(Onze heures trente et une minutes)
Le
Président (M. Morin) :
Bonjour, mesdames messieurs. Très heureux d'être en votre compagnie ce matin.
Comme nous avons le quorum, je déclare la
séance de la Commission des
institutions ouverte. S'il vous plaît, veuillez vérifier vos téléphones cellulaires et tout ce qui
fait du bruit.
La commission
est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi
édictant la Loi concernant la
prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence et apportant diverses modifications législatives pour
renforcer la protection des personnes.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Morin (Côte-du-Sud) remplace M. Ouellette (Chomedey);
Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve) remplace Mme Hivon (Joliette);
et M. Rochon (Richelieu) remplace M. Leclair (Beauharnois).
Étude détaillée (suite)
Le
Président (M. Morin) :
Merci, chère madame. Lors de notre dernière séance, M. le député de Borduas avait présenté
un sous-amendement à l'amendement de la ministre à l'article 1.1 édicté par l'article 1
du projet de loi. Nous avions débuté les échanges sur ce sous-amendement.
M. le député de Borduas, je veux vous entendre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci,
M. le Président. Bien, écoutez, j'avais plaidé ce que j'avais à plaider lors de
la précédente séance. Simplement pour rappeler qu'avec l'amendement que
nous proposons c'était véritablement pour encadrer,
donc, véritablement au niveau de l'endoctrinement. Donc, les commentaires ont déjà été
faits, M. le Président.
Le
Président (M. Morin) :
Merci, M. le député de Borduas. Est-ce
que j'ai d'autres interventions sur le
sous-amendement? Oui, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Oui, M. le Président. Premièrement, comme ce sont des débats qui ont été tenus
publiquement, c'est-à-dire sur nos
ondes, je vais d'abord dire à mon collègue de Borduas
à haute voix ce que je lui ai dit tout
à l'heure, c'est-à-dire qu'étant
donné que cet amendement était une proposition qui enlevait du
portrait de ce qui peut être touché par le projet de loi, que ça
enlevait peut-être — je
dis bien peut-être — la
capacité d'amener des rappeurs devant la Commission
des droits de la personne et des droits de la jeunesse, je l'avais félicité. Il m'avait demandé de mettre
ça sur mon mur Facebook parce qu'il avait été troublé de s'y retrouver quant à ses tergiversations
antérieures. Alors, mon collègue,
maintenant, a appris qu'effectivement, sur mon mur Facebook, on peut trouver que cet amendement,
à notre avis, est une position
plus intéressante que la position à laquelle tient le gouvernement actuellement. Je tiens à le dire parce qu'on parle beaucoup de collaboration, puis il faut le souligner quand quelqu'un
fait une avancée. Puis il faut aussi le dire publiquement parce que,
sinon, les gens restent sur l'impression antérieure.
Ceci dit, ce
que je dis aussi et que je rappelle dans ces débats — j'ai
juste pris les débats qu'on avait faits la semaine dernière — c'est
que c'est un compromis et que c'est un compromis que nous ne voulons pas faire.
Ce compromis, c'est d'accepter que les
personnes soient poursuivies pour discours haineux dans un contexte
d'intolérance sans aucune référence à
l'appel à la violence. Dans tout le débat qu'on a, on nous dit souvent... Puis
je réfère aux premiers échanges qu'on a eus, M. le Président, quand on a
débattu de ce projet de loi, la ministre disait : Nous voulons que les
gens ne puissent pas poursuivre seulement au niveau fédéral, nous voulons que
les personnes puissent poursuivre au Québec. On veut une procédure québécoise, faisant de cela, je pense,
un objet de fierté qui pourrait être légitime, je le dis, là, qui pourrait être
légitime. Il y a déjà les
articles 318 à 321 du Code criminel qui touchent aux appels à la violence, et tout,
puis là on dit : Bon, bien, on
pourrait transposer au Québec tout ce que la Cour suprême a amené sur les
discours haineux et les discours incitant à la violence.
Je crois
véritablement qu'on pourrait, à
l'heure actuelle, se passer de cette
procédure québécoise, qui est troublante à d'autres aspects. On verra quand on sera rendu là,
sur les autres aspects, puis on échangera là-dessus. Mais, mais, mais
je ne comprends pas pourquoi
on l'élargit tout à coup. À notre sens, si le Code criminel couvre les appels à la violence, qu'est-ce qui nous amène à couvrir plus large au Québec?
La seule référence, c'est la Saskatchewan. La seule référence qui est solide, là, qu'on ait, là, c'est la loi de
la Saskatchewan. Or, l'arrêt Whatcott
ne commente pas sur le fond l'importance d'avoir ce type de loi là.
L'arrêt Whatcott, il est sur la loi de la Saskatchewan. Sur la pertinence, il
n'y en a pas.
Est-ce que
nous, au Québec, on a eu un grand débat sur la pertinence d'avoir ce type
législation là, d'aller devant la
commission des droits de la personne et jeunesse? Non, on est tombés à terre
quand la loi est arrivée, on ne l'attendait pas là. On l'attendait exactement où elle devait aller, c'est-à-dire sur
le plan de lutte à la radicalisation, on devait rester dans le plan de lutte à
la radicalisation. Et la radicalisation, on le sait, s'exprime sur deux choses.
L'égalité entre les hommes et les
femmes est attaquée quand on parle de radicalisation, mais surtout, surtout, ce
qui est attaqué, c'était le phénomène de
l'extrémisme religieux. Tout le monde, on attend du gouvernement le dépôt d'une
loi sur l'extrémisme religieux pour lutter
contre la radicalisation et l'extrémisme religieux qui mènent à la violence,
qui mènent aux actes de terrorisme de Saint-Jean-sur-Richelieu, d'Ottawa. Puis,
si on va à d'autres exemples à l'étranger, on va aller sur Paris, on va aller
sur Ouagadougou, on va aller sur Djakarta, il y a de nombreux exemples.
Alors, on
attend ça. Alors, qu'est-ce qu'on reçoit? On reçoit un projet de loi qui va, de
façon beaucoup plus large... Je vais
rappeler aussi, M. le Président, qu'en plus, d'abord, on avait un projet de loi
qui nous parlait du discours haineux et du discours incitant à la
violence dans un contexte de radicalisme menant à la violence et d'intolérance
menant à la violence. Puis là on est rendu à
dans un contexte d'intolérance, puis là il n'y a plus d'appel à la violence.
Donc, on sort encore une fois par la bande l'amendement même de la
ministre. Même plus, dans le projet de loi, le projet de loi, ce n'était même pas ça. Mais son amendement a ouvert
encore plus large, encore plus large que ce qui est contenu dans le Code
criminel. Ça fait que le problème qu'on a depuis le début, c'est qu'on tente de
baliser ça, on tente de revenir à l'intention
première, la lutte à la radicalisation et les appels à la violence. On a répété
souvent que le premier ministre avait
demandé qu'on s'en tienne à la ligne de démarcation qui était l'appel à la
violence. C'était ça, la ligne de démarcation.
Alors, M. le
Président, je le dis, c'est un compromis. Est-ce que ce compromis du collègue
de Borduas est intéressant? Bien, il
est mieux que ce qu'on avait. Maintenant, est-ce qu'on vote un compromis
intéressant ou on vote sur nos
convictions profondes, jusqu'où on peut aller, et tout? Tant que nous resterons
avec un discours haineux dans un contexte
d'intolérance, nous sommes mal à l'aise. Peut-être que le collègue a une
formulation qui permettrait d'en sortir.
L'autre
chose, le discours s'exprimant dans tout autre contexte, l'intention d'exposer
ce groupe à la haine et de causer un
préjudice doit être claire. Causer un préjudice, pas pire, mais... L'intention,
on est d'accord. Mais exposer ce groupe
à la haine, déjà ça couvre moins que ce qu'on a parce que la définition de
«discours haineux» est très large, très, très large. Un discours haineux, c'est un discours qui est d'une
virulence ou d'un extrême tel qu'il est susceptible d'exposer ce groupe à la
marginalisation, au rejet, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion. Il
y a cinq tiroirs, cinq classements, hein,
comme cinq tablettes, là, sur lesquelles on peut mettre les causes, là. Il n'y
en a pas une, l'appel à la violence directe, répétée — on
pourrait avoir toutes sortes de mots, là — mais on a cinq tablettes pour introduire des
causes à la Commission des droits de la personne, causes qui, je le
rappelle — et
ça, on n'a toujours rien entendu là-dessus, toujours pas de solution — prennent quasi un an avant d'être traitées, puis on en rajoute si on parle
d'avoir une idée de si c'est, oui ou non, tenable.
• (11 h 40) •
Alors, M. le Président, j'ai quelques difficultés. Je comprends que le collègue veut éliminer la
portion dont on avait discuté puis
qui est maintenant sur mon mur. Cette compréhension s'affiche maintenant
sur mon mur Facebook, mais le projet de loi reste là. Le projet de loi demeure un projet de loi qui sort du
champ de ce que serait le transfert du Code
criminel au Québec. Il sort du plan de lutte à la radicalisation
pour s'en venir vers autre chose. Alors, ce n'est vraiment pas
facile, M. le Président, d'aider le collègue dans sa démarche. Il y a
autre chose que je veux lui dire, son intention est bonne, je l'ai dit,
là, elle essaie de baliser la loi.
Le problème
qu'on a depuis le début, c'est que la ministre, à part un «principalement ceux s'exprimant» puis l'ajout d'«endoctrinement»,
qu'on salue, la ministre a refusé toutes nos suggestions, toutes nos propositions. On sait que l'article 1, c'est
l'article fondateur de la loi. C'est l'article
1 de l'article 1 et l'article fondateur de la loi. Je dirais, c'est le
sous-sol, c'est ce qui va ensuite
faire que vont s'élever ensuite de ça les murs de la maison qu'on est en train
de construire, comment va juger la
CDPDJ, comment vont être traitées les poursuites qu'elle... enfin, qu'est-ce
qui est frivole, pas frivole, bon, tout, tout, tout va être suivi
ensuite, le pouvoir d'injonction.
Si on ne
s'entend pas sur la base, c'est mal parti pour la suite. Mais tout ce qu'on
fait, là, c'est tenter de convaincre la ministre depuis le début, puis il
y a un refus catégorique. La ministre
nous a appelés à la collaboration. On collabore, mais on n'a aucune réponse
positive de l'autre côté quand il s'agit de s'entendre entre les législateurs
sur les fondements de la loi, sur la base de
ce qu'on veut faire, sur le travail qu'on veut faire et sur le champ d'application de la loi à une société.
Si les gens ne nous voyaient pas débattre du
fondement, ils seraient inquiets, première chose. Là, on fait notre travail, mais,
à leur place, je commencerais à être inquiète de voir que le gouvernement ne
bouge en rien.
Je vais
rappeler qu'on a eu une commission
parlementaire et que, pendant cette commission parlementaire, les gens
sont venus l'un derrière l'autre, les groupes, l'un derrière l'autre, et ils
ont questionné carrément la constitutionnalité de cette loi. Il y a des groupes qui ont
questionné la constitutionnalité de cette loi. C'est dans le mémoire de la ville de Montréal et c'est dans les commentaires du Barreau aux
journalistes après. Il y a des groupes — pas n'importe qui — qui ont contesté la constitutionnalité de
cette loi.
Est-ce que
nous avons eu des avis juridiques, comme le réclamait le Parti libéral à l'époque, quand on a déposé la
charte des valeurs? Est-ce qu'on nous a déposé les avis juridiques, comme le même
parti disait qu'il fallait qu'ils soient déposés? Non, on ne les a pas eus. Donc, je me sens un peu le dindon de
la farce là-dedans. On me demande d'embarquer, on me demande de collaborer, puis on me refuse
toute collaboration à chaque fois que j'offre quelque chose. Chaque fois
que j'amène un amendement
qui pourrait nous faire avancer, c'est non. Non. Le mot, en parlementarisme,
c'est «rejeté», «rejeté», «rejeté». Combien de fois, M. le Président,
avons-nous entendu «rejeté» ou «contre», «contre», «contre»?
Ce n'est pas
ça, de la collaboration. La collaboration, c'est s'entendre sur les
principes. Le gouvernement ne veut pas
s'entendre sur les principes, il veut imposer un principe à l'encontre de
tous... non, je n'exagérerai pas, à l'encontre d'une grande majorité de gens qui sont venus, une grande majorité de
gens qui sont venus nous parler. Le gouvernement veut imposer une
restriction à la liberté d'expression. Il y a des sujets sur lesquels on
s'entend d'habitude qu'il y ait consensus au
Québec, M. le Président. Par exemple, quand on parle de notre code, notre
code d'éthique, on s'entend qu'il
faut qu'il y
ait unanimité même, même
unanimité. Quand on parle du Code
civil, d'ailleurs, qui a été complètement refait quand nous étions au gouvernement, on travaille en consensus, on travaille idéalement en unanimité parce qu'on touche à des aspects fondamentaux de notre société, la façon dont elle
va se conduire... Là, on ne travaille pas en collégialité, le gouvernement impose. Et, tant qu'on ne sera pas
sorti de cette attitude, je vais le dire comme ça, en tout respect, je ne vois pas où on va aboutir, M. le Président. Moi,
je crois profondément que ce projet de loi, tel que rédigé, est une erreur.
Quand je dis ça, je m'assume, j'agis en conséquence.
M. le Président, je
ne suis pas en train de m'amuser, je ne suis pas en train de faire du temps, je
suis en train d'essayer de convaincre un
gouvernement que je crois profondément dans l'erreur. Mes convictions sont
profondes. Je vais vous le dire, là,
je ne m'amuse pas, ça ne m'amuse pas. Mes convictions sont profondes, et je
veux aller au bout de mes
convictions. Assoyez-vous sur vos chaises, vous allez m'entendre plaider mes
convictions. Et on me connaît, M. le Président, ou bien le gouvernement
change d'attitude et collabore avec les oppositions, puis qu'on s'entend sur
des principes solides, sérieux, puis qu'on
s'en va à quelque part, ou bien vous allez m'entendre longtemps plaider. Ce
plaidoyer, il est sincère, M. le
Président, il est sincère. Je désirerais avancer, mais je n'ai qu'un mur devant
moi, un mur complet, un mur total qui
a commencé au moment où le contexte d'intolérance a changé de place. Au moment
où ces deux mots-là, «contexte
d'intolérance», sont sortis du contexte incitant à la violence, il y a eu un
mur devant moi. Parce que je l'ai dit, ça, c'est un point de rupture.
Alors,
M. le Président, il y a un autre point de rupture, tranquillement, qui
s'avance, c'est l'appel direct à la violence qui a été demandé par le premier ministre comme balise de cette loi, qui
n'y est plus. C'est exactement ce que je veux dire, c'est-à-dire que le contexte d'intolérance sorti, c'est la même chose,
là, on est dans le même débat, un Code criminel qui est là pour, justement, les appels à la violence et une loi qui va
nous amener ailleurs au Québec. Je n'ai pas senti, moi, de volonté québécoise de, tout à coup, restreindre
la liberté d'expression, sauf pour réussir à restreindre le champ d'exercice et
d'influence des imams radicaux, extrémistes religieux puis peut-être, pourquoi
pas, d'autres sectes qui pourraient inciter à la violence. En dehors de
ça, là, il n'y en a pas, d'appel.
En
commission parlementaire, les gens qu'on veut toucher par ce contexte
d'intolérance sont venus, en grande majorité,
nous dire : Ne faites pas ça, ce n'est pas comme ça qu'on règle
l'intolérance dans un pays. On règle l'intolérance dans un pays par la prévention. On règle
l'intolérance dans un pays par l'éducation. On règle l'intolérance par des campagnes d'information. C'est comme ça qu'on le
fait. C'est comme ça qu'on agit dans une société démocratique, dans une société intelligente. Il faut demeurer dans
l'esprit québécois. L'esprit québécois, c'est : On est — je vais utiliser une phrase qui a déjà été connue, M. le
Président — six
millions, il faut se parler. Il ne faut pas s'envoyer devant les tribunaux,
il ne faut pas se monter les uns contre les
autres. On est rendus huit millions, là, bien, il faut encore continuer à se
parler puis dégager les lignes de force de la société.
Le Président (M.
Morin) : ...
Mme
Maltais :
Hein?
Le Président (M.
Morin) : Je vous invite à conclure.
Mme
Maltais : Alors, ma conclusion est simple, M. le Président,
je vois que cette intention qu'on ajoute est bonne, mais, tant que le gouvernement continuera à
travailler dans son petit cercle sans permettre d'introduire un véritable
échange sur les fondements de la loi, bien, je vais être obligée de
rejeter.
Le
Président (M. Morin) : Merci, Mme la députée de Taschereau.
Est-ce que j'ai d'autres interventions? Oui, M. le député de Borduas.
• (11 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Bien, simplement quelques commentaires,
là. Je ne referai pas toute la
sémantique, mais simplement, pour revenir sur les propos, là, de ma collègue de
Taschereau, je tiens à lui dire qu'en
micro j'apprécie qu'elle ait fait l'exercice de publier sur son mur les propos
qu'elle a tenus à notre endroit. Et je tenais
à rectifier également, lorsqu'elle attribue à ses collègues une tergiversation
par rapport à une position, ça ne
veut pas dire que sa perception de l'opinion d'un autre individu, c'est l'opinion
de l'autre individu. Donc, ceci étant dit, M.
le Président, je pense que c'est
important, quand on travaille ensemble comme ça, de mettre l'ensemble de la
discussion qui se retrouve sur le mur
Facebook, donc pas uniquement isoler un petit point qui vient conforter la
position que l'on prend comme parti.
Et je tiens à souligner le fait qu'elle ait mis — et c'est tout à son honneur — l'intervention
qu'elle a faite lors de la dernière séance, et je la salue pour cette
raison-là.
Peut-être
un autre point aussi, là, au niveau de l'historique, j'entendais les arguments
de ma collègue sur le fait pourquoi elle va voter contre notre amendement.
Je comprends sa position, mais simplement peut-être rappeler pour la
ministre, dans le fond, M. le
Président, que, nous, ce qu'on dit,
c'est qu'on veut vraiment venir le mettre dans un contexte d'intégrisme religieux, de radicalisation. Donc,
c'est pour ça qu'on présente cet amendement-là, puis qu'on vient baliser, et qu'on vient dire
également dans le deuxième alinéa qu'on impose un critère
d'intention avec préjudice. Donc, vraiment, là, on vient baliser. Donc, on pense que c'est
la bonne façon d'atteindre l'objectif voulu par la... L'objectif du projet de loi, en soi, pourquoi il a été
déposé, ce projet de loi là, c'est pour lutter contre la radicalisation, M. le
Président.
Et
vous me permettrez, M. le Président, en
conclusion, de souligner...
J'entendais ma collègue de Taschereau dire que le Code civil du Québec avait été
adopté sous le gouvernement du Parti québécois. À moins que je me trompe, M. le Président, je pense que le Code civil
du Québec, pour son intégralité, a
été adopté par l'ancien ministre de la Justice,
M. Gil Rémillard, en 1991...
Mme
Maltais :
...c'est le Code de procédure. Ce n'est pas le Code civil, c'est le Code de
procédure avec...
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bien, dans le fond, peut-être juste souligner que le Code civil du Québec, tel qu'on le connaît aujourd'hui, ça fait partie... Même, ça a commencé à l'époque
du gouvernement de Duplessis, puis ça a progressé, puis
tous les gouvernements ont vraiment contribué. Puis d'ailleurs, je pense, pour
avoir entendu M. Rémillard à cet effet-là,
il soulignait également la grande contribution de sa critique de
l'époque... Mme Louise Harel pour sa contribution au Code
civil, donc à l'élaboration du Code civil. Puis je pense que c'est pertinent aussi d'en
parler présentement parce
que,
notamment, il y a un rapport qui a été déposé en droit de la
famille en juin 2015, M. le Président, et on attend toujours, dans le fond, que le gouvernement nous indique que va-t-il faire avec ce rapport en
droit de la famille. Donc, c'était un petit aparté, M. le Président.
Le
Président (M. Morin) :
Je le comprends. Donc, est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement du député de Borduas? Ça va? Donc, je n'entends rien et je ne vois pas... Est-ce qu'on est prêt à voter sur le sous-amendement?
Une voix : Oui.
Le Président (M. Morin) :
Oui. Est-ce que le sous-amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
Le Président (M. Morin) :
Rejeté.
Mme
Maltais : ...
Le Président (M. Morin) :
Oui, c'est bien. Je comprends. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions
sur l'amendement du gouvernement? M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : On va avoir un sous-amendement,
M. le Président.
Le Président (M. Morin) :
Oui.
M. Jolin-Barrette : Si vous me
permettez, je peux vous en faire la lecture.
Le Président (M. Morin) :
Oui, je suspends quelques instants. Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 54)
(Reprise à 12 h 3)
Le
Président (M. Morin) :
Ça va? On y va? M. le député de Borduas, vous êtes prêt à parler de votre sous-amendement?
O.K.? Merci. Nous sommes de retour. M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Eh bien, je l'annonce à la ministre,
il s'agit d'une tentative ultime de
faire progresser l'article 1. En fait, vous savez, l'objectif
du projet de loi, c'est de lutter contre la radicalisation, lutter
contre l'intégrisme. Donc, en constatant que
nos sous-amendements précédents n'ont pas été adoptés de façon à
baliser, ce que nous faisons dans le sous-amendement qui était proposé, c'est vraiment de viser la finalité du projet de loi. Donc, je vais vous faire lecture de l'amendement, M. le
Président.
Modifier l'amendement du gouvernement à
l'article 1 de la loi édictée par l'article 1 du projet de loi en :
1° supprimant, dans son premier paragraphe, les
mots «principalement ceux» et en ajoutant, après le mot «radicalisation», les
mots «ou de propagande intégriste».
2°
remplaçant, dans son deuxième paragraphe, les mots «, peu importe les préceptes
sur lesquels ils s'appuient, qu'ils
soient religieux ou autres, » par les mots «, principalement par des
enseignements et des prêches fondés sur des préceptes religieux,
politiques ou idéologiques,».
Donc, l'article 1, tel que sous-amendé, se
lirait ainsi :
«La présente
loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les
discours haineux et incitant à la
violence s'exprimant dans un contexte de radicalisation, d'endoctrinement ou de
propagande intégriste pouvant mener à l'extrémisme violent ou dans un
contexte d'intolérance.
«Elle s'applique aux discours haineux et aux
discours incitant à la violence, tenus ou diffusés publiquement, principalement par des enseignements et des prêches fondés sur des préceptes
religieux, politiques ou idéologiques, et qui visent un groupe de personnes qui présentent
une caractéristique commune identifiée comme un motif de discrimination
interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne.
«Est un discours haineux, un discours
visé au deuxième alinéa qui, de l'avis d'une personne raisonnable, est d'une
virulence ou d'un extrême tel qu'il est
susceptible d'exposer ce groupe à la marginalisation ou au rejet, à la
détestation, au dénigrement ou à
l'aversion notamment pour que ce groupe soit perçu comme étant
illégitime, dangereux ou ignoble.»
