coiteux :
Oui, merci, M. le Président. Alors, merci, MM. Brodeur et Raposo, d'être
venus présenter un mémoire puis d'échanger
avec nous. Je comprends donc de votre présentation que, dans le fond, votre... je ne dirais pas préoccupation, mais, dans
le fond, votre souhait, c'est que le
cadre réglementaire qui va être défini avec les paramètres de la loi
soit conforme aux intentions gouvernementales de reconnaître votre industrie,
de permettre à cette industrie-là de fonctionner
en toute légitimité sur des bases similaires à ce qu'on retrouve dans d'autres
provinces, c'est bien ça? Alors, je
tiens à vous rassurer, c'est l'intention du gouvernement d'aller dans ce sens-là, donc les projets de règlement qui seront ensuite soumis à la consultation,
on les travaille dans cet esprit-là. On les travaillera dans cet esprit-là une
fois que la loi serait adoptée.
Ça
m'amènerait, moi, à vous poser des questions pour connaître un petit peu plus votre
industrie. Par exemple, vous dites qu'au Québec, à l'heure actuelle, il y a 89 exploitants qui exploitent des centres de
vinification. Ils sont localisés où,
de façon générale? Est-ce qu'ils sont très concentrés dans Montréal,
Québec ou c'est assez dispersé sur le territoire?
M. Brodeur
(Gaétan) : Non, c'est assez
dispersé dans la province. Et, par la force des choses, dans la région
de Montréal... un peu moins dans la région de Québec, mais,
dans la région de Montréal, ils se sont concentrés dans certains secteurs de la ville de Montréal,
question de faciliter pour les clients qui doivent se
déplacer pour aller produire leurs vins et récolter leurs vins, si je peux dire, par la suite. Alors, certaines...
comme le centre-ville de Montréal, et tout ça, ce n'est certainement pas
approprié pour ça.
Alors,
c'est réparti un peu partout au Québec. Il y a déjà eu jusqu'à
au-delà de 130 centres de vinification dans les meilleures années lorsque ça a débuté ici, puis
ça s'est développé un peu. Il y a eu une diminution accrue avec les années, compte tenu de l'incertitude qui régnait et du fait que les exploitants de centres
de vinification, due au fait qu'il
n'y avait aucune réglementation existante, étaient réticents à investir
de l'argent pour développer à ce niveau-là.
Et
l'autre volet qui est intéressant à noter, c'est que ça devenait quasiment
impossible pour les exploitants de faire de la publicité raisonnable
qui permettrait d'attirer et de développer cette industrie-là, alors ces
exploitants-là se sont toujours retrouvés,
et aujourd'hui c'est encore le cas, à un genre de — excusez l'expression, mais c'est en
anglais — «break-even
point» où ils peuvent survivre, ils peuvent
vivoter, mais c'est impossible pour eux de se développer. Et à ça
il faut rajouter la complexité qu'ils
ont toujours dû opérer deux opérations en parallèle, le centre de vinification
séparément du commerce de détail, et
ce, pour ne pas mettre en danger la pérennité de leur permis de grossiste, de
détaillant en matières premières, alors ça dupliquait les coûts, à ce
moment-là.
M. Coiteux :
Oui. Et la partie détail, c'est la vente de moûts, la vente de raisins frais...
M. Brodeur
(Gaétan) : La vente de trousses de vinification et d'équipement...
M. Coiteux :
...et d'équipement pour faire la vinification à domicile.
M. Brodeur
(Gaétan) : ...et de matériel d'embouteillage, exact.
M. Coiteux :
O.K. Donc, les exploitants de centres de vinification qui existent à l'heure
actuelle, ils se sont développés à partir
des installations existantes qui vendaient la matière première et les
équipements, c'est bien cela, ou ils se sont constitués...
M. Brodeur
(Gaétan) : Exactement.
Et ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont rajouté des locaux séparés, encore une fois, où il y avait
moyen pour eux d'assurer le service, parce
que ça demande quand même
un espace suffisamment grand
pour assurer l'entreposage de touries, la manipulation de touries, le
transvidage, et tout ça, alors ils ont développé ces installations-là connexes. Avec les années — et on en retrouve beaucoup aujourd'hui — elles
se sont sophistiquées, et les équipements
qui sont utilisés maintenant sont pratiquement des équipements de qualité
commerciale, professionnelle. Alors, c'est ce qui rend attrayant ce
concept de vinification domestique là artisanale pour le consommateur, c'est qu'anciennement le consommateur faisait ces
vins-là chez lui avec les moyens du bord, avec des équipements plus ou moins adéquats, tandis que maintenant ces
équipements-là sont des équipements de qualité professionnelle, donc
c'est beaucoup plus facile pour eux, beaucoup plus intéressant, beaucoup plus
stimulant aussi dans leur cas.
M. Coiteux : Et à quoi ressemble la clientèle, en termes d'expérience,
là? Est-ce que vous avez plutôt des gens qui faisaient leur propre vinification à domicile
et qui, pour toutes sortes de raisons, ont préféré ce service-là ou c'est
des gens qui arrivent, et puis qui n'ont jamais
fait ça de leur vie, puis vous devez donc leur apprendre les rudiments de cet
art-là?
• (10 h 20) •
M. Brodeur
(Gaétan) : Exact, c'est un peu
des deux. Cette industrie-là a beaucoup fonctionné par le bouche-à-oreille. Et puis les gens, les baby-boomers d'aujourd'hui qui faisaient leur vin chez eux et qui se retrouvent aujourd'hui
dans des condos ou dans des choses comme ça
ne peuvent plus se permettre de faire le vin à domicile, et c'est la
raison pour laquelle ces centres de vinification là leur permettent de
poursuivre ce hobby, mais dans un environnement plus convenable pour eux.
Également, les jeunes
qui sont attirés par ce contexte-là, ainsi que, surtout, ceux qui adorent la
bière ou ces choses-là, c'est un moyen pour
eux d'apprivoiser la vinification domestique ou le brassage domestique en
commençant dans des centres de vinification
comme ça, et par la suite on voit si, oui ou non, c'est quelque chose qui les intéresse de poursuivre
ou non. Alors, on voit toujours une gradation à ce niveau-là. On a déjà
mené des études à ce niveau-là et on remarque
que, souvent, un nouveau consommateur, souvent, va faire, évidemment, une seule cuvée la
première fois et, si par la suite il est satisfait de sa récolte ou de sa
cuvée, la fois d'après il va faire deux ou trois cuvées, question
de se monter un cellier, si j'ose dire, et c'est un peu la façon de
procéder pour les clients.
M. Coiteux : Et, pour le nouveau, là, qui fait ça pour la première fois ou les toutes premières fois, vous offrez une formation? Vous
avez des formateurs? Comment ça fonctionne?
M. Brodeur (Gaétan) : C'est des services-conseils qui sont donnés en
centre de vinification parce
qu'essentiellement le centre de
vinification se veut une location d'espace et une location d'équipements. Les
conseillers qui sont sur place sont
sur place exclusivement pour assurer la manutention des produits et assurer les
conseils voulus aux clients afin que le vin puisse évoluer de la bonne façon à ce niveau-là. C'est une formation
quand même assez réduite. Les clients sont invités à demeurer sur place ou à revenir tout le long du
processus de fermentation. Il faut noter qu'un processus de vinification
jusqu'à l'embouteillage, c'est de 30 à
34 jours environ, et, lorsqu'on dénote les opérations effectivement
effectuées par le client ou les services connexes qui sont faits au
niveau de l'exploitation, on parle d'environ 70 minutes. Alors, c'est 70 minutes d'investissement de temps qui est
requis sur une période de 34 jours. Le reste du temps, le vin fait sa
vinification naturelle, et les gens sur place
s'assurent simplement que les températures de chambre sont contrôlées afin que
la vinification soit maximisée. Et
par la suite, lorsque les vinifications arrivent à leur point final, on
s'assure de transférer les touries
dans des chambres froides afin de stopper la fermentation. C'est un processus
naturel, qui est contrôlé sur place. Alors, c'est le service qui est
assuré par l'exploitant de centre de vinification.
M. Coiteux :
Je voyais dans votre document que vous écrivez que le prix moyen d'une
bouteille de vin finie dans un CDV
est de 6 $. Est-ce que vous incluez, là, matières premières, location de
l'espace, utilisation des équipements et quelques services-conseils?
C'est tout inclus, là?
M. Brodeur
(Gaétan) : Effectivement, oui. Les services-conseils sont inclus dans
le frais de vinification. Le frais du
centre de vinification, habituellement, varie entre 40 $ et 50 $,
selon le centre. Alors, les services-conseils sont inclus dans ça, et effectivement le prix final englobe
tous ces frais-là, oui. Ça peut varier quand même. Il peut y avoir des
produits qui vont se retrouver à 7 $
parce qu'il y a des trousses de vinification qui, au détail, vont se vendre
entre 40 $ et ça va jusqu'à 150 $. Alors, bien évidemment, il
y a des qualités différentes, un peu comme dans un vin commercial.
M. Coiteux :
Quand vous dites «un premier client, souvent, va commencer par faire une
cuvée», une cuvée, ça peut représenter combien de bouteilles?
M. Brodeur
(Gaétan) : 30 bouteilles. C'est standard.
M. Coiteux :
30 bouteilles. Donc, en dedans d'une période de, vous avez dit, 30 à
40 jours, les gens repartent avec une trentaine de bouteilles?
M. Brodeur
(Gaétan) : Exactement. Et c'est la raison pour laquelle...
M. Coiteux :
O.K., puis tout leur a été fourni sur place. Les bouteilles ont été fournies
sur place, l'équipement pour, bon, la
fermentation, transvider, ils ont acheté leurs matières premières sur place.
C'est comme ça que ça fonctionne?
M. Brodeur
(Gaétan) : Ils ont acheté les bouteilles, ils ont acheté les matières
premières, et c'est le client lui-même qui...
à la fin du processus, on lui téléphone, et le client est invité à réserver une
fenêtre pour pouvoir utiliser les équipements d'embouteillage,
d'emballage, et c'est le client lui-même qui finalise complètement son produit.
M. Coiteux :
Et le 6 $ moyen représente tout ça, y compris la bouteille, tout, au
complet?
M. Brodeur
(Gaétan) : Tout ça, oui.
M. Coiteux : O.K. Je
ne sais pas si mon collègue a quelques questions à poser. Moi, j'étais curieux,
là, je n'ai jamais mis les pieds dans un de vos centres.
M. Brodeur (Gaétan) : Non, mais c'est bien parce qu'effectivement c'est
un concept qui est méconnu au Québec.
M. Coiteux :
Mais mon intention, comme ministre, avec les collègues... évidemment, c'est le
souhait que le projet de loi soit adopté,
puis votre industrie, selon moi, a toute la légitimité et elle doit être
reconnue. Je veux dire, on le fait
dans d'autres provinces. Pourquoi les Québécois, qui sont sans doute aussi
amateurs, peut-être même davantage que dans
certaines autres provinces, ils ne pourraient pas avoir accès aux mêmes
services? Alors, on veut sécuriser votre cadre dans lequel vous allez pouvoir, donc, par la suite, faire les
investissements nécessaires en fonction de la clientèle que vous avez puis de faire connaître vos services aux
clients potentiels en toute tranquillité d'esprit. C'est ça, notre intention.
Je vais laisser mon client
poursuivre... — mon
client! je ne suis pas encore dans la business — mon collègue, mon collègue, mon
collègue poursuivre.
Le Président
(M. Auger) : Votre futur client, mais député de Jean-Lesage.
Quatre minutes, M. le député.
M. Drolet :
...un bon viniculteur dans une prochaine vie, mon cher M. Brodeur. Bien,
écoutez, bienvenue à vous deux. Heureux de vous revoir, M. Brodeur,
et puis merci de votre mémoire aussi, parce que je pense vous avez bien présenté, vous avez... comme le ministre l'a si
bien dit, vous nous démontrez un petit peu la méconnaissance de
plusieurs d'entre nous à votre industrie. Et
heureux de voir aussi que vous êtes heureux qu'on aille de l'avant puis qu'on
vous ait écoutés aussi dans cette opération-là. Et j'ai compris aussi, en vous
rencontrant, quand on s'était vus à l'époque, comment, justement,
on était loin du vin à la maison qu'on se faisait dans le bon vieux temps quand
les mononcles nous recevaient après
avoir fait leur cuvette. Alors, c'est
ça qui est à l'origine, là... a, en
fait, donné une industrie autant en potentiel que vous l'avez aujourd'hui. Puis, je l'ai bien compris, ça fait 15 ans
que vous êtes... que les centres de viniculteurs sont apparus.
Mais
j'aimerais juste vous entendre davantage sur la précision concernant... parce que vous avez mentionné les chiffres
tantôt, l'Ontario, 508 centres, versus
89 ici. Oui, ils ont une réglementation, là-bas, adaptée, mais c'est quoi
de plus? Le ministre vous a posé beaucoup de
questions sur les opérations puis qu'est-ce que le centre a fourni comme tel
aux clients. Mais, comme tel, en
Ontario, vous avez dit que, tantôt, les investissements... si la réglementation
était là, les gens pourraient investir
davantage ou... J'aimerais vous entendre un peu sur ce que ça pourrait faire de
plus, justement, avec la réglementation.
Qu'est-ce que ça va donner aux viniculteurs, les centres de viniculteurs
davantage pour se comparer, si on veut, à l'Ontario?
M. Brodeur
(Gaétan) : Bien, effectivement, on le retrouve un peu aussi dans les annexes qui ont été jointes
au document. Ce qui arrive, c'est que la reconnaissance du statut va automatiquement permettre à la plupart des exploitants actuels de développer leur exploitation, c'est-à-dire d'agrandir, parce que l'espace est requis. On parle d'un entrepôt
de services, donc l'espace est requis à ce niveau-là. L'investissement de l'espace est coûteux s'il est non requis,
alors les gens commencent toujours
avec un espace restreint et développent selon la croissance de l'entreprise. C'est un peu ce qui va se produire
à ce niveau-là pour les exploitants actuels. Et la même chose au niveau des équipements offerts : plus la clientèle est
importante, plus c'est facile pour les exploitants, les propriétaires d'entreprise
d'investir sur des équipements sophistiqués
et améliorer l'expérience client, qui est l'objectif ultime de tous les
détaillants, aujourd'hui, pour attirer les clients. Donc, ça, c'est
le premier volet pour les exploitants actuels.
Maintenant,
le fait que la reconnaissance de ce statut-là se fasse va assurément créer une
demande au niveau des permis de
centre de vinification qui va permettre d'assurer l'installation ou le développement de centres de vinification dans d'autres villes, d'autres
régions du Québec. Alors, avec les années, on a vu l'inverse qui s'est produit
face à la non-reconnaissance. Certaines
villes du Québec ont perdu le seul ou unique centre de
vinification ou commerce de vente au détail
qu'ils avaient. Donc, c'est l'effet inverse qui est anticipé maintenant,
c'est que ces centres de vinification là vont se repartir avec de nouveaux propriétaires. Et c'est les jeunes, effectivement, on l'a vu lorsqu'on a fait la présentation avec vous, maintenant qui sont intéressés par ce concept-là. Il faut
reconnaître qu'il y a 20 ans les gens qui investissaient
dans un magasin de vente au détail, c'est
des gens d'un âge relativement avancé qui voulaient faire de ce commerce-là
une préretraite. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Ce sont des jeunes de 25, 30 ans qui investissent et qui veulent
effectivement développer une entreprise,
voire même avoir deux ou trois centres de vinification altérée un peu dans ce
qu'on voit avec les...
Le Président
(M. Auger) : Merci. Nous devons poursuivre.
M. Brodeur
(Gaétan) : ...les commerces de café.
Le
Président (M. Auger) :
Oui, c'est terminé de votre côté. Désolé, M. le député de Jean-Lesage, futur client.
M. Brodeur
(Gaétan) : C'est moi qui parle trop. Je suis désolé.
Le Président (M. Auger) : Donc, nous allons maintenant poursuivre avec l'opposition officielle. M. le porte-parole
et député de Verchères, pour 9 min 30 s
• (10 h 30) •
M. Bergeron : Merci,
M. le Président. J'ai l'habitude de dire, lorsqu'on doit mettre un terme de
façon abrupte à nos échanges avec les témoins, que ça passe donc vite en
bonne compagnie.
J'entendais
le ministre dire : Moi, mon intention, comme ministre... je pensais qu'il
allait dire «c'est de commencer à
produire du vin à la maison», mais il ne s'est pas rendu là. Sait-on jamais,
peut-être développera-t-il ce goût également. Parce qu'on a tous et toutes entendu parler de quelqu'un près de nous ou
qu'on connaît qui a produit son vin à la maison. Je me souviens que, quand j'étais plus jeune, mon
père en produisait à la maison dans des conditions un peu
approximatives, et là est arrivé tout
l'équipement, les moûts qui étaient fournis, ce qui a considérablement
amélioré, je dirais, la qualité du produit.
Quoi qu'il en soit, je m'intéresse à certains éléments de
votre présentation, lorsque vous nous donnez, par exemple, à la fin, la liste des producteurs au Canada et...
les fournisseurs, pardon — ABC
Cork, London, Ontario, Advintage Distribution,
Boucherville, Québec, Mosti Mondiale, Sainte-Catherine, Québec,
RJ Spagnols, Saint-Bruno Québec, Global Vintners Inc., Ontario — et là
vous semblez dire que vous avez besoin qu'on intervienne, entre autres, pour
assurer la qualité des produits pour le bien des consommateurs québécois.
Alors, moi, je me suis posé comme question : S'il y a des producteurs bien établis dont la qualité des produits ne fait
aucun doute, pourquoi est-il nécessaire d'intervenir sur le plan législatif pour assurer la qualité des
produits pour les consommateurs québécois? Serait-ce parce qu'il y a, dans
le marché présentement, des gens qui vendent
encore aux consommateurs québécois des trucs qui sont plus ou moins à la
fine pointe ou plus ou moins appropriés,
disons cela comme ça, et qui font en sorte qu'on se retrouve avec une
production plus qu'artisanale comme celle
que mon père faisait alors que j'étais enfant, c'est-à-dire un peu avec les
moyens du bord, là, quelque chose qui est d'une qualité plutôt
questionnable?
M. Brodeur
(Gaétan) : Non, effectivement, lorsqu'on mentionne l'importance du
contrôle à ce niveau-là, c'est au
niveau des centres de vinification et non pas des producteurs. Les producteurs,
comme je l'ai mentionné tantôt, sont déjà soumis, eux, à des lois au
niveau du Canada, et ces lois-là, que ce soit l'emballage, la loi de
l'agriculture, ou ces choses-là, englobent
le contrôle qui est sur ça. La traçabilité à partir du fournisseur est très
facile à établir et elle se rend jusqu'au détaillant, il n'y a aucun
problème.
Là où c'est
complexe dans le contexte actuel quand il n'y a pas de reconnaissance et
d'encadrement des centres de vinification,
c'est que certains centres de vinification peuvent effectivement opérer de
façon non pas illicite, mais de façon un
peu étirée, élargie et effectuer des opérations qui empêchent d'assurer la
traçabilité du même produit. Donc, il n'y a rien qui peut garantir au client qui achète une trousse de vinification,
qui saupoudre la levure dans la cuve de fermentation... il n'y a rien qui lui garantit qu'au bout des
34 jours il va retrouver son produit dans la tourie finale que
l'exploitant va lui remettre pour
embouteiller. Donc, c'est au niveau de ces contrôles-là que c'est important, et
c'est pour ça que le code de conduite
autoréglementé que l'association a toujours prôné assurait cette traçabilité-là
et ce contrôle serré là au niveau des étiquetages
des cuves de fermentation, par la suite des touries de stabilisation et,
finalement, la tourie qui sert à l'embouteillage final. Alors, c'est au
niveau des centres de vinification que ces contrôles-là sont plus requis.
M. Bergeron :
Donc, si je vous comprends bien... puis vous aurez l'occasion assurément de me
corriger si je fais erreur, mais, si
je vous comprends bien, on est en mesure, actuellement, de confirmer que les
distributeurs vendent des produits de qualité, vendent des produits qui
sont à la fine pointe tant sur le plan phytosanitaire que sur le plan de la vérification, là, mais ce que je comprends
également, c'est que s'est développé, en parallèle de ces détaillants, des
centres de viticulture, et que, là, on n'est
pas trop sûrs de ce qui s'y trouve, et qu'on aurait besoin d'encadrer également
cette nouvelle ou cette espèce d'annexe à l'industrie qui est en train
de se développer, c'est bien cela?
M. Brodeur
(Gaétan) : Bien, effectivement, c'est effectivement au niveau des
centres de vinification que ces contrôles-là
doivent être faits. Les fournisseurs, dans certains cas, les producteurs sont
soit au Québec ou soit dans d'autres provinces
canadiennes. Alors, ces gens-là, comme je le disais tantôt, sont déjà
légiférés, contrôles, investigués sur une base régulière. Tout ce qui est importé par... Eux, ce qu'ils font,
finalement, à la base, c'est qu'ils importent des jus ou des concentrés en quantité énorme. Ces jus et ces
concentrés-là sont traités sur place dans leurs installations et sont
conditionnés pour donner les trousses de
vinification qui sont par la suite
vendues aux consommateurs. Alors, ces trousses vinification là sont faites de façon contrôlée, comme je le
dis. Et, contrairement à ce que vous mentionnez, il y a 15, 20, 30 ans,
lorsque c'était assez aléatoire de démarrer
une cuvée de vinification, maintenant c'est un succès assuré. Alors, c'est
uniquement une question de temps et une
question de suivi du processus tellement la qualité de ces trousses de vinification là est
stable. Et c'est la raison pour laquelle la
plupart des producteurs endossent une garantie à l'intention de leurs clients.
Si la trousse de vinification ne donne pas le résultat souhaité par le
client, alors la trousse est remplacée par un ou l'autre de ces producteurs-là.
Alors, ils sont relativement confiants dans la qualité de leurs produits.
M. Bergeron : Mais, dans le cadre existant, qui est, nous
dites-vous, assez rigide, bien encadré, comment des gens, sous l'appellation de centres de vinification,
peuvent-ils vendre aux consommateurs des produits qu'on pourrait
retrouver chez des détaillants, mais des produits qui n'ont pas nécessairement
la même qualité? Est-ce que, par extension, la réglementation ne devrait pas
s'appliquer également à eux?
M. Brodeur (Gaétan) : À «eux»,
vous...
M. Bergeron : Les centres de
vinification, puisqu'ils vendent également des produits aux clients.
M. Brodeur (Gaétan) : Bien, à
ma connaissance, la plupart des centres de vinification dont on parlait tantôt,
les 89 ou à peu près, sont tous soumis à
cette forme d'autoréglementation là, qui est suivie par la plupart. Certains ne
la suivent pas, donc
c'est de là que découle la forme de contrôle structurée qui est demandée, afin
d'assurer la qualité de ça. Parce qu'on
doit reconnaître que, si les détaillants, face à une reconnaissance du statut de centre de vinification, décident d'investir significativement dans leur entreprise, ils n'ont aucun intérêt à ce que
le voisin qui a également un centre de vinification
fasse des choses illicites ou des produits de piètre qualité qui vont
automatiquement avoir un impact négatif sur tous les centres de vinification. Alors, c'est la raison pour
laquelle il ne faut pas juste reconnaître le statut de centre de vinification — ça doit être très rare que les gens vous
disent ça — mais il
faut également l'encadrer correctement afin de s'assurer que les
investissements qui vont être faits par ces gens-là puissent être sécurisés
partout au Québec.
Le Président (M. Auger) :
Dernier 30 secondes.
M. Bergeron :
Vous seriez surpris de voir le nombre de témoins qui sont venus nous dire qu'on
souhaitait que la régie cesse d'être un chien de garde édenté puis qu'on
souhaite, effectivement, donner des moyens à la régie pour lui permettre d'appliquer les règlements correctement.
Alors, dans ce sens-là, vous n'allez pas dans un sens complètement opposé à certains... à la plupart ou, du moins, à
plusieurs des témoignages qui nous ont été faits jusqu'à présent. Je
vous remercie infiniment.
M. Brodeur (Gaétan) : Merci.
Le Président (M. Auger) :
Merci. Nous allons poursuivre avec le député de Beauce-Nord pour
6 min 30 s M. le député.
M. Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue,
M. Raposo et M. Brodeur. Très
intéressant, votre mémoire, parce que ça m'a éclairé sur votre association des
vins artisanaux. Si je comprends bien, les vins artisanaux, les centres de vinification ne vendent pas d'alcool
comme tel, ne vendent pas de produits finaux comme tels, là, du tout,
hein?
M. Brodeur (Gaétan) : Non. Ça
n'a jamais été le cas.
M. Spénard : Ça
n'a jamais été le cas?
M. Brodeur (Gaétan) : Ça ne
devrait pas être le cas, exactement.
M. Spénard :
Ils vendent plutôt des équipements au consommateur ou ils peuvent louer des
équipements dans leurs entreprises pour que le consommateur fabrique son
propre vin.
• (10 h 40) •
M. Brodeur
(Gaétan) : Exactement. Si vous me le permettez, je vais vous faire une
image très, très facile qui va vous
faire comprendre le concept. En Ontario, un centre de vinification, lorsque le
client pénètre dans la première section du centre de vinification, c'est la portion détail. Alors, il y a une
séquence : le client achète son produit, par la suite transite dans la section suivante et démarre immédiatement
son produit, qui, par la suite, est pris en main par l'exploitant, et
tout ça, et à la fin il revient et va
procéder à l'embouteillage du produit, tel que c'est requis. Au Québec, c'est
complètement différent dans le contexte
actuel. Ce que les détaillants ont dû faire, c'est qu'on retrouve une petite
boutique de détail à une porte
spécifique avec un numéro de porte, et vous devez aller à la porte à côté pour
pouvoir pénétrer dans le centre de
vinification, qui est séparé du magasin de détail. Alors, c'est la raison pour
laquelle je mentionnais tantôt que les coûts pour les exploitants ici se sont dupliqués avec les années et c'est la
raison pour laquelle la reconnaissance
de ce statut-là au Québec va permettre à tous les exploitants actuels et
les futurs exploitants de restructurer leurs opérations de façon professionnelle
et efficace.
M. Spénard : O.K. On est loin du vin de cerises des grands-parents,
là, qu'on buvait durant le temps des fêtes, là, mais comment et qui vérifie le taux d'alcool? Comment c'est fait, la vérification du taux d'alcool dans une bouteille de vin?
M. Brodeur
(Gaétan) : Bien, la trousse
de vinification en elle-même, là, lorsqu'elle est conditionnée et préparée pour être vendue par le producteur, qu'il soit au Québec
ou en Ontario, par la
suite expédiée et vendue au
détaillant qui, lui, la revend au
consommateur, ces trousses-là sont faites de façon stable et sont
conditionnées de la même façon. Le jus qui se retrouve à
l'intérieur a un certain degré Brix qui est régulier, et la conversion en
alcool va toujours donner un niveau d'alcool
maximal. Anciennement, les gens se
retrouvaient que leur vin ne fermentait pas du tout ou se retrouvaient
avec un vin sucré non alcoolisé.
Aujourd'hui, ce n'est pas ce qui arrive. Alors, les degrés Brix sont
automatiquement transformés en degrés d'alcool qui donnent tout le temps
un vin relativement stable entre 12 et 13 degrés.
M. Spénard :
12 % et 13 %? O.K.
M. Brodeur (Gaétan) : Alors,
ça, il n'y a aucune façon de pouvoir extrapoler.
M. Raposo
(Frank) : Dépendant de la trousse de vinification, le taux d'alcool
peut être entre 11,5 % jusqu'à 14 %. Alors, ça dépend le style
de vin.
M. Spénard :
O.K. Si on augmente la fermentation, au lieu d'être 34 jours, s'il met ça
à 68 jours, est-ce que ça augmente le degré d'alcool?
M. Raposo
(Frank) : Non, non.
M. Brodeur
(Gaétan) : Impossible.
M. Spénard :
Je pensais que c'était la fermentation qui faisait le...
M. Brodeur
(Gaétan) : Impossible.
