(Dix-neuf heures trente-sept
minutes)
Le Président (M. Ouellette) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer
que vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas
perturber nos travaux.
La commission
est réunie afin de poursuivre l'étude
détaillée du projet de loi n° 59, Loi
édictant la Loi concernant la
prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Tremblay (Chauveau) remplace M.
Rousselle (Vimont); Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve)
remplace Mme Hivon (Joliette); et M.
Rochon (Richelieu) remplace M. Leclair (Beauharnois).
Étude détaillée (suite)
Le Président (M. Ouellette) : Merci.
Je veux souhaiter la bienvenue particulièrement à Mme la députée de Chauveau, qui se joint aux travaux de notre commission. Et, quand vous nous avez laissés, nous étions à l'article 1 de l'article 1, et vous revenez, nous sommes encore à l'article 1
de l'article 1, mais avec un nouveau sous-amendement.
Effectivement, nous avions entrepris
l'étude du sous-amendement de M. le député de La Prairie à l'amendement
de la ministre à l'article 1 édicté par
l'article 1 du projet de loi. Quand on avait ajourné nos travaux, Mme la
députée de Taschereau, vous aviez la parole.
Mme
Maltais : Oui, M.
le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Et je ne sais pas si Mme la ministre a des choses à nous dire pour partir. Sans
ça, je vais aller du côté de Mme la députée de Taschereau. Mme la
députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Oui, M. le Président. J'ai fini pour le moment, alors j'ai un collègue qui va
peut-être prendre la... avoir des choses à dire aussi.
Le
Président (M. Ouellette) :
Ça va me faire drôlement plaisir d'aller à Richelieu, à part de ça. Donc, M. le
député de Richelieu.
• (19 h 40) •
M.
Rochon : Oui, merci, M. le
Président. En souhaitant la bienvenue à la députée de Chauveau, qui se régalera
sûrement de la hauteur de nos échanges.
Écoutez, au
risque de me répéter, M. le Président, ce qui a, dit-on, des vertus
pédagogiques, j'espère que ce soit vrai,
le projet de loi n° 59 nous pose un problème de fond comme il a semblé en
poser un au premier ministre, qui a pris la peine de déclarer il y a quelques
mois que ce projet de loi allait être amendé pour ne pas risquer de restreindre
la liberté d'expression, et s'attaquer
nommément, là, au discours appelant à
la violence. C'est dans Le Devoir, là. C'est le premier ministre
qui dit que le projet de loi «prohibera seulement "l'appel direct à la
violence"».
On l'a
abondamment cité, je pense que ça vaut la peine d'y revenir : «"Le
but [...] n'est pas de réduire la liberté d'expression au Québec, mais d'en indiquer la limite, qui, à mon avis,
requiert le consensus et va recueillir le consensus des
citoyens", a affirmé [le premier
ministre] au terme du caucus
présessionnel des élus libéraux tenu à Saint-Georges de Beauce. "On peut dire des bêtises, on peut
dire toutes sortes de choses, mais on ne peut pas appeler à la violence."»
C'est ce qu'on pense de ce côté-ci de la table.
«Le projet de loi n° 59 sera ainsi amendé — dit
le texte du Devoir — afin
de préciser la démarcation entre l'acceptable et l'inacceptable, le permis et
l'interdit. "Elle doit être explicite et définie[, cette démarcation]. La
ligne pour moi — c'est le
premier ministre qui parle — c'est l'appel direct à la violence."»
Il cherchait — puis là
je cite toujours le texte du
journal — «à
apaiser les inquiétudes des défenseurs de la liberté d'expression». Il
ajoutait : «C'est sur quoi la ministre de la Justice [...]
travaille.»
Alors, c'est
l'amendement majeur que nous souhaitons voir apporter au projet de loi
n° 59. Et nous ne faisons pas
cavalier seul, M. le Président. Il y a une pléiade d'experts, d'analystes, de
groupes qui vont dans le même sens que nous.
C'est ce qui nous donne aussi de l'assurance. Tu sais, quand on est tout seul à
penser quelque chose, on se questionne. Bien, tout le monde ne se questionne pas quand il est seul à penser
quelque chose, mais, nous, de notre côté, ça nous poserait question.
Alors, une pléiade
d'experts, d'analystes, de groupes vont dans le même sens : ils ne veulent
pas voir la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse assaillie de plaintes dénonçant des
plaisanteries de mauvais goût, des
railleries, des propos rabaissants, choquants ou insultants, des blagues
déplacées, des commentaires dérangeants ou des critiques acerbes. Alors, voilà pourquoi il faut, de leurs points
de vue, de notre point de vue, même du point de vue du premier ministre, baliser ce projet de
loi — en tout
cas, c'était son point de vue, aujourd'hui on peut en douter — sans quoi, si on ne balise pas ce projet de loi et qu'on banalise sa
portée — merci,
cher collègue d'en face — eh bien, ce sera une atteinte assurée à la liberté
d'expression.
Baliser, par
ailleurs, ce projet de loi, c'est une commande énorme, énorme, hein? Baliser la
première partie du projet de loi,
là... Le Mouvement laïque québécois dit, dans son mémoire, que la partie I
est irréformable — c'est
vrai que ce n'est pas très encourageant pour la ministre — parce que, plutôt que de combattre les
discours haineux, cette partie I du projet de loi, dit le Mouvement laïque québécois, là, elle les
encouragera et favorisera même leur prolifération, pas en faisant
exprès, mais ça sera un effet pervers du projet de loi.
Il ne répond
pas, le p.l. n° 59, aux attentes des Québécois. On n'y retrouve rien pour
s'attaquer, par exemple, au recrutement des jeunes. Alors, je le disais,
les groupes sont contre : Juristes pour la défense de l'égalité et des
libertés fondamentales, Chaire de recherche
contre l'homophobie, GRIS-Québec,
Conseil LGBT, Table ronde du mois de l'histoire des Noirs, Centre consultatif
des relations juives et israéliennes, Point de bascule, Association canadienne des libertés civiles, nommez-les. Nommez-les tous, les groupes,
là, la vaste majorité s'est prononcée contre la partie I du projet de loi.
C'est elle, là, qui pose vraiment, vraiment, vraiment problème.
Josée Boileau
écrit : «Que de
confusion autour du projet de loi n° 59 déposé par Québec pour, notamment,
lutter "contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence", comme le signale
le titre du document. Mais son véritable objectif est de contrer le radicalisme et l'endoctrinement, et il le
fait au prix d'énoncés qui laissent déjà entrevoir de vraies dérives démocratiques.»
Vous voyez? Tout le monde va dans le même sens.
«La
ministre se défend, répète qu'il ne s'agit aucunement de censure, mais de
contrer les appels à la violence. Reste que l'un des intervenants qui appuient le projet de loi a donné
l'exemple des radios de Québec qui tiennent parfois des propos "déshumanisants pour certaines
minorités..." Cette seule évocation témoigne de la dangereuse brèche que
le gouvernement libéral s'apprête à
ouvrir — écrit Boileau. Qu'est-ce que le discours haineux? Il nous semblait que l'attentat de Charlie Hebdo avait été l'occasion de
dénoncer la censure au profit du débat, [au profit] du boycott, [au profit] de la critique,
[au profit] de la dénonciation. Mais de faire taire, non.
«La ministre
de la Justice est sans doute de bonne foi — continue Josée Boileau, et nous pensons
aussi qu'elle est de bonne foi — mais elle joue présentement avec [des]
allumettes. Il vaudrait mieux qu'elle envisage immédiatement un
remaniement majeur de tout ce qui ici menace la liberté de dire et de penser.»
Mathieu
Bock-Côté, qui est toujours intéressant, hein, écrit, lui : «On a beaucoup
parlé de l'ouverture du gouvernement libéral
au tchador chez les employées de l'État. Avec raison. Elle représente sa
fascinante paralysie politique lorsque vient le temps d'encadrer les
religions.
«Mais on a
oublié d'examiner ce qui se trouvait dans le projet de loi n° 59 contre
les discours haineux. À tort. Il faut
y jeter un oeil. Le gouvernement cherche à se donner les moyens juridiques
d'empêcher les discours haineux. Dans les faits, il crée les conditions
d'une extension sans précédent du domaine de la censure.
«Avec le
projet de loi n° 59, n'importe qui pourrait porter plainte devant la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse au nom d'une
communauté qu'il dira diffamée. N'importe qui se sentant vexé par un
propos identifiant d'une manière ou d'une
autre un groupe religieux, culturel, sexuel [...] politique pourra saisir la
commission dans [l'esprit] de faire taire celui qui l'embête.
«La
commission [...] aura le pouvoir d'enquêter. Elle pourra coller des amendes aux
délinquants [...] faire cesser de
tels discours et censurer les publications qui les accueillent. Elle décidera
de ce qu'on peut dire ou non au Québec.» C'est très grave.
Alors, M. le
Président, nous ne pouvons pas souscrire au sous-amendement du collègue de
La Prairie pour les motifs que
j'expose. Et je crois que ma collègue de Taschereau fera du pouce là-dessus.
C'est mon intuition, en tout cas, sans vouloir vous remplacer à la
direction de la circulation.
Le
Président (M. Ouellette) :
Ah! oui. Je suis sûr, M. le député de Richelieu, que, lors d'une prochaine
intervention, vous allez me parler du sous-amendement et du contexte de
radicalisation qu'il introduit dans le sous-amendement. Mme la députée de
Taschereau.
Mme
Maltais :
Oui, merci, M. le Président. Le sous-amendement n'introduit pas le contexte de
radicalisation, le contexte de
radicalisation est déjà introduit, est déjà... c'est dans la proposition
principale. Mais il introduit le contexte de discrimination, en
remplacement du contexte d'intolérance. Il faut que vous...
Le
Président (M. Ouellette) :
Je me suis fourvoyé de terme, Mme la députée de Taschereau. C'est mon erreur.
Mme
Maltais :
Tout à fait, mais vous voyez à quel point on suit de façon attentive les
débats, M. le Président.
On a discuté
la semaine dernière de cet amendement de la ministre en le disant mieux écrit,
on sépare le discours haineux du discours incitant à la violence, et
j'avais déjà fait la remarque qu'il y avait possibilité de confusion dans l'interprétation. Maintenant, est-ce que ça change
le fondement de notre réaction, de notre attitude, notre réflexion sur
cette loi, pas sur l'article, là? Bien, écoutez, sur la loi, quand on avait
fait l'adoption de principe, nous, on avait dit six points pour lesquels on
n'était pas d'accord, qui étaient suffisamment forts pour que l'opposition
officielle, le Parti
québécois, dise : Nous ne voulons pas de la... Nous ne sommes pas d'accord
avec ce principe. D'habitude, on adopte le principe en disant : On va
essayer de travailler là-dessus, là-dessus, là-dessus, puis ensuite on jugera
si on l'adopte ou pas. Là, dès le départ, on a annoncé nos couleurs.