Donc,
M. le Président, vraiment, ce qu'on vise, c'est la question
de l'endoctrinement, de la propagande intégriste que l'on vient nommer dans l'article 1 à l'alinéa un. Et ce qu'on vise notamment,
c'est ces enseignements religieux là qui vont mener à la violence, mener à la haine, comme c'était prévu dans
la finalité du projet de loi, M. le
Président. Donc, on vient vraiment
tenter de circonscrire.
Le Président (M.
Morin) : Mme la ministre...
Une voix :
...
Le Président (M.
Morin) : Oui. Un instant, oui.
Mme
Maltais : Juste
une question de clarification. Est-ce que c'est possible,
avant qu'on entre sur le débat, parce
que
c'est difficile, après ça, de voir s'il est recevable si on a démarré le
débat... C'est parce que je veux juste comprendre parce que, dans l'article 1, tel que sous-amendé, vous nous avez réécrit... Là,
«endoctrinement» est à un autre endroit, «radicalisation»... Mais votre amendement, il me semble... Est-ce qu'il
est correct? C'est-à-dire est-ce qu'«endoctrinement» est avant
«radicalisation» dans ce qu'on a voté? Je crois que oui.
Le Président (M.
Morin) : Oui.
Une voix :
...
Mme
Maltais :
«Endoctrinement» est avant. Donc, l'article est bien écrit. C'est le texte
après où il y a une inversion, c'est ça?
Une voix :
...
Mme
Maltais :
Parfait, je n'ai rien d'autre. Merci, M. le Président. C'était pour vérifier la
validité.
Le Président (M.
Morin) : Donc, après vérification, ça va? Même si le texte par
après n'est pas... ça va?
M.
Jolin-Barrette : On s'en excuse, M. le Président, le terme
«endoctrinement» précéderait «radicalisation».
Mme
Maltais :
C'est ça.
Le Président (M.
Morin) : Ça va. Merci de la précision. Mme la ministre.
Mme
Vallée : M. le Président, je comprends l'effort qui est fait
par le collègue, mais il ne faut pas oublier non plus tout le travail
qu'on a fait depuis aujourd'hui. Et le texte, tel qu'il a été amendé et
peaufiné au fil des heures de commission,
fait suite à des amendements, des sous-amendements proposés soit par notre
collègue de l'opposition officielle ou
nos collègues de la deuxième opposition, et donc, là, c'est comme si on revient
faire le débat sur le choix d'un terme ou d'un autre terme.
Je
comprends, M. le Président, qu'au début de ces échanges-là c'était notre
collègue de Montarville qui était ici. Mais,
ceci étant, ça ne veut pas dire pour autant que le débat et la question n'ont
pas fait l'objet d'échange de part et d'autre et, ultimement, de vote de la part des collègues. D'ailleurs, je crois
que la question des prêches a fait l'objet de discussions et, je crois,
était un élément qui provenait, justement, de notre collègue de la deuxième
opposition.
Ce
que je pensais faire — je pense qu'à ce stade-ci c'est peut-être opportun — c'est de vous présenter, là, le texte
tel qu'il pourrait se lire suite à tout le travail qu'on a fait depuis le début
et qui tient compte des amendements et des échanges
que nous avons eus, tout le monde autour de la table, parce que certains
amendements que nous avons déposés, mais qui faisaient suite à un
certain nombre d'échanges...
Donc,
je vous le lis et je crois qu'il serait bien de porter une attention.
Donc : «La présente loi a pour objet [...] des mesures de prévention et de lutte contre les
discours haineux et les discours incitant à la violence, principalement ceux
s'exprimant dans un contexte d'endoctrinement ou de radicalisation pouvant
mener à l'extrémisme violent ou dans un contexte d'intolérance.
«Elle
s'applique aux discours haineux et aux discours incitant à la violence tenus ou
diffusés publiquement, peu importe
les préceptes sur lesquels ils s'appuient, qu'ils soient religieux ou autres,
et qui visent un groupe de personnes qui
présentent une caractéristique commune identifiée comme un motif de
discrimination interdit à l'article 10 de la Charte des droits et libertés
de la personne.
«Est
un discours haineux, un discours visé au deuxième alinéa qui, de l'avis d'une
personne raisonnable, est d'une virulence
ou d'un extrême tel qu'il est susceptible d'exposer ce groupe à la
marginalisation ou au rejet, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion notamment pour que ce groupe soit perçu
comme étant illégitime, dangereux ou ignoble.»
Donc, on
avait fait le débat. Je comprends que le collègue souhaitait faire une
énumération des types de prêche. La
raison pour laquelle on avait mentionné «autres», c'est qu'il y a des prêches
qui étaient non seulement religieux, mais qui
pouvaient avoir un aspect plus politique. Puis on avait élaboré longtemps sur
la question, notamment, de l'État islamique,
est-ce un groupe religieux, un groupe politique. Bref, alors, ça avait fait
l'objet de cette discussion-là, et c'était le choix que nous avions, à
ce moment-là, pris autour de la table après nos longues discussions.
Alors,
j'essaie de comprendre un petit peu la question. L'utilisation du mot
«intégriste» aussi avait fait l'objet de
discussions quand même assez étoffées, là, de part et d'autre, donc je
n'entends pas revenir et refaire toute cette discussion, puisque nous
avons passé quand même quelques heures à discuter du choix des termes.
• (12 h 10) •
Le Président (M.
Morin) : Ça va, Mme la ministre?
Mme Vallée :
Oui.
Le Président (M.
Morin) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, je salue les compromis qui ont
été faits à ce jour par la ministre
avec les oppositions pour tenter de trouver une définition et un article
premier convenables pour tous. Ceci étant dit, et comme je l'ai souligné lors du début de mon intervention, pour
nous c'est important de retrouver le terme «intégriste» dans le projet de loi et de prévoir l'interdiction
formelle sur cet élément-là. Donc, les autres types de discours, dans le
fond, avec le libellé actuel, seraient également
couverts, et on ne s'attaque pas principalement à ce qu'on veut, je crois,
avec le libellé actuel qu'on a, notamment le
contexte de radicalisation, d'intégrisme religieux. Donc, je pense qu'il y a du
chemin qui a été fait, mais on pourrait
encore aller un petit peu plus loin vraiment pour venir bien circonscrire ce
qu'on vise par le projet de loi en
question. Donc, comme je vous l'ai mentionné, là, c'est véritablement dans ce
but-là qu'on dépose ce
sous-amendement. Et je pense qu'on l'a exprimé, là, depuis le début de la
commission, on veut venir préciser davantage et...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : Oui. Et ça va en ce sens-là, M. le Président, on souhaite pouvoir
appuyer le projet de loi, mais ça passe notamment par l'adoption de ce
sous-amendement pour pouvoir voter en faveur de l'article.
Le Président (M.
Morin) : Mme la ministre.
Mme
Vallée : Et, là-dessus, j'ai une question pour le collègue
parce que nous avions ajouté le terme «principalement ceux» suite à des échanges notamment avec notre
collègue la députée de Taschereau. J'aimerais comprendre pourquoi, dans le sous-amendement qui nous est proposé, on
retire cette référence, ce terme, «principalement ceux», qui avait fait l'objet, je pense, quand même, je crois, d'une
session complète, d'une soirée, un soir de fin de session. Je pense qu'on
avait passé presque le bloc complet à étudier cet ajout suite à des échanges
avec la députée de Taschereau.
Alors,
j'essaie de comprendre, là, j'essaie juste... Parce que vous comprenez, je
salue les efforts qui sont faits et la volonté
d'en arriver avec le meilleur texte possible, je pense que tout le monde
souhaite avoir le meilleur texte possible, mais depuis... On est rendus, je crois, à notre 32e heure de commission,
puis le texte a évolué. Donc, il est vivant, il a évolué au bout de ces heures, puis je ne voudrais pas non
plus, en donnant notre aval à un sous-amendement, court-circuiter les efforts faits aussi par notre collègue de
l'opposition officielle, qui sourit, mais qui a aussi contribué, qui a lancé
des idées. D'ailleurs, on me rapporte
que la question du «principalement ceux» a fait l'objet de discussions les
25 novembre, 26 novembre,
27 novembre et 1er décembre. Alors, c'est plus qu'une séance. Alors,
je cherche à comprendre simplement ce qui amène cette modification. Et
d'ailleurs les discussions sur l'intégrisme, le choix du terme, de retenir ou
non «l'intégrisme», ont eu lieu le
25 novembre, et la question du fondamentalisme a fait l'objet de
discussions le 26 novembre.
Le Président (M.
Morin) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, vous aurez pu noter que je ne participais pas à
ces débats et que c'était ma collègue
de Montarville. Mais ce dont on m'informe, c'est que le terme «principalement», sans refaire le débat, c'est que ça ne viserait pas exclusivement le genre de
discours que l'on veut viser et que ça serait un peu plus large. Et là, si on
indique «principalement», on ouvre la
porte aux autres types de discours aussi et on ne vise pas uniquement
les discours à caractère religieux au niveau de la radicalisation, au niveau
de l'endoctrinement. Donc, la proposition pour enlever le terme «principalement», ça va en ce
sens-là, pour viser les discours que
l'on souhaite viser. Donc, ça va en ce
sens-là, M. le Président.
Le Président (M.
Morin) : O.K. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le sous-amendement
du député de Borduas? Oui, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Oui, M. le Président. C'est intéressant, ce que dépose le député de Borduas.
C'est un amendement qui va dans le même sens que les premiers amendements
que j'ai déposés et qui, à mon souvenir, ont été battus. Ça va dans
le même sens, c'est pour ça que je ne peux pas être contre, là. Cette partie-là,
là, la première partie, d'enlever «principalement ceux» et de dire «radicalisation, endoctrinement ou propagande
intégriste», ça allait dans le sens de ce que je voulais. Quand on s'est entendus après sur «principalement ceux s'exprimant», c'est parce
c'était moins pire que... À l'époque, je pense, c'était «lesquels
peuvent s'exprimer», mais nous-mêmes, depuis le début qu'on est d'accord
pour que cette loi s'inscrive dans le cadre du plan de radicalisation. C'est
exactement ce dont je viens de parler tout à l'heure.
Alors,
sur cette partie-là, oui, je le comprends, là, que pour la ministre, c'est un
retour en arrière, mais c'est un retour
en arrière à une position qu'on a depuis le début, nous autres. Donc, sur ce
bout-là, moi, j'aime mieux la proposition du collègue de Borduas, elle reflète la position que nous avions dès le
départ. Si on retourne en arrière, nous aussi, on a essayé, là, de réintroduire le projet de loi dans
le cadre du plan de lutte à la radicalisation. Puis cette partie-là, c'est exactement ce qu'elle fait. Ça fait que ce
côté-là, que ça donne des «discours incitant à la violence s'exprimant», ça,
c'est clair, là, ce n'est pas
«lesquels peuvent s'exprimer», «s'exprimant»... D'ailleurs, je pense même que
j'avais essayé le mot «s'exprimant»
dans mon souvenir. Je pense que je l'avais essayé, puis, dans la discussion,
les gens n'avaient pas voulu. Alors, je suis contente de le retrouver.
Alors, «les discours incitant à la violence s'exprimant dans un contexte de radicalisation — là, on est dans le plan de lutte à la
radicalisation — d'endoctrinement — c'est mon collègue de Bourget qui avait amené ça, ce mot-là, "endoctrinement",
c'est lui qui avait... puis là il y avait eu un accord de la part de la
ministre de dire : Oui, c'est
bon — ou de
propagande intégriste», alors là, là, c'est clair. Moi, pour moi, ça façonne
très bien. Alors, moi, ce bout-là, tout à fait à l'aise.
J'aurais
des questions pour lui sur le deuxième bout, sur la deuxième partie.
D'ailleurs, il aurait eu intérêt — peut-être qu'il va y repenser — à déposer deux amendements pour qu'on en
débatte de façon séparée. Je veux dire, le premier bout, là, je suis d'accord, je suis prête à voter pour,
moi, puis je pense que nos collègues aussi sont prêts à voter pour. Le deuxième
bout, c'est parce qu'il pose des questions,
puis j'aimerais qu'il me réponde. Quand on dit que ça «s'applique aux discours
haineux et aux discours incitant à la violence tenus ou diffusés publiquement,
principalement — donc
là, il n'exclut pas — par des enseignements et des prêches — ça, ça va — fondés sur des préceptes religieux,
politiques ou idéologiques», qui
vise-t-il dans les mots «politiques ou idéologiques»? Peut-il nous dire ce qui
est inclus et ce qui est exclu parce que les idées et la politique,
c'est un univers...
Une voix : Assez vaste.
Mme
Maltais : ...assez
vaste, en effet.
Le Président (M. Morin) : M.
le député de Borduas.
• (12 h 20) •
M.
Jolin-Barrette : Oui. En
fait, la façon dont le sous-amendement est formulé, M. le Président, en réponse
à la collègue de Taschereau, c'est
qu'il faut lire l'article 1 avec l'article 2. Donc, ça s'inscrit dans le cadre
d'endoctrinement, de radicalisation, de propagande intégriste et, là,
principalement dans des enseignements, des prêches fondés sur des préceptes religieux, politiques ou idéologiques.
Donc, il y a toujours le caractère d'extrémisme religieux qui va se retrouver.
Nous, c'est la lecture que l'on fait avec ce
sous-amendement-là, donc on le rattache à la question d'intégrisme religieux,
d'extrémisme en lien avec ce discours-là de propagande, d'endoctrinement, de
radicalisation.
Mme
Maltais : M. le
Président, il y a le contexte
d'intolérance qui est là. O.K.? Il y a radicalisation, endoctrinement,
propagande et intégrisme combinés à l'extrémisme violent, on s'entend. Là, il y
a «un contexte d'intolérance» à côté qui est
la partie que, vraiment... que la ministre a sortie de l'extrémisme violent, puis elle l'a
amenée à côté, qui est un de nos plus grands problèmes. Je veux voir si
ça règle le problème qu'on a vu. Alors, si on suit puis on prend juste la
présente loi...
Je vais
enlever la partie sur «s'exprimant à la violence», je vais le relire comme on
peut le relire : «La présente loi a pour objet d'établir des
mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours
incitant à la violence s'exprimant dans un contexte d'intolérance.» Ça peut
être ça, on peut se baser là-dessus pour aller devant la commission
des droits. Alors, ensuite, dans un contexte d'intolérance, discours haineux,
discours incitant à la violence s'exprimant
dans un contexte d'intolérance, là on n'est pas dans le contexte religieux, on
est dans le contexte d'intolérance.
Ensuite,
il nous dit : «Elle s'applique aux discours haineux et aux discours
incitant à la violence — d'accord — tenus ou diffusés publiquement...», d'accord. Mais là on est dans
«...principalement par des enseignements et des prêches...» Là, dans un contexte d'intolérance, le discours
haineux n'est pas obligé de toucher à l'enseignement ou aux prêches. C'est là
qu'il y a une faille, c'est toujours la même
faille. Puis c'est pour ça que je vous dis que, la première partie, j'aime
bien, mais, dans la deuxième partie,
moi, je serais curieuse de revoir un libellé qui nous permettrait d'éliminer la
faille. Parce que, là, il y a un «principalement», donc il refait la
même faille.
«Contexte
d'intolérance», on ne parle pas de religion. «Principalement», on reste encore
dans l'intolérance, le discours
haineux, puis on ne parle pas de religion. Si on veut parler de religion, qu'on
parle de religion. Moi, tous mes amendements
que j'ai amenés étaient là-dessus, j'ai été obligée de... On a jasé sur
«principalement ceux», mais je ferais rappeler
que ce n'est pas moi qui l'a déposé, c'est la ministre. Pourquoi? Parce que,
justement, je disais : C'est mieux, mais je ne veux pas entériner une position où on est encore dans la même
trappe. On est dans une trappe, là, on essaie d'en sortir.
Alors :
«Elle s'applique aux discours haineux et aux discours incitant à la violence
tenus ou diffusés publiquement...»
Pourquoi est-ce qu'il nous met «principalement»? Pourquoi est-ce qu'il ne vise
pas carrément les discours religieux,
ce qui, pour moi, fait encore la même filière, discours haineux dans un
contexte d'intolérance, définition du discours
haineux, «let's go» les poursuites? Je pense qu'on peut lui laisser deux
minutes pour réfléchir à cette question s'il le veut, M. le président,
qui est une grave question.
Le
Président (M. Morin) : Oui, madame... Est-ce que, M. le député
de Borduas, vous avez besoin de quelques instants pour sonder votre
conscience?
M. Jolin-Barrette : Vous me permettrez, M. le Président, de réfléchir
quelques instants à ce que la députée de Taschereau a dit.
Le Président (M.
Morin) : O.K. Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à
12 h 23)
(Reprise à 12 h 30)
Le Président (M.
Morin) : Bon, suite à votre réflexion, M. le député de Borduas,
j'ai hâte de vous entendre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président, de ces quelques moments. Bien, écoutez, j'ai entendu ce que
la collègue de Taschereau
a dit tout à l'heure, mais peut-être que, pour fins de la discussion, j'aimerais
savoir, est-ce qu'elle, dans l'alinéa
deux, elle établirait une liste exhaustive des éléments. Supposons qu'on
supprimait le terme «principalement», on
indiquait «des enseignements et des prêches fondés sur des préceptes
religieux, politiques ou
idéologiques», est-ce qu'elle aurait
des suggestions? Est-ce qu'elle croit qu'on devrait définir davantage le type
de véhicule pour le discours? Parce que ça pourrait être une avenue
envisagée si on supprime le terme «principalement» dans le sous-amendement. Parce ce qui est important pour nous, là, c'est
vraiment de lier au contexte de la lutte à la radicalisation, de l'intégrisme
religieux, et c'est pour ça qu'on vise notamment l'enseignement et les prêches
fondés sur les préceptes religieux.
Ceci
étant dit, dans le cadre de ce contexte-là de lutte à l'intégrisme, de lutte à
la radicalisation religieuse, on veut nommer
les choses, on ne veut pas nécessairement passer à côté d'un autre type de discours
qui pourrait être effectué dans ce
contexte-là aussi. Donc, c'est pour ça qu'on disait «principalement». Donc, je
suis ouvert aux suggestions, là. Je pense que l'objectif visé est clair, c'est peut-être le moyen d'y arriver qui
l'est un peu moins. Mais, comme je vous dis, M. le Président, je suis
ouvert aux suggestions.
Le Président (M.
Morin) : Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Écoutez,
M. le Président, c'est sûr qu'«enseignements» et «prêches», là,
on est dans le débat sur le moyen,
puis c'est plus délicat. Mais «des enseignements et des prêches — d'abord, je veux vous faire remarquer, vous n'avez pas mis un "ou", vous avez mis un
"et", ce qui colle le mot — fondés
sur des préceptes religieux», tu sais, ôtons le «principalement», là, premièrement, là, je vais vous dire : «Elle s'applique
aux discours haineux et aux discours incitant à la violence tenus ou diffusés publiquement dans le cadre
d'enseignements et de prêches fondés sur des préceptes religieux.»
Puis
là je me souviens que la collègue de Montarville était venue, puis elle nous avait dit : Oui,
mais... Parce que moi, je n'ai pas tendance à dire «politiques ou idéologiques», je suis un peu
embêtée, parce qu'on n'est pas dans le discours incitant à la violence, on est
dans le discours haineux. Alors, si on y allait «dans le cadre d'enseignements
et de prêches fondés sur des
préceptes religieux», je vis bien avec ça. Ma collègue de Montarville
disait : Oui, mais l'islamisme est
une théorie qui veut que le religieux et le politique soient intrinsèquement
mêlés et même un peu... Ouf! ça fait du bien quand... Excusez-moi, le
son vient de baisser.
Une voix :
Les gens vont demander ce qui fait du bien.
Mme
Maltais : Non, ce n'est pas... À la radio, souvent il n'y a
personne qui nous écoute. Pourtant, c'est si intéressant.
Une voix :
Alors, c'est la climatisation qui...
Mme
Maltais : O.K. Alors, des préceptes religieux... Alors,
elle, elle disait : L'islamisme, c'est politico-religieux parce que c'est le religieux qui subordonne le
politique. Alors, moi, il y aurait «sur des préceptes religieux ou
politico-religieux», puis là ça intégrerait ce que voulait la collègue de
Montarville, je vis très bien avec ça.
C'est «idéologique»,
«politique ou idéologique», et j'en suis revenue... Tu sais, discours
politique... Il y a des personnes qui disent
que nous avons des discours haineux quand nous avons des positions politiques
différentes. Puis je vais vous dire
que, dans le temps de la charte des valeurs, le Parti québécois a été attaqué
rudement. J'ai encore vu récemment un tweet qui attaquait un de mes collègues
qui disait quelque chose en disant : C'est un discours haineux — puis c'était un discours politique — c'est un discours haineux. Ça fait que, là,
il y a une porte d'ouverte avec laquelle... Puis c'était une
organisation, là, ce n'était pas un individu, là. C'était une organisation très
bien organisée, organisation plutôt
religieuse qui disait d'un de mes collègues de mon parti : Ce qu'il a dit
dans le cadre d'un discours politique est un discours haineux.
Alors,
en acceptant ça, j'ouvre la porte à accepter que de mes collègues, même, nos
collègues, nos membres, nos militants,
nos partisans, de votre parti, de notre parti, des autres partis soient poursuivis pour motif de discours haineux. Ça fait
que c'est pour ça que je dis que j'enlèverais le «principalement» puis je dirais «dans le cadre d'enseignements et de prêches fondés sur des préceptes religieux ou politico-religieux», puis là je pense que c'est
exactement l'esprit dans lequel était la collègue de Montarville. D'ailleurs,
elle avait utilisé elle-même le mot, je crois, «politico-religieux» ou... Non, «politico-religieux».
De l'autre bord, ça ne marche pas.
Alors, s'il veut réfléchir
à un amendement, moi, ce que je lui dirais : Écoutez, déposez l'amendement
de... Le premier sous-amendement, en soi,
moi, j'aimerais voter pour. Si vous redéposez, par exemple, le 1°, premier
amendement en soi, on fait le débat
puis on vote pour, moi, je suis... Puis là, comme opposition, on dirait :
Bon, on commence à avancer ensemble vers une position qui nous permet de
dialoguer mieux.
Sur le
deuxième, bien là il aurait besoin d'un petit réaménagement pour nous permettre
d'éviter ce que je crains. Et, je
vous le dis, là, c'est sérieux, il y a
eu des attaques, là, régulières de collègues sur le fait que leur discours
pouvait être haineux par des organisations religieuses, puis c'est ça, ma crainte. Moi, je ne veux pas ouvrir cette
porte-là jamais au Québec. Je
pense qu'on a un devoir de respect comme élus, on a un devoir de tolérance, on
a un devoir d'amitié et de compréhension de
ce qui se passe sur un territoire, mais, malheureusement, on est
susceptibles parfois d'être attaqués à cause
de nos convictions profondes. Et c'est le message que je voulais faire au
collègue, je ne sais pas s'il comprend bien ma position.
