(Quinze
heures quarante-quatre minutes)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il
vous plaît. Veuillez vous assurer que
vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas
perturber nos travaux. Je déclare la séance de la Commission des institutions
ouverte. Bon après-midi à toutes et à tous.
Je vois des visages
nouveaux autour de la table, je présume qu'il y a des remplacements. Mme la
secrétaire, est-ce le cas?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Nichols (Vaudreuil) remplace M. Boucher (Ungava);
M. Sklavounos (Laurier-Dorion)
remplace M. Rousselle (Vimont); M. Bédard (Chicoutimi) remplace M. Cloutier (Lac-Saint-Jean);
M. Bergeron (Verchères) remplace M. Lisée (Rosemont);
M. Bonnardel (Granby) remplace
M. Martel (Nicolet-Bécancour);
et M. Charette (Deux-Montagnes) remplace Mme Roy (Montarville).
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Je souhaite la bienvenue aux
députés qui se joignent à notre commission pour ce mandat.
Conformément à l'article
114 du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale et
conformément à la décision unanime des membres de la Commission des institutions,
la commission entreprend aujourd'hui l'étude du rapport sur la mise en oeuvre du code pour
la période 2011‑2014.
Le
3 décembre 2010, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité ce code d'éthique
et de déontologie, posant ainsi un geste significatif et historique dans
la vie démocratique de notre société. Il est indéniable que nos travaux
suscitent beaucoup d'intérêt et font couler beaucoup d'encre. Compte
tenu de l'importance du Code d'éthique et de déontologie, on ne peut que s'en réjouir.
Toutefois, si on se
fie à certains commentaires entendus, il semble que des craintes subsistent
quant au but de l'exercice de révision
auquel nous ont conviés les députés qui ont adopté la première mouture du code.
Le rapport sur la mise en oeuvre du
code, produit par le Commissaire à l'éthique, comporte 23 recommandations qui
abordent autant de sujets sur
lesquels les membres de la commission auront à se questionner et à échanger. À
mon avis, il est donc un peu réducteur
de limiter cet exercice fondamental à la seule question qui se rapporte à la
situation du député de Saint-Jérôme et chef de l'opposition officielle,
bien qu'elle soit importante.
Je
me permets de rappeler les hauts standards de conduite des députés qu'énonce
l'article 6 du code : «La conduite du député est empreinte de bienveillance, de droiture, de convenance, de
sagesse, d'honnêteté, de sincérité et de justice. Par conséquent, le
député :
«1° fait preuve de
loyauté envers le peuple du Québec;
«2° reconnaît qu'il
est au service des citoyens;
«3° fait preuve de
rigueur et d'assiduité;
«4° recherche la
vérité et respecte la parole donnée;
«5° a un devoir de mémoire envers le
fonctionnement de l'Assemblée nationale et de ses institutions démocratiques.»
Par
ailleurs, tel que le stipule l'article 9 : «Les députés reconnaissent que
le respect de ces valeurs constitue une condition essentielle afin de
maintenir la confiance de la population envers eux et l'Assemblée nationale et
afin de réaliser pleinement la mission d'intérêt public qui leur est confiée.»
Fin de la citation.
À
titre de président de la Commission des institutions, je formule le souhait que
nous remplissions notre mandat guidés
par ces valeurs et dans le respect et la protection de l'Assemblée nationale.
Je verrai à animer nos travaux dans cet esprit.
Ceci étant dit, nous
entreprenons aujourd'hui nos travaux avec l'audition du Commissaire à l'éthique
et à la déontologie, Me Jacques Saint-Laurent.
Avant
de débuter, je souligne à tous les journalistes et représentants des médias
qu'il est permis de prendre des images dans la mesure où cela ne nuit
pas à nos travaux. Je vous remercie pour votre collaboration.
Aussi,
puisque la commission doit procéder à une audition d'une durée de trois heures
et que nous avons débuté à 15 h 44, j'ai besoin de votre
consentement pour que nous poursuivions nos travaux jusqu'à 18 h 44.
Y a-t-il consentement?
Des voix :
Consentement.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Il y a consentement.
M.
le commissaire, nous sommes heureux de vous accueillir à la Commission des
institutions. Je vous rappelle que vous
disposez d'une période de 20 minutes pour faire votre présentation, et il y
aura par la suite échange avec les membres de la commission. À vous la
parole.
Exposé
du Commissaire à l'éthique et à la
déontologie, M. Jacques Saint-Laurent
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Merci beaucoup. M. le Président, mesdames messieurs les membres de la Commission
des institutions, permettez-moi d'abord de vous remercier sincèrement de me donner
l'occasion de vous adresser quelques mots au
sujet du rapport sur la mise en oeuvre du Code d'éthique et de déontologie des
membres de l'Assemblée nationale, que
j'appellerai dorénavant le code, pour la période débutant le 6 janvier 2011 et
se terminant le 31 décembre 2014.
L'occasion est d'autant plus importante puisqu'il s'agit du premier rapport sur
la mise en oeuvre du code qui a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée
nationale à la fin de 2010.
Je vous
présente immédiatement les personnes qui m'accompagnent, qui sont, à ma droite,
la responsable du greffe, Mme Dominique Baron, et les deux conseillers
juridiques, Me Élodie Gagné-Lafrance et Me Bruno Fontaine. Je les remercie sincèrement pour leur constante
collaboration professionnelle et pour leur appui dans la préparation du
rapport sur la mise en oeuvre.
• (15 h 50) •
M. le
Président, nous allons maintenant parler du code et de sa mise en oeuvre depuis
son entrée en vigueur. Mon premier message s'adresse à tous les membres de l'Assemblée nationale. Je veux rendre hommage aux femmes et aux hommes qui n'ont ménagé aucun effort pour donner
un sens à leur engagement de soutenir la confiance de la population par leur adhésion aux valeurs de l'Assemblée nationale et par le respect des règles déontologiques
prescrites par le code. Ils ont toute ma reconnaissance, M. le Président.
Voici maintenant un résumé des principes
éthiques et des règles déontologiques que les élus et la population doivent
connaître. Au premier chef, vous l'avez mentionné il y a un instant, M. le
Président, au premier chef, le code comprend
les valeurs de l'Assemblée nationale. Parmi les nombreux engagements
qui y sont proclamés, je dois insister sur l'engagement de tous les membres de l'Assemblée nationale envers l'amélioration des conditions sociales et
économiques des Québécois. En outre, chaque député reconnaît qu'il est au
service des citoyens. J'y reviendrai dans un instant.
Pour résumer
les règles déontologiques prescrites par le code, je rappellerai au député
qu'il est interdit d'exercer certaines fonctions incompatibles. Face au
risque de conflit d'intérêts, un député doit impérativement préserver son indépendance de jugement, il doit mettre de côté
son intérêt personnel au bénéfice de l'intérêt collectif. Par ses
actions, par son influence, il ne peut pas
favoriser ses intérêts personnels, ceux d'un membre de sa famille immédiate, ou
de ses enfants non à charge, ou, d'une manière abusive, ceux de toute
autre personne. De la même façon, tous les députés doivent respecter la confidentialité des dossiers et protéger les
renseignements dont ils ont connaissance dans l'exercice de leur charge.
En outre, le législateur a introduit au code des règles déontologiques
détaillées concernant les contrats impliquant un membre de l'Assemblée
nationale et le gouvernement, un ministère ou un organisme public.
D'autres
règles déontologiques, comme vous le savez, concernent notamment les dons et
avantages, la déclaration des
intérêts personnels et l'assiduité. Les règles déontologiques particulières
applicables aux membres du Conseil exécutif leur imposent, vu les responsabilités importantes qu'ils assument, des
mesures plus sévères en matière de conflit d'intérêts, en matière de
déclaration d'intérêt ainsi que des règles d'après-mandat.
Pour
l'exercice de leur charge, le code donne la priorité aux droits des membres de
l'Assemblée nationale d'être conseillés
par le commissaire ou par le jurisconsulte. Si les circonstances l'exigent, le
commissaire peut, sur demande d'un député ou à son initiative, faire une
enquête pour déterminer si un député a commis un manquement au code.
À compter du
30 avril 2013, tous les membres du personnel des députés, des cabinets de
l'Assemblée nationale et des cabinets
ministériels ont été assujettis aux valeurs de l'Assemblée nationale et à des
règles déontologiques dont la mise en application relève du commissaire.
Dans une
démocratie comme la nôtre, M. le Président, on ne saurait trop insister sur le
rôle fondamental des députés et des
ministres au service des citoyens. Comme je le mentionnais plus tôt, ils
doivent travailler sans relâche à l'amélioration des conditions sociales et économiques des Québécois. Ces valeurs de
l'Assemblée nationale s'appliquent à tous les députés et aux ministres, quelle que soit la formation
politique à laquelle ils appartiennent. Elles doivent les guider, servir de
repère pour maintenir leur indépendance de jugement, être efficaces et agir de
façon responsable.
Chaque fois
que j'en ai l'occasion, je n'hésite pas à expliquer aux députés et aux
ministres que le respect des valeurs de
l'Assemblée nationale n'a rien de théorique ou d'abstrait. Au contraire, ils
doivent s'appuyer sur les repères établis par l'article 6 du code. Il va de soi que ces valeurs invitent clairement les
élus à se comporter en bon citoyen et à respecter la loi, comme nous
sommes tous tenus de le faire. En fait, par l'importante fonction qu'ils
assument à titre de députés ou de ministres,
il incombe aux élus de donner l'exemple. Sans s'imposer des obligations qui
vont au-delà de ce que le code exige,
il s'agit simplement de s'inspirer du cadre légal en vigueur au Québec et de
respecter rigoureusement toutes les normes
qui en résultent. Elles sont autant d'indices des éléments constitutifs du
comportement d'un député guidé par les valeurs de l'Assemblée nationale,
dont l'exemple nous inspire.
Ai-je besoin
d'insister sur le devoir incontournable, pour chaque élu, de donner à la
population qu'il représente la possibilité
de participer au débat public. Le député contribue à l'atteinte de cet objectif
en s'assurant d'être bien renseigné et de
considérer tous les faits relatifs à la situation qu'il traite. Il a la
responsabilité de comprendre les processus
législatifs et administratifs correspondants afin d'effectuer une analyse
approfondie dans chaque cas. En somme, les députés et les ministres ont le
privilège de donner une voix aux citoyens qu'ils représentent et de soutenir
l'intérêt public grâce aux valeurs de l'Assemblée nationale qui les guident.
Une partie
importante de la mise en oeuvre du code concerne le risque de se placer dans
une situation de conflit d'intérêts en exerçant ses fonctions de député
ou de ministre. L'élu doit maintenir une frontière étanche entre son intérêt personnel et l'exercice de sa charge.
Est-il besoin de rappeler qu'il ne s'agit pas de se fier à sa propre analyse
du risque de conflit
d'intérêts, mais, d'abord et avant tout, de considérer ce qui pourrait être
perçu par une personne raisonnablement
bien informée? Voilà pourquoi il est très important de considérer ces questions
de conflit d'intérêts à partir des
circonstances et de l'ensemble des faits propres à chaque contexte particulier.
Il n'est pas question de conclure à partir d'un simple soupçon.
À titre
d'agents de changement, de concepteurs de politiques publiques, les membres de
l'Assemblée nationale peuvent exercer
une influence inestimable pour l'amélioration des conditions sociales et
économiques des Québécois. Dans leur
mandat de prêter assistance aux personnes et aux groupes qui demandent leur
aide, je leur propose de maintenir un contact
très étroit avec les citoyens de leurs circonscriptions en cherchant à être
informés de leurs points de vue et de leurs attentes. Cette connaissance
fine est indispensable pour bien représenter les citoyens de sa
circonscription.
Dans l'analyse de ce qui peut constituer une
situation de conflit d'intérêts pour un membre de l'Assemblée nationale, on ne peut absolument pas ignorer
l'importance reconnue à cette fonction et la notoriété dont bénéficie le
député non seulement dans sa circonscription, mais également pour l'ensemble du
Québec. À mon avis, les membres de l'Assemblée
nationale ne sont pas suffisamment conscients de l'influence qu'ils exercent
autour d'eux d'abord et avant tout par
leurs compétences, mais également par leur crédibilité qui est rattachée à
l'exercice de leur fonction de député ou de ministre. Cette influence prend une importance particulière dans
l'utilisation des médias sociaux puisque l'on s'adresse à un nombre incalculable de citoyens. Dans cet esprit,
l'élu doit prendre garde à l'impact de ses agissements et de ses écrits.
L'objectif d'exemplarité mentionné
précédemment exige des députés et des ministres qu'ils tiennent des propos
empreints d'exactitude et de rigueur, écartant le risque de manquer à leurs
obligations déontologiques.
S'inspirant
de la Loi sur l'Assemblée nationale, l'article 25 du code apporte une précision
importante en matière de conflit
d'intérêts en indiquant que le député qui a un intérêt personnel et financier
distinct de celui de l'ensemble des députés ou de la population à l'égard d'une question dont l'Assemblée nationale
ou une commission dont il est membre est saisie doit déclarer publiquement la nature de cet intérêt et se retirer de la
séance sans exercer son droit de vote ni participer aux débats sur cette
question. Le rapport sur la mise en oeuvre suggère que l'article 25 du code
soit modifié pour prévoir, dans la situation
que je viens de décrire, que le député peut prendre part aux débats sans
exercer son droit de vote, à la condition de déclarer préalablement son
intérêt personnel et financier distinct.
Je dois
ajouter que la modification proposée à l'article 25 du code concerne uniquement
les débats à l'Assemblée nationale ou
en commission parlementaire. Cette recommandation ne concerne pas les séances
du Conseil des ministres ou d'autres
forums, pour lesquels l'article 49 du code doit être appliqué. À mon avis, il
est important de respecter le droit fondamental
des parlementaires de s'exprimer pour communiquer leur expertise dans le
domaine concerné et assumer pleinement
leur mandat de représenter la population. Ainsi, lorsque le député a déclaré
publiquement son intérêt personnel et
financier distinct préalablement, il devrait pouvoir prendre part aux débats
qui sont publics, à la condition de ne pas voter sur cette question pour
laquelle il a un intérêt personnel et financier distinct.
• (16 heures) •
M. le
Président, les règles déontologiques comprennent également un chapitre consacré
aux dons et avantages que peuvent
recevoir les députés et les ministres. Dans certains cas, ils peuvent accepter
des cadeaux, à la condition qu'il ne s'agisse pas d'un échange pour une
intervention ou une prise de position. Ils doivent aussi refuser le cadeau qui
peut influencer leur indépendance de
jugement dans l'exercice de leurs fonctions ou risquer de compromettre leur
intégrité ou celle de l'Assemblée nationale. Lorsque ces interdictions ne
s'appliquent pas, ils peuvent accepter un présent ou une invitation. Toutefois,
si le cadeau a une valeur de plus de 200 $, ils doivent le déclarer au commissaire.
Même si ces
règles, M. le Président, apportent une clarification essentielle en matière de
dons et avantages, les citoyens et
les entreprises doivent savoir que, lorsqu'ils demandent l'aide de leur député
ou d'un ministre, aucun cadeau n'est
requis. Au contraire, ils devraient comprendre que, lorsqu'ils offrent un
cadeau, qu'ils organisent des cocktails ou des réceptions directement en lien avec l'aide qu'ils souhaitent obtenir,
ils risquent de mettre le député ou le ministre dans l'embarras et même de lui nuire. Dans un contexte
politique où les élus sont appelés à faire la gestion de fonds publics,
ces cadeaux sont à éviter, plus spécialement lorsque l'on sollicite une aide
quelconque.
Le
législateur a prévu des règles déontologiques plus sévères pour un ministre,
notamment en matière de conflit d'intérêts.
Comme vous le savez, en plus des fonctions qu'il exerce dans son ministère, un
ministre participe à plusieurs rencontres,
notamment au Conseil des ministres. Dans l'exercice de sa charge, il dispose
d'une quantité impressionnante de renseignements
confidentiels qui ne sont pas disponibles au public. En théorie, ces
renseignements pourraient permettre au ministre
de spéculer sur certains titres à la bourse parce qu'il serait en mesure
d'anticiper ce qui pourrait avoir une influence sur les marchés à court ou à moyen terme. De façon à ce qu'il soit clair
que le ministre ne spécule pas et ne peut pas être soupçonné de le
faire, l'article 45 du code a codifié une règle fondamentale qui existe depuis
un bon moment, depuis longtemps, et cette
règle se résume de la façon suivante : Un ministre ne peut pas conserver
ses intérêts dans une entreprise à la
bourse. Il a deux choix. Il doit se départir de ses titres à la bourse ou les
transporter dans une fiducie ou un mandat sans droit de regard.
L'expérience
des dernières années me conduit à présenter aux membres de l'Assemblée
nationale trois recommandations.
Premièrement,
au moment d'adopter le code, en 2010, les membres de l'Assemblée nationale
n'ont donné que très peu de précision
sur les règles en matière de fiducie ou de mandat sans droit de regard. Nous
avons compris qu'il faut se référer
au Code civil du Québec lorsque ces questions sont soulevées, notamment
concernant d'éventuelles instructions adressées
aux fiduciaires ou aux mandataires. La présentation du rapport sur la mise en
oeuvre est, selon moi, l'occasion d'inviter les députés à considérer la
possibilité d'apporter des précisions au cadre initialement établi, le cas
échéant.
Deuxièmement, à titre d'exemple de ce qui existe
dans certaines autres provinces, je suggère aux membres de l'Assemblée
nationale de considérer la possibilité de prévoir un remboursement des coûts
relatifs à la constitution d'une fiducie ou d'un mandat sans droit de regard.
Troisièmement, le
commissaire doit être, à mon avis, autorisé spécifiquement à requérir
périodiquement des renseignements du fiduciaire ou du mandataire concernant les
biens administrés et la gestion de ceux-ci.
M. le Président, l'objectif de prévention des
situations de conflit d'intérêts pourrait être soutenu encore plus directement en prévoyant une formation relative
aux obligations prescrites par le code, par les règles ou par le
règlement. Cette formation serait
obligatoire à au moins une reprise pour chaque mandat de l'élu. Le code permet
au commissaire de faire une enquête,
comme je le mentionnais tout à l'heure, à la demande d'un député ou de sa
propre initiative. Le rapport sur la
mise en oeuvre résume les activités du commissaire en matière d'enquête depuis
l'entrée en vigueur des dispositions pertinentes le
1er janvier 2012.
J'aimerais
attirer l'attention des membres de cette commission sur le défi que représente
la collecte de renseignements permettant au commissaire d'exercer un
suivi documenté des activités des membres de l'Assemblée nationale et, le cas
échéant, d'appliquer les mécanismes de contrôle prévus par le code. Pour
soutenir les activités de commissaire à ce
sujet, il me semble essentiel de reconnaître la contribution de chaque citoyen
qui dispose de renseignements éminemment utiles à la mission du
commissaire. Dans un contexte strictement confidentiel, ces renseignements permettent
au commissaire d'avoir un regard plus exact sur différents risques de conflits
d'intérêts lui permettant d'intervenir dans
un contexte préventif pour guider les députés et les ministres. Ces gestes
préventifs du commissaire, exercés de
façon confidentielle, ont été appréciés par les députés et les ministres
concernés. Je crois que le code
devrait être révisé pour prévoir plus explicitement cette contribution de tout citoyen
et pour introduire un mécanisme de protection législative complète
contre les représailles dont pourraient faire l'objet les personnes qui
s'adressent au commissaire.
En 2010, le
législateur a fait le choix d'élaborer des règles déontologiques et des
principes éthiques qui s'appliquent à
tous les députés, y compris les cabinets de l'Assemblée nationale. Seuls
les membres du Conseil exécutif font l'objet de règles déontologiques particulières,
comme je l'ai mentionné précédemment. Plus récemment, on s'est interrogés sur
la nécessité d'ajouter d'autres règles
déontologiques particulières dans l'hypothèse où un député, qui n'est pas
membre du Conseil exécutif, détient
des intérêts dont l'importance ou la nature est telle qu'ils le mettent
constamment à risque de se trouver dans une situation de conflit
d'intérêts ou de faire l'objet d'une allégation à cet égard.
Selon
l'importance ou la nature des intérêts du député et la fonction qu'il occupe,
l'obligation de préserver son indépendance
de jugement en écartant son intérêt personnel au bénéfice de l'intérêt
collectif, ou celle de ne pas favoriser ses intérêts personnels, ou,
d'une manière abusive, ceux de toute autre personne, peut, en pratique,
susciter un très grand nombre de questions.
Est-ce que tous ces soucis pourraient ultimement
nuire à l'exercice de la charge du député en question? Voilà pourquoi je crois que l'examen du rapport sur la
mise en oeuvre donne l'occasion de s'interroger sur les limites du code
et de considérer l'opportunité d'introduire
des règles déontologiques qui peuvent être adaptées à cette situation
exceptionnelle.
En terminant,
M. le Président, je rappelle que les responsabilités assumées par les députés
et par les membres du Conseil
exécutif ne sont pas banales, comme vous le savez très bien. La rigueur des
dispositions éthiques et déontologiques adoptées par le législateur en 2010 est directement proportionnelle aux
responsabilités que les membres de l'Assemblée nationale assument.
Je me réjouis
de la culture éthique et déontologique adoptée par les membres de l'Assemblée
nationale, s'inspirant des règles
édictées par le code. Les députés savent bien qu'ils doivent demeurer attentifs
aux risques de conflit d'intérêts et apprendre à déceler ces risques.
Ils ne laissent rien passer. Lorsqu'une situation concrète se présente, ils
connaissent l'importance d'agir sans tarder et de consulter le commissaire ou
le jurisconsulte au moment opportun.
J'apprécie grandement la collaboration de tous
les membres de l'Assemblée nationale et des membres de leur personnel. Je
profite de l'occasion pour les en remercier sincèrement. Merci, M. le
Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le
commissaire. Avant de procéder à un bloc d'échange, vous aviez remis aux
membres de la commission une copie du texte de votre allocution. Est-ce que
vous souhaitez que ce texte soit produit?
M.
Saint-Laurent (Jacques) :
Je l'apprécierais, M. le Président. Vous constaterez que, pour respecter le
20 minutes, j'ai sauté quelques passages. Ils sont dans le texte.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Mais vous souhaitez tout de même
que ces passages fassent partie de votre allocution. C'était le but de
ma question. Je ne voulais pas le mentionner, mais...
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Tout à fait.
Document déposé
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Parfait. Alors, ce sera déposé. Voilà qui est fait.
Discussion générale
Nous allons
maintenant entreprendre un premier bloc d'échange. M. le député de LaFontaine,
à vous la parole.