M. Spénard :
C'est impossible?
M. Raposo
(Frank) : La fermentation, c'est, d'habitude, 14 jours. Après
14 jours, la fermentation est complète, puis après ça c'est la
période de stabilisation et clarification du vin, puis ça va clarifier pendant
un autre 10 jours.
M. Brodeur
(Gaétan) : Et je dois mentionner également qu'avec les centres de
vinification il n'y a aucun exploitant de
centre de vinification qui accepterait de laisser son espace d'entreposage, et
ses touries, et ses équipements... de
laisser dormir ces produits-là pendant 60 jours. D'ailleurs, dans le
contrat de chaque centre de vinification, dans le contrat avec le client
qui est signé, il est stipulé que, lorsqu'il a un avis que le produit est prêt
à être embouteillé, le client a trois jours pour se présenter.
M. Spénard :
O.K. Et la matière première pour fabriquer le vin, c'est vendu sous... ça,
c'est un sauvignon, cabernet, cabernet-sauvignon, merlot, etc.?
M. Brodeur
(Gaétan) : Oui, c'est un peu le principe des vins commerciaux. Il y a
des vins d'assemblage qui sont déjà prémixés, ce sont des jus qui sont
assemblés et mis dans la trousse de vinification. Et il y a beaucoup de vins de
cépages, effectivement, parce que c'est la tendance. Et il y a des vins de
cépages qui proviennent d'origines... d'autres pays.
M. Spénard :
O.K. Une dernière question : Est-ce que les centres vinicoles peuvent
vendre des produits qui servent à faire des boissons sucrées à base
d'alcool?
M. Raposo
(Frank) : Les boissons sucrées comme...
M. Spénard :
À base d'alcomalt, les Four Loko ou les Fckdup.
M. Raposo
(Frank) : Dans le style.
M. Spénard :
Est-ce qu'un centre peut vendre ça, des produits comme ça?
M. Raposo
(Frank) : On a des produits style coolers, mais pas des produits comme
Fckd Up.
M. Brodeur
(Gaétan) : Pas des produits à haute teneur en alcool.
M. Raposo
(Frank) : Non, mais quelqu'un peut produire un style de vin ou bière
comme ça chez eux. Mais, dans un centre de vinification, on n'a pas des
produits de ce style.
M. Spénard :
O.K. Merci.
Le Président
(M. Auger) : Ça va? Merci beaucoup, M. le député de Beauce-Nord.
Donc, merci à vous, MM. Brodeur et Raposo, donc, d'avoir participé aux
travaux de la commission.
Je vais suspendre
quelques instants pour permettre au prochain groupe de pendre place.
(Suspension de la séance à
10 h 44)
(Reprise à 10 h 47)
Le Président
(M. Auger) : À l'ordre, chers collègues! Nous allons reprendre
nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants du Conseil canadien du
commerce de détail. Je rappelle que vous avez 10 minutes pour la présentation, par la
suite suivra une période d'échange avec les trois groupes
parlementaires. Dans un premier temps, vous identifier, et par la suite
vous pourrez commencer.
Conseil
canadien du commerce de détail (CCCD)
M. Fortin
(Marc) : Merci beaucoup. Merci, M. le Président. Mesdames et messieurs
membres de la commission, mon nom est Marc Fortin, je suis président du
Conseil canadien du commerce de détail, division Québec, et puis je suis
accompagné aujourd'hui de Jean-Luc Benoît, qui est notre directeur des
relations gouvernementales au Québec.
Ça
fait que nous tenons d'abord à remercier la commission de nous donner cette
occasion de présenter le point de vue
de nos membres sur le projet de loi n° 170. Nous voulons aussi remercier
le député de Jean-Lesage pour son écoute et son travail acharné depuis
l'automne 2016 sur ce projet. Nous sommes toujours disponibles pour
échanger avec les membres de l'Assemblée nationale sur les enjeux touchant les
détaillants québécois.
Le
CCCD constitue la principale organisation oeuvrant à la défense et à la
promotion des intérêts des détaillants. Fondé en 1963, le conseil a pour mission d'être la voix des détaillants
au Québec, au Canada, en offrant un large éventail de services de
représentation, de recherche, d'éducation ainsi que d'autres services destinés
à favoriser la réussite des détaillants et à mieux faire connaître leur
contribution auprès des collectivités et des consommateurs.
Le
conseil regroupe près de 45 000 établissements au Canada, dont près
du tiers au Québec. De plus, il est la voix des distributeurs alimentaires au Québec et au Canada. Il s'agit de
l'une des plus grandes associations sans but lucratif financées par l'industrie regroupant tous les
types de détaillants, tels que les grands magasins, les magasins grand
public, les chaînes spécialisées, les
magasins indépendants et les commerçants en ligne. Au Québec, le commerce de
détail emploie plus de 475 000 personnes, soit 11 % de la
population active, et le commerce de détail génère des ventes annuelles
estimées à 109 milliards au Québec qui représentent une activité
économique de 5 % du PIB québécois.
Le CCCD partage
l'objectif de moderniser le régime juridique applicable aux permis d'alcool. Et
en tant que représentant des principales
bannières dans le secteur de l'alimentation qui sont à la fois exploitants
d'épiceries et distributeurs, le CCCD a participé aux consultations
menant au projet de loi n° 170.
Nous
tenons d'entrée de jeu à exprimer certains principes qui, selon nous, sont
fondamentaux. D'abord, les règles doivent
être équitables. Le commerce de détail est un secteur hautement concurrentiel de
notre économie, et chaque fraction de
part de marché peut être très importante. On y retrouve souvent des entreprises
offrant les mêmes types de produits aux mêmes consommateurs, mais ayant des modèles d'affaires différents. La
réglementation doit donc éviter de donner avantage indu à une entreprise ou un modèle d'affaires
particulier. Il est primordial que les entreprises de notre secteur
puissent prendre leurs décisions d'affaires en fonction de règles qui sont
connues, équitables et sont les mêmes pour tous. L'expression anglaise «level
playing field» illustre très bien ce principe.
La commercialisation
des produits alcoolisés au Québec a comme particularité que les détenteurs de
permis d'épicerie ont l'obligation de
s'approvisionner, pour le vin, via un fournisseur unique et obligatoire, la
Société des alcools du Québec. Mais
ce fournisseur unique est aussi un concurrent, car il vend des produits
alcoolisés, notamment du vin et de la bière,
directement aux consommateurs à travers son réseau de succursales. Le cadre
législatif et la réglementation doivent donc avoir, en tout temps, l'objectif non seulement d'assurer mais aussi
d'accroître l'équité entre les différents acteurs du réseau, ce pourquoi
nous croyons que tout changement aux lois et règlements régissant la vente de
détail de produits similaires et la promotion des produits alcoolisés devrait
s'appliquer autant à la SAQ qu'aux détenteurs de permis d'épicerie.
• (10 h 50) •
M. Benoît (Jean-Luc) : La réglementation doit être claire et prévisible.
Les détaillants planifient la croissance de leur entreprise, établissent leur plan de développement et
investissent dans une perspective à long terme. Il est donc crucial
qu'ils puissent prendre leurs décisions d'affaires en fonction d'une
réglementation claire et raisonnablement prévisible à moyen et à long terme.
L'industrie
du commerce de détail est très compétitive et repose sur un équilibre sensible.
Le moindre changement réglementaire ou législatif peut donc avoir un
impact important sur le modèle d'affaires de plusieurs détaillants. Il est important que les intervenants du secteur puissent
être consultés et impliqués dans les décisions qui les affectent. Or, le
gouvernement propose, dans le projet de loi
n° 170, de se donner le pouvoir de modifier par règlement plusieurs
éléments qui nous semblent trop importants
pour procéder ainsi. Nous comprenons la volonté gouvernementale de se donner
une certaine souplesse dans l'administration
de cette loi. Nous croyons toutefois qu'il est important que les directions
soient données dans le cadre législatif
lui-même, car celui-ci doit être clair et prévisible à long terme. Bien qu'une
période de consultation soit prévue
dans le cas d'un changement réglementaire, celle-ci n'a ni l'amplitude ni la
transparence de celle prévue par le
processus parlementaire. Nous voyons donc bien mal comment les intervenants de
l'industrie, dans le cas présent les détenteurs de permis d'alcool,
peuvent être avantagés.
Certains éléments du projet de loi
n° 170, notamment ceux compris aux articles 2, 31 et 33 nécessitent,
selon nous, une clarification permanente dans le texte de loi.
L'article 2 donnerait notamment
au gouvernement le pouvoir de modifier par règlement les activités impliquant
des boissons alcooliques qu'un permis
autorise ainsi que les conditions d'obtention et d'exploitation qui y sont
rattachées. Il s'agit, selon nous, de
conditions beaucoup trop fondamentales pour être modifiées par simple
changement réglementaire. Nous croyons donc que le deuxième paragraphe
de l'ajout proposé à l'article 25 de la Loi sur les permis d'alcool
devrait être retiré.
À l'article 31, nous prenons acte
de l'ouverture à autoriser un titulaire de permis d'épicerie à offrir
gratuitement en dégustation dans son
établissement les boissons alcooliques qu'il est autorisé à vendre. Il s'agit
d'une demande de longue date de
l'industrie. Si l'intention gouvernementale est de permettre ces dégustations,
pourquoi ne pas clarifier explicitement la volonté du législateur dans
le texte de loi plutôt que procéder par voie réglementaire?
Le projet de loi n° 170 exprime
aussi la volonté d'outiller les titulaires de permis permettant la
consommation sur place des produits
alcoolisés. La réalité des détaillants en alimentation et la nature de leurs
établissements sont toutefois très différentes de celles des bars et des
restaurants, car les produits vendus par les détaillants sont destinés à une
consommation à domicile. Or, tel que
formulé, l'article 33 du projet de loi ne spécifie pas à quels types de
permis s'appliquerait l'obligation de
formation. Nous sommes en faveur de la formation et de la sensibilisation sur
la consommation responsable, mais nous croyons que cet article devrait
être amendé afin de préciser que le caractère obligatoire de la formation ne
vise que les titulaires de permis pour consommation sur place, soit ceux de
restaurants, de bars, ainsi que le permis transitoire.
Nous comprenons le contexte qui a
poussé le gouvernement à faire connaître son intention d'amender le
projet de loi n° 170 afin de limiter à
7 % le titre alcoolémique d'un breuvage à base de bière pouvant être vendu
par les détenteurs de permis
d'épicerie. Le CCCD ne s'oppose pas à cette modification, mais nous demandons
qu'il soit précisé explicitement que
la limite de 7 % exclut la bière et le vin. Cela étant dit, il est
regrettable qu'alors que nous ayons en main un texte pour le projet de loi nous n'ayons pas aussi une
ébauche d'amendement sur laquelle nous pourrions nous prononcer dans le
cadre de ces consultations.
Dans son récent rapport intitulé Intoxications
aiguës à l'alcool et boissons sucrées alcoolisées, l'Institut
national de santé publique du Québec
recommande la mise en place d'un prix minimum par verre d'alcool standard pour
tous les produits alcoolisés. Selon
l'Organisation mondiale de la santé, limiter l'accessibilité économique à
l'alcool en maintenant des prix de
vente élevés fait partie des interventions les plus efficaces pour diminuer la
consommation d'alcool chez les jeunes,
les gros buveurs et les personnes ayant une dépendance à l'alcool. C'est
pourquoi le CCCD appuie la fixation d'un prix minimum. Par contre, si une telle mesure était mise en place, elle
devrait s'appliquer autant aux produits vendus par les détenteurs de
permis d'épicerie qu'aux produits similaires et comparables vendus par la SAQ.
M. Fortin (Marc) : La
révision de la Loi sur les permis d'alcool devrait aussi constituer une
opportunité pour moderniser nos
règles sur la publicité. Dans le cadre des consultations menant au projet de
loi n° 170, le CCCD a suggéré des
modifications aux articles 6 et 8 du Règlement sur la promotion, la
publicité et les programmes éducatifs en matière de boissons alcooliques découlant de la Loi sur les permis d'alcool afin
de tenir compte des réalités d'aujourd'hui. Nous croyons par exemple qu'un détaillant ou qu'un distributeur autorisé
devrait pouvoir faire de la publicité à l'extérieur de son établissement
sans devoir mentionner en même temps deux marques de deux fabricants distincts.
De même, un détenteur de permis d'épicerie
ou un distributeur devrait pouvoir faire de la publicité conjointement avec un
fabricant.
C'est dans un esprit constructif et de
collaboration que le Conseil canadien du commerce de détail soumet aujourd'hui
ses commentaires et formule ses
recommandations sur le projet de loi n° 170. Nous remercions à nouveau les
parlementaires pour l'opportunité qui nous est donnée de faire entendre
la voix de nos membres. Et le CCCD regrette toutefois que l'exercice menant au projet de loi n° 170 se
soit limité aux enjeux liés à la Loi sur les permis d'alcool et, ce faisant,
n'ait pas permis d'avoir une discussion plus
large sur la mise en marché des produits alcoolisés au Québec, sur la relation
entre les divers intervenants du système et
sur l'optimisation des services et des produits offerts aux Québécois. Nous
souhaitons donc que ce projet de loi ne
constitue qu'une première étape et que, dans un avenir rapproché, les différents
partenaires puissent travailler ensemble dans ce sens.
Nous sommes
maintenant disposés à répondre à vos questions, et je vous remercie beaucoup.
Le
Président (M. Auger) : Merci pour votre présentation. Nous allons
maintenant débuter les échanges avec la partie gouvernementale, et, M.
le ministre, vous avez 16 minutes.
M. Coiteux :
Oui. Alors, merci, MM. Fortin et Benoît. Je vais prendre votre dernier
commentaire à l'effet que vous auriez
souhaité que nous embrassions plus largement encore dans ce réexamen, là, des
conditions d'octroi des permis d'alcool
puis des conditions d'exploitation, tout ça. Je comprends votre commentaire. Ce
ne sont pas des lois qu'on touche fréquemment,
n'est-ce pas, donc je sais qu'il y a un certain nombre de groupes qui ont
manifesté ce genre de désir. Ceci dit, je
pense que, des fois, quand on veut embrasser beaucoup, ça bouscule tellement de
choses que, finalement, on ne propose rien
et qu'il ne se passe pas grand-chose. Et je suis donc partisan d'y aller... pas
nécessairement par petits pas, parce que je pense qu'on fait plus que des petits pas avec ce projet de loi, on fait
des pas très importants dans la modernisation, mais, tout simplement
pour que vous compreniez un petit peu notre point de vue, si on avait vraiment
voulu tout revoir, peut-être qu'on ne serait
pas en train de s'en parler aujourd'hui encore. Je pense qu'on va être
capables, je pense, de franchir des
pas importants en ayant limité un petit peu la nature de l'exercice, bien qu'il
soit, selon moi, quand même assez ambitieux.
Peut-être
qu'avant de passer la parole à mon collègue dont vous avez salué, d'ailleurs,
l'engagement, là, en termes de toutes les consultations qui ont été
menées depuis 2016 pour mener à projet de loi — je pense qu'il va avoir envie
d'échanger avec vous — avant de lui passer la parole, je voudrais,
comme je l'ai fait avec un certain nombre de groupes, rassurer un peu par rapport à certaines
inquiétudes que vous avez, notamment cette question de la formation. C'est
vrai que l'article prévoit une formation
obligatoire. C'est libellé d'une façon assez large, c'est vrai, mais on cherche
un équilibre pragmatique et utile, je
dirais, aussi qui est important entre les tenants d'une formation tous azimuts
d'à peu près tous les gens qui ont,
d'une façon ou d'une autre, à vendre des produits alcoolisés et là où ça compte
le plus, du moins pour débuter les choses et puis pour comprendre
comment ça va évoluer.
Donc,
je répète que notre intention à nous, même si on souhaite procéder par la voie
réglementaire, ce n'est pas d'assujettir les épiciers à cette obligation
de formation, c'est d'assujettir les titulaires de permis et les gens qui occupent la gérance, là, dans les établissements
pour consommation sur place. C'est là où on s'en va, nous. Donc, je
tiens à vous rassurer. Je sais que beaucoup
de gens aimeraient que ça soit figé dans un article de loi, mais les articles
de loi, oui, ont ceci de positif que
c'est clair pour tout le monde que ça va toujours être comme ça jusqu'à tant
que la loi soit changée, je le concède,
c'est vrai. Mais par contre il y a une contrepartie négative à ça. La
contrepartie négative, elle est bien plus qu'une question de facilité pour le gouvernement de procéder, c'est beaucoup
plus d'être capable d'ajuster le tir sans nécessairement toujours revoir toute la législation. Et c'est une
législation complexe, c'est une législation qui appelle beaucoup de
choses.
Et
donc cette capacité de s'adapter aux situations, de s'adapter à l'évolution
aussi du marché, je pense qu'elle est utile
pour tout le monde, pas juste pour le gouvernement qui est en place, qui se
dit : Tiens, on n'aura pas l'opportunité, maintenant, de faire un
changement profond à la loi, mais on peut accompagner un certain nombre
d'obligations de modification sans
nécessairement passer par changement législatif. Je pense que c'est dans
l'intérêt de tous, pas juste du gouvernement,
là, quelque gouvernement que ce soit, par ailleurs. C'est dans l'intérêt de
l'industrie que le gouvernement soit
capable de répondre plus rapidement, c'est dans l'intérêt des consommateurs que
le gouvernement soit capable de répondre
plus rapidement, c'est dans l'intérêt de la société. C'est vraiment l'esprit
dans lequel on fait cette distinction entre
articles de loi versus réglementation. Et même les règlements font toujours
l'objet de consultations, et je pense que nos intentions sont claires
quant à notre volonté de moderniser le cadre.
Alors, je voulais juste vous rassurer là-dessus.
Peut-être que ça ne vous rassure pas 100 %, mais tout ça est enregistré, là, donc tout le monde entend quelles
sont les intentions gouvernementales, puis je pense que c'est utile pour comprendre notre
démarche.
Je n'ai pas de
question parce que c'est très clair, votre mémoire, ce que vous nous soumettez
comme préoccupations, qu'on va certainement analyser. Je
demanderais, à ce moment-là... Je pense que mon collègue voulait poursuivre les échanges
avec...
• (11 heures) •
Le
Président (M. Auger) :
Mais avant, M. le député, mais avant, je crois qu'on a des réactions ou
commentaires. Donc, M. Fortin, M. Benoît? M. Benoît.
M. Benoît
(Jean-Luc) : Très
brièvement, on apprécie beaucoup votre pragmatisme, M. le ministre, puis ça
vous honore. Par contre, puis comme vous le
dites vous-même, la loi et la réglementation est conçue, bon, dans un objectif
de moyen et de long terme. Par contre, la
réglementation — puis on
comprend la volonté du gouvernement de se donner une souplesse — le
processus de modification réglementaire n'a pas la même transparence, ne donne
pas lieu au même niveau de débat public où
les différentes parties peuvent s'exprimer que dans le cas d'un changement
législatif. Je sais que, lors de la
présentation d'autres groupes, cet enjeu-là a déjà été soulevé, alors je
n'élaborerai pas beaucoup sur cet angle-là. Par contre, je me dois de
noter qu'aujourd'hui on étudie le projet de loi n° 170, l'automne dernier
c'était le projet de loi n° 134, qui
était la réforme de la Loi sur la protection du consommateur, et, là aussi, la
volonté gouvernementale était de se
donner une plus grande marge de manoeuvre par voie réglementaire. C'est une
tendance que nous, on observe, et qui... bon, on peut en débattre
longtemps, est-ce que c'est légitime ou pas, mais qui nous inquiète parce que,
bon, il y a des changements de ministres, il
y a des changements de gouvernements. Oui, tout est enregistré aujourd'hui, on
prend acte de votre engagement, par
contre il n'y a rien qui nous dit que l'an prochain, dans deux ans, dans trois
ans, dans cinq ans, ça sera encore le
cas. Alors, pour nous, c'est important qu'il puisse y avoir un dialogue
beaucoup plus large, et beaucoup plus transparent, et beaucoup plus
public qui implique l'ensemble des acteurs, à ce moment-là.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Jean-Lesage, 9 min 30 s.
M. Drolet :
Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue, messieurs, encore une fois, heureux
de vous revoir, en fait, pour ces
consultations-là, qu'on a eu le plaisir de discuter ensemble, et merci aussi
pour votre mémoire d'aujourd'hui. Puis
aussi, bien, vous savez qu'on a rencontré une trentaine de groupes, en fait, de
différents paliers pour être en mesure de se faire une bonne tête, pour en être rendus où qu'on en est là. Et nous
tentons de faire notre possible, en fait, pour être capables de satisfaire ou, du moins, d'arriver à
des attentes de chacun pour être en mesure d'être capables, là, de faire
un projet de loi qui va avoir un sens et
surtout, justement, pour tenter de respecter une industrie qui en avait
vraiment besoin et des opérateurs qui en avaient vraiment besoin.
Mais, moi,
depuis mon expérience... On se connaît assez depuis longtemps pour mon
ex-expérience de vie. Une épicerie,
en 2018, j'aimerais ça vous entendre, c'est quoi, pour vous? Parce que, vous
savez, vous représentez le commerce au
détail, mais, particulièrement, l'épicerie est un facteur aujourd'hui. Moi, je
me souviens, dans le temps que j'étais dans la bière puis dans le temps que j'étais avec Pepsi, je vais vous avouer,
vraiment, l'épicerie était concentrée, il y avait... Ça a commencé à évoluer par la suite, où est-ce que,
là, woups! plusieurs ont commencé à vendre à peu près toutes sortes de choses. Parce qu'on sait qu'aujourd'hui, pour tous
ceux qui nous écoutent et ceux qui sont moins familiers... bien, vous comprendrez qu'aujourd'hui tout le monde, à peu
près, vendent... que ce soit l'épicier, en général, les chaînes
d'épicerie, Couche-Tard ont leur façon de
faire, l'épicier indépendant a sa façon de faire, les grandes surfaces, ne
serait-ce que de nommer Walmart, Costco, tous ceux qu'on connaît, les
grandes surfaces d'alimentation, Metro, Provigo, IGA. Alors, comment on se situe aujourd'hui quand on regarde
tout ça — puis là
j'oubliais les pharmacies — les proportions de parts de marché qui sont attribuées à la vente, en fait? On comprend que les
pharmacies ne vendent pas de boissons alcoolisées, mais les autres en
vendent.
Alors,
j'aimerais un peu que vous me donniez un peu votre profil là-dessus. Comment
est-ce que vous voyez ça, vous, cette
dynamique-là? Parce que, tu sais, vous parlez de réglementation qui soit plus
dans le temps, ferme, mais on voit l'évolution tellement rapide, qui
n'existait pas dans le temps. Comment, aujourd'hui, on se situe quand on
regarde toute l'évolution? On parle de formation, de promotions à l'intérieur
des épiceries, tout ce qui en est... les comptoirs-restaurants, maintenant, dans les grandes surfaces de magasin, avec
consommation peut-être sur place, comme... Comment on se situe, là-dedans, nous autres, en tant que
législateurs, là — moi, je
connais ça un petit peu — mais quand on veut peut-être, maintenant, être équitable
avec tout le monde? Comment vous répondez à ça?
Le Président (M. Auger) :
M. Fortin.
M. Fortin
(Marc) : Merci, M. le Président. Avez-vous le temps de commander un
lunch avec du café?
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Fortin
(Marc) : Parce que
les changements sont grands depuis 20 ans dans les réseaux d'alimentation.
Par contre, c'est pour ça qu'on disait, dans notre conclusion aujourd'hui, ça aurait été intéressant d'avoir une discussion plus élargie, une discussion qui aurait parlé de mise
en marché, qui aurait parlé de changements, qui aurait parlé de permis,
qui aurait parlé d'un peu tout. Je comprends
et je prends acte des commentaires de M.
le ministre. Et le crédit est pour
vous, parce que les choses avancent, puis c'est probablement des étapes. C'est une question, M. le
député, qui est quand même très large. Je la résumerais...
Une voix : ...
M. Fortin
(Marc) : Oui, mais je la
résumerais de façon simple, c'est que les consommateurs canadiens,
québécois ont des besoins, puis ces
besoins-là sont satisfaits de différentes façons par différents détaillants.
Les détaillants ne font que s'ajuster
par rapport aux besoins du consommateur. Donc, les modèles
d'affaires évoluent, mais il y a des choses qui restent quand même stables.
Qu'on rentre dans un IGA, dans un Metro, dans un Provigo, ça reste qu'on n'a
pas de vêtements et de souliers avec une
salle d'essayage, ça reste que c'est de l'alimentation. Oui, il va peut-être
y avoir des mets préparés, la bière
va peut-être exploser un peu plus à cause des microbrasseries,
le vin va peut-être prendre un
peu plus de place, un peu moins de place,
mais, en général, les choses sont assez stables dans ces environnements-là, si vous voulez.
C'est sûr
qu'un Walmart ou un Costco vont être un
peu plus disrupteurs, si vous voulez, dans le marché, mais eux vont
avoir des changements plus larges. Mais les traditionnels vont quand même
rester dans des pourcentages qui sont assez
similaires puis dans un style de business qui est quand même
assez similaire. Ça fait que vous y rajoutez du prêt-à-manger? C'est parce que le consommateur le
demande, il y a un besoin. Le consommateur est pressé, le
consommateur travaille, est étiré. Il y a beaucoup
de familles monoparentales aussi, la maman n'a pas le temps de faire à manger.
Donc, d'offrir ce service-là quand elles
viennent acheter le lait, bien, c'est quelque
chose qu'ils ont besoin, qu'ils
demandent, ça fait que les détaillants vont l'offrir. Ça fait que ces petites variations là vont se faire, mais c'est toujours
par rapport aux besoins du consommateur
puis ce que le consommateur demande.
M. Drolet :
On voit de plus en plus... De plus en plus aussi, vous comprenez que même les
restaurants se lancent dans la
situation aussi en même temps aussi pour être en mesure de survivre, parce que
de plus en plus de compétition. Justement,
c'est pour ça que j'aimerais vous entendre là-dessus, voir, vu que vous
représentez le commerce au détail, vous avez le lobby de chacun d'eux, là, indépendamment le... Là, vous les
représentez ce matin, c'est un rôle plus facile à jouer, mais, quand vous avez votre rôle en tant que...
vous, à notre place, là, en tant que législateurs, vis-à-vis votre
association versus le commerce au détail en général que vous devez respecter,
alors comment vous vous placez quand vous avez à répondre à tout ça? Vous venez de parler de Walmart, Costco, puis là
on parle de la restauration, on ne veut pas protéger plus un que l'autre. Nous, on veut juste
satisfaire tout le monde pour qu'il puisse le mieux... Parce qu'on a dit que ce
qu'on voulait, c'est simplifier la vie de
notre monde pour être en mesure d'être rendu dans les années 2018 et non
plus être à la prohibition, alors il faut quand même être capables de se
donner une tête là-dedans.
Puis vous
êtes un joueur important, vous représentez le commerce au détail en général.
Alors, tu sais, quand je vois que... Je jasais, la semaine passée, avec
la chaîne de restaurant ici, à Québec, Cosmos, qui me dit lui-même — puis qu'il y a eu la manchette après — que les parts de marché sont tellement
difficiles, l'employabilité est tellement difficile, tout ce qui en est, que les marges de profit sont
vraiment, vraiment diminuées. Alors, on n'essaie pas d'aider, nous, plus
un que l'autre, mais on doit être réalistes à
l'effet de ce qu'ils ont besoin, puis c'est pour ça qu'on a fait l'allègement
réglementaire. Autant que possible, je me
suis mis dans mon rôle d'adjoint parlementaire pour être en mesure de
donner et écouter à ces gens-là pour arrêter
la paperasse, le moins possible, autant que possible. Entreprises Québec, on a...
on fait tout notre possible, en fait. En
tout cas, du moins, moi, j'ai travaillé fort là-dessus dans mon rôle de... M.
le ministre pour ce qui est de la sécurité
publique concernant l'alcool, mais dans mon rôle d'adjoint parlementaire, ça a
été mon rôle aussi de défendre aussi pour que ça soit autant... même
pour ce qui est de la consigne. Bref, je me suis mis le nez dans pas mal de
choses.