Alors,
ma façon, un peu, d'étudier l'amendement de la ministre a été de... le
sous-amendement plutôt, ça a été de me dire : Est-ce qu'en quoi que
ce soit ça bouge mon opinion sur les principaux points sur lesquels nous nous
étions fondés pour ne pas adopter le principe de la loi, ne pas voter pour? Ces
points étaient ceux-ci : un, atteinte à la liberté d'expression; deux, le
tribunal de la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse, sa qualité de tribunal qui
est en double du Code criminel; trois, la preuve hors de tout doute
raisonnable, qui existe au Code criminel, n'existera pas — comment on va réussir à compenser ça? — quatre, des problèmes de liste d'attente de
la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse, que j'ai déjà nommée; cinq, la liste
noire, qu'on appelait; et, six, les amendes.
• (19 h 50) •
Il
y a un point qui a déjà été enlevé : la liste noire. C'est dans les
amendements qu'on va étudier probablement bientôt. La liste noire, elle est enlevée. D'ailleurs, une de mes remarques pendant l'étude, quand on
écoutait des gens en commission
parlementaire, pendant les auditions
des groupes, je disais : Ah! ça, ça
va partir, ça ne se peut pas. Puis ça,
on pouvait le dire tout de suite, là. Tout le monde le disait : Ça n'a aucun sens, là. Ça fait
qu'on savait que ça allait partir.
Bon.
Les amendes, il y a des réajustements. D'accord. Mais, sur les quatre
premiers points, en rien, mais en rien cet
article, cette nouvelle version, ce sous-amendement ne change ces points-là. Les deux autres points,
la liste noire et les amendes, il y avait
eu dépôt d'amendements dès le début de la commission parlementaire, dès
le début de l'étude article
par article. Donc, c'était connu.
Alors,
à chaque fois qu'il y a un amendement, sous-amendement ou un amendement, je regarde mes balises. On cherche à
donner des balises à la loi, mais nous, on s'est donné des balises pour cette
loi-là.
Le
texte proposé, qu'on a actuellement,
est : «La présente loi a pour
objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux s'exprimant dans un contexte de discrimination, y compris dans un contexte d'endoctrinement
[...] de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent — partie
"haineux". Elle établit également
de telles mesures contre les discours
incitant à la violence.» Les discours haineux sont encore là-dedans.
Ils sont encore là-dedans.
Une voix :
...en premier.
Mme
Maltais : Ils sont
en premier. Ils sont en premier : «La présente loi a pour objet d'établir
des mesures de prévention et de lutte
contre les discours haineux s'exprimant dans un contexte de discrimination...» Ensuite, il y a un «y
compris dans un contexte de». Mais «les discours haineux s'exprimant dans un
contexte de discrimination», c'est la
même chose que dans la version précédente,
qui disait : «discours haineux s'inscrivant dans un contexte
d'intolérance». Sauf qu'on me dit, et ça, on a proposé — c'est
mon collègue de Richelieu qui l'avait proposé — «discrimination», qui était
une idée de la ministre : «Discrimination» est peut-être plus rassurant
qu'«intolérance». Il y a peut-être une restriction.
C'est ce que semble nous dire la ministre là-dessus. Mais en rien cela n'enlève
cette idée que les discours haineux qui
s'expriment dans un contexte de discrimination vont pouvoir maintenant être
attaqués devant la Commission des droits de la personne et des droits de
la jeunesse.
L'autre
affaire que j'ai rappelée, parce que, je le dis, M. le Président, on a eu quand
même un échange court ce matin avec la ministre là-dessus, puis je
voulais lui... Parce qu'on s'était dit qu'on reviendrait. C'est d'ailleurs...
Je la remercie, c'est elle qui m'a rappelé
ça. L'autre problème, c'est toute la position qu'a prise la Commission des
droits de la personne et des droits
de la jeunesse en disant : Il est temps de faire taire les discours
islamophobes. Ça a été une opinion de
Jacques Frémont, qui était le président de la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse. Oui, il va partir, M. Frémont. Il l'a dit. Mais c'est toute la commission qui
a été derrière cette version de la loi, là. Le changement de présidence
ne change pas l'opinion de la commission, à mon avis.
Puis,
pour dire à quel point ça nous dérange, j'ai été chercher un texte de Kamel
Daoud. C'est un écrivain et un journaliste
algérien. C'est quelque chose qui vient... qui a été écrit le 17 février.
Le titre : Le verdict d'islamophobie sert aujourd'hui d'inquisition. C'est un Algérien qui dit ça. Il quitte le
journalisme, et c'est le texte, si vous allez le lire, et il quitte le journalisme parce qu'il en a assez de se
faire traiter d'islamophobe. C'est un Algérien musulman qui a écrit ça.
«Après
les agressions du Nouvel An à Cologne, l'écrivain et journaliste algérien n'avait pas hésité à pointer le tabou du sexe et du rapport à la
femme dans le monde arabo-musulman. Face aux procès en "clichés
orientalistes" et en "islamophobie", il déclare arrêter
le journalisme et s'en explique dans Le Quotidien d'Oran.» Très
intéressant.
«Kamel Daoud renonce. "J'arrête le journalisme sous
peu", écrit-il dans Le Quotidien d'Oran, journal dans lequel il tient une chronique. Une décision
qui fait suite aux violentes critiques essuyées par l'écrivain algérien après
ses écrits sur les agressions sexuelles de Cologne la nuit du Nouvel An.» Je le
cite : «"Nous vivons désormais une époque de sommations. Si on n'est pas d'un côté, on est de
l'autre", [déclare] l'auteur de Meursault, contre-enquête.» C'est
un roman qui est très connu. Ce n'est pas n'importe qui, cet
écrivain-là. Il a été accusé d'alimenter une islamophobie ambiante.
Il ne me reste que
deux minutes. Peut-être qu'on aura le temps de reparler de ce texte dans le...
Une voix :
...
Mme
Maltais : Il en
reste juste une. Bien, je reviendrai, mais c'est pour vous dire à quel point,
fondamentalement, on a des
appréhensions quant à ce projet de loi. Je vais rappeler les fondements de nos
appréhensions et de notre positionnement. C'est pour ça que cet amendement,
mieux écrit, n'enlève pas les problèmes. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) : J'irais à Montarville. Mme la députée de Montarville.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. J'aimerais donc revenir sur ce sous-amendement de la partie gouvernementale.
Moi, je trouve qu'on se complique la vie ici. On rajoute des termes, on
rajoute : «Dans un contexte de discrimination».
«La
présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte
contre les discours haineux s'exprimant dans un contexte de discrimination, y compris dans un contexte
d'endoctrinement ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme
violent. Elle établit également des mesures contre les discours incitant à la
violence.»
En
mettant «dans un contexte d'endoctrinement...» On est tout à fait d'accord et on l'a demandé. C'était dans nos amendements que
nous avons... «Dans un contexte de radicalisation», on est tout à fait
d'accord. Mais, en mettant «dans un contexte
de discrimination», on ouvre ici la porte. Pour nous, c'est encore trop large
et pas suffisamment précis dans
la mesure où nous avions, le 11 février dernier, soumis un sous-amendement où nous voulions et nous souhaitions que la présente loi s'applique plus précisément contre ces fameux
discours haineux ou encore ces discours incitant à la violence qui s'expriment dans un contexte
d'endoctrinement, de radicalisation ou de propagande intégriste pouvant mener
à l'extrémisme violent.
Alors,
en rajoutant un nouveau contexte, en rajoutant un contexte de plus, un contexte
de discrimination, pour nous, je vous
soumets respectueusement qu'au lieu
d'en enlever et d'alléger le texte, on l'alourdit, mais on ouvre aussi
la porte à une foule de poursuites en
discrimination pour toutes sortes de choses. On met le mot «discrimination», la
clé qui ouvre la porte à des
poursuites de toutes sortes, alors que, si ces poursuites étaient pour contrer
des discours uniquement dans un
contexte d'endoctrinement, dans un contexte de radicalisation, dans un contexte
de propagande intégriste, c'est clair,
le contexte est très précis. Mais la discrimination, y a-t-il quelque chose de
plus large que de la discrimination? Et d'ailleurs, le terme «discrimination», le projet de loi en fait état un
peu plus loin, lorsqu'on dit que... on parle de personnes qui ont des caractéristiques communes identifiées
comme un motif de discrimination interdit par l'article 10 de la charte.
Alors, on comprend que ce sont les personnes
identifiées à l'article 10, les motifs de discrimination de
l'article 10. Alors, moi, je ne vois pas nécessaire d'en rajouter,
«dans un contexte de discrimination».
C'est
une observation que je vous soumets comme ça. C'est la raison pour laquelle je
ne pourrai pas être pour cet
amendement-là, parce que, pour nous, il ouvre encore la porte beaucoup plus
grande. Et le souci, c'est de ramener précisément
à ces fameux discours, à ces paroles qui sont prononcées, mais pas dans
n'importe quel contexte, pas dans un
contexte de discrimination, mais, oui, Mme la ministre, dans un contexte
d'endoctrinement, oui dans un contexte de radicalisation pouvant mener à
de l'extrémisme violent. Parce que c'est de ça qu'il s'agit. Je vous ramène au
noeud du problème, à la raison pour laquelle le gouvernement a déposé ce projet
de loi : pour contrer la radicalisation et l'endoctrinement de ces jeunes, et on y revient. Il n'y avait pas
d'autre raison. Il n'y a pas d'autre raison, au Québec, pour laquelle on fait cette loi-là, si ce n'est que
contrer ces fameux discours qui émanent, qui viennent de cet endoctrinement,
de cette radicalisation. C'est la lutte à ça
que nous faisons ici. Donc, l'ouvrir à un contexte de discrimination, ça ouvre
la porte à une foule de poursuites en discrimination qui vont être déposées
auprès de la Commission des droits de la personne pour... Je vous parie, là...
Nous n'arriverons pas à contrer ce que l'on veut si on ouvre aussi large. C'est
ma perception à la lumière des études qu'on
fait depuis des heures et des heures, là. Si on ouvre à la discrimination de
façon générale, on va beaucoup trop loin.
Alors, c'était le
commentaire que je voulais faire pour le moment. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Merci, Mme la députée de Montarville. M. le député de
Richelieu.
M. Rochon :
Oui, je sais. J'ai senti, M. le
Président, que vous étiez, tantôt,
suspendu aux lèvres de la députée de
Taschereau et que vous sembliez frustré qu'elle doive arrêter la lecture de
l'article racontant l'histoire de cet écrivain et journaliste algérien
qui n'avait pas hésité...
