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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 7 octobre 2015 - Vol. 44 N° 63

Étude détaillée du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l’administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. Sébastien Schneeberger, président suppléant

Mme Stéphanie Vallée

M. Stéphane Bédard

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jean Boucher

M. Guy Hardy 

M. Jean Rousselle

M. Sébastien Proulx

M. Raymond Bernier   

*          Mme Pascale Brière, ministère de la Justice

*          Mme Sabrina Grand, bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales

*          Mme Frikia Belogbi, Fonds d'aide aux recours collectifs

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt minutes)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la Commission des institutions ouverte. Je voudrais demander à tous ceux qui ont un téléphone cellulaire, peu importe, là, le modèle, de le fermer.

La commission est réunie aujourd'hui afin d'étudier les détails du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplaçants?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Fortin (Pontiac) remplace M. Ouellette (Chomedey) et M. Hardy (Saint-François) remplace M. Tanguay (LaFontaine).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Schneeberger) : Merci. Lors de notre séance d'hier, nous avions continué l'étude des articles contenus dans le sujet n° 2. Nous avons adopté les articles 10, 9, 15, 16, 17, 2 et 8. Nous avions débuté l'étude de l'article 11. Je vous rappelle que les études des articles contenus dans... le sujet n° 1 est toujours suspendu. Alors, je vous laisse, Mme la ministre, la parole.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Bienvenue au sein de notre équipe. Hier, on était... nous en étions, pardon, à l'article 11. Donc, nous avions des échanges sur toute la question des demandes préliminaires. Je ne sais pas si les collègues ont des commentaires additionnels.

M. Bédard : Bien, on était, c'est ça, effectivement, sur les demandes préliminaires et sur le fait qu'on était dans une circonstance où déjà une des parties, soit le défendeur, est forclos de plaider quoi que ce soit, donc il est réputé, à ce moment-là, il n'y a plus de preuve, et qu'on le privait du moyen de faire une demande préliminaire, qui sont, bon, celles qu'on a indiquées, un changement de district et d'autres éléments qui sont indiqués à l'article, que je ne me souviens pas par coeur.

Et, bon, ce qu'on nous a fait comme représentation, c'était que, finalement, ces demandes préliminaires s'adressaient aussi au poursuivant, parce que lui non plus ne pourra pas les utiliser à des fins, donc, de regroupement, ou peu importe. Donc, il devra procéder, évidemment, selon ce qui est prévu à l'article. On se retrouve devant, à ce moment-là, un juge de paix fonctionnaire, c'est ça? J'essaie toujours d'avoir la bonne appellation, c'est juge de paix fonctionnaire.

Et je représentais, à ce moment-là aussi, qu'il me semble qu'on devrait laisser la possibilité au défendeur, au moins lui laisser la possibilité de présenter une demande préliminaire, donc... Et j'imagine que, s'il le faisait... Si on n'adopte pas l'article comme il est, s'il fait une demande préliminaire, donc, par exemple, de changement de district... Actuellement, il peut le faire, donc le dossier ne se retrouvera pas... Les changements de district ne se retrouvent pas devant le juge de paix fonctionnaire mais bien devant le juge de paix magistrat... ou devant le juge?

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Actuellement, pour les dispositions prévues au code de... Les infractions qui sont touchées par l'administration du Code de procédure pénale, normalement, effectivement, il existe les mesures préliminaires qui sont présentées devant un juge de paix magistrat. Par contre, lorsqu'il est question des procédures que l'on appelle «no-contest», où le défendeur est présumé ne pas contester, notamment les infractions qui sont visées à la section II, paragraphe quatre, bien, il n'y en a pas, de moyen préliminaire. Donc, dans le fond, ce que l'on fait actuellement, c'est tout simplement d'élargir cette règle quant aux demandes préliminaires à nos nouvelles infractions qui seront traitées sous le régime du «no contest». Parce qu'actuellement, par exemple, pour les stationnements, les billets de stationnement qui sont administrés sous le régime actuel du «no contest», il n'est pas possible pour un défendeur de formuler une demande préliminaire, puisque le code prévoit déjà à 168.1 que les demandes préliminaires ne sont pas possibles, ne peuvent être présentées pour ce type de procédure là.

Alors, ce que l'on fait, l'article vise simplement à l'élargir aux nouvelles infractions, aux nouvelles dispositions traitées. Ces moyens-là... Et cette disposition-là, elle existe. Ce n'est pas quelque chose qui est nouveau, qui est introduit par le projet de loi n° 51. Et on fait... tout simplement l'élargir, parce que, dans le cadre... Dans le fond, le cadre d'un «no contest», c'est qu'on présume qu'il n'y a pas de contestation. Il y a une présomption qui entre en compte, en considération, que le défendeur ne conteste pas le constat. Si on devait ouvrir à des demandes préliminaires, on viendrait... on irait à l'encontre du principe même de ce type de procédure là, parce qu'une demande préliminaire, normalement, sera présentée ou sera formulée lorsqu'on a des représentations à faire.

Et ces représentations-là, comme je le disais hier, sont toujours possibles parce que le défendeur pourra, au moment de la réception de son constat, indiquer qu'il conteste, et donc, par le fait même, il pourra présenter une demande... un moyen préliminaire au juge de paix magistrat qui sera saisi du dossier, puisqu'à partir du moment où on conteste, on signifie notre intention de contester, le dossier est retourné dans le processus habituel et sera référé à un juge de paix magistrat pour adjudication.

M. Bédard : C'est ça, mais là on n'est pas dans ce cas-là, on est dans le cas d'une personne qui a laissé passer des délais. Là, on est de l'autre côté, on est dans le cas où on dit à une personne... elle est forclos de plaider quoi que ce soit. Alors, c'est sûr que, si elle conteste, elle peut prendre tous les moyens ordinaires de contestation.

Non, parce que je regarde à quoi on assimile... Là, actuellement, cette impossibilité de présenter les moyens préliminaires, c'est pour les tickets de stationnement, et c'est pour quel autre type de... pour toutes les infractions...

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Il y a toute une série...

M. Bédard : ...incluant les codes de sécurité routière... toutes les infractions au Code de sécurité routière?

Mme Vallée : ...qui sont visées par la partie II, la section...

Une voix : ...

Mme Vallée : 218.2. Alors, attendez... Alors, 218.2 prévoit les poursuites relatives aux infractions au Code de la sécurité routière qui sont visées par ce type de mesure là ou un règlement relatif à la circulation ou au stationnement adopté par une municipalité lorsque les conditions suivantes sont réunies, et là les conditions sont déterminées à 218.2.

M. Bédard : Donc, l'ensemble des infractions routières sont incluses dans l'article actuel. C'est ce que je comprends? C'est le cas?

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : C'est lorsqu'on est spécifiquement dans le «no contest».

M. Bédard : Exact, mais, je veux dire, dans le «no contest», dans le cas, bien, d'accusation, lorsqu'on porte des... lorsqu'on attribue des sanctions pénales à des infractions routières où l'ensemble des infractions sont incluses...

Mme Brière (Pascale) : Pascale Brière, du ministère de la Justice.

Alors, ce sont les infractions au Code de la sécurité routière, donc les infractions au Code de la sécurité routière ou à un règlement relatif à la circulation ou stationnement adopté par une municipalité.

M. Bédard : Et là on l'étend, par le biais de cet article, aux infractions constatées par... voilà, O.K., par photoradars. C'est ça? C'est tout?

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Comme on l'a mentionné, là, hier, il y a les photoradars, il y a aussi les appareils qui nous permettent de détecter lorsqu'un péage n'a pas été perçu. Et il y a également les systèmes photographiques qui permettent de déterminer si un conducteur a brûlé un feu rouge, notamment, qui sont parfois installés sur certains feux de circulation.

Alors, dans le fond, c'est cette preuve-là qui est administrée par des moyens technologiques.

M. Bédard : ...j'ai une résistance naturelle, moi, à priver les défendeurs de moyens, je vous dirais, en général. Je comprends qu'en termes logiques, évidemment, les infractions constatées par photoradar et l'autre sont des infractions qui sont de même nature que celles visées par l'article actuel. C'est ce que je comprends. Donc, on va leur empêcher de présenter des moyens préliminaires.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

• (11 h 30) •

Mme Vallée : En fait, le juge... Il faut comprendre que le juge de paix fonctionnaire, là, comme on le mentionnait hier, n'a pas cette compétence-là d'entendre les moyens préliminaires. C'est un juge de paix qui va traiter d'un dossier à sa face même sur une base très objective.

On ne prive aucunement le citoyen de son droit de contester et de son droit à une défense pleine et entière, puisque le citoyen, il a quand même cette responsabilité-là aussi, en tant que citoyen, de donner suite, à l'intérieur des délais prévus, aux constats d'infraction qui nous sont signifiés. Alors, il y a une responsabilité. Et, dans le cas d'un citoyen qui serait empêché d'agir, là le code continue de s'appliquer, et ce citoyen-là aura toujours la possibilité d'intervenir par le biais notamment d'une rétractation de jugement. Et, comme Me Grand nous l'expliquait hier, c'est une procédure qui est somme toute assez simple, une procédure qui... C'est un document, un formulaire qui peut être rempli par le citoyen, grâce notamment à l'aide des gens qui travaillent au greffe des palais de justice, et ce n'est pas un formulaire très, très complexe, et par lequel le citoyen peut formuler, mais...

M. Bédard : Les moyens sont limités quand même, là. Le fait d'aller en rétractation de jugement... Ce n'est pas parce que tu l'as oublié que tu as une rétractation.

Mme Vallée : Non, mais il faut comprendre... Il faut comprendre, actuellement, là, actuellement, vous oubliez votre constat, vous le laissez ou vous le jetez par mégarde dans le bac à recyclage, comme nous le mentionnait notre collègue hier, il y a une conséquence à ça. Le dossier va quand même être... Vous allez quand même vous retrouver ultimement avec un jugement qui sera rendu si vous n'avez pas... Parce que vous êtes réputé contester, vous n'avez pas payé et vous allez avoir un jugement rendu et des frais.

Alors, il y a quand même... Les citoyens ont tout de même un délai, et puis il s'agit aussi de notre responsabilité de donner suite à l'intérieur des délais. Et les dispositions ne viennent pas priver... parce que ce sont des dispositions qui ont tout leur sens dans le contexte d'un régime de «no contest». C'est un régime, c'est une façon, une procédure qui permet un traitement devant un juge de paix fonctionnaire, un traitement qui ne comprend pas toutes les représentations devant le tribunal, justement, et le juge de paix fonctionnaire n'a pas cette possibilité d'entendre des éléments, des arguments contradictoires et n'a pas à statuer sur les faits. Le juge de paix fonctionnaire, son mandat, c'est de voir : le dossier est complet, est-ce que le dossier... est-ce que j'ai, dans le dossier, l'ensemble des documents que le code prévoit? Oui. Est-ce que les éléments... Est-ce que les documents sont conformes? Oui. Donc, c'est une appréciation vraiment objective. Le juge de paix fonctionnaire n'a pas cette possibilité d'appréciation subjective et de déterminer et d'apprécier la preuve.

M. Bédard : Ça, je le comprends très bien, mais mon point, il n'est pas là. C'est sûr que lui n'a pas d'appréciation à faire. Il fait des constats, il fait un examen, comme on le disait hier, pour voir si les éléments littéralement cléricaux sont au rendez-vous, si...

L'idée, c'est qu'on rentre dans la logique qui est celle qu'évidemment on crée un régime particulier pour ce type d'infraction, parce qu'il y a un nombre important, parce qu'évidemment il y a une lourdeur sur le système. Si on accordait les mêmes... Si on ne faisait pas de renversement de fardeau ou, dans ce cas-ci, on ne réputait pas quelqu'un d'avoir plaidé coupable... pas d'avoir plaidé coupable, mais de ne pas contester, évidemment, il y a des coûts administratifs liés à tout ça, et c'est une logique en soi qui se défend au niveau administratif.

Du point de vue du défendeur, c'est une logique qui n'a pas de valeur. C'est ça que je veux vous dire. Moi, que demain matin le système me condamne plus vite parce que j'ai eu un ticket puis qu'il me crée des présomptions irréfragables, ce n'est pas pour moi, ce système-là. Il est fait pour l'administration de la justice. C'est ça que je veux bien imprégner, là. L'idée, moi, ma pensée est plus pour le défendeur. La personne qui, puis ça arrive dans la vie, se réveille un bon matin puis effectivement elle a passé le délai, elle le sait, parce qu'elle avait bien d'autres choses à faire que de s'occuper de son ticket et... Bon, et là...

C'est qu'on ajoute, parce qu'on dit : Comme c'est une logique de non-contestation sur laquelle on accorde des présomptions où on ne peut pas démontrer le contraire, bien, aussi ce qui s'ensuit, c'est qu'on ne peut pas lui présenter de moyen préliminaire. Puis là on ne peut pas dire : «Parce que c'est un juge de paix fonctionnaire», parce que ça, c'est la logique du «no contest». La personne, elle, que ce soit un juge de paix fonctionnaire ou un juge à la Cour suprême qui rend le jugement, pour lui, ça ne fait pas vraiment de différence.

Mme Vallée : C'est le même principe que le jugement par défaut qui est rendu devant le greffier en matière civile. Un citoyen se voit signifier, par exemple, une action sur compte, la laisse traîner sur le bureau, n'y donne pas suite, ne comparaît pas... Parce que, dans le fond, le plaidoyer qui est transmis, c'est l'équivalent d'une comparution. Lorsqu'on retourne...

M. Bédard : ...quand ils sont sur défaut, là. L'huissier rentre chez vous...

Mme Vallée : Mais pas nécessairement. Une signification peut se faire par... La signification peut se faire également par courrier recommandé. Prenons le dossier des Petites Créances, par exemple. Ce n'est pas nécessairement une signification par huissier. Donc, on omet, par exemple...

Et puis je pense que le parallèle est intéressant avec le dossier des Petites Créances. Dossier des Petites Créances, on reçoit une signification d'une procédure par courrier recommandé. On va chercher, on signe, la procédure est signifiée, la preuve de signification est déposée au greffe — le délai de comparution est même plus court, hein? On parle de délais qui sont pas mal plus courts que les 60 jours et que les 30 jours prévus — et on ne donne pas suite, parce qu'on a d'autres choses à faire, parce qu'on est pris, ou parce qu'on n'a pas envie, ou pour toutes sortes de bonnes ou de moins bonnes raisons, on le laisse traîner, mais, ultimement, le greffier pourra rendre un jugement par défaut, et incluant les frais. C'est le même principe.

Dans le fond, ce que l'on prévoit ici, c'est une concordance...

M. Bédard : En tout respect, la personne a la possibilité de contester jusqu'au dernier moment, là. Elle se présente le matin, ou il le fait, puis elle pourrait présenter des moyens, puis elle dit au juge : Vous allez me suspendre de, je n'ai pas comparu. Finalement, jusqu'à la dernière minute, il n'y a aucune présomption qui s'applique contre lui. C'est ça que je veux vous dire. C'est que, dans ce cas-ci... Moi, ce qui me rebute tout le temps, c'est l'idée que... Et, dans ce cas-ci, la personne est réputée, donc aucune possibilité de faire une preuve contraire. C'est ça que ça veut dire.

Mme Vallée : C'est ça, le «no contest».

M. Bédard : Et, dans le cas que vous mentionnez, dans les cas de choses par défaut, jamais on ne va être réputé. Quand il y a un jugement, c'est un jugement, c'est exécutoire, mais c'est exécutoire en tout état de cause, peu importe le moment puis peu importe la personne. Mais, jusqu'au dernier moment, la personne a la possibilité de faire valoir chacun de ses moyens. Et moi, j'en ai vu, des gens, se présenter le jour. J'en ai fait, des actions sur compte, puis, à un moment donné, le défendeur se réveille. Puis tu penses avoir ton jugement par défaut. Finalement, woups! tu ne l'auras pas, ton jugement par défaut, ce matin-là, puis il n'y a personne qui a une présomption contre lui parce qu'il l'a oublié, là. Là, à ce moment-là, il demande au tribunal, et là on repart.

Et c'est pour ça... Moi, c'est l'idée de la présomption, qui nous semble normale, mais, dans les faits, c'est quelque chose d'exorbitant du droit. Et là on le fait parce que c'est des infractions qu'on considère, somme toute, mineures, mais qui ont un impact quand même sur la vie des gens, d'être condamnés à 300 $ ou 400 $ d'amende, ou 500 $, ou 600 $.

Mme Vallée : Mais actuellement quelqu'un qui ne donne pas suite à son constat d'infraction, là, pour les mêmes raisons, va aussi voir son dossier déféré à un juge de paix magistrat. Donc, l'objectif de permettre de traiter ces infractions-là par voie de cette procédure «no-contest», comme on le fait dans d'autres types d'infractions, tu sais, à la base, c'est aussi pour désengorger nos tribunaux et permettre à ceux qui ont vraiment des représentations à faire, qui ont signifié, de pouvoir les faire, ces représentations-là. Alors, c'est la base...

M. Bédard : Je comprends. Mais, pour le défendeur qu'on parle, là, lui, ce n'est pas son problème à lui, là. C'est ça que je veux dire. L'engorgement des tribunaux, lui, ce n'est pas son problème, là.

• (11 h 40) •

Mme Vallée : Bien, avec respect, moi, je vous dirais que le défendeur auquel on fait référence, le défendeur qui est, à la limite, négligent, il a... Le défendeur a aussi une responsabilité, et c'est de donner suite à l'intérieur des délais prévus. Et, pour le défendeur qui est dans l'incapacité de donner suite à l'intérieur des délais prévus, il y a d'autres moyens qui sont prévus que ceux prévus... que les moyens dilatoires. Parce que le défendeur qui est incapable d'agir pour, par exemple, un cas d'hospitalisation, ce qui est possible, ce défendeur-là n'aura aucun problème à présenter sa demande en rétractation. Mais le défendeur qui est négligent et qui voudrait seulement qu'étirer les choses, bien, désolée, mais, à travers le «no contest», ce n'est pas possible, parce que l'objectif, c'est de permettre de traiter les dossiers pour permettre de laisser sur les rôles les affaires contestées qui méritent d'être traitées. On nous dit trop souvent : Ah! les tribunaux sont engorgés, les tribunaux sont engorgés. Bien, voici un moyen de traiter d'infractions très précises et tout en respectant, dans le processus procédural qui est mis en place, la possibilité pour le citoyen de se prévaloir d'une défense pleine et entière.

Parce qu'on ne l'enlève pas du tout du processus. Tout ce qui est prévu, c'est que le citoyen qui ne donne pas suite à son constat à l'intérieur du délai prévu va être réputé ne pas contester le constat. Mais les délais sont là et permettent toujours au citoyen simplement de déposer sa contestation et par la suite de faire toutes les représentations qu'il voudra bien faire, parce qu'il existe... En fait, ce qu'on... On ne dit pas, par l'introduction du «no contest», qu'il n'y a pas de défense à faire valoir lorsque tu reçois un constat d'infraction. Ce n'est pas du tout ça, là.

M. Bédard : Ça sonne logique avec vous. Là, je ne suis pas... Ce n'est pas un... Je n'en fais pas une question de principe, là, mais, dans le cas des infractions en général, de la sécurité routière, à part les tickets, je veux dire, de stationnement, effectivement, sur lequel on... Disons, l'ensemble des infractions de sécurité routière, en général... pas en général, là, de façon constante, tu as un contact avec la police, disons, et là, bon, il y a un contact direct, il y a une prise de conscience au moment où ça arrive, en général, alors... que ce soit pour un excès de vitesse ou peu importe. Donc, bien que ça ne soit pas une signification, évidemment, par rapport à la procédure, pour le citoyen, c'est une prise de conscience assez claire qu'il a enfreint la loi et qu'il va y avoir des conséquences qui vont être attachées.

Dans le cas d'un photoradar, il n'y en a pas, de ça. Pour ceux qui ont déjà eu... c'est une... Je n'en ai jamais eu, je vous avouerais. J'ai par contre quelqu'un au bureau qui l'a eu. Tu sais, tu reçois une enveloppe avec le machin, donc... puis là tu dis : Bon, j'étais où? C'était qui? C'était-u moi qui conduisais? La première chose que tu...

Une voix : ...

M. Bédard : Non, c'était... En plus, la personne, ce n'était pas elle qui conduisait, mais, bon, il faut se rappeler, ce n'est pas clair. Mais donc tu n'as pas eu de contact direct. Tu en as par le biais... où là tu dis : Bon, bien, le système me dit que j'ai manqué à la loi et... Puis là on lui dit : Bon, bien, pour les fins d'administration de la justice, pour tout le monde, on va te donner en plus des présomptions irréfragables, puis là, maintenant, en plus, quand tu vas passer ces délais, quand tu vas être présumé avoir reçu la signification, là, en plus, tu vas être forclos de plaider. C'est sûr que moi, j'aurais eu une résistance à le présenter, puis j'imagine que la ministre a posé des questions aussi par rapport à ça. Parce que c'est à peu près le seul contact qu'il a avec la justice, c'est l'envoi d'une lettre par courrier recommandé, ce qui n'est pas le cas pour l'ensemble des infractions au code de procédure... pas au code de procédure, au Code de la sécurité routière.

Ce que je dis à la ministre : Je me serais peut-être gardé une petite gêne dans ce cas-ci, justement, si ce n'est que sur les moyens préliminaires. Tu sais, moi, je suis plutôt mal à l'aise, mais je comprends que, l'administration de la justice, on n'est pas là pour engorger les tribunaux, effectivement, sur des éléments où les gens ne veulent pas contester. Mais, dans ce cas-ci, moi, il y a une logique que j'aurais pu garder, qui est celle de dire : Elle a un dernier moyen, c'est une façon pour elle, ultimement, au niveau dilatoire, là, ou de faire connaître autrement sa contestation, ou le fait qu'il a passé le délai puis il n'y a pas d'autre moyen. Parce que c'est rare que quelqu'un passe à l'hôpital deux mois, là, à moins vraiment d'être mal pris. Il peut arriver bien des circonstances.

Puis la rétractation du jugement, oui, c'est ouvert à tous, mais en même temps c'est très circonscrit sur les moyens qu'on peut faire valoir. Simplement, j'ai toujours cette préoccupation, moi, du pauvre citoyen qui est tout seul face à l'État puis qui ne connaît pas vraiment ça, puis, à un moment donné, il se retrouve face à ça, puis il se sent démuni, puis là on le prive du dernier moyen qu'il a. Vous pouvez me dire : Il n'y aurait peut-être même pas pensé, au moyen préliminaire. Tu sais, peut-être qu'il n'y aurait pas pensé, mais, moi, c'est toujours cette logique qu'il faut... Tu sais, il y a toujours un débalancement des forces quand quelqu'un se retrouve dans une accusation de ce type-là, qui n'est pas fondamental. C'est ça que je voulais faire valoir.

Je comprends que la ministre souhaite le conserver tel quel. Je n'en fais pas une exception de principe, mais je pense qu'on aurait... tu sais. Et là, pour lui, je vois que la ministre va rester sur ses positions, mais ne nous enfermons pas dans cette logique où, à partir du moment où c'est réputé, là, ça devient un dossier à traiter rapidement puis il ne faut pas que ça coûte cher. Puis je comprends qu'il y a des soucis. Tu sais, la justice, ça ne s'accommode pas de ça en général, avant, là. Maintenant, on a des préoccupations. La justice a un coût, effectivement, puis il faut s'assurer que le défendeur, lui, il ne sente pas que le système est contre lui, y incluant la personne qui décide ultimement.

Voilà. Je ne veux pas aller plus loin. J'aurais peut-être souhaité que cet article disparaisse. Je comprends que la ministre y tient, donc je n'irai pas plus loin dans mes représentations.

Le Président (M. Schneeberger) : C'est beau. Je pense que M. le député de Borduas avait des questions.

M. Jolin-Barrette : Oui, davantage des points d'information. Le défendeur qui reçoit le constat d'infraction à la maison et qui ne transmet pas de plaidoyer de culpabilité ou de non-culpabilité mais qui envoie une demande au BIA, une demande de preuve, de complément de preuve, comment ça va être traité par le DPCP? Est-ce qu'il va être assimilé à contester son constat d'infraction?

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Avec votre permission, M. le Président, je demanderais à Me Grand de pouvoir répondre à la question du collègue.

Le Président (M. Schneeberger) : Consentement? Oui, avec plaisir.

Mme Grand (Sabrina) : Alors, pour répondre à votre question, dès qu'une personne...

Le Président (M. Schneeberger) : Identifiez-vous, s'il vous plaît, pour les...

Mme Grand (Sabrina) : Pardon. Alors, Sabrina Grand, procureure en chef adjointe au Bureau des affaires pénales du Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Et donc, pour répondre à votre question, dès qu'une personne se manifeste d'une quelconque façon, nous, on va toujours considérer cette personne-là comme étant une personne qui souhaite plaider non coupable. Donc, pour protéger les intérêts du défendeur, si on reçoit une quelconque communication de sa part, on va toujours, toujours considérer... à moins qu'elle plaide coupable, évidemment, mais, si on a une demande quelconque, une demande de détails, des obligations de preuve ou tout autre demande, nous, on va la considérer comme non coupable. D'ailleurs, on va lui écrire à cet effet-là en lui disant : On a reçu une correspondance de votre part et on a enregistré un plaidoyer de non-culpabilité. Donc là, la personne comprend que c'est ce qu'on a fait et qu'elle doit... si ce n'est pas son intention, elle doit se manifester à nouveau à ce moment-là.

M. Jolin-Barrette : Donc, elle va tomber automatiquement dans le régime général de l'alinéa 1°.

Mme Grand (Sabrina) : Dans le régime général, tout à fait.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Prenons un deuxième cas de figure. La personne qui est dans le cadre du régime d'absence de contestation... Je ne sais pas comment on va l'appeler en français, de «no contest», mais il faudrait trouver un nom en français. Je sais que souvent c'est la demande du chef du premier groupe d'opposition...

