(Quinze heures trente-six minutes)
Le
Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il
vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions
publiques relatives à l'étude du rapport sur la mise en oeuvre du Code d'éthique
et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Boucher (Ungava) est remplacé par Mme Nichols
(Vaudreuil); M. Rousselle (Vimont) est remplacé par M. Sklavounos
(Laurier-Dorion); Mme Hivon (Joliette) est remplacée par
M. Drainville (Marie-Victorin); et Mme Roy (Montarville) est
remplacée par M. Charette (Deux-Montagnes).
Le Président (M. Ouellette) :
Merci. Je vous rappelle que la commission a d'abord entendu Me Jacques
Saint-Laurent, Commissaire à l'éthique et à la déontologie, ainsi que
M. Claude Bisson, jurisconsulte de l'Assemblée nationale, le
26 mai et le 3 juin 2015.
Nous
entendrons cet après-midi M. Michel Dion, professeur à l'Université
de Sherbrooke, ainsi que M. Thierry Pauchant, directeur de la Chaire de management éthique aux HEC à
Montréal. Ce soir, nous entendrons le Commissaire au lobbyisme.
Auditions
Je souhaite
la bienvenue à M. Dion, qui est professeur à l'Université de Sherbrooke,
comme je l'ai mentionné. Et je vous
dirais que, dans d'autres temps, on m'a dit que c'était une des meilleures
universités qu'il n'y avait pas au Québec, mais je ne ferai pas de
publicité aujourd'hui. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé.
Et, pour le
bénéfice des collègues, j'ai eu une discussion avec M. Dion en vous
attendant, et M. Dion me faisait remarquer
que la salle Papineau regorge d'écrits sur les murs qui sont applicables au
code d'éthique. Et je pense que, sur le temps de la présidence,
M. Dion, vous pourriez commencer avec ce que vous m'avez partagé.
Vous avez
10 minutes pour votre présentation, et après il va y avoir une période
d'échange avec les députés du parti ministériel et les députés de
l'opposition. M. Dion, à vous.
M. Michel Dion
M. Dion (Michel) : Merci, M. le
Président, et merci à tous les membres de la commission de bien vouloir
m'accueillir cet après-midi.
Donc,
d'entrée de jeu, je mentionne que le regard que je porte sur le rapport du
commissaire est le regard d'un éthicien. Bien sûr qu'il y a d'autres
regards possibles, mais c'est le mien, celui de l'éthique des organisations.
Donc, ce dont
j'ai fait état au président de cette commission, c'est que, derrière moi, il y
a une affiche qui traite des fonctions du député. Nous retrouvons
effectivement deux des fonctions qui sont dans le premier «attendu» du code d'éthique, soit l'adoption des lois et règlements
et le pouvoir de surveillance sur tout acte du gouvernement. C'est ce
que l'on retrouve affiché derrière moi. Mais
il y a une autre fonction importante du député qui est là, et c'est représenter
les meilleurs intérêts des Québécois. Or, ça n'apparaît pas dans le premier
«attendu» du code d'éthique. Ça pourrait très bien
s'y retrouver, étant donné qu'une des valeurs de l'Assemblée nationale, c'est
de s'engager pour l'amélioration des conditions
sociales et économiques des Québécois. Donc, c'est effectivement cet ajout qui
pourrait facilement se faire, mais nous aurons l'occasion probablement
d'en reparler.
Alors, je
vais insister sur trois points particuliers. D'abord, le manquement aux valeurs
de l'Assemblée nationale, ensuite l'exercice d'une autre fonction par un
parlementaire et la fiducie sans droit de regard.
Donc,
premièrement, le manquement aux valeurs de l'Assemblée nationale. Dans son
rapport, le commissaire précise que
son intervention quant à l'application des valeurs de l'Assemblée nationale
constitue une mesure partielle qui ne correspond pas aux mécanismes qui
sont mis en place en droit du travail. Si rien n'est prévu dans le code pour
une situation donnée, le commissaire
pourrait donc décider s'il s'agit d'un manquement aux valeurs de l'Assemblée
nationale. Le cas du harcèlement est particulièrement éloquent.
• (15 h 40) •
Je mentionne
en passant — nous
aurons peut-être l'occasion d'en discuter — que les motifs de harcèlement sont
les mêmes ou devraient toujours être les
mêmes que ceux pour la discrimination. Le comportement, cependant, est
différent. Mais, s'il y a quelque liste de
motifs de harcèlement à élaborer, elle devrait être identique à celle des
motifs de discrimination.
Le commissaire recommande, et nous ne pouvons
qu'appuyer cette recommandation n° 2, que les membres de l'Assemblée
nationale procèdent à un examen sur la pertinence de prévoir des mesures législatives
en matière de harcèlement
dont pourraient être victimes les députés, les membres du Conseil exécutif et
les membres de leur personnel. Si une
enquête devait être faite à cet égard sans qu'il y ait un article prévoyant
le cas de harcèlement, le commissaire n'aurait en main qu'un seul
outil : le manquement aux valeurs de l'Assemblée nationale.
Puisque les
valeurs ont un contenu éminemment flou que seules des règles précises de
comportement permettent de circonscrire, n'y a-t-il pas là un danger de
tomber, en toute bonne foi, dans une interprétation soit trop large, soit trop
restrictive du contenu de telle ou telle valeur présentée à l'article 6 du
code? Ce danger est d'autant plus grand que «le commissaire peut, de sa propre
initiative et après avoir donné par écrit au député un préavis raisonnable,
faire une enquête pour déterminer si
celui-ci a commis un manquement au présent code», article 92 du code. Et
cela inclut, selon le commissaire, tout manquement aux valeurs de l'Assemblée
nationale.
Il est intéressant de noter que, dans la période
du 6 janvier 2011 au 31 décembre 2014, aucune demande en provenance
d'un membre de l'Assemblée nationale ne référait aux valeurs de l'Assemblée
nationale. Pourquoi alors le commissaire
devrait-il avoir le pouvoir de faire enquête sur un manquement aux valeurs de
l'Assemblée nationale? Ou bien les valeurs sont parfaitement limpides dans
l'esprit de tout le monde, dans leur application, ce qui est très rare,
en fait, ou bien ces valeurs propres à l'Assemblée nationale devraient être mieux expliquées par le commissaire avant même
que celui-ci puisse justifier pouvoir faire enquête sur un manquement aux
valeurs.
Tout manquement aux valeurs d'une organisation
comme l'Assemblée nationale tombe dans la sphère de l'éthique. L'éthique est une question de valeurs. Lorsque l'on veut définir ces valeurs
qui orientent le comportement éthique, on
définit des normes précises de comportement, qui, elles, sont habituellement comprises sous le vocable «déontologie» et qui sont, selon le cas, plus ou moins collées aux
textes juridiques pertinents. Le Commissaire à l'éthique et à la
déontologie accomplit des tâches proprement
éthiques quand il se préoccupe du respect des valeurs de l'Assemblée nationale, mais encore faut-il que ces
valeurs soient suffisamment claires et bien comprises pour concrètement
orienter le sens à donner à telle ou telle norme de comportement prévue
dans le code d'éthique.
Second
sujet : l'exercice d'une autre fonction. Dans son rapport, le commissaire
fait une recommandation à l'effet que les membres de l'Assemblée nationale
procèdent à un examen, au regard des principes éthiques et des règles déontologiques établies par le code, de la
pertinence de maintenir la possibilité pour les députés d'exercer simultanément
plus d'une fonction. Le raisonnement du commissaire s'effectue à trois niveaux.
Premièrement, l'argument pragmatique. Les
députés sont de plus en plus sollicités pour porter assistance aux personnes et
aux groupes qui demandent leur aide dans leur rapport à l'État. Le temps
disponible diminue d'autant, évidemment, pour les députés. Deuxième argument :
l'argument éthique. Le risque d'être placé dans une situation
de conflit d'intérêts
est inévitablement plus important quand il
y a cumul de fonctions. Troisième
argument, celui des contraintes professionnelles.
Et je cite le commissaire : «...il faut tenir compte des contraintes
résultant de l'application de certaines lois professionnelles au sujet
du maintien du droit de pratique, pour la période pendant laquelle ils siègent
à l'Assemblée nationale.»
Quand le commissaire fait sa recommandation
n° 3, il démontre qu'il ne prend position ni pour l'argument pragmatique, le premier, ni
pour l'argument éthique, ni pour l'argument contraintes professionnelles. Quel
message le commissaire lance-t-il implicitement par sa recommandation
n° 3, compte tenu qu'il n'affirme pas qu'un des trois arguments lui apparaît avoir plus de poids que les
deux autres, quitte à laisser évidemment les membres de l'Assemblée nationale
débattre de la question? Le
Commissaire à l'éthique et à la déontologie considère-t-il que ces trois
arguments ont le même poids ou bien croit-il
que ce n'est pas dans sa tâche de suggérer aux membres de l'Assemblée nationale
l'argument qu'il considère, en tant que
Commissaire à l'éthique et à la déontologie, comme étant plus important
que les deux autres arguments? Son silence nous laisse perplexes.
Les membres
de l'Assemblée nationale auront à débattre de la question,
évidemment, entre eux. Il est cependant pour le moins étonnant de constater qu'ils ne
bénéficieront pas de la perception du commissaire quant au poids
respectif des trois arguments qu'il a avancés.
Je soumets
respectueusement aux membres de cette commission qu'il faut aller au-delà de ces trois
arguments présentés par le commissaire et
poser la question de la fonction même de député, plus précisément
de la représentation que se font à la fois les députés et la population
en général de la fonction même de député. Nous pourrions aisément revoir, dans l'histoire de ce Parlement, nombre
d'exemples où des députés occupaient une autre fonction. Nous pourrions
amener des arguments circonstanciels qui permettent d'expliquer pourquoi il en
a été ainsi à différents moments de l'histoire de ce Parlement. Mais
l'explication, qu'elle soit économique, sociale, politique, culturelle, n'est
jamais une justification, et c'est
particulièrement vrai au plan moral. Expliquer, c'est remonter le temps afin de
rendre compte des facteurs qui permettent de comprendre le cheminement qui nous mène à la
situation actuelle. Justifier, c'est plutôt avoir recours à des
arguments objectifs qui ne sont pas totalement assujettis à la particularité
des circonstances. Je suggère donc aux
membres de cette commission d'aller au-delà des arguments présentés par le
commissaire et de réfléchir à leur perception de la fonction de député
tout autant qu'à la représentation que s'en font en général les Québécoises et
les Québécois.
Troisième
sujet : la fiducie et mandat sans droit de regard, l'article 45 du
code. Je soumets à cette commission qu'une fiducie sans droit de regard
ne pourrait permettre qu'un député donne l'instruction formelle de ne pas
aliéner ses biens. Cette directive, qui n'a
rien de la nature d'un conseil, est d'une importance si cruciale qu'on peut
difficilement croire qu'une fiducie sans
droit de regard puisse la permettre ou la tolérer. Une fiducie sans droit de
regard assortie d'une
interdiction de vendre les actifs reviendrait à projeter dans le futur une
condition qui invalide l'expression «sans droit de regard». Si l'expression «sans droit de regard» signifie quelque chose, me semble-t-il, ça ne peut être que d'empêcher que l'émission
de conditions, comme celle de ne pas vendre les biens confiés au fiduciaire, ne
soit, dans les faits, un droit de regard.
Lorsque le commissaire, à
sa recommandation n° 12, souhaite «que le Code soit modifié afin de
préciser les règles relatives à la fiducie [et] au mandat sans droit de regard,
plus spécialement les instructions du membre de l'Assemblée nationale à l'intention du fiduciaire ou du mandataire», on
ne peut qu'applaudir à cette demande. Mais le commissaire aurait dû assortir cette recommandation de la phrase qui l'a
précédée : «...en respectant la finalité recherchée par le législateur», et ce, afin que les
instructions qui deviendraient éventuellement possibles demeurent cohérentes
avec l'objectif d'une fiducie ou d'un mandat
sans droit de regard. Si l'expression «sans droit de regard» a un sens, elle ne
doit pas, selon moi, en tout respect pour une opinion contraire, inclure d'instructions
précédant l'entrée en vigueur de la fiducie sans droit de regard.
Si le législateur accepte quelque instruction
donnée avant l'effectivité de l'interdiction pour un futur qui ne commence qu'à l'entrée en vigueur de la fiducie
sans droit de regard, c'est donc que le législateur tolérerait un droit
de regard limité. Le législateur se trouve donc devant le choix suivant :
ou bien il modifie l'expression afin de refléter un droit de regard limité,
auquel cas des instructions peuvent être données avant que l'interdiction de
tout regard ne s'applique pour le futur, ou
bien il interdit toute forme d'instruction précédant l'effectivité de cette
interdiction. La seconde voie me semble respecter davantage le sens d'un
mandat ou d'une fiducie sans droit de regard.
En conclusion, j'attirerais votre attention sur
un élément mentionné à la page 73 par le commissaire. Alors, le commissaire dit ceci : «...une culture
éthique et déontologique s'est rapidement introduite dans l'exercice de la
charge des députés, des membres du Conseil exécutif et de leur personnel. Cette
culture ne cesse de prendre de l'importance à l'Assemblée
nationale et dans les différents cabinets. Elle contribue à l'amélioration
concrète du lien de confiance avec la population.» C'est ce que dit le
commissaire.
L'expression «culture éthique et déontologique»
laisse tout à fait songeur. On se serait attendu à ce que le Commissaire à l'éthique et à la déontologie puisse
évoquer les changements qui se sont produits à l'Assemblée
nationale : l'intériorisation des
valeurs chez les parlementaires et leur personnel, la qualité des échanges
entre ces personnes et le commissaire, tous des indices pouvant nous
faire croire qu'il y a véritablement eu un changement dans la culture de
l'Assemblée nationale.
Le
commissaire n'est certainement pas l'intervenant privilégié pour faire état de
quelque changement de culture à l'Assemblée
nationale. Cependant, il peut faire état de ses observations personnelles quant
à l'évolution de cette culture organisationnelle dans laquelle il est un
acteur clé. Un changement opéré dans la culture d'une organisation comme l'Assemblée nationale n'est pas banal, surtout
quand le commissaire affirme que c'est une culture éthique et
déontologique qui s'est introduite.
Le commissaire n'a pas cru utile de définir ce
qui rend éthique et déontologique la culture de l'Assemblée nationale, qui influence le comportement des
parlementaires et de leur personnel. On se serait attendu du Commissaire
à l'éthique et à la déontologie qu'il fasse
état de ces changements de culture organisationnelle tels qu'il les a observés
au fil des années. Sans prétendre avoir une
visée juste de la nature et de l'ampleur de ces changements, le commissaire
aurait dû nous faire état de ce qu'il retient de ces changements qu'il
identifiait lui-même comme affectant le caractère éthique et déontologique de
la culture organisationnelle de l'Assemblée nationale.
Je vous remercie de votre attention. Et on
pourra approfondir dans les questions.
• (15 h 50) •
Le Président (M. Ouellette) :
Effectivement, on va approfondir, M. Dion. Merci. Vous comprendrez que je vous ai
laissé conclure sur le temps du parti
ministériel parce qu'on a commencé un petit peu plus tard. On
doit imbriquer tout ça dans notre
horaire. Et je pense que c'est très important, en partant du moment où vous
avez des observations à faire aux membres de la commission, qu'on les
écoute.
M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le Président. Pourriez-vous nous indiquer, de notre côté,
combien de blocs et de temps à chaque bloc nous avons?
Le Président (M. Ouellette) :
Deux blocs. Le troisième bloc, il va être de 14 minutes. Sur celui-là, il
vous reste 12 min 30 s.
M. Tanguay : Parfait.
Le
Président (M. Ouellette) : Il y a un bloc à l'opposition officielle et il y a un bloc à la
deuxième opposition, qui va fermer la première entrevue avec
M. Dion. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci beaucoup. Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Lafontaine,
bienvenue à... M. Lafontaine! M. Dion. Ça part bien!
J'essaie de
me presser parce que vous avez déposé un mémoire, vous avez abordé plusieurs
sujets, et je veux qu'on ait le
temps... pas en rafale, on va prendre le temps de discuter avec les collègues
également de ce côté-ci et les collègues de l'autre côté.
Vous savez,
quand on parle d'éthique et de déontologie, normalement, il n'y a pas de côté
de la Chambre, c'est les
125 députés qui sont interpellés et qui doivent évidemment obtenir réponse
et éclairage dans un processus où... Première mouture du Code de déontologie et d'éthique des
députés, voté en 2010, mis en vigueur le 1er janvier 2012, vous
étiez participant, M. Dion, en 2009. Vous avez participé à la première
mouture, et c'est pour ça que c'est particulièrement intéressant de vous avoir
comme témoin ou comme personne expert, je vous dirais, pas comme témoin, mais
comme expert, pour
venir nous aider, à la lumière de la mise en application tangible à tous les
jours de la première mouture, de se poser la question :
23 recommandations du commissaire, est-ce qu'il y a lieu de bonifier le
Code d'éthique?
Je vais
commencer par votre dernier point : fiducie sans droit de regard. Le
commissaire à l'éthique, vous l'aviez lu, note d'information, février 2014, disait, et je le cite,
page 2 : «Le membre de l'Assemblée nationale doit s'assurer
que la personne qui est choisie pour agir à
titre de fiduciaire ou de mandataire peut exercer cette charge de façon
entièrement autonome et indépendante et être perçue comme telle.» Fin de la
citation.
Le jurisconsulte allait, dans une lettre du
10 mars 2015, dans la même direction, et je le cite, à la
page 3 : «L'obligation imposée au
fiduciaire de conserver intact le patrimoine faisant l'objet de la fiducie est
incompatible avec l'essence même de la fiducie sans droit de regard...»,
et là je termine la phrase.
Alors, pour
vous, M. Dion, dans ce que vous nous avez dit un peu plus tôt puis dans
votre mémoire, il est très, très clair
qu'une personne qui veut constituer une fiducie sans droit de regard ne pourra
pas dire, par exemple : Bien, vous ne vendrez jamais tel bloc d'actions. Je pense que c'est très clair. Et
pouvez-vous nous dire en quoi ça participe de l'essence même, comme le
disait le commissaire à l'époque, comme disait le jurisconsulte à l'époque
aussi, de la fiducie sans droit de regard?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Merci beaucoup,
M. le député. Merci, M. le Président. En fait, c'est bien sans droit de
regard. Donc, en fait, il faut regarder le
moment où la fiducie commence, fiducie sans droit de regard ou le mandat sans
droit de regard, et ce qui a précédé.
Et évidemment il ne faut pas, par des événements qui ont précédé, pouvoir
rendre l'absence de droit de regard
insensée, si on veut. Donc, c'est dans cet esprit-là que je dis que ça va à
l'encontre d'une fiducie sans droit de regard, le fait de donner des
instructions aussi importantes que de ne pas vendre des actifs, des biens. Ça
m'apparaît tellement important comme décision que c'est impossible. Évidemment,
on ne parle plus d'une fiducie sans droit de regard,
on parle d'une fiducie avec un droit de regard limité dans les faits. Dans les
faits, c'est ça que ça crée comme...
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Oui, M. le Président. Pour les personnes qui nous écoutent à la maison, dans
les faits, je pense qu'on peut aussi résumer : lorsque l'on prend
fiducie sans droit de regard mais qu'on dit : Bien, vous ne vendrez jamais
ce bloc d'actions là, ça met l'élu — puis corrigez-moi si j'ai tort ou si j'amène
mal l'exemple tangible par lequel je veux illustrer votre propos — dans une position où il sait que,
jour 1 de son mandat de député, de ministre ou de premier ministre,
jour 1, il a tel bloc d'actions. Un
jour, il va quitter la politique et va récupérer le même bloc d'actions. Donc,
dans la tête d'élu, il a toujours des
intérêts qui sont pérennisés, qu'il va retrouver à la fin de ses mandats. Et
c'est là où on veut faire une muraille
de Chine, faire en sorte qu'il ne décidera, ou ne tentera pas, ou même les
apparences ne feront jamais en sorte qu'on
dira : Bien, peut-être qu'il privilégie à la hausse la valeur de ce bloc
d'actions qu'il va retrouver à la fin de sa carrière politique, n'est-ce
pas?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : C'est
effectivement pour qu'il ne soit pas dans une situation éventuelle de conflit
d'intérêts où il pourrait, dépendamment de
sa position, évidemment, avoir à favoriser un certain secteur économique où,
effectivement, son entreprise se retrouve et voir le prix de ses actions monter
étant donné le positionnement qu'il a fait. Donc, c'est effectivement pour
éviter les conflits d'intérêts qu'on veut une fiducie sans droit de regard. Et
il faut vraiment que ça s'applique avant le...
il ne faut pas qu'il y ait d'instruction aussi importante que ça, là. C'est ça,
le point, là. Donc, c'est pour éviter les conflits d'intérêts,
effectivement, autant réels qu'apparents.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
À la recommandation 23, il y avait, vous l'avez bien lu, la nature et
l'ampleur des intérêts financiers. Quelle
est votre position ou quel éclairage pouvez-vous apporter à nos travaux au
sujet de l'ampleur? Autrement dit, un député
qui, par ailleurs, n'aurait pas à mettre ses actions dans une fiducie sans
droit de regard, mais un député qui aurait tellement d'avoirs, qui serait actionnaire de tellement de compagnies,
que ce soit sur un marché public ou sur un marché privé, y voyez-vous là, vous, un écueil, comme le
commissaire le voyait, un écueil potentiel où il faut faire attention,
où le député pourrait difficilement, dans
cette Assemblée nationale, faire un pas, que ce soit en commission
parlementaire, au salon bleu ou en
posant une question? L'ampleur n'est pas anodine. Et en quelle matière ou
jusqu'à quel point êtes-vous d'accord avec cette affirmation-là?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Alors, je dirais
qu'au niveau du principe c'est à peu près le même genre de situation
dans laquelle on est placés éventuellement,
position de conflit d'intérêts réel ou apparent. Mais le problème, c'est
l'ampleur, c'est comment définir une limite,
là, à partir de laquelle, là, vraiment, il y a trop de biens. Et effectivement
ça pose difficulté, une clause comme
ça qui... Je comprends l'idée, là, au niveau de la possession de biens, qui est
très, très importante, on comprend
bien, mais dans le concret, au niveau normatif, ça prend quelque chose de plus
précis que ça. Et là ça risque de demander quelques travaux pour préciser de quoi il
s'agit, quelle est la limite à partir de laquelle, quand on la franchit,
on tombe... La puissance à laquelle vous faites référence est trop grande.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Et on sait qu'en vertu de l'article 45 un membre du Conseil exécutif doit
mettre en fiducie sans droit de
regard, ce qui n'est pas le cas pour les députés. Quel éclairage pourriez-vous
nous donner à ce moment-là? Un député, qui pourrait être membre, par
exemple, de l'opposition officielle, qui aurait à intervenir en commission, loi
article par article sur le ministère du
Revenu, la loi sur... donc, et poser des questions, quel mécanisme pourrait-on
mettre en place pour — parce que 45 couvre les ministres,
premier ministre — justement
couvrir les députés? Est-ce qu'on fait copier-coller et fiducie sans droit de
regard aussi? Avez-vous une réflexion ou quelque lumière à nous accorder?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Merci. Alors, la
possibilité d'une fiducie sans droit de regard, je dirais, appliquée mur à
mur, probablement qu'il faudrait regarder
différents cas possibles, cas de figure, pour vérifier si ce n'est pas excessif
comme moyen. Mais certainement qu'il faudrait penser éventuellement à ça pour
toutes sortes de raisons. Une très concrète, c'est
que, dans bien des cas, pas seulement au Parlement québécois, les gens
d'affaires viennent en politique et ils peuvent avoir un certain nombre d'affaires. Et c'est le cas dans beaucoup de
pays, effectivement. Donc, est-ce qu'il faut aller dans une fiducie sans droit de regard mur à mur pour
tous les parlementaires? J'ai une hésitation là-dessus. Il faudrait probablement faire des cas de figure pour voir
quels sont les types de situation qui risquent de se rencontrer. Mais il
faudrait probablement créer quelque chose quand même parce que, présentement,
ce n'est réservé qu'aux membres du Conseil exécutif, là, ministres et premier
ministre.
• (16 heures) •
M. Tanguay : Et, sur
cette lancée, donc, on parle ici des députés qui ne sont pas membres du Conseil
exécutif. Il y a l'article 25, je
crois, qui exige qu'un député qui voit là un potentiel conflit d'intérêts,
bien, de le dénoncer et de se retirer
de la discussion. Et là j'y vais de mémoire. Je pense que le commissaire
disait : Bien, il pourrait peut-être dénoncer, mais... participer à la discussion, mais ne pas voter. Comment
voyez-vous ça, vous? Moi, je suis député, j'ai beaucoup d'intérêts financiers. Évidemment, c'est un cas d'espèce parce
que ce n'est pas ma situation, mais je me lève, je le déclare. Je déclare que l'on va aborder, que ce
soit dans un débat parlementaire, peu importe sa nature, qu'on va
aborder un sujet sur lequel il pourrait y
avoir un impact à des compagnies dont je détiens des actions. Je le dénonce, je
ne participe pas au débat puis je ne
vote pas. Là, le commissaire semblait dire : Bien, dénoncez-le, ne votez
pas, mais vous pourrez peut-être participer au débat.
Comment vous voyez ça, vous, au niveau de la
perception du public?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Merci. Je crois
que de participer au débat est... Une fois qu'on a dénoncé, évidemment,
on ne participe pas au débat. Ça m'apparaît
impossible de participer au débat. On a dénoncé qu'il y avait un problème là,
on ne participe pas au débat et on ne vote pas, évidemment. Pour moi, ça
m'apparaît évident, on ne peut pas participer au débat. Il n'y a pas de possibilité
puisqu'on a dénoncé un intérêt, un problème.
M. Tanguay :
J'irai rapidement, M. Dion, au niveau de votre... vous avez abordé ça dans votre mémoire, vous l'avez abordé dans votre exposé un peu plus tôt, pas le cumul des fonctions, mais le fait qu'un député puisse avoir une autre occupation. Vous avez ciblé que le Commissaire à
l'éthique avait trois arguments : pragmatique, éthique et
contraintes professionnelles. Moi, ma préoccupation, c'est au niveau des
contraintes professionnelles. Pour pouvoir garder son inscription sur un tableau d'un ordre professionnel, il faut, comme
député, pouvoir continuer à... je pense, je crois, dans le domaine de la médecine, on me détrompera, mais il
faut pouvoir continuer à démontrer qu'année après année on a pratiqué un
minimum d'heures.
Juin 2009, première mouture, vous êtes là,
vous aviez dit, dans la tribune... et je pense que là, vous dites que le commissaire ne prend pas position, mais je
pense que vous preniez un peu position puis je vais vous citer :
«[M.] Dion a pour sa part affirmé qu'il
serait souhaitable que les parlementaires ne reçoivent aucune autre
rémunération que celle liée à leur
fonction...» On vous citait : «Je serais plus favorable à une notion de
député qui travaille pour ses concitoyens et qui n'a pas deux ou trois
emplois ailleurs...»
Est-ce toujours un peu ce vers quoi vous nous
enlignez? Autrement dit, au-delà des trois arguments, aucune possibilité ou si
l'argument professionnel a validité à vos yeux?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Merci. L'argument
professionnel n'est pas plus important pour moi que l'argument éthique. Certainement
que j'attribuerais la valeur de l'argument éthique comme étant assez importante.
Je comprends bien la situation, mais c'est une décision d'aller en politique,
et ça a une certaine contrainte, et c'est une des contraintes.
Maintenant,
dans mon allocution tout à l'heure, j'ai mentionné qu'il faudrait réfléchir à la représentation
qu'on se fait de la fonction du député. Autant les parlementaires, évidemment,
se font une certaine idée de ce que c'est, cette fonction-là,
indépendamment de ce qui est écrit dans le code, la représentation qu'on se
fait, et quelle est l'attente de la société
au niveau des députés à cet égard-là. Est-ce
que c'est justement les députés qui
les représentent à temps plein? Quand
on regarde les fonctions dans le code d'éthique, là, qu'est-ce que fait un député, c'est difficile de penser qu'il va faire autre chose : l'adoption de lois, il
surveille les actes gouvernementaux, il porte assistance aux personnes et aux
groupes qui demandent son aide dans leur rapport avec l'État, il participe aux
débats publics. Et là vous avez les valeurs, etc., évidemment : défendre l'amélioration des conditions sociales et économiques des Québécoises
et des Québécois, etc., être au service des citoyens. Bon,
alors, ça, ça semble être une job à temps plein, là.
Mais aujourd'hui la différence avec 2009, peut-être, c'est que je vous amènerais à penser à la
fonction de député de votre point de vue, quelle est la représentation que vous vous faites de cette
fonction-là, mais aussi être à l'écoute du public, comment les gens
perçoivent cette fonction puisque, dans le code d'éthique, la seule attente qui
est déclarée dans l'attendu, le deuxième
attendu du code d'éthique, en raison de ses fonctions que je viens d'énumérer,
la population s'attend, de la part du député, à ce qu'il adhère aux
valeurs de l'Assemblée nationale et respecte les règles déontologiques.
Bon, donc, ça, c'est l'attente sociétale qui a été identifiée dans le code
d'éthique, dans le deuxième attendu. Mais est-ce qu'il y a d'autres attentes quant à la possibilité d'avoir une autre
fonction? Alors, ça, j'aimerais que ça soit... je souhaite que ça soit
développé.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, M. Dion. Je vous ai laissé déborder sur votre réponse et
que je prendrai dans votre prochain bloc, M. le député de LaFontaine. On
va à M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Merci,
M. le Président. Bienvenue. Et j'en profite, M. le Président, comme nous
n'avons pas eu l'occasion
de prendre la parole, j'en profite pour vous saluer. Content de vous retrouver.
Et je salue également tous les
collègues autour de la table et les équipes qui les accompagnent.
M. Dion,
j'aimerais bien que vous nous donniez un peu plus d'éclaircissements puis que
vous partagiez avec nous la réflexion
que vous nous avez présentée sur les manquements aux valeurs de l'Assemblée nationale. Vous avez beaucoup parlé de ça dans votre mémoire.
Si je vous ai bien compris, ce que vous souhaitez, c'est que la déclaration sur les valeurs ou les
passages concernant les valeurs dans le code d'éthique soient mieux expliqués,
que ce soit plus clair. Je rappelle, pour les gens qui nous écoutent, que les valeurs dont on parle dans le code
d'éthique... je vais les citer parce
qu'il ne faut pas prendre pour
acquis, M. le Président, que les gens qui nous écoutent, là, connaissent le
code comme nous, on peut le connaître. Et j'admets, M. le Président, que j'ai une connaissance imparfaite du code,
et on vit avec. Alors, imaginez les gens qui nous écoutent. Alors, je
rappelle, M. le Président, donc le passage valeurs de l'Assemblée.
«Les valeurs de l'Assemblée nationale sont les
suivantes :
«1° l'engagement envers l'amélioration des
conditions sociales et économiques des Québécois;
«2° le respect et la protection de l'Assemblée
nationale et de ses institutions démocratiques;
«3° le respect envers les membres de l'Assemblée
nationale, les fonctionnaires de l'État et les citoyens.»
Je ne sais
pas jusqu'à quel point M. Dion souhaitait... Quand il a parlé de valeurs,
est-ce qu'il incluait également ce qui apparaît sous le titre ou
l'appellation «conduite du député»? Je ne sais pas. Est-ce que ça faisait
partie de vos réflexions, vous? Quand vous
avez fait vos commentaires sur les valeurs, est-ce que c'est seulement les
trois dont je viens de parler? Parce que, sous «conduite du député», on
peut lire ceci :
«La conduite
du député est empreinte de bienveillance, de droiture, de convenance, de
sagesse, d'honnêteté, de sincérité et de justice.» On se retrouve
tous là-dedans, n'est-ce pas, M. le Président? «Par conséquent, le
député :
«1° fait preuve de loyauté envers le peuple du
Québec — ça,
c'était le premier alinéa;
«2° reconnaît qu'il est au service des citoyens;
«3° fait preuve de rigueur et d'assiduité;
«4° recherche la vérité et respecte la parole
donnée; et
«5° a un
devoir de mémoire envers le fonctionnement de l'Assemblée nationale et de ses
institutions démocratiques.»
