(Neuf heures trente-quatre minutes)
Le
Président (M. Ouellette) : S'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant
principalement l'admission aux professions et la gouvernance du système
professionnel.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par Mme Lamarre
(Taillon) et Mme Maltais (Taschereau) est remplacée par Mme Jean
(Chicoutimi).
Auditions (suite)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
recevons cet avant-midi les organismes suivants : l'Ordre des géologues du Québec, la Chambre des huissiers de justice du
Québec, l'Ordre des hygiénistes dentaires du Québec et l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec.
Je souhaite la bienvenue à notre premier groupe,
qui est l'Ordre des géologues du Québec, et à son président, M. Robert Wares. M. Wares, vous avez
10 minutes pour faire votre présentation, et après il va y avoir un
échange avec Mme la ministre et les
porte-parole des deux oppositions. Vous allez nous présenter la personne qui
vous accompagne aussi. À vous la parole.
Ordre des géologues du
Québec (OGQ)
M. Wares (Robert) : Parfait. Merci
beaucoup. Alors, salutations à la ministre de la Justice, aux députés
représentant les deux oppositions et à tous les élus membres de la commission.
Un petit
rappel que des communications faites par l'Ordre des géologues auprès de la
ministre et de l'OPQ ont été
transmises à la commission. Plusieurs de ces communications, malheureusement,
ont demeuré sans réponse, et, à défaut de réponse à ces questions, nous ne pouvons évaluer tous les impacts réels
des nombreuses dispositions prévues dans le projet de loi. J'aimerais souligner que le CIQ a fait
divers commentaires et présenté un mémoire avec lequel l'Ordre des
géologues est largement solidaire.
Alors, quelques généralités. L'Ordre des
géologues du Québec a pour mission la protection du public par l'encadrement de l'exercice des géologues et la
surveillance de l'exercice de la géologie. Cet exercice vise à concourir
à découvrir et quantifier les ressources
minérales, hydrauliques et d'hydrocarbures du sous-sol québécois et à
améliorer l'environnement humain et la sécurité du public dans le cadre de
l'implantation d'ouvrages et d'aménagements, de la prévention de risques
naturels, tels que les glissements de terrain, et la protection et la
réhabilitation des terrains contaminés et de l'eau souterraine.
D'ordre
général, il nous semble regrettable que plusieurs des modifications proposées
par le projet de loi n° 98 sont
de nature superficielle et toucheraient tous les ordres, alors que plusieurs
des problèmes à corriger ne concernent qu'un petit nombre d'ordres. Nous craignons un alourdissement du processus,
qui apportera peu d'amélioration substantielle au fonctionnement du système professionnel et qui
taxera de façon significative la gestion des ordres, et plus
particulièrement les petits ordres, aux ressources limitées. Nous constatons
aussi que les modifications proposées ne s'attaquent pas aux principaux
problèmes que nous percevons dans le système professionnel.
Alors, quelques remarques spécifiques au contenu
du projet de loi.
Premièrement,
le projet de loi donne une place importante à l'amélioration de la gouvernance
des ordres. Un tel objectif est
louable. Par contre, l'Ordre des géologues a consacré des efforts considérables
et réels pour assurer une saine gouvernance
et se croit en bonne position à ce sujet. Si la résultante de ces modifications
proposées est de nous imposer tout un travail pour rester au même point,
ce sera un abus de ressources limitées pour un bénéfice négligeable.
Deuxièmement,
certaines propositions de modification du Code des professions ne méritent pas
d'être adoptées, en particulier
l'ajout d'un administrateur soi-disant jeune aux conseils d'administration.
Aucune règle de bonne gouvernance ne
justifie l'ajout d'un administrateur sur la simple base de son âge. Au
contraire, l'expérience et la compétence doivent être recherchées, et le rôle d'administrateur élu
requiert un bagage de connaissances et une maturité professionnelle qui
ne sont pas attendus d'un professionnel en début de carrière.
Il est
pertinent d'ajouter que les géologues en début de carrière font face à de
nombreux défis, dont la précarité d'emploi
et absences prolongées de leur domicile. Ils doivent donc consacrer leurs
efforts à leur carrière et leur famille.
De
plus, les employeurs sont peu enclins à accorder des libérations aux jeunes
employés, alors que les administrateurs de l'Ordre des géologues sont
tous des bénévoles.
Le conseil
d'administration d'un ordre n'est tout simplement pas une école. Et j'ajoute que
la présence de jeunes administrateurs au sein du conseil
d'administration de certains ordres n'a pas permis d'éviter les problèmes
vécus.
• (9 h 40) •
Troisièmement,
une autre modification du Code des professions qui ne mérite pas d'être adoptée
est l'extension du rôle et des
pouvoirs du commissaire aux plaintes à l'admission. Cette extension proposée des pouvoirs du
commissaire n'est justifiée par aucune analyse, le projet de loi n'est
accompagné d'aucune description claire des objectifs de cette extension, et, avec le faible nombre de plaintes qu'il y a
eu à traiter depuis quelques années, on ne sait vraiment
pas quel problème on cherche à
corriger. L'absence de justification claire est d'autant plus troublante que le
projet ne prévoit aucune balise au champ d'action et que le commissaire
n'a effectivement aucun compte à rendre.
Enfin, la question
de l'intégration des personnes immigrantes est mal abordée dans le projet de loi. Pour nous limiter à notre
expérience, l'Ordre des géologues a délivré des permis ou accordé des
équivalences à de nombreuses personnes issues d'autres pays qui par la
suite ont eu beaucoup de difficultés à intégrer le marché du travail. Les
employeurs, évidemment, préfèrent souvent des personnes qui sont
familières avec les façons de faire et la culture locales ou, comme nous l'avons même vu chez certains ministères,
reprennent l'évaluation des candidats en faisant fi de la reconnaissance
des qualifications liées à la délivrance d'un permis professionnel.
Quoi qu'il en
soit, depuis trois ans, les emplois en géologie des ressources ont
substantiellement diminué, de
sorte que même les détenteurs de diplômes reconnus ont de la difficulté
à se placer. Nous comprenons que cette situation
n'est pas unique aux géologues et que le marché
de l'emploi peine à absorber tous les diplômés des universités
québécoises.
En outre,
dans le dernier rapport du commissaire, on observe que la plupart des problèmes
qu'il constate dans l'accès aux professions relèvent des difficultés
d'accès aux formations complémentaires sous la responsabilité des institutions d'enseignement. Alors, on se pose la question :
Que pourra faire le commissaire face au ministère de l'Éducation et aux universités et cégeps?
L'Ordre des
géologues est donc de l'opinion que le projet
de loi n° 98 n'aborde pas les
problèmes majeurs qui affectent le
système professionnel, et nous n'avons connaissance d'aucun projet en ce sens. J'aborderais le sujet
brièvement en soulignant quelques-uns
de ces problèmes, dont quatre problèmes majeurs, soit la lenteur du processus
législatif, la désuétude
des divers éléments du Code des
professions, l'incohérence et
faiblesse des sanctions ou décisions disciplinaires d'un ordre à l'autre
et la lenteur du traitement judiciaire des dossiers disciplinaires.
L'Ordre des géologues a été créé en 2001 et est
donc relativement jeune. C'est un ordre de petite taille, et ses ressources
sont limitées. Néanmoins, nous croyons pouvoir être fiers de notre organisation
et du chemin parcouru dans la mise sur pied
d'un ordre professionnel. Nous sommes cependant inquiets de pouvoir maintenir la pertinence
de notre encadrement professionnel si
la modernisation de notre loi ainsi que le Code des professions ne
procède pas avec diligence et efficience. Je vous remercie de votre
attention.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Wares. Ça a passé très vite. Il vous restait encore deux
minutes, qu'on va prendre dans la période d'échange avec les parlementaires.
Mme la ministre.
Mme Vallée : Alors, merci, M.
Wares et M. Prud'homme. Merci de votre présentation.
Vous semblez...
bon, vous vous objectez aux modifications prévues au projet de loi n° 98, notamment
en raison du fait que votre ordre est
un petit ordre. Vous mentionnez que... Ça semble vous préoccuper beaucoup. Pourtant, au cours des consultations précédentes, on a quand même
plusieurs petits ordres, notamment les chimistes, qui se sont présentés devant nous et qui nous ont dit avoir déjà, d'ores
et déjà mis en place le processus, les grands principes d'encadrement
prévus, et puis tout ça s'était fait de façon quand même assez correcte, et
saluaient cette volonté d'encadrement.
Donc,
j'aimerais... Puis je comprends, là, que, depuis sa création, vous avez eu, au
sein de votre ordre, un secrétaire général
qui a aussi agi comme directeur général, donc il y a eu des fonctions qui ont
été cumulées par l'un et par l'autre. J'aimerais ça vous entendre parler
de votre expérience des 15 dernières années quant à la gouvernance, la
façon dont l'encadrement de l'Ordre des
géologues s'est fait, là, à l'interne, au sein du conseil d'administration, les
rôles que chacun a pu jouer et la
façon dont vous avez vécu, vous, vos 15 premières années d'existence avec
la gouvernance qui est en place.
Le Président (M. Ouellette) : M.
Wares.
M. Wares (Robert) : Eh bien, évidemment,
quand je souligne le fait que les petits ordres ont des ressources limitées, c'est une réalité. On a seulement...
on a moins de 1 000 membres, alors les ressources financières sont toujours
très serrées, alors ce qui mène, évidemment, à certaines, je dirais, compressions dans la structure administrative, et c'est pourquoi qu'on a un secrétaire qui agit aussi
comme directeur général. On a seulement deux employés à temps plein, et
tous les membres du conseil sont des bénévoles.
Alors, honnêtement, si on se base strictement
sur les principes de gouvernance, je ne perçois aucun problème au sein de notre ordre. C'est un ordre qui est
très efficace, qui travaille avec, encore une fois, des ressources limitées,
et je crois que qu'est-ce qu'on accomplit
depuis 15 ans est, je dirais, presque miraculeux, compte tenu qu'on est
seulement vraiment trois qui fait presque tout le travail. Et on est rendus au
point, maintenant, où est-ce que presque tous nos règlements ont été adoptés.
Alors, la prochaine phase, pour l'ordre, c'est un processus d'amélioration qui
va viser, entre autres... Un de nos grands projets, c'est Projet compétences,
qui va évaluer les candidats plus sur une base de compétences que sur une base d'éducation et d'expérience. Et,
deuxièmement, l'encadrement des stagiaires, de notre point de vue, on a fait des
grands pas dans cette direction, depuis deux ans, et, bien, selon notre D.G.,
on est des pionniers dans la
structure, la façon qu'on encadre nos stagiaires. On a un système, en fait, qui
est beaucoup plus, je crois, exigeant et serré que les autres ordres
professionnels.
Mme Vallée : Qu'est-ce qui
vous distingue, justement, des autres ordres professionnels, lorsque vous
dites : Notre système est plus serré, est plus rigoureux?
M. Wares (Robert) : Le processus, le
nombre d'années est plus long. Et, deuxièmement, notre processus d'encadrement, avec un mentor, est plus rigoureux,
le suivi est fait de très, très près. Maintenant, on est dans un
processus, maintenant, si vous voulez,
d'entraînement, où est-ce que le stagiaire doit se trouver un mentor, et qui
doit le suivre de près, avec un système de rapport qui est soumis à
l'ordre de façon régulière.
Mme Vallée :
Vous vous objectez à la notion qui introduit qu'un membre du conseil
d'administration ait moins de 10 ans
de pratique; pas une question d'âge, là, mais moins de 10 ans de pratique.
Donc, au cours des 15 dernières années, est-ce que vous avez eu des gens
qui ont siégé au conseil d'administration qui avaient moins de 10 ans de
pratique?
M. Wares (Robert) : Non.
Mme Vallée :
Vous ne croyez pas qu'un jeune professionnel, une jeune professionnelle avec
moins de 10 ans de pratique peut
apporter, autour de la table du conseil d'administration, de nouvelles idées,
de nouvelles façons de voir et d'encadrer
les enjeux de protection du public? Vous ne croyez pas que ça ajoute à la
qualité du conseil d'administration, d'avoir des gens avec une vision
nouvelle, qui ont peut-être vécu une expérience, certes, différente au niveau professionnel mais qui n'est pas pour autant à
mettre de côté? Parce que je regarde : entre un jeune de moins de 10
ans et un membre du public, le membre du
public n'a pas non plus l'expérience de la pratique professionnelle. Donc, je
comprends difficilement, je dois vous
avouer, là, cette objection à ce que des jeunes intègrent... De jeunes ou de
moins jeunes, parce qu'on a parfois
des gens qui font un retour aux études, qui intègrent une profession, donc ce
n'est pas une question d'âge, c'est vraiment une question d'expérience,
de pratique. Je suis vraiment étonnée de votre objection à ce critère qui est
introduit dans le projet de loi.
M. Wares
(Robert) : Bien, c'est parce que c'est une question, je crois...
Qu'est-ce que vous visez peut-être, c'est un équilibre entre des jeunes, qui apportent des nouvelles idées mais
qui manquent d'expérience, et, à un autre extrême, les dinosaures, qui
sont implantés dans leurs façons de penser et de fonctionner et qui sont là
depuis 50 ans. Alors, il y a deux extrêmes.
Mme Vallée : Oui, puis on a
des gens... Ce n'est pas le temps de pratique qui fait que quelqu'un est plus
compétent, hein?
M. Wares (Robert) : Absolument pas.
J'en connais beaucoup, d'imbéciles...
• (9 h 50) •
Mme Vallée :
Il y a des gens qui ont 30 ans de
pratique et qui n'ont pas la compétence requise, alors qu'on a des gens qui ont cinq ans de pratique et qui sont extrêmement compétents. Je vois mon collègue de Borduas sourire, mais
c'est vrai, là, le nombre d'années de pratique, rien à voir...
Le Président (M. Ouellette) :
Prêtez-lui pas d'intentions, ne prêtez... Vous n'avez pas le droit de lui
prêter d'intentions, Mme la ministre.
Des voix : Ha, ha, ha!
Mme Vallée : Mais je le vois
sourire. Je commence à connaître son non-verbal.
M.
Prud'homme (François) : Je
pense que... Pour venir peut-être ajouter quelque
chose, moi, je suis un nouveau
membre du conseil d'administration, donc
je suis nouveau, puis je représente un peu le côté environnement de
l'Ordre des géologues, si on veut, là, je
travaille en environnement, puis, je pense aussi, cette réticence-là vient
du fait qu'on a de la misère à trouver des administrateurs, et tout ça.
Puis notre travail à nous est un travail de terrain, au début de notre carrière, on a un encadrement des stagiaires qui
est très grand, donc tu restes stagiaire longtemps. Il faut que tu
travailles sur le terrain, alors tu vas loin
de chez vous. Tu construis ta famille. Quand on est jeune, on construit notre
famille. Donc, d'avoir l'obligation
de mettre un jeune, on va avoir de la misère à trouver quelqu'un qui n'est pas...
un non-employé ou quelque chose comme
ça à venir sur le conseil d'administration de l'Ordre des géologues, puisqu'on
a un type de travail qui est beaucoup
éloigné de notre résidence lorsqu'on débute. C'est un peu ça. Donc, c'est plus
contre l'obligation, pas contre le principe, je pense, en général, dans
l'ordre.
M. Wares
(Robert) : Bien, ça, j'allais aborder le sujet. Il y a le côté...
justement le principe, mais, comme François le souligne, la réalité de notre pratique, c'est justement ça, c'est que
les jeunes ne sont tout simplement pas disponibles. Déjà, puisque c'est
du travail bénévole, j'avoue qu'on a beaucoup de misère à attirer des membres
pour se joindre au conseil, et ceux qui se présentent
sont inévitablement du monde qui sont plus en fin de carrière, qui amènent de l'expérience, alors, si ça devenait une nécessité,
d'amener un jeune, ça nous poserait des gros problèmes de recrutement.
Mme Vallée :
Vous mentionnez que le temps de formation, le temps de stage est plus long que
dans d'autres ordres professionnels. On parle de combien de temps, la
formation pour les jeunes?
Une voix : ...
Mme Vallée : Cinq ans? Mais
cinq ans avant de pouvoir accéder...
M. Wares (Robert) : ...stagiaire.
Mme Vallée : ...avant de
pouvoir avoir le titre, avant de pouvoir acquérir le titre de géologue.
M. Wares (Robert) : C'est ça.
Mme Vallée : Donc, évidemment,
le texte du projet de loi ne prévoit pas... ne vient pas viser, justement, ce
stagiaire-là, vise 10 ans, donc à l'intérieur de 10 ans, une fois...
M. Prud'homme (François) : Après la
période de stage.
Mme Vallée : C'est ça, une
fois avoir adhéré à l'ordre.
Dans votre
correspondance du 19 janvier, vous avez également soulevé des questions
concernant l'article 122.0.1, que
l'on retrouve en fait à l'article 61 du projet de loi, sur la question
de la sanction minimale. Vous avez parlé également, aussi, de toute la question de la présomption
d'innocence, qui vous apparaissait problématique. On ne l'a pas abordé
dans votre présentation, j'aimerais vous
entendre davantage sur ces éléments-là que vous avez abordés dans
votre correspondance du mois de janvier.
M. Wares (Robert) : Pourriez-vous
répéter, s'il vous plaît?
Mme Vallée : Dans votre correspondance, vous abordez les
enjeux qui sont soulevés lorsqu'il y a une poursuite intentée contre un professionnel,
la possibilité pour le syndic d'accorder ou de mettre en place une suspension
ou une limitation provisoire du droit
d'exercer les activités. Vous avez abordé cette question-là,
vous aviez certaines réserves quant à
ce droit qui... à cette disposition qui permet au syndic de limiter provisoirement le
droit de pratique dans le cas d'un
membre qui est accusé pour une infraction criminelle punissable de cinq ans ou
plus d'emprisonnement, vous aviez des réserves. J'aimerais vous entendre
sur ces réserves, parce que certains ordres avaient différents commentaires sur
la question.
M. Wares
(Robert) : Bien, c'est parce que qu'est-ce
qui nous inquiète peut-être, c'est... ça donne trop de pouvoirs au syndic. En ce qui concerne les
sanctions, normalement, c'est discuté au sein du C.A., et la mesure ou la
gravité de la sanction doit être discutée, alors, si on donne carte
blanche à un syndic, on considère qu'effectivement ça créerait un schisme entre
le C.A. d'un ordre et le syndic lui-même.
Mme Vallée : Le Barreau
du Québec notamment militait pour
cette modification. Il y a eu un
certain nombre de dossiers qui ont été largement médiatisés et qui ont
milité en faveur d'un resserrement des règles.
Vous, au sein de l'Ordre des géologues, est-ce
que vous avez déjà vécu des situations similaires?
M. Wares (Robert) : Non.
Mme Vallée : Non. Donc... Et vous abordez le pouvoir donné au
syndic, mais le syndic a quand même ce pouvoir de s'assurer de la protection du public, s'assurer qu'il n'y a pas de danger pour le public. C'est un petit peu... C'est
un peu l'esprit derrière cette disposition législative, c'est de s'assurer que le syndic pourra intervenir
si d'aventure l'accusation peut miner la confiance du public dans les
affaires de l'ordre.
M. Wares (Robert) : Oui, mais...
Mme Vallée : Peut-être qu'au
sein de l'Ordre des géologues ce n'est peut-être pas une situation qui risque
de survenir plus fréquemment, mais on pense notamment, dans certains cas, à des
accusations d'agression sexuelle chez des professionnels
de la santé, par exemple, je
pense que c'est probablement l'image qui nous vient spontanément en tête. Et vous croyez que ce serait donner trop de pouvoirs
au syndic que de pouvoir permettre de limiter les fonctions, limiter
l'exercice pour quelqu'un qui fait l'objet de telles accusations?
M. Wares
(Robert) : Je crois
que le rôle principal du syndic est d'établir s'il y a eu faute, premièrement, c'est vraiment leur rôle.
Alors, quand un membre est fautif, de dire que le syndic a tout le pouvoir
d'appliquer la sanction, c'est à ce niveau-là qu'on a des
objections. La nature de la sanction devrait être, je crois, discutée entre le
syndic et le conseil d'un ordre.
Mme Vallée :
En fait, c'est le conseil de discipline qui est chargé d'établir... et non le
conseil d'administration.
M. Wares (Robert) : Excusez-moi, là,
oui, le conseil de discipline.
Mme Vallée :
Parce que, quand même, ça demeure le conseil de discipline qui est chargé de
mettre en place les sanctions. Mais donc, pour vous, c'était la
préoccupation.
Vous aviez
également abordé l'enjeu de la présomption d'innocence dans votre
correspondance du 19 janvier. J'aimerais
vous entendre. On a eu des avis, on a eu notamment un avis du Barreau sur cette
question-là, sur le fait que ça ne portait pas atteinte à la présomption
d'innocence, mais peut-être que vous avez un avis à l'effet contraire, et donc j'aimerais vous entendre. Parce que vous
mentionniez que la disposition souffrait «d'un problème dans son
application face à la présomption d'innocence dont bénéficie le professionnel
visé».
M. Wares (Robert) : L'opinion du
Barreau serait quoi à ce sujet?
Mme Vallée : Bien, l'opinion
qui nous a été formulée par le Barreau était à l'effet que ça n'entachait pas
la présomption d'innocence, avec une recherche jurisprudentielle assez étoffée.
Mais, pour vous, j'étais curieuse, parce que
parfois la beauté du droit, c'est qu'il peut y avoir des opinions diversifiées,
puis je me demandais si votre commentaire était appuyé sur un avis
différent.
M. Wares
(Robert) : Pas vraiment. En fait, ça, c'était un commentaire issu de
notre D.G. Personnellement, je ne suis pas d'accord. Je crois que
j'appuierais plus l'opinion du Barreau à ce sujet-là.
Mme Vallée : D'accord.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre.
Mme Vallée : Merci beaucoup.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors, bienvenue, M. Wares et M. Prud'homme.
Merci d'être ici, à l'Assemblée nationale, et de partager avec nous vos
opinions sur le projet de loi n° 98, c'est très aidant.
D'entrée de
jeu, vous avez été assez sévères par rapport au projet de loi en disant que ça
ne solutionnait pas les problèmes qui
existeraient au sein des ordres. Est-ce que je pourrais avoir une idée de,
selon vous, quels sont les problèmes principaux auxquels on devrait
s'adresser?
• (10 heures) •
M. Wares (Robert) : Oui. J'étais
prêt à en décrire quatre, si vous voulez les entendre. Parfait.
Un des gros
problèmes qui nous affligent, c'est la lenteur du processus législatif. Les
délais dans l'adoption des lois et
règlements sur le système actuel sont tels que le sujet est devenu extrêmement
problématique dans le milieu et que plusieurs
dispositions de nos règlements — là, je parle d'une expérience
personnelle — sont
désuètes ou mal adaptées longtemps après que nous l'ayons constaté.
Alors, voici, je vais vous donner trois exemples
qu'a vécus l'ordre depuis son «inception».
Nous avons
soumis un projet de code de déontologie en 2004, et le code n'a été adopté
qu'en 2012, alors huit ans après sa soumission. Un projet de règlement
d'admission a été soumis en 2004 et aussi adopté en 2012, et modifié en 2014. On nous a invités particulièrement en 2008 à
participer à la modernisation des lois professionnelles — c'était un projet de loi omnibus — dans le secteur des sciences appliquées, qui
touchait les ingénieurs, les géologues, les chimistes, les agronomes, les technologues, etc. Depuis ce
temps, d'énormes efforts ont été consacrés à cet objectif, qui ont
abouti à un premier projet de loi en 2012,
qui est mort au feuilleton, et encore une fois en 2013, mort au feuilleton.
Nous arrivons maintenant à la fin de
2016, alors encore une fois huit ans après «l'inception», et nous n'avons
présentement vraiment aucun espoir de voir aboutir ce projet dans un
avenir rapproché.
Deuxième
élément qui nous concerne énormément, c'est la désuétude des divers éléments du
Code des professions. Le code a été
conçu pour encadrer des professionnels exerçant de façon autonome ou en petit
groupe. La réalité moderne est que de
plus en plus de services professionnels sont offerts par des entreprises à
vocation commerciale. Depuis, les entreprises de services tendent à
offrir un panier de services pour attirer et retenir une plus large clientèle.
Les divers professionnels oeuvrant au sein de ces entreprises sont soumis à
plusieurs pressions et ont généralement un contrôle limité sur ces entreprises.
La commission Charbonneau a souligné ce problème
en invitant à un encadrement beaucoup plus serré des entreprises. Nous croyons que le Code des professions et les lois
professionnelles devraient permettre l'encadrement des entreprises offrant des services professionnels,
comme il se fait d'ailleurs dans les autres provinces, mais qui n'existe
pas au Québec. Le code et les règlements adoptés en son application, par
exemple la tenue de dossier, ignorent l'impact des technologies de
l'information et le commerce sans frontières, qui se sont largement développés
depuis 1974.
Troisièmement,
l'incohérence et faiblesse des sanctions aux décisions disciplinaires. Aucune
balise réelle n'existe pour les sanctions,
de sorte que les écarts sont énormes pour des fautes similaires dans diverses
professions. Je vais vous donner un exemple. L'Ordre des géologues a
imposé une radiation de sept ans à un membre actif qui avait manipulé de façon
frauduleuse des informations dans un projet l'an dernier. Plus récemment, suite
à la commission Charbonneau, l'Ordre des
ingénieurs a imposé une radiation de quelques mois à un ingénieur retraité qui
avait accepté des pots-de-vin pendant plus de 20 ans. Donc, ça,
c'est un exemple qui démontre l'écart dans le système de sanction.
De plus, le Tribunal
des professions a banalisé l'accès aux professions en allégeant diverses
sanctions et en ordonnant l'émission de
permis à des personnes sanctionnées pour des fautes graves. Par exemple, c'est
un cas, je crois, que vous allez tous
reconnaître, le tribunal a ordonné l'émission d'un permis de podiatrie à une
personne dont le permis avait été retiré par l'Ordre des dentistes suite
à des fautes d'une extrême gravité.
Finalement,
la lenteur du traitement judiciaire des dossiers disciplinaires. Dans deux
dossiers disciplinaires menés par le
syndic de l'Ordre des géologues, le processus disciplinaire s'est étiré sur
deux ans, pour très peu de séances du conseil de discipline et sans appel de décision. Je souligne que notre
expérience n'est certainement pas la plus mauvaise dans le monde
professionnel. Il serait souhaitable que les règles de procédure soient
resserrées afin d'optimiser ce processus et éliminer les manoeuvres
bureaucratiques visant à retarder le processus.
Alors, ça, c'est
quatre exemples, là, de problèmes majeurs que nous percevons dans le système
professionnel.
Mme
Jean : Merci beaucoup, c'est clair. Vous dites que... vous parlez du
commissaire à l'admissibilité et vous parlez...
Je n'ai pas entendu, concernant le pôle de coordination qui est proposé... Vous
référez au mémoire déposé par le CIQ, auquel vous adhérez, à ce qui est
présenté là-dedans. Dans ce mémoire-là, il est proposé de faire un comité intersectoriel pour pouvoir faciliter
l'admissibilité des nouveaux arrivants aux professions. Est-ce que
vous êtes... Quels sont vos commentaires là-dessus? Quelle est votre
opinion là-dessus?
M. Wares
(Robert) : Est-ce que vous parlez nécessairement des personnes
immigrantes ou juste...
Mme Jean :
Oui. L'admissibilité, oui. Il y a des problématiques qui se retrouvent justement
pour trouver des places de stage et que
c'est complexe, donc ça requiert justement la participation de différents ministères et de
différents organismes pour faciliter, solutionner les problèmes qui sont
rencontrés.
M. Wares
(Robert) : Non, je ne suis pas votre question. Alors, est-ce que...
Mme Jean :
Est-ce que vous êtes d'accord avec la proposition du CIQ de former un comité
intersectoriel?
M. Wares
(Robert) : Intersectoriel? Oui, oui. Oui, on est d'accord avec ça,
oui.
Mme
Jean : Et vous êtes en
désaccord avec l'étendue... d'étendre le pouvoir du commissaire à
l'admissibilité?
M. Wares
(Robert) : Est-ce que vous parlez maintenant...
Mme Jean :
Le commissaire aux plaintes qui devient un commissaire à l'admissibilité ou aux
admissions.
M. Wares
(Robert) : Ah! O.K., vous ne parlez pas du commissaire aux plaintes, à
l'admission.
Mme Jean :
Pardon?
M. Wares
(Robert) : Est-ce que vous parlez du commissaire aux plaintes, à
l'admission?
Mme Jean :
Oui.
M. Wares
(Robert) : D'étendre ses pouvoirs, non, on n'était pas d'accord.
Mme Jean :
Vous n'êtes pas d'accord. Il reste une minute, veux-tu poser ta question?
Mme
Lamarre : Bien, en fait,
moi, je voyais que vous avez évoqué... puis d'autres ordres l'ont évoqué
aussi, la difficulté d'accès aux formations complémentaires ou aux stages. Ça
semble être problématique.
Actuellement, qui
coordonne ces stages-là lorsque vous avez des candidats étrangers qui arrivent
au Québec, par exemple?
M. Wares
(Robert) : Au sein de notre ordre, on n'a personne qui coordonne ça.
On n'a pas les ressources.
Mme
Lamarre : Mais qui a le
mandat, dans le fond, de coordonner les stages? Est-ce que
ce sont les milieux de formation? Est-ce que
ce sont les universités qui donnent les programmes d'appoint? Qui
coordonne? Par exemple, pour vos diplômés du Québec, qui
coordonne les stages? Ce sont les...
M.
Wares (Robert) : Un mentor.
Le stagiaire doit se trouver un géologue qui est membre de l'ordre, des fois
on va lui en suggérer un, qui devient son mentor.
Mme Lamarre : Et, quand vous avez un...
M. Wares (Robert) : Et ceci se fait
au sein du... Pardon. Ceci se fait au sein du milieu de travail.
Mme Lamarre : D'accord. Et, quand
vous avez un candidat étranger, est-ce que vous avez un mécanisme particulier? Parce que c'est sûr que ce
nouveau candidat qui vient d'arriver au Québec n'a pas le même réseau
de personnes. Est-ce que vous avez une façon de faciliter l'accès à un
mentor pour ce candidat étranger?
M. Wares
(Robert) : Non. Non, on n'a
pas de mécanisme, malheureusement, mais on cherche à en trouver un.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la députée de Taillon. M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Wares, M. Prud'homme, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour votre contribution aux travaux
de la commission.
Le commissaire aux plaintes, présentement, dans
ses fonctions actuelles, couvre les candidats qui viennent de l'étranger. On
souhaite élargir sa compétence pour notamment couvrir les candidats qui ont
étudié au Québec ou qui ont fait une partie de leur scolarité au Québec.
Est-ce que
vous, à l'Ordre des géologues, au cours des dernières années, vous avez eu des
candidats québécois qui ont été
refusés à l'admission à la profession, chez les géologues, pour lesquels le
commissaire aurait maintenant
juridiction? Est-ce que vous en avez eu, des cas d'exemple, là, des gens,
supposons, avec des parcours atypiques ou... avec le fait qu'ils se sont
retrouvés entre deux chaises, supposons, à l'ordre?
• (10 h 10) •
M. Wares
(Robert) : Dans notre cas,
c'est très rare. On a quand même... Bien, pour donner des exemples
concrets, l'ordre est relativement jeune, beaucoup de membres qui étaient anciennement membres de l'association des
géologues ont été «grand-périsés» lors de la
création de l'ordre, mais, par après, beaucoup de personnes d'expérience, pas
nécessairement en géologie, je pense, par
exemple, en géographie, mais qui travaillaient pendant des années dans le
domaine des ressources ont fait
application pour devenir membres. Alors, même, évidemment, si on a quand même
beaucoup de critères, incluant, évidemment,
des stages, pour admettre des membres à l'ordre, bien, on maintient, je vous
dirais, une grande flexibilité quand
on parle de personnes qui n'ont pas nécessairement... qui ne répondent pas
strictement à tous les critères mais... S'ils arrivent avec 30 ans d'expérience dans le domaine, on va les
accepter. C'est pour ça qu'on vise de plus en plus un processus... un mécanisme de compétence, plutôt
que juste regarder l'expérience de travail plus l'éducation, on est en train d'établir un système qui
évalue la compétence de l'individu pour son admission à l'ordre.
Alors, à ce
niveau-là, on ne voit vraiment pas qu'est-ce que le commissaire aux plaintes
pourrait venir ajouter dans un tel système.
M.
Jolin-Barrette : Dans vos
commentaires, relativement aux énoncés d'intention qui avaient été formulés
par l'office, vous abordez la question des
fonctions de l'office puis vous vous questionnez sur le besoin de renforcement
du rôle de surveillance de l'office, qui
n'avait pas été démontré. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par
là? Parce que, dans le fond, c'est jumelé un peu avec le fait que dans
le projet de loi, présentement, on enlève l'autorisation ministérielle pour mener une enquête, donc on
renforce un peu les pouvoirs de l'office de faire enquête par lui-même.
Vous, est-ce que vous êtes d'accord avec ça?
M. Wares (Robert) : On n'a pas
d'objection à renforcer les pouvoirs d'enquête de l'office, non.
M. Jolin-Barrette : Vous trouvez que c'est justifié, les pouvoirs
supplémentaires qui seraient accordés à l'office, en fonction des
pouvoirs actuels, là, que l'office détient déjà?
M. Wares (Robert) : Bien, je vous
dirais que oui.
M. Jolin-Barrette : Pourquoi?
M. Wares
(Robert) : Bien, le rôle de l'office, évidemment, c'est d'assurer le
bon fonctionnement des ordres. Et, sans
aller dans des cas extrêmes, d'augmenter, il faut faire attention, évidemment,
quels pouvoirs auxquels vous songez, on ne veut pas un office, non plus, qui est omniprésent dans le
fonctionnement des ordres, mais évidemment l'office a un gros rôle à
jouer pour assurer ce bon fonctionnement.
Maintenant, j'avoue que... Vous posez la
question. Là, j'ai oublié exactement... Peut-être que M. Dutrisac pourrait...
Les pouvoirs additionnels qu'on songe à confier à l'office spécifiquement, ça
m'échappe, là.
M.
Jolin-Barrette : Bien,
peut-être... J'aurais une autre question sur l'éligibilité des administrateurs,
au niveau du conseil
d'administration. Vous semblez avoir certaines réserves sur le fait que, dans
le fond, ce n'est pas parce qu'on n'est pas, supposons, administrateur d'une association professionnelle qu'on
ne défendra pas nécessairement ces valeurs-là au conseil d'administration. Dans votre énoncé
d'intention, vous dites : Ce n'est pas, supposons, que j'ai une
approche syndicale qu'elle ne se répercutera
pas si jamais si je suis élu administrateur au niveau du conseil
d'administration de l'ordre.
Qu'est-ce que
vous proposeriez pour éviter que les gens, dans le fond, soient représentants
de... agissent à titre de représentants...
M. Wares
(Robert) : Bien, c'est un simple principe de bonne gouvernance. Je ne
crois pas qu'un membre d'un conseil
d'administration devrait en même temps représenter d'autres groupes d'intérêts,
parce que ça mène inévitablement à des conflits d'intérêts. C'est très
important pour un membre du conseil d'être aussi neutre que possible.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Ça, bien,
oui, mais, le projet de loi, c'est ce qu'il prévoit, dans le fond, de ne pas
être membre d'une... de ne pas être
dirigeant d'une association, d'être sur le C.A., ou d'être sur un organisme
affilié. Mais, ceci étant dit, votre lettre allait plus loin que ça pour
dire : Bien, si je défends ce type de valeurs, je ne devrais pas être
admissible au C.A. de l'ordre aussi.
M. Wares (Robert) : Voilà.
M. Jolin-Barrette : Mais comment
est-ce qu'on fait pour évaluer ça? Parce que vous pouvez être...
M. Wares
(Robert) : Il faut évaluer l'implication des autres organismes. Juste
parce que c'est une association, ça ne
veut pas dire que, premièrement, c'est relié au système professionnel. Mais,
si, par exemple, ça représente un syndicat, un groupe d'intérêts
spécifique au sein du domaine, on considère que c'est un conflit d'intérêts.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de Borduas. Merci, M. Robert Wares, M. François
Prud'homme, représentant l'Ordre des géologues du Québec, de votre
participation à notre commission.
Je vais suspendre quelques minutes. Je vais
demander à la Chambre des huissiers de justice du Québec de s'approcher, s'il
vous plaît.
(Suspension de la séance à 10 h 14)
(Reprise à 10 h 17)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant la Chambre des huissiers de
justice du Québec et son président, M. Sylvain Gravel. Vous allez nous
présenter les personnes qui vous accompagnent.
Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite il y aura un échange avec Mme la
ministre et les porte-parole des deux oppositions. M. Gravel, à vous la parole.
Chambre des huissiers
de justice du Québec (CHJQ)
M. Gravel
(Sylvain) : M. le Président, Mme la ministre, mesdames messieurs,
bonjour. Je me nomme Sylvain Gravel, huissier de justice depuis 1978 et
président de la Chambre des huissiers depuis le mois de mai 2016. Je vous présente, à ma gauche, M. Ronald Dubé,
huissier de justice depuis 1970. Il a occupé plusieurs postes à la chambre.
C'est à titre de grand sage de la Chambre
des huissiers que M. Dubé m'accompagne aujourd'hui. À ma droite,
Me Véronique Saulnier, avocate,
directrice générale et secrétaire de la Chambre des huissiers, à l'emploi de la
chambre depuis 2014, qui prendra la parole sur le projet de loi.
La Chambre des
huissiers de justice a été créée en 1995. Elle compte 432 membres, dont
90 femmes et 342 hommes. Nous sommes heureux d'être devant
vous aujourd'hui pour vous présenter notre position sur le projet de loi
n° 98.
Comme vous le
savez peut-être, la chambre a récemment fait l'objet d'une enquête autorisée par le gouvernement. Un des mandats principaux de cette enquête portait sur la gouvernance de notre ordre
professionnel. Depuis le mois de juillet, le rapport d'enquête est
public, et nous sommes en processus d'accompagnement par l'office.
Comme président, à cause de cette expérience
particulière, il me semblait primordial que notre ordre vienne partager ses
réflexions sur le projet de loi n° 98, en particulier sur ses aspects
portant sur la gouvernance des ordres professionnels,
les devoirs de leurs dirigeants et les pouvoirs de l'office. Je suis convaincu
que si les mesures préconisées au projet de loi sur ces sujets avaient
existé dans la période sur laquelle a porté l'enquête, cette enquête n'aurait
fort probablement jamais eu lieu, puisque les problèmes que les enquêteurs ont
constatés, remontant à plusieurs années, n'auraient pas existé.
Pour détailler le message élaboré dans notre
mémoire, je laisserais la parole à Me Saulnier.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Saulnier.
• (10 h 20) •
Mme Saulnier (Véronique) : Bonjour.
Alors, merci, M. le Président. Merci, M. le président.
Donc, vous aurez compris que la
chambre accueille très favorablement le projet de loi n° 98 sur tous ses
aspects concernant la gouvernance des ordres
et le renforcement des pouvoirs de l'office. Quant à la question du Commissaire à l'admission, nous en traitons plus en détail dans notre mémoire, mais je
me contenterai ici d'énoncer que nous croyons que le projet de loi accorde des pouvoirs beaucoup
trop larges au commissaire et lui accorde également une trop
grande autonomie.
Revenons
toutefois sur la question de la gouvernance des ordres, qui nous intéresse
au premier chef. Effectivement, cette
question nous a interpelés tout particulièrement, en raison, comme le disait le président Gravel, du contexte vécu
à la chambre depuis 2014. Il est important de mentionner que l'enquête
déclenchée en novembre 2015 par l'Office des professions
devant... cette enquête faisait suite à une demande formelle d'intervention
adressée à l'office par des dirigeants de
l'ordre en poste depuis 2014 dont je faisais partie, ainsi que le président de
l'époque. Dès notre arrivée à la chambre, nous avions constaté des
dysfonctionnements à différents niveaux de l'organisation, dont celui de la
gouvernance. À partir de l'automne 2014, la
chambre a été proactive par toutes ses structures décisionnelles pour redresser
la situation. Des mesures concrètes furent mises en place rapidement,
bien avant le début de l'enquête.
Après
ce rappel rapide des événements récents, que je jugeais utile de faire, je
reviens au projet de loi, à notre position et à nos recommandations.
Nous accordons donc, nous l'avons dit, notre appui de principe aux mesures qui visent à améliorer la gouvernance des ordres et à
accroître les devoirs de leurs dirigeants. Parmi celles-ci, l'obligation
pour tous les administrateurs des ordres de suivre une formation sur le rôle
d'un conseil d'administration d'un ordre professionnel,
notamment en matière de gouvernance et d'éthique, nous semble une nouvelle
mesure de nature à garantir que, dans tous les ordres professionnels du
Québec, tous les administrateurs auront désormais la connaissance et les
compétences nécessaires pour exercer leur rôle adéquatement.
En
second lieu, sur le sujet de l'accession à la présidence, qui est un sujet qui
nous a préoccupés également, nous sommes d'accord avec le fait que les
ordres puissent continuer de choisir le mode d'élection à la présidence qui
leur convient le mieux entre le suffrage
universel et l'élection par les administrateurs. Toutefois, nous croyons que le
suffrage universel ne devrait être possible
qu'à une condition, celle que tout candidat à la présidence ait auparavant
siégé au C.A. durant une période
minimale de deux ans dans les quatre années précédant l'élection, car il nous
semble que, sans avoir jamais été administrateur auparavant... Nous
croyons qu'un nouveau président fait face à une courbe d'apprentissage très longue et très abrupte. Il doit apprendre non
seulement les dossiers de son ordre, mais également le fonctionnement du
système professionnel dans lequel il arrive du jour au lendemain. Donc, dans
ces situations-là, il nous semble que le président lui-même nouvellement en
poste ainsi que le conseil d'administration et l'ordre dans son ensemble
peuvent certainement souffrir d'une telle situation.
Nous appuyons aussi
sans réserve les articles visant à rendre obligatoire pour tous les ordres
l'adoption d'un code d'éthique dont les
grandes lignes seraient déterminées par l'office. Cette mesure, assurant des
règles éthiques de base, augmenterait également, nous le croyons, la
confiance du public envers le système professionnel.
Sur
un autre sujet, nous saluons aussi le fait que le projet de loi clarifie et
augmente les responsabilités des conseils d'administration au sein des ordres. Une de ces responsabilités
principales des conseils d'administration énoncées au projet de loi et que nous appuyons également est de
fournir les orientations stratégiques de l'ordre. Sur ce sujet, nous
proposons même que le futur code prévoie une
obligation pour les ordres d'inclure dans leurs rapports annuels un résumé de
leur plan stratégique et l'état de sa mise
en oeuvre. Un tel ajout forcerait les ordres à adopter de véritables plans
stratégiques, et cela permettrait également aux membres ainsi qu'au public en
général de connaître et de suivre les orientations importantes des ordres
professionnels.
Maintenant,
M. le Président, sur le renforcement des pouvoirs de l'office, comme vous l'a
dit le président Gravel dans son
introduction, nous sommes également en accord avec les principes énoncés dans
le projet de loi. Nous voyons d'un
bon oeil les mesures octroyant à l'office un pouvoir de surveillance, de
vérification et de contrôle, qui lui permettront d'agir rapidement et efficacement auprès des ordres en cas de situation
problématique. Par exemple, nous
saluons le fait que l'office pourra désormais exiger et non simplement
suggérer des correctifs, si nécessaire, dans des situations problématiques,
comme je viens de le dire.
Nous
sommes aussi en accord avec le fait que l'office pourra déclencher une enquête
de son propre chef, sans besoin de
demander l'autorisation ministérielle. Sur ce point, toutefois, un petit
bémol : nous croyons que l'office devrait conserver une obligation de faire rapport au ministre sur la situation
ayant mené au déclenchement de l'enquête. Cette simple obligation de
faire rapport nous apparaît garantir un processus transparent et assurer le
maintien d'une forme d'imputabilité de l'office auprès du gouvernement.
Sur
les mesures, maintenant, de surveillance et d'accompagnement qui sont
prévues au projet de loi, que l'office pourra imposer à un ordre, nous en approuvons aussi le principe, mais
nous croyons qu'elles devraient être mieux définies et balisées. Les
conditions dans lesquelles l'office pourra imposer de telles mesures ainsi que
celles de leur terminaison devraient, selon nous, être également définies
minimalement... ou le code devrait prévoir que l'office doit les définir
minimalement.
Il
nous semble également, sur ce sujet des mesures de contrôle, qu'une
gradation dans ces mesures de contrôle de l'office devrait être prévue au code dans les cas où l'office a des
raisons de croire qu'un ordre vit des problèmes majeurs liés à l'accomplissement de sa
mission première de protection du public. Parmi toutes ces mesures, évidemment,
nous croyons que l'étape ultime demeurerait la mise sous tutelle selon les mêmes
règles qu'auparavant.
Également,
sur les pouvoirs de l'office, nous proposons qu'il détienne le pouvoir de fixer
la cotisation annuelle d'un ordre dans le cas où il constaterait que cet
ordre ne dispose pas des ressources financières lui permettant d'accomplir sa
mission de protection du public. Ce pouvoir devrait toutefois demeurer d'utilisation
exceptionnelle.
Finalement,
je tiens à exprimer notre confiance dans le fait que les nouvelles mesures
prévues au projet de loi sur la gouvernance
des ordres limiteront sans aucun doute dans l'avenir la nécessité de recourir
aux processus d'enquête, d'accompagnement et de mise sous tutelle.
Merci, M. le
Président. Je laisse le mot de la fin au président Gravel s'il en a encore le
temps. Je m'excuse.
Le Président (M.
Ouellette) : 30 secondes, M. Gravel.
M.
Gravel (Sylvain) : En
terminant, je tiens à vous rappeler que la Chambre des huissiers est en majeure
partie d'accord avec le projet
de loi n° 98, car, d'après nous,
il permettra une meilleure gouvernance des ordres professionnels.
La
Chambre des huissiers de justice du Québec est fière d'avoir pu vous faire part de ses commentaires. Merci de nous avoir écoutés.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, Me Saulnier et M. Gravel. Mme la ministre.
