(Quinze heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission
est de nouveau réunie afin de procéder aux consultations particulières et
auditions publiques sur le projet de
loi n° 107, Loi visant à accroître la compétence et
l'indépendance du commissaire à la lutte contre la corruption et du Bureau des enquêtes indépendantes ainsi que
le pouvoir du directeur des poursuites criminelles et pénales d'accorder
certains avantages à des témoins collaborateurs.
Mme la secrétaire, il y a des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Marceau (Rousseau) est remplacé par M. Bérubé (Matane-Matapédia); Mme Roy (Montarville) est remplacée par M. Spénard
(Beauce-Nord).
Le
Président (M. Ouellette) : Merci. Cet après-midi, nous entendrons les groupes suivants : la Protectrice du citoyen, l'Ordre des
ingénieurs, l'association des policiers et policières provinciaux du Québec.
Et, ce soir, ce sera la Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec.
Ainsi, on va terminer les consultations par le Service de police de la ville de Montréal.
M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : ...question de directive. Jeudi dernier, j'ai demandé au
commissaire de l'Unité permanente
anticorruption de nous fournir les diagnostics organisationnels qu'il
dispose. Et on nous a fourni des documents aujourd'hui et un document qui s'appelle Rapport préliminaire sur la
démarche d'amélioration au service de la vérification de l'Unité permanente anticorruption, qui est un document qui émane du ministère de la
Sécurité publique. Je veux vous indiquer
qu'aux pages 4, aux pages 5, aux pages 6, 7, 8, 9... entièrement
caviardé. C'est une honte, M. le Président. On a demandé au commissaire
de l'UPAC de caviarder les noms mais pas les situations.
Alors, pour
un corps de police... en fait, pour une organisation qui veut un corps de
police, c'est drôlement mal parti. Et
c'est une insulte aux parlementaires de l'Assemblée nationale de nous fournir
un tel document, et j'y reviendrai plus tard, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) :
Et votre question de directive était?
M. Bérubé :
Qu'on demande à l'Unité permanente anticorruption de reconsidérer la demande
qu'on a faite, comme la première
fois, lorsqu'on leur a demandé de venir, puis ils ont changé d'idée. Qu'ils
nous envoient le vrai document, celui
qui leur permettra d'avoir la confiance des parlementaires et du public pour
aller de l'avant. Et, sans ce document, j'invite M. Lafrenière à
faire un deuil de ce projet de loi.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci. Je vais prendre en considération votre demande, M. le député de
Matane-Matapédia, et j'informerai la commission de la suite que je vais
donner à votre demande de directive.
Auditions (suite)
Nous
recevons, dans un premier temps, la Protectrice du citoyen, Mme Marie
Rinfret. Vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent, qui
viennent souvent à la Commission des institutions, mais pour les gens qui nous écoutent aujourd'hui. Vous avez 10 minutes de
présentation, Mme Rinfret, et par la suite il y aura une période d'échange
avec M. le ministre et les porte-parole des deux oppositions. Je vous laisse la
parole.
Protecteur du citoyen
Mme Rinfret
(Marie) : Merci. M. le
Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, membres de la commission,
je vous présente les personnes qui
m'accompagnent : Me Jean-François Bernier, vice-protecteur Affaires
institutionnelles et prévention, et Mme Marie-Hélène Vachon,
conseillère en affaires parlementaires et internationales.
Permettez-moi d'abord de remercier la Commission
des institutions pour son invitation.
D'emblée, le
Protecteur du citoyen souscrit aux principaux objectifs du projet de loi
n° 107, qui vise à accroître la compétence
et l'indépendance du Commissaire à la lutte contre la corruption et du Bureau
des enquêtes indépendantes ainsi qu'à octroyer au Directeur des poursuites criminelles et pénales
le pouvoir d'accorder des avantages à des témoins collaborateurs. Néanmoins, je
suis soucieuse que toutes les conditions soient réunies pour atteindre ces
objectifs. C'est pourquoi dans notre
mémoire je formule des recommandations sur quatre sujets, soit l'importance
d'un arrimage entre les instances
gardiennes de l'intégrité publique; un régime de sanctions pour assurer la
crédibilité du Bureau des enquêtes indépendantes;
l'intervention du Bureau des enquêtes indépendantes en matière d'infractions à
caractère sexuel; et les ententes avec les témoins collaborateurs.
L'intégrité publique constitue un enjeu
contemporain essentiel à la bonne gouvernance et à la probité de l'administration publique. Notre mémoire
répertorie une dizaine de lois ou de projets de loi qui font intervenir
différents acteurs en matière
d'intégrité publique, notamment le Commissaire à la lutte contre la corruption
et l'UPAC, les ordres professionnels,
l'Autorité des marchés publics, si elle devait être instituée, l'inspecteur
général de la ville de Montréal et le Protecteur du citoyen.
Ma première
recommandation vise à assurer l'arrimage entre le Commissaire à la lutte contre
la corruption et les différents mécanismes complémentaires de maintien
et de renforcement de l'intégrité publique, dont celui prévu à la Loi facilitant la divulgation d'actes
répréhensibles à l'égard des organismes publics, sous la responsabilité du
Protecteur du citoyen. Avec la multiplication des mécanismes et des
instances chargés du traitement des divulgations d'actes répréhensibles de toute nature, il est à craindre
qu'une personne témoin d'un tel acte ne sache plus à qui s'adresser. Elle
peut aussi s'interroger sur les conséquences
de sa divulgation et les protections qui y sont associées tant pour elle que
pour la personne visée par les
allégations. Bref, un risque de confusion existe. Néanmoins, à certaines
conditions, une compétence partagée par plusieurs organismes aux mandats
complémentaires n'est pas forcément négative. Elle peut, en fait, être envisagée positivement et vue comme un rempart
d'intégrité additionnel plutôt que comme un risque d'empiétement ou de confusion. Ce qui est essentiel, c'est qu'aucune
divulgation ne soit ignorée, qu'aucun divulgateur ne soit mal protégé et
qu'aucune personne ne soit lésée dans ses droits et ses recours simplement
parce qu'elle ne se serait pas adressée au bon endroit.
Les enquêtes
du commissaire et de l'UPAC mènent ultimement à des accusations criminelles.
Or, tout ne relève pas du droit
criminel, un domaine où le fardeau de la preuve est élevé et où les processus
peuvent être longs. La préservation de
l'intégrité publique passe aussi par d'autres moyens que l'intervention
policière et judiciaire. Je pense ici aux enquêtes administratives réalisées par le Protecteur du
citoyen lorsqu'une divulgation d'actes répréhensibles est déposée en vertu de
la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles, entrée en vigueur le
1er mai dernier.
Pour
instaurer une complémentarité des mécanismes et assurer une prise en charge
efficace des divulgations, une réciprocité
des échanges d'information, dans le respect de l'indépendance et des impératifs
de confidentialité propres à chaque
instance, doit être prévue à la loi. Je recommande en conséquence que le projet
de loi soit amendé pour prévoir que
le Commissaire à la lutte contre la corruption doive transmettre à l'instance
compétente pour les recevoir et les traiter tout renseignement qui ne
relève pas de son mandat.
Outre cette recommandation essentielle, le
Protecteur du citoyen accueille positivement les modifications à la procédure de sélection du commissaire, des
commissaires associés ainsi qu'à la durée de leurs mandats et la consécration
législative de l'UPAC. De même, j'accueille favorablement le fait que les
services d'enquête et de soutien de la Sûreté du Québec soient mis à la disposition du commissaire, ce qui permet d'avoir
accès à une expertise spécialisée et de limiter les coûts rattachés à un
dédoublement de services déjà existants.
Les
modifications proposées à Loi sur la police par le projet de loi n° 107
visent aussi à accroître l'autonomie du Bureau des enquêtes indépendantes pour le déclenchement de ses enquêtes
et à élargir son mandat. Je salue ces modifications, qui bonifient le
modèle du BEI et font écho aux recommandations du Protecteur du citoyen. Ainsi,
l'autonomie décisionnelle accrue du BEI se
manifestera, d'une part, par la suppression de l'étape impliquant le ministre
de la Sécurité publique dans le processus de déclenchement d'une enquête
et, d'autre part, par un véritable pouvoir d'initiative. Ces nouveaux pouvoirs permettront au BEI des
interventions indépendantes et efficaces. Je me réjouis aussi que le projet de loi n° 107 permette la tenue d'une enquête
indépendante lorsque le BEI est informé d'une allégation relative à une
infraction à caractère sexuel commise
par un policier, mais cet élargissement du mandat du BEI est tributaire du
respect de l'obligation pour le directeur du service de police dont est
membre le policier visé d'en informer sans délai le BEI.
• (15 h 40) •
Je suis
plutôt d'avis que le pouvoir d'enquête du BEI ne devrait pas être restreint aux
seules situations signalées par le directeur du corps de police. Une
victime d'une infraction à caractère sexuel commise par un policier peut être réticente à porter plainte auprès de ce même
service de police. Elle pourrait préférer dénoncer la situation directement à
un organisme indépendant comme le BEI
et devrait pouvoir le faire. L'environnement législatif doit favoriser
la confiance des victimes. C'est pourquoi,
tout en étant d'accord avec la modification proposée à l'article 286 de la Loi sur la police,
je recommande que la compétence du BEI d'enquêter sur ces allégations ne soit
pas limitée aux seules situations qui lui sont signalées par le directeur
de police.
Par ailleurs, afin d'assurer l'intégrité et la
crédibilité des enquêtes réalisées par le BEI, je réitère comme ma
prédécesseure que les obligations qui incombent aux policiers impliqués, aux
policiers témoins et aux directeurs de police
dans le cadre du déroulement des enquêtes indépendantes devraient être assorties de
sanctions en cas de non-respect. Un
régime de sanctions spécifique permettrait de renforcer l'autorité du BEI et de
favoriser la pleine collaboration des policiers impliqués. C'est dans une
perspective de prévention que le Protecteur du citoyen a toujours recommandé l'instauration d'un régime spécifique de sanctions
en cas de manquement d'un policier à ses obligations dans le cadre d'une enquête indépendante. C'est aussi dans cette
perspective que le cadre normatif québécois devrait prévoir l'éventualité
de tels manquements et prendre les moyens
pour les éviter, d'autant plus que le projet de loi n° 107 élargit les
pouvoirs d'enquête du Bureau
d'enquêtes indépendantes. De plus, il m'apparaît approprié qu'un organisme
indépendant comme le Commissaire à la déontologie policière exerce la fonction d'examen et
d'enquête relatifs à de tels défauts de collaboration. J'en fais une
recommandation.
Pour
finir, le projet de loi n° 107 donne au Directeur des poursuites
criminelles et pénales le pouvoir d'accorder certains avantages à des témoins collaborateurs. La commission
Charbonneau recommandait «de confier au Directeur des poursuites criminelles et pénales le pouvoir
d'attribuer, au nom de l'intérêt général et après consultation des autorités
concernées, certains avantages aux témoins
collaborateurs, notamment d'ordonner l'arrêt de toute procédure disciplinaire,
de toute procédure civile entreprise par une
autorité publique et de toute réclamation fiscale québécoise et de maintenir
les communications avec les organismes
fédéraux concernés». Je suis en accord avec ce constat, mais j'insiste pour
dire que, pour préserver une saine
administration de la justice et la confiance du public, ce pouvoir
discrétionnaire doit être rigoureusement encadré. De même, les immunités
doivent être octroyées de façon exceptionnelle.
En
plus des balises prévues au projet de loi n° 107, celles qui encadrent
déjà les ententes de collaboration conclues par le DPCP en matières criminelle et pénale doivent trouver
application. De plus, puisque le DPCP aura le pouvoir d'accorder des immunités dans des procédures où il n'est pas
lui-même le poursuivant, il devrait, pour prendre une décision pleinement
éclairée, consulter l'autorité concernée par
la procédure à laquelle il souhaite mettre fin. C'est seulement ainsi que l'on
pourra s'assurer que les ententes de collaboration accordant l'immunité servent
au mieux l'intérêt public. C'est pourquoi je recommande qu'avant de conclure une telle entente le DPCP consulte
l'autorité concernée et qu'il tienne compte de l'avis de cette autorité
dans sa décision. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme Rinfret. M. le ministre.
M.
Coiteux : Merci. Merci, Mme Rinfret. Merci aussi aux deux personnes
qui vous accompagnent, qui ont très certainement travaillé aussi à la
préparation du mémoire. Alors, merci d'être là. Plusieurs questions.
Écoutez,
sur la question des victimes d'agression sexuelle et de la possibilité de
passer directement au BEI, on va examiner
avec attention votre recommandation, ça, c'est certain, comme toutes les
recommandations qui nous sont faites, mais c'est sûr que vous avez
soulevé là un enjeu qui est particulièrement sensible et qui va certainement
avoir toute l'attention nécessaire de ma
part, certainement. Donc, je ne vais pas vous poser davantage de questions
là-dessus, on va regarder ça attentivement de notre côté.
Je commencerais
peut-être par la question de l'immunité, les nouveaux pouvoirs de donner
l'immunité, dans certains cas, à des témoins
collaborateurs de la part du DPCP. On a eu plusieurs échanges à cet effet la
semaine dernière : après
consultation; sans consultation; les liens avec les recommandations de la
commission Charbonneau. On a entendu du
côté du DPCP une objection d'ordre juridique, à savoir que cette consultation-là,
pratiquement, ne serait pas possible, d'un
point de vue juridique, pour toutes sortes de raisons. Je ne suis pas avocat
moi-même, donc je ne pourrai pas élaborer davantage là-dessus, mais on a
entendu cette objection-là.
Comment vous voyez ça,
vous, de votre côté?
Mme Rinfret (Marie) : Bien, écoutez, bien honnêtement, moi, je pense qu'on ne peut pas faire l'économie
de travailler ensemble, avec les autorités concernées, pour accorder à
une personne une immunité de poursuite dans un contexte disciplinaire, fiscal ou civil. J'ai le sentiment qu'agir
autrement permettrait de ramener sur la place publique le cynisme des citoyens, des citoyennes
à l'égard d'ententes conclues et pour lesquelles, au fond, les principaux
poursuivants n'auraient pas été concernés.
J'ai
entendu, moi aussi, la présentation et les réponses formulées par le DPCP et, à cet égard-là, je ne me prononcerai pas sur leurs compétences ou autrement,
mais je pense qu'il y a toujours une façon de trouver le moyen de s'assurer, lorsqu'on
conclut une entente qui confère une immunité à une personne, de le faire pour
les bonnes raisons. Nous ne devons pas
être dans un cadre de partie de pêche, d'où l'importance de s'assurer que
l'entente est essentielle à la conduite des accusations, par ailleurs. Et, ma foi, vous savez, tant le syndic, quand on
réfère au système professionnel, qu'en matière fiscale... ce sont des poursuivants en matière pénale. Alors, je pense qu'il y a moyen, sans doute, de
trouver une voie de passage entre ces
différents intervenants pour permettre d'avoir le bon portrait à l'égard de la
personne avec qui on veut signer une entente.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Vous avez parlé, tout à l'heure, à cet égard, d'un encadrement rigoureux. Et là j'essaie d'imaginer ce
que ça pourrait vouloir dire, puisqu'il est essentiel de maintenir la
séparation des pouvoirs et donc de donner toute l'indépendance nécessaire au
pouvoir judiciaire, là, de prendre ses décisions sans qu'il y ait interférence.
Alors, quelle sorte d'encadrement
vous auriez en tête à ce moment-là?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, à cet
égard-là, le DPCP, dans les réponses
aux questions qui lui étaient posées, mentionnait qu'ils entendaient appliquer aussi à
ces ententes la directive COL... qu'on me passe ici, COL-1, qui, au fond,
guide la signature des ententes actuellement avec les collaborateurs de
justice. C'est à ça qu'on réfère. C'est à ça que je référais dans ma présentation. C'est également à cela qu'on réfère
dans notre mémoire. On insiste pour qu'au-delà des critères
qui sont prévus dans le projet de loi n° 107, qui en soi paraissent
suffisants... mais qu'il y ait un encadrement supplémentaire par l'application de la directive qui s'applique actuellement à l'égard de toutes les ententes de collaborateur de justice.
M.
Coiteux : D'accord.
Autre sujet. Bon, juste en guise d'introduction pour ceux et celles qui nous
écoutent, vous avez des nouvelles responsabilités depuis un certain
nombre de mois en vertu de la nouvelle loi sur la protection des divulgateurs. Comment ça se passe? Et en
particulier parce que... Oui, comment ça se passe en général? On va
commencer comme ça, puis je vais poursuivre la discussion. Comment ça
fonctionne?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, en
fait, je vous dirais que ça fonctionne très bien.
Au fond, dès
le 1er mai 2017, soit à la date d'entrée en vigueur de la loi, nous avions
un site Internet qui permettait le
dépôt de divulgations par formulaire sécurisé. On protège, je vous dirais, bec
et ongles les personnes qui déposent chez nous une divulgation. Et, à cet égard-là, lorsqu'une divulgation est
reçue, on procède à la recevabilité de cette divulgation, donc
qu'effectivement on est en face d'un acte répréhensible au sens de la loi.
Ensuite, dans
l'hypothèse où, effectivement, la divulgation est recevable, nous faisons une
préenquête. Donc, nous recevons des documents pour nous assurer
qu'effectivement le fondement est là, qu'on n'est pas... à l'égard d'une divulgation frivole ou encore à l'égard d'une
vengeance ou simplement de relations de travail, qui ne sont pas des actes
répréhensibles au sens de la loi. Donc, on
est vraiment dans un contexte soit de mauvaise gestion, soit de mauvaise
conduite, soit de contravention à la loi ou à un règlement.
Et, partant de là, dès le moment où,
effectivement, à la suite de la préenquête, il y a matière à enquêter, nous enquêtons. Et notre engagement à l'égard des
personnes qui déposent une divulgation, c'est de faire notre rapport dans
les six mois, je pense...
• (15 h 50) •
Une voix : ...
Mme
Rinfret (Marie) : ...suite à
la décision d'aller en enquête. Donc, ce qui nous conduit, à peu près,
à partir de... jusqu'à huit mois, à partir de la date de réception de la
divulgation.
M. Coiteux : Est-ce qu'il est déjà arrivé, là... ça ne fait
pas très longtemps que ça a commencé, mais est-ce qu'il est
arrivé que vous vous soyez dit : Bien, ça, ça devrait être plutôt transmis
à l'UPAC en vertu du caractère de la dénonciation? C'est déjà arrivé?
Mme
Rinfret (Marie) : Oui. En vertu de la loi, l'article 14 nous commande, lorsqu'un dossier, effectivement, relève davantage d'un acte criminel, de référer soit à l'UPAC ou encore
à un corps de police. Et, de fait, nous avons transféré quelques dossiers qui avaient un aspect criminel, ce qui ne
nous a pas empêchés, dans certains cas, de conserver le volet
administratif de la divulgation.
M.
Coiteux : Je reviens à l'une
des recommandations que vous avez faites. Vous voulez un meilleur arrimage
entre ce que vous faites de votre côté et ce que fait, notamment, l'UPAC
d'un autre côté.
Est-ce que je comprends que, dans le fond, votre recommandation, c'est d'avoir un mécanisme semblable qui irait
de l'UPAC vers le Protecteur du citoyen? C'est ça que vous avez en tête?
Mme
Rinfret (Marie) : Bien, en
fait, la réciprocité entre les organismes responsables de veiller à l'intégrité
publique.
M.
Coiteux : C'est-à-dire
qu'ils reçoivent une divulgation concernant un acte répréhensible qui peut être
ou non de nature criminelle et, selon
leur analyse de la nature même de la divulgation, que chacun puisse envoyer à
l'autorité compétente le soin de donner les suites. C'est ça que vous
demandez.
Mme Rinfret (Marie) : Oui.
M.
Coiteux : D'accord. O.K. Je
ne sais pas si quelqu'un du côté de mes collègues aurait des questions. Pour
moi...
Le Président (M. Ouellette) : Moi,
je vais en avoir une.
M. Coiteux : ...c'était vraiment les
aspects que je voulais approfondir un peu.
Le
Président (M. Ouellette) : M. le président va en avoir une relativement à ce que M. le ministre vient de vous demander. Vous transférez des informations de divulgation que vous avez et qui peuvent être de nature criminelle.
J'ai compris que vous vous gardez un suivi qui va être administratif de
ce que vous transmettez.
Mme
Rinfret (Marie) : Si, effectivement, la plainte... en fait, la divulgation qui apparaît être de nature
criminelle a aussi un aspect de nature administrative, on va garder le
volet administratif.
Le
Président (M. Ouellette) :
O.K. On y reviendra, là — on
a votre rapport annuel, là — parce
que ça va être quelque chose de
passablement important particulièrement pour les gens qui font ces
divulgations-là, qui veulent s'assurer qu'il
y a un suivi. Si vous perdez le suivi en cours de route, bien... Parce que, normalement, vous êtes en interaction avec les
personnes qui vous informent de certains actes de divulgation. Mais on va en
reparler lors de la production du rapport annuel. M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé :
Merci, M. le Président. Bienvenue,
Mme Rinfret, M. Bernier, Mme Vachon, c'est un plaisir de vous accueillir. Le Protecteur du citoyen, la Protectrice du citoyen, c'est une institution qui est importante, au Québec, pour l'Assemblée nationale, pour les parlementaires, surtout pour les citoyens,
c'est une grande institution qui peut nous guider à travers les projets de loi, et elle doit, vous en conviendrez, jouir d'une totale
indépendance. À ma connaissance, vous ne relevez d'aucun ministère.
Mme Rinfret
(Marie) : Non.
M.
Bérubé : Très bien. Vous considérez que vous jouissez d'une
grande indépendance qui vous permet de vous prononcer sur un ensemble de
projets de loi.
Mme Rinfret
(Marie) : Absolument.
M.
Bérubé :
Pouvez-vous me rappeler de quelle façon vous avez été nommée à ce poste?
Mme Rinfret
(Marie) : Par les deux tiers de l'Assemblée nationale.
M.
Bérubé :
Je vous remercie. Alors, voilà le sens de ma première question. Ce qui vous
permet cette grande indépendance, c'est
cette nomination par l'Assemblée
nationale. Vous n'êtes pas choisie
par un conseil des ministres, par une seule formation politique.
Et ce que je me permets de réitérer, si vous avez peut-être
suivi les travaux précédents la
semaine dernière, c'est que, lorsqu'on veut combattre le cynisme des citoyens — c'est
les mots que vous avez utilisés tout
à l'heure, je vous cite — bien,
il faut poser des gestes. Et, quant à la nomination du commissaire de l'Unité permanente anticorruption, il nous apparaît, et nous
partageons cette conviction avec les membres de la deuxième opposition, les
députés indépendants, qu'il faut
procéder pour non seulement qu'il y ait justice, mais apparence de justice. Et
comme juriste... ce n'est pas moi qui vais vous apprendre ça, Me
Rinfret.
Donc,
j'ai lu votre recommandation. Vous soulignez que c'est le même type de
nomination qu'on propose pour la
Direction des poursuites criminelles et pénales, mais, quant à nous, ça devrait
relever du même type de nomination pour s'assurer qu'il y ait une totale indépendance. Alors, je veux le
souligner, nous n'avons pas la même appréciation de ce qui est nécessaire pour assurer l'indépendance du
commissaire. Vous auriez pu décider de ne pas aborder cette question, parce qu'elle ne relève pas directement de vous.
Vous avez quand même choisi de l'aborder dans votre document en disant...
je pense, c'est la recommandation 31,
de mémoire, là, de la commission Charbonneau. Alors, je veux le réitérer en
notant que, lorsque je cite en exemples de grandes organisations avec des
personnes à leur tête qui jouissent d'une indépendance totale, je parle
de vous, alors ça se rend peut-être à vous, et le Directeur général des
élections, et d'autres.
Alors,
ne croyez-vous pas — parce
que vous avez choisi vous-même de l'aborder dans le mémoire, alors j'ouvre la
discussion là-dessus — que le commissaire de l'Unité permanente anticorruption jouirait
d'une plus grande indépendance et ne prêterait pas flanc à du cynisme ou à du
questionnement s'il se soumettait à un mode de nomination sans équivoque
qui démontrerait qu'il est choisi par les parlementaires et non seulement par
un gouvernement?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Rinfret.
Mme Rinfret (Marie) : Merci. Si vous me permettez, je reviendrais sur un élément. Vous avez
parfaitement raison de souligner que
la nomination de la fonction du Protecteur du citoyen se fait par l'Assemblée
nationale. Maintenant, mon pouvoir en est un de recommandation,
notamment, auprès des parlementaires.
Lorsqu'on
réfère à l'UPAC, ou au commissaire, ou au DPCP, on est plus dans le volet du
système judiciaire, à cet égard-là,
et c'est en ce sens-là où on évalue qu'effectivement puis qu'on a choisi, dans
notre rapport, de signifier que les garanties d'indépendance qui étaient
présentées, proposées au sein du projet de loi n° 107 pour le commissaire
nous apparaissaient indépendantes, sans en faire toutefois une recommandation.
Le choix ultime, il vous appartient, aux parlementaires,
pour décider du niveau d'indépendance de cette organisation en fonction de ses
pouvoirs, par ailleurs, qui en sont,
un, de faire des enquêtes, de faire des recommandations au DPCP, qui, lui, a le
pouvoir ensuite de déposer des accusations dans le système judiciaire.
M.
Bérubé : Merci, Me Rinfret. En fait, j'aurais envie
d'ajouter que ce pouvoir-là présentement n'appartient pas aux parlementaires, il appartient à certains
parlementaires, le gouvernement, qui est majoritaire, qui choisit seul la
personne qui est nommée selon ses
critères. Ça ne m'appartient pas, ni au député de Beauce-Nord ni au député de
Mercier, qui siègent avec nous. Alors, je veux le corriger pour votre
appréciation, parce que c'est une prérogative qui n'appartient qu'au
gouvernement présentement.
Alors,
il m'apparaît qu'il est aussi important de protéger le citoyen à travers votre
institution que de protéger la justice.