M. Tanguay : Pour une
période, M. le Président, je crois, de 15 minutes, n'est-ce pas?
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, c'est ça.
• (16 h 10) •
M. Tanguay :
Oui. Parfait. Bien, vous me permettrez d'abord, d'entrée de jeu, M. le
Président, de remercier et de souhaiter la
bienvenue à Me Saint-Laurent. Merci beaucoup de venir... Vous nous apportez
votre éclairage, basé sur votre
expertise des, dirons-nous, des quatre dernières années, en incluant 2011 à
2014, inclusivement. Vous me permettrez également de saluer les
collègues qui sont ici aujourd'hui et qui participent à cette importante
rencontre.
Nous
avons le bénéfice, M. le Président, du rapport sur la mise en oeuvre de notre
code d'éthique, code d'éthique des
députés de l'Assemblée nationale, qui régit le comportement et qui veut que le
comportement des députés... nous aide, là, à avoir le comportement qui
soit sans reproche en matière d'éthique et de déontologie.
Votre
rapport de mise en oeuvre est le fruit de votre expérience sur le terrain, le
fruit... et vous avez entre autres produit, en annexe 3 de votre
rapport, des statistiques sur les différentes questions sur lesquelles on vous
interpellait soit par un député soit par un
membre du personnel ou, encore une fois, des demandes d'entrevues par les
médias. Et c'est important, je pense, de souligner que nous avons donc
le bénéfice de votre expertise sur le terrain.
Vous
mentionnez, dans votre rapport, à la page 13, que le code d'éthique est
peut-être, pour le député, la loi ou sa loi la plus importante. Il a une importance capitale pour un député qui,
avant de voter les lois, doit d'abord être un exemple, doit d'abord, évidemment, non seulement dans les faits,
mais dans les perceptions, doit se soucier constamment, est-ce qu'il
respecte les règles dans leur lettre et dans leur esprit, et quels sont, dans
les faits, mais également dans les perceptions au niveau de la population,
dans le contexte du processus démocratique... Mon comportement a-t-il un
impact? Mon comportement soulève-t-il des questions?
Et vous dites que le doute n'est pas idéal, le doute même est
à proscrire. Dans les cas idéaux, il n'y aurait pas de doute quant à la situation
d'une ou d'un député en particulier, ce serait très clair.
Alors, vous me
permettrez, je pense qu'il est important, pour les quelques premières minutes...
et vous me permettrez, M. le Président, avec le consentement des collègues, je pense qu'on pourrait
s'adresser directement à Me Saint-Laurent,
si on ne déborde pas dans nos questions, plutôt que d'y aller via la présidence. Je ne voudrais
pas diminuer votre rôle, mais je le
sais que vous saurez peut-être faire écho à cette demande qui nous rendrait les
échanges plus efficaces.
Donc,
les expériences que vous avez rencontrées, à la page 11, vous dites que votre
rapport n'est pas exhaustif, donc, autrement dit, vous aurez peut-être, d'entrée de jeu, des éléments sur lesquels vous
aimeriez commenter, qui ne font pas l'objet des 23 recommandations. Mais,
comme vous le dites, à la page 11, que votre rapport n'est pas exhaustif, j'imagine que vous pourrez, et
je vous y invite, si d'aventure vous n'avez pas traité de certains éléments des
quelque 132 articles de notre code, bien, je vous invite à y aller même s'il
n'est pas formellement dans votre rapport, parce qu'aujourd'hui, là, vous nous
livrez à nous, les députés, vous nous livrez le fruit de votre expérience sur
le terrain.
Vous
avez mentionné, dans votre rapport, que la loi de 1982 sur l'Assemblée
nationale, aux articles 57 et 84, c'est ce qui nous régissait comme députés avant, avant décembre 2010. Vous
mentionnez, dans votre rapport, à la page 12, que le moment était venu pour le Québec, en 2010, de
se doter d'un code d'éthique et de déontologie. On était la seule
province à l'époque, en 2010, à ne pas
l'avoir fait. Et vous avez bien précisé qu'il était temps de faire mieux et
d'avoir un code beaucoup plus
élaboré. Alors, en ce sens-là, vous nous invitez, en page 76 de votre rapport,
à faire mieux, mais à faire davantage,
pas à faire moins, et ça, je pense que c'est important dans l'exercice dans
lequel nous nous engageons aujourd'hui,
les 125 collègues, à faire en sorte de ne pas diminuer les règles, mais de
faire mieux, de faire en sorte qu'elles soient encore plus fortes.
On
aura l'occasion, M. le Président, et je le souligne pour le bénéfice des
collègues et du commissaire, Me Saint-Laurent... oui, il y aura les 23
recommandations. On aura l'occasion aujourd'hui de traiter, évidemment, des
conflits d'intérêts, les impératifs quant
aux fonctions des députés, devoir de réserve, et aussi j'ai parlé des
perceptions, s'assurer que la
confiance qu'ont les citoyens dans le processus démocratique demeure toujours
sans faille, demeure toujours très fort, ce lien de confiance. On parlera évidemment des fiducies sans droit de
regard ou des mandats sans droit de regard. On parlera également des représailles, protéger celles et ceux qui veulent
soumettre de l'information au commissaire, d'être à l'abri de toutes représailles directes ou
indirectes. On parlera également des sanctions, recommandations 20 et 22,
que vous aimeriez, vous, plutôt que de les
soumettre à l'Assemblée nationale, que vous aimeriez, vous, 20 pour les députés,
imposer des sanctions, ou 22, votre
recommandation 22, sur le personnel politique. Ce serait important de vous
entendre là-dessus.
C'est
quelques sujets, ce n'est pas une liste exhaustive, M. le Président.
Aurons-nous le temps suffisant pour aborder tous ces sujets? Je
l'espère. Si d'aventure nous manquions de temps, la commission, évidemment, et
ses membres auront l'occasion peut-être, le
cas échéant, de vous demander de revenir nous voir, mais ne nous limitons pas
aujourd'hui, si d'aventure nous n'avons pas eu l'occasion de traiter de toute
question majeure qui intéresse toute la population.
Vous
avez, et ça fait partie de votre rapport, vous avez rendu publics cinq rapports
d'enquête, au courant de ces quatre
années, concernant des députés. Vous avez rendu publics, donc, ces rapports qui
sont sur votre site et vous avez également
des rapports d'enquête, notamment sur du personnel politique. Il y en a deux
notamment que vous mentionnez à l'intérieur
de votre rapport. Les rapports d'enquête sont le fruit de votre application du
code et les rapports d'enquête sont ce qui
vous a permis aujourd'hui de nous soumettre 23 recommandations. S'il n'y avait
pas eu cette application, par vous, du code,
il n'y aurait pas de rapport. S'il n'y avait pas eu, par vous, des décisions
suite aux enquêtes, décisions dont nous avons le bénéfice d'en lire les
tenants et aboutissants, nous n'aurions pas aujourd'hui votre rapport qui vise
encore une fois à améliorer le code d'éthique.
Donc,
code d'éthique, plus de 130 articles, 23 recommandations. On va commencer par
la dernière, la 23e recommandation. La 23e, qui est le chapitre 2.7 de votre rapport
et qui est à la page 75, parle des situations exceptionnelles.
Là, on sort, M. le commissaire, nous sortons de ce qui est déjà
codifié, et, à la page 75, vous traitez, et vous l'avez mentionné à la
page 10 de vos remarques préliminaires, les situations exceptionnelles.
Je vais d'abord
citer... situations exceptionnelles, en page 75, vous traitez de quoi? C'est
quoi qui est exceptionnel? Est-ce qu'on parle de harcèlement, de représailles, de sanctions? Non. On parle ici
d'intérêt détenu par un député,
un membre de l'Assemblée nationale. Situation exceptionnelle, intérêt détenu
par un membre de l'Assemblée nationale; le sujet, c'est les conflits d'intérêts,
le potentiel conflit d'intérêts. Et votre préoccupation, comme la nôtre, qui est toute la nôtre, c'est de maintenir la
confiance du public envers les institutions démocratiques.
Et je vais citer le deuxième paragraphe,
je vous cite, en page 75 : «À ce moment — en 2010 — les élus n'avaient pas anticipé la
possibilité qu'un membre de l'Assemblée
nationale, qui n'est pas membre du Conseil exécutif, détienne des intérêts dont
l'importance [et] la nature [sont] telle qu'ils
le mettent constamment à risque de se retrouver en situation de conflit
d'intérêts ou de faire l'objet d'une
allégation à cet égard. Sans un [encadrement] approprié, les doutes que soulève
une telle situation ne sont pas à même de contribuer à maintenir la
confiance de la population envers les élus.»
Alors,
corrigez-moi si j'ai tort, M. le commissaire, mais, dans le choix de ce mot...
je vais d'abord y aller pas sur la
nature, je vais d'abord y aller sur l'importance, situation
exceptionnelle, un député, conflit d'intérêts, l'importance de ces
intérêts qu'il détient. Corrigez-moi si j'ai tort, mais vous avez
assurément en tête le cas très tangible du député de Saint-Jérôme, qui a fait
l'objet, le 5 décembre dernier, d'une décision qui vous permet aujourd'hui de
nous faire cette recommandation 23 là. Ai-je raison, M. le commissaire?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le commissaire.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Merci, M. le Président. Votre question me permet, avec la permission des membres de la Commission
des institutions, d'apporter une
précision qui me semble très importante à ce stade pour expliquer que le rapport sur la mise en oeuvre a été produit en
application de l'article 114 du code — M. le
Président l'a bien souligné au
début de nos travaux — et
a été produit à l'Assemblée nationale le 24 février dernier avec comme objectif
qu'il soit éventuellement étudié par la Commission des institutions, comme le
prévoit le code.
Alors, il y a
quelques semaines, la situation a tourné, si je peux le dire comme ça, puis il
faut l'aborder très ouvertement, les médias
ont soulevé la question de savoir : Est-ce que la Commission des institutions sera éventuellement chargée d'étudier la situation
du député de Saint-Jérôme? C'est très important pour moi de ramener
les choses dans le contexte de l'étude
du rapport sur la mise en oeuvre et d'expliquer pourquoi la recommandation 23 et d'autres recommandations se trouvent dans ce rapport-là.
Et, si vous me permettez, j'expliquerais simplement que le commissaire est effectivement interpellé, comme vous le
soulignez, par les dossiers d'enquête qu'il a à traiter, mais il est aussi
interpellé par un nombre impressionnant de demandes d'avis qu'il reçoit. Et
vous parliez des statistiques tout à l'heure; si on va à l'annexe 3, aux statistiques, on voit que le bureau du commissaire
n'a pas chômé depuis 2011 en termes de demandes d'avis.
Alors,
ces avis-là sont préparés dans un contexte où le code dit au commissaire, à
l'article 65 : M. le commissaire, vous
avez le mandat, d'abord et avant tout, de faire oeuvre de prévention, d'agir en
prévention des situations qui pourraient se présenter. Alors, le
commissaire le fait d'abord et avant tout dans un contexte d'avis. Comme vous
le savez, le code prévoit, à l'article 87, que le commissaire est appelé à
donner des avis aux députés. Ces avis-là sont strictement confidentiels — on
aura peut-être l'occasion d'en reparler concernant d'autres
recommandations — sont
strictement confidentiels, et les seuls qui
peuvent éventuellement les rendre publics, ce sont les députés à qui ces
avis-là sont adressés.
• (16 h 20) •
Alors, le commissaire
emmagasine, si vous voulez, un bagage d'expériences, un bagage de situations
qui l'amènent à dire : Il faudrait peut-être
considérer des questions de façon plus générale. Et, à ce sujet-là, le code
prévoit également que, lorsqu'il y a une situation d'intérêt général,
l'article 90 prévoit qu'il peut avoir la responsabilité et l'obligation de
renseigner les députés et la population sur l'application du cas. En voyant les
questions qui se sont soulevées, j'ai pensé,
et je continue à penser, qu'il était opportun et que le rapport sur la mise en
oeuvre est un moyen approprié pour
soulever des questions qui présentent non pas seulement un intérêt, si vous
voulez, à l'égard d'un ou d'une députée, mais un intérêt qui va au-delà
de la question qui concerne une seule personne, et d'inviter les membres de
l'Assemblée nationale à exprimer au commissaire des points de vue, des préoccupations,
parce que le commissaire, éventuellement, dans sa responsabilité d'avis, dans
sa responsabilité d'enquête, doit prendre des décisions.
Il doit déterminer
comment on interprète le code, mais je trouve que le rapport sur la mise en
oeuvre est l'occasion rêvée, si vous me
permettez l'expression, de solliciter des commentaires des membres de
l'Assemblée nationale sur des
questions plus complexes, dont celle qui est mentionnée à la recommandation
n° 23. Mais c'est important de bien comprendre que le commissaire, dans le travail de la commission
parlementaire, ne me semble pas autorisé à discuter d'un cas particulier, quel qu'il soit. Le commissaire
pourrait être appelé, dans la fonction qu'il assume, à donner un avis
formel à la demande du député concerné ou à
la demande d'un autre député dans le contexte d'une demande d'enquête. Or, il
n'est pas dans mon esprit et dans mon autorité de discuter d'un cas particulier
aujourd'hui. Par contre, d'échanger puis de soulever les questions que
sous-tend cette problématique-là me semble être l'occasion appropriée de le
faire.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député, il reste
1 min 30 s.
M.
Tanguay : Il reste
1 min 20 s. Lorsque vous parlez de l'importance des intérêts,
M. le commissaire, est-ce
que vous faites notamment référence à la réalité que vous aviez analysée,
notamment dans le cas du dossier de la collègue
de Mirabel, notamment dans le cas du dossier du collègue de Saint-Jérôme, à
savoir l'application de l'article 25? Quand on est propriétaire d'une entreprise ou actionnaire
d'une entreprise quelconque et que le débat à l'Assemblée nationale, que
ce soit ici, en commission, ou au salon bleu, touche directement ou
indirectement ou pourrait avoir des perceptions de conflit d'intérêts,
l'article 25 dit que l'on doit se retirer.
Alors,
lorsque vous parlez de l'importance, corrigez-moi si j'ai tort, mais vous
faites référence au cas d'un député qui
aurait tellement d'intérêts dans tellement d'entreprises qu'il serait presque
en perpétuel... en danger d'être en perpétuel risque de conflit
d'intérêts. Est-ce que j'ai raison de le formuler ainsi?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : En 30 secondes, M. le commissaire.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Oui, bien sûr. La question se soulève
par le biais de l'article 25, mais d'abord et avant tout par les règles générales sur les
conflits d'intérêts. Alors, l'article 25 est un point particulier, une
règle précise sur les conflits
d'intérêts, mais, si on regarde les articles 15, 16 et 18 plus spécialement,
alors, c'est bien sûr que, plus, à titre
de député, j'ai des activités dans toutes sortes de domaines, bien, plus ces
activités-là dans différents domaines me placent dans une situation où je risque d'être dans une situation de
conflit d'intérêts et où j'ai un travail de veille beaucoup plus grand à
exercer.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complétait le temps
alloué pour ce premier bloc d'échange. M. le leader de l'opposition officielle,
à vous la parole.
M.
Bédard :
Merci. Alors, à mon tour, M. le commissaire, merci pour ce rapport. Et
votre travail, d'ailleurs, pendant les
dernières années, pour nous, c'est un ouvrage important. Effectivement, vous le
rappelez, ce code, nous l'avons fait à
l'unanimité, dans un contexte qui n'était pas évident d'ailleurs, il faut s'en
souvenir, où les règles avaient été abaissées
à trois reprises et pour lequel nous pensions tous ensemble que nous devions
donner une prévisibilité à tous les membres de l'Assemblée quant aux règles
éthiques, mais de toute nature, dons et avantages, et ainsi qu'aux règles déontologiques
pour éviter, justement, d'être dans la surenchère. Je vous remercie
effectivement du travail que vous effectuez.
Je vais saluer mes
collègues d'en face. M. le Président, je sais que vous êtes un bon juriste,
donc je suis convaincu que nos travaux vont être bien menés. Dans le cas
contraire, nous vous le rappellerons.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M.
Bédard :
Mes collègues de l'Assemblée, évidemment du côté de l'opposition, et ainsi que
la deuxième opposition, et notre ami le député de Mercier, très intéressé par
cette question.
Donc,
tout d'abord, ce que je semble constater, à la lecture de
votre rapport... Si je vous faisais l'affirmation que, généralement, il y a une collaboration importante et de haut niveau de la part de tous les membres de l'Assemblée, est-ce que ma
phrase serait vraie?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Votre phrase est tout à fait exacte.
Il faut... J'ai essayé de l'exprimer en termes peut-être trop modestes, mais nous avons... et j'ai
plus spécialement, comme commissaire, une collaboration exemplaire de
tous les membres de l'Assemblée nationale qui donnent suite à mes
communications et à mes demandes rapidement.
M.
Bédard : Vous avez fait certaines vérifications ou enquêtes
dans le cadre de vos responsabilités, et est-ce que je conclus aussi
qu'à chaque occasion les personnes, dont faisait d'ailleurs mention le député
d'en face, par exemple, le député de
Saint-Jérôme, ou la députée de Mirabel, ou d'autres, d'élus ou d'anciens élus
maintenant... Est-ce qu'en ce qui concerne
ces deux personnes particulièrement — je vais commencer par ces deux-là — vous aviez un niveau de collaboration
que vous jugiez nécessaire et important?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Dans les différentes enquêtes que
j'ai eu à mener jusqu'à maintenant, y compris l'enquête relative au député de Saint-Jérôme et à la députée de Mirabel,
les membres de l'Assemblée nationale concernés ont été très ouverts à collaborer avec le commissaire, et à donner
toutes les informations requises, et à rendre disponibles les
informations lorsque je devais les obtenir à l'extérieur. Donc, ça s'est très
bien passé.
M.
Bédard : Est-ce que ce niveau de collaboration est le même
pour, par exemple... ou est-ce que vous pensez qu'il serait plus compliqué pour des députés, ou ministres, ou peu
importe, qui auraient terminé leur mandat... Est-ce que vous avez le même niveau de collaboration de ces
gens qui, soit, par exemple, dans les règles d'après-mandat ou par
rapport à des circonstances qu'ils ont eues
à... qu'ils doivent répondre par rapport aux mandats qu'ils occupaient...
Est-ce que ce niveau de collaboration est de même nature?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Dans le contexte d'un après-mandat, M. le député de
Chicoutimi, simplement vous expliquer que je suis intervenu jusqu'à maintenant
sur la base de l'article 28, qui est un article un petit peu oublié, qui prévoit que les députés qui
recevraient des sommes après avoir quitté l'Assemblée nationale mais
concernant des activités ayant eu lieu à l'Assemblée nationale ou dans le cadre
de l'exercice de leurs charges doivent le déclarer. Donc, j'ai communiqué avec les ex-députés à ce sujet-là qui ne
comprenaient pas bien pourquoi je communiquais avec eux, donc ça a été un petit peu plus laborieux. Dans le
cadre des enquêtes que j'ai faites auprès d'ex-députés ou d'ex-ministres,
ça s'est bien passé, j'ai pu rejoindre les gens et obtenir le même niveau de
collaboration.
M.
Bédard : Est-ce qu'on aurait intérêt à renforcer ces
pouvoirs que vous avez en ce qui concerne l'après-mandat?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Je pense que ce qui pourrait être
considéré, ce serait d'assurer que le commissaire continue d'avoir des renseignements qui lui
permettent de contacter ces gens-là. Or, j'ai été en quelque sorte
chanceux jusqu'à maintenant de pouvoir utiliser des adresses électroniques qui
étaient toujours bonnes ou des numéros de téléphone
que j'avais notés à l'époque, mais, à chaque fois, je me suis posé la question,
de savoir : Comment je vais faire pour
pouvoir rejoindre l'ex-député ou ministre n'ayant pas nécessairement une mise à
jour de la déclaration que j'avais à l'époque, là, vous voyez? Mais
c'est la seule difficulté que j'ai notée.
M.
Bédard :
O.K. Et, dans les pouvoirs que vous avez, est-ce que nous avons intérêt à vous
donner, justement, des pouvoirs
d'enquête qui sont élargis? Parce qu'évidemment quelqu'un qui est en fonction,
qui ne collabore pas, il y a toujours
le code qui prévoit que l'absence de collaboration peut, en soi, être un
manquement. Or, dans le cas de quelqu'un qui n'est plus en fonction,
bien, il n'y a... vous n'avez... disons, votre pouvoir de coercition est plutôt
limité.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Oui. Il peut être limité, si je peux
le dire de cette façon-là, au niveau des sanctions, c'est-à-dire qu'il y a un certain nombre de
sanctions qui sont proposées à l'article 99 du code qui, pour une personne
qui n'est plus à l'Assemblée nationale,
deviendraient inapplicables et inutilisables. Donc, à ce moment-là, dans les
réflexions que j'ai eues, je me suis
dit : Bien, il faudra éventuellement qu'à ce moment-là, si j'arrivais à
une conclusion de sanction, que je m'appuie, par exemple, sur le
paragraphe 2° de 99, qui prévoit une recommandation pour l'imposition d'une
pénalité. Alors, ce serait plus dans cette optique-là que je pourrais
travailler à ce moment-là.
• (16 h 30) •
M.
Bédard :
De ce que je devrais comprendre de votre rapport puis de vos commentaires
depuis le début, ce que je comprends
des membres de l'Assemblée actuelle, évidemment, c'est que tout le monde est
conforme aux règles que vous avez
prévues, tant au niveau des déclarations que, je vous dirais, que des règles
qui concernent les conflits d'intérêts. Donc, ce que vous avez, vous avez l'ensemble des déclarations des députés. Selon vous, est-ce que
l'ensemble des députés et des ministres, évidemment,
incluant le premier ministre, sont conformes aux règles de notre code
d'éthique et de déontologie?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Le véhicule qui est utilisé par le commissaire et que le code prévoit à
ce sujet-là, et c'est quelque chose que j'ai eu l'occasion d'expliquer
aux médias il y a déjà quelques années, c'est le véhicule du sommaire de la déclaration des intérêts
personnels. Alors, à chaque année — et
on reviendra pour l'année en cours auprès des élus en novembre prochain — il y a une déclaration des intérêts personnels des députés et des ministres qui est suivie par une analyse à notre bureau, une rencontre avec
les élus et la préparation du sommaire. Alors, quand le commissaire publie les sommaires, que ce soit pour les
ministres ou pour les députés, on doit constater que, s'il y avait des
difficultés, les difficultés ont été
aplanies et que la publication des sommaires atteste, en quelque sorte, que les
obligations des députés et des ministres sont respectées à ce moment-là.
M.