• (10 h 30) •
Mme Vallée :
Merci beaucoup, M. Gravel, M. Dubé, le sage, Mme Saulnier. Merci de
votre présentation.
On
a peu abordé la question du pôle, puis je pense que ce serait peut-être,
dans un premier temps... j'ai plusieurs questions pour vous, mais,
dans un premier temps, je pense qu'il serait intéressant d'échanger sur la question,
sur les pouvoirs du Commissaire à
l'admission, sur le rôle qui est confié au pôle, parce que vous posez beaucoup
de questions dans votre mémoire, et
je pense que, comme il y a eu un certain moment entre les dernières consultations et maintenant, c'est toujours bon de ramener et de peut-être
faire un petit résumé.
C'est
certain que le projet de loi vise deux choses. D'abord, c'est d'ajuster le
rôle du commissaire, ajuster le rôle, là, dans le cadre des plaintes, de
la vérification, des avis du commissaire, à la réalité de l'admission aux professions.
On souhaite que le commissaire ait vraiment
une possibilité d'avoir un regard global sur l'admission, un
regard plus macro plutôt que micro sur l'admission, un regard qui va
porter non seulement sur les candidats provenant de l'étranger, en provenance de l'étranger, mais sur l'ensemble
des candidats. Est-ce que l'admission aux professions pose une
problématique particulière pour, par exemple, un candidat étranger qui a fait toute sa formation
au Québec, donc qui n'est pas considéré nécessairement
comme un candidat venant de l'étranger parce
que la formation a été reçue ici, au Québec? Comme
pour le candidat québécois qui a fait sa formation et qui a une formation
atypique, si on peut le catégoriser ainsi. Et donc on veut permettre au
commissaire d'avoir un regard qui va porter sur l'ensemble des acteurs.
Et c'est un pouvoir
de recommandation, hein, et ça, pour moi, c'est important de le rappeler, pas
un pouvoir d'intervention, pas un pouvoir de
sanction, c'est un pouvoir de recommandation. Et,
par la suite, la mise en place du pôle de coordination, bien, ce pôle-là va rassembler autour d'une même table
tous les acteurs, parce que l'admission, elle interpelle plusieurs intervenants. C'est faux de prétendre
que ce n'est que l'affaire des ordres. Les ordres, vous avez... les
ordres ont un rôle à jouer, mais il y a
aussi les maisons d'enseignement qui ont un rôle à jouer, il y a également les
employeurs. Encore ce matin, on
parlait des manques de stages dans certains domaines, mais ça aussi, c'est un
enjeu qui peut être considéré dans l'ensemble
de l'oeuvre et qui commande peut-être une discussion et des mesures qui
pourraient être prises par quelqu'un dont
on n'a pas nécessairement... ou par un organisme auquel on n'a pas pensé au
premier abord lorsqu'il est question des admissions aux ordres. Alors, c'est... Et ce pôle de coordination, bien,
c'est vraiment... on veut le formaliser parce qu'à quelque part c'est
important que les intervenants se parlent et échangent sur les différentes
problématiques, et c'était ça qui était...
c'est ça qui est la volonté derrière la mise en place du pôle de coordination,
qui existe déjà, par ailleurs, et auquel
on va greffer d'autres organisations, d'autres organismes, et cette volonté
d'élargir les pouvoirs du commissaire à l'ensemble des gens qui
souhaitent... de ceux et celles qui souhaitent accéder aux ordres
professionnels.
Donc,
c'est ce qui est derrière, c'est l'intention derrière le processus, parce qu'on
a constaté qu'il y avait quand même
un certain nombre d'enjeux. Cette semaine... Aujourd'hui, on a un article qui
parle des places de stage. La semaine dernière,
c'étaient d'autres problématiques vécues par un professionnel qui souhaitait
pouvoir accéder à un ordre professionnel. Bref... Et ça nous amène à
chaque fois à identifier un intervenant différent, qui n'est pas nécessairement
l'ordre.
Donc,
le but, ce n'est pas de porter atteinte à l'indépendance des ordres, pas du
tout, c'est d'amener les gens autour d'une
même table, malgré l'indépendance. C'est une indépendance qui est déléguée. Et,
malgré cette indépendance-là, d'amener
les gens à se parler, d'amener les gens à interagir et à trouver ensemble des
solutions à une problématique ou à mettre
en oeuvre une recommandation qui est formulée par un tiers qui est impartial et
qui a une vision plus macro de la situation, je pense que ça ne peut
être que positif. Et je ne vois pas... Et je vois difficilement en quoi ça
vient affecter l'indépendance des ordres lorsque l'objectif ultime, c'est
d'amener des pistes de solution qui ne visent peut-être même pas les ordres.
Alors,
c'est un peu le contexte dans lequel s'inscrit le projet de loi. Vous avez
mentionné dans votre mémoire... vous
avez posé plusieurs questions, donc je ne sais pas si vous aviez des
commentaires à formuler suite à cette remise en contexte.
Le Président (M.
Ouellette) : Me Saulnier ou M. Gravel? Me Saulnier.
Mme
Saulnier (Véronique) : Bien, écoutez, comme vous avez constaté,
effectivement, dans notre mémoire, nous posons davantage de questions
que nous apportons de réponses.
Par contre, je ne pense
pas qu'on ait posé celle de l'indépendance des ordres en tant que telle. En
tout cas, peut-être que ça a été compris comme ça.
Ce qu'il nous a semblé, c'est que le processus
actuel, et en plus dans le contexte où on augmente les pouvoirs de l'office sur
à peu près tout ce qui concerne les ordres professionnels, l'admission fait
partie, évidemment, de la mission des ordres professionnels, donc ces pouvoirs-là sont déjà
élargis... On se demande l'utilité d'élargir le pouvoir du commissaire aux plaintes à l'admission en général,
qui nous semble, en fait, bien prise en charge par les ordres eux-mêmes.
D'ailleurs, ils ont une obligation d'avoir des
relations au moins deux fois par année avec les établissements d'enseignement. Donc, il y a déjà une discussion
au sein même des ordres avec le... On parle des candidats, là, du Québec
en particulier, là. Donc, il y a déjà une structure qui assure que les
processus d'admission aux ordres sont adéquats. L'office a déjà un pouvoir de
surveillance à ce niveau-là, comme à tous les autres niveaux.
Le problème
nous semble... Ce qu'on en a compris, c'est que c'est davantage celui des
candidats étrangers. Chez nous, on
n'a pas de problème au niveau de la reconnaissance de formation ou de diplôme — c'est des reconnaissances de formation,
chez nous — on
n'a jamais vécu de problème à ce
niveau-là. À quelques
occasions depuis que moi, je suis en poste,
en fait, là, je ne peux pas vous parler du passé, mais à quelques
occasions les candidats étrangers ont eu quelques cours d'appoint à suivre, et ensuite ils doivent
suivre la structure de formation professionnelle qui est offerte par la chambre.
Une fois que
tout ça est fait, il arrive que le problème est, encore
une fois, comme dans d'autres ordres,
au niveau de la recherche de stage. Bon, il nous semble qu'un
commissaire qui aurait un pouvoir élargi sur l'ensemble du processus
d'admission pour tous les candidats à tous
les ordres professionnels... on a l'impression que c'est une mesure... En
fait, on n'a pas réussi à comprendre ce que
cette mesure-là cherche à corriger, en fait. On trouve que... bien, c'est ça,
on n'a pas compris ce que la mesure cherche à corriger, parce que le problème
particulier des candidats étrangers, selon ce que je comprends du système
depuis le relativement peu de temps dans lequel j'y oeuvre, depuis que j'y
oeuvre, c'est le problème des candidats étrangers, et il nous apparaît que les
structures qui existent déjà, dont le pôle de coordination, devraient suffire,
ainsi que les pouvoirs de l'office au sein des ordres.
• (10 h 40) •
Mme Vallée :
On a quand même un certain... Certaines problématiques ont été identifiées au
niveau des étudiants étrangers ayant
suivi une formation complète au Québec. Certains d'entre eux, d'entre elles ont
eu des enjeux d'accéder aux ordres professionnels.
La volonté,
c'est d'assurer que l'admission aux ordres, qui se veut comme étant encadrée
par ce souci premier de protection du
public... Parce que la protection du public, c'est la raison d'être de l'ordre,
on s'entend. Et donc cet objectif d'assurer
les compétences requises pour la protection du public, pour assurer la
protection du public à l'intérieur d'une pratique professionnelle, elle
ne devrait pas être différente, le traitement ne devrait pas être différent
s'il s'agit d'un nouvel arrivant, d'un
étudiant étranger ayant suivi sa formation au Québec ou d'un citoyen québécois
qui est né ici, qui a fait toute sa
formation ici et qui tente également d'intégrer un ordre, parce que...
l'objectif étant la protection du public. Or, on constate... peut-être pas au sein de votre ordre, puis,
l'objectif, on fait des règles qui s'appliquent à l'ensemble, mais on
constate qu'il y a quand même certaines problématiques qui sont rencontrées de
façon ponctuelle.
Donc, évidemment, s'il n'y a pas de problème, il
n'y a pas d'enjeu, le commissaire ne sera pas saisi, donc ça n'apporte pas une surcharge de travail pour le
commissaire, il n'est pas saisi d'un non-problème. Mais ce pouvoir
élargi permet au commissaire de pouvoir avoir une vision beaucoup plus large,
qui permet d'identifier, le cas échéant, la problématique
ou l'endroit où la... Est-ce que ça pourrait être, par exemple, une disposition
législative qui pose problème? Est-ce
que ça peut être l'application, la mise en application d'une disposition
législative, d'une disposition réglementaire? Donc, le rôle du
commissaire va être d'analyser la problématique, d'émettre des recommandations
et d'amener ces recommandations au pôle, qui verra à mettre en oeuvre des
moyens pour y remédier.
Et, pour ça, ça commande l'apport de tous, parce
que malheureusement on a tendance à travailler en silo. Actuellement, seuls les nouveaux arrivants sont assujettis... ont cette
porte pour cogner qui est le commissaire aux plaintes. L'étudiant étranger qui a fait sa formation au
Québec n'a pas d'endroit pour apporter sa problématique. Et même, à la
limite, le candidat qui a un parcours
atypique qui est un candidat d'origine québécoise, qui a fait toute sa
formation ici, mais qui, pour toutes
sortes de raisons, n'a pas une formation linéaire habituelle, n'a pas non plus
cet endroit où cogner si d'aventure il devait survenir un problème.
Donc, c'est vraiment d'avoir un point de chute pour l'ensemble de ces
demandes-là et d'assurer aussi que le traitement sera le même, donc que cet
enjeu, que ce souci qu'est la protection du public soit adapté de la même façon, c'est-à-dire que, la protection, les
compétences, les connaissances, elles sont requises de tous ceux et celles qui souhaitent intégrer un ordre
professionnel. Il y a des exigences. Les exigences sont les mêmes et
elles ne devraient pas être différentes d'une personne à l'autre en raison des
caractéristiques personnelles de l'individu.
Le
Président (M. Ouellette) :
Me Saulnier, je ne sais pas si vous avez d'autres commentaires sur les
commentaires de la ministre.
Une voix : En fait...
Le Président (M. Ouellette) :
M. Gravel.
M. Gravel
(Sylvain) : C'est quelque chose que je n'ai jamais eu connaissance, de
ce problème-là, dans notre ordre professionnel. C'est peut-être la
raison pour laquelle on s'est posé la question et nous ne voyons pas
nécessairement la nécessité d'augmenter les pouvoirs du commissaire.
Moi, personnellement, ça ne fait pas très
longtemps que je suis président de la chambre. Je n'ai jamais eu connaissance de ça, et, même dans ma pratique
privée, je n'ai jamais eu connaissance de ça non plus. Je pourrais peut-être
m'adresser à M. Dubé, qui est à la chambre
depuis de nombreuses années, voir s'il a eu connaissance de ça dans notre ordre.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dubé.
M.
Dubé (Ronald) : Oui, M. le Président. Donc, dans le passé, je confirme
ce que le président Gravel a dit, dans le
passé la chambre n'a jamais eu à vivre cette problématique-là. Les étudiants
étrangers qui arrivent ici sont traités selon leur niveau de formation à l'étranger. Maintenant, s'il y a des
compléments de formation à obtenir, on les dirige vers les endroits appropriés. Alors, la problématique ne se
pose vraiment pas à la Chambre des huissiers de justice du Québec au
cours des années.
Le Président (M. Ouellette) : ...minutes,
Mme la ministre.
Mme Vallée :
Brièvement, vous avez suggéré que les membres... que le président élu au
suffrage universel soit assujetti à certaines conditions. Pourquoi
seulement le président élu au suffrage universel? Est-ce qu'il ne pourrait pas survenir, par exemple... au sein d'un conseil
d'administration, on se retrouve avec des membres d'un conseil d'administration qui n'ont pas, par exemple, les
exigences, qui n'ont pas le vécu que vous avez identifié, requis pour
être nommé au suffrage universel? Alors, pourquoi ne pas assujettir les
présidents à ces exigences, peu importe le mode de scrutin?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Saulnier.
Mme
Saulnier (Véronique) : Merci, M. le Président. Je crois que le projet
de loi répond en partie... en grande partie,
en fait, à ce problème-là, c'est que tous les administrateurs vont devoir
suivre une formation, on présume que ça va être au début de leur mandat. Donc, je crois que ça répond à la
problématique, qui effectivement peut exister également pour des
administrateurs et non seulement pour le président, au suffrage universel,
d'avoir des administrateurs qui ne connaissent
pas le système professionnel ni les dossiers de l'ordre. Par contre, je pense
que la formation qu'ils devront suivre
obligatoirement est une garantie au moins que, sur le système professionnel,
ils auront des connaissances de base. Il
leur restera à apprendre les dossiers de l'ordre, mais en groupe, un ordre
professionnel, un conseil d'administration d'un ordre professionnel, les
dossiers de l'ordre, ça s'acquiert relativement rapidement.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Me Saulnier. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Bonjour, M. Gravel, M. Dubé,
Mme Saulnier. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour le dépôt de mémoire que vous avez fait, que
j'ai lu avec beaucoup d'intérêt. J'ai trouvé intéressant d'avoir un
partage d'expérience comme vous l'avez fait
par rapport, justement, au dossier qui nous préoccupe aujourd'hui et qui touche
le projet de loi n° 98, ça positionne bien des choses par des gens qui
l'ont vécu sur le terrain.
Ma première
question, vous parlez... l'office est intervenu à l'ordre des huissiers pour
des éléments qui avaient été
soulevés, et vous allez, après votre expérience, plus loin encore, c'est-à-dire
d'augmenter certains pouvoirs de l'office pour justement poursuivre ce genre de travail là et, quelque part, aller
porter des actes, ou poser des questions, ou même faire des enquêtes sur ce qui se passerait dans
certains ordres. Il y a des ordres professionnels qui ont témoigné ici et
qui étaient complètement à l'opposé de cette
opinion-là, qui voyaient même la base, actuellement, de l'intervention de
l'office et l'augmentation des pouvoirs d'intervention ou même de questionnement
comme un désaveu du travail des ordres professionnels. Avez-vous des
commentaires là-dessus?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Gravel.
M. Gravel
(Sylvain) : Je vais vous
répondre là-dessus, même si je n'étais pas en poste au moment...
L'avantage qu'il y a avec le nouveau projet de loi et augmenter le
pouvoir de l'office, il y aurait les cours à l'éthique aux administrateurs,
et tout ça, ça permettrait de garder une
certaine harmonie au sein des C.A., avec l'éthique, et tout ça, ce qui
empêcherait souvent certaines chicanes
internes, à l'intérieur des C.A. Si l'office a un plus grand pouvoir, il
va pouvoir corriger ça rapidement, ce qui empêcherait un ordre
professionnel comme le nôtre d'avoir eu droit à une enquête.
Mme Jean : Merci. Vous proposez quelque
chose de nouveau, dans votre mémoire, en proposant, au rapport annuel
des ordres professionnels, dans le dépôt du rapport
annuel, que soit indiquée la planification stratégique, et même aller plus loin, c'est-à-dire de préciser le
niveau de mise en oeuvre du rapport stratégique. Est-ce que vous pouvez
me commenter sur les intentions ou les objectifs d'une telle proposition?
M. Gravel (Sylvain) : Je vais
laisser Me Saulnier répondre.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Saulnier.
Mme
Saulnier (Véronique) : Merci. Sur ce sujet en particulier, écoutez,
c'est sûr que l'expérience, là, qu'on vient partager avec vous ici est certainement vraiment particulière, là, dans
le système professionnel en général. C'est ça qui nous pousse à faire des recommandations qui ne sont
peut-être pas partagées par tous les ordres professionnels, qui n'ont
pas vécu ce qu'on a vécu.
Un des
problèmes qu'on a vécus, à la chambre, c'est qu'il n'y en avait pas, de...
Quand on parlait de problème de gouvernance, ce qu'on avait constaté
auparavant, un de ces problèmes-là, c'est qu'il n'y avait pas de planification stratégique. Enfin, peut-être qu'il y en a déjà
eu, mais depuis plusieurs années il n'y en avait pas. Il n'y avait pas non
plus de règle de
gouvernance écrite, et donc pas de règle de gouvernance suivie. Et donc on
croit que, pour éviter que ce genre de
problème survienne... Parce que, malgré que dans le projet de loi, maintenant,
on prévoit que les conseils d'administration devront établir des orientations stratégiques, bien, pour les forcer à
le faire sous forme d'un véritable plan stratégique, bien élaboré, dans
les normes, sur une période de trois ans, ou de cinq ans, ou de deux ans, mais
disons trois ans, de devoir l'inscrire au rapport annuel, bien, ça devra
orienter pendant toute la durée de l'année les actions des conseils d'administration en fonction de ces planifications
stratégiques qui auront été établies et, au fil des ans, bien, d'en
suivre le développement et le niveau d'avancement.
Puis on pense aussi, comme je le disais tout à
l'heure, que d'inscrire ça dans les rapports annuels, le rapport annuel, d'ailleurs, devant être déposé à toute
l'Assemblée nationale, bien, ça permettra de faire en sorte que les gens
de l'ordre, les gens du gouvernement ainsi que les membres du public en général
sauront ce qu'est en train de faire soit leur ordre professionnel ou en tout
cas les ordres professionnels, sur quoi ils travaillent et comment ils avancent
dans leurs dossiers.
Ça répond à votre question?
Mme
Jean : Oui. Juste un éclaircissement de plus là-dessus. Un des
objectifs principaux du projet de loi n° 98 est de redonner confiance au public aux ordres
professionnels, et la transparence, la communication, l'information
peuvent être dans ces outils-là. Est-ce que
vous êtes d'accord, vous pensez que de mettre ce genre d'information là dans
des rapports annuels serait justement un outil pour arriver à cet
objectif?
Mme Saulnier (Véronique) : C'est une
des motivations pour lesquelles on a fait cette proposition-là, parce
qu'effectivement ça devient accessible, c'est public, les rapports annuels, et
effectivement c'est très transparent.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Taillon. Non? Ah non?
Mme Jean : J'aurais encore une
question.
Le Président (M. Ouellette) : Ah!
Bien, Mme la députée de Chicoutimi. Excusez.
Mme
Jean : Ma question était justement au niveau du Commissaire à
l'admission, dont vous avez des réserves, et le pôle de coordination qui est proposé. Vous mentionnez que la
problématique que vous voyez la plupart du temps, ce n'est pas une problématique d'admission, mais on
se retrouve avec les mêmes problématiques de stages non disponibles. Est-ce que vous ne croyez pas qu'avoir une table
de coordination où les différents intervenants pourraient discuter de
ces problèmes-là pourrait apporter une solution à la problématique que vous
rencontrez ou que les nouveaux membres rencontrent, c'est-à-dire accéder à des
stages?
• (10 h 50) •
M. Gravel
(Sylvain) : Je vais vous répondre là-dessus. Le problème du stage,
c'est le travail. Les huissiers sont des
travailleurs autonomes, il y a des bureaux d'huissiers, tout ça. On ne peut pas engager de stagiaire si on n'a pas
de travail à lui donner, ça ne donne rien.
Engager un stagiaire, lui faire lire le journal, ce n'est pas lui rendre
service, et n'avoir rien à lui donner comme travail lorsqu'il sera un
professionnel, ce n'est pas lui rendre service non plus.
C'est le
problème qui se pose dans notre profession. Ce n'est pas un problème d'immigré,
de personne qui a suivi ses cours
ici, tout ça, là, c'est le problème de travail. On est une petite profession,
on relève du Code de procédure. C'est tout ça qui fait en sorte qu'on a
des stages à offrir ou non.
Dans ma pratique privée, on prend habituellement
un stagiaire qui est au cégep, on lui fait faire son stage d'étudiant chez nous, après ça on lui fait faire
son stage d'huissier chez nous et on le garde comme huissier. On ne
prend pas un stagiaire pour, après son
premier stage, lui dire : Je n'ai plus besoin de toi, puis tu as travaillé
gratuitement pour moi ou à très peu
de salaire pour moi pendant six mois. Lorsque les bureaux d'huissiers prennent
un stagiaire ou quelqu'un d'autre, ils s'assurent habituellement de
pouvoir le garder après.
Mme
Jean : Pensez-vous que d'avoir un pôle de concertation ou de
coordination tel qu'il est proposé, où justement les différents
ministères seraient là, dont le ministère de l'Immigration, pourrait être une
plateforme qui permettrait d'indiquer aux gens qui font de la sollicitation, ou
qui informent, ou qui promeuvent le Québec pour les immigrants d'informer qu'en tant qu'huissier, bien, peut-être
qu'il n'y a pas de place ou... peut-être que ça pourrait être une table
qui dit : Bien, regarde, on va
réorienter? Pensez-vous que ça pourrait être utile, justement, pour ne pas
qu'un nouvel arrivant arrive ici en
pensant : Oui, j'ai fait mon cours, j'ai mon équivalence, et tout d'un
coup, oups! je ne peux pas parce qu'il n'y
a pas de stage? Pensez-vous qu'un pôle comme ça pourrait être une table qui
permettrait ces échanges d'information là et de bien informer le nouvel
arrivant avant que lui puisse prendre sa décision de venir au Québec?
Le Président (M. Ouellette) : En
30 secondes, Me Saulnier.
Mme
Saulnier (Véronique) : Très rapidement. En fait, moi, ce que j'ai
compris, c'est que le pôle existe déjà, cette structure semble exister déjà. Les résultats, semble-t-il, ne sont
pas encore visibles, mais je crois que cet organisme ou ce comité existe déjà. Donc, de l'inclure à la
loi, en plus de tout l'imbroglio qu'on a soulevé dans notre mémoire sur les pouvoirs de chacun... Ça, vraiment, c'est
quelque chose qui nous a beaucoup interpelés. Les pouvoirs de l'office,
les pouvoirs du commissaire, les pouvoirs du
pôle de coordination, qui a le dernier mot là-dedans, les ministères
concernés qui doivent se rencontrer puis qui sont
chapeautés par le Code des professions, alors que... En tout cas, là, ça nous a
semblé très, très, très nébuleux. On pense qu'une structure, oui, ça devrait
exister, mais pas nécessairement encadré comme ça l'est dans le Code des
professions actuellement.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui.
Me Saulnier, M. Gravel, M. Dubé, bonjour. Merci pour votre
contribution aux travaux de la commission.
D'entrée de
jeu, à la page 14, là, de votre mémoire, vous dites, bon : Les ordres
professionnels ne devraient pas participer à une entreprise ayant un but
lucratif. À quoi vous faites référence?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Saulnier.
Mme
Saulnier (Véronique) : Je réponds parce que j'étais là en 2014,
j'étais là au moment du déclenchement de l'enquête par l'Office des professions, qui a fait suite à une demande
d'intervention que j'ai personnellement adressée à l'Office des professions avec d'autres personnes.
Effectivement, le problème principal qui est survenu à la Chambre des huissiers de justice et qui était l'objet
principal de notre demande d'intervention à l'Office des professions, c'est que
la Chambre des huissiers de justice a été, de 2010‑2011, dans ce coin-là,
jusqu'à avril 2016, propriétaire ou actionnaire à 51 % d'une entreprise à
but lucratif puis qui s'appelait Huissiers Québec. Pouvez-vous me rappeler
votre question, Me Jolin-Barrette?
M.
Jolin-Barrette : Bien, en
fait, concrètement, c'est parce que je comprends la situation particulière
qu'il y a eu à la chambre, mais il y a d'autres ordres professionnels
qui ont des activités connexes, supposons, et il y a certains ordres
professionnels qui sont venus nous dire... puis, je pense, la Fédération,
aussi, des chambres de commerce est venue nous dire : Bien, peut-être
qu'on devrait modifier la définition dans le Code des professions sur quelle
est la mission d'un ordre professionnel. Il
y en a qui disaient : Bien, écoutez, présentement c'est principalement la
protection du public. Il y en a qui
disaient : Bien, peut-être qu'on devrait simplement biffer puis dire
«uniquement». Donc, je veux savoir : Est-ce que ça s'inscrit, votre
commentaire dans votre mémoire, en lien avec cette assertion-là?
Mme
Saulnier (Véronique) : Tout à fait, tout à fait. On est d'opinion qu'effectivement la mission
d'un ordre professionnel, c'est la protection du public, ça devrait
demeurer la protection du public. Et le fait d'être détenteur en partie
ou en totalité d'une entreprise à but lucratif, ça nous semble totalement en
contradiction de la mission première d'un ordre professionnel.
Et, je vous
dirais, dans le cadre de l'enquête et avant l'enquête, sur tous les autres
sujets, concernant la gouvernance, concernant
certains problèmes de structure organisationnelle, l'ensemble
des dirigeants de l'ordre, c'est-à-dire la directrice générale, le président de
l'époque, le président Gravel également, en ce moment, est très... travaille très fort pour redresser la situation. Le conseil d'administration, à
l'époque, tout le monde travaillait dans le même sens, du redressement.
Le seul point d'achoppement qui a perduré un
petit peu plus longtemps, jusqu'en avril 2016, c'est la détention des parts
d'Huissiers Québec. Et, à ce sujet-là, ça
nous mène aussi aux pouvoirs de l'office, qui avait suggéré, selon les pouvoirs
qu'il détenait dans le Code des
professions à l'époque... qui avait suggéré à quelques reprises à l'ordre de se
départir des parts d'Huissiers Québec,
mais malheureusement il y avait une résistance de certaines personnes. Et c'est
au déclenchement de l'enquête, en
tout cas, qu'en avril 2016 le C.A., par une résolution unanime, a décidé de se
retirer d'Huissiers Québec, finalement.
Mais, si c'était écrit, s'il y avait
des activités incompatibles d'un ordre
professionnel, si on parlait de la
mission de protection du public, première mission, c'est ça, et en dessous,
bien, voici les activités incompatibles, si c'était écrit textuellement, bien, il n'y en aurait pas eu, de débat, dans notre ordre professionnel. Parce que
ça créait des débats : On a le
droit, on n'a pas le droit. On avait des avis juridiques d'un côté, on avait des avis juridiques de l'autre
côté. On avait l'office qui disait non, on avait des gens... Donc, c'est
pour ça que la proposition est là, activités incompatibles, puis celle-là,
bien, détenir des... je ne sais pas comment...
M. Jolin-Barrette : ...vous pensez
qu'on devrait plutôt le lister, dans le fond, faire une liste des activités
incompatibles?
Mme Saulnier (Véronique) : C'est une
proposition qu'on fait.
M. Jolin-Barrette : Parce qu'il y a
certains ordres professionnels, dans le fond, qui ont certaines activités
commerciales mais qui ne sont pas nécessairement conflictuelles avec leur
mission, supposons.
Mme
Saulnier (Véronique) : Tout à fait. Parce que les structures sont conformes à la mission de
protection du public, les structures
sont à côté de l'ordre professionnel.
On connaît d'autres ordres, on connaît
le Barreau du Québec, avec la Corporation de services, bon, tout ça.
Mais, nous, ce n'était pas structuré comme ça.
M.
Jolin-Barrette : Sur la
question des tiers, vous ne l'abordez pas dans le mémoire, par contre,
supposons, les optométristes sont
venus nous en parler, sur le fait que... Et, la pratique de l'activité
d'huissier, dans le fond, il y a
certains huissiers qui sont regroupés dans
des plus grands groupes. Est-ce que vous pensez qu'on devrait également
viser, par le Code
des professions, de mettre des dispositions qui permettraient au syndic d'un ordre d'aller
toucher les tiers, d'aller toucher,
supposons, les entreprises ou les regroupements qui chapeautent, dans le fond, les huissiers qui font un exercice commun de leur pratique?
M. Gravel (Sylvain) :
Personnellement, moi, je crois que oui. Et là-dessus je vais vous laisser aux
dires de M. Dubé, qui a été syndic pendant plusieurs années.
Le Président (M. Ouellette) :
30 secondes, M. Dubé
M. Dubé
(Ronald) : L'économie du
code prévoit que le syndic enquête sur un professionnel, donc, tout ce
qui concerne les entreprises, les personnes morales, ces choses-là qui peuvent
être en corrélation avec l'exercice de la profession,
je ne pense pas que le code permette au syndic d'intervenir. Et, dans
l'hypothèse où le code serait modifié dans ce sens-là, le syndic va
appliquer la loi.
M. Jolin-Barrette : Est-ce que vous
l'accueilleriez favorablement?
M. Dubé
(Ronald) : Bien, si c'est la
volonté du législateur, le syndic va appliquer la loi qu'il a à
appliquer. Mais, pour l'instant, nous, on n'a pas réfléchi à est-ce que
ça devrait l'être, oui ou non, ou soulevé la question. Elle est intéressante,
elle mérite d'être étudiée.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. le député de Borduas. M. Sylvain Gravel, Me Véronique Saulnier, M. Ronald Dubé, représentants de la Chambre des
huissiers de justice du Québec, merci d'être venus déposer à la commission
parlementaire.
Je suspends
quelques minutes. Je demande à l'Ordre des hygiénistes dentaires du Québec
de s'avancer en avant, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 11 heures)
(Reprise à 11 h 4)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
recevons maintenant l'Ordre des hygiénistes dentaires du Québec et sa présidente, Mme Diane Duval, qui va nous présenter
la personne qui l'accompagne. Vous avez 10 minutes pour nous faire votre
présentation, et après il y aura des échanges avec Mme la ministre et les porte-parole
des deux oppositions. Mme Duval, à vous la parole.
Ordre des hygiénistes
dentaires du Québec (OHDQ)
Mme Duval (Diane) : Alors, merci, M.
le Président. Alors, je suis accompagnée de Me Janique Ste-Marie, directrice
générale et secrétaire de l'ordre.
Alors, Mme la ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, M. le
président de l'office, alors,
merci de cette invitation à vous présenter,
en fait, qui nous donne l'opportunité de vous présenter un bref mémoire, qui va
droit au but, au fond, des commentaires que nous avons à formuler sur la loi, le
projet de loi n° 98.
D'entrée de
jeu, je vous dirais que nous saluons les travaux du Code des professions qui
ont pour but... en fait, qui ont pour
objectif de donner aux ordres professionnels des outils pour accomplir mieux
leur gouvernance et leur mission de protection
du public. Alors, pour nous, nous saluons les travaux de la commission
parlementaire sur le projet de loi n° 98.
D'entrée de jeu aussi et d'emblée, je vous dirais
qu'on s'associe aux commentaires du
CIQ. Nous avons participé, ces deux,
trois dernières années, à l'ensemble des travaux qui ont eu lieu et on est à
même de témoigner du vaste consensus concernant
l'ensemble des commentaires aux diverses dispositions que présente la loi, sur
le projet de loi n° 98. Donc, d'entrée
de jeu, on s'est dit, à l'ordre, qu'on irait davantage témoigner... d'être un
peu plus pratiques que juridiques, et donc de témoigner en espérant qu'on puisse présenter ou ouvrir de nouvelles
pistes de réflexion aux membres de la commission.
Alors, ça
fait maintenant plus de 40 ans, on est nés en même temps que le code,
40 ans que l'Ordre des hygiénistes dentaires assure... s'acquitte
de son mandat de protection du public auprès de 6 200 hygiénistes
dentaires. Et donc, le système
professionnel, on vient en témoigner pour apporter des commentaires, en tout
cas, des éclaircissements concernant notre cheminement à ce titre-là.
D'entrée de
jeu, je vous dirais qu'on va vous amener — vous allez voir la pédagogue, je suis
enseignante — à la page 7
de notre mémoire, où on parle de l'article... je vais aller droit au but,
l'article 16.10.1, qui précise que le commissaire peut «donner à tout ordre professionnel,
ministère, organisme, établissement d'enseignement ou autre personne des
avis ou lui faire des recommandations sur toute question relative à l'admission
à une profession». Bien sûr, on a plusieurs questions qui se posent. Pour nous,
je vous dirais qu'en introduction c'est très important de préserver l'autonomie
et l'autorité des ordres en matière
d'admission professionnelle. Bien sûr, la venue ou l'élargissement du rôle du
commissaire aux plaintes à commissaire à
l'admission nous interpelle, nous inquiète. Les questions qu'on se pose, on
vous les a exposées ici, c'est :
Est-ce que le commissaire pourra, par exemple, avoir la possibilité d'enquêter,
de surveiller, de prescrire? Est-ce qu'il
va pouvoir recevoir ou examiner une plainte non seulement d'un individu, mais
aussi d'une institution? Est-ce que le commissaire
sera en autorité d'imposer, de proscrire un examen qui est mis en place à
l'admission par un ordre professionnel?
Est-ce qu'il aura l'autorité d'imposer ou de proscrire cet examen-là? Est-ce
qu'il se retrouvera à gérer des problématiques
en lien avec le processus des agréments canadiens? Parce que c'est un concept
qu'on veut venir... qu'on veut
discuter avec vous, celui de la mobilité de la main-d'oeuvre. Est-ce qu'il
intervient dans le processus déjà balisé par des ententes pancanadiennes
sur la mobilité de la main-d'oeuvre? Ce sont des questions qui nous interpellent
beaucoup en raison principalement, je dirais, de deux volets de notre
organisation, de notre ordre professionnel.
• (11 h 10) •
Le premier,
parlons d'intégration des personnes immigrées. À l'Ordre des hygiénistes
dentaires, c'est un dossier qu'on connaît
bien depuis 20 ans, depuis même 30 ans, depuis les tout débuts de sa
création. L'ordre accueille les dentistes étrangers, formés à
l'étranger. C'est nous, ils viennent cogner à notre porte. Depuis environ, je
dirais, à peu près sept, huit ans, depuis les années 2007, on a un processus
qui a très bien fonctionné en réunissant les acteurs du système. Donc, on s'est assis à une table, maisons
d'enseignement, ministère de l'Immigration et des Communautés
culturelles ainsi que notre ordre professionnel, pour trouver une solution à
l'arrivée quand même assez massive de dentistes formés à l'étranger, tant et si bien que le cégep de
Maisonneuve — parce
qu'il y a neuf cégeps qui offrent le programme en hygiène dentaire — a parti un cours, une attestation collégiale
d'appoint. Ces dentistes-là, ces professionnels-là sont évalués au niveau de leurs compétences sur la radiographie,
sur la radiologie et sur la dentisterie opératoire, mais, lorsque le
profil est similaire, une cohorte est partie
au sein du cégep de... au programme d'hygiène dentaire du cégep, où on va
chercher les compétences qu'ils n'ont pas.
Parce
qu'il faut démystifier un peu la profession
d'hygiéniste dentaire. Quand vous arrivez avec des dentistes de l'étranger, qui proviennent de l'Algérie, qui
proviennent de la Syrie, de l'Irak, de l'Iran, de la Roumanie, vous
n'avez pas de système professionnel comme ici, au Québec, donc il y a
tout un rouage d'accueil qui doit se faire puis une compréhension. Quand ils arrivent ici, au Québec,
pour eux, ils viennent chercher un permis de travail. C'est différent, ça, un
permis de travail, qu'un permis
d'exercer une profession. Donc, ils viennent chercher un permis de
travail. Or, ils s'aperçoivent que la profession d'hygiéniste dentaire,
qui d'ailleurs n'existe pas dans ces pays-là, c'est bien différent que la profession
de dentiste. Alors, ce qu'on fait, c'est
qu'on les accueille, on les rencontre en grands groupes, on leur explique le
cheminement, présente leur dossier des
équivalences, qui est étudié au sein du comité et des responsables enseignants
dans ce dossier-là. Et là, par la
suite, certains vont décider soit de faire le cours de formation
en entier, les trois années, ou de s'insérer à travers la cohorte, et qui s'est donnée par ailleurs aussi à Saint-Hyacinthe, aussi à Trois-Rivières, il y a eu même des tentatives du côté de Chicoutimi.
Ça va relativement bien, je vous dirais. Je vous
dirais que l'obstacle le plus important qui est rencontré, c'est les budgets.
Former un hygiéniste dentaire, ça coûte des sous, alors il faut qu'il y ait...
Parce qu'il y a des contraintes budgétaires que les cégeps doivent rencontrer, alors on leur
impose cela aussi. Alors, il faut penser que les obstacles aux stages
sont aussi des obstacles d'ordre budgétaire. Ça peut se présenter aussi dans le
réseau de la santé. Pour nous, ça se présente au niveau des institutions
d'enseignement, pour le moment.
Alors, ce
travail-là, on a réussi à le faire grâce à une table de concertation qui a eu
des pouvoirs d'action, pas juste de
recommandation. Donc, on est la preuve que ça fonctionne. C'est pour ça, je
dirais, que nous abondons tout à fait dans le sens du CIQ, où on a dépassé, là, le fait de discuter des problèmes, on
les règle, dans ces tables de concertation là. Et on recommande qu'il y
ait vraiment un comité qui soit formé, intersectoriel, qui soit balisé dans le
Code des professions et qu'il soit permanent, pour agir à ce niveau-là. Donc,
pour nous, ça a très bien fonctionné de cette manière-là.
Donc, on ne
recommande pas l'élargissement du commissaire. On trouve qu'il fait un
excellent rôle au niveau des plaintes.
D'ailleurs, ça nous a permis plus de transparence au niveau de notre site
Internet, dans le but de faire connaître toutes les démarches que
peuvent entreprendre les gens quand ils viennent au Québec et comment on
procède pour l'étude de leurs dossiers. Donc, ça, ça a été davantage décrit au
sein de notre site, et ça a été important. Ça, c'est un premier constat.
L'autre constat que je vous dirais, c'est la
mobilité de la main-d'oeuvre. Le Québec forme pas loin de 25 % des
hygiénistes dentaires canadiens. Près de la moitié, pas loin, sont formés en
Ontario; le reste, c'est le Canada en entier. Donc, c'est ici où on retrouve
neuf écoles, près de 18 écoles en Ontario et ailleurs dans le reste du Canada.
On a une
entente sur la mobilité de la main-d'oeuvre permis sur permis. Or, ici, au
Québec, contrairement à ailleurs dans
le reste du Canada... À l'admission, pour obtenir un permis d'exercice, dans
les autres provinces, il y a un double standard
qu'il faut atteindre, que l'ordre demande. Le premier, c'est qu'il faut être à
l'intérieur d'un programme agréé par la Commission d'agrément dentaire
canadien, ça, c'est d'une part, et, d'autre part, il y a un examen d'admission.
Ici, au Québec, il n'y a pas d'examen
d'admission, sauf que je vous dirais qu'on a bien tiré notre épingle du jeu, et
ils ont accepté, dans l'accord de...
l'entente de la mobilité de la main-d'oeuvre, autour des années 2005, que nos
programmes, au fond, d'hygiène
dentaire soient agréés. «Agréés» veut dire aussi que cette commission-là...
Parce que, vous savez, quand on parle de compétences professionnelles, c'est plus d'une centaine... un
référentiel d'une centaine de compétences qui existent au Canada, puis ce sont les mêmes, permis sur permis,
et la commission d'agrément nous permet de rendre uniforme le contenu.
On n'est pas là pour qui enseigne. Dans ce sens-là, il y a la commission sur l'évaluation des apprentissages, le qui, le comment,
tous les processus de reddition, d'évaluation, etc. Mais, le regard que jette
l'ordre sur le quoi, les compétences, il faut
se rappeler une chose bien importante, c'est que les cliniques d'hygiène
dentaire sont à l'intérieur des cégeps, c'est une particularité de milieu de
stage. Quand nos hygiénistes dentaires s'en vont en stage en santé
publique, que ce soit dans le
cadre des CLSC, bon, via les écoles,
les CHSLD, ce sont des milieux qui sont déjà agréés, ça; nous, ce
n'est pas le cas. Mais pourtant les
patients, les clients se présentent à la clinique d'hygiène dentaire. Alors,
les participants à la formation des hygiénistes dentaires, on est soumis
aux mêmes règles éthiques, déontologiques, écriture au dossier, trousse d'urgence, accès aux personnes handicapées, stationnement, voyez-vous, normes et standards
d'asepsie, normes et standards de radiologie. Tout
ça, on est tenus avec ça. Et, pour nous, c'est quand même un moyen d'assurer
cette uniformité-là, sans pour autant, pour le moment, imposer...
Le Président (M. Ouellette) :
Mme Duval...
Mme Duval (Diane) : On est-u déjà à
10 minutes?
Le
Président (M. Ouellette) :
Ah! vous êtes dépassé 10 minutes, puis Mme la ministre a été très
magnanime de prendre sur son temps. Je pense que c'était très intéressant,
c'est pour ça que je ne vous ai pas coupée, mais je vais demander à Mme la
ministre d'entreprendre un échange avec vous, Mme Duval.
Mme Vallée : Merci,
M. le Président. Alors,
Mme Duval, bienvenue. Un plaisir de vous revoir. Mme Ste-Marie,
alors, bienvenue.
Écoutez,
c'est certain qu'il y a plusieurs éléments de votre mémoire qui ont suscité notre intérêt.
Vous étiez sur le rôle du processus
de reconnaissance, alors on va poursuivre. Vous étiez... Bien, je pense
que vous n'étiez pas très loin.
À la
page 9 de votre mémoire, vous mentionnez que «les processus de reconnaissance des équivalences de diplôme et de formation sont enchâssés dans
les règlements [et] les normes d'équivalence. Les ordres professionnels doivent
appliquer la réglementation de façon
objective [...] uniforme. L'ordre tient à témoigner de l'importance de
l'expertise des ordres dans l'analyse
des compétences [qui mène] à la reconnaissance des équivalences de diplômes et
de la formation des candidats. Pour
notre ordre, l'évaluation et l'analyse des compétences d'un candidat sont
assurées par des membres du corps enseignant en hygiène dentaire.»
Le processus de reconnaissance des équivalences,
il est actuellement sous le regard du commissaire, le commissaire aux plaintes. Ça ne semble pas poser de problème,
au contraire, parce que je pense que
vous avez souligné le bon travail du
commissaire et la bonne mise en oeuvre des dispositions qui ont été adoptées il
y a six ans, et justement le fait que
ce processus-là de reconnaissance soit sous le regard du commissaire permet de
mettre en place une assurance qualité, je dirais, et un regard qui est
plus global.
Donc, moi, j'essaie de comprendre... Puis vous
êtes plusieurs ordres à avoir formulé vos préoccupations de différentes façons, là. Et je pense que tout le
monde ici était passionné, parce qu'on sent la passion qui vous anime,
lorsque vous parlez de votre ordre, ce n'est
pas la première fois qu'on se rencontre, et puis je pense que c'est contagieux.
Mais en quoi ce serait différent si le processus d'admission des personnes qui
sont formées au Québec était assujetti au commissaire
ou... Parce que les deux processus, dans le fond, sont, à quelque part,
intimement liés. C'est un processus d'admission,
et l'objectif derrière l'élargissement des rôles du commissaire, c'est
d'assurer, entre autres, une équité. Et on a un processus qui a été mis en place, qui va bien. Maintenant, à partir
du moment où on élargit, en quoi le processus... en quoi ça deviendrait compromettant pour
l'indépendance des ordres? Parce qu'on s'entend que vous avez soulevé
certaines questions. Là, il n'est pas
question, pour le commissaire, d'imposer quoi que ce soit. Ce que le
commissaire détient, c'est un pouvoir
de recommandation; vision globale, mais un pouvoir de recommandation, pas
question de venir imposer à un ordre de modifier un examen, par exemple,
là, c'est un pouvoir de recommandation. Donc, j'essaie de comprendre, cet
élargissement-là, en quoi ça affecte et en quoi ça ne pourrait pas être un plus
pour notre système professionnel.
• (11 h 20) •
Mme Duval (Diane) : Concernant...
Quand vous avez parlé de, bon, assujetti, moi, je pense que l'ordre professionnel doit garder le plein contrôle des admissions, il doit être complètement autonome et déterminer, s'il le veut, aussi, pour des raisons qu'il doit justifier par mémoire puis par démarches, si d'intérêt de protection
du public il est requis d'avoir un examen à l'admission, de s'assurer
que les cégeps soient agréés.
Nous avons eu
des pourparlers, puis la Fédération des cégeps viendra témoigner aussi, parce
qu'elle est censée venir à la
commission... donc, nous avons eu aussi des pourparlers avec les cégeps, qui
rencontrent, eux autres aussi, des contraintes
budgétaires, et certains, présentement, ont laissé tomber cette espèce de
requête de l'ordre de s'assurer que les cégeps soient agréés. Et ça, cette démarche-là s'est faite, puis on
verra comment la fédération l'articulera, mais on pose beaucoup de
questions d'ordre budgétaire, de droit; si on émet le permis, ça devrait être
suffisant pour un ordre professionnel à partir du moment où il y a des
compétences qui sont de prescription ministérielle, que ça, ça devrait s'arrêter là et que nous, on devrait accueillir
les gens sans autre demande particulière lorsqu'elles sont justifiées dans
la mesure de la protection du public. Et
c'est là où on se dit : On ne voudrait pas qu'un tiers arrive...
justement, un tiers arrive dans un
problème plus complexe, qui est capable d'être réglé à une table de
concertation entre les personnes... que ce soit réglé par un tiers qui
se fait le représentant d'une institution, parce que la Fédération des cégeps
se positionne dans ces dossiers-là aussi.
