(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électroniques.
Le mandat de
la Commission des institutions est d'entendre le Directeur de l'état civil et
le Curateur public suite à l'adoption d'un mandat d'initiative du
21 septembre 2017. Les auditions de ce matin sont en lien avec la
consultation générale sur le rapport
quinquennal 2016 intitulé Rétablir l'équilibre — Rapport sur l'application de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels et de la Loi sur la protection
des renseignements personnels dans le secteur privé ayant eu lieu les 16,
17, 22, 23 août 2017.
Mme la secrétaire, il y a des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Marceau (Rousseau) est remplacé par Mme Léger (Pointe-aux-Trembles).
Mémoire déposé
Le
Président (M. Ouellette) : À ce stade-ci, je veux déposer le mémoire qui nous est parvenu du Curateur public, qui sera déposé sur le
site.
Je vous
souhaite la bienvenue. Bon début de semaine. Juste pour nous rappeler qu'on est
ici suite à une demande de mandat d'initiative de Mme la députée de
Pointe-aux-Trembles. Et on a souhaité entendre le Directeur de l'état civil sur
certains points touchant le document de consultation, mais on a bien pris soin
de s'enquérir auprès des différents collègues parlementaires qu'on serait très
précautionneux parce que le Directeur de l'État civil a une cause pendante devant
les tribunaux, et je pense qu'il n'y a aucun des collègues qui est intéressé à
aller à cet endroit-là.
Et je
souhaite la bienvenue à M. Reno Bernier, qui est sous-ministre adjoint des
registres de l'état au ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité
sociale et représentant du Directeur de l'état civil. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour faire votre
présentation et qu'on aura une période d'échange avec les membres du
gouvernement et les porte-parole des deux oppositions. Donc, M. Bernier,
je vous laisse la parole.
Exposé du sous-ministre adjoint des
registres de l'État, M. Reno Bernier
M. Bernier
(Reno) : Merci,M. le Président. Alors, merci de m'accueillir
aujourd'hui, Mmes et MM. les députés, membres
de la commission, M. le Président. Je vous remercie pour cette invitation à
échanger avec vous sur les règles d'accès
aux registres de l'état civil, un sujet qui est soulevé lors de la consultation
générale sur le rapport quinquennal 2016 de la Commission d'accès à
l'information.
Au cours des
dernières années, j'ai eu à participer à des auditions publiques de la
Commission des institutions en tant
que Directeur de l'état civil, poste que j'ai occupé de juin 2011 jusqu'à
la fin août 2017. Je me présente aujourd'hui devant vous, comme l'a
mentionné le Président, à titre de sous-ministre adjoint du secteur des
registres de l'état au ministère du Travail,
de l'Emploi et de la Solidarité sociale. C'est un nouveau secteur dont fait
partie l'équipe du Directeur de
l'état civil. Je suis donc au fait des règles applicables en matière d'accès
aux actes de l'état civil et c'est pourquoi j'ai accepté avec plaisir de
me joindre à vous pour contribuer à la réflexion entourant vos travaux.
Je vous
propose de débuter par une mise en contexte sur le registre de l'état civil au
Québec et d'enchaîner ensuite avec un résumé des principales règles qui
sont appliquées par le Directeur de l'état civil.
Les bases de
l'état civil, au Québec, remontent au début des années 1600, où à
l'époque, jusqu'en 1993, l'état civil était administré par des
milliers d'officiers publics partout au Québec. Le 1er janvier 1994, le
gouvernement a instauré la fonction de Directeur de l'état civil, lequel
devenait alors le seul officier de l'état civil au Québec. Le gouvernement centralisait aussi du même coup plus
de 425 000 registres qui
étaient répartis dans 3 600 lieux différents partout au Québec pour créer un registre central
qui s'est appelé le registre de l'état civil. Cette réforme visait
notamment une plus grande cohérence dans
l'application des règles entourant l'état civil et une conservation plus
sécuritaire des données.
C'est dans ce
contexte que les fonctions du Directeur de l'état civil, qui est un officier
public, ont été enchâssées au Code
civil du Québec. Essentiellement, ces fonctions consistent à dresser les actes
de naissance, de mariage, d'union civile et de décès qui surviennent au
Québec ou qui concernent une personne qui y est domiciliée, à inscrire ces
actes au registre, à être le gardien de ce
registre et à délivrer aux personnes qui y ont droit des certificats, des
copies d'actes et des attestations.
Le registre de l'état
civil compte plus de 21 millions d'actes. Le directeur garde ces actes
concernant les 100 dernières années et,
passé ce délai-là, il les envoie à Bibliothèque et Archives nationales à des
fins de conservation. Le registre de
l'état civil contient des informations personnelles sensibles et importantes
pour le Québec, pour les personnes également.
Il contient notamment la filiation des personnes, les parents, les
grands-parents, etc., toute la lignée familiale ainsi que les dossiers d'adoption également qui sont soumis à des règles
très rigoureuses en matière d'accès. Donc, on ne perd pas la trace de la
filiation, on a vraiment tout ça dans notre registre, qui compte, comme je vous
le dis, plus de 21 millions d'actes.
Les actes de
l'état civil ont une valeur juridique importante. Ils sont nécessaires pour
soutenir l'exercice des droits civils,
pour prouver l'identité ou pour faire la preuve des événements de vie. Ils sont
également nécessaires pour obtenir des documents essentiels comme le
passeport ou pour accéder à divers programmes et services.
Par conséquent, les actes de l'état civil
doivent pouvoir être mis à la disposition des intéressés dans certaines
circonstances. D'ailleurs, le Directeur de l'état civil délivre annuellement
plus de 400 000 certificats, copies d'actes et attestations.
Cependant, le
contenu du registre de l'état civil n'a pas un caractère public, et son accès
doit se faire dans le respect du
droit à la vie privée. En effet, les actes d'état civil contiennent un grand
nombre de données d'identification personnelle comme le nom, le lieu et la date de naissance, le nom et l'adresse des
parents, les signatures manuscrites, etc. Et, dans certains cas, les actes contiennent aussi des
informations très sensibles comme des mentions qui découlent de
jugements d'adoption, des décisions en
matière de protection de la jeunesse, des changements complets d'identité qui
sont confidentiels. Donc, afin d'assurer un certain équilibre entre ces
deux principes, celui de l'accessibilité et celui de la protection de la vie privée, il y a des règles qui ont été prévues par
le législateur, qui doivent être appliquées de manière rigoureuse par le
Directeur de l'état civil.
• (10 h 10) •
Donc, voici
un résumé de ces règles principales. L'article 5 de la Charte des droits
et libertés de la personne de même
que les articles 3 et 35 à 41 du Code civil consacrent le droit à la vie
privée. Ces articles prévoient que nulle atteinte ne peut être portée à
la vie privée d'une personne sans son consentement ou sans que la loi
l'autorise. Par ailleurs, l'article 2
de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection
des renseignements personnels prévoit
que cette loi ne s'applique pas aux registres de l'état civil et aux actes. Ça ne
signifie pas que les actes de l'état civil
ne sont pas accessibles ou que les renseignements qu'ils contiennent ne sont
pas protégés, mais ça signifie plutôt qu'il
faut se référer au Code civil pour connaître les règles applicables. Ces règles
qui prévoient comment l'accès au registre doit se faire, c'est-à-dire par la délivrance de certificats, de copies
d'actes et d'attestations qui respectent des conditions de forme et de contenu bien précises, conformément à
l'article 144 du Code civil. En outre, le Directeur de l'état civil
ne peut délivrer ces documents qu'aux personnes qui y sont mentionnées ou à
celles qui justifient de leur intérêt, tel que le prévoit l'article 148 du
Code civil.
De manière
générale, une personne va pouvoir justifier son intérêt lorsqu'elle peut
démontrer que le document qu'elle
demande est nécessaire pour l'application d'un jugement ou d'une loi, à titre
d'exemple, une personne qui exerce un pouvoir
d'enquête prévu dans une loi ou bien un liquidateur dans une succession. C'est
des exemples qu'on peut vous donner. Exceptionnellement, le Directeur de
l'état civil peut aussi autoriser la consultation du registre en vertu de l'article 150 du Code civil. Cependant, s'il
permet cette consultation, le directeur doit s'assurer que les
renseignements inscrits seront sauvegardés,
ce qui limite les cas d'application de cet article. Par ailleurs, c'est
important de mentionner que le
gouvernement a adopté deux projets de loi à l'automne 2001, suite aux
attentats terroristes du 11 septembre, qui sont venus restreindre l'accès aux registres de l'état civil, dans le
but de rendre encore plus sécuritaire la délivrance de ces documents importants.
En ce qui concerne le Directeur de l'état civil,
sa responsabilité, c'est d'appliquer ces règles-là en toute neutralité. Il n'est pas propriétaire du registre,
mais il est plutôt son gardien. Donc, il fait ça pour le compte de
millions de citoyens qui se fient, dans le
fond, sur le fait qu'il va appliquer les règles qui sont prévues à la loi. Dans
l'exercice de ce rôle, le directeur doit tenir compte des principes
d'accessibilité et de respect de la vie privée associée aux documents de l'état
civil. Il doit également conjuguer de façon constante entre ces deux principes
pour essayer de garder un certain équilibre. Il doit également tenir compte du
contexte qui l'entoure, c'est-à-dire le contexte de mondialisation de l'information qui permet aujourd'hui de rendre
accessible à un large public des informations personnelles dont
l'utilisation, par ceux qui y accèdent, est
difficilement contrôlable. On a qu'à penser, entre autres, à Internet. Il doit
aussi tenir compte des nouvelles technologies qui facilitent le
traitement massif et le croisement de données.
En terminant,
je me permets de mentionner que le Directeur de l'état civil, c'est une
organisation moderne qui a su développer, au fil des années, une
expertise et des services à la clientèle qui sont performants, et dont on
s'inspire pour différents projets, notamment au gouvernement. Cette
organisation traite avec une grande efficacité plus de 2 millions de
transactions annuellement avec les citoyens, les entreprises, et les ministères
et organismes, tout en conservant des taux
de satisfaction de la clientèle très élevés, qui varient de 96 % à
99 %. Mais le plus important, c'est qu'il s'agit d'une organisation
à dimension humaine qui est composée d'hommes et de femmes qui ont à coeur le service public et qui se dévouent, jour après
jour, pour accompagner les citoyens avec professionnalisme, empathie et
discrétion dans des événements de vie qui sont souvent chargés d'émotions;
qu'on pense notamment au décès. Donc, je peux vous dire qu'on est particulièrement
fiers de cette équipe et qu'on peut se fier sur sa rigueur dans le travail
qu'elle exécute.
Enfin,
je tiens à assurer tous les membres de la commission de notre entière
collaboration dans la réflexion qui est en cours dans la foulée du rapport quinquennal de la commission d'accès.
D'ailleurs, la commission d'accès recommande, à sa recommandation 60, de relancer la réflexion sur la recherche de
l'équilibre entre la vie privée et l'accès à l'information pour différents secteurs,
différents domaines. Et je tiens à vous assurer qu'on est tout à fait ouverts
et disposés à collaborer à ça pour
vous appuyer dans votre démarche. Donc, en terminant, c'est ce que je voulais
vous laisser comme message. Je suis tout à fait disponible pour répondre
à vos questions, et je vous remercie de votre attention.
Discussion générale
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. On va du côté du gouvernement...
Une voix :
...
Le Président (M.
Ouellette) : Ça va? Pas d'autre question? Mme la députée de
Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Oui, avec plaisir. Bonjour, M. Bernier. Très contente que vous soyez ici.
D'ailleurs, je tiens à dire que, dans
l'ensemble des travaux qui touchent la modernisation de la loi, là on est sur
le rapport quinquennal, mais tout ça est
quand même relié. Alors, je vous invite à continuer à suivre nos travaux et d'y
être, parce que je trouvais important que
vous soyez dans... même si vous n'êtes pas directement lié par le rapport quinquennal,
vous avez quand même des recommandations
particulièrement sur ça. Mais tout le propos allait quand même autour des
informations personnelles et sensibles.