Bédard : Si je vous
disais, par exemple, en ce qui concerne le député de Saint-Jérôme, par
exemple : Son engagement à donner un
mandat sans droit de regard ou une fiducie dans le cadre de ses actifs va
au-delà du code, donc des obligations qui sont prévues pour un député ou
un chef de l'opposition, est-ce que ma déclaration est exacte?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Dans le contexte où le député de
Saint-Jérôme est actuellement député et chef de l'opposition officielle, ce que prévoit le code à ce sujet-là, c'est qu'il
n'y a que deux catégories de règles déontologiques : il y a des règles déontologiques qui s'appliquent à
tous les députés, y compris les ministres, et il y a des règles
déontologiques particulières, plus sévères, qui concernent les ministres, les
membres du Conseil exécutif.
Alors, dans
la catégorie des règles déontologiques applicables aux députés, il n'est pas
requis, dans le contexte actuel, de
constituer une fiducie ou un mandat sans droit de regard. Dans ce sens-là, il y
a un engagement plus grand, si vous voulez,
de la part du député de Saint-Jérôme qui prévoit constituer cette fiducie-là.
Là où moi, je propose aux membres de la
Commission des institutions et inévitablement, bien sûr, au député de
Saint-Jérôme de faire une analyse, c'est de dire : Est-ce que, par rapport aux objectifs en matière
de conflits d'intérêts, le véhicule d'une fiducie ou d'un mandat sans
droit de regard pour un député qui n'est pas
ministre est un véhicule approprié? Là-dessus, j'aurais intérêt... j'aimerais
beaucoup en discuter avec les membres de la Commission des institutions pour
qu'on essaie de préciser quels sont les objectifs, quels sont les risques, et
ensuite moi, j'aurai à prendre mes décisions par la suite, bien sûr.
M.
Bédard :
Parce qu'actuellement dans le cas... évidemment, chaque député fait sa
déclaration; dans le cas du député de
Saint-Jérôme, il veut aller plus loin que ce que le code prévoit, mais, dans
tous les cas de figure, que ce soient les ministres ou ceux qui ont une
fiducie sans droit de regard, dont je fais partie, d'ailleurs, à ce moment-là,
vous, ce que je comprends, vous avez les
différents actifs dans votre déclaration, donc vous savez où pourrait se situer
telle ou telle possibilité de conflit d'intérêts. Donc, vous êtes au
courant de façon personnelle de ces faits. Est-ce que c'est exact?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Effectivement, la déclaration des
intérêts personnels a justement pour objectif de permettre au
commissaire de faire cette analyse-là avec le député ou le ministre concerné,
c'est-à-dire de recevoir la déclaration des intérêts personnels pour lui-même,
pour les membres de sa famille immédiate, d'en faire une analyse attentive et ensuite d'examiner avec elle ou lui
s'il y a des situations qui doivent être corrigées et apporter des
correctifs.
M.
Bédard :
...de vos discussions, donc vous pouvez faire des recommandations au député, au
ministre concernant tel ou tel intérêt. C'est ce que je comprends.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Exact.
M.
Bédard :
O.K. Sur les règles de la fiducie ou du mandat, ce que je comprends... vous
dites dans votre rapport : Il y a peu d'indications, donc vous
dites : À ce moment-là, moi, j'ai pris exemple sur ce qui existe dans le
Code civil, donc qui définit c'est quoi, un
mandat ou une fiducie sans droit de regard. C'est ce que je comprends. Donc, ce
sont les références... Le Code civil
est notre droit commun, là, et donc notre référence à tous, c'est, au niveau
juridique, les exemples que vous avez pris pour dicter en quoi consiste
une fiducie ou un mandat sans droit de regard.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Tout à fait. En fait, le code prévoit
à l'article 45 une obligation qui est particulière pour les ministres, elle n'est pas la même pour
les députés, et cette obligation-là, qui est particulière pour les
ministres, je l'ai expliqué un peu dans les
notes préliminaires, résulte d'une règle ancienne qui prévoit qu'il faut éviter
qu'un ministre ou une ministre se
mette à spéculer à la bourse, parce qu'il a des informations qui lui
permettraient de le faire. Alors, ça, c'est le cas de figure usuel et qui fait en sorte que l'article 45 dit :
Un ministre ne peut pas conserver ses intérêts à la bourse. Il doit soit
les vendre, soit les placer dans une fiducie ou un mandat sans droit de regard.
Cette
règle-là n'est pas applicable pour les députés comme tels. Ce qui s'applique
pour un député ou une députée, c'est l'article 18 du code, notamment,
mais, plus précisément, cet article-là vise les règles contractuelles. Or, on
dit, à l'article 18 : Lorsqu'un député
détient des intérêts dans une entreprise... Et là on va faire la distinction,
si vous voulez, entre une entreprise
privée et une entreprise publique : entreprise publique signifie
entreprise à la bourse. Alors, lorsqu'on a des intérêts dans une entreprise privée et que cette entreprise-là fait
affaire avec l'État d'une façon ou d'une autre, il n'y a pas une obligation, contrairement aux ministres, de
vendre ses intérêts dans l'entreprise privée ou d'empêcher l'entreprise privée de faire affaire avec l'État. Ce que le
code prévoit, c'est de dire : Bien là, vous pourrez continuer à faire
affaire avec l'État à la condition d'en informer le commissaire et d'obtenir
une autorisation de sa part, qui pourra fixer des conditions, notamment une
fiducie sans droit de regard.
Alors,
voyez-vous, c'est très spécifique. Quand on est dans les entreprises publiques,
pour un député, c'est toujours à
l'article 18. Et là on dit : Bien, si un député détient des intérêts dans
une entreprise à la bourse, cette entreprise-là peut faire affaire avec l'État sous réserve que l'importance
de l'intérêt détenu par le député ou le contexte de la conclusion du
contrat nous amène à penser qu'il y aurait collusion ou influence indue. Alors
là, ça amène encore un travail du commissaire avec
le ou la députée concernée pour dire : Bon, bien, comment ce contrat-là
a-t-il été octroyé? Est-ce que c'est un contrat, par exemple, de gré à
gré, où, là, il y aurait une vérification beaucoup plus attentive du
commissaire, comme vous pouvez l'imaginer,
ou si c'est un contrat par appel d'offres, etc.? Alors, vous voyez, c'est dans
ce contexte-là que la fiducie ou le mandat sans droit de regard, pour un
député, a une portée plus restreinte, si je peux dire comme ça.
M.
Bédard : En
terminant...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Plus qu'une minute, M. le député de Chicoutimi.
M.
Bédard :
Une minute. Si je vous disais que cet article-là a été fait pour, à l'époque,
assurer une prévisibilité, cet article
qui concerne le mandat ou la fiducie, pour ceux qui viennent en politique, pour
leur permettre d'assumer une charge publique
tout en n'étant pas surpris par la diminution des règles ou, encore là, de se
voir imposer des règles qui iraient au gré, là, au gré du vent, au gré
de la pression médiatique, est-ce que vous pensez que c'est une justification
qui était correcte à l'époque?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, je pense que c'est une
justification que je comprends bien et que j'utilise moi-même. Parce que, vous avez vu, dans le rapport
sur la mise en oeuvre, je suggère que le commissaire soit autorisé à
donner des avis à des gens qui se proposent de devenir candidats. Parce que la
question m'a été soumise à différentes occasions,
et je me suis servi de cette notion de prévisibilité là, comme vous le
mentionnez. Et j'ajouterais simplement que, dans l'article 45, il y a aussi un élément, à la toute fin, où on vient
ajouter que le commissaire peut lui-même ajouter des conditions. Alors, c'est un élément pour lequel je
m'interroge puis j'essaie de comprendre qu'est-ce que le législateur
avait à l'esprit à ce moment-là.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce
bloc d'échange. Je me tourne maintenant vers le député de Deux-Montagnes.
À vous la parole, M. le député.
M.
Charette : Merci, M. le Président. Merci, M. le commissaire, c'est un
plaisir de vous recevoir aujourd'hui, tout comme ce fut un plaisir de
lire votre rapport au moment du dépôt de ce dernier, en février dernier. Et je
vais vous dire comment je l'ai reçu à la
base. J'ai pu le lire, effectivement, rapidement, et ma conclusion ou
l'interprétation que j'en ai fait,
c'est que c'est un bilan, un bilan, en quelque sorte, des premières années
d'application de ce code d'éthique qui nous régit tous en tant que
députés. Donc, c'était une occasion, oui, de bilan, mais également une occasion
de réfléchir à comment l'améliorer.
Peut-être me
rassurer : Est-ce que, déjà à ce niveau-là, j'ai la bonne interprétation?
Est-ce que c'est la façon dont on devait recevoir votre rapport?
• (16 h 40) •
M.
Saint-Laurent (Jacques) : C'est une excellente façon de le
recevoir, M. le député de Deux-Montagnes. J'avais comme objectif, pour
le premier rapport sur la mise en oeuvre, de résumer les activités du bureau du
commissaire depuis trois ans. Et je dois avouer une
frustration, si je peux le dire de façon amicale, qui est celle d'avoir préparé
de nombreux avis qui interprètent les
différents articles du code et de
voir que ces avis-là demeurent confidentiels parce que je n'ai pas la
possibilité de les rendre publics, ce sont seulement les députés
concernés qui peuvent le faire. Et j'ai imaginé, à ce moment-là, la
possibilité d'anonymiser ces avis-là et de faire en sorte que le rapport en
contienne le plus grand nombre possible. C'est pour ça que vous avez vu toute
une série d'interprétations qui se veulent une certaine forme d'enseignement
pour les députés et pour la population aussi. Donc, c'est l'objectif que
j'avais au départ.
M.
Charette : Donc, ce n'est
pas mépriser le travail qui a été fait en 2010 que de conclure qu'avec
l'expérience ce rapport-là, malgré tous ses
mérites, n'est pas parfait ou, à tout
le moins, qu'il y ait eu des événements,
dans l'intervalle, qui nous permettent de penser à des situations qui
n'avaient pas été anticipées au moment de sa rédaction et de son adoption, il y
a quelques années maintenant.
Et
je vais d'ailleurs, à ce niveau-là, lire un petit passage de votre allocution
d'introduction, lorsque vous faites référence
notamment aux situations exceptionnelles. Vous avez bien précisé, au départ, le
code effectivement s'applique à l'ensemble
des députés. On a prévu, par contre, des dispositions particulières pour les
membres de l'exécutif, dispositions qu'on
n'avait pas jugées bon, à l'époque... généralisées à certains députés ou, à
tout le moins, à des députés vivant une situation particulière. Et, tout à l'heure, vous avez mentionné :
«Voilà pourquoi je crois que l'examen du rapport sur la mise en oeuvre
donne l'occasion de s'interroger sur les limites du code et de considérer
l'opportunité d'introduire des règles déontologiques qui peuvent être adaptées
à ces situations exceptionnelles.»
J'ai aimé ce
passage-là et je vous dis pourquoi. Depuis quelques semaines, en tout respect,
au niveau de la Coalition avenir Québec, on
a relevé des lacunes au code d'éthique, on a relevé des éléments qui mériteraient
aujourd'hui d'y être ajoutés. Et certaines
personnes, et je ne doute pas de leurs intentions, je ne veux pas leur en
prêter, nous ont taxé de vouloir politiser ou sinon contribuer à un
cercle médiatique. On nous a reproché même de jouer un jeu partisan. Donc, est-ce que c'est souhaitable? Est-ce que
c'est légitime, pour une formation politique, de soulever des lacunes
qui semblent être pertinentes? Est-ce que
c'est légitime, pour une formation politique, de mettre sur la table des
éléments qui pourraient éventuellement être intégrés à une nouvelle
mouture du code d'éthique?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Peut-être simplement expliquer ma
proposition pour l'ensemble des membres de la Commission des institutions et les membres de l'Assemblée nationale.
Dans le contexte du rapport sur la mise en oeuvre, ma suggestion
première serait de soulever les lacunes, comme vous le dites très bien. Et je
pense que le travail qui a été fait en 2009
et 2010 est un travail exceptionnel. J'ai la chance de collaborer, à
l'occasion, avec nos collègues canadiens, commissaires aux conflits
d'intérêts, et plusieurs provinces, plusieurs territoires sont jaloux du code
québécois parce qu'ils trouvent qu'il est
bien fait. Et je pense qu'on doit saluer le travail des députés, qui ont fait
le code à l'époque, et des légistes aussi. Je pense entre autres à Me
Louis Sormany, qui avait fait un travail exceptionnel.
Alors,
ce que je vous propose, c'est de dire : Il est légitime de soulever des
questions, mais il serait souhaitable d'avoir
la prudence d'éviter de personnaliser. Donc, la question que soulève la
recommandation 23, à laquelle vous faites référence, est une question
qui, pour le moment, nous semble s'appliquer à un seul député, de Saint-Jérôme, mais elle pourrait s'appliquer dans bien d'autres situations et
elle pourrait servir à donner un guide plus raffiné au code dans des situations semblables et des outils pour le
commissaire. Alors, dans ce sens-là, je
pense que c'est légitime de
poser les questions, mais de façon peut-être moins personnalisée.
M.
Charette : C'est gentil. Tout à l'heure, vous avez mentionné, au
niveau de la fiducie sans droit de
regard, que vous seriez intéressé à
en discuter, à discuter de la formule. Est-ce
que ça voudrait dire que nous
pourrions en discuter dès cet après-midi?
Est-ce qu'on pourrait savoir, en fonction de votre expertise,
dans quelle mesure on pourrait mieux baliser cette fiducie sans droit de regard? Est-ce que c'est un élément
dont vous êtes autorisé à discuter avec nous cet après-midi?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Dans les préparatifs que j'ai effectués pour cette commission
parlementaire, j'ai pris quelques notes sur
des points qui me permettraient d'expliquer les interrogations qui me viennent
à l'esprit et pour lesquelles
j'aimerais avoir des commentaires des membres de l'Assemblée nationale. Donc,
dans ce sens-là, je suis prêt à vous soumettre quelques éléments qui me
viennent à l'esprit, si je peux le dire de cette façon-là.
M. Charette :
C'est bien gentil. Nous aurons l'occasion d'y revenir, là, dans quelques
instants. Sinon, et je reviens toujours
à la situation particulière que vous décrivez, je comprends
qu'on ne peut pas nommer spécifiquement un député, mais qu'est-ce qui pourrait être un exemple de situation
exceptionnelle pour vous? Qu'est-ce qui pourrait être une situation
importante au point où les intérêts du député, la fonction qu'il occupe soient
questionnés? Quelle est la définition pour
vous d'une situation exceptionnelle qui mériterait peut-être
que l'on revoie certaines dispositions du Code d'éthique?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Ce qui m'amène à soulever cette interrogation-là, c'est en me référant
aux règles de base du code, que j'ai
résumées très, très succinctement dans la présentation d'ouverture,
ces règles de base là qui, comme je le
dis à chaque personne qui veut bien l'entendre, sont des règles qui sont bien
faites, mais qui sont aussi très exigeantes pour les députés et les ministres concernés, parce qu'en fait on met sur les épaules des élus
la responsabilité d'effectuer leur propre
veille sur la situation qui les concerne et d'effectuer un suivi sur les
différents risques de conflit d'intérêts auxquels ils pourraient être confrontés. Alors, c'est pour ça
que je disais dans ma présentation : Ils doivent apprendre à déceler
les conflits d'intérêts, comprendre en quoi leur situation personnelle peut
constituer un risque.
Alors, dans cet élément-là, lorsqu'on comprend
le fardeau qui est imposé à chaque député, on peut imaginer, dans un contexte bien simple de proportionnalité,
on peut imaginer que plus j'ai des activités financières, économiques, plus j'ai des activités
caritatives ou toutes sortes d'autres activités à l'extérieur de ma fonction de
député, bien, c'est autant de risques
qui me tombent sur les épaules. Alors, le fait de pouvoir constater qu'il y a
une proportionnalité entre la nature de
nos intérêts, l'importance de nos intérêts, comme je le mentionne dans le
rapport, et les risques que je dois contrôler, ça m'amène à dire : Bon, bien vous vous imaginez... je fais une
parenthèse pour vous mentionner qu'après l'élection du 7 avril 2014
j'ai eu un bon nombre d'appels téléphoniques des membres des médias, des
journalistes qui, à juste titre, me
disaient : M. le commissaire, est-ce qu'il y a des règles particulières
pour un député de l'opposition? Qu'est-ce qu'il doit faire, etc.? Et la question est tout à fait pertinente. La
question, elle est drôlement pertinente. Dans le contexte de 2010, on n'a pas jugé opportun d'avoir d'autres règles
que les règles générales et particulières... ministres. Avec
l'expérience, là, on se dit : Bien, peut-être
que ce serait opportun de donner un outil au député qui se voit confronté à une
veille qui va le paralyser et de lui
donner un outil qui va faire en sorte qu'il va être capable de s'avancer puis
de faire sa job de député.
M. Charette : Donc, pour le mentionner ou le dire autrement,
c'est légitime pour une formation politique
ou pour les députés de penser élargir le code d'éthique à des députés, à
des élus qui ne sont pas membres du Conseil exécutif. C'est ce que je comprends
de votre dernière affirmation.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Bien, en fait, je dirais simplement que ça, ce sera le choix des membres de
l'Assemblée nationale. Moi, ce que j'essaie d'exprimer, c'est que, sur un
aspect comme celui-là, il y aurait peut-être intérêt
à ce que les membres de l'Assemblée nationale précisent leurs attentes, leurs
pensées à ce sujet-là. Parce que, s'il n'y a pas de précision
d'apportée, bien, dans le contexte déjà planifié au code, c'est le commissaire
qui, à l'occasion d'avis, d'enquêtes, aura à prendre les décisions qu'il doit
prendre.
• (16 h 50) •
M.
Charette : Vous avez mentionné, et je vous cite : Plus j'ai
d'obligations économiques, autant j'ai de risques de conflits d'intérêts potentiels. Je ne vous
paraphrase peut-être pas mot pour mot, mais c'est ce que vous avez déclaré
il y a quelques instants. Bref, plus j'ai
d'activités économiques, plus grandes sont mes chances de devoir régir mon
comportement en conséquence. Est-ce que ça
correspond à la situation particulière ou spéciale que vous souhaiterez que
l'on définisse mieux selon la
recommandation 23? Est-ce que cette activité économique importante pourrait,
par exemple, prendre la forme de la
propriété d'un conglomérat de presse qui contrôle à peu près 40 % des
médias québécois? Est-ce que ça pourrait prendre également la forme d'un individu, d'un élu, qui pourrait détenir
75 % des droits de vote pour ce
même conglomérat? Est-ce que c'est le type de situation particulière qui
pourrait être examiné de la part des élus de l'Assemblée nationale?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Ça fait partie des exemples qui peuvent être considérés. La question
qui se pose notamment, c'est la question du risque. Je vous
parlais tout à l'heure des articles 15, 16 et suivants. Alors, à
l'article 16, on prévoit qu'un député
ne doit pas favoriser des intérêts en exerçant une influence sur la personne qui
doit décider. Alors, cette notion de
risque d'influence est une notion qui est quand même importante, et ça
peut amener des questionnements, une analyse sur l'influence éventuelle.
M.
Charette : On a parlé
brièvement, tout à l'heure, du fameux mandat qui pourrait être confié à un
fiduciaire. Je sais que mon collègue
de Granby aura l'occasion de vous entretenir sur le sujet davantage
tout à l'heure. Quelle est, par exemple, la limite d'une
fiducie sans droit de regard? Est-ce
que, par exemple, l'élu qui
placerait ses avoirs dans une pareille fiducie serait légitimé? Est-ce
qu'il aurait la possibilité d'interagir avec son fiduciaire ou est-ce que, par
exemple, le président du conseil
d'administration de son entreprise
serait, lui, en droit de continuer à le questionner sur les affaires
courantes de l'entreprise? Est-ce que ce serait fait dans le respect d'une
fiducie sans droit de regard?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
C'est la question que j'ai introduite dans le rapport sur la mise en oeuvre,
sur laquelle je pense qu'il y aurait lieu de faire un examen. Par
rapport à la population,
si je peux l'exprimer de cette façon-là, M. le député de Deux-Montagnes, c'est que la fiducie sans droit de regard a été plus spécialement
conçue dans un contexte, comme je
l'expliquais tout à l'heure, de spéculation. Et déjà il y a
quelques années, au moment de la discussion du code, en 2009‑2010, en commission
parlementaire — je vous parlais tout à l'heure de mes collègues
des autres provinces qui ont eu aussi
une discussion à ce sujet-là — on
se rend compte que le véhicule de la fiducie ou du mandat sans droit de
regard est un véhicule qui est peut-être
moins adapté dans des contextes d'entreprise
unique, si je peux le dire comme ça, là, pour le dire très succinctement. Et à ce moment-là, dans un contexte
d'entreprise unique, il y a peut-être des aménagements qui pourraient
être considérés, imaginés, qui feraient en sorte que, par rapport à l'objectif
d'un lien de confiance avec la population, bien, on introduit des mesures qui
sont crédibles et qui donnent l'assurance qu'il y a moins de risques
d'intervention.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il reste un peu moins d'une minute, M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : Bien, c'est bien gentil. On aura aussi l'occasion, aussi,
de pouvoir parler... Vous avez mentionné — le temps me manque,
malheureusement — au
niveau de la déclaration d'intérêt, vous proposez une modification à ce niveau-là, c'est-à-dire le député qui pourrait avoir
un intérêt, dorénavant, pourrait se contenter de le déclarer sans avoir
à se retirer de la discussion, mais tout en étant, si je comprends bien, privé
de son droit de vote, ultimement, là, sur cette question précise là.
Est-ce que ce
n'est pas contraire à à peu près toutes les bonnes règles de gouvernance,
notamment au niveau des conseils d'administration? Lorsqu'il y a un
intérêt, ce n'est pas suffisant que de le déclarer, il faut se retirer. Est-ce qu'en retenant cette
proposition on s'éloignerait de règles élémentaires de gouvernance qui
s'appliquent dans à peu près tous les conseils d'administration ou
toutes les instances décisionnelles?
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : On va devoir attendre pour
revenir. Ça complète malheureusement le temps. Alors, vous pourrez
revenir, M. le député de Deux-Montagnes. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Rapidement, M. le commissaire, sur la question de mon collègue. Je vous donne
de notre temps pour répondre à notre collègue qui... Vous allez nous
éclairer. Alors, si vous pouvez rapidement apporter votre réponse.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Oui. Bien, d'abord, effectivement, je
pense que, par rapport aux règles que l'on connaît au niveau des conseils d'administration, j'imagine qu'on
pourrait s'étonner de la recommandation du commissaire qui semble dire que, malgré le fait qu'une
personne a un intérêt personnel et financier distinct, il pourrait participer au
débat.
