(Quatorze heures six minutes)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je demanderais aux personnes présentes,
tel que nous avons l'habitude de le faire, de fermer les appareils qui sonnent
pour ne pas être dérangés. Merci.
Le mandat de la Commission des institutions est
de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi modifiant le Code
de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant la
perception des amendes.
Alors, Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Bonne nouvelle. Alors, nous allons entreprendre, cet après-midi, les auditions qui portent sur
ce rapport... en fait, la loi qui avait été adoptée, la loi de 2003...
chapitre 5 des lois des 2003, pardon, qui modifiait le Code de procédure
pénale, le Code de la sécurité routière et d'autres
dispositions législatives. Selon la
loi, un rapport devait être produit
après cinq ans de l'entrée en vigueur de la loi qui a eu lieu en 2004. Il y a
eu effectivement un rapport qui a été déposé à l'Assemblée nationale en 2011, et ça illustre les propos que nous
tenons ici, à la commission, régulièrement sur la surcharge de travail de cette commission, puisque
nous nous retrouvons en 2014 et que nous pouvons, trois ans plus tard,
procéder à l'audition du rapport.
Auditions
Alors, sans
plus tarder, nous avons le plaisir de recevoir trois groupes cet après-midi,
en premier des représentants du ministère de la Sécurité publique, alors, je vais vous demander, dans un premier temps, pour le bénéfice des membres de la commission et de nos auditeurs, de vous
présenter et de nous faire la présentation de votre rapport que vous voulez
nous faire, et il y aura
ensuite un échange avec les membres de la commission. Alors, je vous cède la
parole, Mme Beausoleil.
Ministère de la
Sécurité publique
du Québec (MSPQ)
Mme
Beausoleil (Johanne) :
Merci. Alors, bonjour, M. le
Président, membres de la Commission des institutions. Alors,
mon nom est Johanne Beausoleil, je suis sous-ministre associée à la Direction générale des services
correctionnels du ministère de la Sécurité publique. Alors, c'est avec
un grand plaisir que nous sommes avec vous aujourd'hui pour présenter le rapport pour la partie,
principalement, des services correctionnels, et mes collègues vont renchérir
par la suite.
Alors, en
vigueur depuis le 16 mai 2004, la Loi modifiant le Code de sécurité routière et
le Code de procédure pénale
concernant la perception des amendes... celle-ci a été évidemment abolie avec
l'emprisonnement pour défaut de paiement
d'amendes à la suite d'une infraction en matière de circulation routière et de
stationnement. L'article 30 de cette loi prévoyait que le ministère de
la Sécurité publique devait, dans les cinq ans qui suivaient l'entrée en
vigueur de l'ensemble des dispositions de la loi, faire au gouvernement un
rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi.
Pour
effectuer la présentation de la partie de la Direction générale des services
correctionnels du ministère de la
Sécurité publique, nous avons demandé à Mme Marlène Langlois,
directrice des programmes et responsable de ce suivi, de vous le présenter. Voici la partie concernant
le ministère de la Sécurité publique, Mme Langlois, et par la suite on pourra
répondre à vos questions.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, Mme Langlois, dans un
premier temps, vous identifier, et la
parole sera à vous.
• (14 h 10) •
Mme Langlois (Marlène) : Alors, mon
nom est Marlène Langlois, je suis directrice des programmes à la Direction
générale des services correctionnels du ministère de la Sécurité publique.
Alors, M. le Président, mesdames et messieurs, membres
de la commission, c'est un plaisir pour moi d'être ici pour discuter du rapport du suivi de la Loi
modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant
la perception des amendes.
Je précise d'entrée de jeu que, même si ce
rapport était sous la responsabilité du ministère de la Sécurité publique, il a été produit en 2011 en
collaboration avec le ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire, la Société de l'assurance
automobile du Québec et le ministère de la Justice du Québec. Par conséquent,
je vais présenter les résultats qui
concernent le ministère de la Sécurité publique, et mes collègues présenteront
ensuite leurs propres résultats.
Permettez-moi d'abord un petit rappel des
raisons pour lesquelles nous sommes réunis ici.
