(Quinze heures neuf minutes)
Le
Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
des institutions reprend ses travaux.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi
édictant la Loi concernant la
prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui. Mme Montpetit (Crémazie) est remplacée par M. Iracà (Papineau); Mme Hivon (Joliette) est remplacée par
M. Kotto (Bourget); et M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par M. Rochon
(Richelieu).
Étude détaillée
(suite)
Le
Président (M. Ouellette) :
Lors de l'ajournement de nos travaux, hier, vous discutiez d'un sous-amendement proposé par le député de Bourget à un amendement par Mme
la députée de Montarville au premier alinéa de l'article 2 de la
loi édictée par l'article 1 du projet de loi. Les gens qui nous suivent
assidûment depuis le début de nos travaux savent exactement où nous
sommes.
Donc, je présume que, Mme la députée de
Taschereau, vous allez ouvrir nos débats cet après-midi.
• (15 h 10) •
Mme
Maltais : Merci,
M. le Président. En effet, j'aimerais avoir quelques commentaires
supplémentaires concernant ce sous-amendement déposé par le député de Bourget.
Quand on le
lit, l'amendement de la collègue permet, d'une certaine façon, de baliser déjà
qui pourrait tenir ou diffuser
publiquement un projet de loi, dans quel cas on pourrait décider que cette
diffusion se retrouverait... pourrait être susceptible de faire l'objet d'une plainte à la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse. Quand elle ajoute «lorsque ce discours est fondé sur un précepte intégriste ou
radical», il nous semble effectivement qu'il y a là peut-être un peu une balise supplémentaire, mais
ce n'est pas suffisant, parce que le terme «radical» lui-même, on en a
déjà discuté, n'est pas vraiment le terme qui pourrait s'appliquer...
On parle de
radicalisation, mais la radicalisation a un sens actuellement qui est celui de
la radicalisation religieuse, de la
radicalisation des jeunes envers le terrorisme, envers le djihad, tandis
qu'être radical, un précepte radical porte plus à confusion, pour nous. Par exemple, un précepte
radical pourrait... Moi, je trouve que le Parti communiste ou staliniste
a été assez radical dans sa vie. On parlait
de nazisme l'autre fois, lors du débat. La ministre nous disait : Ça
pourrait, par exemple, mettre fin à
quelque chose comme le nazisme, le discours haineux, parce qu'on pourrait dire
que le stalinisme était de la même
veine. Le nombre de millions de morts, d'un côté ou de l'autre, sont difficiles
à comparer parce qu'on tombe de
l'horreur. On dirait : On passe de Charybde en Scylla. Alors, M. le
Président, en ajoutant «appelant à la violence», on permet justement de
délimiter la loi.
Maintenant,
quel sera l'impact du fait de mieux baliser et de mieux délimiter? Bien,
l'impact, c'est que nous ne voulons
pas que ces gens qui se retrouveraient l'objet d'une plainte à la Commission
des droits de la personne et des droits de la jeunesse se retrouvent devant des délais, je dirais, non
raisonnables. Le poids d'une plainte devant une commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse a déjà été évoqué pendant nos travaux. Je réfère encore au cas de
Mme Proulx, Mme Proulx qui avait perdu
quatre mois de sa vie, quatre mois de salaire parce qu'elle avait fait l'objet
d'une plainte à la Commission des
droits de la personne, du Canada toutefois, là, mais c'est quand même le même
type de plainte, discours haineux.
Alors, en permettant de discriminer les plaintes en ne retenant que ces
discours fondés sur des préceptes appelant
à la violence, intégristes ou radicaux appelant à la violence, on permet de
diminuer le nombre de plaintes qui vont entrer à la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse.
La
disponibilité des ressources humaines à la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse fait
partie des débats de notre côté. Je n'ai jamais entendu la ministre nous
rassurer en nous disant : Oui, il y aura plus de ressources à la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse. Je n'ai jamais entendu la ministre
nous dire comment seraient répartis les effectifs, qu'est-ce qui va se
passer. C'est vraiment une nouvelle intro, une introduction d'un nouveau
processus.
Alors, de ce
côté-là, notre intention est de mieux baliser, mieux baliser le travail, de
refermer l'entonnoir. C'est un
concept que j'ai eu dans les débuts de nos discussions sur l'article 1,
refermer l'entonnoir, faire un entonnoir qui fait qu'on puisse discriminer les plaintes plus
rapidement, plus facilement, à partir de balises connues. Il y a la balise de
la jurisprudence, mais nous, on prend
comme balise ce qui semblait faire consensus ici, au Québec, du moment où M. le
premier ministre a dit : La ligne sera
l'appel à la violence. C'était une balise qui a été agréée. D'ailleurs,
regardez, on a fait : Ah! tiens, voici la
nouvelle mouture du projet de loi qui donc délimitera, balisera à partir de
l'appel à la violence. On attendait une véritable mouture.
Donc, cet
écueil — je
pense que c'est le bon mot — cet
écueil qu'est le manque de ressources humaines à la commission des droits de la personne et de la jeunesse, manque de ressources
humaines qui a un impact sur la vie des personnes faisant l'objet d'une plainte puis les délais d'attente étant
extraordinairement longs, cela nous amène à vouloir refermer
l'entonnoir, M. le Président.
Alors, si je peux me
permettre, les mots «appelant à la violence» sont bien trouvés, cernent bien le
problème, cernent bien la balise, la
radicalisation et le terrorisme. La radicalisation menant au terrorisme fait
appel à la violence. C'est un appel à
la violence, un appel au djihad auquel répondent nos jeunes, alors on trouve
que c'est tout à fait pertinent que
ces quelques mots, peu de mots voulant dire beaucoup, M. le Président, peu de
mots qui signifient beaucoup et qui permettraient
une discrimination très efficace du nombre de plaintes pouvant se retrouver à
la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse...
D'ailleurs,
si on veut, il n'y a pas que nous qui avons été inquiétés par cette longueur
dans le traitement des plaintes. Je
vois, la Fédération des établissements d'enseignement privé sont venus en
commission parlementaire nous présenter un mémoire. Cette fédération a longuement élaboré la plupart de leurs...
Oh! M. le Président, il me manque de temps. Je réfère à la page 7 de ce
mémoire, tout simplement, M. le Président. Nos auditeurs sauront aller chercher
l'extrait.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme la députée de Taschereau. M. le député de
Richelieu.
M. Rochon :
Oui. J'ajouterai aux propos de ma collègue de Taschereau, qui signale que la
Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse risque d'être inondée de plaintes avec les délais
que cela va supposer, qu'en cette
période d'austérité économique étatique où d'importants programmes sociaux sont
supprimés ou significativement réduits,
l'idée que des deniers publics soient investis pour que la commission des
droits de la personne et de la jeunesse ouvre ce beau grand bureau des plaintes
est assez particulière, assez particulière, cette idée, en cette époque
d'austérité.
Alors,
ce sous-amendement, ma collègue l'a dit, M. le Président, il s'inscrit dans le
même esprit que ceux qu'on a soumis
jusqu'ici à la commission, c'est-à-dire encadrer, restreindre la portée de ce
projet de loi qu'une majorité d'experts que nous avons entendus estime être liberticide, c'est-à-dire qu'il
risque... qu'il s'attaquera à la liberté d'expression. Au lieu de lutter contre l'intégrisme, au lieu de
lutter contre l'islamisme radical, la loi qui naîtra de ce projet, si la
ministre refuse toujours de l'amender
significativement, bien, cette loi, elle risque d'être instrumentalisée pour
lutter contre celles et ceux qui luttent contre ces dérives intégristes.
Le
droit de s'exprimer librement, il est clairement menacé. Le projet de loi de la
ministre, il offre aux groupes intégristes
la possibilité de réprimer la liberté d'expression. L'esprit de cette loi est
douteux. Je vais citer un chroniqueur en
sciences sociales dans un document de réflexion présenté à la commission. C'est
Antonin Miller. Il écrit que l'esprit de
cette loi «invite à mettre trop d'emphase sur le ressenti victimaire — c'est une chose qu'on a beaucoup dite aussi
ça, le ressenti victimaire — dans l'offense au détriment des faits, [du
réalisme] et du contexte. Le vécu subjectif d'une personne dite raisonnable — c'est dans le texte de la loi, ça, personne
raisonnable — ne peut
être plus important que les faits», écrit M. Miller. C'est inadmissible.
Alors,
on se bat contre cela depuis des semaines et on se heurte à l'opinion de la
ministre que l'effet du discours compte
davantage que l'intention du discours. Alors, voilà, notre tentative de
restreindre, donc d'encadrer la portée de ce projet de loi, eh bien, elle passe par ce sous-amendement, maintenant,
que nous avons soumis à la commission, à l'effet que le premier alinéa du second article se lise ainsi : «Il est
interdit de tenir ou de diffuser publiquement un discours visé à
l'article 1 lorsque [ce] discours est fondé sur un précepte intégriste ou
radical appelant à la violence.»
Et
là vous savez que je vais vous rappeler que le premier ministre lui-même s'est
exprimé sur le projet de loi n° 59
et a proposé qu'on l'amende en ce sens, a
même dit au Devoir que la ministre
y travaillerait, que c'était dans ses devoirs, et nous sommes bien déçus que le
travail ne se fasse pas en ce sens-là. Le premier ministre disait être
conscient des risques que soit brimée
la liberté d'expression, et c'était dans cet esprit qu'il le suggérait. Et
c'est nous, maintenant, qui le
faisons. Nous reprenons cette suggestion qu'il a faite que nous nous attaquions
aux discours qui appellent clairement à la violence.
• (15 h 20) •
Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Richelieu. Mme la députée
de Montarville, est-ce que vous avez
d'autres commentaires à rajouter sur le sous-amendement introduit par M. le
député de Bourget? Oui, Mme la députée de Montarville.
Mme
Roy
(Montarville) : Oui, brièvement, pour le bénéfice
des gens qui nous écoutent, et c'est le cas de le dire, qui nous écoutent, tout simplement que, par
mon amendement, je tentais de baliser et d'encadrer davantage le discours
qui pourrait être sanctionné, qui pourrait
être interdit. Et avec ce sous-amendement, auquel je souscris, on arrive encore
à resserrer davantage le discours, et moi,
ça me convient parfaitement, le but recherché étant de nuire le moins possible
à la liberté d'expression. Alors, voilà, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre, si vous n'avez pas de
commentaire, on va passer au vote. Si vous avez des commentaires, je
vous reconnais.
Mme Vallée :
M. le Président, je pense que toute cette question de... tous les échanges que
nous avons, nous les avons eus dans
cette salle, je m'en souviens très bien, dans cette salle il y a quelques mois
déjà. Donc, je vais tout simplement référer les collègues aux propos que
nous avons eus à ce moment.
Le
Président (M. Ouellette) :
Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, on va procéder au vote sur le
sous-amendement introduit par M. le
député de Bourget, qui vise à ajouter, après les mots «intégriste ou radical»,
les mots «appelant à la violence». Et je présume qu'il va y avoir un
vote qui est demandé par appel nominal. Vote par appel nominal, M. le
secrétaire.
Le Secrétaire : Mme Maltais
(Taschereau)?
Mme
Maltais : Pour.
Le Secrétaire : M. Rochon
(Richelieu)?
M. Rochon : Pour.
Le Secrétaire : Mme Roy
(Montarville)?
Mme Roy
(Montarville) :
Pour.
Le Secrétaire : Mme Vallée
(Gatineau)?
Mme Vallée : Contre.
Le Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. Iracà
(Papineau)?
M. Iracà : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : M. Ouellette
(Chomedey)?
Le Président (M. Ouellette) : Je
m'abstiens.
Donc, le
sous-amendement introduit par M. le député de Bourget est rejeté. Nous revenons
à l'étude de l'amendement proposé par Mme la députée de Montarville.
Est-ce qu'il y a des interventions? Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) :
Oui. Alors, puisque la version... si je pourrais dire, l'ajout qui a été fait
par le sous-amendement vient d'être rejeté.
On retourne donc à l'amendement initial. Pour le bénéfice des gens qui nous
écoutent, l'amendement irait comme
suit : «Il est interdit de tenir ou de diffuser publiquement un discours
visé à l'article 1 lorsque le discours est fondé sur un précepte
intégriste ou radical.»
Naturellement, lorsqu'on fait référence à
l'article 1 dans cet article, on élabore un petit peu davantage sur les discours, entre autres les préceptes religieux.
Alors, lorsque je parle d'un précepte intégriste, on peut comprendre qu'il
s'agit d'un précepte intégriste religieux
et, lorsque je parle d'un précepte radical, on peut comprendre également, à la
lecture du deuxième alinéa de l'article 1, que ça devient un précepte
radical religieux.
Alors, je le soumettrais au vote, M. le
Président, si, naturellement, il n'y a pas d'autre... Peut-être que mes collègues ont des ajouts à faire, mais je pense
que c'est une façon de resserrer le discours et de resserrer l'interdiction.
C'est ce qu'on tente de faire depuis le
début de ces travaux parlementaires. Et voilà, je vous le soumets. Je le
soumets à la table.
Le Président (M. Ouellette) : Merci.
Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Merci, M. le Président. Avant qu'on passe au vote sur l'amendement de la
collègue, je pense que j'aimerais ça
l'entendre nous donner quelques éclaircissements, parce que c'est vraiment, là...
Mon problème par rapport à son
amendement, c'est sur le mot «radical», un précepte radical. J'aimerais ça
qu'elle me dise qu'est-ce qu'elle vise. Un précepte intégriste, on comprend que c'est de l'intégrisme religieux,
probablement, qu'elle parle. Est-ce que je m'abuse?
Mme Roy
(Montarville) :
Vous avez tout à fait raison.
Mme
Maltais :
Merci. Mais qu'est-ce qu'un précepte radical? Étant donné qu'un précepte, c'est
un enseignement ou un... je ne dirais
pas un ordre, là, mais un enseignement — mettons que c'est le mot qui est le plus
souvent utilisé dans les définitions — qui vise des concepts
idéologiques, politiques, religieux, tout ça, est-ce que... Quand elle parle
d'un précepte radical, est-ce qu'elle peut
nous expliquer un peu ce qu'elle vise pour que je puisse bien juger de la
pertinence de placer ce mot dans son amendement?
Mme
Roy
(Montarville) : Avec plaisir. Alors, M. le
Président, il faut
revenir absolument à l'article 1 dans son premier alinéa, et le 2 se lit avec le 1. Et, lorsque je vous parle d'un
discours qui est fondé sur un précepte intégriste, la collègue comprend très bien que, plus
spécifiquement, je suis particulièrement intéressée par le deuxième alinéa, qui
nous parle de préceptes religieux.
Et, lorsque je vous parle d'un discours qui est fondé sur un précepte radical,
je vous ramène à l'alinéa un de l'article
1, qui nous parle d'endoctrinement ou de radicalisation, donc un précepte
d'endoctrinement ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme
violent.
Je
le lie ensemble... Je le lie dans le sens de non le lire, mais le lier,
l'attacher. Et, pour nous, on revient à la base, c'est une façon de mieux encadrer le discours qui sera interdit. Et
c'est la façon que nous avons trouvée de le rédiger, parce que, si on revient à l'alinéa un, on dit que cette
«loi a pour [objectif] d'établir des mesures de prévention et de lutte
contre les discours haineux
s'exprimant dans un contexte de discrimination». Ça, c'est très large, mais ce
que nous préférons, c'est le «y compris dans un contexte
d'endoctrinement ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent». On y revient, à cet extrémisme violent qui aurait
dû d'ailleurs encadrer toute la loi, comme l'avait souhaité le premier ministre, l'appel à la violence et non l'extrémisme
violent, mais l'appel à la violence. Et elle établit également
de telles mesures contre les discours incitant à la violence. Alors, on
y revient, à cette violence.
Donc, pour moi, la question
de la collègue était : Qu'est-ce que c'est qu'un discours radical? Je
réfère à l'alinéa un de l'article
1. Un discours radical, dans un contexte d'endoctrinement ou de
radicalisation... Minimalement, on
resserre vers ça, quoiqu'on est toujours pris avec la notion du contexte de discrimination
qui, elle, est très large. On tente de resserrer même si, comme je le
répète pour les gens qui nous écoutent, l'article 1 a été adopté par la
majorité gouvernementale, point. Et il n'y a
pas d'unanimité ici, et on tente de trouver une porte de sortie, une voie de
secours pour tenter de limiter la portée de l'article 1. Je vous le dis
bien humblement.
Et
d'ailleurs, les échanges que nous avons eus hier m'ont
permis d'aller faire un petit tour, de remonter dans le temps puisqu'on se taquinait un peu sur une motion
que nous avions eue. Mme la ministre s'en souvient sûrement. C'était le 11 février 2015, et je suis retournée lire les
galées, et Mme la ministre nous disait quelque chose, à la fin naturellement de son exposé, dans lequel elle n'était pas d'accord
avec notre motion, mais elle termine en disant, et c'est la ministre
qui parle, et on parle naturellement de tout ce contexte d'endoctrinement, de radicalisation, des événements
de Saint-Jean-sur-Richelieu, de ce
soldat qui a été tué par un jeune qui a été radicalisé, ce soldat québécois
qui a été lâchement assassiné. Et on parle aussi du contexte de tous les événements qui s'en sont suivis, Ottawa également,
et on comprend très, très bien qu'on parle ici de cette
radicalisation qui vient d'un contexte particulier, qui est celui de l'islam
radical, l'islamisme radical.
Et naturellement, Mme
la ministre nous accusait, bon, de faire une ADQ 2.01 et de soulever la haine
et la crainte des gens, etc. Bon. Mais elle
termine son exposé en disant : «...ce que je souhaite, M. le Président», et c'est là que c'est intéressant, elle nous
dit : «...ce que je souhaite, M. le Président, [c'est] que ce salon
bleu s'exprime solidairement, unanimement
sur des questions [...] que nous en venions à un consensus, parce que les
enjeux sont beaucoup plus grands que les enjeux partisans.»
