(Dix heures une minute)
Le
Président (M. Bérubé) :
Je déclare la séance de la Commission
des institutions ouverte. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que
vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas perturber
nos travaux.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Bérubé (Matane-Matapédia) remplace M. Bédard
(Chicoutimi); M. Bergeron (Verchères) remplace M. Leclair
(Beauharnois); et M. Charette (Deux-Montagnes) remplace Mme Roy
(Montarville)
Le
Président (M. Bérubé) : Merci. La Commission des institutions
est réunie afin de procéder à l'interpellation du député de Verchères au ministre responsable des Affaires
intergouvernementales canadiennes et de la Francophonie canadienne sur le sujet suivant : Les
engagements électoraux des partis politiques fédéraux dans les champs de
compétence du Québec.
Je vous
rappelle brièvement le déroulement de l'interpellation. Dans un premier temps,
le député de Verchères aura un temps
de parole de 10 minutes, suivi du ministre pour 10 minutes également. Par la
suite, des périodes de cinq minutes
seront allouées selon la séquence suivante : d'abord, un député de
l'opposition officielle, ensuite le ministre puis un député du groupe formant le gouvernement, et ainsi de suite. Et
on vous a déjà prévenus de notre façon de procéder.
Je comprends qu'il y a entente à l'effet que le
deuxième groupe d'opposition interviendra lors des troisième et sixième séries d'interventions. 20 minutes
avant midi, j'accorderai 10 minutes de conclusion au ministre et un temps
de réplique égal au député de Verchères.
Enfin, je
vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement, dépasser midi.
Ainsi, comme la séance a débuté à 10 h 1, est-ce qu'il y a
consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de midi, soit jusqu'à
12 h 1?
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Bérubé) : Il
y a consentement.
Alors, M. le député de Verchères, vous avez la
parole pour 10 minutes.
Exposé du sujet
M.
Stéphane Bergeron
M.
Bergeron : Alors,
merci, M. le Président. Il y a quelques instants, j'étais en point de presse,
j'y attendais d'ailleurs impatiemment le
ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes. Ce que je disais
essentiellement, puis je vais commencer là-dessus...
D'abord, vous
me permettrez, M. le Président, de vous saluer et saluer les collègues qui sont
des nôtres aujourd'hui, les gens du
Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes, que j'ai toujours
grand plaisir à côtoyer. M. le ministre, merci d'être là. Peut-être
aurions-nous eu l'occasion de nous voir plus tôt, mais, peu importe, on en a
pour deux heures. Je salue mon collègue de
Deux-Montagnes. C'est assez remarquable! Il a toujours brillé par son absence
lorsqu'on parlait de souveraineté, mais,
lorsqu'on parle de fédéralisme, il est présent à son poste. Alors, je pense
qu'il faut en tirer quelques conclusions.
Alors, M. le Président, je suis très heureux
d'être des vôtres aujourd'hui et je disais, tout à l'heure en point de presse, que j'ai quand même une certaine
expérience des campagnes électorales fédérales, ayant participé moi-même à
quatre élections fédérales et ayant toujours été un spectateur assidu et
intéressé des campagnes électorales fédérales. Et j'ai rarement vu une campagne électorale où les partis politiques
fédéraux proposaient, sans la moindre gêne, ouvertement, autant
d'empiétements dans les champs de compétence du Québec.
Alors, je
donnais, par exemple, le cas des transferts en santé qui diminuent d'année en
année, comme le rappelait Gilles Duceppe
hier. Alors, au lieu de répondre à la question qu'il a posée au débat, à savoir
de ramener à au moins 25 % la part du financement fédéral dans les
soins de santé, les partis politiques fédéraux ont plutôt proposé toute une kyrielle de propositions, d'engagements
précis : plus de médecins, des soins à domicile, un fonds en santé
mentale. Autant de priorités qu'il
appartient au Québec de déterminer. Et c'est au Québec de fixer ses priorités
en matière de santé, de déterminer quelles devront être les priorités en
fonction des besoins, en fonction de l'objectif de mieux soigner les malades au Québec. Alors, on voit la même
chose dans plusieurs autres secteurs, puis on aura l'occasion
d'en parler dans quelques instants, que ce soit en matière d'infrastructure,
en matière d'éducation.
C'est
curieux, mais nos fédéralistes, à travers le Canada et au Québec, disent
respecter la Constitution. Ils en ont un
tel respect qu'ils veulent à peine y toucher mais ils sont parfaitement
incapables de la respecter. Chaque fois qu'ils ont une occasion, il semble qu'ils aient un besoin
irrépressible de contourner la Constitution. Puis on va avoir l'occasion
de parler plus tard également du pouvoir fédéral de dépenser.
Donc, devant
cette multiplication de propositions des partis politiques fédéraux
d'empiétements dans les champs de
compétence du Québec, il m'apparaissait important que nous ayons l'occasion
ici, à l'Assemblée nationale, le gouvernement,
l'opposition officielle et manifestement le deuxième groupe d'opposition, de
discuter ensemble des incidences, pour
le moment, à long terme pour le Québec de ces propositions d'empiétement dans
les champs de compétence québécois.
Il y a un
certain nombre de modifications du paysage politique depuis un certain nombre
d'années. Et, au nombre de ces
modifications du paysage politique, on a, à Québec, un gouvernement dont le
premier ministre, curieusement... et
ça, je crois que c'est le premier premier ministre depuis longtemps à s'en
remettre presque aveuglément aux députés fédéraux pour défendre les
intérêts du Québec. Les députés fédéraux qui sont élus au Québec, c'est à eux,
nous a dit à quelques reprises dans cette Chambre le premier ministre, de
défendre les intérêts du Québec.
Alors, c'est
d'autant plus important, dans ce contexte où le premier ministre s'en remet aux
députés fédéraux du Québec pour
défendre les intérêts du Québec, de savoir quelles sont les intentions des
futurs députés fédéraux du Québec, quelle que soit leur formation politique, en
matière de défense des intérêts du Québec. C'est d'autant plus important
de savoir quelles sont les visions qu'ils
ont, quelles sont leurs orientations par rapport aux intérêts du Québec. Alors,
on s'en va dans quelle direction?
Donc, je croyais qu'il était important que nous prenions quelques instants ici,
à l'Assemblée nationale, pour réfléchir aux propositions des partis
fédéraux et voir peut-être à dégager des consensus.
Vous savez,
la formule de l'interpellation est une formule intéressante dans la mesure où
elle permet, du moins théoriquement,
d'approfondir une question. À chaque vendredi, on a l'occasion d'interpeller un
ministre du gouvernement pour
approfondir une question. Évidemment, la formule de l'interpellation, telle
qu'elle existe, a ses avantages mais nous réserve aussi beaucoup de frustrations parce qu'on a souvent
l'impression que ce n'est pas une interpellation, que c'est une série de monologues. Alors, on monologue
chacun de notre côté pendant un certain temps, puis après ça, bien, on
laisse l'autre monologuer, puis après ça on revient puis on monologue un petit
bout de temps aussi.
Alors, la
formule de l'interprétation, bien sûr, nous réserve un certain nombre de
frustrations. Mais pourquoi ne pas espérer?
Espérer qu'aujourd'hui elle nous donne l'occasion de parvenir à un certain
nombre de consensus, de consensus qui
pourraient, d'ici la fin de cette campagne interminable, qui sait, influencer
les prises de position des différents partis puis influer sur le cours
des choses non pas sur le résultat parce qu'évidemment je n'ai pas la
prétention que cette interpellation pourrait avoir une grande incidence sur les
résultats de l'élection fédérale, mais peut-être les partis politiques fédéraux auront-ils la sagesse de
prêter attention à ce que nous dirons ce matin par rapport à cette campagne
qui a cours présentement. Et peut-être les
partis politiques fédéraux voudront se montrer plus respectueux des compétences
du Québec.
• (10 h 10) •
Et je
pourrais reprendre la lettre qui a été adressée par le premier ministre aux
partis politiques fédéraux et dire à
quel point le Québec est tout à fait capable de prendre ses décisions dans ses
champs de juridiction sans qu'un parti politique fédéral ait la
tentation d'essayer d'orienter les choses. Alors, c'est la raison pour
laquelle, un peu à la blague — mais je
pense qu'à quelque part dans toute blague il y a une part de vérité — je disais que je tendais la main au ministre
des Affaires intergouvernementales et
j'aurais aimé qu'il vienne me joindre. Mais peut-être qu'on pourra, comme on
l'a fait au début de cette interpellation, se serrer à nouveau la main
pour sceller cette...
On a des visions différentes sur l'avenir du Québec,
l'avenir politique et constitutionnel du Québec. Je pense qu'à sa face même
c'est une évidence. Le ministre des Affaires intergouvernementales croit que
l'avenir du Québec passe par sa participation au régime fédéral canadien. Je
pense que la preuve est faite, de mon côté, que le Québec est toujours voué,
de frustration en frustration, à ne pas
pouvoir s'épanouir pleinement à l'intérieur de la fédération canadienne. Mais,
au-delà de cela, le fait est que,
dans le cadre constitutionnel actuel... C'est dans ce cadre que nous opérons et
c'est dans ce cadre que nous allons opérer pendant encore quelques
années. Je ne prévois pas de changement. Je le dis tout de suite, là, s'il y en a qui s'attendent à des changements
avant 2018, je n'en prévois pas. Alors, c'est d'autant plus étonnant de voir
le premier ministre revenir sur cette
question presque tous les jours à l'Assemblée, mais, quoi qu'il en soit, je ne
prévois pas de changement d'ici 2018.
Conséquemment, d'ici
2018, est-il possible que nous puissions faire en sorte de défendre correctement,
convenablement, la capacité du Québec de
faire ses choix, particulièrement dans ses champs de compétence? On pourrait
avoir... Ça vous apparaît long, M. le
ministre? Alors, j'entendais nos amis du deuxième groupe d'opposition dire
qu'on allait réclamer de nouveaux
pouvoirs. Bien, nous en sommes, mais, au moins, dans les champs de compétence
que nous avons déjà, est-il possible de s'assurer que nous puissions
préserver la capacité d'agir du Québec et faire en sorte d'amener les partis politiques fédéraux, qui sont
présentement en campagne mais qui auront un certain nombre d'élus d'ici
peu au Québec, à prendre en considération le respect des compétences
québécoises?
Alors, on aura l'occasion, dans les prochaines minutes,
d'aborder non seulement les demandes faites par le premier ministre, qui, j'ai déjà eu l'occasion de le dire,
m'apparaissent pour le moins timorées par rapport à des demandes qui ont été formulées par un précédent premier
ministre libéral, mais, ceci dit, on va revenir sur ces demandes, sur les
réponses, mais on va revenir
également sur des engagements pris par les partis politiques fédéraux dans des
champs de compétence du Québec. Et je
l'espère et je le dis bien sincèrement : J'espère que cette interpellation
n'en sera pas une de confrontation mais
nous pourrons ensemble trouver peut-être des consensus qui pourront, je
l'espère, influencer les partis politiques fédéraux qui sont
présentement en campagne.
Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le
député de Verchères. Maintenant, la parole est au ministre, également
pour 10 minutes.
Réponse
du ministre
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Merci, M. le Président. Je
salue nos collègues, les gens qui nous accompagnent. Et je dois dire d'entrée de jeu, puisque mon collègue de Verchères
le ramène avec le sourire : Pour ceux qui n'ont pas vu le point de presse
auquel il s'est adonné tantôt, il a eu la gentille amabilité de m'inviter à le
rejoindre pour refaire une scène vraiment mémorable.
Mais je ne veux pas me faire une expertise dans le «hijacking» des points de
presse. Alors, je me garde une petite réserve.
Ceci étant dit, il y aurait eu de la place pour le faire
parce que, dans le fond, ce que le député de Verchères a dit à ce moment-là et ce qu'il redit aujourd'hui, c'est
que, devant les positions que le premier ministre du Québec a présentées,
les demandes qu'il a présentées, il nous
tend la main pour rejoindre ces demandes-là, pour appuyer ces demandes-là. Et
je crois que j'aurais donc pu aller lui donner la main pour dire :
J'accepte la main qui vient rejoindre les demandes que nous avons faites. Puis on va les aborder tantôt
parce que, tantôt au point de presse, notre collègue notait le pouvoir fédéral
de dépenser, qui est une question fort
importante, relevait la question aussi de la santé, on va en discuter très
certainement, et plein d'autres enjeux qui ont été soulevés.
Et je dois dire que, sauf erreur, dans toutes les démarches
qui ont été faites historiquement à l'égard d'un premier ministre du Québec qui, au nom des Québécois,
faisait entendre les priorités qui intéressaient les Québécois dans le cadre
d'une campagne électorale — à
ma connaissance, mais je peux me tromper, là — je pense que c'est la
première fois qu'il y a une réponse écrite de tout le monde. Alors, il y a déjà
là quelque chose de significatif, je crois, ou il y a une reconnaissance, de la part de ceux qui oeuvrent
sur la scène fédérale, que la question du Québec est importante et qu'ils
doivent la respecter. Alors, c'est sur la
forme, je dirais. Sur le fond, on peut argumenter et voir les choses
différemment.
Puis moi, je suis
bien intéressé à ce qu'on procède justement à un échange important parce que,
lorsque notre collègue parle de la défense de nos compétences, j'en suis tout à
fait. D'ailleurs, les 125 députés qui sont ici le sont, généralement. Alors, ce ne
sera pas une surprise de ce côté-là.
Et d'ailleurs bon nombre des demandes qui sont faites, et ne serait-ce que celle du pouvoir fédéral de
dépenser... est probablement celle qui est la plus structurante à l'effet de
parler du respect des compétences. On aura l'occasion d'y revenir.
Évidemment, il y aura toujours des échanges de
vues. Mon collègue l'a dit tantôt, sa lecture à lui, c'est que le Québec ne
progresse pas dans le Canada et progresserait à l'extérieur du Canada. Je pense
que l'histoire des bientôt 150 dernières
années atteste facilement le contraire, c'est assez évident, en termes de
qualité de vie, de progrès social, économique.
Enfin, même des gens qui oeuvrent dans la formation souverainiste reconnaissent
que ce n'est pas le goulag et que,
contrairement, le Québec a avancé. Par contre, pour des questions identitaires,
croient-ils, il y a d'autres façons de voir
ça. Et donc il allait jusqu'à dire que, selon lui, le premier ministre actuel
était celui qui se désintéressait de la chose et laissait aux députés fédéraux le soin de faire la représentation du
Québec. Alors, évidemment, il fait une connotation, là, une lecture, je dirais,
partisane de sa lecture. Et c'est correct, tu sais, c'est correct. Nous, des
partis politiques, il ne faut pas avoir peur de ça. La lecture qu'il
fait est à cet effet-là. Moi, personnellement, je suis tout à fait au
contraire.
Je vais
donner un exemple pour attester ce que je suis en train de dire. Parlons de la
santé, justement. Alors, la position
du Québec, c'est que le gouvernement fédéral devrait hausser sa contribution en
matière de santé à la hauteur de
25 % de ce que sont les fonds qui sont investis en matière de santé et
surtout de les lier à la démographie parce qu'on sait que l'âge a un impact dans les coûts qui sont dépensés, investis par
les provinces. Alors, le premier ministre du Québec a tissé des alliances et, lorsqu'on dit qu'il ne
s'intéresse pas à ce qui se passe à l'extérieur de nos frontières québécoises,
a tissé des alliances — on reviendra sur beaucoup d'alliances avec
l'Ontario — mais
notamment en matière de santé avec l'ensemble des autres provinces et
territoires dans le Conseil de la fédération. Évidemment, sur la carte
d'affaires du premier ministre, ce n'est pas
marqué : «Gouvernance souverainiste». C'est marqué : Nous, on veut
participer, on veut faire avancer nos
intérêts avec les autres. Alors, forcément, dire, comme mon collègue l'a dit,
que le premier ministre du Québec, ça ne l'intéresse pas de faire des
représentants ailleurs, là, je pense que la vérité, malheureusement, contredit
notre collègue.