Mais, tu sais, aujourd'hui, quand on doit
répondre à tout ça... Je fais un long exposé, là, mais il faut que vous compreniez qu'on a, nous autres, à se placer...
Puis j'aimerais juste aussi... Peut-être pas... Vous dites c'est large,
mais en même temps vous avez à vivre ça.
J'aimerais savoir, de votre part à vous, là, quand vous êtes assis dans vos
bureaux et que les gens de vos
associations vous appellent, parce que vous êtes payés pour ça, pour répondre à
leurs demandes... Vous avez parlé du
nombre de membres tout à l'heure. Alors, est-ce que, des fois, il y en a un,
des fois, les parts de marché, que ça les agace un peu vis-à-vis
l'autre?
• (11 h 10) •
M. Fortin
(Marc) : Bien, ça doit les agacer tous les jours. Moi, je ne parle pas
de parts de marché avec eux parce que
ce n'est pas mon rôle, là. Au niveau des parts de marché, ils ont leur
stratégie, chacun, unique et précise pour aller au marché et aller chercher plus de consommateurs.
Donc, je ne leur parle pas de ça, mais, nous, c'est vraiment les besoins
qu'ils peuvent avoir. Donc, je vous félicite
pour l'allègement parce que, oui, je pense que, peu importe le genre
d'entreprise, mes membres, et autres, on a
besoin d'allègements réglementaires. Et, dans certains cas, on a besoin de
45 permis pour ouvrir un
magasin. Dans certains créneaux, c'est rendu ridicule et complexe. Ça fait que,
oui, l'allègement est bienvenu, est important.
Mais c'est important, je crois, aussi de bien comprendre les besoins du
consommateur, les besoins des entreprises, des
entrepreneurs, qui font tourner l'économie et qui créent de l'emploi, qui
collectent les taxes, pour dire : Quels sont vos besoins afin de mieux
fonctionner?
Ça fait qu'on sort peut-être un peu de la
discussion qu'on a aujourd'hui avec... Comme je vous dis, c'est une question large.
On est mieux d'avoir une discussion avec un lunch puis de regarder un peu où
les choses vont sur les tendances, mais en
général... Je pense qu'on a fait nos commentaires. Vous êtes sur la bonne
lignée. Il y a certains petits ajustements,
de la façon que nos membres et nous le regardons, certains petits ajustements
qu'on aimerait voir. Maintenant, c'est à vous de reprendre les
commentaires puis de voir comment est-ce que vous allez assigner ça.
M. Drolet :
Je vais aller directement à une question par rapport à la publicité. Vous
souhaitez qu'on autorise les publicités
comme, par exemple... dépanneur centre-ville, un exemple, qui... et Budweiser
vous offre telle affaire pour être en mesure
d'arriver avec, un moment... l'entrée scolaire ou l'entrée étudiante d'un cégep
ou de... et... Puis on a d'autres groupes qui ne souhaitent pas, naturellement, d'avoir des promotions conjointes
comme ça parce que c'est dangereux pour différentes situations.
J'aimerais vous entendre là-dessus un petit peu.
Le Président (M. Auger) : 30
secondes, ça va être un peu.
M. Fortin (Marc) : Je ne suis
pas sûr de bien saisir votre question, mais je vais répondre de la façon...
M. Drolet : Bien, les
publicités conjointes puis croisées.
M. Fortin
(Marc) : Les promotions croisées? Bien, les promotions croisées
existent dans toutes les catégories. La
SAQ fait des promotions croisées aussi, «obtenez un verre gratuit avec ci». La
SAQ va aussi vous donner de l'alcool gratuitement contre les points avec
la carte Inspire, ce que nous, on ne peut pas faire non plus. Quand on parle de
«level playing field», c'est un peu ça qu'on
essaie de dire aussi, c'est qu'il faut que ce soit la même chose pour tout
le monde. Si on va légiférer au niveau de l'alcool, il faut que ça s'applique
partout.
Donc, nous,
on pense... C'est quelque chose qui existe depuis des décennies et des
décennies. Ce n'est pas quelque chose
qui est axé spécifiquement à un créneau, ou autre, c'est un marchand qui essaie
de faire croître son entreprise puis...
Le Président (M. Auger) :
Merci. Nous devons malheureusement continuer — ou heureusement,
dépendamment — avec
le député de Verchères pour 9 min 30 s.
M. Bergeron :
D'abord, merci, messieurs. Je ne peux pas être plus d'accord avec vous sur
votre argumentation dans laquelle
vous exprimez de légitimes préoccupations à l'égard de cette tendance qu'ont
les gouvernements, depuis ces dernières
années, de gouverner par règlement plutôt que par législation, et vous avez
raison. C'est une discussion qu'on a eue
récemment, le ministre et moi, sur le projet de loi sur le contrôle des armes à
feu. Je lui disais : Moi, je n'ai aucune raison de douter de vous,
là, mais allez-vous encore être en poste dans un an et demi, deux ans, trois
ans?
Je suis moi-même l'un des prédécesseurs de
l'actuel ministre de la Sécurité publique, comme vous le savez. Il y en a eu quelques-uns qui se sont succédé
avant que l'actuel titulaire entre en fonction à titre de ministre de la
Sécurité publique. Et, justement, on ne peut
pas savoir si les engagements qui sont pris par un ministre en commission
parlementaire vont être ce qu'on va
retrouver dans les règlements dans un an et demi, deux ans, trois ans, et c'est
une réelle préoccupation. On n'est
même pas sûrs si les engagements qui sont pris en commission vont être tenus,
pas dans un an et demi, deux ans, trois
ans, mais dans six mois. Le même ministre avait pris les engagements à l'égard
des partis d'opposition concernant la réglementation
entourant le contrôle des armes à feu, puis on a effectivement été, entre
guillemets, consultés, mais on a eu quelques
petites surprises quand on a vu le résultat final, en bout de piste, parce que
le gouvernement est libre de faire absolument tout ce qu'il veut.
Alors, moi,
je comprends votre préoccupation. Puis d'ailleurs j'ai cherché à prêcher par
l'exemple lorsque j'étais ministre de
la Sécurité publique parce que, dans le cadre du projet de loi sur le Bureau
des enquêtes indépendantes, j'ai soumis
aux députés d'opposition, donc aux députés libéraux puis aux députés de la CAQ,
le cadre réglementaire dans lequel
nous entendions procéder pour la rédaction des règlements. C'est quelque chose
d'assez inusité, ça, qu'on fournisse aux
députés d'opposition, lors de l'étude d'un projet de loi, le cadre
réglementaire. L'avez-vous vu, ce cadre réglementaire pour l'actuel
projet de loi? Absolument pas.
Or, une bonne
partie de la législation concernant les permis d'alcool va incomber à la
réglementation et non pas à la législation.
C'est sûr que c'est plus facile pour le gouvernement parce qu'il n'a pas à se
représenter devant les parlementaires. Puis
d'ailleurs le ministre invoquait justement le fait que l'une des raisons pour
lesquelles il veut procéder par règlement, c'est parce que certains des éléments du cadre législatif qu'on a
présentement datent des années 30 puis qu'on ne les a pas revus depuis. C'est donc long. Donc, quand vous exprimez le souhait qu'on revienne bientôt
avec d'autres éléments de législation, c'est un souhait. Puis le ministre
dit partager votre souhait, mais il n'y a aucune garantie qu'on va revenir rapidement
avec ça.
Le projet de loi qu'on a sous les yeux, là, c'est le résultat d'un processus
qui a été entrepris sous le gouvernement libéral précédent avec mon prédécesseur Robert Dutil, qui avait
justement embrassé trop large puis qui s'est vu un peu contesté dans tout ce qu'il voulait faire. Alors,
il est retourné à la table à dessin, il y a eu des élections, je me suis
retrouvé en position, on a commencé les
modifications, on s'est retrouvés en élection, les libéraux sont revenus au
pouvoir, et là, à la toute fin du mandat, à quelques semaines du
déclenchement d'une élection, là on arrive avec un projet de loi, puis on dit : On ne peut pas embrasser trop large
parce qu'on n'a pas le temps, puis il va falloir qu'on règle une partie de
notre affaire par règlement parce qu'on n'a pas le temps
non plus. Ça fait que je comprends vos préoccupations, elles sont extrêmement
légitimes. J'espère que le ministre va les comprendre également.
Le Président (M. Auger) :
Commentaires, réactions? Parce qu'on n'avait pas de question.
M. Benoît (Jean-Luc) : Très
brièvement là-dessus parce qu'on a été assez clairs tantôt, je pense, sur notre
préoccupation face à la gestion par règlement
plutôt que par changement législatif. Cela étant dit, vous avez
entièrement raison, il y a des aspects de
notre réglementation qui datent probablement des années 30. Ça, c'est
avant la dernière Grande Guerre. Puis
effectivement il y aurait lieu d'avoir, collectivement, une discussion beaucoup
plus large, comme mon collègue l'a mentionné tantôt, une réflexion qui
impliquerait l'ensemble des partenaires pour voir comment le consommateur québécois pourrait mieux être servi, comment on
pourrait mieux répondre à ses besoins pour les prochaines années et,
idéalement, les prochaines décennies.
M. Bergeron :
La compréhension générale du public, c'est que ce qui constitue le cadre
législatif et réglementaire concernant l'alcool au Québec, ça passe par
les permis. Vous avez soumis aux parlementaires, dans le cadre de votre présentation, puis pour le public en général le
fait que, non, ça ne passe pas que par les permis. Alors, de façon plus
précise, de façon plus tangible, vous diriez
qu'on aurait besoin de quoi, comme modifications pour faire en sorte que sur le
plan de la vente d'alcool au niveau des détaillants, notre législation soit
plus moderne?
M. Benoît
(Jean-Luc) : Bien, plusieurs
éléments, puis je pense que, comme on le suggère, c'est une discussion
qui doit impliquer l'ensemble des acteurs,
que ce soit le côté gouvernemental, que ce soit la RACJ, que ce soient les
détaillants, que ce soit la SAQ, que ce
soient les autres titulaires de permis d'alcool. On est mûrs, au Québec, pour
une réflexion sur comment on
commercialise les produits alcoolisés, comment on les rend disponibles,
comment, en 2018, les consommateurs, de
manière responsable, devraient pouvoir se procurer ces produits-là, que ce soit
pour consommation sur place, que ce soit pour consommation à domicile. C'est une réflexion qu'on n'a pas eue
depuis très, très, très longtemps. Je veux dire, je ne suis pas très vieux, mais pas longtemps avant ma
naissance, on allait à la Commission des liqueurs, puis les bouteilles d'alcool étaient dans un «back store», tu arrivais
à un comptoir, puis tu demandais ce que tu voulais, puis tu repartais,
c'était presque gênant de repartir avec ça. Les choses ont beaucoup évolué
depuis ce temps-là, mais on est dus pour avoir
une réflexion. On salue l'initiative du gouvernement d'avoir voulu dépoussiérer
une partie de la loi, une partie de nos
règles, mais il y a encore beaucoup de travail à faire, puis on croit que c'est
une discussion qui devrait être faite avec l'ensemble des intervenants.
Le Président (M. Auger) :
2 min 30 s. Ça va, M. le député de Verchères? M. le député de
Beauce-Nord, 6 min 30 s.
• (11 h 20) •
M. Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue,
MM. Fortin et Benoît. Sans
reprendre le discours de mon confrère de Verchères, moi aussi, j'ai... on a une
certaine réticence à avoir beaucoup, beaucoup de règlements sans que ce
soit nécessairement dans la loi. Par contre, ça a l'autre côté de la médaille
aussi. Lorsqu'on veut bonifier un règlement
quelconque, c'est beaucoup plus facile par après pour un autre gouvernement
ou même le même gouvernement. Je ne veux pas
faire de politique ici avec ça, là, mais c'est beaucoup plus facile d'y
revenir sans faire une commission
parlementaire et d'amender une loi comme telle. Mais, nonobstant ça, j'ai une question : Quel est l'article le plus important... pas l'article, quel est le règlement le plus important
que vous aimeriez voir... qui soit dans la loi comme telle pour les
épiceries en ce qui concerne la vente d'alcool, là, tout le temps, là?
Le Président (M. Auger) :
M. Benoît.
M. Benoît
(Jean-Luc) : Bien, je vais
m'en tenir aux recommandations qu'on fait dans notre mémoire. L'article 2
nous inquiète vraiment. Pouvoir modifier par
règlement les conditions de permis, ce n'est rien qui est
très rassurant. Les conditions de permis, ça régit qu'est-ce qu'un
détenteur de permis va pouvoir vendre, comment il va pouvoir le faire. C'est
assez fondamental, ça affecte directement le modèle d'affaires. Et, selon nous,
c'est clair que ça nécessite une discussion
beaucoup plus large que les 45 jours pour y réagir par écrit après la
publication d'un projet de modification réglementaire.
M. Spénard : O.K.
Je comprends. À cause des investissements nécessaires, et tout, là, on ne peut
pas se fier uniquement sur la réglementation.
M. Benoît (Jean-Luc) : Entre
autres, entre autres.
M. Spénard :
En ce qui concerne l'alcool comme tel, comment ça va, les relations? Parce
qu'on sait que vous êtes obligés
d'acheter de la Société des alcools du Québec en ce qui concerne le vin et le
spiritueux. Quelles sont vos relations avec la Société des alcools du
Québec?
M. Fortin (Marc) : On a des relations conviviales avec la SAQ. Ce
sont des partenaires et ce sont des compétiteurs en même temps. Il y a certaines règles qui sont en place, et puis il
faut suivre ces règles-là. Nous, on les suit. La SAQ, elle est juge et partie, donc
elle a un peu plus de contrôle que nous, on peut l'avoir des fois. Je pense
qu'un exemple concret est la baisse
de 1,40 $ qu'il y a eu il y a maintenant un an. Il y a beaucoup de volume
qui s'est trouvé à se déplacer de l'alimentation
vers la SAQ. Ça n'a pas été équitable. C'est une allocation qui a été donnée à
tous les produits de vin à la SAQ,
mais qui n'a pas été donnée au réseau Alimentation. Pourtant, on a le même
système de calcul de prix minimum, par contre
on a été mis de côté. Donc, de façon claire, il y a eu un bris de relation qui
s'est fait à partir de ce moment-là avec la SAQ, puis on est en train de
retravailler pour rebâtir ça avec l'équipe de la SAQ en ce moment.
M. Spénard :
O.K. L'autre chose, mon confrère de Jean-Lesage en parlait tout à l'heure, là,
les promotions croisées qui visent un
peu, si on veut, à détourner le plancher minimum d'alcool. La SAQ en fait avec
sa carte de points Inspire, évidemment. Vous, vous en faites ou vous
n'avez pas le droit d'en faire?
M. Fortin
(Marc) : Bien, nos membres
font des promotions conjointement avec des manufacturiers. Par contre, ça
n'a aucun rapport mesquin au niveau d'essayer de contourner un prix minimum. Ce
sont des stratégies de mise en marché qui
sont mises en place par les manufacturiers afin de voler des parts de marché à leurs compétiteurs. La même chose pour les détaillants. Lorsqu'un détaillant spécifique fait une entente avec un
brasseur, entre autres, spécifique pour une promotion, c'est pour
amener des consommateurs dans son magasin. Et, pour le producteur, c'est pour
que les gens achètent son produit versus son compétiteur. Ce n'est pas pour
contourner le prix minimum, c'est vraiment une question de compétitivité, comme vous allez voir des céréales
en promotion avec un spécial quelconque ou un programme quelconque. C'est le
même principe à ce niveau-là. Je ne veux pas le banaliser. Ce n'est pas pour
que les gens consomment plus, ce n'est pas pour contourner un prix
minimum, c'est vraiment pour... c'est une question de parts de marché. Tout à
l'heure, M. Drolet, qui connaît bien ces... M. le député, qui connaît bien ces entreprises-là, Coke, Pepsi, même principe, tu voles
des parts de marché à tes compétiteurs avec tes différents programmes, tes
différentes promotions.
Le Président
(M. Auger) : Dernière minute.
M. Spénard :
Il reste une minute?
Le Président
(M. Auger) : Oui.
M. Spénard : O.K. Le prix que vous payez le vin à la SAQ... C'est parce qu'on avait eu... À un moment
donné, j'avais reçu des petits détaillants
en épicerie ou des dépanneurs qui me disaient que la Société des alcools avait changé. Il fallait que tu prennes ça à la caisse, la même
sorte de vin. Ils ne pouvaient plus payer avec la carte de crédit, il fallait
qu'ils paient quasiment comptant. Est-ce que
c'est réglé, ça, avec la Société des alcools? Est-ce qu'il y a eu un assouplissement de la part de la Société
des alcools ou il n'y a pas eu d'assouplissement?
Le Président
(M. Auger) : M. Fortin.
M. Fortin
(Marc) : Je vous dirais qu'il y a
eu certains changements, mais, pour un épicier... l'épicier ne peut pas acheter directement de la SAQ, à moins que ce soit une agence.
L'épicier achète par un distributeur, donc le distributeur achète de la SAQ. Pour nous, il n'y a
aucun changement à ce niveau-là, au niveau de la distribution alimentaire. Que
vous soyez un indépendant ou que vous soyez
un majeur, vous commandez de la SAQ par rapport aux besoins que les
marchands ont, et aux commandes, et au volume. Les marchands vont commander directement.
Par contre,
où il y a des restrictions des fois, c'est que la SAQ va avoir une réglementation qui va dire : Maintenant, toi,
le distributeur, tu ne peux plus vendre ou faire payer par carte de crédit les
détaillants pour les produits du vin. Oui, ça, c'est arrivé, puis ça
cause un problème parce qu'il y a des détaillants qui ont des systèmes de
paiement qui sont automatiques avec les distributeurs, puis là, maintenant, il
a fallu enlever le vin de ces systèmes de paiement là.
Ça
fait que, oui, c'est des problématiques, des fois, qui arrivent, mais on
s'ajuste à... tant que le «level playing field», à quelque part, n'est pas touché, c'est-à-dire que, tout d'un
coup, la SAQ nous met des bâtons dans les roues ou baisse les prix dans leur réseau, mais n'est pas
équitable dans le réseau de l'alimentation, qui fait en sorte que le
même consommateur va aller dans les deux
réseaux puis va dire : Bien, c'est des voleurs, chez les détaillants,
puisque j'ai le même produit moins cher à la SAQ... Normalement, ça
devrait être la même chose.
Le Président
(M. Auger) : Merci. Merci à vous, MM. Benoît et Fortin, de
votre participation aux travaux de la commission.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'à 15 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 27)
(Reprise à 15 h 30)
Le Président
(M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des
institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 170, Loi
modernisant le régime juridique applicable
aux permis d'alcool et modifiant diverses dispositions législatives en matière
de boissons alcooliques.
Nous
entendrons cet après-midi les organismes suivants, soit L'Association des brasseurs du Québec,
l'Association des directeurs de police du Québec et l'Institut national de
santé publique du Québec.
Je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants de L'Association des brasseurs du
Québec. Je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour votre présentation, par la suite suivra une période
d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps,
bien vouloir vous identifier, et par la suite vous pourrez commencer.
L'Association
des brasseurs du Québec (ABQ)
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Merci, M. le Président. Alors, mon nom est Patrice
Léger-Bourgoin, je suis directeur général de
L'Association des brasseurs du Québec, accompagné aujourd'hui de ma collègue
Mélanie Champagne, qui est
conseillère principale, Affaires publiques et gouvernementales. Dans un premier
temps, merci de nous accorder votre attention, c'est un privilège.
Permettez-moi,
dans un premier temps, de vous présenter L'Association des brasseurs du Québec.
Nous partageons une expertise
cumulative, au Québec, de 500 ans d'expérience. Bon an, mal an, nos
membres Molson Coors, Sleeman et Labatt
réalisent 90 % des ventes de bière au Québec. Ce gage de reconnaissance
démontre que la population québécoise apprécie
la qualité de nos produits et notre capacité d'innovation pour répondre au goût
des gens d'ici. Nos retombées économiques s'élèvent à 1 milliard de
dollars de PIB annuellement avec plus de 50 établissements partout au
Québec qui fonctionnent grâce aux produits et services de
2 000 fournisseurs dans la province. Nous en sommes très fiers.
Nous avons pu
constater, au cours des dernières années, que les pratiques commerciales
évoluent rapidement dans un marché où les acteurs sont de plus en plus
nombreux. Pour cette raison, nous avons accueilli favorablement l'annonce du projet de modernisation de la Régie
des alcools, des courses et des jeux du Québec. Nous le considérons, en
fait, comme un pas dans la bonne direction.
De notre avis, une
nécessaire mise à niveau de certaines dispositions législatives est proposée
dans le projet de loi n° 170. Par
contre, il semble que le législateur veuille procéder ultérieurement à de
nombreux changements par voie de règlement au lieu, malheureusement, de
partager ses orientations dès le présent projet de loi.
M.
le ministre, au cours des consultations, vous avez tenté de rassurer d'autres
intervenants. Nous devons vous dire que nous partageons leurs
préoccupations. Cette situation contribue, en fait, à soulever de multiples
interrogations et entretient, à notre humble
avis, un flou inutile. Un chantier aussi imposant ne se voit qu'une seule fois
par génération. Il faut savoir que
les assises de la structure actuelle remontent aux travaux de la commission
Thinel d'il y a 50 ans. Donc, on vit avec les décisions pendant une
bonne cinquantaine d'années.
Dans ce marché
changeant, donc, une modernisation de la RACJ est certes bienvenue. Nous
accueillons positivement les nombreux
assouplissements réglementaires qui vont faciliter, assurément, la vie des
consommateurs et de ceux qui leur
vendent nos produits : plus de souplesse sur les terrasses, au dépanneur,
dans les restos et au niveau des permis, par exemple. Avouons-le tous,
il était temps de corriger ces incohérences et ces anachronismes temporels.
Par contre, à notre
humble avis, des pans législatifs et réglementaires entiers méritent aussi une
attention particulière. Dans les faits, on
ne s'attaque pas à certains enjeux de fond. Dans ce marché en constante
transformation, il est impératif de doter,
par exemple, la RACJ d'un mécanisme de prévisibilité du processus décisionnel
en se fondant sur la transparence avec des décisions administratives
écrites.
D'autre
part, on va prendre le Règlement sur la promotion, la publicité et les
programmes éducatifs en matière de boissons
alcooliques. Les dispositions de plusieurs articles méritent réflexion. Lors
des consultations, M. le ministre, vous avez exprimé votre volonté de mettre fin à des irritants tels que les
parasols dédiés à une seule marque et de permettre notamment la dégustation en supermarché de bières
par un employé d'épicerie. Nous en sommes très satisfaits. Par contre,
poussons le raisonnement vers plus de flexibilité lorsque vient le temps de
faire de la publicité conjointe.
Abordons maintenant
la question du cadre institutionnel de la RACJ. Quel rôle doit-elle se voir
attribuer aujourd'hui? Une chose est sûre,
elle se doit d'allouer efficacement les ressources mises à sa disposition pour
veiller avec diligence à la
conformité réglementaire de tous les détenteurs de permis. Il est essentiel que
les publicités sur le Web, par exemple,
soient assujetties à la réglementation. Les récents cas des boissons sucrées
hautement alcoolisées constituent des exemples concrets. Pendant des
mois, les stratégies commerciales prônant l'excès et les abus d'alcool ont
circulé sur les médias sociaux en toute impunité.
Dans
un autre ordre d'idées, en vertu de l'article 54 du projet de loi, le
pouvoir d'adopter des règlements en ces matières serait retiré à la régie pour le confier désormais au
gouvernement. Nous y voyons deux défauts. Le premier, elle retire le
pouvoir par un organisme indépendant dépositaire d'une expertise en matière de
boissons alcooliques dont la proximité avec
le terrain pourrait être un gage d'efficacité. Le deuxième défaut, ce pouvoir
serait dévolu au gouvernement. Ce dernier est l'unique actionnaire d'un
des acteurs les plus importants du marché qui est, par ailleurs, en situation
monopolistique. Il est dès lors raisonnable de craindre un risque de traitement
inéquitable.
Abordons
maintenant la question des cocktails à base de malt à haute
teneur en alcool. Nous avons partagé, dès l'été dernier, nos préoccupations aux autorités compétentes. Rappelons aussi que
le titre du récent rapport de l'Institut
national de santé publique est Intoxications aiguës à l'alcool et
boissons sucrées alcoolisées. Donc, le «et» devient très important, puisqu'il est aussi question d'autres formes
d'alcool que les produits qui ont fait la manchette, et ce n'est pas
étonnant, puisque les produits de type
cocktails et shooters connaissent une popularité grandissante. Ces mélanges
sont constitués d'amalgames
de différents alcools forts, parfois supérieurs à 40 %. Illustration de cet état de fait, les
ventes de spiritueux au Québec, en
moins de 10 ans, ont augmenté, passant de 492 millions à
727 millions. La commercialisation de ces produits doit donc faire
l'objet d'une attention particulière.
D'ailleurs,
le Dr Arruda, directeur national de la santé publique, a pris soin de
préciser dans sa présentation qu'un prix
minimum devrait être institué sur d'autres produits alcooliques. Le
gouvernement a décidé de confier l'exclusivité
des ventes des boissons supérieures à 7 % à la SAQ, c'est bien. Un
paradoxe important est toutefois passé inaperçu :
alors qu'on s'apprête à retirer ces
produits des tablettes pour les confier à la SAQ en évoquant, d'ailleurs, avec
raison, l'accessibilité économique de
ces produits, on oublie que la SAQ n'est pas assujettie au prix minimum sur la
bière.
Cela
nous amène à aborder la délicate question de l'équité réglementaire. Pour les
membres de l'ABQ, il s'agit d'un irritant
de plus en plus inexplicable et surtout persistant. Si, au nom de la santé
publique, on doit s'intéresser aux pratiques de mise en marché, il est raisonnable de penser que cette réflexion soit
conduite au sens large. La commercialisation de l'alcool a évolué au cours des 25 dernières années. Pour cette
raison, nous plaidons vigoureusement pour que tous les canaux de vente d'alcool soient assujettis au même cadre
réglementaire, qu'ils soient de la bière, du vin, des spiritueux, pour
la consommation à domicile ou la
consommation sur place, par l'entremise de fabricants industriels ou
artisanaux, détaillants privés comme
la SAQ. Il ne s'agit pas ici de débattre des orientations de gestion de la SAQ,
il s'agit plutôt de s'interroger sur
le bien-fondé de la loi qui l'autorise à un plein pouvoir pour réaliser son
mandat commercial. Perpétuer les inéquités envoie un mauvais message, un
mauvais signal.
Vous
savez, le temps est révolu où la SAQ assumait un rôle prohibitionniste et de
régulation sociale. Au contraire, aujourd'hui,
la société d'État à vocation commerciale a un mandat très clair : elle
gère ses succursales de même manière que n'importe quel commerce de détail avec une approche de gestion de
catégories qu'elle définit dans sa Politique d'achat et de mise en
marché comme, et je cite, «un processus qui consiste à obtenir l'efficience et
la rentabilité des catégories en répondant avec efficacité aux besoins des
consommateurs».
Dans
le plus récent avis de l'INSPQ, ce dernier réitère sa recommandation à l'effet
que le gouvernement adopte en priorité
une politique de fixation de prix minimum pour tous les produits alcoolisés et
que ce prix soit ajusté annuellement selon
l'IPC. Dans le rapport, et je cite les auteurs de l'INSPQ : «La priorité
est de fixer un prix minimum pour toutes les boissons alcoolisées, ajusté selon la concentration en alcool.» Nous
déplorons que le projet de loi n° 170 ne tienne pas compte de
l'opinion de cet organisme. La SAQ devrait être assujettie à la même
réglementation que les épiceries et les dépanneurs.
Depuis
longtemps, pour aujourd'hui et pour demain, notre engagement est clair, chez
les brasseurs, et limpide. Les grands
brasseurs sont reconnus pour leurs standards élevés en matière de consommation
responsable. Ici, soyons clairs, nous
respectons les lois et règlements. Que ce soit à l'égard du prix minimum ou des
types de promotions que nous faisons, suggérer que nous contournons le
prix minimum et une prétention sans fondement.