Et vous savez quoi,
M. le Président? Elle a raison quand elle dit ça. Elle a raison quand elle dit
ça. C'est un problème de société que nous
vivons, que les sociétés démocratiques modernes vivent. L'intégrisme religieux
qui mène au terrorisme, là, on ne
connaissait pas ça il y a 20 ans, nous, pratiquement, hein? On a eu les
attentats de septembre 2001 qui nous
ont réveillés à quelque chose, une réalité qui était bien loin de nous et qui est devenue très, très proche et, par la suite, les événements qui s'en sont
suivis.
• (15 h 30) •
Et,
quand la ministre dit : Je souhaite «que ce salon bleu
s'exprime solidairement, unanimement sur des questions et que
nous en venions à un consensus, parce
que les enjeux sont beaucoup
plus grands que les enjeux partisans», je suis tout à fait d'accord avec elle. Le problème, c'est que la
solution que le gouvernement nous a apportée, que cette loi nous apporte, bien, elle ne fait pas consensus, elle ne
fait pas unanimité, et elle ne fait pas solidarité, et on doit travailler avec
ça.
Alors,
je lui soumets que ce qu'on tente de faire, à l'article 2, en — il faut que je fasse attention avec ce
verbe, je vais changer de verbe — essayant d'encadrer le plus possible
l'atteinte à la liberté d'expression qui sera faite — parce que, si on parle en termes juridiques, c'est ça qui est fait — si on veut s'attaquer à un type de discours,
l'encadrer pour le rapetisser au plus
petit degré possible pour qu'on cible le plus possible... C'est ce qu'on tente
de faire. C'est ce qu'on tente de faire, et la réponse du gouvernement
nous sera qu'on ne peut pas faire ça parce que c'est discriminer. Et, je regrette, ce n'est pas discriminer que de cibler
précisément l'atteinte qui sera faite. Nous, on soutient que ça se défendrait,
puis que ça se défendrait en cour, puis qu'on peut porter une limite à la
liberté d'expression, et elle se justifie.
Alors,
pour ces raisons, je vous soumets mon sous-amendement. Et, je vous dis, je
trouve ça assez regrettable, assez
regrettable que cet article 1 ait été adopté à la majorité gouvernementale,
donc qu'il ne tient pas compte de la position, ou des amendements, ou des remarques, ou des considérations, ou des
craintes dont lui ont fait part les deux oppositions, à la table, ici
présentes.
Et
moi, M. le Président, personnellement, là, je parle pour les gens qu'on a
entendus, les gens qui nous appellent, les
gens qui nous écrivent, encore cette semaine à mon bureau, les courriels que
l'on reçoit relativement à ce projet de loi, qui est très mal perçu,
très mal vu, très mal accueilli dans la population en général.
Donc, ce
qu'on tente de faire, c'est de limiter au plus possible l'atteinte à la liberté
d'expression qui sera faite. Alors,
c'est la raison pour laquelle je vous soumettais ce sous-amendement à l'alinéa
deux. Et, tout comme Mme la ministre, je crois que c'est quelque chose qui devrait
être... c'est un problème auquel on doit s'attaquer, mais, effectivement, de
façon unanime, puis ce n'est pas le cas actuellement. Alors, voilà, je vous le
soumets respectueusement.
Le Président
(M. Ouellette) : Oui. Ça va être M. le député de Richelieu?
Mme Maltais :
Allez, allez.
M. Rochon :
Oui? Oh, je veux soumettre, rapidement, très rapidement...
Mme Maltais :
Non, prenez votre temps, M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui? Non, je veux soumettre que je partage tout à fait l'opinion de ma
collègue de Montarville sur le
consensus souhaité par la ministre. Je le souhaite aussi, moi, ce consensus,
mais ce que la ministre néglige d'observer... ce qu'il est en train de se créer de ce côté de la table. Et elle
néglige aussi qu'une vaste majorité d'experts partagent les craintes exprimées de ce côté de la table qui
exprime son propre point de vue, bien sûr, mais se fait aussi le porte-voix de
maints experts, analystes, chroniqueurs. Alors, oui, c'est important de faire
consensus.
Et
moi, j'ai peut-être une observation, là. Et je crois que nous nous apprêterons
par sous-amendement, mais je ne veux
pas scooper, comme on dit en journalisme, ma collègue de Taschereau. J'ai un
petit problème avec le terme «précepte» s'il n'est pas suivi d'un qualificatif pour mieux en saisir la portée,
puisqu'un précepte, c'est un énoncé qui enseigne les règles de conduite, mais dans plein de domaines,
hein : philosophique, religieux bien sûr, mais moral, artistique. Alors,
je crois que nous n'aurions pas tort de préciser un peu, là, la notion ici, là,
de précepte.
Le Président (M. Ouellette) : Juste avant, Mme la députée de Taschereau, Mme la
ministre veut répondre au commentaire de Mme la députée de Montarville.
Mme Vallée :
M. le Président, je pense que c'est important, une fois... à l'occasion, là...
bien, au moins une fois par jour,
lorsqu'on est ici, de rappeler à nos collègues, rappeler à notre collègue de Montarville,
rappeler à notre collègue de
Taschereau que ce qui est prévu dans 59, ce n'est rien de nouveau. En ce sens
que nous avons appliqué les principes qui se dégagent de l'arrêt
Whatcott, un arrêt unanime de la Cour suprême qui encadre justement la limite à
la liberté d'expression et qui explique dans
quelle mesure il peut y avoir une limite à la liberté d'expression dans une
société libre et démocratique, lorsque le droit de l'un entrave et porte
atteinte notamment au droit à la sécurité de l'autre. C'est exactement
là où nous logeons. C'est exactement là où nous logions en 2015. Prétendre le
contraire, ce n'est pas tout à
fait
exact. C'est un peu décevant, considérant que ma collègue est juriste, et a très bien
pu lire l'arrêt Whatcott, et sait très
bien de quoi il retourne.
Donc,
je tenais à le dire, parce que nous avons légiféré à l'intérieur d'un cadre de paramètres très limités qui ont été établis par la Cour suprême, établis par la Cour suprême, qui s'est penchée sur des législations qui mettent en place des dispositions civiles, pas criminelles, dans
d'autres provinces canadiennes qui encadraient le discours haineux, le
discours incitant à la violence.
Même
chose, le Conseil de l'Europe recommande fortement à ses États
membres non seulement de légiférer en matière pénale, mais également de mettre
en place des mesures civiles pour
encadrer le discours qui, là-bas, est considéré comme un discours de haine — pas
discours haineux, discours de haine — mais
qui a la même définition. Ce souci de préserver la liberté d'expression,
il est là et il demeure.
Je
relisais les échanges que la collègue de Montarville a eus hier en ondes avec un animateur fort
populaire de la région de Montréal
et je prends les propos puis je... On a ici des outils pour venir justement
intervenir civilement de façon
préventive pour empêcher, pour limiter ce type de discours qui peuvent porter
atteinte à d'autres. Et elle sait très
bien, la collègue, elle sait très bien tout ça. Et, si ce n'est pas une joute
partisane, je me demande ce que c'est.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Je
pense que c'est important
ici que je m'adresse à la ministre.
Je ne suis pas ministre de la Justice; je suis députée
de Montarville. C'est-à-dire que je représente les citoyens de Boucherville et de
Saint-Bruno-de-Montarville. Je suis ici en tant qu'élue, en tant que
politicienne et non en tant qu'avocate, et
en aucun moment je ne pose de gestes juridiques, et en aucun moment je ne donne
d'avis juridiques. Ce que je fais, je
parle au nom des gens qui sont venus dans mon bureau pour que je les défende. Il y a
une énorme différence, Mme la ministre.
Et,
oui, il y a les arrêts de la Cour suprême; oui, il y a
Whatcott; oui, il y a Taylor. Il
y a tout ça, je vous l'accorde,
mais on est ici pour le créer, le droit;
pour le faire, le droit; et pour le changer aussi, le droit, quand le droit ne
répond plus aux besoins de la population.
Alors,
je tiens à le dire parce que c'est extrêmement important. Oui, je suis avocate; oui, je paie mes
cotisations; oui, vous êtes ma ministre. Je ne suis pas ici en tant
qu'avocate, je ne suis pas ici en tant que juriste, mais en tant que politicienne. Et mon travail, en tant que
politicienne, c'est d'être la voix des gens qui me demandent de les
représenter, et c'est ce que je fais. Et je comprends et je sais que Mme
la ministre comprend la différence. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) : Merci. Mme la députée de Taschereau, vous aviez un commentaire sur l'amendement de notre collègue de
Montarville.
Mme Maltais : Oui, M.
le Président. Je ne suis pas juriste,
je ne suis pas avocate ou membre du Barreau, je ne voudrais pas embarquer dans ce type de débat là de
mon côté, je n'en ai pas la compétence. Je sais toutefois que, moi aussi,
je suis ici comme... je ne dis pas
«politicienne», je dis «femme politique». Je trouve que le mot «politicien»,
«politicienne» renvoie à une image
préconçue d'autres choses. Il y a une noblesse dans la vie politique
qui est «hommes et femmes politiques».
Maintenant,
c'est le fun, dans Taschereau, ils ont apprécié ma nuance, ils disent :
Ah! les femmes politiques...
Le Président
(M. Ouellette) : Il faut que je fasse attention à ce que je dis.
• (15 h 40) •
Mme Maltais : Oui. Vous, vous ne pouvez pas dire ça. Alors, M. le Président, ce que je comprends, c'est que la députée de Montarville veut répondre aux préoccupations de ses citoyens
et de ses citoyennes et qu'en ce sens elle a proposé un amendement qui restreindrait
la restriction — ça,
c'est une double négation — qui
permettrait de mieux baliser la loi.
Alors, j'ai bien écouté ses propos et je vais proposer un sous-amendement pour essayer de mieux
correspondre à ce qu'elle veut
puis... qu'on trouvera peut-être comme ça un arrangement ou on trouvera un
meilleur amendement qui peut-être, à la fin, trouvera la faveur du
gouvernement.
Alors,
il se lirait comme suit : Modifier l'amendement modifiant le premier
alinéa de l'article 2 de la loi proposée par l'article 1 du
projet de loi en remplaçant les mots «intégriste ou radical» par les mots
«religieux intégriste».
Le
résultat au net, si j'ose dire ainsi, M. le Président... je ne suis pas
comptable non plus, mais ça se dirait comme ci : «Il est interdit de tenir ou de diffuser publiquement un
discours visé à l'article 1 lorsque le discours est fondé sur un
précepte religieux intégriste.»
Le Président
(M. Ouellette) : Je suspends quelques minutes.
(Suspension de la séance à
15 h 41)
(Reprise à 15 h 45)
Le Président (M. Ouellette) : Le sous-amendement introduit par Mme la députée
de Taschereau est recevable. Donc,
nous sommes à étudier le sous-amendement qui introduit les mots «religieux intégriste» en
complément à l'amendement de Mme
la députée de Montarville. Donc, la parole est à vous, Mme
la députée de Taschereau,
pour nous expliquer les raisons sous-tendant votre sous-amendement.
Mme Maltais : Merci, M.
le Président. En fait, j'aime bien
ces situations où, tranquillement, au fil de la discussion,
on arrive à peaufiner, on arrive à mieux
cerner, on arrive à mieux inscrire dans le texte d'une loi la pensée des législateurs.
Je trouve que là on est en train de faire ce
travail-là depuis tout à l'heure dans les sous-amendements. On est en train de trouver, je pense, là
où on devrait aller.
Lorsque
notre collègue... Si vous remarquez, là, d'abord, comment est écrit le sous-amendement, il enlève le mot «radical».
Je comprends la collègue de Montarville, qui parle de radicalisation puis qui dit :
Je rattache les mots «intégriste» et
«radical» à «radicalisation», mais je ne crois pas, malheureusement, qu'on puisse y aller de la même façon que dans l'article 1, parce que
c'était «radicalisation pouvant mener à [un] extrémisme violent».
Ici, on introduit, à
mon sens, une confusion en introduisant le mot «radical» sans y accoler soit
l'extrémisme violent... et tout. Je sais aussi que la ministre n'apprécie pas
quand on écrit un peu... on reste trop près de l'article 1. Souvent, son argument va être : C'est
redondant, on réécrit, et tout ça. Vous étiez peut-être... Peut-être
avez-vous été moins présent,
intellectuellement parlant, bien
sûr — vous avez beaucoup de boulot, M. le Président — à la dernière rencontre,
mais c'est revenu souvent qu'il fallait faire attention aux interactions entre l'article 1
et l'article 2.
Alors,
si on regarde l'article 2, on voit que, sur la proposition de la collègue, on dit : «précepte intégriste ou radical». «Radical», pour moi, ne fait pas nécessairement... n'est pas un pendant à «radicalisation pouvant mener à [un]
extrémisme violent»; et «intégriste»
n'est pas qualifié. L'intégrisme existe en politique; l'anarchisme peut
être considéré comme un intégrisme.
Alors,
moi, je trouve qu'en disant «précepte religieux intégriste», on est exactement
dans le sujet. Un précepte religieux, d'abord, en lui-même, ce
serait : il ne faudrait pas le faire, parce qu'évidemment il y a précepte
religieux. Un précepte intégriste ne vise
pas le religieux alors que la situation actuelle est le phénomène religieux. Ça
a monté d'un phénomène d'appartenance
des jeunes à un phénomène religieux qui mène au terrorisme et au djihad. Alors,
je trouve qu'en mettant «précepte
religieux intégriste», là on est droit dedans. On ne peut pas se tromper. Je ne
sais pas ce que la collègue de
Montarville en pense, mais on ne peut pas se tromper en disant «précepte
religieux intégriste». On vise la bonne cible. On arrête de viser
d'autres cibles que celles-là.
Si
je le relis l'article 1, parce que c'est très important de faire la
correspondance avec l'article 1, on voit que, dans le premier alinéa, on parle de contexte de
discrimination. Puis là c'est large, parce qu'il y a un «y compris». Un «y
compris» n'est pas une exclusion,
c'est une inclusion. On s'entend que, quand on dit ensuite, après le mot
«discrimination», «y compris dans un
contexte d'endoctrinement ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme
violent», on a une inclusion de cela. Mais «contexte de discrimination»
est beaucoup plus large que ça.
Alors,
«contexte de discrimination», donc, c'est un type de discours sur lequel on a
un doute. Alors, en ajoutant «fondé
sur un précepte religieux intégriste», là on n'enlève pas le concept de
discrimination, mais on cible précisément la discrimination fondée sur
des préceptes religieux intégristes.
• (15 h 50) •
On
parle de quoi, là, automatiquement? On parle des relations hommes-femmes, on
parle d'égalité hommes-femmes. C'est
ça, la discrimination, qui est le phénomène majeur porté par l'intégrisme
religieux et dans beaucoup de religions. Ça ne cible pas une religion. Et, ça aussi, j'ai compris très bien que
le gouvernement ne voulait pas discriminer une religion, ne voulait pas faire jeter le regard sur une
religion. Alors, ce que ça permettrait de faire... à ce moment-là, on englobe
toutes les religions, mais on se dit que les religions ne doivent pas
avoir de discours visé à l'article 1 fondé sur un précepte religieux intégriste, mais on élimine les autres
types. On élimine, par exemple, les personnes vivant avec un handicap, qui nous ont dit — et je parle de l'Office des personnes
handicapées, j'ai cité leur mémoire hier, M. le Président : On n'est pas vraiment visés par ces discours-là, ça ne mène
pas à des crimes, et tout. Donc, on parle, là, vraiment, pour moi, d'une cible...
Alors, je
serais bien curieuse de savoir, de la part de la collègue, ce qu'elle pense de
mon sous-amendement... notre, parce
que j'en avais parlé bien sûr avec mon collègue de Richelieu, toujours
d'agréable compagnie et prêt à débattre avec moi des meilleures façons de légiférer. Alors, mon collègue de Richelieu
a agréé cette version. Alors, je serais curieuse de savoir ce que pense la députée de Montarville de
notre proposition, étant donné que la ministre, en plus, elle semblait avoir certaines résistances... réticences — «résistances», c'est un bon mot aussi, mais
je garderai «réticences» par amour de
la langue française — alors,
certaines réticences à son amendement. Peut-être qu'on pourrait aller chercher,
là, l'aval du gouvernement. Qu'en pensez-vous, chère collègue?
Le
Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville, que pensez-vous, justement, du sous-amendement
introduit par Mme la députée de Taschereau?
Mme Roy
(Montarville) :
Puisque vous me posez la question, je vais répondre.
Le Président (M. Ouellette) :
Bien, je vous la pose.
Mme Roy
(Montarville) :
On n'est vraiment pas loin du sous-amendement que j'ai déposé.
Mme Maltais :
Tout à fait.
Mme Roy
(Montarville) : On
précise le précepte intégriste. Le précepte intégriste, pour moi, faisant
référence de façon implicite à l'article 1. Le mot «religieux»
y était, et là c'est encore plus direct. Donc, votre sous-amendement se lit comme suit : «Il est interdit de tenir ou de diffuser
publiquement un discours visé à l'article 1 lorsque le discours est fondé sur un précepte
religieux intégriste.»
Je suis tout à fait d'accord avec vous. On l'a dit cent fois, Mme la députée et Mme la ministre, depuis le début, c'est à ça qu'il faut s'attaquer, au discours des intégristes religieux
et de l'islam radical, mais jamais le gouvernement
n'aura le courage de mettre le mot «islam radical» dans sa loi, même si on lui
demande mille fois.
Alors, en
parlant d'un discours fondé sur un précepte religieux intégriste, on rejoint même les
propos du premier ministre
qui, en décembre 2012, après son élection à la chefferie du Parti libéral du Québec, avait dit qu'il était urgent de lutter contre l'intégrisme religieux. Et, M. le Président, je vais le répéter, là, parce
que c'est quand même
notre premier ministre
qui avait dit ça avant même d'être premier
ministre. Et, moi, quand il a dit ça,
j'ai dit : Wow! Il a des couilles, il a dit le mot! Alors là, j'étais vraiment au diapason avec le Parti libéral lorsque le député
de Roberval avait dit ces choses
lorsqu'il a été élu chef du Parti libéral du Québec, en décembre 2012 :
«Nous allons nous empresser de lutter contre l'intégrisme
religieux.» Ça, ce sont ses paroles. Ce ne sont pas les paroles de la caquiste,
ce sont les paroles du député
de Roberval devenu chef du Parti libéral du Québec.
