(Dix-neuf
heures quarante-deux minutes)
Le Président
(M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je
demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
civil et d'autres dispositions
législatives en matière d'adoption et de communication de renseignements.
M. le secrétaire, il
y a des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Merlini (La Prairie) est remplacé par
M. Bourgeois (Abitibi-Est).
Documents déposés
Le Président (M. Ouellette) : Avant de débuter les remarques préliminaires, je
dépose les documents suivants, reçus
depuis la fin des consultations particulières, que vous avez reçus par
courriel, c'est-à-dire un mémoire de l'Association des parents pour l'adoption québécoise, un mémoire
de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse,
un mémoire de l'Ordre des psychologues du
Québec, des commentaires de l'origine PETALES Québec. Ces documents
seront déposés sur le site et rendus publics.
Nous allons
immédiatement... J'espère que tous les collègues en ont eu une copie par
courriel. Oui?
Remarques préliminaires
Nous
allons débuter immédiatement... Bien, merci d'abord et avant tout pour les gens
dans la salle. On pensait commencer
hier. Finalement, on commence ce soir. Mais on commence cette semaine, ça fait
que... Je pense, c'est un sujet qui
est très important. Et on devait commencer à 19 h 30, mais on vient
d'avoir des amendements aussi, puis, le temps de tout faire la mécanique, ça fait que vous allez nous accompagner
jusqu'à 21 h 30. Il va y avoir des remarques préliminaires de la part de Mme la ministre et les
porte-parole des deux oppositions, et après on va commencer l'étude
détaillée à l'article 1. Mme la ministre.
Mme Stéphanie Vallée
Mme Vallée :
Alors, bonsoir, M. le Président. Je suis vraiment heureuse d'être ici ce soir
pour entamer une étape importante qui est l'étude détaillée du projet de
loi n° 113.
Alors, d'entrée de
jeu, je souhaite saluer, évidemment, les collègues parlementaires, la députée
de Joliette, le député de Borduas, mais une
salutation toute particulière aux gens qui sont ici présents dans la salle
puis, je pense, qui attendaient avec grande impatience le début de nos
travaux, alors les gens du Mouvement Retrouvailles, les gens... le chef Ghislain Picard qui est ici, l'équipe de
Femmes autochtones, les gens de Mashteuiatsh. Alors, eh bien, à vous tous...
Uashat, pardon, désolée, les gens de la
communauté d'Uashat, désolée de l'erreur. Alors, «kwe». Et j'aimerais... Vous
ne pouvez pas savoir à quel point je suis
heureuse que vous soyez avec nous ce soir pour débuter cette étude détaillée.
Alors,
vous savez, pour de nombreuses
personnes, toutes les personnes adoptées, la quête de l'origine est tellement importante puis... et c'est important parce que
c'est important de connaître nos origines. C'est une quête identitaire qui est plus que légitime parce que,
lorsqu'on connaît nos racines, bien, on apprend à mieux se connaître soi-même.
Alors,
les dispositions qui sont incluses dans le projet de loi n° 113 viennent
modifier de façon importante le droit de l'adoption au Québec, vont nous
amener notamment à reconnaître les liens préexistants de filiation, entre
l'enfant et ses parents d'origine, et, pour bien des adoptés, c'est un élément
extrêmement important et extrêmement sensible.
Alors,
dans la reconnaissance des liens préexistants dans la filiation d'origine entre
l'enfant et ses parents, le nom des
parents d'origine, avec ce qui est permis au projet de loi, va être inscrit à
l'acte de naissance de l'enfant avec celui de ses nouveaux parents. C'est une reconnaissance qui va permettre aussi
que le nom de famille de l'adopté puisse contenir celui de ses père et
mère d'origine.
En
plus de connaître l'identité de ses parents d'origine, l'enfant pourrait
communiquer avec eux et même maintenir certains
contacts, puisque le projet de loi vient permettre qu'une entente de
communication soit conclue entre la famille d'origine et la famille
adoptive. Si la situation s'avère bénéfique pour tous, cette entente pourrait
même mener à des échanges fructueux entre les parties.
Le
projet de loi prévoit également des mesures qui concernent la communication de
renseignements identificatoires entre l'adopté et ses parents d'origine
et propose le renversement de la règle actuelle qui est celle du secret
entourant l'adoption — et ça, je sais que c'est si important! Suite
à l'entrée en vigueur de la loi, la règle générale serait maintenant la
communication de renseignements identificatoires.
Afin
d'éviter des possibles cas d'infanticide ou d'abandon d'enfants non désirés,
dans l'année qui suit la naissance de
l'enfant, le parent d'origine pourra toutefois exprimer un refus à la
communication de son identité, ce qui entraînera automatiquement, pour
l'adopté, un refus de communication de sa nouvelle identité. Tout refus déjà
exprimé avant l'entrée en vigueur de
la loi sera respecté. C'est cette volonté d'atteindre un certain équilibre
entre le respect du droit à l'information, à la vie privée et aussi le
respect de bien connaître son origine.
Alors, dans
le cas d'une personne inapte, le projet de loi propose qu'un proche parent, une
personne de confiance, son
représentant légal ou encore son conjoint puisse consentir à ce que soient
communiqués ces renseignements identificatoires.
Je rappelle
que tout refus à la communication de l'identité cessera d'avoir effet un an
après le décès de la personne concernée.
Les modifications proposées, comme je le mentionnais, visent à atteindre un
équilibre entre le droit à la vie privée des uns et le besoin de
connaître ses origines des autres.
Il y a
un amendement... J'aimerais vous parler d'un amendement
que j'entends proposer, lors de l'étude
détaillée, en matière de
communication de renseignements et des retrouvailles, soit de permettre les
retrouvailles entre une personne adoptée ou adoptable et ses frères et
soeurs. J'ai été à l'écoute des demandes qui ont été faites en ce sens lors des
consultations particulières, notamment par l'équipe du Mouvement Retrouvailles, et je
souhaite y donner suite. Pour que les retrouvailles de la fratrie soient
possibles, la personne adoptée et sa fratrie devront évidemment y consentir.
Les amendements qui sont envisagés prévoiraient
que les demandes de l'adopté et de la fratrie seraient inscrites dans le
dossier de l'adopté. Ce faisant,
l'établissement communiquerait les renseignements qui permettent à l'adopté et
à sa fratrie de s'identifier et de prendre contact lorsque le
consentement des deux parties aura été manifesté.
Toujours dans le souci du respect de la vie
privée, de cet équilibre fragile dont je vous parlais plus tôt, les retrouvailles de la fratrie seraient possibles
seulement si le parent d'origine n'a pas inscrit de refus ou s'il est décédé.
De cette façon, l'identité du parent qui a inscrit un refus ne serait
pas dévoilée contre sa volonté de son vivant.
• (19 h 50) •
Les démarches
d'adoption et les quêtes identitaires suscitent évidemment de vives émotions
chez les personnes concernées, mais,
au-delà des liens de sang et des liens du coeur, il ne faut pas oublier que la
quête identitaire est parfois justifiée
par des raisons et des enjeux de santé. En effet, il arrive qu'une personne
soit atteinte d'une maladie et que le fait de ne pas avoir accès à ses antécédents familiaux puisse complexifier le
traitement de sa maladie. Le projet de loi prévoit donc de faciliter la
communication des renseignements médicaux qui concernent l'adopté, son parent
d'origine ou un membre de leur famille. Ces renseignements seront transmis aux
autorités médicales seulement, qui auront alors l'information nécessaire pour
agir adéquatement. Le patient pourra ainsi en savoir plus sur son profil
génétique sans avoir à prouver la gravité de
son état de santé et sans avoir à passer par un tribunal, à moins que la
personne concernée s'oppose à cette
demande. Je suis donc confiante que plusieurs patients pourront bénéficier de
ce changement en matière de communication de renseignements médicaux.
Les modalités
dont je viens de vous faire part concernent toutes les familles québécoises,
quelles que soient leur nationalité
et leurs origines. Nous tenons à ce que toutes ces personnes se sentent
accueillies et respectées, au Québec, et
c'est pourquoi nous nous sommes particulièrement intéressés aux demandes
formulées par les Inuits et les Premières Nations en matière d'adoption
coutumière autochtone.
Tel que
mentionné par mon collègue ministre des Affaires autochtones lors de la
présentation du projet de loi, en
octobre dernier, les nations autochtones considèrent l'adoption comme un don de
l'enfant, et la responsabilité de le conduire
jusqu'à la maturité incombe à toute la communauté. Considérant ces réalités, il
est proposé de reconnaître les effets
de l'adoption coutumière autochtone dans notre Code civil. Pour ce faire,
l'adoption se fera selon la coutume en place
au sein de la nation concernée, qui, il va de soi, respecte certains principes
fondamentaux, soit l'intérêt de l'enfant, la protection de ses droits, le consentement des personnes concernées.
Chaque communauté ou nation autochtone devra désigner une autorité compétente qui veillera à ce que ces principes
soient appliqués et que l'enfant ait bien été confié à l'adoptant. Par
la suite, l'autorité verra à délivrer un certificat d'adoption coutumière
autochtone, qu'il transmettra au Directeur
de l'état civil. Ce dernier dressera alors un acte de naissance conforme avec
la nouvelle filiation de l'enfant. La reconnaissance des effets de l'adoption
coutumière autochtone se traduira par cette modification apportée aux registres de l'état civil. Dans certains cas, et
si la coutume le permet, il pourra y avoir maintien des droits et des
obligations entre l'adopté et son parent d'origine, par exemple la
vocation successorale.
Les
modifications qui sont proposées au Code civil permettront de considérer la
coutume en matière d'adoption propre
à chaque milieu autochtone. En reconnaissant les effets de l'adoption
coutumière autochtone dans notre Code civil, nous franchirons un pas historique et, ce faisant, nous enverrons aussi
un message d'ouverture et d'inclusion envers les Inuits et les Premières
Nations. Nous reconnaissons l'importance de leurs traditions culturelles et
sociales.
Par ailleurs, lors des consultations
particulières de novembre dernier, il a été proposé par différentes nations autochtones d'ajouter au Code civil une mesure
visant la reconnaissance des effets que certains ont désignés par «garde
coutumière». Et là vous me corrigerez, mais en langue innue on parle de «ne
kupaniem» et, en langue attikamek, «opikihawasowin».
Alors, des
discussions ont été tenues, au cours des dernières semaines, entre les équipes
du ministère de la Justice, du
ministère de la Santé et les représentants autochtones concernant cette
préoccupation. Les discussions ont permis de dégager une solution qui, je crois, répond aux besoins des communautés
et qui s'inscrit dans la réflexion que nous avons faite également pour
l'ensemble des familles québécoises.
En effet,
l'adoption peut, dans certains cas, ne pas répondre aux besoins des familles,
tant québécoises qu'autochtones, lorsque
celles-ci souhaitent que soient maintenus les liens de filiation. Nous
proposons donc l'introduction d'une nouvelle forme de tutelle aux mineurs au sein du Code civil, soit la tutelle
supplétive. Cette tutelle permettrait à un ou deux parents de déléguer judiciairement à la personne qu'ils
désignent dans leur cercle familial leur charge de titulaire de l'autorité
parentale et de tuteur
légal de leur enfant. Il s'agit en fait d'une combinaison de deux concepts qui
se trouvaient dans les projets de loi
antérieurs, à savoir la tutelle dative et le partage de l'autorité parentale,
laquelle répond, à notre avis, plus adéquatement aux besoins actuels des
familles, et ce, dans le meilleur intérêt de l'enfant.
En effet,
cette nouvelle tutelle couvrirait davantage de situations d'ouverture
possibles, notamment parce qu'une telle tutelle ne viserait pas
seulement les cas où les deux parents sont empêchés de s'occuper de leur enfant
comme le proposaient les projets de loi antérieurs. Cette tutelle supplétive
constitue une solution alternative à l'adoption d'un enfant par un membre de sa famille et permet de donner suite notamment
aux demandes de la Chambre des notaires, de la Coalition des familles homoparentales, de la Fédération des associations
des familles monoparentales et recomposées et de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse,
qui se sont dites en faveur de mesures de cette nature, permettant de maintenir les repères identitaires de l'enfant
tout en habilitant la personne qui s'occupe de l'enfant à poser des
gestes à son égard.
Comme je le mentionnais précédemment, lors des
consultations particulières, les représentants des nations autochtones ont fait état que le projet de loi ne
permettait pas de reconnaître une pratique désignée comme garde coutumière.