Depuis
des décennies, plusieurs spécialistes avaient dénoncé l'utilisation de
l'emprisonnement pour non-paiement d'amendes,
et ce, tant par souci d'équité et de justice, parce que ce sont toujours les
plus démunis qui se retrouvent en prison,
que par le besoin de plus en plus important de places dans les établissements
de détention du Québec. Dans la foulée d'une
série de travaux, l'Assemblée nationale a adopté, le 12 novembre 2003, la Loi
modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant la perception des amendes. En
vigueur depuis le 16 mai 2004, cette
loi a aboli l'emprisonnement pour
défaut de paiement d'amendes à la suite d'une infraction en matière de circulation routière et de stationnement.
L'article 30 de cette loi prévoyait que le ministère de la Sécurité publique doit, dans les cinq ans qui suivent l'entrée en vigueur de l'ensemble des dispositions de la loi, faire au gouvernement un rapport sur la mise en
oeuvre de la présente loi de même que l'opportunité, le cas échéant, de proposer les modifications qu'il juge utiles. C'est donc ce rapport qui fera l'objet de ma présentation,
laquelle se déroulera comme suit : la présentation du mandat de la
Direction générale des services
correctionnels du ministère de la
Sécurité publique; le rappel du problème de l'incarcération pour non-paiement
d'amendes; l'historique et l'objectif de la loi et les résultats obtenus depuis l'adoption
de la loi; les avantages pour les services correctionnels et pour la société
en général; et une brève conclusion.
Le mandat de
la Direction générale des services correctionnels. La Direction générale des
services correctionnels a le mandat
d'assurer la garde des personnes qui lui sont confiées ainsi que leur suivi
dans la communauté jusqu'à la fin de
leur peine. Le mandat est défini comme suit : éclairer les tribunaux en
leur fournissant des rapports présentenciels ou tout autre renseignement
demandé, administrer les décisions rendues par les tribunaux, dont la garde des
personnes condamnées à des peines
d'emprisonnement inférieures à deux ans et le suivi des mesures dans la
communauté, soutenir la réinsertion
sociale des personnes contrevenantes et assurer la garde des personnes prévenues.
Ce qui nous concerne davantage ici est la garde des personnes condamnées
à des peines d'emprisonnement inférieures à deux ans.
Un bref mot
sur le Programme de travaux compensatoires. Le programme est géré par la
Direction générale des services correctionnels. Il s'agit d'une mesure
légale, substitutive à l'incarcération, qui s'adresse principalement aux personnes démunies financièrement et incapables
d'acquitter leurs amendes pour une infraction à une loi ou à un règlement
provincial ou municipal, au Code criminel et à toute autre loi fédérale. Pour
un citoyen qui est dans l'impossibilité de s'acquitter d'une amende, il doit
accepter volontairement d'exécuter des heures de travail non rémunérées dans le
but d'éviter l'emprisonnement. Ce sont des
heures de travail qui sont réalisées au profit d'organismes à but non lucratif
ou de municipalités.
L'historique
et les objectifs de la loi. Comme mentionné au début, déjà dans les années 70
et 80, on se préoccupait de
l'utilisation de la prison pour les non-paiements d'amendes. La préoccupation
était telle que le ministère de la Justice du Québec avait créé un groupe de travail qui a déposé, en novembre 1980,
son rapport du groupe de travail sur l'emprisonnement à défaut de paiement d'amendes. On avait d'abord fait
le constat que l'emprisonnement pour non-paiement d'amendes représentait, à cette époque, des coûts de
5 millions annuellement. Le groupe remettait aussi en question ce type
d'incarcération en raison de la
non-pertinence de l'utilisation de l'incarcération pour des contrevenants qui
ne présentent pas de dangerosité liée
au type d'infraction à l'origine de leur emprisonnement et aussi en raison de
l'aspect discriminatoire de l'emprisonnement comme alternative à
l'amende et à l'égard des contrevenants économiquement défavorisés.
Dans un autre
rapport publié en 1986 par le ministère du Solliciteur général de l'époque, qui
s'appelait le rapport du Comité
d'étude sur les solutions de rechange à l'incarcération, on faisait le même
constat et on proposait six recommandations afin de recouvrer des
amendes par des moyens souples et efficaces, de façon à éviter
l'emprisonnement.