Bon, tant
qu'à y aller sur les conceptions de qui sont les uns et les autres et comment
se qualifient-ils, moi, je... Et il
dit d'ailleurs là-dessus que... et c'est un peu nouveau, il dit : Cette
année, j'ai rarement vu autant de désirs d'empiètement. Bien, moi, M. le
Président, sur les choses qui sont nouvelles, j'ai noté une différence au
niveau du Bloc québécois, et qui a été notée
d'ailleurs par plusieurs commentateurs, et j'ai ici avec moi deux affiches que
mon collègue ne va pas nier, là. Ça
va tout à fait dans le sens de son engagement politique, donc ce n'est pas une
critique, mais c'est un constat quand
même, puis on pourrait peut-être en discuter. J'en ai une qui est une
affiche... et je fais la promotion en même temps du Bloc. On m'excusera.
J'espère que ce n'est pas une dépense électorale fédérale, mais, quand
même : Qui prend pays prend parti. Je me souviens du Bloc, dès sa fondation jusqu'à
2011, qui ne se représentait pas comme le
parti du mouvement souverainiste mais un mouvement qui se voulait l'expression
de l'ensemble des Québécois. Il y a une
autre affiche qui dit à peu près ceci — parce que, si jamais on se pose une question
sur de quel pays il parle, on peut toujours se poser des
questions : L'avenir du Québec ce n'est pas de demeurer
une province dans le Canada, mais de devenir un pays dans le monde.
Et ça, c'est ses publicités actuelles.
• (10 h 20) •
Il n'est pas là, malgré ce qu'il peut dire, pour
représenter les Québécois à la Chambre des communes. Sa proposition — ce qui est différent d'avant — est de représenter le mouvement péquiste ou
le mouvement séparatiste. Et donc,
lorsqu'il sollicite un mandat qui, déjà,
ne lui donnera pas les clés du pouvoir parce
qu'il ne présente pas suffisamment de candidats pour accéder au gouvernement — on aura l'occasion d'y revenir — et ça, c'est nouveau, il est en ce moment
le porteur d'une seule
frange de population. Il a le droit. Et moi, je respecte les électeurs qui vont
voter pour le Bloc. Je respecte les électeurs qui vont voter pour tous
les partis politiques. C'est à eux de voter. Ce n'est pas à l'Assemblée nationale de voter pour tous les Québécois. Mais,
en ce moment, il cible son électorat qu'il envisage de représenter aux
25 % de ceux qui ont voté pour le Parti québécois la dernière fois. Alors,
on voit bien qu'il y a cette différence-là fondamentale.
Et elle peut peut-être s'expliquer par le fait que le chef du Parti québécois a
déjà exprimé lui-même des doutes à
l'égard du Bloc québécois. Et je lis ici un article de février dernier où le
chef actuel du Parti québécois et chef de
l'opposition officielle dit, et je pense qu'on en reparlera aussi aujourd'hui,
et c'est entre guillemets : «Le Bloc ne sert strictement à rien[...]. Le Bloc québécois, j'ai
toujours eu un problème avec ça.» Alors, qu'est-ce qui s'est passé entre
le moment où le Bloc ne servait à rien et
aujourd'hui? Bien, je pense que ce qui a changé, c'est que le Bloc, maintenant,
représente le Parti québécois et pas l'ensemble des Québécois.
Alors, dans
les éléments qui ont changé, il y a cet élément-là où il y a un doute sur la
pertinence du Bloc. Il a le droit de
faire campagne, là, je ne le nie pas, puis il y a des gens qui peuvent
légitimement voter pour lui. Mais, lorsqu'on va prendre l'ensemble des demandes qui sont formulées actuellement ou
l'ensemble des besoins du Québec, la question est la suivante :
Peuvent-ils être valablement représentés? Ou peut-on chercher valablement une
réponse qui, de toute évidence, va se faire
sur des alliances et des ententes — des alliances avec les autres provinces, des
ententes avec d'autres partis politiques — ou même, question plus
importante, avec la capacité de faire un budget ou de déposer des lois?
Alors, par exemple, une question qui reste soumise
ici à un débat qu'on aura sur le 25 % pour la santé dont, d'ailleurs, le chef du Bloc québécois parlait
hier, ma question sera la suivante pour notre interpellation : Dans quel
budget compte-t-il faire cette
contribution à hauteur de 25 % pour le Québec? Qui sera son ministre des
Finances qui va nous permettre
d'avoir ce 25 %? Poser la question, c'est y répondre. Il ne le permettra
pas parce qu'il n'aura pas de ministre des
Finances. Et toute la question revient ici : Comment peut-on le mieux
s'assurer que ce qui est important pour le Québec se réalise? Est-ce que ce n'est pas d'investir les
paliers de décision? Et ça, c'est une question fondamentale qui doit aussi
nous habiter.
On va
s'entendre sur plein de choses. On a déjà un consensus. Mon collègue cherchait
des consensus, il y en a un maintenant, je crois. On verra avec la
deuxième opposition. Je pense qu'on peut dire que l'opposition officielle et le
gouvernement s'entendent sur les demandes
que le premier ministre du Québec a faites et pour dire que nous les appuyons.
Ça, c'est le premier bout. Notre collègue de
la deuxième opposition viendra nous dire s'il y a un consensus total. Après ça,
on pourra analyser chacun des éléments. Mais les Québécois auront à
choisir eux-mêmes, pas nous, eux, quel parti politique
fédéral ou quel candidat dans leur comté peut le mieux répondre à cela. Et ils
devront se demander... parce qu'à un moment donné il y a aussi qui
formera le gouvernement. Il faut donc se demander : Quel parti pouvant
former le gouvernement peut le mieux répondre aux attentes des Québécois?
Merci, M. le Président.
Argumentation
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le ministre. Nous passons au député de Verchères pour cinq minutes
cette fois.
M.
Bergeron :
Oui. Merci, M. le Président. Je commence à comprendre pourquoi le ministre a
finalement décidé de ne pas traverser
pour me serrer la main parce que je ne m'attendais pas à ce qu'il descende si
rapidement dans l'arène partisane en
tout début d'interpellation. Je l'avais appelé à chercher les points en commun,
il a plutôt cherché à mettre en
relief les points de divergence. Alors, grand bien lui fasse. Je vais chercher
à éviter cela, mais je ne peux pas laisser un certain nombre de choses
être dites sans rectifier certains éléments, M. le Président.
D'abord, il a
commencé en nous disant que, sauf erreur, c'était la première fois qu'une
intervention d'un premier ministre
donnait lieu à une réponse de tout le monde. Il a dit que c'était significatif.
Alors, ou bien c'est significatif parce que le premier ministre imposerait tellement son autorité que les partis
politiques fédéraux se sentent l'obligation d'y répondre ou bien c'est simplement parce que les demandes
sont tellement minimales que les partis fédéraux ne voient pas de difficulté
à y répondre. On aura l'occasion d'approfondir ça dans quelques instants.
Maintenant, le ministre a essayé de me faire
dire que j'avais dit que le premier ministre se désintéressait de la défense des intérêts du Québec à l'extérieur des
frontières du Québec. Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit. Ce que j'ai
dit, c'est qu'à quelques reprises le premier
ministre, et en ce salon bleu, nous a dit : Il y a des députés fédéraux
pour faire ça, là. Bien, qu'ils
fassent leur job. Hein? On a sous-traité la défense des intérêts du Québec aux
députés fédéraux. J'en veux pour preuve
une déclaration qu'il a faite notamment lorsqu'il a été question d'intervenir
pour aider le chantier maritime Davie. Alors,
il a dit : «[Des représentations,] nous en avons déjà faites.» Alors, ça,
ça corrobore ce que le ministre vient de dire puis ce que je n'ai jamais contesté. Par contre, le premier ministre
incite les députés fédéraux québécois, notamment les ministres conservateurs du Québec, à faire pareilles
représentations. Donc, on dit : Nous, on fait notre job. Les députés
fédéraux, ils font la leur, puis qu'ils la
fassent. Je suis bien d'accord avec lui, mais, à un moment donné, justement
parce qu'on a l'air de s'en remettre
aux députés fédéraux pour faire le travail, pour défendre les intérêts du
Québec, bien, c'est important de s'assurer qu'ils le fassent.
Et là le
ministre a fait mine de se surprendre — hein, il vient de découvrir quelque chose
aujourd'hui, là — que le
Bloc québécois est souverainiste. Alors,
pour ceux à la maison, là, je ne sais pas si vous étiez bien attachés sur votre
chaise, mais vous venez peut-être de
réaliser aujourd'hui, grâce à l'intervention du ministre, que le Bloc québécois
est souverainiste. Alors, j'espère que vous, comme le ministre, n'êtes
pas tombés en bas de votre chaise à réaliser cela. Mais moi, je rappelle — parce
que j'ai eu l'occasion de porter pendant quelques années cette bannière, celle
du Bloc québécois, à l'époque mythique que le ministre semblait invoquer, et
nous étions déjà, à l'époque, un parti souverainiste — le Bloc québécois a été
fondé pour poursuivre deux objectifs fondamentaux : réaliser
l'indépendance, contribuer à la réalisation de l'indépendance du Québec,
promouvoir l'indépendance du Québec et, dans l'intervalle, défendre les
intérêts des Québécoises et des Québécois.
Et le
ministre peut bien tenter de banaliser le Bloc québécois, tenter de le
minimiser, tenter de dire à quel point ça
ne vaut pas un clou, le fait est, M. le Président, qu'il ne pourra jamais dire
du Bloc québécois qu'il ne défend pas les consensus québécois à Ottawa.
Il ne pourra jamais dire du Bloc québécois qu'il propose des empiétements dans
les champs de compétence du Québec.
Alors, ce dont il est question, aujourd'hui, M.
le Président, l'interpellation, je vous le rappelle, porte sur les propositions des partis fédéraux dans les champs
de compétence du Québec. Et la seule chose que le ministre a trouvé à dire, c'est de parler du Bloc québécois, alors que
le Bloc québécois ne propose aucun empiétement dans les champs de compétence du Québec. Mais là, je veux dire, à
quelque part, là, on est loin du sujet de l'interpellation d'aujourd'hui. Si au
moins il s'était donné la peine d'évoquer
les empiétements auxquels je fais référence des autres formations politiques.
Mais, non, la seule chose qu'il dit, c'est
qu'il dit que le Bloc québécois est voué à l'opposition. Bien, j'ai une petite
nouvelle également pour les gens qui
nous écoutent, j'espère que vous ne tomberez pas en bas de votre chaise : Des
quatre partis fédéralistes qui se
présentent, il y en a au moins trois qui vont être dans l'opposition. Et ce
n'est pas parce qu'ils vont être dans
l'opposition qu'ils vont être moins utiles. Et cette prétention du ministre, je
pense, a pour effet de sous-estimer, de banaliser. Je pense que ça manque de respect pour la fonction de député
et la fonction de député d'opposition. Je m'attendais à un peu plus
d'élévation de sa part.
Le
Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député. La parole est
justement au ministre pour cinq minutes cette fois.
M. Fournier : Oui. Je
regrette que, lorsque j'exprime mes opinions, cela soit vu comme une attaque
par mon collègue. Lorsqu'il exprime son
opinion, qu'il a reprise encore une fois, à l'effet que le premier ministre du
Québec s'en remettait aux députés
fédéraux, je ne suis pas d'accord avec celle-là. Je ne me suis pas fâché pour
autant. Lui, il a le droit d'émettre
ses opinions, puis moi, je n'ai pas le droit. C'est comme ça qu'il voit ça, la
chose. Il va même jusqu'à réduire mon
expression sur les 10 minutes que j'ai faites en disant que je n'ai parlé que
de ça, ce qui est faux, ce qui est faux. J'ai reconnu sa main qui est venue rejoindre la nôtre pour souligner les
demandes faites par le premier ministre. J'ai souligné que ce qui était le plus structurant pour la
défense de nos compétences, c'était la demande sur le pouvoir fédéral de
dépenser. Pourquoi omettre, dans les cinq minutes que vous aviez, cela
pour ne parler que du Bloc québécois?
Alors, moi,
je suis d'accord pour qu'on parle des sujets que vous voulez mentionner, mais
amenez-les sur la table. Je n'ai pas
de difficulté avec ça. Là, vous ramenez l'élément que ce qu'il faut, c'est
voter pour l'opposition. Puis, c'est drôle,
quand on est en campagne électorale, quand vous êtes au Parti québécois, vous
voulez former le gouvernement. On a
eu une élection il n'y a pas longtemps, puis vous avez tout fait pour former le
gouvernement. Ça doit être important de
former le gouvernement quand on est un parti politique puis qu'on a des
objectifs. Ça doit être important, sinon vous ne vous battriez pas pour
ça ici, à l'Assemblée nationale.
• (10 h 30) •
Puis je le
sais pourquoi vous vous battez pour ça, et c'est tout à fait normal. Dans notre
système politique, on a des élections
aux quatre ans qui nous amènent à choisir des gouvernements. Il y a des députés
qui sont dans l'opposition. Ils font
leur travail, je ne le nie pas, je l'ai été moi-même. Mais c'est un
gouvernement qui va mettre de l'avant un programme politique. C'est à ce
que sert l'élection. Or, si on est à choisir, à cette élection-ci, un
gouvernement, je vous demande comment on peut voter pour le Bloc québécois en
choisissant un gouvernement. On laisse aux autres, à l'extérieur du Québec, le soin de choisir le gouvernement. Et là
on me dit... Honnêtement, je trouve ça un peu frustrant. Il me dit : Le premier ministre du Québec s'en remet aux députés
fédéraux pour défendre le Québec. Bien, le Bloc québécois puis le PQ s'en remettent aux citoyens du reste du Canada
pour choisir leur gouvernement. Je peux-tu trouver que c'est frustrant? Si on veut faire avancer... Puis parlons-en, là. Entamons la conversation qu'il
voulait entamer ce matin puis qui était bien partie. Entamons-la sur certains éléments, notamment
sur l'élément qui a été soulevé déjà tantôt sur le 25 % de contribution fédérale.
Alors, parlons de ça, puis réaffirmons l'importance de cet élément-là, et
souhaitons que le gouvernement qui sera élu pourra le faire. Quand je disais à l'égard du Bloc — puis ça, c'est une évidence, là : Il
n'a pas assez de députés pour qu'ils
forment le gouvernement, c'est ça, la formule. Alors, moi, je vois bien qu'il
n'est pas ma solution pour avoir 25 %. Ça, je le sais, ça saute aux yeux. Il pourra toujours s'opposer, mais il
ne pourra jamais proposer. Il va être, dans le fond, comme s'il était invité dans un aréna pour une
partie, il est voué aux estrades, bon. Alors, une fois que j'ai dit ça, je
peux-tu savoir quel club qui va gagner puis qui va compter un but pour
mon équipe?
Parlons du
25 %. Alors, l'historique est le suivant : lorsque la Loi canadienne
sur la santé a été établie dans des champs
de juridiction provinciale, il y avait l'idée de supporter à 50 % les
coûts. Au fil du temps, c'est descendu à telle enseigne qu'on est aux
alentours de 20 %. Et, si on n'y voit pas, ça va descendre en bas de
20 %. La proposition du gouvernement du
Québec, qui a été ralliée par nos collègues et mon collègue ce matin, c'est de
demander 25 %. Ça nous semble
tout à fait logique d'établir ce principe de support dans une compétence
québécoise où nous allons prendre nos décisions sur la santé.
Je crois que c'était cette semaine ou la semaine
dernière, je n'en suis pas certain, je donnais une entrevue à Mme Buzzetti, du Devoir, à Ottawa où je lui
disais sur cette thématique : Vous savez, la santé, là, c'est à Québec
qu'il y a des questions qui sont
posées puis c'est à Québec qu'il y a des réponses qui sont données. Ça fait que
c'est à Québec qu'on va prendre des
décisions. Puis là-dessus je pense qu'on s'entend tous, puis on peut se
redonner la main puis dire : C'est vrai. Alors, à partir de là, c'est nos compétences, puis on va les
réaffirmer sans arrêt. Puis il n'est pas question que quiconque vienne décider, d'ailleurs, ni pour nous...