C'est aussi important. Et, comme Protectrice du citoyen, vous vous assurez que
le citoyen puisse exercer totalement ses
droits, puisse avoir accès à des ressources, et tout ça. En termes de justice,
imaginez, si des situations contribuent à nous faire perdre confiance à
l'égard des institutions comme la justice... D'ailleurs, je me pose tout le temps
la question : Qu'est-ce qu'on aurait à
perdre à le faire? Ceux qui s'y opposent... pour quelle raison? Je pose la
question. J'aurai peut-être la réponse éventuellement. Et je termine
cette question-là en vous disant, puis je n'ai pas eu l'occasion de le faire la
semaine dernière, que le commissaire de
l'Unité permanente anticorruption, à la page 189 du rapport qui porte sur sa
rencontre, son entrevue, qu'il a eue
avec la procureure, indique lui-même que, si c'est nécessaire, il est ouvert à
cette question-là. Alors, je souhaite cette même ouverture au ministre
pour s'assurer qu'on ait l'indépendance nécessaire.
Ceci étant dit, vous
parlez — je
crois que c'est à la page 13, à l'article 53 — que «la Loi sur la police
prévoit certaines infractions pénales
concernant les enquêtes du Bureau des enquêtes indépendantes, mais elles ne
couvrent pas tous les types de
manquement et sont rarement utilisées». Est-ce que vous pouvez préciser
davantage ce que vous vouliez indiquer
à ce moment-là? Par exemple, quels sont les autres manquements que vous avez
identifiés et qui sont rarement utilisés?
Puis, si oui, à quelle fréquence, si c'est arrivé une fois, deux fois?, juste
pour nous illustrer un peu ce que vous voulez dire à l'article 53 de la
page 13.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Rinfret.
• (16 heures) •
Mme
Rinfret (Marie) : Oui. En
fait, lorsqu'on réfère à «sont rarement utilisées», c'est une... c'est la revue
de la jurisprudence, au fond, que
nous avons faite qui nous a permis de constater qu'il n'y avait pas de reproche
formulé à l'égard de policiers qui auraient pu ne pas collaborer avec le
BEI.
Je reviens
sur ce que je vous ai dit en présentation, on agit vraiment ici à titre préventif. Au moment où on se parle, je n'ai pas de dossier où les policiers
n'auraient pas collaboré avec le BEI. Cependant, dans la mesure où le projet de
loi n° 107 élargit les pouvoirs du BEI,
notamment, à l'égard des infractions à caractère sexuel, je pense qu'on est
devant un moment approprié pour
encadrer un régime de sanctions spécifique à l'égard des policiers qui
pourraient être visés par une enquête indépendante.
M.
Bérubé : Est-ce
qu'on dit «la Protectrice du citoyen»? C'est bon ou pas?
Une voix : ...
M.
Bérubé : O.K. Bon.
J'aime mieux dire ça.
Mme Rinfret (Marie) : C'est très
bon.
M.
Bérubé : Alors, en
termes d'expertise sur les questions de justice et de police, pouvez-vous nous
référer quelques avis, au cours des dernières années, sur lesquels a travaillé l'institution,
juste pour voir un peu les réflexions précédentes que vous avez eues? Ça va
nous permettre de s'y référer.
Mme
Rinfret (Marie) : On a émis
un rapport sur la création du Bureau
d'enquêtes indépendantes en 2010. Je
pense que je vais laisser la parole, si vous me permettez, à Me Bernier, qui
pourrait vous informer plus précisément.
M. Bernier (Jean-François) : Avec
votre permission.
Le Président (M. Ouellette) : Bien
oui, M. Bernier.
M. Bernier
(Jean-François) : Merci, M. le Président. Effectivement, en 2010, comme la protectrice l'a dit, on a
publié un rapport relativement à la procédure, justement, des enquêtes lors d'événements policiers dont
l'intervention policière cause une
blessure à autrui, une blessure grave ou la mort, qui a mené ultimement à un projet de loi qui finalement a donné naissance au Bureau des enquêtes indépendantes. C'était effectivement un organisme dont on proposait la création
dans le rapport en 2010.
Par ailleurs, la Loi sur le Protecteur du citoyen ne nous autorise pas à recevoir
des plaintes de citoyen qui relèveraient plutôt de la déontologie
policière et d'actes policiers à l'égard de citoyens. À ce moment-là, on réfère
les gens vers le Commissaire à la
déontologie policière, sur lequel nous avons, par ailleurs, compétence.
Alors, on dit toujours aux gens...
M.
Bérubé : En fait, votre juridiction est quand même
limitée sur ces questions. Comme sur le projet de loi n° 107,
votre zone d'intervention est très limitée.
M. Bernier
(Jean-François) : Effectivement, on ne pourrait pas se prononcer officiellement, en vertu de notre
loi, sur le travail du policier dans le
cadre de ses fonctions d'agent de la paix, parce que la loi nous empêche
de le faire. Par contre, on s'est permis, entre guillemets, en 2010, de
s'adresser au ministère de la Sécurité publique, qui avait la responsabilité d'administrer la procédure en question, dont j'ai parlé tout à l'heure, pour lui recommander autre chose qui a mené à ça, donc.
M.
Bérubé : On mettra
la main sur votre document.
Le Président (M. Ouellette) :
...terminé, M. le député de Matane?
M.
Bérubé : Merci, M.
le Président. Je pense que mon temps est terminé.
Le
Président (M. Ouellette) :
Bien, le président a besoin d'un éclaircissement. Vous ne pouvez pas vous
prononcer officiellement sur le travail du policier. Moi, là, j'aimerais
juste ça avoir une explication, parce que, là, vous vous prononcez; vous ne vous prononcez pas;
officiellement; non officiellement. Clarifiez-moi ça, M. Bernier, s'il vous plaît.
M. Bernier (Jean-François) : Je suis désolé, je n'ai pas été assez clair dans
ma réponse. C'est qu'on ne peut pas traiter
de plaintes de citoyen à
l'égard du travail policier, je vous
dirais, dans le cadre de ses fonctions d'agent de la paix.
Le Président (M. Ouellette) :
C'est ça. Merci. M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue, Mme Rinfret, M.
Bernier et Mme Vachon. C'est un très beau mémoire que vous nous avez
soumis. Moi aussi, je constate l'importance de la Protectrice du citoyen. Je pense que c'est un organisme qui a toute la
confiance des citoyens et citoyennes du Québec.
Vous
avez parlé à l'intérieur de votre rapport que ça peut arriver que vous
confiiez... si on s'aperçoit que le dossier qui nous est confié ou la plainte qui nous a été faite s'adressait à
l'UPAC, on peut transférer à l'UPAC mais seulement une partie de la plainte, parce qu'on garderait le
côté administratif s'il y en a un. Donc, j'aimerais ça avoir un peu plus
d'explications. Je pense que c'est M. le
président qui a posé la question. L'UPAC va traiter le côté pénal, le côté
criminel de la plainte, et vous, vous
allez traiter le côté administratif de la plainte. Mais je pense que ça forme
un tout, ça, quand on veut déposer
des accusations contre quelqu'un. C'est parce que je me demande comment les
accusations vont se déposer. Des
accusations par vous et des accusations par l'UPAC. J'ai de la misère à
comprendre le cheminement de cette méthode-là.
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, pour être la plus précise possible, j'ai envie de vous lire
l'alinéa deux de l'article 14 de
la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des
organismes publics, qui indique que «le
Protecteur du citoyen met fin à l'examen ou au traitement de la divulgation ou
le poursuit selon les modalités convenues avec l'organisme à qui il a transmis les renseignements». Et ici on
réfère au Commissaire à la lutte contre la corruption ou à un service de police, ce qui fait que — et là je vais vous donner un cas de
figure — si j'ai
une divulgation qui fait état, à l'égard
d'un organisme public, de corruption et encore, aussi, de manquement grave à
l'éthique, je vais pouvoir acheminer le
volet qui concerne un acte criminel à l'UPAC, qui va faire son travail, qui va
évaluer, selon la preuve qu'il obtiendra, s'il y a lieu de déposer des
accusations auprès du DPCP.
Et,
de notre côté, on va poursuivre l'enquête administrative pour évaluer si
effectivement il y a eu un manquement grave
en matière d'éthique. Et ce que ça emporte cependant, c'est que nous faisons
une recommandation à l'autorité visée par l'acte répréhensible
identifié.
M.
Spénard :
L'autorité qui s'occupe de la plainte.
Mme Rinfret (Marie) : Exactement, et qui vise à mettre en place les correctifs appropriés
pour corriger la situation dans son organisation.
M.
Spénard : O.K. En mémoires, la semaine dernière, en
commission, on a eu ici deux ordres professionnels... c'est-à-dire, il y en a un qui nous a envoyé un
mémoire, et le Barreau est venu ici aussi en nous disant qu'avec le pouvoir
qu'on délègue au DPCP en ce qui concerne la
protection des témoins, témoins qui sont nécessaires à une saine justice,
les ordres professionnels ne seraient pas
avisés. Il n'y a personne qui serait avisé. Alors, j'avais posé une question et
je n'ai pas eu de réponse des ordres
professionnels là-dessus. J'avais posé une question dans le sens de dire :
Un citoyen se plaint à un ordre
professionnel d'avoir été trompé par un membre de cet ordre-là, que ce soit un
comptable, un avocat, amenez-en, et
il porte plainte. Maintenant, l'ordre professionnel commence à faire enquête,
et le DPCP décide que : Pour nous, c'est un témoin privilégié, donc
on arrête tout.
Qui s'occupe du citoyen
en bas qui a porté plainte, qui a probablement été floué? Qui s'en occupe
durant ce temps-là? Ça revient à qui, ça, d'après vous?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, c'est une bonne question, et d'emblée j'aimerais vous répondre
qu'il devrait appartenir aux ordres professionnels d'informer la
personne qui a pu être visée par l'acte répréhensible.
Maintenant,
en matière de droits professionnels comme en matière de poursuites criminelles,
le poursuivant est le syndic. Donc, à
partir du moment où il y a une demande qui est formulée à l'effet qu'un
professionnel aurait contrevenu à son
code de déontologie, par exemple, bien, partant de là, il appartient ensuite au
syndic de se saisir du dossier et, lui, de déposer la plainte. Mais, normalement, je vous dirais que ça devrait
appartenir... je ne connais pas les codes de déontologie des syndics, là, mais il me semble qu'à quelque
part il y a un devoir d'information à la personne qui a déposé la demande
auprès de l'ordre professionnel concerné.
• (16 h 10) •
M.
Spénard : Merci de votre réponse. C'est parce que, la
semaine passée, ce n'est pas ça qu'on a entendu du DPCP. Il n'a pas de comptes à rendre à personne, et je
ne suis pas certain que l'ordre professionnel peut aviser le citoyen que :
Monsieur, bien, tu n'auras pas de réponse,
parce que monsieur est rendu un témoin protégé du DPCP. Je pense que ça
reste strictement confidentiel.
Alors,
moi, ma question : Le citoyen en bas qui a porté plainte, qui va s'en
occuper? Et là vous me dites : C'est les ordres professionnels. Ce n'est pas la réponse qu'on m'a donnée,
moi. Ce n'est pas la réponse que le DPCP m'a donnée la semaine dernière. Parce que, lorsqu'on protège
un témoin comme ça, vous comprendrez qu'on le protège de façon très,
très, très confidentielle.
Alors,
moi, ma simple question — et vous êtes la Protectrice du citoyen : Qui va s'en occuper
finalement, du citoyen, à travers l'UPAC, les différents corps policiers
puis le DPCP? Qui c'est qui va s'occuper du citoyen comme tel?
Mme Rinfret (Marie) : Je vous dirais, c'est un peu en réponse à ce
questionnement-là où on dit : Il faut vraiment que les ententes de collaboration soient
exceptionnelles, parce que justement on fait face à des situations où il y a
des gens qui ont pu être floués. Puis
là je parle un peu au conditionnel, parce qu'à partir du moment où on met fin à
la poursuite on ne sait pas, là, si
le professionnel est condamné ou pas, si effectivement il y a eu une faute.
Mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une personne qui s'identifie
comme étant une victime de ce professionnel.
Et
conséquemment c'est pour ces raisons-là qu'on indique qu'il faut vraiment que
l'entente de collaboration soit essentielle
à aller chercher une collaboration qui va en venir à une accusation, et non pas
que ce soit quelque chose d'agréable à aller
chercher — en
anglais, ils ont une expression à cet égard-là, là, un «nice-to-have», là — dans le cadre d'une enquête. Il ne faut vraiment pas que ça apparaisse comme
étant quelque chose qui va ajouter à la preuve, si on n'en a pas besoin
de manière essentielle. C'est pour ça qu'on ajoute qu'il faut que ce soit fait
de façon exceptionnelle.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, M. le député de Beauce-Nord.
Mme
Marie Rinfret, M. Jean-François Bernier, Mme Marie-Hélène Vachon, représentant
le Protecteur du citoyen, merci d'être venus déposer en commission.
Je
suspends quelques minutes. Je demanderais à Mme Kathy Baig, de l'Ordre des
ingénieurs du Québec, de bien vouloir s'avancer.
(Suspension de la séance à
16 h 12)
(Reprise à 16 h 16)
Le Président (M. Ouellette) : Bon. Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant
l'Ordre des ingénieurs du Québec,
et, Mme Kathy Baig, vous allez nous présenter les deux personnes qui vous
accompagnent. Vous avez 10 minutes
pour nous faire votre présentation, et après il y aura un échange avec M. le ministre et les porte-parole des deux
oppositions. Je vous laisse la parole, Mme Baig.
Ordre
des ingénieurs du Québec (OIQ)
Mme
Baig (Kathy) : Excellent. Donc, merci, M. le Président, M. le
ministre, membres de la commission. Comme vous l'avez dit, je m'appelle Kathy Baig, je suis ingénieure et je suis
présidente de l'Ordre des ingénieurs du Québec, un ordre professionnel qui regroupe 63 000 professionnels.
Je suis accompagnée de l'ingénieur Réal Giroux, syndic à l'ordre, ainsi
que de Me François-Xavier Robert, avocat aux affaires juridiques de
l'ordre.
La
lutte contre la corruption et contre d'autres crimes économiques est une
préoccupation sociale qui repose sur le travail collectif de plusieurs institutions. La lutte contre la
corruption est susceptible de mettre en cause des professionnels. Cette lutte implique des infractions pénales et
des fautes disciplinaires, des fautes qui doivent être sanctionnées par les
conseils de discipline des ordres
professionnels. L'Ordre des ingénieurs est donc un partenaire important dans
cette lutte. C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.
Au
cours des dernières années, notre Bureau du syndic s'est donné les moyens de
traiter les dossiers de corruption et
de collusion. Leur budget est passé de 1,4 million de dollars en 2009-2010
à 4,3 millions en 2016-2017. L'effectif du Bureau du syndic a triplé depuis 2009 et compte à lui seul, maintenant,
une trentaine d'employés. En plus de l'ajout des ressources, d'autres moyens ont été déployés, incluant la révision des
méthodes de travail, la création d'unités spécialisées dans les dossiers de corruption et de collusion
ainsi que le recours à la collaboration d'experts en crimes économiques.
Ces efforts donnent maintenant des
résultats. Le Bureau du syndic a ouvert plus de 225 enquêtes reliées à la
commission Charbonneau. Jusqu'à
maintenant, une soixantaine de plaintes ont été déposées au conseil de
discipline pour des affaires de
collusion ou de corruption. Une trentaine d'ingénieurs ont été sanctionnés, et
ces décisions peuvent être consultées sur notre site Web. Une trentaine d'autres dossiers sont présentement devant
le conseil de discipline et passeront prochainement. Comme près de 100 enquêtes sont encore actives, en
lien avec ces dossiers, on peut également s'attendre à ce que d'autres
dossiers de plainte soient déposés prochainement au conseil de discipline.
Je
tiens aussi à souligner que certains stratagèmes ont été mis au jour par les
enquêtes réalisées par notre Bureau du
syndic. Ces enquêtes disciplinaires et les audiences disciplinaires qui en ont
suivi ont permis d'apporter un éclairage complémentaire important aux travaux de la commission Charbonneau en mettant
au jour plusieurs mécanismes sophistiqués de collusion et de corruption dans le
domaine de la construction. La publicité et la médiatisation des débats,
le conseil de discipline, qui les a
entendus, constituent des outils puissants de dissuasion. Les sanctions
disciplinaires ont écarté de l'exercice de la profession de nombreux
ingénieurs qui avaient, à divers degrés, participé à des stratagèmes.
Bref,
l'OIQ a investi d'importantes ressources matérielles et humaines dans le but
d'assurer la protection du public. En
outre, certaines caractéristiques propres au système disciplinaire ont assuré
le succès des démarches de l'ordre. On parle ici, entre autres, de la
célérité des instances disciplinaires, du fardeau de preuve moins exigeant
qu'en matières pénale et criminelle et de la
contraignabilité des professionnels visés tant au stade de l'enquête qu'à celui
de l'audience disciplinaire. L'ordre
est donc convaincu que ces démarches, conjuguées aux caractéristiques propres
au système disciplinaire, ont permis
d'atteindre des résultats exceptionnels en regard de la protection du public,
lesquels vont au-delà de la simple
condamnation des ingénieurs visés. Comme vous pouvez le constater, l'ordre
assume ses responsabilités.
• (16 h 20) •
Tel que mentionné dans son mémoire, l'ordre
accueille favorablement le projet de loi n° 107, qui s'ajoute à d'autres initiatives du gouvernement pour renforcer la lutte contre la corruption. Nous souhaitons toutefois
partager avec vous
certaines pistes d'amélioration pour tenir compte du rôle que nous jouons et pour
améliorer la collaboration entre les différents acteurs clés.
J'en arrive
donc à nos remarques sur les éléments du projet de loi qui touchent le
Commissaire à la lutte contre la
corruption. L'ordre est favorable à l'élargissement de la compétence du
commissaire. En effet, la corruption ne concerne pas uniquement le
domaine contractuel, et la commission Charbonneau l'a démontré.
En ce qui concerne la protection des témoins collaborateurs, et tel que mentionné plus
tôt, notre Bureau du syndic a mené
des centaines d'enquêtes sur la collusion et la corruption. Nous sommes donc pleinement
conscients du rôle essentiel que les
dénonciateurs peuvent jouer pour faciliter ce travail d'enquête. Nous sommes
donc favorables à l'idée de bonifier la protection des témoins collaborateurs, incluant
en permettant au Directeur des
poursuites criminelles et pénales
d'arrêter une poursuite disciplinaire
d'un ordre professionnel. Ce pouvoir devrait toutefois être exercé avec
discernement, notamment en tenant compte des impacts sur la crédibilité du
système professionnel et du processus disciplinaire. Des balises
doivent être établies, et la commission Charbonneau en avait d'ailleurs
proposé un certain nombre dans son rapport.
Nos
principales préoccupations que je vais vous exposer aujourd'hui touchent quatre points. Le premier, ce sont les qualités des actes professionnels. Nous pensons
que le DPCP ne devrait pas pouvoir arrêter une poursuite disciplinaire qui vise
la qualité des activités professionnelles exercées, par exemple, lorsqu'un professionnel
a contrevenu aux règles de l'art qui
s'appliquent à sa profession. Pensons, notamment, à un ingénieur qui
aurait effectué une surveillance des travaux complaisante ou incomplète en échange d'un avantage indu. Le public
s'attend à ce que l'ordre agisse et prenne toutes les mesures nécessaires pour sanctionner
un ingénieur qui aurait mis en péril la sécurité du public. Le pouvoir extraordinaire d'arrêter l'instruction d'une plainte disciplinaire devrait être utilisé
avec une grande prudence. Il ne s'agit pas uniquement d'analyser
l'opportunité d'exercer ce pouvoir uniquement dans la perspective du droit
criminel. La finalité propre du système
professionnel, la protection du public doivent être considérées, y compris son
volet de sanctions et de dissuasion face aux comportements contraires
aux valeurs d'une profession.
Le deuxième
point, c'est l'intérêt général versus l'intérêt de la justice. Ce nouveau
pouvoir devrait donc être exercé seulement
lorsque l'intérêt général de la société le justifie. Ainsi, comme l'indique
notre mémoire, le critère d'intérêt de la justice contenu dans le projet
de loi devrait être remplacé par celui d'intérêt général, comme le proposait
d'ailleurs la commission Charbonneau. Un tel
critère tiendrait compte des éléments qui doivent être considérés par le syndic
lorsqu'il octroie une immunité
disciplinaire comme il peut le faire depuis juin dernier, d'ailleurs. Nous
remercions les membres de l'Assemblée nationale d'avoir modifié le Code
des professions pour doter les ordres professionnels de ce nouvel outil. Ce critère de l'intérêt public permet de
mesurer l'importance relative des instances criminelles et disciplinaires,
leurs chances de succès et leur issue probable à... de l'intérêt public,
de voir les gestes de contrevenant être non seulement sanctionnés, mais
également d'être mis à jour avec célérité, publiquement et de façon
transparente.
Nous
suggérons en outre que le nouvel article 24.1 de la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales
incorpore les mêmes critères que ceux récemment introduits au Code des professions à
l'égard de l'immunité de poursuite pouvant être accordée à un
professionnel par le syndic de son ordre. Le DPCP devrait tenir compte,
notamment, de la protection du public, de maintenir le lien de confiance envers
les membres de l'ordre, de la nature et la gravité de l'infraction, de
l'importance des faits allégués pour la conduite de l'enquête et de leur
fiabilité, de la collaboration du professionnel et de l'étendue de sa
participation à l'infraction.
Le troisième
point, c'est la collaboration entre le DPCP et le syndic. Il nous apparaît
essentiel qu'une forme de collaboration
existe entre le DPCP et les syndics dans le respect des lois et des impératifs
opérationnels de chacun. Il est important de préciser que nous ne
demandons pas que la décision d'arrêter une poursuite disciplinaire soit
sujette à l'approbation du syndic. Toutefois, nous croyons que le syndic est
bien placé pour contribuer à la réflexion du DPCP préalable à l'exercice de ce pouvoir d'arrêter l'instruction d'une
plainte disciplinaire, plainte qui peut prendre des éléments portant sur
la qualité des services professionnels ou des considérations étrangères à l'enquête
policière.
Notre dernier
point qu'on veut mettre en lumière aujourd'hui, c'est le caractère public de la
décision du DPCP. Pour mettre fin à
l'instruction d'une plainte disciplinaire, pour ne pas mettre en péril la
confiance de nos concitoyens envers les
ordres professionnels, il serait important de donner un caractère public à cet
avis. Autrement, le dossier sera retiré, sans raison apparente, du rôle
d'audience d'un conseil de discipline. Les ordres ne seront pas en mesure de
fournir d'explications, ce qui laissera
cours à des suppositions ou à des hypothèses qui nuiront à la réputation des
ordres et du système professionnel.
Nous ne demandons pas que l'avis indique les raisons de l'arrêt de la
poursuite, mais simplement le
fait que la poursuite a été arrêtée par le DPCP.
En conclusion, je réitère que nous appuyons ce projet de loi. Avec quelques
ajustements, les changements qui sont proposés permettront à l'ensemble
des acteurs clés concernés de lutter encore plus efficacement contre la corruption. Je vous remercie de votre
attention. Mes collègues est moi seront heureux de répondre à vos questions.
Merci.
Le
Président (M. Ouellette) : Probablement que vous avez pratiqué votre présentation, Mme Baig,
parce que vous êtes en plein dans votre...
Mme Baig
(Kathy) : J'avais l'angoisse de ne pas rentrer dans le
10 minutes. Je pense que ça a rentré... C'est excellent.
Le Président (M. Ouellette) :
C'est ça. Pour une première à l'Assemblée, je vous félicite. M. le ministre.
M. Coiteux : Vous n'avez pas
parlé de la question de la nomination du commissaire à l'UPAC.
Mme Baig (Kathy) :
Effectivement, on n'en a pas parlé dans l'allocution, mais...
M. Coiteux :
Mais il y a quelque chose, dans votre mémoire, là-dessus, n'est-ce pas?
Mme Baig (Kathy) : Tout à fait.
M. Coiteux : Bon. Et vous
n'allez pas dans le sens de ce qu'est le projet de loi. C'est ce que j'ai
compris.
Mme Baig
(Kathy) : En fait, ce qui est dans notre mémoire, ce qu'on dit, c'est
que déjà la nouvelle proposition qui
est dans la loi est une amélioration pour la nomination. Si on voulait avoir
une apparence complète d'indépendance, on
est d'avis que ça pourrait être nommé par l'assemblée générale aux deux tiers.
Mais le mode de nomination aujourd'hui est une amélioration.
M. Coiteux :
Par exemple, là, je vais prendre le DPCP. Il y a un comité de sélection composé
du sous-ministre de la Justice et de
quatre autres membres, dont un avocat recommandé par le bâtonnier du Québec, un
professeur de droit recommandé par
les doyens des facultés de droit du Québec, une personne recommandée par des
organismes représentant le milieu
municipal et une autre personne choisie par le ministre parmi les personnes
oeuvrant dans un organisme qui a pour objet d'aider les victimes d'actes
criminels.
Vous trouvez que ce n'est pas un mécanisme de
nomination indépendant?
Mme Baig (Kathy) : En fait,
oui, ce qu'on dit, c'est que le fait qu'il y ait un comité de sélection est une
nette amélioration pour la nomination. On
pense que, pour assurer la compétence de la personne qui va prendre le poste,
c'est un très bon mécanisme. Maintenant, où on avait un peu plus de
questionnements, c'est au niveau de l'apparence de l'indépendance. Mais,
encore une fois, ce qui est proposé dans la loi est une amélioration par
rapport à ce qui y était avant, et on a
seulement souligné que, si on voulait vraiment avoir une apparence totale
d'indépendance, on pensait que ça pourrait être l'assemblée générale.
Mais la
raison pour laquelle on n'en a pas parlé dans l'allocution, c'est qu'on voulait
venir ici principalement pour parler des enjeux qui touchent le système
professionnel, et pas nécessairement au niveau de la nomination.