Pour conclure, nous
fondons beaucoup d'espoir en une véritable réforme du cadre réglementaire, et
celui-ci commence par l'équité réglementaire entre les joueurs. Merci de votre
écoute.
Le
Président (M. Auger) : Merci pour votre présentation. Nous allons
maintenant débuter les échanges avec le gouvernement et M. le ministre
pour 14 minutes.
• (15 h 40) •
M. Coiteux :
Oui, merci, M. Léger-Bourgoin, Mme Champagne également. Vous avez
beaucoup insisté sur l'équité vis-à-vis de
l'ensemble des joueurs de l'industrie en matière de réglementation. Vous pointez beaucoup en direction de la SAQ. Et là je comprends qu'il y a quand même
un peu de substitutions entre la bière et d'autres boissons alcoolisées,
dont le vin et peut-être
les spiritueux aussi, mais la réelle concurrence actuelle des bières
l'industrie, là, que vous représentez, est-ce qu'elle n'est pas davantage
constituée de bières artisanales plutôt que de vins commercialisés par la SAQ?
M. Léger-Bourgoin (Patrice) : Non.
Vous savez, M. le ministre, les microbrasseries, on les voit davantage comme des alliées parce que les
microbrasseries aident à faire découvrir des nouveaux produits, des produits de
spécialité. Lorsqu'on regarde les différentes statistiques de ventes d'alcool
au Québec, la raison pour laquelle le législateur, en 1993, a décidé d'avoir un prix minimum uniquement sur la bière, c'est
qu'à l'époque environ 60 %,
65 % des volumes de consommation
totale, au Québec, de boissons alcooliques étaient de la bière, et la SAQ avait
un mandat plus de régulateur social
que de société d'État à vocation commerciale. Et aujourd'hui, si on prend les
chiffres tant de Statistique Canada que de l'INSPQ, la bière représente 50 % du marché total de consommation
d'alcool au Québec et les vins et les spiritueux, l'autre 50 %. Alors, le produit de
substitution, en ce qui me concerne, n'est pas une bière de microbrasserie. Le
produit de substitution est un spiritueux ou
un vin. Et, encore là, comme je le disais dans ma présentation, l'idée n'est
pas d'être en porte-à-faux face au
style de gestion de la SAQ. Les gens en place ont, comme leur loi leur permet,
tous les pouvoirs de réaliser leur
mandat commercial. Notre enjeu, c'est qu'on veut se battre, tout simplement, à
armes égales, surtout s'il est question ici de santé et de sécurité
publique.
M. Coiteux :
Bien, ça m'amène quelques questions. Moi, je commencerais peut-être par cette
question du prix minimum de la bière.
À l'origine, est-ce que vous aviez demandé au gouvernement d'établir un régime
de prix minimum pour la bière?
M. Léger-Bourgoin (Patrice) : Il y a eu des demandes, à l'époque, de l'ABQ, si
je me fie aux différentes archives, pour qu'il y ait un prix minimum sur
la bière. Évidemment, en 1993, j'étais à l'université, là.
M. Coiteux :
Est-ce que c'était motivé vraiment par des raisons de santé publique ou c'était
pour mettre une espèce de plancher
sur des guerres de prix qui auraient pu exister entre les différents brasseurs?
Autrement dit, est-ce que c'était beaucoup plus une question de
rentabilité qu'une question de santé publique?
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Je ne serais pas
d'accord avec vous pour les questions de rentabilité, puisqu'à l'époque l'enjeu était effectivement que les prix
de la bière au Québec, en raison de guerres entre brasseurs et
détaillants d'alimentation, faisaient en
sorte que les prix, perpétuellement, diminuaient vers le bas, et par conséquent
on créait des enjeux de santé publique en raison d'une consommation
abusive.
M. Coiteux : Mais est-ce que je
me trompe si, dans le fond, du point de vue de l'industrie, la principale préoccupation en était une de rentabilité?
C'est-à-dire que, s'il y avait une guerre de prix entre les différents
brasseurs qui amenait le prix à un niveau
très faible dans une industrie qui, somme toute, est oligopolistique, bien, on
se disait : On ne peut pas faire
de collusion. Donc, si c'est gouvernement qui impose une forme de collusion par
prix minimum, est-ce que ça ne fait pas notre affaire sur le plan
financier et économique? Est-ce qu'il n'y avait pas quand même un peu de ça,
là? Soyons un peu...
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Je n'étais pas
là, M. le ministre, en 1993, alors je peux difficilement vous répondre.
M. Coiteux : Non, vous n'étiez
pas là.
Mme Champagne (Mélanie) : Mais
ce qu'on dit dans nos archives, par exemple, ce qui est très clair, c'est qu'à l'époque, comme encore aujourd'hui, il y a un
gros enjeu de réputation aussi. Et les questions de décès sur les
routes, par exemple, toute question de décès
qui est amenée suite à la consommation d'alcool a un impact négatif sur
l'industrie, donc l'industrie a toujours été très responsable dans sa façon de
vendre ses produits.
M. Coiteux :
Non, ça, je comprends puis je ne dis pas l'inverse. C'est simplement que, dans
l'histoire — puis le Québec,
il ne fait pas bande à part là-dedans — en général, lorsque l'industrie demande un
prix minimum, en règle générale, c'est
pour limiter les pressions sur la concurrence, et on ne peut pas faire
abstraction de ça. C'est légitime, d'ailleurs, de poser cette question-là quand les pressions
concurrentielles sont très fortes. Mais ça m'amène à... C'est-à-dire, si
c'était ça qui motivait, au départ, le prix
minimum de la bière du point de vue de l'industrie, je ne peux pas vous... Moi
non plus, je n'étais pas au
gouvernement à l'époque, donc je ne pourrais pas dire quelle était l'intention
gouvernementale à l'époque. Mais
alors demander un prix minimum pour des produits qui sont des produits qui
concurrencent la bière, encore là, que moi,
je vois qu'il y a... Je comprends qu'il y a une certaine concurrence entre les
vins vendus à la SAQ et la bière vendue dans les dépanneurs, les
épiceries, mais, d'un autre côté, les mêmes vins ne se retrouvent pas dans les
épiceries et dépanneurs, donc vous avez un
avantage, de ce point de vue là, sur l'accessibilité du produit, et il y a
beaucoup plus de succursales. Donc,
du point de vue des bases de la concurrence, j'aurais des questionnements, là,
sur ce que vous me dites.
Mais une fois qu'on a dit ça, est-ce que — puis
je ne veux pas vous prêter d'intentions — demander un prix minimum pour
les boissons alcoolisées commercialisées par la SAQ, ce n'est pas, encore une
fois, motivé par des questions de concurrence?
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Bien, je vous dirais, deux choses l'une. La
première, je ne l'ai malheureusement pas
avec moi, elle est dans mon attaché-case, mais j'ai les déclarations de M. Ciaccia à l'époque, et, si je me fie aux propos du ministre Ciaccia à l'époque, c'était clairement
un enjeu de santé publique, c'est ce qu'il affirmait dans les médias.
J'ai quelques coupures de presse que je pourrais vous soumettre.
Ceci dit,
notre volonté, c'est, pour des raisons de santé et de sécurité publiques, que
les mêmes joueurs fassent face aux
mêmes contraintes. Et ce n'est pas seulement notre volonté, M. le ministre. L'INSPQ, dans
ses trois derniers rapports, vous dit
qu'il devrait y avoir un prix minimum pour toutes les formes d'alcool au Québec. L'Organisation mondiale de la santé
dit exactement la même
chose. Et le Québec
est l'une des seules provinces, actuellement, au Canada, hormis l'Alberta, à ne pas avoir un prix
minimum sur toutes les formes d'alcool, et, qui plus est, il n'y a même pas de
prix minimum sur la bière à la SAQ.
M. Coiteux : Oui, mais, si je
poussais le raisonnement de la concurrence sur des bases équitables pour tous, à
toutes fins pratiques, on serait obligés de dire que tous les produits
devraient avoir accès aux mêmes réseaux de commercialisation, et donc les
bouteilles qui sont réservées à la SAQ en vertu du monopole de la SAQ sur un
certain nombre de choses devraient être remises en question.
M. Léger-Bourgoin (Patrice) : Je
ne conteste pas du tout le monopole de la SAQ.
M. Coiteux : Il y a un peu ça
que vous apportez ici, là. Et je ne dis que ce n'est pas quelque chose qui
mérite discussion. Je ne dis pas que c'est quelque chose qui mérite discussion, mais vous comprendrez que c'est un autre
chantier, celui-là, que celui d'une
modernisation et d'entrer dans le XXIe siècle du point de vue d'un grand nombre d'irritants qui touchent la délivrance et les conditions associées aux permis d'alcool.
Je vais vous dire ce que j'ai dit à d'autres groupes auparavant : Je voudrais bien faire la révolution dans toutes les sphères de la société
où il y a de l'alcool, sauf que ça me prendrait plusieurs années pour y arriver, alors qu'il y a
des irritants qu'on connaît depuis très longtemps. D'autres se
sont cassé les dents là-dessus
avant moi, puis j'espère ne pas me casser les dents, donc j'ai essayé d'être
assez pragmatique sur les changements que je propose.
Puis je ne
suis pas insensible à ce que vous avancez en disant : S'il n'y avait
plus de monopole de la SAQ, si tout le monde était sur un pied d'égalité, si toutes les
boissons vendables à la SAQ pouvaient être vendues dans les dépanneurs,
et vice versa, libre concurrence. Je ne dis
pas que ce n'est pas une vision légitime, mais qui doit être discutée, qui
pourrait être discutée éventuellement dans une législature. Je ne pense pas que la 41e va avoir le temps
d'aborder ce type de débat, et donc on a fait des choix très, très
pragmatiques sur les enjeux qu'on amène, c'est pour ça.
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Mais, vous savez, si vous me permettez, M. le ministre, je ne mets pas en question le monopole de la SAQ, là. Je veux
simplement qu'on comprenne bien l'essence de mon propos. Je crois que le monopole de la SAQ est un monopole, d'un point de vue gouvernemental, qui se justifie. Mon seul point, c'est de
cibler les pratiques commerciales. Si la SAQ
a le droit de faire des publicités, d'avoir des pratiques commerciales comme
une carte de points... Pourquoi
une carte de points qui donne de l'alcool gratuit est acceptable pour les
produits vendus à la SAQ, alors que
la gamme de produits, essentiellement, à la SAQ est de 12 % d'alcool et plus? Pourquoi
que, dans l'univers de la bière, on questionne le fait que je donne une
casquette dans une caisse de 24?
M. Coiteux : Ah! bien là,
voyez-vous, puis je ne veux pas présumer de ce que va dire l'INSPQ ou d'autres intervenants en santé publique, mais c'est là où
vous allez prendre des chemins différents. Vous dites : Bien, on est
d'accord avec les institutions de santé publique qui veulent un prix minimum. Je fais valoir que
c'est tout à fait possible que vous ayez en tête des enjeux de santé publique, mais il y a certainement aussi des enjeux financiers, je crois. Mais, écoutez, je suis formé à penser comme ça, je suis un économiste,
alors je ne peux pas faire abstraction de ces éléments-là. Mais, par contre, sur la capacité de vous donner
des instruments additionnels pour faire de la promotion et puis promotions
croisées ou combinées, comme vous avez dit,
tout ça, là, vos alliés du prix minimum vont vous laisser, là, ils vont venir
nous dire que, ça, ils n'en veulent pas.
Donc, c'est
clair que, quand on aborde des enjeux comme celui-là, c'est difficile de
réconcilier tout le monde
autour d'une seule solution. Et, nous, il
faut qu'on fasse des arbitrages, c'est
ça qu'on fait comme législateurs, là. Par exemple, vos
produits sont vendus dans les dépanneurs.
Les dépanneurs, il y en a à tous les coins de rue, pratiquement. C'est un
avantage que la SAQ n'a pas parce qu'elle ne peut pas avoir des succursales à tous les coins de rue, bien qu'il y en ait pas mal plus aujourd'hui qu'il y en a eu dans le passé, d'une
part.
M. Léger-Bourgoin (Patrice) : Mais
elle a augmenté ses heures d'ouverture.
• (15 h 50) •
M.
Coiteux : Et d'autre part, il y a des gens qui viennent nous dire : Bien, non seulement c'est vendu dans les dépanneurs,
mais il y a des gens qui nous disent : Il faudrait que
ça soit vendu jusqu'à minuit, jusqu'à 1 heure du matin, jusqu'à
2 heures du matin. Puis M. Arruda nous avait cité, il y a
quelques minutes, il nous a dit : De grâce, ne faites pas ça, je vais faire une convulsion, nous a-t-il
dit, hein? Mais ça, vous auriez aimé ça, vous, d'avoir une heure de plus peut-être,
non?
Mme Champagne
(Mélanie) : Je vous rassure,
non, je vous rassure, on n'a pas ça dans nos demandes, on n'a pas ça
dans notre mémoire.
M. Coiteux : Nous, on était
prêts à vous concéder une heure avant, plus tôt.
Mme Champagne (Mélanie) : On
n'a pas ça à nulle part dans nos demandes.
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Dans notre mémoire, dans toutes les communications, on n'a jamais
demandé une prolongation des heures.
M. Coiteux : Mais voyez-vous, c'est pour ça... Alors, non,
mais je comprends, mais c'est parce que nous, comme législateurs, là, il
faut qu'on fasse tous ces arbitrages-là.
Mme Champagne (Mélanie) : Mais
on ne veut pas que Dr Arruda fasse des convulsions.
M. Coiteux : Non, vous... Moi
non plus, je ne veux pas. Je l'aime bien, d'ailleurs, parce que...
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Coiteux : Alors, je vous écoute, bon, puis la question
de la réglementation, je le sais que... encore une fois, je vais
essayer d'être pragmatique avec ça — je vais essayer d'être pragmatique! — je suis pragmatique, mais je vais
essayer de m'expliquer, pourquoi je l'aborde
comme ça. C'est que toutes les conditions associées à des permis, si on devait
les mettre dans les articles de loi, j'ai insisté à plusieurs reprises sur le
fait que ça ne permettrait pas de répondre à des problématiques qui sont
détectées sur le terrain auxquelles on voudrait apporter une réponse rapide.
Mais il y a
un autre enjeu, il y a un autre enjeu qui est plus pragmatique encore, c'est
que, pour traduire un article de loi,
des pages et des pages de règlement, comme ça existe, là, on se retrouverait
avec un projet de loi ici, là, qui nous tiendrait occupés probablement au-delà de l'ajournement de l'été
prochain, puis finalement il n'y en aurait pas, de modernisation des permis d'alcool. Parce qu'un règlement, le traduire en
article de loi, ça peut être une centaine d'articles de loi. Trois règlements en articles de loi, c'est
peut-être 300 articles de loi. Donc, non seulement ça va figer les choses
pour un bon bout de temps, mais on va
passer du temps, mes chers amis, à jongler sur chacun de ces articles-là, alors
que, si on se donnait des orientations
quant au cadre réglementaire sur lequel on s'entend, où on va, ce qui est
l'approche que moi, je privilégie, bien,
on aurait des chances d'arriver à un résultat. Sinon, ma crainte, c'est qu'on
termine la session, puis on n'a rien changé du tout, puis on refait le même coup d'autres législatures avant qui ont
fait chou blanc avec leur intention de moderniser les permis d'alcool.
Ce n'est pas la proposition que je fais.
Donc, vous
m'avez dit : Voilà un pas dans la bonne direction. Vous me dites : Ce
serait intéressant de faire d'autres pas.
Admettons qu'on ne fait pas ces autres pas que vous souhaitez mais qu'on fasse
au moins les pas qui sont proposés, la question est simple, aura-t-on
progressé?
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Si vous faites
des pas aussi en fonction de l'équité réglementaire, assurément, M. le
ministre, on va avoir progressé.
Encore là, je
reviens... et je ne vais pas faire le procès ici de la SAQ, je conviens avec
vous que ce n'est pas le lieu. Par
contre, il s'agit aussi de s'assurer que le Règlement sur la promotion, la
publicité et les programmes éducatifs en matière de boissons alcooliques soit équitable entre les différents
joueurs. Je vous parlais de la SAQ,
mais, si on prend, par exemple, le prix minimum, M. le ministre, seuls
les canaux de vente auprès des détaillants en épicerie pour la consommation à emporter est assujettie au prix minimum. La SAQ ne
l'est pas, mais la bière pour emporter, règlement également,
ne l'est pas. Alors, c'est là où il y a
des enjeux émergents d'équité réglementaire où... si on se dit que, pour des raisons de
santé et de sécurité publique, on doit, par exemple, encadrer les promotions et le prix, mais que ces éléments-là soient
appliqués de manière, je vous dirais, égalitaire, équitable, choisissez
l'adjectif qui convient, mais, pour nous, c'est important, tout simplement.
Et je répète
qu'il y a, dans le travail de M. Drolet... M. Drolet
vient de l'industrie, il a travaillé fort, et il y a déjà énormément d'éléments pour
lesquels on est satisfaits, on l'a dit. D'enlever des règlements
tels que ça prend deux marques sur
10 parapluies sur une terrasse, tout
le monde convient que ça n'a aucun
bon sens. Ce qui a été fait pour permettre aux enfants sur une terrasse
aussi...
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Désolé, nous devons poursuivre avec l'opposition officielle. M. le député de Verchères, pour
8 min 30 s.
M. Bergeron : On a, de façon répétée, ce débat ici sur
l'opportunité de procéder par règlement. Et là l'argument qu'on nous sert, c'est parce que, là, on n'aura pas le temps d'adopter
une législation plus costaude. Bien, on n'a pas le
temps parce que le gouvernement a un peu mal planifié son travail, puis qu'on se retrouve en toute fin
de législature avec un projet de loi, puis là on dit :
Bien, il faut qu'on bouge. Si je ne veux pas me retrouver à faire chou blanc
comme les législatures précédentes,
il faut que vous me fassiez confiance puis qu'on procède par voie réglementaire. Mais, comme le soulignaient des
témoins un peu plus tôt aujourd'hui, on demande de faire confiance à l'actuel ministre,
mais qui sait qui sera là dans ces fonctions
après l'élection, hein? On pourrait se retrouver avec des gens qui sont très favorables
à la privatisation de la SAQ, on en a
entendu parler beaucoup ces dernières heures. Alors, je pense que vous
comme moi pensons que ce n'est pas nécessairement une bonne idée, sauf que vous comme moi
réalisons qu'actuellement l'industrie de la bière a perdu des parts de marché au fil du temps. Et ce n'est pas
juste le fait de la SAQ, là, il y a quand
même des vins qui sont
disponibles dans les mêmes réseaux de
distribution que ceux-là où vous êtes. Dans les dépanneurs, dans les épiceries,
il y a des vins disponibles, puis vous
avez également perdu des parts de marché en raison de cela. Et je pense
que l'idée selon laquelle on doive
avoir une certaine équité réglementaire,
on ne peut pas prétendre, si on veut procéder par voie réglementaire,
qu'on ne peut pas satisfaire à ce besoin et
à cette attente sous prétexte qu'on en aurait pour trop longtemps à étudier le
projet de loi. Justement, le ministre
veut procéder par voie réglementaire, ça fait que j'imagine qu'il devrait être
capable d'alléger puis de rendre les
choses plus équitables sur le plan réglementaire. Et ailleurs on a eu on eu...
puis ça va me permettre de rendre
justice au ministre, juste avant l'ajournement... pas l'ajournement, mais la
suspension pour le dîner, le ministre nous a dit : Je vais vous présenter mon cadre réglementaire. Alors là,
on avance, on bouge, puis c'est positif. Puis je tiens à le souligner parce que j'avais essayé de faire oeuvre
utile, à l'époque où j'étais ministre de la Sécurité publique, avec
cette idée d'arriver avec un cadre
réglementaire, histoire que les parlementaires ne soient pas laissés tout
simplement dans le flou par rapport à ce qui va se produire par la
suite.
J'aimerais
revenir sur la SAQ. Je crois vous avoir entendu lire un extrait de la loi
constitutive de la SAQ, où on ne semble
pas trop se préoccuper de santé publique, mais on se préoccupe énormément de
rentabilité. Parce que, là, quand vous demandez l'équité réglementaire,
tu sais, je veux dire, on s'offusque du fait qu'on puisse, avec tant d'achats
dans une épicerie, donner une caisse de
bière gratuite, mais on ne s'offusque pas du fait qu'en ayant la petite carte
de points remplie à la SAQ on puisse
obtenir x nombres de bouteilles gratis. Je pense qu'il y a là une préoccupation
qui doit être analogue pour les
parlementaires que nous sommes qui devront également avoir en tête les
questions de sécurité publique, de santé publique. Alors, avez-vous cet
article-là à portée de main que vous pourriez nous lire?
M. Léger-Bourgoin (Patrice) :
Oui, tout à fait. J'ai la Politique d'achat et de mise en marché de la SAQ. L'article 1.1, le mandat, c'est quand même
plusieurs lignes, là, alors j'y vais avec la partie que vous nous demandez
de préciser, là. Alors, mandat de la SAQ,
entreprise commerciale : «Elle a tous les pouvoirs pour réaliser son
mandat commercial consistant notamment en la sélection, l'achat,
l'importation, l'entreposage, la distribution et la vente de boissons
alcooliques.»
M. Bergeron :
Tous les mandats pour réaliser sa mission commerciale, mais je crois savoir
qu'avec le temps la SAQ s'est comme délestée
de sa mission sociale puis sa mission de santé publique. Peut-être qu'on
devrait y revoir également.
Deux petites questions en terminant parce que je
sais qu'on manque un petit peu de temps. La première, cette fameuse histoire des boissons alcoolisées sucrées,
si on adopte l'amendement qu'on n'a pas encore vu jusqu'à présent, là, qui limiterait à 7 %, qu'est-ce qui
empêcherait l'industrie, éventuellement, de doubler la grosseur des canettes
pour faire en sorte d'avoir à peu
près la même quantité, en bout de piste, puis qu'on n'aura rien gagné, en bout
de piste, puis les effets vont être aussi dommageables chez les
consommateurs? Première question.
Deuxième
question, vous avez abordé très brièvement la question de l'article 54 qui
n'est pas sur l'écran radar de personne, mais que je trouve préoccupant,
là, parce que vous nous dites qu'on revient en arrière avec cet article-là,
c'est bien ça?
• (16 heures) •
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Bien, l'idée,
c'est d'éviter qu'on ne revienne en arrière. Quand je dis «en arrière», c'est avant les travaux de réflexion de la
commission Thinel du début des années 70. À l'égard de l'article 54,
nous, on aime bien le fait que la
régie fournit au ministre de la Sécurité publique des avis sur toute question
concernant les impacts sociaux et les
mesures de sécurité qui peuvent nécessiter des activités visées par ses lois et
règlements parce qu'on considère la RACJ
comme étant l'organisation qui connaît le mieux l'émission de permis, comment
la réalité des boissons alcooliques évolue
au Québec. Alors, c'est sécurisant pour nous d'avoir un organisme neutre,
compétent, près du terrain qui est en mesure
de fournir aux parlementaires des éclairages avisés. Et, en plus de ça, la RACJ
a le pouvoir de pouvoir tenir des consultations
particulières sur différents sujets. Alors, pour nous, on trouve que, dans la
modernisation de la RACJ, mettre de l'avant encore plus ces
particularités dont elle dispose, c'est une bonne nouvelle.
Maintenant,
pour les cocktails à haute teneur en alcool, je vous dirais... et, M. le
ministre, on ne s'est pas opposé au fait
que vous envoyiez ces produits-là à la SAQ. Vous avez vu que, dans nos
interventions, on a même laissé entendre que c'était une bonne nouvelle.
C'était problématique, ces produits-là, et vous avez travaillé avec diligence là-dedans.
Et maintenant, ceci dit, ce qui devient
malheureux par moments, c'est qu'il y a, actuellement, au Québec 200 brasseurs détenteurs de permis de la
RACJ, et on parle ici de deux ou trois entreprises, là, qui ont agi, là, de
façon — bien,
je vais le dire, le mot — malveillante, avec des publicités douteuses
sur le Web, et ainsi de suite. Alors, il ne faut pas mettre au pilori
l'ensemble d'une industrie pour deux ou trois entreprises.
Ceci dit, je
vous dirais qu'il y a le règlement sur les produits composés de bière au
Québec. Ce règlement-là, dans l'état actuel, dit qu'un produit composé
de bière, essentiellement, est un produit qui n'a pas les caractéristiques de
goût d'une bière, on lit entre les lignes l'amertume. Et, pour la Régie des
alcools, des courses et des jeux, la situation actuelle n'est pas problématique,
puisque les produits sont intégrés à l'intérieur de catégories entre — je
vous dis ça par coeur — 1,1 % et 11,9 % de taux d'alcool.
Maintenant, en mettant la barre à 7 %, bien là, comment, après ça, on
va départager un produit aromatisé par
rapport à un produit de bière, un produit de bière qui a un petit arôme mais
qui a un goût de prédominance de bière? Est-ce qu'on va l'avoir à
11,9 %?
Alors, il va
y avoir une barre ou un seuil, je devrais dire, où c'est sûr que des
entreprises vont être tentées de tester la réglementation, comme le règlement dont je vous parle... est un
règlement qui avait été publié à la suite d'un autre type de produit qui était entré dans le marché qui
occasionnait des enjeux de sécurité et de santé publique analogues à ceux
qu'on a connus au cours des derniers mois.
Le message, c'est qu'il va... Quand on est
jeunes — on
a tous été jeunes — on
est toujours tenté par des expériences,
c'est la nature d'être jeune. Et il va toujours y avoir des entreprises qui
vont vouloir profiter, entre guillemets, de la naïveté de la jeunesse.
Alors, j'invite les parlementaires à être vigilants, à être vigilants parce
qu'il va toujours y avoir un produit de
substitution. Et on ne refait pas le passé, mais voilà pas si longtemps,
c'était de la vodka dans du Red Bull, après ça on a eu de l'alcool en
poudre, on a eu des fausses vodkas faites à base de produits de malt.
Le
Président (M. Auger) : Merci. Désolé, encore une fois, de vous
couper la parole, mais je dois céder la parole au député de Beauce-Nord
pour 5 min 30 s.
M. Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue,
Mme Champagne et M. Léger-Bourgoin.
Assez intéressant, surtout la richesse brassicole que... on ne pense pas que
c'est tant que ça, mais, dans le fond, c'est aussi important que ça dans
le PIB.
Vous avez
parlé à plusieurs reprises de donner des pouvoirs à l'organisme réglementaire,
c'est-à-dire à la RACJ, là, ça, on
s'entend, là, pour pouvoir intervenir rapidement. Vous donnez un exemple où que
quelqu'un qui n'avait pas de permis,
ça a pris trop de temps à récupérer la boisson, et tout, etc. Quels pouvoirs
réglementaires de plus vous donneriez à la RACJ?
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Vous savez, il y
a un élément où le travail de la RACJ est extrêmement difficile. Et on a eu le cas de Four Loko, mais, dans la façon
de former les entreprises, le cas de Four Loko n'est pas une exception.
Il y a de nombreuses entreprises au Québec, actuellement, qui commercialisent
sur les tablettes d'épicerie des produits brassicoles
sans être directement détenteurs d'aucun permis, alors l'entreprise est
incorporée au registre des entreprises et fonctionne avec des tiers pour mettre en marché leurs produits, les
fabriquer, les mettre en marché et les commercialiser. Et, dans le cas
de Four Loko, c'est exactement ce pattern-là qui a été utilisé.
La RACJ est
responsable d'intervenir auprès de ses détenteurs de permis. Alors, si le
détenteur de permis a fait faillite
en cours de route et que la réelle entreprise responsable de commercialiser le
produit sur un territoire donné — dans ce cas-ci, c'est le Québec — dit : Ah! vous ne pouvez pas vous
approcher de moi, je ne suis pas un détenteur d'un permis, alors il est
raisonnable de penser que ce fut un cas difficile pour la RACJ.