Avril 2014, le
même député devient notre premier
ministre à tous. Et, dans son
discours... son discours... je ne sais pas
si on l'appelle le discours inaugural, mais son premier discours en tant que premier ministre, il nous répète : «Nous allons lutter contre l'intégrisme
religieux.» Et j'ai applaudi, M. le Président, j'ai applaudi. Je me suis levée
et j'ai applaudi le discours du premier ministre. J'ai dit : Wow! Il l'a redit. Et, moi, depuis le début que j'ai
cette vision et que je pense comme lui à cet égard.
Malheureusement, force est de constater qu'au cours des mois son discours a changé,
qu'en novembre 2014, je crois, vers
la fin de 2014, il ne parlait plus de lutter contre l'intégrisme religieux,
mais plutôt contre les dérives religieuses, disant que l'intégrisme étant un choix personnel. Mais le mot
«religieux» est encore là, je vous ferai remarquer, M. le Président. Le premier ministre nous dit : «Nous allons lutter contre
les dérives religieuses.»
Eh bien, dans
le sous-amendement qui est proposé par la collègue
de Taschereau, «lorsque le discours est fondé sur un précepte religieux intégriste», on se
rejoint tout à fait, là. On se rejoint. C'est ce qu'on vous dit
depuis le début, c'est ce qu'on vous
dit depuis le début des travaux, c'est ce qu'on vous disait même
avant même que Mme
la ministre dépose son projet de loi, qu'il fallait s'attaquer à ces discours d'intégristes religieux, ces
discours radicaux, ces discours d'endoctrinement.
Donc, vous me
posez la question : Que pensez-vous de cet amendement?
Bien, je pense... de ce sous-amendement, pardon,
eh bien, il rejoint même les paroles de notre premier ministre. Alors, que peut-on demander de plus? Donc, je suis tout à fait en faveur et pour les mêmes raisons : il faut, encore une fois, limiter la portée du discours qui sera interdit, mais le
préciser le plus possible, et c'est ce que nous tentons de faire ici, encore
une fois.
Et je
souligne, M. le Président, que ce n'est pas un avis juridique, mais c'est
l'avis d'une femme politique, tiens, d'une
élue qui écoute ses concitoyens et les concitoyens qui sont venus en commission parlementaire. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : M.
le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui. Moi, je vais vous donner l'avis de Larousse,
M. le Président. Larousse, le dictionnaire Larousse.
Notre...
Une voix :
...
M. Rochon :
Non, Larousse, le nom de famille, là.
Le Président
(M. Ouellette) : Ah! Larousse.
M. Rochon :
Je ne parlais pas d'une teinte de cheveux.
Ma collègue de Taschereau
faisait bien de nous dire que le terme «intégriste» devait être précisé, parce
que Larousse nous dit en effet que l'intégrisme, c'est
l'«attitude [ou la] disposition d'esprit de certains croyants qui, au nom du respect intransigeant de la tradition, se
refusent à toute évolution», oui, mais c'est aussi, et elle nous l'a dit, le
«conservatisme intransigeant en matière de doctrine politique».
Alors,
voilà qui vient appuyer la requête de ma collègue de qualifier ce précepte en
ajoutant la notion de «religieux», alors «fondé sur un précepte
religieux intégriste».
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais : Écoutez, M. le
Président, je suis fort aise de voir
que nos collègues se rallient. Nous faisons de plus en plus consensus. Alors, nous avons déjà un premier côté de
table qui semble vouloir chercher une véritable solution au problème qu'est le radicalisme religieux, quel qu'il soit,
sans cibler de religion, comme on le désire depuis un bout de temps. Nous autres, on ne tient pas nécessairement
à cibler une religion. On peut comprendre qu'il y ait eu des véritables
problèmes, qu'il y ait des gens qui se soient sentis stigmatisés,
mais, dans ce cas-là, en mettant «fondé sur un précepte religieux
intégriste», effectivement on règle tout le problème de cibler une religion.
Donc,
vous savez, c'est un peu difficile, parce
que, depuis à peine quelques
heures, nous discutons, nous échangeons sur cette loi, mais nous n'arrivons pas à trouver, jusqu'ici, de
consensus. C'est difficile, parce que normalement une majorité peut imposer ses
vues, mais, dans ce cas-là, quand on parle de liberté d'expression, c'est
difficile d'imposer ses vues.
L'autre
chose, c'est qu'il existe des députés qui ont des droits de parole puis qui les
utilisent parce qu'ils ont des
convictions profondes, M. le Président, mais
des convictions très profondes, convictions que le projet de loi n° 59
n'est pas la voie, n'est pas la voie qui devrait être privilégiée par la
société québécoise.
Alors,
on cherche des aménagements, des amendements qui nous permettraient de garder
un petit peu de confort. On ne les
trouve pas, jusqu'ici, malgré toutes, toutes les contrepropositions qu'on ait
faites. Parfois, j'ai l'impression que ce
projet de loi s'est comme un peu perdu dans la mécanique gouvernementale et
qu'on a oublié qu'on était quelques-uns ici à débattre d'un sujet fondamental. Je ne sais pas qu'est-ce qui se
passe du côté gouvernemental, mais il va falloir qu'à un moment donné quelqu'un se penche sur la
situation que nous vivons, et peut-être qu'on pourrait en arriver à avoir enfin
une révision fondamentale de la loi.
Savez-vous pourquoi
je dis ça? Parce que je viens d'entendre la ministre nous dire : Oui,
mais, écoutez, ça existe déjà, c'est dans
Whatcott. On sait qu'il y a ci, il y a ça, ça existe ailleurs. Il existe le
Code criminel au Québec. Le Code
criminel est déjà là, il existe. Ce qu'on introduit, c'est quelque chose de différent,
au Québec, on introduit un nouveau processus
de traitement de plaintes fondées sur le discours haineux. Ces plaintes vont
s'en aller à la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse, qui ne fonctionne pas comme en droit
criminel, la mécanique de la preuve n'est pas la même : la preuve hors de
tout doute raisonnable, ça existe en droit criminel, mais ça n'existe pas à la
CDPDJ. Donc, il y a une différence fondamentale.
• (16 heures) •
Il n'y a
pas seulement la définition de discours haineux, là. Je veux
juste dire que ceci n'est pas la première embûche à laquelle nous allons faire face. Je veux juste
dire, là, ce n'est pas... Écoutez, retournez à mon discours de l'adoption
de principe, vous allez voir exactement
les cinq points sur lesquels on achoppe. Sur quelque chose de fondamental comme la liberté
d'expression, là, il y a cinq points sur lesquels on achoppait. Un seul
s'est dégagé, c'est la liste. D'ailleurs, pendant les
auditions en commission parlementaire, j'ai dit immédiatement : la liste,
ça va sauter. Ça ne pouvait pas tenir le coup. Ça a sauté. Mais, pour
le reste, on avait cinq points.
L'article 1,
on l'a adopté avec beaucoup de difficultés, puis on n'est même pas satisfaits.
Ça fait qu'imaginez le reste de la
loi et la mécanique qui en découle! Alors, on essaie de vous amener sur des
pistes de solution. C'est ce qu'on essaie
de faire, M. le Président, on cherche des pistes de solution. Ici, ce qu'on
dit, c'est : Resserrons la loi pour que ce soit sur lorsque le discours est fondé sur un précepte religieux
intégriste. Puis on ne défait pas le motif de discrimination, on a
compris que la ministre y tenait, mais on le cerne, ce à quoi devrait toucher
le principe de discrimination.
Alors,
M. le Président, je veux juste dire, là, que nos objections ne sont pas
anodines, elles sont fondamentales, et que ce n'est pas que
l'article 1 ou... l'article, qui est un sujet d'objection; toute la
mécanique de la loi est un sujet d'objection, M. le Président, toute la
mécanique de la loi.
En
plus, on a derrière nous, là, les délais d'attente à la Commission des droits
de la personne et des droits de la jeunesse.
Et je rappellerais, de mémoire, là, le texte de Pierre Trudel, qui dit :
Cette loi-là se pourrait peut-être, mais le contexte actuel fait qu'on ouvre une boîte à plaintes dans un contexte
où les gens cherchent comment se plaindre. Alors, Trudel est très, très,
très perspicace, pertinent dans le texte qu'il a proposé.
Alors, M. le
Président, nous cherchons une voie de solution. C'est bien sûr quelque chose
qui balise. Par rapport à la commande initiale du gouvernement, ça
balise beaucoup, beaucoup, beaucoup la loi, mais j'avise le gouvernement que ce serait bien qu'on
entende les deux oppositions qui disent : Il faut baliser de forte manière
cette loi. Sinon, on va perdurer dans
cette façon de faire qui est de chercher, de contreproposer, d'essayer d'amener
le gouvernement ailleurs. Puis je
vous dirais que là où on veut les amener, c'est là où les Québécois sont, là où
les Québécoises sont. Notre discours n'est
pas déconnecté de la réalité québécoise. Bien au contraire, c'est le discours
gouvernemental qui actuellement est déconnecté
de la réalité québécoise ou de l'appel des Québécois et des Québécoises pour
régler un problème. Alors, c'est ce qu'on veut.
D'ailleurs,
je répéterais que le ministre délégué aux Finances — notre collègue à qui je souhaite prompt rétablissement, c'était l'ancien ministre des
Affaires municipales — lors de la fameuse motion de la CAQ du 11 février
2015 — c'est
ça? — avait
dit qu'il y avait une ligne... que le Code criminel existe déjà — je
l'ai cité en adoption de principe, si vous
allez voir, vous allez voir mes... je l'ai cité à cette époque-là — et qu'il ne fallait pas tomber là-dedans, exactement dans ce à quoi est tombé le
gouvernement. Il lançait un avertissement à son propre gouvernement. Aujourd'hui, quand on le relit, on voit que
c'était prémonitoire. Il nous disait : N'allez pas là. M. le Président,
nous ne voulons pas y aller.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Juste
un petit clin d'oeil à ma collègue qui dit : Enfin, la deuxième opposition se rallie. Mais je
voudrais souligner, bien humblement, que, depuis le début, on répète qu'il
faut s'attaquer au discours des intégristes
religieux, des agents de radicalisation, des prédicateurs autoproclamés. Et, à la différence avec ma collègue de Taschereau,
quoique j'aime bien l'amendement, là... Et j'ai pris note lorsque vous parliez,
puisque ça m'a interpelée, chère collègue.
Vous dites qu'il ne faut pas cibler une religion. Bien, nous, nous croyons le
contraire, à la Coalition avenir Québec. Je
crois le contraire, nous croyons le contraire : toute cette problématique
vient de l'islam radical, l'islamisme
radical. Et, oui, il faut cibler une religion parce qu'il est là le problème,
sinon nous ne serions pas ici
aujourd'hui, et cette loi n'aurait jamais été déposée en mai dernier. Alors,
c'est la petite différence entre ma collègue de Taschereau et moi-même.
Et
ce courage politique que ça prend... parce que, oui, là, on va parler de
politique. Force est de constater que jamais nous ne verrons ces mots
dans cette loi, même si nous le demandons et nous le réclamons. Et même ma
collègue de l'opposition officielle refuse de cibler cette religion, alors que,
lorsque l'on parle — je
reprends vos... j'ai pris note lorsque vous
parliez, chère collègue — à une experte, qui est une experte indéniable dans le domaine de
la radicalisation mais aussi de
l'islamisme, l'islamisme radical, Mme Fatima Houda-Pepin, ça existe au
Québec, et c'est à ça qu'il faut s'attaquer,
il faut s'attaquer à cette problématique. Et nous, on croit qu'il faille s'y
attaquer, et c'est la raison pour laquelle nous disons que cette loi-là
ne cible pas le bon problème. Sinon, nous ne serions pas ici.
S'il
n'y avait pas eu ce jeune homme à Saint-Jean-sur-Richelieu qui est allé tuer un
soldat, s'il n'y avait pas eu ce
jeune homme de Montréal qui, lui, s'est rendu à Ottawa pour tuer un autre
soldat, entrer dans le parlement et faire feu sur tout ce qui bougeait, finalement — et, Dieu soit loué, il n'y a pas eu personne
d'autre qui a été atteint — et tout ça au nom
d'Allah, hein, tout ça au nom d'Allah, naturellement après un endoctrinement
sûr et certain — on leur
a mis des idées dans la tête — bien, on ne serait pas ici. C'est la seule
raison pour laquelle on est ici et c'est la raison pour laquelle on dit
qu'on devrait plutôt viser le discours des islamistes radicaux.
Malheureusement,
ce n'est pas ça qu'il y a dans ce projet de loi. Donc, contrairement à ce que
ma collègue de l'opposition
officielle nous dit, oui, il faut viser une religion, et c'est la seule qu'il
faut viser. C'est le commentaire que je voulais apporter.
Le Président (M.
Ouellette) : Vous suscitez une réponse. Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
Eh oui! M. le Président, je veux rassurer ma collègue. Depuis le début qu'on
sait que tout le problème vient de
l'islamisme, qui est un mouvement politicoreligieux, qui est vraiment, pour
moi, un mouvement de domination
politique plutôt que religieux, mais le gouvernement ne veut pas cibler une
religion. Alors, à partir de là, nous faisons
des propositions qui nous semblent pouvoir les rallier, parce que sinon, on
fait face à un mur. Alors, c'est dans ce sens-là.
Qu'elle
ne s'inquiète pas, je n'ai pas peur des mots. L'islamisme est un vaste
problème. C'est l'islamisme qui... bien,
beaucoup de gestes terroristes qui sont posés en ce moment sont en ce nom. Je
n'ai pas peur des mots, mais j'ai peur des lois, et je veux que les lois
soient bien écrites. Et pour ça j'essaie de rallier le gouvernement à une
version qui est peut-être, pour la collègue, édulcorée, mais qui pourrait nous entraîner vers
un chemin plus intéressant que celui dans lequel veut nous entraîner le gouvernement.
Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Taschereau. S'il
n'y a pas d'autre commentaire, on va
voter sur le sous... Oh! excusez, M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Vous mettez votre grain de sel?
• (16 h 10) •
M.
Rochon : Bien oui! Bien oui,
bien oui! Je vais assaisonner ça un peu. Dans le plan d'action gouvernemental
2015‑2018, ce que nous lisons du premier ministre, c'est : «La
radicalisation...» Et là il va peut-être baisser dans l'estime de ma collègue de Montarville. «La radicalisation
n'est pas l'apanage d'une religion en particulier...» C'est ce qu'il dit.
Mais
je veux, moi, revenir à Pierre Trudel, dont a rapidement parlé tantôt ma
collègue de Taschereau, parce que c'est
vrai que sa contribution à notre réflexion a été très intéressante, très
intéressante. Pierre Trudel, il est professeur au Centre de recherche en droit public, là, de la
Faculté de droit de l'Université de Montréal. Et lui, il dit convenir que le
projet de loi n° 59 — puis ça, moi, je l'ai dit aussi à plusieurs
reprises — part
d'une intention louable, sauf qu'il rate sa cible. Et c'est pour ça que
nous, nous voulons mieux encadrer son application, là. Il rate sa cible puis il
institue une inquisition nouveau genre qui fait fi des mécanismes de la liberté
d'expression.
«Tout le
monde convient [ici] — lui le premier, là, Trudel — que les propos qui incitent à détester ou à
poser des gestes violents sont à
proscrire. [Mais] déjà [il y a] des dispositions du Code criminel [qui]
permettent d'accuser devant les tribunaux ceux qui répandent de tels
propos.
«La loi
proposée interdit de tenir publiquement un discours haineux ou incitant à la
violence contre un groupe présentant
une caractéristique commune — hein, on a dit ça souvent, c'est contre des
groupes de personnes, on pourrait peut-être
rappeler lesquels — à
l'égard de laquelle on ne peut faire de discrimination [...] la race, la
couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil,
l'âge, sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou
nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation de moyens pour
pallier ce handicap. [...]Les tribunaux ont
pourtant rappelé — notre
ami Trudel — que la
liberté d'expression ne protège pas
que les propos servant à des
"fins légitimes d'information du public". Même le mauvais goût est
protégé. [...]Le projet de loi n° 59,
[il] propose d'ajouter [...] un mécanisme de plaintes. Toute personne [va
avoir] le droit de déposer des plaintes auprès de la Commission des droits de la personne [et de la jeunesse] sur
n'importe quels propos, discours, émissions de télé, caricatures ou
images qui lui semblent visés par la loi.»
Lui, il se
demande où sont rendus les «Je suis Charlie». Parce que, écrit-il, «les
tribunaux ont distingué entre le propos
qui incite vraiment une personne à haïr ou à se livrer à de la
violence et les propos détestables qui n'ont pas de chances d'avoir de tels effets. Mais la
distinction est ténue.» Et ce qu'il exprime, et là je le cite au texte :
C'est qu'«en ouvrant la porte à cette
"chasse" à tout propos qui déplaît, le projet de loi n° 59
[oui] fait fi des conditions concrètes de l'exercice de la liberté
d'expression. Il forcera tous ceux qui s'expriment à se demander à chaque fois
si quelqu'un quelque part ne va pas trouver que leurs mots, leurs blagues, leur
photo ou leur caricature semble "haineux"».
Alors, fondé
sur cette opinion de Pierre Trudel, fondé sur les opinions exprimées très
majoritairement ici allant dans ce
sens-là, nous réitérons une ixième fois qu'il faille resserrer l'application du projet de loi n° 59. Et c'est dans cet esprit-là que s'inscrivent chacun des sous-amendements ou amendements que nous avançons de ce côté-ci de la table.
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la députée de Taschereau.