M. Bédard : Bien, la vôtre aussi.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. Et donc prenons le cas où la personne se réveille après 35 jours, donc là elle est réputée ne pas contester l'infraction, mais qu'elle... puis on est dans les moyens préliminaires, mais qu'elle souhaiterait... elle constate que, sur le constat d'infraction il y a eu une erreur matérielle, qu'elle souhaiterait faire modifier le constat d'infraction pour le rendre conforme. Donc là, à ce moment-là, ça ne serait pas possible pour cette personne-là de faire modifier le constat d'infraction pour l'erreur matérielle ou pour que la preuve... Je ne vous dirais pas pour quelle raison un citoyen souhaiterait rectifier le constat d'infraction, mais prenons le cas où ça serait important pour cette personne-là, bien, à ce moment-là, il ne pourrait pas s'adresser... il ne pourrait pas faire de demande préliminaire pour faire modifier le constat d'infraction, parce qu'on lui enlève ces moyens-là.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Je vais céder la parole à Me Grand.

Mme Grand (Sabrina) : En fait, ça dépend si le jugement a été rendu ou pas. Donc, si évidemment le jugement n'a pas encore été rendu, que ce soit par un juge de paix fonctionnaire ou un juge de paix magistrat, évidemment, on va prendre note de la manifestation du défendeur et on va s'assurer que ce soit transmis à qui de droit. Mais évidemment que, s'il y a un jugement qui a été rendu, on ne peut pas comme poursuivre, aller à l'encontre d'un jugement. Donc, dès que le jugement a été rendu, que ce soit par un juge de paix fonctionnaire ou un juge de paix magistrat, on ne va pas demander de modification au nom du défendeur.

Par contre, si le jugement n'a pas encore été rendu... Donc, dans votre exemple, ça fait 35 jours, mais le juge de paix fonctionnaire ne s'est pas encore saisi du dossier, à ce moment-là, nous, ce que le BIA va faire, c'est qu'il va tenter de retirer le dossier, entre guillemets, donc de récupérer le dossier avant que le juge de paix fonctionnaire se penche dessus, pour pouvoir le ramener dans le régime régulier, puisqu'on comprend que le défendeur a une requête à présenter.

• (11 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord, mais actuellement, avec ce qu'on propose, il n'y a pas de recours. Dans le fond, le citoyen va écrire une lettre au DPCP, va dire : Bien, je souhaiterais qu'on modifie le constat d'infraction. Mais ça ne veut pas dire que la lettre va se rendre à temps ou qu'elle va être... dans le fond, le procureur va être saisi du dossier.

Je comprends ce que vous me dites, si jamais le jugement est rendu, c'est terminé. Mais, entre le moment... on n'offre pas de recours à l'individu, au citoyen. On dit : Bien, écoute, après ton 30e jour, c'est terminé. Concrètement, il pourrait envoyer une lettre, mais ça ne veut pas dire qu'au niveau du DPCP on va faire la correction. Il n'y a pas de garantie qui... il n'y a pas de possibilité de saisir les tribunaux pour ça dans le régime qui est proposé.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Grand (Sabrina) : Je ne suis pas sûre de saisir votre question, mais évidemment que, dans l'exemple que vous donnez, c'est le défendeur qui souhaite lui-même présenter une requête. Donc, si nous, on comprend de sa manifestation qu'il souhaite adresser une requête à la cour et qu'il n'y a pas encore de jugement qui a été rendu, bien, ce qu'on va faire, c'est qu'on va faire en sorte que le dossier ne prenne pas le chemin, entre guillemets, du «no contest», mais plutôt le chemin régulier et soit renvoyé devant le juge, mais ce n'est pas... Nous, on ne fera pas la demande à la place du défendeur.

M. Jolin-Barrette : Moi, ce que je vous dis, c'est qu'actuellement, avec ce qui est proposé à 168.1, il ne pourrait même pas le faire. Dans le fond, il ne pourrait pas présenter une requête aux tribunaux parce qu'on lui soustrait les demandes préliminaires.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Parce que, dans le cas de ce qui est... À 168.1, là, le défendeur a dépassé son délai et donc le défendeur a dépassé le délai qu'il avait pour signifier son intérêt... son intention de contester. Le dossier a été référé à la procédure... à l'instruction des poursuites qui ne... que le défendeur est réputé de ne pas contester — alors, je vais éviter d'utiliser l'abréviation anglophone — et il... plutôt que par la voie habituelle, et, dans cette voie où il est présumé ne pas contester, bien, évidemment, le défendeur ne reçoit pas d'avis d'audition, ne reçoit pas d'avis que le dossier va être traité à une date x, au même titre que, dans un dossier par défaut, on ne reçoit pas d'avis... le défendeur ne reçoit pas d'avis que, mardi prochain, à 11 h 15, le greffier va faire l'évaluation de l'ensemble des dossiers par défaut qu'il a à traiter. C'est la même chose.

M. Jolin-Barrette : Mais, M. le Président, je suis d'accord avec la ministre. Je comprends. Ce que je vous dis, c'est que la personne qui se réveille après 35 jours puis constate qu'il y a une erreur sur le constat d'infraction, qu'elle souhaite le faire corriger et que, supposons, elle ne veut pas aller en rétractation de jugement, elle ne pourrait même pas le faire corriger parce qu'on lui enlève ce moyen préliminaire là. Dans l'éventualité où le dossier n'aurait pas été... Dans l'éventualité où le juge de paix fonctionnaire n'aurait pas été saisi du dossier, elle se retrouve avec pas de recours, puis l'acte d'accusation pourrait ne pas être exact.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : C'est la même chose qu'on retrouve actuellement, parce que, comme je le mentionnais tout à l'heure à notre collègue de Chicoutimi, ce n'est pas une nouvelle philosophie qui est introduite, là. On fait tout simplement élargir la portée aux infractions qui sont prévues par les cinémomètres. Alors, actuellement, là, c'est une procédure, c'est... il s'agit d'une disposition qui existe pour un certain nombre d'infractions. Alors, on ne modifie pas, là, on ne vient pas... on n'arrive pas avec une nouvelle philosophie.

M. Jolin-Barrette : Je comprends tout à fait. On élargit.

Mme Vallée : On l'élargit, exactement.

M. Jolin-Barrette : Mais je veux quand même le porter à votre attention, parce qu'un citoyen pourrait vouloir que l'acte... le constat d'infraction représente réellement les bonnes informations.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Ce qu'on m'indique, c'est qu'il y a actuellement... il existe un délai administratif habituel de traitement des dossiers, ce qui est tout à fait normal. Alors, ce n'est pas parce que nous sommes rendus au 31e jour qu'automatiquement le dossier... que la décision a été rendue. Et donc, si cette manifestation-là intervient avant que le dossier n'ait été traité par le juge de paix fonctionnaire, bien, à ce moment-là, l'intervention permet de sortir le dossier du régime qui prévoit une présomption de non-contestation et de le retourner à travers le processus habituel, qui est connu. Alors, il s'agit...

M. Jolin-Barrette : Et ça, c'est fait systématiquement au niveau administratif?

Mme Vallée : Je demanderais à Me Grand, peut-être, qui, au quotidien, travaille avec ces dossiers.

Mme Grand (Sabrina) : Effectivement, dès qu'on reçoit une manifestation quelconque du défendeur, nous, notre souci, c'est, entre guillemets, de protéger ses droits dans la mesure du possible. Donc, s'il y a un jugement... s'il n'y a pas de jugement qui a été rendu, on va effectivement, systématiquement, aviser qui de droit, donc le juge de paix fonctionnaire dans cet exemple-là, pour s'assurer que le jugement ne soit pas rendu, si on comprend que le défendeur avait quelque chose à... un point quelconque à faire valoir.

M. Jolin-Barrette : Les gens s'adressent au DPCP par lettre.

Mme Grand (Sabrina) : Oui, ou au Bureau des infractions et amendes auquel vous faisiez référence tout à l'heure. Effectivement, là, à l'endos du constat d'infraction, il y a toute une série d'informations qui sont indiquées, entre autres le fait que, si les gens veulent transmettre un plaidoyer de culpabilité ou de non-culpabilité, ils doivent le transmettre au DPCP via le Bureau des infractions et amendes. Donc, effectivement, c'est l'endroit où les demandes de ce genre-là vont, la plupart du temps, aboutir.

Le Président (M. Schneeberger) : M. le député de Borduas, ça va? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 11? Ça va? Alors, nous allons mettre aux voix l'article.

Alors, est-ce que l'article 11 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Schneeberger) : Dans le même bloc, il restait l'article 14. Est-ce que nous poursuivons pour finir ce bloc-là dans... Je vous laisse la parole, Mme la ministre.

Mme Vallée : Oui. Alors, il s'agit ici d'un article de concordance. Alors, c'est une... l'article prévoit de remplacer l'article 218.2. C'est une modification qui est en lien avec la modification que nous avons apportée à l'article 10 et prévoit notamment que... les conditions qui doivent être réunies pour que le défendeur qui est en défaut de transmettre un plaidoyer ou la totalité ou une partie du montant de l'amende soit réputé ne pas contester la poursuite.

Alors, vous regardez le texte actuel de 218.2, et nous biffons du texte actuel, de 218.2, les paragraphes 1°, 2°, 3°, parce qu'on les retrouve maintenant à l'article 163 du code, alors... qui ont été modifiés à l'article 10.

Le Président (M. Schneeberger) : Est-ce qu'il y a des interventions?

Mme Vallée : ...l'article 10, si vous vous souvenez, on a établi les conditions qui permettent de mettre en place de nouveau... ce régime où le défendeur est réputé ne pas contester. Donc, il faut d'abord qu'il s'agisse d'une infraction qui est visée à la section II du chapitre VI, qu'il y ait eu une infraction constatée personnellement par un ou plusieurs agents de la paix ou personnes chargées de l'application de la loi, que le constat d'infraction soit signifié au défendeur conformément à l'un des paragraphes de 157.2, donc conformément aux dispositions 20 à 24 du Code de procédure pénale, et que le défendeur avait 18 ans ou plus au moment de la perpétration. Alors, ce sont les conditions que l'on retrouvait auparavant à l'article 218.2, et là on les abroge parce qu'elles sont couvertes par un autre article.

Le Président (M. Schneeberger) : Est-ce que ça va comme ça? Oui? Article adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, Mme la ministre, vous nous avez signifié tout à l'heure que vous vouliez peut-être passer à l'article 24.

Mme Vallée : S'il vous plaît, oui.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, je vous laisse la parole.

• (12 heures) •

Mme Vallée : Donc, l'article 24 n'a pas été lu. Alors, je vais en faire la lecture.

Donc, article 24 : L'article 20 de la Loi concernant les partenariats en matière d'infrastructures de transport (chapitre P-9.001) est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, de «employés d'un partenaire» par «personnes».

Alors, l'objectif derrière cet amendement vise à supprimer le pouvoir du ministre des Transports de désigner les personnes qui sont chargées de faire rapport d'infractions relatives au péage imposé conformément à la Loi concernant les partenariats en matière d'infrastructures et de transport, la restriction relative au statut d'employé du partenaire. Donc, il pourrait s'agir non seulement d'employés du partenaire, mais il pourrait s'agir d'une personne qui est désignée.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : ...M. le Président, je me demandais... Donc, on vise la personne, mais ça pourrait constituer, dans le fond, une personne morale, donc que ça serait donné en sous-traitance.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, M. le Président, je pense qu'il est important de référer au règlement qui concerne les infrastructures routières à péage. Alors, ce règlement qui concerne... en fait, le titre complet du règlement, c'est Règlement concernant les infrastructures routières à péage exploitées en vertu d'une entente de partenariat public-privé, qui prévoit de façon spécifique, à son article 35, qu'«un employé du partenaire désigné par le [ministère] des Transports à titre de personne chargée de l'application de la loi [...] doit, au moment de sa désignation, satisfaire aux conditions suivantes...» Alors, d'abord, c'est une personne majeure, c'est une personne qui n'a pas, «au cours des 5 dernières années, été [déclarée] coupable ou s'être avoué coupable d'une infraction criminelle ayant un lien avec les activités qu'il pourra exercer dans le cadre de cette désignation, à moins qu'il n'ait obtenu un pardon; [et] — 3° — avoir fait la déclaration sous serment prévue à l'annexe 1 devant une personne autorisée à recevoir le serment».

Le Président (M. Schneeberger) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Donc, la personne...

Mme Vallée : Alors, c'est une personne physique.

M. Jolin-Barrette : O.K., c'est une personne physique.

Mme Vallée : Ça doit être une personne physique.

M. Jolin-Barrette : Mais on exclut, dans le fond, maintenant, le lien d'emploi avec le partenaire.

Mme Vallée : Exactement, exactement.

M. Jolin-Barrette : Donc, ça pourrait être l'employé d'un sous-traitant?

Mme Vallée : Techniquement, oui.

M. Bédard : Mais c'est quoi, le but? Parce que, là, si on fait ça, c'est... il y a une raison, là, j'imagine. Quelqu'un n'a pas pensé ça en se levant un matin.

Mme Vallée : Mais il y a... il existe...

M. Bédard : Il y a une raison, j'imagine, réelle, factuelle.

Mme Vallée : Oui, mais il existe actuellement des sous-traitants qui travaillent pour les compagnies, alors c'est pour permettre à ces sous-traitants-là de... à ceux et celles qui travaillent pour ces sous-traitants-là d'être désignés. Donc, évidemment, par exemple, dans le pont de l'autoroute 25, actuellement on n'avait que deux personnes qu'on pouvait désigner, parce que le partenaire en soi, le partenaire n'avait que deux employés, il avait très, très peu d'employés. Donc, ce n'était pas suffisant, mais le partenaire peut...

M. Bédard : Ah! O.K., O.K., O.K., il n'avait que deux employés.

Mme Vallée : Oui, mais... C'est ça. Parce que, parfois, le partenaire, il regroupe plusieurs entreprises, et, à l'intérieur de ces entreprises-là, il y a des gens, il y a des individus qui pourraient être désignés. La loi ne le permet pas, parce que la loi prévoit le lien direct avec le partenaire dans sa forme actuelle. Alors, ça permet...

M. Bédard : Donc, il y a une demande des entreprises...

Mme Vallée : Ça permet d'aller... d'élargir le bassin de personnes pour aussi correspondre à la réalité. Et, si on se fie au texte actuel, on ne peut aller chercher... on ne peut désigner des employés de ces partenaires-là, de ces entreprises qui ont des liens avec le partenaire. Donc, le projet de loi vise à élargir, évidemment toujours en maintenant les obligations prévues à l'article 35... Donc, on ne lésine pas sur la question de la sécurité, sur l'obligation que cette personne-là soit une personne majeure. Dans le fond, c'est tout simplement que cette personne-là, plutôt qu'avoir un lien d'emploi avec le partenaire, elle a un lien d'emploi avec une autre entreprise, et c'est avec les entreprises qui sont... qui travaillent en collaboration avec le partenaire privé.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, dans le fond, je comprends qu'on s'éloigne un peu du partenaire... puisque c'est un PPP, dans le fond, on s'éloigne un peu du partenaire que le gouvernement du Québec a. Dans le fond, dans le cadre du PPP, il fait affaire avec son partenaire, puis antérieurement c'était, bien, les personnes qui étaient à l'emploi du partenaire qui étaient chargées de l'application de la loi pour la signature du constat d'infraction pour l'attestation. Là, on se retrouve à s'éloigner davantage, et le partenaire pourrait donner des contrats... bien, en fait, pourrait donner des contrats, c'est ça, de sous-traitance à d'autres entreprises qui... eux, leurs employés, se verraient attribuer cette fonction-là. J'essaie juste de voir... Parce que, pour l'État, c'est quand même autoriser une personne à attester l'infraction ou la signature. Tout ça, c'est quand même important pour l'État. Dans le fond, on s'éloigne un peu, là.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : En fait, ce qui nous amène... Actuellement, cette demande-là, elle est formulée par l'un des partenaires qui est un regroupement de plusieurs entreprises. Le partenaire comme tel, désigné par le ministre, n'a que très peu d'employés, et donc son bassin lui permettant de désigner des personnes, il est très mince. Et, par exemple, dans un... Là, je ne veux pas nommer les partenaires précisément, mais, dans une situation, on a... une de ces entreprises-là, qui est responsable des systèmes de péage électronique, n'est pas le partenaire comme tel. Il y a l'entreprise qui est responsable des systèmes électroniques. Elle, dans la forme actuelle du projet de loi, ne peut pas désigner ses employés aux fins de la loi, alors que, là...

M. Bédard : ...ce qu'il dit... c'est ce que je comprends, effectivement, ça, c'est le problème de l'entreprise. Elle, elle dit : J'ai fait mes contrats, là, c'est rendu tout petit, je n'ai plus d'employé. Mais là le constat, effectivement, c'est que, là, il veut le donner à quelqu'un d'autre. Donc, effectivement, on s'éloigne, parce que ce n'est pas avec le partenaire maintenant qu'il va faire un acte qui n'est pas bénin, là, pour les citoyens, ça va être quelqu'un à qui il va pouvoir sous-traiter cette responsabilité, tout simplement, qui n'est pas un employé, qui n'est pas un de ses employés. Donc, on sort de la sphère du partenaire, c'est ce que je comprends. Là, on va... À la limite, ça pourrait être moi, ça pourrait être vous, ça pourrait être son voisin, ça pourrait être quelqu'un qui lui demande.

Mme Vallée : Bien, en fait, actuellement, il y a déjà de la sous-traitance pour les péages. Alors, l'entreprise, le partenaire fait la sous-traitance pour les compagnies, pour le système d'information... les systèmes informatiques et pour envoyer, par exemple, les demandes de paiement. Mais ces entreprises-là n'ont pas... dans la forme actuelle de la loi, ne peuvent désigner des employés aux fins de la loi. Alors, c'est pour permettre d'élargir, justement, le bassin à travers lequel on peut aller chercher des personnes désignées.

Puis on parle aussi d'entreprises qui manipulent déjà, là, cette information-là. Alors, ils sont en lien, ils sont en lien avec le partenaire, ils ont des ententes signées avec le partenaire mais n'ont pas cette possibilité de désigner... ou le partenaire n'a pas la possibilité de désigner les employés de ces entreprises-là pour les fins de la loi.

Le Président (M. Schneeberger) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : ...peut-être que la ministre pourrait nous renseigner. Dans les appels d'offres, lorsqu'on construit un PPP, lorsque l'État décide d'aller en PPP, est-ce que, dans le document d'appel d'offres, des conditions d'appel d'offres, c'est prévu, ce genre de chose, que ça serait administré par le partenaire? Parce qu'on comprend que c'est une demande qui vient par la suite, là, dû à une réalité sur le terrain. On a deux employés seulement chez le partenaire, mais ce partenaire-là fait un choix nécessaire... bien, en fait, fait un choix de ne pas embaucher davantage d'individus. Mais est-ce qu'au moment de la demande initiale, quand il y a eu contrat, quand il y a eu soumission, l'exploitation faisait partie des documents d'appel d'offres, lorsqu'on répond à l'appel d'offres?

Mme Vallée : On m'indique que, oui, la sous-traitance était permise dans les ententes.

M. Jolin-Barrette : Non, mais la sous-traitance des activités, mais, ce que je veux dire, au niveau de la responsabilité pour l'attestation, est-ce que le partenaire s'engageait à ça dans l'appel d'offres ou ce n'était pas prévu?

• (12 h 10) •

Mme Vallée : La question...

M. Bédard : Bien, moi, j'aurais tendance à dire que oui dans l'appel d'offres, parce que c'est prévu dans la loi. Donc, j'imagine, ça faisait partie des conditions de l'appel d'offres, ce n'est pas par hasard.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, ce qu'on vient faire, en fait, on vient un peu modifier les conditions du contrat sur lequel le gouvernement s'était basé pour aller en appel d'offres.

Mme Vallée : On ne vient pas changer les conditions du contrat.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, pour un partenaire, un partenaire qui soumissionne dans le cadre d'un appel d'offres, puis qui dit : Je vais avoir à administrer la preuve, les constats d'infraction, et qui... nécessairement ça va lui administrer des coûts supplémentaires d'avoir des employés à sa charge plutôt que d'avoir des sous-traitants. Il peut y avoir un impact, là, pour les partenaires commerciaux. Aussi, supposons qu'il aurait budgété, au moment de répondre à l'appel d'offres, les autres candidats au PPP qui auraient soumissionné, si c'était une variable dans leurs prix pour soumissionner pour obtenir le contrat, puis qu'après coup on vient dire : Bien, finalement, vous pouvez déléguer cette responsabilité-là à quelqu'un d'autre, là, en modifiant la loi, bien, peut-être qu'il y a un impact financier aussi sur le coût du contrat, là. Je fais juste poser la question.

Mme Vallée : Avec votre permission, M. le Président, je vais demander de suspendre et de permettre à quelqu'un du ministère des Transports de pouvoir venir répondre aux questions très précises sur le contrat qui lie...

Le Président (M. Schneeberger) : Donc, nous suspendons pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 12)

(Reprise à 12 h 14)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons la séance. Je laisse la parole à Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, avec votre permission, nous allons effectuer une vérification pour qu'on puisse s'assurer... On m'indique, là, qu'en principe ça ne devait pas... il ne devait pas avoir ce niveau de détail là dans l'entente, mais j'ai demandé à ce qu'on puisse le vérifier pour répondre de façon plus précise à la question du collègue de Borduas. Alors, si vous permettez, on pourrait... À moins que vous ayez d'autres questions, nous pourrions peut-être suspendre l'article, passer à un autre article et vous revenir avec la réponse. Parce que je comprends qu'il s'agit là d'une question importante pour le collègue, mais je veux m'assurer d'avoir la meilleure réponse possible.

M. Bédard : Peut-être une question pour ma compréhension. Est-ce qu'il y a d'autres exemples, à part les PPP, où on donne ce pouvoir-là à une personne désignée... bien, d'un partenaire, à part municipal, vous allez me dire, là, mais... Est-ce qu'il y a d'autres exemples, en toute matière?

Mme Vallée : En fait, je vais céder la parole à Me Brière, mais je crois qu'il s'agit seulement... parce que nous sommes dans la question des péages, et je crois...

M. Bédard : Non, c'est ça que je me demandais, parce que c'est quand même un pouvoir de... Il y a un constat... C'est ça. «Exercer les pouvoirs prévus aux chapitres II et III de ce code», donc des pouvoirs aux chapitres II et III, ça concerne quoi exactement? Seulement pour bien comprendre. Je comprends que ce n'est pas moi qui a adopté la loi à l'époque, là, mais...

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, Mme Brière.

Mme Brière (Pascale) : Pascale Brière.

Ce que vous voulez savoir, est-ce que c'est : il y a d'autres cas où il y a des personnes chargées de l'application de la loi qui ne sont pas des agents de la paix?

M. Bédard : Exact.

Mme Brière (Pascale) : O.K. C'est sûr qu'il en a beaucoup, des personnes qui délivrent des constats qui...

M. Bédard : Mais qui sont en dehors de l'appareil public, là, tu sais. Parce que, déjà, c'est un cas qui me semble exceptionnel. Peut-être que ce n'est pas le cas. C'est ça, je voulais comme le...

Mme Vallée : Me Grand pourrait répondre.

Mme Grand (Sabrina) : Effectivement, dans d'autres lois, dans d'autres domaines, il y a aussi la possibilité, dans certains cas, donc... Il y a des agents de la paix qui peuvent, effectivement... Il y a les agents de la paix qui peuvent, par défaut, remplir des constats d'infraction ou des rapports d'infraction. Il y a aussi des inspecteurs-enquêteurs qui sont à l'emploi de ministères ou organismes. Mais il peut aussi y avoir d'autres personnes qui peuvent être désignées à titre de personnes chargées de l'application de la loi. On peut penser, entre autres... On parlait de la Loi sur les véhicules hors route, je pense que c'est un cas, là, les employés de certains regroupements qui font de la patrouille sur les sentiers, par exemple, là, pour des organismes privés, là, peuvent être autorisés à remplir certains documents à des fins de poursuite éventuelle. Donc, ce n'est pas le seul cas où on désigne des personnes qui ne sont pas liées directement à l'appareil gouvernemental à titre d'agents de la paix, inspecteurs ou enquêteurs, il y a d'autres cas.

Une voix : ...

Mme Grand (Sabrina) : Oui, c'est ça. C'est à ça que je pensais, là, les sentiers de motoneige, entre autres, là, et les clubs, là, de VTT, et trucs du genre, là. Puis il n'y a pas d'autres exemples qui me viennent en tête, mais, dans les faits, en cherchant le moindrement, on pourrait en trouver d'autres...

Mme Vallée : ...les pistes cyclables aussi.

Le Président (M. Schneeberger) : Ça va comme ça, M. le député de Chicoutimi?

M. Bédard : Parfait.

Le Président (M. Schneeberger) : Ça va?

M. Bédard : Oui.

Le Président (M. Schneeberger) : Pas de question? Oui, député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, oui, une question également sur l'article 20. Dans l'éventualité où le citoyen qui reçoit le constat d'infraction veut assigner la personne qui a rédigé le constat, donc, dans ce cas-ci, ça serait, supposons, l'employé du sous-traitant ou la personne désignée, à ce moment-là on va s'adresser au procureur? Dans le fond, le lien, comment ça va se faire pour assigner la personne chargée de rédiger le constat d'infraction?

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Me Grand.

Mme Grand (Sabrina) : Oui. En vertu de l'article 63 du Code de procédure pénale, c'est prévu que le défendeur pourrait toujours requérir du poursuivant qu'il assigne la personne qui a rempli le constat ou le rapport d'infraction. Donc, le défendeur va s'adresser au poursuivant, il va lui dire : Bien, moi, je ne me contente pas, dans ce cas-ci, par exemple, de la preuve documentaire, je veux que la personne qui a rédigé le document soit présente.

