(Neuf heures trois minutes)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, prenez place, s'il vous plaît. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions
ouverte. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques
sont en mode silencieux pour ne pas déranger nos travaux.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 26, Loi visant principalement
la récupération de sommes obtenues à la suite de fraudes ou de manoeuvres
dolosives dans le cadre de contrats publics.
Mme la secrétaire, bonjour. Y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Bourgeois (Abitibi-Est) remplace M. Ouellette (Chomedey)
et Mme Hivon (Joliette) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, bonjour à tous, bon matin. Nous reprenons nos travaux. Et, sans plus tarder, nous recevons ce matin le Vérificateur général du Québec et les membres de son équipe. Alors, bonjour à
vous, bienvenue à la Commission des institutions. Vous disposez d'une période de 10 minutes
pour la présentation de votre mémoire, et tout
d'abord je vous demanderais de
présenter les gens qui vous accompagnent, M. le Vérificateur général.
La parole est à vous.
Vérificateur général
M. Samson
(Michel) : Merci, M. le Président. Alors, bon matin à tous. Ça nous fait plaisir
d'être ici ce matin. Je suis
accompagné de M. Serge Giguère, qui est vérificateur général adjoint
au Vérificateur général, évidemment, et de M. Alain
Fortin, qui est directeur principal au vérificateur.
Derrière moi, en cas de besoin,
deuxième niveau de réponse, si on
peut dire, M. Denis Lacroix, qui est directeur de vérification, et Mme Lucie Roy, que plusieurs d'entre vous connaissent, qui est la
directrice du cabinet au Vérificateur général.
Alors, M. le Président, Mme la ministre de la
Justice, Mmes, MM. les membres de cette commission, c'est
avec plaisir qu'à la suite de la
demande de la commission je participe aux auditions publiques concernant le
projet de loi n° 26. Depuis
1996, le Vérificateur général a réalisé plus d'une vingtaine de missions
touchant directement les contrats publics dans les différents domaines de l'activité gouvernementale, notamment la
santé, l'éducation, le transport et les ressources informationnelles, par
exemple mentionnons la vigie relative au projet de modernisation des centres
hospitaliers universitaires de Montréal, la
vérification de la gestion des contrats présentant des situations à risque au
ministère des Transports et celle
portant sur les contrats de services professionnels liés au traitement de
l'information. Mon intervention ne
constitue pas une prise de position quant à la pertinence de ce projet de loi,
elle vise plutôt à alimenter la réflexion des parlementaires en
soulevant des points qui, à mon avis, méritent d'être considérés afin
d'atteindre certains objectifs inhérents à ce projet de loi. Parmi ces
objectifs, nommons les suivants : améliorer la confiance des citoyens
envers le processus d'attribution des
contrats publics, récupérer les fonds publics dépensés injustement pour des
contrats publics, favoriser la
réhabilitation des entreprises qui ont posé des gestes répréhensibles. Pour
atteindre de tels objectifs, certains principes
tels que la rigueur, l'équité et la transparence doivent servir de base aux
actions gouvernementales à accomplir. Ces principes ont guidé ma lecture
du projet de loi, et j'y référerai au cours de ma présentation.
À l'égard du
programme de remboursement. Le chapitre II du projet de loi porte sur le
programme de remboursement
volontaire. Une entreprise ou une personne physique pourra ainsi rembourser
certaines sommes obtenues à la suite
d'une fraude ou de manoeuvres dolosives. Un principe de gestion fondamental
doit soutenir un tel programme, soit
l'équité par rapport à son application. En effet, les citoyens doivent avoir
l'assurance que chaque cas est traité de façon rigoureuse et que les entreprises obtiennent une quittance à l'égard des
contrats visés à la suite du versement d'une somme jugée raisonnable dans les circonstances. À cet
égard, le statut et le rôle de l'administrateur décrits à l'article 6 sont de
première importance. Il faut que celui-ci ait accès à toutes les ressources et
à tous les outils nécessaires afin de juger adéquatement
du caractère raisonnable du projet d'entente. Cet administrateur, tout en
maintenant son indépendance, doit donc
posséder des mécanismes de vérification et d'investigation requis et pouvoir
échanger de l'information avec certaines entités telles que l'UPAC,
l'Autorité des marchés financiers et l'Agence du revenu du Québec.
La
détermination du montant correspondant au préjudice est un élément de risque
important auquel l'administrateur devra faire face. Les modalités
d'application du programme joueront un rôle essentiel pour orienter le jugement
de l'administrateur et assurer l'équité du
processus. Selon l'article 4 du projet de loi, je comprends que ces modalités
feront l'objet d'une publication
ultérieure. Si ces modalités ne sont pas incluses dans le projet de loi, il est
nécessaire qu'elles soient bien définies et comprises
avant l'entrée en vigueur du programme. Par exemple, il serait souhaitable que,
dans les modalités d'application, on
précise que les sommes faisant l'objet du remboursement porteront intérêt à
compter du dernier paiement fait par
l'organisme public pour le contrat visé et qu'un montant forfaitaire sera exigé
pour récupérer les frais engagés, au
même titre que pour un recours judiciaire. La durée du programme est une autre
modalité importante à établir.
Les recours
judiciaires. Le chapitre III du projet de loi contient des règles
particulières applicables aux recours judiciaires.
Afin d'inciter les entreprises et les personnes physiques à utiliser le
programme de déclaration volontaire, il faut envoyer un message clair : toutes les ressources financières,
humaines et techniques nécessaires seront prévues afin de s'assurer que les actions seront mises en oeuvre
pour récupérer les sommes payées en trop. En pratique, l'efficacité du programme de remboursement volontaire sera
tributaire de l'évaluation que feront les différents acteurs de la possibilité
d'être reconnu coupable lors d'un recours judiciaire ultérieur. Selon moi,
certaines mesures doivent contribuer à l'efficacité
du programme de remboursement volontaire et faciliter l'application des recours
judiciaires à ceux qui n'utiliseront pas le programme.
L'article 10
du projet de loi précise que toute entreprise ou toute personne physique est
visée. Il est essentiel de définir
clairement la portée de «personne physique». Par exemple, dans quelle mesure
les employés des organismes publics qui
ont participé à de telles manoeuvres sont-ils concernés par le projet de loi?
Pour rebâtir la confiance des citoyens, il est tout aussi, sinon plus important de sanctionner les personnes corrompues
responsables de la gestion des fonds publics que les corrupteurs eux-mêmes. D'autre part, je vous invite à évaluer
s'il serait pertinent que les sous-traitants soient aussi mis en cause.
La durée des mesures instaurées par le projet de
loi a aussi une influence sur l'évaluation que feront les entreprises ou les personnes visées du risque
d'être prises en défaut. Selon l'article 16, il ne peut y avoir
prescription pour les actions
intentées dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de la loi. De plus,
selon l'article 37, les dispositions du chapitre III, lequel est relatif aux recours judiciaires, cessent
d'avoir effet cinq ans après leur entrée en vigueur. Or, étant donné la complexité des dossiers
portant sur les situations de fraude et la possibilité que de tels cas se
répètent dans l'avenir, nous nous
interrogeons sur le bien-fondé de cette date d'échéance. Il serait avantageux
que les entreprises ou les personnes
ayant réalisé des actes répréhensibles sentent l'épée de Damoclès suspendue
au-dessus d'elles pour une période plus longue.
L'article 10 mentionne aussi que les entreprises
et les personnes physiques qui ont fraudé sont solidairement responsables du préjudice causé. Il serait utile
de prévoir explicitement une présomption de responsabilité de l'entreprise dès qu'il est reconnu que des
gestes répréhensibles ont été commis par un ou des employés. En l'absence d'une
telle présomption, il y a
un risque que l'entreprise prenne trop facilement ses distances par rapport aux employés concernés, ce qui pourrait diminuer les possibilités
de récupérer les sommes injustement versées.
Pour
terminer, je vous présente quelques éléments de nature générale qui sont,
d'après moi, tout aussi importants pour assurer l'efficacité de la
démarche.
D'abord,
la détermination des règles de répartition des sommes recouvrées entre le gouvernement du Québec et les organismes publics, telles les municipalités,
représente une étape majeure de la démarche. Il sera donc nécessaire de définir rapidement ces règles de répartition afin que chacun puisse
évaluer clairement les avantages qu'il peut retirer de l'application du projet de loi. Si des organismes
publics ont subi un préjudice à la
suite d'actes frauduleux commis dans le
cadre de la gestion des contrats publics, c'est aussi le cas pour le gouvernement par l'intermédiaire de ses programmes de subvention.
Ensuite, la
transparence doit être au rendez-vous, c'est un principe essentiel pour assurer
la crédibilité associée à ce projet de loi. Même si l'on a le souci de préserver les renseignements de nature confidentielle, le processus ne doit pas être perçu comme étant mené en vase clos. D'une part,
il serait nécessaire que le ministère
de la Justice ait la responsabilité de rendre compte sur une base périodique de l'ensemble des résultats
obtenus par rapport à l'application
du projet
de loi. D'autre part, il serait pertinent de prévoir de façon explicite que je
pourrai avoir accès, dans le cadre de mes
travaux, à l'ensemble de la documentation. Cela permettra aux parlementaires de mieux évaluer dans quelle mesure cette loi est appliquée en conformité avec les règles qui seront
établies et dans un souci de saine gestion des fonds publics.
Voilà pour
l'essentiel des constatations qui découlent de ma lecture de ce projet de loi. Je suis maintenant à votre disposition, ainsi que mon équipe,
pour répondre à vos questions. Merci de votre attention.
• (9 h 10) •
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, je vous remercie pour cette présentation. Nous allons maintenant procéder à un premier bloc d'échange avec, du côté
gouvernemental, Mme la ministre de la Justice. La
parole est à vous.
Mme Vallée : Merci,
M. le Président. Alors, merci beaucoup,
M. Samson. Merci à votre équipe de participer aux travaux de la commission,
participer à la réflexion qui entoure la mise en place du projet de loi.
J'aimerais, dans un premier temps, vous entendre...
Vous avez soulevé un élément qui est quand même assez important, c'est la responsabilité présumée des employés d'une entreprise. Alors, si je vous comprends bien, vous souhaitez
que nous élargissions la portée de
l'article 10 pour qu'une entreprise soit tenue solidairement responsable du seul fait
de l'acte d'un employé, et non pas
d'un dirigeant, non pas d'un administrateur, non pas d'un dirigeant parce que
ça, c'est déjà prévu, puis vous voulez aller plus loin. Donc, si
un employé a posé des gestes, a commis des manoeuvres dolosives ou a
fraudé, vous proposez d'étendre la responsabilité à l'ensemble de l'entreprise.
Est-ce que j'ai bien compris?
M. Samson (Michel) : Oui. En
fait, oui, effectivement, vous avez bien compris. Il y a peut-être deux volets,
lorsqu'on parle, oui, de personnes physiques, évidemment, on parle des employés
d'une entreprise, pour éviter un petit peu, comme je le
mentionnais précédemment, qu'une entreprise, si un employé était poursuivi suite à des
manoeuvres dolosives ou une fraude...
pour éviter que l'entreprise automatiquement ne prenne ses distances vis-à-vis
ces employés-là, cet employé-là en
disant : Moi, je n'étais pas au courant. Donc, il y a
ce lien-là. Et ça déborde un petit
peu votre question, mais il y a aussi tout l'aspect, lorsqu'on
parle de personnes physiques dans le projet de loi, pour être bien certain que «personne physique»... Lorsqu'on
regarde la définition à l'article 2, je crois, d'«entreprise», on parle de personnes physiques qui détiennent une entreprise à titre individuel, mais, dans le projet de loi, je pense que ce serait important de comprendre
que, lorsqu'on parle de personnes physiques,
c'est l'intention du législateur, on vise aussi que ce soient des
fonctionnaires ou des gens dans
l'appareil public qui pourraient avoir commis des fraudes. À notre première
lecture — et nous
ne sommes pas juristes, ici, je vous
le dis tout de suite — on avait l'impression que ce n'était pas si clair que ça si ces
gens-là étaient inclus, étaient concernés par le projet de loi. Donc, il
y a ces deux volets-là.
Mme Vallée :
Bien, merci. Puis en fait c'est justement
la beauté des consultations, c'est de permettre... Parfois, lorsqu'on a le nez collé sur un projet de loi, on n'a pas nécessairement la même lecture. Et on connaît nos intentions.
Alors, c'est intéressant et c'est toujours
enrichissant d'entendre ceux et celles qui en ont fait une première lecture et
en ont tiré certaines conclusions, alors merci pour vos observations.
Je suis aussi
curieuse de vous entendre... Parce
que vous avez parlé du programme de
remboursement volontaire, puis évidemment
c'est une mesure-phare du projet de
loi. Évidemment, on souhaite que le
programme puisse permettre d'éviter
des recours fastidieux, mais en même temps il faut que ce programme-là puisse
être administré et orchestré de façon
rigoureuse. Alors, dans ce sens-là, je me demandais quelle pouvait être la
contribution du Vérificateur général, quels étaient les éléments, les outils
qui pourraient peut-être être mis à contribution du responsable du programme,
de l'administrateur du programme de
remboursement volontaire. Je comprends que, pour vous, il est important,
essentiel qu'il y ait une fluidité de transmission de renseignements
entre les plus importants acteurs du domaine, notamment l'UPAC, l'AMF, mais qu'est-ce que le Vérificateur général... Parce que
vous avez aussi, dans le cadre de votre mandat, fait des vérifications, vous vous êtes penchés sur certains dossiers
problématiques, vous avez déjà soulevé ou allumé... soulevé des drapeaux. Alors, quelles pourraient
être votre collaboration et votre contribution aux travaux du bureau de
remboursement volontaire?
M. Samson
(Michel) : Oui. M. le Président, effectivement, dans le cadre de
nos travaux, premièrement, je pense que
c'est important de préciser que le mandat du Vérificateur général, lorsqu'on
réalise des travaux, n'est pas de découvrir la fraude. Évidemment, vous comprenez, on a une équipe chez nous quand
même de... une bonne équipe, mais on n'a pas les moyens d'écoute
électronique, on n'a pas les pouvoirs et on ne les veut pas non plus.
Mais il n'en
demeure pas moins que, dans le cadre de nos travaux, on va parfois avoir des
indices ou, comme vous l'avez
mentionné, Mme la ministre, allumer une lumière parce qu'on a des
préoccupations à certains égards. On a déjà, avec notre organisation,
des mécanismes d'échange, je dirais, ou de collaboration avec d'autres
organisations comme l'UPAC, entre autres,
assez... je ne dirais pas régulièrement, mais assez souvent il y a des échanges
sur des vérifications qu'on peut
avoir faites ou qu'on réalise, on va avoir des échanges pour être sûrs, dans le
fond, qu'on coordonne nos travaux et
que nous, par une vérification, on ne nuirait pas à une enquête de l'UPAC. Mais
aussi, après une vérification, ça va plus
loin. Souvent, l'UPAC nous rencontre, nous demande des échanges... on échange
certaines informations avec eux pour les aider, eux, dans leur travail,
puis ensuite ils font leur travail.
Donc, je
ferais le parallèle. Un mécanisme de la sorte pourrait possiblement,
dépendamment de l'administrateur et
de son indépendance... Je pense que, les travaux qu'on réalise au Vérificateur
général, à certaines occasions on pourrait avoir des échanges avec l'administrateur responsable de ce programme-là
pour l'alimenter, si besoin était. Évidemment, son mandat est très large, lorsqu'on parle de couvrir tous les contrats
des 20 dernières années. Bon, il y a peut-être, par contre, certaines occasions où on pourrait être
mis à contribution, puis, à ce moment-là, écoutez, le Vérificateur général
est au service de l'Assemblée nationale, et
on travaille tous pour une saine gestion des fonds publics, alors c'est certain
qu'on collaborerait, dans le respect chacun
de nos rôles et responsabilités, mais on collaborerait avec l'administrateur en
question.
Mme Vallée : On a, hier, reçu
des commentaires notamment de la Fédération des chambres de commerce du Québec
et de différents organismes, regroupement d'administrateurs de sociétés d'État,
l'Association des ingénieurs-conseils. Une
des préoccupations quant au programme de remboursement volontaire était d'avoir
une certaine assurance, pour une
entreprise qui se prévaut du programme de remboursement volontaire, que cette
démarche-là ne va pas susciter ou ne
va pas enclencher une série d'autres enquêtes ou d'autres actions. Évidemment,
il est clair que la quittance donnée n'est
pas une quittance à l'égard des infractions de nature criminelle ou des
infractions de nature pénale, c'est clair, mais il y avait une crainte que le passage au programme
de remboursement volontaire pouvait éventuellement susciter
l'attention de certaines escouades.
Vous
mentionnez l'importance d'échanger — et à
l'intérieur de vos travaux vous le
faites — d'échanger
avec l'UPAC, d'échanger avec l'AMF.
Alors, comment pouvons-nous assurer que l'entreprise sera intéressée?
Parce que ce que j'ai ressenti hier, c'est que
certaines corporations avaient une crainte d'encourager leurs membres à
participer au programme de remboursement volontaire malgré la quittance, malgré l'absence...
malgré le fait que la loi aura des dents quand même et va venir
modifier les règles du droit commun justement pour permettre d'aller récupérer les sommes. Mais,
si cette collaboration-là avec les
entités, elle est connue, elle est clairement identifiée, croyez-vous que ça pourrait peut-être susciter
des craintes ou susciter une... oui, c'est ça, une crainte ou peut-être
une aversion envers le programme de remboursement
volontaire?
M. Samson (Michel) : M. le
Président, je vous dirai que possiblement ça pourrait peut-être susciter une
crainte vis-à-vis le processus de
remboursement volontaire, mais, si je le prends un petit peu, je dirais, a
contrario, plus le processus pour le
recours judiciaire va être fort, structuré, plus je pense qu'on a des chances,
permettez-moi l'expression, mais que le
programme de remboursement volontaire fonctionne. En tout cas, à notre point de
vue, il faut que les entreprises qui ont
commis des gestes frauduleux ou... sentent vraiment qu'il va arriver de quoi,
il va y avoir un recours judiciaire, puis les sanctions sont
importantes, sont lourdes. Alors, l'autre possibilité que tu as, c'est qu'il y
a un programme de remboursement volontaire
vers lequel tu peux te tourner et qui permet à tout le monde de diminuer les
coûts, de diminuer les coûts pour
l'État puis pour l'entreprise. Il y a un équilibre à trouver entre les deux, tu
sais. C'est une grande question, mais...
Il y a tout l'aspect
aussi qui est très important de l'équité, de l'équité et de la transparence du
processus. Le programme de remboursement
volontaire ne doit pas, puis je l'ai mentionné un petit peu... ne doit pas
devenir une boîte noire où personne
ne sait ce qui se passe là-dedans, sinon, écoutez, il y en a qui peuvent
prendre la chance de dire : Écoute, je suis aussi bien d'aller au programme de remboursement volontaire, ça va
tout régler, personne ne saura rien. Il faut que les entreprises et la
population, les contribuables sentent qu'il y a une équité avec ce
programme-là; que, oui, même s'il y a eu un
remboursement volontaire sans recours judiciaire, l'entreprise a dû, pour se
réhabiliter, payer des sommes importantes ou... ça s'est fait dans un
cadre bien défini et correct.
Mais il y a un
équilibre à trouver entre les deux, puis j'en conviens, que ce n'est pas
nécessairement facile à trouver, là. Mais
plus le programme de recours judiciaire est fort, plus nous pensons que le
programme de remboursement volontaire peut fonctionner.
• (9 h 20) •
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre, permettez-moi de vous souligner
qu'il reste quatre minutes à votre bloc de questions.
Mme
Vallée : Merci. Justement, le programme, les mesures
exceptionnelles sont costaudes, comme l'ont souligné certains groupes, même trop selon l'avis de
certains, pas assez selon l'avis d'autres groupes, dont les municipalités, qui
demandent notamment une présomption de dommage plus importante.
J'aimerais vous
entendre, justement, sur la question de la présomption de dommage qui est
établie jusqu'à un maximum de 15 % dans
le projet de loi. Parce qu'évidemment, lorsque le dommage est connu comme étant
de 5 %, 6 %, on ne
réclamera pas au-delà du dommage connu, mais la présomption est établie jusqu'à
concurrence de 15 %. Certains... Les
municipalités, notamment la ville de Montréal, et je sais que... la ville de
Gatineau, qui vous succédera, ont demandé que la présomption de dommage soit plutôt établie à 20 %, puisque
c'était plus près de ce qui... c'était plus représentatif de leur
réalité notamment. J'aimerais vous entendre sur cette question-là.
M.
Samson (Michel) : Oui. M. le Président, je pense que le
problème... Bien, je pense, premièrement, que c'est très important qu'il y ait un montant, un
pourcentage qui soit fixé, je pense que c'est la base. Bon, est-ce que ça doit
être 15 %, ou 20 %, ou
25 %? La problématique qu'on a, et vous le savez tous, c'est qu'on est
dans le domaine de la fraude, et à ce
jour je n'ai pas nécessairement... On a beaucoup de suppositions, on nous dit
que... Le coût des contrats, par exemple, on a beaucoup entendu qu'au
gouvernement le coût des contrats avait diminué de 25 % à 30 % depuis
la commission Charbonneau, etc., mais est-ce
qu'on est appuyé puis fondé sur quelque chose de très solide avec ça? Moi, je
n'ai pas vu d'étude à cet égard-là.
Je
pense que le... Le 15 %, pour moi, est un minimum que l'on doit mettre. Si
d'autres intervenants pensent que ça
doit être 20 % ou 25 %, j'aimerais voir, ça serait possiblement
intéressant pour les parlementaires de savoir, bien, ce 20 % là, est-ce qu'il est appuyé... est-ce
qu'il repose sur quelque chose de solide ou c'est, excusez l'expression, un
feeling qu'on a que c'est plus du
20 % puis 25 %. Peut-être que c'est 20 % ou 25 %, mais
certainement pas en bas de 15 %. La mesure doit être assez forte
pour sentir que le pourcentage est sérieux vis-à-vis les entreprises.
Mme
Vallée : Vous
précisez justement que la limite de cinq ans, la clause
crépusculaire qui est prévue au projet
de loi, n'est pas suffisante. Est-ce que, selon vous... vous allez jusqu'à dire
que les règles de droit commun, lorsqu'il est question de fraude ou de manoeuvre dolosive, devraient être modifiées de
façon permanente? Est-ce que c'est ce qu'on doit déduire de votre
observation?
M. Samson (Michel) :
Ça pourrait être une possibilité, mais notre réflexion était plus à l'effet, je
vous dirais, que... lorsqu'on voyait que
l'on pouvait retourner en arrière sur 20 ans, couvrir tous les types de
contrats qui ont été alloués, que ce
soit construction, ressources informationnelles, etc. Ça donne
un panier de contrats, en tout cas, un nombre de contrats incroyable, et vous savez le temps et les efforts
qui sont nécessaires pour monter une preuve, pour faire des recours. Compte
tenu du 20 ans en arrière, on se disait :
Cinq ans en avant, on trouve que ce n'est pas beaucoup. Si on regarde...
Puis ce n'est peut-être
pas un bon exemple, mais les travaux de la commission Charbonneau auront
duré quand même un certain nombre d'années. Nous, on se disait : Cinq ans, là, c'est très,
très court. Nous, on pense plus à 10 ans. Sans être peut-être permanent,
on aurait dit 10 ans. Et aussi, avec le 10 ans, ça fait en sorte que
les entreprises... puis là probablement que les
associations vont avoir un discours contraire au nôtre, là, mais ça fait aussi
que les entreprises sentent qu'il y a une pression qui est là pour
durer, ce n'est pas juste un programme passager, on se dit : Juste cinq
ans, et après c'est fini. Donc, 10 ans,
c'est beaucoup plus long, et ça donnera, à ce moment-là, que ce
soit l'administrateur ou aux autres intervenants, un laps de temps beaucoup plus grand pour justement
peut-être monter la preuve, s'il y a lieu, faire les
représentations qu'il faut et poser
des gestes vis-à-vis ces actes répréhensibles là. Donc, si on avait une
suggestion à vous faire, on ne l'a pas écrit dans les discours, mais on
irait plus à 10 ans que cinq ans.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, ça complète ce
premier bloc. Je me tourne maintenant vers l'opposition officielle. M. le
représentant de l'opposition officielle, porte-parole en matière de justice,
député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.
M.
Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la
bienvenue. Bon matin à tous mes collègues.
Vous
abordez l'enjeu de la transparence puis vous dites : C'est important que
le processus soit transparent, que les
Québécois sentent qu'il se passe quelque chose, finalement, avec le programme
de remboursement volontaire, mais en
même temps hier il y a des groupes puis des associations qui sont venus nous
rencontrer puis qui nous ont exprimé la crainte que, si le processus, justement, était trop transparent, ça pourrait avoir l'effet
inverse, c'est-à-dire que ça pourrait être un incitatif, pour eux, d'y penser à deux fois avant de participer
au programme parce que ça pourrait avoir d'autres effets dans d'autres
juridictions. Et c'est un argument qui mérite quand même une attention
particulière parce que, si effectivement à prime abord ça peut sembler intéressant, mais
du même souffle, là, il faut se rappeler ce que la loi dit, là : pour participer au programme de remboursement,
c'est parce qu'il pourrait y avoir eu une situation de fraude. Alors, c'est
l'entreprise elle-même qui admet qu'il
pourrait y avoir eu une situation de fraude, elle s'entend avec le
gouvernement, son nom est public. Ça peut amener d'autres types de
procédure.
Alors,
dans votre souci de transparence, que je partage, bien évidement, est-ce que,
pour vous, ça pourrait être suffisant,
là, qu'il y ait une espèce d'annexe dans laquelle, je ne sais pas, moi, à
chaque mois, par thèmes ou par groupes, on énonce les sommes qui ont été récupérées mais sans du même souffle
donner le détail de l'entreprise et des contrats en jeu?
M.