M. Coiteux :
Mais je reviens quand même sur le type de comité de sélection. Forcément, le
gouvernement ne peut nommer personne qui n'a pas été choisi par ce
comité de sélection indépendant. Pourquoi il n'y aurait pas apparence
d'indépendance avec un comité comme ça dans le cas du DPCP?
Mme Baig
(Kathy) : Bien, en fait, je ne voudrais pas m'éterniser trop
longuement sur cette question-là, le comité de sélection, et effectivement on dit «au niveau de la compétence», on
pense que c'est un bon moyen. Au niveau de la perception de certaines
personnes, il y a peut-être une meilleure perception si jamais c'était nommé
par l'assemblée générale. Mais, encore une
fois, ce n'est pas notre cheval de bataille, ce n'est pas là-dessus sur lequel
on veut vraiment... On l'a mentionné, je suis d'accord...
M. Coiteux : Je comprends que
ce n'est pas votre cheval de bataille.
Mme Baig
(Kathy) : ...puis, dans notre mémoire, je pense qu'on est très clairs
à l'effet que c'est une très bonne façon de nommer. Je pense que, dans
le mémoire, on est quand même assez nuancés sur la façon qu'on l'apporte.
M. Coiteux :
Je comprends que ce n'est pas votre cheval de bataille, mais, puisque vous
l'avez inscrit dans le mémoire et que
je m'attends à ce que mon collègue de l'opposition officielle pose des
questions à cet effet pour renchérir sur sa propre position, je me
permets quand même de soulever cet enjeu-là.
Donc, vous
n'êtes pas en train de nous dire que le comité de sélection, le mécanisme qui
est utilisé dans le cas du DPCP, fait
en sorte que le DPCP n'a pas pleine indépendance ni l'apparence de
l'indépendance. Vous ne nous dites pas ça, là.
Mme Baig
(Kathy) : Nous, ce qu'on dit,
c'est que le comité de sélection est vraiment bien au
niveau de la compétence. Au niveau de l'apparence de l'indépendance, ce qui a été dit dans le mémoire, c'est que la nouvelle façon de nomination, c'est bien, mais c'était l'assemblée générale, au niveau de
l'apparence, pour certaines personnes, qui pourrait être encore... C'est tout.
• (16 h 30) •
M. Coiteux :
O.K. D'accord. C'est parce que je me permets non seulement d'avoir cet échange
avec vous là-dessus, mais de répondre
à quelque chose qui a été dit tout à l'heure, comme si
c'étaient des parlementaires du parti formant le gouvernement qui nommaient le DPCP, parce que c'est ça que ça veut dire,
finalement, puisque ce qui est prévu dans le projet de loi n° 107,
c'est un mécanisme qui est identique à celui du DPCP.
Donc, c'est laisser entendre que, des parlementaires
du parti politique formant le gouvernement, c'est eux qui décident c'est qui
qui va être le DPCP, c'est qui qui serait, le cas échéant où la loi est adoptée
telle qu'elle est, le commissaire à l'UPAC. Ça n'a aucun sens, là. On a un comité
indépendant qui sélectionne, de façon indépendante, des candidats
compétents, et le gouvernement n'a pas le choix que de nommer à l'intérieur des
recommandations. Alors, quand on parle de
politisation des processus de
nomination, l'apparente politisation de ça, je pense qu'elle était éclatante
du côté de ce qui a été dit tout à l'heure
par mon collègue de Matane-Matapédia. Et, puisque c'est dans votre mémoire,
je me permets de soulever ces points-là parce que ce sont
des enjeux extrêmement sérieux, l'indépendance entre les membres de l'Assemblée et les représentants du
pouvoir judiciaire et, étroitement associés au pouvoir judiciaire, les pouvoirs
policiers. Alors, ce n'est pas pour rien
qu'on fait cette proposition-là. Ce n'est pas pour rien que les parlementaires,
à une autre époque, ont décidé que le
DPCP serait nommé de cette façon-là. Alors, je pense que ça valait la peine
d'être redit, parce qu'il fallait effectivement le dire.
Mais
je reviens à un autre sujet, maintenant, une fois que je me suis exprimé à mon
tour là-dessus, hein, je reviens à un
autre sujet, qui est celui de l'immunité et de la consultation du syndic. La
question que je me pose ici, puis je vais vous la poser dans les termes suivants : Est-ce que vous voyez les
choses différemment selon qu'un dossier ait été ouvert ou non à propos de la personne qui pourrait faire
l'objet d'une telle immunité? Est-ce que vous traiteriez, si vous étiez consultés...
ce qui n'est pas la proposition dans le
projet de loi, mais, si vous étiez consultés, est-ce que vous traiteriez
différemment les choses selon que la
personne fait l'objet d'un dossier ouvert chez vous ou bien vous apprendriez
quelque chose pour la première fois?
Mme
Baig (Kathy) : Si je comprends bien votre question, vous voulez
savoir, si jamais il y avait une entente qui était faite mais avec un membre d'un ordre professionnel sur lequel il
n'y avait pas de dossier disciplinaire en cours versus si on a un
dossier disciplinaire... c'est dans ce sens-là.
À
première vue, c'est sûr que, nous, ce qui nous embête beaucoup, c'est s'il y
avait un dossier disciplinaire en cours, dans le sens où, je pense qu'on en a
parlé beaucoup, on en a parlé dans le mémoire et dans l'allocution, c'est quoi,
la reddition de comptes qu'on donne au citoyen ou à la personne qui a porté une
plainte. Donc, ça, ça m'apparaît vraiment clair. Maintenant, s'il n'y
avait aucun dossier disciplinaire du tout... Peut-être que je pourrais demander
au syndic qui m'accompagne, voir si lui voyait un enjeu en ce sens-là.
M.
Giroux (Réal R.) :
Théoriquement, si le syndic est saisi d'une information, alors il a le
devoir de faire enquête, normalement. Mais là on fait appel à une situation
hypothétique où l'individu en question, si j'ai bien compris votre question,
serait... ou serait pressenti pour être un informateur, par exemple, de l'UPAC. Ça dépend beaucoup de la gravité des choses qui lui seraient reprochées. Mais, s'il y avait
une infraction de nature professionnelle, donc qui est liée à sa profession,
là, à ce moment-là, on a le devoir de faire enquête, c'est sûr.
M.
Coiteux : C'est pour ça que
je vous posais la question, parce que justement, si vous étiez
consultés, est-ce que ça ne vous
mettrait pas dans une position extrêmement délicate par
rapport à ce qu'est votre rôle? Et, à ce moment-là, est-ce qu'ultimement, sachant cette situation dans laquelle vous
seriez et ne sachant pas comment vous réagiriez à une telle chose,
est-ce que ça ne pourrait pas dissuader certaines personnes à devenir des... on
appelle ça des...
Une voix :
...
M.
Coiteux : Des témoins
collaborateurs. C'est le terme que je cherche. Est-ce qu'on ne va pas obtenir
un résultat inverse à celui qui est souhaité? Je pose la question. Je
n'ai pas la réponse. Mais j'aimerais ça en discuter avec vous.
M. Giroux (Réal R.) : Je pense que, si le témoin collaborateur... si,
par exemple, ça faisait l'objet, simplement, comme on l'a suggéré, d'une consultation de la part... Par exemple, dans
notre exemple de l'UPAC, si l'UPAC nous mettait au courant de ça, bien, c'est sûr qu'à ce moment-là on serait ouvert à
un autre traitement, à une autre manière de regarder les choses.
La dernière chose que l'on veut, bien entendu,
c'est de nuire à une enquête criminelle. Ça, c'est certain. Mais on est
habitués aussi, par ailleurs, à traiter avec des gens qui ont agi comme
informateurs dans certaines enquêtes de collusion, notamment, et pour
lesquelles l'UPAC n'a pas été, selon notre connaissance, impliquée. Il y a des
municipalités où nous avons fait
enquête, à l'heure actuelle, où l'impact... l'UPAC, excusez-moi, n'a pas mis
les pieds encore, selon nos informations et selon tout ce qui a été
relaté dans les journaux. Donc, on est habitués aussi à traiter des cas d'informateur
en ce qui a trait à des malversations d'ordre professionnel.
M.
Coiteux : Oui, mais il peut y avoir des informateurs qui pourraient
être susceptibles d'avoir un dossier chez vous en discipline et d'autres qui n'auraient pas cet... Je ne sais pas
comment vous traitez ça, là. J'espère que vous traitez ça avec toute la délicatesse requise. Mais c'est
ça, le sens de ma question, c'est que, des fois, un informateur n'est pas
simplement quelqu'un qui a quelque chose à
se reprocher, mais, si l'informateur a quelque chose à se reprocher — vous avez peut-être vécu des
situations comme celles-là — comment
vous traitez ça?
Et
donc, le cas échéant, comment traiteriez-vous du cas où c'est le DPCP qui,
selon vos souhaits, vous consulterait avant
de conférer une telle immunité? Comment vous traiteriez quelque chose comme ça
si c'était la première fois que vous
appreniez l'existence d'une personne qui cherche à obtenir l'immunité pour
quelque chose que vous ne savez même pas qu'elle a commis?
Mme
Baig (Kathy) : Si je peux me permettre. Deux choses. Vous demandez la
question : Est-ce qu'il devrait nous
consulter, même s'il n'y avait pas de dossier? Mon réflexe serait peut-être de
dire : Oui, pour qu'on puisse l'éclairer dans sa prise de décision — c'est ce qu'on dit aussi dans notre
mémoire — pouvoir
échanger avec lui. Ensuite de ça, si jamais
c'était le cas où on était zéro au courant des infractions qu'il a commises,
nous aussi, dans les ordres professionnels... je pense, c'est avec la loi n° 11, où on nous a donné un pouvoir
d'immunité encore plus grand, donc, on peut également octroyer cette
immunité disciplinaire là actuellement. Donc, je pense, c'est un travail de
collaboration.
Nous, ce qu'on dit, c'est que
collaborer, ce n'est pas nécessairement de mettre un frein à cette prise de
décision là, c'est d'avoir un échange
avec le DPCP pour qu'il puisse prendre une décision éclairée. Donc, je ne pense
pas que l'indicateur de police — je pense, c'est le terme qui est
utilisé — pourrait
voir ça comme une menace, parce qu'on ne demande pas un pouvoir décisionnel. On demande un pouvoir de
collaboration, de réflexion et d'échange avec le DPCP pour l'aider dans
la prise de décision. Donc, je ne sais pas si ça répond plus à votre question.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Oui, ça répond à une partie de mes questions, mais justement
ça fait en sorte que je vois encore davantage la complexité du genre de situation
dans lequel tout le monde se met dans des cas comme ceux-là et donc ça nécessite une réflexion profonde. Alors, c'est ce
qu'on va faire certainement suite aux consultations, cette réflexion profonde.
Pour moi, ça va, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Est-ce qu'il y a des questions de la part des collègues?
Parce que j'entendais M. Giroux, et vous
parlez d'utilisation d'informateurs à votre niveau, et je pense que, quand on
étudiera l'article par article... Il
y a une très grande différence entre l'informateur de syndic ou de police et le
témoin collaborateur qui va venir témoigner dans une cause. Et je comprends de votre témoignage aussi qu'il y a des
endroits où vous avez conclu des enquêtes, les gens ont reconnu, parce qu'on l'a vu, ont reconnu une certaine
culpabilité devant le syndic, et ce n'était pas à la connaissance des autorités policières qui ont amené certaines
actions, là. Je pense à certaines municipalités sur la Rive-Nord que, suite
à une condamnation chez vous, il y a des bureaux qui ont été mis en place sans
qu'il y ait eu intervention policière.
Mais,
dans l'article par article, je pense que M. le ministre apportera les
précisions nécessaires à la définition d'un informateur par rapport à un témoin
collaborateur, parce que, un informateur, le DPCP ne le voit pas. Il voit le
témoin collaborateur, qui a un
avantage et un intérêt à collaborer avec la justice. L'informateur est beaucoup
plus confidentiel, que ça soit à
votre niveau ou au niveau des forces policières. Je ne sais pas si vous avez
quelque chose à rajouter là-dessus ou si ça éclaire un peu le
commentaire que vous nous aviez fait, M. Giroux.
M.
Giroux (Réal R.) : Je fais allusion spécifiquement à des individus
ingénieurs qui ont, dans certains cas, hein, participé à des actes collusoires. Et c'est une des malversations les
plus difficiles à prouver s'il n'y a pas de dénonciation. Donc, ces personnes-là sont venues nous rencontrer
et nous ont révélé des détails importants, pour nous, nous mettant sur la piste d'enquêtes puis nous permettant
souvent de rejoindre, façon de parler, d'autres participants à des actes
collusoires.
Le Président (M. Ouellette) : O.K. Donc, ces personnes-là, c'est des personnes
qui vous donnent de l'information. S'ils
ont participé, à ce moment-là, je pense que la recommandation ministérielle va
être de vous dire : Vous devez en référer
à l'UPAC, parce qu'ils sont partie à une infraction et, à ce moment-là, vont
devenir des témoins collaborateurs dans le système de justice, avec
intervention du DPCP.
• (16 h 40) •
M.
Giroux (Réal R.) : Vous avez raison. Dans les deux exemples que j'ai
en tête en particulier, c'est des gens qui avaient déjà collaboré avec
l'UPAC dans ces cas-là.
Le Président (M. Ouellette) : C'est beau. Ça a au moins le mérite d'être clair.
M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé :
Merci, M. le Président, Mme Baig, les gens qui vous accompagnent. On est
heureux d'accueillir l'Ordre des ingénieurs du Québec et on a bien lu votre
mémoire. Et on note que votre première recommandation porte sur la nomination du commissaire à l'UPAC. C'est
la première. Vous vous êtes réunis en comité, vous avez échangé. Vous
êtes une grande institution qui date de 1920.
Vous
avez choisi, dans le mémoire que vous présentez à la Commission des
institutions, en première position la nomination
du commissaire à l'UPAC, et pas sans raison. Et je vais citer votre
mémoire : «Par sa fonction, le commissaire est appelé à enquêter sur de possibles infractions commises par des
hauts fonctionnaires, du personnel politique et même des ministres. En conséquence, le commissaire doit
non seulement être indépendant, mais perçu comme tel par le public. Or, sa nomination par le gouvernement — pas par l'ensemble des parlementaires — pourrait occasionner des soupçons de partisanerie ou d'indulgence, minant ainsi la
confiance que devrait lui porter le public ainsi que celle des personnes
qui ont été témoins de malversations et dont la collaboration est essentielle.»
Je
suis heureux que le ministre ne vous ait pas taxés de politiser ce débat-là. Il
l'a fait avec moi, mais il ne l'a pas fait
avec vous, et je m'en réjouis pour vous. Vous êtes nos invités, après tout.
Puis vous avez raison de le dire, parce que vous savez qu'il y a un sondage, en mai dernier, qui nous indiquait que
61 % de la population du Québec croit que l'UPAC est sensible aux
pressions politiques. Vous avez certainement vu ce sondage-là. Alors, ce n'est
pas sans raison qu'on propose ça. Le
ministre, le gouvernement, eux, choisissent de maintenir la solution actuelle
en disant : C'est la bonne façon
de procéder, même si la population lui dit ça. Alors, il faut maintenir ça. Et,
pour avoir participé moi-même à un conseil
des ministres... ils peuvent avoir trois noms, ils en choisissent un, ils
délibèrent entre eux. Ces procès-verbaux-là ne sont pas accessibles avant des années. Ils nous font une
recommandation et ils votent avec leur majorité parlementaire. Alors, il
est juste de dire qu'uniquement les députés libéraux choisissent le patron de
l'UPAC. Et j'ajouterais à votre argumentaire
que : Est-ce qu'il est possible qu'ils enquêtent sur des ministres ou des
gens apparentés au gouvernement libéral?
Oui. Et je vais me permettre de dire que les cas sont abondamment médiatisés,
et pas les moindres. Alors, oui, l'UPAC,
le commissaire de l'UPAC, nommé par le gouvernement libéral, enquêtent sur des
gens du Parti libéral du Québec. Il y a même deux parlementaires de
cette Chambre qui ont été rencontrés par l'UPAC dans cette législature.
Alors, sur votre première
recommandation, le ministre vous a posé la question. Je sais que vous
l'assumez. Vous l'avez écrite. Pouvez-vous nous réitérer pourquoi c'est
important d'avoir une totale indépendance de l'UPAC lorsque vient le temps de
conduire des enquêtes, notamment, sur des hauts fonctionnaires, du personnel
politique, voire même des ministres ou des députés?
Mme Baig
(Kathy) : Excellent. Donc, pour répondre, la première chose :
c'est notre première recommandation, mais
c'est simplement parce que c'est un des premiers articles de loi dedans. Ce
n'est pas parce que c'est la recommandation la plus importante dans le
mémoire.
M. Bérubé : ...
Mme Baig
(Kathy) : Oui, c'est la recommandation n° 1, mais elle est là pas
parce que c'était la plus importante, mais
bien parce que c'est en lien avec la liste des articles de loi. Et, je vais
vous répéter ce que j'ai dit tantôt, en fait, on l'a clairement dit dans
le mémoire, que le mode de nomination actuel, c'est une amélioration par
rapport à ce qu'il y a actuellement. Au
niveau de la compétence, on pense que le comité de sélection, c'est vraiment la
bonne forme pour s'assurer de la compétence de cette personne-là.
Maintenant,
bien que c'est une amélioration, au niveau de la perception, on a pensé... et
les mots qui sont là, c'est : Pour garantir de manière optimale une
perception : nommée par l'assemblée générale, mais, encore une fois...
Une voix : ...
Mme Baig
(Kathy) : Je dis tout le temps «générale». Je m'excuse. Assemblée
nationale. Encore une fois, ce n'est pas la raison principale pourquoi
on est venus ici, c'est une amélioration, et c'était juste une question de si
on voulait vraiment avoir une meilleure apparence.
M.
Bérubé : «Garantir
de façon optimale».
Mme Baig (Kathy) : La
perception.
M. Bérubé :
Je retiens cette phrase. Ce n'est pas sans raison. L'Ordre des ingénieurs a
souffert que certains de ses membres,
heureusement une très faible minorité, aient commis des gestes qui n'allaient
pas dans le sens de ses valeurs fondamentales. Et c'est pour ça que je
salue tout le travail que vous avez fait, les recommandations, les échanges à travers la profession pour vous assurer qu'on
suive les meilleures pratiques possible en ce sens, et moi, je le retiens. Et
je veux bien croire que ce n'était pas le sujet que vous vouliez
aborder, mais vous l'avez placé dans le mémoire. Alors, comme parlementaire — il est là — je salue votre courage. Vous n'êtes pas
seuls, hein? Le nombre de chroniqueurs, le nombre de groupes qui le demandent, c'est quand même beaucoup de monde
qui pense que c'est une bonne idée, puis la population québécoise,
essentiellement, également, et je suis convaincu que... Vous avez combien de
membres?
Mme Baig (Kathy) : 63 000,
environ.
M. Bérubé :
63 000?
Mme Baig (Kathy) : Oui.
M. Bérubé :
C'est énorme. 63 000 membres. Alors, je suis convaincu qu'ils vont
être sensibles à cette proposition, qu'ils
sont en accord avec vous. Et, parmi ces membres, vous savez qu'il y en a au
moins une à l'Assemblée nationale, qui
a dit, en 2012, publiquement que l'élection de 2012 avait été faite dans une
atmosphère de corruption. Une de vos membres.
Elle est actuellement vice-première ministre du Québec, Mme la présidente.
Alors, vous la représentez toujours, elle est toujours ingénieure, à ma
connaissance.
Sur ce que
vous avez fait en termes de travail, vous avez parlé beaucoup également de
l'indépendance du DPCP, vous vous
êtes intéressés également à cette institution, qui est aussi importante que
l'UPAC, quant à moi, parce qu'un amasse
la preuve, l'autre décide de procéder ou pas. Ça va ensemble. On en a moins
parlé, parce que ça relève moins de la sécurité
publique, c'est de la justice. Est-ce qu'il y a des éléments que vous voulez
ajouter à la discussion qu'on a eue tout à l'heure entre le ministre et
vous sur cette question?
Mme Baig
(Kathy) : Mais on n'a pas tant parlé de l'indépendance, mais on parle
beaucoup de la collaboration avec le
DPCP, on parle beaucoup du caractère public. C'est quelque chose qu'on n'a pas
beaucoup abordé, mais pour nous c'est
un des enjeux importants, le caractère public. Je pense qu'on l'a mentionné, je
pense qu'il y a d'autres gens qui sont
venus avant... le plus important, nous, c'est que, si jamais il y a des plaintes
qui sont retirées au conseil de discipline, bien, il faudrait être capable de donner l'information soit aux
demandeurs d'enquête ou aux gens qui font le suivi. Des fois, il n'y a pas nécessairement de demandeur d'enquête,
mais les membres ou le public font le suivi de certains dossiers, surtout
une fois que c'est inscrit au rôle.
Donc, au-delà
de la collaboration, un des enjeux qui est vraiment important, ça serait le
caractère public, si jamais le DPCP
prenait une telle décision, pour qu'on puisse donner cette reddition de comptes
là aux gens et un peu protéger l'image du système professionnel puis tout le
travail qu'il fait actuellement pour, puis on l'a témoigné, là, dans
l'allocution, tous les dollars qui sont investis.
M.
Bérubé : Puis c'est à juste raison, parce que vous êtes là
pour protéger, je dirais, le public aussi, s'assurer que, lorsqu'il traite avec des ingénieurs, c'est les
plus hauts standards possible. Puis vous avez du perfectionnement, je sais
que vous vous inspirez des meilleures
pratiques à l'international également, et ce mémoire est le fruit de beaucoup
de travaux que vous avez faits depuis très longtemps en ce sens-là.
Donc, vous considérez
que, s'il n'y a pas ce caractère public, c'est préjudiciable pour vos membres,
c'est ça?
Mme Baig
(Kathy) : Du système professionnel...
M.
Bérubé :
Du système en général.
Mme Baig
(Kathy) : ...et des ordres professionnels, tout à fait.
M.
Bérubé :
Des ordres, pas seulement du vôtre.
Mme
Baig (Kathy) : Bien, s'il y en a d'autres, ils vont être dans la...
Que ce soient les CPA, que ça soit le Barreau, s'il y a autre chose, ils vont être pris dans la même situation. S'il y
a des plaintes qui sont retirées du conseil de discipline et qu'on ne peut pas expliquer pourquoi ça a été
retiré, qu'est-ce qui s'est passé, qu'on ne peut pas faire cette reddition
de comptes là, que ce soit l'Ordre des ingénieurs, le Barreau ou les CPA, ils
vont être dans la même situation.
M.
Bérubé :
D'accord. Écoutez, ça me va, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Mme Baig, M. Giroux et...
j'ai oublié le nom de l'autre monsieur, bien, bienvenue. Moi, je peux vous dire, on a reçu avant la Protectrice du
citoyen, et puis vous semblez protéger plus le public que la Protectrice
du citoyen comme telle, et je m'explique.
Dans
la recommandation n° 3, le deuxième picot, il dit : «...en [...] y
ajoutant l'obligation pour le DPCP de consulter le plaignant avant de notifier l'avis mettant fin à l'instruction de la
plainte.» Ça, ça veut dire qu'il y a quelqu'un qui est revenu au citoyen puis lui dire : Écoutez,
là, ta plainte que tu avais faite, là, regarde, elle n'ira pas plus loin, mais
on t'avertit que... tu sais? Mais au
moins on l'avertit. Tantôt, je n'ai pas eu de réponse là-dessus, aucune
réponse. Interroger les ordres professionnels.
Vous êtes le premier ordre professionnel qui vient nous dire ça, d'ailleurs. La
Protectrice du citoyen ne savait pas
c'est qui qui allait faire ça, qui protège le citoyen, en bas de la ligne,
celui-là qui a fait la plainte. Alors, je trouve ça intéressant puis j'espère que j'ai bien compris, là, que c'est ça qui
allait se passer. Bien, c'est ça que vous demandez.
Mme
Baig (Kathy) : Oui, tout à fait, vous avez bien compris. En fait,
c'est clairement écrit ici. C'est qu'actuellement, si jamais une plainte était retirée, le plaignant,
c'est nous, mais il peut y avoir d'autres personnes. Donc, on souhaite de
pouvoir le notifier. Peut-être que je
pourrais donner la parole à Me Robert, qui a beaucoup élaboré sur le sujet. Il
pourrait vous donner un complément d'information.
Le Président (M.
Ouellette) : Me Robert.
• (16 h 50) •
M.
Robert (François-Xavier) : Alors, merci. En fait, le plaignant, dans
le système professionnel, c'est un peu l'équivalent, dans le système
criminel, du DPCP. En général, la plupart des plaintes dans un système d'un
conseil de discipline sont déposées par le
syndic. Il y a des gens, des fois, qui peuvent déposer des plaintes
d'eux-mêmes, mais ça reste une situation qui est assez marginale.
La question,
effectivement, que vous posez et votre préoccupation, c'est : S'il y a une
plainte qui est arrêtée, est-ce qu'on
informe le demandeur d'enquête, donc la personne qui, elle, a peut-être pris
son courage à deux mains et a appelé le bureau du syndic pour faire un
signalement? En fait, selon le projet de loi tel qu'il est écrit en ce moment, dépendant du moment où l'avis du DPCP va être
déposé, on va être en mesure de fournir une réponse ou on ne pourra pas
fournir une réponse. C'est-à-dire que, contrairement aux dossiers criminels ou
pénaux à la justice, les dossiers du conseil
de discipline sont confidentiels jusqu'à ce que l'audience disciplinaire
commence. Donc, si l'avis est déposé après le début de l'audience
disciplinaire... ce qui devrait être assez rare, mais, si ça arrivait, à ce
moment-là, l'avis serait public, puis
là on pourrait, nous, donner des comptes, dire : Écoutez, nous, on avait
déposé une plainte, on estimait qu'il y avait une infraction. Puis ça, le syndic, lui, a déjà fait sa reddition de
comptes, pendant son enquête, au demandeur d'enquête, ce n'est pas
nouveau, là.