Et c'est embêtant... Ce qui est évident, c'est que c'est sûr qu'il faut trouver
l'équilibre, vous l'avez dit tout à l'heure,
l'équilibre entre la protection des renseignements personnels et privés,
évidemment, et celui de l'accès à l'information.
Et
on se rappelait, durant le temps du rapport quinquennal, entre autres, que
voilà plusieurs années, pour le bien des gens qui nous écoutent aussi, voilà plusieurs années on avait des listes
électorales sur poteaux avec toutes les adresses, téléphones. Tous les renseignements de tout le
monde, c'était tout sur les poteaux pour les élections, d'une part, et
donc c'était... et malgré tout il y avait
des secrets de famille bien importants aussi. Aujourd'hui, on voit, on sent
comme l'inverse, c'est comme si
l'État conserve ses documents, l'accès est plus, peut-être, difficile, mais, on
voit, sur Internet, Facebook, tout le
monde indique tout ce qui se passe dans leur vie privée. Ça fait qu'il y a
comme un déséquilibre, on peut se le dire. Et je salue l'intention du
gouvernement de vouloir moderniser, de moderniser la loi. Espérons que ça va
venir bientôt.
Vous
avez fixé à 100 ans... On a eu plusieurs discussions sur le 100 ans
et on se demande pourquoi... Dans le fond, ce n'est qu'un principe, le 100 ans, par rapport à conserver les
documents puis l'envoyer aux archives après 100 ans. Donc, la préservation des renseignements doit y être
pendant 100 ans, à moins d'une demande au Directeur de l'état civil,
qu'on lui demande, pour toutes sortes de
raisons, qu'on reviendra tout à l'heure si le temps me le permet. Mais
qu'est-ce qui arrive quelqu'un qui a
plus de 100 ans? Les 100 ans et plus, on en a discuté, eux autres ne
sont pas protégés, mais les zéro à 100 ans, eux autres, sont
protégés. Il me semble qu'il y a un chiffre qui a été là je ne sais pas
pourquoi, là.
Le Président
(M. Ouellette) : M. Bernier.
M. Bernier
(Reno) : Merci. Merci de votre question. Merci, M. le Président. Tout
à fait, c'est une excellente question.
Dans
le fond, ce que je peux vous dire, pour comprendre un peu d'où vient ce
100 ans là puis il se base sur quoi, c'est qu'à la base le registre de l'état civil, comme je l'ai mentionné
tout à l'heure, contient des informations personnelles. Techniquement, les informations personnelles
doivent être protégées. Donc, il y a certains mécanismes d'accès qui
sont possibles dont on va probablement parler tout à l'heure. Donc, le
principe, c'est qu'il faut appliquer ces principes-là qui sont prévus par la
loi.
La question du
100 ans, ça s'applique à tout ministère ou organisme qui détient des
renseignements ou des documents, doit déterminer un délai de conservation de
ces documents-là passé lequel il en dispose, notamment avec Bibliothèque et
Archives nationales. Dans le cas du Directeur de l'état civil, ce délai de
100 ans a été établi dès les débuts, en
1994, pour différentes raisons. À titre d'exemple, dans les travaux de la
réforme du Code civil qui ont entouré la recommandation de créer un registre centralisé, le 100 ans avait
été évoqué, puis ça, ça remonte à des travaux qu'il y avait à partir du
milieu des années 70, donc c'est un délai de 100 ans qui remonte à un
certain temps qui était envisagé et...
• (10 h 20) •
Mme Léger :
...entre la conservation d'un document, M. Bernier, et celle d'y avoir
accès, il y a une différence, là. Ce
n'est que la conservation des documents, puis, après 100 ans, vous
l'envoyez aux archives. Mais là on parle vraiment d'y avoir accès. Donc, le 100 ans n'a pas
rapport nécessairement, d'y avoir accès. Dans l'accès, beaucoup de gens
nous l'ont dit... Parce que, quand je vois
un acte de naissance, un acte de décès, un acte de mariage, est-ce que vraiment
c'est des renseignements personnels?
On se questionne, on s'est questionnés pendant la durée des audiences pour le
rapport. On sait qu'il faut savoir qu'on est... On en a besoin au
ministère de la Famille, on en a besoin à divers organismes, savoir combien
qu'il y a de naissances au Québec. Alors, pourquoi ces documents-là... Parce
qu'on ne reviendra pas aux généalogistes
parce qu'on s'est entendus, quand même, il y a une cause pendante, malgré que c'est
une cause particulière. Entre autres, il y avait eux qui sont venus
vraiment nous indiquer qu'ils ont besoin de ces informations-là. Mais la plupart des gens nous ont dit que... Qu'est-ce que
c'est, le renseignement personnel? Est-ce que c'est l'acte de naissance?
Parce qu'un acte de naissance devrait être
public. Un acte de mariage, on fait ça en grande pompe à l'église ou tout
ça, tout le monde sait ça. Moi, quand je me
suis mariée, moi, tout Pointe-aux-Trembles sont venus sur le perron, tu sais,
alors je ne pouvais pas cacher que je ne me mariais pas.
Alors,
tu sais, l'acte, est-ce que l'acte en lui-même, parce qu'il y a une adresse, il
y a des informations... Est-ce que
c'est possible de penser à enlever ces informations-là puis des informations qui
sont plus personnelles? C'est dans cet esprit-là, là, que je vous donne
cette question-là.
Le Président
(M. Ouellette) : M. Bernier.
M. Bernier (Reno) : Merci.
C'est une précision qui va me permettre de répondre plus efficacement à votre question. Le 100 ans, c'est la période pas
seulement de la conservation du document, mais c'est la période aussi
pendant laquelle les renseignements
personnels contenus dans les actes sont conservés confidentiels, sous réserve
des règles d'accès dont on a parlé tout
à l'heure. Dans les actes d'état civil, là, tu as les actes de naissance, de
mariage, d'union civile, de décès. Tu as aussi les changements de nom.
Tu as les jugements aussi qui viennent modifier les actes comme les jugements d'adoption, les déchéances d'autorité parentale,
tous les dossiers de droit de la famille, là, qui sont confidentiels.
Donc, tous les actes sont interreliés.
L'acte de naissance va être mis à jour avec l'acte de mariage, l'acte de décès,
les changements de nom, etc. S'il y a des jugements, il va être mis à
jour aussi.
Le contenu de
ces actes-là, la loi ne prévoit pas d'exception pour une ou l'autre des
informations qui pourraient être rendues
publiques. La loi prévoit que, les actes, tout le contenu qui sont dans les
actes, qui sont déterminés, d'ailleurs, dans le code, tout ça est confidentiel, sous réserve des demandes d'avoir un
certificat de mariage, par exemple, un certificat de décès, etc.
Puis
d'ailleurs on a environ 400 000 certificats ou copies d'acte qui sont
délivrés à chaque année pour les personnes qui veulent appliquer une loi ou les personnes qui ont besoin d'exercer
une demande d'accès à un programme, ou etc., puis ils ont tout à fait le droit d'avoir leurs
documents, puis les documents sont disponibles. Puis donc c'est vraiment
accessible.
Puis aussi il
y a des échanges qui se font, de renseignements, pour simplifier les démarches
des citoyens entre les ministères et les organismes.
Mme Léger :
M. Bernier, quand vous dites «accessibles», là, si moi, je fais une
demande d'un acte de naissance de mes collègues, est-ce que je peux
l'avoir?
M. Bernier
(Reno) : Pour le moment...
Pour l'instant, vous ne pouvez pas. Avant 2001, vous pouviez. Suite aux événements du 11 septembre 2001, il y a deux
projets de loi qui ont été adoptés par le gouvernement, à
l'automne 2001, puis ces projets de loi
là sont venus prévoir que maintenant, depuis ce temps-là, c'est seulement les
personnes qui sont visées à l'acte, qui sont mentionnées à l'acte, qui
ont le droit de les avoir, ou bien les personnes qui justifient de leur
intérêt. Puis, la justification de leur intérêt, on entend l'application d'une
loi ou l'application d'un jugement.
Mme Léger :
...dans le fond, le Directeur de l'état civil... Là, vous êtes sous-ministre,
là, mais le Directeur de l'état civil, donc, à cause de ce que vous me
dites là, refuserait de me donner l'acte de naissance d'un collègue, là.
M. Bernier
(Reno) : Tout à fait. À moins que vous ayez une très, très bonne
raison, par exemple l'application d'un droit ou d'un jugement que vous
auriez envers votre collègue. Mais techniquement il n'a même pas le droit de
vous donner accès à ça.
Mme Léger :
Est-ce que vous pensez que, dans la réflexion que nous aurons pour la suite des
choses, c'est possible de revoir ça,
de... Parce que, là, vous l'associez avec des jugements, parfois, ou tout ce
droit de la famille et à tout ce que ça implique, je peux comprendre, que je considère effectivement des notions
peut-être plus sensibles, on pourrait en rediscuter, mais des notions plus sensibles. Mais, un acte de
décès, de naissance ou de mariage, je ne vois pas ce qu'il y a de
sensible maintenant, aujourd'hui. Je parle
en 2017. Ça l'était avant, puis là ça ne l'est plus, après 2001. Alors, est-ce
que vous ne trouvez pas, avec toutes
les demandes que vous avez... Parce que je suis convaincue que vous mettez
beaucoup de temps à répondre aux
gens : Non, je ne peux pas pour telle, telle raison. Il doit y avoir
beaucoup de votre équipe qui doit être alloué vraiment à refuser ces types de demande là. Est-ce que vous ne croyez
pas qu'on pourrait améliorer cette situation-là?
M. Bernier
(Reno) : Je vous dirais, en termes d'accessibilité, là, dans les
actes, il y a différentes informations, vous avez raison, il y a des informations, peut-être que le degré de risque
est différent. Par exemple, prenons la date de naissance, parce qu'elle est pas mal dans tous les actes, là.
La date de naissance, selon les règles actuelles, je pense, qui est
appliqué actuellement, n'a pas... est un
renseignement personnel au même titre que le fait que la personne a changé de
nom ou bien la filiation, le nom des
parents, etc. Cette date de naissance là, donc, est restreinte... elle a les
mêmes restrictions que le reste du document qui est l'acte ou le
certificat.
C'est
probable... Peut-être que certaines personnes peuvent penser que, une date de
naissance, ce n'est pas si grave que
ça de le diffuser, puis c'est très, très possible. Il y en a d'autres, par
contre, qui pourraient penser, préférer que ce ne soit pas diffusé. Il
faut comprendre que les actes...
Mme Léger :
...on nous la demande partout, M. Bernier, la date de naissance. Un permis
de conduire, ci, ça, tout le monde nous demande notre date de naissance.
On est pognés à le donner à nos banques, n'importe qui, là, ils nous le
demandent. Mais le Directeur de l'état civil, lui, il ne peut pas le donner. Il
y a quelque chose qui ne marche pas, il me semble, là.
M. Bernier
(Reno) : Bien, en fait, c'est vrai qu'on nous le demande souvent. Et
c'est d'ailleurs pourquoi c'est important,
je pense, pour le Directeur de l'état civil, surtout que présentement la loi l'empêche
de le faire, mais de ne pas diffuser
de façon massive les dates de naissance de tous les Québécois. Parce que, quand
tu veux accéder à un programme ou à
un service, ça te prend des secrets partagés avec le ministère ou l'organisme
avec qui tu fais affaire. Bien souvent, ils vont
nous demander le nom de jeune fille de la mère, la date de naissance,
l'adresse. Plus on diffuse... Et, selon les informations
dont on a, plus on diffuse ces informations-là de façon large, par exemple sur Internet, avec les mécanismes, les robots de recherche qu'on a aujourd'hui, les
croisements de données, plus on augmente le risque associé, par exemple,
au vol d'identité ou à l'usurpation d'identité.