M. Jolin-Barrette : Et ça ne causera pas de problème du fait que la personne désignée maintenant va être plus loin dans le champ d'application?

Mme Grand (Sabrina) : Non, je ne vois pas...

Mme Vallée : Ça n'affecte rien de la contraignabilité de la personne. Évidemment, ce sont les personnes qui sont désignées par le ministre, donc il y a quand même... ces personnes-là, il y a quand même... L'information relative à ces personnes-là, elle est là, elle existe. Il y a quand même une vérification aussi qui est faite. Et donc les personnes ne sont pas moins contraignables parce qu'elles sont... elles pourraient être des employés d'un des partenaires.

Les personnes désignées par le partenaire actuellement sont contraignables. Et, comme lorsqu'il est question, par exemple, d'inspecteurs ou de ceux et celles qui veillent à assurer ou... au respect des règles dans les sentiers de motoneige et qui dressent les constats, ces personnes-là sont aussi contraignables. Alors, il n'en demeure pas... La contraignabilité de l'employé n'est pas affectée du tout par l'article.

Le Président (M. Schneeberger) : Député de Borduas, ça va?

M. Jolin-Barrette : Ça va, merci.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui? Alors, on suspend l'article 24?

Mme Vallée : Oui, s'il vous plaît.

Le Président (M. Schneeberger) : O.K. Alors, est-ce que... Je voulais juste savoir, maintenant, si la ministre reprenait au niveau du bloc de la procédure pénale, le point n° 3, qui concerne l'article 12.

Mme Vallée : En fait, je vous aurais demandé de nous permettre d'aller, comme je l'avais mentionné, à l'article 27, puisque la personne responsable du fond est ici déjà depuis quelques jours et est de Montréal. Alors, on pourrait peut-être permettre, dans une question d'efficacité...

Le Président (M. Schneeberger) : Consentement? Oui?

Mme Vallée : ...permettre sa présence, comme ça...

M. Bédard : ...elle était tannée de nous entendre?

Mme Vallée : Non, je ne pense pas. Elle n'a pas manifesté d'impatience.

• (12 h 20) •

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, consentement pour aller à l'article 27? Ça va? Oui? Mme la ministre, on vous écoute.

Des voix : ...

Le Président (M. Schneeberger) : C'est à vous la parole, Mme la ministre.

Mme Vallée : Oui. Alors, je vais faire la lecture de l'article 27.

Donc : L'article 43 de la Loi sur le recours collectif (chapitre R-2.1) est modifié :

1° par l'insertion, dans ce qui précède le paragraphe a et après «À l'égard de l'aide qu'il attribue», de «pour assurer son fonctionnement»;

2° par le remplacement, dans le paragraphe a, de «et celles qui ont été prélevées conformément à l'article 42» par «et toute somme qu'il reçoit en application de la présente loi, avec les intérêts».

Alors, M. le Président, c'est un article qui vise à permettre au Fonds d'aide aux recours collectifs de pouvoir assumer ses frais de fonctionnement, donc exclusivement les frais de fonctionnement du fonds d'aide, à même les fonds que le fonds d'aide détient plutôt qu'avec une subvention annuelle du ministère de la Justice.

Il y a également une clarification qui est apportée à l'article afin de préciser que le fonds peut utiliser, pour verser de l'aide, ses revenus d'intérêt, de même que les sommes qu'il récupère à la suite d'un recours qui a eu du succès.

Alors, simplement pour l'exercice 2013-2014, pour les fins d'information des collègues, le fonds détenait des sommes qui totalisaient 13 676 811 $, et la subvention qui lui a été accordée par le ministère de la Justice pour son fonctionnement était d'un montant de 416 000 $... de fonctionnement, oui.

Le Président (M. Schneeberger) : C'est beau? Oui. Alors, est-ce qu'il y a des interventions concernant l'article 27? Le député de Chicoutimi.

M. Bédard : Bien, j'imagine que c'est aussi pour des raisons, évidemment, budgétaires que cette décision est prise. Donc, le budget de fonctionnement pour le fonds, en général, c'est de 416 000 $ par année, c'est ce que je comprends. C'est l'historique que vous avez?

Mme Vallée : Je vais vous demander...

M. Bédard : Je m'adresse à vous parce qu'il semble que vous êtes la personne compétente...

Mme Vallée : Pour le Fonds d'aide aux recours collectifs.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui. Je demanderais le consentement pour... vous nommer, s'il vous plaît.

Mme Belogbi (Frikia) : Frikia Belogbi, pour le Fonds d'aide aux recours collectifs.

Oui, pour répondre à votre question, en effet le budget de fonctionnement pour le fonds d'aide est de 416 000 $, 416 800 $ exactement, durant à peu près les trois dernières années.

M. Bédard : Est-ce que ça a déjà été plus important?

Mme Belogbi (Frikia) : Oui, il a déjà été plus important. Évidemment, dans le cadre des mesures de restrictions budgétaires, le fonds a fait sa part, comme tous les organismes publics, et on a dû, donc, procéder à des diminutions durant les quatre, cinq dernières années.

M. Bédard : O.K. Et donc c'était combien auparavant, environ?

Mme Belogbi (Frikia) : On est passés de 719 000 $ à 696 000 $, et, après ça, ça a été 416 800 $ durant les trois dernières années.

M. Bédard : O.K. Et là je comprends qu'évidemment c'était une subvention qui vous était donnée par le ministère de la Justice comme fonctionnement?

Mme Belogbi (Frikia) : Absolument. C'est une subvention, donc, qui nous vient du ministère de la Justice.

M. Bédard : Et l'article... le but, évidemment, c'est de ne plus avoir de subvention, donc de ramener à zéro?

Mme Belogbi (Frikia) : Oui. Dans le passé, le gouvernement nous donnait, donc, une subvention pour le budget du fonctionnement, mais également pour le budget de l'aide aux bénéficiaires, les montants qu'on verse dans les recours collectifs. Les dernières années, le fonds a très bien travaillé, donc nous connaissons des excédents, dont parlait Mme la ministre tout à l'heure, 13 676 211 $. Donc, la subvention, qui était 278 300 $, qui allait uniquement pour l'aide aux bénéficiaires a été annulée, et à juste titre, étant donné qu'aujourd'hui on est capables de financer les recours collectifs sans avoir besoin de financement ou, en tout cas, de subventions de la part du gouvernement. Il nous reste donc le fameux 416 800 $, qui est uniquement dédié au fonctionnement, et aujourd'hui on a besoin d'en avoir un peu plus, évidemment.

M. Bédard : O.K. Donc, vous me dites que vous avez accumulé une somme, dans votre fonds, de 13 millions de dollars. O.K. Et, historiquement parlant, ces sommes n'allaient pas au fonds consolidé. Donc, elles restaient dans vos coffres?

Mme Belogbi (Frikia) : Non, jamais aucun montant n'a été prélevé sur ces montants-là pour aller au fonds consolidé.

Le Président (M. Schneeberger) : M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard : O.K. Mais ce fonds de 13 millions, il est créé à partir de quoi?

Mme Belogbi (Frikia) : Ces revenus qu'on prélève en vertu de la loi, de l'article 42, justement, qui est le sujet de l'ordre du jour aujourd'hui... En vertu de l'article 42, la loi nous permet de prélever un certain pourcentage sur ce qu'on appelle les reliquats. Un reliquat, c'est des sommes... c'est un solde qui reste une fois que le recours est exercé, une fois que les justiciables ont reçu leurs indemnités, une fois que les procureurs ont reçu leurs honoraires, les déboursés, les avis publics, en tout cas, tous les frais de justice ont été payés, il se peut qu'il reste un montant, donc c'est ce qu'on appelle un reliquat en vertu de 42 et en vertu du Code de procédure civile, donc 1033 et 1034. Et, sur ce montant-là qui subsiste en vertu de notre règlement, on peut aller chercher un pourcentage, et c'est comme ça que le fonds finance les recours collectifs. C'est ce montant-là dont on parle, le 13 millions qui nous permet de financer les recours collectifs.

M. Bédard : Et là vous me dites : On peut prélever un pourcentage du reliquat. Ce pourcentage est établi à combien?

Mme Belogbi (Frikia) : Ça dépend des montants. Je peux vous les donner si vous le désirez.

M. Bédard : Mais peut-être me donner votre échelle, là, entre... C'est quoi, le pourcentage?

Mme Belogbi (Frikia) : Ça dépend. Alors, si c'est un reliquat en vertu de ce qu'on appelle 1033 — 1033, c'est 1033 du Code de procédure civile, excusez-moi — donc, en vertu de cet article-là, le reliquat... Il y a deux formes de reliquat. Il y a le reliquat en vertu de 1033 du Code de procédure civile, comme je le disais tantôt, c'est une fois que tout a été payé, les frais de justice, les indemnités individuelles, le solde constitue un reliquat, et, si c'est ce cas-là, donc c'est le premier cas de figure, s'il est... je prends le premier et le dernier, s'il reste un montant, donc, inférieur à 100 000 $, un reliquat inférieur à 100 000 $, le fonds peut aller prélever 50 % de ce 100 000 $ là. Par contre, s'il reste 500 000 $, le fonds peut aller prélever 90 % du reliquat. Je vous donne une fourchette du maximum au minimum, parce qu'il y a aussi 70 % et 60 %.

Le Président (M. Schneeberger) : M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard : Non, mais...

Mme Belogbi (Frikia) : Pardon...

M. Bédard : Donc, c'est ça. Et après ça?

Mme Belogbi (Frikia) : Je peux continuer?

M. Bédard : Oui, oui, allez-y.

Mme Belogbi (Frikia) : Donc, ça, c'est le premier cas de figure. Le deuxième cas de figure, le deuxième reliquat, c'est en vertu de ce qu'on appelle 1034, donc c'est 1034 du Code de procédure civile. Ce solde-là ou ce reliquat-là, c'est dans les situations où aucune distribution n'a été faite aux citoyens, aux membres du groupe. C'est exceptionnel, c'est arrivé... on prend un certain cas, des recours...

M. Bédard : Parce que les montants ne sont pas suffisants?

Mme Belogbi (Frikia) : Non, ce n'est pas une question de montants insuffisants, ça, c'est autre chose. Quand la distribution... ce qu'on appelle une distribution impraticable ou trop onéreuse, admettons...

M. Bédard : O.K., les montants sont trop petits par personne.

Mme Belogbi (Frikia) : Exactement, c'est 0,03 $, si je prends le cas de...

M. Bédard : Les cartes de crédit, par exemple.

• (12 h 30) •

Mme Belogbi (Frikia) : Non, ça, on est dans le premier cas de figure, les gens veulent leur argent même si c'est 2 $ dans chaque compte.

Mais je parle, par exemple, des recours qui ont été intentés contre les fabricants de chocolat, qui ont été gagnés également, chaque individu pouvait aller chercher 0,03 $ sur chaque tablette de chocolat qu'il a achetée. On comprend que c'est impraticable et trop onéreux, ne serait-ce que pour gérer ces 0,03 $ là, c'est impraticable. À ce moment-là, une fois que les frais de justice sont payés, donc les honoraires, les déboursés, les avis, la gestion de tous ces montants-là a été faite, donc aucune distribution, on s'entend bien, ça, c'est une autre sorte de reliquat qui va être distribué en vertu de 1034 du Code de procédure civile. Et je vous donne, donc, le maximum et le minimum. Le maximum du pourcentage est de 70 % si le montant est inférieur à 100 000 $ et le pourcentage est de 30 % si le reliquat est inférieur à 800 000 $. Donc, c'est...

M. Bédard : 30 %?

Mme Belogbi (Frikia) : 30 % s'il est supérieur à 800 000 $. Et vous avez évidemment 60 %, 55 %, 40 %, il y a toute une moyenne. Je vous donne le plus élevé puis le plus bas des pourcentages. Et il y a...

M. Bédard : Et le reste va où?

Mme Belogbi (Frikia) : Pardon?

M. Bédard : Le reste va où?

Mme Belogbi (Frikia) : Eh bien, on prend un pourcentage, et le pourcentage restant va être généralement distribué à des oeuvres de charité, des oeuvres caritatives, en effet.

M. Bédard : ...décidé par?

Mme Belogbi (Frikia) : C'est le juge qui en décide. S'il n'y a pas de transaction entre les parties, les parties ne s'entendent pas, le dossier va devant le juge, c'est le juge qui va décider de A à Z — est-ce que c'est un reliquat en vertu du 33 et du 34? — à qui vont les montants qui subsistent après l'application de la loi et de... sur le Fonds d'aide aux recours collectifs et le règlement.

Par contre, si c'est les parties qui s'entendent, donc il y a un recours, elles s'entendent pour conclure une transaction, à ce moment-là elles vont d'ores et déjà prévoir à qui va aller le solde, donc, qui reste de ce reliquat-là. Et c'est toujours sous l'approbation, évidemment, du tribunal. Les parties ne peuvent rien faire. Le tribunal doit, dans tous les cas, homologuer la transaction. Donc, c'est comme ça que ça fonctionne.

M. Bédard : Et à l'époque... Cette loi, elle date évidemment de longtemps. À l'époque, donc, on n'avait pas considéré le fait que le trésor public puisse être bénéficiaire du reliquat?

Mme Belogbi (Frikia) : Pour l'instant, non. Au moment où on se parle, la loi est celle-là. Donc, dans l'avenir, on va voir avec le nouveau Code de procédure civile.

M. Bédard : Oui, c'est ça. Ça a été modifié quand? Est-ce que ça a été passé comme ça ou c'est par la suite qu'on l'a modifiée?

Mme Belogbi (Frikia) : C'est à peu près la même chose depuis 1978, je vous dirais.

M. Bédard : Ah oui? Depuis le début?

Mme Belogbi (Frikia) : Il n'y a pas eu de... Il y a eu des petites modifications mais pas en profondeur comme ça. Mais probablement qu'avec le nouveau Code de procédure civile les choses vont évoluer autrement.

M. Bédard : Donc, ça date de 1978. Ça devait être une bonne loi à l'époque, j'en suis convaincu. Et le fonds de 13 millions, il s'est accumulé pendant toute cette période-là ou...

Mme Belogbi (Frikia) : Durant 35 ans, durant les... tout le temps, depuis l'existence du fonds.

M. Bédard : O.K. Puis vous, vous avez un conseil d'administration qui est formé de?

Mme Belogbi (Frikia) : Trois administrateurs qui siègent une fois par mois pendant deux jours, donc 24 fois par année, et qui vont décider des demandes d'aide financière, évidemment.

M. Bédard : ...mais ils proviennent d'où?

Mme Belogbi (Frikia) : Ils proviennent... Pardon, je ne comprends pas la question.

M. Bédard : Dans le sens : les membres du conseil d'administration sont nommés par qui?

Mme Belogbi (Frikia) : Ah! par le gouvernement.

M. Bédard : O.K. Donc, est-ce qu'il y a des qualifications particulières ou... Non? La loi ne prévoit pas, par exemple, que...

Mme Belogbi (Frikia) : Non. Je n'ai absolument rien à ce sujet.

M. Bédard : N'importe qui peut... à moins d'avoir 18 ans, peut être sur le conseil d'administration.

Mme Vallée : On est un petit peu loin de l'article, mais...

M. Bédard : Non. Bien, on est même plutôt près, je vous dirais, parce que, là, on parle des montants qui vont être attribués. Donc, il faut bien comprendre le fonctionnement.

Mme Vallée : L'article 8 : «Le fonds est administré par trois personnes dont un président, nommées pour au plus trois ans par le gouvernement, après consultation du Barreau du Québec et de la Commission des services juridiques.

«Le gouvernement fixe, s'il y a lieu, le traitement, le traitement additionnel ou les honoraires qui peuvent être versés à chacun des administrateurs ainsi que leurs allocations ou indemnités.»

Article qui est demeuré tel quel depuis l'adoption, l'excellente adoption de la loi en 1978.

M. Bédard : Je pense qu'ils n'avaient pas prévu à l'époque qu'ils allaient avoir 13 millions, je suis assez convaincu.

Mme Belogbi (Frikia) : À l'époque, c'est une excellente loi, je dirais, puis elle demeure excellente loi pour la simple raison qu'on est sollicités par plusieurs pays. Ça n'existe pas ailleurs.

M. Bédard : On est un cas unique?

Mme Belogbi (Frikia) : On est pas mal un cas unique, et c'est un fleuron, croyez-moi. Et on a...

Mme Vallée : ...

Mme Belogbi (Frikia) : Pardon? Absolument. Mme la ministre vient de me le rappeler, on a eu la délégation française, que je revois d'ailleurs le 13 octobre, la semaine prochaine. On a eu des délégations de Hong Kong, de la Belgique, d'Albanie, qui sont très intéressées par notre fonctionnement pour la simple raison que, dans l'ère des compressions budgétaires qu'on connaît un peu partout dans le monde, même en Europe, passez-moi l'expression, ça ne coûte rien au gouvernement, parce que l'argent qui rentre des justiciables va sortir pour les justiciables.

Le recours collectif, son but, d'ailleurs, c'est de permettre l'accès à la justice, comme son nom l'indique. Sans cette loi-là, et sans l'existence du fonds, et sans ce financement-là, beaucoup, beaucoup de recours collectifs n'auraient pas...

M. Bédard : ...

Mme Belogbi (Frikia) : ... — absolument — n'auraient pas eu lieu.

M. Bédard : Évidemment, le projet de loi a pour effet de... Le but, au départ, c'était que cet argent serve à permettre le financement de recours collectifs. C'est ce que je comprends. Au départ, est-ce qu'on a créé un fonds avec un montant de départ? J'imagine que oui, il y avait un fonds capitalisé...

Mme Belogbi (Frikia) : Oui, oui, oui. Absolument. D'ailleurs, les années, j'allais dire, qui n'étaient pas fastes, beaucoup d'argent venait du gouvernement, en effet, et c'est... Le but d'aujourd'hui, d'ailleurs, c'est pour éviter l'application de l'article 44. L'article 44, qu'est-ce qu'il nous dit, de notre loi? Il nous dit... et il est très lié à 42... 44.1, c'est lié à 42, donc sous étude aujourd'hui :

«Le gouvernement peut, aux conditions qu'il détermine :

«a) s'engager à combler les besoins de liquidités du fonds de manière à lui permettre d'assurer, à échéance, le remboursement du capital et le paiement des intérêts concernant un emprunt contracté par le fonds;

«b) garantir le paiement», etc.

Et alinéa deux : «Les sommes requises aux fins du présent article sont prises sur le fonds consolidé du revenu.»

Ce qu'on ne fait plus depuis des années et ce qu'on veut éviter de faire aujourd'hui, ce que le législateur veut éviter de faire, justement, aujourd'hui. Et c'est la raison pour laquelle on est là et c'est la raison pour laquelle on veut, pour pouvoir assurer notre mandat, continuer du moins à l'assumer, aller prélever un certain montant pour le fonctionnement.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Et je pense qu'il est peut-être aussi bon de préciser et d'informer les collègues que l'Ontario détient un fonds qui est similaire à notre Fonds d'aide aux recours collectifs, puis les frais de fonctionnement du fonds d'aide de l'Ontario sont aussi assumés à même les sommes qu'il détient.

Donc, on s'inspire aussi de ce qui se fait ailleurs, qui se fait en Ontario, notamment. Je vois le sourire, le sourire taquin de notre collègue de Chicoutimi. Mais, bref, tout simplement, c'est... bien, il y a aussi une réalité. On a des surplus, une logique qui est là.

M. Bédard : C'est ça. Mais, quand ça va bien, c'est sûr... Mais, moi, c'est pour ça que je regarde... Au départ, il a été capitalisé de combien, ce fonds-là? Avez-vous le montant?

Mme Belogbi (Frikia) : Je peux vous donner les chiffres. Juste une petite parenthèse, si vous le permettez. Aujourd'hui, on parle effectivement du 13 millions, mais il y a un seul dossier qui a rapporté beaucoup d'argent pour le fonds, c'est un dossier qui est assez connu, c'est le dossier sur l'avortement, qui a rapporté exactement 6,7 millions à l'époque. Donc, si on enlève le 6,7 millions de l'époque, il ne restera pas gros montant dans ce fonds-là. Pourquoi? Parce que...

M. Bédard : C'est en quelle année, le recours sur l'avortement?

Mme Belogbi (Frikia) : La transaction a eu lieu en 2010, et, dans ce recours là contre l'avortement, évidemment, les femmes — ça concernait les femmes, bien sûr — n'ont pas jugé utile de réclamer des indemnisations, et aucune réclamation n'a été faite.

M. Bédard : Et qui était poursuivi?

Mme Belogbi (Frikia) : C'était le gouvernement, évidemment.

M. Bédard : O.K. Belle transaction.

Mme Belogbi (Frikia) : Donc, c'était le plus gros, je vous dirais, montant que le fonds n'a jamais eu. Mais il a déjà eu des reliquats de 8,17 $, oui, comme on a eu des reliquats de 800 000 $.

M. Bédard : Parce qu'en général j'imagine que tout est distribué, bien, aux plaignants, à ceux et celles qui participent au recours.

Mme Belogbi (Frikia) : En général, c'est assez bien fait pour que tout soit distribué, sauf si les personnes ne réclament pas ou sauf... comme on l'avait dit tantôt, la distribution est onéreuse ou impraticable. À ce moment-là, on peut bénéficier d'un certain bon reliquat.

M. Bédard : Donc, en 2010, il y a eu un ajout important qui a permis au fonds, donc... C'est quand même une bonne souscription, 6 millions. Mais là, à partir d'aujourd'hui, vous avez la possibilité de prendre ce fonds pour votre fonctionnement, pour couvrir l'ensemble de votre fonctionnement, un certain montant.

• (12 h 40) •

Mme Belogbi (Frikia) : Oui, un certain montant pour pouvoir fonctionner. Parce qu'on est un tout petit organisme. On est un tout petit organisme qui comptait, depuis 35 ans, quatre personnes. C'est le plus petit organisme qu'il n'y a pas au gouvernement. Donc, il y a une agente de secrétariat, un technicien, le ou la secrétaire et un juriste.

Les quatre dernières années, encore une fois, le fonds a voulu faire son devoir de restriction budgétaire. Le poste de juriste n'a pas été comblé. Sauf qu'aujourd'hui l'équipe commence un petit peu à s'essouffler. On a absolument besoin, donc, d'engager une nouvelle ressource pour pouvoir, donc, mener à bien notre mandat, et cette ressource-là, évidemment, je peux vous donner des chiffres si vous le désirez, l'augmentation... Les raisons pour lesquelles on a besoin de cette ressource absolument, c'est l'augmentation du nombre de recours collectifs, l'augmentation des demandes d'aide, la complexité des dossiers, et je peux en donner encore, des motifs qui font qu'on a besoin d'aller prendre un certain montant pour pouvoir ne serait-ce qu'arriver à mener à bien notre mandat.

M. Bédard : O.K. Et combien avez-vous projeté de prendre? Parce qu'il n'y a pas de balise. C'est ça qui est... À la limite, ça pourrait être 100 % de votre fonctionnement?

Mme Belogbi (Frikia) : Nous avons demandé, donc, un montant, en tout cas, pas très... Je n'ai pas, en tout cas, le montant exact, là, pour l'instant, mais on a besoin d'une ressource absolument. Je ne peux pas vous le donner comme ça, le chiffre.

M. Bédard : O.K. Non, non, c'est... La loi, évidemment, n'a pas de balise à partir du moment où on met... ou pour son fonctionnement... Ça veut dire que, demain matin, le ministère de la Justice peut vous dire que vous avez zéro, et débrouillez-vous. Autrement dit, la loi, elle ne vous donne pas de limite de ce que vous pouvez prendre pour votre fonctionnement.

Mme Belogbi (Frikia) : Mais, de toutes les façons, notre limite est faite par le gouvernement. Nos budgets sont approuvés à chaque année. On ne peut pas aller sans limite, là, notre budget est approuvé par le gouvernement.

Mme Vallée : En fait, ce n'est pas... Ici, ce que l'on donne, ce n'est pas un chèque en blanc, là, au fonds d'aide pour dire : Dans la première année, on va épuiser le fonds. Au contraire, il y a toujours... La gestion se fait toujours d'une façon rigoureuse, mais c'est pour permettre d'avoir... d'aller chercher le financement à même les surplus qui sont présents.

M. Bédard : Remarquez que je n'en ai pas contre la gestion, parce qu'à l'évidence, effectivement, c'est un petit organisme.

Mme Vallée : C'est un petit organisme qui travaille de façon extraordinaire et qui gère de façon rigoureuse aussi ses finances.

M. Bédard : Oui. Mais l'idée, ce n'est pas là, l'idée, c'est qu'à partir de maintenant moi, je peux vous demander de prendre l'ensemble de votre fonctionnement à partir du fonds. Ça, je peux vous le demander, le 100 %, parce que... Là, vous me dites : Vos frais de fonctionnement sont autour de 416 000 $?

Mme Belogbi (Frikia) : Oui.

M. Bédard : Ils vont être un peu plus élevés quand vous allez engager, évidemment, votre ressource. Donc, on parle plus de 500 000 $?

Mme Belogbi (Frikia) : Oui.

M. Bédard : Ça va être sûrement autour de ça. Parce que, là, vous avez... Donc, vous avez 13 millions. Les sommes que vous allez prélever pour votre fonctionnement vont varier, puis là je n'ai pas de balise pour ça. C'est quand même une modification importante, vous comprendrez. Et je comprends votre besoin, au contraire. L'idée, c'est que, là, on change la philosophie par rapport à ce qui était au départ. C'est que ces fonds-là servaient à quoi principalement auparavant, ce fonds de 13 millions? Bien, l'argent que vous aviez, il servait à financer les recours?

Mme Belogbi (Frikia) : Oui, absolument.