Alors, pour nous, c'est toute l'entente de la mobilité de la main-d'oeuvre qui
est mise en péril ici. Et, pour ça, pour nous, on se dit : Bien,
jusqu'où on ouvre une porte ou, je dirais, qu'on commence à mettre en place des
mécanismes où l'ordre, en amont, n'est plus,
je dirais, en autorité de faire respecter les règles d'admission requises
par leur profession?
Alors, on ne
voit pas, effectivement, en quoi le commissaire va ajouter à quelque chose qui
peut se régler par un comité
sectoriel qui serait balisé dans le Code des professions et qui amènerait des
solutions certaines. Parce qu'il faut voir
que, dans l'air aussi, il y a bien des collèges qui remettent en question aussi
les examens. Alors, il y a beaucoup de processus, là, qui sont
présentement, je vous dirais, pour des contraintes budgétaires, surtout pour
des contraintes budgétaires, remis en
question, alors que nous, on dit : Il n'y a pas de processus qui doit être
différent, basé sur la mobilité de la
main-d'oeuvre, pas plus qu'il n'y en a dans les contraintes qu'on peut avoir
vis-à-vis... Tous nos admis... Quand on dit «contraintes», toutes les conditions qu'on peut poser comme ordre
professionnel vis-à-vis les admissions, les admissions, même, de nos Québécois,
doivent être les mêmes, parce que tout ça, avec la vue d'ensemble que nous
avons, en vue de la protection du
public, moi, je pense qu'il faut... pas «je pense», l'ordre est ferme qu'il
faut garder absolument
le contrôle sur les admissions, et il
doit se faire en concert, avec une démarche concertée avec les partenaires. Alors,
on ne voit pas ce que le commissaire, avec une vue, comme vous dites,
macro qu'on a, qu'on a cette expertise-là à l'ordre... quelle vue macro autre
qu'une table sectorielle ne pourrait pas régler.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée : D'où le pôle.
Mme Duval
(Diane) : Bien, d'où le pôle
fonctionnel, d'où le pôle... d'où une table de décision comme on l'a
vécu, nous, et non pas chargée de faire des commentaires, des recommandations. Il
faut s'assurer que les gens travaillent ensemble.
On peut comprendre la dynamique plus complexe dans le réseau de la santé, pour
les stages, avec les contraintes qu'on vit aujourd'hui, avec les
professionnels, tout ce qui se passe dans le réseau, ça, on le comprend très
bien, les difficultés, mais ces difficultés-là ne sont pas insurmontables et
peuvent être menées par un comité sectoriel de...
Mme Vallée :
Mais j'ai tellement l'impression... Je vous écoute et j'ai l'impression que
vous prenez des termes différents, mais vous dites la même chose, vous dites la même chose que nous, dans le sens que l'objectif
du commissaire, c'est d'identifier les difficultés rencontrées par celui
ou celle qui aura requis son intervention, qui aura requis son
expertise.
Évidemment,
vous avez mentionné... Vous questionnez, dans votre mémoire : Est-ce
qu'une institution pourrait s'adresser
au commissaire? Là n'est pas le rôle
du commissaire. Le rôle du commissaire, c'est d'être là pour des individus
et non pour des institutions. Ça fait que,
là-dessus, je tiens à vous rassurer, là, il ne doit pas servir de commissaire
pour une institution. Je pense que
vous le mentionnez au début de votre mémoire... ou à la page 7, je crois. Mais, après ça, une fois que le commissaire est saisi d'un enjeu, qu'il a
émis ses recommandations, le pôle de coordination, qui pourra
s'adjoindre des organismes de façon
ponctuelle, selon l'enjeu soulevé, est justement cette table, ce lieu, ce comité, peu importe,
ce lieu de rencontre où les acteurs sont appelés à trouver et à mettre en
oeuvre une solution.
Il y a une
recommandation x qui est formulée. La recommandation x peut trouver
une mise en oeuvre assez simple comme
elle pourrait amener certaines personnes à trouver un autre véhicule pour la
mise en oeuvre. Mais les organismes autour de la table ont à échanger.
Donc,
d'aucune façon l'autonomie des ordres, l'autonomie universitaire n'est mise à
mal dans ça, parce que les organismes,
les ordres font partie de ce forum de discussion. Et d'aucune façon le
commissaire n'a un pouvoir d'imposer une solution à l'ordre ou à l'un
des partenaires.
J'ai
l'impression que l'on dit la même chose, peut-être que le choix des mots ou la
façon de l'exprimer est différent, mais,
lorsque je vous entends mentionner cette préoccupation que vous avez et qui est
celle de tous les ordres, d'assurer la protection
du public, elle est là, parce qu'évidemment c'est en trame de fond. Le
commissaire ne peut d'aucune façon venir occulter cet enjeu de
protection du public.
Mais, à partir du moment où la protection du
public est garantie, mais que subsistent un certain nombre de difficultés, comment pouvons-nous répondre à ces
enjeux-là? Comment pouvons-nous nous assurer que nous pourrons, au Québec, avoir... pouvoir compter sur toute la
main-d'oeuvre qualifiée dont nous avons besoin? Parce que c'est un peu
ça, les enjeux. Et les différents cas, qui ont été fort médiatisés, au cours
des dernières semaines, des derniers mois, nous laissent toujours planer qu'il y a des gens qualifiés qui, malgré les
processus en cours, ont de la difficulté à intégrer le réseau
professionnel, et peut-être que, dans nos façons de faire ou dans nos façons de...
notre interrelation, il y aurait des choses à améliorer.
Je pense que
de maintenir un statu quo, ça ne nous amène pas bien loin, mais, de revoir nos
façons de faire, je pense que c'est
tout à fait légitime et justifié, et d'autant que cette autonomie des ordres,
bien, c'est quand même un pouvoir qui est
délégué par le gouvernement aux ordres professionnels, c'est quand même... Et
je ne crois pas que ce soit déraisonnable que d'assujettir... pas
d'assujettir mais de permettre au commissaire d'avoir un regard sur l'ensemble
des admissions.
Le Président (M. Ouellette) :
30 secondes, Mme Duval.
Mme Duval
(Diane) : 30 secondes? Bien, écoutez, je pense que... Au fond, je
vous retourne la question, dans la mesure
où je me dis : Nous avons posé des gestes qui ont fonctionné et qui ont
réuni des acteurs qui ont des pouvoirs de décision. Alors, pour nous,
c'est important de répéter ça.
Vous dites
qu'on a médiatisé, effectivement, certains cas. Je ne crois pas que les ordres
professionnels... Qu'ils fassent des
bons coups ou des mauvais coups, ils n'auront jamais bonne presse, parce que ce
sont... Ils n'ont pas nécessairement bonne presse, on publie plus
souvent les mauvais coups que les moins bons coups.
Alors, cela dit, oui, je pense qu'on lève la
main, à l'Ordre des hygiénistes dentaires, puis on l'a prouvé, on va participer à la vie sociale du Québec, la vie
économique du Québec avec les nouveaux arrivants. C'est intéressant pour
le Québec. Ça prend de la relève, on a une
population qui vieillit. Mais tout ce que font les ordres professionnels, le
nôtre, en tout cas, c'est d'assurer de
mettre tous les mécanismes en place pour s'assurer que, finalement, il n'y ait
pas quelqu'un qui paie au bout de la ligne. Puis pourquoi le système
professionnel existe, c'est justement pour le patient, le client.
Alors, on dit
les mêmes choses, mais nous, on parle vraiment d'une table où ça réunit les
gens qui ont les solutions dans les
mains tout de suite, et non pas partir en recommandation et revenir. Ça a
marché. Alors, on est la preuve que ça fonctionne et on croit que ça
peut fonctionner pour d'autres ordres professionnels aussi.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme Duval. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors, bonjour, Mme Duval. Bonjour,
Mme Ste-Marie. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci de commenter, de partager avec nous votre
expérience et votre opinion sur ce projet de loi là, qui est très
important.
Quelque chose que j'ai tenté de comprendre, vous m'expliquerez
ça : Le profil ou le parcours d'un nouvel arrivant qui est dentiste
ou qui se qualifie comme dentiste, est-ce que le parcours privilégié de ce
nouvel arrivant là est de le réorienter comme hygiéniste dentaire?
• (11 h 30) •
Mme Duval (Diane) : Je vais laisser
la parole à Me Ste-Marie, si vous permettez, pour répondre sur ce
parcours-là.
Le Président (M. Ouellette) : Me
Ste-Marie.
Mme Ste-Marie (Janique) : Oui,
bonjour. En fait, on l'ignore. Tout ce qu'on sait c'est qu'on a eu, depuis 2007‑2008...
Bien, depuis toujours, depuis une vingtaine d'années, là. Moi, ça fait sept ans
que je suis à l'ordre, mais il y a des gens qui sont là depuis 25 ans, à
l'ordre, et qui me disent qu'il y avait déjà des demandes, il y a 25 ans, de
dentistes formés à l'étranger. Alors, on a toujours eu des demandes d'équivalence
de formation.
Ceci étant
dit, en 2007‑2008, là, il
y a eu, si on veut, plus de demandes,
une centaine de demandes par année, plus qu'une centaine de demandes par année. Alors, c'est là qu'on a mis en
oeuvre une formation peut-être plus d'appoint pour ces dentistes formés à
l'étranger là, où ils avaient accès plus rapidement au permis d'exercice.
Alors, en
amont, c'est des choix qu'ils font, soit de venir chez nous ou soit d'aller à
l'Ordre des dentistes. Alors, nous, ce n'est pas un questionnement,
comme tel. Nous, on reçoit la demande de procéder aux équivalences.
Alors, on a
tout un système, très bien organisé, de processus, d'analyse et on
fonctionne comme ça. Alors, si ce n'est
pas la formation d'appoint, qui, comme l'a dit Mme Duval, c'est une formation
qui coûte cher, alors c'est dans le permis éventuellement.
Mme
Jean : À la table de
concertation dont vous faites référence, est-ce que vous savez si le sujet a
été abordé, justement, vis-à-vis les nouveaux arrivants qui sont dentistes,
et que potentiellement ils sont réorientés pour devenir hygiénistes dentaires? Est-ce qu'ils ont été avisés? Est-ce qu'il y a
un lien entre ces gens-là qui veulent venir au Québec... qui pensent peut-être
être dentistes, puis finalement ils se retrouvent hygiénistes dentistes? Est-ce
que vous savez si, à la table de concertation, ça se parle?
Mme Duval
(Diane) : Bien, de toute
évidence... On s'imagine bien que ça doit se parler. Ils sont peut-être loin des compétences ou des argents requis, là, de l'argent requis pour faire
leur demande auprès des facultés et ils comptent travailler, ils ont des familles, ils comptent travailler en attendant,
donc il s'attendent rapidement à avoir... je vous reviens à la case départ, mais
un permis de travail, puis ce n'est pas de ça dont il est question.
Il s'agit d'avoir un candidat qui demande un permis d'exercer une
profession, avec tous les tenants et les aboutissants qu'on connaît, de
protection du public.
Alors, oui,
c'est certain qu'on discute avec eux, mais, à un moment donné, les
obstacles sont peut-être tels qu'ils décident de cheminer avec
nous, et nous les accommodons. C'est des bons accommodements, raisonnables, que
nous faisons, dans la mesure où on trouve les mécanismes qu'il faut pour servir
cette clientèle-là de nouveaux arrivants.
Mme
Jean : Merci. Concernant le
commissaire à l'admissibilité, dont vous n'êtes pas d'accord, vous êtes
d'accord avec la table de concertation ou
encore, comme le CIQ le propose, un pôle intersectoriel, parce que ça a
fonctionné chez vous, une personne comme le Commissaire à l'admission
qui ferait des analyses, des recherches, des enquêtes pour identifier des problématiques systémiques à
l'admission, vous ne trouvez pas que ça pourrait être intéressant, peut-être plus sous la forme d'un vérificateur général, pour être
capable de faire des rapports, justement, à la table de coordination, et qui pourrait, à ce moment-là, solutionner comme
problèmes... donc, quelqu'un qui regarde comment ça fonctionne au niveau de l'équité, est-ce qu'il y a des
problèmes systémiques ou est-ce qu'il n'y en a pas, et, s'il y en a, bien,
c'est de faire des rapports, justement, à la fameuse table?
Mme Duval
(Diane) : On ne voit pas, à
l'Ordre des hygiénistes dentaires, comment un ordre professionnel qui s'acquitte de sa mission, qui reçoit des demandes
d'équivalence, qui sont confrontés aux milieux de stage ne connaissent pas tous les problèmes que vous venez de dire. Ils
les connaissent parfaitement. Ils vont venir. Nous, on a expliqué nos
obstacles, ils vont le faire, mais ils les connaissent. Il n'y a pas... Ils
sont liés aux stages, ils sont liés aux contraintes budgétaires, ils sont liés aux
contraintes des ressources professionnelles disponibles, ils sont liés à des
circonstances... Ils les connaissent. Il n'y a pas d'identifications, à mon
sens, là, bien, qui ne sont pas connues des ordres professionnels.
Alors, votre question, c'est : Qu'est-ce
qu'il va venir identifier de plus que les ordres ne savent déjà?
Mme
Jean : Est-ce que
vous pensez que d'avoir un commissaire comme ça pourrait permettre de soulever
ce qui est connu déjà, de
le mettre en rapport avec l'encadrement qui est donné avec la loi, et qui permettrait de
mettre en lumière une problématique qui est peut-être connue, mais qui
n'a pas son moyen d'être mis en lumière?
Mme Duval
(Diane) : Bien, moi, je vous
dirais, c'est de créer, dans le système, un intermédiaire qui va
ralentir un processus. Pourquoi ne pas aller tout de suite vis-à-vis les acteurs, où le problème se pose, et revenir à
l'idée de se dire que... Un comité sectoriel qui réunit les acteurs, qui forcément sont
impliqués dans l'accueil et dans l'intégration des stages, ça demeure, à notre point de vue, la recommandation, qui a été faite du CIQ et qui est la nôtre, de mettre sur pied un
comité permanent sectoriel avec les acteurs. Pourquoi cet intermédiaire-là, qui
forcément a des budgets, hein, qui va... Ça ne peut pas être assorti autrement
qu'avec des budgets aussi. Alors, je préfère absolument qu'on les place au
service de cette table-là.
Mme Jean : Je pense que tu avais une
question.
Mme Lamarre : Oui. M. le Président...
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Taillon.
Mme Lamarre : Alors, Mme Duval,
Mme Ste-Marie. Bien, en fait, moi, je vous écoute et puis je me dis, effectivement : Où ça bloque? Et ça semble beaucoup
bloquer, puis là vous êtes plusieurs ordres à venir le dire, ça bloque au
niveau des stages, ça bloque au niveau du budget, ça bloque au niveau des
ressources humaines pour encadrer les stagiaires,
et ce ne sont pas nécessairement des dossiers sur lesquels les ordres ont des
leviers, ça me semble être beaucoup plus...
ça semble relever d'autres enjeux. Et là le pouvoir du commissaire semble
beaucoup s'intéresser aux ordres, on l'élargit également aux maisons
d'enseignement, mais le constat... Et vous semblez dire que les ordres ont déjà
des diagnostics par rapport aux motifs qui
font qu'il y a, en tout cas, cette résistance ou, en tout cas, cette difficulté
d'accès à des statuts professionnels. Donc,
vous, vous proposez vraiment qu'on aille en action, mais dans une action avec
les budgets qui vont permettre de régler les problèmes. Est-ce que je
vous comprends bien?
Mme Duval
(Diane) : Tout à fait, tout à fait. Et je vous dirais qu'on a même un
cégep qui s'est offert à accepter une
cohorte, et ce sont les personnes qui ont refusé parce que ça se passait à
Chicoutimi. Je peux comprendre qu'il y a des contraintes de stage, de lieu de stage auxquelles sont soumis plusieurs
de nos admis. Ils ne choisissent pas toujours le cégep où ils vont étudier non plus, hein, nos Québécois
et nos Québécoises. Alors, moi, je me dis : Il faut concentrer nos
énergies sur des tables qui ont le pouvoir
de décider et d'avoir les budgets pour aller de l'avant et trouver des...
Chacun doit trouver sa voie à travers ça, oui.
Mme
Lamarre : Peut-être que vous ne le savez pas, mais est-ce que vous
connaissez le budget qui a été octroyé au collège Maisonneuve-Rosemont
pour accueillir, en fait, cette cohorte avec la formation d'appoint
particulière, spécifique? Remarquez, je trouve ça... j'ai beaucoup, beaucoup de
respect pour la profession d'hygiéniste dentaire, je comprends juste mal que ce soit la principale option qu'on offre aux
dentistes. Je ne sais pas combien de candidats dentistes ont l'option de préserver leur titre de dentiste.
Et je trouve que c'est un beau choix, de choisir hygiéniste dentaire,
mais je ne voudrais pas que les gens le
fassent parce qu'ils n'ont pas d'autre option. Mais mettons que c'est à ça
qu'on arrive comme conclusion, là,
vous, vous avez eu, en tout cas, je pense, l'ouverture d'offrir, là, une
vingtaine de postes constamment. C'est quoi, le budget qui est
disponible au collège Maisonneuve, savez-vous, à peu près?
Mme Duval (Diane) : On n'a pas les
chiffres exacts, mais on avait déjà fait un calcul. Former un hygiéniste dentaire, au Québec, quand on prend l'ensemble
des ressources, le climat qui... la mise
en place, le matériel, la technologie et
tout, on n'est pas loin, avec les enseignements, là... c'est au moins
19 000 $ par personne, puis, je pense, ça ne comprend pas le corps enseignant comme tel, c'est
strictement le milieu clinique, là, le cubicule, la chaise, le matériel, le
matériel roulant et tout. C'est quand même beaucoup de sous.
Mme Lamarre : Merci.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme Duval, Me Ste-Marie, bonjour. Merci pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Sur la
question des lanceurs d'alerte, vous dites — et puis vous n'êtes pas le premier ordre
professionnel à nous le dire :
Bon, oui, l'immunité, mais il y a une problématique aussi au niveau du milieu
de travail. Est-ce que, si quelqu'un dénonce,
il va être protégé dans son emploi? Puis je pense que la profession
d'hygiéniste aussi, dans le fond, ça se fait beaucoup en cabinet ou
presque exclusivement en cabinet de dentisterie. Donc, comment vous voyez la
protection qu'on pourrait accorder, la protection supplémentaire en matière de
droit du travail?
• (11 h 40) •
Mme Duval
(Diane) : On vous la pose,
c'est certain, aussi. Je vais vous dire, les hygiénistes dentaires à 92 %
sont dans le cadre d'un cabinet dentaire, et
forcément, s'ils dénoncent une activité, un surtraitement ou une activité
illégale, bien, je vous dirais que la
plupart ne gardent pas leur emploi ou voire même sont stigmatisés, dans leur
région, parce qu'ils se parlent entre eux pour ne pas réengager cet
hygiéniste dentaire là. On en a, des cas d'espèce comme ça.
Alors, je pense qu'il faut garder son
indépendance professionnelle. Puis, le cadre de la modernisation de la profession, on l'a mentionné, la situation dans
laquelle est plongée l'hygiéniste dentaire à l'emploi du dentiste, c'est
quand même une situation exceptionnelle d'un
professionnel envers un autre, ce qui nuit à cette protection du public, nuit...
ou met l'emphase sur le droit de gérance. Il
positionne l'hygiéniste dentaire dans un contexte extrêmement difficile à cet
égard-là.
Donc,
le lanceur d'alerte, à moins d'être indépendant sur le plan professionnel, dans
le contexte actuel, je vais prendre vos solutions, parce qu'elles sont
très difficiles. Vous comprendrez que, même s'ils n'ont pas des noms, les soupçons que ça pourrait être un de nos membres
qui ait pu lancer une alerte à l'intérieur du cabinet, la relation
professionnelle de confiance est presque terminée en soi. Alors, il y a
l'hygiéniste dentaire qui quitte, c'est rarement le contraire.
M. Jolin-Barrette : Et, dans le
fond, ça fait partie un peu du cloisonnement de la profession. Supposons, en Ontario, les hygiénistes ont le droit d'ouvrir une
clinique, de faire de l'hygiène dentaire aussi. Et là on pourrait lier ça
aussi avec l'augmentation des amendes. Vous
nous dites : Bon, pour l'augmentation des amendes, il faut prendre en
compte peut-être le revenu gagné par
l'hygiéniste. Puis là, puisqu'elles sont en cabinet de dentisterie, elles se
retrouvent dans une situation où
elles sont salariées, dans le fond, elles ne sont pas travailleurs autonomes,
elles n'ont pas une entreprise. Donc, comment vous réconciliez tout ça?
Mme Duval
(Diane) : Bien, écoutez... Parce que, je dirais, vous avez mis un
petit peu la table sur l'histoire de la modernisation, parce que, là, c'est rendu complexe. Les amendes,
16 000 $ pour une pratique illégale, ça se voit, là. Puis ce
n'est pas des gens, là, qui ont des revenus, là... ils ont des revenus moyens,
de 40 000 $, là, puis c'est leurs seules conditions de travail. Alors,
nous, on dit : Attention, là! Ça doit s'ajuster au niveau du revenu de la
personne.
Mais, puisque
vous parlez de modernisation de la profession, je veux dire aux gens de la
commission qu'on a mis beaucoup
d'emphase sur certains problèmes qui ont été relevés dans le cadre de la
commission Charbonneau, qui nous laissent
entendre que ça prend des mécanismes plus importants de surveillance sur les
ordres professionnels. Moi, je vous dirais
que, quand on transporte un dossier comme celui du domaine buccodentaire sur la
place publique, dossier de modernisation
qui, il y a 20 ans, a causé un imbroglio au cégep où je travaillais, puis
on a été pris entre l'employeur et les dentistes
à contrat dans cette histoire-là, pour lequel l'Office des professions s'est
déplacé au cégep pour nous rencontrer en disant que ça allait se régler incessamment, eh bien, on est 20 ans
plus tard. Ça, là, le public n'est pas dupe. Quand on parle de
réputation et qu'on transporte sur la place publique des débats dans l'intérêt
du public, qui ne se font pas, et qui indirectement, pour le public, c'est vu
comme étant un monopole professionnel et du corporatisme, ça, ça entache le
système professionnel québécois. Et ça, on n'en parle pas assez, de ça.
Alors, moi,
je vous dirais que, s'il y a un dossier qui doit se régler... Je sais qu'il y a
une volonté que ça se règle, mais ce
n'est pas... Les gens ne sont pas fous. Les publicités, ils les voient. La
crédibilité des membres, à l'effet de l'intérêt
des ordres de protéger l'intérêt de ses membres, ils en font, des déductions,
ils n'ont pas besoin d'une commission Charbonneau pour en faire, croyez-moi.
M. Jolin-Barrette : Donc, en ce
sens-là, vous pensez qu'on devrait avoir un débat public sur la question?
Mme Duval (Diane) : Vous voulez
parler pour...
M. Jolin-Barrette : Bien, ce que
vous soulevez. Vous soulevez avec l'Ordre des dentistes, vous soulevez l'Ordre
des hygiénistes.
Mme Duval
(Diane) : Bien, en fait, ce qu'on dit, écoutez, on est... On parle
d'adéquation de compétences, on parle
des compétences. Ça fait une vingtaine d'années que les compétences n'ont pas
été révisées. On a toujours eu comme réflexe
de dire : Bien, attendons la modernisation, qui ne vient pas, et qui ne
vient pas, et qui ne vient pas. Nos membres sont rendus beaucoup plus loin, finalement, dans leur profession, qui...
Gardez-le à l'esprit, là, les hygiénistes dentaires initient leurs soins d'hygiène dentaire sans la nécessité
d'un examen diagnostique préalable, et c'est dans la loi. Alors, tout le
monde le sait. Alors, on tarde énormément à donner au Québec
ce qu'il y a ailleurs au Canada, et
c'est la population qui en souffre. Mais la population le voit aussi,
voit ces monopoles-là s'exercer à leur détriment et contre leurs intérêts.
M.
Jolin-Barrette : Sur la
question de la cotisation, vous dites : Ça devrait rester la prérogative
des membres. C'est un peu à l'inverse de la majorité des ordres
professionnels. Pourquoi?
Mme Duval
(Diane) : Moi, je trouve
que, quand on arrive en assemblée
générale des membres et qu'on parle de cotisation,
forcément on parle de mandat de protection du public, et c'est une belle
occasion de discuter avec nos membres de
la volonté d'accomplir notre mandat. Ils comprennent le sens de
l'argumentation. Ce n'est pas un critère, pour nous, on ne l'a jamais vécu, on n'a jamais vécu de
difficulté, mais on travaille à faire comprendre notre mandat de protection
du public, et c'est une belle occasion, en assemblée générale, d'en discuter
avec eux. Et je pense qu'ils doivent rester effectivement
les personnes qui décident de l'augmentation de la cotisation. Je pense qu'un
ordre doit faire de la reddition de
comptes puis doit expliquer à ses membres à quoi ça sert, une cotisation. On
n'a jamais eu de difficulté à l'ordre pour ça. Et on considère que même c'est un beau moment
d'éducation envers nos membres, de compréhension de mandat avec eux.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
M. le député de Borduas. Mme Diane Duval, Me Janique Ste-Marie, représentant l'Ordre des hygiénistes dentaires du Québec, merci d'être venues
rencontrer les membres de la commission.
Je suspends quelques minutes. Je demande à
l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec de bien vouloir s'avancer.
(Suspension de la séance à 11 h 46)
(Reprise à 11 h 49)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et sa présidente, Mme Lucie Tremblay. Vous allez nous
présenter les personnes qui vous accompagnent.
Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, après il y aura des échanges avec Mme la ministre
et les porte-parole des deux oppositions. Mme Tremblay, à vous la parole.
Ordre des infirmières
et infirmiers du Québec (OIIQ)
Mme
Tremblay (Lucie) : Merci, M.
le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires, M. le président de l'Office des professions, merci de
nous accueillir aujourd'hui pour pouvoir nous laisser nous exprimer sur
le projet de loi n° 98. Je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue
Louise Villeneuve, qui est membre du conseil d'administration
et qui est directrice des soins infirmiers adjointe au Centre intégré
universitaire de santé et de services sociaux
du Nord-de-l'Île-de-Montréal — ça, c'est toute une prononciation à
faire — Carole
Mercier, qui est secrétaire générale de l'ordre, et Marie-Claude Simard,
qui est chef du service juridique de l'ordre.
• (11 h 50) •
Alors, investi de notre mission de protection du
public, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec représente, avec ses 74 000 membres, le plus gros ordre
professionnel. Réunies en assemblée générale en 2015, plus de
1 000 infirmières ont, au nom de la santé des Québécois, réitéré leur
engagement à offrir des soins sécuritaires et de première qualité grâce à des
compétences infirmières en phase avec le développement exponentiel des
connaissances scientifiques, des technologies de la santé et des besoins de la population. Ils ont affirmé
que la protection du public passe également par un accès aux soins au
moment opportun.
Ainsi,
l'ordre est résolument engagé à fournir aux Québécois les professionnels
compétents qui répondent à leurs besoins. C'est le propre des activités
d'admission, que nous exerçons avec rigueur et équité tant pour les diplômés du
Québec que pour les diplômés hors Québec. À ce chapitre, mentionnons que chaque
année l'ordre délivre plus de 3 500 permis d'exercice à la profession
infirmière.
De notre
côté, le conseil d'administration est conscient qu'un ordre professionnel doit inspirer la confiance du
public. Nous avons adopté des valeurs de
gouvernance qu'est la confiance, l'équité, le respect, la bienveillance. Ces
valeurs nous guident dans l'ensemble de nos
décisions, et le mémoire que nous vous présentons aujourd'hui est basé sur ces
valeurs.
D'entrée de
jeu, l'ordre tient à confirmer qu'il adhère à l'objectif de la réforme quant à
la modernisation des conseils d'administration
des ordres professionnels, sous réserve de quelques éléments qu'on a mentionnés
dans notre mémoire, notamment au
chapitre de la gouvernance des ordres professionnels. Et vous allez pouvoir trouver
les modifications qu'on propose, mais ces propositions-là de changement
au niveau de la loi et de notre loi, des infirmières et infirmiers, est impératif si on veut pouvoir mener à bien la
réforme de notre gouvernance. Alors, nous demandons à l'office
d'examiner avec la plus grande attention nos
recommandations. Et évidemment on demeure disponibles pour vous accompagner,
vous transmettre nos commentaires là-dessus, pour ce que ça se fasse dans les
meilleurs délais.
Par ailleurs, l'ordre identifie que le véritable
enjeu soulevé par la réforme qui est proposée, c'est celui de l'intégration des professionnels au marché du
travail, incluant les personnes immigrantes. Nous sommes convaincus qu'à
une problématique gouvernementale on a besoin d'une réponse gouvernementale.
Alors, je
m'explique. À notre avis, là, la solution ne se trouve pas dans le Code des
professions. Le défi, là, c'est un défi
de coordination entre plusieurs acteurs sectoriels, des acteurs qui doivent
être décisionnels. Il faut que les silos soient brisés, il faut cesser
de se renvoyer constamment la balle. Les problèmes sont bien documentés,
systémiques et ils concernent plusieurs
acteurs, qui doivent travailler en synergie avec le ministère de l'Immigration,
Diversité et Inclusion. Ce ministère
a toute l'expertise. Il a les compétences, il a l'autorité gouvernementale de
planification de l'immigration et de l'intégration à la société
québécoise.
Pour illustrer clairement mon propos, l'ordre
accepte autour de 800 diplômés hors Québec par équivalence chaque année. L'ensemble des dossiers qui nous
sont soumis, là, c'est à peu près ça, là, 800, donc on accepte 100 %
des dossiers. Et, si vous voulez avoir plus de détails, là, sur les chiffres,
ils se trouvent d'ailleurs dans notre rapport.
En 2016, 700
stages de formation dans les cégeps et 100 stages cliniques ont été
prescrits. Parmi les stages dans les
cégeps, seulement 400 des 700 personnes ont eu accès aux places requises
pour réaliser leur programme d'intégration professionnelle, et aucune, aucune n'a eu accès aux programmes dans les
hôpitaux. 50 % des candidats sont bloqués dans leur parcours, et,
comme on peut le constater, aucun de ces goulots d'étranglement n'est du
ressort de l'Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec. Alors qu'on met tout en oeuvre, à l'ordre, pour admettre
des diplômés hors Québec, très concrètement,
l'admission, ça dépend de la capacité d'accueil des cégeps. La réalisation des
stages cliniques, ça dépend du réseau
de la santé et des services sociaux. Et la maîtrise de la langue française,
bien, c'est évalué par l'Office québécois de la langue française.
Donc, les enjeux, ils sont clairs, ils sont
documentés, les problèmes sont connus et ils se situent en amont des plaintes.
L'heure est vraiment venue de passer à l'action. Le gouvernement doit s'assurer
de donner aux instances concernées les ressources et les conditions nécessaires
pour agir.
D'ailleurs, le commissaire aux plaintes a documenté ces problématiques, il est l'auteur de
rapports faisant largement état des
embûches, et qui ne sont pas du ressort des ordres professionnels. Les
professionnels désireux d'avoir accès à des stages ou des formations
d'appoint n'y ont pas accès, ils n'y arrivent pas.
À ce jour, toutes les recommandations demeurent
lettre morte. La balle est maintenant dans le camp du gouvernement, qui doit
agir.
La
question de reconnaissance d'équivalence des DHQ et le traitement en toute
équité des dossiers de candidature font l'objet de normes rigoureuses
qui ont été développées par des experts de la profession mais aussi des experts
en évaluation, comme pour les diplômés du
Québec. En cela, l'ordre travaille en collaboration avec l'Office des
professions, et qui, bien sûr, après consultation des ministères concernés, en
propose l'adoption au gouvernement.
Il ne faut
pas s'y tromper, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec remplit sa
mission de protection du public en
protégeant le public, en assurant la compétence de ses membres, et ça, c'est
vrai qu'ils soient diplômés du Québec ou diplômés hors Québec. La
démonstration qu'ils sont aptes à exercer une profession est fondamentale en
matière de protection du public, et cette
démonstration de compétence ne souffre d'aucun compromis, c'est la santé de la
population qui en dépend, c'est notre santé à chacun d'entre nous qui en
dépend. Alors, comment est-il sérieusement possible de soutenir que l'élargissement des pouvoirs du commissaire atteint cet
objectif, alors qu'une de ses principales fonctions est de défendre ou de prendre en considération des
intérêts individuels du candidat à la profession? L'ordre estime que le
seul principe qui devrait gouverner
l'ensemble des acteurs du système professionnel, c'est celui du contrôle des
compétences dans un souci de protection du public.
Évidemment,
on est une organisation apprenante. L'ordre a mis en place des processus
d'admission, et on voit à les revoir, à les améliorer d'une façon
continue. Mais en plus les individus qui se sentent lésés ont déjà des recours.
Dans un autre
ordre d'idées, les pouvoirs de concertation et de collaboration entre les
parties prenantes sont déjà attribués
par le Code des professions. Il semble que c'est à ce niveau-là que leur
utilisation présente un certain nombre de difficultés. Par exemple, l'article 12 du code prévoit déjà que
l'office doit, en concertation avec le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, prendre les
mesures visant à favoriser la collaboration entre les établissements
d'enseignement.
Et, M. le
Président, si vous me le permettez, je vais prendre une petite minute de plus,
parce que j'ai un exemple qui, à mon avis, est assez fondamental pour
illustrer mon propos.
L'article 184
autorise déjà le gouvernement à prendre des modalités de collaboration, à fixer
des modalités de collaboration entre
un ordre et les établissements d'enseignement. Nous soumettons à la ministre
que ces pouvoirs auraient intérêt à être pleinement utilisés.
De plus, comme nous cherchons tous une pleine
collaboration des acteurs concernés par l'intégration au marché du travail, nous recommandons à la ministre
d'inclure les ministères sectoriels impliqués — et dans notre cas, évidemment, le ministère de la Santé et des
Services sociaux — à ces
articles du code. Le gouvernement disposerait alors de tous les leviers
efficaces à la coordination des parties prenantes.
Les obstacles sont identifiés depuis belle
lurette. Ils sont circonscrits, ils font l'unanimité, ils sont l'objet de recommandations de nombreuses instances crédibles.
Il faut lever ces obstacles, et c'est en dehors du contrôle des ordres professionnels. Il est grand temps qu'on passe à
l'action. Alors, l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec demande
au gouvernement de s'engager sans plus
attendre dans l'action en mettant en place les mesures nécessaires pour
qu'on puisse assurer un accès aux formations et un accès aux stages cliniques.
Comme nous
venons d'en faire la démonstration, nous croyons qu'un commissaire à
l'admission, une personne seule,
indépendante, limitée par des simples pouvoirs de recommandation, ne soit pas
la solution. L'ordre soutient avec conviction qu'aux problématiques
gouvernementales s'impose une réponse gouvernementale, et aucun commissaire ne
peut imposer ses décisions au gouvernement.
Alors, merci de votre attention. Et nous sommes
maintenant disposés à répondre à vos questions.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
• (12 heures) •
Mme Vallée : Merci beaucoup.
Alors, merci de votre présentation. Et on ressent toute l'émotion et toute la
passion, vous aussi, qui vous animent.
D'abord, il y a,
aux pages 6 à 10 du mémoire, un certain nombre de demandes de modification à la Loi sur les infirmières
et les infirmiers. Là-dessus, je veux simplement, là, vous indiquer que j'ai déjà
demandé à l'office de vérifier le
tout et d'examiner vos demandes pour voir s'il est possible d'y accéder quand même
à l'intérieur des paramètres. Donc, je voulais prendre quelques minutes
pour vous rassurer là-dessus.
Il y a énormément
d'enjeux qui ont été abordés dans votre présentation. Vous avez parlé beaucoup
des acteurs, des différents acteurs
autres que les ordres professionnels et leur impact sur la démarche d'admission.
C'est sûr qu'on doit travailler
ensemble. Je pense que c'est notre objectif, c'est le but, c'est l'objectif
des modifications qui sont apportées au projet de loi,
c'est d'amener les différents acteurs... parfois, oui, d'amener ponctuellement
des acteurs qui ne sont pas nécessairement identifiés autour du pôle pour rechercher une
solution. Le but, ce n'est pas simplement de se parler pour parler, c'est vraiment d'arriver avec des
solutions concrètes à des problèmes définis, identifiés et qui ont fait
l'objet, là, aussi d'une analyse. Et
c'est le rôle... L'objectif de la mise en place du Commissaire à l'admission,
c'est aussi d'avoir ce regard-là qui est plus macro, qui va permettre
d'alerter les acteurs, les principaux intervenants des difficultés ou des
problématiques qui ont été identifiées. Et évidemment, dans ce contexte-là, le
commissaire est appelé à émettre des recommandations,
donc, évidemment, ce n'est pas liant pour les ordres, ce n'est pas liant pour
les organismes, mais, chose certaine, autour du pôle, une fois ces
problématiques et ces difficultés identifiées, bien là on est réunis autour
d'une instance et on a, à quelque part, ce contrat social là, cette obligation
d'aborder les enjeux, d'en parler directement.
Puis
on est bien conscients qu'il n'y a pas que les ordres. Un peu plus tôt, je
pense, c'était Mme Duval qui disait : Les ordres professionnels ont mauvaise presse, les ordres professionnels
ont mauvaise mine, puis, je l'ai mentionné au congrès du CIQ au
printemps dernier, moi, je veux qu'on travaille ensemble pour changer ça, parce
que c'est faux de prétendre que les ordres
professionnels ne jouent pas leur rôle de protection du public, c'est faux de
le prétendre, on a des ordres
professionnels dévoués à cette mission-là, et vous n'êtes pas les seuls non
plus qui sont des acteurs dans l'admission des membres ou des futurs membres. Et donc
l'objectif, c'était justement d'amener autour de la table les joueurs qui
sont impliqués, pour ne pas viser que les
ordres, parce que, dans bien des cas, il y a des enjeux qui sont hors du
contrôle des ordres professionnels.
Et malheureusement c'est l'ordre professionnel, bien souvent, qui est interpelé
pour commenter une situation pour laquelle l'ordre n'a pas de contrôle.
Donc,
évidemment, lorsque vous me dites : Il faut qu'on passe à l'action, vous
avez raison, parce que ça fait des années
qu'il y a des tables, qu'il y a des comités, et tout ça, puis qu'il faut
renforcer les leviers de coordination. Bien, nous, c'est ce qu'on vous
propose, ce qu'on retrouve dans le projet de loi.
Puis est-ce que ce
n'est pas ça que vous souhaitez, justement, que d'amener les gens... bien, dans
un premier temps, d'étendre un regard pour être capable d'identifier les
problématiques, et puis d'amener les organismes autour d'une même table pour identifier la solution à la problématique? Je vous
écoute et puis j'écoutais, tout à l'heure, d'autres ordres professionnels. J'ai l'impression qu'on est
tous animés par cette même volonté, c'est simplement dans les moyens de l'atteindre, peut-être... On parle d'un comité, on
parle d'un pôle. Au-delà des termes, regardons concrètement ce que ça
veut dire. Puis est-ce que ce n'est pas la même chose, en bout de piste?
Mme Tremblay (Lucie) : Mme la ministre, même si je suis d'accord avec l'objectif,
je ne pense pas que c'est le bon
moyen qui est proposé. Quand vous dites : Est-ce que le commissaire ne
peut pas documenter?, c'est abondamment documenté. On les connaît, les
problèmes.
Et
c'est pour ça que, quand je vous dis : Il faut qu'on passe à l'action, ça
prend des gens qui sont décisionnels. Et, jusqu'à présent, ce pôle de coordination là, je ne l'ai pas senti
décisionnel, je ne pense pas qu'il
ait les moyens de prendre les
décisions qui s'imposent. C'est pour ça qu'un comité interministériel,
intersectoriel pourrait avoir des acteurs décisionnels
qui vont lever les obstacles, parce
que, les obstacles, on les connaît,
ils sont documentés. Puis le commissaire aux plaintes a d'ailleurs fait un très bon travail dans ce sens-là, mais il n'est pas le seul, il y a plusieurs instances qui
le disent, où est-ce qu'ils sont, les problèmes.
Et,
comme société québécoise, vous parliez d'un contrat social qu'on a. On a
un contrat social de les lever, ces obstacles-là,
de prendre des décisions qui vont permettre d'agir, et c'est là-dedans
qu'on vous invite à intervenir, à trouver des moyens où est-ce que... La
situation est documentée, là, beaucoup, beaucoup, beaucoup, mais maintenant il
faut prendre action.
Et
vous avez parlé, peut-être pas dans ces termes exacts, de redorer le blason
des ordres professionnels...
Parce que nous, on est très attachés au système professionnel, on croit que ça
fait une différence dans la vie des Québécois. Mais, quand j'entends parler du Commissaire à l'admission qui va
défendre davantage des intérêts individuels plutôt que des intérêts de protection du public, j'ai
l'impression qu'on donne le message contraire, où est-ce que
régulièrement on entend dans la presse, on entend même parmi nos
membres qu'on s'attend d'un ordre
professionnel... ou on prétend
qu'un ordre professionnel défend davantage ses membres. Nous, on croit que le devoir d'un ordre professionnel, c'est de protéger le public,
et il faut qu'on ait les coudées franches pour le faire. Si à n'importe quel moment le commissaire peut intervenir dans nos processus alors qu'il
y en a déjà, des recours, premièrement, une chatte va en perdre ses chatons, parce que, si à n'importe quel moment il peut y avoir deux interventions qui se fassent en parallèle... Et
les interventions du commissaire, vous l'avez dit, ne sont pas
prescriptives, là, on crée toutes sortes d'attentes sans amener une solution
concrète.
Nous, on pense, là,
qu'on n'est plus au temps de documenter, on est au temps où est-ce que, les
goulots d'étranglement, on les connaît. Il faut se donner les leviers pour les
enlever, ces obstacles-là, parce que c'est toute la société québécoise qui va
en profiter.
• (12 h 10) •
Mme Vallée :
Lorsque vous mentionnez que le commissaire ne va que contribuer à augmenter la
quantité de rapports qui sont émis, le commissaire va pouvoir aussi... va avoir
cette possibilité d'étudier le cas d'un individu en particulier et confronté à un problème d'admission. Son objectif,
c'est d'assurer, d'une certaine façon, l'équité pour tout candidat aux
admissions.
Bien sûr,
la protection du public demeure l'objectif ultime. Le commissaire ne va pas l'occulter, le
commissaire relève de l'office. Il n'y a aucunement...
Puis je ne vois pas en vertu de quoi vous pouvez penser, même penser que
le commissaire n'aurait pas l'intérêt de la protection du public comme
priorité.
En
ayant cette priorité-là en tête, il est quand même tout à fait opportun de s'assurer qu'une fois que cet enjeu de protection du public là, il est identifié les
candidats à l'admission aux professions auront les mêmes standards. C'est
que, pour l'objectif visé de la
protection du public, on ne mettra pas des standards plus élevés pour un
candidat ou pour un autre.
Cette
notion d'équité, elle est importante parce
que, dans certains... ça demeure un
enjeu, et d'où cette volonté d'assurer
cette vision macro là afin de voir, bon, notre candidat étranger, une fois
l'assurance des compétences, l'assurance de la qualification, sur laquelle on ne doit pas lésiner... Puis là-dessus
je suis tout à fait d'accord, là, il
n'y a personne ici qui veut venir donner une admission à rabais, ce
n'est pas l'objectif. L'objectif, c'est d'assurer une équité dans le
traitement d'une demande d'admission, s'assurer que le ou la candidate n'aura
pas un défi additionnel à relever qui n'est pas exigé, par exemple, d'un
candidat québécois qui a fait sa formation ici, parce que l'objectif, c'est vraiment...
Si notre objectif, c'est d'assurer la protection du public,
d'assurer que les gens, les candidats potentiels aient en poche toutes
les qualifications requises, toutes les compétences requises, bien, il ne
devrait pas y avoir d'enjeu qui soit lié au fait que le candidat provienne de
l'étranger.
Alors,
cette volonté-là d'élargir la mission, elle est vraiment fondée sur un souci
d'équité, et qui nous amènera peut-être à identifier des problématiques,
qu'elles se rencontrent dans la législation, dans la réglementation, et là le pouvoir de recommandation du commissaire va nous
permettre rapidement d'identifier la problématique et de la modifier. Et je vois difficilement en quoi le pôle autour
duquel siégeront les ministères serait différent d'un comité
interministériel, qui ne comprend bien souvent pas tous les intervenants qu'on
souhaite mettre autour du pôle.
Mme Tremblay (Lucie) : Mme la ministre, quand vous dites : Les gens
doivent avoir des recours, ils doivent être
traités en équité, ils ont déjà les recours, ils peuvent appeler d'une décision
du Comité d'admission par équivalence.
Je
suis relativement récente à l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec,
mais mon premier constat quand je suis
arrivée, il y a quatre ans, c'est de voir la rigueur avec laquelle on a
déterminé un référentiel de compétences et que ce référentiel de compétences là doit s'appliquer à
la même hauteur, là, de façon équitable tant pour les diplômés du Québec
que pour les diplômés hors Québec. Il y a
des experts qui ont travaillé à développer ce référentiel de compétences, on
a des experts qui se dédient à en faire
l'évaluation. J'ai de la misère à comprendre comment une seule personne
pourrait intervenir différemment.
Et, quand je regarde
ça, aussi, j'ai une préoccupation, une préoccupation que ma collègue de
l'Ordre des hygiénistes dentaires a soulevée
aussi : le financement d'un tel projet. Et est-ce qu'on n'est pas en
train d'augmenter la complexité des choses?
Il
y a un processus, il y a des recours disponibles, on connaît les
problématiques. Il faut enlever les goulots d'étranglement. Ce serait
terrible de passer à côté de l'opportunité qu'on a en ce moment de se donner
les moyens de lever ces obstacles-là.
Et il faut que le
ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion donne l'heure
juste aussi à ces candidats-là, parce que,
moralement, quand 50 % des gens sont bloqués, je vous ai parlé de nos
valeurs tantôt, notre valeur de
bienveillance est heurtée dans une situation comme celle-là. Comment est-ce que
des gens peuvent partir d'un pays, tout laisser derrière, arriver ici avec la
conviction qu'ils vont pouvoir exercer à la hauteur de leurs compétences, et
qu'ils arrivent devant des murs? Des
murs qu'il est temps de pouvoir ébranler, qu'il est temps de pouvoir enlever
pour permettre une entrée équitable.
