(Onze heures treize minutes)
Le Président
(M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 128, Loi visant
à favoriser la protection des personnes par la mise en place d'un encadrement
concernant les chiens.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Jolin-Barrette
(Borduas) est remplacé par Mme D'Amours (Mirabel).
Auditions
(suite)
Le
Président (M. Auger) : Merci. Ce matin, nous entendrons les
organismes suivants : premièrement, Chiots nordiques, et le
Regroupement québécois des intervenants en éducation canine.
Je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants de Chiots nordiques. Je vous
rappelle que vous avez 10 minutes pour
votre présentation, et par la suite suivra une période d'échange avec les trois
groupes parlementaires. Dans un premier temps, vous identifier, et par
la suite vous pourrez commencer votre présentation.
Chiots
nordiques
Mme Ducharme
(Chantal) : Merci. Dans un premier temps, oui, j'aimerais vous
remercier de nous avoir invités aujourd'hui ici pour présenter notre
organisme. Mon nom est Chantal Ducharme. Je suis la représentante de
Chiots nordiques et je suis aussi policière retraitée du Service de police de
Laval et ayant participé au comité consultatif sur la nouvelle réglementation
animale à Laval.
Chiots nordiques est
un organisme sans but lucratif...
Le Président
(M. Auger) : Vous pouvez demeurer assise pour votre présentation.
Mme Ducharme
(Chantal) : D'accord.
Le Président
(M. Auger) : Merci.
Mme Ducharme
(Chantal) : Chiots nordiques est un organisme sans but lucratif dont
tous les membres sont bénévoles. Notre mission est le suivi des interventions
ayant des impacts directs sur le mieux-être animal afin de favoriser une cohabitation harmonieuse au sein des
communautés autochtones du Québec. Notre principale activité est d'organiser des
cliniques de stérilisation ciblées, ponctuelles afin de contrer la
surpopulation canine des communautés autochtones. Ces actions concertées
contribuent au bien-être animal et favorisent une meilleure santé publique.
Une
équipe typique est composée de 17 personnes : des vétérinaires, des
préposés aux soins et à la capture, des techniciens en santé animale. Tous ces gens bénévoles donnent leur
énergie et leur temps à cette cause de santé publique et animale. Nous avons une expérience de près de
20 cliniques de stérilisation ciblée dans toutes les communautés...
dont toutes les communautés visitées sont
enchantées de notre travail, des résultats obtenus. Les chiens qui visitent nos
cliniques sont stérilisés, vaccinés, notamment contre la rage, ils sont
vermifugés et sont micropucés.
Mme Demianowicz
(Ewa) : Bonjour. Mon nom est
Ewa Demianowicz, je suis responsable de campagne pour Humane Society
International Canada. Je remercie les membres de la commission de nous recevoir
aujourd'hui et à l'organisme Chiots nordiques de nous permettre de coprésenter
avec eux aujourd'hui.
HSI Canada
est la branche canadienne du groupe Humane Society International, un des
plus importants groupes de
protection animale au monde, travaillant sur plusieurs enjeux en lien avec
le bien-être animal. Au Québec, nous avons participé à la saisie... à des saisies de chiens de situations
de négligence en partenariat avec le MAPAQ. Nous avons aussi opéré un refuge d'urgence qui reçoit ces chiens
saisis par le gouvernement. Nous avons notamment participé à la
plus grande saisie de l'histoire canadienne, c'est-à-dire 525 chiens
provenant d'un seul élevage.
Depuis
2013, nous travaillons conjointement avec Chiots nordiques dans les communautés
autochtones. Nous contribuons
financièrement à ses cliniques, et j'ai moi-même participé à une douzaine de
ses cliniques dans le cadre de notre partenariat.
Mme Ducharme
(Chantal) : Les problèmes
liés aux populations des chiens dans les communautés autochtones. Malheureusement, aucune disposition dans le projet
de loi n° 128 ne vient encadrer la situation concernant les
morsures de chien dans les communautés autochtones ou ne tient compte de la
réalité que vivent ces communautés.
La majorité des chiens dans les communautés
vivent en liberté sur le territoire de la communauté. Certains appartiennent à
des familles spécifiques et reviennent sur la propriété familiale pour y être
nourris ou y dormir. C'est environ 90 %
des cas. Certains n'appartiennent pas à une famille spécifique, mais demeurent
dans la communauté. On parle alors de 10 % des chiens de la communauté.
Ils survivent par eux-mêmes. Puisque la majorité de ces chiens sont non stérilisés, de graves problèmes de surpopulation
canine sont présents dans la plupart des communautés. En chiffre, on
peut dire par expérience que, dans un petit
village de communauté autochtone, on peut retrouver entre 80 à 300 chiens,
souvent dans un territoire d'environ deux kilomètres carrés.
Les chiens
vivant en liberté dans les communautés autochtones sont généralement
extrêmement bien socialisés. Ils sont
habitués à être en contact avec les humains dès leur jeune âge, dans un
contexte où ils sont libres et peuvent exprimer leur comportement naturel sans crainte, leur développement psychologique
et comportemental est habituellement très bien équilibré. Par contre,
les divers problèmes liés à la surpopulation créent des situations où les
morsures deviennent plus probables.
Les constats
observés. Le nombre de chiens excède la capacité de charge dans son habitat
dans la majorité des communautés
autochtones du Québec. Le nombre de chiens les amène à se battre pour la
nourriture, la reproduction et le territoire.
Les chiens sont la principale source de transmission de la rage. La rage est un
virus transmissible à l'homme ayant des
répercussions non négligeables. Les chiens provenant des communautés sont
fortement parasités. Ces parasites peuvent entraîner chez l'animal des signes cliniques importants et certains
peuvent infecter les humains. On commence à sentir l'intérêt de certains
organismes ou certains paliers du... gouvernement, pardon, comme notamment Santé
Canada, sur l'aspect de la parasitologie des sols.
Un grand nombre de chiens se font heurter par
des véhicules à moteur. Les blessures observées peuvent être graves et mettre
en péril le bien-être animal ainsi que des humains au volant. Quelques fois par
année, des opérations d'abattage par armes à
feu sont organisées. Les chiens souffrent notamment de malnutrition et n'ont
pas d'abri. De plus, nous retrouvons
certaines races de chien non adaptées aux rigueurs de l'hiver ou des chiens
trop jeunes ou trop âgés qui ne peuvent survivre à l'extérieur lors des
grands froids.
L'absence des
services vétérinaires dans les communautés autochtones est la source du
problème de surpopulation canine et
de ses conséquences. Les animaux n'étant pas stérilisés et vivant en liberté,
ils se reproduisent constamment et à un rythme trop important pour ce
que la communauté est en mesure de gérer.
• (11 h 20) •
Mme Demianowicz (Ewa) : Les
morsures de chien dans les communautés autochtones sont beaucoup plus courantes
que dans les communautés urbaines. Je vous répète les statistiques : 39 %
des fatalités liées à des chiens au Canada
sont arrivées sur les réserves autochtones. Pourtant, ce n'est que 1 % de
la population canadienne qui demeure sur une réserve. Nous ne pouvons connaître le nombre total de morsures au
sens large ayant lieu sur les réserves, parce qu'elles ne sont pas comptabilisées, mais nous pouvons
déduire, comme l'a fait le vétérinaire, Dr Richard G. Herbert,
un expert sur la question dans les communautés autochtones... les
nombreuses morsures de chien fatales sur les réserves et leur occurrence
disproportionnellement élevée dans ces régions comparées au reste du pays
donnent une bonne idée de l'ampleur du problème dans les communautés
autochtones.
Toujours
selon le Dr Herbert, les enfants vivant sur des réserves sont
180 fois plus à risque d'être tués par un chien que les enfants
hors des réserves. La grande majorité des chiens qui ont causé des attaques
mortelles appartenaient à quelqu'un. On
parle de 89 %. À la lumière de ces statistiques, si nous souhaitons
réellement aborder la problématique des morsures de chien, on ne peut ignorer les communautés autochtones et le
problème auquel elles font face. La surpopulation canine, comme le
mentionnait Chantal, est la source des facteurs présents dans les communautés
autochtones qui augmentent le risque de
morsure. On parle premièrement de chiens qui sont affamés, qui ne mangent pas à
leur faim, donc qui sont plus
propices à défendre leur nourriture ou à attaquer. Les services vétérinaires
sont absents dans les réserves. Donc,
les animaux qui ont des blessures ou qui sont malades ne reçoivent aucun soin.
Les animaux souffrants vont moins tolérer les manipulations.
Malheureusement, à cause de la surpopulation
canine, la négligence envers les chiens est courante dans les communautés autochtones. Elles ne sont pas
équipées pour gérer la surpopulation canine. Elles sont donc obligées
d'adopter des méthodes de gestion animalière
brutales et violentes. Les chiens sont abattus, trappés, empoisonnés. On leur
lance des roches, on les frappe à coup de
bâton. Ces méthodes ont de graves conséquences évidemment sur les chiens, mais
aussi sur la psychologie humaine. On ne peut
nier l'impact psychologique que des actes d'abus et de cruauté peuvent avoir
sur les humains, particulièrement les
enfants qui sont témoins de ces actes-là. La littérature sur le sujet est
nombreuse, surtout le lien entre la cruauté animale et les cas de
violence domestique.
La surpopulation canine mène à un phénomène bien
connu dans les communautés, celui où des chiens vivent en meute. Donc, on voit des chiens se tenir en groupe et protéger un
territoire en groupe face aux autres chiens ou aux inconnus. Et le manque de ressources dans certains
cas pousse certains chiens à quitter le territoire et à vivre en périphérie,
en bordure de la communauté. Ces chiens-là
vont avoir des portées qui vont nécessairement n'avoir aucun contact
avec les humains. Donc, on parle de chiens
qui deviennent pratiquement sauvages. Habituellement, ces chiens-là n'ont
aucune envie d'être en contact avec les humains et évitent les communautés.
Mais parfois, à la recherche de nourriture, ils vont s'aventurer dans les
communautés.
Les solutions pour
venir à bout de ces problèmes auxquels font face les communautés autochtones
est assez simple. Il faut investir dans les
infrastructures de service vétérinaire dans les communautés autochtones. Il est
plus que temps
que les gouvernements investissent dans ces infrastructures. Et ce n'est pas à
des groupes à but non lucratif comme les
nôtres de gérer ce problème. La surpopulation canine n'est pas qu'un problème
de bien-être animal, c'est un problème de santé publique, et toutes les
instances gouvernementales doivent en prendre la responsabilité.
Les
autres mesures que nous proposons devraient s'appliquer à la province en
général. Pour toutes les raisons déjà énumérées
par plusieurs groupes qui ont parlé devant nous, nous demandons un amendement
au projet de loi n° 128 qui retire
les articles 17, 19 et 20, soit les dispositions liées à des races
particulières. Statistiquement, les chiens de type husky sont responsables de 88 % des décès causés
par un chien dans les 30 dernières années au Québec. On parle de sept
morts sur huit. Pourtant, nul ne songe à
interdire ces races de chien dans la province, et avec raison. Il ne nous
viendrait pas à l'esprit de juger la
famille des huskies en entier et leurs croisements pour quelques individus qui,
à cause d'une série d'événements particuliers
et de facteurs bien précis, sont passés à l'attaque. Pourquoi cette logique
s'applique-t-elle lorsqu'un chien de type pitbull passe à l'attaque? Pourquoi la race du chien prend soudainement
tant d'importance et que les circonstances précises qui ont mené à une
attaque sont pratiquement évacuées du débat?
Pour
les diverses raisons qui ont déjà été énumérées, nous suggérons au gouvernement
d'aller encore plus loin et d'adopter
une loi provinciale qui interdit aux municipalités d'adopter des lois qui
ciblent des races particulières comme l'ont fait 20 États américains : Arizona, Californie, Caroline du
Sud, Colorado, Connecticut, Dakota du Sud, Floride, Illinois, Maine, Massachusetts, Minnesota, Nevada, New
Jersey, New York, Pennsylvanie, Oklahoma, Rhode Island, Texas, Utah,
Virginie. Et vous avez dans notre exemple également des exemples de ces
lois-là.
Je
souligne également qu'aucun État américain n'interdit des races ou des types de
chien. Et, avec la tendance actuelle
aux États-Unis, où ce type de règlement
est en chute libre dans les municipalités, c'est-à-dire qu'il y a
plus de municipalités qui révoquent
ou décident de ne pas adopter ce genre de loi que de municipalités qui en
adoptent, il serait extrêmement surprenant qu'on songe à adopter ce
genre de loi au niveau étatique en 2018. C'est plutôt les «preemptive laws», celles qui interdisent
l'adoption de tels règlements, au
niveau municipal, que l'on voit se
répandre sur le territoire américain.
Le
Président (M. Auger) :
Juste un instant. Le temps étant écoulé... Par contre, M. le ministre... Est-ce que vous en avez encore pour...
Mme Demianowicz
(Ewa) : Très peu. Je voulais
juste parcourir les dernières mesures qu'on suggère. Donc, si vous le
permettez...
Le Président
(M. Auger) : Ça va?
M. Coiteux : Oui, peut-être
une petite minute de conclusion, parce que
je sais que moi, je n'aurais peut-être
pas beaucoup de questions, personnellement, mais je sais...
Le Président
(M. Auger) : ...plein de questions, O.K. Une dernière minute de
conclusion, s'il vous plaît.
M. Coiteux : ...mais je sais que mon collègue
va en avoir peut-être plus que moi puis j'aimerais qu'on ait du
temps pour les échanges.
Le Président
(M. Auger) : Oui. Excellent. Une minute, s'il vous plaît.
Mme
Demianowicz (Ewa) : Les
autres mesures qui ont prouvé être efficaces, en termes de réduction de
morsures de chien : tenue en laisse,
confinement obligatoire — évidemment, ce n'est pas une mesure qu'on peut appliquer sur les territoires autochtones, mais ailleurs c'est
important — enregistrement
et identification obligatoires des chiens, stérilisation obligatoire à la source — donc
les animaux vendus dans les animaleries ou les élevages devraient être
stérilisés, plusieurs municipalités
ont déjà adopté ce genre de règlement — interdiction de détention à l'attache sans
supervision, réglementation accrue de l'élevage — je voudrais vous rappeler qu'au Québec on
peut avoir un nombre de chiens reproducteurs illimité, dans un élevage, et que nous avons fait la saisie
de 525 chiens dans un seul élevage opéré par une seule famille — possibilité d'interdire la possession de
chiens à certains individus, encadrement et définition de «chien
dangereux» — on vous
a donné des exemples, dans le
mémoire, de définitions de «chien dangereux» qui existent aux États-Unis — application assidue de la législation en matière de contrôle
animalier — la clé
du succès pour réduire les morsures de chien, c'est d'appliquer les
règlements déjà en vigueur — et,
bien sûr, une mise en place de campagne de sensibilisation et d'éducation.
Le Président
(M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons
débuter les échanges. M. le ministre. 15 minutes.
M. Coiteux :
Oui. Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Moi, je n'aurai pas
beaucoup de questions, je vais en
avoir quand même quelques-unes, mais mon collègue le député d'Ungava a un
intérêt tout à fait particulier, je pense que vous comprendrez, parce que vous avez... une bonne partie de votre
présentation, c'est sur la réalité des communautés autochtones, et sur
son territoire, comme député, évidemment, il est devant ces réalités au
quotidien puis il défend, évidemment, les
intérêts de ses citoyens, qui sont souvent des gens qui vivent dans les
communautés autochtones. Donc, je vais lui laisser un peu d'espace
après, certainement, pour les échanges.
Mais ma
question est la suivante. Ici, évidemment, c'est un projet de loi dont le...
qui met l'accent sur la sécurité publique.
Et évidemment la sécurité publique, ça nécessite des efforts concertés de
plusieurs parties, et donc toutes les solutions
aux problématiques que vous soulevez ne se retrouvent pas forcément dans ce
projet de loi, notamment les ressources, des
investissements dans les services vétérinaires dans les communautés
autochtones, ce n'est pas une loi en sécurité publique en soi qui va
trouver la solution à ça, mais c'est un enjeu qui est important, puis vous avez
raison de le soulever, et je vous remercie
de le soulever, tout comme hier aussi on nous a soulevé l'enjeu des morsures
dans les communautés autochtones. Ce que nous avons dans ce projet de
loi, ici, c'est la possibilité pour les communautés de s'assujettir à cette
loi, mais ce qu'on vise, et à travers une autre loi qui est sous la
responsabilité du MAPAQ, c'est de conclure
des ententes avec les communautés autochtones pour trouver la meilleure façon
de travailler avec ces communautés, pour avoir des modèles qui soient
adaptés à leurs réalités et à leurs besoins.
Mais est-ce
que vous, puis ça va être ma seule question, ensuite je vais laisser mon
collègue continuer... est-ce que vous,
vous trouvez qu'il y a des éléments qui devraient être dans cette loi en
particulier, qui devraient être dans cette loi, qui ne s'y trouvent pas, à l'heure actuelle, qui concernent les
communautés autochtones, outre le fait qu'elles puissent ou non
s'assujettir, selon leur volonté, à tout ou partie de la loi ici?
Le Président (M. Auger) :
Mme Ducharme.
Mme Ducharme
(Chantal) : Oui. Je pense qu'il faut vraiment prendre conscience du
problème des communautés autochtones
et l'adresser de façon convenable à leur réalité. Et la loi, telle que bâtie en
ce moment, elle n'aura pas d'impact si vous la laissez telle quelle,
sans modifications et sans paramètre vraiment collé à la réalité autochtone. Du
jour au lendemain, cette loi-là est mise en application, à mon sens à moi, elle
ne changera rien à leur réalité.
• (11 h 30) •
M. Coiteux :
Voilà la raison de ma question.
Alors, ma question, c'est : Qu'est-ce qu'il manque dans cette loi, que vous souhaiteriez y voir, dans cette loi? Parce qu'il y a peut-être
d'autres lois que vous souhaiteriez modifier qui sont sous la
responsabilité du MAPAQ. Il y a peut-être des actions qui ne sont pas de nature
législative qui doivent être entreprises,
puis vous en avez mentionné. Mais, dans cette loi en particulier, est-ce qu'il
y a des choses que vous nous suggérez de considérer pour justement avoir
plus d'impact positif dans les communautés autochtones?
Le Président (M. Auger) :
Mme Ducharme.
Mme Ducharme
(Chantal) : Bien, moi, ce que je crois, et Ewa, ma collègue, pourra en
discuter un peu plus, je crois qu'il
y a un lien très clair entre sécurité publique et santé publique. Contrôler une
morsure, c'est contrôler l'occasion que
ça va arriver, oui, par la sécurité publique, mais aussi c'est de mettre dans
une loi... mettre de l'avant un système aussi de prévention de morsures, un système d'outils pour les communautés, donc
mettre en place des cliniques de stérilisation, donner l'occasion de
structurer un petit peu l'intervention en communauté.
Mme Demianowicz
(Ewa) : Je crois qu'une loi qui est rédigée dans l'objectif... dans un
contexte où les services vétérinaires
sont présents ne peut pas s'appliquer du tout dans un contexte de communauté
autochtone. On retrouve le mot «vétérinaire» un peu partout dans ce
projet de loi là. Les vétérinaires ne sont pas présents dans les communautés autochtones. Si un chien est mort, qu'est-ce qu'on
fait avec ce chien-là dans une communauté autochtone? Quelles sont les ressources que les communautés ont pour sortir ce
chien-là de la communauté? Si on avait voulu prendre réellement en considération cette problématique-là, on aurait
peut-être songé à consulter les communautés autochtones, avant de
rédiger le projet de loi, et leur demander
comment on gère des problématiques auxquelles elles font face, et ce serait
quoi, une bonne définition de «chien
dangereux», et quelles méthodes, quelles mesures potentielles on peut prendre
lorsqu'on fait face à un chien
dangereux dans une communauté autochtone. Pour l'instant, les seules méthodes
qu'ils ont, c'est d'électrocuter le chien, de l'empoisonner ou de le
tuer à coups de bâton, ce qui n'est pas une solution.
M. Coiteux : Je vais laisser
mon collègue le député d'Ungava continuer.
Le Président (M. Auger) : Oui,
M. le ministre. M. le député d'Ungava, pour 10 minutes.
M. Boucher : Alors, merci
beaucoup, M. le ministre. Merci, M. le Président.
Alors, bon,
comme vous venez de l'apprendre, moi, je suis le député d'Ungava, qui concerne
toute la moitié nord de la province
de Québec. C'est 865 000 kilomètres carrés, plus que 50 % du
territoire du Québec. C'est toute la section habitée par la nation crie,
la nation inuite, les neuf communautés cries et les 14 villages inuits.
Quand vous dites «les communautés
autochtones», tu sais, moi, c'est un terme... pour moi, ça n'existe pas, les
communautés autochtones. C'est Wendake,
ici, à Québec, c'est Essipit aux Escoumins puis c'est aussi Ivujivik sur le
toit du Québec. Voyez-vous, bon, des différences à travers les
11 nations, tu sais, des choses qui sont... tu sais, 11 réalités
différentes, et même plus, là?
Mme Ducharme
(Chantal) : On a eu l'occasion de travailler avec des nations cries,
on a eu des relations avec certains villages inuits. On a eu plusieurs
cliniques de stérilisation, 17, effectivement, faites, et quelques cliniques de
vaccination seulement avec des Innus,
différentes communautés autochtones de la Côte-Nord à la Baie-James. La
réalité, elle est la même partout, je peux
vous dire. Les chiens, le contexte de la vie en communauté, pour les chiens, la
relation des gens de la communauté en
rapport avec leurs animaux, les animaux de la communauté, est la même. Ce qu'on
voit, les morsures, elles sont là, et on voit
le problème de sécurité, on voit le problème de santé publique et le problème
de santé animale. Tout est interrelié.
M. Boucher : Écoutez, moi, je conçois que, bon, la relation
avec les chiens, chez les Cris et chez les Inuits — je vais
parler de ce que je connais le plus, là, on va mettre les autres de côté — ce n'est pas la même relation que pour
nous. Nous, notre chien, c'est notre toutou,
là, qui couche dans notre lit puis c'est notre petit bébé. Eux, c'est un animal
soit de protection ou de travail, c'est moins un animal de compagnie. Vous
faites signe que non, là, vous semblez ne pas être d'accord avec ça.
Mme Demianowicz
(Ewa) : Non. Le chien a vraiment une importance majeure, et il y a un
lien extrêmement affectif entre les
humains et les chiens dans les communautés autochtones. Ce n'est... Oui, il y a
des chiens qui vont être utilisés pour aider à la chasse, mais il n'y a
pas de protection qui est faite. Les communautés autochtones vivent en communauté, il n'y a pas de clôture, les gens sont
très libres, là, de se promener et
n'ont pas un attachement à la propriété comme on a, et les chiens font
partie de cette communauté-là.
Nous,
quand on arrive, en tant qu'étrangers, dans les communautés avec nos services
vétérinaires, les gens qui ne sont
pas au courant de ce qu'on fait, qui pensent qu'on est là pour prendre les
chiens puis les voler, réagissent très fortement. On a besoin de leur expliquer qu'on est là pour la
santé de leurs chiens, pour leur santé, et que ça va être bénéfique.
Ils sont très protectifs de leurs chiens.
Moi, j'ai des commentaires de gens quand... Je suis souvent à la capture
des chiens, donc je me promène dans
les communautés et j'attrape les chiens pour les amener à la
clinique, et puis j'ai des commentaires de gens
qui vont me dire... j'attrape un chien à la laisse, et qui vont me dire :
Nous, on n'attache pas nos chiens, madame, c'est des êtres vivants, on
les aime, nos chiens, là. Ce n'est pas vu comme un outil de travail. Il y a un
lien réel, là.
M. Boucher : Là-dessus, je suis tout
à fait d'accord avec vous. Puis c'est
là où je voulais en venir, c'est, en fait, où les chiens appartiennent à la communauté. Mais, moi, pour avoir vécu à temps plein depuis
2007 à Kuujjuaq et avoir fait partie de la communauté, je
peux vous dire que la situation change, la situation évolue. Les gens sont
conscients que, oui, il y a
des attaques de chien, oui, le chien, ça peut être... peut rendre de grands
services, mais en même temps ça peut devenir un objet de danger, un
objet de menace, dans certaines circonstances, puis il y a une prise de
conscience.
La
loi, bon, à l'article 3, crée justement une exception où
cette loi-là ne s'appliquera pas au Nord et puis dans les communautés autochtones. Est-ce que vous êtes
d'accord avec ça ou pensez-vous qu'on devrait arriver avec une loi
imposée du Sud, entre guillemets, pour
dire : Bien, voici, maintenant, là, au Nunavik, dans les communautés
cries, c'est ça que vous allez faire avec vos chiens?
Mme Demianowicz
(Ewa) : Mais il n'y a rien d'intéressant dans le projet de loi pour
une communauté autochtone qui
voudrait gérer son problème de chiens dangereux, il n'y a absolument aucune
disposition là-dedans qui s'appliquerait à la réalité des communautés autochtones. Les chiens vivent en liberté, il
n'y a pas de contention. Déjà, il y a une différence majeure. On n'est pas habitués à ça en contexte
urbain. Les chiens ne seront pas gardés à la maison, dans les communautés autochtones,
c'est des chiens qui ne vivent qu'à l'extérieur. Et il n'y a pas de ressources, il n'y a pas de soins
vétérinaires, il n'y a pas de structures qui permettent de gérer la population
canine. Donc, si on voudrait proposer un règlement qui pourrait être adopté dans les communautés
autochtones, il faudrait travailler
avec ces communautés-là et créer quelque chose de complètement nouveau qui respecterait la façon
de faire dans ces régions-là.
M. Boucher :
C'est là où je voulais en venir. Tu sais, je pense que la solution vient d'eux
en premier, peut-être avec notre support, si besoin est. Mais il n'y a
rien qui les empêche de passer des règlements, bon, on parle des villages nordiques, municipaux ou, du côté des réserves,
des règlements applicables sur la réserve, je veux dire : Bien, voici,
dans telle situation, les chiens devraient
être contrôlés de telle façon, faire ceci, faire cela. Puis il y a une question
de culture et de mentalité. Ce serait
tellement plus facile de dire : Bien, tout le monde attache son chien, on
met des clôtures, on ne verra pas plus
qu'un chien par famille, pas ci, pas ça, sauf que culturellement on ne peut pas
faire ça, là. Donc, il faut tenir compte de la culture et puis, tu sais, ne pas faire comme depuis des dizaines et
même des centaines d'années, appliquer la façon de faire des Blancs et du Sud pour dire : Bien,
voici comment ça doit se passer chez vous à partir de la semaine
prochaine parce qu'on pense que c'est ça qui
serait bon pour vous. Je pense que ce serait là, justement, la mauvaise façon
d'agir. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Mme Demianowicz
(Ewa) : Tout à fait. C'est notre approche. Habituellement, on attend
toujours qu'une communauté nous invite avant de s'y rendre. On n'y va pas,
nous, en s'imposant.
Par contre, je
voulais juste souligner que garder des chiens à l'attache n'est pas une
solution pour une communauté autochtone. Les
chiens à l'attache sont plus propices de mordre, donc ce n'est pas la solution.
Les chiens vont continuer de vivre en liberté dans ces régions-là.
Mais ce qu'il faut,
c'est leur donner, et je pense que c'est ça qu'on essaie de vous dire, des
ressources. Les communautés autochtones ne
pourront pas gérer leur problème de surpopulation canine s'il n'y a pas de
services vétérinaires sur place, si
on ne stérilise pas les animaux, si on ne gère pas la surpopulation canine
qu'il y a en ce moment. C'est une question de ressources. En ce moment,
ils sont complètement abandonnés à eux-mêmes, et pourtant le problème est réel. 39 % des fatalités ont lieu sur les
réserves autochtones. Il y a une crise et un problème de santé publique réel
sur place. Il faut, à un moment
donné, intervenir comme on l'a fait lorsqu'il y a eu une crise de santé
publique au niveau de la santé des
humains. Il faut en ce moment réaliser qu'il y a un lien entre la santé des
animaux de la communauté et la santé des humains et faire quelque chose.
• (11 h 40) •
Mme Ducharme (Chantal) : Et,
comme vous dites, laisser la place à toutes les communautés, dans leur secteur, de gérer leurs meutes par communautés, étant donné que c'est un problème provincial, et on le
voit dans toutes les
communautés... On ne peut pas dire qu'à Wemotaci il y a
un problème puis à Chisasibi il n'y en a pas. Ce n'est
pas vrai. Ils sont opposés un de l'autre
comme endroits. On a un près de La Tuque, Wemotaci, l'autre en Baie-James, et
c'est la même réalité. C'est un problème provincial, ça demande une réponse
provinciale.
M. Boucher : Comme je vous dis, je ne vous dis pas que la situation
est idéale puis tout est parfait, mais il
y a une prise en main. Moi, je peux
vous dire que, depuis 2007, il y a des villages nordiques où je suis allé, puis je
pourrais vous amener demain matin, je vous
mets au défi de rencontrer un chien en liberté, puis on va aller dans le
village d'à côté puis, je veux dire, on va se faire approcher
spontanément par des chiens. Puis ce n'est pas égal partout, mais moi, je vois
une évolution positive; peut-être pas assez rapide, peut-être pas à notre goût à
nous, mais je pense qu'il y a une démarche qu'on pourrait appeler dans
le bon sens, du bon pas, là.
Mme Ducharme
(Chantal) : Effectivement, il y a une avancée. On le voit, nous, les communautés
comme... Je cite Chisasibi. Et
pourquoi ça a avancé, c'est parce qu'il
y a une personne
qui est responsable de la gestion. Cette personne-là, elle a une expérience comme technicienne en santé
animale. Elle nous a demandé à deux reprises, et on y retourne une troisième fois : Gérez la meute. Oui, ça
fonctionne très bien à Chisasibi. On le sait très bien,
que les communautés peuvent se
prendre en main. Mais elles ne se prendront pas toutes seules en main et pas seulement
juste avec des organismes sans but lucratif comme nous.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Nous allons maintenant poursuivre avec l'opposition officielle. M. le député de Verchères, porte-parole,
pour les neuf prochaines minutes et 30 secondes.
M. Bergeron : Merci, M.
le Président. Merci à vous, mesdames.
Vous apportez un éclairage intéressant, original sur une réalité à laquelle on n'a pas l'habitude d'être confrontés et
qui ne nous vient pas spontanément à l'esprit lorsque vient le temps de légiférer. Je pense qu'il faut
continuellement se rappeler que le mur-à-mur au Québec, ce n'est peut-être
pas la meilleure des choses parce qu'il y a
des communautés qui ne vivent pas selon la même tradition et qu'il faut
donc tenir cela... prendre cela en
considération. Et, quand vous parlez de l'importance des chiens dans la culture
des communautés nordiques, je pense, c'est important de le souligner et
de le prendre en compte. On se souvient des traumatismes
qui ont perduré pendant des générations suite à l'abattage des chiens dans le
Nord. Donc, merci infiniment de cette contribution intéressante à nos
travaux.
Vous commencez
d'emblée en disant : Malheureusement, aucune disposition dans le projet de
loi n° 128 ne vient encadrer,
dis-je, la situation concernant les morsures de chien dans les communautés
autochtones ou... ne tient pas compte de la réalité que vivent les communautés
autochtones. Vous avez 100 fois raison, sauf que, lorsqu'on regarde les propositions que vous nous faites... Après avoir
décrit ce que vous appelez comme une crise de santé publique, et très bien d'ailleurs, vous nous faites vos propositions
et vous dites : Besoin urgent d'accès à des services vétérinaires
dans la communauté autochtone. Bon,
évidemment, je ne suis pas sûr que ça relève directement de la sécurité
publique, mais c'est sûr que vous avez une occasion de faire valoir ce
point, puis à M. le ministre de le faire valoir auprès des collègues concernés. Et là vous continuez : Retirer les
interdictions de races particulières de chien, prévenir l'adoption de lois
ciblant des races particulières, tenue en
laisse, confinement obligatoire, enregistrement et identification obligatoires,
stérilisation obligatoire à la source, interdiction de la détention à l'attache
sans supervision, réglementation accrue de l'élevage, possibilité d'interdire
la possession de chiens à certains individus, encadrement et définition des
chiens dangereux.
Et là vous
poursuivez, mais tout cela, ce sont des dispositions qui ne s'appliquent pas et
ne peuvent pas s'appliquer aux
communautés nordiques, et vous le savez. Donc, j'ai l'impression que, pour ces
propositions-là, vous faites écho à des
propositions qui ont déjà été communiquées aux membres de la commission. Et
moi, je veux renchérir à la question qui a été posée par M. le ministre. Par rapport à la problématique
particulière que vous nous exposez, qu'attendez-vous de voir dans ce projet de loi? Tu sais, vous nous
dites : Il y a une crise de santé publique, il faut faire quelque chose.
Bon, bien sûr, Dieu le Père à Québec
peut essayer de faire quelque chose, mais d'abord il faut le faire en
conjonction, en collaboration avec
les communautés concernées, puis vous l'avez bien souligné lorsque vous parliez
de Wemotaci. Mais qu'est-ce qu'on
peut mettre comme cadre général en place qui va permettre justement aux communautés qui souhaitent qu'on fasse
quelque chose, que ce quelque chose puisse se faire?
Le Président (M. Auger) :
Madame, oui?
Mme Demianowicz (Ewa) : Je
pense qu'on a déjà un peu abordé cette question-là.
Premièrement,
on vous le dit, la solution, elle est simple. On a besoin de services vétérinaires
dans les communautés autochtones pour gérer la surpopulation canine. En
ce moment, il y a trop de chiens et il y a plusieurs problèmes qui découlent du fait qu'il y a trop des chiens pour
le peu de ressources que les communautés ont pour les gérer. Il faut que
les animaux soient stérilisés, arrêtent de
se reproduire, pour qu'on ait une population de chiens gérables pour la
communauté.
Autrement, la
définition de «chien dangereux», telle qu'elle est définie en ce moment, ne
peut pas s'appliquer dans une communauté autochtone. Les mesures qu'on
propose lorsqu'on fait face à un chien dangereux, ces mesures-là ne peuvent pas
s'appliquer dans une communauté autochtone parce qu'ils n'ont pas de ressources
pour aller voir une vétérinaire, pour aller faire évaluer le chien en tant que
tel, pour euthanasier le chien. Il faut que les communautés autochtones aient une structure, un cadre où ils
peuvent gérer les cas de morsure, les cas de chien dangereux, et
puissent répondre à ces problèmes-là qui
sont présents. Donc, c'est une question d'infrastructure, mais c'est... On ne
peut pas nier que c'est une question d'infrastructure puis on n'ira pas
très loin si on ne donne pas accès à ces ressources-là.
M. Bergeron :
Oui, ça, je le comprends très bien. Mais vous comprenez qu'on parle ici d'un
cadre légal, non pas d'une mesure
politique où on dit : On va injecter tant d'argent pour permettre le
déplacement de vétérinaires, qui est une mesure qui ne relèvera pas nécessairement directement du ministère de la
Sécurité publique. Mais est-ce qu'il y a quelque chose, dans le cadre légal qu'on est en train de mettre en place, qui
peut soutenir ce dont vous parlez? D'autant que vous avez vous-mêmes
reconnu que les vétérinaires, ce n'est pas nécessairement facile pour eux de
travailler sur le terrain. Souvent, ils sont
vus de façon méfiante par les communautés. Souvent, ils ne peuvent approcher ni
les individus ni les chiens des
individus et, à plus forte raison, les chiens qui ne sont pas habitués à être
manipulés par des êtres humains. Donc, on voit là que l'envoi de vétérinaires, un, ce n'est pas simple, deux, même en
envoyant davantage, ce ne sera pas simple. Mais, au niveau du cadre légal, parce que c'est ce dont il
est question aujourd'hui, qu'est-ce qu'on peut intégrer, selon vous, qui
permettrait ou qui faciliterait la mise en
place de mesures qui pourraient nous permettre, comme vous le dites, de
faire quelque chose?
Mme Demianowicz
(Ewa) : Il aurait fallu consulter les communautés autochtones avant de
rédiger le projet de loi parce que,
si le projet de loi vise à favoriser la protection des personnes par la mise en
place d'un encadrement concernant les
chiens... Les personnes en danger en ce moment sont sur les réserves
autochtones. Comment ça se fait qu'on n'a pas consulté les personnes
présentes sur ces réserves, qui représentent 40 % des fatalités au Canada,
pour savoir : Mais qu'est-ce qu'on devrait mettre dans ce projet de loi là
pour encadrer votre réalité à vous?
M. Bergeron :
Je comprends votre revendication, mais, puisqu'on ne l'a pas fait en amont, on
est en train de le faire, là. Il est
encore possible de changer le projet de loi. Les communautés autochtones
avaient l'opportunité de venir se faire
entendre, ce qui n'est pas nécessairement un réflexe naturel, de venir à
l'Assemblée nationale, effectivement, pour faire valoir leur point de vue. Mais, puisque vous êtes là et puisque vous
êtes en mesure de nous faire valoir leur point de vue ou du moins ce qui pourrait être leur point de vue,
que voyez-vous, dans la structure, dans le cadre légal qu'on est en
train de mettre en place, qui pourrait effectivement permettre que nous
fassions quelque chose?
Mme Ducharme
(Chantal) : Bien, c'est sûr qu'on parle toujours... on en vient à la
surpopulation canine, le seul moyen... la surpopulation canine, pardon,
qui cause des morsures pour les différentes raisons que j'ai citées
tantôt : reproduction, territoire,
manque de nourriture. Donc, qu'est-ce qu'on peut faire comme réglementation?
C'est sûr qu'on peut instaurer une
stérilisation des chiens. Oui, il va falloir amener des vétérinaires à aller
travailler en territoire autochtone. On peut instaurer des règlements de
responsabilité des chiens, les chiens qui ne sont pas nourris, qui n'ont pas
d'abri. On parle de la P-54, l'ancienne
P-54, maintenant la 3.1. Le bien-être animal, il n'est pas appliqué dans les
règlements dans les communautés autochtones, et pourtant c'est l'endroit
que, si les chiens auraient un abri, si les chiens seraient nourris et que la
négligence serait dénoncée, on aurait moins de morsures. C'est ça, nos
problèmes.