Alors, la
question, c'est : Est-ce que, pour pouvoir commercialiser de la bière au
Québec, ça vous prend un permis de la
RACJ, oui ou non? Et est-ce que ça vous prend un permis d'entrepôt, oui ou non?
Et, si c'est oui et que tout le monde a ses permis, bien là, la RACJ dispose de tous les pouvoirs pour
s'assurer, en tant que régulateur, que tout le monde respecte la loi et
les règlements.
Mme Champagne
(Mélanie) : Une chose est
certaine, c'est que, si le p.l. n° 170 est adopté tel quel, la RACJ aura des responsabilités accrues. On parle de vigie des publicités Web,
etc. Donc, il vient un moment, des fois, où les besoins sont plus grands que les moyens. Donc, la question,
ça va être : Est-ce que la RACJ a besoin de davantage
de moyens ou est-ce qu'elle a besoin de prioriser sur les enjeux qui sont les
plus criants plutôt que, justement, d'aller s'occuper de parasols ou de
publicités? Tu sais, ça va être une question de priorité des moyens. Mais
l'important, c'est que, si on veut qu'il y ait une vigie Web, ça va prendre une
équipe de vigie Web. Ça prend des façons normées de procéder.
C'est pour ça
qu'on demande aussi la prévisibilité réglementaire, c'est-à-dire que les décisions, lorsqu'elles sont rendues par du personnel administratif, qu'elles soient écrites pour que ça
soit plus aisé pour notre industrie de prévoir et de prévoir nos
activités, nos événements, etc. Je vous donne un exemple : l'année
dernière, on a un de nos membres qui fournit
une pub à la RACJ, elle est acceptée; cette année, la même publicité, mais
l'année a changé, est fournie et elle est refusée, cette publicité-là. Donc, qu'est-ce qui s'est passé entre
l'année dernière puis cette année dans la façon d'examiner ce dossier-là? Donc, ce qu'on demande, dans le fond,
c'est qu'il y ait une prévisibilité, c'est-à-dire qu'on puisse
s'attendre à ce qu'il y ait des normes,
qu'il y ait peut-être un bulletin d'information de la RACJ, mais qu'on sache un
peu davantage sur quoi sont basées les décisions.
M. Léger-Bourgoin
(Patrice) : Vous avez
énormément de nouveaux joueurs dans notre industrie, et je pense que ça a été relevé dans le plan stratégique de la
RACJ 2018‑2023. Souvent, les nouveaux brasseurs qui se lancent dans
une entreprise ne sont pas nécessairement au
fait de toutes les règles, les lois et règlements, et il y a beaucoup
d'éducation à faire. Et, pour des organismes
comme la RACJ ou RECYC-QUÉBEC, c'est un gros mandat de s'assurer que les gens
qui se lancent dans notre industrie soient
au fait de toutes les dispositions réglementaires. On est l'une des entreprises
de biens de consommation, parce qu'on
est un bien de consommation, pas normal comme les autres, mais ça en demeure
un... on est une des industries les
plus réglementées. Alors, il faut s'assurer que les joueurs moins familiers
avec la réglementation soient au fait de celle-ci.
Le Président (M. Auger) :
30 secondes, M. le député.
M. Spénard :
Merci. L'autre chose qui est... J'ai de la misère à vous suivre sur un prix
minimum pour tous les alcools selon
le pourcentage d'alcool qu'il y a dans le... Ça n'a pas de bons sens, il y
aurait un prix minimum pour la bière légère,
il y aurait un prix minimum pour la bière forte, il y aurait un prix minimum
pour du vin à 11,5 %, il y aurait un prix minimum pour du vin à
14 %. Mais là on s'en va dans un labyrinthe d'où on n'en sortira jamais.
Le Président (M. Auger) :
Merci, M. le député.
M. Léger-Bourgoin (Patrice) :
Je vous invite à le voir à l'inverse. Actuellement, il y a un prix minimum sur différentes catégories de prix minimums pour tous
les produits vendus dans les épiceries. Mais, si vous allez à la SAQ pour une bière ou pour une bière pour emporter
dans un «brew pub», là il n'y a pas de prix minimum du tout, là. Alors,
vous avez un secteur extrêmement normé avec
quatre paliers de prix minimums, et les deux autres secteurs pour
consommation à domicile, eux, n'ont absolument aucune règle.
Le
Président (M. Auger) : Désolé, c'est tout le temps que nous
avions. Donc, merci à vous, Mme Champagne et
M. Léger-Bourgoin, de votre participation aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 9)
(Reprise à 16 h 48)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, chers collègues! Nous reprenons
nos travaux en souhaitant la bienvenue à l'Association des directeurs de police du Québec. Je vous rappelle que
vous avez 10 minutes pour votre présentation, par la suite suivra
une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier
temps, bien vouloir vous identifier, et par la suite vous pourrez commencer
votre présentation.
Association des
directeurs de police du Québec (ADPQ)
Mme Dion (Helen) : M. le
Président, je vous présente mes deux collègues qui m'accompagnent : d'un
côté, j'ai M. Didier Deramond, et de l'autre côté, M. André Fortier,
M. Fortier étant membre de notre association et aussi directeur
du Service de police de Saint-Jean-sur-Richelieu. M. Didier Deramond a été
un haut dirigeant d'une grande organisation policière au Québec et agit
présentement à titre de directeur général de notre association.
Le Président (M. Auger) :
Merci.
• (16 h 50) •
Mme Dion
(Helen) : Membres de la commission,
M. le Président, M. le ministre, puisque nous sommes ici pour échanger et répondre aux interrogations que vous
pourriez avoir, comme nous le faisons régulièrement maintenant lorsque nous nous présentons en commission, je passerai
assez rapidement mes remarques d'introduction pour ne pas empiéter
inutilement sur la période d'échange avec vous.
Fondée il y a
plus de 80 ans, l'Association des directeurs de police du Québec est un
organisme à but non lucratif dont la
mission première est de mettre en commun et valoriser l'expertise des
dirigeants policiers et de leurs partenaires au profit d'une meilleure sécurité publique pour les citoyens du Québec et
toutes ses communautés. Elle compte dans ses rangs l'ensemble des dirigeants de plus de 34 organisations
policières municipales et autochtones, de la Sûreté du Québec, de la
Gendarmerie royale du Canada et d'autres services de sécurité publique oeuvrant
dans la province de Québec.
De façon
générale, l'ADPQ accueille favorablement ce projet de loi qui actualisera
plusieurs aspects du contrôle des boissons alcooliques. Nous sommes
d'accord avec les dispositions relatives à la formation sur la consommation responsable. Déterminer un encadrement adéquat des
détenteurs de permis dès le départ contribuera à assurer une meilleure
compréhension, une plus grande adhésion et une conformité plus efficace aux
nouvelles dispositions.
Cependant,
nous avons des préoccupations eu égard à certaines responsabilités qui seraient
dévolues à la Régie des alcools, des
courses et des jeux sans qu'il n'y ait eu au préalable, selon nous, de
consultations assez approfondies avec les
organisations municipales et/ou policières à ce sujet. Les responsabilités dont
il est question ici incluent des éléments de sécurité publique. Par exemple,
il n'est pas rare de constater une différence quant à la capacité de l'endroit
selon le permis octroyé et les recommandations du service des incendies
local.
Nous croyons important
de rappeler que la contrebande et le commerce illégal d'alcool existent et
menacent la santé des consommateurs, l'intégrité du régime fiscal québécois et déséquilibrent aussi la libre concurrence au
sein de l'industrie des boissons alcooliques. Le marché parallèle
d'alcool au Québec prend diverses formes et s'exerce aussi bien lors des étapes de fabrication ou
d'importation que lors de la vente en gros ou au détail. La quête de profit
figure au sommet des raisons qui alimentent le commerce des produits de
contrebande d'alcool, tandis que le désir d'éviter les taxes et les droits
payables constituent le principal mobile pour s'approvisionner auprès des
marchés clandestins.
Dans cette
optique, et bien que certains des changements proposés ne feront que rendre la
loi actuelle conforme à la réalité d'aujourd'hui, après avoir revu le projet
de loi, nous nous sommes penchés sur
certains points plus précis. Le projet de loi permettrait, dès
l'ouverture de l'établissement, la préparation à l'avance de boissons
alcooliques. Cette permission prête flanc à
de la fraude par transvidage favorisant la contrebande et marque un énorme
recul à l'hygiène et la sécurité du produit.
Vous ne serez pas surpris de m'entendre dire que
nos préoccupations ont trait à tout ce qui entoure les enjeux d'applicabilité et de surveillance soulevés par la
nouvelle réglementation qui rentrera en vigueur éventuellement, notamment celle de permettre à une personne non canadienne
munie seulement d'un permis de travail délivré par les autorités de l'immigration
d'obtenir un permis d'alcool.
Au fil des
ans, nos organisations policières ont développé une expertise certaine et des
techniques d'inspection efficaces dans le domaine des établissements
licenciés, et ce, depuis 1996. Le programme ACCES Alcool, Actions concertées pour contrer les économies souterraines,
vise à contrer les économies souterraines qui entraînent le commerce illégal des boissons alcooliques au Québec. Plus
précisément, le programme ACCES Alcool est basé sur des opérations en continu d'inspection systématique
d'établissements détenteurs d'un permis d'alcool pour consommation sur place
ainsi que sur la conduite d'enquêtes de
réseaux d'approvisionnement illégal d'alcool. Les objectifs que l'on poursuit
via ce programme sont de protéger
l'intégrité du régime fiscal québécois et récupérer les revenus dus au
gouvernement, diminuer la concurrence
déloyale en réduisant l'offre et la demande des produits illégalement
transigés, dissuader les détenteurs de permis
d'alcool de s'adonner au commerce illégal de boissons alcooliques, démanteler les
réseaux d'approvisionnement illégaux
d'alcool, incluant la fermeture des débits clandestins, et contribuer à la
protection de la santé des consommateurs québécois.
De façon
générale, c'est en ayant à l'esprit ces objectifs que nous avons considéré le présent
projet de loi. Nous l'avons dit,
l'ADPQ accueille favorablement ce projet de loi qui actualisera plusieurs
aspects du contrôle des boissons alcooliques.
Les notions de consommation responsable et de formation à cet égard sont un
ajout de taille. L'introduction de sanctions administratives pécuniaires
dans les cas de manquements en matière de promotion et de publicité fera aussi
une différence. Les obligations relatives au personnel d'un établissement
déterminées par règlement représentent une amélioration
notable pour la sécurité des citoyens, et nous souhaiterions que tous les
employés d'un établissement licencié soient soumis aux mêmes obligations
en matière d'antécédents judiciaires que les détenteurs de permis.
Que la
problématique des incivilités dans les bars continue d'être traitée de concert
avec la régie et les municipalités est
une bonne chose, mais nous oserions pousser un peu plus loin la responsabilité
des tenanciers à l'égard de leurs clients impliqués dans une collision
routière alors qu'ils conduisaient avec les facultés affaiblies.
Il y aurait lieu aussi de s'assurer, puisque le
projet de loi permettra la livraison d'alcool, qu'un mécanisme de contrôle soit
mis en place afin d'éviter que celle-ci ne se retrouve dans les mains d'un mineur.
L'obligation
pour les débits de boisson de se doter d'une politique de service responsable
et d'une politique claire à l'égard
des comportements de nature sexuelle devrait aussi être considérée. Nous
souhaitons voir imposer l'obligation d'afficher à l'intérieur des
établissements une politique claire concernant l'admission et l'exclusion des
clients.
Nous considérons également que
l'amende reliée à la vente aux mineurs devrait être substantielle, de l'ordre
de 500 $ pour une première offense et
de 1 000 $ pour l'offense subséquente. Toutefois, nous sommes d'avis
qu'une réflexion s'impose à l'égard des impacts qu'aura la nouvelle
réglementation sur les différents règlements municipaux qui, actuellement, définissent les emplacements des
bars et/ou restaurants. Par ailleurs, nous tenons à souligner, M. le
Président, que la nouvelle loi risque de
rendre plus complexes l'application et la surveillance des règles en la
matière, ce qui ne fera nécessairement
qu'augmenter notre charge de travail au sein des organismes policières. Les
dossiers administratifs seront plus
difficiles à effectuer et feront augmenter le nombre de suivis de rapports qui
devront être transmis par la suite à la régie. Ainsi, en 2017 seulement, certains corps de police ont reçu une
augmentation des demandes de vérification provenant de la régie de l'ordre de 25 %. Avec les
changements proposés, le nombre de demandes va continuer d'augmenter.
Des ressources financières additionnelles
devront être prévues pour que les différents services policiers puissent
efficacement faire leur travail de
surveillance des nouvelles mesures et faire respecter les nouvelles lois,
procéder aussi à de la formation des policiers appliquant celles-ci.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président
(M. Auger) : Merci beaucoup pour la présentation. Nous allons
maintenant débuter avec le gouvernement pour les échanges. M. le ministre, pour
8 min 30 s.
M. Coiteux :
Oui. Alors, bonjour, Mme Dion, M. Deramond, M. Fortier. Dans
l'intérêt du temps, je vais aller droit au but parce qu'on a peu temps.
Compte tenu des votes qu'on vient de faire, ça nous a restreints un peu.
Vous
êtes un partenaire important en sécurité publique. On a l'occasion souvent de
se... On a eu l'occasion de se rencontrer
en dehors des projets de loi, mais aussi à l'occasion de la présentation d'un
certain nombre de projets de loi. J'apprécie toujours beaucoup votre
contribution et je continue de toujours l'accueillir avec beaucoup d'intérêt,
mais aujourd'hui vous m'inquiétez un petit
peu. Je vais vous dire franchement, aujourd'hui, vous m'inquiétez un petit peu
parce que les pas que nous faisons dans
certains types d'allègements sont, dans un certain nombre de cas,
significatifs, certes, mais dans un
certain nombre de cas, bien en deçà des attentes du milieu qui se comparent à
ce qu'on voit dans d'autres provinces. Devant
nous, on n'a pas un projet de loi qui propose, pour l'instant, d'abolir,
notamment, le fameux timbre. Par contre, beaucoup d'intervenants sont
venus et nous ont dit : Pourquoi vous n'allez pas jusque-là? Et là vous
nous faites une présentation où vous nous
dites que, même la préparation à l'avance des carafons, ça vous inquiète. Je
trouve que c'est une inquiétude qui est... je veux dire, l'inquiétude
apparaît très tôt dans le processus parce que, dans les autres provinces, il n'y a pas de telles restrictions systématiques
comme on a au Québec. Dans les autres provinces, il n'y a même pas le timbre, et j'ai un peu de mal à croire que, dans
les autres provinces, les corps policiers n'ont pas le souci d'assurer la
même sécurité publique, de lutter contre la contrebande, de lutter contre
l'évasion fiscale.
Alors,
pourquoi, pour vous, les dispositifs actuels, qui sont extrêmement restrictifs...
Il y a beaucoup de gens qui sont
venus dire : Écoutez, vous avez d'autres façons de nous coincer si on est
délinquant, là, pourquoi, dans le fond, on ne peut pas remettre ça en question puis faire les choses
autrement? Est-ce que c'est la seule façon d'opérer, à travers les
timbres puis ces contrôles tatillons qu'on a
qui sont systématiques pour tout le monde? Puis probablement que, souvent, ça
ne donne pas grand résultats parce qu'on va chez des gens qui sont parfaitement
honnêtes puis qui sont toujours parfaitement honnêtes,
alors qu'il me semble que les enquêtes policières devraient pointer, en
général, vers un certain nombre de joueurs chez qui on doit faire des inspections un peu plus systématiques que
juste regarder s'il y a un timbre sur une bouteille.
Le Président
(M. Auger) : Mme Dion.
• (17 heures) •
Mme Dion
(Helen) : En fait, M. le ministre, M. le Président, je félicite le
Québec d'être vraiment des fers de lance, si
on veut, d'une législation un peu plus centrée pour le bénéfice de nos
citoyens, et pour le bénéfice de l'hygiène publique, et surtout de la sécurité des produits. On évite, par le
timbrage, la contrebande. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas, mais on
l'évite d'une certaine façon.
Ce
à quoi on est préoccupés par rapport au fait que vous vouliez élargir, dans le
présent projet de loi, la possibilité de
préparer d'avance des carafons et qu'à la fin de la journée il y ait une
obligation de le transvider, c'est au niveau du contrôle, M. le Président. Il va s'avérer difficile, en fonction des
organisations policières, d'être là le matin, passer la journée et de s'assurer qu'à la fin de la journée tout
soit transvidé. À l'heure actuelle, il y a une tolérance autour d'une heure
avant la consommation pour pouvoir le faire, et ce qui nous semble respecté. Et
les plus grands... mon collègue va pouvoir vous le témoigner, les plus grandes
infractions qu'on a, c'est des infractions en matière, justement, de
transvidage, de timbrage qui n'existe pas.
Ce sont les principales infractions qu'on connaît, malgré que la loi soit moins
permissive encore aujourd'hui. En l'élargissant, nous, on croit que ça
va donner un pas de plus à la contrebande de s'installer et faire en sorte que les produits d'hygiène... en fait,
l'hygiène, on retrouve souvent des mouches dans les produits, je vous fais
grâce de tout ce qu'on peut trouver, mais
souvent, même, le produit n'est pas ce que le client a demandé. Donc, c'est à
ça à quoi nous, de notre côté, on a
des préoccupations. À l'heure actuelle, ce n'est pas parfait, mais ça nous
permet quand même d'effectuer un meilleur contrôle. Mais, comme je vous
dis, si on agrandit cette fenêtre-là, on fait un net recul quant à la salubrité
et la sécurité des clients, si on veut.
M. Coiteux :
Donc, ailleurs au Canada, il y a des problèmes sérieux de salubrité puis
d'insécurité liés à la non-utilisation du
timbre et à des dispositions sur la préparation à l'avance qui seraient moins
strictes qu'ici, vraiment?
Mme Dion (Helen) : Je ne peux pas vous dire, ailleurs au Canada...
je ne peux pas vous dire qui applique, nécessairement, au Canada. Ici, on a fait le choix que ce soit un programme
ACCES Alcool, fait en collégialité avec le ministère.
M. Coiteux : Oui, mais ma question est la
suivante : Les techniques d'enquête et d'intervention se sont adaptées à l'existence de ce système-là,
ne peuvent-elles pas s'adapter à l'existence d'un système différent?
Mme Dion
(Helen) : M. le Président, M. le ministre, on va toujours s'ajuster. C'est sûr qu'on s'ajuste en
fonction des lois et on va appliquer les
lois, on va trouver les méthodes pour s'appliquer. Ce qu'on vous dit, c'est que
ça risque énormément d'être difficile. Plus on agrandit la fenêtre,
plus on va devoir avoir une présence du début à la fin pour voir si, effectivement,
le projet de loi est respecté.
M. Coiteux : Mais là vous
intervenez partout de façon indiscriminée ou vous ciblez des gens qui, en
fonction de vos éléments d'enquête, présentent un risque accru?
Mme Dion
(Helen) : Bien, à l'heure
actuelle, ce qu'on a, c'est que la Régie des alcools nous envoie les...
bien, en fait, le ministère,
là, par la Régie des alcools, nous envoie le nombre de bars licenciés ou de
restaurants licenciés sur notre territoire à faire les vérifications.
Donc, on le fait de façon systématique, les listes qu'on a.
M. Coiteux : Et, dans les cas de figure où il y aurait
absence d'un timbre ou des dispositions de cette nature-là n'auraient pas été totalement respectées, est-ce
que c'est parce qu'on avait affaire à de l'alcool de contrebande ou il y avait d'autres raisons?
Mme Dion
(Helen) : Bien, écoutez,
il y a de l'alcool... en fait, il y
a du transvidage qui se fait à l'intérieur des bouteilles qui sont timbrées qu'il faut quand même vérifier. Parce
qu'on regarde, souvent, la bouteille... on est allés, on a fait une vérification voilà deux, trois mois, on sait, on a pris des
notes pour savoir à quel endroit était rendue la hauteur du liquide à
l'intérieur, et, woups! souvent, dans
les autres inspections, on se rend compte que le liquide est plus haut
alors que c'est la même bouteille. Je vous
dis, on ne manque pas d'ingéniosité pour certains tenanciers. Donc, c'est à ça
qu'on vous dit qu'on prête flanc dans certaines situations.
M. Coiteux : Oui, non, la seule question que je me pose, c'est
que... Si on ne met pas des ressources, finalement, pour découvrir des incongruités par
rapport à l'observation d'un règlement, sans que ça soit nécessairement de
l'évasion fiscale ni de l'alcool de
contrebande, alors que, si on avait mis les mêmes ressources
policières pour aller derrière ceux qui, effectivement, se livrent à de
l'évasion fiscale, d'une part, et/ou, d'autre part, de la contrebande, les
mêmes effectifs concentrés aux bons
endroits, peut-être qu'on pincerait les gens qu'on veut pincer. Je
veux dire par là, si ultimement on pince
des gens qui ne sont pas en conformité avec le règlement mais qui n'ont pas
acheté de l'alcool de contrebande, d'une part, puis qui n'ont pas fait
de l'évasion fiscale, d'autre part, est-ce qu'on n'est pas en train de mettre
les ressources à la mauvaise place?
Mme Dion
(Helen) : Bien, écoutez,
le programme d'ACCES Alcool nous donne le mandat de le faire,
on le fait avec les ressources
qu'on a, et qui est financé en partie par le ministère de la Sécurité publique, et pas dans son entièreté. Donc,
c'est là où, je veux dire, on veut bien mettre les ressources
aux bons endroits, mais on a à la fois la validation du respect d'un permis, et aussi de vérifier l'alcool
de contrebande, le cas échéant, puis de faire des alambics. On le fait,
ça aussi, lorsqu'on a des informations pour le faire, évidemment, dans plusieurs
endroits qu'on peut aller.
Le Président (M. Auger) : 30
secondes, M. le ministre.
M. Coiteux : C'est bon pour
moi.
Le
Président (M. Auger) :
Donc, nous allons maintenant poursuivre avec le député de Verchères
pour cinq minutes.
M. Bergeron : Alors, madame messieurs, c'est un plaisir de vous
revoir, merci de votre présentation. Comme le disait M. le ministre, et je ne peux pas être plus d'accord avec lui que
cela, vous êtes des partenaires absolument
indispensables pour assurer la sécurité publique, et évidemment votre avis nous
importe énormément.
Ceci dit, un
peu à l'instar de M. le ministre, on cherche à départager ce qui constitue,
pour ainsi dire, des résistances parce
que c'est comme ça qu'on fait les
choses, parce que c'est plus simple de les faire comme ça et la
véritable motivation. Dans le sens
où, à l'époque où j'étais ministre de
la Sécurité publique puis qu'on a
envisagé la possibilité d'alléger le cadre législatif et réglementaire entourant les permis d'alcool, vous nous
invoquiez, de façon tout à fait justifiée, la nécessité de maintenir les
timbres sur les bouteilles. Or, depuis, un certain nombre de modifications sont
intervenues : d'une part, l'espèce de
système informatique, là, qui fait la correspondance entre l'inventaire et les
achats, et, d'autre part, le fait que, maintenant,
les gens sont autorisés à produire eux-mêmes le timbre qu'ils apposent sur les
bouteilles. Conséquemment, est-ce que c'est véritablement une preuve que
le matériel, que les bouteilles ne sont pas des produits de contrebande? Sincèrement, je ne vois plus vraiment,
aujourd'hui, l'utilité du maintien du timbre, sinon parce qu'on a toujours fait
ça comme ça puis on est confortables dans cette façon de faire.
Alors, à
moins que vous... Et puis, encore une fois, je comprenais l'argument qui m'était
invoqué à l'époque où on envisageait d'éliminer... d'assouplir le cadre
réglementaire et législatif, parce qu'il n'y avait pas ces nouveautés auxquelles on est maintenant confrontés. Mais
aujourd'hui, comme je vous disais, à moins que vous me convainquiez du
contraire, je ne vois plus vraiment l'utilité, sinon que de constituer une
exigence, une contrainte tatillonne sur les commerçants
qui n'a plus vraiment sa raison d'être, à première vue, pour le parlementaire
que je suis, là. Alors, convainquez-moi du
contraire, puis vous savez que je vais être réceptif, mais, pour le moment, je
ne vois pas vraiment l'utilité de maintenir le timbre.
Le Président (M. Auger) :
Mme Dion.
Mme Dion (Helen) : En fait,
lorsqu'on maintient le timbre, M. le Président, ou qu'on maintient ce genre d'identification d'une... on sait alors que la bouteille en question a été achetée, et
les droits ont été payés, et on sait bel et bien que c'est ce produit-là que les droits ont été payés, les droits,
les dus, les taxes supplémentaires pour le gouvernement. Donc, c'est de
cette façon-là qu'on a la possibilité de l'identifier plus facilement.
Est-ce qu'il y a d'autres moyens qu'un timbre pour le faire? Est-ce qu'il y a un autre moyen que les législateurs vont penser pour nous donner les outils pour être capables de
différencier une bouteille dont les taxes et les dus ont été payés versus une autre qui provient de la contrebande et
qui n'a pas été payée? Si les législateurs nous donnent le moyen, nous,
on va prendre le moyen qui nous est donné. À l'heure actuelle, la formule du
timbre fonctionne; pas parfait, comme on a dit, mais fonctionne.
M. Bergeron :
Je veux revenir sur ce qu'a dit M. le ministre tout à l'heure, et ce avec quoi
je suis plutôt en accord, parce qu'on
a souvent des commentaires de gens qui nous disent : C'est-u vraiment le
travail des policiers d'aller vérifier des
timbres? Ce n'est pas le travail de la RACJ? Est-ce qu'on ne devrait pas donner
davantage de moyens à la RACJ de faire
ça, considérant le fait que les policiers ont certainement d'autre chose de
plus important à faire que de venir vérifier les timbres dans les commerces? Vous aurez peut-être le goût de réagir à
cette expression, à cette espèce de commentaire qui revient très
souvent.
L'autre chose,
c'est : Est-ce qu'on ne devrait pas mettre nos ressources en amont pour
tenter de lutter contre la contrebande plutôt qu'en aval alors que le
mal est fait au moment où on vérifie le timbre, là?
Le Président (M. Auger) :
Malheureusement, 15 secondes.
Mme Dion (Helen) : Je vais
demander à mon collègue Didier Deramond de répondre, s'il vous plaît.
Le Président (M. Auger) : Très,
très rapidement, s'il vous plaît.
• (17 h 10) •
M. Deramond
(Didier) : Effectivement, au niveau des ressources en amont, avec le programme ACCES,
auquel on participe depuis plus d'une
douzaine d'années, et avec une étroite collaboration avec le ministère
de la Sécurité publique et la RACJ, là, effectivement, là, on travaille
sur différentes enquêtes en amont.
Bon, est-ce que
les ressources sont toujours priorisées au bon endroit? Je pense qu'on aurait
avantage, comme corps policiers, bien entendu, à faire cet examen de
conscience là, vous avez totalement raison. Mais en même temps il y a tellement
de choses à faire, il y a tellement de priorités. Je veux dire, nous autres, on est
ici devant vous juste pour vous énoncer les préoccupations que l'on a en
matière de sécurité publique, en matière de quiétude aussi, en matière de comportements dans les endroits licenciés également.
Donc, c'est un peu ça. Mais est-ce
que le travail policier va
devoir s'ajuster? Puis on le fait, il va s'ajuster constamment, effectivement.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Nous allons maintenant poursuivre pour 3 min 30 s, M. le député de Beauce-Nord.
M. Spénard :
Merci, M. le Président. À mon tour de vous saluer, Mme Dion,
M. Deramond et M. Fortier. Deux
choses que vous m'avez conforté dans qu'est-ce que je pensais. La livraison
d'alcool avec les mets par les restaurants, comment qu'on va s'assurer qu'on ne livre pas à des mineurs et comment
qu'on va s'assurer qu'on va détourner la loi passé 11 heures le soir, en tout cas, passé vers 3 heures? Ça,
je pense qu'il n'y a rien de prévu. Et l'autre que... Moi aussi, j'ai un
peu de réticence de dire qu'on va préparer les carafons de vin, qu'on va
préparer... Moi, je vais vous dire que, quand
j'achète du vin, je veux voir la bouteille, premièrement, puis je veux
savoir... Vous avez raison de dire : Peut-être de faire décanter une heure avant, mais on ne peut
pas le faire décanter huit heures en ligne, là, parce qu'à un moment
donné, là, il ne sera plus buvable.