Le Président (M. Morin) : M.
le député de Borduas, comprenez-vous très bien?
M. Jolin-Barrette : Je comprends la position de ma collègue. Ceci
étant dit, sur la question de son exemple au niveau des tweets, là où je ne la rejoins pas, par contre,
c'est que la lecture que je fais de l'alinéa un avec l'alinéa deux, c'est que ça doit quand même s'exprimer «dans un
contexte d'endoctrinement, de radicalisation ou de propagande intégriste
pouvant mener à l'extrémisme violent ou dans
un contexte d'intolérance». Donc, c'est là où je ne la rejoins pas parce que c'est des critères cumulatifs. Donc,
la question du tweet, je douterais qu'elle se qualifie dans le cadre du projet
de loi.
Le Président (M. Morin) : Mme
la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : J'interprète autrement, cher collègue, parce que,
là, «dans un contexte d'intolérance», il est tout seul. C'est un «ou», ce n'est pas un «et», ce
n'est pas cumulatif. Et ça, ça a été clair, ce n'est pas cumulatif. Donc, si
nous avions devant nous la proposition que nous avions au départ, qui avait été déposée par la ministre,
qui disait que dans... C'était
«lesquels peuvent s'exprimer — sa proposition de départ, là — dans un contexte d'intolérance ou de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme violent», ça allait.
Là, je serais tout à fait d'accord avec lui. Mais là le contexte d'intolérance
n'est pas dans un contexte de radicalisation ou d'endoctrinement, c'est un
contexte d'intolérance, point, pur.
Alors, être
traité d'intolérant au Québec, beaucoup de monde est passé par là, ça arrive. Des fois,
c'est vrai, mais, des fois, c'est plus dur. Alors, «discours haineux
dans un contexte d'intolérance», l'effet est là, tout le contexte de radicalisation pouvant mener à l'extrémisme
violent sort, on peut le lire comme ça. C'est ça, mon problème. Puis
je le dis depuis le départ, là, il
s'est passé quelque chose, là. Si on était dans l'ancienne formulation, on
vit avec, oui, j'appuierais, dans
l'ancienne formulation, là, parce
qu'on serait toujours
dans le contexte de violence, d'extrémisme, de radicalisation, mais là
on ne l'est pas.
En tout cas, qu'est-ce que vous pensez de mon
interprétation?
M.
Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, je vous dirais que, lorsqu'on lit l'alinéa un: «La présente loi a pour objet d'établir des mesures de prévention et de la
lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence
s'exprimant dans un contexte...», et là
passons tout de suite à «dans un contexte d'intolérance», ça fait que,
ça, c'est le premier critère, donc
discours haineux, contexte d'intolérance ou discours incitant à la violence,
contexte d'intolérance.
Deuxième
étape, là, nous, ce qu'on vient faire avec «principalement par des enseignements — supposons qu'on dit «ou», là — ou des prêches fondés sur des préceptes
religieux, politiques ou idéologiques»,
il y a quand même un lien, on
vise l'intolérance. L'objectif, c'est viser la radicalisation, l'intolérance
religieuse.
Mme
Maltais : Politique
ou idéologique.
M. Jolin-Barrette : Bien,
l'intention que l'on souhaite donner à ça, c'est vraiment le contexte d'intégrisme
religieux.
• (12 h 40) •
Mme
Maltais : Je suis d'accord, c'est là-dessus que je suis totalement en accord, sauf que
le libellé de l'amendement que vous proposez à l'heure actuelle ne nous
amène pas tout à fait là. Il
y a une intention, c'est clair, vous
vous dirigez vers ça, mais votre libellé
n'est pas celui-là encore, puisqu'il y a «principalement par des enseignements
et des prêches»... «des enseignements», je vais enlever «prêches»...
«principalement par des enseignements politiques ou idéologiques». Vous parlez des enseignements
idéologiques, «principalement par des...» Parce que «les prêches fondés sur des pratiques religieuses», c'est bon. Moi, je
n'ai pas de problème avec ça, c'est ça qu'on vise. C'est ça, le plan de lutte
à la radicalisation, c'est pour empêcher des prêches ou des organisations qui
amènent des jeunes à s'en aller en Syrie. Il
y en a beaucoup au Québec. J'ai vu des chiffres, là, sur le nombre de jeunes
qui sont radicalisés actuellement au Québec,
là, moi, je ne pensais pas qu'il y en avait autant que ça. Ça fait que c'est
pour ça que je suis d'accord avec ce bout-là, mais il faudrait chercher
quelque chose...
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci,
M. le Président. Peut-être une question pour la ministre. Avec le libellé «ou
dans un contexte d'intolérance», la
raison pour laquelle le critère d'intolérance se retrouve là, pour l'objectif
visé du projet de loi de lutter contre l'intégrisme, la lutte à la
radicalisation, est-il absolument nécessaire? Parce qu'avec la proposition d'amendement que l'on fait, si on laisse
«principalement par des enseignements ou des prêches fondés sur des préceptes
religieux, politiques ou idéologiques», ça permettrait de
faire le point entre les deux. Donc, peut-être peut-elle nous renseigner avec
cette proposition?
Mme Vallée :
J'ai eu le loisir d'expliquer en long et en large la raison de ce terme, de
l'utilisation de ce terme lors de nos échanges en novembre dernier.
Alors, voilà.
M. Jolin-Barrette : Bien, M. le
Président...
Mme Vallée : C'est parce que,
M. le Président...
Le Président (M. Morin) :
Excusez, oui.
Mme Vallée :
...avec respect, là, j'ai pris l'amendement du collègue, j'ai regardé, et
chaque élément a fait l'objet de discussions
abondantes. Je comprends que ce n'était pas le collègue qui était présent, mais
il y avait des représentants — et son recherchiste était là — de sa
formation politique, et je n'ai pas envie de redire tout ce qui a été dit. Le
contexte d'intolérance est important, et il
y a des raisons pour lesquelles... C'est justement pour éviter que la
définition de «discours haineux»
puisse être interprétée trop largement, parce qu'on a le souci, de l'autre côté
et ici aussi, d'assurer que le discours haineux ne puisse, d'aucune façon, être interprété pour, par exemple,
mettre un terme à des échanges d'opinions différentes, pour éviter qu'on vienne étiqueter de discours
haineux des échanges qui n'en sont pas. Alors, il faut bien le camper. Et là
je vous dirais que j'en ai déjà dit
beaucoup, puisque j'ai passé des heures et des heures à discuter de ces
concepts-là dans le passé.
Le Président (M. Morin) : M.
le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Je
comprends la ministre, qu'elle en a discuté abondamment. Ceci étant dit, M. le
Président, j'ai présenté...
Mme Vallée : Je vous invite à
relire les galées, vous pourrez avoir la réponse.
M.
Jolin-Barrette : Bien, M. le
Président, je remercie la ministre de sa proposition. Ceci étant dit, comme je l'ai
mentionné lors du dépôt du sous-amendement,
M. le Président, notre temps de parole tire à sa fin, et c'est vraiment dans
le but de susciter notre adhésion au projet
de loi. Donc, si la ministre
ne souhaite pas susciter notre adhésion... Puis, pour nous, c'est vraiment important,
cette position-là, au niveau de l'endoctrinement, de la propagande intégriste.
Donc, de ce que l'on comprend, c'est
que le contexte d'intolérance serait peut-être déjà visé par l'endoctrinement, la radicalisation
et la propagande intégriste en ce sens-là. Donc, s'il est compris, on pourrait
faire un bout de chemin en ce sens-là.
Le Président (M. Morin) : Ça
va? Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : D'abord,
je trouve que mon collègue pose des questions légitimes et que la ministre — je
le dis respectueusement aussi comme toujours — aurait
pu se permettre d'élaborer un peu plus longuement parce que
le collègue suit très
bien la commission parlementaire depuis un bout de temps et essaie de travailler
en collaboration avec tout
le monde.
D'ailleurs,
il y a une habitude ici, M. le
Président, quand un parlementaire se joint à une commission
parlementaire, même si on a déjà commencé à travailler sur
un amendement, on lui accorde un nouveau... Enfin, on sait que
c'est 20 minutes par droit de parole sur un sujet, alors on lui
accorde un nouveau 20 minutes, même si les autres ont déjà commencé à débattre. Pourquoi?
Parce qu'il vient de se joindre à la commission parlementaire. Et c'est en tout respect qu'on fait ça,
pour lui donner la chance de bien et de mieux comprendre ce qui se passe.
Alors, moi, je trouve que le collègue
méritait réponse. Ça fait que c'est moi qui vais être un peu obligée
d'expliquer... je ne veux pas être à la place de la ministre puis
commencer à expliquer le débat qu'on a eu.
Mais le problème
qui est soulevé actuellement, il est intéressant. C'est que, justement, nous sommes dans le
discours haineux au lieu d'être dans
le discours incitant à la violence. Ça fait que, là, puisqu'on on ajoute le
concept de discours haineux, qui sort
du contexte de radicalisation, d'endoctrinement, de propagande intégriste
pouvant mener à l'extrémisme violent,
quand on est dans le discours haineux, là, on est obligés de mettre plein de
garde-fous, on est obligés d'en mettre plein.
C'est ça qui se passe. Ça fait qu'à chaque fois qu'on
essaie de toucher aux garde-fous, là, la ministre, elle dit : Non,
non, ne touchez pas à mes garde-fous. En
fait, je vais m'exprimer comme je le pense, là, c'est parce que
la ministre est allée
trop loin, elle est allée trop loin en amenant «discours haineux». Après ça,
elle ne veut pas l'amener dans le discours à la violence, donc elle est obligée de parler de contexte
d'intolérance, de contexte... Aïe! du contexte, là, on est dans le concept, puis il y a de l'interprétation
autour de qu'est-ce qu'un contexte. Quel est le contexte? Aïe! quel est le
contexte, là, ça se règle
généralement dans une longue explication sur qu'est-ce qui se passe autour, quel est l'environnement, on est
dans un problème.
Donc, si on
n'avait pas le discours haineux ou si le discours haineux était lié à la
violence ou à l'extrémisme violent, bien là ça irait bien, on serait en
train d'échanger sur véritablement sa proposition. Mais là il vient de
comprendre, le collègue, pourquoi je
m'accroche toujours les pieds dans ça, le discours haineux. Après ça, on va
être obligés de mettre «contexte
d'intolérance». Après ça, tout le monde lui a dit : C'est complètement
fou, il faut que vous décriviez, à tout le moins, «discours haineux». Puis on ne s'entend même pas sur la
définition de «discours haineux», puisque la ministre vote systématiquement contre tous les amendements
qu'on amène sur la définition de «discours haineux». On a essayé d'enlever des mots en disant : Collons-nous
pas à Whatcott, collons-nous à des choses qu'on veut, nous autres, au Québec,
il y en a trop là-dedans. Mais non, c'est non. C'est non systématiquement.
Alors, je suis
désolée de voir le collègue se faire refuser des explications qu'il aurait
méritées, je crois, profondément. Il ira
lire les galées, puisque c'est ce qu'on lui laisse. Je pense qu'il est assez
intelligent pour les avoir déjà lues,
d'autant qu'il a un recherchiste avec lui qui a déjà assisté à la commission
parlementaire. Ça fait que, s'il décide de poser la question, c'est
qu'il pensait qu'elle méritait d'être posée.
Alors, M. le
Président, ce que je vais lui rappeler, c'est que la première partie est encore
une partie qui est intéressante. S'il veut
enlever les mots «principalement ceux» et ajouter «propagande intégriste», moi,
je suis tout à fait d'accord. Il peut
le redéposer, on pourra en jaser, moi, je me dis déjà pour. Et, pour le reste,
bien, je trouve ça un peu difficile d'appuyer la deuxième partie,
toujours à cause de la faille qui n'est pas introduite par son amendement, mais
qui est introduite par le discours haineux
dans un contexte d'intolérance qu'on décrit ensuite. C'est ça, la grande faille
de la loi, d'après moi, et la grande
ouverture qui ne devrait pas se faire. C'est là qu'on perd les balises de la
liberté d'expression. Voilà, M. le Président.
Le
Président (M. Morin) : Merci, Mme la députée de Taschereau. M.
le député de Borduas, ça va? Donc, est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement du député de
Borduas? Donc, je n'en vois pas, n'entends pas... Donc, on serait prêt à voter sur le
sous-amendement. Est-ce que le sous-amendement du député de Borduas est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
Le
Président (M. Morin) : Rejeté. Donc, le sous-amendement est
rejeté. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement de la
ministre? Oui, M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Alors, j'aurais un sous-amendement à proposer, c'est le suivant. J'en fais
lecture ou vous préférez faire la distribution avant?
Le Président (M.
Morin) : Oui, allez, allez, faites-en lecture. Après, on le
distribuera.
M. Rochon :
O.K. Alors, modifier l'amendement modifiant l'article 1 de la loi proposée par
l'article 1 du projet de loi en remplaçant, dans l'alinéa introduit par le
troisième paragraphe de l'amendement, les mots «discours haineux» par les mots «discours incitant à la haine» et en
remplaçant les mots «est susceptible d'exposer» par les mots «incite à exposer».
Le Président (M.
Morin) : Merci. Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à
12 h 50)
(Reprise à 12 h 56)
Le Président (M.
Morin) : M. le député de Richelieu, ça va aller?
M. Rochon :
Oui.
Le
Président (M. Morin) :
Vous êtes prêt? Nous sommes de retour à nos travaux. M. le député de Richelieu, quelques
explications?
M. Rochon :
Oui. Alors, notre esprit de collaboration s'illustre par le dépôt d'un nouveau sous-amendement. Je reprends : Modifier
l'amendement modifiant l'article 1 de la loi proposée
par l'article 1 du projet
de loi en remplaçant, dans l'alinéa introduit par le troisième paragraphe
de l'amendement, les mots «discours haineux» par les mots
«discours incitant à la haine» et en remplaçant les mots «est
susceptible d'exposer» par les mots «incite à exposer».
Alors, pour bien se
comprendre, le texte amendé se lirait donc comme suit :
«Est
un discours incitant à la haine, un discours visé au deuxième alinéa qui, aux
yeux d'une personne raisonnable, est
d'une virulence ou d'un extrême tel qu'il incite à exposer ce groupe à la
marginalisation ou au rejet, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion notamment pour que ce groupe soit perçu comme étant
illégitime, dangereux ou ignoble.»
Alors,
vous voyez, M. le Président, que nous réintroduisons la notion, à nos yeux,
essentielle d'intention. Et cette notion
d'intention, il y en a d'autres qui l'ont introduite. Union européenne : «Chaque État membre prend les mesures nécessaires
pour faire en sorte que les actes intentionnels — les actes
intentionnels — ci-après
soient punissables :
«a)
l'incitation publique à la violence ou à la haine visant un groupe de personnes
ou un membre d'un tel groupe, défini
par référence à la race, la couleur, la religion, l'ascendance, l'origine
nationale ou ethnique.» Union
européenne Alors, incitation...
Code criminel du Canada :
«Quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à
la haine — incite à la haine — contre un groupe identifiable, lorsqu'une telle
incitation est susceptible d'entraîner une violation de la paix, est
coupable...»
On parle,
dans le Code criminel canadien, de fomenter volontairement la haine contre un
groupe identifiable. On ne parle pas de fomenter la haine contre un groupe
identifiable, on parle de fomenter volontairement la haine. Alors, vous voyez que nous ne sommes pas les seuls à défendre
ce point de vue, là, qu'il faille insister sur le caractère
intentionnel.
Alors, je
souhaite entendre la ministre sur cette nouvelle suggestion en la rappelant de s'inscrire dans une réelle volonté
de collaboration, un réel esprit de collaboration. Il me semble qu'on n'est pas
très éloignés, là, on précise...
Le
Président (M. Morin) : M. le député de Richelieu, ce n'est pas
dans mon éducation de vous couper la parole, puis je ne permettrai même
pas à la ministre de vous répondre. Compte tenu de l'heure, la commission...
Des voix : ...
Le
Président (M. Morin) : Et j'espère vous revoir tous et chacun à
15 heures, la salle
Louis-Joseph-Papineau. Merci.
Bon appétit.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 10)
Le
Président (M. Morin) :
Bon milieu d'après-midi, mesdames
messieurs. La Commission des institutions reprend ses
travaux. Comme à l'habitude, surveillez les bruits insolites qui nous arrivent
parfois par inadvertance.
Je vous
rappelle que la commission
est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi
édictant la Loi concernant la prévention
et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence
et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la
protection des personnes.
Si on se
rappelle bien, en terminant nos travaux ce midi, nous étions sur un sous-amendement du député de Richelieu.
Peut-être, nous remettre dans l'ambiance, M. le député.
M.
Rochon : Oui. Alors, encore une fois, M. le Président, nous avons agi dans un esprit de collaboration, faisant tout ce qui est en
notre pouvoir, sinon pour convaincre la ministre qu'il faille
spécifiquement s'adresser aux appels à la violence, ce qui est notre conviction absolue — et
je tiens à le rappeler — sinon
pour ça, au moins pour limiter les dégâts qui découleraient...
découleront — je
vais être plus affirmatif que ça — de son projet de loi.
Alors, c'est
dans cet objectif de limiter les dégâts que nous avons présenté notre
sous-amendement introduisant la
notion d'incitation. Et c'est une notion que nous n'avons pas inventée, elle
est présente dans le Code criminel puis elle est dans une décision-cadre de l'Union européenne. Code criminel du
Canada : «Quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à la
haine contre un groupe identifiable, lorsqu'une telle incitation est
susceptible d'entraîner une violation de la paix, est coupable...» Alors, vous
voyez la notion d'incitation. Plus loin dans le Code criminel, on peut lire : «Quiconque, par la communication
de déclarations autrement que dans une conversation privée, fomente volontairement — il y a la notion d'intention ici,
"fomente volontairement" — la haine contre un groupe
identifiable est coupable...» Alors, voilà pour le Code criminel.
Et, dans la
décision-cadre de l'Union européenne, «chaque État membre prend les mesures
nécessaires pour faire en sorte que les actes intentionnels — intentionnels — ci-après
soient punissables — à
savoir :
«a)
l'incitation publique à la violence ou à la haine visant un groupe de personnes
ou un membre d'un tel groupe, défini par référence à la race, la
couleur, la religion, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique.»
Alors, je
vais rappeler notre sous-amendement. En fait, je vais lire le texte tel
qu'amendé, ça va être plus facile à suivre pour les gens qui nous
regardent :
«Est un
discours incitant à la haine, un discours visé au deuxième alinéa qui, aux yeux
d'une personne raisonnable, est d'une
virulence ou d'un extrême tel qu'il incite à exposer ce groupe à la
marginalisation ou au rejet, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion notamment pour que ce groupe soit perçu
comme étant illégitime, dangereux ou ignoble.»
Alors, ce
qu'on a fait, c'est qu'on a modifié l'amendement de la ministre en remplaçant,
dans l'alinéa introduit par le
troisième paragraphe de l'amendement, les mots «discours haineux» par les mots
«discours incitant à la haine» et en remplaçant les mots «est
susceptible d'exposer» par les mots «incite à exposer».
Quand nous
nous sommes quittés pour la pause du repas, M. le Président, mon souvenir est à
l'effet que la ministre démontrait une ouverture à l'égard de ce
sous-amendement. Alors, j'ai hâte de l'entendre là-dessus.
Le Président (M. Morin) : Mme
la ministre.
Mme Vallée :
Alors, M. le Président, je remercie le collègue de cet effort, quand même, qui
démontre toute la volonté et
l'importance du travail de collaboration. Puis je dois vous dire qu'on a
analysé l'amendement vraiment avec rigueur.
Et puis ça tombe bien, l'amendement a été déposé juste avant notre pause, donc
ce qui a permis aux équipes derrière moi
et à mes côtés de regarder chaque mot. Parce que le poids des mots est
important dans une disposition législative, surtout lorsqu'il est
question de définir un concept et de définir des termes.
Alors, effectivement, lorsque
l'amendement a été déposé, je me suis dit : Bon, alors, regardons,
analysons parce que, pour certains
néophytes ou pour quelqu'un qui regarde cet amendement et le compare au projet
actuellement, pourrait dire : Il
y a très peu de distinctions entre les deux textes. Ça s'apparente,
effectivement. Par contre, il y a un élément qui est très important. Notre collègue de Richelieu, tout
à l'heure, faisait référence à des ententes internationales où on mettait
l'accent sur la question d'actes
intentionnels qui devaient être
punis. Alors, M. le Président, il s'agit là d'une volonté de
criminaliser un certain type d'actes.
La
disposition sur laquelle nous travaillons ne s'inscrit pas
dans ce type de législation. Alors, oui, nous avons le Code criminel qui vient criminaliser notamment l'incitation à la haine. Les dispositions sur lesquelles nous travaillons sont des dispositions de nature civile. La semaine dernière et à
quelques reprises auparavant, on a eu quelques échanges sur toute la question
de l'intention derrière le discours. Moi, je sais que j'en suis peut-être un
peu redondante, mais je reviens toujours
avec la décision de la Cour suprême dans Whatcott parce qu'il est important
pour moi que les enseignements de la Cour suprême puissent être suivis avec rigueur par quiconque, quelque juridiction
qui souhaiterait encadrer de façon civile
les discours incitant à la violence, les discours haineux, et, dans Whatcott,
on reprend aussi ce qui avait été mentionné auparavant par la Cour suprême dans Taylor, on nous dit : Ce n'est pas tant l'intention derrière
le discours qui est analysée, mais
bien l'effet du discours sur le groupe qui est visé. Et, par les termes
«incitant à la haine», on se replace, on replace l'attention vers
l'intention et on s'éloigne des paramètres de Whatcott.
Donc,
je vous dirais que, pour moi, il est important que nos dispositions ne s'éloignent pas des enseignements de la Cour suprême pour en assurer la validité. D'autre part — puis c'est un élément que j'ai oublié de vous
mentionner lorsqu'on a eu nos
échanges sur la question de l'intention, il y a deux semaines, je crois — la
députée de Taschereau avait déposé
un certain nombre d'amendements, et on a discuté longuement sur, justement,
les paramètres de Whatcott. Il ne faut
pas oublier, un jour, on arrivera à l'article 20 — parce
que je suis optimiste de nature — et,
à l'article 20, le Tribunal
des droits de la personne et de la jeunesse, lorsqu'il aura reçu une
dénonciation et qu'il aurait statué sur la question, pourra voir à
identifier quelles sont les meilleures mesures de redressement possible dans le
cas qui lui est soumis. Et, à ce moment-là, le tribunal pourrait considérer le caractère
délibéré du discours, et ça pourrait être pris dans l'analyse et dans la
mise en place d'une mesure de redressement qui s'avérerait adéquate dans le
contexte particulier.
