(Onze
heures dix-sept minutes)
Le Président (M.
Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 63, Loi
concernant la vérification de l'identité des personnes incarcérées au
moyen de leurs empreintes digitales.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président : Mme
Maltais (Taschereau) est remplacée
par M. Bérubé (Matane-Matapédia)
et Mme Roy (Montarville) est remplacée par M. Spénard (Beauce-Nord).
Remarques préliminaires
Le Président (M. Ouellette) : Dans un
premier temps, je veux souhaiter la
bienvenue au ministre, à mes collègues de Crémazie, Ungava, Argenteuil, La Prairie, mon collègue de Beauce-Nord et mon collègue de
Matane-Matapédia. Pour les
gens qui nous suivent, qui sont habitués de nous suivre dans le projet de loi n° 98, on fait un petit intermède ce matin. On reviendra à 98 dans les prochaines heures.
Mais, ce matin, on est avec le ministre
de la Sécurité publique et le projet de loi n° 63. M. le ministre,
pour vos remarques préliminaires.
M. Martin Coiteux
M.
Coiteux : Oui. Alors, merci, M. le Président. Je salue en commençant le député de
Matane-Matapédia, le député
de Beauce-Nord, bien sûr mes collègues aussi du côté ministériel, donc tous les
collègues de la Commission des institutions. Alors, je suis content de cet intermède-là dans
l'étude de l'autre projet de loi, qui va nous permettre, nous, de faire l'étude
détaillée du projet de loi n° 63,
la Loi concernant la vérification de
l'identité des personnes incarcérées au moyen de leurs empreintes
digitales.
Alors,
c'est un projet de loi qui a été déposé en octobre... présenté en
octobre 2015 par ma prédécesseure, et les membres de l'Assemblée en ont adopté le principe hier. Essentiellement, c'est un projet de loi qui va permettre au réseau correctionnel
de bénéficier d'un nouvel outil, un outil fiable et efficace qui va bonifier
les pratiques qui sont déjà en place en matière d'identification des
personnes incarcérées.
En
février 2017, on a eu de courtes consultations particulières en commission
parlementaire et à cette occasion on avait
d'ailleurs entendu le Syndicat des agents de la paix en services
correctionnels, mais on avait aussi reçu des mémoires de la Commission d'accès à l'information ainsi que
du Barreau du Québec. Et je tiens... Bon, non, je vais passer tout de
suite pour écourter ma présentation, ici.
• (11 h 20) •
Alors,
de quoi s'agit-il? D'abord, toute remise en liberté basée sur une erreur
d'identification, si rare soit-elle, peut
mettre en danger la sécurité du public. Et, justement, de telles libérations,
faites par erreur à l'hiver 2015 en raison d'une mauvaise identification, ont incité les services correctionnels à chercher de nouveaux moyens
pour bonifier leurs pratiques. Et, concrètement, ce que vient faire le projet
de loi n° 63, c'est de permettre aux services correctionnels du ministère
de la Sécurité publique de vérifier l'identité de toutes les personnes
incarcérées à l'aide de leurs empreintes digitales. Le mot «toutes» est important
ici parce que c'est l'objet de la loi.
Parce que, pour la
grande majorité des personnes incarcérées, il est déjà possible légalement de
prendre leurs empreintes digitales parce qu'elles sont soumises à la loi fédérale. Mais par contre il y a
d'autres personnes qui sont dans le
réseau correctionnel, qui, en raison de l'infraction qu'elles ont commise, de
la nature de l'infraction qu'elles ont commise, sont visées par une autre loi, qui est une loi québécoise
qui concerne le cadre juridique des technologies de l'information. Et cette loi-là ne permet pas de prendre
leurs empreintes digitales sans leur consentement.
Alors,
on se retrouve avec deux catégories de détenus, et ça serait très compliqué de
dire : Bien, celui-là, on peut le prendre, celui-là, on ne peut pas le
prendre. Ça alourdirait évidemment les procédures, de telle sorte qu'on ne les
prenait pas. Et ce que vient faire le
projet de loi, il vient de permettre, aussi dans le contexte de
la loi québécoise, de le faire sans demander le consentement des personnes détenues. Et donc ça va
permettre de mettre en place une procédure qui va être la même pour
tous, indépendamment de la loi qui s'y applique, la loi fédérale ou la loi québécoise.