M. Bédard : Donc, ultimement, vous risquez d'avoir moins d'argent pour financer les recours?

Mme Belogbi (Frikia) : De toutes les façons, les revenus dont on parlait tantôt génèrent des intérêts, et nous avons l'intention, en tout cas, d'utiliser ces intérêts-là pour le budget de fonctionnement.

M. Bédard : Il le fait comme une fondation, finalement. Les intérêts... Là, je regarde, disons, ces temps-ci, vous n'auriez pas beaucoup d'intérêt, là, mais disons 2 %, 3 %, avec un fonds obligataire qui est... Même un fonds obligataire, ces temps-ci, ce n'est pas diable, là, donc... C'est à partir de ces fonds-là que vous... Donc, vous ne souhaitez pas entamer le capital?

Mme Belogbi (Frikia) : Pour l'instant, on va toucher aux intérêts.

M. Bédard : O.K. Mais avez-vous proposé qu'on regarde seulement les intérêts, qu'on prenne seulement les intérêts?

Mme Belogbi (Frikia) : Non, notre demande n'a pas été faite uniquement pour les intérêts. Nous avons demandé à ce que... pour, comme je le disais tantôt, remplir notre mandat, qu'on puisse aller... Aujourd'hui, on ne peut plus fonctionner avec le 416 000 $, et ça se comprend. Et, encore une fois, étant donné que nous avons des surplus, on a demandé au gouvernement à ce qu'on puisse aller prélever des sommes pour combler un petit peu notre déficit, donc, de fonctionnement et, encore une fois, pour éviter d'aller... d'utiliser l'article 44.1 et demander au gouvernement d'augmenter notre subvention. Et notre subvention viendrait évidemment des fonds consolidés du revenu.

M. Bédard : Exact, mais je pense que vous n'auriez pas de réponse favorable, c'est ce que je comprends, de toute façon. Cette demande a déjà été faite, et vous n'avez pas eu de réponse favorable. Donc, à partir de là... Non, où j'ai une inquiétude, je vous dirais, c'est qu'ultimement, évidemment, on va en arriver là, à ce rythme-là, parce que, des règlements de 6 millions, vous n'en aurez pas peut-être. Dans les 10 prochaines années, vous n'en aurez peut-être pas, là.

Mme Belogbi (Frikia) : C'est arrivé une fois dans 35 ans.

M. Bédard : Dans 35 ans, c'est ça.

Mme Belogbi (Frikia) : On a des chèques de 2 $, de 8,16 $. Ça aussi, ça arrive.

M. Bédard : Mon inquiétude est la suivante... Je crois, comme vous, que c'est un bon choix qu'on a fait, effectivement, de permettre les recours collectifs, qu'il y ait un accompagnement puis qu'il y ait une forme de justice. Le problème que j'ai est le suivant : c'est que, là, en vous donnant ce pouvoir-là sans balise... Puis je ne vous dis pas que je n'ai pas confiance en vous, mais c'est sûr que, si le gouvernement décide demain matin de fermer les valves, vous allez être capables de vivre pendant quelques années. Mais, à ce rythme-là, c'est sûr qu'on va avoir un problème. C'est sûr que les intérêts ne suffiront pas à faire fonctionner votre organisme au complet. Ça, ça me semble évident.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Mais par contre ce qui est prévu actuellement, c'est de permettre aux fonds de puiser à même ses surplus, mais on n'enlève pas l'autre... on n'enlève pas la possibilité aussi, éventuellement, d'un support, d'un soutien du ministère de la Justice, là. Alors, c'est certain...

M. Bédard : ...le ministère de la Justice peut aider qui il veut, là.

Mme Vallée : Non, mais, en fait, l'objectif, c'est de permettre, dans un contexte où on a des sommes quand même importantes qui sont dans un fonds, d'être utilisées pour les fins des recours collectifs, là. Évidemment, l'utilisation vise le fonctionnement du fonds, l'utilisation de ces sommes-là vise les activités régulières du fonds qui permettent la mise en place des... et qui permettent l'aide aux recours collectifs. Donc, on utilise des fonds dédiés pour les fins de l'activité très précise.

M. Bédard : Bien, je vous avouerais que ça, je ne partage pas votre opinion, effectivement. C'est pour l'administration, et la loi n'a pas été faite comme ça. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien qu'on la change, c'est que, justement, on voulait qu'elle ne serve pas pour l'administration mais qu'elle serve pour ceux qui font des recours collectifs. J'imagine que c'était ça, l'esprit de la loi, puis je n'en doute pas, elle est assez claire, effectivement.

Non, l'idée, c'est que c'est évident que vous allez prendre votre fonctionnement, l'ensemble de votre fonctionnement dans ces fonds-là, puis, à court terme, on va finir par avoir un... Bien, ce fonds-là va disparaître au rythme... Je vois «du fonctionnement», là, tu sais... Vous savez, l'équilibre budgétaire, on est supposés l'avoir cette année. Donc là, on ne sera pas dans l'austérité dans les 10 prochaines années, mais, à partir du moment où vous pouvez vous connecter sur un fonds de 13 millions, on risque de vous dire : Bon, bien, il y a plein de priorités au ministère... moi, c'est ça qui m'inquiète, et là qu'on se retrouve où vous n'aurez plus de fonds à un moment donné, puis ça va mettre en péril votre organisation.

C'est comme une solution court terme. Moi, c'est drôle, je serais très ouvert à... Pourquoi ne pas garder seulement les intérêts? Parce que, 13 millions, les intérêts, au moins on n'entame pas le capital, c'est le principe de la fondation, mais c'est surtout qu'on garde l'esprit que ces sommes-là devraient plutôt servir à ceux et celles qui font des recours collectifs. C'est ça, l'objectif. Comme on a eu une chance d'avoir un 6 millions de capital, moi, j'aimerais bien que cet esprit-là demeure, et il me semble... Avez-vous projeté, si vous aviez seulement les intérêts, qu'est-ce que ça vous ferait comme...

• (12 h 50) •

Mme Belogbi (Frikia) : En fait, le 13 millions, ce 13 millions là n'est pas gelé, n'est pas immuable. Ça monte à 16, ça peut descendre à huit, à neuf, à 10. Il bouge, n'est-ce pas? On parle de reliquats, on parle de prélèvements sur des sommes d'argent. Il ne faut pas oublier que ces fonds-là... Évidemment, cette subvention-là, elle est bénéficiaire inversée, mais, si le recours réussit, elle est remboursée au fonds d'aide, donc ne risque pas de le mettre à sec, ce fonds-là, là, le remboursement de l'aide inversé. Par contre, si le recours est perdu, là, non seulement le montant est perdu, mais, en plus, on doit payer les dépens, évidemment, à l'autre partie. Donc, il ne faut pas le prendre...

M. Bédard : Regardez, c'est qu'actuellement quelqu'un qui a un recours collectif, il... Quand il gagne, au-delà du reliquat, est-ce qu'il verse des frais au fonds?

Mme Belogbi (Frikia) : C'est là le but, justement, pour éviter...

M. Bédard : Exact, mais vous comprendrez qu'avec ça maintenant on va le faire un peu par la bande.

Mme Belogbi (Frikia) : Pardon? Excusez.

M. Bédard : Autrement dit, si vous prenez ces sommes-là que vous prenez à partir des reliquats et que vous les attribuez à votre fonctionnement, c'est comme si effectivement il y aura un montant qui serait prélevé pour vos fonctionnements à partir des recours que vous entamez, ce que vous n'avez jamais fait dans le passé. Là, on le fait parce qu'on a un historique. S'il n'y avait pas d'historique, on n'aurait pas ça, là.

Non, je suis plutôt inquiet, moi, de voir qu'on... sans balise, qu'on fait ça, qu'on assure l'ensemble du fonctionnement puis qu'on ne préserve pas... Je comprends qu'il peut y avoir des règles budgétaires qui s'appliquent cette année ou l'an prochain, mais là on est... Là, on change la loi pour toujours, là. Je suis un peu étonné.

Le Président (M. Schneeberger) : Je vais donner la parole à Mme la ministre.

Mme Vallée : Il y a peut-être... Il y a une information, par contre, qui est quand même importante. Les revenus de la dernière année, du fonds, ont quand même totalisé 2 642 445 $, alors c'est quand même non négligeable. On parle... 2 642 445 $...

M. Bédard : Excusez, je n'ai pas compris. Il vient d'où, ce montant-là?

Mme Vallée : Les revenus du fonds. Les revenus du fonds.

M. Bédard : O.K., les revenus du fonds.

Mme Vallée : Donc, ces revenus sont présents.

Et l'autre élément qu'il est important de porter à l'attention du collègue de Chicoutimi, M. le Président, c'est qu'en vertu de l'article 16 de la Loi sur le fonds d'aide aux recours collectifs, chaque année, le fonds doit transmettre au ministre, à la ministre, son budget pour le prochain exercice financier, puis ce budget-là est sans effet sans qu'il soit autorisé.

Donc, pour venir un petit peu répondre à la préoccupation à l'effet que, peut-être, on irait à... on viendrait peut-être à épuiser le fonds et à détourner ou... pas détourner, mais à s'éloigner de sa mission, ce qui n'est pas l'objectif, aucune, il y a quand même ces balises-là qui sont prévues, c'est-à-dire que le fonds doit prévoir son budget, doit faire une prévision pour l'année suivante. Donc, advenant... si d'aventure on arrivait avec une prévision budgétaire de 750 000 $ pour la prochaine année, il y a des chances que des lumières rouges s'allument, de fortes chances que des lumières rouges s'allument et qu'on dise : Écoutez, là, ce n'est pas l'historique, et on a des considérations... Parce que l'objectif, évidemment, c'est de permettre que les fonds soient versés pour les fins du... et pour permettre les recours collectifs. Mais je pense que cette donnée-là des revenus de 2 642 445 $ était quelque peu importante à transmettre parce qu'on... j'avais omis de la faire.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard : ...je ne doute pas de l'administration du fonds puis que les besoins sont réels. Ce que je vois, c'est qu'au rythme... même à 416 000 $ ou à 500 000 $, puis que vous le preniez à partir de votre fonds, bien, c'est sûr que vous allez entamer le capital de façon importante. Et là, effectivement, on change la destination du fonds, littéralement, là. Moi, c'est ça qui me chicote.

Là, on a un problème budgétaire cette année. On me dit que, l'an prochain, on est à l'équilibre. Mais là je change la philosophie, là, le but de tout ça, c'est que cet argent serve ultimement à financer plus de recours. C'est ce que je comprends. Puis, à la limite, vous avez trop d'argent, vous pouvez le remettre au fonds consolidé, ça, il n'y a pas de problème, là. On peut dire qu'il y a une année où vous allez en remettre ou pas, mais, quand on change totalement la philosophie puis que... et là on fait dépendre de votre administration du fonds, là, c'est drôle, ça me chicote.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Remettre au fonds consolidé ne garantit pas que les fonds remis aux fonds consolidés vont retourner dans leur totalité à l'accès aux recours collectifs. Alors, à partir du moment où on remet les fonds dans les fonds consolidés, on n'a pas ce même... Et l'objectif ici est de s'assurer que les fonds qui sont destinés aux recours collectifs puissent être utilisés pour ces fins-là.

M. Bédard : La réalité, c'est que l'organisme est pris face à des choix budgétaires difficiles, ça, c'est la réalité. On y impose des choix — c'est ce que je vois — qui ont fait en sorte que son budget a diminué d'à peu près 40 %, alors que les besoins augmentent, et que, là, elle ne sait plus où prendre son argent. Ça, c'est la réalité concrète. La réalité concrète, c'est qu'on a dit : Bien, prenons-le à partir du fonds.

Alors, moi, que quelqu'un me dise qu'on le prenne dans le fonds consolidé, qu'on le prenne là, de toute façon c'est de l'argent public, tout ça, mais c'est de l'argent qui sert à une destination qui est bonne, qui est juste. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est qu'elle n'était pas prévue à servir là. Donc, tu sais, que l'organisme soit aux prises avec une situation budgétaire difficile sur un an puis qu'on me dit : On va prélever pour une année pour permettre d'accomplir sa mission, ça, je serais d'accord, mais là on ne fait pas ça.

Là, ce qu'on fait dans la loi, sans balise, on dit : Maintenant, comme par hasard, tu as un fonds, puis il va servir à ton fonctionnement puis, ultimement, il va payer l'ensemble du fonctionnement. Donc, ça va être une pression additionnelle sur l'organisme, et cet argent-là ne servira pas à sa destination principale. C'était de financer des recours, j'imagine. C'était ça, le but, au départ du fonds.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Belogbi (Frikia) : Pardon. Si vous le permettez, on reste, comme je vous l'ai dit, les trois dernières années, à 416 800 $. Nous n'allons pas chercher des millions de ce fonds-là, n'est-ce pas? Et, comme le disait Mme la ministre, notre budget doit être absolument approuvé à chaque année en vertu de l'article 16 de notre loi. Ça, c'est d'une part.

D'autre part, vous avez sûrement entendu parler des recours collectifs contre le tabac, n'est-ce pas, récemment, au mois de juillet, c'est très récent. Le fonds aurait pu avoir un revenu de plus que 6 millions de dollars de ce dossier-là, parce qu'on a financé les dossiers du tabac. Donc, il n'y a aucun danger que le fonds se retrouve avec des fonds à zéro, qu'il ne soit plus capable de remplir sa mission qui est celle de financer les recours collectifs. Donc, je ne vois pas l'inquiétude à ce niveau-là, parce que, comme je vous l'ai dit, nous avons aussi des revenus... des remboursements, donc, de subrogation lorsque les recours sont gagnés, ont réussi.

M. Bédard : Oui, mais auparavant vous n'aviez pas à supporter ces frais-là. C'est que, là, c'est assez particulier, c'est que vous me projetez une situation dans l'avenir qui n'est pas arrivée dans le passé. Dans le passé, effectivement, vous accumuliez, mais c'étaient des fonds propres, qui vous appartenaient, qui n'étaient pas amputés à partir de votre fonctionnement sur 35 ans, sinon vous n'auriez pas une cent actuellement.

Mme Vallée : Le fonds a quand même des revenus, là. N'oublions pas, le fonds a des revenus de... l'an dernier...

M. Bédard : Mais, à l'évidence, à 13 millions... mais, regardez, à 13 millions... Moi, je fais le calcul, là. En général, bon, votre budget, dans les faits, il se tenait plus autour de 700 000 $, 800 000 $, autour de 700 000 $ environ, en général, c'est ce que j'ai compris, 719 000 $, puis là vous avez une coupure drastique à 419 000, qui vous empêche de faire... de réaliser... d'embaucher quelqu'un qui a une compétence nécessaire. Donc, si je projette ça, même si je recule dans le temps, là, c'est sûr que vous n'auriez pas 13 millions, là. Tu sais, si je reculais dans le passé, je veux dire, à partir de maintenant, à partir de 1995 vous payez votre fonctionnement à partir de ça, là, c'est sûr que vous auriez été en demande au fonds consolidé. Vous n'auriez pas 13 millions, vous auriez zéro dans votre compte en banque. C'est ça que je veux vous dire.

Et là vous me dites : Non, non, dans le futur, je vais être correcte. Moi, c'est drôle, j'ai une crainte réelle, moi... C'est pour ça que, là, on règle un problème qui est ponctuel... Vous avez un problème budgétaire actuellement, je le comprends, puis il est normal, puis on peut faire... il y a des choix qui se font, je suis assez bien placé pour vous le dire. Le problème, c'est que vous réglez un problème ponctuel avec une solution qui est un changement de philosophie. Moi, je peux vous dire, là, j'ai une résistance qui est très forte. Moi, c'est drôle, je n'aurais pas fait ça. J'aimerais mieux un prélèvement, par exemple, qu'on me le fasse sur deux ou trois ans pour permettre d'embaucher, ça, j'aimerais mieux ça.

• (13 heures) •

Mme Vallée : La modification législative ne change pas la philosophie de façon importante, en ce sens que le budget du fonds demeure sous approbation et doit être approuvé par le ministre. Tout le processus... En fait, ce qu'on permet, c'est de puiser... c'est d'utiliser les surplus pour payer le fonds de fonctionnement. Mais les autres, les autres modes, comme une intervention éventuelle et d'autres modes de financement du fonds, sont toujours là. On ne vient...

Mais ce fonds de 13 millions là, et on parlait de revenus qui sont anticipés aussi dans d'autres dossiers, ce sont des fonds qui sont dans les coffres de l'État, et qui pourraient être mis à contribution, actuellement qui dorment, et qui ne sont pas utilisés, et qui peuvent être utilisés par le fonds. Et n'oublions pas que les revenus moyens du fonds... je vous ai parlé des revenus de l'an dernier, mais les revenus moyens du fonds, ça se situe entre 1,5 puis 1,8 million par année. On a ça aussi, là. Il faut considérer tout ça. Ce n'est pas comme si aujourd'hui on faisait une ponction ad vitam aeternam dans un fonds qui ne sera jamais bonifié par aucune forme de revenus.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre.

Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 h 13)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, bon après-midi à tous. Je vous demanderais de... Veuillez bien fermer vos cellulaires et appareils électroniques.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives.

Lors de la suspension des travaux ce matin, nous avions suspendu l'étude de l'article 24 et avions consenti à entreprendre l'étude de l'article 27. Alors, étant donné que le député de Chicoutimi avait pris pas mal de temps ce matin là-dessus, je vais poursuivre avec le député de Borduas, qui avait des questions, notamment. Député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Dans un premier temps, pour l'article 27, je comprends que, bon, en modifiant l'article, un peu comme le disait le député de Chicoutimi, on vient utiliser le fonds général pour utiliser... bien, en fait, pour les dépenses courantes. On disait tout à l'heure que, bon, on utilise les reliquats et les réclamations liquidées dans le budget, et puis c'est en fonction du montant annuel pour les gains au niveau des recours collectifs. Sauf que, quand on regarde l'état des résultats, supposons, en 2013 — ça varie vraiment d'année en année — en 2013 le réel, au niveau du reliquat, il y avait 380 000 $ et puis, en 2014, 1 872 177 $. Donc on a des... C'est dans le dernier rapport annuel, au niveau du reliquat.

Même chose au niveau des intérêts. En 2013, il y avait 219 000 $ d'intérêts et puis, en 2014, 178 441 $ d'intérêts. Tout à l'heure, vous nous disiez, M. le Président, les gens du fonds nous disaient : Bon, on va fonctionner sur les intérêts, entre autres. Parce que ce qu'on comprend, c'est que le gouvernement, maintenant, ne mettra plus d'argent à l'intérieur du fonds pour les dépenses de fonctionnement. Mais, avec des revenus de 178 000 $ et puis, si jamais il y a des... bien, je ne voudrais pas dire des mauvaises années, mais supposons qu'il n'y a pas de recours collectifs qui sont remportés sur lesquels le fonds aurait financé, au bout de la ligne ce n'est pas une façon qui m'apparaît pérenne de financer le fonds. Ultimement, il va y avoir des problèmes un jour ou l'autre.

Et, où je suis... j'éprouve certaines réserves aussi, tout à l'heure c'est que la ministre nous disait, M. le Président, qu'au niveau du fonds consolidé, bien, il y a toujours possibilité que le gouvernement finance. Mais aussi j'ai retenu son argument de dire : Bien, écoutez, c'est mieux d'avoir un fonds distinct, parce que, quand ça s'en va dans le fonds consolidé, on n'est pas convaincu que l'argent qui va dans le fonds consolidé va être affecté à la mission. Par contre, le gouvernement, avec la loi sur les victimes d'actes criminels, a haussé, lors d'un projet de loi au printemps dernier, le montant de la contribution obligatoire, donc, sur les constats d'infraction. Donc, la contribution volontaire... Non, mais c'est deux choses distinctes, mais ce que je veux dire, c'est que cette augmentation de la contribution volontaire, ça s'en va au fonds consolidé. Tout à l'heure, M. le Président, la ministre a dit : Bien, ça ne veut pas nécessairement dire que, quand ça s'en va au fonds consolidé, ça va être traité pour ça. Donc, je veux juste qu'on s'assure, dans le cas du fonds, bien, que ça soit distinct puis qu'on assure une façon pérenne de financer le fonds.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : M. le Président, premièrement, d'abord, là, pour un petit peu revenir sur la question des victimes d'actes criminels, je veux juste rappeler au collègue que l'indemnisation, l'IVAC, l'Indemnisation des victimes d'actes criminels, là, c'est 130 millions par année. Alors, de l'argent... Ce 130 millions par année, là, l'argent qui va dans le fonds consolidé sert à assumer ça, en plus de servir... d'aider les CAVAC et les autres organismes.

Mais là on n'est pas là-dedans. Nous sommes dans une situation où nous avons un organisme qui s'appelle le Fonds d'aide aux recours collectifs, qui est un organisme, ne l'oublions pas, on a l'organisme, et cet organisme-là, contrairement aux autres organismes, n'est pas à même de se financer à même ses revenus. Donc, la loi, dans sa forme actuelle, ne permet pas à l'organisme qu'est le Fonds d'aide aux recours collectifs de puiser ses revenus à même ses frais de fonctionnement, de financer ses activités. Alors, tout ce qu'on permet, c'est ça. On permet de se financer et, oui, de puiser à même ses surplus.

Mais regardons la réalité, là : en 2014-2015, on avait des revenus de 2 460 000 $, un petit peu plus; on avait, en 2013-2014, des revenus de 2 642 000 $, qui excluaient l'aide gouvernementale; en 2012-2013, des revenus de 1 604 945 $, qui excluaient l'aide gouvernementale. Donc, le fonds a, en plus d'un surplus important d'un peu plus de 13 millions, aussi, annuellement, des revenus. Alors, ce n'est que normal que de permettre à un organisme comme le fonds d'aide de se financer à même ses revenus.

• (15 h 20) •

Et c'est un organisme qui génère des revenus. Ce n'est pas un organisme qui ne génère pas de revenus, là, c'est un organisme qui génère des revenus. Et on veut simplement permettre à cet organisme, qui est générateur de revenus, d'assumer ses frais de fonctionnement. Parce que l'organisme est capable de voler de ses propres ailes à même les revenus qu'il génère et à même les surplus qu'il a réussi à accumuler et qu'il accumule. Donc, on a fait mention d'un certain nombre de recours qui avaient généré des revenus fort intéressants, des surplus fort intéressants, on a fait état d'autres recours.

Puis l'autre élément qui est important, c'est que le fonds finance aussi des recours qui sont solides, des recours qui sont sérieux et qui ont un potentiel de générer aussi des revenus pour l'organisme. Une fois que les frais d'avocats sont payés, une fois que les expertises sont payées, mais il y a quand même dans les recours, à l'intérieur des recours qui sont soutenus, des revenus, des surplus qui sont retournés au fonds. Alors, tout ce...

Et je pense que l'objectif de ce projet de loi là, c'est de la saine gestion, de la saine gestion des finances publiques, c'est de permettre simplement à un organisme générateur de revenus de pouvoir utiliser ces revenus-là pour se financer. Ça n'empêche pas, d'aucune façon... Et ça oblige aussi... ça maintient l'obligation pour l'organisme de faire autoriser son budget, ça maintient... Toutes les obligations de gestion prévues à la loi demeurent. On fait simplement une modification pour permettre de venir répondre à une situation qui, juridiquement, ne permettait pas à l'organisme générateur de revenus de payer ses frais de fonctionnement à même ses revenus. C'est tout simple. Et on parle du fonds, on parle du fonds, oui, mais le fonds, à la base même, est un organisme, un organisme qui est là et qui a comme objectif d'accompagner et d'aider les recours collectifs.

Puis ce qu'on propose de faire, c'est ce qui se fait... je comprends, mon collègue de Chicoutimi nous faisait un sourire taquin, mais c'est quand même ce qui se fait en Ontario, c'est quand même ce qui se fait ailleurs, il y a de nombreux organismes financés par des fonds dédiés mais qui vont assurer leur fonctionnement à même leurs revenus. En tout cas, je vous le présente... Pour moi, ça va de soi que c'est une façon saine de gérer tout en considérant les balises bien précises qui sont prévues à la loi qui crée cet organisme-là. Alors, cet organisme-là ne pourrait pas du jour au lendemain présenter un budget de frais de fonctionnement qui pourrait mettre en péril, par exemple, son fonds, pourrait mettre en péril sa mission. Ces budgets-là sont analysés avec rigueur et sont préparés aussi avec rigueur par l'équipe du fonds.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais la question, M. le Président, c'est davantage d'assurer de façon pérenne le financement du fonds. Donc, effectivement, il y a des revenus, mais ça ne veut pas dire que, de façon constante, les revenus vont toujours être au rendez-vous, parce que, lorsqu'il y a des déboursés, le montant au fonds va diminuer. Puis, on le constate, uniquement par les intérêts, ce n'est pas suffisant. L'utilisation des reliquats, ça varie d'année en année en fonction des...

Mme Vallée : C'est un principe de base, et c'est la même chose pour l'État, c'est la même chose pour le gouvernement. On ne peut pas prévoir que nos revenus seront toujours les mêmes. On ne peut pas non plus planifier des dépenses qui iraient au-delà de notre capacité de payer et au-delà de nos revenus. Alors, le même principe que nous devons appliquer dans une saine gestion des finances publiques, que nous appliquons dans nos budgets familiaux, bien, s'applique au fonds, c'est-à-dire que le fonds doit s'assurer de gérer tout ça avec rigueur, avec sérieux afin de maintenir, d'une part, son objectif premier, qui est d'aider à soutenir financièrement les recours collectifs.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, on est en accord avec la ministre au niveau de la saine gestion, mais, avec égard, le financement de l'État québécois et le financement du fonds ne semblent pas être tout à fait la même chose, parce que les revenus du gouvernement ou de l'État québécois, dans une certaine mesure, peuvent être projetés, peuvent être prévisibles. Dans ce cas-ci, dans le cas du fonds, qui tire ses revenus, entre autres, des reliquats, bien, on ne sait pas ce que les tribunaux vont décider. Puis, M. le Président, la ministre le sait très bien, même avec le meilleur dossier en cour, ça peut arriver que vous ne gagniez pas. Donc, c'est juste au niveau du financement du fonds de façon pérenne où on a une certaine inquiétude.