Au cours des
années, la demande carcérale devenant de plus en plus grande, le ministère de
la Sécurité publique subissait plus
de pression pour mieux gérer l'utilisation de ces places en détention. Il
devenait désormais capital que les places
soient réservées à des personnes contrevenantes présentant un risque pour la
société, d'où les travaux du ministère de
la Sécurité publique, du ministère de la Justice du Québec et du ministère des
Transports qui ont conduit au dépôt, à l'Assemblée
nationale, à l'automne 2003, du projet de loi modifiant le Code de la sécurité
routière et le Code de procédure pénale
concernant la perception des amendes. Il
y avait trois objectifs. Les
objectifs étaient de récupérer les sommes dues, de responsabiliser la personne à l'égard de ses dettes et d'utiliser la
capacité carcérale à meilleur escient. Ce projet de loi a finalement
été adopté en novembre 2003 puis est entré en vigueur en mai de l'année
suivante.
Il est important ici de rappeler que la loi
amenait de nouvelles mesures relatives à la suspension du permis de conduire et à l'empêchement de transactions sur
les véhicules des personnes contrevenantes, l'abolition de l'incarcération
pour non-paiement d'amendes et une nouvelle infraction passible d'une peine
d'emprisonnement pour les personnes récalcitrantes
à payer leurs amendes en matière de circulation routière, mais sans les libérer
du paiement des amendes comme c'était
le cas auparavant. Enfin, l'article 18 de la loi a modifié le Code
de procédure pénale, obligeant les percepteurs à offrir les travaux
compensatoires avant le recours à l'incarcération.
Les résultats
obtenus depuis l'adoption de la loi pour le ministère de la Sécurité publique. Comme anticipé, les modifications apportées par la loi
concernant les amendes imposées à la suite d'infractions en matière de
circulation routière et de stationnement en 2003 ont eu des effets positifs sur
l'utilisation de la capacité carcérale. L'abolition de l'emprisonnement pour le non-paiement des amendes s'est avérée
profitable, et ce, malgré la nouvelle infraction passible
d'emprisonnement pour les personnes récalcitrantes à acquitter leur dette.
Les avantages
pour les services correctionnels. Je précise que les données du rapport de 2011
ont été mises à jour en juillet 2014.
Donc, en 2001‑2002, la mesure
d'incarcération pour non-paiement des
amendes occupait de 3 % à
5 % des places dans les établissements de détention du Québec. Bien que ce
pourcentage puisse sembler minime par rapport aux 3 650 places occupées quotidiennement à cette
époque dans les établissements de détention, il s'agissait tout de même,
en moyenne, de 143 places occupées chaque
jour pour le non-paiement d'amendes. Le rapport indique également une diminution significative du recours à
l'incarcération pour non-paiement des amendes, soit 5 797 incarcérations
en 2003‑2004 comparativement à 260 en
2008‑2009 et à 89 en 2013‑2014, donc une baisse de 98,5 % par rapport à
l'année de référence. Depuis 2003‑2004, le nombre de jours-séjour estimé en établissement de
détention en raison de non-paiement d'amendes n'a cessé de diminuer avec les années, passant de 55 445
jours-séjour en 2003‑2004 à 2 459 en 2008‑2009 et à 953 en 2013‑2014, soit une différence de moins
54 492 jours-séjour estimée depuis l'application de la loi, donc également
une baisse de 98,3 %. À titre
d'information, la durée moyenne d'un séjour en détention pour une personne
incarcérée à la suite d'un
non-paiement d'amendes en 2003 était de 9,6 jours par semaine... excusez, 9,6
jours par personne. Elle est demeurée sensiblement
la même au fil des ans, à l'exception de 2009‑2010, là, avec une moyenne de
13,6 jours. Donc, l'incarcération d'une
personne en raison de la nouvelle loi, l'article 360... excusez, 366 du Code de
procédure pénale a été jusqu'ici une mesure exceptionnelle, puisque
seulement deux à huit personnes par année ont été incarcérées depuis 2005-2006.