Mme Maltais : Écoutez, M.
le Président, là, j'aimerais ça que
le gouvernement... Je n'ose plus dire «la ministre» parce
que je comprends qu'elle n'est plus en relation. Elle dit : J'ai déjà
discuté beaucoup de ça à l'article 1; ça revient; j'ai vu ça à l'article 1; je me suis déjà
exprimée à l'article 1. D'accord. Maintenant, j'aimerais ça, à ce
moment-là, que le gouvernement — je pense aux collègues qui sont ici — entende et commence à se demander où nous
allons aller si nous ne trouvons pas
un terrain d'entente. Il va falloir qu'il y ait un questionnement, de l'autre
côté, sur le terrain d'entente que nous pouvons trouver. C'est
extrêmement important. Si on veut vraiment toucher à la liberté d'expression,
il va falloir le faire ensemble. Il va falloir le faire ensemble. Alors, il va
falloir qu'on arrive à trouver ce terrain d'entente. Et le terrain d'entente, il est de revenir à l'objectif initial dans
lequel s'est inscrite cette loi. Cette loi est inscrite dans le plan d'action contre la radicalisation. Ça
s'appelle : La radicalisation au Québec : agir, prévenir, détecter
et vivre ensemble, Plan d'action
gouvernemental 2015‑2018. Et, si on va dans les actions contre la
radicalisation religieuse, on est véritablement là-dedans, il y a là-dedans
le projet de loi n° 59.
S'il y a eu une mauvaise évaluation de la
perception populaire et des experts — des deux — de la
part du gouvernement sur ce que devait
contenir cette loi, c'est possible, ça arrive. On peut parfois se tromper, même
quand on est au gouvernement, ça peut
arriver. Puis, dans ce temps-là, bien, il faut... On dit : 100 fois
sur le métier, remettez votre ouvrage.
Je vais être obligée de revenir à l'appel que nous avons fait dès le début,
après la fin des auditions parlementaires.
À la fin des
auditions, j'ai dit : Écoutez, ça nous prend une refonte de la loi. Toutes
les propositions que nous faisons amènent
à une refonte un peu de la loi ou, en tout cas, à un resserrement de la loi sur
la position commune. Nous voulons tous et toutes que le discours fondé sur un
précepte religieux intégriste et qui est extrêmement haineux au départ...
C'est là-dessus qu'on en a, sur la radicalisation. On n'est même pas capables
de toucher à ça, on n'est même pas capables d'aborder ça. On se fait dire non à
ça.
Je le dis, il
y a plusieurs points. Après ça, il y a que ça aille à la commission, que ce
soit un processus différent du
processus des plaintes, c'est un autre problème. On aurait pu, par exemple,
l'intégrer au processus des plaintes de la CDPDJ et non pas créer un processus à côté avec des infractions pénales.
Là aussi, c'est un problème, parce qu'il y a des infractions pénales.
Quand il y a une pénalité — pénalité,
des milliers de dollars — c'est
un problème. Alors, c'est là-dedans qu'on
est. Quand les jeunes se coupent de cette loi-là, alors que la DPJ, les
commissions scolaires viennent nous dire : Vous dédoublez des
processus, il y a un problème.
Alors, le
sous-amendement que nous faisons — puis je pense que je comprends qu'il est
agréé par la collègue, ce que j'apprécie vraiment — bien,
ça serait un premier pas vers une résolution du problème que nous avons.
Nous n'avons
pas de problème de liberté d'expression au Québec. Là, là-dessus, je veux le
dire, là, il y a comme une espèce de
signal qu'on enverrait à l'international comme si on adoptait cette loi-là en
l'état, la façon dont elle est écrite, qu'on
a un gros problème de discours haineux au Québec. Non. On a un problème de
radicalisation au Québec. On a un problème,
comme dans bien d'autres pays, de jeunes qui se radicalisent et qui veulent se
joindre à un combat armé au nom d'une
religion. Voilà notre problème. Mais envoyer le message qu'au Québec nous avons
un grave problème de propos haineux ou de discours haineux, je trouve ça de mauvais
aloi, tu sais, je vais vous dire... Je trouve que c'est un mauvais choix
de la part du gouvernement.
Alors,
nous, on essaie de convaincre le gouvernement de mettre, je vais dire, le
plasteur sur le bobo et non pas à côté...
ou de ne pas mettre un plâtre là où on a besoin d'un plasteur. Je ne sais plus
quelle expression essayer de donner pour
exprimer ce que j'ai à dire. C'est-à-dire qu'il va falloir que le gouvernement
accepte de restreindre sa loi. Vous ne légiférerez pas sans l'opposition
sur la liberté d'expression, à moins que le gouvernement aille vers un bâillon,
ce qui m'étonnerait.
Alors, M. le
Président, moi, je considère que ce sous-amendement nous amène vers une piste
de solution intéressante, que notre appel
doit être entendu. Nous voulons sortir de l'impasse dans laquelle nous sommes,
et la proposition que nous faisons par ce sous-amendement nous permet
d'envisager de sortir de l'impasse. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : S'il n'y a pas d'autre commentaire sur le
sous-amendement de Mme la députée de Taschereau, je vais mettre le
sous-amendement aux voix sur appel nominal. M. le secrétaire.
Le Secrétaire :
Mme Maltais (Taschereau)?
Mme Maltais :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Rochon (Richelieu)?
M. Rochon :
Pour.
Le Secrétaire :
Mme Roy (Montarville)?
Mme Roy
(Montarville) :
Pour.
Le Secrétaire :
Mme Vallée (Gatineau)?
Mme Vallée :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Boucher (Ungava)?
M. Boucher :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Iracà (Papineau)?
M. Iracà :
Contre.
Le Secrétaire :
M. St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Ouellette (Chomedey)?
Le Président (M. Ouellette) : Je m'abstiens. Donc, le sous-amendement à
l'article 2 introduit par Mme la députée de Taschereau est rejeté.
Nous
retournons à l'étude de l'amendement de Mme la députée de Montarville à
l'article 2, qui introduit les mots «lorsque le discours est fondé
sur un précepte intégriste ou radical» après ce qui est inscrit au premier
alinéa.
Mme
la députée de Montarville, je vous indique qu'il vous reste deux minutes sur
l'étude de votre amendement pour vous.
Mme Roy
(Montarville) :
Deux minutes pour moi? Merci.
Une voix :
...
Mme Roy
(Montarville) : C'est trop? Non, ce n'est pas que c'est trop.
Écoutez...
Une voix :
...
Mme Roy
(Montarville) : Non, je n'étirerai pas le temps pour étirer
le temps, ce n'est pas du tout mon intention.
Encore une fois, on tente, pour le
bénéfice de la population, pour le bénéfice de l'intérêt public, de faire en
sorte que la liberté d'expression
soit le moins possible atteinte, et c'est la raison pour laquelle je vous
soumettais cet amendement, qui nous
dit qu'il est interdit de tenir ou de diffuser publiquement un discours visé à
l'article 1 lorsque le discours est fondé sur un précepte
intégriste ou radical. Et, puisqu'on réfère à l'article 1, on parle de
précepte religieux entre autres. Le «entre
autres», quant à nous, il est de trop, mais, minimalement, «précepte intégriste
religieux» ou «radical religieux» sont
couverts avec cet amendement que je mettrai aux voix si personne d'autre n'a de
commentaire à faire. Pour ce qui est de ma part, je les ai faits.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.
• (16 h 20) •
Mme Maltais :
Oui, M. le Président. Avant de passer au vote, quelques mots simplement. Je
dirais que c'est un bel effort. J'ai
essayé d'améliorer un peu la formulation de la collègue de Montarville deux
fois, hein, par des... une fois, en fait, excusez-moi, en essayant de
resserrer la formulation. Maintenant, la majorité gouvernementale ne veut pas.
Alors,
c'est évident que j'ai encore un problème avec «radical». Maintenant, même si parfois j'ai des problèmes
avec certaines formulations, comme avec «radical», je suis
capable de comprendre que c'est quand même mieux que la formulation initiale. Autrement dit, même si ce
n'est pas, à mon sens, extrêmement porteur ou très bien écrit, c'est quand
même un resserrement par rapport à la proposition initiale, qui était la
proposition gouvernementale.
Alors,
je pense que moi, je vais appuyer l'amendement de la collègue. Je sais que des
fois elle dit : Moi, je ne pense pas
ça, moi, je ne pense pas ça, puis elle vote parfois contre nos amendements ou
sous-amendements, mais, à un moment donné,
je crois qu'il faut parfois se rallier, comme opposition, autour de : nous
cherchons une meilleure solution que la présentation initiale. Ce n'est pas une proposition parfaite. Je pense
que nous avions mieux tout à l'heure, mais c'est mieux que la
proposition initiale. C'est une intention de resserrer.
J'ai quelque chose
d'intéressant. J'en ai parlé tout à l'heure puis je n'ai pas eu le temps, M. le
Président... je manquais de temps. Je manque
de temps, dans cette commission, je n'en reviens pas moi-même. Le mémoire de la
Fédération des établissements
d'enseignement privés, page 12, élément 5 : «Disponibilité des
ressources humaines à la CDPDJ.»
Voici :
«S'il est adopté comme tel, le projet de loi n° 59 amènerait un lot
supplémentaire de travail et de responsabilités
aux gens oeuvrant au sein de la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse.» Donc, surcroît
de travail égale besoin de ressources humaines. Surcroît de travail, si tu
n'ajoutes pas des ressources humaines, égale allongement des listes
d'attente, c'est clair. Je vais continuer. «Dans son rapport d'activités et de
gestion pour l'année 2013‑2014, la CDPDJ souligne que malgré le nombre de
postes accordés par le Conseil du trésor, 168 postes équivalent à temps
complet, la CDPDJ ne peut qu'employer 148 personnes en raison des
restrictions budgétaires.
«De
plus, les explications fournies dans le rapport mentionné illustrent bien les
mesures de réduction des dépenses. Ces
contraintes financières viennent de toute évidence nourrir notre questionnement
sur les capacités de la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse à faire face à une charge de
travail supplémentaire. Également — je cite
toujours le rapport — l'ensemble
des chiffres entourant les dossiers traités dans l'année 2013‑2014
démontre que la capacité de la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse a atteint son plein potentiel. En plus d'accueillir de plus en plus de dossiers, la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse peine à
conserver un rythme de traitement de telle sorte que le nombre de
dossiers réglés diminue à chacune des années.»
Le
nombre de dossiers réglés diminue à chacune des années. Bien, je vous annonce,
M. le Président, que, si on adopte
sans cet amendement ou les sous-amendements qu'on a apportés, sans nos
propositions, si on adopte cette loi, le nombre de dossiers réglés va
diminuer encore plus à chaque année.
«La
fédération — je cite
encore — ne met
pas en doute le travail et la rigueur des analyses faites par le personnel
de la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse.» Bien au contraire, puisqu'on dit que le nombre
de plaintes a augmenté. Ils n'essaient pas
de traiter à toute vitesse, mais ça allonge donc le délai de traitement.
«Cependant, il faut savoir que le
délai de traitement d'un dossier sans judiciarisation est passé de 324 jours
pour 2012‑2013 à 376 en 2013‑2014 — et ça a augmenté encore.
«À
l'analyse de ces données, la fédération s'interroge sur les capacités de la
Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse à faire face à une augmentation drastique de sa
charge de travail, advenant par exemple que tous les propos haineux énoncés par des jeunes du Québec fassent l'objet
d'une dénonciation. Les conséquences d'un traitement lent et inefficace
peuvent avoir des impacts importants dans le milieu scolaire.»
Nous
avons offert tout à l'heure, monsieur... pas tout à l'heure, à la dernière
séance, d'enlever de la coupe de cette loi
les jeunes mineurs du Québec, moins de 18 ans. Ça nous a été refusé. La
DPJ et les établissements scolaires disent que ça va entrer en
contradiction. Ça va être la pagaille dans quelle loi doit s'appliquer. On va
introduire une judiciarisation, là, il doit y avoir de l'intervention sociale.
C'est un problème.
Alors,
que nous disent-ils? «Qu'adviendra-t-il du personnel des écoles et des élèves
en attente du traitement de leur dossier?
L'école devra-t-elle suspendre le membre de son personnel ou l'élève? Dans le
cas d'un jeune, l'incertitude et le stress liés à l'attente du
traitement de son dossier ne risquent-ils pas de compromettre sa réussite
scolaire?»
Est-ce qu'on va parler des jeunes? Alors, c'est pour ça que moi, je trouve que cette
idée de la collègue, je suis prête à
l'adopter, parce que nous cherchons depuis le début à ne pas embourber
la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse dans les plaintes. Ils en ont par-dessus la tête.
Ils sont déjà hors délai. C'est déjà à peu près inacceptable, ce que peuvent
vivre des gens qui sont visés par des plaintes. Est-ce qu'on pourrait au moins
ne pas en rajouter puis essayer de resserrer
là-dessus? Il n'y a aucune raison d'adopter cette loi en l'état
proposé, aucune raison, M. le Président.
Alors,
cet amendement me plaît, me va tout à fait. Il n'est pas
parfait, mais il correspond à un des objectifs que nous
nous sommes fixés : permettre de baliser la loi et de faire que pas trop
de monde ne tombe sous sa coupe, M. le
Président. Voilà ce que j'ai à
dire là-dessus.
Le Président (M. Ouellette) :
Merci, s'il n'y a pas d'autre commentaire à l'amendement déposé par Mme la députée
de Montarville à l'article 2, au premier alinéa, le vote est demandé,
le vote par appel nominal. M. le
secrétaire.
Le Secrétaire : Mme Roy
(Montarville)?
Mme Roy
(Montarville) :
Pour.
Le Secrétaire : Mme Maltais
(Taschereau)?
Mme Maltais : Pour.
Le Secrétaire : M. Rochon
(Richelieu)?
M. Rochon : Pour.
Le Secrétaire : Mme Vallée
(Gatineau)?
Mme Vallée : Contre.
Le Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. Iracà
(Papineau)?
M. Iracà : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : M. Ouellette
(Chomedey)?
Le Président
(M. Ouellette) : Je
m'abstiens. Donc, l'amendement déposé par Mme la députée de Montarville est rejeté.
Nous
continuons. Nous revenons au premier alinéa de l'article 2, en vous
rappelant que seulement M. le
député de Richelieu a du temps pour le premier alinéa.
M. Rochon : Alors, je vais y aller
avec la proposition d'un amendement, M. le Président, qui sera le
suivant : Modifier l'article 2
de la loi proposée par l'article 1 du projet de loi en ajoutant,
dans le premier alinéa, après les mots «est interdit», les mots «à toute
personne de 16 ans ou plus».
Alors, le texte amendé se lirait ainsi :
«Il est interdit à toute personne de 16 ans ou plus de tenir ou diffuser
publiquement un discours visé à l'article 1.»
Le Président (M. Ouellette) :
On suspend quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 28)
(Reprise à 16 h 33)
Le
Président (M. Ouellette) :
Nous reprenons nos travaux. Nous en sommes à l'étude d'un amendement
introduit par M. le député de Richelieu à l'article 2 proposé par l'article 1 du projet de loi. Et nous avons fait certaines vérifications parce
qu'il y avait quelque chose qui était similaire, qui avait été introduit hier,
mais, compte tenu qu'on est allés vérifier la jurisprudence et qu'on n'est pas sur le même fondement, votre amendement
est jugé recevable. Et je vais vous demander de nous fournir les explications
appropriées, M. le député de Richelieu.
M.
Rochon : Je vous remercie,
M. le Président. En précision à ce que vous venez, là, d'exprimer, en effet,
nous avions soumis antérieurement à
cette commission que cette loi ne devrait pas pouvoir s'appliquer aux personnes
de moins de 18 ans. Et nous
avions expliqué alors qu'il y avait déjà des ressources pour les jeunes, notamment
et surtout la direction de la protection de la jeunesse.
Notre
amendement a été battu alors, et nous nous souvenons de propos de notre
collègue de Montarville nous faisant remarquer
que les 16, 17 ans sont attrayants pour ceux qui recherchent la radicalisation.
Alors, nous avons tenu compte de ça
pour revenir devant la commission avec ce nouvel amendement que je relis... en fait, je relis le texte amendé : «Il est
interdit à toute personne de 16 ans ou plus de tenir ou diffuser
publiquement un discours visé à l'article 1.»
Je reviens à
l'appui de ma proposition d'amendement avec des extraits de mémoires qui vont dans ce
sens-là. Celui de la Fédération des commissions scolaires du Québec, qui nous dit qu'«alors que le plan de lutte
contre l'intimidation et la violence
à l'école prévu dans la Loi sur l'instruction publique réserve à la direction
de l'école, au protecteur de l'élève et à la commission scolaire la responsabilité
d'intervenir, le projet de loi propose [également de confier] ce pouvoir à la Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse lorsqu'un élève tient
un discours haineux ou incitant à la violence à l'égard d'un groupe de
personnes. Bien que l'objectif poursuivi par le projet de loi soit, à première
vue, complémentaire aux dispositions de la Loi sur l'instruction publique, le pouvoir d'enquête de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse entrerait — avance
la Fédération des commissions
scolaires — directement
en conflit avec les responsabilités des intervenants scolaires.
«En effet, même si le discours haineux ou
incitant à la violence s'adresse à un groupe de personnes, le même discours peut également porter atteinte aux droits
d'un élève dûment identifié et lui causer un préjudice personnel. Dans ce cas, l'école a non seulement l'obligation de
faire une enquête sur les événements faisant l'objet d'une plainte et d'offrir
des mesures d'aide à l'élève victime d'un
tel discours, mais doit également intervenir pour encadrer l'auteur du discours
et lui imposer des sanctions disciplinaires, le cas échéant.
«Avec ce qui
est proposé dans le projet de loi n° 59 — poursuit la Fédération des commissions
scolaires — la
Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse pourrait intervenir et faire enquête sur le même
événement avec l'obligation de
soumettre le cas au Tribunal des droits de la personne si son enquête démontre
qu'il existe des éléments de preuve
suffisants qu'un élève a tenu un discours haineux ou incitant à la violence.
Or, dans un établissement d'enseignement
primaire et secondaire, les autorités scolaires sont les mieux placées pour
intervenir auprès des élèves, quelle
que soit leur implication dans un événement, qu'il s'agisse d'indiscipline, de
troubles de comportement, d'intimidation ou de propos discriminatoires à
l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes.