M.
Spénard : Je ne veux pas que vous me parliez une demi-heure
de temps là-dessus, parce que je n'ai pas une demi-heure, là, mais, en
fin de compte, là...
M. Robert
(François-Xavier) : Mais, en gros, c'est que, si c'est déposé...
M.
Spénard :
En fin de compte, moi, ce que je veux savoir, là : Est-ce que vous avez
comme principale obligation d'informer le plaignant, d'informer le
citoyen? C'est votre job puis c'est ça que vous demandez.
Mme
Baig (Kathy) : C'est ce qu'on demande. Actuellement, la façon qu'on comprend
la loi, c'est qu'actuellement on ne pourra pas lui donner l'information.
M.
Spénard :
Bien, c'est ça, mais c'est ce que vous demandez.
Mme Baig
(Kathy) : C'est exactement ce qu'on demande, tout à fait.
M.
Spénard :
O.K. J'ai une autre question qui n'a pas rapport à ça, mais tantôt Me Giroux a
dit que ça arrive souvent qu'on fait
enquête; même s'il n'y a pas de plainte de déposée officiellement du côté pénal
ou du côté civil, on fait enquête.
Moi, j'aimerais savoir : Lorsque vous faites enquête comme ça pour, je ne
sais pas, un plaignant qui se plaint pour un contrat municipal, à qui
faites-vous rapport?
Mme Baig
(Kathy) : Si je peux me permettre. M. Giroux pourrait répondre.
M.
Spénard :
Oui.
Le Président (M.
Ouellette) : M. Giroux.
M.
Giroux (Réal R.) : On a deux
possibilités. La première possibilité, il y a un demandeur d'enquête qui a
identifié une situation. Dans votre
exemple, il a identifié un ingénieur ou des ingénieurs qui ont peut-être commis
des malversations. Je dis
«peut-être», parce que ça demeure toujours à être prouvé. Là, c'est sûr, je
dois répondre à ce demandeur-là. Par contre,
sur la foi d'une l'information, il n'y a pas de demandeur d'enquête, d'une
information qu'on peut avoir obtenue d'une
manière incidente, j'ai le devoir de faire enquête. À ce moment-là, c'est un
dossier que l'on rouvre à l'interne chez nous. On appelle ça un dossier
proprio motu. Donc, on prend sur nous la responsabilité de rouvrir ce dossier,
de faire enquête. Beaucoup des dossiers de collusion, corruption, ça s'est
passé de cette façon-là.
M.
Spénard :
Lorsqu'un dossier est positif sur une malversation quelconque, vous portez
plainte.
M. Giroux (Réal R.) :
Exact.
M.
Spénard : O.K. L'autre chose que j'aimerais que vous
m'expliquiez, puis c'est la première fois que je le vois, là, à la
recommandation n° 3, encore le premier picot : «...remplaçant le
critère d'intérêt de la justice par celui d'intérêt général.» J'aimerais
ça avoir un peu d'explications là-dessus.
Mme
Baig (Kathy) : Oui. En fait, justement, parce que c'est un sujet qui
revient souvent, «intérêt de la justice» ou «intérêt supérieur de la justice»... là, je ne veux pas me substituer
aux avocats, puis probablement qu'après je vais donner la parole à Me Robert, mais c'est vraiment plus au
niveau procédural et administratif, alors qu'«intérêt général» ou «intérêt
du public», c'est vraiment plus au niveau
collectif, donc plus général, plus grand. Ça fait que c'est comme ça que je le
vulgariserais pour un non-avocat. Je ne sais
pas si Me Robert a des compléments à donner par rapport à cette
interprétation-là.
Le Président (M.
Ouellette) : Me Robert.
M.
Robert (François-Xavier) : Rapidement.
Merci, Mme la présidente. Rapidement. L'intérêt de la justice ou l'intérêt supérieur de la justice, c'est des
notions qui sont, quant à nous, à peu
près équivalentes. Puis, on regarde
dans la jurisprudence, là, ils sont utilisés de façon mélangée par la Cour
suprême, notamment, puis il n'y a pas vraiment de différence.
L'intérêt
général ou l'intérêt public, c'est un peu des similaires, dans le fond, visent vraiment la poursuite du bien commun. Puis, à ce moment-là, on ne
s'attarde pas uniquement aux aspects purement juridiques ou judiciaires,
en fait, donc simplement l'administration du procès criminel,
mais on va s'intéresser, dans ce contexte-ci, à d'autres questions, par
exemple l'importance de la régulation des professions, que les professionnels
soient éthiques, soient intègres, qu'il y
ait des sanctions. Donc, on va s'intéresser à d'autre chose que simplement la
conduite du procès criminel. Ça fait que
c'est pour ça que nous, comme la commission Charbonneau, on préférait le
critère d'intérêt général, parce que ça force le DPCP à entamer une réflexion beaucoup plus sérieuse... ou beaucoup
plus complète, plutôt, sur : Est-ce que c'est vraiment opportun d'arrêter une poursuite disciplinaire ou
est-ce que je le fais simplement pour me faciliter le travail dans mon dossier criminel? Mais, non, il y a d'autres
circonstances dont je dois tenir compte, il y a d'autres impératifs, puis c'est
ça que l'intérêt général puis l'intérêt public commandent.
M.
Spénard : O.K. Il me reste 10 secondes. Si je comprends
bien, l'intérêt général inclut l'intérêt de la justice, mais l'intérêt
de la justice n'inclut pas l'intérêt général si on veut faire ça, là.
M. Robert (François-Xavier) : C'est
notre compréhension de ces mots-là tels qu'ils ont été utilisés dans la
jurisprudence, notamment.
M.
Spénard :
O.K. Merci beaucoup, merci pour votre apport. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Mme Kathy Baig, M. Giroux et Me François-Xavier Robert, merci d'être venus déposer en commission.
Je vais
suspendre quelques minutes et je vais demander à l'Association des policières
et policiers provinciaux du Québec et son président, Pierre Veilleux, de
s'avancer.
(Suspension de la séance à 16 h 55)
(Reprise à 16 h 59)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous recevons maintenant l'Association des policières et policiers
provinciaux du Québec, son président,
Pierre Veilleux, qui nous fera le plaisir de nous présenter les gens qui
l'accompagnent. Puisque vous êtes un
habitué, vous savez que je dois vous confiner dans 10 minutes et que par la suite il y aura des échanges avec M. le ministre et les porte-parole
des deux oppositions. Je vous donne la parole immédiatement, M. Veilleux.
Association des policières
et policiers provinciaux du Québec (APPQ)
M.
Veilleux (Pierre) : Merci, M. le Président. Je suis accompagné de Me Alain Rousseau,
procureur de l'association; M. Jacques Painchaud, vice-président à la discipline et à la déontologie; et Dominic Ricard, vice-président aux griefs et à la formation.
• (17 heures) •
L'Association des policières et policiers
provinciaux du Québec, agissant à titre de représentante de plus de 5 400 membres actifs de la Sûreté du Québec, tient à remercier la commission de l'opportunité qui lui est offerte de faire
valoir son point de vue concernant le projet de loi n° 107.
Tout d'abord, soulignons d'emblée que, sous réserve de commentaires ou d'observations contenus dans le présent document,
l'association est en accord avec les différents principes énoncés concernant l'Unité permanente anticorruption, le Bureau
des enquêtes indépendantes et également
celui relatif à l'ajout de certains pouvoirs au Directeur des poursuites criminelles et pénales.
En fait, il est opportun de savoir que nos
membres composent présentement plus ou moins 80 % des effectifs affectés à l'UPAC. Le lecteur ne sera donc pas
surpris que les prêts de service proposés se situent parmi nos principales
préoccupations dans le cadre des discussions
sur le projet de loi n° 107. Par ailleurs, nous ne pouvons qu'être en accord
avec l'indépendance opérationnelle que
désire octroyer le législateur à la Direction de l'UPAC. Toutefois, il est
reconnu que l'apparence
d'indépendance et d'impartialité est au moins aussi importante qu'une réelle
indépendance et impartialité. De
plus, l'élargissement du mandat de l'UPAC nous semble répondre à un besoin pour
que nos institutions publiques, parfois
mises à mal aux yeux de la population, puissent maintenir ou rétablir leur
crédibilité dans l'esprit de la population en général.
Indépendance
et impartialité de l'UPAC. Comme mentionné précédemment, l'indépendance et
l'impartialité sont des composantes
essentielles afin que nos institutions publiques puissent bénéficier du respect
qu'elles méritent, garantissant du même coup le bon fonctionnement de notre
société. Ainsi, nous sommes d'avis que le mode de nomination ou la destitution
du directeur de l'UPAC devrait se faire lors... devrait faire l'objet, pardon, d'une
procédure de vote aux deux tiers des députés
de l'Assemblée nationale. D'ailleurs, quant aux personnes devant être désignées
par l'Assemblée nationale, le site
Web de celle-ci mentionne ce qui suit : «Une personne désignée est une
personne nommée par l'Assemblée nationale
pour exercer une charge publique. Un tel statut contribue à préserver
l'indépendance de la personne désignée et
son impartialité dans l'exercice de ses fonctions[...]. Les cinq personnes
désignées sont nommées sur proposition du premier ministre approuvée par
au moins les deux tiers des membres de l'Assemblée.»
Or, il
est notoire que les travaux de l'UPAC aient parfois démontré leur proximité
avec le monde politique provincial ou
municipal, justifiant amplement, à notre avis, que la nomination ou la
destitution de son directeur se fasse par un vote des deux tiers des députés de l'Assemblée
nationale. Nous croyons que ce processus serait de nature à assurer aux yeux de
la population l'indépendance et
l'impartialité de l'UPAC et contribuerait à une diminution du cynisme ambiant
de notre société entourant nos institutions et la classe politique en
général.
Les
conditions de prêt de l'UPAC : préoccupation majeure de l'association. Aux
fins d'une meilleure compréhension, nous nous permettons de reproduire
ici l'intégrale de l'article 14 du projet de loi n° 107.
Article
14 : «Peut agir comme enquêteur tout membre d'un corps de police dont les
services sont prêtés au commissaire, sur entente conclue entre ce
dernier et l'autorité [...] qui relève [de] ce corps de police.
«Les enquêteurs dont les services sont ainsi
prêtés sont des agents de la paix sur tout le territoire du Québec.»
Étant donné
que le projet de loi n° 107 ne fait aucunement état des conditions
précises dans lesquelles s'effectueront ces prêts de service, l'association est donc très préoccupée à ce sujet,
et ce, autant pour ses membres qui sont actuellement affectés à l'UPAC que ceux qui y accéderont dans
l'avenir. En effet, il est bon de
savoir que les membres de l'association qui composent la majorité des effectifs policiers de l'UPAC ne font
présentement l'objet d'aucun prêt de service au sens de l'article 14 du projet de loi. Ils relèvent
plutôt de leur service de police d'origine, en l'occurrence la Sûreté du Québec.
Les
principales préoccupations de nos membres à ce sujet peuvent être résumées
comme suit : que leur soit reconnue la possibilité de demeurer au
sein de l'UPAC au-delà du temps de placement régulier de quatre ans, qui est ou
serait sur le point
d'être complété lors de l'entrée en vigueur de cette disposition du projet de
loi; que la possibilité que ce prêt de
service de l'UPAC puisse être renouvelable; qu'un délai raisonnable soit
accordé aux membres de l'UPAC entre le moment
de la communication des conditions de prêt de service, selon l'article 14, et
la possibilité qui devrait leur être offerte
de se retirer de l'UPAC afin de retourner à leur service de police d'origine;
que, durant ce service, les membres aient
également la possibilité de revenir à leur service policier d'origine avec un
préavis de 30 jours; que l'encadrement juridique
et contractuel de ce prêt de service soit clairement établi, et ce, afin que
leurs droits, privilèges et conditions de travail soient respectés.
Prêt de service à l'École nationale de police du
Québec — ENPQ :
un modèle à retenir. Afin que les prérogatives administratives et
opérationnelles de l'UPAC, de même que l'ensemble des préoccupations de nos
membres, soient rencontrées, l'encadrement juridique de ces prêts de service
devrait faire l'objet d'un modèle dans lequel les droits et obligations de tous les intervenants sont
clairement établis. Le modèle de prêt de service de l'École nationale de police
en est un déjà connu de nos membres, du
gouvernement, de la Sûreté du Québec et de l'association. Ce dernier a également fait ses preuves en termes d'efficacité et
d'efficience dans le respect des droits des hommes et des femmes appelés à
devenir membres de l'École nationale
de police. Ainsi, nous croyons que ce modèle de prêt de service serait celui à
retenir pour les membres appelés à devenir membres de l'UPAC.
Sans qu'il
soit utile d'entrer ici dans les détails de ce type de modèle, nous désirons
toutefois attirer votre attention sur
les principales composantes. Le prêt de service fait l'objet d'une entente
tripartite entre l'ENPQ, la SQ et l'association. Cette entente de prêt de service prévoit que les conditions de travail
applicables à nos membres sont celles du contrat de travail entre l'association et le gouvernement,
sauf celles mentionnées dans le contrat tripartite. La procédure applicable au
règlement des litiges de ce contrat est la même que celle connue des parties
dans le contrat entre le gouvernement et l'association,
en faisant les adaptations nécessaires. Cette entente permet l'uniformisation
des conditions de travail des membres assujettis au prêt de service. Ce contrat
tripartite a l'avantage également de prévoir les modalités de transfert lors d'un retour au service de police d'origine du
membre. Enfin, cette entente tripartite prévoit les modalités d'un retour au service de police d'origine, que ce soit la
volonté du membre ou celle de l'ENPQ, que ce soit durant ce prêt ou à son
expiration. À la lecture des différents
éléments, nous espérons que le gouvernement constatera comme nous les avantages
d'utiliser un modèle de prêt de service déjà connu par les différentes parties
en cause et reconnu pour son efficacité.
Élargissement
du mandat des enquêtes indépendantes. Le projet de loi prévoit l'élargissement
de la juridiction du BEI pour y inclure les infractions à caractère
sexuel commises par un policier dans l'exercice de ses fonctions. À cet égard, nous croyons opportun de reproduire
dans ce mémoire les différentes dispositions dont il est question, entre
autres les articles 28 et 30 du projet de
loi et le 286 de la Loi sur la police, que je vais m'astreindre de vous en
faire lecture à ce moment-ci. Même si
l'association ne s'objecte pas formellement à l'élargissement du mandat du BEI
à cet égard, nous croyons utile de
souligner que nous ne voyons tout de même pas la nécessité que ce type
d'enquête soit fait par le BEI,
puisque celles-ci sont, à notre avis, déjà effectuées de façon indépendante,
que ce soit à l'interne ou à l'externe des services de police, et ce, avec rigueur. De plus, nous savons
pertinemment que les allégations de cette nature sont prises très au sérieux par les autorités concernées.
Notre préoccupation sur le sujet concernait davantage la capacité du BEI de
répondre adéquatement à cet élargissement de son mandat dans un délai
raisonnable. En effet, selon les statistiques disponibles,
depuis le début des travaux en 2016, le nombre d'enquêtes enclenchées par le
BEI est en constante augmentation. De
plus, même si des ressources y ont été rajoutées, seulement 11 dossiers
d'enquête ont été transmis au DPCP, sur un total de 76 dossiers. Il va de soi que, compte tenu de ce dernier
élément, l'association est contre tout autre élargissement du mandat du
BEI que celui déjà prévu au projet de loi.
Il nous semble
que le monde politique en général nourrit de grandes aspirations en ce qui a
trait au Bureau des enquêtes
indépendantes. Quant à nous, avant d'élargir davantage les responsabilités du
BEI, peut-être devrait-on songer à leur
attribuer les ressources humaines et matérielles nécessaires à
l'accomplissement de leur mandat actuel. Cependant, il n'est pas inutile ici de
rappeler que, lors des discussions entourant le projet de loi instaurant le BEI
en 2015, tous les intervenants, quel
que soit le parti, appréhendaient que les coûts associés au fonctionnement du
bureau n'explosent comme ce fut le cas en Ontario avec son unité
d'enquête, le SIU. Il est opportun de prendre en considération que les impacts professionnels et personnels dans ce type de
situation sont, autant pour la victime alléguée que pour le policier impliqué, très importants. C'est donc dire que les doutes
que nous entretenons quant à la capacité du BEI d'accomplir son travail,
son mandat dans un délai raisonnable sont d'autant plus préoccupants qu'une
allégation aussi grave que celle relative à
une infraction à caractère sexuel commise par un policier dans l'exercice de
ses fonctions doit être complétée avec rigueur, efficacité et rapidité, et ce, autant dans l'intérêt de la victime, du
membre impliqué que pour le respect de notre fonction par la société en
général.
Par ailleurs,
nous avons pris connaissance des principales recommandations de la Commission
des droits de la personne et des
droits de la jeunesse. Plus particulièrement, la commission mentionnait ce qui
suit : «...la commission estime
que le pouvoir discrétionnaire que le projet de loi prévoit octroyer au
directeur du BEI quant aux enquêtes portant sur les allégations relatives à une
infraction à caractère sexuel maintient une forme de discrimination à l'égard
des femmes. La commission est d'avis que
toutes les allégations pour lesquelles le BEI doit faire enquête méritent la
même attention.»
• (17 h 10) •
Cette
affirmation de la commission, en plus d'être surprenante, nous semble, avec
respect, tout à fait injustifiée. En effet, la discrétion accordée au
directeur du bureau de ne pas faire enquête s'il considère que les
allégations... que l'allégation, pardon, est
frivole ou sans fondement, après avoir consulté, s'il le juge nécessaire, le
directeur du DPCP, est une discrétion tout à fait semblable à toute
allégation de nature criminelle à l'encontre d'un policier, tel que spécifié à
l'article 286 de la Loi de police. Il nous semble qu'à cet égard les
allégations pour une infraction à caractère sexuel commise
par un policier dans l'exercice de ses fonctions ne font donc aucunement
l'objet de discrimination et sont traitées sur le même pied que toute autre
allégation d'infraction criminelle qu'aurait commise un policier.
En
conclusion, l'association est favorable à l'ensemble des volontés exprimées par
le législateur dans le cadre du projet de loi n° 107. Toutefois, nous
sommes d'avis que la nature des travaux devant être entrepris par l'UPAC
de même que les enjeux suffisamment
importants soulevés par son indépendance et son impartialité justifient
amplement que le projet de loi
prévoie que le mode de nomination du directeur se fasse par un vote aux deux
tiers des députés de l'Assemblée nationale.
Les conditions du prêt de service des membres de l'association à l'UPAC sont
des préoccupations majeures de l'association,
et nous soutenons que le modèle d'encadrement juridique à retenir est celui
utilisé par les membres en prêt à l'École nationale de police.
Finalement,
nous sommes d'avis qu'avant d'élargir le mandat du BEI il faudrait avant tout
songer à lui procurer les ressources
humaines et matérielles nécessaires sans pour autant que ces coûts n'explosent
comme ce fut le cas pour le SIU en
Ontario, cela afin que les enquêtes se fassent avec rigueur, dans un délai
raisonnable, pour minimiser l'impact négatif de ce type d'enquête, et ce,
autant pour les victimes que pour les policiers impliqués dans ce type
d'allégation.
En
terminant, l'APPQ tient à vous remercier de l'attention que vous avez portée au
présent mémoire et espère avoir apporté une contribution utile à vos travaux
ainsi qu'à votre réflexion sur le projet de loi n° 107.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le ministre.
M. Coiteux :
Oui. Alors, merci, M. Veilleux, merci, M. Painchaud, M. Ricard,
Me Rousseau d'être là aujourd'hui avec
nous. Donc, vous avez émis le souhait que votre contribution soit utile. Elle
l'est, elle l'est toujours. Chaque fois que vous vous présentez en
commission, ça enrichit nos réflexions concernant le projet de loi.
Je
ne veux pas engager un long échange sur la question de la nomination, mais
évidemment, là, on a une vision différente
là-dessus, on a une vision différente. Moi, ça ne fait pas de longues années,
là, que je suis à l'Assemblée nationale du Québec encore, mais j'ai pu observer un certain nombre de choses
depuis que j'y suis arrivé, puis, savez-vous, parfois il se passe des choses étranges, hein, à
l'Assemblée nationale. Notamment, il y a certains votes aux deux tiers, puis on
pense que c'est une grande chose, des fois,
les votes aux deux tiers, puis parfois, oui, ça fonctionne bien pour certains
types de fonction, mais des fois il y a des
partis qui décident de s'abstenir lors des votes aux deux tiers. C'est le cas
de la deuxième opposition. Ah! ils
réclament, d'un côté, des votes aux deux tiers, mais, dans les faits, lorsqu'on
a des votes aux deux tiers...
récemment, ils ont décidé que, non, ils s'abstiennent. Pourquoi je dis ça?
C'est parce que, quand on veut l'indépendance... Et là il n'y a aucune
fonction banale, là, y compris dans celles qui sont nommées aux deux tiers. Mais ce n'est pas toutes les fonctions qui sont
nommées à l'Assemblée nationale qui concernent une personne qui a le
pouvoir de déposer des accusations contre quelqu'un puis éventuellement le
priver, ou la priver, de sa liberté, là.
On
a affaire au système judiciaire, on a affaire au pouvoir policier. Vous savez
de quoi on parle, c'est votre métier. Vous savez l'importance du rôle
que vous jouez dans la société. Vous avez un rôle qui est très particulier, qui
est très important. Et, pour moi, puis c'est
pour ça que je dis qu'on n'a pas la même vision là-dessus... Des fois, on peut
partager des choses. Là-dessus, je
pense qu'on n'a pas tout à fait la même vision. Pour moi, cette
indépendance-là, elle va être réelle et
apparemment réelle, d'autant plus qu'on l'éloigne un petit peu des joutes
politiques. Puis l'Assemblée nationale est un endroit où il peut y avoir des joutes politiques. C'est normal que ça
en soit ainsi. Puis je ne dis pas que c'est toujours comme ça dans tous
les processus de nomination, mais, ce qu'on propose ici, qui est calqué sur
comment on nomme le DPCP, c'est quand même
des gens très sérieux, indépendants qui vont choisir et retenir des candidats
sur la base de leurs compétences, de
leurs capacités, il n'y a aucune politisation du processus. Et, oui, le
gouvernement a à nommer une personne,
mais ce n'est pas une personne qui est le choix discrétionnaire du gouvernement,
ultimement, parce que c'est vraiment décidé par un comité indépendant.
Je
ne pense pas que les Québécois pensent que le DPCP agit de manière non
indépendante. Je ne le crois pas. Et je ne crois pas que les Québécois
vont penser ainsi du commissaire à l'UPAC une fois que, comme je l'espère, on
aura adopté le projet de loi, qu'il sera
nommé, le commissaire à l'UPAC, selon un processus qui est calqué, dans sa
forme, peut-être pas dans des personnes qui sont retenues pour former le
comité, mais dans sa forme, sur celui du DPCP. Moi, j'en suis convaincu. Je comprends qu'on a des différends là-dessus
entre les partis politiques. Il peut y avoir plusieurs raisons pour
cela, mais moi, je suis convaincu que c'est une manière d'assurer
l'indépendance, surtout dans un cas où on a
affaire à des institutions qui doivent être écartées le plus possible des
joutes politiques qu'on voit parfois à l'Assemblée,
puisqu'il y a même des abstentions lors de ce genre de vote là. Ça vous dit à
quel point il y a des joutes parfois.
Une
fois que j'ai dit cela, je voulais vous dire une autre chose. J'ai entendu les recommandations que vous nous faites sur la question des prêts de service, le
modèle qu'on a avec l'École nationale de police, et on va certainement regarder ça avec beaucoup, beaucoup
d'attention, là. Puis j'écoutais ça. Bon, on fait toujours
les analyses après. A priori, ça m'apparaissait plein de bon sens, ce
que vous nous disiez là. On va examiner ça. Des fois, d'inscrire dans la loi un
certain nombre de choses, ça peut être une
redondance par rapport aux choses qu'on ferait en pratique, mais, si ça
peut rassurer, on va certainement étudier ça attentivement.
Ceci
dit, sur ces prêts de service, lorsque le commissaire est venu nous voir la semaine dernière, il nous a dit que, dans le
futur, ce qu'il pense qui devrait arriver, pas nécessairement tout de suite, mais c'est que l'UPAC embauche ses
propres policiers, autrement dit, que ça ne sera plus une question de prêt de
service, mais vraiment l'UPAC qui irait embaucher comme la Sûreté du Québec va
embaucher. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Comment vous voyez ça?
Le Président
(M. Merlini) : M. Veilleux.
M. Veilleux
(Pierre) : Je suis un peu
surpris d'entendre ça. On a eu une rencontre justement avec
M. Lafrenière, lorsque le dépôt a été fait à l'Assemblée nationale, pour justement essayer de parler de ces technicalités-là, et présentement ce qui se passe, c'est que... Là, il faut regarder l'historique
un peu. Ça a parti de l'escouade Marteau, qui était exclusive à la Sûreté du Québec. Et, chez nous, c'est un système de placement provincial. C'est-à-dire, c'est des placements de quatre
ans renouvelables. Bien, en fait, les gens, au bout de quatre ans, peuvent
décider de sortir et appliquer ailleurs, et là ça a été incorporé à l'UPAC, l'UPAC
est partie... Bon.
M.
Lafrenière, lui, ce qu'il me disait... en
tout cas, des propos que j'ai compris
cette journée-là, c'est qu'il voulait continuer à aller puiser des
experts, des enquêteurs chevronnés, des enquêteurs qui ont des années
d'expérience pour confectionner son
membership, excusez-moi l'expression, et il était conscient que la Sûreté du Québec était le plus gros bassin
pour aller chercher les policiers enquêteurs. Il y avait également
des sûretés municipales à Montréal, etc., et ce qui le fatiguait, lui,
c'était notre système, justement, d'application ou notre système de placement au
niveau provincial, parce qu'à partir du
moment qu'un membre sort d'une unité à cause des distances et la possibilité
peut-être qu'il y ait une personne de
la Gaspésie qui applique à l'UPAC, bien, tu as toujours un délai de 120 jours
pour laisser au membre le temps de
s'organiser pour vendre sa maison, racheter une maison, déménager sa famille,
etc. Ça fait que, lui, le 120 jours, ça le fatiguait un peu, parce qu'il dit : Moi, là, si j'en ai un qui part
de chez nous, ça va prendre 120 jours avant que le prochain arrive, ça
fait que y a-tu moyen de penser un système où est-ce que ça pourrait être
beaucoup plus rapide?