Disons-le, là, ça n'oppose pas les Québécois aux Canadiens. Dans toutes les
autres provinces, ils
ont des systèmes différents. Chacun a des particularités. Je veux dire, le
système médical puis de santé en Ontario peut être très différent de
celui de la Colombie-Britannique.
Alors,
forcément, ça ne peut pas être un dictat d'Ottawa, qui est loin des réalités.
Par contre, là où Ottawa a un rôle à
jouer, c'est de s'assurer que ses transferts supportent... et il peut le dire
aux Canadiens. Et je crois que la campagne électorale... Et c'est ce que le
Québec veut dire aux acteurs fédéraux : Il faut investir en santé, il faut
le monter à 25 %, il faut le faire selon l'âge et il faut tenir des
compétences provinciales. Merci.
Le
Président (M. Bérubé) : ...M. le ministre. La parole est
maintenant au député de LaFontaine pour cinq minutes également.
M.
Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Vous me permettrez
d'entrée de jeu de vous saluer, de vous souhaiter le bonjour, évidemment de saluer mon collègue
député de Verchères. Aujourd'hui, je suis très heureux de faire l'interpellation et d'y aller sur le sujet qu'il a
choisi. Saluer également le collègue de la deuxième opposition et évidemment
mon collègue avec lequel aujourd'hui je
partage son plaisir de discuter, oui, dans le contexte d'une interpellation où,
comme le disait mon collègue de Verchères, il est là, le bon forum dans
notre système parlementaire. Il y a là un bon forum, devrais-je dire, dans notre système parlementaire, où on peut
approfondir des questions et on peut s'écouter. On essaie de ne pas
faire de monologue, mais on s'écoute et on essaie de tirer des postulats.
Et
je pense qu'il est important... et j'ai écouté attentivement mon collègue de Verchères
lorsqu'il faisait état... puis je le paraphrase, je ne prends pas ses
mots exacts, mais il a parlé d'une certaine frustration de voir que le Québec
ne s'épanouirait pas au sein de la
fédération canadienne. Et je ne pense pas trahir son propos en le résumant
ainsi. Et il a ciblé, dans son
intervention, l'importance, selon la conception du Parti québécois, pour que le
Québec s'épanouisse, qu'il y ait nécessairement la souveraineté du
Québec.
Moi,
j'aimerais l'inviter à réfléchir très sérieusement sur un postulat, un postulat
qui, pour moi, est indéniable et qui
fait en sorte qu'aujourd'hui je suis député du Parti libéral du Québec,
postulat qui fait en sorte que le Québec a su se réaliser au sein de la fédération canadienne. Et évidemment, il le sait — il a été député fédéral de 1993 à 2005,
je crois, il dit qu'il a participé à quatre élections fédérales — une
fédération — et
le Canada est loin d'être la seule fédération dans
le monde — est une
coopération constante et, je vous dirais, un système politique qui nécessite
constamment, presque au quotidien,
des échanges, de la collaboration et des ententes. Et, en ce sens-là, il est
important, je pense, de participer activement
non seulement au point de vue administratif, mais au point de vue électif au sein
de la fédération canadienne. Et c'est
pour ça, il va de soi, il coule de source dans mon esprit, que nos
représentantes, représentants à Ottawa, pour le Québec, doivent
nécessairement et obligatoirement être assis autour de la table des décideurs.
Effectivement,
mon collègue M. le ministre l'a souligné, c'est ce que souhaitait le Parti
québécois en avril 2014 : former
le gouvernement pour décider, pour influer sur les décisions, faire en sorte
que le Québec tire son épingle du jeu. Et,
en ce sens-là, je pense que les 78 députés — on est maintenant 78 députés fédéraux, on
peut envoyer 78 fédéraux — doivent prendre une part active au
sein de la fédération canadienne.
Mais j'aimerais
revenir sur mon postulat. Et ça participe des lectures que mon collègue de
Verchères a nécessairement faites lui aussi
lorsque l'on parle d'une évolution qui fait en sorte que le Québec des
50 dernières années plus particulièrement, je parle depuis la
Révolution tranquille, a su tirer son épingle du jeu au sein de la fédération canadienne. Ça, on ne peut pas le nier. Maîtres
chez nous, Jean Lesage, 1960, réélu en 1962. René Lévesque, qui a été
l'un des fondateurs par la suite du Parti
québécois mais qui a participé et qui a vu de l'interne, de l'intérieur, tout
ce qui a pu être fait, la fondation
de la... Jacques Parizeau a participé à la fondation de la Caisse de dépôt et
placement du Québec. René Lévesque
également, au sein d'un gouvernement libéral, a pu participer à la
nationalisation de l'électricité qui a été reprise par la suite... parce qu'on sait que c'est sous un gouvernement
d'Adélard Godbout en 1944 qu'il y avait eu d'abord une première prise de
possession du mouvement hydraulique au Québec.
Et
j'aimerais le référer, j'aimerais faire référence à Mario Polèse. Vous allez
dire : Mario Polèse? Oui, il a participé au comité Bonin lors de la préparation du premier référendum de 1980. Il
était professeur à l'INRS, et, en 1977‑1980, avait participé au comité Bonin, et a écrit par la suite — c'est beaucoup plus contemporain, en 2009 — la citation suivante, et je le cite : «De l'histoire des 50
dernières années, je tire aujourd'hui la leçon que l'appartenance à la
fédération canadienne n'a pas empêché
les Québécois d'avancer. Ce que les Québécois ont réalisé — individuellement et collectivement — depuis les débuts de la Révolution tranquille n'est pas banal : Un peuple
en situation d'infériorité économique et sociale s'est transformé en l'espace d'une génération en l'un
des peuples les plus prospères, les plus créateurs et, j'ose le dire, les plus libres de la terre. Peu de peuples, dont des
peuples qui disposent d'un État souverain, ont réussi un virage aussi
spectaculaire.» Fin de la citation. Ça, c'est Mario Polèse, Serions-nous
plus libres au lendemain d'un oui?, en 2009, page 181.
Alors, j'aimerais que l'on puisse
discuter notamment de ce postulat : Le Québec tire son épingle du jeu et
est parmi les sociétés les plus libres et prospères au monde.
Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de LaFontaine.
La parole est maintenant au député de Verchères pour cinq minutes.
M.
Bergeron :
Merci, M. le Président. Je remercie le député de LaFontaine de nous avoir
rappelé que René Lévesque, qui a été
un ministre important dans le gouvernement libéral de Jean Lesage, qui a
contribué puissamment à mener le Québec sur sa Révolution
tranquille, a été tellement convaincu du fait que le Québec parvenait à s'épanouir à l'intérieur du Canada qu'il a été
fonder le Parti québécois. Un Lucien Bouchard, qui a été ministre fédéral
dans un gouvernement conservateur, a été
tellement convaincu que le Québec avait sa place à l'intérieur du Canada qu'il a
été fonder le Bloc québécois.
Et je pense que ce nouveau discours du
Parti libéral à l'égard du Bloc québécois traduit, je dirais, cette attitude
un peu plus timorée des gouvernements
libéraux antérieurs à l'égard du gouvernement fédéral et les partenaires de la
fédération. Moi, je me souviens que,
lorsque le Bloc québécois a été fondé, il y avait un certain Robert Bourassa,
premier ministre du Québec, qui
n'était pas tout à fait étranger à la fondation du Bloc québécois parce qu'il
voyait dans cette formation politique
l'occasion justement de faire pression sur le pouvoir à Ottawa pour obtenir des
gains pour le Québec. Et je me souviens
que le député de LaFontaine lui-même, dans une vie antérieure, j'imagine, était
plutôt favorable au Bloc québécois, qu'il
en avait fait la promotion. Alors, ce changement de discours du Parti libéral,
pour moi, pour reprendre un terme qui a été employé par le ministre un
peu plus tôt, est très significatif, très significatif.
• (10 h 40) •
Cela
dit, je ne veux pas que le ministre m'accuse de n'avoir parlé que du Bloc
québécois, alors que c'est lui qui a
mis la balle au jeu dès le départ. Je vais revenir, moi aussi, à ce qui est
l'objet de cette interpellation, à savoir les propositions des partis
politiques dans les champs de compétence du Québec. Et je rappelle encore une
fois que le Bloc québécois ne propose aucune
mesure qui empiète dans les champs de compétence du Québec. Alors, une fois
cette précision faite, allons-y, par exemple, dans des propositions
faites par le NPD en matière de santé.
Le ministre
nous a invités à parler de santé. On va regarder ce que le Nouveau Parti démocratique nous propose en matière de santé. Alors,
rappelons que la santé, c'est plus du tiers du budget du Québec.
C'est une compétence exclusive du Québec.
Le gouvernement fédéral s'est institué en arbitre par sa loi fédérale de la santé simplement parce qu'au
départ il versait 50 % des fonds pour assurer les soins de santé. Comme le
rappelait Gilles Duceppe hier, on va atteindre
le 18 % bientôt, là. Alors, c'est dire à quel point cette contribution
fédérale s'est érodée, ce qui n'empêche pas le gouvernement fédéral de
toujours imposer ses conditions.
Mais là le
NPD nous propose des investissements dans les soins à domicile pour 41 000
aînés, 5 000 places en soins de
longue durée, améliorer l'accès aux soins palliatifs en fin de vie,
300 millions pour 200 cliniques médicales, aider les provinces à embaucher 7 000
professionnels de la santé, une stratégie nationale sur la maladie d'Alzheimer,
un fonds d'innovation en santé
mentale, une assurance médicament universelle, tout autant de mesures précises
qui viennent dicter au Québec... guider les façons de faire ou qui
viennent orienter des façons de faire.
Le député de,
je crois, Rimouski, Guy Caron, avait dit en conférence de presse qu'on
veut s'assurer que le fédéral puisse
exercer un leadership en santé. Ma question, fondamentalement au ministre,
c'est : Est-ce au gouvernement fédéral d'assurer un leadership en santé lorsqu'on n'assume plus que 18 %
des soins de santé au Canada et au Québec? Est-ce que cette promesse d'un droit de retrait avec
pleine compensation financière de la part du NPD tient la route lorsqu'on
voit à quel point ils y vont de mesures
précises, détaillées en matière de santé, où on a l'air de dire : Bien,
nous, là, notre vision pour la santé,
c'est cela? Alors, le texte ensuite, que le Québec aurait le droit de se
retirer des conditions fédérales avec
pleine compensation financière mais pas les autres provinces, alors est-ce que
ça va tenir la route, ça, lorsqu'on va discuter au cours des prochains
mois?
Alors, si
jamais la promesse ne tient pas la route, est-ce qu'on en viendra, parce que le
gouvernement fédéral nous proposera à nouveau d'être plus généreux dans
sa contribution, à accepter l'argent fédéral avec les conditions qui viennent avec? Qu'est-ce qu'on va faire si le
gouvernement fédéral décide d'attacher des conditions à l'argent qu'il nous
propose en santé?
Le
Président (M. Bérubé) : Ça va, M. le député de Verchères? Donc,
il vous reste quelques secondes. C'est bon? O.K. M. le ministre, cinq
minutes en réplique.
M.
Fournier : Merci. Je suis très content de la question puis de
la façon dont on l'oriente. J'avais un peu parlé, moi aussi, du 25 %, je vais y revenir. Je ne
peux évidemment pas m'empêcher de revenir sur certains éléments d'introduction que notre collègue a amenés,
parlant notamment de René Lévesque et de Lucien Bouchard. René Lévesque,
qui est un monument, qui a eu l'opportunité
de servir dans un parti fédéraliste et dans un parti séparatiste, c'est exact,
et qui, à la fin de sa carrière, a choisi le «beau risque». Donc, il a
eu un parcours qui, me semble-t-il, collait pas mal à une évolution des mentalités québécoises où il y avait
un grand geste de revendication puis, par la suite, un désir de trouver
une collaboration.
Lucien Bouchard,
évidemment, a été premier ministre du Québec, a été ministre à Ottawa, est
boudé maintenant par le Parti québécois pour des raisons que j'ignore. Mais là
ce qui m'a le plus intéressé, c'est lorsqu'il a parlé de Robert Bourassa
qui supportait le Bloc québécois. On pourrait même citer le chroniqueur
maintenant mais ancien ministre libéral
fédéral Jean Lapierre qui a quitté les libéraux fédéraux pour adhérer au
Bloc à l'époque. Et effectivement c'est le point que je faisais tantôt.
Il a raison de dire, citant Robert Bourassa, qui, d'une certaine façon
avait initié ou lancé un mouvement... C'était à un moment où on voulait donner
voix aux Québécois, pas au Parti québécois. Et c'est ça qui a changé.
Honnêtement, je vous montre cette affiche, M. le
Président. Je la montre à tout le monde : Qui prend pays prend parti. Imaginez-vous la photo de Robert Bourassa. Bien non. Mais c'est
ça maintenant, le Bloc québécois. Alors, moi, je fais juste noter que c'est comme ça. Je fais juste noter que le
Bloc québécois, maintenant, ne veut pas représenter les Québécois, il veut représenter le Parti
québécois. C'est ce que je voulais dire tantôt, mais je ne veux pas m'immiscer,
là, sans arrêt.
Et il
dit : Qu'est-ce que les autres partis proposent? Il dit : Le Bloc
québécois est le seul qui propose de ne pas faire d'empiétement. Le Bloc québécois ne propose rien, il s'oppose. Il ne peut pas proposer, il ne formera pas
le gouvernement. Quand on est un gouvernement, les oppositions
s'opposent, elles ne peuvent pas proposer. L'initiative de proposition revient au gouvernement. Or, il ne veut pas être le gouvernement, il ne veut pas proposer. Donc, ça répond à cela.
Maintenant, abordons la question
surtout du NPD, si j'ai bien compris, parce
que la question était beaucoup
sur le NPD. Bonne question
parce que moi, je partage le point de vue du député de Verchères
à 100 %. Les compétences du
Québec en matière de santé et des
provinces — parce
que je le dis pour toutes les provinces, c'est pareil pour toutes les provinces — sont les nôtres. Et, bien sûr, lorsqu'il
note ces énoncés de la part du NPD, il faut leur dire : Attention! Ce
sont des compétences provinciales. Par
contre, ayons au moins le... racontons l'histoire, puis je ne le dis parce que
je veux défendre leur thèse. Je fais juste mettre sur la table des
éléments qui...
Une voix :
...
M. Fournier : Non, non, mais c'est des éléments qui sont sur la table.
Ils ont aussi dit — je le
dis pour ne pas alambiquer le
débat — que le
Québec pouvait se retirer sans compensation — je veux dire, je veux juste le dire — sans condition, sans compensation. M. Mulcair l'a redit, je crois, hier.
Alors, je fais juste, donc, mentionner. Nous, ce qu'on constate,
c'est : Il faut augmenter à 25 % puis il faut respecter nos
compétences.
Pour
moi, lorsque je regarde l'ensemble des éléments qui sont sur la table en ce
moment, je constate qu'il est possible de
faire avancer cette idée d'augmenter le pourcentage dans le respect des
compétences. Alors, quand on est du Québec, comment on fait ça? Bien, d'abord, on l'énonce. Le premier ministre n'a
pas commencé à le dire dans une lettre, là, c'était dans le budget Leitão, là... excusez, le budget du
ministre des Finances actuel, premier et deuxième. Il y a eu des énoncés
qui ont été faits régulièrement ici. Mais il
a porté ce combat, notamment pour bâtir des alliances avec les autres
provinces, à telle enseigne que, là-dessus, l'augmentation à 25 %,
le respect des compétences des provinces, l'importance de le répartir selon les pyramides des âges a été
discuté, entériné au Conseil de la fédération. Il faut occuper tous les champs
de décision, il faut aller partout. Et c'est
aux Québécois, maintenant, de décider. Qui va nous faire passer du 20 % à
25 %? Quel ministre des Finances
de quel parti le fera? Et c'est ça, l'enjeu, un des enjeux qu'il y a lorsqu'on
a à se demander qu'est-ce que les
gens proposent de faire au gouvernement fédéral pour le Québec. Et on ne peut
pas passer à côté de cette question-là.