«Il est
important de rappeler que le rôle de l'école et de la commission scolaire est
non seulement d'intervenir auprès
d'un élève victime d'intimidation ou de violence, mais également auprès de
l'auteur afin de lui offrir des mesures de soutien ou d'encadrement en vue d'éviter la répétition d'un tel acte.
Or, comment peut-on — et là je
termine l'extrait, là, que je voulais
vous soumettre — pour une
même situation, avoir l'école qui met tout en oeuvre pour réhabiliter l'élève
auteur d'un discours haineux ou incitant à
la violence, si le Tribunal des droits de la personne obtient, après enquête de
la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse, le pouvoir d'intervenir pour le sanctionner
civilement par l'imposition d'une
sanction pécuniaire...» Alors, c'est la question, là, que se pose la Fédération
des commissions scolaires et l'objection qu'elle exprime.
Autre extrait que je souhaite vous soumettre,
mémoire, en regard du projet de loi n° 59, de la direction de la protection de la jeunesse... en fait, des
directeurs de la protection de la jeunesse. «Nous n'avons pas de
recommandations à formuler en ce qui
concerne l'application de ces procédures aux adultes. Toutefois — ajoutent-ils — nous tenons à vous faire part de nos vives inquiétudes quant au fait
que le projet de loi ne crée pas de distinction entre les personnes mineures
et majeures.» C'est ce que nous voulons
introduire, nous, par le biais de notre amendement. «Ce dernier aspect
nécessite, selon nous, une révision. Notre système juridique établit
généralement cette distinction afin de prendre en compte la vulnérabilité des mineurs et reconnaît l'importance
d'agir avec célérité et efficacité pour prévenir la récidive et ainsi bien
protéger la société.
«Le
regard que nous portons sur cet aspect du projet de loi se fonde
essentiellement sur les connaissances scientifiques, notre expérience clinique et l'efficacité
largement reconnue de nos interventions en matière de délinquance. En tant que
directeurs de la protection de la jeunesse,
et à l'instar de nos partenaires québécois en cette matière, nous sommes
convaincus que la portée de nos interventions est tributaire des grands
principes qui guident nos actions et nos décisions.»
«Ces principes doivent en tout temps guider nos
interventions à l'égard des jeunes, et il ne devrait en être autrement dans
présent projet de loi.
«Les
connaissances cliniques — j'achève — et la jurisprudence le
démontrent, l'adolescent est un
individu en développement qui n'a pas
atteint sa maturité et qui, à ce titre, a des besoins différents de ceux des
adultes.» Ça, il faudrait le souligner en caractères gras.
«Les
connaissances cliniques et la jurisprudence le démontrent, l'adolescent est un
individu en développement qui n'a pas
atteint sa maturité et qui, à ce titre, a des besoins différents de ceux des
adultes. L'intervention doit donc être appropriée
à ce stade de développement. En ce sens, le projet de loi ne précise nullement
les modalités pouvant spécifiquement s'appliquer aux mineurs, ce qui est
fort préoccupant.»
Ça préoccupe
les directeurs de la protection de la jeunesse, ça nous préoccupe. Nous
estimons que ce projet de loi ne
devrait pas punir des enfants, là, de moins de 16 ans, voilà, et qu'il y a la
direction de la protection de la jeunesse pour veiller à eux.
• (16 h 40) •
Le
Président (M. Ouellette) :
Avez-vous des commentaires, Mme
la députée de Montarville, sur l'amendement
déposé par votre collègue de Richelieu?
Mme Roy
(Montarville) :
Puisque vous me posez la question, oui, j'en aurais quelques-uns, M. le
Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Mais c'est sûr, Mme la députée de Montarville, à partir du moment où je m'adresse à
vous, je vous la pose, la question.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Effectivement, je me réjouis de voir que cet amendement-là
a tenu compte des préoccupations que j'avais émises à la première mouture de l'amendement qui avait été fait, parce
qu'en voulant exclure toute personne
mineure on ne touchait pas, malheureusement, les jeunes de cégep. Et le but de
l'exercice, effectivement, contrer la
radicalisation, l'endoctrinement, bien, ce qu'on se rend compte au Québec,
c'est que ça s'est passé dans un
cégep, entre autres. Et je crois que cet amendement rejoint ma préoccupation,
dans la mesure où il faut faire quelque
chose pour les jeunes de 16 et 17 ans qui, à un moment ou à un autre, se font
endoctriner et passent dans le côté obscur de la chose, si je peux
parler ainsi.
Donc, cet
amendement se lit ainsi : «Il est interdit à toute personne de 16 ans ou
plus — donc 16,
17 et 18, 19, et là on devient
adulte — de tenir
ou diffuser publiquement un discours visé à l'article 1.» Ce serait une façon
de s'assurer que la loi puisse s'appliquer à des jeunes de 16 et 17 ans,
mais surtout s'assurer qu'elle ne touche pas les enfants, c'est-à-dire ceux de 15, 14, 13, 12, et vous
descendez. Les différents intervenants qui sont venus nous voir pour nous
parler justement de l'école, parce
qu'il y a des mesures, plus loin dans le projet de loi, qui touchent les
écoles, écoles primaires, écoles secondaires, la Loi sur l'instruction
publique, avaient de fortes réserves à l'égard de ce projet de loi.
Donc, ce
serait une façon de répondre à leurs préoccupations, de laisser les
administrations scolaires utiliser les moyens
qui sont mis à leur disposition, qu'on leur fasse confiance pour qu'ils
puissent avoir des outils pour intervenir, pour les rarissimes cas où ils auraient à intervenir probablement,
parler d'enfants qui se radicalisent à neuf, 10 ans. Il ne doit pas y en avoir une tonne, mais force est de
constater que les jeunes du cégep, par exemple, ont été touchés par ce fléau.
Hier, un rapport nous disait justement que des personnes... et c'était le
chercheur Dejean, si je me souviens bien, concluait
son étude ou parlait, dans son étude... pardon, c'est l'article qui se
concluait en disant que, selon lui, des personnes, à un moment précis, ont endoctriné ou sont venues
spécifiquement au cégep pour aller toucher cette clientèle vulnérable et
s'en servir finalement.
Donc, c'est
un amendement qui me plaît, qui pourrait faire en sorte qu'on épargne les
jeunes et qu'on touche ceux qui,
malheureusement, sont, d'une certaine mesure, visés par la radicalisation ou
les agents de radicalisation qui s'intéressent à eux, qui s'intéressent aux jeunes de 16 et 17 ans, entre autres, et
ça, bien, c'est le fil d'actualité, les événements qui nous l'ont démontré au fil des derniers mois. Donc,
c'est un amendement que je reçois bien et pour lequel je voterai en sa faveur.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Taschereau, est-ce que vous avez des commentaires sur l'amendement
de votre collègue de Richelieu?
Mme
Maltais : Je crois que, oui, M. le Président, je vais avoir
quelques commentaires. J'apprécie l'amendement du collègue député de Richelieu et l'approbation que
reçoit cet amendement de la collègue de Montarville.
Effectivement, nous avions entendu ses commentaires à l'effet qu'elle voulait un peu quand même
qu'on agisse auprès des jeunes qui pouvaient être, par exemple, au
collège Maisonneuve ou d'autres collèges et qui sont plus âgés. Personnellement, ce n'est pas mon choix. Je veux vous dire, là, à nos chers
collègues : Moi, je pense que la DPJ, ce n'est pas pour rien que
c'est jusqu'à l'âge de 18 ans.
Jusqu'à l'âge
de 18 ans, jusqu'à aujourd'hui, là, on considère encore que ce sont des enfants.
Ce sont des gens qui sont traités
dans un système de protection de la jeunesse. Là, je dis
«enfant», là, je ne voudrais pas que certains se choquent contre moi, là. Ils sont peut-être ados aussi. Enfants,
préados, ados et jeunes adultes, mais jusqu'à l'âge de 18 ans... avant l'âge de 18 ans, en fait, on les traite dans
un système de justice séparé, parce que ce sont des jeunes
qui sont encore en pleine formation,
parce que ce sont des jeunes qui sont encore en pleine exploration du monde,
parce que ce sont des jeunes qui sont
très facilement réinsérables. Il ne faut pas les punir. Il faut leur faire
comprendre, les faire réagir et les ramener
dans une direction qui leur permette de mieux grandir, mieux grandir,
protéger... la protection de la jeunesse. S'il y a quelque chose au Québec
qui reçoit l'aval de tout le monde, c'est la protection de la jeunesse.
Je ne
comprends pas qu'on nous présente une loi sur les discours haineux et qu'on
n'accepte pas d'en évincer les jeunes.
Il y a la DPJ qui existe, mais, en plus, il y a les commissions scolaires et les cégeps qui sont formés pour travailler
auprès des jeunes. Il y a des intervenants
sur le terrain, et ce qui va se passer, c'est qu'il va y avoir des jeunes être
en train d'être travaillés... auprès
de qui il va y avoir une intervention parce qu'ils vont avoir tenu des discours
inacceptables, puis il y a un parent
qui va porter plainte ou une personne va porter plainte. Ça fait que l'étudiant
ou l'étudiante, l'élève va être en même temps dans un processus d'enquête de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse
puis, en même temps, va être en
réinsertion ou en travail sur le territoire avec la commission
scolaire ou avec le cégep,
travail de réinsertion ou, en tout cas, de rééducation, ça dépend de jusqu'où
ça va.
Je comprends que la ministre va nous amener un amendement
qui va dire qu'après enquête la CDPDJ peut décider
d'envoyer ça à la DPJ, mais qu'est-ce qu'on fait là, d'introduire une lourdeur
administrative pour nos jeunes? C'est quoi,
l'intérêt? Si c'est des jeunes, ça va à la DPJ. C'est
clair, ça, tout le Québec s'entend là-dessus. Même pour des actes autrement plus
graves, autrement plus graves que des discours haineux, on a choisi d'aller à
la DPJ, on a choisi de conserver des pouvoirs aux commissions scolaires, on a
choisi l'intervention, la réinsertion. Et là, pour du discours haineux, tout
à coup, on introduit une nouvelle
procédure. On s'en va dans un organisme qui est reconnu parce qu'il est
débordé pour ses listes d'attente puis on entend les jeunes là. Lourdeur
administrative.
Pourquoi
est-ce qu'on introduit cette lourdeur administrative pour le traitement des
jeunes? Ça n'a pas de bon sens.
Alors, on a écouté la Coalition
avenir Québec, qui disait : Écoutez,
on se sent mal à l'aise. J'aurais apprécié que tout le monde vote, y compris la CAQ. J'aurais apprécié que la
collègue comprenne qu'on n'envoie pas les jeunes ailleurs qu'à la DPJ ou
auprès de leurs intervenants scolaires. Ça aurait été mieux, à mon sens. La
collègue n'a pas voulu entendre là-dessus.
Au moins, entendons le 16 ans et moins.
Entendons le moins de 16 ans. Préoccupons-nous de la jeunesse, préoccupons-nous de ces jeunes qui ne sont pas
encore dans leur tête. Ils ne sont vraiment pas sur le chemin de la violence dans leur tête. Ils ne sont pas là. Ils sont
radicalisés. Ceux qu'on veut, là, ils sont radicalisés par des agents de
radicalisation qui les entraînent et
qui leur font un lavage de cerveau. Je propose de ne pas les envoyer devant la
CDPDJ. Je propose de les envoyer à la DPJ, puis de les réinsérer dans la
société, puis leur défaire le lavage de cerveau.
D'ailleurs,
là-dessus, je me rappelle que la ville de Montréal
est venue ici aussi. On parle souvent des commissions scolaires, on parle souvent... La ville de Montréal
dit : Le projet de loi n° 59 — je
vais résumer à peu près le mémoire,
là — a
été travaillé en privé, n'a pas fait affaire avec nous. On travaille avec les
jeunes, on travaille avec le centre de prévention
à la radicalisation. Vous auriez bien dû travailler avec nous. Il y a un silo,
là, qu'on est en train d'introduire, qui ne tient pas compte de la société, qui ne tient pas compte de la façon dont le Québec
traite ce genre de question. Alors, sortons les jeunes de moins de 16
ans de ce silo-là.
• (16 h 50) •
Quel est l'intérêt?
Quel est l'intérêt aussi d'amener un amendement en disant :
Oui, mais la commission des droits de
la personne et de la jeunesse, elle
posera un jugement à part la plainte? Oui, mais il va y avoir une plainte sur
un jeune, elle va être déposée. Il y
a un jeune qui va avoir reçu une plainte. Ce jeune-là, il ne faut pas lui
envoyer une plainte, puis ensuite en enquête, puis ensuite... Il faut
l'envoyer immédiatement dans les services d'intervention, de réinsertion.
Savez-vous ce
qu'il va arriver? Il va être encore plus marginalisé. Au lieu de l'introduire
dans une dynamique de... je vais
l'appeler de rapatriement dans la société, de réinsertion dans la société,
dans une dynamique de sentiment d'appartenance
à une communauté, au contraire, on judiciarise le processus. Ça fait qu'on
l'envoie dans une dynamique de marginalisation. On le rejette, on le
repousse. On ne l'envoie pas dans les mains d'intervenants scolaires qui connaissent le travail puis qui vont essayer de le
raccrocher à sa gang, raccrocher par des activités, par des choses. On ne
l'envoie pas là, on l'envoie dans un
processus de judiciarisation. On va empirer le problème. On va rendre la
situation plus critique.
Ce que le gouvernement propose, c'est
l'antisolution. Aïe! Vraiment, là, c'est l'antisolution. J'ai plaidé pour 18 et moins, là, là, je plaide pour moins de 16
ans, là. Écoutez-moi, là, au moins, acceptez cet amendement. Au moins, ne faites pas cette erreur-là. Ça fait plusieurs
fois que je dis, là, qu'il y a quelque chose qui ne marche pas ici, là. On ne
touchera pas à la liberté d'expression comme
ça sans l'aval de l'opposition officielle, sans l'aval de la deuxième
opposition. Il va falloir qu'à
l'autre bout, là, ça se réveille. Y a-tu quelqu'un qui écoute ce qui se dit
ici, là? Est-ce qu'il y a un leader à l'autre
bout, là, qui entend? Est-ce qu'il y a un premier ministre qui entend, là? On
n'enverra pas les jeunes de moins de 16
ans dans un processus de judiciarisation en dehors de la DPJ, en dehors des
réseaux scolaires, en dehors de nos réseaux d'intervention avec notre aval, jamais, jamais. Je ne crie pas, je suis
convaincue, je suis outrée de ce que vous êtes en train de faire, Mme la ministre. Je suis outrée de ce
qui est en train de se passer. À un moment donné, il va falloir que ça se
réveille, de l'autre bord.
Jamais nous
n'accepterons que des jeunes de moins de 16 ans soient introduits dans un
processus comme ça. Ça n'a pas de sens. Quand est-ce que vous allez
comprendre ce qu'on vous dit? Puis quand est-ce que, de l'autre bord, il va y avoir une réaction puis qu'il va enfin y
avoir autre chose qu'un mur qui tient à sa loi tellement qu'il est prêt à
entraîner les jeunes dans ce
processus-là, qu'il est prêt à entraîner les jeunes dans un processus qui va
les marginaliser, qu'il est prêt à
entraîner les jeunes dans un processus qui va faire que le Québec va faire une
distinction tout à coup, là, puis là les jeunes, on ne les protège plus? On n'est plus là-dedans, là. La
réinsertion sociale, oubliez ça. On s'en va dans... Non, non, c'est un
processus de judiciarisation. Réveillez-vous, là. Je le dis : c'est un
processus de judiciarisation.
Avez-vous entendu le mémoire? Étiez-vous là lors
des auditions en commission parlementaire? Regardez la réalité. La DPJ, c'est elle qui s'occupe de nos jeunes, c'est elle qui
s'occupe de nos enfants. Les commissions scolaires, ce sont eux. Le
collègue de Papineau, il a déjà été président d'une commission scolaire, vous
aussi. Les deux ont été collègues. Qu'est-ce
qu'ils en pensent de ça? Est-ce que les commissions scolaires sont utilisées...
Est-ce que les commissions scolaires
n'ont pas, dans leurs systèmes, des gens, des intervenants et des intervenantes
qui normalement prennent en charge les jeunes qui vivent des
problématiques comme ça?
Ce n'est pas
vous, mes chers collègues, que je veux faire réagir, c'est le leader et le
premier ministre. Je veux qu'ils parlent
à la ministre et qu'ils lui disent que, sans l'aval de l'opposition, si elle ne
nous entend pas, si elle ne comprend pas
que ça ne marche pas, on n'arrivera à rien. Il faut que ça bouge. Il faut qu'il
se passe quelque chose. Nous n'arriverons à rien. Nous n'accepterons pas. Je peux-tu le dire plus clairement, là?
Nous n'accepterons pas que les jeunes de moins de 16 ans soient pris dans un tel processus. Alors, on va tout faire
pour empêcher ça. On va plaider pour empêcher ça. Ça fait partie des
valeurs les plus profondes que j'ai. Là, on touche à ce qu'on est, à nos
convictions profondes.
Le système de la DPJ, je l'ai défendu puis je
suis sûre que la ministre aussi, elle l'a défendu. On l'a défendu, entre autres, quand Ottawa, à un moment donné,
essayait justement d'introduire le... de rentrer les jeunes de 14 et plus
dans le Code criminel. À l'époque, j'étais
avec Paul Bégin, ministre de la Justice, puis on fait une bataille monstre. Il
ne faut pas qu'ils touchent aux
jeunes à partir de 14 ans, ils ont fini par 16 ans, mais ça a été une bataille
énorme, je m'en rappelle encore.
Pourquoi je m'en rappelle? Parce que c'est une des choses dont je suis le plus fière, parce
qu'on a sorti les jeunes de là, parce
qu'on a rappelé les valeurs que le Québec porte. On a rappelé son attention
particulière aux jeunes puis sa façon de travailler avec les jeunes de
façon différente. C'est une de nos fiertés.