L'autre
modification qui est proposée par notre collègue de Richelieu serait
de remplacer les mots «est susceptible d'exposer»
par «incite à exposer». Encore là, pour certains, ça pourrait être un discours
purement sémantique, mais, en amenant
le terme «inciter», on vient restreindre la définition qui, encore une fois, est proposée dans Whatcott et qui nous indique l'importance
d'insister sur les effets que le discours a sur les groupes, et non sur
l'intention derrière celui ou celle qui porte...
• (15 h 20) •
Alors,
de prendre ce sous-amendement là, je crois qu'on viendrait donner des outils à
ceux et celles qui tiennent ce type
de discours là dans des contextes, par exemple, de prêches religieux parce
qu'ils pourraient utiliser l'intention, dire : Ah non! je n'ai pas l'intention requise, je n'ai pas...
Alors, il n'y avait pas d'intention malicieuse derrière les propos
tenus, et ça pourrait, finalement, avoir l'effet contraire de celui qui est
recherché.
Et
puis on est allés voir aussi, évidemment, la définition d'«inciter», et c'est
pousser vivement quelqu'un à quelque chose,
et ça s'éloigne des paramètres de Whatcott. Alors, je vous dirais, par mesure
de prudence, je nous invite à toujours conserver
et garder en tête les enseignements de la Cour suprême parce qu'on est à
l'intérieur de dispositions de nature civile.
Alors, les dispositions criminelles existent, elles relèvent du Code criminel.
On est dans la sphère civile comme on l'était dans le dossier de M.
Whatcott, comme d'autres juridictions canadiennes aussi ont fait. Alors, au
Canada, on a certaines provinces qui ont
aussi légiféré en la matière et l'ont fait à travers leurs organismes de
protection des droits de la personne similaires à la commission des
droits de la personne et de la jeunesse.
Alors,
voilà les commentaires. Ce n'est pas à défaut, par contre, d'avoir analysé avec
rigueur et sérieux l'amendement de
notre collègue. Et, encore une fois, je le remercie parce que ce type
d'exercice là nous permet aussi de réfléchir
et d'essayer de trouver, évidemment, les bons mots, les meilleures expressions
pour définir qui ne nous éloigneraient pas des paramètres de la Cour
suprême.
Le Président (M.
Morin) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui. Merci, M. le Président. Je ne pense pas que notre mission ici soit de
légiférer en fonction de ce qui
plaira ou déplaira à la Cour suprême. La ministre souligne que les mots ont
leur importance, que le choix des mots est important. Nous le savons, et c'est parce que nous le savons que nous
avons voulu bien les peser, ces mots-là, dans le sous-amendement que
tous ici ont sous les yeux en ce moment. La ministre souligne qu'on s'éloigne
des paramètres, voulant que ce n'est pas tant l'intention que l'effet qui est
analysé. Bien oui, on s'éloigne de ces paramètres-là, c'est volontaire, on veut
que la notion, là, d'intention compte.
«Avec le projet de
loi n° 59, n'importe qui va pouvoir porter plainte devant la commission
[...] au nom d'une communauté qu'il
dira — que
cette personne dira — diffamée.
N'importe qui se sentant vexé par un propos identifiant d'une manière ou d'une autre un groupe religieux,
culturel, sexuel ou politique pourra saisir la commission dans l'espoir de faire taire celui qui l'embête.» C'est Mathieu
Bock-Côté qui écrit ça, puis je suis tout à fait à l'aise avec son opinion.
Alors, la commission pourra coller des
amendes aux délinquants, faire cesser de tels discours, censurer les
publications qui les accueillent, décider de ce qu'on peut dire ou pas
dire au Québec.
«Que
de confusion autour du projet de loi n° 59 déposé par Québec pour,
notamment, lutter "contre les discours haineux et les discours incitant à la violence"», écrit Josée
Boileau. «...son véritable objectif est de contrer le radicalisme et l'endoctrinement, et il le fait au prix
d'énoncés qui laissent déjà entrevoir de vives dérives démocratiques.» C'est ça
que, de ce côté-ci de la table, on veut éviter.
«La ministre se défend — c'est Mme Boileau qui fait remarquer
ça — répète
qu'il ne s'agit aucunement de censure, mais
de contrer les appels à la violence. Reste que l'un des intervenants — fait-elle remarquer — qui appuient — fait remarquer Boileau, là — le projet de loi a donné l'exemple des radios
de Québec qui tiennent parfois des propos "déshumanisants pour certaines minorités"... Cette seule
évocation témoigne de la dangereuse brèche que le gouvernement libéral s'apprête à ouvrir. Qu'est-ce que le
discours haineux? Il nous semblait — écrit Josée Boileau — que l'attentat de Charlie Hebdo avait été l'occasion de dénoncer la censure au profit du débat, du boycott — ma collègue de Taschereau a beaucoup parlé de ça, hein? — de la critique, de la dénonciation. Mais faire taire, non.» Pas faire
taire, dénoncer, débattre, critiquer, voire boycotter.
Une autre qu'on a beaucoup entendue,
c'est Mme Fatima Houda-Pepin. Le
gouvernement fait le jeu, selon elle, des
islamistes avec son projet de loi sur le discours haineux. Selon elle, «le projet de loi n° 59 donnerait une protection juridique aux islamistes. D'une part, il ne
comprend aucune disposition particulière pour contrer leur discours politique
et religieux. De l'autre, il leur permet de
dénoncer ceux qui les critiquent à la commission[...]. "Si le projet de
loi n° 59 avait
été en vigueur en 2005, au moment où j'ai lutté contre la charia — a dit Mme Houda-Pepin — je
n'aurais pas pu le faire, a-t-elle dit. J'aurais été attaquée et
condamnée pour islamophobie par ces groupes."»
Alors,
il y a plein d'opinions comme celles-là, là, on pourrait passer l'après-midi
à vous lire des textes journalistiques,
des opinions d'experts. Moi, il me
semble que le sous-amendement que nous avons proposé... Et on irait bien plus loin, hein, je vous rappelle. Nous, on souhaiterait un projet de loi qui s'attaque vraiment aux appels à la violence, mais là on fait un bout, là, on est dans un esprit
de collaboration, là. Je suis bien déçu que notre sous-amendement ne trouve pas preneur du côté du gouvernement, M. le Président.
Le Président (M.
Morin) : Merci. Mme la ministre, avez-vous des choses à
ajouter?
Mme
Vallée : Bien, en fait, j'écoutais notre collègue qui relisait
des citations d'articles qui ont été lues à maintes reprises, vous savez, je l'ai mentionné, moi
aussi, je vais me répéter, mais parfois c'est d'intérêt public d'adopter des
mesures qui peuvent, d'une certaine
façon, enfreigner des droits prévus aux chartes parce qu'elles sont justifiées
dans le cadre d'une société libre et
démocratique. Ce sont les enseignements de notre cour. Et puis le collègue nous
disait tout à l'heure : Vous savez,
on n'a pas nécessairement à se coller sur les enseignements de la Cour suprême,
on n'a pas nécessairement à faire ce
que la Cour suprême nous indique. Je vous dirais, M. le Président, dans une
société de droit, je pense que c'est important de travailler à l'intérieur des paramètres et des interprétations faites
par la Cour suprême. La Cour suprême nous donne bien souvent, dans le cadre de ses jugements, des paramètres à
l'intérieur desquels, justement, il est possible d'adopter des mesures qui enfreignent un droit prévu aux
chartes, mais sont justifiables dans le cadre d'une société. Et c'est pour ça, dans un contexte comme ça, c'est d'autant plus
délicat et c'est d'autant plus important de se coller sur les enseignements
de la Cour suprême.
Et
puis je vous dirais, le meilleur exemple, le meilleur exemple de ça, et un
exemple qui nous a touchés récemment, c'est
le dossier des soins de fin de vie. La Cour suprême a été appelée à trancher et
à statuer à savoir si les soins de fin de vie se justifiaient dans une société libre et démocratique ou si ça
constituait un acte criminel, et la Cour suprême a établi des balises. C'est sûr qu'au Québec, de notre
côté, on avait légiféré, mais les législatures ailleurs au Canada auront,
certaines d'entre elles, à prévoir
des dispositions législatives, et ces dispositions législatives là, bien, pour
les guider, seront inspirées des paramètres de la Cour suprême.
Et
c'est un petit peu... et c'est ce que nous faisons, c'est... Nous ne sommes pas
la première législature à souhaiter encadrer
les discours haineux, les discours incitant à la violence à l'intérieur de
dispositions civiles. Il existe au Canada des
dispositions de nature civile, et certaines d'entre elles ont
fait l'objet d'analyse par la Cour suprême. Alors, riches de cette
analyse, nous avons l'opportunité d'élaborer un texte qui sera respectueux des
droits et libertés.
• (15 h 30) •
Le Président (M.
Morin) : Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : M. le Président, j'aimerais avant régler une chose. Ça fait
plusieurs fois que la ministre dit : On n'est pas en matière
pénale, on est en matière civile. Alors, j'aimerais ça que la commission... il
y ait quelqu'un de la Commission des droits
de la personne et des droits de la jeunesse, j'aimerais ça qu'il nous explique
pourquoi, dans leur mémoire — si elle veut lui donner — ils ont écrit ceci en page 2 : «La
commission, qui a été préalablement consultée, constate que le gouvernement a proposé au législateur une approche qui
institue une loi spécifique comportant des infractions de nature pénale...» On est avec des infractions
de nature pénale. Quand c'est du civil et qu'on va dans un recours contre
quelqu'un, on a recours contre la victime.
Et, s'il y a une somme qui est déboursée, ça va aller à la victime. Là, on est
dans le monde civil. Mais, quand il y a une
pénalité imposée par le gouvernement et que l'amende va au gouvernement,
c'est une pénalité. C'est pour ça que la commission dit : Infractions de nature
pénale.
Alors,
comme il y a ici, là, une distinction entre ce que dit la commission et ce que
dit la ministre, j'aimerais ça que la commission s'exprime là-dessus, M.
le Président, si la ministre veut lui donner la permission.
Mme
Vallée : M. le Président, on est dans l'étude article par
article, là, on a eu la chance... la commission était présente lors des consultations. Alors, pour le
moment, je vous dirais que nous allons continuer l'étude article par article.
Le Président (M.
Morin) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais :
J'en conclus que la commission est ici au service de la ministre, et non pas
des parlementaires. C'est un choix.
Comme c'est elle, à la fin, qui aura à juger de cette loi, moi, j'ai pensé que
ça aurait été intéressant d'entendre pourquoi la commission contredit la ministre dans
tout ce qu'elle dit depuis... D'autant que la loi elle-même contredit la
ministre. Article 20 de la loi édictée par cette loi, O.K., article 20, le dernier
alinéa dit ceci : «Les sommes versées en application
du premier alinéa sont portées au crédit du Fonds Accès Justice.» Elles ne sont
pas portées à la victime. Elles ne
sont pas portées à la victime, ça s'en va au gouvernement, au Fonds Accès
Justice. C'est une pénalité, c'est... Bien, la commission dit que c'est pénal. Ça fait que moi, j'essaie de lire en
fonction de la commission, qui me dit ça. Je vois que l'argent ne va pas
à la victime, il va au Fonds Accès Justice... bien, qu'il n'est pas directement
à la victime.
Le Président (M. Morin) : Mme
la ministre.
Mme Vallée : En fait, M. le
Président, il ne faut pas oublier, là, les dispositions visent un groupe
protégé par l'article 10, pas un individu.
Donc, ces dispositions-là ne visent pas, par exemple, Stéphanie Vallée, elles
visent un groupe. Et donc, les sommes, comme on a un groupe qui est
touché, qui est visé par les propos, les sommes sont versées au Fonds Accès Justice. Puis on aura l'occasion de
jaser du Fonds Accès Justice, mais le Fonds Accès Justice sert notamment
à financer l'aide, l'accompagnement aux victimes. Alors, c'est pour ça que les
sommes sont dirigées vers le Fonds Accès Justice, qui soutient notamment les
victimes.
Mme
Maltais :
C'est comme ça qu'on se retrouve en matière pénale, c'est très clair pour moi.
Alors, ça, c'est une chose, mais je
voulais juste le corriger, là, parce que ça ma fatigue, ça revient tout le
temps. Donc, je suis d'accord avec la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, pas avec la
ministre. Je suis en désaccord avec la ministre, je suis en accord avec
la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.
Maintenant, arrêt Whatcott, je prends le mémoire
de maître...
Une voix : ...
Mme
Maltais :
Non, je vais continuer. Vous voulez rajouter quelque chose là-dessus? Pas de
problème, allez-y. Excusez-moi.
Le Président (M. Morin) :
Oui.
Mme Vallée : En fait...
Mme
Maltais : Avec
plaisir. Non, non, mais je cède avec plaisir...
Mme Vallée :
Non, mais je voudrais quand même... Il y a des choses qu'on doit prendre en
considération, là, le mémoire... lorsque la commission des droits de la
personne et de la jeunesse a déposé son mémoire, on avait un projet de loi qui,
notamment, prévoyait la constitution d'une liste. Lors des échanges, la commission
s'est dite mal à l'aise avec la liste, comme
d'autres intervenants. La liste, bon, on avait expliqué pourquoi
cette liste-là avait été mise sur pied,
c'était notamment pour donner des moyens, des outils aux municipalités,
qui nous ont dit : Finalement, ce n'est pas nécessaire. Donc, on l'a
retirée.
Là, il faut
aussi considérer l'ensemble des amendements qui ont été déposés d'entrée de jeu dans le projet de loi,
qui viennent changer la donne. C'est-à-dire
que bien des réserves exprimées par la commission des droits étaient en fonction d'une
rédaction qui a été amendée à la lumière des commentaires qui ont été formulés.
Mme
Maltais : Mais, M. le Président, je veux juste rappeler que la commission dit que c'est une approche qui institue une loi spécifique comportant des
infractions de nature pénale, et les infractions de nature pénale sont toujours
là... Bon.
Deuxièmement,
le mémoire assez intéressant de Me Grey et Me Latour, page 11 : «Arrêt
Whatcott à distinguer. Notons
enfin que, dans son mémoire précité[...], la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse s'appuie sur
l'arrêt Saskatchewan Human Rights Commission c. Whatcott [...] pour affirmer
que "[...] la Cour suprême du Canada
[aurait] conclu à l'unanimité en 2013 que
les lois sur les droits de la personne visant les propos haineux sont conformes
à la Charte canadienne des droits et libertés de la personne..."
«Or — je
continue à citer le mémoire — il faut constater que la législation de la Saskatchewan soumise à la Cour suprême dans Whatcott était fort différente de la
législation proposée ici et ne contenait aucunement l'arsenal de mesures
drastiques et contraignantes incluses dans
le projet de loi n° 59 : dénonciations anonymes — ça,
on va aller voir dans les amendements — restrictions
préalables à la diffusion, amendes exorbitantes — il y a un changement dans les amendes, il y a quand même
encore des amendes — registre...»
On verra ce qu'on en fait, mais il
n'y a plus de registre public. Mais
il y a quand même une grosse différence avec la loi de la
Saskatchewan, là. On nous sert l'arrêt Whatcott, mais c'est ce que je dis, jamais sur le fond de cette loi. Sur
la capacité constitutionnelle d'atteindre aux droits et à la liberté
d'expression de cette façon-là, ça, ça n'a pas été jugé. Sur le fond
même, ça n'a pas été jugé.
Je rappelle
que la ville de Montréal a dit de se poser des questions et je rappelle
que le Barreau a dit de se poser des
questions. Je ne comprends pas que la ministre, elle, ne se pose pas de questions. Ça fait que l'amendement de mon collègue, en essayant de resserrer toujours
et en parlant d'incitation à la haine au lieu... Bon, on ne veut pas avoir
«incitation à la violence»,
«incitation à la haine» au lieu de «haineux». La différence qu'il fait — puis
là il est intéressant là-dedans — la
différence qu'il fait... Mais ça, nous, on est d'accord avec ça, la différence
qu'il fait, c'est qu'on ne sanctionnera pas le discours, on va... Parce que l'intention, c'est
d'interdire le discours à l'heure actuelle. Nous autres, ce qu'on veut,
c'est d'interdire l'effet négatif sur l'ordre public ou le vivre-ensemble,
c'est une...
Ce qu'on
cherche à faire normalement, là, dans le débat qu'on avait eu, c'est de faire
que les fomenteurs de désordre, ceux
et celles qui veulent que les gens rompent avec le vivre-ensemble,
les fomenteurs... les fomentateurs... fomentateurs, pas fomenteurs... pas faux menteurs, fomentateurs,
alors les fomentateurs de désordre, eux et elles, soient interpellés, soient
visés par la loi. Ça fait qu'en disant «incite à la haine» et
«incite à exposer un groupe», bien là, oui, il y a l'intention, tout à fait, puis il y a des pénalités si quelqu'un a
l'intention de faire ça. Puis ça, à notre avis, ce n'est pas inconstitutionnel,
alors que la loi actuelle, à notre
avis, mais je vous... Je ne dirai même pas à notre avis, de l'avis de la ville
de Montréal, exprimé comme ça, là,
tendrement exprimé, mais bien clair, de l'avis du Barreau, tendrement exprimé,
mais assez clair, merci, la loi, elle ne passera probablement pas le
test.
Mais, si on met «incitation à la haine», là, on
est exactement, exactement dans l'esprit de ce qu'on veut faire comme société puis dans l'esprit du Code criminel. On n'est
même pas dans l'appel à la violence. Moi, je crois encore que c'est l'appel à la violence qui devrait
être... Mais mon collègue fait faire un pas en disant : Au moins, au
moins, ne pénalisons pas le discours
en soi. Mais que le discours soit un incitateur à troubler l'ordre public et le
vivre-ensemble, bien là, là, on fait un pas, on vient de baliser un peu
plus étroitement. C'est ça, l'esprit.
Ça fait que
c'est un bon... Oui, c'est l'intention. Je vous rappellerais que mon collègue
de Lac-Saint-Jean, qui est quand
même un juriste constitutionnel
d'assez bon niveau, est venu ici parler de l'intention puis que nous, on pense
que l'intention doit être là. Sans
intention, on va se planter. Bien, c'est une belle manière de le ramener tout
en laissant... Je vais vous dire, je
trouve ça déjà encore très large, mais ça nous donnerait l'impression, au
moins, de se ramener dans un ordre des choses plus naturel dans une société
qui croit à la liberté d'expression.
• (15 h 40) •
Le
Président (M. Morin) :
Est-ce que j'ai des commentaires du côté de la ministre? Ça va. Oui, Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) :
Oui. Bonjour, tout le monde. En ce qui a trait à l'amendement que vous avez déposé, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt. Je crois,
tout comme vous, qu'il est important... D'ailleurs, il y avait
un amendement que nous avons soumis qui a été battu en
mon absence, là, je crois qu'il est important de bien, bien circonscrire le
type de discours auquel on veut s'attaquer.
On revient toujours, là, dans le cadre de la radicalisation et des
discours de ces intégristes religieux qui endoctrinent nos jeunes parce
que c'était vraiment l'esprit dans lequel ce projet de loi a été présenté, ce projet de loi a été déposé, c'est ce à quoi il faut s'attaquer. Nous le disons depuis
le printemps dernier qu'il faut être précis, que le projet de loi est trop large. C'est pour ça qu'on tente de
travailler pour circonscrire, circonscrire, circonscrire, ce qu'il faut
continuer de faire dans notre réflexion, parce que moi, je crois, tout comme le
croyait à l'époque le premier ministre, M.
Philippe Couillard, qu'il fallait,
comme il le disait en décembre 2012, s'attaquer à l'intégrisme religieux, comme
il l'a dit lorsqu'il a été élu premier
ministre au printemps 2014, qu'il
fallait s'attaquer à l'intégrisme religieux. Alors, je crois, tout comme
le premier ministre Philippe Couillard l'a cru...
Le Président (M. Morin) :
Excusez, Mme de Montarville, vous n'avez pas...
Mme Roy
(Montarville) :
Oui. Ah! excusez-moi, le premier ministre.
Le Président (M. Morin) :
Oui, ça fait deux fois. La première fois, je me suis dérhumé, mais...
Mme
Roy
(Montarville) : Je ne peux pas dire le nom, excusez-moi. Je m'excuse, c'est une
déformation professionnelle, j'ai l'habitude de nommer les gens...
Le Président (M. Morin) :
Oui, oui, je comprends tout ça, c'est simplement que je me dois de vous
avertir.
Mme Roy
(Montarville) :
Parfait. Alors, tout comme notre premier
ministre l'a dit au printemps 2014
lorsqu'il est devenu chef de la
province, premier ministre de la province, il faut lutter contre
l'intégrisme religieux. Moi, j'ai cru à ses paroles et j'y crois toujours. Alors, c'est l'importance de circonscrire. Nous
avons fait un amendement dans le but de circonscrire davantage le type de discours auquel il faut s'attaquer
pour ne pas, justement, porter atteinte à la liberté d'expression d'une façon qui soit trop large. Nous
le disons depuis le début. Actuellement, nous trouvons que c'est encore trop
large.
Avec tout le
respect que j'ai pour mon collègue et l'amendement qui a été déposé, je m'inquiète un petit peu parce qu'il y aurait une nuance à apporter. Je crois que
les intentions de l'opposition officielle sont nobles. Cependant, il y a un
petit problème légal si on fait ça.
Et je m'explique, et la ministre pourra nous corriger. Vous voulez, dans votre
sous-amendement, remplacer le mot
«discours haineux» par les mots «discours incitant à la haine». Mon problème,
c'est que, si on enlève le mot «discours haineux», on enlève l'objet. Si
vous conservez «discours incitant à la haine», c'est l'incitation, c'est le
discours incitant...
Mme
Maltais : Tout à
fait.
Mme Roy
(Montarville) : ... — oui, attendez — qui est prohibé, et non le discours haineux.
Et c'est là qu'on a un problème parce
qu'il faut s'attaquer au discours haineux selon la jurisprudence. Alors, c'est
pour ça qu'avec tout le respect je vous dis que, malheureusement, ça nous prend le discours
haineux parce qu'il englobe ces discours auxquels nous voulons nous attaquer, les discours des...
enfin, qu'il faut circonscrire davantage et préciser davantage. Mais, si on ne
met que l'incitation, donc c'est
l'incitation qu'on prohibe. Mais ce n'est pas l'incitation qu'on veut prohiber,
c'est le discours haineux qu'on veut
prohiber. Alors, c'est pour ça que je crois qu'on ne peut pas l'enlever, mais
je vous le soumets bien respectueusement.
Mais je persiste et signe à dire que nous devons circonscrire davantage le
discours auquel il faut s'attaquer pour
ne pas brimer la liberté d'expression générale, mais bien la liberté
d'expression de ces agents de radicalisation, de ces prédicateurs autoproclamés, de ces gens qui tiennent des discours,
M. le Président, qui vont carrément à l'encontre de notre Charte des droits et libertés, de nos
valeurs, de notre égalité entre les
hommes et les femmes. Un prédicateur qui nous dira qu'une femme ne peut pas sortir de chez elle si elle n'est pas
accompagnée, qu'on a le droit de battre sa femme, écoutez, ça, ce discours-là est un discours qui va
carrément à l'encontre de l'égalité entre les hommes et les femmes, donc
à l'encontre d'un droit protégé par nos chartes des droits et libertés.