Et
ça, Mme la ministre, je vous rejoins là-dedans. Il faut qu'on travaille sur
l'équité, il faut que tous les candidats qui ont les compétences d'entrer dans la profession puissent le faire.
Mais là il y a des obstacles, et, ces obstacles-là, ça prend des décisions gouvernementales. Je ne le dirai
jamais assez, à une problématique gouvernementale on a besoin d'une réponse gouvernementale. Et on a besoin de gens
qui ont les capacités de prendre les décisions, que ce soit au ministère
de l'Enseignement, que ce soit au ministère
de la Santé, mais il faut qu'il y ait des décisions qui se prennent... ou tout
au moins il faut donner l'heure juste aux
futurs immigrants en leur disant qu'il y aura des obstacles et que ce n'est pas
sûr qu'ils vont pouvoir venir travailler à la hauteur de leurs compétences.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors, bienvenue, Mme Tremblay, Mme Mercier, Mme Villeneuve,
Mme Simard. On n'a pas de problème de présence de femmes dans votre
conseil d'administration. Bravo!
Une
question rapide. Donc, je comprends
qu'on a déjà l'information, c'est déjà documenté. Vous êtes d'accord à ce qu'il
y ait de l'équité, peut-être
pas d'accord à ce que ça passe par la présence ou le
renforcement d'un commissaire à l'admission.
Et vous avez identifié qu'on connaît déjà les goulots d'étranglement qui fait que, bon, les
stages ne sont pas disponibles, les places ne sont pas disponibles, et
c'est là que le bât semble blesser. Ma question très simple : Est-ce qu'une table de... un pôle de concertation, de
coordination, tel qu'il est proposé, étendu, avec la présence des ministères,
avec la présence du ministère de l'Enseignement supérieur, le
ministère de la Santé, pourrait être, là... Est-ce que d'avoir une table comme ça où, justement, les instances
gouvernementales seraient présentes, et avec des pouvoirs d'action,
permettrait, justement, d'accélérer ou de
faire les gestes que vous espérez qui soient faits pour solutionner des
problèmes connus?
Mme Tremblay (Lucie) : Le pôle existe depuis cinq ou six ans et il n'a
pas réussi à lever ces obstacles-là. C'est pour ça qu'on se dit que c'est une décision gouvernementale qu'on a de
besoin. On a de besoin de gens qui sont capables, qui ont le pouvoir de lever les obstacles. On
n'est pas à discuter, là, les problématiques, vous l'avez dit, sont
identifiées. Il faut, à un moment
donné, que le gouvernement prenne les moyens d'enlever ces obstacles-là, parce
que je pense qu'on partage l'objectif
qu'il faut admettre de façon équitable, il faut reconnaître les compétences des
gens qui viennent de l'étranger, mais,
si on veut arriver à faire tout ça, il y a des obstacles devant nous, et il faut
avoir les moyens de les enlever, ces obstacles-là.
Mme Jean :
Je passe la parole à ma...
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée de Taillon.
Mme Lamarre :
Alors, Mme Tremblay, Mme Mercier, Mme Villeneuve et
Me Simard, écoutez, vous avez également
émis, aujourd'hui, un communiqué, je pense, qui résume très bien ce que vous
avez décrit. Comment on peut justifier
que, sur 100 stages cliniques dans les hôpitaux, il n'y ait pas eu une
place disponible? C'est quoi, la raison pour ça?
Mme Tremblay
(Lucie) : Mme Lamarre, je vais en faire une présomption, et peut-être
que ma collègue, Mme Villeneuve, qui
travaille présentement dans le réseau de santé, pourra bonifier ma réponse,
mais le réseau de santé est sous forte pression financière en ce moment.
Accueillir des personnes en stage, ça demande un investissement. Ça demande du temps, mais, il faut l'entendre, c'est
un investissement. Ça prend des gens qui vont accueillir ces stagiaires,
qui vont les encadrer, qui vont les évaluer.
Et, si, il y a quelques années, il y avait un engouement qui était plus grand
parce que ça amenait au marché du travail,
il semble qu'il y ait beaucoup moins d'embauche qui se fasse présentement dans
le réseau de santé et que l'intérêt, pour les établissements de santé,
n'est plus là.
Alors, depuis
le mois de décembre, zéro admission. C'est assez dramatique pour ces gens-là
qui sont en attente, et qui souhaitent contribuer à la société québécoise,
et qui se voient privés de le faire.
Mme Lamarre :
Effectivement, on pense que... on considère que les gens dans le réseau de
santé, actuellement, sont
complètement dépassés, essoufflés à répondre à des besoins essentiels urgents,
hein, on est comme dans une phase d'urgence,
on n'est pas dans une phase de posturgence ou de développement. Et l'accueil de
ces candidats-là fait partie d'un vaste processus où on pourrait
développer, où on pourrait offrir beaucoup plus de postes.
Moi, j'ai l'impression
que j'entends aussi dans votre message qu'actuellement on s'apprête, avec le
pôle de coordination, à investir... Puis
avec le commissaire, parce qu'il faut bien comprendre que, si le commissaire
s'acquitte bien de toutes les
responsabilités qu'il a, ça va lui prendre un budget. Et vous dites : Cet
argent-là, mettons-le, bien, sur des infirmières qui vont superviser dans les
hôpitaux, dans les écoles de formation, dans les milieux, les CLSC,
mettons-les là, c'est là qu'on va vraiment
ouvrir ce goulot d'étranglement qui est complètement limité par vraiment cette
non-disponibilité réelle, là, des professionnels pour accueillir et
encadrer les candidates.
Mme Tremblay (Lucie) : Non seulement ça, évidement il faut mettre
l'argent où est-ce que ça va compter, où est-ce que ça va faire une différence. Et, comme je l'ai dit
abondamment, on n'est plus au point de documenter, là, il faut agir,
alors il faut mettre l'argent là où ça compte.
Et
le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion a tous les
pouvoirs de le faire. Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu qu'il
prenne un leadership là-dedans? Parce que c'est eux qui sont responsables de
l'accueil, de l'intégration des immigrés. Alors, il y a peut-être quelque chose
là à utiliser davantage.
• (12 h 20) •
Mme
Lamarre : Mais moi, je
comprends aussi de votre communiqué que vous souhaitez qu'il y ait
de meilleurs échanges entre le ministère de l'Intégration, de la Diversité et de
l'Inclusion, et le ministère de l'Éducation, et le ministère de la Santé,
parce que tout ça, c'est coordonné, et c'est ce manque de
coordination là qui crée les bouchons d'étranglement, là.
Mme Tremblay
(Lucie) : Tout à fait. Qui crée des tensions et qui bloque certains
candidats à l'admission.
Mme
Lamarre : Donc, de votre
côté, est-ce que vous avez eu des contestations nombreuses sur les
équivalences? Parce que les gens vont dire : Oui, on dit ça, là, mais...
Sur les évaluations que vous faites au niveau des équivalences nécessaires, est-ce
que vous avez eu beaucoup de contestations? Juste pour qu'on nettoie ce...
Mme Tremblay (Lucie) : Mme Lamarre, on a reçu 800 dossiers complets et
on a traité ces 800 dossiers complets là.
Alors, il est très, très rare qu'il
y ait des contestations, on peut les
compter sur les doigts d'une main. Alors, c'est très rare.
Mme
Lamarre : Quand vous
dites : 50 % des gens qui
ne sont pas admis, c'est un sur deux, là, c'est un sur deux.
Mme Tremblay (Lucie) : Une personne sur deux. Et le goulot
d'étranglement ne se situe pas dans la cour des ordres.
Alors,
nous, on est pris avec une situation intenable, immorale où est-ce que, pour
assurer la protection du public, pour
s'assurer que l'infirmière a les compétences de soigner la population d'ici,
elle a besoin de faire ces stages-là, nous les prescrivons, et ils vont
se ramasser devant un obstacle. C'est inadmissible, c'est inadmissible.
Mme Lamarre : C'est sûr que ça crée des situations humaines
très difficiles mais aussi des lacunes professionnelles, on a besoin
d'avoir un plus grand nombre d'infirmières pour contribuer à notre réseau. Et
ces gens-là ont donc des difficultés à s'intégrer.
Peut-être
juste un élément, si on peut parler d'autre chose, parce que je pense que vous
avez bien marqué le point. Et j'espère
que la ministre a bien entendu votre recommandation, parce que vous n'êtes pas
la première à le faire. Là, ça fait vraiment
beaucoup de gens qui souhaitent vraiment qu'il y ait une intégration des gens,
mais qui disent : Attention! Le problème,
il est au niveau des places de stage, il est au niveau des ressources humaines
pour superviser ces stages et le financement de ces programmes. Alors,
on va espérer que ce soit entendu.
Il
y a une dimension, là, au niveau de la gouvernance, la recommandation 21
de votre mémoire, à la page 29, où vous dites qu'au niveau du conseil d'administration vous ne voyez pas
vraiment d'objection à ce qu'il y ait des gens qui aient une appartenance à des organisations. Et je
sais que vous avez un grand nombre de membres, et donc c'est sûr que vous avez des enjeux différents d'ordres qui sont
plus petits, mais il me semble qu'à l'intérieur d'un ordre il y a
plusieurs conflits d'intérêts. On parle toujours d'un conflit d'intérêts réel,
d'un conflit d'intérêts potentiel, mais il y a tout le conflit d'intérêts apparent. Et une grande partie de ce projet de loi
là, c'est de rehausser la confiance du public envers les ordres. Alors, pourquoi ne pas enlever ce conflit
d'intérêts apparent en excluant les gens qui ont déjà des appartenances
à des organisations, quitte à les inviter comme experts de façon ad hoc?
Mme Tremblay
(Lucie) : Évidemment, là, on est pour la transparence, on est pour la
déclaration du conflit d'intérêts, mais on a
besoin d'avoir davantage de flexibilité, parce qu'alentour d'une table d'un
conseil d'administration où est-ce
que l'expertise est aussi vaste, du début de la vie à la fin de la vie, c'est
intéressant d'avoir des infirmières qui, par exemple, sont impliquées dans l'association des infirmières en
néphrologie, où est-ce qu'ils vont nous amener une expertise, une
connaissance qui va nous permettre de mieux accomplir notre devoir de
protection du public.
Alors,
dans certaines circonstances, vous avez raison, il peut y avoir des conflits
d'intérêts, et on voudrait que ce soit balisé
davantage par des règles de notre conseil d'administration qui empêcheraient
ces gens-là qui, par exemple, pourraient avoir davantage de l'intérêt par rapport aux défenses du membre plutôt
que de la profession, mais un professionnel qui est impliqué dans son association professionnelle, ça
amène une richesse alentour de la table du conseil d'administration, et
le conseil était très ferme qu'il ne veut pas se priver d'une telle expertise.
Alors, bien sûr, s'il y a
conflit d'intérêts et que l'association est davantage dans la défense du
membre, bien, il va y avoir un écart, mais
je trouve que le mot «association» est trop large, et ça nous enlève de la
marge de manoeuvre d'avoir de l'expertise souhaitée.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Merci. Mme
Tremblay, Mme Mercier, Mme Villeneuve, Me Simard, bonjour. Bienvenue à
l'Assemblée nationale.
Vous
dites : Le terme est trop large, «association». Comment est-ce que vous le
baliseriez, si on veut le faire, là?
Mme
Tremblay (Lucie) : On vient
de dire peut-être une association qui est responsable de la défense des
intérêts des membres. Il y a quelque
chose qui doit être plus raffiné là-dedans
pour éviter ce conflit d'intérêts là mais pas se priver d'expertise de la part de gens qui sont impliqués
dans des associations professionnelles. C'est souvent ces gens-là qui peuvent
amener la richesse alentour de la table.
M. Jolin-Barrette : O.K. Est-ce que
l'Ordre des infirmières a des organismes affiliés?
Mme Tremblay (Lucie) : Est-ce que la
fondation de l'ordre, pour vous, c'est un organisme affilié?
M. Jolin-Barrette : Et donc est-ce
que vous avez des membres du conseil d'administration qui siègent sur...
Mme Tremblay (Lucie) : Oui.
M.
Jolin-Barrette : O.K.
Votre recommandation 15, vous dites, dans le fond, que les ordres
devraient occuper une place plus
importante au niveau du programme... du cursus universitaire avec les universités,
donc que vous ayez un aspect décisionnel sur la formation initiale.
Pouvez-vous nous en dire plus? Puis comment vous voyez ça avec le milieu universitaire? Parce que le bureau des recteurs sont venus nous voir, et
puis ils souhaitent une très grande... maintenir leur indépendance institutionnelle, ils ont fait
leurs commentaires par
rapport au commissaire, mais là vous,
vous nous dites : On veut avoir un levier, là, sur la formation
initiale des infirmières.
Mme
Tremblay (Lucie) : On l'a
dit à plusieurs reprises aujourd'hui, l'admission à la profession, c'est
crucial dans la protection du public. Et
depuis plusieurs années on demande un rehaussement de la norme de
formation pour l'entrée à la profession, pour que les infirmières... Celles qui s'en
viennent. Celles qui sont en exercice en
ce moment, là, ne m'inquiètent
pas du tout, ce sont des gens qui ont été
bien formés, qui se sont développés au fil du temps. Mais est-ce qu'on peut donner les outils nécessaires
aux infirmières de l'avenir pour qu'elles puissent rentrer dans la profession
et venir épauler leurs collègues avec toutes les compétences,
équivalentes à leurs collègues qui sont en exercice?
Alors, on
aimerait ça pouvoir s'assurer qu'effectivement la formation qui est donnée et le niveau de
formation qui est donné correspond au champ d'exercice moderne des soins
infirmiers.
M.
Jolin-Barrette : Mais ce que
je comprends de votre réponse, c'est qu'actuellement le programme de formation, supposons, qu'il soit au
collégial ou qu'il soit à l'université, ne correspond pas à ce qui se passe...
bien, à ce qu'une infirmière doit faire face dans sa réalité quotidienne, puis il
y a certaines lacunes au niveau de la formation.
Mme
Tremblay (Lucie) : La
réponse pourrait être très longue, mais, il y a plusieurs
années, on a divisé ce qui était
enseigné au niveau collégial du niveau universitaire. Notre méthode pour pouvoir donner de la rétroaction au niveau des
collèges et des universités, c'est à travers notre examen, mais on
souhaiterait nettement être davantage impliqués et qu'il y ait des décisions qui
se prennent par rapport à la formation initiale des infirmières. C'était notre
message.
M.
Jolin-Barrette : Votre recommandation 16, vous proposez de retirer complètement le fait que le conseil de discipline
puisse imposer une suspension temporaire pour quelqu'un qui est accusé d'une
infraction criminelle de cinq ans. Il y a
certains ordres professionnels qui nous ont dit : Bon, peut-être
vous pourriez le laisser, mais, en fait, que l'accusé le soit en fonction
d'une infraction qui a un lien avec l'exercice de la profession. Est-ce que ça
pourrait être une façon de réconcilier votre position ou...
Mme Tremblay (Lucie) : Deux choses.
Premièrement, le syndic peut déjà intervenir et il peut prendre des décisions rapidement si la protection du public
est mise en cause. Nous, on a un malaise sur la présomption d'innocence.
À ma connaissance, et je ne suis pas une
juriste et je ne m'improviserai pas comme tel, mais nous avons une
présomption d'innocence, ce n'est pas parce
que quelqu'un est accusé qu'il est nécessairement coupable. Et de l'empêcher
d'exercer sa profession, de gagner sa vie, pour nous, crée un malaise.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Sur la
question des lanceurs d'alerte, vous proposez la mise en place d'une loi-cadre.
Il y a des ordres professionnels qui nous ont dit : Écoutez, ça peut être
problématique, lorsqu'on est lanceur d'alerte, l'immunité, oui, qui est conférée par le syndic, mais, pour le milieu de
travail également, bien, écoutez, souvent les individus qui dénoncent
vont être congédiés.
La
majorité des infirmières travaillent dans un milieu syndiqué. Est-ce que ça
pose une problématique pour vous?
Mme
Tremblay (Lucie) : Ce n'est
pas une discussion qu'on a eue en profondeur en ce moment, mais
définitivement la loi-cadre, pour nous, serait meilleur, parce que ça évite de
traiter les choses à la pièce.
Alors, s'il
faut que le domaine du travail ait sa propre loi, que nous, on ait une propre
loi, à un moment donné, là, ça n'aura
plus de sens, il va manquer de cohérence. Tous les pays qui ont eu du succès
avec leurs processus par rapport aux lanceurs d'alerte ont une
loi-cadre, et on pense que c'est vraiment la façon d'y arriver.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Puis
comment vous voyez ça, que le Directeur des poursuites criminelles et
pénales pourrait conférer l'immunité en matière disciplinaire sans
nécessairement consulter le syndic?
• (12 h 30) •
Mme
Tremblay (Lucie) : On a un
problème, on a un problème. On parle de protection du public. Quelqu'un
qui a fait un geste grave par rapport...
Puis on avait eu une discussion. Imaginez que... peut-être que l'exemple va
être tiré par les cheveux un peu,
mais qu'un pédophile qui travaille à Sainte-Justine devienne un témoin
collaborateur, puis que son dossier soit retiré, puis qu'il continue à
travailler avec des enfants. Nous, ça crée un malaise important.
Alors, il y a
des mises en garde à faire là. Il y a un terrain glissant là, il faut le voir
vraiment avec la lorgnette de protection
du public. Je comprends qu'on peut avoir besoin d'information, mais cette
information-là ne devrait pas se faire au détriment de la population.
M. Jolin-Barrette : Puis, dans le
présent projet de loi, dans le 98, on donne le pouvoir au syndic de conférer l'immunité. Là-dessus, est-ce que vous êtes à
l'aise, avec ce qui est proposé dans le 98? Je comprends que vous voulez
une loi-cadre, mais vraiment sur ce qui est
conféré comme pouvoirs au syndic présentement, là, de conférer
l'immunité.
Mme Tremblay (Lucie) : Je vais vous
donner une partie de réponse et, si vous voulez avoir un complément
d'information, je vais inviter Me Simard à compléter, mais, pour le moment, ce
qu'on constate, c'est que ce n'est pas suffisamment bien balisé, alors on
aurait besoin de le baliser davantage. Et ma collègue pourrait...
Le Président (M. Ouellette) : Ce ne
sera pas aujourd'hui.
Mme Tremblay (Lucie) : Ce ne sera
pas aujourd'hui. Sauvée par la cloche!
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Ouellette) : J'ai
l'impression que M. le député de Borduas, probablement, sait la réponse.
Mme Lucie Tremblay, Mme Carole
Mercier, Mme Louise Villeneuve et Me Marie-Claude Simard, qu'on a passé proche d'entendre, représentant l'Ordre des
infirmières et des infirmiers du Québec, merci d'être venues déposer en
commission.
Nous suspendons les travaux jusqu'à
14 heures, dans la même salle.
(Suspension de la séance à 12 h 32)
(Reprise à 14 h 3)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons, dans un tintamarre de construction, les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi
modifiant diverses lois concernant principalement l'admission aux professions
et la gouvernance du système professionnel.
Nous entendrons cet après-midi les organismes
suivants : l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec,
l'Ordre des ingénieurs du Québec, l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec,
le Collège des médecins du Québec et l'Ordre des ergothérapeutes du Québec.
D'ailleurs,
on travaille avec du bruit jusqu'à 3 heures. Ça fait
que c'est comme ça, là, pour les deux, trois premiers groupes, mais, à
partir de 3 heures, ça va être plus calme à l'extérieur.
Nous recevons
maintenant l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires
du Québec, M. Régis Paradis qui est son président-directeur
général, qui allez nous présenter les
gens qui vous accompagnent. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, et je vous ferai signe quand vous
êtes presque rendu à terme, et après vous allez avoir une discussion
avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. M. Paradis,
à vous la parole.
Ordre des infirmières
et infirmiers
auxiliaires du Québec (OIIAQ)
M. Paradis
(Régis) : Merci, M. le Président. Tout d'abord, je veux vous présenter, à ma
droite, Me Eva Sikora et Me Amélie
Bellerose, qui sont avocates à l'ordre, et le directeur du service juridique du
même ordre, Me Georges Ledoux, et moi-même, Régis Paradis. Alors, Mme la ministre, Mmes, MM. les
parlementaires, merci infiniment de nous donner l'occasion d'être
entendus sur cette commission parlementaire là concernant le projet de loi n° 98.
D'entrée de jeu, nous sommes favorables aux modifications visant à donner... à certaines recommandations de la commission Charbonneau
portant sur l'éthique ou la déontologie applicable aux membres d'un ordre professionnel, aux membres de son conseil d'administration ou à l'obligation de créer des infractions dans les codes de
déontologie en regard de la collusion, de l'abus de confiance ou encore
de la corruption.
Nous nous
attarderons peu sur les dispositions du projet
de loi visant à modifier certains
mécanismes relatifs à l'admission aux
professions. En effet, le Conseil
interprofessionnel du Québec et
d'autres ordres professionnels ont déjà formulé
de nombreuses observations à ce sujet. À l'instar de ce qui a déjà été
mentionné, nous pensons qu'il n'est pas nécessaire d'ajouter d'autres responsabilités à celles qu'il assume déjà, pas plus qu'il n'est
opportun d'intégrer à la loi le Pôle de coordination pour l'accès à la
formation. Cette position s'appuie sur les progrès importants déjà réalisés
dans l'intégration des personnes immigrantes
et sur le fait que le succès, dis-je bien, de cette intégration repose davantage
sur l'implication et la collaboration de tous les partenaires impliqués.
Nos autres remarques porteront principalement
sur les dispositions modifiant la gouvernance des ordres professionnels.
Notre ordre
est évidemment d'accord avec l'article 25 du projet de loi créant l'obligation pour tout professionnel de se
doter d'une adresse électronique professionnelle. Cette disposition permettra de généraliser ce mode de communication peu coûteux et efficace entre un ordre et ses
membres pour les diverses fins poursuivies par un ordre, notamment pour l'inscription annuelle au tableau et aux activités de formation
continue, les élections, la consultation prévue dans le cadre des règlements et,
enfin, la transmission de toute autre information pertinente.
L'ordre
compte déjà plus de 80 % de ses
membres qui ont communiqué une adresse électronique que l'on peut
qualifier de personnelle. Maintenant, est-ce que l'utilisation, dans le projet
de loi, des mots «adresse électronique professionnelle»
implique que tout membre d'un ordre devra se créer une seconde adresse
spécifiquement dédiée à cette fin? Au
besoin, nous souhaitons que cette disposition soit clarifiée, si telle est
l'intention du législateur, afin de permettre aux membres de s'y
conformer sans aucune contrainte.
Pour ce qui
est de la réduction du nombre d'administrateurs, dès la consultation
préliminaire menée en juin 2015 par la ministre responsable de
l'application des lois professionnelles, l'ordre ne s'est pas montré favorable
à la réduction proposée. Il est vrai qu'il
existe une tendance à réduire la taille des conseils d'administration.
Cependant, doit-on favoriser une
telle approche généralisée pour l'ensemble des ordres, sans tenir compte de
leurs réalités? Nous ne le croyons pas, à tout le moins.
Nous sommes
d'avis que la diminution envisagée n'est pas automatiquement synonyme de
meilleur fonctionnement de l'appareil
politique d'un ordre. Concrètement,
pour notre ordre, cela implique une réduction de 25 à 16 membres.
Dans notre cas, l'impact se ferait surtout
ressentir auprès des élus, car leur nombre passerait de 20 à 11, nombre auquel
il faudrait ajouter les quatre administrateurs représentants du public nommés par
l'Office des professions du Québec et la personne élue à la présidence
au suffrage universel des membres. Nous croyons qu'une gouvernance plus
efficiente d'un ordre professionnel tient davantage à la culture
organisationnelle qu'au nombre de personnes siégeant à son conseil d'administration. Au moment même où le
gouvernement propose de réduire la taille du conseil d'administration des
ordres, il prévoit augmenter de 40 % la taille du conseil d'administration
de l'Office des professions du Québec.
Le projet de
loi prévoit la reconnaissance aux administrateurs nommés des mêmes droits et
responsabilités que les administrateurs élus. Nous approuvons
entièrement cette modification. Ainsi, les administrateurs nommés pourront notamment voter pour combler une vacance au
conseil d'administration ou encore désigner les membres du comité exécutif.
Ils pourront aussi participer, le cas
échéant, au même titre que les administrateurs élus à l'élection lorsque le
président est élu au suffrage des membres du conseil d'administration.
Relativement
aux pouvoirs et aux responsabilités de la présidence du conseil... pardon, du
conseil d'administration d'un ordre,
dis-je bien, nous partageons la position déjà exprimée par le Conseil
interprofessionnel du Québec à l'effet que le président élu d'un ordre ne peut être assimilé à un président de
conseil d'administration. Nous estimons qu'il faut tenir compte de la situation particulière du président
exerçant ses fonctions au sein d'un ordre professionnel. Ainsi, le
président d'un ordre devrait conserver la
prérogative liée à la surveillance générale des affaires de l'ordre et demeurer
politiquement responsable de l'accomplissement du mandat d'un ordre, soit la
protection du public.
• (14 h 10) •
Pour ce qui
est du comité exécutif, le Code des professions prévoit toujours la possibilité
pour un ordre de constituer un comité exécutif. Dans cette éventualité,
nous sommes d'accord avec la possibilité qu'un ordre puisse désigner ses membres pour une période d'un ou encore de deux
ans. Cependant, nous jugeons que le comité exécutif doit conserver la responsabilité de s'occuper de l'administration
courante des affaires de l'ordre pour qu'il conserve ainsi toute sa
pertinence pour les ordres souhaitant le maintenir.
Pour ce qui
est de la limite des mandats, après réflexion, l'ordre appuie le principe
limitant à trois le nombre de mandats
pouvant être remplis par une personne élue à la présidence d'un ordre. Selon la
durée des mandats déterminée pour chaque
ordre, soit entre deux et quatre ans, nous notons toutefois que cette période
maximale pourrait quand même varier de
six à 12 ans. Cette latitude est-elle souhaitable? Le législateur
aurait-il pu prévoir une période maximale fixe? Nous le demandons.
D'autre
part, nous sommes aussi d'accord avec l'article 33 du projet de loi
interdisant la candidature à un poste d'administrateur
d'une personne qui est membre du conseil d'administration ou dirigeant d'un
regroupement des membres de l'ordre, d'une association professionnelle
du domaine de la profession ou d'un organisme affilié à l'ordre. Nous comprenons que, pour un ordre dans le domaine de
la santé comme nous, cela vise principalement mais non exclusivement une personne qui occupe
une fonction au sein du conseil d'administration d'un syndicat ou qui en est un
dirigeant. Cette disposition protégera l'indépendance des
administrateurs d'un ordre professionnel, principe qui est incontournable en matière de saine gouvernance, et cela fera en
sorte que les administrateurs d'un ordre n'auront pas à choisir entre les
intérêts de l'ordre et ceux d'un autre organisme au sein duquel ils agissent.
Dans
un autre ordre d'idées, nous souscrivons à l'idée d'interdire le cumul des
fonctions de président et de directeur général.
Toutefois, il n'est pas du tout opportun, à notre avis, d'insérer au Code des
professions les pouvoirs devant être exercés
par un directeur général. Il appartiendra au conseil d'administration de
déterminer les pouvoirs et responsabilités d'un directeur général,
incluant les dispositions applicables pour mettre fin à ses fonctions.
Suite
à la commission Charbonneau, nous appuyons l'idée que le conseil
d'administration d'un ordre devra se doter, par règlement, d'un code
d'éthique et de déontologie et que ses membres devront se soumettre à ces
règles.
En
regard des droits conférés à l'assemblée générale des membres, nous sommes en
désaccord avec le projet de loi, qui
retire l'exigence de faire approuver par les membres réunis en assemblée
générale la cotisation professionnelle fixée par le conseil d'administration. Les pouvoirs confiés aux membres réunis en
assemblée générale sont déjà très limités — ces
pouvoirs sont au nombre de trois — et nous croyons que les membres doivent
continuer à avoir un droit de regard sur l'approbation de la cotisation professionnelle fixée par le conseil
d'administration. Cette approbation permet l'exercice d'une gestion
financière transparente et responsable.
Nous
avons également la même réserve en ce qui a trait au mode d'élection à la
présidence, qui, selon nous, ne doit pas être dévolu au conseil
d'administration mais demeurer la responsabilité de l'assemblée générale.
Tout en étant
d'accord avec le principe prévu à l'article 65 du projet de loi devant
faire supporter à la partie intimée les
frais de l'ordre engagés pour faire enquête, nous pensons qu'il faudrait les
préciser dans cette disposition comme cela est décrit actuellement à
l'article 151 du code pour les déboursés devant être inclus dans l'état
des déboursés.
Enfin,
l'ordre est d'accord avec les modifications proposées visant à hausser les
amendes minimales et maximales en
matière disciplinaire, en fait de les doubler. Sans constituer un outil final
pouvant avoir un effet dissuasif, nous sommes d'avis que cette approche permet de mieux sanctionner les contrevenants,
et en particulier ceux qui sont des récidivistes.
Enfin,
compte tenu de l'importance des mesures prévues au projet de loi et dans
l'éventualité de l'adoption des dispositions
relatives à la réduction du nombre d'administrateurs et à l'interdiction du
cumul des fonctions de présidence
et direction générale, le gouvernement doit
prévoir des mesures transitoires pour
la mise en application de ces importants changements. Sauf pour
le délai d'implantation lié à la réduction de la taille du conseil
d'administration, qui est de quatre ans, un délai d'au moins deux ans nous
semblerait nécessaire pour permettre aux ordres professionnels de se conformer,
dis-je bien, aux autres changements.
En conclusion, M. le
Président, nous avons noté que de manière générale le gouvernement propose des modifications qui sont pertinentes et utiles, sauf
pour celles à l'égard desquelles nous avons exprimé une réserve. Il faut
admettre et souligner que la plupart des modifications prévues modernisent
notre système professionnel et qu'elles protégeront mieux le public, tout en
offrant aux ordres de meilleurs moyens pour s'acquitter de ce mandat.
Alors, merci de votre attention. Nous sommes
disposés, mes collègues et moi, à répondre à vos commentaires ou questions.
Le Président
(M. Ouellette) : Probablement que vous l'aviez pratiqué, parce
que vous aviez prédit que vous dépasseriez de 25 secondes; vous avez
dépassé de 25 secondes. Mme la ministre.
Mme Vallée :
Merci beaucoup. Alors, merci, M. Paradis, pour votre présentation.
Dans
un premier temps, évidemment, votre ordre fait partie des rares ordres,
actuellement, où il y a un cumul de fonctions, président, directeur
général, je pense que... Et vous êtes quatre ou cinq, quatre sur 46.
Une voix :
...
Mme Vallée :
Cinq. Donc, vous êtes en accord avec l'interdiction du cumul des fonctions.
Par
contre, vous mentionnez qu'il n'est pas opportun d'insérer au sein du code la
fonction de directeur général.
Si on s'entend sur la
prémisse qu'on ne peut cumuler les deux fonctions, pourquoi on ne définirait
pas ces fonctions-là à l'intérieur du code?
Pourquoi on ne vient pas... on ne peut prévoir spécifiquement les fonctions et
l'indiquer spécifiquement? J'essaie de comprendre un petit peu la portée de la
représentation.
M. Paradis
(Régis) : Essentiellement, Mme la ministre, c'est parce que la
personne qui est élue, au sein d'un ordre professionnel, c'est la présidente ou le président, donc c'est la
personne qui est imputable et c'est à elle à que revient le mandat de choisir et de déterminer les fonctions,
tâches et responsabilités d'un directeur général. Et c'est la raison
pour laquelle nous ne croyons pas que ça
devrait être inclus dans le code. Je pense qu'il n'y a pas de contradiction non
plus entre le fait qu'on est d'accord à
scinder les deux fonctions, mais que le directeur général doit toujours,
finalement, être embauché et relever du conseil d'administration d'un
ordre.
Mme Vallée :
Mais ce que je comprends... Bien, vous dites : Il n'est pas nécessaire
d'insérer la fonction de façon spécifique
au sein du code, puisque cette fonction-là, elle existe en raison de la volonté
du conseil d'administration. Mais, à ne
pas le spécifier, est-ce qu'on ne pourrait pas se retrouver dans une situation
où d'office le conseil d'administration... ferait indirectement ce qu'il ne peut pas faire directement,
c'est-à-dire qu'il s'attribue, au sein du conseil, à travers ses façons de faire, des fonctions de direction générale sans
pour autant le préciser? Est-ce qu'en ne le nommant pas on ne donne pas
une voie de passage pour ceux qui ne souhaiteraient pas respecter les
dispositions du Code des professions?
M. Paradis
(Régis) : Je dirais, là-dessus, qu'il n'y a aucune donnée probante qui
démontre qu'une telle chose pourrait se faire. Moi, je peux vous dire
que ça fait quand même pas mal d'années que je suis...
Mme Vallée : La nature
humaine étant ce qu'elle est.
M. Paradis (Régis) : Pardon?
Mme Vallée : La nature
humaine étant ce qu'elle est.
M. Paradis
(Régis) : Oui. Mais ça fait quand même pas mal d'années que je suis à
la direction de l'ordre, et quand même
déjà un peu plus de 16 ans à la fonction de directeur général, et je ne
crois pas qu'une telle possibilité pourrait se produire au sein de
l'ordre.
Peut-être que d'autres pourraient ajouter
quelque chose là-dessus.
M. Ledoux
(Georges) : Peut-être compléter, Mme la ministre. Je pense que vous
avez entendu plusieurs ordres faire
des représentations dans le même sens, à savoir qu'il faut faire confiance, je
pense, au sens des responsabilités des conseils
d'administration, qui déjà, plusieurs, comme vous le disiez tout à l'heure...
c'est même quasiment la totalité des ordres
qui ont désigné des directeurs généraux ou des personnes... des directrices
générales au sein de leur ordre. Alors, je pense qu'il faut leur faire confiance, leur reconnaître cette latitude,
cette capacité, eux-mêmes, en fonction des règles de saine gouvernance qui existent actuellement, de
déterminer les pouvoirs de leurs directeurs généraux et de la personne
qui va s'occuper de la direction générale.
Alors, c'est
une question de confiance et aussi de respecter la latitude qu'ont les ordres,
à ce moment-là, incluant, et des
ordres vous l'ont dit dans leurs mémoires... incluant sur la façon, par
exemple, de mettre fin à une entente ou encore un contrat d'emploi avec
un directeur général. Dans le scénario que vous envisagez actuellement, dans le
code, vous lui accorderiez la même
protection que plusieurs personnes qui occupent des fonctions statutaires, au
sein du code, au niveau de la
destitution, le vote aux deux tiers. Alors, beaucoup d'ordres ont dit dans
leurs mémoires qu'une telle façon de procéder, un peu mur à mur, ça
allait à l'encontre de la latitude normale dont ils devraient pouvoir disposer
comme organismes autonomes et responsables.
Puis, dans le fond, ce qu'on vous demande,
essentiellement, c'est de faire confiance aux ordres. Ils ne vont certainement pas tenter de contourner l'effet de
la loi. S'il y a un directeur général, ils vont lui donner, en vertu des
principes de saine gestion, tous les
pouvoirs inhérents pour accomplir correctement les fonctions qu'ils voudraient
bien leur confier.
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la ministre.
• (14 h 20) •
Mme Vallée : Maintenant, concernant la taille du conseil d'administration, je comprends que ce qui est prévu au code viendrait modifier de façon importante votre
structure. Actuellement, vous avez 25 membres et 21 d'entre eux
qui sont élus. Pouvez-vous nous expliquer votre structure actuelle puis faire peut-être
le miroir avec ce qui est présenté et les enjeux que ça suscite chez vous?
M. Paradis
(Régis) : Certainement. Présentement, Mme la ministre, notre conseil
d'administration est composé
de 25 personnes. Nous avons 20 membres élus au suffrage universel par
les membres de la région, nous avons quatre représentants
du public nommés par l'Office des professions et également aussi le président,
qui est moi, élu au suffrage universel des membres, ce qui fait en tout
et pour tout 25.
Ce que le projet de loi propose, c'est de réduire la taille, donc, à 16 personnes. Donc,
concrètement, on conserve les quatre
représentantes, représentants du public, et naturellement les
20 personnes élues présentement diminueraient à 11, ce qui ferait, vous savez, les 11, plus les
quatre, plus le président élu au suffrage universel, qui ferait 16. Alors,
concrètement, dans la réalité, ce qui
se produirait, chez nous, c'est que le nombre de membres élus au suffrage
universel dans chacune des régions diminuerait quasiment de 50 % ou
presque, de 20 à 11. Alors, évidemment, c'est beaucoup.
Moi, je vous
dirais également, aussi, que la taille du conseil actuellement, à 25, n'a
jamais causé de problème ni en termes d'efficacité, en termes d'efficience
également, et il n'y a rien qui démontre, finalement, qu'il faudrait réduire la
taille du conseil.
On pense
qu'il devrait relever à chacun des ordres professionnels de déterminer,
effectivement, sa taille, parce qu'actuellement
on en a de 25, on en a de 16, on en a de 18, et, d'autres ordres, encore plus
que cela. Alors, nous pensons qu'il devrait demeurer la prérogative de
l'ordre de déterminer la taille de son organisation.
Mme Vallée :
Les experts en gouvernance qui nous ont rencontrés il y a quelques semaines
nous disaient qu'il était important de réduire, qu'une bonne, une saine
gouvernance s'exprimait par un conseil d'administration qui est moins nombreux,
qui permet un meilleur échange, une meilleure fluidité de l'information. Est-ce
que vous, vous auriez une alternative à proposer à ce qui est prévu au projet
de loi?
M. Paradis (Régis) : Alors,
l'alternative à proposer, pour nous, c'est le statu quo, en ce qui nous
concerne, Mme Vallée. C'est-à-dire qu'on devrait maintenir la taille
actuelle, qui fait, selon nous, une bonne représentation.
Puis
là je comprends que les administrateurs élus ne sont pas des représentants
régionaux, mais, enfin, je pense que vous comprenez dans le sens que je
veux le dire, c'est que ça permet actuellement aux infirmières et infirmiers auxiliaires dans chacune
des régions de s'identifier, finalement, à leurs administrateurs. Et, dans ce sens-là, nous pensons qu'on pourrait assez facilement maintenir le statu
quo, compte tenu, et je le répète, que ça ne nous a jamais causé de problème.
Pour
vous dire, moi, ça fait longtemps que je suis le président à l'ordre, là, ça
remonte en 1987, là, pour vous dire que
c'était Mme Thérèse Lavoie-Roux qui était ministre à la Santé à
l'époque, alors ça date quand même, et sincèrement ça ne m'a...
Mme Vallée :
J'étais encore au secondaire.
M. Paradis
(Régis) : Ah oui? C'est bien pour dire, hein?
Alors,
j'arrivais à l'ordre, Mme la ministre. Et de tout temps le conseil d'administration de l'ordre était composé de la taille qu'il est actuellement, et sincèrement ça ne m'a jamais causé de problèmes en
termes d'efficacité, d'efficience, puis je ne pense pas que les
décisions, finalement, seraient meilleures ou moins bonnes, finalement, si on
le modifierait. Et je compléterais en disant : Finalement, pourquoi ne pas
conserver ce qui fonctionne bien?
Mme Vallée :
Bien, en fait, il y a eu des modifications qui ont été apportées, notamment au
Barreau, à la Loi sur le Barreau, qui...
Le Barreau s'est présenté devant nous, la bâtonnière nous disait que l'exercice
avait été fort concluant. Puis je me souviens très bien des échanges que
nous avions eus à l'époque, lors de la modification de la Loi sur le Barreau, notamment avec des collègues de l'opposition,
parce qu'il y avait... certains membres avaient un peu cet argumentaire
que vous mentionnez, c'est-à-dire : Bien, il est important que les membres
se sentent représentés au sein de leur ordre professionnel,
et là... Et en fait vous mettez le doigt sur un enjeu, parce que l'ordre
professionnel n'est pas censé représenter les membres à l'intérieur du conseil d'administration. Les membres du
conseil d'administration sont là dans l'objectif d'assurer la protection
du public, ce qui est la mission de l'ordre, la mission première de l'ordre.
Et
ne croyez-vous pas que, justement, de maintenir ce type de représentation là
contribue à véhiculer une perception quant au rôle de l'ordre au sein
des membres?
M. Paradis
(Régis) : Moi, je serais
porté à croire que non. Je vais vous dire, les 20 personnes élues au sein
de notre ordre travaillent toutes dans des établissements de santé. Il y en avait
de nombreux. Maintenant, ça a été réduit à 34, il y a deux ans, avec la loi
actuelle.
Mais
je vais vous donner un exemple précis, si vous permettez, Mme la ministre. À chaque année,
évidemment, à l'instar de tous les ordres,
on se doit de tenir notre assemblée générale, donc nous présentons à l'ensemble
de... plusieurs centaines
d'infirmières auxiliaires la composition du conseil d'administration, et, les
gens, on le voit dans leurs applaudissements,
qu'ils témoignent vraiment beaucoup de respect et puis de plaisir à savoir que,
finalement, on a dans leur région,
finalement, des personnes qui sont élues au conseil d'administration, qui
prennent des décisions pour la protection du public, et également
auxquelles ils puissent s'identifier, tout en comprenant très bien ce que vous
venez de dire, finalement, qu'ils ne sont
pas là pour représenter leur région, mais ils sont là pour la protection du
public à l'intérieur du conseil.
Mais,
malgré tout ça, pour les motifs que je viens d'invoquer, Mme la ministre, je
crois qu'on devrait quand même maintenir cette décision-là au niveau de
l'ordre professionnel.
Mme Vallée :
Et j'aimerais vous entendre, parce que le projet de loi prévoit un encadrement
du nombre de mandats que peut occuper...
que peut avoir à son actif un président de l'ordre, puis en fait c'est votre
intervention qui m'amène à cette
question-là : Qu'est-ce que vous pensez de cet encadrement, de limiter le
mandat de celui ou de celle qui exercera le rôle de président de l'ordre, compte tenu, vous, de votre
expérience — j'imagine
que vous avez quand même cogité sur la question, là — compte
tenu du bagage que vous avez?
M. Paradis
(Régis) : Bien, Mme la ministre, moi, ce sont des mandats de
quatre ans, chez nous, puis j'ai eu le plaisir,
j'ai été choyé... j'en ai eu sept d'affilée, ininterrompu. Et puis je vous
dirais ceci : Quand on a la passion de ce qu'on fait puis qu'on a à coeur le système professionnel, l'intérêt de
la protection du public, et qu'on est toujours heureux et fier de ce qu'on fait, ce n'est pas du travail,
c'est du plaisir. Et, dans ce sens-là, je peux vous dire une chose, en tout
cas, à tout le moins en ce qui me concerne,
puis je crois que c'est la même chose pour la plupart des autres présidents des
ordres : On ne s'assoit jamais sur nos
lauriers, même si ça fait 10, 12, 15 ans ou encore plus de 25 ans
comme moi, là, je pense qu'on a toujours ce désir, cette passion-là.
D'un autre côté, moi,
je crois résolument, finalement, au système professionnel tel qu'il existe
actuellement. D'ailleurs, je suis toujours
étonné qu'il ne soit pas repris par d'autres provinces ou encore d'autres pays
ailleurs également. On a un bon
système professionnel, et les ordres s'en acquittent bien. Et, dans certains
cas comme on parle ici, la taille des ordres, il faut leur faire
confiance également à ce niveau-là.
Malgré tout, je ne
suis pas... et on en a discuté longuement, au conseil d'administration, nous ne
sommes pas opposés à la limitation, quand même, des mandats.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de
Chicoutimi.
• (14 h 30) •
Mme Jean :
Merci. Alors, bonjour, Mmes Sikora et Bellerose. Bonjour, M. Paradis,
M. Ledoux. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci de partager
avec nous votre expérience et votre opinion sur le projet de loi.
Moi, j'attirerais
votre attention sur votre réserve ou opposition au fait que l'office ou même
l'ordre pourrait déterminer la cotisation, que ça devrait aller aux membres de
l'ordre de pouvoir fixer quelles seraient leurs propres cotisations. On s'entend que l'ordre a une mission, une mission qui est de protéger
le public, et que ça implique quand même des besoins, des besoins financiers. Comment, à
ce moment-là, un ordre qui se retrouverait sous-financé, et que les membres ne veulent pas augmenter leurs
cotisations, pour des raisons qui leur appartiennent... Dans quelle situation peut se retrouver un tel ordre?
Puis quelle serait sa porte de sortie à ce moment-là?
M. Paradis
(Régis) : Dans un premier
temps, si vous me permettez, Mme la
députée, ils ont peu de
pouvoirs, comme vous le savez, hein, les
membres, en assemblée générale. Ils
ont le pouvoir d'adopter la cotisation qui est fixée par le conseil d'administration, ils ont le pouvoir de
déterminer le mode d'élection, également, à la présidence et également,
aussi, de déterminer quels seront les auditeurs ou vérificateurs externes au
niveau des états financiers. Alors, ils en ont vraiment très peu.
Et moi, je vous
dirais également que... Enfin, ce que j'ai entendu, depuis plusieurs années, ce
n'est pas arrivé fréquemment, si c'est déjà
arrivé, qu'un ordre manquait de liquidités, de fonds pour s'acquitter de sa
fonction de protection du public.
Je
vous dirais également, aussi, que, de notre côté, il n'est pas arrivé
fréquemment qu'on ait à aller en hausse de cotisation. D'ailleurs, nous sommes la plus basse de tous les ordres
professionnels et de très loin. À 195 $ par année, là, c'est la
plus basse et de loin.
Et
je compléterais avec ceci : Quand c'est bien expliqué, bien présenté,
règle générale, finalement, nos membres, à tout le moins, ont toujours compris la situation et nous ont donné,
finalement, les besoins que nous avions pour s'acquitter de notre mandat
de protection du public, Mme la députée. Alors, dans ce sens-là...
Et
puis c'est important pour les membres, la cotisation, d'être... Ils aiment ça
en parler puis échanger là-dessus. Alors,
je verrais très mal, enfin, de mon côté, de leur enlever ce droit-là, qui, je
pense, n'a pas causé tant de problèmes que ça depuis l'avènement du
système professionnel qu'on connaît actuellement, c'est-à-dire 1973, hein,
depuis...