Le Président (M.
Ouellette) : ...intention, M. le député de Richelieu...
M. Rochon :
C'est vrai que ça ressemble à ça.
Le Président (M.
Ouellette) : Mais je sais que vous allez nous livrer la fin de
l'article.
• (20 heures) •
M. Rochon :
Oui, et je vous sens très heureux de ça. Alors, il n'avait pas hésité, ce
monsieur, à pointer le tabou du sexe et du rapport à la femme, dans le
monde arabo-musulman.
Alors :
«La polémique...» La voilà, l'histoire qu'elle n'a pas eu le temps de nous
raconter, parce qu'elle était... elle nous instruit sur les
risques de dérapage après l'adoption du p.l. n° 59, tel qu'on peut le lire
actuellement, là. «La polémique est née de deux textes publiés récemment par
Kamel Daoud. Dans une tribune publiée fin janvier dans le quotidien italien La Repubblica et traduite
dans le monde, intitulée Cologne, lieu de fantasmes, l'écrivain pointait
comme ressort principal des
agressions de Cologne le tabou du rapport à la femme dans les sociétés arabes,
lié à la montée de l'islamisme. Une
argumentation également développée quelques jours plus tard dans un article
publié par le New York Times sur "la misère sexuelle du
monde arabe".
«Des textes qui lui
ont valu une volée de bois vert. Un collectif d'anthropologues, sociologues,
journalistes et historiens l'a notamment épinglé le 11 février dans Le Monde,
en l'accusant de recycler "les clichés orientalistes les plus éculés" et d'"alimenter les
fantasmes islamophobes d'une partie croissante du public européen, sous le
prétexte de refuser tout angélisme".»
Et je cite M. Daoud : «"Que
des universitaires pétitionnent contre moi aujourd'hui, pour ce texte, je
trouve [ça] immoral parce qu'ils ne
vivent pas ma chair ni ma terre et que je trouve illégitime, sinon scandaleux
que certains me servent le verdict
d'islamophobie à partir de la sécurité et des conforts des capitales de
l'Occident et [de] ses terrasses[...]. Le tout servi en forme de procès stalinien et avec le préjugé du
spécialiste : je sermonne un indigène parce que je parle mieux des
intérêts des autres indigènes et postdécolonisés."
«Et
l'écrivain de dénoncer l'instrumentalisation de l'accusation
d'islamophobie — je le
cite toujours — je pense
que [ça] reste immoral de m'offrir en pâture
à la haine locale sous le verdict d'islamophobie qui sert aujourd'hui aussi
d'inquisition. Je pense que c'est honteux de
m'accuser de cela en restant bien loin de mon quotidien et celui des miens.
Dénoncer la théocratie ambiante chez nous
devient un argument d'islamophobe ailleurs. Est-ce ma faute? En partie. Mais
c'est aussi de la faute de notre époque, son mal du siècle", ajoute-t-il.
«En
2014, Kamel Daoud avait été visé [...] par un salafiste algérien, qui appelait
à son exécution pour "apostasie et
hérésie", après ses propos sur son rapport à l'islam.» J'ouvre à nouveau
les guillemets pour le faire parler : «"Je persiste à le croire : si on ne tranche pas dans le
monde dit arabe la question de Dieu, on ne va pas réhabiliter l'homme, on ne va
pas avancer", avait déclaré l'écrivain
sur le plateau d'On n'est pas couché sur France 2. Aujourd'hui, le
voilà encore attaqué pour n'avoir pas hésité à faire entendre une vérité
qui dérange.»
«Kamel Daoud a donné
mercredi une interview au journal algérien Le Temps, dans laquelle il
revient sur son retrait annoncé du
journalisme. Précisant ne pas craindre pour sa vie malgré les menaces, il se
dit fatigué de tout ça : "[Ça] fait 20 ans que je subis ces pressions. Je suis arrivé au point où,
chaque fois que je reçois un prix, j'ai peur. J'ai aussi envie de
réfléchir à mes positions et à prendre du recul", développe-t-il.
"J'ai dit ce que je pense. Maintenant, je vais le dire autrement. J'ai envie d'écrire des romans. Ce n'est
pas une démission. Ce n'est pas une lâcheté. Ce n'est pas une
abdication[...]. Ce que je pense, je le dis. Je n'ai pas à baisser les yeux.
Moi, je n'ai tué personne."»
Le Président (M.
Ouellette) : Vous êtes dans «discrimination», là.
M. Rochon :
«Moi, je n'ai tué personne.» Alors, voilà les risques auxquels conduit le
projet de loi n° 59 : des risques de censure, des risques de
voir toutes sortes de gens se lever pour crier à l'intolérance, au dénigrement,
à quoi encore? Il y a un paquet de...
Mme
Maltais :
Détestation.
M. Rochon :
La détestation. Encore, encore!
Mme
Maltais :
Pardon, pardon... Comme...
M. Rochon :
Il y en a plein d'autres, il y en a plein d'autres.
Le Président (M.
Ouellette) : Vous n'avez plus de temps.
Mme
Maltais :
Au rejet.
M. Rochon :
Au rejet! Le rejet, M. le Président, quoi de pire que le rejet? Bien, voilà, en
gros. Je n'ai plus de temps, vous me dites?
Le Président (M.
Ouellette) : Non, non, non, Mme la députée de Taschereau n'avait plus
de temps.
M. Rochon :
Ah! elle n'a plus de temps, d'accord.
Le Président (M. Ouellette) : Parce qu'on était sur le sous-amendement de
discrimination, M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
D'accord. Parfait.
Le Président (M.
Ouellette) : Vous avez terminé votre intervention?
M. Rochon :
Oui.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Montarville, avant que je
revienne à Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée de Montarville avait un
commentaire à rajouter.
Mme
Roy
(Montarville) : Oui, simplement, très bref. Je veux
revenir à la raison pour laquelle on fait une loi : pour contrer la radicalisation. Puis je pense
qu'il y a une information ici qu'on pourrait partager avec tous les parlementaires : Près
de 180 Canadiens ont quitté le pays pour aller combattre en Irak et en
Syrie, selon le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, et la Gendarmerie royale du Canada.
Dans un point de presse commun tenu ce matin à Ottawa, les services de renseignement ont précisé qu'une centaine
de ces individus sont allés grossir les rangs de l'État islamique.
C'est pour vous
mentionner, M. le Président, qu'on parle de 180 Canadiens. On ne fait pas
la ventilation ici à savoir combien de Québécois,
mais il y en a déjà trop, on sait qu'il y en a une dizaine qui
ont été interpellés avant qu'ils ne quittent. Mais cette réalité, elle
existe toujours, et nous devons trouver une façon, naturellement, avec les
services policiers, qui font leur travail,
mais une façon ici de faire en sorte que ces jeunes-là ne soient pas
endoctrinés pour aller poser le geste, pour vouloir quitter le Québec et
le Canada.
Alors, je vous ramène à cet objectif qui est de
contrer la radicalisation, l'endoctrinement. Et c'est toujours d'actualité, et c'est toujours
présent, et c'est la raison pour laquelle il faut cibler, mais vraiment
cibler les discours de ceux qui
réussissent à convaincre ces jeunes, d'une façon ou d'une autre, à commettre
ces gestes irréparables dans bien des cas
et à renier la société d'accueil qui les accueille ou même la société
où ils sont nés, dans cette société démocratique pour plusieurs d'entre eux, également.
Donc, c'est à ça qu'il faut s'attaquer.
Et le
discours auquel il faut s'attaquer, il est précis, mais ce n'est pas, encore une fois, un discours dans un contexte de
discrimination, on parle vraiment d'endoctrinement ici et de ce qui est dit à ces
jeunes pour les convaincre de passer à
l'acte. Merci, M. le Président. C'est juste pour vous rappeler le fait que c'est
extrêmement d'actualité et c'est... il faut être précis. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Ouellette) : Mais je nous rappelle qu'on est sur l'étude du sous-amendement
déposé par M. le député de La Prairie et non pas sur l'amendement déposé par la ministre.
Vous aurez amplement le temps de nous instruire
sur les raisons pour lesquelles l'amendement de la ministre ne devrait pas être adopté,
mais je nous rappelle qu'on est sur le sous-amendement, qu'on est sur le
sous-amendement
de l'article 1. Mme la ministre.
Mme Vallée : Évidemment, je
ne peux pas faire autrement que souligner qu'il y avait des collègues de notre collègue
de Montarville qui ont souscrit à certaines propositions qui ont été présentées la semaine dernière. Donc, je veux bien, là, qu'on dise... qu'on vienne ici, puis
qu'on change d'interlocuteur, et qu'on change le discours, mais il y a
un travail qui s'est fait en commission parlementaire la semaine dernière, où des gens ont accepté
d'aller de l'avant avec des modifications et des propositions de modification.
Même chose, tout à l'heure, j'écoutais avec intérêt le collègue de Richelieu s'enflammer contre une proposition de sous-amendement qu'il avait
lui-même initiée. À un moment donné, là, ça serait bien qu'on puisse avancer,
là.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) :
Avec tout le respect que j'ai pour Mme
la ministre, c'est bien les termes
qui sont... je veux parler des termes
qui sont dans le sous-amendement du collègue de La Prairie, alors... Et ce ne sont pas des termes qui ont été... ou des décisions qui ont été prises
par un collègue précédemment, on parle vraiment
du terme de «discrimination» ici, qui est rajouté. Alors, c'est à cet
égard-là, là, que je commentais.
Le Président (M. Ouellette) : Merci,
Mme la députée de Montarville. On est prêts à s'en venir à Montréal? Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : À partir de
Chomedey, Montarville. Écoutez, j'ai une question, j'ai une question,
M. le Président. Je ne
ferai pas un long préambule, j'ai une question. La députée de Montarville nous dit que, selon elle, l'amendement tel que proposé, qui est... particulièrement
la portion «s'exprimant dans un contexte de discrimination», ça ressert le sous-amendement...
Une voix : ...
• (20 h 10) •
Mme Poirier : Ça élargit,
excusez, j'inverse les choses, ça élargit la portion de ce qu'on veut faire. Ce
que j'entends, c'est que la ministre dit le contraire, dit : Ça ressert.
Moi,
j'aimerais ça avoir un avis. J'ai deux juristes devant moi, là, une dit que ça
rouvre, l'autre dit que ça ressert. Est-ce
que je pourrais avoir un point de vue
juridique qui me permettrait de comprendre, entre les deux positions qui sont
devant nous, pourquoi d'un point de vue ça peut resserrer et pourquoi d'un point
de vue ça ouvre? Parce que,
là, pour la même expression, on est vraiment dans des positions
diamétralement opposées.