Je comprends très bien ce que la ministre nous dit, que le fonds doit financer ses activités à même ses revenus. Où je me questionne, on le constate, on est en mesures de restrictions budgétaires, et la part du financement que le ministère de la Justice va attribuer va être réduite, et on dit : Dans le fonds, pour le budget de fonctionnement, on aurait besoin d'un budget de fonctionnement... au cours des dernières années, on calculait 416 800 $. Avec les ressources supplémentaires, le budget va être approuvé, mais, de façon durable, il va falloir s'assurer que le fonds puisse être financé.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Le fonds continue de se financer à même ses activités, à même le financement des recours collectifs sérieux qui sont entrepris. Et évidemment le fonds évalue, avant même d'entreprendre un recours... va évaluer l'apparence de droit, la probabilité d'exercice du recours collectif. Donc, il y a une analyse.

Et, quant au budget du fonds, je vous rappelle que ce n'est pas rien, là, ce que prévoit l'article 16. Non seulement l'article 16 prévoit l'obligation pour le conseil d'administration du fonds de soumettre leur budget pour approbation avant toute chose, mais il y a également une possibilité... le gouvernement, techniquement, peut démettre un administrateur qui gère de façon... qui ne gère pas adéquatement le fonds. Parce que l'article 16 prévoit même que le gouvernement peut démettre un administrateur qui acquiesce à une dépense non prévue par le budget du fonds, sauf à une dépense qui n'excède pas les revenus du fonds non prévus au budget, mais il y a quand même... pour s'assurer d'une gestion rigoureuse, il y a quand même une disposition qui prévoit un contrôle par le gouvernement, il y a des dispositions qui prévoient aussi l'encadrement du fonds.

Ce qu'on propose n'est vraiment pas différent du fonctionnement d'un organisme, un organisme qui génère des revenus. Puis je vous ai fait état des revenus, là, mais... Et prenons... Par exemple, en 2011-2012, les revenus étaient de 9 421 000 $. Il y a des années où les revenus sont plus petits. 2012-2013, c'est des revenus de 1 604 000 $. Mais, en 2011-2012, 9 412 000 $, et on ne permettait pas au fonds de financer ses frais de fonctionnement de 422 000 $ à même ces revenus-là. Ils ont des revenus de 9 millions, en 2010-2011 des revenus de 5 464 000 $, et on n'a pas permis, l'aide gouvernementale, de financer les frais de fonctionnement de 438 000 $.

Alors, regardons les frais de fonctionnement en proportion des revenus. C'est certain que c'est quand même un montant qui est marginal. Et les revenus du fonds, depuis 10 ans, vraiment, sont largement supérieurs aux frais de fonctionnement. Donc, on n'aurait pas eu besoin de piger dans les surplus accumulés, là. Parce que c'est ça, en fait, on va piger dans les surplus accumulés lorsque les revenus du fonds vont être inférieurs. Mais les revenus du fonds ont été quand même substantiels au cours des 10 dernières années, et c'est ce qui nous amène à dire : Bien, écoutez, il y a une possibilité pour le fonds de financer ses frais de fonctionnement sans même aller puiser dans ses surplus accumulés. Alors, ce n'est pas tout à fait exact de dire aujourd'hui : On part avec un 12 ou un 13 millions qui va être amputé d'entre 400 000 $ et 500 000 $ à chaque année et qui ne sera jamais renfloué. Ce n'est pas exact, là. On n'en est pas là. On a des revenus, année après année, qui sont quand même importants et qui nous amènent à constater qu'il est tout à fait possible et tout à fait sain de considérer que ces revenus-là puissent permettre en partie de financer les frais d'opération.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le député de Borduas, ça va? Député de Chicoutimi.

• (15 h 30) •

M. Bédard : Écoutez, c'est sûr qu'on a un point de désaccord, et, à un moment donné, il faut les constater, pour différentes raisons. C'est sûr que moi, je n'accepte pas l'histoire de la saine gestion. On n'est pas dans la saine gestion. La saine gestion, en tout respect, c'est l'argent... comment est dépensé chaque dollar, que ce soit 1 $ ou 1 million. Et ça, le gouvernement conserve la faculté de vérifier. Donc, ce n'est pas une question de saine gestion. Là, on est... On change tout simplement la destination d'un fonds qui a été créé. Voilà. Auparavant, il servait pour financer des recours, maintenant il va financer pour le fonctionnement d'un organisme, qui est quand même assez fondamental.

Puis il y a deux assertions sur lesquelles je suis en désaccord. Des organismes qui n'ont pas de revenus, il y en a que le gouvernement finance par rapport à sa mission, et ils n'ont pas de revenus. Puis, dans ce cas-ci, qualifier de revenus ce qui est un prélèvement, pour moi, est quand même douteux. Ce que je comprends, c'est qu'au niveau réglementaire on donne la possibilité au fonds de prélever un reliquat qui est en pourcentage, qui pourrait être plus, qui pourrait être moins. Alors, évidemment, si on commence à prendre le fonds puis le mettre dans le fonctionnement, c'est sûr qu'on va créer une pression là-dessus à court, moyen, long terme, et ce n'était pas la finalité du fonds quand il a été créé, c'est évident.

Alors, on change les choses, et je ne suis pas sûr si on les change pour le mieux. Pourquoi? Parce qu'on est face à une problématique à court terme où il y a un choix budgétaire qui a été fait — puis moi, je n'ai pas à le questionner aujourd'hui — mais qui impacte une organisation qui a un rôle que tout le monde reconnaît ici puis que tout le monde appuie. Ça fait que c'est sûr que je suis prêt à des compromis, mais, de là à changer le principe de la loi et de la destination du fonds, moi, je pense qu'on n'en est pas là.

Donc, moi, je peux... Là, j'ai des amendements de prêts, à la ministre. On peut regarder différentes choses. On peut regarder d'une façon temporaire. Parce que je comprends les besoins qui ont été identifiés, ils sont réels, puis moi, je veux que le fonds réalise sa mission correctement malgré les pressions budgétaires qui sont les siennes, mais qui sont réparties un peu partout dans l'appareil public. Alors, allons-y pour une solution à court terme, d'abord, sur une période x de trois ans, puis après ça on réévaluera. Ça, ça peut être le premier scénario. Le deuxième — puis là j'attends avant de l'évoquer parce que j'y réfléchis — c'est celui, possiblement, d'utiliser les fonds... les intérêts, peut-être, tout en préservant le fonds pour ne pas, justement, créer cette pression-là inutile.

Donc, à ce moment-ci, M. le Président, je vais faire un petit amendement, pour ne pas qu'on nous manque de temps, là, tout d'un coup, on ne sait jamais, il pourrait en manquer.

Le Président (M. Schneeberger) : ...pas mal de... Le temps est pas mal passé sur cet article, là, mais...

M. Bédard : Oui. Alors donc, à l'article 27 — c'est un sous-amendement, évidemment — supprimer... Donc, le premier amendement, ce serait tout simplement de supprimer le paragraphe 1°.

Là, évidemment, c'est la solution un peu plus drastique, c'est celle de ne pas lui permettre de puiser dans son fonds pour assurer son fonctionnement. Par contre, il peut continuer à dépenser les sommes, mais pas pour son fonctionnement. Alors, vous comprendrez que cet article... cet amendement a un effet contraire, mais le but, c'est d'essayer de trouver, je vous dirais, une zone de confort avec la ministre, qui est face à des obligations budgétaires que je constate, mais sans modifier l'approche qu'on a développée dans les 30 dernières années, 35 dernières années sur le fonds, tout simplement. Puis, s'il y a des solutions... Si elle a d'autres solutions ponctuelles à faire, moi, je n'ai pas de problème avec ça. Ça fait que je vais distribuer les copies, M. le secrétaire.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, bien, on va suspendre quelques instants pour la réception de l'amendement.

(Suspension de la séance à 15 h 33)

(Reprise à 15 h 38)

Le Président (M. Schneeberger) : Nous reprenons la séance. Je laisse la parole à M. le député de Chicoutimi pour présenter son amendement.

M. Bédard : Oui, bien, l'amendement parle par lui-même, évidemment. J'en ai un autre aussi qui peut limiter dans le temps aussi, qui pourrait être ça, qui pourrait limiter pour une certaine période lors de la mise en vigueur de la loi, pour rencontrer... ça rencontrerait l'objectif qui nous a été présenté par la responsable du fonds, soit celui d'être capable d'embaucher des ressources compétentes à court terme pour réaliser sa mission, mais en même temps ne pas aller à l'encontre des principes puis de se retrouver face à une situation où, dans le temps, ce qui va arriver, c'est qu'évidemment le gouvernement va se désengager, il va dire : Maintenant, vous avez une source de revenus, donc vous devez vous financer à partir de votre source de revenus. Le but, ce n'était pas ça. Parce que ce n'est pas des revenus à proprement dit, des prélèvements, c'est des... Et j'ai bien demandé tantôt si c'étaient des revenus, si on chargeait aux gens des montants ou on facturait, comme tout avocat peut le faire, là. À ce moment-là, on génère des revenus. La SAQ génère des revenus. Là, dans ce cas-ci, on fait un prélèvement qui est, entre guillemets, arbitraire, qui n'est pas mauvais, qui est bon — j'ai vu la grille qui m'a été présentée, qui est bien pensée — mais qui, si on arrive au résultat qu'on propose là, va faire en sorte... qui va créer une pression sur le fonds, moi, j'en suis convaincu, à moyen terme.

Alors, vous savez, dans les... On a créé quelque chose de bien. À un moment donné, le gouvernement est toujours face à des choix. Si on dit : On a le choix de financer, je ne sais pas, un organisme en santé ou bien financer un fonds d'aide pour les recours collectifs, dans la balance des inconvénients puis dans les choix prioritaires, ça ne risque pas d'être en haut de la liste. Alors, moi, je veux seulement préserver la mission à long terme, tout simplement.

Donc, je propose à la ministre, peut-être... Je sais que maître... — et là j'oublie votre nom, pour faire exprès, là...

• (15 h 40) •

Mme Vallée : Me Belogbi.

M. Bédard : ... — bon, doit quitter. Dans les faits, j'ai pas mal obtenu les informations que nous avions besoin. Là, on est plus dans l'ordre d'est-ce que c'est un bon choix législatif de le faire ou non. Je proposerais à la ministre d'y réfléchir, de voir comment on peut trouver une solution qui soit... qu'on atteigne son objectif, qui est celui de diminuer la pression financière, puis qu'on reconnaisse l'objectif, aussi, du fonds, qui est celui d'être financé à la hauteur de sa mission.

Mon but, ce n'est pas... On ne soulèvera pas des... Dans le contexte actuel, là, il n'y a personne qui va marcher dans la rue pour ça. Ça, je le comprends. D'ailleurs, les victimes sont difficilement identifiables là-dedans. Puis, à part quelques avocats, on aurait de la misère à avoir une vraie bonne manifestation, donc... Mais je pense que c'est sain, et ça respecte l'esprit de la loi de l'époque que de... soit de limiter pour un temps l'application d'un prélèvement ou soit de limiter à ses intérêts.

Voilà, c'est ce que je propose à la ministre. Peut-être, si elle le souhaite, de suspendre...

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Non, non, on va disposer. Je réitère que ce que nous présentons dans le projet de loi n'a pas d'aucune façon comme objet de venir modifier de quelconque façon l'objet pour lequel a été créé le Fonds d'aide aux recours collectifs à l'époque. Le fonds a toujours comme objectif de financer les recours collectifs suivant les dispositions de la loi. Et nous croyons que la situation qui prévaut permet au fonds de financer ses frais de fonctionnement à même le reliquat qui est versé, sans pour autant porter atteinte, évidemment, à la mission.

Les dispositions qui permettent l'encadrement du budgétaire demeurent, ils sont là. La rigueur... Et je sais que le collègue ne met pas en doute au niveau de la saine gestion de ce fonds-là. On fait et on propose de faire ce qui se fait ailleurs, tout simplement. Et les reliquats n'étaient pas, à l'époque... Et, on comprend, dans les premières années du fonds, de création du fonds, les reliquats ne permettaient pas, à cette époque-là, de prévoir... ou de pourvoir aux frais de fonctionnement. Il fallait permettre une capitalisation de tout ça, il fallait permettre aussi au fonds de se créer une certaine notoriété, ce qu'il a réussi à faire avec succès. Et cette notoriété-là et le sérieux des recours collectifs qui sont financés permettent depuis bon nombre d'années d'assurer des reliquats importants qui ont permis, ne l'oublions pas, d'accumuler un surplus de plus de 13 millions, qui, actuellement, est dans les coffres.

Donc, on considère que de permettre... Et on n'interdit pas le soutien que peut apporter le gouvernement au fonds, là, on ne l'interdit pas, mais on permet au fonds, pour le moment, de financer ses frais de fonctionnement. Donc, voici, et je pense que ça fait pas mal le tour de ce qu'on a à dire. Mais je crois que c'est un amendement qui est tout à fait justifié dans un contexte où on a un organisme qui génère d'importants reliquats année après année et qui a également su accumuler un surplus qui est non négligeable.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre. Je passerais maintenant la parole au député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Mais en fait ce que je souhaite savoir : Si la situation du fonds se détériorait — parce qu'on comprend, là, qu'il est en bonne situation financière, 13 millions au cours des années, 1,8 million de reliquats, 178 000 $ d'intérêts l'an passé, 2014 — est-ce que le gouvernement s'engage à doter le fonds et à maintenir une certaine forme, à apporter des contributions spéciales? C'est prévu que le gouvernement peut financer des activités, ça va le demeurer, mais il ne faudrait pas, dans le fond, qu'il y ait certains recours qui soient refusés pour des raisons financières. Et ce que je veux dire par là... Dans le fond, j'aimerais ça avoir un engagement ferme du gouvernement pour dire : On va toujours assurer que le fonds soit bien doté, et qu'il n'y aura pas de choix financier qui va être effectué pour les demandes de recours qui vont être présentées, puis que, toute personne qui décide de présenter un recours collectif et décide de présenter une demande d'aide, bien, le fonds ne sera pas lié par une contrainte financière. Est-ce qu'on peut avoir cet engagement-là du gouvernement?

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Actuellement, M. le Président, ce que nous avons, actuellement, ce n'est pas un désengagement de l'État. Ce n'est pas ça. Et les pouvoirs et les obligations prévus à la loi demeurent. Alors, je pense que c'est quand même assez clair. Maintenant, si l'État avait voulu se désengager, il y a d'autres articles du projet de loi qui auraient fait l'objet d'amendements. Tel n'est pas le cas.

Par contre, je pense que, souvent, on entend... et on reproche de laisser dormir dans les coffres de l'État des sommes, dans les fonds, qui ne sont pas affectées à absolument rien. Alors là, on a la possibilité d'affecter ces surplus-là au fonctionnement et on a également ces reliquats année après année — «reliquats» ou «revenus», je comprends que le député de Chicoutimi préfère qu'on utilise le terme «reliquats», là — qui est le cas, mais on a quand même des reliquats qui sont, d'une certaine façon, les revenus du fonds, qui sont importants. Alors, c'est simplement, pour le moment, de permettre à l'organisme...

Ceci étant dit, l'objectif de l'organisme, que l'on connaît, demeure, et les dispositions qui lient le ministre de la Justice — ou la ministre — au fonds demeurent. Alors, c'est tout simple.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement?

M. Bédard : Non, c'est sûr que je vais avoir tendance à... insister, pas insulter, évidemment, à insister, pour la raison qu'on est face à une situation qui est temporaire. Et, tu sais, j'entends beaucoup de choses : L'État ne veut pas se désengager. Or, c'est faux, il se désengage, là. Il faut voir le budget réduire de 40 %... Si ce n'est pas un désengagement, je me demande c'est quoi, là. Ce n'est sûrement pas, en tout cas, un témoignage fort à l'effet que c'est une priorité ministérielle. Donc, c'est un constat.

Puis moi, je ne questionne pas ces choix-là. Il y a une chose qui est sûre, c'est que tout le monde est d'accord avec la mission du fonds et la mission de l'organisme. Et ce qu'on veut lui transférer, c'est des problèmes qui sont vécus de façon temporaire, parce que j'imagine que, quand on va arriver à l'équilibre budgétaire, comme on a déjà eu de longues années dans le passé... Bien, on s'assure toujours d'une saine gestion, mais on ne coupe pas dans les missions des organisations qu'on pense importantes. Donc, on est face à une situation qui est temporaire dans le temps, et moi, je souhaite trouver une solution qui est temporaire dans le temps.

Et je sais ce qui va arriver : immanquablement ces budgets-là, ils vont disparaître, littéralement. C'est sûr que l'État, ministre de la Justice, va avoir des choix budgétaires, Conseil du trésor va lui envoyer quelques pressions financières en courant d'année puis il va lui dire : Il faut que tu atteignes tes cibles, puis rapidement tout le monde va mettre le doigt là-dessus, là : Woups! Bien là, on a un 500 000 $ qui traîne. Alors, ça, on va l'enlever et... parce que la mission va se financer pareil.

Or, dans le temps, ce qui va arriver, c'est qu'on va entamer le fonds de façon importante en présumant qu'il va faire des revenus, alors que ce n'est pas des revenus. Tu sais, c'est... les mots ont leur importance. Ce n'est pas... On ne peut pas muter ce qui est un reliquat, ce qui est un prélèvement arbitraire, par un règlement, comme étant un revenu. Moi, quand je facture un client, ça, c'est du revenu. Il le sait avant, il le sait pendant puis il le sait après. Là, dans ce cas-ci, on ne le sait pas, puis de présumer de l'aboutissement d'une cause, bien malin qui pourrait... Quand tu es rendu que, pour financer ta mission, tu présumes que tu vas gagner, sinon tu risques d'avoir des problèmes de financement, je pense que ce n'est pas ce qu'on veut. Ce n'est pas ce qu'on veut pour l'organisation.

• (15 h 50) •

Et honnêtement, si on parle de saine gestion, là, elle semble correspondre à des objectifs de saine gestion. Je regarde les pressions budgétaires qu'elle a eues dans les dernières années, et on me dit que les recours collectifs continuent. Je n'ai pas eu de plaintes à mon bureau de comté, donc la mission semble continuer à se réaliser en termes de financement. Ça veut dire qu'ils sont capables, dans la pression budgétaire qu'ils ont, de réaliser leur mission. Or, là, ils sont à un point, à ce que j'ai compris, qui est plus difficile, où ils manquent de ressources à l'interne pour accomplir cette mission. Alors, il faut toujours faire les bons choix. Et le temps a toute sa valeur. Moi, dans ce cas-ci, je ne vois pas l'adéquation entre les problèmes budgétaires vécus par l'organisation dans les circonstances qu'on connaît puis la destination de la loi, qui visait à quoi? À faire en sorte que ces sommes-là servent à financer des recours.

Je vous dirais d'ailleurs que, si on avait... Et je suis convaincu qu'au niveau financier — si j'ai le temps, je le ferai ce soir ou en fin de semaine — si on avait appliqué dès le départ ou même dans les 15 dernières années cette théorie à cette organisation, à ce moment-ci elle n'aurait plus de fonds. Si, dans son budget, qui était autour de 700 000 $, elle avait utilisé à chaque année le 700 000 $ pour son fonctionnement, bien, on aurait eu un problème, à ce moment-ci le fonds n'existerait pas, et on courrait après... Soit on aurait augmenté les prélèvements, peut-être... Parce que c'est ce qui risque d'arriver à un moment donné. Si les reliquats qu'on obtient ne sont pas suffisants, alors ce qu'on va faire, c'est qu'on va augmenter la portion qu'on va chercher.

Je trouve ça un peu malsain, je vous dirais. Dans l'esprit qu'a été fait le recours... a été faite la loi, plutôt, ce n'était pas la destination. Puis d'autant plus que le fonds en tant que tel a un montant qui est important principalement dû à un événement qui ne risque pas de se reproduire à court terme et qui faisait en sorte, effectivement, que les victimes ne souhaitaient pas se manifester, j'imagine, et ça a fait en sorte qu'il y a eu un montant important. Comme si quelqu'un dépensait des revenus non récurrents dans des dépenses qui sont, elles, récurrentes. En termes de saine gestion, ça, je ne recommanderai jamais ça à personne, là. Puis ce n'est pas parce que j'ai été au Trésor pendant un an et demi, là, j'ai appris ça dès ma tendre enfance, là. Si tu prends un montant de capital puis tu l'attribues à des dépenses qui reviennent sans que ta source de financement se maintienne, bien, c'est évident que tu vas pogner un mur à un moment donné. Alors, moi, je veux éviter le mur, puis en même temps je veux trouver une solution à la réalité vécue par l'organisation. Puis, avant d'arriver à une solution aussi importante qui va mener à l'affaissement du financement étatique de l'organisation, ça, je peux pas mal le prévoir sans me tromper... À moins que...

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, M. le député de Chicoutimi. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui?

M. Jolin-Barrette : Pas sur cet amendement-là, M. le Président.

Mme Vallée : Non, pas sur l'amendement.

Le Président (M. Schneeberger) : Non? O.K. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, je vais le mettre...

M. Bédard : Bien, je vais continuer. Il me reste du temps?

Le Président (M. Schneeberger) : Comment?

M. Bédard : Il me reste du temps?

Le Président (M. Schneeberger) : Oui.

M. Bédard : O.K., parfait. Non, non, écoutez, vous savez, je suis assez persévérant, c'est un peu ma marque de commerce. Et ça me rappelle le bon vieux temps, d'ailleurs, de mon premier projet de loi, en 2003, comme porte-parole en justice, c'était, je me souviens bien, sur la modification des tribunaux administratifs en plein mois de... et j'ai été le premier à être appelé ici au mois d'août sur un projet de loi qui n'intéressait pas grand monde, à part quelques experts qui voulaient changer la composition des tribunaux administratifs. Et j'ai tenu quand même un bon moment, une vingtaine d'heures, puis finalement, bien, le projet de loi n'a pas été adopté.

Vous comprendrez qu'aujourd'hui ce n'est pas mon but, parce qu'il y a des éléments du projet de loi qui sont bons, qui méritent d'être adoptés, il y en a d'autres que je pense qui doivent être améliorés. Puis il ne faut jamais s'enfermer dans une logique où on a totalement raison. Il y a toujours une partie de vérité de notre point de vue qui semble claire mais qui est peut-être moins évidente quand on regarde cette problématique dans l'ensemble.

Peut-être que la ministre peut réfléchir. En tout cas, moi, j'aurai à réfléchir dans les prochaines heures à peut-être une façon différente aussi de garantir un montant de base, c'est peut-être ça, pour éviter la pression qu'il y aura sur ce fonds. Peut-être que ça sera le prélèvement d'un montant pour une période, comme je vous disais tantôt, qui serait limitée dans le temps, ça ferait en sorte de permettre à l'organisation de continuer sans faire en sorte qu'on utilise ce qui n'est pas des revenus comme étant des revenus qu'on peut utiliser à toutes les fins.

Moi, ce que je souhaite toujours, M. le Président, c'est qu'on légifère le mieux possible dans le temps, parce qu'un jour je ne serai plus ici, vous non plus, peut-être que vous serez là plus longtemps, je vois que ça fait moins d'années que moi que vous êtes élu, malgré que François Gendron pourrait peut-être témoigner autre chose quant à la longévité... mais que ce type de loi là, qui peut paraître anodine dans le contexte qu'on connaît, peut se retourner contre une organisation, mais surtout une mission qu'on s'est donnée puis qu'on se vante, d'ailleurs... qu'est-ce qui assure d'avoir, justement, justice pour des citoyens qui, autrement, n'auraient pas de moyen de faire valoir leurs points de vue parce que soit les montants sont trop bas ou soit il y a une disproportion, souvent, des forces en présence. Donc, on est tous bien fiers, on reçoit de la visite d'ailleurs... Et moi, je veux bien voir le modèle ontarien, je veux bien le regarder, mais on me dit qu'on a le meilleur modèle, donc c'est sûr que j'ai tendance à m'y attacher, d'autant plus qu'il n'a pas créé de problèmes dans le temps.

Je ne sais pas, s'il y avait eu un vrai problème de saine gestion, par exemple, je ne sais pas, le fonds n'utiliserait pas les sommes pour les fins auxquelles elles ont été... elles sont destinées, s'il les utilisait à d'autres fins, là on serait face à un problème de saine gestion. Si l'organisation avait un personnel qui est disproportionné par rapport à sa mission, là je vous dirais : On a un vrai problème qui n'est pas lié à cet article-là, qui est plus lié à la réalité que l'administration est déficiente. On ne m'a pas représenté ça, puis je ne me souviens pas non plus d'avoir entendu parler de cette problématique.

Donc, on est tout simplement face à quelque chose de très simple : un gouvernement qui est face à une réalité budgétaire, qui répartit ses efforts un peu partout et qui choisit parfois bien, parfois mal. Dans ce cas-ci, je vous dirais, mal. En tout cas, il n'y a pas de... je n'ai pas de preuve irréfragable qui me permette de conclure autre chose, M. le Président.

Et ce n'est pas simple. Tu sais, souvent, c'est un emploi, on veut simplement faire ça. Dans ce cas-ci, ce n'est pas simple, c'est qu'on change la destination d'un fonds. Alors, ça n'a rien de simple, c'est plutôt fondamental dans l'utilisation du fonds. Si on l'a fait comme ça à l'époque, il y avait une raison simple — sûrement simple, elle — qui était bien identifiée dans le cadre du projet de loi. Et d'autant plus qu'à travers le temps ça fait des années que ce fonds-là existe et que les surplus existent aussi.