Samson (Michel) : Écoutez,
vous avez une question fort intéressante. Lorsqu'on parle de transparence, vous
savez, le Vérificateur général est une institution qui prône la transparence et
une reddition de comptes la plus complète possible. Lorsqu'on regarde
les différents enjeux de ce projet de loi... Et je comprends bien les propos
que vous avez mentionnés par rapport à des
intervenants qui sont venus ici hier, mais, encore là, ce qui va faire le
sérieux... bien, «sérieux», je ne veux pas exagérer en disant ce mot-là,
mais la crédibilité de ce programme-là vis-à-vis la population, c'est la transparence qu'il va y avoir avec. Vous comprenez
que, si le programme de remboursement volontaire est mis de l'avant et on ne sait pas trop, trop qui a réglé quoi, pour
quel montant, très, très peu d'informations, je crois que la crédibilité du
programme auprès de la population — et je ne vous parle pas
auprès des entrepreneurs, évidemment — auprès de la population va être beaucoup moindre. Je pense
qu'il y a moyen de rendre les choses publiques de façon transparente sans
nuire, évidemment, à tout.
Mais
encore là je reviens à ce que je mentionnais précédemment : Il y a
toujours l'équilibre entre le programme volontaire et les recours judiciaires. Il faut que les intervenants qui
ont fraudé sentent que le recours judiciaire est fort sérieux et que le
choix qui s'offre à eux, c'est d'aller vers le programme de déclaration
volontaire.
Donc,
de rendre public avec qui on a conclu une entente, quel a été le montant, c'est
là-dessus que le programme va être
jugé, et je pense que vous le savez fort bien, c'est là-dessus que la
population va juger le programme. Si on n'est pas capable de savoir qui a réglé quoi, puis pour combien on a réglé,
puis ça représente combien par rapport à l'ensemble des contrats qui avaient été octroyés... Écoutez,
pour nous, de la façon qu'on le voit, c'est un peu la crédibilité du programme
vis-à-vis la population.
M. Cloutier :
Mais la crédibilité du programme, c'est aussi les sommes qui vont être
recouvrées, là.
M. Samson (Michel) :
Tout à fait, tout à fait.
• (9 h 30) •
M.
Cloutier : Alors, si l'entreprise est d'avis que... participe
au programme, bénéficie de l'article 3, se retrouve dans une situation, effectivement, où il pourrait
y avoir eu une fraude, l'admet, s'entend, puis, de l'autre côté, tu as le DPCP
qui, lui, décide que peut-être que ça mérite
une enquête, peut-être que ça mérite d'être approfondi mais sur le plan
criminel, l'enjeu, c'est, si la
transparence est complète, jusqu'où les entreprises vont «gambler» puis aller
de l'avant en mettant le doigt sur la...
en mettant la proposition sur la table puis en disant : On va s'entendre
avec le gouvernement malgré le risque de
poursuite qui pourrait s'ensuivre. C'est ça, l'enjeu qui a été exprimé hier. Je
ne prétends pas que j'ai une solution puis que ma réflexion, elle est
complétée, mais ce qui est certain, c'est que, si on met en place une mesure,
en vigueur, puis qu'en bout de ligne
on rend ça transparent, c'est extraordinaire, on a un super processus
transparent, on a une entreprise qui
s'en prévaut parce qu'elle se retrouve dans une situation un peu mitoyenne,
puis elle, elle est convaincue que ce n'est pas une situation
criminelle, mais c'est une situation civile, puis elle va s'en sortir, mais que
ça reste un processus d'exception, bien on
va avoir une loi hypertransparente, les gens vont être contents de ça, mais
elle n'aura pas de résultat. Alors, c'est cet équilibre qu'on doit
trouver, qui n'est, à mon point de vue, pas simple.
Mais
c'est là-dessus peut-être que j'aimerais vous entendre. Puis je comprends ce
que vous dites, tu sais, que, si la loi,
elle est stricte, elle est forte, dans le fond, si le bâton est puissant, les
gens vont avoir avantage à se tourner vers le programme de remboursement volontaire, mais du même souffle encore
faut-il que lui aussi soit attrayant pour que ça aussi fonctionne. Alors, votre souci de transparence est plus que
louable et certainement nécessaire, mais jusqu'où on va? C'est vraiment ça, je pense, l'enjeu. Mais
peut-être que ma crainte n'est pas fondée. Peut-être que la ministre va pouvoir
nous rassurer à cet effet-là, la distinction
entre la fraude criminelle puis la fraude civile puis les écarts qu'il y a
entre les deux. Je comprends que, le
libellé, on ne doit pas prouver qu'il y a une fraude, il est plutôt au
conditionnel, mais je trouve qu'on est dans des zones fragiles, je vais
le dire comme ça.
M. Samson (Michel) :
Oui, bien je pense que vous l'avez bien mentionné. Le défi, c'est de trouver un
équilibre.
Lorsqu'on
parle de transparence, écoutez, s'il y a un recours judiciaire... Et, je le
répète, je ne suis pas juriste, et la
plupart d'entre vous êtes mieux placés que moi pour parler de ces choses-là,
mais c'est sûr que, que ce soit le corps policier ou les procureurs, ils vont devoir monter une preuve au
criminel. Donc, il y a tout un travail qui va devoir être fait, même s'il y a un programme de remboursement
volontaire. Donc, il faut qu'ils sentent qu'il y a vraiment de quoi de
fort à cet égard-là, au niveau du recours judiciaire.
Écoutez,
la transparence, je pense qu'il y a moyen de trouver un équilibre. Qu'est-ce
que nous pensons qui devrait être
rendu public lorsqu'il y a une entente en vertu du programme de remboursement
volontaire? Comme je l'ai mentionné, bon,
le nom, le montant qui a été remboursé, le pourcentage des contrats que ça
représente, parce que c'est là-dessus aussi que l'administrateur... le défi de l'administrateur va être là-dessus.
Oui, on peut avoir un programme de remboursement volontaire, mais, si
j'avais un contrat de 300 millions, et il y a une négociation qui
s'effectue, bon, bien, c'est-u pour 1 million? C'est-u pour
10 millions? C'est-u pour 20 millions? Comment on réussit à concilier
tout ça?
Moi, je pense
qu'encore une fois la crédibilité du programme de remboursement volontaire
repose sur la transparence. Je comprends que
ça peut heurter ceux qui vont avoir commis un geste, mais rappelons-nous à la
base que ces gens-là ont commis un
geste illégal, tu sais, on ne veut pas leur donner une voie... en tout cas
j'ose croire qu'on ne veut pas leur
donner une voie d'évitement. Ces gens-là ont commis un geste répréhensible,
illégal. Ce qu'on veut, c'est de trouver
une façon pour éviter le recours judiciaire, bon, parfait, oui, tout le monde
pourra en bénéficier, mais en même temps
je pense qu'on doit rendre public, et il doit y avoir... la transparence doit
en faire partie pour justement qu'on voit qu'est-ce que ça donne au bout
de la ligne.
M. Cloutier :
Oui, évidemment. Et vous faites beaucoup référence, le succès du programme, à
son caractère transparent, j'en suis, mais
le succès du programme, c'est aussi le nombre de personnes qui vont s'en
prévaloir puis les montants qui vont
être perçus. Puis un ne va pas sans l'autre, puis c'est l'ensemble de l'oeuvre
qui va faire qu'en bout de course, au bout d'un an, on va dire :
Bien, finalement, ça a marché.
Je
veux vous entendre sur... Vous écrivez que les personnes corrompues
responsables de la gestion des fonds publics ainsi que les corrupteurs eux-mêmes devraient être dans le collimateur.
Mais là-dessus c'est peut-être l'objet d'un autre forum, mais vous mentionnez quand même que ceux et
celles qui avaient la responsabilité des fonds publics devraient être tenus responsables. Est-ce que vous avez des
propositions en ce sens? Est-ce que votre réflexion a fait l'objet peut-être
d'un autre mémoire dans un autre forum, mais
vous l'écrivez quand même dans votre mémoire? Je suis curieux de savoir
qu'est-ce que vous aviez en tête.
M.
Samson (Michel) :
Oui. M. le Président, non, ça n'a pas fait l'objet d'un mémoire
dans d'autres forums, mais, écoutez, si des gens, si on parle... à l'intérieur de
l'appareil gouvernemental ou d'une municipalité ont participé de
façon frauduleuse à un processus
quelconque, je pense qu'il doit y avoir des sanctions qui sont prises
contre ces personnes-là, là, sinon on évacue une partie importante du problème.
Si les personnes corrompues demeurent en place sans aucune sanction, est-ce
que le phénomène va se reproduire
dans deux ans, dans trois ans, dans cinq ans? Je pense qu'on doit couvrir
l'ensemble du processus.
M.
Cloutier : C'est intéressant, votre... Évidemment, vous avez tout à
fait raison. Là, ce qui est... Là, le projet de loi vise les entreprises qui, elles, ont fraudé dans le cadre d'un
contrat public, mais là, vous, ce que vous dites, c'est : Ceux et celles qui avaient la responsabilité de la
gestion des contrats, s'il y en a qui ont participé, dans le fond, à cette
manoeuvre dolosive, comment ces gens-là pourraient être inclus?
Est-ce que vous
suggérez qu'on devrait traiter de cet enjeu-là dans le projet de loi actuel? Si
oui, de quelle manière? Je suis curieux de vous entendre.
M.
Samson (Michel) : De quelle manière? Écoutez, honnêtement,
cette question-là m'embête un peu, de quelle manière. Mais est-ce que ça devrait être couvert? Oui. D'emblée, on vous
dirait que, oui, ça devrait être inclus dans le projet, que les gens qui
ont participé à un stratagème ou à une fraude et qui font partie... qui sont à
l'intérieur d'une municipalité ou peu
importe, comme je le mentionnais, sont couverts par ce projet de loi là et sont
sujets à être poursuivis et à sanction.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, quatre minutes à
votre bloc.
M.
Cloutier : On a des échanges informels du côté gouvernemental,
puis ce sera intéressant peut-être d'approfondir cet enjeu-là. On me dit
que c'est déjà couvert. Maintenant, il faudra voir de quelle façon, dans
quelles conditions des directeurs, par
exemple, de municipalité ou carrément des fonctionnaires du gouvernement
pourraient se retrouver dans ce
processus. Sérieusement, moi, je ne le saisis pas. Je serais curieux peut-être
de vous entendre là-dessus éventuellement, puis ça va éclairer aussi nos
travaux, parce que c'est la première fois que l'enjeu est soulevé, jusqu'à
maintenant. Et ça va certainement mériter
d'être approfondi, de quelle façon, effectivement, parce que, vous avez tout à
fait raison, là on vise les
entreprises qui sont fautives, mais ce n'est pas impossible qu'il y ait
d'autres... qu'il y ait des responsables, des gestionnaires de portefeuille qui ont peut-être outrepassé leur
mandat ou carrément agi de manière frauduleuse ou...
M. Samson (Michel) :
Souhaitons que non, mais c'est possible.
• (9 h 40) •
M. Cloutier : Souhaitons que
non, mais pensons que ça peut être probable. Même c'est probable.
M. Samson (Michel) :
Bien, avec la discussion sur un projet de loi, c'est peut-être une occasion pour vous d'en débattre et de
voir si ça devrait être inclus.
M. Cloutier :
La ministre me fait signe que peut-être ça mérite d'être clarifié. Alors, tant
mieux, puis ça sera peut-être plus clair.
Présomption envers l'entreprise
lorsque c'est un employé, on a eu tout à l'heure cette discussion-là du côté gouvernemental, mais, vous, ce que vous dites, c'est que non seulement un dirigeant, si c'est un employé qui aurait manoeuvré, l'entreprise devrait... il devrait y avoir une présomption de
culpabilité, en quelque sorte, ou de responsabilité, plutôt, envers l'entreprise également.
Donc, vous élargissez le champ de la présomption. C'est ça?
M.
Samson (Michel) :
Oui, on est conscients qu'on élargit le... effectivement. Et, à ce moment-là, de ce que je comprends,
c'est que le fardeau de la preuve est transposé du côté de l'entreprise, dans le fond, pour éviter des situations où on aurait une fraude commise par un ou deux
employés où... peu importe le niveau dans cette organisation-là, et que
l'entreprise s'en lave les mains, si on peut dire, mette à pied, congédie cette
personne-là en disant : Moi, je n'étais pas au courant, puis ça finit là, l'entreprise n'est pas touchée du tout, et c'est l'employé qui
est poursuivi ou qui en subit seul les conséquences.
Bon, je sais que c'est un changement, quand
même, qui pourrait être important,
mais à tout le moins c'est un point
qu'on voulait vous mentionner puis soulever pour éviter, justement,
que l'entreprise se dégage trop facilement, qu'une entreprise
se dégage trop facilement de ses responsabilités suite à des actes frauduleux qui auraient été
commis en disant simplement : Non, non, je n'étais pas au courant;
je les ai congédiés, donc on a réglé la situation chez nous.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Il ne reste qu'une minute à ce bloc d'échange.
M.
Cloutier : Oui. Peut-être
rapidement, là, parler de la présomption à l'article 10.
Vous, ce que vous dites, c'est que peut-être
que le renversement de la présomption devrait se faire de façon intemporelle
puis que la loi... on devrait donner
un caractère permanent, finalement, à la disposition. Est-ce que c'est bien ça que
j'ai compris? Vous avez... En fait, votre suggestion, c'est de l'étendre
à 10 ans?
M. Samson (Michel) :
À 10 ans, oui. Oui.
M. Cloutier :
Mais rendu à... Oui, ça, c'est pour les actes...
Une voix :
Ça, c'est pour la réatroactivité.
M. Cloutier :
Exactement, c'est pour la rétroactivité. Est-ce que ça...
M. Samson (Michel) :
Non, la rétroactivité est fixée, je crois... est proposée à 20 ans.
M. Cloutier :
Est à 20 ans.
M. Samson (Michel) :
Ça, oui, O.K., mais c'est justement parce qu'elle est fixée à 20 ans et
que ça couvre l'ensemble des contrats, peu importe le type de contrat. Ça donne
une masse de contrats, un nombre de contrats incroyable, et le temps que l'administrateur ou... si le programme
fonctionne, qu'on puisse mettre en place tout ça, et commencer des analyses, et que l'administrateur joue son rôle,
on se dit... Ça nous apparaît, nous, cinq ans, court comme délai.
On suggère que 10 ans serait beaucoup mieux, compte tenu de l'importance
des contrats en jeu et du nombre.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, c'est malheureusement tout le temps... à moins que vous ayez une question à cinq secondes et une réponse de trois. Je me tourne maintenant
vers la deuxième opposition. Mme la
députée de Montarville, à vous la parole.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. M. Samson, bonjour. Messieurs madame, bonjour.
Merci pour le mémoire, merci d'être là.
Vous
nous amenez des précisions qui sont très intéressantes, certaines, d'ailleurs,
qui nous étaient venues à l'esprit. Alors,
j'aime beaucoup aussi la durée de cette loi exceptionnelle,
qu'elle soit applicable un petit peu
plus longtemps, qu'elle soit en vigueur un petit peu plus longtemps.
Votre préoccupation rejoint une préoccupation que nous avions, de notre côté.
Cela
dit, je vous amène tout de suite à la page 3. Vous soulevez deux autres
préoccupations à l'égard des intérêts et également
des sommes forfaitaires. Comme le projet
de loi n° 26 est à deux
volets, un programme de remboursement ou la poursuite judiciaire, il
y a une différence entre les intérêts
et il y a une différence entre les sommes forfaitaires.
Alors, je reprends ce que vous nous
écrivez fin de la page 3 : «Par
exemple, il serait souhaitable que,
dans les modalités d'application, on précise que les sommes faisant
l'objet du remboursement porteront intérêt à compter du dernier paiement fait
par l'organisme public pour le contrat visé...»
Tout comme c'est le cas pour les recours judiciaires. Et vous poursuivez en
disant : «...et qu'un montant
forfaitaire sera exigé pour récupérer les frais engagés, au même titre que pour
[les recours judiciaires].»
Pour ce qui
est du recours judiciaire, la somme forfaitaire pour couvrir les procédures est
de 20 %, c'est écrit dans
la loi. Cependant, pour ce qui est du
remboursement volontaire, du programme de remboursement volontaire, ce n'est
pas écrit dans la loi. On nous a informés, lors d'une séance d'information, que
ce serait autour de 10 %.
J'ai
deux questions à cet égard-là. Pour ce qui est des intérêts, considérez-vous
que ça devrait être les... Pardon, non,
pas les intérêts. Je reprends : En ce qui a trait aux sommes forfaitaires,
donc, on nous a dit 10 % pour le programme de remboursement volontaire, 20 % pour la voie judiciaire.
Pensez-vous que ça devrait être la même chose, égal, 20 % dans les
deux cas, toujours dans le souci d'équité et de transparence? Pourquoi cette
différence? Qu'en pensez-vous?
M. Samson
(Michel) : Écoutez, je pense que l'écart entre le 10 % et
le 20 % peut se justifier dans le sens que les recours judiciaires vont coûter beaucoup plus cher que le programme
de remboursement volontaire à faire fonctionner. Donc, le 20 % qu'on va ajouter dans le recours judiciaire va
couvrir beaucoup de frais liés au recours judiciaire, évidemment, alors
que dans l'autre, normalement, si le programme fonctionne bien, ça devrait se
faire plus rapidement, à un coût, espérons-le,
moindre. Donc, à ce moment-là, si c'est 10 %, ou 15 %, ou 12 %,
peu importe, si on parle de 10 %, je trouve qu'il y aurait une
logique, à cet égard-là, que le montant soit différent de celui du recours
judiciaire, oui.
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. Chose certaine, il faudrait
toutefois s'assurer que ce ne soit pas le contribuable qui aurait à défrayer les frais du programme, là,
il faudrait que ce soit suffisant pour le couvrir. Vous pensez que 10 % le
ferait?
M. Samson
(Michel) : Je pense. Et c'est là aussi... Comme on le
mentionne, les modalités d'application vont être connues plus tard, donc ça va faire partie des modalités d'application.
Je pense qu'on pourrait avoir le souci d'établir des modalités d'application de la sorte, comme par
exemple avec un 10 %, et aussi de donner en même temps une certaine
latitude à l'administrateur, parce que c'est lui, finalement, l'administrateur,
qui va négocier, si on peut dire, entre les deux parties pour établir le montant. Donc, l'administrateur aura à
rendre des comptes par rapport au règlement qu'il va proposer, mais il
doit quand même... pour assurer son travail, je pense qu'il doit disposer quand
même d'une certaine latitude, d'une certaine
indépendance pour réaliser son travail, et à ce moment-là il justifiera les
décisions qu'il va prendre.
Mme Roy
(Montarville) : Donc, cette différence-là, de un,
refléterait le travail accompli, un petit peu moins pour le
remboursement volontaire, et serait aussi un incitatif pour les entreprises en
partant.
M. Samson (Michel) : Aussi.
Mme Roy
(Montarville) : Par ailleurs, pour ce qui est de l'intérêt,
on fait courir les intérêts à partir de la signature du contrat initiale pour ce qui est du recours
judiciaire mais non pour ce qui est du paiement volontaire. Vous en pensez
quoi? Et vous faites une distinction et vous dites qu'il ne devrait pas y avoir
cette distinction-là.
M. Samson (Michel) : Oui. En
fait, ce qu'on dit, c'est que les sommes devraient porter... on suggère que les
sommes devraient porter intérêt à compter du dernier paiement fait par
l'organisme public, donc...
Mme Roy
(Montarville) :
Dans les deux cas?
M. Samson
(Michel) : Dans les deux cas, oui. Puis, comme je l'ai
mentionné précédemment, encore là, dans le cadre d'une négociation, bien l'administrateur pourrait avoir une
certaine latitude pour régler les dossiers, en étayant et en justifiant pourquoi il a pris cette décision-là,
mais d'emblée il y a un 10 %, il y a des intérêts, et l'administrateur
aura une latitude dans son application. Je pense qu'on doit lui donner
une latitude à cet égard-là.
Mme Roy
(Montarville) : Je vais changer de sujet, je vais passer à
la page 5. On parle du fameux article dans lequel on définit une personne, l'article 10. Selon notre
compréhension, «personne physique» avait un sens très, très large et couvrait également les élus, les
fonctionnaires, les sous-contractants, toute personne qui aurait touché,
participé à ces contrats frauduleux, ces manoeuvres frauduleuses. Vous
nous dites que ce serait bon de le spécifier pour une raison, entre autres, de rebâtir la confiance des
citoyens, c'est un argument que nous avons entendu. Je me demandais si... Que
penseriez-vous du fait que nous puissions rajouter, justement, pour réconforter
le citoyen... Parce que, selon notre compréhension,
«toute personne physique» incluait tout le monde. Mais, si nous mettions
quelque chose à l'effet... on ajoutait «notamment», les personnes
physiques notamment, et en décrire quelques-unes, par exemple les élus, les fonctionnaires, les sous-contractants, sans
réduire la portée de ce qui suit, est-ce que ça pourrait être une façon qui
serait, selon vous, suffisante ou
devrions-nous faire différemment pour que les citoyens aient confiance en
l'application de cette loi et que les
personnes visées de tous les milieux et les milieux politiques soient au
premier chef visées ou possiblement...
• (9 h 50) •
M. Samson (Michel) :
Oui, ce serait une façon de le faire, une option possible, de venir
rajouter : Notamment telle
personne, de tel type, tel type, tel type. Et là l'autre volet aussi au
niveau de l'article 2, lorsqu'on vient donner certaines définitions, je le reprends, là, au niveau de l'entreprise, par contre,
là, comme je l'ai mentionné, puis c'est peut-être ça qui nous a, dans notre lecture, je dirais... peut-être
pas induits en erreur mais qui pourrait créer une confusion, c'est qu'on
vient dire «ou une personne physique qui
exploite une entreprise individuelle», une personne physique qui exploite une entreprise. Donc, quand on
arrive dans le projet de loi et on parlait de personne physique, nous, on
s'est dit : Attention! La personne physique, de quelle personne
physique parle-t-on? Est-on bien sûr qu'on parle de la vraie personne physique et non pas du détenteur unique d'une entreprise
individuelle? Donc, ça pourrait être précisé aussi à l'article
2 par une définition à cet égard-là, mais ça, le moyen...
Mme
Roy
(Montarville) : Chose certaine, pour ce qui est...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Permettez-moi, Mme la députée, de souligner qu'il
reste un peu plus de deux minutes à votre bloc d'intervention.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, M. le
Président. Pour ce qui est de, du
moins, réconforter et informer la population,
je pense qu'à juste titre ça pourrait être des informations ou des définitions
qui pourraient éclairer le citoyen, que nous pourrions effectivement
rajouter lors de l'étude article par article.
Écoutez,
moi, ça répond à mes questions. J'avais beaucoup de préoccupations à
l'égard du cinq ans pour l'application parce
que tout comme vous je me disais : Mais c'est beaucoup
plus long, ce sera beaucoup plus long. Donc, le fait que vous vouliez allonger la durée de vie de cette loi
exceptionnelle, j'y souscris totalement, et c'est quelque chose dont nous pourrions
discuter ultérieurement. Alors, merci infiniment pour votre mémoire.
M. Samson (Michel) :
Merci, ça fait plaisir.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : On vous remercie. Je me retourne du côté du
gouvernement. Et, je pense, le député de La Prairie souhaite
prendre la parole. À vous la parole, M. le député.
M.
Merlini : M. le Président, merci beaucoup. M. Samson, membres de
l'équipe du Vérificateur général, je reconnais la qualité du travail qui est fait dans votre mémoire et reconnaît
l'expertise que vous voulez apporter sur un projet de loi, ce qui est assez inusité parce que normalement on
vous voit à la Commission de l'administration publique, et c'est toujours
dans l'esprit de la saine gestion des fonds
publics qu'on obtient vos points de vue, vos rapports, vos recommandations
et vos analyses.
Vous soulevez
plusieurs points auxquels j'ai des questions, en commençant par la quittance.
Vous parlez que vous souhaitez que les
entreprises obtiennent une quittance à l'égard des contrats visés. On a entendu
différents groupes nous dire :
Il faudrait que la quittance soit une fois et pour toutes, on efface l'ardoise.
Par contre, la ministre, hier, a très bien dit que l'objectif du projet de loi
n'était pas d'acheter, de se refaire une... de se réhabiliter d'une façon... en
s'achetant la quittance. Et d'autres
ont dit : Bien, si on y va contrat par contrat, ça risque d'être long et
fastidieux, d'où l'importance que
vous soulignez de peut-être ne pas avoir une portée crépusculaire de cinq ans
mais de 10 ans, pour la loi, parce qu'on recule 20 ans en
arrière.
Vous-mêmes, dans
votre travail de vérification, vous l'avez soulevé dans votre mémoire, que vous
regardez plusieurs contrats. La Commission
de l'administration publique examine tous les contrats, incluant les
subventions, et je vais y revenir tantôt.
La quittance, comment
la voyez-vous? Voyez-vous vraiment contrat par contrat ou, lorsque
l'administrateur s'entend avec les
entreprises ou les entrepreneurs visés, est-ce qu'on irait plus pour une
quittance globale et dire : O.K., la
compagnie a décidé de mettre cartes sur table, on arrive, on établit un
montant, la quittance est donnée, et voilà, c'est réglé? Comment
voyez-vous ça?
M.
Samson (Michel) : En fait, de notre point de vue, la quittance
devrait porter sur les contrats concernés et non pas sur l'ensemble des contrats qui peuvent avoir été octroyés à la
firme XYZ au cours des deux ou trois dernières années, sinon, écoutez, ça pourrait... Puis je ne prête
pas de mauvaises intentions à personne, mais ça pourrait être facile, plus
facile pour une organisation de se
présenter devant l'administrateur puis de dire : Écoute, voici quatre,
cinq contrats que j'ai obtenus, puis
là-dedans il y a peut-être des montants qui ne sont pas tout à fait corrects,
et de s'entendre là-dessus, alors qu'à
côté les plus gros contrats, si on peut dire, n'en font pas partie, et on donne
une quittance complète. Il me semble que
ça doit vraiment porter... Et là, encore là, ça va reposer sur tout le sérieux
de l'analyse, du travail qui va avoir été fait par l'administrateur. C'est pour ça qu'on parle qu'il doit avoir les
moyens, que ce soient des moyens de vérification ou peu importe, mais il
doit disposer de moyens, lui, puis d'échange d'information pour s'assurer qu'il
n'y a pas, entre guillemets, de gros morceau
qui y échappe. Lorsqu'on entreprend une négociation avec une entreprise, bien
il doit savoir l'ensemble, si
possible, des contrats qui auront été octroyés à cette occasion-là pour pouvoir
justement peut-être ramener le tir ou
corriger le tir un peu, mais c'est sûr que la quittance devrait porter sur uniquement
les contrats concernés et non pas l'ensemble.