• (11 h 50) •
M. Bergeron :
Et l'autre difficulté, vous en êtes bien conscientes, puis je sais que vous en
êtes conscientes, puis je sais que vous avez cherché à nous sensibiliser
à cela, puis notre collègue d'Ungava y faisait référence il y a quelques instants, c'est que, si on impose la stérilisation
des chiens et si on impose la responsabilité des propriétaires à l'égard
du mieux-être animal, vous êtes bien
conscients que c'est encore Dieu le Père à Québec qui impose ses règles aux
communautés nordiques puis que ça ne
risque pas de passer comme une lettre à la poste, là, qu'on impose la
stérilisation puis qu'on impose au propriétaire d'en prendre soin,
d'autant que, de votre propre aveu, il y a une majorité des chiens dits errants
qui n'appartiennent à personne.
Mme Ducharme
(Chantal) : Comme je vous ai dit tantôt, c'est un faible taux. On
parle des chiens de dépotoir, principalement.
Ce qu'on appelle, nous, des chiens de dépotoir, c'est ceux qui vivent dans le
dépotoir et vont quelquefois en communauté.
Ce n'est pas ceux-là qu'on voit dans les communautés, qui vivent au jour le
jour avec les enfants dans les cours
d'école. Ceux-là, comme j'ai répété, ils sont équilibrés et ont rarement des
comportements de morsure, mais ils en ont dû au fait du contexte que je
vous ai cité précédemment.
Mme Demianowicz
(Ewa) : Je pense qu'il n'y a pas une communauté qui refuserait de
l'aide du gouvernement provincial qui
les appellerait, ouvrirait le dialogue et dirait : Nous voulons régler
votre problème de morsures de chien et nous
voulons vous donner des services de soins vétérinaires pour stériliser vos
animaux et gérer votre population canine. Nous, quand on approche des communautés, rarement, on se fait
dire : Non, ne venez pas. C'est sûr qu'il y a un aspect, là,
d'éducation une fois qu'on est là pour expliquer à tout un chacun, chaque
individu, qu'est-ce qu'on fait là. Mais les communautés sont évidemment très
ouvertes, là, à notre présence et nous invitent, là, à venir travailler.
Le
Président (M. Auger) : Merci. Nous devons poursuivre avec le
deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Mirabel, pour
6 min 30 s.
Mme D'Amours :
Merci. J'aimerais savoir... Quand vous allez dans ces régions-là, est-ce que
vous êtes invités par les communautés
ou si vous y allez parce que vous savez qu'il y a un problème puis vous
débarquez, là, pour faire des interventions?
Mme Ducharme
(Chantal) : C'est toujours par invitation. On a toujours fonctionné
par invitation. Chiots nordiques ne s'est
jamais présentée dans une communauté pour venir dire : On vient régler
votre problème. Ça fonctionne beaucoup par bouche à oreille, d'une communauté à
l'autre. D'une communauté comme Wemotaci, à la demande des institutions là-bas, on a réussi... on a été
invités par la suite à une autre communauté attikamek, qui est Manawan, par
la suite à une autre communauté attikamek,
qui est Obedjiwan. Un peu comme ça, un peu partout, il y a un changement, il y
a un vent de changement au niveau des
communautés autochtones et villages inuits du Québec. Ils veulent trouver une
solution plus éthique à la gestion de leurs
animaux. Ils sont très conscients de la problématique du bien-être animal mais
du lien avec la santé publique.
Mme D'Amours :
Qui vous invite? Est-ce que c'est les grands chefs, les grandes chefs?
Mme Ducharme
(Chantal) : Oui, effectivement, le conseil de bande. Avant d'arriver
dans une communauté autochtone, on a une
entente avec le conseil de bande. Il faut que ce soit systématique. Et c'est un
problème de population de chiens. Et, quand on parle de capture, quand
on capture tous les chiens qui bougent en communauté, si je peux me permettre, c'est parce que c'est un problème de
communauté. On ne va même pas là pour stériliser trois, quatre chiens
d'un propriétaire qui voudrait son chien
stérilisé. Non. Il y a tellement de problèmes que c'est une décision
systématique du conseil de bande de nous demander : Venez nous
aider, venez stériliser l'ensemble de nos chiens.
Mme D'Amours :
Est-ce que vous avez déjà, par le passé, offert votre aide à ce qu'ils soient
structurés? Est-ce que vous avez déjà proposé des alternatives? Et
quelles ont été leurs réponses?
Mme Ducharme
(Chantal) : Oui. Quand on fait les cliniques, on fait toujours une
représentation dans les écoles. On
fait des représentations pour prévenir les morsures, donc les comportements
canins à détecter, les gestes à avoir, la réaction, le comportement humain qu'on doit avoir avec un animal. On
parle de bien-être animal, bien sûr, mais on parle beaucoup de prévention des morsures parce que
c'est principalement le mal-être des personnes qui vivent là-bas. On a
certaines communautés qui ont pris en charge, en main, beaucoup leur structure
de gestion animalière, donc je citais Chisasibi
tantôt. Wemotaci ont mis en place un nouveau règlement municipal avec la stérilisation
obligatoire, avec les paramètres
particuliers d'une communauté autochtone. Donc, les femelles en chaleur, ils ne
les mettent pas en enclos parce que
ce n'est pas dans leurs moeurs, mais ils établissent certaines structures.
Donc, une stérilisation, c'est une réponse à diminuer la quantité de
chiens dans la communauté.
Mme D'Amours :
Depuis hier, ce que je dis, puis c'est sûr que ça a un lien, mais... On parle
beaucoup, beaucoup de gestion animalière, mais la loi, c'est pour la
sécurité des citoyens. Alors, je sais qu'il y a un lien qui est relié à ça. Tout comme nous, je pense que le Grand Nord a perdu le
contrôle. Maintenant, contrairement à mon collègue, là, moi, je ne m'attendais pas à ce que les communautés viennent
nous parler parce que je pense qu'ils vont travailler, je pense, dans le
même sens que nous. Comme vous dites, ça va
peut-être être plus long. Mais je pense que le gouvernement, ainsi,
pourrait envoyer notre projet de loi et même, je dirais, de leur proposer de
s'en inspirer et de faire la même chose chez eux.
Je
reviens aux morsures. Quand vous parliez, tout à l'heure, là, qu'il manquait de
vétérinaires, est-ce que le projet de loi
que nous, on dépose... Est-ce que les médecins auraient aussi une importance?
Parce que, si on manque de vétérinaires, puis qu'il y a des morsures, est-ce que les médecins ont une grande
importance pour faire la divulgation, d'être un élément aussi pour tenir un registre, de voir aussi, bon,
quand tu es médecin, le degré de la morsure? Est-ce que vous pensez que
le médecin est aussi important que le vétérinaire?
Mme Ducharme
(Chantal) : Oui, c'est un acteur très important. De toute façon, il se
doit de répertorier les morsures, qu'on pense juste... le volet possible de
rage, de transmission de rage, est important. Par la loi, il doit le
transmettre. Mais, oui, l'implication des médecins de santé humaine est très,
très importante, au même titre que les vétérinaires. Si vous voulez bâtir un
règlement, vous parlez de chiens dangereux, il faut des évaluations, il faut
des vétérinaires. Il faut des vétérinaires sur place qui connaissent la réalité
autochtone.
Mme D'Amours :
Quand vous parlez que vous avez un nombre d'enfants qui sont décédés de
morsures de chien, qui vous les
donne, ces statistiques-là, s'il n'y a pas rien qui est pris là-bas? Comment
vous êtes capables de réussir à avoir un nombre? Est-ce que c'est un
nombre certain?
Mme Demianowicz
(Ewa) : Oui. Les morts sont comptabilisés au niveau, quand même, du
coroner, puis il y a des statistiques nationales sur les causes de mort,
là. Donc, ça, c'est des statistiques extrêmement fiables parce que... Les petites morsures, évidemment, personne ne
tient de registre là-dessus, que ce soit dans les communautés
autochtones ou ailleurs dans la province.
Mais, lorsqu'on en vient à des morsures graves qui mènent à la mort, bien,
évidemment, il y a tout un système
qui entre en branle, et qui analyse les situations, et plein de données qui
apparaissent, là. Donc, ces données-là sont extrêmement fiables.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que
nous avions. Donc, Mmes Demianowicz et Ducharme, merci beaucoup
pour avoir participé aux travaux de la commission.
Et je suspends
quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 58)
(Reprise
à 12 heures)
Le
Président (M. Auger) :
Nous reprenons nos travaux en souhaitant la bienvenue au Regroupement québécois
des intervenants en éducation
canine. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre présentation, par la suite suivra une période d'échange avec les trois groupes
parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous présenter. Par
la suite, vous pourrez commencer votre présentation.
Regroupement
québécois des intervenants
en éducation canine (RQIEC)
M. Robert
(Patrice) : M. le Président, M. le ministre, membres de la commission,
d'abord, merci de nous donner l'opportunité d'apporter notre point de
vue sur le projet de loi n° 128.
Mon nom est Patrice
Robert, je suis le président fondateur du Regroupement québécois des
intervenants en éducation canine. Je vous
présente Mme Fanny Peltier, qui est membre du conseil d'administration du
regroupement, et Mme Lucie Malouin, membre du regroupement qui a
participé à l'élaboration du mémoire qui vous a été présenté.
Le
Regroupement québécois des intervenants en éducation canine est une association
sur une base volontaire, qui représente
58 membres qui interviennent auprès des propriétaires de chiens dans
presque toutes les régions du Québec. Nous
intervenons quotidiennement en éducation canine, en évaluation comportementale,
en réhabilitation et en formation pour le public sur le comportement des
chiens. Pour être membre de notre regroupement, un intervenant canin doit s'engager à respecter un code d'éthique strict,
avoir réussi un examen d'admission qui s'assure qu'il possède les connaissances
requises pour la pratique de la profession,
il doit demeurer à la fine pointe de la technologie grâce à un programme
de formation continue obligatoire et doit travailler selon les méthodes basées
sur les dernières avancées scientifiques.
Le
regroupement est heureux que le gouvernement décide de se pencher sur la
sécurité des personnes vis-à-vis les morsures
de chien. Nous tenons à saluer le choix du gouvernement de légiférer sur les
chiens hybrides issus du croisement entre
un chien et une autre espèce de canidé ainsi que la proposition quant aux
chiens dressés à des fins de protection, de garde, de combat et
d'attaque.
Toutefois,
nous aimerions partager notre expertise en comportement canin sur des points
qui nous apparaissent problématiques
du projet de loi n° 128 tel que proposé actuellement. Il s'agit des
articles 17 et 19 ainsi que les alinéas 1° à 3° de l'annexe I, qui visent à déclarer des chiens potentiellement
dangereux en fonction de leur appartenance à une race ou à un croisement avec l'une de ces races. Nous
entendons vous démontrer que ces dispositions ne favorisent nullement la
sécurité publique et qu'au contraire elles établiront un faux sentiment de
sécurité qui aura des effets contraires aux objectifs de ce projet de loi.
Le regroupement
soutient, tout comme le démontrent les études à ce sujet, que de se baser sur
la race ou sur l'apparence physique d'un chien ne peut déterminer en aucune
façon la dangerosité de celui-ci. Les comportements agressifs et les morsures sont des comportements qui sont soumis aux
lois du conditionnement et que, si la génétique y joue un rôle certain, on ne peut en aucune façon faire
une corrélation entre le phénotype, c'est-à-dire l'apparence physique,
et les comportements agressifs que peut démontrer un chien.
Il
y a des individus agressifs parmi les chiens de toutes les apparences et de
toutes les races, et cela ne représente qu'une portion de l'ensemble des individus possédant les mêmes
caractéristiques morphologiques. Ce que nous appelons une race n'est en fait qu'une sélection arbitraire
de caractéristiques physiques déterminées par des clubs canins et
érigées en standards. Sur l'ensemble d'une
race, il y a des centaines, voire des milliers de lignées possédant chacune des
tendances qui leur sont propres, mais qui
n'affectent jamais l'ensemble des individus d'une même lignée ou encore moins
ceux d'une même race. Il y a toujours une variabilité due à la génétique
et aux innombrables possibilités que cela implique.
Si certaines lignées
sont plus enclines à devenir agressives que d'autres, c'est par une mauvaise
sélection des individus qui sont reproduits,
et ça ne représente jamais l'ensemble des individus qui composent cette race,
et ces tendances de certaines lignées
ne sont observées que pendant de courtes périodes de l'Histoire. Avant, c'étaient
les bergers allemands qui étaient
perçus comme agressifs, puis les dobermans, puis les huskies. Aujourd'hui, ce
sont les pitbulls. Demain, ce sera une autre race avec d'autres
caractéristiques physiques.
En fait, pratiquement
tous les animaux sont agressifs. Même les humains sont agressifs. L'agressivité
est un comportement inné, nécessaire à la
défense et à la survie des espèces. L'agressivité est latente chez tous les
individus, mais contenue par des mécanismes
d'inhibition qui sont le sceau de sécurité commun à tout individu dit non agressif.
C'est quand cette inhibition n'est pas
présente ou qu'elle a été perdue suite à des expériences traumatiques qu'un
chien est agressif. Il n'existe
aucune race de chien chez qui ces mécanismes d'inhibition ne sont pas présents.
Ils peuvent être plus faibles chez certains
individus ou certaines lignées et nécessiter un encadrement et un traitement
appropriés, mais cela ne s'observe pas sur l'ensemble d'aucune race de
chien connue à ce jour.
C'est
normalement en bas âge qu'un chien va apprendre à inhiber cette agressivité, au
contact des autres chiots de sa
portée ou en étant en contact avec des adultes sains. Un manque au niveau des
conditions d'élevage, l'utilisation de méthodes
d'éducation dépassées ou violentes, une mauvaise compréhension du langage canin
sont autant de facteurs qui
détermineront l'agressivité d'un chien, peu importe son apparence.
Nous
pouvons vous assurer qu'en tant que professionnels, quand nous voulons savoir
si un chien... si on a un risque de
se faire mordre, on ne regarde pas la race du chien ni même sa grosseur. On
observe son comportement sans aucun égard à son apparence physique. On peut être plus ou moins à l'aise à
travailler avec tel ou tel chien qui a telle ou telle apparence, mais ce n'est basé que sur des considérations
personnelles et ne relève que de l'anecdotique. Lors de nos
interventions, nous avons autant de chance
de nous faire mordre par un petit chien frisé que par un gros chien à poil long
ou court si on n'observe pas les signaux précurseurs de l'agression.
Déclarer
certaines races dangereuses aura des conséquences néfastes non seulement sur le
bien-être de nombreux chiens qui ne sont pas du tout une menace à la sécurité, mais aussi et
surtout au niveau de la sécurité de la population, et plus particulièrement
au niveau des personnes vulnérables comme les enfants et les personnes âgées.
Cela aura pour principal effet de dire que
l'apparence est le meilleur moyen de déterminer la dangerosité des chiens et
aura comme effet pervers de rendre
aux yeux des gens non informés les autres chiens sans danger. Cela aura aussi
pour effet de laisser croire aux
parents d'enfants ou aux propriétaires de chiens qu'ils peuvent faire confiance
sans distinction à tous les chiens qu'ils rencontrent. Est-il nécessaire de rappeler que 40 % des morsures de
chien est le fait de chien familial? Cibler certaines races aura pour effet de dédouaner les individus
agressifs qu'ils n'appartiennent pas à ces caractéristiques morphologiques
et mettra d'autant en danger la population, parce qu'elle se croira faussement protégée en
pensant que les chiens agressifs ont été bannis.
Le meilleur
moyen de protéger la population des agressions canines est de s'assurer de la
qualité des élevages, d'éduquer la
population sur le langage canin, d'éduquer les propriétaires de chien en
comportement canin par des formations
qui sont en accord avec les connaissances scientifiques actuelles et de mieux
identifier les individus agressifs sans égard à leur apparence ou à leur
race pour les réhabiliter lorsque c'est possible. L'identification des chiens
potentiellement dangereux devrait se faire par dénonciation par un policier, un
médecin, un employé municipal en contrôle animalier, un vétérinaire ou un
intervenant canin.
Un chien
déclaré potentiellement dangereux, c'est-à-dire un chien qui a causé des
lésions corporelles à un humain ou à
un animal domestique, devra être tenu en laisse et sous le contrôle de son
gardien et porter une muselière en tout temps quand il n'est pas dans le
domicile de son gardien, ne devrait pas être en contact avec des enfants, être
confiné à une pièce sécurisée ou dans une cage dans l'absence de son gardien.
Il devrait être soumis à une évaluation
comportementale pour déterminer s'il est dangereux ou non et pour déterminer les mesures appropriées à prendre, à
savoir le type de contrôle à appliquer, sa rééducation, sa médication ou
son euthanasie ou toute autre mesure jugée
appropriée au moment de son évaluation. Tout chien qui ne fait pas l'objet
d'une dénonciation devrait être présumé comme non agressif jusqu'à preuve du
contraire.
On pourrait
également envisager, tout comme on le fait pour la conduite automobile,
d'exiger de chaque propriétaire de
chien qu'il suive une formation de base en comportement canin, ce qui
assurerait une intervention précoce auprès des individus à risque et une
plus grande diffusion des bonnes pratiques à adopter quand on possède un chien.
En résumé, nous vous recommandons de légiférer
sans égard à une race, un type, un croisement de races ou d'apparence physique à l'exception des...
exception faite des hybrides, de légiférer au niveau de la reproduction et de
la vente de chiens au Québec de façon à
contrer la reproduction de chiens malades, instables et tenus dans des
conditions non optimales à leur développement,
incluant le développement naturel de l'inhibition à l'agressivité, d'interdire
le dressage des chiens pour la
protection, la garde, l'attaque ou le combat, de mettre en place un programme
d'éducation de la population concernant
le comportement, les besoins et le langage canin. Cette éducation devrait être
faite par des personnes qui sont à jour dans les connaissances
scientifiques actuelles en comportement canin.
Merci, M. le
Président, M. le ministre, membres de la commission, de nous avoir donné
l'opportunité de nous exprimer devant vous. Nous demeurons disponibles
pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup pour la présentation. M. le ministre, vous avez 16 minutes à
votre disposition.
M. Coiteux :
D'accord. Je veux juste m'assurer de bien avoir compris une chose, pour
commencer. Vous êtes... Par rapport à l'annexe, là, qui désigne des
races et des types spécifiques de chien, les chiens dressés à des fins de
combat, les hybrides issus d'un chien et d'un autre canidé qui n'est pas un
chien, pour vous, ça devrait être interdit?
M. Robert (Patrice) : Oui, oui.
M. Coiteux :
O.K. Donc, votre enjeu, par rapport à cette annexe-là, c'est essentiellement
les chiens de type pitbull.
• (12 h 10) •
M. Robert
(Patrice) : D'identifier des races, peu importe la race que vous allez
identifier. Vous auriez identifié des caniches ou des labradors, on serait
ici aujourd'hui pareil.
M. Coiteux : D'accord.
Mon autre question, c'est que... Vous dites, bon,
on ne peut pas définir un chien... selon votre point de vue, on
ne peut pas définir un chien comme étant potentiellement dangereux à moins que
son comportement ait démontré qu'il
était dangereux. Et donc, a priori, tous les chiens seraient... je pense que
c'est vos propos, a priori, tous les chiens ne sont pas dangereux, dans
le fond. C'est ce que vous avez dit?
M. Robert
(Patrice) : Bien, en fait, oui, parce que le chien est un animal
social qui est fait pour vivre en groupe, et un animal qui vit en groupe
normalement ne démontre pas des comportements agressifs envers les membres de
ce groupe-là. Le chien a été domestiqué. Donc, avoir un chien agressif, en soi,
est une aberration.
M. Coiteux : O.K. Mais alors ma question est la suivante. Ces
chiens qui n'auraient pas démontré un comportement agressif et qui
n'auraient donc pas été, dans vos propositions, suite à un examen, déclarés
comme potentiellement dangereux, il y a néanmoins des règles d'encadrement qui
doivent s'appliquer à son égard.
M. Robert
(Patrice) : Oui.
M. Coiteux :
Et quelles sont ces règles d'encadrement que vous voudriez voir appliquées dans
toutes les villes du Québec, sans exception, sans la moindre exception?
Quel est le plancher minimal des règlements municipaux pour s'assurer que...
M. Robert (Patrice) : Bien, le
plancher...
M. Coiteux :
...la population soit en sécurité, même lorsqu'un chien n'a pas encore commis
un geste agressif?
M. Robert
(Patrice) : Oui. Le plancher minimal, c'est d'avoir un contrôle, de
comprendre le comportement de son chien,
d'avoir un contrôle sur le chien. Donc, les gens doivent être informés de
savoir comment manipuler un chien, de la même façon qu'on demande un permis de conduire pour conduire une
automobile qui peut tuer des gens, de la même façon qu'on demande un
permis pour port d'arme, puis que les gens doivent suivre des formations, on
devrait donner des formations pour avoir le droit de posséder un chien.
Donc, avec
l'émission d'une médaille, on pourrait exiger que les gens suivent une
formation de base pour comprendre le
comportement, être en mesure de contrôler, de comprendre leur chien et d'être
en mesure de le manipuler. Dans la même façon, garder le chien en laisse quand c'est approprié, en présence
d'autres personnes, en milieu urbain. En milieu rural, ça peut être
moins approprié, si les gens sont sur leur propriété, mais, en milieu urbain,
garder le chien en laisse et avoir le contrôle en tout temps sur l'animal.
M. Coiteux : La formation dont
vous parlez, est-ce qu'elle est actuellement disponible sur tout le territoire?
M. Robert (Patrice) : Oui.
M. Coiteux : Et à quoi
ressemble-t-elle?
M. Robert
(Patrice) : C'est des formations qui sont données par des éducateurs
canins, qui donnent l'information de
base, à savoir comprendre le langage canin, savoir comment manipuler son chien,
comment le travailler, un renforcement positif,
pas de travailler avec des techniques, là, qui sont aversives, comme on sait
que les techniques aversives ont tendance à rendre les chiens plus
agressifs, les rendre plus anxieux, donc comment travailler avec les animaux,
de base.
M. Coiteux : Qui offre cette
formation?
M. Robert
(Patrice) : C'est des formations qui sont offertes par différents
groupes. C'est des gens qui ont travaillé dans le domaine puis qui offrent différents groupes. Ça fait qu'il n'y a
pas de réglementation au niveau de l'éducation canine au Québec, là, comme vous le savez sans doute. Donc, c'est un peu
toujours des gens qui sont autodidactes, qui vont permettre ce genre de formation là. Ça fait qu'on trouve de tout,
des bonnes formations, des moins bonnes formations. C'est le but de
notre regroupement, justement, d'essayer de...
M. Coiteux : Mais voilà la
question, voilà la question. C'est pour ça que je vous dis : Quel est le
plancher minimum? Vous mettez l'accent sur
la formation des propriétaires de chiens, vous parlez de la laisse, de la maîtrise
de son animal en tout temps, probablement
d'autres dispositions. Je ne sais pas si vous souhaitez également la
micropuce, il y a beaucoup de gens qui nous
ont mentionné ça au cours de nos consultations jusqu'à maintenant. Mais vous me
dites : Cette formation, bien
qu'elle existe partout sur le territoire. Là, je me poserais la question :
Comment est-elle livrée en dehors des grands
centres, où il y a peut-être un certain nombre de formateurs, dans les
communautés rurales ou en région éloignée? Comment ça fonctionne? Il faudrait le savoir, mais vous me dites qu'elle
est de qualité inégale. Alors, comment pourrait-on s'assurer, si on va dans le sens de ce que vous
proposez, que cette formation-là, elle ne soit pas de qualité inégale
mais de qualité attendue pour des fins d'assurer la sécurité de la population
partout sur le territoire?
M. Robert
(Patrice) : Exact. C'est un peu le but du regroupement, on essaie
d'avoir une standardisation dans les pratiques d'éducation canine, ce
qu'on n'a pas au Québec, et c'est un peu le but d'avoir créé cette
association-là. On était une cinquantaine,
au départ, à vouloir former ça, parce qu'il y a des balises scientifiques
connues à ce jour, qui sont reconnues
par les vétérinaires, qui sont promues par les vétérinaires, qui sont promues
par les comportementalistes en comportement animal. Donc, il y a des
bases scientifiques qui sont connues, entre autres, comme je disais, là, le renforcement positif. Et, quand on travaille sur
ces bases-là, c'est les bases minimales qui devraient être utilisées
pour travailler avec les animaux de compagnie.
M. Coiteux : Mon collègue
député d'Orford avait peut-être quelques questions.
Le Président (M. Auger) : Oui,
M. le député d'Orford.
M. Reid :
Merci, M. le Président. Vous savez, dans les sujets qu'on ne connaît pas
nécessairement, quand on vient ici,
même s'il y a un projet de loi, les choses ne sont pas toujours définies,
parce qu'on veut avoir de l'information. Et il y a quelque chose qui n'est pas sorti, que moi, j'ai
entendu dans des corridors, parce qu'il y a beaucoup de gens qui
viennent ici, puis souvent on parle un peu,
etc., et j'aimerais avoir une opinion, parce qu'il me semble que ça pourrait
avoir un impact ou en tout cas que vous pourriez jouer un rôle dans quelque
chose comme ça. C'est qu'il y a quelqu'un qui a dit : Peut-être
qu'on devrait avoir, que ce soit pour certaines espèces ou pour tout le monde, mais avoir une preuve d'assurance, pour un propriétaire de chien, pour être capable d'être... effectivement, dans une ville, autrement dit, d'avoir son permis, etc.
Évidemment,
c'est un changement qui est radical et qui est peut-être impossible, là. Par
contre, je me dis, moi, on fait bien,
pour d'autres choses... On demande, pour les armes à feu, d'avoir suivi un
cours, on demande... Alors, est-ce
que ça pourrait être une assurance ou alors,
par exemple, l'obligation d'avoir
suivi un cours, des choses comme ça? Je ne vais pas vous servir un plat, là, où vous dites : Évidemment, nous, on
est prêts parce que ça nous donne de la business, et tout ça, mais logiquement, derrière ça, est-ce qu'il y
a des impossibilités? Est-ce que c'est trop gros? Est-ce que ça pourrait
avoir comme impact de réduire, par exemple,
la combinaison d'un animal qui pourrait être dangereux quand il n'est pas
bien pris en charge au Québec? Je ne sais
pas qu'est-ce que c'est... Pour nous éclairer là-dessus. Moi, c'est quelque
chose que je n'avais entendu, puis ce
n'est pas arrivé non plus par les témoins qui sont venus nous rencontrer. Donc,
j'en profite pour vous poser la question.
M. Robert (Patrice) : Au niveau
des assurances?
M. Reid :
Assurances, ou l'obligation d'un cours, ou ce genre d'obligation là, d'avoir
soit un assureur qui s'est assuré que
vous êtes, disons, correct, là, ou d'avoir au moins une formation, qui devrait,
à ce moment-là, être standardisée, évidemment.
M. Robert (Patrice) : Bien,
pour ce qui est des assurances, je vais laisser tout de suite après ma collègue
ici répondre, mais, je vous dirais, à la
base, quand on a un problème... Je vais trahir mon âge, là, mais, quand j'étais
jeune, il n'y avait pas de sécurité sur les pots de pilules. Et, quand on a eu
des enfants qui ont mangé des pilules, puis que ça a causé probablement des décès, ce qu'on a fait, c'est qu'on a été
voir les fabricants de pilules puis on a dit : Vous allez régler votre problème, tu sais, c'est à vous à
régler le problème. Si on a des problèmes avec un coussin gonflable qui
est défectueux, bien, on va voir le fabricant puis on va aller dire au
fabricant : Répare ton problème.
Donc, au
niveau des chiens, un des principaux problèmes qu'on rencontre, c'est au niveau
de l'élevage. Ça, ça a été mentionné
à plusieurs reprises. Il faut contrôler les éleveurs et que les éleveurs
produisent des chiens qui sont stables, des chiens qui sont capables de
s'intégrer en société.
Ensuite,
comme c'est quand même un être vivant, il faut éduquer cet animal-là. Et, si on
éduque cet animal-là avec des
anciennes méthodes, des méthodes coercitives, donc on le travaille avec un
collier à pics, avec un «choker», c'est sûr que cet animal-là...
M. Reid : ...que
vous êtes en train de parler, à ce moment-là, du propriétaire ou enfin de celui
qui fait... oui, O.K., dans la majorité des cas.
M. Robert
(Patrice) : Oui, exact. Donc, à ce moment-là, oui, nous, on est en
faveur de demander à ce que, pour posséder
un chien, les gens doivent suivre au moins une formation de base, qui n'est pas
obligée d'être très longue, ça peut être
une heure ou deux, ça peut être très bien standardisé, fait de façon très
cohérente en collaboration avec les médecins vétérinaires, qui vont reconnaître tout de suite la pertinence d'avoir
ce genre de formation là, et par la suite les gens vont être équipés.
Donc, on va, à la source, aller sécuriser le produit, si on veut. Ça, c'est la
base.
Pour ce qui est des assurances, comme je vous
dis, je vais laisser Mme Malouin répondre à la question.
Le Président (M. Auger) : Mme Malouin.
Mme Malouin (Lucie) : Oui. Je n'ai
pas très bien compris votre question par rapport aux assurances.
M. Reid :
Par exemple, pour avoir un permis, dans une ville, mettons, il faudrait que la
personne... comme quand on veut
acheter une automobile, il faut avoir un permis de conduire, il faut avoir une
preuve d'assurance. Alors, est-ce que,
par exemple... Ça paraît gros, mais il y a peut-être... ça peut peut-être nous
amener à des idées intéressantes. Mais est-ce que... J'aimerais ça avoir
vos commentaires là-dessus. Ce que j'ai entendu, c'est un cas un peu extrême. Autrement dit, tu ne peux pas avoir un permis de
chien si tu n'as pas une preuve d'assurance. Mais peut-être que ça nous mènerait peut-être à quelque chose d'autre, puis
j'aimerais ça avoir vos commentaires, parce qu'il n'y a personne qui a
parlé de ça, à par les corridors.
Mme
Malouin (Lucie) : O.K. Moi, je connais plus un peu l'aspect des chiens
dangereux, par rapport aux... bien, certaines
races, par rapport aux compagnies d'assurance, qui ne désirent pas assurer les
propriétaires. Mais, au niveau des cours,
les intervenants en comportement canin ont des assurances. Je ne sais pas... Je
crois que je ne comprends pas bien votre question.
M. Reid : Ce
serait pour le propriétaire.
Mme Malouin (Lucie) : Pour le
propriétaire.
M. Reid :
Parce que ça existe, on m'a dit que ça existait pour certains cas et qu'il y a
certains cas où les assurances hésitent
à donner une assurance parce que le type d'animal... ou il n'y a pas de
garantie que le propriétaire ou l'animal a été bien élevé, autrement dit...
bien, l'animal a été bien élevé, le propriétaire a fait une bonne job.
Mme
Malouin (Lucie) : Oui. Bien, vous savez, les compagnies d'assurance
peuvent déterminer quels risques qu'elles
désirent prendre. Elles peuvent déterminer, pour une raison ou aucune raison,
qu'elles sont à l'aise de prendre certaines
races de chien ou types de chien. Toutefois, il peut aussi y avoir un manque de...
Quand on parle d'expérience, c'est les demandes de règlement. Alors, ils
peuvent décider de ne pas assurer un certain type de chien par manque d'expérience, donc par manque d'expérience de
règlement. Donc, en fait, on ne le sait pas, la raison. Il faudrait
vérifier auprès des compagnies d'assurance, pourquoi elles ne veulent pas
assurer ce...
M. Reid :
O.K. Donc, ça existe, mais ce n'est pas systématique. C'est ça qui est existe
aujourd'hui. O.K. Merci.
• (12 h 20) •
Le
Président (M. Auger) : D'autres
interventions? M. le ministre. Ça va? Ça va, M. le député d'Orford? M.
le député de Verchères, pour 9 min 30 s.
M. Bergeron :
Merci, M. le Président. Merci de votre présentation. À l'instar de M. le
ministre, j'ai bien constaté que vous
mettez l'emphase, puis c'est normal parce que c'est votre spécialité, sur la
formation. Vous avez répété un certain nombre
de choses qu'on entend depuis un certain nombre de jours, notamment cette idée
selon laquelle il n'y a aucun chien qui
naît dangereux, il le devient. À cette affirmation qui nous a souvent été
répétée, bien, je pose la question... je rétorque que, bien sûr, on est dans une autre ère, vous
l'avez souligné à juste titre, on est dans une autre ère, de plus en plus
les propriétaires éduquent leur chien de façon responsable, mais, pendant des
siècles, voire des millénaires, on a entraîné certaines races de chien au
combat, donc on a développé un comportement agressif chez certains chiens, qui
se sont probablement perpétués dans le code génétique de certaines races.
Et
là on me rétorque, et j'admets cet argument-là, on me rétorque : Oui, mais
comment vous allez identifier la race?
Ce n'est pas juste l'apparence, là. Comment est-ce que vous allez être certains
qu'il y a dans le code génétique ce quelque chose auquel on fait
référence?
Vous
avez ajouté, tout à l'heure : Le chien est un animal grégaire, donc qui
vit en groupe, c'est un animal social, et
que des manifestations d'agressivité contre les membres du groupe, ce n'est pas
normal. Sauf que nous avons tous été témoins
de chiens qui, lorsqu'ils se croisent sur la rue, s'agressent très brutalement,
ce qui vient contredire l'argument selon lequel le chien est un animal grégaire et que toute manifestation
d'agressivité à l'égard des membres du groupe, ce n'est pas normal. Là,
vous allez me répondre : C'est parce que l'autre ne fait pas partie du
groupe. Non?
M. Robert
(Patrice) : Non, pas du tout. C'est-à-dire que le comportement
d'agressivité en soi n'est pas normal, et le problème qu'on rencontre... Si vous vous promenez en Europe ou en
Amérique latine, les chiens sont en liberté dans la rue puis ils ne s'attaquent pas, là. Donc, ici, on
a un problème parce qu'on a perdu le contrôle au niveau des élevages et justement parce qu'on a laissé des gens reproduire
des animaux qui n'auraient pas dû être reproduits, et qu'on fait un peu n'importe quoi, puis qu'on met ça en liberté dans
la ville, là. C'est pour ça qu'on rencontre ce genre de problème là. Un
chien bien élevé, bien socialisé n'aura pas ce genre de comportement là. Et il
faut reprendre le contrôle sur ce genre de situation là.
M. Bergeron :
Bien, moi, je... En tout cas, évidemment, moi, j'ai un tout petit chien, que je
crois avoir... qu'on a bien élevé, on
lui a même fait suivre un cours de dressage. Avec les êtres humains, elle est
adorable. Avec n'importe quel autre
être vivant, elle est insupportable. Elle est d'une agressivité, là, c'est
incroyable. Alors, on a tenté autant comme autant de contrôler ça, mais
on dirait que c'est une réaction, entre guillemets, normale, dans notre
société, de voir les chiens s'agresser les uns et les autres.
M. Robert
(Patrice) : Ce n'est pas normal.
M. Bergeron :
Ce n'est pas normal.
M. Robert
(Patrice) : Ce n'est pas normal.
M. Bergeron :
Bien, en tout cas, si ce n'est pas normal, c'est mauditement répandu, parce
qu'on voit ça, là, tous les jours dans les rues...
M. Robert
(Patrice) : Absolument. C'est définitivement un problème qu'on a, et
c'est pour ça qu'on dit qu'il faut, à
la base, aller voir ceux qui nous font ces chiens-là, qui nous font des chiens
stables, qui donnent une bonne socialisation.
Donc,
ce que vous me décrivez comme problème avec votre chien, c'est un problème au
niveau de la socialisation. Il n'a pas été bien socialisé par rapport
aux autres espèces animales, les espèces avec lesquelles il va vivre...
M. Bergeron :
Je vous assure qu'on a tenté, là. Depuis qu'elle est toute petite qu'on la
présente à toutes sortes d'autres animaux. Il n'y a rien à faire.
M. Robert
(Patrice) : Mais la socialisation, passé quatre mois, ce n'est plus
possible, on oublie, ce n'est plus faisable.
La socialisation doit se faire en période primaire, quand le chiot est bébé.
Et, passé quatre mois, on ne parle plus de socialisation. Là, on va
gérer ce qu'on a entre les mains.
Donc, passé
cette période-là, là il faut prendre des outils pour gérer cet animal-là. Donc,
vous savez que vous avez ce
problème-là, donc, à ce moment-là, il faut garder en laisse, éviter les
contacts avec les autres individus. Mais, s'il y avait eu une bonne
socialisation en bas âge, vous n'auriez pas ce problème-là.
M. Bergeron : Et un des
problèmes qu'on a, c'est que souvent ils sont vendus après quatre mois...
M. Robert (Patrice) : Oui,
exact. Donc, des mauvais...
M. Bergeron :
...et que le mal est fait, là, si je comprends bien ce que vous nous dites, là.
Donc, il faut s'organiser pour les...
M. Robert
(Patrice) : Avoir des éleveurs, des gens qui savent ce qu'ils font,
qui font une bonne socialisation en bas âge; quand l'animal est vendu à
deux mois à un propriétaire, qu'il puisse aller dans une école qui va lui expliquer
qu'il a encore deux mois, que le chien va
avoir une période d'adolescence dans laquelle tous les comportements
devront être réappris.
Donc, il y a
toute une science qui est connue, au niveau du développement des chiens, qui
doit être maîtrisée, que les
propriétaires de chiens doivent maîtriser, que ceux qui enseignent aux
propriétaires de chiens doivent maîtriser pour rendre ces animaux-là ce qu'ils devraient être, des animaux de bonne
compagnie, des animaux fiables puis qui sont faits pour vivre en société
sans représenter un danger pour les autres.
Un chien qui
attaque un humain, c'est une aberration, c'est une aberration, ça ne devrait
pas exister, mais c'est des animaux
qui sont élevés dans des conditions aberrantes, donc on a des comportements aberrants.
C'est ce qui arrive. Ça n'a aucun bon sens qu'on se sente menacé par un
chien.
Le Président (M. Auger) :
Quatre minutes.
M. Bergeron : Quatre minutes. Vous semblez exclure la possibilité que... Parce que chez l'être humain ça arrive, là, il y a
des êtres humains qui, même bien socialisés, sont naturellement agressifs.
M. Robert (Patrice) : Définitivement.
M. Bergeron : Ça arrive,
paraît-il. Ce n'est pas le genre de chose qui peut arriver chez un animal?