Et
ce n'est pas parce que mon collègue dit : Sur les quatre fédéralistes, il
y en a trois qui vont être dans l'opposition. Le point, c'est le suivant : Il y en a un qui va l'être, puis, en
ce moment, mon collègue propose que ce soient les Canadiens des autres
provinces qui décident ça va être qui. Je n'en reviens pas qu'on délègue aux
autres Canadiens le choix du gouvernement fédéral, alors qu'on ne prendrait pas
notre place.
Le
Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. Et, amateurs
d'éphémérides, sachez qu'un 25 septembre, en 1989, le premier
ministre Bourassa — parce
qu'on l'a évoqué — remportait
une élection. Alors, pour les amateurs d'éphémérides.
M. le député de
LaFontaine, vous avez cinq minutes. C'est à vous.
M.
Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Vous allez me
permettre, dans un premier temps, de poursuivre ma tentative — mais je
ne passerai pas cinq minutes là-dessus, là — d'établir un postulat avec mon collègue de
Verchères sur le fait que le Québec a
tiré de façon remarquable et formidable son épingle du jeu au sein de la
fédération canadienne. Si on pouvait
s'entendre là-dessus, M. le Président, on pourrait peut-être faire un rapport
commun. Je ne sais pas si on peut faire un rapport commun à la fin de
l'interpellation sur des propositions qui nous apparaissent évidentes.
Et
vous remarquerez, M. le Président, que je prends soin de ne pas prendre des
citations, des citations de gens qui
sont fédéralistes, qui l'ont été toute leur vie et qui... Je vais référer à
l'ancien collègue Joseph Facal, qui est chroniqueur, qui a été ministre, député du Parti québécois,
ministre du Parti québécois et qui, lui aussi, arrivait au même postulat. On se
rappelle Mario Polèse, qui a fait partie des
chercheurs qui ont préparé le premier référendum de 1980, et qui après, en 2009, dans son livre, a reconnu que le Québec
avait tiré son épingle au sein de la fédération canadienne, et que, lorsqu'il
enseignait, trouvait assez dérisoire de dire
à ses étudiantes et étudiants qu'ils faisaient partie d'un peuple opprimé parce
qu'en 2009, lorsqu'il écrivait cela, ce
n'était plus du tout la réalité des choses. Et le discours, malheureusement, du
Parti québécois, et je le dis de façon très respectueuse, ne tient plus
la route.
• (10 h 50) •
Joseph
Facal, dans son livre de 2010 intitulé Quelque chose comme un grand peuple,
à la page 12, et je le cite : «...l'affirmation économique,
politique, culturelle du peuple québécois, au cours des dernières décennies,
doit se lire comme une des grandes réussites
du monde occidental...» Fin de la citation, page 12. Le Québec, une grande
réussite du monde occidental. M. le
Président, excusez du peu, ce n'est pas un député libéral qui l'a dit, c'est un
acteur politique, ancien député du Parti québécois, ministre du Parti
québécois qui le reconnaît.
Allons
plus loin. À la page 130 de son livre, 2010, Quelque chose comme un grand
peuple, Joseph Facal écrit, et je
le cite : «Il y a d'abord le fait indéniable que le Québec a réussi à se
moderniser et à prospérer à l'intérieur du système politique canadien.
[...]le Québec a progressé au sein du Canada.» Fin de la citation. Quand on
dit, et je cite Facal, «à l'intérieur du
système politique canadien», ça veut par définition dire à l'intérieur
notamment du Parlement, à l'intérieur du
cabinet des ministres et lors des rencontres, lors des réunions, lors des
décisions autour de la table, là où les décisions se prennent quant à la perception de nos taxes et
impôts et à la façon dont elles seront investies et dépensées. Bien, c'est là
où le Québec doit avoir une voix forte. Alors, ça, c'est Joseph Facal qui en
faisait état.
Et
je pourrais longuement également citer le livre de Jacques Parizeau, Souveraineté
— Hier,
aujourd'hui et demain, qui faisait état lui aussi, comme je l'avais fait
un peu plus tôt, que, dans le cadre de la Révolution tranquille, il y avait eu
des avancées remarquables au sein du Québec, qui est au sein du Canada.
Il a fait
référence, effectivement... Moi, je ne l'ai plus, M. le Président, mon gilet de
1993. Je ne sais pas si le collègue de
Verchères l'a gardé. Il y a un gilet, et c'est nul autre que Lucien Bouchard
qui en faisait état le 20 août 2014. Et je le cite. Le 20 août dans Le Devoir — et les gens peuvent aller voir la
référence — le
titre : Le Bloc dilue le pouvoir politique du Québec à Ottawa, selon Bouchard, le 20 août 2014, La Presse
canadienne, et je cite Lucien Bouchard : «J'ai un gilet que j'ai conservé [...] c'était du matériel de
campagne, et c'est écrit là-dessus "J'ai travaillé à la première et
dernière campagne du Bloc
québécois" avec le logo du Bloc. Je ne l'invente pas.» Fin de la citation.
Ça, c'était Lucien Bouchard il y a à peine un an, père fondateur... un des fondateurs du Bloc québécois en 1990,
auquel je m'étais rallié, moi aussi. Je n'ai pas gardé mon gilet de
1993. Mais Lucien Bouchard, force est de constater, vient faire ce constat.
Par la suite,
mon collègue de Verchères a parlé de René Lévesque, sous un gouvernement
libéral de Jean Lesage, qui avait
fait un passage souverainiste, et il s'était inscrit dans le «beau risque».
C'est quoi, le «beau risque»? Le «beau risque»,
c'était de dire : Si on fait la démonstration que le Canada, ça
fonctionne, on vient de torpiller notre option souverainiste. C'était
ça, le «beau risque». Et il prenait le «beau risque».
Mario Polèse
vient de conclure que le «beau risque» s'est réalisé. Joseph Facal a conclu
aussi que le «beau risque» s'est
réalisé. Le Québec sait faire au sein de la fédération canadienne, et, dans le
contexte actuel, avec le Bloc québécois, force nous est, lorsqu'on veut
mieux pour le Québec, de faire écho des propos de Lucien Bouchard, qui dit :
Le Bloc québécois — c'est
lui qui l'a dit — dilue
le pouvoir du Québec à Ottawa. Puis ça, personne ne veut ça.
Le
Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de LaFontaine. Et
c'est maintenant que le député de Deux-Montagnes fait son entrée dans le
débat pour cinq minutes.
M. Charette : Merci, M. le
Président. Étant donné que c'est la première fois que j'ai l'occasion de
prendre la parole ce matin, vous allez me
permettre les politesses d'usage et saluer le ministre, leader du gouvernement,
le collègue de LaFontaine qui
l'accompagne, également tout le personnel à leur côté mais également le député
et collègue de Verchères, qui se
réjouissait — c'est
l'impression que j'ai eue — de ma présence ce matin. Et je peux l'assurer d'une chose, je
serai ici pour toute la durée de
l'interpellation parce qu'effectivement il y a des beaux côtés à cette formule.
Le collègue de Verchères le
mentionnait, l'interpellation, c'est une occasion sans doute unique pour aller
chercher des précisions de la part du gouvernement, mais également, pour
une formation de l'opposition, c'est l'occasion d'exprimer un petit peu le choix de ses priorités. Donc, ça m'amuse, à
l'occasion, de voir les priorités que relève l'opposition officielle dans ses
choix d'interpellation. Mais, ceci dit, le
sujet ce matin, il est important, et, oui, c'est de notre devoir de prendre la
parole. Et, de mon côté, c'est donc
d'autant plus agréable de le faire que c'est la première fois depuis qu'un
important mandat m'a été confié, il y
a quelques jours, par le chef de notre formation politique, François Legault,
lors du congrès... non pas du congrès mais du caucus présessionnel que
l'on a tenu il y a quelques jours à peine.
Ce que la
coalition a convenu de faire au cours des prochaines semaines, et ce n'est pas
banal, c'est prendre acte de son
évolution, de sa maturité. La coalition est encore une jeune formation
politique qui va souligner, dans quelques semaines, son quatrième
anniversaire uniquement. Donc, on parle d'une jeune formation politique. Et on
a décidé de définir de façon plus
particulière son rôle ou, du moins, son programme en matière de relations
interprovinciales, d'une part, mais
de la place que le Québec souhaite occuper aussi au sein du Canada parce que
c'est effectivement la grande conclusion
à laquelle on est arrivés au cours des derniers mois, au cours de la dernière
année : on devait se positionner face
à un débat qui est très polarisant sur la question nationale, à savoir un débat
qui oppose traditionnellement deux camps, les fédéralistes, d'un côté, les souverainistes, d'un autre. Et on ne
pouvait pas indéfiniment rester flous sur nos intentions. Donc, déjà, on a eu l'occasion de préciser une
chose : ce que l'on apportera comme propositions au cours des prochaines
semaines, des prochains mois, se fera assurément dans le cadre de l'espace
canadien. Donc, le projet souverainiste, la Coalition avenir Québec le rejette
d'emblée. Elle le rejette comme une très vaste majorité de Québécois le
rejette.
Et, oui, je
ne peux pas nier mon passé, j'ai été, pendant un certain nombre d'années,
député du Parti québécois mais je
fais partie de ce million de Québécois qui depuis 1994, au fil des élections, a
décidé de délaisser le Parti québécois parce
que son option ne répondait plus à leurs aspirations. Donc, je ne suis pas le
seul. Je fais partie d'un courant, je pense, qui est bien présent dans
la population québécoise, donc ce million de Québécois qui, traditionnellement,
appuyait le Parti québécois et qui a décidé
de le délaisser pour aller rejoindre les millions de Québécois qui ne se
retrouvent pas dans cette option-là.
Mais, en même temps, lorsqu'on regarde, ce qu'offre le camp fédéraliste n'est
pas, pour nous, davantage satisfaisant,
encore moins au cours des dernières années où les revendications semblent de
moins en moins présentes du côté du Parti libéral, notamment.
Donc, pour la
Coalition avenir Québec, ce sera le défi, au cours des prochaines semaines, de
définir une position qui se fera à
l'intérieur du Canada et certainement pas dans une optique de menace, comme le
Parti québécois aime le faire à
travers des revendications. Le Parti québécois aime se faire dire non pour
ensuite justifier son option. Nous, on apportera des propositions
constructives, comme on le fait depuis toujours, pour équilibrer, en quelque
sorte, l'offre politique qui, actuellement, est présente au niveau québécois.
Et, on ne
peut pas le nier, c'est le Parti libéral qui est au pouvoir pour les prochaines
années, et on s'inquiète d'une chose.
Effectivement, on l'a mentionné lors des élections de 2008, notamment. On avait
un chef, à l'époque, en la personne de
Jean Charest, qui s'était fait très revendicateur dans le cadre des élections
fédérales. Et, lorsque l'on regarde aujourd'hui les revendications que fait ce même parti avec un autre chef, on peut
tout simplement conclure à une résignation ou, à tout le moins, on a abdiqué sur bon nombre de sujets.
Il y avait quelques thèmes qui nous semblaient importants, qui faisaient
partie de la liste de 2008 et qui, malheureusement, n'y figurent plus
aujourd'hui, notamment la maîtrise d'oeuvre en matière de culture. J'ai ici la lettre que le premier ministre Charest
avait présentée, et cet élément-là n'y figure pas. Je me demande :
Est-ce que le gouvernement actuel juge qu'on a...
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le député, votre temps est écoulé.
M.
Charette : ...suffisamment obtenu en matière de culture pour ne plus
faire de revendications en cette matière?
Le
Président (M. Bérubé) : Alors, votre temps est écoulé, M. le
député, c'est écoulé. Veuillez respecter les règles, s'il vous plaît.
M. le ministre, en réplique.
• (11 heures) •
M.
Fournier : Oui. Bon, bien, bienvenue à notre collègue qui nous
annonce sa pleine participation. On l'accueille avec plaisir. Je reviendrai sur cet élément qui justifiait son départ
les deux dernières fois parce que c'est... une fois, mais je pense qu'il
y avait une absence à l'autre fois. En tout cas, on ne peut pas le dire non
plus.
De toute
façon, je veux revenir sur les demandes qui sont faites aujourd'hui.
Honnêtement, je croyais que la CAQ était
pour appuyer les demandes qui ont été faites. Je suis étonné qu'on ne reçoive
pas leur appui là-dessus, mais, bon, je
n'y peux rien. Il nous dit que la CAQ est une jeune formation. Ne nous y
trompons pas. C'est peut-être une nouvelle formation mais dont certains dirigeants, dont lui-même, sont des députés
qui étaient députés d'une autre formation politique, le Parti québécois, avant. Et c'est vrai aussi
pour le chef. Alors, jeune formation qui a une longue histoire politique de
séparation. Avouons quand même que c'est avec ça que nous oeuvrons
présentement.
Alors, leur
vision du Québec et de sa capacité à créer des alliances, à jeter des ponts
avec les autres, est sans doute mue
par cette idée de : L'isolement du Québec est préférable qu'à des
collaborations. Probablement que c'est un peu ce qui va le guider dans
sa suite des représentations.
Alors, il
nous dit qu'ils ont remarqué que leur position était un peu floue avant. Bienvenue dans le pays du réel! Ça fait un petit bout de temps qu'on le disait parce qu'honnêtement la différence entre la CAQ
d'aujourd'hui et celle, disons, d'il y a deux mois — parce
que ça s'est passé assez rapidement — il y a deux mois — et
ça, ça date du début, là, des présentations ou des prétentions électorales de
la CAQ lors des dernières élections — la CAQ se disait clairement
ni fédéraliste ni séparatiste. Aujourd'hui,
on les voit d'ailleurs lancer des invitations aux séparatistes pour aller les
rejoindre. Il y a un député qui a dit
ça. Aujourd'hui, ils sont passés de ni fédéralistes ni souverainistes à et
fédéralistes et souverainistes. Je ne
peux pas dire qu'en termes de passage du flou à précision on s'y retrouve
vraiment. Il n'aime pas ce qu'on propose, mais il nous dit qu'il ne sait pas
encore ce que lui veut. Alors, sa grille d'analyse me semble probablement
déficiente pour pouvoir analyser ce qu'on propose.
Maintenant,
puisqu'il ne semble pas d'accord avec les demandes que nous avons faites,
puis-je lui rappeler sa réaction
lorsqu'à juste titre... non pas la réaction qu'il a faite parce que je pense
qu'il aurait dû rester avec nous, mais la raison pour laquelle il posait ce geste, c'est qu'il trouvait que,
lorsque l'opposition officielle avait décidé de nous parler d'indépendance ici — je me souviens même, c'était à l'époque du
passage de la comète Tchouri, si vous vous en souvenez — à ce moment-là,
il nous disait : Les vraies préoccupations, ce n'est pas ça. C'est
l'emploi, c'est l'économie, et donc ce n'est pas le sujet. Et je
m'étonne qu'aujourd'hui il ne veuille pas parler des demandes que nous faisons.
Par exemple,
lorsqu'on parle du financement des infrastructures, notamment liées à la
Stratégie maritime et au Plan Nord,
on est en train de parler d'emploi. Je peux même vous dire qu'à l'égard du Plan
Nord, ce qu'on en train de se dire,
c'est lancer un moteur économique de création d'emplois par des infrastructures
qui donnent accès à des ressources pour
lesquelles on n'a pas accès, et, lorsqu'on y aura accès, on va lancer un
deuxième moteur économique. C'est de la création d'emplois au carré, les infrastructures avec le Plan Nord.
C'est un moteur économique qu'on lance, qui lance un autre moteur
économique, et il n'est pas pour ça.
On parle de
l'accord Canada-Union Européenne sur deux aspects, d'abord sur la protection
des fromagers et sur la protection de l'accord, ce qui m'amène d'ailleurs
à dire mon étonnement lorsque le Bloc québécois a la position suivante : Si les fromagers ne sont pas
compensés, on est contre l'accord, accord qui a été appuyé par le Parti
québécois. Et là ça m'a étonné parce
que ça met un peu en contradiction ma position à l'effet que le Bloc représente
le Parti québécois. Ça m'étonne un peu.
Une voix : ...
M.