C'est bien
certain que le prêt de service, si on regarde le modèle de l'École nationale de
police, il prévoit de façon immédiate
ou en très peu de temps que le policier qui applique et qui se fait accepter
suite aux entrevues ou au processus de
sélection soit en place à l'École nationale de police à cause des classes. Bon,
c'est un peu comme une école, il faut que tu sois là pour faire
l'enseignement. Ça fait que moi, je pense que c'est un modèle intéressant.
Bon. Est-ce
que c'est une bonne idée ou une mauvaise idée de faire son embauche de
policiers? Moi, je pense qu'ils vont
avoir de la difficulté, dans un sens. Premièrement, il recherche des gens
d'expérience. Donc, s'il veut faire de
l'embauche, ça va être possiblement, pour la plupart, des policiers ou des
aspirants policiers qui n'ont pas d'expérience, et, s'il veut de l'expérience, bien, je ne pense pas, moi,
honnêtement — c'est
mon avis à moi, là — qu'il va
réussir à aller faire une attraction,
dans les corps de police, de gens qui sont déjà en place dans des unités
d'enquête, exemple, comme le crime économique. Ça me surprendrait qu'il
serait capable d'aller chercher une population de policiers qui sont déjà
chevronnés en matière d'enquête au niveau des crimes économiques.
Mais je suis
surpris... bien, je n'ai pas écouté M. Lafrenière quand il est venu ici, là,
mais je suis un peu surpris de sa déclaration.
• (17 h 20) •
M.
Coiteux : Ça me semblait être un énoncé de ce que serait le futur, pas
nécessairement la situation immédiate, là. Je pense que ce n'était pas
dans l'immédiat, là, qu'il mentionnait ça. Mais, telle que la loi serait
conçue, ça...
(Consultation)
M.
Coiteux : Ça l'exclut actuellement, c'est ça, cette possibilité
d'aller embaucher directement... Actuellement, ce n'est pas le cas. Non,
c'était plus pour le futur. Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Merlini) : Il vous
reste cinq minutes, M. le ministre.
M.
Coiteux : Il me reste cinq minutes. Peut-être parler un petit peu du
BEI. Cette question des infractions à caractère sexuel, bon, si j'ai
bien compris ce que vous nous avez dit, ce n'est pas que vous avez une
objection de principe à ce que le BEI se
voie confier cette tâche-là, c'est que vous n'étiez pas convaincus que c'était
la seule façon de le bien faire. Vous
pensez que le système qu'on a actuellement est adéquat... qu'on avait avant.
Parce que, dans les faits, c'est déjà le BEI. C'est simplement pour lui
donner l'autorité sans nécessairement avoir l'autorisation ministérielle.
M.
Veilleux (Pierre) : Bien, en
fait, le débat remonte bien avant le projet de loi, ça a été au moment où on a
voulu instaurer le BEI.
Plusieurs
personnes voulaient un bureau d'enquêtes indépendantes justement pour la notion
d'indépendance, du moins pour les apparences. Parce que moi, dans le temps, je
me disais... Bien, on ne m'a jamais démontré qu'il y avait eu collusion
dans les enquêtes policières qui sont enquêtées par d'autres corps de police.
Bon, le SIU, en Ontario, font également des
infractions d'ordre sexuel, lorsque c'est arrivé dans les fonctions. Et on le
voyait venir, c'était une étape qui
s'en venait, on l'a vue. Et ce n'est pas qu'on est contre, c'est que,
premièrement, présentement, il y a énormément d'enquêtes qui est fait par le BEI, puis ça se fait relativement bien.
Honnêtement, là, c'est tout à leur honneur, ça se passe relativement bien. Les gens sont respectueux. Nos
gens se sentent bien traités au niveau des enquêtes en général. Donc,
ça, là-dessus, ça va bien. Mais on voit le lot de travail que ça génère. Ces
gens-là sont des petites équipes, doivent se déménager
à peu près partout en province, parce que nous autres, on a une disparité
régionale assez marquante, et je pense qu'ils sont pas mal débordés, et
ça a un impact sur le temps que ça prend pour soumettre un dossier et ça a un
impact également pour le membre qui est
enquêté. Parce que, vous savez, oui, c'est correct qu'il y ait une enquête
lorsqu'il y a mort d'homme ou
blessure grave, mais le policier pense toujours qu'il a bien fait, lui, et, la
plupart des enquêtes, il n'y a pas d'accusation.
Donc, le
temps que ça prend, plus le délai du DPCP à étudier le dossier pour arriver
finalement à une accusation ou à ne
pas accuser, c'est un temps énorme et un stress énorme pour nos policiers.
Donc, c'est sûr que, dans l'idéal, nous, on aimerait que les enquêtes se fassent le plus rapidement possible, avec
une étape du DPCP le plus rapidement possible, pour
qu'on puisse au moins avoir si, oui ou non, on est clairs là-dedans. Donc, à
rajouter des infractions à enquêter de plus sans nécessairement rajouter du
personnel, avec les stats qu'on voit présentement, on pense que les enquêtes vont encore s'alourdir, donc le temps va
s'allonger encore avant d'avoir des nouvelles de l'enquête, s'il y a accusation
ou non ou dépôt d'accusations. Donc, c'est un peu ça qui nous inquiète.
On n'est pas contre
le fait qu'ils enquêtent des infractions d'ordre sexuel, à caractère sexuel,
mais il faudrait qu'il y ait plus de
personnes ou plus de ressources pour que... Premièrement, déjà, le mandat
actuel, on trouve que ça prend beaucoup
de temps — puis ce
n'est pas un reproche, là, c'est une constatation — donc on aimerait peut-être que ça aille
plus vite. Et là on rajoute en plus une charge de travail supplémentaire au BEI
sans mentionner si on va adapter les ressources humaines et matérielles là-dessus.
C'est ça qui nous inquiète, M. le ministre.
M.
Coiteux : Bien, là-dessus, j'aimerais vous rassurer, parce que, de un,
cette responsabilité, le BEI l'exerce déjà à l'heure actuelle. Elle l'exerce en
vertu d'une directive ministérielle. J'ai à me prononcer là-dessus. Bon, on a
trouvé une façon de le faire qui ne
nécessite pas nécessairement toujours du cas par cas, là, mais, pour
institutionnaliser cette pratique qui
existe, le projet de loi est très clair, puis il permet au BEI d'agir de façon
beaucoup plus rapide. Déjà là, ça peut initier plus rapidement. Ça,
c'est une chose.
Mais
l'autre chose, c'est que, depuis le début, là, j'ai toujours dit que c'est une jeune organisation, elle prend son envol, elle a
commencé avec des ressources qui nous apparaissaient tout à fait adéquates mais, chaque fois qu'on nous a demandé des ajouts de ressources, qu'on a considéré ces demandes-là avec toute la
diligence qu'elles méritent. Il y a déjà
eu des ajouts de ressources
et il y a actuellement un processus qui pourrait mener à un nouvel ajout
de ressources. Donc, on
accompagne, effectivement, le BEI en fonction de ses besoins en ressources
pour s'assurer qu'il joue pleinement son rôle,
que les enquêtes soient des enquêtes de qualité faites dans des délais
raisonnables, à la fois dans l'intérêt de la justice pour tous, mais aussi de certains de vos membres,
là, qui sont impliqués dans ces enquêtes-là et qui — je
partage votre point de vue là-dessus — ont besoin de connaître
l'issue de cette enquête-là le plus rapidement possible.
Alors,
soyez rassurés de ce côté-là, on ne s'est jamais mis dans une situation
où on dit : Non, voici les ressources qu'ils ont, puis on va leur ajouter des responsabilités,
puis ils vont trouver une solution magique pour augmenter leur productivité. Non, on est là pour répondre avec
diligence aux ajouts de ressources raisonnables qui nous sont demandés. On
prend toujours le temps de les analyser bien, mais on a toujours donné suite, jusqu'à
maintenant, à toute demande raisonnable de ce côté-là. Ça va pour moi, M. le
Président.
Le Président (M. Ouellette) : Bien, c'était le dernier commentaire de M. le ministre. On s'en va à Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. M. Veilleux, ainsi que vos collaborateurs,
bienvenue à l'Assemblée nationale.
Dans
votre mémoire, vous indiquez très clairement votre préférence quant à la nomination du
commissaire de l'Unité permanente
anticorruption. Vous proposez qu'il soit nommé aux deux tiers des députés de
l'Assemblée nationale comme toutes
les grandes institutions, que ce soient le Vérificateur général, le Protecteur
du citoyen, le Commissaire au lobbyisme,
et combien d'autres. J'entendais le ministre tout à l'heure... La seule
exception devrait être la police, ça, la police, ça devrait être contrôlé par le gouvernement, donc il faut une
exception là-dessus. Mais vous, vous décidez... puis vous connaissez ça assez bien, vous représentez
une grande proportion des policiers de notre police nationale du Québec,
vous proposez une nomination aux deux tiers et, je vous cite, qu'on puisse
«bénéficier du respect qu'elles méritent, garantissant
du même coup le bon fonctionnement de notre société». Donc, moi, je me réjouis
que vous soyez de cet avis-là. Vous parlez du respect. D'ailleurs, je
noterai au passage que, quand on a parlé du projet de loi n° 133 sur le
port de l'uniforme policier, le ministre
nous a indiqué que c'était pour des questions de respect. Alors, j'espère que cette
même valeur va s'appliquer à votre recommandation pour le projet de loi
n° 107.
Mais,
au-delà de cette recommandation-là, vous dites, en page 5 : «Or, il est
notoire que les travaux de l'UPAC aient parfois démontré leur proximité avec le
monde politique provincial ou municipal, justifiant[...], à notre avis, que
la nomination ou la destitution de son
directeur se fasse par un vote [aux] deux tiers des députés de l'Assemblée
nationale.» Je vais m'attarder à la première partie : Il est
notoire qu'il y ait parfois une proximité. Qu'est-ce que ça veut dire?
M. Veilleux (Pierre) : En fait, ce qu'on a voulu dire là-dedans, M. le
député, M. le Président, en fait, ce qu'on a voulu démontrer là-dedans,
c'est que, dans les faits, l'UPAC a quand même une expérience de faits,
là — on
a vu les journaux, on a vu le type
d'enquête — et
souvent il fallait qu'ils aient travaillé soit dans le monde municipal ou soit
dans le monde politique provincial.
On l'a vu dans les journaux. Je ne renommerai pas les dossiers, je pense que
tout le monde les connaît. Donc, c'est un peu ça qu'on a voulu
démontrer.
Comme le commissaire
ou l'UPAC doit travailler souvent à proximité avec des élus, souvent contre des
élus également, parce qu'on a vu des élus
municipaux et même des élus provinciaux se faire nommer par des enquêtes, donc
c'est important qu'aux yeux du public puis
aux yeux de toute la population il y ait une distance, pas juste une certaine
distance, mais une distance certaine, et on
pense que ça passe par la nomination par l'Assemblée nationale à cause
justement de la définition qu'on a
été chercher sur le site des nominations, c'est-à-dire de préserver
l'indépendance de la personne désignée et son impartialité dans
l'exercice de ses fonctions.
Loin
de moi de croire qu'il y a eu de la collusion de la part de M. Lafrenière.
Je veux que ça soit clair. M. Lafrenière, pour moi, est un homme intègre. Cependant, je pense à l'avenir également
et je pense que, pour démontrer aux yeux du public l'indépendance nécessaire, justement parce que le projet de loi porte ce
titre-là, l'indépendance nécessaire... je crois que ça devrait être nommé par l'Assemblée
nationale.
Bon. Est-ce qu'il y a des jeux à l'Assemblée nationale et qu'il y en a qui s'abstiennent ou non? Ça, je ne peux pas m'en mêler, là, malheureusement, mais je pense
que, si tout le monde fait son travail et tout le monde est de bonne foi là-dedans, tout le monde peut arriver à nommer,
oui, la bonne personne pour faire le travail.
• (17 h 30) •
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Matane.
M.
Bérubé : Merci, M.
Veilleux. Effectivement, il y a une perception populaire
assez forte. Il y a un sondage de mai dernier... 61 % de la population croit à une ingérence du politique
dans les affaires de l'UPAC. Alors, ça me semble une perception aussi importante et urgente à corriger que celle qu'avait le ministre
dans le cas du projet de loi n° 133, qui
touchait vos policiers. C'est aussi
important, selon moi, de réagir à cette perception publique. Ça a été le choix
du législateur. On a voté en faveur. On en a fait une priorité.
Le projet de loi n° 107 devra passer le test
aussi de la crédibilité. Vous avez des policiers de la Sûreté du Québec
qui sont à l'UPAC. Combien?
M. Veilleux
(Pierre) : C'est environ 80 % des effectifs. Sous toute réserve,
si mes confrères... Peut-être une quarantaine. Une quarantaine, environ.
M.
Bérubé :
Une quarantaine.
Une voix :
65.
M.
Bérubé : Vous
convenez qu'avant d'accorder davantage de pouvoirs à l'UPAC en se constituant comme un
corps de police il faut savoir comment ça fonctionne présentement.
Je vous ai fait
remettre, tout à l'heure, un document que vous avez probablement très près de
vous, qui est un diagnostic organisationnel
fait par le ministère de la Sécurité publique, donc le ministère du ministre,
sur ce qui se passe à l'intérieur de
l'UPAC. Je vous invite à aller à la page 4 et regarder successivement la page
4, la page 5, la page 6, la page 7, la page 8 et la page 9. Qu'est-ce
que vous remarquez?
M. Veilleux
(Pierre) : Qu'il n'y a pas grand-chose à lire.
M.
Bérubé :
Pouvez-vous juste nous montrer qu'est-ce qu'on...
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, c'est du caviardage.
M.
Bérubé : Et voilà.
Alors, ça, lorsqu'on a posé la question : Comment ça va avec les effectifs, notamment,
de la Sûreté du Québec à l'intérieur de l'UPAC... on a posé la question
à M. Lafrenière, qui était assis à votre place, voici le document
qu'il a remis au bénéfice des parlementaires. On ne saura rien de ce qui se passe avec les
policiers de la Sûreté du
Québec ou du SPVM à l'intérieur de l'UPAC. Ça, c'est les conditions actuelles
de ce dirigeant, qui demande aux parlementaires de l'Assemblée
nationale de lui donner encore plus
de pouvoirs puis pas de reddition de
comptes. Alors, moi, je trouve
ça insultant, comme parlementaire. On avait demandé : Minimalement,
enlevez les noms, laissez des situations.
Je
veux que vous sachiez que ça touche vos membres, ce document-là,
puis je vous le laisse. Il est public, de
toute façon. Et je ne sais pas comment vous réagissez à ça. Je vous
invite à vous informer, si vous ne le savez pas déjà, sur comment que ça se passe pour certains policiers
qui ont des griefs légitimes à l'intérieur de l'organisation de l'UPAC.
Ne réagissez pas à ce document, mais de façon générale.
M. Veilleux (Pierre) : Bien, en fait, c'est une des raisons pourquoi
qu'on demande un modèle un peu comme l'École
nationale de police, parce que, dans le modèle, ce qu'il est bien important
de comprendre, c'est que, si les membres ne se sentent pas appuyés du syndicat ou ils sentent que le syndicat, ou
l'association, ou les associations sont exclus du processus de relations de travail qu'il peut y
avoir à l'interne, au-delà de la sensibilité des dossiers, c'est important
qu'on ait une entente tripartie.
C'est important que leurs droits soient respectés et c'est important
d'avoir un interlocuteur au niveau des relations de travail pour justement
régler les griefs, que ce soit du harcèlement, que ce soient des griefs de convention
collective, d'application de règles, etc.
J'ai l'impression
peut-être que l'UPAC a un peu peur de laisser rentrer le syndicat. Je ne sais
pas si c'est une question de sensibilité de dossiers. C'est vrai que
c'est des dossiers sensibles. Mais tous les dossiers sont sensibles lorsqu'on
parle d'enquêtes criminelles. Ça peut
toucher des citoyens, mais ça peut toucher des personnes de notoriété quand même
assez importante. Mais entre divulguer des informations d'une enquête puis faire des relations de travail, ça, il faut
faire une bonne distinction.
M.
Bérubé : Il me
reste une minute. Je veux vous poser la question. Puis aussi vos
membres pourraient être des lanceurs d'alerte, hein, de ce qu'ils ont vu
à l'intérieur de l'UPAC. C'est possible que ça arrive aussi.
M. Veilleux
(Pierre) : Pardon?
M.
Bérubé : Vos
membres pourraient être des lanceurs d'alerte de ce qu'ils ont vu à l'intérieur
de l'UPAC, qui n'est vérifié par personne, hein, je vous l'indique.
Je termine sur une question que je me pose
depuis le mois de mai dernier. Lorsque M. Lafrenière annonçait à l'Assemblée
nationale qu'il allait y avoir une
enquête administrative sur les fuites à l'UPAC, vous avez émis un
communiqué — le
4 mai, à mon souvenir — vous
opposant à ça. Pourquoi?
M.
Veilleux (Pierre) : Bien, en
fait, c'est que ce n'est pas le fait d'avoir une enquête à l'interne qui nous
inquiétait, c'était la façon que
c'était fait. Nous, on travaille avec des enquêteurs des affaires internes
dûment mandatés, des policiers, des
agents de la paix. Et l'intention de
M. Lafrenière était d'aller chercher deux anciens membres de l'UPAC retraités.
Donc, ils ne sont plus agents de la paix.
Bon, c'était une enquête administrative, c'est un jeu de mots, parce qu'on sait
très bien que, s'il y a allégation de fuite, ça peut tomber facilement... et ça
tombe dans une enquête criminelle.
Donc, nous,
on s'est opposés au fait que... Oui, tu peux en faire une, enquête. Ça, on ne
s'objectera pas à ça. Mais tu vas le
faire faire par des policiers, des agents de la paix qui peuvent enquêter des
enquêtes criminelles et non pas des enquêtes administratives qu'on
transforme en criminelles par la suite.
M.
Bérubé : Est-ce que vous craigniez, à l'époque, une
complaisance dans cette enquête? Est-il juste de dire ça?
M.
Veilleux (Pierre) : Pas nécessairement.
C'était plus au niveau du statut des personnes qui allaient enquêter.
Moi, je me suis objecté principalement sur le fait que ce n'étaient pas des policiers. Parce que c'est des
anciens de l'UPAC, est-ce que
c'étaient des gens qui se connaissaient bien, entre monsieur... Ça, je n'en ai
aucune idée. Je ne les connais pas, les gens.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Matane, c'est terminé.
M.
Bérubé : Je suis
convaincu que ça vous intéressait, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Je suis obligé de reprendre le document que M.
le député de Matane vous a donné,
parce qu'il y a eu une demande du commissaire à l'UPAC, que le document
ne soit pas rendu public et soit uniquement pour les besoins des membres
de la commission. Donc, je suis obligé de reprendre le document.
M.
Bérubé : ...M. le
Président.
Le Président (M. Ouellette) : Vous
êtes l'auteur de cette remise de document.
M.
Bérubé : Je vais
aller le rechercher.
Le Président (M. Ouellette) : Mais
je dois le reprendre. Donc, M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Il n'y a rien dans ce document-là,
O.K.? Merci, M. le Président. Alors, M. Veilleux, bienvenue, MM.
Painchaud, Rousseau, M. Ricard.
Bien, premièrement, je veux répondre à mon ministre de la Sécurité
publique, qui se bidonne de notre abstention sur le vote pour le Commissaire au lobbyisme aux deux tiers de
l'Assemblée. Rappelez-vous qu'on avait demandé au moins qu'il y ait trois candidatures, et le processus de
sélection était très biaisé. Alors, c'est pour ça qu'on s'est abstenus. On ne
s'est pas abstenus sur la candidature comme telle, mais sur le principe de la
candidature. Alors, c'est très différent de qu'est-ce que vous avez dit, M. le
ministre.
M. Veilleux,
vous avez parlé que la nomination aux deux tiers... je ne veux pas y revenir au
complet, mais je pense que vous avez
une phrase ici qui... sans revenir sur le projet de loi n° 133 sur le port
des uniformes, c'est vrai qu'«il est reconnu que l'apparence
d'indépendance et d'impartialité est au moins aussi importante qu'une réelle
indépendance et impartialité». Ça, je pense
que moi, je l'ai bien saisi et j'espère que le ministre l'a saisi aussi. En
politique, on est dans une question
d'apparence. Même si on sait qu'on est honnête, on est impartial, tout est dans
les apparences, ça, c'est clair.
Moi, j'avais
posé la question à l'Association des directeurs de police : Est-ce que
vous avez des statistiques sur les membres qui sont prêtés à l'UPAC, des
statistiques de temps qu'ils passent à l'UPAC? Parce qu'on sait qu'il y a deux sortes d'autorité, là : hiérarchique et
fonctionnelle. Ils peuvent revenir dans leurs systèmes. C'est quoi, la durée,
en moyenne, des prêts? Est-ce que le
policier demeure à l'UPAC, veut continuer ou si, au bout d'un an, il veut
revenir puis... Est-ce que vous avez des statistiques là-dessus?
Le Président (M. Ouellette) : M.
Veilleux.
M. Veilleux (Pierre) : Je n'ai pas
nécessairement de statistique en tant que telle, mais, par contre, pour avoir rencontré
les membres de l'UPAC et avoir quand même des contacts au niveau des
représentants syndicaux, parce qu'il y a
quand même des délégués syndicaux à l'intérieur de l'UPAC... en fait, nous
autres, c'est des placements de quatre
ans. Donc, quand tu y vas, à moins vraiment qu'il arrive un problème, que tu
sois inapte à accomplir tes fonctions, etc., généralement, c'est un minimum de quatre ans. Donc, les gens qui vont
là, ils rentrent pour quatre ans. Il y a beaucoup de jeunes... ça fait
que ça va peut-être répondre à votre question, il y a beaucoup de jeunes
policiers qui font partie des membres de l'UPAC et il y a des gens qui ont
manifesté — bien,
d'ailleurs, c'est pour ça qu'on le mentionne — que, s'il y avait des changements au niveau du projet
de loi, au niveau des placements ou des prêts ou... appelons ça comme on
voudra, qu'il y ait une réserve, un droit de retour à l'organisation de la
Sûreté du Québec.
Vous
savez, c'est des enquêtes qui ne sont pas faciles, c'est des enquêtes qui sont
très longues, c'est très technique, et
ces gens-là, souvent, veulent un nouveau défi après quelques années, ils
veulent aller faire d'autre chose. Ça fait que c'est souvent le phénomène des crimes économiques. Mais, comme je vous
dis, c'est des gens qui n'ont généralement pas des 20 ans puis des
18 ans de police, là.
• (17 h 40) •
M.
Spénard : Vous avez des statistiques sur la moyenne d'âge
des membres de la Sûreté du Québec prêtés à l'UPAC?
M. Veilleux (Pierre) : La moyenne d'âge, bien, dans la Sûreté du Québec,
c'est environ 38 ans, en général, au niveau des 5 400 membres puis, je vous dirais, à l'UPAC, c'est
possiblement un peu plus jeune que ça, là, peut-être 35. Mais je vous
dis ça sans trop...
M.
Spénard :
Pas de statistique...
M. Veilleux (Pierre) :
Ce n'est pas très scientifique, mon affaire, là.
Le Président (M. Ouellette) : ...plus les années de service qui sont
importantes, M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard :
Hein?
Le Président (M. Ouellette) : C'est plus les années de service, parce que l'âge
n'a pas tellement d'importance.
M. Veilleux
(Pierre) : Effectivement. Vous avez raison, M. le Président.
M.
Spénard : Oui, oui. M. Veilleux, il y a une autre
statistique qui m'a surpris un peu, même si on a accordé des ressources supplémentaires au BEI. Là, nous sommes
rendus au 10e mois de 2017, là. Le 10e mois achève, et vous me dites qu'en 2016, sur 76 dossiers ouverts par le
BEI, 11 dossiers seulement d'enquête ont été transmis au DPCP, en 2016.
Savez-vous combien il y en a aujourd'hui, en 2017? Non?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, non, c'est en date d'aujourd'hui. On dit que les
travaux...
M.
Spénard :
En date d'aujourd'hui.
M. Veilleux
(Pierre) : ...les travaux ont débuté en 2016, et là il y a eu des
dossiers qui se sont enquêtés. Aujourd'hui,
à l'heure actuelle, il y a 76 dossiers actifs. En fait, il faut
additionner. Il y en a 11 qui sont rendus au DPCP et 60 dossiers... Non,
sur un total de 60 dossiers, pardon. Donc, il y en a 11 qui sont rendus au
DPCP.
M.
Spénard :
11 de rendus au DPCP.
M. Veilleux
(Pierre) : Oui.
M.
Spénard : Puis, on le sait, comme vous l'avez dit, et pour
la victime et pour l'accusé, cet espace de temps là, surtout si on parle d'infractions à caractère
sexuel, je pense que ça devient déraisonnable. Ça devient très déraisonnable
comme temps, là. Ce n'est pas une enquête sur la collusion dans l'industrie de
la construction où est-ce que, tu sais, il y
avait un «touch» de basé à quelque part, là, mais trouvez-vous ça normal que ça
prenne tant de temps que ça juste pour une enquête à caractère sexuel ou une
enquête sur une bavure d'un policier?