Alors, qu'est-ce qui, là-dedans, n'est pas clair
pour vous et qu'est-ce que vous souhaiteriez apporter comme éclaircissement pour que les valeurs de
l'Assemblée... et précisez, s'il vous plaît, si, pour vous, la conduite du
député et ce qui s'ensuit en fait partie. Alors, qu'est-ce qui pourrait
être ajouté pour clarifier tout ça?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion (Michel) : Merci. Donc,
regardez le titre I, «Valeurs et principes éthiques». Dans mon mémoire, j'ai fait quelques pages de commentaires à cet
égard-là. Est-ce que le qualificatif «éthiques» s'applique aux
principes, aux valeurs? Ça pose un certain nombre de problèmes.
Mais disons
que, spontanément, quand on lit l'article 6, on voit immédiatement qu'il n'y a
pas de distinction entre valeurs et
principes, c'est-à-dire qu'on ne sait pas où sont exactement les principes. Dès
qu'on est après les trois premiers éléments et qu'on arrive avec la
bienveillance, on est dans les valeurs encore. Et, par la suite, le député
«fait preuve de loyauté», est-ce qu'on n'est
pas encore dans les valeurs ou bien est-ce qu'on doit comprendre qu'on est
rendu dans les principes éthiques,
alors qu'on parle de vérité, qui est une valeur? Donc, c'est un peu mélangé,
là. Ici, il y aurait vraiment une réforme à faire, là, pour distinguer
quelles sont les valeurs de l'Assemblée nationale et quels sont les principes
d'ordre éthique et bien distinguer les deux.
J'en profite pour
mentionner, et c'est dans mon mémoire, à la page 7, que les principes
éthiques... en fait, le commissaire va
dire : Les principes éthiques sont soutenus par les valeurs de l'Assemblée
nationale. Ce n'est pas rien, dire ça. Évidemment, on ne sait pas quels sont ces
principes éthiques puisque le code d'éthique est flou, mais on peut
faire des hypothèses et on peut se poser des questions, effectivement, si
certains principes, par exemple rechercher la vérité, respecter la parole donnée, faire preuve de rigueur, est-ce que tout ça,
c'est fondé sur les valeurs précédentes? C'est flou, là. Donc,
l'affirmation du commissaire, page 25, là, elle est très louable, mais, en réalité,
on ne comprend pas du tout ce qu'il veut dire puisqu'on ne sait pas, même, la distinction
entre quelles sont les valeurs et les principes.
Alors,
tout ça pour dire, pour terminer avec cette question, que les manquements
aux valeurs... donner le pouvoir au commissaire de pouvoir faire enquête
pour un manquement aux valeurs donne quoi, en fait? Qu'est-ce que ça donne à la fin? Ce n'est pas sûr que ça donne quelque chose parce que regardez n'importe quelle organisation, quand il va y avoir des
sanctions disciplinaires, ça sera pour des normes qui ont été transgressées. Ce
ne sera jamais parce
que la personne n'a pas accompli telle ou telle valeur
organisationnelle. Ce n'est pas important, ce n'est pas comme ça qu'on va concevoir l'enquête, c'est vraiment en fonction d'une
norme précise. Donc, je comprends mal comment le commissaire peut avoir ce pouvoir-là et qu'est-ce que ça donne,
surtout, d'avoir ce pouvoir d'enquête sur un manquement aux valeurs.
Bon, peut-être vous
pouvez m'éclairer là-dessus, mais c'est quelque chose que je comprends
difficilement quand je compare la culture ici avec d'autres cultures
organisationnelles.
• (16 h 10) •
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Oui. Donc, si je vous ai bien compris, donc, dans la...
vous trouvez que, dans la formulation même, ce n'est pas clair, et surtout, ce qui n'est pas clair, c'est la
distinction entre ce qui est une valeur et ce qui est un principe. Oui.
Maintenant,
vous l'aurez noté, vous savez, M. Dion, que le député peut demander une
enquête. Dans notre code, le député, un
député, peut demander une enquête, et le commissaire peut, de son propre chef,
déclencher une enquête, sauf que le
pouvoir du commissaire de déclencher une enquête ne souffre d'aucune limite,
alors que le député peut demander une
enquête, mais il ne peut pas le faire pour la partie, justement, sur les
valeurs et les principes. Je ne sais pas si vous l'aviez noté. Donc, en
d'autres mots, le commissaire à l'éthique pourrait déclencher une enquête sur
un collègue, par exemple, qui ne respecterait pas, par exemple, la valeur qui
prévoit qu'on travaille pour l'amélioration des conditions sociales et
économiques ou encore qui ne respecte pas les institutions démocratiques, etc.
Le commissaire pourrait enquêter pour manquement à une des valeurs, mais ce
n'est pas possible, pour le député, de le faire.
Est-ce que... parce
que je suis toujours dans la partie «valeurs», là. Est-ce que vous
souhaiteriez, vous, que le pouvoir d'enquête du commissaire pour manquement à
une valeur ou manquement au respect d'une des valeurs soit mieux encadré? Là,
je fais référence, pour les gens qui nous écoutent, à l'article 91 et 92 du
code d'éthique. 91, c'est demande
d'enquête : «Le député qui a des motifs raisonnables de croire qu'un autre
député a commis un manquement aux
dispositions des chapitres I à VII du titre II ou à celles du titre III du
présent code peut demander au Commissaire à l'éthique et à la déontologie de faire une enquête.» Et l'enquête
d'office, c'est l'article 92 : «Le commissaire — donc,
commissaire à l'éthique — peut, de sa propre initiative et après avoir
donné par écrit au député un préavis raisonnable, faire une enquête pour
déterminer si celui-ci a commis un manquement au présent code.»
Donc,
vous aurez noté que, dans le 91, on limite la demande d'enquête du député au
titre II et au titre III. Or, il se trouve que le titre I, dans le code
d'éthique, c'est justement le titre qui porte sur les valeurs et les principes,
et les pouvoirs d'enquête du commissaire, eux, incluent le titre I, donc
valeurs et principes.
Alors,
vous, est-ce que vous souhaiteriez que les pouvoirs d'enquête du commissaire
pour manquement à une valeur ou un principe soient mieux encadrés,
soient mieux balisés?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Dion.
M. Dion (Michel) : Oui. Alors, je me pose la question de l'utilité
de ce pouvoir du commissaire de le faire de sa propre initiative. Quand
on regarde les valeurs, faire preuve de loyauté envers le peuple du Québec,
pour prendre cet exemple-là, quand est-ce
que le commissaire va se rendre compte qu'un député, finalement, ne s'est pas
conformé à ça? Un député est au service des citoyens. Quand est-ce que
le député ne l'est pas, au service des citoyens, de sorte que ça mérite qu'il y ait une enquête? Et on pourrait
rajouter les exemples, là. Faire preuve de rigueur et d'assiduité.
L'assiduité, c'est intéressant parce que ça suppose une présence régulière, et
on venait tout juste de parler d'une double fonction tout à l'heure.
Rechercher la vérité,
ça, c'est très intéressant parce que tout le monde cherche la vérité, et il y
en a peu qui la trouvent. Et donc l'idée de la rechercher, c'est intéressant,
mais est-ce que c'est vraiment une valeur? Bon, alors, est-ce que le
commissaire va intervenir parce qu'il y a eu un manquement à cette valeur ou à
ce principe? Ça m'apparaît assez difficile.
Ce serait possible, dans la situation, et là vous pourrez m'éclairer si c'est
le cas, où le commissaire vous donne des lignes directrices pour expliquer le sens des valeurs. Et là il vous
donne sa réflexion. Après tant d'années, il vous dit : Bien, la convenance, là, la valeur qui est
identifiée après la droiture, il y a la convenance, mais la convenance, quant
à moi, comme commissaire, avec les années, je conçois que c'est tel genre de
comportement que ça suppose. Je définis le comportement de convenance, qui est
convenant.
S'il
ne vous fournit pas ça, il est mal placé pour faire une enquête par la suite.
Donc, il doit vous aider, il doit vous donner
des lignes directrices pour que vous ayez un sens plus précis des valeurs, puis
c'est vrai pour n'importe quelle organisation.
On parle de l'Assemblée nationale, ça pourrait être une entreprise, n'importe
quelle entité. Quand on veut que les
valeurs soient intériorisées par les individus, il faut les aider, il faut leur
donner des lignes directrices, une compréhension de la valeur.
Donc, le commissaire, c'est son devoir, je
crois, devoir moral, en tous les cas, de vous donner des précisions sur le sens de ces valeurs-là. Il peut le faire au
fil des années, par une ligne directrice qui traite de telle ou telle
valeur. Et là, à ce
moment-là, s'il a donné ça puis, à plusieurs reprises, des précisions à cet
égard, là, il est mieux placé, effectivement, pour faire une enquête. Mais je doute quand même de l'utilité d'une
telle enquête, pour manquement aux valeurs, de sa propre initiative, j'entends. L'important est que
le commissaire fasse de la sensibilisation, je dirais, au niveau du sens
des valeurs. Ça, je pense, c'est un devoir qu'il devrait accomplir.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Je vous rappelle, M. Dion,
qu'il y avait eu effectivement une enquête sur l'ex-député Tomassi pour
ce qui est de l'assiduité, notamment de l'assiduité.
J'aimerais revenir à un autre élément de votre
mémoire. Vous faites référence à la recommandation n° 17 du rapport, donc la recommandation n° 17, qui se
lit comme suit : «Que l'article 87 du code soit modifié pour prévoir
que le commissaire peut rendre public un avis qu'il a rendu à l'égard d'un
membre de l'Assemblée nationale, lorsque ce dernier — donc
lorsque le député — déclare
publiquement avoir obtenu un avis du commissaire.»
Donc, vous
souhaitez que le code soit modifié pour que le commissaire rende public l'avis
qu'il a donné à un député lorsque le député dit : J'ai reçu un
avis. Et ça, c'est dans le rapport, le rapport sur la mise en oeuvre.
Et là vous,
vous dites : Le seul fait qu'un député déclare avoir obtenu un avis du
commissaire ne devrait pas donner au
commissaire la possibilité de rendre public cet avis, n'est-ce pas? Je vous
cite bien, n'est-ce pas? Vous souhaiteriez quoi, vous?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Merci. En fait,
ce que l'on lit dans la recommandation, c'est que, dès que le député
déclare publiquement qu'il a reçu un avis, il ne déclare pas la nature de
l'avis. Il dit seulement : J'ai eu un avis.
M. Drainville : C'est
ça.
M. Dion
(Michel) : Donc, il ne dit
pas grand-chose, en réalité, et, à ce moment-là, à partir de ce moment-là,
le commissaire pourrait rendre public
l'avis, alors que le député n'a rien dit, il a juste dit : J'ai reçu un
avis. Il n'a pas mis le commissaire en mauvaise position, il a juste
dit : J'ai reçu un avis, sans donner la nature.
Effectivement,
s'il se met à interpréter le député, qui dit : Bien là, j'ai reçu un avis
qui dit à peu près ceci, ah, bien là je
comprends que le commissaire doit rendre ça public parce qu'il faut que ça
soit... il ne faut pas qu'il y ait de mauvaise interprétation. Mais, s'il ne dit rien, s'il dit seulement : J'ai
reçu un avis du commissaire, c'est comme assez vide comme contenu. Ça ne
met pas le commissaire en mauvaise position du tout, du tout.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Et donc, M. Dion, terminez
votre logique, s'il vous plaît. Et donc on devrait faire quoi? On
devrait modifier le code ou... pas modifier le code, mais modifier la
recommandation 17 pour mieux la baliser, pour mieux la nuancer?
M. Dion (Michel) : Bien, moi,
je la nuancerais, mais c'est une suggestion personnelle, là, ce n'est rien de
plus que ça.
M. Drainville : Mais oui, mais c'est pour ça que
vous êtes ici, mon cher. On est ici pour entendre vos suggestions
personnelles.
• (16 h 20) •
M. Dion (Michel) : Exactement.
J'ai fait cette suggestion, que, lorsque le député déclare qu'il a un avis du commissaire et qu'il en fait un commentaire qui reflète une partie du
contenu, etc. — vous
trouverez la formulation, si ça vous
intéresse, là — qu'à ce moment-là, oui, le commissaire, il faut qu'il rende l'avis public absolument
pour ne pas créer de confusion parce que
c'est une interprétation que le député a, ce n'est pas nécessairement
conforme à l'avis tel qu'il est écrit
par le commissaire. Donc, à ce
moment-là, oui, mais pas seulement
le fait d'avoir fait... J'ai eu un avis du commissaire, ça ne veut rien
dire, ça.
Le Président (M. Ouellette) :
Dernière minute, M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Alors, je rappelle, M. le
Président, que l'article 87 du code
actuel dit donc : «Avis du commissaire — avis au député :
«Sur demande
écrite d'un député, le Commissaire à l'éthique et à la déontologie lui donne un
avis écrit et motivé, assorti des recommandations qu'il juge indiquées, sur toute question concernant les obligations
du député aux termes du présent code.
Cet avis est donné dans les 30 jours qui suivent la demande du député à moins
que celui-ci et le commissaire ne conviennent d'un autre délai.»
Confidentialité : «L'avis du commissaire
est confidentiel et ne peut être rendu public que par le député ou avec son consentement écrit, sous réserve du pouvoir du commissaire de
procéder à une enquête et de faire rapport sur les faits allégués ou
découverts à l'occasion de la demande d'avis.»
Et là il y a la recommandation 17 qui dit : Bien, l'avis du commissaire pourrait être rendu
public dès que le député confirme qu'il a reçu un avis.
Dans
le fond, vous nous invitez à la prudence. Dans le fond, c'est comme si
on disait : J'ai reçu... c'est une sorte de, comment dire, un avis
de réception. J'ai reçu quelque chose.
Une voix :
Un accusé de réception.
M. Drainville :
Un accusé de réception. Ça ne dévoile en rien le contenu, et donc ce que vous
dites, c'est que ça ne devrait pas enclencher automatiquement le dévoilement,
par le commissaire, de l'avis tel que le prévoit la recommandation 17 dans le
rapport.
M. Dion
(Michel) : Tout à fait ça.
M. Drainville :
Très bien. Merci.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, M. Dion. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Pour 12 min 30 s?
Le Président
(M. Ouellette) : Oui, M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Je les fais rapidement, beaucoup
de sujets à aborder, puis je veux... Évidemment, ma collègue de Vaudreuil aura quelques
questions également.
Au
passage, pas besoin d'échanger là-dessus, nous avons pris bonne note de votre
suggestion que, contrairement à ce
qui est la mouture actuelle de l'article 114, il y ait possible recommandation
du commissaire à tous les cinq ans. Bien,
vous soulignez que ce serait peut-être intéressant, s'il a de quoi à dire, même
si ça ne fait pas cinq ans, bien, qu'il le dise et que les élus en
débattent et statuent, le cas échéant. Ça, j'en ai pris très bonne note, puis
je vois votre réaction, puis je pense
qu'il y a beaucoup de bon sens là-dessus. On va se faire une tête
entre nous, entre les 125 collègues, mais je pense que c'est important
de le souligner, que c'était pertinent.
Je
ne veux pas entrer trop dans la sémantique, mais moi aussi, M. Dion, je
trouvais ça intéressant, les pages 12 et suivantes, votre quatrième
point sur l'étalon de mesure, la personne raisonnablement bien informée. Alors,
y a-t-il situation de conflit d'intérêts, l'étalon de mesure? Puis je voyais
que vous référiez aux pages 28 et 39 du rapport du commissaire. Est-ce qu'une personne raisonnablement bien informée y verrait
là un accroc potentiel? Ça, c'est une chose.
Aidez-moi
à y voir les distinctions nécessaires. Il n'est aucunement fait mention, tant dans le
code que dans ce que j'appellerais la jurisprudence du commissaire, d'un
étalon de mesure qui, au-delà de la raisonnabilité du niveau d'information...
Un peu comme en matière civile, on dit : Est-ce qu'il y a une faute, oui
ou non? Bien, pour savoir si une faute a été
commise, on va se mettre dans la situation d'une personne raisonnablement prudente et
diligente placée dans les mêmes circonstances. Nous invitez-vous, puis
je veux être sûr de bien vous lire, à peut-être étayer ce que vous appelez la
personne idéale?
Le
Commissaire, quand il dit : Est-ce
que j'ai devant moi un cas de faute,
ne devrait-il pas étayer l'institution qu'est le commissaire à l'éthique? Cette personne idéale là, au-delà de
dire : Y a-t-il faute, et je dois me mettre dans les chaussures d'une personne raisonnablement bien informée, mais
il devrait davantage dire aussi : Oui, raisonnablement bien
informée, mais normalement prudente et
diligente, placée dans les mêmes circonstances? Puis, vous allez voir, par la
suite, on va débouler sur ce qui peut
être, pour un député, des modes de défense parce qu'il y en a, des modes
de défense, la bonne foi, ainsi de suite. Mais j'aimerais vous entendre
sur cette personne idéalisée, là, qu'on mériterait peut-être de préciser et
comment pourrait-on le faire.
Le Président
(M. Ouellette) : M. Dion.
M. Dion (Michel) : Oui, merci. Donc, effectivement, il m'est apparu
que le «raisonnablement informée» n'était pas suffisant, d'autant plus que l'information, déjà, n'est pas toujours
complète. Le «raisonnablement informée» était difficile à articuler dans
la pratique.
Mais
vous avez effectivement fait référence à la prudence, à la diligence, au
caractère impartial, au spectateur impartial qui regarde. Je crois que
c'est un tel spectateur idéal qu'il faut avoir en tête, il faut élargir. Ce
n'est pas une question seulement
d'information, c'est une question aussi de prudence, de
diligence, d'impartialité. Je pense que c'est trop limitatif que de s'en tenir simplement à l'information qu'une personne pourrait avoir. C'est un des critères par
lesquels une personne décide, oui. Quand cette personne est face à des
problèmes d'éthique, par exemple, bon, bien, elle va rassembler évidemment les faits et, avec cette information la plus large possible, va pouvoir prendre la décision. Mais ce
n'est pas simplement le rassemblement des faits. Il y a nécessairement une
question de prudence et de ne pas vouloir tomber
dans des extrêmes, tenir compte des différentes personnes, des différents
groupes qui peuvent être affectés par la décision.
Donc,
il y a vraiment une question de prudence, diligence,
d'impartialité qui est là et non pas seulement de... Le «raisonnablement informée», ça me
semblait vraiment insuffisant.
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, exact. Et ma collègue de Vaudreuil,
effectivement, qui a, je pense, une formation en droit, nous parlait de l'ancienne appellation, qui était
«agir en bon père de famille» dans une société qui méritait encore d'être évoluée, donc
«personne normalement prudente et diligente placée dans les mêmes
circonstances». Diriez-vous, êtes-vous d'accord
avec moi que, si on allait de l'avant en précisant quel est l'étalon de mesure
de la personne idéalisée pour le commissaire pour déterminer est-ce
qu'il y a, dans ce cas-là qui est devant moi, sous analyse, faute ou pas, ça
nous permettrait d'arriver à des décisions qui ne termineraient pas sans
sanction?
Et
je vous donne trois moyens de défense qui ont été appliqués par le commissaire.
Premier élément : Ah! bien, la personne
a agi de bonne foi. Oui, on peut le considérer au niveau de la force
de la sanction si elle a agi de bonne
foi ou pas, mais, en ce sens-là, il y a le facteur d'intention ou pas
d'intention.
Deuxième
élément, la personne n'était pas suffisamment expérimentée, ne savait pas que ça ne se faisait
pas. Je trouve que c'est... puis
je m'avance, mais corrigez-moi si vous croyez que j'ai tort, je
pense que c'est une défense trop facile, qu'on pourrait mettre de côté
si l'on disait : Bien, écoute, elle ne le savait pas, mais est-ce qu'une
personne normalement raisonnable, prudente et diligente aurait agi de la sorte?
Et aussi, un autre
moyen de défense, et ça, c'est mon collègue de La Prairie qui, dans sa
discussion avec le commissaire à l'éthique,
avait avoué : Avant de donner
une sanction, moi, comme commissaire — je
le cite — j'ai
pensé à la conséquence politique d'une réprimande. Fin de la citation.
Alors,
si, comme commissaire à l'éthique, je me dis : Y a-t-il
faute? Oui, il y a faute. Puis, dans les deux derniers cas d'application, il y avait eu faute, mais il a dit : La personne
agissait de bonne foi, la personne n'était pas suffisamment
informée, puis il faut que je pense à l'impact politique que ça va avoir. Dans
les deux cas, je ne recommande aucune sanction. Pensez-vous que ça nous
aiderait, à ce moment-là, d'étayer l'analyse et de dire : Bien oui, il va
y avoir des sanctions en bout de piste?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Oui, alors, je pense qu'effectivement il faut réviser ça.
Quand on regarde les moyens de défense que vous avez mentionnés, la défense de
bonne foi, qu'on retrouve même dans certaines lois au Québec... La deuxième est vraiment, vous l'avez
mentionné... n'est pas très forte, c'est l'ignorance. Alors, plaider
l'ignorance, là, ce n'est pas ce qu'il y a de mieux, non. Et les
conséquences politiques d'une réprimande, c'est bien ça que vous avez mentionné, est-ce que... là, on est dans l'ordre
de... on agit en fonction des conséquences de l'action et on regarde
quelles seront les conséquences pour moi, mais les conséquences pour d'autres
aussi. C'est une façon, évidemment, de regarder la décision.
Mais
je voudrais revenir aussi à l'idée que vous avez mentionnée dès le début.
Anciennement, on parlait du bon père
de famille. En fait, le juge se servait de ça, et vous avez encore de
l'agissement prudent et diligent, par exemple, pour les administrateurs, les membres de conseil
d'administration. C'est des valeurs qui sont intégrées dans la société.
Dans la Loi sur les sociétés par actions, par exemple, et dans le Code civil du
Québec, vous avez ça, et ça sert au juge pour décider, là, effectivement, dans
tel ou tel cas.
Donc,
je pense qu'il faut aller vers là, il faut aller... Il faut déborder le
«raisonnablement informée» et aller vers la personne prudente, diligente et impartiale qui va essayer de... qui
serait comme l'idéal dont se servirait de
toute façon le juge et dont va se servir ou pourrait se servir le
commissaire.
Le Président
(M. Merlini) : Pardon. Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : Merci. Relativement à la notion du bon père de famille, dans le fond, ce que je comprends, c'est que vous dites que cette notion-là,
c'est une notion qui est quand même assez désuète, dépassée ou...
• (16 h 30) •
M. Dion (Michel) : Bien, elle a été utilisée dans le passé. Là, on
comprend qu'est-ce qui était là, mais
la société a changé, on peut dire ça, puis en espérant qu'elle soit de
plus en plus dépatriarcalisée, en espérant.
Mme Nichols :
Très bien, je comprends où vous vous en allez avec la notion du bon père de
famille, puis je suis plutôt d'accord avec
vous qu'on a utilisé longtemps cette notion-là. Les juges l'appliquent
maintenant un peu moins, mais c'est plus, maintenant, la personne
raisonnable, diligente, c'est plus sûr.
M. Dion
(Michel) : C'est ça, exactement. C'est ça, c'est ça, oui.
Mme Nichols :
Définitivement, c'est plus vers là où on s'en va.
M. Dion,
merci. Merci d'être ici. J'ai pris connaissance aussi de votre mémoire puis
j'avais certaines questions, entre
autres relativement à la... quand vous parlez de la recommandation n° 3
sur les membres de l'Assemblée nationale afin qu'ils «procèdent à un examen, au regard des principes [d'éthique] et
des règles [de déontologie] établies par le code» et aussi «de la
pertinence de maintenir la possibilité, pour les députés,
d'exercer simultanément plus d'une fonction». Entre autres, vous revenez sur le propos du commissaire qui implique
trois niveaux de raisonnement. Si je ne me trompe pas, vous parlez d'abord du premier niveau, qui
est l'argument pragmatique. Vous parlez ensuite de l'argument éthique et
de l'argument des contraintes professionnelles.
À la lecture, ma
première impression, c'est que, dans le fond, ce que vous dites par rapport aux
propos du commissaire, c'est que ce n'est pas assez clair, le poids de chacun. Je
me demandais : Selon vous, est-ce qu'il y a un argument qui devrait avoir
plus de poids qu'un autre dans les trois qui ont été nommés?
Le
Président (M. Merlini) : M. Dion.
M. Dion (Michel) : Merci. Donc, vous ne serez peut-être
pas étonnée que je trouve l'argument éthique assez lourd, comparativement
aux deux autres. Mais n'oubliez pas que j'ai insisté sur le fait qu'il faut
plutôt avoir une période entre vous — évidemment, les 125 députés — pour
réfléchir à la perception que vous avez de la fonction de député et que la population a, quelles sont les attentes sociales. Et, si,
par hypothèse — je
lance l'hypothèse — on
arrivait à la conclusion que la population
s'attend à ce que ses députés soient là à temps plein et qu'ils n'aient pas une
seconde fonction, bien, ça ferait partie de la réflexion. Si vous
arrivez, de différentes manières, par des forums ou autres, là, que vous
arrivez chacun, dans votre circonscription, à pouvoir tâter le pouls de la population et finalement avoir un résultat, à la fin, sur qu'est-ce que la population veut, bien, à ce moment-là, ça pourrait
faire partie d'un nouvel «attendu» du code d'éthique où on voit l'attente sociétale de la population
quant aux fonctions du député et au fait qu'il y aurait ou non possibilité
d'avoir plusieurs fonctions.
Le Président
(M. Merlini) : Mme la députée de Vaudreuil, il vous reste
1 min 40 s.
Mme Nichols : Oui. Je vais faire ça vite, mais en fait je vais
me permettre en même temps de commenter un peu par rapport à l'argument des contraintes professionnelles. Vous
êtes sans doute au courant qu'il y a certaines pratiques qui ont des contraintes professionnelles. Il y en a
que... Je donne l'exemple d'un avocat. Bon, il doit faire un certain
nombre d'heures de formation par année. Puis ça, c'est correct. Je veux dire,
c'est son choix, à l'avocat. Il fait les heures de formation, mais il n'en a pas besoin pour continuer de pratiquer. Donc,
si dans quatre ans, huit ans, après un, deux mandats, il décide de retourner dans la pratique, bien, ça
sera lui qui va avoir été pénalisé de ne pas avoir pratiqué pendant huit
ans ou d'avoir fait d'autres choses pendant
huit ans. Mais, si je pense au médecin, par exemple, qui, lui, doit pratiquer,
je trouve que les conséquences sont
peut-être un petit peu plus lourdes. Les contraintes professionnelles, pour
cette personne-là qui veut retourner
à la pratique, sont beaucoup plus lourdes. Je me demandais, vous avez sûrement,
dans votre cheminement, pensé à ça dans la rédaction du mémoire.
M. Dion
(Michel) : Oui.
Le Président
(M. Merlini) : En 40 secondes, M. Dion.
M. Dion (Michel) : En 40 secondes. C'est clair qu'il y a des
cas faciles, vous l'avez mentionné. Le Barreau, on peut suivre des cours, et ce n'est pas trop long. Et
les médecins, c'est beaucoup plus compliqué. Mais, en réalité, je vous
ramène à une réflexion fondamentale sur la
fonction de député plutôt qu'aux circonstances ou aux cas exceptionnels qui
peuvent être... qui finalement pourraient empêcher même des députés de se
lancer en politique si on va de l'avant avec ça.
Donc, je vous ramène
plutôt à une réflexion de fond sur la fonction de député, votre perception,
mais aussi la perception du public sur le
fait qu'il faut être à temps plein ou non. C'est peut-être que... finalement,
après un tour de piste du Québec, on trouverait peut-être un appui au
fait d'avoir plus d'une fonction.
Le Président
(M. Merlini) : Merci, M. Dion. Ça termine ce bloc.
Malheureusement, ça termine ce bloc. Mme la
députée de Vaudreuil, vous pourrez vous reprendre. On se tourne maintenant vers
la deuxième opposition et le député de Deux-Montagnes. À vous la parole.
M. Charette :
Merci, M. le Président. Merci, M. Dion, d'être parmi nous cet après-midi.
Peut-être, dans la foulée des
questions de ma collègue, toujours sur cette recommandation 3, vous disiez,
c'était éventuellement une évaluation qui devrait être faite à savoir si un député peut se permettre d'avoir une
charge additionnelle. Est-ce que l'on pourrait
se poser spécifiquement la question pour les membres du Conseil exécutif?
Un député, c'est une chose, avec un emploi du temps
qu'on lui connaît bien, mais un ministre, c'en est une autre. Est-ce qu'il devrait y avoir peut-être une réflexion plus approfondie pour les ministres
en particulier? Est-ce qu'on devrait exiger l'exclusivité de fonction à ceux
qui siègent au Conseil exécutif?
Le Président
(M. Merlini) : M. Dion.
M. Dion (Michel) : Oui, merci. C'est une excellente suggestion. En
fait, bien, suggestion... en tout cas, question. Excellente question. Je crois qu'effectivement pour ce qui
est de la situation des ministres il y a bien des chances que, si on ne fait que lire le code d'éthique, on voit très bien la lourdeur. Et on s'imagine que,
quand on a une tâche de ministre, c'est encore pire, de sorte que ce serait probablement difficile d'avoir une
deuxième occupation, si on veut. Et, étant donné les charges publiques qu'on a, il y a un impact, en
fait, si on fait ce choix-là. Donc, je serais d'avis que, sur la question,
oui, des ministres, on devrait être plus sévère là-dessus, quitte à ce que...
La
question pourrait être séparée en deux parce qu'effectivement je vois la tâche
des ministres tellement lourde que c'est difficile de croire qu'on va
avoir du temps. Puis, si on a du temps, on est en train de le gruger sur les
objectifs que vous avez même énoncés
derrière, puisque c'est des objectifs tellement importants, là, la défense d'intérêts
publics du Québec. Et, quand on est ministre, évidemment, on est aux premières
lignes. Donc, je pense qu'effectivement il pourrait
y avoir une nécessité de s'attaquer à cette situation-là en premier, quitte à
ce qu'ensuite on regarde l'ensemble des députés aussi. Mais vous allez
le faire entre vous, mais je pense qu'effectivement c'est une très bonne voie,
d'aller dans ce sens-là.
Le
Président (M. Merlini) : M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
...d'étudier d'autres codes d'éthique, d'autres assemblées législatives à
travers le Canada? Si oui, est-ce qu'il y a ce type de distinction là à
travers d'autres législatures?
M. Dion
(Michel) : Je n'ai pas vérifié. Honnêtement, je n'ai pas fait cette
vérification-là.
M. Charette :
D'accord. Et aussi, en complément d'information, une question posée
précédemment par mon collègue de LaFontaine
au niveau des restrictions, toujours celles qui s'appliquent au Conseil des
ministres, c'est le choix qui avait
été fait il y a quelques années, lorsqu'on a adopté le présent code d'éthique.
Différentes situations, au cours de la dernière
année, nous ont fait se... on s'est demandé, en fait, s'il n'y avait pas lieu
d'étendre ces restrictions-là à une autre catégorie de députés. Est-ce que ce serait, par exemple, les officiers
des oppositions, sinon chef de l'opposition officielle, chef de la deuxième opposition, la présidence de
l'Assemblée nationale? Donc là, on avait bien circonscrit les
limitations il y a cinq ans. Est-ce qu'avec
l'exercice des dernières années ce serait pertinent d'étendre à d'autres
catégories, sans dire à tous les députés, mais peut-être aux officiers
notamment des partis d'opposition?