M. Robert
(Patrice) : Ah! définitivement, oui. On travaille avec du vivant, il y
aura toujours un chien à quelque part
qui va nous faire mentir, toujours. Ça fait que, oui, il y a des chiens qui
vont avoir une très bonne socialisation puis que ça ne va donner aucun résultat.
M. Bergeron :
Alors, quand vous nous dites, là, que... des sanctions au propriétaire plutôt
qu'à l'animal, on peut se retrouver
dans une situation... je reprends votre recommandation, là, mais on
peut se retrouver dans une situation où un animal attaque, et, lorsqu'on
examine les circonstances, on réalise que le propriétaire est un propriétaire
responsable, qu'il n'y a pas eu de
provocation, l'animal ne se sentait pas menacé, il a soudainement décidé
d'attaquer. Là, il faudrait s'en prendre au propriétaire là encore?
M. Robert (Patrice) : Ça
n'arrive pas, un chien... Ça arrive, mais c'est très, très, très rare qu'un
chien va...
M. Bergeron : Mais ça arrive.
M. Robert (Patrice) : ...va
attaquer sans raison. C'est une tumeur au cerveau. Il faut qu'il y ait une
cause pratiquement physique, quelque chose qui est imprévisible, comme ça peut
arriver chez un humain.
M. Bergeron :
Les vétérinaires nous ont dit qu'il y avait certaines attaques qui étaient des
attaques de prédation, qui n'étaient donc pas prévisibles...
M. Robert (Patrice) : Oui.
C'est prévisible, c'est toujours...
M. Bergeron : ...qui n'avaient
rien à voir avec une tumeur au cerveau, là.
M. Robert (Patrice) : C'est
prévisible. Vous avez des comportements précurseurs de toute attaque, il y a
des comportements précurseurs. On peut
déterminer que le chien est en mode de prédation. Il va d'abord commencer par
fixer sa proie, il va commencer... Donc, on
peut voir apparaître ces signaux-là. Même s'ils sont rapides, on les voit
arriver. Et, si les propriétaires
sont avertis de ces signaux-là, qu'ils comprennent le langage de leur chien,
que le chien a été vu en bas âge...
Vous m'amenez un petit chiot de deux mois, je peux vous dire s'il a de la
«drive» ou non au niveau de sa prédation. Je vais être capable de vous donner des outils
pour gérer ça, vous dire dans quelles circonstances ça va être
problématique et vous donner les outils pour
gérer cet animal-là, pour minimiser le plus possible les problèmes que ça pourrait
engendrer. Donc, il y a des outils, il y a des choses qui sont connues à ce
niveau-là.
Des
agressions... Les gens qui disent : Mon chien n'a jamais rien fait, puis
tout d'un coup il nous a attaqués, il y a eu probablement des dizaines de signaux qui ont été envoyés par le
chien, mais que les gens n'ont pas été capables de détecter. Un chien qui se lèche les babines, tout
le monde trouve ça cute, mais c'est un signal d'inconfort de la part du
chien. Un chien qui détourne la tête quand
on lui fait un câlin, c'est un signal d'inconfort, mais les gens se
disent : Ah! il aime ça quand je
lui fais des câlins. Le chien, ça fait trois ans qu'il vous dit : Je
n'aime pas ça, je n'aime pas ça, je n'aime pas ça. À un moment donné, il y a un accident qui arrive,
puis on dit : Ah! je ne l'avais pas vu venir. Le chien a fait tout ce
qu'il pouvait, mais on ne comprend pas le
langage du chien. Ça fait que c'est sûr qu'à ce moment-là c'est des problèmes,
puis on a l'impression qu'on n'a pas compris, mais, oui, il y avait
généralement des signaux.
Un chien qui
attaque sans signaux, c'est un chien qui a eu probablement une éducation qui
lui a interdit de manifester ces
signaux-là. Un chien qui grogne donne un avertissement, de dire : Ne
pousse pas le bouchon, je vais te mordre.
Il donne un avertissement. Si on punit ce grognement-là parce qu'on dit, avec
les anciennes croyances, qu'un chien ne
devrait pas grogner, bien, on enlève un moyen de communication à l'animal, et à
ce moment-là le chien va mordre sans avertissement parce qu'il aura eu
une mauvaise éducation. Donc, c'est...
M. Bergeron :
Oui, je comprends. Mais, un chien qui tout à coup mord et provoque des
blessures graves, on le remet dans la circulation puis on s'en prend au
propriétaire?
M. Robert (Patrice) : Non.
Comme je l'ai expliqué dans ma présentation, ce chien-là devrait être déclaré
potentiellement dangereux, devrait avoir un contrôle, devrait avoir une
évaluation. Mais c'est la responsabilité du propriétaire de s'occuper de son
chien, définitivement.
M. Bergeron : Je vous remercie.
Le Président (M. Auger) :
Merci. Nous allons maintenant poursuivre avec Mme la députée de Mirabel, pour 6
min 30 s.
Mme D'Amours : Merci, M. le
Président. Bonjour. Bonjour, mesdames. Vous nous avez mentionné que de mettre
un règlement sur les...
Une voix : ...
Mme D'Amours : Je m'excuse...
Le Président (M. Auger) : Oui,
allez-y, madame...
• (12 h 30) •
Mme D'Amours : Il a une voix
forte, mon collègue d'à côté.
Vous nous
disiez qu'il y avait peut-être... qu'on créerait peut-être une fausse sécurité
si on mettait, bon... Parce que vous
avez fait référence à l'article 19, 17 et 19, en nommant une race ou un
type de chien, mais ne croyez-vous pas qu'au contraire... Parce que l'article 17 et 19 met un règlement à part
qui fait que le ministre peut mettre une race ou un type de chien mais
peut aussi l'enlever. En fait, la loi, c'est pour... Si on se réfère au début
des tragédies qu'on a vécues et pourquoi
qu'on dépose cette loi-là, c'est parce qu'il y a un manque de sécurité,
les citoyens ne se sentent plus en sécurité. Donc, en faisant ce projet de loi là, on vient
comme de... on veut régler le problème pour ensuite probablement prévenir avec des gestes. Est-ce que vous ne pensez
pas que les citoyens sont assez intelligents pour dire que, maintenant qu'il y a un règlement
qui est annexé à cette loi-là, qui fait qu'on peut mettre un chien ou on peut
l'enlever, là, mais on peut le mettre... que les gens ne se sentiront
pas un peu plus responsables, s'ils aiment leurs animaux, s'ils aiment leurs
races de chien?
M. Robert
(Patrice) : Pour nous, ça va
avoir l'effet contraire. C'est-à-dire qu'il n'y a pas une race qui, dans son ensemble, représente des problématiques. C'est que vous pouvez avoir plus ou moins d'individus d'une même race
qui représentent une problématique parce qu'elle aura été favorisée par certains éleveurs, certains
groupes de personnes pour faire
du combat, pour faire de l'attaque, donc ça... il peut y avoir un certain
groupe d'individus d'une même race qui vont être favorisés dans
certaines circonstances. Ça va changer avec les modes. Mais ce n'est pas
l'ensemble de ces individus-là. Donc, il n'y
aura pas de circonstance dans laquelle on pourra dire qu'il y a une
race dans son ensemble qui représente un problème, ça ne risque pas
d'arriver.
Mme D'Amours : Mais vous parlez
des individus. Si ces races ou ces types de chien là ne sont pas dans le règlement,
comment fait-on pour sécuriser les citoyens? Comment fait-on pour leur donner le sentiment
de sécurité si on ne fait pas de geste concret?
M. Robert
(Patrice) : Les gestes concrets, comme je disais, c'est d'aller à la
base, de s'assurer que ceux qui produisent ces chiens-là vont le faire de la
bonne façon, ceux qui vont les éduquer vont le faire de la bonne façon, et d'appliquer les règlements
municipaux qui sont en place pour
justement, dès qu'il y a une dénonciation face à un individu qui représente un potentiel de dangerosité, qu'on
intervienne immédiatement, qu'on n'attende pas qu'il y ait des drames épouvantables comme on a connus, qui se sont
passés, qui ont mis tout le Québec sous le choc. On s'entend, ça n'a
aucun bon sens. Donc, il faut qu'on soit en
mesure d'intervenir, mais d'intervenir vers les individus qui représentent un
problème, pas pénaliser toute une population
pour cibler certains individus qui, eux, auront été sélectionnés par certains
humains pour des considérations qui sont douteuses.
Mme D'Amours :
Je vais vous poser la question. Je l'ai posée hier, mais on manquait de temps
pour que je puisse élaborer sur cette
question-là. C'est : Pour qu'une population change ses habitudes, combien
de temps nous devons attendre pour
voir un réel changement? Là, je ne parle pas du cours, combien de temps ça
prend, mais combien de temps si tous les propriétaires de chiens suivent un cours de bon comportement. Combien de
temps, ça change, et combien de temps aussi que ça va prendre pour avoir un réel changement sur les chiens? Parce
que vous avez parlé qu'un chien, après quatre mois, pour la sociabilisation, c'est terminé. Bien, nos
chiens vivent 10, 12, 15 ans. Alors, moi, je me pose la question :
Combien de temps ça va prendre pour qu'une société se sente en sécurité?
M. Robert
(Patrice) : Bien, je pense que, si on commence à appliquer aujourd'hui
ce genre de règlement là, de dire que
les gens doivent suivre une formation, vous allez voir des résultats
relativement rapidement. Parce que, si on est capable de prévoir les signes précurseurs d'une agression, on va être
capable d'intervenir beaucoup plus rapidement et d'identifier beaucoup plus rapidement. Ça fait que, moi, je vous dirais,
en quelques années on devrait voir un changement majeur au niveau des comportements des individus, des gens, parce qu'on
sera plus en mesure de comprendre et de prévenir ces situations-là. Et, si les autorités compétentes interviennent
rapidement sur dénonciation d'un individu problématique, bien, à ce moment-là, les gens vont se sentir en
sécurité, parce que les chiens problématiques ne seront plus en
circulation.
Mme D'Amours :
Ma dernière question, c'est... Bon, oui, pour la formation, on achète un chien
chez un éleveur, on le fait voir chez
le vétérinaire, tout ça a un coût. Qu'est-ce que vous pensez des familles qui
n'ont pas beaucoup de sous mais qui
aimeraient que leur enfant ait un animal de compagnie à la maison, qui ne
pourront pas se permettre d'avoir un animal de compagnie parce qu'elles
n'auront pas les moyens de tout faire ça? Qu'est-ce que vous pensez de...
M. Robert
(Patrice) : Avoir un chien, c'est une responsabilité. Ce n'est pas un
jouet, avoir un chien. Avoir un chien
implique qu'on doit avoir des frais vétérinaires, qu'on doit payer une formation.
Quand on a des enfants, on doit aller voir
le médecin. Heureusement, au Québec, on n'a pas à payer, mais il faut aller
voir le médecin, il faut aller à l'école, il faut... Avoir un chien, c'est une responsabilité d'une vie. Donc, si on
est prêt à s'engager à avoir un chien, il faut être prêt à avoir tout ce
qu'il faut, ce qui est nécessaire pour s'assurer du bien-être de cet animal-là.
Donc,
pour moi, si les gens n'ont pas les moyens d'avoir un chien, bien, il y a
d'autres occupations qu'on peut faire.
Tu sais, ce n'est pas nécessaire pour les enfants, pour être bien développé, d'être en... de posséder un
animal, là. Ce n'est pas un jouet, un chien.
Mme D'Amours :
Et est-ce que...
Le Président
(M. Auger) : ...question. 30 secondes, Mme la députée.
Mme D'Amours :
Merci. Est-ce que vous pensez que la vente de chiens devrait être contrôlée?
M. Robert
(Patrice) : Absolument.
Mme D'Amours :
Et puis est-ce que ce serait une raison supplémentaire pour la sécurité des
gens?
M. Robert
(Patrice) : Oui, définitivement.
Le
Président (M. Auger) : Merci, Mme la députée de Mirabel. Donc,
Mmes Maloin et Peltier, M. Robert, merci beaucoup d'avoir
participé aux travaux de la commission.
Je vais suspendre la
commission jusqu'à 15 heures. Merci.
(Suspension de la séance à
12 h 36)
(Reprise à 15 heures)
Le Président
(M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des
institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 128, Loi
visant à favoriser la protection des personnes par la mise en place d'un
encadrement concernant les chiens.
Nous
entendrons, cet après-midi, les organismes suivants : tout d'abord, le
chef de l'opposition officielle de la ville de Montréal, le Dr Ethan Lichtblau, M. Bernard Biron, ANIMA-Québec
et, finalement, la Coalition pour la promotion de la
sécurité des personnes et des chiens.
Je souhaite maintenant
la bienvenue au représentant et chef de l'opposition officielle de la
ville de Montréal. Je vous
rappelle que vous avez 10 minutes à votre disposition pour faire votre
présentation, et par la suite il y
aura une période d'échange avec les
trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous
identifier, et par la suite vous pourrez commencer votre présentation.
Ensemble
Montréal
M. Perez
(Lionel J.) : Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. Mon nom est
Lionel Perez, chef intérimaire du parti politique Ensemble
Montréal, chef de l'opposition à l'hôtel de ville de Montréal.
M. le Président, M.
le vice-président, M. le ministre, chers membres de la commission, tout
d'abord, je vous remercie de donner à
l'opposition officielle de la ville de Montréal l'occasion de s'exprimer sur ce
sujet. Nous sommes d'avis que l'expérience
de Montréal sur cette question sera bénéfique dans vos travaux concernant le
projet de loi n° 128.
Vous
n'êtes pas sans savoir qu'à la suite d'incidents impliquant diverses attaques
de chiens, dont une qui a causé la
mort de Mme Christiane Vadnais, en juin 2016, la ville de Montréal
s'est dotée, en octobre de cette même année, d'un nouveau règlement sur le contrôle animalier, un
règlement que je qualifierais d'hybride puisque, d'un côté, il mettait
l'accent sur la responsabilité des
propriétaires de chiens et, de l'autre, il proposait un encadrement plus sévère
des chiens jugés dangereux, notamment
avec une interdiction de se procurer un nouveau chien du type pitbull.
D'ailleurs, plusieurs des mesures
comprises dans le règlement montréalais se trouvent dans le projet de loi
n° 128, ce qui tend à démontrer que les problématiques vécues à
Montréal ont le potentiel de se retrouver ailleurs au Québec.
Nous
appuyons fermement le projet de loi n° 128. Et, bien qu'il reflète
l'esprit du règlement montréalais de 2016, nous avons tout de même quelques recommandations à faire concernant son
application. L'idée est d'en faire un outil qui va protéger et sauver
des vies humaines. C'est l'argument essentiel qui doit être à la base de nos
discussions.
En
effet, malgré les positions variées et divergentes quant à l'encadrement
souhaitable des chiens dans nos collectivités,
on se doit de se rappeler que l'important est toujours de protéger la vie
humaine. En clair, la vie humaine doit
avoir priorité sur le droit des propriétaires de posséder une certaine race ou
un certain type de chien. En cas de doute, il faut toujours pencher du côté de la prudence et de la prévention,
toujours. Cela peut paraître évident, mais il y a parfois des évidences qu'il est bon de rappeler, surtout dans
un débat où les opinions sont polarisées, où la science et les
statistiques sont interjetées de toutes sortes de façons et où les émotions
sont vives.
Cela
étant dit, nous considérons d'entrée de jeu qu'il est important que ce soit le
gouvernement du Québec qui légifère sur ce sujet, d'abord parce qu'il
est nécessaire d'avoir une application uniforme dans la loi sur l'ensemble du
territoire québécois. Il faut des balises minimales, peu importe notre
territoire ou municipalité.
À Montréal, nous
vivons une situation géographique et administrative particulière avec une ville
divisée en 19 arrondissements et un
territoire partagé avec 14 autres villes liées dans notre agglomération.
La gestion animalière étant de
compétence d'arrondissement à la base, il nous a fallu recourir à un article
particulier de la Charte de la Ville de Montréal pour que notre
règlement sur le contrôle des animaux de 2016 soit appliqué de façon uniforme à
l'ensemble des arrondissements. Ce même
article, en effet, permet au conseil municipal de se déclarer compétent à
l'égard de tous les arrondissements
mais pour une période maximale de deux ans. Il y a une possibilité de
renouveler cette compétence mais seulement si les deux tiers du conseil
votent en faveur.
Avec
l'administration actuelle, ils ne détiennent pas ce nombre de votes, ce qui
veut dire que, dans quelques mois, la
compétence de la gestion animalière pourrait bien retourner aux
arrondissements. En effet, 19 réglementations différentes pourraient constituer un cadre ingérable, sans
parler de la confusion qui régnerait chez les citoyens. Nous ferions
face à des situations absurdes où, par
exemple, un chien devrait être tenu en laisse d'un côté de la rue mais pourrait
gambader en toute liberté de l'autre côté de
l'autre rue parce que c'est une rue mitoyenne. Nous sommes donc de l'avis
qu'une législation uniforme sur le territoire québécois préviendrait le
risque de disparités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de règlements de contrôle animalier par arrondissement
des grandes villes comme Montréal ainsi que par leurs villes voisines. Elle permettrait à tous les Montréalais et à tous
les Québécois de bénéficier de la même quiétude d'esprit sur l'ensemble
du territoire.
Soyons clairs, nous
sommes très heureux que le projet de loi n° 122 ait reconnu le principe de
l'autonomie municipale, mais nous sommes
d'avis que l'intervention du gouvernement du Québec demeure nécessaire dans
certains cas particuliers où des problématiques dépassent les frontières d'une
municipalité ou peuvent avoir un impact sur les municipalités avoisinantes. Au-delà des
compétences des villes, c'est un enjeu profond qui concerne tout le Québec.
Nous croyons donc que c'est au gouvernement du Québec qu'il revient d'agir dans
ce dossier. Il doit agir vite.
Cela ne veut pas dire qu'une municipalité ne peut pas aller au-delà des critères minimaux établis par le gouvernement du Québec. Étant donné le sentiment d'insécurité dans la population et la confusion
généralisée qui entourent actuellement la
réglementation concernant les chiens dangereux, partout au Québec
et particulièrement à Montréal, il y a urgence d'agir. Notre première recommandation
est que le projet de loi soit adopté avant la fin de la présente session parlementaire.
J'ai
parlé, un peu plus tôt, de l'approche complémentaire mise de l'avant
par le règlement de la ville adopté en 2016. En vue de la
mise en place de ce règlement, il nous a fallu documenter la présence des
chiens sur notre territoire et en nous
penchant sur les races et le type qui étaient responsables du plus grand nombre
de morsures. Nous avons pu constater la surreprésentation des pitbulls
dans la population des chiens mordeurs, confirmant ainsi la pertinence de mettre
en place un règlement spécifique pour ce type de chien. En effet, les données
en provenance des inspecteurs canins des 19 arrondissements montréalais montrent que les chiens du type pitbull, qui
représentent 3 % de la
population canine à Montréal, étaient responsables de 38 % des
morsures signalées en 2016 et de 37 % des morsures rapportées pour les neuf premiers mois de 2017, et cela ne représente
que 50 % de toute la population canine qui est enregistrée auprès
de la ville de Montréal.
Nous
sommes convaincus qu'une législation qui combine la responsabilisation des
propriétaires et l'interdiction de
certaines races de chiens réputés dangereux représente la meilleure solution
pour assurer la sécurité de la population. On respecte ainsi le vieil
adage qui dit : Mieux vaut prévenir que guérir.
Malheureusement,
la nouvelle administration montréalaise a choisi d'écarter l'interdiction de
nouveaux chiens de type pitbull ainsi
que la plupart des mesures qui avaient été mises en place, dans le règlement de
2016, pour contrôler la population existante de pitbull, et tout cela
sans solution de rechange à date.
Nous
comprenons le besoin de miser davantage sur l'éducation et la
responsabilisation des propriétaires de ces animaux dangereux, mais cela ne suffit pas. L'éducation est un travail
de longue haleine. La responsabilisation, bien qu'elle soit souhaitable, nous permet seulement d'agir a
posteriori, une fois que le mal est fait, une fois qu'un drame est
survenu. Rendu là, il ne sert pas de punir,
mais il faut prévenir. Je le répète, à elles seules l'éducation et la
prévention ne préviendront pas les
attaques de chiens dangereux. Nous croyons qu'il est de la responsabilité du
gouvernement et des élus de mettre en
place des lois et des règlements qui maximisent la sécurité de la population.
Pour ce faire, nous croyons toujours qu'il est nécessaire d'appliquer
conjointement les deux approches : responsabilisation des propriétaires et
interdiction de certaines races.
Comme
deuxième recommandation, Ensemble Montréal propose donc que le projet de loi
interdise d'emblée les chiens de type
pitbull comme des chiens interdits, en vertu et tel que défini par le projet de
loi n° 128. Laisser ce choix aux villes ferait perdurer un débat de
société et ne réglerait rien ni à court terme ni à moyen terme.
Vous savez,
il s'est dit beaucoup de choses à propos de la réglementation de Montréal, on
nous a traités de tous les noms. On a
fait croire à la population que la ville procéderait à des euthanasies massives
de chiens pitbulls, qu'on instaurait un faux sentiment de sécurité dans
la population, que nous étions des antichiens, et j'en passe. La vérité, c'est
que, contrairement à l'administration actuelle, nous ne sommes pas dogmatiques
ou idéologiques sur ces enjeux-là. Notre approche,
comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises, était fondée sur la sécurité du
public. La vérité, c'est qu'également, ce
règlement, le nôtre, sur le contrôle animalier, nous l'avons voulu accommodant
et équilibré. À cette fin, nous avons permis
aux propriétaires actuels de chiens pitbulls de conserver leur animal en
respectant certaines conditions très strictes, notamment être âgé d'au
moins 18 ans, obtenir un permis spécial, veiller à ce que son chien soit
stérilisé, vacciné et micropucé, qu'il porte
une médaille et muselière en tout temps sur la place publique et utiliser une
laisse d'une longueur maximale de 1,25 mètre. À ce propos, nous
sommes satisfaits que le projet de loi n° 128 permette à une personne qui
est actuellement propriétaire d'un chien interdit de le conserver sous
certaines conditions.
• (15 h 10) •
Mais, s'il y
a une chose que le règlement nous a apprise, c'est l'importance de collecter et
d'analyser les données relatives aux incidents et aux morsures. C'est
également le meilleur moyen de contrer les arguments idéologiques et pseudo-scientifiques sur le sujet des morsures. Dans cette optique, nous souhaitons
que le gouvernement du Québec
mette en place un registre des morsures national, mais, également dans ce même
registre, qu'il va comptabiliser toutes les blessures ayant été infligées à une
personne ou un animal domestique par un chien afin de pouvoir s'appuyer sur des
données probantes dans l'application de sa législation. Nous recommandons que l'exigence de
signalement prévue au projet de loi n° 128 devrait également
s'appliquer aux policiers et aux premiers répondants, puisqu'ils constituent la
première ligne dans la majorité des cas
d'attaque. Enfin, toujours dans le but d'avoir un portrait statistique clair
un jour, notre recommandation : Que le projet
de loi n° 128 inclue ce registre
national des morsures afin de recenser les morsures de chien sur
l'ensemble de son territoire.
Nous avons
tous à coeur la sécurité de nos citoyens. Est-ce que cette sécurité doit
passer au second plan, derrière le
droit d'un propriétaire de posséder un type de chien jugé dangereux? Est-ce un risque que nos administrations sont
prêtes à prendre? Nous ne le croyons pas.
En terminant,
M. le ministre, j'aimerais adresser les propos que vous avez tenus plus tôt
cette semaine, au début de la
consultation. Vous avez tout à fait raison de dire que c'est un dossier
polarisant, pour lequel le consensus ne sera pas possible, mais je suis préoccupé lorsque je vous entends dire que vous
voulez trouver une position qui va rallier le plus grand nombre. Cette orientation risque de niveler
ce consensus vers le bas. Il est facile d'être d'accord sur les enjeux
moins controversés. Or, la plus importante
mesure de votre projet de loi est l'interdiction de certains types de chien. Si
vous le retirez, une grande partie de
votre projet de loi perdra sa
pertinence. Dans un dossier aussi polarisant, le principe qui doit vous guider est la sécurité de la population,
hormis toute controverse, pression ou rectitude politique. Je suis
convaincu que vous avez aussi cette conviction et que vous ne décevrez pas la population
québécoise, qui compte sur vous. Je vous remercie.
Le Président
(M. Auger) : Merci,
M. Perez, pour votre présentation. Nous allons débuter les échanges. M. le ministre, pour les 15 prochaines
minutes.
M. Coiteux : Oui. Merci
beaucoup, M. Perez, pour le
mémoire, d'une part, puis pour être venu nous le présenter ici
même, en commission, à l'Assemblée nationale, parce
que ça nous donne l'occasion
d'échanger et poser des questions, et je
pense que ça va être extrêmement utile. Ça
va être d'autant plus utile que vous
avez assumé un rôle important au sein d'une
administration qui effectivement a adopté un règlement qui en beaucoup de points est tout à fait en accord
avec les grands principes qui sont énoncés dans ce projet de loi.
Alors, ce que
j'aimerais entendre, vous entendre partager avec nous, ce sur quoi j'aimerais
vous entendre partager avec nous,
c'est comment ça s'est passé dans les faits, là, parce que
l'application du règlement... bon, qui a été suspendu depuis, mais vous avez eu une année, grosso modo, d'application de ce règlement, et plusieurs des groupes qu'on a entendus au cours des derniers jours nous ont dit des
choses comme... d'abord ont contesté le genre de statistiques que vous
citez dans le
document, ils nous ont dit : Bien, écoutez, comment ils ont pu compiler de
telles statistiques? Donc, j'aimerais ça que vous puissiez nous renseigner davantage sur la compilation des
statistiques. Je pense que ça va être important parce qu'il y a des gens qui sont venus contester ça.
D'autre part, il y a des gens qui nous ont dit : Mais, en
pratique, là, comment ils ont identifié... comment on peut identifier un
chien de type pitbull? Alors, on a entendu, évidemment, du côté de
Mme Vadnais, qui est ici présente, d'ailleurs, et qui nous a livré son témoignage également
dès le premier soir de la consultation... Elle nous a expliqué que c'était quelque
chose qui s'apprenait relativement facilement, reconnaître un chien de type
pitbull.
Donc, comment ça s'est passé, en pratique, à Montréal?
Est-ce qu'il y a eu effectivement des infractions au règlement et que vous avez dû
sévir? Et, dans le fond, moi, j'aimerais que vous nous racontiez cette
année-là pour voir qu'est-ce qu'on en tire comme leçons et comment on
pourrait s'en inspirer pour la suite des choses.
Le Président (M. Auger) :
M. Perez.
M. Perez
(Lionel J.) : Merci beaucoup, M. le ministre, M. le
Président. Merci beaucoup pour la question, je pense qu'elle
est des plus pertinentes. Ce qu'on a vécu sur une période de deux ans, à Montréal,
peut refléter ce que le Québec va vivre au cours des deux prochaines
années suite à l'adoption du projet de loi n° 128.
Comme vous le
savez, c'est malheureusement à cause d'une tragédie qu'il y a
eu un éveil collectif sur cet enjeu-là,
et, suite à cet éveil collectif, on a pu réaliser qu'il y avait
certaines lacunes, lacunes dans l'application de la loi et de la réglementation sur le contrôle
animalier à la ville de Montréal. Un exemple, je l'ai mentionné tantôt, on a
19 arrondissements; bien, on
avait 19 règlements distincts. Dans les 19, il y avait
trois arrondissements où les pitbulls étaient interdits, et dans les 16 autres ce n'était pas interdit. On a
réalisé qu'il fallait faire quelque
chose. Il y a eu une prise de
décision, il y a eu des analyses avec des conseillers notamment,
certains vétérinaires, avec d'autres groupes, différentes recherches qui
ont été faites pour essayer d'élaborer une
stratégie qui va incorporer les meilleures pratiques, les meilleures pratiques à travers les
différentes juridictions dans le monde. Et c'est ce que nous avons fait.
L'autre chose
que ça a permis, c'est qu'il y a eu une plus grande volonté de pouvoir faire
respecter le règlement. Les lacunes
qu'il y avait auparavant... Il y avait certaines défaillances, mais, avec cette
nouvelle prise de conscience, on a mis
de l'avant une volonté. Donc, il y avait déjà des inspecteurs dans différents
arrondissements. On a ajouté une équipe canine de neuf inspecteurs pour
veiller au respect de l'application du nouveau règlement.
Ce qu'on a vu
comme constat, c'est très intéressant. On estime — et, quand je dis «on estime», la ville de
Montréal, les statistiques que je vous cite sont également incluses dans les
statistiques de la ville de Montréal par la nouvelle administration — qu'il y a environ 115 000 chiens qui se trouvent sur le
territoire montréalais. Des dernières statistiques que nous avons en fin d'année 2017, il y
avait presque 50 000 qui étaient enregistrés. Avant l'adoption de notre
règlement, on avait environ
15 000 chiens... 14 000 chiens qui étaient enregistrés. Donc, en
la période de moins de six mois, moins d'un an, on est allés d'un taux
d'enregistrement de 15 000 sur 115 000 jusqu'à 50 000.
Il y a eu, évidemment, des campagnes de
sensibilisation, d'éducation à certains niveaux pour faire connaître la nouvelle réglementation. On a eu des rencontres
dans différents arrondissements, des sessions d'information. Il y a eu
faciliter la prise d'enregistrement des différents chiens.
Concernant
spécifiquement l'autre statistique, encore une fois, les taux de morsures, ce
n'est pas seulement dans mon mémoire,
mais dans le mémoire de la nouvelle administration, concernant le montant
global, le taux global. Là, ce qui
n'est pas inclus dans le mémoire de la nouvelle administration, c'est combien
ont été effectuées par quel genre de chien. Alors, nous, les statistiques que je vous donne sont celles qui ont été
déterminées par les services des fonctionnaires, qui sont apolitiques, suite à leur élaboration des
différentes définitions en collaboration avec le milieu et à travers une
formation pour ces inspecteurs et ces
individus canins. Et ils ont déterminé que... Et il y a 3 % des chiens qui
sont enregistrés comme des chiens
pitbulls. On se comprend qu'à la base, des propriétaires qui ne veulent pas
partager ou veulent essayer d'éviter que ce soient des chiens pitbulls, bien, le taux ne va pas être vers le
haut, mais il va être plutôt vers le bas, parce qu'il y a une zone grise. Donc, à peu près 3 % de chiens,
1 500 chiens sur 49 000 chiens, on a pu détecter, en 2016
et 2017, pendant une période de presque deux ans, qu'ils représentaient
37 % et 38 % des morsures.
Je comprends
qu'il y a un débat, il y a un débat scientifique, il y a un débat à différents
égards, qu'est-ce qui est exactement
un pitbull. Ce que je peux vous dire là-dessus, c'est que, dans d'autres
juridictions, notamment différentes cours,
notamment Ontario, ils ont dit que ça peut se faire, on peut déterminer. C'est
sûr que peut-être, à un certain moment, il y a pourtant un petit pourcentage où il y a certains doutes, pour des
raisons qui me dépassent, mais essayer de suggérer qu'on ne peut pas dans la quasi-totalité de cas,
déterminer, je pense, ça, ça reflète un penchant idéologique. Ce n'est pas
quelque chose qu'ils veulent accepter.
Alors, dans
un contexte où on fait l'enregistrement en amont, où on peut exiger cela, le
débat n'a plus lieu parce qu'on ne va
pas agir après qu'il y ait une morsure, on va le faire avant. Donc, s'il y a un
débat, il va être avant tout incident.
Dernier
point, je dirais qu'on a pu démontrer... il y a eu plus de
1 500 contraventions qui ont été données sur cette période-là. Notamment, c'était en lien avec le
besoin d'enregistrement, parce que c'était nouveau, on avait une plus
grande volonté. Et ça se poursuit, on voit encore que les chiffres continuent,
concernant l'enregistrement.
• (15 h 20) •
Donc, pour
nous, le modèle montréalais pourrait être un modèle québécois. On incorpore
tous les éléments. Et ça, c'est
quelque chose qu'on n'a pas entendu de la part des médias et de la part de nos
opposants. Eux, ils mettent l'accent seulement
sur l'aspect qu'on interdise un certain type de chien. Or, lorsque vous
regardez notre règlement, et il y a l'élément en annexe de notre mémoire, on établit clairement toutes les meilleures
pratiques : nécessité de stérilisation, vaccination, micropuçage. Il faut absolument être enregistré,
il faut un médaillon. Ça, c'est pour tous les genres de chien. Si un chien est déterminé à risque, bien, il y a
d'autres obligations, là, muselière sur la place publique. Il faut
une barrière de deux mètres de haut. Il faut également s'assurer qu'il
est sous le contrôle à tout moment par un adulte de 18 ans. Si jamais il
est à l'extérieur, bien, il faut une muselière.
Alors,
tout ça, ça incorpore toutes les meilleures
pratiques. Souvent, on entend... De
Calgary. Je vous invite à faire la
comparaison entre notre règlement et le règlement de Calgary. La seule différence, c'est le fait
que nous, d'emblée, on a voulu reconnaître les chiens de type pitbull
comme étant dangereux et donc interdits. Et encore là on avait une clause
grand-père.
Alors,
moi, je vous soumets que, lorsqu'il y
a un risque à la population,
lorsqu'il y a, évidemment,
différentes opinions et il y a
des études qui vont dans les deux sens,
pourquoi prendre le risque? Allons-y
avec la prudence, établissons un
registre national des morsures et puis suivons la chose, mais entre-temps il
faut agir à court terme. Et, avec ce que je lis dans le mémoire de la
nouvelle administration, j'ai peur, j'ai très peur parce que, depuis qu'ils ont
enlevé toutes les dispositions de notre règlement qui effectivement traitent un chien de type pitbull comme tout autre chien, bien, ils
n'ont plus d'obligation de muselière et ils
n'ont plus l'obligation de ne pas avoir contrevenu... avoir un casier
juridique au cours des cinq dernières
années. Alors, je suis très préoccupé
à savoir est-ce que, dans ce mémoire, on donne la même valeur à l'humain
qu'à un chien.
M. Coiteux :
M. Perez, juste pour que je comprenne bien, lorsqu'un... Et ça, ça n'a pas été
suspendu, l'obligation de les enregistrer?
M. Perez
(Lionel J.) : Non, non.
M. Coiteux :
Bon, lorsqu'un chien est enregistré par son propriétaire à Montréal, à l'heure
actuelle, est-ce qu'il y a une identification du type ou de la race du chien
qui vient avec l'enregistrement?
M. Perez
(Lionel J.) : Oui.
M. Coiteux :
C'est une déclaration volontaire du propriétaire ou il y a quelqu'un qui
contrôle la véracité?
M. Perez (Lionel J.) : Pendant la première année, il y avait, justement,
des sessions dans différents arrondissements pour identifier, pour identifier le genre de chien qu'il y avait, il y
avait une certaine formation à cela. Pour la suite des choses, il faudrait qu'on vous valide si ça a été
maintenu par la nouvelle administration. Mais, oui, il y avait une
obligation...
M. Coiteux :
Donc, il y avait un fonctionnaire formé à cet effet qui pouvait dire au
propriétaire, par exemple : Je ne suis
pas tout à fait certain de ce que vous me dites, je ne crois pas que ce soit un
chien comme vous me le dites, mais je pense que c'est un chien de type
pitbull.
Est-ce
qu'il y a eu des cas comme ceux-là? Est-ce qu'il y a eu des contestations? Je
veux juste voir comment ça a fonctionné.
M. Perez
(Lionel J.) : Il y a eu certaines contestations, absolument. Je n'ai
pas les chiffres du nombre, mais il y en a eu, absolument. Il y a eu des
discussions. Et là il y avait un genre de... je ne dirai pas un genre d'appel,
mais il y avait une analyse plus approfondie
par d'autres experts, par d'autres éléments, à travers la fonction publique,
pour finalement en venir à un stade où ils étaient satisfaits de la teneur du
type de chien, de la race de chien.
M. Coiteux :
Si je comprends bien, chaque arrondissement a ses propres inspecteurs canins,
mais vous avez ajouté une équipe de neuf inspecteurs qui avaient la
responsabilité sur l'ensemble du territoire.
M. Perez
(Lionel J.) : Exact. Je dirais que la quasi-totalité des
arrondissements avaient des inspecteurs avant l'adoption du règlement en 2016.
Il y avait certains qui ont partagé, vu leur taille, mais, vu la nécessité, vu
la volonté de faire respecter le nouveau
règlement, oui, il y a eu une nouvelle équipe de neuf inspecteurs qui ont été
rajoutés pour justement faire respecter le règlement.
M. Coiteux :
Avez-vous senti, vécu de la résistance dans certains arrondissements ou de la
part de certains inspecteurs canins, dans certains arrondissements, qui
auraient nécessité appelons ça des formations supplémentaires, ou des rappels à l'ordre, ou... Pourquoi je vous
pose cette question-là, c'est parce que les gens sur le terrain doivent
être nos alliés pour faire respecter les
règlements. On a eu quelques témoignages, là, au cours des dernières heures,
cette semaine, des gens qui
disent : On a des fois des très bons règlements, mais ils ne sont pas
appliqués. Les gens, finalement, laissent passer. On nous a même dit une chose assez dramatique, là, que le chien
qui a attaqué Mme Christiane Vadnais aurait dû, en vertu des règlements qui existaient... il aurait
déjà été pointé, et donc il y aurait eu déjà des mesures qui auraient été
prises à son égard avant qu'il arrive
l'épouvantable tragédie. Alors, il faut que les villes qui... Parce que le
gouvernement peut établir un cadre
minimal, il peut dire : Voici la loi qui doit s'appliquer, donc les règlements
doivent être conformes à cette loi,
mais ce ne sont pas des fonctionnaires du gouvernement du Québec
qui vont aller assurer le respect des règles
et de la loi, ce sont les autorités
municipales, donc c'est extrêmement important que les partenaires sur le
terrain soient là et fassent le travail. Est-ce que vous avez senti de
la résistance? Puis qu'est-ce que vous avez fait?
M. Perez (Lionel J.) :
Moi, je dirai que je suis, d'abord, tout à fait d'accord avec vous. Il est
essentiel à ce que les villes, elles
s'engagent. Il faut qu'elles soient des partenaires avec le gouvernement du
Québec pour faire respecter le projet de loi n° 128, qui sera
adopté.