Mais
pourquoi on n'applique pas la même valeur, la même vision à ce projet de loi
là? Qu'est-ce qui empêche ça, M. le
Président? Qu'est-ce qui empêche de véritablement prendre cette section-là puis
dire : Écoutez, on ne fera pas ça aux jeunes de moins de 16 ans
parce qu'eux, on les traite différemment dans la vie?
J'ai fait un petit coup d'émotion...
Une voix : ...
Mme
Maltais :
Non, ce mot-là, je ne l'utilise pas. Un petit coup d'émotion, mais c'est parce
que je n'en reviens pas, là. Je n'en reviens pas.
Nos
propositions sont raisonnables, là, en général. Vraiment, là, celle-là, elle
est majeure. C'est une proposition qui
se tient. C'est une proposition qui est minimale. C'est une proposition qui
devrait normalement... Moi, je vous le dis, là, je croyais recevoir l'aval du gouvernement sur cette proposition-là.
Sincèrement, là, je pensais que j'allais avoir de l'écoute. Je pensais que, de l'autre côté, là, il y aurait
une résonance. J'ai rarement vu des projets de loi où la résistance
gouvernementale est si forte à amener des aménagements qui soient autre
chose que, je vais le dire, là, de la cosmétique. Jamais vu ça. Jamais vu ça.
Il y a un
véritable problème en ce moment. Je ne sais pas quelle est la volonté
gouvernementale en voulant rentrer des
jeunes... J'aimerais ça avoir une explication. Je sais que je n'en aurai pas,
la ministre ne veut plus nous parler, mais je voudrais comprendre. Ah! si elle veut me parler, tiens, O.K. Parfait,
M. le Président. Si elle veut m'expliquer pourquoi les jeunes doivent
rentrer là-dedans, j'écoute.
Le Président (M. Ouellette) : Vous
avez terminé votre plaidoyer, Mme la députée de Taschereau?
Mme
Maltais : Non, je
n'ai pas terminé, mais on m'a dit que la ministre voulait me parler, alors
j'écoute.
Une voix : ...
Le
Président (M. Ouellette) :
Bien, M. le député de La Prairie, je pense que Mme la députée de
Taschereau parle au président. Donc,
je vais vous laisser terminer, et, si Mme la ministre peut vous répondre, après
votre intervention, elle vous répondra, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Alors, M. le Président, j'aimerais ça des fois que les collègues de l'autre
côté, tant qu'à parler, parlent au
micro et nous disent ouvertement ce qu'ils pensent. Est-ce qu'ils sont d'accord
avec ça, là, que les jeunes de moins
de 14 ans... moins de 16 ans soient sous la croupe de cette loi-là? Ça fait
partie de leurs valeurs, ça? Ça fait partie des choses qu'ils entérinent? J'aimerais ça qu'ils aillent parler aux
organismes communautaires de leurs circonscriptions, puis qu'ils aillent
parler à la DPJ, puis qu'ils aillent faire un petit tour, qu'ils aillent jaser
un peu du fouillis légal et administratif dans lequel on va plonger les
commissions scolaires, DPJ, CDPDJ, où est-ce qu'il est rendu, le dossier, il est à toi, il est à moi. Ah! on est déjà en
intervention; non, on n'est pas en intervention. Ah! il y a une plainte d'un
parent, il ne veut pas le retirer. Ah! c'est le fun. Ça va être beau,
ça.
C'est quoi,
l'idée? C'est quoi, le principe qu'il y a derrière ça? Quelle est l'idée? Quel
est le principe? Quelle est la valeur qui sous-tend cette position de soumettre
les jeunes de moins de 16 ans à cette loi? Est-ce qu'il y a un plus pour
notre société là-dedans? Est-ce qu'il y a
quelque chose, il y a une plus-value à la société de soumettre les jeunes de
moins de 16 ans à cette loi? Eh, que
c'est difficile à trouver! Je me penche là-dessus, je lis le texte, là, puis
j'essaie de comprendre en quoi il va
y avoir une plus-value pour la société. Zéro plus-value. Est-ce qu'on ajoute
une bonification aux jeunes? Est-ce
qu'on permet de mieux les réinsérer? Non. Est-ce qu'on permet de mieux les
déradicaliser? Non. Est-ce qu'on permet de mieux encadrer leurs parents?
Non, non, non.
• (17 heures) •
Il n'y a rien
là-dedans qui permet qu'un jeune ou qu'une jeune soit mieux traité socialement,
soit en meilleure position après
l'intervention. Est-ce qu'une intervention devant la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse
par une plainte, même si elle a subi une enquête qui, après ça, l'envoie à la
DPJ, est-ce qu'en quoi que ce soit on
va avoir aidé... À la fin de l'intervention, là, est-ce qu'on va avoir aidé le
jeune ou la jeune? Non. C'est une évidence. Il n'y a personne au Québec qui va vous croire si quelqu'un répond oui à ma
question, et surtout pas quelqu'un qui travaille dans l'univers de la
jeunesse : aucune personne ne va croire qu'on est dans un domaine de
réinsertion. On est dans la pénalisation, on
est dans la judiciarisation et on est dans l'univers des amendes. C'est ça, le
processus dans lequel on introduit les jeunes de moins de 16 ans.
Alors, l'amendement, il ne brise pas la loi, il
ne défait pas la mécanique que je n'aime pas, il ne défait pas la notion de discours haineux, il fait juste soustraire
les jeunes d'une trappe, d'une mauvaise mécanique. Il soustrait les jeunes
d'une mauvaise idée. Pourriez-vous au moins,
même si vous trouvez... Tiens! Vous trouvez que c'est une bonne idée,
alors soustrayons les jeunes de cette supposée bonne idée. Ça peut être
intéressant de soustraire les jeunes.
Alors, M. le
Président, moi, je ne renonce pas à convaincre mes collègues d'en face de
l'idée fondamentale qui est de
soustraire les jeunes de moins de 16 ans au projet de loi n° 59. Si les
adultes craignent un climat d'autocensure, imaginez les jeunes. Alors, M. le Président, pour le moment, je vais me
garder quelques minutes pour reprendre mon souffle et vous revenir
peut-être tout à l'heure.
Le Président (M. Ouellette) : Oui.
Mme la ministre.
Mme
Vallée : Moi, je vais prendre la parole parce qu'à un moment
donné il y a des limites à nous attribuer toutes sortes de prétentions, là. Je pense qu'on a clairement campé la position
dans le dépôt des amendements. L'objectif des amendements qui seront étudiés à
l'article 10 vise à référer, référer une personne au service approprié parce
qu'on est tout à fait conscients que
certaines personnes peuvent tenir un discours haineux, mais que ce discours
haineux là soit un cri d'alarme parce
que la personne est en détresse, parce que le jeune, l'adolescent vit une
période sombre; et c'est justement l'objectif.
Puis la collègue n'a pas à me faire la leçon sur l'importance du rôle du
directeur de la protection de la jeunesse dans notre société, croyez-moi. Et l'objectif vise non seulement à
référer les jeunes... Donc, peu importe l'âge, ce n'est pas vrai que
la...
Et la collègue n'écoute pas, là...
Mme
Maltais : Non,
j'écoute, je suis capable de faire deux affaires en même temps.
Le Président (M. Ouellette) : Le
président vous écoute, madame.
Mme Vallée :
Non, non, mais c'est parce qu'elle parle à son collègue pendant que je parle
puis après ça elle dit que je...
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre...
Mme Vallée :
Après ça, elle dit que je n'interviens pas puis je ne suis pas intéressée à lui
répondre. Alors là, je veux bien, là, mais, à un moment donné...
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre, moi, je suis tout ouïe à vos commentaires.
Mme Vallée :
Oui, je sais. Je sais, mais c'est parce que c'est la collègue, tout à l'heure,
qui disait que je ne voulais pas lui
parler. Alors, c'est triste, là, je lui parle puis elle ne m'écoute pas. Alors,
je me sens un petit peu mise de côté. Puis je comprends que le député de
Richelieu est intéressant, mais bon...
Des voix : ...
Le Président (M. Ouellette) :
Parlez-moi, Mme la ministre.
Mme Vallée : Ceci étant...
M. Rochon : Merci, Mme la ministre.
Mme Vallée : Un plaisir, cher
collègue!
Tout ça pour
dire que l'objectif de l'amendement qui a été déposé vise justement à permettre
de référer aux bonnes instances,
référer au directeur de la protection de la jeunesse, référer à l'établissement
scolaire. Parce qu'on a été à l'écoute, M. le Président, des propos de ceux et celles qui nous ont fait des
représentations et qui ont fait des représentations tout à fait légitimes, et je pense aux représentations
faites à propos des adultes qui peuvent, dans un moment de désorganisation,
lancer aussi un cri d'alarme par le biais de certains discours. Alors, c'est
pour ça. Donc, on réfère aux établissements scolaires parce que l'établissement
scolaire peut intervenir, mettre un terme...
Parce que
l'objectif de tout ça, là, ce que nous devons comprendre, l'objectif est que
cesse le discours de haine; c'est
d'agir de façon préventive. Contrairement à ce que notre collègue laisse
sous-entendre, ce n'est pas d'instaurer et d'alourdir inutilement le processus, c'est de pouvoir intervenir pour
faire cesser la diffusion d'un discours haineux, d'un discours incitant
à la violence, et l'intervention peut nécessiter simplement une intervention de
la protection de la jeunesse. Et je dirais
même plus, la direction de la protection de la jeunesse peut être saisie,
aussi, d'entrée de jeu. Donc, pas
nécessaire, comme le laisse entendre la collègue, d'attendre que la CDPDJ ait
procédé à une analyse. La direction de la protection de la jeunesse,
dans le cas des jeunes, peut intervenir dès qu'elle reçoit un signalement.
Donc, M. le
Président, il s'agit là d'amendements, comme il y a plusieurs autres
amendements qui ont été déposés le 19
novembre dernier, qui font suite aux consultations et qui démontrent que nous
avons été à l'écoute. Et c'est inexact de
prétendre que nous n'avons pas été à l'écoute. C'est inexact de prétendre qu'on
ne veut pas faire un bout de chemin puis
qu'on ne veut pas travailler. Mais ce qui est présenté actuellement va laisser
des écueils. De limiter à 16 ans, ça veut dire qu'un jeune de 15 ans pourrait tenir un discours de haine sans
intervention? Mais voyons, M. le Président! Ce jeune-là, le jeune de 15
ans, il peut aussi nécessiter une intervention.
Il y a
quelque chose que j'aimerais porter à l'attention de la collègue. Puis là je me
retiens, hein, M. le Président, parce
que j'entends plein de trucs qui se disent et puis je me retiens d'intervenir à
tout coup parce que je ne voudrais pas faire
de... m'autofilibuster, comme nous disons si bien. Mais j'aimerais simplement
porter à l'attention des collègues... des membres de la commission et
de... porter à l'attention de ceux et celles qui nous écoutent deux nouvelles.
Une, publiée
sur TVA Nouvelles, le 12 avril 2016... Et ça, je pense que ça vient
rejoindre peut-être une question qui
avait été soulevée, hier, par notre collègue de Bourget, qui voulait des
exemples de types de crimes haineux qui étaient commis à l'encontre des gens, qui pouvaient découler d'un certain
discours de haine, et, vous savez... «Statistique Canada a révélé que
1 295 crimes haineux ont été rapportés par les services de police au
Canada en 2014, [...]3,7 — crimes
haineux — par 100 000 habitants.» Puis les trois
principaux motifs de ces crimes haineux, c'est la race, l'origine ethnique,
la religion et... enfin, les quatre motifs.
On nous dit les trois motifs, mais les quatre motifs : race, origine
ethnique, religion, orientation
sexuelle. Et les crimes... la gravité des infractions, là, elle varie :
elle peut passer des méfaits à des voies de fait, des menaces, du
harcèlement criminel et... Et, bien souvent...
Une voix : ...
• (17 h 10) •
Mme Vallée :
J'entends dire : Ça ne prend pas de projet de loi. Mais le projet de loi
vient encadrer le discours, parce que
le discours de haine, il mène à la justification de crime de haine. Et c'est ça
que nous enseigne Whatcott. Vous savez,
quand je ramène à Whatcott, quand je ramène aux arrêts de la Cour suprême, ce
n'est pas pour faire mon avocate. Je
ne suis pas désincarnée de mon rôle de députée. C'est simplement pour expliquer...
Parce qu'on joue beaucoup... on dit beaucoup...
on a beaucoup laissé sous-entendre que l'objectif du projet de loi visait à
porter une atteinte frontale à la liberté d'expression, ce qui n'est le cas : c'est une atteinte à la liberté
d'expression justifiée dans une société libre et démocratique, parce que le discours de haine va venir, d'une
certaine façon, banaliser les actes de violence à l'égard de ceux et celles
qui sont visés par le discours de haine.
Il ne faut
pas attendre que l'acte soit posé avant d'agir, avant d'intervenir : c'est
un travail en amont, c'est un travail de
prévention, malgré ce que peuvent penser les collègues. Et il ne vise pas qu'un
seul et unique type de discours prononcé par un seul et unique type de personnage. Parce que les discours de
haine, ils sont inacceptables, peu importent ceux et celles qui les prononcent. Peu importent ceux et
celles qui les prononcent. Oui, si ça s'inscrit dans le cadre d'un prêche,
c'est inacceptable. Si ça s'inscrit dans le cadre d'un discours tenu par un
polémiste, c'est aussi inacceptable. Et là je regarde
la collègue de Montarville, parce
qu'elle parlait des polémistes qui
n'étaient pas les bienvenus à Montréal : ce n'est pas plus acceptable lorsque ça
vient d'un polémiste que lorsque le discours est tenu dans le cadre d'un
prêche.
Alors, vous
voyez, c'est des incitations qui amènent... ou des discours qui amènent à
banaliser la violence utilisée à
l'encontre de gens, c'est un problème. D'ailleurs, aujourd'hui, encore une fois sur le site de TVA...
Nouvelles — pardon,
désolée — c'est intéressant parce qu'on nous apprend que
l'Université Concordia veut freiner les discours haineux sur Internet et met en place un portail pédagogique.
Donc, c'est une autre forme d'outil, mais ce qui est quand même
préoccupant, c'est qu'on indique que
«les propos haineux sont en hausse sur les réseaux sociaux». Donc, les propos
haineux, il ne faut pas se fermer les yeux. Malheureusement, il y en a,
des propos haineux, et c'est une approche autre, face à ce type de propos là, et donc eux l'abordent sous un angle pédagogique.
Et d'ailleurs le projet
de loi va mettre en place également
des outils pédagogiques. La commission
des droits de la personne et de la jeunesse n'a pas qu'un rôle de... liberticide, comme le diraient
certains, elle a un rôle aussi dans le cadre de la pédagogie, un rôle
d'information, de diffusion d'information. Comme elle le fait actuellement dans le cas de la discrimination envers les
individus, on aura ce même rôle à l'égard des groupes, à l'égard du
discours haineux.
Et, vous voyez, dans le cadre de la nouvelle,
les chercheurs, eux, définissent le propos haineux comme suit, c'est un petit
peu différent de notre définition, mais quand même, vous verrez, ça se
rapproche : «Tout propos, geste, comportement,
écrit ou affichage susceptible d'inciter à déprécier ou à intimider une
personne ou un groupe, ou encore à faire preuve de violence à son égard.» Ça
rejoint, c'est... Même, je vous dirais que notre définition est encore
plus sévère, encore plus stricte que celle
qui est reprise par le groupe de Concordia. Et Sécurité publique Canada a
même accordé une subvention pour
l'encadrement. Et, vous voyez : «Le portail propose une foule d'outils
pédagogiques et multimédias destinés à dénoncer l'utilisation d'Internet
par [des] groupes haineux pour diffuser des messages de radicalisation et encourager l'extrémisme violent», parce que
le discours haineux, peu importe celui ou celle qui le prononce, le tient, peut
mener à un extrémisme violent. Et
l'extrémisme violent, il n'est pas que religieux. Il peut être religieux, mais
il n'est pas que religieux, et
l'extrémisme violent est inacceptable, peu importe son fondement, peu importe
le précepte, et c'est ce que nous retrouvons dans l'article 1 de notre définition.
Le Président (M. Ouellette) :
Commentaires? S'il n'y a pas de commentaire, on va passer au vote.
M. Rochon : ...M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : Vous
avez des commentaires, M. le député de Richelieu?
M. Rochon : Oui. La ministre nous parlait
des réseaux sociaux. Il y a Cyber-Aide qui a produit un mémoire, à cette commission, et qui dit : «S'il peut
être intéressant de se doter de moyens d'agir et d'intercepter les fautifs, il
nous semble cependant primordial de
travailler à la source.» Hein, tantôt, la ministre a dit que ce projet de loi
s'inscrivait aussi dans une démarche préventive, un esprit préventif.
Ce n'est pas
ce que trouve Cyber-Aide. «Notre expérience terrain tend, en effet — exprime l'organisme — à nous démontrer qu'il est au moins
aussi vital d'informer la population, de diffuser les connaissances dans les
milieux, notamment les écoles, afin que nos
jeunes soient outillés pour mieux comprendre ces questions et leur permettre
d'adopter, en amont, les bons
comportements. Autrement, la Loi concernant la prévention et la lutte contre
les discours haineux et les discours
incitant à la violence pourrait tout aussi bien s'appeler la loi concernant la
punition des discours haineux et des discours incitant à la violence.»
Hein,
Cyber-Aide, encore une fois, là : «...la Loi concernant la prévention et
la lutte contre les discours haineux et
les discours incitant à la violence pourrait tout aussi bien s'appeler la loi
concernant la punition des discours haineux et des discours incitant à
la violence.
«Et
c'est un peu le sentiment que nous avons à la lecture des différents articles
du projet de loi : l'aspect de la prévention
nous semble négligé et doit pourtant, à
notre avis, figurer au sommet des
moyens à se donner pour atteindre nos objectifs collectifs.»