Alors, moi,
je pense qu'il nous faudrait avoir un point
de vue, de dire... La députée de
Montarville nous dit que ça ouvre, la ministre dit que
ça resserre. Moi, je pose la question. Est-ce qu'on peut nous dire... Peut-être
que la ministre pourrait nous le dire,
pourquoi, selon elle, ça n'ouvre pas et que ça resserre, qui est sa position,
si je comprends bien. Donc, est-ce qu'on peut avoir une explication
entre ces deux positions-là pour qu'on puisse mieux comprendre puis mieux
apprécier le dialogue, là, qui vient d'avoir lieu devant nous?
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée : J'ai dit ce que
j'avais à dire dans les séances précédentes.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier : Bien, je trouve
ça intéressant comme dialogue, mais, M. le Président...
Mme
Vallée : Je vais faire un point.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la ministre.
Mme
Vallée : Moi, j'étais
ici à 8 heures, ce matin, parce
qu'on devait se discuter, parce qu'on avait, semble-t-il, une
volonté d'aller de l'avant. Puis finalement moi, à 8 heures du matin, j'étais ici, j'ai
fait signe à notre collègue, je l'ai appelée,
puis finalement on m'a dit bien clairement que, tant et aussi longtemps que le discours haineux était dans le projet de
loi, il n'y avait pas de discussion
possible. Donc, je pense, j'ai fait, la
semaine dernière et la semaine
précédente, des efforts substantiels
pour trouver une piste d'atterrissage, et ce que je constate aujourd'hui, c'est que ça a été fait en vain.
Parce que, là, on
discute d'un sous-amendement déposé par notre collègue de La Prairie, qui
fait suite à un sous-amendement qui a été retiré mais qui avait été déposé par le
collègue de Richelieu, et c'était dans une volonté de mieux écrire le texte. Et là on joue à un ping-pong
et on questionne sur des éléments qui ont fait l'objet de discussions la semaine passée. Alors, je comprends que les collègues sont tous pris dans des activités
parlementaires, mais on en a parlé. Alors, moi, là... il
y a dans la démarche une certaine limite à ma naïveté, je vous dirais.
Le Président (M.
Ouellette) : Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Mais, M. le Président, j'entends bien, j'entends bien la ministre et puis, bon, je
respecte son horaire du temps, là. Ça, je
n'ai pas de problème avec ça. Sauf que la collègue de Montarville arrive avec une dynamique, et une explication, qui m'apparaît peut-être
avoir du sens. Et, quand je regarde les amendements qui avaient été présentés précédemment, entre autres par la deuxième
opposition... La deuxième opposition a amené souvent des amendements,
là, je me rappelle, par votre collègue — là, je ne sais pas son comté,
là, M. Barrette...
Des voix :
Borduas.
Mme
Poirier : ...Borduas,
merci — par M. Borduas... par M. le député de
Borduas, qui reprenaient beaucoup l'élément
«dans un contexte», et puis là il appliquait ça à certains contextes. La
députée de Montarville dit : Le contexte apporté par la ministre, qui est celui de la discrimination, pour elle,
n'est pas dans l'esprit de la loi, n'est pas dans l'esprit de la volonté pour laquelle on est censés être
ici, qui est censée être une... Bon, certains disent que c'est pour des
discours haineux, nous pensons plus
qu'on est ici pour la radicalisation. Il est peut-être là, le fondement de
l'écart de cette table, finalement.
Je pense que, d'un côté de la table, on est ici parce qu'on veut parler de la
radicalisation, on veut parler de ce qui
se passe. La députée de Montarville vient de nous lire un texte média qui
fait... qui rapporte, justement, encore, et encore, et encore des données sur des jeunes qui partent à
l'étranger, de l'endoctrinement important, qui fait en sorte de situer,
finalement, la problématique pour laquelle on est ici, M. le Président, qui est
la radicalisation de certains jeunes et de personnes qui partent faire la
guerre en Syrie, là. Tu sais, si on est là, c'est pour ça, entre autres, et
pour bien d'autres choses, parce que le projet de loi comprend toute une autre
section.
On
avait d'ailleurs, vous vous rappellerez, fait une proposition de motion de
scission pour pouvoir discuter des choses
en deux temps. La ministre arrive avec un... Bien, pas la ministre, excusez, le député arrive avec un amendement,
et là on introduit le contexte de discrimination.
Une voix :
...
Mme Poirier :
Pardon?
Le Président (M.
Ouellette) : Sous-amendement.
Mme
Poirier : Excusez, un
sous-amendement. Merci. Et je reprends le texte du Conseil du statut de la femme, le mémoire qui avait été présenté dans le
cadre du projet de loi n° 59, puisque je n'ai pas eu de réponse à ma
question : Qu'est-ce qui est ouvert,
qu'est-ce qui est fermé? Eux nous parlaient plus de stigmatisation en tant que
telle, qui est, à mon avis, pas très,
très loin de l'expression de la discrimination, et il y avait beaucoup de
craintes de la part du Conseil du statut
de la femme, M. le Président, sur le fait qu'il ne fallait pas venir
stigmatiser certaines populations en tant que telles. La stigmatisation,
c'est de la discrimination en tant que telle, c'est deux synonymes pour moi.
Et
je vous lis, M. le Président, ce que le Conseil du statut de la femme est venu
nous dire ici. Il disait que «bien que
le projet de loi [...] soit formulé en évitant — et ça, on a souhaité avoir ces
amendements-là, mais bon — toute référence à une religion particulière, l'intention
exprimée — nous,
on ne parlait pas de religion, je rappelle, à des mouvements extrémistes pour lesquels nous avons parlé
ici — oralement
par le gouvernement...» Ce n'est pas moi qui le dis, là, c'est le
Conseil du statut de la femme qui dit : «...l'intention exprimée
oralement par le gouvernement est de lutter contre la radicalisation de jeunes Québécois attirés par les mouvements
fondamentalistes qui utilisent l'islam à des fins politiques.» Ça, M. le
Président, là, ça, c'est la raison de la loi.
Et
là on dit, pour continuer : «Certains craignent que la lutte contre la
radicalisation ne stigmatise l'ensemble des membres des communautés musulmanes.» Là, on est dans la discrimination.
Là, on fait de la discrimination, directement.
Des voix :
...
Mme Poirier : M. le
Président, je ne veux pas être désagréable, mais il me semble qu'il y a du
bruit. C'est un peu désagréable. Merci.
Et je continue la
lecture : «D'autres s'inquiètent que le fait d'associer les crimes
d'honneur à la lutte contre la radicalisation
ne stigmatise certaines communautés — encore là, on le voit, viendrait discriminer
certaines communautés. Des distinctions s'imposent pour éviter les
amalgames douteux.»
Alors,
c'est pour ça que, quand je vois le mot «discrimination...» La collègue
disait : Ça ouvre. Bien, c'est un peu ce que le Conseil du statut de la femme est venu dire aussi. La
stigmatisation, à partir du moment où je mets le focus sur un, je viens
provoquer une discrimination.
«Les
propos qui suivent apportent un éclairage intéressant sur les dangers liés à la
diffusion de discours issus de groupes
radicaux qui se réclament de l'islam. Selon Kamel Daoud...» Au moment où il
était journaliste... Mes collègues ont
lu des textes après sa sortie du journalisme, mais on le nomme comme auteur et
journaliste algérien menacé d'une fatwa — alors on sait ce que ça veut dire, M. le
Président — pour sa
dénonciation des mouvements islamistes. Et ce qu'il disait : «[L]a spiritualité et la foi, c'est personnel. Ce qui est inacceptable,
c'est quand la foi se transforme en dogme et en totalitarisme qui
cherche à s'imposer aux autres. Je fais une distinction absolue entre
spiritualisme, foi, rites, dogmes et l'usage
politique de la religion[...]. Ce qui est inacceptable, c'est que des gens
décident de ma vie à ma place, au nom du
sens qu'eux pensent avoir trouvé de la religion.» C'est ça, la discrimination,
quelqu'un qui vient faire en sorte que... m'imposer... certains ont appelé ça des préceptes, là, dans certains des
amendements présentés. Bien, c'est de ça dont on parle.
Et
il ajoute : «L'islamisme est devenu un fléau mondial[...] — lui, il n'a pas peur, il le nomme, là, hein,
il le nomme. On ne naît pas
islamiste, on le devient. On ne naît pas nazi, on le devient. On ne naît pas
fasciste, on le devient. Si on le devient,
ce n'est pas parce qu'on vous a payé, ce n'est pas parce qu'on vous a obligé
seulement, c'est parce que vous avez été
convaincu de certaines idées, et, ces idées, il fallait bien qu'elles trouvent
le moyen de circuler. Et c'est ce qui se répand maintenant, ce sont des idées qui captent des gens dans la détresse et
la misère philosophique, des gens qui leur offrent une alternative illusoire du sens de la vie, qui
finissent par les séduire et les détruire.» Et c'est un texte qui était paru le
10 août 2015.
• (20 h 20) •
Alors, M. le
Président, on a vu dans les dernières semaines, là, toutes sortes d'amendements
déposés, mais ce pourquoi il faut revenir...
toutes sortes de sous-amendements et d'amendements, hein, parce qu'on en a eu
plusieurs, on s'entendra. Mais tous
ces sous-amendements et amendements ne trouvent pas écho chez la partie
gouvernementale, et les sous-amendements proposés par la partie gouvernementale
ne trouvent pas écho de ce côté-ci. On a un problème, M. le Président. Le
problème, c'est qu'on ne s'entend pas sur l'objet de la loi.
Le
premier ministre... Et le Conseil
du statut de la femme est très clair,
là, le Conseil du statut de la femme nous dit... — j'ai
dit «Conseil des ministres» — Conseil du statut de la femme a très bien
dit dans son mémoire : «L'intention exprimée oralement», et je pense qu'ils ont fait exprès pour écrire
«oralement», parce qu'«écrit» on ne le voit pas : «L'intention exprimée oralement par le gouvernement est de
lutter contre la radicalisation de jeunes Québécois attirés par des mouvements
fondamentalistes...»
Le
projet de loi de loi qui est ici, qui nous parle de discrimination, ce n'est
pas de ça dont on parle. Et il est là, l'objet
du pourquoi on est ici depuis des heures, c'est que ce projet de loi là ne
répond pas à ce pour quoi on est convoqués. Le gouvernement nous a
convoqués à discuter en vue de lutter contre la radicalisation des jeunes
Québécois. La députée de Montarville a été très éloquente, je me rappelle, il y
a quelques semaines sur un des amendements ou des sous-amendements — on ne sait plus comment les nommer. Quand on parle de
fanatisme, quand on parle d'intolérance, quand on parle de propagande
intégriste, mais c'est de ça qu'on parle, c'est de ça qu'on parle.