L'autre chose
que j'aimerais... que vous avez apportée aussi, et ça, on n'a pas eu d'unions
municipales qui sont venues nous
parler de ce possible problème-là, en permettant aux restaurants de servir de
la boisson sans servir de repas... Il y a de la réglementation
municipale, évidemment, qui permettait un restaurant, mais qui ne permettait
peut-être pas nécessairement la consommation
d'alcool sans repas, parce qu'on sait que tu peux consommer de l'alcool avec un
repas, à l'heure actuelle, mais, tu sais, tu
vas manger. En premier lieu, c'est : Tu vas manger. Mais là ça se peut
qu'il y ait du monde qui vont
uniquement prendre une bière, puis deux bières, puis trois bières. Alors, ça,
avec un permis de restaurant, ce n'est pas
nécessairement un permis de bar, et je pense que ça aurait été intéressant
d'entendre la FQM — surtout
pour les plus petites municipalités — sur le point de ce
règlement-là.
En ce qui
concerne les statistiques, est-ce que vous avez des statistiques? Est-ce que
vos statistiques sur l'alcool, sur
les descentes, ça va en diminuant, sur le timbrage? Parce que de l'alcool de
contrebande, moi, je pense que c'est de l'alcool qu'on achète dans les autres pays puis qu'on ne déclare pas à
la douane, mais il n'y a pas d'alambics comme ça au Québec, là. Tu sais, rassurez-moi, là, on n'est plus en 1930, là,
lors de la prohibition, là. Je ne pense pas qu'il se fasse de l'alcool,
à moins que vous sachiez des choses que moi, je ne sais pas, là.
Le
Président (M. Auger) : Une minute s'il vous plaît, pour la
réponse.
Mme Dion (Helen) : Là-dessus, je peux vous répondre par
l'affirmative. Malheureusement, il existe encore des fabrications d'alcool, d'alambics, on en défait
régulièrement. Et l'alcool de contrebande est encore présent parce que
c'est beaucoup moins cher que de l'acheter à
la Société des alcools du Québec. C'est simplement la raison pour laquelle
ça se fait encore, et que ça se passe dans
les tenanciers, et que ça se vend aux tenanciers. Alors, les statistiques comme
telles, malheureusement, je ne les ai pas
avec moi, mais je peux vous dire qu'on en a. Et puis, juste pour donner une
idée, dans nos inspections, dans la
ville de Québec, c'est plus de 800 établissements qu'on doit surveiller. À
Laval, c'est plus de 400 établissements
qu'on doit surveiller au niveau des policiers. Je vous fais grâce de Montréal,
là. Donc, je peux vous dire que c'est beaucoup, beaucoup
d'investissements puis de vérifications. Et, oui, on a des bouteilles de
transvidage.
Le
Président (M. Auger) : C'est tout le temps que nous avions.
Est-ce que vous voulez avoir les statistiques, M. le député?
M. Spénard :
Pardon?
Le Président
(M. Auger) : Est-ce que vous avez une demande formelle pour des
statistiques?
M. Spénard :
Non, non, je voulais juste les remercier, M. le Président.
Le
Président (M. Auger) : Ça va? Donc, merci à vous, Mme Dion,
MM. Deramond et Fortier, pour votre participation aux travaux.
Je suspends quelques
instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à
17 h 14)
(Reprise à 17 h 16)
Le
Président (M. Auger) :
Nous reprenons nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants de l'Institut national de
santé publique du Québec. Je vous
rappelle que vous avez 10 minutes pour la présentation, par la suite suivra une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier et, par la
suite, vous pourrez commencer votre exposé.
Institut
national de santé publique du Québec (INSPQ)
Mme Damestoy
(Nicole) : Merci. Alors, M. le Président, M. le ministre, chers membres
de la commission, je suis Nicole Damestoy, présidente-directrice générale de l'Institut
national de santé publique du Québec.
Je suis accompagnée par la
Dre Nicole April et le Dr Réal Morin, tous deux médecins spécialistes en santé publique et médecine préventive, experts dans
le domaine de l'alcool dans les questions
de santé publique et auteurs du mémoire que nous avons déposé aujourd'hui.
Le Président
(M. Auger) : Merci.
Mme Damestoy
(Nicole) : L'institut est un
centre d'expertise et de référence en santé
publique qui a le mandat de soutenir la prise de décision par le partage des informations scientifiques les plus à jour dans le domaine de la
prévention avec l'objectif
d'améliorer la santé et le bien-être de la population. Nous suivons de près l'évolution de la consommation d'alcool
au Québec depuis la création de l'institut il y a maintenant
bientôt 20 ans et nous avons réalisé plusieurs
avis de santé publique sur cette question.
Nous participons aussi à des travaux sur les politiques publiques en matière d'alcool avec des organisations
canadiennes et des chercheurs de renommée internationale dans le domaine.
Encore
tout récemment, à la demande du directeur national de santé publique et
sous-ministre adjoint, Dr Arruda, nous
avons produit un rapport sur les intoxications à l'alcool et les boissons
sucrées fortement alcoolisées. C'est donc avec plaisir que nous participons aujourd'hui aux consultations particulières
et auditions publiques sur le projet de loi n° 170.
D'entrée
de jeu, nous reconnaissons la légitimité d'alléger le fardeau réglementaire des
différents titulaires de permis
d'alcool et nous comprenons que c'est l'objectif principal du projet de loi.
Cependant, en nous invitant aujourd'hui, nous comprenons que vous souhaitez de notre part des opinions basées sur les
données scientifiques qui vous permettront d'avoir l'assurance que le projet de loi n° 170
permet au gouvernement de jouer pleinement son rôle d'assurer un certain
équilibre entre les intérêts économiques,
d'une part, et la nécessité de protéger la santé et la sécurité du public,
d'autre part. Donc, nous désirons partager avec vous certains constats
et préoccupations en lien avec quelques dispositions prévues au projet de loi.
D'abord,
l'alcool n'est pas un produit de consommation ordinaire, nous ne sommes pas les
premiers à vous le dire. C'est une
substance dont la consommation est particulièrement banalisée dans notre
société, tandis que c'est un facteur de risque parmi les plus importants
au niveau de l'impact que ça a sur les décès et les incapacités au Québec.
Malheureusement,
les problèmes d'alcool ne concernent pas seulement les personnes dites
alcooliques. Il y a une abondance
d'études sur le sujet qui associent l'alcool à quelque 200 problèmes sociaux et
de santé, par exemple la violence, les blessures, les maladies du coeur, les maladies
du foie et les cancers. Et on sait, par exemple, qu'une consommation aussi faible qu'un verre par jour augmente le
risque de cancer du larynx, de la bouche, de l'oesophage et même le
cancer du sein chez les femmes. L'alcool concerne ceux qui boivent, évidemment,
mais aussi leur entourage.
• (17 h 20) •
Deuxièmement, les
Québécois boivent plus et boivent moins bien qu'avant. Un homme sur quatre au
Québec consomme de façon excessive, une
femme sur cinq, c'est beaucoup plus qu'il y a à peine quelques années. On a
déjà dit que les Québécois buvaient mieux que les Canadiens des autres
provinces. C'était vrai avant les années 2000 alors que la consommation,
mesurée en équivalent d'alcool pur, était de plus de 10 % plus élevée au
Canada comparativement au Québec. Depuis ce
temps, la tendance s'est renversée, et on boit plus, au Québec, que la moyenne
canadienne. C'est la facilité de se
procurer de l'alcool qui est le principal déterminant de la consommation
d'alcool et des problèmes sociaux et de
santé qui lui sont associés. On ne peut pas boire ce qu'on ne peut pas se
procurer, on ne peut plus boire quand on ne peut plus s'en procurer. Le prix, le nombre et la répartition des points de
vente et leurs heures d'ouverture sont autant de facteurs à considérer dans l'adoption des politiques
publiques sur l'alcool. Tout en modernisant les dispositions pour les
permis d'alcool, le projet de loi n° 170 pourrait contribuer à réduire les
méfaits liés à la consommation excessive d'alcool en abordant l'accessibilité économique, d'une part, et en maintenant certaines limites par rapport à l'accessibilité physique.
D'abord,
au niveau de l'accessibilité économique, le projet de loi n° 170 n'aborde
pas le principe du prix minimum. Pourtant,
la littérature scientifique est formelle, ce qui n'est pas si fréquent que ça dans
le domaine de la santé publique : l'accessibilité économique doit
être une priorité. C'est un avis non seulement partagé par les autorités de
santé publique à travers le monde, mais même
par l'OCDE, qui reconnaît que les prix constituent un outil économique
classique pour s'assurer qu'au moins une
partie des coûts liés à la consommation d'alcool soient intégrés dans son prix
de vente.
Les
moyens pour limiter l'accessibilité économique à l'alcool consistent d'abord à
avoir des prix suffisamment élevés au
moyen de taxes et de majorations. Ensuite, il s'agit d'indexer les prix à
l'inflation pour maintenir leur valeur réelle au fil du temps. Au Québec, au cours des 15 dernières années, les
boissons alcoolisées achetées en magasin ont connu une hausse de prix de 9 %, tandis que l'indice
des prix à la consommation a augmenté de 27 %. C'est donc dire que
l'alcool coûte de moins en moins cher avec le temps qui passe, relativement.
La fixation d'un prix minimum par
verre d'alcool standard est la façon de restreindre l'accès à de l'alcool à
trop bas prix. Le prix minimum appliqué à
tous les types de boissons alcooliques évite la substitution vers des produits
trop bon marché. Toutes les provinces canadiennes, sauf le Québec et
l'Alberta, fixent un prix minimum pour l'ensemble des boissons alcoolisées vendues en magasins et dans les bars et
restaurants. Plusieurs pays européens font de même. La mesure du prix
minimum n'affecterait qu'une minorité de produits vendus au Québec. Ce qui est
intéressant avec le prix minimum, c'est
qu'il s'agit d'une mesure particulièrement efficace chez les jeunes et chez les
grands buveurs, qui sont très
sensibles aux bas prix, et ce sont eux qu'on veut rejoindre en priorité, tel
que l'a annoncé le gouvernement le mois dernier en réaction aux
problèmes causés par les boissons sucrées alcoolisées.
Ensuite, l'accessibilité physique. Le
projet de loi n° 170 annonce une augmentation de l'accessibilité
physique à l'alcool : vente dans les
dépanneurs plus tôt le matin, possibilité de consommer de l'alcool dans les
restaurants sans devoir manger, achat
d'alcool pour consommation dans les aires communes des hôtels, possibilité de
vendre de l'alcool à des heures plus
tardives la nuit lors de certaines festivités. Ces mesures ont toutes le même
objectif, soit de faciliter la vie des gens
et des détenteurs de permis. Prises individuellement, elles peuvent paraître
plutôt anodines; ensemble, elles participent à une érosion progressive du système visant à encadrer une substance qui
est déjà passablement banalisée et très accessible. Selon nous, il y aurait lieu de mieux encadrer ces
nouvelles dispositions, au moins certaines d'entre elles. Par exemple,
au chapitre de l'allongement des heures de
vente, nous insistons sur la nécessité de maintenir la limite du 23 heures
pour la vente d'alcool dans les épiceries et les dépanneurs. Nous insistons
aussi pour qu'au-delà de 3 heures du matin, à la fermeture des bars, il ne
soit possible nulle part d'acheter de l'alcool. Il faudrait également préserver
la mission des restaurants. À la fermeture des cuisines, en soirée, les
restaurants ne devraient pas pouvoir se transformer en bars.
Finalement, en rafale, quelques
remarques. L'institut salue les pouvoirs supplémentaires que le
gouvernement entend accorder à la Régie des
alcools, des courses et des jeux, notamment le droit de donner des sanctions
pécuniaires à des détenteurs de permis
fautifs et d'approuver les publicités diffusées dans les médias sociaux. Des
moyens suffisants doivent soutenir ce
rôle de protection du public. Comme dans plusieurs cas qui ont trait à des
sanctions punitives, c'est la perception
du risque de se faire prendre qui est le moteur du changement. Avoir plus de
pouvoirs sans moyens pour les faire appliquer, cela réduit
significativement l'impact de la mesure proposée.
La semaine dernière, il a été beaucoup
question, à cette Assemblée, de propositions concernant la formation aux
services responsables des boissons
alcooliques. Former les gérants et le personnel affecté au service de l'alcool
a sa place parmi un ensemble de mesures de prévention des problèmes liés
à la consommation d'alcool.
Enfin, concernant les amendements
prévus au projet de loi, l'institut appuie sans réserve l'annonce faite par
le gouvernement d'interdire la vente par les
épiceries et les dépanneurs des mélanges de bière de plus de 7 % d'alcool
et de mieux contrôler les publicités sur l'alcool afin de protéger les mineurs
et de diminuer la consommation à risque.
En conclusion, l'alcool n'est pas une
substance ordinaire. Les Québécois boivent davantage. Tout en
reconnaissant les besoins des détenteurs de
permis, il importe de limiter les méfaits sur la santé et la sécurité publique,
et pour ce faire, certaines mesures ont plus d'impact que d'autres, en
particulier adopter en priorité une politique de fixation d'un prix minimum par verre d'alcool standard pour tous les
produits alcoolisés, et pas seulement la bière, et que ce prix soit
ajusté annuellement selon l'indice des prix
à la consommation; deuxièmement, maintenir la limite du 23 heures pour la
vente en épicerie et en dépanneur et pour la
livraison à domicile, et qu'entre 3 heures et 7 heures du matin il ne
soit pas possible d'acheter de l'alcool; finalement, réglementer
davantage la publicité et la promotion et accorder, pour ce faire, des pouvoirs
accrus à la RACJ.
En vous remerciant de cette invitation, nous
sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour la présentation. Nous
allons maintenant débuter la période d'échange avec la partie gouvernementale
et M. le ministre pour les prochaines 8 min 30 s.
M. Coiteux : Merci, Mme Damestoy, Mme April,
M. Morin. Honnêtement, je vous écoutais, puis je pense qu'on n'est pas si loin, vous et moi, là, par rapport à un certain nombre d'enjeux que vous soulevez, même très proches, dans le fond, peut-être
à l'exception de la multiplication des prix minimums, mais ça, peut-être
qu'on aura l'occasion d'en parler un peu, mais... Par exemple, la question du 23 heures, on a effectivement des demandes, peut-être pas insistantes, mais à tout le moins qui est répétée, de permettre aux points de vente
tels que les dépanneurs d'aller au-delà
de 23 heures.
M. Arruda est venu la semaine dernière, il m'a dit : M. le
ministre, minimalement, ne faites pas
ça, puis je l'ai rassuré. Alors, je vous rassure, ce n'est pas mon intention d'aller... en tout cas, en ce qui me concerne, ce n'est pas mon intention d'aller dans
cette direction-là.
Je
suis assez attentif à votre remarque concernant le 3 heures du matin également,
parce que ce qu'on souhaitait introduire, c'étaient
des choses absolument exceptionnelles, là. Ce n'était pas la norme de pouvoir
aller au-delà du 3 heures du matin, c'étaient des cas très exceptionnels de
circonstances particulières, où on voulait donner une marge de manoeuvre
discrétionnaire, mais c'est au cas par cas. Ce n'est vraiment pas généralisé,
ce qu'on veut faire dans ce domaine-là.
Alors, je pense qu'on n'est pas très loin. Je décode que vous aviez moins
d'inquiétudes sur le 7 heures du matin. Alors, vous n'insistez pas
trop sur cet aspect-là, c'est vers ça qu'on allait dans les heures d'ouverture.
Alors,
je pense qu'on se rejoint pas mal, peut-être à l'exception de la question des
prix minimums. Puis je ne dis pas que
ce n'est pas quelque chose qui ne devrait pas être regardé, mais c'est très
complexe. Puis ce n'est pas parce que c'est complexe qu'il ne faut pas le regarder, mais néanmoins... Je regarde un
peu la situation au Québec, vous dites : On boit plus qu'on buvait auparavant, on boit plus que
d'autres Canadiens, alors qu'avant on buvait moins que d'autres
Canadiens. Pour moi, c'est une donnée
nouvelle, là, je ne pensais pas que c'était ça, comme ça. Je sais que vous avez
le discours qu'un verre d'alcool
standard est un verre d'alcool standard, peu importe de quoi s'agit-il, mais
j'ai comme l'impression qu'une bonne partie de la hausse de consommation
d'alcool au Québec récemment est liée à la consommation de vin plutôt que
d'alcool à 40 %, qui titre à 40 % et plus, et qu'il y a encore cette
différence-là entre le reste du pays et le Québec.
Puis
là je reviens à la question du prix minimum dans un contexte québécois, là, pas
dans un contexte désincarné de notre
réalité. Si c'est le vin qui est la boisson qui est liée à l'augmentation de la
consommation au Québec, je ne sais pas s'il
y a un minimum du prix du vin en Ontario, mais le fait est que, pour la vaste
majorité de la population, il est encore vrai qu'ils peuvent se procurer des bouteilles de vin moins chères en Ontario
qu'au Québec. Ma compréhension de la raison pour laquelle c'est comme ça, c'est parce que la SAQ a là le segment de
marché le plus important, sur lequel ils sont allés chercher les marges les plus importantes. Et la raison
pour laquelle peut-être les spiritueux seraient moins dispendieux au Québec qu'en Ontario, c'est parce que la demande
est moins forte et, conséquemment, les marges que la SAQ va se prendre sur ce marché-là sont moins importantes. Mais je
ne crois pas qu'on ait un problème de surabondance de consommation ou de hausse démesurée de la consommation des
spiritueux et puis que la façon de procéder pour la SAQ serait
d'augmenter sa marge sur les spiritueux,
qu'elle a de la misère à vendre au même titre que le vin, où elle prend des
marges plus importantes qu'en Ontario.
Autrement dit, je
pense que le système actuel fait son travail en l'absence de prix minimums, au
moins en ce qui concerne la SAQ. J'ai
l'impression... je peux me tromper, je ne sais pas ce que vous en pensez, mais
j'ai l'impression que, dans notre
réalité québécoise, là, ce qu'on avait récemment, c'était un incitatif à aller
acheter en Ontario parce que ça coûtait moins cher et non pas autre
chose. Est-ce que je me trompe?
Le Président (M. Auger) :
M. Morin.
M. Morin (Réal) : Le prix minimum, en fait, c'est en ce qui regarde
l'utilisation du prix à des fins de contrôle de la consommation,
l'instrument qu'on privilégie surtout pour atteindre les objectifs
gouvernementaux que vous aviez communiqués vous-même le 13 mars, la
consommation des jeunes et la consommation excessive, les personnes qui, finalement, consomment de l'alcool pas pour la
dégustation, mais pour l'intoxication. Et ça, c'est une mesure, donc,
qui affecte un groupe de la population de consommateurs, mais c'est justement
ceux auprès de qui on veut intervenir en prévention.
M. Coiteux :
Oui. Vous voulez l'appliquer aux vins vendus par la SAQ, où la marge est déjà
plus élevée que dans la plupart des autres provinces.
• (17 h 30) •
M. Morin
(Réal) : Mais il y a très, très peu de vins qui sont concernés. De
fait, nous sommes en train de compléter ces
études-là, on va pouvoir vous donner des données très précises là-dessus. C'est
une très petite minorité des vins qui
sont concernés parce que, de fait, ils sont vendus au-delà du prix minimum, ils ne sont pas concernés par cette mesure. La mesure du prix minimum touche un nombre
limité de produits pour des volumes, dans certains cas, qui sont
significatifs pour certains consommateurs, ceux qu'on veut protéger.
M. Coiteux :
Mais vous voulez l'appliquer partout. Vous voulez l'appliquer à tout type de
produit.
M. Morin (Réal) : Bien, oui, il s'applique partout, mais en réalité
l'appliquer partout ne signifie pas que tous les produits sont
concernés. En fait, moins de 10 % des produits, quelques pour cent...
M. Coiteux :
Oui, mais justement, alors là, nous, là, comme gouvernement, si on empruntait
cette voie-là... Moi, j'ai quelques réticences pour toutes sortes de
raisons. Puis ce n'est pas parce que je ne me préoccupe pas de la santé publique, là, c'est pour des raisons totalement
différentes que celle-là. Si c'était seulement pour des questions de
santé publique... C'est que je ne suis juste
pas convaincu qu'on va atteindre le résultat en appliquant des prix minimums à
100 % des produits, alors que vous me
dites que c'est 10 % qui est concerné. Il y a tellement de redondances à
cause de notre système de commercialisation, notamment à cause de
l'existence de la SAQ, qu'on va mettre un appareil absolument monstrueux de contrôle... Dans le fond, on aurait
dû se concentrer sur le 10 % problématique. Les jeunes dont vous
parlez, ce n'est pas tant à la SAQ, là,
qu'ils vont aller acheter le produit, c'est dans les dépanneurs. Et justement
on veut retirer les produits
problématiques des dépanneurs parce que c'est là que l'accès est le plus
facile, c'est là qu'il y a des points de vente partout, c'est là que les prix sont plus accessibles aussi.
Pourquoi ne pas se concentrer sur les produits problématiques plutôt qu'essayer d'imposer des prix minimums à
tous les segments de marché partout en toutes circonstances,
indépendamment de la réalité de notre marché ici, au Québec?
M. Morin (Réal) : Bien, en
fait, c'est de trouver une mécanique qui fasse en sorte qu'on ne peut pas
acheter des produits d'alcool à trop bas prix. La mécanique du prix minimum,
effectivement, concerne une petite proportion des produits...
M. Coiteux :
Mais où vous les voyez, les bas prix, à part pour les produits, justement,
qu'on souhaite retirer du marché dans les dépanneurs? Où vous les voyez,
les bas prix, dans nos réseaux de commercialisation?
M. Morin (Réal) : Bien, on a
nous-mêmes fait des études des produits dans le cadre des boissons sucrées
alcoolisées, mais on sait que le phénomène existe aussi pour d'autres produits
de type bière. Acheter une bière à 9 % d'alcool
qui revient, en consommations standard, à 0,75 $, on n'est pas capables
d'avoir ça avec une bière à 5 %. Autrement dit, le jeune, et des mineurs mais aussi les jeunes adultes... parce
que, dans notre étude, ceux qu'on retrouvait à l'urgence, c'étaient
prioritairement... c'étaient surtout des 18-25 ans. Donc, l'intoxication à
faible prix, on va au dépanneur puis on dit : Qu'est-ce qui va me procurer
l'effet désiré pour pas cher? D'où la mécanique...
M. Coiteux :
Mais il existe déjà un prix minimum pour la bière. On me disait même qu'il est
modulé en fonction du taux d'alcool.
M. Morin
(Réal) : Oui, mais
insuffisamment, malheureusement insuffisamment, de telle sorte que les bières
fortes reviennent à très peu cher. C'est ce
qu'on a fait comme démonstration. Alors, si on applique une mécanique
proportionnelle au taux d'alcool, bien, on
évite l'espèce de regard du jeune ou de la personne qui consomme beaucoup, qui
se dit : Qu'est-ce que je pourrais prendre qui m'en donnera le plus
pour mon argent? C'est une technique applicable, qui est appliquée ailleurs, à
savoir est-ce qu'il faut réviser l'ensemble des prix de la Société des alcools,
de fait, une petite proportion des produits.
À ce moment-là, vous pouvez voir comment opérer sans que ce soit déraisonnable
en termes d'opération administrative.
M.
Coiteux : Bien, les indications qu'on a, c'est qu'on est un des
endroits où l'alcool est le plus cher, presque au monde, dans plusieurs... peut-être pas pour tous les
segments, là, mais dans un grand nombre de segments, on est parmi les endroits où c'est le plus cher au monde. Vous
allez peut-être nous trouver un exemple, peut-être la Suède, je ne sais
pas où, mais, quand on se compare au reste,
on est un des endroits les plus chers. Alors, oui, on peut augmenter davantage,
là, peut-être, dans certains cas, mais j'ai
l'impression que nos réseaux de
commercialisation ont déjà intégré ça, là, pas mal. Je me trompe peut-être.
Le Président (M. Auger) : Merci,
M. le ministre. Merci. Nous devons continuer avec le porte-parole de l'opposition
officielle, le député de Verchères, pour cinq minutes.
M. Bergeron : Je ne vous cacherai pas, M. le Président... D'abord, merci infiniment, mesdames monsieur,
d'être des nôtres cet après-midi. Je ne vous cacherai pas que je trouve la discussion
qui vient de se dérouler extrêmement intéressante, parce
qu'effectivement il y a cette perspective selon laquelle, particulièrement pour
des régions limitrophes comme l'Outaouais, ça coûte moins cher traverser
à la LCBO l'autre bord puis revenir en douce avec une couple de bouteilles de
vin plutôt que d'aller à la SAQ. Donc, il faut prendre ça en considération.
Mais moi, je
ne suis pas réfractaire d'emblée à l'idée d'appliquer des prix minimums,
d'autant que vous nous avez parlé de
l'augmentation de 9 % des produits alcooliques au cours des dernières
années, comparativement à une augmentation du reste du panier de consommation de 27 %. Donc, toutes
proportions gardées, l'alcool est meilleur marché aujourd'hui pour les Québécoises et Québécois qu'il l'était
auparavant comparativement à d'autres produits d'alimentation, si on
peut appeler l'alcool un produit d'alimentation.
Donc, moi, je
ne suis pas d'emblée opposé, mais je serais très intéressé à avoir cette liste
de produits auxquels vous faisiez
référence tout à l'heure. Et j'ose espérer
que vous allez réussir à finir de dresser cette liste avant que nous
ayons complété nos travaux parce que ça pourrait être extrêmement éclairant.
Donc, j'attends des indications de votre part à cet égard.
Deuxièmement,
la question des boissons sucrées alcoolisées, bon, il va y avoir, semble-t-il,
un amendement au projet de loi qui va limiter à 7 % d'alcool les
produits qui peuvent être vendus en vente libre dans les épiceries et les dépanneurs. Sauf qu'il y
en a qui disent : Oui, mais qu'est-ce qui empêcherait les producteurs
d'essayer de contourner ça en augmentant
la grosseur de la canette pour qu'il
y ait une proportion d'alcool plus importante
en bout de piste, toujours 7 %,
mais, en bout de piste, beaucoup plus d'alcool au volume que ce qu'il y a
présentement? Comment vous réagissez à cela?
Dernier élément, sur
les heures d'ouverture. Sur les heures d'ouverture, il a été évoqué durant les
travaux la possibilité que... parce que
l'argument qui avait été évoqué pour devancer à 7 heures, c'étaient les
fameux pêcheurs, là. Bon, les
pêcheurs, c'est plus à 4 heures ou à 5 heures du matin, là, s'ils
veulent pouvoir faire le plein avant de se retrouver sur le lac. À 7 heures, ils sont déjà sur le lac.
Alors, il y a eu une hypothèse qui a été évoquée de rendre
cette période de temps, mettons de 16 heures par jour, modulable. On
pourrait commencer un peu plus tôt le matin, finir plus tôt le soir ou
commencer un peu plus tard en journée puis finir un peu plus tard le soir.
J'aimerais savoir comment vous réagissez à cette proposition.
Mme Damestoy (Nicole) :
Pour les deux premières questions, je vais passer la parole à la
Dre April, qui a beaucoup travaillé sur la notion du prix minimum, qui est,
en ce moment, en train de terminer des travaux, même, sur l'effet qu'un
prix minimum pourrait avoir d'un point de vue de santé publique s'il était
appliqué au Québec.
Mme April (Nicole) : À votre réponse, est-ce que vous pouvez pouvoir
avoir la liste des produits?, ce qu'on peut donner dans le cadre de nos analyses, c'est le nombre de produits visés
et donner des exemples tels un produit à tant de pour cent d'alcool, tel volume se vend tant, mais on ne
peut pas vous donner de noms parce
qu'on ne les a pas. Dans la banque de donnée
qu'on avait, c'était complètement dénominalisé, c'est comme ça qu'on a pu avoir
accès à cette information-là.