Fournier : Non, je l'avoue, des fois, il faut apporter des...
il faut se dire : Là, il y a quelque chose qui ne marche pas. Bien, ils vont me l'expliquer parce que,
quand même, il faut se souvenir que c'était la première ministre Pauline Marois
qui a accepté l'accord de libre-échange avec
toutes ses composantes. Et là, tout à coup, le chef du Bloc dit : Bien
non, on n'en veut plus. Mais,
honnêtement, dans l'entente de libre-échange, il y a des gains énormes,
énormes. Et il faut s'assurer de
compenser et d'accompagner les fromagers. Il ne faut pas annoncer à l'avance
qu'on va tout laisser tomber. Enfin, c'est mon point de vue. Mais ça,
c'est des emplois. Ça, c'est de l'économie.
L'accord sur
le Partenariat transpacifique dont on parle ici, dans nos demandes, et qui
insiste pour protéger la gestion de
l'offre, encore une fois, c'est deux éléments importants, économiques — je vois que je n'ai pas assez de temps — protéger notre agriculture rurale et créer plein d'emplois parce qu'il y a un
marché immense pour nous. Pourquoi vous êtes contre?
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le ministre. Merci.
La parole est maintenant au député de LaFontaine
pour cinq minutes.
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le Président, je vous remercie. Je salue la présence, ce
matin, de notre collègue de Deux-Montagnes, qui représente la Coalition
avenir Québec. Et je suis heureux de constater qu'il aura un second bloc pour nous aider à faire la lumière sur ce qui
m'apparaît être, et il me corrigera si j'ai tort, je n'en demande pas
mieux : Nous ne sommes pas
souverainistes, nous ne sommes pas fédéralistes, bien au contraire. Il faudrait
définir le «bien au contraire». Mon collègue également tente d'apporter sa pierre dans cet
édifice, qui, ma foi, peine à s'édifier, en disant : Non, non, non, ils ne sont pas ni souverainistes
ni fédéralistes, ils sont souverainistes et fédéralistes. Alors, à un certain
moment donné, la Coalition avenir Québec
devra se faire une tête, devra préciser des éléments qui sont toujours dans les
parages.
Par exemple,
qu'adviendra-t-il du moratoire de 10 ans en 2022? Comment ça, moratoire de
10 ans? Mon collègue de
Deux-Montagnes n'est pas sans savoir que le chef de la Coalition avenir Québec
affirmait qu'il ne militera plus pour la souveraineté, du moins, du moins, pour les 10 ans à venir. Et là je
cite, M. le Président, un
article du Devoir du 14 juin 2011, ce qui fait en sorte que, de 2011, 10 ans plus tard, on est en 2021‑2022 : «Le sort du projet souverainiste
sera décidé par la prochaine
génération, a tranché aujourd'hui le fondateur de la Coalition [avenir]
Québec.» Alors, le chef de la Coalition avenir Québec a tranché en disant,
et il le disait en 2011 : Moratoire sur les référendums jusqu'en 2022.
J'aimerais
savoir de mon collègue de Deux-Montagnes, qui représente la Coalition avenir
Québec : Qu'adviendra-t-il au
lendemain de ce moratoire-là? Y aura-t-il un prolongement du moratoire? Et
comment pouvons-nous, lorsqu'il affirmait, et c'est le deuxième élément
sur lequel j'aimerais revenir...
Et je ne sais
pas, M. le Président, si vous connaissez Henri Guillemin. Henri Guillemin est
un historien, fameux historien, dont
j'adore les capsules, évidemment, qui paraissait sur la télévision française
dans les années 50, 60 et 70 et qui aimait
beaucoup conserver les documents, aimait beaucoup les citations, et je m'en
inspire beaucoup. Et j'ai été capable, non
sans peine, de mettre la main sur un document, daté de mai 2005, qui s'appelle Finances
d'un Québec souverain, qui a été
écrit en mai 2005 par l'actuel chef de la Coalition avenir Québec et qui
disait, M. le Président, qu'un Québec souverain,
sur cinq années, engrangerait des profits de 17 milliards. Il faisait une
analyse sur plusieurs pages. Et j'aimerais l'entendre sur sa méthodologie, M. le Président, parce que, celles et
ceux qui nous écoutent à la maison, il prévoyait faire des projections budgétaires d'un Québec souverain,
projections sur cinq ans. Il allait essayer d'avoir un bénéfice ou un déficit. Il disait : Non, non, il va y avoir
un bénéfice de 17 milliards sur les cinq prochaines années mais en prenant
une seule année de référence : 2003‑2004.
Alors, sur une tête d'épingle, sur une tête
d'épingle, il faisait une projection sur les cinq prochaines années et arrivait... Et c'est l'actuel chef de la Coalition
avenir Québec qui disait : «L'étude a consisté à comparer sur un horizon
de cinq ans les finances du Québec comme pays
souverain et comme province canadienne.» Et il disait : Le Québec doit
être souverain. Et c'est le chef de la Coalition avenir Québec qui disait ça en
2005, études étoffées et étayées dont je questionne
la méthodologie parce que quand on prend une seule année de référence,
lorsqu'on connaît les variations d'une année
à l'autre, vous pouvez avoir des résultats tout à fait distincts. Et il
concluait : «Les gains de la souveraineté peuvent aussi être
chiffrés à 17 milliards sur un horizon de cinq ans.»
Mais le chef
de la Coalition avenir Québec, qui est comptable, je crois, de formation,
évidemment voulait s'assurer que ça
tenait la route. Alors, il avait demandé à l'époque à cinq experts. Et là moi,
je ne ferai pas grief à notre actuel collègue de Rousseau, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en
matière de finances et revenus. Je ne ferai pas un grief à mon collègue de Rousseau, qui est souverainiste,
qui avance ses arguments à visière levée, qui, lui, à l'époque, disait :
Oui, cette analyse tient la route. Il était
l'un des cinq experts qu'avait retenus l'actuel chef de la Coalition avenir
Québec pour dire : Oui, ça tient la route.
Maintenant,
deux choses l'une : le chef de la Coalition avenir Québec a commis une
erreur en 2005. Il n'aurait pas pu
conclure et n'aurait pas dû conclure qu'un Québec souverain engrangerait sur
cinq ans 17 milliards de bénéfice. Donc, il s'est trompé ou,
aujourd'hui, il veut mettre de côté ce qu'il disait à l'époque comme étant des
bénéfices d'un Québec. Il faudrait savoir. J'aimerais savoir la position sur ce
document.
Le
Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de LaFontaine. Ça
met fin à votre temps. Et c'est au député de Verchères, maintenant, pour
cinq minutes.
• (11 h 10) •
M.
Bergeron : M. le
Président, je ne nierai pas que les échanges sont extrêmement intéressants.
Maintenant, est-ce qu'ils répondent au but de cette interpellation? Ça, c'est
une autre question.
Je note
qu'encore une fois le ministre a dénigré le rôle de l'opposition. Je regrette,
M. le ministre. Oui, nous avons fait
la lutte pour être au gouvernement, mais je pense qu'un député d'opposition
peut amener des propositions. Et d'ailleurs ça va à l'encontre de ce que votre premier ministre nous a invités à
faire en début de mandat en nous invitant à faire des propositions. Alors, je pense que, oui, les
députés de l'opposition ont leur rôle à jouer et les députés de l'opposition
peuvent apporter une contribution intéressante.
J'ai entendu
le député de LaFontaine. Ah! bien là, la transfiguration est complète, M. le
Président, là. Vraiment, on a affaire
à un gouvernement qui... On est loin de demander la réforme en profondeur du
fédéralisme canadien, on est loin d'attendre
que le fruit soit mûr, si tant est qu'il le devienne un jour. On a maintenant
décrété, du côté du député de LaFontaine, que, là, le «beau risque»
était réalisé. Donc, on passe à un autre appel.
Maintenant,
je veux revenir sur l'échange qu'on a eu sur la santé, et force est de
constater que je n'ai guère eu de réponse à mes questions concernant les
objectifs poursuivis par le Nouveau Parti démocratique. Et je vais prendre à
témoin un article signé par Hélène Buzzetti, le 17 septembre dans Le Devoir,
où elle disait : «Pour toucher la manne, les
provinces devront s'engager à investir l'argent dans les secteurs jugés prioritaires par Thomas
Mulcair.» Alors, d'un côté, Thomas
Mulcair dit au premier ministre : Oui, oui, il va y avoir un droit de retrait avec
pleine compensation financière et, de
l'autre côté, Thomas Mulcair dit : Il y a ça, il y a
ça, il y a ça sur lesquels on veut investir, puis, pour
pouvoir toucher la manne, il va falloir que vous utilisiez l'argent dans
les secteurs qu'on juge prioritaires.
Alors, on n'a
pas entendu le ministre nous dire ce qu'il allait faire, si tant est que
Thomas Mulcair décidait de tenir parole
dans un sens ou dans l'autre. Là, on ne sait pas trop si c'est Tom qui a promis
quelque chose, puis Thomas a promis autre chose, mais, clairement, on a promis deux
choses complètement contradictoires. Puis là, nous, il faut qu'on
essaie de se dépatouiller là-dedans.
Mais le ministre
nous a parlé d'infrastructures. Il nous a parlé du Plan Nord
puis de Stratégie maritime. Stratégie maritime,
il serait intéressant d'avoir une discussion sur les littoraux maritimes du Québec.
Le premier ministre Charest voulait
construire un port en eau profonde, alors que le littoral ne nous appartient
pas. En fait, les îles au large du Québec
appartiennent au Québec à
marée basse mais elles appartiennent au fédéral à marée haute. Peut-être
qu'on aurait dû avoir des réponses
pour mettre en oeuvre la Stratégie maritime. Le Plan Nord. Il n'y avait
pas une cenne, dans le budget, de prévue
pour les cinq prochaines années au niveau du Plan Nord. Peut-être
qu'il serait intéressant d'avoir des réponses du fédéral au niveau des investissements. On n'a pas une réponse des partis fédéraux au
niveau des investissements en infrastructures.
En fait, le gouvernement fédéral a mis en place un programme phare, qui est le programme Chantiers Canada, où on nous propose de verser à la pièce, selon les
desiderata puis les priorités du gouvernement
fédéral, l'argent.
Ça, c'est sans compter les 100 millions de dollars qui sont octroyés à la discrétion du fédéral dans
le domaine des infrastructures nationales.
On demande le versement en bloc, personne ne s'engage à un versement en bloc
des sommes au niveau des infrastructures. Le NPD va plus loin, il propose de transférer directement aux municipalités. Il a même été jusqu'à proposer la création d'un ministère des Affaires
urbaines. Alors, M. le Président, est-ce
qu'on va accepter cette orientation-là de la part du NPD ou est-ce qu'on ne va pas plutôt essayer de dire : Non, ça n'a pas de bon sens, ça
ne peut pas aller dans ce sens-là.
On veut le transfert en bloc, et c'est nous qui allons, avec les municipalités, déterminer quelles seront les priorités.
D'ailleurs, M. le Président, sous le gouvernement
du Parti québécois, on avait commandé un rapport sur les interventions fédérales dans le domaine des
affaires municipales. Ce rapport, normalement, devait être publié en janvier 2014; on n'en a jamais vu la couleur. Alors, le ministre
peut-il nous dire si ce rapport-là est prêt? S'il est prêt, est-ce qu'on peut en avoir une copie? À combien s'élève le coût des dédoublements?
Quels sont les effets des interventions fédérales dans le domaine des affaires
municipales? Quels sont, aux yeux du ministre, les principaux problèmes liés à la double
gestion qu'impose le fédéral au sujet
des infrastructures? Il me semble que, là, ce sont des questions sur
lesquelles on devrait avoir des réponses, et j'irais même jusqu'à dire, M.
le Président, sur lesquelles nous devons avoir des positions communes à l'égard
des partis politiques fédéraux parce
que, s'il est vrai qu'on doit s'en remettre aux députés fédéraux qui seront élus, là, au Québec, là, dans
les quelques prochaines semaines, il me semble que c'est important de dire à
ces députés fédéraux quelle est la position
des partis politiques à Québec, de l'Assemblée
nationale, sur ces propositions qui sont faites dans les champs de juridiction des provinces et
du Québec.
Le Président (M. Bérubé) : Merci,
M. le député de Verchères. M. le ministre, pour cinq minutes.
M. Fournier : Il y en a beaucoup.
Je vais essayer de prendre en rafale un peu vers la fin pour ce qui est du municipal. Et c'est un peu en rapport aussi...
quand mon collègue dit : Ah! comme ça, pour le Parti libéral, tout est beau, tout est parfait? Des fois, il faut le dire quand ça ne
va pas puis, des fois, il faut le dire quand ça va. Je pense que ça
serait correct. Puis, quand il y a
des empiètements, bien, on le dénonce puis on essaie de travailler pour qu'il
n'y en ait pas. Je vais vous dire, par exemple, sur l'entente sur les infrastructures, ça a été long qu'on s'entende, mais on s'est
entendus finalement. Puis il
n'y en a pas, d'empiètement sur les infrastructures. Il a fallu qu'on se batte, par
exemple. Mais on s'est entendus sur le Fonds sur la taxe sur
l'essence, on s'est entendus sur le Fonds des projets nationaux et régionaux,
sur le Fonds pour les petites collectivités. Ça, c'est pour ce qui avait été
d'offert. On s'est entendus là-dessus : pas d'empiètement, les priorités
se décident ici. Ça a été long, on aurait aimé ça que ce soit plus vite, mais
on l'a fait.
Maintenant,
je peux bien me gargariser puis dire : On s'est entendus. Mais ce n'est
pas assez. Je parlais tantôt du développement
économique. Ce qui m'étonne toujours
de mon collègue qui est avec nous encore puis qui trouvait que l'Assemblée, on devrait parler d'économie, il n'accroche pas là-dessus : il faut qu'on
augmente la proportion d'infrastructures. Puis, comme mon collègue prend même les formules de M. Duceppe, là, on a
vraiment l'impression que c'est le Bloc contre le NPD, cette interpellation-ci en ce
moment, bien, il faut bien remarquer que, sur le domaine des infrastructures, sur les infrastructures...
Une voix : ...
M.
Fournier : Bien, je
l'ai moins vu. Mais, sur les infrastructures, il
faut bien noter qu'il y en a plusieurs qui disent : Il faut en mettre plus, là.
Puis je laisse à eux le soin de nous écouter puis faire leur propagande, s'ils
veulent, puis leur publicité. Mais il y a
du monde qui ont embarqué dans les partis
politiques fédéraux, ceux qui veulent être opposition ou
ceux qui veulent être au gouvernement, qui
ont dit : Il faut
en faire plus. C'est ça qu'il
faut faire, c'est pour ça qu'on l'a
demandé. Puis pas juste nous, on l'a fait
avec les autres provinces. Il y a une personne qui a été très importante
dans ce travail-là, c'est la première ministre de l'Ontario, avec qui on
travaille de façon très rapprochée. C'est ça, créer des alliances. Puis c'est la différence entre nous, il faut le voir. C'est
que nous, on est capables de bâtir des alliances avec les autres pour mettre de l'avant ces idées-là qui
sont de plus en plus propagées. Alors, des fois, c'est bon, des fois, ce n'est
pas tout bon, mais on essaie de faire avancer.
Maintenant,
je voudrais revenir sur le fait
qu'avec le «beau risque» on aurait tout abandonné, puis il n'y a
plus rien, puis on ne demande plus rien. Pourquoi on n'en parle pas?
C'est dans lettre du premier ministre, c'est dans les demandes du premier ministre où on rappelle notamment qu'il est important
d'inscrire dans la Constitution la reconnaissance
de la différence qui, entre Meech et
aujourd'hui, a connu une évolution jurisprudentielle formidable. Dans le temps
de Meech, par exemple, le Parti
québécois était contre, il trouvait que ce n'était rien. Quand Meech est tombé,
ils ont dit : C'est-u bien effrayant! On a perdu un gros morceau. Bon, parfait!
Aujourd'hui, on est rendus où? On cherchait que la Cour suprême puisse
interpréter notre Constitution en se disant : Il y a une société distincte
au Québec. Dans l'affaire du juge Nadon,
elle a reconnu qu'il y avait des valeurs sociales distinctes, pas à peu
près : la langue, la religion, le droit civil, des valeurs sociales
distinctes. Ça, c'est dans le corpus actuel.