Et,
vous le savez très bien, M. le Président, j'ai le cégep Maisonneuve dans mon
comté, hein — je vois
votre soupir, là — moi, j'ai le cégep Maisonneuve dans mon
comté et je suis très préoccupée. Quand je vois les professeurs qui sont
inquiets, quand je vois la direction qui est inquiète, quand je vois des
étudiants qui sont inquiets, c'est parce qu'il y a un problème, il y a un problème qu'il faut adresser.
Et, quand des gens prennent... veulent prendre le contrôle pour... je vais faire attention à ce que je vais dire, là,
qui veulent prendre le contrôle pour adopter un mode de vie, imposer aux autres
leur mode de vie, bien, c'est ce qui se
passe, et ça, ça m'inquiète profondément. Quand je vois qu'il y avait là un nid
et que plusieurs jeunes ont voulu
partir pour la Syrie... Fort heureusement, on a été capables de les arrêter. La
mise sur pied du centre de prévention
à Montréal fait... était censé sortir un rapport en décembre sur le cégep
Maisonneuve, on ne l'a pas encore vu.
On ne l'a pas encore vu. Pourquoi, M. le Président? Pourquoi? Est-ce que ce
qu'il y a dans ce rapport-là est trop
grave? Est-ce que, dans ce rapport-là, il y a justement les motifs pour
lesquels ça continue encore, tout ce qui se passe au cégep Maisonneuve?
Quand il y a des centaines de parents qui communiquent avec le centre pour
dénoncer la radicalisation de leurs jeunes,
moi, je pense que, comme société, il faut être assez inquiet. Il faut être en
mesure d'arrêter cette hémorragie. Ce
n'est pas facile, arrêter le fanatisme, ce n'est pas facile, arrêter ça, la
radicalisation, mais ce n'est pas avec un propos qui nous parle de
discrimination qu'on va y arriver, pas du tout.
Alors, je vais vous
dire, je ne suis pas capable d'apprécier cet amendement-là, dans le sens où
j'ai, d'un côté, quelqu'un qui me dit que ça
ouvre puis, de l'autre côté, qui me dit que ça resserre. Je ne suis pas capable
de faire cette appréciation-là parce que j'ai deux positions totalement
opposées qui font en sorte que... Vous comprendrez, M. le Président, comment
vous voulez vous positionner quand, pour le même mot, on a vraiment deux
positions juridiques différentes? La
Commission des droits de la personne est ici, pourrait peut-être nous le dire,
pour eux, qu'est-ce que ça veut dire, la discrimination dans ce
contexte-là. Moi, j'aimerais ça savoir l'opinion de la Commission des droits de
la personne, qu'ils nous disent est-ce
que ça va permettre d'être... est-ce que ça va être un outil ou ça va être une
nuisance. Est-ce que ça va serrer ou ça va ouvrir? Je ne le sais pas, M.
le Président, présentement.
Alors, sur
ce, M. le Président, je comprends que la ministre peut être fatiguée de ces longues heures, on n'en est
pas à nos premières expériences dans ce type
de sujet. Et malheureusement c'est des sujets tellement importants
dont on discute aujourd'hui, et je comprends qu'il
y a l'appréciation des sujets qui ne sont pas du tout à la même hauteur des deux côtés de la table, et on ne s'entend pas sur le
fondement de cette loi-là. Alors, M.
le Président, je pense
que, quand on n'est pas capables de lire un problème avec une lecture
commune, il est très difficile d'adresser une solution.
Alors, M. le Président, je vais laisser la parole à mon collègue ou à d'autres collègues,
parce que, pour moi... Il y a là le fait de ne pas avoir de réponse. Peut-être
que le collègue qui a déposé l'amendement pourrait peut-être
y répondre, à l'interrogation à
l'effet que ça resserre et, d'un autre
côté, ça ouvre. Peut-être
que lui comme dépositaire de cette proposition-là pourrait avoir une réponse. Je pense
que ça permettrait d'avoir un débat mieux éclairé, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Mais, d'après ce que je peux voir, Mme
la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, c'est plus votre collègue de Richelieu
qui pourrait avoir certains...
Mme
Poirier : Je pense
que mon collègue de Richelieu, M. le
Président, si on avait une réponse du
député d'en face, accepterait
de céder son droit de parole pour avoir cette réponse-là, M. le Président.
M. Rochon : Elle lit dans mes
pensées, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
C'est bien ce que j'avais... c'est bien ce que j'avais cru entrevoir. M. le député de La Prairie.
M. Merlini : Merci beaucoup, M. le
Président. Je m'avoue surpris de l'attitude de l'opposition officielle par rapport
au sous-amendement que j'ai déposé jeudi dernier parce qu'effectivement c'était suite aux
discussions, lorsque nous étions suspendus, d'améliorer le libellé que
le député de Richelieu avait lui-même proposé, d'enlever les mots «contexte d'intolérance» et de les remplacer par
les mots «contexte de discrimination». Et l'équipe de légistes qui entoure la ministre, ils sont les spécialistes,
moi, je ne suis pas avocat, mais c'est eux qui sont arrivés avec l'idée
d'inclure le «contexte de discrimination» à
un endroit plus approprié dans la façon dont le sous-amendement est écrit. Et
ça a été la nature du
sous-amendement, c'était pour faire suite à la demande du sous-amendement
proposée par l'opposition officielle. Et
là, ce soir, mis à part la collègue de Montarville qui a clairement donné son
argumentation pourquoi qu'elle ne voulait pas que le «contexte de discrimination» soit inclus... mais c'est la
seule personne qui a vraiment parlé du sous-amendement. Là, on a entendu pendant des minutes et des
minutes... Bon, on a cité des articles, on est revenus sur des choses qui ont
été dites déjà, auparavant, dans plusieurs autres sous-amendements qui ont été
proposés, mais, en fin de compte, ma proposition
de sous-amendement ne visait qu'à mieux écrire ce que le député de Richelieu
souhaitait comme sous-amendement, qu'il
a lui-même retiré. Alors, maintenant, d'entendre les députés de l'opposition
officielle, dont fait partie le député de Richelieu, dire qu'on n'est pas d'accord, c'est comme un peu... je n'ai
pas de mot. Il n'y a pas de terme parlementaire pour le décrire, M. le
Président.
Alors, voilà
l'explication que je peux donner : C'est un amendement... un sous-amendement
que j'ai proposé pour mieux écrire le
sous-amendement qu'avait déposé le député de Richelieu et qu'il avait retiré.
C'est l'opposition officielle qui
voulait rentrer le «contexte de discrimination», les légistes et la ministre
ont fait l'effort d'arriver avec un texte qui serait viable, je vais utiliser ce mot-là, qui serait correct, et c'est
le but et la nature de mon sous-amendement. Et, encore une fois, d'entendre le Parti québécois s'opposer
à ce qu'eux-mêmes souhaitaient avoir comme sous-amendement, bien, j'en
suis surpris, M. le Président. J'en suis très surpris.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de Richelieu, est-ce que votre...
M.
Rochon : Oui. Juste pour que
mon collègue de La Prairie revienne un peu de sa surprise et qu'il...
Voilà, pour qu'il revienne de sa
surprise, je veux faire remarquer que la nature de mon sous-amendement de notre
dernière séance ne visait qu'à
remplacer «contexte d'intolérance» par «contexte de discrimination». Alors, on
n'a pas fait qu'une réécriture, appelons-la
esthétique, de mon sous-amendement, on l'a dénaturé, là, on en a ajouté, là, et
je ne peux plus y souscrire tellement qu'on l'a réécrit et tellement
qu'on en a ajouté.
Et je
rappelle notre allergie aux termes
«discours haineux». Nous sommes, depuis le début des travaux de cette commission,
fort cohérents, nous réclamons que la partie I du projet de loi ne s'adresse qu'aux discours qui appellent, qui incitent à la
violence.
• (20 h 30) •
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, M. le député de Richelieu.
S'il n'y a pas d'autre intervention sur le... Oui?
Mme
Poirier : M. le Président, je n'ai pas eu de réponse. Le député
de La Prairie a pris la parole, mais il n'a pas répondu à ma question. Alors, est-ce qu'il peut
nous expliquer, pour lui, qu'elle est la différence entre la position gouvernementale et la position de la CAQ, sur le
fait que, d'un côté, on dise que ça ouvre le débat et, de l'autre côté, on dise : Ça le resserre? Je n'ai pas eu de
réponse. J'aimerais ça. J'imagine qu'il a la réponse et je pense qu'il pourrait
nous instruire, tous, de sa volonté comme législateur.
Le Président (M. Ouellette) : M. le
député de La Prairie.
M.
Merlini : Ma volonté était simplement, M. le Président, que le
sous-amendement soit mieux écrit. C'est aussi simple que ça. On retrouve «dans un contexte de discrimination», dans le
sous-amendement que j'ai proposé, tel qu'il est écrit, de la même façon, «dans un contexte de discrimination».
«Dans un contexte de discrimination», il est écrit de la même façon. Il est juste à un meilleur endroit
dans le libellé du sous-amendement. Voilà, c'est tout. Il n'y a pas d'autre
explication à donner.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Force est de constater comme nous, M. le Président,
que vous n'avez pas eu de réponse, vous non plus, là. Alors, moi, ma
question, elle est simple : En quoi ça ouvre, en quoi ça ferme? Je veux
juste comprendre.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée :
On a eu plein de discussions à micro fermé, parce que, rappelez-vous, M. le
Président, nous avions suspendu, nous
avions mis nos recherchistes et nos équipes, de part et d'autre, en
collaboration pour revenir avec un texte. Maintenant, on ne reviendra pas en arrière. Simplement, je vous invite à
participer à tous les jours à nos travaux. Comme ça, vous n'en manquerez
pas une.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : ...M. le Président, que, le menu législatif étant ce
qu'il est, nous sommes appelées, bien souvent, à vaquer à d'autres
occupations...
Mme Vallée : Ah! c'est
dommage...
Mme
Poirier : ...et, ayant des responsabilités en d'autres
domaines, je me dois d'assister à d'autres commissions parlementaires,
alors...
Mme Vallée : Vos collègues
font un travail exceptionnel.
Mme
Poirier : Bien, c'est pour ça, c'est pour ça qu'ils font un
travail exceptionnel. Alors, mon but est de venir les appuyer là-dedans.
Et je n'ai toujours pas de réponse, M. le
Président, même après cette remarque sur mes absences...
Mme Vallée : On y a répondu.
Mme Poirier : ...puisqu'en
principe on ne devrait jamais souligner les absences des collègues.
Mme Vallée : Ah! je ne
souligne pas les absences, je vous invite à participer plus souvent.
Mme Poirier : Bien, d'une
façon très fine. Mais on n'ira pas là-dessus.