Je
dirais que, de façon générale, c'est très bien passé. Les histoires ou bien les
cas qui ont été soulevés ont été des cas
d'exception. C'est sûr que, comme c'est un dossier qui est très polarisant, il
y a les positions qui sont très tranchées, notamment pour ceux qui opposaient le règlement. Donc, chaque petit
élément devenait vraiment toute une histoire, tandis que, lorsqu'on
qu'on regarde les chiffres, lorsqu'on parle avec les gens sur le terrain, ça a
fonctionné.
C'est
sûr que, lorsqu'il y a un changement, les habitudes se changent auprès de la
population, donc, c'est normal, il y
a une période d'ajustement. Je peux vous dire que, s'il y avait des cas,
c'étaient des cas d'exception, et il y avait toujours une volonté, à
l'intérieur des services de la ville de Montréal, de trouver des solutions.
Le Président
(M. Auger) : Désolé, M. Perez, le temps est écoulé, votre
temps est déjà écoulé.
Une voix :
...
Le Président
(M. Auger) : Oui, absolument.
M. Coiteux :
J'avais une autre question, mais on s'en reparlera.
Le
Président (M. Auger) : Donc, nous devons poursuivre avec
l'opposition officielle et son porte-parole, le député de Verchères,
pour 9 min 30 s. M. le député.
M. Bergeron :
Avec la grande gentilhommerie qu'on me connaît, M. le Président... Si vous
voulez poser votre question sur mon temps, M. le ministre.
M. Coiteux :
...je l'apprécie et je vais la poser tout de suite.
Le Président
(M. Auger) : M. le ministre.
M. Coiteux :
Si on compare le règlement de l'administration à l'intérieur de laquelle vous étiez
un membre important avec celle de Laval aujourd'hui, je connais une différence
importante. Mais, si je fais abstraction de cette différence importante,
comment ces deux règlements-là se comparent?
M. Perez
(Lionel J.) : Je peux vous dire que je n'ai pas analysé en détail le
règlement de Laval. De ce que je sais de notre règlement et ce que je sais du règlement de Laval, c'est qu'il y a
beaucoup de similarités, énormément de similarités.
Lorsque j'ai la
chance de parler à différentes personnes et je les informe comme quoi tous les
éléments de responsabilisation des
propriétaires sont incorporés dans notre règlement, c'est une surprise totale,
ça n'a pas été véhiculé sur la place
publique, ils pensent qu'on parle vraiment de l'interdiction. Donc, sauf erreur,
je pense qu'ici, on peut faire l'analyse
rapidement, on voit que les meilleures pratiques, elles sont là et il faut
aller de l'avant avec la responsabilisation des propriétaires. C'est un élément nécessaire. Mais même
l'administration, la nouvelle administration, dans son mémoire, souligne
que ce sont des solutions à moyen et long terme. Pour le court terme, hein,
pour agir en amont et pas après qu'il y ait
un incident, il faut réglementer, il faut reconnaître certains chiens comme
étant dangereux, réputés dangereux et, dans le cas des pitbulls,
interdits.
Le Président
(M. Auger) : Merci. Donc, huit minutes, M. le député de
Verchères.
• (15 h 30) •
M. Bergeron :
Merci, M. le Président. Écoutez, votre position est claire. Elle était claire
avant l'élection municipale de
l'automne dernier, elle est claire depuis, elle est tout aussi claire ce matin.
Sauf que nous avons des témoignages qui nous amènent à remettre en question un certain nombre de points de vue.
Vous parlez du pitbull, et j'ai défendu, depuis le début... Puisqu'il
semble que vous ayez suivi attentivement les travaux de cette commission, vous
avez probablement constaté que j'ai défendu
depuis le début le fait que certaines races ont été traditionnellement, pendant
des siècles, des millénaires,
conçues, croisées, entretenues génétiquement pour le combat et qu'il doit... il
est resté des traces, aujourd'hui, au
nombre desquelles j'imagine que vous identifiez le pitbull. Sauf que des
spécialistes sont venus nous dire : Écoutez, il n'y a pas vraiment de possibilité d'identifier ce
que c'est qu'un vrai pitbull. Il y a un animal qui peut ressembler à un
pitbull, mais, comme on n'a pas son
pedigree, son arbre généalogique remontant jusqu'à Mathusalem, on ne peut pas
être certain que c'est un vrai
pitbull puis qu'il n'y a pas, dans le mélange génétique, au fil des
croisements, des traits plus paisibles qui ne se sont pas insérés dans son code génétique. On est venu nous dire, aujourd'hui, que l'animal statistiquement le plus dangereux au Québec serait le malamute ou le husky, et qui
n'est pas dans notre liste, qui n'est pas la vôtre, et non
pas le pitbull. Alors, la question,
c'est : Si on décide d'interdire un animal comme le pitbull, qui,
semble-t-il, est un animal croisé, ce n'est pas un animal de race, si on
décide d'interdire un animal comme le pitbull, comment allons-nous régler la problématique d'identification? Tous les
spécialistes semblent nous dire qu'il est impossible de les identifier. Et
pourquoi ce chien, alors que d'autres, semble-t-il,
sont tout aussi dangereux, voire davantage, mais ça s'adonne qu'ils ont un air
plus sympathique?
M. Perez
(Lionel J.) : Merci pour la question. D'abord, moi, ce que je vous
dirais, concernant l'enjeu de statistiques...
ou plutôt sur la capacité de définir et de déterminer qu'est-ce qu'un pitbull,
c'est une question de quel est le niveau de certitude qu'on veut
atteindre, numéro un, et quel est l'impact également à cet égard-là.
Donc,
je vous dis un exemple. Il y a plus de... presque 900 villes, aux
États-Unis, il y a plus de 40 États qui ont une certaine forme d'interdiction ou de reconnaissance
de certains chiens comme étant dangereux ou réputés dangereux, et ça se fait. Est-ce que, parce qu'il y a peut-être
certains cas problématiques, on doit jeter le bébé avec l'eau? Est-ce que,
parce qu'on n'a pas cette certitude à 100 %, dans 100 % des cas, on
ne peut pas aller de l'avant?
Je pense que c'est un
faux argument. Je pense que, si on parle à des personnes expertes, à travers
différents mécanismes, que ce soit un genre
de test ADN, mais pas seulement, des éléments morphologiques ainsi que
d'autres, la grande majorité de
personnes disent que, oui, on peut. C'est sûr qu'il faut voir aussi qui le dit,
hein, qui dit qu'on ne peut pas et
quel est leur point de vue idéologique. Parce que, beaucoup de ces
personnes-là, il n'y a aucun cas de figure où ils vont dire qu'ils
accepteraient comme quoi on devrait interdire une certaine race ou type de
chien, soyons clairs, certaines personnes, certains groupes, peu importe
l'effet.
Alors,
nous, ce qu'on dit, c'est qu'il y a cette capacité de le faire, il y a
plusieurs États qui le font. Il y a le cas de Winnipeg, qui est clair, le cas de la Catalogne, qui était clair, le
comité eux-mêmes l'ont reconnu. Oui, ils ont dit : Ce n'est pas
noir et blanc, oui, il y a des études controversées, oui, il y a différentes
positions.
Je
vous ramène que, dans un cas de doute, dans un cas où peut-être on n'est pas
sûrs comment procéder, ayons la sagesse de prendre plus de prudence et
de pouvoir effectivement aller de l'avant et mettre la sécurité de la
population en amont.
Concernant
l'aspect sur les statistiques, notamment avec les huskys, il faut voir de
quelles statistiques ils parlent exactement.
Est-ce qu'ils parlent de mort ou est-ce qu'ils parlent de blessure grave? À ma
connaissance, de la littérature que j'ai
lue, on parle dans un cas spécifiquement de mort peut-être dans certains
territoires que les huskies sont plus prévalents. Il faut comprendre dans quel milieu spécifiquement
ils le sont. C'est habituellement dans le Nord, dans certaines réserves autochtones. Il y a des enjeux particuliers qui
peuvent expliquer ça. Mais ce qui est clair, c'est, point de vue morsure
grave, à cet égard, c'est sans équivoque. Il y a deux études en particulier qui
ont été faites par des médecins, des chirurgiens plastiques, un de Philadelphie et un — je termine là-dessus — en Oregon, qui a dit clairement, clairement
comme quoi la majorité de leurs cas viennent de chiens de type pitbull.
M. Bergeron :
D'ailleurs, effectivement, nous avons pris note des statistiques, notamment,
qui nous ont été présentées par
Mme Vadnais, démontrant hors de tout doute raisonnable, à première vue,
que, là où on a interdit des chiens de
type pitbull, il y a eu une amélioration, une réduction significative du nombre
de morsures, du nombre d'incidents, dont certains tragiques. D'aucuns viennent nous dire que, oui, c'est vrai,
sauf que les statistiques sont par définition biaisées parce qu'on inclut dans le nombre des pitbulls
retirés des chiens qui ne sont peut-être pas des pitbulls, donc on remet
en question la validité de ces statistiques.
Mais, si on retirait tous les chiens dangereux, est-ce que ça n'aurait pas
d'effet spectaculairement important sur les statistiques, plutôt que de
ne retirer que celui-là? Et comment on définit, à ce moment-là, ce qu'est un
chien dangereux, outre le pitbull? Bien, voilà.
M. Perez
(Lionel J.) : C'est sûr que chaque territoire aura certaines
particularités. Mais c'est pour cela, la pertinence et la nécessité d'avoir un
registre national des morsures et des blessures. J'insiste là-dessus.
Ce
qu'on a pu constater, avec les statistiques montréalaises, sur une période de
plus de 15 mois, c'est qu'on n'était plus dans «on pense», dans les perceptions. Je comprends qu'il y a peut-être
une différence d'opinions sur la définition technique, mais on peut regrouper les pitbulls et puis... croisés, les
terriers. Si on veut les diviser, ensuite, créer une autre catégorie, c'est possible. Mais actuellement ce
qui est clair, c'est qu'il y a une dangerosité importante des pitbulls.
Le comité lui-même, qui a été établi par le gouvernement, le reconnaît.
Comment
agir avec cette constatation? Bien, ça, c'est un débat. Nous, on préconise une
approche à deux volets, une approche à court terme pour s'assurer de la
sécurité publique, donc avoir une interdiction pour les pitbulls, avoir une
déclaration pour d'autres chiens pour s'assurer qu'il y a des mesures
particulières, les muselières, les laisses, etc., micropuçage, on veut cela, mais on veut également la
responsabilisation des propriétaires pour le micropuçage, pour la
stérilisation, pour le médaillon, pour des amendes salées...
Le
Président (M. Auger) :
Désolé, nous devons poursuivre avec le deuxième
groupe d'opposition, donc...
nous avons quand même un temps assez limité. Donc, pour
6 min 30 s, effectivement, Mme la députée de Mirabel.
Mme D'Amours : Merci, M.
le Président. Bonjour, monsieur.
Merci beaucoup. Vous avez mentionné que vous aviez du personnel dans chaque arrondissement qui
était dédié à ce règlement puis que vous en avez embauché neuf autres, personnes. Est-ce qu'ils avaient des compétences spécifiques? Est-ce que ça a
engendré des coûts à la ville? Parce que souvent c'est un argument qu'on nous dit, que, les villes, ça va leur
coûter plus cher. Puis là, quand on parle de villes, là, ce n'est pas nécessairement Montréal, Laval et
Québec, mais c'est plutôt à la grandeur de la province du Québec. Est-ce
que vos cols bleus ou vos personnes que vous
aviez pour ce dossier-là avaient des formations ou vous avez dû les
former? Et dans quelle proportion ça s'est rentabilisé?
M. Perez
(Lionel J.) : Alors, on avait déjà presque une vingtaine
d'inspecteurs, même plus, dans les différents arrondissements. Ça faisait partie des postes, donc, ça faisait partie
déjà des postes dans différents arrondissements. On a voulu
ajouter neuf personnes, neuf années-personnes, comme on parle. Oui, il y avait
un coût, absolument, il y a des salaires
supplémentaires à cet égard-là. Il y a évidemment les avantages qui s'en
rattachent. Oui, ils ont eu une formation, absolument, ils ont eu une
formation à cet égard-là.
Donc,
on parle principalement des coûts pour le personnel, principalement. Il y avait
une formation qui était une base unique, les autres inspecteurs l'ont
également reçue, pour mettre à jour leurs connaissances et avoir une certaine
uniformité sur cet enjeu-là. Donc, oui, il y a un coût, je comprends. Il y a
aussi question de densité, question de nombre de chiens.
Je
comprends que c'est un défi pour des enjeux plus ruraux. Notre expérience...
Évidemment, avec le volume qu'on a,
c'était une nécessité. Et, pour nous, lorsque c'est un enjeu de sécurité
publique, peu importe que ce soit une ville, province ou au niveau
fédéral, on va trouver les mesures et les fonds pour trouver une solution.
Mme D'Amours :
Mais vous disiez que vous aviez 15 000 chiens, si je me souviens bien
des chiffres...
M. Perez
(Lionel J.) : 50 000.
Mme D'Amours : ...maintenant, mais qu'avant ces mesures-là vous
aviez à peu près 15 000, donc, de 15 000 à 50 000. Il y a quand même eu un gain, à la
ville, au niveau des licences de chien, au niveau de l'enregistrement.
Alors, est-ce que ça fait en sorte qu'au
niveau monétaire ça s'équivaut? Est-ce que, par la vente des médailles, par la
responsabilisation que les propriétaires ont maintenant, il a fait en sorte que
ça vient à coût nul?
M. Perez
(Lionel J.) : Je vais vous dire qu'on pourra faire un petit calcul,
mais, oui, les coûts additionnels pour les différents postes, de mémoire, c'était 1,1 million de dollars. Les
prévisions, encore, c'étaient des prévisions avant qu'on adopte la loi, on pourra faire les vérifications,
suite à l'adoption, c'étaient des revenus générés de 3,5 millions de
dollars. Alors, il faut voir quel était le
modèle, mais, avec le chiffre, sachant le coût qui est engendré, on peut faire
ce calcul très rapidement pour faire un suivi.
• (15 h 40) •
Mme D'Amours :
Et est-ce que vous pensez qu'avec le règlement que vous aviez déposé que vous
aviez créé une fausse impression de sécurité vis-à-vis de vos citoyens?
M. Perez
(Lionel J.) : Absolument pas. Tout le contraire, tout le contraire.
Nous, on pense qu'on a pu éliminer un grand
sentiment d'insécurité auprès de la population. Et, depuis l'annulation des
dispositions dans notre règlement animalier, à Montréal, depuis le
20 décembre, ce sentiment d'insécurité a augmenté. Il y a une
préoccupation importante par la population.
Et,
vous savez, j'ai passé une campagne électorale, au mois de novembre, et, je
peux vous dire, à titre personnel, ce n'est
pas facile nécessairement, parce qu'il y a certains individus, certains groupes
qui sont très vocaux, qui sont prêts à insulter,
à nous accuser d'être des racistes, à être des ignorants, d'être des personnes
qui ne connaissent pas leurs affaires. Moi,
je ne suis pas dicté par l'idéologie. Nous, on a été dictés sincèrement par le
besoin d'assurer la sécurité du public, minimiser, diminuer effectivement ce sentiment d'insécurité et éliminer
la confusion auprès de la population. On avait acquis cela pendant 15 mois, on était sur la bonne route. C'est sûr
que, dans un processus d'amélioration continue, on peut toujours
améliorer les choses, mais on avait donné un important coup de barre.
Et il ne faut pas
oublier : la population, hein, M. Tout-le-monde, ils n'ont pas des groupes
qui viennent pour défendre leurs intérêts,
c'est à nous de le faire. Je suis très fier de la position que nous avons
prise. Je ne regrette rien, à titre
personnel, évidemment. Et, je pense, c'est ce qu'ils veulent, ils veulent du
leadership de leurs élus. Ils veulent des personnes qui n'ont pas peur, qui sont prêtes à prendre la chaleur et
qui sont prêtes à dire : Peut-être que ce n'est pas parfait, mais on va aller de l'avant, on va mettre la vie
humaine avant la capacité de toute personne d'avoir n'importe quel genre
de chien qu'ils veulent.
Mme D'Amours :
Tout à fait d'accord avec vous, monsieur. Merci, M. le Président.
Le Président
(M. Auger) : Merci beaucoup. Merci à vous, M. Perez, pour
votre participation aux travaux de la commission.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
15 h 42)
(Reprise à 15 h 45)
Le Président
(M. Auger) : Nous reprenons nos travaux en souhaitant la
bienvenue à M. Ethan Lichtblau. Je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour votre présentation, par la suite il y aura une période
d'échange avec les trois groupes
parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier, et par la
suite vous pourrez commencer votre présentation.
M. Ethan
Lichtblau
M. Lichtblau (Ethan) : Oui.
Ethan Lichtblau, coroner, chirurgien orthopédiste aussi. J'ai été déconseillé
de déposer un mémoire par le Bureau du
coroner, mais on m'avait dit que je pourrais lire un petit document que j'avais
écrit. Merci de m'avoir invité devant cette commission pour présenter mon point
de vue sur la loi proposée, la loi n° 128.
Je voudrais
féliciter le gouvernement du Québec d'avoir pris au sérieux la question de la
fréquence et gravité des morsures de chien. C'est un problème qui est
très présent au Québec ainsi que dans des autres juridictions.
Comme vous
savez, cette loi propose d'interdire ou de sévèrement contrôler certaines races
de chien, considérant que ces races spécifiques sont a priori dangereuses
ou potentiellement dangereuses. La loi mentionne également le signalement
obligatoire des morsures de chien à la municipalité locale soit par un
vétérinaire ou un médecin. Par contre, la loi ne mentionne aucune mesure
éducative.
Avant
d'aborder l'une de ces questions, je voudrais revenir brièvement sur
l'investigation que j'ai faite concernant la mort de Mme Christiane Vadnais. Rappelons que mon rôle de
coroner est de décrire les circonstances entourant le décès de Mme Vadnais, de fournir une analyse
détaillée de ces circonstances et, le cas échéant, de faire des
recommandations qui augmenteraient la sécurité publique. Ce n'est pas mon rôle
de prendre un parti politique ou d'être partial envers un groupe ou un autre.
En termes de
circonstances, Mme Vadnais est décédée en juin 2016 dans les circonstances
les plus horribles, et cette mort a
été provoquée par une attaque d'un chien extrêmement violent. Dans mon analyse
détaillée des circonstances de la mort
de Mme Vadnais, j'ai pu montrer qu'il y avait une chaîne extrêmement
malheureuse d'événements ou de facteurs, si tu veux, individuels qui, dans leur combinaison, ont entraîné sa mort.
Parmi ces facteurs, un, la présence d'un chien ayant des antécédents de mauvais traitement par son
propriétaire et une histoire de comportement violent documentée; deux, une attaque violente antérieure de ce même chien
qui, si un suivi approprié avait été effectué, aurait très probablement conduit à l'euthanasie; trois, l'absence prolongée
du propriétaire cette journée-là; quatre, une muselière mal appliquée; cinq, une porte en arrière de la maison qui reste
ouverte; six, un trou dans la clôture qui n'a jamais été réparé; sept,
une femme qui est par hasard dans sa cour
arrière, sans moyen d'échapper à ce chien violent; et, huit, un moment de la
journée où personne n'est là pour fournir de l'aide.
J'ai retenu
l'opinion que je n'étais pas en mesure d'identifier le chien en question comme
étant un pitbull, même en présence d'une preuve, preuve entre
guillemets, d'ADN qu'il s'agissait d'un pitbull. D'après mon examen des «photographs» de ce chien, j'étais d'avis que le
chien ressemblait plutôt à un boxer. D'autres intervenants ont abordé
les problèmes liés aux évaluations de l'ADN.
Mais je mentionnerai que l'entreprise spécifique utilisée dans mon
investigation ne permet pas que ces
résultats soient utilisés devant les tribunaux judiciaires. Depuis la rédaction
de mon rapport, et malgré des
protestations de la famille et d'autres personnes, je maintiens que je suis
incapable d'identifier ce chien spécifique comme étant un pitbull.
J'ai
mentionné dans mon rapport les renseignements que le public devrait connaître
avant la mise en place d'une loi. J'ai
fait mention de cette information dans l'espoir de fournir un contexte approprié
au problème. Certains des points que j'ai mentionnés semblent susciter des désaccords, alors je répète, pour
l'instant, seulement les points sur lesquels je pense que nous pouvons tous être d'accord : un, environ
50 % des cas de morsure de chien se produisent chez les enfants; deux,
les décès dus à des morsures ou des attaques
de chien sont extrêmement rares; trois, bien que les morsures mortelles de
chien soient rares, les morsures de chien non fatales, non mortelles, ne le
sont pas et elles constituent un véritable problème de santé publique.
• (15 h 50) •
J'ai
mentionné dans mon rapport les deux types de législation habituellement
appliqués pour diminuer la fréquence et
la gravité des morsures de chien. Il s'agit de la législation de type interdiction
de races spécifiques, «breed-specific ban», en anglais, ou BSB. L'autre approche législative est la race neutre et
consiste plutôt à responsabiliser les propriétaires; en anglais,
«responsible pet ownership» ou RPO, si tu veux.
J'ai discuté,
dans mon rapport, les grandes lignes des deux types de législation. Après ces
descriptions détaillées, j'ai conclu
que j'étais en faveur d'un type de loi RPO. Les raisons de ma conclusion sont
bien détaillées dans mon rapport, et,
par intérêt de brièveté, je n'y reviendrai pas. Cependant, je voudrais
mentionner plusieurs points que j'espère que la commission prendra en
considération.
Un, mon
rapport n'a pas réinventé la roue. D'autres coroners du Québec avant moi sont
parvenus à des conclusions identiques ou similaires. Il n'y a pas un
coroner dans le passé qui a recommandé un type de loi BSB.
Deux, votre
commission est certainement au courant de l'enquête du coroner qui a eu lieu en
Ontario, en 2003, à la suite du décès
de Courtney Trempe en 1998. C'est une enfant qui a été tuée après avoir été
attaquée par un bullmastiff. Parmi les 30 recommandations qui sont
sorties de cette enquête du coroner, il y avait l'éducation de la population,
la responsabilisation des propriétaires et
la création d'une base de données centralisée, il n'y avait aucune mention
d'une interdiction de races spécifiques. On doit noter que pratiquement toutes
les recommandations qui sont sorties de cette enquête
du coroner n'ont pas été respectées par le gouvernement provincial de l'Ontario,
qui a finalement adopté, en 2005, une loi de type BSB.
Trois, il y a
eu beaucoup de questions, ces derniers jours ici, concernant la littérature
scientifique. Les parlementaires veulent
savoir comment il est possible qu'il y ait des controverses non résolues dans
la littérature. Comment est-il possible qu'un article scientifique dise une chose et un autre article
scientifique dit exactement le contraire? C'est une question très pertinente. En tant que chirurgien orthopédiste,
je suis confronté à ce type de problème tous les jours. Tout ce que je
peux vous dire, c'est que la controverse scientifique est normale. Il y a
presque toujours deux, ou même plus, côtés à un problème, et c'est notre travail de lire la littérature scientifique
avec une bonne dose de scepticisme et avec un esprit critique.
Je peux affirmer que la plupart des
articles que j'ai lus lors de la préparation de mon rapport, bien qu'ils aient
été examinés par des pairs, étaient mal
rédigés et étaient remplis d'informations erronées ou trompeuses. À titre
d'exemple, les études rétrospectives qui
viennent des grands centres médicaux reposent souvent sur des informations
trouvées dans les dossiers médicaux
spécifiques. Cette information est presque toujours incomplète. Comme le disent
les gens qui travaillent dans l'informatique, «garbage in» égale
«garbage out».
Je
voudrais mentionner trois sources d'information erronées fréquemment citées par
des experts, experts entre guillemets,
parfois des journalistes et même des parlementaires. Précisément, je mentionne
DogsBite.org et dogbitelaw.com.
DogsBite.org est un
site Web géré par une femme, Mme Colleen Lynn, qui a été mordue par un
pitbull. Elle n'a aucune expertise en comportement animal et aucune expertise
dans la collecte des données. Ses données sur les morsures de chien proviennent
de reportages non vérifiés. Chacune de ses affirmations selon lesquelles
différentes juridictions ont connu le succès
avec BSB ne se tient que par des articles de journal, qui à leur tour font des
associations simplement sur les affirmations
faites par des leaders communautaires dans ces juridictions. Il y a peu ou pas
de preuve évaluée par les pairs citée dans DogsBite.org.
Quant
à dogbitelaw.com, ce site est géré par un avocat dont le seul intérêt est
d'intenter des poursuites contre les propriétaires de chiens dans les
cas où le chien a mordu une victime. Son site Web n'est rien de plus qu'un
outil pour recruter des nouveaux clients.
Il
y a également des sites Web créés par des groupes propitbulls qui diffusent
leurs propres types d'informations erronées.
Il
n'est pas difficile d'identifier les sites Web pro et antipitbulls. Je
demanderais respectueusement à la commission de rejeter toute statistique — statistique entre guillemets — ou affirmation provenant d'un ou autre type
de site, car celles-ci ne devraient en aucun cas être considérées comme
ayant poids de preuve scientifique.
En
conclusion, voici quelques points sur lesquels nous pouvons tous s'entendre,
j'espère. Un, les propriétaires doivent
être tenus responsables des actions de leur animal. Deux, un registre central
et clair. Sans une bonne collecte de données,
nous n'aurons aucune idée si notre législation atteint ses objectifs. Trois,
les efforts éducatifs doivent être une partie
importante de nos efforts législatifs. Tout le monde comprend qu'un nombre
important des attaques de chien sont évitables. Quatre, il doit y avoir un moyen de payer pour les initiatives
législatives. J'ai suggéré dans mon rapport d'utiliser des fonds collectés par l'enregistrement des animaux ainsi
que par l'émission des contraventions. Cinq, obtenir la coopération des différents partenaires et organisations pour aider
à la promulgation de ces initiatives législatives. C'est la clé pour
assurer le succès de la législation. Et,
six, la formation des équipes locales de contrôle des animaux sera également
essentielle pour assurer le succès de
toute législation proposée. Sans ces équipes, l'application de la loi serait
extrêmement problématique.
En
terminant, le Québec se trouve dans une position unique en ce qui concerne la
législation proposée sur les chiens dangereux.
Nous pouvons légiférer en fonction de l'émotion et l'utilisation sélective des
données et répéter probablement des
erreurs dans des autres juridictions ou nous pouvons légiférer sur la base
d'une utilisation rigoureuse de la raison, de l'évidence et de la science et deviendrons probablement un chef de file
mondial dans la réduction de la fréquence et la gravité des morsures de
chien. Le choix est entièrement le nôtre.
Le Président
(M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons
débuter les échanges avec M. le ministre pour 15 minutes.
M. Coiteux :
Merci, M. Lichtblau, pour votre mémoire... bien, ce n'est pas un mémoire,
en fait, vous n'étiez pas... on vous
déconseillait, je crois, chez votre employeur, de présenter un mémoire, mais
merci d'être venu puis d'avoir partagé avec nous votre point de vue
là-dessus.
Vous
avez dit, pour... Dans un souci d'économie du temps, vous avez dit, je ne vais
pas revenir sur les arguments qui
m'ont amené à privilégier une approche plutôt qu'une autre. Moi, j'aimerais
vous donner l'occasion de nous le dire maintenant,
qu'est-ce qui vous a amené à dire qu'une approche fonctionne mieux qu'une
autre, c'est-à-dire la différence entre
une approche qui désigne des races spécifiques, compte tenu de leur
dangerosité, qui est présumée d'office, là, à cause des comportements, à cause des attaques qui ont eu
lieu, versus une qui dit : Non, on ne s'occupe pas de ça, on va
regarder strictement la responsabilisation des propriétaires. Pourriez-vous
prendre quelques minutes pour nous expliquer qu'est-ce qui vous a amené à cette
conclusion-là?
M. Lichtblau
(Ethan) : Bien, la littérature dans... Pour les deux, la littérature
n'est pas très bonne. Il y a quelques études
qui sont sorties. Il y a une étude qui vient de Catalogne et qui suggère
peut-être qu'une BSB est efficace, mais, quand tu regardes cet article, tu vois qu'il regarde des hospitalisations en
Catalogne puis la variance des hospitalisations d'une année à une autre, c'est 80, jusqu'à 110, 120,
puis ça bouge, il y a une grosse variation, puis je ne pense pas qu'on
pourrait retenir les conclusions de cette
étude. Il y a d'autres études qui... c'est comme semblable, dans le sens que,
les conclusions, à mon avis, ça ne se tient pas.
Le
«responsible pet ownership», la seule information que j'ai, c'est... ça vient
de Calgary, où ils démontrent des statistiques. Même Calgary, les
statistiques ne sont pas révisées par des pairs.
Alors, moi, je pense
que RPO est plus sensible. Est-ce que j'ai des preuves? Non, je n'ai pas de
preuve.
M. Coiteux :
Mais qu'est-ce qui vous amène, à ce moment-là, si vous n'avez pas de preuve, à
dire qu'une approche est supérieure à une autre?
• (16 heures) •
M. Lichtblau
(Ethan) : Moi, je pense que l'approche, ça fait du bon sens, c'est
pratique parce que c'est faisable. On
pourrait renforcer ça, il y a des systèmes qu'on pourrait mettre en place pour
renforcer ça. Tu sais qu'en Ontario il y a un BSB, mais il y en a, des pitbulls, en Ontario,
toujours. Il y a des sites Web qui démontrent des photos des pitbulls
après des pitbulls. Alors, pour moi, ça fait
du bon sens dans ce sens-là. Mais il n'y a pas de preuve que RPO serait
efficace. Il n'y a pas de preuve non
plus que le BSB serait efficace, à mon avis. Et, jusqu'à date, il n'y en a pas,
de preuve que BSB était efficace. Et
même il y a des régions, des juridictions qui ont adopté un BSB qui ont
maintenant changé pour un autre type de loi parce qu'ils trouvent que ce
n'était pas efficace, ça n'a rien changé. Encore là, avant tout, sans un
registre central, on ne sait pas, on ne sait
pas qu'est-ce qui se passe en Ontario. L'Ontario pourrait nous dire n'importe
quoi, il n'y a pas de statistique pour soutenir leur BSB, il n'y en a
pas, parce qu'ils ne collectent pas des données.
M.
Coiteux : Bien, on a eu, hier, je crois, si je me rappelle... ou
avant-hier, mais on a eu un témoignage notamment d'un groupe avec une
ancienne fonctionnaire de la ville d'Ottawa, qui a été responsable de la mise
en application des règlements à Ottawa et
qui à ma surprise, je ne sais pas si vous en savez davantage là-dessus, mais à
ma surprise avait dit qu'il était possible, en Ontario, pour une ville
de ne pas appliquer la partie de la loi ontarienne qui touche la race en particulier, si on s'avère incapable d'identifier
la race, et qu'Ottawa avait fait une formule d'«opting out»,
pratiquement, de la loi ontarienne. Est-ce que vous êtes au courant de ça?
M. Lichtblau (Ethan) : Je ne
suis pas au courant de ça.
M. Coiteux :
Alors, on nous a dit que, dans le fond, ils ne l'avaient pas appliquée, c'est
ce qu'on a entendu, parce qu'ils étaient incapables de l'appliquer et
que... Il ne semblerait pas y avoir eu de conséquence pour Ottawa vis-à-vis du
respect de la loi ontarienne.
M. Lichtblau (Ethan) : Puis
qu'est-ce qui s'est passé? Est-ce qu'ils ont des données pour démontrer que...
M. Coiteux :
Non. Ce qu'on nous a expliqué, c'est qu'en pratique ils n'arrivaient pas à
identifier les pitbulls. Et la raison
pour laquelle je pose cette question-là, en même temps, c'est parce que vous me
dites que vous, sur la base des photos que
vous aviez du chien qui a tué Mme Vadnais, vous ne l'auriez pas identifié
comme un pitbull, vous-même. Et vous avez fait référence à une entreprise qui a fait un test génétique, vous dites
que, ce test génétique là, cette entreprise-là ne vous autorise pas à le présenter en cour. Mais là on
n'est pas en cour, on est dans une commission. Sans entrer dans les
détails, est-ce que ce test-là vous apparaissait concluant?
M. Lichtblau
(Ethan) : Pas vraiment, non. La façon que la madame l'a expliqué, le
test, c'est qu'il faut faire une comparaison,
évidemment, du «DNA» de ce chien aux autres chiennes. Ça fait que je lui ai
demandé : Mais c'est quoi, les autres
chiens? Bien, on a collecté, mettons, 1 800 pitbulls, puis on a pris
leur ADN, puis là, par la suite, on va comparer l'ADN de ce chien à des
pitbulls. Mais, les 1 800 pitbulls, comment tu sais qu'ils sont des
pitbulls?
M. Coiteux :
Mais est-ce que votre objection à cet aspect du projet de loi... Parce que vous
n'avez pas discuté directement des
articles du projet de loi, mais, en privilégiant une approche type Calgary...
Quoique moi, je pense que l'approche
qu'on propose dans le projet de loi n° 128 est aussi un hybride. On vient
de discuter avec un représentant de l'administration
montréalaise précédente qui avait proposé un modèle hybride. C'est un modèle
hybride, dans les faits, parce qu'il
fixe des règles de responsabilisation des propriétaires et il permet au
gouvernement, par décret, d'aller jusqu'à l'interdiction de races spécifiques. C'est un modèle hybride que nous
avons. Mais est-ce que votre propre objection à cet aspect-là de la loi,
c'est-à-dire d'aller jusqu'à des races spécifiques, est strictement basée sur
la difficulté pratique d'identifier les pitbulls ou il y a d'autres raisons qui
vous amèneraient à conclure...
M. Lichtblau
(Ethan) : Non, c'est basé sur l'expérience dans les autres
juridictions, où on n'a aucune preuve qu'un
BSB est efficace, seulement ça. Je comprends bien qu'il y a des difficultés
d'identifier qu'est-ce qui est un pitbull, qu'est-ce qui n'est pas un pitbull, etc., je comprends tout ça, mais, si
on sépare ça, on met ça côté, il n'y a pas de preuve, dans les autres
juridictions qui ont adopté des BSB, que le BSB a été efficace, point final.
M. Coiteux : Vous vous êtes
référé aussi à un cas en Ontario en 2003 qui avait donné lieu à un rapport d'un
coroner en Ontario. Le chien en question, est-ce qu'on avait identifié
clairement son pedigree, sa race, si c'était un croisement? Est-ce qu'on avait
été capable de le faire?
M. Lichtblau
(Ethan) : Oui, l'enquête elle-même n'a jamais été publiée, seulement
des recommandations qui viennent de cette enquête. De tout ce que moi,
j'ai su de cette enquête, le chien identifié était un bullmastiff, mais je n'ai
pas...
M. Coiteux :
Bullmastiff. Est-ce que ça ressemble à un pitbull? Est-ce que ça fait partie
des mêmes lignées ou c'est complètement différent?
M. Lichtblau (Ethan) : Je ne
pourrais pas vous dire, je ne sais pas.
M. Coiteux : Et comment vous expliquez que la loi ontarienne,
qui a suivi de deux ans, donc, ces recommandations, elle soit allée dans un sens si différent des...
Parce que j'imagine que ça avait dû émouvoir l'opinion en Ontario, ça
avait dû susciter d'énormes débats. Pourquoi pensez-vous
que l'Ontario est arrivée avec un modèle différent de celui qui était
recommandé par le coroner en question?
M. Lichtblau
(Ethan) : Très bonne question. Je ne sais pas. Peut-être le politique,
peut-être des autres choses ont rentré dans leur décision. Je ne sais
pas.
M. Coiteux :
Qu'en est-il, maintenant, de l'applicabilité des règlements? Parce que, dans le
cas... Vous avez été très... vous
êtes très méthodique et rationnel, là, c'est un, deux, trois, quatre, cinq,
vous utilisez une approche très factuelle. Et il y a eu une étape, dans
l'enchaînement des événements qui ont mené à la tragédie, où vous avez
dit : Ce chien-là, normalement, compte
tenu des infractions qui avaient été commises par son maître, qui était
responsable à l'égard de son chien,
aurait dû être euthanasié et il ne l'a pas été. Est-ce que vous avez poussé un
petit peu plus loin l'analyse, pourquoi le règlement n'a pas été
respecté à Montréal, à l'époque, et donc que ça a fait en sorte que les...
La raison
pour laquelle je pose cette question-là, encore une fois, c'est parce que,
supposons qu'on vous suivait puis qu'on disait : On va aller vers
une responsabilisation des propriétaires, comment on va s'assurer, dans tous
les cas de figure, s'il y a des signes
précurseurs, qu'ils soient dénoncés, et qu'ils donnent lieu à des actions, et
qu'un tel chien aurait été mis hors
d'état de nuire avant que la tragédie survienne? Comment on peut s'assurer de
ça, pratico-pratique, là, dans les villes, là, que les règlements soient
effectivement appliqués?
M. Lichtblau
(Ethan) : Pratico-pratique, je pense
que la plus importante recommandation, c'est les équipes des animaux. Moi, je suis convaincu qu'à Anjou il n'y avait pas de ressource pour faire le suivi, il n'y avait pas de ressource, il n'y avait pas d'argent, il n'y avait pas de
ressource, il n'y avait pas des équipes des animaux. Oui, le signalement a
été fait par les policiers à la ville, ils
ont fait leur job. La ville a laissé tomber la balle, il n'y avait pas de
ressource. On a besoin de ressources, on a besoin des équipes de
contrôle des animaux.
Quelqu'un va
visiter le propriétaire... Imaginez que quelqu'un a visité ce propriétaire. Le
chien serait euthanasié tout de
suite, tout de suite. Dans un appartement malpropre, malsain, avec un
propriétaire non fiable, un gros chien comme ça, ce serait fini là. Mais
il n'y avait pas de ressource.
M. Coiteux : Et donc il y a un
lien entre l'absence d'une loi provinciale qui oblige les villes à adopter des
règlements et les appliquer. C'est ce qui s'est passé.
M. Lichtblau (Ethan) : Bien
oui. Mais, si vous avez...
M. Coiteux : Donc, une loi provinciale qui dirait clairement
que les villes doivent adopter un règlement conforme à certaines normes minimales
d'encadrement et qu'elles doivent s'assurer de l'application, ça aiderait énormément.