Mme Jean :
Mais on a quand même entendu parler de quelques-uns.
Vous
savez qu'un des enjeux auxquels le projet de loi veut faire face, c'est la
confiance du public vis-à-vis les ordres
professionnels, donc demande une transparence et demande aussi d'avoir
confiance sur le fait que l'ordre est bien là pour protéger le public et non pas là pour défendre les droits de ses
membres. Et là-dessus il y a une perception assez grande, assez
importante, je pense, à laquelle il faut faire face, de la part du public.
Vous parlez, oui, que
les membres n'ont pas beaucoup d'occasions... ou n'ont pas beaucoup de
pouvoirs, et il y en a un deuxième qui est
de nommer le nombre de membres du conseil d'administration de l'ordre élus par
rapport au nombre nommés. Et là vous mentionnez que malheureusement il y
en aurait moins qui seraient élus, plus nommés.
Est-ce
que ce vous ne trouvez pas que le fait de pouvoir rebalancer, dans un conseil
d'administration, les membres qui
sont nommés versus ceux qui sont élus pourrait permettre à la population de
dire : O.K., oui, j'ai plus de chances... je crois plus que le conseil d'administration serait
là pour défendre les droits du public et non pas les droits des membres,
le fait que ce soit mieux équilibré, ou plus équilibré, ou plus réparti?
M. Paradis
(Régis) : Mais déjà, dans le projet de loi, on consent de nouvelles responsabilités
et pouvoirs additionnels aux représentants
du public. Alors, on peut toujours leur accorder ces responsabilités additionnelles
là tout en maintenant le cadre actuel au niveau de la taille du conseil
d'administration.
Moi, comme je le
disais tout à l'heure, je vois très bien les représentants du public pouvoir
nommer... voter, c'est-à-dire, la
présidence, élue pas au suffrage universel mais élue au suffrage du conseil
d'administration, du comité exécutif,
etc. Alors, on n'est pas du tout, du tout opposés, finalement, aux nouveaux
pouvoirs qui pourraient être accordés aux
représentantes, représentants du public. Mais cependant on pense que...
Quatre sur les 25 personnes actuellement
en place, je pense que la proportion, dis-je
bien, en termes de pourcentage, est suffisamment bien équilibrée,
à mon avis.
Mme Jean :
Malgré que c'est un gros pourcentage, qui est pas mal plus important, par
rapport au nombre d'administrateurs qui sont
élus, par rapport à ceux qui sont nommés, parce qu'il y a quand même
une bonne différence entre quatre et 21, là.
M. Paradis
(Régis) : Oui, on est conscients que le pourcentage, effectivement, là...
je vous l'accorde.
Mme Jean : Donc, au
niveau de la perception du public,
vous pensez vraiment que ça ne fait pas de problème à ce niveau-là?
Pour vous, vous ne le voyez pas, là, comme quoi ça pourrait être mieux perçu si
l'équilibre ou le pourcentage était plus pondéré à ce niveau-là.
M. Paradis (Régis) : Évidemment, moi, je vous dirais ceci : On pourrait
réduire la taille du conseil d'administration, puis peut-être que finalement, dans x nombre années d'ici, on pourrait avoir la
même difficulté et également, aussi, la même perception. Alors, c'est la
raison pour laquelle moi, je pense que, finalement, le statu quo ou encore laisser
à la prérogative de l'ordre le choix de déterminer serait la meilleure chose à
faire.
Mme Jean :
Le laisser aux membres. D'accord.
Vous
êtes d'accord avec le fait, dans le cas d'une enquête et que quelqu'un
serait reconnu coupable, qu'il puisse absorber
les frais liés à cette enquête. Vous mentionnez, par exemple, quand même...
tout de même une réserve sur le fait qu'il faudrait préciser quel type de frais
devraient être inclus là-dedans. Est-ce
que vous avez une idée déjà de
comment ça pourrait être réparti ou comment ça pourrait être précisé, ces frais
d'enquête là?
M. Paradis (Régis) : Mon collègue assiste le syndic depuis de très, très, très nombreuses années, je pense
qu'il pourrait vous l'exprimer avec grande clarté.
Le Président (M. Ouellette) :
Me Ledoux.
M. Ledoux
(Georges) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme la députée, essentiellement,
notre proposition ou notre suggestion, c'est plutôt de clarifier
quelle serait la nature de ces frais, justement, engagés pour faire enquête comme c'est inscrit dans la loi. Déjà, dans l'article 151,
lorsqu'on parle des déboursés qui peuvent être
supportés, justement, par une partie plaignante... une partie intimée,
pardon, qui est reconnue coupable devant le conseil de discipline, on énumère, on fait une nomenclature des
différents déboursés, alors que ce n'est pas fait actuellement dans l'amendement proposé au projet de loi. On suggère bien modestement qu'il faudrait peut-être
réfléchir à indiquer ce qui serait inclus, justement, dans les frais de
l'ordre engagés pour faire enquête. Je
pense que ce serait une bonification intéressante à retrouver.
Les
frais engagés par l'ordre pour faire enquête, est-ce que ce sont tous les
frais de déplacement, les frais de séjour d'un syndic? Est-ce que c'est les frais, par exemple, d'un expert dont
il a dû retenir les services pour faire une enquête?
Bref,
il faudrait être plus précis, comme c'est déjà le cas à l'article 151
lorsqu'une partie intimée est reconnue coupable, il
y a une description des différents
frais qui seraient inclus. Alors, je
pense qu'on pourrait s'inspirer peut-être de l'article 151 pour
comprendre plus précisément ce qui serait inclus dans la notion de frais
engagés dans le cadre d'une enquête.
Mme Jean :
Merci. Dernière petite question. Vous n'êtes pas d'accord avec la proposition
de faire une table, un pôle de
coordination, mais vous êtes d'accord avec la proposition du CIQ, donc, qui,
eux, proposent de faire un comité multisectoriel
qui remplacerait le pôle. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette idée-là du
CIQ de faire un comité multisectoriel pour l'admissibilité, pour
l'admission?
M. Paradis
(Régis) : On n'est pas vraiment...
On n'est pas opposés, effectivement, à cette possibilité-là. Cependant, à l'instar du conseil et de
son mémoire et de plusieurs autres ordres professionnels, on est opposés très
fermement, cependant, à élargir les pouvoirs du commissaire. On pense
que le commissaire, actuellement, a le droit d'agir et d'enquêter concernant les équivalences et admissions des
personnes immigrantes, et nous pensons effectivement que ce pouvoir-là est tout à fait
suffisant pour protéger le public.
Mme Jean :
Merci.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le
député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci,
M. le Président. M. Paradis,
Me Ledoux, Me Bellerose, Me Sikora, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Merci de contribuer aux travaux de la commission.
D'entrée de jeu, le code d'éthique, vous êtes
favorables à ce qu'on permette à l'ordre professionnel d'adopter un code d'éthique, vous dites, par règlement. Il y a
certains ordres qui sont venus nous dire : Bien, écoutez, oui, on veut
un code d'éthique, mais on voudrait laisser
la liberté de le faire par résolution du conseil d'administration. Pour vous,
est-ce que c'est important que ce soit par règlement puis que ça suive le
processus, là, avec l'office, puis tout ça?
M. Paradis
(Régis) : Moi, je vous dirais, là-dessus, que, s'il y a une décision
qui est prise de l'adopter par résolution plutôt que par règlement, on pourrait
se rallier, finalement, à cette proposition-là... ou à cette réalité-là,
devrais-je dire.
• (14 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Il y a une partie des infirmiers et infirmières
auxiliaires qui travaillent dans le réseau public, puis il y en a d'autres également qui travaillent
en résidence privée, supposons, résidence pour personnes âgées ou soins
de longue durée, tout ça. On a discuté, dans
le cadre des travaux de la commission, de la possibilité de viser
éventuellement les tiers, de donner un
pouvoir au syndic de s'adresser aux tiers, notamment pour les entreprises, les
sociétés. Comment vous verriez ça,
qu'on donne ce pouvoir-là au syndic, dans le cadre d'une enquête disciplinaire,
qu'il puisse, en fait, contraindre les tiers, les interroger? Parce que
ça se posait pour, bon, les optométristes notamment, ça pourrait se poser pour
les pharmaciens, pour les grandes bannières.
Vous, avec les résidences, supposons, ou avec les centres de soins,
comment vous voyez ça?
M. Paradis
(Régis) : C'est juste qu'en
ce qui nous concerne, sur les 29 000 membres
inscrits au tableau de l'ordre, nous
en avons quelque... un peu moins de 19 000 dans le réseau public et le
reste qui travaille beaucoup, effectivement, dans le réseau privé,
notamment les résidences privées ou autres.
Et puis à ce
niveau-là je vais laisser, qui assiste le syndic depuis de nombreuses années,
Me Ledoux peut-être commenter votre question, si vous me permettez, M. le
député.
Le Président
(M. Ouellette) : Me Ledoux.
M. Ledoux
(Georges) : Alors, écoutez, je vais essayer sommairement... même si on
n'a pas travaillé, là, de manière plus étendue sur la question que vous
soulevez.
Une chose est claire,
c'est que normalement, évidemment, le syndic d'un ordre procède à des enquêtes
sur la conduite des membres, hein? Comme
tel, là, normalement, le but de l'enquête, c'est de porter sur la conduite d'un
membre. Les pouvoirs
d'enquête, théoriquement, du syndic, donc, se concentrent à savoir si, oui ou
non, le membre a manqué à ses obligations déontologiques ou à toute
autre obligation légale.
Le
droit d'accès, par contre, à des documents, ou à des informations, ou à des
renseignements, dans le cadre de son
enquête, on sait qu'à la lumière d'une affaire, rendu dans l'affaire
Pharmascience, on a étendu le droit d'accès du syndic, dans le cadre d'une enquête, à demander des
renseignements à un tiers, mais jusqu'à maintenant, à moins que la loi
soit modifiée précisément sur cet aspect, le syndic d'un ordre n'enquête pas
sur un tiers, il enquête, normalement, sur la conduite
d'un professionnel qui est sous la responsabilité de l'ordre, donc qui est
membre de l'ordre. Alors, il faudrait peut-être,
à ce moment-là, travailler sur des amendements, si on voulait modifier la
portée ou l'étendue des pouvoirs d'un syndic
pour que ça porte sur la conduite d'un tiers. Vous parliez, par exemple,
d'établissement ou... d'exploitant de résidence privée ou de toute autre ressource privée. Il faudrait que la loi soit
modifiée pour préciser ou ajouter ces pouvoirs-là au syndic.
Mais,
pour l'instant, dans l'économie de la loi, à moins que je me trompe, le syndic
enquête essentiellement sur des membres,
même s'il peut avoir des droits d'accès, dans le cadre de son enquête, là, à
des documents ou des renseignements auprès
de tiers, mais l'enquête est toujours dirigée, évidemment, à l'endroit de la
conduite d'un membre, à moins que la loi soit modifiée.
M. Jolin-Barrette : Mais, sur le principe, êtes-vous favorables à ce
qu'on donne davantage de pouvoirs au syndic pour couvrir ces
situations-là?
M. Ledoux
(Georges) : Écoutez, je vous dirais qu'il faudrait peut-être procéder
à un examen plus approfondi de tout ça. Une chose est sûre, c'est qu'il
y a plein d'autres intervenants, actuellement, qui ont des pouvoirs d'enquête
et d'inspection. Vous me parliez tout à
l'heure du secteur privé, par exemple des exploitants de résidences privées. Il
y a des instances qui procèdent à la
certification qui ont des pouvoirs d'inspection et de vérification auprès de
ces exploitants.
Donc, il y a déjà
d'autres intervenants qui exercent des pouvoirs d'enquête, d'inspection ou de
vérification. Il faudrait s'assurer de ne
pas faire double emploi en conférant à un syndic des pouvoirs d'enquête
identiques ou similaires quand il y a
déjà plein d'intervenants qui ont des pouvoirs d'enquête ou d'inspection auprès
des tiers dont vous parlez, là, dans votre intervention.
M. Jolin-Barrette : Sur la question du montant des amendes... Dans le
fond, dans le projet de loi n° 98, on vient augmenter
substantiellement les pénalités. Est-ce que vous avez des commentaires? Parce
que tout à l'heure l'Ordre des hygiénistes
nous disait : Bien, écoutez, le salaire moyen d'une hygiéniste est autour
de 40 000 $, je crois. Chez les infirmiers et les infirmières
auxiliaires, est-ce que c'est un enjeu également?
M. Paradis
(Régis) : Ce n'est pas quelque chose que, jusqu'à date, on a vraiment
réfléchi sérieusement, ça mériterait d'être
examiné plus à fond. Donc, tant qu'on n'a pas fait de réflexion approfondie,
donc, avec nos instances, ce serait un peu plus difficile pour moi
d'exprimer une position.
Et cependant, sinon,
tout comme les hygiénistes dentaires, nous sommes aussi, naturellement, un des
ordres professionnels parmi les plus bas
salariés, là, à travers les 46 ordres professionnels, donc il est certain
que ça pourrait avoir un impact
également. Mais je vous dirais qu'il faudrait vraiment faire une réflexion plus
approfondie avant de prendre position à ce niveau-là.
Le Président
(M. Ouellette) : Un petit commentaire? 20 secondes, M. le
député de Borduas, pour finir.
M. Jolin-Barrette :
Bien, je vais en profiter pour vous remercier pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Le Président
(M. Ouellette) : C'est sa meilleure question, M. Paradis.
M. Régis
Paradis, Me Georges Ledoux, Me Eva Sikora et Me Amélie
Bellerose, merci d'être venus en commission parlementaire, représentant
l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec.
Je vais suspendre quelques minutes. Je demanderais
à l'Ordre des ingénieurs du Québec de bien vouloir s'avancer.
(Suspension de la séance à
14 h 45)
(Reprise à 14 h 50)
Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant
l'Ordre des ingénieurs du Québec et sa présidente, Mme Kathy Baig. Et vous
savez un peu comment ça fonctionne. Vous allez nous présenter la personne qui vous accompagne, vous allez avoir
10 minutes pour faire votre présentation, et après vous allez avoir
un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions.
Mme Baig, à vous la parole.
Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ)
Mme Baig
(Kathy) : Donc, effectivement, je vais vous présenter la personne qui m'accompagne :
Me François-Xavier Robert, de la Direction des affaires juridiques
de l'ordre. Merci, M. le Président. Mme la ministre, les membres de la commission.
D'entrée
de jeu, de manière générale, l'Ordre des ingénieurs accueille très
favorablement une grande partie des modifications
proposées au Code des professions par le projet de loi n° 98. Pour
plusieurs points, ce projet de loi contribue à la modernisation tant
attendue du système professionnel québécois.
Toutefois,
l'Ordre des ingénieurs du Québec n'a pas attendu le dépôt de ce projet de loi
pour amorcer sa propre modernisation,
et des changements importants ont été apportés à la gouvernance de l'ordre au
cours des dernières années. Je vais vous donner quelques exemples.
À titre
d'exemple, tous les nouveaux administrateurs de l'ordre reçoivent une formation
avancée en matière de gouvernance
depuis 2008. C'est maintenant, même, une journée de formation de deux jours,
qui permet aux administrateurs d'apprivoiser leur rôle et de bien
comprendre leurs responsabilités en fonction du Code des professions.
Pour ce qui
est de l'éthique, l'Ordre des ingénieurs du Québec s'est doté d'un code
d'éthique sévère auquel doivent se
soumettre tous ses administrateurs et maintenant même les candidats qui
souhaitent déposer leur candidature comme administrateurs. Ce code d'éthique prévoit surtout un processus clair
pour accueillir et traiter avec efficacité les plaintes portant sur les
questions d'éthique.
Pour ce qui
est des candidats au permis d'ingénieur, ils doivent obligatoirement réussir un
examen portant sur l'éthique et la
déontologie professionnelles, comme le prévoit le projet de loi n° 98.
Toutefois, je suis fière de préciser que l'Ordre des ingénieurs du
Québec applique cette mesure depuis 1994.
Ces exemples montrent bien que, sur plusieurs
points, le projet de loi n° 98 vient implanter des pratiques déjà en vigueur au sein de l'Ordre des ingénieurs du
Québec. Il nous faut maintenant obtenir des moyens d'accélérer la mise en place de mesures qui facilitent la gouvernance,
le respect des bonnes pratiques en matière d'éthique et toujours mieux
assurer la protection du public.
L'une des
mesures réclamées par l'Ordre des ingénieurs du Québec depuis plusieurs années
est la réduction de la taille de notre conseil d'administration, qui est
actuellement à 25. Je suis heureuse de constater que cette mesure très attendue
se retrouve enfin dans le projet de loi n° 98.
L'ordre est aussi satisfait de constater que les
dénonciateurs seront désormais mieux protégés en recevant l'immunité contre une plainte qui pourrait être
déposée devant le conseil de discipline. L'ordre appuie totalement cette
mesure, mais on considère qu'elle ne va pas
assez loin. L'Ordre des ingénieurs recommande depuis plusieurs années
que les dénonciateurs soient mieux protégés
par la loi et que leur protection s'étende à d'autres types de représailles,
comme la rétrogradation ou le congédiement. J'invite donc les parlementaires à
apporter toute la considération nécessaire à la protection des dénonciateurs, puisque, comme vous le savez, leur
protection est l'une des principales voies qui mènent à une meilleure
protection du public.
Le projet de loi n° 98 pourrait aussi aller
plus loin pour faciliter le déroulement des enquêtes. Dans sa forme actuelle, le projet de loi envisage de permettre
aux syndics d'échanger de l'information avec des tiers au sein du
système professionnel. L'Ordre des
ingénieurs du Québec recommande plutôt que les syndics professionnels soient
autorisés à échanger des informations
avec les autorités compétentes lorsqu'il existe des motifs raisonnables de
croire à l'existence d'un danger
imminent pour la sécurité du public. Le syndic pourrait alors en informer
l'organisme concerné, par exemple la Commission des normes, de l'équité,
de la santé et de la sécurité du travail, si nécessaire.
Cela m'amène
à aborder la question des amendes qui peuvent être imposées aux professionnels.
Nous sommes, bien sûr, en faveur de
l'augmentation du montant de ces amendes prévue dans le projet de loi
n° 98. J'invite toutefois les parlementaires
à examiner sans tarder la concordance entre les nouvelles amendes prévues au
Code des professions et les amendes
prévues par les différentes lois professionnelles. Si le projet de loi est
adopté sans ce travail de concordance, nous serons obligés d'appliquer un système où l'usurpation du titre
d'ingénieur serait passible d'une amende de 62 500 $, alors
que l'utilisation de plans non signés par un ingénieur serait passible d'une
amende de seulement 10 000 $. On peut certainement tous convenir que ces amendes ne représentent pas la
gravité relative de chaque infraction en matière de protection du
public.
Je tiens à souligner aussi notre grande
satisfaction à l'effet que le coût des frais d'enquête pourra s'ajouter au montant exigible de la part d'un professionnel
trouvé coupable d'une infraction disciplinaire. L'ordre peut témoigner
que certaines enquêtes sont effectivement très coûteuses à réaliser, notamment
les enquêtes relatives à la malversation.
J'en arrive maintenant à des aspects du projet
de loi sur lesquels nous avons certaines réserves. La première concerne le
processus électoral pour le choix des administrateurs.
Dans sa forme
actuelle, le projet de loi interdit à un candidat de communiquer avec les
autres membres de son ordre. Cette interdiction ne va pas dans le sens
de l'intérêt de la protection du public, puisqu'il y a l'interdiction de candidats recevant l'appui de groupes d'intérêts
comme des grands employeurs ou des syndicats. Cela ne va pas non plus dans le sens d'une saine gouvernance des ordres
professionnels, puisque les membres ne seront probablement pas en mesure
de voter de façon éclairée. Il serait plus
efficace que chaque ordre professionnel puisse lui-même fixer les règles du
processus électoral, incluant
l'encadrement des dépenses électorales ainsi que les forums dans lesquels les
candidats peuvent s'exprimer.
Il en va de
même avec le projet d'imposer un code d'éthique uniforme à tous les
professionnels. Tous les experts en matière
d'éthique confirment que le code d'éthique est toujours plus respecté s'il est
issu d'une réflexion sérieuse de la part de l'organisation concernée. Le projet de loi devrait donc s'en tenir à
l'adoption par l'Office des professions du Québec d'un cadre général qui
laisse à chaque ordre professionnel la responsabilité d'adopter son propre code
d'éthique.
Ceci étant
dit, la protection du public ne repose pas uniquement sur la gouvernance des
ordres et sur le contenu du Code des
professions. Je vais donc profiter de cette opportunité pour conclure ma
présentation par une réflexion sur les lois particulières à chaque
profession.
Comme vous le
savez, l'encadrement d'une profession par un ordre professionnel repose sur la
description du champ d'exercice de la profession et de ses actes
réservés. Or, la Loi des ingénieurs décrit le champ d'exercice de la profession en des termes
qui n'ont pratiquement pas changé depuis son adoption en 1964. Je n'ai
certainement pas besoin de vous
convaincre que la science et les besoins de la société ont passablement évolué
et que le champ d'exercice de notre profession
tel que décrit dans la loi actuelle est maintenant désuet. Notre loi
s'intéresse de près aux activités du génie civil et des génies plus traditionnels. Elle ignore largement le rôle des
ingénieurs en génie informatique, logiciel, biotechnologies et plusieurs autres. Pour bien protéger le public,
l'Ordre des ingénieurs du Québec doit faire reposer ses activités sur
une loi qui reflète mieux la réalité d'aujourd'hui.
Je vous remercie de votre attention. Et nous
sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci. Mme la ministre.
• (15 heures) •
Mme Vallée : Bonjour,
Mme Baig. C'est un plaisir de vous revoir.
Il y a plusieurs choses à aborder dans ce bref
moment que nous avons ensemble.
Dans un
premier temps, pour ce qui est de la Loi sur les ingénieurs puis la
modernisation de la loi, vous savez qu'il y a actuellement un travail qui est en cours, comme l'ensemble des lois,
des défis et des chantiers sur la modernisation des lois professionnelles. Et le défi qui est le plus
grand, c'est de concilier les préoccupations des ordres professionnels,
parce qu'à partir du moment où on modifie une loi d'autres ordres veulent...
ont aussi des préoccupations sur le champ d'exercice,
par exemple, et sur les compétences. Et donc l'objectif, c'est d'en arriver à
quelque chose qui va concilier les positions
des différents ordres, parce qu'on ne peut pas travailler en silo, on doit
travailler en collaboration. Puis je sais que, pour ce qui est de l'Ordre des ingénieurs, l'Ordre des ingénieurs a
formulé certaines préoccupations, certaines demandes, et il s'agit là de concilier tout ça avec les
autres acteurs. Mais là-dessus je sais qu'on peut compter sur votre
collaboration.
Maintenant,
c'est un peu l'éléphant dans la salle, c'est qu'on ne peut pas passer sous
silence le fait qu'il y a des dispositions
dans le projet de loi qui sont insérées au Code des professions et qui viennent
répondre aux problématiques qui ont été vécues par votre ordre au cours
des dernières années, on ne peut pas mettre sous silence la tempête qui a
ébranlé l'Ordre des ingénieurs au cours des dernières années.
Nous avons, au cours de l'été, mis l'ordre... en
fait, le gouvernement a mis l'ordre sous administration en
raison de certains enjeux, en raison des
défis auxquels faisait face, par
exemple, le syndic pour répondre à
toutes les demandes qui étaient présentées, assurer que la protection du
public était bel et bien l'objectif premier de l'ordre et que l'ordre n'avait
pas de préoccupation plutôt associative. C'est un enjeu, c'est là.
Et j'aimerais
vous entendre sur les problèmes que l'ordre a vécus au cours des dernières
années. Je sais que vous avez été très présents dans le cadre de
l'accompagnement. Vous-même, Mme Baig, avez été là, avez mis en oeuvre plusieurs
des recommandations qui avaient été formulées par les
accompagnateurs. Vous avez dit : Je souhaite amener mon ordre vers une nouvelle étape, vous avez fait beaucoup
d'efforts. Donc, j'aimerais vous entendre sur ce que le projet de loi offre aux ordres pour répondre aux problématiques similaires à celles
que vous avez vécues puis là où on pourrait aller plus loin, là où on a
besoin peut-être, le cas échéant, d'adapter ce qui est prévu au projet de loi.
Mme Baig
(Kathy) : Excellent. Effectivement, j'ai été très impliquée dans le projet de transformation avec
les accompagnateurs. Il y avait plusieurs recommandations. Celles qui touchent
le projet de loi ici, évidemment, le fait d'avoir
un président à temps plein, nous, avant, on avait des présidents qui étaient là
à temps partiel, puis peut-être,
au niveau des responsabilités entre le D.G.
et le président... faisait que ça pouvait nuire. Donc, je sais que dans le
projet de loi vous voulez départager ça clairement, et, je pense, dans
notre mémoire on le dit, que globalement on est d'accord avec ça. Donc, c'est
l'une des premières actions.
L'autre chose, on parle beaucoup, nous, au
niveau de notre conseil d'administration, on est quand même 25. L'année passée, le conseil d'administration a pris
la résolution de diminuer le conseil à 16, mais, comme vous le savez, c'est dans notre loi, donc on ne peut pas aller de
l'avant. Votre projet de loi va nous permettre d'accélérer cette
décision-là qu'on a prise.
Ensuite,
évidemment, il y a tout ce qui touche à la cotisation, je ne peux pas passer ça
sous silence. Effectivement, ça a été
un sujet qu'on en a parlé beaucoup, longuement, au conseil d'administration,
puis je peux peut-être me permettre de vous donner le reflet de cette
réflexion-là qu'on a faite au conseil d'administration, parce qu'on était
peut-être un peu partagés, mais en bout de
ligne on est favorables à l'idée que la cotisation soit décidée par le conseil
d'administration.
Mais on a des
inquiétudes parce que, pour nous, le fait que les membres se présentent à
l'assemblée générale et votent sur la
cotisation, c'est, pour certains, une forme de vote de confiance. Donc,
certains avaient une petite réserve que ce soit le conseil
d'administration.
Ensuite de ça, déjà, nos assemblées générales,
il y a peu de participants, et donc, le fait que la cotisation ne serait plus
votée, on a des inquiétudes qu'il va y avoir encore moins de participants à
l'assemblée générale.
Mais à la fin
on se dit que c'est quand même le C.A. qui est le mieux placé pour prendre cette
décision-là, que sa mission, c'était
la protection du public. Puis en plus, dans nos AGA, on a moins de 1 % des gens qui se présentent. Ça fait
que d'avoir moins de 1 % qui décident sur l'avenir financier de l'ordre
faisait, pour nous, que c'était peut-être mieux que ce soit le conseil
d'administration.
Et aussi
c'est le conflit d'intérêts, pour le membre, entre ses besoins financiers et le
fait de la protection du public. Pour lui, il doit porter deux chapeaux
quand il fait le vote à l'AGA.
Donc, pour toutes ces décisions-là, nous sommes
favorables à ce que la cotisation soit votée par le conseil d'administration. En échange, on pense quand
même que les ordres ont un devoir de
communiquer, de quand même
trouver une façon de faire la reddition de comptes, d'informer leurs membres pour qu'ils puissent être au courant, quitte
à ce que ça puisse quand même être un sujet à l'AGA mais pour donner l'information
et les entendre tout de même.
Donc, ce sont principalement les éléments du projet de loi qui, je pense, vont pouvoir aider d'autres ordres
qui seraient peut-être dans des situations similaires à la nôtre.
Mme Vallée :
Je...
Une voix :
...
Mme Vallée :
Oui, continuez.
Mme
Baig (Kathy) : Oui, je
m'excuse, vous avez raison, il y a toute l'éligibilité des candidats aussi au
conseil d'administration qui pourrait...
Mme Vallée :
Oui, justement, je voulais vous entendre, parce que vous proposez quelque chose
dans votre mémoire à cet effet, parce que vous... Bien, en fait, est-ce que
vous considérez que c'est opportun qu'un candidat à la présidence ait une
expérience...
Mme Baig
(Kathy) : Oui, bien, moi, je... Oui.
Mme
Vallée : ...de gestion
au sein du conseil d'administration? Puis je pense que c'est d'avoir siégé au
moins un an. Certains ordres nous ont recommandé deux ans, vous nous
recommandez un an.
Est-ce qu'on pourrait se retrouver dans une situation où cette exigence-là n'est pas présente autour de
la table? Est-ce qu'il serait possible de se retrouver dans une
situation... Puis, le cas échéant, qu'est-ce qu'on fait?
Le Président (M.
Merlini) : Me Robert ou Mme Baig.
Mme
Baig (Kathy) : Oui, effectivement, je vais vous parler de ça, parce
que, bien, bref, moi, je viens d'arriver en poste, j'étais quand même là depuis trois ans, et je peux vous témoigner
que je pense que la marche est grande à monter si on ne connaît pas du tout comment ça fonctionne.
Donc, oui, le conseil d'administration a mis l'éligibilité que le
président ait au moins une année d'expérience au sein du conseil.
Puis
est-ce qu'il pourrait y avoir une possibilité qu'il n'y ait pas de candidat qui
ait ça? Peut-être. Mais, dans la réflexion,
au niveau du conseil, on s'est dit : Peut-être pas les trois dernières
années ou les quatre dernières années, mais juste d'avoir été là pendant une année, ça fait qu'on peut retourner...
tu sais, il y a quand même 24 personnes au conseil
d'administration, à chaque année il y a des nouveaux, donc la possibilité qu'il
n'y ait personne qui... Peut-être qu'elle existe, mais elle est peut-être moins
probable en disant que toutes les années précédentes ce serait possible.
Je sais qu'il y a d'autres
ordres professionnels qui ont dit trois, quatre ans à avoir siégé au conseil.
Donc, maintenant, si la possibilité, elle
arrive, il faudrait peut-être qu'il y ait des mécanismes pour avoir des
solutions de rechange, si je peux dire.
Je ne sais pas si, Me
François-Xavier, vous aviez des choses à ajouter.
M. Robert
(François-Xavier) : Peut-être compléter là-dessus, Mme la ministre.
François-Xavier Robert.
Écoutez, je crois
que, dans la Loi sur le Barreau, il y a une disposition un peu analogue parce
qu'on exige du bâtonnier qu'il ait au moins
un an d'expérience et on dit : S'il n'y a pas de candidat qui a un an, à
ce moment-là, cette exigence-là, on
peut dispenser les prochains candidats de ce texte. Je pense qu'on pourrait
prévoir probablement la même chose. De toute façon, ce serait pratique
si vous créez un nouvel ordre professionnel, parce que vous risquez d'avoir un
problème à ce moment-là.
Mme Vallée :
En effet, en effet.
Vous
avez aussi abordé la question... bien, vous avez abordé la question des
cotisations professionnelles. J'ai trouvé intéressant votre commentaire,
vous dites : On n'a qu'environ 1 % des membres qui se présentent lors
des assemblées, et donc on a 1 % de
notre grande famille de plus de 61 000 membres qui avait, finalement,
le droit d'encadrer, de décider des
ressources dont disposerait l'ordre pour mener à bien ses obligations de
protection du public. C'est intéressant parce que, juste avant vous, un ordre professionnel nous disait... se
vantait, bon : Nous, notre cotisation est la plus faible, et c'est
important de maintenir ce droit-là pour les membres.
Quels ont été les
enjeux auxquels vous avez été confrontés, au cours des dernières années, qui
ont résulté d'un manque de ressources?
Mme
Baig (Kathy) : Juste apporter une petite... C'est moins de 1 %,
c'est comme nettement moins que 1 % qu'on a à notre assemblée.
Les
enjeux qui ont résulté d'un manque de ressources? Je suis partagée à dire qu'il
y a manque de ressources dans le sens
où est-ce qu'on a un cadre financier, on l'a mis sur cinq ans, puis avec ce
cadre-là on avait les moyens de faire ce qui était prévu dans notre
cadre financier.
Maintenant, si on
veut accélérer ce cadre-là puis faire avancer ça, c'est sûr qu'il pourrait y
avoir des besoins financiers supplémentaires. Après ça, il y a toujours un
enjeu de donner la bonne information à l'AGA pour qu'ils puissent prendre cette décision-là, alors que, si
c'est le conseil d'administration qui prend la décision, bien, sa
mission première, c'est la protection du public, donc il est peut-être plus
libre de prendre la bonne décision.
Est-ce que ça répond
à votre question?
Mme
Vallée : Oui, ça va. Pour ce qu'il en est du code d'éthique, en
fait, du code d'éthique et de déontologie, vous dites : Vous devriez nous permettre, à chaque ordre, d'adopter
notre propre code d'éthique. Dans votre mémoire, vous faites une allusion aux conseils d'administration
des sociétés d'État. Les conseils d'administration des sociétés d'État
sont quand même guidés par un règlement-cadre qui est le Règlement sur
l'éthique et la déontologie des administrateurs publics du Conseil exécutif. Donc, il y a un règlement-cadre à partir
duquel chaque société d'État va s'inspirer pour adopter ses propres règles. Qu'est-ce qui pose problème à
prévoir à l'intérieur du Code des professions un certain énoncé de
valeurs, de valeurs puis de principes
directeurs, de grands principes qui pourraient guider les ordres? En quoi ça
porte atteinte à cette autonomie des ordres?
• (15 h 10) •
Mme
Baig (Kathy) : Je vais
commencer à dire que nous, on en a eu un, code d'éthique, puis ça a été long
pour nous de le développer, faire en sorte que les membres, les administrateurs
y adhèrent. Donc, nous, ce qu'on propose, dans
le mémoire, c'est qu'il y ait un cadre général, puis ce
cadre-là va faire en sorte que chaque ordre professionnel puisse adopter un code d'éthique qui est propre à son
organisation, pour être sûrs d'y avoir une adhérence. Ça fait qu'on
n'est pas contre le fait qu'il y ait un
cadre général, mais, si c'était un code d'éthique imposé à tous les ordres
professionnels, là on aurait plus d'inquiétudes à savoir si les gens
vont y adhérer.
Mais,
si vous me permettez, je pourrais peut-être demander à Me Robert de...
Est-ce que vous avez des compléments d'information?
M.
Robert (François-Xavier) : Bien, en fait, Mme la ministre, la question
est : Qu'est-ce qu'on entend par normes d'éthique?, ce qui était un peu, je crois, le texte du projet de loi. Ça
peut couvrir l'ensemble du code, puis tout ce qu'il nous reste, c'est à rajouter le mot «ingénieurs» à
la fin puis à changer la date d'adoption, ou ça peut couvrir ce que vous
parlez, qui... en fait, ce qu'on parle aussi,
je pense, on parle de la même chose, c'est-à-dire des grandes valeurs
générales sur le rôle, peut-être pour initier la réflexion éthique, on
parlerait de ça comme ça. Bien, à ce moment-là, c'est d'autre chose. Ça, ça permet aux gens de faire l'effort
que notre conseil a fait et d'autres conseils ont fait, si on suit les
auditions, de faire la réflexion éthique et
d'arriver à des normes. Mais c'est sûr que, un code d'éthique tout cuit dans le
bec, attendez-vous pas à ce qu'il
soit vraiment... à ce que les gens se l'approprient puis qu'ils le suivent
parce qu'ils considèrent que ça répond à leurs valeurs, mais ils
risquent de le suivre parce qu'ils ont peur d'être pris un peu, là.
Mme Vallée :
C'est parce que...
Le Président (M.
Merlini) : Une minute, Mme la ministre, une minute.
Mme Vallée :
La voix était différente.
Certains ordres nous
ont dit... nous ont partagé le besoin d'avoir un code d'éthique en raison des
enjeux, des délais qui résultent du fait
d'adopter cas par cas des codes distincts. D'autres souhaitent avoir un code
propre à leurs réalités et à leurs
enjeux de protection du public. Donc, évidemment, on a, selon les groupes qui
se sont présentés, des visions différentes qui nous ont été portées.
Pour vous, quels sont
les grands enjeux de protection du public auxquels devraient s'attarder les
membres de votre ordre?
Le Président (M.
Merlini) : En 30 secondes.
Mme Baig
(Kathy) : Les grands enjeux que... Je m'excuse.
Mme
Vallée : La
protection du public. Les enjeux-cadres sur lesquels il n'est pas possible de
faire de compromis.
M.
Robert (François-Xavier) :
Vous voulez parler... Parce que vous dites les membres de l'ordre... ou c'est
les membres du conseil d'administration?
Mme Vallée : ...les membres
du conseil d'administration seront assujettis à ce code, je m'en excuse, petit
lapsus.
Mme Baig
(Kathy) : Je veux juste bien comprendre votre question. Dans le code
d'éthique, vous demandez quels sont les
grands enjeux, si on faisait un seul code d'éthique pour tous les ordres
professionnels, pour lesquels on ne pourrait pas...
Le
Président (M. Merlini) : Malheureusement, la réponse devra se faire attendre à la fin de nos travaux.
Nous nous tournons maintenant vers l'opposition officielle. Mme la députée de Chicoutimi,
la parole est à vous pour votre temps d'échange.
Mme
Jean : Merci. Bonjour, Mme
Baig, Me Robert. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Merci d'être ici
pour partager avec nous vos opinions et ce que vous pensez du projet de loi.
Je reviendrais sur une
question qui me trotte dans la tête depuis longtemps, en fait, à l'Ordre des
ingénieurs, concernant la cotisation. À
l'Ordre des ingénieurs, vous êtes dans une situation assez particulière parce qu'il y a plusieurs spécialités,
vous avez le génie civil, vous avez le génie, je ne sais pas, en technologies, vous avez toutes sortes de génies, en fait, qui implique quelque
part des besoins différents de la
part des membres par rapport à leur inscription à l'Ordre des ingénieurs. Il y a des spécialités qui
risquent aussi de demander plus de ressources à l'ordre, en tant que tel, que d'autres, ce qui fait que...
Est-ce que,
dans le cas de l'Ordre des ingénieurs, ce n'est pas un problème
d'avoir un montant fixe pour rentrer membre de l'ordre et que ça ne
puisse pas être modulé, justement, selon les spécialités qui se retrouvent à
l'Ordre des ingénieurs?
Mme Baig (Kathy) : C'est une
excellente question. Moi, ça fait trois ans que je suis impliquée au conseil d'administration, et ça fait trois ans qu'on a ce
genre de discussion là un peu informelle, à savoir : Est-ce qu'il devrait y avoir une catégorisation
des membres? Est-ce que la cotisation devrait être différente pour... il y a
plein de modèles, là, soit par spécialité,
par pratique privée, pas pratique privée? On est dans cette réflexion-là. Je
n'ai pas de réponse à vous donner, à vous dire pourquoi ce n'est pas en
place. On en a parlé l'année passée, justement, on est arrivés à la réflexion que, pour l'instant, on était quand même
capables de bien encadrer les membres en fonction de leurs spécialités. Mais je ne vous cacherai pas, quand on fait le
plan stratégique, actuellement, que ça va être encore une question
qu'on va soulever puis on va aller plus en
profondeur, à savoir est-ce qu'il devrait y avoir une catégorisation des
membres, pas juste pour la cotisation mais beaucoup plus pour les
besoins des membres en fonction de leur pratique, et puis appliquer vraiment au
niveau de la protection du public en fonction de chacun leurs besoins.
Donc, c'est une réflexion qu'on a, on y
réfléchit, mais, à part ça... Pas encore.
Mme
Jean : C'est intéressant. Ce matin était proposé par un des ordres,
justement, que la planification stratégique pourrait être faite au sein de l'ordre, mais que ça devrait être déposé
lors du rapport annuel, cette planification stratégique là. Et ils allaient même au-delà, c'est-à-dire ils
proposaient même que, dans le rapport annuel, on indique aussi comment
va la mise en oeuvre, où est-ce que l'ordre est rendu dans la mise en oeuvre du
plan stratégique.
Cette proposition-là était faite dans une
optique de transparence et de confiance du public face aux ordres
professionnels. J'aimerais vous entendre, justement, sur cette proposition-là.
Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Baig (Kathy) : Nous, notre ordre
professionnel, on se pose beaucoup de questions au niveau de la transparence, communication avec les membres,
reddition de comptes. Cette question-là que vous posez au niveau du plan stratégique, on n'en a pas débattu au conseil
d'administration, mais, avec les discussions qu'on a dans les dernières années, où est-ce qu'on veut beaucoup plus de
transparence et beaucoup plus informer les membres, le public, je pense
que ce serait peut-être une option
envisageable. Donc, il faudrait en débattre plus longtemps au conseil
d'administration, là, avoir la
discussion, mais d'entrée de jeu, avec ce que je vois, ce qu'on a fait dans les
dernières années, où on essaie de donner beaucoup plus d'information,
beaucoup plus de transparence, ça pourrait être une bonne option.
Mme Jean : Merci. Dans votre
mémoire, je pense que c'est à la page 8, vous mentionnez... vous avez un
commentaire sur la composition du conseil de l'Office des professions et...
«Depuis la création de cet ordre, tous ses présidents, à l'exception d'un seul,
ont été des juristes.» Je trouvais ça intéressant, en tout cas, comme sujet
soulevé.
Est-ce que vous avez une idée de comment
pourrait être répartie ou encadrée la composition de l'Office des professions? Parce que, là aussi, il y a encore
toutes sortes de professions, toutes sortes d'ordres. Avez-vous une idée
de comment ça pourrait être réparti?
Mme Baig (Kathy) : Est-ce que vous
voulez répondre, Me Robert?
M. Robert
(François-Xavier) : Merci.
En fait, je ne pense pas que c'est à nous à le faire, parce que l'Office des professions, c'est le
mandataire du gouvernement. C'est à vous à le faire, à savoir d'établir...
Mais un des critères qui doit, selon
nous, primer, puis c'est bien clair que ce n'est pas un jugement sur les
membres actuels de l'Office des
professions ni de ceux du passé, mais il y a la question
de la représentativité des
professions. On sait qu'un conseil d'administration — et, l'Office
des professions, les membres sont un conseil d'administration — est souvent plus est efficient et plus
efficace, est capable de voir les problèmes
de façon plus globale quand il y a une certaine forme de représentativité. Dans
ce qu'on a vu de l'historique des
membres de l'Office des professions, le secteur des sciences appliquées a été
le parent pauvre, hein? Vous, je
crois que vous êtes architecte de formation, mais il n'y a jamais eu d'architecte
à l'Office des professions. Donc, c'est
peut-être... Je pense que ça permettrait des fois, à ce moment-là, sûrement
d'avoir une vision un peu plus globale des problèmes, surtout que le
secteur des sciences appliquées est un peu particulier, c'est-à-dire que c'est
un des rares secteurs où une bonne partie
des membres travaillent pour une entreprise privée qui n'est pas dirigée par
des membres, ce qui n'est pas le cas de la santé puis ce qui n'est pas
le cas non plus du droit et des affaires.
Mme
Jean : Merci. Parlant de représentativité, est-ce qu'à l'Ordre des
ingénieurs, pour la représentativité des différences hommes-femmes, là
on parlait un peu des jeunes, dans le projet de loi... Est-ce que vous avez,
vous, des politiques pour favoriser la représentativité, justement? Est-ce qu'à
l'Ordre des ingénieurs il y a des actions ou des règlements qui existent pour
pouvoir assurer ça? Et quels sont-ils, s'il y en a?
• (15 h 20) •
Mme
Baig (Kathy) : Je pense qu'on a un tableau au niveau de notre représentativité.
O.K., je le cherchais. On a pas loin
de huit ou neuf femmes sur notre conseil d'administration, on a des jeunes, on
a des retraités. On a même une jeune
ingénieure, je pense qu'elle a moins de cinq ans d'expérience, elle vient de
commencer. Donc, on a quand même une bonne représentativité sur notre
conseil d'administration actuellement. On a aussi des gens qui ont plus de
10 ans d'expérience.
Mais on n'a
pas nécessairement de politique, à ma connaissance, pour s'assurer d'avoir une représentativité
sur le conseil d'administration, on n'a pas...
Nous, on serait probablement très en faveur d'avoir des profils de compétence, sur lesquels les candidats devraient voir s'ils
répondent au profil, puis qui qu'ils pourraient déposer leur candidature en fonction de ces profils de compétence
là.
Mme
Jean : Parfait. Merci. C'est
ce qu'on voit d'ailleurs à la page 6, je pense, pour les profils de
compétence.
Lorsque
vous parlez de compétence minimale d'un administrateur potentiel ou administratrice potentielle, est-ce
que vous avez déjà, vous, pensé quel serait ce type de compétence là ou ce
serait...
Mme Baig (Kathy) : Bien, il faudrait
y réfléchir. Ça va dépendre surtout des gens qu'on a sur le conseil d'administration, pour avoir une complémentarité
au niveau des compétences, donc dépendamment de chaque conseil, le tiers qui tombe en élection, puis regarder c'est
quoi, les besoins, à ce moment-là. Aussi en fonction des grands
chantiers qu'on a. Si dans les deux
prochaines années on a un grand chantier en technologies de l'information,
bien, peut-être qu'il serait préférable d'avoir une ou deux personnes
vraiment avec une expertise en TI, pour faire un profil, à ce stade-là.
Ça fait qu'on
n'a pas nécessairement réfléchi à tous les profils, mais je pense qu'il y a
deux choses, c'est regarder la composition
actuelle, avant d'aller en élection, et de regarder les projets en cours
actuellement puis aller voir si on a les compétences sur le conseil
d'administration.
Le Président (M. Merlini) : Une
minute, Mme la députée.
Mme
Jean : Absolument. À la page 8 de votre mémoire, vous mentionnez que
le commissaire aux plaintes, qui serait
le commissaire aux admissions maintenant, pourrait se traduire, à moyen ou à
long terme, à la diminution des... à l'affaiblissement
des exigences relatives à l'admission. Rapidement, une trentaine de secondes
pour... Je n'ai pas trop compris. Pouvez-vous me préciser un peu votre
pensée là-dessus?
Mme Baig
(Kathy) : Nous, au niveau du Commissaire à l'admission, au Québec puis
au Canada, il y a un bureau qui fait l'accréditation des permis en
ingénierie, donc on n'a pas vraiment de problème au niveau de l'admission des
étudiants du Québec ou du Canada.