Donc, il y a
des lois qui prévoient que vous devez communiquer votre date de naissance, mais
la loi le prévoit, et c'est vous qui
choisissez de la fournir, bien souvent on n'a pas le choix parce que c'est
prévu dans la loi, mais le directeur, lui,
il est le gardien de tous ces actes-là puis il n'y a rien qui lui permet, actuellement,
de rendre publiques les dates de naissance
des Québécois et des Québécoises. Les seules fois où il peut communiquer la
date de naissance, ça va être, par exemple,
dans l'application de l'article 150, qui prévoit qu'on peut donner accès
au registre. On va le faire dans deux cas, souvent. On va le faire parce
que la loi ou la loi prévoit qu'on doit communiquer la date de naissance, on le
fait, par exemple, pour la Régie de
l'assurance maladie et pour la Régie des rentes, aujourd'hui Retraite Québec. La
loi prévoit spécifiquement qu'on doit communiquer cette information.
On va le
faire aussi, très souvent... On fait près de 800 000 échanges
électroniques de données avec les ministères et organismes par année. On le fait quand? On fait la demande du citoyen
pour simplifier ses démarches. Par exemple, quand une personne... quand les parents ont un enfant au
Québec, maintenant, avec la déclaration unique qu'offre le Directeur de l'état civil, ils peuvent accéder à une dizaine de
programmes et services en une seule démarche en remplissant le
formulaire d'état civil et en leur donnant
leur consentement à ce que l'état civil communique les informations requises
aux différents ministères et organismes. C'est ce qu'on appelle le
principe de déclaration unique.
Donc, oui, on
se l'échange, la date de naissance, mais seulement quand la loi le prévoit ou
quand le citoyen y consent.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Ça serait votre dernière question.
Mme Léger :
Et quel type d'amélioration que vous pensez, étant... Ayant été Directeur de
l'état civil, quel type d'amélioration
qui répondrait un peu plus à des demandes que vous avez tout en ayant l'accès
et en ayant la protection de la vie privée des gens?
M. Bernier
(Reno) : Je pense que l'exemple de déclaration unique est un bon
exemple pour simplifier la vie des gens
en communiquant les renseignements personnels dans le cadre d'ententes. On fait
des ententes, souvent. Donc, ce que je pourrais dire qu'on pourrait
améliorer, c'est qu'il pourrait y en avoir encore plus de ces formulaires
uniques, notamment pour aider les gens à
liquider les successions dans le cadre des décès. On en a une déclaration
unique de décès aussi, mais elle ne
déclenche pas pour l'instant l'accès à différents programmes et services. Donc,
moi, je pense qu'au niveau de bonifier ces échanges électroniques là,
qui sont très sécurisés, qui sont faits conformément à la loi puis conformément
à des ententes écrites, ça, ça pourrait être fait.
Par ailleurs,
je vous dirais, juste pour vous donner, les faits, à l'État civil,
présentement, sur les 2 millions, environ, de transactions qu'on fait par année, là, avec les citoyens, les
ministères, les organismes — puis vous pouvez voir nos chiffres, ils sont publics — on a 200 plaintes par année seulement,
et c'est en diminution constante au fil des années. Et les plaintes qu'on a, ce n'est pas concernant
l'accès au certificat de notre voisin ou de notre voisine, c'est parce que
ça coûte cher, le tarif réglementaire est...
il prévoit des tarifs, ça coûte cher, ou bien ce n'est pas possible d'obtenir
le certificat de quelqu'un d'autre.
Dans le fond,
depuis 2001, il y avait eu un plan de communication qui avait été fait de façon
importante, puis on sent beaucoup
moins... Au début, c'est vrai, ce que vous dites, il y a eu un peu une
surprise. Pourquoi on fait ça? Il y avait les attentats terroristes qui justifiaient tout ça. Mais, depuis ce
temps-là, j'ai l'impression, en tout cas, j'ai l'impression, de ce qu'on
voit de l'interne, qu'il n'y a pas tant de plaintes que ça des gens pour
accéder à ces actes-là de tiers, là.
Puis, comme
je vous dis, quand ils ont un droit à faire valoir, quand ils ont une loi ou
quand il y a le consentement de la
personne concernée, on les donne les accès puis on les donne très rapidement.
On a des super bons délais de traitement puis on a des taux de
satisfaction très élevés.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. Je voulais commencer par
vous, vous savez, à matin, parce que c'est
votre demande de mandat d'initiative. Mon collègue de Vimont, qui a été très
galant, va poser une question avant qu'on aille à Borduas. M. le député de
Vimont.
M.
Rousselle : Merci, M. le Président. Écoutez, je vous écoute
depuis tantôt... Premièrement, bonjour, M. Bernier. Puis félicitations pour votre nouveau poste! Je
vous écoute depuis tantôt, puis on parle, justement, de registre, on
parle de protéger les informations, on parle de tout ça. Moi, je sais, comme
ancien policier, tous les policiers qui ont affaire à aller fouiller dans l'ordinateur, dans l'information des gens, ils ont
un genre de... ils ont un code d'éthique, ils ont... c'est surveillé, c'est vérifié par un central. Est-ce
que c'est la même chose au niveau... Parce que vous parliez, tantôt,
d'une équipe. Puis je ne doute aucunement de
votre équipe, en passant Puis vous en avez parlé puis effectivement vous
avez parlé de rigueur aussi tantôt, je vous
ai écouté. Mais, juste pour sécuriser les gens qui ont de l'information
là-dedans, est-ce qu'il y a un
processus pour vraiment vérifier, voir si les informations qui sont données,
oui... est-ce qu'il y a une vérification pour s'assurer qu'il n'y a pas personne qui sort de l'information pour
un but quelconque, là, je veux dire, un but personnel, un but...
Pouvez-vous me répondre là-dessus?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Bernier.
• (10 h 30) •
M. Bernier (Reno) :
Tout à fait. D'abord,
tous les actes sont créés ou sont rédigés à partir de deux documents. La
naissance va être rédigée à partir de la
déclaration de naissance faite par les parents et complétée par le constat de
naissance signé par le médecin ou par l'accoucheur. Donc, on a déjà là, en
partant, une corroboration des informations.
Ensuite,
quand quelqu'un veut accéder à cette information-là, il peut faire une demande de certificat ou de copie d'acte, ce sont des documents sécurisés qui
contiennent différentes caractéristiques de sécurité qui limitent la possibilité
de faire de la contrefaçon, et, pour obtenir
ça, ils doivent prouver leur identité. C'est un des changements importants
qui a été apporté en 2001, d'ailleurs, que le Directeur de l'état civil
puisse exiger des preuves de l'identité du demandeur pour vérifier s'il est
bien celui qu'il prétend être. Il y a différents éléments qui sont possibles en
termes de vérification.
On
a également un suivi serré qui se fait à l'interne avec des
mécanismes de suivi pour détecter s'il
y a des erreurs, par exemple, qui peuvent être faites lorsqu'on dresse les actes. Et puis, comme les
gens commandent habituellement
un certificat rapidement après l'acte, tout de suite on peut corriger, si
jamais il y avait des erreurs. Mais c'est très rare. Notre taux d'erreur, il n'est
pas élevé.
Donc, on a vraiment
des mécanismes rigoureux. Et puis le fait aussi que la loi empêche qu'on le
donne à des personnes qui ne sont pas
mentionnées à l'acte vient limiter beaucoup les risques que quelqu'un puisse usurper
l'identité d'une autre personne, quoique
c'est encore possible. Je ne peux pas... Il n'y a pas de système
parfait. Mais, avec les règles qu'on a là, c'est plus difficile, je vous
dirais, d'aller dans le sens que vous soulignez.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Moi, je
parlais plus pour un système de vérification interne auprès des employés. Moi, c'est
plus un système dans ce sens-là. Comme je vous dis, là, ce n'est pas que... je
n'ai pas personne qui m'ont dit comme quoi qu'il
y avait des informations qui avaient sorti ou quoi que ce soit, là, je veux rassurer tout de suite, mais c'est juste pour rassurer les gens, parce que, comme ma collègue le
mentionnait tout à l'heure, c'est de l'information vraiment personnelle que tu veux vraiment que ce soit comme gardé
secrètement. Et je voulais juste m'assurer, comme je vous disais tantôt,
voir si vous avez un système interne de
vérification auprès de vos employés pour s'assurer que des employés ne
sortent pas de l'information à but personnel, pour en obtenir quelque chose ou
quoi que ce soit, là.
M. Bernier
(Reno) : Tout à fait, oui, on a ces mécanismes-là. Je ne dévoilerai pas tous les détails sur
la place publique, ça pourrait risquer de diminuer l'efficacité de ces
mesures-là, mais je peux vous dire qu'il y en a beaucoup.
Par exemple, prenons l'exemple, les employés, avant d'être embauchés, doivent
prendre des engagements, on fait des vérifications, etc. L'outil qu'ils utilisent, dans lequel se
retrouvent les actes, c'est un bureau virtuel, donc ils accèdent seulement
à l'acte électronique, et les accès sont contrôlés dans un réseau de production
fermé, qui est isolé, qui ne communique pas avec Internet ni avec l'extérieur.
Donc, ça, il y a des coûts associés à ça, mais on a quand même ça.
Et
on a tous les actes qui sont conservés dans une voûte sécurisée, avec une
relève qui est à un autre endroit, au cas
où il y aurait un événement, et l'accès à la voûte est très
contrôlé. Donc, il y a seulement
les employés, en fait, qui peuvent accéder à la voûte puis accéder aux
registres électroniques de l'État civil.
Et la loi prévoit
d'ailleurs que c'est seulement les employés de l'État civil qui peuvent réaliser
les fonctions du Directeur de l'état civil, justement pour éviter ça.
M. Rousselle :
Merci.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bonjour, M. le Président. Merci. Bonjour,
M. Bernier. Merci de venir en commission parlementaire. C'est fort instructif, ce matin, et je salue le mandat
d'initiative de ma collègue de Pointe-aux-Trembles qui a été accepté. Je
remercie les collègues gouvernementaux. Je pense qu'on devrait faire cet
exercice-là plus...
Le Président
(M. Ouellette) : Ça arrive souvent.
M. Jolin-Barrette : Bien, plus souvent qu'il y en ait qui soient
acceptés, M. le Président. Je pense, c'est instructif.
Quelques
questions, M. Bernier. Dans un premier temps, je comprends que maintenant
vous êtes sous-ministre et qu'on a
désigné un nouveau Directeur de l'état civil, mais vous avez été, au cours des
six dernières années, Directeur de l'état
civil. Je comprends qu'avant 1994 les renseignements étaient disponibles. Actes
de naissance, actes de mariage, actes
de décès, tout ça, c'était disponible. Donc, il y a beaucoup de documents, avant 1994, qui se retrouvaient dans la
sphère publique. Ils se retrouvaient dans la sphère publique notamment parce
que c'était géré par les congrégations religieuses,
les baptistères, tout ça. Donc, tout ça était disponible. Donc, supposons, ma
grand-mère maternelle, qui est née et qui est décédée avant 1994, tout
ça, je peux y avoir accès.
M. Bernier (Reno) : Techniquement, les actes des 100 dernières
années sont soumis à l'obligation de confidentialité. C'est vrai, ce que vous dites, parce que,
quand tu as 425 000 registres
répartis dans 3 600 lieux différents, c'est difficile de contrôler qui accède à quoi puis s'il y a des gens
qui se sont fait des copies ou pas. D'ailleurs, un des éléments qui est
à la base du dossier judiciaire dont on vous
a parlé, c'est qu'il y a des accès qui sont rendus disponibles pour les années
d'avant 1994 puis techniquement ce n'est pas légal de faire ça.