Le Président
(M. Merlini) : M. Dion.
M. Dion
(Michel) : Donc, on parle bien de la fiducie sans droit de regard?
M. Charette :
C'est-à-dire fiducie sans droit de regard, mais les députés-ministres ont un
certain nombre de contraintes qui sont plus
grandes que celles imposées aux autres députés, même gouvernementaux. Donc, la
question est de savoir : Est-ce qu'on devrait étendre ces
contraintes-là aussi aux officiers, par exemple, des partis d'opposition?
M. Dion
(Michel) : Je serais d'avis qu'on pourrait examiner la question.
Évidemment, ça dépendrait des contraintes,
là. Quand on parle de la fiducie sans droit de regard, on en a parlé tout à
l'heure, de l'étendre à des fonctions, j'aime
bien l'idée de l'étendre à des fonctions, donc le chef de l'opposition
officielle, etc. Donc, j'aime bien ça parce que ce n'est pas l'ensemble des députés, c'est des
fonctions qu'on considère que cette fonction-là est importante et que,
donc, il y a des contraintes supplémentaires pour ces personnes-là. Je pense
que ça pourrait être un bon exercice, oui, de commencer
par des fonctions, quitte à ce que, dans un deuxième temps, vous réfléchissiez
pour les autres députés. Mais, pour ceux qui détiennent ce genre de
fonction là, c'est une bonne idée, oui. Je suis très positif à ça.
• (16 h 40) •
M. Charette :
Dans le mémoire que vous nous avez présenté, vous avez évoqué une formation qui
serait souhaitable pour les élus. On évoquait de neuf à 15 heures de formation.
C'est pratique courante dans bon nombre d'organisations,
ce n'est pas actuellement le cas au niveau des députés. Qu'est-ce qu'on devrait
y enseigner? En fait, même au niveau
municipal, notamment, ces formations-là sont de plus en plus chose courante,
sinon même imposées. Donc, quel
pourrait être le programme de formation idéal? Qu'est-ce qu'on devrait aborder
avec nos élus qui arrivent souvent d'environnements très différents,
avec certainement de bonnes intentions, mais qui n'ont peut-être pas la mesure
complète des charges liées avec leur fonction, notamment?
Le
Président (M. Merlini) : Juste avant votre réponse, M. Dion,
vous allez me permettre, chers collègues, de saluer la présence dans la salle d'un ex-député de Verdun, ex-leader
adjoint du gouvernement et ex-ministre, M. Henri-François Gautrin, ex-député de Verdun. Bienvenue à la
séance de la Commission des institutions. Heureux de vous retrouver.
Merci d'assister à nos travaux.
Alors, allez-y,
M. Dion, pour la réponse.
M. Dion
(Michel) : Oui. Alors, excusez-moi, ça m'a dérangé dans...
M. Drainville :
Il nous faisait cet effet dans le temps aussi.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Charette :
Sur la formation...
M. Dion
(Michel) : Oui, la formation, oui. Alors donc, éthique et déontologie,
je crois qu'il faut que l'éthique soit
là. L'éthique, c'est une question de valeurs. Et, habituellement ou, en tout
cas, souvent, on inclut aussi, dans le champ de l'éthique, le respect des droits humains fondamentaux. Donc, c'est ce
qui est le champ habituellement occupé par l'éthique.
Évidemment,
il sera question de déontologie et il sera inévitablement question du Code
d'éthique et de déontologie. Il faut qu'il soit expliqué, mais il ne
faut pas que ça soit une simple formation qui soit l'explication seule du Code d'éthique. Il faut que ça soit une réflexion sur
l'éthique qui va nous amener au code, qui va éventuellement nous amener
à d'autres textes juridiques, mais il ne
faut pas que le juridique empiète sur l'éthique. L'éthique, ce n'est pas le
perroquet du juridique, ça ne redit pas les lois autrement, ça exige quelque
chose de meilleur que les lois. Donc, si vous avez un de code de déontologie professionnel, bien, il y a de
l'éthique professionnelle, à côté, qui n'est pas écrite. Et agir avec
éthique professionnelle, c'est agir de
meilleure manière que ce que le code de déontologie exige. Et c'est la même
chose avec les lois en général. Les
lois existent, bon, et il y a des choses qui ne sont pas prévues par la loi, et
c'est là que s'insère l'éthique.
Donc, il faut que cette
formation-là, d'après moi, soit minimalement la moitié de la formation sur
l'éthique pour qu'il y ait vraiment une
substance, là, autre que la simple explication des lois ou du code. J'ai énoncé
neuf à 15 heures parce que je
m'imagine que trois heures, ce n'est pas assez et que 30 heures, c'est trop
concrètement, pratiquement. Mais vous choisirez qu'est-ce qui est le
mieux. Mais c'est difficile, en bas de chiffres comme ça, de faire une
introduction sur l'éthique et d'amener quelque chose qui va aider les gens le
moindrement, donc faire les distinctions de base, là.
M. Charette : Qui, selon vous,
serait le plus à même d'assurer cette formation-là? Est-ce que ce serait le
Bureau du Commissaire à l'éthique directement?
M. Dion
(Michel) : C'est une très
bonne question. Normalement, les commissaires à l'éthique ou... replacez
ça dans des grandes entreprises qui ont des
officiers de l'éthique, là, ce sont ces personnes-là soit qui donnent la
formation, soit qui vont avoir à aller
chercher des formateurs à l'extérieur. Donc, je crois qu'il faut absolument que
ça passe par le bureau du commissaire,
que ce soit le commissaire qui le donne lui-même avec quelqu'un d'autre ou peu
importe, là, mais ça doit passer par là absolument, oui.
M. Charette : Je sais que le
temps dans mon cas est très limité. Peut-être aborder la question de la famille
immédiate. Le code d'éthique y fait
référence de façon très spécifique. Pour le moment, on entend, «famille
immédiate», un lien soit avec les enfants,
sinon le conjoint ou la conjointe. On a évoqué la possibilité d'étendre
davantage cette notion-là. Est-ce
qu'on est bien couverts, selon vous, actuellement, avec la notion d'enfants et
de conjoint, conjointe, ou s'il n'y aurait pas lieu, justement, là,
d'étendre à d'autres catégories?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Dion.
M. Dion (Michel) : Merci. Ça me
semblait limité quelque peu. Bien sûr, on a référé à la Loi d'interprétation québécoise, mais il reste que vous avez pleine
liberté pour élargir la notion. Comme citoyens, je vous dirais, quand on
voit ça, on se dit : Il me semble,
c'est limité, là. Il n'y a pas grand monde dans cette famille-là immédiate, là.
Il me semble, c'est plus large que
ça, la famille immédiate. Mais, bon, il y a des lois en particulier où ça va
aller plus loin. Donc, ici, je vous pose
la question : Est-ce que ça mérite
d'aller plus loin? Moi, j'ai l'impression qu'il faudrait y réfléchir, en tous les cas.
M. Charette : Si notre volonté
est de faire de notre code d'éthique le meilleur code d'éthique qui soit pour les élus, est-ce que je peux comprendre, de votre
réponse, qu'on aurait intérêt, justement, à étendre, que ce soit frères,
soeurs? Est-ce que ce serait à notre avantage pour se doter du code le plus
irréprochable possible?
M. Dion (Michel) : Oui, il
s'agira d'identifier la limite, là, jusqu'où on va. Les limites les plus
lointaines que j'ai vues, c'étaient les
cousins, ce n'étaient pas les enfants des cousins. Déjà, les cousins, on est
rendus assez loin, là. Donc, il faut arrêter ça à un moment donné, c'est
sûr, là. Mais effectivement de l'étendre un peu plus à une famille qu'on
considère comme immédiate, vous référez aux frères et soeurs, ça m'apparaît
tout à fait raisonnable.
M. Charette : C'est gentil,
merci. Ça complète mon temps d'intervention. Un gros merci.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Merci, M. Dion, d'être venu
nous rendre visite et de nous partager vos réflexions. Je pense que ça
va aider tous les collègues dans la poursuite de leur mandat.
Je vais suspendre quelques minutes, je vais
demander à M. Thierry Pauchant de s'avancer. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 46)
(Reprise à 16 h 48)
Le Président (M. Ouellette) :
On reprend. On reprend nos travaux. Nous recevons maintenant M. Thierry
Pauchant, qui est directeur de la Chaire de management éthique aux HEC de
Montréal. Bienvenue, M. Pauchant, à cette commission parlementaire.
Vous avez
assisté au témoignage de M. Dion, et donc vous savez que vous avez 10
minutes. Après ça, il va y avoir une période d'échange avec les députés
ministériels et les députés de l'opposition. Je vous reconnais et je vous cède
la parole.
M. Thierry C.
Pauchant
M. Pauchant
(Thierry C.) : Merci, M. le
Président. Bonjour, messieurs mesdames. C'est un plaisir d'être ici
aujourd'hui. J'ai fait des notes et, si ça vous dit, je pourrais vous les
envoyer avec plaisir.
Je vais faire
trois interventions. Premièrement, une réflexion globale sur le rapport,
deuxièmement, ses points positifs et, troisièmement, peut-être des
points moins positifs avec des recommandations.
Je commence
avec la réflexion globale. Il est très bien, ce rapport, sur le juridique ou
sur le déontologique, il est fort pauvre
sur l'éthique. J'interviens en éthicien sur l'éthique, comme Michel Dion vient
de faire, et je voudrais vous dire que le droit et l'éthique font partie de la même famille.
C'est comme un frère ou c'est comme une soeur, mais ils n'ont pas le
même caractère, ils n'ont pas le même sexe, ils n'ont pas les mêmes
comportements, ils sont différents. Tous les deux recherchent des comportements
moraux, bien sûr, mais on peut l'avoir à la fois par le droit, par l'éthique,
et les confondre arrive à des gros problèmes. Je crois que le rapport arrive à
des problèmes qui sont trop juridiques, trop déontologiques, pas assez
éthiques.
Le
commissaire, bien sûr, au titre I, à la page 22, parle des valeurs et principes
éthiques, rappelle que les valeurs de l'Assemblée nationale ne sont pas
des normes précises, etc., qu'on ne doit pas utiliser de façon mécanique, mais
il retombe tout de suite sur... les députés
et les ministres ne savaient pas en quoi s'en tenir et s'interrogeaient sur ce
qu'il aurait été dorénavant permis ou
interdit. Ceci est à la page 22. C'est un langage juridique que je comprends,
que j'honore. J'aime beaucoup le
droit, mais, quand vous parlez d'interdit ou de permis, c'est un langage
juridique blanc et noir qui ne touche pas aux zones grises de l'éthique,
et ça pose problème.
• (16 h 50) •
Il est
souhaitable, bien sûr, de faire ça, mais, si vous invoquez, je ne sais pas, moi, Adam Smith, ce
philosophe moral écossais, Emmanuel Kant en
Allemagne, Paul Ricoeur en France, Martha Nussbaum aux États-Unis,
Charles Taylor ici, au Canada, ce sont tous des gens qui font une grosse
différence entre le droit et l'éthique, qui n'est pas faite dans ce rapport.
Les droits
nous amènent à des devoirs dits négatifs, ce qu'on ne devrait pas faire,
obéissant à la loi et aux règles déontologiques.
L'éthique, ce sont des devoirs dits positifs, ce qu'on devrait faire si on est
bienveillant envers soi et envers les autres. C'est très différent.
Pour prendre
une métaphore et pour aller vite, le droit nous offre une grammaire, comment on
conjugue les verbes, est-ce qu'on met des «s» au pluriel, etc. L'éthique nous donne
un style. Pour prendre une autre métaphore, le droit et la déontologie, c'est des poutres ou une structure
d'une maison; l'éthique, sa décoration, sa chaleur de vivre. Il y a
un danger de confusion entre le frère
et la soeur, entre le droit et l'éthique. Est-ce qu'il devient trop
déontologique? On mène une société à une conception négative de la morale,
ce qui pose problème, encore une fois.
Obéir à la
loi aussi n'est pas admirable. Et je vais développer beaucoup ce concept d'admiration envers les députés,
qui manque actuellement, d'ailleurs. Obéir à la loi n'est pas admirable, c'est
un comportement qui est attendu. C'est-à-dire,
ne vous attendez pas que, parce que les députés respectent la loi, le droit, on
trouve une admiration envers votre travail.
Vous n'allez pas capitaliser en admiration en respectant le droit. Par contre,
en agissant de façon éthique, là, on arrive à un comportement dit admirable. Vous arrivez à développer de la
confiance dans le public, confiance, d'ailleurs, qui est rappelée par le
Commissaire à l'éthique en disant : C'est absolument essentiel de suivre
les valeurs de l'Assemblée nationale pour
avoir la confiance du public. La confiance ne s'achète pas simplement avec le
droit, elle se gagne aussi avec un leadership éthique qui va bien
au-delà du droit.
Être
admirable. Les recherches scientifiques, au Québec et ailleurs, relèvent que la
première pratique en éthique n'est
pas le Code de déontologie, mais le comportement que les gens vont utiliser
pour un leader. C'est-à-dire, c'est en modelant un comportement par
rapport à un leader, et les députés sont certainement des leaders importants
dans la population québécoise, qu'on arrive à rehausser la barre.
Malheureusement, dans ce rapport, on parle
surtout de répondre à des reproches. Il n'est pas simplement question de
répondre à des reproches. Là, c'est encore une fois un langage juridique,
déontologique de répondre à un reproche qui
est une défense. C'est une position défensive. Être éthique, ce n'est pas
simplement répondre à des reproches, mais
faire le bien, ce qui est tout à fait différent, encore une fois. Vous
comprenez que cet accent juridique lourd, et encore une fois que j'applaudis parce que la morale à la
fois décline du droit et de l'éthique, et vous comprenez que, là, on
marche sur une jambe et non pas deux jambes.
Tout à fait important, mais, de nouveau, il y a
une... de faire du droit, mais il y a une confusion entre le frère et la soeur,
la métaphore que j'ai prise, le droit et l'éthique. On ne bâtit pas la
confiance simplement en suivant des comportements attendus.
Tous mes commentaires généraux vont se décliner
dans les points positifs que je vais faire sur le rapport, j'en ai beaucoup, et
aussi les recommandations, j'en ai cinq.
Voici les points positifs avec lesquels je suis
en accord. Oui, il faut un pouvoir d'enquête du commissaire, c'est à la page 24. Oui, il faut faire une
différence entre les députés et les membres du Conseil exécutif, c'est à la
page 26. Oui, il faut accepter que les députés puissent exercer une autre
fonction, mais de façon beaucoup plus encadrée, et j'y reviendrai tout à l'heure, parce que le commissaire réagit à la loi
actuelle, bien sûr. Je crois que le commissaire pourrait dire quelque
chose sur la loi actuelle, ce qu'il omet de faire. J'y reviendrai.
Oui, il faut une déclaration des intérêts
personnels rendue publique, c'est à la page 15 du rapport, mais la recommandation du commissaire — 11 — des notes de certaines exceptions à la discrétion
du commissaire, j'aurai des questions à lui poser, de : Pourquoi il
y a des exceptions? Oui, il faut des politiques sur les dons et les avantages.
À la page 38, c'est assez bien fait. Oui, il
faut des politiques sur l'assiduité. À la page 40, c'est assez bien fait. Oui,
il faut une politique sur la
fiducie... du mandat sans droit de regard avec les recommandations de
modifications qui sont discutées à la page
50. Oui, il faut des politiques d'après-mandat à la page 54. Entre nous, soit
dit, dans l'industrie privée, elles sont beaucoup plus strictes que le
rapport, actuellement, dit. On pourrait, si vous voulez, revenir là-dessus.
Oui, il faut une obligation d'une formation
en éthique et en déontologie, recommandation... la 18 à la page 65. Et enfin,
oui, il faut pouvoir autoriser le
commissaire à imposer des sanctions, c'est la recommandation 22, page 71, mais
là avec beaucoup de doigté, sinon le commissaire se fait juge et partie
et lui-même devient en conflit... et rentre en conflit d'intérêts.
Voici mes cinq
recommandations. Premièrement, faire une meilleure balance entre le droit et
l'éthique. Vous comprenez que je trouve ce
rapport réellement trop lourd du côté droit et pas assez élevé du
côté éthique. Je ne cherche pas à remplacer le droit par l'éthique, j'essaie de
trouver une balance entre les deux. Je respecte le droit, et le juridique,
et le déontologique, mais il y a déjà une confusion dans le titre lui-même. C'est-à-dire,
vous appelez ça un code d'éthique et de
déontologie. Parler de code
d'éthique, ça s'appelle un oxymoron, c'est comme, par exemple, dire : Il y a des crevettes géantes. Une crevette, c'est petit, ça ne peut pas être géant, c'est
impossible. Soit les crevettes sont grandes ou soit elles sont petites. De parler de code d'éthique, vous
renvoyez à la norme et, en renvoyant à la norme et à la règle, vous
détruisez l'éthique et vous rentrez dans le
juridique. Il y a un problème d'appellation. Je propose tout simplement, puisque c'est le mot que vous proposez, de l'appeler Les valeurs
de l'Assemblée nationale et le Code de déontologie. C'est exactement le texte, mais, dès que
vous dites code d'éthique et code de déontologie, vous rentrez dans le problème
que je dénonce ou que j'essaie de vous alerter.
Deuxième
recommandation, bonifier la qualité des avis de l'unité du conseil
et avis du Bureau du commissaire. Il dit
qu'il a une unité de conseil et d'avis, mais, encore une fois, ce comité d'avis
et de conseil, à la page 59, c'est simplement des avis juridiques. Ça y est, on recommence à donner des avis.
J'aimerais que vous réfléchissiez à la possibilité de donner plus de moyens au Bureau du commissaire pour qu'il ait aussi des avis
éthiques et pas simplement des avis juridiques.
Troisième recommandation,
ouvrir le questionnement et la recherche du Bureau du commissaire envers des pratiques développées à l'international. J'ai été
très étonné, mais réellement très étonné parce que la France l'a déjà,
la Hollande l'a déjà, la Belgique l'a déjà, les États-Unis l'ont déjà. Qu'on se
pose la question si on doit avoir une des recommandations
à la page 2, page 24, de politiques sur le harcèlement sexuel, mais la réponse
est : Oui, il faut, bien sûr, le renforcer. Beaucoup de codes l'ont
déjà, beaucoup de démarches éthiques l'ont déjà, mais c'est évident qu'il faut
le faire. J'ai été surpris que le
commissaire le propose comme une recommandation à discuter. Pour moi, c'est une
obligation. Mais le problème, c'est qu'il y
a une espèce d'esprit de clocher qui regarde la province, qui regarde ce que
nous faisons. Nous avons fait
beaucoup de progrès depuis décembre 10, là, depuis décembre 10 qu'on a
commencé, mais il y a des portes qui ne sont pas encore ouvertes, qui le
devraient.
J'ai
fait un commentaire sur la recommandation 2 à la page 24. Je n'ai pas trouvé la
mention sur le harcèlement psychologique ou moral. Je n'ai pas à vous
dire qu'il y a eu des abus de langage, dans l'Assemblée nationale, très importants. Il n'y a aucune mention. C'est pour ça
que je parle d'esprit de clocher. Je crois qu'en regardant d'autres
pays, d'autres provinces, on arriverait
justement à trouver, dans ce code et dans cette démarche éthique, d'autres
choses à faire. Je suis certainement pour appuyer à la fois les
recommandations contre le harcèlement sexuel et contre le harcèlement
psychologique ou moral.
Quatrième
recommandation, réviser la loi permettant au député le cumul des fonctions.. Je
reviens au point que j'avais fait tout à
l'heure. Pour moi, les fonctions d'un député... est un emploi à temps plein. Je
n'ai pas à vous dire qu'actuellement
l'opinion publique aux États-Unis d'Amérique sur les députés est favorable
simplement à 7 % pour les députés;
environ 10 %, 12 % pour le Québec, juste après les vendeurs de
voitures d'occasion. Il faut réellement habiliter, faire quelque chose pour cette fonction, et cet
emploi merveilleux, et ce métier fantastique que vous faites de député.
Il est nécessaire de redorer l'admiration qu'on fait. Je crois que de cumuler
des fonctions n'aide pas. Je suis professeur des universités, j'ai été vice-président dans l'industrie privée. Je ne suis
plus vice-président dans l'industrie privée. Quand j'ai voulu retourner au privé, j'ai dû refaire mes
galons parce qu'avant j'étais universitaire. J'ai payé le coût. Je crois que
vous pouvez accepter de payer le coût d'être en politique.
Cinquième
recommandation, accroître le caractère admirable de la fonction de député. Je
finis avec ça. Pour établir des jalons, je
vous propose de faire une recherche scientifique — après tout, je suis universitaire. Et la
recherche scientifique que je vous propose,
c'est ceci : que tous les partis politiques et même les indépendants nous
disent quels étaient les députés admirables que vous avez eus, qui sont
aujourd'hui à leur retraite. Étudiez ces gens, trouvez les qualificatifs, trouvez les comportements, trouvez
les attitudes que ces gens admirables avaient dans votre profession, et
je vous parie que ce que vous avez trouvé va être différent des valeurs de
l'Assemblée nationale que vous allez pouvoir complémenter.
Et à ce moment-là vous allez balancer votre code de déontologie avec réellement
une attache plus éthique d'essayer de
remonter votre profession au lieu de simplement vous défendre de reproches
attendus. Merci de votre attention.
• (17 heures) •
Le Président
(M. Ouellette) : Merci, M. Pauchant. Je reprends votre
dernière remarque, et on a eu la visite d'un il n'y a pas tellement longtemps,
il y a quelques minutes.
Bon,
effectivement, si vous voulez faire parvenir au secrétariat de la commission les notes, ça va nous faire plaisir.
Et ne vous gênez pas, en cours d'audition,
si vous avez des commentaires. Tout ce qui pourra nous parvenir nous
aidera dans notre réflexion. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
M. le Président, nous avons deux blocs? Juste pour être...
Le Président
(M. Ouellette) : Et vous avez... Ça n'a pas changé, M. le député
de LaFontaine.
M. Tanguay : 14, 12... 30. O.K. C'est bon. Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Pauchant, pour le temps que vous
avez pris à la réflexion et, aujourd'hui, de venir échanger avec nous.
Vous
nous invitez à nous élever, je crois — et
je reprends la balle au bond, je vais le dire comme ça — au-delà d'un code, donc de nous élever. Et le dernier exemple que vous avez souligné
était intéressant lorsqu'il s'agissait d'identifier dans un autre forum
que la commission, ici, Commission des institutions, et à l'intérieur, en bout
de piste, d'un autre document que le code
d'éthique... de nous élever par l'identification de modèles. Et il s'agit pour
nous, les députés, et j'aimerais vous
entendre là-dessus, peut-être en nous donnant quelques pistes tangibles
d'atterrissage de cette idée, à élever, donc, les pairs qui le méritent comme étant des modèles en matière
d'éthique. Comment, nous, pourrions-nous traduire ce désir-là, de ce que
vous en savez, de ce qui est le quotidien du député?
Le
Président (M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : On le fait dans beaucoup d'organisations. Donc, ce
n'est pas une chimère que je dis, ce n'est
pas un voeu pieux, là, non, je le fais professionnellement dans différentes
organisations. D'autres collègues le font
déjà dans d'autres organisations. Ce que nous faisons, c'est basé réellement
sur le leadership, c'est-à-dire basé sur les choses qui se sont passées dans le passé, de documenter comment ces gens
ont été vus comme admirables puisque faire quelque chose d'éthique attire l'admiration. Faire quelque chose de
droit, de juridique, ne remplit simplement que des attentes. Mais ça, ça demande réellement un effort
de recherche. Ça demande réellement que vous vous demandiez : Moi,
en tant que député, quels députés qui ont
pris leur retraite, comme ça, il n'y a pas de conflit d'intérêts, étaient
admirables pour moi et pourquoi?
Et vous voyez cette
question, pourquoi j'ai regretté que le commissaire essaie de baisser les
questions. Et il vous charge — peut-être vous lui avez parlé, donc il
répond à ce que vous lui avez parlé — de dire : Moi, je faisais un code, mais il y a des ministres et des députés qui
sont venus le voir en lui disant : Il fallait leur dire des interdits et
des permis, là. Donc, il vous charge que
vous êtes binaires vous-même : blanc, noir. Je ne pense pas que vous
l'êtes, je crois que beaucoup de vos
collègues ne l'étaient pas et je crois que de faire une recherche approfondie à
l'Assemblée nationale sur les députés qui étaient admirables, de trouver
justement ces jalons, serait réellement intéressant et mettrait le Québec
peut-être à l'avant-garde de l'éthique nationale.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Et on touche, M. Pauchant, à l'essence même. Et peut-être qu'on peut le
déplorer de la politique, oui, au
Québec en 2016, où il n'y a pas beaucoup de place entre le gris clair et le
gris foncé : vous êtes correct, vous n'êtes pas correct. Et il y a un sentiment de survie chez
tous les élus, de dire : Bien, que quelqu'un en autorité me dise si je
suis correct, et, si je suis correct,
je vais garder une preuve qu'il m'a dit que j'étais correct, et, le cas
échéant, je vais sortir la preuve que je suis correct, puis je vais être
politiquement sauf.
Alors,
il s'agit en quelque sorte — et vous voyez bien, là, pour nous, pour les
députés, les 125 collègues — d'un
instinct de survie qui fait en sorte que... Donnez-nous un code, donnez-nous
une réponse claire.
Et
ça, je vous dirais, peut-être, malheureusement, si vous me permettez
l'expression, c'est notre réalité de tous les jours aujourd'hui où il y
a un débat, oui, parlementaire, mais qui est médiatique. Et on vous dira... pas
par personne interposée, on vous dira si
vous avez eu tort ou raison, et il y aura un prix politique à payer, et cela,
malheureusement.
Et
je me suis permis de faire une petite recherche sur vos écrits passés et une
entrevue que vous donniez en avril 2004 au Devoir et je
trouvais là un écho à ce que nous discutons, autrement dit une approche très manichéenne du bien et du mal. Et
vous disiez ce que je m'étais laissé dire, moi, il y a deux ans, et je trouvais
ça dangereux, comme commentaire, mais
vous l'avez repris en vos propres mots : «...une codification à outrance
engendre des conséquences négatives.» Et, autrement dit, faire tellement
de règles, avoir un cadre tellement fixe, tellement serré que seuls des
superhumains pourraient ne pas fauter et que, ce faisant, régulièrement, de nos
collègues seraient pris à fauter, ce qui évidemment ajouterait au cynisme.
Alors, j'aimerais peut-être vous entendre là-dessus, comment, nous, on pourrait
peut-être prendre de l'élévation dans ce contexte-là.
Le
Président (M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Merci pour la question.
Vous me parlez de survie. Bien, dans l'industrie privée il y a aussi des impératifs de
survie, et pourtant ils y arrivent. Alors, l'argument de survie n'incombe pas
simplement aux députés. Et, oui, je
sais que la vie politique peut être ingrate et difficile. Bien, ceci étant
dit, bien sûr, il faut des règles. J'ai commencé en disant : L'éthique et le droit
sont frère et soeur, font partie de la même famille, et c'est pour un engagement
moral. On s'entend, là, il n'est pas question de ne pas avoir ces règles-là.
Moi, je veux parler
de science, tous les écrits de science, scientifiques. Il y a énormément de
recherches scientifiques qui ont été faites. Au plus vous augmentez les règles,
au moins il y a un questionnement éthique. La corrélation
est positive. Je répète, au plus vous augmentez les règles, au plus vous
diminuez le comportement éthique parce que les gens ne réfléchissent plus. C'est-à-dire qu'ils obéissent à la directive, et, quand vous obéissez à la
directive, les cellules grises
s'arrêtent là. Vous arrivez à un comportement, on appelle ça du béhaviorisme,
et vous acceptez la règle.
Je vais vous le
mettre en termes plus crus encore. Si les règles, maintenant, sont faites par
des gens qui vous veulent du mal ou vous
faire du mal, vous suivez les règles qui vous font du mal tout en vous disant
qu'en fait vous vous fassiez du bien.
C'est pour ça que les recherches montrent que la déontologie seule mène à des
travers très importants. Et c'est
pour ça que je me permets de dire que le commissaire à l'éthique, aujourd'hui qui est avocat, qui est juriste, qui a travaillé dans beaucoup
de ces domaines, encore une fois, ceci n'est pas un problème, devrait aussi
contrebalancer ce côté du travers du droit.
M. Tanguay :
Et peut-être juste rapidement, M. le Président, on voit le rôle du commissaire
comme étant un quasi-juge pour nous. Alors, nous nous imbriquons parfaitement
dans ce que vous dites, qui est peut-être un travail...
Et,
à la limite, je vous dirais, dans les discussions entre collègues qui... parce que
c'est nommé aux deux tiers de l'Assemblée nationale, la personne qui
sera commissaire. Bien, connaît-elle ou connaît-il le droit et est-elle
avocate, est-il avocat? Ah! parfait, il ou elle a été juge dans le passé, alors
nous nous inscrivons.
Mais,
encore une fois, c'est un peu naviguer dans des eaux où on veut de plus en plus
d'assurance. Beaucoup de collègues nous disent : Bien, je ne le savais
pas et, si ça avait été précisé, j'aurais agi différemment. Mais je vois
votre invitation à s'élever, et à ne pas tenter de tout codifier comme des
petits robots et, en bout de piste, manquer la cible.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant... Ah! oui?
M. Tanguay : Il y avait
la collègue de... qui voudrait continuer. Crémazie.
Le
Président (M. Ouellette) : Oui, je vais aller à Mme la
députée de Crémazie
dans deux secondes. Je voulais juste voir si vous aviez un commentaire
sur le commentaire de M. le député de LaFontaine.
M. Pauchant (Thierry C.) : Je
crois qu'on se comprend.
Le Président (M. Ouellette) :
Bon, bien, c'est bon. On va à Mme la députée de Crémazie.
Mme Montpetit : Si tout est limpide, c'est parfait. Je vous
remercie, M. le Président. Merci pour votre présentation des plus
intéressantes. Sincèrement, vous devez être un... en fait, fort intéressant.
Petite information, pour votre information personnelle aussi, je pense que ça va être
pertinent. Vous avez soulevé la question du harcèlement psychologique et
harcèlement moral. Puis là c'est information suivie d'une question.
Ledit rapport du commissaire a été déposé en
février 2015, et rapidement il y a un comité qui a été formé à l'Assemblée
nationale, dans le contexte aussi qui avait lieu à l'époque, et qui a déposé,
en juin 2015, une Politique relative à
la prévention et à la gestion des situations de harcèlement au travail. Donc, pour que vous
sachiez effectivement... Et nous étions, à l'époque... je ne sais pas si,
depuis, il y a eu une évolution, mais nous étions le deuxième Parlement au
Canada à déposer une telle politique. Donc, il
y a encore de nombreux Parlements
qui... Je pense que le premier, c'était le... En tout cas, il en reste plusieurs qui n'en ont pas à l'heure actuelle. Et donc, c'est le harcèlement. On s'est basés sur les lois des
normes du travail et harcèlement psychologique, là, qui incluent tous les
motifs de l'article 10 de la Charte des droits de libertés de la personne.
Mais je serais quand même curieuse de vous
entendre par rapport à ça, sur le commentaire. Vous souleviez, si... bon, ce n'est pas un... Si on allait vers les
valeurs de l'Assemblée nationale, est-ce que ce genre de politique là devrait
être justement... faire partie d'un code d'éthique ou, en tout cas, d'un document
qui s'appellerait Valeurs de l'Assemblée nationale?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
• (17 h 10) •
M. Pauchant (Thierry C.) : Sur
le problème de harcèlement sexuel ou harcèlement moral, on peut aborder certaines de ces problématiques par un code de déontologie. Donc, on peut le faire. Il y
a plusieurs pays dans le monde — je suis content qu'il y ait
différentes provinces au Canada qui le fait déjà — qui peuvent vous aider
en la matière. Et je recommanderais au
commissaire de prendre note, de sortir de l'esprit de clocher et de regarder
ailleurs comment les gens s'y sont
pris. Après, si on parle d'éthique, ça,
c'est autre chose. Justement, l'éthique demande justement du questionnement.