Par ailleurs, on a constaté une baisse importante de l'utilisation journalière
des places utilisées dans les établissements de détention pour le non-paiement des amendes, soit une moyenne de 151
places occupées quotidiennement en 2003‑2004 comparativement à une moyenne
de sept places en 2008‑2009 et de 2,6 places en 2013‑2014.
Le
taux d'occupation des places en détention pour le non-paiement des amendes qui
représentait 4 % en 2003‑2004 ne
représente donc plus que 0,5 % en 2013‑2014. Enfin, dans la dernière
année, le coût d'une incarcération s'élevait à 190 $ environ par jour, donc, pour un total de
180 000 $, ce qui représente... pour l'année en cours pour les
séjours pour non-paiement d'amendes.
Donc, on peut penser que les dépenses du ministère de la Sécurité publique
auraient été donc supérieures de
10,5 millions de dollars si le nombre de jours d'incarcération était
demeuré le même qu'en 2003‑2004.
• (14 h 20) •
L'impact
sur les travaux compensatoires. L'article
18 de la loi a modifié le Code de
procédure pénale, obligeant les percepteurs à offrir les travaux
compensatoires avant le recours à l'incarcération. Après l'entrée en vigueur de la loi, on a observé une augmentation du nombre de dossiers traités dans
le cadre du Programme de travaux compensatoires géré par la Direction générale des services
correctionnels du ministère de la Sécurité publique, passant de 12 000
dossiers en 2003‑2004 à 18 500
dossiers en 2009‑2010, ce nombre étant demeuré le même depuis les cinq
dernières années. Cette augmentation
pourrait s'expliquer par le fait qu'avec la mise en oeuvre de la loi les
municipalités se sont retrouvées dans l'obligation
d'offrir des travaux compensatoires aux personnes qui étaient dans
l'impossibilité de payer leurs amendes alors que le Bureau des infractions
et amendes le faisait déjà.
Les
avantages pour la société en général. Au cours des cinq dernières années, le
Programme de travaux compensatoires a
généré un gain social de plus de 4,6 millions d'heures de travaux dans des
organismes communautaires. C'est près du double du nombre d'heures
rapporté dans le rapport de 2011 qui se basait également sur une période de
cinq ans, soit de 2004‑2005 à 2008‑2009. Depuis l'entrée en vigueur de la loi,
la collectivité a bénéficié pour près de 46 millions
de dollars en investissement sur la base d'un calcul de 10 $ l'heure. Ce
gain social n'a cessé de croître au cours des dix premières années de la mise en oeuvre de la Loi modifiant le
Code de sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant la perception des amendes.
Enfin, cette mesure a permis à 81 % des hommes et 19 % des femmes
vivant sous le seuil de la pauvreté de s'investir dans une démarche de
résolution de problème respectueuse de leur condition personnelle et
financière.
En conclusion, en ce
qui concerne la Direction générale des services correctionnels, nous
considérons que les modifications au Code de la sécurité routière et au Code de
procédure pénale ont été plus que bénéfiques. En effet, la réduction de l'utilisation de l'emprisonnement pour
le non-paiement d'amendes à la suite de la modification législative a représenté des économies, puisque, n'eût été de
cette mesure, au moins 150 places de plus seraient utilisées dans nos
établissements quotidiennement. Dans le contexte actuel de surpopulation, une
telle situation aurait créé une pression encore plus grande sur le réseau
correctionnel.
Je vous remercie de
votre attention.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci, Mme Langlois. Est-ce que vous vouliez
ajouter quelque chose, Mme Beausoleil?
Mme Beausoleil
(Johanne) : Non, ça va.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci pour cette présentation.
C'est très intéressant. Vous avez cité plusieurs chiffres, et je suis certain, je n'ai pas posé la question, mais je suis
certain que les membres de la commission apprécieraient une version papier de votre rapport, de sorte
qu'on puisse avoir ces différentes statistiques pour y référer. Est-ce que la
chose est possible?
Mme
Beausoleil (Johanne) : La mise à jour du rapport n'est pas encore
finalisée, on n'a pas reçu les autorisations encore. Par contre, on
pourrait faire ressortir les chiffres puis vous les transmettre en résumé, je
vous dirais.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Oui, oui, à partir des informations que vous
venez de citer, là...