M. Jolin-Barrette :
Donc, techniquement, en vertu de la loi, depuis l'instauration du nouveau Code
civil du Québec, la position, sans entrer,
là, dans les détails, ce n'est pas là que je veux m'en aller, là, mais
techniquement, depuis 1994, tous les actes, même ceux qui avaient été
diffusés avant, on ne serait pas supposé les diffuser.
M. Bernier
(Reno) : Effectivement, à moins que ce soit conformément aux règles,
là, comme je vous disais tout à
l'heure, là, un certificat, une copie d'acte qui a été obtenu par une personne
qui est mentionnée à l'acte ou qui justifie de son intérêt et, par exemple, les échanges électroniques que je vous
disais tout à l'heure, qui ne sont pas rendus publics, là. C'est à
l'interne du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Supposons, en matière de généalogie, il y a
plusieurs livres qui se sont écrit, supposons des livres de famille où il y a copie d'actes dans le
livre, où il y a les... on fait l'historique des baptêmes, de qui s'est
marié avec qui, qui est décédé, tu sais,
l'arbre familial, tout ça. Donc, est-ce que le fait de diffuser, par le biais
d'un livre qui a été publié, qui touche les 100 dernières années,
ça aussi, c'est couvert par cette interdiction-là?
M. Bernier (Reno) : Ça dépend
si la personne qui a écrit le livre a obtenu le consentement des personnes concernées. Ça, ce serait correct. Ça arrive
souvent en passant. Ils vont faire une biographie ou ils vont faire des
recherches puis ils vont obtenir le
consentement de la famille, bon, etc. Mais, si tu n'as pas le consentement de
la personne concernée puis que tu n'as pas une loi qui te permet de le
faire, techniquement, tu n'es pas supposé de pouvoir dévoiler les
renseignements de moins de 100 ans.
M. Jolin-Barrette : Des
personnes qui sont vivantes?
M. Bernier (Reno) : Oui.
M. Jolin-Barrette : O.K. Parce que, bien, il y a deux choses qui
s'opposent là-dedans. Il y a le fait des familles de vouloir savoir d'où elles viennent. Je vous
donne un exemple. Prenons mon exemple. Chez les Jolin, bien, il y a un
livre qui a été écrit par une cousine de ma mère et qui relate l'histoire des
Jolin depuis ceux qui sont arrivés, là, sur la Côte-de-Beaupré. Alors, dans ce
livre-là, il y a des cousins et des cousines qui sont encore vivants, et je
doute que le consentement ait été obtenu
avant de diffuser les différents actes, donc, théoriquement, ce ne serait pas
en toute légalité, en fonction de
l'opinion du Directeur de l'état civil. Parce que ce cas-là se prête sur
beaucoup de familles, qui veulent connaître leurs origines et qui
veulent tracer l'origine de leur famille. Et je pense qu'aussi savoir d'où on
vient, c'est important aussi. Ça fait un peu
partie du patrimoine, un peu de l'historique québécois aussi. Donc, comment
est-ce qu'on conjugue ça? Puis nous,
comme législateurs, peut-être qu'on pourrait être amenés à réfléchir aussi sur
des modifications. Ce serait quoi, vos recommandations par rapport à ça
pour ajuster peut-être le droit à, un, la réalité qui existe mais,
deuxièmement, au désir peut-être des Québécois de connaître leurs origines?
M. Bernier
(Reno) : Vous soulevez une question très importante, effectivement. Et
puis, dans ce sens-là, moi, comme je
vous le disais tout à l'heure, je pense qu'il pourrait y avoir une... Je vous
soumets le tout. Écoutez, c'est en tout respect, c'est vous qui décidez, mais il pourrait sûrement y avoir un
comité de travail qui réfléchisse à ces questions-là, comme le recommande la Commission d'accès à
l'information. La recommandation 60, c'est justement de relancer la
réflexion sur la recherche de l'équilibre
entre le respect de la vie privée puis certaines activités, dont la généalogie
puis l'histoire aussi, parce
qu'effectivement présentement, là, il y a une apparence d'incohérence, disons,
entre les principes.
Comme je vous
le dis, souvent, dans ces cas-là, soit que les personnes sont décédées depuis
un certain temps... Et, comme je vous
le disais avant, de 1600 à 1914, c'est tout disponible à Bibliothèque et
Archives nationales, donc on peut déjà faire un bon bout de chemin dans
la généalogie, la filiation. Puis ensuite, pour les 100 dernières années,
souvent, ces personnes qui rédigent les ouvrages auxquels vous référez vont
pouvoir obtenir le consentement de la famille, des personnes concernées.
Mais là je ne
veux pas commenter un cas précis auquel vous faites référence. Il faudrait
l'évaluer. Et ce n'est pas nécessairement
l'opinion du directeur que je vous dis, là. Ce n'est pas seulement le
directeur, c'est les opinions du ministère de la Justice également et des jugements des tribunaux également qui ont
été rendus dans les dernières années. Donc, le directeur, il fait
seulement appliquer les règles, lui, de son côté. Il n'a pas tant de discrétion
que ça, je vous dirais, là.
M. Jolin-Barrette : Donc, je comprends que le directeur est mis dans
une sorte de carcan et... bien, en fait, le carcan législatif, et il y a
une sorte de lourdeur aussi pour les gens, supposons, qui voudraient écrire des
livres ou qui voudraient retracer l'histoire
familiale. Bien là, à ce moment-là, s'il faut qu'ils demandent le consentement
à toute la lignée, à toute la
branche, les cousins, les cousines, les petits-cousins, c'est assez volumineux,
pour un acte de bonne foi, un peu, là.
M. Bernier
(Reno) : Effectivement, c'est tout un défi. Et puis, compte tenu du cadre juridique actuel, c'est vrai que
ça peut se produire.
M. Jolin-Barrette : O.K. Si je retourne au moment où les travaux du Code civil
ont été effectués, là, je
comprends qu'on a visé le 100 ans de couverture,
mais pouvez-vous nous renseigner sur
pourquoi ce choix a été là? À la lumière des débats, là, qu'est-ce qui
justifiait ce choix-là de 100 ans?
• (10 h 40) •
M. Bernier
(Reno) : Bien, le 100 ans, c'est un délai qu'on retrouve ailleurs
dans le Code civil aussi, là. C'était en cohérence avec certains délais qu'on a dans le Code civil. Au niveau,
par exemple, des rentes viagères, des règles d'usufruit, l'emphytéose, la fiducie, les baux, c'est un
100 ans qui est prévu, là, également.
C'est également 100 ans qui est prévu dans la règle générale de la Loi sur les archives, là, à l'article 19. Puis, si
on regarde ce qui se fait dans les autres provinces, les autres directeurs de l'état civil ailleurs au
Canada, le délai de confidentialité, si je peux m'exprimer ainsi, varie de
95 à 120 ans. Donc, le 100 ans
était dans la norme, là, dans la moyenne, et puis il s'inspirait, à l'époque,
de l'espérance de vie. On le sait qu'aujourd'hui l'espérance de vie,
elle a augmenté, et vous comprendrez qu'avec les défis auxquels vous faites référence, l'État civil n'a pas choisi
l'option de monter ça comme dans les autres provinces à 120 ans. On
s'entend, vous avez mis le doigt sur certaines réalités là. Donc, on a gardé le
100 ans tout le long depuis 1994.
M. Jolin-Barrette : O.K. Une question sur 148, 150 du Code civil du
Québec. Vous dites : Nous, on donne accès aux actes parce qu'on est gouvernés par ces articles-là, notamment si je
figure à l'acte de naissance, mais notamment si je démontre un intérêt, et l'intérêt est apprécié par
le Directeur de l'état civil. Tantôt, vous avez dit que, par le biais
d'une loi ou par le biais d'un jugement... Est-ce qu'il y a d'autres moments où
le Directeur de l'état civil va juger qu'il y a un intérêt pour avoir accès à
ces actes-là outre le fait que vous soyez mentionné à l'acte?
M. Bernier
(Reno) : Il y a une directive qui a été produite par le Directeur de
l'état civil sur le site Internet, la directive
concernant l'application de 148. Les cas d'application auxquels on réfère,
c'est l'intérêt juridique qui est défini, par exemple, par la jurisprudence ou par les opinions juridiques dont on
dispose. Donc, on parle vraiment de la notion d'intérêt juridique. C'est essentiellement lorsqu'il y a une
loi qui doit être appliquée et qu'on a besoin de ce document-là. Ça peut
être aussi si le document est nécessaire
pour l'exercice d'une fonction prévue dans une loi. Comme, par exemple, au
niveau de la protection de la jeunesse, les
centres jeunesse peuvent accéder à des actes de naissance évidemment puisqu'ils
travaillent pour les enfants concernés.
Donc, ça tourne autour de ça, là, la question de
l'intérêt. Souvent, des jugements qui vont venir, par exemple, attribuer la
garde à une personne d'un enfant, etc., bien, cette personne-là va pouvoir
avoir accès à l'acte.
M. Jolin-Barrette : O.K. En terminant, je vais avoir une question
aussi. En tant que Directeur de l'état civil, vous recevez les actes de mariage. Maintenant, c'est
possible d'avoir des célébrants autorisés. Donc, exemple, moi-même, j'ai
célébré deux mariages dans ma carrière.
Donc, j'ai été autorisé par ma collègue la ministre de la Justice ou par la
sous-ministre à la Justice à célébrer un
mariage. À partir du moment où on célèbre le mariage, on doit transmettre, je
crois, dans les meilleurs délais, la
déclaration de mariage au Directeur de l'état civil. Est-ce que vous, de votre
expérience en tant que Directeur de
l'état civil, c'est arrivé qu'il y ait des déclarations qui n'aient pas été
transmises? Parce qu'on a eu ce débat-là à l'Assemblée nationale à l'effet que les mariages au Québec, selon
l'interprétation, devaient emporter des conséquences juridiques, tous les mariages. Mais là le Directeur
de l'état civil, lui, s'il ne reçoit pas la déclaration, qu'est-ce qu'il
fait?
M. Bernier
(Reno) : Bien, le Directeur de l'état civil, s'il ne reçoit pas la
déclaration de mariage remplie par le célébrant,
signée par les deux époux et avec des témoins — donc, il y a pas mal de monde, là, qui
atteste, là, de l'événement du mariage — on ne peut pas le dresser,
l'acte de mariage. Nous, on n'est pas informés qu'il y a un mariage.
Je trouve ça
intéressant ce que vous amenez. Ça me permet de vous dire, dans le projet de
loi n° 59 qui a été adopté par
l'Assemblée nationale, le 27 novembre
qui vient et le 1er janvier, il
y a différentes mesures qui vont entrer en vigueur. L'une de ces mesures-là est l'obligation dorénavant, pour tous les
célébrants qui veulent célébrer un mariage, de faire la publication
préalable de l'avis de mariage sur le site Internet du Directeur de l'état
civil plutôt que dans les lieux de célébration.
Ça, ça va permettre au Directeur de l'état civil de s'assurer, dès le départ,
que le célébrant est autorisé pour faire ce qu'il veut faire, que les époux ne sont pas déjà liés par un lien
antérieur de mariage, etc. Donc, vous avez mis le doigt sur quelque
chose qui va être corrigé avec ça, ce qui s'en vient.
M. Jolin-Barrette : Donc, le Directeur de l'état civil va faire le
suivi sur les dossiers, parce qu'auparavant, lorsque je voulais célébrer un mariage, outre le fait
d'avoir été autorisé, bien, je le publiais au palais de justice puis à
l'endroit... au manoir ou à la salle de réception, puis là le Directeur de
l'état civil, lui, n'était pas informé.
Une
sous-question là-dessus. Est-ce que, lorsque la ministre de la Justice ou sa
sous-ministre délivre une attestation à un célébrant particulier, le
Directeur de l'état civil est informé dès ce moment-là?