Là où j'apporte une distinction que je vous
soumets bien humblement, qui ne fait pas l'unanimité à travers le Canada, là, je le mentionne au passage... mais,
moi, ce qui m'apparaît très important, c'est qu'on avait, avec l'article
62 de la Loi sur l'Assemblée nationale, cette notion de divulgation d'un
intérêt personnel et financier distinct, mais qui ne conduisait pas automatiquement à un retrait du débat. Et on a des
députés, des ministres, à l'Assemblée nationale, qui possèdent une expertise extrêmement pertinente et qui peut, cette expertise-là, nourrir le débat, si je
peux le dire de cette façon-là.
Alors, dans ce sens-là, à la condition que la personne ait déclaré son
intérêt personnel et financier distinct, donc que les gens, avant de l'entendre, sont prévenus de
cet intérêt personnel et financier distinct, il m'apparaît souhaitable,
dans un débat public... je ne parle pas d'un débat au Conseil des
ministres, mais, dans un débat public à l'Assemblée nationale, il
m'apparaît souhaitable que cette personne-là puisse communiquer son savoir, si
je peux dire ça comme ça, mais pas qu'elle puisse voter.
M. Tanguay : Merci beaucoup,
M. le commissaire. Rapidement, pour résumer... Et je vous donne un cas d'application : lorsqu'entre autres dans vos
notes d'introduction, en pages 10 et 11, vous parlez de la charge de
député — on
ne parle pas de la charge d'un ministre, mais de la charge d'un député — qui
pourrait, selon l'importance des intérêts financiers
et la nature — j'en
suis toujours à l'importance, là — alors, susciter de grands questionnements,
vous le dites à la page 11...
Corrigez-moi si j'ai tort, mais n'êtes-vous pas d'accord que, lorsqu'un député
est actionnaire d'une seule compagnie versus un député qui est
actionnaire de 100 compagnies, êtes-vous d'accord avec moi que ça, c'est un cas
d'application où, effectivement, c'est exceptionnel pour le député qui en a
100, et il a un intérêt important en termes de
nombre et, évidemment, d'argent investi, alors, êtes-vous d'accord avec moi que
vous visiez notamment ce cas d'espèce là,
un député qui a une action ou des actions dans une compagnie versus un député
qui a des actions dans 100 compagnies? Je
le sais, que ce ne sont pas tous les cas d'espèce, mais êtes-vous d'accord que
ce cas-là, c'est un cas que vous visiez également?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : En fait, ce que j'essaie d'exprimer
dans ce questionnement-là, c'est la question, plus spécialement, du
risque d'influence, parce que je pense que c'est important de considérer cette
question-là. Or, dans l'aspect risque
d'influence, bien, c'est sûr que l'importance de l'intérêt, que ce soit en
termes de nombre ou en termes de
valeur, si vous voulez, ou de propriété — je pense qu'on doit le mentionner comme
ça — c'est
quelque chose qui doit être considéré, parce qu'il y a, encore là, une
proportionnalité entre ces différents intérêts là et le risque d'influence.
M. Tanguay : Donc, vous
diriez oui?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Oui, si vous voulez.
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le commissaire. On s'est interrogés... «On», est-ce
que ce sont les collègues que vous avez mentionnés, un peu plus tôt, de l'unité-conseil, Me Fontaine et Me Gagné-Lafrance? Vous dites,
à la page 10 : «Plus récemment, on s'est interrogé [quant à] l'importance
[et] la nature...» C'est qui, ça, «on s'est interrogé»?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Non, c'était plus spécialement au niveau de la société en général.
M. Tanguay : O.K.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Vous avez vu comme moi les nombreux articles qu'on a eus dans les
médias. Alors, quand je parle de «on
s'est interrogé», il y a eu un nombre considérable de discussions, de
questionnements, qu'est-ce que
l'on peut faire ou qu'est-ce qu'on ne peut pas faire, et je pense que c'est
dans ce contexte-là que j'ai soulevé «on s'est interrogé».
M. Tanguay : Diriez-vous qu'en matière d'éthique et de
déontologie il faut avoir une aversion pour le doute?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Je pense qu'on doit surtout avoir un objectif de transparence, d'abord et avant tout, et un objectif d'être en mesure d'expliquer les
choses. Alors, il y a des justifications qui doivent être données, et,
dans la mesure où on donne une
justification, une explication qui permet de comprendre qu'on a pris des
mesures pour contrecarrer le risque d'influence, c'est là qu'on doit
aller avec le code, selon moi.
M.
Tanguay : Et diriez-vous que, dans le cas d'espèce, là, mon
député qui est actionnaire de 100 compagnies, dans ce cas d'espèce là... Et je ferai écho à la responsabilité
proactive d'un député : le député doit, sans tarder, vous le mentionnez dans vos documents, évidemment,
soulever un cas, mais faut-il qu'il soit au courant au départ, là, qu'il
est en conflit d'intérêts. Le député qui est
actionnaire d'une seule compagnie a un défi moins grand que celui qui est
actionnaire de 100 compagnies. Et, dans
votre décision concernant notre collègue de Mirabel, du 1er décembre 2014, vous
citiez — parce
que la plainte avait été déposée par un collègue du Parti québécois, le député
de Berthier — au
paragraphe 39°, et je vous cite : «[Le
député de Berthier, donc,] soumet que la députée de Mirabel aurait dû avoir le
réflexe de se retirer du débat, vu son intérêt personnel. Il ajoute que
la responsabilité première d'agir appartient à la députée de Mirabel...» Et
vous faites écho à cette responsabilité du député.
Diriez-vous
qu'un député qui n'aurait pas suffisamment de balises ou d'encadrement serait à
risque, justement, de rencontrer ou
de mettre en application son obligation d'être proactif et de mentionner,
évidemment, qu'il risque d'avoir un
intérêt? Parce que, jusqu'à un certain point, là, la bonne foi peut être une
excuse, mais, jusqu'à un certain point, la bonne foi ne pourra pas toujours pardonner des situations
où effectivement il s'est mis en conflit d'intérêts. Alors, j'aimerais vous entendre sur le défi particulier du député qui
doit être proactif, dénoncer, en vertu de l'article 25, le cas de conflit
d'intérêts quand il y a autant l'importance,
100 compagnies, de son défi particulier. Vous allez être d'accord avec moi
qu'effectivement un député se met à risque, en ce sens-là, n'est-ce pas?
• (17 heures) •
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Naturellement, je dois hésiter à
sous-estimer la capacité de quelque député que ce soit de prendre les moyens nécessaires pour éviter
d'être placé dans une situation de conflit d'intérêts. Je ne pense pas
que ce soit opportun pour moi de qualifier, d'une façon ou d'une autre, dans ce
sens-là. Ce que je suis porté à suggérer, puis c'est l'objet du code en général, et c'est l'avantage du code
d'ailleurs, c'est plutôt de dire, un peu comme on le fait dans d'autres
secteurs pour la sécurité : Lorsqu'on impose des règles en mesure de
sécurité du travail, on ne présume pas de l'incompétence des gens qui utilisent
les appareils, mais on dit : On ne prendra pas le risque additionnel d'une
distraction ou de quoi que ce soit, on va élaborer des outils. Or, moi, quand
je propose, dans le rapport sur la mise en oeuvre,
de considérer ces aspects-là, c'est dans un contexte vraiment constructif de
dire : Je ne suis pas en train de présumer de quoi que ce soit, mais est-ce que, pour que ce soit plus facile
d'exercer sa charge de député ou de ministre, on aurait avantage à
ajouter quelques garde-fous?
M. Tanguay : Et votre réponse
est visiblement oui à ça. Nous avons avantage à ajouter des garde-fous.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Bien là, c'est difficile pour moi de vous répondre
à ça, parce que je pourrais me faire dire,
par un bon nombre de députés à l'Assemblée nationale : M. le commissaire,
bien, faites votre travail; vous n'avez pas besoin de garde-fous
additionnels. Alors, ça serait une réponse tout à fait appropriée.
Ce que je suggère, c'est que je ne prétends pas
être détenteur de la seule avenue possible. Et avoir la chance d'étudier périodiquement un rapport sur la mise en
oeuvre, pour moi, c'est une occasion excellente de donner l'occasion aux
députés de m'éclairer là-dessus.
M. Tanguay : Et, si vous le
soulevez, donc la question est importante. On s'est questionné — la
société en général : l'importance de ne
pas avoir de doute en matière d'éthique. Donc, si vous le soulevez,
corrigez-moi si j'ai tort, mais je
pense que c'est parce que vous y voyez là un intérêt, une importance que
d'aborder la question et, le cas échéant, oui, d'avoir des garde-fous,
n'est-ce pas?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : J'ai trouvé que la question était
suffisamment importante pour la mentionner dans le rapport sur la mise
en oeuvre. Donc, j'y reconnais une importance, tout à fait, à la question.
M. Tanguay :
Et, lorsque, dans votre rapport concernant le député de Saint-Jérôme, au
paragraphe 65, vous dites, et je vous
cite : «...un député doit demeurer attentif lorsque son intérêt personnel
entre en jeu dans l'exercice de sa charge, il lui incombe de vérifier et
de s'abstenir pour éviter que son action ait pour effet de [la] favoriser»,
j'aimerais savoir, évidemment, si vous
notez, vous, dans la pratique, qu'effectivement un député qui aurait des
actions dans 100 compagnies versus
une seule, bien — parce
que vous le dites, là, il a l'obligation d'être proactif — aurait la partie peut-être
difficile... en tout cas, plus difficile
qu'un député qui n'a pas d'intérêt dans aucune compagnie, il va sans dire, mais
mettons l'exemple d'une seule compagnie. Alors, seriez-vous d'accord
avec cette affirmation-là que, oui, le député a sur ses épaules tout un défi?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Naturellement, il faut d'abord faire
le lien entre l'exercice de la charge et les intérêts en question.
Alors, il faut que les intérêts soient en lien avec l'exercice de la charge. C'est
pour ça que, dans les commentaires que j'ai exprimés dans le rapport sur la
mise en oeuvre et dans les notes introductives, je parle d'une frontière
étanche. Alors, la frontière étanche devient nécessaire lorsque les fils
peuvent se toucher, si je peux prendre cette expression-là. Si on est dans des
situations où il n'y a aucun lien à faire entre les activités d'une entreprise
et les activités du député, l'objectif n'est
pas le même du tout. Donc, on peut difficilement généraliser comme vous le
proposez.
M. Tanguay : Mais êtes-vous
en désaccord avec l'affirmation suivante : L'obligation d'être proactif
pour un député qui est actionnaire dans 100 compagnies est beaucoup plus lourde
qu'un député qui en a juste une? Êtes-vous d'accord ou en désaccord avec cette
affirmation-là?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Bien, c'est difficile d'être en désaccord, parce
que j'ai moi-même parlé, tout à l'heure, de la notion de proportionnalité.
M. Tanguay : Donc, vous êtes
d'accord.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Alors, présumons qu'il y a un lien
entre l'exercice de la charge et les 100 entreprises dont vous parlez, et à ce moment-là il y a une
proportionnalité qui impose un fardeau plus lourd sur le député pour
exercer une veille face à un risque de conflit d'intérêts.
M. Tanguay :
Parfait. Merci beaucoup, parce que vos réponses nous éclairent, hein, vos
réponses viennent du terrain.
Maintenant, tout ce débat-là transposé aux proches, à la famille et aux
personnes liées, évidemment, vous serez d'accord à préciser, comme vous le faites en page 10 de votre rapport,
«y compris avec les personnes de son entourage, [peut] constituer un
intérêt personnel qui pourrait éventuellement exercer une influence sur son
indépendance de jugement, dans l'exercice de
sa charge». Donc, ce questionnement-là et tout ce qu'on dit depuis le début est
précisé, le cas échéant, mais tout ce
qu'on dit là également nous pousse à avoir aussi un questionnement aussi
rigoureux, appliqué non seulement au député en sa personne, mais
enfants, personnes à charge, famille, entourage également, n'est-ce pas? Vous
le soulignez, vous-même, dans votre rapport.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Oui. Si vous me permettez, je rappellerais qu'en matière de risque de conflit d'intérêts
le code de 2010 est quand même... qui est le code actuel, est quand même
très, très bien fait, dans le sens où on met, d'abord et
avant tout, le fardeau ou l'obligation sur le député, la députée concernés de
ne pas se placer dans une situation de
conflit d'intérêts. On a un fardeau qui est, aussi, important vis-à-vis les
membres de la famille immédiate et les enfants non à charge. Et,
lorsqu'on sort de ce réseau intime, si vous me permettez l'expression, très
étroit, là on a une notion de ne pas
favoriser des intérêts d'une manière abusive. Et ça va de soi parce que, chaque
fois qu'un député intervient pour un
citoyen de sa circonscription, inévitablement, il favorise les intérêts du
citoyen de sa circonscription. Ce qui est interdit, c'est de le faire d'une façon abusive. Et c'est comme ça que
là-dessus je pense que le code est déjà très bien fait, là.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il reste deux minutes, M. le député.
M. Tanguay :
Oui, tout à fait. Au niveau maintenant de la nature... j'aurai l'occasion, dans
le prochain bloc, d'en discuter avec vous, mais, au niveau de la
nature... on parlait de l'importance, mais de la nature des intérêts, est-ce qu'il pourrait y avoir un débat... lorsque l'on
parle de la nature, un questionnement qui pourrait... À moins que vous
me dites — et c'est ma question : Non, ce ne
serait aucunement pertinent, est-ce qu'il serait pertinent de se poser la
question : O.K., il y a des intérêts
très importants dans une entreprise qui ne peut pas, par définition, être en
affaires avec l'État versus une entreprise, oui, exemple, une compagnie
qui rendrait des services au gouvernement, est-ce que la nature vient également, dans votre interrogation, de
l'entreprise, que ce soit une entreprise dans un domaine x ou y notamment,
par exemple une entreprise qui contrôlerait
certains médias? Est-ce que la nature est à cet effet-là, dans votre
sémantique?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Dans l'objectif que je poursuis au
niveau de la discussion relative au rapport sur la mise en oeuvre, je pense qu'on ne peut pas
contourner la question de la nature et de la nature en lien avec les médias.
Quand on lit les commentaires, justement
dans les médias, de journalistes, de personnes dans les opinions de lecteurs et
autres, il y a deux questions qui reviennent constamment, et, à mon avis, c'est
drôlement intéressant, pertinent de discuter de ces questions-là, parce qu'on peut peut-être être à l'avant-garde dans
nos façons de considérer ces questions-là. Et ce qu'on entend, c'est que les gens disent : Est-ce qu'il
y a une possibilité que, par une propriété aussi importante au niveau
des médias, l'influence qui est exercée fasse en sorte qu'on favorise l'image?
Ou, à l'inverse : Est-ce que c'est possible que, par l'importance encore de l'intérêt et la nature, l'intervention
ait pour effet qu'on ternisse l'image des adversaires? Alors, ça, ce
sont des questions qui sont intéressantes, pertinentes et pour lesquelles il
faut discuter, à mon avis.
M. Tanguay : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce
bloc d'échange. Je me tourne maintenant vers le député de Mercier. À
vous la parole, pour huit minutes.
• (17 h 10) •
M. Khadir :
Merci, M. le Président. J'ai déjà eu l'occasion de saluer personnellement le
commissaire, M. Saint-Laurent, et j'en profite pour saluer mes collègues
également.
M. le commissaire, d'abord, moi, je vais
poursuivre évidemment sur la lancée de mon collègue de Deux-Montagnes et aussi du député de LaFontaine pour
préciser un peu la nature de ce qui est du caractère exceptionnel, les
circonstances spéciales et les questions qu'on se pose sur les fiducies et
leurs limitations.
Mais, avant, comme on a étudié, avec mon équipe,
votre rapport sur la mise en oeuvre du code, je voudrais simplement repasser avec vous les recommandations
qui sont... Parce que vous avez, si je ne m'abuse, 23 recommandations.
Sur ces 23 là, il y en a quelques-unes qui sont un peu plus matière à
discussion et critiques de... il y en a d'autres qui sont relativement consensuelles. Alors, pour ce qui est de votre
recommandation 3 sur l'importance de se questionner : Quelles autres fonctions un député peut
éventuellement exercer ou pas?, on est d'accord, il faut vraiment le
préciser : il y a des questions d'intérêt là-dedans.
Ensuite,
la question de se retirer des séances, mais de... ou pas, de participer au
débat ou pas pour un député qui serait en conflit d'intérêts avec le
sujet débattu, je pense, mérite examen; on est d'accord avec vous.
Votre
recommandation n° 6, sur les obligations concernant les intérêts détenus
par un député à l'extérieur du pays, toute
la question offshore, des intérêts dans des paradis fiscaux ou des législations
de complaisance, parce que c'est des sujets d'actualité puis ça va
toucher d'importantes personnes au Québec, notamment les chefs des deux
principaux partis — il a été question, durant la campagne
électorale, notamment — il faut le préciser. Ça rentre en conflit frontal avec la question de la bienveillance de l'action
des députés — la
règle 6 de notre code — envers l'intérêt du public, intérêt général.
Et donc il faut l'aborder. Je pense que tout le monde est prêt à ça. Nos amis
des deux côtés, en premier, reconnaissent le caractère critique de ça.
Nous sommes d'accord avec vous pour que le code
soit modifié pour voir comment on facilite la constitution d'une fiducie sans
droit de regard. De là à penser qu'il faut nécessairement payer, nous avons eu
d'autres... mais on pourra y revenir, nous avons quelques éléments là-dessus à,
disons, vous proposer.
La
recommandation 19 : «Que le code soit modifié pour interdire des
mesures de représailles contre» les sonneurs d'alarme. En fait, c'est l'équivalent de ça. Ceux qui viennent sonner
l'alarme, auprès du commissaire, sur des manquements aux règles de déontologie et d'éthique, de la part
des... Bon. En attendant une loi qui vienne vraiment nous doter d'une
véritable loi pour les protéger, vivement... et on est très contents que vous
le mentionnez.
Enfin, votre
proposition n° 20, pour imposer une pénalité pour défaut de respecter, je
pense que, pour donner plus de mordant au travail du commissaire, c'est
absolument essentiel.
Et aussi la
révision des règles de déontologie à l'égard des obligations du député, les
pouvoirs du commissaire dans les situations exceptionnelles. Ce qui
m'amène donc à certaines situations exceptionnelles...
Combien de minutes je dispose encore, M. le
Président?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Pardon?
M. Khadir : Combien de
minutes me reste-t-il?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
4 min 30 s.
M. Khadir : Oh là là! Je me dépêche. En fait,
je voudrais demander au commissaire : Est-ce que, selon vous, un chef de parti, par rapport à un député — un député, disons, qui n'a pas de fonction
particulière — représente
une situation exceptionnelle?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
C'est certainement une fonction importante.
M. Khadir : Importante. Un chef de l'opposition
officielle a fortiori, j'imagine. Parce que, dans notre expérience, le chef de l'opposition officielle en fait exerce
plus d'influence par ses nombreuses questions, par ses interventions,
par l'attention médiatique qu'il reçoit en
permanence. En fait, de mon expérience de sept, huit ans ici, à l'Assemblée, en
fait exerce plus d'influence que même plusieurs ministres dans la partie
gouvernementale, dans l'orientation des débats en société. Est-ce que je me
trompe?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
C'est pour cette raison que je soulignais tout à l'heure que, dans la version initiale du code, on n'a pas fait la distinction
entre un député qui exerce des fonctions parlementaires et un député qui
n'en exerce pas, et la question est sur la table.
M. Khadir : ...un chef de parti, surtout de
l'opposition officielle, donc on en convient que ça sort du commun des
députés en termes de pouvoir, et d'influence, et d'attention médiatique.
Maintenant,
dans notre société, être baron d'un empire médiatique... Rappelons qu'au Québec
on est un des pays, en Occident, où
les médias sont les plus concentrés. Ici, au Québec, on avait auparavant trois
barons médiatiques : il y avait M. Conrad
Black; lui a quitté un peu le tableau. Il reste essentiellement deux familles
qui possèdent... qui sont de la trempe des barons médiatiques : il
y a la famille Desmarais et la famille du député de Saint-Jérôme...
M.
Bédard : M. le
Président...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Question de règlement.
M.
Bédard : ...je
dirais, au-delà de notre réforme, de percer les...
M. Khadir : Non, mais c'est
le caractère exceptionnel exprimé par le ministre...
M.
Bédard :
Non. Le caractère régulier, c'est d'appeler les gens comme ils sont. Et, par
respect pour tout le monde, je pense
que le député, il devrait, au niveau de son code, le regarder et de comprendre
qu'on doit agir aussi de façon digne. Alors, le but, c'est d'appeler les
gens par leur titre, puis, s'il y a des titres à donner autrement, il y aura
des occasions.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Non, je m'excuse, messieurs, le point, en fait...
M.
Khadir : ...détenteur de l'empire...
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : ...M. le député de Mercier,
simplement, je comprends l'intervention, je vous inviterais à poursuivre en faisant attention de ne pas, inutilement ou
indûment, mettre en cause la réputation des gens.
M. Khadir :
...le terme qui dérange — ce n'est pas grave — donc, détenteur important d'un conglomérat
médiatique qui est prépondérant, qui est dominant au Québec, est-ce que, pour
vous, c'est une situation exceptionnelle?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : C'est une situation exceptionnelle...
M. Khadir :
Très bien. Parfait.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : ...et c'est la raison pour laquelle je propose de
l'examiner.
M. Khadir : Alors, le député de Saint-Jérôme se trouve, à deux égards au moins, en étant chef de l'opposition
officielle et en étant détenteur d'un conglomérat médiatique dominant au Québec,
se trouve dans une situation exceptionnelle.
Donc,
ensuite, le troisième élément, une entreprise de presse qui couvre les activités parlementaires, hein, la presse étant le pendant... en fait, le... en
confrontation, en principe, permanent... En démocratie, le rôle de la presse,
c'est de confronter en permanence le pouvoir et les gens du pouvoir, que ça
soit au gouvernement ou dans l'opposition, de les critiquer, de dévoiler ce que
le pouvoir ne veut pas dévoiler.
Donc,
êtes-vous d'accord avec moi qu'en principe, si les médias jouent
leur rôle, si la liberté de presse s'exerce, les médias sont en permanence en conflit avec le pouvoir dans les questions
qu'ils posent, dans le point qu'ils mettent... sur les conflits, sur les
manquements, si vous voulez, du pouvoir?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Je répondrais, M. le député de Mercier, que je n'ai pas les compétences et non
plus l'autorité pour conclure là-dessus.