Vous allez me
dire : Oui, mais là il se satisfait de ça. Je fais juste dire qu'il y a du
progrès, mais on veut que ça aille
plus loin. Si on était capables de prendre cette interpellation-ci pour se
dire : Il y a des choses qui vont puis il y a des choses qui vont
moins bien, puis travaillons ensemble à les porter plus loin? Si la main tendue
que mon collègue faisait était de me
dire : M. le ministre, vous avez raison, Meech, on n'était pas pour avant,
mais après ça on a vu, quand on l'a perdu, qu'on aurait dû l'avoir puis
on est pour maintenant? S'il me disait : On va travailler avec vous à avoir
la reconnaissance du Québec comme société
distincte dans la Constitution, et après ça, M. le ministre, savez-vous quoi? Je pense que vous allez avoir raison, on va faire un bon pas, on va
avoir sécurisé notre identité qui, pourtant, se développe bien. C'est ce qu'on
dirait. Tout le monde dirait que l'identité québécoise s'est bien développée.
Personne ne va dire le contraire.
Mais on a des éléments où on veut dire à l'ensemble des Canadiens :
Reconnaissez-le. Puis, même si c'est déjà dans le corpus jurisprudentiel, il y a là un geste de reconnaissance
important. Peut-être que, là, il peut me dire : Savez-vous quoi? Je n'ai plus d'argument pour qu'on parte
parce que je vois bien qu'on a notre place puis qu'on va nous la donner
comme on est avec notre identité. Peut-être qu'on peut bâtir quelque chose.
On parle de
la nomination des juges, de la réforme du Sénat, du pouvoir de dépenser, du
droit de veto. On parle de ça dans la
lettre. Pourquoi il est obligé d'utiliser le truc de : Je ne l'ai pas lue,
ça n'existe pas, puis je vais juste parler de ce qui me tente pour faire avancer mon point de vue? Tous ces éléments sont
là. On pourrait en parler de façon très correcte.
Et les
frontières. Il nous parle des frontières. C'est dans les demandes. D'ailleurs,
c'est pour la première fois que c'est
dans des demandes comme celles-là, les frontières septentrionales. Ça m'étonne
qu'il ne m'en ait pas dit un mot puis
qu'il n'ait pas dit : Bravo! Ça m'étonne qu'il n'ait pas dit : C'est
important de régler ça. Nous autres, on pense que c'est important de
régler ça. Oui, mais pourquoi il fait semblant comme quoi on ne l'avait pas
demandé, pourquoi on n'insistait pas pour ça? Bien oui, c'est ça que vous avez
dit. Mais alors moi, je trouve qu'on est... Si j'ai mal compris, saisissez l'occasion de revenir puis dire :
M. le ministre, je vous appuie, j'appuie toutes les demandes que le
gouvernement a faites. Ça serait déjà quelque chose.
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le ministre. La parole est au député de LaFontaine pour cinq minutes.
• (11 h 20) •
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le Président. Vous me permettrez très rapidement de revenir
sur l'affirmation de mon collègue de
Verchères par rapport au «beau risque», auquel j'ai fait référence un peu plus
tôt, de René Lévesque lorsqu'il
disait : Bon, bien, ça y est, le «beau risque» s'est concrétisé, le Québec
n'a plus de demande. Mon collègue le ministre
responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes est à pied d'oeuvre,
il vient de le démontrer, dans plusieurs
dossiers. Une fédération... puis il y en a plusieurs dans le monde, des
fédérations qui sont des succès comme le
Canada en est un, comme le Québec y participe activement. Le Québec doit être
autour de la table des décideurs. Le Québec, par la voix de son
gouvernement aussi, doit pouvoir faire ses représentations. Et c'est une
coopération, une fédération. Une fédération, on est condamnés à coopérer.
Évidemment,
il y a des dossiers qui sont un petit peu plus difficiles, un peu plus épineux,
mais l'objectif au sein de la
fédération, c'est d'aller chercher évidemment ce qui fait en sorte que le
Québec puisse se réaliser, faire grandir le Canada également. Et nous avons une histoire commune et
un avenir commun au sein de la fédération canadienne. Et ça, force est de le
constater. Puis ce n'est pas juste moi. J'ai fait référence à
Mario Polèse, j'ai fait référence à Joseph Facal là-dessus. Le Québec a su tirer son épingle du jeu. Et, quand
on n'est pas autour de la table des
décideurs, parce qu'évidemment
l'interpellation aujourd'hui... Et je suis
content que mon collègue, le ministre en charge du dossier, fait état de façon
très précise et très concrète des
enjeux de l'actuelle élection fédérale et vient préciser, vient redire et
réaffirmer quelles sont les demandes
du Québec. Et on sera là, comme on l'a été dans le passé, pour défendre les
intérêts du Québec et faire en sorte que cette fédération, qui est notre
pays, puisse évidemment nous apporter les bénéfices nécessaires.
Et
j'aimerais, sur cette importance — parce que je ne l'ai pas fait et je le sais
que mon collègue de Verchères est féru également de citations — terminer
par une dernière citation quant à l'article du 20 août 2014 dans Le Devoir,
Presse canadienne, Le Bloc dilue le pouvoir politique du Québec
à Ottawa, selon Bouchard. Une citation, une dernière citation que je
n'ai pas eu l'occasion de lire un peu plus tôt, et je cite Lucien Bouchard il y
a un an : «Quand vous envoyez à Ottawa
30, 40, 50 députés, comme on le faisait autrefois, il y a de fortes
chances que des poids lourds [ne soient pas] au cabinet, a observé l'ex-premier ministre. Quand on est autour
d'une table tout le monde, si vous êtes là, vous allez en arracher pour
le Québec.» Fin de la citation.
Il faisait référence à quoi? Il faisait
référence au fait qu'une délégation québécoise, des députés, femmes et hommes
qui oeuvrent au sein d'un gouvernement fédéral, comme le disait Lucien
Bouchard, vont en arracher pour le Québec,
vont obtenir des gains pour le Québec. Il faut être autour de la table parce
que, lorsqu'il y a absence, bien, évidemment, on ne prend pas notre rôle de leader. Et c'est ce que le Parti libéral
du Québec, qui a été fondé lui aussi en 1867, qui lui aussi va fêter, en 2017, son
150e anniversaire, a toujours été : un moteur d'évolution pour le
Québec au sein de la fédération canadienne.
Il disait le
«beau risque», et je fais... Il faut faire attention, là. Le député de
Verchères disait : Ah! le «beau risque» qui s'est matérialisé, le Québec... Le «beau risque» n'était pas pour le
Québec, M. le Président, le «beau risque» était pour le Parti québécois parce que le «beau risque» de
Lévesque était de dire : Si nous participons activement et de bonne foi,
et collaborons, et coopérons avec la
fédération canadienne et avec les entités fédérales, nous, du Parti québécois,
nous courons le risque de démontrer
le non-fondement de notre option souverainiste. Si ça fonctionne, pourquoi ne
participons-nous pas à bonifier notre
fonctionnement fédéral? Et c'était ça, le «beau risque». Et le «beau risque»
s'est matérialisé pour le Parti québécois.
Et
je n'irai pas à citer Parizeau, M. Landry... le premier ministre Jacques
Parizeau, l'ex-premier ministre Landry qui
disaient que le Parti québécois doit pouvoir carburer sur des crises. J'ai les
citations, mais je ne les ferai pas parce que mon collègue de Verchères les connaît très, très bien. Mais, lorsqu'on
parle du «beau risque» confirmé par le Parti québécois pour le Parti québécois... Rappelons-nous de la
fameuse tournée, M. le Président, des mousquetaires. Trois anciens députés
du Parti québécois, nommément Alexandre
Bourdeau, Stéphan Tremblay et Jonathan Valois, avaient, en juin 2004, fait
une tournée du Québec et avaient
constaté... et je cite le rapport de juin 2004, à la page 11, qui
parlait de la génération des jeunes,
à l'époque, qui étaient, je crois, les 16-25 ans, on me corrigera si j'ai
tort. On disait : «...cette génération consciente de ses moyens et de ses capacités. Le Québec de ces
jeunes n'est pas le Québec de la soumission ni même celui du rattrapage.
Le Québec d'aujourd'hui en est un de réussites, d'exploits et d'ambitions.»
Ça,
c'était la photographie de trois députés du Parti québécois en 2004. Il est là,
le «beau risque» matérialisé pour le
Parti québécois : une génération qui ne se reconnaît pas du tout au sein
du Parti québécois et dont je fus partie parce que moi aussi, j'avais eu mon gilet du Bloc québécois, en 1993, disant
que c'est la première et dernière élection. Alors, quand on fait écho,
quand on fait écho des propos de Lucien Bouchard, c'est important d'être acteur
présent.
Le
Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de LaFontaine. La
parole revient au député de Verchères pour cinq minutes.
M.
Bergeron : Alors, M. le Président, d'abord, deux petites
mises au point. La première, c'est que, contrairement à ce que dit le ministre, je l'ai dit d'emblée, je
ne suis pas ici pour faire avancer mon option aujourd'hui, là, parce que je
l'ai reconnu, là, ça ne se réglera pas avant
2018. La seule raison pour laquelle je suis ici, O.K., aujourd'hui, pour cette
interpellation, c'est que nous puissions,
ensemble, aborder toute cette question des empiétements proposés par les partis
fédéraux actuellement dans cette campagne. C'est important, ce qui se passe
actuellement.
Puis,
bien oui, le premier ministre a écrit une lettre aux partis fédéraux puis, bien
oui, il a eu des réponses, mais les
réponses ne sont pas toutes satisfaisantes. Sur la question des frontières, pas
de réponse satisfaisante; sur la nomination des juges, pas de réponse satisfaisante; sur Davie, pas de réponse
satisfaisante; sur le transfert en blocs des budgets en infrastructure, pas de réponse satisfaisante; sur
le transfert canadien, pas de réponse satisfaisante non plus. Alors, moi, il me
semble que ça devrait être interpellant, là, de dire : On demande moins que jamais
puis, sur une bonne partie de ce qu'on demande,
on n'a pas de réponse satisfaisante. Alors, je ne suis pas ici pour faire
avancer mon option, mais il y a quand
même des trucs qui sont pour le moins préoccupants.
Une voix :
...
M.
Bergeron : Non, non. L'idée, c'est de faire en sorte de
défendre les intérêts des Québécoises et des Québécois et de profiter de cette occasion qui nous est
donnée aujourd'hui pour faire consensus à l'intention des partis politiques
qui nous regardent probablement aujourd'hui.
J'espère qu'ils s'intéressent à ce qui se passe ici aujourd'hui et qu'ils se
disent : À quelque part, là, on n'aura
pas une «free ride», si vous me permettez l'expression latine, sur ces
propositions qu'on fait dans les champs de compétence des Québécois, des
Québécoises, là.
En
éducation, en famille, en formation professionnelle — je vais faire plaisir au ministre, il avait l'air
de trouver que je mettais trop l'emphase sur le NPD — je
vais faire la liste des différentes propositions de toutes les formations politiques. Dans le cas du NPD : garderies à
15 $, débouchés pour 40 000 jeunes sur le marché du travail, emplois
et stages.
Promesses du Parti
libéral du Canada : allocation canadienne aux enfants, crédit d'impôt pour
les fournitures scolaires — crédit d'impôt pour les fournitures
scolaires! — Stratégie
emploi jeunesse; stages pour les étudiants en science, technologie, génie et études commerciales;
750 millions de dollars en formation professionnelle; cadre national en
matière d'éducation préscolaire et de
garde d'enfant — cadre
national en matière d'éducation préscolaire et de garde d'enfant!
Promesses
du Parti conservateur : crédit d'impôt pour la création d'emplois
apprentis. Je veux dire, on ne peut pas être plus 100 % dans les
compétences du Québec.
Alors,
ma question au ministre, fort simple, c'est : On fait quoi une fois qu'on
a pris acte du fait que tous les partis politiques fédéraux qui se proposent de former le gouvernement, là, ils
nous disent : Nous, là, on va être à deux mains dans les compétences du Québec? Que ce soit en
matière de santé, on l'a vu tout à l'heure, que ce soit en matière d'infrastructure, en matière d'éducation, famille,
formation professionnelle, on va être à deux mains dans les compétences du
Québec. Là, à part de fustiger les uns les autres puis essayer de prêter des
intentions aux uns et aux autres, peut-être que ça serait important de répondre, là, parce qu'on a une occasion de
parler aux partis politiques fédéraux aujourd'hui.
Et
moi, je pense qu'à quelque part au lieu d'essayer de marquer des points les uns
contre les autres, on devrait essayer de marquer des points pour le
Québec, dans cette campagne électorale qui a cours, pour faire en sorte que les
partis politiques fédéraux réalisent que,
peu importe qui formera le gouvernement, peu importe qui sera dans l'opposition,
il y aura une Assemblée nationale unanime.
Et, peu importe qui est au gouvernement et peu importe qui est dans l'opposition
à l'Assemblée nationale aussi, il y a une Assemblée nationale unanime sur la
question du respect des compétences du Québec,
et ce n'est pas vrai que les partis politiques fédéraux, quelles que soient
leurs bonnes intentions, vont pouvoir passer ça comme une lettre à la
poste.
Alors,
c'est à ça que je m'attendais aujourd'hui. Pas à cette espèce de litanie de la
part des uns et des autres sur les
mérites et les démérites des uns et des autres mais bien de faire en sorte que
nous puissions nous entendre et envoyer un message clair aux partis
politiques fédéraux quant au fait qu'il n'est pas question que le gouvernement
fédéral s'immisce dans les compétences du Québec.
J'ai
parlé, tout à l'heure, des affaires municipales au ministre. J'ai parlé du
rapport sur lequel nous étions en train de travailler. Je n'ai eu aucune réponse. On est encore partis sur notre
monologue partisan chacun de notre côté. Est-ce qu'on peut faire abstraction de ça aujourd'hui et marquer des points
pour le Québec auprès des partis politiques fédéraux qui sollicitent, qui briguent les suffrages
actuellement et qui souhaitent obtenir l'appui des Québécoises et des
Québécois? J'ose espérer qu'ils sont
attentifs à ce qu'on fait aujourd'hui, M. le Président, et j'ose espérer qu'on
va finir, d'ici la fin de la journée, à s'entendre sur les priorités et
sur le fait que ça ne pourra pas passer comme une lettre à la poste.
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le député de Verchères. M. le ministre, pour cinq minutes.
• (11 h 30) •
M. Fournier : Directement sur
la question posée, je crois pouvoir dire que nous sommes unanimes à vouloir protéger, défendre et promouvoir nos juridictions.
Je pense pouvoir dire ça. Je pense même pouvoir dire que l'histoire récente — et même mon implication personnelle dans
certains dossiers — peut
même témoigner que, lorsque cela arrive... Et là je suis donc postérieurement à l'élection. Quel message
pouvons-nous passer, là? Postérieurement, après l'élection, quel geste
pouvons-nous poser?
Notre
formation politique, on l'a fait, et je l'ai fait personnellement dans certains
dossiers, dont celui du registre des armes à feu pour ne nommer que
celui-là, mais, lorsqu'on a à défendre nos juridictions, non seulement la
défense politique, mais la défense juridique
est utilisée, et on ne peut plus dire comme avant. Certains disaient que la
cour, comme une tour de Pise, penchait toujours
du même côté. Il nous arrive d'avoir des gains importants, comme celui que je
mentionnais tantôt dans l'affaire Nadon.
Et je veux
dire à mon collègue qu'il pourra toujours compter sur nous pour défendre nos compétences.
Et c'est pour ça que nous demandons, notamment à l'égard du pouvoir
fédéral de dépenser... qu'il soit constitutionnalisé. Et je tiens à dire à notre collègue qu'à toutes les
fois qu'il parle des autres partis il omet toujours de dire qu'ils ont
aussi dit... Parce que ça, c'est nouveau, là. C'est la première campagne
où il y a tous les chefs des partis politiques pouvant
former le gouvernement. On aurait aimé plus de précision, je l'avoue. On aurait aimé des
choses plus fortes. Mais certains avaient quand même assez de vigueur...
qu'ils veulent permettre au Québec de se retirer avec compensation sans condition.