M. Bernier
(Reno) : Oui, tout à fait, on est informés. On tient ce qu'on appelle
le registre des célébrants
autorisés à célébrer un mariage ou une union
civile au Québec. Tous les célébrants qui ont le droit de célébrer un mariage,
on reçoit l'autorisation. On la met dans un registre qui est accessible
publiquement. On peut faire une recherche par nom de célébrant pour vérifier
s'il est autorisé. Mais c'est la seule chose qu'on reçoit présentement.
Avec la
publication des avis de mariage, là on va recevoir un indice que le mariage va
être célébré dans les 20 jours suivants.
Donc là, on va s'attendre à avoir une déclaration qui va rentrer, donc on va
pouvoir faire des suivis. Et d'ailleurs l'autorisation des célébrants désignés, des célébrants civils, va être
transférée également, ce qui est prévu, au Directeur de l'état civil
pour créer un guichet unique pour simplifier les démarches des citoyens et
également s'assurer de tous ces contrôles-là dont vous parlez. Ça aussi, ça devrait
se faire en janvier.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas. Merci, M. Reno Bernier,
représentant du Directeur de l'état
civil, d'être venu déposer devant la commission. Ce fut vraiment très
instructif. Et je pense que c'était un besoin pour les membres de la commission, dans l'étude du
rapport. Et vous avez des très bonnes suggestions, par rapport à la
recommandation 60, qui vont sûrement être prises en considération par
l'équipe ministérielle.
Je suspends quelques minutes. Je demanderais à
M. Normand Jutras, notre Curateur public, de bien vouloir s'avancer.
(Suspension de la séance à 10 h 46)
(Reprise à 10 h 49)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le Curateur public, M. Normand Jutras. Bonjour, M. Jutras.
Vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent. Votre présence
en commission aujourd'hui, les membres de la commission ont manifesté, dans ce mandat
d'initiative, le désir de vous entendre, parce qu'on a eu, en cours de consultations, plusieurs témoignages, et les membres de la commission avaient besoin de faire clarifier et de faire préciser le
rôle du Curateur public. Et c'est ce qui a fait que les parlementaires se sont entendus pour vous recevoir.
Vous allez avoir 10 minutes pour faire
votre présentation, M. Jutras. Je pense que vous connaissez les airs, étant — je
le dis pour les besoins de certains de nos membres — un
ancien de la place. Et après il y aura échange avec M. le député de La Prairie
et les porte-parole des deux oppositions. Je vous laisse la parole.
Exposé du Curateur public,
M. Normand Jutras
M. Jutras (Normand) : Alors, merci,
M. le Président. Mmes, MM. les parlementaires, alors je me présente d'abord,
Normand Jutras, Curateur public du
Québec. Je vous présente aussi les
personnes qui m'accompagnent : à ma droite, Jocelyne Hallé, qui est directeur
général des affaires institutionnelles, secrétaire générale du Curateur
public et responsable de l'accès à l'information, et, à ma gauche,
Me Nicole Filion, qui est directrice des affaires juridiques au Curateur
public.
Alors, en
août dernier, vous avez entendu Ura Greenbaum, au nom de l'association pour la
défense des droits des personnes qui
sont sous curatelle publique. J'ai écouté son témoignage devant la commission,
j'ai lu aussi son rapport et immédiatement,
la journée même, je vous écrivais, M. le Président, pour demander d'être
entendu par la commission, parce que les propos qu'avait tenus
M. Greenbaum, devant la commission, y étaient d'une extrême gravité. Il
attaquait la réputation du Curateur public,
il attaquait la réputation des employés du Curateur public. Et c'est pourquoi
j'ai demandé d'être entendu pour
rétablir les faits et défendre la réputation de l'institution qu'est le
Curateur public et défendre aussi la réputation des employés du Curateur
public. Somme toute, il était venu vous dire que le Curateur public se servait
de la règle de confidentialité qu'il doit
respecter pour cacher ses écarts de conduite, cacher ses dérapages et, somme
toute, ne pas respecter la loi. Alors, vous conviendrez avec moi qu'il s'agit
là d'accusations qui sont très graves. Alors, je vous remercie donc d'avoir
répondu à ma demande et de pouvoir vous dire ce qu'il en est.
• (10 h 50) •
Je rappelle
brièvement, la mission du Curateur public, c'est la protection des personnes
inaptes. On entend par une personne
inapte une personne qui est incapable de prendre soin d'elle-même ou de prendre
soin de ses biens. Alors, on parle de
déficients intellectuels, des gens qui ont des problèmes de maladie mentale,
des cas de personnes atteintes de maladies dégénératives telles
l'alzheimer, ou des traumatisés crâniens, ou des personnes qui ont été victimes
d'AVC sévères.
Les personnes
qui sont sous régime public, qui relèvent du Curateur public — je rappelle que c'est toujours le dernier recours, le Curateur public — il y en a 13 500 au Québec, et on
intervient... on est nommés par le tribunal de la Cour supérieure quand
personne de la famille n'a pu ou n'a voulu s'occuper de la personne inapte. Des
personnes sous régime privé, c'est-à-dire quand quelqu'un de la famille ou un
proche accepte d'être tuteur ou curateur, il y en a 17 000 au Québec, dont 5 000 mineures, alors donc on
parle donc de 12 000 personnes. Ça, c'est des cas où quelqu'un
de la famille accepte la charge. C'est
toujours d'ailleurs ce qu'on privilégie, nous, parce qu'on considère que la
personne va être mieux servie par quelqu'un
qui l'aime, qui la connaît, qui connaît son histoire, ses goûts, ses
préférences. Alors, dans ces cas-là,
on surveille l'administration des patrimoines. Le curateur, par exemple, privé
nous fait un rapport annuel, on surveille
ce qu'il en est de ce rapport, on accompagne ces personnes-là et... Donc, c'est
toujours, je le rappelle, ce que nous privilégions, mais, quand ce n'est
pas possible, le Curateur public répond présent.
On fait aussi la promotion du mandat de
protection. Nous sommes la référence en matière d'inaptitude au Québec. Le
Curateur public, c'est plus de 700 employés. On a 11 bureaux à
travers le Québec.
Les lois qui
sont applicables, il y a d'abord la Loi sur l'accès. La Loi sur l'accès
s'applique au Curateur public à titre d'organisme public, donc pour les
documents administratifs que l'on détient comme organisme qui relève du
gouvernement du Québec, alors donc les documents d'ordre administratif, les
données budgétaires, les dossiers des fournisseurs,
les contrats, etc. Mais, par contre, il y a quelque chose qui est tout à fait
spécial, concernant le Curateur public, qui est dans la Loi sur le Curateur public, qui concerne les
renseignements dans les dossiers des personnes inaptes qui relèvent du Curateur public, et auxquels je suis
tenu à la confidentialité de ces dossiers-là. Et je vous dis qu'il y a beaucoup
de choses dans ces dossiers-là. Il y a les
évaluations médicales qui sont faites de la personne, il y a les évaluations
psychosociales, les rapports d'impôt, les états financiers, les relevés de
placements, les comptes bancaires, le dossier médical
de la personne aussi, parce que nous consentons aux soins pour la personne
inapte. Alors, effectivement, il y a beaucoup de renseignements d'ordre
médical. Mais il y a aussi les conversations qu'on a avec ces personnes-là, les
confidences qu'elles peuvent nous faire, qu'elles peuvent
nous raconter par rapport, par exemple, aux chicanes qu'il y a dans la famille
ou discordes qu'il y a dans la famille.
Alors, vous comprenez que ce sont des dossiers
dans lesquels il y a effectivement des informations qui sont très sensibles.
Alors, les
principes de base, là, qu'il faut rappeler, d'abord, le Curateur public, c'est une personne physique qui est nommée en vertu de l'article 1 de la Loi sur le Curateur public, et ce que la loi dit, c'est que le Curateur public a une
relation personnelle avec les personnes
qu'il représente puis il agit à l'endroit des personnes inaptes comme un
curateur privé agit à l'endroit de
son pupille. Comme la fille qui s'occupe de sa mère, bon, bien, curateur privé,
curatrice privée, je dois avoir la même relation avec les personnes qui
relèvent de moi.
Ce qui doit
me guider constamment, c'est l'article 257 du Code civil, d'abord
l'intérêt de la personne inapte. Je dois
toujours agir dans l'intérêt de la personne inapte, le
respect de ses droits, la sauvegarde de son autonomie. Je dois assurer
la confidentialité des dossiers qui relèvent du Curateur public, et ça, c'est en
vertu des articles 50 et suivants de la
Loi sur le Curateur public, mais c'est en vertu de la charte québécoise
aussi, l'article 5 qui parle du respect du droit à la
vie privée d'une personne, puis les articles du Code civil, les articles 3
et 35 du Code civil du Québec. Et d'ailleurs même
le personnel du Curateur public n'a pas accès à tous les dossiers. Sur le plan informatique,
il y a des accès qui sont limités.
Un membre du personnel ne peut avoir accès qu'aux dossiers dans lesquels il est
appelé à travailler, il ne peut pas aller travailler dans les autres
dossiers.
Alors donc,
la personne inapte qui est sous régime public, elle a droit au respect de sa
vie privée comme toute autre personne.
Chacun d'entre nous ici, on a droit au respect de notre vie privée. Si on nous
demande nos rapports d'impôt, bien,
vous pouvez dire : Bien, non, ça me regarde, je ne les fournis pas. Et
c'est la même chose pour... Quand il y a un tuteur privé qui
s'occupe d'une personne inapte, le tuteur privé peut dire : Non, moi, je
refuse de donner des renseignements concernant la personne dont je
m'occupe. Et c'est la même chose qui s'applique pour le Curateur public.
Il faut
rappeler aussi que ce par quoi je suis régi, ce sont des règles de droit civil
et non pas de droit administratif. Ce
n'est pas le droit administratif qui s'applique dans ces cas-là, ce n'est pas
la Commission d'accès à l'information, c'est les
notions de droit civil en raison de la relation personnelle que je dois tenir.
Et un tuteur privé peut refuser l'accès aux renseignements, il en va de
même... Permettre un appel, comme suggère M. Greenbaum, d'une décision que
je rends, ça voudrait dire qu'une
personne inapte qui relève du Curateur
public aurait moins de droits qu'une
personne apte ou qu'une personne qui relève du privé. Alors donc, il y a
les articles 50 et suivants qui s'appliquent. Et on voit qu'il y a une discrétion qui est donnée au Curateur public même quand c'est un proche parent qui veut avoir des informations, parce que je dois toujours agir dans l'intérêt de la personne.
Concernant les cas qu'a soulevés
M. Greenbaum, j'y réponds dans une annexe qui est jointe à mon mémoire.
• (11 heures) •
Par ailleurs, ce que je dois vous dire, M. Greenbaum
disait que le Curateur public a une administration
opaque et ne rend pas de comptes. C'est tout à fait faux. On rend des comptes à la personne inapte, en autant, évidemment, qu'elle est en mesure, là, de comprendre ce qu'il en est. On rend des comptes aux proches, en autant
qu'ils satisfassent aux conditions de 52. On rend des comptes aux
héritiers quand vient le temps d'ouvrir la succession.
Le Protecteur du citoyen intervient dans nos dossiers, nous demande des
comptes. Quelqu'un qui n'est pas satisfait de ma décision peut s'adresser au Protecteur du citoyen, et le Protecteur
du citoyen s'adresse à moi et me
demande, là, des explications.
Le Vérificateur général du Québec passe de
quatre à cinq mois par année au Curateur public, au siège social, à vérifier les comptes sous administration. Alors, il y a quatre personnes, là, qui sont là, qui
travaillent pour le VG, qui sont là à vérifier les comptes sous administration.
Puis même, quand il y a la période de pointe, qu'on appelle, il y a huit
personnes du VG qui sont là à vérifier les comptes sous administration.