Et je vous dirais simplement que le code introduit différentes règles prévoyant
un cadre pour éviter d'être placé
dans une situation de conflit
d'intérêts. Et je pense
que le cadre est déjà très
bien fait, il s'agit de voir : Est-ce que des situations
comme celle qu'on vit justifieraient de le raffiner davantage?
M. Khadir :
Je voulais qu'on aborde cette question-là...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : 50 secondes.
M. Khadir : Je voulais qu'on aborde cette question-là
parce que la population, je
pense, est en droit de
s'attendre, de cette commission, qu'on aborde la chose de manière, je dirais... de manière ouverte, sans
se gêner, parce qu'il en va d'une question d'importance cruciale
sur laquelle le député de Chicoutimi, avec moi... nous sommes les deux seuls à
avoir travaillé, quatre ans, après
d'innombrables abus et manquements, de la part du gouvernement qui était en place à l'époque... Donc, il faut avoir le courage de l'aborder. Et les médias sont
en conflit permanent avec le pouvoir, donc quelqu'un qui est à la tête
d'un empire médiatique et qui exercerait des fonctions politiques
serait en conflit permanent avec
lui-même si on ne lui donne pas l'occasion, par des règles
déontologiques claires, de choisir entre les deux intérêts.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète
tout le temps dont nous disposions avec le député de Mercier. Je me
tourne vers le député de LaFontaine. À vous la parole.
M.
Tanguay : ...rapport de la mise en oeuvre du code, vous faites
une analyse quant au concept d'intérêt personnel, et je crois que vous faites votre analyse dans le
contexte de l'application de l'article 25, lorsque l'on parle d'intérêt
personnel et financier, et vous référez notamment à cette section-là et vous
citez le Commissaire à l'éthique en Colombie-Britannique,
qui avait rendu publique une définition d'«intérêt personnel». Évidemment, vous
dites... et vous nous invitez à faire
un examen minutieux de chaque circonstance particulière. Pouvez-vous nous
expliquer rapidement en quoi c'est important
d'y aller au cas par cas et de s'attarder justement aux circonstances
particulières? En quoi c'est important, dans votre analyse, vous? Et
vous l'avez eu... et vous l'avez répété, notamment dans le cas du député de
Saint-Jérôme, la députée de Mirabel aussi, vous le répétez souvent.
• (17 h 20) •
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Lorsqu'une personne a le privilège de
devenir membre de l'Assemblée nationale, il y a, à mon avis, en application du code et aussi de la Loi sur
l'Assemblée nationale, un certain nombre de comportements, de réflexes à développer. Et, parmi ces
comportements, ces réflexes, le souci de prioriser l'intérêt public est très
important. Et, dans le souci de prioriser
l'intérêt public, la difficulté que nous rencontrons, y compris à mon niveau,
c'est celle d'écarter notre intérêt
personnel ou notre façon personnelle d'aborder les questions. Or, comme le veut
le proverbe : Chassez le naturel et il revient au galop. Alors,
c'est un peu ce qu'il faut avoir comme réflexe de prudence, et c'est pour ça
que j'essaie d'expliquer aux élus, ministres
et députés, qu'un intérêt personnel ce n'est pas simplement
un intérêt financier auquel on accorde un montant d'argent. Alors, l'intérêt
personnel, c'est tout intérêt qui peut effectivement venir biaiser — et là j'exagère avec le terme «biaiser»,
mais c'est simplement pour illustrer — qui peut venir biaiser notre
jugement.
M.
Tanguay : Tout à fait.
Et, dans le cas de la décision — c'est
le paragraphe 23 de votre rapport d'enquête du
5 décembre dernier — paragraphe
23, dans le cas du député de Saint-Jérôme, où vous disiez : «L'intérêt
personnel mentionné au code comprend un intérêt personnel n'ayant pas de valeur
financière ou économique...»
Et, plus
loin, évidemment, dans ce même paragraphe 23, vous citez le Commissaire à l'éthique, en Colombie-Britannique, qui, lui — toujours
paragraphe 23, décision du 5 décembre concernant le député de
Saint-Jérôme — le
Commissaire à l'éthique... Et, si vous le
citez, c'est évidemment parce que vous faites siens, jusqu'à un certain
moment... vous faites vôtres, d'ailleurs, pardon, ces propos, lorsque lui, et
je le cite, parle, lorsqu'il définit des intérêts, parle de «personal loyalty or affection, or benefits
provided to others in the expectation of returned favours in the future».
Donc, on est loin des intérêts financiers proprement dits. C'est-à-dire :
On n'est pas loin, mais c'est différent des intérêts financiers proprement
dits.
On parle,
lorsque vous définissez la notion d'intérêts déjà incluse dans notre code, que
l'on doit se questionner, et c'est
déjà le droit actuel, sur — vous citez le commissaire de la Colombie-Britannique — «personal loyalty», les loyautés personnelles. Est-ce qu'il pourrait y avoir un
conflit d'intérêts basé sur des loyautés personnelles ou des expectatives
de faveurs que l'on pourrait se voir
retourner? Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur cet aspect-là très
important de la définition de «conflit d'intérêts potentiel».
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Oui. C'est une définition qui peut
être très vaste. Vous me permettrez, modestement, de prendre un ou deux
exemples simplement. Et je vais prendre mon propre exemple, là, fictif, mais imaginons que, depuis mon jeune âge, je suis
passionné par la musique et je suis toujours membre du club musical
depuis plusieurs années. Alors, pour moi, cette appartenance au club musical
présente un intérêt qui, par rapport à d'autres personnes, est un intérêt beaucoup plus grand. Et, si, dans l'exercice
de ma charge de député, je ne me méfie pas de cette situation personnelle là, bien, de façon peut-être
inconsciente, je vais prendre une décision ou une action qui va indirectement
être influencée par ma loyauté à ce club musical là auquel j'appartiens depuis
très longtemps. Alors, c'est ce genre d'explication
que j'ai voulu utiliser, en faisant la citation de la décision du commissaire
Fraser en Colombie-Britannique.
M. Tanguay :
Sans vous demander d'avoir un exemple concret, mais, sur un plan théorique,
êtes-vous d'accord que, dans nos
délibérations en commission, les 125 députés, pour bonifier notre code et même
par rapport au droit actuel du code,
conflit d'intérêts, vous nous mentionnez le Commissaire à l'éthique de la
Colombie-Britannique, lorsque l'on parle : «expectation of returned favours», êtes-vous d'accord... pas besoin
d'avoir un exemple tangible, mais que, sur un plan théorique, effectivement, conflit d'intérêts peut
être, pour une personne, d'agir parce qu'elle aurait une expectative
d'une faveur qui lui serait retournée?
Êtes-vous d'accord avec cette application-là de conflit d'intérêts qui ne
serait pas financier, là?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Bien, c'est déjà prévu au code, hein? Vous avez ces notions-là aux articles 15
et 16, et vous les avez aussi dans la section relative aux dons et avantages,
où on dit qu'on ne peut pas accepter un don
qui risque d'avoir une influence sur notre indépendance de jugement. Bien, ça,
c'est une notion de retour, là. Si on me donne des billets pour aller à
un match du Canadien en finale puis que ça vient de quelqu'un qui s'attend, de
ma part, à une aide discrétionnaire comme ministre, bien, on a notre notion de
retour, là.
M. Tanguay :
Vous citez, dans votre rapport, le cas d'espèce suivant et, dans vos notes,
dans votre allocution d'ouverture,
vous parliez, en page 6 : «...les membres de l'Assemblée nationale ne sont
pas suffisamment conscients de l'influence
qu'ils exercent autour d'eux», et vous l'appliquiez, cette fois-là, aux médias
sociaux. Et vous donnez l'exemple, qui
pourrait sembler anodin, mais vous avez pris une décision — c'est à la page 29 de votre rapport — dans le cas... c'est quelques lignes, je vais les lire, ça pourrait sembler anodin, mais là vous
avez mis, comme commissaire, votre
pied à terre, vous avez pris une décision puis vous avez dit : Le
comportement sera dirigé par ma décision, moi, commissaire, de la façon
suivante.
Alors, page
29 de votre rapport, je vous cite : «Par exemple, nous avons recommandé à
un député de ne pas prêter son nom à l'exposition d'un bien lui
appartenant dans la salle d'exposition d'une entreprise ouverte au public. Le
fait d'associer le nom du député, de façon
indirecte, à l'entreprise qui expose le bien, pourrait risquer d'influencer
d'éventuels clients au bénéfice de
l'entreprise, se basant sur le fait que le député aurait lui-même mis sa
confiance dans cette entreprise.» Fin de la citation.
Alors,
j'aimerais vous entendre là-dessus, couplé à votre déclaration, en page 6, de
votre allocution, lorsque vous dites : Les députés — je
vous cite, là — «ne
sont pas suffisamment conscients de l'influence qu'ils exercent autour d'eux».
J'aimerais vous entendre là-dessus, quant à cette importante préoccupation que
tout député devrait avoir.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, en fait, ce que j'essaie
d'exprimer, M. le député de LaFontaine, c'est qu'il faut, à mon avis, comme membre de l'Assemblée
nationale, essayer d'éviter de devenir un objet publicitaire. Alors,
dans la population — et j'en suis un exemple vivant — si j'ai à acheter une nouvelle voiture, je
vais me poser la question, de savoir : Bien, d'abord, quelle marque je devrais prendre puis, une fois que
j'aurai choisi une marque, bien, quel concessionnaire?
Alors,
imaginons que je suis un fidèle admirateur, et vous me permettrez d'éviter de
donner un nom parce que ça risquerait de créer...
M. Tanguay : ...
Des voix : Ha, ha, ha!
M.
Saint-Laurent (Jacques) : ...de créer confusion, mais je suis un
fidèle admirateur d'un membre de l'Assemblée nationale ou d'une membre de l'Assemblée nationale et que, là, par le
biais des médias sociaux ou autrement, j'apprends que cette personne-là est propriétaire d'un
véhicule dont je connais maintenant la marque et je me dis : Bon, bien,
si, elle, elle a choisi ce
véhicule-là, bien, ça peut être bon pour moi. Et, ensuite, là, je vois que ce
véhicule-là a été acheté chez tel concessionnaire, alors là je vais
aller chez ce concessionnaire-là.
Et, dans ce sens-là, je ne veux pas exagérer, je
pense qu'il ne faut pas se cacher puis camoufler le nom du concessionnaire du véhicule qu'on a, mais là il y
a une marge entre simplement utiliser son véhicule et l'afficher dans un
show-room, si vous me permettez l'anglicisme, et c'est ce que j'explique dans
cette page-là.
M. Tanguay :
Donc, vous êtes d'accord avec l'affirmation suivante — et c'est une préoccupation
particulière : lorsque, par son
comportement ou par les faits, un député est intimement lié à une compagnie, a
un intérêt financier, lorsque, pour
un député, que ce soit le fait de dire : J'achète telle marque de voiture,
il s'associe à cette compagnie, ce n'est pas anodin — et c'est
une préoccupation légitime — êtes-vous d'accord avec moi que
l'association de facto qu'un député aurait avec une compagnie pourrait poser un défi particulier, disons-le comme
ça, êtes-vous d'accord avec ça? C'est ce que vous venez d'expliquer.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Bien, je l'expliquais, tout à l'heure, dans un contexte, comme je l'ai dit bien
modestement, d'outils publicitaires. Or, le
fait qu'on ait des membres, à l'Assemblée nationale, qui sont des gens
qu'on associe à des entreprises ou à des
succès d'affaires ou des succès artistiques, ce n'est pas quelque chose qu'on
doit bannir. Au contraire, on a
besoin de l'expertise de ces gens-là et le code donne des outils pour faire en
sorte qu'ils ne se placent pas dans des situations de conflit
d'intérêts.
M. Tanguay :
Et diriez-vous qu'il est important de toujours s'assurer, évidemment, que, dans
les faits ou même dans les
apparences, parce que les apparences sont toujours importantes... on doit
s'assurer d'avoir les balises en place, justement pour ne pas qu'il y ait — indirectement même, ou même seulement qu'en
apparence — un lien
qui soit fait entre un député, son
action comme élu et une compagnie qui lui serait intimement liée? Êtes-vous
d'accord avec l'affirmation?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Quand je rencontre les députés et les ministres à la suite des déclarations des
intérêts personnels, c'est l'explication que
je leur donne privément en, à ce moment-là, donnant les exemples
correspondant à leurs intérêts.
Alors, c'est
un peu la règle de base qui est prévue au code, aux articles 15, 16 et
suivants, d'éviter de se placer dans une situation de conflit
d'intérêts. Et, moi, comme commissaire, bien, j'ai la responsabilité de les
renseigner, de les guider à ce sujet-là, et de répondre à leurs questions.
M. Tanguay :
Avec le peu de temps qu'il me reste... Vous seriez donc d'accord avec cette affirmation-là.
C'est une préoccupation, c'est un défi qu'il faut avoir en tête, et vous
l'abordez souvent dans vos rencontres. C'est ce que vous venez de dire,
n'est-ce pas?
• (17 h 30) •
M. Saint-Laurent (Jacques) :
C'est un défi pour tous les députés et tous les ministres.
M. Tanguay : Les 125. Tout à
fait.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Trois minutes, M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
M. le commissaire, vous... Le code traite déjà, évidemment, du jurisconsulte,
les articles 108 à 112. Vous mentionnez, dans différentes décisions,
entre autres, paragraphe 89 de votre décision du 5 décembre : «...le
jurisconsulte et le commissaire sont en mesure de les supporter — vous
parlez des députés — et
de les guider dans l'analyse de ces questions.»
Quant à
l'action du jurisconsulte, pouvez-vous nous confirmer ou commenter sur
l'importance de son rôle, le rôle qu'il joue, et en regard des articles 108
à 112 du code actuel?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Bien, le jurisconsulte exerce une fonction qui existait à l'époque dans la Loi sur l'Assemblée nationale et qui a été reconduite
au niveau du code. L'objectif premier du code, en incluant le jurisconsulte,
c'est de donner aux députés, et au ministre,
et aux membres de leurs familles, parce que nous avons aussi, à
l'occasion, des avis à donner aux membres de
leur famille, de donner aux membres de l'Assemblée nationale les outils qui
leur permettent d'obtenir les avis qu'ils souhaitent obtenir.
Alors, on
peut imaginer que, pour les députés, ce n'est pas nécessairement spontané de
s'adresser au commissaire lorsqu'ils
sont dans une situation qui les inquiète. Alors, le fait d'avoir la possibilité
de s'adresser au jurisconsulte, à ce moment-là, est un outil que les
parlementaires, à l'époque, ont choisi de maintenir et qui apporte une
contribution qui m'apparaît solide à l'application du code.
M. Tanguay :
Vous citez, je l'ai mentionné, vous citez, dans les documents que nous avons
devant nous et qui participent de notre discussion avec vous... Vous
citez donc le commissaire à l'éthique de Colombie-Britannique. Sur votre site
Internet, vous faites les liens avec les autres commissaires des autres
provinces et du Parlement canadien. Diriez-vous, évidemment, et soumettriez-vous qu'il
serait évidemment intéressant pour nous, dans nos débats, de s'attarder sur ce qui se passe ailleurs et aussi... dans un
premier temps; dans un deuxième temps, de demander l'opinion d'experts
en ces différentes matières, comme vous le faites vous-même?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, je pense que, quel que soit
l'objet d'une discussion à l'Assemblée nationale, toujours dans un
contexte de proportionnalité, bien sûr, mais c'est certainement opportun, quand
on peut et quand c'est opportun, de
consulter, de connaître ce qui se fait ailleurs, que ce soit ailleurs au Canada
ou en Europe. Si on parle de
l'éthique et de la déontologie... Plus récemment, après notre code d'éthique et
de déontologie, la France a adopté une législation
nouvelle à ce sujet-là, qui est, à mon avis, intéressante et qui a conduit à la
création d'une nouvelle fonction, qui est la Haute Autorité pour la
transparence de la vie publique.
Alors, cette
haute autorité là a une compétence qui est beaucoup plus large. Ça ne concerne
pas uniquement les élus. Alors, c'est un exemple d'application et de
consultation à l'extérieur qui peut être très utile.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce
bloc d'échange. M. le député de Chicoutimi, à vous la parole.
M.
Bédard :
Oui. Bien, je vais continuer à la suite de notre collègue. C'est intéressant,
effectivement. D'ailleurs, dans les avis, au Canada, ailleurs, est-ce
que vous avez regardé le cas de M. Paul Martin, l'ancien premier ministre du
Canada?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Je l'ai regardé simplement par
l'entremise des textes que j'ai pu retrouver dans les médias. Je n'ai
pas retracé de documents officiels.
M.
Bédard :
O.K. Vous n'avez pas creusé, oui. O.K. Bien, c'est quand même un cas,
effectivement, qui peut être intéressant
à regarder, qui a été décrié au Canada pendant des années... qui était ministre
des Finances et premier ministre pendant quelques années, effectivement,
et qui était propriétaire d'une des plus grandes compagnies...
Je vous
dirais que nos amis d'en face s'intéressent beaucoup à la complexité, donc la
complexité d'une déclaration. C'est
sûr que... Est-ce que vous... Je vous posais la question... Je vais revenir,
parce qu'il y a deux thèmes qui m'intéressent : l'offshore et la complexité. Si je vous disais,
par exemple, que je n'avais pas d'intérêt, que je n'aurais jamais
appartenu à un bureau d'avocats qui s'appelle Gauthier Bédard et que finalement
j'ai peu de passe-temps dans ma vie et que je ne contribue à à peu près rien, ni à Centraide, ni à rien, est-ce que je
serais un cas complexe pour vous... et que finalement je n'ai pas d'avoirs, je n'ai pas d'actifs. Tout ce
que j'ai, j'ai un régime de retraite. Est-ce que je serais un cas complexe pour
vous?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : En fait, il n'y a pas de cas simple
ou de cas complexe au niveau des députés et des membres de l'Assemblée
nationale. Ce qu'il y a, c'est des situations personnelles de chaque individu,
parce que, que vous ayez des intérêts ou
non... Reprenons l'exemple du club musical que je donnais tout à l'heure. Il
peut y avoir des intérêts qui vous
sont personnels. Vous pouvez avoir une passion pour les films de science-fiction,
pour donner un exemple fictif, justement, et, à ce moment-là, dans un
contexte particulier par rapport à l'exercice d'un mandat à l'Assemblée
nationale, ça pourrait exercer une influence, et il faudrait traiter de cette question-là
à ce moment-là.
M.
Bédard :
Autrement dit, plus on s'intéresse à de choses, plus ça peut devenir
effectivement complexe. Voilà. Donc,
on va chercher à s'intéresser à moins de choses, je pense. C'est la réalité,
dans les faits, de la plupart des députés qui sont ici, effectivement, qui sont souvent impliqués dans leur milieu,
qui ont eu un passé et qui fait en sorte qu'à un moment donné ils font le choix d'avoir cet appui
populaire, donc... Et ça, on va toujours vous aider dans la gestion, je vous
dirais, de comment on peut s'assurer de
règles, en même temps, tant sur la prévisibilité, mais sur la façon que... les
directives que vous pouvez donner
pour s'assurer que chaque député, chaque cas particulier, que vous ayez tous
les moyens nécessaires pour vous assurer du respect du code.
Où je vois où
vous n'avez pas les moyens, puis ça m'a comme étonné, c'est les investissements
offshores. Et, vous savez, à
l'époque, c'était une réalité qui existait, mais qui était peu connue. On voit
les articles qu'il y a eu, dans Le Monde, entre autres, sur... bon, un média à part, sur...
même un ministre français a été confronté à ça, des allégations qui
finalement ont été confirmées, donc, sur des avoirs étrangers, où on se sert,
et pas nécessairement de façon illégale, mais d'outil fiscal pour éviter de
payer nos impôts.
D'abord, un,
dans l'état actuel de notre code, est-ce que chaque député, chaque ministre a
l'obligation de vous donner, par
exemple, leurs investissements, s'il y en a, offshores? Parce qu'il me semblait
avoir vu passer une déclaration à cet effet-là : Avez-vous des
investissements étrangers ou des biens dans des compagnies offshores? Est-ce
que c'est possible? Est-ce que ça existe, cette obligation?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Pour faire un court historique, M. le député de Chicoutimi, simplement pour vous expliquer que, dans la version actuelle du
code, la règle est un petit peu différente en ce qui concerne un
ministre ou un député. Alors, dans les premières versions des formulaires de
déclaration ou des intérêts personnels, nous n'utilisions pas une formulation spécifique sur le offshore, si
je peux prendre l'expression, de telle sorte que ça a amené, à un moment
donné, une demande ponctuelle de déclaration,
dans le contexte où il y avait eu des déclarations d'un consortium de
médias qui nous indiquait que, même ici, au Québec, on avait un certain nombre
de personnes qui avaient des intérêts offshores.
Et ce que je propose,
c'est que la règle soit plus explicite au code. Alors là, je me suis autorisé,
comme commissaire, de faire une
interprétation un peu large de ce qui m'est permis dans le code. Mais rappelons
simplement que, pour un ministre, il doit
déclarer tous les éléments d'actifs et de passifs. Or, on s'entend que tous les
éléments d'actif et de passif, ça couvre ce qui est à l'extérieur du
Québec. Dans le cas d'un...
M.
Bédard :
...si quelqu'un avait un actif à l'étranger, en soi ce n'est pas un manquement
au code. C'est ce que je dois
comprendre. Si je vous déclarais... Si quelqu'un déclare : Écoutez, oui,
j'ai des actifs dans tel compte, à tel endroit, qui est un abri fiscal
bien, bien connu, ça ne serait pas un manquement au code en soi. C'est ce que
je dois comprendre du code actuel?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Effectivement, il n'y a pas de règle
déontologique, au moment où on se parle, qui créerait une infraction... un manquement, je devrais plutôt dire, un
manquement pour un député, ou une députée, ou un ministre de détenir des intérêts offshores. Il faudrait peut-être
voir : Est-ce que, dans l'application que ferait le
commissaire des valeurs de l'Assemblée
nationale, une personne qui, par ce moyen-là, se soustrait à ses obligations
fiscales commet un manquement aux valeurs de l'Assemblée nationale?
Peut-être. Ce serait une question que j'aurais à regarder à ce moment-là.
M.
Bédard :
Donc, ce que vous souhaitez, c'est qu'ici on s'assure que, dans le code...
Est-ce que vous souhaitez qu'on l'indique spécifiquement que ce type de
façon de faire est contraire à l'esprit du code ou qu'on vous donne des moyens
additionnels pour... je vous dirais, pour donner des avis ou sanctionner des
gens qui auraient de telles attitudes?