À HEC Montréal, nous formons nos gestionnaires à
se poser des questions, à ne pas simplement obéir à des normes. C'est l'enseignement qu'on leur donne. Nous avons fait un questionnaire
qui permet de repérer comment les gens le voient. Je travaille pour des organisations, et si, dans le questionnaire,
des gens qu'on veut recruter au
niveau V.P. me disent : L'éthique, c'est répondre aux normes
du code, vous savez quoi? On va recommander de ne pas embaucher ce vice-président parce que cette personne fait
preuve justement qu'il a besoin, elle a besoin de zones blanches, et de
zones grises, et noires. Et nous, on a
besoin de gens très sophistiqués qui se donnent la peine de se poser des
questions. Et donc, quand, au questionnaire, on répond : L'éthique
répond simplement aux normes du code de déontologie, pour nous, c'est une
lumière rouge qui s'allume en disant : Nous avons là quelqu'un qui n'est
pas assez complexe pour le travail qu'il doit faire.
Je crois
qu'un travail de député est assez complexe merci pour ne pas simplement
s'arrêter au blanc et au noir. Et donc
le premier, c'est que, oui, vous pouvez combler certaines choses du point de
vue déontologique, mais ça va vous demander beaucoup, en effet, de
questionnement.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Crémazie.
Mme Montpetit :
Je vous remercie. Ça complète bien la discussion. Puis je voulais vous en
informer aussi pour votre gouverne personnelle également.
M. Pauchant (Thierry C.) : Très
bien, merci.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci. Puis je reviens là-dessus, M. Pauchant, et, ceci dit, la
complexité, la nécessité de raffiner l'analyse.
Je ne veux pas être réducteur du travail de nos amis les médias, mais, lorsque
nous sommes devant trois caméras, nous
avons sept secondes pour expliquer une situation complexe, et c'est le jeu
politique. Alors, croyez-vous — je vous pose la question — que ces principes se traduisent, ou
peut-être avec plusieurs adaptations, à la réalité politique qui est la
nôtre? J'ai sept secondes pour prouver à la population, qui décidera peut-être
de ne pas me réélire, si, oui ou non, j'ai manqué à mon devoir.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : M. le député
de LaFontaine, bienvenue dans le monde. Moi, je dis à mes étudiants de doctorat : Vous rentrez dans un ascenseur, et
puis vous avez 30 secondes pour expliquer votre thèse de doctorat qui
fait 650 pages. Trouvez un moyen. Ce n'est pas simplement la problématique
des députés, ça.
Personnellement,
je trouve que vous, les gens en média... Je vais me permettre de dire quelque
chose. Je crois que vous êtes
obnubilés par comment la presse et les médias vous regardent. Je crois que ça
serait cool si vous pouviez un petit peu
ralentir sur : Ho! qu'est-ce que Le Soleil, et Le Devoir,
et puis La Presse ont dit aujourd'hui? Ça serait bien. Pour
les gestionnaires, je leur donne le conseil de dire : Arrêtez d'éteindre
des incendies chaque jour. À force d'éteindre des incendies, vous faites un métier de pompier. C'est merveilleux, un
métier de pompier, c'est très important, mais il y a d'autres choses que d'éteindre des incendies. Il y
a aussi de la prévention d'incendie, comment on construit un building,
peut-être qu'est-ce que vous mettez comme pare-feu, etc. Et je trouve que votre
métier, vous êtes réellement focussés sur les médias d'une manière
épouvantable. Vous vous levez le matin, vous regardez les lignes de presse,
mais je les ai aussi, là. Bon, peut-être ce serait bien d'avoir une réflexion
entre vous et de dire : Comment on peut faire?
En entreprise privée, il y a des gens qui
disent : Nous n'allons plus réagir aux marchés financiers qui nous demandent d'avoir des rendements dans trois jours.
On va faire un plan stratégique qui va le faire sur six mois. On va
passer de trois jours à six mois, sinon on n'arrive pas à vivre, là. C'est les mêmes problématiques. «Welcome to the world»!
M. Tanguay :
Merci.
Le Président (M. Ouellette) :
On va faire transcrire vos propos, M. Pauchant, puis on va les passer aux
125 députés. M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Merci,
M. Pauchant. Bienvenue parmi nous. Sur la recommandation 11, qui se
lit comme suit : «Que le code soit
modifié pour permettre aux membres de l'Assemblée nationale d'aviser le
commissaire des raisons pour
lesquelles ils souhaitent que certains renseignements qui les concernent ou qui
concernent les membres de leur famille immédiate
ne soient pas inscrits au sommaire», vous avez exprimé des réserves, n'est-ce
pas, sur cette recommandation 11. Est-ce que vous pouvez élaborer
un petit peu, s'il vous plaît, là-dessus?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : D'un côté, le
commissaire... En éthique, il y a des règles de pouce, et, l'une des
règles de pouce qu'on a en éthique, c'est de dire : Transparence, c'est
bien.
M. Drainville :
Transparence comment?
M. Pauchant (Thierry C.) :
Transparence, c'est bien, d'être transparent, de donner l'information. Puis là
je comprends que c'est mis sur des sites Web, etc. Donc, c'est transparent.
Moi, je
m'inquiète un petit peu que le commissaire dit : Oui, mais je vais prendre
quand même une réserve de faire que certaines informations ne seront pas
transparentes. C'est la question que je vous pose, et c'est à vous à débattre,
en tant que députés, pour essayer de comprendre qu'est-ce que ça veut dire.
C'est pour ça que j'ai réagi comme ça, M. Drainville.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Donc, vous nous appelez un petit
peu à la prudence. Vous nous dites : Avant de donner suite à cette recommandation, posez-vous la
question : Est-ce qu'un code d'éthique doit assurer plus ou moins de
transparence? Si vous en venez à la
conclusion que ça doit assurer plus de transparence, je vous invite, à ce
moment-là, à être prudents avec la recommandation 11.
M. Pauchant (Thierry C.) : Oui.
M. Drainville : Vous pourriez nous dire aussi que
vous n'êtes pas d'accord avec la recommandation 11. Ce serait plus
direct et plus clair, non?
M. Pauchant
(Thierry C.) : Je comprends
aussi la nécessité. Il y a des fois des choses qui sont difficiles à dire
ou qui mettraient les gens dans l'embarras.
Encore une
fois, c'est... Vous voyez la question que vous me proposez? Et vous me demandez
d'être plus clair, vous me demandez
de donner une affirmation claire et non ambiguë sur un problème éthique. Je
vous renvoie la question en disant : Il faut se questionner, il
faut utiliser du bon sens avec une équipe de députés qui regarde si c'est
nécessaire.
C'est le problème, avec le droit et
l'éthique. L'éthique est fuyante, c'est du style. Au plus vous rendez
l'éthique claire, au plus elle se rapproche du droit. Au plus elle se rapproche
du droit, au moins vous êtes dans l'éthique.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Sur la recommandation 3 : «Que les membres de
l'Assemblée nationale procèdent à un examen, au regard des principes éthiques et des règles déontologiques établis par
le code, de la pertinence de maintenir la possibilité, pour les députés, d'exercer simultanément plus
d'une fonction», vous y avez fait référence dans les échanges que vous
avez eus avec la partie gouvernementale,
mais, quand vous nous mettez en garde là-dessus... Pouvez-vous aller un petit
peu plus loin que ce que vous avez déjà dit?
M. Pauchant
(Thierry C.) : Moi, j'ai l'impression — et c'est simplement
une impression que j'ai — que
le commissaire se dit : Puisque la loi
permet le cumul, je vais essayer de donner des restrictions à ce cumul pour des
questions de conflit d'intérêts. C'est, à mon
avis, la position qu'il prend. Moi, je prends une autre position en
disant : Le commissaire, pour lui aussi, pourrait prendre la
position de questionner le fondement de cette loi et se demander si on ne
devrait pas la changer.
M. Drainville :
Si on ne devrait pas mettre fin au cumul?
M. Pauchant
(Thierry C.) : Si on ne devrait pas modifier. Et, je vais vous le
dire — vous
me demandez des réponses claires — je préfère une loi qui l'interdirait avec
des exceptions qu'une loi qui le permette avec des restrictions. Ceci
est clair.
M. Drainville :
Très bien. Sur les politiques d'après-mandat, est-ce que vous avez des
observations un peu plus précises à nous soumettre?
M. Pauchant (Thierry C.) : Moi, j'ai trouvé que le commissaire allait réellement
dans le bon sens. Nous avons eu, à
l'Assemblée nationale du Québec, des problèmes importants par différents
membres de cette Assemblée qui avaient des problématiques en la matière,
et je crois que ça va dans le bon sens. J'ai fait la remarque, par contre, que,
dans le privé, il y a, des fois dans
certaines industries, des règles extrêmement strictes. Par exemple, si vous
êtes dans l'industrie du jeu vidéo,
et si vous avez travaillé pour des jeux vidéo, et si vous quittez la firme,
vous ne pouvez pas travailler pour une firme
de jeux vidéo pendant une période de deux ans. Ce sont des règles extrêmement
strictes. Alors, à vous de voir où vous allez mettre le jalon, mais il
est évident qu'il nous faut des politiques strictes et, oui, là, déontologiques
pour éviter des abus.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Oui. Sur la recommandation 22, qui se lit comme
suit : «Que la Loi sur l'Assemblée nationale soit modifiée pour déléguer au Bureau de l'Assemblée
nationale le pouvoir d'autoriser le commissaire à imposer des sanctions,
à la suite d'une enquête tenue en
application des règles et concluant qu'un manquement a été commis par un membre
du personnel d'un député ou d'un cabinet de l'Assemblée nationale.
«Que la Loi sur
l'exécutif soit modifiée de la même façon pour permettre, en application du
règlement, l'imposition d'une sanction, en cas
de défaut, à un membre du personnel d'un cabinet ministériel.» Là-dessus aussi,
si je vous ai bien compris, il y avait un appel à la prudence.
Le Président
(M. Ouellette) : M. Pauchant.
• (17 h 20) •
M. Pauchant
(Thierry C.) : C'est une question de droit, et je ne suis pas juriste.
Mais il me semble que d'être partie prenante
dans l'enquête... puisque c'est le commissaire qui peut faire une enquête, donc
il fait faire l'enquête comme il
semble bon avec ces personnes. Il me semble que de faire que celui qui fait
l'enquête et qui est responsable de l'enquête, donc qui rassemble les
preuves, soit aussi la même personne qui doit le sanctionner pose un problème
au point de vue juridique.
Et donc moi, je vous
pose la question, je ne suis pas juriste : Est-ce que vous, vous êtes, en
tant que député, confortable avec cette
position de juge et partie? Je pose la question. Pour moi, elle me rend inconfortable. Je ne suis
pas juriste, et là je ne vais pas m'avancer
pour dire : Il faut le faire ou non. Je peux vous donner des conseils
en éthique parce que c'est ma profession. Il m'est difficile de vous
donner des réponses claires du côté du droit.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Très bien. J'aimerais maintenant, M. Pauchant... Il
me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président
(M. Ouellette) : 10 minutes.
M. Drainville :
J'aimerais aller sur, dans le fond, la ligne de force qui traverse vos propos,
c'est-à-dire le renforcement de la dimension
éthique par rapport à la dimension juridique, le meilleur équilibre,
disiez-vous, entre le droit, et l'éthique, et tout ce concept que je trouve
intéressant, c'est-à-dire de rendre la fonction de député admirable aux
yeux de nos concitoyens.
Il nous reste
10 minutes, là, M. Pauchant. Si vous aviez un ou deux conseils ou une
ou deux recommandations très précises,
un ajout, par exemple, que vous souhaiteriez que nous fassions au code, un
ajustement, là je vous laisse nous conseiller,
puisque c'est pour ça que vous êtes ici, entre autres, mais je pense qu'on a
souhaité vous entendre parce qu'on souhaite puiser dans vos
connaissances. Alors là, je vous demande : Est-ce qu'il y a une ou deux
recommandations précises, là — je ne suis pas dans le discours
philosophique, je suis vraiment dans des choses très précises — qu'on pourrait ajouter ou modifier qui contribueraient à
renforcer la dimension éthique et qui contribueraient donc à atteindre
l'objectif de rendre notre fonction de député plus admirable, comme vous le
dites?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant (Thierry C.) : Bon,
dans la recommandation, M. Drainville, j'ai déjà dit des choses. Personnellement, je serais vous, je changerais le
titre pour ne pas confondre code de déontologie et code d'éthique, là.
J'ai dit que c'était un oxymoron, à vous de voir si, pour vous, ça l'est.
M. Drainville : ...les
valeurs de l'Assemblée nationale et le code de déontologie, hein?
M. Pauchant
(Thierry C.) : Oui, ça
serait déjà mieux. Mais je vais me permettre, puisque vous m'en donnez l'occasion, de dire quelque chose aussi sur les
valeurs. J'ai aussi proposé de faire de la recherche appliquée et de
donner des moyens au commissaire de faire de
la recherche appliquée sur les députés qui étaient admirables. On ne peut pas
le faire par philosophie, on ne peut pas le faire par grands traits, on
ne peut pas le faire par grands principes, il faut que ça soit empirique, il
faut que ça vienne de votre profession. Pourquoi vous, vous, vous, vous
dites : Celui-là, celle-là, elle était admirable?
Alors, moi,
j'ai proposé : Donnez donc des ressources au commissaire qu'il fasse une
recherche en coopération avec une
université — il y en
a plein au Québec qui sont très douées dans le domaine de l'éthique — et allez chercher des qualificatifs
de ces députés qui étaient admirables dans le passé et qui vont l'être encore
demain, ça vous donnera des balises fortes,
solides, documentées sur lesquelles vous allez pouvoir faire quelque chose. Je
ne pense pas qu'on peut le discuter d'une façon philosophique.
Maintenant, sur les valeurs. Et vous ouvrez
cette porte-là. Je l'ai dit à demi-mot tout à l'heure, j'ai dit : La recherche que je vous propose, je vous suggère que
ce que vous allez découvrir des députés dits admirables, ça va peut-être
être complémentaire ou différent des valeurs de l'Assemblée du Québec.
Laissez-moi vous dire, sur les valeurs, j'ai un
collègue tout à l'heure qui a dit : L'éthique, c'est des valeurs. C'est un raccourci qui est dangereux parce qu'on
se rend compte qu'en recherche quand vous mettez des valeurs ensemble ces valeurs s'opposent. C'est-à-dire que, si vous
obéissez à la valeur une, vous allez peut-être être en contradiction
avec la valeur deux, à la valeur trois. Par
exemple, la valeur d'égalité, d'un côté, qui est fantastique, égalité devant le
droit, etc., et la valeur de liberté s'opposent à un certain moment, et
il faut la contrebalancer avec une autre valeur.
Il me semble
que l'exercice que vous allez faire ou que vous pourriez faire sur les députés
va bonifier la charte des valeurs, va bonifier les valeurs de
l'Assemblée nationale, va pouvoir enrichir ça non pas par des principes
généraux, intellectuels, mais des attitudes
et des données que vous allez collecter de façon empirique et factuelle,
ordonnée, concrète sur l'activité de votre métier. Je vois que c'est une
richesse fantastique que vous pourriez...
M. Drainville : ...cette
idée, là, d'identifier, d'une façon qui resterait à définir, des
parlementaires, mettons, inspirants, qui
font consensus par l'action qu'ils ont menée, par le type de travail qu'ils ont
incarné, et, à partir de cette analyse ou étude, d'en tirer un certain
nombre d'enseignements qui pourraient servir par la suite à enrichir le code,
enrichir la section des valeurs, en fait, sur le code.
M. Pauchant (Thierry C.) : Ça
pourrait enrichir les valeurs, vous avez bien compris. C'est-à-dire que je me refuse de vous donner une réponse théorique avec
des balises : petit un, petit deux, petit trois. Je vous dis : C'est
de la zone grise, allez étudier cette zone grise, et elle deviendra
moins grise. Et, avec ce moins gris, vous allez pouvoir faire quelque chose. C'est la réponse que je vous donne. Je ne pense pas qu'il soit possible
de donner des grandes... On va arriver à
quoi? On va arriver : Bien, ce sont des gens qui sont généreux, ce sont
des gens qui sont justes, ce sont des gens qui sont... et hop, je
reconstruis la liste des valeurs, là.
On le sait,
en leadership, si vous dépassez sept, les gens ne le retiennent
pas. Là, vous êtes déjà à huit, neuf, là. Je vous parie que la
moitié, les trois quarts des députés n'arriveraient même pas à dire ces
neuf, si je demandais, là : Quelles sont les valeurs de l'Assemblée nationale?
C'est-à-dire, il faut faire très attention à ça.
Et,
deuxièmement, ces valeurs s'opposent aussi. Un travail réellement important sur
le métier de votre profession serait réellement intéressant et vous
donnerait une longueur d'avance sur beaucoup d'assemblées nationales à travers
le monde.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Vous
vous imaginez bien que ce ne serait pas évident pour... enfin, ce serait un
exercice très inhabituel, et, à ma connaissance, ça ne s'est jamais fait, là.
Ça me fait penser un peu, puis je ne veux absolument pas déprécier
la suggestion que vous faites, mais ça me fait penser un peu, M. le Président,
à cette enquête qu'on fait parfois dans le
domaine de la formule 1 quand on demande à tous les pilotes d'identifier
qui, selon eux, est le meilleur d'entre
eux. Ils le font d'une façon anonyme, et on ne sait pas qui a voté pour qui,
mais, à la fin de la journée, il y a un pilote qui sort et qui est le meilleur parmi eux. Comparaison un peu boiteuse,
je l'admets, je l'ai dit d'emblée, mais c'est un peu ça que vous nous demandez. Vous nous demandez, dans
le fond, comme élus, peu importe le parti, d'identifier, mettons, à
partir d'une liste qui pourrait être soumise, mettons... chaque caucus pourrait
soumettre un certain nombre de noms, probablement
de parlementaires qui ne siègent plus pour éviter les conflits d'intérêts,
entre guillemets, et là l'ensemble des parlementaires
pourrait être appelé à en choisir un certain nombre, toutes couleurs politiques
confondues, par exemple.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Et moi, je
vous ai vus aller, là. Vous avez eu des députés ou des anciens ministres
qui sont décédés, et tous les partis
politiques, même les indépendants, ont reconnu, même s'ils étaient des ennemis
politiques, que c'était un homme ou une
femme qui avait vraiment beaucoup de valeurs. Vous vous entendez aussi quelque
part, là, au-delà des agendas politiques, et c'est ça qu'on essaie de
chercher. Et ça, ça vous permettrait d'avoir une liste de valeurs qui est
beaucoup moins abstraite de ce que vous avez aujourd'hui.
Et je sais
que vous avez travaillé beaucoup sur cette liste abstraite. Je sais que ça a
été dur pour vous d'établir les valeurs
de l'Assemblée nationale, c'était quoi, là. C'est beaucoup de travail, là, mais
c'est un travail aussi, à un certain moment, qui se sclérose lui-même.
On le sait, en leadership, si vous arrivez avec
12 qualificatifs de leadership, c'est comme si vous n'en aviez pas. Vous sclérosez. C'est trop complexe, on n'y
arrive pas, là. Mais par contre d'avoir une base empirique, concrète, documentée par des gens, par des noms, qui peut
être attachée à des noms, à des femmes, à des hommes qui ont servi cette
nation à travers l'Assemblée nationale, ça lui donnerait une force, réellement,
et, oui, on pourrait redorer le blason du métier de député, oui.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Marie-Victorin, 2 min 30 s.
M. Drainville : Très bien. C'est intéressant,
M. Pauchant. Il nous reste seulement deux minutes. J'aimerais ça retourner à la recommandation 22, quand vous
dites : Est-ce que les députés seraient à l'aise pour déléguer au
Bureau de l'Assemblée nationale le pouvoir d'autoriser le commissaire à imposer
des sanctions contre un membre du personnel d'un
député ou un membre du personnel d'un cabinet ministériel? Vous posez la
question. Si ce n'est pas au Bureau de l'Assemblée
nationale ou encore au commissaire, qui en aurait le pouvoir délégué, d'imposer
des sanctions, qui ça pourrait être à
ce moment-là? Qui pourrait imposer ces sanctions, si ce n'est pas le Bureau de
l'Assemblée nationale ou si ce n'est pas le Commissaire à l'éthique, qui
s'est vu déléguer ces pouvoirs-là par le Bureau de l'Assemblée nationale?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant (Thierry C.) : Oui.
Bien, entre autres, vous avez bien entendu les réserves que j'ai faites sur le
commissaire avec juge et partie. Je ne connais pas assez votre mécanisme
interne pour vous répondre.
• (17 h 30) •
M. Drainville : C'est bien. Je vous ai bien entendu
également sur le fait que vous trouvez très curieux, je pense que le mot est... je pense que c'est même un
euphémisme que de dire que vous trouvez curieux qu'il n'y ait pas de
politique en matière de harcèlement, de
harcèlement psychologique et moral, comme vous le dites, hein? C'est bien le
mot que vous avez utilisé, hein, harcèlement moral?
M. Pauchant (Thierry C.) :
Sexuel, psychologique et moral.
M. Drainville : Juste en
terminant, du harcèlement moral, c'est quoi, par exemple?
M. Pauchant (Thierry C.) : Abus
de langage, faire que la personne vous en doit une, lui imposer à ne réagir
simplement que par un code de déontologie ficelé, ça en est.
M. Drainville : Comment
vous dites, la fin? J'ai mal saisi.
M. Pauchant
(Thierry C.) : D'enforcir
que des gens, dans une entreprise ou dans une organisation, confondent que l'éthique, c'est simplement répéter les règles
qu'on avait faites avant, c'est une sorte de harcèlement moral, oui,
parce que vous faites régresser la personne.
Il y a des
études, hein, qui existent, là. À force de faire ceci, c'est-à-dire à répresser
les gens, vous les enfermez dans un
cocon, et ils ont du trouble psychologique. Il y a des études qui démontrent
ça, que, si vous donnez plus de liberté, plus la possibilité à l'individu d'utiliser son intelligence, plus de techniques
de dialogue, comme on fait actuellement, de débat, là, la personne peut
fleurir et elle se sent moins harcelée moralement. Oui, le mot est juste.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Pauchant. Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols :
C'est exactement sur... Le point qui avait piqué ma curiosité, c'était entre
autres... Vous aviez fait la mention
entre le harcèlement psychologique et le harcèlement moral, et ça a piqué ma
curiosité. Vous avez commencé à nous donner des
exemples, là, justement, pour différencier, mais pouvez-vous élaborer un peu
plus sur comment on pourrait intégrer ça,
justement, dans notre... on va l'appeler notre code des valeurs de l'Assemblée
nationale et notre code de déontologie?
M. Pauchant (Thierry C.) : Dans
le développement moral des gens — et il existe plusieurs théories et pas simplement
des théories intellectuelles, mais aussi des documentations scientifiques — il
existe plusieurs niveaux. On va les appeler 1, 2, 3, 4, 5.
Si vous êtes
à un niveau de développement moral 5 et si on vous oblige à intervenir à
un niveau de développement 1, on
vous fait du mal, et vous allez régresser moralement. Ceci devient un cas de
harcèlement moral parce que vous, vous êtes ici, et on vous demande de ralentir là. Et ça, c'est très
documenté. La personne devient psychologiquement malade. Elle perd de l'intégrité, elle parle d'abus, elle
dit : Je ne suis pas considérée. C'est comme... vous demanderiez à une
Ferrari de pédaler en bicycle. À un certain
moment, vous allez pouvoir dire : J'ai de quoi en dessous du capot, là, je
peux accélérer, là, je peux le faire. Mais, si, malheureusement, au
travail ou dans une assemblée, on vous demande à chaque fois de régresser, ça
pose des problèmes importants à la fois physiologiques et psychologiques.
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : En fait, en même temps que vous parlez, j'essaie,
dans ma tête, d'imaginer comment quelqu'un pourrait faire ou soulever qu'il est victime de harcèlement moral ou...
tu sais, c'est ça, le défi de la preuve et qui, justement, sera tranché
ou quel argument on pourra apporter pour soutenir un harcèlement. Il me semble
que le harcèlement psychologique, bien,
c'est quand même une nouvelle notion, entre autres, dans le Code du travail. Il commence à y avoir un petit peu
plus de jurisprudence pour le définir, mais le harcèlement moral, en fait, pour
moi, c'est un nouveau principe. Je le comprends par vos explications,
mais je trouve qu'il est difficile à définir puis je me demande comment on
pourrait faire pour le définir. Mais vos explications sont très claires, là.
M. Pauchant (Thierry C.) : Vous
voulez un autre exemple?
Mme Nichols : Bien sûr.
M. Pauchant (Thierry C.) : J'ai
le temps, M. le Président?
Le Président (M. Ouellette) :
Bien oui.
M. Pauchant (Thierry C.) :
Merci. On l'a vu à la commission Charbonneau, où des gens qui acceptaient des cadeaux disaient que ce n'était pas correct, mais
ils devaient le faire parce que leurs copains le faisaient. Et il y a
eu un délit moral de ces gens
disant : Ce n'est pas correct que je prenne des bouteilles comme ça dans
le truc qui arrive pour me les donner,
là, mais ses copains et ses collègues disaient : Oui, tu es trop de
chicane, toi, puis il faut le faire, puis tu feras partie de la gang. Vous voyez la pression qui devient...
c'est une pression sociale. Tu ne fais pas partie de la gang, puisque tu ne fais pas ça. Et donc c'était une personne qui avait, disons, un niveau
de moralité numéro 3 qui disait : Si je descends à moins 1, je régresse, là, je ne suis pas à l'aise,
là. Et ces personnes en ont souffert. On a fait des entrevues, et ils
disent : On a réellement du mal à vivre avec ça. Est-ce que l'exemple vous
aide un peu plus?
Mme Nichols : Oui, oui, oui. Là, j'imagine une grille de
valeurs puis... Oui, merci beaucoup. On peut peut-être
passer la...
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de La Prairie.
M. Merlini : Merci
beaucoup, M. le Président. Fort intéressante, fort pertinente, votre présentation,
M. Painchaud... Pauchant, pardon. Je m'excuse.
Mme Nichols : Pauchant.
M. Merlini : Oui. Excusez-moi, oui, en effet. Je veux revenir
sur un des points que vous avez soulevés, qui est la formation en
éthique et en déontologie que vous avez suggérée à faire. Souvent, les partis
politiques approchent des candidatures
potentielles, souhaitent avoir des personnalités parmi leurs candidats, et tout
ça, et là on se retrouve, du jour au
lendemain, élu, et là on s'aperçoit que l'exigence du métier, que ça soit des
scrums, que ça soit des points de presse, que ça soit, comme vous disiez
tantôt, l'allusion à suivre absolument tout ce qui est écrit et tout ce qui est
dit dans les médias, ce n'est pas la même tasse
de thé pour tout le monde, et pas tout le monde ne la consomme de la même
façon.
Votre
formation en éthique et en déontologie, comment la voyez-vous? Serait-il
préférable pour les partis d'en faire une
avant avec ses candidats et candidates ou effectivement d'en faire une
après? Mais comment la voyez-vous, si vous la faites après que les gens
sont élus? Parce que, même là, les gens pourraient se retrouver devant un...
Vous parliez de niveaux, là, tantôt.
Quelqu'un qui est à un niveau, disons, 2, et on lui demande un niveau 5,
va se dire : Bien, je ne serai jamais capable de rencontrer les exigences de ce métier,
je ferais mieux de retourner à ma pratique, je ferais mieux de retourner
à mon ancienne carrière ou mon autre carrière que j'avais avant mon élection.
Alors, comment qu'on fait à ce moment-là? Comment la voyez-vous, cette formation-là? Parce que je la
crois nécessaire, parce que vous soulevez des points qui sont fort intéressants
et fort pertinents dans notre but à nous de l'améliorer, ce code, et notre
déontologie, et nos valeurs. Mais là, à un moment donné, comment qu'on le fait,
là?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Je peux vous dire comment je le fais à l'École des
hautes études commerciales. Premièrement, nous formons nos gens, soit des gestionnaires
qui reviennent à l'école pour avoir un autre diplôme soit pour des
jeunes qui veulent devenir gestionnaires. Donc, on fait avant et après, si vous
voulez, ou pendant.
Premièrement, les
équipes avec différentes éthiques, donc, on essaie de leur faire comprendre
c'est quoi, la différence entre une éthique
déontologique, une éthique du droit, une éthique de rôle. Bref, on leur donne
un paquet de théories qui permettent
de nommer les choses. L'idée, ce n'est pas d'avoir des noms et d'en faire des
singes savants, là. C'est qu'ils ont un vocabulaire maintenant pour
nommer des choses différentes.
La
deuxième chose qu'on leur demande, c'est... on n'utilise aucun cas, on utilise
des histoires de vie, c'est-à-dire
on demande aux gens d'écrire un quatre pages sur un dilemme éthique qu'ils ont
eu à voir.
Troisièmement, on
utilise, dans cette formation, la technique du dialogue, où, dans une assemblée
comme celle-ci, différentes personnes vont pouvoir agir sur l'histoire de vie
rapportée par la personne.
Ces trois éléments-là,
d'avoir un langage commun sur des théories, des histoires de vie concrètes et
non pas abstraites, trois, un dialogue ou un
échange à un débat et très performant,
c'est ce que nous utilisons. Ça
marche très bien. Ça permet à d'autres personnes d'avoir d'autres idées
sur un problème. Et, si quelqu'un, par exemple, arrive avec une éthique déontologique, il y a quelqu'un qui peut
arriver avec, par exemple, une façon plus «caring» de faire des choses
ou de la justice. Et, à ce moment-là, ça se balance par lui-même. Nous, on le
fait par bouts de trois heures. Au bout de trois fois trois heures, on a fait
pas mal de chemin.
M. Merlini :
Vous mentionnez l'équilibre, la balance à aller chercher entre le droit et
l'éthique. Notre premier rôle est de législateur. Je vois un conflit
potentiel en disant qu'on veut améliorer l'éthique, on veut améliorer le code
déontologique, puis je vois notre rôle de législateur interférer ou nuire au
résultat qu'on souhaite obtenir avec ces consultations, avec le rapport du
Commissaire à l'éthique.
Comment concilier,
là, le fait qu'on a ça dans notre tête et dans notre travail quotidien
lorsqu'on étudie, par exemple, le projet de
loi article par article? Et là est-ce qu'on serait trop tentés de prendre une
approche plus de droit, alors qu'on devrait prendre une approche plus
éthique quand vous disiez, au début, l'équilibre à aller chercher, la balance à
aller chercher?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : La question que vous posez est évidemment très
intéressante. Si vous voulez, je pourrais
vous envoyer une recherche qu'on a faite sur les éthiques préférées par
profession. Et on voit très clair que les gens qui sont formés en finances, en droit, en ressources humaines, etc., ont
des éthiques différentes parce qu'ils ont préféré d'abord ce lieu de
métier et, deuxièmement, ils ont été renforcés par le métier lui-même, qui vous
donne des biais professionnels. C'est tout à fait normal, entre nous, soit dit.