Alors,
c'est ce que ça vient faire essentiellement, le projet
de loi. Ça va
donc permettre l'enregistrement d'une signature
unique à partir des empreintes digitales, qui va être comparable ensuite à la
fois à l'entrée et à la sortie du centre de détention. C'est une signature qui va être complètement effacée à la libération définitive de la personne incarcérée, parce
que c'est important pour la protection de la vie privée et des renseignements
personnels.
D'autre part,
on a l'intention de mettre ce système en place en deux phases en commençant par
les quatre plus grands établissements de détention — Montréal,
Rivière-des-Prairies, Saint-Jérôme et Québec — dans les six mois suivant l'adoption de la
loi, et ça, ça va déjà nous permettre de couvrir 70 % des personnes
incarcérées. La suite va suivre pour
le 30 % restant. Alors, c'est ça, essentiellement, que propose le projet
de loi n° 63, M. le Président. Donc, j'ai bien hâte qu'on
commence l'étude détaillée.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le ministre. Pour les gens qui nous écoutent, vous faisiez référence
à l'établissement de Montréal, mieux
connu, pour les plus jeunes de nous, comme étant l'établissement Bordeaux.
Donc, je le mentionne pour les gens
qui nous suivent, là, parce qu'on pourrait avoir une confusion des genres entre
Rivière-des-Prairies, qui pourrait être aussi à Montréal, et
l'établissement de Montréal. M. le député de Matane-Matapédia.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Merci, M. le Président. Alors, le point de départ de l'intention
gouvernementale de législation, quant à
cet enjeu, c'est la libération par erreur de quelqu'un que vous connaissez
bien, Francis Boucher, de la prison de Bordeaux. Ce n'est pas le seul cas. Il y en a eu plusieurs dans les dernières années,
des gens que des policiers, des enquêteurs ont contribué à faire condamner et qui réussissent, soit avec la complicité,
soit avec incompétence, soit avec astuce, à limiter leur détention et être en cavale. Alors, c'est
pour ça que le gouvernement intervient. D'ailleurs, il a annoncé son intention
en 2015. Maintenant, nous allons procéder à l'étude détaillée.
On aura
plusieurs questions importantes sur le coût d'opération, sur l'échéancier et
évidemment qu'est-ce qu'on a appris
des cas passés. Le rapport administratif sur soit la libération par erreur ou
l'évasion de Francis Boucher, on ne l'a toujours pas, alors, si le ministre pouvait nous trouver ça, ça nous
intéresse. Je suis sûr que ça vous intéresserait aussi, M. le Président. Alors, on va collaborer avec
toute la rigueur nécessaire pour avoir la meilleure législation possible, comme
parlementaires, lorsqu'on aura terminé
l'exercice, qu'on ait senti qu'on a contribué à une belle pièce législative qui
va être utile et qui va permettre
d'améliorer la sécurité de nos centres de détention, pour s'assurer que les
criminels qui ont été condamnés purgent leur peine tel que l'exigent nos
lois. Voilà.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. le député de Matane-Matapédia. M. le député de Beauce-Nord.
M. André Spénard
M.
Spénard : Merci, M.
le Président. Alors, M. le ministre, collègues du gouvernement, collègues du
parti d'opposition, alors nous aussi, on veut collaborer. Je pense que ça va
renforcir la sécurité des citoyens, à savoir que quelqu'un ne peut pas s'évader par simple erreur d'identification.
Alors, les empreintes digitales demeurent le moyen le plus sûr pour identifier une personne, jusqu'à
preuve du contraire. C'est un mécanisme qui est reconnu dans la loi par
toutes les sociétés.
Alors, nous
aurons évidemment... Oui, c'est Mme la députée, en 2015, qui avait apporté ce projet de loi, et qui est
repris par M. le ministre ici. C'est la
même chose qui avait été déposée par la ministre de la Sécurité publique
dans le temps. Nous aurons quelques
points d'information à éclaircir, mais nous n'avons pas l'intention de faire
languir ce projet de loi trop longtemps, étant donné qu'il a été déposé au
mois de novembre 2015, octobre 2015, je crois. Alors, il est plus que temps que ce projet de loi suive son cours
normal et soit, aussi, voté par l'Assemblée
nationale. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) : Est-ce qu'il y a d'autres collègues qui ont des remarques préliminaires? S'il n'y a pas d'autres collègues qui ont des remarques préliminaires et s'il n'y a
pas de motion préliminaire, nous allons immédiatement débuter l'étude article
par article. M. le ministre, pour la lecture de l'article 1.