Le Président (M. Ouellette) : Non.
Mme Poirier : Mais je
renouvelle, M. le Président, que je n'ai toujours pas eu de réponse à la
question de la collègue de Montarville, finalement. La collègue de Montarville
a fait une affirmation en disant que la proposition du gouvernement vient ouvrir le débat. Puis la partie gouvernementale ne
veut pas, à ce moment-ci, donner la réplique sur la position de la deuxième opposition. Alors, ça fait
en sorte que ceux qui nous écoutent, qui, j'imagine, sont très nombreux,
M. le Président, ils ne peuvent pas nous
regarder, mais ils nous écoutent, mais, à ce moment-là, ils n'ont pas plus de
réponse que j'en ai, et ils ne seront pas plus instruits.
La ministre
vient de le dire, ils ont... vous avez eu des discussions à micro fermé, alors,
encore plus, personne n'a eu l'information.
Alors, peut-être qu'il aurait été intéressant d'avoir ces informations-là à
micro ouvert pour qu'on puisse partager
les positions entre le gouvernement et la deuxième opposition. Alors, c'est
regrettable, M. le Président, mais moi, je pense qu'on aurait pu faire
bénéficier nos travaux du savoir des deux côtés.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. S'il n'y a pas d'autre intervention sur le sous-amendement de M. le
député de La Prairie, je vais soumettre le sous-amendement pour le vote.
Est-ce que le sous-amendement du député de
La Prairie est adopté?
Des voix : Adopté.
Mme
Maltais : Par
appel nominal.
Le Président (M. Ouellette) : Par
appel nominal? Mme la députée de Taschereau...
Mme
Maltais : Contre!
Le
Président (M. Ouellette) : Mme la secrétaire.
Mme Maltais :
C'est parce que ça m'étonne que ce soit à moi de...
Le Président (M.
Ouellette) : Non, non, non, mais...
Mme Maltais :
Ah! J'ai eu le réflexe de dire...
Le Président (M.
Ouellette) : Oui, non, je le sais, que vous avez... je le sais, que
vous avez eu le réflexe.
Mme
Maltais :
Je vous écoute, M. le Président!
La Secrétaire :
M. Merlini (La Prairie)?
M. Merlini :
Pour.
La Secrétaire :
Mme Vallée (Gatineau)?
Mme Vallée :
Pour.
La Secrétaire :
Mme Tremblay (Chauveau)?
Mme
Tremblay : Pour.
La Secrétaire :
M. St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis :
Pour.
La Secrétaire :
M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay :
Pour.
La Secrétaire :
Mme Montpetit (Crémazie).
Mme
Montpetit : Pour.
La Secrétaire :
Mme Maltais (Taschereau).
Mme
Maltais :
Contre.
La Secrétaire :
M. Rochon (Richelieu).
M. Rochon :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).
Mme Poirier :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Roy (Montarville).
Mme Roy
(Montarville) :
Contre.
La Secrétaire :
M. Ouellet (Chomedey).
Le Président (M. Ouellette) :
Je vais m'abstenir.
La Secrétaire :
C'est adopté.
Le Président (M. Ouellette) : Le sous-amendement déposé par M. le député de La Prairie est adopté. Et je vous vois, M. le député de Richelieu,
que vous me faites des signes et je vous donne la parole.
M. Rochon :
Je ne voudrais pas décevoir votre soif de sous-amendements, M. le Président, je vais tout de suite
l'étancher. Alors, je vous propose l'amendement suivant...
Le Président (M. Ouellette) : Sous-amendement...
M.
Rochon : ...le sous-amendement suivant : Il s'agit de modifier l'amendement à l'article 1 de la loi proposé par l'article 1 du projet de loi en ajoutant, dans l'alinéa introduit par le
troisième paragraphe de l'amendement et après les mots «deuxième alinéa», les
mots «tenu de manière répétée et».
Je vous lis
le texte sous-amendé : «Est un
discours haineux, un discours visé au deuxième alinéa, tenu de manière répétée et qui, de l'avis d'une personne
raisonnable, est d'une virulence ou d'un extrême tel qu'il est susceptible
d'exposer ce groupe au rejet, à la
détestation [...] au dénigrement notamment pour que ce groupe soit perçu comme
étant illégitime, dangereux ou ignoble.»
Je vous dépose le texte.
Le Président (M. Ouellette) : Je
suspends quelques minutes.
(Suspension de la séance à 20 h 37)
(Reprise à 20 h 41)
Le Président (M. Ouellette) : Nous
reprenons nos travaux. M. le député de Richelieu vient de déposer un sous-amendement pour rajouter, après le mot «deuxième alinéa», dans le troisième
paragraphe, les mots «tenu de manière répétée
et». Mais, avant d'aller plus loin, suite à l'adoption du dernier sous-amendement, pour éviter toute répétition, je
me dois de retirer un sous-amendement qui avait été adopté, qui avait
été présenté par le député de Bourget et qui faisait référence au mot «d'endoctrinement», parce que, là, le dernier
sous-amendement qui vient d'être adopté déplace, dans le paragraphe, «d'endoctrinement». Et, pour cette
raison, je me dois de retirer le sous-amendement du député de Bourget.
Mme
Maltais : ...juste une question comme ça de...
C'était recevable d'écrire un sous-amendement qui déplaçait un sous-amendement déjà adopté?
Le Président (M. Ouellette) : Il
semblerait qu'il y avait consentement quand il a été présenté.
Mme
Maltais : O.K. C'est ça. O.K. Parfait, oui, oui. Mais
c'est juste pour après que je veux comprendre, parce que je peux
avoir...
Le Président (M. Ouellette) : Oui.
Oui, je sais.
Mme
Maltais : Ça peut
me donner des idées, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Oui. Je pense que vous n'avez pas besoin de cela, Mme la députée de Taschereau, mais je pense
aussi que ça donne des idées à votre collègue de Maisonneuve,
d'Hochelaga-Maisonneuve, mais je ne voudrais absolument pas vous
prêter d'intention.
Mme Poirier : Je veux juste
poser une question, M. le Président.
Le Président (M. Ouellette) : Oui.
Mme
Poirier : Lorsqu'on
dépose un sous-amendement, on doit mentionner qu'est-ce qu'on déplace,
qu'est-ce qu'on fait, je n'ai pas vu ça dans le texte qui nous avait été
présenté. On n'a pas identifié le déplacement des mots «endoctrinement», là.
Mme
Maltais : M. le
Président...
Le
Président (M. Ouellette) :
Oui, Mme la députée de Taschereau, effectivement, dans une discussion au micro lors de notre dernière séance de jeudi dernier, ça
faisait partie des discussions qui avaient cours, que, si le sous-amendement de M. le député de La Prairie
était adopté, il fallait retirer le sous-amendement déposé par M. le député de Bourget.
Ceci étant
fait, je reviens à vous, M. le député de Richelieu, et vous allez nous expliquer, pour sûrement
les prochaines secondes, le but de l'ajout de l'expression «tenu de
manière répétée et».
M.
Rochon : Voilà. Alors, on
peut peut-être rappeler ce que deviendrait le texte
sous-amendé : «Est un discours haineux, un discours visé au deuxième alinéa — je
rajoute — tenu
de manière répétée — et
le reste, c'est le texte que nous
avions déjà — et
qui, de l'avis d'une personne raisonnable, est d'une virulence ou d'un extrême
tel qu'il est susceptible d'exposer
ce groupe au rejet, à la détestation ou au dénigrement notamment
pour que ce groupe soit perçu comme étant illégitime, dangereux ou
ignoble.»
Pour défendre la pertinence du sous-amendement
que je vous soumets, j'aurai recours, M. le Président, à un mémoire qui a été présenté à la commission
par Guillaume Rousseau, professeur de
droit à l'Université de Sherbrooke et
avocat, et François Côté, candidat au doctorat en droit à la même université,
qui écrivaient, dans un mémoire qu'ils ont
donc soumis à la commission : «Dans l'éventualité où le Parlement décidait
de ne pas mettre de côté la partie I, il devrait tout
au moins la modifier
substantiellement. La référence aux discours haineux devrait être retirée, tant
ce concept est flou et donc de nature
à permettre à la commission des droits de la personne et de la jeunesse et
aux tribunaux de brimer la liberté
d'expression. L'idée d'interdire seulement les appels directs à la violence est un pas dans
la bonne direction. Il faudrait
toutefois — et c'est là que je vous dis que ça vient
appuyer le sous-amendement que je soumets à la commission — faire un pas de plus et interdire seulement les appels directs et
répétés — hein — à la violence. Le but est d'éviter — puis je poursuis leur texte à eux, là — de mobiliser les ressources et le pouvoir
coercitif de l'État pour une personne qui n'aurait fait que déraper à une seule reprise, par exemple
sur un réseau social où la spontanéité des échanges favorise les dérapages — écrivent-ils. Il y aurait également lieu de
prévoir qu'une personne ne pourra être reconnue comme ayant commis l'infraction que si elle avait l'intention
d'inciter à la violence. Ici, il s'agit notamment d'éviter qu'une personne
commette l'infraction en employant une
métaphore un peu violente, alors qu'elle n'a aucunement pour but de faire
en sorte que le groupe visé par sa métaphore soit violenté.»
Alors, voilà,
là, l'explication de ce bout de phrase que je souhaite voir apparaître au
texte, à savoir «tenu de manière répétée», hein, ne pas s'arrêter à un
seul coup de gueule, là. On note une intention, là, le discours est tenu de
manière répétitive, répétée. Alors, voilà l'explication, M. le Président.
Le
Président (M. Ouellette) :
Sûrement que vos explications vont alimenter la réflexion de votre collègue de
Taschereau.
Mme
Maltais :
Bien, M. le Président, avant, j'aimerais savoir comment, du côté
gouvernemental, comme il est d'usage, on accueille cette proposition du
collègue, qui est fort raisonnable, je trouve.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
ministre.
Mme Vallée :
La répétition n'est pas nécessaire, on en a parlé dans le passé : Un
discours haineux, c'est un discours haineux.
Le discours haineux, si on se fie, par exemple, à l'amendement... au
sous-amendement qui est proposé, ça ferait : il n'y a pas de
problème à ce que quelqu'un tienne un discours haineux une fois, il suffit
qu'il ne le tienne pas une deuxième fois.
Alors, c'est
l'effet du discours qui est problématique et non l'intention derrière le
discours. La Cour suprême l'a mentionné,
et on en a parlé abondamment, et donc... Et voilà. Donc, la répétition en
soi... Ce n'est pas le fait que le discours soit répété qui est le problème, c'est que le discours soit sur la place
publique, soit tenu. Donc, quelqu'un qui... Un prêche haineux devrait
être répété, selon le sous-amendement.