Donc, il faut
le circonscrire, et je pense qu'on est là pour travailler de bonne foi à
circonscrire ce discours-là. Mais, tout
comme notre premier ministre le disait, il faut s'attaquer à
l'intégrisme religieux. Et ça, c'est le mot d'ordre. Et je pense que la population, elle le comprend aussi. La population
comprend très, très bien qu'il ne faut pas s'attaquer à tout type de discours, et, pour ça, bien, si vous
enlevez le mot «discours haineux» pour le remplacer par «discours incitant»,
je vous soumets que c'est l'incitation qui
devient prohibée, et non le discours haineux lui-même, donc on n'avance
pas. C'est un petit commentaire que je voulais formuler ici
avec tout le respect que j'ai pour mes collègues, mais je pense que
c'est important de le garder.
Le Président (M. Morin) :
Merci, Mme la députée de Montarville. M. le député de Richelieu.
M. Rochon : Oui. Bien, écoutez, ma
collègue de la deuxième opposition référait à des propos du premier ministre. La ministre a noté mon intérêt pour les
opinions entendues à propos de ce projet de loi, mais je veux aller plus
loin que ma collègue de la deuxième opposition pour rappeler que le premier
ministre, le 29 août 2015, il promettait d'amender le projet de loi n° 59 pour ne pas brimer avec ce projet
de loi là la liberté d'expression. Il donnait à entendre que ce projet
de loi n'allait prohiber que l'appel direct à la violence : «"Le but,
disait-il, n'est pas de réduire la liberté d'expression
au Québec, mais d'en indiquer la limite, qui, à mon avis, requiert le consensus
et va recueillir le consensus des
citoyens[...]. On peut dire des bêtises. On peut dire toutes sortes de choses,
mais on ne peut pas appeler à la violence."
«Le projet de
loi n° 59 sera ainsi amendé afin de préciser la "démarcation"
entre l'acceptable et l'inacceptable, le
permis et l'interdit.» Ouvrez les guillemets, c'est toujours le premier
ministre qui parle : «"Elle doit être explicite et définie. La ligne pour moi, c'est l'appel direct à
la violence", [...]cherchant à apaiser les inquiétudes des défenseurs de
la liberté d'expression.»
Alors, ça demeure notre premier choix. En dépit,
là, des sous-amendements, là, que nous présentons, là, pour limiter les dégâts, notre premier choix, on ne le
rappellera jamais assez, c'est de nous attaquer aux appels à la violence.
On réglerait ainsi bien des choses.
Le Président (M. Morin) : Ça
va? Donc, Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : M. le Président, je vais un peu réagir aux propos de ma
collègue de Montarville, qui a tout à fait raison sur sa prémisse, qui est qu'on est normalement ici pour
s'attaquer au discours religieux... l'intégrisme religieux. Pas au discours religieux, à l'intégrisme
religieux et à la radicalisation. On est tout à fait d'accord, mais l'objet du
projet de loi n'est pas ça. C'est ça,
le problème. C'est ça, le problème. Alors, ce qu'a proposé mon collègue... Puis
je l'ai dit, là, nous autres, ce
n'est pas notre objectif, là. Améliorer cette loi-là, là, sur la partie du
discours haineux, là, ce n'est pas notre
objectif, ça ne devrait pas être là. C'est le discours incitant à la violence
qui était l'appel du premier ministre Couillard au mois d'août. Il a
fait un appel en disant : La ligne, ça va être l'appel à la violence.
M. Rochon : Premier ministre tout
court.
Mme
Maltais : Hein?
M. Rochon : Premier ministre tout
court.
Mme
Maltais :
Premier ministre, pardon C'est que vous m'avez entraînée dans un chemin dans
lequel je vais rarement.
Le Président (M. Morin) : Je
vais essayer de ne pas me tromper moi-même.
• (15 h 50) •
Mme
Maltais : Oui, d'accord, M. le Président. Donc, c'est l'appel à la
violence. Et la lutte, c'est l'intégrisme religieux. C'est ça, le départ. Le problème, c'est qu'actuellement on
est devant un mur. Vous avez manqué les quelques dernières séances, nous
avons essayé de ramener des balises de ce projet de loi là autour de la lutte à
l'intégrisme religieux menant à la
radicalisation. On a essayé, on s'est fait dire non. Et puis votre collègue qui
est venu, le député de Borduas, a essayé de ramener ça au discours
religieux, on s'est fait dire non.
Alors, ce que
propose mon collègue, c'est ce qu'on appelle en bon franglais du «damage
control». C'est-à-dire que le
discours qui va être prohibé ne sera pas que le discours intégriste religieux,
et il ne sera pas que le discours menant à la radicalisation, tous les types de discours
haineux — puis en
correspondant ensuite à la définition, là, d'une virulence extrême, telle que susceptible d'exposer un
groupe, ta, ta, ta — seront
prohibés. Ça fait que ce qu'on fait finalement, c'est d'essayer de baliser un petit peu. Ça fait
qu'entre «discours haineux» et «discours incitant à la haine» on ajoute
l'intention pour se sortir de l'espèce de puits sans fond dans lequel,
d'après nous, on s'entraîne.
Alors, au
lieu d'être dans un discours haineux et d'attaquer le discours, on veut, au
moins, s'assurer que la personne qui
va porter ce discours ait une intention d'entraîner d'autres, un fomentateur de
trouble, un fomentateur de haine, un fomentateur
de discrimination, un fomentateur. C'est que, là, on essaie... Oui, ça s'attache
à l'intention, mais parce que, systématiquement,
le gouvernement a refusé tout, tout, tout ce qui permettait de baliser un peu
mieux cette loi-là puis de la ramener vers une loi contre la
radicalisation.
Si le
gouvernement avait enlevé, par exemple, «dans un contexte d'intolérance», bien
là on saurait qu'on est en train de
travailler sur le discours haineux dans un contexte d'endoctrinement ou de
radicalisation menant vers l'extrémisme violent. Là, on serait dedans, puis là on n'aurait même pas, probablement,
proposé «incite» parce que le discours haineux serait dans le cadre de la radicalisation et de l'endoctrinement. Là, on
parle, puis là on en parle, puis on regarde, puis on travaille, puis on
essaie d'améliorer la loi.
Mais là c'est refus total. C'est ça, le
problème. C'est pour ça que, je dirais, c'est un pis-aller. C'est-à-dire que, là, ce que je comprends, c'est qu'on va
s'avancer dans la loi, puis, une fois qu'on va avoir balisé l'article 1, la loi
va passer des amendes, puis il y a un
tribunal qui va juger de la liberté d'expression hors de... On n'est plus dans
«hors de tout doute raisonnable», là,
on est dans la prépondérance de la preuve. Tu sais, il y a une mécanique que ça
entraîne après.
Mais, comme
on nous refuse systématiquement la balise de départ et que je pense que le
gouvernement rejette systématiquement
tout ce qui nous entraîne vers la lutte à l'intégrisme ou au radicalisme
religieux, point, bien, au moins, en essayant de passer cette petite
chose là, on balise un peu mieux une loi qui n'a pas de sens. Autrement dit,
là, on s'organise pour que ça ne fasse pas
trop de dommages. Puis je comprends, je suis d'accord avec vous, je n'en aurais
pas besoin, de cette balise-là, s'il
y avait, du côté du gouvernement, un peu de compréhension sur ce qu'on veut
faire ou votre intention, qui est la
même que la mienne, vraiment. Mais, en attendant, il faut bien baliser quelque
part parce que le train est parti.
Puis, quand le train est parti, bien, il faut s'asseoir dans les wagons puis
essayer de trouver la position la plus confortable
possible, M. le Président. Ce n'est pas du wagon-lit qu'on a ici, là, c'est de
la chaise carrée puis raide. Ça fait qu'on
essaie d'ajouter un petit coussin. C'est un petit coussin qu'on essaie
d'ajouter. C'est ce que je voulais dire à ma collègue.
Je n'aurai pas mon chocolat, je le sens.
Des voix : Ha, ha, ha!
Mme
Maltais :
Pour les gens, je m'excuse de cette petite intervention. Et parfois, même si on
travaille très fort à échanger, challenger sur les opinions, on a quand
même un certain respect, alors on se permet des petits gags.
Le Président (M. Morin) :
Bien, est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement du député
de Richelieu?
Mme
Maltais : Bien,
moi, je vais encore intervenir. Parce que, là, j'ai parlé à ma collègue de
Montarville.
Le Président (M. Morin) : Ah!
bien, vous avez tout le loisir de le faire, chère madame.
Mme
Maltais :
Merci. Alors, je vais faire un dernier rappel à la ministre là-dessus. Je le
sais que, pendant la pause... Puis ce
n'est pas anodin qu'on ait déposé avant la pause, on pensait qu'il y avait là
matière à réflexion. Et c'était intéressant, ça a permis aux juristes de regarder, mais on ne trouve pas... Il y a
une intention, là, actuellement au gouvernement, c'est d'imposer le projet de loi n° 59 — de plus en plus, c'est clair — dans sa facture actuelle, dans sa facture
actuelle, malgré la commission
parlementaire. Puis c'est ça, ces mots-là sont lourds de conséquences pour un
gouvernement et pour une population ensuite.
Parce que ce
n'est pas le gouvernement, là, qui va être... À court terme, le gouvernement,
là, les gens ne sont pas contents,
ils le disent. La revue de presse
contre le projet de loi n° 59 est hyper impressionnante. Je n'ai jamais
vu... Du Globe and Mail jusqu'au Devoir, là, tout le monde dit que ça n'a pas de bon sens dans cette mouture-là. C'est décrié,
c'est une atteinte à la liberté
d'expression qui n'est pas acceptable. C'est ça, le message général. Mais là
c'est le gouvernement qui reçoit ce message-là. Mais après, quand il va
être en application, ce projet de loi là, c'est les Québécois
et Québécoises qui
vont les avoir, là, les résultats de l'application de cette loi-là. Il y a des dommages politiques
pour le gouvernement, mais, évidemment,
ça ne se passionne pas nécessairement tous les jours dans les cours d'école ou dans les
milieux de travail pour la liberté
d'expression, sauf quand arrivent des événements terroristes. Je suis Charlie, ça, tout le monde en est. Je suis liberté
d'expression, tout le monde en est. Mais ça, c'est l'anti Je suis Charlie,
c'est l'anti «je suis liberté d'expression». C'est la réponse que personne ne veut. Alors, au moins, aidez-nous.
Aidez les gens qui vont être pris avec cette loi-là. Et je dis pris avec
cette loi-là, M. le Président. Pris, on va être mal pris avec cette loi-là.
Alors, moi, je trouve que ce «incite à» fait
qu'on cherche véritablement les personnes qu'on veut chercher. Est-ce qu'on veut protéger les personnes par cette
loi-là, les groupes discriminés, alors que les groupes discriminés sont
venus nous dire : Ne faites pas ça, ou bien est-ce qu'on veut lutter
contre la radicalisation et les propos incitant à la violence? C'est ça, là, dans lequel on est. Mais les groupes
discriminés, ils disent : Ne faites pas ça. Ça fait que dire : On
veut protéger les groupes discriminés, puis
l'argent va aller dans le Fonds d'Accès à la justice puis
va être redistribué aux groupes discriminés... Les groupes discriminés, ils ont dit : Ce
n'est pas la bonne manière, ce n'est pas comme ça. Ils ne sont pas là
pour garnir les fonds du gouvernement non plus, là. Alors, c'est ça, la
terrible réalité, c'est que ce sont les Québécois
et les Québécoises qui vont payer. Ils vont payer financièrement, mais ils vont
payer cher parce que toucher à la liberté d'expression, ça coûte cher à
une société.
Alors, ces
mots d'«incite» qui ramènent à l'intention, qui ramènent à... il faut être sûr
que c'est une personne qui, volontairement,
fait un geste qui incite à la haine et à la discrimination, c'est minimal, M.
le Président. Ce n'est même pas notre
demande, c'est minimal. Ce n'est même pas notre demande. Notre demande, c'est
l'appel à la violence, c'est l'appel
que le premier ministre a fait à la ministre. Ça, c'est notre vision des
choses. Mais «incite à la violence», c'est réparer un petit peu les
dégâts que cette loi pourrait causer. Un petit peu.
Je reviens
sur le côté pénal, bien, il y a bel et bien des pénalités qui vont s'en aller
dans les fonds gouvernementaux, le
Fonds Accès Justice, qui vont être utilisés après ça. Mais j'ai la commission
des droits de la personne et de la jeunesse qui dit que c'est pénal, mais on ne peut pas l'entendre, la commission
des droits de la personne et de la jeunesse. Elle n'est pas ici pour les parlementaires, elle est ici pour
le gouvernement. Je ne pense pas qu'on avance beaucoup dans cette loi-là
actuellement. On veut la bonifier, on veut
resserrer comme la commission parlementaire nous a envoyé un message. Les
auditions en commission parlementaire, ça a été d'envoyer le message :
Resserrez les balises de cette loi.
Mon collègue
le député de Richelieu dit : Je vais resserrer en mettant, au lieu de
«discours haineux», «discours incitant
à la haine». Il faut qu'il y ait une intention que la personne veut de la
haine. Écoutez, ma collègue de Montarville disait tout à l'heure : Si quelqu'un dit qu'il faut battre les
femmes, bien, c'est une incitation à la haine, mais c'est aussi une
incitation à la violence, c'est déjà couvert. C'est déjà couvert. Quelqu'un qui
incite à battre une femme, là, ou quelqu'un
qui a un discours qui dit qu'il faut battre les femmes, c'est couvert par
«incitation à la violence», c'est considéré comme un geste de violence
inacceptable, hein, mettons, minimalement.
Alors, moi,
je reviens à la question que nous ont lancée d'entrée de jeu Me Grey, Me
Latour : De quoi veut-on nous protéger? De l'incitation à la haine
ou du discours haineux? De la radicalisation ou de l'intolérance? De la
radicalisation, c'est clair. De l'incitation à la violence, c'est clair, c'est
unanime. Du discours haineux et du contexte d'intolérance, c'est là qu'il y a
un problème. C'est là qu'il y a un problème, M. le Président. Merci.
• (16 heures) •
Le Président (M. Morin) :
Merci. Est-ce que j'ai d'autres interventions? Oui, Mme la députée de...
Mme Poirier : Hochelaga-Maisonneuve.
Le Président (M. Morin) : Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. J'ai écouté l'explication de la ministre
attentivement parce que je trouve la proposition de mon collègue fort intéressante, et la réponse
de la ministre m'interroge beaucoup. Quand elle nous
dit : Que volonté soit de nature
civile, et non criminelle, je peux comprendre, mais je ne veux pas comprendre.
C'est vraiment ce que
je ressens. Pour moi, quelqu'un qui incite à la violence et qui a des propos qui
incitent à la violence, il faut que ce
soit de nature criminelle, il faut que ce soit pénalisant de façon
importante. M. le Président, on n'est pas dans l'insulte banale. Pour moi, il y a une gradation entre des
propos malaisants, des propos blessants et ce qu'on a appelé le discours
haineux, que mon collègue souhaite modifier
pour «discours incitant à la haine», parce
que les mots «discours incitant
à la haine», à mon avis, parlent beaucoup plus et donnent le ton à la volonté.
Le discours qui incite les personnes qui le disent...
sont des propos tellement graves, et il faut que ce soient des propos très
graves que l'on veuille encadrer ici, et non pas des propos juste qu'on
pourrait qualifier de nature blessante. Il faut que la hauteur de l'effet des
propos soit tellement blessante que ça amène la personne ou le groupe à de la
haine, et là on n'est plus dans le propos blessant.
Si, M. le Président, je vous dis que je n'aime pas votre cravate, ça peut être blessant
pour vous. Je vois votre réaction, ça
vous choque. Ça vous choque. Je ne vous ai pas blessé, ça vous choque, et on
est dans la gradation. Si je vais avec des propos plus forts, peut-être
que je vais vous blesser, mais je n'aurai pas un propos qui va inciter à la
haine. Et le mot «inciter à la haine»
devient collectif en tant que tel parce
que je peux amener d'autres personnes
avec moi quand je vais tenir ces
propos-là. Mon propos peut provoquer d'autres personnes à embarquer dans mon
propos et à vous haïr, finalement, je vais vous dire bien franchement, ce
qui n'est pas mon intention, M. le Président, vous le savez bien.
Mais c'est de
ça dont on parle, il y a une forme de gradation. On avait le dialogue sur
la hiérarchisation des droits hier...
avant-hier... je ne me rappelle plus, mais c'est un peu ça. Le propos que l'on
veut bannir ici, que l'on veut venir dire
qu'on n'en veut pas dans notre société, qu'on veut, finalement, interdire, bien,
c'est celui qui incite soit celui qui le tient ou les gens autour à la haine, ce qui est très différent pour moi que de nommer juste
«discours haineux». Celui qui va provoquer l'autre à peut-être un geste
haineux, un geste de violence en tant que tel — et on l'a vu avec tout le
volet endoctrinement — ça va amener des jeunes à aller combattre
ailleurs et avoir, justement, éventuellement des gestes de violence en tant que tels. C'est un discours qui
est tellement fort qu'il va venir faire en sorte de créer un espace de
violence.
Alors, je ne comprends pas quand la ministre
nous dit : «Incite à exposer» pourrait restreindre. Moi, à mon avis — puis on peut ne pas être d'accord, puis
c'est bien correct — «incite à
la haine» ne vient pas restreindre. Bien au contraire, ça vient ouvrir. Parce que, si je viens avec les mots
«discours haineux», est-ce que c'est un discours, comme mon collègue l'a dit, qui incite à la haine ou
c'est juste un discours qui est haineux par lui-même et qui ne provoque pas
l'autre? Mon collègue est très clair, c'est
quelque chose qui va provoquer quelque chose, qui va inciter autour. Donc,
c'est un discours qui a un geste vers l'autre en tant que tel.
Et, quand je
vous parlais de gradation, moi, je pense que l'expression «discours incitant à
la haine» est, effectivement,
beaucoup plus large. Alors donc, je ne suis pas du tout d'accord avec ce que la
ministre nous dit, qui... pour elle, c'était quelque chose qui venait restreindre. Moi, je ne suis
pas d'accord. Et, pour souligner ça, c'est le deuxième volet de l'amendement qui incite à exposer ce
groupe, mais c'est dans cette même logique là. Alors, «incite à exposer»
et «incite à la haine», ça ne vient pas restreindre, ça vient, au contraire,
ouvrir. Est-ce que la ministre veut que ça soit tellement pointu que, finalement, il n'y aura rien qui va rentrer dedans
à un moment donné? Bien, si c'est ça, arrêtons là, là, puis arrêtons
tout ça, là.
On ne veut
pas qu'il n'y ait rien, là, qui puisse l'être, un discours haineux. On en
entend, des discours haineux. Je vous
ai fait la lecture, M. le Président, de certains discours haineux qu'on entend
dans notre population, on en... pas nécessairement
de notre population, mais des gens qui viennent faire des discours haineux ici,
au Québec. Il y a quelques années,
l'Assemblée nationale, par une motion, nous avons voté ensemble pour dénoncer
la venue de deux que je vais appeler profanateurs homophobes. Ces deux
personnages-là tenaient un discours homophobe très haineux, et nous avons collectivement adopté une motion pour
dire : Non, on n'en veut pas, de ce monde-là qui tiennent ce type de discours là, discours incitant à la haine,
incitant à la violence. Et finalement, bien, naturellement, ils ne sont pas venus,
on était bien contents. Mais on n'a pas
juste qualifié que c'est des gens qui avaient un discours haineux, c'est un
discours qui incitait... Parce que le fait d'inciter à la haine, pour moi, est
un geste d'ouverture, c'est qu'on vient dire que c'est pour les autres aussi, ce n'est pas juste un discours qui
est prononcé comme ça : Moi, je n'aime pas ça, c'est un discours qui va
faire que d'autres... et, je l'ai dit tout à
l'heure, par l'endoctrinement, va amener des personnes à commettre des gestes.
• (16 h 10) •
Je ne
comprends pas, là, la perception de
la ministre sur ces mots-là, sur le fait que c'est limitatif.
Moi, bien au contraire, je trouve ça
très ouvert. Ce que je comprends, c'est que la nature que mon collègue
souhaite apporter par cet amendement-là, c'est d'avoir, justement, une perspective qui
nous permet de rejoindre le discours que l'on trouve non acceptable, et non pas juste celui qui nous
blesse. Et j'ai comme l'impression que, même si ça fait bien des heures qu'on est là, cette gradation du discours, on n'en a pas
véritablement parlé, on n'a pas véritablement parlé de qu'est-ce que je considère ou que nous
considérons comme propos choquant, blessant et totalement inacceptable et
celui qui, en plus, incite les autres
à la haine. Il y a des choses qui se disent dans notre société que
je trouve inacceptables, par exemple les propos qui vont qualifier les femmes avec des mots qui ne se disent pas. Moi,
je trouve ça inacceptable, moi. Mon collègue peut trouver ça bien acceptable, moi, je
peux dire que c'est inacceptable. Puis c'est correct, c'est une question de
choix de personne. Est-ce que
ça me blesse? Pas personnellement. Est-ce
que ça me choque? Oui. Mais est-ce que
ça incite à la haine? Non. Mais peut-être
que, pour une personne dans une religion quelconque, ce même propos là, pour
cette personne-là, pourrait dire : Ça incite à la haine, et ça
devient un discours haineux. C'est une question de perception du propos.
Alors, pour
moi, d'insister que ce discours-là, il doit inciter à la haine, ça vient donner
une force très importante parce
que la gradation dont je vous parle, M. le Président, elle est très différente entre le propos choquant et celui qui va
inciter quelqu'un peut-être
à commettre un geste violent ou qui est perçu par la personne comme étant un
propos homophobe, qui est un propos
discriminatoire en tant que tel. Et ça, je
pense que ce qu'on essaie de faire
dans cette définition-là, c'est de
venir chercher l'essence la plus pointue pour venir rejoindre ce propos-là, et
le fait de refuser cet amendement par la partie ministérielle m'amène à me questionner
sur la réelle volonté.
Ma collègue
disait tout à l'heure : On a rarement vu unanimité de tous les
médias. Bien, moi, je pose la question : On veut
rejoindre quoi? Si le fait de nommer que le discours doit être celui qui incite
à la violence et que, pour la ministre, c'est restrictif, ah! là, j'ai vraiment
un problème. Parce que sinon, nous, on ne comprend pas où elle veut aller, on
ne comprend pas où le gouvernement veut aller avec ça, on ne comprend pas l'objectif de la loi. Puis ce
que je suis sûre, c'est qu'on n'est pas seuls, de grands juristes ne
comprennent pas non plus.