Étude détaillée
M.
Coiteux : Oui. Alors, article
1 : La Loi sur le système correctionnel du Québec (chapitre S-40.1) est
modifiée par l'insertion, après l'article 18, du suivant :
«18.0.1. Malgré le premier alinéa de l'article
44 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information (chapitre C-1.1), les Services
correctionnels peuvent, sans le consentement des personnes incarcérées,
vérifier ou confirmer leur identité
au moyen d'un procédé permettant la prise de leurs empreintes digitales à
l'entrée et à la sortie d'un établissement de détention.»
Alors, voilà
la lecture et le commentaire est le suivant : c'est l'article
qui prévoit que les services correctionnels peuvent vérifier à l'entrée et à la sortie d'un établissement de détention l'identité des personnes incarcérées au moyen de
leurs empreintes digitales sans avoir à requérir leur consentement.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Ça va.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Juste une question d'information, moi :
Est-ce que ça comprend tous les détenus? «Toute personne incarcérée»
comprend tous les détenus et tous les prévenus?
Le
Président (M. Ouellette) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Oui, bien, c'est
ce qu'on a l'intention de faire. Et c'est ça, suite à l'adoption du projet de loi, qu'on va déployer dans le
réseau, dans les établissements. Maintenant, on ne pourrait pas le faire actuellement, à
moins qu'on distinguerait entre les
types de détenus, là, sujets à la loi fédérale ou sujets à la loi québécoise.
Avec ça, ici, on vient faire en sorte
que même ceux qui sont détenus en vertu d'une infraction qui n'est pas sujette
à la loi fédérale, on puisse le faire pour eux aussi, et donc qu'on
puisse le faire finalement pour tout le monde.
M.
Spénard : Étant
donné qu'on est là, ma seconde question porte sur un prévenu qu'on prend les
empreintes digitales. Maintenant, ce prévenu est reconnu innocent.
Qu'est-ce qu'on fait avec les empreintes digitales?
M.
Coiteux : Bien, dans notre
cas, le système correctionnel, là, toute personne qui va quitter définitivement
le centre, ça ne sera pas juste une sortie temporaire, on va effacer de
façon permanente les empreintes en question.
M.
Spénard :
Même pour les détenus.
M. Coiteux :
Pour tous les détenus, parce que les empreintes digitales qui pourraient devoir
être détenues autrement, pour des questions
de casier judiciaire, sont détenues par la police et non pas par les services correctionnels. Mais nous, les services correctionnels, on va
les effacer. Ils ne seront plus dans les services correctionnels. On va
les effacer.
M.
Spénard : Après...
O.K., là, je vous suis, M. le
ministre, mais j'aimerais savoir... Parce que,
lorsque les détenus sont libérés après le tiers ou le deux tiers de leur
peine, ils sont en libération conditionnelle. Est-ce qu'on garde les empreintes
jusqu'à la fin de la libération conditionnelle?
Une voix :
...
M.
Coiteux : Non, quand ils
quittent l'établissement de façon définitive. Ça ne veut pas dire qu'il n'y en a pas certains d'entre eux qui reviendront, mais ce n'est pas notre objectif.
Notre objectif, c'est qu'ils n'aient pas à revenir, et donc c'est la réhabilitation, notre objectif.
Mais, quand ils vont quitter l'établissement, on va effacer les empreintes. Ce
qui ne veut pas dire que les services
policiers, eux, ne garderont pas les empreintes qu'ils ont le droit garder en
vertu des lois, on s'entend. Donc, la
sécurité continue d'être assurée, du point de vue de l'identification des gens
qui détiennent un casier criminel.
M.
Spénard : Merci, M. le ministre. Lorsque quelqu'un est en
libération conditionnelle avec des clauses, est-ce que son dossier est
encore conservé par le centre de détention ou il passe ailleurs?
(Consultation)
M. Coiteux :
Le dossier correctionnel reste chez nous mais les empreintes sont effacées.
M.
Spénard : Les empreintes sont effacées aussitôt qu'il quitte
le centre de détention, même s'il est en libération conditionnelle, les
empreintes sont effacées.
• (11 h 30) •
M. Coiteux :
Oui, parce que le but du projet de loi, ici, sur les empreintes, c'est de
permettre l'identification à l'entrée et à
la sortie. Donc, c'est quand ils entrent et qu'ils reviennent, qu'ils entrent,
qu'ils reviennent, les prévenus, ils vont en cour, ils reviennent, bon.