Le
Président (M. Ouellette) :
M. le député de Richelieu, est-ce que les explications de la ministre vous
éclairent?
M.
Rochon : Bien, écoutez, la
ministre est cohérente avec elle-même, hein, et nous le sommes avec nous-mêmes.
À nouveau, elle nous dit que ce n'est pas
l'intention qui compte, c'est l'effet. Et nous, nous lui répétons depuis des
jours que c'est l'intention, hein, et
que ce n'est pas l'effet qu'il s'agit de mesurer, que c'est l'intention. Et
l'intention est bien plus claire
quand le discours est tenu de manière répétée, qu'il ne s'agit pas d'un coup de
gueule isolé sur un réseau social, là.
Puis par
ailleurs je souhaite répéter ce que nous disons aussi depuis des jours, c'est
que nous souhaiterions bien plus pouvoir travailler sur un projet de loi
qui s'attaquerait aux discours incitant à la violence. C'est le choix du gouvernement, là, de vouloir s'attarder aux
discours haineux. Et, encore une fois, nous ne tentons ici, avec une série de
sous-amendements, que de limiter les dégâts
qu'une vaste majorité d'experts, d'analystes, de commentateurs prédisent.
• (20 h 50) •
Le
Président (M. Ouellette) :
Mme la députée de Taschereau, juste pour la bonne marche de nos travaux, on
nous indique que, dans une quinzaine de
minutes, nous devrons aller en Chambre pour le vote d'une motion de report à
laquelle, Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve, vous avez participé de façon très active aujourd'hui. Mme la
députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Oui, M.
le Président. Bonne proposition d'amendement, toujours dans l'esprit de nous trouvons que cette loi est non fondée, mais, puisqu'il le
faut, puisqu'un jour cette loi sera adoptée, puisque le gouvernement a la majorité et ne semble pas vouloir toucher aux
fondements de la loi, un jour, elle va être adoptée, donc essayons d'en
faire quelque chose de moins dangereux pour la liberté d'expression, de
plus soft, mieux balisé.
Alors, cette proposition-là du député de Richelieu, elle est intéressante pour une
chose : on nous a refusé l'intention, bien, au moins,
accordez-nous, s'il vous plaît, la répétition. Dans la nouvelle mouture de l'amendement,
on sépare distinctement... parce qu'il y a eu comme une mouture d'un sous-amendement
tantôt qui a refait une mouture de l'amendement de la ministre, on a séparé
distinctement les discours à la violence des discours haineux, et là, dans cet amendement-là
que vient de nous proposer le collègue, il est très
bien placé, il est dans la définition
du discours haineux. Alors, un
discours appelant à la violence n'a pas besoin d'être soutenu... d'être tenu de
manière répétée. C'est ça, l'intelligence de la proposition du collègue.
Quand c'est
des appels à la violence, c'est dans le haut, mais ça, c'est dans la définition
du discours haineux. On est contre l'idée qu'il y a des discours haineux
dans la loi, on l'a dit. C'est pour ça que je ne veux pas, là, qu'on me dise :
Là, vous voulez amender quelque
chose contre laquelle vous êtes — ce
qu'on nous a dit tout à l'heure, là — vous
êtes en train d'amender quelque chose, mais vous soumettez des propositions puis après ça vous votez contre. Bien, c'est parce qu'on est contre la portion du
discours haineux, là. On l'a dit, là, puis je l'ai dit, oui, à la ministre ce
matin.
Ceci
dit, je vais revenir sur une chose. Contrairement
à l'impression qui a pu être donnée
par la ministre, que je lui ai posé un lapin ce matin, je lui ai dit ce matin... Respectueusement, Mme la ministre, moi, j'avais dit que je vous... en tout cas, ma compréhension des choses était que j'avais
dit que je vous enverrais un texto s'il fallait se voir à 8 heures.
Je n'ai pas envoyé de texto parce qu'on ne se voyait pas à 8 heures.
Mme Vallée : Je suis en Outaouais,
alors...
Mme
Maltais : Et la ministre m'avait assuré qu'elle était ici le lundi soir,
puisqu'elle avait un comité ministériel à 9 heures, donc elle est arrivée la veille. Je ne lui ai pas posé un
lapin puis je ne l'ai pas fait venir de Gatineau spécialement
pour lui poser un lapin.
Ceci étant
écarté, M. le Président, «tenu de manière répétée» permettrait, à tout le moins, à tout le moins, que, si
on n'a pas l'intention de la personne, on sache que c'est dans... l'intention
est derrière la répétition. L'idée de l'intention,
que la ministre ne veut pas nous accorder, là, qui ne sera pas
inscrite dans la loi, on peut la trouver ailleurs, et c'est une balise intéressante parce qu'elle évite justement les Twitter, les Facebook d'une fois.
Le jeune, là, qui est allé à la
télévision, il s'est fait un Facebook où est-ce qu'il disait d'aller...
c'était épouvantable, là, il disait d'aller tirer des musulmans, les Arabes, je ne sais plus trop, lui,
il était habillé en clown, bien, il s'est fait... ce n'est pas compliqué, là,
cette fois-là n'aurait rien ajouté, là, elle
n'aurait rien ajouté, et immédiatement la police est débarquée. Donc, la loi n'est
pas là pour ça. Mais en plus il aurait pu être traîné devant la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse, ça
fait qu'il aurait pu avoir une double sanction, double poursuite. Ça fait que,
là, ce que ça donne, ça, avec ce «de
manière répétée», ça éviterait que cette personne-là qui s'est fait dire tout
de suite : Arrête ça, par la police, puis qui s'est fait dire par la société : Arrête ça,
et qui n'a pas récidivé, qui a dit : Ah! mon Dieu, mon Dieu, c'est
épouvantable, ce que j'ai fait... Il
a eu une contrition immédiate, M. le Président. Bien, cette contrition
immédiate, en essayant de garder «tenu
de manière répétée», bien, on l'évite... on la protège, on l'arrête là, on
n'envoie pas ces gens-là devant la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse. C'est un peu l'esprit dans lequel j'étais, M. le
Président.
Je ne sais
pas si, là-dessus, il y a des commentaires de l'autre côté, mais je trouve que
l'intention de permettre... d'ajouter la répétition permettrait, à tout
le moins, d'éviter les événements isolés.
Le Président (M. Ouellette) : Commentaires,
Mme la ministre?
Mme Vallée :
Un jour, on avancera puis on pourra voir les amendements qui sont en liasse et
qui abordent des enjeux soulevés par la collègue.
Mme
Maltais :
M. le Président, est-ce que finalement l'idée du collègue va être reprise
ailleurs? Parce qu'ici, là, on est
sur la définition de discours haineux. C'est le seul endroit où il y a une
définition de discours haineux. Alors, si ailleurs il y a autre chose, c'est
autre chose.
Mme Vallée : Les amendements
ont été remis, là.
Le Président (M. Ouellette) : Bien,
ils ne sont pas...
Mme
Maltais : Ils ne
sont pas déposés.
Le Président (M. Ouellette) : Ils
n'ont pas été... Ils ne sont pas déposés, Mme la ministre.
Mme
Maltais : Pas ici,
à la table.
Mme Vallée : Bien, les
amendements sont sur le site de l'Assemblée. Les amendements ont été remis
séance tenante à la première séance.
Mme
Maltais : Ils sont
sur le site? Ah! ils ont été mis sur le site.
Le
Président (M. Ouellette) :
On m'informe qu'ils sont déposés sur le site de l'Assemblée, mais ils ne sont
pas introduits à l'étude du projet de loi.
Mme Vallée :
Exactement. Donc, on pourra aborder... Lorsqu'on prétend, là, qu'on touche aux
jeunes, on a... il y a beaucoup
d'amendements qui ont été apportés à la lumière des commentaires qui ont été
formulés. Un jour, j'espère qu'on y arrivera.
Mme
Maltais : M. le
Président.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Ah! donc, je comprends que l'amendement ne touche que les jeunes. Ça, je le
savais. Quand je parle de jeunes, là,
je ne parle pas nécessairement de quelqu'un d'en bas de 18 ans, là :
un jeune de 20 ans, un jeune de 21 ans.
Le Président (M.
Ouellette) : En bas de 65, on est jeune de coeur...
Mme
Maltais :
Oui, vous savez à quel point j'ai le coeur jeune. Vous aussi! Mais il n'y a pas
d'amendement qui vient dire ce que dit notre collègue de Richelieu, là.
On qualifie le discours haineux, on le prend puis on le balise.
Donc, les
discours haineux pour tous les âges, absolument tous les âges, M. le Président.
Alors, c'est pour ça que la proposition est, à mon avis, intéressante.
Voilà!
Le Président (M. Ouellette) : Je
sens, M. le député de Richelieu, que vous avez un commentaire à ajouter.
M.
Rochon : Oui. Moi, j'allais
ajouter : Faute de supprimer le discours haineux, dont on ne veut pas, on
le balise. Puis on n'est pas les seuls à ne pas le vouloir. Tantôt, je
vous parlais de Me Rousseau puis de Me Côté — ah non, je ne lirai pas longtemps ce qu'ils ont dit dans leur
mémoire à ce sujet, parce que je vois un collègue du parti ministériel qui
va s'impatienter — eux autres recommandent principalement de
retirer la partie I du projet de loi ou, à défaut, de supprimer la référence aux discours haineux, là. Ils le
demandent, là. Ensuite, ils proposent, et c'est ce que je fais, moi, là,
d'ajouter une mention du caractère
direct, répété et intentionnel. Ré-pé-té. Sinon, le problème, je l'ai souventefois
dit, et j'ai fait parler là-dessus Pierre Trudel, on ouvre la porte...
Si on ne s'intéresse qu'à l'effet plutôt qu'à l'intention, on ouvre la porte à une chasse à tout propos qui déplaît. Et
c'est là qu'on fait fi des conditions concrètes de l'exercice de la liberté
d'expression, parce qu'on va forcer tous ceux qui s'expriment, où qu'ils
s'expriment, à se demander à chaque fois s'il n'y a pas quelqu'un quelque part
qui va trouver que ce qu'ils disent, leurs mots, leurs blagues, leurs photos,
leurs caricatures ne sont pas haineuses.
Alors, faute de supprimer l'allusion aux
discours haineux, la notion de discours haineux dans le projet de loi, puisque le gouvernement visiblement n'y consentira
jamais, on tente de baliser. Alors, c'est ça, «tenu de manière répétée».
Le but, c'est de baliser.