M. Lichtblau (Ethan) : Oui. Si
vous avez une loi qui n'est pas renforcée, ce n'est pas une loi.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Coiteux : Est-ce que j'ai
encore un peu de temps?
Le Président (M. Auger) :
4 min 30 s.
M. Coiteux : 4 min 30 s. Je ne sais pas si j'ai
un collègue qui aurait des questions. Ça va
aller, de mon côté, je pense, j'ai posé les questions qui
m'apparaissaient les plus importantes.
Le Président (M. Auger) : Merci,
M. le ministre. M. le député de Verchères. 9 min 30 s à votre disposition.
• (16 h 10) •
M. Bergeron :
Merci infiniment de votre présentation.
Ce que je
répète depuis le début de ces consultations et même avant, c'est qu'au-delà de
l'émotion... Parce que c'est clair qu'il
y a de l'émotion. C'est clair que
nous ne serions pas ici réunis à discuter d'un projet de loi s'il n'y avait
pas eu des accidents tragiques entraînant la
mort de citoyens et de citoyennes aux crocs de tel ou tel type de chien. Mais, au-delà de l'émotion, ce que je dis également, c'est qu'il nous faut pouvoir nous appuyer sur
des données, sur des faits, sur la science pour que la décision que nous allons prendre et qui va engager
l'ensemble de la société québécoise
pour les prochains mois, les prochaines années, soit la plus correcte,
la plus appropriée possible.
Et il faut
donc prendre un certain recul sur le sens commun, sur la légende urbaine et
voir quels sont les faits. Et, des faits,
on nous en présente beaucoup, depuis trois jours, des statistiques. D'aucuns
critiquent telle statistique; d'autres, au contraire, ajoutent leur propre crédibilité à ces statistiques, ajoutent
leur voix pour crédibiliser ces statistiques. Et là vous nous dites,
comme coroner... Et vous nous dites également qu'aucun coroner n'a jamais été
en mesure d'identifier précisément l'animal ayant tué Mme Vadnais comme
étant un pitbull et qu'aucun coroner n'a jamais recommandé qu'on interdise
cette race de chien.
Depuis quelques
jours, on vient nous dire que... on vient nous exposer les difficultés, sur le
plan génétique, d'identifier tel type de...
telle race ou telle autre race, les difficultés d'isoler telle race plutôt que
telle autre, et puis nous, on doit
composer avec tout ça, mais je dois dire que votre témoignage d'aujourd'hui
m'apparaît pour le moins déstabilisant, déstabilisant dans le sens où la compréhension
générale, faisant suite à cet accident tragique auquel nous faisons
référence, c'était que c'était un pitbull. Or, je comprends de ce que vous nous
avez dit qu'il n'y a rien qui indique que c'était véritablement un pitbull.
M. Lichtblau
(Ethan) : C'est vrai.
M. Bergeron :
Conséquemment, c'est un élément qui s'ajoute à notre... au fait de devoir
prendre en considération cette
difficulté qu'on a à identifier une race, d'une part, et pourquoi isoler telle
race sur la base d'informations qui pourraient se révéler non fondées. D'aucuns jureraient leurs grands dieux qu'il
s'agissait, bien sûr, d'un pitbull. D'autres, comme vous, nous disent
que ce n'était probablement pas un pitbull, ce serait davantage un boxer. Le
boxer figure-t-il sur la liste? Donc, il y a
là une difficulté additionnelle, pour les législateurs que nous sommes, que
vous mettez au jeu et dont on va devoir tenir compte.
Maintenant, et
là ce n'est probablement pas la spécialité d'un coroner, quoique vous avez
probablement dû vous pencher sur ce
genre de question, lorsqu'on assiste à des blessures ou des décès, dans le
cas d'un coroner, des décès causés par
un chien, est-ce que ces décès semblent statistiquement pointer vers certaines
races en raison de la puissance de la mâchoire,
du fait que la mâchoire coince puis qu'il faut littéralement utiliser un bâton
ou je ne sais quoi pour ouvrir, ou est-ce
qu'au contraire les statistiques nous indiquent que la variété de chiens qui
sont impliqués dans des décès est trop grande
pour qu'on puisse effectivement retenir un certain nombre de caractéristiques
physiques chez tel ou tel type de chien qui se sont rendus coupables
d'attaques mortelles?
M. Lichtblau
(Ethan) : Premièrement, en Canada, on n'a pas assez de décès. Un à
deux par année, ce n'est pas assez pour prendre des décisions dans ce
sens-là. Les États, peut-être on a plus de données. Mais une chose que je pourrais vous dire, c'est qu'il y a des recherches
qui disent que c'est le poids, la largeur du chien qui va contribuer à
la puissance de sa mâchoire, pas le type,
pas la race du chien. Donc, un pitbull qui pèse 40 livres pourrait
peut-être avoir la même puissance de
mâchoire qu'un autre type de chien ou race de chien qui pèse 40 livres,
c'est probablement plus le poids du
chien qui est important dans ce sens-là. Mais, même à ça, il y a des décès qui
sont causés par des multiples chiens, où on ne pourrait pas dire que c'est à cause de sa mâchoire. Puis aussi il y a
des enfants qui sont tués par des chiens où peut-être, si ça avait été
un adulte, il ne serait pas tué.
M. Bergeron :
D'ailleurs, vous avez souligné le fait qu'un grand nombre de décès, je pense,
c'est 50 % des décès, ce sont des enfants.
M. Lichtblau
(Ethan) : 50 % des blessures, des morsures. Je ne suis pas
certain que c'est 50 % des décès, mais c'est quand même un bon
pourcentage en chiffres aussi pour les décès.
M. Bergeron :
O.K. Parce qu'hier on a eu des témoins qui sont venus nous faire la
nomenclature des derniers décès
survenus et pour essayer de les contextualiser, et cette présentation nous
amenait à penser que la majorité des décès survenus ces dernières années
seraient des enfants et que souvent il y avait un contexte qui pouvait non pas
justifier, évidemment, parce que c'est totalement injustifiable, mais expliquer
que le chien ait décidé d'attaquer.
Est-ce
que c'est quelque chose que vous, comme coroner, êtes en mesure de confirmer,
infirmer? Vous n'avez pas suffisamment de statistiques ou...
M. Lichtblau
(Ethan) : ...ici, du Québec, les huit décès dans les derniers
40 ans, je pense, c'est sept enfants sur huit décès, puis les enfants ont été laissés tout seuls avec un chien ou
des chiens sans un parent qui est là pour protéger.
M. Bergeron :
Donc, ce sont des statistiques dont vous étiez au fait.
M. Lichtblau
(Ethan) : Oui, oui.
M. Bergeron :
Exactement. Et vous me parliez, tout à l'heure, des statistiques aux
États-Unis. Est-ce que ce sont des statistiques auxquelles vous avez
accès?
M. Lichtblau
(Ethan) : Non, pas vraiment. Il y a des études qui viennent des États,
où il y a un auteur qui s'appelle Patronek
qui a étudié les décès. C'est très difficile d'étudier les décès aux États,
mais, ce qu'il a fait, il a collecté des décès qui viennent dans les journaux, les médias, des rapports de coroner, des
rapports policiers, puis il a essayé de concilier toute cette
information, puis il a sorti une étude 2000 jusqu'à 2009. Je pense qu'il a
trouvé 280 décès, pour un «average» d'entre 15 et 25 par année.
Mais
quand même c'est difficile de faire cette évaluation, c'est difficile de tenir
des conclusions. Puis même, si vous avez
plus un certain type de chien qui est impliqué dans les décès, il faut savoir
combien de chiens sont, dans la région, de ce type. Si vous avez beaucoup de chiens de ce type dans cette région,
c'est logique que ce chien sera impliqué dans plus de morts ou plus de
blessures qu'un autre chien. Puis on n'a pas cette information.
Le Président
(M. Auger) : Ça va, monsieur...
M. Bergeron : Je
vous remercie, M. le Président.
Le
Président (M. Auger) : Donc, Mme la députée de Mirabel, pour
6 min 30 s.
Mme D'Amours :
Merci, M. le Président. Bonjour, monsieur. J'aimerais avoir un éclaircissement.
Vous dites que le chien auquel il y a eu la tragédie avec
Mme Vadnais... À votre première vue, quelle sorte de chien c'était?
M. Lichtblau
(Ethan) : Un boxer.
Mme D'Amours :
Un boxer. Pourtant, vous avez fait faire un test d'ADN, puis, dans votre
rapport du 28 septembre, il y a
87,5 %, que vous mentionnez, que
c'est Staffordshire, mais il n'y a rien nulle part qui nous dit que,
finalement, il y a un ADN de boxer.
M. Lichtblau
(Ethan) : Oui.
Mme D'Amours :
Est-ce que j'en comprends... Parce que, si vous dites que vous n'êtes pas
capable de déterminer si c'était un
type de pitbull... Mais à la vue vous croyez que c'était un boxer. Est-ce que
c'est bien ce que j'ai compris?
M. Lichtblau
(Ethan) : Répétez ça.
Mme D'Amours :
Si vous n'êtes pas en mesure... Parce que vous nous dites que vous n'êtes pas
en mesure de dire que le chien était un pitbull.
M. Lichtblau
(Ethan) : Parce que j'ai regardé les photographies de ce chien-là,
puis, pour moi, ça devient un boxer.
Mme D'Amours :
Mais l'ADN confirme...
M. Lichtblau
(Ethan) : L'ADN, 87 % pitbull, vous avez raison.
Mme D'Amours :
D'accord, oui. Mais vous n'avez pas spécifié qu'il y avait du boxer dans l'ADN.
M. Lichtblau
(Ethan) : Il n'y a pas mentionné aucun boxer dans l'ADN.
Mme D'Amours :
D'accord. Est-ce que, dans vos rapports, vous... Parce que je ne l'ai pas lu,
je l'ai lu en diagonale, parce que j'ai lu
plus le grand rapport aussi en diagonale. Mais est-ce que, dans vos rapports,
vous mettez une note qui est une...
quand il y a une blessure avec un chien ou une mort avec un chien, si ça a été
fait par distancement ou par prédation? Est-ce que vous vous souciez de
ce détail-là?
M. Lichtblau
(Ethan) : Je ne comprends pas ta question.
Mme D'Amours :
Un chien qui va attaquer par distancement, c'est un chien qui a eu peur, un chien
qui a mal, un chien qui veut protéger
son territoire, un chien qui a une volonté très précise. Un chien qui... puis
là je ne suis pas experte non plus, là, mais un chien de prédation,
c'est que tout à coup il y a une proie puis... Vous comprenez?
M. Lichtblau
(Ethan) : Oui, puis il chasse après la proie. O.K. Mais c'est quoi
exactement, ta question?
Mme D'Amours :
Dans votre rapport, est-ce que vous mentionnez...
M. Lichtblau
(Ethan) : Dans mon rapport?
Mme D'Amours :
Oui. Est-ce que vous mentionnez...
M. Lichtblau
(Ethan) : On ne sait pas, on ne sait pas, il n'y a personne qui était
là quand madame a été tuée.
Mme D'Amours :
Ah! Est-ce qu'un vous avez, dans d'autres rapports, effectué... Si vous aviez
un autre exemple, est-ce qu'il y a... Non, vous ne le mentionnez pas?
M. Lichtblau
(Ethan) : Non. Dans les autres rapports des coroners ici, à Québec,
les huit, il n'y a aucun détail qui mentionne prédation versus distance.
Mme D'Amours :
O.K. Ça fait que, quand vous faites un rapport, comme coroner... Vous n'étiez
pas là, c'est sûr, il n'y avait pas personne, mettons, pour
Mme Vadnais. Mais, s'il y en avait pour d'autres, est-ce que ça fait
partie de vos questionnements, quand vous faites un rapport?
M. Lichtblau
(Ethan) : C'est tellement rare, des décès par des chiens, qu'on n'a
pas un processus... on n'a pas un «template», tu sais, pour suivi quand
on fait une investigation comme ça.
Mme D'Amours :
Est-ce que, par ce qu'on a vécu, vous pensez que ça pourrait se faire, pour
qu'on ait aussi des données dans le futur...
• (16 h 20) •
M. Lichtblau (Ethan) : Dans le
futur, ça pourrait peut-être se faire, oui.
Mme D'Amours : Mais pour le
moment ce n'est pas automatique, ce n'est pas...
M. Lichtblau (Ethan) : Oh!
pantoute, non.
Mme D'Amours : Non. O.K. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Auger) : Merci,
Mme la députée de Mirabel. Merci à vous pour votre présence et votre participation
aux travaux de la commission.
Je vais suspendre les travaux quelques instants
pour permettre à M. Bernard Biron de prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 21)
(Reprise à 16 h 22)
Le
Président (M. Auger) :
Nous allons reprendre nos travaux en souhaitant la bienvenue à M. Bernard
Biron. Je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour votre présentation, et par
la suite il y aura une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Donc, peut-être nous
présenter également la personne qui vous accompagne, et par la suite
vous pourrez commencer votre présentation.
M. Bernard Biron
M. Biron
(Bernard) : Merci, M. le Président. M. le ministre et Mmes, MM. les
membres de la commission. Mon nom est
Bernard Biron, je suis le père de la petite Vanessa Biron qui a été attaquée en
septembre 2005. Et je suis venu accompagné de mon frère, Jean-Christophe
Biron, qui est avocat.
M. Biron (Jean-Christophe) :
Bonjour.
M. Biron
(Bernard) : Je voudrais vous remercier de m'avoir invité ici et de
m'offrir la chance de m'exprimer sur le sujet.
Depuis deux
ans que ma fille a été attaquée, elle a subi des très graves blessures, elle en
subit aussi les séquelles permanentes,
je me suis énormément renseigné sur le sujet, sans prétendre être un expert,
mais j'ai lu énormément d'études, de statistiques, de pages Web,
d'opinions. J'ai rencontré des experts vétérinaires, des médecins
aussi, je reviendrai là-dessus, et ce qui m'a permis de me faire une
opinion, que j'espère être la plus neutre possible.
J'ai lu
beaucoup, et j'en ai mis des références aussi dans mon mémoire, des deux côtés
de la médaille, des sites Web
d'organisations qui sont propitbull, qui sont contre les pitbulls.
Effectivement, on trouve de tout et son contraire, et des statistiques, et des contre-statistiques. Il y a
quand même certains points communs qui ressortent de tout ça, qui ne
sont pas contestés ni par l'un ni par
l'autre, entre autres, et c'est là-dessus que je base mon opinion, c'est le
bagage génétique du pitbull, donc le
fait bien établi, comme vous l'avez mentionné dans la commission à plusieurs
reprises, que le pitbull a été entraîné dans le but d'être une machine à
tuer, dans le but d'être capable de tuer des gros animaux. Donc, on a croisé volontairement pendant des générations et des
générations d'animaux des races qui avaient le plus grand potentiel
mortel, d'être capable de mordre, d'avoir
une force physique, et ça a donné la race du pitbull. Ça, ce n'est pas contesté
par personne. Ça a été admis aussi
par l'Ordre des vétérinaires, à qui on a posé cette question. Et donc on
parlait de points de ralliement dans
tout ça. Ça, c'est un point, quand même, je pense, qui est bien établi, le
bagage génétique du pitbull et le fait qu'il a été... c'est une race qui a été créée par l'homme dans un but très
précis, un but qui avait peut-être une utilité à l'époque, qui
maintenant, je pense... qui n'est plus une caractéristique souhaitable, d'avoir
une machine à tuer dans nos villes, dans nos voisinages.
Et donc, basé là-dessus, on conclut qu'il y a
des caractéristiques physiques de cette race pitbull. Et, quand je dis «pitbull», ici, là, je vais répéter «pitbull»
plusieurs fois, mais on comprend que je fais référence aux trois, quatre
races qui sont identifiées dans votre en
projet de loi, qu'on peut appeler pitbull, là, pour faire simple. Et donc ces
chiens de type pitbull ont des
caractéristiques physiques très, très spécifiques qui les démarquent de toutes
les autres races de chien, on comprend. Ils ont été conçus dans ce
but-là, donc c'est logique.
Et,
parmi ces caractéristiques-là, il y en a trois que je retiens qui, je pense,
permettent d'expliquer la dangerosité du pitbull et d'expliquer les statistiques qu'on voit, les statistiques
publiées par la ville de Montréal, qui nous disent que 50 % des
morsures graves sont produites par des pitbulls, alors que 3 % des chiens
sont des pitbulls à Montréal. On peut contester des statistiques, mais, à un
moment donné, l'écart est tellement énorme que, je veux dire, il y a de la
vérité là-dedans, là. Et ce n'est pas qu'à
Montréal. Toutes les villes qui tiennent des statistiques ont des proportions à
peu près identiques, donc
10 fois plus de morsures que la proportion que représente le pitbull.
Donc, ça, c'est significatif. Et ce qui permet d'expliquer ça, je pense, parmi toutes les
caractéristiques propres du pitbull, on a le fait qu'ils sont plus propices
à faires des attaques de prédation. Et donc ça, c'est quelque chose qu'on a...
qui a été discuté ici. Donc, il y a bien une distinction
entre les types d'attaques de distancement et les attaques de prédation, et le
bagage génétique fait en sorte que certaines races de chien vont être
plus propices à le faire. Donc, ça aussi, je pense que c'est quelque chose qui
n'est pas contesté.
Et même, je pense, le
Dr Martin Godbout nous avait donné en exemple de dire : Oui, il y a bien
des races qui vont faire plus de prédation
que d'autres, tous les chiens ont des traces de séquence de prédation, c'est
quelque chose de normal, mais
certaines races vont aller beaucoup plus loin, vont aller jusqu'au bout de la
séquence de prédation, qui est la mort
ou qu'ils vont essayer de tuer. Et donc, parmi les races qui vont le faire, il
y a le pitbull, il y a aussi... il est mentionné le Jack Russell, je crois, qui est un beaucoup plus
petit chien, et il a ajouté par la suite que c'était surtout dans le cas de
la vermine, donc c'est pour faire des actes
de prédation sur des rats, des choses comme ça, ça ne cause pas de
problème.
Le pitbull va le
faire sur des humains pourquoi? Parce qu'il en est capable. Parce qu'un autre...
une deuxième caractéristique, c'est qu'il
est beaucoup plus fort que certaines autres races de chien. Quand on regarde un
pitbull, ça se voit tout de suite, c'est une boule de muscles. C'est
impressionnant, la musculature d'un pitbull. C'est dû à son historique
génétique, on a favorisé ces caractéristiques-là.
Donc,
le pitbull, non seulement va attaquer plus souvent, va essayer d'attaquer plus
souvent, mais va réussir, parce qu'il
en a la capacité, parce qu'il en a la force. Un pitbull est capable de
renverser, de faire tomber par terre un humain adulte en bonne santé; un
Jack Russell n'est pas capable de faire ça. Alors, ça explique la dangerosité
du pitbull.
La troisième
caractéristique que je pense qui explique, c'est le fait que le pitbull ne va
pas lâcher sa proie, ne va pas arrêter sa
séquence de prédation, va aller jusqu'au bout, coûte que coûte. Et c'est
tellement impressionnant à voir, un
pitbull va continuer même après avoir reçu des balles de fusil, plusieurs, ça
prend plusieurs balles de fusil, là, pour... il faut causer la mort du pitbull pour arrêter son attaque. Il n'y a rien
qui va l'arrêter. C'est tellement impressionnant que ça a donné lieu à
des mythes qui ont été propagés comme de quoi que la mâchoire d'un pitbull se
bloquerait — c'est
un mythe — comme de quoi que le pitbull ne ressent pas
la douleur. D'après ce que j'ai lu, c'est un mythe, et je le crois, mais
ces mythes-là viennent de la réalité que le pitbull est extrêmement tenace.
Et
l'attaque de prédation, et ça aussi c'est quelque chose que l'Ordre des
vétérinaires a expliqué, c'est un comportement
normal pour cette race de chien là, c'est un réflexe normal. Ce n'est pas un
signe de maladie mentale, ce n'est pas un signe aussi de maltraitance ou
de mauvais comportement par un maître.
Et
donc, quand on dit : On va essayer de mettre l'accent sur le maître, le
problème, c'est le maître, à l'autre bout de la laisse, je pense qu'on fait preuve d'un dogmatique, là,
idéologique et on fait abstraction de ces faits scientifiques là, de
dire : Bien, c'est un chien qui... c'est normal pour ce chien-là. Un chien
en bonne santé, bien dressé, dans une famille qui l'aime, peut très bien
décider d'attaquer sans prévenir, de faire une séquence de prédation. C'est
normal.
Ce qui n'est pas
normal, c'est qu'on tolère un chien qui pose ce niveau-là de risque dans nos
villes, dans nos voisinages. Ce n'est pas
normal. On ne tolère pas un tigre, on ne tolère pas qu'un voisin pourrait
adopter un ours ou un lion. Pourquoi est-ce qu'on tolère un pitbull,
étant donné qu'on connaît son niveau de dangerosité?
• (16 h 30) •
Donc,
moi, en tant que père d'une petite fille qui a été victime, pendant les deux
dernières années, j'ai beaucoup fréquenté des établissements médicaux,
elle a eu beaucoup de chirurgies, de visites chez le médecin. J'ai parlé à des chirurgiens, j'ai parlé à des infirmières, à plusieurs
personnes dans le monde médical et qui m'ont confié... et
toutes ces personnes-là, je peux vous dire, sont en faveur de votre projet de loi, sont en faveur
d'interdire les pitbulls, parce qu'eux voient les conséquences humaines,
les conséquences médicales des attaques de pitbull. Et ça ne se compare pas
avec d'autres races de chien. Une morsure de
berger allemand, ça fait mal, ça fait des dégâts, ça demande des points de
suture, mais ça n'a rien à voir avec une
morsure de pitbull. Le pitbull, bien, je pense que Mme Vadnais l'a dit, a
été comparé, et ça, je l'ai lui plusieurs fois, à une morsure de requin.
Le type de morsure, le fait qu'il va secouer, qu'il va arracher des morceaux, c'est unique à ce type de chien. Et moi,
je les ai vues malheureusement aussi, les conséquences d'une morsure de pitbull, je les ai vues sur ma fille. Et, le
personnel médical, ce qu'ils nous disent, c'est que très souvent ils vont
traiter des cas de morsures de
pitbull graves, et le chien, c'est le toutou de la famille, la famille est
surprise, le chien n'avait jamais montré
d'agressivité, n'avait jamais... c'est la première fois, et tout d'un coup
comme ça, sans explication... Et ça, ils le vivent, les médecins le voient souvent. Ils ne peuvent pas le dénoncer à
cause du secret professionnel auquel ils sont tenus, mais, quand on leur
parle comme ça, sans se compromettre, sans nommer de nom, ils vont nous le dire
spontanément qu'eux, ils sont contre les pitbulls.
Et
ça, ça vient contredire la théorie qui dit : Non, ce n'est que le maître,
ce n'est que le maître. Il y a des bonnes familles qui ont bien traité leur chien, et pourtant... Et très, très
régulièrement. Ça ne fait pas partie de statistiques, ça ne fait pas...
médiatisé, ça ne va pas dans les journaux parce que c'est le toutou de la
famille, il n'y a pas de dénonciation, il n'y a pas de poursuite judiciaire.
Dans
le cas de l'attaque de ma fille, elle a été victime d'une attaque de prédation.
Ça, c'est très, très clair. Elle a mis
le pied dans un parc, et le chien, sans prévenir, lui a sauté à la gorge. Et
donc, moi, ce que j'en conclus, de ça, c'est que... Et c'était vraiment un pitbull, là, il n'y a pas de débat sur la
race du chien, c'est un pitbull, et ça a été écrit dans le jugement. Le propriétaire du pitbull en question, Karim
Jean-Gilles, a été reconnu coupable au criminel. Alors, on dit
souvent : Il faut responsabiliser les
propriétaires, tout ça. Oui, je suis tout à fait d'accord. Dans ce cas-là, il a
été reconnu criminellement coupable,
donc, avec la loi qui est déjà en place, c'est possible de le faire. Mais ça,
c'est des choses qui sont faites par après les morsures, ça ne prévient
pas la morsure, ça n'empêche pas les dégâts qui ont été causés. C'est un
soulagement, le fait qu'il soit reconnu coupable, mais ça n'enlève rien.
Donc,
plusieurs observations que j'ai pu faire aussi, suite au procès en question,
les voisins sont venus témoigner, entre
autres ils vivent dans la peur. Ça m'a choqué, moi, de voir à quel point les
voisins sont venus raconter un après l'autre qu'ils
vivaient depuis des années dans la peur parce qu'un voisin avait un pitbull,
bien que ce chien-là n'avait jamais mordu
d'humain auparavant. C'était la première fois, sur ma fille. Et ça, je me
dis : Mais comment est-ce qu'on tolère ça, que des gens vivent dans
la peur comme ça?
Un
autre exemple qui est frappant, c'est... Vous vous souvenez sûrement, à
Montréal, dans un bloc-appartements, une
dame tenait la porte pour laisser rentrer un pitbull et son maître, et le
pitbull a mordu à la jambe ou au genou, à la cuisse la dame en question, l'a traînés par terre. Et
c'est une adulte, là, en bonne santé. Il l'a traînée par terre sur une
distance, sur le trottoir. Et là je me dis : Il n'y a pas eu de... même
pas de contact visuel entre la dame et le pitbull, il n'y a pas eu de
provocation, là, c'est une attaque gratuite puis sans aucune raison, une
attaque de prédation, encore une fois.
Et
là on vient dire des arguments : Oui, mais il faudrait éduquer le public à
bien se comporter, à bien se comporter devant
les chiens pour réduire le risque. Je m'excuse, mais qu'on vienne me dire
qu'est-ce que cette dame-là a fait de pas correct. Qu'est-ce que... Quel manque d'instruction elle avait? Et
comment, en lui donnant plus d'information, on aurait pu prévenir cette attaque-là? Il n'y a même pas eu
de contact visuel. Elle tenait la porte, et vlan! Ma fille, la même
chose. Qu'est-ce que... Ma fille sait se
comporter devant les chiens. Notre famille a eu des chiens, des gros chiens,
elle était très bien éduquée à savoir comment se comporter devant un
chien. Ça ne l'a pas aidée. Dans une attaque de prédation, il n'y a rien qui peut prévenir ça. Ce n'est pas un
manque d'éducation du public, ce n'est pas un manque d'éducation du
maître. C'est un comportement normal de certains types de chien.
La
seule mesure efficace que je peux penser, qui peut prévenir des attaques de
prédation, c'est de bannir les races qui
ont plus de tendances à faire de la prédation et ont la capacité de mener à
bout leur séquence de prédation parce qu'ils ont la force physique. Et
là je ne parle pas juste de poids de chien, mais je parle de musculature, de
puissance et...
Le Président
(M. Auger) : Juste un instant, M. Biron. Désolé de vous
interrompre, on a déjà... Oui?
Une voix :
...
Le Président
(M. Auger) : On peut continuer? Vous pouvez terminer, allez-y.
M. Biron
(Bernard) : Bien, je voulais juste dire, en terminant, une dernière chose.
Une chose m'a surprise, dans toutes
mes recherches sur le Web, c'est la position de PETA, People for Ethical
Treatment of Animals, qui, on le sait, sont en faveur des animaux; leur but premier, c'est le bien-être des animaux.
Ils ne s'opposent pas aux législations visant les races en particulier. Ils ne vont pas jusqu'à les
recommander, mais ils ne s'y opposent pas. Et leur logique, c'est que,
bien, les refuges, on le sait, sont remplis
de pitbulls. Alors, si on décide de mettre fin, dans une région, dans un pays,
à l'élevage de pitbulls, on arrête de
créer des nouveaux pitbulls, bien, on va soulager les refuges, on va soulager
les chiens, parce que les pitbulls ne
sont pas gagnants là-dedans. Les pitbulls vont souvent attaquer des chiens,
vont aussi subir des blessures, sont les chiens les plus maltraités, sont les chiens les plus abandonnés et les
plus euthanasiés qui se retrouvent dans les refuges, alors on est gagnants si on arrête de créer des nouveaux
pitbulls. Tout le monde y gagne, le pitbull aussi. Alors, eux, ils
disent : Il n'y a pas de problème
éthique à faire ce type de législation là. Et ça, ça m'a surpris. Et je pense
que ça renforce la valeur, la validité de votre projet de loi, sachant
que ça ne cause pas de problème éthique. Merci.
Le Président
(M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. M. le
ministre, il vous reste 13 minutes.
M. Coiteux :
Oui. Merci, M. Biron. Écoutez, d'abord, avant de poser quelque question
que ce soit, je voudrais simplement
vous dire qu'autant votre témoignage que celui de Mme Vadnais, l'autre
soir, viennent nous chercher, hein, très
profondément. Et effectivement c'est la tragédie qui a été vécue, tant du côté
de la famille Vadnais que dans votre famille, avec votre fille, qui a
ému suffisamment la population et le gouvernement, les oppositions aussi, parce
qu'on travaille ces questions-là ensemble,
pour qu'on en arrive aujourd'hui à considérer la nécessité de légiférer en la
matière et de ne pas laisser les villes
faire des règlements sans balises, là, sans balises importantes, parce qu'on
veut s'assurer que les Québécois
seront en sécurité partout sur le territoire et pas seulement dans les villes
qui sont les plus proactives à cet effet, hein? Alors, merci d'être là puis merci d'être capable de nous expliquer
des choses, là, calmement, rationnellement, comme l'a fait
Mme Vadnais, malgré ce que vous avez vécu, ce que votre fille a vécu.
Nous, puis,
j'imagine, que l'ensemble des collègues se sentent un peu interpelés par les
mêmes choses, on est conscients qu'il existe
des gens... puis ce n'est pas vous, là, parce que vous, vous êtes des victimes,
mais il y a des gens qui n'ont pas
nécessairement été des victimes, mais qui ont des positions très tranchées par
rapport à cette race de chien en particulier.
Donc, il y a effectivement des groupes pro et des groupes antipitbulls. Et,
ceux-là, je pense qu'on est capables de faire la part des choses. On sait qu'il y a un... qu'il peut y avoir un
biais dans la présentation des statistiques, le choix des études, les points de vue qui vont nous être
présentés, et ça, je pense qu'on est capables de trier ça. En tout cas, je
présume qu'on est capables. On dit :
Regardez, là, ils défendent une idée, ils défendent une idéologie, ils
défendent un préjugé, dans un cas
comme dans l'autre. Là, où on a le plus de difficulté, là, c'est lorsque des
experts viennent nous voir, lorsque des médecins vétérinaires viennent
nous voir, et là je me mets à la place de tout le monde ici, autour de la
table, on les questionne puis on essaie de
les amener à nous donner des conclusions, là, fermes, est-ce qu'effectivement,
les pitbulls représentent un risque plus grand que les autres types de
chien, puis ils sont tous là, comme, hein... on essaie de faire attention : Bien non, regardez, le
comportement de prédation, ça peut être le cas d'un autre chien. Des fois,
c'est... Il y a quand même eu
l'admission qu'il y avait des dispositions génétiques dans certains cas, mais
ils ne sont pas allés aussi loin que dire : Oui, mais ces dispositions
génétiques rendent le pitbull particulièrement dangereux.
Comment vous
expliquez ça, vous, que ces gens-là, donc, qui représentent des opinions plus
expertes que la nôtre, du moins je présume qu'ils sont plus experts que
nous... Comment se fait-il qu'ils aient tant d'hésitation à pointer du doigt une race
particulière et qu'ils semblent être à peu près tous... les médecins, ça, c'est
une autre catégorie, mais ils semblent
à peu près tous réticents, voire même opposés, dans certains cas, à ce que le
gouvernement aille aussi loin que de dire :
Regardez, il y a une race qui n'aura plus droit de cité sur le territoire du
Québec, à part peut-être une clause grand-père, avec des mesures
d'encadrement? Comment vous expliquez ça, vous?
• (16 h 40) •
M. Biron (Bernard) : Je pense
que ça peut s'expliquer assez simplement, parce que, bon, on l'a dit, c'est un dossier qui est polarisant, donc il y a des gens
qui sont pour, des gens qui sont contre. Si on prend position clairement
pour un ou l'autre, on se met à dos l'autre moitié. Et donc, par exemple, si je
prends l'exemple de l'Ordre des médecins vétérinaires,
qui est venu ici, qui a admis qu'il y a bien des génétiques, mais qui n'ont pas
été jusqu'à tirer des conclusions, des conclusions qui, à mon avis,
s'imposent, ils se sont arrêtés, bien, c'est clairement pour essayer de ne pas
déplaire ni à l'un ni à l'autre qui...
et de ne pas prendre position, parce
que ça va les mettre dans le trouble,
si je peux dire, ils vont devoir affronter
l'autre groupe et ils ne le veulent surtout pas, ils ne veulent pas se
mouiller. Donc, ils sont venus quand
même, je pense... Je respecte beaucoup leur témoignage, qui est venu apporter des faits quand même,
mais ils sont restés neutres. Et puis,
je pense, c'est le Dr Godbout aussi qui avait
dit : Ça n'aide pas le débat si on prend position, mais ça, je suis un
peu en désaccord avec ça, parce que, je veux dire, on doit... à la fin de la
journée, là, vous devez faire un choix, on bannit les pitbulls ou on ne les bannit pas. Et donc, si eux refusent de dire leur
opinion ou de prendre position, ça ne vous avance à rien. Vous devez vous fier à d'autres sources d'information, à votre propre jugement pour prendre cette décision-là. Mais, à
un moment donné, il va falloir la prendre, parce que,
comme on a dit aussi, ne rien faire, c'est faire quelque chose. Ne pas les bannir, c'est un choix, c'est choisir un camp.
Et donc, si eux refusent d'aider à faire ce choix-là en expliquant
clairement leur prise de position, je ne
pense pas que ça aide à faire avancer le débat. Mais je comprends pourquoi ils le font et je les respecte. Et c'est la même chose pour les autres
ordres professionnels. Personne ne semble vouloir avoir le courage de se
mouiller et de dire : Bien, nous, on est de ce côté-là, et puis «so be
it», on affrontera la critique, je crois.
M. Coiteux : Une autre chose
qui m'a interpelé beaucoup aussi, là, puis on vient de discuter avec... on
vient d'échanger avec le coroner qui a fait
l'enquête suite à la mort de Mme Christiane Vadnais, il nous a dit
que, si on avait appliqué la
réglementation en vigueur dans l'arrondissement d'Anjou, le chien en question
n'aurait jamais pu attaquer Mme Vadnais
parce qu'il aurait déjà été mis hors de circulation. Alors... Puis là, dans le fond, la question sur laquelle je veux vous amener, c'est la suivante : Comment s'assurer que les
villes, quelque règlement qu'elles adopteront pour l'avenir, puis le gouvernement entend légiférer pour qu'il y ait des règlements solides... comment s'assurer qu'effectivement elles vont les appliquer, ces
règlements-là?
M. Biron
(Bernard) : C'est une
excellente question. Et je
pense que, pour qu'un règlement soit
efficace, il doit être applicable concrètement. Il doit être simple, il
doit être applicable. J'ai entendu la mairesse Plante dire : On a juste à empêcher les mauvaises personnes d'avoir des
chiens dangereux, et ça va être... tout va être beau. Ça, c'est le genre
de règlement qui n'est pas applicable, à mon avis.
Comment on va identifier des mauvaises personnes? Comment on va prédire
qui va mal se comporter? Ça devient inapplicable. En théorie, ce serait
parfait, là, mais c'est inapplicable.
Interdire une
race de chien, c'est tout à fait applicable, c'est très simple. Et, quand on
dit : Non, c'est impossible de l'identifier,
je pense qu'on fait preuve de mauvaise foi. Il y a
eu beaucoup de jurisprudence aux États-Unis,
on en a parlé à la commission, il y a eu... les juges ont rejeté du revers de la main
ces arguments-là à chaque fois, systématiquement, en disant : Une personne
d'intelligence moyenne peut très certainement identifier un pitbull. Et à mon
avis, donc, c'est parfaitement applicable.
Et la preuve... ce n'est pas une preuve, mais un indice, c'est qu'il y a
41 pays, je crois, la Norvège, le Danemark, la France,
l'Allemagne, l'Australie, des États, des villes qui l'ont interdit, l'Ontario
l'a fait, la ville de Brossard, où j'habite, l'a fait, et ça n'a pas causé de
chaos, ça n'a... Ils ont réussi à...
M. Coiteux : Comment ça se
passe à Brossard à l'heure actuelle? Parce que Montréal a adopté un règlement.
Le règlement a été récemment suspendu, suite à une élection. Comment ça se
passe à Brossard en ce moment?
M. Biron
(Bernard) : Bien, je peux
vous dire que, d'un point de vue des citoyens, moi puis ceux que je connais, on est très soulagés. Du point de vue de la peur, on a mentionné que le pitbull aurait... bannir le pitbull
pourrait créer un faux sentiment de
sécurité. Moi, je n'adhère pas à ces arguments-là. Au contraire, je pense
qu'il y a un vrai sentiment d'insécurité quand les pitbulls sont autorisés. Et je peux vous
dire que moi, je me sens plus en sécurité maintenant à Brossard. Et
je suis très reconnaissant à la ville de Brossard d'avoir maintenu le règlement
malgré le changement d'administration, malgré les pressions qu'ils ont subies
aussi.
Et vous avez
raison, quand vous dites : On ne veut pas laisser aux villes le fardeau de
légiférer là-dessus, parce qu'il faut comprendre que les villes sont des fois
soumises à des pressions énormes, entre
autres, des organismes de
refuge, qui refusent de prendre en charge
les chiens si on adopte certains types de règlement. Des villes ont fait marche
arrière simplement parce
qu'elles sont victimes de chantage. Et donc moi, je suis reconnaissant au
courage de la ville de Brossard et je me sens plus en sécurité. Donc,
ça, c'est un impact clair et immédiat.
M. Coiteux :
Dans plusieurs villes, et puis je ne vais en pointer aucune du doigt, vous
comprendrez bien que je suis ministre
des Affaires municipales, je vais me faire appeler rapidement, je ne suis pas
seulement ministre de la Sécurité publique,
mais j'ai souvent entendu, par le passé, des échos selon lesquels des citoyens
se plaignaient, dans plusieurs villes, dénonçaient des situations où ils
sentaient que leur sécurité était en danger puis il n'y avait pas beaucoup de
suites, il n'y avait pas beaucoup de suites,
même lorsque des règlements existaient, que ce n'était pas forcément pris au
sérieux, et que bien des tragédies auraient pu être
évitées s'il y avait eu de la collaboration des autorités compétentes, là, des municipalités pour faire appliquer les règles.