Alors, M. le Président, je ne le sais pas trop, je ne le sais pas trop où on va avec ça, et,
si on n'est pas capables de
s'entendre sur l'objectif... Et c'est pour ça que probablement ça fait 30 heures qu'on est sur l'article 1, qui est le corps
de ce projet de loi là, on ne
s'entend pas sur l'objectif de cet article-là. Je vais vous dire, M. le Président, je pense qu'on va
fêter la Saint-Jean ensemble, là, si ça continue, là, parce qu'il est là, là, il est là, le fondement du projet de loi. Si on n'est pas capables de nommer les choses... Et ce
n'est pas le premier sous-amendement et amendement qui est proposé ici, là, on en a une pile
qui est là. Mais, si on ne recherche pas les mêmes objectifs autour de la
table, je ne sais pas comment on va en venir à une conclusion, puis c'est
malheureux. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Morin) : Merci, Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce que j'ai d'autres interventions? Oui, M.
le député de Richelieu.
M.
Rochon : Merci, M. le
Président. La ministre a réfléchi à notre sous-amendement pendant le repas.
J'aimerais qu'elle y réfléchisse plus
avant encore, peut-être en dégustant un de ses mignons chocolats de la
Saint-Valentin qu'elle nous a
distribués. On pourrait faire une pause chocolat, peut-être. On ressemblerait à
des disciples de l'Amour infini. J'espère que je n'ai pas eu l'air de
tenir de propos haineux pour cette secte-là.
Le Président (M. Morin) : Un
propos d'amour.
M.
Rochon : Non, sérieusement,
M. le Président, si on n'est pas plus précis, là, si on ne circonscrit pas
mieux les choses, on ne va faire rien
d'autre qu'ouvrir un tribunal du mauvais goût. Remplacer les mots «discours
haineux» par «discours incitant à la
haine», remplacer «est susceptible d'exposer» par les mots «incite à exposer»,
ça fait plein de sens. On a, tantôt,
parlé de M. Grey puis de Mme Latour, là, les Juristes pour la défense de
l'égalité et des libertés fondamentales, tout le monde les a entendus exprimer leurs vives inquiétudes, là. Pas
de petites inquiétudes, de légères craintes, non, de vives inquiétudes,
M. le Président, à l'égard du projet de loi. Puis moi, je n'ai pas leur
expertise, ils sont, eux autres, spécialisés en droit constitutionnel et en droit public et ils ont tout
fait pour dissuader la ministre de la Justice d'inscrire dans la
législation québécoise des dispositions contre le discours haineux ou incitant
à la violence, le Code criminel canadien réprime déjà, ont-ils fait remarquer,
les discours haineux.
Le projet de loi n° 59, qui confère à la
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, un pouvoir d'enquête sur les discours haineux ou
incitant à la violence ciblant un groupe de personnes comme les femmes, les homosexuels, les minorités visibles, les
groupes religieux, des communautés ethniques ou encore les militants de partis
politiques, bref tout groupe formé de
personnes protégées par l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la
personne, ces mesures-là, ont dit M.
Grey et Mme Latour, elles sont inconciliables — en fait, ils ont dit totalement
inconciliables — avec
les assises d'une société libre et démocratique. Ce n'est pas léger, là, c'est
assez sévère comme critique, là, mesures totalement inconciliables avec les
assises d'une société libre et démocratique.
L'ancienne
bâtonnière du Québec, Mme Latour, reproche à la ministre — j'ai aimé cette image-là, je l'ai déjà
dite ici, vous la connaissez, Mme la
ministre — d'avoir
recours à un canon législatif pour tuer une mouche hypothétique. Elle se questionne, par ailleurs, sur l'impact
financier d'une brigade d'enquête à la commission en cette époque d'austérité
économique, hein, on n'a plus d'argent pour rien, les soins à domicile...
Mme
Maltais : La
persévérance scolaire...
M. Rochon : ...la persévérance
scolaire... Est-ce qu'il y a d'autres...
Mme
Maltais : ...l'exploitation
sexuelle...
M.
Rochon : ...l'exploitation
sexuelle, nommez-en, là, on n'a plus d'argent pour rien, et là on va instituer
une brigade d'enquête à la commission, hein? Par ailleurs, loin de
favoriser le vivre-ensemble et puis la cohésion sociale, comme le prétend le gouvernement libéral, le
projet de loi n° 59, disent beaucoup de monde, bien, il va créer un climat
social de suspicion. Et on le sait, c'est
quoi, le problème, c'est que la liberté d'expression, c'est à la fois la plus
célébrée et la plus honnie des
libertés fondamentales. C'est pour dire les choses qui dérangent la société qui
sont à l'encontre des idées reçues que l'on a besoin de la protection constitutionnelle.
Alors, écoutez,
je ne sais plus trop quoi dire pour convaincre la ministre
de regarder ça beaucoup plus attentivement. J'ai encore tendance à lui rappeler le grand
effort de collaboration que nous faisons parce que, encore une fois,
notre premier choix à nous, ce serait
de nous limiter aux appels à la violence. Alors là, on est dans la limitation
des dégâts, puis là j'ai bien peur
que, même là, on échoue. Alors, j'aimerais bien que la ministre
se donne un peu de temps encore pour réfléchir à notre sous-amendement.
• (16 h 20) •
Le Président (M. Morin) : Mme
la ministre, est-ce que...
Mme Vallée : J'ai quand
même indiqué — puis
je pense que notre collègue de Montarville a aussi fait état des motifs
qui nous amènent à ne pas pouvoir accepter cet amendement — ce n'est pas une question de... En fait, ce
n'est pas une question
de ne pas reconnaître le travail de collaboration. Au contraire, je l'ai dit, je l'apprécie. Mais
nous avons aussi une responsabilité de légiférer à l'intérieur d'un certain paramètre législatif,
et il est important de le respecter et de s'assurer que notre législation, notre loi sera la plus près possible de ces
paramètres qui nous ont été édictés par la Cour suprême. Donc, malgré la bonne volonté, malgré les efforts,
que je reconnais, les termes employés et la portée de ces termes ne nous permettent pas de nous rapprocher
des paramètres, mais nous en éloignent, et, malheureusement, on peut difficilement
aller de l'avant dans ce contexte.
Le
Président (M. Morin) : Merci, Mme la ministre. Est-ce que j'ai
d'autres interventions sur l'amendement du député de Richelieu?
M.
Rochon : M. le Président, je
souhaite faire remarquer à la ministre ce qu'elle doit bien savoir déjà, il est
loin d'y avoir un consensus autour de
ce projet de loi, il y a tout le contraire d'un consensus. Il y a une vaste
majorité d'analystes, d'experts, de
groupes de gens qui connaissent ça qui sont venus lui dire et qui lui répètent
encore que ça n'a pas de sens. Il me
semble que ça, elle ne peut pas ne pas en tenir compte. Nous sommes là, tous
ici, parlementaires, pour représenter nos concitoyens, il faudrait peut-être
le faire.
Le Président (M. Morin) :
Merci, M. le député de Richelieu. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le
sous-amendement du député de Richelieu? Je
n'en vois pas. Donc, nous sommes prêts à voter sur le sous-amendement du
député de Richelieu. Est-ce qu'il est adopté?
Mme
Maltais : M. le
Président.
Le Président (M. Morin) :
Oui.
Mme Maltais : Pourrions-nous avoir
un vote par appel nominal, s'il vous plaît?
Le Président (M. Morin) :
Certainement, madame. Mme la secrétaire.
La Secrétaire :
M. Rochon (Richelieu)?
M. Rochon : Pour.
La Secrétaire : Mme Maltais
(Taschereau)?
Mme Maltais : Pour.
La Secrétaire : Mme Poirier
(Hochelaga-Maisonneuve)?
Mme Poirier : Pour.
La Secrétaire : Mme Roy
(Montarville)?
Mme Roy
(Montarville) :
Je vais voter contre pour une logique juridique.
La Secrétaire : Mme Vallée
(Gatineau)?
Mme Vallée : Contre.
La Secrétaire : M. Merlini
(La Prairie)?
M. Merlini : Contre.
La Secrétaire : M. Rousselle
(Vimont)?
M. Rousselle : Contre.
La Secrétaire : M. Boucher
(Ungava)?
M. Boucher : Contre.
La Secrétaire : M. St-Denis
(Argenteuil)?
M. St-Denis : Contre.
La Secrétaire : M. Tanguay
(LaFontaine)?
M. Tanguay : Contre.
La Secrétaire : M. Morin
(Côte-du-Sud)?
Le Président (M. Morin) : Je
m'abstiens.
La Secrétaire : C'est rejeté.
Le
Président (M. Morin) :
Rejeté. Donc, est-ce que j'ai des interventions sur le sous-amendement de Mme la ministre?
Des voix : ...
Le
Président (M. Morin) :
Attention! Est-ce que j'ai des interventions sur le sous-amendement de... sur l'amendement?
Excusez-moi. Oui, Mme la députée de Montarville, je vous écoute.
Mme Roy
(Montarville) :
Oui. Alors, toujours dans le souci de tenter de circonscrire le propos — puis je
comprends ce que la ministre dit, je
comprends ce que ma collègue
de l'opposition officielle dit également — j'aurais
un nouveau sous-amendement à proposer. Et
le dernier, et le dernier, mais je
pense que ça pourrait être
intéressant. Et les collègues en ont des copies ou je vais vous le lire?
Le Président (M. Morin) : Si
vous voulez nous le lire, chère madame.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vais le lire? D'accord.
Le Président (M. Morin) :
Après ça, on le distribuera à vos collègues.
Mme
Roy
(Montarville) : Parfait. Alors, je vais tout vous lire avec... Bon, alors, sous-amendement. Modifier l'amendement du gouvernement à l'article 1 de la loi
édictée par l'article 1 du projet de loi en :
1° supprimant, dans son premier paragraphe, les
mots «, principalement ceux», en ajoutant, après le mot «radicalisation», les mots «ou de propagande intégriste» et en
supprimant les mots «ou dans un contexte d'intolérance»;
2° remplaçant, dans son deuxième paragraphe, les
mots «, peu importe les préceptes sur lesquels il s'appuie, qu'ils soient religieux ou autres, » par les mots
«, dans le cadre d'enseignements ou de prêches fondés sur des préceptes
religieux ou politiques,».
L'article 1,
tel que sous-amendé, c'est plus clair quand on le lit tout d'un bout, là, c'est
plus logique. Article 1 :
«La présente
loi a pour but d'établir des mesures de prévention et de lutte contre les
discours haineux et les discours incitant
à la violence s'exprimant dans un contexte d'endoctrinement, de radicalisation
ou de propagande intégriste pouvant mener à l'extrémisme violent;
«Elle s'applique aux discours haineux et aux
discours incitant à la violence tenus ou diffusés publiquement, dans le cadre d'enseignements ou de prêches fondés
sur des préceptes religieux ou politiques, et qui visent un groupe de personnes qui présentent une caractéristique
commune identifiée comme un motif de discrimination interdit à l'article 10
de la Charte des droits et libertés de la personne;
«Est un
discours haineux, un discours visé au deuxième alinéa qui, de l'avis d'une
personne raisonnable, est d'une virulence
ou d'un extrême tel qu'il est susceptible d'exposer ce groupe à la
marginalisation ou au rejet, à la détestation, au dénigrement ou à l'aversion notamment pour que ce groupe soit perçu
comme étant illégitime, dangereux ou ignoble.»
Vous aurez
compris que ça reste semblable, là, cet alinéa trois demeure semblable, puisqu'il s'agit de la
définition de Whatcott qui est là, entre autres. Enfin, pas juste, Taylor également, puisqu'on parle de ce qu'est un discours haineux. Mais ce que nous faisons — et
ça rejoint les propos de ma collègue de l'opposition
officielle — on vient enlever les extras. On vient enlever les circonstances ou les types de
discours qui pourraient être touchés pour ne toucher principalement que ceux qui font vraiment l'objet et l'esprit de la loi, ce que voulait
l'esprit de la loi initialement, l'objet du problème. Donc, on a tendance à circonscrire ici, là-dedans,
les... c'est précis, là, tendance à circonscrire davantage le contexte dans
lequel le discours est prononcé. Alors, ce
n'est pas n'importe quoi, c'est vraiment tout ce contexte. Et on précise de quel type de discours il s'agit, c'est bien précis.
Alors là, on n'ouvre pas la porte aux chansons de rappeurs ou à un discours
d'un animateur enflammé, on est précis.
Le Président (M. Morin) : Mme
la députée de Montarville, on va regarder votre...
Mme Roy
(Montarville) :
Ah!
Le Président (M. Morin) :
Oui. Puis vous pourrez argumenter par la suite.
Mme Roy
(Montarville) :
Excusez-moi, je...
Le
Président (M. Morin) :
Et, avant de suspendre, je veux peut-être vous donner un petit 10 minutes de relaxation
durant le temps qu'on va regarder...
Une voix : ...
Le
Président (M. Morin) :
Oui. Est-ce que vous êtes d'accord ou pas d'accord?
Oui? Parce que c'est trois heures de travail. Donc, ça va?
Merci.
Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 28)
(Reprise à 16 h 38)
Le
Président (M. Morin) :
Nous reprenons nos travaux. Nous en étions au sous-amendement de Mme la
députée de Montarville. Là, j'aimerais vous entendre.
Mme Roy
(Montarville) :
Merci, M. le Président. Oui, j'étais partie, j'étais dans ma plaidoirie. Effectivement, la procédure veut que nous
déposions puis, ensuite, que nous expliquions. Alors donc, ce que nous voulons
faire avec ce sous-amendement, c'est, comme je le disais, vraiment pour circonscrire davantage le contexte dans
lequel les discours seraient
prohibés. Il y a vraiment un contexte particulier à tout ce projet de loi, mais surtout à la naissance de ce projet de loi. Donc, le contexte, le circonscrire et également
préciser quel est le type de discours qui serait prohibé. Et, en supprimant — naturellement,
on fait une réflexion, là — quelques
mots et en ajoutant quelques mots, on vient de circonscrire davantage, de
rapetisser davantage le champ de la limitation de la liberté d'expression.
• (16 h 40) •
Donc, à la lecture du premier paragraphe de
l'article 1, tel que sous-amendé, on dit très clairement que «la présente loi a pour objet d'établir des mesures de
prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant
à la violence s'exprimant dans un contexte
d'endoctrinement, de radicalisation — et ça, on en a tous convenu, là, c'est
vraiment la
radicalisation qu'il faut contrer — ou [encore dans un contexte] de propagande
intégriste pouvant mener à l'extrémisme violent». Et le mot «intégriste»
était déjà un mot dont nous avions fait mention de l'importance.
Au
deuxième alinéa, la présente loi «s'applique aux discours haineux et aux
discours incitant à la violence tenus ou
diffusés publiquement, dans le cadre d'enseignements ou de prêches fondés sur
des préceptes religieux ou politiques». Et c'est très, très, très clair dans
quel contexte, et, quand nous disons «dans le cadre d'enseignements ou de
prêches», ce n'est pas pour rien, dans la
jurisprudence ce sont des termes qui sont repris, entre autres, dans Whatcott,
si je ne m'abuse. Donc, nous
reprenons des termes que la jurisprudence a déjà employés. Donc, c'est le
contexte, ces propos haineux, ces discours
haineux, ces discours incitant à la violence tenus ou diffusés publiquement
dans le cadre d'enseignements ou de prêches fondés sur des préceptes
religieux ou politiques qui visent un groupe de personnes qui représentent une caractéristique... Enfin, tout le reste est semblable,
là. C'est semblable, on comprend tous qu'il ne faut pas faire... Puis c'est vraiment les groupes visés par la charte,
là, dont il est question. Donc, cette «loi s'applique aux discours haineux
et aux discours incitant à la violence tenus
ou diffusés publiquement, dans le cadre d'enseignements ou de prêches fondés
sur des préceptes religieux ou politiques».
Et
nous enlevons, oui, le mot «tout autre», et c'est important parce que «tout
autre», «tout autre discours», on allait très, très, très large, alors
qu'ici c'est vraiment les discours dans un contexte de préceptes religieux ou
politiques. Et pourquoi est-ce qu'on met
«politiques»? On ne veut pas s'attaquer à aucun parti politique, mais, dans la
mouvance actuelle, on sait très, très
bien que l'intégrisme religieux ou l'islamisme, parce que c'est à ça qu'on
s'attaque, l'intégrisme religieux... Comme
le disait le premier ministre au printemps dernier, l'intégrisme religieux est
aussi un précepte politique pour certains, l'islamisme est politique, politico-religieux. Alors, c'est dans le
contexte de cette mouvance... Parce que revenons à la base, cette loi a été mise sur la table et déposée
à l'Assemblée nationale après que de jeunes hommes se soient convertis, radicalisés et fassent ou le djihad à l'étranger
ou commettent des crimes ici au nom d'Allah. Alors, ce n'est pas n'importe
quoi, c'est un contexte religieux ou
politico-religieux. Alors, on précise vraiment le type de discours à prohiber,
le contexte dans lequel le discours doit être dit.
Et là ça protège, ça
protège les droits et libertés et la liberté d'expression de tous ceux qui
auront des discours haineux ou des discours
incitant à la violence dans toutes sortes d'autres domaines qui, eux, bien,
pourront être poursuivis au criminel pour
leurs discours haineux et incitant à la violence. Mais, dans le cas précis,
c'est vraiment une loi précise pour
s'attaquer à des discours dans un contexte particulier et des discours précis
qui émanent d'une problématique qui est
une problématique nouvelle au Québec. Ne nous le cachons pas, on n'a jamais vu
ça avant, là. 20 ans passés, on n'entendait pas parler de ça, 10 ans
passés, à peine, mais maintenant c'est une réalité, c'est une réalité des pays démocratiques, de nos démocraties. Nous avons énormément
de liberté, mais on se voit confrontés à cette réalité, qui est cet endoctrinement qui s'est propagé par des
discours haineux et des discours incitant à la violence, mais pas par n'importe
qui, par des gens qui sont là de façon
malicieuse, qui sont là de mauvaise foi pour endoctriner, enrôler, embrigader
des jeunes, la plupart du temps.
C'est rarement un homme de 65 ans qui va commettre ce genre d'atrocité. Donc,
c'est très précis.
Qui
propage ces discours, c'est très précis aussi, ce sont des agents de
radicalisation, des imams autoproclamés. On les connaît, on les voit, ils sont sur Internet, puis ils se
multiplient, puis il y en a des nouveaux. Puis on voit leur figure
apparaître dans la presse, puis on voit des jeunes qui voulaient partir qu'on a
arrêtés, heureusement, parce qu'un père a
appelé la police avant que les enfants embarquent. Il y avait une dizaine
d'adolescents qui voulaient quitter pour aller faire le djihad, ils ont été arrêtés à cause de la vigilance des
parents. Pas parce que le système fonctionne, parce qu'un parent a appelé la police. Mais on n'avait pas
détecté ça, on n'avait pas détecté où allaient ces enfants, ces jeunes qui sont
les enfants de ces parents. Il y avait
quelque chose qui se passait, il y avait un message qui se passait. Il y avait
un discours d'endoctrinement, il y
avait un discours d'enrôlement, il y avait une propagande pour les amener à
faire ça. Ce n'est pas du jour au lendemain que quelqu'un allume :
Je veux aller combattre. Il s'est passé quelque chose.
Donc,
on revient dans le contexte, et c'est un contexte nouveau. Comme je vous dis, au Québec,
là, ça s'est passé, c'était en novembre... pas novembre dernier, l'autre
novembre, les premiers attentats. Saint-Jean-sur-Richelieu, un Québécois qui
s'est converti. Et je n'ai rien contre la conversion, n'importe qui peut se
convertir en n'importe quelle religion, là,
grand bien leur en fasse s'ils y trouvent la paix. Mais le problème, c'est que
c'est une conversion qui a mené à une
radicalisation, un endoctrinement dans un but ... Et ne nous le cachons pas,
c'est de l'islamisme et des islamistes qu'il
s'agit. C'était ça. C'était ça dans son cas, et il est allé tuer un soldat, un
de nos soldats canadiens, pour la cause, pour sa cause, une cause qu'on ne connaissait pas avant ici, qui est totalement
folle, là, hein? On les appelle les fous de Dieu, les fous d'Allah, puis
je confirme, c'est ce que c'est. Mais c'est à ça, et c'est très précis. Ce ne
sont pas tous les discours auxquels il faut s'attaquer, bien au contraire, bien
au contraire.
Et ça, c'était notre
jeune homme de Saint-Jean-sur-Richelieu. D'ailleurs, sa famille a souffert de
ça et souffre encore de ça. Et l'autre
famille, le jeune homme de Montréal qui, lui, est allé à Ottawa,
ce n'est pas rien, rentrer dans le Parlement
armé, puis tirer dans les... bien, avant d'entrer, tuer un autre soldat, un
soldat qui était là, montant la garde, non armé. Il a été tué pour quoi? Pour la cause, pour Allah encore une fois. Alors, ça, pourquoi? Il a été endoctriné, ce jeune. Quelqu'un
lui a mis dans la tête qu'il fallait aller tuer pour la cause, les fous de
Dieu.
Alors,
c'est très précis, M. le Président, vous comprenez que ce n'est pas n'importe quel
discours. Et d'ailleurs ce jeune homme qui, par la suite, est entré dans
le Parlement a tiré, a tiré tout ce qu'il a pu. J'ai des collègues, des amis
du NPD, il y a des trous de balles,
là, puis il y a des balles qui sont dans les portes au NPD, là. Il y avait
du monde l'autre bord de la porte,
des collègues députés fédéraux du Québec qui étaient là. Et on n'est pas à l'abri de ça,
personne n'est à l'abri de cette
folie. Mais ce jeune homme, en plus, quelques
mois après les événements, une bande vidéo a été rendue publique dans
laquelle le jeune nomme, avant de passer à l'acte... et, oui, c'était
effectivement au nom d'Allah qu'il passait à
l'acte, et il avait une cause, lui, là, il était en mission, là. Qui lui a mis
cette mission dans la tête? Où a-t-il été endoctriné? Qui sont ces gens qui ont fomenté... qui ont endoctriné ce
jeune? Bien, c'est à eux qu'il faut s'attaquer, c'est au discours que
ces gens-là ont tenu qu'il faut s'attaquer, et c'est ce que permet cette loi.
C'est
très important de comprendre que ce n'est pas la liberté d'expression de tout le
monde qu'il faut brimer. Loin de là,
il faut préserver la liberté d'expression, c'est la plus belle chose qu'on a au
Québec, au Canada, cette liberté d'expression. Dans les pays
occidentaux, d'ailleurs, c'est extrêmement important, et arrive un moment où,
la liberté d'expression, on peut faire une
entorse pour protéger, pour protéger notre démocratie, pour protéger la
majorité devant un risque — et le risque, il est là, il existe — devant un type de discours. Et on le
connaît, il existe, ce type de discours.
Le projet de
loi, tel qu'il nous avait été proposé initialement, était beaucoup trop large.