M. Merlini : Dans votre mémoire vous parlez que «la
détermination du montant correspondant au préjudice est un élément de
risque important auquel l'administrateur devra faire face». Est-ce là que votre
bureau du Vérificateur général pourrait être
utile, dans la détermination du montant du préjudice? Parce que seul, un
administrateur, à regarder quelques
contrats ou plusieurs contrats, de tenter d'évaluer la portée du préjudice est
assez... doit être assez difficile. Est-ce là que vous pourriez apporter
votre contribution à titre de Vérificateur général?
M. Samson (Michel) :
Ma réponse, oui, va peut-être vous surprendre, mais, oui, comme je l'ai
mentionné précédemment, c'est sûr, on pourrait collaborer.
M. Merlini :
Vous seriez disposés à le faire, oui, c'est ça?
M. Samson
(Michel) : Oui, on
pourrait collaborer. Mais je vais aller plus loin, puis personne n'a posé la
question, mais vous diriez,
quelqu'un : Est-ce que ça pourrait être une suggestion que cet
administrateur-là — puis
je vais le dire clairement — soit
à l'intérieur du bureau du Vérificateur
général?, tout de suite je vous dis non, je pense que ce ne serait pas une bonne idée. La réponse peut vous
surprendre, mais j'aime mieux la dire pour que ce soit bien clair. Non, je
pense qu'on doit garder une distance. On peut collaborer et alimenter
cette personne-là, puis soyez assurez qu'on le ferait, s'il y avait lieu, mais
notre rôle s'arrêterait là.
M.
Merlini : Dans la
détermination des règles de répartition des sommes recouvrées, on a entendu
hier la ville de Montréal
répéter, et ainsi que la ville de Laval... de dire : On veut être à la
table, on veut savoir ce qui se passe parce que des fois il y a une entreprise, une compagnie qui aurait pu faire
affaire avec plusieurs entités, plusieurs organismes publics. Alors là, comment qu'on divise la tarte
des sommes recouvrées? Et vous dites que ça représente une étape majeure
de la démarche. Alors, comment voyez-vous
déterminées ces règles de répartition là? Parce qu'effectivement ça va être
quelque chose qui va être assez important.
On parlait d'équilibre tantôt. Est-ce que ça fait partie de ça? Et comment y en
arriver, à ça, selon votre expérience comme Vérificateur général?
M. Samson (Michel) :
En fait, la... je ne dirais pas la lumière, mais le point qu'on veut souligner
avec cet aspect-là, c'est de vous
mentionner, de mentionner aux parlementaires : N'oubliez pas que, oui, une
ville pourrait avoir eu des contrats
frauduleux dans la ville X, mais n'oubliez pas que le gouvernement, par
ses programmes de subvention, pourrait
avoir contribué grandement à ces sommes-là, que ce soit au niveau de réfections d'aqueduc, peu importe. Donc, s'il y a une entente qui est conclue sur ces contrats-là avec la ville,
faites attention, le gouvernement, à notre avis, a aussi une portion qui le concerne parce qu'il a mis en
place des programmes de subvention, il a versé des sommes à cette ville-là.
Donc,
s'il y a des sommes qui sont récupérées, il me semble qu'il serait normal que
le gouvernement en récupère, lui
aussi, une partie. Bon, quel sera le pourcentage? Ça
pourrait être en proportion des contrats puis des subventions versées,
là, effectivement, mais notre point était : N'oublions pas cet aspect-là
que l'administrateur devra se préoccuper.
M.
Merlini : C'est là que ça
m'amène à la question, justement, des subventions. Est-ce qu'à ce moment-là on
devrait explicitement inclure les programmes de subvention à l'intérieur de ce projet
de loi là? Parce que vous dites effectivement : S'il y a un contrat qui a été octroyé, par
exemple, pour la réfection de l'aqueduc, et la municipalité a bénéficié d'une subvention, est-ce que le gouvernement
serait en droit de vouloir récupérer cette subvention-là ou est-ce que ces
argents-là retourneraient à la ville pour qu'elle puisse récupérer ses travaux
avec une firme honnête, là, on va le dire comme
çà, là? Ou est-ce qu'on parle aussi de d'autres subventions dans d'autres... un
peu comme on fait quand on vérifie les subventions
à la Commission de l'administration
publique? Est-ce que vous souhaitez qu'on inclue ça ici, dans le projet de loi?
M. Samson (Michel) :
Bien, on pourrait faire référence aux subventions versées par le gouvernement à
toute organisation ou peu importe, là, parce
que ça peut être dans... c'est ça, oui, ça peut être les municipalités, ça
pourrait être des universités, ça
pourrait être autres organisations. Donc, il pourrait y avoir une référence
que, s'il y a une subvention qui a
été versée et qu'il y a des contrats frauduleux en lien avec cette subvention-là
qui a été versée ou ce programme-là, bien le gouvernement a le droit de
récupérer sa part du montant.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Nous en sommes à la dernière minute de jeu, M. le
député.
M.
Merlini : Merci. Merci beaucoup. Dernier point que je voudrais
aborder, et ça tombe bien, c'est... vous demandez de prévoir de façon explicite que vous pourriez voir de faire
une analyse comme on l'a fait en Commission de l'administration publique, de revoir l'application de la loi plus tard
dans le temps, voir si elle a obtenu des résultats. Parce qu'on a parlé beaucoup hier qu'il faut que ça
marche, il faut arriver à des résultats. Le but, c'est de récupérer des sommes.
Alors, comment qu'on fait, ça, pour l'inclure?
Est-ce qu'on ajoute l'article dans le projet de loi, et là vous ferez un
travail de vérification comme vous l'aviez fait par le passé?
M.
Samson (Michel) : Bien, nous, on vous suggérerait d'ajouter
effectivement dans le projet de loi qu'après, je ne sais pas, trois ans
ou cinq ans il y a une évaluation qui va être faite. Puis cette évaluation-là
peut être faite par une organisation autre
que le Vérificateur général. Nous, ce qui est important aussi, c'est qu'on ait
le pouvoir de vérification des travaux
qui vont avoir été faits. Mais, comme c'est une nouvelle loi et on cherche un
équilibre, plusieurs intervenants l'ont
mentionné, qui n'est pas toujours facile, qui n'est pas facile à trouver, je
pense, ce serait bien qu'après trois ans ou cinq ans on procède à une
évaluation de la loi pour voir qu'est-ce que ça donne.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie infiniment. Alors, merci au nom
de la commission de vous être déplacés, de vos représentations fort
utiles.
Sur ce, nous allons suspendre quelques instants, le temps de permettre à nos
prochains invités, la ville de Gatineau, de s'avancer. Nous suspendons.
(Suspension de la séance à 10 heures)
(Reprise à 10 h 2)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, la commission reprend ses travaux. Nous avons le plaisir
d'accueillir les représentants de la
ville de Gatineau, le maire de la ville étant avec nous. Alors, bonjour, M. le
maire. Vous bénéficierez d'une période de 10 minutes pour faire la présentation de votre
mémoire. Et, dans un premier temps, je vous demanderais, pour le bénéfice des membres de la commission et
ceux qui nous écoutent, de présenter les gens qui vous accompagnent. À
vous la parole.
Ville de Gatineau
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bonjour. Donc, je m'appelle Maxime
Pedneaud-Jobin, maire de Gatineau. Je suis accompagné de Me Claude Alain,
qui est directeur des services juridiques de la ville, et de Patrick
Robert-Meunier, qui est responsable du dossier à mon bureau.
Donc, Mme la
ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, c'est un plaisir et un
honneur d'être présents pour exprimer
la position de la ville de Gatineau sur le projet de loi n° 26. Un
merci spécial à la ministre Vallée, ministre que nous connaissons bien
dans l'Outaouais, de nous donner la chance de participer à vos travaux
importants.
On a fait
plusieurs interventions auprès du gouvernement du Québec et auprès de l'UMQ
pour demander le dépôt d'un projet de
loi comme celui-ci. Gatineau tient donc à féliciter le gouvernement pour sa
décision. On est globalement satisfaits du projet de loi. Il offre des
outils créatifs, originaux pour nous aider à agir dans l'intérêt des citoyens
et des contribuables.
Au cours des
années, la ville de Gatineau a adopté diverses mesures pour améliorer sa
gestion des appels d'offres et lutter contre la collusion. Ces mesures
sont en annexe de notre mémoire.
Je tiens aussi à souligner que Gatineau,
contrairement à d'autres villes, a été épargnée par le phénomène de la corruption elle-même. À ce jour, aucun de nos
fonctionnaires n'a été associé à de la malversation comme on l'a parfois
vu ailleurs. On reste vigilants, évidemment,
mais on est fiers de cet état de fait, d'autant plus que notre fonction
publique a souvent été instigatrice de mesures éthiques novatrices.
Par ailleurs, le 3 septembre 2013, à la
commission Charbonneau, un témoignage révélait avec force détails l'existence d'une fraude à grande échelle à
Gatineau par des firmes de génie. Nous avons immédiatement mandaté nos services de procéder à une analyse des soumissions
reçues pour les services professionnels d'ingénierie de 2003 à 2009, c'est-à-dire au moment où le système dénoncé était
en place, et on a comparé les mêmes données dans ce même domaine pour la période 2010‑2013, période que nous
croyons exempte de collusion dans ce domaine-là. Le but de l'exercice était de
déterminer l'impact de la fin du système de la collusion.
Le rapport a
été déposé devant le conseil municipal le 30 septembre 2013. J'en ai une
copie ici que je peux laisser à la
commission, mais, pour les personnes qui voudraient le consulter, le rapport
est sur le site de la ville de Gatineau. Dans cette analyse, vous trouverez une description détaillée du cadre de
gestion de nos appels d'offres, une description du stratagème utilisé à Gatineau par les collusionnaires, les impacts
chiffrés de la fin de la bulle collusionnaire ainsi que l'ensemble des mesures adoptées par Gatineau pour
améliorer ces processus. On croit que les résultats de ces analyses sont d'un grand intérêt pour la commission, et ils
expliquent en partie notre présence ici. Je vous les présente brièvement.
Entre 2003 et 2009, il y a 131 contrats qui
ont été octroyés à l'une ou l'autre des quatre firmes qui ont fait partie du système de collusion. Ici, je dis «qui
ont fait partie», c'est des déclarations à la commission Charbonneau, ce
n'est pas jugé, donc il faut
prendre toutes les... avoir toutes les réserves possibles, mais il reste que
c'est un témoignage qui était très clair.
Pour les
contrats de 25 000 $ à
500 000 $ où la collusion était révélée, c'est un ensemble de
17,7 millions de dollars, la
valeur de l'ensemble des contrats. On s'est donné un indicateur dans le temps
avec les barèmes de l'AICQ, là, de l'agence des ingénieurs-conseils du Québec, sur les prix qui... C'est un barème
qui est utilisé pour évaluer ce qu'on devrait payer. Il y a un écart de
22,5 % entre ce qu'on a payé... entre le plus bas soumissionnaire conforme
et le barème, entre les deux périodes.
L'écart entre la moyenne des soumissions conformes et le barème entre les deux
périodes, lui, a varié de 13 %. La part de marché des entreprises
concernées a varié de 16 % entre les deux périodes. Et un détail qui n'est
pas négligeable : le nombre de fournisseurs est passé de sept à 11 entre
les deux périodes, donc le marché s'est ouvert de façon considérable.
Pour les
contrats de plus de 500 000 $, qui représentent 4 millions qui
ont été octroyés par Gatineau à ce moment-là, la réduction entre le plus bas soumissionnaire conforme et le barème de
l'AICQ, c'est 33,4 %, donc c'est une variation importante. L'écart entre la moyenne des
soumissions conformes et le barème, lui, a varié, encore une fois, pour les
contrats de plus de 500 000 $, de 20,1 %.
Pour nous, le
constat principal de ça, c'est que la collusion a eu un coût pour Gatineau.
Dans le rapport qu'on vous dépose, tous les détails sont là, les noms,
les prix, tout est très documenté.
Une autre conclusion, c'est que la clause de
présomption de dommage est nécessaire mais trop basse, selon nous. La clause est nécessaire pour inciter tous
les acteurs à une résolution rapide des recours qui vont être institués par
les organismes publics, ça va nous permettre
d'éviter des débats considérables avec les entreprises délinquantes à la fois
sur l'existence et sur les montants des
dommages. Sans cette clause, on est convaincus qu'on pourrait faire la preuve
de la collusion, on pourrait faire la
preuve des dommages mais en retirer moins pour les contribuables parce que dans
le processus on va investir une partie des sommes qui pourrait être
importante pour faire les démonstrations nécessaires.
On croit
toutefois que le montant des dommages accordé devrait être relevé à 20 %.
On l'a vu dans le cas de la collusion
des firmes de génie chez nous, il est tout à fait possible de penser que le
dommage dépasse les 20 %. On a eu malheureusement
un autre cas à Gatineau en 2003 où on a fait une autre analyse, la ville de
Gatineau, dans le dossier de l'asphalte,
où on s'est aperçus qu'on payait entre 20 % et 75 % plus cher pour
l'asphalte que les villes d'Ottawa, Montréal, Québec et Laval. À ce moment-là, il y a eu une demande d'enquête au
Bureau de la concurrence, demande qui n'a pas eu de suite, mais le dossier a fait parler de lui, on a procédé à un nouvel
appel d'offres, et immédiatement après l'incident du Bureau de la concurrence les prix ont chuté de
30 %. Ce projet de loi là va nous permettre de refouiller ce dossier-là et
d'aller au bout de l'affaire, mais il confirme
selon nous aussi que le 15 % est trop bas. Vous le savez, lors de la
commission Charbonneau plusieurs personnes ont parlé de majoration de
prix de 20 % à 30 %.
Et finalement
on croit qu'à cette majoration il est probable que la collusion ait causé...
qu'on doive ajouter des dommages
supplémentaires. Par exemple, notre analyse nous indique que le nombre de
soumissionnaires était moins élevé durant la bulle collusionnaire
qu'après celle-ci. Il faut se demander s'il y a des fournisseurs qui, sentant l'absence
d'ouverture du marché, s'abstenaient de participer aux appels d'offres. Cette
réalité aurait pu causer, selon nous, des dommages qui s'ajouteraient ainsi à
la majoration de 20 % ou 30 % des contrats par les firmes
malhonnêtes.
• (10 h 10) •
La période de
prescription prolongée, pour nous, est une bonne chose, qu'elle soit prolongée
à 20 ans pour les cas admissibles. Chez nous, on sait qu'on a un cas avéré
entre 2003 et 2009, on a une piste sérieuse dans le domaine de l'asphalte
en 2003 aussi. On est aussi en train de faire une analyse pour le projet
Rapibus, dont la construction s'est échelonnée
plus récemment, entre 2011 et 2013, mais c'était un projet de
255 millions, à l'époque c'était le plus gros projet de transport en commun au Québec, et c'est un
projet pour lequel on a aussi demandé à l'UPAC de faire des vérifications.
Alors, il est donc, selon nous, nécessaire
de nous permettre de retourner au strict minimum 10 ans, même c'est
11 ans quand on va à 2003, mais
on pense que 20 ans est une période tout à fait raisonnable. On comprend
que c'est une mesure exceptionnelle
mais qui répond à une situation exceptionnelle. Pour nous, le simple passage du
temps ne doit pas permettre aux voleurs d'avoir les moyens de s'en
sortir.
Le caractère
public des ententes de recouvrement, pour nous, est essentiel. La transparence
s'impose. Les actes collusionnaires ont été des actes occultes, et c'est
par la transparence qu'on doit leur répondre. Les contribuables ont été attaqués par les firmes dans le sens qu'on
leur a volé ce qui leur appartenait, on doit corriger ça, mais les citoyens ont
aussi vu ces mêmes firmes attaquer
l'intégrité des institutions publiques, et on doit réparer ça aussi. Donc, les
citoyens doivent être mis au courant des conséquences qui ont eu lieu
des actes des firmes délinquantes.
On souhaite
que la ministre maintienne les principes du projet de loi et les principaux
mécanismes qui s'y retrouvent mais
qu'elle hausse à 20 % les présomptions de dommage. On croit également
qu'il est nécessaire, en fait incontournable de prévoir explicitement au projet de loi l'obligation pour le
gouvernement de consulter et d'impliquer les municipalités dans les contrats visés qui les touchent
directement tout au long du processus. On a une expertise à partager, on a subi
des dommages importants et surtout on doit à
nos contribuables et à nos citoyens de jouer notre rôle dans la défense de
notre ville. Finalement, il nous apparaît
important que les municipalités aient la possibilité d'exercer un recours judiciaire
si elles le jugent approprié.
En
conclusion, le projet de loi n° 26 déposé par le gouvernement envoie
un message fort : La société rejette la fraude et le vol érigés en système. Les mesures proposées sont
exceptionnelles mais sont nécessaires pour répondre à une situation
exceptionnelle. L'immense majorité des entreprises sont honnêtes; c'est
également pour les protéger qu'on doit être
intraitables avec celles qui ne le sont pas. Ce projet de loi va nous aider à
protéger les institutions publiques, à redonner
aux citoyens confiance dans les mécanismes en place pour s'assurer que chaque
dollar perçu en taxes et impôts soit
dépensé avec rigueur. Nous offrons donc au gouvernement notre entière
collaboration dans tout le processus qui suit d'élaboration du projet de
loi. Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Je vous remercie, M. le maire, pour vos représentations. Je cède immédiatement
la parole à la ministre de la Justice.
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, M. le maire, Me Alain, M. Meunier,
merci de votre participation aux
travaux de la commission. Très heureuse de pouvoir compter sur vos observations
parce que je sais que vous avez depuis
déjà quelques mois, même quelques années, toujours été très à l'avant-plan
lorsqu'il est question de transparence et je sais que c'est un enjeu qui
vous préoccupe grandement.
J'aimerais
tout de suite aborder la question de la présomption de dommage. Vous luttez,
tout comme votre collègue de la ville
de Montréal, pour une hausse de la présomption de dommage jusqu'à concurrence
de 20 %. Il faut expliquer peut-être, pour les gens qui nous écoutent,
qu'il n'est pas impossible de demander des dommages au-delà du 15 %, il ne
serait pas impossible... une municipalité,
un organisme public aurait la possibilité, tout en en faisant la démonstration,
d'aller chercher des dommages au-delà du 15 % s'il s'avérait que dans un
dossier, effectivement, les dommages sont supérieurs.
J'aimerais
que vous nous indiquiez ce que ça peut représenter pour vous, de devoir... la
différence, la présomption de
dommage, entre le 15 % et le 20 %. Qu'est-ce que ça peut représenter
pour la ville de Gatineau dans un contexte où vous nous indiquez que, dans certains dossiers, on parle de 30 % de
chute de prix et même, dans un autre dossier, on parle de jusqu'à 75 %? Alors, qu'est-ce que cette
bonification de 5 % là à la présomption de dommage pourrait apporter de
plus à la ville de Gatineau dans le cadre de l'adoption éventuelle de ce
projet de loi là?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, pour nous, c'est que ça va être plus
près du dommage réel, d'abord. On se comprend
tous que, dans ce dossier-là, c'est difficile d'être extrêmement précis, là, ça
prend des analyses. On en a fait un bout,
on en est fiers, mais il va falloir aller plus loin dans le cadre d'un cadre
judiciaire. Mais on est convaincus que le dommage dépasse largement,
dans certains cas, le 15 %, c'est un plancher. Ça fait que d'abord le
dommage réel.
De l'autre côté, le message politique, moi, je
pense que les citoyens sont choqués, nous, on est choqués, nos fonctionnaires sont choqués de ce qui s'est passé,
et on doit sentir que l'amende ou en tout cas que la conséquence, elle a
du sens et elle fait mal. Et, pour nous,
15 %, on pourrait dire que c'est un strict minimum, mais, pour moi, le
minimum, ce
serait 20 %. Et on peut poursuivre pour en avoir plus, on peut poursuivre
la démarche, mais les entreprises aussi, dans le projet de loi, corrigez-moi si je me trompe, mais peuvent aussi
essayer de démontrer que c'est moins. Pour moi, le 20%, il y a un
équilibre là.
Mme Vallée :
Bien, en fait, le projet de loi propose deux choses distinctes.
La
présomption de dommage, donc, ça, c'est pour récupérer ce qu'on n'aurait pas dû
payer. En fait, là, ce n'est pas une punition, c'est tout simplement
récupérer ce que les contribuables ont payé en trop.
Il
y a dans le projet de loi un montant de 20 % qui est prévu, 20 % du
montant global qui est prévu et qui serait imposé à l'entreprise une fois les procédures terminées, dans le cadre
d'un processus judiciaire, on s'entend, là. Qu'est-ce que vous pensez de ce 20 % là? Parce qu'hier
on a entendu, évidemment, des groupes qui nous disaient : Bien là, c'est
15 %, et on a le 20 %, et
on a les intérêts, puis c'est épouvantable, c'est beaucoup. On s'entend, c'est
15 % de présomption de faute...
de dommages sur l'ensemble de la valeur du contrat. C'est 20 % du
15 % ou du montant, là, ce n'est pas 15 % plus 20 %. Mais qu'est-ce que vous pensez de
cet ajout-là qui est quand même exceptionnel, on fait exception aux règles
de droit commun en ajoutant ce 20 % à
ce que devront rembourser les entreprises qui se sont livrées à de la fraude ou
à des manoeuvres dolosives?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, pour nous, c'est un des incitatifs
originaux qu'on trouve intéressant pour justement s'assurer qu'on fasse...
qu'on ait des règlements hors cours. Nous, on est inquiets par la complexité de
ces dossiers-là. Il y a des choses qu'on est
convaincus d'être capables de démontrer, mais, un incitatif comme ça, c'est
plus facile pour celui qui a posé le geste de l'avouer puis de venir
l'expliquer que, la victime, d'essayer de comprendre comment ça s'est produit. Puis d'ailleurs, dans notre rapport, c'est
assez original, les stratagèmes qui étaient en place à Gatineau. Donc, ce 20 % là qui s'ajoute, pour
nous, c'est un message, là, c'est : Venez nous voir, on va régler hors
cour, sinon ça va vous coûter encore plus cher. Pour moi, c'est
intéressant comme outil, de notre point de vue.
Mme
Vallée : Juste à tire informatif, comment ça a coûté à la ville
de Gatineau de produire un rapport? Parce que c'est quand même... vous avez fait un travail fastidieux où vous
êtes remontés dans le temps. Ça a représenté quel montant? Puis vous
vous y êtes pris comment pour, justement, élaborer, mettre en place ce
rapport-là?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : J'aurais malheureusement dû me préparer pour
répondre à cette question-là, mais on
l'a fait à l'interne, ce n'est pas comme si on avait... Donc, il y a eu
beaucoup de temps consacré à ça et, je dirais, des fonctionnaires, des
élus. On a eu des présentations publiques, il y a eu quelques discussions, des
débats. C'est un domaine complexe. Oui, ça a coûté cher. Je dirais que ça s'est
établi sur un an, à peu près. Donc, il y a du temps.
Quand
vous parliez précédemment du cinq ans, là, on n'en a pas parlé dans notre
mémoire, mais cinq ans, c'est assez
court, parce que ça, c'est un dossier. La ville de Gatineau, c'est une grande ville, mais
il reste que c'est un petit service qui travaille là-dessus, là. Ils travaillent sur ce dossier-là pendant un
certain nombre de mois, ils vont travailler sur un autre pendant un
certain nombre de mois, puis pendant ce temps-là ils doivent gérer la ville.
Donc, il y a des coûts, il y a du
temps de fonctionnaires, mais malheureusement... à moins que Me Alain soit capable de m'aider, mais je ne
pense pas qu'on pourrait vous donner un chiffre fiable, là. Mais ça...
Mme Vallée : Je ne voulais pas vous poser une colle, là. En
fait, dans le fond, je voulais avoir une idée puisque, lorsqu'on parle du 20 %, lorsqu'on parle de
la présomption de dommage, c'est un peu l'objectif, c'est de venir compenser
pour les coûts que les contribuables ont à
assumer pour apporter un dossier devant les tribunaux, parce que, pour mener
à bien un dossier contre les entreprises qui
se sont livrées à ce type de manoeuvre là, ça ne se fait pas gratuitement. Non
seulement il y a les frais d'avocat, mais il
y a également tous les coûts de la préparation du dossier — qui se font pour un objectif qui est tout à fait noble, mais ce n'est pas à coût nul.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Tout à fait. Je vais demander à nos services d'essayer de l'estimer, parce qu'en
plus, dans le cas de Gatineau, c'est relativement facile parce qu'on a une date
de début, une date de fin, quatre noms d'entreprise,
un stratagème très clair, ça fait que, pour nous, on savait où aller chercher,
mais il y a des villes qui vont savoir qu'il
y a un problème, savoir qu'il y a quelque chose qui ne sent pas bon, mais elles
ne sauront pas très précisément où poser des questions. Ça fait que
notre estimé pourrait vous être utile, là, on va s'assurer de le faire.
•
(10 h 20) •
M. Alain (Claude) : Et, si je peux me permettre, pour tenter de
répondre à votre question, Mme la ministre, ce n'est qu'une des analyses
qui sera nécessaire dans le cadre de
recours judiciaires. C'est une analyse factuelle de ce qui s'est passé, l'analyse des coûts, mais après ça il va
falloir faire des analyses de juricomptabilité, en plus des autres contrats et
des autres domaines. Donc, c'est une tâche qui est à la fois
un travail de moine puis une tâche titanesque de collecte de données, de centralisation des données, d'analyse des
données et aussi d'analyse des autres facteurs qui auraient pu influer sur les
prix. Donc, cette présomption est un
incitatif important, qui peut nécessairement aussi être renversée par les entreprises
qui auraient à faire une preuve contraire.
Mme
Vallée : On étend,
dans le projet de loi, l'effet de la loi non seulement
au domaine de la construction, mais à l'ensemble des contrats publics. Est-ce qu'à la ville de Gatineau vous avez
peut-être eu vent ou savez déjà que cette étendue du projet de loi, cet
élargissement de la portée du projet de loi pourra être utile à la ville de
Gatineau?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Si je ne m'abuse, un dossier comme le
dossier du Rapibus, ça reste essentiellement
de la construction, ça fait que c'était peut-être couvert dans la première
version, là. Nous, du point de vue de l'intérêt du contribuable, on trouve ça
très intéressant de l'élargir, mais, dans les cas qu'on a, que nous avons, là,
je crois que c'est à peu près strictement le domaine de la construction.