Le Président
(M. Auger) : Vous allez le faire parvenir au secrétariat? Merci.
Mme April (Nicole) : Ensuite, votre autre question, c'était : Si
on augmente... Mettons qu'on a une concentration à 7 %
d'alcool et qu'on augmente le volume du contenant, bien, à ce moment-là, quand
on parle de consommation standard, on
parle de 13,5 grammes d'alcool ou 17 millilitres d'alcool
pur. Alors, à partir du moment où on augmente la quantité d'alcool pur, si on se retrouve avec cinq
consommations standard, pour dire quelque
chose, cinq fois 17 millilitres,
bien, le prix, ça va être cinq fois le prix
minimum pour une consommation standard, ça fait que 1,71 $, ça va faire
8 $ et quelque chose. Alors, le principe s'applique à partir de la
quantité. Puis, si vous avez une bouteille de spiritueux...
M. Bergeron :
Mais ça, c'est en présumant qu'il y aura un prix minimum, là.
Mme April (Nicole) : Dans le contexte d'un prix minimum. Mais ce
n'était pas ça, votre question? Excusez-moi.
M. Bergeron : Non, parce
qu'admettons qu'on ne va pas dans... parce que, là, il semble y avoir des
réticences, de l'autre coté, là. Mais
admettons qu'on ne va pas dans la direction du prix minimum, il y a un danger
de voir, effectivement, les
producteurs s'adapter à cette limitation à 7 % en augmentant le volume
puis en ayant des effets tout aussi dommageables sur la santé.
M. Morin (Réal) : Et c'est la raison pour laquelle on a suggéré,
dans notre avis — on n'y a
pas fait référence — sur
les boissons sucrées, de voir la
faisabilité — on pense
que ça l'est — de
réduire les formats, de forcer une réduction des formats pour éviter que, dans une canette à usage unique non refermable,
on puisse s'intoxiquer avec une seule canette.
Le Président
(M. Auger) : Merci. Nous devons malheureusement poursuivre, ou
heureusement, avec le député de Beauce-Nord pour 3 m 30 s.
M. Spénard :
Merci, M. le Président. Ça va très rapidement. Alors, bienvenue,
Mme Damestoy, Mme April et
M. Morin. J'ai bien aimé votre mémoire. Je vais essayer d'y aller
rapidement. La plus forte augmentation que vous avez en ce qui concerne
l'intoxication aux choses, la plus forte augmentation que vous avez, c'est
entre les 18 et 24 ans.
M. Morin
(Réal) : C'est ceux qu'on a vus le plus fréquemment, dans les
urgences, intoxiqués à l'alcool.
• (17 h 40) •
M. Spénard :
Les taux d'intoxication aiguë, là... Mais, l'augmentation d'alcool, vous dites
qu'on était à moins 10 % par rapport aux autres provinces avant
l'an 2000, et depuis l'an 2000, bien, on est rendus à 10 % de plus de
consommation d'alcool. C'est dans quel groupe d'âge?
M. Morin
(Réal) : Veux-tu y aller, Nicole?
Mme April (Nicole) : Oui. Ça, quand on parle de ces quantités-là,
c'est des volumes d'alcool, c'est le total d'alcool vendu qu'on calcule par moyenne de personnes âgées
de 15 ans et plus dans la population. C'est la consommation moyenne
dans la population qui a augmenté.
M. Spénard :
O.K., mais vous n'avez pas de groupe d'âge spécifique à ça, là?
Mme April
(Nicole) : On a d'autres
données, par contre, qui sont celles de la consommation excessive
d'alcool qu'on définit dans les enquêtes...
M. Spénard :
O.K., que j'ai ici.
Mme April
(Nicole) : ...ça, vous
l'avez vu, qu'on définit par les enquêtes, comme cinq et plus par occasion
au moins une fois par mois chez les hommes
et quatre et plus par occasion au moins une fois par mois chez les femmes,
et qui sont augmentées encore plus chez les
femmes, beaucoup chez les jeunes adultes et quand même dans toute la population.
M. Spénard :
O.K. Parce que je m'aperçois que les 12 à 17 ans, c'est assez stable
depuis 2014, là, de 2014 à 2017, alors que moi, dans mon esprit, je pensais
que ça avait augmenté beaucoup.
L'autre
chose, vous parliez de canettes, M. Morin, et puis un certain fabricant
d'une boisson alcoolisée, là, jus et boisson,
là, sucre et boisson, là, parlait d'une canette refermable. Autrement dit, dans
son idée, c'était : si on avait une canette refermable, là, comme une bouteille vissée, la personne en
question ne se sentirait pas obligée de tout caler la canette, là, elle pourrait y aller plus mollo,
plus progressivement. Qu'est-ce que vous en pensez, de cette idée-là,
vous?
M. Morin
(Réal) : Ce serait un
facteur intéressant dans la mesure où la mise en marché ne se fait pas comme
ce qu'on a connu, avec du deux pour
7 $, avec un attrait créé au produit qui laisse entendre que, même si
c'est refermable, tu t'en vas veiller
avec ça, tu en achètes deux, puis c'est pour toi, puis tu vas t'intoxiquer avec
10 consommations standard dans
la soirée. C'est une idée, mais on préfère de loin l'idée que des canettes, qui
sont généralement interprétées d'usage unique...
on n'a pas d'exemple de canettes refermables, actuellement, au moins, qu'on
réduise le volume pour être moins trompeur
quant à l'effet que ces canettes-là peuvent produire chez le consommateur. On
aime mieux quelqu'un qui achète un
pack de quatre petites canettes — ça existe — que d'avoir des grosses canettes vendues
parce que le consommateur est mieux guidé dans son choix de consommation
responsable.
M. Spénard : O.K.
Ça va, M. le Président. Merci.
Le
Président (M. Auger) :
Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions. Donc, merci à
Mmes Damestoy, April et M. Morin pour votre participation aux
travaux de la Commission des institutions.
Et la commission suspend ses travaux jusqu'à
19 h 30.
(Suspension de la séance à 17 h 43)
(Reprise à 19 h 30)
Le Président (M. Auger) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons
les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 170, Loi
modernisant le régime juridique applicable
aux permis d'alcool et modifiant diverses dispositions législatives en matière
de boissons alcooliques.
Nous entendrons
ce soir l'organisme suivant, soit Restaurants Canada,
donc je leur souhaite la bienvenue. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre présentation, par la
suite suivra une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, vouloir vous identifier, et par la suite vous
pourrez commencer votre présentation.
Restaurants Canada
M. Lefebvre
(David B.) : Alors, bonjour,
M. le Président, MM. et Mmes les membres de la commission.
Nous sommes ici ce soir pour discuter du projet de loi n° 170 visant à moderniser les lois sur l'alcool et à
faire entrer le Québec dans la
modernité en ce qui a trait à la vente et au service des boissons alcooliques. Merci beaucoup, M. le ministre, de nous
recevoir ce soir en commission
parlementaire. Je voudrais également
saluer le travail du député André Drolet, qui a toujours été un champion
pour les PME et qui a mené ce dossier de main de maître depuis plusieurs
années.
M. Jean
Bédard, président du Groupe Sportscene, et Mme Caroline Pedneault,
directrice des services juridiques de la
même organisation, se joignent à moi, David Lefebvre, vice-président, Affaires fédérales et pour le Québec de Restaurants Canada, pour discuter de la question
et répondre, évidemment, à vos interrogations.
Restaurants Canada représente plus de
32 000 membres à travers le pays, dont près de 6 000 au Québec. Indépendants, chaînes, bars et traiteurs, nous
couvrons l'ensemble des services alimentaires et voyons justement
dans cette opportunité de vous
parler... notre vaste connaissance du secteur des services alimentaires en
général, des restaurants et des bars
en particulier. Nous avons travaillé également en compagnie de l'Association des restaurateurs
du Québec sur ce dossier
depuis plusieurs années et nous sommes bien contents de pouvoir vous présenter
notre point de vue unique.
Le projet de
loi n° 170, pour Restaurants Canada, était voulu, attendu. Suite aux
modifications réglementaires de juin
2017, nous attendions le plat de résistance qui a été présenté il y a quelques
semaines par le ministre. Nous avons déposé un mémoire en bonne et due
forme dont vous avez pu prendre connaissance.
En général,
nous sommes satisfaits du projet de loi tel que présenté. Bien qu'il ne soit
pas parfait, il est par contre logique
et il va permettre au Québec d'entrer dans la modernité en matière d'alcool.
Selon nous, ce n'est plus le temps de reculer, déjà que le projet de
loi... il y a un projet de loi qui avait été présenté en 2012 par le ministre
Dutil. Ça fait 15 à 20 ans, au Québec,
qu'on parle de modernisation de la loi, donc il est temps d'aller de l'avant.
Et il est temps également, dans une perspective canadienne
aussi, que le Québec continue d'être un leader en innovation pour son
secteur du tourisme et son secteur des petites et moyennes entreprises,
et c'est une belle occasion de le faire.
Selon nous,
le projet de loi tel que présenté ne devrait pas être approché de
manière partisane. Les débats actuels sont
sereins, et nous sommes fiers d'être ici avec vous aujourd'hui pour y participer. Sans plus attendre, je cède la parole à
M. Jean Bédard.
M. Bédard
(Jean) : Alors, merci,
David. Merci à vous tous de nous accueillir ce soir. Écoutez, moi, je n'ai
pas l'habitude des commissions parlementaires, et c'est quand même un
projet de loi qui me tient à coeur. Juste rapidement, vous dire que,
vous savez, La Cage aux Sports existe au Québec depuis 1983. On a plus de
3 000 employés, une cinquantaine
d'établissements étendus à la grandeur de la province. Il y a à peu près
7 millions de visites par année, des gens qui passent chez nous. Ça fait 25 ans, personnellement, et plus,
là, que je suis à la tête de cette organisation-là, et je dois juste vous dire que le comportement des gens, en général,
à l'égard de l'alcool a changé beaucoup au cours des années. Et, pour moi, je pense que c'est une occasion unique de
faire des changements, de moderniser cette loi qui existe depuis
plusieurs années.
Moi,
personnellement, j'ai été impliqué dans plusieurs dossiers. Je suis avec
Restaurants Canada, bien évidemment, et
on est un regroupement, les chaînes de restaurants du Québec. On travaille
beaucoup avec l'ARQ depuis longtemps sur plusieurs dossiers, et je ne me rappelle pas... Depuis que je suis dans
la restauration, on a toujours parlé de changer cette loi-là. Moi, ça
fait 25 ans qu'on en parle et je pense qu'où est-ce qu'on est rendus
aujourd'hui, l'effort qui a été fait par M.
Drolet... Je sais que c'est un dossier qui lui tient à coeur. On avait passé
proche... Je pense qu'on a eu un rendez-vous manqué à quelque part en... il y a de ça cinq ans. Je pense que
l'occasion... On apprécie beaucoup ce qui a été fait, d'ailleurs, dans les modifications au niveau de la loi l'année
dernière, qui a quand même facilité un petit peu notre travail, mais je pense qu'on est rendus à une étape importante où
on doit vraiment revoir cette loi-là. Puis je pense que le contenu, en
ce qui nous concerne, nous, nous satisfait,
mais je pense qu'il y a des choses qu'on aurait quand même partagées avec vous
ce soir. Donc, merci beaucoup de nous recevoir puis du temps.
Je ne sais pas si Caroline, qui travaille avec
moi depuis quelques années... Je dois vous dire qu'elle, elle sait vraiment
c'est quoi, la Loi sur les permis d'alcool, elle le vit à chaque jour. Nous,
vous savez, on a 45 permis, on paie quasiment 100 000 $
de permis par année pour avoir le droit d'exploiter. Et Caroline, je pense, va
être une addition intéressante ce soir parce
qu'elle, elle vit au jour le jour le travail puis elle est capable de voir, je
pense, avec des exemples concrets, les choses qu'on pourrait améliorer
au niveau de la loi. Donc, merci beaucoup.
Mme Pedneault
(Caroline) : Bien, juste pour me présenter, Caroline Pedneault,
directrice, Affaires juridiques. Merci
beaucoup de nous recevoir aujourd'hui. Je travaille avec M. Bédard depuis
maintenant cinq ans, puis je vous dirais que, dès les trois premiers mois, je me suis rapidement rendu compte que
cette loi-là méritait votre attention pour qu'on puisse y faire quelques améliorations, pas afin de moins bien protéger
notre public, au contraire. Moi, je pense que, rendus en 2018, on peut aussi bien le protéger, mais de
manière différente en faisant simplement améliorer certains processus,
certaines réglementations qui sont déjà en place.
Alors, je
pourrai vous faire part, au besoin, là, de différentes situations qui me sont
venues. On vit, nous, avec... Oui, on
a les permis d'alcool, mais j'ai aussi d'autres permis. Je travaille avec
l'Autorité des marchés financiers pour ce qui est les permis d'exploitation de guichets
automatiques, qui ont des procédures, qui font les mêmes vérifications, qui
sont dans l'allègement des procédures, donc je pourrai vous en faire
part. On travaille aussi avec le MAPAQ au niveau des permis pour
l'alimentation.
Donc, je pense que toutes ces modifications-là
sont un très beau premier pas vers une amélioration de notre secteur
d'activité. Merci.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, ceci complète la
présentation. Nous allons maintenant débuter la période d'échange, et,
M. le ministre, vous avez, ainsi que votre équipe, 16 minutes.
M. Coiteux :
On a un beau 16 minutes, c'est parfait, ça. Alors, merci,
MM. Lefebvre et Bédard, Mme Pedneault. Je vais laisser un petit peu d'espace à mon collègue tout à l'heure,
mais je vais commencer tout de suite. J'aimerais ça que vous me décriviez... peut-être Mme Pedneault,
parce que vous êtes très associée à la gestion de tous ces permis-là
pour votre groupe, j'aimerais ça que vous
m'indiquiez quels sont les irritants que vous rencontrez au quotidien et quels
sont les aspects du projet de loi qui
vont corriger des irritants, dans un premier temps. Puis ensuite est-ce que
vous trouvez qu'on corrige suffisamment d'irritants ou vous avez des
suggestions à nous faire pour aller plus loin?
Le Président (M. Auger) :
Mme Pedneault.
Mme Pedneault (Caroline) :
Alors, bien, je dirais que, oui, votre projet de loi va corriger certains
irritants. Notamment, un des irritants dont
j'avais déjà fait part avec M. Lefebvre lors d'une rencontre ici, c'était
le fait de pouvoir consommer de
l'alcool dans la section restaurant vendre de nos établissements sans avoir à
commander un repas complet. Pour nous,
c'était une aberration parce que, dans le même établissement, je l'avais
raconté, là, moi, je me trouve assise dans une section qui est la section restaurant vendre, je ne pouvais pas
consommer sans commander de repas, puis à quelques mètres de là, sur ma terrasse-bar, je pouvais être
en présence de mineurs jusqu'à 20 heures, puis là on pouvait
consommer sans repas, puis c'était vraiment
à quelques mètres de moi. Donc, ça, c'est bien évidemment une des modifications
qui est la bienvenue.
Au niveau des modifications qui ne
sont pas présentes, au niveau de l'allègement des procédures, je vous
dirais que, dans la majorité de nos irritants — M. Bédard pourrait vous
en faire part — nous,
quand on ouvre un nouveau restaurant,
M. Bédard le dit souvent, notre plus gros stress, ce n'est pas les
investissements, ce n'est pas le financement, ce n'est pas la construction, c'est quand aurons-nous enfin notre permis
d'alcool pour pouvoir procéder à l'ouverture. Avant l'ouverture, on doit procéder à la formation, pour
procéder à la formation complète, je dois pouvoir commander mon alcool pour l'avoir en établissement. Donc, ça, ça
engendre un processus, on parle d'un processus d'environ trois mois.
Nous, on a plusieurs permis sous la même
entité juridique. J'ai huit administrateurs, maintenant, sur mon conseil
d'administration, à chaque fois je dois redéposer un formulaire de
renseignements pour chacun d'eux, chacun des dirigeants, la personne chargée
d'administrer le commerce, et puis on refait une enquête au niveau de la Sûreté
du Québec dans le district où je suis en train de faire une demande de permis.
Pour
prendre l'exemple de l'Autorité des marchés financiers en ce qui a trait au
permis de guichet automatique, je remplis
le formulaire une fois pour M. Bédard, il est valide pour une période de
trois ans. Donc, on réutilise, si on fait... Premièrement, on fait les demandes en ligne, ce qui est beaucoup plus
simple pour nous. On joint les formulaires en ligne, et ce formulaire en
ligne est bon pour une période de trois ans. Évidemment, il est de la
responsabilité du signataire de divulguer à
l'Autorité des marchés toute modification qu'il pourrait y avoir aux
déclarations qui y sont faites. Mais, moi, au niveau de l'allègement des
procédures, ça, ça serait un gros, gros plus vers lequel on pourrait aller.
• (19 h 40) •
Ensuite
de ça, il y a aussi tout ce qui est d'exigences qui sont là depuis très
longtemps. Je pense qu'il y a un paquet d'exigences en matière d'obtention de documents qu'on doit remettre, de
certificats de constitution, que ce soient les titres au niveau de la location, qui ont sa raison d'être
pour pouvoir s'assurer que le commerce est bien en place, qu'il est bien
affiché, tout ça. Il y a d'autres
procédures, je pense qu'on pourrait simplement se reposer la question :
Qu'est-ce qu'on protège par la
demande de ce document-là? Qu'est-ce qu'on vise comme protection? Quel est
l'objectif? Je pense qu'avec les années il y a certaines procédures ou demandes
que la régie nous fait, nous présente qui sont à revoir, disons. Puis il y en a
plein qui sont encore très, très bonnes puis, je pense, qui ont leur raison
d'être, mais je pense qu'il y en a
certaines... Je vais donner l'exemple que je
donne souvent, les photos de la vaisselle. Je pense qu'en 2018 il n'y a
personne qui n'ouvre pas un
restaurant sans vaisselle, puis je ne pense pas qu'en matière d'alcool c'est
important. On m'a déjà demandé une photo de mes inventaires parce
que la nouvelle personne... Souvent,
on a des très, très bons intervenants au niveau de la Régie des
alcools, ce qui est un autre aspect que David a mentionné dans le mémoire
de Restaurants Canada. On travaille avec... Moi, j'ai 50 établissements, à peu près,
au travers le Québec, je n'ai pas toujours le même intervenant
ou rarement. Je n'ai pas les mêmes interventions si je fais affaire avec
la régie de Québec ou la régie de Montréal.
Donc,
une uniformité au niveau des traitements des demandes... C'est certain que
l'intervenant unique pourrait alléger
parce que, dans ce cas-là, c'était une nouvelle personne,
puis on m'a demandé une photo de l'inventaire. Mais je ne peux pas avoir d'inventaire d'alcool parce que
je n'ai pas de permis. Puis là on... Puis ça peut prendre... Une fois que
mon dossier est complété, je dois remettre
des photos, puis là, les dernières histoires d'horreur, ça peut prendre
10 jours, alors que j'ai déjà
vécu... j'ai remis les photos et puis, quand ton dossier est complet, que
toutes les enquêtes sont complétées, d'avoir mon permis en dedans de 24 heures. Ça fait que, pour nous, c'est vraiment
une distorsion puis c'est une incohérence. Donc, à l'occasion, ça nous engendre des problèmes. On doit prévoir
l'ouverture, on veut faire de la promotion, on veut que notre restaurant
fonctionne, on est toujours sur un qui-vive au niveau de la date.
Au niveau du MAPAQ, par exemple, ils ont une procédure. Ils émettent des permis en matière de salubrité — ce
qui est tout aussi important, je pense, dans
le domaine de la restauration — on
soumet le formulaire, on paie les droits, ils me donnent mon permis. Puis je vous dis, un délai de 30 jours, là,
c'est à peu près ce que ça prend pour avoir un permis au MAPAQ.
Par la suite, ils ne me laissent pas comme ça, ils viennent faire les vérifications en établissement. Ils font les inspections, ils s'assurent que je respecte et que ce que j'ai divulgué
au sein de ma demande de permis est respecté. Puis ça fonctionne quand
même bien. Je ne pense pas qu'on a plus d'infractions parce que cette méthode
est en place. Donc, je pense qu'il y aurait...
M. Coiteux : ...Mme Pedneault, il y a
des choses qui ne sont pas du domaine de la loi, mais des pratiques, des
procédures administratives de la RACJ. Sachez qu'on prend des notes et qu'on va
avoir l'occasion de discuter de ces questions-là.
Moi,
j'aimerais vous amener, vous ou toute autre personne, là, dans les trois qui
êtes présentes ce soir... On a eu des représentants
des bars aussi qui sont venus nous voir puis ils ont une certaine inquiétude
par rapport à certaines libertés qu'on
souhaite vous donner, notamment cette question d'avoir la possibilité de
consommer un verre de vin, une bière sans nécessairement consommer un
repas. Eux, ils ont l'inquiétude que certains restaurants se transformeraient
en bars si on étendait cette liberté-là au-delà de certaines heures. Est-ce que
vous voyez un enjeu là? Est-ce que vous êtes prêts à concevoir qu'il pourrait y
avoir une limite en ce qui concerne l'heure qui serait associée à une telle
liberté?
Le Président
(M. Auger) : M. Lefebvre.
M. Lefebvre
(David B.) : En fait, effectivement, si je peux me permettre, cette
question-là, on est bien placés, à Restaurants
Canada, aussi pour discuter de ça, étant donné qu'on a dans notre association à
la fois des bars, des restaurants, aussi
des traiteurs, et tout ça. Mais on traite vraiment avec les deux, et ce qu'on
remarque dans notre secteur d'activité, dans notre industrie, c'est que les lignes sont de plus en plus floues entre
les bars et les restaurants, dans le sens où il y a de plus en plus, surtout du côté bars et brasseries, une
offre de nourriture complète ou semi-complète pour garder des clients.
Donc, d'un autre côté, ça nous apparaît tout
à fait logique que le projet de loi n° 170 tel qu'il est présenté permette
aux restaurants le service d'alcool sans nécessairement une consommation
de repas complet.
L'autre chose que votre projet de loi
vient complètement simplifier, c'est la question de dire : Oui, mais
qu'est-ce qui est un repas? Est-ce que
prendre une entrée, c'est un repas? Est-ce qu'avoir une frite sur une facture...
On vient régler cette situation-là qui a posé beaucoup de problèmes dans
le passé au Québec. Puis simplement, quand on parle de modernisation des lois, c'est un très bon exemple. Maintenant, le Québec
va ressembler davantage à ce qui se fait à travers le monde, où il y a
la possibilité de, justement, prendre un verre.
M. Coiteux :
Mais la question que je vous posais : Est-ce qu'il y a des heures
critiques, là? Est-ce qu'il y a une heure
à partir de laquelle véritablement un restaurant... puis là je me mets dans la
peau de ceux qui sont venus nous raconter l'autre histoire, l'autre versant de l'histoire, ils ont dit : Oui,
mais à partir d'une certaine heure, est-ce qu'un restaurant ne va pas se
transformer en bar si, effectivement, tout le monde peut aller consommer de
l'alcool sans prendre un repas? Autrement
dit, est-ce qu'il y a des heures critiques, dans le fond, qui feraient en sorte
que ça fonctionnerait très bien à la fois pour les restaurants et pour
les bars, qu'il y aurait une espèce de modus vivendi qui rendrait tout le monde
à l'aise?
M. Lefebvre
(David B.) : Bien, pour l'instant, au Québec, au niveau de la loi, il
y a ce qui existe au niveau des heures
de permission de vente d'alcool, donc, que ce soit pour différents permis ou
quoi que ce soit. Dans la mesure où on pourrait
se demander aussi est-ce qu'il y a vraiment une heure pour consommer de
l'alcool, il y a des établissements qui sont ouverts le matin, le midi, l'après-midi, etc. Donc, ça, nous, on n'a pas
de recommandation spécifique sur le
nombre d'heures et sur le type
d'heures. Dans le fond, nous, ce qu'on mentionne, c'est : dans la mesure où la pratique est correcte et où le restaurant respecte les conditions de son permis, à ce moment-là il y aurait possibilité pour des gens de rester, par exemple, des fois même plus tard après
un repas dans certains restaurants comme tels, et...
M. Coiteux :
Mais je pose la question : Jusqu'à 3 heures du matin?
M. Lefebvre (David B.)
: Oui, bien, ça, il y a déjà des choses qui sont mentionnées dans le projet de loi, entre autres au niveau des terrasses, qui sont mises de
20 heures jusqu'à 23 heures.
M. Coiteux : Non, mais à l'intérieur, disons, un restaurant à
l'intérieur, pas de terrasse. En tout
cas, les restaurants que moi,
je connais, en général, passé une certaine heure, ils disent : Regardez,
là, la cuisine va fermer, là, puis c'est généralement bien avant 3 heures du matin. Alors, est-ce qu'il est nécessaire que cette liberté-là s'exerce jusqu'à 3 heures du matin quand la majeure partie des restaurants vont
fermer avant? C'est une question que je pose, je n'ai pas de réponse.
M. Lefebvre (David B.) :
Bien, c'est ça, la majorité des restaurants vont fermer avant, et aussi la
capacité de prendre un repas complet aussi,
là, rarement va s'étendre jusqu'aux petites heures tardives du matin. Donc, on se
demande, nous, là, si c'est quelque chose qui vaudrait la peine d'être précisé à
ce moment-là. Peut-être que...
M. Bédard (Jean) : Moi, en fait, je comprends la question puis je
comprends aussi le danger que vous voyez, là, que les restaurants deviennent un bar. En ce qui nous concerne, nous,
évidemment, ce qu'on remarque, au fil des ans puis de
plus en plus, les gens se couchent de plus
en plus tôt, hein? Moi, je me
rappelle l'époque des Cages, voilà 25 ans, où ça devenait... effectivement, les gens
restaient plus tard, puis il y avait même un «last call». Tout ça, nous autres, on
ne vit plus ça. Où est-ce que
je me demande... Je me dis : Mais un jour, peut-être, les Canadiens sont
dans les séries, ils jouent dans l'Ouest, bon, un jour, on ne sait pas,
là, tu sais, je me pose la question, et là je me vois mal arriver à minuit...
M. Coiteux :
On souhaite tous que ce jour revienne.
M. Bédard
(Jean) : Pardon?
M. Coiteux :
On souhaite tous que ce jour revienne.
M. Bédard
(Jean) : Bien, moi aussi, j'aimerais bien ça. Cette année, on n'a pas
été gâtés. Mais je me dis : Qu'est-ce
qu'on fait à minuit, supposons? Je
n'ai pas à vous évoquer qu'à partir de 11 heures ça ne fonctionne plus
ou on ne peut plus servir seulement
de l'alcool. Nous autres, c'est des exceptions. Je pense que le cas que vous
parlez, c'est des exceptions également,
parce que, pour ce que je sache de ceux qu'on représente
puis les restaurants que je connais, bars, je n'en connais pas beaucoup qui tournent en bars, là. Ça fait
que, donc, j'ai un petit peu de misère avec trop de contraintes, puis
surtout pour des exceptions comme celle que je viens de vous mentionner.
M. Coiteux : Oui, je pense que mon collègue député de
Jean-Lesage aurait envie de continuer les échanges. Ce
n'est pas parce que je manque de questions, mais je sais qu'il en a beaucoup
aussi.
M. Drolet :
Ah! bien, peut-être pas autant que vous, M. le ministre.
Le Président (M. Auger) :
M. le député de Jean-Lesage, cinq minutes.
M. Drolet :
On est complémentaires là-dedans, on fait en sorte de...
Le Président (M. Auger) : Cinq
minutes, monsieur.
M. Drolet : Bonsoir, messieurs dame. Merci, encore une fois, de vous retrouver, en fait, parce
que j'ai eu ce plaisir-là d'être avec vous lors des consultations au départ, avant d'en arriver à être assis ici. Et, vous savez... Puis
en plus, comme on l'a dit puis que je
le répète... Parce qu'en même temps,
M. le Président, je pense que c'est les derniers. Est-ce que vous me
corrigez? Vous me...