Là, oui. Mais, quand ils quittent le centre, ils ne sont plus détenus, on
efface.
M.
Spénard :
O.K. Merci.
Le Président (M. Ouellette) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur
l'article 1? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que
l'article 1 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M.
Ouellette) : Adopté. M. le ministre, lecture de l'article 2.
M.
Coiteux : Article 2, M. le Président, donc : L'article 18.1
de cette loi est modifié par l'ajout, à la fin, de l'alinéa
suivant :
«Malgré
le premier alinéa, les Services correctionnels ne peuvent communiquer à un
corps de police les empreintes digitales
d'une personne incarcérée prises conformément à l'article 18.0.1 que si ce
renseignement est nécessaire aux fins d'une poursuite pour une
infraction à une loi applicable au Québec.»
L'article
prévoit dans quel cas les services correctionnels peuvent communiquer à un
corps de police les empreintes digitales d'une personne incarcérée.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Oui, M. le Président. Est-ce qu'il est prévu que
ces empreintes digitales peuvent circuler entre différents centres de
détention — québécois
et/ou fédéral — pour
les peines de deux ans et plus?
M. Coiteux :
Les systèmes vont communiquer, donc oui.
M.
Bérubé :
Dans le système québécois, assurément.
M. Coiteux :
Dans le système québécois des établissements de détention.
M.
Bérubé :
Sachant que ce projet de loi existe, est-ce que les pénitenciers fédéraux vous
ont demandé d'avoir accès également à votre banque pour des prévenus, des
détenus qui pourraient éventuellement transférer dans des centres fédéraux?
M. Coiteux :
Non, ils n'ont pas fait une telle demande.
M.
Bérubé :
Et, s'il y avait une telle demande, quelle serait votre réponse?
(Consultation)
M.
Coiteux : Honnêtement, on n'aurait certainement pas une réponse
positive immédiate, de toute manière, puisque les lois actuelles ne le
permettraient pas.
M.
Bérubé : Est-ce qu'il y a eu des appels d'offres qui ont été
lancés ou préparés pour, je dirais, l'appareillage, l'outillage
nécessaire pour la prise des empreintes?
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M. Coiteux :
On a déjà acheté les équipements, M. le député.
M.
Bérubé :
Vous avez été un peu présomptueux.
M.
Coiteux : Oui, peut-être, mais les équipements ont déjà été acquis.
D'ailleurs, les coûts ultimes vont être moins élevés que ce qui avait
été prévu initialement.
M.
Bérubé :
On a acheté ça neuf?
M.
Coiteux : Bien, oui, on avait prévu des coûts initiaux, hein,
évidemment, de 250 000 $, initialement, qu'on prévoyait. Puis
finalement ça va être — pour
la phase I, j'entends — 125 000 $.
M.
Bérubé :
Il y a eu un appel d'offres là-dessus?
M. Coiteux :
Les achats étaient en bas des seuils d'appel d'offres.
M.
Bérubé :
Vous voyez, on y revient, hein? Quelle est l'entreprise qui a obtenu le
contrat?
M. Coiteux :
Il faut que je pose la question, là, je ne serais pas capable de vous répondre
immédiatement, l'entreprise qui a fourni les équipements. Si vous me donnez
quelques petites secondes.
(Consultation)
M. Coiteux :
Crossmatch. Crossmatch.
M.
Bérubé :
Une entreprise du Québec?
Une voix :
...non...
M.
Bérubé :
...tant que ce n'est pas BCIA.
Le Président (M.
Ouellette) : Ne bougez pas. Ne bougez pas, là, on va chercher la
réponse, M. le député de Matane-Matapédia. M. le ministre.
M. Coiteux :
...internationale. Ce n'est pas une entreprise du Québec.
M.
Bérubé : Comme vous avez déjà prévu l'achat de l'équipement,
vous avez sûrement en tête un échéancier. Vous avez parlé des priorités, les centres de détention qui sont
prioritaires. Ça ressemblerait à quoi, l'échéancier global de mise en
oeuvre de ce système?
M.
Coiteux : Dans les six prochains mois, en ce qui concerne les quatre
principaux établissements. Et puis, pour la suite des choses, sur une
période maximale de trois ans.
M.
Bérubé : D'accord.
On a le coût, on a l'échéancier, on a qui a fourni.