M. Veilleux (Pierre) : Bien, ça dépend toujours du type d'enquête. S'il
y a mort d'homme, les enquêteurs sont reliés
un peu au délai du coroner, parce qu'il y a une enquête du coroner, etc. S'il y
a des enquêtes qui demandent des expertises
médicolégales, etc., donc aussi il y a des délais reliés à ça. Mais
effectivement on trouve que les délais sont très longs. Et c'est un stress, un stress et pour les
victimes, et pour les familles, et pour les policiers, les familles des
policiers également.
Donc,
oui, on trouve ça long et on souhaiterait que les enquêtes se fassent plus
rapidement. Ça dépend toujours du type
d'enquête. Une enquête à caractère sexuel, généralement, ça implique deux
personnes : l'agressé et l'agresseur...
M.
Spénard :
Il ne faut pas faire...
M. Veilleux (Pierre) : ...et les témoins potentiels. Et ça se passe
toujours... en tout cas, dans la plupart du temps, dans un petit environnement de travail où ce n'est
pas nécessairement très long à faire. Mais c'est de faire les rapports, d'attendre les expertises, de soumettre les
rapports au DPCP. Le DPCP aussi prend un certain laps de temps afin d'étudier
le dossier, des fois, des compléments
d'enquête. Ça fait que c'est... Je ne veux pas défendre les enquêtes, mais moi,
je pense qu'on pourrait le faire plus vite. Mais là ça dépend toujours
des ressources, ça dépend toujours des acteurs...
Le Président (M. Ouellette) : Merci.
M.
Veilleux (Pierre) : Il y a bien des impondérables.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, M. le député de Beauce-Nord. M. Pierre Veilleux...
M.
Spénard :
C'est tout?
Le Président (M. Ouellette) : Bien oui, c'est fini déjà. C'était tellement
intéressant qu'on n'a pas vu passer le temps.
M.
Pierre Veilleux, M. Jacques Painchaud, Me Alain Rousseau et M. Dominic
Ricard, dont c'est la première visite, merci d'être venus déposer.
Je suspends jusqu'à
19 h 30.
(Suspension de la séance à
17 h 44)
(Reprise à 19 h 33)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
Nous
poursuivons et terminons les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 107, Loi
visant à accroître la compétence et l'indépendance du commissaire à la lutte
contre la corruption, du Bureau des enquêtes indépendantes ainsi que le pouvoir du directeur des poursuites
criminelles et pénales d'accorder certains avantages à des témoins
collaborateurs.
Nous entendrons ce
soir, pour terminer nos audiences, les organismes suivants : le Syndicat
de la fonction publique et parapublique du
Québec et le Service de police de la ville de Montréal. Nous recevons le
président général — il
peut être directeur général, là — M. Christian Daigle. Vous allez nous
présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 10 minutes. Mais je
pense que vous connaissez les us et coutumes de la commission, M. Daigle, parce
qu'on se voit souvent. Vous avez
10 minutes pour faire votre exposé, et par la suite il y aura une période
d'échange avec M. le ministre et les porte-parole des deux oppositions.
Je vous laisse la parole.
Syndicat
de la fonction publique et parapublique du Québec inc. (SFPQ)
M.
Daigle (Christian) : Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. Alors,
je suis accompagné de M. Julien Gaudreau, qui est conseiller politique au bureau de la présidence. Alors, nous
allons vous présenter ce soir l'avis du Syndicat de la fonction publique
et parapublique du Québec concernant le projet de loi n° 107.
Alors,
ce projet de loi sera ici évalué à l'aune de sa contribution à la prévention de
la collusion et de la corruption autour
des contrats publics. Le projet de loi n° 107 propose peut-être quelques
mesures louables pour renforcer l'indépendance ou le mandat du Bureau des enquêtes indépendantes, de l'Unité permanente
anticorruption ou encore du Directeur des poursuites criminelles et
pénales, mais ce projet de loi ne propose rien de bien déterminant pour
prévenir les cas de corruption ou de collusion autour de l'octroi et de la
gestion des contrats publics au Québec.
Dans un premier temps, voici comment le SFPQ
accueille les principales mesures avancées par le projet de loi n° 107 pour
chaque organisme visé. Le SFPQ accueille favorablement la proposition
d'accroître l'autonomie du Bureau des enquêtes
indépendantes. Le SFPQ accueille favorablement, également, la proposition de
confier au BEI les enquêtes portant sur
toute allégation relative à une infraction à caractère sexuel commise par un
policier dans l'exercice de ses fonctions.
Le
SFPQ accueille favorablement la proposition d'élargir le mandat de l'UPAC de
façon à ce qu'il couvre aussi les cas de corruption dans
l'administration de la justice ou dans l'octroi de droits et privilèges. Le
SFPQ accueille favorablement la proposition d'établir que le commissaire, les commissaires associés aux vérifications, le commissaire associé aux enquêtes, les enquêteurs dont les services
sont prêtés au commissaire ainsi que le personnel non policier du
commissaire forment désormais un corps de police spécialisé constituant l'UPAC.
Le
SFPQ accueille favorablement, également, la proposition d'instituer que le
Commissaire à la lutte contre la corruption
soit, à l'avenir, nommé pour un mandat non renouvelable de sept ans. Le SFPQ
accueille favorablement la proposition d'accroître les pouvoirs du DPCP
afin de favoriser la collaboration des témoins clés.
Les
propositions avancées dans le projet de loi n° 107
visent à renforcer le mandat ou l'indépendance du BEI, de
l'UPAC et du DPCP pour assurer le respect des lois en vigueur.
Toutefois, dans les communications du ministre
à l'égard du projet
de loi n° 107, ce projet de loi est d'ailleurs présenté comme une contribution substantielle à
la mise en oeuvre des recommandations
de la commission Charbonneau. Peut-être est-il judicieux de le rappeler, mais
la commission Charbonneau était officiellement désignée sous le nom de Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion
des contrats publics dans l'industrie de la construction. Or, de l'avis du SFPQ, le projet de loi ne permettra pas de réduire significativement le risque de corruption, de collusion ou d'autres
types de pratique répréhensible autour des contrats publics, pour la simple
et bonne raison qu'il ne s'attaque pas du tout à la racine des problèmes, soit la prolifération de la sous-traitance
dans le secteur public québécois. En effet, la multiplication des
organismes ou des mécanismes de vérification de la gestion contractuelle ne change rien à la règle implacable
suivante : plus la valeur totale des contrats publics est élevée, plus il y a de risques de pratique répréhensible
autour de ces contrats.
En matière de contrats publics, mieux vaut donc
s'attarder à la cause des problèmes : le poids démesuré de la sous-traitance. Avec détermination, le SFPQ est probablement l'organisme québécois qui persiste le plus à rappeler ce
principe tout évident, pourtant si lourd de sens et de conséquences pour
l'ensemble de notre société.
Voici quelques épisodes
marquants de cette dénonciation publique par le SFPQ. En 2006, les présidentes
et présidents régionaux du SFPQ ont fait des
démarches auprès de toute la députation provinciale sur le projet de loi n° 17. En
2010, le SFPQ a transmis au ministère
des Transports du Québec, au
Vérificateur général du Québec, à l'Unité anticollusion une étude sur les
surcoûts de la sous-traitance au ministère des Transports. En 2012, le SFPQ a
fait des représentations portant sur le projet de loi n° 1, Loi
sur l'intégrité en matière de contrats publics. La même année, le SFPQ réclamait une commission d'enquête sur les
contrats en informatique, une demande réitérée maintes fois depuis. En 2014,
le SFPQ a participé aux consultations de la commission Charbonneau, exposant les principaux facteurs de la
prolifération de la sous-traitance au
MTQ, proposant des pistes de solution pour rapatrier le travail en régie
interne. En 2015, le syndicat a lancé
une campagne de communication intitulée Payer le double, sur les
surcoûts de la sous-traitance dans la fonction
publique québécoise. En 2017, le syndicat est notamment intervenu dans le
dossier de la sous-traitance en déplorant publiquement
l'incapacité du MTMDET, l'ancien MTQ, à honorer l'engagement de regarnir son effectif de 970 postes sur une période de cinq
ans.
Au tableau
que vous retrouvez dans notre avis, on vous présente l'évolution de la valeur totale des contrats publics octroyés par les cinq champions de la sous-traitance dans l'Administration gouvernementale, seulement pour
les contrats de 25 000 $ et
plus, entre 2015‑2016 et cinq ans auparavant. Nous y retrouvons le ministère
des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports,
le Centre des services partagés du Québec, la Société québécoise des infrastructures, le ministère du Travail, de
l'Emploi et de la Solidarité sociale, la Régie de l'assurance maladie du
Québec.
Dans les
technologies de l'information, dans plusieurs ministères ou organismes de la
fonction publique, plus du tiers des
personnes qui travaillent dans le domaine des TI sont au service de firmes
externes. C'est le cas dans les ministères suivants : Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la
sécurité du travail, Institut du tourisme et de l'hôtellerie du Québec,
ministère de la Culture et des Communications, ministère de la Justice, ministère
de la Famille, ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, ministère
des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des
transports, Régie de l'assurance maladie du Québec.
Certes, le
nombre de firmes externes a diminué de 588 personnes entre 2015 et 2016, mais seulement
84 nouveaux employés fonctionnaires
sont entrés en poste pendant cette même période. Dans le domaine informatique,
c'est l'ampleur des projets en informatique qui a diminué, ces derniers
temps, pas la dépendance envers les firmes privées. Dans le domaine des transports, en raison notamment
du fiasco de l'autoroute 13 dans la nuit du 14 au 15 mars dernier, le ministère avait
annoncé vouloir embaucher 50 nouveaux opérateurs de chasse-neige pour effectuer
le déneigement du réseau autoroutier des régions de Montréal et de Québec
à compter de l'hiver 2017‑2018.
• (19 h 40) •
Cependant, faute d'avoir reçu un nombre suffisant de
candidatures, du fait des conditions d'embauche peu attractives et du temps de travail requis, le ministère a dû repousser d'un an son objectif de
réduire la sous-traitance dans ce secteur.
Ces dernières
années, la dépendance chronique de l'État québécois aux contrats publics a
attisé nombre de controverses et de
scandales. En voici quelques exemples : 2009‑2010, publication de
multiples reportages d'enquête faisant
état de discrimination, d'intimidation, de collusion, de corruption et de liens
avec le crime organisé au sein de l'industrie
de la construction au Québec; 2011, le rapport Duchesneau est rendu public par
la presse, lequel rapport soutient, entre
autres, que le ministère des Transports prête flanc aux manoeuvres collusoires;
2011, cédant à la pression populaire, le
gouvernement de Jean Charest instaure la commission Charbonneau puis lui
concède les pouvoirs conférés par la Loi sur les commissions d'enquête; 2012, scandale de dépassements de coûts puis
de complot, abus de confiance et fraude autour de la construction du mégahôpital du Centre universitaire de santé
McGill; 2016, on apprend publiquement dans quelles circonstances Robert Poëti a été démis de ses
fonctions du ministère des Transports, alors qu'il estimait avoir manqué
de temps pour amorcer des changements dans la
gestion contractuelle au ministère; 2016 également, allégations d'importantes fraudes au sein de la Société
immobilière du Québec autour de contrats de location d'immeubles au profit de collecteurs de fonds du Parti
libéral.
Ces scandales et ces controverses ont surtout
conduit à un type de réaction de la part de la classe politique au pouvoir : pour calmer le jeu momentanément,
instaurer une enquête, un mécanisme de vérification ou une nouvelle procédure
de gestion contractuelle. Nous en avons
preuve avec l'UPAC, la commission Charbonneau, l'AMF avec le registre des
entreprises autorisées à conclure des contrats et sous-contrats publics,
l'Autorité des marchés publics, le Bureau de l'inspecteur
général au MTMDET et deux rapports du Vérificateur général sur la gestion
contractuelle au ministère. La même
approche est adoptée concernant le bordel informatique. Le gouvernement actuel
adopte une approche équivalente avec son projet de loi n° 135.
Soulignons-le
encore une fois, améliorer la gestion contractuelle ou la surveillance des
contrats est bien, mais ça ne pourra jamais être aussi efficace pour prévenir
les actes répréhensibles que de diminuer à la source l'importance de l'offre contractuelle. Il faut prendre au sérieux
la question de la probité et de l'intégrité de l'État québécois et aborder
de front le problème de cette dépendance
chronique, malsaine, à la sous-traitance. En ce sens, le projet de loi propose
bien quelques mesures appréciables
pour accroître l'indépendance et le mandat du BEI, de l'UPAC ou du DPCP.
Cependant, ce projet de loi ne propose rien pour juguler la principale
source de péril à l'intégrité et la probité de l'État. Il serait d'ailleurs fort candide de s'attendre à ce que les
sous-traitants s'autodisciplinent en matière de surcoûts, car les
sous-traitants ne souffrent d'aucune
conséquence des dépassements de coûts. Ils en tirent plutôt profit, selon une
recherche de l'IRIS qui a été publiée en 2013.
En vue de
diminuer la dépendance du secteur public à la sous-traitance, une approche
différente, voire audacieuse est
nécessaire et vitale. Au Royaume-Uni, le Trades Union Congress et la New
Economics Foundation proposent, à cette fin, un ensemble de recommandations pour améliorer les pratiques. Nous
vous les avons déposées dans notre mémoire. Dans le même esprit, un projet de loi actuellement
à l'étape de l'étude par le Sénat californien exigerait que les comtés de l'État fassent la démonstration que tout
sous-traitant engagé sur une base personnelle n'entraîne pas de surcoût pour
le comté et n'entraîne pas le déplacement de travailleurs.
Avec
le projet de loi n° 15... ou qui est rendu la loi n° 15, le
gouvernement actuel s'est doté de moyens accrus pour contrôler les
effectifs internes du secteur public. Fort de cette loi, le Conseil du trésor a
pu piloter des coupes paramétriques dans plusieurs ministères et organismes qui
se voient dès lors imposer un plafond de postes à pourvoir à l'interne. Or, un tel mécanisme très strict pour
contrôler et réduire le nombre de postes en sous-traitance n'a jamais été mis en place par ce gouvernement. Pour les
dirigeants des ministères et organismes publics, il y a au contraire,
actuellement, un incitatif à pourvoir
à l'externe certains postes qu'il n'est plus possible de pourvoir à l'interne, faute
d'autorisations du Conseil du trésor.
Ainsi,
la réduction de la sous-traitance de l'État québécois redevient plus que jamais
un enjeu politique. Lors des dernières
négociations dans le secteur public, en 2015, à la table de négociation du SFPQ
de l'accréditation Ouvriers, les porte-parole
de la partie patronale ont dit clairement que la question de surcoûts de la
sous-traitance n'était pas un enjeu de
négociation, que c'était une question politique. Le SFPQ remet donc sur le
tapis cet enjeu dérangeant, qu'on fait mine trop souvent de ne pas voir,
qu'est la sous-traitance. Je vous remercie pour votre écoute.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, M. Daigle. M. le ministre.
M. Coiteux :
Bien, je vous remercie beaucoup pour votre contribution. Je suis surtout très
heureux que vous appuyiez le projet de loi
n° 107 dans pratiquement l'ensemble de ses propositions, de ses
dispositions. Donc, je n'aurai pas beaucoup de questions sur cette
partie-là.
Concernant
la question de la sous-traitance — vous avez consacré la majeure partie de
votre présentation à cette question-là — comment je pourrais dire, c'est un thème qui m'intéresse à plusieurs
égards. Bien, vous avez fait référence aux
négociations, les dernières négociations. Vous avez fait
référence à la loi sur le contrôle des effectifs. Donc, vous avez fait allusion à un certain nombre d'éléments qui
se sont aussi déroulés à l'époque où j'étais président du Conseil du trésor.
Donc, je voulais simplement vous dire qu'à
bien des égards disons que ma position par
rapport à la sous-traitance, la
position du gouvernement en est une de pragmatisme, là. Dans certains cas, il est nécessaire
de faire affaire à de l'expertise externe. Ce n'est pas toujours vrai qu'on peut tout faire à l'interne, ce n'est
pas toujours vrai. Je ne veux pas rentrer dans des cas spécifiques, mais, à l'inverse, on ne peut pas
généraliser au point où on dit que l'État ne peut jamais
travailler avec des gens de
l'externe. Dans certains cas, il est nécessaire, utile, et c'est la bonne décision en matière de
gestion publique, des fois, de faire appel à de l'expertise externe,
mais, des fois, non
Et,
notamment dans le secteur des contrats informatiques, je
pense que vous ne pouvez pas nier, à tout le moins, qu'on avait mis beaucoup
l'accent là-dessus lorsqu'on a dévoilé la stratégie québécoise des TI et que, dans
les faits, effectivement, il y a eu un grand
nombre de remplacements de contractuels externes par des gens engagés dans la fonction
publique, dans le secteur de l'informatique.
Ça, c'est une chose qu'on a faite, au gouvernement. Donc, ce n'est pas parce
qu'on avance dans le suivi et dans la
législation qui donnent suite aux recommandations de la commission Charbonneau
qu'on ne fait rien en sous-traitance, bien au contraire. Il faut faire les
deux.
Ça
se fait au ministère des Transports aussi, parce qu'il y a de nombreux
ingénieurs qui ont été engagés au cours des dernières années. Ça se fait en informatique, parce qu'il y a eu un
très grand remplacement, un remplacement tellement grand qu'à un moment donné
les entreprises du secteur privé se plaignaient de la concurrence du secteur
public, qui venait chercher des ressources. Je ne le dis pas pour débattre avec
vous, je le dis simplement pour dire que je partage, à bien des égards,
vos préoccupations mais que, par rapport à ça, notre position, comme
gouvernement, en est une de pragmatisme puis
de décisions basées... c'est quoi dans le meilleur intérêt public. Puis dans
certains cas, effectivement, on a besoin de rehausser notre expertise
interne, puis j'en suis.
Je n'ai pas de
question, M. le Président, mais peut-être qu'un de mes collègues en aurait.
Le Président (M. Ouellette) : Bien, si ça va si bien que ça, donc, c'était
clair. J'en ai peut-être une, moi, pour M. Daigle. Présentement, avez-vous des gens qui sont couverts par votre
syndicat qui travaillent à l'UPAC, au BEI ou au DPCP?
M.
Daigle (Christian) : Oui, nous en avons au niveau de l'UPAC, nous en
avons également au niveau du DPCP. Tous les employés de soutien, que ce
soient des techniciens en droit — à ce moment-là, il peut y avoir d'autres
sortes de technicien aussi, je n'ai pas le
détail — des agents
de bureau, agents de secrétariat également, aussi, ce sont toutes des personnes qui sont syndiquées chez nous au niveau
du SFPQ... tous les emplois de soutien administratif que nous représentons
à travers l'ensemble des ministères et organismes dont font partie ces
différents organismes là.
Le Président (M. Ouellette) : Et, au niveau de l'UPAC, êtes-vous capable de
nous donner un nombre approximatif de gens qui seraient couverts?
M. Daigle
(Christian) : Sans vouloir avancer quoi que ce soit, c'est peut-être
un peu moins qu'une trentaine, peut-être entre 20 et 30, peut-être, là. Je n'ai
pas le détail, le fin mot, mais ce serait une vingtaine ou une trentaine.
Le Président (M.
Ouellette) : ...disponible?
M. Daigle (Christian) : Nous
pourrions trouver l'information, certainement.
Le Président (M. Ouellette) : Est-ce que vous pourriez l'envoyer au secrétariat
de la commission lorsque nous ferons
l'étude article par article? C'est probablement une donnée, dans la composition
d'un corps de police, pour laquelle on doit tenir compte aussi.
M.
Daigle (Christian) : Parfait. Nous ferons les validations pour
l'ensemble des différents organismes qui ont été mentionnés, autant le
BEI que le DPCP et l'UPAC. À ce moment-là, ça nous fera plaisir de vous les
transmettre.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci. M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. Bienvenue
à l'Assemblée nationale. Plusieurs éléments intéressants dans votre mémoire qui portent à réflexion, notamment
s'interroger sur les racines des problèmes qui sont vécus à répétition. Il y a même une chronologie
intéressante, là, qu'on est capables de suivre, selon votre évaluation :
ça commence en 2006, en page 5; on va jusqu'en 2012; après, ça recommence, en
2014, 2015, 2017. Et après on parle d'un
feu roulant de controverses et scandales, 2009, 2010, 2011, 2012, après on s'en
va en 2016. Donc, il y a encore du travail à faire.
Vous
identifiez en page 3 que vous accueillez favorablement la proposition d'élargir
le champ d'application de la Loi
concernant la lutte à la corruption et la mission du Commissaire à la lutte
contre la corruption de façon à ce qu'il vise aussi les cas de corruption dans l'administration de la justice ou dans
l'octroi de droits et privilèges comme... et j'insiste sur ces trois
termes : nomination, autorisation, subvention.
Comme
vous évoquiez vous-même des situations
qui relèvent directement de ce gouvernement, ne croyez-vous pas qu'il serait opportun de s'assurer d'une plus grande importance
d'un commissaire qui est nommé par le même gouvernement?
• (19 h 50) •
M.
Gaudreau (Julien) : Écoutez,
nous, on considère que toute augmentation de l'indépendance du commissaire est intéressante. Vous l'avez constaté, on a appuyé généralement l'ensemble des mesures qui sont prévues au projet de loi, parce qu'on considère qu'il
s'agit quand même de pas dans la bonne direction.
Ceci
étant dit, vous pouvez le constater aussi, notre intention, c'était surtout de
démontrer que ces mesures-là, elles sont accessoires dans la réelle
lutte à la corruption, à la collusion dans le secteur public, donc.
M.
Bérubé : Parce
que, écoutez, là, ce n'est pas moi qui l'invente, là, vous nommez des gens.
Vous nommez un ancien premier ministre qui a déclenché... une intention politique,
M. Poëti, qui a quitté son ministère. Vous portez même un jugement sur
l'avancement de son travail.
On
parle toujours du même gouvernement, mais on est dans la même législation, là, que
depuis le printemps 2014. Moi, mon
problème est toujours le même, là, et je n'ai pas deux versions là-dessus.
Il m'apparaît que les institutions doivent être indépendantes non seulement
pour l'apparence, mais pour une totale indépendance en matière de justice. Et,
en matière de police, c'est d'autant plus
important. D'enquêter sur le gouvernement du Québec, ce n'est pas simple, quand
ta nomination relève du gouvernement du Québec lui-même. Imaginez, là. Vous
avez évoqué le scandale de la Société immobilière du Québec. Il y a quelques
jours, ça a fait un an que l'équipe d'Enquête, de Radio-Canada, avec
Marie-Maude Denis et Isabelle Richer, ont sorti cette histoire, potentiellement
le plus grand scandale immobilier de l'histoire du Canada. Radio-Canada, pas le
bureau d'enquête de QMI, comme certains ministres aiment le rappeler à l'occasion dans les points de presse en
disant : Ah! non, ce n'est pas ça que je voulais dire, finalement. Je sais
très bien que c'est voulu.
Radio-Canada, société d'État... Donc, on peut se poser des questions :
Pourquoi, dans le municipal, puis vous l'avez
évoqué, ça avance plus vite que dans le politique, Québec? Puis je ne suis pas
le seul observateur à avoir remarqué ça.
Donc, il me semble que ça prend des mesures renforcées. Il y a un sondage, au
printemps dernier, qui a indiqué que 61 % de la population québécoise croit à l'ingérence politique dans les
affaires de l'UPAC — un
sondage relativement facile à retrouver.
Donc,
vous n'avez pas indiqué clairement comment vous voyez le mode de nomination,
mais en même temps vous énumérez des
situations d'un même gouvernement et où les mesures pour pallier à cette
situation-là ne sont pas claires. Vous avez nommé, entre autres,
l'informatique. Il n'y a rien qui a été fait là-dessus. Le transport, moi, je
ne sens pas qu'il y a rien qui a été
fait. La seule chose qui a été faite, c'est qu'on a délesté le ministre des
Transports de son titulaire, qu'il y
en avait un autre. Donc, je ne sens pas ça. On n'a pas ramené Robert Poëti aux
Transports, là, récemment.
Donc,
sur les mesures coupe-feux ou les mesures susceptibles de ramener la confiance,
est-ce qu'il y a des réflexions que vous avez faites qui ne se retrouvent pas
dans le mémoire mais que vous souhaitez partager aux membres de la
commission?
M.
Daigle (Christian) : On n'a
pas fait de débat, dans nos instances, sur les modes de nomination.
Par contre, d'avoir une nomination qui pourrait être faite par
l'ensemble des parlementaires... ou à une mesure, là, aux
deux tiers des parlementaires ou aux 4/5... je ne sais pas quelle
formule serait la plus appropriée, mais qui pourrait permettre, par l'ensemble des parlementaires, de se prononcer, et pas seulement
par le gouvernement, ça serait peut-être une mesure qui
pourrait répondre à certains besoins en ce sens-là.
Le Président (M.
Ouellette) : Le député de Matane.
M.
Bérubé :
Vous croyez que c'est une mesure qui pourrait répondre à certains besoins en
termes de...
M. Daigle (Christian) : De donner une plus grande validation du mandat de
la personne et également, aussi, par la population, d'avoir une plus
grande crédibilité aussi envers la population, aussi, par cette nomination-là.
Le Président (M. Ouellette) :
...
M.
Bérubé : C'est évident que la question, je dirais, de
l'impression que peut avoir la population, mais aussi dans les faits... Dans les faits, vous savez, vous avez
mené des batailles importantes. Par exemple, si vos membres sont des sonneurs d'alerte, là — vous savez qu'on n'est pas très bien
couverts là-dessus, hein, à Québec — il me semble qu'on pourrait aller beaucoup plus loin que ça.
Imaginez, dans un milieu comme l'UPAC, où il y a déjà beaucoup de pouvoirs
puis c'est difficile d'en savoir
davantage... Cet après-midi, j'ai évoqué, par exemple, que, juste dans le
climat de travail, on n'est pas capable d'avoir d'informations, tout est
caviardé. C'est une demande qu'on a faite à l'UPAC, d'avoir de l'information. Avant de créer un nouveau corps de police, il faut toujours
bien faire l'évaluation de ce qu'on a présentement. Puis vous avez identifié qu'il y a encore des
lacunes importantes, qu'il y a des enjeux qui n'avancent pas. Ce
n'est pas nécessairement lié à la structure de l'UPAC, hein? Ça n'a pas été
identifié dans le rapport Charbonneau, là, la commission Charbonneau.