Maintenant, au niveau de l'affaiblissement, je
ne sais pas si, Me Robert, vous voulez détailler.
M. Robert (François-Xavier) : Bien,
en fait, dans la mesure où le commissaire décidait, dans le cadre d'une enquête, de faire des recommandations par rapport
à des normes, et ça peut arriver qu'il le fasse, là, la notion de
mécanisme d'admission étant définie de façon très large déjà dans la loi
actuelle, à partir du moment où il peut recommander, par exemple, de...
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Me Robert. La réponse pourra
être complétée à la fin. Maintenant, allons au deuxième groupe
d'opposition et le député de Borduas. À vous la parole.
M. Jolin-Barrette : Bonjour,
Mme Baig. Me Robert, bonjour. Merci pour votre contribution aux
travaux.
Peut-être,
Me Robert, si vous voulez compléter votre réponse... Je vais peut-être
rajouter une petite question : Dans le fond, pour être ingénieur,
il y a un volet canadien, donc d'un océan à l'autre, si on peut dire?
M. Robert
(François-Xavier) : En fait, sommairement, comme Mme Baig disait,
dans le fond, tous les diplômes de
génie au Canada font l'objet d'un agrément, en tout cas, puis qui est décidé
par le BCAPG, Bureau canadien d'agrément des programmes en génie, qui dépend d'Ingénieurs Canada, qui est la
fédération qui regroupe tous les ordres professionnels en génie. Donc,
partout au Canada, les ordres ont les mêmes conditions d'admission en génie,
c'est-à-dire d'avoir un diplôme de premier
cycle en génie agréé — il y a des particularités pour les équivalences, là, mais, prenons
les candidats canadiens, c'est ça — et ensuite trois ans
d'expérience en génie, dont un an d'expérience canadienne. Il n'y a pas
d'exception, c'est ça partout.
Nous, si, par
exemple, le commissaire arrivait avec ses nouveaux pouvoirs d'admission et
commençait à faire des recommandations
à cet effet-là, bien, on se pose la question à savoir la mobilité, par exemple,
des gens ici. Ce n'est pas évident
que les autres provinces accepteraient autant un affaiblissement des normes
d'ici parce que... ou un changement des normes ici. On a certaines craintes à cet effet-là dans la mesure où,
nous, l'admission est très imbriquée, dans le fond, à travers le Canada.
M.
Jolin-Barrette : Donc, ce
que vous nous dites : Avec les nouveaux pouvoirs que le gouvernement
souhaite confier au commissaire, pour un candidat qui a fait ses études au
Québec ou en Ontario, dans le fond, c'est la même chose, et donc il n'y a pas vraiment de cas sur lequel il pourrait se
pencher pour un candidat québécois ou un candidat ayant fait ses études
au Québec.
M. Robert
(François-Xavier) : Tout à fait.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Donc,
il n'y a pas vraiment de cas d'individus qui ont un parcours atypique chez
vous, chez les ingénieurs?
Mme Baig (Kathy) : On parle des gens
qui ont un diplôme dans une université canadienne.
M. Jolin-Barrette : Exactement. Non,
il n'y en a pas. O.K., parfait.
Dans vos
recommandations, à la page 15, au niveau du délai de prescription, vous
souhaitez, là, dans le fond, qu'on standardise le délai de prescription
pour entreprendre des poursuites pénales pour exercice illégal, entre autres.
M. Robert
(François-Xavier) : Bien, en fait, dans ce cas-là, le problème qu'on
a, nous, c'est qu'on a un article, puis
il y a la même chose à la Loi sur les architectes, il y a une disposition qui
est un peu particulière, dans la Loi sur les ingénieurs, qui interdit à quelqu'un de réaliser un ouvrage avec des
plans qui ne sont pas signés et scellés par un ingénieur. Ça a donné des résultats très tristes des fois, on
pense à l'usine Neptune qui a explosé. Il y a eu le cas aussi, on vous
parle... un affaissement de roc, il y a eu des problèmes aussi dans l'industrie
du condo.
Le problème,
c'est qu'on a juste un an à partir de la réalisation des travaux, pas à partir
du moment que ça s'est effondré, là,
à partir de la réalisation des travaux, pour poursuivre, c'est excessivement
rapide. Puis ce qui arrive, à ce moment-là,
c'est que, bien, dans bien des cas, on ne peut pas poursuivre. Il y a un cas
qu'on vous donne comme exemple, où on
croyait qu'on pouvait poursuivre; finalement, on n'a pas pu, ça a résulté en
acquittement. Parce qu'en un an à partir des travaux c'est très vite, faire l'enquête, parce qu'on n'a pas le
signalement nécessairement encore, le signalement peut venir plus tard, puis, s'il vient après un an,
bien, c'est fini, on n'a pas de dossier. Puis, comme vous parlait
Mme Baig sur ce dossier-là, c'est aussi
avec une amende maximale de 10 000 $, là, par rapport aux nouvelles amendes.
Ça devient un petit peu folklorique, là.
M. Jolin-Barrette : Donc, ce que
vous souhaiteriez, c'est une modification de la Loi sur les ingénieurs à ce
niveau-là, donc trois ans à partir de la connaissance par le syndic de la
commission de l'infraction.
M. Robert
(François-Xavier) : Trois ans de la connaissance par l'ordre, parce
qu'en matière pénale c'est par l'ordre, ce n'est pas par le syndic
nécessairement, là.
M. Jolin-Barrette : Puis est-ce que
vous mettez un délai à partir du moment où il y a la commission de
l'infraction?
M. Robert (François-Xavier) : C'est
cinq ans. C'est comme ce qu'il y a dans le Code des professions actuellement, on demande la même chose. On ne
demande pas un traitement plus favorable que ce qu'il y a dans le code
pour cette infraction-là, on demande le même traitement.
M.
Jolin-Barrette : Au niveau
de l'immunité, à la page 13 de votre mémoire, vous dites : Ça prend
une immunité, oui, pour la personne qui s'assoit à la table avec le
syndic mais également contre toute forme de représailles. Donc, comment vous voyez ça, dans le fond, toute forme
de représailles? Nécessairement, on vise, bon, l'emploi, mais est-ce que
vous avez une idée comment on devrait peut-être le libeller, si on retient
votre proposition?
Mme Baig (Kathy) : Au niveau du
libellé, je ne sais pas si on a...
M. Jolin-Barrette : Bien, peut-être
pas dans les termes précis mais dans le sens...
M. Robert
(François-Xavier) : Prenez la loi sur l'inspecteur général. Vous en
avez déjà voté plein, de lois où vous
en parlez, de cette protection contre les mesures de représailles, c'est juste
que c'est souvent des lois sectorielles. Mais je pense à celle-là. Il y a la loi dont j'ai oublié le nom, mais qui
porte sur le commissaire... dans le fond, la loi-cadre de l'UPAC aussi, vous allez avoir ce même genre de
notion là qui apparaît, qui est quand même bien formulé. Dans le projet de loi n° 87, il y avait quelque chose aussi
similaire, là, qui... bon, le projet faisait abstraction du système
professionnel, mais, l'idée, vous allez la
trouver là. Puis des exemples, bien, de cette disposition-là, pensez à
Mme Duhamel, ce qu'elle a expliqué qu'elle a vécu à la commission
Charbonneau. Je n'ai pas besoin de vous le répéter.
Le Président (M. Merlini) : Une
quarantaine de secondes, M. le député.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc,
vraiment, oui, de couvrir plus large.
Question
rapide. Page 8 de votre mémoire, au niveau de la formation des
administrateurs, vous dites : Il n'y a pas d'obligation de suivre
la formation, donc on devrait inscrire dans le code l'obligation de suivre la
formation pour les administrateurs.
Mme Baig
(Kathy) : Effectivement. Bien, je pense que le point, c'est qu'il n'y
a pas de sanction si jamais ils ne le suivent pas. Donc, pour être
certains qu'ils soient obligés de le suivre.
M.
Jolin-Barrette : Puis la sanction que vous proposeriez, ce serait
quoi? D'être inhabile à siéger au conseil d'administration ou...
Mme Baig (Kathy) : ...dépendamment
des cas, là, ça pourrait être une option, là, oui.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie.
Le Président (M. Merlini) : Merci,
Mme Kathy Baig, présidente de l'Ordre des ingénieurs du Québec, et
Me François-Xavier Robert, pour votre présence cet après-midi et ces
échanges avec les membres de la commission.
Je suspends
quelques instants et j'invite l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec à
venir prendre place à la table. Alors, nous suspendons.
(Suspension de la séance à 15 h 28)
(Reprise à 15 h 31)
Le
Président (M. Merlini) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Nous avons maintenant l'Ordre des
ingénieurs forestiers du Québec.
Et je vous invite, M. Laliberté, à vous présenter et présenter les gens
qui vous accompagnent. Vous connaissez
le modus operandi. Vous avez 10 minutes pour faire la présentation de
votre mémoire, et ensuite procédera l'échange avec les parlementaires
membres de la commission. À vous la parole, M. Laliberté.
Ordre des ingénieurs
forestiers du Québec (OIFQ)
M. Laliberté
(François) : Merci, M. le Président. Mme la ministre, chers membres de la commission,
bonjour. Merci de nous recevoir aujourd'hui. Je suis accompagné de Mme Marielle
Coulombe, à ma droite, qui est directrice générale et secrétaire de l'ordre, et
Me Ariane Imreh, qui est notre conseillère juridique.
Alors,
permettez-moi tout d'abord de rappeler que l'Ordre des ingénieurs
forestiers, ça existe depuis 1921, et on compte aujourd'hui environ
2 100 membres qui oeuvrent dans toutes les sphères du secteur
forestier et répartis dans toutes les régions du Québec.
Évidemment qu'en 10 minutes ça nous serait impossible
de passer en revue toutes les positions qu'on a développées dans notre
mémoire, donc on va se limiter à seulement cinq d'entre elles. Mais d'entrée de
jeu nous reconnaissons la nécessité d'une réforme du Code des professions.
Donc, premier
enjeu, premier élément : le renforcement en matière d'éthique et de déontologie.
C'est vraiment un point fort de ce projet de loi. L'ordre appuie donc sans réserve la ministre dans son orientation de renforcement en matière d'éthique et de déontologie. Nous réclamions d'ailleurs depuis longtemps
de rendre obligatoire une formation pour nos membres. Et, en ce qui concerne le code d'éthique pour les administrateurs, bien, nous avons adopté un tel
code récemment.
Deuxième élément, nous aimerions parler de
l'efficience du système professionnel. Nous comprenons que le projet de loi n° 98 vise à améliorer
l'efficience du système, particulièrement en matière de gouvernance. Selon
nous, cette recherche d'efficience
doit d'abord passer par une utilisation optimale des outils existants. Nous
croyons que le système devrait être plus flexible et plus réactif.
Actuellement, les ordres ne peuvent adapter leurs règlements suffisamment
rapidement pour répondre aux nouvelles réalités auxquelles ils font face, le
processus est extrêmement lent. Il faut au moins deux ans, souvent plus, pour apporter
de simples modifications à nos règlements ou en adopter de nouveaux.
Dans ce
contexte, il n'est pas surprenant que des situations problématiques soient
récurrentes et se retrouvent dans les
médias, ce qui alimente la perception du public quant à l'inaction des ordres.
Pourtant, c'est seulement en vertu de nos règlements ou de nos lois que nous pouvons intervenir pour assurer la
protection du public. Par exemple, notre règlement sur les autres
modalités d'admission est en traitement depuis bientôt trois ans, la
modification proposée doit nous permettre de
reconnaître une équivalence de stage pour un immigrant qui arrive ici avec un
très fort bagage professionnel. Entre-temps, nous n'avons pu accorder
d'équivalence de stage à ces candidats, ce qui fait que ça ajoute
32 semaines d'attente à la délivrance d'un permis pour ces candidats.
Donc, pour
nous, s'il y a un processus qui devrait être examiné, c'est bien celui du
cheminement des modifications réglementaires. Or, force est de constater
que le projet de loi n° 98 n'aborde pas cette problématique.
Troisième
élément : les pouvoirs d'enquête. Selon nous, le projet de loi amorce une
transition vers une culture plus «policière» — je le mets entre guillemets — en élargissant les structures de contrôle et
les pouvoirs d'enquête. À ce
sujet, nous sommes d'avis qu'il faut
maintenir l'obligation d'obtenir
l'autorisation du ministre préalablement au déclenchement de toute
enquête effectuée par l'Office des
professions sur un ordre professionnel. Il s'agit de situations
exceptionnelles qui commandent des actions
exceptionnelles. Nous considérons que le réseau que constituent les ordres
professionnels, le Conseil
interprofessionnel et l'Office des professions devrait plutôt avoir comme
principale préoccupation de travailler en collaboration afin d'assurer
la protection du public, et ce n'est pas ce que nous percevons de cette
réforme.
Le quatrième élément, nous l'appelons, nous
l'intitulons D'un commissaire aux plaintes à un commissaire aux équivalences.
Je m'explique.
Vous ne serez donc pas surpris que nous sommes
en désaccord quant à la proposition d'élargir le mandat du commissaire à
l'ensemble de la mission. À nos yeux, il existe bel et bien un enjeu, mais
celui-ci se situe au niveau de l'admission
par équivalence. Nous parlons ici des candidats étrangers et ceux ayant un
parcours atypique. Pourquoi ne pas simplement instituer un commissaire aux
équivalences? Ceci refléterait mieux l'enjeu réel, en plus d'avoir une
connotation positive, comme le souhaite la ministre.
Nous
comprenons que, par ce projet de loi, et comme l'a mentionné Mme la ministre,
vous cherchiez à vous assurer que tous les candidats bénéficient d'un
traitement équitable, qu'ils soient issus de l'immigration, qu'ils
proviennent d'une autre province ou qu'ils
soient résidents québécois avec un parcours atypique. Nous adhérons entièrement
à ce principe.
En ce qui
concerne les candidats québécois et canadiens ayant été formés dans un des
programmes reconnus, nous croyons que
le système actuel fonctionne très bien. Comme le dit le dicton : Si ce
n'est pas brisé, pourquoi le réparer? Actuellement, nos règlements sur
l'admission sont cohérents les uns avec les autres et surtout ils sont
équitables pour les candidats d'un règlement à l'autre.
Rappelons qu'il existe trois voies pour accéder
à la profession réglementée, par règlement, et en fonction des programmes
reconnus au Québec : il y a des ententes sur la mobilité, dont les ARM
avec la France dont nous faisons partie,
éventuellement d'autres pays, les ententes entre provinces permis sur permis
des autres corporations provinciales et les programmes accrédités dans les autres provinces par le bureau
canadien d'agrément des programmes en foresterie — puis ça, ça fonctionne depuis
1989 — et
finalement par équivalence, et, dans ce cas, nous avons élaboré un référentiel
par compétences, depuis quelques années, qui comprend une grille d'analyse très
précise. Donc, un commissaire aux équivalences doté de pouvoirs accrus nous
apparaît mieux convenir qu'un commissaire à l'ensemble de l'admission.
Le cinquième
et dernier élément : les responsabilités du conseil d'administration et du
président. Pour ce point, nous
espérions que M. Tony Côté, notre vice-président, soit présent pour vous
entretenir de ce thème, mais il est retenu dans sa région du Saguenay—Lac-Saint-Jean,
alors je vous en ferai part.
Alors, nous
comprenons que, par le projet de loi n° 98, on souhaite marquer de façon
plus accentuée l'imputabilité des
administrateurs par rapport aux affaires de l'ordre. Bien entendu, le conseil
d'administration demeure responsable des décisions et des orientations politiques et stratégiques de l'ordre,
mais nous voyons mal comment un conseil d'administration constitué de plus d'une dizaine de personnes
puisse effectuer sur une base régulière une surveillance générale des
affaires de l'ordre sans que l'efficience de celui-ci n'en soit affectée. Il
faut éviter, selon nous, que plusieurs administrateurs interviennent ou se sentent investis de pouvoirs leur permettant
d'intervenir auprès de la permanence, une telle situation pourrait
engendrer des conflits et de la confusion. À notre avis, la responsabilité
d'effectuer le lien entre le conseil d'administration
et la permanence, donc de voir au bon déroulement général des affaires de
l'ordre, doit demeurer au poste de la
présidence. Ceci est d'autant plus évident que le rôle de la présidence en est
un de porte-parole, il doit donc être en contact étroit avec la permanence de l'ordre. Nous croyons que cette
section du projet de loi n° 98 doit être revue pour refléter la
réalité du fonctionnement des ordres et la bonne gouvernance également.
Ça complète
notre présentation. Et nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions,
vos commentaires. Merci.
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Laliberté. Alors, je me
tourne maintenant pour un premier bloc d'échange avec la ministre. Mme
la députée de Gatineau, la parole est à vous.
• (15 h 40) •
Mme Vallée : Merci, M.
le Président. Alors, M. Laliberté, merci de votre présentation.
Vous avez...
bien, vous avez abordé toute la question du commissaire, le commissaire aux
plaintes qui devient le Commissaire à l'admission, et vous souhaitez,
vous, plutôt un commissaire aux équivalences, un peu fondé sur votre approche de reconnaissance des compétences qui a
été développée au sein de votre ordre, mais vous mentionnez que ce
commissaire-là devrait avoir des pouvoirs accrus. Alors, quels seraient les
pouvoirs accrus du commissaire que vous pourriez
voir? Parce que, dans le fond, on modifie le rôle de commissaire aux plaintes,
qui existe déjà, qui est déjà
encadré de façon législative. Nous, on propose d'ouvrir à l'ensemble des
admissions, mais vous proposez une voie différente, puis je vous avoue que vous êtes les premiers à nous présenter cette
avenue-là. Alors, j'aimerais vous entendre davantage.
M. Laliberté
(François) : Bien, dans un premier temps, on ne présente pas une voie si différente.
D'abord, on modifie le nom et on
l'amène pour adresser spécifiquement l'enjeu de l'équivalence, qui, à notre avis...
c'est l'enjeu, c'est l'enjeu important.
Donc, à ce moment-là, tout le reste de l'admission, qui est réglementé
par des programmes, fonctionne bien, et ce qu'on s'assure, c'est que les autres candidats, atypiques ou
étrangers, aient accès d'une façon qui est équitable. Donc, c'est ce
qu'on veut dire par là.
Donc, les
pouvoirs que le commissaire aux plaintes a en ce moment sont déjà
bien. Maintenant, quand on parle de pouvoirs accrus, je laisserais
Me Imreh vous en parler, mais il y a déjà quelque chose là dans votre projet
de loi.
Mme Imreh
(Ariane) : Bien, en fait, ce
qu'on a pu constater, en comparant les actuels... le champ de compétence
du commissaire aux plaintes, c'est que
celui-ci va se pencher sur le fonctionnement des mécanismes de reconnaissance des compétences, et, dans le nouveau libellé du projet de loi, on va parler d'une manière un
petit peu plus large, on
embrasse plus large dans la mesure où on va traiter d'une compétence qui va
s'attarder au «fonctionnement de tout processus ou activité». Pour nous, c'est plus large, c'est plus vaste. Ça
permet au commissaire d'aller observer, d'aller analyser, étudier et
faire des recommandations jusque dans des détails plus fins que ce qu'il a actuellement.
C'est la lecture qu'on fait de cette modification dans les termes.
Mme Vallée : Oui, mais vous proposez, dans vos recommandations : «...instituer un commissaire aux équivalences avec des pouvoirs accrus.» Donc, est-ce que je
dois comprendre que les pouvoirs accrus auxquels vous faites référence
sont les pouvoirs que l'on retrouve au projet de loi n° 98?
M. Laliberté
(François) : Exactement.
Mme Vallée :
D'accord, c'est parce que je croyais que vous aviez d'autre chose à proposer
que...
M. Laliberté
(François) : On comprend qu'il aurait des pouvoirs accrus dans le
projet de loi. Mais restreindre, si on peut dire, au champ de
l'équivalence, qui, à notre sens, est l'enjeu.
Mme Vallée :
Cette approche-là d'équivalence, qui est un peu... qui est, dans le fond,
l'approche par compétence que vous
avez adoptée, plutôt que l'approche scolaire, donc, ça prend appui sur un
référentiel de compétences, mais on a aussi
différents acteurs qui entrent dans l'équation. Dans l'admission, on a toute la
formation initiale, la reconnaissance.
Est-ce
que vous voyez le rôle du pôle de façon différente avec le rôle du commissaire
tel que vous le proposez?
M. Laliberté
(François) : La question du pôle... Vous amenez ça sur la question du
pôle de coordination. Ce n'est pas une
question sur laquelle on s'est véritablement penchés, tout simplement... pour
la bonne raison que, dans notre cas,
la formation initiale qui est accréditée passe par une université, trois
programmes dans la même université, et tout ça fonctionne admirablement bien, nous sommes en contact constant avec ces
gens-là. Alors, pour nous, la coordination, elle n'est pas difficile à
faire.
Alors,
c'est vraiment, et je reviens là-dessus, au niveau de l'équivalence, lorsqu'on
a des candidats étrangers qui arrivent
ou encore des candidats québécois, formés au Québec, mais avec des parcours atypiques,
donc qui ne sont pas passés par les
programmes reconnus. À ce moment-là, ça nous prend la question du référentiel
par compétences qu'on a mis... Puis
ce n'est pas la seule manière nécessairement, mais c'est celle qu'on a adoptée.
Et je pense que Mme Coulombe pourrait vous en parler un peu plus,
là, elle a piloté le dossier. Ça fonctionne très bien.
Le Président
(M. Merlini) : Mme Coulombe.
Mme Coulombe
(Marielle) : Oui, si vous me
permettez d'en rajouter. En fait, c'est un système qui fonctionne très
bien
pour nous. C'est un système aussi qui... En fait, on a pu mettre ça en place
grâce à l'aide financière du MIDI. Et
ça, et ce n'est pas une publicité ici, mais
c'est une mesure qui doit être maintenue, parce que ça a été vraiment
déterminant dans notre cas à nous.
Et
effectivement, comme M. Laliberté le disait, pour nous, l'enjeu, si enjeu
il y a... Parce qu'à notre point de vue on n'a pas détecté de problème, de candidat qui était insatisfait de la
démarche. Elle est claire, elle est bien documentée. D'ailleurs, je vous invite à aller consulter notre
site Internet, où vous allez pouvoir voir, là, qu'est-ce qu'il en est
exactement. Et, à notre connaissance... En
fait, on a un processus d'appel dans chacune des trois voies d'entrée qui sont
possibles pour nos candidats, et aucun candidat, à date, n'a fait appel
à ce processus-là d'appel. Alors, on voit mal ou on ne voit pas, en fait, là,
la problématique.
Par
contre, on peut en déduire que, si jamais il y avait un problème, ça pouvait être
au niveau de l'équivalence, alors d'où notre recommandation.
Le Président
(M. Merlini) : Merci. Mme la ministre.
Mme Vallée :
Vous voyez... Vous avez présenté dans votre mémoire, en page 6, une
préoccupation à l'égard du rôle qui
serait confié au commissaire aux admissions. Alors, vous arrivez avec votre...
vous avez formulé votre recommandation pour
un commissaire aux équivalences, mais, dans votre analyse, vous considérez que
ce qui est présenté dans le projet de loi n° 98 est une «importante
immixtion de la part du commissaire dans l'ensemble du processus».
En
quoi le processus d'admission des personnes qui sont formées au Québec n'aurait
pas avantage à être également pris en
considération par le commissaire, puisque... Bon, l'admission, la formation, ça
forme un tout. Donc, pourquoi on ne pourrait
pas aller sur cet angle-là et simplement... ou résumer le rôle du commissaire à
l'évaluation des équivalences?
M. Laliberté
(François) : Si vous permettez, je vais me répéter. Le système
fonctionne très bien, à ce moment-ci.
Mme Vallée :
Oui, bien, je comprends. Pour vous.
M. Laliberté
(François) : Oui. Et, oui, je ne peux parler que pour notre ordre.
Mais le système fonctionne très bien, d'une part.
D'autre part, il faut
comprendre que, lorsque les programmes sont accrédités, s'il y a problème — dans
notre cas, il n'y en a pas — s'il
y a problème, c'est au niveau de la maison d'enseignement, par exemple, ce
n'est pas le système professionnel.
Alors,
à ce moment-ci, on va amener une structure... Et là plusieurs ordres l'on dit,
et là-dessus, à l'instar des autres ordres,
on a le même discours, la structure, qui prend de l'ampleur, inévitablement va
coûter plus cher, va demander plus de ressources,
et ici c'est les membres qui paient, et les membres sont... Je veux bien croire
que c'est pour la protection du public,
c'est pour avoir une bonne formation, mais c'est les maisons d'enseignement qui
sont touchées et non pas nous, notre système, dans notre mission propre.
Alors, de grossir quelque chose...
Puis en plus, je
reviens là-dessus, on ne voit pas l'enjeu. Et j'écoutais tantôt l'Ordre des
ingénieurs vous dire à peu près la même
chose, et plusieurs autres vous ont dit la même chose de toute façon. Ces
mécanismes-là sont déjà, en plus, très bien
encadrés par l'Office des professions, et en plus on a le bureau
d'accréditation ou d'agrément des programmes
au Canada de plusieurs professions, ce n'est pas juste la nôtre. Tout ça forme
un tout déjà assez... très bien encadré,
très cohérent, à notre avis. Alors, s'il y a un problème pour les candidats
formés dans ces voies-là, on serait au courant, là, et on n'a pas
entendu de problème, on n'a vraiment pas entendu de problème.
Par
contre, on le redit, les enjeux, au niveau de l'équivalence, il y en a. Nous,
on n'a pas connu de gros problèmes, on
n'a pas de cas, en tout cas, qu'on a entendu qu'ils sont venus par le
commissaire aux plaintes, mais c'est des enjeux, effectivement, et ce
n'est pas pour rien qu'on a fait un référentiel de compétences.
Tu allais ajouter
autre chose? Non? Ça va?
• (15 h 50) •
Mme Vallée : Est-ce
que... Parce que vous parlez de
l'immixtion. Et on ne peut pas mettre de côté l'argumentaire que certains ont développé, c'est-à-dire que c'était une ingérence dans l'indépendance des ordres professionnels, dans l'autonomie
des ordres professionnels. Puis je me demandais en quoi un pouvoir de recommandation d'un commissaire constituait
en soi une ingérence, puisque le pouvoir de recommandation n'est pas liant
pour l'ordre. Il permet simplement de revoir peut-être certaines
pratiques, mais il n'a pas de force... il n'est pas contraignant pour l'ordre.
M. Laliberté
(François) : Je comprends. Cependant,
on est d'avis qu'un éventuel commissaire à l'admission qui pourrait
aller enquêter ou étudier à peu près tout va demander des ressources importantes
puis de la... Excusez. Bien, je vais
continuer : De l'expertise aussi importante va venir dans nos processus, ça ne peut pas... C'est impossible que ça ne s'arrête seulement
qu'aux processus, il va devoir y avoir de l'expertise pour comprendre le processus
de chacun des 46 ordres et 50 quelques professions, il va devoir y avoir
de l'expertise pointue de développée pour comprendre ce processus-là, et ce n'est pas
vrai, là, que... On ne voit pas comment il n'y aura pas, à ce moment-là, immixtion, là. On va aller vers le détail, c'est inévitable. Pour
comprendre, pour bien comprendre le processus, on va devoir aller dans
le détail. Ça peut n'être qu'un pouvoir de
recommandation, mais, quand on obtient une recommandation de quelqu'un
qui n'est peut-être pas nécessairement
expert, à moins d'avoir développé toute l'expertise, là, à ce moment-là, ça
peut devenir de l'immixtion. Même si
on n'est pas obligés, c'est juste la recommandation, bien, on veut collaborer,
on veut travailler avec l'office ou avec le commissaire, et à ce
moment-là on va devoir, là, échanger, ça va prendre du temps, puis c'est une
forme d'immixtion, ça, quand même.
Mme Vallée :
Mais le problème, c'est qu'il existe déjà, le commissaire. C'est ça, c'est là
où ça soulève un tas de questionnements,
c'est que le commissaire existe déjà. Je comprends peut-être que, pour vous, le
commissaire n'a pas eu à se pencher sur des cas, ça, je comprends, mais
il existe déjà pour l'ensemble des ordres.
Donc,
il est déjà là pour une clientèle spécifique, mais il existe, il a déjà ce
pouvoir d'émettre des recommandations pour
l'ensemble des ordres, encore une fois, comme je vous le mentionnais, pour la
clientèle très précise. Maintenant, ce que
l'on fait, c'est d'étendre la portée, c'est de permettre qu'un étudiant
étranger ayant reçu sa formation au Québec puisse le saisir d'un enjeu, mais ce n'est pas différent
que... le pouvoir du commissaire demeure le même qu'il est actuellement.
Donc,
il n'y a pas... L'expertise dont vous parlez, la possession des connaissances
dont vous parlez, il doit déjà l'avoir.
Puis on a fait un parallèle, il y a quelques semaines, avec la Protectrice du
citoyen, qui, elle, est chargée d'avoir un... dont le spectre d'action est quand même très vaste, et puis ça n'a pas
posé... ça ne pose pas de problème, ça ne commande pas des ressources
extraordinaires.
Et,
pour ce qui est du commissaire et des fonctions souhaitées, que nous souhaitons
accorder au commissaire, les évaluations ne commandent pas la mise en
place d'une structure extravagante parce que, s'il n'y a pas de problème, comme vous le mentionnez, le commissaire ne sera
pas saisi de dossiers. Le commissaire ne peut pas... ne va pas mettre
son chapeau d'inspecteur Gadget puis
commencer à intervenir au sein de chaque ordre, ce n'est pas le rôle du
commissaire, là.
M. Laliberté
(François) : Mme Coulombe veut ajouter quelque chose, mais, juste
pour vous dire, avant que... l'exemple que vous donnez...
Le Président
(M. Merlini) : ...une trentaine de secondes. Très brièvement.
M. Laliberté
(François) : D'accord. L'exemple que vous donnez, l'immigrant qui
étudie ici, s'il a passé à travers les
diplômes ici, il n'y aura pas de problème, donc, il va être admis
automatiquement. Il ne peut pas se plaindre, il va être admis
automatiquement. Mme Coulombe.
Mme Coulombe
(Marielle) : Il ne me reste pas beaucoup de temps. En fait, on
comprend bien votre point, Mme la ministre, mais en fait on se dit : Si le commissaire
ne va pas plus loin... Parce que, l'admission, ça demande une expertise pour être en mesure d'évaluer la
compétence du candidat, et on a 46 ordres au Québec;
on s'attend à ce qu'il y ait une expertise dans les 46 ordres
spécifiques au domaine. Si le commissaire ne va pas plus loin, on ne comprend
pas la mesure de le renforcer, mais, s'il reste à un niveau plus général,
l'office le fait déjà actuellement. Quand...
Le Président
(M. Merlini) : Merci, Mme Coulombe. Je dois écourter votre
réponse et passer la parole à Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jean : Merci
beaucoup. Alors, bonjour à vous deux,
M. Laliberté, Mme Coulombe, Mme Imreh. Bienvenue.
Une voix : ...
Mme Jean : Les
trois. Je n'ai pas... Bon, quoi qu'il en soit, bienvenue ici, à l'Assemblée
nationale.
Pour faire du
chemin sur ce qui est soulevé par
rapport au Commissaire à l'admission,
au commissaire des plaintes actuellement, ce qu'on lit dans le projet de loi, ce que moi, je lis au projet
de loi, le commissaire peut
«effectuer ou faire effectuer les
études et [...] recherches qu'il juge utiles [et] nécessaires
à l'exercice de ses fonctions». Donc, on s'entend qu'il peut faire des travaux, il peut poser des questions,
il peut prendre des gestes pour la réalisation de son mandat. Il peut aussi «désigner
toute personne pour effectuer l'enquête en son nom». Donc, on s'entend aujourd'hui
que, selon le projet de loi qui est présenté aujourd'hui, le commissaire peut
faire des enquêtes et peut même en faire faire, des enquêtes.
Donc, je
pense que le questionnement mérite d'être fait, c'est-à-dire : Est-ce que la possibilité de faire des enquêtes par le commissaire
est quelque chose qui serait utile pour la mission qu'on lui donne?
Et j'arrive à
ce que je voulais dire. La mission du Commissaire à l'admission, ce que moi,
j'en lis, dans la lecture du projet
de loi, c'est d'avoir quelqu'un
qui peut porter un oeil... une vue d'ensemble sur l'admissibilité des personnes aux ordres professionnels. Cette vision d'ensemble là, effectivement, pour l'avoir, ça prend des outils pour pouvoir se faire une opinion puis avoir la vue sur ce sujet-là, donc il
doit être capable de le faire. Cette vision d'ensemble là peut être
utile pour pouvoir corriger des problématiques systémiques chez certains ordres
ou chez certains processus.
Est-ce que
vous seriez, vous, ouverts... ou est-ce
que c'est quelque chose qui vous dérange ou qui ne vous dérange pas, d'avoir, justement, un groupe ou une personne qui peut apporter...
faire des rapports sur, justement, des problématiques systémiques qui
pourraient arriver en ce qui concerne le dossier ou l'enjeu de l'admission ou
de l'admissibilité?
M. Laliberté
(François) : Probablement
que Mme Coulombe va vouloir ajouter quelque chose, mais je vous
dirais d'entrée de jeu que l'Office des professions regarde déjà
tous nos règlements et les règlements de tous les ordres. J'imagine, à ce moment-là, qu'il y a une vue d'ensemble. Pourquoi avoir quelqu'un d'autre qui aurait
une autre vue ensemble? Il aurait une autre vue d'ensemble? C'est
ce qu'on ne comprend pas, c'est le bout qu'on ne comprend pas.
Mme Jean : Bien, ce que moi, je comprends, c'est qu'il y a
des problématiques réelles au niveau de l'admissibilité, et c'est pour ça qu'ils ont créé le commissaire
aux plaintes. Il peut y avoir des problématiques systémiques à ce
niveau-là.
Vous parliez tout à l'heure, vous... je ne sais pas si c'est au même ordre, mais la
problématique que vous, vous rencontrez,
c'est l'efficience au niveau du système professoral...
professionnel, pas professoral mais professionnel. Par exemple, vous
avez des équivalences de stage qui, parce que ça ne concerne pas l'ordre, ça
concerne les institutions d'enseignement, a rajouté le fameux 32 semaines
pour...
M. Laliberté
(François) : ...pas tout à fait ça, là. Mme Coulombe va peut-être vous expliquer, là, exactement, là.
Mme Jean : O.K. Bien, j'ai peut-être
mal compris.
• (16 heures) •
Mme Coulombe
(Marielle) : En fait, nous,
dans notre règlement sur les autres conditions et modalités pour
être admissible à l'ordre, une des conditions qui est là pour tout le monde,
peu importe la porte d'entrée, est un stage de 32 semaines qui a comme objectif de mettre le candidat en contact avec la pratique
professionnelle d'un ingénieur forestier, et ces 32 semaines là doivent être faites
sous le mentorat d'un maître de stage qui est un ingénieur forestier actuellement
actif sur le marché du travail. Ça, ça convient très bien pour un jeune
diplômé, quelqu'un qui est en train de faire sa formation universitaire à l'Université Laval, où, là, il est
en contact avec le réseau des ingénieurs forestiers du Québec. Mais où ça s'applique beaucoup moins bien, c'est
quand on met ça dans le cadre d'un candidat qui arrive de l'immigration,
avec 15, 20 ans d'expérience comme ingénieur forestier dans son pays
d'origine, qui peut être reconnu comme un expert dans son pays. Ce n'est pas toujours le cas, mais ça arrive, ces cas-là. Ce
candidat-là arrive ici, chez nous, et là on doit lui demander de faire
un 32 semaines de stage sous le mentorat d'un ingénieur forestier ici, au Québec,
mais il a quand même tout son bagage.
Nous, quand
on fait l'analyse du candidat pour évaluer ses compétences, on regarde aussi
son bagage professionnel, pas seulement sa formation, et on est en
mesure d'évaluer si ce candidat-là a besoin de faire ce 32 semaines là supplémentaire ou non. Et dans beaucoup
de cas, je vous dirais, ce n'est pas le cas. Mais actuellement notre règlement dit : Il faut, il faut qu'il fasse ça,
sinon on ne peut pas lui émettre son permis.
On est en
train de faire modifier notre règlement pour pouvoir donner une équivalence.
Alors, en même temps qu'on étudie son dossier, on va lui donner une
équivalence de compétence, mais on veut lui donner aussi une équivalence
pour qu'il soit dispensé, en fait, si on veut, là, de ce stage de
32 semaines là. Actuellement, notre règlement est en révision auprès de l'Office des professions, pour bientôt trois ans, mais... On a détecté ce
problème-là il y a trois ans, mais, alors, pendant ce temps-là, on a des candidats qui continuent
d'appliquer chez nous. Il y a des candidats que, oui, ils doivent avoir
ce stage, ils doivent faire ce stage-là de 32 semaines, mais on en a aussi
qui pourraient être exemptés.
M. Laliberté (François) : Me Imreh
voudrait rajouter.
Mme Imreh (Ariane) : Simplement pour
faire un peu de pouce là-dessus, évidemment, c'est le processus qu'on trouve lourd, parce qu'on a une très belle collaboration de la part des gens qui travaillent à l'office, on a notamment une avocate qui est très dédiée à nos dossiers
réglementaires. Sauf que malheureusement on se rend compte que c'est le processus
en soi qui est lourd, qui est long.
N'y aurait-il
pas lieu de s'interroger sur des façons d'améliorer la gestion du cheminement
des règlements et des modifications réglementaires pour
les ordres? Je pense que, déjà là, ce serait un bon point de départ.
Mme Jean : Donc, je
comprends que vous auriez voulu voir dans le projet de loi une amélioration
pour alléger le processus de manière
à ce que, lorsqu'un ordre comme vous désirerait changer un règlement, ça ne
prenne pas trop de temps, et à ce moment-là vos demandeurs seraient
traités de façon adéquate.
M. Laliberté
(François) : Oui, parce que, comme je vous disais, nos outils, ce sont
ces règlements-là, et on est à même de
constater les problèmes, et de les détecter, et de voir qu'est-ce qu'on a
besoin comme modifications pour bien remplir notre mission, mais, si ça
prend, comme je l'ai dit tantôt, deux, trois ans et plus, même, pour avoir des modifications, pendant ce temps-là, il y a des cas
problèmes qui, dans certains cas, se retrouvent dans les médias, puis là
ça nous fait mauvaise presse.
Mme Jean :
Ce qui n'aide pas à la confiance du public.
M. Laliberté
(François) : Ce qui n'aide pas, absolument pas.
Mme
Jean : D'entrée de jeu, vous avez dit, tout à l'heure : On ne
voit pas dans ce projet de loi là quelque chose qui favoriserait la
collaboration. Et en même temps, bien, au début de votre présentation... Dans
le projet de loi, il y a quand même une proposition de créer le pôle de coordination.
Est-ce
que, selon vous, un pôle de coordination où seraient impliqués l'office, les
maisons d'enseignement, les ministères pourrait être utile pour
solutionner, ou faciliter, ou faire le travail lié à la mission?
M.
Laliberté (François) : Donc, comme je vous l'ai dit, dans notre
situation, on n'a pas de véritable problème de coordination. Est-ce que
ça se présente pour d'autres ordres? Je veux bien le croire. Notre point quant
à plus de collaboration est surtout, comme
le mentionnait Me Imreh, pour accélérer nos processus de changement et
donc collaborer plus activement à cet effet-là. Que ce soit un pôle de
coordination ou que ce soit un comité multisectoriel comme le propose le CIQ, qui semble être une bonne idée...
Probablement que ça pourrait aider grandement d'autres ordres qui ont des situations complètement différentes de la
nôtre. En ce qui nous concerne, on n'a pas... très peu étudié ce
problème-là parce que... bien, en fait, ce problème ou cette question, parce
que ce n'est pas un problème.
Mme Jean :
Merci. C'est terminé.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bonjour. Merci de votre présence puis de
contribuer aux travaux de la commission parlementaire.
D'entrée
de jeu, vous dites qu'on devrait maintenir l'obligation de l'autorisation
ministérielle pour mener une enquête. Pourquoi est-ce que vous souhaitez
qu'on maintienne l'autorisation ministérielle avant que l'office puisse entamer
une enquête?
M. Laliberté
(François) : On trouve important que la... D'abord, on considère que
mener une enquête, c'est quelque chose d'exceptionnel, et à ce moment-là on croit
important que la ministre en soit saisie. Dans notre perception des
choses, c'est important de le faire.
Ceci étant dit, la collaboration avec l'office est absolument importante. Moi, je
vois... Nous, nous voyons mal que l'office
soit mal reçu dans un ordre lorsqu'il y a des problèmes. Ça peut être nous qui demandons à l'office de
l'aide, ça peut être l'office
qui entend des choses et vient nous voir. On doit collaborer, on se doit de
collaborer, on doit être dans un système comme ça.
Est-ce que
ça a besoin d'être balisé par des pouvoirs d'enquête? Pas certain. Mais, s'il
arrive des... On croit même que ça va un
peu loin et que ça, ça instaure une culture... C'est une question
de principe, hein, de perception ou d'image, ça instaure une culture, ça
s'en va vers une culture plus contrôlante ou policière, puis ça, quand on entre
dans ces perceptions-là, la collaboration, elle peut être plus difficile. Donc, pourquoi aller vers ce genre
de mesure là quand c'est surtout pour
des cas exceptionnels? Puis, à ce
moment-là, quand c'est exceptionnel,
la ministre responsable doit en être saisie, à notre avis.
M. Jolin-Barrette : Puis vous dites : On a peur de la question de la culture, de
rentrer dans une culture policière, dans la relation de l'ordre par
rapport à... dans sa relation avec l'office, dans le fond, ça va changer les
paramètres, la relation. Mais concrètement
vous pensez que, quoi, ce serait comme une épée de Damoclès sur l'ordre lors
des négociations avec l'office?
Je comprends que vous me dites, bon : C'est un changement de perception,
c'est un changement de culture, mais,
au jour le jour, si l'office veut faire une enquête, présentement, bien, elle va déjà s'adresser à vous, mais, si jamais elle décide de faire une enquête, elle va aller
requérir l'autorisation de la ministre... Je comprends que sur les perceptions
c'est important, mais sur le pratico-pratique, là.
M.
Laliberté (François) : Sur
le pratico-pratique, comme je vous ai dit, si l'office considère qu'il y a quelque chose qui cloche, elle peut
venir nous voir, puis on va collaborer. Si nous, comme ordre, ne collaborions
pas, bien, je pense que l'office, à ce
moment-là, elle aurait tous les
arguments pour aller voir le ministre
responsable et dire : On a un
problème ou on semble détecter un problème, et ils ne collaborent pas. Déjà
c'est un signal, un très mauvais signal qu'on envoie. Et à ce moment-là le ministre
responsable serait... il me semble que ce serait automatique d'autoriser la
chose.
Mais
au moins il y a un mécanisme pour mettre le ministre responsable, à ce
moment-là, au fait qu'il semble y avoir un problème. Et, pour nous, on croit
que c'est important que ça se fasse.
M. Jolin-Barrette : Sur la question des délais de prescription, donc, vous souhaitez
une harmonisation des délais de prescription. Pouvez-vous définir votre
propos?
M. Laliberté
(François) : Me Imreh.
Mme Imreh (Ariane) : Oui, tout
à fait. Alors, on voit qu'il y a
un amendement qui est proposé, là, à l'article 189.1 afin de... voyons, de
permettre un délai de prescription supérieur à ce qui est prévu actuellement, et on constate qu'à 189.0.1, bien,
on a laissé les délais de prescription tels qu'ils sont actuellement, en matière d'exercice
illégal, d'usurpation de titre, soit un an de la connaissance, et on
peut retourner jusqu'à cinq ans de la commission de l'infraction. On voit mal pourquoi le législateur n'a pas profité de
l'amendement à 189.1 pour également entrer ce même amendement à 189.0.1.
Nous
sommes un petit ordre professionnel. Souvent, les faits sont dénoncés à
retardement. Mme Coulombe se plaît souvent
à dire : Tu sais, Ariane, la forêt, elle est lente, elle prend son temps.
Et souvent nous arrivons avec des dénonciations, et, même s'il nous
reste un an pour agir, il faut faire une enquête complète.
Les
ressources sont relativement limitées dans un petit ordre qui n'a que huit
personnes au siège social, incluant tous
les employés. Il me semble qu'une mesure qui favoriserait un délai supérieur au
un an qui est prévu actuellement pourrait vraiment aider l'ordre à
accomplir et à remplir adéquatement sa mission de protection du public en
matière d'exercice illégal et d'usurpation de titre, qui sont quand même
fondamentaux en termes de protection du public.
Le Président (M.
Ouellette) : Une minute, M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, pour l'ordre, la proposition, trois ans à partir de la
connaissance, sept ans à partir de la commission de l'infraction, ça
satisfait l'ordre?
Mme
Imreh (Ariane) : Oui, tout à fait, parce qu'on viendrait d'harmoniser
tous les délais, et je pense que ces délais-là seraient raisonnables
aussi.
• (16 h 10) •
M. Jolin-Barrette : O.K. Rapidement, sur la question de l'immunité que le syndic peut
conférer, est-ce que vous êtes à l'aise avec ça ou vous souhaitez que ça
soit élargi, exemple, contre toute mesure de représailles?
Mme
Imreh (Ariane) : Bien, évidemment, c'est une question sur laquelle on
ne s'est pas attardés, quand on a analysé le projet de loi, mais nous
croyons qu'évidemment ce serait bien de l'élargir et de pouvoir ainsi protéger
les lanceurs d'alertes à tous égards. Ça, c'est bien clair.
M.
Jolin-Barrette : Je vous remercie.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci. Merci, M. François... non... oui,
M. François Laliberté, Mme Marielle Coulombe et Mme Ariane
Imreh, représentant l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec.
Je
suspends quelques minutes. Je demanderais au Collège des médecins du Québec de
s'avancer, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à
16 h 11)
(Reprise à 16 h 13)
Le Président (M.
Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le
Collège des médecins du Québec, représenté
par son président-directeur général, le Dr Charles Bernard, ainsi que son
secrétaire, le Dr Yves
Robert — c'est
que vous venez de sauver du temps! Vous avez 10 minutes pour nous
présenter votre exposé, et après il y aura une période de questions avec
Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Dr Bernard,
c'est à vous la parole.
Collège des médecins du Québec (CMQ)
M. Bernard
(Charles) : Alors, merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM.
les parlementaires, le Collège des médecins
vous remercie de lui permettre de vous présenter ses réflexions et ses
préoccupations relatives au projet de
loi n° 98, dont l'objectif annoncé est d'améliorer la gouvernance des
ordres professionnels, le fonctionnement du système professionnel et les
mécanismes d'accès aux professions.
Vous avez reçu notre
mémoire détaillé. Nous vous présenterons maintenant ce qui nous apparaît
essentiel.
Pour
apprécier la valeur de tout projet de loi portant sur le système professionnel,
nous devrions tous ne nous poser qu'une
seule question reflétant sa mission : Le public sera-t-il mieux protégé
par les changements proposés? C'est donc par cette question que nous
commenterons brièvement les principales orientations proposées par le projet de
loi.
Nous affirmons
d'emblée que notre système professionnel québécois, qui existe depuis plus de
40 ans, est l'un de nos fleurons institutionnels, envié non seulement
ailleurs au Canada, mais également à travers le monde, le Collège des médecins peut en témoigner. Qu'il ait
besoin d'ajustements est normal et souhaitable. Tous les acteurs du système attendaient depuis quelques années une mise
à niveau, et cette volonté exprimée par le projet de loi est
encourageante, et nous la saluons.
Une
première action très significative a été faite il y a quelques années, suite à
des représentations de plusieurs ordres professionnels, particulièrement
du collège, avec l'adoption du projet de loi n° 17 réformant le système disciplinaire. Ce changement a considérablement amélioré l'efficacité de la justice
disciplinaire et protège clairement
mieux le public, et nous en remercions le gouvernement.
Mais de quels maux
souffre actuellement notre système professionnel pour lui offrir des
traitements visant à améliorer sa condition?
Pour le collège, les problèmes auxquels nous avons à faire face principalement
sont les suivants, les trois principaux.
Premièrement, l'accès des données reflétant la pratique professionnelle de nos
membres. Depuis que je suis en place
comme président du collège, il n'y a pas une rencontre avec votre collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux
et le président de l'Office des professions, que je vois assis à la table, où
nous ne demandons pas d'avoir accès aux
données de surveillance des pratiques de nos membres. Nos lois sur la
protection des renseignements personnels, malgré leur noble objectif,
nous bloquent cet accès.
Le meilleur exemple
des conséquences de cet état de fait est l'usage abusif des opioïdes. Si vous
lisez les journaux, écoutez la télé, vous
avez vu ça. À l'heure où cette situation est décrite aux États-Unis et au Canada comme une urgence de santé, où la Fédération
des ordres des médecins du Canada, en
juin 2016, a pris position pour que des programmes de surveillance des ordonnances d'opioïdes comme ceux qui
existent dans d'autres provinces depuis plusieurs années et gérés par des collèges des médecins soient
établis dans chaque province, le Québec fait office de parent pauvre.
Le
principal obstacle, c'est l'absence d'accès aux données. Cet outil pourrait
prévenir des décès. Voilà un bon exemple
de mesure simple qui permettrait à l'Ordre, par exemple, des pharmaciens
et au collège de mieux protéger le public. Et nous ne
mentionnons pas l'accès aux données d'hospitalisation, qui pourraient également...
qui nous sont également défendues. Sans l'accès aux données, nous pouvons
difficilement agir préventivement, et notre frustration est d'autant
plus grande que le public croit à tort, comme vous peut-être, que nous y avons
accès.
La deuxième préoccupation,
c'est l'absence de juridiction sur les entreprises établissant des contrats
avec nos membres. Nous avions eu l'occasion,
lors d'une récente commission
parlementaire sur les pouvoirs accrus
de la RAMQ, projet de loi n° 92, si mon souvenir est bon, de dire que, dans le
domaine de la santé, le Québec était devenu une terre de prospection pour
les entrepreneurs, voyant dans les faiblesses de notre système autant
d'occasions d'affaires. Il est pertinent aujourd'hui de prendre acte de cette
réalité et de doter les ordres professionnels d'un droit de regard sur les contrats liant les entreprises et leurs membres.
La commission Charbonneau, on y réfère souvent, mais la commission
Charbonneau a largement démontré que le
professionnel peut être soumis à des pressions d'entreprise pour
contourner ses obligations déontologiques. Nos syndics doivent aller en cour
pour avoir accès à de tels contrats.
Il est bien
d'enseigner des règles d'éthique. Ne devrait-il pas y avoir des pouvoirs
conséquents permettant de s'assurer qu'elles
s'appliquent? Et clairement les pouvoirs des ordres professionnels, actuellement, ne sont plus adaptés.
Voilà
une autre mesure concrète et urgente qui protégerait mieux le public. Encore
faudrait-il aussi prévoir les pouvoirs de facturer les frais encourus
par ces nouveaux mandats aux entreprises elles-mêmes.
Troisième
sujet qui nous préoccupe : la prolifération des charlatans. Il n'y a pas
une semaine où nous ne devons pas
agir sur des situations d'exercice illégal. Nous avons eu l'occasion de vous
entretenir à ce sujet après votre entrée en fonction, Mme la ministre. Nous vous réitérons le fait que, si la loi doit
prévoir des amendes, c'est bien; ce qui nuit le plus aux charlatans, c'est leur réputation. À quoi sert-il d'augmenter
des amendes contre des charlatans insolvables qui récidivent le lendemain de leur condamnation? La
mise en place d'un registre permanent avec photos, facilement accessible
au public, pourrait non seulement informer ces derniers, mais alimenter la vigilance médiatique et aussi
prévenir ou à tout le moins atténuer
les effets des récidivistes. Voilà une autre mesure concrète protégeant le
public. Encore faudra-t-il statuer sur la priorité entre protection du
public et droit à la vie privée des charlatans.
Que
nous propose le projet de loi à l'étude? Une réforme de la gouvernance des
ordres en établissant un nombre réduit,
fixe et identique d'administrateurs pour tous les ordres, comme si la réalité
de chaque profession était identique.
La
séparation des fonctions de président et directeur général, sur ce
point, il n'est pas inutile de rappeler que cette mesure ne touchera que sept des 46 ordres, dont le
nôtre. Nous avions cette séparation jusqu'en 2005 et nous y reviendrons s'il le faut, si vous avez des questions. Toutefois,
pour des raisons pratiques, nous souhaiterions que la loi prévoie un
délai d'un an pour s'ajuster. (Interruption). Merci.
Le Président (M.
Ouellette) : ...non? Ah! Vous avez dit...
• (16 h 20) •
M.
Bernard (Charles) : Non. Il
pense à ma sécheresse de bouche parce que c'est sec, à l'Assemblée nationale.
La formation des
administrateurs et des futurs membres en éthique et déontologie, c'est un autre
sujet qui est couvert. Alors, depuis 2007,
nous donnons systématiquement à tous nos candidats au permis d'exercice des
sessions de formation sur les aspects légaux et déontologiques. Nous
continuerons à le faire en élargissant sa portée.
Une augmentation de la représentativité des administrateurs nommés à l'office au sein des
conseils d'administration. Nous
constatons toutefois que le projet de loi est remarquablement muet sur les
qualités requises de ces administrateurs ainsi que sur les mécanismes de sélection et de nomination. Auront-ils
de la formation, des mécanismes d'évaluation? Aucune information à ce sujet. Nous avons l'impression qu'actuellement
les nominations relèvent davantage du hasard et des décisions
discrétionnaires de l'office que d'un processus rigoureux.
Le Code des professions prévoit des mécanismes
de destitution des secrétaires des syndics, et nous saluons le fait qu'il en sera de même pour les directeurs
généraux. Mais qu'en est-il d'un mécanisme préétabli de destitution des administrateurs? Eux
aussi pourraient être fautifs, et le projet de loi est muet à ce sujet. Est-ce
que ce sera un des nouveaux pouvoirs
confiés à l'office? Le projet de loi n'en parle pas. Si le passé est garant de
l'avenir, nous sommes d'avis qu'il faudrait
mettre en place à l'avance un tel mécanisme et formuler des règles du jeu
claires pour tous, y compris le public.
Est-ce que ces mesures protégeront mieux le
public? Nous vous laissons juges de la réponse. Nous sommes d'avis que l'effet de ces mesures sur les enjeux
actuels de protection du public seront mineurs, d'où notre marque
médiatisée récemment de «réforme cosmétique».
Enfin, le
projet de loi aborde la question de l'accessibilité aux professions et prévoit
deux mécanismes pour la faciliter,
c'est-à-dire l'élargissement des pouvoirs du commissaire aux plaintes, qui
deviendrait Commissaire à l'admission, et la création du pôle de
coordination pour l'accès à la formation.
La profession
médicale, elle est contingentée, je ne vous apprends rien. Le nombre de postes
dans les facultés de médecine et le nombre de postes sur le marché du
travail, par spécialité, par région, sont déterminés par un décret gouvernemental, je ne vous apprends rien là non
plus. Nous sommes... Non seulement tous les postes sur le marché du travail sont-ils pourvus, mais le nombre de
candidats qualifiés par nos propres facultés de médecine est déjà, dans
plusieurs spécialités, supérieur au nombre de postes qui seront disponibles.
De notre
point de vue, le problème dans la profession médicale n'est pas une
reconnaissance des compétences mais de cohérence des politiques
gouvernementales. Visiblement, le ministère de l'Éducation, le ministère des
Relations internationales, le ministère de
l'Immigration, le ministère de la Justice et surtout le ministère de la Santé
et des Services sociaux lancent des
messages au mieux contradictoires dont le collège fait les frais. Un médecin
étranger qui doit payer lui-même son
stage d'évaluation parce que le ministère juge que sa spécialité n'est pas
prioritaire sera-t-il motivé à le faire s'il n'a pas l'assurance d'un poste quand il obtiendra son permis? C'est
notre réalité quotidienne. Nous serions prêts à lui donner son permis, mais l'exercice de la médecine
est conditionnel à la disponibilité d'un poste relevant d'un ministère
de la Santé et des Services sociaux. Pour
notre profession, le problème d'accessibilité et d'intégration relève bien
davantage des contradictions interministérielles que du collège.
Souhaitons
que le commissaire et le pôle ou d'autres mécanismes de concertation aient
suffisamment de pouvoirs sur la
machine gouvernementale pour atteindre l'objectif visé. Ici encore, le public
sera-t-il mieux protégé par ces mesures? Nous jugerons l'arbre à ses
fruits.
En
conclusion, nos commentaires détaillés se trouvent dans notre mémoire, que vous
avez reçu il y a une semaine. Retenez
que nous sommes plus que favorables à toute mesure qui aura pour effet de mieux
protéger le public. S'il est bien de
donner des pouvoirs aux agents de contrôle des ordres que sont l'office et le
commissaire, il faudrait peut-être aussi donner plus de pouvoir réel aux ordres, qui constituent, il ne faut pas
l'oublier, la première ligne de protection du public. Renforcer les contrôles sans donner des nouveaux
pouvoirs réels aux ordres, selon nous, c'est étouffer les ordres sous la
lourdeur bureaucratique sans améliorer véritablement la protection du public.
Pour nous, le
projet de loi n° 98 constitue une bonne introduction d'amélioration au
système professionnel. Nous attendons impatiemment la suite, qui visera
directement à mieux protéger le public.
Nous vous remercions. Et nous sommes ouverts à
toutes vos questions, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, Dr Bernard. Je vais vous laisser prendre une gorgée d'eau avant la
période de questions. Mme la ministre.
Mme Vallée : Merci. Merci, Dr
Bernard. Merci de votre présentation.
Je ne suis
pas certaine que je partage complètement votre lecture du projet de loi. Je
pense qu'il y a une volonté claire d'augmenter la protection du public,
de répondre à un certain nombre de recommandations.
M. Bernard (Charles) : ...on dit que
c'est une introduction.
Mme Vallée : Oui, c'est ça.
Mais, bref, sur votre introduction, j'aimerais vous entendre. Parce que d'abord
il y a la question de la gouvernance,
on va aborder cet aspect-là. Sur la gouvernance, vous avez un enjeu, vous avez soulevé un enjeu : vous
n'êtes pas d'accord à imposer un modèle unique quant au nombre des
administrateurs qui siègent au conseil
d'administration d'un ordre. Je crois
que vous semblez souhaiter le statu
quo quant à votre... quant au
nombre de membres qui siègent au conseil d'administration. J'aimerais vous entendre un peu sur la réalité
du Collège des médecins et sur la composition actuelle de votre conseil
d'administration.
M. Bernard
(Charles) : Si on nous donne
le choix, c'est sûr qu'on préférerait garder le modèle qui existe, mais je sais qu'il y a des modes, il y a
des gourous, actuellement, il y a toutes sortes de vocabulaires, dans la
gouvernance, et ça change. Je vous
rappelais dans notre présentation verbale ici qu'en 2005 on avait une gouvernance un peu différente, ça a changé.
Alors, je ne suis pas contre le fait qu'on puisse changer la gouvernance, au contraire, si on a une garantie que ça va améliorer quelque
chose.
Mais je
questionne autour de moi et je leur demande : Est-ce que vous trouvez que,
si on a 20 ou 11 administrateurs autour
de la table du Collège des médecins, ça va changer quelque chose dans la protection du public? Je n'ai pas encore rencontré
personne qui m'a dit : Oui, ça va tout changer. Alors, ça me questionne
sur la pertinence de ça.
Et nous, en
plus, on a une longue, longue histoire de notre conseil d'administration où on
avait des représentants des facultés
de médecine. Il faut dire que le modèle
du système québécois
a été un peu calqué sur le Collège des médecins, il y a 40 quelques années, il
ne faut pas l'oublier, et on a un
petit peu importé des choses que le
Collège des médecins faisait. La
seule chose qui n'avait pas été introduite, c'est d'introduire, justement,
les écoles... pour nous, c'est les écoles de médecine, mais les
écoles dans les autres professions, ce qui fait que, par exemple, pour le Barreau, dont vous êtes, on a fait une école de Barreau à part et qui est gérée par l'ordre professionnel. Nous, le Collège des médecins, c'est les universités qui gèrent la formation professionnelle, si
vous voulez, les résidences, et nous,
on fait les agréments, et tout ça,
mais on est très proches de ces gens-là pour qu'ils connaissent les besoins de
la population et les besoins des gens qui viennent sur le terrain pour travailler. Parce qu'il ne faut pas oublier que, quand on forme
des gens à l'université, il faut qu'ils
soient capables de rendre des services après dans la population, c'est ça,
l'objectif premier, parce que, si on forme des gens juste pour les former, puis ils ne sont pas capables de rendre
de service, ça ne donne absolument rien. Alors, la présence des facultés
de médecine nous permettait d'avoir ce contact.
On va
sûrement trouver une façon, tu sais, on est créatifs, là. Même s'ils ne sont pas
assis autour de la table, on va les
impliquer autrement. Et jamais on... Si le projet de loi impose ça, écoutez, le
Collège des médecins va obtempérer puis va... Mais ce n'est pas notre
premier choix.
Le Président (M. Ouellette) : Oui,
M. Robert.
M. Robert (Yves) : J'ajouterais en
complément, si vous permettez, qu'on a un problème de représentativité. Il faut représenter toutes les régions, et notre
profession, ce n'est pas que la médecine, on a 60 spécialités qu'on
reconnaît, donc, si on n'a pas autour de la
table minimalement des médecins de famille et des médecins d'autres
spécialités, il y a un problème de représentation de la profession
elle-même.
Donc, on ne
se battra pas pour un nombre d'administrateurs. Est-ce que 11, 15, 20, 25, 22,
c'est meilleur? Ce n'est pas ça, la question. La question, c'est d'avoir
un souci de représentativité. Puis, pour nous, les membres du conseil
d'administration, ce n'est pas nécessairement le nombre qui devrait faire
l'objet d'un débat mais un souci de bonne représentativité non seulement des
spécialités, mais des régions également.
Mme Vallée :
Mais vous soulevez quelque chose d'intéressant parce que les différents
intervenants qui nous ont rencontrés
au cours des dernières semaines nous ont sensibilisé à cet enjeu-là de la
représentativité qui ne devrait pas être présent au sein des ordres professionnels, dont la mission devrait être
vraiment centrée sur la protection du public. Donc, à partir du moment où la mission de l'ordre est la
protection du public, la représentativité au sein du conseil
d'administration n'a pas sa raison d'être, puisque le conseil d'administration
de l'ordre n'est pas là pour... n'est pas une association professionnelle mais
doit bien veiller à assurer la protection du public, et ça, la
représentativité, la provenance des administrateurs ne devrait pas être un
enjeu ou un facteur à considérer.
• (16 h 30) •
M. Robert
(Yves) : Oui, c'est un bon
point, mais en fait on s'aperçoit, dans l'exercice de notre mandat, qu'il
y a des différences d'une région à l'autre
et que la participation des médecins d'autres régions fait en sorte que ça
enrichit souvent les points de vue qu'on
développe comme collège pour l'ensemble de la population. Gérer les problèmes de qualité d'exercice à Montréal et dans le reste du Québec,
c'est deux choses différentes, et, nonobstant ce qu'on en dit, sur le
plan organisationnel, les impacts sur la charge et... la façon d'appliquer le
code de déontologie, par exemple, à Montréal ou
ailleurs, est un peu différente d'une région à l'autre. Et cet input-là de la
part des médecins qui travaillent en région est un plus pour nous autres. Et je dois vous dire que, quand on fait des consultations en préparant des documents, des guides d'exercice, et tout ça, on s'aperçoit que la façon d'appliquer les
règles varie d'une région à l'autre à cause des ressources qui sont
disponibles et de la nature des problèmes auxquels ils font face.
Mme Vallée : Bien, ça aussi,
c'est intéressant, parce qu'un code d'éthique, en principe, code d'éthique et
de déontologie, comment peut-il être
appliqué ou interprété différemment d'une région à l'autre? Est-ce qu'on ne
devrait pas... Les valeurs d'éthique et la déontologie ne devraient-elles pas
être les mêmes, peu importe que l'on pratique à...
M. Bernard
(Charles) : ...uniformité dans l'application du code de déontologie
puis dans l'éthique, là. Ce que mon
collègue, Dr Robert, veut vous expliquer, c'est que la réalité du terrain
est très différente entre un hôpital universitaire du CUSM ou du CHUM, en plein centre-ville de
Montréal, et, je ne sais pas, moi, à Shawville, dans votre région.
Alors, les médecins n'ont pas les mêmes préoccupations, n'ont pas les mêmes...
Mme Vallée :
Mais vous m'excuserez, je vous pose la question parce que je n'ai pas votre
expertise. C'est pour ça que vous êtes là.
M. Bernard
(Charles) : Non, non, mais
c'est dans tous les domaines, ce n'est pas juste dans le domaine de la
médecine. Alors donc, c'est que cet éclairage-là, autour d'une table... Un conseil
d'administration, hein, pas juste au Collège
des médecins, dans toute organisation, que ce soit dans des organismes gouvernementaux, et tout ça... Je regarde autour. À l'Assemblée
nationale, ce n'est pas tout le même
modèle, hein, les députés ne sont pas tous sur le même cadre, il y a des gens qui sont
originaires de différents métiers, de différentes régions, et tout ça, et ça
enrichit le débat.
Mme Vallée : Oui, mais notre
code d'éthique s'applique, peu importe...
M.
Bernard (Charles) : Au
Collège des médecins, si on a tous le même modèle de bonhommes ou de bonnes femmes, bien, qu'est-ce que vous voulez que je
vous dise, ça va être plate puis il
n'y aura pas de richesse dans les
discussions qui vont s'amener autour de la table. Moi, je pense
qu'un conseil d'administration, peu importe l'organisme — et
puis je ne parle pas
juste du Collège des médecins, je suis sur d'autres conseils d'administration, et j'en ai fait beaucoup dans ma carrière — ce qui fait la richesse,
c'est les origines différentes des gens qui sont autour de la table.
Je vais vous donner
un exemple. On se ramasse à Montréal puis avec tous des gens qui sont des
médecins du centre-ville de Montréal. Il ne faut pas se le cacher, c'est la
région où plus de la moitié ou presque les deux tiers des médecins sont, dans la région autour. C'est sûr
que, si vous faites un conseil
d'administration puis, par exemple, vous faites un vote puis
vous élisez des gens, ça va être tous être des gens de Montréal.
Est-ce que vous allez avoir une bonne écoute, une
bonne vision, une bonne sensibilité de ce qui se passe à travers tout le Québec?
Moi, j'en doute.
Mme
Vallée : On nous a...
Bien, je vous dirais que, pour ce qui
est de la protection du public, j'ai
l'impression qu'il y a effectivement des pratiques qui sont distinctes, mais il
y a quand même des grandes lignes de conduite qui doivent s'appliquer, qui doivent être les mêmes, et ça, peu importe la
pratique, qu'on pratique la médecine, qu'on pratique le droit, le notariat, le génie civil, peu importe.
La protection du public, elle n'est pas si différente, et les enjeux de
protection ne sont pas si différents.
Je
comprends qu'il puisse y avoir, sur le terrain, différents enjeux ponctuels
auxquels le conseil
d'administration doit s'attarder. Mais ça
m'amène à une question. Il y a quelques semaines, la Fédération des chambres de
commerce de Montréal nous suggérait de modifier le texte du Code des
professions pour mentionner... et mon
collègue de Borduas a posé la
question à un ordre qui vous a précédés ce matin, s'il ne serait pas opportun
de mentionner que la seule et unique mission
d'un ordre est celle de la protection du public; plutôt que d'indiquer «la
principale mission», tel qu'on le retrouve actuellement, mais que la seule et unique mission de l'ordre soit la
protection du public. Compte tenu des représentations que vous avez
faites dans votre mémoire, j'aimerais vous entendre sur cette question.
M.
Bernard (Charles) : La réponse, c'est oui. Très simple. Nous, on est,
au Collège des médecins, uniquement sur
le mandat de la protection du public,
on a zéro budget pour faire la promotion de notre travail, O.K.?
Vous pouvez... Me Dutrisac est
là, là, il scrute nos rapports
annuels depuis des années sur les
budgets, vous pouvez lui demander s'il a trouvé une cent qui est allée dans la promotion de la médecine par
l'ordre. Jamais. On n'est pas là pour ça, il y a d'autres organisations qui font
ça.
C'est
sûr que, si on regarde tous les ordres
professionnels, à travers les 46, il y en a
qui jouent le rôle de syndicats, il y
en a qui jouent le rôle de promoteurs
de leur profession, il y en a qui vantent... qui font des campagnes de
publicité. Le Collège des médecins est là pour la protection du public.
Et,
nous, ce qu'on veut avoir, c'est des instruments pour faire notre job. Les
instruments pour faire notre job, vous l'avez
bien dit... J'en suis, pour la gouvernance et tout ça, là, mais, pour moi,
c'est secondaire. Moi, l'important, c'est de faire de l'inspection correctement, avec les instruments puis les outils
qu'il faut, c'est de faire des
enquêtes correctement, avec les
outils qu'il faut, puis donner des permis à des gens qui sont compétents, pas
donner des demi-permis, pas avoir deux standards, pas me faire des
petites magouilles pour que Jos Bleau passe parce qu'il vient de tel pays, puis
toutes sortes d'affaires, là. On a des
standards, puis les médecins au Québec sont tous égaux. Et, tant que je serai
président du Collège des médecins, on va tous avoir la même compétence.
C'est
sûr qu'on a des moutons noirs dans notre profession. D'ailleurs, c'est pour ça
qu'on fait de l'inspection, c'est pour ça qu'on fait des enquêtes. Et
notre rôle principal et unique, c'est ça.
Alors,
le reste, le fligne-flagne, on n'en veut pas. On veut, par exemple, que vous
nous donniez les outils pour le faire correctement. On avait certains
outils avant, mais, depuis un certain nombre d'années, on ne les a pas, donc on
intervient de façon individuelle.
Puis,
quand on nous questionne puis qu'on nous reproche d'être ci, corporatistes,
d'être ça, de protéger quoi que ce
soit, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? J'ai des règlements, et des
balises, et des frontières qui sont infranchissables. Bien, moi, je
respecte les lois, malheureusement, mes parents m'ont élevé comme ça.
Alors,
si on veut faire des flignes-flagnes, bien là, c'est d'autre chose, on
n'embarquera dans des flignes-flagnes. Mais
on veut, si les règles soient changées, qu'elles soient claires, puis qu'elles
soient claires pour tout le monde, qu'on fasse notre travail, mais, pour...
Mme
Vallée : Vous semblez prétendre qu'il y a une volonté de
fligne-flagne. Au contraire, au contraire, cette volonté...
M.
Bernard (Charles) : Bien, j'ai lu récemment des gens qui m'ont fait
des recommandations, concernant les permis
des étrangers, où on disait qu'on devrait adapter les stages, qu'on devrait
aider pour des stages... ne pas les envoyer trop loin. On envoie les gens où il y a des disponibilités de stage.
C'est une pénurie de stages. Je pense qu'il y a d'autres ordres
professionnels qui sont passés avant nous qui vous ont dit : Il n'y en a
plus, de stages.
Écoutez,
on a des cohortes d'étudiants en médecine énormes. On a du monde qu'on doit
faire de la remédiation, hein, il y a des gens qu'on veut ramener à
l'ordre. Il y en a qu'on radie qui sont des pas bons, mais il y en a qui sont récupérables, ça prend des stages. Et on a des
gens qui viennent de l'étranger, on a des ARM. Mais, qu'est-ce que vous voulez, on est une province de huit millions, Mme
la ministre, on n'a pas des hôpitaux comme en Californie ou dans la région de Boston, à l'infini, là. Alors donc, le
nombre de stages est limité, puis là tout le monde se bat pour les mêmes stages.
Là,
on va nous demander bientôt, je ne sais pas si vous êtes au courant, de
participer à un effort d'IPS. Mais, ce monde-là,
il faut qu'ils fassent des stages, eux autres aussi. Mais où on va les envoyer,
tout ce monde-là, là? On va les empiler un par-dessus l'autre?
Si on veut avoir des gens compétents, il faut
qu'on ait des stages cohérents. Alors, c'est pour ça que je vous dis qu'il faut
qu'on nous donne les outils qu'il faut puis il faut faire attention pour ne pas
essayer de nous demander de faire des flignes-flagnes ou des choses pour adapter nos stages ou
adapter nos comportements pour aider les gens, qui sont traités égaux,
tout le monde.
Mme Vallée : Bien, c'est
justement l'objectif du traitement équitable... du projet de loi, lorsqu'il est
question d'élargir les pouvoirs du
commissaire pour en faire un commissaire à l'admission, c'est de s'assurer que
les processus sont équitables pour tous, peu importe qui est la
personne, peu importe d'où vient celui ou celle...
M. Bernard
(Charles) : ...le commissaire aux plaintes existe déjà depuis 2007.
Est-ce qu'il y a eu beaucoup de cas où le Collège des médecins a été
pris en faute? Je vous pose la question.
Mme Vallée : Ah! En fait, je
n'ai pas de...
M. Bernard (Charles) : Zéro.
Mme Vallée : Ce n'est pas une
question de prise en faute. Puis ça aussi, je pense qu'il faut...
M. Bernard (Charles) : Non, mais
c'est un commissaire aux plaintes.
Mme Vallée : C'est un
commissaire aux plaintes.
M. Bernard (Charles) : Les plaintes,
c'est les gens qui ne sont pas contents.
Le Président (M. Ouellette) : Là, je
suis obligé d'intervenir parce qu'il ne suit plus, mon...
Une voix : ...
Le Président (M. Ouellette) : Non,
c'est juste parce qu'il faut que ce soit enregistré.
M. Bernard
(Charles) : Mais c'est parce que c'est mon enthousiasme. Je suis
convaincu de la protection du public puis du rôle du Collège des
médecins.
Le Président (M. Ouellette) : J'ai
compris ça, j'ai compris ça.
M. Bernard
(Charles) : Je m'excuse, M. le Président, si je... Ça sort plus vite...
Mais ça roule plus vite en haut, par exemple.
Le
Président (M. Ouellette) :
Bien, je n'ai pas de misère avec ça, mais pour qu'on soit capables de suivre
puis les gens qui nous suivent aussi soient aussi capables de suivre.
M. Bernard (Charles) : O.K. Je vais
laisser mon collègue répondre lentement.
Le Président (M. Ouellette) : Une
dernière remarque, Mme la ministre.
Mme Vallée :
Bien, en fait, l'objectif, lorsque vous parlez du traitement équitable, je
trouve ça intéressant parce que c'est
l'objectif, d'avoir un traitement équitable, et d'avoir un commissaire à l'admission,
pas tant aux plaintes, puisque ça donne peut-être une couleur qui n'est
pas celle qui est souhaitée, mais qui est plutôt d'identifier les enjeux qui peuvent poser problème, qui ne sont pas
nécessairement tous propres au fait des ordres professionnels, parce que
l'enjeu et le défi de l'admission aux professions n'est pas que le fait des
ordres professionnels non plus, puis il est important d'avoir ce regard plus
global et d'amener les gens autour d'une table.
M. Bernard
(Charles) : Avant de laisser la parole à mon collègue, Dr Robert,
je peux vous dire que, dans notre présentation,
on vous a dit que, nous, notre lecture de ce problème-là, c'est plus un
problème de cohérence, O.K., ce n'est pas un problème d'ordre
professionnel.
Mme Vallée : Bien, c'est
justement le rôle du pôle.
Le Président (M. Ouellette) : On a
terminé.
M. Bernard
(Charles) : Je m'excuse,
mais vous aurez beau mettre même tous les commissaires du monde, ça ne réglera pas s'il n'y a pas de cohérence entre les
différents ministères puis les... Si
le ministère de l'Immigration veut que ça rentre à pleine porte, puis si
un autre ministère dit : On ferme la porte, qu'est-ce qu'on fait?
Mme Vallée : Mais c'est le
rôle du pôle d'avoir cette coordination-là, d'amener les gens...
• (16 h 40) •
M. Bernard
(Charles) : ...on ne s'oppose pas à ça. On vous dit : Donnez-lui
des dents, du pouvoir, pas des recommandations...
Le Président (M. Ouellette) : O.K.
Merci. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme
Jean : Merci. Alors,
bonjour, M. Bernard et M. Robert. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci
pour vos commentaires.
Je vais inviter ma collègue la députée de Taillon
à vous poser des questions.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Taillon.
Mme Lamarre : Merci, M. le
Président. Alors, Dr Bernard, Dr Robert. C'est sûr qu'on a
effectivement des priorités multiples pour
mieux assurer la protection du public, mais aujourd'hui le gouvernement nous
propose un projet de loi, alors on va
essayer de rester sur celui-là. On pourra reparler dans d'autres contextes, là,
de... entre autres le projet de loi sur la RAMQ, qui était très
pertinent.
Mais il reste
que, même dans ce projet de loi ici, on cherche à comprendre les objectifs, les
pouvoirs réels, les moyens que le
gouvernement veut attribuer au Commissaire à l'admission, donc le nouveau
commissaire. Quels sont les objectifs qui sont visés?
Vous, vous
proposez d'en faire un ombudsman. Moi, ce que j'ai été surprise, et je voudrais
que vous me donniez le fond de votre
pensée, la page 18, votre recommandation 15, où vous dites : «Le
collège recommande que l'étendue des pouvoirs
du commissaire soit précisée, notamment quant à sa compétence à l'égard des
personnes formées au Québec et quant à la limite entre l'admission à la
profession et l'admission aux études.»
Est-ce que
votre compréhension du mandat qui serait actuellement dévolu au Commissaire à
l'admission pourrait aller aussi loin
que de fixer le nombre d'admissions, par exemple, en médecine, le nombre de
candidats qui pourraient aller en médecine de famille, en médecine
spécialisée? Est-ce que c'est votre compréhension actuelle?
M. Robert
(Yves) : C'est ce qui n'est
pas clair dans le projet de loi, à notre avis. C'est-à-dire, est-ce que ça
va aller jusque-là? Et jusqu'à quel point le commissaire va pouvoir émettre des
recommandations sur les entrées en médecine, par exemple?
Jusqu'à
maintenant, il y a une table de concertation qui est mise en place à la
Direction générale des services de santé
et de la médecine universitaire du ministère, et c'est eux qui préparent le
décret et qui suivent la planification de la main-d'oeuvre médicale au Québec avec Recrutement Santé Québec. Et donc c'est par décret que le nombre de
postes d'entrée en médecine en première
année, de résidence dans chacune des places de spécialité... et dans les postes
disponibles sur le marché du travail par la suite, par spécialité et par
région, c'est déterminé par décret.
Donc, la
question qu'on se pose, justement, et
c'est ça qu'on demande de préciser : Ça va être quoi, le rôle du commissaire,
en rapport avec cela? Parce qu'un des problèmes qu'on est en train...
Puis ça va être important, parce que le nombre de postes, il est
fixe et il n'est pas nécessairement lié à l'origine du médecin, O.K.? Donc, normalement,
il devrait y avoir une cohérence entre les
entrées et les sorties sur le marché
du travail de nos facultés de
médecine. Et, si on veut prévoir des places pour des médecins venant de
l'étranger, bien, il faudrait les ajouter à ceux qu'on fait rentrer. Sinon, il
y a une collision frontale qui va arriver au niveau du marché du travail, c'est
ça qui est le problème.
Mme
Lamarre : Un goulot
d'étranglement. Parce que médiatiquement, on le sait, là, vous avez été
interpelés, puis ça arrive assez souvent,
sur le manque de milieux de stage. Et pourtant, à l'ordre, vous avez, comme
vous l'avez dit, des représentants des universités.
Donc, qui, actuellement, aurait le pouvoir d'augmenter le nombre de milieux de stage? Est-ce que
c'est un problème de ressources humaines, d'organisation, de financement
des établissements pour accueillir plus de stagiaires? Où est la solution?
M. Bernard
(Charles) : Les stages de
formation, ça relève du ministère de
l'Éducation, parce que les stages
sont principalement faits en milieu de formation, c'est-à-dire les
milieux universitaires. Donc, on a déjà fait des représentations auprès du ministère
de l'Éducation. Il faudrait qu'il y ait, encore là, une cohérence entre les
attentes du ministère de la Santé et
Services sociaux et le ministère de l'Éducation. Mais c'est sûr et certain que, si vous augmentez
le nombre de possibilités de stage,
ça va prendre du financement pour avoir plus de stages, parce que les maîtres
de stage, ils le font bénévolement en partie, mais ils ne feront pas des
stages tout le temps, tout le temps bénévoles.
Mme
Lamarre : Et, le pôle de
coordination, est-ce que vous voyez qu'il possède les leviers pour ça? Il n'y a
pas de mission de financement, là, actuellement, là, qui a été prévue à ça?
M. Robert
(Yves) : Bien, c'est là
qu'est toute la question. Un pôle, on peut se réunir autour d'une table,
mais, au bout de la ligne, c'est qui qui va prendre la décision? Puis qui va
faire que ça va être efficace ou non?
Et
là un des problèmes auxquels on a à faire face, c'est qu'en fait on demande à
tous les médecins étrangers de passer par Recrutement Santé Québec,
c'est eux qui coordonnent, entre guillemets, le parrainage entre les places disponibles, la formation du médecin, et c'est
nous, une fois qu'on a un jumelage qui est fait, qui procédons à
l'évaluation. Ce stage-là, pour les 60 spécialités, le ministère a
déterminé qu'il n'y avait que 10 spécialités prioritaires, les autres étant pleines. Donc, ça ne veut pas dire que le médecin ne
pourrait pas faire un stage, mais il faudrait qu'il débourse lui-même, parce que le ministère ne finance que
les 10 spécialités reconnues comme prioritaires. Et un stage,
l'évaluation, de trois mois, c'est
20 000 $. Donc, la question, c'est : Qui paie le
20 000 $ pour les spécialités qui sont saturées, et pour
lesquelles elles sont d'autant plus saturées que le médecin étranger qui aurait
une de ces spécialités non prioritaires devrait défrayer lui-même le coût du
stage, sans garantie d'avoir une place?
Mme
Lamarre : Mais, mettons l'hypothèse, là, parce qu'on va aller un peu
plus en détail, c'est ça qui revient souvent,
si le médecin étranger a le 20 000 $ et qu'il dit : Moi, je suis
prêt à débourser pour ce stage-là, est-ce qu'actuellement il y a un
mécanisme qui dit : On va accueillir, on va s'arranger pour qu'il y ait
une opportunité, pour qu'il soit accueilli dans cette spécialité-là pour faire
son stage?
M. Bernard
(Charles) : Actuellement, il est sur une liste d'attente. Il va avoir
son tour quand il va y avoir une disponibilité.
M. Robert
(Yves) : Il va avoir son stage, oui, il va avoir son stage...
Mme Lamarre :
Le fait qu'il veuille payer, il n'y a pas nécessairement de place...
Des voix :
...
Le Président (M.
Ouellette) : Woups! On recommence. Il faut suivre, à l'audio.
M. Bernard
(Charles) : Je suis indiscipliné, hein?
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, un petit peu. Mais c'est correct, je comprends.
M. Bernard
(Charles) : Mais vous êtes là pour me discipliner, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : Bien, je vais essayer, mais c'est difficile,
c'est difficile, il doit y avoir de quoi dans l'eau. Mme la députée de
Taillon.
Mme
Lamarre : Donc, même si le médecin étranger est prêt à débourser le
20 000 $ pour faire son stage, vous dites : Il y a une
liste d'attente, et donc il n'y a pas de possibilité.
Qu'est-ce
qu'il faut pour qu'il y ait une plus grande ouverture? C'est le ministère de
l'Éducation qui doit ouvrir plus de
postes? C'est le ministère de la Santé qui doit créer des incitatifs dans les
établissements hospitaliers ou de formation pour augmenter les cohortes?
Le Président (M.
Ouellette) : Dr Robert.
Mme Lamarre :
On cherche des solutions, là.
M. Robert (Yves) : Il faut qu'il y ait une place physique, premièrement, parce qu'en fait
les maîtres de stage ne sont pas illimités, O.K., parce qu'il faut que
ce soit dans un milieu agréé. Donc, il y a déjà des résidents qui sont là, il y a déjà des résidents en attente, il y a déjà des
IPS qui sont en formation, il y a des professionnels autres que des
médecins qui utilisent les mêmes stages, et il y a nos propres médecins qui
sont déjà au tableau de l'ordre à qui on impose des stages occasionnellement. Et, les lieux de stage étant limités et fixes,
bien, à un moment donné, le médecin étranger va pouvoir entrer quand il
y aura une place.
M. Bernard
(Charles) : Si je peux compléter...
Mme Lamarre :
Je vais me permettre un petit commentaire, par exemple, sur les IPS, si vous me
permettez, parce qu'au départ on n'en avait
pas beaucoup, mais là, maintenant, il y en a, et, dans toutes les autres
professions, ce sont les mêmes professionnels qui font la formation des
autres professionnels. Donc, maintenant qu'on a une cohorte de plus de 300 infirmières praticiennes
spécialisées, ce ne serait pas une bonne façon de libérer des places de
médecin, de la disponibilité de médecins, en permettant aux IPS
diplômées d'être celles qui supervisent les IPS en formation?
Le Président (M.
Ouellette) : Je vais demander au Dr Bernard de compléter sa
réponse de tantôt.
M.
Bernard (Charles) : Oui, vous avez entièrement raison, puis on est en
faveur de ça. Mais, avant que les gens soient
autonomes complètement puis qu'il y ait des formateurs qui soient prêts à le
faire... On attend ça, on veut que ça existe, mais les cohortes,
actuellement, sont très faibles, puis la demande est très grande. Même si on
imposait aux infirmières de former leurs
propres IPS, elles ne seraient pas capables, il n'y aurait pas d'accueil. Je
pense, d'ailleurs, l'Ordre des infirmières est venu vous le dire. Alors
donc, on n'a pas juste le Collège des médecins, les autres...
Pour revenir sur la question du
financement, les stages qui étaient pour les médecins étrangers, surtout les
ARM, étaient financés par le ministère de la
Santé, où on a retiré la plus grande partie de ce financement-là à cause des
postes qui étaient non disponibles ici, au Québec. Alors, c'est très restreint.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée de Taillon. Une minute.
Mme Lamarre :
Une minute, c'est bien ça?
Le Président (M.
Ouellette) : Une.
Mme
Lamarre : Écoutez, moi, je veux d'abord vous... Je trouve que vous
avez innové quand même au niveau de la vérification externe des livres
des ordres professionnels. Ça, je pense que c'est un signe de transparence.
Et, dans la
perspective où vous demandez que l'ordre fixe les cotisations, je pense qu'il
faut... En fait, il y a deux écoles de pensée, là. Donc, moi, je vois que vous,
vous avez choisi que l'ordre fixe les cotisations. S'il fixe les cotisations,
eh bien, je pense qu'il faut avoir énormément de transparence, et ça, c'est
nécessaire parce que, sinon, les membres vont résister en se disant : Les
gens n'utilisent pas adéquatement les montants d'argent.
Par
contre, vous avez une petite réserve sur la rémunération du président ou des
postes, moi, je dirais les hauts dirigeants, là...
M. Bernard
(Charles) : On n'a pas de réserve...
Le Président (M.
Ouellette) : Oui.
• (16 h 50) •
M. Bernard
(Charles) : On n'a pas de réserve, on est de ceux qui sont les plus
ouverts pour que le rapport annuel soit le
plus transparent et le plus complet possible. La seule chose, c'est que, la
rémunération, on est d'accord qu'elle soit
connue puis on veut qu'elle soit connue sous une forme de rémunération globale
par exemple, et que ce soient des montants, par exemple, avec la
politique de rémunération, pour ne pas identifier, puis stigmatiser des gens,
puis dire : Le directeur des affaires
juridiques du Collège des médecins gagne tel salaire, puis ça va rendre les
autres avocats tous jaloux, au Québec.
Mme Lamarre :
...quelques postes de haut dirigeant.
M. Bernard
(Charles) : Mais pourquoi ne pas dire que, dans les directeurs, la
fourchette de salaires est comme ça puis la
politique est établie de telle façon? Ça revient au même, là, mais c'est une
façon de ne pas identifier avec des noms. Moi, je trouve que c'est un
petit peu... On voit ce que ça donne aussi, là, la chasse aux sorcières puis
l'identification de gens, Untel gagne 0,05 $ de plus que l'autre.
Le Président (M. Ouellette) : Dr Bernard, c'est sûrement un lapsus, que vous
mêliez les docteurs avec les avocats. M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Dr Bernard, Dr Robert, bonjour. Bienvenue à
l'Assemblée nationale.
D'entrée de jeu, j'aimerais qu'on revienne sur la
discussion que vous aviez avec la ministre relativement à la mission d'un ordre
professionnel. La question, c'était «principalement», dans le Code des
professions, principalement la protection
du public. Il y en a certains qui sont venus nous dire : Uniquement la
protection du public. Vous disiez : Nous, au Collège des médecins, on ne fait que ça, on ne
fait pas de publicité, on ne va pas chercher du membership. Est-ce que
vous ne pensez pas qu'il y a une réalité
aussi différente de la part du Collège des médecins, où est-ce que vous avez
des actes réservés, versus certains
ordres professionnels où c'est une profession à titre réservé, où, là, ces
gens-là, malgré le fait qu'ils font
de la protection du public, pour pouvoir faire de la protection du public
aussi, il faut qu'ils assujettissent les futurs professionnels à devenir membres de l'ordre pour que le syndic puisse
les inspecter, parce qu'ils n'ont aucune obligation de le faire?
M.
Bernard (Charles) : Vous avez raison, mais nous, on fait le travail
qu'on a à faire avec, comme j'ai dit, les règles du jeu qui sont établies. Et c'est sûr qu'on a des actes
réservés. Je suis obligé de jouer dans cette pièce-là parce que c'est
comme ça que ça fonctionne.
Alors,
si vous me demandez, moi, le Collège des médecins, je vous réponds : Pour
nous, c'est la protection du public,
et on essaie de faire notre rôle à 100 %. Les autres, si vous voulez modifier
la façon de fonctionner, libre à vous, c'est
vous qui avez le pouvoir de modifier les règles, ici, et les lois, alors c'est
à vous de jouer. Moi, je ne vous dirai pas, tel autre ordre qui n'a pas d'acte réservé, qu'est-ce que
vous devez leur mettre comme balises pour la protection du public, à
vous de juger, là. Si vous trouvez qu'ils
peuvent faire d'autres activités, c'est à vous... Moi, je ne peux pas faire de
morale ou de leçons à d'autres. Moi,
par contre, à moi-même et à mon groupe, oui, on peut se mettre des balises,
oui, on peut travailler.
Le Président (M.
Ouellette) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Votre recommandation 21 relativement au fait d'augmenter le
plancher des amendes, vous souhaitez,
dans le fond, que le collège ait un représentant au niveau de la négociation de
l'amende. Comment vous voyez ça? Parce que, dans le fond, vous
dites : On veut s'assurer qu'il ait les liquidités pour payer ou qu'il
soit solvable.
M.
Bernard (Charles) : Oui, exactement. Nous, là, c'est sûr et certain
que, dans les amendes... Vous parlez des amendes pour nos membres ou les
amendes pour les charlatans?
M.
Jolin-Barrette : Bien, en
fait, votre recommandation 21, reconnus coupables en matière d'exercice
illégal, donc les charlatans.
M. Bernard
(Charles) : Oui, mais c'est ce que je vous ai dit tantôt, nous, on
trouve que ce n'est pas juste ça qui doit
être fait. On l'avait déjà dit antérieurement à Mme la ministre. Oui, c'est
beau, que vous alliez augmenter, tripler, quadrupler les amendes. La
majorité de ces gens-là, nous, on le sait, là, ça fait des années, même avant
le Code des professions puis l'Office des
professions, depuis 1847 qu'ils chassent les charlatans, alors, les gens sont
insolvables, mais ils recommencent tout de suite le lendemain matin.
Par contre,
la première chose que les gens n'aiment pas, c'est de voir leur grosse face
dans le journal ou bien donc sur un
site, puis de dire : Ça, c'est un bandit. Alors, ça, par exemple, ça leur
fait mal, puis les gens peuvent les identifier puis ne retournent pas
consulter ces gens-là.