Mme la ministre avance, il y a des
choses qui avancent, il y a des mots qui avancent, on sent qu'on est en train
de circonscrire davantage, puis je pense
que c'est la bonne chose à faire parce que les gens comprennent très, très bien
qu'il ne faut pas limiter la liberté d'expression
des citoyens à tout type d'expression et à tout genre d'expression et même à
toute personne. On comprend que ce
sont les agents de radicalisation, les imams autoproclamés, les endoctrineurs,
ceux qui font des lavages de cerveau aux
jeunes, ceux qui tiennent des discours qui font en sorte que ces jeunes
changent radicalement pour aller mener un combat, une guerre sainte, c'est vraiment à ceux qui font ça qu'il faut
s'attaquer, les convertir de cette façon, les endoctriner de cette façon. Je ne veux pas utiliser le mot
«convertir» parce que, comme je vous l'ai dit, je n'ai rien contre la
conversion, là, vous pouvez changer
de religion tant que vous voulez, là, grand bien vous en fasse si vous êtes
heureux. Mais embrigader les jeunes, leur mettre dans la tête qu'il y a
une mission à aller faire, qu'ils doivent la faire, et souvent que c'est une mission qui est, assez paradoxalement, totalement
contraire à nos chartes des droits et libertés, à nos valeurs que nous défendons ici, ce qui est paradoxal, là, c'est
tout à fait paradoxal et c'est la raison pour laquelle il faut limiter leur
liberté d'expression.
• (16 h 50) •
Alors, je
vous répète que ce sous-amendement-là, c'est vraiment pour circonscrire le
contexte dans lequel les discours sont
prononcés et à quel type de discours
auquel il faut s'attaquer. Et je pense qu'en vous proposant
ce sous-amendement, bien respectueusement, là, on est très
précis sur la cible, on est beaucoup plus précis et on respecte les termes de
la jurisprudence, on respecte Taylor, on
respecte Whatcott, mais on va précisément sur le type de discours auquel il faut
porter une attention particulière et
faire en sorte qu'il soit sanctionné, et au type de personnes qui portent ce
discours-là. Et je pense
qu'on en est là, je pense que les gens qui nous écoutent comprennent ça. Il
ne faut pas s'attaquer à la liberté d'expression, mais il faut s'attaquer à ces discours qui sont
dangereux pour la liberté d'expression et notre liberté à nous tous, et elle
est là, la différence.
Alors, je
vous le soumets respectueusement, je... Vous comprendrez qu'on y a réfléchi,
puis on y a réfléchi, puis on y a
réfléchi. Moi, personnellement, je vous le dis, Mme la ministre, là, je ne
vais pas vous proposer 14 autres amendements sur l'article 1, là, c'est une dernière
tentative pour tenter de circonscrire. Moi, ce sera ma dernière tentative, mais
je pense que la population, si vous lui proposiez quelque chose comme ça, elle comprendrait qu'il
y a un contexte, puis le contexte,
c'est vraiment l'endoctrinement des jeunes, les discours... Et même on disait
que c'est assez technique, c'est assez théorique,
c'est assez juridique, puis c'est du jargon d'avocats, on le comprend, mais
qu'en disant «établir des mesures de
prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence s'exprimant dans un contexte d'endoctrinement — tout le monde comprend ça — de
radicalisation — tout le monde comprend ça — ou
de propagande intégriste — tout le monde comprend ça — pouvant
mener à l'extrémisme violent», ce sont des mots clairs, simples, précis
qui ne portent pas à interprétation.
Deuxième alinéa,
cette loi «s'applique aux discours haineux et aux discours incitant à la
violence tenus ou diffusés publiquement — tout le monde comprend ça — dans
le cadre d'enseignements ou de prêches fondés sur des préceptes religieux ou politiques». Là, on comprend
que ça, là, c'est vraiment l'action du lavage de cerveau, du discours qu'on
répète. On ne le fait pas
innocemment, on essaie d'inculquer quelque
chose, on essaie de faire rentrer quelque chose dans la tête de quelqu'un
dans le cadre d'enseignements ou de prêches sur des préceptes religieux et politiques.
Et c'est important de dire les
préceptes religieux et politiques parce
qu'on le sait tous et vous le savez
tous, on parle d'islamistes. Ce n'est pas
compliqué, c'est ça. Les crimes qui ont été commis ici, les attentats
terroristes qui ont été commis ici l'ont été sur cette base. Les attentats terroristes qui ont été commis
ce mois-ci en Afrique, à Ouagadougou, à Jakarta, en Indonésie, l'étaient
également. Encore une fois, c'étaient des discours qui ont été commis au nom
de préceptes religieux ou politico-religieux. Et puis, dans le cas des attentats terroristes commis en janvier, bien,
ce sont des Québécois qui en ont été victimes. Alors, ça nous guette,
puis ça nous guette partout sur la planète, ces dérives de fous de Dieu. Il y en a
partout et il y en a ici. Alors, c'est à eux qu'il faut
s'attaquer. Pas à tout le monde, à eux très précisément.
Alors, c'est
pour ça que nous considérons que les termes qui ont été employés dans le texte
que je viens de vous lire sont précis, clairs et, surtout, compris de la population.
Parce que, lorsqu'on rédige une loi, il y a aussi un souci
d'être compris par les gens qui vont la
lire. Puis il y a déjà que c'est déjà technique comme ça quand
on parle de Taylor, quand on parle de
Whatcott, quand on parle de limitations possibles à la liberté d'expression,
ça, c'est du jargon d'avocats, là. Puis on n'a pas le choix, des lois,
bien, c'est fait par les avocats, naturellement, et les législateurs, mais
c'est...
Une voix : ...
Mme Roy
(Montarville) :
C'est fait par les législateurs. C'est rédigé par les avocats, mais ce sera
débattu par les avocats, ce sera plaidé
par les avocats, ce sera tranché par les tribunaux parce qu'on a besoin du
système judiciaire et du système
législatif, on a besoin des deux qui travaillent ensemble. Donc, c'est beaucoup
du jargon d'avocats, mais il faut que
la population qui le lise comprenne, là. Et je pense
qu'à sa face même, de la façon dont est rédigé le sous-amendement que nous vous proposons, n'importe quel journaliste qui nous écoute actuellement va comprendre que ce n'est pas la liberté d'expression de tout
le monde à qui il faut s'attaquer et à qui on veut toucher. La liberté
d'expression, ici, là, elle est extrêmement circonscrite. Et j'invite, d'ailleurs, les journalistes à lire ce sous-amendement. J'invite à ce que vous le lisiez parce que c'est l'esprit de la loi, c'est la raison pour
laquelle cette loi-là a été déposée. Ce n'était pas pour s'attaquer à la liberté d'expression de qui que ce soit autre
qu'à celle des agents de radicalisation, des imams autoproclamés, et c'est
très précis.
Alors,
j'espère que, du côté du gouvernement, on va voir la précision là-dedans.
Puis, avec la façon dont c'est rédigé,
c'est qu'on rejoint l'objectif également, on rejoint l'objectif. L'objectif
initial, lorsque ça a été déposé, il faut le remettre dans le contexte. Il ne faut pas aller
plus loin que ça, il faut le remettre dans le contexte. On a besoin d'une loi
parce qu'il y a des agents de
radicalisation, parce qu'il y a des jeunes qui se font embrigader, ça existe,
et c'est contre ça qu'il faut
s'attaquer. Et uniquement contre ça, pas plus loin, parce que, pour le
reste, il y a déjà le Code
criminel, d'où la pertinence,
nous croyons, de cet amendement.
Et je pense
sincèrement que les gens vont comprendre, puis, même si on... Et je reviens à
ça, on parlait du passage ici de Me
Julius Grey et de Me Latour, des sommités, et c'est la question
que j'avais demandée : Pourrions-nous circonscrire davantage si nous tentions de nous attaquer au
discours de radicalisation? Et ils m'avaient dit : L'embrigadement, oui.
Alors, j'ai même le verbatim :
«L'embrigadement, oui, on pourrait s'y attaquer.» Alors, nous croyons que le
verbatim, ici, de ce sous-amendement s'attaque, justement, à
l'embrigadement, à ceux qui embrigadent et à ce qu'ils disent pour embrigader. Et c'est à ça uniquement
qu'il faut s'attaquer. Il ne faut pas limiter la liberté d'expression, il faut
la protéger. Mais, quand nos libertés et nos droits individuels sont
menacés parce qu'il y a un phénomène de radicalisation, d'endoctrinement créé par des gens qui, eux, ne respectent pas notre
démocratie, ne croient pas en notre démocratie et se servent de nos
chartes pour attaquer notre démocratie, je pense qu'il faut agir.
Et c'est pour
ça qu'on vous soumet respectueusement ce sous-amendement qui pourrait
faire l'affaire des gens qui nous
écoutent, des journalistes s'ils le lisaient, et, j'ose espérer, des grands
juristes qui auront à travailler avec ces lois-là si la loi finit par
être adoptée un jour. Mais il faut être clair, il faut être précis, le plus
précis possible, le plus circonscrit possible,
et nous croyons que c'est le type de limitation à la liberté d'expression qui
est acceptable dans le cadre d'une société libre et démocratique en
vertu de l'article 1 de nos chartes parce qu'elle est nécessaire dans le
contexte que je vous ai dit. Ce n'est pas
pour rien que ce projet de loi a été déposé, il y a un contexte, et il faut
qu'il nous revienne à l'esprit, ce contexte. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Morin) : Merci,
Mme la députée de Montarville. Mme la
ministre, avez-vous quelques
propos?
Mme Vallée : Oui, certainement. Bien, M. le Président, on a eu le loisir, par le passé, d'analyser certains termes... Parce que
je vois quand même une constance dans les amendements
qui sont proposés par notre collègue et sa formation politique. Si je me souviens bien, toute la question
de l'endoctrinement avait fait l'objet de discussions, de longues discussions, le 3 décembre dernier, et je
crois qu'à ce moment nous avions
également discuté de la question de la propagande intégriste.
Et j'essaie de comprendre qu'on avait, à
l'époque, amendé... On a inclus l'endoctrinement, la radicalisation à l'intérieur de notre sous-amendement du mois de
décembre dernier, et je cherche à comprendre en quoi on ne retrouve pas,
justement, cette propagande intégriste à l'intérieur de l'endoctrinement et la
radicalisation. Parce que l'objectif était
aussi d'avoir des termes qui pouvaient inclure le plus grand nombre de
situations et ne pas limiter à un élément très fort, alors on avait inclus le contexte
d'endoctrinement, de radicalisation qui menait à l'extrémisme violent. Donc,
justement, l'objectif était de viser ce type de discours auquel vous faites
référence. Alors, j'essaie de voir ce que le terme «propagande
intégriste» vient ajouter, puisqu'on peut, à mon humble avis, le retrouver dans
les termes précédents.
Le Président (M. Morin) : Ça
va, Mme la ministre?
• (17 heures) •
Mme
Vallée : Et simplement, M. le Président, pour ce qui est de
l'autre modification suggérée par le sous-amendement, on revient à l'utilisation «d'enseignements ou de
prêches fondés sur des préceptes religieux ou politiques». On avait eu la
discussion également, et c'est ce qui nous avait amenés à apporter «peu importe
que les... sur lesquels les préceptes s'appuient».
Parce que des prêches, en soi... le prêche n'était pas l'enjeu. Donc, le prêche
est le véhicule, mais un prêche peut
être tout à fait inoffensif. Et donc ce n'était pas le véhicule que nous avions
désigné, mais plutôt les préceptes sur lesquels s'appuie le véhicule. Et
donc que ce soit un enseignement, que ce soit un prêche, en soi,
l'enseignement, le prêche ne posent pas à
problème. Mais, lorsque ce type de véhicule là, que ce soient aussi des
écrits... On avait discuté d'écrits,
on avait discuté de discours, on avait échangé... En fait, c'est le fondement
de tout ça qui est à l'origine de ce qu'on
recherche à contrer. Ce n'est pas le véhicule qui est utilisé pour transmettre
le message, mais c'est le message comme tel, là, qui...
Et donc c'est
pour ça que nous avions apporté cet amendement, de dire que le discours, donc,
le discours peut être écrit, le discours peut être prononcé, le discours
peut prendre de multiples formes, peut prendre la forme d'un enseignement, peut prendre la forme d'un prêche,
mais c'est le fond, et non la forme qui est important et qu'on doit cerner,
et c'est pour ça qu'on s'était entendus sur
la question des préceptes. Et je comprends que, dans l'amendement on parle de
préceptes religieux, politiques, mais on
avait aussi discuté de préceptes idéologiques, qui ne se fondent pas
nécessairement sur une orientation politique, mais une idéologie qui
peut être tout aussi dommageable qu'un précepte religieux.
Alors, tout
ça pour revenir à ma question, j'essaie de voir en quoi la propagande... on ne
retrouve pas la propagande intégriste dans notre référence à
l'endoctrinement puis la radicalisation. Pour moi, ça allait de soi, c'était inclus.
Le
Président (M. Morin) : Mme la ministre, vous avez terminé, mais
là, Mme la députée de Taschereau, est-ce que Mme la députée de
Montarville peut répondre aux questions ou ça prend un consentement?
Mme
Maltais :
Je vais juste, avant, faire un petit mot, puis, après ça, il n'y aura pas de
problème.
Le Président (M. Morin) :
O.K. Allez-y, chère madame.
Mme
Maltais : Bien,
c'est-à-dire est-ce qu'elle a terminé son 20 minutes, la députée de
Montarville?
Le Président (M. Morin) :
Oui, oui.
Mme
Maltais : Ah!
c'est ça.
Le Président (M. Morin) :
C'est pour ça.
Mme
Maltais : Ah! O.K.
Écoutez, la députée de Montarville est venue déposer un amendement qui reprend exactement les amendements que désire le Parti
québécois. Je veux dire, enlever, supprimer «dans un contexte d'intolérance»,
là, c'est en décembre qu'on a demandé à la
ministre de les enlever. Sur parler d'intégrisme, de préceptes religieux, en
décembre on a demandé ça à la ministre.
Donc, c'est sûr qu'on est d'accord avec la députée de Montarville, c'est
exactement ce qu'on réclame depuis
des mois. C'est sûr qu'on est contents. Je dirais, je suis très contente de
voir que la députée a la même opinion
que nous. D'ailleurs, elle avait voté oui quand nous avons... J'ai été revoir
les galées, elles avaient voté oui,
la députée de Montarville et la CAQ, quand nous avions proposé comme amendement
de supprimer les mots «ou dans un
contexte d'intolérance». Donc, on l'a... exactement ça qu'on a déjà proposé. Et
on a proposé de rentrer «intégrisme religieux». On a vraiment tout
essayé ça.
Donc, est-ce que ce nouvel essai, qui reprend
les essais précédents du Parti québécois, on l'appuie?
Une voix : ...
Mme
Maltais :
Non, c'est le vôtre, mais ça reprend exactement ce qu'on avait déposé. On est
tout à fait d'accord, c'est ça qu'on
plaide depuis le début parce que nous croyons... Puis je n'arrête pas...
particulièrement aujourd'hui, c'est dommage,
ce matin, j'aurais dû... Nous n'avions
que le mode radio, mais, ce matin, j'ai rappelé pourquoi on est là. Puis
vous avez raison, Mme la députée de Montarville, on est ici parce qu'il y a eu des jeunes
qui ont été radicalisés, il y a eu des
jeunes qui sont allés à Saint-Jean-sur-Richelieu, puis ils ont pris leur
voiture, puis ils ont essayé de tuer des militaires... ils ont tué, ils ont tué. Ils essayaient de tuer,
ils ont tué. Ils ont tué parce qu'ils étaient convaincus sur la base de gens qui
leur disent que les préceptes religieux
doivent mener à ça. Moi, je l'ai déjà dit, ce n'est pas ça, l'islam. Ça, c'est
l'islamisme. C'est ça, la différence. Puis elle est fondamentale, la
différence.
C'est au nom
de gens qui prônent des préceptes religieux, des islamistes qui... que des gens
sont allés à Ottawa et ils ont tué. À Paris, à Ouagadougou, à
Djakarta, il y a eu des gens qui ont été entraînés dans un processus
de radicalisation qui les a amenés à tuer. C'est ça qu'on est supposés
combattre ici. C'est ça, le débat. Il n'y en a pas d'autre, débat, normalement, mais la ministre et le gouvernement
libéral nous ont entraînés dans un autre débat, dans un autre univers.
Pourtant...
Ça, c'est toujours amusant, j'aime ça. Ça fait longtemps qu'on n'est pas
revenus à ça, M. le Président. Ça fait que, pour fins de pédagogie et
pour rappeler à la mémoire des gens ce que c'est, j'ai ici La radicalisation
au Québec : agir, prévenir, détecter et
vivre ensemble. Ça, c'est le plan
de radicalisation qui a été déposé par le gouvernement libéral, c'est un plan d'action gouvernemental
2015-2018. Je vais citer l'introduction, il y a plein... J'en ai cité, ça parle
des incidents de Saint-Jean-sur-Richelieu,
d'Ottawa. Il y a un paragraphe qui est intéressant. Celui-là, je ne l'ai pas
encore cité : «La radicalisation
n'est pas l'apanage d'une religion en particulier et ne concerne pas que la
religion. Cependant, l'actualité locale, nationale et internationale
très médiatisée implique des personnes s'identifiant à un courant radical violent de l'islam, ce qui appelle à une
intervention rapide et ciblée — ciblée, rapide et ciblée — sans porter atteinte à la liberté
d'expression, fondamentale dans une société démocratique comme le Québec.»
Ça, ce sont
les mots du gouvernement que j'ai devant moi, le gouvernement libéral. On est
d'accord, ça, c'est bon. Aïe! c'est
rare que vous allez m'entendre, là... J'ai un collègue ici qui rigole. C'est
vrai, ça, c'est bon. C'est ça qu'on veut. Pourquoi vous n'avez pas déposé une loi qui correspond à ça? Pourquoi
c'est l'exact contraire? Puis, quand je dis l'exact contraire, relisons ces mots, M. le
Président : «...implique des personnes s'identifiant à un courant radical
violent[...], ce qui appelle à une
intervention rapide et ciblée.» Est-ce que ce projet de loi cible... Je vais
citer, là. C'est le gouvernement, ce
n'est pas moi qui dis ça, là. Je ne veux pas me faire attaquer après ça, là, ce
n'est pas moi qui dis ça, c'est le gouvernement.
Est-ce que cela cible un courant radical violent de l'islam? Non, ça ne cible
pas cela. Ça fait que, là, c'est raté.
Deuxième partie, «sans porter atteinte à la
liberté d'expression». Est-ce que cette loi est sans porter atteinte à la liberté d'expression? Bien non, c'est le
contraire. On l'a répété souvent ici, tout le monde l'a dit, c'est une loi qui
porte atteinte à la liberté d'expression, c'est une loi qui restreint la
liberté d'expression. C'est possible dans une société démocratique, mais on nous avait dit que ça ne serait pas ça. Et après,
tentant de cibler, de préciser les choses, le premier ministre nous avait dit : La loi devra être
écrite avec une ligne de démarcation, l'appel direct à la violence. Ça ouvrait
déjà plus large, ça ne ciblait plus,
selon les mots libéraux — je vais le dire comme ça — des personnes associées à un mouvement
radical violent de l'islam. Ça, c'est vos mots, là, ce n'est pas moi. Ce n'est
pas ça, là. Déjà, ça sortait de là.
• (17 h 10) •
Bien, on est prêts à faire un bout de chemin,
mais pas n'importe quel. Alors, ce que propose la députée de Montarville, que nous avons déjà proposé puis
qu'on est d'accord, «ou dans un contexte d'intolérance», ôter ça, elle a
raison. Ça fait combien de fois que je
plaide ça ici? Combien de fois? Encore ce matin, je disais, «ou dans un
contexte d'intolérance»,
quand il a été sorti de l'extrémisme violent et de la radicalisation, c'est là
qu'il y a eu un problème. Elle est
là, la faille. Elle est là, la faille, sur «discours haineux», et ça, là, «dans
un contexte d'intolérance». Elle est là, la faille, puis ça, tout le monde essaie de la colmater, la
brèche dans la liberté d'expression. C'est une brèche, là. Puis moi, j'y crois profondément,
c'est une brèche qui va faire le jeu, le jeu des personnes s'identifiant à un
courant radical violent de l'islam, ça
s'appelle l'islamisme. La brèche, ça va faire le jeu des islamistes. C'est ce
que tout le monde est venu nous dire en commission parlementaire.
C'était ça.
C'est ça que les gens sont venus nous dire, donc autocensure. Le contexte
d'intolérance, c'est là qu'on tombe
dans l'autocensure. Ça fait qu'elle a raison la députée, c'est pour ça qu'on
l'avait déjà... Je le sais que ça lui fait donc... C'est pour ça qu'on la soutient fortement. Mais cent fois sur le
métier remettons notre ouvrage, répétons à la ministre que «dans un contexte d'intolérance» devrait être
sorti de la loi, sorti de la loi, out, bye, K.O. Enlevons ça de là. Ça
s'appelle «supprimer» en langage
parlementaire. Nous avons déjà déposé un amendement qui dit : Supprimer
les mots «ou dans un contexte d'intolérance». Exactement.
Sur «, peu
importe les préceptes sur lesquels ils s'appuient, qu'ils soient religieux ou
autres,» changé par «par des
enseignements ou des prêches fondés sur des préceptes religieux ou politiques»,
jusqu'à «préceptes religieux» je suis bien
d'accord. «Préceptes politiques», là, j'aimerais ça... Ah! elle ne peut plus...
«Préceptes politiques», j'ai un doute, mais je n'aime tellement pas la
loi qui nous est proposée que je trouve qu'on devrait l'accepter, l'amendement
de la députée. Même si j'ai un doute sur «politiques», j'aurais... Je le disais
tout à l'heure... Ce matin, elle n'était pas là la députée, ce matin, mais je disais... parce que c'était une autre
collègue. Ceci dit, c'est parce qu'elle était dans une autre commission parlementaire, elle a beaucoup de
boulot. Ça aurait été «politico-religieux», je serais plus à l'aise. Ce serait
«politico-religieux», je trouverais ça
intéressant, je me sentirais beaucoup plus confortable. Mais je ne veux
tellement pas qu'on parle de «dans un
contexte d'intolérance», puis je ne veux tellement, moi aussi, que ça s'en
aille sur l'intention première que je
suis d'accord. Je suis prête à prendre le risque parce que je veux qu'on enlève
le contexte d'intolérance. Je veux
qu'on enlève «dans un contexte d'intolérance» depuis le début. Ça fait des
jours, et des jours, et des jours que je dis : Elle est là, la ligne de fracture. Alors, je suis d'accord
avec cet amendement. Et je ne sais pas si j'ai d'autres collègues qui
veulent intervenir sur cet amendement...
Mme Vallée : ...
Le Président (M. Morin) : Un
instant! Un instant, là, c'est...
Mme Maltais : O.K. M. le Président,
je vais laisser...
Le Président (M. Morin) :
Oui. Est-ce que vous avez terminé, Mme la députée de Taschereau?