Je
vais vous retourner la question : Est-ce que, dans une entreprise privée,
on doit faire du profit, les gens ne font que ça? La réponse, c'est non. Bien sûr que non! Il est évident que,
pour vous, dans votre rôle, le rôle de législateur est primordial, mais vous avez aussi un rôle du
contrôle de l'État et vous êtes aussi un intermédiaire entre les citoyens
du Québec et l'Assemblée nationale. Et vous
avez aussi... et je le rappelais tout à l'heure, ce n'était pas dans le texte,
que vous avez un rôle de leadership et de
modèle très important à faire. Et j'ai déploré que ça ne soit pas nommé dans
votre tâche, qu'en tant que députés vous ne
vous dites pas : Au-delà du fait que je suis un législateur, que je suis
une courroie de transmission et que je suis un contrôleur du gouvernement,
je suis aussi un modèle et je dois faire attention à mon comportement, à mes attitudes, à mes mots, à
qu'est-ce que je fais pour justement montrer qu'on peut avoir un comportement éthique et faire des choses belles en
politique. Je crois que c'est possible de concilier les
quatre. Est-ce que c'est facile? Non.
• (17 h 40) •
Une voix :
...
Le Président (M. Ouellette) : Merci pour... Non, non, mais, M. le... Avant que je retourne à M. le député de
LaFontaine, oui, on la veut, votre étude. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. Pauchant. Je ne sais pas si votre... Puis là je ne veux
pas être trivial ou réducteur, mais, en
2009, vous aviez donné une entrevue au journal Les Affaires et vous
parliez de Barack Obama. Et, lorsque
vous l'avez cité en exemple au niveau des trois niveaux, puis je vais tenter de
résumer vos propos, vous disiez qu'il y avait plusieurs niveaux
d'éthique, et on l'a bien vu depuis le début de nos échanges. Vous
disiez : Il y a un premier niveau, qui est le respect de la loi;
niveau 2, qui est celui guidé par l'intérêt, du donnant-donnant; et le
niveau 3, où on s'élève dans l'éthique.
Et ça, je pense qu'on l'a bien vu dans vos exemples. Et vous disiez, peut-être
parfois par des exemples tangibles, ça nous aide à mieux
comprendre : «Au Canada, je ne connais malheureusement aucun leader
politique au niveau 3. Ils se maintiennent surtout aux niveaux 1 et
2. Aux États-Unis, par contre, Barack Obama a certainement dépassé ces
niveaux.»
Quand
j'ai lu ça, il y a quelques jours, je voulais juste comprendre... Je comprends
l'introductif, mais, au niveau 3, un
niveau supérieur, le Barack Obama de 2009... Je ne sais pas si vous pouvez
étayer l'explication que vous vouliez donner ou l'exemple que vous
vouliez donner à l'époque.
M. Pauchant (Thierry C.) :
Votre métier, et vous le savez comme moi, est un métier qui est extrêmement difficile parce que vous avez beaucoup de
contraintes. Je ne pense pas que le président Obama a fait ce qu'il voulait
faire aux États-Unis d'Amérique s'il n'avait
pas été contraint par des partis qui l'ont empêché de faire ce qu'il voulait
faire. C'est la première chose.
Mais la
deuxième chose, c'est de dire que, oui, il existe des niveaux. Le modèle dans
l'article, là — je me
souviens que j'ai fait ça en 2009 — c'est l'un des modèles qui existent. J'en
utilise d'autres aujourd'hui qui sont plus précis, mais c'est l'idée qu'on peut justement avoir différents
niveaux d'éthique et que, dans une assemblée, tous ces niveaux d'éthique
se rassemblent. Entre nous soit dit, le premier est bon aussi, là. Je ne suis
pas en train de dire que le quatrième est meilleur, ce n'est pas vrai, ça. Le
premier est bon aussi, hein? C'est un petit peu en psychologie développementale
en disant : Un enfant, un bébé de deux ans, c'est certain qu'il ne va pas
pouvoir faire la même chose qu'un adulte de 30 ans,
de 40 ans, de 50 ans, mais c'est aussi une personne, et il faut le
respecter en tant que tel. Donc, il n'y a pas de niveau de préférence,
si vous voulez.
Moi, je
serais de vous, j'essaierais de me demander aussi, au niveau des députés, quel
niveau d'éthique il vient... C'est-à-dire
je ne me demanderais pas simplement : Est-ce qu'il a des contacts? Est-ce
qu'il sait bien parler? Est-ce qu'il est assidu? Est-ce qu'il travaille
dur, etc., qui sont les critères habituels. Je me demanderais aussi :
Est-ce que c'est un monsieur ou c'est une
dame qui fait preuve de probité? Est-ce qu'il a cette ambiance d'aborder la
complexité, qu'il ne veut pas se
noyer dedans? Est-ce qu'il va mourir avec ce stress-là ou est-ce qu'il va
pouvoir réellement faire en sorte qu'il va se poser des questions difficiles? Moi, c'est des questions qu'on me
demande de me poser dans des entreprises privées en disant : On a un vice-président à prendre,
là, aidez-nous à décider quel vice-président on va prendre. Vous en êtes au
même niveau. Mais de prendre systématiquement des gens qui sont niveau 1,
ça va faire du tort à l'organisation.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de LaFontaine, deux minutes.
M. Tanguay :
Oui, oui, deux minutes. Deux points rapides. Le deuxième sera peut-être de vous
demander s'il y a un modèle d'Assemblée ou de Parlement qui pourrait
nous guider quant à cette élévation vers l'éthique, mais mon premier point,
peut-être qu'il existe un forum, lorsque vous avez dit un peu plus tôt qu'à la
page 59 du rapport du commissaire... et
on peut voir, aux pages qui suivent, page 60, le bureau du commissaire
comprend trois unités : conseils et avis, de un, de deux, le greffe et, de trois, vérifications et enquêtes.
Puis vous disiez qu'il y aurait peut-être lieu d'avoir une autre unité qui serait peut-être un forum créé,
qui serait unité éthique, où là on pourrait avoir des discussions qui
sont... Honnêtement, ça fait quatre ans,
M. Pauchant, que je suis député, et c'est la première fois où j'ai ce
niveau de discussion, qui est
extrêmement enrichissant, et stimulant, et qui ouvre nos perspectives sur ce
que dit le code stricto sensu. Alors, peut-être
que vous nous invitez à créer ou à permettre la création de cette unité comme
forum permanent de discussion et de réflexion éthique.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant, pour 50 secondes.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Ça manque
énormément dans ce rapport. Et c'est un monsieur, le commissaire... je
ne le connais pas personnellement, j'ai
regardé son curriculum vitae, je comprends que c'est un monsieur qui veut bien
faire, et il comprend que les valeurs ne
sont pas... on ne peut pas les normer, etc. Mais, dès qu'il a dit ça, il va
dans les reproches et il veut boucher les trous. Moi, je lui conseille
de faire des montagnes, pas simplement boucher des trous.
M. Tanguay :
Dernière petite question : Y a-t-il une assemblée d'élus au monde où vous
pourriez dire : Bien, allez peut-être vous y référer pour quelques
pratiques que vous pourriez mettre en...
M. Pauchant
(Thierry C.) : Je ne connais
pas assez, je suis désolé. En entreprise privée, certainement, j'aurais
des exemples, mais, en assemblées nationales, je ne connais pas assez.
M. Tanguay : Merci
beaucoup.
M. Pauchant (Thierry C.) : Avec
plaisir.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
Merci, M. le Président. C'est effectivement un échange qui est particulièrement
intéressant pour finir notre après-midi en beauté.
Vous avez évoqué, il y a quelques instants, avec
mon collègue de LaFontaine la perspective du commissaire, c'est-à-dire le rapport qui nous été fourni, là,
il y a quoi, il y a un an maintenant. Plutôt que dire qu'il a une approche
orientée essentiellement sur le juridique, est-ce qu'on pourrait tout
simplement résumer son travail comme étant l'évaluation qu'il a faite des cinq dernières années de l'existence du code et
interpréter son travail comme étant une façon de le bonifier à travers
son expérience bien à lui de commissaire des dernières années?
Le
Président (M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant (Thierry C.) : Moi, je veux bien dire ça, je veux bien dire ça.
Encore une fois, moi, je ne me mets absolument pas en doute la
compétence de ce monsieur, loin de moi... de dire ça. Je ne mets même pas en
doute la fondation et la nécessité du droit.
J'ai été très clair que je cherche beaucoup plus une balance. Mais il y a
quelque chose de vicié dès le début,
et j'ai essayé de le dire, le nom même l'emprisonne parce que, dès que vous
dites «un code d'éthique», ça renvoie
à des normes. Donc, le seul, maintenant, outil qu'il va pouvoir faire,
utiliser, c'est la grammaire. Donc, il va faire des points, des virgules, des trémas, il va mettre des x au pluriel,
etc., parce que vous lui demandez de faire de la grammaire. C'est pour ça que je vous ai proposé de balancer
plus «valeurs de l'Assemblée nationale», qui au moins est plus large, et «code de déontologie». Et à ce moment-là ce
monsieur, ce commissaire, va pouvoir avoir deux chapeaux. Mais vous lui avez donné un mandat qui est déjà vicié à la
base, qui se retrouve dans son nom même, et c'est pour ça que je vous ai
proposé de peut-être envisager d'avoir une appellation plus large.
M. Charette :
Parmi les réflexions qui sont les nôtres actuellement, ça avait été discuté
notamment au niveau de la commission Charbonneau, on proposait de
regrouper deux chapeaux, c'est-à-dire l'éthique et le lobbyisme. Est-ce que c'est un mariage qui, pour vous, est naturel?
Est-ce que c'est bon de distinguer ces deux environnements-là ou on
pourrait penser qu'une seule et même personne chapeauterait, là, les mandats
qui leur reviennent actuellement?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant (Thierry C.) : Question difficile. Il faudrait réellement
regarder attentivement quelles sont les demandes et les choses qu'on doit faire dans le lobbyisme et voir si ça
peut être concilié avec ça. Je crois que la question que vous posez est une bonne question qui demande une
recherche approfondie. Je ne pense pas qu'on puisse avoir un avis comme
ça sur des hypothèses.
M. Charette :
Et quelle est l'importance de l'exercice que nous conduisons actuellement? Vous
avez évoqué, et on se le fait dire
régulièrement, le degré non pas d'appréciation, et ça, on se le dit souvent
entre nous... Sur une base individuelle,
je pense que les députés — ou on aime le penser, à tout le moins — sont appréciés dans leur
circonscription. C'est lorsqu'on en arrive au terme générique de député en
général que, là, dans la population, la perception, elle est beaucoup plus négative. Et, dans les
circonstances, quelle est l'importance de l'exercice que nous conduisons
actuellement, c'est-à-dire de procéder à l'évaluation des cinq premières années
de ce code d'éthique et de chercher à le bonifier? Quelle est l'importance de
l'exercice?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant (Thierry C.) : Pour moi, qui suis professeur d'éthique, je
pourrais dire que c'est absolument essentiel,
c'est le lien qui fait que la population vous donne une confiance. Je
m'inquiète, M. le député, de voir le nombre de gens qui ne vont plus voter. Je m'inquiète de voir des
gens, des jeunes qui ne s'incluent plus en politique. Je m'inquiète du
manque, des fois, de démocratie et de sens
civique de nos populations. Je crois que vous êtes la cheville ouvrière qui
peut faire une différence. Et de
parler d'éthique, et de déontologie, et de droit, c'est-à-dire avoir des
devoirs négatifs et des devoirs positifs, je crois que c'est la clé de voûte qui permettrait d'ouvrir ça. Je vois
que c'est fondamental, ce que vous faites actuellement.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
• (17 h 50) •
• (17 h 50) •
M. Charette :
Quel devrait être notre objectif? Vous savez, bon, il y a une dynamique qui est
celle de l'Assemblée nationale, un
parti au gouvernement, des partis d'opposition, et ultimement ce sont des représentants de chacune de ces formations
politiques qui auront à travailler à l'adoption d'un code d'éthique. Dans cette
perspective-là, quel devrait être notre objectif? Se doter du meilleur code d'éthique qui soit au détriment de ne pas aller
chercher l'adhésion de tous ou plutôt aller chercher l'unanimité? Quel devrait être
notre priorité? L'unanimité à tout prix ou se doter du meilleur code d'éthique possible, quitte à ce que quelques
députés se sentent plus ou moins à l'aise avec quelque mesure que ce
soit? Donc, l'unanimité à tout prix ou le meilleur code d'éthique possible?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Je vais me permettre de refuser les deux options parce
que «code d'éthique», pour moi, c'est un
oxymoron. Donc, je n'irai pas là-dedans.
Et unanimité, je crois que ce n'est pas possible. Mais je crois qu'au niveau des partis politiques vous avez des
terres communes où vous pouvez faire des compromis et accepter des choses. Je crois que vous l'avez déjà démontré
dans le passé, où des députés ou des ministres sont décédés, et vous
avez réellement, sincèrement applaudi cette personne, son courage, son
intégrité, etc., au-delà des différences de couleurs politiques. Je crois que vous l'avez fait déjà. Et donc il est possible
d'avoir des terres communes. Je crois que vous êtes tout à fait capables
de pouvoir les définir entre vous.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
Je vais peut-être mieux formuler ma question. Si, éventuellement... Pour un
article du code d'éthique ou un nouvel
article qu'on aimerait amener ou intégrer au code d'éthique, quel devrait être
le but recherché? S'assurer de la pleine adhésion des 125 députés
en question, donc que chacun serait à l'aise à voter en faveur de cet
article-là, ou plutôt se dire : Ce n'est pas l'unanimité — même
si vous n'aimez pas le terme — qui est nécessaire, mais plutôt la
recherche du meilleur code d'éthique possible? Parce que c'est un dilemme que
l'on se pose. Il y a des discussions, il y a des échanges très constructifs qui
ont lieu actuellement autour de cette table, à travers cette même commission. Mais on se pose la question :
Est-ce qu'on doit tous être d'accord sur chacun des articles en question ou
on doit plutôt souhaiter l'adoption du meilleur code d'éthique possible?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : La recherche
de la perfection? J'avoue que... Je vais le dire autrement. J'ai
commencé en disant qu'il y avait des choses,
il y avait énormément de choses qui ont été faites depuis décembre 2010.
Je crois que vous avancez bien et je
crois qu'il y a énormément de travail qui déjà été fait. Ça montre d'ailleurs
que vous, en tant que groupe, vous
arrivez à faire des choses ensemble. Je vous ai avertis que... faites
attention, on est partis dans une direction qui risque de faire pire par manque de balance. C'est les deux conseils que
je vous ai donnés. Je crois que le chemin que vous avez parcouru répond à la question que vous posez,
que, oui, il est possible que vous trouviez des solutions ensemble.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette : Et tous les
questionnements qui ont eu lieu, notamment sur la place publique, concernant la
fameuse fiducie sans droit de regard avec ou sans consigne, ce sont des
questions, aussi, qui sont certainement légitimes. Mais comment chercher
notre... ou comment atteindre cette volonté du plus grand consensus — je
reviens à la même question — versus
le meilleur code d'éthique possible?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Vous me posez
une question, et ça me demanderait d'être à la fois juriste et
fiscaliste. Je ne suis ni l'un ni l'autre, et donc je ne peux pas prendre
position là-dessus. Je n'ai pas d'avis sur la question.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
Mais vous comprenez... Et le but du débat qui a eu cours pendant quelques
semaines, bon, sans la nommer toujours spécifiquement, on avait
naturellement un cas de figure en tête. Comment, dans ce cas, pallier la
difficulté de pouvoir s'adresser à un cas précis versus un cas qui serait
applicable à tous?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Avec tout le
respect que je vous dois, je n'ai pas... Pour moi, vous me décrivez la complexité de votre travail, que j'adore. Je
trouve que vous êtes des gens qui se posent justement ces questions-là et
qui arrivez à répondre malgré tout. Et,
malgré les oppositions politiques qui peuvent être rudes, vous arrivez à faire
un travail qui est réellement
exceptionnel et qui, pour moi, est important parce que ça touche à la
démocratie. Donc, je crois que ce que vous
dites, c'est une réflexion de votre métier. Si vous me demandez des réponses
précises à des choses où... je ne suis ni fiscaliste ni juriste, je ne
peux pas vous répondre.
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de Deux-Montagnes.
M. Charette : Sinon, peut-être
une question que j'ai eu l'occasion de poser à la personne qui vous a précédé, toujours
dans l'esprit d'aller chercher une adhésion dans la population,
peut-être rehausser notre degré d'appréciation : Est-ce que les contraintes qui sont actuellement imposées aux membres du Conseil
des ministres devraient être
étendues à d'autres fonctions? Tout à l'heure, j'évoquais la possibilité de les étendre, par exemple, aux officiers des
partis d'opposition, pas uniquement
l'opposition officielle, mais la deuxième opposition, là. C'est notre
jargon à nous. Mais est-ce que
c'est quelque chose qui serait de nature à rehausser le degré de confiance?
Le Président (M. Ouellette) : Ça
sera la dernière réponse, M. Pauchant.
M. Pauchant
(Thierry C.) : Question
technique. Je ne connais pas assez vos us et coutumes. Il faudrait que
je les étudie. Il faudrait que je regarde réellement,
de façon empirique et concrète, comment vous fonctionnez.
Là, je pourrais donner un avis. Là, vous me demandez un avis, avec un
grand principe, que je ne peux pas donner.
Le Président (M. Ouellette) :
Vous avez un dernier commentaire, M. le député de Deux-Montagnes, pour
30 secondes? Je comprends que M. Pauchant a passé une entrevue de
candidat.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président
(M. Ouellette) : Ça sera le commentaire de la présidence. Sur ces
très bonnes paroles, merci, M. Pauchant, vous avez été très éclairant. On
attend vos notes et on attend la recherche que vous avez faite. Ça nous aide énormément.
Je suspends — oui, je suspends, hein? — nos
travaux jusqu'à 19 h 30. Vous pouvez laisser vos documents ici, on va
barrer les portes et, à 19 h 30, on reçoit le Commissaire au
lobbyisme.
(Suspension de la séance à 17 h 57)
(Reprise à 19 h 37)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques relatives à l'étude du Rapport sur la
mise en oeuvre du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale.
Nous entendrons ce soir le Commissaire au
lobbyisme du Québec. Je souhaite la bienvenue à M. François Casgrain — il me
semble, ça fait longtemps qu'on ne vous a pas vu — et à toute votre
équipe, que vous allez nous présenter.
Je vous
rappelle que vous disposez de 15 minutes pour votre exposé, et après il y
aura une période d'échange avec les membres de la commission, tant du
côté ministériel que de l'opposition. Je vous laisse la parole.
Commissaire au
lobbyisme
M. Casgrain (François) : M. le
Président, Mme et MM. les membres de la commission, je vous remercie de l'invitation qui m'est faite d'échanger avec vous
sur le rapport du Commissaire à l'éthique et à la déontologie sur la
mise en oeuvre du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale.
Tout d'abord,
vous me permettrez de vous présenter les personnes qui m'accompagnent : à
ma gauche, Mme Émilie Giguère,
directrice des communications, de la formation et des relations avec les
clientèles, et, à ma droite, M. Jean Dussault, qui est mon adjoint,
mais qui est également secrétaire général et directeur de l'administration.
M. le
Président, l'Assemblée nationale est une composante importante de notre système
démocratique. Dans notre système politique, le gouvernement est formé à
partir de membres élus siégeant en assemblée, d'où l'imbrication de normes d'éthique et de déontologie applicables
tant aux membres de l'Assemblée dans leur rôle de député que dans celui,
le cas échéant, de membres du Conseil exécutif. Lorsque les électeurs d'une
circonscription électorale choisissent une personne pour les représenter à
l'Assemblée nationale, cela constitue bien sûr un geste le plus important et le
plus fondamental de notre gouvernance démocratique. Les électeurs investissent
leur capital de confiance en confiant aux élus
d'importants pouvoirs. En contrepartie, ils ont des attentes envers les
personnes, attentes que le code codifie sous forme de valeurs à son article 6. Ces valeurs sont
fondamentales et conditionnent le mandat de l'élu. Elles sous-tendent
également les règles déontologiques que l'on trouve dans le code.
• (19 h 40) •
La confiance
est un ingrédient essentiel du système politique et démocratique. Elle ne peut
se construire que si les titulaires de charge publique se comportent de
manière à la mériter et à la conserver. La transparence sert justement à renforcer cette confiance. Les membres de
l'Assemblée nationale l'ont bien compris lorsqu'ils ont adopté à l'unanimité le Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale ainsi que la Loi sur la transparence et l'éthique en matière
de lobbyisme.
L'éthique
sous-tend de la sensibilité et du respect envers les valeurs de la société
dans laquelle on évolue. Les règles déontologiques
ne peuvent donc se substituer à l'exercice éthique, par les élus, de leurs responsabilités. Si l'observance des règles
est importante, le respect de l'esprit de celles-ci l'est tout autant afin
d'atteindre les objectifs recherchés. La Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme
en est un bel exemple, où l'objectif de transparence des communications d'influence dont les titulaires de charge publique sont l'objet
implique, par voie de conséquence, une responsabilité
pour le titulaire d'une charge publique. Le
Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale a créé un cadre nouveau visant à donner des balises aux élus
et aux membres de leur personnel sur les comportements qu'ils doivent adopter face à diverses situations
pouvant survenir dans leur environnement. Voilà pourquoi il est nécessaire de procéder à une analyse de sa mise en
oeuvre.
C'est dans
cette optique que j'ai examiné le rapport produit par mon collègue
le Commissaire à l'éthique et à la déontologie.
Je suis d'accord avec la majorité des recommandations qu'il a faites dans celui-ci ainsi qu'avec des
éléments qu'il aborde concernant notamment les médias sociaux, les lanceurs
d'alerte et le financement de certaines réunions regroupant les représentants de plusieurs associations législatives ou de plusieurs Parlements alors que
le financement est assumé par des entreprises ou des organisations qui
commanditent l'événement.
Permettez-moi de
revenir un peu en arrière, soit au moment des travaux qui ont précédé l'adoption
du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale. Le Commissaire au lobbyisme avait à l'époque fait certaines recommandations. Le projet
de loi n° 48 ne prévoyait en
effet pas d'exclusivité de fonctions pour les députés. Et nous nous interrogions sur la légitimité pour un
individu d'occuper la fonction de député tout en exerçant, dans sa vie professionnelle
parallèle, des activités de lobbyisme au sens de la loi. Un article
a été ajouté, prévoyant qu'un député ne peut exercer des activités de
lobbyisme au sens de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de
lobbyisme. Le Commissaire
à l'éthique et à la déontologie va plus loin et s'interroge même sur la
pertinence de maintenir la possibilité, pour le député, d'exercer
simultanément plus d'une fonction.
Nous avions aussi
souligné qu'en principe les marques d'hospitalité, les cadeaux ou autres
avantages sont rarement désintéressés. Nous
avions proposé deux dispositions pour encadrer les cadeaux, soit la création d'un
registre où seraient inscrites la nature, la
valeur et la provenance des cadeaux ainsi que la fixation d'un seuil maximal
pour ceux-ci. Une disposition qui combine les deux suggestions a été
retenue : les dons, les marques d'hospitalité ou autres avantages
d'une valeur de plus de 200 $ doivent être déclarés dans un registre tenu
par le commissaire.
La
commission d'enquête sur l'industrie de la construction recommande quant à elle
un resserrement des règles relatives
aux cadeaux. Par ailleurs, le code pourrait prévoir l'obligation, pour un
membre de l'Assemblée nationale ou un membre
du personnel politique, d'aviser le Commissaire au lobbyisme si un don ou un
avantage lui est offert en échange d'une intervention ou d'une prise de
position de sa part.
Nous avions également
exprimé nos réserves quant à la portée véritable de l'article du projet de loi
prévoyant que les restrictions relatives aux
dons, marques d'hospitalité ou autres avantages ne s'appliquent pas lorsqu'ils
sont de nature purement privée et
reçus à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, des fonctions de député.
L'article a été modifié pour prévoir
que la loi ne s'applique... ne s'applique pas, pardon, aux dons, marques
d'hospitalité ou autres avantages reçus par un député, mais uniquement
dans le contexte d'une relation purement privée.
En
outre, nous avions mentionné que les règles d'après-mandat applicables aux
ex-membres du Conseil exécutif contenues
dans le projet de loi n° 48 pouvaient entrer en contradiction avec la Loi sur la transparence et l'éthique en
matière de lobbyisme. Nous avions suggéré un
arrimage des dispositions de l'un et l'autre texte sur ce sujet, ce qui a
été fait en partie. Toutefois,
la loi ne vise toujours pas la situation prévue à l'article 28 de la Loi sur la transparence et l'éthique
en matière de lobbyisme, soit le fait d'agir
à titre de lobbyiste-conseil auprès d'un titulaire d'une charge publique, d'où
la possibilité d'une confusion quant aux règles applicables... donc,
les règles d'après-mandat qui seraient applicables. Par ailleurs, aucune
règle d'après-mandat ne s'applique à un membre de l'Assemblée nationale qui
n'est pas membre du Conseil exécutif, ce à quoi on devrait remédier.
Nous
avions souligné qu'il n'existait aucune disposition en cas d'absence
ou d'incapacité d'agir ou de vacance du poste du
Commissaire à l'éthique et à la déontologie. Un article a été ajouté à cet
effet. Le même problème existait à l'époque dans la Loi sur la transparence et
l'éthique en matière de lobbyisme, et une disposition avait dû être adoptée
d'urgence, en fin de session, afin de permettre de nommer un commissaire au
lobbyisme par intérim.
Au
cours de l'automne 2010, dans le cadre de l'étude détaillée du Code d'éthique
et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale, nous avions fait part aux membres de la commission de préoccupations
relatives à certains libellés au projet de loi, lesquels ont été
modifiés pour tenir compte de nos remarques.
Maintenant,
j'aimerais porter à votre attention certains éléments de réflexion en regard du
lobbyisme et de l'éthique. La Loi sur la transparence et l'éthique en matière
de lobbyisme établit le droit pour le public de savoir qui cherche à influencer les titulaires de charges
publiques. Ce droit de savoir s'exerce grâce au Registre des lobbyistes,
et nul ne peut faire d'activités de lobbyisme, à moins que l'objet de ces activités
ne soit inscrit dans le registre.
La loi est
inextricablement liée aux différentes étapes menant à une décision d'une institution
publique. Les titulaires de charge publique,
qui sont imputables des décisions qu'ils prennent, ont donc un rôle important à
jouer dans l'application de la loi afin que celle-ci atteigne les objectifs
de transparence et de saines pratiques des activités de lobbyisme visées. Dans ce contexte, je crois pertinent que
le Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale et les règles
déontologiques applicables aux membres du personnel politique comprennent des
règles concernant leur conduite à l'égard des activités de lobbyisme dont ils
font l'objet.
Les
titulaires de charges publiques doivent être proactifs dans l'application de la
loi. Le droit pour le public de savoir qui cherche à les influencer leur
impose la responsabilité de s'assurer que les lobbyistes s'acquittent de leurs obligations. Il est aussi important que les
titulaires de charges publiques s'assurent que les lobbyistes qui
communiquent avec eux respectent le Code de déontologie des lobbyistes.
En matière de
conduite à l'égard du financement des activités politiques, nous croyons qu'il
serait pertinent de s'inspirer des règles
applicables dans d'autres juridictions canadiennes aux élus et aux lobbyistes
qui agissent auprès d'eux, plus
particulièrement en matière de financement et d'implication politique. Ces
règles visent à éviter les conflits d'intérêts
ou l'apparence de tels conflits. La loi fédérale sur les conflits d'intérêts
prévoit, à l'article 16, qu'un titulaire d'une charge publique ne peut
solliciter personnellement des fonds d'une personne ou d'un organisme si
l'exercice d'une telle activité le place en situation de conflit d'intérêts.
À ce sujet, le
Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique du Parlement du Canada a
émis une directive avisant notamment les titulaires de charge publique de ne
pas «solliciter des fonds auprès d'une entreprise ou d'un organisme avec qui le titulaire de charge
publique, son bureau ou son ministère a eu des rapports officiels ou prévoit en
avoir.
«[...]Solliciter
ou accepter des fonds d'une personne ou d'un organisme qui [ont] déjà exercé ou
qui exerceront probablement des
activités de lobbyisme auprès des titulaires de charge publique ou [auprès de]
leur bureau, leur ministère ou leur comité.»
À Toronto, une
controverse entourant le processus d'approvisionnement de la ville a mené à une
commission d'enquête. La juge Denise Bellamy
a publié son rapport en 2005. Elle y a émis 32 recommandations relatives aux
activités de lobbyisme, dont — je cite les recommandations 109 et 113.
La n° 109: «Outside of city
procurement processes, ethically appropriate lobbying is permitted. However, at no time should lobbying take the
form of entertainment or the bestowing of gifts, meals, trips, entertainment,
or favors of any kind on staff or councillors.»
Et la recommendation 113 :
«Professional lobbyists should not engage in any type of political fundraising
for candidates or councillors they lobby, beyond making their own donations.»
La ville d'Ottawa,
à l'instar de la ville de Toronto,
a également adopté des règles similaires à l'égard des
activités de nature politique.
La commission d'enquête sur l'industrie de la construction
a également fait des recommandations afin d'interdire aux ministres et à leur personnel
de solliciter des contributions politiques aux fournisseurs et bénéficiaires de leur
ministère. Ainsi, il nous apparaît que des règles clairement établies devraient
circonscrire les situations où un membre de l'Assemblée nationale ou un
membre du personnel politique doit s'abstenir de solliciter ou d'accepter qu'un
lobbyiste ayant une inscription active au
registre des lobbyistes, par exemple,
organise une activité de financement à son avantage ou à celui du parti, d'un comité du parti ou de l'une de ses
constituantes ou participe activement à sa campagne électorale. Les élus
devraient aussi se voir interdire de
solliciter ou d'accepter de telles contributions de personnes qui ont exercé ou
dont on peut raisonnablement considérer qu'elles exerceront des
activités de lobbyisme auprès d'eux au cours d'une période à déterminer.
Ceci complète
ma présentation, M. le Président. Je vous remercie de votre attention, et je
suis disponible pour répondre à vos questions.
• (19 h 50) •
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Casgrain. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci, M. le Président. Nous avons, je crois, trois blocs, et le premier est de
combien de minutes?
Le Président (M. Ouellette) :
16 minutes, M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
16 minutes? Parfait. Merci beaucoup.
Merci beaucoup, M. le Commissaire au lobbyisme,
et bienvenue, évidemment, aux personnes qui vous accompagnent. Merci d'avoir pris le temps de la réflexion et le temps de
présenter votre perspective, vos opinions quant aux bonifications que
nous pourrions apporter au Code d'éthique et de déontologie des députés.
Évidemment,
vous avez eu l'occasion de lire, je crois, les 23 recommandations qui sont
incluses dans le rapport du Commissaire
à l'éthique. Dans votre présentation, il y a certains points. On aura l'occasion,
au courant de la soirée, de toucher
aux points que vous avez apportés, mais j'aimerais savoir s'il y a des
recommandations, plus particulièrement entre la première et la 23e, qui ont attiré votre attention et sur lesquelles
vous aimeriez plus d'avant commenter parce qu'on touche beaucoup, beaucoup d'éléments qui touchent au rôle du député au
jour le jour, et, pour éclairer nos travaux, c'est l'objectif de vous entendre ce soir, il s'agirait
peut-être d'avoir votre vision des faits, même si, ça, je peux le
concevoir, pour certaines recommandations,
clairement, ça va au-delà de votre mandat. Mais, néanmoins, vous avez, par
votre passé, entre autres, comme
responsable au sein de l'institution, le Directeur général des élections du
Québec, maintenant comme Commissaire au lobbyisme, vous avez une
perspective qui peut être bénéfique pour les élus. Alors, je ne sais pas s'il y a des recommandations, de la première à la 23e,
sur lesquelles vous dites soit : Oui, effectivement, c'est bien
enligné, on vous invite à peaufiner la
réflexion, ou, d'aventure, sur certaines, vous dites : Bien, il y a
peut-être un drapeau rouge, selon votre perspective toujours.