Une voix : ...
M.
Bérubé :
Oui, est-ce que le logiciel, ça vient avec la machine ou c'est à part? Parce
qu'il y a, entre la machine et le logiciel qui permet de... C'est des
données qui sont, je dirais, sensibles.
M. Coiteux : Il a été développé à
l'interne, le logiciel.
M.
Bérubé : Au
ministère de la Sécurité publique, avec vos services. D'accord. Ça va, M. le
Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Les quatre premiers centres, c'est dans le cadre du projet pilote, et après ça
c'est sur une période de trois ans pour les installer partout ailleurs.
C'est ce que j'ai compris.
M.
Coiteux : Oui, bien, c'est un petit peu... c'est plus qu'un projet
pilote, là, c'est un déploiement en deux phases, en fait, parce qu'on n'a pas l'intention juste de tester pour voir,
c'est vraiment... on va d'abord dans les principaux centres de détention, on va couvrir 70 % de
l'univers, puis ensuite, graduellement, on a différents centres de détention,
mais on a aussi des quartiers
cellulaires, on a... Donc, on a des réalités différentes dans des plus petits
centres que dans des quartiers cellulaires. C'est pour ça que ça va se
faire graduellement, pour que ça se fasse correctement partout.
Le
Président (M. Ouellette) :
Et l'installation informatique que M. le député de Matane-Matapédia
parlait va se faire aussi graduellement ou elle va se faire, dans le
cadre de la première phase, partout?
M.
Coiteux : Bien, ça doit se faire pour que ça soit fonctionnel partout
où ça va être mis en service. Alors, ça va d'abord être mis en service dans les
quatre établissements. Ça prend à la fois le matériel mécanique, là, je dirais,
si je peux m'exprimer ainsi, pour la
prise d'empreintes, mais le logiciel aussi. Il faut que ça soit ensemble, en
même temps, dans la phase des six mois.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Beauce-Nord.
M.
Spénard :
Merci, M. le Président. Première phase d'ici six mois et les autres
établissements de détention d'ici trois ans. Juste une petite question
qui me vient à l'esprit : L'établissement de détention de Puvirnituq,
c'est d'ici trois ans aussi?
M.
Coiteux : Écoutez, on a l'intention... On est en contact avec l'ARK,
l'Administration régionale Kativik. On discute
des différentes solutions possibles concernant Puvirnituq. On travaille
là-dessus avec l'Administration régionale Kativik. On ne le fait pas seul, comme ministère de la Sécurité
publique, ce sont nos partenaires. Et j'ai bon espoir d'être capable
d'annoncer bientôt une solution qui aura fait l'assentiment des deux parties.
M.
Spénard : O.K.
Merci. Pas d'autre question, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
S'il n'y a pas d'autre question, d'autre commentaire à l'article 2, est-ce que
l'article 2 est adopté? Adopté. Article 3. M. le ministre.
M.
Coiteux : Oui, M. le président. Article 3 : Les Services
correctionnels du ministère de la Sécurité publique peuvent, sans le consentement des personnes
incarcérées qui leur ont été confiées avant le (indiquer ici la date de la
sanction de la présente loi), prendre les empreintes digitales de ces
personnes aux fins de l'application de l'article 18.0.1 de la Loi sur le
système correctionnel du Québec (chapitre S-40.1), édicté par l'article 1 de la
présente loi.
Le Président (M. Ouellette) : Vos
commentaires.
M.
Coiteux : On comprendra que c'est pour permettre de prendre les
empreintes sans le consentement des personnes qui sont déjà incarcérées,
pour que ça puisse s'appliquer à tous les détenus.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Passe.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Pas de
question, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Donc, étant donné que ça semble rejoindre l'assentiment
général, est-ce que l'article 3 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Ouellette) :
Adopté. Article 4, M. le ministre, ce qui est le plus compliqué du projet de
loi.
M.
Coiteux : C'est toujours le
plus compliqué, M. le Président, ce dernier article, puisqu'il clôt l'exercice
normalement, sauf les titres, etc. Alors :
4. La présente loi entre en vigueur le (indiquer
ici la date de la sanction de la présente loi).
Le Président (M. Ouellette) : Bon.
Et c'est là que les commentaires de M. le député de Matane-Matapédia débutent.
M.
Bérubé :
Vous connaissez mon intérêt pour ces questions, M. le Président. J'ai évoqué le
rapport administratif sur la libération par erreur de Francis Boucher.