Est-ce que vous avez le sentiment que ces choses-là, au moins dans votre
communauté à vous, ont changé?
M. Biron
(Bernard) : Oui. Les choses ont changé, suite à... C'est malheureux
parce que ça prend souvent des tragédies,
mais, suite à l'événement de ma fille, je sens que les choses ont changé. Je
sens que maintenant... Puis j'ai parlé des policiers aussi, des
enquêteurs, qui maintenant prennent les dénonciations beaucoup plus au sérieux
qu'avant, maintenant. Ça a vraiment changé. Et le sentiment général de sécurité
est beaucoup plus grand maintenant.
M. Coiteux : Est-ce que vous
sentez que le comportement des propriétaires de chiens a changé aussi?
M. Biron
(Bernard) : Oui. Je pense que les gens en général veulent obéir aux
règlements, obéir aux lois, pour la plupart.
Et je le vois, je vois des gens tenir leur chien beaucoup plus en laisse
qu'avant, avec des muselières. Ça a... Les gens ont été sensibles à ce
qui s'est passé puis ont bien réagi, je crois.
M. Coiteux : Et à Brossard
même, là, pour mettre en vigueur l'interdiction des pitbulls, au moment de l'immatriculation, là, lorsqu'ils doivent
immatriculer leur chien, est-ce qu'ils doivent l'amener avec eux, leur chien?
Est-ce qu'il y a une vérification de la
véracité de l'identité du chien en question lorsque le propriétaire dit :
Bien non, ce n'est pas un pitbull, c'est un... autre chose?
M. Biron (Bernard) : Je ne
saurais pas vous dire comment que ça, ça se passe à Brossard, là, je n'ai pas
été enregistrer de chien dernièrement. On pourrait faire le suivi et puis vous
envoyer l'information.
Le Président (M. Auger) :
1 min 30 s.
M. Coiteux : J'ai 1 min 30 s ? Est-ce que...
Je voudrais vous donner cette minute et demie là, s'il y a quelque chose que vous voudriez exprimer
avant que notre temps s'écoule, là, pour vous laisser le maximum possible.
M. Biron
(Bernard) : Bien, j'ai sous
les yeux le règlement, la loi qui a été créée en Ontario, en 1990, et qui
est encore en vigueur, qui a subi les
assauts des poursuites devant les tribunaux et qui a résisté à tout ça, donc
qui a passé le test des tribunaux.
Mon frère, qui est avocat, peut vous en parler un petit peu. Il y a une
clause qui est intéressante, en fait, la manière pratico-pratique
qu'eux ont décidé de trancher la fameuse question de qu'est-ce qui est un
pitbull, comment est-ce qu'on identifie un pitbull. Alors, je laisse la parole
à mon frère.
Le Président (M. Auger) :
M. Biron.
M. Biron
(Jean-Christophe) : Merci. En fait, mon avis, c'est que la loi ou le
règlement qui va s'ensuivre n'a pas besoin de décrire toutes les
caractéristiques physiques d'un pitbull pour pouvoir le bannir. Je pense que
l'intention du législateur ici est très claire, dans le projet de loi, que je
salue, d'ailleurs, et l'annexe I est très claire aussi.
Dans la loi
de l'Ontario, ils définissent ce que c'est, un pitbull, mais aussi ils
définissent un pitbull comme étant un chien
qui a toutes les apparences, toutes les caractéristiques physiques
substantiellement les mêmes que celui d'un pitbull. Donc, ça, ça laisse
de la marge de manoeuvre aux tribunaux si un jour les tribunaux doivent
interpréter la loi ou les règlements. Et les tribunaux vont avoir la
possibilité d'établir des balises claires sur ce qui est un pitbull ou ce qui
ne l'est pas.
Et, en fait,
c'est juste ça, mon point que j'aimerais apporter, c'est que je pense qu'on n'a
pas besoin de s'enfarger dans les
fleurs du tapis, là, pour définir ce qu'est un pitbull dans la loi ou le
règlement. L'intention est claire, là, dans la loi.
• (16 h 50) •
M. Biron (Bernard) :
Exactement. Donc, eux ne se sont pas coupé les cheveux en quatre. Ils ont
dit : Si ça ressemble suffisamment à un
pitbull, bien, c'est probablement dangereux. De toute façon, on va... si on
l'interdit, on n'a pas besoin d'aller jusqu'à obtenir tout son pedigree,
là, jusqu'à Mathusalem, comme on l'a mentionné. Si ça ressemble à un pitbull,
ça a la musculature d'un pitbull, c'est un chien dangereux, ça suffit.
Le
Président (M. Auger) : Merci. Nous devons maintenant poursuivre
avec l'opposition officielle. M. le député de Verchères, pour 9 min 30
s.
M. Bergeron : D'abord, merci infiniment d'être des nôtres, de
nous avoir livré votre témoignage. À l'instar de M. le ministre, j'imagine, de
l'ensemble des collègues autour de cette table, nous sommes conscients de
l'importance et de la difficulté que
représente votre témoignage, tout comme celui de Mme Vadnais, par exemple,
parce que ça doit faire ressurgir toute une
combinaison de sentiments, à la fois un sentiment de responsabilité, de vouloir
sensibiliser les législateurs que nous
sommes pour que la décision soit la plus appropriée possible, pour éviter que
des telles tragédies se poursuivent, mais de vous replonger
continuellement dans le bain de cet évènement que vous avez vécu, et dont vous continuez... avec les conséquences desquelles vous
continuez de vivre. Alors, merci, donc, d'avoir pris le temps de
préparer votre témoignage, d'être venu nous
voir, de nous l'avoir livré et, comme le disait le ministre, avec calme. Vous
auriez tellement de raisons de rager, d'être
en colère, et ça aurait été tout à fait normal que ça s'exprime. Donc, encore
une fois, merci.
Vous avez d'emblée plaidé
en faveur de l'interdiction de la race pitbull. Plusieurs témoins, puis vous
les avez entendus, je crois comprendre que
vous avez suivi attentivement nos travaux, plusieurs témoins sont venus nous
dire que ça n'existe pas, ça, la race
pitbull, alors... et que ça constituerait une difficulté réelle que d'interdire
une race qui n'existe pas. Comment réagissez-vous à cette affirmation
selon laquelle les pitbulls, là, on en a tous vu, mais ça n'existe pas.
M. Biron (Bernard) : C'est absolument
loufoque comme argumentation. Et, encore là, on voit qu'il y a une idéologie derrière ça et on cherche à dire
n'importe quoi pour justifier notre opposition au règlement. Parce que,
quand on cherche quelles sont les
conséquences négatives à ce type de législation là, ce serait quoi, le
problème, si on bannit les pitbulls?
On a beau chercher, là, j'ai cherché longtemps, je n'en ai pas trouvé, de
conséquences négatives; des conséquences positives sur la sécurité,
mais, négatives, il n'y en a pas.
Alors, je
sens qu'on fait preuve, à un moment donné, de créativité dans nos arguments
pour défendre l'indéfendable quand on
avance des arguments comme ça. Moi, ça n'a pas beaucoup de valeurs à mes yeux.
Le pitbull existe. Si on va dans une
animalerie, on va voir un vétérinaire, on parle de pitbull, il ne va pas nous
dire : De quoi vous parlez? Il va savoir c'est quoi, un pitbull. Tout d'un coup, il n'y a plus de pitbulls, quand
on veut faire une loi. Mais, je veux dire, ce n'est pas cohérent, là.
Et puis je pense que votre loi est très, très
bien écrite parce qu'elle ne fait pas seulement mentionner le mot «pitbull», mais elle définit des races précises,
qu'ensemble on appelle «pitbull» pour simplifier, mais on parle de races
très précises, des races qui existent, des races qu'on peut prouver
génétiquement.
Et, quand
moi, j'entends un test d'ADN à 87 % pitbull, avec un échantillonnage de
16 000 pitbulls, je veux dire, et qu'on refuse d'admettre, on refuse de dire le mot : Oui, c'est un
pitbull, on refuse... on nie une évidence scientifique, moi, je me questionne sur les motivations. C'est aberrant.
87 %, là, dans mon livre à moi, c'est un pitbull, O.K.? Et, je veux
dire, depuis quand on va nier la validité scientifique d'un test d'ADN? Ça
commence à être pervers comme raisonnement, là. 16 000, je pense que c'est
un échantillon quand même raisonnable.
M. Bergeron :
Vous l'avez souligné à juste titre, nous avons à quelques reprises posé la
question aux différents témoins sur ces races qui ont été constituées
génétiquement, par croisement, au fil du temps, des siècles, voire des millénaires, pour une fonction bien précise, celle
du combat. Comme c'est une pratique fort heureusement révolue, il y a eu
d'autres croisements. C'est l'argument de
ceux qui disent que la race pitbull, à toutes fins utiles, n'existe plus, parce
qu'elle a été croisée avec toutes sortes d'autres affaires depuis un certain
temps, et que conséquemment, même s'il y avait pu y avoir dans le code
génétique de cette race cette prédisposition à l'attaque, ça s'est édulcoré par
l'apport d'autres caractéristiques génétiques d'autres races. Comment vous
réagissez à cet argument?
M. Biron
(Bernard) : J'ai du mal à suivre cet argument-là. Le pitbull d'antan,
qui était une machine de combat, ressemble
encore au pitbull aujourd'hui. Alors,
je veux dire, les gènes, là, ne se sont pas dissipés dans la nature,
hein? Il y a eu des croisements peut-être
avec d'autres races, mais il y a eu aussi des races pures qui ont été élevées et
qui continuent d'être élevées. Les races qu'on identifie comme pitbulls sont des
races pures qui ont des caractéristiques génétiques qui remontent au
temps où ils étaient élevés pour le combat.
Et ça, c'est
supporté aussi sur le terrain par les statistiques. Quand on dit : 50 % des morsures graves, à Montréal,
sont causées par 3 % des chiens, qui sont des pitbulls, ça vient supporter
le fait que, oui, c'est des chiens qui sont prédisposés à l'attaque et qui ont
des capacités physiques supérieures à d'autres chiens.
M. Bergeron :
Vous avez évoqué dans votre témoignage oral, il y a quelques instants, les
races de chiens dangereux, mais vous ne mettez l'emphase que sur une
seule, le pitbull. Vous aviez quoi d'autre en tête lorsque vous avez parlé de
cela?
M. Biron
(Bernard) : Bien, le projet de loi mentionne également, je pense, vous
avez une autre race, là, à part les pitbulls,
dans votre projet de loi, les rottweillers. Donc, je pense que... Je ne me suis
pas penché sur le cas, mais je vous fais confiance que, si vous l'avez
nommé, c'est parce que vous avez des...
M. Bergeron :
Je veux tout de suite préciser que, pour l'heure, ce n'est pas encore notre
projet de loi, c'est le projet de loi du ministre. Ce le sera
éventuellement.
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Biron (Bernard) : Bien,
quand je dis «vous», je m'adresse à l'ensemble de la commission.
M. Bergeron : Mais, non, je
comprends, je comprends ce que vous voulez dire.
Je vais
revenir sur un argument, là. Mettons que demain matin on l'adopte comme ça puis
on interdit le pitbull, hein? On a vu
une témoin de la ville d'Ottawa qui nous a dit : À Ottawa, on ne l'a pas
vraiment appliqué. On a vu le cas de Mme Vadnais,
où il semblerait que, si le règlement de la ville, de l'arrondissement d'Anjou
avait été appliqué, ce chien-là aurait
été sorti de la circulation, puis on n'aurait jamais pu déplorer le décès de
Mme Vadnais. Mettons que demain matin on l'adopte, là, vous comprenez bien que M. le ministre ne sera pas dans
toutes les municipalités du Québec pour s'assurer que ce soit appliqué. Quelle garantie... Puis je sais
que M. le ministre a posé cette question parce que c'est une
préoccupation qui est réelle. Comment
peut-on s'assurer, sur le terrain, de l'application d'une loi par l'ensemble
des forces de l'ordre sur le territoire québécois? Il y en a qui vont vous
dire : Bien, oui, mais, tu sais, les policiers, là, techniquement, là, il
faut qu'ils empêchent le mélange
d'alcool dans des bars? Ils ont-u d'autre chose à faire de plus important? Les
policiers, là, ils ont-u d'autre chose de plus important à faire que de
s'assurer que les pitbulls, ils soient retirés de la circulation?
M. Biron (Bernard) : Bien, je
pense que, je veux dire, il y a plusieurs lois qui ont une portée provinciale.
Il y a des moyens mis en place pour assurer...
Lorsqu'on vote une loi, le système doit appliquer la loi sur le terrain, je
veux dire, c'est la base de notre... fondement d'une société de droit. Et donc
cette loi-là ne ferait pas exception.
M. Bergeron :
Je vous arrête tout de suite, M. Biron. Vous avez parfaitement raison,
puis je ne peux pas être plus en accord avec vous. Mais, lorsqu'on pense
au cas de la ville d'Ottawa, lorsqu'on pense à ce qui s'est passé dans l'arrondissement d'Anjou, force est de constater que
ce n'est pas toujours appliqué de façon extrêmement rigoureuse. Donc, si on adopte une législation, il faut s'assurer
qu'elle puisse être appliquée. Si on adopte une législation dont on n'a
aucune garantie qu'elle sera véritablement appliquée, c'est un coup d'épée dans
l'eau, c'est un voeu pieux, là.
M. Biron
(Bernard) : Effectivement, il faut s'assurer qu'elle soit appliquée.
Mais, je veux dire, si on s'empêche de
légiférer en disant : Peut-être elle ne sera pas appliquée, on ne passera
jamais de loi non plus, O.K.? Donc, il faut...
M. Bergeron : On n'est pas élus
puis on n'est pas ici pour ne pas adopter de loi.
M. Biron (Bernard) :
Exactement.
M. Bergeron :
...on est ici pour adopter des lois, mais on veut qu'elles puissent être appliquées.
Donc, qu'est-ce que vous avez à nous
dire à nous, législateurs, qui nous apprêtons à adopter une loi? Parce que
j'espère... On l'a appelée de tous nos
voeux, cette loi, alors j'espère qu'il y aura une loi, mais il faut qu'on ait
une loi qui soit applicable. Qu'est-ce que vous avez à nous recommencer
pour que cette loi soit véritablement applicable?
M. Biron
(Bernard) : Pour qu'elle soit applicable, ce que je peux vous
recommander, c'est : Gardez-la le plus simple possible. Je pense que, dans son état actuel, elle est
applicable, elle est simple. Soyez très clairs dans vos directives lorsque vous allez formuler un règlement qui va
clairement interdire et définir sous quels critères. Et je pense que...
Libre à vous d'établir quels sont les
critères pour identifier un pitbull et l'interdire. Le plus simple ce sera, le
plus applicable ce sera, tout simplement.
M. Bergeron : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Donc, nous allons maintenant poursuivre avec le deuxième groupe d'opposition.
Mme la députée de Mirabel, pour 6 min 30 s.
• (17 heures) •
Mme D'Amours :
Oui, merci, M. le Président. Bonjour, MM. Biron. Que pensez-vous de la
loi, du projet de loi qui est sur la
table? Je vais peut-être m'adresser à l'avocat. D'après vous, c'est une bonne
chose si on met en règlement puis qu'on met des types de chien dans un
règlement, et non que ce soit écrit directement dans la loi? Avez-vous une
opinion sur ça?
M. Biron (Jean-Christophe) :
Oui, bien, je pense que c'est une bonne chose parce que le règlement est plus facilement modifiable qu'une loi. Donc, ça va
permettre à la loi de toujours évoluer et suivre l'état de la situation sur
le terrain. Si jamais on apprend, de par la
littérature scientifique, qu'il y a d'autres chiens potentiellement dangereux
qui sont dangereux, de type pitbull ou
autres, on peut facilement les inclure dans le règlement. Donc, dans ce
sens-là, c'est une loi qui peut
évoluer plus facilement que si, disons, je compare celle de l'Ontario, où les
chiens dangereux ou interdits sont directement
ciblés dans la loi. Donc, la loi de l'Ontario peut difficilement évoluer. Ça
prend toujours un amendement à la loi, ce qui est plus compliqué qu'un
simple règlement ou un décret.
M. Biron (Bernard) : Si je peux me
permettre d'ajouter, je pense, c'était le maire de Laval ou en tout cas quelqu'un
de la ville de Laval qui avait dit : Oui, mais, si on bannit une
certaine race, les gens qui veulent avoir des chiens dangereux, ils vont simplement passer à autre une race, en fait, ou même vont créer une
autre race éventuellement, à force de
faire des croisements, donc vont reproduire une autre race dangereuse. Eh bien,
si c'est le cas, si, dans le futur, une nouvelle race émergeait, qui était dangereuse, la loi, de la manière
qu'elle est formulée, avec la liste de chiens par règlement, pourrait facilement tenir compte de ça. Donc, je
pense que ça a été formulé d'une manière intelligente et je vous en
félicite.
Mme D'Amours : Je vous ai
abordés tout de suite avec deux questions, mais j'aurais aimé vous faire un commentaire. Je suis convaincue que ce soir je vais avoir des messages sur
Twitter et Facebook sur les commentaires que je vais faire, mais je vais les
assumer, et je me fous de ces gens-là.
Je dois vous
dire que, tout comme mes collègues l'ont mentionné, vous êtes d'un calme, et vous
êtes posés, et vous arrivez ici avec
des études scientifiques. Vous dites que vous n'êtes pas experts, que vous
arrivez avec des études que vous avez
analysées, des études scientifiques, vous avez des pour, vous avez des contre,
et vous arrivez même à parler d'une clause
grand-père, que vous seriez prêts à vivre avec ça. Je dois vous dire... Puis je
dois vous féliciter, parce que
d'autres organismes qui sont venus nous faire part de leurs commentaires puis des dépôts de mémoires où il n'y a pas de...
c'est soit qu'ils étaient pour ou soit qu'ils étaient contre certains articles
de la loi, qu'ils ne laissaient pas de jeu non plus à des propriétaires de chiens. Ce que je sens chez vous,
c'est que c'est... quand même vous auriez pu être la personne, comme Mme Vadnais, à dire : On n'en veut plus,
de ces chiens-là, on ne veut plus les voir dans nos rues, et vous êtes quand
même d'accord avec ceux des propriétaires
qui ont des chiens présentement, avec une clause grand-père, mais qui aussi...
bon, en laisse, muselière, vous êtes quand
même conscients que ces gens-là aiment leurs chiens et qu'ils veulent les
garder. Donc, je vous félicite pour ça parce que vous êtes quand même...
même si vous êtes touchés personnellement, vous êtes quand même logiques et vous savez que ces gens-là aiment
leurs chiens puis que... vous êtes capables de voir qu'on pourrait
accepter des chiens sur le territoire avec des conditions.
M. Biron
(Bernard) : Je pense... Bien, merci beaucoup pour les commentaires. Je
crois qu'une clause grand-père est un
bon compromis. Quand on parle d'applicabilité de la loi, je pense que c'est une
manière de faire accepter la loi, d'avoir un consensus, parce
qu'effectivement les gens qui ont un chien, c'est leur bébé. Ce serait
impensable de leur demander comme ça, du
jour au lendemain, d'abandonner leur chien, de le faire euthanasier, de le
faire adopter par une autre province
ou territoire. Je veux dire, il faut quand même utiliser notre gros bon sens,
et puis la clause grand-père, à mon avis,
est un bon compromis. Puis je pense que Mme Vadnais aussi était dans le
même sens, là, je pense qu'on avait dit : Quand le chien sera décédé,
bien, on adoptera une autre race de chien.
Et je peux même citer une citation que je
trouvais intéressante, qui provenait de Dr Michel Pepin, qui était porte-parole de l'Association des médecins
vétérinaires du Québec, qui avait dit : Avec 350 races de chien, il y
en a bien d'autres qui sont plus adaptés à la vie en société.
Donc, la
clause grand-père, simplement, le prochain chien ne sera pas un pitbull. Et je
pense que ça, ce n'est pas violent
dans son applicabilité. Ça ne va pas nécessairement causer la même levée de
boucliers que si on avait été très radical.
Le Président (M. Auger) : Ça
va, madame?
Mme D'Amours : Oui, merci, M.
le Président.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, merci,
MM. Biron, Bernard et Jean-Christophe, pour votre participation aux
travaux de la commission.
Je vais suspendre quelques instants pour
permettre à ANIMA-Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 5)
(Reprise à 17 h 10)
Le Président (M. Auger) : Nous
allons reprendre nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants
d'ANIMA-Québec. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour votre
présentation, et par la suite il y a période d'échange
avec les trois groupes parlementaires. Dans un premier temps, bien vouloir vous
identifier, et par la suite vous pourrez commencer votre présentation.
Association nationale
d'intervention pour le mieux‑être
des animaux, Québec (ANIMA‑Québec)
Mme Sansregret (Julie) : Mon
nom, c'est Julie Sansregret. Je suis la représentante des élevages canins pour ANIMA-Québec. J'ai plusieurs chapeaux aussi. J'ai une école
d'entraînement de sports canins, où je vois 360 chiens par semaine,
puis je suis éleveure de chiens aussi. Ma collègue.
Mme Lévesque (Renée) : Mon nom
est Renée Levesque. Je suis secrétaire-trésorière d'ANIMA-Québec.
Alors, dans
un premier temps, j'aimerais vous remercier de permettre à ANIMA-Québec de
présenter son mémoire.
D'emblée, le
projet de loi n° 128 visant à favoriser la protection des personnes par la
mise en place d'un encadrement concernant les chiens est accueilli
favorablement par ANIMA-Québec.
ANIMA-Québec a été fondé en 2002, avec l'aval du
MAPAQ. C'est un organisme à but non lucratif dont la mission est de rehausser le bien-être des chats et des chiens au Québec.
Son premier mandant consistait à l'inspection des lieux de garde des chats et des chiens afin
d'assurer le contrôle des normes en matière de sécurité et de bien-être. En
fait, la P-42. Les activités d'inspection
ont cessé en 2013 pour s'orienter davantage vers des activités différentes,
c'est-à-dire toujours d'améliorer la
condition de vie des animaux domestiques mais en travaillant sur un projet de
certification. Alors, on a travaillé
sur un programme de certification pour les lieux de garde, pour les éleveurs de
chiens et de chats. Donc, notre rôle, maintenant, c'est davantage de
l'éducation, de la formation et de la certification.
Les membres
de notre conseil d'administration comportent huit personnes, dont trois
médecins vétérinaires, l'un étant
représentant du MAPAQ, un de l'Association des médecins vétérinaires du Québec,
un autre de l'Ordre des médecins vétérinaires
du Québec. On a un représentant éleveur de chats, un représentant éleveur de
chiens. On a également des gens qui se sont ajoutés par leurs
expériences connexes.
C'est ma collègue Julie qui va vous présenter
les propositions, les solutions qu'on vous propose.
Mme Sansregret
(Julie) : Alors, chez ANIMA-Québec, on prône deux approches qu'on
trouve qui seraient pertinentes dans,
justement, l'application, là, de la loi. C'est, en fait, d'encadrer les
éleveurs, parce que ce qu'on prétend, c'est
de se dire : Ces chiens-là, les pitbulls, ils ont été produits par
quelqu'un. Qui qui produit ces chiens-là? Puis, on se dit, si on réussit à réglementer ou à légiférer au
niveau de la production, on va s'assurer, premièrement, de
l'identification des chiens, de la
traçabilité des chiens puis du suivi aussi, avec le contrat, de s'assurer que
les chiens, ils sont vendus avec un
contrat, qu'ils sont bien... qu'ils sont vendus à des personnes qui disent
qu'elles sont bienveillantes, en fait, et d'assurer un suivi aussi pendant toute la vie du chien, pour
essayer d'évaluer les programmes de reproduction, dans le fond. Parce que nous, on croit que ces chiens-là, ces chiens
dangereux là, ils ont une dimension exactement génétique qui pèse dans
la balance. Puis, en contrôlant, dans le fond, la production de ces chiens-là,
on pourrait dire : Bon, ce chien-là qui est dangereux vient de cet éleveur-là. Donc, il faudrait qu'il se pose des
questions sur le choix de ses reproducteurs peut-être, peut-être la
façon qu'il a... la place où il a placé ce chien-là, dans le fond, dans cette
nouvelle famille là.
Elle
va s'assurer aussi de la socialisation des chiens, que ce soit... dans le fond,
qu'ils soient élevés d'une façon correcte,
pour essayer de protéger aussi la population, de l'enrichissement du milieu de
vie, d'une éducation aussi. Puis ça va
lui permettre, dans le fond, de suivre son développement puis d'essayer
d'encadrer cette... parce que présentement c'est un petit peu n'importe
quoi, vous l'avez vu, là. La production, c'est M., Mme Tout-le-monde, c'est les
éleveurs dits consciencieux qui ont le code de déontologie du Club canin
canadien.
ANIMA-Québec
ne favorise pas une certaine race ou ne dit pas : C'est juste les races
pures. On ne veut pas... Nous autres,
ce qu'on essaie de faire, c'est certifier des élevages, des producteurs, dans
le fond. Monsieur, madame qui a
un chien à la maison, qui voudrait faire vivre la belle... les choses de la naissance à ses
enfants, là, en disant : On va reproduire ce chien-là, il y a des responsabilités, cette
personne-là. Au-delà de produire des chiens, il faut qu'elle les place puis il
faut qu'elle les suive aussi durant leur processus et leur vie.
Ça
fait que, donc, on n'est pas... ANIMA-Québec n'est pas en train de dire :
On va cibler certaines races. On dit : C'est une question de production, dans le fond. Puis c'est ça qu'on veut
essayer de se positionner, avec nos programmes de certification, dans le
fond, qui sont en processus présentement.
Puis
notre deuxième point, dans le fond, l'imputabilité des producteurs, ce qu'on
veut... et dans un deuxième point aussi
la responsabilisation des propriétaires de chiens, qui va de soi, avec tout ce
que vous avez été mis, donc, en lumière, là, de dire : Bien, les gens, il faut qu'ils soient responsables.
Ceux qui ont ces chiens-là, il faut qu'ils répondent de leurs
responsabilités aussi.
Ça
fait qu'ANIMA-Québec se veut quelqu'un qui va essayer d'amener des outils, qui
va essayer de vous aider, dans le fond, dans la réglementation. On ne
croit pas que bannir une certaine race va arriver à... pour plein de raisons d'identification, là, mais va arriver à offrir un
sentiment de sécurité en général, parce qu'on croit... Il y en a, des
chiens dangereux. Il y a des pitbulls
dangereux, il y a d'autres races dangereuses. On aimerait que le gouvernement
se penche sur vraiment, là, une
réglementation qui vise les chiens dangereux en général et non pas juste
certaines races. Tous les chiens ont
un potentiel d'être dangereux. C'est sûr que, s'il pèse plus puis qu'il est
plus... musculairement il a plus de potentiel, mais, quand même, ça
reste un potentiel quand même.
Puis
la responsabilisation, dans le fond, des propriétaires de chiens, ça aussi,
nous tient à coeur, dans nos outils de formation
puis de certification aussi. On a un programme nouveau de certification en
milieu de garde aussi puis selon certains
de vos points de loi, l'article, je crois, qui dit, dans le fond, qu'il y a
besoin d'une personne ou d'une place pour garder ces chiens-là qui sont en processus d'évaluation. On pourrait
aussi prêter main-forte dans cette avenue-là aussi.
Donc, il y a
différents points, je ne sais pas si vous voulez qu'on les passe, des
commentaires spécifiques par rapport aux
articles, mais je pense que le gouvernement devrait se garder... parce qu'il a
gardé le bien-être des animaux, dans
le fond, qui régit le bien-être des animaux, devrait s'approprier la loi sur
les chiens dangereux en donnant certaines responsabilités aux municipalités et non pas toute la responsabilité aux
municipalités. Puis je pense que ça doit se faire dans un cadre organisé
ou plus gros que, dans le fond, à l'échelle de la municipalité.
• (17 h 20) •
On
pense que, oui, ça passe par l'éducation. J'en fais. J'en fais, de l'éducation
de propriétaires de chiens, puis de l'éducation
de propriétaires de chiens volontaire, là, qui s'inscrivent, qui paient, qui
viennent dans mes cours apprendre des choses,
on en fait beaucoup. On ne change pas le monde demain matin, mais on pense
qu'avec certaines lois on puisse donner,
dans le fond, puis d'encadrement... qu'on puisse changer peut-être pas à court
terme mais à moyen terme, à long terme. Quand on pense qu'un chien vit
15 ans, si on se dit... si on se donne les outils, puis dire : Bien,
on contrôle la production, bien, on élimine
beaucoup... ou en tout cas on fait un bout de chemin, en 15 ans, sur nos
chiens dangereux, là. On a une
traçabilité, on a un modèle, on a... Parce qu'il n'y a pas grand-chose
scientifique. En fait, il y en a, mais ils se contredisent beaucoup. Puis il y a beaucoup de statistiques qu'on laisse
parler en fonction de qui on est quand on lit la statistique. Moi, j'ai des statistiques de golden retrievers agressifs
parce que, moi, c'est les golden retrievers qui sont dans des familles, ça fait que c'est sûr que,
statistiquement parlant, c'est eux qui mordent plus les enfants que d'autres
races. Mais, c'est ça, je pense qu'il faut
voir un petit peu plus grand et loin. Puis ANIMA-Québec est là, dans le fond,
pour essayer, avec notre expérience
de certification, essayer de vous donner une sorte de boîte à outils, là, en
étant compétents dans la matière, en ayant de l'expérience dans la matière puis en
essayant de s'entourer de gens compétents et avec expérience aussi, parce
que ça aussi, c'est un petit peu du n'importe quoi, dans le milieu du métier,
pour les chiens, là, puis nous autres, on le vit au quotidien aussi, là.
Le
Président (M. Auger) : Merci pour votre présentation. Nous allons
maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, pour
16 minutes.
M. Coiteux :
Bien, merci d'être parmi nous aujourd'hui pour échanger avec nous. Merci aussi
de nous dire que vous souhaitez être des partenaires pour assurer la
sécurité de la population.
Vous prenez
dans votre domaine de compétence qui est celui de la certification, celui de
s'assurer que les éleveurs aient les
meilleures pratiques possible, alors je vais vous questionner surtout sur cet
aspect-là. Le projet de loi, évidemment, ne propose pas un encadrement des éleveurs. Vous comprendrez que ça ne
veut pas dire que je ne pense pas que ce soit une chose à faire. Est-ce
que c'est ce véhicule-là qui est la bonne façon de le faire? Je pense que le
MAPAQ a plus d'expertise que le ministère de
la Sécurité publique pour faire ces choses-là. Et c'est tout à fait
complémentaire. Puis il y aura des
conclusions à l'exercice de consultation avec des chantiers et des choses qui
pourront être faites immédiatement, puis
il y a des choses qui vont peut-être nécessiter un peu plus de temps. Mais il
faut assurer la sécurité de la population, donc il faut trouver les
moyens de le faire rapidement.
Je vais vous
poser la question suivante : Pourquoi des éleveurs produisent des
pitbulls? Quel est le but de produire des pitbulls?
Mme Sansregret
(Julie) : En fait... Puis c'est une très bonne question, je vais vous
dire, parce que moi, je suis dans le
milieu, hein, puis je ne pourrais pas vous nommer d'éleveurs de pitbulls, mais
il y en a à la tonne, là. Le règlement de Montréal, ce qu'il a fait au
quotidien, dans ma pratique, c'est qu'il a fait en sorte qu'il y a plein de
monde qui ont produit ces chiens-là puis qui
se sont retrouvés dans mes maternelles pour chiots avec des familles avec des
jeunes enfants et tout qui avaient comme profonde conviction que, si tu
n'as pas de casier judiciaire, si tu es une bonne personne, ces chiens-là, c'est des bons chiens, puis il n'y aura
pas de problème. Ces chiens-là restent des chiens, puis je le dis à tous
mes cours. Je ne sais pas où elles sont, ces
personnes-là, puis c'est ça qui m'apeure dans le... Ils n'ont pas... ils n'ont
aucune conscience sur la traçabilité de leurs chiens, il n'y a aucune
conscience sur leur génétique.
M. Coiteux :
O.K. Mais admettons, là, que nul ne pourrait élever, c'est-à-dire reproduire
des chiens, moyennant un certain nombre...
Mme Sansregret (Julie) : De
critères.
M. Coiteux : ...de conditions
très strictes. Avant qu'on en arrive à ça, là, est-ce qu'il ne devrait pas être
actuellement interdit de reproduire des pitbulls, selon vous?
Mme Sansregret (Julie) : En
fait, on devrait...
M. Coiteux :
Parce que, là, si j'interprète bien ce que vous m'avez dit, je m'excuse de vous
interrompre, mais il n'y a pas d'éleveur certifié, à l'heure actuelle,
qui reproduit des pitbulls au Québec. C'est ça que vous me dites?
Mme Sansregret (Julie) : Il n'y
a pas d'éleveur...
M. Coiteux : Donc, c'est dans
la clandestinité.
Mme Sansregret (Julie) : Bien,
tout le monde le fait dans la clandestinité, je vais vous dire, c'est...
M. Coiteux :
Mais alors, justement, si on a un motif raisonnable de penser... Je le sais,
qu'il n'y a pas unanimité là-dessus.
Mais, si on a un motif raisonnable de croire que ce type de chien, à cause de
leur pedigree génétique puis les raisons
pour lesquelles ils ont été élevés jadis et peut-être encore aujourd'hui,
malheureusement, posent un risque pour la sécurité publique, minimalement,
là, est-ce qu'il ne devrait pas être interdit de les reproduire à quiconque?
Mme Sansregret
(Julie) : En fait... Mais là il va falloir parler de plus que les
pitbulls, par exemple, là, il va falloir parler des bullmastiffs, il va
falloir parler des dobermans, il va falloir...
M. Coiteux :
Mais, si j'ai... Puis là je vais parler comme un ministre de la Sécurité
publique, O.K.? Si je n'ai pas la capacité
d'aller jusqu'au bout de l'encadrement que vous souhaitez tout de suite, mais
le gouvernement, avec l'ensemble de ses possibilités, peut-être qu'un
jour il pourrait y arriver, mais c'est un gros travail, vous allez en convenir,
puis vous vous offrez comme partenaires
là-dedans, en attendant, est-ce qu'on ne devrait pas au moins, pour un motif de
précaution, dire : Bien, il n'y a plus personne qui a le droit puis il y a
des sanctions si on reproduit des pitbulls?
Mme Sansregret (Julie) : Mais
comment vous allez l'appliquer, personne n'a le droit?
M. Coiteux : Je vais vous
donner un exemple.
Mme Sansregret
(Julie) : C'est la même chose que de dire : Plus
personne n'a le droit de reproduire de chiens.
M. Coiteux : Non, mais
j'aimerais juste tester quelque chose avec vous. Je le teste, là, je teste ça
avec vous. Moi, je cherche des solutions, je
cherche des solutions. Si une animalerie ne peut pas en vendre, par exemple, si
une animalerie ne peut plus en
vendre, comment ça se fait qu'un éleveur, il en vendrait dans les animaleries?
Ils ne peuvent pas
en vendre, donc il n'y a
plus de marché. Donc là, on est dans le domaine des individus. Mais, si c'est
interdit d'en acheter de quelqu'un
qui n'est pas autorisé à le faire, il
y a une offense à acheter un chien de
quelqu'un qui n'est pas autorisé à vous le vendre...
Mme Sansregret (Julie) : Mais
pourquoi vous voulez le faire juste avec le pitbull?
M. Coiteux : Pour un motif de précaution. Il y a beaucoup
de gens qui nous disent qu'ils ont peur de coexister dans les villes avec des pitbulls. Il y a eu
des attaques de... je vous dis... il
n'y a pas eu que des attaques de
pitbull, mais il y en a eu, et la population a des craintes légitimes.
On ne peut pas rester les bras croisés, là, face à ça.
Mme Sansregret
(Julie) : Non, puis, c'est ça que je vous dis, commençons tout de
suite, puis dans 15 ans notre problème est réglé.
M. Coiteux :
Mais, en attendant, en attendant, est-ce qu'on ne devrait pas au moins, de
façon... Parce que... Puis là je
comprends, puis il y a les droits des animaux, puis on ne veut pas que des...
puis personne ne voudrait que des chiens qui par ailleurs ne présentent aucun danger soient euthanasiés. O.K.? Mais
est-ce qu'on veut qu'ils se reproduisent, puis qu'il y en ait de plus en plus, puis qu'il y en ait...
que les gens les achètent puis les gens les reproduisent puis...
Comprenez-vous?
Mme Sansregret
(Julie) : Oui, je comprends. Mais là ce que le règlement de la ville
de Montréal a fait, c'est qu'il y a eu
encore plus de chiens dangereux. En fait, ils ne sont pas encore dangereux,
mais ils vont peut-être potentiellement l'être plus tard.
M. Coiteux : Pourquoi ils vont
être plus dangereux après?
Mme Sansregret (Julie) : Bien,
parce qu'ils ne sont pas encore à maturité sociale, là, ils ne sont pas encore
matures, ces chiens-là, ils n'ont pas un an encore, là, les chiens qui ont été...
Une voix : ...
Mme Sansregret (Julie) : Ils ne
sont pas dangereux là, c'est ça.
M. Coiteux : Mais vous dites
que c'est le règlement de Montréal qui a produit ça. Pourquoi?
Mme Sansregret
(Julie) : Moi, ce que j'ai vu, dans ma pratique, c'est que le
règlement a fait que les gens en ont acheté plus pour démontrer à toute
la population qu'ils sont gentils.
M. Coiteux : O.K.
L'anticipation de...
Mme Sansregret
(Julie) : Exactement, en réaction. C'est ça que ça a causé. Donc,
j'aurais tendance à penser que ce n'est pas l'avenue à choisir.
M. Coiteux :
Oui, mais, si ça avait été interdit d'en acheter, il y aurait eu des sanctions
pour les acheter. Donc, si c'est
interdit d'en vendre, il y aurait eu des sanctions pour les vendre. Et
peut-être que, ce phénomène-là que vous dites, s'il y avait eu une loi préexistante qui aurait ciblé ça... peut-être
que ce ne serait pas arrivé. Il faut qu'il y ait un point de départ à
quelque chose.