M. Greenbaum,
il dit : Ils procèdent par échantillonnage. La vérification, c'est comme ça que ça se fait. Et les standards auxquels nous
sommes soumis, c'est les mêmes standards que, par exemple, Loto-Québec, la Caisse
de dépôt ou la Société des alcools.
Je vous donne
un petit exemple en passant. Sur les 600 immeubles qu'on gère, le
curateur, à chaque année le VG va fouiller concernant 125 de ces
immeubles-là.
On soumet un rapport annuel à l'Assemblée
nationale — il
reste une minute. Quand je suis convoqué devant l'Assemblée nationale... J'ai
été convoqué devant la commission, il
y a trois ans, je suis venu rendre
des comptes. À l'étude des crédits, je rends des comptes à l'Assemblée
nationale.
D'ailleurs, je rends des comptes au comité
d'audit, on a un comité d'audit au Curateur public. La Commission
d'accès à l'information aussi surveille de quelle façon je respecte cette
confidentialité-là.
Et en fait aussi je vous ai parlé du comité
d'audit, mais, sur les demandes qui nous sont faites, par exemple, 65 demandes par année, cette année il y en a
10 qui ont été refusées. Alors, il n'y a pas d'abus de notre part. Sur
l'année précédente, sur les 63 demandes qui nous sont faites, il y en a 15
qui ont été refusées.
Alors, il s'agit toujours de savoir quel est
l'intérêt de la personne, de la personne inapte, puis pourquoi cette
personne-là intervient pour avoir ces renseignements-là, quel est son but.
Alors, je pourrai donner d'autres exemples, M. le Président, en répondant aux
questions.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Jutras. Avant qu'on débute la période de questions, je réitère
que la présence du Curateur public est pour
éclairer les membres de la commission sur votre rôle et non pas en réponse à
certains commentaires ou à certaines questions qui ont pu être soulevées par
des témoins ultérieurs, qui sont maîtres de leurs propos quand ils viennent en
commission parlementaire. Quand on a fait la séance de travail pour accepter le
mandat d'initiative,
l'intérêt des membres, c'était d'avoir le plus d'information possible sur le
rôle et les services que vous donniez aux gens qui sont sous curatelle
publique dans le cadre de l'étude du rapport de la Commission d'accès.
Discussion générale (suite)
M. le député de La Prairie.
M. Jutras
(Normand) : Et dans ce
sens-là, M. le Président, vous allez voir que, dans mon annexe, la
réponse au cas par cas, je ne donne jamais de nom.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de La Prairie.
M. Merlini :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci à M. Jutras, Me Filion et
Mme Hallé pour votre présence ce matin
en commission et pour nous offrir, là, les éclairages additionnels pour le
rapport quinquennal de la Commission d'accès à l'information.
J'aimerais
revenir sur la Loi du curateur public et l'article 52 en particulier parce
qu'il est indiqué que les seules personnes
qui peuvent avoir accès aux dossiers confidentiels sont celles prévues à cet
article-là. Puis, dans le quatrième paragraphe
de l'article, on nomme spécifiquement, bien, le conjoint, un proche parent, un
allié, toute autre personne ayant démontré
un intérêt particulier, etc. Ma question est la suivante : Qu'est-ce que
vous considérez comme un proche parent? Comment le voyez-vous? Parce que vous agissez, comme vous avez dit
tantôt, comme un individu et non comme une société d'État proprement
dite, là. Puis je vais revenir sur cet aspect-là aussi dans ma prochaine
question.
M. Jutras
(Normand) : Alors, un proche
parent, on va considérer, par exemple, que ça peut être le conjoint, la conjointe, ça peut être les frères et soeurs, ça
peut être les enfants. Mais ça peut aller plus loin que ça aussi. Ça peut
être un voisin qui a toujours porté un intérêt particulier à cette personne,
qui s'en est toujours occupé, qui a eu une relation continue avec cette
personne-là.
M. Merlini : Donc, ma question
suivante, c'était justement sur le terme suivant, dans l'article, c'est un
allié. Est-ce que vous le voyez comme ça? La
personne, comme vous dites, que vous donnez l'exemple du voisin, est-ce
que ça, c'est considéré comme un allié ou il y a un autre...
M. Jutras
(Normand) : Non, un allié
fait plutôt référence à la notion de droit civil de la personne mariée, là,
à savoir le beau-frère ou belle-soeur. On considère ça comme étant un allié.
M. Merlini : O.K., c'est comme
ça que vous le définissez. «Toute autre personne ayant démontré un intérêt particulier». Qu'est-ce que c'est que... Comment
définissez-vous l'intérêt particulier? Parce que, dans la quête d'information,
d'accès à l'information, vous avez dit dans
votre présentation que, oui, vous donnez accès aux documents
administratifs, mais vous avez un rôle,
comme curateur, de protéger certaines choses, et la loi vous dit exactement
qu'est-ce que vous devez protéger. Mais un intérêt particulier, s'il
vous plaît, me donner un peu plus de détails à ça.
M. Jutras
(Normand) : Alors, c'est une
personne... Alors, on vérifie qu'est-ce qu'il en est, là. Disons que
j'ai la demande qui m'est parvenue, moi, je
communique avec la curatrice déléguée qui s'occupe de la personne inapte
concernée, là, et, bon, qu'est-ce qu'il en est de cette personne-là qui demande
des renseignements, là. Alors, on voit quelle est la relation. Est-ce que c'est une relation qui a été constante? Est-ce que
c'est une relation qui a été soutenue? Est-ce que c'est une relation, par exemple, d'amitié? Est-ce que
c'est une relation d'aide? Est-ce que c'est une relation, là, qui
représente vraiment, pour la personne inapte, une relation significative?
M. Merlini :
Donc, à ce moment-là, une fois que cette évaluation-là est faite, les
informations qui sont demandées, est-ce
que vous portez jugement sur cette demande d'information là? Parce que vous
êtes le curateur de cette personne-là, vous
devez dire : O.K., la relation, elle est claire, elle est établie, elle
est correcte. Mais là l'information qui m'est demandée, là vous devez juger si, oui ou non, c'est dans
l'intérêt de la personne dont vous êtes le curateur. Alors là, à ce
moment-là, c'est comme un deuxième niveau d'évaluation qui se fait avant de
transmettre l'information. Pouvez-vous me donner davantage d'explications,
peut-être?
M. Jutras
(Normand) : Oui, je vais
laisser Mme Hallé répondre à ça parce que
c'est elle qui va gérer exactement comment ça se passe. Mais effectivement
il ne faut pas oublier la fin de l'alinéa 4, qui dit «avec l'autorisation
de ce dernier» parce que, donc, même quand c'est quelqu'un qui est proche, j'ai
quand même discrétion pour autoriser la divulgation des renseignements. Mais
vous allez voir qu'on a un processus qui est tout à fait parcimonieux dans le
respect des droits de la personne inapte. Alors, je vais laisser
Mme Hallé, qui gère ces cas-là.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Hallé, en complémentaire.
Mme Hallé
(Jocelyne) : Oui, d'accord.
Donc, effectivement, par
rapport à l'intérêt
particulier, pour vérifier si la personne démontre un intérêt
particulier, et là ce dont à quoi vous faites référence, c'est si les documents
demandés visent l'intérêt de la personne représentée, est
à son avantage et à son intérêt, pour ce faire, le conseiller en accès à l'information se réfère au curateur délégué, d'abord pose la question au requérant, qui nous démontre, qui nous
indique les motifs pour lesquels l'information demandée vise l'avantage et l'intérêt de la personne représentée, et le
conseiller en accès se réfère à la
personne, au Curateur public, qui est le plus proche de la personne
représentée, qui est le curateur délégué, et il lui demande son avis. D'abord, au
niveau du requérant, est-ce que le requérant a un lien significatif auprès de
la personne représentée? Et, au
regard des documents demandés, est-ce que, de l'avis du curateur délégué, les
documents demandés vont vraiment servir l'intérêt supérieur de la
personne représentée, seront à son avantage, serviront son intérêt? Et le
curateur délégué, lorsqu'il nous fait une recommandation, s'appuie sur sa
connaissance de non seulement la personne représentée, mais le réseau, les
personnes qui gravitent autour de cette personne-là. Mais il peut aussi
consulter. Si la personne est hébergée, par
exemple, dans un CHSLD, le curateur délégué va consulter les personnes qui sont
proches de cette personne représentée là. Ça
peut être le travailleur social, ça peut être l'infirmier. Alors, il... Et
c'est un travail, je pourrais vous
dire, qui se fait vraiment avec beaucoup de rigueur, parce que, pour nous,
lorsque, admettons, c'est un proche qui fait une demande, on présume que
les proches sont bienveillants, mais ce n'est pas suffisant pour donner accès à
l'information. Il faut tout de même le vérifier.
Vous savez,
j'en profite pour dire que, lorsqu'on traite des demandes d'accès, il y a deux
droits qui, pour nous, c'est un
équilibre à atteindre entre... Pour nous, le droit à la transparence à l'égard
de l'information est aussi important que le droit au respect de la vie privée des personnes. Et c'est quelque
chose qui, vraiment, me gouverne et gouverne mon équipe lorsqu'on traite
des demandes d'accès.
Le droit à la transparence, dans la mesure où la
loi le prévoit, pour nous, c'est très important, et c'est la raison pour laquelle lorsque, par exemple, un
proche demande de l'information, on prend ça au sérieux et vraiment on
en fait une analyse exhaustive. Et, avant de
refuser l'accès, avant de dire qu'après analyse des personnes responsables du
bien-être il n'est ni à l'avantage ni dans
l'intérêt de la personne représentée que le Curateur public donne accès à de
l'information, c'est appuyé sur, vraiment, une analyse rigoureuse à chaque fois
et dans tous les cas.
• (11 h 10) •
M. Jutras (Normand) : Je peux
vous donner deux exemples. Vous avez, par exemple, la personne qui nous demande les états financiers de sa mère. On fait
des vérifications. C'est demandé par le fils. Le fils, ça fait 10 ans
qu'on ne l'a pas vu, il n'a jamais été là, sauf qu'il sait que sa mère vit ses
derniers jours. Par contre, la soeur, qui s'est toujours occupée de sa mère, elle, on lui fournit les
renseignements. Mais, le fils qui se pointe parce qu'il sait que sa mère est
à l'agonie, dans un cas comme ça, on va refuser.
Je vous donne
un autre exemple. Vous savez qu'il y a des personnes qui surveillent les
personnes isolées, dans les CHSLD,
qui ont de l'argent et qui s'immiscent dans la vie de ces personnes-là. Nous autres,
on est assez souvent confrontés à ces
problèmes-là. Alors, quand, par exemple — j'ai eu quelques cas dernièrement — la personne inapte m'envoie un document comme quoi elle demande ses états
financiers, elle demande sa situation financière, moi, je communique
avec la curatrice déléguée. La curatrice déléguée, elle me dit : Écoutez,
c'est impossible que cette personne-là ait signé ça librement et
volontairement, elle est dans un état d'Alzheimer avancé, elle ne sait plus son
nom, elle ne sait plus où elle est rendue,
elle est vraiment dans un état d'Alzheimer avancé. Comment ça se fait que cette
personne-là a signé ça? Alors, bien,
on vérifie quand même avec elle. Plus souvent qu'autrement, elle ne se souvient pas d'avoir signé ça ou elle dit : Je n'ai pas signé ça. Alors donc, on
refuse, à ce moment-là, de donner les renseignements. Et ça, des cas
comme ça, là, on en a eu trois, quatre, là, au cours des derniers mois,
là, au cours des deux dernières années.
Alors, c'est
pour ça qu'il faut être vigilants, tenant compte, entre autres, là, de ce que je vous dis, là, les personnes qui surveillent les personnes seules et isolées
qui sont dans des CHSLD et puis évidemment ils tentent de s'immiscer dans la vie de
personnes qui ont de l'argent, d'où la grande vigilance dont on doit faire
preuve.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci.