Et je ne me souviens pas, à l'époque où on était au gouvernement, que quelqu'un ait eu l'idée d'aller utiliser ces fonds-là à d'autres fins. Je ne me souviens pas. Il faudrait que je demande à mon collègue Bertrand St-Arnaud, que j'appréciais beaucoup, vous savez, un ministre de la Justice avec qui j'avais des relations très étroites comme leader adjoint. Il était aussi mon leader adjoint, tant au gouvernement que dans l'opposition. Et je suis convaincu que Me St-Arnaud m'en aurait parlé, parce qu'il m'est arrivé, effectivement, de lui demander des petits efforts. Ça, ça m'est arrivé.

• (16 heures) •

On a eu des discussions, souvent, bon, avec le Barreau du Québec pour trouver des solutions. On a regardé quelle est la meilleure façon de s'assurer de financer nos missions, mais en même temps de respecter nos grands équilibres, et je vous dirais que le ministre de la Justice était toujours très collaborateur, ainsi que sa sous-ministre qui était en poste à ce moment-là. Et cette idée-là ne m'avait été jamais proposée. Donc, c'est pour ça que j'ai une réticence qui est comme naturelle, de me dire : Il y a des bonnes idées puis... dans notre jargon on appelle ça, souvent, des fausses bonnes idées. Moi, ça m'est arrivé, ça. Souvent, ça arrive le soir, d'ailleurs, les fausses bonnes idées, où tu es convaincu que ce que tu proposes est bon. Tu te réveilles le lendemain matin, tu te dis : Hum! Finalement, ce n'est pas nécessairement le bon choix. Bien, dans ce cas-ci, c'est possible. Alors, il y a un choix qui a été proposé, moi, qui me semble ne pas correspondre à ce qu'on souhaite.

Donc, à une solution court terme, moi, je souhaite... à une problématique court terme, je souhaite une solution court terme, mais, si le fond est trop élevé — ça peut arriver, effectivement 13 millions, c'est peut-être trop à gérer — on va trouver une solution autre. Ça, moi, j'ai... Vous savez, on peut être ouverts à toute possibilité. Ce que je souhaite, c'est que, moi, le gouvernement ne se serve pas de ça pour se désengager, et je suis convaincu, convaincu que c'est ce qui va arriver.

Le monde me dira que c'est de l'argent public, entre guillemets. C'est de l'argent, donc l'argent n'a pas d'odeur, peu importe d'où il provient. Or, cette mission-là est financée à même nos impôts. Là, on dit : Ça sera à partir des reliquats. Vous voyez la logique un peu saugrenue? C'est qu'évidemment on va chercher une partie du reliquat parce qu'on se dit : Elle sert à ceux et celles qui vont utiliser leurs recours, ces recours-là, puis on ne charge pas... à moins qu'on me dise le contraire, donc... Mais là on décide autrement, on dit : Finalement, ça serait comme une forme, donc, de revenus, d'honoraires indirects. À la limite, on est presque dans les frais judiciaires qu'on se sert pour financer une mission globale sur des recours qui, dans les faits, sont souvent difficilement prévisibles tant sur le résultat que sur la répartition, évidemment, des sommes qui sont obtenues. C'est souvent de longs procès, et bien malin celui qui peut, dans un...

Vous savez, si je vais voir mon banquier et je lui dis... ma caisse populaire... Ma femme m'en voudrait si je disais «banquier». Donc, si je vais voir ma caisse et je lui disais : Mon cher ami, j'anticipe cette année de gagner à la loto, ce qui fait que ça va régler une partie de mes problèmes, je n'aurais pas une bonne écoute. Même chose si je lui disais : J'ai un recours où je pense avoir des bonnes chances de gagner, donc c'est ce qui fait que j'aimerais avoir plus d'argent. Ce type d'argument est peu retenu en matière budgétaire parce que, justement, il a un caractère imprévisible. L'effet, sûrement, retors de tout cela, encore une fois ce serait de créer une pression sur l'utilisation de ces fonds-là et des reliquats.

Comment on distribue, comment on s'assure que ces reliquats vont être utilisés ou vont être pris? Peut-être qu'un jour quelqu'un va penser : Comme c'est des revenus — c'est pour ça que le terme «revenus» m'a comme chicoté — bien, à partir du moment où il y a un règlement, bien, on se prend un pourcentage aussi parce qu'on a fourni un service. Ça pourrait être ça aussi, puis là on se financerait à partir de nos, entre guillemets, revenus. Ou peut-être même on pourrait dire que les gens doivent déposer un montant qui va servir à financer le fonds parce qu'il doit payer ses frais de fonctionnement. Donc, si vous voulez des bons services, bien, on peut facturer des montants avant pour vous permettre...

Vous voyez, cette logique-là, comment elle peut être douteuse, alors que l'objectif de la loi qu'on s'est donné au départ, c'est de faire en sorte que les recours soient ouverts, disponibles, et qu'on fasse en sorte qu'ils soient utilisés, et qu'on rende justice. Parce que, dans les faits, le but de ces recours collectifs, c'est que... Comme on le disait tantôt, c'est souvent l'impunité pour certaines grandes compagnies par rapport à des événements qui peuvent paraître anecdotiques en termes de montants mais qui, à grande échelle, sont révoltants pour les contribuables et pour les consommateurs.

Donc, la destination de la... la finalité de la loi plutôt, elle est bonne puis, on l'a vu dans le temps, elle a évidemment pour effet, puis ça, j'en suis bien content, souvent d'accorder aux victimes un dédommagement et, dans d'autres cas, comme on le voyait, de donner une leçon, une leçon, parce que la justice, elle sert aussi à ça. Elle rend justice, donc elle dit à ceux et celles qui ont utilisé des moyens qui ne sont pas conformes à la loi : Bien, voici le prix à payer. Malheureusement, on paie... On dit que, peut-être un jour, on va tout payer, là, mais il y a des choses... il y a des comportements pour lesquels il n'y a pas de sanction. Alors, la loi sur les recours collectifs le permet, puis moi, je suis bien content de savoir que le Québec, dans son modèle, a sûrement un des meilleurs modèles, qui inspire d'autres. Donc, j'ai compris, nos amis français qui s'inspirent... parfois, on s'inspire d'eux, ils s'inspirent beaucoup de nous et d'autres législatures à travers le monde. Donc, soyons fiers de ce qu'on a fait et maintenons ce bel acquis que nous avons.

Et ce qui est beau là-dedans, M. le Président, c'est qu'on peut en même temps, imaginez-vous, maintenir cet objectif qui est noble et qui est bon et en même temps rencontrer les objectifs que s'est donnés la ministre, soit celui de rencontrer les objectifs budgétaires qu'elle a à court et moyen terme, j'imagine, pour l'an prochain aussi, parce que déjà on est dans la préparation, bon, de la finalité de l'année budgétaire. Tout le monde a leur petite enveloppe surprise ou ils savent... Ils l'ont eue, normalement, c'est au mois d'août, vers la fin du mois d'août : voici ce qu'il nous reste à faire pour arriver, c'est... L'automne est le moment plus intense en ces matières. Mais j'imagine aussi qu'on prévoit à long terme, parce que, si on ne fait pas ça, moi, je suis convaincu, M. le Président, que la courbe... Si je suis la courbe de désengagement des dernières années, là, en dedans de deux ans, on arrive à zéro. Alors, on va passer d'un financement d'à peu près... à ce que j'ai compris, autour de 700 000 $ à zéro puis on va dire : Non, non, non, on ne coupe pas de services, vous avez ce fonds-là.

Le Président (M. Schneeberger) : ...

M. Bédard : Une minute? Malheureusement.

Alors, je veux éviter cela. Légiférons dans le temps. Assurons-nous de préserver cette mission puis cette destination. La loi avait été bien faite à l'époque. J'ai dit d'ailleurs pendant l'étude du projet de loi que certains articles étaient bien rédigés. Je l'ai relu, il est fort bien rédigé. Parce que des fois on lit des vieux articles puis on a le goût de les refaire. Dans ce cas-ci, je n'ai pas le goût de retravailler dessus. Il me semble que ça a été bien fait, bien rédigé. Il n'y a pas de termes qui me questionnent.

Donc, je dis à la ministre : Je lui offre la main tendue pour qu'on trouve une solution pour faire en sorte de régler son petit problème budgétaire et assurer le maintien de la réalité actuelle sur l'utilisation du fonds.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, M. le député de Chicoutimi. Alors, si je n'ai pas d'autre intervention, je vais mettre maintenant aux voix l'amendement tel que déposé par le député de Chicoutimi. Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix : Rejeté.

Le Président (M. Schneeberger) : Rejeté. Alors, nous passons maintenant... l'article 27 sous sa forme originale.

Une voix : Est-ce qu'on peut faire la mise aux voix?

Le Président (M. Schneeberger) : Est-ce qu'on peut faire la mise aux... Député de Chicoutimi.

M. Bédard : ...un autre amendement à présenter.

Des voix : ...

Le Président (M. Schneeberger) : Mise aux voix de demandée pour l'article 27?

M. Bédard : Bien, la mise aux voix, non. Excusez-moi, j'ai encore du temps. Donc, la mise aux voix, ça se fait...

Mme Vallée : Je pense que vous aviez épuisé votre temps.

M. Bédard : C'est après trois séances environ. Excusez-moi, là...

Une voix : ...

Le Président (M. Schneeberger) : M. le député de Chicoutimi, on vous écoute.

M. Bédard : Alors, l'amendement est le suivant :

Insérer au paragraphe 1° de l'article 27 du projet de loi, après les mots «ou pour assurer son fonctionnement», les mots «pour une période de cinq ans à partir de la mise en vigueur du présent article».

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, monsieur. Est-ce que vous voulez une suspension de quelques instants pour le dépôt de l'article?

Mme Vallée : Juste pour pouvoir le lire, s'il vous plaît.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui. Suspension, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 16 h 9)

(Reprise à 16 h 19)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous allons reprendre la séance et nous revenons sur le deuxième amendement de l'article 27 déposé par le député de Chicoutimi. À vous la parole.

• (16 h 20) •

M. Bédard : Oui, merci. Alors donc, lui, vous savez, ça démontre... cet amendement démontre toute mon ouverture, M. le Président. Donc, il a pour effet de limiter pour une période de cinq ans. Donc, pour les frais de fonctionnement, au moins, les effets vont être dans le temps, puis après ça on réavisera, on verra effectivement s'il y a... si on est capables, dans le temps, avec les prédictions que nous avons, de s'assurer d'un financement à long terme.

Parce que, les prédictions, je m'en méfie, M. le Président. C'est comme les prédictions des économistes qui auraient pu, hein... Il y a une belle phrase, c'est Warren Buffett qui disait que les prédictions, ça dit peu de choses sur ce qui va arriver, mais beaucoup sur la personne qui les dit. Alors, dans ce cas-ci, c'est sur qu'on va tenter d'anticiper que tout va bien se passer. Or, moi, j'ai l'impression du contraire. Peut-être que c'est moi qui est pessimiste, mais il y a une chose qui est sûre, c'est qu'on ne rouvrira pas la loi dans cinq ans si, par exemple, mon scénario se produisait. Il va arriver autre chose, on va modifier le règlement. Ça fait que je veux éviter ça, et, comme ça, le législateur sera appelé à prendre la bonne décision.

C'est sûr que, pendant le court arrêt que j'ai eu, M. le Président, j'ai... D'ailleurs, j'ai même une idée de recours à proposer. J'étais sur The Economist, où on parlait justement des constructeurs, les Dirty Secrets of the Car Industry. Je suis convaincu qu'il y a matière à recours en cette matière. Malheureusement, je n'ai pas de ce modèle, mais je suis convaincu qu'il y a des avocats actuellement qui doivent sûrement regarder ça avec beaucoup d'attention. Et, à ma connaissance, je pense, c'est le premier arrivé, le premier servi, peut-être, ou... Je connais peu sur le fonctionnement... Je n'ai jamais intenté de recours collectif, mais... Donc, il faut être quand même assez rapide sur la gâchette. Mais, de là à vous proposer, M. le Président... Un recours, c'est une chose, mais d'anticiper des retombées, des revenus pour le fonds, c'en est une autre, parce que je suis convaincu que les personnes qui vont être appelées à prendre ce recours puis à s'inscrire au recours collectif qui va sûrement avoir lieu en auront juste assez pour compenser les pertes qu'ils ont eues.

Donc, sur mon amendement, ce qu'on souhaite, M. le Président, c'est baliser dans le temps, mais je pense que c'est toujours sage de le faire pour éviter de se retrouver dans une situation où le problème n'existe plus, mais lui, l'effet moins bon, l'effet pernicieux se maintient pour une raison qui n'est plus justifiée. Vous savez, le ministère de la Justice fait plein de choix. À notre époque, je me souviens, le ministre Bertrand St-Arnaud avait beaucoup plaidé et il avait fini par gagner sur le réajustement des seuils au niveau de l'aide juridique. Et je peux vous dire que, quand il avait un morceau...

Mme Vallée : ...

M. Bédard : Ah! ça, vous savez, ça, c'est le grand mystère de la vie, hein? Et, s'il fallait qu'une obligation étatique — j'ai souvent entendu ça — une obligation réelle soit rencontrée parce que, dans le temps, on a peur de ne pas... de manquer de moyens, M. le Président, ou que les crédits n'y apparaissent pas... Dans les faits, la vie et gérer un budget, c'est des choix. Puis, à 72 milliards, il y a quand même des moyens d'avoir certaines priorités, puis je pense que l'aide juridique n'en était pas une mauvaise.

Je vous avouerais qu'il a dû me convaincre. Parce que moi-même, j'ai pratiqué dans le domaine, moins sur l'aide juridique... D'ailleurs, je ne l'ai pas fait, mais je sais à quel point c'est important pour les contribuables et ceux, évidemment, qui ne sont pas en moyen et que ces recours étaient de moins en moins accessibles. Le seul parallèle que je pourrais faire par rapport à la situation, c'est exactement ce que je veux pour les recours collectifs. Je ne souhaiterais pas qu'une décision qui n'est pas insensée, là, mais qui ne correspond pas à l'objectif qu'on s'est donné au départ se retourne contre l'objectif principal de la mission que s'est donnée le fonds, soit celui d'aider aux recours collectifs.

Souhaitons, M. le Président, que le temps fasse son oeuvre et que nous puissions trouver une façon de s'assurer que la ministre n'ait pas à annoncer de mauvaises nouvelles au président du Conseil du trésor, mais qu'en même temps elle soit capable de maintenir cette mission à long terme. Et c'est pour ça que je propose cet amendement. Il limite dans le temps, donc c'est peut-être la formule la plus simple, et c'est étonnant, parce que c'est peut-être le compromis. Normalement, j'attends avant de faire des compromis. Ça, c'est un compromis. C'est de dire : Je ne suis pas d'accord avec vous, je ne suis pas d'accord avec la façon que vous faites...

Moi, j'aurais procédé autrement, M. le Président. Je ne vous le cacherai pas, face à la même situation, j'aurais regardé d'autres avenues sachant qu'il y a des fonds de disponibles et que tout le monde semble d'accord, y incluant le conseil d'administration du fonds. Alors, à partir du moment où le fonds est d'accord et tout le monde se dit d'accord, bien, on peut discuter et voir de quelle façon on arrive à un résultat où on rencontre nos objectifs budgétaires. Là, on n'est pas là.

Et c'est sûr que, quand on parle, on a tendance à se convaincre, M. le Président. Ça m'est souvent arrivé, lorsque j'ai plaidé comme leader parlementaire, à la fin on en est... Au début, on dit qu'on a peu de chances puis, à la fin, on est outré de voir que le président ne nous donne pas raison. Dans ce cas-ci, je suis convaincu que cette modification entraînera la fin du financement du fonctionnement du fonds, qui dépendra maintenant de ses... pas du fonds, mais de l'organisation, évidemment, et qu'on considérera maintenant le fonds comme étant la seule source de revenus possible pour financer la mission.

Peut-être qu'on peut me détromper, peut-être que... On peut même arriver à un pourcentage. Ça pourrait être ça, M. le Président. On a pensé à ça, des amendements futurs, de limiter à un pourcentage la partie qui peut servir, du fonds, pour financer la mission. Peut-être que ça peut être ça? Peut-être que ça peut être aussi, M. le Président, de limiter à une partie des intérêts. Je vous dirais, seulement en lisant l'article, il y a plein de possibilités que donne cette disposition pour faire en sorte qu'on atteigne les objectifs et qu'en même temps on ne travestit pas l'intention de départ du législateur. Je vous dirais que mon imagination, en lisant l'article, s'active et je suis convaincu que je vais pouvoir proposer des modifications pertinentes qui vont faire en sorte que nous trouverons une solution.

Et peut-être que c'est moi, M. le Président, qui va finalement constater que j'avais tort. Ça peut arriver. Ça m'est arrivé rarement, mais ça m'est arrivé. Et je ne l'envisage pas pour l'instant, M. le Président, je vous dirais, et c'est pour ça que j'avais proposé à la ministre qu'elle suspende l'article. Et je vous avouerais que je ne suis pas à court de moyens, et ça me rappelle vraiment mes premières législations, c'est pour ça que j'ai...

Une voix : ...

M. Bédard : Exact. Ah non! Il faudrait d'ailleurs vous parler de mon ami Benoît Pelletier... où on a fait la loi d'accès à l'information. Il était sûr que ça allait durer 10 heures, ça avait duré 60 heures, dont 20 heures de filibuste intelligent, où on discutait, et...

Mme Vallée : ...non, non, non, jamais.

• (16 h 30) •

M. Bédard : Ah! pas là, non, à l'époque. Et là je dois le reconnaître, mais, lui-même, à la fin, on a trouvé un terrain d'entente, à la fin de l'exercice, vous irez voir ses commentaires lors de l'adoption finale, ça a été un beau moment, ce qui fait qu'on est restés en très bons termes. Mais on a regardé ce projet de loi... Moi, j'ai toujours aimé légiférer, étonnamment, puis je ne l'ai pas fait beaucoup dans les dernières années. Je l'ai fait un peu lorsqu'on était au gouvernement, pour des raisons que vous connaissez, avec principalement la loi n° 1. Mais, le reste du temps, même dans l'opposition, à la fin, je le faisais moins. Donc, ça me rappelle le temps où je lisais mot à mot et que j'essayais de voir s'il y avait, dans l'interprétation, des problématiques dans l'utilisation des termes.

Dans ce cas-ci, je vais vous avouer que les mots choisis... D'ailleurs, c'est économe de mots, donc qui fait que c'est simple. Souvent, les procédures pénales comme le Code criminel, c'est très lourd, comme on a vu dans les autres dispositions. Dans ce cas-ci, on touche une loi où on voit que le principe civiliste est appliqué, M. le Président. C'est des principes qui sont énoncés, simples, clairs, sans nuance. Et ce principe veut qu'il était simple que le fonds... l'utilisation du fonds était limitée. Il ne souffrait d'aucune ambiguïté, ce principe.

Donc, ce n'est pas que je suis réfractaire au changement, M. le Président, le changement est souvent nécessaire, mais encore faut-il y trouver les mots, les justifications et les impacts, de ces changements, à court, moyen, long termes pour éviter le phénomène que je vous parlais tantôt, de la fausse bonne idée. Si la personne responsable au niveau de l'administration du ministère de la Justice y a trouvé là une possibilité de faire des économies, peut-être, mais je ne veux pas que ça soit au prix du fonctionnement de l'organisation. Et, je regarde la présidente, ça ne sera peut-être pas dans son mandat, parce que c'est quand même long de passer à travers 13 millions, malgré qu'évidemment c'est changeant. Il y a des mouvements de trésorerie importants, c'est ce que j'ai constaté, c'est ce qu'on me disait. Il reste quand même que c'est une somme appréciable, mais, quand on légifère, on légifère dans le temps et on regarde toujours les impacts à long terme que peuvent avoir nos modifications, et, dans ce cas-ci, j'ai un doute profond que cette modification va avoir un effet pernicieux, d'autant plus que les sommes ne sont pas non plus astronomiques. Si on m'avait dit que les frais de fonctionnement de l'organisation sont, je ne sais pas, de 2 ou 3 millions de dollars, qu'il y a eu, je ne sais pas, dans les années, des événements qui auraient pu... où on aurait pu soulever un doute quant à l'administration, bien, on aurait procédé autrement dans tous les cas de figure. Puis j'imagine que le Vérificateur général nous l'aurait dit.

Donc, on n'est pas là. On est face à une organisation qui est en diminution de budget de façon importante. Puis je n'accuse personne. C'est un constat qui est froid, qui est... Les chiffres, ça, c'est l'avantage, ils sont têtus, c'est une belle expression. C'est sûr que, voir son financement diminuer de 42 % dans les dernières années, je ne peux pas conclure qu'on réinvestit. En tout cas, au moins ça, ça, c'est une assurance.

Mme Vallée : C'est vous qui avez coupé le financement en plus, en 2012-2013. C'est ça, c'est la réalité. Le financement a été coupé, dans l'année financière 2012-2013, à 419 400 $. Alors, quand vous parliez de choix... le député de Chicoutimi parlait des choix qui avaient été faits en justice, ça a été un choix, et voilà.

Mais je voulais juste, M. le Président... Je vais prendre la parole parce que je voulais juste rassurer le collègue. Il y a quelque chose que nous recevons, parlementaires, à tous les ans, qui est le rapport annuel du fonds, qui nous permet de suivre année après année le solde des actifs financiers nets à la fin de l'exercice. Donc, ça nous permet... C'est un outil qui nous permettrait d'intervenir.

Parce que, si nous devions aller de l'avant avec la proposition d'amendement qui est présentée, ça nous amène au bout des cinq ans à cette obligation de légiférer parce qu'on laisse un certain vide et ça nous amène à un devoir de légiférer alors qu'il est possible que le besoin ne soit pas présent. Par contre, à chaque année, nous avons la possibilité de suivre l'évolution du fonds, et le ministre, la ministre, a aussi cette obligation de suivre les prévisions budgétaires. Donc, ce contrôle-là prévu aux dispositions de la loi, prévu aux articles 16, aux articles 17 de la loi, donne des outils afin de pouvoir agir en amont et éviter le scénario apocalyptique qui nous est dressé aujourd'hui par le collègue de l'opposition.

Comme ça, à titre indicatif, on m'indiquait que, si nous prenions le solde du surplus cumulé dans le Fonds d'aide aux recours collectifs, qui est évalué en date d'aujourd'hui, et que nous prenions des dépenses supplémentaires à la hauteur de 500 000 $, on en aurait, sans ajouter rien d'autre, on s'entend, sans rajouter aucun reliquat, on en aurait au moins pour 22 ans et, si on devait ajouter à ces sommes-là les sommes anticipées suite aux recours sur les cigarettes, sur les cigarettiers, c'est un 8 millions additionnel. Donc, on ajouterait 16 années supplémentaires, mais tout ça, évidemment, dans un scénario apocalyptique où on n'a aucun reliquat qui entre au fonds.

Et je comprends la préoccupation de ne pas détourner, de ne pas venir porter atteinte aux objectifs qui étaient visés en 1978, et telle n'est pas notre vision, mais je pense qu'il est important aussi de rappeler qu'à l'époque on n'avait pas ces surplus importants, on n'avait pas cet actif qui, année après année, s'accumulait et donc qu'il est tout à fait normal de considérer qu'un organisme comme le Fonds d'aide aux recours collectifs puisse, à même ses revenus, assurer son fonctionnement. Et la loi ne prévoit pas d'obligation pour le ministère de la Justice de subventionner mais prévoit un accompagnement au fonds, qui est là, et qui est prévu de par la loi, et qui demeure, mais... Et c'est la situation.

Mais, oui, nous sommes dans un mandat... nous avons un mandat de redresser les finances publiques. Je pense que ce que nous faisons actuellement et le choix... Et la proposition qui est sur la table aujourd'hui, c'est une proposition qui a été demandée et entérinée par le conseil d'administration du fonds, d'une part, et c'est une proposition qui est juste compte tenu des sommes qui sont disponibles, et qui sont là, et qui ne sont pas utilisées. Et donc je pense qu'il est tout à fait opportun de le faire.

Maintenant, est-ce qu'il est possible de réagir en amont? Tout à fait, puisque nous aurons à toutes les années ce rapport annuel là qui est déposé et qui prévoit bien clairement l'état financier dans lequel se situe le fonds. Donc, ça permettrait d'agir, même, avant même cinq ans. Si d'aventure devait survenir un incident particulier, il y aurait... on pourrait voir la progression de tout ça.

Donc, ces outils-là permettent aux parlementaires, permettent au ministre d'intervenir et de pouvoir réagir pour assurer que l'organisme qui est le Fonds d'aide aux recours collectifs puisse maintenir sa mission et assurer sa mission, tout simplement.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Chicoutimi, j'aurais... je vais passer la parole au député de Borduas, étant donné que ça fait déjà un moment que...

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, je comprends les arguments, de part et d'autre, de mes collègues, mais, sur le dernier argument de la ministre, par rapport à la clause crépusculaire de cinq ans qui est proposée par mon collègue, je comprends qu'annuellement on révise, on reçoit le document, mais concrètement c'est à la discrétion du ministre d'apporter les modifications requises. Tandis qu'avec la proposition de mon collègue, avec la clause crépusculaire, ça permet aux oppositions d'intervenir aussi dans le cadre de l'étude d'un projet de loi. Donc, ce n'est pas tout à fait la même chose.

Dans le fond, la commission serait saisie éventuellement, au bout de cinq ans, là, d'une nouvelle modification législative. Donc, on pourrait s'exprimer, les oppositions. Bien entendu que nous souhaitons ne plus être, dans l'opposition, dans cinq ans, ça, c'est autre chose, mais il y a une différence entre les deux. Je comprends que l'information est disponible, mais ça ne veut pas dire qu'il va y avoir une action gouvernementale en ce sens-là.

Le Président (M. Schneeberger) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Bien, en fait, la disposition à l'amendement, tel qu'il est prévu, ne prévoit pas de référence à la commission, là. On prévoit que le fonds pourrait, pour une période de cinq ans, puiser à même ses surplus et peut assurer son fonctionnement à même ses revenus, mais pour une période de cinq ans. Donc, après l'expiration de la période de cinq ans, on n'a rien.