Est-ce que le ministre pourrait le déposer à la commission? Ça nous permettrait
d'en savoir davantage sur ce qu'on veut réparer.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
ministre.
M. Coiteux : Malheureusement, je ne
peux pas faire ça.
M.
Bérubé : Pour
quelle raison?
M.
Coiteux : Bien, il y a des questions de sécurité. Il y a des questions...
Donc, il faudra procéder par un autre véhicule, si jamais on veut avoir
une réponse plus formelle. Mais il y a des questions de sécurité qui s'imposent
ici.
M.
Bérubé :
Le véhicule, c'est l'accès à l'information? On connaît les réponses. Les
réponses habituelles. Je suis déçu,
parce que ça nous permettrait de comprendre pourquoi on fait ça, c'est quoi,
notre point de départ. Et le renseignement nominatif, le seul qui existe, là, il est déjà connu, c'est Francis
Boucher. D'ailleurs, je suis assez étonné qu'on ne l'ait pas reconnu lorsqu'il est sorti. Il est assez
connu dans cette prison. C'est un rapport qui est important et qui pourrait
nous permettre de connaître ça, puis
aussi pour les collègues du ministre aussi qui prennent leur temps de
législateur pour venir travailler sur
cette loi-là. Je comprends que le ministre ne trouve pas pertinent de nous le
rendre public. Ça sera ma déception. Il
peut toujours changer d'idée. Il ne me le donnera pas davantage à l'étude des
crédits, je suis assez convaincu de cela. Mais il m'apparaît que, pour que ça soit complet, pour que notre
collaboration et la confiance soient totales envers ce projet de loi là, il faut comprendre, il faut connaître
ce rapport-là. Et, sans ce rapport-là, ça change les choses un peu, pour nous.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
ministre.
M.
Coiteux : Bien, j'ai déjà expliqué pourquoi. J'entends la déception.
Je ne peux malheureusement pas y trouver de solution...
Le
Président (M. Ouellette) :
Bien, est-ce qu'il y a d'autres commentaires, M. le député de Matane-Matapédia?
M.
Bérubé :
Est-ce qu'il y a un code de sécurité? Est-ce qu'il y a une habilitation qui est
marquée par ce rapport-là? Si oui, laquelle?
• (11 h 40) •
M.
Coiteux : Je suis obligé de vous référer à la loi sur l'accès à l'information pour chercher un
autre véhicule pour qu'on puisse répondre, parce qu'il y a des enjeux...
M.
Bérubé : ...l'autorité ultime, c'est le ministre.
Le ministre peut décider lui-même de nous épargner d'une
série d'intermédiaires et le déposer,
et ainsi contribuer à ce qu'on comprenne mieux une pièce législative. Parce que
lui et sa prédécesseure connaissent
l'objet du rapport et son contenu, mais pas nous. Alors, on va adopter une
législation sans savoir ce qui s'est véritablement
passé dans l'affaire Francis Boucher et dans les autres qui n'ont pas eu
nécessairement de rapport administratif.
Alors, je
trouve ça intéressant. Je ne crois pas que ça va donner des trucs aux
criminels, ils en ont déjà plusieurs. Mais,
dans ce cas-là, ça pourrait nous permettre de comprendre, par exemple :
Est-ce qu'il y a eu complicité à l'intérieur? S'il y a eu complicité,
est-ce qu'il y a eu condamnation de gens qui auraient contribué? Est-ce que
c'est une évasion ou est-ce qu'on a juste ouvert la porte et il n'avait rien
prévu puis il est juste sorti? Ça, là, ça fait toute la différence. Est-ce que c'est une erreur de bonne foi? Est-ce
que c'est une erreur liée à l'incompétence? Est-ce que c'est une évasion?
Est-ce qu'il y a des employés du centre de
détention de Bordeaux qui ont contribué à son évasion? Moi, je n'ai pas de
réponse à ça.
En tout cas,
sa prédécesseure, je veux l'assurer qu'elle ne m'a jamais donné cette
réponse-là, je m'en souviendrais. Et
lui, qui fait preuve davantage d'ouverture à bien des égards, je veux le saluer
d'ailleurs là-dessus, je suis convaincu qu'il pourrait
faire en sorte de conclure l'étude de ce projet de loi là en nous donnant
l'information qu'il nous manque dans ce casse-tête.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le ministre.