Le Président (M. Auger) : Oui, absolument.
M. Drolet : Vous êtes les
derniers que l'on rencontre, alors, c'est non les moindres, effectivement,
surtout Restaurants Canada, c'est loin d'être les moindres, et d'autant plus que nous avons rencontré plus de
30 groupes lors de la consultation.
Pour être en mesure de se faire une tête sur l'ensemble de l'oeuvre... Et puis vous avez pu entendre, parce
que vous avez sûrement écouté... Mme la
juriste a certainement écouté les interventions
que l'on a eues, autant de la Santé publique, autant de la Sécurité publique, autant de... Vous comprenez qu'on avait
un rôle à jouer puis on a à en arriver à quelque chose qui fait en sorte qu'on
puisse se donner une bonne tête. Puis le ministre a été très ouvert à
tout, puis je pense qu'il m'a écouté aussi beaucoup pour qu'on en soit
rendus là.
Mais moi,
j'aimerais quand même vous entendre aussi sur ce qu'on a déjà fait à
date aussi, parce que vous l'avez dit tantôt, puis c'est quand
même rare qu'on se fait parler de cela, mais au moins de ce qui a été fait à
date. On parle des sanctions pénales qu'on a
pu diminuer — puis,
vous, je pense que vous en avez été témoins parce qu'on a pu le faire par projet
de règlement, aider cet aspect-là — le permis unique, qu'on a aussi donné un
appétit, en fait, au projet de loi actuel, parce qu'on a dit : Mais, mon Dieu, il faudrait, quelque part...
puis j'ai vendu au ministre l'importance que ça pouvait avoir pour vous autres, cette situation-là, lorsque vous avez parlé tantôt de plans, puis de ci, puis
de ça. Mais là, maintenant, c'est un
permis unique qui fait en sorte... Puis, moi, mon rôle d'adjoint parlementaire, loin de M. Coiteux parce que
je suis avec M. Billette... Alors,
vous comprenez que, de mon côté à moi, j'ai comme un genre de satisfaction d'allègement réglementaire. Je
pense que vous le sentez. Est-ce que vous pouvez un petit peu intervenir là-dessus
pour me donner un peu, madame...
Le Président (M. Auger) :
Mme Pedneault.
• (19 h 50) •
Mme Pedneault
(Caroline) : Oh oui, oui,
définitivement, oui, on le sent. Au niveau du permis unique, je peux vous dire que, dans certains établissements, nous, on est passés de six permis à deux permis. On a gardé nos
capacités, qui sont les mêmes, on les a
simplement additionnées. M. Bédard... je ne sais pas si tu l'as mentionné tout à l'heure, mais on a pour près de 100 000 $ en frais de permis cette année.
Je pense qu'on a pratiquement fait le tour des renouvellements, parce que les permis se renouvellent avec leur date
d'anniversaire. On n'a pas sorti les
chiffres avant de venir ici, mais on peut penser qu'on était facilement autour
de 150 000 $ en frais de permis annuels. Alors, c'est certain que c'est
grandement apprécié. Il reste à voir
maintenant, au niveau des plans puis tout ça, que le procédural suive par la
suite, mais ça va venir, ça, je ne suis pas inquiète.
Ensuite de
ça, comme je vous le disais tout à l'heure, au niveau de la permission de
pouvoir consommer de l'alcool sans repas complet, pour nous, c'était un
très, très grand irritant, surtout... bien, peut-être moins cette année, avec
la performance du Canadien, mais, quand on
avait des événements sportifs, les gens, souvent, désiraient pouvoir
consommer puis être dans des meilleurs
sièges que ceux qu'on retrouve dans notre section bar. Pour ce qui est de vos
exceptions tout à l'heure, c'est ça, nous, on a une section bar, donc ça
comble le...
M. Drolet :
J'aimerais vous amener sur la formation. Ça a été une discussion qui a fait la
manchette, il y a plusieurs groupes,
et puis, bon, ça va du tout au tout. Et puis, de tout le personnel... Bon,
moi... nous, on a pensé que... je pense que les propriétaires, les
titulaires et puis, en même temps, les gérants responsables — parce
que je pense qu'il y en a tout le temps sur
le plancher — pouvaient
être des personnes importantes pour ce statut-là, et d'autant plus qu'on sait
aussi qu'il y a des meetings, en
fait, qui se font au sein des organisations telles que La Cage aux Sports, je
suis certain qu'il y a déjà là des sensibilisations de consommation
responsable et puis de... Mais j'aimerais vous entendre là-dessus, parce qu'on
entend qu'il faudrait que tout le monde soit aussi formé. Alors, j'aimerais
vous entendre là-dessus, M. Bédard.
Le Président (M. Auger) :
M. Bédard.
M. Bédard (Jean) : En fait,
nous... Évidemment, il faut comprendre un peu la nature de l'industrie, là.
Nous, on a 3 000 employés, mais notre taux de roulement est
pratiquement... à chaque année, je change la majorité de mes employés. Ça, on a un taux de roulement
extrêmement élevé parce qu'on a des jeunes, nous. Souvent, on embauche
des jeunes, c'est leur premier emploi. Au
Québec, il y a un Québécois sur cinq, sa première job, ça va être dans la
restauration, il ne faut jamais oublier ça. Et c'est difficile pour nous de
garder un niveau de formation égale.
Nous, ce qu'on fait chez nous, c'est qu'on a un
portail employés. Les gens qui rentrent chez nous doivent absolument aller sur la formation sur le portail.
Puis on a une formation sur l'alcool, sur l'alcool responsable. Moi, je
suis pour la formation de mes opérateurs. Les
opérateurs, quand je dis... mes gérants sur place, qu'ils aient une
formation. S'il y a des nouveautés... Là, on
va avoir aussi le cannabis, là, qui s'en vient, où on va avoir à gérer ça
également. Puis, pour moi, c'est
important que ça soit bien géré. Donc, une formation pour des dirigeants, je
suis pour ça. Moi, je vous dis, autant au
niveau du MAPAQ, moi, quand on me parle de programmes, nous, on a toujours
participé à ces éléments-là, mais je pense
que c'est utopique de penser qu'on pourrait, dans notre industrie... Il y a
250 000 personnes qui travaillent dans notre industrie, il y a plus que 25 %, c'est des jeunes de moins de
25 ans qui ne feront pas carrière là-dedans, il y aurait un coût extrêmement élevé,
un coût de suivi extrêmement élevé. Moi, je pense que c'est impossible. Par
contre, d'avoir une bonne formation
au niveau des établissements comme tels, des responsables, au même titre qu'on
a en matière d'insalubrité, puis tout ça, moi, je suis absolument
d'accord.
Le Président (M. Auger) :
Merci. Nous devons maintenant poursuivre avec le porte-parole de l'opposition
officielle et député de Verchères pour les neuf prochaines secondes et 30...
neuf prochaines minutes et 30 secondes...
Des voix : ...
M. Spénard :
C'est tout, fini, merci.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup, nous... Non, 9 min 30 s.
M. Bergeron : O.K. J'ai
dit : Le président veut me museler quelque chose de rare.
J'aimerais
peut-être faire du pouce sur le sujet qui a été abordé par le ministre tout à
l'heure. Il y a effectivement de la
résistance du côté des bars, tout comme vous avez probablement des réserves à
ce qu'on essayait de faire comprendre à nos amis de l'industrie des
bars, c'est que, pour le consommateur, il n'y a plus vraiment de différence
entre un bar puis un restaurant. Et je crois
comprendre qu'il existe actuellement une obligation d'une portion x du chiffre
d'affaires qui soit composée de repas. Est-ce que ça tient toujours ou c'est
quelque chose qu'on a envisagé éventuellement pour le projet de loi?
M. Lefebvre
(David B.) : Bien, moi, en ce moment, ma compréhension actuellement,
c'est : dans un restaurant, donc
même un restaurant licencié, on doit avoir consommation de nourriture pour
pouvoir consommer de l'alcool. Donc, il
n'y a pas de possibilité... Par exemple, vous et moi, on va dîner un midi, bon,
moi, j'ai déjà mangé pour toutes sortes de raisons, et puis je vous
accompagne, puis moi, je prendrais seulement une bière, par exemple, pour
l'instant, ma compréhension dans la loi actuelle, ce n'est pas possible.
Heureusement, le projet de loi n° 170 veut modifier ça.
M. Bergeron :
Non, ça, je comprends ça, mais ma question, c'est... Pour répondre à la
préoccupation des bars, il avait été
évoqué la possibilité qu'on puisse dire : Bien, pour faire la distinction
entre un restaurant et un bar, il faudrait qu'il y ait une proportion x
du chiffre d'affaires du restaurant qui soit composée de nourriture pour
assurer que ça demeure toujours un restaurant. L'autre élément, évidemment,
c'est de s'assurer qu'à un moment
donné on ne ferme pas la
cuisine puis qu'on continue à servir de la boisson, là.
M. Lefebvre (David B.)
:
Mais ça, c'est ça, c'est la question qui est posée, et nous, comme association, ce que les gens nous disent
sur le terrain, c'est ce qu'on a toujours voulu éviter, c'est que ça soit aussi facture par
facture ou quart de travail par quart
de travail, c'est-à-dire de voir que, sur la facture, il faudrait qu'il y
ait tel montant de nourriture par rapport au montant de l'alcool, quelque
chose comme ça. Ce qui est intéressant du projet de loi n° 170, c'est
que ça vient solutionner tous ces problèmes-là d'un seul coup. Donc, ça, c'est évidemment
un avantage qu'on y voit.
Maintenant,
il faudrait voir aussi si... du côté bars ou d'autres types de commerces, à ce
moment-là, est-ce qu'eux seraient
tenus de ne pas avoir plus de tant de pour cent de leur chiffre d'affaires issu
de la nourriture, et tout ça, alors que, dans l'industrie, une des plus grosses augmentations des chiffres
d'affaires actuellement, ce sont des bars et des brasseries qui vendent
des repas.
Donc, il faut voir aussi, à ce moment-là, là,
qu'il ne faut pas nécessairement... Nous, on n'a pas du tout la perspective de déshabiller Jean pour habiller
Jacques, et puis on voit que, je veux dire, il y a déjà de la coexistence
qui se fait sur le terrain. On voit ce qui
se fait à travers le monde aussi, dans plusieurs États américains, dans
certaines autres provinces canadiennes, et nous, on ne voit pas
nécessairement de grosses préoccupations là-dessus. C'est certain qu'il faut
s'en occuper, mais on ne pense pas que, du
jour au lendemain, les restaurants vont devenir des bars puis il va y avoir des
problématiques aiguës par rapport à ça. C'est quelque chose sur lequel on est
prêts à travailler, mais on ne voit pas de...
M. Bergeron :
Mais, si on ne fait pas cette distinction-là, à la fois pour les bars et pour
les restaurants, puis si les consommateurs
ne font pas non plus la distinction... Entre vous, puis moi, puis la boîte à
pain, elle est où, la distinction entre un permis de bar puis un permis
de restaurant?
Le Président (M. Auger) :
Mme Pedneault.
Mme Pedneault
(Caroline) : Oui, si je peux me permettre, bien, dans un permis bar,
les mineurs ne sont pas admis à
l'intérieur. Donc, pour répondre à la question, ça, c'est la première
distinction. Un enfant âgé de moins de 18 ans n'a pas accès à la
section bar.
M. Bergeron :
Je pense que c'est ce qui embête les bars, parce qu'ils se disent : Ils
font exactement la même chose que nous autres, mais eux autres ont le
droit d'avoir des mineurs chez eux.
Mme Pedneault
(Caroline) : Mais actuellement, je pense que la... Je ne sais pas
quand la modification de la loi est
arrivée à ce sujet-là, mais, moi, dans mon même établissement cohabitent un
permis bar et un permis restaurant vendre. Donc, à l'intérieur du même établissement, j'ai une
section où les mineurs ne sont pas admis puis j'ai vraiment, littéralement, là, ce n'est pas... c'est une
image, là, j'ai une délimitation physique, puis mon enfant qui est assis avec
moi voit la consommation. Puis, de ce côté-là, l'adulte a le droit de consommer
sans manger, mais moi, du côté de cette délimitation-là,
je suis obligée de manger un repas complet pour prendre un verre de vin avec
mon fils, qui avait peut-être plus
faim que moi, puis moi, je n'ai pas faim à ce midi-là. Puis on parle de repas
complet, en plus, dans la loi. Alors, moi qui mange seulement, mettons, une salade grecque en entrée, ce n'est pas un
repas complet. Huit ailes de poulet, c'est-u un repas complet? Le débat,
on l'a déjà eu, nous. Est-ce que huit ailes de poulet, c'est un repas complet?
Ça fait que je pense
que le projet de loi, la bonne chose qu'il y a là-dedans, c'est...
M. Bédard (Jean) : Bien, en fait, moi, j'ai peut-être une... Je vais
poser la question à l'inverse : À ce moment-là, si, justement, la loi est changée, qu'est-ce qui
empêcherait un bar de repositionner son concept et être capable de
profiter de cette loi-là? Parce que,
justement, peut-être que, je ne sais pas, moi... si c'est un bar de danseuses,
c'est évident qu'il va falloir qu'il
change son concept parce qu'il n'amènera pas des jeunes là-dedans, mais ça
n'empêcherait pas quelqu'un, si, justement,
la loi change puis on est un petit peu plus flexibles... Parce qu'à la fin de
la journée, là, souvent, ce qu'on oublie dans ces histoires-là, c'est
l'expérience du client. Tu sais, on est là, puis on met des lois, puis on
essaie d'empêcher quelqu'un parce que lui,
il ne veut pas, puis tout ça. C'est ça un peu, souvent, le problème des lois,
c'est qu'on essaie de gérer
l'exception. Dans ce cas-là, bien, en ouvrant cette loi-là de façon logique,
pour que tu crées ton expérience, tu dis : Moi, chez nous... Puis nous autres, on pourrait peut-être décider que,
des jeunes, on n'en veut pas tant que ça parce que, par notre concept, on pense que ça serait plus
intéressant, ça gêne les gens de voir des jeunes. Moi, je pense que ces
bars-là, là... Puis, tu sais, puis moi, je
ne suis pas contre les bars, là, je ne suis pas contre personne, moi, là. Je
suis contre, tu sais, la libre compétition puis l'expérience client.
Nous,
en ce moment, on a un problème, exemple, on a des groupes, puis il y en a...
ils sont 10, il y en a deux qui viennent les rejoindre, là ils ne
peuvent pas juste... ils sont obligés de commander à manger parce qu'ils sont
dans la section restaurant, ou tout le monde
il faut qu'ils déménagent dans la section bar. Comme expérience client, ce
n'est pas l'idéal. Mais, si la loi le
permet, bien, ce bar-là qui pense que, finalement, c'est un désavantage pour
lui pourrait prendre la décision de
dire : Bien, on va changer un peu mon concept, puis les jeunes seront...
j'irai me chercher un permis restaurant vendre comme tout le monde, puis
je jouerai sur le même niveau que ce genre de concept là.
Je
pense que c'est plus une question de concept que de loi, là. Je pense que le
débat n'est pas nécessairement à la bonne place, quant à moi.
• (20 heures) •
M. Bergeron :
O.K. Je vais maintenant vous amener sur une des préoccupations qu'un certain
nombre de témoins nous amènent ou
nous enjoignent d'avoir, comme parlementaires, en termes de sécurité publique,
de sécurité... de la santé publique
parce qu'il y en a qui nous tiennent ce discours-là : Est-ce que, par
rapport à la réponse que vous venez
de me donner, on ne vient pas de faire en sorte de rendre l'alcool
beaucoup plus accessible, visible, dédramatisé, normalisé, banalisé pour les
enfants?
M. Lefebvre
(David B.) Bien, en fait,
nous, dans notre perspective, on ne pense pas vraiment parce que tous les autres garde-fous et tout ce qui régit l'alcool, que ce soit la Régie des alcools, des courses et des jeux, que ce soient les éléments du Code criminel, ou quoi que ce soit, demeurent. Donc, c'est un
secteur qui est encore, même avec le projet de loi n° 170, à
l'échelle mondiale et même nord-américaine, très encadré par rapport à ce qui
peut se faire ailleurs.
Et
on parle, en ce moment... un établissement, par exemple, pour la discussion
qu'on a, qui pourrait vendre de l'alcool
sans repas, bien, c'est un établissement qui est déjà un établissement
licencié. C'est déjà un établissement qui a un permis d'alcool et qui a
les droits et responsabilités liés à son permis, qui ne seront pas modifiés.
L'autre
chose qui est positive aussi dans le projet de loi n° 170, c'est toute la
série de mesures transitoires d'un permis
à l'autre, comment ça va être renouvelé, ou quoi que ce soit. Je pense qu'il y
a un bon travail qui a été fait pour s'assurer
qu'il y ait une continuité logique à l'intérieur des différents types de permis
et pour faire en sorte qu'il y ait le moins de cas possible qui passent
à travers les craques, justement, pour ça. Donc, je pense qu'au niveau des
mesures transitoires il y a des bonnes choses qui ont été faites là-dessus.
Et
on est relativement confiants que, justement, cette ouverture, cette modernité
dans les lois de l'alcool québécoises va
permettre à la fois une meilleure expérience client, mais aussi que le travail
des forces de l'ordre et que tout ce qui touche à la sécurité publique puisse continuer de se faire aussi bien que ça se
fait maintenant. Est-ce qu'il y a des améliorations à apporter? Ça, ce n'est pas nécessairement à nous
de répondre là-dessus, mais on a parfaitement confiance que le Québec
est prêt pour ça et est capable de l'assumer.
Le Président
(M. Auger) : 45 secondes.
M. Bergeron :
Deux questions rapides, parce qu'il commence à manquer de temps. La première,
il y a une hypothèse qui a été évoquée de
faire en sorte de permettre des heures d'ouverture continues mais modulables,
plus tôt le matin pour permettre aux
pêcheurs d'aller chercher leur bière avant de se rendre dans la chaloupe, ou
plus tard le soir, première question. Deuxième question... Je pense que
je vais vous laisser répondre à la première.
Le Président
(M. Auger) : Oui, il reste 30 secondes.
M. Lefebvre (David B.)
:
Oui, bien, rapidement, notre compréhension, c'est que le cas des heures
d'ouverture plus tout, et tout ça, c'était
davantage pour le commerce de détail que pour le secteur de la restauration, ou
quoi que ce soit.
Restaurants Canada aime beaucoup les pêcheurs, mais je pense que la question,
c'était davantage pour les gens qui veulent amener de l'alcool dans le cadre
de leurs activités. Donc, à ce moment-là, on n'a pas vraiment de position sur
la question.
Pour les heures plus
tard, bien, nous, on pense que la consommation, justement, en restaurant, où il
y a une certaine surveillance, il y a des
gens qui sont là, des professionnels du service de l'alcool, on pense que c'est
un bon secteur pour le faire. Mais
maintenant, là, on ne pense pas qu'il y ait un incitatif comme tel, là. Puis ce
n'est pas une banalisation non plus,
c'est plus une normalisation de dire que le Québec est rendu là, en 2018, de
modifier des lois qui, des fois, datent du début du siècle, début du
XXe siècle, on s'entend.
Le
Président (M. Auger) : Merci. Nous allons maintenant poursuivre
avec le porte-parole du deuxième groupe d'opposition, le député de
Beauce-Nord, pour 6 min 30 s.
M. Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue,
Mme Pedneault, M. Lefebvre et
M. Bédard. Si vous souhaitez que les Canadiens fassent les séries, c'est
une bonne chose en soi pour vos affaires,
mais dites-vous bien que vous devez avoir sauvé de l'argent sur les ailes de
poulet que vous donniez quand le Canadien scorait sur un but, ils n'en
ont pas donné souvent.
M. Bédard
(Jean) : ...pas coûté bien cher dernièrement.
M. Spénard :
J'imagine que vous n'en avez pas donné souvent cette année.
M. Bédard (Jean) : Au début de l'année, oui, mais disons que, depuis
janvier, on en a beaucoup en réserve, là.
M. Spénard :
O.K. J'ai bien aimé votre mémoire, qui est un mémoire pour responsabiliser les
propriétaires, justement. C'est un mémoire que j'ai bien aimé.
J'ai deux, trois petites choses, parce
qu'on n'a pas beaucoup
de temps. Votre recommandation 6, que je trouve fort intéressante parce
que vous êtes le seul à nous parler
de ça, sur le timbrage, vous ne dites
pas que vous êtes contre le timbrage, on va envoyer ça à la fiscalité, rien.
Mais, étant donné que le seuil de tolérance pour la RACJ est zéro, vous présentez une recommandation comme quoi est-ce qu'on pourrait avoir un seul de tolérance de 1,5 %
sur le timbrage, étant donné que, dans la très grande majorité des cas, c'est
des erreurs qui sont faites soit à la Société
des alcools du Québec, soit aux transporteurs, soit que le timbre s'efface, et
tout. Avez-vous des statistiques plus poussées pour étayer ça?
Le Président
(M. Auger) : Mme Pedneault.
Mme Pedneault
(Caroline) : Non, on n'a pas de statistiques, mais je peux, pour en
avoir plaidé quelques-uns auprès de
la Régie des alcools... Ça, c'est une des modifications, tout à l'heure... on
manque de temps. Donc, dans les améliorations
de la loi, moi, je la louange, celle-là, bien entendu. Par contre, il reste
qu'il vient quand même avec une amende
pécuniaire, là, il y a quand même une conséquence. Et toute notre plaidoirie
était toujours sur la diligence raisonnable, le fait que j'avais une canette d'une marque que je ne nommerai pas sur
un volume faramineux d'achat de bière
dans l'année, là, donc on réussissait à démontrer que c'était certainement une
erreur soit de timbrage, une erreur humaine.
Donc,
le pourcentage, c'est quelque chose dont on avait discuté, M. Lefebvre et moi.
Je pense que c'est une façon de
dire : Bien, écoutez, on sait que c'est sûr que d'informatiser tout
ça, il y aurait une solution probablement beaucoup plus
coûteuse, celle-ci sauverait de l'argent pour tout le monde, tant au niveau du temps que la régie prend, au
niveau de la Sûreté, qui va puis qui
prend un rapport, un procès-verbal de saisie pour une canette non timbrée, qui
envoie ça chez eux, qui retourne ça à la régie. Imaginez le nombre de
frais que ça peut coûter pour une canette, alors que moi, dans cet établissement-là,
par exemple, je peux démontrer que j'ai acheté, je ne sais pas, peut-être 100 000 litres
d'alcool dans l'année. Là, j'ai une canette
de 310 millilitres, puis là, hipelaïe! Ça fait que je pense que ce qu'on
veut prévenir, c'est la contrebande,
puis ces choses-là. Je ne pense pas qu'une canette ou une bouteille dans un
volume très, très grand, on peut dire qu'on va protéger notre citoyen.
Donc, c'est plus qu'une excellente recommandation de la part de
M. Lefebvre.
M. Lefebvre
(David B.) : Oui, puis juste si je peux apporter une précision, il y a
des situations aussi où, des fois, un établissement peut faire une
dégustation, et quoi que ce soit, les personnes arrivent, oublient une ou deux
bouteilles sur l'ensemble de l'alcool qui
est présent sur place, il y a un problème, il peut avoir une sanction
pécuniaire. L'idée du 1,5 % par
contre, ça ne dédouane pas des gens qui ont des offenses répétées, ou quoi que
ce soit, là, de se faire sévèrement taper
sur les doigts, mais ça donne une chance au moins de l'expliquer puis d'avoir
une espèce de zone de tolérance qui permet
de ne pas remettre en cause, peut-être, tout le système, mais d'avoir une
méthode pratique pour réussir à être logique.
M. Spénard :
L'autre chose, la préparation du vin et des boissons à l'avance. D'habitude,
lorsqu'on prend une bouteille de vin, c'est
bon de la faire décanter une demi-heure, une heure avant. Mais là moi, j'ai un
peu peur dans cet article-là parce que peut-être que le restaurateur va
dire : Bon, bon, on en vend à peu près 25, litres de vin, là, on en prépare 25, mais sauf que le dernier litre de vin
que vous vendez, ça fait huit heures qu'il est ouvert. Comment
pensez-vous nous préserver, préserver les
clients ou les consommateurs d'une chose comme ça, ou, je ne sais pas, là, il a
été ouvert la veille, mais on va la mettre dans le frigidaire, on va le
sortir le lendemain?
Le Président (M. Auger) :
M. Lefebvre.
M. Lefebvre (David B.) : Très rapidement. C'est une
très bonne question. De la manière dont c'est adressé dans le projet de loi n° 170, c'est de punir l'opérateur ou la
personne qui a le restaurant si jamais il y a de l'alcool qui est perdu parce qu'à la fin de la journée on se
comprend bien que tout ça doit être mis dans l'évier ou à la poubelle.
Donc, autrement dit, il y a un gros risque
de perte s'il y en a trop d'ouverts d'avance, et à ce moment-là ça nous semble
une mesure qui est suffisante pour prévenir des problèmes auprès des
consommateurs. Autrement dit, je n'aurais pas avantage à ouvrir trop de
bouteilles d'avance parce que ça serait une perte sèche sur mon alcool et puis
ça serait une perte... à ce moment-là, comme
c'est de l'alcool que je jette, ma perte, ce n'est pas nécessairement le
«cost», ma perte, c'est de l'argent que
j'aurais pu vendre ce produit-là à mon client. Donc, autrement dit, c'est
vraiment une perte sèche, aux livres, complète.
M. Spénard : Un
dernier point...
Le Président (M. Auger) :
Dernière minute.
M. Spénard :
... — une
minute? — la
formation. Alors, évidemment vous l'expliquez très bien qu'il y a le problème de roulement de personnel, et tout. Et
vous avez, j'ai l'impression, à l'intérieur de vos restaurants... vous
nous avez dit, M. Bédard, que vous aviez vous-même un portail où est-ce
que chaque employé allait puis avait une formation responsable. Et votre recommandation 7 m'a fait un peu sourciller,
«dans la mesure où la formation est financée par le gouvernement», ça, on ne l'avait pas vu venir,
celle-là, formation simplement pour les gérants et les propriétaires
d'établissement. Est-ce que, dans votre idée, il y a tout le temps une de ces
personnes-là présente sur place?
Le Président (M. Auger) :
M. Bédard? M. Lefebvre.
• (20 h 10) •
M. Lefebvre (David B.)
:
Oui. En fait, ça, c'est une question intéressante. Je pense que la situation a
été abordée du fait qu'il y a
quelqu'un dans l'établissement qui est responsable. Et ultimement, en ce
moment, dans les établissements, c'est le gérant ou le propriétaire qui
est responsable de ce qui se passe dans l'établissement. Donc, nous, c'est un
peu la suite logique de ça, de dire qu'au niveau de la formation de l'alcool ça
soit ça au niveau de la responsabilité.
Et, sur la question de payer, on comprendra
qu'on arrive maintenant, au Québec, avec une nouvelle idée de formation, de faire de la formation. Et, à Restaurants
Canada, on estime à ce niveau-là que, si le gouvernement est sérieux dans cette démarche-là, il doit en assumer du
moins une grande partie des coûts. Et on verrait plutôt du bon oeil, si
jamais il y a de la formation qui est faite,
qu'elle soit à travers, officiellement, la Régie des alcools ou le ministère de
la Sécurité publique. C'est un peu
comme ça que ça se fait dans les autres provinces canadiennes, c'est l'État, au
sens large, qui est responsable de la
certification, et quoi que ce soit. À ce moment-là, on estime que, si le
gouvernement est sérieux là-dedans, c'est une responsabilité
gouvernementale qui doit être assumée par le gouvernement et non par un tiers.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup. Donc, c'est tout le temps que nous avions. Merci à vous,
Mme Pedneault, MM. Bédard et Lefebvre, de votre participation aux
travaux de la commission.
Mémoires déposés
Mais, avant
de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des organismes et
des personnes qui n'ont pas été entendus lors des consultations
publiques.
Et la
commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au mardi
24 avril 2018, à 10 heures, où elle entreprendra un autre
mandat. Merci beaucoup et bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 20 h 11)