Mme Lévesque (Renée) : Mais, si
on permettait que... Excusez.
Une voix : Oui, oui.
Mme Lévesque
(Renée) : Mais, si on
permettait seulement l'achat de ces chiens-là qui proviennent
d'éleveurs certifiés, plutôt
que d'interdire totalement cette race-là? Pourquoi est-ce qu'on n'irait pas
positivement, en disant : Bien, si on a des gens consciencieux qui
le font, qui choisissent des bons reproducteurs, socialement acceptables...
M. Coiteux : ...c'est parce
qu'ils ne sont pas tous certifiés, vous me dites, non, ou...
Mme Lévesque (Renée) : Non,
mais votre loi...
M. Coiteux : Quel est l'état des lieux en matière de certification?
Quel est l'état des lieux en matière de certification?
Mme Sansregret (Julie) :
Pardon?
M. Coiteux : Quel est l'état
des lieux, au Québec, en matière de certification des éleveurs responsables?
Mme Sansregret
(Julie) : Elle n'est pas très grande, présentement.
M. Coiteux : Alors, demain matin, j'appliquerais votre recommandation, ça ne règle pas mon problème tout
de suite, ça va prendre du temps.
Mme Lévesque
(Renée) : Pas tant, pas tant
puisque, si les éleveurs, pour en faire, doivent être certifiés, ils
vont demander une certification. Ce n'est pas une question de 15 ans.
M. Coiteux : Oui. Bien, maintenant je vais revenir à
ma question, ma question initiale. Admettons qu'on dirait : O.K.,
vous ne pouvez pas en acheter d'autres à personne qu'un éleveur certifié,
admettons, alors ça exclut déjà pas mal de vente... en tout cas, il y
en a, mais c'est une offense à la loi, puis il y a des sanctions, puis il y a
des conséquences, hein, lorsque c'est dénoncé et démontré. Admettons
qu'on ferait ça. Mais je reviens à ma question initiale : Pourquoi ces
éleveurs-là font faire des pitbulls plutôt que d'autres types de chien?
Pourquoi?
Mme Sansregret
(Julie) : Par amour pour leur race, pour les mêmes raisons que moi,
j'élève mes chiens pour l'amour pour
la race, pour la rendre meilleure, pour la production, pour trouver des
familles qui vont faire la promotion de cette race-là parce qu'elle est
parfaite.
Mme Lévesque (Renée) : Pour le
plaisir d'avoir un bon chien aussi. C'est ça, l'objectif.
M. Coiteux :
Oui, bien, c'est parce qu'il y en a tellement, des sortes de chiens, il y en a
tellement, pourquoi celui-là en particulier, pourquoi celui-là qui cause
des peurs atroces à beaucoup de personnes? Pourquoi celui-là? Parce que l'affaire, c'est que, si on vivait tout seul avec
un chien puis qu'on ne vivait pas en société, bon, c'est mon choix, c'est
le choix d'un autre, c'est le choix d'un
autre, c'est des choix individuels. Mais on vit en société. Alors, si mes
voisins, ils disent : Ton choix,
c'est très bien, là, mais il y a des milliers de chiens différents, puis, celui
que tu as choisi, j'ai peur, je ne me sens pas en sécurité, alors
pourquoi on devrait les reproduire, à ce moment-là? C'est ça, la question que
je pose.
• (17 h 30) •
Mme Sansregret
(Julie) : Bien, en fait, là,
ce qui arrive, c'est que c'est pour démontrer... Les gens... La
popularité, c'est pour démontrer que c'est des bons chiens.
M. Coiteux : Mais ça, c'est
circonstanciel. C'est parce qu'on a des débats, à l'heure actuelle, des débats
qui doivent avoir lieu.
Mme Sansregret (Julie) :
Exactement.
M. Coiteux : C'est ça.
Mme Sansregret (Julie) : Mais
avoir un chien, puis c'est pour ça, votre difficulté, ça a toujours été un
choix émotionnel sur toutes les...
M. Coiteux : Oui, mais on peut
avoir des émotions pour des milliers de chiens différents. Alors, c'est ça, la
question.
Mme Sansregret (Julie) :
Exactement. Et des chiens croisés. Puis, dans cette optique...
M. Coiteux : Oui, je suis
d'accord. Je vais vous amener sur... parce que j'aurai peu de temps...
Le Président (M. Auger) : Six
minutes.
M. Coiteux :
Six minutes. Quand même, quand même. On nous a parlé d'évaluer le comportement
des chiens, on nous a parlé beaucoup
de ça. Est-ce que c'est pratique d'obliger à ce que tous les chiens soient...
on évalue le comportement? Je ne
pense pas, parce qu'il y en a des milliers. Mais est-ce qu'on pourrait exiger
l'évaluation comportementale de chiens qui nous font craindre un certain
nombre de choses, même s'ils n'ont pas encore fait quoi que ce soit?
Mme Sansregret (Julie) :
Absolument.
M. Coiteux :
Absolument. Mais, quand ils sortent d'un élevage certifié, ils sont petits,
ils sont jeunes encore. Est-ce qu'ils
ont le temps de changer de comportement après? Donc, comment on gère ça, là,
cette situation-là, pour l'après-vente, si on autorisait des éleveurs
certifiés à vendre des pitbulls?
Mme Sansregret
(Julie) : Bien, à ce moment-là, si le chien, il a été mis, dans les
possibilités... si la génétique, elle
a été choisie, on met toutes les chances de notre côté. On ne peut pas... Tu
sais, c'est comme les humains, je veux dire, même, on produit des enfants puis on veut tout le bien pour eux, ça ne
veut pas dire que l'enfant qui devient à être agressif ou tueur en série
a eu nécessairement un mauvais élevage. Mais une production...
M. Coiteux :
Non, vous avez bien raison. Puis, le projet de loi, la partie du projet de loi
qui suscite le plus de passions, là, c'est
le nom «pitbull» qui apparaît à un moment donné, où il y a un certain nombre de
races de chien qui sont typiquement
associées aux chiens de type pitbull. Si ce n'était pas de ça, là, je pense que
ça susciterait moins de passions, hein, mais ça, ça suscite énormément
de passions. Bon...
Mme Sansregret
(Julie) : Mais prenons ça pour encadrer tous les chiens dangereux.
M. Coiteux :
Oui, mais, c'est ça, je voulais vous amener là-dessus, il y a une partie du
projet de loi importante qui dit
qu'on va encadrer tous les chiens dangereux, y compris ceux qui ont commis des
choses, qui, par leur comportement observé,
présentent des risques, et il y a un certain nombre de dispositions qui
s'appliquent. Ça fait partie du projet de loi, là. Cette partie-là, vous
l'aimez, sans doute.
Mme Sansregret
(Julie) : Oui.
M. Coiteux :
Bon. Mais, en attendant d'aller vers la meilleure des solutions selon votre
opinion, mettons que j'achetais ça, là, je
me dis : Bien, coudon, finalement, il y a peut-être des bons pitbulls,
finalement, pour autant qu'ils sortent des
bons élevages, admettons que je serais d'accord avec ça, admettons, c'est une
hypothèse, partons de ça, je le sais, que, demain matin, on ne sera pas rendus là. Je le sais, qu'en adoptant... si on adopte, là, dans les prochaines semaines
ce projet de loi là, qu'on ne sera
pas rendus là encore. Qu'est-ce qu'on fait en attendant? Est-ce que, pour des
motifs de précaution, on ne devrait
pas au moins dire : Bien, en attendant qu'on soit rendus là, là, élevez-en
pas? Est-ce qu'on pourrait au moins faire ça de façon... minimalement,
le temps que d'autres travaux se fassent? Je pose la question.
Mme Sansregret
(Julie) : Lesquels on n'élèverait pas? Parce que, je veux dire, il y a
des croisés aussi, il y a toutes sortes de...
M. Coiteux :
Croisez-en pas, admettons.
Mme Sansregret
(Julie) : Croisez-en pas non plus?
M. Coiteux :
N'en élevez pas, n'en croisez pas.
Mme Sansregret
(Julie) : Alors là, on peut tomber sur un bon labrador qu'on va
croiser avec un pitbull, puis on va l'interdire. Puis les chiots de...
M. Coiteux :
...avant même qu'ils n'apparaissent, avant même qu'ils soient mis au monde, là,
hein? Parce que votre crainte, je le sais... Je le sais, c'est quoi,
votre...
Mme Sansregret
(Julie) : ...est-qu'on doit commencer?
M. Coiteux :
Non, mais je pense que votre crainte, c'est qu'une fois qu'ils sont mis au
monde, s'ils sont des bons chiens, puis qu'ils se retrouvent en refuge,
puis qu'il n'y a personne qui veut en avoir... vous avez peur qu'ils soient
euthanasiés. Je pense, c'est ça, votre crainte. Non?
Mme Sansregret
(Julie) : Non, non. Parce que, moi, mon point, c'est : Il ne se
retrouvera pas en refuge, parce que c'est
l'éleveur qui doit être responsable du chien qu'il a produit. Il retourne chez
l'éleveur, l'éleveur a une décision à prendre.
Il
faut responsabiliser les éleveurs. Quand il produit un chien, ce n'est
pas : Je te le vends, puis il ne se passe plus rien. Il faut qu'il
fasse un suivi.
M. Coiteux :
Je suis d'accord avec vous. Mais, en attendant, en attendant d'en arriver à une
solution comme celle-là, qui va nécessiter
quand même pas mal de travail, là, les gens ont des craintes légitimes.
Qu'est-ce qu'on fait?
Mme Sansregret
(Julie) : Mais, votre loi des chiens dangereux, c'est parce que c'est
difficile à comprendre, de dire :
On va se donner les outils pour faire un projet de loi mais juste pour calmer
ou pour se dire : On fait quelque chose, il faut faire quelque
chose.
M. Coiteux :
Non, non, non, ce n'est pas ça que je veux dire, là, ce n'est pas ça que je
veux dire. Les opinions sont tranchées,
O.K., mais il y a une partie sérieuse de la population qui est convaincue que
c'est un chien dangereux, là. Alors, des
gens comme vous, vous dites non, mais il y a en d'autres qui nous disent oui,
et vous n'allez pas effacer leurs craintes demain matin, là. Alors, ce n'est pas juste une question de dire :
On va faire quelque chose pour faire quelque chose, c'est qu'il y a des gens qui n'achètent pas l'argument
qu'ils ne sont pas des chiens dangereux. Puis ils sont nombreux, dans la
société, puis il faut les entendre, il faut les entendre. Nous, comme législateurs, on
ne peut pas juste entendre ceux qui disent :
Non, regardez, il y a une solution à long terme, on va avoir les meilleurs
éleveurs de la planète. On peut tout faire pour aller vers ça, mais on
le sait, que ça va prendre un certain temps, qu'il y a des enjeux de sécurité
aujourd'hui, il n'y a pas juste des enjeux
de sécurité dans cinq ans, ou dans 10 ans, ou dans 15 ans. Quand on
craint quelque chose, quand on a un motif sérieux de croire qu'il
pourrait arriver quelque chose, on pose des gestes.
Mme Sansregret
(Julie) : Oui, mais vous savez qu'il y a plusieurs municipalités...
ou, en fait, il y a des provinces puis il y
a des pays qui l'ont appliquée, cette loi-là, puis que statistiquement ça n'a
rien fait, ça n'a rien changé.
M. Coiteux :
...comme législateurs, c'est que les statistiques des uns contredisent les
statistiques des autres. Puis on est devant ça, là. Imaginez-vous devant
quoi on est.
Mme Sansregret
(Julie) : Puis je vous comprends totalement. C'est pour ça que
j'essaie de vous amener à une solution
qui ne fait pas... qui va faire en sorte qu'on va régler le problème une fois
pour toutes, et non pas juste dire, demain, là, qu'est-ce qu'on...
Demain, il y en a plein qui l'ont fait, bannir des races, puis ça n'a pas fait
rien.
Le
Président (M. Auger) : Merci. C'est tout le temps que nous
avions. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle. M. le
député de Verchères, pour 9 min 30 s.
M. Bergeron : Merci, M. le Président. Je dois vous avouer bien
honnêtement, puis on aura le débat ultérieurement, que j'ai été un petit peu inquiet par les propos
du ministre. Je suis de ceux qui pensent qu'on se donne la peine
d'entendre les gens non pas pour dire :
Bien, ça, ça ne relève pas de moi, je ne m'en occuperai pas. Souvent, ça arrive
qu'un projet de loi, effectivement,
nous permette de régler des problèmes d'un autre ministère, puis on amende,
puis il suffit qu'ils se parlent au Conseil des ministres pour que les
choses se règlent. On nous dit depuis un certain nombre de jours qu'on devrait réglementer les élevages, qu'on devrait
mettre un terme aux usines à chiots. On nous a dit il y a quelques
instants que c'est entre zéro et quatre mois que la socialisation se fait, puis
souvent, dans les usines à chiots, il n'y a pas de socialisation, les chiens sont enfermés dans des conditions
épouvantables, puis on les vend avant l'âge de quatre mois, les nouveaux propriétaires ne savent pas comment
socialiser correctement leur chien. Donc, il y a certainement des choses
à faire de ce côté-là. Il y a certainement
quelque chose à faire du côté de la stérilisation. Donc, moi, je ne voudrais
pas qu'on se voile les yeux puis
qu'on se dise : Bien, ça, ça ne relève pas de moi puis, bon... Mais on
aura ce débat-là éventuellement. Mais je tenais à vous remercier de
votre présentation.
Vous
avez parlé qu'on doit poser des gestes non pas en fonction d'une race, mais en
fonction du poids et de la musculature.
J'aurais tendance à vous poser comme question : À compter de quel
poids? Puis quel genre de musculature doit servir de balise pour les
parlementaires que nous sommes?
Mme Sansregret
(Julie) : Bien, comme M. Biron disait, il y a des chiens qui ont
des problèmes de prédation. Quand on
est un Jack Russell puis qu'on pèse 15 livres, c'est sûr qu'on fait moins
de dommages. On a autant de prédation qu'un pitbull ou un rottweiler,
mais on fait moins de dommages.
Je
ne pourrais pas... Je ne peux pas me prononcer sur le poids parce que ça dépend
d'un paquet d'affaires, dont la victime,
dont... mais je suis en lieu de croire puis de témoigner que c'est sûr que plus
le chien est grand, plus il va causer des dommages. On n'est pas ici
pour réglementer les chihuahuas, mais il y a des morsures de chihuahua, par
exemple, beaucoup, là, que probablement les médecins puis les infirmières pourraient
témoigner, là. C'est sûr qu'ils ne causent pas autant de dommages.
M. Bergeron :
O.K. Là, on a compris qu'il n'existe pas d'élevage accrédité de pitbulls.
Mme Sansregret
(Julie) : Non.
M. Bergeron : O.K. Et là vous avez répondu au ministre :
Si on interdit la reproduction et la vente des pitbulls, on devrait
aussi interdire la reproduction et la vente des bullmastiffs et des dobermans.
Mme Sansregret
(Julie) : Je ne dis pas qu'on devrait l'interdire.
M. Bergeron : Non, non, mais, si on se rend là, à un moment donné, pourquoi ne pas considérer les bullmastiffs puis les dobermans?
Moi, je voudrais vos poser comme question : Existe-t-il des élevages accrédités
de bullmastiffs et de dobermans?
Mme Sansregret
(Julie) : Pas à ce point-ci, non.
M. Bergeron :
O.K. Ça n'existe pas pour l'instant.
• (17 h 40) •
Mme Sansregret
(Julie) : L'idée de la certification... Puis ce qu'on a, ce qu'on
rencontre comme problèmes, présentement, c'est le débat sur : Ce n'est pas un chien
pur race. Donc, ANIMA-Québec ne parle pas juste pour les chiens de pure race, on parle aussi pour les chiens
croisés, parce que, pour nous autres, le bien-être
animal ne passe pas... je veux dire, ce
n'est pas une question de race. Si... On veut juste dire... On ne veut
pas les interdire, on veut les encadrer. C'est ça qu'on pense, que, par l'encadrement, c'est ça qui va faire en sorte qu'on va produire des meilleurs chiens puis qu'on va
sensibiliser les gens à acheter des meilleurs chiens. C'est pour cette
raison-là.
M. Bergeron :
Je sais que c'est une question qui n'est pas directement pertinente au débat,
mais prenons les dobermans, par exemple, là. Est-ce que c'est le fait qu'il n'y
a pas d'éleveur certifié qui explique qu'on continue les mutilations sur ce
type d'animal, par exemple, qu'on coupe la queue, qu'on coupe les oreilles, ce
genre de truc, là?
Mme Sansregret
(Julie) : Oui. Et votre question, c'était...
M. Bergeron : Est-ce que c'est parce qu'il n'y a pas d'éleveur certifié de dobermans qu'on continue ce
genre de mutilation sur les animaux, qui sont malgré tout élevés, reproduits?
Parce qu'il y en a. Ça fait qu'il doit y avoir des gens qui les élèvent, qui
les reproduisent, qui les vendent, puisqu'il y en a.
Mme Sansregret (Julie) : Oui.
M. Bergeron : Mais j'imagine
que, s'ils étaient certifiés, on ne procéderait pas à ce genre de mutilation.
Mme Sansregret (Julie) :
Exactement. Puis là on vit un débat un petit peu dans cette veine-là.
M. Bergeron : O.K.
Mais je reviens à l'argument de départ. Mettons qu'on décide malgré tout qu'on
intègre dans le projet de loi une
disposition concernant la stérilisation. Je comprends que vous avez une réserve
à ce qu'on se dirige vers une
stérilisation spécifique aux pitbulls, mais mettons qu'on dit, là : On va
réserver un certain nombre d'animaux pour la reproduction, et les autres doivent être automatiquement stérilisés.
Est-ce que c'est quelque chose qui vous apparaîtrait envisageable?
Mme Sansregret (Julie) : Oui.
Bien oui. Bien sûr.
M. Bergeron : Puis qu'est-ce
qu'on retient comme animal pour la reproduction?
Mme Sansregret (Julie) : Avec l'expérience,
dans le fond, c'est un chien qui a un...
M. Bergeron : L'expérience de
qui?
Mme Sansregret (Julie) : De
l'éleveur, qui a un chien qui a un tempérament exceptionnel, qui...
M. Bergeron :
Oui, mais, vous, comme éleveurs, on vous connaît, là. Mais, ceux qu'on ne
connaît pas, là, comment est-ce qu'on
peut s'assurer qu'ils conservent seulement des spécimens ayant les
caractéristiques x ou y pour la reproduction?
Mme Sansregret (Julie) : Avec
la certification et le suivi, dans le fond, de la certification.
M. Bergeron :
Donc, ce que vous nous recommandez, et là je l'ai vu dans votre mémoire, mais
je vous le fais répéter parce que,
pour moi, ça commence à apparaître important, ce que vous souhaiteriez, c'est
qu'on mette un terme aux usines à
chiots puis ce genre d'éleveurs un peu anarchiques qui produisent possiblement
des animaux qui, une fois distribués, n'auront pas les qualités
sociales, disons ça comme ça, pour leur permettre d'être des animaux totalement
sécuritaires.
Mme Sansregret (Julie) :
Exactement.
M. Bergeron : Bon. Et au nombre
de ces animaux qui peuvent ne pas présenter les caractéristiques pour être totalement sécuritaires on compte les pitbulls,
les mastiffs, les bullmastiffset les dobermans, parce qu'il n'y a pas
d'élevage certifié pour l'heure.
Mme Sansregret
(Julie) : C'est pour ça que c'est difficile, c'est que ça n'a pas
rapport à la race. Ce n'est pas la race, c'est l'individu.
M. Bergeron : Expliquez. Je ne
vous suis pas, là.
Mme Sansregret (Julie) : On ne
veut pas spécifier certaines races. Ce n'est pas la race. Depuis...
M. Bergeron :
Non, mais c'est parce que vous nous donnez comme argument la certification. Et,
au moment où on se parle, selon vos
dires, il n'y a aucun élevage de pitbulls, aucun élevage de bullmastiffs, aucun
élevage de dobermans qui sont certifiés.
Mme Sansregret (Julie) : Non.
M. Bergeron : Donc, techniquement, ils produisent des individus
qui pourraient ne pas présenter les caractéristiques faisant d'eux des
animaux pouvant vivre correctement, de façon sécuritaire, en société.
Mme Sansregret
(Julie) : Il n'y a pas d'élevage certifié, mais il y a des élevages
certifiables, par exemple. Ce n'est pas
parce qu'ils ne sont pas certifiés qu'ils n'ont pas la capacité de produire des
bons chiens. Ils sont certifiables, mais ils ne sont pas certifiés.
M. Bergeron : O.K.
Alors, quelle est la distinction, pour les législateurs que nous sommes, entre
un élevage certifié et un élevage
certifiable? Donc, je comprends de ce que vous me dites que vous connaissez des
éleveurs qui ne sont pas certifiés, mais que, s'ils se donnaient la
peine ou s'ils étaient obligés, ils seraient aisément certifiables.
Mme Sansregret
(Julie) : Exactement, selon notre carnet d'exigences, qui est
disponible.
M. Bergeron : O.K. Et vous connaissez des éleveurs de pitbulls, de bullmastiffs et de dobermans qui pourraient
être facilement certifiables?
Mme Sansregret
(Julie) : Je n'ai aucune connaissance d'éleveur de pitbulls, mais j'ai
des connaissances d'éleveurs de bullmastiffs et de dobermans qui pourraient
être certifiables.
M. Bergeron :
O.K. Donc, on revient au problème qu'évoquait M. le ministre, à savoir qu'il
n'y a pas d'éleveur de pitbulls certifié et qu'il n'y a pas,
présentement, d'éleveur de pitbulls, que vous connaissez, qui soit certifiable.
Mme Sansregret
(Julie) : Que je connais. Exact. Mais ça...
M. Bergeron :
Donc, on peut penser que, pour cette race, il y aurait des trucs un peu
clandestins qui se passent actuellement,
des affaires où, tu sais, on n'est pas trop sûr du croisement qu'on fait, on
n'est pas trop sûr de la sociabilité des individus qu'on produit, qu'on
lâche dans la circulation.
Est-ce
qu'il y a d'autres races que vous pourriez identifier comme ça, pour les parlementaires que nous sommes, qu'il n'y a pas
d'éleveur certifié et qu'il n'y a pas d'éleveur, à votre connaissance,
certifiable?
Mme Sansregret
(Julie) : Je ne peux pas, parce que ça dépend des individus. Je ne
peux pas, je ne peux pas.
M. Bergeron :
Encore une fois, là, je ne vous pas suis, là.
Mme Sansregret
(Julie) : Mais ça dépend...
M. Bergeron :
Vous nous dites : Pour le pitbull, il n'y a pas d'éleveur certifié et il
n'y a pas d'éleveur que je connaisse qui
soient certifiable. Est-ce qu'il y a d'autres races présentant des caractéristiques physiques et musculaires pouvant être éventuellement
dangereuses pour lesquelles vous ne connaissez aucun éleveur certifié et aucun
éleveur certifiable?
Mme Sansregret
(Julie) : Il y a plus de 175 races, puis il doit y
avoir des millions de races croisées. Je ne peux pas prétendre connaître
tous les éleveurs, tous les producteurs.
M. Bergeron :
Merci.
Le
Président (M. Auger) : Nous devons maintenant poursuivre avec le
deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Mirabel, pour
6 min 30 s.
Mme D'Amours :
Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Vous dites qu'il y a 175 races,
puis moi, j'ai des documents qui disent qu'il y en a 350.
Mme Sansregret (Julie) : Oui, je dis 175 races reconnues. Je ne sais
pas combien que le Club canin canadien en a.
Mme D'Amours :
Oui. Depuis le début, on nous dit que le pitbull n'est pas une race.
Une voix :
Non.
Mme D'Amours :
Pourtant, dans la société, quand on parle de bouvier bernois, un labernois, on
est quand même dans le même type de
catégorie qu'un pitbull, parce que ce n'est pas une race pure. Y a-tu une
différence? Est-ce que vous la connaissez? Est-ce que vous pourriez
m'indiquer... Vous ne la connaissez pas?
Mme Sansregret
(Julie) : Non. Un chien croisé, c'est un... Bien, le labernois, c'est typique
d'un mélange entre un labrador puis un bouvier bernois. Ça, c'est...
Mme D'Amours :
Oui, mais un pitbull, si on recule, c'est des croisements aussi de chiens,
c'est l'homme qui l'a créé par des croisements de chiens. Alors,
pourquoi aujourd'hui on ne peut pas dire que c'est une race?
Mme Sansregret
(Julie) : Bien, ça, il faudrait demander au Club canin canadien. Puis
c'est eux qui ont tout le... C'est quoi qui détermine une race, ça,
c'est...
Mme Lévesque (Renée) : C'est
fédéral, c'est une loi fédérale.
Mme Sansregret
(Julie) : ...c'est une loi, c'est la Loi de la généalogie, là.
Mme D'Amours : ...quelqu'un qui aurait des intentions comme... Je vais
prendre Mira, où ils ont fait un croisement de chiens très spécifique pour un besoin spécifique. Ils ont probablement d'abord été au fédéral pour enclencher le
processus pour déterminer que c'est une race. Non? Ce n'est pas de cette façon?
O.K.
Mme Sansregret
(Julie) : En passant, Mira est un élevage certifié ANIMA-Québec.
Mme D'Amours :
Oui, c'est ça, je voulais revenir à... Vous dites, la certification... Vous,
vous parlez de certification, que vous ne
connaissez pas d'éleveur de pitbulls, mais c'est... à votre organisme. C'est
ça. Est-ce que dans d'autres organismes il y a des éleveurs de pitbulls
reconnus? Est-ce que vous le savez?
Mme Sansregret
(Julie) : Je ne pourrais pas vous répondre.
• (17 h 50) •
Mme
D'Amours : Vous avez parlé,
puis ça m'a surprise... vous avez parlé d'émotion, vous avez dit que les
gens qui viennent parler ici avec émotion pour les animaux... Parce que ça fait
partie de votre vie. Moi aussi, j'ai eu des chiens à la maison, ça a fait
partie aussi de ma vie. C'est des émotions que j'ai comme vous, que je partage,
pour les animaux, pour les chiens, mais j'ai
aussi des émotions pour les humains, j'ai aussi beaucoup d'émotions. Et c'est
là où on a une difficulté à trouver le juste milieu quand on pose des
questions. Si vous aviez à bonifier le projet de loi, par quel amendement, par
quelle proposition on pourrait convenir du côté de l'émotion des animaux mais
en même temps de l'émotion pour les humains?
Avez-vous pensé à ça? Parce que tout à l'heure, M. Biron, ce que je lui
disais, c'est que je l'ai salué
d'avoir... Il aurait pu très bien, dans sa situation, dire non aux pitbulls,
plus jamais les pitbulls. Par contre, il était très à l'aise avec, bien, une clause grand-père qui
dit : Bien, les pitbulls qui sont sur le territoire demeurent à des
conditions, avec une laisse, une muselière,
des conditions très, je pense, légitimes. Il n'est pas arrivé avec une position
très drastique, en disant non aux pitbulls. Ce que je vois, c'est que
vous, vous n'avez pas de proposition, si jamais on légiférait pour les pitbulls, de quelle façon... Vous comprenez ma
question? Si jamais on légiférait pour les pitbulls, qu'on les mettait
dans une catégorie qu'on n'en veut plus, au Québec, est-ce qu'il y a une
proposition qui vous satisferait si on ajoutait quelque chose au projet de loi?
Mme Sansregret
(Julie) : À part de vous dire que dans plusieurs pays et provinces ça
ne fonctionne pas, je ne peux pas
vous répondre, là. Nous autres, ce qu'on veut, ce qu'on prône, c'est :
Donnons-nous la chance de contrôler la production de chiens en général,
puis c'est ça qui va, à long terme... Mais je n'ai malheureusement pas de... Je
ne pense pas qu'on devrait faire une loi pour le court terme, je pense qu'on
devrait ouvrir nos horizons un petit peu puis...
Mme D'Amours :
Mais ne croyez-vous pas que la loi qui est devant vous, le projet de loi qui
est devant vous, qui ne met pas spécifiquement le nom, le type du chien
dans le projet de loi mais bien dans un règlement qui... ce règlement-là peut facilement donner la latitude au
ministre de mettre une race de chien ou de l'enlever, le temps que,
comme vous dites, là, ça se rétablisse,
qu'on retrouve notre sécurité, qu'on reprenne le contrôle des animaux, de nos
chiens? Est-ce que ce n'est pas une façon de faire qui, il me semble,
est convenable?
Mme Sansregret
(Julie) : Personnellement, je pense puis je le redis, de bannir une
race n'est pas la solution.
Mme D'Amours :
Est-ce que vous êtes prêts, comme éleveurs, à prendre l'entière responsabilité
d'un chien que vous avez sociabilisé,
on va dire un pitbull? S'il y a un éleveur de pitbulls, là, vous êtes un
éleveur, est-ce que vous êtes en mesure de me dire que vous allez
prendre l'entière responsabilité que le chien qui est le pitbull, avec sa
force, sa musculation, sa prise, la forme de
sa bouche, vous êtes prête à prendre la responsabilité que vous avez donné des
cours, que le chien a été bien sociabilisé,
que, le maître, vous le connaissez, que vous le voyez souvent, et qui, à un
moment donné, par prédation, fait un événement tragique? Est-ce que vous
êtes prête à en prendre la responsabilité?
Mme Sansregret
(Julie) : La responsabilité de la reproduction, de mon imputabilité à
avoir produit... à me poser des questions
sur le choix de mes reproducteurs, à me poser des questions sur le choix de la
famille, à me poser des questions sur...
à me poser des questions, oui, parce que, moi, mon élevage me dit : Il
faut que je reproduise des chiens qui sont
bons pour la société et pour les familles en général. Donc, c'est à moi de dire...
c'est à moi de voir qu'il y a un potentiel problème, comme c'est aux
gens de dire : Il y a un potentiel problème, puis il faut faire quelque
chose, il faut faire un suivi là-dessus. Puis, oui, je veux me rendre
responsable de la production de mon chien puis de voir où ça s'en va, c'est
sûr.
Le Président
(M. Auger) : Désolé, c'est tout le temps que nous avions à notre
disposition. Merci, Mmes Sansregret et Lévesque, pour votre participation
aux travaux de la commission.
Et
je vais suspendre quelques instants pour permettre à la Coalition pour la
promotion de la sécurité des personnes et des chiens de prendre place.
Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 54)
(Reprise
à 17 h 56)
Le Président (M. Auger) : Désolé, nous sommes déjà en
ondes, pardon. Donc, je vous souhaite
la bienvenue, donc, la Coalition pour
la promotion de la sécurité des personnes et des chiens. Je vous rappelle que
vous avez 10 minutes pour la présentation,
et par la suite il y aura une période d'échange avec les trois groupes
parlementaires. Dans un premier temps, bien
vouloir vous identifier ainsi que les personnes qui vous accompagnent, et par
la suite vous pourrez commencer votre présentation. À vous la parole.
Coalition
pour la promotion de la sécurité
des personnes et des chiens (CPSPC)
Mme Goldwater
(Anne-France) : Merci.
Alors, M. le Président, M. le
ministre, membres de la commission,
je me présente : Je suis Me Anne-France Goldwater, du cabinet Goldwater,
Dubé. Je suis aussi directrice des affaires juridiques
au sein de la Coalition pour la promotion de la sécurité des personnes et des
chiens, la CPSPC. Je suis assistée par Mme Marie-France Ouimet, vice-présidente,
à ma gauche, et le Dr David William Silversides, généticien vétérinaire et professeur titulaire à la Faculté de médecine
vétérinaire de l'Université de
Montréal. Le Dr Silversides et moi,
nous répondrons à vos questions à la fin de ma présentation.
D'abord, au nom de la
CPSPC, nous vous remercions collectivement de nous avoir invités à participer à
ce dialogue. Sachez que nous étions parmi les premiers à faire la demande
l'année passée, en mai 2017. Le but de notre dialogue
aujourd'hui, bien sûr, c'est de mettre en place un
encadrement de tous nos chiens afin d'assurer la sécurité de tous les Québécois
et Québécoises. Une demi-mesure n'est pas une solution acceptable.
Alors,
nous sommes plusieurs experts et professionnels qui se sont rassemblés, depuis
2016, pour expliquer que, pour
identifier la dangerosité d'un chien, il faut s'intéresser au comportement et
la personnalité de l'animal, non pas à sa race. C'est ainsi qu'on assure la sécurité de la population. Une loi
rassembleuse aurait beaucoup plus d'effet qu'une loi qui stigmatise une
partie de la population.
La
CPSPC, comme, j'espère, vous le savez, est intervenue dans le litige opposant
l'ancienne administration de la ville
de Montréal et la SPCA. Nous représentions aussi des
centaines de familles québécoises qui ont été affligées par le règlement LSR de la ville. Des milliers de citoyens
ont entamé des démarches pour se procurer une demande de permis spécial de chien de type pitbull, dans la
confusion totale, sans même déterminer si leur chien était visé. Arrêtez, s'il vous plaît, mes concitoyens, de penser aux chiens de pure
race. Nous ne sommes pas aux États-Unis,
nous sommes au Québec, où 98 %
des chiens québécois sont des hybrides. Et ce sont seuls les chiens de race
pure qui ressemblent à leurs parents. Des gens ordinaires ne savaient
tout simplement pas quelle était la race de leurs chiens.
• (18 heures) •
Nous avons ainsi été
témoins des situations déchirantes qui ont eu lieu, où 600 familles avec
des chiens supposément de type pitbull ont
reçu des lettres les enjoignant de se départir de leur animal. Nous avons
découvert combien de familles
québécoises dépendent de leur chien : des familles monoparentales, des
familles avec un enfant autiste ou un enfant
avec un handicap, des personnes à faibles revenus. La CPSPC a été un témoin
privilégié de l'inapplicabilité du règlement tel qu'il existait, en plus
de son caractère arbitraire, discrétionnaire et irrationnel.
Qu'est-ce qui est
important pour vous, c'est que la ville a vu le nombre de chiens enregistrés
diminuer considérablement. La ville a vu que
le nombre de morsures de chien est demeuré stable entre l'adoption de leur
règlement et sa suspension. Les données
recueillies par la gestion animalière de la ville dénotent qu'ils ont eu
217 morsures en 2015, 263 en
2016 et 229 en 2017. Le taux de morsure n'a pas changé non plus. Et, quant à la
fiabilité des statistiques que la ville a commencé à recueillir,
personne, à date, ne vérifie pour de vrai quelles sont les races de chien.
J'ajoute, et comme
vous devriez le savoir déjà, maintenant, après tant d'heures investies, que
toutes les morts causées par des morsures de chien dans le Québec depuis le
début du temps, à l'exception de la mort tragique de Mme Vadnais, ont été causées par des chiens du Nord, et personne ne
propose aujourd'hui de bannir des races comme le husky, ou l'akita, ou le malamute, qui étaient impliquées dans ces
morts-là. Dans tous les rapports de coroner ici, au Québec, au fil des années, il y en a eu huit, dont le
dernier, le rapport du Dr Lichtblau, lumière bleue, hein, Lichtblau...
Personne, aucun coroner, dans l'intérêt public,
n'a recommandé le bannissement d'une race particulière de l'animal. Et un
coroner est un scientifique dont le seul devoir et la seule mission, c'est la
protection du public.
Alors donc, un
premier enjeu : Nous recommandons fortement au comité de retirer les
dispositions relatives à l'interdiction de
races particulières, soit les articles 17 et 20 et l'annexe, qui mentionne
les chiens de type pitbull ainsi que les
rottweilers, vu le problème inhérent de l'identification qu'ils comportent. Je
vous réfère à l'onglet 3. Je vous invite à l'étudier, s'amuser avec vos conjoints, vos enfants, à la maison, pour
que vous voyiez, que vous appreniez. C'est absolument impossible
d'identifier un chien par son apparence, ou sa musculature, ou quoi que ce
soit. Ce n'est pas vrai. Et regardez à
l'onglet 3, dernière page, le chien n° 117, il est 50 % bulldog
et 25 % «staffie», American Staffordshire terrier, et ça ressemble à un petit rien. Alors,
vous allez réussir à ne pas prendre en considération des chiens qui ont
le sang genre de race pitbull tout comme vous allez juger et condamner des
chiens qui peuvent avoir une grande gueule mais qui ne sont en rien des chiens
de type pitbull.
Alors, bon, dans le
test, dans l'étude qui a été faite, à l'onglet 3, l'Université de Floride,
il y a eu près de 6 000 répondants
à travers les États-Unis qui ont complété l'enquête. Ce n'étaient que des
spécialistes, des vétérinaires, des éleveurs
de chiens et tout. Les répondants ont correctement identifié la race
prédominante du chien croisé dans seulement 27 % des cas. Vous m'entendez? 27 % des cas. Seuls 15 %
des chiens ont été correctement identifiés plus de 70 % du temps. Ces résultats indiquent qu'autant vos
inspecteurs canins que les vétérinaires québécois ne seront pas en
mesure d'identifier un chien croisé par simple examen visuel de ses
caractéristiques morphologiques.
Plus important encore, dans le cas de
notre litige avec la ville de Montréal, nous avons mandaté le Dr
Silversides ici, à ma droite, un professeur
et généticien, et les conclusions de son rapport, reproduit à l'onglet 2,
indiquent clairement ceci, je fais
une traduction libre de l'anglais en français : «Les caractéristiques
morphologiques et la stricte génétique d'un animal, sans considération de son environnement et son éducation, n'ont
aucun lien rationnel avec son comportement ou risque de dangerosité.» L'historique afférent aux chiens de combat n'est
plus pertinent, parce que ça fait très longtemps et des centaines, des centaines de générations de
chiens qui ne sont plus élevés pour le combat, pour la guerre. Et nous
ne sommes pas non plus dans le sud des
États-Unis, où certains ont pu avoir fait de l'élevage pour les combats de
chiens.
Je
vous ajoute, pour ceux qui sont intéressés, d'aller voir le documentaire sur
les chiens du joueur de foot américain Michael
Vick, qui avait fait de l'élevage de chiens de combat, de vrais chiens de
combat, que tous ses chiens ont été saisis. C'étaient des chiens élevés pour le combat, de type, genre pitbull, la
fausse image monstrueuse. Ils ont sauvé 51 de ses chiens. Un était trop blessé pour sauver, un était
irrémédiablement agressif. Les 49 autres ont été réhabilités, ont été
placés dans des familles ordinaires, ça fait
à peu près 10 ou 12 ans de ça, donc la grande majorité,
sinon tous ces chiens ont eu le temps de vivre, vieillir et mourir, et
il n'y a jamais eu aucun incident, avec des chiens qui ont été l'objet
d'élevage pour combat.