Le Président (M. Ouellette) :
M. Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Disons que je
n'ai pas vraiment de drapeau rouge sur les 23 recommandations. C'est sûr
que la majorité des recommandations sont des recommandations qui sont tirées de
l'expérience du Commissaire à l'éthique et à
la déontologie parmi lesquelles on peut évidemment voir que certaines tiennent
compte de la pratique réelle. On
parle, par exemple, de déclarations, des avis qu'on peut obtenir, avant une
élection, sur une situation qui pourrait être éventuellement conflictuelle. Si on prend cette recommandation, je pense
que c'est quelque chose qui est intéressant pour permettre à quelqu'un qui désire éventuellement devenir membre de
l'Assemblée nationale d'avoir une perspective qui va le placer... savoir exactement les règles qui sont
susceptibles de s'appliquer quant à lui. Il y a d'autres dispositions qui
sont beaucoup plus, je dirais, de terrain.
Et effectivement dire : Le député qui a déjà fait une déclaration, qui est
réélu la même année, est-ce qu'il doit refaire une déclaration?
Peut-être que
je pourrais, pour répondre à votre question, dire que peut-être certaines
recommandations qui... je ne suis pas
contre. Cependant, je n'ai peut-être pas suffisamment d'expérience pratique
pour pouvoir... mais qui m'ont peut-être
un peu plus surpris. Par exemple, la recommandation 7, lorsqu'on dit : «...ainsi
que les [relations relatives] à l'immeuble dont il est locataire.»
Je comprends,
pour les droits réels, savoir où la personne demeure, avoir tous les
renseignements nécessaires... puis je
ne sais pas jusqu'où va la
déclaration, mais ça m'a un peu, disons... cette recommandation-là m'a peut-être
un peu surpris.
S'il y a
des recommandations sur lesquelles, évidemment, on peut être
d'accord, la question des lanceurs d'alerte en est une. Par
exemple, je pense, c'est ça, la recommandation 19. Quelqu'un attire l'attention
au commissaire d'une situation dont il a connaissance. Il veut évidemment
garder une certaine forme d'anonymat. Il ne s'agit pas d'une plainte parce
que ce n'est pas lui qui peut faire
une plainte, mais donner des informations permettant éventuellement au commissaire peut-être de s'intéresser à une question m'apparaît peut-être
important de le considérer, d'autant plus que, on le sait, la commission
d'enquête sur l'industrie de la construction également a fait une
recommandation relativement aux lanceurs d'alerte.
Je n'étais pas sûr d'être d'accord ou
complètement d'accord, par exemple, avec la recommandation 20 sur la question des sanctions, des sanctions
administratives. Bon, je comprends le commissaire de dire : Bon, quelqu'un
qui ne répond pas dans les délais,
puis on lui fait des rappels, puis, à un moment donné, peut-être que la
sanction administrative pécuniaire
pourrait le ramener dans le droit chemin. Je pense que le député qui,
éventuellement, ne ferait pas sa déclaration, le fait, après lui avoir fait tant de rappels, de,
je ne sais pas, moi, simplement dire qu'il n'a pas encore fait sa
déclaration, ce serait probablement... ce serait suffisant. Je pense que cette
personne-là va se dépêcher à remplir ses obligations.
Donc, peut-être qu'à ce niveau-là j'aurais donc
une réserve, sauf peut-être sur le cas du changement significatif à ces déclarations qu'il n'aurait pas faites. On a
l'obligation d'indiquer — lorsqu'il y a un changement significatif — évidemment
la nature de ces modifications-là. Si on ne le fait pas ou on attend la
déclaration suivante, mais ça fait déjà plusieurs mois que j'aurais dû le déclarer, est-ce qu'il y a une
situation éventuellement potentielle de conflit d'intérêts? Donc, peut-être
que, dans ces situations-là, il pourrait y avoir... Mais, encore là, il
faudrait peut-être y réfléchir. Et je pense que le Commissaire à l'éthique et à
la déontologie serait peut-être le plus en mesure, évidemment, de commenter sa
recommandation.
Et finalement
il y a la recommandation, si on peut dire... peut-être la recommandation sur...
la recommandation 22 sur le pouvoir
discrétionnaire. Est-ce qu'on peut finalement déléguer au bureau, qui pourrait
confier au commissaire le soin de
faire des sanctions concernant le personnel politique? Bien, est-ce qu'on veut
avoir une situation où, en fonction d'un
changement de législature, on a un changement, on donne au commissaire ces
responsabilités-là ou on lui enlève? Ça, j'ai de la difficulté à voir
est-ce qu'on fait du... on peut changer cela.
Par ailleurs,
il y a peut-être une dernière... Puis je ne voudrais pas prendre trop de votre
temps, M. le député. Je pense que
j'avais quelque chose qui m'est revenu en tête, j'essaie juste de le retrouver.
Je ne reviens pas, peut-être que ça va me revenir, là, j'ai eu un petit blanc, là, en parlant sur une
recommandation, peut-être, sur laquelle j'avais... je n'étais pas
contre, mais j'avais peut-être quelques commentaires.
• (20 heures) •
M. Tanguay : À vous
entendre, il y a beaucoup d'éléments de réflexion qui me viennent en tête. On a
eu l'occasion de rencontrer deux experts en
éthique, déontologie cet après-midi. Et nous sommes au début, je dirais, de
nos travaux. On va rencontrer des témoins de
différents horizons, des professionnels, des gens comme vous, M. le
Commissaire au lobbyisme, qui viennent nous apporter leur éclairage.
Par rapport,
justement, à la recommandation 20, permettre au commissaire lui-même, après
enquête, d'imposer ses sanctions, on
disait, cet après-midi, avec des experts... des professeurs universitaires nous
disaient : Bien, effectivement, il a le bénéfice de ne pas se positionner, comme Assemblée nationale — l'expression est peut-être trop forte — en conflit d'intérêts d'imposer ultimement la sanction à un de nos pairs. Et, à cet
effet-là, vous, M. le Commissaire au lobbyisme, de la manière... puis peut-être pour le bénéfice des gens qui nous
écoutent à la maison, vous, lorsque vous faites enquête, détrompez-moi si j'ai tort, mais vous avez
l'opportunité, donc, de faire cheminer, le cas échéant, à la direction des
affaires criminelles et pénales un dossier où vous auriez jugé qu'il y a eu une
faute. Comment voyez-vous donc cette recommandation 20
là, le rôle du commissaire versus vous, ce que vous avez à vivre sur des
enquêtes qui, bien souvent... je veux
dire, peut-être même dans 100 % des cas, vont toucher à un élu parce qu'il
s'agit de représentations, dans bien des cas, qui sont faites auprès d'un élu? Oui, à un décideur de l'État, mais
souvent à un élu. Alors, comment vous vous positionnez, vous, dans des
dossiers où vous devez faire enquête, puis il y a un élu d'impliqué, là?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Donc, sur cette
question-là, je voudrais peut-être juste mentionner que le commissaire a
effectivement deux possibilités de sanction.
Une sanction qui est pénale. À ce moment-là, évidemment, il va envoyer, comme vous l'avez mentionné, le dossier au
Directeur des poursuites criminelles et pénales, qui va évidemment
analyser la preuve : Est-ce qu'elle est
hors de tout doute raisonnable? Les critères qu'aussi le Directeur des
poursuites criminelles et pénales a comme barème pour éventuellement
prendre des poursuites.
Par ailleurs,
le commissaire a également le pouvoir d'appliquer, dans les cas où est-ce qu'il
y a un manquement grave ou répété, une sanction de nature disciplinaire
au lobbyiste. Ça veut dire que quelqu'un qui le ferait de façon répétée, le commissaire pourrait dire : Écoutez,
là, en fonction de la loi, on estime que, là, ça fait trop de fois qu'on
nous avise, ça fait trop de situations où
vous ne déclarez pas, et on peut imposer une sanction disciplinaire,
évidemment, qui peut être appelable,
mais évidemment après un processus pour s'assurer que la personne a le droit de
se défendre. Donc, la sanction
disciplinaire, qui est l'interdiction de faire des activités de lobbyisme
pendant une certaine période pouvant aller jusqu'à un an, mais
évidemment qui doit tenir compte de la gravité, donc, de l'infraction.
Pour répondre à votre question, je pense
qu'effectivement le député ou le ministre est souvent mal placé pour
éventuellement sanctionner lui-même ou permettre que soit sanctionné... que ça
soit via le bureau ou n'importe, un élément
politique. Évidemment, si on nomme quelqu'un qui est apolitique, il me semble
que c'est la meilleure personne pour éventuellement examiner la faute
puis recommander : Est-ce que ça va être une réprimande, est-ce que ça
doit être éventuellement une sanction plus musclée? Donc, c'est pour ça que je
pense que cette recommandation-là, la recommandation 22,
j'avais quelques... Est-ce qu'on laisse ça à la discrétion de lui confier ou de
ne pas lui confier? Donc, on prend une décision, on le garde ou on lui
donne, mais on n'est pas entre deux chaises.
M. Tanguay :
Est-ce que j'ai... puis corrigez-moi si j'ai tort, parce que je sais que vous
avez une expérience très étoffée en matière légale,
Me Casgrain : Est-ce que je simplifie trop en disant que votre sphère
d'action concerne des infractions où il y a
responsabilité stricte, autrement dit, vous l'avez fait ou vous ne l'avez pas
fait, versus une sphère de responsabilité,
code d'éthique des députés et de déontologie, où, là, le Commissaire à l'éthique
et à la déontologie doit dire :
Bon, il y avait le critère... Puis on avait un débat, cet après-midi, sur
l'étalon de mesure de la personne modèle. Et là on disait :
Peut-être que le commissaire pourrait d'aventure préciser cette personne
modèle. Ce qui a été utilisé jusqu'à maintenant dans la jurisprudence du
Commissaire à l'éthique, ça a été de dire : Est-ce qu'au regard d'une
personne normalement
ou raisonnablement informée — ce sont les termes — il y a eu manquement ou perception de
manquement? Et là on disait : Bien, il
y aurait peut-être lieu de dire : Est-ce que moi, Commissaire à l'éthique,
je ne devrais pas plutôt ajouter des
critères de la personne modèle qui s'apparentent davantage à la responsabilité
civile? La personne normalement prudente
et diligente, prise dans les mêmes circonstances, aurait-elle agi, comme
député, face à son code d'éthique? Et le comportement, est-ce qu'il est
manifestement déraisonnable au regard de cet étalon de mesure là?
Et ça nous
amène donc dans un débat où vous... et corrigez-moi encore une fois
si j'ai tort, puis j'ai hâte de vous entendre là-dessus, j'ai
l'impression que vous avez des analyses à faire qui sont davantage de
responsabilité stricte, est-ce qu'il a passé ou pas sur la lumière rouge,
versus une analyse d'un comportement... Vous dites : Bien, pourquoi tout
ce préambule?
Pourquoi tout ce préambule? Parce que le
commissaire a vu des fautes, dans le passé, puis il a dit : Écoutez, il y a des moyens de défense... Trois, il était de
bonne foi ou elle était de bonne foi, ne connaissait pas les règles. On
est loin de la responsabilité stricte, là.
Et, troisième élément, l'impact politique serait tellement manifeste et
dévastateur que je n'irai pas au niveau de sanctions. Alors, il y a
comme deux mondes, deux univers juridiques à réconcilier : le vôtre et
celui du Commissaire à l'éthique. J'aimerais juste avoir votre vision dans
cette perspective-là.
M. Casgrain (François) : Je
vous dirais que, si tout est...
Le Président (M. Ouellette) :
...M. Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Excusez. Si
tout était si simple, disons, si tout était noir ou blanc, je dirais que je
suis un peu d'accord avec vous, mais même le
Commissaire au lobbyisme ne peut pas agir... Je comprends que, lorsqu'on
s'en va devant la cour, là, c'est une
responsabilité stricte, mais avant, lorsqu'il va avoir éventuellement... Il va
faire une enquête, de sa propre initiative, en fonction, évidemment, des
effectifs qu'il a, hein? On lui donne un certain nombre d'effectifs. Il a une très
large juridiction. Il doit s'assurer qu'évidemment les gens qui ne respectent
pas la loi puis qui, de toute évidence, ont
voulu enfreindre la loi, éventuellement, on les amène devant les tribunaux si
on est capables d'avoir la preuve, donc,
parce qu'on doit tenir compte quand même de la preuve que l'on a. Est-ce qu'on
a une chance raisonnable d'obtenir une
condamnation? Est-ce que ça apporte quelque chose d'amener éventuellement
certaines situations en cour? Parce qu'il y a des délais, hein? J'ai souvent dit : Il faut tenir compte de
d'autres éléments parce qu'on prend, par exemple, un constat d'infraction contre une personne en 2008 puis,
quand on est rendus en 2016 puis que le dossier n'est pas encore terminé
parce qu'il a monté jusqu'à la Cour d'appel,
puis il est revenu, puis on est retourné, après ça, à la Cour d'appel, je ne
suis pas sûr si on sert le système beaucoup.
Donc, on
doit, c'est sûr, amener les gens à se conformer à la loi. Comment y arriver?
Donc, ça, c'est des questions qu'on doit se poser, même comme
Commissaire au lobbyisme, même avec les sanctions pénales, contrairement aux sanctions de nature plus civile qu'on retrouve
dans un code d'éthique. Donc, c'est le test du réalisme, si on peut dire,
pour amener : C'est quoi, mon mandat? Qu'est-ce qu'on me demande?
Donc, éventuellement, je pense qu'on doit tenir
ça en ligne de compte parce que, sinon, je vais demander au Bureau de l'Assemblée nationale de me donner une
armée d'enquêteurs, puis, oui, ça va coûter très cher. Oui, je vais peut-être amener plusieurs personnes, mais, si je ne
les amène pas à adhérer, si je ne les amène pas à comprendre pourquoi on
fait telle chose, je n'arriverai jamais à
remplir correctement mon mandat parce que les gens, à ce moment-là, se
braquent, et, quand on les amène... je ne
dirais pas qu'on leur donne une chance... Il y a déjà un journaliste qui m'a
dit que j'étais un peu comme BELAIRdirect,
une police qui pardonne, mais j'ai dit : Non, il ne faut pas voir ça
comme ça. Il faut voir la situation. Quel est le résultat que je désire
obtenir, qui est le plus probant pour le rôle qu'on m'a confié?
Et je pense
que j'ai pris peut-être un peu long à vous répondre, mais c'est pour vous dire
: Ce n'est pas si différent que ça,
jusqu'à un certain point, les rôles. C'est sûr que le pouvoir de sanction
pénale est distinct. D'ailleurs, c'est pour ça que, dans certaines circonstances, on a demandé la possibilité, comme
dans certaines autres provinces, d'avoir des sanctions administratives
pécuniaires parce que c'est moins ostentatoire pour les personnes, et à ce
moment-là on va arriver à plus de résultats
pour ce que je vous ai expliqué tout à l'heure. Donc, je pense que c'est un
petit... Il faut toujours être en mesure de jauger ça. Évidemment, ça ne
doit pas devenir de l'arbitraire, mais on a besoin d'une certaine forme de
discrétion bien campée où est-ce qu'on applique des principes qui vont être
appliqués aux différents cas que l'on a devant nous.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de LaFontaine. Je vous informe que je vais amputer votre deuxième bloc parce que la réponse était
importante, même si elle était incomplète pour la publicité pour la police
qui pardonne. Il y a d'autres compagnies, maintenant, qui pardonnent aussi.
M. le député de Marie-Victorin.
• (20 h 10) •
M. Drainville : Merci,
M. le Président. Merci, M. le commissaire, d'être là avec votre équipe. Bien
apprécié.
Vous comprendrez, M. le commissaire, que, dans
le contexte de nos travaux, nous nous devons de nous questionner et de
réfléchir à cette recommandation qui a été faite par la commission d'enquête
sur l'industrie de la construction, nommément la recommandation 54, qui se
propose d'adopter une loi qui regrouperait, dans un même organisme, le
Commissaire à l'éthique et le Commissaire au lobbyisme.
Il est bien
évident, M. le Président, que, si on doit se poser la question des mesures que
nous devons mettre en place pour
améliorer le code d'éthique, bien, on n'a pas le choix que de se
demander : Est-ce qu'une fusion du Commissaire à l'éthique et du Commissaire au lobbyisme serait
souhaitable pour améliorer le code d'éthique? Et il faut d'autant plus
se poser la question
que la commission d'enquête nous a invités à le faire et que la ministre des
Institutions démocratiques est également en réflexion là-dessus.
Alors, M. le
commissaire, allons-y, allons-y d'abord de façon générale. Comment est-ce que
vous... Qu'est-ce que vous pensez de
cette idée de fusionner le Commissaire à l'éthique et le Commissaire au
lobbyisme? Est-ce que vous pensez que ce serait une bonne idée?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Casgrain.
M. Casgrain (François) : Merci.
Écoutez, c'est sûr que la recommandation Charbonneau va plus loin que le regroupement simplement du Commissaire à l'éthique
et à la déontologie et le Commissaire au lobbyisme, tout le volet municipal. Dans des réflexions qu'on nous avait
demandé sur les recommandations, notamment 54 à 60, et dont on avait
fait part à la ministre de la Justice mais
ainsi qu'aux différentes formations politiques représentées à l'Assemblée
nationale — parce
que, pour moi, c'était indispensable que chacune des formations politiques en
soit informée — on
a mentionné qu'il s'agissait d'une idée
intéressante, qu'évidemment l'expertise au sein d'un seul organisme permettrait
d'apporter un regard plus intégré en matière d'éthique et de lobbyisme,
qui permettrait évidemment d'avoir... favoriser, comme le disait la commission sur l'industrie de la construction, si
on peut dire, un développement d'une culture d'intégrité intégrée ou
globale et cohérente. Cependant, évidemment,
tout le côté municipal causait peut-être une certaine problématique,
que je dis entre guillemets, dans
le sens qu'il y a plus de modifications qui devraient être apportées pour avoir
cette cohérence. Mais, au départ, ça nous apparaissait une idée qui
pouvait être intéressante.
Cependant, ce
que je peux dire, M. le député, sans être trop long, c'est que la réflexion de
la commission Charbonneau était assez
courte sur cette question-là, et on prenait peut-être certains raccourcis quant
à certaines questions, notamment au
niveau de l'ajout de certaines responsabilités, sans nécessairement y voir la
nécessité, avec tout ce qu'ils proposaient
comme ajouts, par exemple, de surveiller les dirigeants d'organismes au niveau
de leur éthique, les présidents, les
sous-ministres, voir si les sous-ministres font bien leur job, voir si les
municipalités font bien leur job, sans ajouter éventuellement de ressource ou de financement supplémentaire. Et là-dessus
je pense que nous avons donné certaines réserves.
Mais par
ailleurs, au-delà de modifications qui pourraient être apportées du fait
qu'évidemment le Commissaire à l'éthique
et à la déontologie, actuellement, là, a une seule responsabilité, c'est relativement
aux membres de l'Assemblée nationale,
donc, il peut être très proche de ces membres-là, un commissaire qui aurait une
responsabilité intégrée devrait évidemment faire en sorte que c'est
probablement plus des gens de son équipe, là... qu'il ne pourrait pas toujours
être là, comme le Commissaire à l'éthique et
à la déontologie, auprès des députés. Donc, il faudrait que les députés
apprennent que ça serait éventuellement des
membres de son équipe ou de son adjoint qui agiraient. Mais, à part de cela, je
pense qu'il y a une idée là-dessus qui pourrait être intéressante.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Oui. Dans le document dont vous
parlez, que vous nous avez fait parvenir... J'imagine que vous n'avez
pas objection à ce qu'on le cite?
M. Casgrain (François) : Non.
M. Drainville : Ça vous
va?
M. Casgrain (François) : Ça va.
M. Drainville : Très
bien. Alors, ce document, donc, qui s'intitule Réflexions du Commissaire au
lobbyisme relativement à certaines recommandations de la Commission d'enquête
sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la
construction, je me permets de citer, puisque vous avez vous-même reconnu
l'avoir distribué à l'ensemble des acteurs, vous écrivez un certain nombre de
choses.
Vous parlez effectivement du regroupement de l'expertise au sein d'un seul organisme, qui
pourrait permettre de porter un
regard plus intégré en matière d'éthique et de lobbyisme et favoriser le développement d'une culture d'intégrité globale
et cohérente. Vous êtes très, très cohérent, c'est le cas de le dire, par rapport aux propos que vous venez de tenir.
Vous
dites : «D'autres juridictions canadiennes confient l'encadrement du lobbyisme à un commissaire
qui est également responsable
de veiller à l'encadrement des règles d'éthique.» Mais vous ajoutez
ceci : «Cependant, aucune de ces juridictions — canadiennes,
donc — ne
confie l'application de ces règles au regard de l'ensemble des institutions parlementaires, gouvernementales et municipales.
Il s'agirait d'une première au Canada. Le regroupement en une seule entité des dimensions de l'éthique et du lobbyisme
pour tous ces paliers [...] pose un défi de taille, notamment en raison
du grand nombre d'institutions en cause.»
Parmi ces institutions, il y a l'ensemble des
lois qui seraient concernées et il y en a vraiment plusieurs qui tomberaient sous le chapeau de ce nouveau
commissaire qui s'appellerait le Commissaire à l'éthique et au
lobbyisme... enfin... Oui, voilà, c'est ça.
Et donc il faudrait, d'une certaine façon, consolider l'ensemble de ces lois
pour éventuellement avoir une cohérence, justement, à travers ces lois.
Alors,
je souligne, parmi ces lois, il y a bien entendu la loi qui crée le code de
déontologie. Il y a la loi, évidemment, qui... la loi sur le lobbyisme.
Je ne donnerai pas le titre au long, là. Ensuite de ça, il y a la loi, dans les
municipalités, qui
s'appelle la Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale. Ensuite
de ça, il y a la loi qui... le Règlement sur l'éthique et la discipline dans la fonction publique, qui concerne
le personnel de l'État, n'est-ce pas? Bien entendu, c'est la Commission municipale qui veille à
l'application de la Loi sur l'éthique et la déontologie. Donc, nécessairement,
la Commission municipale serait concernée. Est-ce qu'il m'en manque? Est-ce que
j'en oublie?
M. Casgrain (François) : La Loi sur le ministère des Affaires municipales
aussi serait concernée, compte tenu de
la nature des... peut-être des plaintes, l'organisme qui est chargé des
plaintes, malgré qu'il resterait pour d'autres types de plaintes. Mais
effectivement, vous avez bien noté, il y a quatre juridictions au Canada — je
peux peut-être juste commencer par
celles-là —quatre
juridictions, au Canada, qui donnent effectivement la responsabilité du
lobbyisme au commissaire à
l'intégrité ou au commissaire... un commissaire à l'éthique, tout dépendant des
noms qu'ils portent dans les autres
juridictions canadiennes, qui sont généralement des juridictions de... en tout
cas, l'Ouest et Centre. C'est Alberta, Saskatchewan, Manitoba, Ontario.
Cependant, il y a six
autres juridictions qui ne confient pas les responsabilités du lobbyisme au
commissaire à l'intégrité. C'est notamment
le cas en Alberta, où est-ce que c'est au niveau de l'accès. Au
Nouveau-Brunswick, la loi n'est pas
encore en vigueur, mais c'est le Protecteur du citoyen. Et, en Nouvelle-Écosse,
par exemple, c'est au niveau du municipal.
Indépendamment de
cela, ce que je veux juste mentionner, c'est qu'il y a des régimes distincts en
fonction de la perception que l'on a de la
réalité, mais dans aucune juridiction canadienne le lobbyisme ne touche les
municipalités. En Ontario, certaines
municipalités se sont redonné des règlements sur le lobbyisme, mais ces
règlements-là peuvent différer en fonction
de ce que ces municipalités-là adoptent comme règles. Et, par exemple, c'est là
que je le mentionnais, c'est que c'est sûr qu'au niveau du Québec, si on
donne ça à un commissaire à l'éthique et au lobbyisme et on inclut toutes les
municipalités en plus de l'Assemblée nationale, c'est...
M. Drainville :
...plus de personnel, fonctionnaires...
M. Casgrain (François) : ...à plus de personnel plus les ministres, comme je le disais tout à l'heure, à mon avis, c'est quand même assez gros.
M. Drainville :
Assez quoi? Assez quoi?
M. Casgrain
(François) : Et à ce moment-là les règles sont différentes aussi au
niveau de ces différentes juridictions là. Il faudrait avoir une harmonisation,
ce qui serait plus compliqué si on voulait regrouper toutes les juridictions. Mais ce n'est pas impossible, mais
ça serait évidemment une première, et le défi serait effectivement de
taille.
• (20 h 20) •
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville :
Vous n'êtes pas contre, mais mettons que vous soulevez tellement de questions
et vous identifiez un très grand nombre de difficultés, si bien qu'on finit par
comprendre que ce n'est pas nécessairement votre première option.
M. Casgrain
(François) : Regrouper tout? Non.
M. Drainville :
Tout étant? Précisez, là. Tout étant?
M. Casgrain (François) : Tout était le municipal, l'Assemblée nationale,
le député, la responsabilité au niveau des
ministères, là. Disons, je vous parle de la recommandation 54 et les suivantes,
là, de la commission Charbonneau, qui parlent également de...
M. Drainville : 54, là, précisons-le, O.K.? Je le cite. Je cite le
rapport de la CEIC, là : «Un pouvoir de surveillance touchant l'ensemble des élus provinciaux et
municipaux et de leur personnel politique, des sous-ministres, des
dirigeants d'organismes publics [...] des
présidents de conseil d'administration [et] des organismes et des entreprises
d'État.» En fait, on regroupe tout ça au sein d'un même organisme :
«[Adopter] une loi regroupant au sein d'un même organisme les instances de contrôle et d'application des règles
d'éthique et de lobbyisme de l'État québécois et de ses municipalités, incluant...» Donc, les élus provinciaux et
municipaux, leur personnel politique, les sous-ministres, les dirigeants
d'organisme public, les présidents de conseil d'administration des organismes
et des entreprises d'État.
M. Casgrain
(François) : C'est ça.
M. Drainville :
Vous trouvez que c'est...
M. Casgrain
(François) : C'est gros.
M. Drainville :
La bouchée est grosse, mettons.
M. Casgrain (François) : Oui.
M. Drainville :
O.K.
M. Casgrain (François) : Donc, dans la commission Charbonneau, ils
voyaient... elle, évidemment, au niveau du municipal, pour elle, l'avantage, la question de l'éthique et du
lobbyisme, des questions qui peuvent éventuellement... d'être connexes,
d'avoir une entité indépendante et éventuellement pouvant avoir un effet, si on
peut dire, positif sur l'ensemble des questions éthiques et du lobbyisme.
Oui, je vous dirais
ceci, cependant, M. le député, c'est qu'il ne faut jamais oublier que ça ne
peut pas être une panacée. On ne peut pas
dire : On vous confie la responsabilité, et maintenant tout va bien aller.
On a un seul commissaire qui s'occupe de tout.
Il
faut toujours se rappeler que les titulaires de charge publique, quels qu'ils
soient, ont une responsabilité. Les leaders,
dans leur milieu, ont un rôle fondamental à jouer. C'est eux qui vont indiquer
la direction, c'est eux qui peuvent indiquer
également quelles sont les règles qu'on veut qui soient suivies. On peut
établir des règles, mais le commissaire, qui est éventuellement à Québec
ou qui serait même à Montréal, peu importe l'endroit où il se trouve, ne peut
agir seul. Il doit compter sur une responsabilisation des titulaires de charge
publique et un rôle des leaders politiques. Et, à cet égard-là, je pense que
c'est ça qui est le plus important si on veut vraiment avoir une culture
éthique.
M. Drainville :
Vous n'avez pas besoin de...
Le Président
(M. Ouellette) : 50 secondes... M. le député de
Deux-Montagnes...
M. Drainville : ...nous convaincre de ça, Me Casgrain. La
responsabilisation de chacun des titulaires de charge publique, nous en
sommes.
Mais
je me permets quand même de revenir à ce rapport que vous avez fait parvenir à
l'ensemble des formations politiques. Vous soulevez dans ce
rapport-là... Alors, j'en lis un autre extrait. Vous dites : «La
commission soulève l'application de normes
contradictoires ou incompatibles. Cela signifie-t-il qu'il faudra uniformiser
toutes les règles? Quelle série de règles sera privilégiée?»
Là,
vous ajoutez, par exemple, dans le domaine municipal : «...bien que la Loi
sur l'éthique et la déontologie en matière
municipale exige un contenu minimal, chaque municipalité dispose de son propre
code d'éthique et de déontologie. Aussi,
cette loi ne s'applique qu'aux municipalités locales et au préfet élu d'une
MRC, le cas échéant. [Alors que] la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme s'applique
beaucoup plus largement — aux municipalités, MRC, organismes municipaux et supramunicipaux.»
Bon,
si vous aviez, vous, la possibilité d'améliorer le fonctionnement de ces deux
grandes institutions, comment est-ce que vous agiriez? Est-ce que...
parce que, dans ce que vous dites et dans ce que j'ai lu ici, il y a
différentes combinaisons possibles. Par
exemple, on pourrait décider que toute la question de l'éthique, y compris dans
le monde municipal, pourrait être
regroupée sous un seul ensemble, par exemple, parce qu'actuellement, on le
disait, pour ce qui est de l'éthique
et de la déontologie, la Loi sur l'éthique et la déontologie en matière
municipale, elle relève de la Commission municipale. Les municipalités ont leur propre code d'éthique. Puis,
bien, évidemment, il y a la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme qui s'applique
aux titulaires de charge publique dans le milieu municipal, hein? Bon.
Alors,
j'imagine que, dans les différentes hypothèses, il y a la possibilité de
regrouper tout le mandat éthique sous un
seul chapeau. Ou encore on pourrait dire : Bon, bien, tout ce qui est
municipal, éthique et lobbyisme, on le regroupe à un seul endroit et...
Par exemple, ça pourrait être le Commissaire au lobbyisme qui pourrait être
responsable de tout le lobbyisme, donc tous
les titulaires de charge publique, et qui pourrait prendre l'aspect, la
dimension éthique, mettons, et déontologie
dans le monde municipal. Et à ce moment-là le Commissaire à l'éthique, lui,
pourrait conserver ses fonctions actuelles par rapport à l'Assemblée
nationale puis au Conseil exécutif, par exemple.
Le Président
(M. Ouellette) : ...dernière réponse de ce bloc-là.
M. Casgrain
(François) : Oui. Donc, c'est sûr que...
M. Drainville : Parce que j'essaie de voir, moi, est-ce qu'on est des...
On est ici pour essayer de voir comment on peut améliorer le
fonctionnement de nos institutions.
M. Casgrain
(François) : C'est sûr que...
M. Drainville :
On a besoin de votre éclairage, là, Me Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Oui. Le Commissaire au lobbyisme, actuellement, a une
juridiction qui touche évidemment autant les
niveaux parlementaire, gouvernemental et municipal. Et je pense que c'est
important que ça soit de façon
horizontale. Plusieurs des mandats, si on regarde au Registre des lobbyistes,
par exemple, vont toucher des mandats qui
sont soit multisectoriels ou multipaliers. Je fais du lobbyisme pour une
entreprise qui a besoin d'un agrandissement de son entreprise, je vais faire des représentations au niveau municipal,
je vais en faire auprès d'Investissement Québec, je vais en faire auprès du bureau du ministre,
éventuellement du député. Est-ce qu'on peut dire : Bien, le municipal va
être d'un bord puis l'autre? Je pense que non. Je pense que la situation comme
on l'avait fait...
M. Drainville : Le
mandat lobbyisme, il faut le centraliser.