Alors,
Cyber-Aide ne voit pas, là, la démarche préventive que voit la ministre
dans le projet de loi n° 59. «Désigner quelqu'un afin qu'il puisse
mener une enquête, pénaliser un établissement scolaire qui fera preuve de tolérance envers
des comportements jugés inacceptables nous
apparaissent comme des solutions qui s'imposent davantage en bout de piste,
à la fin de la chaîne des actions. Pour
éviter de transformer des directions d'école en hordes d'enquêteurs, il vaut
peut-être mieux accorder à la sensibilisation et [à] l'information l'importance
qu'ils méritent.»
Et
j'hésite à rajouter ce que vous appelez mon grain de sel, ce que vous avez
appelé tantôt mon grain de sel, là, au plaidoyer extrêmement convaincant, là,
qu'a fait ma collègue de Taschereau.
Je suis aussi stupéfait qu'elle, et
sans doute que la députée de
Montarville, que la ministre ne veuille pas annoncer, dès l'article
2 de ce projet de loi, qu'il ne
s'applique pas, ce projet de loi là, aux enfants du Québec, aux jeunes de 15
ans et moins.
Elle
est consciente... elle en parle, elle dit que, plus loin dans le projet de loi,
apparaissent, là, des explications. Elle
est au courant qu'il existe les directions de protection de la jeunesse, que
les commissions scolaires sont sensibles à toutes ces questions-là également : qu'il existe des mécanismes,
dans les commissions scolaires, dans nos écoles, pour lutter contre... pour gérer cette question, là, de
discours haineux pouvant être tenus par nos enfants. Il n'est pas besoin de
rajouter une épaisseur de plaintes à la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse, qui sera bien suffisamment inondée de
plaintes de partout si ce projet de loi est adopté. Alors, voilà, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme Vallée :
Simplement un petit élément que tout le monde semble aussi oublier dans tout
ça, c'est que la commission des droits de la
personne et de la jeunesse, la CDPDJ, comporte un volet jeunesse. Alors, vous
pouvez être assuré, M. le Président,
de leur sensibilité à l'égard des droits de la jeunesse. La CDPDJ a comme
mandat de veiller à assurer le
respect des droits des jeunes. Alors, elle a ce mandat-là. Ce n'est pas un
organisme dangereux, vous savez, c'est un organisme qu'on peut apprendre
à aimer et apprécier, il s'agit de bien le connaître.
Le Président (M.
Ouellette) : Bon, je vais réserver mes commentaires. Mme la députée de
Taschereau.
• (17 h 20) •
Mme
Maltais : M. le Président, on peut bien faire des allusions
fines, on n'en est pas là-dedans. On est dans une chose toute simple : Pourquoi — et là-dessus on n'a pas de réponse — mettre les moins de 16 ans sous la coupe de
cette loi? Quelle est la nécessité
qu'il y a, au Québec, de mettre les moins de 16 ans sous la coupe de cette loi?
On n'est pas dans le processus de
plaintes de la CDPDJ, on est dans un nouveau processus qui mène à de la
pénalisation, des peines. Nous, on
considère pénal... La ministre aura beau dire ce qu'elle voudra, le seul
endroit, je pense, à peu près, au Québec, où on donne des amendes, c'est dans le pénal. Alors, pourquoi, tout à coup,
vouloir mettre les moins de 16 ans sous la coupe de cette loi? C'est
inutile.
C'est
inutile. Cette loi-là, ce n'est pas de la prévention. Cette loi-là ne fait pas
de la prévention. Cette loi-là ne fait
pas d'intervention sociale. Cette loi-là ne fait pas le travail auprès des
jeunes qui est nécessaire pour les déradicaliser. Pour le travail en
amont, cette loi-là n'est pas là-dedans. Si la ministre croit véritablement que
les jeunes doivent être réinsérés,
approchés, qu'on doit envoyer des intervenants, et tout, bien, que la ministre
accepte notre amendement. Les jeunes
de moins de 16 ans ne devraient pas être sous la coupe de cette loi. C'est fondamental pour nous. C'est vraiment fondamental.
On a essayé moins de 18 ans : pas possible. Bien, au moins, moins de 16
ans, il me semble que c'est une évidence, c'est le gros bon sens.
On
a déjà, dans les commissions... Écoutez, relisez les mémoires. Est-ce qu'on va dire que
la DPJ ne connaît pas la CDPDJ?
Est-ce qu'on va dire que la Fédération des commissions scolaires ne connaît pas
la CDPDJ? Est-ce qu'on va dire que la
fédération de l'enseignement privé ne connaît pas la CDPDJ ou ne l'aime pas?
Bien non. Mais pourtant ils pensent, eux autres aussi, que c'est une
lourdeur administrative inutile.
Cyber-Aide,
là, je les connais, cette organisation-là, ils font un magnifique travail auprès des
jeunes. Eux autres, justement, sont en prévention, c'est leur spécialité. Et
c'est justement d'apprendre aux jeunes à travailler, sur les
médias sociaux, de façon respectueuse. Faire du repérage, c'est ça, leur
travail. S'il y a un expert, moi, en lequel je pense qu'il a une compétence pour dire comment les jeunes... pour faire de la pédagogie
auprès des jeunes sur les médias sociaux, c'est Cyber-Aide. Bien,
Cyber-Aide dit que ce n'est pas une loi sur la prévention, c'est une loi sur la
punition. C'est fondamental. Ce n'est pas n'importe quoi, là, c'est une loi sur
la punition.
Alors,
on demande tout simplement que les moins de 16 ans ne soient pas sous la
coupe de cette loi. Cette loi est déjà
une errance. Alors, pourquoi ils ne sont pas... On va parler tout à l'heure de crimes, de méfaits, de menaces, de violence. C'est quoi... le
Code criminel?
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la députée de Taschereau.
S'il n'y a pas d'autre intervention, je vais mettre l'amendement de M.
le député de Richelieu
aux voix. Le vote par appel nominal est demandé. M. le secrétaire.
Le Secrétaire :
M. Rochon (Richelieu)?
M. Rochon :
Pour.
Le Secrétaire : Mme Maltais
(Taschereau)?
Mme
Maltais :
Pour.
Le Secrétaire : Mme Roy
(Montarville)?
Mme Roy
(Montarville) :
Pour.
Le Secrétaire : Mme Vallée
(Gatineau)?
Mme Vallée : Contre.
Le Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
Le Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
Le Secrétaire : M. Iracà (Papineau)?
M. Iracà : Contre.
Le Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
Le Secrétaire : M. Ouellette
(Chomedey)?
Le
Président (M. Ouellette) :
Je m'abstiens. Donc, l'amendement proposé par M. le député de Richelieu
est rejeté. M. le député de Richelieu, à vous la parole. On est toujours
sur le premier alinéa de l'article 2, à moins que vous me demandiez d'aller au
deuxième alinéa. Je pense que ce n'est pas ça que vous allez me demander.
M.
Rochon : Non. Écoutez,
M. le Président, je suis plutôt désespéré de ce qui se passe ici.
Aïe! J'ai eu un moment...
Une voix : ...
M.
Rochon : Je ne le dirai pas?
Parfait! Je ne le dirai pas. Je croyais qu'un de mes collègues,
dont je ne m'attendais pas d'emblée à ce qu'il appuie notre proposition,
allait le faire.
Sérieusement,
M. le Président, nous ne cesserons pas de réclamer que ce projet de loi encadre mieux sa portée. Notre
croisade, elle va se poursuivre tant que la ministre refusera de
considérer tous les témoignages entendus, par cette commission, à
l'occasion des consultations, et que nous reprenons abondamment dans l'étude article
par article du projet de loi n° 59. La liberté d'expression, c'est une valeur trop
importante pour que nous décidions de laisser faire le gouvernement,
pour que nous baissions pavillon. On ne le fera pas. On ne le fera pas, M. le
Président.
Et, comme
ma collègue de Taschereau, j'émets le voeu que d'autres autorités de ce gouvernement entendent — faute
de le voir — ce
qui se passe ici, et décident, là, de changer d'attitude. Il est urgent que ça
change. Beaucoup de gens, beaucoup de gens, au Québec, sont inquiets. Tantôt,
je disais à la blague que je croyais que j'allais assister à toute une surprise, c'est-à-dire un collègue du parti ministériel appuyant ma proposition. C'était à la
blague que je disais ça. Mais,
en même temps, je m'étonne que ses collègues
d'en face, pour qui la liberté d'expression devrait être une valeur absolue,
hein, non négociable, acceptent de tourner
un peu les coins ronds, acceptent de trouver que, oui, on peut peut-être, dans
certains cas, l'encadrer, la liberté d'expression. J'ai beaucoup de difficultés
à comprendre, beaucoup de difficultés à comprendre.
Puis il faut constamment, dans l'étude de ce deuxième article du projet de loi,
se rappeler ce que dit le premier, le premier, qui ratisse extrêmement
large — c'est
ça, le drame, là — dit...
La fameuse
définition, là, on a tenté, par tous les moyens, de dissuader la ministre de
ratisser aussi large, mais un
discours haineux, de l'avis d'une personne raisonnable, est celui qui expose un
groupe au rejet, à la détestation ou au dénigrement, notamment pour que ce groupe soit perçu comme étant
illégitime, dangereux ou ignoble, c'est tellement large, M. le Président, tellement large. Imaginez
le nombre de plaintes; encore une fois, imaginez le nombre de plaintes qui va atterrir à la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse de la part de groupes qui se sentiront
rejetés, détestés, dénigrés, parfois tout à
fait injustement. Alors, on va me dire : Ah! oui, il va y avoir une
enquête et puis on ne retiendra pas
toutes les plaintes, on retirera les plaintes fondées. Oui, mais il va toujours
bien y avoir une enquête, il va toujours bien y avoir un bureau pour
examiner ces plaintes-là, il sera débordé, débordé.
Comment
fermer les yeux sur ce qui va se passer au Québec? Comment fermer les yeux sur
le fait que maintenant les Québécoises et les Québécois vont devoir constamment
se demander si leur propos ne mènera pas au dépôt d'une plainte devant la Commission des droits de la personne et des droits de
la jeunesse? La ministre disait, hier, voulant imager ce qu'elle vit
ici, qu'elle avait l'impression que nous nous adonnions au jeu du serpent et de
l'échelle, et je lui faisais remarquer que nous n'avons pas le choix : nous n'avons pas le choix
parce qu'ici ce sont des principes fondamentaux qui sont en jeu.
Nous
n'arrêterons pas de nous battre contre ce projet de loi que nous jugeons
liberticide. On ne crie pas des noms à
la ministre, là, quand on dit ça, là. On le dit en termes... nous employons le
seul adjectif capable de qualifier la portée de ce projet de loi, il est liberticide, il va brimer. Il va brimer la
liberté d'expression, c'est quelque chose de très, très, très grave et qu'aucun homme et femme politique ne
devrait pouvoir accepter, on devrait être les derniers à souscrire à une
affaire comme celle-là. Nous bénéficions, nous, justement, ici, de cette
fantastique liberté d'expression.
Hein, je
dis... Mme Latour, l'ancienne bâtonnière du Québec, qui disait : La plus
honnie et la plus célébrée des libertés
au Québec. Évidemment, nous ne sommes pas toujours réjouis de ce que nous
entendons, hein, de ce que les gens peuvent
dire et exprimer parce qu'ils bénéficient ici de la liberté d'expression, mais
nous acceptons que ce soit le cas.
Alors, encore
une fois, M. le Président, moi, je suis bien, bien, bien déçu et stupéfait de
ce qui se passe ici. J'ai envie de
redire, comme ma collègue de Montarville, que la ministre elle-même souhaitait
voir poindre un consensus. Alors,
moi, j'en vois un, un consensus assez large,
au Québec. Je vois l'opposition
officielle et la deuxième opposition
sur la même longueur d'onde à peu près,
à peu près sur la même longueur d'onde, à quelques nuances
près, mais ça, c'est correct, c'est
normal. Maintenant, il me semble que là c'est la ministre
qui fait bande à part et qui empêche ce consensus, là, de voir le jour.
Alors, voilà, M. le Président.
• (17 h 30) •
Le
Président (M. Merlini) :
Merci, M. le député de Richelieu. Alors, il
n'y a pas d'autre intervention sur...
Je crois qu'il ne reste plus de
temps, M. le secrétaire. Bien, il vous restait deux minutes, M. le député de Richelieu. Alors, comme vous avez terminé, je vais maintenant
procéder à la mise aux voix du...
Une voix : ...
Le Président (M. Merlini) :
Oui, oui.
Une voix : ...
Le
Président (M. Merlini) :
Ah! O.K. Merci de cette précision, M. le secrétaire. Nous allons maintenant passer à l'étude
du deuxième alinéa. Alors, pour le deuxième alinéa, est-ce que
nous avons des interventions? Oui,
Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais : M.
le Président, simplement, j'aimerais beaucoup qu'on m'explique la portée de cet
alinéa. D'ailleurs, c'est Julius Grey qui avait un commentaire assez lapidaire — je
vais le citer — dans
son mémoire : «La deuxième ligne de l'article 2 — "Il
est également interdit d'agir de manière à ce que de tels actes soient
posés" — est
incompréhensible.» Alors, je me dis que, si un juriste comme Julius Grey dit
ça, on peut peut-être avoir quelques explications pour essayer de mieux
comprendre.
Le Président (M. Merlini) : Mme
la ministre.
Mme Vallée : M. le
Président, je pense que le texte est quand même
relativement clair. Agir de manière à ce que de tels actes soient posés, c'est donc d'agir, de
permettre, d'autoriser la tenue de propos haineux. Donc, sachant très bien que
l'on permet la diffusion d'un discours haineux, participer à la diffusion peut
engendrer notre responsabilité également.
Nous avons eu
des échanges, au cours des dernières semaines, concernant notamment des avis
qui pourraient être donnés préalablement pour retirer des propos haineux
sur un site. Quelqu'un qui, le sachant et étant au fait de la diffusion de
propos haineux, les maintiendrait sur le site pourrait engager sa
responsabilité.
Donc, agir de
manière à ce que des actes soient posés, c'est de les permettre, c'est de les
faciliter, d'une certaine façon, puis
c'est de les tolérer, les accepter. Donc, un propriétaire de salle informé
qu'un discours haineux serait tenu en sa salle et qui accepterait que le
discours soit tenu, bien, agirait de manière à ce que de tels actes soient
posés.
Puis ça,
il y a un autre élément, je pense, qu'il est important de mentionner.
L'utilisation du terme «agir de manière à», c'est une expression que l'on retrouve dans le corpus législatif
québécois. On le retrouve, par exemple, dans le Code des professions,
que l'on retrouve aux articles 30.1, 32, 37.1; on le retrouve également
dans la Loi sur le Barreau.
Alors, pourquoi on a intégré ce concept-là à l'intérieur du projet de loi? Bien, c'était vraiment pour aller rejoindre
la personne qui, sans être celui ou celle
qui tient le discours haineux, va mettre en oeuvre ce qu'il faut, ce qui permet
que le discours soit tenu ou soit diffusé.
On a parlé tout à l'heure de la personne, du
propriétaire de la salle ou de la personne qui met un local à la disposition d'un prédicateur ou d'un polémiste, mais il pourrait y avoir aussi
quelqu'un qui finance des activités, donc qui financerait un événement ou la venue d'un polémiste. Ça pourrait être ce
type d'exemple là, qui ne sont pas des exemples exhaustifs, mais, pour ce qui est de l'utilisation du concept «agir de
manière à», c'est un concept, c'est une expression qui se retrouve dans
un certain nombre de dispositions législatives.
Mme Maltais : M. le
Président, est-ce qu'on peut avoir quand même...
Je comprends qu'«agir de manière à»... mais quelle est la portée de... Est-ce que ça veut
dire qu'il faut qu'il y ait une intention? Est-ce que l'omission en fait
partie? Tu sais, mettons qu'il y a
omission, puis on ne le sait pas, mais qu'on s'est trouvé à agir... on loue un
local... Le collège Maisonneuve, Adil Charkaoui va là. La direction du
cégep a permis la location, est-ce qu'ils ont «agi de manière à»?
Le
Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme Vallée : M. le
Président, ici, aujourd'hui, je pense que l'important, c'est d'expliquer le terme. Moi, je ne suis pas ici pour donner des avis sur des
situations précises, ce n'est pas l'objectif. Mais «agir de manière à», il y a
une chose qu'on doit comprendre, ce
n'est pas passif, c'est jouer un rôle actif. C'est aussi, puis je reviendrais,
c'est aussi une expression que l'on
retrouve aussi dans bon nombre de législations qui sont relatives aux droits et
libertés de la personne dans d'autres
provinces et territoires canadiens. Donc, c'est un élargissement d'une
interdiction que l'on retrouve à l'article 2.
Et,
pour ce qui est de la question de la collègue, vous comprendrez, M. le Président, que c'est justement le rôle des
tribunaux d'interpréter toute la portée. Les tribunaux interprètent la portée
des termes, mais nous, ce concept-là, ce n'est pas un concept nouveau,
c'est un concept que l'on retrouve dans la législation québécoise et dans la
législation relative aux droits de la personne.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
M. le Président, c'est parce qu'il faudrait au moins savoir la portée de ce
qu'on écrit. Je comprends que c'est
aux tribunaux à interpréter, mais le premier débat, la première discussion est
ici. D'ailleurs, parfois, les tribunaux s'y réfèrent, aux galées. Alors,
ma question est simple, je veux connaître la portée de la loi. Qu'est-ce qui
arrive?
J'ai
donné un exemple : le collège a loué, a appris qu'Adil Charkaoui était
dans son... chose, l'a appris ensuite, est-ce
qu'il a agi de manière à ce que de tels actes soient posés? Je pense que je
mérite une réponse. Je pense que c'est une
bonne question et que normalement, quand on a une loi... Le travail de
législation, c'est qu'on donne des exemples, puis on vérifie si ça s'applique ou pas, puis ça nous permet de voir si
la loi a une bonne portée, une trop grande portée, trop petite... c'est normal, là. Je n'ai jamais vu
ça, me faire dire : C'est les tribunaux qui interpréteront, qui nous
diront si on a raison ou pas.
Mme Vallée :
Dans le cas...