Mais là
peut-être que ma définition du domaine n'est pas la bonne, mais nous, on a
asphalte, on a génie-conseil où, là,
on a des raisons de faire des analyses, et il y a l'ensemble du dossier
Rapibus, qui est un dossier de transport en commun assez complexe, qui
touche beaucoup de domaines, où, là, les analyses vont être en profondeur.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...reste
cinq minutes à ce bloc d'échange.
Mme Vallée :
Pour ce qui est de la clause crépusculaire, c'est-à-dire la durée de vie du
projet de loi qui est de cinq ans, vous avez abordé la question, mais vous
l'avez effleurée. Le Vérificateur général, tout à l'heure, semblait être
plus ouvert à une portée de 10 ans. On
a entendu des groupes qui nous disaient : Vous venez modifier le droit
commun, on ne devrait pas modifier le droit commun. J'aimerais vous
entendre davantage sur la durée du projet de cinq ans.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Pour
nous, ça nous apparaît court parce qu'on a des ressources limitées à... Évidemment, on s'y est investis puis on va
continuer de le faire, mais il reste que le temps, ça va vite. Pendant qu'on
fait ça, il faut qu'on continue de
gérer la ville, c'est souvent les mêmes équipes. Donc, pour nous, cinq ans...
Disons qu'en écoutant le Vérificateur
général je trouvais que ce qu'il disait avait bien du bon sens, parce que, pour
nous, cinq ans, on est dans le
minimum à cause des ressources qu'on doit consacrer à ça. Puis là on a des pistes
d'action. Si en cours d'enquête, disons,
on s'aperçoit qu'il y a d'autres domaines, on reçoit des appels, cinq ans, ça
pourrait être serré, là. Mais je ne peux pas m'avancer plus parce que... avec ce qu'on a, là, on sait qu'on a pas
mal de travail, mais je me fierais au Vérificateur général.
Mme Vallée : Hier, la ville
de Montréal soulignait son intérêt à s'investir notamment dans le programme de remboursement volontaire, d'avoir un mot à dire
sur les règlements qui pourraient intervenir, l'UMQ viendra un petit peu
plus tard et a une vision similaire. Il
était question, lors de la présentation de la ville de Montréal, de peut-être
s'inspirer du seuil de matérialité qui a été mis en place à l'AMF pour
déterminer... pour obtenir l'adhésion et le son de cloche, finalement, d'une municipalité. Le seuil de
matérialité de la ville de Montréal avait été établi à 100 000 $.
Pour les autres municipalités, il s'agit d'un pourcentage.
J'aimerais
vous entendre sur cet aspect-là de la participation notamment de la ville de
Gatineau ou des municipalités dans le processus du programme de
remboursement volontaire.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Nous,
on est tout à fait mal à l'aise avec un seuil. Le monde municipal est complexe, l'UMQ va élaborer là-dessus. Il y a des
grandes villes, il y a des petites villes, il y a des très petites villes. Il y
a une question de principe à ce que la ville puisse donner son accord.
Pour nous, la
piste à explorer est moins la piste du seuil qu'une piste de comment on fait
pour que les villes puissent s'exprimer
mais sans que vous, vous soyez devant 75 partenaires différents qui
disent, tu sais... Il y a des mécanismes qui existent dans le cas d'un recours collectif. Est-ce qu'on peut
s'inspirer de ça? Est-ce qu'on peut remettre une certaine responsabilité dans les mains des villes pour
dire : Bien, parlez-vous, mais nous, on a besoin d'un nombre
d'interlocuteurs limité? Nous, c'est plus cette avenue-là qui nous
intéresserait à cause du principe.
D'abord, pour
une ville, un petit contrat, qu'est-ce que ça veut dire, un petit contrat, pour
Gatineau, pour Chelsea, pour
Notre-Dame-de-la-Paix, là, ça varie beaucoup, et le maire et les élus doivent
se rapporter à leurs citoyens en disant : Bien, on a défendu les intérêts de notre ville dans ce contrat-là, même
s'il était très petit. C'est dans ce sens-là où moi, je pense qu'on devrait donner une responsabilité aux
villes de vous faciliter la vie, mais que ce soient les villes qui décident
de leur implication, là, entre elles. Moi,
je suis prêt à ce qu'on se donne nous-mêmes du trouble pour vous en éviter,
mais j'ai beaucoup de difficultés à accepter qu'on ne soit pas à la
table du tout, qu'on n'ait pas un accès direct.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Une minute, Mme la ministre.
Mme Vallée : Pour le
programme de remboursement volontaire, est-ce que vous avez d'autres
observations?
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Outre
ce qu'on a dit, je ne crois pas, non.
Mme Vallée :
Au niveau de la... Bon, je comprends que, pour vous, il est important d'avoir
voix au chapitre, de pouvoir donner
votre appréciation d'un potentiel règlement. Je comprends puis je suis très
consciente qu'un petit contrat pour Montréal n'est peut-être pas petit pour
Egan-Sud ou pour Montcerf, on s'entend, là, et il faut aussi regarder
l'impact que ça peut avoir pour une petite municipalité de recouvrer ne
serait-ce que 20 000 $. Ça, j'en suis consciente.
Est-ce que l'UMQ pourrait désigner des
représentants pour... dans le cadre de ces négociations-là?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je
vous dirais que c'est le genre d'avenue qui, pour nous, est plus intéressante parce que, là, à ce
moment-là, moi, je peux parler à mon union puis dire : Écoutez, dans cette
affaire-là, là, il y a une question de
principe, il s'est passé telle chose, on a une expertise particulière, on est
capables de vous en parler pendant des heures; ce n'est pas vrai qu'on ne sera pas à la table. C'est plus cette
piste-là qui, pour moi, est intéressante qu'un seuil où, là, on sort du... La bonne foi
se présume, puis je sais que le gouvernement travaille bien, mais, si on n'est
pas là du tout ou bien si vous ne nous appelez pas, dans certains cas, il y a
peut-être quelque chose qui aurait dû être fait qui ne sera pas fait,
alors que, si on est là, bien on aura la responsabilité de lever le doigt, là.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je
vous remercie, ça complète ce premier bloc d'échange. Je me tourne maintenant
vers l'opposition officielle pour votre bloc. M. le député de Lac-Saint-Jean, à
vous la parole.
M.
Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous. Je
souhaite reprendre, là, votre quatrième recommandation en ce qui a trait à la capacité d'agir, là, pour
les municipalités, j'essaie de voir comment vous, vous voyez l'application
de la loi. Est-ce que, dans votre esprit,
c'est davantage la municipalité qui va intenter des poursuites contre les
entreprises ou c'est davantage la ministre de la Justice?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est difficile de répondre parce que chacun
des cas peut être assez complexe, là. Il y a des firmes qui sont très
grandes qui ont été actives sur tout le territoire du Québec, donc il y a des
fois où ce ne serait même pas dans notre
intérêt de dire : On va poursuivre nous-mêmes. On serait prêts à
travailler avec le gouvernement pour
que le gouvernement ou en tout cas qu'une autre instance le fasse, en mettant
en commun... Il y a d'autres cas où moi,
je n'aimerais pas une situation où le gouvernement décide de ne pas y aller et
que nous, on n'ait pas le droit d'y aller. Nous, on est déterminés à aller au fond des choses dans un certain
nombre de dossiers. Que cette possibilité ne soit pas là, moi, me
heurte.
M.
Cloutier : Bien, moi, je comprends de l'article 12 que la
possibilité, elle est là, c'est-à-dire qu'avant d'intenter une action le gouvernement doit informer la
municipalité pour qu'elle puisse agir, elle ait le délai suffisant pour pouvoir
intenter une action. Mais ça, vous trouvez que ce n'est pas suffisamment clair,
c'est ça?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui. Il y a deux articles dans le projet de
loi qui parlent de la possibilité, pour une municipalité, d'intenter un recours. Il y a l'article 34 qui
essentiellement dit que, si une municipalité veut intenter un recours durant la période du programme de
remboursement volontaire, elle doit demander la permission au ministre. L'autre
article, c'est l'article 12, qui dit que le ministre peut intenter le
recours mais après avoir informé l'organisme de son intention et lui
avoir accordé un délai raisonnable pour qu'il intente lui-même une action.
À notre avis,
il y a une confusion ici, à savoir, bon : Est-ce que, dans le cas de
l'article 12, le gouvernement doit autoriser l'organisme public à prendre le recours ou pas? Et
l'article 12 ne parle pas du programme de remboursement. Donc, la question
qui se pose, c'est : Est-ce que la permission du ministre est nécessaire
après la fin du programme de remboursement volontaire? On pense que non,
mais ça mériterait une précision.
• (10 h 30) •
M.
Cloutier : Bien, je vous avoue que, moi, ce que je comprends,
c'est que non, parce que l'article 34 le rend conditionnel à l'autorisation de la ministre pour
ne pas nuire aux négociations dans la première année, ce qui m'apparaît
logique, honnêtement.
M. Alain (Claude) : C'est tout à
fait logique, on est d'accord avec ça.
M.
Cloutier : O.K. Je fais la même interprétation. Il y a une
période de grâce où on donne la chance au coureur, hein, c'est un peu
ça.
M. Alain
(Claude) : C'est souhaitable, pour le gouvernement et les organismes
publics, qu'il y ait une centralisation et une compréhension globale des processus qui pourraient avoir lieu
avec l'ensemble des organismes puis des entreprises. Mais, après ce programme de remboursement, est-ce
qu'un organisme public doit demander l'autorisation? La question se pose.
M. Cloutier : Et,
honnêtement, moi, je suis assez de votre avis. Ce serait plus simple d'en faire
un nouvel article qui justement donne ce pouvoir-là aux municipalités plutôt
qu'une lecture a contrario de l'article 34 puis de l'article 12 pour finalement comprendre qu'effectivement on peut le
faire, d'autant plus que ça amène le genre de discussion que nous avons.
Alors, de toute évidence, ça m'apparaît nécessaire.
Alors, ce n'est pas la première fois qu'on la
voit, cette proposition-là. Je crois que nous l'avons eue d'autres
municipalités, là, il faudrait revoir. Mais de toute évidence il y a lieu de
préciser.
Est-ce que le
seuil de 20 % est, selon vous, le seuil le plus juste dans les
circonstances? Parce que ce que d'autres groupes nous ont dit, c'est que peut-être que c'est un peu différent
pour les municipalités eu égard aux types de contrat qu'elles contractent, mais dans une perspective
plus large, plus générale, les montants en cause pouvaient être inférieurs.
Alors, je ne sais pas si c'est un argument qui est valable, honnêtement,
ça fait partie de nos réflexions, mais, pour la municipalité de Gatineau, ça
vous apparaît évident que, pour vous, 15 %, c'est inférieur au coût réel?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est inférieur aux dommages réels. Pour
nous, tout ce qu'on a, là, nous indique que c'est inférieur aux dommages réels. Encore une fois, c'est
difficile, là, on n'est pas dans de la science exacte, là, mais on a assez d'indices dans notre analyse sur le
génie-conseil et dans notre analyse sur l'asphalte que 15 %, c'est trop
bas, là.
Un plancher à
20 %, pour moi, est intéressant. Puis, encore une fois, le projet de loi permet
de contester vers le haut ou vers le bas, mais 20 % est plus
intéressant pour nous et plus près de la réalité, selon nous.
M. Cloutier : Puis
est-ce qu'avant d'avoir un accord avec une entreprise qui serait négocié par le
ministère de la Justice... Est-ce que
vous êtes d'avis que la municipalité de Gatineau devrait pouvoir donner son
aval avant l'accord final?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Tout à fait, tout à fait. Moi, je pense
qu'il y a un historique, il y a... On a travaillé avec ces gens-là, on a un avis qui, pour moi, est
important à donner. Pour moi, il y a des cas où on voudrait peut-être aller
plus loin, on voudrait être plus sévères,
pour toutes sortes de raisons que le gouvernement ne connaît pas nécessairement
en lisant le dossier, là. Donc, de consulter la ville, à ce moment-là, ce
serait, pour moi, incontournable.
M.
Cloutier : Mais est-ce qu'on ne devrait pas ajouter un article
dans lequel on explique qu'il y aura nécessairement une collaboration avec ceux et celles qui ont été
directement impliqués au dossier si le ministère de la Justice prend en charge la responsabilité des poursuites? Est-ce
que ça, ça apparaît dans le projet de loi suffisamment clairement, à votre
point de vue?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Le mémoire de l'UMQ porte beaucoup sur cette
question-là, vous allez leur parler
aujourd'hui, mais, pour moi, c'est clair que ce n'est pas suffisant, ça
apparaît mais pas suffisamment, là. Pour nous, bien, comme Montréal l'a dit assez clairement aussi, là, il ne devrait
pas y avoir de décision qui se prenne dans des enjeux où Gatineau a été
impliquée de façon importante sans que Gatineau en fasse partie.
M.
Cloutier : Puis je dirais même dans la préparation aussi des
dossiers, dans l'approfondissement de la cause.
M. Pedneaud-Jobin
(Maxime) : Oui.
M.
Cloutier : Des intervenants qui peut-être sont encore à la
municipalité... d'autres auront sans doute quitté, mais il arrivera des
moments où de toute évidence l'expertise sera davantage soit au sein des
municipalités ou des organismes publics. Il faudra que la coordination, la
collaboration, elles soient là.
Maintenant, est-ce
que le projet de loi pourrait être davantage... pourrait être plus clair pour
assurer la bonne collaboration, pour ne pas
que, dans le fond, on reparte à zéro puis qu'on dérape ou on essaie de
comprendre un dossier que, si en bout de course on avait la bonne
personne assise autour de la table, ça irait nettement...
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Exactement. Puis j'ajouterais un élément
peut-être moins solide, mais, dans un cas de programme de remboursement
volontaire, là, il y a un élément de communication là-dedans, là. Nous, on est préoccupés par ça, en disant : On envoie le
message, là, que, la ville de Gatineau, il y a des choses qu'on ne tolérera pas
et qu'on va prendre acte, on va poser des
gestes, on va s'assurer d'essayer de tout faire pour retrouver l'argent qui a
été volé aux contribuables. Mais
envoyer ce message-là puis... ça fait qu'il y en a peut-être qui vont
dire : Bien, étant donné qu'ils
sont sérieux, on devrait peut-être en profiter, de ce programme-là, parce qu'on
va les avoir dans les pattes de toute façon.
Donc, si le gouvernement fait des gestes ou se prépare à en faire, si nous, dès
le départ, on est là, il y a aussi cet aspect-là
qu'on peut gérer ensemble qui, pour moi, ne me semble pas négligeable dans un
contexte où il y a une partie de ça
qui est volontaire. Bien, pour que ce soit volontaire, il faut qu'on se sente
interpellé, puis nous, on est bien placés pour interpeller, là, on est
près de la réalité, là, qui a été vécue par les gens.
M.
Cloutier : Vous avez fait référence tout à l'heure aux
ressources qui sont nécessaires, pour la ville de Gatineau, pour approfondir, documenter, puis que vous avez
fait ça à l'interne, tout à l'heure. Mais est-ce que... Eu égard à la charge
de travail et à l'ampleur des dossiers,
avez-vous l'impression que vous avez les ressources nécessaires pour mener de
front, éventuellement, les
poursuites, vous allez être contents d'avoir l'appui du gouvernement? Puis,
inversement, est-ce que le gouvernement, lui, aura les ressources
nécessaires pour venir compenser la prise en charge de ces dossiers-là, qui
normalement ne serait pas de sa responsabilité?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Encore une fois, je pense qu'il faut
accorder les ressources nécessaires à ça. Le traumatisme qui a été vécu par les citoyens, par la collectivité,
dans le cas de Charbonneau, pour moi, ça en vaut la chandelle, là, il
faut qu'on se donne les outils.
On
n'est pas mal à l'aise à mettre des choses en commun avec le gouvernement, à
partager de l'expertise, parce que
c'est complexe, c'est lourd, puis on ne veut pas que le contribuable, au bout
du compte, n'ait rien gagné, là, ça fait que c'est dans notre intérêt de
travailler ensemble. Mais, pour moi, il faut qu'on se les donne, les
ressources. Nous, on le sait déjà, en fait,
M. Alain est préoccupé par ça parce qu'il a déjà une grande charge de travail,
mais le mandat qu'on leur donne, nous, à nos services, c'est de
dire : Il faut faire ça, c'est une priorité, là. Il faut que les citoyens
sentent qu'on défend les institutions
publiques, puis qu'il y a des affaires qu'on ne tolérera pas, puis qu'il doit y
avoir des conséquences aux actes
illégaux. Pour moi, c'est important d'envoyer ce message-là du point de vue du
respect de la chose publique, là. L'État
est attaqué de toutes parts, de toute façon. Dans un dossier comme celui-là, il
faut qu'on démontre que l'État se défend puis qu'il y a des choses qu'on
n'accepte pas, ça fait que ça vaut la peine d'investir les ressources.
Évidemment,
on est prêts à travailler intelligemment avec le gouvernement pour voir, il y a
peut-être des cas où le gouvernement
devrait porter le dossier, mais il ne faut pas laisser passer ces choses-là au nom
du coût, là, de la démarche, là.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Je vous souligne qu'il nous reste cinq minutes à ce
bloc d'échange.
M. Cloutier :
Je vous remercie, M. le Président. Peut-être pour être encore plus précis, ça
ressemble à quoi, l'ampleur de la tâche?
Mettons que la ville de Gatineau dirait au gouvernement : Inquiétez-vous
pas, nous, on va prendre en charge
l'ensemble des dossiers, ça peut être quoi, une dizaine de poursuites? Il y a
trois dossiers qui sont pendants? Est-ce que vous pouvez nous donner une
idée de l'ampleur de la tâche ou de poursuites qu'il pourrait y avoir?
M. Pedneaud-Jobin
(Maxime) : C'est... Je vais...
M. Cloutier : C'est difficile
à ce stade-ci?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Il y a celui-là qui... où c'est un dossier
assez clair. Je ne dirai pas facile, mais le cadre est très précis. Le
dossier de l'asphalte dont je vous parlais, encore une fois c'est assez précis.
Donc, c'est deux démarches qui, pour moi, on est capables de gérer ça à
Gatineau.
Là où il y a
un point d'interrogation, c'est un projet comme le projet Rapibus, qui est un
projet de transport en commun
important, 255 millions. Là, ce n'est qu'un grand point d'interrogation.
Il n'y a peut-être rien qui s'est passé de pas correct, mais, s'il y a quelque chose, c'est un projet d'une
ampleur très grande où, là, pour la ville, à un moment donné, il
pourrait y avoir un problème. Je ne sais pas si Me Alain veut rajouter un
élément.
M. Alain (Claude) : En fait, on en
est au début des analyses qui seront nécessaires pour mener à terme des recours
judiciaires, s'il y a lieu, et cette analyse a requis beaucoup de temps et
d'énergie en termes de ressources humaines
et ressources financières, les prochaines le seront tout aussi. Il va falloir
s'adjoindre des experts aussi à l'externe, des juricomptables entre autres. Et, à ce moment-ci, on a déjà des
pistes d'intervention où on veut aller enquêter, si vous me permettez
l'expression, mais on va peut-être en découvrir d'autres aussi.
Donc, le fait
que le gouvernement soit impliqué, c'est nécessaire, mais la tâche, pour
répondre spécifiquement à votre
question, elle est titanesque. Il va falloir obtenir l'information. Et, comme
vous le savez, les corps publics procèdent à la destruction de documents à partir, je crois, de sept ans, dans la
plupart des cas, alors le défi est également, pour les corps publics, de retrouver les informations
pertinentes, les témoignages qui vont nous permettre également de bâtir nos
dossiers. Donc, plus on recule en arrière, plus le défi est important, tout
comme, d'ailleurs, pour les entreprises.
• (10 h 40) •
M.
Cloutier : J'essaie
d'imaginer l'ampleur de la tâche que ça peut représenter. Ça doit être... Je
pense que le mot «titanesque» doit être le meilleur qualificatif qu'on
peut trouver.
Mais, moi, ce
qui m'inquiète, c'est : D'un point
de vue gouvernemental, est-ce qu'on va avoir le soutien et l'équipe de recherche, les experts nécessaires pour
s'assurer que la job va être faite? Puis combien de dossiers de front à travers
tout le Québec on va être capable de mener
en même temps? J'imagine que vous avez réfléchi à ça, mais, dans le contexte
budgétaire que nous connaissons, ça suscite
des questions qu'on aura la chance ultérieurement de discuter, nous. Mais
ce qu'il faut être certain, c'est que des
municipalités comme la municipalité de Gatineau, si vous décidez de mener de
front, par exemple, trois dossiers, mais qu'il en reste cinq pendants, bien,
que les cinq pendants qui sont transférés au gouvernement,
là... Après ça, comment on va hiérarchiser les dossiers? Quels vont être les
dossiers qui vont être prioritaires? À
qui on va transférer cette responsabilité-là? Puis est-ce que l'équipe qui va
être en place va avoir toute la structure? Je soulève des questions, mais votre témoignage ce matin m'amène à réaliser...
ou me fait réfléchir davantage sur la nécessité de s'assurer que les
ressources vont suivre, là.
M. Pedneaud-Jobin
(Maxime) : Tout à fait. Puis la question va se poser à moindre niveau
chez nous aussi, là, jusqu'à quel
point on s'investit, jusqu'où on va, combien de ressources on alloue à ça.
Nous, on augmente considérablement nos
programmes d'infrastructure, on investit beaucoup dans le rattrapage qu'on a à
faire, notre charge de travail augmente, ça a un impact sur nos services
juridiques. Donc, pour nous aussi, c'est une décision, mais, pour moi, il ne
faut pas que... on doit en tenir
compte, évidemment, parce qu'on gère les fonds publics, mais il ne faut pas que
le seul critère, ce soit le rapport coût-bénéfice, là, il y a une
question de justice là-dedans aussi.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
40 secondes, M. le député. Oh! Mme la députée de Joliette.
Mme
Hivon :
Oui. Alors, bonjour. Petite question rapide. Hier, évidemment, les gens qui
représentent l'industrie de la
construction, les ingénieurs, tout ça, chambres de commerce nous
disaient : Vous savez, toute la question, là, de la transparence, pour que les organisations, pour que
les compagnies viennent, il faut vraiment qu'il y ait un incitatif pour eux. Vous, vous semblez vraiment convaincus.
Évidemment, c'est une question d'équilibre avec les risques de poursuite,
de mettre assez de pression pour qu'ils
disent : J'y ai un avantage, mais comment vous sentez que ça va marcher,
cette loi-là? Vous semblez très
convaincus que ça va marcher. Pourquoi ils vont venir? Pourquoi vos entreprises
vont venir?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Rapidement.
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, entre autres parce qu'ils veulent
continuer à travailler, puis, s'ils ne font pas ça... Nous, là, on est
déterminés. Puis on sait qu'un enjeu de transparence, là, ça peut leur faire
peur un peu, mais il y a ce processus-là qui
les protège un peu, mais il y a un autre processus qui ne les protège pas du
tout, c'est le processus judiciaire,
puis nous, on va y aller. Donc, s'ils ont peur de la transparence de ce projet
de loi là, ils devraient aussi avoir peur
de la transparence d'un processus judiciaire un peu plus... moins encadré,
disons, pour les aider. C'est dans ce sens-là où, nous, l'obligation de transparence, ça ne nous
dérange pas du tout, parce que l'alternative, dans notre cas, c'est qu'on
s'en va en cour parce qu'on ne laissera pas
passer ça. Puis, en cour, bien ils se débrouilleront avec la transparence, la
totalité...
C'est pour ça
que, pour moi, l'incitatif est quand même important, du projet de loi. Dans le
cas du génie-conseil, c'est un certain
nombre fini d'entreprises, là, justement c'est un problème, une grande
concentration. Ces entreprises-là veulent tourner la page. Il me semble
que, dans le projet de loi, on a une occasion de le faire.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je
vous remercie. Je me tourne maintenant vers la deuxième opposition. Mme la
députée de Montarville, à vous la parole.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. M. le maire,
bonjour. Messieurs, bonjour. Merci pour votre mémoire.
Et je vais
poursuivre dans la même veine parce que, dans votre mémoire, vous nous dites
d'entrée de jeu : De 2003 à 2009,
la ville a octroyé 131 contrats à quatre firmes collusionnaires. Alors,
elles sont bien identifiées, on sait à qui on a affaire.
Vous nous
disiez précédemment dans une réponse qu'actuellement il n'y a pas de poursuite
en cour, mais on fait l'analyse des
dossiers. C'est ce que je comprends, il n'y a pas de poursuites qui ont été
intentées contre aucune de ces quatre firmes jusqu'à présent?
M. Alain (Claude) : Aucune poursuite
à ce jour.
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. On est en train de travailler sur
l'analyse des dossiers. Ces firmes-là, ils ne sont pas fous, ces dirigeants-là, ils savent que cette loi, elle avait
été annoncée, qu'elle s'en venait. Est-ce que vous avez des contacts avec elles? Est-ce qu'elles
manifestent l'intérêt de régler? À cet égard-là, est-ce qu'on sent une bonne
foi pour un règlement ou pas du tout, il n'y a pas eu de contact à cet
égard?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, Me Alain me corrigera si je me
trompe, mais, présentement, à cause de l'étude
du projet de loi, tout le monde est un peu en attente. Et nous, on pourrait
intenter des poursuites, on pourrait faire des choses, mais, si le projet de loi nous donne un cadre qui est
complètement nouveau, et les firmes et nous, en fait, on n'a pas intérêt à se parler tout de suite, là, on va
attendre de voir qu'est-ce qui est adopté en bout de ligne. Et, à ce moment-là,
j'imagine que leur attitude va être... qu'on va recevoir des appels.
Mme Roy
(Montarville) : Depuis les révélations qu'on a entendues à
la commission, depuis les changements de
pratique, est-ce qu'il est plus facile, du côté des appels d'offres, de faire
les appels d'offres? Y a-t-il de nouveaux joueurs? Quelle est la dynamique à
Gatineau au niveau, justement, des contrats qui sont octroyés par la ville?
Est-ce que ça a changé les joueurs et
est-ce que ça a modifié les prix, est-ce qu'on a senti une diminution des prix?