M. Casgrain
(François) : Comme on l'a actuellement, ça m'apparaît effectivement un
registre centralisé et beaucoup mieux que la
situation, par exemple, ontarienne où les municipalités, à la pièce, se mettent
à se donner chacun un registre, des
règles un peu différentes chacune à leur façon. Et quelqu'un est obligé d'aller
regarder tous ces registres-là s'il veut
savoir exactement si une entreprise fait des représentations auprès de
différentes municipalités, alors que nous, un registre centralisé, on est capables de voir, pour une entreprise, où il
se fait. Donc, ça, c'est un avantage indéniable du système québécois.
Est-ce qu'on
pourrait faire la même chose au niveau éthique? Et là c'est là que j'ai compris
votre question un petit peu. Oui, on
pourrait possiblement le faire. Évidemment, l'avantage d'avoir un Commissaire à
l'éthique et à la déontologie pour
les membres de l'Assemblée nationale, les membres du personnel, bon, politique,
que ce soit au niveau ministériel ou
au niveau des personnels de député, a aussi ses avantages. C'est une personne
dédiée. C'est une personne qui s'occupe de ces situations-là. C'est une personne qui a une réalité qui est très
proche des députés. Le désavantage qu'il a, c'est le Commissaire à
l'éthique et à la déontologie qui pourrait plus vous en parler, c'est la
petitesse un petit peu de son organisation
qui, à un moment donné, le sclérose un petit peu. Est-ce que c'est la seule
raison pourquoi on doit lui donner plein
de responsabilités? Je ne suis pas sûr. Est-ce qu'on doit commencer à diviser
ça puis... donc, l'éthique municipale, l'éthique puis le lobbyisme comme
c'est actuellement?
• (20 h 30) •
Évidemment, quand il y a eu des discussions sur
la démocratie municipale... je veux dire, sur la déontologie, l'éthique et déontologie au niveau municipal en
2010... des questions qui se sont posées, hein? Les municipalités sont venues : On veut ci, on veut être comme les
membres de l'Assemblée nationale. On dit : Est-ce qu'on veut que ça
soit juste des plaintes provenant de
l'intérieur? Oui, mais, regarde, dans certaines municipalités, ils sont six,
donc ils ne peuvent pas juste se...
Donc là, on a dit : Non, n'importe qui peut éventuellement se plaindre
d'un agissement d'un élu. Donc, les réalités sont différentes, et on a trouvé un modèle qui est différent. Le modèle,
cependant, nous a amenés à une judiciarisation de chacun des cas.
La Commission
municipale agit comme un organisme quasi judiciaire. Elle est là sur le banc et
elle entend, puis il y a une
difficulté au niveau... Je ne veux pas parler de la problématique de la
Commission municipale, mais il y a une problématique
qui a été engendrée par les amendements qui sont venus un petit peu de toutes
parts. Peut-être qu'il faut regarder,
revoir à nouveau le modèle, même si les municipalités l'aiment, parce qu'à
l'heure actuelle, évidemment... Bon, puis
il y a des bureaux, beaucoup de bureaux d'avocats aussi qui l'aiment, là, parce
que, écoutez, ça fait travailler du monde des bureaux d'avocats, là, de façon importante, là. Et je pense que ce
n'était pas l'idée de départ de la loi, et, à ce niveau-là, peut-être qu'il y a des interrogations,
effectivement, à se poser. La commission d'enquête sur l'industrie de la
construction a été très sévère pour la Commission municipale. Je pense qu'elle
a été indûment sévère dans le sens de... sur certaines questions. La Commission
municipale n'avait pas les ressources pour agir différemment. Ça, c'est l'autre
point. Puis vous me permettrez...
Je m'excuse,
M. le Président, de prendre un peu de temps, mais je pense que c'est important.
Si on veut donner des responsabilités
à un organisme, il faut lui donner les ressources pour les exercer. Si on ne
veut pas lui donner ou si on pense
qu'on veut se limiter à tant de ressources, il faut lui donner les
responsabilités qu'il est capable de faire avec tant de ressources. Et là-dessus je pense qu'une des
problématiques de la Commission municipale, ça a été ça. On lui a donné
un pouvoir, supposément, dans sa loi... qui
date d'ailleurs de mille neuf cent tranquille, elle a été adoptée en 1932. Il y
a des dispositions — j'ai
été président de la Commission municipale — qui sont encore là, qui
étaient là en 1932 et qui n'ont pas
d'allure. Cette loi-là, elle devrait être révisée et elle ne l'a pas été depuis
longtemps. On a rajouté plein de bouts, là, mais je pense qu'il n'y a pas d'unité dans cette loi-là, et elle devrait
être revue. Fermez la parenthèse. Et donc c'est ce que, peut-être, je pourrais
dire en fonction de ce que vous m'avez demandé, M. le député.
M. Drainville : C'est une réponse très complète,
c'est un beau survol. Je vous remercie. Je remercie le président pour sa patience, mais je pense que c'était quand
même éclairant pour tous les membres de la commission et c'est du temps
qui m'est amputé sur le deuxième bloc, de toute façon. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) : Bien, je suis fin de vous amputer du temps, mais effectivement c'était
un échange qui était important et qui
devait se faire. Puis je pense que c'était important qu'on aille au bout des
réponses de part et d'autre. Et, M. le député de LaFontaine, vous prenez
la suite.
M. Tanguay : Pour 15
minutes, je pense, M. le Président?
Le Président (M. Ouellette) :
Bien... Oui, ça va dépendre de vous.
M. Tanguay :
O.K. «Just watch me.» Du Commissaire au lobbyisme, moi... Puis c'était
un débat intéressant, effectivement, le
collègue de Marie-Victorin, mais ne croyez-vous pas qu'il faudrait voir tout
ça, ces questions-là, sous le spectre
de la finalité au lendemain d'une enquête? Si d'aventure le Commissaire à
l'éthique était aussi Commissaire au lobbyisme ou, vice versa, le
Commissaire au lobbyisme était Commissaire à l'éthique, dans le contexte où,
même, on pourrait considérer de modifier les modes de sanction non pas par un
vote des deux tiers de l'Assemblée nationale, donc
des pairs, mais par une sanction imposée par le commissaire, il y aurait des
trains qui quitteraient la gare à la même date, mais les sanctions ne seraient pas matérialisées au même moment.
Rapidement, le député, dans une relation avec un lobbyiste, serait
sanctionné, alors qu'un lobbyiste pourrait, oui, être radié, mais il pourrait y
avoir des enquêtes qui seraient transférées à la direction des affaires
criminelles et pénales.
Autrement dit, il n'y a
pas là une antinomie fondamentale — et je ne réponds pas à la
question, je me fais la réflexion, puis vous
allez nous aider — entre
les finalités des sanctions, leur exécution très rapide et expéditive,
selon la nature même... On parle d'élus, là,
de 125 députés à l'Assemblée nationale, qui reçoivent un rapport, semble-t-il,
en vertu du commissaire... Puis c'est sans droit d'appel, là, je ne peux
pas aller en Cour d'appel, ce n'est pas la décision d'un... appelable. On le sanctionne assez rapidement, de
façon diligente, et, parallèlement à ça, pour des faits, dans une même cause, qui sont allégués, bien là on peut prendre
votre exemple, 2008‑2016, il n'y aurait pas un danger, là, où un des
acteurs de cette mauvaise pièce de théâtre est sanctionné, puis c'est un élu,
dans les six mois, puis après ça, bien, il y a un lobbyiste, en quelque part, qui a été un rôle principal ou secondaire,
peu importe... Lui, quel type de défense pleine et entière pourra-t-il avoir? Et, aux yeux du public, la
cause ne sera-t-elle pas déjà entendue? Alors, il y a ça qui m'interpelle,
moi. Je ne sais pas ce que vous en pensez?
Le Président (M. Ouellette) :
M. Casgrain.
M. Casgrain (François) : Il y a
peut-être plusieurs éléments à ce que vous mentionnez. C'est sûr que la relation... parce qu'il faut dire que...
Je débuterais comme ceci. Il y a peu de dossiers que le commissaire a eus où il y avait, si on peut dire... qu'il y
aurait eu un manque, de la part d'un titulaire de charge publique, de ses
normes d'éthique et de déontologie.
Souvent, évidemment,
c'est du côté du lobbyiste, le fait de ne pas avoir été transparent, si on peut
dire, de ne pas avoir déclaré, de ne
pas avoir indiqué, de ne pas avoir son mandat au registre des lobbyistes...
avoir indiqué son mandat au registre
des lobbyistes, d'où éventuellement un manquement à la loi. Et ce manquement à la loi
là, c'est sûr et certain que... Puis
souvent je dis aux titulaires de charge publique : C'est pour ça que c'est
important que vous vous en occupiez parce que c'est effectivement dans une relation souvent avec un élu ou avec un
autre titulaire de charge publique de haut niveau que peut... avoir eu cette relation-là, et on va mettre en doute, éventuellement, la décision qu'on
va prendre. Et c'est vous qui allez
éventuellement porter le chapeau, qui avez plus de chances de porter le
chapeau, même si la responsabilité appartient éventuellement au
lobbyiste, et sans faute déontologique.
Bon, dans le
cas d'espèce que vous me mentionnez, c'est qu'il y aurait eu une faute
déontologique de la part de l'élu, éventuellement, qui, éventuellement,
pourrait être sanctionnée, là, tout dépendant si on parle d'un membre de l'Assemblée nationale. Évidemment, ce que je disais tout à l'heure, je ne
mentionnais pas que c'était nécessairement
le commissaire. C'est le commissaire qui
doit prendre ces... d'en arriver à cette conclusion-là. Le commissaire prend
une décision, ce qui en est appelable... Et
ce que je comprends, c'est qu'évidemment c'est de la régie interne de l'Assemblée,
ce qui est différent des corps municipaux, là, qui ne sont pas... ils n'ont pas
la même... au niveau constitutionnel, ils ne sont pas au même niveau
qu'évidemment les membres de l'Assemblée nationale.
Et je pense
qu'effectivement à ce que le lobbyiste aurait le droit à une défense pleine et
entière parce que... Mais je pense
que c'est des fautes éventuellement différentes et je pense qu'on peut avoir un
système qui est double. C'est sûr qu'ils
ne seront pas au même niveau, et ça, c'est une préoccupation qu'il faut... un
questionnement qu'il faut avoir, mais je ne suis pas sûr que c'est
antinomique, nécessairement.
Le Président (M. Ouellette) :
Monsieur...
M. Tanguay :
Mais néanmoins vous venez de dire que ça serait deux systèmes différents avec
un seul arbitre.
M. Casgrain
(François) : Bien, un seul
arbitre, c'est-à-dire que le Commissaire au lobbyisme n'arbitre pas,
c'est les tribunaux qui arbitrent dans le
cas, entre guillemets, du lobbyiste. Dans le cas de l'élu, bien, c'est...
évidemment, les membres de l'Assemblée nationale disent : On nomme
quelqu'un pour occuper des fonctions, en tout cas, lorsqu'il s'occupe des membres de l'Assemblée nationale,
donc une personne que l'on désigne pour nous remplacer parce que nous,
on est susceptibles d'être un peu en conflit d'intérêts parce que c'est soit
quelqu'un de notre formation politique ou celui d'une formation adverse. Et là
il peut y avoir une décision qui pourrait être teintée, en tout cas, si... même
si les parlementaires font le meilleur travail qu'ils font, quelqu'un qui est
de l'extérieur... parce qu'on parlait de ça tout à l'heure : Est-ce que quelqu'un pourrait voir dans cela évidemment
un parti pris? Et c'est là que guette... éventuellement les membres de
l'Assemblée nationale dans la décision qu'ils peuvent prendre.
Évidemment,
quand le commissaire, dans la situation actuelle, ne recommande pas de sanction,
bon, bien, ce n'est pas problématique
pour les membres de l'Assemblée nationale. Il n'y en a pas encore eu dans le
cas où il recommanderait une
sanction. Qu'est-ce qui serait fait? On n'a pas encore d'exemple. Je ne suis
pas sûr que l'Assemblée qui suivrait la recommandation serait problématique, c'est dans le cas où il ne le suit
pas qu'il y a un problème qui risque de se poser aux yeux du public.
• (20 h 40) •
M. Tanguay : Bien oui,
tout à fait. Même si on ne change pas la loi, il y a un problème, comme vous
venez de l'illustrer... bien, un problème,
il y a un défi là à réconcilier. Et donc seriez-vous... Si je pousse le
raisonnement un pas plus loin,
iriez-vous à nous dire que, si, d'aventure, là, on voulait fusionner les deux
postes de commissaires, il ne faudrait pas donner suite a fortiori à la
recommandation 22, qui permettrait au commissaire fusionné d'imposer la
sanction dans le cas du député?
Alors, vous êtes dans un scénario où vous avez
un lobbyiste et un élu de l'Assemblée nationale qui auraient, de façon alléguée, suite à votre enquête ou à
l'enquête du commissaire fusionné, je vais l'appeler comme ça, mal agi.
Et là, dans le cas du député, bien, c'est final et sans appel, vous recommandez
une sanction qui est appliquée selon la recommandation 22. Puis, dans l'autre cas, bien,
il y aura un processus avec audi alteram partem et droit d'appel, et
ainsi de suite. C'est là où vous... Est-ce
que vous recommanderiez de ne pas, si d'aventure on fusionne les deux, a
fortiori... n'allez pas donner suite à la recommandation 22, de
permettre au commissaire fusionné d'imposer une sanction à l'un des deux
acteurs, qui est le député?
Le Président (M. Ouellette) :
Me Casgrain.
M. Casgrain
(François) : En vous
écoutant, j'ai eu un doute sur ma lecture que j'avais eue de la recommandation
22. Quand je lis la recommandation 22, elle m'apparaissait être
applicable aux membres du personnel de députés ou aux membres d'un cabinet ministériel. Et là on dit : Le Conseil
exécutif, dans le cas du cabinet ministériel, pourrait déléguer
éventuellement... donc, le Conseil des ministres pourrait déléguer au
Commissaire à l'éthique et à la déontologie relativement
à un membre de son personnel parce qu'il est mal placé pour éventuellement
sanctionner ou ne pas sanctionner le
membre du personnel de cabinet. La même chose pour le personnel de députés, par
le biais du Bureau de l'Assemblée nationale.
Donc, c'est là que je disais que je divergeais peut-être un peu d'opinion.
C'est oui ou c'est non. Je ne comprenais pas, dans les recommandations
du commissaire... Bon, évidemment, votre question va peut-être plus loin que la
recommandation 22, mais, si on donnait suite
à la recommandation 22, c'est plus au niveau des membres de personnel.
Ce que moi,
j'avais compris, c'est qu'évidemment l'Assemblée nationale, elle est
souveraine, c'est elle qui décide notamment
de la discipline de ses membres. Donc, elle confie l'enquête à un commissaire
indépendant puis, bon, toutes les règles
concernant les déclarations, les conflits d'intérêts, mais elle se garde la
responsabilité d'établir éventuellement la sanction applicable ou... c'est-à-dire la sanction applicable en tenant
compte ou non de la recommandation du commissaire. Donc, je ne
comprenais pas qu'il changeait cet état de choses dans son rapport.
Le Président (M. Ouellette) :
M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Bien, vous avez tout à fait raison, la recommandation 22 traite des employés.
Par contre, le débat avait été ouvert
avec le Commissaire à l'éthique sur peut-être, le cas échéant... parce que nous
ne sommes pas stricto sensu liés à la
rédaction des 23 recommandations, mais il s'agit d'une occasion. Mais vous avez
tout à fait raison, la recommandation 22 traite les employés. Mais, le
cas échéant, la question avait été posée, et le débat avait élargi aussi à la sanction qui pourrait être imposée ou
demandée... imposée par le Commissaire à l'éthique lorsqu'il vise
également un comportement de député. Là,
également, le raisonnement s'applique aussi en matière d'un employé où un
employé est impliqué où, là, la recommandation... la sanction est sans
appel, là, également. Alors, c'est là où le raisonnement...
Et, même dans
un cas où on ne change pas le code actuel, où le commissaire recommande une
sanction quand même assez
substantielle à un élu, c'est là où je voyais... et ça participe... En
tout cas, votre réflexion nous aide à y voir un peu plus clair... des défis qu'aurait... parce que le commissaire
nouveau, la nouvelle mouture aurait à jongler avec plusieurs balles et des balles qui seraient de formes
différentes : un élu, un employé d'élu, un lobbyiste, avec des obligations
tout à fait distinctes dans un contexte où — et je vous rapporte à notre
premier bloc d'échange, vous et moi — votre grille d'analyse, moi, peut-être de façon réductrice, je
le dis, elle est peut-être stricto sensu une responsabilité stricte en
matière de loi sur le lobbyisme — vous avez passé sur le feu rouge ou
pas — versus
une analyse de comportement d'un élu ou même d'un employé d'élu. Une personne normalement prudente et diligente
aurait-elle dérogé de ce comportement type là souhaité.
Alors, ce
sont... Puis, peut-être pour une dernière opportunité d'échanger sur ce
sujet-là, parce qu'il y a d'autres objets dont j'aimerais traiter avec
vous, je voulais juste, donc, m'assurer de voir quels seraient, selon vous, les
défis, l'ampleur des défis et jusqu'à quel
point on peut mélanger ces différents éléments de nature, là. Sans dire que
c'est l'huile et l'eau et que ça ne se mélange pas, là, c'est différent.
Le Président (M. Ouellette) :
Bon, trois minutes, M. Casgrain.
M. Casgrain
(François) : Oui.
Rapidement. Ce que je n'ai pas mentionné jusqu'à maintenant, il faut dire
que, dans le Code de déontologie des lobbyistes — puis je n'oublie pas votre question — il y a une obligation. Il y a une
obligation déontologique de la part du lobbyiste,
vous avez raison, c'est de ne pas amener... ou amener le titulaire de charge
publique en contradiction avec ses normes d'éthique et de déontologie, les
normes de conduite qui lui sont applicables.
Donc,
éventuellement, s'il y a une norme déontologique pour un élu, il ne peut pas
recevoir un cadeau, disons, d'un certain montant ou déraisonnable, je ne
peux pas lui offrir, je ne peux pas le tenter. Même juste le tenter, même si l'autre le refuse, c'est éventuellement...
Effectivement, ça peut être une faute déontologique pour le lobbyiste. On ne
doit pas placer, donc, le titulaire de
charge publique dans une situation où est-ce qu'il pourrait contrevenir à son
code d'éthique et de déontologie.
Donc, ça, je pense que c'est tout à fait important, toutes ces normes-là, parce
que c'est ça qui va régir le décideur public, là, celui qui va prendre
la décision.
Maintenant, quand on est du côté du décideur, ou
le titulaire de charge publique, ou membre de l'Assemblée nationale, on a à prendre une décision, on a des
normes, on s'est fait offrir quelque chose et, malencontreusement,
disons que le membre l'accepte, moi, je
pense que ce n'est pas pour rien qu'il n'y a pas eu de problématique jusqu'à
maintenant, mais il pourrait y en avoir si
jamais certaines recommandations que je faisais concernant le financement
étaient touchées. Mais là c'est important parce que c'est tout notre
système qui est basé...
Est-ce
qu'il y a un défi de confier ça au commissaire? Bien sûr qu'il y a un défi. Et
je pense qu'il faut qu'il y ait des
règles qui s'appliquent. Au niveau municipal quand est arrivé le niveau
municipal, on a voulu confier, au départ, à la Commission municipale,
puis je pense que c'était un pouvoir de sanction, c'est lui qui sanctionne. Au
départ, est-ce qu'on en fait un pouvoir de
recommandation? Évidemment, c'est ce que les élus voulaient. Les élus
municipaux, ils voulaient que ce soit un
pouvoir de pure recommandation au conseil municipal. Alors, finalement, ici, on
a décidé que ça allait être un
pouvoir décisionnel, donc un pouvoir de décider s'il y a eu un manquement, la
nature du manquement et, éventuellement,
la sanction pour éviter le conflit d'intérêts probablement plus important ou
plus susceptible de survenir au
niveau municipal parce que plus petite équipe. Généralement, les conseils sont
composés, des fois, de tous les membres de la même équipe, ce qui n'est pas le cas généralement à l'Assemblée
nationale, même s'il peut y avoir des majorités. Donc, c'est sûr que le
défi est différent.
Le
défi, au niveau de l'Assemblée, c'est que l'Assemblée est toujours — et au niveau des privilèges parlementaires — responsable de la discipline de ses membres.
Est-ce qu'il peut le confier à une autre personne? Oui, mais il faut qu'il y ait des règles permettant à la
personne de se défendre de façon pleine et entière, et je pense que c'est
possible. C'est peut-être un défi, mais
évidemment ça, c'est une discussion que vous, les députés, devez avoir. Mais je
pense que ce n'est pas... un n'empêcherait pas l'autre.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de LaFontaine, je vous dirais,
votre temps est écoulé.
M. Tanguay :
Oui. Merci beaucoup.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois. Merci pour votre présence ce
soir.
Mes
collègues ont invoqué, un petit peu plus tôt, une des recommandations de la
commission Charbonneau qui viserait à
réunir, pour ne pas dire fusionner, les services du Commissaire à l'éthique et
vos services à vous. Vous avez parlé de la complexité, ce que ça
pourrait engendrer comme responsabilités. Mais, au niveau du député ou de la
députée elle-même, il y aurait certainement des avantages à mieux s'y
retrouver.
Je
vous lance quelques petites questions, puis on pourra peut-être interagir
là-dessus. Quelle est la ligne entre le citoyen qui vient voir son
député et celui que l'on pourrait associer à un lobby? Je vous donne un exemple
que l'on a certainement tous vécu au cours
des dernières semaines au niveau de l'industrie du taxi, par exemple. On a des
commettants qui sont chauffeurs de taxi,
donc qui viennent nous interpeller par rapport à une réalité qui les inquiète.
Pour nous, c'est le commettant que l'on reçoit, mais, en même temps, cet
individu-là participe ou fait partie d'une corporation ou d'une association de chauffeurs de taxi. Quelle est la
limite et comment le député peut bien départager le commettant du
potentiel lobbyiste qu'il reçoit à son bureau de circonscription?
Le Président
(M. Ouellette) : M. Casgrain.
• (20 h 50) •
M. Casgrain
(François) : Bonne question, difficile, s'il en est, un peu à répondre
dans le sens suivant. C'est sûr que le citoyen,
en tant que citoyen, peut interpeller en tout temps, pour son cas
personnel, évidemment, un député et il ne fait pas de lobbyisme en ce faisant. Évidemment,
le lien entre le commettant doit continuer d'exister. La problématique
que vous soulevez, c'est celui qui... est-ce qu'il agit en tant que citoyen
pour lui-même ou il agit en tant que citoyen pour finalement soit son
entreprise ou soit la corporation? S'il agit pour la corporation, là évidemment
qu'il agit... il est éventuellement un lobbyiste.
Évidemment, ce qu'on
va regarder souvent, c'est : Est-ce qu'il y a une inscription au registre?
Souvent, il va y avoir une inscription. Si
on regarde... bien, en tout cas, l'exemple de l'industrie du taxi, à cet
égard-là, on voit qu'il y a
des mandats qui sont inscrits, un, en faveur
d'Uber, qui avait inscrit un mandat. La corporation des chauffeurs de taxi ou
certains organismes ont enregistré des
mandats. Il y a certaines situations, comme celui qui
est peut-être... est-ce qu'il agit pour lui-même, qui est plus difficile à déterminer. Mais, de façon générale, c'est
ce qu'on va regarder. S'il y a un mandat d'inscrit, il est clair qu'on va travailler pour éventuellement défendre l'industrie du taxi. Puis la personne qui est chauffeur de
taxi vient vous voir, bien, normalement, on considère quand même une transparence
dans son action.
M. Charette :
Dans la même perspective, le député ou la députée, dans son bureau de
circonscription, peut recevoir des
mandataires de sociétés d'État. Est-ce
qu'une société d'État
peut faire ce que l'on pourrait concevoir être du lobbying? Est-ce
qu'il y a nécessité, dans son cas,
d'un enregistrement particulier ou c'est une relation qui est normale,
qui ne nécessite pas d'enregistrement ou de suivi particulier?
M. Casgrain
(François) : Donc, dans la loi, on prévoit que quelqu'un qui est
titulaire de charge publique, c'est-à-dire
qui fait partie d'une institution publique ou qui représente une institution
publique, lorsqu'il est dans le cadre de,
on va dire, l'exercice de ses fonctions, il ne fait pas du lobbyisme lorsqu'il
intervient pour, si on peut dire, l'organisme pour qui il travaille. Comme pour le député qui fait des
représentations, même auprès d'un ministre, ou le maire qui vient voir
le député ou le ministre responsable de sa région administrative ne fera pas...
on ne considérera pas qu'il fait du lobbyisme, même si ça s'apparente, là. Par
exemple, je viens voir, en faveur d'une industrie qui se retrouve dans ma municipalité, plaider en faveur de cette
industrie-là, le maire. Il ne sera jamais considéré comme faisant du lobbyisme.
Il fait sa job, là, lui, là. Évidemment, si
c'est la personne de l'entreprise qui vient voir le député pour que le député
intervienne, lui, il doit s'inscrire parce
qu'il fait une représentation pour essayer d'influencer... pour que le député
l'aide à influencer la décision. C'est peut-être la différence que je
ferais à votre question.
M. Charette :
Toujours de tracer un petit peu la limite parce que c'est réellement le
quotidien, là, qui est nôtre au niveau
des bureaux de circonscription. On a parlé du chauffeur de taxi, l'entrepreneur
ou la propriétaire d'une entreprise quelconque
qui interpelle son député se place dans la même situation, étant donné que
c'est sa réalité. Elle n'est pas membre d'une association qui pourrait défendre ses intérêts, est-ce que cette
personne-là fait du lobbying ou elle est considérée comme un commettant
ou une commettante qui vient solliciter les avis ou sinon l'intervention de son
député?
M. Casgrain (François) : Il faut regarder, là, évidemment, la nature de la
communication qu'il fait auprès du député.
Si, évidemment, c'est une communication qui vise vraiment à influencer la prise
de décision qui va lui être positive, notamment quand la personne a un
pouvoir ou l'institution publique a un pouvoir de décision, c'est plus clair
quand elle intervient, quand la personne
intervient pour son entreprise. Puis là je comprends, les bureaux de député,
c'est là où c'est le plus difficile,
c'est là qu'on reçoit probablement le plus de monde, le plus de réalités
différentes. Et celle que vous dites,
la personne vient pour son entreprise, pour essayer de favoriser son
entreprise, pour essayer de faire en sorte que le député intervienne pour l'aider à ce qu'il
l'obtienne, bien, c'est là qu'à ce moment-là il y a éventuellement,
effectivement, une activité de lobbyisme qui pourrait être à déclarer.
M. Charette :
Si le même entrepreneur a, par exemple, des problèmes avec Hydro-Québec,
exemple, là ce n'est plus faire
valoir ou souhaiter un changement de réglementation qui pourrait le favoriser, mais bien le citoyen corporatif qui sollicite, comme un citoyen
pourrait solliciter son député pour obtenir son aide à régler une situation et...
M. Casgrain
(François) : Chaque fois, avoir une... Excusez-moi, je n'ai pas
attendu le «cue».
Le Président (M. Ouellette) : Mais ça
va bien, vous avez une bonne
conversation. Puis je pense que l'audio est capable de suivre. Ça va
super bien.
M. Casgrain
(François) : Excusez, j'ai juste perdu mon idée... Oui, Hydro-Québec. Évidemment,
je suis un entrepreneur, j'ai un problème avec Hydro-Québec, j'essaie
d'influencer une orientation, l'obtention d'un permis, l'obtention d'un contrat. Non. Non, ce n'est pas toutes les communications, là, il faut qu'elles soient liées soit à une question réglementaire,
une question d'un programme... je veux qu'on instaure un programme...
La
problématique, notamment, souvent, de, entre guillemets, plainte ou de
problématique... ou aider à régler une problématique
que l'on a n'est pas nécessairement du lobbyisme. Le lobbyisme, c'est vraiment
une communication qui vise à influencer la prise de décision, certaines
décisions identifiées dans la loi, notamment les lois, les règlements, les
autorisations, par exemple, en environnement, ou un avantage pécuniaire, ou un
contrat, et c'est ça qui est visé.
M. Charette :
Je vous pose cette question-là, on est à revoir notre code d'éthique,
actuellement. Est-ce que vous jugez
que notre code d'éthique, pour ces questions-là, est suffisamment clair au niveau
de la loi qui régit la relation entre le député et le Commissaire au
lobbyisme? Est-ce que, là, on est aussi bien protégés ou il y a des
améliorations qui pourraient être souhaitables?
M. Casgrain (François) : C'est sûr que, comme on l'a mentionné, je l'ai
mentionné un peu dans mon allocution, la question du rôle du titulaire de charge publique est fondamentale
relativement à sa relation avec le lobbyiste. Et, s'il est clair que le lobbyiste ne respecte pas la loi, il
devrait y avoir une responsabilité qui, peut être... je ne sais pas si elle
est sanctionnable ou peut-être qu'il faut
uniquement l'indiquer comme étant une responsabilité claire que l'on a. À
l'heure actuelle, il y en a qui disent qu'ils l'ont, il y en d'autres qui ne le
disent pas, malgré que, dans un sondage auprès des titulaires de charge
publique... disent que 96 % estiment qu'ils ont une responsabilité, mais,
quand ils viennent pour l'appliquer, c'est genre, excusez-moi mon éducation judéo-chrétienne :
Éloigne de moi ce calice.
On
aimerait mieux ne pas avoir à s'en mêler puis à y toucher, sauf que, si on ne
s'en mêle pas, si on joue un peu... Puis,
cet après-midi, il y a une image qui m'est venue, puis je ne voudrais pas
l'utiliser puis prendre trop de votre temps, mais, tu sais, Aurore l'enfant martyre. Vous allez me dire :
Pourquoi je vous parle d'Aurore l'enfant martyre? Mais tous les voisins savaient. On ne se mêle pas de ce
qu'il se passe chez le voisin, on ne se mêle pas de ce qu'il se passe...
Même le père disait : Moi, je ne me
mêle pas, je veux garder ma vie de couple. À un moment donné, si on ne se mêle
de rien, bien... puis on laisse tout aller, bien, il y a des choses
importantes qu'on va rater.
Donc, c'est dans ce
sens-là que le rôle du titulaire de charge publique, du député, relativement à
l'activité de lobbyistes qui est faite après de lui, il faut que ça soit clair
qu'il a une responsabilité. Est-ce que c'est dans le code d'éthique? À Toronto, à Ottawa, dans certaines
municipalités ontariennes, c'est le cas. Il y a carrément une
disposition qui le prévoit qu'ils ont un rôle à jouer, et ils doivent le jouer.
S'assurer, par exemple, notamment à Toronto, que le lobbyiste qui s'adresse à
lui est inscrit au registre.
M. Charette :
Et c'est un article...
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette :
Merci, M. le Président. Donc, c'est un article qui est intégré en bonne et due
forme au code d'éthique des élus ontariens et qui, sans que ça soit du
mot pour mot, se libelle de façon assez générale?
M. Casgrain (François) : Non, qui se libelle de façon assez claire, qui
dit que le titulaire de charge publique ne peut, si on peut dire, avoir des communications avec quelqu'un qui tente
de l'influencer sans que cette personne-là ne soit inscrite au registre. Et, si c'est le cas ou c'est
de façon... puis ce n'est pas prévu, ça, c'est une rencontre imprévue, il
doit lui dire qu'il a l'obligation de s'inscrire et le mentionner au
registraire — parce
que c'est un registraire dans le cas de Toronto — au registraire. Donc,
il y a une obligation très claire, et cette obligation-là peut lui amener,
peut-être éventuellement, une réprimande ou
ça peut aller éventuellement, si ça fait plusieurs fois qu'il est avisé, à des
sanctions qui peuvent être plus importantes.
• (21 heures) •
M. Charette :
Et c'est un ajout que vous accueilleriez
favorablement si, éventuellement, on convenait, là, de le faire au niveau de
notre code d'éthique.