M. Coiteux :
Malheureusement, ce ne serait pas l'attitude responsable de ma part, compte
tenu des enjeux de sécurité.
M.
Bérubé : Donc, les Québécois ne pourront jamais savoir
pourquoi un des criminels... à tout le moins le fils d'un des criminels les plus célèbres du Québec a
été libéré par erreur. On ne saura jamais pourquoi. Ça m'apparaît une question d'intérêt public, M. le Président, et il
m'apparaît que c'est mon devoir de poser cette question. Il m'apparaît que
ce serait le devoir également du ministre de
rendre public ce rapport. Ce n'est pas acceptable, selon nous, ce sera mon
commentaire final. Et on pourra suivre la
filière habituelle, mais on s'attend à la réponse du ministère de la Sécurité
publique.
Vous
savez d'ailleurs que de... à moins que quelqu'un l'ait, à quelque part, et le
rende public, mais vous savez que...
D'ailleurs, il faudra se poser la question, au ministère de la Sécurité
publique et à la Sûreté du Québec : c'est les champions du refus des questions d'accès à
l'information, là. Alors, dans bien des cas, on prétexte qu'il y a des enjeux
de sécurité. Je pense qu'ils ont des secrets
ou des erreurs qu'on veut cacher, parce que, dans certains cas, ça exposerait
l'incompétence de certains. Personne n'est à l'abri de ça, M. le Président.
Merci.
Le Président (M. Ouellette) : Je suis assez bien placé, M. le député de
Matane-Matapédia, pour vous dire que les enjeux de sécurité sont très
réels dans les organismes. Et des fois les perceptions que les gens peuvent
avoir ne correspondent pas toujours à la réalité.
M.
Bérubé :
C'est pour ça qu'il faut être factuel, M. le Président, comme vous le dites si souvent.
Le Président (M. Ouellette) : Je suis d'accord, et je vous dirai que, dans ce
cas-là, je suis d'accord avec la position du ministre. Les enjeux de
sécurité... le premier devoir du ministre de la Sécurité publique, c'est
d'assurer la sécurité publique du Québec.
M.
Bérubé :
Oui, mais, dans ce cas-là, vous seriez le premier à vouloir le lire, je suis
convaincu.
Le Président (M.
Ouellette) : Le lire, c'est une chose; le rendre public, c'est autre
chose.
M.
Bérubé :
«Yes!» Vous avez compris mon argumentaire.
Le Président (M. Ouellette) : J'ai compris votre argument, et je pense que M.
le ministre a compris votre argument aussi. Et vous aurez sûrement une
autre chance, à la période des crédits, lorsque...
M. Coiteux :
...tout le monde a entendu mes propres arguments, donc...
Le Président (M.
Ouellette) : C'est ça...
Une voix :
...
M. Coiteux :
...le public saura faire la part des choses.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, comme
finalité à ce projet de loi, moi aussi j'abonde un peu dans le sens de mon confrère de Matane-Matapédia,
parce que ce projet de loi vient strictement répondre à l'évasion de
Francis Boucher, évasion ou... Et on ne sait pas ce qui s'est passé là-dedans.
Est-ce
qu'il y a eu de l'aide de l'intérieur? Est-ce que c'est une évasion? Est-ce que
c'est simplement un manque d'information sur le prisonnier? On ne le
sait vraiment pas. Alors, ça aurait été intéressant de savoir, étant donné que le projet de loi, il est venu tout de suite après
son évasion, pratiquement, là, par madame l'ancienne ministre de la Sécurité
publique, il aurait été agréable de... peut-être pas agréable, mais au moins de
le savoir, s'il y avait de l'aide de l'intérieur, si ce n'est pas... Est-ce que ce projet de loi là
répond à son évasion stricte? Je ne le sais pas du tout. On ne le saura jamais.
Mais ça aurait été intéressant de connaître
les faits de la libération par erreur, qu'on nous a toujours dit, de M. Francis
Boucher, ce que je ne crois pas, M. le Président, en passant.
Par
contre, ça va finir... je vais conclure avec ça, je pense que c'est un projet
de loi qui a déjà trop tardé et qui devrait être mis en oeuvre assez rapidement. Alors, nous appuierons ce projet de
loi et nous appuyons aussi les idées de M. le ministre.
Le Président (M. Ouellette) : Vous savez que vous allez quand même avoir le
droit à des remarques finales, là, après l'adoption de l'article 4.