Donc, j'essaie de voir, le point de départ, c'est quoi.
Tantôt,
on l'a évoqué. Vous avez un certain nombre de syndiqués qui travaillent à
l'UPAC. Dans quels types de poste?
M. Daigle
(Christian) : C'est des postes de soutien administratif.
M.
Bérubé : Quel est
le... je dirais, qu'est-ce que vous recevez comme... le terme anglais étant feed-back, de vos employés
sur le... Comment ça se passe?
Le Président (M.
Ouellette) : Rétroaction.
M.
Bérubé :
Rétroaction, oui. Merci, M. le Président. Rétroaction.
M.
Daigle (Christian) : Pour l'instant, nous avons eu peu de
communications avec les gens qui travaillent au niveau de l'UPAC, parce qu'ils avaient toujours un devoir de réserve, si
vous voulez, de par leurs fonctions. Donc, c'est plus difficile, des
fois, d'aller chercher des informations chez eux.
S'il
y avait des cas ou des problématiques, dans le milieu de travail, au niveau de
leur travail à eux, par rapport à leurs conditions de travail, nous en
aurions entendu parler. C'est peut-être arrivé à quelques niveaux, mais on a
des dirigeants, aux niveaux local et
régional, qui peuvent s'occuper de répondre à ces besoins-là. Mais, sur les
orientations politiques ou sur la
façon dont ça se passe à l'interne, on n'a pas eu d'information qui nous a été
transmise à ce niveau-là.
M.
Bérubé : Je vous pose la question : Est-il possible
que, lorsqu'on travaille à l'UPAC, notre première loyauté, indifféremment de l'endroit d'où on provient, soit
envers l'UPAC et qu'à cette fin il y ait des mises en garde importantes qui soient faites aux employés à l'effet que c'est
d'abord des employés qui relèvent du commissaire de l'UPAC, qu'ils sont
des employés de l'UPAC formellement au moment où ils sont à l'intérieur...
qu'ils proviennent du SPVM, de la Sûreté du Québec, de votre syndicat ou
d'ailleurs?
Avez-vous
déjà fait des vérifications, si on leur demande des éléments supplémentaires de
loyauté, voire même des documents qu'ils devraient signer lorsqu'ils
sont à l'UPAC?
M.
Daigle (Christian) : Malheureusement, je n'ai pas cette
information-là, je ne saurais répondre à cette question.
M.
Bérubé : D'accord. Vous parlez de vérification et contrôle
plutôt que prévention. Un des termes qui est dans le slogan de l'UPAC, de mémoire, c'est... il y a vérifier,
prévenir et enquêter. Je pense que c'est ça, hein, qui est un peu la
devise de l'UPAC. Donc, quand j'ai lu ça, je
me posais la question : Pouvez-vous le préciser davantage? Dans le texte,
vous en parlez, mais il me semble que juste
lire le texte, ça porte à confusion un peu, parce qu'il y a de la prévention à
faire aussi. Idéalement, si on est
capable de limiter le nombre de crimes qui impliquent, là, tout ce que vous
avez indiqué, les marchés publics, et
tout ça, bien, on va pouvoir s'attarder aux cas les plus lourds, où il y a des
systèmes, par exemple, où il y a beaucoup plus d'argent en jeu.
Donc,
c'est en page 8 que je vois ça, «vérification et contrôle plutôt que
prévention». Tu sais, moi, j'aurais mis aussi «et prévention», mais, en
utilisant le terme «plutôt», ça m'apparaît comme...
Le Président (M.
Ouellette) : À quelle page, M. le député de Matane?
M.
Bérubé : Page 8, en gras. C'est écrit «vérification et
contrôle plutôt que prévention». C'est-u que vous trouvez que c'est ça
présentement ou vous donnez une indication?
M.
Daigle (Christian) : Nous, ce qu'on dit, c'est : Présentement, de
la façon que semble vouloir fonctionner le gouvernement, c'est qu'à chaque fois qu'il y a des scandales, à chaque
fois qu'il y a quelque chose qui se passe, bien, on crée une espèce
d'entité extérieure pour essayer de dire : Bon, on va calmer le jeu, on va
calmer la grogne populaire qu'il peut y
avoir, en créant cet organisme-là ou en créant un organisme qui va nous
permettre peut-être d'amener une certaine
mesure de contrôle, mais de ne pas s'attaquer à la racine du problème même, qui
est d'aller à l'externe pour faire ce qu'on peut faire à l'interne.
Donc, c'est à ce niveau-là qu'on...
M.
Bérubé : Vous avez parlé d'ailleurs de sous-traitance tout à
l'heure comme étant une façon pour le gouvernement de se priver, je dirais — sans jeu de mots — d'une expertise de la fonction publique. On
est capable de bien faire les choses, les gens sont formés, les gens ont
des bonnes conditions, les gens ont une loyauté envers l'État.
Vous trouvez
que l'apparition d'un nombre plus grand de privatisations... ou de
sous-traitances — on va appeler
ça sous-traitance — a ouvert, je dirais, des brèches permettant
à des intérêts privés de s'approcher plus que jamais de fonds publics.
M. Daigle
(Christian) : Bien, c'est l'utilisation des fonds publics qui est
faite par la sous-traitance. C'est ça, la difficulté. En plus de perdre cette expertise-là, cette capacité
également d'être redevable envers les élus, parce que les sous-traitants n'ont pas les mêmes redevances à
donner au niveau des élus, à ce niveau-là, en plus, nous perdons de l'argent
à travers tout ça, parce que la
sous-traitance coûte beaucoup plus cher que ce que nous pouvons faire à
l'interne pour les mêmes travaux.
Donc, on se prive d'expertise, d'une capacité de garder cette expertise-là à
l'interne et même de fonds publics qui pourraient être nécessaires
ailleurs.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de Matane. C'était très intéressant. M. le député de
Beauce-Nord.
• (20 heures) •
M.
Spénard :
Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue, MM.
Daigle et Gaudreau.
J'ai lu
attentivement votre mémoire. Je veux bien croire que c'est un appel à la
mobilisation pour donner moins de
sous-contrats, mais moi, je m'en tiendrai à la loi qu'on étudie présentement,
la loi n° 107, que je trouve que vous êtes pratiquement tout en accord, avec le BEI, avec l'UPAC et avec le DPCP,
qu'est-ce qu'il y a dans la loi. Je
pense que vous semblez en accord avec les grands principes.
M. Daigle
(Christian) : Oui. Nous
accueillons favorablement les principes qui ont été énoncés dans le projet de loi, effectivement.
M.
Spénard : O.K. À l'UPAC, vos employés proviennent de quels ministères
pour travailler là? Est-ce que l'UPAC a engagé directement ses propres
employés et ils se sont syndiqués avec vous? De quels ministères viennent-ils?
M. Daigle
(Christian) : Il a pu y
avoir des gens de la Sûreté du Québec qui ont été transférés au niveau de l'UPAC. Il
peut y en avoir peut-être eu au niveau de la Sécurité publique. Je ne suis
pas certain à ce niveau-là. Mais ça peut être des appels de candidatures qui ont été faits à travers
les ministères avec des postes qui sont affichés à ce moment-là aussi. Je n'ai pas l'origine de ces demandes-là d'emploi qui ont
été effectuées, malheureusement.
M.
Spénard : O.K. Mais vous gardez toujours et ils sont toujours...
j'imagine que vous gardez toujours un lien syndical
avec ces personnes-là, vous les représentez au point de vue de la convention collective, vous défendez leurs droits, et tout.
M. Daigle
(Christian) : Effectivement, ils ont les mêmes droits que tous les fonctionnaires des différents ministères
et organismes, ils sont couverts par la même convention collective.
M.
Spénard : O.K. Est-ce
que vous avez eu des problèmes particuliers à l'intérieur de l'UPAC?
M. Daigle
(Christian) : Pas à ma connaissance. Nous n'avons pas eu de situation qui a pu remonter jusqu'au bureau de la
présidence. Il y a peut-être eu des petits cas au niveau peut-être
d'application de convention collective, d'application de termes ou d'articles
précis et...
M.
Spénard : ...en
général, le climat de travail, il n'y a pas...
M. Daigle (Christian) : Je n'ai
aucune indication qu'il y aurait un problème au niveau de l'UPAC.
M.
Spénard : O.K. Vous
parlez aussi que vous êtes en accord avec le Bureau des enquêtes indépendantes,
Mme Giauque. Je suis bien d'accord avec le
Bureau des enquêtes indépendantes, sauf qu'on a appris cet après-midi qu'en
2016, sur les 76 enquêtes amorcées, 11 seulement ont été transmises au DPCP.
Alors, ma
question. Vous dites qu'il y a un manque criant de personnel. Je le conçois,
parce que ce ne sont pas des enquêtes...
Lorsqu'on est au Bureau des enquêtes indépendantes, il y a quelques enquêtes
qui peuvent être compliquées, mais il
y a d'autres enquêtes que c'est beaucoup moins compliqué parce que ça implique
une, deux ou trois personnes, à peu
près, maximum, ce n'est pas l'UPAC avec sa grande collusion. Mais j'aimerais
savoir : Est-ce que vous considérez que le BEI, à date, étant donné le
très faible résultat... Et les faibles résultats s'appliquent aussi à l'UPAC,
hein? Quand on regarde le tout, là,
depuis six ans, là, ça n'a pas été... on a de la misère à passer le stade des
mises en accusation et le stade du
processus judiciaire. Je pense qu'il n'y a pas eu beaucoup, beaucoup
d'accusations, considérant les sommes affectées à ça et considérant le
monde qui travaille là aussi.
Mais au BEI,
si ça continue comme ça, quelle est votre évaluation du BEI, étant donné qu'il
y a si peu d'enquêtes qui
aboutissent, que c'est tellement long, puis là, avant que ça soit déposé au
DPCP... et on ne parle pas non plus de l'analyse du DPCP, jusqu'à la
mise en accusation comme telle, là? Quelle est votre idée là-dessus, sur le
BEI?
M.
Daigle (Christian) : Nous n'avons pas fait d'étude sur le taux
d'enquêtes qui ont pu être terminées ou transférées au DPCP et nous n'avons pas non plus étudié la question ou
fait une analyse des dossiers, parce que les gens qu'on représente sont plus au niveau du soutien
administratif. Donc, nous n'avons pas les accréditations des personnes qui sont plus haut placées et qui s'occupent de
faire ces analyses-là et de les transférer au niveau du DPCP tout comme nous n'avons pas non plus les personnes qui sont
accréditées au niveau du DPCP qui font les mises en accusation. C'est
plutôt LANEQ, j'imagine, qui doit le faire ou les autres syndicats de la
fonction publique.
M.
Spénard : Est-ce
que vous avez des personnes qui travaillent au BEI, syndiquées?
M.
Daigle (Christian) : Il faudrait que je valide l'information pour le
BEI. Je ne pourrais pas vous dire, malheureusement.
M.
Spénard : Puis est-ce
que vous en avez au DPCP?
M. Daigle (Christian) : Au DPCP,
nous en avons, oui, effectivement, une dizaine peut-être, à peu près.
M.
Spénard : Je n'ai
pas d'autre question, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Juste une précision, M. Daigle. Vous avez mentionné tantôt que les cas qui
touchent vos employés... ou,
c'est-à-dire, les syndiqués qui travaillent soit au BEI, au DPCP ou à l'UPAC,
ce n'est pas remonté à la présidence.
Ça, ça veut dire que ce n'est pas à votre connaissance personnelle, mais ça
pourrait être dans votre machine en quelque part.
M. Daigle
(Christian) : C'est que nous avons un syndicat qui est à trois
niveaux. Nous avons des délégués et des dirigeants au niveau local qui s'occupent, dans leurs secteurs mêmes de
travail, de répondre à des questions. Ils ont une formation de base sur
l'application de la convention collective, qu'on parle du temps supplémentaire,
des horaires variables, de la paie, et ainsi de suite. S'il y a des
problématiques qui sont plus difficiles, mettons, à répondre ou à documenter, on a des bureaux régionaux. Nous avons
sept bureaux régionaux, à la grandeur du Québec, dans les régions, et c'est des gens qui sont libérés à temps plein,
qui ont une meilleure connaissance et qui peuvent accompagner ou épauler
les gens au niveau local pour les aider. Et, si jamais il y a des difficultés
qui sont plus grandes, lorsqu'on dépose des griefs,
lorsqu'on fait des travaux de classification, lorsqu'on a besoin de formation,
là ça monte au niveau national, et nous avons, des fois, des comptes rendus qui nous sont faits périodiquement
par les différents services que nous avons au niveau du syndicat.
Donc, il se peut qu'il y ait eu des difficultés,
mettons, d'application de convention, de climat de travail ou de situations particulières qu'il a pu arriver dans un bureau où des gens vont
chercher de l'information sans qu'il y ait une problématique ou une situation vraiment lourdes dans un bureau, mais ça
ne remonte pas jusqu'à notre niveau à ce point-là. Donc, ça a pu se
régler au préalable. C'est pour ça que je vous dis : Je ne peux pas vous
dire que j'ai eu connaissance d'information
ou de problématique qui est arrivée. Est-ce que c'est possible? C'est possible,
mais ça a dû se régler à un autre niveau à ce moment-là.
Le
Président (M. Ouellette) :
O.K. Et, les chiffres que vous allez aller chercher par rapport aux demandes
qui vous ont été faites par la commission, vous allez aller au niveau
régional?
M. Daigle
(Christian) : Nous allons aller au niveau du bureau directement. Nous,
nous avons des banques de fichiers
informatiques, parce que, lorsque les gens paient des cotisations syndicales,
le gouvernement nous transmet à chaque
15 jours le nombre de personnes qui travaillent à chaque endroit, avec le
centre de responsabilité, et nous sommes capables de dénombrer les
effectifs que nous avons en poste dans chacun des organismes. Donc, nous
pouvons aller chercher au chiffre près le
nombre de personnes que nous avons dans différents ministères, dans même
différents centres de responsabilité
ou dans différentes régions du Québec même, aussi. Ils nous font tout
décortiquer au niveau informatique cette
information-là. Donc, ce sera possible pour nous d'aller chercher ces
chiffres-là et de vous les fournir au niveau de notre syndicat
directement.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Christian Daigle, M. Julien Gaudreau, représentant le Syndicat de la
fonction publique et parapublique du Québec.
La commission
suspend ses travaux quelques minutes pour permettre au Service de police de la
ville de Montréal de s'avancer, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 20 h 7)
(Reprise à 20 h 9)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant comme dernier intervenant de nos consultations le Service de police de la ville de Montréal,
représenté par le directeur adjoint Claude Bussières, qui va nous présenter la personne qui l'accompagne.
M. Bussières, vous allez avoir 10 minutes pour faire votre présentation. Vous
prenez 10 minutes ou moins, pas plus, et après il y aura un échange avec M. le
ministre et les porte-parole des deux oppositions. Je vous laisse la parole.
Service de police de la
ville de Montréal (SPVM)
M. Bussières (Claude) : Merci.
Alors, je suis accompagné de Johanne Paquin, qui est inspectrice-chef à la
Direction stratégique du Service de police de la ville de Montréal.
M. le Président, Mmes, MM. les
commissaires, la ville de Montréal et son Service de police remercient la Commission des institutions de lui donner l'occasion de se prononcer sur
un enjeu des plus importants pour notre société, soit la confiance des citoyens et des citoyennes envers
l'administration de la justice et nos institutions publiques.
• (20 h 10) •
M. le
Président, le SPVM salue la volonté
du législateur de proposer un cadre de travail assurant une cohésion accrue des efforts déployés dans la lutte à la
corruption. Notre organisation apportera sa collaboration pleine et
entière à l'atteinte de cet objectif,
dans le meilleur intérêt des institutions et des citoyens, conformément
à l'esprit du projet de loi. Nous aurons l'occasion
d'y revenir, car, avant de vous faire part de nos brèves observations,
permettez-moi de vous présenter succinctement le SPVM.
Avec ses 4 586 policiers et 1 420 employés civils,
le SPVM est le plus important corps de police municipal au Québec et le second plus important corps municipal
au pays. Il contribue au maintien de la qualité de vie dans les quartiers,
à la sécurité publique et conséquemment au
maintien du sentiment de sécurité des citoyens. Notre organisation offre des
services policiers de niveau 5, selon les
niveaux de service définis par la Loi sur la police, auprès de 2 millions
de résidents de l'agglomération de
Montréal. Ce territoire de 500 kilomètres carrés couvre 19 arrondissements de
la ville de Montréal et les 15 villes
reconstituées. Pour des fins d'efficacité de gestion, ce territoire est scindé
en quatre divisions, soit le nord, le sud, l'est et l'ouest, desquelles
relèvent 32 postes de quartier.
Chaque année, notre centre d'appels d'urgence
9-1-1 répond à plus de 1,4 million d'appels, dont plus de 400 000 sont référés aux policiers du SPVM.
De ce nombre, 15 000 appels visent des situations de violence conjugale
ou intrafamiliale, et 33 000 appels
sont en lien avec des personnes mentalement perturbées ou en crise. Durant la
même période, près de 3 000 opérations en matière de sécurité
routière sont réalisées, soit des activités de prévention ou de répression, et
plus de 100 000 infractions au Code criminel y sont enregistrées.
Il est donc
clair qu'au quotidien le SPVM occupe une place significative dans la vie de la
société montréalaise et que les
enquêtes occupent une part importante de notre mission de protection de la
sécurité des biens et des personnes.
À ce propos,
notre compréhension est à l'effet que le projet de loi n° 107 fait appel à
l'expertise des corps de police menant
des enquêtes dans le but d'assurer une conduite efficace et rigoureuse des
enquêtes en matière de corruption. C'est du moins ce que nous en faisons à la
lecture de l'article 8.8, qui est écrit : «Le commissaire établit, en
collaboration avec le corps de
police, les modalités selon lesquelles l'enquête doit se poursuivre.» Cette
volonté manifeste de favoriser le partage
des connaissances et de l'expertise, ceci, sera un gage de succès, selon des
modalités qui resteront à déterminer. Sur
ce point précis, le SPVM est heureux d'y voir une confirmation de ses responsabilités,
telles qu'inscrites dans la Loi sur
la police, laquelle prévoit que les services policiers de niveau 5 doivent
enquêter sur la corruption de fonctionnaires judiciaires ou municipaux.
Il faut
ajouter à tout ceci que le SPVM a un long historique de partenariat avec
nombreux corps de police d'ici et d'ailleurs en matière de lutte à la
criminalité sous toutes ses formes. C'est cet esprit qui anime une quinzaine de
policiers du SPVM qui travaillent au sein de l'Escouade de protection de
l'intégrité municipale, mieux connue sous l'acronyme EPIM, qui travaille en
étroite collaboration avec l'UPAC. Depuis sa création en 2013, l'EPIM a traité 297 dossiers, dont 40 qui lui avaient été
transférés directement de l'UPAC. C'est dire l'expertise que possèdent nos
policiers dans ce domaine et qui est reconnue par l'UPAC elle-même.
Outre les enquêtes qui touchent la corruption, l'abus de confiance, le trafic
d'influence et les fraudes, l'EPIM traite également de tout le volet de
l'intégrité municipale.
Passons, en
second lieu, à la formulation de l'article 286 du projet de loi, qui propose
que le directeur d'un corps de police ne soit pas soumis à l'obligation
d'alléguer au MSP lorsqu'il s'agit d'une allégation relative à une infraction
à caractère sexuel commise par un policier dans l'exercice de ses fonctions.
Dans ce cas, propose le projet de loi, le directeur
devrait plutôt informer sans délai le Bureau des enquêtes indépendantes. Bien
que l'allégation relative à une telle infraction fasse maintenant l'objet d'une
enquête de la part du BEI, ce avec quoi nous sommes d'accord, il nous
apparaît important de ne pas faire en sorte que le fait de relever le directeur
de police de son obligation d'en informer le MSP soit perçu comme une forme de
banalisation des infractions à caractère sexuel. Les événements survenus très récemment à ce sujet montrent l'importance de
maintenir un message fort et clair à la société à l'effet que l'ensemble de
l'appareil judiciaire est mobilisé dans sa lutte à toute la criminalité, et aux
crimes à caractère sexuel en particulier, dans le but de rassurer la
population.
À ce sujet, nous vous rappellerons
respectueusement qu'il serait plus souhaitable que le premier alinéa de l'article 286 demeure, et ce, malgré que certaines
enquêtes soient confiées au BEI. Selon nous, le directeur d'un corps de
police doit effectivement, sans délai, informer le ministre de toute allégation
relative à une infraction criminelle commise
par un policier. Dans une perspective de cohésion, le SPVM estime que le ministre
de la Sécurité publique doit continuer d'être informé d'une allégation
relative à une infraction à caractère sexuel commise par un policier dans l'exercice de ses fonctions. Nous y voyons un
enjeu de transparence et de confiance des citoyens envers le système
judiciaire.
En
conclusion, le projet de loi n° 107 propose des pistes de solution pour compléter
les moyens déjà mis en place pour
lutter contre la corruption, et le SPVM entend y apporter son soutien plein et
entier. M. le Président, les épisodes de corruption qui ont marqué le paysage québécois ces dernières années
ont soulevé, à juste titre, l'indignation populaire, qui y voit, bien au-delà des chiffres, une
dégradation des moeurs publiques et un affaiblissement des valeurs de notre
société. Un travail considérable a
été fait pour enrayer ce type de criminalité, et l'UPAC est parmi les
principaux acteurs qui ont mené la
charge contre les instigateurs de ces stratégies condamnables. Il est
indéniable que la multiplication des opérations et l'arrestation de suspects ont eu un effet
important sur les politiques publiques et qu'à terme la confiance des citoyens
envers les institutions publiques s'en trouvera renforcée. L'UPAC a
accompli un travail considérable qui doit se poursuivre.
Les enquêtes
et les actions de l'Escouade de protection de l'intégrité municipale du SPVM
s'inscrivent dans la foulée de ces
actions concertées, et nous souhaitons que cette collaboration fructueuse se
poursuive sur la base du développement
des expertises propres à chaque organisation, dans un climat de confiance
mutuelle. Je vous remercie.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Bussières. Avant de passer la parole à M. le ministre, je pense que
vous aurez bien compris, dans votre
mémoire, quand vous faisiez référence à l'article 286 du projet de loi, on réfère à l'article 28, le projet de loi n'ayant que 47 articles, et, pour les gens qui nous suivent, qui veulent
suivre, c'est l'article 286 de la Loi de police. Et donc c'est
juste une petite précision. M. le ministre, à vous la parole.
M.
Coiteux : Oui. C'est une remarque qui est rassurante pour tous les membres
de la commission, parce que...
Le Président (M. Ouellette) : 286
articles, oui.
M. Coiteux : ...286 articles, ça
fait beaucoup d'heures de commission, effectivement.
Des voix : Ha, ha, ha!
• (20 h 20) •
M.
Coiteux : Mais, oui, tout à fait. Il y a beaucoup de lois, pour ceux
qui nous écoutent, il y a beaucoup de lois qui viennent modifier des lois existantes, et c'est le cas du projet de
loi n° 107 ici, qui vient modifier plusieurs articles de la Loi de
la police. Et conséquemment c'est à ça qu'on faisait référence.
Merci, M.
Bussières, merci, Mme Paquin, d'être avec nous ce soir. D'abord, j'ai entendu
le commentaire sur cette question, l'obligation de transmettre sans
délai l'information concernant une infraction à caractère sexuel sur laquelle il y aurait une enquête, d'informer le MSP. J'ai
bien entendu, mais — juste
pour que ça soit bien compris — à l'heure actuelle, une fois que nous avons cette information, ça nous permet de
demander au BEI de faire l'enquête. Donc, ça, on essaie de faire ça le plus rapidement possible.
On s'est
donné un processus qui fait en sorte que ça se fait rapidement. Mais, puisque le BEI se verrait confier par la loi cette responsabilité-là sans demander l'autorisation ministérielle ou
soit sans recevoir la demande ministérielle, il est logique que l'on demande, donc, au corps de police concerné de
transmettre l'information directement au BEI pour qu'il puisse initier l'enquête, ce qui ne veut pas dire que le MSP ne va pas être
mis au courant. Le MSP va être mis au courant
par le BEI. Donc la transmission de l'information au MSP, elle demeure, donc, juste pour vous
rassurer. C'est d'ailleurs une petite
modification à l'article 287 de la Loi de la police qui vient
préciser ça dans le projet de loi.
Donc, simplement, là, pour que tout
le monde soit bien rassuré qu'il n'y
a pas moins de sérieux qui est accordé à cette question-là. C'est le
contraire, on y accorde encore davantage de sérieux.
Maintenant,
j'aurais une question, puis ce n'est pas ça, ce n'est pas là-dessus. Il y a
un certain nombre de policiers du
SPVM qui oeuvrent au sein de l'UPAC, et ce qui est proposé dans le projet de loi, c'est que ça puisse continuer ainsi par le biais de prêts de service. Comment ça se passe, actuellement, là, la relation entre le SPVM, et l'UPAC, et en particulier les policiers du SPVM qui travaillent au sein de
l'UPAC? Comment vous voyez cette question des prêts de service pour l'avenir?
Une voix : ...
M.
Bussières (Claude) : Oui.
Vous savez, les prêts de service, au SPVM, existent depuis une vingtaine
d'années, O.K., ça ne date pas d'hier, et puis nous sommes pour
cet apport-là à la société, de prêt de service, O.K.,
nous trouvons que c'est une belle façon de contribuer.