Alors,
je tiens à vous enseigner ceci. Je suis une juriste, pas une scientifique, mais je vous dis ceci encore, qui vient du rapport de Dr Silversides : «L'espèce chien se
distingue de manière importante par ces innombrables différences morphologiques, mais génétiquement la différence
entre un chihuahua et un grand danois n'est pas plus importante que la différence entre vous et moi.» La science nous a
enseigné qu'il n'existe pas de différentes races entre les groupes
d'êtres humains à morphologie différente, et il est temps qu'on intègre ce même
discours par rapport aux chiens.
Enfin,
seulement 1 %
des 20 000 à 25 000 gènes d'un chien détermine l'entièreté de
son apparence, de sa tête à sa queue.
Un chien croisé peut avoir plus de 50 % des gènes d'un American
Staffordshire terrier mais avoir le corps et le visage d'un berger allemand. L'opposé est aussi vrai. Un chien peut
avoir la tête énorme et un corps musclé d'un «Staffie» mais avoir les gènes prédominants d'un caniche. Vous
ferez l'exercice à la maison ce soir. Vous verrez que vous êtes sur une fausse piste, et vous allez gaspiller votre temps
et notre argent à essayer d'identifier la différence entre Fido, Rover,
Pierre, Jacques et Paul, et vous n'allez rien accomplir.
Alors,
comme deuxième enjeu, nous recommandons l'inclusion des chiens de support
émotionnel à l'article 5.1°, quant aux chiens exemptés, parce qu'un
chien qui a un effet thérapeutique et qui est utilisé lorsqu'il y a un
traitement médical ne devrait pas être soumis aux dispositions de la loi.
Comme troisième enjeu...
Le
Président (M. Auger) : Juste un instant, Mme Goldwater.
Est-ce que vous en avez encore pour très longtemps? Parce que le temps
est écoulé, mais, M. le ministre, vous pouvez permettre...
M. Coiteux :
Je veux bien laisser encore deux minutes pour conclure, peut-être, la dernière chose, pour
conclure, pour qu'on puisse ensuite passer aux échanges.
Le Président
(M. Auger) : Deux minutes pour conclure, ça vous va?
Mme Goldwater
(Anne-France) : Bien, ce que je préfère... parce que tous ces points
sont couverts dans le mémoire, mais je vous
dis ceci et je vais vous donner des suggestions pratiques parce que je sais que ça vous
préoccupe beaucoup, M. le ministre Coiteux. Alors, je vous dis ceci.
Comme le
Dr Godbout vous a dit, il n'y a aucune base scientifique à discriminer
entre les races de chien en prétendant
qu'une race pourrait être plus à risque qu'une autre. Nous ne pouvons pas
croire qu'étant au fait de ces données scientifiques percutantes... que vous ferez le choix de
maintenir l'encadrement de seulement certaines races. Ce serait illogique, irrationnel et contraire à la science.
Et une chose est certaine, ce ne sont pas les Québécois et Québécoises
qui en sortiraient gagnants, car ce serait un procédé inefficace pour assurer
leur protection.
Voici
les alternatives, parce que vous avez besoin de solutions, pas juste un autre
discours d'Anne-France, n'est-ce pas, pour allumer la télévision,
entendre mes discours. Bon.
Alors,
le bannissement de races particulières, à jeter à la poubelle, parce que vous
n'avez que tant de notre argent à investir
pour accomplir quelque chose, qui est la réduction du nombre de morsures, n'est-ce pas? Alors, nous privilégions l'approche
de la protection de personnes fondée sur le comportement des chiens, pas sur
leur génétique, leurs caractéristiques morphologiques,
et donner l'opportunité aux vétérinaires et comportementalistes de déterminer objectivement un risque de dangerosité de tout animal à quatre pattes. La
dangerosité devrait être évaluée à la lumière des circonstances
entourant l'attaque par le chien et les six
niveaux de l'échelle de Dunbar utilisée à Calgary, laquelle s'intéresse à la
gravité objective des morsures
canines, et qui a l'avantage d'établir des amendes de plus en plus salées selon
l'importance de l'événement, comme
quand c'est une chose, un excès de vitesse à 15 kilomètres à l'heure, et
c'est une autre chose, un excès de vitesse à 50 kilomètres à
l'heure, par rapport aux risques pour le grand public. Des mesures de...
Le
Président (M. Auger) : Désolé, le temps étant vraiment écoulé...
M. le ministre veut poser des questions. Donc, M. le ministre, pour un
peu moins de 14 minutes.
• (18 h 10) •
M. Coiteux :
Bien, d'abord, merci, merci d'être venue présenter votre point de vue, ainsi
que les gens qui vous accompagnent aujourd'hui.
Peut-être je vais juste commencer avec deux
petites remarques puis je voudrais vous entendre là-dessus. Lorsque vous avez dit, dans le cas de Montréal...
Parce qu'on a reçu, tout à l'heure, M. Lionel Perez, qui était
évidemment un membre de l'administration précédente et
qui est venu raconter un peu l'histoire de sept années de règlement à Montréal. Moi, j'ai toujours compris, et c'était
ça qui était le règlement, que personne n'avait à se départir de son
chien parce qu'il y avait une clause
grand-père. Donc, d'où vient cette idée qu'il y a 600 familles qui étaient
obligées brutalement de se départir de leurs chiens? Ça ne correspond
pas, en tout cas, à ce qu'était l'esprit du règlement. Est-ce qu'il a été mal
appliqué?
Mme Goldwater
(Anne-France) : M. Perez vous a mal raconté l'historique de la
chose. Sachez, lui comme les autres
ne sont plus au pouvoir, et, sachez, ça a eu... vous devez le savoir — si ne vous ne le savez pas, je vous le dis
ici — ça
a eu un impact considérable lors de
l'élection municipale, la politique et l'application du règlement par
l'ancienne administration de
M. Coderre, et ça a eu un impact extrêmement important, la plateforme de
Mme Plante, de suspendre les dispositions
de bannissement de races particulières et de miser sur des mesures plus
grandes, qui englobent tous les chiens, la sécurité de tous, sans
stigmatiser une partie de la population.
Écoutez, là, moi, je suis l'avocate, c'est moi
qui ai fait ce travail, assistée de Marie-France Ouimet, assistée de Mme Sabbah derrière moi. On a opéré notre
cabinet 48 heures sans dormir, tous les juniors de cabinet,
gratuitement, pour 600 familles, je n'invente pas ça...
M. Coiteux : À qui...
Le Président (M. Auger) : Une
personne à la fois, s'il vous plaît.
Mme Goldwater
(Anne-France) : ...mais, écoutez bien, qui n'étaient pas capables, qui
n'étaient pas capables de respecter
le règlement parce que le règlement était trop exigeant et trop coûteux. Tous
ont bien pris avantage du fait qu'il fallait
obtenir un certificat qu'on n'a pas un dossier criminel, qu'il fallait
stériliser son animal dans une période raccourcie, peu importe la santé de l'animal ou si l'animal
était en train d'allaiter des chiots, si l'animal a été atteint, affligé d'un
cancer. On s'en fichait, des circonstances des adultes et de leurs enfants.
Il y a des
familles, je regrette, je connais ça dans ma pratique, où les parents n'ont pas
assez pour mettre la bouffe sur la
table pour leurs enfants. Sortir de leurs poches ce qui pouvait coûter jusque
1 000 $, pour une famille ordinaire, pour répondre à des
exigences arbitraires et insensées...
C'est qui, au sein de la société, qui doit
prouver qu'il n'a pas de dossier criminel? L'État doit le savoir...
Le
Président (M. Auger) : M. le ministre... Juste un instant. Je
vais vous expliquer que je vais équilibrer le temps entre les questions
et les réponses pour avoir des échanges les plus constructifs possible.
Mme Goldwater
(Anne-France) : Alors, j'ai dû préparer une injonction avec les
dossiers de toutes ces familles devant
la cour Supérieure, et la ville de Montréal, et leur cabinet, je les remercie,
ils ont eu la... été assez gracieux de céder à la demande d'injonction...
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Coiteux :
Parce qu'avant... après on ira sur le fond, mais j'ai une deuxième question de
fait. Donc, moi, ce que je comprends,
c'est qu'on ne leur a pas demandé de s'en départir, mais ce que vous me dites,
c'est que les exigences qui étaient demandées en échange du droit de
conserver l'animal étaient en pratique...
Mme Goldwater (Anne-France) :
Ils ont reçu des avis de se départir...
Le
Président (M. Auger) : Juste un instant, s'il vous plaît. Pour le
bon déroulement des travaux, je veux entendre la question. Je vais
donner le temps pour la réponse, je vais équilibrer le temps entre les deux. M.
le ministre.
M. Coiteux :
Encore une fois, elle est, pour moi, un peu intrigante. C'est parce qu'on nous
a dit tout à l'heure qu'il y a eu une
augmentation du nombre de chiens immatriculés, suite à la prise du règlement,
pas une diminution. On nous a dit que
c'était passé de 15 000 à 50 000, et ça ne correspond pas à la
population totale, mais il y a eu une augmentation, pas une diminution.
Mme Goldwater
(Anne-France) : Les chiffres que j'ai obtenus personnellement
directement de la ville, et j'étais là hier ou avant-hier, mardi, est
qu'il y avait une baisse, pas pour dire que des chiens ont disparu, mais en
total...
M. Coiteux : 15 000 à
combien, alors?
Mme Goldwater (Anne-France) : En
total, le nombre d'enregistrements a baissé.
M. Coiteux : De 15 000 à
combien?
Mme Goldwater
(Anne-France) : Moi, j'avais compris l'enregistrement total, un an
avant, était 145 000, et ça a baissé à 115 000 globalement,
tous les chiens.
M. Coiteux :
...vérifications.
Mme Goldwater
(Anne-France) : Et, le nombre de morsures, je vous ai donné...
Le Président
(M. Auger) : ...on pourra faire les vérifications pour avoir les
bonnes données.
Mme Goldwater
(Anne-France) : Le nombre de morsures n'a pas changé. Enfin,
dernièrement, toutes ces familles-là ont reçu des avis de se départir de leur
animal dans les quatre semaines.
M. Coiteux :
O.K. On fera les vérifications après ça. Pour moi, c'étaient juste des
questions préalables. Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président
(M. Auger) : 9 min 30 s.
M. Coiteux :
Il me reste 9 min 30 s. Je vais aller sur une autre question,
parce que, là, c'est notre dernière période de consultation sur ce
projet de loi, donc, on est dans notre troisième journée. C'est bien ça?
Le Président
(M. Auger) : Troisième.
M. Coiteux :
Trosième. Ça va tellement rapidement, on fait tellement de choses dans une
semaine. C'est notre troisième
journée, et on a entendu des témoignages qui, ma foi, sont très
contradictoires, y compris sur le plan des évidences scientifiques. Alors, les gens nous disent :
La science nous dit, la science ceci, les écrits, et, ce qu'on s'aperçoit, je
pense qu'on est tous... on se sent tous de la même façon partout, là, ici,
nous, les parlementaires, il n'y a pas de consensus scientifique, il n'y en a
pas.
Mme Goldwater
(Anne-France) : Dr Silversides va vous répondre, parce que la
meilleure preuve de consensus vient des généticiens.
Le Président
(M. Auger) : Aviez-vous terminé votre question, M. le ministre?
M. Coiteux :
Oui, bien, c'est ça, c'est que je l'ai posée à d'autres, alors je vous la pose
aussi. Puisqu'il n'existe pas de consensus scientifique, est-ce qu'il y
a des scientifiques qui sont plus scientifiques que d'autres?
Le Président
(M. Auger) : Donc, M. Silversides.
M. Silversides
(David William) : Pas de consensus scientifique sur quoi exactement?
M. Coiteux :
Sur, par exemple, la dangerosité que peut
représenter un type de chien en
particulier, sur le fait que certains chiens, en raison de leurs caractéristiques, ont peut-être plus de probabilités d'adopter un comportement
agressif ou même d'utiliser des attaques de
type prédation. Même l'Ordre des vétérinaires est allé jusqu'à
admettre qu'il y avait quand même
un lien entre la génétique de certains chiens et les comportements de
prédation, sans en nommer aucun, par contre, mais on est allé jusque-là. Bon. Mais il y en a
d'autres qui nous ont dit que ça n'existe pas, ça, qu'il n'y avait aucun lien. Il y a
des gens qui nous ont dit que c'est purement comportemental, lié à l'éducation du chien. Il y a des gens qui ont dit : Non, il y a quand
même un certain nombre de prédispositions. Alors, qui croire?
Le Président
(M. Auger) : M. Silversides.
M. Silversides
(David William) : Bon, je suis... mon expertise, ça, c'est la
génétique, et je peux dire que, selon mes
lectures, selon mes études, selon mon expertise, bon, je ne vois pas un lien
génétique pour une race comme telle, pour l'agressivité, pour le fait que cette race-ci est plus dangereuse que
d'autres races. La seule évidence, bon, ce que moi, j'ai vu, c'est que les petites races ont une tendance
d'être un peu plus agressives. Est-ce que ça, c'est
génétique? Est-ce que ça, c'est parce
qu'elles sont plus petites? Ça, ce
n'est pas dit. Mais, en base génétique, il n'y a pas beaucoup
de différences génétiques. Ce sont
les chiens. Toutes les races, ce sont les chiens. En base génétique, les chiens
sont aussi proches au loup, aussi
proches au coyote qu'ils peuvent se reproduire entre eux autres. Nos races sont
les regroupements quasiment artificiels de la génétique, O.K.?
Quelques gènes, un petit groupe de gènes nous donne toutes les différences
morphologiques.
Au
niveau du comportement, je ne comprends pas et je ne crois pas qu'il y a une
base génétique pour dire qu'une race est plus disposée d'être, bon,
problématique qu'une autre. Bon, un chien individuel, oui. Bon, ce qu'on
cherche, selon moi, ça, c'est la protection
de notre société contre les chiens méchants, mais un chien méchant ne vient pas
avec une race en particulier. Il n'y a
aucune base génétique, je peux vous dire cela, aucune base génétique pour dire
que telle race...
Le Président
(M. Auger) : M. le ministre, une autre question.
5 min 30 s.
M. Coiteux : D'accord. J'ai
combien?
Le
Président (M. Auger) : 5 min 30 s.
M. Coiteux :
5 min 30 s. O.K. J'aimerais aller sur un autre... Bon, d'abord,
juste...
Une voix :
...
M. Coiteux :
Oui, puis il y en a plein d'autres, mais c'est parce que, dans... on a peu de
temps, on a peu de temps pour échanger là-dessus.
Mme Goldwater
(Anne-France) : ...c'est quand vous voyez les études faites par des
médecins des êtres humains, eux n'ont
aucune expertise dans la science des animaux et ils n'ont jamais l'opportunité
de valider quel animal a causé quel dommage.
Ils n'entendent que le rapport de victimes ou de policiers, ils ne prennent pas
le chien pour faire une évaluation d'ADN
de l'animal. Alors, lorsqu'ils essaient... Écoute, il va toujours y avoir des
gens qui aiment et qui haïssent les animaux, au sein de la société. Mais
un docteur qui fait une étude à l'université de médecine, faculté de médecine,
sur les êtres humains ne peut pas, de ce fait, savoir qui a causé quel dommage
à l'être humain.
Le Président
(M. Auger) : M. le ministre.
M. Coiteux :
...pas passer tout le temps sur les études scientifiques, parce qu'il y a des
études qui mesurent l'efficacité des
différentes approches qui se contredisent également. Mais je veux changer de
sujet, je veux changer de sujet.
Une voix :
...
Le
Président (M. Auger) : Juste un instant. Je veux qu'on comprenne
bien puis que les auditeurs également nous entendent très bien. Votre
question, M. le ministre.
M. Coiteux :
Oui. Alors, je voudrais aller sur un autre terrain, parce qu'on vient d'avoir
une discussion fort intéressante sur
l'origine des chiens, c'est-à-dire de quels élevages ils proviennent, qui les a
élevés, qui les a reproduits, en d'autres
termes, et puis la question que j'aimerais vous poser... Tous les chiens, en
général... Mais, si je prenais les chiens de type pitbull, et je comprends, là, que c'est des mélanges, c'est des
croisés, mais les chiens qui... pour le commun des mortels, là, quand ils disent : Ça, c'est un pitbull,
là, ces chiens-là que les gens possèdent aujourd'hui, ils les achètent de qui?
Ils achètent où? Quelle information ils ont,
lorsqu'ils les achètent, de la part du vendeur, sur quel chien ils sont en
train d'acheter?
Le Président
(M. Auger) : Mme Goldwater.
• (18 h 20) •
Mme Goldwater
(Anne-France) : Oui. Ce qu'il est important à réaliser, c'est, au sein
de la société, qui fait peut-être partie de
l'explication sociologique de la
mauvaise réputation sociale attribuée à ces animaux... c'est qu'ils sont
souvent associés à des classes sociales qui ont accès à des éleveurs, disons,
non certifiés, pas pour dire qu'ils ne sont pas... non certifiables, mais non certifiés, alors des
gens qui ne prennent pas ou qui ne savent pas, en effet, qu'il est important
de savoir qu'est-ce qu'il en est de l'élevage de l'animal, comment le chiot a été
socialisé, si les parents ont été évalués par un vétérinaire pour leur
état de santé, pour leur tempérament et tout. Ça, ça reflète les moyens des
gens qui se procurent des hybrides. Des gens
à un autre niveau, quelqu'un comme moi qui va aller automatiquement à un
éleveur certifié, qui va s'assurer
d'avoir le dossier médical des parents pour le tempérament, les yeux, les
hanches, les genoux, tout littéralement, là, et qui va par la suite aussi faire évaluer le chiot chez le vétérinaire
spécialiste, il n'y a pas beaucoup qui sont comme moi parce qu'il y a
juste... 2 % des chiens québécois sont de race pure.
Alors,
certes, là, il y a un rôle social important à gérer, comme on le fait avec la
vente d'autos. Une auto n'est pas une
arme à feu, mais une auto peut tuer beaucoup de gens dans une année si on ne
s'assure pas que l'auto est sécuritaire, si la société n'assume pas son rôle de légiférer et réglementer l'état
de l'auto, les systèmes de sécurité, et assurer aussi que les conducteurs ont des cours de conduite, et
qu'on s'assure que les conducteurs dangereux n'ont pas non plus le droit
d'obtenir un permis. On pourrait bien
s'inspirer de l'évolution du droit quant aux conducteurs d'autos pour changer
la donne.
Quand nous étions jeunes...
vous avez l'air tous d'être plus jeunes que moi, mais, bon, vous savez, il y
avait toujours un taux de mortalité, sur les
chemins québécois, sur les autoroutes québécoises parce que tout le monde, s'il
vous plaît... tout le monde conduisait saoul. Ça a pris également un changement
de moeurs, pas juste la loi, des campagnes d'information
des gouvernements provincial et fédéral pour changer la donne et convaincre les
plus jeunes générations de se
responsabiliser par rapport à leur consommation d'alcool et l'ivresse au
volant. C'est la même chose qui... Il est temps et passé temps. Nous
sommes ici pas pour vous dire que c'est l'anarchie, l'anarchie doit régner. Je
suis une juriste...
Le Président
(M. Auger) : Une minute à l'échange.
Mme Goldwater
(Anne-France) : ...Marie-France Ouimet est juriste. Nous sommes ici
pour qu'il y ait une loi promulguée, mais une loi qui va assurer notre
protection collective et la protection des chiens entre eux aussi, hein?
M. Auger :
Une dernière question. 45 secondes.
M. Coiteux : Oui. Mais alors
est-ce qu'on devrait permettre à n'importe qui de vendre un chien...
Mme Goldwater
(Anne-France) : Absolument pas. Et ceux qui aiment le plus les
animaux, pas nécessairement moi, je
suis très mi-chemin, là, veulent même prohiber la vente des chiens sur Kijiji
ou par les petites annonces parce que, si
on ne met pas un contrôle social sur le transfert des chiens, si on les traite
comme de la propriété, comme des objets, certes, on va aggraver le problème
de négligence, d'abus et de propager des chiens à mauvais tempérament ou ne pas
protéger le grand public de ceux qui abusent de leur animal.
Un chiot n'est pas né sauvage. Le chien est
l'animal le plus sociable...
Le Président (M. Auger) : Désolé,
nous devons poursuivre avec l'opposition officielle. M. le député de Verchères,
pour 9 min 30 s.
Mme Goldwater (Anne-France) : ...
M. Bergeron :
Oui, ça va vite. Bien, merci infiniment. Merci de votre présentation, qui
suscite, ma foi, beaucoup d'enthousiasme, disons cela comme ça.
Alors, je
lis, vous êtes la coalition... vous représentez la Coalition pour la promotion
de la sécurité des personnes et des
chiens. Vous avez passé beaucoup de temps de temps à nous parler de la
protection des pitbulls, vous étiez en train de commencer à nous parler la protection des gens. Comme on est ici non pas
pour protéger les pitbulls, mais pour protéger les gens, pourriez-vous rapidement nous terminer votre
présentation sur ce que vous proposez? Parce que ne nous dites pas
simplement ce que vous n'aimez pas dans le projet de loi, on aimerait que vous
nous disiez ce que vous voudriez que contienne ce projet de loi. Alors,
allez-y.
Mme Goldwater (Anne-France) : ...tout
excitée. Bon. Alors, des mesures de redressement...
Le Président (M. Auger) :
8 min 30 s.
Mme Goldwater
(Anne-France) : ...les mesures de redressement doivent être prévues
puis appliquées pour le chien qui a
mordu selon la gravité objective de la morsure, par exemple les cours canins ou
le port de la muselière, peu importe le chien, grand, petit, ou la race.
Les chiens évalués dangereux, on doit penser à la confiscation du chien, et sa
réhabilitation, et ne pas retourner un chien rendu dangereux au propriétaire
qui était incompétent, ou négligent, ou vicieux lui-même.
Nous soutenons que ça prend autant des mesures
préventives qu'incitatives et coercitives — je suis une avocate, j'aime les mesures
coercitives — qui
renforcent dès maintenant, dès demain l'application des règlements actuels qui auraient pu avoir sauvé la vie de
Mme Vadnais, une femme de mon âge. C'est comme ça que je suis devenue
impliquée, c'est une femme de mon âge dans son jardin. Je veux dire, ça
pourrait m'arriver à moi, je vis dans un quartier plein de chiens.
Alors, il faut
appliquer les lois qui sont là, passer tout
de suite le port obligatoire de la
laisse pour tous les chiens. Vous
voulez savoir, la vraie réussite, Manitoba, réduire les morsures, c'est quand
ils ont imposé des amendes salées, qui deviennent
plus salées d'infraction en infraction. Soudainement, tout le monde gardait son chien en laisse. Et, quand le maître maîtrise son
animal, on peut déjà là penser éliminer la grande majorité de blessures. Misons
donc sur cette responsabilisation des
propriétaires et la sanction des mesures par amende ou des cours, éducation.
Les amendes doivent être modulées en
regard de l'échelle Dunbar. Nous recommandons des campagnes d'information comme a été fait pour éliminer l'ivresse au volant, qu'on sait,
les taux ont chuté au fil des années, et de la sensibilisation qui favorise
l'adhésion, la compréhension et le respect des mesures incitatives et
coercitives adoptées.
La population
doit acheter la loi. «Don't push them underground», comme on le dit, on ne veut
pas que des gens commencent...
arrêtent de parler et se cachent de la loi. Il faut que la population... Et la promesse : On ne va jamais bannir aucune race, mais venez et faites-nous la preuve
que vous êtes des bons citoyens. Comment? Avec un registre national et des morsures et des chiens. Donnez... Envoyez à
des gens des coupons-cadeaux pour ceux qui s'enregistrent sur un site à
l'Internet. S'ils s'enregistrent et puis ils donnent la preuve que l'animal est
stérilisé, vacciné contre la rage — vous avez oublié ça — vacciné
contre la rage et micropucé, il reçoit le maximum de coupons-cadeaux.
Mettez-moi en charge de partenariats
public-privé, je vous garantis que je vais vous trouver des chaînes de magasins
qui vont être heureuses de vous
fournir des coupons gratuitement comme mode de publicité. Et vous savez comment
nos voisins vont faire à peu près
n'importe quoi pour le petit cahier de coupons-cadeaux. Pourquoi?
L'idée, c'est que ça ne coûte pas cher au gouvernement, n'est-ce pas — je
pense toujours à l'argent, moi, hein? — et
que les gens soient heureux et soient incités à dire : Oui, je vais
obéir à la loi, ce qui fait toujours le bonheur de tout avocat, n'est-ce pas?
Bon.
Alors là,
vous devez également penser à autre chose, injecter des ressources nécessaires — oui,
ça prend un peu d'argent — pour
augmenter le nombre d'inspecteurs canins où on en a besoin comme mesure de
prévention. Où? Les parcs publics et
près des écoles. C'est là où on a besoin d'avoir une présence accrue de
personnes formées, pas des gens agressifs, des personnes qui ont de l'entregent avec des gens, qui ont de
l'entregent avec les enfants, et observer sur le terrain où sont les problèmes, qui sont les gens qui sont
problématiques, comme le maire Giuliani avait fait à New York
quand il a fait accroître le nombre
de policiers dans le centre-ville de New
York, et ça a fait chuter le taux de
criminalité, n'est-ce pas?
Bon,
nous voulons aussi qu'il y ait des ressources investies pour la bonne formation
de vos inspecteurs canins et policiers,
assurer le respect des mesures en place. Sachez, les policiers que j'ai
rencontrés, en général, sont des gens qui aiment les chiens, et la majorité sont merveilleux avec leurs
concitoyens, mais ce monde doit aussi être formé à enquêter sur toutes
les circonstances entourant les incidents de morsure afin de prévenir; dès qu'il
y a un premier incident, qu'on intervient rapidement comme on fait en protection de la jeunesse, par exemple, tout de suite. On ne veut jamais miser sur le placement d'un enfant, mais, si on n'intervient
pas rapidement dans une famille en difficulté, ça peut se solder
avec un enfant en famille d'accueil. Même chose pour l'animal.
Alors,
il faut aussi avoir des enquêtes et des mesures effectives à veiller au respect
de la loi sur la sécurité et le bien-être
animal, parce que, si vous réduisez, si vous menez la bataille
contre la négligence et la cruauté animale, vous allez éliminer ce monde, comme on a vu les deux
propriétaires des deux chiens, là, Lucifer et l'autre, qui... je ne veux pas
les traiter d'abuseurs de chiens, mais qui,
pour moi, ces deux hommes sont directement responsables de torts, de
dommages extrêmes et de tragédies, une tragédie totale, une autre
quasi-tragédie, créées par leur animal. L'animal est l'outil de l'homme. Bon.
• (18 h 30) •
Nous recommandons de prévoir un droit de
contestation des conclusions de l'enquête par l'inspecteur canin — je
suis une avocate, il faut toujours
avoir le droit de contester — et
une contestation des mesures de redressement devant le tribunal. Nous voulons garantir le droit du
propriétaire, de l'occupant d'une maison d'habitation de ne pas laisser
entrer un inspecteur canin sans mandat de perquisition.
Nous
pensons aussi à l'implantation d'un programme d'éducation
par professionnels qualifiés. Pour
qui? Cibler la population à risque : les jeunes enfants, donc les
parents de jeunes enfants, les enfants en âge préscolaire et au
primaire, les propriétaires des chiens, l'objectif étant la prévention, la
réduction du risque de morsure.
Bon, le registre
national, je vous en ai déjà parlé.
On devrait requérir,
à l'achat ou l'adoption d'un chiot, que le propriétaire suit un cours d'éducation
canine à renforcement positif pour chiots
qui inclut les volets socialisation,
inhibition de la morsure et mordillement, langage et comportements canins. Si les personnes n'ont pas
l'argent, il va falloir adresser le problème des familles à faibles
revenus, mais, si vous n'êtes pas prêt à investir à un cours canin pour savoir
comment rendre votre animal un concitoyen de la province qui est responsable et
sociable, la personne devrait être prohibée d'en acheter.
Je
pense également à un programme d'assurance responsabilité et assurance médicale
obligatoires à travers la province.
Encore, ça prendra un partenariat public-privé. J'ai été pour proposer ça à
M. Coderre, avant que... je lui dis, donc : Bon débarras, mais là, je pense, ici, à l'Assemblée
nationale — c'était
une petite shot, je sais, mais je ne pouvais pas m'empêcher — ça
prendrait un partenariat public-privé au niveau provincial pour convaincre les
assureurs d'accepter que les propriétaires vont être obligés de
souscrire universellement à une telle assurance — santé, responsabilité
civile, propriétaire — à un prix abordable. Je vous le dis
d'avance, les assureurs vont l'accepter s'ils savent qu'ils vont avoir beaucoup de clientèle. Et ça va vous aider
beaucoup par rapport aux dégâts que des animaux peuvent créer aussi,
comme on sait, le 1er juillet, chaque année, lors des déménagements.
Donc,
ce genre de mesure pratique, terre à terre vous permettra dès demain de montrer
à la population que vous êtes soucieux de leur sécurité, que vous n'êtes
pas là pour les punir, pour bannir un animal ou l'autre...
Le Président
(M. Auger) : Un instant. On a un dernier 30 secondes, et M.
le député de Verchères...
M. Bergeron :
Bien, justement, là, vous nous avez dressé toute une liste de propositions,
mais, au niveau des élevages, qu'est-ce que vous proposez?
Mme Goldwater
(Anne-France) : Les élevages doivent être contrôlés et certifiés.
Notre réputation... Je suis une anglophone,
hein? Alors, notre réputation internationale par rapport aux droits des animaux
est absolument horrible, on est
connus à travers la planète pour nos usines de chiots et nos abattoirs de
chevaux, et j'en passe. Quand on a adopté la loi sur le bien-être des
animaux, soudainement on a avancé, on était en premier plan, progressistes.
Le
Président (M. Auger) : C'est tout le temps que nous avions pour
l'opposition officielle. Et, Mme Goldwater, juste un instant. Vous faisiez référence, dans vos solutions, à votre
mémoire aux pages 29 et 30. C'est bien ça? Je vous ai trouvée.
Mémoire
déposé
Et
d'ailleurs je dépose votre mémoire, de la Coalition pour la promotion de la
sécurité des personnes et des chiens.
Maintenant,
nous allons avec Mme la députée de Mirabel pour les six prochaines minutes et
30 secondes. Merci.
Mme D'Amours :
Merci, M. le Président. Ma question s'adresse à monsieur. Vous êtes
scientifique. Si j'ai bien compris,
j'aimerais que vous me le mentionniez, si j'ai bien compris, c'est qu'un chien n'a
pas de génétique. Quand il naît, il est à zéro, il n'a pas de
prédominance génétique, là, si c'est un chien qui est violent, un chien doux,
un chien... Au départ, ils n'en ont pas.
M. Silversides
(David William) : O.K. On ne peut pas dire qu'une race est prédisposée
à la naissance d'être méchante, non, on ne
peut pas dire cela, parce qu'il n'y a aucune évidence pour cela. Et moi, je
fonctionne sur l'évidence. C'est comme nous autres. Nos enfants sont nés
avec, bon, un tableau un peu vide, plein de potentiel pour aller...
Mme D'Amours :
Oui, mais j'ai eu deux filles.
Le Président (M. Auger) : Mme
la députée de Mirabel.
Mme D'Amours : ...j'ai
eu deux filles. Je peux vous dire que, dès la naissance, je savais qu'il y en
avait une qui avait un méchant caractère. Puis elles étaient bébés
toutes les deux, là.
M. Silversides
(David William) : Exactement.
Mme D'Amours :
Il y avait une génétique plus de la mère que du père, je peux vous en assurer.
Donc, ce que vous êtes...
M. Silversides
(David William) : Oui, exactement. Est-ce que ça va avec la race en
question ou l'individu en question?
Mme D'Amours :
Oui, je comprends, je comprends. Mais donc vous êtes en... Mais je comprends.
Je voulais que... Vous me dites...
M. Silversides
(David William) : Il y a des personnes au Sud qui disent que, bon, les
Mexicains sont les méchants «hombres».
Mme D'Amours :
Oui, bien, je n'irai pas là, je n'irai pas là.
M. Silversides
(David William) : Moi, je sais que ça, ce n'est pas vrai.
Mme D'Amours :
Je vous arrête, je vous arrête, je n'irai pas là.
Le
Président (M. Auger) : Juste une personne à la fois, s'il vous
plaît, pour les gens qui nous écoutent, pour le...
M. Silversides
(David William) : C'est la
même chose que vous posez, la même question que vous posez. Ça ne va pas avec la race,
O.K.? Ces questions de race, ça ne fonctionne pas.
Mme D'Amours :
Je veux juste...
Le Président
(M. Auger) : Mme la députée de Mirabel.
Mme D'Amours : Merci,
M. le Président. Alors, j'aimerais
que vous me rassuriez. Tantôt, j'ai parlé des chiens Mira. Un chien qui est de cet organisme-là, quand
ils sont bébés, ils vont les prêter à des familles pour les
sociabiliser. Et, lorsqu'on va visiter l'entreprise Mira, l'organisme Mira, on
nous dit qu'ils ont choisi des chiens en fonction de leur comportement et de leur génétique. Alors, je
trouve que ça tombe un peu comme en contradiction, parce qu'un chien peut être très bien élevé mais avoir un comportement...
Parce que, lorsqu'il arrive chez Mira, c'est là qu'ils jugent si le
chien est bon pour accompagner une personne qui en a besoin... ou sinon ils
vont dire : Ah non! il n'a pas vraiment le tempérament, on le laisse à la
famille d'accueil ou on le donne en adoption.
M. Silversides
(David William) : La physiologie, la forme...
Mme D'Amours :
On parle du tempérament, je m'excuse, oui.
M. Silversides
(David William) : ...oui, ça va avec la génétique directement, pour
une race, O.K., une race va être dans
la même forme. Ça, c'est génétique, oui. Pour le comportement, on peut dire
qu'il y a des prédispositions génétiques, mais ça, c'est au niveau de l'individu, ce n'est pas au niveau de la
race. Et vous venez de le dire vous-même, que, bon, parmi les chiots, il y aura un ici qui est bon
pour la fonction, pour le comportement, et un autre qui ne fonctionnera
pas, on va le laisser avec la famille d'accueil. Il faut dire que le
comportement, partie génétique, c'est individuel, ce n'est pas lié avec la
race.
Mme D'Amours :
O.K. J'ai encore du temps, M. le Président?
Le Président
(M. Auger) : 2 min 30 s.
Mme D'Amours :
Ma dernière question, c'est que vous avez parlé, tout à l'heure,
Mme Goldwater... vous avez parlé, tout à l'heure, que vous avez
défendu 400 familles.
Mme Goldwater
(Anne-France) : 600.
Mme D'Amours :
600 familles. Allez-vous les défendre s'ils doivent prendre une assurance,
qu'ils doivent avoir... qu'ils
suivent des cours de bon comportement, mais que vous avez dit qu'ils n'avaient
pas l'argent à l'époque? Est-ce que vous allez les défendre pour dire
qu'ils n'auront pas l'argent pour s'assurer pour avoir un chien, pour...
Mme Goldwater
(Anne-France) : Deux réponses, oui, j'ai deux réponses.
Première
réponse : J'ai déjà représenté toutes ces personnes gratuitement. Le
travail que je fais pour la CPSPC, je le
fais gratuitement. Je fais pleurer mon mari, mais c'est... quand il y a un
problème avec un chat, un chien ou un cheval, on m'appelle, moi, à trois
heures le matin. Alors, oui, je vais les défendre gratuitement. Je suis bête,
je comprends.
Par contre,
pour la société, j'ai les moyens que j'ai, je contribue ce que je peux, mais,
au niveau de la société, je suis
extrêmement sensible au fait que ces gens à faibles revenus, lorsqu'ils étaient
dans mon bureau, ces personnes tout à fait ordinaires, elles pleuraient des chaudes larmes par crainte de perdre
leur animal, avec des enfants que j'ai dû soulager moi-même, grand-maman que je suis. Je sais que la
société doit participer à les aider, payer ces cours. Je paie beaucoup
d'impôts, messieurs mesdames, je vous assure, je paie énormément beaucoup, je
paie mes impôts avec fierté et je tiens que ce soit investi ainsi.
J'ajouterais
également un dernier point sur Mira parce que j'ai été marraine de Mira pendant
un an et je suis très intéressée par
la génétique. Ils ont des dossiers, des filières où ils suivent la reproduction
de leurs animaux pendant des générations
et générations et ils ne peuvent pas prédire le tempérament, dans une portée,
de chaque animal. C'est pour ça qu'ils
les placent au sein des familles, pour les socialiser, parce qu'il faut avoir
un tempérament particulièrement stable et serein pour être un animal qui assiste les personnes non voyantes, les
personnes à mobilité réduite et les enfants autistes.
Dans le même
sens, vous verrez le documentaire sur M. Vick. Vous apprendrez que, même
quand on fait l'élevage pour créer
des animaux vicieux, vous êtes chanceux si vous avez même un chiot dans une
portée qui a un potentiel de devenir
agressif avec beaucoup d'entraînement, mais avec beaucoup d'entraînement. Ce
n'est pas vrai qu'un chien est né, comme
un être humain... ce n'est pas vrai qu'un être humain est né pour être violent.
On a vu au Rwanda les enfants soldats. Ils
ne sont pas nés comme ça parce qu'ils viennent du Rwanda, hein, pas plus qu'ils
ont une morphologie particulière. Ils ont
été entraînés pour être vicieux et agressifs. Quand on les a sortis de la
guerre, ils sont redevenus des citoyens tout à fait normaux, comme vous
et moi. Correct?
• (18 h 40) •
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup.
Mémoires
déposés
Donc, avant
de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des organismes et des personnes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques,
soit l'Association des juristes progressistes, Mel-Lyna Cadieux, le
Collège des médecins du Québec, Denise
Loiselle, «Pitbull» Association of Châteauguay, l'Union des municipalités du
Québec et la ville de Montréal.
Donc, merci,
Mmes Goldwater, Apollon-Auguste et Ouimet, M. Silversides, pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Et la commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 41)