Mme Beausoleil
(Johanne) : À partir de la présentation de madame, oui.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : ...parce que ça donnait des
informations que nous n'avions pas, et je pense qu'à voir les mines...
M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé :
De quelle nature sont les autorisations nécessaires pour nous transmettre le
rapport?
Mme Beausoleil (Johanne) :
C'est-à-dire que le rapport... il n'y a pas de problème pour le rapport qui a
été fait, qui a été déposé ici. C'est
les mises à jour, là, des chiffres. Il faut les valider, là, tu sais, en termes
de s'assurer que ce qui est dedans répond effectivement...
Une voix :
D'accord.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Mais, à tout le moins...
Mme Beausoleil
(Johanne) : On va vous transmettre...
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : ...l'aspect, sur la base des
informations que vous venez de nous transmettre, vous pourriez nous fournir un document qui reprend ces données-là. Et
donc vous pourrez le transmettre à la commission, au secrétariat?
Une voix :
Oui, avec plaisir.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci. Alors donc, nous allons entreprendre un
premier bloc d'échange avec le député de Vimont pour casser la glace.
M.
Rousselle : Merci, M. le Président. Mme Beausoleil, Mme
Langlois, bienvenue ici. Je regarde le projet de loi, puis effectivement, si on recule dans le temps,
parce que, là, c'est un rapport qui remonte de loin... puis effectivement
on aurait dû en tout cas vous rencontrer
plus hâtivement, mais, comme le président le mentionnait, on est tellement
occupés, à un moment donné on manque
de place. Mais moi, je me rappelle que, dans les années 2003‑2004, ceux qui
connaissaient beaucoup la game arrivaient au système d'incarcération à
la dernière heure puis ils pouvaient être renvoyés. Donc, ils n'étaient même pas responsabilisés, ils pouvaient
s'en aller chez eux puis avec rien. Et je réalise qu'avec ça ça vient le
modifier énormément, puis ça a l'air d'être
un grand succès, parce que je regarde les chiffres, justement, concernant le
coût aussi, mais tu reçois, puis en plus ça
te coûte moins cher parce qu'il y a de la place d'incarcération, comme vous aviez mentionné,
qu'on a grandement besoin, parce qu'on en a besoin pour d'autres choses.
Il y avait
trois objectifs d'atteints. Mais je pense que c'est vraiment
atteint. Si on regarde juste les chiffres, là, ça fonctionne bien. Moi, je voulais vous amener au
niveau des travaux compensatoires. Je vois que c'est un succès. Vous m'avez donné le chiffre de 12 000 à 18 000, quelque part là-dedans.
Est-ce qu'il y a un système de vérification pour voir que ces travaux compensatoires sont vraiment faits
et correctement? Parce que je sais que bien souvent c'est fait dans des organismes à but non lucratif, des gens qui... Ça
peut être des personnes aînées ou ça peut être des gens... ou ils ont vraiment
besoin d'aide, mais qui n'oseront pas parler
parce qu'ils veulent toujours avoir cette aide-là qui arrive. Mais il y en a,
des gens qui n'ont pas toujours l'idée à donner une bonne prestation.
Est-ce qu'il y a une vérification sur la qualité
de prestation? Je sais bien qu'il n'aura pas un bulletin à la fin de
l'année, mais au moins qu'il donne une prestation honnête, je voudrais dire.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Alors, Mme Beausoleil.
Mme
Beausoleil (Johanne) : Oui. Alors, les organismes communautaires sont
des partenaires, sont considérés dans la loi comme des partenaires à
part entière.
On a l'équivalent d'environ, bon an, mal an,
26 millions de dollars qui est donné à nos partenaires communautaires,
que ce soit pour de l'hébergement, que ce
soit pour des travaux compensatoires. Ça inclut les travaux compensatoires.
Et nos organismes travaillent sous le joug
de l'ASRSQ qui est une association qui s'assure de faire la liaison avec nous.