Donc, s'il n'y a pas d'autre commentaire, est-ce que l'article 4 est adopté?
Des voix : ...
Remarques
finales
Le
Président (M. Ouellette) :
Il est adopté. Donc, on est rendus à l'étape finale des remarques finales,
effectivement. M. le ministre, je ne sais pas si vous avez des remarques
finales.
M. Martin Coiteux
M. Coiteux : Oh, ça va être très
bref. Notamment, je pense qu'on vient de se doter d'un nouvel outil qui va minimiser, parce qu'on aura un meilleur outil
d'identification des détenus à l'entrée et à la sortie, qui va minimiser les
risques de libération par erreur. Donc, on a posé un geste ensemble,
aujourd'hui, pour renforcer davantage la sécurité publique, alors j'en suis
tout à fait heureux.
Le
Président (M. Ouellette) :
Et, comme j'étais très heureux de vous donner la parole pour les remarques
finales, j'ai juste sauté une
étape : on doit aussi adopter le titre du projet de loi. Et est-ce que le
titre du projet de loi est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Ouellette) : Est-ce
qu'on a besoin d'une motion de...
Une voix : ...
Le
Président (M. Ouellette) :
...pour les références? Bon, bien, j'ai besoin d'une motion que, M. le
ministre, vous me faites pour les références. Cette motion-là est
adoptée aussi.
Et on n'a pas besoin de renumérotation? Tout va
bien. On est rendus maintenant à l'étape de M. le député de Matane-Matapédia
pour ses remarques finales.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Ce qui a mené à la libération par erreur de Francis Boucher, ou à son évasion,
c'est une succession d'erreurs, et on apprend toujours de ses erreurs. Et
manifestement le seul qui aura accès à ce rapport administratif portant sur Francis Boucher, c'est le ministre. Alors, les
agents correctionnels, les intervenants, l'opposition, le public ne sauront
pas qui sont les responsables. Il y a une
impunité totale. La porte s'est ouverte, personne ne surveillait la porte, il
est sorti.
Est-ce que
quelqu'un a été sanctionné? On ne le sait pas. Est-ce que quelqu'un a commis
une erreur? On ne le sait pas. Est-ce
qu'il y a eu de la complicité? On ne le sait pas. Ce n'est pas une mince
affaire. Francis Boucher, ma prétention, je n'ai pas votre connaissance de ce dossier, M. le Président, mais
c'est quelqu'un qui est facilement identifiable dans un centre de
détention, même s'il est surpeuplé, celui de Bordeaux — c'est
un autre enjeu.
C'était une
question fondamentale. Pourquoi on fait une législation? Parce qu'on veut
améliorer ou corriger une situation.
On veut corriger quoi? Pourquoi c'est arrivé? Moi, je sais que c'est parce que
Francis Boucher a été libéré par erreur
qu'il y a une législation. C'est pour ça, c'était ça, la réponse
gouvernementale, mais on ne connaît pas le point de départ, on ne
connaît pas le rapport.
Le ministre ne veut pas le rendre public, ne
m'indique pas pour quelle raison. Il n'y a pas de renseignements nominatifs autre que qui est coupable ou pas ou qui
était au dossier. Il m'apparaît qu'il manque là à son devoir de transparence
quant à ce dossier-là. Alors, je reviens à la charge. Je suis convaincu qu'il
est d'intérêt public de rendre public ce
rapport. Et, s'il y a des sanctions... Pourquoi on le sait, par exemple,
pourquoi on a eu un rapport dans le cas du centre de détention
d'Orsainville? Puis on en sait pas mal, même s'il y a choses caviardées.
Pourquoi qu'il n'y a absolument rien dans le
cas de Francis Boucher? On essaie de... Qu'est-ce qu'on ne veut pas rendre
public? Je vais le dire comme ça. Je me questionne. Je vais rester sur
cette interrogation-là, malheureusement.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de Matane-Matapédia. À tout seigneur tout honneur, M. le
député de Beauce-Nord, terminer les remarques finales.
M.
Spénard :
Alors, M. le Président, j'ai déjà conclu tout à l'heure lors de l'article 4,
alors je n'ai rien à ajouter, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : Bien,
merci, chers collègues, de votre collaboration.
La commission, ayant accompli son mandat,
suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes où elle poursuivra un autre mandat, l'étude détaillée du
projet de loi n° 98, ici même au salon rouge, cet après-midi à
15 heures.
(Fin de la séance à 11 h 49)