Autrement dit, est-ce qu'on doit être très directifs dans l'utilisation de ces
comptes offshores par des députés de l'Assemblée nationale ou autres
membres visés par le code de déontologie?
• (17 h 40) •
M. Saint-Laurent (Jacques) :
La suggestion la plus importante que je pourrais vous soumettre, c'est celle de prévoir plus clairement, plus explicitement, je
devrais dire, qu'il y a une obligation pour tous de déclarer les
intérêts offshores, pour reprendre
l'expression. Au-delà de ça, il y a peut-être matière à réflexion, mais je n'en
ferais certainement pas une
recommandation, d'introduire un
manquement déontologique par le fait de détenir des intérêts offshores. Je
pense qu'il y a des... Je le dis dans les textes que vous avez
devant vous que le reste de la législation québécoise s'applique à tous les députés. Alors, si
un député se soustrait à ses obligations fiscales, je ne pense pas que ce soit nécessairement
le commissaire qui doit devenir un percepteur fiscal. La question est ouverte,
là.
M.
Bédard : Oui, oui. Non, c'est ça, parce que,
dans votre rapport, je regarde, vous faites... Vous ne l'indiquez pas,
mais vous dites : Un tel comportement serait — vous posez la
question — pourrait
être considéré comme contraire à l'article
6, qui dit : «La conduite d'un député est empreinte de bienveillance,
[...]droiture, [...]convenance, de sagesse, d'honnêteté, de sincérité et
de justice.»
Autrement
dit, par le biais de cet article sur l'éthique, il y aurait une possibilité.
Mais c'est pour ça que je vais un peu
plus loin. Est-ce que, nous, on aurait intérêt, comme députés, à le prévoir de
façon plus spécifique? Parce que c'est sûr qu'après ça il y a l'opprobre populaire. Il peut y avoir, je vous
dirais, bon, des reportages ou une pression médiatique. Dans les faits, est-ce que cette question devait plutôt
être résolue par nous? À une certaine époque, on a décidé de prévoir,
par exemple, l'exclusivité de fonction pour
les ministres pour éviter, justement, ces situations. Est-ce que, dans ce
cas-ci, on n'est pas rendus là et de
dire, sur ces éléments... parce que ça peut être légal, à la limite, cette
évasion fiscale. Est-ce qu'on ne devrait pas y prévoir une...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
...d'intervenir. L'évasion fiscale n'est pas légale.
M.
Bédard :
Pas l'évasion fiscale, mais de moyens fiscaux qui permettent l'utilisation de
ces comptes offshores. Pardon. Et
est-ce qu'on aurait avantage donc à le préciser ou vous laisser cette latitude
à partir des règles éthiques qui sont plus générales?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Alors, à ce stade, je n'ai pas jugé
opportun de proposer l'ajout d'une règle déontologique. Mais
effectivement l'analyse peut très bien être faite et elle peut être faite dans
le contexte de l'exemplarité, dont j'ai
parlé plus tôt aujourd'hui et qui est dans le rapport sur la mise en oeuvre.
Comment expliquer à ses concitoyens d'une circonscription et les inviter
à être compréhensifs à l'égard d'une augmentation de tarif ou d'une
augmentation d'impôt si le député lui-même réussit à se soustraire à ses
obligations fiscales de cette façon-là? On parlait
tout à l'heure de l'exemple de M. Cahuzac à Paris. Je pense que c'est un
exemple frappant d'une conséquence qui a été sérieuse pour lui.
M.
Bédard :
Autre élément, vous faites mention dans votre rapport... et là les pages... à
partir du conseil et avis...
Une voix : 62.
M.
Bédard : 62 que
j'ai du rapport, parce que, tout dépendant, il n'y avait pas...
Une voix : ...selon la
version aussi.
M.
Bédard : Selon la version, exact, qui est la même, mais les
pages sont paginées différemment.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : 2.6.3? C'est ça?
M.
Bédard :
Oui, 2.6.3, voilà.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : À la page 63.
M.
Bédard :
Vous y faites mention, par exemple, de l'importance du caractère confidentiel
des avis qui sont requis de votre part pour
les députés. Vous semblez y attacher une valeur particulière, à cette
confidentialité. Pourquoi?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Le rôle du commissaire, pour les
députés et les ministres, si vous me permettez cette métaphore, ressemble, en termes de confidentialité, et je pense
que le député de Mercier va bien comprendre ce que j'essaie d'exprimer, ressemble au rôle d'un médecin par
rapport à un patient. Et ce que j'explique parfois aux journalistes qui
me disent : Comment ça se fait que vous
ne voulez pas nous parler des dossiers?, bien, je leur dis : Écoutez, si
je veux bien conseiller le ministre
ou le député, il faut que j'aie tout le détail de la situation sans filtre. Et
c'est la même chose pour le médecin qui a besoin de conseiller et de
traiter son patient sans filtre.
Alors, si je dis à
mon médecin ou j'omets de dire à mon médecin que j'ai consommé toutes sortes de
cochonneries la veille, il ne pourra pas, le médecin en question, me traiter
adéquatement.
M.
Bédard :
Donc, ça brise le lien de confiance.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Ça brise le lien de confiance, d'où
l'idée d'insister autant sur la confidentialité de la relation député,
ministre, commissaire. Et la même chose avec le jurisconsulte.
M.
Bédard : Un peu plus loin, vous mentionnez, dans votre
interprétation, à 2.6.3, que «le commissaire n'est pas autorisé à donner
un avis écrit et motivé concernant un autre député.» Par exemple, si moi, j'ai...
On peut porter une plainte, c'est ce qu'en
prévoit notre code. Mais si, par exemple, je vous demandais un avis concernant
un comportement d'un député, pour moi, pour ma lecture à moi, est-ce que
vous me le donneriez, cet avis-là?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Non. Je vais refuser de donner un
avis concernant un autre député, même si c'était de façon informelle.
Alors, c'est...
M.
Bédard :
Pour quelle raison?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, c'est ma compréhension de l'article 87 du code, qui
fait référence précisément au député concerné.
On
parlait tout à l'heure de la Colombie-Britannique. Là, je ne voudrais pas m'avancer de façon
téméraire, mais, à mon souvenir, en Colombie-Britannique, il est possible de demander au commissaire un avis sur une autre
personne et il est possible, pour un citoyen,
de demander au commissaire : Je veux avoir un avis sur le comportement du
député Jacques. Alors, ça, pour nous,
ce n'est pas quelque chose qui a été prévu dans la version du code en 2010,
et on doit y réfléchir. Ça a toutes sortes de conséquences. On a plutôt
prévu que le député qui a des motifs raisonnables de croire qu'il y a un
manquement peut s'adresser au commissaire, mais sur la base d'une demande
d'enquête et non pas sur la base d'une demande d'avis.
M.
Bédard : Donc, il
en va même de la confiance qu'on doit avoir envers le commissaire. Si, demain
matin, je vous demande un avis, puis vous le rendez public sans mon consentement,
en dehors d'enquête possible, peu importe, que vous faites, à ce moment-là, on
est tous convaincus que le lien de confiance va disparaître entre le député et
le bureau du commissaire.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Effectivement, puis il va disparaître de façon
générale.
M.
Bédard :
Pour tous les autres députés.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Le commissaire va être dans une situation
problématique à ce moment-là.
D'ailleurs, ça me
permet de rappeler que le commissaire est assujetti, lui-même, à des règles
éthiques et déontologiques. Il y a un règlement sur les règles déontologiques
applicables au commissaire.
M.
Bédard : Parfait. C'était simplement, là, faire la remarque.
Évidemment, vous avez les mêmes dispositions que le jurisconsulte.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Il reste moins de deux minutes, M. le député
de Chicoutimi.
M.
Bédard :
Sur le dernier élément... on parle beaucoup de doute, de doute de conflit
d'intérêts. J'ai entendu ça plusieurs fois.
Est-ce que je me trompe si je vous disais que, de la façon que vous vous guidez
par rapport aux conflits d'intérêts, c'est le test
de la personne généralement bien informée, où il peut y avoir conflit ou
apparence de conflit d'intérêts? Donc, ce
n'est pas le doute où la personne mal intentionnée... puis je ne prête pas
ça comme intention à mes collègues
d'en face, mais quelqu'un qui est généralement bien informé de la
situation doit... vous en tirez une conclusion, donc c'est à partir de ce test-là que vous concluez au conflit
d'intérêts ou à l'apparence de conflit d'intérêts. Est-ce que ce que je
viens de dire est vrai?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Tout à fait. Si je peux me permettre de référer aux
notes préliminaires que j'ai présentées tout
à l'heure, je faisais référence en insistant sur l'aspect important d'examiner
une situation éventuelle de conflit
d'intérêts sur la base des faits d'un contexte particulier. Et je complétais ce
commentaire-là en disant qu'on ne peut pas s'appuyer sur un simple
soupçon, parce qu'imaginez qu'on s'appuie sur des simples soupçons, les membres
de l'Assemblée nationale seraient dans un état de paralysie assez incroyable.
M.
Bédard :
Parfait. Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complétait... Merci, M. le
député de Chicoutimi. M. le député de Granby, à vous la parole.
M.
Bonnardel : Merci, M. le Président. M. le commissaire,
bienvenue. M. le commissaire, pour moi, il y a des choses qui ne
fonctionnent pas à la page 8, là. Vous dites :
«Premièrement,
au moment d'adopter le code en 2010, les membres de l'Assemblée nationale n'ont
donné que très peu de précisions sur
les règles applicables en matière de fiducie ou de mandat sans droit de regard.
Nous avons compris qu'il faut se référer au Code civil du Québec,
lorsque des questions sont soulevées...»
Le Code civil, j'ai
l'article 1278 ici, M. le commissaire. Il se lit comme suit :
«Le
fiduciaire a la maîtrise et l'administration exclusive du patrimoine fiduciaire
et les titres relatifs aux biens qui le composent sont établis à son nom; il exerce tous les droits afférents au
patrimoine et peut prendre toute mesure propre à en assurer
l'affectation.»
Là, vous dites plus
loin : Et j'invite «les députés à considérer la possibilité d'apporter des
précisions au cadre initialement établi, le
cas échéant». Pourquoi on devrait être juge et partie quand je m'attends de
vous que vous me disiez qu'on va appliquer exactement ce que le Code
civil dit?
Et
qu'est-ce que vous répondriez si un ministre ou un chef de parti vous
dit : Moi, oui, j'utilise une fiducie, mais avec droit de regard? Alors, comment on peut travailler, comment on peut
apporter des précisions nous-mêmes, si on est juge et partie, quand vous, votre boulot, c'est de nous dire :
Voici ce qui devrait être appliqué, voici ce qui devrait être appliqué
selon le Code civil. Vous dites quoi à ça?
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Simplement préciser, M. le
député de Granby, vous faites référence aux notes du commissaire
déposées aujourd'hui et non pas au rapport. Parce que vous avez dit : À la
page 8...
M.
Bonnardel :
Excusez, là... oui, les notes. Excusez. Les notes, les notes que... Oui,
les notes.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Tout simplement pour que les gens qui nous
suivent à distance, là... M. le commissaire.
• (17 h 50) •
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Merci, M. le Président. Écoutez, pour
apporter les précisions que vous souhaitez à ce sujet-là, rappelons que le code prévoit, à deux endroits, des
possibilités d'établir une fiducie ou un mandat sans droit de regard. On a parlé tantôt de l'article 18, on
a parlé de l'article 45. Et, dans les différents articles du code où le
commissaire exerce un rôle de conseiller, il pourrait, à son initiative, le
recommander aussi. Ça, c'est le premier point.
Une
fois qu'on a exprimé ce point-là, on voit plus spécialement... c'est ce à
quoi je fais référence dans le texte. À l'article 45, on dit : Il faut qu'il y ait une fiducie sans droit
de regard, sans autre précision. Ce qui m'amène à soulever la question
auprès des membres de la Commission des institutions, c'est plus spécialement
deux points : le point que je mentionnais
tout à l'heure, où on a un constat qui n'est pas unique au Code d'éthique et de
déontologie des membres de l'Assemblée
nationale, un constat qui dit : On n'est pas certains que le processus de
fiducie ou de mandat sans droit de regard
soit le véhicule — merci,
je cherchais le terme français pour le «shield» — l'écran de protection approprié pour
une situation d'une entreprise unique. On dit, dans ces cas-là : Bien,
même s'il y a une fiducie ou un mandat sans droit de regard, on sait très bien que Jacques est toujours propriétaire de son entreprise,
donc c'est un peu fictif. Est-ce
qu'on pourrait faire quelque chose qui ferait en sorte qu'on atteindrait mieux l'objectif
de distance qu'on veut créer? Alors, dans
ce sens-là, je soulève la question.
Le deuxième élément,
c'est de dire... À l'article 45 du code lui-même — et là je vais aller
voir, si vous me permettez — on ajoute une phrase à la fin, qui dit au
commissaire : M. le commissaire — dans le premier alinéa — «il
doit — le ministre — en outre, à l'égard de ces intérêts, se
conformer à toute autre mesure ou condition requise par le Commissaire à
l'éthique et à la déontologie, le cas échéant».
Alors, c'est le deuxième élément qui m'amène à
dire : Est-ce qu'il y a des précisions à apporter? C'est dans
ce contexte-là que je soumets la question aux membres de la Commission des
institutions.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le commissaire. Oui, mais, M. le commissaire, on ne se le cachera pas, il y
a un cas unique qui nous touche et il y a
un autre... il y a des cas qui pourraient nous toucher en 2018, vous
le savez très bien, et, dans ces conditions,
si un député, ministre ou chef de parti vous dit : Moi, oui, je
suis prêt à prendre fiducie, mais il est hors de question que je...
aucun droit de regard, vous nous répondez quoi à ça?
Le
jurisconsulte a dit : Ça ne peut pas fonctionner. Alors, est-ce que
vous êtes dans le même état d'esprit que lui? Puis vous nous dites quoi,
à nous, comme députés, là? Vous dites que la fiducie, il faudrait peut-être
l'étudier, vous dites : Apportez des
précisions. Mais moi, je m'attends à ce que vous me disiez : Ça prend
une fiducie sans droit de regard. Et
je n'accepterai jamais qu'un ministre ou un chef de parti me dise : J'aurai un
droit de regard sur cette fiducie parce que je ne veux pas léguer ou
vendre ces actions.
Alors, c'est
pour ça, un petit peu, que je trouve particulier que vous nous lanciez
le ballon en nous disant : Vous, les députés, bien, vous allez
décider par vous-mêmes les précisions de ce code d'éthique, quand vous êtes là
pour nous dire explicitement : Voici ce
que vous devriez faire, voici ce que vous ne devriez pas accepter. Alors, si, le cas échéant, il y a quelqu'un
qui, le cas échéant, présentement, qui touche ce à quoi on discute aujourd'hui, on pourrait en discuter en 2018,
bien, je m'attends à ce que vous soyez capable de nous donner précisément ce à quoi vous vous attendez de la part de votre rôle et,
nécessairement, de notre code à nous.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Dans la responsabilité que je dois assumer comme Commissaire à l'éthique
et à la déontologie, j'ai éventuellement à me prononcer, dans un contexte d'avis ou de rapport d'enquête, sur
ces questions-là. Et, comme je dois
me prononcer sur ces questions-là, je dois vous expliquer que je ne peux pas le
faire dans le contexte de la commission actuellement.
Alors, si la Commission des institutions dit, après examen du rapport sur la mise en oeuvre, considération : Le code nous apparaît clair tel qu'il est
là, moi, j'aurai, le moment venu, à appliquer le code tel qu'il sera. Ce que je
trouve important, comme commissaire, de soumettre à l'attention des membres de
la Commission des institutions, c'est l'opportunité, si les membres le veulent
bien, d'apporter un éclairage additionnel sur les deux aspects que je viens d'expliquer. Il n'y a aucune obligation
de le faire. Et moi, j'aurai à prendre mes décisions sous forme d'avis ou de
rapports d'enquête le moment venu, mais je
ne peux pas rendre une décision dans un contexte d'étude en commission parlementaire, comme nous le
faisons aujourd'hui.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. le député de Deux-Montagnes.
M.
Charette : C'est gentil,
merci. Peut-être compléter l'échange qu'on avait avant le
changement, la petite rotation qui s'est opérée au niveau, justement, de
l'obligation de déclarer des intérêts. J'ai noté votre dernière citation. Vous disiez que la recommandation que vous nous
faites ne fait pas l'unanimité à travers le Canada. Est-ce à dire que
d'autres provinces ne permettent pas ce
changement-là et ne permettent pas qu'un député ayant un intérêt se contente
uniquement de le déclarer, sans l'empêcher de participer aux travaux et, ultimement,
influencer les travaux?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien sûr que, quand je dis que ça ne fait pas l'unanimité
au Canada, là, je n'ai pas fait de consultations particulières sur cette recommandation-là. Ce que
j'essaie d'exprimer, c'est simplement que, si on allait voir les législations
dans d'autres provinces, on constaterait que ces législations-là s'apparentent
à l'article 25 tel qu'il existe actuellement.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
...6 min 45 s.
M.
Charette : C'est bien
gentil, merci. Et on fait un petit
peu du coq-à-l'âne, compte tenu du peu de minutes qu'il nous
reste. Un député qui est propriétaire d'une entreprise importante, une entreprise
de taille, vous disiez tout à
l'heure : Plus l'importance est grande, plus les risques peuvent le
devenir.
Est-ce qu'on ne doit pas faire une distinction entre, effectivement, le type d'entreprise
lui-même et le domaine dans lequel
l'entreprise intervient? Est-ce
qu'une entreprise qui, par exemple, de par ses actions, de par son quotidien, a jugé bon d'inscrire des dizaines, sinon plusieurs
lobbyistes qui interviennent dans plusieurs ministères, est-ce que ce type d'entreprise là nécessite peut-être
une plus grande attention qu'une entreprise
qui serait... Vous parliez d'un concessionnaire automobile tout à
l'heure. Est-ce qu'il y a une distinction à faire? Et je ne sais pas si je
l'exprime bien, mais il y a des entreprises
qui, de par leurs mandats, de par leurs activités économiques,
ont l'obligation d'enregistrer des lobbyistes. Et, si ces lobbyistes-là touchent à une pléthore de
ministères, est-ce que ça ne devient pas un autre cas ou un autre
exemple de cas particulier qui mériterait une attention particulière de
notre part?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
L'exemple que vous mentionnez est un petit peu difficile à concevoir pour moi.
Je répondrais, de façon générale, simplement que, si je suis, comme député,
propriétaire d'une entreprise et que cette entreprise-là, par le biais de mon
personnel, a des lobbyistes inscrits qui font des représentations dans
différents ministères, je suggérerais à ce député-là de consulter rapidement le
Commissaire à l'éthique et à la déontologie et de voir qu'est-ce qui en est,
là. Ça me semble être une question qu'il faudrait vérifier ponctuellement.
M.
Charette : ...curieux de nature. Est-ce que vous avez des députés qui
vous ont interpellé parce qu'ils avaient des lobbyistes inscrits dans différents ministères? Est-ce que vous avez eu
des approches de cette nature-là jusqu'à maintenant?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Pour les raisons que j'exprimais tout
à l'heure au sujet de la confidentialité des avis, alors c'est une
question à laquelle je ne peux malheureusement pas répondre. Quels que soient
les sujets sur lesquels j'ai
été consulté, c'est important de garder ces sujets-là confidentiels. Les seuls
éléments qui sont publics, ce sont les avis que les députés ont rendus,
eux-mêmes, publics.
M. Charette : Mais on s'entend pour
dire qu'une entreprise qui est... parce que vous parliez tout à l'heure de
domaine unique ou, à tout le moins, de propriété unique. On s'entend qu'il y a
une distinction entre une entreprise qui
vend un produit x, de façon bien, bien, bien circonscrite, et une entreprise
qui, de par ses activités, se sent obligée de faire pression sur bon
nombre de ministères pour faire valoir ses intérêts. Il y a une distinction,
tout de même, à faire à ce niveau-là.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : C'est une distinction, M. le député
de Deux-Montagnes, qui est une distinction factuelle, qui est importante
de considérer pour le commissaire comme pour le député, et cette distinction
factuelle là pourrait amener une solution, si vous voulez, différente selon les
circonstances.
M.
Charette : Tout à l'heure, vous parliez également — et je change à nouveau de sujet — que, dans d'autres provinces... je pense que vous donniez l'exemple
de la Colombie-Britannique, où on avait permis, dans le code d'éthique qui a été adopté, aux députés de demander une
enquête sur d'autres... c'est-à-dire un avis sur un autre élu, ou même
on permettrait au public... on permet, je
crois, c'est ce que j'ai compris de votre intervention, on permet même au
public de demander des avis. Ça n'avait pas été considéré au moment de
l'élaboration du code d'éthique. Et, pour vous, est-ce qu'aujourd'hui c'est une
orientation qui mériterait d'être évaluée de notre part?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Ma suggestion, on la retrouve dans
une des recommandations que j'ai soumises, qui est d'abord et avant tout une suggestion d'accorder une protection aux
personnes qui font des déclarations au commissaire, laissant au commissaire la responsabilité, si vous
voulez, de faire son travail d'analyse, qui va conduire à une éventuelle
enquête, plutôt que de permettre à des
citoyens, directement, de s'adresser au commissaire dans un contexte de
demande d'enquête.
• (18 heures) •
M.
Charette : On a parlé, à différents
chapitres, des avis que vous êtes amené à rédiger de votre côté. Est-ce qu'on pourrait vous confier un
mandat, c'est-à-dire de nous proposer un avis sans que ça ne touche un député en
particulier mais à une situation? Est-ce que ce type d'avis là peut être
sollicité de votre part? Est-ce qu'on pourrait, comme commission ou comme parlementaires,
tout simplement nous proposer un avis sur un sujet x? On a beaucoup parlé notamment
de la fiducie sans droit de regard. Est-ce qu'on pourrait vous proposer de nous
en produire un, et avis qui pourrait ensuite être rendu public?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
C'est une suggestion intéressante. On voit effectivement ailleurs au Canada la possibilité, pour l'Assemblée ou une commission de l'Assemblée, de demander un avis au
commissaire, ce qui n'existe pas dans notre code dans l'état actuel des
choses. Donc, ça pourrait effectivement être une possibilité à considérer.
M. Charette : Donc, c'est une
latitude que vous pourriez accueillir favorablement, là, si le changement était
convenu, là, par les membres de la commission.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
J'ajouterais simplement à ça, si vous me permettez, que, lorsque je reçois des demandes d'avis et qu'il m'apparaît que la réponse
à cette demande d'avis là pourrait avoir une portée générale, une portée
normative, pour prendre un vocabulaire
juridique, bien, l'expérience que j'ai acquise me permet avec plus
d'autonomie qu'avant de transformer cet avis-là en l'anonymisant en une norme
que je diffuse par le biais d'une ligne directrice.