Mme
Maltais : Je n'ai pas terminé, mais, puisque la ministre a quelque
chose à dire, je pense qu'il faudrait l'entendre.
Le Président (M. Morin) : En
tout cas, de votre intervention là. C'est ce je vous demande.
Mme Maltais : Oui.
Le Président (M. Morin) :
C'est ça.
Mme Maltais : Oui.
Le Président (M. Morin) :
Pour votre temps, je le sais bien.
Mme Maltais : Ah! oui.
Le Président (M. Morin) :
Mais là, Mme la ministre.
Mme Vallée :
Bon. On a fait quelque chose qui... Puis là on verra, là, en temps et lieu, en
temps opportun, peut-être à rédiger,
mais, en fait, l'objectif, c'est d'avoir notre carré de sable pour éviter des
débordements, puis ça, on partage toute cette volonté-là. L'utilisation des termes est importante parce
qu'ultimement il y aura une interprétation qui sera donnée au projet de loi, puis je pense qu'il est
important d'utiliser les mots justes, les mots exacts. Il y aurait peut-être
lieu de... en considérant, là... Puis
là disons qu'on travaille avec le projet que notre collègue nous a soumis,
puis, par la suite, si les collègues sont à l'aise, on verra à apporter
des modifications en fonction de nos règles parlementaires. Mais, si nous prenions... Et ça, c'est une idée, mais il
pourrait peut-être être utile d'amender, là, ou de modifier le texte afin qu'il
se lise comme suit :
«La présente loi a pour objet d'établir des
mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence pouvant s'exprimer
dans un contexte d'endoctrinement, de radicalisation ou de fanatisme — puis là je vais vous expliquer
pourquoi je vous propose cela — pouvant mener à l'extrémisme violent.»
«Fanatisme»
nous ramène, lorsqu'on regarde la définition... «Dévouement absolu et exclusif à une cause qui pousse à l'intolérance religieuse ou politique
et conduit à des actes de violence.» Et ça pourrait, je crois,
rejoindre la préoccupation des collègues. Je vous écoutais, puis j'essaie de trouver — puis
je suis sincère, là — j'essaie
vraiment de trouver cette voie de passage qui pourrait rejoindre les préoccupations de notre collègue de l'opposition
officielle, notre collègue
de la deuxième opposition,
et je maintiendrais, par contre, le deuxième alinéa, compte tenu de la discussion.
J'apporte un peu d'eau au moulin. Sincèrement, on tente de trouver une
définition qui permettrait à tous d'être à l'aise.
Alors, il y a quelque
chose qu'on pourrait faire si vous le souhaitez. Je regarde l'heure, on
pourrait suspendre cet article-là,
passer à l'article suivant et on pourrait, pendant la pause du week-end,
revenir... et vous revenir avec une version
complète. Mais je ne voudrais pas suspendre et ne pas faire avancer nos
travaux, donc je vous suggérerais de passer à la suite des choses. Mais il y a vraiment... il y a une volonté réelle de travailler, puis
moi, oui, je suis préoccupé et je tiens à rester à l'intérieur des
paramètres de Whatcott. Mais est-ce qu'il y a une voie de passage? Je crois que
oui.
Le Président (M.
Morin) : Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : M. le Président, pourquoi la ministre a refusé de me supprimer «ou dans un contexte
d'intolérance», puis là elle le veut?
Mme Vallée :
Bien, en fait...
Mme
Maltais :
Pourquoi ça n'a pas été... Cet appel-là, là, ça fait...
Mme Vallée :
...
Mme
Maltais : Non,
attendez, je vais finir mon intervention. Pas de problème, là, mais je veux
bien comprendre, là. Ça fait des semaines que je dis ça, ça fait des
semaines que j'en parle, puis ça a été non toujours. Alors, je veux juste comprendre pourquoi... Est-ce que c'est
qu'enfin il y a une conviction profonde que ça ouvrait trop large? Je voudrais
comprendre parce que c'est ça que j'ai prévu depuis le début.
Mme
Vallée : En fait,
c'était de permettre d'avoir cette porte de passage. Donc, le «pouvant
s'exprimer», on croit que c'est peut-être potentiel, ça pourrait
permettre de répondre aux mêmes préoccupations que «dans le contexte d'intolérance». Puis, honnêtement, la réflexion est en continu dans notre travail, là, puis on s'active,
et on tente, sincèrement, de répondre à différentes préoccupations qui sont soulevées lors de nos échanges. La collègue
nous disait ce matin : On est
très sérieux dans nos démarches. Bien, nous aussi. Je pense
que, le fait de proposer différentes versions... il ne faut pas s'attarder sur le moment où certaines solutions
arrivent, mais plutôt s'attarder sur le fait que nous avons peut-être
une piste de solution.
Le Président (M.
Morin) : Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : C'est
parce que, ce matin, j'en ai reparlé, puis c'était un refus. Ce matin, on me
disait que, si on enlevait «dans un
contexte»... Je suis contente, là, qu'on l'enlève. Ça ne veut pas dire que tout
est fini, mais je suis contente. Mais
sauf que, «dans un contexte d'intolérance», ce matin, on m'a dit... Le prétexte
qu'on m'amenait, c'est que, si on l'enlevait,
ça visait trop la religion et que c'était non. Puis là, tout d'un coup, c'est
oui. Ça fait que je veux savoir pourquoi.
Entre ce matin et ce midi, est-ce qu'il y a
un avis qui est arrivé qui disait que, juridiquement,
ce n'était pas la même chose? C'est quoi qui s'est passé? Parce que les
arguments, je vais aller les relire, mais, ce matin, là, c'était non.
Mme
Vallée : Bien, je vais vous dire bien honnêtement, on réfléchit
et on tente de trouver une piste de solution. On a cette piste-là qu'on vous propose puis qu'on pourrait travailler de
façon un peu plus... on pourrait travailler davantage pour, je l'espère, à notre prochaine séance, en
arriver à quelque chose qui ferait l'affaire de tout le monde. Maintenant,
si vous me dites que, par principe, vous ne
souhaitez pas qu'on fasse l'analyse, ce n'est pas grave, on va continuer, on va
voter sur le sous-amendement. Moi, j'essaie
juste de trouver la voie de passage. Je pense que de s'attarder... Soyez
assurée, je n'étire pas le plaisir
pour le simple plaisir d'étirer le plaisir, puis je ne fais pas des heures
juste pour faire des heures ni pour
faire du temps. Je pense qu'on est constamment... les équipes sont constamment à la recherche aussi d'une alternative qui permettrait de répondre aux préoccupations des
collègues parlementaires tout en respectant les paramètres. Alors, bon, les...
• (17 h 20) •
Mme
Maltais : Je veux comprendre le changement, c'est-à-dire que la... Moi, là, on ne peut pas discuter d'une proposition qui
n'est pas écrite, là, je la cherche.
Mme
Vallée : Alors, moi, je veux simplement... Je vous lance
l'idée. Si vous trouvez que l'idée est intéressante, on va la pousser. Et, si vous dites : On
n'est pas intéressés parce qu'on n'est pas intéressés, bien, O.K., continuons
et votons sur l'amendement. Mais je
proposais de suspendre, de passer à l'autre article, de vous revenir avec
quelque chose. Mais c'était une façon
d'avoir un carré de sable, c'est-à-dire d'avoir des paramètres dans lesquels le
discours haineux s'inscrivait puis des paramètres qui permettent aussi
de répondre à toutes les préoccupations dont on a parlé dans le passé. Et parfois il y a des idées... Je vous avoue que
les... On travaille et on... Des idées puis des suggestions, on ne vous les a
pas toutes présentées, mais il y en a
quand même beaucoup. On a des petites abeilles derrière nous qui s'activent
puis qui sont, elles aussi, à la recherche d'un point de rencontre de
nos préoccupations respectives.
Mme
Maltais :
Il demeure que j'aimerais ça qu'elle me redise un peu, là, comment ça s'écrirait
parce que, je veux dire, j'ai deux
préoccupations. «Dans un contexte d'intolérance», je le disais, sorti de
l'extrémisme violent, ça, je ne peux pas vivre avec ça. Ça fait qu'on avait déjà
demandé qu'il soit supprimé. Si c'est supprimé, effectivement c'est déjà
une épine d'enlevée. Il reste le discours
haineux. Est-ce que le discours... Comment va se lire le texte une fois qu'on
aura eu les choses? Parce que, moi,
«discours haineux», s'il n'est pas collé à la radicalisation ou au fanatisme
religieux, là, entraînant dans la
violence ou des choses comme ça, c'est là que j'ai un inconfort. Ça fait que je
veux bien en régler... Comme je dis,
je suis prête à accepter la proposition de la collègue parce qu'elle est mieux
que la proposition de la ministre. Mais je ne sais pas quelle sera la
proposition de la ministre et je ne sais pas de quelle façon on va la lire.
Ça
fait que, oui, on aura un bout de chemin de fait. Est-ce que, ce carré de sable
là, on peut le travailler? Oui, je le crois.
Puis je pense qu'on peut arriver à quelque chose, mais je veux juste... Parce
que je veux vraiment être honnête, je veux
être sincère, là, j'ai les mêmes arguments depuis le début. Depuis le début, il
y a une ligne de fracture avec «dans un
contexte d'intolérance». Si elle est supprimée, on vient de tasser quelque
chose. Maintenant, il va rester comment va se lire le discours haineux,
comment sera... Parce que, là, on est dans le discours haineux, puis moi, je le
répète, là, c'est l'appel à la violence qui
était notre intention. «Radicalisation» égale «appel à la violence». C'est
d'une clarté, ça, claire. C'est d'une clarté limpide. Alors, je veux
juste comprendre où on s'en va.
Le Président (M.
Morin) : O.K. Et on aura peut-être besoin d'une permission pour
entendre l'auteur du sous-amendement. Est-ce qu'il y a...
Mme
Maltais :
Oui.
Le Président (M.
Morin) : Oui. Mais pas pour partir pour 20 minutes, là.
Une voix :
...
Le Président (M.
Morin) : Non, mais quand même, je veux simplement vous...
Mme Roy
(Montarville) :
...de ce que madame...
Le Président (M.
Morin) : Pardon, madame, c'est moi qui ai la parole, là.
Excusez, c'est simplement que je demande la
permission que vous interveniez parce
que votre temps est écoulé, mais je
veux que ça soit fait brièvement.
Mais j'ai hâte de vous écouter, allez-y. J'ai le consentement?
Des voix :
Consentement.
Mme Roy
(Montarville) :
Merci, M. le Président. Juste pour que je sois bien au diapason, là, on parle
de la proposition que la ministre nous a dite, là? Parfait. Si on prend, naturellement,
pour acquis qu'il faut toujours lire un article de loi, là, les trois alinéas ensemble, on ne
prend pas des petits bouts, là, il faut... Tout ça, là, c'est un morceau,
c'est un bloc, là. Mme la ministre, on n'est vraiment pas loin, là, et je sens que vous comprenez où on
s'en va puis vous comprenez aussi vraiment
le sens du travail qui est fait ici, mais moi, j'aimerais comprendre, c'est
que, si vous ajoutez «les discours
incitant à la violence pouvant s'exprimer» et non «s'exprimant», là vous venez
d'ouvrir plus large avec le verbe
«pouvoir», qui est comme les verbes «principalement», «notamment», «peut»... En
droit, là, tu viens d'ouvrir la porte,
alors que, nous, ce que nous voulions faire, c'était dans ce contexte
particulier là, «s'exprimant dans un contexte d'endoctrinement». En
mettant «pouvant», on va plus large, ça fait qu'on rouvre à nouveau.
Par ailleurs, donc, «des propos, des discours incitant à la violence pouvant
s'exprimer dans un contexte d'endoctrinement,
de radicalisation ou de fanatisme», alors vous enlevez «de propagande
intégriste». Moi, je constate que, depuis le début des travaux, à chaque
fois qu'on a voulu mettre le mot «intégriste», on nous le fait enlever.
Là,
vous mettez «fanatisme». Pourtant, c'est ce dont il s'agit parce que
«fanatisme» ouvre encore large. Et c'est pour ça que je vous dis, on n'est pas loin, là. Parce que la naissance
de ce projet de loi là, ce n'est pas le fanatisme, c'est vraiment
l'islamisme. Et omettre le mot «intégriste» dans ce projet de loi là, pour
nous, c'est... Je ne comprends pas pourquoi
vous voulez l'enlever à nouveau pour mettre «fanatisme». Et, lorsqu'on ajoute «peut», donc le pouvant, bien,
ce n'est pas exclusif, là, on ouvre, on
ouvre encore. Ça fait qu'on pensait circonscrire, puis là je trouve que ça
rouvre à nouveau. C'est juste ça.
Voyez-vous ce que je veux dire, là? On pensait resserrer le discours, resserrer
le contexte, resserrer les circonstances, puis là on le rouvre encore.
Ça fait que je voudrais comprendre pourquoi, c'est tout.
Le
Président (M. Morin) : ...à vous écouter, est-ce que je
suspends, puis vous discutez ensemble ou on n'est pas rendus là?
Des voix :
...
Le Président (M.
Morin) : Non? On n'est pas rendus là? Ça va.
Mme
Maltais : Bien, ce qu'on fera, on va continuer à discuter sur le
sous-amendement de la CAQ, là, puis on ira à mardi pour des...
Le
Président (M. Morin) : Oui, ça va. Oui, merci. Merci, Mme la
députée de Montarville, mais votre permission est terminée.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci. Trop bon...
Le Président (M.
Morin) : C'est comme à l'école. Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : Non, ça nous a fait plaisir. C'est toujours difficile, le
contexte d'une étude article par article, parce que c'est 20 minutes. Il faut que les gens comprennent, là, une étude
article par article, c'est chacun a 20 minutes pour débattre de son amendement. Et, comme la députée a
fait un immense plaidoyer en interpelant les journalistes, qu'elle avait peut-être appelés, je ne sais pas, ça a fait
un 20 minutes continu, donc elle n'avait plus de temps. Ça fait qu'on est
allés dans une circonstance exceptionnelle pour permettre de jaser de ça.
Sauf
que moi, je vais vous dire, on reviendra sur la proposition de la ministre,
elle sera écrite, on pourra voir, puis j'aurai
des questions toujours sur les mots «discours haineux», jusqu'à quel point ça
les balise ou pas de façon resserrée, puis je vais le faire avec
vraiment, là, toute l'ouverture pour essayer de nous sortir de là.
Maintenant,
la propagande intégriste, c'est parce que de la propagande, c'est un terme
particulier. De la propagande, c'est
qu'on propage des idées. Donc, ce qu'elle propose, la députée, «établir des
mesures de prévention et de lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant
dans un contexte d'endoctrinement — on est déjà dans les idées — de radicalisation ou de propagande intégriste pouvant mener à
l'extrémisme violent». Si la collègue n'avait pas pris tout son temps pour faire un grand plaidoyer en interpelant les
journalistes, peut-être qu'elle pourrait nous expliquer mieux «propagande». Mais c'est la vie. Mais, comme
je vous le dis, à première vue, on est d'accord parce que c'est meilleur
que la proposition qu'on a sur la table.
Maintenant, on nous
dit : Il pourrait y avoir une autre proposition. Comprenez bien combien je
suis embêtée, M. le Président, je vais voter
pour en sachant qu'il y a une contre-proposition que je ne verrai pas à cause
de nos modes de fonctionnement.
Alors, on va continuer à voter pour. Moi, je vais continuer à voter pour. De
toute façon, si la ministre a une
meilleure proposition, elle va nous la déposer, elle va donc la rejeter. Ça
fait qu'on va prendre le rejet probable. Étant donné la discussion qu'on vient d'avoir, l'échange qu'on vient d'avoir,
on va prendre le rejet de la ministre non pas comme un rejet de la volonté
qu'on a d'aller parler de l'intégrisme religieux, ou du fanatisme, ou de peu
importe le terme, la propagande ou d'enlever
«dans un contexte d'intolérance», mais on va prendre le rejet comme étant... On
serait dans une négo, on va appeler
ça une contre-offre. On va prendre le rejet comme étant : Nous rejetons
votre offre, mais nous préparons une contre-offre. Alors, ça va être
dans ce sens-là.
Remarquez,
je vais vous le dire tout de suite, là on est toujours sur l'amendement de la
ministre, mais, quand on arrive à
l'article même... C'est pour ça que je veux être claire. Nous, on pensait que
probablement qu'on se rendrait à l'article au moins aujourd'hui, sinon
demain. Non pas à l'amendement ministériel, mais à l'article. Même si on a
encore un amendement sur cet amendement-là,
on pensait arriver peut-être bientôt à l'article, et c'est sur l'article même
qu'on a un amendement fondamental. Mais on l'annoncera assez d'avance
pour que, dans le débat, on puisse ne pas arriver à la dernière minute comme ça puis qu'on puisse s'échanger de façon
ouverte sur ce que pourraient devenir les balises de cette loi. On fera le «move» peut-être
pour mardi pour essayer de réussir à faire qu'il y ait une piste
d'atterrissage qui se balise. Tu sais, genre offre, contre-offre, là, on
peut jouer à ça.
• (17 h 30) •
Le Président (M.
Morin) : Mme la ministre. Oui, oui, ça va bien.
Mme
Maltais :
Mais oui, elle peut.
Le Président (M.
Morin) : Un instant. Oui.
Mme Vallée :
J'écoute la collègue, et, si on a, du côté de l'opposition officielle, un amendement
important à soumettre, je pense qu'il serait
important d'en discuter parce que l'objectif... Si nous, on arrive, on propose quelque chose, et puis on revient, puis on refait le débat... Je n'ai pas envie de
faire travailler les équipes pour le simple fait de travailler les
équipes. Mais, si l'objectif est d'arriver à un point de rencontre, bien là, à
ce moment-là, le travail est tout autre. Travailler
simplement pour ajouter des amendements, je pense qu'on a
fait quand même pas mal d'efforts dans ce sens-là de part et d'autre de cette table. Alors, il faut le voir... Puis je comprends que nos
règles parlementaires nous amènent à aborder les questions d'une façon un peu différente, mais il faudrait peut-être
avoir une possibilité d'échanger préalablement parce qu'il ne faudrait pas que le travail soit en
vain. Si nous devions arriver, dans le cadre de cette étape, à trouver une
piste d'atterrissage, il ne faudrait pas qu'elle soit détruite ou criblée
d'embûches à l'étape suivante.
Le Président (M.
Morin) : Mme la députée de Taschereau.
Mme
Maltais : On n'a jamais pensé dans l'esprit d'une embûche.
D'ailleurs, dans toute la réflexion qu'on est en train de faire au fur et à mesure du débat sur l'article 1 comme tel,
je le dis, on intègre tous les amendements qu'on fait, là, actuellement, puis on les lit en fonction de l'avenir. On ne
les lit pas seulement... tu sais, on les lit et on... Tout ce qu'on propose est en fonction de l'avenir,
puis, quand on... Tout le travail qui a été fait ne peut pas être abandonné.
Nous autres, on était là-dedans, là, on le
suivait. Donc, on ne reconstruira pas, là, complètement, ce n'était pas
l'esprit. C'était de mieux baliser
sur les principes qu'on a toujours énoncés, puis qu'on retrouve peut-être un
peu dans la proposition qui s'en...
L'extrémisme violent, l'appel à la violence, on se tient dans les mêmes mots.
Bon, il y avait l'intention qui était là, qui a été jusqu'ici rejetée,
mais on verra si c'est peut-être... Ça dépend du libellé de la chose.
Mon inquiétude sera toujours — et je
le dis, là — sur
le discours haineux, comment il va être interprété par les tribunaux. Entre autres, puisqu'on en parle, je dirai, la
discussion, ce que je... une dernière chose, si on enlève «dans un contexte
d'intolérance», ce que j'accueille avec plaisir, vu qu'on l'a déjà proposé,
pour l'avenir, là, est-ce que «discours haineux»... Puis là peut-être
vous allez avoir besoin de temps, là, c'est pour ça que je vous la pose tout de
suite, la question. Si on s'en va vers ça,
est-ce que, quand on dit : «La présente loi a pour objet d'établir des
mesures de prévention et de lutte
contre les discours haineux et les discours incitant à la violence s'exprimant
dans un contexte...», puis là on décrit
le contexte qui n'est plus «intolérance», est-ce que «discours haineux» est lié
au reste de la phrase? Est-ce que ce sont
les deux types de discours, les discours haineux et les discours incitant à la
violence s'exprimant dans un contexte d'endoctrinement
qui vont... Est-ce que les discours haineux, autrement dit, vont... Est-ce que
«s'exprimant dans un contexte d'endoctrinement, de radicalisation ou de
fanatisme pouvant mener à l'extrémisme violent», est-ce que ce sont les deux
types de discours qui doivent être liés à «s'exprimant», au reste de la phrase?
Quand il y aura interprétation, est-ce que
quelqu'un pourra plaider que «discours haineux», c'est séparé de «discours incitant à la violence s'exprimant dans
un contexte d'endoctrinement» ou si le juge dira : Non, non, c'est
«discours haineux s'exprimant dans un
contexte d'endoctrinement», bla, bla, bla, et «discours incitant à la violence
s'exprimant dans», bla, bla, bla?
Vous comprenez, est-ce que ce sont deux objets séparés avec le même contexte ou
si c'est deux objets dans lesquels il
y a un contexte accolé aux discours
incitant à la violence? J'ai l'impression que ça prend des juristes pour
nous suivre, là, mais, quand on fait de la législation,
on s'attache à ça. Mais moi, je ne connais pas assez le droit, je le dis
bien honnêtement, pour savoir comment ce sera interprété. Quelqu'un pourrait-il
plaider ça?
Le
Président (M. Morin) :
Mme la députée de Taschereau, compte tenu de nos discussions, vous êtes en
fraude depuis quelques secondes, mais j'ai compris que nos collègues
vous donnaient le...
Mme
Maltais : Ma question
est posée, de toute façon, M. le Président, c'est correct.
Le Président (M. Morin) :
C'est correct? Oui, c'est bien, ce que... Je vous ai laissée aller parce qu'il
y a un consentement, là. Mme la ministre.
C'est pour être équitable envers tout le monde. Est-ce que vous voulez que je
suspende quelques instants?
Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 36)
(Reprise à 17 h 48)
Le Président (M. Morin) :
Bon, nous reprenons nos travaux. Et, dans nos échanges, nous croyons qu'il est possible d'en arriver à quelque
chose de bien, mais on va laisser travailler la ministre cette fin de semaine jusqu'à mardi, et elle va vous revenir, et on va analyser son travail, s'il est abordable
par les oppositions, et, tous ensemble, je crois qu'on va y
arriver.
Donc, la commission ajourne ses travaux au mardi
16 septembre, à 10 heures...
Une voix : ...
Le Président (M. Morin) :
Quoi?
Une voix : ...
Le Président (M. Morin) :
Excusez, je suis rendu au mois de septembre. Excusez, oui, février.
(Fin de la séance à 17 h 49)