M. Jolin-Barrette : On retourne au régime général de base qu'on a actuellement. Donc, si jamais c'était l'intention du gouvernement de poursuivre, bien là, il faudrait se rasseoir tous ensemble. C'est une mesure de contrôle aussi de l'action gouvernementale dans ce sens-là.

Mme Vallée : Le rapport annuel est là, et c'est à ça que servent...

M. Jolin-Barrette : Mais le rapport annuel est là, c'est de l'information qui est disponible, sauf que, dans tous les cas... Le rapport annuel est disponible, on peut poser des questions à l'Assemblée, mais ça ne veut pas dire qu'on va avoir une prise sur l'action gouvernementale, c'est un peu malheureux dans notre Parlement.

• (16 h 40) •

Mme Vallée : C'est justement à ça que servent nos rapports annuels, que servent les interventions du Vérificateur général. C'est de permettre de soulever... de dresser un portrait de la situation financière des organismes aux parlementaires. Ce n'est pas pour rien que ces rapports-là nous sont déposés à l'Assemblée nationale, c'est pour permettre aux parlementaires d'être informés en temps réel de la situation et de la santé financière des organismes.

Donc, il serait tout à fait possible d'intervenir, il est tout à fait possible d'intervenir lorsqu'un rapport annuel soulève un certain nombre de questionnements, qu'il s'agisse des surplus, mais qu'il s'agisse d'autres éléments qui y sont contenus. Puis je pense que c'est tout à fait... c'est normal qu'un fonds, qu'un organisme soit soutenu à même ses revenus. C'est tout à fait normal, et d'aucune façon on ne vient modifier l'objectif et l'esprit de la loi. L'objectif de la loi était de soutenir les recours collectifs. Évidemment, là, je ne prétends pas connaître le père de cette loi autant que notre collègue de Chicoutimi puisse le connaître, non, pas du tout...

M. Bédard : ...

Mme Vallée : Non, je ne voudrais pas, mais, ceci étant, je n'ai pas cette connaissance personnelle privilégiée qu'a le député de Chicoutimi avec le père de la loi.

Mais tout ça pour dire que je pense qu'à l'origine on souhaitait assurer un meilleur accès à la justice. On permettait à David d'affronter Goliath et on permet toujours à David d'affronter Goliath, ça demeure, et l'esprit est là, mais David a un portefeuille légèrement mieux garni qu'il ne l'avait au moment de la création du fonds.

Et c'est tout simplement ça, c'est d'actualiser aussi en fonction d'une réalité qui est là. Il y a des fonds qui sont là, et on a, au cours des dernières années, oui, réduit l'aide au fonctionnement du fonds pour des raisons budgétaires, oui. Et je pense que c'est cette fluctuation-là... Peu importent les partis politiques qui ont été au pouvoir, on voit au fil des ans une fluctuation de l'aide qui a été accordée en fonction des revenus du fonds, en fonction des reliquats. Donc, ça démontre que... Et tout ça, bien, évidemment... Le fonds est un petit peu à la merci de tout ça. Alors, ça permet au fonds d'avoir une meilleure prévisibilité aussi en vue de préparer son budget et en vue de s'organiser.

Mais tout ça pour dire que la clause nous obligerait à revenir aussi, et rien n'indique que, dans cinq ans, on n'aura pas aussi affaire à un fonds... à un surplus important, parce que, selon les scénarios qui sont devant nous, on anticipe des surplus importants.

Je comprends que le collègue de Chicoutimi dit : On ne doit pas prévoir ou faire ses prévisions financières à la lumière des chances de succès d'un dossier, mais je vous dirais à la blague que bon nombre d'entre nous qui avons pratiqué avons travaillé de cette façon-là. Les revenus n'étaient pas toujours les mêmes en fonction du succès des dossiers.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, Mme la ministre.

M. Bédard : ...donc, dans ce cas-ci, on est comme à pourcentage. Et moi, j'invite la ministre à ne pas employer le terme «revenus». Ce n'est pas des revenus. Ce n'est pas des revenus, c'est un reliquat, et, pour moi, c'est fondamental, ça, parce que... Et moi, je suis même inquiet pour la suite. Ce n'est pas...

Il y a deux possibilités sur l'utilisation du fonds, mais il y a aussi sur le désengagement à partir des fonds purement publics. Je pense qu'il n'y a rien, dans le contexte actuel, qui peut nous justifier à faire ces choix-là puis nous enfermer dans une logique qui est celle où l'organisation, tout d'un coup, qui est face à des compressions, n'a plus de compression. C'est ce que je vois. Parce que je peux faire la projection de 500 000 $, mais, dans les faits, le budget de fonctionnement était plus peut être de 550 000 $, peut être de 600 000 $, et là tout va changer en fonction du montant qu'on met.

Et ce que j'ai compris des représentations de la directrice, c'est que le nombre d'utilisations... c'est ça, donc, l'utilisation de ce fonds est en augmentant. Puis, ce que je vois des nouvelles, effectivement ça peut arriver. Donc, il va y avoir une pression à l'interne sur les ressources. Puis c'est correct, parce qu'il ne faut surtout pas faire en sorte que les pressions financières diminuent, je vous dirais, le support, le financement de recours aussi importants, puis qui répondent à un objectif purement budgétaire.

Et ça devait être ça, l'esprit, à l'époque, d'ailleurs, qui a guidé... Je vous avouerais que je ne profiterai pas de la fin de semaine pour demander l'intention du législateur, mais je suis convaincu qu'à la lecture du texte c'est pas mal ça. Et ce texte-là, il ne souffre pas beaucoup d'ambiguïté, c'est ce que je disais tantôt. Si on avait voulu que le fonds se finance dans son fonctionnement, on l'aurait inscrit.

Alors là, on modifie, donc on ne peut pas dire qu'on ne modifie pas, on sait qu'on modifie au-delà des raisons. Là, ce que propose, je dis : Cinq ans. La ministre dit : Vous avez les rapports annuels. O.K., mais moi, je suis dans l'opposition, et mettons que c'est le député de Borduas qui est de l'autre côté, il va faire face aux mêmes pressions financières, puis mettons que c'est la ministre qui est de l'autre côté, elle va dire : Bien, moi, je ne veux plus le financer. Pensez-vous vraiment qu'elle va proposer un projet de loi qui va être adopté et qui va aller à l'encontre de ce qu'on vient de faire? Bien non. C'est sûr qu'on vient de figer ça dans le temps, là.

C'est évident que l'inverse ne se fait pas dans notre beau Parlement. Vous essaierez, M. le député, M. le Président, de déposer un projet de loi puis de le mener à terme. J'en ai fait un à la dernière session, c'était le projet de loi sur Nelson Mandela, la journée Nelson Mandela. J'avouerais que c'est à peu près ce que le Parlement nous permet quand on est dans l'opposition, une journée comme ça, mais c'est rare qu'on fait adopter un corpus législatif réel de modifications. Et c'est un peu un des problèmes de notre Parlement, je pense. Souhaitons qu'un jour, s'il est modifié... C'est bien d'avoir des éléments liés à la tenue des membres et à leur façon de s'exprimer, mais moi, j'aimerais bien que les législateurs aient un réel pouvoir. Je pense que ça ferait en sorte que le rôle des députés serait réellement valorisé. Quand tu es capable, dans le cadre d'un mandat de quatre ans normal, de déposer un projet de loi puis de le faire adopter, pas rien que de le déposer, puis faire une conférence de presse, puis après ça de t'endormir avec, ça te sert comme oreiller.

Ça, je trouve ça tellement désolant. Des gens qui ont travaillé, moi, j'en ai vu, très fort, faire la conférence de presse, si ça tombe une mauvaise journée où quelqu'un est décédé d'important, bien, il ne passe pas, puis après ça tout ce qu'il lui reste, c'est celui d'avoir déposé le projet de loi. C'est assez incroyable, hein? Et c'est le fait que notre Parlement, malheureusement, a mêlé l'exécutif et le législatif. Ça fait en sorte que les députés qui ne sont pas dans l'exécutif ont un pouvoir qui est plutôt bénin. Ceux qui ont le plus de pouvoir, il faut le dire, c'est l'opposition, par rapport aux députés qui sont ici, parce que nous, on a du temps. La seule arme qu'on a réellement pour essayer de convaincre, comme on n'a pas la force du nombre, il nous reste le temps. Imaginez-vous! Alors, ça fait en sorte qu'on doit l'utiliser à bon escient en voyant des dispositions comme ça et éviter de penser que, si on souhaite l'inverse dans cinq ans, bien, on va être capables de présenter un projet de loi qui va avoir l'effet contraire. Vous et moi, on sait que ça n'arrivera pas, en tout cas, pas à moins d'une grande réforme où on adopte au Québec un régime présidentiel où, là, on aurait une véritable séparation des pouvoirs, un président d'un côté, qui nomme son exécutif, et une vraie législation, peut-être deux chambres, comme aux États-Unis. Je trouve que c'est un bon système de contre-pouvoir, de «check, balance», ce qu'on n'a pas ici.

Ceci dit, je ne suis pas là pour vous réformer tout le système mais pour vous expliquer que je sais très bien qu'à l'inverse on aura un problème. J'ai beau lire le rapport, c'est évident que je ne serais pas capable de modifier la loi. Et il y aura toujours dans notre beau monde des pressions financières.

Alors, on revient au choix. On n'en a pas, de problème, puis il y a une belle phrase qui dit — ça, je l'aime bien — tu sais, on ne doit pas réparer ce qui n'est pas brisé. Ça a été adopté en 1978, ça fonctionne bien. Ce qu'on a, dans les trois ou quatre dernières années, on a une pression financière, puis là on changerait parce que tout d'un coup on a une pression financière. Moi, ça me... c'est sûr que j'ai une résistance, là, normale, naturelle.

Là, je me dis : Bon, il y a plein d'autres solutions possibles, puis là j'en propose une. Le cinq ans, moi, ça me semblait le plus simple, parce que... En même temps, je donne raison à la ministre, même si je ne suis pas d'accord, mais je lui dis : Si vous avez vraiment raison, bien, dans cinq ans vous allez devoir présenter un même projet de loi. Et je pense que ça aura un bon effet. Ça ferait en sorte que le rôle, au moins... les gens de la commission se reverraient, peut-être qu'un jour, un moment donné, quelqu'un dirait : Pourquoi on adopte cette disposition-là?, comme je viens de le faire, puis il dirait : Ah! à l'époque, ils ont fait ça, il y avait une clause crépusculaire, et maintenant on veut voir si, effectivement... du côté de l'opposition, est-ce que ce qu'on a projeté se réalise. Est-ce que les projections de reliquats ont été rencontrées? Est-ce que les projections de fonctionnement ont été rencontrées?

• (16 h 50) •

Parce que je veux bien lire le rapport annuel ou aller en crédits, M. le Président. J'ai vu aux derniers crédits, d'ailleurs, que mon collègue avait questionné la ministre. Vous comprendrez que ce n'est pas ce qui a retenu l'attention, ça n'a pas fait la première page, puis je n'ai pas senti qu'il y avait... il n'y a pas eu de modification dans les budgets accordés, à travers les crédits, à l'organisation. Il y a eu un commentaire de mon collègue, qui a mentionné qu'il trouvait que cette coupure était importante, puis on lui a dit quelque chose comme que la réduction est prise à même le surplus accumulé, qu'on ne peut pas... qu'il n'y aura pas d'impact sur les services par le fonds d'aide. Or, je dois vous avouer que c'est sûr que, quand il y a moins de ressources, puis tu as une augmentation de la demande, je ne sais pas si on peut qualifier ça d'impact, mais il va y avoir un effet. Disons, c'est le bon terme que je vais prendre, ça va avoir un effet, et, ce que je dois comprendre, dans le temps il va y en avoir plus, de demandes.

Ça fait que moi, je veux simplement m'assurer que, si on change quelque chose, c'est de la bonne façon puis qu'on ait le dernier mot, ou les législateurs, sur ce qui nous revient, d'ailleurs. Le reste, administrer le budget, ça appartient à l'Exécutif, ça appartient au ministre pis au président du Conseil du trésor. Mais, pour ce qui est de la législation, ça, ça nous appartient, puis, avant de laisser passer un morceau comme ça... je ne veux pas dire «un petit» parce que ça reste important, mais c'est sûr que, dans le corpus législatif qu'on a, ce n'est peut-être pas la pierre angulaire, là, qui va faire en sorte que tout le château va s'écrouler, là. On n'en est pas là. Où est-ce qu'on est, c'est dans quelque chose, moi, qui m'apparaît somme toute pernicieux et qui peut avoir des effets à long terme qu'on ne souhaite pas. Donc, je veux l'éviter, tout simplement.

Et j'essaie de rendre service à la ministre, parce qu'un jour elle n'occupera plus ce poste. On passe dans le temps, il y en a d'autres. Peut-être qu'un jour elle va se dire : J'en ai vu, moi, de mes anciens collègues, de dire : Eh que je n'aurais pas dû faire ça! J'en ai vu, malheureusement : Eh que je n'aurais pas dû faire ça. On est dans un environnement où on a... bon, on a de la pression, on a des impératifs puis, en même temps, on a toujours la balance des inconvénients, tu sais, entre ne pas faire ou faire ce qui nous est demandé. Bon.

Alors, dans ce cas-ci, j'aide la ministre, je lui dis... Je lui trouve une solution. Je suis quand même... Effectivement, d'ailleurs, c'est mon tempérament, être gentil. Je suis content, l'exercice en commission me permet de le démontrer. Au salon bleu, ça n'a pas toujours été clair, je l'avoue, mais, au salon... ici, en commission, ça montre une autre facette. Si la ministre, d'ailleurs, avait assisté à la rédaction du code d'éthique, à l'époque, c'était un beau moment.

Mme Vallée : ...

M. Bédard : Oui, en partie, c'est vrai. Bon, on a eu plusieurs... effectivement.

Mme Vallée : Je présidais, d'ailleurs.

M. Bédard : Ah! c'est ça, effectivement, avec mon collègue Jacques Dupuis, puis, à la fin, avec le leader actuel, je pense, et avec Me Sormany, qui était... On était entre bonnes mains. Et je pense qu'il n'y a pas un article qui n'a pas été modifié trois fois, qui a fait en sorte qu'on a eu quelque chose qui rencontrait le consentement de tous.

Alors, j'offre à la ministre encore une fois ma collaboration. Puis le but... J'ai déjà, par mon amendement, je vous dirais, reconnu que je n'ai pas raison sur le fond. Je lui donne raison sur le fond. Par contre, je lui demande : Dans le temps, est-ce qu'elle a raison? Alors, je lui demande de prendre un pari, tout simplement. Et je suis sûr que les gens qui sont ici seraient contents de savoir qu'on pourrait passer à d'autres articles, et, celui-là, elle pourrait livrer ce qu'on lui est... ce qu'elle souhaite faire et, j'imagine, aussi ce qu'on lui a demandé, mais elle le fait de consentement évidemment, et, en même temps, de protéger ce qui, dans les faits, était quelque chose de bien.

Puis ça nous donnera le temps de regarder ce qui se fait en Ontario, mais, en même temps, j'ai toujours une méfiance, moi, de toujours copier ce qui se fait ailleurs. Si on les interrogeait, ils auraient toujours... Peut-être, ils viendraient puis ils pourraient nous dire qu'il y a des effets pernicieux à cela parce que ça crée une pression sur les revenus, alors... sur les revenus! Eux, je ne sais pas si c'est des revenus. D'ailleurs, je ne sais pas s'ils facturent les gens... s'ils facturent plutôt à même ce qui est... Là, il faut aller voir le fonctionnement global. Des fois, c'est bien différent. Ça fait qu'avant de faire une importation de ce qui se passe ailleurs je nous invite tous à la prudence. Et nous avons un bon projet de loi, intéressant, et c'est sûr que je suis le premier ici à souhaiter que nous puissions passer à un autre article, parce que celui-là est intéressant, mais ce n'est pas le plus intéressant de l'ensemble du projet de loi, M. le Président.

Malheureusement, je crois que vous allez me dire que mon temps est terminé.

Le Président (M. Schneeberger) : Exactement. Vous avez tout compris. Alors, est-ce qu'il y avait d'autres interventions au niveau de l'amendement? Ça va?

Alors, nous allons passer au... mettre le deuxième amendement aux voix. Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Vallée : Rejeté.

Le Président (M. Schneeberger) : Rejeté.

M. Bédard : Pour. Évidemment, vote par appel nominal.

Le Président (M. Schneeberger) : Vote nominal, oui. Rejeté, oui. C'est bon? Rejeté?

Une voix : ...

Le Président (M. Schneeberger) : Oui. O.K. On va nommer les noms, alors.

La Secrétaire : M. Bédard (Chicoutimi)?

M. Bédard : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Mme Vallée (Gatineau)?

Mme Vallée : Contre.

La Secrétaire : M. Boucher (Ungava)?

M. Boucher : Contre.

La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

M. Hardy : Contre.

La Secrétaire : M. Rousselle (Vimont)?

M. Rousselle : Contre.

La Secrétaire : M. Proulx (Jean-Talon)?

M. Proulx : Contre.

La Secrétaire : M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier : Contre.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, l'amendement est rejeté. Alors, nous allons maintenant... revenons maintenant à l'article n° 27 dans sa forme initiale. Est-ce qu'il y avait d'autres...

M. Bédard : Oui, un autre amendement, qui risque de ressembler au dernier mais que la période va être différente.

Alors, à l'article 27 : Insérer au paragraphe 1° de l'article 27 du projet de loi, après les mots «pour assurer son fonctionnement», les mots «pour une période de trois ans à partir de la mise en vigueur du présent article».

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous allons suspendre quelques instants pour le dépôt de l'amendement.

(Suspension de la séance à 16 h 56)

(Reprise à 17 h 20)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, bonjour. Nous reprenons la séance. Nous en étions à un troisième dépôt d'amendement sur l'article 27, déposé par le député de Chicoutimi. Alors, député de Chicoutimi, à vous la parole.

M. Bédard : Oui, merci. Je ne vous dirai pas que je suis content de reparler, mais je dois le faire. Donc, ça me fait plaisir. Et j'ai eu le temps de réfléchir à... parce qu'on me donnait l'exemple de l'Ontario. Là, je veux le dire à la ministre, j'ai peut-être une solution pour elle. Elle disait : Prenons l'exemple de l'Ontario. Je suis allé vérifier en Ontario, pas dans cette loi-là — là, je n'ai pas eu le temps, je vous avouerais — je suis allé vérifier leur situation budgétaire et je crois que cette année ils ont anticipé un déficit de 8,5 milliards de dollars. Alors, je propose à la ministre : Comme on est... on est comme en Ontario, faisons comme les Ontariens. Alors, je propose à la ministre de maintenir le financement et peut-être de l'augmenter au niveau des besoins, puis on fera un petit astérisque sur l'équilibre budgétaire, et ça va me faire plaisir, et là on pourra dire : On fait comme les Ontariens. Voyez, c'est une des solutions que j'ai proposées, mais c'est peut-être la plus compliquée, je vous avouerais, parce qu'elle aurait trop de gens à convaincre.

Or, l'amendement qui est déposé, qui peut être amendé, je vous avouerais, je ne suis pas... Je suis ouvert à des sous-amendements. Vous savez à quel point je ne suis pas amoureux de mes textes. Je suis conscient que, comme tout le monde, quand on les distribue, bien, ils peuvent être améliorés. Mais je suis convaincu qu'on peut trouver une solution qui va permettre de rencontrer les objectifs de tout le monde, puis, en même temps, si je peux me permettre de revaloriser un peu le rôle du Parlement ici, ce sera une petite contribution, M. le Président, dans le cadre de ce projet de loi.

Ça m'est arrivé, je vous dirais... D'ailleurs, je vais avoir d'autres amendements. Il y en a un, entre autres, sur la mise en vigueur qui va... qu'on va regarder, et, à un moment donné aussi, il va falloir se parler aussi des amendes, je vous dirais, sur lesquelles j'imagine que la ministre a réfléchi aussi, pour trouver quelle est la meilleure façon de trouver... je vous dirais, d'en arriver à une solution qui corresponde à notre historique puis en même temps aux objectifs qu'on se donne de s'assurer que tout le monde respecte la loi.

Dans ce cas-ci, M. le Président, c'est beaucoup plus simple, parce que la ministre souhaite un amendement à la loi, que je lui donne — c'est ça, le pire, c'est rare que je casse aussi rapidement — mais je lui donne en lui disant : Bien, il y a une limite de temps. Je lui donne une limite de temps et, bon, j'ai trois ans, ça peut être quatre, ça peut être cinq. Je lui ai offert cinq, malheureusement... Mais je suis ouvert à discuter, évidemment pas 10 ans, parce que j'aimerais quand même que les parlementaires aient un petit historique, là, et, en même temps, on verrait l'évolution d'une organisation qui est importante puis qui est un peu mystérieuse pour un peu tout le monde, hein? C'est comme des organisations qui sont en marge, qu'on va peu voir, puis, comme elles ont des budgets pas énormes, je vous dirais... je ne dirais pas «pas importants», parce que des centaines de milliers de dollars, pour tout citoyen, ça reste des montants importants, mais qui sont souvent méconnues, alors qu'elles ont une mission qui est très intéressante.

Tout ça pour vous dire que ce serait une belle occasion, puis, en même temps, elle pourrait se vanter auprès de son leader qu'elle a trouvé une solution, qui n'est pas ce qu'elle souhaitait, qui n'est pas ce que le comité de législation lui avait proposé, mais qui reste quand même quelque chose de, somme toute, correct dans les circonstances et qui va s'assurer que l'organisation va être capable de fonctionner sans être tributaire de son financement en totalité par le ministère de la Justice.

Donc, à un problème temporaire, trouvons une solution temporaire. Si on pense dans le temps qu'au contraire, ce fonds, qui existe, qui a été créé pour les raisons qu'on connaît et auquel on veut donner une destination qui est différente, bien, si on voit dans le temps, effectivement, dans cinq ans, on est rendu, je ne sais pas, moi, à 18, 20 millions, que, seulement à partir des intérêts, on aurait quelque chose de bien, peut-être qu'on sera... on sera peut-être ailleurs à ce moment-là. Mais moi, je ne peux pas anticiper ça. Puis anticiper le mieux, c'est toujours le pire, hein? J'ai toujours tendance à faire le contraire, M. le Président, moi, parce que gérer le mieux, là... Vous comprenez à quel point c'est facile, ça, gérer le mieux? Quand tout ce que tu as prévu arrive puis même ce que tu as anticipé de plus beau arrive, c'est-u facile, hein? Dans ma vie, ce qui m'est arrivé, c'est souvent le contraire ou entre deux. Ça fait que j'ai tendance toujours... pas parce que je suis pessimiste, mais parce que c'est plus facile de gérer quand tu anticipes le pire.

Puis, dans ce cas-ci, c'est que ce qu'on propose n'est pas définitif. C'est la beauté. Des fois, on doit comme trancher au couteau : voici où est la justice. Tu sais, les juges sont obligés à ça. Des fois, ils décident entre les deux. Dans ce cas-ci, ça serait comme un jugement à la Salomon, où on donne raison à la ministre, mais pas tout le temps, dans un temps déterminé, qui n'est quand même pas mauvais en soi. Et je suis convaincu que ceux et celles qui ont d'autres choses à faire... Parce que, si on était tous facturés à l'heure, c'est sûr que ça coûterait cher, hein, les heures qu'on passe ici. Donc, on pourrait tous vaquer à d'autres choses et adopter le reste du projet de loi avec... Évidemment, on va faire une étude attentive et, je vous dirais, avec beaucoup de... dans les détails pour s'assurer que l'intention du législateur, qui est ceux et celles qui sont autour de cette table, soit rencontrée.

Donc, pourquoi trois ans? La première raison n'est pas... je vous dirais, elle ne vous surprendra pas, c'est parce qu'on a rejeté cinq ans. Si on avait, M. le Président, donné notre accord à cinq ans, bien, c'est sûr qu'on n'en serait pas là. Pourquoi trois ans? Bien, je vous dirais que le trois ans, quand j'y pense, c'est peut-être un petit peu problématique, parce qu'il devrait correspondre presque de façon... ça dépend à quel moment le projet de loi va être en vigueur, mais, de façon presque concomitante, avec l'élection. Maintenant, on est à date fixe, donc on a la date exacte. Je pense que c'est autour du 12 octobre, la prochaine élection générale, quelque chose comme ça, deuxième semaine d'octobre. En tout cas, peu importe, là. Dans le calendrier, si on avait un calendrier à portée de la main, on pourrait se le dire. Donc, trois ans.

Je vous avouerais que je préférais cinq ans. Souvent d'ailleurs, le cinq ans, on l'emploie pour les révisions de certaines lois : loi d'accès à l'information, justement cette réforme que j'ai eu la chance de faire avec... d'écouter et d'entendre avec monsieur... avec Benoît Pelletier... Et il y avait un légiste avec lui, j'ai oublié son nom, un homme d'une mémoire extraordinaire. C'est une des lois les plus complexes en termes de... par rapport aux dispositions, ce qu'elles visaient. Et, à la fin, on avait fait un exercice... Je vous raconte ça, mais je veux en venir à l'article du trois ans. Dans la mise en vigueur, évidemment, je ne laissais aucune marge de manoeuvre au ministre. Il ne pouvait pas suspendre l'application des articles. Il y avait une date butoir pour chaque article du projet de loi. Je pense qu'il y en avait pas loin de 200. Alors, à la fin, de mémoire, il a pris l'article de mise en vigueur, seulement que les numéros d'article, il était capable de nous dire, chacune des dispositions, elle concernait quoi et pourquoi elle entrait en vigueur à ce moment-là comme étant la date butoir. Et je m'étais toujours dit, malheureusement, que j'allais garder ce nom-là en mémoire puis, quand j'allais revenir au gouvernement, j'allais m'assurer qu'il soit dans mes équipes, parce que je me disais : Quel légiste formidable! Et malheureusement le temps a fait que j'ai duré un peu trop longtemps à l'opposition. Donc, quand je suis arrivé au gouvernement, je n'ai pas retenu son nom. Mais j'ai été entouré par contre, je dois le dire, de légistes d'une très grande qualité. Donc, il ne m'a pas manqué.