La ville de Montréal nous disait hier qu'on a senti des fluctuations. De
votre côté, ça ressemble à quoi depuis les dernières années?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est toujours un peu périlleux de dire ça,
là. Comme quelqu'un disait, il y a une question de perception. Nous, dans notre
attitude... dans notre analyse, c'est clair qu'il y a plus de joueurs entre...
puis on a pris deux périodes qui...
il y a plus de joueurs, et les prix sont plus bas. En tout cas, on a pris un
barème qu'on trouve intéressant parce
que c'est un barème qui est analysé chaque année. Ça fait qu'on regarde l'écart
avec ce barème-là, et c'est clair
qu'il y a eu une chute des prix, en fait une chute de l'écart avec le barème.
Et donc, pour nous, l'effet commission Charbonneau
est tout à fait réel, est tout à fait clair. Le fait qu'il y ait plus de
joueurs qui soumissionnent, c'est majeur, parce que ça fait un marché beaucoup plus sain. Donc, pour nous, il y a
une espèce d'effet secondaire important, positif de la commission Charbonneau
chez nous aussi.
Mme Roy
(Montarville) :
Un effet d'économie, donc, sur les coûts des contrats.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui.
Mme Roy
(Montarville) :
Vous l'évaluez à quel pourcentage?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je ne pourrais pas vous... C'est difficile
parce que, dans certains domaines, c'est le marché qui a évolué parce que, je ne sais pas, la matière première, le
prix a baissé, donc on ne peut pas faire de lien trop direct avec la collusion. Dans d'autres domaines,
il y a un nouveau joueur qui n'est pas nécessairement arrivé à cause de ces
événements-là.
Ça fait que c'est délicat de vous dire : On
a économisé tant. C'est pour ça que, notre analyse, on la trouve intéressante, parce que sur ces années-là on a des
chiffres précis. C'est 131 contrats, comme vous le disiez, c'est
17 millions. 17 millions,
ça nous donne le goût de faire des calculs, là. Si le projet de loi s'applique
puis on réussit à tout démontrer combien... c'est quoi, le gain pour la
ville, on peut arriver à des chiffres intéressants.
Mme Roy
(Montarville) : On parle de 131 contrats pour une
période de six ans. On sait que le projet de loi, s'il est adopté tel quel, pourrait permettre de
remonter 20 ans à l'arrière. Mon collègue de la première opposition nous
disait : C'est une tâche
colossale dans la mesure où c'est un contentieux, la ville a un contentieux...
Vous avez combien d'employés au contentieux? Combien d'avocats
travaillent avec vous?
M.
Alain (Claude) : Il y a quatre avocats dans la section civile et
quatre autres dans la section pénale.
Mme
Roy
(Montarville) : Et donc ça fait huit personnes au
total. Mais, si on exclut la section pénale et... Oui, c'est ça, juste
pour le civil, là.
M.
Alain (Claude) : Oui, mais, en
temps et lieu, il y aurait des discussions qu'on aurait également
avec d'autres organismes publics pour...
Et c'est une réflexion qui n'est pas encore faite mais qui devra être faite, à
savoir de quelle façon... Est-ce qu'il y a lieu d'avoir une représentation commune? Alors, ça, c'est une
réflexion qui n'est pas encore faite. Pour le moment, ce qui est important,
c'est de débuter et continuer les analyses que l'on fait à l'interne.
Mme
Roy
(Montarville) : Je vais vous amener sur le témoignage d'hier de vos collègues
le maire de Laval et les gens de Laval, le contentieux de Laval, qui
nous sont arrivés avec des propositions pour le moins intéressantes à l'égard de la transparence et aussi pour
rassurer la population, parce
que ce projet de loi n° 26 est naturellement dans la foulée de
toute cette corruption et collusion dont les citoyens ont été victimes.
J'aimerais savoir ce que vous pensez d'une
recommandation ou d'un ajout que suggère la ville de Laval, entre autres que
les sommes qui auraient été payées à
des élus ou des fonctionnaires collusionnaires fassent également partie
d'ententes de remboursement ou soient remboursées. On parle de primes de
départ, etc.
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Nous, c'est un aspect du projet de loi qu'on
n'a pas analysé... ou en fait on a écouté ce que d'autres en disaient, mais je
serais mal à l'aise de vous donner un avis formel de la ville parce qu'on n'a
pas fait cette réflexion-là, entre autres
parce que, je croise les doigts, en tout cas on espère que ça va continuer
comme ça puis on s'assure que ça
continue comme ça, mais on n'a pas eu de corruption avérée à Gatineau. Et,
quand je dis qu'on n'en a pas eu, on
a fait des démarches, on a été prudents, on a notre vérificateur général qui a
fait toutes sortes de choses, on a été diligents, mais on n'a pas de cas
devant nous, là.
Nous,
au contraire, je dirais que... Je parlais du cas de l'asphalte. C'est nos
fonctionnaires qui ont sonné la sonnette d'alarme en disant : Il y a quelque chose qui se passe dans le
marché, et c'est nous qui avons fait appel au Bureau de la concurrence.
Donc, l'équipe qui aurait pu être corrompue est l'équipe qui a mis de l'avant
le fait qu'il y avait des problèmes. Ça fait
que les indications, en fait, à Gatineau sont inverses, on a une fonction
publique qui est engagée et qui ne
laisse rien passer. Je ne peux pas prévoir l'avenir, là, mais c'est pour ça
qu'on ne s'est pas attaqués à cet aspect-là du projet de loi.
• (10 h 50) •
Mme
Roy
(Montarville) : ...vous n'en faites pas mention, mais je me demandais ce que vous pensiez de cette
idée-là, toujours dans l'optique du remboursement des sommes volées.
M.
Alain (Claude) : Bien, l'objectif
du projet de loi, c'est d'aller récupérer des sommes payées à la
suite... des sommes payées qui
n'auraient pas dû être payées. Alors, dans cet objectif, c'est tout à fait logique que d'étendre ça à des fonctionnaires et à des élus qui
auraient fait partie de ces stratagèmes-là.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vous remercie infiniment pour vos précisions. Merci.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour la deuxième opposition?
Je vous remercie. Je me tourne du côté du gouvernement. M.
le député de Vimont, à vous la parole.
M.
Rousselle : Merci. M. le maire, en passant, je vois que vous
prenez ça vraiment à coeur puis vous avez fait un bon travail.
Félicitations!
Je regarde, vous
savez que la loi n° 26 va plus loin que la précédente, la 61. Et vous
avez fait, justement, une recherche au
niveau des contrats, Rapibus, construction, asphaltage et tout, là. Vous, le
fait qu'on élargit, justement, à tous les
contrats publics, vous, sur votre côté, est-ce que vous avez fait une analyse
là-dessus? Est-ce que c'est bon pour vous? Est-ce que vous avez regardé
cet aspect-là?
M. Pedneaud-Jobin
(Maxime) : Non, sinon un élément de principe, c'est-à-dire, élargir,
moi, je ne vois pas beaucoup d'effets
négatifs, là. Si ça fait peur à des gens, tant mieux. Puis je vois des éléments
positifs parce qu'il y a des choses
qu'on va certainement découvrir dans ces processus-là. Donc, que ça soit plus
large, pour moi, il y a beaucoup de gains puis il n'y a pas tellement
d'inconvénients.
M. Rousselle :
Mais vous n'avez pas fait de recherche, vous n'avez pas regardé...
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Non, on n'a pas encore... On en avait
beaucoup sur nos épaules dans les cas qu'on connaissait, donc on n'est
pas allés... On n'est pas sortis de ce cadre-là, pas encore.
M.
Rousselle : Le maire de Montréal nous disait qu'ils se sont
rendu compte à partir de 2010 que les coûts avaient baissé vraiment. Vous, est-ce que c'est à cette
date-là que vous avez remarqué aussi? Est-ce que ça a eu le même impact
chez vous ou...
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est clair que les prix ont baissé, c'est
clair qu'il y a des domaines où les choses se sont améliorées. Puis ça, c'est au moment de Charbonneau entre
autres, là. C'est pour ça que, nous, il y avait certaines voix qui disaient : Bon, bien, il n'y en a
pas chez nous, mais les prix baissaient chez nous aussi, là, donc il y a
quelque chose qui se passait à l'ouest du Québec aussi.
Donc, on a
constaté ça. C'est pour ça que le projet de loi, pour moi, est intéressant.
Dans la mesure... À partir du moment où les prix ont baissé, il y a des
choses qu'on devrait regarder qu'on ne regardait pas avant, là.
M. Rousselle : ...à partir de
2010.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je
dirais peut-être même...
M. Rousselle : Avez-vous regardé
le temps? Parce qu'il y a l'UPAC aussi qui a sorti avant la commission
Charbonneau, vous savez.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je
dirais 2009, là, je dirais 2009.
M. Rousselle : 2009, oui?
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui.
M. Rousselle : O.K. Merci.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça
complète pour vous, M. le député de Vimont? Mme la ministre de la Justice.
Mme Vallée :
J'aimerais revenir... Dans le cadre du programme de remboursement volontaire,
tout à l'heure, on parlait de l'implication des municipalités qui
pourraient être intéressées ou interpellées par le fait qu'une entreprise
choisisse de se soumettre au programme de remboursement volontaire. Comment on
arrive à... Comment éviter, dans le cadre
d'un règlement... Parce que, vous savez, les entreprises nous ont dit haut et
fort que l'objectif de se prévaloir du programme de remboursement
volontaire, pour elles, c'était d'obtenir des quittances, la plupart, soit des
quittances totales. Donc, elles ne veulent pas
éventuellement être poursuivies après la période de suspension des procédures,
elles ne voudraient pas être
poursuivies par des tiers ou par des organismes publics, et donc elles vont
rechercher un programme global,
c'est-à-dire elles vont mettre cartes sur table. Évidemment, de notre côté, il
faudra aussi obtenir l'information de la part des différents organismes publics, de la part des municipalités,
mais, une fois qu'on aura déterminé un certain nombre de contrats, une période visée, un montant qui
apparaît raisonnable comme règlement complet, total, final, comment on pourrait empêcher qu'une municipalité fasse
obstacle? Parce que, si on implique tous les intervenants, peu importe
l'étendue ou la valeur du contrat...
Parce qu'on se disait tout à l'heure : Un petit contrat pour Montréal
n'est pas nécessairement un petit contrat en région, et ça, on le comprend.
Donc, peu importe la valeur matérielle du contrat, comment empêcher, à ce moment-là, si tout le monde a droit au
chapitre, qu'une municipalité, pour des raisons x ou y, s'objecte au règlement
et fasse échec à cette démarche-là?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Moi,
au risque... je ne sais pas si l'UMQ
va vouloir me contredire, mais, pour moi,
l'important, c'est qu'on soit à la table, c'est qu'on soit impliqués à tous les
moments. Est-ce que, dans certains cas, le gouvernement pourrait se
substituer? Étant donné la complexité de ce qu'on vit là, moi, je ne suis pas
sûr que je me chicanerais pour que systématiquement partout tout le temps on
soit là. À un moment donné, il y a peut-être des moments où le gouvernement va dire : Bon, bien on y va. Mais qu'on
ne soit jamais là, ça, c'est là où... ou qu'on ne soit pas là du tout... Mais vous avez raison, il y a
certainement des cas, là, où ça pourrait poser problème, mais il faut au moins
que la ville ait l'occasion de l'exprimer,
il faut au moins que la municipalité puisse dire : Bien, moi, voici ce que
j'en pense.
Mme Vallée :
Parce que c'est certain que, par exemple, l'article 20
prévoit que l'organisme public est tenu de collaborer avec le ministre
dans le cadre de l'application de la loi, donc non seulement dans le cadre de
poursuites judiciaires, mais aussi dans le
cadre du programme de remboursement volontaire. C'est certain que, dans ce contexte-là,
il est possible qu'une firme XYZ qui fait affaire un peu partout sur le
territoire souhaite effacer l'ardoise, se dirige vers le bureau, et là fasse état d'un certain nombre de contrats. Donc, il
est fort probable que la personne désignée par le ministre ou par la ministre pour administrer le programme
se tourne vers les municipalités et leur demande : Bon, bien voici, nous
avons l'entreprise XYZ. Pouvez-vous
nous fournir l'information que vous avez et qui est en lien avec les dossiers?
Donc, il y aura cette
collaboration-là qui sera de toute façon nécessaire. Je vois difficilement
comment on pourrait penser avoir un programme de remboursement
volontaire efficace sans la collaboration des municipalités.
Maintenant,
ce que je comprends de votre intervention, c'est que vous souhaitez que, dans
le cadre de l'appréciation d'un règlement, les municipalités soient
consultées et puissent faire valoir des observations.
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui. Et...
Mme Vallée : ...sans nécessairement
avoir un droit de veto.
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) :
Bien, pas dans tous les cas. Tu sais, le maire de Montréal
disait : Ou c'est la métropole ou ce ne l'est pas; moi, je vous
dirais : On est un gouvernement de proximité ou on ne l'est pas. Quand on travaille avec un gouvernement partenaire, il
doit avoir son mot à dire, on doit être capable de parler des choses qui ont
affecté notre propre monde, là, puis qui relèvent de notre juridiction puis de
nos responsabilités, de notre légitimité politique, je dirais.
De là à, dans tous les cas, systématiquement
nous donner un droit de veto, moi, c'est là où je suis parlable, parce
que sinon il y a
des dossiers qui ne pourraient ne pas avancer, étant donné la complexité de l'ensemble
de la chose, là, et de la
diversité du monde municipal.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il
reste un peu moins de deux minutes, Mme la ministre.
Mme Vallée : Bon, il a été question beaucoup
de transparence, il a été question de... Dans le cadre
du programme de remboursement volontaire, beaucoup d'entreprises ou de représentants d'entreprise étaient préoccupés de la nature de l'information qui pourrait être divulguée à la suite du recours
au programme de remboursement volontaire. Qu'est-ce que vous pensez? Comment voyez-vous cette préoccupation de la part des entreprises? Je comprends que l'objectif n'est pas de cacher sous la couverte, mais en même temps, pour certaines, la divulgation d'information... Moi, je le
voyais comme étant un élément positif
pour l'entreprise parce
que je me disais : Bien, on
divulgue que nous avons réglé les dossiers et maintenant on est prêts à un
nouveau départ, à tourner la page puis à repartir en neuf avec des bases
éthiques différentes et avec un
esprit différent, mais, a contrario, on semble ne pas le voir de cette façon-là
au niveau de certains regroupements. Comment vous le voyez, vous, le... Quel type d'information devrait être divulgué? Quel type d'information pourrait ne
pas l'être?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En
30 secondes, s'il vous plaît.
• (11 heures) •
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) :
Bien, je dirais qu'ils font une erreur stratégique. Je vous dirais que les
politiciens, par exemple, n'ont pas bonne presse. Des farces d'enveloppe
brune, on en entend. La réponse à ça, pour moi, c'est la transparence totale. Il faut être plus catholique que le pape, il faut
aller plus loin que ce que le bon sens, des fois, exigerait. Moi, je
pense que, dans ce dossier-là, il faut faire ça. Des farces d'ingénieur, les
ingénieurs doivent être tannés d'en entendre.
Et ces firmes-là doivent, pour moi, mettre le plus de choses sur la table, puis
il y a plus de risques à avoir moins de transparence que d'en avoir
trop, dans ce cas-là, j'en suis profondément convaincu.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Je vous remercie, M. le maire et les personnes qui vous accompagnent. Merci de
vous être déplacés pour faire ces représentations.
La commission va suspendre ses travaux le temps
d'accueillir les prochains invités, le Directeur général des élections. Nous
suspendons.
(Suspension de la séance à 11 h 1)
(Reprise à 11 h 4)
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, la commission reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant avec plaisir les représentants du Directeur
général des élections. Je vais confesser immédiatement ma difficulté avec les
titres, puisque c'est Me Lucie Fiset
qui est la Directrice générale des élections... ou le Directeur général des
élections si on ne féminise pas le
titre. Donc, bonjour. Bienvenue. Et vous disposez de 10 minutes pour votre
présentation, et en vous demandant,
dans un premier temps, de présenter les personnes qui vous accompagnent. À vous
la parole, Mme la directrice.
Directeur général des
élections
Mme Fiset
(Lucie) : Bien, merci beaucoup. Merci, M. le Président, Mme la
ministre puis Mmes et MM. les députés. Alors, je tiens d'abord à vous
remercier de nous avoir accueillis parmi vous, auprès de cette commission,
suite à une demande en ce sens. Je suis accompagnée
aujourd'hui par Me Benoît Coulombe, directeur des affaires juridiques par intérim, mon adjoint et directeur du
financement des partis politiques, M. Denis Lafond, et également mon
adjointe à titre de présidente de la
Commission de la représentation électorale et secrétaire générale de
l'institution, Mme Catherine Lagacé.
Je précise en débutant que mon intervention n'a
pas pour objectif de discuter, je dirais, des dispositions du projet de loi n° 26, si ce n'est de celles qui concernent les
modifications proposées... — vous me permettrez, je vais mettre mes
petites béquilles, merci — de celles proposées relativement aux
modifications à la Loi sur les contrats des organismes publics,
particulièrement aux articles 26 à 29 du projet de loi. Donc, mon propos a
davantage pour but d'éclairer la commission
quant à l'application de ces dispositions au regard des lois électorales, qui,
comme vous le savez, prévoient un
cadre législatif distinct quant à l'interdiction de conclure un contrat public
lors de la commission de certaines infractions énoncées aux lois
électorales, donc la Loi électorale provinciale, la Loi sur les élections et
les référendums dans les municipalités et la Loi sur les élections scolaires.
Donc, en
décembre 2010, la Loi anti-prête-noms en matière de contributions électorales a
été adoptée. Cette loi s'inscrivait
dans la foulée de l'adoption de différents projets de loi — il y en avait cinq en particulier dans le
cadre de la réforme
des lois électorales en matière de financement politique — visant à renforcer la confiance de la
population envers notre système
démocratique. Donc, les lois électorales ont été modifiées afin d'y ajouter des
dispositions qui prévoyaient une interdiction de conclure un contrat
public avec soit une personne physique ou une personne morale qui aurait été
reconnue coupable d'une infraction pénale visant le versement de contributions
politiques illégales en vertu des lois électorales.
Au même moment, le législateur prévoyait dans ces lois que le Directeur général
des élections devait tenir un registre des personnes non admissibles à
l'obtention d'un contrat public en vertu de ces dispositions.
Maintenant, la Loi
sur les contrats des organismes publics adoptée en 2006 a été modifiée, elle
également, ultérieurement aux lois
électorales, donc en 2011 et en 2012, afin d'y ajouter des dispositions qui
encadraient l'octroi de certains contrats publics et qui énonçaient
également des interdictions quant à la conclusion de contrats publics. Le chapitre VI du projet de loi n° 26
prévoit des modifications législatives à cette loi et vise principalement la
suppression de l'interdiction
automatique à contracter d'une entreprise qui aura été reconnue coupable de
l'une des infractions mentionnées à
l'annexe I de la loi. Aucune modification législative n'est prévue au
regard des lois électorales dans le projet de loi n° 26. Vous comprendrez ainsi le pourquoi de notre
intervention aujourd'hui, compte tenu que, pour nous, la cohérence
législative se doit d'être privilégiée au bénéfice des différents administrés.
Donc,
la Loi sur les contrats des organismes publics prévoit expressément, pour
l'instant, deux registres, alors le
Registre des entreprises non admissibles aux contrats publics et le registre
des entreprises autorisées. Le Registre des entreprises non admissibles
indique la liste des entreprises qui ont été déclarées coupables en vertu d'un
jugement définitif d'une infraction énoncée
à l'annexe I de cette loi. Les infractions proviennent de différentes lois mais
non pas de celles des lois
électorales puisque, comme je vous l'ai mentionné, nous avons un cadre
législatif distinct qui concerne l'application
des dispositions pénales des lois électorales. Le registre qui est tenu par le
Directeur général des élections, soit
le Registre des personnes non admissibles aux contrats publics, possède une
vocation similaire au RENA, mais il est tout à fait distinct. Donc, on doit vérifier chacun des registres aux fins
de déterminer si une entreprise a effectivement la capacité de conclure
des contrats avec un organisme public.
• (11 h 10) •
Il
importe de souligner que la Loi sur les contrats des organismes publics énonce
des critères qui sont différents de
ceux stipulés aux lois électorales, nous en convenons. Nous avons cru opportun
de vous souligner les deux principaux, les
autres étant d'une moindre importance. Donc, les deux principaux : d'une
part, l'interdiction de conclure un contrat public prévue aux lois électorales vise toute personne physique ou
personne morale ayant commis une infraction concernant le versement
d'une contribution politique illégale; au niveau de la Loi sur les contrats des
organismes publics, les contrevenants visés par l'interdiction de contrat
public sont les personnes morales de droit privé, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite, les
sociétés en participation et les personnes physiques mais uniquement
lorsqu'elles exploitent une
entreprise individuelle. Donc, on constate déjà qu'il y a une distinction quant
à l'identification des contractants qui sont visés par chacune des lois.
Précisons
toutefois que, lorsqu'un dirigeant qui est toujours à l'emploi d'un contractant
a été déclaré coupable d'une
infraction visée à l'annexe I de la Loi sur les contrats des organismes
publics, ce contractant est
présentement visé par une infraction de conclure un contrat public.
Évidemment, on comprendra a contrario que, si un dirigeant, à titre d'exemple, ne serait plus à l'emploi d'un
contractant, à ce moment-là, la Loi sur les contrats des organismes publics ne
viserait pas une interdiction de conclure un
contrat public, tandis que, pour les lois électorales, une personne physique
serait inscrite sur le registre du Directeur général des élections et ne
pourrait conclure en soi un contrat public.
D'autre
part, nous constatons une distinction quant aux contrats visés par les
interdictions : les lois électorales prévoient une interdiction pour tout contrat public, peu importe sa
nature et peu importe son montant, alors que la Loi sur les contrats des
organismes publics spécifie les types de contrat qui sont visés à son article 3.
Maintenant,
le registre des entreprises autorisées prévoit qu'une entreprise
qui désire conclure un contrat, avec un organisme public, d'une valeur
égale ou supérieure, maintenant, à 5 millions
de dollars doit détenir une
autorisation de l'Autorité des
marchés financiers et être inscrite
sur de registre. Selon l'article 21.26 de cette même loi, cette autorisation
ne peut être accordée notamment si l'entreprise a été déclarée coupable d'une
infraction prévue à l'annexe I ou d'une infraction
prévue aux lois électorales. Donc, le législateur
a prévu spécifiquement dans cette loi que, lorsqu'un contractant est reconnu coupable en vertu soit d'une
infraction à l'annexe I ou d'une infraction aux lois électorales,
automatiquement il y a interdiction
de conclure un contrat public. Mais nous constatons que, par le projet de
loi n° 26, les modifications législatives proposées visent à
accorder une plus grande latitude à l'Autorité des marchés financiers et a pour
but principalement d'éliminer cette
interdiction automatique et ainsi accorder, ce que nous comprenons, une
prédominance au processus
d'habilitation de l'Autorité des marchés financiers. Nous vous soumettons que
l'objectif poursuivi par le législateur
par ces dispositions pourrait être compromis si les lois électorales ne sont
pas, elles aussi, modifiées selon ce que je proposerai un peu plus loin.
Nous
notons à cet effet que l'Assemblée nationale s'est prononcée positivement sur
l'opportunité d'éliminer le registre des entreprises non autorisées par
le biais de l'article 9 de la Loi sur l'intégrité en matière de contrats
publics qui a été adoptée en décembre 2012,
et nous constatons également que le projet de loi n° 26 propose
maintenant de modifier la Loi sur les
contrats des organismes publics afin d'accorder le pouvoir à l'Autorité des
marchés financiers de délivrer une
autorisation ou de la maintenir malgré qu'une infraction ait déjà été commise,
que l'entreprise soit inscrite au registre des entreprises non autorisées, malgré qu'une infraction soit commise en
cours de processus ou que l'infraction soit commise après l'obtention de l'autorisation. Évidemment,
l'entreprise devra répondre des critères d'intégrité qui sont énoncés à la
loi et apporter, le cas échéant, les
correctifs nécessaires pouvant être requis par l'Autorité des marchés
financiers. L'orientation qui semble
donc se dessiner par les propositions faites par le biais du projet de
loi n° 26 serait de permettre à une firme de poursuivre ses activités auprès des organismes publics à la
suite de l'obtention d'une autorisation par l'Autorité des marchés financiers malgré qu'elle puisse faire
l'objet d'une déclaration de culpabilité pour une infraction visée à
l'annexe I.
Donc,
au Directeur général des élections, suite au dépôt de ce projet de loi, nous
avons analysé l'ensemble des dispositions,
et cette analyse, pour nous, a révélé une incohérence législative que nous nous
devions de vous souligner. Nous avons
notamment constaté que, l'obtention d'une autorisation par l'Autorité des
marchés financiers et l'inscription au
registre des entreprises autorisées d'une entreprise, un seul jugement de culpabilité
suite à une poursuite entreprise par
le Directeur général des élections ferait obstacle à l'inscription à ce
registre et à la possibilité pour cette entreprise de poursuivre ses activités dans le cadre de
contrats conclus avec des organismes publics. Donc, pour nous, compte tenu
du processus d'habilitation de l'Autorité des marchés financiers qui prend une
plus grande importance, compte tenu des pouvoirs qui sont accordés à l'Autorité
des marchés financiers pour délivrer une autorisation, il nous apparaît opportun de proposer des modifications
législatives afin que les contraventions qui sont visées aux lois électorales
reçoivent le même traitement que celles qui sont visées à
l'annexe I de la Loi sur les contrats des organismes publics.