Alors, il est proposé, outre l'adoption
coutumière prévue dans le projet de loi, de reconnaître également certains
effets que comprend la réorganisation
familiale autochtone, et qui peut s'apparenter au concept du droit québécois
de la tutelle, puisqu'elle ne vient
pas modifier les liens de filiation. Il s'agit donc de reconnaître au Code
civil les effets de la tutelle coutumière autochtone et de confier un
rôle supplémentaire à l'autorité compétente autochtone, soit celui de délivrer un certificat concernant la désignation d'un
tuteur, en conformité avec la coutume d'une communauté autochtone et en
prévoyant les mêmes conditions de délivrance que celles déjà prévues en matière
d'adoption coutumière, c'est-à-dire qu'il y
aurait une attestation par une autorité compétente, qui s'assurerait du respect
de la coutume, que les consentements des
personnes concernées sont valablement donnés, que l'enfant a été confié au
tuteur et que la tutelle est dans l'intérêt de l'enfant. Ce certificat
ne serait pas notifié au Directeur de l'état civil puisqu'il ne témoigne
aucunement d'une modification de la filiation.
En terminant, je sais que le projet de loi
n° 113 est très attendu et qu'il va répondre aux attentes de nombreux Québécois
et Québécoises qui ont été adoptés. L'entrée en vigueur d'une loi est un processus
de longue haleine, et rien ne doit
être laissé au hasard. Ça exige du temps, ça exige de la réflexion, ça exige de
la discussion. Elle nécessite des ajustements, des remises en question
pour prendre en compte un maximum de cas et de situations, au bénéfice de tous.
Grâce à la collaboration et aux commentaires des nombreux groupes et de
toutes les personnes qui ont participé aux consultations particulières à
l'égard de ce projet de loi, je suis convaincue que les modifications législatives
proposées en matière d'adoption et de communication de renseignements vont satisfaire la grande majorité
de nos concitoyens et citoyennes.
Je remercie
encore une fois de plus tous ceux et celles qui nous ont accompagnés à chaque
étape importante qui a mené à l'étude
détaillée d'aujourd'hui, je pense évidemment au Mouvement
Retrouvailles, aux représentants de la nation innue, des Premières Nations, aux équipes du Directeur de l'état civil, au ministère de la Santé et des Services sociaux, aux
centres jeunesse, à l'équipe, évidemment, hypertravaillante du ministère de la Justice, parce
qu'ensemble nous avons fait le pari
de moderniser, d'assouplir les règles de l'adoption pour qu'elles correspondent
mieux à la réalité contemporaine de
toutes les familles du Québec. Je suis fière du projet de loi n° 113 parce
qu'il traduit bien la volonté, le projet, le besoin de lever le voile sur la culture du secret qui
entoure l'adoption, fière parce que, dans tout le processus, nous n'avons
jamais perdu de vue l'intérêt de l'enfant, nous l'avons placé au coeur
de nos priorités.
Je suis
persuadée que nos échanges seront constructifs et fructueux, parce que je dois
aussi remercier mes collègues des
oppositions parce que nous avons eu des échanges, nous avons partagé nos
préoccupations respectives, tout ça en but de faire de notre projet de loi un projet de loi meilleur pour la
société québécoise, et je sais que je pourrai compter sur leur collaboration pour que nous puissions
franchir les prochaines étapes parlementaires du projet de loi au cours de la
présente session parlementaire, parce que c'est ça, notre objectif.
Je souhaite
témoigner de ma propre ouverture, ma collaboration en vous déposant en liasse
les amendements que je souhaite
présenter tout au long de l'étude détaillée, dans l'objectif d'optimiser nos
travaux. Alors, pour les gens qui sont à l'écoute, les amendements ont
été déposés. Donc, ce qui est contenu dans l'allocution, on le retrouve dans
les amendements, qui sont quand même nombreux.
Mais je tiens encore une fois à remercier tout
le monde pour le travail qui a été fait. «Meegwetch.»
• (20 heures) •
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre. Mme la députée de Joliette.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon :
Oui, bonjour. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de saluer la
ministre, toute son équipe, l'équipe aussi qui provient du ministère de
la Santé et des Services sociaux, bien sûr, mes collègues du parti ministériel, mon collègue le porte-parole de la
deuxième opposition en matière de justice, mon recherchiste, Martin Blanchette.
Mais surtout je tiens à vous saluer, vous
tous et toutes qui êtes avec nous ce soir. Je pense que ce moment-là est un
moment très fort pour vous tous. Et
c'est un moment très fort pour nous aussi, qu'importe de quel côté de la table
nous nous situons ce soir.
Je veux donc
saluer, bien sûr, M. le chef Ghislain Picard, qui est parmi nous. C'est un
honneur. Et ça montre, je pense, à
quel point c'est une question importante pour les communautés autochtones, pour
les nations autochtones. Je veux,
bien sûr, saluer les représentants de la communauté d'Uashat, les représentants
de la nation attikamek, merci beaucoup d'être
là, et de Femmes autochtones. C'est un plaisir de vous avoir. Et, bien
sûr, les derniers mais non les
moindres, les représentants du Mouvement Retrouvailles, qui sont avec
nous depuis les tout débuts, mais qui sont avec nous depuis beaucoup,
beaucoup de temps avant même qu'il y ait eu un premier projet de loi, et qui
ont porté à bout de bras leurs revendications au nom de milliers de personnes adoptées
au Québec qui espèrent, pour pouvoir avoir un sentiment de sérénité, un sentiment d'identité beaucoup plus
complet, de pouvoir avoir ces renseignements-là, pour pouvoir avoir le sentiment d'être complètement la personne qu'elles
espèrent pouvoir être. Et je dois vous dire que je suis émue de vous voir, Mme Fortin, de voir les autres
représentantes du Mouvement Retrouvailles et des personnes adoptées.
Puis un petit clin d'oeil à
Mme Poitras, qui porte une belle fleur à sa boutonnière parce que
c'est un grand jour pour elle, je crois. Je sais qu'elle est là depuis
le tout début. Donc, vraiment, ça nous fait chaud au coeur.
Moi, je l'ai déjà
raconté, mais, quand j'ai été attachée politique,
à la fin des années 90, dans ma première semaine d'attachée politique avec l'ancien ministre de la
Justice, Serge Ménard, il y avait des gens qui m'avaient appelée pour
cette situation-là, donc des personnes adoptées qui souhaitaient pouvoir avoir
accès à l'information concernant leurs origines,
alors c'est vous dire à quel point ça fait longtemps que ce dossier-là
m'accompagne. Et, depuis que je suis en politique, dès 2009‑2010, j'ai
travaillé, dans l'opposition, sur l'avant-projet de loi de la ministre de
l'époque, qui est aujourd'hui la ministre de
l'Immigration. Et par la suite il y a eu l'autre projet de loi, le projet de
loi n° 81 du leader actuel du
gouvernement, suivi du projet de loi, quand nous, nous étions au gouvernement,
de mon collègue le ministre de la Justice, Bertrand St-Arnaud, avec lequel j'ai collaboré parce que j'étais
ministre des Services sociaux, et finalement le projet de loi de l'actuelle ministre, le projet de loi
n° 113. Donc, c'est vous dire à quel point ça fait
longtemps, de tous les côtés, qu'on veut
apporter des réponses, autant pour les peuples autochtones, autant pour les
personnes adoptées de toutes origines au Québec. Alors, je pense que c'est vraiment un grand jour, c'est un grand
moment, parce que, là, c'est sérieux. On n'a pas uniquement déposé un projet de loi pour bien faire et montrer notre
intention, mais on s'y met, on attaque le travail et on va étudier à
partir d'aujourd'hui de manière très sérieuse chacune des dispositions de ce
projet de loi.
Donc, je veux
vous remercier de votre patience, vous tous et toutes, de votre détermination,
de vos convictions, qui ont fait en sorte qu'aujourd'hui on commence ce
travail-là. Et je veux remercier la ministre parce que, vous savez, on
se critique souvent, de part et d'autre, ça fait partie de notre travail...
C'est le lot d'être dans l'opposition, et j'y ai été plusieurs années, donc j'ai une certaine expérience. J'ai été
18 mois de l'autre côté, donc j'ai une petite expérience de ce côté-là aussi. Mais tout ça pour vous dire qu'on a
un rôle à jouer, chacun de notre côté, mais il faut souligner aussi quand, avec
le cri du coeur de personnes directement concernées... quand ces cris du coeur là
sont lancés mais quand ils sont entendus
par le gouvernement, il faut aussi le souligner. Donc, je veux remercier la
ministre et, bien sûr, l'équipe du leader du gouvernement, qui ont entendu ce cri du coeur et qui ont accepté de
changer l'ordre des choses et que nous amorcions aujourd'hui... Ça devait être hier, mais il y a eu un autre imprévu. Je
me disais : Eux autres, ils vont se dire que ça n'a aucun sens,
tout ce qui leur arrive. Mais finalement on commence aujourd'hui. Donc, je veux
remercier la ministre.
Une voix : ...
Mme
Hivon : Oui, oui,
on aurait pu aussi avant, voilà. Donc, je veux...
Le Président (M. Ouellette) : Vous
voyez l'harmonie, là? C'est ça.
Mme
Hivon :
Je veux le souligner, c'est ça. Et donc ça arrive des fois. Et moi, je pense
qu'on amorce un beau moment. La
ministre et moi, on a déjà travaillé en grande collaboration pour le projet de
loi sur les soins de fin de vie, je sens
qu'on va avoir une belle collaboration. Ça ne veut pas dire qu'on ne pose pas
de question puis qu'on adopte tout comme ça. Elle m'en posait de manière très, très insistante, beaucoup, mais on
collaborait, et je pense que c'est la même approche qui va être de mise. Et moi, je veux vous dire que
j'offre toute ma collaboration. Ce que je veux, c'est qu'on ait le meilleur
projet de loi possible pour toutes les
personnes concernées, un projet de loi qui va être moderne, qui va modifier nos
lois pour être vraiment en phase avec
le consensus social, en phase avec les réalités d'aujourd'hui des personnes
adoptées et aussi des peuples
autochtones, qui ont une réalité bien particulière. Et je pense que c'est
vraiment un grand geste aussi, de pouvoir
reconnaître dans notre droit civil, dans notre Code civil la réalité des
peuples autochtones en matière d'adoption. Donc, ça aussi, c'est une
très grande avancée.
Donc, bien
sûr, je ne passerai pas à travers tous les éléments que nous allons discuter,
la ministre a fait un très bon tour
d'horizon. Simplement dire qu'évidemment il y a beaucoup de matière dans ce
projet de loi là. On parle autant de changements
en matière d'adoption interne, d'adoption internationale, d'adoption
coutumière, évidemment aussi toute la question de la communication de renseignements
pour les personnes adoptées et de nouvelles réalités, là, que la ministre va
soumettre pour asseoir cette question de la garde coutumière qui avait été
évoquée, là, lors des auditions. Donc, je pense qu'on a beaucoup de travail devant nous. Mais ce qui est
formidable, c'est qu'enfin on commence ce travail-là. On le fait, je pense, de tous les côtés avec la
meilleure bonne foi et dans un esprit de collaboration. Alors, je suis très
heureuse qu'on en soit rendus à cette
étape-là. Et je pense que c'est le début vers un aboutissement qui va être une
grande avancée pour le Québec, pour la société québécoise.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, Mme la députée de Joliette. M. le député de Borduas.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. À mon tour de saluer la
ministre, mes collègues de la partie gouvernementale,
ma collègue de Joliette, le personnel politique de la ministre ainsi que les
membres de la fonction publique qui
sont avec nous aujourd'hui, qui travaillent et qui ont travaillé sur le projet
de loi; M. Aubry également qui est avec moi, qui m'accompagnera lors des travaux. Je tiens
à vous dire bonjour, tous et chacun qui sont dans la salle ce soir, les représentants des communautés autochtones, des
nations autochtones, les représentantes du Mouvement Retrouvailles,
Mme Poitras, Mme Fortin et Mme Blouin. C'est un plaisir de vous
retrouver.
Donc,
écoutez, je ne serai pas très long au niveau des remarques préliminaires.