M. Charette : C'est gentil. Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste quelques secondes. Ça va
aller? Merci, M. le député de Deux-Montagnes.
Mme la députée de Vaudreuil, à vous la parole.
Mme Nichols : Oui. Alors, merci, M. le Président. Alors,
pour continuer un peu dans le même sens que mon collègue, mon collègue parlait
un petit peu de confidentialité, moi, j'aimerais vous ramener un petit peu sur
la recommandation n° 19
qu'on n'a pas abordée. Vous recommandez, entre autres, que le code soit modifié
pour interdire des mesures de
représailles contre une personne qui communique des renseignements au
commissaire ou qui collabore à une vérification
ou à une enquête concernant un manquement au code. Je présume que, pour
élaborer sur une telle recommandation,
vous avez, par le passé, sûrement eu des expériences ou... en fait, je me
demande : Cette recommandation-là, ça émane d'où? D'une expérience,
probablement.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Oui. En fait, l'expérience que le
commissaire a rencontrée — et ça va peut-être vous étonner
un peu, mais je pense que c'est important de l'exprimer telle qu'elle est — c'est une expérience de rencontrer
une difficulté à obtenir des renseignements. C'est-à-dire que, somme toute, du
moins au début, ça se corrige un peu, les gens n'ont pas le réflexe de
communiquer avec nous et, dans ce sens-là, de pouvoir l'exprimer plus
clairement. Puis d'inviter la population en général à communiquer avec le
commissaire me semble être souhaitable. On n'a pas mis en place, contrairement
à ce qu'on voit, par exemple, auprès de l'UPAC ou du Directeur général des
élections, une ligne
de divulgation. Peut-être qu'on aurait avantage à considérer cette
possibilité-là qui serait d'autant plus intéressante si la protection
que nous recommandons était retenue.
L'autre
chose, c'est qu'il serait énormément intéressant, non seulement pour le
commissaire, mais pour l'ensemble des
élus, si les citoyens avaient la possibilité de communiquer avec le commissaire
non pas dans un contexte d'agressivité ou de reproches, mais dans un
contexte très simple de questionnement. M. le commissaire, j'ai constaté que le
député Jacques est dans telle situation et
je ne suis pas certain que ce soit correct ou non. Alors, il ne porte pas
d'accusation, mais il communique une information que moi, je traite de
façon confidentielle, qui peut s'arrêter là, qui ne peut conduire à aucune démarche ou, au contraire, qui va me mettre
la puce à l'oreille, pour le dire de cette façon-là, parce que moi, je
vais la relier à une autre information que
j'ai déjà et qui va faire en sorte que je vais pouvoir interpeller le député ou
la députée puis lui dire : Bien là, il y a un problème, il faudrait
que tu corriges ça rapidement.
Mme
Nichols : Dans le fond, je comprends que ça serait déjà arrivé dans le
passé, quelqu'un qui a une information, quelqu'un... soit un citoyen ou...
et qui n'ose pas rapporter des faits ou dénoncer parce qu'à la base il n'y a
pas de protection de prévue.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : C'est ça, et il n'y a pas cette compréhension qu'il
y a une garantie totale de confidentialité.
Alors, la personne qui communiquera avec le commissaire ne sera pas ostracisée,
si je peux le dire de cette façon-là,
et le commissaire ne dira pas : J'ai eu un appel de Jacques et
j'entreprends une enquête à l'égard d'un député parce que j'ai eu un appel de Jacques. Alors, le fait de
pouvoir expliquer ça plus clairement aux gens, ça devrait normalement
amener une certaine assurance.
Mme
Nichols : Vous parlez de protection. Quel type de protection on
pourrait envisager, entre autres, là, pour une personne qui ferait délation ou quelqu'un qui apporterait une
information? Comment vous voyez ça, le type de protection qu'on pourrait
assurément apporter à cette personne-là?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, on pourrait, je pense,
envisager le même genre de protection qu'on voit, par exemple, dans les
lois du travail, où on va prévoir que les mesures de représailles à l'égard d'un
travailleur dans telle ou telle situation sont présumées être des mesures de
représailles.
Mme Nichols :
Puis là je regardais un petit peu, entre autres, là... Vous avez parlé de
l'UPAC, il y a les articles 31 à 35, où on
traite la protection des dénonciateurs. Il y a aussi le Bureau de l'inspecteur
général de la ville de Montréal où on
traite aussi une partie, où il y a une protection aussi, définitivement, pour
le dénonciateur. Mais je présume que, si on s'en va vers une telle
procédure ou une telle méthodologie, ça va sûrement entraîner un... Est-ce
qu'il va falloir engager d'autre monde ou... Comment on va l'appliquer?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, c'est sûr qu'il pourrait y avoir
un coût à ça. C'est difficile d'anticiper quel sera le volume. Je pense que c'est intéressant
d'essayer de soumettre aux membres de la Commission des institutions que
c'est quand même différent de ce qu'on
propose au niveau des mesures policières ou autres. Or, le contexte du
commissaire à l'éthique et à la déontologie
est un contexte beaucoup plus préventif, est un contexte beaucoup plus de
collaboration, et le fait de
constater quelque chose qu'on ne comprend pas et d'en communiquer l'information
au commissaire vise à soutenir l'évolution de la société, ne vise pas à
avoir plus de dossiers criminels.
Mme
Nichols : Si je fais un parallèle, là, avec les députés ici, on est
125 députés, là, je me demandais jusqu'à quel point c'est nécessaire, ça, pour les députés ou à quel point
c'est... à quel point vous, vous avez besoin de ça. Quelle est la
nécessité autour de cette protection-là?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, c'est une nécessité dans un
contexte préventif. Je vous parlais tout à l'heure de la Haute Autorité pour la transparence de la vie
publique. J'ai parlé au président de cette haute autorité-là, M. Nadal,
et nous discutions tous les deux de ce défi
qui est celui d'obtenir les renseignements qui nous permettraient de jouer
notre rôle de façon préventive, autrement dit, de ne pas attendre que
des situations de conflits d'intérêts se soient produites, mais d'éduquer les gens puis de leur faire comprendre
que, là, il y a peut-être un risque et qu'il faudrait apporter des
correctifs au risque avant qu'il ne soit trop tard.
Mme
Nichols : On parlait de la confidentialité. Est-ce que la
confidentialité de la personne qui fait la dénonciation, est-ce que ça
reste autour de... est-ce que ça reste pour vous? C'est une information qui va rester
à vous ou c'est une information que vous
sentirez le besoin ou le devoir de transmettre... mettons que ça touche un
ministère, de transmettre au ministère ou de transmettre ailleurs? Ou la
confidentialité va s'arrêter où?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Dans le contexte de la législation
actuelle, la confidentialité s'arrête au bureau du commissaire. Or, le commissaire n'est pas autorisé
à communiquer avec d'autres ministères ou organismes pour dire : J'ai constaté — reprenons l'exemple fiscal dont on parlait
tout à l'heure, là — qu'il y
a une évasion fiscale de la part du député
Jacques et je voudrais en informer l'Agence du revenu. Je ne pourrais pas faire
ça. Le commissaire n'est pas autorisé.
Mme Nichols :
D'ailleurs, un petit peu plus tôt, vous parliez que vous aviez de la difficulté
à rejoindre soit des anciens députés ou...
les rejoindre, là, de façon quelconque, là, soit par téléphone ou par courriel,
là. Est-ce que ça pourrait être... Est-ce qu'il y a un mécanisme qui pourrait être... Je
me demandais : Dans la confidentialité, vous pourriez recevoir de l'information qui pourrait s'appliquer
ailleurs. Est-ce que ça pourrait servir... L'information que vous allez
avoir, est-ce que vous pourriez l'appliquer à d'autre chose que le cas précis?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, si j'avais les coordonnées
personnelles d'un ex-député ou d'un ex-ministre de cette façon-là, la tentation serait forte de l'utiliser, si j'ai
besoin de l'utiliser, dans le contexte des règles d'après-mandat ou autrement. La façon avec laquelle j'ai
contourné, si je peux le dire comme ça, le défi de rejoindre des gens, c'est
que j'ai demandé non pas d'avoir les
coordonnées, mais j'ai donné une enveloppe scellée à l'Assemblée nationale en
demandant à l'Assemblée nationale :
Pourriez-vous poster cette enveloppe-là à l'ex-député ou à l'ex-ministre en
question? Alors, je n'ai pas eu l'information, ils ont fait l'envoi de
mon enveloppe dans une deuxième enveloppe que je n'ai jamais vue.
• (18 h 10) •
Mme
Nichols : Parce qu'ils peuvent... Justement, je ne voyais pas, dans la
façon que c'est libellé, comment on pouvait aller chercher cette information-là.
Il n'y avait pas de recommandation non plus. Je n'ai pas lu non plus de recommandation à cet effet-là. Mais c'est votre rapport. Mais est-ce que
vous avez eu aussi des expériences de ce qui s'est passé ailleurs par
rapport à la dénonciation? Là, je reviens un petit peu au dénonciateur, à la
personne qui rapporte quelque chose. Est-ce
qu'il y a eu des expériences qui se
sont faites ailleurs, qui vous ont été rapportées pour pouvoir
le libeller comme ça puis l'étendre plus large?
M. Saint-Laurent (Jacques) :
J'ai fait une analyse par le biais des gens à mon bureau sur ce qui se fait
dans d'autres organisations au Québec.
Alors, c'est ce qui fait qu'on a fait la recommandation comme vous la
voyez actuellement. Mais je ne
me souviens pas, outre les discussions dans le cadre de nos rencontres, une
fois par année, des différents commissaires canadiens, je ne me souviens pas
d'avoir fait une analyse plus scientifique au niveau canadien.
Mme
Nichols : Je cherchais
aussi, au niveau de la protection, là, de la personne qui fait la
dénonciation, jusqu'à quel point une
personne a besoin de protection. Selon vous, ça peut aller jusqu'où, la
protection quelle aurait besoin? Ça peut l'affecter jusqu'où? Ça serait
quoi, les limites qu'on peut lui offrir?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Vous pouvez imaginer que l'objectif de tout ça est un objectif de créer un
climat de confiance. On pourrait effectivement s'interroger sur la nécessité
formelle d'avoir cette protection-là. Est-ce que la protection ultimement servira? Je pense que vous soulevez une question
pertinente. La proposition qui est soumise dans le rapport sur la mise en oeuvre est une proposition de créer un sentiment de confiance auprès des personnes pour que
les gens n'hésitent pas à communiquer avec le commissaire beaucoup plus que
d'assurer une protection par rapport à des risques réels.
Mme
Nichols : Est-ce que vous pouvez élaborer un petit peu plus dans le genre de protection qu'on pourrait
leur amener ou est-ce que
vous vous fiez un peu à ce qu'on voit, entre
autres, là, sur l'UPAC ou ailleurs?
Parce que je me dis : Pour la personne qui
dénonce, là, il faut que ça soit convainquant comme protection ou...
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, je pense qu'il y a deux éléments qu'on peut souligner dans le
contexte de notre discussion. Le premier élément qui est en lien avec la
notion de confiance, c'est la notion de confidentialité, le fait que la personne sache que cette information-là n'est pas divulguée, que
ce soit à l'égard
du député ou du ministre
concerné, que ce soit à
l'égard d'autres organisations policières, c'est quand même un élément très important pour maintenir
cette confiance-là. Le deuxième élément, c'est de dire : Bien, si, directement
ou indirectement, votre employeur ou une autre
personne en est informée et que, là, ça présente une difficulté et puis que ça pourrait théoriquement mettre en jeu votre sécurité d'emploi, pour prendre cet exemple-là,
bien là c'est de dire : Dans le risque très peu probable que ça mette
en jeu votre sécurité d'emploi, parce que c'est confidentiel, on vous ajoute
une deuxième couche de protection en vous garantissant qu'il y aura des recours
à votre disposition à ce moment-là.
Mme
Nichols : Très bien.
Mais je comprends que... Dans le fond, je comprends que l'efficacité du
commissaire va être grandement accrue par... s'il peut compter, entre autres,
là, sur l'aide de la population.
M. Saint-Laurent (Jacques) : Effectivement.
Mme Nichols : Très bien. Merci. Oui,
ça complète. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, Mme la députée. M. le
député de La Prairie, il vous reste trois minutes.
M.
Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. Dans nos discussions de cet après-midi,
on parle évidemment du code de déontologie et le code d'éthique, et, pour
la population qui nous regarde présentement, c'est quand même assez aride comme sujet. Alors, je vais prendre quelques citations de vous, M.
le commissaire, pour essayer de donner un peu de contexte à la population, pour comprendre ce que représente le Code d'éthique et de déontologie
pour le député, mais qu'est-ce que ça représente en termes explicatifs
pour la population.
Alors, dans
votre rapport sur la mise en application, vous dites, à la page 20 : «Dans
l'exercice de leur charge, le code doit leur service de guide en matière
d'éthique et de déontologie. Avec ce nouveau cadre juridique, ils peuvent mieux déceler un risque d'être placés dans une situation de
conflit d'intérêts et prendre en considération tout questionnement qui peut
être soulevé à ce sujet.»
Aujourd'hui,
dans vos notes d'ouverture, vous dites : «L'élu doit maintenir une
frontière étanche entre son intérêt personnel
et l'exercice de sa charge. Est-il besoin de se rappeler qu'il ne s'agit pas de
se fier à sa propre analyse du risque de conflit d'intérêts, mais d'abord et avant tout de considérer ce qui
pourrait être perçu par une personne raisonnablement bien informée?»
Dans votre rapport d'enquête du 5 décembre, au
paragraphe 88, vous dites : «À titre de représentants de la population
du Québec, les élus doivent mettre de côté leur intérêt
personnel pour servir l'intérêt public et le bien commun.»
Et au
paragraphe 89, et c'est le paragraphe que je considère très important : «Chaque
député est le premier et le mieux
informé des situations qui risquent de soulever des interrogations concernant
son intérêt personnel. Dans le cas de doute, la responsabilité première
de ne pas se placer dans une situation de conflit d'intérêts et d'appliquer les
règles d'éthique et déontologiques
prescrites par le code appartient au député et au ministre
concerné.» Je lis ça, et, de la façon que je vois ça, le code d'éthique et de déontologie pour les députés
représente ce qu'est le Code de sécurité routière pour les automobilistes. Comme les automobilistes ne
doivent pas ignorer l'existence du code et de ses règles, aucun député
ne doit ignorer ce qui est dans le code d'éthique et le code de déontologie.
Dans une des
recommandations que vous avez dans votre rapport de mise en oeuvre, la recommandation 20, vous souhaitiez avoir la possibilité d'imposer une pénalité
pour le défaut de respecter certaines obligations prescrites par le code, qui seront préalablement identifiées par
le législateur. Présentement, dans le code, dans le cas des deux
rapports d'enquête que vous avez faits en décembre dernier, vous avez le droit,
en vertu de l'article 99, effectivement, de ne recommander aucune sanction, mais, dans le cas de la recommandation 20, vous souhaitez imposer une pénalité. Et là je me demande... dans le cas de l'article
99, les pénalités qui sont inscrites ici, que vous pouvez recommander ou non
dans votre rapport, il y a :
«1° la réprimande;
«2° une pénalité, dont il indique le montant;
«3° la
remise au donateur ou à l'État ou le remboursement du don, de la marque
d'hospitalité ou de l'avantage reçu;
«4° le remboursement des profits illicites;
«5° le
remboursement des indemnités, allocations ou autres sommes reçues comme député
ou comme membre du Conseil exécutif pour la période qu'a duré le
manquement au présent code;
«6° la
suspension du droit du député de siéger à l'Assemblée nationale,
accompagnée d'une suspension de toute indemnité et de toute allocation,
jusqu'à ce qu'il se conforme à une condition imposée par le commissaire;
«7° la perte de son siège de député; et
«8° la perte de son statut de membre du Conseil
exécutif, le cas échéant.»
Normalement,
avec le code, actuellement, quand vous déposez un rapport d'enquête, les
élus sont appelés à voter sur la recommandation que vous faites. Dans le cas présent, les deux rapports que vous nous
avez donnés en décembre, vous ne
recommandez pas de pénalité. Mais qu'est-ce qui nous dit que vous allez être
capable de faire le travail qui est là, d'imposer la pénalité? Pourquoi
vous voulez prendre cette pénalité-là?
Le Président
(M. Ouimet, Fabre) :
Malheureusement, on a dépassé le temps, et là je suis en train
d'emprunter sur le dernier bloc. Je vais vous accorder une minute pour
répondre, M. le commissaire.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
O.K. Merci beaucoup. Merci pour cette question. Simplement préciser que le processus d'enquête conduit éventuellement à une
recommandation sur une sanction, l'article 99. La recommandation n° 20,
à laquelle vous faites référence, est une recommandation qui vise des
situations plus modestes, si vous voulez. Par exemple,
si on avait constaté que le député Jacques a reçu un cadeau de plus de
200 $ et qu'il n'a pas déclaré son cadeau comme il devait le faire, à ce moment-ci, dans le contexte du code tel
qu'il existe, je devrais initier un processus d'enquête complet pour en arriver éventuellement à une
sanction constatant que Jacques n'a pas fait sa déclaration pour un
cadeau. Alors, dans un contexte d'importance
du manquement versus le processus, le processus d'enquête est beaucoup trop
lourd, à mon humble avis, d'où l'idée de
permettre au commissaire, dans un contexte beaucoup plus administratif, de
constater le manquement, d'informer le député et d'imposer une sanction.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Tel qu'annoncé,
ça complétait ce bloc d'échange. M. le député de Chicoutimi, à vous la
parole pour votre dernier bloc d'échange de 14 minutes.
M.
Bédard :
Merci. On a peu de temps, c'est pour ça que je vais essayer d'y aller en vrac,
M. le commissaire. Parce qu'on a abordé plusieurs choses... qui est
intéressant. Sur la collaboration, ce qu'il vient d'y avoir, de tous les députés...
et je vois que ça a été réel. Et je vous dirais sauf un cas, parce qu'on a
accès à la correspondance. En ce qui concerne l'ancien ministre de l'Éducation,
je vous dirais que cette collaboration était, à certains égards, douteuse, même que suite... déficiente. On a eu même la
correspondance, effectivement, suite à une demande qu'on a faite, puis
ce qu'on voyait, c'est que... Si on peut vous donner plus de moyens pour éviter
ces lettres à répétition de gens qui n'en tiennent pas toujours compte à la
hauteur... moi, je pense que ça, là-dessus, on peut vous aider. La
prévisibilité, pour nous, c'est important pour vous aussi, puis il y en a même
qui se placent au-dessus, dans le sens qu'ils prévoient des règles
additionnelles.
• (18 h 20) •
Sur la fiducie en droit de regard,
peut-être un dernier élément. Ce que je comprends, vous dites dans votre
rapport : Vous pouvez effectivement... Il y a des conditions, que ce
soient soit la fiducie ou le mandat sans droit de regard, le Code civil prévoit effectivement qu'il y a des
conditions qu'on se fait donner de ne pas vendre. C'est ce que prévoit
la loi actuellement, par exemple à l'article 1212, où on dit... du Code civil,
que «la stipulation de»... eh, mon Dieu! J'ai de la misère avec ce
mot-là...
Des voix :
...
M.
Bédard :
...«d'inaliénabilité», voilà — ...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Ah! de...
M.
Bédard :
...non, il est dit comme ça — «est faite par écrit [et] à l'occasion du
transfert, à une personne ou à une
fiducie — on
prévoit des règles — de la
propriété d'un bien ou d'un démembrement d'un droit de propriété sur un bien»
et que «cette stipulation n'est valide que si elle est temporaire et justifiée
par un intérêt sérieux et légitime». Je comprends
que ça, ce sont les balises que nous avons actuellement. Sur l'intérêt sérieux
et légitime, est-ce que vous pensez qu'on
aurait intérêt à préciser cet intérêt sérieux et légitime, ou les dispositions
du Code civil vous semblent suffisantes?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Peut-être que j'ai une interprétation
un petit peu différente, parce que l'article 1212 auquel vous faites référence prévoit que la restriction
relative à l'inaliénabilité n'est autorisée que dans le cas d'une
donation ou d'un testament. Alors, à ce
moment-là, je ne pourrais pas m'autoriser, dans ma compréhension... puis là je
ne veux pas aller trop loin pour les
raisons que j'ai exprimées plus tôt, mais je ne me sens pas tout à fait à
l'aise de m'autoriser de cet article-là
pour considérer qu'elle est permise dans un contexte d'un député à l'Assemblée
nationale, qui n'est pas dans un contexte de donation ou de testament.
M.
Bédard : Non, bien, l'article 1212 prévoit l'inverse, il
prévoit qu'on ne peut pas le faire dans le cadre d'une donation ou d'un testament, mais on peut le faire
dans d'autres cas. Mais on y reviendra, là, c'est une disposition qui
est claire, mais on peut en discuter, effectivement, qui dit qu'on ne peut pas
le faire par donation, on ne peut pas dire à quelqu'un, par donation ou par
testament : Tu ne pourras, mais, dans le cas d'une fiducie, on peut. Dans
le cas d'un mandat sans droit de regard,
évidemment, ça participe, mais je comprends votre préoccupation de mieux
baliser. Puis ça, je pense qu'on a
des discussions à avoir dans un contexte qui est peut-être en dehors même de la
commission, où on est à bâtons rompus, où on peut échanger sur quelle
est la meilleure formule à proposer.
Sur les différentes
modifications... Ah! sur le fonctionnement de l'article 25. Là, c'est plus un
commentaire avec vous — là,
je porte à votre attention, vous l'avez invoqué parfois — où on
dit : «Un député qui, à l'égard d'une question dont l'Assemblée nationale
ou une commission dont il est membre est saisie...» Et là, à partir de là, vous
avez conclu... vous demandez, par exemple,
qu'on n'enlève pas le droit de vote à certaines personnes dans telles
conditions, c'est une des recommandations
que vous nous faites, ou lui priver de parler sur certains aspects. Ça, je vous
demanderais de... Moi, je me souviens, à
l'époque, quand on a rédigé l'article, c'était principalement pour dans le
cadre de projets de loi ou de mandats
spécifiques sur un sujet précis où les gens pouvaient évidemment discuter, mais
aussi pouvaient voter sur des questions où il y avait un conflit
d'intérêts, c'était quand même assez incroyable, mais on ne voulait pas
empêcher les députés de discuter, par exemple, dans le cadre plus large, sur
des questions qui pouvaient être... sur lesquelles ils pouvaient avoir un intérêt, mais qu'à partir du moment où il y a un vote
où ils doivent prendre position, que ce soit par motion, dans le cadre d'un projet de loi particulier où il y a des
dispositions, là, évidemment, dans tous les cas, de permettre aux députés de voter sur des aspects aussi précis,
là, ça nous posait problème. C'est dans cet esprit-là qu'on l'a rédigé.