Advenant le maintien des dispositions actuelles
aux lois électorales suite à l'adoption des modifications législatives, nous ferions face à la situation suivante : seules, les infractions
énoncées à la Loi électorale, la Loi sur les élections et les
référendums dans les municipalités ou à la Loi sur les élections scolaires
constitueraient un obstacle absolu et
incontournable à l'obtention d'une autorisation de l'Autorité des marchés
financiers, sans oublier une interdiction totale de conclure tout contrat public, peu importe le montant, peu
importe le type de contrat, et ce, pour une période de trois ans. Alors que le législateur a cru
important de confier à un organisme particulier, soit l'AMF, le pouvoir
d'évaluer l'intégrité — ce
qui n'a pas été accordé au Directeur général des élections — le
pouvoir également d'avoir les moyens pour faire les
démarches nécessaires afin de s'assurer de l'intégrité d'une entreprise, et
qu'il lui a confié également la responsabilité
de voir à délivrer une autorisation aux seules entreprises qui rencontraient
ses exigences, la discrétion du poursuivant
public qu'est le Directeur général des élections mettrait en péril tout ce
processus d'habilitation et affecterait, à notre avis, les pouvoirs de l'Autorité
des marchés financiers et en conséquence
les objectifs recherchés par le projet
de loi n° 26.
Nous notons également que, dans le cadre de
notre réflexion, on ne peut écarter le fait que les emplois d'un nombre important de travailleurs québécois
pourraient être mis en péril par les agissements d'une ou de quelques personnes
qui oeuvrent au sein d'une entreprise,
d'autant que l'Autorité des marchés
financiers peut notamment exiger le
départ de ces dirigeants afin de délivrer l'autorisation qui pourrait
être requise auprès de l'autorité.
Donc, nous
souscrivons entièrement à l'idée que la réhabilitation d'une entreprise est une
orientation qui doit être privilégiée
plutôt que celle de sanctionner des comportements antérieurs de certains
dirigeants d'une firme. Les modifications
législatives à la Loi sur les contrats des organismes publics apportées par le projet de loi n° 26 sont une démonstration de cette
orientation.
Il ne fait cependant aucun doute pour nous que
le maintien des dispositions actuelles des lois électorales ne permettrait pas, encore une fois, de l'atteindre.
Donc, nos recommandations seraient d'apporter des modifications législatives
autant à la Loi sur les contrats des
organismes publics qu'aux lois électorales afin que les dispositions pénales
soient visées par l'annexe I de
cette loi et que le traitement qui puisse être accordé soit uniforme à celui
qui existe présentement dans cette loi.
Je tiens à
vous préciser, en terminant, que le comité consultatif a été informé des
propositions que nous entendions vous faire aujourd'hui. Et je
terminerai ma présentation en vous assurant, évidemment, notre collaboration et
en vous remerciant, et je suis disponible pour répondre à toutes vos questions
ou vos commentaires.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Je vous remercie, Mme la directrice.
Mme la ministre de la Justice, la parole est à vous pour ce premier bloc
d'échange.
• (11 h 20) •
Mme Vallée :
Merci, M. le Président. Alors, Mme Fiset, M. Coulombe,
M. Lafond, merci, bienvenue. Bienvenue et surtout merci de
contribuer à la réflexion, à notre réflexion dans le cadre du projet de
loi n° 26.
Évidemment,
je me souviens bien des débats, en 2010, lorsqu'avaient été adoptées les
dispositions dont vous nous faites part aujourd'hui, et des enjeux.
Alors, à l'époque, l'objectif visé, évidemment, c'était d'assurer que quelqu'un
qui contrevenait à la Loi électorale était sanctionné lourdement, et l'objectif
était vraiment de démontrer que les lois électorales
étaient des lois que nous devions respecter et qu'il y avait des conséquences
graves à ne pas le faire. Et ce que je
comprends aujourd'hui, je comprends de votre mémoire, votre objectif, c'est...
parce que depuis 2010 beaucoup d'eau a coulé
sous les ponts et que d'autres lois ont été adoptées, l'objectif de votre
intervention n'est pas de réduire l'importance et le... mais bien d'assurer une cohérence dans l'ensemble des lois qui
régissent les entreprises, puis, bon, vous souhaitez éviter des
dédoublements, évidemment.
Mais, en abolissant le registre, est-ce que vous
croyez que le régime d'autorisation de l'AMF va quand même assurer et va quand même permettre d'atteindre les
mêmes objectifs que ceux qui étaient prévus lorsque les lois électorales
ont été modifiées? Est-ce que vous ne croyez
pas qu'on va... Et c'est une question
parce qu'il y a peut-être une
perception que, de modifier et d'abolir le registre, on dilue la portée
et on s'écarte des objectifs qui étaient visés auparavant.
Mme Fiset (Lucie) : Vous parlez du
registre tenu pas le Directeur général des élections?
Mme Vallée : Oui.
Mme Fiset
(Lucie) : D'accord. Pour moi, je répondrais par la négative, je ne
crois pas, parce que notre objectif, justement,
n'est pas de retrancher l'interdiction des contrats publics, là n'est pas notre
point. Nous devons maintenir cette conséquence,
je dirais, d'une déclaration de culpabilité, des dispositions pénales en
matière de financement politique, donc, de contribution illégale versée. Nous devons
maintenir cette conséquence légale automatique, je dirais, d'interdiction de
contrat public.
Toutefois,
compte tenu que le législateur, je dirais, dans sa grande sagesse, a cru
opportun, en 2014, justement, de
retrancher cette interdiction pour l'ensemble des contrats publics, outre ce
qui concerne les lois électorales, on s'est posé la question du pourquoi. Et c'est pour ça qu'on parle de cohérence
législative, parce que, pour nous, effectivement, la seule difficulté
qu'on y voit, c'est que nous serions les seuls qui, une fois qu'il y aurait une
déclaration de culpabilité, il y aurait une
interdiction automatique. Nous serions les seuls. Donc, dans la grande sagesse
du législateur, nous nous sommes dit : Bien, soit qu'il nous a
oubliés, soit qu'il y a autre chose derrière cela.
Mais, pour
nous, si on a prévu dans la Loi sur les contrats des organismes publics cette
possibilité, justement, que, malgré des contraventions à des lois aussi
importantes que le Code criminel, là, qui sont prévues dans l'annexe I,
les conséquences devraient être les mêmes
également pour les lois électorales, parce que les firmes qui sont visées, on
le sait, comme vous le dites, il y a
bien de l'eau qui a coulé en dessous des ponts, on le voit, ces firmes-là
veulent faire en sorte que ce que nous avons vécu ne se reproduise plus.
Donc, évidemment, nous pouvons agir pour un cinq ans, hein, la prescription est de cinq ans, nous pouvons agir
pour des événements qui ont eu lieu également dans les années antérieures,
et on se dit qu'en 2014, alors que le
législateur veut permettre, à quelque part, à ces firmes de poursuivre leurs
activités au Québec mais à certaines
conditions, qu'on maintiendrait quand même une interdiction automatique pour
des infractions prévues aux lois électorales, pour nous, il y a là une
difficulté. Je ne crois pas que ça enlèverait du mordant à nos lois électorales, au contraire, parce que
l'interdiction de contrat public demeurerait. Cependant, le traitement qui
serait accordé serait le même que pour toute infraction aux lois du
Québec.
Donc, ma
réponse, ce serait... En tout cas, à mon avis, je ne crois pas, parce qu'au
contraire les firmes veulent, veulent
agir de sorte, justement... On le voit, ils adoptent des codes de conduite, ils
adoptent des règlements internes, ils mettent
fin aux emplois des dirigeants qui étaient impliqués à l'époque. Ils veulent,
ils veulent pouvoir poursuivre leurs activités
au Québec, ils veulent démontrer qu'ils sont capables de mettre en place des
mesures qui leur permettraient de conclure
des contrats publics en toute transparence. Donc, pour moi, cet objectif-là
demeurerait. Et la conséquence de l'interdiction de contrat public doit
être maintenue, évidemment, mais avoir un traitement similaire.
Mme Vallée :
Donc, permettre, dans le fond, de considérer les changements organisationnels,
les changements apportés au sein de
l'entreprise qui pourraient avoir complètement évacué les éléments
perturbateurs qui étaient à l'origine des
infractions commises, donc considérer ce ménage-là fait à l'interne, considérer
possiblement d'éventuels règlements de
dossier au point de vue financier, et donc d'avoir cette considération qui est
plus large et qui ne serait... et donc permettre aux entreprises de
véritablement effacer l'ardoise et recommencer.
Mais, pour
l'avenir... On comprend, actuellement, on regarde une dynamique qui a été mise
en lumière lors des travaux de la
commission Charbonneau, alors, bon, on a beaucoup d'acteurs qui ont pu être
visés, qui ont pu faire l'objet d'une
couverture médiatique quand même assez importante. Mais, pour l'avenir, comment
assurer que le message aux entreprises
sera aussi fort? Parce que, là, actuellement, le message est très clair : il n'y en a pas, de contrat
public, pour une période de trois
ans. Mais, dans cinq ans, dans 10 ans, est-ce que le message sera
tout aussi porteur si on va de l'avant avec les recommandations que vous
nous formulez?
Mme Fiset
(Lucie) : Bien, encore une fois, je reviendrais avec mon propos antérieur à l'effet
de dire : Pourquoi est-ce que
le législateur prévoirait un encadrement distinct pour les
lois électorales versus toutes les autres lois, qui, selon moi — ce sont les lois, les dispositions pénales
applicables dans la province de Québec — ont une importance similaire?
Donc, n'oublions pas que maintenant, également,
le législateur a ajouté à cette interdiction, je dirais, mais a ajouté par sa réforme en matière de financement
des partis politiques en 2010, vous l'avez bien dit, avec fermeté, a ajouté
d'autres éléments qui permettent d'avoir cet
effet dissuasif, je dirais, vis-à-vis les firmes pour qu'on ne revive plus ce
que nous avons vécu. Donc, tant les dispositions pénales que l'ajout,
effectivement, d'une autre conséquence légale, les manoeuvres électorales
frauduleuses, ont été ajoutés. Nous avons obtenu des pouvoirs supplémentaires
qui nous permettent davantage de détecter,
d'être davantage actifs dans ce domaine-là. Donc, pour moi, l'aspect dissuasif
serait le même, même si on
imposerait, finalement, un encadrement similaire quant à l'octroi des contrats
publics, que ce soit une infraction à
une disposition en matière électorale, ou domaine criminel, ou d'autres
domaines prévus à l'annexe I.
Mme Vallée :
Donc, dans le fond, de vos propos je comprends que, si votre registre n'est pas
aboli, on aurait une réhabilitation à
deux vitesses, si je comprends bien, on aurait une réhabilitation pour tous les
autres domaines mais qui n'aurait pas
plein effet, puisque votre registre demeure. Et, malgré tous les efforts
consentis, il n'en demeure pas moins que les entreprises ne peuvent tout
simplement pas contracter avec les organismes publics, et donc...
Mme Fiset (Lucie) : Exactement. Une
impossibilité.
Mme Vallée :
Et malgré toute la bonne volonté. Puis on comprend, là, quand même,
l'évaluation qui est faite par l'AMF
est quand même une évaluation rigoureuse et soumise à certains critères, mais,
peu importe ce qu'on pourrait faire, notamment
avec notre programme de remboursement volontaire, ça demeurerait un élément qui
pourrait peut-être être un obstacle à la participation d'une entreprise
au programme de remboursement volontaire.
Mme Fiset
(Lucie) : C'est possible, parce que, tel que je vous l'ai mentionné,
on a donné... on a accordé à l'AMF tous
les pouvoirs nécessaires, justement, pour leur permettre d'établir, d'exiger auprès des firmes certaines actions, ce
que nous
n'avons pas. Les lois électorales, il
n'y a aucun pouvoir qui est accordé
au Directeur général des élections. C'est une conséquence légale, tout
simplement, comme la manoeuvre électorale frauduleuse, c'est automatique comme
la manoeuvre électorale frauduleuse. Dès le
moment où une personne est reconnue coupable des infractions que le législateur a prévues sous cette rubrique, automatiquement la personne se voit visée par une manoeuvre
électorale frauduleuse, donc ne peut
se présenter pour une période de cinq ans, ne peut voter. Donc, l'interdiction
de contrat public, c'est la même
chose, il n'y a aucun pouvoir qui est dévolu au Directeur général des
élections.
Donc, pour
moi, si dans sa grande sagesse, encore
une fois, il a prévu que l'Autorité
des marchés financiers était l'organisme
compétent pour déterminer si une autorisation devait être délivrée et voir, justement,
quelles sont les exigences de
l'autorité, quelles sont les contraintes que la firme devra respecter en cette matière, pour moi, il va de soi que la
cohérence exige que les dispositions des lois électorales puissent subir
le même sort.
• (11 h 30) •
Mme Vallée :
La cohérence et, je vous dirais... C'est parce qu'on se posait des questions, hier, à savoir c'est beau, avoir une loi, mais encore faut-il que notre loi
et notamment le programme de remboursement volontaire
puissent aller chercher une certaine adhésion, parce qu'on peut mettre
en place un beau programme, mais encore faut-il qu'il soit intéressant pour les entreprises.
Alors, si je vous comprends bien, ça pourrait permettre... cette modification législative là pourrait
enlever un obstacle potentiel et paver la voie pour une plus grande adhésion
des entreprises, parce
que, d'une façon ou d'une autre, la participation, on l'a dit et on l'a redit, on
ne peut s'acheter une réhabilitation via le programme de remboursement volontaire, mais par contre le
programme de remboursement volontaire, et la participation au programme,
et le remboursement des sommes aux
contribuables est un élément qui pourra être considéré, parmi bien d'autres,
parce qu'évidemment le fait d'avoir
fait le ménage, comme on mentionnait tout à l'heure, est aussi un élément
important, mais pourra être considéré, et ce, sans avoir l'enclume du
registre, de votre registre, finalement, qui plane.
Mme Fiset (Lucie) : Exactement.
Le Président
(M. Ouimet, Fabre) : Ça
complète ce bloc d'échange. Je me tourne vers le député de Lac-Saint-Jean.
À vous la parole.
M.
Cloutier : Merci, M. le Président. Nous avons des échanges fort
intéressants, peut-être qu'on peut poursuivre dans la même voie. J'essaie de comprendre les pouvoirs que vous avez
présentement. Ce que je comprends, c'est que vous autres, vous appliquez la loi, il n'y a pas de
dialogue comme tel avec les entreprises pour les mesures qu'elles pourraient
avoir mises en place pour corriger la situation. C'est ça?
Mme Fiset
(Lucie) : Exactement. Quand on dit : Il n'y a pas de dialogue
avec les entreprises, je vous dirais que, les entreprises, ils sont inquiets, justement, lorsque le DGE entre chez
eux, frappe à la porte. Ils sont très inquiets compte tenu de l'Autorité
des marchés financiers, du fait que les entreprises tentent d'avoir des
autorisations, justement, pour pouvoir conclure des contrats publics.
Donc, pour
nous, comme je le répète, c'est une conséquence automatique, c'est une
conséquence législative, donc nous ne pouvons pas exiger d'une firme, d'une
entreprise d'agir de telle, ou telle, ou telle façon pour éviter qu'une infraction pénale ou qu'un constat d'infraction,
donc, soit porté contre cette personne-là. Dès le moment... Nous, on fait
des enquêtes, tout simplement, on constate
est-ce qu'il y a infraction à la loi ou pas. C'est sûr que le DGE a une
discrétion de poursuivre en public,
lorsqu'il décide d'émettre ou non des constats d'infraction, mais, dès le moment
où nous avons la commission d'une
infraction claire, avec une preuve à l'appui, il y a possibilité d'émettre un
constat d'infraction. Et, une fois
que le constat est émis, qu'il y a un jugement de déclaration de culpabilité,
c'est automatique, on n'a pas de discrétion quant à l'application d'une
interdiction de contrat public.
M.
Cloutier : Mais, juste pour que je comprenne bien, là, je n'ai
pas plongé là-dedans depuis un bout, mais la contribution, c'est une
contribution individuelle, ce n'est pas une contribution de l'entreprise à des
partis politiques. L'application de la Loi électorale, c'est donc un individu
qui est condamné.
Dois-je
comprendre que c'est à la fois l'individu et l'entreprise? C'est dans un
contexte de prête-noms, probablement, de...
Mme Fiset
(Lucie) : Oui, exactement, il y a possibilité... Ce ne sont pas que
les donateurs qui sont visés par des contraventions aux lois, il y a également
les personnes qui procèdent au remboursement. Donc, vous l'avez bien ciblé,
c'est dans le cadre des dossiers de
prête-noms particulièrement où des entrepreneurs, des firmes, des employeurs
ont procédé au remboursement de leurs employés qui, eux-mêmes, avaient
versé des contributions politiques à des entités dûment autorisées. Donc, on peut poursuivre le donateur, on peut poursuivre le
dirigeant qui a procédé de facto au remboursement et on peut également
poursuivre la firme qui aura... dont les sommes, les fonds auront été utilisés
pour rembourser le donateur.
M.
Cloutier : Donc, au moment où on se parle, il y a des firmes,
entre autres, d'ingénierie au Québec qui se sont vu retirer leur
possibilité d'avoir des contrats publics. C'est ça?
Mme Fiset
(Lucie) : Présentement, il y a quelques entreprises qui sont
poursuivies par le Directeur général des élections. Il n'y a pas encore de jugement, n'oublions pas qu'il faut
qu'il y ait un jugement de culpabilité qui soit rendu. Il y a plusieurs
dirigeants de firme qui ont été poursuivis par le Directeur général des
élections, mais, pour l'instant, il n'y a pas de firmes de génie-conseil — c'est ce que vous me demandez, là — qui sont présentement inscrites sur notre
registre.
M. Cloutier : Pourquoi? On
fait la distinction entre les dirigeants et la firme, c'est ça?
Mme Fiset
(Lucie) : Oui, parce que, tel que je vous l'ai mentionné, on peut
poursuivre une personne physique ou
une personne morale. Alors, dépendant... Présentement, plusieurs dirigeants
sont poursuivis par le Directeur général des élections, certaines
entreprises le sont également, mais nous n'avons pas de jugement de culpabilité
d'obtenu.
M. Cloutier : Au moment où on
se parle, il n'y a aucune entreprise québécoise qui est sur votre registre?
Mme Fiset
(Lucie) : Il y a certaines personnes morales qui sont sur notre
registre, nous en avons six, présentement, mais qui ne sont pas des
firmes de génie-conseil. C'était votre question.
M.
Cloutier : O.K., mais... Oui, en fait, c'était ma question
initiale, effectivement, mais j'essaie de comprendre. Là, il y en a six sur votre registre. Donc, pour
reprendre le questionnement de la ministre à l'effet de l'effet dissuasif du
programme de remboursement, puisqu'il y a juste six entreprises
qui se retrouvent sur le registre, ça ne me semble pas être... c'est
donc peu d'entreprises qui se retrouvent prises, dans le fond, dans un registre
alors qu'elles pourraient se retrouver absolues — je ne sais pas si on
peut le dire comme ça — par
l'AMF.
Mme Fiset
(Lucie) : Bien, comme je
vous ai mentionné, actuellement, parce
qu'il n'y a pas encore de jugement de culpabilité d'obtenu, les gens ont plaidé
non coupable, les firmes ont plaidé non coupable dans certains dossiers
pour lesquels nous avons entrepris des
procédures judiciaires... Et, dans d'autres, la possibilité demeure toujours,
évidemment. Et, comme je vous ai
mentionné, il y a d'autres cas où ce sont les dirigeants. Nous avons privilégié
la poursuite pénale contre les
dirigeants des entreprises qui ont oeuvré à mettre en place, justement, des
stratagèmes de prête-noms, aux fins de sanctionner
les véritables responsables et non pas, justement, de sanctionner une
entreprise complète qui emploie plusieurs personnes qui, en définitive, sont victimes de ce qu'une, deux ou trois
personnes, hauts dirigeants, ont pu faire. Donc, c'est des choix que nous avons faits présentement. Et, pour certains, il
y a eu des plaidoyers de culpabilité, ils se retrouvent sur notre
registre. Pour d'autres, on attend les jugements.
M.
Cloutier : Mais, de ce que je comprends, puisque tout ça est
relativement nouveau, la liste va s'allonger. Et on pourrait se
retrouver dans un scénario où une entreprise importante pourrait se retrouver
sur votre liste et qui pourrait aussi
vouloir se prévaloir du programme qu'on est en train de mettre en place, et
vous souhaiteriez, à ce moment-là, donner davantage de pouvoirs à l'AMF pour qu'ils puissent regarder l'ensemble
du portrait, incluant le comportement eu égard à la Loi électorale.
C'est bien ça?
Mme Fiset
(Lucie) : Exactement. Je vais être claire, je le répète, je ne demande
pas à ce qu'on retranche complètement
l'interdiction de contrat public, au contraire. Les dispositions des lois
électorales devraient être transférées, disons ça comme ça, être transférées à l'annexe I, finalement, de
la Loi sur les contrats des organismes publics pour avoir un traitement similaire, et les entreprises qui
sont inscrites sur notre registre, finalement, seraient inscrites également sur
le registre de l'Autorité des marchés financiers.
Donc, il n'y
aurait que les personnes physiques, en définitive, qui sont présentement sur
notre registre qui ne seraient pas
transférables, disons ça comme ça, sur le registre de l'Autorité des marchés
financiers, compte tenu que les personnes visées sont différentes, je
vous l'ai mentionné tout à l'heure, les contractants identifiés à la Loi sur
les contrats des organismes publics sont
différents, puisque nous, aux lois électorales, les personnes physiques sont
visées. Mais, encore une fois, je
vous dirais, n'oublions pas que, lorsque nous avons eu les modifications pour
les lois électorales, en 2010, le contexte de l'époque et l'orientation
à l'époque, c'était vraiment de sanctionner, et c'étaient beaucoup de
révélations, d'allégations, utilisation de
prête-noms, financement par des personnes morales, on se doit d'agir, d'agir
avec fermeté. Donc, à l'époque, en
2010, le législateur a cru opportun, justement, de prévoir ce canevas, je
dirais, mais, dès 2011‑2012, il a
modifié une loi qui vise spécifiquement l'octroi des contrats publics, est venu
prévoir des interdictions et est venu encadrer
ces interdictions en excluant les personnes physiques. Et on peut le comprendre
parce que rares sont les personnes physiques, en soi, qui concluent des
contrats publics avec un organisme public.
M.
Cloutier : Je comprends donc, à ce moment-là, que ce serait la
même chose pour le DGE. Vous souhaitez que le registre pour les
personnes physiques, lui, reste actif, mais que, pour le registre des personnes
morales, ce soit transféré à l'AMF. C'est ça?
Mme Fiset (Lucie) : Non. Moi, je
vous dirais que, par cohérence législative, si on fait effectivement la
modification législative tel que proposé, c'est donc dire que les personnes
physiques ne seraient pas visées par une interdiction de contrat public, ce
seraient les mêmes contractants qui sont identifiés dans la Loi sur les
contrats des organismes publics qui seraient visés.
M.
Cloutier : Mais, au moment où on se parle, les personnes
physiques sont aussi exclues de la participation à l'octroi de contrats
publics. C'est-u ça?
Mme
Fiset (Lucie) : Présentement, oui.
M. Cloutier :
Oui? Puis ça, c'est une sanction à la Loi électorale.
Mme
Fiset (Lucie) : Loi électorale exclusivement, effectivement. Mais je
vous dirais encore là que le législateur, dans sa grande sagesse, s'il avait voulu inclure les personnes physiques
dans l'interdiction de contrat public, il l'aurait également prévu lors
de ses modifications législatives, en 2011 et 2012, dans la Loi sur les
contrats des organismes publics. Donc, il y avait une motivation derrière le
fait de ne pas prévoir les personnes physiques au sein de cette loi.
M.
Cloutier : Mais, dans le fond, ce que vous dites, c'est... vous
vous questionnez de comment ça se fait que, pour la Loi électorale, on
ait maintenu cette interdiction-là pour les personnes physiques.
• (11 h 40) •
Mme
Fiset (Lucie) : Je ne me
questionne pas. Je sais, à l'époque, en 2010, quelle était l'intention du
législateur. Le législateur...
M. Cloutier :
Mais les modifications se sont faites de façon subséquente.
Mme
Fiset (Lucie) : À la Loi sur
les contrats des organismes publics. Et évidemment nous n'avons pas
participé aux modifications législatives à cette loi, mais, compte tenu qu'il s'agit d'une
loi qui traite spécifiquement de l'octroi des contrats publics, et que
le législateur a décidé d'exclure les personnes physiques, nous supposons
justement que c'est parce que les personnes physiques n'étaient pas
intéressantes, à exclure de cette loi.
M. Cloutier :
Très bien. Je vous remercie pour les précisions.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça
complète pour l'opposition officielle? Merci. Mme la députée de Montarville,
à vous la parole.
Mme Roy
(Montarville) :
Merci beaucoup, M. le Président. Madame messieurs, merci. Merci, mesdames.
C'est
complexe, je vais être bien honnête avec vous, là, c'est complexe, mais, à la
lumière de ce que vous nous dites...
Vous nous dites, bon : Avec le p.l. n° 26, vous créez des
incohérences législatives. Vous arrivez à la page 10 et vous nous
dites : Voici une liste de modifications qu'il faudrait apporter si nous
ne voulons pas être incohérents avec nous-mêmes,
la problématique remonte peut-être à quelques années antérieures avec la liste
et l'annexe I. Je vous écoute parler, vous semblez être en faveur du
maintien du refus automatique, d'une certaine façon. Alors, ma question va porter dans cet angle-là : Est-ce que le refus
automatique... est-ce qu'il devrait être maintenu pour toute infraction pénale,
sauf celles pouvant spécifiquement faire
l'objet d'un recours en vertu du p.l. n° 26? On veut justement que
les entreprises puissent continuer puis rembourser.
Mme
Fiset (Lucie) : Je vous dirais que je ne suis pas en accord avec le
refus automatique, au contraire, je suis en accord avec la réhabilitation. Donc, pour moi, effectivement, qu'on
puisse permettre à... une entreprise qui a vécu les années que nous connaissons et pour laquelle certains
dirigeants ont agi contrairement notamment aux lois électorales mais auraient
pu agir également contre d'autres lois ne devrait pas stigmatiser, finalement,
cette firme pour l'ensemble des années ultérieures.
Et, le législateur ayant adopté... pas adopté, mais ayant dans l'idée d'adopter
des dispositions, justement, pour permettre
cette réhabilitation, ce que je souhaite, c'est que cette réhabilitation-là
soit également possible s'il y a une infraction qui est commise en vertu
de la Loi électorale.
Mme
Roy
(Montarville) : Bien, voilà. En vertu de la Loi
électorale, vous auriez aimé maintenir, justement, cette interdiction.