L'adoption... Le projet de loi qu'on a aujourd'hui, c'est un peu une
illustration de l'évolution de la société québécoise. Vous savez, on était dans
les années 30, 40, 50, 60, où on
donnait des enfants à l'adoption. On était à l'époque dans une société qui
était différente de celle
d'aujourd'hui, les règles qui prévalaient à l'époque ne sont pas celles que
l'on veut qui prévalent encore aujourd'hui. Et ça a pris beaucoup trop de temps avant qu'on puisse arriver à
certaines modifications législatives qu'on va apporter dans le cadre du présent projet de loi. Il y a eu
trois projets de loi, un avant-projet de loi. On va travailler pour rendre le
projet de loi n° 113 le meilleur possible de façon à faire en sorte que ça
réponde à la réalité des personnes qui ont été adoptées, à la connaissance de leurs origines, également au niveau des
nations autochtones, des communautés autochtones, de façon à ce que le
projet de loi réponde à la réalité qui est vécue par l'ensemble des
intervenants.
Le coeur du
projet de loi, aussi, on doit toujours garder en tête l'intérêt de l'enfant.
Et, lorsqu'on est, dans le fond... En
fait, lorsqu'on n'est plus un enfant mais qu'on l'a été aussi, le droit à la
connaissance des origines aussi, on doit se placer dans la position de l'enfant aussi. Donc, ça, c'est quelque chose
que nous, on va mettre de l'avant puis on va défendre, parce que ce n'est pas parce que vous avez
vieilli, dans le fond, que vous n'êtes pas toujours un enfant aussi ou l'enfant
de quelqu'un. Donc, les droits de l'enfant,
de l'intérêt de l'enfant aussi doivent être pris en considération de façon
principale.
Donc,
écoutez, bon, on a fait la nomenclature, ma collègue de Joliette l'a bien fait,
sur toutes les étapes. Peut-être souligner
aussi que Me Lavallée, de l'Université de Sherbrooke, avait rendu un rapport en
2007 aussi qui illustrait, dans le fond, la réalité pour une adoption
propre à chaque enfant. Il y a eu des travaux, également, qui ont été faits
avec le Comité consultatif en droit de la
famille aussi. On a certaines... On a fait part de nos commentaires à la
ministre relativement au droit des
grands-parents d'avoir accès également à leurs enfants dans le cadre d'une
rupture du lien de filiation. La tutelle supplétive qui sera apportée
est une avancée dans une bonne... c'est une bonne démarche.
Donc,
écoutez, M. le Président, le droit à la connaissance des origines, c'est
quelque chose qui est fort important. Il
y a beaucoup de Québécois qui sont touchés par ça. Il y a beaucoup de Québécois
qui ont attendu extrêmement longtemps, trop
longtemps. Donc, je pense qu'en politique, quand on se parle, M. le Président,
on peut réussir à avancer, et je pense que
c'est ce qui s'est passé au cours des derniers jours. Donc, j'accueille
favorablement l'ouverture du gouvernement et de ma collègue du Parti québécois
d'aller de l'avant avec le projet de loi d'ici la fin de la session. Je pense
qu'on va travailler sérieusement, au cours des prochaines heures, des
prochaines semaines, pour arriver avec un projet de loi qui répond vraiment aux besoins puis aux aspirations des
personnes qui ont été adoptées et des nations et des communautés autochtones.
Donc, je vous dirais, enfin débutons pour terminer.
• (20 h 10) •
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de
Borduas. Avant d'aller à M. le député de Mercier pour ses remarques préliminaires, Mme la
députée de Joliette, vous aviez un
petit commentaire additionnel que vous avez omis dans vos remarques
préliminaires.
Mme
Hivon : Oui. C'est parce qu'on a souligné beaucoup
les gens qui sont présents ici ce soir, mais je veux juste, évidemment, remercier les gens... les représentants, en fait, de la communauté inuite et aussi les
Cris, parce que, bien
sûr, ils sont à l'origine de tous les
travaux sur l'adoption coutumière. Donc, se sont ajoutées d'autres nations qui
ont parlé de leur propre réalité, et
donc ils sont ici parce qu'ils voulaient être certains que cette question-là
soit prise en compte dans le projet de loi, mais, bien entendu, les premiers qui ont été, je dirais,
à l'avant-plan pour débattre de cette question-là et faire valoir l'importance de
l'adoption coutumière, les Inuits et les Cris, je veux les remercier très sincèrement
aussi.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Joliette. M. le député de Mercier, pour
vos remarques préliminaires.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Combien de
minutes? Ah! Bien non. Non, je ne voudrais pas abuser, parce que...
Le
Président (M. Ouellette) :
C'est rare, là. Profitez-en, là, c'est la première fois que je fais ce geste-là
avec vous. Mais je sais que vous n'ambitionnerez pas.
M. Khadir : Non, mais... Oui. Mon collègue vient d'exprimer cette attente de commencer pour
pouvoir travailler pour enfin finir
ou aboutir. Bon, alors, j'espère que c'est bien parti. En tout cas, la ministre peut d'ores et déjà compter sur l'entière collaboration de ma formation politique, qui adhère pleinement au principe du projet de loi n° 113.
C'était plus qu'attendu et c'est un...
On a un cadre réglementaire, législatif qui est vraiment beaucoup
trop vieux maintenant, ça approche
les 100 ans. Il faut que ce régime d'adoption change en vertu des meilleurs, disons, droits de tous et chacun, en particulier les jeunes, les enfants concernés,
tout en assurant la confidentialité nécessaire des dossiers. En ce sens, nous voyons vraiment
d'un très bon oeil la volonté du gouvernement d'aller dans cette direction.
Maintenant,
pour améliorer, de notre perspective, la reconnaissance des droits de
tous, pour que ce soit au coeur de
cette réforme gouvernementale, bien
entendu, nous étions préoccupés par
ce qui avait été soulevé par les communautés
autochtones, par les Premières Nations notamment. Je n'étais pas là au tout début de l'intervention de la ministre, mais, d'après
tout ce que j'entends, je comprends donc qu'il
y a une volonté de la part du gouvernement d'intégrer au coeur du projet
de loi, avec ses propres amendements,
donc, la notion de garde ou d'adoption coutumière en autant, donc, que ça
respecte, disons, ce qu'on prévoit comme étant en harmonie avec les principes
de protection des droits de l'enfant et donc du respect du droit, également, du consentement de toutes les personnes concernées. Moi, je pense
qu'on aura déjà accompli beaucoup en faisant ça.
Maintenant,
je ne reviendrai pas sur la vétusté du système d'adoption actuel. Évidemment,
on se rappelle que c'est une autre
époque, qui avait ses exigences, notamment, disons, le contexte social et religieux, qui
confinait tant de mères monoparentales
ou ayant eu des enfants en dehors du cadre alors sacré du mariage, disons, à
avoir devant eux une vie faite
d'exclusion sociale. On n'est plus dans cette situation, donc vivement une
adaptation à une réalité qui est tout autre aujourd'hui, qui fait en sorte que la majorité des enfants québécois adoptés
viennent, bon, des centres de jeunesse, ils sont donc en âge, souvent, d'être conscients de leur entourage et de
développer des liens d'affinité avec les membres de leur famille
d'origine. Ces enfants peuvent donc être âgés, bien sûr, de deux ou trois ans,
mais ils peuvent aussi être âgés de 10,
12 ans, de sorte que l'enjeu principal de l'adoption ne soit plus
uniquement la confidentialité des dossiers, mais aussi le droit à la connaissance des origines de l'enfant, comme ça a été
mentionné, et tel que protégé par, maintenant, la convention internationale des droits
des enfants.
Je
rappelle que le député de Saint-Laurent, à l'époque où il était en charge du dossier,
avait démontré la volonté de moderniser, donc, ces lois, avec le projet
de loi n° 81, pour contrer les effets néfastes de l'adoption plénière,
dont l'effacement total d'une partie de
l'arbre généalogique de l'enfant, qui fait tant problème, tout comme le projet de loi n° 47 déposé
par la suite par notre ex-collègue St-Arnaud, qui visait les mêmes modifications. Ces projets de loi, s'ils avaient exemple, le droit de visite
aux grands-parents et l'importance des liens affectifs qui entourent la
relation personnelle enfants—grands-parents. Bon, ces projets de loi sont morts au feuilleton. On a heureusement quelque
chose de très bien pour,
donc, recapter l'esprit, la direction qu'il y avait dans ces projets de loi. Donc, on ne demande rien, finalement,
qui soit extravagant.
Pour ce qui est de cette mouture du projet de
loi, bien sûr, on entend bien... ça
reconnaît l'urgence de moderniser les
règles entourant l'adoption plénière, mais, sur certains aspects, le projet de loi n° 113, de notre point de vue, ne va pas
aussi loin que les deux précédents. Malheureusement, cette solution logique et nécessaire
qu'est la délégation de l'autorité parentale
ne s'y retrouve pas. C'est, à nos yeux, un pas qu'il aurait fallu poser, et
j'espère... enfin, nous allons... Évidemment, mes connaissances du dossier sont bien en deçà
de mes respectés collègues, qui sont avocats et avocates, mais, d'après notre lecture, et on aura l'occasion
d'y revenir, et la ministre aura toute l'occasion de nous répondre, il faut inclure
ces éléments essentiels dans le cadre
de la réforme du droit de la famille.
S'il y a consensus sur le fond, sachant que le droit québécois sera donc ainsi
modifié, pourquoi remettre à plus tard cette modification de la loi, un élément essentiel pour le développement
psychologique de l'enfant?
Donc,
je parlais de ces éléments manquants rapidement, éléments qui avaient pourtant été mis de
l'avant, donc, dans les projets de loi nos 47 et 81 qui ont précédé, soit
deux types de délégation parentale, partielle ou totale, donc la délégation parentale partielle, le fait de
partager l'autorité parentale avec un conjoint, et, dans le cas de la
délégation totale, lorsqu'il s'agit de transmettre l'autorité parentale à deux
parents adoptifs. Le plus grand bénéfice de ce partage de l'autorité
parentale... Est-ce que la ministre veut m'interrompre? Est-ce que ça pourrait...
Mme
Vallée : Bien, en
fait, je ne veux pas interrompre. Je
comprends que vous êtes arrivé un petit peu en retard, mais il y a un amendement qui va venir suppléer à quelque chose de similaire. Donc, je pense qu'on parle un peu le même langage,
peut-être dans des termes juridiques différents, mais on a un bout de chemin
qui est...
M. Khadir : Excellent. D'accord. Donc, je vais juste
vous dire que, si vous vous en allez là, on sera encore plus contents.
Et donc, délégation parentale... Puis est-ce qu'il en va de même pour la
délégation parentale partielle?
Mme
Vallée : Bien, en
fait, on introduit... bien, on en reparlera, mais on introduit la tutelle
supplétive, qui vient répondre à cette préoccupation-là...
M. Khadir :
Ce que vous étiez en train de dire.
Mme Vallée :
...et ce qui permet... l'effet miroir permet de reconnaître la tutelle qui se
vit au sein des nations autochtones. Donc, je pense
qu'on a fait un bout de chemin. Il y
a eu beaucoup de travail de fait au
cours des dernières 48 heures.
M. Khadir : Parfait. Alors, je réserve quand même
mes commentaires, étant
donné mes compétences limitées
dans le domaine, pour pouvoir bien les
analyser avec mon équipe et avec tous nos collègues, mais, donc, notre
intention à nous, c'est de vraiment
profiter du fait qu'on a attendu si longtemps puis qu'il est temps que nos lois s'adaptent à l'évolution de notre société, d'autant plus que, dans mon propre travail de
député, j'ai un cas d'une famille... et là c'est un autre cas, qui est peut-être
moins représenté ici, lorsqu'il
s'agit de tenir compte de la réalité d'adoption vraiment, dans ce cas, supplétive, c'est clair que c'est... si j'ai
compris vos explications, sur la possibilité, donc, on a dit, d'une adoption
supplétive, n'est-ce pas?
Mme Vallée :
Oui. Et on vous a passé les amendements, donc vous pourrez...
M. Khadir : Oui, oui, je les
ai ici, je viens de les recevoir.
Mme Vallée :
Parfait.