Alors, nous, on le fait dans notre humble
mesure, on a un site où les membres... pas nos membres, mais, les charlatans qui sont reconnus coupables, là, on a
une liste des gens qu'ils peuvent consulter, mais c'est juste très
limité à notre site Web, et il n'y a pas... Moi, j'avais pensé à un registre
national qui serait facile d'accès pour tout le monde, et là ça ferait beaucoup
plus mal aux charlatans.
Mais, les
amendes, on peut en mettre, il n'y a pas de problème. Mais je vous mets au défi
d'aller les percevoir.
M.
Jolin-Barrette : Mais, sur
le fait qu'un membre de l'ordre soit là pour négocier, qu'est-ce que vous
voulez dire par là, dans le fond? Qu'il évalue sa situation financière...
M. Robert
(Yves) : C'est surtout pour
déterminer les modalités de remboursement de l'amende en question. Quand
on se fait poser la... demander par quelqu'un qui se fait condamner :
Est-ce qu'on peut vous rembourser à raison de 0,50 $
par mois... C'est de ça dont on parle, quand on parle de négociation. Il faut
que ce soit quelque chose de raisonnable.
M.
Jolin-Barrette : Je
comprends. Pour ce qui est de la question de la suspension ou de la limitation
provisoire, vous dites : Attention,
soyons prudents. C'est des infractions punissables de cinq ans et plus
d'emprisonnement. Vous dites :
Il faut qu'il y ait un lien avec l'exercice de la profession, certains gestes.
Comment est-ce que vous baliseriez ça?
M. Bernard
(Charles) : Bien, comme vous
avez dit, on joue de prudence dans ce dossier-là, pour deux raisons. C'est que les juristes vont vous dire qu'il y a
la présomption d'innocence, et il
faut être très prudent quand on... On
n'est pas des juristes, on a des conseillers
juridiques, mais les conseillers juridiques nous disent : Jouez de
prudence dans ce dossier-là. Et nos syndics, déjà, dans l'exercice de
leurs fonctions, voudraient à l'occasion... C'est des mesures qu'on pourrait qualifier d'exceptionnelles, il ne faut
pas oublier ici qu'on est dans l'exception de l'exception. Alors donc,
on se demande : Est-ce que... C'est important, oui, mais il ne faut pas dire que ça va
être quelque chose qui va être appliqué quotidiennement ou hebdomadairement.
M.
Jolin-Barrette : Je
comprends. Tout à l'heure, vous avez mentionné, en parlant du commissaire aux
plaintes, Commissaire à l'admission, que, si
c'était le désir du gouvernement qu'il y ait quelque chose qui change, il faudrait
qu'il ait des dents et du pouvoir, donc,
concrètement, il faudrait donner davantage de pouvoirs, pas uniquement un
pouvoir de recommandation, au commissaire à l'éthique, si on allait dans
l'optique gouvernementale.
M. Bernard (Charles) : Pourquoi ce
n'est pas le président de l'office qui a ce pouvoir-là?
M. Robert (Yves) : Ou pourquoi pas
le pôle?
M. Bernard (Charles) : Pourquoi pas
le pôle, dont le président sera le président de l'office?
Alors, moi,
je pense, sans vouloir donner tous les pouvoirs à notre ami président de
l'Office des professions, on a déjà
des mécanismes, on a déjà des droits de regard, on a déjà des demandes qui
pouvaient être faites, jusqu'à maintenant, dans... Moi, je suis... On n'est pas contre des pouvoirs accrus à
l'Office des professions, au contraire, vous l'avez vu dans nos représentations. On n'a absolument rien à dire
contre ça, au contraire, au contraire. Moi, je trouve, et ça, c'est mon
opinion personnelle, qu'il y a un peu de dédoublement là-dedans, là. On va
avoir un président de l'office qui va être président
d'un pôle puis on va avoir un commissaire. Qui va avoir prédominance sur
l'autre sur les recommandations? Qui
c'est qui va faire le plus de pression sur les ministères pour que ce soit
cohérent? Je vous laisse juge de ça, là. Moi, je me pose les questions.
Je ne suis pas un spécialiste de lobby sur les ministères du gouvernement, mais
je me pose la question. Mais ça prend
énormément de pouvoir pour faire changer une directive gouvernementale. Ça, je
peux vous le dire.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Dr Bernard.
M. Bernard (Charles) : M. le
Président, ça nous a fait plaisir.
Le Président (M. Ouellette) : Bien.
Puis vous reviendrez n'importe quand.
M.
Bernard (Charles) : Invitez-nous, on aime ça.
Le Président (M. Ouellette) : Dr Robert, Dr Bernard, représentant le
Collège des médecins du Québec, merci.
Je suspends quelques
minutes. Je demanderais à l'Ordre des ergothérapeutes du Québec de s'avancer.
(Suspension de la séance à
16 h 58)
(Reprise à 17 heures)
Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant
l'Ordre des ergothérapeutes du Québec,
son président-directeur général, M. Alain Bibeau, qui va nous présenter les
gens qui l'accompagnent. Vous avez 10 minutes pour présenter votre mémoire,
et après il y aura une période d'échange avec Mme la ministre et les
porte-parole des deux oppositions. M. Bibeau, à vous la parole.
Ordre des ergothérapeutes du Québec (OEQ)
M. Bibeau
(Alain) : Merci, M. le Président de la commission. Mme la ministre,
Mmes, MM. les députés et M. le président de
l'Office des professions, à titre de président-directeur général de l'Ordre des
ergothérapeutes du Québec, au nom des
membres de son conseil d'administration et de sa direction, je vous remercie de
nous accueillir aujourd'hui à la commission.
Sans plus tarder, je vous présente les personnes qui m'accompagnent : tout
d'abord, Mme Louise Tremblay, ergothérapeute et secrétaire générale de
l'ordre, et Mme Caroline Fortier, avocate et conseillère juridique de l'ordre.
Cette
consultation est importante pour les ordres, pour notre ordre aussi. L'Ordre
des ergothérapeutes du Québec souhaite
que ce p.l. n° 98 puisse, à terme, jeter des bases positives et
porteuses sur lesquelles les autres volets à venir de la réforme du Code
des professions pourront s'appuyer.
Vous
aurez compris, à la lecture de notre mémoire, que l'Ordre des ergothérapeutes
accueille favorablement la majeure partie des modifications au code
mises de l'avant par ce projet de loi, plus particulièrement celles qui de par notre analyse sont clairement susceptibles
d'ajouter à la protection du public, entre autres celles en lien avec les
dimensions éthiques, celles ayant pour effet
d'accroître les pouvoirs du syndic ainsi que celles qui permettront aux
conseils d'administration des ordres une gouvernance à réelle valeur
ajoutée.
Cela
dit, certains éléments du projet nous inquiètent. L'objectif de l'ordre
aujourd'hui est donc de vous exprimer nos
préoccupations, confiants qu'elles pourront être entendues et générer dans la
continuité du processus les aménagements requis. J'ajouterai que cela nous apparaît parfaitement réaliste et en
résonance totale avec la perspective ministérielle telle que Mme la
ministre l'a d'ailleurs exprimée au début de cette audience, une perspective de
maintien des équilibres nécessaires au
respect de la mission des ordres, et de l'amélioration et de l'évolution du
système professionnel, et qui réitère le
principe d'autonomie des ordres, cela sachant qu'il a été garant et aura permis
l'atteinte de la raison d'être du système : la protection du
public.
L'Ordre
des ergothérapeutes s'inquiète justement du fait que certaines des
modifications proposées par ce projet de
loi risquent de miner son autonomie. Par exemple, concernant la gouvernance des
ordres, l'ordre considère que le projet de loi va plus loin que nécessaire. Notre impression est celle d'une
réponse excessive en réaction au choc sociétal du rapport de la
commission Charbonneau, qui pourtant ne visait dans ses recommandations que les
ordres du domaine de la construction.
Pour
l'Ordre des ergothérapeutes, un modèle de gouvernance adapté à chacun et
flexible est fondamental. Il permet à
l'organisation de fonctionner de la manière la plus optimale possible dans ses
choix, ses processus, ses fonctionnements ainsi que dans le partage des valeurs, des rôles, des fonctions et des
responsabilités des personnes qui la composent. La gouvernance en soi
est complexe et ne peut pas se simplifier à une recette unique.
Un
ordre professionnel, on en conviendra tous, est un type unique et particulier
d'organisation. À ce titre, il est d'autant plus important que sa
gouvernance ait un sens fort pour les personnes qui y travaillent. Ainsi, pour
que le principe d'autonomie puisse ici
s'exprimer, les choix en la matière doivent pouvoir émerger de la réflexion de
ceux qui gouvernent l'ordre. D'ailleurs, dans cette position, l'Ordre des
ergothérapeutes rejoint tout à fait celle de l'Office des professions du Québec, qui, dans son plan
stratégique récent, souhaite continuer de miser sur les fondements du
système professionnel, notamment sur
l'autogestion, afin de faire face aux défis majeurs des prochaines années, tout
en rappelant qu'une gouvernance souple et adaptée est l'un des
ingrédients pour supporter l'évolution des ordres et leur pérennité compétente. «Pérennité compétente», c'est
peut-être moi qui ai ajouté ça, mais le reste, c'est la planification
stratégique de l'office.
Alors,
de manière plus systémique, l'Ordre des ergothérapeutes croit que l'on doit
obliger une reddition de comptes valide
de cette gouvernance. Cette dernière devrait être basée sur les résultats des
ordres quant à leur accomplissement des différents pans de leur mission
et non pas sur la conformité à l'adoption d'un modèle unique et imposé.
De plus, certains aspects qui deviendraient
obligatoires en vertu du p.l. n° 98 n'auront, à notre avis, aucun effet positif, au contraire. En effet, ils placeront
notre ordre devant un exercice de réorganisation d'envergure qui nous
distraira de nos réels enjeux et mobilisera
nos précieuses ressources et énergies à se conformer à ce que l'ordre considère
non requis dans son contexte.
Vous
comprendrez aisément que l'Ordre des ergothérapeutes ne veut pas cela. Alors, Mmes, MM. les députés, Mme la ministre, M.
le président de l'office, il faut permettre à l'Ordre des ergothérapeutes de
continuer à agir et à s'autogérer en la matière.
En
toute responsabilité, l'Ordre des ergothérapeutes désire continuer de
décider en fonction de sa réalité propre la composition et le nombre maximum d'administrateurs pouvant siéger à son conseil d'administration ou de fixer, si c'est son besoin, la limite du nombre de mandats du
président par voie réglementaire, comme cela est déjà actuellement possible de le faire.
Dans le même
sens, l'Ordre des ergothérapeutes du Québec demande que soient retirées les dispositions interdisant le cumul des
fonctions de président et de directeur général, tout comme celle introduisant
au code la fonction de directeur général.
De plus,
l'Ordre des ergothérapeutes vous invite à modifier les articles 28 et 40 du projet de loi de manière à ce que soit laissé au président le pouvoir d'assurer
la surveillance générale des affaires de l'ordre. Pour un type
spécifique d'organisation comme un ordre, la
vigie du président est d'autant plus importante qu'elle ne peut pas, selon
nous, être déléguée ni transférée.
Par ailleurs,
à l'instar de nos propos sur la gouvernance, le projet de loi n° 98 aurait
avantage à miser plus justement sur
le renforcement des structures et mécanismes déjà prévus. Ainsi, cela éviterait
l'alourdissement introduit, par exemple, par l'instauration d'une mesure
voulant confier des pouvoirs supplémentaires au commissaire sans que rien ne
nous permette de croire qu'il existe un enjeu en la matière.
De plus, par
exemple, l'utilisation de résolutions par le conseil d'administration plutôt
que l'emprunt d'une voie réglementaire serait totalement suffisant à
l'adoption et aux révisions éventuelles du code d'éthique et de déontologie
applicable aux administrateurs du conseil d'administration.
Un autre
exemple probant se situe avec le comité de la formation de l'ordre. Ce comité
obligatoire a le mandat précisément de s'assurer de l'adéquation de la
formation aux compétences professionnelles requises pour l'exercice de la profession. Ainsi, aussi, s'il s'avérait
constaté une déficience dans les compétences acquises par les diplômés
d'un programme d'études qui donne ouverture à un permis de l'ordre, le comité
de la formation devrait sans aucun doute chercher
à corriger la situation, et cela, que les compétences manquantes ou
insuffisantes soient dans le domaine de l'éthique ou dans n'importe quel
autre domaine de compétence.
D'ailleurs, l'ordre est même d'avis que les
comités de la formation des ordres obligatoires devraient voir leur mandat s'enrichir de la question de la formation
d'appoint pour les candidats à l'exercice d'une profession en provenance
de l'étranger. De fait, compte tenu de la
composition de ce comité et de la nature de ses responsabilités, il appert que
cette instance constituerait un lieu
pertinent pour traiter de la question de la formation d'appoint. C'est
d'ailleurs ainsi que l'Ordre des ergothérapeutes a conclu un partenariat
avec le programme d'ergothérapie de l'Université de Montréal, au terme duquel
un programme de formation d'appoint a été mis en place.
Je terminerai
en vous remerciant de nouveau pour le temps qui nous est alloué. Et je réitère
l'appui de l'Ordre des ergothérapeutes
du Québec à cette démarche législative en ayant pleine confiance que Mmes, MM.
les parlementaires, Mme la ministre,
M. le président de l'office tiendrez compte de nos préoccupations à l'égard de
certaines modifications proposées
afin de nous mener à bon port et de préparer le chemin pour tout le reste qui
devra arriver aussi. Merci beaucoup.
Le Président (M. Ouellette) : Merci.
Mme la ministre.
Mme Vallée :
Merci beaucoup. Merci de votre présentation. Je dois vous dire... Bien, je vous
entendais, j'ai pris connaissance de
votre mémoire, puis ce que je peux constater, c'est que l'ordre s'objecte à
plusieurs... en fait, la majorité, là, des
grandes modifications qui visent la gouvernance des ordres. Vous vous objectez
à la limitation de la taille du conseil d'administration, à la limitation du pouvoir du nombre de mandats du
président, au pouvoir de surveillance générale des affaires de l'ordre au conseil d'administration, à
l'inscription des fonctions de directeur général au Code des
professions, à l'interdiction du cumul de fonctions de président et de
directeur général et à la présence d'un jeune administrateur de moins de
10 ans de pratique au conseil d'administration.
J'aimerais donc voir avec vous dans quelle mesure
l'ordre considère nécessaire de procéder à une mise à jour des
pratiques de gouvernance à l'intérieur du système professionnel, parce que la gouvernance,
elle est quand même un enjeu annoncé de la
réforme, on a eu des échanges. Alors, j'aimerais vous entendre sur cet
aspect-là, qui est quand même
non négligeable dans le projet de loi n° 98.
• (17 h 10) •
M. Bibeau
(Alain) : Alors, Mme la ministre, je comprends bien votre question. Alors, comme vous le savez, on ne s'oppose pas, par ailleurs, à une mesure de gouvernance qui, à notre avis, a une valeur ajoutée dans la perspective
de notre mission de protection du public. Et
là je fais référence à l'article qui fait en
sorte qu'il y a des candidats au conseil d'administration de l'ordre qui
ne pourront plus être candidats justement sur la base où ils présenteraient une
certaine incompatibilité dans le sens de se
retrouver autour de la table du conseil et être en conflit de mandats, donc le
mandat de la protection du public
versus le mandat d'une personne, par exemple, qui représenterait les intérêts,
les intérêts des membres. Donc, en
termes de gouvernance d'un ordre professionnel dont la mission est la
protection du public, cela est un élément de gouvernance que l'on n'avait pas, que l'on n'avait pas, les ordres ne
disposaient de cette possibilité-là de pouvoir exclure des candidats sur cette base-là, mais on comprend
bien l'importance de cette mesure-là. Et ça, c'est vraiment une mesure
utile et pertinente à une gouvernance pour un ordre professionnel qui a une
mission de protection du public. Donc, on ne s'oppose
pas à des modifications de la gouvernance qui ont un sens dans le sens de la
gouvernance d'un ordre professionnel.
Pour le
reste, la gouvernance en lien avec le nombre d'administrateurs, bien, je pense
que ça, vous l'avez bien compris,
pour nous, le nombre d'administrateurs, que ce soit 16, que ce soit 18, que ce
soit 22... je pense que ce n'est pas une
question... c'est une question de principe. Laissons les administrateurs... On
est dans un principe d'autogestion de l'ordre,
donc on fait confiance à ces administrateurs-là pour justement établir quelle
gouvernance nous sied le mieux selon notre réalité propre et selon où on est rendus
aussi. Il y a beaucoup de différences entre les ordres professionnels.
J'en ai entendu quelques-uns depuis que je
suis là, cet après-midi, et il faut convenir que, oui, on a tous la même
mission, mais on a des réalités et des perspectives professionnelles,
évidemment, qui peuvent être très différentes. Donc, laissons la gouvernance
s'adapter aux besoins de l'organisation, sans jamais perdre de vue qu'on a tous
la même mission.
Mme Vallée :
Mais justement les experts de la gouvernance nous disaient et nous expliquaient
qu'il est important d'avoir... pour avoir une meilleure dynamique au
sein d'un conseil d'administration, il est important de ne pas avoir trop de joueurs autour de la table, pour assurer, entre
autres, une meilleure appropriation du rôle, des responsabilités du conseil d'administration. Et d'ailleurs
il y a certains ordres qui ont apporté d'eux-mêmes les modifications en cours
de route. Certains... L'Ordre des ingénieurs mentionnait souhaiter ces
modifications-là, apporter ces modifications-là.
Donc, dans
votre réalité, vous avez actuellement 18 administrateurs. Comment se vit
votre réalité actuellement autour de la table du conseil
d'administration? Et qui sont ces administrateurs autour de la table?
M. Bibeau
(Alain) : Alors, actuellement, à l'Ordre des ergothérapeutes, il y a
13 administrateurs élus, donc, sur la base
régionale, donc sur une représentativité régionale. Il y a un président qui est
de la profession aussi et il y a quatre administrateurs nommés par l'Office
des professions.
Et je vous
dirais qu'on a revu notre gouvernance, il y a quelques années, notamment au
niveau de la distribution régionale
de nos membres autour de la table pour qu'elle reflète mieux la répartition
régionale des ergothérapeutes en exercice
dans l'ensemble des régions du Québec. Alors, ça, on a fait ça, ce qui nous a
amenés, par exemple, à diminuer le nombre
de représentants de la région de Montréal au profit des régions plus de la
couronne nord et de la couronne sud de Montréal. Donc, cette
réflexion-là de gouvernance par rapport à une représentativité régionale, on
l'a faite.
Écoutez, ça
n'a jamais été un enjeu, au niveau du conseil, que l'on soit 18 autour de la
table, par rapport à une préoccupation d'efficience ou d'efficacité. Je
pense qu'il y a autre chose que le nombre d'administrateurs qui fait qu'un conseil va être efficient et que chacun va
pouvoir apporter sa valeur ajoutée au sein des discussions. Et, dans
cette perspective-là, donc, le conseil est tout à fait à l'aise de la façon
dont est répartis actuellement.
Et on le
disait aussi, je le disais aussi d'entrée de jeu, il ne faut pas oublier qu'actuellement le code nous permet de mettre un maximum d'administrateurs au
sein de l'ordre, et ça n'a jamais été requis par notre ordre.
Donc, la disposition législative ou réglementaire, elle existe déjà.
Donc, les ordres qui auraient voulu, antérieurement au projet, diminuer le nombre d'administrateurs
sur la base d'une efficience améliorée auraient pu le faire, auraient pu
le faire, tout à fait.
Mme Vallée : Le temps file. Dans votre présentation, dans votre mémoire, vous mentionnez
que, bon, vous vous objectez au
partage des fonctions de président et de directeur général. Pour vous, il ne
devrait pas y avoir d'obstacle au cumul
de ces fonctions-là. Et, selon votre mémoire, cette décision-là de permettre le
cumul des postes, elle a été prise suite à une longue réflexion de votre
conseil d'administration.
Donc,
pourriez-vous nous indiquer, dans le cadre de votre réflexion, quels ont été
les avantages, les inconvénients que vous avez identifiés? Et qu'est-ce
qui vous a amenés à nous présenter cette vision-là, cette proposition-là?
M. Bibeau (Alain) : D'abord, je
reviens sur la notion... On ne dit pas que d'avoir un président et un directeur
décider ce qui est requis pour l'ordre.
Et effectivement vous avez raison, Mme la
ministre. Moi, quand je suis arrivé, il y a un peu plus de cinq ans, l'ordre venait d'adopter un nouveau plan
d'organisation et avait révisé sa gouvernance, étant antérieurement,
justement, dans un modèle avec un directeur
général... ou avec une directrice générale, à l'époque, et une présidente,
pendant plus de 20 ans, depuis
toujours. Et cette décision-là a été prise en toute connaissance de cause.
L'ordre s'est même fait accompagner, là, d'experts en gouvernance pour
justement faire les bonnes réflexions et prendre les bons choix. Évidemment, ce
n'est pas une recette. Évidemment, il n'y a pas de modèle parfait. Mais les
risques, et les avantages, et les inconvénients de l'un et de l'autre ont été
pesés, soupesés par le conseil. Et cette dimension-là de cumul de la fonction de président et de directeur général ne
peut pas être regardée de manière isolée, en soi. Et le conseil, en
toute compétence, a regardé les éléments de risque avec une structure comme
celle-là et l'a mitigé par d'autres décisions, évidemment.
Notamment, à
l'époque, le conseil s'était doté d'un plan d'organisation où on s'était assuré
d'avoir des piliers très forts au
niveau, par exemple, de la direction de l'exercice, au niveau du secrétariat
général, où on a une ergothérapeute qui est secrétaire générale, à l'ordre, ce qui n'est pas le cas dans
beaucoup d'ordres. On s'est donné des structures solides autour, sachant qu'il y avait un risque d'avoir, par exemple,
un président-directeur général élu au suffrage universel qui, si jamais,
par exemple, il n'était pas élu, bien, on se
retrouvait avec deux sièges vides, pour le dire comme ça, au sein de
l'ordre, donc l'expertise d'un président et
l'expertise d'un directeur général qui, du coup, part sur la base de l'élection
présidentielle. On avait mitigé... Le
conseil a souhaité mitiger ce risque-là justement en ayant une structure
d'organisation et des piliers très solides pour... advenant que le
risque s'avère.
Mais je veux
revenir sur le principe que c'est vraiment le conseil d'administration qui a
assuré la gouvernance et qui a pris la décision dans ce sens-là.
Est-ce
que la gouvernance de l'ordre décidera quelque chose d'autre demain matin, l'an
prochain, dans cinq ans? Je vous
dirais qu'actuellement on vient de terminer une planification stratégique qui
ne nous a pas amené cet enjeu-là, l'enjeu de gouvernance par rapport au
rôle de président ou directeur général. Ce n'est pas un enjeu, pour l'ordre, actuellement. Donc, dans notre contexte à nous,
qu'on vienne obliger ça, c'est sûr que, comme je le disais bien, ça
vient nous dévier de nos grands enjeux qu'on a identifiés
dans notre planification stratégique en lien avec notre mission de protection
du public.
Je pense que Mme
Tremblay voulait... Non? D'accord. Je ne sais pas si je suis clair, Mme la
ministre, ou...
• (17 h 20) •
Mme
Vallée : Bien, en fait, c'est assez particulier, parce que
l'ordre est quand même... Vous êtes quelques-uns encore à permettre ce cumul des fonctions là et à cumuler, dans les
faits, ces fonctions-là. Les gens ont plutôt... Les ordres ont plutôt opté
vers d'autres façons, d'autres formes de gouvernance. D'ailleurs,
l'Ordre des chimistes, qui est un petit ordre, nous disait : Bien,
nous, on a adapté, on a modifié tout ça et on considère que la dynamique au
sein du conseil d'administration s'en est trouvée améliorée, grandement améliorée.
Alors, c'est pour ça que c'est quand
même un peu surprenant, puisque...
Et aussi tous les experts en matière de gouvernance nous disent : Très important
d'assurer cette distinction entre les fonctions de directeur général et de
président, puisque la mission n'est pas la même. La direction générale administre vraiment l'administration des affaires courantes de l'ordre, et la présidence a des fonctions
autres.
M.
Bibeau (Alain) : Mme la ministre, si vous permettez, c'est certain qu'il y a un enjeu de
séparation des rôles, des fonctions et des pouvoirs, hein? Ça, je pense
que ça a été bien identifié par notre conseil aussi.
En même temps, comme je vous disais, on a mis des mesures en place, le conseil a mis
des mesures en place pour mitiger l'ensemble des risques, et, au niveau
de la gouvernance, on s'est dotés notamment... Nous, on a décidé de poursuivre avec notre comité exécutif. On a un
comité des ressources humaines qui a été créé et un comité d'audit et de finances qui a été créé, des comités de gouvernance
au sein de l'ordre, et notre comité exécutif a aussi eu la... a la responsabilité
de jouer le rôle de comité de gouvernance de l'ordre.
Donc,
évidemment qu'on s'est assurés, là, de ne pas prendre une décision isolée de
tout l'ensemble de l'organisation, parce que la gouvernance, ce n'est pas un
élément isolé, c'est l'ensemble de l'oeuvre, je pense, qu'il faut
regarder. Et ça, les ergothérapeutes, on est très bons là-dedans.
Ça, c'est peut-être une déformation professionnelle, on a besoin d'avoir beaucoup de pragmatisme et
d'avoir une vision et une compréhension globale de l'ensemble
des choses, alors c'est sûr que ça
s'applique aussi dans un contexte où on a à réfléchir la gouvernance. Et on est
dans une approche holistique. Et, pour nous, la gouvernance, un peu comme
l'éthique, ça demande une réflexion, il n'y a pas de recette, et ça peut
évoluer dans le temps. Et il y a des risques, et il faut trouver des manières
de les mitiger, parce qu'il n'y a pas de choix parfait.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
Vallée : J'aimerais
vous entendre rapidement sur votre préoccupation à l'effet
de modifier la constitution du conseil d'administration pour ajouter la présence d'un professionnel
de moins de 10 ans d'expérience. On ne parle pas de jeune en âge
mais de jeune en expérience.
M. Bibeau
(Alain) : Je vais laisser Mme Tremblay...
Le Président (M.
Ouellette) : Mme Tremblay.
Mme
Tremblay (Louise) : En fait,
ce n'est pas un enjeu, à l'Ordre des ergothérapeutes, O.K., on
s'entend, là, ce n'est pas un enjeu. Depuis au moins 15 ans, il y a
toujours eu des jeunes, et voulant dire... comme vous dites, pas nécessairement
en âge, là, on a tendance à assimiler moins de 10 ans d'inscription au
tableau avec 35 ans d'âge, là, mais...
L'un dans l'autre, là, c'est vrai que c'est la réalité, la plupart du temps,
mais quand même. Et ce n'est pas un enjeu, donc, pour
l'ordre.
La
question tourne davantage autour de... Advenant que cette situation-là
surviendrait, à l'ordre, où il n'y
aurait pas de jeune administrateur élu. La logistique de ça, la dynamique du
conseil d'administration, où on devra former un administrateur... un, le chercher, deux, le nommer, le former, et qui va
changer au bout d'un an, en fait, cet administrateur-là n'atteindra jamais son plein potentiel, jouer un
rôle probant au sein du conseil d'administration, parce que nos mandats,
à l'Ordre des ergothérapeutes, sont d'une
durée de trois ans, là, pour les administrateurs. Alors, on pourrait être
amenés à changer à chaque année, donc à
former constamment. Ce n'est pas le cas à l'ordre, je le dis, c'est plus... on
l'a regardé d'une manière plus systémique, là.
Mme Vallée :
Donc, c'est plutôt le fait d'avoir un mandat limité.
M.
Bibeau (Alain) : C'est le principe, le principe de dire : Bon...
Et Dieu sait que, l'Ordre des ergothérapeutes, 45 % des ergothérapeutes, au Québec, ont moins de 35 ans. Et des
jeunes, dans l'organisation de l'ordre, on en a beaucoup sur l'ensemble de nos comités, que ce soit en
inspection, que ce soit à la formation continue. La place des jeunes est
là. D'ailleurs, au sein du conseil, je pense
qu'on en a trois, actuellement, qui répondent au critère qui est suggéré dans
le p.l. C'est la question de principe, de dire... Bon, on n'est pas
contre les jeunes, loin de là. Est-ce qu'on va inclure des jeunes? Et
pourquoi des jeunes et pas plutôt la parité
hommes-femmes, et pas plutôt des clientèles d'autres minorités ou des...
On devient... À un moment donné, on va avoir une représentation qui va se baser
sur...
On
est un conseil d'administration d'un ordre professionnel. Quand les gens
arrivent autour de la table, c'est pour leur compétence d'être capable de s'élever au-dessus de la mêlée et,
justement, pouvoir gérer l'ordre de manière... avec une gouvernance qui fait du sens, pour justement
protéger le public. On est quand même une organisation particulière où,
nos membres, on n'est pas là pour eux, ultimement, hein, on n'est pas là pour
eux, ultimement.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jean : Merci. Alors, bienvenue,
M. Bibeau, Mme Tremblay, Mme Fortier. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Merci pour le mémoire et pour vos commentaires.
Un des enjeux auquel fait face ou auquel veut
répondre le projet de loi n° 98 est certaines lacunes ou un certain manque de confiance du public vis-à-vis
les ordres professionnels. Ce manque de confiance là peut exister par le
manque de transparence où il y a, justement,
le système de gestion ou l'encadrement de la gérance ou de la gestion
des ordres professionnels. Plusieurs des
articles ou des propositions visent justement à encadrer de manière à ce qu'on
puisse regagner une confiance élevée de la part du public.
Vous dites que vous n'avez pas besoin de cet
encadrement-là. La flexibilité vous permet de fonctionner, actuellement, et
vous fonctionnez bien.
Ce matin, on a quand même eu le témoignage d'un
ordre professionnel qui... Ils se sont retrouvés dans des situations non désirables, si je peux m'exprimer
ainsi, qu'ils auraient voulu éviter. Et le témoignage était intéressant
dans le sens que, eux, ce qu'ils nous
disaient, c'est que, si l'encadrement, tel qu'il est proposé dans le projet de
loi, avait existé, la situation dans laquelle ils ont été, qu'ils ont
fait face, n'aurait pas existé, ne serait pas survenue.
Donc, l'idée
d'avoir des encadrements comme ça, proposés par le projet de loi n° 98,
selon vous, est-ce que vous pensez
qu'effectivement ça peut aider les ordres à assurer une transparence ou à
regagner la confiance du public vis-à-vis ces ordres-là?
M. Bibeau
(Alain) : Écoutez, je ne connais pas la situation particulière à
laquelle vous faites référence, donc c'est difficile pour moi de porter
un regard là-dessus.
En même
temps, vous avez raison, la confiance du public, c'est un enjeu du système
professionnel, c'est un enjeu des ordres, c'est un enjeu de l'Ordre des
ergothérapeutes du Québec.
Alors, clairement, à mon avis, le public, et on
l'a vu, hein, dans certains sondages, le public comprend mal la mission des ordres, le public ne comprend pas que
l'ordre est là pour le protéger exclusivement et nous apparente souvent
à une association ou à une instance qui est là pour l'intérêt de ses membres,
ce qui n'est pas le cas. On a clairement, clairement un déficit d'information
ou de pédagogie envers le public, et je pense que ça, c'est important. Et ça,
c'est un enjeu important.
Est-ce que
des mesures comme celles dans le p.l. n° 98 peuvent répondre à ça?
Certainement certaines. Quand je parlais
tantôt d'avoir des gens, au sein du conseil d'administration, qui ne sont pas
en conflit de missions, déjà, si on peut réaliser ça, on s'évite
d'immenses problèmes.
En même temps, par rapport à la confiance du
public, moi, je pense qu'il faut saluer l'exercice pédagogique notamment qui se fait avec le Conseil
interprofessionnel et qui veut justement informer le public. Ordre de protéger,
c'est notre mission. Et je pense qu'il faudra mettre des énergies, au cours des
prochaines années, pour enrichir cela. D'ailleurs, l'office, dans sa
planification stratégique — que
j'ai lue avec attention, Me Dutrisac, comme vous pouvez le constater — a aussi
identifié cet enjeu-là de confiance du public par rapport aux ordres et au
système professionnel.
Et en même
temps je pense qu'on peut être pessimiste par rapport à la confiance du public,
parce que c'est vrai que, quand on
les questionne par sondage, le taux de compréhension de ce que les ordres font
et c'est quoi, la mission n'est pas
très grand, mais en même temps rappelons-nous que, quand on questionne ces
mêmes personnes là, elles ont confiance énormément dans les professionnels qui sont membres de nos ordres et qui
exercent la profession. Alors, je
pense qu'on peut tabler sur cela, parce que
la protection du public, oui, c'est la mission de l'ordre, mais la protection
du public, ne l'oublions pas, ne se
fait que par l'exercice quotidien, dans un souci de compétence et d'intégrité,
de l'ensemble de nos membres, c'est
eux qui sont directement avec le public. Et, nonobstant que ce soit un
enjeu pour l'ordre, je pense que la population a clairement confiance
dans les professionnels qui exercent dans les professions réglementées.
• (17 h 30) •
Mme
Jean : Donc, oui, ce sont les professionnels qui donnent confiance,
mais en même temps l'ordre est là pour assurer que les professionnels
continuent à bien faire leur travail.
M. Bibeau (Alain) : Oui, je suis
d'accord avec vous, on peut être meilleurs, on peut être meilleurs dans cela.
Et je souhaite qu'on le soit, d'ailleurs.
Mme Jean : Je comprends... Dans
votre introduction, vous parliez que vous étiez d'accord à augmenter les
pouvoirs du syndic. Quels sont les pouvoirs supplémentaires auxquels vous êtes
d'accord?
M. Bibeau
(Alain) : Bien, notamment, par exemple, ceux en lien avec la
possibilité, pour les syndics de différents ordres, d'échanger de
l'information. Il y avait peut-être... Me Fortier, est-ce qu'il y a des...
Mme Fortier
(Caroline) : Il y avait également la question, évidemment, de la
limitation de suspension en cas d'infraction
potentielle à une... une infraction criminelle punissable par cinq ans
d'emprisonnement. Donc, c'était dans ce sens-là qu'on le voyait, et non
pas quelque chose qui ne fait pas déjà partie du projet de loi.
Mme Jean :
D'accord. On parlait, tout à l'heure, de l'article qui propose la nomination
d'un jeune au conseil d'administration, qui
se décline peut-être en diversité ou en représentativité sur un conseil
d'administration, et effectivement vous avez soulevé le sujet de la
parité ou, je dirais, le déficit, souvent, hommes-femmes qui se retrouve au
sein des conseils d'administration. Est-ce que vous, à
l'Ordre des ergothérapeutes, vous avez des politiques pour assurer une certaine
diversité, pour que justement un conseil d'administration puisse être le plus
efficace possible?
M. Bibeau
(Alain) : Hommes-femmes? Dans cette perspective-là?
Mme Jean :
Hommes-femmes.
M. Bibeau
(Alain) : Écoutez, la profession est en majorité féminine. 92 %
des ergothérapeutes... Je ne me trompe pas, Mme la secrétaire générale?
Mme Tremblay
(Louise) : Presque 93 %.
M. Bibeau
(Alain) : Presque 93 % des ergothérapeutes sont des femmes.
Alors, moi, je veux bien la parité hommes-femmes, tout à fait, je suis d'accord
avec ça...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Bibeau
(Alain) : ...mais je vous dirais que ce n'est pas un enjeu pour... et
ce n'est pas un enjeu dans la culture de
la profession. Moi, je suis un homme. Comme président-directeur général de
l'Ordre des ergothérapeutes du Québec, ça n'a jamais été une préoccupation, dans ma tête, que je suis un homme, c'est
quelque chose qui n'est pas possible. Dans la culture de la profession,
ce n'est pas un enjeu, d'être un homme ou d'être une femme.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme Tremblay, vous avez un commentaire
additionnel?
Mme Tremblay
(Louise) : Oui. Si je peux me permettre, actuellement le code ne
permet pas de représentativité autre
qu'une représentativité régionale. Ce sont des membres élus, donc, qui se
présentent volontairement, qui sont appuyés par cinq autres de leurs collègues. Ça se limite à ça. On n'a aucun
pouvoir pour décider de privilégier, réserver un siège supplémentaire à
un homme, ou à un jeune, ou à qui que ce soit.
Alors,
on se fie à l'intérêt de nos membres. Bien sûr, on a 93 % des membres qui
sont des femmes, mais vous seriez étonnés
de voir la composition de notre conseil d'administration, il y a quand même pas
mal d'hommes malgré tout... qui sont en surreprésentation, je dirais.
Mme Jean :
Est-ce que vous avez, vous... vous êtes ouverts à des profils de compétence
pour siéger sur un conseil d'administration d'un ordre professionnel?
Avez-vous déjà pensé à ça?
M. Bibeau
(Alain) : Je vais laisser Mme la secrétaire générale...
Le Président
(M. Ouellette) : Mme Tremblay.
Mme Tremblay
(Louise) : Oui. D'ailleurs, c'est quelque chose qu'on a cherché à
faire lorsqu'on a modifié... Au début
des années 2010, on a modifié notre règlement sur les élections et le
fonctionnement. On a cherché à avoir une façon d'établir des critères d'éligibilité, je vais le dire comme ça, mais, le
code ne le permettant pas, on a été obligés de se limiter à la
représentation... représentativité régionale.
Mais
certainement parce que, soyons honnêtes et réalistes, les membres des ordres
professionnels qui deviennent administrateurs élus ne sont pas des
administrateurs, parce qu'ils ne proviennent pas d'une profession de ce
domaine. Les ergothérapeutes sont des
ergothérapeutes, ce sont des... 85 % des ergothérapeutes sont des
cliniciens. Leur expérience de
gestion d'un organisme n'est pas là, à la base, là, on peut le présumer, en
tout cas pour la majeure partie d'entre eux.
Toutefois, depuis qu'il y a la formation qui est
donnée par le Conseil
interprofessionnel du Québec, depuis
plusieurs années, pour les nouveaux
administrateurs, tous nos administrateurs doivent suivre... sont invités très, très, très fortement à suivre cette formation. L'ordre s'est également
doté de politiques de gouvernance et d'un code d'éthique des administrateurs,
d'un document sur les rôles et les responsabilités des administrateurs. Il y a un processus d'accompagnement, d'évaluation, etc. Alors, tout ça fait en sorte de
soutenir le développement des administrateurs. Et, lorsqu'ils sont engagés au
sein de comités, comme le comité exécutif,
comité des ressources humaines, comité d'audit et des finances, ils sont également
soutenus pour de la formation additionnelle pour être en mesure de jouer leur
rôle de manière plus appropriée.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
Oui. M. Bibeau, Mme Tremblay, Me Fortier, bonjour. Vous êtes le
dessert, aujourd'hui, comme on dit.
M. Bibeau
(Alain) : J'espère que vous avez une dent sucrée.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Jolin-Barrette : À votre recommandation 9, vous nous dites,
bon : Le directeur général, on souhaiterait que ce soit retiré. Par
contre, si on le conserve, on souhaite que ce ne soit pas aux deux tiers.
Vous souhaiteriez, dans le fond, qu'il n'y ait
pas de... bien, en fait, que ce ne soit pas une majorité qualifiée de deux
tiers, que ce soit simplement une majorité simple pour le destituer?
M. Bibeau (Alain) : C'est ça.
C'est ce qu'on a dit, absolument, oui. C'était ça, la question, là?
M. Jolin-Barrette : Oui, bien,
c'était une question...
M. Bibeau (Alain) : O.K.
Parfait. O.K.
M. Jolin-Barrette : Mais
pourquoi est-ce que vous ne voulez pas avoir le directeur général qui soit
identifié?
M. Bibeau (Alain) : Qu'il soit
identifié au code?
M. Jolin-Barrette : Oui, au
code.
M. Bibeau
(Alain) : Bien, je pense qu'on l'a expliqué dans notre mémoire. Pour
nous, ce n'est pas une fonction qui devrait
être au code. Si on l'oblige dans l'organisation des ordres, bien, c'est un
poste qui a un caractère, évidemment, administratif. Donc, pourquoi
ajouter au code une personne qui a des fonctions exclusivement administratives,
contrairement à un syndic ou un secrétaire général, pour lesquels on comprend
bien leur désignation au code et leur nécessité d'indépendance dans leurs
fonctions par rapport, justement, à la présidence et à la direction générale,
et de l'obligation, pour démettre de ces gens-là, d'avoir un vote aux deux
tiers des membres du conseil d'administration?
Donc, pour
nous, le directeur général ne doit pas apparaître au code. Et, s'il y a lieu,
il devrait y avoir des politiques, justement,
de gestion des ressources humaines. Et il y a d'autres lois qui encadrent le
travail qui permettraient, si jamais, au
lieu d'une destitution au code, il y a un licenciement du directeur général qui
doit se faire, bien, que ça se fasse selon ces balises-là, et qu'on ne
vienne pas introduire au code nommément le directeur général.
M. Jolin-Barrette : Parfait.
M. Bibeau (Alain) : Je ne sais
pas si je suis clair ou...
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est
très clair.
Pour ce qui est de la question de l'assemblée
générale annuelle des membres, vous dites : Pour le choix des vérificateurs, ça devrait peut-être relever du
conseil d'administration. Là, j'aurais tendance à vous dire : Déjà, on
enlève deux des trois pouvoirs à l'assemblée générale annuelle. Des fois, c'est
difficile d'avoir quorum dans une assemblée générale annuelle. Comment on va
réconcilier tout ça, là?
M. Bibeau
(Alain) : Oui, bien, je vous dirais que le projet aurait peut-être dû
proposer celui-là en premier, dans le sens
où, écoutez, quand on connaît la réalité des ordres, des assemblées générales
annuelles... Et ce n'est même pas la nomination,
dans le code, hein? Si on retourne au code, on parle de l'élection des
vérificateurs de l'ordre. Alors, c'est complètement...
Même, dans les faits, ça ne se fait pas. Je ne pense pas qu'il y ait un ordre
qui, en assemblée générale, demande à son AGA d'élire, d'élire les
vérificateurs.
Non, écoutez,
je pense que, dans la perspective où... au niveau de la gouvernance, vraiment,
les personnes qui sont capables de
choisir, de nommer des vérificateurs, c'est vraiment une responsabilité du
conseil. Et d'ailleurs nous, on vient justement de faire l'exercice, au
niveau de notre comité de gouvernance, d'audit et de finances, de rechercher
sur le marché une firme, justement, d'auditeurs, et c'est les membres du
conseil qui font le choix final.
Et l'AGA ne peut pas porter un regard compétent
sur l'élection des vérificateurs de l'ordre. Alors, dans cette perspective-là, on a dit : Tant qu'à enlever
les deux autres éléments, bien, enlevons celui-là, qui d'emblée ne fait pas
de sens et n'en fait pas actuellement, là.
• (17 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Mais la
question qui se pose... Dans le fond, le conseil d'administration supervise, là, dans le fond,
regarde les décisions qui sont prises par la direction générale, évalue la gestion générale des décisions qui sont
prises à l'intérieur de l'ordre, regarde
également la gestion financière de l'ordre. Et là, si c'est le C.A. qui fait
tout ce travail-là, puis qu'en plus
il désigne les vérificateurs généraux, les membres, là-dedans, vont se
retrouver dans une situation où ils vont dire : Bien, comment je fais pour peut-être avoir un petit peu de
contrôle sur le C.A.? Le seul bout que j'avais, c'était la cotisation
puis peut-être l'élection des vérificateurs.
M. Bibeau
(Alain) : C'est certain qu'il y a un enjeu à ce niveau-là, mais, dans
l'état actuel des AGA... J'entendais tantôt
quelqu'un qui m'a précédé parler de la représentativité, pour reprendre ce
mot-là, des membres à l'AGA. Chez nous, je vous dirais que c'est 1/2 de 1 % de l'ensemble du membership qui
peut se retrouver en AGA pour qu'on ait quorum. Alors, il est certain que la place des membres dans l'administration ou
la gouvernance des ordres, elle s'exprime ailleurs qu'à l'AGA, à mon avis. Et elle s'exprime
notamment par l'élection des administrateurs au niveau régional et
l'élection à la présidence. Chez nous, le choix a été fait que l'élection à la
présidence, direction générale pour notre cas, se fait au suffrage universel des membres. Alors, chaque
membre, peu importe sa provenance et sa région, est habilité à voter,
donc. Et c'est ça, un système de
gouvernance : les membres font confiance aux administrateurs élus pour
bien gérer l'organisation et prendre les meilleures décisions possible.
Vous parliez
de la cotisation, tantôt, qui est la prérogative de l'AGA jusqu'à aujourd'hui.
En même temps, c'est une prérogative limitée parce que, l'administration
de l'ordre, le conseil d'administration, s'il devait, sur la base d'un besoin de ressources financières pour protéger le
public, aller chercher une cotisation spéciale, le code le prévoit déjà,
le code le prévoit déjà, nonobstant le vote ou pas de l'assemblée générale
annuelle. Donc, c'est un demi-pouvoir, dans le sens où...
Mais en même
temps je suis conscient... Puis ça, c'est un enjeu. Tantôt, on parlait de
l'enjeu de la protection, de la confiance
du public, mais celui-là aussi, au niveau des membres, il y a un enjeu de
communication avec les membres pour qu'ils
comprennent bien notre mission, notre prérogative, qu'on n'est pas là pour eux
mais qu'en même temps on fait pour les
soutenir dans un exercice compétent et intègre. Alors, ça, il y a un enjeu à ce
niveau-là, et clairement, actuellement, les AGA ne répondent pas à cela.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, M. Bibeau. M. Alain Bibeau, Mme Louise Tremblay,
Me Caroline Fortier, représentant l'Ordre des ergothérapeutes du
Québec, merci d'être venus déposer en commission aujourd'hui.
La commission
ajourne ses travaux au mardi 20 septembre 2016, après les affaires
courantes, soit vers 15 heures, où elle poursuivra son mandat.
Merci, Jad, de votre présence en commission avec nous.
(Fin de la séance à 17 h 43)