Mme
Fiset (Lucie) : Non, qu'il y ait réhabilitation, qu'il y ait une
possibilité de réhabilitation. Donc, si on veut qu'il y ait une possibilité de réhabilitation, il ne faut pas qu'il y
ait une interdiction automatique. Parce que l'interdiction automatique,
c'est une conséquence, tout simplement, nous n'avons aucune discrétion.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vous remercie beaucoup.
Mme Fiset
(Lucie) : Ça me fait plaisir.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour la deuxième opposition
également? Du côté du gouvernement, y a-t-il d'autres questions? Mme la
ministre de la Justice.
Mme Vallée : Bien, juste une petite question. Suite à l'adoption de la...
ou dans le cadre des travaux de la loi n° 1, est-ce que vous êtes
intervenus? Est-ce que vous aviez demandé... Voyant un peu comment les choses
se dessinaient, est-ce que vous êtes intervenus pour, justement, souligner
cette incohérence-là, là, ce manque de cohésion entre les différentes
dispositions?
Mme
Fiset (Lucie) : Alors, je me suis référée à mon légiste qui m'a dit
que non, nous ne sommes pas intervenus dans
le cadre de l'adoption du projet de loi n° 1, considérant que
l'adoption des dispositions concernant les lois électorales était très récente, l'entrée en vigueur. Donc, probablement
qu'à cette époque... je n'étais pas Directrice générale des élections, mais à cette époque il n'y avait pas
intérêt, là, nous n'avions pas assez de matière pour pouvoir valablement,
je dirais, nous prononcer sur les modifications proposées par le projet de
loi n° 1.
Mme
Vallée : Et j'essaie de comprendre. Là, comme c'est là, ce que
vous souhaitez touche les personnes morales, vous ne souhaitez pas... vous ne parlez pas des personnes physiques qui
sont en affaires. Parce que les personnes physiques en affaires doivent
aussi obtenir leur autorisation de l'AMF.
Mme Fiset
(Lucie) : Non.
Mme Vallée :
Non?
Mme Fiset
(Lucie) : Non.
Mme Vallée :
Mais les personnes physiques en affaires, oui.
Mme
Fiset (Lucie) : Les personnes physiques qui exploitent une entreprise
individuelle sont les seules visées.
Mme
Vallée : Alors donc, la personne physique, donc, théoriquement,
si vous aviez une personne physique sur votre liste et que cette
personne exploite une entreprise, elle est aussi visée. Donc, on ne parle pas
seulement que des personnes morales, là, ici.
Mme
Fiset (Lucie) : Exactement.
La seule particularité, pour la Loi sur les contrats des organismes publics, qui vise les personnes
physiques, c'est celle qu'on vient de mentionner. Mais, de notre côté, c'est
toute personne physique, peu importe.
Mme
Vallée : En effet,
mais ces personnes physiques là... Parce que je comprends que, pour ce qui est
des personnes morales, je comprends
qu'abolir votre registre et tout diriger vers l'AMF, ça permet à l'AMF d'exiger
que ceux et celles qui ont posé des
gestes illégaux, des gestes de nature pénale, ne fassent plus partie de l'organisation, ne fassent plus partie de l'entreprise,
mais on fait quoi avec la personne morale... La personne physique en affaires,
ça, ça demeure. Celle qui a commis
une entorse à la Loi électorale, si elle est en affaires, elle demeure la même
personne, là, il n'y a pas de possibilité pour la personne physique en affaires
de changer qui elle est ou qui elle...
Mme
Fiset (Lucie) : Pour nous,
dans le fond, ce que je demanderais, c'est que l'ensemble des contractants
visés par la Loi sur les contrats des
organismes publics soient les mêmes qui soient visés par les
dispositions des lois électorales. Donc,
si on vient inclure les dispositions des lois électorales à l'annexe I de
la Loi sur les contrats des organismes
publics, évidemment, les cocontractants... les contractants, excusez, visés par cette loi-là
seront les mêmes, peu importe le type d'infraction
qui serait commise. Donc, la personne physique exploitant une entreprise
individuelle serait effectivement
visée par la Loi sur les contrats des organismes publics, ce qui éliminerait cependant toute personne physique qui n'exploite
pas une entreprise individuelle. Donc, toute
personne physique que nous avons poursuivie pour une contribution illégalement
versée, contribution politique
illégalement versée qui se retrouve présentement sur notre registre ne serait pas visée d'aucune
façon par la Loi sur les contrats des organismes publics.
Mais
là la question se pose, bon : Est-ce qu'il y a un malaise à
cela? Moi, ce que je vous réponds, c'est que, dans le cadre de la loi spécifique qui traite,
justement, de l'encadrement de l'octroi des contrats publics, le législateur
n'a pas cru opportun de prévoir,
justement, la personne physique pure, je dirais. Donc, pour moi, le traitement
devrait être similaire, on devrait
exclure également une personne physique qui aurait versé une
contribution illégale de l'encadrement de l'interdiction des contrats publics.
Mme Vallée :
Merci.
Mme Fiset
(Lucie) : Ça me fait plaisir.
Mme Vallée :
M. le Président.
Le Président (M. Ouimet,
Fabre) : Oui, pardon.
Mme Vallée :
Ça va pour moi, ça complète. Je ne sais pas si mes collègues ont des questions.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Ça va? Alors, les membres, on a complété, du côté des
membres? Parce qu'il nous reste un peu de
temps. Alors, parfait. Je vous remercie, Mme la Directrice générale des
élections. Merci à votre équipe pour cette présentation.
Nous
allons suspendre le temps de permettre à nos prochains invités, les
représentants de l'Union des
municipalités du Québec, de s'avancer. Nous suspendons.
(Suspension de la séance à 11 h 48)
(Reprise à 11
h 50)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, la commission reprend ses travaux. Et nous accueillons avec
plaisir les représentantes de l'Union des municipalités du Québec. Mme la mairesse, bonjour. Vous disposez d'une
période de 10 minutes pour faire
votre présentation, et je vous demanderais, pour le bénéfice des parlementaires
et ceux qui nous suivent, suivent nos travaux, de présenter la personne qui
vous accompagne. À vous la parole.
Union des municipalités
du Québec (UMQ)
Mme Roy
(Suzanne) : Alors, merci beaucoup.
Mme la ministre, M. le
président de la commission, Mmes, MM. les députés. À titre de présidente
de l'Union des municipalités du Québec, je remercie la commission de nous
entendre aujourd'hui sur le projet
de loi n° 26. Alors, tout d'abord, la personne qui m'accompagne est Me Diane Simard, directrice
des affaires juridiques à l'Union des municipalités du Québec et secrétaire de
la corporation.
Alors, avant
d'entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de vous rappeler que l'Union des municipalités représente depuis
plus de 90 ans les municipalités de toutes tailles dans toutes les régions
du Québec. Sa mission est d'exercer à l'échelle
nationale un leadership pour les gouvernements de proximité efficaces,
autonomes et valoriser le rôle fondamental des élus municipaux. Les
membres de l'Union des municipalités représentent 80 % de la population du
Québec et du territoire du Québec.
Depuis
plusieurs années, la confiance du public à l'endroit des institutions
démocratiques du Québec est au coeur des réflexions de l'Union des
municipalités du Québec. En mars 2011, nous avons mis de l'avant une initiative
sans précédent pour le milieu municipal en
lançant une vaste réflexion sur l'avenir des municipalités et en y associant
4 200 citoyens, les élus
municipaux de toutes les régions du Québec, de toutes les grandeurs de
municipalité, des universitaires, des experts, un comité de sages ainsi que plusieurs organisations socioéconomiques.
Les résultats de ces consultations se sont traduits, en novembre 2012, par la publication du livre
blanc municipal, qui présente notamment des propositions pour renforcer
la démocratie municipale et rapprocher la décision du citoyen par une charte
des municipalités.
L'UMQ juge
primordial de préserver la confiance du public envers les institutions et
appuie les actions qui visent cet
objectif, et ce projet de loi, le projet de loi n° 26, pour nous, est
justement une de ces actions qui permettra de préserver la confiance du
public envers les institutions.
L'UMQ réclame
depuis plusieurs années des outils pour récupérer les sommes qui ont été
injustement payées par des
municipalités suite à des fraudes ou de la collusion, c'est d'ailleurs une des
recommandations formulées par l'UMQ dans
son mémoire déposé à la commission Charbonneau en octobre dernier. Le projet de
loi n° 26 répond à cette demande. Dans ce contexte, l'UMQ salue la présentation du projet de loi qui
donnera au gouvernement et aux municipalités des moyens exceptionnels pour faciliter le recouvrement des sommes payées
injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le processus d'octroi de contrats
publics. C'est une excellente nouvelle pour l'Union des municipalités
mais surtout, surtout pour les citoyens, les citoyennes de toutes nos
municipalités.
De plus, par
la mise en place d'un programme de remboursement volontaire, les municipalités
pourront récupérer des sommes
importantes sans qu'elles aient besoin d'entreprendre de longues et coûteuses
procédures, une bonne nouvelle aussi
pour les citoyens. L'UMQ se réjouit également que le projet de loi prévoie une
présomption de dommage pour les entreprises fautives.
Nous croyons
qu'il est très intéressant que le projet de loi propose que dorénavant les cas
de condamnation d'une entreprise
soient des éléments considérés à l'Autorité des marchés financiers dans
l'éventualité de son intégrité au lieu d'être
un automatisme. En effet, nous
considérons que les entreprises qui satisferont aux exigences d'intégrité au
moment d'une nouvelle demande d'autorisation ne doivent pas
systématiquement être punies pour des actes fautifs antérieurs, d'autant plus
que, si elles sont en affaires, elles pourront plus facilement payer les sommes
dues, le cas échéant.
Une autre
considération que j'aimerais mettre en lumière aujourd'hui est celle du
partenariat. Je vous ai parlé en début
du livre blanc, et le livre blanc base justement l'importance des relations
avec le gouvernement du Québec et les municipalités sur une relation de
partenariat, et nous souhaitons que, dans la mise en oeuvre du projet de loi,
nous appliquions aussi le partenariat. Nous
considérons que les municipalités, à titre de gouvernement de proximité,
doivent être considérées comme des
partenaires privilégiés. D'ailleurs, le programme de remboursement volontaire sera plus efficace si les municipalités
sont davantage associées aussi dans les processus de négociation.
De façon
plus concrète, l'article 5 du projet
de loi laisse à la totale discrétion
du ministre la part d'implication qu'il accordera aux municipalités concernées dans
le processus de remboursement volontaire, même si c'est de leur argent dont il est question. Pourtant,
l'implication des municipalités concernées est cruciale pour maximiser les
résultats. Ce sont elles, les municipalités, qui possèdent l'information et qui permettront à l'administrateur du programme d'être plus efficace dans ses négociations. Par conséquent, nous croyons que les municipalités doivent être étroitement associées au processus de l'administration du programme.
Il est
fréquent que... Il sera probablement fréquent qu'un entrepreneur doive des sommes à plusieurs
municipalités. Si cet
entrepreneur s'inscrit au programme de remboursement volontaire, la loi devrait prévoir des mécanismes d'approbation
des offres et des règles de partage entre les municipalités. Ainsi, l'Union des
municipalités du Québec demande que l'article 5 du projet de loi soit
bonifié dans ce sens.
En ce qui a trait aux procédures judiciaires, l'UMQ souhaite recevoir la
confirmation qu'à l'expiration du programme
de remboursement les municipalités pourront elles-mêmes intenter une action
contre toute entreprise ou personne physique
qui a fraudé ou qui s'est livrée à une manoeuvre dolosive lors de l'octroi d'un
contrat municipal, et ce, sans
l'autorisation du ministre. Il s'avère important pour les municipalités de pouvoir ester en justice de
façon indépendante et autonome du pouvoir du
ministre lorsqu'elles souhaitent prendre action contre une entreprise
dans le cadre du projet de
loi n° 26.
D'autre
part, l'article 14 indique que le tribunal qui accueille une
action doit ajouter à la somme qu'il accorde en réparation d'un préjudice un montant forfaitaire égal à 20 % de cette somme à titre de frais engagés
pour l'application de la loi. Dans le
même ordre d'idées, l'UMQ souhaite s'assurer que cette somme revienne aussi à
la municipalité qui prend action.
• (12 heures) •
De
plus, nous sommes d'avis que la présomption de dommage fixée à 15 % du
montant total du contrat visé devrait être
augmentée à 20 % comme seuil minimum. Cette présomption de dommage est un
incitatif pour l'entreprise à s'inscrire au programme de remboursement. À notre avis, plus la présomption de
dommage sera élevée, plus l'incitatif sera efficace.
Le
projet de loi prévoit que le gouvernement peut déterminer des règles de
répartition de toute somme recouvrée entre le ministre et l'organisme public
en tenant compte des pertes subies par ce dernier, et ce, tant dans le cadre du
programme de remboursement que dans une
procédure judiciaire. Nous considérons d'emblée que, lorsque la municipalité
poursuit elle-même une entreprise, la
totalité des sommes qu'elle récupérera devrait lui appartenir. Les règles de
partage s'appliquent donc uniquement
lorsque le ministre poursuit au nom d'une municipalité ou lorsqu'un
entrepreneur participe au programme de remboursement pour des sommes
dues à une ou des municipalités.
À ce sujet, l'UMQ
rappelle que le partage des sommes récupérées doit être juste, doit être
équitable pour les municipalités concernées.
Pour ce faire, il s'avère primordial
que le ministre détermine en collaboration avec le monde municipal
le mécanisme approprié à cette fin, dans un esprit de partenariat entre
gouvernements de proximité et le gouvernement
du Québec, en accord avec les principes du livre blanc. Nous réitérons que les
municipalités doivent être considérées
comme des partenaires. En ce sens, l'article 19 devrait prévoir que le
gouvernement consultera l'Union des municipalités du Québec et les
municipalités pour déterminer les règles de répartition qui s'appliqueront.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : ...conclure rapidement, madame...
Mme Roy (Suzanne) : J'arrive à la conclusion. Alors, en conclusion, le projet de loi n° 26 répond aux principales préoccupations du monde municipal. Les neuf
amendements proposés par l'Union des municipalités du Québec visent justement à apporter certaines précisions au
niveau de certains flous juridiques et s'assurer le rôle que doivent jouer les
municipalités. Avec les bonifications proposées par l'UMQ, nous sommes d'avis
que le projet de loi n° 26 sera plus respectueux envers les municipalités qui ont des créances à faire valoir
auprès des entreprises et rendra les mécanismes de récupération de ces
sommes dues encore plus efficaces.
M.
le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, voilà l'essentiel de
notre réflexion sur ce projet de loi, et je vous remercie de votre
attention.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie pour cette présentation. Je me
tourne maintenant vers la ministre de la Justice pour un premier bloc
d'échange. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Vallée :
Mme Roy, Me Simard, merci beaucoup de votre participation. Je sais
que vous étiez hier en Outaouais, donc vous avez une semaine chargée.
Écoutez,
on a eu la chance d'échanger; la ville de Montréal était ici, la ville de Laval,
la ville de Gatineau un peu plus tôt ce matin. Pour ce qui est de la
présomption de dommage, vous semblez pas mal tous avoir un point commun,
c'est-à-dire la demande pour hausser la présomption de dommage à un montant de
20 %. On entendait hier d'autres organismes
qui considéraient déjà que le 15 % était substantiel, compte tenu que la
loi prévoit aussi la rétroactivité des intérêts,
prévoit également une somme additionnelle de 20 % des sommes totales pour
venir un peu compenser pour les coûts engendrés par la prise des
procédures, ce qui déroge un peu... ce qui déroge en fait pas mal du droit
commun.
Donc,
j'aimerais vous entendre sur les sommes de 20 % que vous réclamez.
C'est-à-dire que, la présomption de dommage,
la ville de Gatineau nous a expliqué, quant à elle, pourquoi, elle se base sur
des études puis des cas, des données bien
précises, la ville de Montréal aussi, mais, quant à vos autres membres — parce que, j'imagine, Gatineau et Montréal
ont fait leurs représentations — est-ce que vos autres membres vous ont
fait état également de situations similaires?
Mme Roy (Suzanne) : Oui, effectivement. Et ce qu'on constate, en tout cas, et on l'a vu
même après qu'il y a eu tous les travaux : la différenciation dans
les prix, on parle de différence qui tourne autour de 30 % dans certains
cas.
Puis
un autre élément aussi qui est important, on pense que le fait de le mettre à
20 % en partant va être un incitatif, pour les entreprises, pour
participer volontairement, déjà à la base, à la négociation. Si on part à
15 % au niveau de la négociation, alors...
Et, si on part à 20 %, on va être incité à dire : Ah! on va aller
tout de suite vers un remboursement pour éviter d'aller automatiquement
au 20 %. Alors, il nous semblait que le 15 %, là-dessus, n'était pas
suffisant.
Et
au niveau des dommages, bien sûr, vous parliez d'intérêts, et tout ça, mais je
veux juste vous rappeler que, dans la
grande majorité des cas, dans les grands travaux d'infrastructure dans les
municipalités, on le fait et on est souvent, en grand pourcentage... on le fait par règlement d'emprunt. Alors, ces
sommes-là que nous avons payées en trop, nous aussi, on paie de l'intérêt là-dessus depuis des années, de façon
cumulative. Alors, ça aussi... Je comprends qu'il y avait d'autres
arguments qui disaient... bon, ça s'ajoute à d'autres éléments, mais ces
éléments-là, pour les citoyens et les citoyennes
de nos municipalités, ils les ont absorbés, ils les absorbent encore et
continuent de les payer, et souvent avec intérêts.
Donc, il nous
semble que, cette présomption, en le mettant à 20 %... On est même
convaincus que ce n'est pas ça, c'est
plus que ça dans la réalité, mais ce serait au moins un incitatif à aller vers
la formule volontaire dans un premier temps.
Mme
Vallée : On a élargi,
à l'intérieur du projet
de loi, la portée de la loi à l'ensemble
des contrats conclus avec des organismes publics. Donc, on ne se limite
pas à l'industrie de la construction, on ratisse beaucoup plus large.
Est-ce qu'au sein de vos membres on vous a fait état
de la nécessité, justement, d'ouvrir la portée de la loi pour couvrir
d'autres domaines que le domaine de la construction?
Mme Roy
(Suzanne) : Oui, et je pense
que c'est important aussi pour les municipalités. Bien sûr, on parlait de
construction parce que c'est une grande
partie des investissements au niveau municipal, mais on peut penser à l'informatique, on peut penser à d'autres domaines
où effectivement les municipalités ont été appelées à travailler avec des fournisseurs, où il a pu y avoir des processus
de collusion. Alors, on pense qu'on ne doit pas exclure... il ne doit pas
y avoir qu'une seule catégorie qui est
redevable d'intervention quand il y a eu de la collusion, pour les
municipalités. Alors, que ce soit dans un domaine ou dans un autre,
effectivement, les municipalités souhaitent que ça reste élargi.
Mme Vallée : On entendait
évidemment, et vous en faites état dans votre mémoire, la volonté d'être partie
prenante non seulement aux poursuites judiciaires, mais également au programme
de remboursement volontaire. La difficulté
que ça pose, c'est que, dans certains cas, on a des entreprises qui étaient
présentes sur l'ensemble du territoire et
qui ont pu faire affaire avec bon nombre d'organismes publics, de
municipalités, et d'inclure le droit de veto de tous et chacun pouvait être un peu complexe. La ville
de Montréal nous disait : Nous, on s'inspire un peu de ce qui se fait à
l'AMF, on pense qu'il y a un certain seuil de matérialité qui pourrait être mis
en place, et donc, bon, pour la ville de Montréal,
l'AMF va nous consulter à partir d'une somme de 100 000 $; pour les
autres municipalités, à partir d'un montant équivalent à 5 % de la
mise. Le maire de Gatineau nous disait : Le seuil n'est pas nécessairement
l'élément important puisque, dans certaines
petites municipalités, un contrat de 20 000 $ peut avoir une importance
assez... sur un budget, peut avoir incidence budgétaire quand même assez
importante.
Mais comment
on peut arriver... Avez-vous des idées pour éviter de se retrouver dans une
situation où on alourdit beaucoup un
processus qui se veut plus souple, qui se veut facilitant? On veut l'éviter. On
reconnaît que les municipalités, d'une
façon ou d'une autre, seront appelées à collaborer puisque, pour
l'administrateur du programme, lorsqu'on aura porté à son attention des contrats qui concernent des organismes publics
ou des municipalités, il va d'une façon tout à fait naturelle entrer en communication avec ces
organismes-là pour le partage d'information, pour assurer d'avoir tout ce qu'il
faut, mais en même temps comment on peut
s'assurer de venir rejoindre votre objectif, vos attentes sans pour autant
alourdir indûment le processus?
Mme Roy
(Suzanne) : Bien, d'abord,
concernant le seuil, effectivement, pour la ville de Montréal, un seuil de
100 000 $, pour certaines
municipalités, c'est une grande partie de leur budget annuel, alors il faut,
là-dessus, je pense, rester souple.
Mais on est capables de travailler en amont, de s'entendre sur des critères de
répartition — donc,
effectivement, une entreprise
pourrait avoir travaillé dans plusieurs municipalités au Québec, avec des
grandeurs de contrats différentes d'une
municipalité à l'autre — donc d'élaborer avec le ministère des critères pour qu'on puisse
après répartir de façon équitable les
sommes qui seront encourues. Il y a des modèles qu'on pourrait mettre en place
préalablement pour ne pas refaire au
cas à cas, et on vous offre toute notre collaboration pour travailler,
justement, avec le ministère pour élaborer à la base les différents modèles qui pourraient être utilisés pour la
répartition selon les différents cas qui pourraient se présenter.
Mme Vallée :
Est-ce que les unions municipales... parce que je sais que ce n'est pas toutes
les municipalités du Québec, toutes
les municipalités qui sont membres de l'UMQ, mais est-ce que les unions
municipales pourraient... Est-ce qu'il pourrait être envisageable
qu'elles puissent être une espèce de courroie de transmission dans ce
processus-là de programme de remboursement volontaire?
• (12 h 10) •
Mme Roy
(Suzanne) : Oui, tout à
fait, tout à fait. Avec la Fédération québécoise des municipalités et l'Union
des municipalités du Québec, je pense qu'en ayant particulièrement travaillé en amont sur les critères applicables, donc, nous pouvons agir à ce titre-là d'intermédiaire. Mais
il faut avoir d'abord avoir travaillé ensemble en amont pour s'entendre
sur la répartition.
Mme Vallée : Parce
qu'une autre avenue qui pourrait être aussi envisagée serait de s'inspirer de
la Loi sur la faillite et
l'insolvabilité, qui prévoit que les ententes seront convenues à la majorité,
en nombre et en valeur. Et donc c'est une avenue aussi qui pourrait peut-être... Je ne sais pas si ce type de
processus là pourrait être acceptable pour éviter... En fait, l'objectif, c'est d'éviter que, pour des raisons
complètement autres, on ait une municipalité qui fasse obstacle à un règlement
qui pourrait s'avérer fort intéressant pour d'autres municipalités et fasse
obstacle aussi à la réhabilitation éventuelle d'une
entreprise, évidemment, si l'offre est jugée acceptable. Parce que c'est
certain que l'administrateur du programme devra aussi s'enquérir... sera accompagné d'une équipe pour établir ce
qui est un règlement équitable. Il n'est pas question... On l'a mentionné, on ne le dira pas assez,
l'objectif du projet de loi, ce n'est pas d'aller chercher une réhabilitation à
rabais, ce n'est pas de se magasiner
une réhabilitation, là, on s'entend très bien. Mais en même temps il peut y
avoir des éléments propres à la
nature humaine, simplement, qui pourraient faire obstacle à un règlement, et
ça, évidemment, on ne voudrait que ça
survienne parce que, là, ça viendrait un peu à l'encontre de l'objectif du
programme de remboursement volontaire, puis on est conscients aussi des
coûts de la judiciarisation.
Mme Roy
(Suzanne) : Exact. Bien, ça
peut faire partie des discussions. On le citait dans notre mémoire, d'ailleurs,
comme exemple pour voir un mode de répartition, sur lequel il faut envisager...
Ce qui est important, c'est que les municipalités soient vraiment partie prenante, soient
informées aussi, hein, pour ne pas arriver en bout de ligne, puis voici les 0,02 $ du sac desquels tu hérites, de ce
remboursement volontaire, là. Alors, ça aussi, c'est important au niveau de
l'information, de la communication avec les
municipalités en amont, pendant les négociations et à la fin. Je ne sais pas,
Me Simard...
Mme
Simard (Diane) : Oui, merci. Bonjour. Bien, tout à fait, on partage
cet objectif-là, en fait, qui n'est pas de bloquer les règlements hors cours dans le cadre du programme de
remboursement. Et puis on sait très bien que, lorsqu'il y a plusieurs municipalités qui sont concernées par
des contrats, la question va se poser, c'est pour ça qu'on n'est pas allés
jusqu'à proposer un droit de veto à
certaines municipalités. Puis, comme disait notre présidente, bien il y a
tellement une diversité dans le monde
municipal qu'un petit contrat, c'est quoi, puis un gros contrat, c'est quoi?
Donc, ça dépend toujours du budget de
la municipalité. C'est pour ça que le seuil, ce n'est pas quelque chose non
plus qu'on a retenu comme étant possible et favorable à l'ensemble des
municipalités.
Et,
dans le mémoire qu'on a présenté, justement, on amenait comme piste de solution
les mécanismes qui sont prévus à la
Loi sur la faillite et l'insolvabilité. On n'a pas eu le temps suffisamment
d'analyser en détail quels mécanismes pourraient
être transférés, mais on pense qu'il y a là-dedans des choses... Lorsqu'il y a
plusieurs créanciers, lors d'une faillite, il y a déjà des mécanismes,
alors je pense qu'on pourrait, oui, s'en inspirer puis travailler ensemble avec
vos légistes au ministère pour voir de
quelle façon ça pourrait être transféré dans le cadre du projet de
loi n° 26. Ça pourrait être très intéressant.