Mme Hallé (Jocelyne) : Est-ce
que je peux encore dire quelque chose?
Le Président (M. Ouellette) :
Oui.
Mme Hallé
(Jocelyne) : C'est que, dans
la mesure du possible, à chaque fois qu'on a une demande d'accès, on
demande l'avis de la personne représentée elle-même, lorsque, bien sûr, elle
est capable de se prononcer à cet égard. On la consulte.
Le Président (M. Ouellette) :
Puis je suis certain que tout est documenté.
Mme Hallé (Jocelyne) : Oui, absolument,
absolument. Rigoureusement, oui.
Le Président (M. Ouellette) : O.K.
M. le député de La Prairie, ça va?
M. Merlini :
Oui, merci, M. le Président. Vous avez mentionné l'accès aux documents
administratifs par la Commission d'accès à
l'information, mais il y a aussi le Protecteur du citoyen qui peut enquêter et
questionner le Curateur public sur une décision relative à l'accès au
dossier d'une personne que vous représentez. Quelles sont les situations où... Puis comment faites-vous pour réconcilier ce
que vous venez de décrire avec... Parce qu'il y a aussi les tribunaux. Vous avez mentionné dans votre présentation
qu'effectivement les gens peuvent recourir aux tribunaux, mais il y a le
Protecteur du citoyen
qui peut enquêter. Mais comment composez-vous avec ça, compte tenu de ce que
vous dites, ce que vous nous avez
présenté, de dire : Oui, on le fait dans le meilleur intérêt de la
personne? Mais là le Protecteur du citoyen arrive, et veut enquêter sur
la décision, et questionner sur votre décision. Comment ça se passe à ce
niveau-là?
M. Jutras (Normand) : Bien, je vous dis un élément puis après je laisse
la parole à Mme Hallé. Écoutez, sur les 120 dossiers qui se sont
rendus devant le Protecteur du citoyen, je pense que c'est...
Une voix :
...
M. Jutras (Normand) : Alors, sur 194 dossiers qui se sont rendus
devant le Protecteur du citoyen, dans huit cas seulement... 10 cas seulement,
il a renversé ma décision. Alors, je pense que la moyenne au bâton est bonne,
n'est-ce pas?
Mme Hallé
(Jocelyne) : Mais ce n'est pas juste des cas d'accès, il faut le dire.
M. Jutras
(Normand) : Oui. Alors, allez-y.
Le Président
(M. Ouellette) : C'est-à-dire que le protecteur a recommandé une
autre décision que la vôtre, parce que je ne
pense pas qu'il puisse renverser, il recommande, et le Protecteur du citoyen fait des recommandations.
Mme Hallé
(Jocelyne) : C'est-à-dire
que, si vous le permettez, il a jugé que 5,15 % des plaintes qui
concernent le Curateur public étaient
fondées, mais, dans les 194, ce ne sont pas juste des plaintes relatives à
l'accès à l'information, c'est même la minorité, les demandes au niveau
de l'accès à l'information.
Mais je peux vous
expliquer comment on procède. Il y a un protecteur délégué qui me contacte et
qui me demande... Au fond, ils prennent des
renseignements sur toute la démarche qu'on a mise en oeuvre pour refuser
l'accès à de l'information, et, dans le fond, on doit leur démontrer... Vous me
demandiez, tout à l'heure, si c'était documenté. Effectivement, on leur transmet les notes, on leur transmet le
processus, on leur dit pourquoi il a été évalué que ce n'était pas dans l'intérêt de la personne représentée que
l'information soit transmise. Et alors, voilà, on leur fait vraiment toute
la démonstration, quel est l'avis du
curateur délégué, qu'est-ce qui a appuyé notre décision. Je vous dirais que ça
se passe de cette façon-là.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger : Oui, merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Jutras. Bonjour,
Mme Filion et Mme Hallé. Bienvenue.
D'abord,
je trouve... pour faire suite à ce que disait le président de votre venue ici,
on l'apprécie énormément, parce que, comme il y a eu quand même des
audiences sur le rapport quinquennal, c'est quand même tout le dossier des
renseignements personnels, avec l'accès à l'information, évidemment, donc on a
un paradoxe qu'on trouve parfois... Qu'est-ce
qui est plus renseignements puis qu'est-ce qu'on doit divulguer ou pas, là?
Alors, c'est sûr qu'on se questionne à ce
niveau-là. Et l'importance de votre rôle... Alors, je trouve important que vous
y soyez. Au-delà de certaines attaques que vous avez eues, je crois que, pour la suite des travaux, je vous invite
vraiment à pouvoir... si on modernise la loi, que vous y soyez présents
sans nécessairement attendre à avoir une réplique de...
Évidemment,
l'Association pour la défense des personnes et des biens a suscité beaucoup de
questionnements, et vous tentez quand même
de dire : Il y a une autre version des choses. Alors, on n'est pas ici
pour faire l'arbitrage de ça, pas du
tout. Mais par contre les questions qui ont été soulevées par l'association
nous ont interpelés, puis moi, ça m'a interpelée parce qu'évidemment, ce n'est pas une personne, parce qu'on parle d'une
personne qui est venue représenter l'association, mais c'est quand même
un groupe de personnes, et des questions qui, à mon avis, méritent qu'on aille
aussi plus loin.
Alors,
au-delà de ça, quand mon collègue, tout à l'heure, disait, notre collègue
disait : Qui sont-ils, les titulaires de l'autorité parentale, c'est qui, le conjoint, le proche parent, et
tout ça?, vous avez répondu à plusieurs de ces réponses-là. Mais tout à l'heure vous avez suscité mon intérêt
encore plus quand vous avez dit : La famille, un proche parent qui
est là, qui aide pendant tout le long pour aider la personne inapte... Parce
que votre rôle est très important de protéger ces personnes-là, puis par chance
qu'on a un curateur public pour veiller à la protection des personnes inaptes.
Mais
en même temps vous avez parlé du fils qui arrive d'un coup, comme ça, et que
vous allez lui refuser parce que
vous... En tout cas, de ce que j'ai pu comprendre, c'est que, dans l'intérêt de
la personne, vous voyez qu'elle avait plus un intérêt pécunier, mais,
malgré tout cette personne-là, le fils, est quand même un proche parent, il est
quand même dans la famille. Et vous êtes le
juge de déterminer si le renseignement doit être donné, mais pourtant c'est
quand même un proche parent. Vous y
voyez peut-être un intérêt pécunier parce qu'il arrive à la dernière minute,
mais peut-être que ce n'est pas ça non plus. Alors, cette personne-là se
voit quand même refuser, mais il est quand même un proche parent. Ça fait que
ça m'a questionnée.
Je
ne dis pas que votre intention n'est pas louable. Je veux dire, vous protégez
la personne pour ne pas se faire dilapider ses biens. Mais en même temps
est-ce que c'est vraiment votre rôle? Moi, je pose cette question-là.
M. Jutras (Normand) : Oui, mais là il ne faut pas que vous oubliiez
l'article, l'alinéa 4°, qui me donne discrétion, la première chose.
La deuxième
chose, c'est que, dans un cas comme ça, l'article 39 s'applique, et on
peut... Dans un cas comme ça, on va
fournir ce qu'on appelle le compte sommaire, mais on ne fournira pas tout le
bilan de la personne. Mais l'article 39 prévoit que, dans un tel
cas, on peut produire un compte sommaire.
Mme Léger :
Est-ce que vous le faites en...
M. Jutras (Normand) : Oui, oui,
c'est...
Mme Léger : Mettons,
pour ce fils-là, est-ce que vous l'auriez fait?
M. Jutras (Normand) : Pardon?
Mme Léger : Pour ce
fils-là en question, qui arrivait, est-ce que vous auriez...
M. Jutras
(Normand) : Oui, oui, dans
un cas comme ça, on le ferait parce que je dois le faire, à ce moment-là.
C'est une obligation, de fournir le compte
sommaire. Mais je n'ai pas à fournir tout le bilan et toute l'administration.
Si la personne est avec nous, par exemple, depuis 15 ans, je n'ai pas à
fournir ça.
Mme Léger : Alors,
quelles sont, d'abord... quelles informations on vous demande, en général, là?
Quelles informations qu'on demande au Curateur public?
M. Jutras (Normand) : Bien,
souvent, souvent, là, c'est la question des finances. Les gens veulent savoir qu'est-ce qu'il en est des états financiers de la
personne et veulent avoir un bilan de sa situation. Plus souvent
qu'autrement c'est ça.
Mais d'autres
fois, étrangement, les personnes veulent avoir le dossier médical. Et ça, il y
a une stricte confidentialité qui
concerne ça parce que... Tu sais, on a même dit devant cette commission-ci que
les héritiers avaient droit à tout le dossier de la personne puis on a
fait part, là, de pages qui étaient disparues. Nous, là, quand on nous demande tout un dossier comme ça, on vérifie le
dossier puis on va caviarder ce qui n'est pas d'intérêt pour les
héritiers. On va remettre aux héritiers ce qui leur est utile pour le règlement
de la succession, mais on n'a pas à livrer le dossier médical de la personne. Et ça, il y en a... Ça, je trouve que c'est une
hérésie juridique épouvantable que de venir dire devant cette commission-ci qu'une fois qu'une personne
est décédée les héritiers ont droit à tout son dossier. Alors,
imaginez-vous, ça voudrait dire que
n'importe qui qui est ici, la personne décède, on peut aller demander son
dossier médical à l'hôpital, on peut
aller demander son dossier médical au médecin. Ça n'a aucun sens. Alors donc,
nous, ce qu'on remet, c'est ce qui est utile à la succession de la
personne.
Mme Léger :
Quand vous dites ça, que ça n'a aucun sens, le dossier médical, c'est
questionnable malgré tout. Quand vous
dites ça, que ça n'a aucun sens, le dossier médical, moi, je pense qu'il y a
matière à question sur ça. C'est questionnable,
à mon avis. Je ne veux pas être à l'encontre de ce que vous dites, je n'ai pas
une opinion précise, mais il y a des
gens, des archivistes ou en tout cas il y a plusieurs personnes qui sont venues
nous dire, qu'est-ce qui était médical, qu'est-ce qui ne l'est pas, la
ligne est mince aussi ou elle est bien large, ça dépend comment on le voit, là.
C'est
questionnable, à mon avis, parce que, si la personne est décédée... Est-ce
qu'on a à savoir ça, les héritiers, à savoir ça? Est-ce que
génétiquement ça a un impact? Tu sais, il me semble qu'il y a d'autres types de
questions.
Mais,
regardez, on n'embarquera pas dans ça. Mais c'était vraiment... Je ne suis pas
sûre. Je ne serais pas fermée complètement, là.
• (11 h 20) •
M. Jutras
(Normand) : Mais je peux
vous donner un exemple. Si, par exemple, les héritiers veulent prétendre
que, lorsque le testament a été fait, la
personne n'a pas donné un consentement libre et volontaire parce qu'elle était
déjà inapte, alors ça, cette partie
de dossier médical là va être transmise. Il y a des cas comme ça. Mais ce n'est
pas vrai que le Curateur public doit
remettre le dossier médical d'une personne. Comme votre dossier médical, ça
demeure confidentiel, puis les personnes inaptes ont droit à cette même
protection.
Mme Léger : Et vous
disiez aussi que les informations qu'on vous demande, c'est particulièrement
des informations financières. Quand vous
avez dit, tout à l'heure, que c'est des personnes... pourquoi ces personnes-là
inaptes arrivent au Curateur public, que
vous avez la responsabilité de protéger ces personnes-là, vous avez dit que
parce que dans la famille ou dans le
milieu il n'y a pas... la personne, on dit qu'ils ne veulent pas et ne peuvent
pas. Mais en même temps ces personnes-là
demeurent quand même dans le rayon familial. Alors, s'ils ne peuvent pas ou ne
veulent pas, ils ont des raisons aussi
personnelles de dire que je ne peux pas ou veux pas, mais en même temps ils
sont quand même de la famille, là.