M. Khadir : Mais ce que j'allais dire, c'est
qu'on a des cas très concrets, par exemple, de familles immigrantes qui ont fait toute une démarche dans l'acquisition
des connaissances, dans la mise en avant et la mise à niveau de leurs
connaissances pour se trouver du travail ici, et le problème réside dans le
fait que, dans le pays d'origine, la filiation n'étant pas interrompue, actuellement ces familles-là sont séparées d'un
enfant qu'ils ont pourtant adopté et sauvé de la misère totale, juste parce que nos lois sont déficientes pour
reconnaître de telles réalités modernes, qui sont le fruit d'un intense rebrassage dans les populations, une
intense migration, qui fait en sorte qu'on doit d'abord penser à l'intérêt de
l'enfant et des familles et non pas à
l'inadéquation entre nos lois et les lois des pays d'origine, et donc de
permettre de faciliter les choses
pour la reconnaissance d'une réalité légitime, c'est-à-dire des parents qui ont
réellement adopté un enfant. Voilà. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Ouellette) :
Souhaitons, M. le député de Mercier, que vous puissiez participer à tous nos
travaux pour pouvoir les enrichir.
M. Khadir : En autant, c'est
ça, que l'énergie, l'âge et les agendas le permettent, bien sûr.
• (20 h 20) •
Le
Président (M. Ouellette) :
Mais ça, si vous voulez qu'on en parle, on pourra en parler, mais je suis sûr
que vous allez être capable de vous rendre...
M. Khadir : Non, mais je suis
sûr qu'on va suivre ce qui nous intéresse particulièrement.
Le Président (M. Ouellette) : Ce
sera de l'énergie supplétive qu'on vous enverra, M. le député de Mercier.
M. Khadir : Ça, je serais
prêt à le prendre n'importe quand.
Étude détaillée
Le
Président (M. Ouellette) :
Bon, maintenant que les remarques
préliminaires sont terminées, on
m'informe — et là,
là, je vais avoir besoin de votre consentement — qu'on veut procéder pour faire en sorte que...
particulièrement parce qu'on a des
gens ce soir, on veut procéder par
blocs. Là, je suis un peu sur la pointe des pieds parce que,
la dernière fois que j'ai eu ce mot-là dans la bouche, il y a
eu autre chose, là. Donc, on m'informe qu'on pourrait procéder, pour l'étude
du projet
de loi n° 113, par cinq grandes
familles, la première étant l'adoption coutumière autochtone, qui regrouperait les dispositions principales et des dispositions de concordance, la seconde étant l'adoption interne, qui
regrouperait, là aussi, des dispositions principales et des dispositions de concordance, la troisième étant l'adoption
internationale, avec ses dispositions principales, la quatrième étant la communication de renseignements identitaires et médicaux, avec ses
dispositions principales, et finalement la
cinquième section serait la tutelle supplétive et la tutelle coutumière
autochtone, avec ses dispositions
principales et ses dispositions de concordance. Cette étude-là, il y a
94 articles pour le projet de loi, ça couvre 54 des 94 articles. Et, après l'étude des cinq sections,
si tout le monde est d'accord, nous reprendrons article par article pour compléter l'étude du projet de
loi. J'ai bien compris que tout le monde a compris la même chose? Oui?
Mme la ministre, ça va? M. le député de Borduas? Oui?
Mme Vallée :
Je pense bien... Et, M. le Président, je vais dire au micro, je sais que mon
collègue le député de Borduas aura
des amendements à déposer qui s'inscrivent dans la logique, là, légistique au
tout début du projet de loi et j'ai convenu
que, même si nous procédions par blocs, nulle n'était mon intention de
m'objecter au dépôt des amendements qu'il
s'apprête à nous présenter, et qu'il m'a gentiment soumis pour étude préalable,
de sorte que nos travaux puissent avancer de façon efficace.
Le
Président (M. Ouellette) :
Vous comprendrez que, partant du moment où j'aurai eu votre consentement pour
qu'on soit en mesure de regrouper certains
articles, à tout moment — et ça a toujours été le propre de la présidence de faire en sorte de mener les travaux le plus
rondement possible — à tout
moment je sais qu'il y a des articles qui vont être introduits avant les articles 1 à 94 du
projet de loi, et on se gouvernera. Mais je veux juste qu'on soit tous d'accord
de procéder par blocs, parce que
normalement on procéderait... article 1, 2, 3, et ainsi de suite. Mais ce
soir on commencerait par la première
section, qui est l'adoption coutumière autochtone et les dispositions
principales, c'est-à-dire l'article 10, 7, 30 et 92, on commencerait par ceux-là, et après on irait avec les dispositions
de concordance, qui sont les articles 1, 2, 3, 5 et 6. Si tout le monde est d'accord, on part comme
ça. Et normalement, si on passe au travers de ces neuf-là ce soir, là, bien,
je vous dirai qu'on va avoir un bon bout de fait. J'ai le consentement des
collègues?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Joliette.
Mme
Hivon :
Oui. Moi, je veux juste comprendre quand vous dites 54 dispositions versus
le reste. Vous voulez dire que, par les blocs, on va en traiter 54...
Le Président (M. Ouellette) : On va
en traiter 54 sur 94.
Mme
Hivon :
Exact. Et ensuite c'est toutes sortes de dispositions qui complètent d'une
manière ou d'une autre, ou de concordance, ou...
Le Président (M. Ouellette) : C'est ça. On va se gouverner au fur et à mesure,
par la suite, de façon à ce que les droits
des uns et les droits des autres soient respectés et qu'on soit en mesure
d'imbriquer dans l'étude les articles comme le 0.1 et d'autres articles qui pourraient venir. Ça fait que... Mais,
pour ce soir, c'est notre première soirée d'étude. Et, puisque nous avons des représentants de la
communauté autochtone qui sont ici présents, je pense qu'il y a consentement
pour débuter par la première section, qui
est l'adoption coutumière autochtone. Si tout le monde est d'accord, on part.
M.
Jolin-Barrette : On y va.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre, lecture de l'article 10, s'il vous
plaît.
Mme Vallée :
Pour lequel j'aurai un amendement. Et là je regarde les gens dans la salle
parce que...
Le Président (M.
Ouellette) : ...la version anglaise.
Mme Vallée :
Non, il y a un amendement à la version française aussi.
Le Président (M.
Ouellette) : Ah! Puis il y a une française aussi? Bon, bien, c'est ça.
Ça va bien.
Mme Vallée :
Oui. Je pense que oui.
Le Président (M. Ouellette) : Ça fait que commencez par me lire
l'article 10, Mme la ministre, et après vous me lirez votre
amendement.
Mme
Vallée : Alors, l'article 10 tel qu'on le retrouve au
projet de loi n° 113 : «Ce code est modifié par l'insertion,
après l'article 543, du suivant :
«543.1.
Peuvent se substituer aux conditions d'adoption prévues par la loi celles de
toute coutume autochtone du Québec
qui est en harmonie avec les principes de l'intérêt de l'enfant, du respect de
ses droits et du consentement des personnes concernées. Ainsi, les
dispositions du présent chapitre qui suivent, à l'exception...»
Je m'excuse, M. le
Président, c'est bien dur de me concentrer quand vous parlez en même temps.
Le Président (M.
Ouellette) : Excusez, Mme la ministre, c'est parce que j'essaie de
regarder...
Mme Vallée :
Oui, bien, je comprends, mais c'est parce que je suis très auditive.
Le Président (M.
Ouellette) : Ça va. Excusez-moi.
Mme Vallée :
O.K. Merci. Désolée.
«Ainsi,
les dispositions du présent chapitre qui suivent, à l'exception de celles de la
section III, ne s'appliquent pas à une adoption faite suivant une
telle coutume, sauf disposition contraire.
«Une
telle adoption qui, selon la coutume, crée un lien de filiation entre l'enfant
et l'adoptant est, sur demande de
l'un d'eux, attestée par l'autorité compétente désignée pour la communauté ou
la nation autochtone de l'enfant ou de l'adoptant.
Toutefois, si l'enfant et l'adoptant sont membres de nations différentes,
l'autorité compétente est celle désignée pour la communauté ou la nation
de l'enfant.
«L'autorité
compétente délivre un certificat qui atteste de l'adoption après s'être assurée
du respect de la coutume, notamment que les consentements requis ont été
valablement donnés et que l'enfant a été confié à l'adoptant; elle s'assure en outre que l'adoption est, suivant une
appréciation objective — et là je regarde, il y a un amendement — conforme à l'intérêt de l'enfant.»
Le Président (M. Ouellette) : Voulez-vous nous présenter votre amendement avant
de donner vos commentaires, Mme la ministre?
Mme
Vallée : Avec plaisir. Donc, article 10 : Modifier le
troisième alinéa de l'article 543.1 proposé par l'article 10
du projet de loi :
1° par le
remplacement, dans le texte anglais, de «duly» par «validly»;
2° par la suppression
de «, suivant une appréciation objective,».
Le Président (M.
Ouellette) : Vos commentaires sur votre amendement.
Mme
Vallée : Bon, la première modification est apportée à des fins
de cohérence avec la terminologie anglaise qui est employée au Code
civil.
Et, pour ce qui est de la deuxième modification,
celle-ci est proposée en raison des commentaires reçus des représentants autochtones concernant la notion
d'appréciation objective. Cette notion ne serait rien d'autre qu'«un reflet
d'une méfiance face au
peuple autochtone», je reprends textuellement, et qu'«une manifestation d'un paternalisme
dépassé», je reprends textuellement,
considérant cette perception, et que de toute façon l'intérêt de l'enfant doit
être évalué de manière impartiale. L'expression «appréciation objective»
est retirée.
Le Président (M. Ouellette) : Est-ce
que vous avez des commentaires à votre article 10?
Mme Vallée : Pour
l'article 10, cette disposition porte dans les lois la reconnaissance des
effets de l'adoption coutumière autochtone,
qui, avec d'autres propositions du projet de loi, permettront à l'enfant adopté
d'obtenir un acte de naissance conforme à sa situation et de bénéficier
de tous les droits et avantages liés à sa nouvelle filiation.
L'expression
«les dispositions du présent chapitre qui suivent» rend applicable
l'article 543 du Code civil à une adoption coutumière autochtone,
lequel traite notamment de l'intérêt de l'enfant.
L'expression «à l'exception de celles de la
section III» rend applicables les articles 577 à 581 du Code civil
relatifs aux effets de l'adoption, dont certains sont modifiés par le présent
projet de loi, pour les adapter à la réalité autochtone. On parle ici des
articles 577.1, 578.1 et 581.
Enfin, l'expression «sauf disposition contraire»
vise les articles 565.2 et 574.1 du Code civil introduits par le projet de
loi, lesquels ont trait à l'adoption coutumière autochtone hors du Québec mais
au Canada.
Donc, l'adoption aura lieu dans l'intérêt de
l'enfant, suivant les conditions de la coutume autochtone, et qui doivent être en harmonie avec les principes
fondamentaux de l'intérêt de l'enfant, du respect des droits de l'enfant, du
consentement des parents d'origine, des
adoptants et de l'enfant, s'il est en âge de comprendre. Et les effets d'une
telle adoption seront ceux qui sont
prévus au Code civil, tel que modifié par le présent projet de loi, pour les
adapter à la réalité autochtone. Et, pour qu'ils soient reconnus,
l'adoption coutumière devra être attestée par l'autorité autochtone qui est désignée pour agir par la communauté ou la nation.
Cette autorité n'est pas nécessairement dédiée à une seule communauté,
elle pourrait agir pour un ensemble des communautés d'une nation.
Donc, ce sont les commentaires sur l'article et
les amendements.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Joliette.
Mme
Hivon : Est-ce
qu'on traite de l'amendement en premier, de l'article?
Le Président (M. Ouellette) : On
traite de l'amendement, Mme la députée de Joliette.
• (20 h 30) •
Mme
Hivon :
O.K. Pour ce qui est de l'amendement, je salue cet amendement,
parce qu'effectivement il y avait des
relents de paternalisme dans ce libellé-là. Alors, je pense qu'on veut
justement s'éloigner de ça et reconnaître pleinement la coutume et les manières de faire autochtones,
donc je salue cet amendement-là. Évidemment, j'aurai beaucoup d'autres
commentaires quand on va revenir à l'article, mais, sur l'amendement, ça me
convient.
Le Président (M. Ouellette) : Aucun
commentaire, M. le député de Borduas, sur l'amendement?
M. Jolin-Barrette : Pas sur
l'amendement.
Le
Président (M. Ouellette) :
M. le député de Mercier, est-ce qu'il y a des commentaires sur l'amendement?
O.K. On revient à l'article 10. Non, on va l'adopter après discussion sur
l'article 10. Commentaires sur l'article 10? Mme la députée de
Joliette.