Mme Maltais :
Je vais terminer, si vous le permettez. Je comprends que vous avez hâte de me
répondre, mais je vais juste...
j'avais une petite respiration d'une seconde. Simplement, je répète la
question : Est-ce que ces gens-là vont être interpelés? Dans
l'alinéa 2, est-ce qu'ils sont intégrés? Est-ce qu'ils sont là? Voilà.
Le Président
(M. Ouellette) : Merci. La présidence a manqué le call sur
celle-là. Mme la ministre.
• (17 h 40) •
Mme Vallée :
M. le Président, il y a des cas actuellement qui font l'objet de différents
dossiers d'enquête, des dossiers judiciarisés, alors je pense que la
collègue nous amène dans un terrain qui peut être particulier. Par contre, quelqu'un qui met à la disposition une salle,
sachant... en toute connaissance de cause... Parce que l'important, c'est de
savoir que le discours est de faciliter,
finalement, la tenue du discours de haine. Ça, c'est une chose. Parce que,
lorsque l'on mentionne «agir de
manière à», il y a un élément actif, il y a un élément participatif, alors il
faut être au fait de la tenue du discours.
Il
y a un élément qui est important. Parce que la collègue réfère aux établissements d'enseignement. Et nous avons déposé des amendements,
qui seront discutés à l'article 30, pour permettre à des établissements d'enseignement, comme
les cégeps, notamment — et c'est suite à des représentations
formulées en commission parlementaire par la Fédération des cégeps — de mettre un terme, de briser les baux, de
casser des baux, de casser des contrats, lorsqu'ils apprennent que ces baux-là, ces contrats-là sont utilisés à des
fins qui pourraient venir faire craindre pour la sécurité psychologique et
physique des élèves, et la possibilité de transmettre un avis de résiliation.
Donc,
évidemment, on va donner des outils. L'objectif est de donner des outils. Parce
qu'on est très conscients qu'il est
possible, à un certain moment donné, de louer un local sans connaître
l'utilisation du local. Une fois que l'utilisation du local est connue et qu'elle contrevient aux
principes mêmes, aux règles mêmes du collège, qu'elle contrevient entre autres à certaines dispositions, bien, il a été
demandé par la Fédération des cégeps, par les établissements scolaires de
pouvoir intervenir, de pouvoir mettre
un terme à ce contrat-là, et c'est ce que nous prévoyons. Nous en discuterons
éventuellement à l'article 30.
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
M. le Président, je pose une question sur l'article 2; elle me répond par
l'article 30, qui n'est pas sur les discours haineux.
L'article 30 est sur autre chose.
La question que j'ai,
c'est simple — là,
il commence à y avoir des éléments de réponse : Faciliter, mettons,
intentionnellement la tenue serait l'interprétation que je pourrais avoir
d'«agir de manière à»?
Une voix :
...
Mme Maltais :
C'était une question.
Mme Vallée :
C'est une question?
Mme Maltais :
Oui.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la ministre.
Mme Vallée :
Ce n'était pas clair que c'était une question. Je pensais que la collègue
réfléchissait à haute voix.
Je pense
qu'«agir de manière à», il y a un élément d'action, de proaction, selon qu'il
ne s'agit pas d'être passif. Il y a
un élément de connaissance aussi, c'est-à-dire que l'on encourage, on permet,
on tolère, on accepte, on provoque. Alors, c'est ce qui est prévu dans
«agir de manière à».
Mme Maltais :
Donc, la loi a une portée sur le scripteur, l'orateur, le diffuseur, les médias
sociaux et même les locateurs.
Mme Vallée :
Ceux qui permettent... Le locateur qui n'est pas au fait que le local loué sera
utilisé à ces fins-là n'agit pas «de manière à», mais le locateur qui
est au fait, qui sait que le local sera loué à un polémiste, par exemple, sachant qu'une conférence ayant potentiellement...
ou ayant un fond de discours haineux, qui accepte, qui met à la disposition la salle sera touché par cet élément
de l'article 2... Le diffuseur qui diffuse sachant qu'il s'agit là d'un
discours haineux.
Alors, il y a
toute la question... et on en a parlé un peu plus tôt. Par exemple, on a parlé,
il y a deux semaines, du média en
ligne qui récoltait les commentaires des internautes. On peut présumer qu'on
n'a pas toujours un monitoring à la seconde près, mais, une fois informé
qu'un commentaire est émis... Et d'ailleurs, on le voit, les dispositions de la
législation sont aussi à cet effet-là, parce
que, s'il s'agit de propos discriminatoires, il y a aussi cet avis qui est
transmis.
Mais tolérer,
contribuer, laisser en ligne un commentaire de haine pourrait être considéré
comme agir, hein? C'est lorsqu'on
sait qu'il pose problème ou lorsqu'on encourage, lorsqu'on connaît le contenu
du discours et qu'on le propage, qu'on le diffuse, qu'on l'encourage... c'est
cet élément d'action qui suggère une connaissance, évidemment, de la teneur
du discours, une forme d'endossement de par la contribution active.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais : Le cas
Mike Ward, les diffuseurs, les salles de spectacle ont...
Mme Vallée : ...
Mme Maltais : Je
ne parle pas de la cause.
Mme Vallée : Bien, je
pense que c'est devant les tribunaux, M. le Président. Les dossiers qui sont
devant les tribunaux, là, il n'est pas question...
Mme Maltais : O.K. Un
humoriste...
Mme Vallée :
...il n'est pas question
que l'on embarque dans les dossiers qui sont actuellement pendants devant
les tribunaux.
Mme Maltais : Très
bien, M. le Président. Je vais poser
ma question quand
même. Je pense que j'ai encore le
droit de poser des questions ici.
Mme Vallée : Ah! vous
avez le droit, mais moi, je n'embarquerai pas dans les dossiers qui sont actuellement
judiciarisés.
Le Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Taschereau.
Mme Maltais :
Merci, M. le Président. Je vais poser ma question parce qu'elle ne touche pas
le dossier, elle ne va pas sur
la cause elle-même.
Un humoriste
ou une humoriste, quel qu'il soit, loue des salles, fait ses spectacles. Ses
propos sont considérés comme haineux
après le fait. Est-ce que, d'après ce que je comprends de ce que la ministre
a dit, le diffuseur est sous la coupe de l'alinéa 2? Est-ce que je
me trompe?
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la ministre.
Mme Vallée : Ici, il n'est pas question d'un humoriste, il
est question de tiers qui encouragent par le financement, par la connaissance du discours, évidemment, la tenue d'un événement.
Encore faut-il que le tiers soit aussi au fait du contenu du discours. Et on parle d'un discours de
haine ici. Discours de haine, discours haineux, c'est fort, c'est très fort.
Et chaque cas, évidemment, sera un cas d'espèce.
Puis on a
fait référence... Lors de l'article 1, on a tenté d'amener... Tout dépendra des
propos, parce que les propos seront interprétés en fonction
de l'article 1, de la définition de l'article 1. La satire, ce n'est
pas un discours de haine.
• (17 h 50) •
Le Président (M. Ouellette) : Mme
la députée de Taschereau.
Mme Maltais : M. le
Président, il y a
des humoristes qui ont été poursuivis en
vertu du code criminel, je pense, en
France, mais en vertu d'un code criminel, avec preuves à l'appui, puis qui ont
été condamnés. C'est une chose. Mais moi,
je lis l'alinéa 2, là, et je pense
qu'on se dirige vers exactement un climat d'autocensure. Parce que
vous avez à juger d'abord, comme locateur, comme diffuseur, du caractère haineux d'un discours avant de louer
votre salle. C'est ça, le problème,
là. Là, on est dans l'univers de l'autocensure. J'ai l'impression de ça. C'est
comme ça que je lis l'alinéa 2,
moi. Alors, je me demande si on n'est pas dans l'univers de
l'autocensure dans lequel on craint de tomber.
(Consultation)
Le Président
(M. Ouellette) : ...les gens qui nous écoutent... on réfléchit en
silence. Mme la ministre.
Mme Vallée : Je veux juste ajouter. Simplement,
«agir de façon à», c'est être en action. Contribuer à ce que puisse être tenu un discours de haine, c'est une forme de
participation à la diffusion. Mais, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, encore faut-il être au fait du contexte et du discours, être au fait
que, par exemple, pour la location d'une salle, que ce soit une salle communautaire,
une salle de spectacle, peu importe, encore faut-il savoir que le locataire
loue la salle pour pouvoir diffuser des discours de haine. Alors, il ne
faut pas, du coup, généraliser. Chaque cas sera analysé en fonction des
circonstances et des faits propres à la situation.
Le Président
(M. Ouellette) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Chaque cas, la ministre l'a dit, là, avec beaucoup de justesse, sera
analysé. Parce qu'effectivement elle,
elle fait la différence entre discours haineux et satire, mais tous les groupes
de personnes qui écoutent un humoriste, quel qu'il soit, rigoler à leur
sujet, pourraient estimer que cet humoriste tient un discours qui les expose au
rejet, à la détestation ou au dénigrement et que celui qui lui a donné une
scène pour se produire a joué un rôle actif pour que ce discours soit tenu. Et
ça montre, là, toute l'absurdité de ce projet de loi et ce à quoi il ouvre la
porte.
Le Président (M. Ouellette) : Avez-vous une question pour la ministre? C'était
un commentaire, M. le député de Richelieu?
M. Rochon : La ministre a le choix d'y voir une réflexion ou de sentir qu'il y
avait une question. C'est une réflexion à laquelle j'aurais aimé
l'entendre réagir, mais...
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme Vallée :
Je pense avoir réagi suffisamment. Je pense qu'on a expliqué le contexte dans
lequel le terme «agir de manière à»
s'inscrit. Et effectivement il y aura analyse, mais je ne veux pas revenir sur
toute la question de la définition. Je sais que mon collègue a relu,
tout à l'heure, la définition, je veux juste lui rappeler qu'il y a contribué.
Mme Maltais :
Hein?
Le Président
(M. Ouellette) : Bien, j'étais justement...
Mme Vallée :
Bien oui. Ce n'est pas parce qu'on vote contre qu'on n'a pas déposé
d'amendement puis qu'on n'a pas
participé aux échanges. Il faut peut-être le reconnaître, ça aussi, hein? Il y
a des suggestions, il y a des échanges qui
ont été faits pour bonifier l'article 1. On a voté contre, mais, au
départ, on a quand même fait des suggestions, alors il faut le reconnaître, hein? Je pense qu'autour
de la table, ici, on le sait que la collègue a participé, que les collègues ont
participé activement. Et, dans
l'article 1, on retrouve un petit peu de la députée de Taschereau, un
petit peu du député de Richelieu, un
petit peu de la députée de Montarville, puis un petit peu de tout le monde,
finalement. C'est un beau projet de collaboration.
Le Président
(M. Ouellette) : Un petit peu du député...
Mme Maltais :
Wow! Je n'en reviens pas, là!
Le Président
(M. Ouellette) : Woup, woup, woup!
Mme Maltais :
Là, si on veut la...
Mme Roy
(Montarville) : Il y a un petit peu de nous autres là-dedans...
Mme Maltais :
Non. On ne le veut pas, l'article 1. On n'a pas...
Mme Vallée :
Vous avez déposé des amendements...
Mme Maltais :
Écoutez bien, là, M. le Président, pouvez-vous ramener la ministre à l'ordre,
un petit peu, là? On essaie de parler, nous autres aussi.
Le Président (M. Ouellette) : J'étais justement pour vous dire que Mme la
députée de Montarville voulait faire un commentaire sur le deuxième
alinéa.
Mme Roy
(Montarville) : Oui, mais elle va en faire sur les propos
qu'elle vient d'entendre, là. Moi, ça m'a fait penser, ce que vient de dire la ministre, à une annonce à la télé,
là : «Il y a un petit peu de nous autres là-dedans.» Je veux bien, mais des petits bouts de tout le monde, ça
ne fait pas nécessairement un tout cohérent. Et l'angle précis que l'on voulait
n'est jamais apparu. Je pense que c'est important de le souligner, là. Et
j'avais une question...
Mme Vallée :
...
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre, un instant! Un instant!
Mme Vallée :
...
Le Président
(M. Ouellette) : Un instant, Mme la ministre! Mme la députée de
Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Alors, je n'ai pas dit que ça ne sert à rien
d'écouter des amendements; je dis que le tout qui en résulte, de ces petits bouts qu'on a mis ensemble, n'arrive pas à la conclusion, à l'objectif
que nous nous étions fixé. Il y a une différence. Et je n'ai pas dit...
Et d'ailleurs Mme la ministre parlait de mon entrevue à l'émission de
M. Dutrizac hier...
Le Président (M. Ouellette) : Oui, mais on ne savait pas que c'était à
Dutrizac, mais là on vient de l'apprendre. Mais merci.
Mme Roy
(Montarville) :
Bien, vous le savez, 98,5. C'est sur mon site, vous pouvez l'écouter.
Le Président
(M. Ouellette) : Oui, oui.
Mme Roy
(Montarville) : Il y a
une chose qu'elle omet de dire, cependant, c'est que j'ai mentionné sa participation.
On
a soumis des amendements à d'autres occasions, parce que
j'en ai fait plusieurs. Et j'ai dit : La ministre
comprend très bien, mais je ne comprends pas pourquoi
elle ne va pas au bout de la réflexion que la société québécoise lui demande.
Parce qu'elle le sait que le problème, c'est l'intégrisme religieux,
l'islamisme radical, et on ne va pas là. Et j'ai rendu à César ce qui appartient à César, j'ai dit qu'elle a fait du travail,
mais il y a quelque
chose qui fait qu'elle ne va pas plus
loin, qu'elle ne franchit pas le pas que nous souhaitons tous, collectivement,
qu'elle franchisse.
Alors, un
petit peu de ci, puis un petit peu de ça, puis un petit peu de la députée
de Taschereau, puis un petit peu de la députée de Montarville, puis un
petit peu du député de...
mettez-en, là. Bien, on arrive avec une courtepointe rapiécée puis on
n'a pas, justement, une belle pièce législative. Alors, c'est ce que je vous
soumettais.
Mais, moi, j'avais
une question à poser à la ministre sur...
Le Président
(M. Ouellette) : Le deuxième alinéa.
Mme Roy
(Montarville) :
Oui, c'était ce que j'allais faire, tout simplement.
Le Président
(M. Ouellette) : C'est ce que je souhaitais de votre part, Mme la
députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Oui, mais je n'ai pas pu laisser passer
cette affirmation, là, parce que... Lorsqu'on dit effectivement qu'elle a travaillé, mais... On l'a
dit, elle a travaillé, mais le résultat n'est pas le résultat auquel la
population s'attend.
Ma
question était la suivante. Elle nous explique qu'il est également interdit
d'agir de manière à ce que de tels actes
soient posés. Elle nous dit : C'est faciliter, financer, donc c'est une
forme de participation. Et ma question était bien simple : Est-ce que ça s'apparente ici à ce
qu'on appelle de la complicité en droit criminel, dans la mesure où il y a une
connaissance de l'acte et qu'on y consent,
on y participe? Est-ce que c'est là que vous vouliez aller avec cette
formulation, tout simplement?
Le Président
(M. Ouellette) : Mme la ministre.
Mme Vallée :
On n'est pas ici dans les notions de droit criminel, on est plus dans une notion
de responsabilité... je vous dirais
de responsabilité partagée. C'est-à-dire la responsabilité du fait, elle est
alors partagée par celui ou celle qui
tient le discours haineux, le discours de haine, mais aussi par celui ou celle
qui le rend possible de par sa participation. Alors, c'est au niveau plutôt de la responsabilité que des notions
criminelles, puisqu'on est dans les dossiers de nature civile.
Mais je
regardais... puis j'essaie de voir où je peux trouver les propos de la
collègue, parce que, moi, ce que je vois
à l'article 2, donc... à la page 2 de son transcript : «Ils
finissent par pouvoir nous pousser dans le fond de la gorge tout
ce qu'ils veulent.» C'est ça qui a été dit hier. Alors, c'est dommage, parce
qu'honnêtement, M. le Président, moi, quand
j'ai entamé ces travaux-là, j'ai pris acte de certains commentaires qui avaient
été formulés, j'ai fait le travail avec les équipes pour les intégrer dans la mesure du possible à l'intérieur
du projet de loi, tout en respectant évidemment et en assurant que le texte ne porte pas atteinte aux
droits et libertés, parce qu'on est justement dans un texte qui vise à protéger
les droits et libertés de la personne, malgré ce qu'on peut en dire.
Et, oui, il y
a un petit peu de tout le monde là-dedans. Peut-être que la collègue voit ça
comme étant une référence à une
publicité, mais mon objectif était vraiment qu'il y ait un petit peu de chacun
de nous là-dedans, en faire une pièce législative qui aurait tenu compte
et qui tiendrait compte des suggestions formulées par les partis d'opposition,
des suggestions formulées par ceux et celles
qui se sont présentés en commission parlementaire et qui ont mis sur la table
des propositions visant à bonifier un
texte de loi. C'était vraiment l'objectif et c'est dans cet esprit-là que j'ai
entamé les travaux.
Mais ce qui m'a quelque peu... ce qui a un peu,
je dirais, dessoufflé la baloune de mon enthousiasme, c'est de constater qu'on dépose des amendements, qu'on
travaille les amendements, qu'on accepte les amendements et qu'ultimement
on vote contre les propres amendements. Et là je fais référence à un amendement déposé par
le collègue, notre collègue ici — dont j'oublie le...
• (18 heures) •
Une voix : Laprairie.
Mme Vallée :
...Laprairie, désolée! j'étais pour l'attribuer à une autre circonscription
d'une autre époque — qui a
déposé un amendement, mais amendement qui faisait suite à des échanges quand
même qui s'étaient déroulés sur pratiquement
toute une séance de l'après-midi, même sur plus de deux jours de séance en
commission parlementaire, et qui ultimement ont été rejetés. Alors,
c'est dommage. C'est tout simplement ça.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la ministre. Merci, les collègues, pour votre collaboration.
La commission
ajourne ses travaux à demain, le jeudi 12 mai 2016, après les affaires
courantes, vers 11 heures, où elle poursuivra l'étude détaillée du
projet de loi n° 64.
(Fin de la séance à 18 h 1)