Alors, dès qu'il y a quelque chose, et c'est
dans la direction de Mme Langlois, au programme, donc, dès qu'il y a quelque
chose qui s'est passé, par exemple, si on
parle des travaux compensatoires, particulièrement, on va être informés si ça a
fonctionné ou principalement quand ça ne
fonctionne pas, je vous dirais. Quand ça fonctionne, on en entend moins parler.
Alors, quand il y a une problématique, on va
directement être informés puis on va aller voir qu'est-ce qui s'est passé, on
va faire une intervention. On s'assure aussi que les ressources sont
crédibles, que c'est quand même... on ne leur fait pas faire n'importe quoi non plus, que ça correspond évidemment
aussi à la condition des personnes contrevenantes parce que
des fois ils ont des limitations.
Donc, on s'assure de tout ça mais vraiment en partenariat, comme la loi le prévoit, avec nos
ressources.
Mme Langlois (Marlène) : En fait, on a 13 organismes de référence qui sont
partout dans la province, qui font affaire
avec des organismes d'accueil qui accueillent les personnes qui font les
travaux compensatoires, et je dirais que c'est selon certains critères et c'est bien encadré, là. Pour compléter
Mme Beausoleil, c'est en vertu de certains critères, puis on s'assure que les travaux sont faits. Il y a
un plan de travail qui est élaboré avec la personne qui doit faire des travaux
compensatoires, et cette personne-là doit respecter son plan de travail. Alors,
c'est assez bien encadré et structuré.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci. M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Effectivement, sûrement, vous envoyez les gens, selon leurs compétences,
au bon endroit, parce que je
sais bien que, moi, vous m'envoyez à une place faire du petit point, ça ne
marchera pas bien, il y aurait des grosses mailles, là, tu sais, ça, je
suis sûr de ça.
Par contre, l'affaire, c'est :
les gens qui sont là et qui ne donnent pas une bonne prestation, y a-tu
un système qui fait
qu'ils sont repénalisés? Y a-tu quelque
chose qui fait qu'il faut qu'ils en
fassent d'autres ou... Parce que moi, je vous donne un exemple, c'est que, monsieur X, madame X, qu'ils s'en aillent
dans un organisme puis que, là, ils ont un travail à donner, une prestation correcte, puis là ils
décident de ne rien faire, je sais bien qu'ils vont faire... il va y avoir un
rapport négatif à son endroit, ça, j'en conviens. Mais il arrive quoi
après?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de Vimont. Simplement, là,
pour le bénéfice de nos téléspectateurs qui
écoutent le député de Vimont qui parle d'expérience, qui semble avoir une
grande connaissance du
système, c'est qu'il était policier et non pas parce qu'il avait beaucoup de
contraventions et qu'il a utilisé le système. Mme Beausoleil.
Mme
Beausoleil (Johanne) : Effectivement, les gens qui ne répondent pas, évidemment, ou qui ne se
présenteront pas pour faire l'ensemble des travaux qu'ils ont droit, on
ne reconnaîtra pas comme quoi c'est complété, là.
Donc, souvent, il y a
une première intervention.
• (14 h 30) •
Une voix :
...
Mme Beausoleil
(Johanne) : Pardon?
Une voix :
...
Mme
Beausoleil (Johanne) : Oui,
c'est ça, il y a une première intervention qui va être faite
auprès de la personne. On va lui
expliquer : Si ça ne fonctionne pas, bien tu t'exposes à, et autrement,
bien, on remonte ça au niveau du percepteur, et ce ne sera pas considéré
comme complété, là. Donc, la personne va demeurer encore avec une infraction.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Juste
terminer, parce que, là, je sens que mes confrères veulent poser des questions.
Je sais qu'à un moment donné, au
niveau de la détention, ça a baissé énormément, là, selon vos chiffres, là, puis c'est super,
c'est parfait, mais, la personne qui
a à faire une incarcération, quelqu'un,
il faut qu'il aille, est-ce qu'on s'assure qu'elle le fait ou c'est comme dans le temps, tout dépendant s'il y a de la place, ou on s'assure
vraiment que... pour que le système soit valide et
correct, là, tu sais?