Mme
Hivon : Bien, on
comprend que c'est, donc, l'article qui vient poser le principe de la
reconnaissance de l'adoption coutumière dans
notre Code civil. Dans un premier temps, j'étais curieuse de savoir, de par,
bon, les échanges, tous les travaux
qui ont été faits, qui, en fait... Je comprends que l'instance va venir,
l'instance qui va être désignée, puis on
va y revenir, là... va avoir ce rôle-là d'attribuer, donc, l'adoption... de
reconnaître cette adoption-là, mais la coutume... Parce que, lors des auditions, on a vu que la
coutume était très différente ou passablement différente d'une communauté
à l'autre, d'une nation à l'autre. Donc,
dans certaines communautés, c'est vraiment de l'adoption coutumière; on va
revenir dans le dernier bloc à la
notion plus de tutelle coutumière ou de garde coutumière. Mais qui est garant,
je dirais, au sein d'une nation ou
d'une communauté, de déterminer ce qu'est la coutume, dans le fond? Comment ça
se vit, ça, dans les nations, de
savoir : Nous, un tel processus d'adoption, c'est conforme à notre
coutume, donc il peut y avoir une reconnaissance? Qui est comme garant
de cette coutume-là qui s'est établie au fil du temps?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée :
Bien, en fait, chaque nation et chaque communauté a au sein de son organisation
des sages qui sont en quelque sorte
les garants de la tradition, d'où la mise en place de l'autorité compétente.
Alors, l'autorité compétente est désignée par la nation, par les communautés,
au sein d'une même nation, et ces communautés ont leurs, je dirais, et
là j'utilise mes termes à moi, puis ce n'est
pas... leurs porteurs, je dirais, au sein de la communauté, de la tradition, de
la coutume qui viendront en support à l'autorité compétente pour accompagner
ceux et celles qui auront la responsabilité d'assurer que la démarche
correspond réellement à la tradition, à ce qui se vit depuis des traditions au
sein de cette communauté-là.
Et
il n'y a pas un modèle, je dirais... il n'y a pas un modèle formel et
institutionnel, je dirais. Chaque communauté, au sein de son organisation, a des membres... Et je sais à quel point
les aînés des communautés sont souvent ceux qui sont les porteurs. Il y a aussi, bon, l'organisation de
l'autorité, il y a aussi des experts, évidemment, là, on réfère aussi à ces
gens-là, mais chaque communauté a son réseau de sages qui accompagne l'autorité
compétente.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Joliette.
Mme
Hivon :
Je crois effectivement que vous en avez parlé tout à l'heure, là, juste avant
de revenir plus en détail sur la question de l'autorité compétente, on dit
«désignée pour la communauté ou la nation autochtone». Donc, une autorité
compétente, il pourrait, par exemple, y avoir, je ne sais pas, pour la nation
crie, plus qu'une autorité compétente parce qu'il y a plus qu'une communauté ou
il pourrait y en avoir une pour l'ensemble de la nation. C'est bien ça?
Mme Vallée :
Exactement. Par exemple, moi, je me rattache beaucoup à la nation algonquine,
qui est celle que je côtoie
régulièrement, 10 communautés algonquines, une organisation qui pourrait
chapeauter l'ensemble des communautés, mais
il se pourrait aussi fort bien qu'au sein de chaque communauté on souhaite
avoir en place notre autorité compétente, puisqu'on a vraisemblablement
des dynamiques différentes. Alors, ça, il faudra le... il faut laisser la
possibilité à une nation d'avoir pour la
nation son autorité chapeau ou permettre aux communautés qui le souhaitent
d'avoir leur organisation au
sein de leur structure.
Je pense que...
Je crois que cette volonté-là a été formulée pour bien respecter la diversité
qui existe d'une nation à l'autre. Je
pense que, les nations, chaque nation a sa propre façon d'interagir. Les
communautés au sein de chaque nation ont leurs particularités, il est important
de les respecter, d'où la disposition que l'on retrouve à l'article 10. Et
voilà.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Joliette.
Mme
Hivon : Oui. Puis, pour comprendre cette sensibilité-là,
donc, de prévoir une flexibilité, est-ce que ça vient du fait que la coutume pourrait varier d'une communauté
à l'autre à l'intérieur d'une même nation ou est-ce que c'est plutôt pour des aspects d'organisation des services, et donc de l'instance, que cette précision-là ou que
cette flexibilité-là est donnée?
Mme Vallée : Bien, il y a un peu des deux parce que, d'une communauté
à l'autre, l'organisation de services n'est pas toujours la même, effectivement. Et, d'autre part, au sein d'une même nation, il
y a certaines traditions qui ont pu se développer en raison des réalités
géographiques différentes, en raison, évidemment, des particularités. Et la
coutume, c'est une coutume qui est verbale,
alors c'est vivant. Et donc, si on est sur un territoire qui est immense...
Encore une fois, je fais référence aux communautés algonquines, et même d'autres communautés.
Le territoire, la diversité ont
amené, au fil des ans, au fil des siècles, à aborder un enjeu d'une façon...
avec des particularités. Donc, il faut aussi le reconnaître, parce que ce qui se vit peut-être
dans le nord de l'Ontario n'est pas nécessairement ce qui se vit
dans l'ouest de l'Outaouais.
Mme
Hivon : Et est-ce qu'en fait on pourrait avoir une seule
instance pour une nation, donc une instance pour la nation au complet, même s'il pouvait y avoir des variantes dans la
coutume à l'intérieur de cette nation? Je ne sais pas si vous me suivez. Je me demande juste : Est-ce
qu'en fait une instance va être en place pour la reconnaissance de l'exercice
d'une coutume propre ou est-ce qu'on
pourrait avoir une supra-instance pour l'ensemble d'une nation, même
s'il y a des variantes dans l'exercice de la coutume?
• (20 h 40) •
Mme Vallée : Techniquement, rien n'empêche qu'il y ait une grande
instance si... En fait, l'important, c'est d'avoir l'adhésion des communautés. Si les communautés au sein d'une même nation, pour des raisons
d'efficience, pour des raisons de ressources,
d'expertise, considèrent qu'il est plus utile d'avoir une seule et même
autorité compétente, qui verra à
apporter en fonction de chaque communauté les petites modulations nécessaires, il n'y a rien qui empêche ça, au même titre que, si, au sein d'une nation, pour toutes
sortes de raisons, on n'arrive pas à s'entendre sur la mise en place de cette
autorité chapeau, bien, les communautés
peuvent très bien... Parce que certaines communautés ont des organisations
aussi en place, il faut aussi reconnaître ça. Dans plusieurs
communautés, dans la majorité des communautés, on a déjà des structures qui sont en place pour... et qui
oeuvrent déjà auprès des familles, auprès des intervenants, dans certains
auprès de la protection de la
jeunesse, auprès des services sociaux. Bref, il y a plusieurs organismes déjà
constitués. Lors des consultations,
des groupes nous disaient : Bien, on a déjà une bonne idée de ce que
pourra prendre comme forme notre autorité
compétente. Donc, on ne veut pas donner un modèle prêt-à-porter, je dirais. On va faire du sur-mesure, pour les communautés, en fonction de la réalité. Mais c'est
certain que, une nation qui souhaite avoir cette autorité chapeau qui
viendra apporter un regard particulier pour chacune des demandes en fonction de
la communauté dans laquelle cette demande-là s'inscrit, il n'y a pas
d'objection de principe.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Puis à ce jour, on en avait parlé lors des auditions, mais qu'est-ce qu'on
envisage comme autorité compétente?
Est-ce que ça peut être, par exemple, la commission santé et services sociaux
d'une nation donnée? Est-ce que ça
peut être autre chose? J'aimerais juste avoir une idée de ce qui est envisagé
comme porteur, donc, l'entité qui serait reconnue. Est-ce que c'est une
entité déjà existante ou c'est une entité à créer dans les communautés?
Mme Vallée :
Évidemment, ce sera à chaque communauté,
à chaque nation de le déterminer.
Certaines communautés nous ont déjà indiqué qu'elles souhaitaient
travailler avec l'organisation qui est déjà en place, qui a déjà une certaine expertise pour l'interaction, pour traiter les
enjeux qui relèvent des services sociaux. Alors, si, pour certaines nations,
c'est la voie qui est envisagée,
parfait. Si on souhaite créer une entité distincte qui aura comme seule et
unique responsabilité de voir à l'adoption coutumière et à la tutelle
coutumière, pas de problème non plus.
Alors,
ce sera vraiment aux nations de déterminer en fonction des ressources qui sont
les leurs, en fonction de leur
réalité, parce qu'au sein d'une petite communauté peut-être qu'il n'est pas
nécessaire de créer une autre structure en parallèle, tout simplement
utiliser une structure en place et s'assurer, cette structure, qu'elle sera à
même de répondre aux exigences qui sont
introduites par l'article 10. Donc, vraiment, à ce niveau-là, il y a une
flexibilité qui doit être présente pour répondre aux réalités de chaque
nation, de chaque communauté.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
J'ai beaucoup de questions, hein, c'est parce que c'est comme le coeur. C'est
le début, hein? Ça fait qu'au début d'un...
Le Président
(M. Ouellette) : Oui, oui, il n'y a pas de problème.
Mme Hivon :
Donc, est-ce qu'on a des indications, par exemple, des... Je sais que c'est
drôle parce que je demande ça à la
ministre, là. Je sais qu'il y a beaucoup de représentants des nations, des
communautés, mais on est en étude détaillée, la période des consultations est terminée, donc c'est la ministre qui
répond. Je veux savoir : Est-ce qu'on a des indications des différentes nations de, je dirais, la
proportion de celles qui pensent fonctionner avec une institution déjà
existante, une institution déjà
existante versus la création d'une toute nouvelle entité? Est-ce qu'on a déjà
une idée par rapport à ça, de comment
se dessinent les choses — ça fait quand même un moment qu'il y a des réflexions par rapport
à ça — donc,
en termes de proportions ou de la tendance qui se dessine?
Mme Vallée :
En fait, je n'ai pas de statistiques, mais, par exemple, pour les Inuits, on
nous dit : Bien, ce sera l'agent
d'inscription, on fera affaire avec l'agent d'inscription. Lors des
consultations, je me souviens, et puis là j'essaie... on a eu des représentations à l'effet que ce
serait quand même assez, assez rapide parce qu'on utiliserait les structures
en place. Donc, je n'ai pas de statistiques à proprement parler.
Mme Hivon :
...les statistiques mais juste une... Je ne sais pas s'il y a eu des
indications de données.
Mme
Vallée : Bien, en fait, on n'a pas... Je vous dirais que la
reprise de nos travaux en commission parlementaire s'est faite, là, assez rapidement. Donc, il y aura
sans doute, là, un intérêt qui sera renouvelé au cours des prochains jours,
au cours des prochaines semaines. Parce
qu'il y a eu les consultations, mais on n'avait pas encore entamé l'étude
article par article. Donc, j'imagine que peut-être certains
s'imaginaient qu'on n'était pas rendus là, donc...
Mme Hivon :
Vous n'avez pas toutes ces indications-là, c'est-à-dire, des communautés ou des
nations.
Mme Vallée :
Je n'ai pas toute l'information avec moi aujourd'hui, là, mais...
Mme Hivon :
O.K. C'est bon. Si c'est possible de juste nous donner... Ce n'est pas d'y
aller nation par nation ou communauté
par communauté, mais je trouve ça intéressant de savoir... Est-ce que ça veut dire la mise en place de toutes nouvelles organisations, donc, ou bien on
va se référer davantage à des organisations déjà existantes? Donc, c'est
une information qui m'intéresserait.
Puis,
en ce qui concerne le fonctionnement de cette autorité compétente, est-ce qu'on imagine
ça un peu comme un quasi-tribunal,
là, je ne veux pas dire que c'est archiformel, mais avec un certain formalisme?
Parce que, quand je lis les critères qui sont là, on
dit vraiment qu'il va tenir en compte, donc, de l'intérêt de l'enfant, du
respect de ses droits, du consentement des personnes concernées, donc c'est vraiment
des choses assez précises, juridiques, des notions bien établies. Donc,
est-ce qu'on a en tête une autorité qui pourrait ressembler à une forme de
tribunal?
Mme Vallée :
En fait, l'autorité va venir constater un certain nombre de faits. Donc, elle
n'est pas là pour substituer son
appréciation, elle va constater si les critères sont rencontrés. Et elle doit
être complètement impartiale, donc, évidemment, l'autorité
ne doit pas être une des parties à l'adoption.