Le Président (M. Ouellette) : Mme la
députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
Un petit mot. Peut-être un dernier mot étant donné... avant le vote, si j'ose
dire. La ministre a dit : Alors,
un prêche haineux devrait être répété. Non. Un appel direct à la violence n'a
pas besoin, dans cette description-là, d'être
tenu de façon répétée. Si ce prêche est un appel direct à la violence, on peut
l'arrêter immédiatement. Mais les gens dont
on parle et qu'on cherche à bloquer, les imams radicaux, les islamistes, ils
prêchent de façon répétée. La définition que propose mon collègue
correspond exactement aux personnes que nous visons.
M. Rochon : Que vise le
gouvernement.
Mme
Maltais :
Bien enfin, que je commence à croire que nous sommes, de ce côté-ci de
l'opposition, là, les seuls à viser directement. C'est ça qu'on veut,
nous. Tiens, je vois que la collègue de Montarville a...
M. Rochon : Regarde sous ses
lunettes...
• (21 heures) •
Mme
Maltais :
...a haussé les sourcils. Mais effectivement ça vise exactement... Les prêches
haineux des imams que nous
considérons comme des agents de radicalisation au Québec, ils sont tenus de
façon répétée. Alors, la balise, elle
tient le coup. Quand on regarde les gens
qu'on vise, bien, la balise, elle tient le coup, elle le supporte, M. le Président. Alors, c'est pour ça que nous... Je trouve que c'est une bonne
idée de mon collègue de Richelieu.
Le Président (M. Ouellette) :
Êtes-vous d'accord avec ça, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve?
Mme Poirier : M. le Président,
mettez-moi pas des mots dans la bouche, quand même, là.
Le
Président (M. Ouellette) :
Non, non, mais non. Mais je ne vous prête pas d'intentions, je vous l'ai dit tantôt.
Mme
Poirier : Je vous
faisais la lecture, tout à l'heure, du mémoire du Conseil
du statut de la femme, je vais vous
faire la petite lecture à la page 17,
on dit : «...l'insistance de certains discours...» «L'insistance», une autre façon d'écrire ce que
mon collègue a écrit, «tenu de
manière répétée». Alors : «...l'insistance de certains discours religieux
ou idéologiques...» Alors, il me
semble que, là, on vient nommer les choses, que ce soit un discours
idéologique, intégriste, fondamentaliste. Puis là on pourrait continuer comme ça, on a vu qu'on avait une
créativité extraordinaire d'adjectifs qu'on pouvait mettre autour de ça. Mais le Conseil du statut de la
femme vient nous le mentionner, ils nous disent : «Or, l'insistance de
certains discours religieux ou
idéologiques sur cette vision de l'honneur renforce des pratiques préjudiciables
et justifie moralement les restrictions imposées aux femmes et aux
fillettes...»
Alors, vous
savez, M. le Président, certains disent que, quand on finit par répéter, ça
devient la vérité. Hein, c'est une
vieille pratique : à force de répéter, on va finir par te croire. C'est
d'ailleurs un vieux principe, aussi, publicitaire. Répète une publicité, les gens vont finir par l'acheter,
ta télévision. C'est aussi clair que ça. IBM s'est fait d'ailleurs le champion
de cette technique de diffusion dans les
années 80 en prenant le rebord des pages de journaux, en mettant la même
publicité. À toutes les fois que vous
mettiez le doigt sur le coin de votre page, c'était écrit «IBM». Vous tourniez
la page du journal, c'était écrit «IBM». Ils ont fait ça pendant des
semaines. Comme par hasard, il y a eu une explosion pour IBM. Le discours répété a un effet important,
important, il s'installe, il s'installe chez les personnes et
il va venir apporter une dimension bien différente.
D'ailleurs, le Conseil du statut ajoutait, et
c'est très intéressant de dire... Parce que, d'ailleurs, il avait fait une
proposition, une proposition qui est intéressante à lire, en disant :
«L'intention du législateur est de protéger tous les citoyens et citoyennes, y compris les mineurs — la ministre parle des jeunes — contre les dérives des dogmes religieux, des
idéologies sectaires et des traditions préjudiciables.» Je pense
que c'est quelque chose que, ce côté-ci, là, on est assez d'accord. «En ce
sens, la liberté de religion ne peut servir d'excuse pour inciter — inciter.
Inciter, quand on incite quelqu'un à faire
quelque chose, en général on n'ira pas juste une fois, on va inciter plusieurs
fois la personne — les
fidèles à imposer à certaines personnes des contraintes excessives
pouvant nier la jouissance de leurs droits et libertés fondamentales...»
Alors, même le Conseil du statut de la femme est venu mentionner cette dimension du discours
qui est de dire la répétition,
l'insistance, le fait de dire qu'on vient inciter les gens. Et vous savez, M. le Président... vous n'étiez peut-être
pas à la présidence de nos travaux, probablement, vous aussi, occupé à d'autres
choses dans notre Parlement, mais je rappellerais
l'épisode de cet été. Et la ministre souvent dit qu'elle est en réaction à cette
dénonciation que j'ai faite cet été d'un
homme qui tient un discours totalement misogyne. Il ne l'a pas tenu une fois, il l'a
tenu à maintes reprises. Et c'est le fait qu'il le maintienne, le répète et le diffuse à grande échelle
qui a fait en sorte que ce discours-là est devenu beaucoup plus
gros, beaucoup plus idéologique, beaucoup plus fanatique, en
tant que tel, et qui a fait en sorte de... Son but était de faire
adhérer des gens à cette idéologie-là.
Parce qu'il
est là, là, il est là, l'objet de tout cela. Le but, c'est de faire adhérer les
gens à une doctrine, on va le dire
comme ça, que je pense que tout le monde ici rejette, mais qui est le
radicalisme. Et la preuve est faite. Vous vous rappellerez, M. le Président, on a des témoignages dans les journaux de plus
en plus à l'effet que c'est sur le cellulaire qu'on va rejoindre les jeunes et qu'on a des messages répétés à ces
jeunes-là pour les endoctriner, qu'on a des messages répétés pour les
entraîner vers la Syrie, pour les entraîner à commettre des gestes
irréparables.
Alors, la proposition de mon collègue ne m'apparaît pas du
tout farfelue, m'apparaît tout à fait intéressante. La collègue de Taschereau l'a bien dit, là, un propos
violent est un propos violent. Il est inadmissible. Mais, pour définir ce
qu'est le discours haineux, de venir nommer
que, lorsqu'il est fait de manière répétitive, il est là pour se cristalliser
en quelque part... M. le Président, je pense que mon collègue voit juste
dans cette proposition.
Vous savez,
M. le Président, les discours idéologiques, bien, plus particulièrement les
discours intégristes, ce n'est pas la
première fois qu'on en parle, de notre ami Tariq Ramadan. Tariq Ramadan répète
sur toutes les tribunes qu'on devrait implanter
la charia partout dans le monde. Rappelons-nous l'épisode de l'Ontario. Il
avait été tenir ce discours en Ontario, d'implantation de la charia. Il y en a qui trouvaient que c'était une
bonne idée, en Ontario. Et n'eût été de la clairvoyance de votre ex-collègue la députée de
La Prairie... de La Pinière, excusez-moi, de La Pinière, qui
avait des connaissances permettant d'apprécier les propos tenus à cette
époque par certaines personnes en autorité en Ontario, eh bien, je suis persuadée que l'Ontario aurait adopté la charia,
parce qu'il n'y avait pas de discours contraire et que justement on avait
réussi à faire croire aux gens que c'était
une bonne solution, la charia, finalement c'était un bon régime. On pouvait
installer ça en parallèle, là, de nos procédures.
Et on se rappellera que nous avons adopté en
2005 une motion ici, à l'Assemblée nationale, pour dénoncer ce mouvement-là. On s'en ennuie des fois, de la
députée de La Pinière, parce que là-dessus elle avait de la clairvoyance,
elle avait du jugement, elle avait de
l'information, elle avait de la connaissance. Et ça, souvent, ça a manqué dans
ce débat-là. Et, M. le Président, je
pense que ce que mon collègue apporte comme amendement est sérieux et appuyé
par des juristes sérieux. Alors, M.
le Président, moi, je demanderais à la partie gouvernementale de revoir sa
position là-dessus et je pense qu'il y a là quelque chose d'intéressant
à réfléchir.
Le
Président (M. Ouellette) :
Merci, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée de Taschereau.
• (21 h 10) •
Mme
Maltais :
Écoutez, M. le Président. La ministre nous a souvent amené comme exemple le
nazisme comme étant le type de
discours qu'il faudrait réfréner au Québec. Évidemment, j'ai déjà dit deux choses,
d'abord, que c'était un peu farfelu
au Québec que de parler de nazisme comme étant un discours qu'il fallait
éliminer, là. Ce n'est pas vraiment, vraiment, vraiment à l'ordre du
jour. Ce n'est pas ça, le discours qui est à l'ordre du jour. C'est la radicalisation.
Deuxièmement,
le nazisme, c'est l'argument qu'a toujours amené la Commission des droits de la
personne et des droits de la
jeunesse, d'ailleurs un de ses seuls arguments qu'elle amène régulièrement
quand il s'agit de discours haineux, qu'elle
voulait une loi sur les discours haineux ou, en tout cas, qu'on réfrène le
discours haineux. Ça a été dit et répété dans plein, plein d'articles. C'est le leitmotiv de la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse, ce n'est pas un argument... Ce n'est pas le meilleur
argument. Mais il y a une chose que je peux vous dire, par exemple :
Si ça a fonctionné, le nazisme, c'est parce
que ça a été tenu de manière soutenue
et répétée, comme discours. Hitler a...
Une voix : ...
Mme
Maltais : Oui, M.
le Président? Vous m'avez fait un signe que je ne comprends pas.
Le
Président (M. Ouellette) :
Je vous laisse terminer votre phrase, mais on est appelés au salon bleu pour
aller voter.
Mme
Maltais : Ah! bien,
je reviendrai, M. le Président.
Une voix : ...
Mme
Maltais :
Ah! non, on va voter.
Le
Président (M. Ouellette) :
Ah! Ah! ne prenez pas vos rêves pour des réalités, M. le député d'Argenteuil. On s'en va au salon bleu voter sur la
motion de report.
Mme Poirier : Est-ce que vous
ajournez nos travaux, M. le Président?
Le Président (M. Ouellette) : Je
peux...
Mme
Maltais : On
reviendra. On reviendra... C'est comme vous voulez.
Le Président (M. Ouellette) : Je
n'ajourne pas les travaux, pour faire mentir le député d'Argenteuil.
M. St-Denis : ...tout seul.
Le Président (M. Ouellette) : Je
viendrai...
Une voix : Vous reviendrez
ajourner tout seul.
Le Président (M. Ouellette) : Bon,
bien, donc, on va effectivement ajourner.
Puisque nous devons aller au salon bleu pour le
vote sur la motion de report, la commission va ajourner ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 11)