Et mon collègue n'en parle pas. Il
dit : C'est la première fois qu'il y
a autant de désir de s'investir dans
nos compétences. Il omet de dire que
c'est la première fois que tout
le monde dit : Oui, c'est important,
le pouvoir de dépenser, que vous puissiez
vous retirer. Ce n'est pas assez fort, ce qu'ils disent. Il y en a
un qui le dit avec plus de vigueur, on aimerait que ce soit plus clair pour tout le monde, mais il oublie de le
dire parce que ça ne sert pas sa cause.
Alors, sous
l'angle de : On ne peut pas être ensemble, puis tout ça, il a sa vision à lui. Il ne
m'empêchera pas de dire que toute son
argumentation est faite pour soutenir l'appui au Bloc québécois. Il a d'ailleurs
choisi son camp. Son chef se dit
frère siamois du chef du Bloc
québécois. Alors, forcément, on voit
bien que c'est l'opération qu'il mène aujourd'hui. Mais je m'adresse exactement à son problème
qu'il soulève. On est sérieux quand on dit qu'on veut défendre nos compétences. Et je pense pouvoir dire, il va
le reconnaître, d'ailleurs, il l'a déjà reconnu, qu'on a posé des gestes pour ça,
et on en posera aussi à l'avenir.
Mais je reviens à la question aujourd'hui dans
le cadre de cette interpellation, dans le cadre d'une campagne électorale, et donc d'un choix à venir. Et là je
ne me reporte pas après l'élection, de ce qui se fera après, je parle de ce qui
se passe présentement, qu'est-ce qu'on va
faire pour protéger nos juridictions au Québec. Est-ce que la question qu'on
va poser sera : Chers Québécois,
choisissons le gouvernement fédéral, assurons-nous d'y être présents pour
éviter que cela vienne à l'encontre
de nos juridictions, pour que nous y soyons à l'interne? On peut faire le
consensus sur cette question-là.
Il y en a une
autre qui peut être faite, c'est celle qui est proposée, d'ailleurs, par mon
collègue : Chers Québécois, laissons
les Canadiens, à l'extérieur du Québec, choisir le gouvernement fédéral et,
nous, choisissons l'opposition. Alors, je
lui dis, à sa question, lorsqu'il nous dit qu'il faut défendre nos
juridictions : Toujours, on sera là, toujours. Mais il nous met à risque avec sa proposition parce que sa
proposition, c'est de laisser aux Canadiens à l'extérieur du Québec... de
choisir le gouvernement. Quelle est
la garantie que cela nous donne? En quoi cela favorise la protection? Je le dis
honnêtement, on ne doit pas avoir le
même angle d'analyse pour qu'il puisse dire... C'est irréel! Quelle est la
meilleure garantie pour le Québec que
nous soyons dans l'opposition et qu'on laisse le gouvernement être choisi par
d'autres? Il veut faire de cette campagne
électorale un abandon, une renonciation à notre capacité d'influencer. Et je
dis : Franchement! Ce n'est pas la bonne piste.
Si on veut
faire un consensus, commençons par se dire : On va défendre nos intérêts,
on va défendre nos juridictions. Et nous allons favoriser, permettre aux
Québécois de choisir ceux qui formeront le gouvernement pour qu'ils soient
justement attentionnés à nos compétences plutôt que de laisser ça aux autres.
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le ministre. La parole est au député de LaFontaine pour cinq minutes.
M. Tanguay : Merci beaucoup,
M. le Président. Je crois que c'est mon dernier bloc.
Le Président (M. Bérubé) :
Oui.
M. Tanguay :
Et j'ai aimé cet échange, M. le Président, qui s'est fait de façon, somme
toute, très, très respectueuse. Nous
ne partageons pas, évidemment, la même vision. Nous ne partageons pas,
évidemment, la même approche. Et je fais miens, de façon très, très convaincue, les propos que vient de tenir le
ministre qui fait écho aux constats, constats historiques, constats politiques, d'acteurs qui ont déjà été,
comme le député de Verchères, membres, entre autres, notamment du Bloc québécois et ont été députés à Ottawa. J'ai eu
l'occasion de citer Lucien Bouchard qui disait carrément que le Bloc québécois
dilue la présence du
Québec au sein de la fédération canadienne. Je pense que les gens qui nous
écoutent à la maison peuvent très,
très bien reconnaître cette réalité. Quand tu n'es pas assis autour de la
table, là où la décision se prend, ce n'est pas la meilleure façon de défendre tes intérêts. Je vous
dirais même, M. le Président, que c'est une voie qui n'est aucunement
fructueuse.
Et, en ce
sens-là, il y a une élection fédérale. Il y aura élection, le 19 octobre
prochain, pour choisir le prochain gouvernement
fédéral. Pas pour choisir l'opposition, pour choisir le gouvernement. Il y
aura, par définition, une opposition qui fera son travail, comme le fait
l'opposition du Parti québécois, comme le fait l'opposition de la Coalition
avenir Québec et les députés indépendants.
Mais les décisions se prennent par un gouvernement. Nous devons avoir, au
Québec, des représentantes, représentants qui connaissent bien la réalité.
Nous sommes tous des députés, on connaît bien nos comtés. Lorsque nous ne siégeons pas, nous sommes dans nos comtés. On
rencontre les citoyens, on prend le pouls du Québec et on fait en sorte,
évidemment, autour de la table des décideurs, de défendre les positions de nos
citoyens et citoyennes.
Le député
fédéral... Et le collègue de Verchères le sait mieux que moi pour l'avoir été
de 1993 à 2005, pendant 12 ans, il
faut être autour de la table des décideurs. Il faut faire en sorte — et le ministre a réaffirmé ce qui a été
l'histoire du Parti libéral du
Québec — de
toujours défendre les intérêts et les juridictions du Québec au sein de la
fédération canadienne. Et ça, ça passe par la coopération.
Je ne veux pas utiliser les documents que j'ai devant moi de
façon bassement partisane, mais force est de constater, et je le dis avec le plus haut respect, il y a une
question d'approche, une question de vision. Lorsque notre actuel collègue de
Lac-Saint-Jean était ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes,
ça a pris plus d'un an pour avoir, au sein de son cabinet, une personne qui allait s'occuper des Affaires
intergouvernementales canadiennes. Il y avait évidemment un attaché
politique, et ça, ça datait du 31 octobre 2012.
Donc, élections, septembre
2012, nouveau ministre du Parti québécois des Affaires intergouvernementales canadiennes, il y avait un attaché politique qui
s'occupait de la Gouvernance souverainiste. Questions ont été posées en Chambre. Par la suite, le 3 octobre 2013, ce même attaché
politique, qui était en charge de la Gouvernance souverainiste, est devenu en charge des Affaires
intergouvernementales et de la Gouvernance souverainiste. Et l'évolution s'est
poursuivie jusqu'à la veille des dernières
élections, le 11 février 2014, où ce même attaché politique est passé de,
jadis, Gouvernance souverainiste à
Affaires intergouvernementales canadiennes et Gouvernance souverainiste. Et là
il a terminé sa course à Dossier constitutionnel.
Il faut résolument,
comme le fait le ministre, comme le fait son équipe, participer à la fédération
canadienne, être là où les représentations
se font, porter la voix du Québec parce qu'il n'y a personne d'autre que les
Québécoises et les Québécois, par
leur représentation, qui pourront mieux le faire. Et c'est tout à l'honneur du
député de Verchères de vouloir faire
porter notre attention, en cette Assemblée nationale, notre Assemblée nationale
du Québec, sur le débat, justement, au
sein de la fédération canadienne, sur une élection fédérale. Tout à fait! Il
faut s'y intéresser, à ces questions-là. Et l'appel, moi, que je reçois, du député de Verchères. Il
faut non seulement s'y intéresser, mais il faut se poser la question : Qui
est le plus à même de livrer? Qui est le plus à même de livrer les aspirations,
les revendications du Québec qui ont été exprimées par la voix de notre premier ministre, notre premier ministre?
Et je fais un clin d'oeil, évidemment, à mes collègues.
Les 125 députés de l'Assemblée nationale, ici, ont à coeur
de défendre les intérêts du Québec et ont à coeur aussi que ça ne demeure pas, évidemment, que des
revendications mais que ça se transpose dans des décisions. Et ça — le collègue de Verchères, homme intelligent, le sait très bien — il faut être autour de la table des décideurs.
Et je salue son initiative.
Et la question revient donc : Qui, dans le débat
fédéral — et la
réponse appartient aux Québécois — est le mieux à même de livrer pour le
Québec?
Le Président (M. Bérubé) : Merci, M.
le député de LaFontaine. Pour deux minutes, M. le député de Deux-Montagnes.
• (11 h 40) •
M.
Charette : Merci, M. le Président. Je suis entièrement d'accord avec
les propos du député de LaFontaine. C'est ce que croit la Coalition avenir Québec,
que la solution se trouve autour de la table au niveau de la fédération canadienne, qu'il faut y être partie prenante.
Donc, peut-être, vous y trouverez des réponses aux questions que vous m'avez
présentées un petit peu plus tôt.
Et, concernant les demandes qui ont été formulées par
l'actuel gouvernement libéral, on n'est pas en désaccord. Ce que l'on dit, c'est qu'elles ne sont pas
suffisamment ambitieuses par rapport, notamment, aux demandes qui avaient
été aussi formulées par ce même parti en 2008, notamment au niveau de la
culture.
J'ai un extrait d'une lettre qui avait été envoyée par le
premier ministre Charest aux candidats et aux chefs des partis fédéraux, et, clairement, on y voit une
ambition qu'on ne retrouve plus aujourd'hui. Et ce que proposera la Coalition
avenir Québec, c'est justement un programme qui est ambitieux, à la hauteur des attentes des Québécois
et des Québécoises. Et
c'est là où, peut-être, le Parti libéral déçoit. Mais, en même temps, à
travers les interventions — et
c'est dommage, j'ai très, très
peu de temps — du
bloc précédent, on me posait plusieurs questions : Où s'en va la Coalition avenir Québec? Je
vous dis tout simplement : Patientez quelque peu parce qu'il a été annoncé, il y a quelques
semaines... c'est le début d'une
réflexion qui va trouver sa fin, à tout le moins qui sera précisée lors de
notre prochain conseil, au début de novembre prochain. Mais, déjà, je
vous rassure, s'il y avait inquiétude de votre côté, ce sera avec la fédération
canadienne mais certainement un programme
plus ambitieux que ce que propose actuellement le Parti libéral du Québec et
qui laisse les Québécois et les Québécoises sur leur faim.
Et, par
rapport à quelques orientations déjà données, on a clairement dit, notamment au
niveau de la langue et de l'immigration...
on souhaitait, et on demandera, et on fera valoir la pertinence de réclamer
l'entièreté des pouvoirs. Et ce n'est pas démesuré comme demande...
Le Président (M.
Bérubé) : Merci, M. le député.
M. Charette : ...parce que, par le
passé, le Parti libéral...
Conclusions
Le
Président (M. Bérubé) : On passe aux conclusions. Merci de
respecter les règles, comme on vous a invité à le faire.
Alors, M. le ministre, conclusion pour
10 minutes.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier : Merci, M. le
Président. Alors, je vais faire un salut à notre collègue de la coalition, qui
nous a annoncé, je pense, ce matin, c'est un
peu une des nouvelles de la journée, que la Coalition avenir Québec avait
changé un peu de nom. En fait, c'est le même nom, mais il l'écrit un peu
différemment. C'est maintenant la coalition à venir Québec. Alors, on va attendre cette coalition à venir Québec. Et mon
collègue semble être consentant. Le logo va changer, mais ça correspond pas mal à ce qu'il nous
annonce. Donc, pour l'instant, la coalition se retire des débats et va
réfléchir, nous reviendra un jour. On vous attendra.
Revenons sur...
Une voix : ...
M.
Fournier : Peut-être. Revenons à nos échanges. Et, puisque
c'est le dernier bloc, je voudrais au moins qu'on revienne sur les demandes dont je constate...
chacun avec vos grilles d'analyse différentes, vous auriez souhaité peut-être
d'autres éléments, mais que, sur les
éléments qui sont mentionnés, je pense pouvoir dire ça, sur ces éléments-là, il
y a un appui. Je pense pouvoir dire
cela. J'ai compris que chacun — je ne veux pas déformer vos propos — aurait peut-être mis d'autres choses
mais que, pour les éléments qui sont là, il y a un appui.
Ce n'est pas
banal, je le dis, puis, je pense, vous l'avez dit, puis peut-être mon collègue
pourrait le redire tantôt, parce que,
puisque la motivation de l'interpellation de mon collègue, c'était de
l'exprimer aux partis politiques fédéraux, que nous ayons des lectures
différentes ou d'autres ajouts que vous auriez voulus, c'est correct, là, de le
dire, mais pouvons-nous au moins dire :
Les demandes du premier ministre du Québec reçoivent l'appui unanime de
l'Assemblée nationale? Déjà là, là,
il y aurait une force qui soutient chacun de ces éléments. Et je saisis cette
main tendue que nous offrait le
député de Verchères pour que nous l'exprimions ainsi. C'est déjà peut-être un
premier geste pour protéger nos juridictions
et surtout nous assurer d'un progrès que nous voulons faire. Quelle sorte de
progrès? Tantôt, j'ai eu l'occasion de le dire.
Dans les
éléments qui sont mentionnés, il y a des éléments importants en matière de
développement économique. Et souvent,
à la période des questions, à l'Assemblée nationale, on s'intéresse à ces
questions de développement économique.
Et pourquoi je sollicite l'appui aux demandes du gouvernement du Québec aux
chefs des partis politiques fédéraux?
C'est parce que, lorsqu'il est question d'infrastructures et même des
frontières septentrionales, qui n'étaient pas dans les demandes antérieures mais qui sont très importantes, puis
mon collègue l'a un peu dit... Vous savez, lorsqu'on pense à la Stratégie maritime et le Plan Nord, la
jonction entre les deux, c'est un peu lorsqu'on regarde la pointe du Québec.
Puis effectivement, si on est pour faire un
quai en eaux profondes, on se retrouve dans un... ça commence au Québec, ça
finit dans des territoires fédéraux. Il me
semble qu'on devrait régler ça. Il me semble qu'on devrait. Là-dessus, il y a
un intérêt, là, pour nous, de le
manifester parce que, bien, si jamais il y a un quai, là, c'est parce qu'il va
peut-être y avoir de l'activité
économique qui est là, et ça pointe à l'horizon. Alors, c'est de plus en plus
important parce que ça colle à la réalité, à nos besoins actuels à cause
de nos plans à l'égard de la Stratégie maritime et du Plan Nord.
Lorsqu'on
parle du développement durable et des changements climatiques, il y a une
donnée de protection de la planète puis de protection pour nos jeunes
d'un avenir meilleur, évidemment. Mais il y a là-dedans toute la transition économique à laquelle nous sommes appelés. Est-ce
que le Québec va attendre ou le Québec va être parmi les leaders? Est-ce que le Canada va faire ce choix de la
transition économique? Parce que, là-dedans, il y a des emplois maintenant.
Même chose lorsqu'on parle des accords avec le Canada et l'Union européenne, un
accord dans lequel le Québec a participé — c'était
une première, ça — à
la demande du Québec, soit dit en passant, qui a lancé ce débat-là. Et ça,
c'est un marché formidable pour nous.
Même chose lorsqu'on
parle de l'accord de Partenariat transpacifique. On me permettra le petit
aparté pour dire à mon collègue qu'évidemment grâce à notre
participation au Canada nous avons une frontière Pacifique. S'il fallait
changer nos frontières, on serait peut-être un peu plus loin du Pacifique.
Alors, peut-être que cet accord-là ne nous permettrait
pas d'avoir, pour les producteurs, les manufacturiers québécois,
un marché immense devant nous. C'est des questions qui sont importantes.