Puis
tout simplement pour revenir sur la question
concernant le niveau d'organisation, peut-être, des communautés ou le niveau d'avancement de la réflexion, le ministère de la Justice va accompagner, évidemment, les communautés
puis les nations pour la mise en place des autorités. Donc là, pour le
moment, on attendait d'être un petit peu plus avancés dans nos travaux, mais je
pense qu'avec la reprise de nos
travaux, ce soir... j'ai l'impression qu'on va activer le rythme. Et
puis ces autorités-là vont vraiment être établies en fonction de la réalité et
des besoins des nations.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : C'est parce
que c'est vraiment
une révolution, là. C'est extraordinaire, je
pense, d'être capable de reconnaître une réalité autochtone vraiment dans notre Code civil, c'est
vraiment une grande avancée. Et évidemment on a
nos lunettes traditionnelles, donc il faut un peu les enlever, je pense, quand
on pose des questions aussi, pour voir un
peu comment ça peut être conforme à l'intérieur même du Code civil, un peu la
flexibilité qu'on a. Mais en même temps
on veut que ça s'insère dans le Code civil. C'est ça, j'ai cette question-là de...
parce qu'à ce jour, quand on parle d'intérêt
de l'enfant, de ces notions-là, de s'assurer du consentement, tout ça, c'est
toujours par le biais d'un tribunal, je veux dire, jusqu'à ce jour, jusqu'à cette révolution-là qu'on fait
d'incorporer, donc, la réalité vraiment autochtone avec la coutume dans
notre Code civil.
Donc, est-ce qu'on envisage un peu le même type,
je dirais, de vérification ou de validation quand on dit «on constate»? Constater, c'est une chose, mais
comment on va arriver à... Est-ce qu'on va entendre, je ne sais pas, bon, les
parties uniquement? Est-ce qu'il va y avoir
un expert? J'essaie de comprendre le fonctionnement un peu de cette instance-là
par rapport aux principes qui doivent être
respectés, donc les consentements des personnes, l'intérêt de l'enfant, le
respect des droits. Je veux juste
comprendre comment ça pourrait fonctionner. Est-ce que c'est une seule
personne, par exemple, de l'autorité
compétente qui va rencontrer les parties, les parents biologiques, les parents
qui pourraient être les parents adoptants,
l'enfant? Est-ce qu'il y a un expert qui peut être amené pour témoigner que
c'est dans le meilleur intérêt de l'enfant? Un petit peu comment ça va
se vivre, cette réalité-là.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
• (20 h 50) •
Mme Vallée : En fait, comme je le mentionnais un peu plus tôt,
chaque autorité va mettre en place sa procédure, va mettre en place, je dirais, ses règles, que j'appelle règles de
pratique, mais en fait c'est pour faire référence un petit peu à ce qu'on connaît, nous, dans le milieu
de la justice. Donc, il y aura un processus qui sera établi pour assurer,
évidemment, que les critères sont validés.
Évidemment, en matière d'adoption coutumière
autochtone, on est un petit peu... je pense qu'on peut faire un parallèle similaire avec l'adoption intrafamiliale
aussi, dans le sens qu'il y a une présomption que, la famille — puis, au sens plus large, là, évidemment, en matière d'adoption coutumière — c'est la famille qui est la mieux placée
pour évaluer l'intérêt de l'enfant. Et, en gardant ça à l'esprit puis en ayant les
mesures qui seront mises en place par chaque autorité, on va être à même d'établir une séquence pour
permettre d'assurer, par exemple, que, bon, on respecte les droits de l'enfant, l'intérêt
de l'enfant est pris en considération, les personnes concernées, les parents
biologiques sont au fait et sont en accord,
donc, et que le consentement aussi a été donné valablement. Donc, tout ça
pourra être évalué par l'autorité compétente.
Vous dire : Aujourd'hui, voici, on a un
formulaire standard, je pense que ça va un peu à l'encontre de l'esprit même de la mise
en place de l'autorité compétente, qui sera vraiment, là, définie, sa
constitution, son mode de fonctionnement sera défini. Puis, comme je le
mentionnais tout à l'heure, le ministère de la Justice va accompagner, là, les
communautés, les nations dans ce travail-là.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Joliette.
Mme
Hivon :
Bien, c'est ça, en fait, je vous demande un peu, ce n'est pas évident, mais
d'être en quelque sorte la
porte-parole des communautés, à la lumière de ce que vous savez, parce
qu'évidemment le principe même, c'est que ce n'est pas le ministère qui arrive avec ses gros sabots puis qui
dit : Voici, c'est comme ça que vous allez faire, puisque l'idée même, c'est de dire que le pouvoir est
donné, donc, aux nations, aux communautés de mettre en place leur autorité
compétente. Donc, ça, je pense que c'est bien
clair. C'est juste que nous, on n'a pas la chance d'avoir toute cette information-là. Donc, l'idée, c'est de comprendre
un peu comment ça se dessine, un peu comment les nations voient la mise sur pied de cette autorité-là. Est-ce qu'ils
imaginent, par exemple, des rencontres avec les parties, ou quelque chose de
plus administratif, ou vraiment quelque
chose avec une rencontre pour déterminer, bon, si... comment on répond à
l'intérêt de l'enfant, c'est quoi, la
réalité de cet enfant-là? C'est un peu pour comprendre comment ça se ferait,
parce qu'évidemment nous, on pense toujours, je dirais, au pendant de
comment on le vit dans notre réalité, là.
Mme Vallée : Mais justement
c'est tellement une belle illustration de ce qu'amènent les modifications au Code civil. C'est qu'évidemment le législateur ne
peut pas vraiment légiférer sur la coutume, en fait, on ne peut pas légiférer
sur la coutume, donc c'est vraiment
l'autorité qui va avoir la responsabilité de s'assurer que, bon, l'intérêt de
l'enfant, les consentements des
personnes impliquées sont réels. Il y a une grande latitude qui est accordée
aux nations puis aux communautés pour la mise en place de l'autorité en
raison de l'impossibilité pour nous, le législateur québécois, de venir encadrer la coutume. Et donc l'autorité, elle, a une
responsabilité de prendre les mesures, va avoir l'autorité pour prendre
les mesures qui sont souhaitées pour accomplir ses responsabilités.
Alors, on a
choisi de ne pas encadrer le mode de fonctionnement des autorités par respect
pour les nations. Donc, c'est un
petit peu l'enjeu auquel on est confrontés. C'est-à-dire on reconnaît
l'adoption coutumière autochtone. Ce faisant, on doit comprendre que... et là j'utilise un exemple, une expression que
j'utilise souvent, c'est que ça ne rentre pas dans les petites boîtes
habituelles. Donc, compte tenu que ça ne rentre pas dans les petites boîtes
habituelles, auxquelles... Ça ne rencontre peut-être pas le formalisme auquel
nous, dans notre tradition civiliste, on est habitués, mais en même temps c'est important de venir reconnaître dans la
réalité québécoise une réalité qui existe, une réalité qui est celle des
communautés autochtones, des nations autochtones.
Et on travaille en collaboration avec ces
nations pour mettre en place une autorité qui va veiller à assurer l'intérêt de l'enfant, à assurer que l'on respecte
les paramètres qui sont quand même définis ici. Le ministère accompagne les nations et les communautés dans la mise en
place de cette structure-là. Il y
aura vraisemblablement aussi un suivi qui sera effectué. Il y aura un
travail de collaboration, au cours des prochains mois, au cours peut-être des
prochaines années, pour assurer, là, que tout le monde est à l'aise avec le fonctionnement,
surtout que les communautés auront réponse à leurs questions, parce qu'il y a des notions peut-être
plus juridiques auxquelles on aura besoin de réponses, chemin faisant, des
réalités auxquelles on sera confronté puis pour lesquelles on devra peut-être
demander une certaine collaboration, un certain suivi.
Alors,
notre volonté, c'est vraiment de travailler en collaboration et de reconnaître
aussi de façon très officielle cette autorité
qui est celle des nations d'encadrer et de reconnaître ce qui constitue, au
sein de leurs coutumes, un processus d'adoption,
parce que c'est quand même... Et c'est quand même une procédure, pour les
communautés qui ont recours à
l'adoption coutumière, parce qu'on va revenir tout à l'heure avec d'autres
modèles aussi... Parce que l'adoption amène une rupture des liens de filiation, puis, dans bien des communautés, on
nous l'a expliqué, cette rupture-là n'existe pas, alors d'où
l'introduction de la tutelle.
Donc,
c'est important de respecter ces coutumes-là. Mais, ces coutumes-là, nous, on
n'est peu familiers ou pas familiers avec les coutumes. Donc, il y aura, je
dirais, un partage de connaissances entre les équipes du ministère de la
Justice et les communautés et les nations.
Donc, il y aura une belle dynamique aussi en place. Ça nous permettra, nous,
de notre côté, de nous familiariser aussi et
de mieux comprendre peut-être certains besoins et certaines réalités qui sont
celles de ces communautés et de ces nations.
Mme
Hivon : Avant de passer la parole à mon collègue, j'ai
juste, à ce moment-ci, une dernière question, c'est... «L'autorité compétente délivre un certificat qui
atteste de l'adoption...» Donc, j'imagine qu'on va peut-être revenir, là,
dans les articles, sur les effets de ce
certificat, mais ça, c'est ce certificat-là qui, par exemple, va permettre la
reconnaissance, donc, de la nouvelle
filiation via la coutume pour l'état civil puis les autres effets qui
pourraient s'ensuivre. Donc, c'est ce
certificat-là qui est émis, puis il n'y a pas de lien... L'autorité compétente
émet le certificat, et ensuite il est, à sa face même, porteur de droits
et d'effets, et c'est l'équivalent, mettons, d'un jugement si on était chez les
allochtones.
Mme Vallée :
En fait, c'est le document qui va être transmis au Directeur de l'état civil.
On va le voir, on va y revenir à
l'article 3 du projet de loi. Ce n'est pas un jugement, mais c'est le
document officiel qui viendra... qui sera déposé à l'appui d'une demande
de modification des registres de l'état civil.
Mme
Hivon :
O.K. Ça va pour l'instant.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : ...la première, là : Avec l'autorité compétente qui constate la
situation à la demande de la personne,
ça a un caractère permanent? À partir du moment où l'autorité compétente
constate qu'il y a une demande de la part de l'enfant ou de l'adoptant
et qu'il y a émission du certificat, il y a un caractère permanent?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
Vallée : Bien, effectivement, le certificat est transmis au
Directeur de l'état civil, puis qui va venir modifier les informations
auprès des registres.
M. Jolin-Barrette : Donc là, on est dans une situation d'une communauté, d'une nation
autochtone qui, elle, dans sa coutume, de façon permanente, va utiliser
le véhicule de l'article 543.1.
Mme
Vallée : Ça, c'est vraiment... on est dans le cas d'une
adoption, avec ce que ça comporte comme rupture de lien de filiation. Donc, on n'est pas dans une
tutelle où on maintient les liens de filiation, mais on fait tout simplement
transférer à un membre de la famille la
responsabilité de prendre soin de l'enfant, avec tout ce que ça comporte comme
possibilités, de signer les passeports, la
carte d'assurance maladie, et tout ça. Ça, on va le voir au niveau de la
tutelle, de la reconnaissance, les
nouvelles dispositions dont j'ai parlé et qui font l'objet d'amendements. Ici,
on est vraiment dans le cadre de l'adoption.
• (21 heures) •
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Donc, de l'adoption, avec une rupture du lien de
filiation de façon permanente et avec la création d'un nouveau lien de
filiation.
Mme Vallée :
Exactement.
M. Jolin-Barrette : Parfait. Juste une question de compréhension. Quand je lis le
paragraphe 543.1, le premier paragraphe,
on dit : «Peuvent se substituer aux conditions d'adoption prévues par la
loi celles de toute coutume autochtone du
Québec qui est en harmonie avec les principes de l'intérêt de l'enfant...»
Quand on lit le deuxième paragraphe : «Une telle adoption qui,
selon la coutume, crée un lien de filiation entre l'enfant et l'adoptant...»
Donc, dans le premier paragraphe, on parle
de «toute coutume autochtone» puis, dans le deuxième paragraphe, on parle de la
coutume autochtone qui crée un lien
de filiation. Juste être sûr, là. Est-ce qu'on vise la même chose ou on vise,
dans le premier paragraphe, une
coutume qu'il n'y aurait pas rupture de lien de filiation? Parce qu'on dirait
qu'on est plus large dans le premier. Dans le deuxième, on vient dire,
bien : Quand vous avez une coutume avec création d'un lien de filiation.