Alors, moi,
je suis embêtée un peu de savoir, le rôle du curateur, qui est important, et la
famille, qui, au cours du temps... Parce que c'est vous qui décidez quel
est l'intérêt des personnes de vouloir avoir ces informations-là et vous occuper de vous assurer de l'intérêt des
personnes, mais en même temps, vous, comme Curateur public, êtes-vous
plus apte qu'une personne parente à
déterminer qu'est-ce qui doit être fait ou pas? Vous comprenez? Je me pose
cette question-là, qui est, pour moi,
bien grande. Est-ce que tous les droits vous sont soumis à vous? Tout à
l'heure, vous avez parlé de droit administratif, droit civil. Je
comprends la différence, je trouve ça bien que vous avez fait cette... mais en
même temps qui vous êtes, le Curateur
public, pour décider plus qu'un parent de ce qui est dans son intérêt ou pas?
Alors, ce n'est pas un jugement, hein, que je vous fais, là, c'est
vraiment une compréhension.
M. Jutras
(Normand) : Non, non, mais
là, écoutez, là, moi, la personne m'est confiée, c'est par un juge de la
Cour supérieure après avoir entendu la cause puis après avoir vu aussi ce que
les parents et amis disent. Mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, dans beaucoup de
familles, des fois, il y a des discordes épouvantables, et souvent aussi
la discorde résulte du fait que, pour
certaines personnes, l'ouverture d'un régime de protection, c'est l'ouverture
de l'héritage. Mais l'ouverture de l'héritage, ça va être au décès de la
personne, et la personne peut être sur régime de protection pendant 10 ans, 15 ans. Alors, moi,
durant toutes ces années-là, j'administre en fonction de l'intérêt de cette
personne-là et non pas en fonction de l'héritage à venir.
Tu sais,
quand je me fais dire, moi, par exemple, par un fils : Pourquoi vous payez
si cher pour la pension de notre mère?
Elle n'a plus connaissance de rien, vous pourriez l'envoyer dans un endroit où
ça coûte moins cher. Mais, en tout cas, tu sais, si la personne a toujours vécu dans l'argent, puis c'était son
choix de s'en aller dans cette maison-là, moi, je dois respecter ça, je
ne peux pas passer à côté de ça.
Mais les
chicanes de famille, c'est très délicat. Puis, quand le juge confie la
personne, c'est parce qu'il ne veut pas que la personne inapte soit prise entre les deux clans de la famille.
Et, encore là, on a dit devant vous : Ce n'est pas dans la loi, mais c'est dans la jurisprudence, et la
jurisprudence est constante à cet effet-là que le juge a à tenir compte, lui
aussi, tout comme moi, de l'intérêt de la personne. Et, si l'intérêt de la
personne, c'est de ne pas la laisser aux prises avec la chicane dans la famille
puis que la personne soit prise en otage, bien, à ce moment-là, la personne
m'est confiée.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. M. Jutras, Mme Filion, Mme Hallé, merci de votre
présence en commission parlementaire, ça nous éclaire.
Quelques
questions. Je vais y aller... Vous avez déjà eu la discussion avec mes
collègues, là, mais des spécifications. Sur l'article 52, les
critères pour donner accès, vous disiez tout à l'heure, M. Jutras, que
c'est avec l'autorisation du curateur qu'on va pouvoir donner accès à ces
renseignements-là et vous donniez l'exemple du fils qui revient après, supposons, quelques années, vous pourriez refuser
de lui donner les renseignements parce que, bon, il arrive comme un
cheveu sur la soupe après x nombres d'années puis il veut savoir quel est
l'état du patrimoine de sa mère.
Ma question,
c'est la suivante : Est-ce que votre décision, elle est évolutive dans le
temps? Exemple, le fils revient après
10 ans, et là, comment je pourrais dire, il se réhabilite, il commence à
s'occuper de sa mère, vient aux visites, fait les rendez-vous médicaux
avec elle. Est-ce que votre décision, elle est figée dans le temps ou vous
analysez le dossier, supposons, une fois par année ou aux six mois? Comment ça
fonctionne, cette mécanique-là avec le Curateur public?
M. Jutras
(Normand) : Alors,
effectivement, c'est évolutif. Et, si, le fils, on ne l'a pas vu depuis
10 ans, mais effectivement il revient, et il commence à s'occuper
de sa mère, et à bien s'en occuper, puis à être présent, et etc., effectivement la décision va pouvoir changer.
C'est toujours l'intérêt de la personne inapte et c'est dans l'intérêt de
la personne inapte. Tant mieux, tant mieux si le fils revient puis qu'il
commence à s'occuper de sa mère. Je ne demande pas mieux, moi, là, là.
M. Jolin-Barrette : Et là, pour les gens qui sont dans cette
situation-là, le Curateur public réévalue la demande aux combien de temps, environ? Je comprends, là, c'est
du cas par cas, là, mais est-ce que c'est une fois par cinq ans ou
c'est...
M. Jutras
(Normand) : Oh! non, non,
c'est plus rapproché que ça. On va suivre le dossier, on va suivre la
relation, puis, si effectivement la relation
s'établit de façon sérieuse, à ce moment... et ça peut même être au bout de six
mois, là, si vraiment le fils est
présent et puis qu'il est présent dans un but vraiment d'intérêt pour sa mère.
Puis évidemment, bien, il nous fait une nouvelle demande, et à ce
moment-là, effectivement, on tient compte, là, de l'évolution de la situation.
M. Jolin-Barrette : Tout à
l'heure, vous avez dit, dans le fond, il y a un curateur délégué. Lorsque vous
êtes nommé titulaire de la curatelle pour une personne, bien, il y a quelqu'un
dans votre organisation qui devient le curateur
délégué. C'est une personne physique qui va être le curateur de la personne qui
est sous le régime de protection. Ce curateur
délégué là, à quelle fréquence il va rencontrer la personne qui est sous cette
curatelle? Cette personne physique là, là, comment ça se passe,
pratico-pratique, là?
M. Jutras
(Normand) : Ça, ça dépend
énormément des cas. La loi nous parle
d'au moins une fois par année. Mais, la
fois par année, c'est une visite, là, vraiment, d'évaluation, là, de voir qu'est-ce qui s'est passé au cours
de la dernière année et quel est le
plan de la représentation pour la
prochaine année, bon. Mais par contre il y a des personnes qu'on va voir
très souvent. Il y a des personnes qui...
Dernièrement, une curatrice déléguée me disait que, dans un cas, elle avait été
en communication avec la personne à tous les
jours pendant deux mois de temps parce qu'effectivement cette personne-là
était en crise, puis il fallait s'en occuper de façon
plus vigilante. Dans d'autres cas... Moi, je vais régulièrement rencontrer des personnes
inaptes dans leur milieu de vie. La question que je pose toujours, entre autres : Est-ce que vous avez de la visite? Est-ce que des
personnes de votre famille viennent vous voir?
Je vous donne
un exemple. Il n'y a pas tellement longtemps, un déficient intellectuel, il me dit : Ma
mère vient me voir à toutes les
semaines. Bon, bien, dans ce cas-là, on prend entente avec la mère puis on
dit : Bon, bien, continuez de voir votre fils, O.K., puis, s'il y a
quelque chose, vous communiquez avec nous, à ce moment-là. Tu sais, c'est moins
important qu'on soit très présents dans un cas comme ça.
Alors donc,
nos visites sont modulées en fonction des besoins de la personne. Alors, il y en a que ça peut être
qu'on doit voir quasiment une fois par mois.
Par contre, il y
en a d'autres, comme ce déficient
intellectuel là dont je vous parle, dont sa mère s'occupe bien, bien là,
effectivement, on peut espacer notre visite.
Mais
par ailleurs on est souvent en communication avec le
personnel, avec le personnel infirmier, avec les gens de la ressource. Ils vont nous appeler : Bon, bien,
M. Untel va moins bien, pourriez-vous venir le voir? Il a certains problèmes.
Les changements de saison, la ressource
communique avec nous : Il a besoin de vêtements d'hiver, il a besoin de
bottes, pouvez-vous venir voir ça?
Pouvez-vous vous en occuper? Sa télévision a brisé, ça prendrait une autre
télévision. Il a brisé ses lunettes,
il s'est assis sur ses lunettes. Tu sais, c'est... Alors donc, c'est tous des
cas où vraiment, là, ça se présente très, très
fréquemment.
Par contre, il y en a d'autres, effectivement...
J'ai un cas, dernièrement, que j'ai rencontré, un jeune déficient intellectuel qui a son petit appartement, puis qui
gère son affaire, et puis qui va bien à tel point qu'on pense demander
une mainlevée de son régime, dans son cas.
La travailleuse sociale va le voir régulièrement. Parce qu'on
n'est pas les seuls à intervenir,
hein? Il ne faut pas oublier que le Curateur public, on n'est pas un proche
aidant, c'est... les gens du réseau sont davantage... sont plus proches. Il y a les travailleurs sociaux, il y a
les infirmiers, les infirmières, les gens qui tiennent les ressources,
mais avec qui on est souvent en communication, tout dépendant des besoins de la
personne.
Le Président (M. Ouellette) :
...minutes, M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Vous dites, dans certains cas, le curateur
donne une mainlevée sur le régime, demande une mainlevée. Ça veut dire aussi que, parfois, lorsque vous avez
certaines familles qui, à un certain moment, ne pouvaient pas s'occuper de la personne, et là, que le régime
public est venu, le Curateur public s'est fait attribuer la curatelle, ça
arrive aussi que les familles peuvent
demander de reprendre la curatelle ou la tutelle sur l'individu qui est visé
par ce régime de protection là.
• (11 h 30) •
M. Jutras (Normand) : Oui. Je
vous raconte un cas. Dernièrement, j'ai été conférencier devant un club de l'âge d'or. Après la rencontre, il y a
une dame qui vient me voir puis qui me dit : Notre mère relève de vous,
mais, nous autres, la chicane était
dans la famille. Quand est venu le temps d'ouvrir le régime, on ne pouvait plus
se parler, c'était la chicane
épouvantable. La chicane était due à notre soeur aînée. Notre soeur aînée,
maintenant, est décédée, et l'harmonie est revenue dans la famille, et on est prêts à s'occuper de notre mère.
Alors, nous, dans un cas comme ça, on ne demande pas mieux. Et même on
aide les gens, on aide les gens à reprendre la personne.
Et aussi les régimes doivent être réévalués,
tout dépendant si c'est une tutelle ou une curatelle, les tutelles aux trois ans, les curatelles aux cinq ans. Quand
vient le temps de la réévaluation, on
rencontre de nouveau la famille puis on
leur dit : Vous n'avez pas pu accepter il y a trois ans. Accepteriez-vous
maintenant? Sauf des fois on est un peu victimes de notre succès, parce que les gens disent : Ah! ça va bien comme
ça, on va laisser ça de même. Mais on insiste davantage pour que... Et, s'il y a possibilité que
quelqu'un, dans l'intérêt de la personne inapte, soit suivi par quelqu'un de sa
famille, c'est toujours ça qui nous guide. Et, quand c'est possible, oui, on va
de l'avant.
D'ailleurs,
la loi me fait une obligation, moi, de toujours chercher à me remplacer, somme
toute, tu sais, de toujours, si c'est possible, trouver quelqu'un de la
famille qui peut assumer la charge.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Me Jutras. Me Nicole Filion, Mme Jocelyne Hallé
et M. Normand Jutras, représentant le Curateur public du Québec, ça
a été important que vous veniez déposer aujourd'hui.
La commission
suspend ses travaux jusqu'à 15 heures, où on reprend nos consultations sur
le projet de loi n° 107.
(Fin de la séance à 11 h 31)