Comment on peut faire ces ententes internationales qui tiennent compte de nos
particularités? Comment on va investir le gouvernement pour qu'il en
soit préoccupé et qu'il en fasse la promotion?
Même
chose lorsqu'on parle du Chantier Davie. Lorsqu'on
parle des transferts en matière de santé, de la péréquation, du pouvoir fédéral de dépenser, on est en train de
parler de nos services sociaux. Nos échanges qu'on a, là, combien de fois que c'est le ministre de la Santé qui
répond? Je pense que c'est rare qu'on n'a pas une période de questions où il n'y a pas une question sur le sujet. Ça préoccupe les
oppositions. Vous savez, quand vous étiez au gouvernement, on était l'autre
côté, c'était la même chose. C'est sans
couleur politique. C'est une question tellement importante au Québec. C'est la
moitié du budget du
Québec. C'est des choses qui sont importantes pour nous. Ces demandes-là sont
fondamentales en matière économique comme en matière de nos services
sociaux.
Même chose
pour la péréquation lorsqu'on regarde l'ensemble des transferts. Puis je sais
qu'il y a une différence entre nous
sur la péréquation puis sur le fait qu'on reçoit 16 milliards de plus que
ce qu'on en paie à Ottawa. Je sais qu'il
y a une différence entre nous, mais le fait est que nous le recevons et qu'on
ne peut pas l'abandonner. Le fait est qu'on doit se battre pour protéger
nos acquis et ne pas baisser les bras. Et c'est ce qui se retrouve dans les
éléments.
Je ne veux
pas mettre de côté le pouvoir fédéral de dépenser parce qu'il est dans les
demandes. Et pourquoi il est dans les
demandes? Parce que c'est l'outil le plus structurant pour nous assurer de la
protection de nos compétences. Et mon
collègue de Verchères nous dit depuis le début : Je veux qu'on fasse cet
échange-là en ayant à coeur la protection de nos juridictions. On va au moins admettre que, là-dessus, on s'entend
tous. On va au moins admettre que c'est ça qu'on veut. Puis on peut même dire que, pour la première fois, il commence à y
avoir des échos. Je le dis tout de suite avant que mon collègue me dise que je me satisfais de pas grand-chose :
Je ne suis pas satisfait, mais je suis au moins capable de dire qu'il y a des échos, que les gens en
parlent. Il y en a un qui est allé un peu plus loin, je vous laisse deviner
lequel. Je ne veux pas faire la
promotion de personne. Mais il reste que je crois que les gens l'entendent. Et
il faut s'assurer de ça. Et on en a déjà beaucoup fait.
Malheureusement,
il reste peu de temps. J'aurais donc voulu qu'on parle de Radio-Canada, de la
nomination puis du bilinguisme des juges à la Cour suprême! Je le dis
parce que mon collègue de Verchères est très intéressé par les questions acadiennes. Je le salue, d'ailleurs,
parce que je pense qu'ensemble il faut qu'on le dise aux Québécois : Il y
a 2,5 millions de francophones
et francophiles au Canada, à l'extérieur du Québec. C'est très important. Quand
on a à coeur notre identité au
Québec, le socle, c'est notre langue. Or, ce socle-là a de l'écho à l'extérieur
du Québec. Il faut s'en occuper, il faut les aider et il faut les remercier
pour tous les efforts qu'ils ont faits dans l'histoire et qu'ils font encore.
D'ailleurs,
je tiens à le souligner, aujourd'hui dans Le Devoir, il y a un
article sur Sault Ste. Marie qui s'inscrit dans le cadre du 400e de la présence francophone en Ontario, qui tourne
la page après 25 ans de Meech et qui va hisser le drapeau des Franco-Ontariens. Dans 400 endroits
aujourd'hui en Ontario, on va hisser le drapeau des Franco-Ontariens. Je veux que les Québécois puissent aussi savoir
qu'il y a une nouvelle légitimité, loin d'être parfaite mais accrue par rapport
à celle qui était, à l'égard de la langue.
Avons-nous là un pays à bâtir, un pays à imaginer pour que la francophonie ne
se limite pas qu'au seul Québec mais
qu'elle soit plus large encore, constatant que le français, au Québec, va bien?
On peut échanger. Les statistiques
que je vais vous dire vont dire que c'est bon, celles que vous allez me dire
vont dire que c'est moins bon, mais
je pense que le constat général, ils vont dire : On n'est pas en train de
disparaître, puis personne ne veut qu'on disparaisse.
Mais il y a
là une nouvelle réalité qu'on voit dans les autres provinces. Et je prends
celle de l'Ontario parce que non
seulement il y a cela, mais, l'an dernier, je pense qu'on avait eu l'occasion
d'en parler, il y a eu un Conseil des ministres conjoint — on
vient d'en avoir un autre, mais celui d'avant — où il y a une déclaration de
Toronto — que
j'appelle comme ça — qui a été signée entre les deux
gouvernements — fantastique! — dans laquelle on dit : Non seulement la
langue française est fondatrice de ce pays,
mais c'est une langue d'avenir. Et on insiste sur une des notions sur laquelle
je vais revenir, dont on n'a pas parlé, qui est la question de l'immigration en
français dans l'ensemble du pays.
• (11 h 50) •
Malheureusement,
même s'il y a encore beaucoup de français vivant, il reste qu'il y a beaucoup
d'immigration, et la proportion finit
toujours par s'étioler. Si au moins on pouvait arriver, dans un premier
temps — et c'est
loin d'être la fin de la marche — à nous rendre à la cible de
ceux qui sont de langue maternelle française dans le reste du pays comme
immigration qui arrive là, et puis qu'après ça on le porte un peu plus loin! Ne
sommes-nous pas en train de bâtir, toujours
en faisant la promotion de notre identité, dont l'élément fondamental est la
langue, de le développer sur une scène encore
plus large, de donner des assises encore plus fortes en se disant qu'en même
temps on pourra bénéficier d'un marché économique plus fort?
Avec
l'Ontario, on a réglé un accord de commerce interprovincial qui nous donne
accès à des marchés publics. On est
la quatrième zone économique, Québec-Ontario. Plutôt que de se dire qu'il
faudrait se séparer, on devrait se dire : Nous allons nous retrouver. Nous allons prendre notre place. Nous allons
investir les lieux de pouvoir. Et, chers Québécois, à cette élection-ci,
vous pouvez choisir le gouvernement. Ne laissons pas cela aux autres, ne nous
abandonnons pas à seulement choisir l'opposition. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. Ça conclut les
interventions de votre groupe parlementaire.
Et c'est au
député de Verchères que revient le privilège de terminer ces échanges mais,
cette fois, pour 10 minutes.
M. Stéphane Bergeron
M.
Bergeron :
Je vais commencer par prendre la balle au bond de ce cri du coeur de la part du
ministre, et que je sais sincère, par
rapport à la réalité des francophones, des communautés francophones et
acadiennes du Canada. Et je sais qu'il sait qu'il peut compter sur moi
pour ce qui est de mettre en valeur la réalité, la vitalité des communautés francophones et acadiennes du Canada. Je sais
qu'il sait que, là-dessus comme sur bien d'autres choses, sur bien d'autres
sujets, on peut travailler ensemble parce
que c'est dans l'intérêt du Québec de travailler avec les communautés
francophones et acadiennes du Canada. Mais je suis obligé de lui dire,
par la même occasion, qu'il y a autant sinon davantage de francophones, au sud de la frontière, qui
partagent la même réalité, qui sont, en grande partie, issus de cette moitié de
la population québécoise qui, au
siècle précédent, a immigré vers le Sud et qui peuvent également contribuer à
cette réalité du Québec francophone en Amérique du Nord.
Alors,
moi, je pense qu'à quelque part il faut avoir l'esprit ouvert et travailler
avec l'ensemble des communautés francophones
et acadiennes, celles du Canada, bien sûr, mais également celles des
États-Unis. Puis ce n'est pas pour rien que, lors des congrès mondiaux acadiens, par exemple, on voit des gens
qui nous viennent du Maine, qui nous viennent du Vermont, qui nous viennent de la Louisiane, parce qu'il y a là des
souches communes, des réalités différentes mais des souches communes. Mais ça,
c'est un tout autre débat, puis on aura certainement l'occasion
de le faire en un autre lieu à un autre moment.
Mais je veux
revenir sur le sujet d'aujourd'hui. Le ministre voudrait que nous nous satisfassions ou que nous
nous gargarisions de cette lettre qui
a été envoyée par le premier ministre. À l'instar de mon collègue de Deux-Montagnes, avec lequel je partage peu de choses, je dois dire qu'en 2008
le premier ministre Charest avait signé une lettre où il faisait 14 demandes aux partis fédéraux. Seulement
une, une seule, une seule de ces 14 demandes a été respectée : l'entente
sur le pétrole extracôtier. Le reste
est demeuré sans réponse. On dira que ce n'est pas une grande manifestation de
considération de la part des partis politiques fédéraux à l'égard du premier
ministre de tous les Québécois
et de toutes les Québécoises.
Curieusement, la pensée du Parti libéral avait
changé. En 2011, constatant probablement que la façon de faire par
lettre ne donnait pas les résultats escomptés, le député de Châteauguay a
déclaré que «publier une longue liste de revendications
au début d'une campagne électorale fédérale est une "formule
dépassée"». J'imagine qu'influencé par cette nouvelle doctrine du député de Châteauguay le
gouvernement libéral a jugé que, si on revampe la formule des demandes par lettre, on ne va pas y aller trop fort. Donc,
on y est allés avec une liste pas trop exhaustive. Et je vais revenir
là-dessus.
Alors, la
question n'est pas de savoir est-ce que
cette liste traduit les revendications traditionnelles
pour la défense des compétences du
Québec. Elle traduit certainement un certain nombre de revendications
traditionnelles par rapport à la
défense des compétences du Québec, mais elle nous laisse sur notre faim. Et non
seulement elle nous laisse sur notre faim,
mais les réponses des partis politiques fédéraux nous laissent également sur
notre faim puisque plusieurs des réponses éludent plusieurs des quelques demandes adressées par le premier
ministre. Et là on se retrouve avec des engagements où le Nouveau Parti
démocratique propose 18 empiétements dans les champs de compétence du Québec;
le Parti libéral, 14; le Parti conservateur, 12.
Puis je vais
revenir là-dessus dans quelques instants, mais j'aimerais parler de ce que ne
contient pas cette lettre. Et la
liste pourrait être plus grande. Sur la question de la péréquation, la lettre
en parle, certes, mais, là encore, on a une vision complètement
différente. Le ministre nous dit qu'advenant l'indépendance, il y aurait un
manque à gagner de 16 milliards. Une
étude très détaillée de Stéphane Gobeil, qui a été saluée, Un
gouvernement de trop, en arrive plutôt à la conclusion, à partir des comptes publics fédéraux, qu'il y aurait un
surplus de 2 milliards de dollars au terme de l'indépendance. Alors, encore une fois, nous
pourrions en discuter longuement, il semble que les chiffres ne soient pas
les mêmes. Mais parlons simplement du pouvoir fédéral de dépenser.
Robert Bourassa
disait que le pouvoir fédéral de dépenser... qu'il se révèle souvent, dans les
faits, être l'équivalent de véritables
amendements constitutionnels de fait apportés au partage des compétences
législatives. Cette capacité que le
gouvernement fédéral a d'intervenir dans les champs de compétence du Québec
vient modifier le partage des compétences qui est, je dirais, le socle — vous parliez de socle — du pacte fédératif de 1867, et ce, sans
qu'il n'y ait la moindre négociation.
Qu'est-ce
qu'on aurait aimé voir apparaître également dans cette liste? Le respect de la
juridiction québécoise en matière de
valeurs mobilières. Pourquoi ce silence? Une compensation financière pour le
refus de transmission des données du registre des armes à feu. Pourquoi
devrions-nous payer deux fois? Les conditions fédérales de financement de la lutte contre l'itinérance, hein? On a un
litige avec le gouvernement fédéral. Pourquoi est-ce absent de la liste des
revendications? L'abolition du crédit
d'impôt aux fonds de travailleurs. On parlait de développement économique,
c'est un outil important de
développement économique au Québec. Le gouvernement fédéral a décidé de scraper
là-dedans. Pourquoi ça ne faisait pas partie de la liste? L'application
de la loi 101 aux entreprises à charte fédérale. Il y a des citoyens et des citoyennes du Québec qui ne sont
pas protégés par les dispositions de la loi 101 parce qu'ils travaillent dans
des entreprises sous charte fédérale, même si c'est sur le territoire du
Québec. Ça m'apparaît être une situation anormale.
Le retour des conférences du premier ministre. La gestion de l'offre, M. le
Président. Tellement importante! Comment ça se fait que la lettre du
premier ministre n'en faisait pas état?
M. le
Président, le ministre ne nous invite pas aujourd'hui à regarder ce que chacun
des partis politiques fédéraux propose
pour le Québec et en quoi ces partis risquent d'empiéter dans les compétences
du Québec. C'est ce que j'aurais voulu
qu'on fasse. Le ministre est arrivé ici avec un seul objectif : convaincre
les Québécois qu'il fallait qu'ils soient autour de la table du Conseil des ministres, peu importe ce qu'il propose pour
le Québec. Que ce soit bon ou que ce ne soit pas bon, il faut qu'on soit autour de la table du Conseil des ministres.
C'est l'illusion du pouvoir, M. le Président, l'illusion du pouvoir. L'illusion du pouvoir au niveau
fédéral. Puis on a déjà cédé aux sirènes du pouvoir, hein, par le passé. Je me
souviens qu'on a dit aux Québécois qu'il y aurait un «French power» à Ottawa,
hein, le «French power» : 74 députés libéraux sur 75. Ça, c'était être pas
mal nombreux autour de la table, hein? Est-ce que ça a empêché l'application
des mesures de guerre, M. le Président?
Est-ce que ça a empêché l'emprisonnement arbitraire de plus de 300 Québécois
sans procès, sans aucune accusation?
Non, M. le Président, ça n'a rien empêché. Est-ce que ça a empêché, en 1982, le
rapatriement unilatéral de la
Constitution contre l'avis de l'Assemblée nationale du Québec? Non, ça n'a pas
empêché le rapatriement unilatéral de la Constitution contre l'avis de
l'Assemblée nationale du Québec.
• (12 heures) •
M. le Président,
ce que je dis, c'est qu'il aurait été important aujourd'hui de nous interroger
sur ce que les partis politiques fédéraux proposent pour le Québec.
Quelles sont les incidences de ce que chacun de ces partis politiques fédéraux proposent
pour le Québec et les incidences des choix que les Québécoises
et les Québécois risquent de faire d'ici quelques semaines en élisant tel gouvernement ou tel gouvernement ou en
contribuant ou en ne contribuant pas à l'élection du prochain gouvernement fédéral, peu importe sa
couleur? Parce que, là, je comprends que la seule chose à laquelle aspire
et la seule à laquelle
appelle le ministre... les Québécois, c'est de dire : Il faut que vous
votiez pour le gouvernement, peu importe
sa couleur. Or, moi, j'aurais aimé qu'on discute ensemble de ce que ce prochain
gouvernement, quel qu'il soit, propose
pour le Québec, de ce que ce prochain gouvernement, quel qu'il soit, propose
comme empiètement dans les champs de
compétence du Québec, qui sont autant de difficultés qu'aura le gouvernement à
devoir gérer des situations qui ne sont pas faciles à gérer tout le
temps.
Ceci dit, M.
le Président, c'est la voie qu'à choisi de suivre le ministre. J'en suis bien
désolé, mais il sait malgré tout, malgré nos divergences, il sait qu'il
pourra compter sur l'appui indéfectible de l'opposition officielle et de votre
humble serviteur pour faire en sorte que nous puissions tous les jours, en
toute circonstance, pendant tout le reste du mandat — parce qu'il se passera peut-être quelque
chose d'autre en 2018 — défendre les intérêts du Québec et les compétences
exclusives du Québec.
Le Président (M. Bérubé) :
Merci, M. le député de Verchères. Et ceci met un terme à nos travaux.
Je lève la séance. Et la commission, ayant
accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.
Merci. Bonne fin de journée.
(Fin de la séance à 12 h 2)