Mme
Vallée : Dans le projet de loi, on ne voit nulle part, là, de
disposition qui prévoit qu'une municipalité qui fait le choix de
poursuivre devra partager le reliquat, là. Évidemment, la municipalité qui fait
le choix d'entreprendre elle-même ses
procédures judiciaires pour des contrats dont elle a assumé les coûts va
récupérer les sommes, va assumer les
frais et va récupérer les sommes. Par contre, évidemment, si nous devons... si
le ministère de la Justice, la Procureur général doit entreprendre au
nom d'une municipalité qui refuse d'entreprendre des poursuites, à ce
moment-là, là, au niveau du partage, il y a
des chances que l'objectif soit que les coûts de la procédure puissent être
remboursés, là, évidemment. Parce que, dans certaines situations, il est possible qu'une
municipalité ne souhaite pas aller de l'avant, n'ait pas les moyens, ne souhaite pas aller de l'avant
pour... Et ça aussi, il faut éviter que, lorsqu'on a la preuve, lorsqu'on
a l'information à
l'effet qu'une entreprise
a commis une manoeuvre dolosive, a commis une fraude, s'est livrée à de tels
actes... bien, qu'on puisse aller récupérer
les sommes versées en trop. Puis on peut comprendre, il peut y avoir toutes
sortes de raisons qui vont faire en sorte qu'une municipalité, politiquement,
décide de ne pas aller de l'avant ou se dise : Bien, je n'ai pas les moyens financiers pour
assumer les poursuites, mais, à ce
moment-là, il sera possible pour la ministre d'entreprendre les poursuites au
nom de la municipalité, évidemment après avoir donné un préavis.
Pour
vous, qu'est-ce qui pourrait être un
préavis raisonnable? Parce qu'on est à l'intérieur d'une loi qui a une portée
limitée dans le temps, et il faut permettre
à tout le monde de pouvoir préparer le dossier, monter le dossier. Qu'est-ce
qui pourrait être un délai de préavis raisonnable donné à la
municipalité pour déterminer si, oui ou non, on va de l'avant?
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Moi, je vous donne un préavis
qu'on achève ce bloc, et donc il faudrait une réponse courte.
Mme Vallée :
Est-ce qu'on peut prendre le temps sur le prochain échange? Je peux réduire...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Oui, oui, oui, je vais faire ça. Mais si
c'était possible de garder ça pour respecter le cadre qu'on s'est fixé. Merci.
Mme Vallée :
Parfait, merci. Désolée.
Mme Roy (Suzanne) : On n'a pas consulté nos membres sur un préavis, mais, souvent,
j'imagine que dans la plus grande...
le plus souvent ça va être effectivement le manque de ressources financières pour
poursuivre elles-mêmes ou donc pour prendre action elles-mêmes où les municipalités
ne voudraient pas prendre action, parce qu'à partir du moment où elles peuvent récupérer de l'argent pour leurs citoyens
je pense qu'il n'y a là que des avantages, donc. Mais, en termes de préavis, on n'a pas regardé avec nos membres quel serait le préavis.
Mais, au-delà du préavis, je pense, ce qui
est intéressant, c'est qu'il y ait une discussion avec les municipalités. Et, à partir du moment où la raison, c'est : On n'a pas les moyens, nous, de faire des démarches, là,
la ministre va le faire pour nous, mais, s'il y a
d'autres raisons, je pense
qu'il doit y avoir une discussion avec la municipalité.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous
remercie. Et je me tourne maintenant
vers le porte-parole de l'opposition
officielle en matière de justice, le député de Lac-Saint-Jean, pour votre bloc
d'intervention.
M.
Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, bonjour et bienvenue. Vous avez plusieurs
modifications qui portent sur la collaboration, l'importance de travailler avec le gouvernement, et vous souhaitez que ça soit davantage présent dans le texte législatif pour vous assurer, dans le fond, qu'il y aura
cette collaboration. Est-ce
que, selon vous, ça doit se faire par
amendement législatif? Puis vous souhaitez que cet encadrement-là soit
davantage obligatoire, c'est bien ça?
Mme Roy
(Suzanne) : Oui, tout à
fait, je pense, pour nous assurer, au niveau des municipalités, que les règles
seront claires, qu'on y aura contribué, que la relation sera vraiment une
relation de partenariat et que surtout, pour les citoyens de chacune de nos municipalités, il y
aura vraiment une équité. C'est vraiment la question, oui, de partenariat
mais aussi d'équité entre les différentes
municipalités qui nous préoccupe particulièrement, parce qu'on est foncièrement
convaincus qu'on va retrouver des
entreprises qui auront agi de la même façon envers différentes municipalités.
Donc, il faut s'assurer, à ce
niveau-là, que les citoyens de chacune de ces municipalités-là puissent
retrouver ce qu'ils paient probablement encore.
M. Cloutier :
Je ne suis pas certain que je saisis bien l'angle de l'équité. Vous souhaitez
quoi exactement?
Mme Roy (Suzanne) : Bien, l'angle de l'équité quand je dis qu'on veut travailler ensemble
avec le législateur pour mettre en amont des règles, parce que, souvent,
dans plusieurs cas où il y aura des municipalités d'impliquées, plusieurs municipalités d'impliquées, on veut
s'assurer que tout le monde puisse obtenir le maximum pour ses citoyens,
donc, en définissant d'avance — on parlait tantôt de la loi sur les
faillites où chacun des créanciers obtient sa juste part — en
travaillant en amont à s'assurer que les critères soient corrects pour
l'ensemble des municipalités, parce que ce projet de loi là, bien sûr, c'est très important pour toutes les
villes, les grandes, bien sûr, mais aussi pour les moyennes puis les
plus petites municipalités, parce que ça a aussi eu de l'impact sur leurs
citoyens puis sur leur taxation.
M.
Cloutier : Donc, l'angle de l'équité, c'est que vous avez peur
que parfois il pourrait y avoir des règlements qui ne seraient pas à la hauteur pour des municipalités qui n'auraient
pas eu la chance, dans le fond, d'exprimer leurs...
• (12 h 20) •
Mme Roy (Suzanne) : Non, je le prends dans
l'autre angle, c'est-à-dire plus on va travailler ensemble à élaborer des critères à la base, plus on va s'assurer que
tout le monde va se sentir à l'aise. Donc, oui, de l'inscrire en modification
dans le projet de loi est quelque chose d'important pour nous.
M. Cloutier :
Donc... Puis, avant qu'il y ait un accord avec une entreprise ou une
municipalité directement concernée, vous êtes d'avis que la municipalité
devrait pouvoir s'exprimer, avant que l'accord soit conclu?
Mme Roy (Suzanne) : Oui. On n'est pas allés jusqu'au droit de veto, on l'a exprimé, Me
Simard l'a bien exprimé tout à l'heure, mais on est d'avis qu'il doit y
avoir aussi des discussions avant d'arriver à un règlement final.
M.
Cloutier : Puis vous
partagez les mêmes préoccupations que les autres municipalités à l'effet que le
plafond devrait être bonifié, de ce...
Mme Roy
(Suzanne) : Oui, tout à fait. Et bonifier le 20 %, je ne l'ai
peut-être pas exprimé assez clairement, devrait, pour nous, être un seuil
minimum, parce que certaines municipalités se sont bien outillées — vous
avez reçu Gatineau ce matin — où ils peuvent démontrer, dans certains cas,
que ce n'est pas 20 %, mais que c'est 30 % dans tel cas. Alors, pour nous, le seuil de 20 % est le
seuil minimum, où on présume du 20 % sans avoir besoin... Mais, du moment
où on a des preuves que c'est plus de 20 %, il ne devrait pas être
limitatif, ça devrait être un seuil minimum.
M.
Cloutier : Est-ce qu'à votre point de vue les petites
municipalités ont ce qu'il faut pour entamer les procédures judiciaires
nécessaires ou vous avez plutôt l'impression qu'ils vont se tourner vers le
gouvernement?
Mme Roy
(Suzanne) : J'ai l'impression que, dans plusieurs cas, étant donné les
ressources financières, les ressources
humaines en termes de juristes aussi — et souvent ils ne voudront pas aller à
l'externe pour occasionner d'autres frais — ils vont se tourner vers
le gouvernement.
M. Cloutier : J'imagine que le gouvernement, lui, n'a pas l'intention
de se tourner à l'externe pour aller chercher des ressources supplémentaires, mais ça fera partie, j'imagine, de notre
réflexion plus globale. Mais ça pose... encore une fois, ça soulève l'enjeu des ressources. Ça
m'apparaît... Je vous pose la question, mais, je pense, je connaissais bien la
réponse. La réalité des petites
municipalités, c'est qu'elles sont déjà complètement débordées. Si en plus il
fallait leur demander de... La
collaboration, elle est nécessaire, mais en même temps je pense que l'aide
gouvernementale, elle est plus qu'appréciée, j'en suis convaincu.
Mme Roy
(Suzanne) : C'est pour ça qu'un projet de loi comme celui-là nous
permet d'aller plus loin pour la récupération.
Alors que ça aurait peut-être été possible juste auprès des plus grandes
municipalités, là ça offre une possibilité pour l'ensemble des
municipalités du Québec, et c'est le côté intéressant aussi que nous apprécions
du projet de loi.
M. Cloutier :
Très bien. Je vous remercie.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le député de
Lac-Saint-Jean. Est-ce qu'il y a
d'autres membres de l'opposition officielle qui ont des questions? Non, ça va? Mme la députée de Montarville, à vous la parole.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, Mme Roy, Mme la mairesse et également présidente de l'UMQ.
On
a eu une suggestion ce matin que je n'ai pas trouvée inintéressante, loin de
là. Vous savez que cette loi, c'est une
loi d'exception qui a une durée de vie de cinq ans; le Vérificateur général nous a fait la suggestion de l'étendre à 10 ans, compte tenu de la complexité des dossiers, du
temps. Et c'est toujours long, les procédures judiciaires, même si elles sont
abrégées par ce projet de loi spécial... projet de loi d'exception, pardon.
Qu'est-ce que vous pensez de cette suggestion-là
et qu'en penseraient vos membres? Est-ce que c'est une préoccupation qui a été
soulevée par les membres de l'UMQ?
Mme Roy
(Suzanne) : Ça n'a
pas nécessairement été soulevé par les membres, mais c'est sûr
que plus on ouvre l'éventail, donc,
les possibilités pour récupérer de l'argent pour nos citoyens, donc, par
exemple, le fait d'allonger la durée de vie de cette loi de cinq à 10 ans, ça ne peut être que positif pour
nos membres. Alors, ça nous donne une avenue supplémentaire ou du temps, parce qu'on le sait, au niveau du
système de justice ça peut être long quelquefois, et des fois ne serait-ce
que pour rassembler tout ça. Alors, effectivement, le 10 ans n'est pas
inintéressant pour nous.
Mme Roy
(Montarville) :
Parfait. Par ailleurs, on parle de l'UMQ. Vous représentez 80 % des élus
de la province, mais il y a combien de municipalités? Combien de municipalités,
de villes sont membres de l'UMQ?
Mme Roy (Suzanne) : Un peu plus de
300.
Mme Roy
(Montarville) : Un
peu plus de 300. Sur ces municipalités de toutes tailles, parce qu'on en parle,
c'est une préoccupation pour le recouvrement des sommes et justement
faire le travail, tout le travail d'enquête juridique qu'il y aura autour pour arriver avec de la preuve également
pour demander à ces entreprises de nous rembourser, selon vous, sur ces 300 municipalités, quel est le
pourcentage... Je ne vous demanderai pas un chiffre, là, c'est trop... ce ne
serait pas approprié, mais, selon
vous, le pourcentage qui auraient de la difficulté à remplir elles-mêmes les
objectifs du projet de loi n° 26, qui n'auraient pas les effectifs, qui n'auraient pas de contentieux
suffisant, on parle de quel type de municipalité puis d'un pourcentage, peut-être,
là...
Mme
Roy (Suzanne) : Je n'irai pas en pourcentage, mais je dirais que
toutes les municipalités de moins de 25 000 de population, souvent, ne vont pas avoir de
contentieux ou très peu, seulement au niveau du service du greffe. Donc, c'est
beaucoup de municipalités, là. Alors, en
pourcentage, les municipalités de moins de 25 000, je ne sais pas si
Me Simard a ça en mémoire comme ça.
Mme Simard (Diane) : Je ne voudrais
pas avancer de chiffre.
Mme Roy
(Montarville) :
...ça nous donne une idée, les municipalités de moins de 25 000.
Mme Roy (Suzanne) : ...moins de
25 000, c'est clair que ça devient beaucoup plus difficile...
Mme Roy
(Montarville) :
Dans l'application.
Mme Roy (Suzanne) : ...dans
l'application, dans les ressources qu'elles possèdent pour pouvoir intervenir.
Mme Roy
(Montarville) :
D'où, justement, l'implication de la ministre, du ministère pour...
Mme Roy (Suzanne) : Tout à fait.
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. Et ça ne veut pas dire non plus
qu'il n'y a pas eu de contrat frauduleux dans ces petites villes, ces
villes de plus petite taille.
Mme Roy (Suzanne) : Non, non, tout à
fait, là.
Mme Roy
(Montarville) : Autre commentaire. Hier, c'était un
commentaire de la ville de Laval que nous avons trouvé fort intéressant, c'est un ajout qu'ils voulaient faire, et je me
demandais si vos membres en avaient parlé entre eux ou si vous avez eu écho de ça, parce que, tout
comme vous, le mémoire de la ville de Laval avait été déposé aussi devant
la commission Charbonneau. Donc, vous êtes
au fait et vous voyez où je m'en vais. Le fait d'ajouter au projet de
loi n° 26 des articles qui
permettraient à la ville de récupérer les sommes qui auraient été payées à des
élus, ou des fonctionnaires, ou des
employés qui auraient participé à des manoeuvres dolosives, frauduleuses,
qu'est-ce que vous en pensez? Qu'est-ce que vos membres en pensent?
Mme Roy (Suzanne) : En fait, on n'a
pas fait la discussion face au projet de loi n° 26 sur cet aspect-là.
Mme Roy
(Montarville) :
...c'est un ajout, mais je voulais savoir si vous avez eu des échos de ça.
Mme Roy
(Suzanne) : Oui, c'est ça.
Et on n'en a pas discuté avec nos membres. Laval est effectivement dans
une situation particulière où c'est très d'actualité, je dirais, donc a
présenté ce point de vue là, mais ça nécessiterait définitivement plus d'analyse. En tout cas, je
pense que le législateur sera à même de soupeser le pour ou le contre d'aller
dans cette orientation, mais nous ne sommes pas allés plus loin, nous, dans notre
analyse à ce niveau-là.
Mme Roy
(Montarville) : Je me demandais si ça avait suscité de
l'intérêt ou des discussions, du moins auprès d'autres élus de d'autres
municipalités.
Par ailleurs,
pour ce qui est des sommes, vous demandez, tout comme la ville de Montréal et
d'autres villes, que la présomption
soit de 20 %. Dans quelle mesure ce fameux 20 %... Parce qu'il faut
penser que c'est quand même un chiffre arbitraire,
qu'on s'est basé, entre autres, sur le fait... les témoignages qui ont été
entendus, que certains contrats auraient été gonflés de 13 % à
30 %. Pourquoi le 20 % est-il si important pour vos membres?
Mme Roy
(Suzanne) : Il est important
parce qu'on pense que c'est plus de 15 %. On l'a vu, hein? Même si on n'a
pas toute la documentation, plusieurs municipalités témoignaient des
changements de prix à la baisse après qu'on ait commencé, qu'il y ait des démarches qui se fassent partout au Québec au
niveau de la collusion. Donc, il y avait là cet élément-là.
Et l'élément
aussi qui est extrêmement important, on pense qu'en mettant cette présomption à
20 % on va inciter plus
d'entreprises à aller vers la contribution volontaire de façon préalable. Parce
que c'est comme si la barre de négociation est à 15 %, à partir du moment où on dit qu'on présume que c'est
15 %. Alors, si on la met à 20 %, ça peut être un incitatif de dire, pour les entreprises : Bien, on va
aller vers la déclaration volontaire et on va discuter avec le ministère pour
une entente. Et, si on part à
15 %, on risque de finir à 10 %. Si on part à 20 %, on a plus de
chances d'arriver autour de 15 %.
Mme Roy
(Montarville) :
Le 15 % étant un minimum. C'est une présomption, le 15 %.
Mme Roy
(Suzanne) : Oui, on parle
vraiment d'un minimum, je l'ai spécifié. Je disais que, bon, Gatineau, entre
autres, a beaucoup de documentation qu'ils
sont, de façon générale, au-delà du 20 %. Donc, quand on peut démontrer
que c'est plus de 20 %, effectivement, que l'on puisse aller chercher plus
de 20 %. C'est vraiment le seuil minimal.
Mme Roy
(Montarville) :
Bien, je vous remercie infiniment de vos précisions. Très clair. Merci.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je
vous remercie. M. le député de La Prairie, je pense que vous avez des
questions pour nos témoins.
M. Merlini : Merci, M. le Président.
D'abord, merci pour le mémoire, Mme Roy, de votre corporation.
J'ai quelques
questions concernant certains points en particulier, en commençant par la
quittance, que vous dites, pour les
contrats visés sans l'autorisation de la municipalité concernée. J'ai posé
cette question à d'autres, et il y a eu des réponses différentes, que ce
soient des associations d'entrepreneurs ou de constructeurs.
Est-ce que
vos membres souhaiteraient une quittance globale ou une quittance par contrat?
Parce qu'on parlait tantôt du
partage, comment je pourrais dire, des sommes à recouvrer, mais là, à ce
moment-là... Comme la ministre le dit, on
ne s'achète pas une quittance, on ne s'achète pas une réhabilitation par la
quittance. Alors, à ce moment-là, est-ce qu'une quittance globale satisferait les membres de l'UMQ ou vraiment il
faudrait y aller contrat par contrat, surtout dans le cas d'une
entreprise qui a eu des contrats avec plusieurs de vos membres?
• (12 h 30) •
Mme Simard
(Diane) : Merci. En fait, on n'a pas analysé cette question-là, mais,
pour avoir entendu, hier, les discussions
là-dessus, parce que je les ai entendues sur le Web, en voiture, je dirais que
chaque cas est tellement différent... Parce
que, là, je sais que ce qu'on a discuté ici, c'est à savoir un entrepreneur qui
se présente dans le cadre du programme de
remboursement, il se présente pour trois contrats, mais en fait il y en a
d'autres, hein, c'est sûr qu'il ne peut pas donner une quittance pour les contrats sur lesquels il
n'y aura pas de discussion. Donc, il peut cacher des contrats. Donc, je pense
que ça mérite d'être analysé plus
longuement, les quittances, parce qu'il faut voir qu'il y aura tellement de cas
différents que c'est difficile, je pense, de donner une réponse globale
pour l'ensemble des situations.
M.
Merlini : Est-ce qu'à ce moment-là vous ne voyez pas ça comme un
découragement, pour l'entrepreneur qui souhaite
régler ces enjeux-là, de dire : Bien, avec une municipalité... Si on donne
l'autorisation à la municipalité concernée de donner la quittance, et une autre dit non, l'entrepreneur va-t-il se
décourager puis dire : Bien, je vais laisser faire, dans ce cas-là,
puis je vais prendre mes chances de régler hors cour possiblement?
Mme Simard
(Diane) : Bien, je répondrais, là-dessus, qu'avec les mécanismes qu'on
voudrait voir inscrire à la loi concernant,
justement, les règles de partage, cette question-là va être réglée aussi par
rapport aux quittances, parce que l'entrepreneur
qui se présente dans le cadre du programme de remboursement pour éviter des
procédures judiciaires a tout intérêt
à présenter l'ensemble des contrats dans lesquels il a fait des manoeuvres
dolosives, et ce sera dans l'intérêt aussi de l'administrateur du programme de régler l'ensemble des dossiers pour
ne pas, justement, que l'entrepreneur se fasse poursuivre par la suite pour un contrat qu'il n'aura pas dévoilé. Je
pense que c'est dans son intérêt de régler l'ensemble des contrats et
puis que la quittance ait lieu sur l'ensemble des contrats.
Nous, on veut
que ces gens-là continuent de faire des affaires puis on veut que le programme
de remboursement, il fonctionne.
Donc, c'est ça, le but, hein, c'est qu'il n'y ait pas de poursuite par la
suite. Ça fait que je pense que ce serait de s'entendre sur une forme de
quittance qui va faire en sorte que tous les dossiers seraient réglés à la
satisfaction des municipalités, puis les mécanismes qui
seront mis en place dans le partage de l'équité devraient aussi régler cette
question-là.
M.
Merlini : Dans le but avoué du projet de loi de recouvrer ces
sommes-là, vous voulez que la présomption de dommage soit augmentée à 20 %. Vous dites que plus la présomption
de dommage sera élevée, plus l'incitatif sera efficace.
Voyez-vous
d'autres mesures, d'autres incitatifs qui rendraient le remboursement
volontaire encore plus intéressant et
qui rempliraient les objectifs du projet de loi n° 26, qui est, dans
le fond, le recouvrement des sommes qui ont été payées indûment, là?
Mme Roy (Suzanne) : Bien, il y avait cet élément-là qu'on a sorti dans le mémoire, puis il
y avait aussi le fait qu'après ça ne soit pas systématiquement regardé
au niveau de l'AMF, là, que les gens puissent continuer d'avoir de l'argent pour pouvoir rembourser et faire des
affaires. On n'est pas allés plus loin au niveau de d'autres critères ou
d'autres incitatifs pour que les entreprises contribuent volontairement.
Mme
Simard (Diane) : Si je peux compléter, sur le 20 %, oui, on pense
que c'est une mesure incitative importante, mais il y a aussi le fait,
comme ça a été démontré par la ville de Laval, et de Gatineau, et de Montréal,
que c'est très difficile de faire la preuve,
hein, de manoeuvres dolosives. Donc, c'est pour ça que, le 20 %, on tient
à avoir le 20 %, parce que, bien
que devant la commission Charbonneau beaucoup de témoignages ont démontré que
ça pouvait aller jusqu'à 30 %,
les sommes injustement payées, c'est très difficile, pour une ville, d'en faire
la preuve. C'est une première, en fait, au Québec, on n'a jamais eu vraiment de dossier là-dessus en cour. Donc,
c'est pour ça qu'on y tient aussi, au 20 %, que ce soit augmenté de
15 % à 20 %, la présomption de dommage, parce que ce n'est pas facile
de faire ce genre de preuve là. Puis je pense que les villes aussi qui
sont concernées vous l'ont mentionné.
M.
Merlini : Est-ce que vos membres souhaiteraient également — la ville de Montréal le souhaitait, l'a
présenté dans son mémoire — y inclure aussi les avantages qui étaient
non pécuniers, dans les manoeuvres dolosives et de fraude, les choses qu'on ne peut pas identifier clairement
dans un contrat mais, disons, le maire Coderre le disait, des rénovations
de maisons, des pavages d'entrée? Est-ce que
c'est quelque chose que vos membres aussi souhaiteraient que ça soit pris
en considération? Surtout quand vous parlez
«en fonction des pertes subies par ce dernier», est-ce que ça rentrerait dans
cette chose-là?
Puis j'aimerais
rajouter, en plus de ça : Est-ce que, dans la... «En fonction des pertes
subies», vous avez fait mention tantôt,
Mme Roy, des règlements d'emprunt, les intérêts encourus depuis le temps
que vous avez fait le règlement d'emprunt. Est-ce que ça se limite, les
pertes subies, non seulement aux montants du contrat, mais les surcharges, les
montants d'emprunt et les avantages qui ne sont pas nécessairement pécuniers?
Mme Roy
(Suzanne) : Bien, c'est pour ça que, quand on parle du 20 %, on
dit à quel point c'est difficile et complexe
de démontrer ça. Vous venez de citer
plein d'exemples qui font partie du 20 % et des impacts qu'ont eus ces
contrats-là ou ces montants-là qui étaient supérieurs au juste prix qu'auraient
dû payer les citoyens et les citoyennes. Pour
nous, il n'y a pas de limitation à juste le contrat. Si on a des
éléments démontrant qu'il y a plus de 20 %, oui, il faut aller au-delà de ça. Mais c'est complexe.
C'est pour ça que ce seuil-là, pour nous, est l'élément...
Et,
du moment où on a plus d'éléments — vous en mentionnez quelques-uns — qui vont démontrer plus de 20 %,
alors il ne faut pas inscrire, au niveau
législatif, 20 %, mais «seuil minimum de 20 %». Peut-être qu'on
n'aura pas beaucoup de cas où on va
pouvoir aller au-delà de ça, mais cette possibilité-là, elle est là. Il faut
pouvoir la prendre, il faut que le ministre puisse la prendre.
M. Merlini :
Alors, c'est de là l'importance...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous souligne qu'il nous reste environ deux
minutes à ce bloc d'échange.
M.
Merlini : O.K., merci. D'où l'importance de bien évaluer ces pertes
subies là et l'importance que vous accordez, l'Union des municipalités, à être à la table, à être en partenariat dans
tout ce qui a trait aux négociations, là, par rapport aux sommes à
recouvrer, et tout ça.
Mme Roy (Suzanne) : Tout à fait, parce qu'au-delà du montant supérieur qu'on présume, bien,
il y a les impacts que ça a eus sur la municipalité et que ça a encore,
là, sur les décisions qui ont été prises.
M.
Merlini : Et le niveau de l'impact, comme la ministre le disait
tantôt, un contrat de 20 000 $ pour Saint-Philippe, la municipalité de Saint-Philippe, ce n'est pas la
même chose qu'un contrat de 20 000 $ pour Sainte-Julie puis ce n'est
pas la même chose qu'un contrat de 20 000 $ pour la ville de
Montréal.
Mme Roy (Suzanne) : Et, toutes proportions gardées, ça a la même importance pour les
citoyens dans chacune des municipalités.
M. Merlini :
C'est ça. Exactement, exactement. Merci, Mme Roy.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça
complète pour M. le député de La Prairie?
M. Merlini :
Oui.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il
reste environ une minute du côté gouvernemental.
Mme Roy
(Suzanne) : Bien, merci
beaucoup de nous avoir entendus. Et on est bien heureux, on le réitère, de
voir ce projet de loi là, qui va être à l'avantage des citoyens et des
citoyennes dans chacune des municipalités.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) :
Alors, je vous remercie à mon tour, Mme la mairesse, Me Simard, d'avoir
présenté le point de vue de l'Union des municipalités du Québec.
Sur ce, nous
avons bien travaillé, et la Commission des institutions ajourne ses travaux au
10 février, à 10 heures, afin de terminer les consultations
particulières et auditions sur le projet de loi n° 26. Merci et bon
week-end.
(Fin de la séance à 12 h 37)