Mme
Vallée : C'est la même chose.
M.
Jolin-Barrette : C'est la même chose?
Mme
Vallée : C'est la même chose. On ne vient pas... 543.1 ne fait
pas référence à nos concepts de tutelle, qu'on verra plus tard. On est vraiment dans le cas d'une rupture du lien de
filiation, dans l'esprit d'une adoption, je dirais, plus traditionnelle,
telle qu'on la connaît, telle qu'elle est connue de façon plus générale.
M. Jolin-Barrette : Ça fait qu'à la deuxième phrase du premier paragraphe, quand on
dit : «...par la loi celles de toute coutume autochtone du Québec», c'est
toute coutume ayant un bris du lien de filiation et en créant un nouveau.
Mme Vallée :
Exactement.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Sous-question, deuxième paragraphe, la phrase qui commence par :
«Toutefois, si l'enfant et l'adoptant sont
[des] membres de nations différentes, l'autorité compétente est celle désignée
pour la communauté ou la nation de
l'enfant.» Donc là, on est dans un cas où l'enfant appartient à une communauté
ou à une nation; l'adoptant, à une
autre communauté ou à une autre nation. Dans un cas comme ça, on va prendre la
coutume de la nation de l'enfant.
Mme Vallée :
Exactement.
M. Jolin-Barrette :
La question que je pose, c'est : Si un enfant appartient... bien, en fait,
ses origines sont de deux nations ou deux communautés autochtones distinctes,
qu'est-ce qui arrive?
Mme
Vallée : Bien, c'est ça. Lorsque les parents sont de nations
distinctes, c'est vraiment... l'enfant vient déterminer l'autorité...
M. Jolin-Barrette : Non, mais, c'est ça, quand c'est l'adoptant... quand vous avez l'enfant
qui est d'une nation puis l'adoptant
qui est d'une autre nation, ça va être les règles, la coutume de la nation de
l'enfant. Quand vous avez un enfant
qui a deux nations, supposons ses parents biologiques, là, ils proviennent de
deux nations distinctes, qu'est-ce qui arrive? C'est les règles de quelle communauté ou quelle nation autochtone qui
s'appliquent pour déterminer quelle est la nation de l'enfant?
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
Hivon :
Bien, j'imagine...
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon :
J'imagine que l'enfant, il est rattaché plus à une communauté qu'à une autre.
Mme Vallée :
...l'enfant appartient à une nation...
(Consultation)
Mme
Vallée : Je
demanderais de suspendre parce qu'il y a des discussions un petit peu partout. Alors, question
de bien saisir, là, pour vous, vous
demandez : Quelle est l'autorité
compétente lorsque les parents de l'enfant sont de nations différentes?
M.
Jolin-Barrette : Autochtones distinctes.
Mme Vallée :
Exactement.
Mme
Hivon :
Crie et attikamek.
Mme Vallée :
Par exemple. D'accord.
Le Président (M.
Ouellette) : On va chercher la réponse?
Mme Vallée :
Bien oui, tout simplement pour éviter que...
Le Président (M. Ouellette) :
C'est beau. On suspend quelques secondes.
(Suspension de la séance à
21 h 4)
(Reprise
à 21 h 7)
Le Président (M. Ouellette) : ...nos travaux. Nous en étions sur une question
à savoir, pour les enfants de parents de communautés différentes, c'est
quelle coutume qui s'applique. Mme la ministre.
Mme
Vallée : Ce sera évidemment
la coutume de la nation de l'enfant, parce
que, suivant la coutume, l'enfant
qui a un père et une mère issus de nations
différentes sera rattaché à la nation soit de son père ou soit de sa mère.
Encore là, ce n'est pas homogène.
Alors, selon la nation, selon les nations en question, bien, l'enfant sera
rattaché lui-même à une nation,
et c'est la coutume de cette nation-là qui sera considérée pour le processus d'adoption.
Et l'autorité compétente qui verra à désigner, ça, c'est une autre
chose, mais on va analyser la situation de l'enfant à partir de la coutume de
la nation à laquelle l'enfant est rattaché,
à laquelle l'enfant appartient. Parce
qu'un enfant n'appartient pas à deux
nations. La coutume établit les
règles, mais ces règles-là sont très différentes suivant les nations et suivant
le père est membre de quelle nation,
la mère de quelle autre nation. Alors, c'est pour ça, on n'a pas voulu encadrer
parce que c'est tellement... On
doit donner une flexibilité qui va permettre de reconnaître, justement,
cette réalité. Puis c'est vraiment... c'est la Loi sur les Indiens qui fait qu'une personne ne peut pas être membre de deux
communautés en même temps. Donc, il
y aura un rattachement, il y a
un rattachement. L'enfant est un peu le point central, puis d'une certaine
façon aussi toutes les décisions sont
prises dans l'intérêt de l'enfant. Et l'intérêt de l'enfant, c'est
aussi que la coutume propre à la communauté à laquelle il est rattaché
soit respectée et considérée.
• (21 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Je comprends tout à
fait. Sur la Loi sur les Indiens, je comprends que ça, c'est légal, mais, sur
l'aspect coutume aussi... Dans le
fond, la Loi sur les Indiens vient
statuer à quelle communauté vous appartenez. Par contre, il est possible que la coutume ne se retrouve
pas représentée dans la Loi sur les Indiens non plus. À ce moment-là, je comprends que... En fait, ma question, c'est plus : S'il y a
un conflit entre deux nations sur
l'attribution de la nation à l'enfant, qu'est-ce qui arrive? On laisse
les partenaires s'arranger, déterminer?
Mme Vallée :
Mais il n'y a pas de conflit parce que l'enfant va... L'enfant ne peut pas être
membre de deux communautés en même
temps, donc...
M. Jolin-Barrette :
En vertu de la Loi sur les Indiens, mais...
Mme Vallée :
Oui, puis en vertu... Puis généralement l'enfant est membre de la communauté
dans laquelle il vit, de la nation ou
de la communauté dans laquelle il vit. On rattache tout ça vraiment à
l'individu qu'est l'enfant, à la personne qu'est l'enfant.
M. Jolin-Barrette : Mais, juste là-dessus, la communauté dans
laquelle il vit, au moment, là, de l'adoption, là, coutumière, s'il ne
vit pas sur le territoire de sa communauté, qu'est-ce qui arrive?
Mme Vallée :
Mais l'enfant va être rattaché à une communauté. C'est difficile... C'est parce
que, là, on a notre approche plus civiliste, avec nos règles, mais ce
n'est pas la même approche au sein des communautés puis dans la coutume autochtone. Et puis c'est pour ça qu'il
faut éviter de faire, comme je le mentionnais tout à l'heure, du prêt-à-porter.
C'est vraiment... Chaque dossier sera un cas
d'espèce, chaque enfant... Évidemment, on a les grandes lignes, les grands
paramètres pour venir encadrer et s'assurer
d'éléments de base comme le consentement, et tout ça. Quand il n'y a pas
de consentement, peu importe la nation, il
n'y a pas de consentement. Mais il faut quand même s'assurer de respecter la
réalité propre de la communauté dans laquelle vit l'enfant.
Puis, au moment où
l'adoption est prononcée, l'enfant va vivre dans un... va avoir un domicile, va
avoir, par exemple, un domicile soit chez
son parent d'origine ou... parce qu'il va être rattaché à ce domicile-là, fort
probablement. Donc, tant que
l'adoption n'a pas eu lieu, c'est le point de référence auquel on se rattache,
là, pour déterminer la coutume qui est applicable et donc les éléments
particuliers qui devront être considérés par l'autorité pour déterminer si les
conditions sont présentes pour procéder à l'adoption.
M. Jolin-Barrette : O.K. Troisième paragraphe : «L'autorité
compétente délivre un certificat qui atteste de l'adoption après s'être assurée du respect de la coutume,
notamment que les consentements requis ont été valablement donnés et que l'enfant a été confié à l'adoptant; elle
s'assure en outre que l'adoption est, suivant[...] — bien, en fait, avec l'amendement, là — conforme à l'intérêt de l'enfant.» Avec le
libellé que vous avez, là : «L'autorité compétente délivre un certificat qui atteste de l'adoption après
s'être assurée du respect de la coutume», premier élément, A, là, ensuite, dans
A, respect de la coutume, c'est comme
si vous mettiez : Notamment, A1, le consentement, A2 que l'adoption a été
confiée à l'enfant, puis, A3, c'est
conforme à l'intérêt de l'enfant, plutôt que d'avoir A, B, C, D. Quand je le
lis, là, tu sais, dans le fond, c'est
comme si c'était à l'intérieur de la coutume que vous avez ces besoins-là,
plutôt que de dire... bien, s'être assuré du respect de la coutume, de
la validité du consentement, que l'enfant a été confié à l'adoptant.
Mme Vallée :
Bien, en fait, l'autorité doit d'abord être familière avec la coutume pour
déterminer si on est vraiment devant une situation d'adoption. Et puis
évidemment...
M. Jolin-Barrette : Parce que,
dans le fond, là, il va constater si... est-ce qu'il est face à une situation
de la coutume, mais, pour le consentement,
il va falloir qu'il le valide aussi. Ce n'est pas inclus dans la coutume qu'il
y a le consentement
de l'adopter puis aussi que c'est conforme à l'intérêt de l'enfant. L'intérêt
de l'enfant, c'est un caractère objectif, donc ce n'est pas dans la
coutume, ce n'est pas... C'est une condition, dans le fond, d'intérêt public,
là.
Mme Vallée : Oui, mais
l'autorité... En fait, l'architecture de l'article, dans le premier alinéa on
vient vraiment mettre en place les conditions minimales de l'adoption. Ça,
c'est l'alinéa un. Et, dans l'alinéa trois, on vient établir les éléments que
l'autorité doit vérifier, les éléments dont elle devra s'assurer. Donc, il y a notamment
les critères qu'on retrouve à l'alinéa un parce que, dans l'alinéa un, le
respect des droits de l'enfant, l'intérêt de l'enfant, le consentement des personnes
concernées, on le retrouve aux conditions minimales de l'adoption de l'alinéa
un. On revient, on y refait référence à l'article 3 parce que l'autorité
doit aussi les constater. Mais elle doit surtout s'assurer du respect de la
coutume, et aussi tout ça en gardant à l'esprit les conditions de base à
l'adoption, parce qu'il ne peut pas y avoir adoption si les conditions que l'on
énumère à l'alinéa un ne sont pas rencontrées.
M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord
avec vous, là, mais moi, quand je lis un, là, ça dit : «Peuvent se
substituer aux conditions d'adoption prévues par la loi celles de toute coutume
autochtone du Québec...» O.K.? Ensuite, là, tu mets tes critères : «...principes
de l'intérêt de l'enfant, [...]respect de ses droits et du consentement des
personnes concernées.» C'est cumulatif. Dans le fond, tu as ta coutume, puis en
plus il faut que tu rajoutes ces trois éléments-là. Ce n'est pas à l'intérieur
de la coutume, c'est : Tu as la coutume, plus un, deux, trois. Mais moi,
quand je lis le paragraphe trois, avec le «notamment»...
Mme Vallée : Oui, mais c'est
parce que le paragraphe trois se lit avec le paragraphe un. C'est un tout,
l'article se lit dans un tout. Le paragraphe un, on vient camper les conditions
minimales, puis, au paragraphe trois, on fait
la référence à... en fait, on vient prévoir qu'il faut aussi, en sus de ce qui
est prévu à l'alinéa un, assurer du respect de la coutume, donc ce qui
implique que l'autorité a une connaissance de cette coutume-là.
Alors, l'architecture n'est pas comme celle que
vous avez présentée, mais c'est vraiment : Un, ça, c'est les conditions de base, alors intérêt de l'enfant,
respect des droits de l'enfant, consentement des personnes concernées. Bon,
par la suite, l'autorité va délivrer un
certificat, puis le certificat va attester qu'on s'est assuré du respect de la
coutume puis va attester également
des éléments qu'on retrouve à l'alinéa un, c'est-à-dire la validité des
consentements, l'intérêt de l'enfant et le respect des droits.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Joliette aurait peut-être juste un petit mot pour nous aider.