En ce moment, à l'UPAC et en d'autres endroits,
les prêts de service, généralement, sont pour une période de trois ans, O.K.? Il y a
une sélection qui est faite à l'intérieur du SPVM, O.K., un
processus d'entrevue, pour pouvoir envoyer des gens
occuper ce type de fonction là. Ça ne s'est pas toujours fait avec des
entrevues. Auparavant, on envoyait des policiers
d'expérience ou qui avaient des connaissances, et autres, mais, depuis quelques
années, on procède avec des entrevues,
ce qui permet d'avoir une certaine latitude pour... pas une latitude, mais pour
permettre d'avoir une chance égale à tout le monde de pouvoir aller
oeuvrer au sein de ces organisations spécialisées là.
En ce moment,
nous avons huit policiers qui sont en prêt de service à l'UPAC, O.K.? Je ne
sais pas si je réponds bien à votre question.
M. Coiteux : C'est pour des périodes
de trois ans, c'est ça?
M. Bussières (Claude) : C'est bien
ça.
M.
Coiteux : Est-ce que c'est la période optimale ou bien est-ce que vous
préférez que ce soit renouvelable, que ce soit plus long ou moins long?
M.
Bussières (Claude) : On considère que la période de trois ans, c'est
une belle période, O.K., ça permet au policier d'aller oeuvrer dans une
autre organisation et revenir, par la suite, sans être, si je pouvais
m'exprimer ainsi, décroché de la réalité du corps de police à qui il
appartient.
C'est sûr
que, même si on dit que c'est trois ans, ce n'est pas coulé dans le béton, là.
Vous comprendrez qu'en matière
d'enquête ça ne fonctionne pas selon l'horloge. Alors, on ne dit pas : Il
est minuit moins une, tu pars demain matin. Tout dépendant des rôles et responsabilités que le policier va jouer à
l'organisation où il est prêté, ça se peut qu'on prolonge de quelques mois... C'est sûr qu'on a comme un
officier de liaison, si je pourrais dire, O.K., un inspecteur-chef, au Service
des enquêtes spécialisées, qui s'assure
d'avoir le contact avec l'UPAC pour s'assurer que, dans la dernière année que
le policier oeuvre au sein de l'UPAC, le policier puisse jouer un rôle,
on pourrait dire, plus secondaire que d'enquêteur principal à un dossier particulier pour lui permettre la chance... on
sait qu'il doit revenir, alors, pour lui permettre la chance de
possiblement terminer son mandat à la date prévue.
M. Coiteux : Vous prêtez certains de
vos policiers. Est-ce qu'il arrive qu'on vous en prête?
M.
Bussières (Claude) : Oui, effectivement. Dans certains dossiers, c'est nous qui recevons des policiers d'autres
organisations.
M. Coiteux : Est-ce que ça peut arriver,
des prêts de l'UPAC vers le SPVM?
M.
Bussières (Claude) : De
l'UPAC vers le SPVM, non, mais d'autres corps de police, oui, dans des dossiers
spéciaux.
M. Coiteux : D'autres corps de
police, d'accord, mais ça pourrait arriver, il n'y a rien qui l'empêche ou...
M. Bussières (Claude) : Ça pourrait
arriver, là, mais il n'y a jamais eu cette occasion.
M.
Coiteux : O.K. M.
Lafrenière, le commissaire, nous a dit qu'un jour ce qu'il souhaiterait, c'est
d'être capable d'embaucher ses
propres enquêteurs, ses propres... ça deviendrait un corps de
police, donc ses propres policiers.
Il ne nous a pas dit qu'il
s'attendait à faire ça tout de suite, être capable de faire ça tout de suite,
mais qu'un jour ça devrait aller vers ça.
Voyez-vous ça
comme quelque chose de possible dans un horizon relativement court ou vous
voyez qu'il y a des grands défis de ce côté?
M.
Bussières (Claude) : Bien,
ce que je pourrais vous dire, c'est que, oui, c'est possible, mais, comme nous,
on sélectionne souvent des enquêteurs
d'expérience, O.K., et possiblement que les autres corps de police font la même
chose, je... À part recruter des
anciens policiers peut-être qui ont pris leur retraite, qui ont une
expérience enquête, aller chercher, dans
la société, des personnes qui auraient ce genre d'expérience
là en enquête pour arriver à faire des enquêtes de plus haut niveau, si on veut, ça m'apparaît difficile,
O.K.? Ça fait qu'à court terme je ne sais pas si ça pourrait être réalisable.
À moyen terme, ça restera à voir, là, mais je trouve ça un peu...
M. Coiteux : ...enquêteurs
d'expérience à la retraite, ça, vous pensez que ça serait une possibilité?
M. Bussières (Claude) : Ah! ça, il
n'y a pas de problème.
M. Coiteux : D'accord. Moi, M. le
Président, je n'ai pas d'autre question.
Le
Président (M. Ouellette) :
...avoir une précision de chiffres avant d'aller à mon collègue de La Prairie. Vous avez mentionné qu'il y a huit enquêteurs qui sont à
l'UPAC. C'est à part des 15 de l'EPIM?
M. Bussières (Claude) : C'est ça.
Le
Président (M. Ouellette) :
O.K. Donc, les huit, ils sont dans ce qu'on connaît tout le monde, là, sur l'Escouade de
protection de l'intégrité, là, l'ancien Marteau. C'est une équipe de travail de
huit qui fait des enquêtes, et vous avez votre EPIM, de 15... qui est autonome, sous la coordination du
commissaire à l'UPAC, mais qui fait ses affaires et qui fait aussi les
enquêtes du commissaire.
M.
Bussières (Claude) : C'est
bien ça. Puis qu'il y ait une coordination entre les deux équipes, c'est bien important.
Le Président (M. Ouellette) : O.K. M.
le député de La Prairie.
M.
Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. L'Association des
policières et policiers provinciaux du Québec tantôt nous ont parlé
d'une de leurs préoccupations, qui était les conditions de prêt de service. Le
SPVM, j'imagine, fonctionne de la même façon, par prêt de service.
Vous avez dit
combien de vos membres sont affectés à l'UPAC. Est-ce que vous avez des
préoccupations aux conditions des prêts de service?
M.
Bussières (Claude) : Habituellement, lorsqu'on a fait des prêts de
service, il y a un protocole d'entente qui est fait, O.K., et, bon, tout ce qui est de nature opérationnelle va relever
du corps de police ou de l'endroit où est-ce que le policier va s'en aller, O.K.? Administrativement,
c'est sûr que le policier appartient toujours au SPVM, et le policier, de par
sa convention collective, garde ses mêmes privilèges, si on veut.
M. Merlini : O.K. Parfait. Merci, M.
le Président. Ça me va.
Le Président (M. Ouellette) : Le député
de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Merci,
M. le Président. Bonsoir, bienvenue à
l'Assemblée nationale, aux représentants, représentantes du SPVM.
D'entrée de jeu, je veux à nouveau remercier le
SPVM de m'avoir permis de vivre une expérience Cobra au PDQ 23, dans Hochelaga-Maisonneuve, l'hiver dernier, avec un homme formidable qui est
le sergent Claude Lizotte, que vous
connaissez, qui, je pense, est un modèle à bien des égards en termes de police communautaire, une patrouille de nuit qu'on a faite dans des circonstances particulières. Alors, je veux, à
travers vous — je
l'avais fait avec la Fraternité des policiers — vous
témoigner de la satisfaction que j'ai eue de vivre cette expérience avec
l'ensemble des policiers et policières du
PDQ23 et je pense que les parlementaires auraient beaucoup à gagner à vivre
cette expérience-là. Je l'ai fait avec
la Sûreté du Québec également au poste de La Mitis, dans ma circonscription, et
on découvre plusieurs facettes du travail
de policier, qui est exigeant et qui est combien important dans une démocratie.
Alors, je voulais vous transmettre ça, qu'il y ait une trace de ça, que
j'ai beaucoup aimé cette expérience.
Lorsque je
fais lecture de votre mémoire, force est de constater qu'il détonne un peu, je
dirais, avec les propos et les informations que nous donnent vos policiers de
la fraternité des policiers et policières de la ville de Montréal pour ce qui est, notamment, de l'UPAC, alors c'est
abondamment discuté dans les dernières années, des réserves importantes.
Je comprends que vous êtes en faveur du
projet de loi, que vous êtes un partenaire important, que cette
collaboration-là va être précisée
davantage dans votre rôle et elle reconnaît votre expertise. C'est comme ça que
je pense que vous l'avez exprimé. Le
SPVM, évidemment, est un joueur important pour l'UPAC, avec plus de 4500
policiers. Vous avez accès à énormément
d'informations sur le territoire de l'île de Montréal. Il y a des enjeux
majeurs. J'en rappelle quelques-uns : le Faubourg Contrecoeur, les compteurs d'eau, l'immobilier, des
transactions frauduleuses qui ont lieu sur
l'île de Montréal, dans le port de Montréal, autour du port
de Montréal.
• (20 h 30) •
Alors, évidemment,
Montréal étant une métropole, c'est une plaque tournante
où des acteurs majeurs qui veulent s'adonner
à des activités illicites, voire même corrompre des agents publics agissent.
Alors, vos informations de première main servent l'UPAC.
J'ai des questions
assez techniques. D'abord, maintenant, on connaît le nombre de policiers qui font
l'objet d'une collaboration, d'une entente de prêt de service avec l'UPAC. On
en a discuté aujourd'hui. Est-ce que vous avez reçu des évaluations
du climat qu'on retrouve à l'UPAC et de comment ça se passe pour vos policiers?
Parce qu'évidemment il y a une confiance là-dedans. À partir du moment où
c'est un prêt de service, c'est l'image du SPVM, vous voulez que ça se passe bien pour eux, que ce soit une bonne
expérience. Mais je suis assez convaincu qu'il existe des rapports qui vous
indiquent comment ça se passe. J'en ai évoqué un cet après-midi, moi, un
rapport.
Alors, à
votre connaissance, est-ce qu'il existe dans vos services un rapport qui
détaille comment ça se passe pour les policiers et policières du SPVM
qui sont prêtés à l'Unité permanente anticorruption?
Le Président (M. Ouellette) : M.
Bussières.
M.
Bussières (Claude) : À ma
connaissance, M. le Président, je n'ai jamais eu connaissance d'un rapport, là, dont
monsieur fait mention, là, sur comment se passe le climat de travail, là, à
l'UPAC.
M.
Bérubé : D'accord.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Matane.
M.
Bérubé : S'il n'y a pas de rapport, est-ce que vous avez
eu connaissance de plaintes de vos policiers quant à leurs conditions de
travail à l'intérieur de l'UPAC?
M.
Bussières (Claude) : O.K.
Vous comprendrez que, lorsque nous prêtons des policiers à l'extérieur...
Première des choses, le policier
n'est pas obligé d'y aller, il y va sur une base volontaire, O.K.,
une fois qu'il a été sélectionné. Et ça arrive, pas juste à l'UPAC, mais à d'autres endroits, que, des fois, les
policiers vont débuter leurs prêts de service et puis se rendent compte, pour différentes raisons, que
ça ne leur plaît pas, ou ce n'est pas dans leurs cordes, ou ce n'était pas
l'espérance qu'ils avaient du travail qu'ils avaient à réaliser, alors ils
demandent de revenir. Ça, c'est des choses qui arrivent... je ne dirais pas «de façon régulière», mais qui arrivent de
temps à autre. Alors, oui, ça, c'est des choses qui sont possibles.
M.
Bérubé : Je vais
poser ma question différemment : Est-ce que, suite à des informations
qu'on vous a fait parvenir, vous avez dû de vous-même retirer des policiers et
policières de l'UPAC?
M. Bussières (Claude) : À ma connaissance, je vous dirais non, mais c'est
vraiment à ma connaissance personnelle, O.K.?
Mais c'est sûr et certain que, si une note ou une information nous vient de l'UPAC... un dirigeant de l'UPAC nous informe que peut-être qu'un policier ne
fait plus l'affaire pour x raison, il serait bien de le rapatrier au SPVM, dans
nos protocoles d'entente, c'est fait en sorte qu'on peut rapatrier quelqu'un,
effectivement.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci.
M.
Bérubé :
D'accord.
Le Président (M.
Ouellette) : Avez-vous besoin de la réponse, M. le député de Matane?
M.
Bérubé :
Bien, en fait, je vous invite à aller aux nouvelles à savoir si c'est le cas.
Je pense que c'est une information qui pourrait être pertinente pour le SPVM.
Je
l'ai évoqué cet après-midi, je l'évoque à nouveau de façon totalement
transparente, l'association des policiers provinciaux du Québec, qui était ici cet après-midi, ont émis un
communiqué au début mai dernier, lorsque le commissaire de l'Unité permanente anticorruption a lancé une enquête administrative concernant les fuites dans son
service, concernant de l'information
sensible, chose qui n'avait pas été faite avant dans d'autres cas, notamment la
SIQ et dans d'autres cas. C'est le
cas à ce moment-là. Ils ont indiqué que ça les dérangeait que ce ne soient pas
des agents de la paix qui procèdent aux
enquêtes. Ça, c'est quelque chose qui, d'un point de vue fondamental, les a
inquiétés — je vais
utiliser le terme «inquiétés».
Maintenant,
je me tourne vers le SPVM. Est-il possible que cette enquête administrative se
soit notamment tournée vers les
éléments du SPVM et qu'en ce sens vous ayez des craintes quant au fait qu'on
puisse identifier des agents du SPVM comme étant à la source de fuites?
Je ne peux pas être plus clair que ça.
Le Président (M.
Ouellette) : M. Bussières.
M.
Bussières (Claude) : Oui. Si on a eu des craintes que peut-être un de
nos agents aurait pu couler de l'information ou quoi que ce soit? Écoutez, si c'est ça qui s'était produit, bien, on
aurait fait face à la musique. On n'a pas de crainte à ça. S'il y a des
gens qui commettent des fautes, ils auront à payer la note en conséquence.
M.
Bérubé : Un complément de question, à ce moment-là :
Est-ce qu'on a enquêté sur des policiers du SPVM qui étaient prêtés à
l'UPAC, sur cette question?
M.
Bussières (Claude) : Qu'est-ce qui se passe à l'UPAC, ça appartient à
l'UPAC. Je vous l'ai dit tantôt d'entrée de jeu, c'est que le seul lien que j'ai avec les policiers qui sont
prêtés à l'UPAC, c'est un lien plutôt administratif, O.K., s'assurer que le protocole est respecté, les dates
sont respectées, qu'il va revenir, qu'il a ses conditions de travail minimales
selon sa convention collective. Et tout ce
qui se passe à l'intérieur du prêt de service chez l'UPAC, comme lorsque ça se
passe à l'intérieur de chez nous quand il y
a des gens de prêtés chez nous, le niveau opérationnel, ça reste à l'intérieur
de la...
M.
Bérubé : Ces
policiers sont quand même réputés provenir du SPVM. Même
s'ils sont à l'UPAC, ils proviennent de
chez vous. Il m'apparaît qu'une information de cette nature-là devrait être acheminée aux
dirigeants du SPVM. Je lance ça comme ça, vous en faites ce que vous en voulez,
mais je vous indique que ce genre d'information là devrait parvenir à la Direction du
SPVM. Et je prends votre réponse, mais, cette question-là, il était important pour
moi de la placer.
Le Président (M.
Ouellette) : M. Bussières aurait probablement...
M.
Bérubé :
J'aurais une autre question.
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, je sais, mais je veux lui permettre de répondre.
M.
Bussières (Claude) : Juste
pour vous dire : Si une infraction aurait été commise à la discipline,
c'est sûr qu'il va avoir à répondre à
la discipline du SPVM. Ça fait que, si l'UPAC a fait une enquête, O.K., et
puis qu'ils ont trouvé quelque
chose... bien, c'est sûr que l'UPAC
n'a pas son comité de discipline interne, si on veut, alors il va
référer le cas chez nous. Ça, c'est sûr et certain.
M.
Bérubé : Avec une
enquête faite par des personnes nommées par l'UPAC qui ne sont pas des agents
de la paix, et, sur ces recommandations, vous allez appliquer des
sanctions.
M.
Bussières (Claude) : Non,
c'est qu'ils vont nous transmettre les informations qu'ils ont, et chez nous on va reprendre, on va
regarder qu'est-ce qui a été fait en matière d'enquête. Peut-être
qu'il manque des détails, peut-être
qu'il y a des choses à aller poursuivre en matière d'enquête, mais c'est sûr que
l'enquête va être réanalysée, puis après ça il y aura des sanctions s'il
y a lieu.
M.
Bérubé : Dernière
question. Les banques d'enquêtes, techniquement, là, ma compréhension, je ne
suis pas...
Le Président (M. Ouellette) : ...
M.
Bérubé : ...les banques de données, plutôt, ça
permet à l'UPAC d'aller piger dans votre banque de données, de poursuivre ses
enquêtes, d'en amorcer, voire même d'en conclure. Mais est-ce qu'ils vous en
redonnent? Autrement dit, ils
partent de l'information que vous patrouilleurs, vos policiers, vos
enquêteurs, bon, sont allés chercher. Mais, une fois qu'elle est partie ou qu'elle est accessible pour l'UPAC, êtes-vous
capable d'avoir un état de situation de ce qu'ils font avec cette preuve-là ou c'est à sens unique, dans la compréhension que
vous avez du projet de loi et de la relation qui changerait avec l'UPAC? Parce
qu'à ma connaissance ça donne un pouvoir fantastique à l'UPAC, de piger dans
les banques de données des grands corps de police du Québec.
Le Président (M.
Ouellette) : M. Bussières.
M.
Bussières (Claude) : O.K. Habituellement, comment fonctionne le
renseignement au Québec, c'est que
tous les corps de police déversent
leurs renseignements dans une banque centrale, O.K.,
qui est gérée par la Sûreté du
Québec, et puis on pige dedans pour
pouvoir faire nos enquêtes, si on veut. En cours d'enquête, O.K.,
tant que l'enquête n'est pas terminée,
c'est sûr que les informations que nous possédons ne sont pas divulguées à
tous, O.K.? Un coup que l'enquête va être terminée, les informations vont être transmises dans la banque de données. Alors, c'est sûr que,
si l'UPAC ont accès à cette banque de
données là, bien, il faudrait
qu'après leurs enquêtes eux aussi déversent les données dans cette banque
centrale là.
M.
Bérubé :
...qu'il y ait une relation...
Le Président (M. Ouellette) : Merci. Avant d'aller à M. le député de Beauce-Nord, je veux juste préciser la demande de M. le député de Matane-Matapédia : on vous demanderait de vérifier, à votre niveau — ce
n'est pas à votre connaissance personnelle, mais sûrement qu'on est capable de
faire la vérification — depuis
le début de l'UPAC, s'il y a des policiers du SPVM qui ont été retournés,
avant la fin de leur terme, au niveau du SPVM. Je ne sais pas si c'est à votre
direction ou à la direction de Mme Paquin, mais il y a sûrement possibilité de
retrouver l'information à quelque part.
M. Bussières
(Claude) : ...dire que, oui, il y en a qui sont retournés avant terme,
là, O.K.?
Le Président (M. Ouellette) : O.K. Mais faites la vérification, c'est ce que M. le député de Matane-Matapédia a besoin d'avoir pour le bénéfice des membres de la commission.
Et, depuis le début de l'UPAC en 2011, acheminer au secrétariat de la commission, peut-être par année, le nombre de policiers du SPVM qui ont
été retournés, avant la fin de leur terme, à leurs corps... d'origine.
M. Bussières
(Claude) : D'accord.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous accueillir dans l'Assemblée nationale. Je n'ai pas
beaucoup de questions, mais j'ai une couple de questions,
moi. On parle beaucoup d'indépendance, de transparence — on
en parle beaucoup — de l'UPAC vis-à-vis le MSP, et tout ça. Moi, j'aimerais savoir, face
aux élus de la ville de Montréal, face à la ville de Montréal, quel est
votre degré d'indépendance.
Le Président (M.
Ouellette) : M. Bussières.
M. Bussières
(Claude) : Oui. Au niveau opérationnel, on a une indépendance à 100 %,
O.K., ça, c'est bien important. Au niveau
administratif, c'est normal qu'on ait une reddition de comptes. La ville de
Montréal nous fournit un budget,
alors on doit oeuvrer au sein de ce budget-là en cours d'année, et c'est normal
qu'à la fin de l'année on fasse un compte rendu de nos dépenses en cours
d'année.
Le Président (M. Ouellette) : Vous faites le compte rendu... je m'excuse, M. le député de Beauce-Nord, ce sera sur mon temps, mais vous faites
le compte rendu au comité de sécurité publique?
M. Bussières
(Claude) : C'est bien ça, à la commission de la sécurité publique de
la ville de Montréal.
• (20 h 40) •
Le Président (M. Ouellette) : Vous ne faites pas le compte rendu au bureau administratif, là, c'est vraiment au comité.
M.
Bussières (Claude) : Non, on
est redevables à la commission de la sécurité publique de la ville de Montréal.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : O.K.
C'est parce que votre mémoire commençait par : La ville de Montréal
et son Service de police vous soumettent le mémoire ici. Alors, je me
demandais, parce qu'on parle beaucoup de transparence, et tout... alors, connaissant le maire, qui se représente, et les
derniers problèmes qu'il y a eu avec les informations qu'il voulait diriger...
Le Président (M. Ouellette) :
Rapidement, M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard :
... — oui, M.
le Président, oui, je vais passer — alors je me demandais ça : Opérationnellement
parlant, vous êtes 100 % indépendants des élus municipaux?
M. Bussières
(Claude) : Effectivement.
M.
Spénard : O.K. L'autre chose que j'aimerais savoir, sous...
c'est l'EPIM, l'Escouade de protection de l'intégrité municipale. Vous dites
que, depuis 2013, on a traité 297 dossiers, dont 40 qui ont été transférés
directement par l'UPAC. Après la loi
n° 107, si la loi n° 107 est adoptée telle quelle, est-ce que ça va
demeurer? Avez-vous l'impression que
ça va demeurer, cette coopération-là, à l'intérieur des... Parce que ça traite
de l'intégrité municipale, puis on sait que l'UPAC en traite beaucoup,
d'intégrité municipale aussi.
Alors, est-ce que ça
va demeurer ou si l'UPAC va tout rapatrier?
Le Président (M.
Ouellette) : M. Bussières.
M.
Bussières (Claude) : Selon notre compréhension, l'EPIM fait partie
d'une équipe d'enquête désignée selon la loi, alors le même modus
operandi devrait se poursuivre que présentement.
M.
Spénard :
Même si L'UPAC est reconnue comme corps de police.
M.
Bussières (Claude) : Effectivement, parce qu'en ce moment l'EPIM
travaillent en collaboration et rendent compte à l'UPAC, O.K., pour les
dossiers qui concernent tout ce qui est corruption et fraude, et autres, en
matière municipale. Mais il y a d'autres
dossiers qu'EPIM traite également. Ça peut être des menaces contre des élus, ou
autres, O.K.? Oui, on transmet l'information à l'UPAC, mais ce n'est pas
une obligation.
M.
Spénard : O.K. Et une autre chose qui m'a chicoté un petit
peu — vous
êtes le seul qui parle de ça — c'est l'article, bien, 286 de la Loi de police, mais, nous autres, c'est notre
article 28, là. L'obligation de rapporter immédiatement au ministère de
la Sécurité publique, ça disparaît et ça a l'air à vous chicoter, ça. Je
peux-tu avoir la raison profonde pourquoi ça vous chicote, étant donné que ça
s'en va directement au Bureau des enquêtes indépendantes?
Alors,
pourquoi vous souhaitez que l'article 286 de la Loi de police reste tel quel,
non amendé par l'article 28 de ce projet de loi?
M.
Bussières (Claude) : Parce que, toutes les autres infractions, O.K.,
on doit les rapporter au ministre et là, avec la nouvelle loi, ça serait
la seule infraction qu'on ne rapporterait pas au ministre mais qu'on
rapporterait via le BEI. Comprenez-vous?
M.
Spénard :
...à caractère sexuel pour un policier en fonction.
M. Bussières
(Claude) : En fonction, O.K.? Alors, ça fait un peu...
M.
Spénard :
Parce que ça serait la seule infraction.
M.
Bussières (Claude) : Ça peut être une perception pour le public...
O.K., comme j'ai expliqué dans mon chose, on voit ce qui s'est passé dans les
événements très récents, l'impact que peut avoir ce type de crime là sur la
population. Alors, nous, pour une
perception, pour que ça soit plus clair pour les citoyens, on ne voulait pas
qu'il y ait de différence, alors on voulait toujours tout donner...
M.
Spénard : C'est donc dire que toutes les autres infractions
commises par un policier en exercice sont rapportées directement au
ministère de la Sécurité publique.
M. Bussières
(Claude) : À chaque fois que nous avons une allégation.
M.
Spénard :
À chaque fois que vous avez une allégation itou. O.K. Merci. Je n'ai pas
d'autre question.
Le Président (M. Ouellette) : J'ai une question par rapport à l'EPIM, M.
Bussières, juste pour la compréhension des gens qui nous écoutent et
aussi les membres de la commission.
Vous
dites que l'EPIM a traité, depuis sa création, 297 dossiers, dont 40 lui ont
été transférés directement par
l'UPAC. Est-ce que les membres de la commission se trompent en pensant que les
dossiers qui ont été travaillés, qui ont été enquêtés par l'EPIM et les
40 transférés par l'UPAC, c'est des dossiers touchant la ville de Montréal?
M. Bussières (Claude) :
C'est bien ça.
Le Président (M. Ouellette) : Donc, l'EPIM travaille prioritairement dans les
limites de la ville de Montréal ou sur le territoire de la ville de
Montréal.
M. Bussières (Claude) :
Effectivement, c'est le territoire que l'on couvre.
Le Président (M.
Ouellette) : O.K. Merci.
Donc, M.
Claude Bussières, Mme Johanne Paquin — en espérant qu'on aura l'opportunité de vous
entendre une prochaine fois, Mme
Paquin — représentant
le Service de police de la ville de Montréal, merci d'être venus déposer en
commission. Pour une première, ça a bien été.
J'ajourne les travaux de la commission sine die,
là? Oui?
Une voix : ...
Le Président (M. Ouellette) : Oui,
sine die. Merci.
(Fin de la séance à 20 h 45)