• (17 h 30) •

Et, c'est drôle, il l'avait fait sans que je lui demande, parce qu'il m'est arrivé, imaginez-vous... Quand on dit que le Parlement doit être valorisé, quand on a adopté le DPCP, ça, c'est un événement malheureux du Parlement, on avait déterminé qu'un monsieur en particulier allait être DPCP, le premier. Je vous le dis, ça pourra vous servir pour la suite, c'était le fonctionnaire qui était sous-ministre à l'époque. Et le projet de loi a été adopté comme ça, avec l'article qui disait : Pour la première nomination, ça sera le sous-ministre. Bien, savez-vous ce qu'ils ont fait lorsqu'ils ont mis en application le projet de loi? Et le dernier article, c'était un article de mise en vigueur normal, qui disait : La loi entre en vigueur par décret du gouvernement. Eh bien, ils ont mis en vigueur l'ensemble de la loi. Ils ont isolé les termes spécifiques, dans cette disposition, qui identifiaient le sous-ministre en question comme étant le premier DPCP. Ça, je n'en suis pas revenu, M. le Président.

C'est dommage parce que le ministre de la Justice de l'époque, c'est quelqu'un que j'estimais beaucoup, M. Marcoux. J'imagine — et là, comme il n'est pas ici, je peux nommer son nom — on a dû lui tordre un bras. Je ne lui ai jamais demandé, d'ailleurs, même... parce qu'on a toujours eu des bonnes relations ensemble. Mais ça m'a donné deux leçons. La première, c'est que, même quand on donne... quand on adopte des articles ici, ce n'est pas final. Mais le deuxième, c'est que... Dans les faits, je n'avais qu'à moi à m'en prendre, parce que le texte permettait effectivement cette exception, donc, de suspendre un bout de phrase de mise en vigueur. Et là, quand tu es face à ça, ameuter les journalistes sur un DPCP, on sait à quel point... Ce n'est pas fondamental, le DPCP, c'est seulement celui qui ordonne les mises en accusation. C'est quand même... Et ça avait soulevé un intérêt, je vous dirais, qui était... dans la presse judiciaire, mais de façon quasi anecdotique. Donc, je me suis dit : Ça n'arrivera pas.

Alors, chaque projet de loi que j'ai adopté par la suite et les mises en vigueur, il y avait toujours une date butoir qui permet de déterminer... peu importe que fait le gouvernement, il y aura une date butoir de mise en vigueur de l'article. Donc, le gouvernement n'aura pas à suspendre l'application d'un texte qu'on a voulu ou d'un bout de texte qu'on a voulu, chose que je pensais illégale, mais le législateur peut... pas le législateur... l'Exécutif a des pouvoirs à ce point qu'il peut suspendre des mots d'un projet de loi. Donc, je vous le dis à titre de gouverne.

Ça n'ajoute pas grand-chose à notre débat par contre, qui est celui de souhaiter que nous limitions dans le temps l'application de cet article. Pourquoi j'insiste autant? Parce que je pense que c'est la bonne chose et... Il faut toujours être animé du doute de dire, bon : Est-ce que ça pourrait être différent? Et c'est pour ça que je cherche différentes façons d'amender le projet de loi, mais je pense que la limite de temps reste encore la meilleure. Il y aurait celui du pourcentage, j'en ai parlé tantôt, qu'on a préparé, qui pourrait être celui de dire à l'organisation : Vous ne pouvez pas financer plus que tant de pourcentage de votre mission de. Ça pourrait être ça. Et ça, ça éviterait l'effet que je vous dis, où 100 % du financement de l'organisation dépendrait du fonds, ce que je ne souhaite pas, et c'est ce qui va arriver. C'est ce qui risque d'arriver et c'est... Bien, c'est ce qui va arriver, je pense, sans le moindre doute. Donc, il ne doit pas être à la merci de ce que génère le fonds à partir de poursuites qui ont obtenu un résultat positif et d'un reliquat sur lequel on prend un pourcentage.

Je n'ai pas questionné la grille, mais c'est sûr qu'on pourrait tous dire : Ça pourrait être autre chose. Ça pourrait être des pourcentages moyens. Si les fonds sont trop importants, bien, peut-être que, justement, ce reliquat n'est peut-être pas le bon. Ça, je ne le sais pas, je ne suis pas allé jusque- là. Ce n'est pas une question que je me suis posée, mais, à la limite, ça va peut-être être ça. Parce qu'au départ ce n'était pas ça, la finalité, ce n'était pas de créer une fondation, là, c'était de s'assurer qu'on finance adéquatement la mission de l'organisation puis qu'on puisse soutenir ceux et celles qui utilisent les dispositions de la loi. Et, depuis ce temps-là, bien, on a fonctionné avec un régime qui a donné des résultats qui sont reconnus par tous ici, au Québec, et à travers le monde par les praticiens. Je n'ai jamais vu personne me dire que notre système était archaïque ou qu'il ne rencontrait pas les objectifs qu'on s'est fixés.

Par contre, j'ai vu... Je me souviens, lors de l'adoption du Code de procédure civile, il y a eu... qui s'est fait en plusieurs étapes, là. À un moment donné, j'ai été porte-parole, il y a eu un rapport qui a été déposé dans les années 2010, pour mener à son adoption en 2014, lorsqu'on était au gouvernement, mais il y a eu beaucoup d'étapes... 2009, je pense, et il y avait des modifications aux recours collectifs. Bon, il y avait certaines parties qui trouvaient qu'il y avait des conséquences, pour eux, importantes, évidemment plus du côté de ceux et celles qui se défendent.

Ceci dit, personne ne remet en cause la finalité, c'est une bonne chose de permettre cela. C'est une justice qui est accessible pour tous. Certains reprochent que, bon, il y a... des avocats, souvent, vont être les grands gagnants de ces procédures, mais c'est des procédures souvent très complexes, avec... Je n'en ai pas fait, mais je voyais... On avait eu, chez nous, la procédure qui concerne... bon, suite au déluge, aux événements de 1996, et, je peux vous dire, bon, ça amène, dans ce cas-ci... dans ce cas-là plutôt, il y avait eu beaucoup de témoins experts... Même des témoins en tant que tels, les retrouver, les faire témoigner, ça amène beaucoup de travail, de la part des avocats, là-dedans. Ce qui fait que c'est une spécialité en soi, là. Il y a comme un... C'est un secteur de pratique qui s'est développé pour des gens dans le domaine. Puis je ne m'y risquerais pas, moi qui étais plutôt avocat... je le suis toujours, mais avocat en relations de travail, droit qui a l'avantage d'être plutôt statique dans le temps, avec quelques modifications. Mais le principe demeure, un congédiement reste un congédiement. Et voilà.

Donc, ce que je souhaite de la part de la ministre... C'est sûr que le temps s'écoule. Il n'est que 17 h 35. J'aurais souhaité un peu plus d'ouverture, mais... Il y avait une phrase qui disait — bien qu'étant pour un État laïque — que la grâce frappe on ne sait jamais quand, M. le Président. Donc, des fois, il faut l'attendre. Alors, je suis condamné à attendre dans les prochaines minutes, et j'espère ne pas être obligé d'utiliser la motion d'ajournement à un moment donné pour permettre à la ministre d'y réfléchir. Parce qu'on a d'autres dispositions qui sont intéressantes et qui méritent aussi d'être étudiées. Mais c'est sûr que, cette disposition, j'y tiens. Puis moi aussi, j'ai besoin de temps pour y réfléchir, pour voir est-ce qu'il y a d'autres solutions.

Et le problème quand on s'embarque dans une procédure d'amendement, c'est que le dialogue, comme vous voyez, est plus difficile. La chance que j'ai, c'est que je n'ai pas beaucoup besoin d'interventions pour m'inspirer, quand on est face à une disposition de cette nature-là. En soi, là, je peux, de façon circulaire, là, mais assez longtemps, en discuter. Puis, des fois, ça nous éveille à des choses qu'on n'avait pas anticipées, M. le Président. Et c'est un exercice que je n'avais pas fait depuis longtemps, mais qui est au coeur...

Une voix : ...

• (17 h 40) •

M. Bédard : ... — non, non — mais qui est au coeur de notre système, et qui n'a rien de dilatoire, et qui vise plutôt à s'assurer qu'on légifère correctement, et qu'on ne fasse pas d'erreur. Parce que c'est une disposition anodine dans un projet de loi qui a un impact difficilement mesurable dans le temps. Alors, dans les faits, notre réflexe, ça serait de s'en détourner, puis : Il y a des gens plus compétents que nous, législateurs, pour s'en occuper. Bien, moi, je ne délègue pas ça. Comme on dit en latin, là, delegatus non potest delegare. Alors, je ne déléguerai pas ce qui m'a été délégué. Et, dans les faits, c'est un droit qu'on m'a donné, puis c'est peut-être le droit le plus important, c'est de légiférer sur mes concitoyens. C'est un droit ultime dans notre société, ça. On ne sait pas à quel point ce droit-là est fondamental.

Puis, quand, des fois, je vois la Loi du ministère du Revenu, je me dis : Il y a des législateurs qui l'ont abandonnée. Quand on voit sa complexité, son incompréhension et le fardeau qui est sur les pauvres contribuables... Je veux dire, à un moment donné, face à la complexité, on a délégué notre responsabilité. Et, à chaque fois que j'ai un citoyen qui vient chez nous, puis avec... que ce soit au niveau du système des présomptions, mais évidemment du fait que, même quand tu contestes, tu as tort et que... J'ai même vu, moi, un sous-ministre du Revenu venir me plaider en commission, il demandait la suspension d'un article qui semblait bénin, pas de cette nature-là, mais d'une autre nature, qui était, M. le Président... Ah! c'est un article de la Loi d'accès à... non, Protecteur du citoyen, là... Non! consommateur, voilà, protection du consommateur. Et, l'article, à sa lecture, ce n'était pas déchiffrable pourquoi on suspendait l'application de cet article. On se met à chercher, c'est un paragraphe. Même le ministre de la Justice, qui était M. Marcoux, n'avait aucune idée, fait descendre le sous-ministre. Bien, il nous dit : C'est la loi sur... c'est la disposition qui concerne le harcèlement. Tu sais, on avait une loi qui empêchait une société de crédit de vous appeler plus qu'une fois. À partir du moment où vous lui disiez, au téléphone, par lettre : Vous devez me poursuivre, cessez de me harceler, ils n'avaient plus le droit de le faire, sous peine... Bien, le ministère du Revenu est venu nous représenter que lui ne devait pas se voir appliquer cet article-là parce que, lui, quand il continuait à intercéder auprès des gens, c'était pour leur bien, parce qu'ils devaient de l'argent, puis, comme il y avait beaucoup de pénalités, il fallait qu'il leur permettre de continuer à harceler. C'est drôle, hein? Eh bien, on ne l'a pas adopté. Vous comprendrez qu'après trois séances tout le monde a dit : Bien, ça ne marche pas. Et, même du côté libéral...

Alors, ça vous démontre que, des fois, dans les détails, il se cache des choses. Et, dans ce cas-ci, ce n'est pas un détail. On est au coeur de la loi, on est au coeur de ce qu'elle représente et on peut seulement anticiper sur le futur qu'est-ce que ça va avoir comme résultat. Et là-dessus ce que je demande à la ministre, c'est de nous donner le temps, à nous, législateurs, de bien évaluer, dans trois ans dans ce cas-ci, dans quatre ans peut-être, ou mieux dans cinq ans, l'impact de cette disposition sur le fonds et sur les services donnés aux justiciables.

Le Président (M. Schneeberger) : Merci, M. le député de Chicoutimi. Est-ce que j'ai d'autres interventions?

Mme Vallée : En fait, vous savez, M. le Président, je pense que ce qui est important ici, dans le projet de loi, c'est de permettre au fonds d'aller chercher cette source de revenus là, qui est là parce que... et d'éviter de recourir notamment à l'article 43 et... surtout l'article 44, pardon, qui permettrait au fonds de devoir contracter un emprunt pour pouvoir assumer son fonctionnement, parce que le fonds dispose de ressources.

Puis c'est aussi pour permettre d'éviter qu'à un certain moment donné, par des directives, on commande et on demande au fonds de venir couper notamment l'aide aux bénéficiaires. Ça, ça serait triste. Ça s'est fait dans le passé sous un autre gouvernement. Je pense que, d'ailleurs, c'est le député de Chicoutimi qui avait demandé ça à son collègue qui était ministre de la Justice à l'époque, de venir toucher à... de prendre 150 000 $ dans le fonds aux bénéficiaires...

Une voix : ...

Mme Vallée : Oui, du fonds. Oui, 150 000 $ qui n'allaient pas aux bénéficiaires. Mais c'est une opération comptable tout à fait légitime.

Mais, en fait, on tente d'y aller de façon transparente et tout simplement de permettre au fonds de pouvoir utiliser des ressources qui sont les siennes, qui sont là, et d'éviter de devoir emprunter, et d'éviter les frais aussi qui se rattachent à ces emprunts-là... et réitérer que cette demande-là, elle nous a été formulée par le conseil d'administration du fonds. Donc, ce n'est pas... là, c'est faux de m'imputer cette — comment le député de Chicoutimi le disait? — fausse bonne idée. C'est le conseil d'administration du fonds qui nous a présenté cette piste de solution intéressante et qui nous l'a soumise et avec laquelle on a travaillé. Puis je pense que c'est de façon transparente.

Puis mon collègue nous disait, M. le Président, qu'on pouvait parler longtemps puis qu'il était plein de créativité, puis je... C'est la beauté de notre système parlementaire. Moi, je suis patiente. On est tous les deux patients et on est tous les deux déterminés, alors je pense qu'on est condamnés à se côtoyer. Et je n'ai pas... Je comprends, là, qu'on a d'autres articles, tout ça, mais sauf que, pour moi, c'est un... Je pense que nous avons suffisamment de moyens et d'outils qui nous permettent d'assurer une vigie sur la bonne santé financière du fonds, sur la bonne administration du fonds, sur cette rigueur aussi à laquelle le fonds est assujetti dans la façon dont il fait les choses.

Autre petit truc que je souhaitais simplement porter à l'attention, M. le Président, de notre collègue, c'est qu'il m'a un petit peu remise à l'ordre en me disant : Il faut utiliser le terme «reliquats» et ne pas utiliser le terme «revenus». Mais le terme «reliquats» est inclus dans les revenus lorsqu'on regarde les états financiers, ça fait que je ne suis pas tout à fait dans le tort. Vous avez raison, parce que votre souci de la précision, il est important, mais moi, je n'étais pas tout à fait dans le tort lorsque je faisais référence à des revenus, parce qu'effectivement les reliquats font partie des revenus du fonds. Petit clin d'oeil comme ça, en passant.

Alors, ceci étant... Puis, de réduire à trois ans — là, on passe de cinq ans, on tombe à trois ans — je crois que ça nous place dans une situation qui... ça place le fonds dans une situation de vulnérabilité et qui pourrait mener, dans certaines circonstances, à recourir à d'autres sources de financement et qui ne sont pas, peut-être, les plus envisageables... les plus intéressantes.

Et j'ai commencé... J'ai regardé un petit peu aussi la façon dont le fonds ontarien... parce que ce n'est pas tout à fait... bon, le fonds ontarien était géré. Au moment de sa création en 1992 — quand même — je crois qu'ils se sont grandement inspirés de ce que nous faisions et de cette loi qui est là. Mais, au début de sa création, il y a eu une injection d'un montant de 500 000 $ pour assurer le fonds, et par la suite à ça s'ajoutent un pourcentage des revenus... un pourcentage des jugements, pardon, et un pourcentage de 10 %, qui est prévu à la loi, et s'ajoutent également les frais, donc les dépens, auxquels sont assujettis les... Alors, bon, c'est une autre forme de financement, bien que nous ayons un pourcentage et bien que nous ayons, je pense, démontré qu'il y avait quand même des reliquats intéressants qui étaient attribués au fonds au fil des années.

C'est certain qu'au début on n'aurait pas... Au tout début de sa création, il n'était pas vraiment envisageable, je crois, de prévoir que le fonds puisse se financer à même ses reliquats. On mettait en place un système, on avait... on espérait que ce système-là, comme je le mentionnais, puisse être utilisé et soit un outil qui serait connu et utilisé par David contre Goliath. Mais, au tout début, les sommes étaient... les reliquats qui étaient déposés étaient vraiment d'un petit... La première année, je pense qu'on parle de 72 $, là. C'était au tout début, dans les premiers balbutiements du fonds. Mais, je pense qu'on l'a démontré, ils ont été appelés, au fil des ans, au fil de la complexité des dossiers aussi et de l'importance des dossiers, à s'accroître de façon considérable.

Donc, voilà, c'est mes petites observations. Je sais que ça mènera à d'autres observations du collègue de Chicoutimi...

Le Président (M. Schneeberger) : ...d'ajourner les travaux.

Mme Vallée : Oui, je le sais. Je vous voyais aller. Ça va être... Mais c'est intéressant.

M. Bédard : Ça me rappelle mes contre-interrogatoires, ça, c'est pour ça.

Une voix : ...M. le Président.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci. Écoutez, je comprends l'argument des collègues. D'un côté, on dit : Bon, ça placerait le fonds dans une situation de vulnérabilité. De l'autre côté, mon collègue invoque le travail parlementaire. Dans ce cas-ci, je dois dire que je suis assez d'accord avec mon collègue de Chicoutimi pour avoir un contrôle parlementaire accru. Ce qu'on a constaté, c'est que souvent, les gouvernements successifs, à partir du moment où ils sont assis à la droite du président, bien, malheureusement, ce qui était plaidé lorsqu'ils étaient assis à gauche, bien, ça devient autre chose. Donc, la conception diffère. Puis on souhaite que, lorsqu'il va y avoir un nouveau gouvernement, ça sera différent.

Ceci étant dit, M. le Président, la ministre nous dit : On pourrait placer le fonds dans un état de vulnérabilité. Bien, je ne le crois pas, parce qu'on serait obligés de se rasseoir ensemble pour réexaminer la disposition puis pour reconnaître est-ce que, oui ou non, le fonds est en bonne situation financière. Puis ça amène une mesure de contrôle.

Mais où j'en viens, c'est que le fonds, à l'article 44, peut emprunter, mais, ceci étant dit, c'est soumis à l'autorisation de la ministre. Et nous aurons, M. le Président, et je vous l'annonce d'avance, un amendement pour l'article 44, qui, je crois, nous permettra de garantir que le fonds ne se retrouvera pas en situation de vulnérabilité. Parce qu'actuellement on dit : Le ministère peut venir combler, renflouer les coffres du fonds. Mais ça devrait être plutôt : Le ministère doit, à partir du moment où le ministre en titre autorise un emprunt pour garantir la pérennité du fonds... Bien, le gouvernement devrait assumer fait et cause pour le fonds à partir du moment où il va y avoir un emprunt.

Donc, ça pourrait constituer un point d'entente entre les partis, ici, pour assurer la pérennité du fonds et aussi l'engagement que le gouvernement, je crois, par cette commission, prend d'assurer le financement, le financement dédié du fonds, et l'objectif pour lequel il a été créé, aussi. Mais je reviendrai avec mon amendement suite à l'amendement du collègue de Chicoutimi.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui, vous avez fini? Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Le député...

M. Bédard : Oui. Je déposerais un autre amendement.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui? Le député de Chicoutimi.

Une voix : ...

Le Président (M. Schneeberger) : Oui. Mais il faut voter lui. Alors, on va passer à...

• (17 h 50) •

M. Bédard : Ah! c'est vrai, on a oublié de voter.

Le Président (M. Schneeberger) : C'est ça.

M. Bédard : Bien, une chance qu'on a la secrétaire, hein?

Le Président (M. Schneeberger) : Il faut passer au vote. Alors, nous allons passer maintenant aux voix le troisième amendement déposé par le député de Chicoutimi. Est-ce que l'amendement, tel que déposé, est adopté?

Une voix : Pour.

Mme Vallée : Rejeté.

Le Président (M. Schneeberger) : Rejeté?

Une voix : Il est rejeté.

Le Président (M. Schneeberger) : Rejeté? Alors, l'amendement est rejeté. Alors, nous revenons maintenant sur l'article n° 27 tel que déposé initialement. Il reste quelques minutes, est-ce qu'il y a d'autres...

M. Bédard : Oui, oui. Moi, je vais avoir un amendement.

Le Président (M. Schneeberger) : Oui? M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard : Je pense qu'en général je vous invite à vous tourner vers votre gauche, vous allez avoir plus de chances d'avoir le prochain. Donc, effectivement, je vais déposer un amendement, donc, qui... je vais vous le lire avant, on est en train de l'écrire, mais qui reprend essentiellement... mais qui dit, finalement, que c'est pour une période de six ans au lieu de trois.

Le Président (M. Schneeberger) : Nous allons suspendre quelques instants pour le dépôt de l'amendement.

(Suspension de la séance à 17 h 51)

(Reprise à 17 h 56)

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, nous reprenons la séance pour quelques minutes. Alors, je donne la parole au député de Chicoutimi pour son quatrième dépôt de... quatrième amendement sur l'article 27.

M. Bédard : Oui. Je n'avais pas beaucoup de temps, malheureusement, M. le Président. Peut-être simplement dire... J'aurais pu déposer une motion d'ajournement, mais, bon, peut-être vous dire deux choses. D'abord, un, sur le 150 000 $ que la ministre m'attribuait, honnêtement je n'ai pas de souvenir. Puis il faut bien connaître Me Bertrand St-Arnaud, c'est un homme à qui il était difficile d'imposer quoi que ce soit. Par contre, dans les discussions, il y a un élément... et ce n'était pas sur le 150 000 $. Ça, c'était sur l'École du Barreau. Ça, là j'ai agi, sur le financement de l'École du Barreau et — elle en parlera à sa sous-ministre — j'ai même eu l'occasion de rencontrer le bâtonnier là-dessus, dans le cadre des suivis budgétaires. Alors, ça, c'est la première chose. Quant au reste, c'était quelqu'un qui déterminait... On se voyait en début, lors des crédits, puis on se revoyait à la fin, sauf quand il était en demande, comme sur la loi pour la modification des tarifs au niveau de l'aide juridique.

Sur la deuxième chose, la ministre dit : C'est le conseil d'administration qui nous a demandé. Je veux lui dire : C'est normal. C'est normal qu'il vous le demande, vous coupez les vivres. Alors, ils sont en mode solution, ils demandent la même chose. C'est comme si vous prenez quelqu'un par le cou. En général, il va essayer de trouver une solution quand il sent qu'il est pris. Alors, ce n'est pas un argument qui va m'amener à changer... Oui, si on leur coupe les vivres, ils vont dire : Bien là, nous, notre mission, comment on la finance? Alors là, ils proposent ça. C'est à la ministre à dire : Bien, oui, non, ou j'ai une petite réticence.

Quant à la situation de vulnérabilité, par contre, du fonds, bien là, je dois dire à la ministre que ce n'est pas la loi qui est le problème, c'est les coupures budgétaires. Là, il faut comme... Puis là on n'est pas dans le phénomène de la poule et l'oeuf, là. Ce qui est directement responsable, c'est qu'on dit à l'organisation : Tu n'auras plus de revenus, là. Ça n'a rien à voir avec le fonds ou la loi. Donc, ça non plus, ça ne peut pas me convaincre. Donc, ce n'est pas tout d'un coup le problème de la loi, la loi existe depuis 35 ans. Et la ministre me disait — et je termine avec ça : Au dépôt, ça n'a pas été envisagé... envisageable, ce n'était pas envisageable. Je vais seulement lui dire que, pendant les 35 dernières années, ça n'a pas été envisagé. Alors, on a quand même un bon historique, là, de 35 ans.

Donc là, qu'est-ce qui reste? Il reste finalement... pas le Barreau, l'École du Barreau. Ce qui reste, c'est l'amendement : six ans, ce qui est quand même un délai plus que raisonnable. Je vous dirais que, même, je trouve ça un peu long. La raison principale, c'est que j'ai déjà proposé cinq ans. Donc, malheureusement, on ne peut pas aller plus loin. Mais je pense que d'avoir un délai de six ans permettrait au moins à cette commission d'avoir un suivi correct de l'application de la loi et de déterminer si on doit maintenir cette façon de faire.

Et moi, je vais toujours résister à l'idée qu'une organisation doit générer ses propres revenus. Ça, je vais toujours résister à ça. Et je vous dirais : Je suis étonné que le Trésor permette ça. Je suis étonné parce qu'il n'y a rien de pire que les fonds dédiés, où on perd le contrôle. Et cet argent-là n'appartient pas au fonds, il n'appartient pas à ceux qui l'administrent, il appartient à des victimes qui n'ont pas réclamé. Alors, est-ce que c'est la meilleure destination? Je ne le sais pas, mais c'est discutable. Et de le considérer comme étant un élément qui appartient au fonds... Le fonds n'est qu'un outil à qui on donne le droit de prélever, principalement.

Donc, voilà ma résistance. Elle est même renforcée. Souhaitons que nos travaux nous permettent de trouver une solution correcte pour nous tous, pour les membres de cette commission, pour le projet de loi, pour les autres dispositions qu'il contient, pour la ministre.

Le Président (M. Schneeberger) : ...M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard : Merci.

Le Président (M. Schneeberger) : Alors, compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux jusqu'à demain. Je vous souhaite une belle fin de soirée à tous.

(Fin de la séance à 18 heures)

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