C'est ce que je voulais vous dire sur
l'article 25, ce n'était pas empêcher les députés de discuter de sujets sur
lesquels ils pouvaient avoir même un intérêt différencié des membres de
l'Assemblée nationale, des autres membres ou de la population en général. Et là on avait toujours l'exemple, bon,
avocat, mais avocat, par exemple, qui continue à pratiquer. Il y en
avait, on ne peut pas empêcher cette
personne-là d'en discuter avec les autres membres. Par contre, s'il y a un vote
sur est-ce qu'on doit permettre ou
non à ces gens-là de continuer à pratiquer, bien là, à ce moment-là, il doit se
retirer sur le vote, mais ne pas en
discuter. Je vous donne cet éclairage-là pour vous permettre de l'apprécier
dans le contexte où on en discutait, justement pour bénéficier, ce que
vous souhaitiez, de l'éclairage de ceux qui ont une expertise.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Si je peux me permettre un commentaire à ce
sujet-là...
M.
Bédard :
Allez-y, oui.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : C'est fort utile d'entendre cet historique, qui,
pour moi, m'instruit beaucoup. La formulation actuelle de l'article 25 me
semble un petit peu différente de ce que vous exprimez, dans le sens où on dit — et là j'arrive à la fin du premier
alinéa — qu'il
doit «se retirer de la séance sans exercer son droit de vote ni
participer aux débats sur cette question».
Et c'est ça qui m'apparaissait un peu sévère, parce que... imaginons que je
suis propriétaire d'une érablière, je
connais le domaine des érablières sur le bout de mes doigts, et là on a une
législation qui porte là-dessus. Que
je ne puisse pas voter, c'est une chose, mais que je ne puisse pas partager
avec mes collègues, au salon bleu ou en commission parlementaire, mon
expertise, ça me semblait trop sévère.
M.
Bédard : O.K. Mais
je voulais seulement revenir rapidement
sur le terme «saisie». Vous regarderez à quel moment l'Assemblée est saisie. Ce n'est pas dans le cadre de discussions
plus larges. C'est souvent... pas «souvent»... selon notre code, moi, ce
que j'en interprète, selon notre loi et nos règlements, c'est dans le cadre
d'une motion spécifique, d'un projet de loi, donc pas... même, une question à
la période des questions n'est pas une question dont l'Assemblée nationale est saisie au sens de cet article, c'est
ce que je voulais simplement vous dire. Mais je pense qu'on dit à peu
près la même chose, on veut l'assouplir pour permettre aux gens de profiter,
finalement, de ses compétences.
Autre élément
que voulais aborder avec vous, c'est au niveau de votre fonctionnement. J'ai
vu, dans votre rapport, vous aviez...
bon, vous aviez votre greffe, vous avez, excusez-moi, j'essaie de retrouver les
pages exactement, vers la fin... ah!
voilà. Vous avez une fonction conseil et avis, vous avez une fonction greffe,
une fonction vérification et enquête, une vérification effectifs et budget. Vous n'avez pas une grosse équipe, ça,
je le sais, par contre. Mais est-ce que vous avez des murs étanches, là, entre, par exemple,
conseil–avis, vérification–enquête? Et qui sont les responsables? Par exemple,
conseil et avis, ceux qui vous aident à rédiger vos avis et... versus les
personnes qui sont responsables des enquêtes.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, en fait, le groupe conseil et
avis comprend deux personnes qui sont avec moi aujourd'hui, qui sont les
deux conseillers juridiques. Le groupe Vérification et enquête, au début des
activités du commissaire, on avait fait
l'embauche, sur une base occasionnelle, d'un enquêteur et on a mis fin à
l'embauche de cet enquêteur-là parce que, d'abord, il n'y a pas le
volume pour justifier une personne à temps complet au niveau des enquêtes et il y a aussi un avantage exceptionnel
à pouvoir utiliser des enquêteurs et des enquêtrices selon les domaines d'activités spécialisés, ce qui fait en sorte que,
maintenant, on fonctionne avec des enquêteurs sur une base
contractuelle. Alors, le même enquêteur qui
était occasionnel est engagé sur une base contractuelle lorsque c'est requis,
et ça nous donne la possibilité d'en avoir plus d'un si les
circonstances le requièrent.
M.
Bédard :
Parce qu'à l'époque souvenez... souvenez-vous... vous n'étiez pas présent,
c'était M. Sormany... on avait la préoccupation du mur pare-feu.
Alors, quelqu'un qui vient vous voir, qui vous demande un conseil, puis, à partir du moment où vous lui dites : Bien là,
tu es en problème, tu peux te corriger ou vous constatez plutôt que la
personne, là, elle a dévié un petit peu
trop... Et là vous dites : Là, je suis dans un autre mode. Je suis dans un
mode enquête. On s'était dit, là, la
personne doit être informée entre l'avis que vous donnez, le conseil, et le
moment où vous passez en mode enquête à votre propre initiative, parce
que vous avez ce pouvoir. Est-ce que ces... je dirais ces murs coupe-feux
existent?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Ils n'existent pas. Ce serait mentir
que de vous dire qu'il y a un mur coupe-feu. Ce que je comprends de votre question, c'est de savoir est-ce que le
commissaire qui aurait, par exemple, donné un avis à un député à ou à un ministre et qui, subséquemment,
est dans un contexte d'enquête se sentirait lié par l'avis qu'il a donné
antérieurement. Alors, il y a deux aspects. Le premier aspect, qui est le plus
formel, c'est que, si c'est un avis écrit du commissaire
en vertu de l'article 87, l'article 88 prévoit que le député ou le ministre
concerné est présumé ne pas avoir commis de manquement à ce moment-là,
pour les mêmes faits, on s'entend. Donc là, dans ce cas-là, il n'y aurait pas
de frontière étanche, c'est le contraire, il y aurait vraiment une cohérence ou
une constance entre l'avis donné et la demande d'enquête.
Dans un autre cas qui serait un avis qui n'est
pas formel et qui n'est pas en application de l'article 87, bien là il y a le
défi pour le commissaire de son objectivité et de son impartialité pour ne pas
être biaisé par l'avis qu'il a donné antérieurement.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il reste 3 min 30 s, M. le député de Chicoutimi.
M.
Bédard : Et donc,
dans cette équipe avis-conseil, vous avez deux personnes, les deux personnes
que vous m'aviez nommées. Ces personnes, on les connaît? Ce sont des avocats,
j'imagine.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
C'est Me Élodie Gagné-Lafrance et Me Bruno Fontaine.
M.
Bédard :
Dernière chose, et je m'en voudrais de ne pas l'aborder avec vous, vous abordez
toute la question des dons,
avantages, puis ça avait été une discussion fort complexe, je vous dirais, lors
de la commission parce qu'au début on voulait
zéro, mais on s'est rendu compte que, si on mettait zéro, là, ça mettait,
genre, à risque un député qui est dans un souper-bénéfice, on lui donne une plaque avec : Merci, M. le
député. Bien là, s'il ne le déclare pas, il se retrouverait piégé.
Par contre,
il y a les cas plus évidents. Vous
dites, dans votre avis : Ceux qui s'en vont à l'étranger, ils
doivent le déclarer, je pense. Donc, ça doit
faire l'objet d'un avis quand on rembourse simplement les frais. Et là je vais un peu plus loin. Donc, si, par exemple, quelqu'un... si, moi, étant porte-parole dans seul Dieu sait quoi, j'étais invité, je ne sais pas, à Hawaii par l'association particulière qui est dans
mon dossier de faire une conférence sur les bienfaits de l'éthique, par exemple,
pour ces gens-là, mais à Hawaii, est-ce que vous pensez que ce type de
comportement, un, il devrait être déclaré, mais est-ce qu'il serait
conforme à l'esprit du code? Et là je vous dis ça pour éviter que quelqu'un
dise : Bien, j'avais seulement l'obligation de le déclarer, je n'avais pas l'obligation de refuser, autrement dit de ne pas y aller. C'est sûr, quand tu es allé, dire... c'est plus compliqué, là. Donc,
j'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous pensez que... si
j'ai ce type d'invitation, est-ce que le plus simple et qui est conforme à
l'esprit de notre code, c'est de répondre non?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il reste moins de deux minutes à ce bloc d'échange.
• (18 h 30) •
M. Saint-Laurent (Jacques) : Peut-être d'abord préciser que les articles du code sont
complétés par des lignes directrices
sur les dons et avantages, et que la première réponse que je donnerais à ce
député ou à ce ministre, ce serait de dire : Avant toute chose, il faut regarder si vous avez la possibilité d'accepter. Il y a deux exceptions qui sont formelles, je vous
en parlais tout à l'heure. Si c'est un échange pour une intervention ou une
prise de position, c'est un refus obligatoire.
S'il y a un risque d'influence sur l'indépendance de jugement ou ça peut porter
atteinte à l'intégrité du député ou de l'Assemblée nationale, on refuse.
Dans
les autres cas, et c'est important, vous me permettrez la parenthèse de dire
qu'il ne faut pas que la déclaration des
intérêts devienne... pas des intérêts, mais du don devienne un échappatoire à
l'analyse de l'acceptabilité. Alors, ce n'est pas parce qu'on a déclaré
un don qu'il est, de ce fait, acceptable.
Pour
ce qui est des dons à l'extérieur... des invitations à l'extérieur,
excusez-moi, les lignes directrices donnent une distinction que j'ai
importée, d'ailleurs, des autres provinces, une distinction qui est basée sur
les activités officielles. Or, si je suis en
visite officielle à Hawaii, pour reprendre votre exemple, à ce moment-là les
frais relatifs à l'invitation officielle
ne sont pas considérés comme un don. Mais, une fois rendu là-bas, on vous donne
un présent quelconque qui n'est pas en lien avec la visite officielle,
alors ce que je recommande, si ce présent-là a une valeur de plus de
200 $, c'est de le déclarer.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Quelques secondes, M. le député de Chicoutimi.
M.
Bédard :
Mais pas le voyage.
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Mais pas le voyage parce que c'est dans une
activité officielle.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète ce bloc d'échange. Merci. M. le député de LaFontaine, à vous la parole. Il reste
11 minutes.
M.
Tanguay :
11 minutes. Merci beaucoup, M.
le Président. Quelques questions
rapides avant de céder la parole à nouveau à mon collègue de La Prairie
pour ce dernier bloc d'échange.
M.
le commissaire, les dispositions de notre code actuel relatives au
jurisconsulte sont, évidemment, 108 à 112, inclusivement. Alors, j'aurais une ou deux questions à vous poser
concernant le jurisconsulte. À l'article 108, on peut lire, de l'actuel code : «Le Bureau de l'Assemblée
nationale nomme, à l'unanimité de ses membres, un jurisconsulte chargé
de fournir à tout député qui lui en fait la
demande des avis en matière d'éthique et de déontologie.» Alors, 108, le
jurisconsulte donne des avis... Je vous laisse le temps d'aller chercher l'article
108, que vous connaissez probablement par coeur et mieux que nous. Donc, le jurisconsulte, 108, donne des
avis en matière d'éthique et de déontologie à tout député qui le
demande. Ces avis, en vertu de 110, ne vous lient pas, vous, comme Commissaire
à l'éthique.
Avez-vous
eu l'occasion de prendre connaissance de l'avis rendu le 10 mars 2015 par
le jurisconsulte concernant les fiducies sans droit de regard qui a été
rendu public?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien sûr. Le jurisconsulte m'a
transmis une copie de l'avis et de la demande qu'il avait reçue après
que ces documents-là eurent été rendus publics.
M.
Tanguay : Pour nos travaux et le questionnement que nous devons avoir,
est-ce qu'il s'agit là d'un exercice approprié
par le jurisconsulte, qu'on va entendre mardi prochain? Est-ce que vous jugez
que c'est un exercice tout à fait approprié et conforme aux dispositions
du code que cet avis qui a été rendu public?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Bien, écoutez, je pense que le jurisconsulte pourra
vous expliquer dans quelle mesure il
considère qu'il est à l'intérieur de son mandat de répondre à cette
question-là. L'article 108 du code lui donne la responsabilité de répondre à une demande d'avis en
matière d'éthique et de déontologie, donc je vais laisser le
jurisconsulte vous donner son interprétation à ce sujet-là.
M.
Tanguay : Dans votre note de février 2014 sur le même sujet, vous
terminiez la note datée de février 2014 : «Le jurisconsulte et le
commissaire peuvent être consultés sur toute question concernant la présente
note d'information au sujet de la fiducie
sans droit de regard ou du mandat sans droit de regard.» C'est votre citation,
février 2014, vous dites dans votre
note : Vous pouvez aller me consulter, moi, ou consulter le jurisconsulte.
Diriez-vous que ça, la lettre du 10 mars 2015, c'est dans l'exercice et dans l'invitation que vous faisiez
vous-même dans votre écrit? Seriez-vous d'accord avec cette
affirmation-là?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : En fait, je ne serais pas d'accord
avec cette affirmation-là parce que je la faisais, l'invitation, dans le contexte d'un examen d'une
situation particulière à l'égard d'un député ou d'un ministre. Alors, pour moi, c'est
important dans un contexte d'humilité, si je peux dire comme ça, de ne pas
prétendre que je suis le seul à pouvoir répondre aux questions des députés et des ministres. Donc, à moins de faire un
oubli, j'essaie systématiquement d'inviter les gens à consulter l'un ou l'autre. Mais cette
invitation-là ne visait pas une consultation du genre de celle qui a eu lieu au
mois de mars.
M. Tanguay :
Bon, mais vous allez être d'accord avec moi : tant votre note que la note
du jurisconsulte ne mentionnent pas de
député. Il s'agit de notes... Êtes-vous d'accord avec moi? Tant votre note et
que la note du jurisconsulte ne mentionnent pas de député. Ce sont des
notes globales...
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Ne mentionnent pas de nom de député.
M. Tanguay :
...qui sont applicables — êtes-vous
aussi d'accord avec moi? — qui
sont aussi applicables aux 125 députés, sont pertinentes pour les 125 députés
quant à l'interprétation à donner de ces importantes questions.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Je pense qu'il faut peut-être faire
la nuance suivante, M. le député de LaFontaine, pour comprendre que
l'avis du jurisconsulte auquel vous référez ou un avis du commissaire qui
porterait sur un sujet général sera applicable, mais adapté au contexte
particulier. Donc, on ne peut pas simplement, pour prendre une expression
informatique, faire un copier-coller. Il faut faire une analyse factuelle et là
considérer l'avis en fonction d'un contexte factuel.
M.
Tanguay : Tout en prenant très bonne note de ce que vous venez
de préciser, êtes-vous d'accord avec moi que ces deux avis, le vôtre et
celui du jurisconsulte, sont pertinents en matière de fiducie? Êtes-vous
d'accord avec moi?
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Bien, ce sont certainement des avis
qui sont utiles dans l'analyse des questions relatives aux fiducies.
M. Tanguay :
Votre réponse est oui, M. le commissaire?
M. Saint-Laurent
(Jacques) : Ma réponse est oui.
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le commissaire. Je vais céder la parole à mon collègue, M.
le Président.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Ça me fait plaisir de céder la parole au
député de La Prairie.
M.
Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais revenir sur un
point que vous avez soulevé dans vos remarques
d'ouverture, M. le commissaire. L'article 25 du code apporte une précision
importante en matière de conflits d'intérêts. En particulier, dans
l'article 25, il y a un passage au milieu du premier paragraphe qui dit «de
déclarer publiquement et sans délai la
nature de cet intérêt et — vous avez fait référence tantôt dans
l'échange avec le collègue de Chicoutimi — de se retirer de la
séance sans exercer [de] droit de vote ni participer aux débats sur cette
question.
«Le député doit en
outre aviser le secrétaire général de l'Assemblée nationale et le commissaire.»
Maintenant,
dans vos deux décisions... dans vos deux rapports d'enquête récents, vous avez
conclu qu'il y a eu manquement à l'article 25
du code, et, dans le cas du député de Saint-Jérôme, il y avait même deux
manquements : un à l'article 5 et l'autre à l'article 25.
Alors, je reviens à
mon exemple du Code de sécurité routière. Je prends un jeune conducteur qui a à
peu près trois, quatre mois d'expérience et
qui passe un stop, et la police l'intercepte. Et en plus de passer le stop,
bien, il n'avait pas sa ceinture de
sécurité. Alors là, le policier a le choix de lui imposer une pénalité ou de ne
pas lui imposer la contravention, tel
que le Code de la sécurité routière l'exige. Comme je disais tantôt, pour nous,
le code de déontologie, le Code d'éthique et de déontologie, on n'est
pas sensés de l'ignorer, on ne peut pas passer à côté.
Il
s'est passé, dans votre rapport d'enquête... et je constate qu'il y a eu un
délai quand même assez long entre les faits que vous avez enquêtés et le
temps où vous avez décidé de faire enquête ou le temps que ça a pris au député
de Berthier pour vous faire la demande
d'enquête. Vous avez conclu le manquement aux articles du Code d'éthique et
vous n'avez recommandé aucune sanction avec
l'argument suivant : que les deux députés en question étaient de bonne foi
et aussi étaient récemment élus. Dans le cas
de la recommandation n° 20,
comment allez-vous... comment pouvez-vous réconcilier cette défense de bonne foi et de manque
d'expérience? Je reviens à mon conducteur qui a trois mois d'expérience qui
se fait arrêter par l'agent de sécurité,
comment voulez-vous, comme commissaire, imposer des pénalités alors que là on prend une défense... parce que, là, ça serait trop
facile pour un député, ou un ministre, ou un chef, ou peu importe, de toujours invoquer la bonne foi. Le jeune, dans son auto,
peut dire au policier : Bien, je vais faire le prochain stop. Ah! ma
ceinture, bien, je vais la mettre tout de suite. Alors, comment réconcilier l'argument que vous donnez ici et le fait
que l'article 25 est quand même assez clair, là, en termes de déclarer
publiquement? Et c'est un manque assez important, là, parce
que vous le soulignez aujourd'hui, là, que c'est une précision importante en matière de conflit d'intérêts. J'aimerais que vous élaborez là-dessus, là, sur cet aspect-là.
• (18 h 40) •
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Depuis l'entrée en vigueur du code, j'ai mis l'emphase, parce que
je pense que c'était important
de prendre cette approche-là, sur l'aspect que je qualifierais de pédagogique.
Alors, lorsque j'ai constaté qu'il y avait des ajustements
à apporter dans le comportement, dans la situation financière des élus,
dans la plupart des cas, je suis
débarqué chez le député, la députée ou le ministre pour expliquer la situation et demander qu'il y ait des correctifs, en me
disant : S'il n'y a pas de suite à la demande que j'adresse, j'ai toujours
la possibilité de revenir avec un processus formel d'enquête et de
serrer la vis, si vous me permettez l'expression
Alors,
ce qui est tout à l'honneur des membres de l'Assemblée nationale, c'est
que je n'ai pas eu à serrer la vis. Et, dans des cas où j'étais moi-même mal à l'aise de poser des exigences à l'égard, parfois, des membres de
la famille qui n'étaient pas des
conjoints, alors je trouvais que c'étaient des exigences quand même assez
sévères, les recommandations, les exigences que j'ai posées ont toutes
été suivies.
Alors, pour ce qui est du député de Saint-Jérôme
et de la députée de Mirabel, la situation était différente, dans le sens où il
y avait des enquêtes initiées. Dans le cas de la députée de Mirabel, c'était
une demande d'enquête de
l'extérieur. Dans le cas du député de Saint-Jérôme, c'est moi qui, après avoir
informé le député de Saint-Jérôme du contexte,
lui ai dit que la façon la plus adéquate d'apporter une réponse à la question
qui était soulevée était de faire un processus
d'enquête. Alors là, j'étais dans un contexte formel qui écartait mon objectif
premier de pédagogie. Alors, j'ai poussé le raisonnement jusqu'à faire
l'enquête au complet, mais j'ai trouvé qu'il n'était pas opportun d'aller dans
un contexte de sanction.
Alors, c'est
un peu la même chose qu'on voit dans le Code de la sécurité routière. Si on
regardait la jurisprudence des tribunaux en matière pénale du Code de la
sécurité routière, on verrait que, pour une première infraction, la conséquence
n'est pas la même que pour la cinquième infraction. Alors, c'est la logique que
j'ai utilisée.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il reste une minute, M. le député de La Prairie.
M.
Merlini : Merci beaucoup. Mais, encore une fois, dans
l'article 99, il y avait la possibilité de recommander, comme vous faites l'exemple au niveau du Code de
la sécurité routière, que les amendes sont, disons, progressives, on va
le dire ainsi. Et, quand j'ai fait
l'énumération tantôt, à l'article 99, la première pénalité qui pourrait
être recommandée par le commissaire,
c'est la réprimande. Alors, un peu comme... je reviens à mon conducteur, mon
jeune conducteur, le policier peut
arriver puis dire : O.K., bien là tu vas mettre ta ceinture puis, la
prochaine fois, fais attention à ta conduite, tandis que les autres
clauses, les autres pénalités possibles sont encore plus sévères.
Effectivement, vous jugez de la sévérité du manquement au code, et ça revient à
vous d'en faire la recommandation, et présentement ça revient aux députés de l'Assemblée nationale de voter dessus. Mais là,
sur une défense de bonne foi, vous n'avez même pas suggéré la possible
réprimande. Pourquoi? De la même façon que le président, des fois, nous
rappelle à l'ordre, nous, les députés quand on déborde... nos propos débordent
un peu, là.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. le commissaire, en quelques secondes, rapidement.
M. Saint-Laurent (Jacques) :
Oui, bien, en fait...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Très rapidement.
M.
Saint-Laurent (Jacques) : Rapidement, simplement dire que c'est
ma décision, c'est mon choix. Je me suis basé sur ce que j'ai lu de mes collègues des autres provinces dans des
situations qui m'apparaissaient semblables et j'ai pensé à la
conséquence politique d'une réprimande, et ça, ça a eu un effet sur ma
décision.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Alors, ça
complète le temps dont nous disposions pour échanger avec le commissaire. Au nom des membres de la commission, M. le
commissaire, je vous remercie infiniment. Je remercie également les
membres de la commission, le personnel et tous ceux qui ont participé à nos
travaux.
Je lève la séance et ajourne les travaux de la
commission. Bonne soirée à tous.
(Fin de la séance à 18 h 45)