M. Casgrain (François) :
Oui. Si c'était dans le... c'est sûr que je l'accueillerais favorablement.
M. Charette :
Autre question. Vous avez mentionné, dans votre présentation, tout ce qui est
cadeau sous différentes formes avec une
valeur qui ne doit pas excéder 200 $
ou sinon qui doit être déclarée si excédant 200 $. On a un fonds
qui est administré par l'ensemble... enfin, chaque bureau de circonscription
gère une enveloppe, le fameux programme de
soutien à l'action bénévole, qui génère beaucoup de questionnements chez les
députés, à savoir à travers un montant
x qui est donné à un organisme qui se qualifie, donc qui correspond... qui
respecte les règles de ce programme-là pour,
par exemple, encourager une soirée de reconnaissance de bénévoles, ou une
soirée de financement, ou autre, bref, une contribution qui est donnée.
C'est de l'argent public, on s'entend bien. Les participants qui veulent
assister à cette soirée-là vont devoir payer
un prix de 150 $ ou 200 $ — parce qu'il y a un volet financement à cette
soirée. Est-ce que la contribution qui est donnée par l'entremise du SAB peut
donner droit à une gracieuseté, une gratuité? Et dans quelle mesure, si
c'est le cas, ça doit être déclaré ou pas?
M. Casgrain (François) : Écoutez, on participe... il y a toutes sortes de
situations où il est susceptible d'avoir, si on peut dire, des avantages
qui sont liés à la... on peut dire... je ne dirais pas à la bienséance, on
disait ça auparavant, mais des règles un peu
d'hospitalité, hein? Je vais donner des conférences à un moment donné puis,
bon, on m'offre... il m'est arrivé de
me faire offrir une boîte de chocolats ou de me faire offrir quelque chose de...
C'est sûr qu'on ne peut pas éliminer
ces choses-là. Malgré que, dans mon cas, avant même d'y aller, on dit :
Écoutez, le commissaire ne désire pas à ce que vous lui offriez quelque chose pour le remercier. Il ne va pas là
pour recevoir quelque chose. Donc, ça, c'est des possibilités qui sont
offertes pour éviter qu'on soit dans cette situation-là. Mais chacun a sa
réalité.
Ce
qui est le plus problématique, c'est quand on dit, ou dans le code, ou dans
certains cas, qu'on ne peut pas avoir un
avantage qui pourrait avoir effet comme d'influencer... je ne me souviens plus
comment on le mentionne en tant que tel.
Je vous mets au défi de me dire qu'un député va admettre, à un moment donné,
que ce qu'il a reçu, quel que soit le montant, était susceptible
d'influencer la décision qu'il va prendre. Puis là, tout à l'heure, on parlait,
le député de Rivière-des-Prairies nous
mentionnait justement une question à cet égard-là. C'est sûr qu'on ne peut pas...
on ne peut pas, tout simplement.
Est-ce qu'on doit les refuser? Est-ce qu'on doit tous les refuser? Bien, quand
on reçoit quelque chose d'hospitalité...
une femme qui reçoit un bouquet de fleurs ou qui reçoit... on reçoit... il ne
peut pas les... on ne peut pas nécessairement
les refuser. Mais, dans certaines situations, je pense qu'effectivement il faut
que les règles soient assez claires. Si c'est un entrepreneur avec qui
tu fais affaire, si c'est quelqu'un qui fait du lobbyisme auprès de toi, si
c'est quelqu'un qui est susceptible d'en faire, ou etc., je pense qu'à ce
moment-là il faut que ça soit clair que c'est interdit.
M. Charette :
Selon la connaissance que vous avez du programme de soutien à l'action
bénévole, c'est un programme qui est
suffisamment balisé actuellement? Est-ce que les députés mériteraient d'être
mieux protégés? Est-ce qu'il y a des modifications qui pourraient être
souhaitables?
M. Casgrain (François) : À votre question, je m'excuse de ne pas y avoir
répondu directement, je suis passé par un autre chemin, mais... puis ça
fait un petit peu longtemps que j'ai regardé ces règles-là. Bon, à une époque,
je les avais regardées, mais, à mon souvenir,
c'est sûr qu'il y a... C'est déjà balisé, il y a une certaine forme de
discrétion. Puis je pense que c'est
normal qu'il y ait une certaine forme de discrétion qui soit donnée aux
députés. Il peut toujours se faire questionner,
de toute façon, sur ce qu'il a fait de ces sommes-là. Qu'il donne à un
organisme de charité qui, éventuellement, l'invite, bon, à quelque chose... souvent, même, c'est une obligation
quasiment pour lui par rapport à ses commettants, un respect
relativement à ses commettants. La situation ne peut pas juste être noir ou
blanc.
En fait, c'est un
petit peu ça que je veux vous dire. Il doit quand même y avoir une forme de
place à l'évaluation — et c'est ça, l'éthique, dans le fond — à l'évaluation. Est-ce qu'une personne
placée un peu dans la même situation
ou une personne à l'extérieur verrait ça comme étant problématique ou non?
Est-ce que, moi, le fait que ça soit rendu
public, est-ce que je serais mal à l'aise? Est-ce que je serais placé dans une
situation qui pourrait nuire, me nuire ou nuire, bon, évidemment, à l'ensemble du système auquel j'appartiens? Je
pense que ce sont des questions... L'éthique s'adresse à ces questions-là, et je pense qu'on ne peut pas tout
prévoir. La déontologie ne peut pas régler toute l'éthique, tout l'aspect éthique. Et, de ce côté-là, je pense
que c'est important qu'on n'essaie pas de tout, tout, tout régler. On ne
sera jamais capables. Puis on va arriver à certaines autres zones où est-ce que
c'est problématique.
M. Charette :
Le commissaire a remis, l'année dernière, un rapport avec
23 recommandations. La plupart constituent,
je le pense, des avancées ou des progrès significatifs dans la mesure où on
devait les retenir. Il y en a une, par contre,
qui a suscité davantage de questionnements, la recommandation n° 4, en
vertu de l'article 25 du code d'éthique.
Dans
l'éventualité où un député ou une députée avait un intérêt dans un débat
quelconque, ce que le commissaire nous
propose comme modification, c'est de dire : Voici, déclarez votre intérêt.
Mais vous auriez tout de même, par la suite, le droit de participer au
débat sans vous mettre en porte-à-faux avec le Commissaire à l'éthique.
N'est-ce pas une contradiction avec une
règle relativement élémentaire d'éthique? C'est-à-dire, lorsqu'on est en
conflit potentiel d'intérêts, non
seulement il faut le déclarer, mais on se retire de tout débat qui pourrait
ultimement nous favoriser. Est-ce que c'est une recommandation avec
laquelle vous êtes confortable?
M. Casgrain
(François) : On a parlé,
tout à l'heure, de réflexion que l'on avait faite ou... même à la
commission Charbonneau, on a parlé de
cohérence, la notion de cohérence. Évidemment, si les règles ont à être
cohérentes les unes par rapport aux autres... Si on prend, par exemple,
la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, l'article 361, si ma mémoire ne me fait pas
défaut, indique très bien que, lorsque quelqu'un a un intérêt financier
distinct de celui de la municipalité, il
doit le déclarer et éviter de participer au débat et de voter. Si ce n'est pas
dans le cadre d'une assemblée publique, il doit quitter. Donc, il y a
des règles qui sont relativement précises à cet égard-là.
Ce que j'ai
compris de situations qui avaient pu se passer... Et là c'est pour ça que,
quand je dis en porte-à-faux avec le
Commissaire à l'éthique, je ne sais pas lesquelles... je pense savoir laquelle
il visait, mais l'idée, c'est de dire : Est-ce qu'on s'en va chercher des députés pour des discussions à un
assez haut niveau? Bon, ce n'est pas, des fois, une réglementation. C'est quoi, la nature de ça, on va
dire de l'avantage financier? Est-ce que c'est un avantage important?
Est-ce que c'est un avantage... Qui va avoir à le déterminer?
Évidemment,
si la règle est claire, bien, à ce moment-là, personne ne peut participer à
rien. Mais si, par hasard, on a, dans
la société... on a des enseignants, on a des gens qui ont été dans le commerce,
on a des gens qui sont avocats... mais, dans les avocats, il peut y en avoir, des gens qui ont... dans la
fiscalité... Il y en a d'autres qui sont plus en droit civil ou en droit criminel. Il y en a d'autres qui sont des
agriculteurs, il y en a d'autres qui sont... donc, de toutes les sphères de
la société. C'est ça qu'on veut avoir aussi, au niveau de l'Assemblée, d'avoir
des gens qui vont venir nous parler aussi de leur expérience.
Et
probablement que c'est dans ce sens-là que le commissaire faisait sa remarque,
si je me souviens bien d'avoir lu correctement
le rapport qu'il a fait, dire : Est-ce qu'on interdit complètement? Est-ce
que ça n'appartient pas aussi aux députés de faire la part des choses si
c'est un intérêt financier important? Lui permettre quand même de participer au
débat, mais il n'a pas le droit de vote. Et
j'ai eu une hésitation en regardant ça, et j'avais justement pris la note
relativement, à un moment donné... sur la
Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, dont je vous
ai parlé tout à l'heure. Et c'est là
que je me suis dit : Bien, c'est sûr qu'il faut se poser la question.
Mais, si on est trop sévères, peut-être qu'on va se priver, dans nos
débats, de points de vue intéressants.
• (21 h 10) •
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, M. Casgrain. Merci, M. le député de Deux-Montagnes. On a été très
magnanimes, et c'est une discussion qui est très intéressante. M. le député de
LaFontaine...
M. Tanguay : Merci, M.
le Président...
Le Président (M. Ouellette) :
...si je vous dis qu'il vous reste 13 minutes, est-ce que vous allez être
choqué après moi?
M. Tanguay : Non, rien
que vous ne pourrez faire ne me fera me choquer contre vous, mon cher collègue,
M. le Président. 13 minutes. J'ai une
question, peut-être deux questions au Commissaire au lobbyisme, à
Me Casgrain. Après, je laisserai la parole à mes collègues.
Au niveau des
communications, rendre publics certains avis... Et là je fais référence aux
recommandations 17 et 21 du rapport du Commissaire à l'éthique, 17
et 21 où l'on disait, à 17 : «Que l'article 87 du code soit modifié
pour prévoir que le commissaire peut rendre public un avis qu'il a rendu à
l'égard d'un membre de l'Assemblée nationale, lorsque ce dernier déclare
publiquement avoir obtenu un avis du commissaire.» Ça, c'est la 17.
Et la
21 : «Que les articles 87 et 91 du code soient modifiés pour indiquer
que la demande écrite d'avis d'un député ou la demande écrite présentée
au commissaire de faire une enquête ne peut être rendue publique qu'après que
le commissaire en ait confirmé la réception.»
Alors, sur
ces deux recommandations-là, j'aimerais savoir comment vous, vous les
accueillez. D'autant plus, dans le contexte où de nouvelles... bien,
c'est-à-dire une mise à jour de votre politique de communication, justement, a
été faite le 31 mars dernier où, d'une part à 5.1, on disait que la
transparence participait du respect du droit du public à l'information, mais qu'il y a, je pense, et
corrigez-moi si j'ai tort, il y a néanmoins des atermoiements que vous
apportez lorsqu'il s'agit de confirmer ou pas s'il y a vérification ou enquête
de votre côté.
Alors,
j'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec cette proposition du Commissaire à
l'éthique. Auquel cas, si vous êtes
d'accord, bien, vous faites une distinction entre son rôle et le vôtre? Ou, si
vous dites non, il devrait y avoir, dans les deux cas, une réserve quant à la confirmation ou pas, que ce soit fait
par la personne concernée ou pas, qu'il y ait un devoir de
confidentialité quant aux vérifications et enquêtes. Je veux juste que vous
éclairiez notre lanterne par rapport à ça.
M. Casgrain (François) : Bien,
peut-être que... Il y a quelques aspects à votre question. Le premier, sur la recommandation 17, évidemment, ici, c'est la
personne qui dit : Oui, oui, j'ai consulté, tout est correct. Puis
évidemment consulté sur quoi, quelle est la
conclusion sur laquelle on est d'accord? Bon, ce que j'ai compris, c'est que le
commissaire dit : Bien, écoutez, si la
personne veut utiliser l'avis que je lui ai donné, il faut, dans le fond, qu'il
ne le garde pas pour lui, son avis, il faut qu'il puisse être rendu public. J'ai tendance à être
d'accord avec cette position-là, qui m'apparaît être une clarification de ce sur quoi le commissaire s'est
vraiment prononcé, avec quels aspects qu'on lui a donnés... parce que
c'est toujours un aspect : Voici ce que
l'on m'a dit, voici, en fonction de ce que l'on m'a dit, l'avis que j'ai donné,
et non pas, bon, évidemment, uniquement une position.
Concernant 21.
Évidemment, dans le cas de l'article 21, ce que j'ai compris, évidemment,
du commissaire, c'est des situations
dans lesquelles il a été peut-être placé... ou il apprend, par le biais,
évidemment, éventuellement des médias... on a un journaliste qui l'appelle : On vient de dire qu'on a déposé...
l'avez-vous reçu? Il n'a pas encore... même pas encore reçu la confirmation... La personne qui fait l'objet
éventuellement de la plainte n'a même pas encore été avisée qu'il y
avait une plainte contre elle, alors que la loi se veut une question de
transparence.
Oui, c'est
difficile. Est-ce qu'on peut complètement s'en sortir quand on dit : Oui,
on va faire une plainte et on le dit au journaliste, mais la plainte
n'est pas encore faite? C'est peut-être un peu plus difficile, malgré que je
comprends parfaitement le commissaire sur sa recommandation.
Maintenant,
concernant la politique de communication, effectivement, la politique de
communication du commissaire, comme
toutes les autres politiques... L'an dernier, on s'était donné, si on peut
dire, comme mandat, au cours de
l'année, de revoir nos différentes politiques, l'ensemble de nos politiques du
commissaire. Bon, en raison de maladie, j'ai été absent de nombreux
mois. On a attendu, relativement à la politique de communication, notamment,
mon retour pour en parler. On a eu une discussion. On a pausé. On s'est aperçu qu'il y avait
certaines contradictions entre certaines parties de notre politique de communication, notamment au niveau des plaintes, comment on rendait publiques les... Est-ce qu'on ne
rendait pas publiques les plaintes? On ne disait rien sur nos enquêtes. Mais par
ailleurs quelqu'un pouvait nous demander si on était en enquête, il finissait
par savoir qu'on avait eu une plainte. Donc, comment on fait pour concilier ça?
Et évidemment la question de la loi sur l'accès à l'information, qui, elle,
s'applique à la Loi sur la transparence et
l'éthique en matière de lobbyisme, qui ne s'applique pas, bon, au niveau du code d'éthique et de déontologie. Donc, évidemment, je pense que
c'est deux situations différentes, et je suis très à l'aise avec la position
qu'on a prise.
C'est sûr que, dans des circonstances
exceptionnelles, il peut arriver... C'est sûr qu'on va confirmer. Si quelqu'un
nous dit : Fais une conférence de presse pour dire : Je viens
d'envoyer au commissaire, puis le commissaire va dire : Avez-vous reçu? Si on l'a reçu, on va dire : Oui, on l'a
reçu. On a fait une conférence de presse ou émis un communiqué de
presse. Tu sais, on ne fera pas à semblant de jouer au chat et à la souris.
Donc, il y a eu une situation qui est survenue exactement
la journée où est-ce que... Moi, je tenais à ce qu'on finisse avant l'année financière qui finit le 31 mars. Est arrivée une situation,
le 31 mars, qui a amené peut-être une mauvaise compréhension de ce qu'on voulait faire. C'est pour ça que, dans
l'infolettre qu'on a faite récemment, on a dit pourquoi on avait adopté cette
politique de communication là un peu différente de ce qui existait auparavant.
M. Tanguay :
Merci beaucoup. Il ne reste que sept minutes, même 6 min 30 s,
puis mon collègue de La Prairie a des
questions. Rapidement, article 94 du code d'éthique et de déontologie, enquête
conjointe, je veux savoir si vous avez des
réflexions par rapport à ça. Ou, tel que rédigé et tel qu'il se vit par vos
services et peut-être les interrelations, sans aller dans le détail, avec le Commissaire à l'éthique,
avez-vous des remarques particulières ou l'article 94, tel qu'il le
permet, est suffisamment étayé, vous donne la latitude pour être efficace?
M. Casgrain
(François) : Disons que,
lors de l'étude du projet de loi n° 48, le commissaire avait dit :
Oui, bon, ça peut être une bonne
idée, mais il faut être conscient que les enquêtes ont des natures différentes.
Si j'arrive au niveau des sanctions
pénales, c'est sûr et certain que j'ai des droits donnés, éventuellement, si je
veux questionner la personne, ce qui n'est pas le cas... bon. Les
situations peuvent des fois être difficiles.
Donc, sans rentrer dans le détail, oui, il y a
eu entre les deux commissaires, à un moment donné, certains échanges qui ont eu lieu relativement à ce que...
Les enquêtes communes sont cependant excessivement difficiles. Ce que je
pense qui est le plus propice, c'est l'échange éventuellement d'information. Il
est important, concernant... si jamais ça
touchait les mêmes personnes — parce qu'on en a discuté amplement suite à vos
questions — qu'il
puisse y avoir des échanges... bon,
disons que ça restait deux commissaires distincts, qu'il puisse y avoir des
échanges entre les commissaires. Je
pense que c'est important qu'il en soit ainsi, ne serait-ce que pour échanger
et pour éviter des contradictions. Qu'on puisse échanger, ça, je pense que c'est une forme d'entente. Sans être
une enquête conjointe, c'est d'avoir des ententes entre les
commissaires, comme la même chose qu'ils pourraient faire avec le Vérificateur
général, par exemple.
Le
Président (M. Ouellette) : Je vous enlève la parole, M. le député de LaFontaine, parce que, là, je
voudrais bien que le député de La Prairie parle.
M. Tanguay :
Non, mais juste rapidement, parce que je trouve ça intéressant, est-ce que, Me
Casgrain, l'échange d'information entre vous, Commissaire au lobbyisme
et Commissaire à l'éthique... il n'y a pas de mur de Chine, là, vous pouvez
vous échanger toute information?
M. Casgrain (François) :
C'est-à-dire que c'est sûr que le... c'est toujours une évaluation du... bien,
du commissaire avant tout, des différents
commissaires, des commissaires à l'éthique. Est-ce que c'est un échange?
L'échange d'information, c'est fluide. Par
exemple, s'il y a une rencontre, là, quand est-ce que va se tenir cette
rencontre-là? Quel type? Bon, c'est
des échanges de ce type-là qui peuvent avoir lieu. Mais il pourrait y avoir une
entente, parce que la loi, à mon avis,
ne l'interdit pas non plus, entre les commissaires pour éventuellement qu'il y
ait certains échanges d'information.
Par ailleurs, de notre
côté, généralement, il y a beaucoup d'informations qui vont provenir, qu'on ne
veut pas savoir parce qu'on ne veut pas
contaminer, si on peut dire, notre preuve. Bien souvent, c'est une question de
contamination de la preuve. Si c'est une preuve qui avait été obtenue, alors qu'il
n'y avait pas de droits qui ont été donnés, on ne pourrait pas l'utiliser. Et, si on l'a... et là ça peut être problématique. C'est pour ça que
les échanges sont avant tout de nature, je dirais, plus administrative
que d'échange véritablement d'information.
M. Tanguay : Et vous ne
sentirez pas, de votre côté, selon votre témoignage ce
soir... «témoignage», c'est un grand
mot, là, mais que vous n'avez pas de contrainte légale, par ailleurs, outre que
la fonctionnalité des enquêtes puis ne pas
contaminer, mais vous n'auriez pas de contrainte légale à ce que les
informations d'enquête, de part et d'autre, puissent circuler entre les
deux services?
• (21 h 20) •
M. Casgrain (François) : Bien, la
question qu'on a eue, par exemple, de la commission Charbonneau : Avez-vous des ententes avec la Sûreté du
Québec? Avez-vous déjà eu
des échanges? Et est-ce que vous agissez en vase clos ou pas en vase clos? C'est sûr et certain que,
bon, sans parler de dossiers, il est arrivé certains cas où est-ce que,
bon, on s'est fait demander certaines
informations, par
exemple, que l'on pouvait avoir pour
aider évidemment la compréhension de dossiers ou des échanges. Je pense
que ces échanges-là sont profitables. Il ne faut pas agir en vase clos
complètement...
M. Tanguay : D'accord.
Merci.
M. Casgrain (François) :
...sinon, ce ne serait pas tenable.
M. Tanguay : Merci. Je
comprends. J'ai terminé.
Le Président (M. Ouellette) :
Ah oui?
M. Tanguay : Oui.
Le Président (M. Ouellette) :
Non, mais c'était très pertinent, votre question, M. le député de LaFontaine, parce que
l'échange d'information, il faudra peut-être le regarder pour un amendement
législatif, ou aller juste dans un échange poli, ou, à un moment donné,
c'est quelque chose sur lequel il va falloir se pencher.
Je vous ai volé 30 secondes, M. le député
de La Prairie. Il vous reste 2 min 30 s.
M. Merlini :
Merci beaucoup, M. le Président. Me Casgrain, M. Pauchant, de HEC
Montréal, vous a précédé avant l'heure
du souper et a parlé du droit et de l'éthique, qui font partie de la même
famille, mais qui sont différents, comme frères et soeurs, différents comportements, différentes attitudes, mais
qu'il fallait, nous, les parlementaires, chercher à balancer le droit et l'éthique dans ce qu'on
souhaite faire, dans la révision suite au dépôt du rapport, pour améliorer
notre code d'éthique — en passant, qui n'aime pas le titre «code
d'éthique», il parlait plutôt des valeurs de l'Assemblée nationale...
Une voix : Code des valeurs.
M. Merlini :
...un code de déontologie, et que la confiance était nécessaire au leadership
éthique. C'est la confiance qui
détermine qu'on ait un leadership éthique. Vous-même, vous l'avez dit, plus tôt
dans votre allocution, que la confiance est nécessaire, qu'il faut non seulement respecter les règles, mais
respecter l'esprit des règles. Et vous l'avez, particulièrement dans
votre rôle de Commissaire au lobbyisme.
Maintenant,
je veux vous amener à la recommandation 18 du rapport, qui se lit ainsi :
«Que le code, les règles et le règlement
soient modifiés de façon à prévoir l'obligation pour les députés, les membres
du Conseil exécutif et les membres de leur personnel de participer à une
formation dans les six mois du début de leur mandat et, par la suite, à au
moins une reprise pour chaque mandat subséquent.»
M. Pauchant
en a fait allusion également, que les élus, et leurs membres de personnel, et
les membres du Conseil exécutif
devraient avoir justement une formation sur l'éthique et la déontologie. Est-ce
que ça serait, selon vous, également applicable au lobbyisme? Parce
qu'effectivement, quand on arrive de différents milieux, on n'est pas
nécessairement habitués à ces choses-là, et
là on fait face, comme on disait tantôt, dans les différentes interventions, à
des groupes qui veulent nous
influencer, qui tentent de nous parler de différents dossiers. Alors, est-ce
que ce serait utile pour vous de faire ce genre de formation là et
est-ce que ça serait possible de la faire dans le cadre aussi d'une formation à
l'éthique et à la déontologie?
M. Casgrain (François) : Non
seulement utile, essentiel. Après chacune des élections, on entre en contact,
normalement, avec les whips et on leur offre de faire une formation. Oui, pour
les nouveaux députés, c'est tout à fait essentiel. Dans certains cas... bon, on
va faire une formation, demain, avec la formation de la... avec la Coalition avenir Québec — on est habitués de dire la CAQ — et évidemment à leur demande parce qu'on
estimait avoir un besoin. Oui, on avait... on a offert, à un moment
donné... Évidemment, le besoin peut aussi se faire sentir par la suite.
On nous a, là, au
Bureau de l'Assemblée, également dit : On estime qu'on aurait besoin
d'accompagnement. Donc, on a — bon, je pense que c'est parti aujourd'hui ou
hier — justement
une information pour réoffrir notre offre de services. Lorsqu'on a fait une tournée des régions, notamment, on a
demandé à chacun des bureaux de circonscription s'ils étaient intéressés à avoir une formation. Et c'est
essentiel aussi parce qu'il y a un tournant, là. Il y a peut-être 40 %
de nouveaux députés avec chaque législature.
Donc, ces gens-là, ils ont besoin, évidemment, d'information. Mais,
quand on arrive comme nouveau député, comme
on arrive comme un nouvel élu, on nous en donne tellement! Puis, à un
moment donné, c'est essentiel qu'on en ait
au début, mais avoir un rafraîchissement, des fois, après deux ans, ou trois
ans, ou même, disons, quatre ans après une nouvelle législature, au
moins, c'est dans ce sens-là que je pense que c'est important.
Et on a vu même des
députés, parce qu'on parlait de ça tout à l'heure, des fois, il y a des
confusions : Oui, mais on a eu une
formation. Non, ils avaient eu une formation du Commissaire à l'éthique et à la
déontologie. Et, des fois, il y a une certaine forme de confusion même
sur les différents rôles. Donc, à cet égard-là, je pense qu'effectivement la
formation est importante pour exercer ne serait-ce que son leadership, comme
vous le mentionnez, conserver la confiance, savoir qu'est-ce qui s'applique.
Donc, je pense que oui.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. M. le député de Marie-Victorin, pour
clore...
M. Drainville :
Finir en beauté, M. le Président?
Le Président
(M. Ouellette) : Oui, bien, je ne l'ai pas dit, mais je l'ai
pensé.
M. Drainville : Comme j'ai seulement
quelques minutes, sur les règles d'après-mandat, M. le commissaire,
comme vous savez, il y a
une différence entre les règles d'après-mandat qui sont prévues dans le code
d'éthique par rapport aux
règles d'après-mandat qui sont prévues dans votre loi sur le lobbyisme. Si on
résume très grossièrement, un ancien ministre ne peut pas faire de lobbying
auprès quelque ministère que ce soit pendant deux ans après qu'il ait quitté
ses fonctions, alors que, dans la loi sur le
lobbying ou sur le lobbyisme, il ne peut pas faire de lobbyisme auprès du
ministère ou de l'organisme gouvernemental, là, au sein duquel il a été ministre.
Je résume, là, mais, grosso modo, c'est ça. Non?
M. Casgrain
(François) : Disons qu'au niveau du lobbyisme... disons que, pour un
ancien ministre, là, c'est deux ans. Il ne
peut pas être lobbyiste-conseil auprès d'une institution publique, quelle
qu'elle soit, et il ne peut pas non plus agir comme lobbyiste d'organisation
ou d'entreprise auprès des ministères du gouvernement de façon générale ou
auprès de toute autre, si on peut dire, entité gouvernementale auprès de qui il
a eu des rapports officiels, directs et importants. Ça veut dire qu'évidemment,
si j'étais à la Commission municipale, je suis l'ancien ministre des Affaires
municipales, je ne pourrais pas faire d'activités de lobbyisme auprès de la
Commission municipale.
M. Drainville : Bien là,
écoutez, l'article 29 de votre loi dit : «Nul ne peut exercer
des activités de lobbyisme auprès d'un titulaire d'une charge publique exerçant ses fonctions au
sein de la même institution parlementaire, gouvernementale ou municipale que celle dans laquelle il a
lui-même été titulaire d'une charge publique au cours de l'année qui a précédé...» Blablabla. Donc, vous
définissez, vous, l'ensemble des ministères. Quand on lit «la même institution gouvernementale»,
pour vous, c'est l'ensemble de l'État québécois?
M. Casgrain
(François) : «...au sein d'une telle institution avec laquelle il a
eu, au cours de cette année, des rapports
officiels, directs et importants.» Donc, l'interprétation qui a été donnée et
qui avait été même discutée lors du projet de loi n° 48, c'est de
dire : Dans le cas des ministres, lorsqu'ils sont assis à la table du
conseil, ils ont accès à l'ensemble des dossiers... bien, dans les ministères
et organismes. Et, en tout cas, c'est ce qui avait déjà été, là, au niveau du projet
de loi n° 48. Est-ce qu'il y aurait avantage à ce que ce soit plus clair? Évidemment, j'en
conviens, j'en conviendrai aisément
avec vous. Et, si c'était plus clair, ça éviterait effectivement toute interprétation possible à
cet égard.
M. Drainville :
O.K. Donc, dans votre esprit, même si vous admettez avec moi que la formulation
laisse un peu à désirer — puis ce n'est pas de votre faute, on l'aura
compris — il n'y a
pas vraiment de différence, dans les règles d'après-mandat, entre ce qui
est prévu dans le code d'éthique puis ce qui est prévu dans votre loi pour ce
qui est des anciens ministres. Il n'y a pas vraiment de différence ou il n'y a
pas de différence, en fait?
M. Casgrain (François) : La différence, c'est l'article 28, M. le député,
l'article 28 de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, qui dit : Ce n'est pas...
L'article 29 s'applique en tant que lobbyiste d'entreprise ou d'organisation. En tant que lobbyiste-conseil,
d'être rémunéré et faire du lobbyisme auprès d'institutions publiques,
et là ce n'est pas limité aux ministères,
c'est de façon générale, il ne peut pas être lobbyiste-conseil. Donc, dans ce
sens-là, il y a une différence, il y
a une différence importante. Et c'est une des raisons pour lesquelles on
dit : Écoutez, il faut qu'il y
ait au moins une harmonisation, sinon le ministre peut penser que quelque chose
s'applique, et alors que c'est une autre règle qui peut s'appliquer en
vertu d'une autre loi.
M. Drainville : Comme il me
reste très peu de temps, donc, ce que vous dites, c'est : Dans le code
d'éthique, il n'est pas question de lobbyistes-conseils, c'est ça?
M. Casgrain
(François) : Exact. Non.
M. Drainville :
Il n'est pas question de lobbyistes-conseils dans le code d'éthique.
M. Casgrain (François) : Non.
M. Drainville :
O.K. Ça fait que, si on veut améliorer le code d'éthique, le conseil que vous
nous donnez, j'imagine, c'est : Assurez-vous d'être harmonisés avec la loi
sur le lobbyisme puis d'intégrer une disposition sur le lobbyisme-conseil dans
le code d'éthique.
• (21 h 30) •
M. Casgrain
(François) : Oui. Et je
voudrais juste apporter un bémol, là.
On me montrait l'article en même
temps, je voulais être sûr de ce que je venais de vous dire. L'article 60,
paragraphe 2° du Code d'éthique des membres de l'Assemblée nationale, effectivement, pourrait être aussi applicable à des lobbyistes-conseils, mais uniquement
au niveau des différents ministères,
et non pas à l'ensemble des institutions
publiques. C'est ça, la distinction. Effectivement, une partie de
l'article 28 pourrait être couvert, mais pas l'ensemble de
l'article 28.
M. Drainville : O.K.
Mais, d'abord, ça, c'est important, il y a quand même une différence, là,
malgré une interprétation généreuse,
mettons, du deuxième paragraphe de 60. Il faudrait quand même harmoniser. Et,
deuxièmement, ça pourrait être une bonne
idée de préciser, dans le code d'éthique, d'ajouter une disposition qui
concerne très directement le lobbyisme-conseil, comme c'est le cas dans
la loi sur le lobbyisme, exact?
M. Casgrain (François) : Oui.
M. Drainville : Exact.
M. Casgrain (François) : Oui,
exact.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci.
M. Drainville : Très
bien. Merci beaucoup.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci,
M. le député de Marie-Victorin. J'avais une bonne idée où vous vous en
alliez, mais là je pense qu'on va arrêter pour ce soir.
Merci, M. Casgrain. Merci aux gens qui vous
accompagnent, ça a été très agréable. Je vous remercie.
Je remercie les membres de la commission pour
leur collaboration d'aujourd'hui.
Je lève donc la séance, la commission ajourne
ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 31)