Mme
Hivon :
Bien, juste pour voir si... En fait, ce que je comprends, c'est qu'évidemment
l'adoption coutumière, ça existe
déjà, ça se pratique. À l'intérieur de la coutume, je veux dire, les nations
autochtones s'assurent que ces éléments-là sont là. Ils ne procéderont pas à une adoption ou ils n'accepteront pas
une adoption coutumière qui ne respecte pas le principe de l'intérêt de l'enfant, là; ce n'est pas externe
à eux, eux autres. Je veux dire, c'est un peu... il faut s'éloigner de notre
conception, comme si on vient mettre des
critères de notre droit civil paternaliste. Eux-mêmes, je veux dire, ça va de
soi que l'intérêt de l'enfant puis les consentements doivent être
clairs.
Donc, moi, de
ce que je comprends, c'est que ça fait partie de la coutume. C'est pour ça
qu'au troisième alinéa on parle
notamment... En s'assurant du respect de la coutume, ça inclut les éléments qui
sont déjà dans leur coutume, qui évidemment se retrouvent dans notre
droit à nous, mais eux, dans leurs coutumes, ils les ont aussi, là. Ils ne font
pas des adoptions qui vont contre l'intérêt
de l'enfant, où il n'y a pas de consentement des parents, là, ça va de soi.
Alors, c'est ce que dit le troisième, c'est ce que je comprends.
Mme Vallée : Bien, c'est ça,
on dit la même chose.
Mme
Hivon :
Puis le premier, en fait, ce qu'il dit, c'est que nous, on va accepter, dans le
Code civil, de reconnaître ça quand une coutume autochtone est conforme
avec ces principes-là. Mais, si une coutume autochtone existait puis qu'elle ne
reconnaissait pas ces principes-là, bien, dans notre droit, ce ne serait pas
une coutume reconnue.
Mme Vallée : Ce n'est pas de
l'adoption.
Mme
Hivon :
Exactement. Sauf que... Est-ce que c'est ça?
Le
Président (M. Ouellette) :
La salle est d'accord, Mme la ministre et Mme la députée de Joliette... et de
Borduas, la salle est d'accord avec vos explications.
Mme la ministre... Oui, M. le député de Borduas,
excusez.
• (21 h 20) •
M.
Jolin-Barrette : Juste là-dessus, si on l'intègre dans le Code civil,
ce sont... un critère... Je comprends qu'il peut
y avoir des modalités dans la coutume qui vise à valider ça, mais, pour qu'elle
soit reconnue dans le Code civil, le fait
d'avoir le consentement, d'avoir l'intérêt de l'enfant comme critère d'intérêt public, moi, quand je lis trois, je n'aurais pas mis «notamment». Je le vois comme ça. Il est peut-être
déjà dans l'adoption coutumière, dans la coutume, sauf que le législateur fait un choix que, pour que ça se retrouve, dans le fond, comme document public, c'est quelque
chose que l'autorité compétente doit faire, que vous exigez
de l'autorité compétente, ce n'est pas uniquement dans la coutume. Moi,
je le vois comme ça, là.
Mme Vallée : C'est
que l'autorité compétente doit, sur le certificat, faire état de ces
éléments-là. Et, oui, on a validé que
l'adoption, elle est conforme à la coutume, oui, on a validé les éléments
d'ordre public qui sont ceux de l'adoption parce que, si ces éléments-là ne sont pas présents, on n'est pas face à
une situation d'adoption, mais évidemment ce n'est pas limitatif, parce
que la coutume pourrait aussi amener à valider d'autres éléments que ces
éléments-là. Donc, le «notamment», il est là
pour ça. Le choix d'avoir inclus le «notamment», il est là parce que l'autorité
compétente pourrait, pour assurer du
respect de la coutume, avoir constaté d'autres éléments que ces éléments de
base là, d'autres critères qui sont fondamentaux pour la nation en
question, pour la communauté.
Alors,
on fait ici référence aux exigences du législateur, qui ne sont pas des
exigences exhaustives, c'est-à-dire qu'il peut y avoir d'autres
exigences en plus des exigences du législateur. Peut-être que l'autorité
compétente...
M. Jolin-Barrette : Ça, je suis d'accord avec vous. Mais ce que je veux dire, c'est que les
exigences que vous venez spécifier, ce sont des exigences d'ordre public
que vous venez mettre dans le Code civil du Québec. Donc, nonobstant tout ce qui est inclus dans la coutume...
On prend pour acquis qu'elles le sont déjà, mais vous venez l'indiquer
de façon distincte aussi. Mais je...
Mme
Vallée : On ne peut pas... Dans le fond, là, ce qu'on indique,
c'est que, de tous les éléments que l'autorité compétente doit constater, ces éléments-là sont essentiels parce que, si
ces éléments-là ne sont pas présents, on n'est pas devant une situation d'adoption, on peut être
devant une autre situation. Parce qu'il faut quand même respecter... Ici, on
vient faire une modification du lien de
filiation. Donc, pour pouvoir venir modifier le lien de filiation d'une
personne, il faut que ces conditions-là soient présentes. Et
possiblement que, dans certaines communautés, dans certaines nations, il y aura d'autres éléments additionnels qui
devront être rencontrés pour pouvoir être reconnu comme une adoption au sein
de cette nation-là ou au sein de cette communauté-là.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Je vais laisser ça comme ça.
Le Président (M.
Ouellette) : Ça va? Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : Une petite dernière question. Le «notamment», là,
juste pour bien comprendre, c'est ça, c'est que, dans le fond, il y a l'énumération de ce qui est comme... qu'on veut
s'assurer qui soit validé, mais, pour l'autorité compétente, pour qu'il y ait une reconnaissance d'une adoption
coutumière, il pourrait y avoir d'autres éléments qui doivent être validés, donc des éléments supplémentaires
qui pourraient être différents d'une nation à une autre, mais l'autorité compétente aurait besoin de les valider parce que
sinon elle ne serait pas en respect de sa propre coutume. Mais nous, le législateur, en lien avec le Code civil, on
n'exige pas ça, on exige que la coutume soit respectée, ce qui veut dire tel,
tel élément, mais eux savent ce qu'il peut y avoir de plus en lien avec leurs
coutumes. C'est ça?
Mme
Vallée : C'est ça, parce qu'on ne peut pas... Comme je le
mentionnais tout à l'heure, le législateur ne peut pas déterminer ce qui
est...
Mme
Hivon :
Exact.
Mme Vallée :
...ce qui vient correspondre à la coutume de la nation. Donc, ça, ce sera
vraiment aux autorités compétentes,
familières avec la coutume de déterminer si on a respecté ou non la coutume. Si
on l'a respectée, ils vont l'attester
et ils vont transmettre le document, le certificat. Puis, si les éléments
essentiels ne sont pas respectés, bien, on ne sera pas devant une situation...
Peut-être que ce sera une autre situation qui sera choisie ou qui... Parce que,
l'autorité compétente, autant qu'elle
a la possibilité de dresser ce certificat-là, l'autorité compétente pourrait
dire : Je ne suis pas devant une
situation d'adoption, je ne peux pas autoriser cette adoption-là parce qu'il y
a des éléments qui ne sont pas rencontrés
et qui sont des éléments essentiels au sein de notre coutume pour qu'on
puisse considérer la démarche comme une démarche d'adoption.
Le Président (M. Ouellette) : Ça va? Est-ce que l'article... Est-ce que
l'amendement à l'article 10 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M. Ouellette) :
Est-ce que l'article 10... M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Au deuxième paragraphe, là : «...l'enfant et
l'adoptant est, sur demande de l'un d'eux...» Donc, l'enfant peut demander à
l'autorité compétente, à n'importe quel âge... peut entamer lui-même les
démarches?
Mme Vallée :
Encore une fois, c'est... Oui, mais, encore une fois, c'est suivant la...
M.
Jolin-Barrette : En fonction de la coutume.
Mme Vallée : ...en fonction
de la coutume.
M.
Jolin-Barrette : O.K.
Le Président (M.
Ouellette) : Est-ce que l'article 10 ainsi amendé est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre, lecture de l'article 7, s'il vous
plaît.
Une voix :
...
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, on va à 7. Après 10, c'est 7. Vous comprenez que...
Pour les gens qui...
Mme Vallée :
Il y a une petite gymnastique à faire.
Une voix :
...
Le Président (M. Ouellette) : Non, mais nous avons effectivement une logique. Puis vous comprenez que, puisque c'est les articles
charnières, les dispositions principales, c'est un peu plus long.
L'article 7,
pour lecture, pour le temps qu'il nous reste — puis ce n'est pas une
chanson, là. Mme la ministre. Il n'y a pas
d'amendement à l'article 7, vous allez introduire 7.1 un petit peu plus
tard, dans une autre section. Donc, lecture de l'article 7. Mme la
ministre.
Mme Vallée :
Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 152, de la section
suivante :
«Section VII.
«Des autorités
compétentes pour délivrer des certificats d'adoption coutumière autochtone.
«152.1. L'autorité
compétente pour délivrer un certificat d'adoption coutumière autochtone est une
personne ou un organe domicilié au
Québec désigné par la communauté ou la nation autochtone. Elle ne peut,
lorsqu'elle est appelée à agir, être partie à l'adoption.
«L'acte
de désignation d'une telle autorité est notifié au directeur de l'état civil
dans les 30 jours de la désignation et, le cas échéant, celui-ci
est avisé dans le même délai de la date à laquelle l'autorité cesse d'être
compétente.»
Le Président (M.
Ouellette) : Commentaires, Mme la ministre.
Mme
Vallée : Alors, ça, c'est la disposition qui institue
l'autorité qui a la compétence pour délivrer un certificat d'adoption
coutumière, pour suppléer au fait que, suivant la coutume autochtone,
l'adoption ne fait pas l'objet d'un jugement. L'autorité doit être complètement
impartiale.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon : J'essaie juste de comprendre, là. Afin de suppléer
au fait que, suivant la coutume... O.K., bien, c'est ce qu'on discutait
tantôt. Ça ne fait pas l'objet d'un jugement...
Mme Vallée :
C'est ça.
Mme
Hivon :
...c'est donc un certificat qui a un peu un parallèle avec un jugement qu'on
aurait ici. O.K.
Bon,
on revient à qui peut être une autorité compétente. Donc là, ici, on a
bien «une personne ou un organe domicilié au Québec». Une personne.
Ça veut dire que ça pourrait être un individu?
Mme
Vallée : Ça pourrait être un individu, ça pourrait être un
groupe de personnes, mais ces gens-là sont désignés par la communauté, donc, la communauté, la nation,
là, qui verra à déterminer quel est le mode... pas l'outil mais le mode...
Mme
Hivon :
Le cheminement.
Mme
Vallée : ...le véhicule le plus approprié. Puis l'important,
derrière tout ça, c'est que cette personne ou ce groupe de personnes là soient vraiment familières avec la coutume. Donc,
c'est pour ça que la communauté... Puis là on parlait, plus tôt, des groupes de sages. Est-ce que ça pourrait être un
groupe d'aînés? Est-ce que ça pourrait être... Il y a une série de possibilités. Et ce sera à la communauté
de déterminer, au sein de cette même communauté, qui sont les personnes,
soit la personne ou les personnes qui connaissent cette coutume, sont
familières avec cette coutume et sont à même d'apprécier
ce qui relève de la coutume puis ce qui ne relève pas, aussi, de la
coutume — ça
aussi, c'est bien important — pour préserver cette tradition.
Le Président (M. Ouellette) : On a d'autres questions sur l'article 7? Oui?
Donc, ça va aller à demain. Les travaux de la commission sont ajournés. On devrait normalement continuer demain après-midi. Il y a la motion
du mercredi dans laquelle nos députés de l'opposition sont impliqués et...
• (21 h 30) •
Une voix :
...
Le
Président (M. Ouellette) : ...et
la soussignée itou. Donc, probablement... Pour l'heure du début de la commission, demain, vous pourriez vérifier
au secrétariat, mais je vous dirais non officiellement qu'on devrait commencer
aux alentours de 5 heures, on devrait
faire de 5 à 6, demain après-midi.
Mais vérifiez au secrétariat avant de vous déplacer, demain, parce qu'il faut avoir les avis. Puis des
fois que M. le député de Borduas retirerait sa motion du mercredi. C'est
une farce que je fais.
Donc, les travaux de la commission sont ajournés.
Merci de votre présence.
(Fin de la séance à 21 h 31)