Mme
Beausoleil (Johanne) : Tout à fait. Les personnes font leur temps d'incarcération. Une personne qui a une
sentence d'incarcération, quand on parle d'une sentence complétée, on parle du
deux tiers. Évidemment, elles sont éligibles
à un programme au sixième, mais ce n'est pas de sortie comme ça,
là, c'est vraiment sous... et, oui, nos taux ont beaucoup
baissé en termes de libération. À une époque, nous étions environ à 80 %. Aujourd'hui, on est environ à 5 %,
6 %.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci. Je cède la parole au député d'Ungava.
M.
Boucher : Bonjour, madame. Écoutez, un peu pour continuer dans la
veine, là, de mon collègue de Vimont, à
côté, bon, on parle que ça soulage, bon, des centaines d'incarcérations qui
étaient peut-être plus ou moins utiles, mais, du côté des travaux compensatoires, est-ce que le système est capable
d'absorber cet afflux de nouveaux travailleurs, si on peut les qualifier comme ça? Comment ça
fonctionne? Est-ce qu'il y a des délais d'attente? Est-ce que le système est en
mesure d'absorber ça?
Mme
Beausoleil (Johanne) : Depuis les cinq dernières années, on est à peu
près toujours dans les mêmes règles, les
mêmes nombres. Alors, est-ce que le système est capable de l'absorber? La
réponse, c'est oui. Il y a eu effectivement une augmentation, mais là, depuis cinq ans, là, on est toujours à peu près à
la même chose. Donc, on considère, pour nous, que, oui, le système le fait, le fait bien aussi. Quand on parle
d'incarcération, il faut comprendre que la distinction qu'ils avaient, c'est que les personnes à l'époque venaient
en détention, purgeaient leur sentence, elles sortaient et elles étaient
libres de, alors qu'aujourd'hui elles font
leurs travaux et elles doivent s'acquitter aussi de l'amende. Alors, c'est
vraiment un plus, comme société,
donc, parce que, quand ils venaient en incarcération... tu sais, si on regarde
aujourd'hui, c'est 190 $ par
jour... puis ils sortaient puis ils n'avaient plus rien à payer, alors
qu'aujourd'hui, bien, c'est : Tu fais tes travaux, donc tu assumes tes responsabilités, et tu paies ton
amende, et tu prends des ententes évidemment en fonction des paiements
d'amendes. Ça fait que c'est la grosse distinction qui, à mon sens, à notre
sens, est très profitable.
M.
Boucher : À l'époque... bon, moi, je ne suis pas... contrairement à
mon collègue, je ne suis pas policier, là, j'étais un petit peu plus
loin dans l'échelle, j'étais... bien, j'étais; je suis toujours avocat, mais je
l'étais à l'époque.
Une voix :
Un peu plus loin dans l'échelle.
M. Boucher :
Dans l'échelle du temps. Lui, il donnait l'infraction, puis moi, je m'en
occupais plus tard.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Il vous reste 50 secondes, M. le député.
M. Boucher : O.K. Alors,
je voudrais savoir... À partir du moment où quelqu'un, bon, reçoit un constat
d'infraction, aujourd'hui, c'est sûr,
bon, il a son 30 jours pour le payer, le contester, etc. Pour se rendre
jusqu'aux travaux compensatoires, on parle de combien de temps à peu
près, puis quelles sont les étapes que la personne a à franchir?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : En 30 secondes.
Mme
Beausoleil (Johanne) : Le délai, exactement, je pense que nos
collègues vont plus savoir. On sait qu'ils ont un certain délai parce qu'il faut trouver, encore là, la ressource
qui va répondre, pour laquelle la personne va être capable de faire les travaux. Mais, en termes de délai,
c'est très variable, et je sais que c'est très variable selon les régions aussi.
Il y a des régions qui sont plus sollicitées
que d'autres régions, mais je pense que nos collègues vont peut-être être plus
en mesure de répondre en termes de délai, là.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci pour ces précisions. Ça
met un terme à ce premier bloc d'intervention. Je me tourne vers le député de Matane-Matapédia et porte-parole de
l'opposition officielle en matière de sécurité publique.
M.
Bérubé :
Merci, M. le Président. Alors, Mme Beausoleil, Mme Langlois, chers collègues,
effectivement j'occupe le poste de
porte-parole en matière de sécurité publique pour l'opposition officielle, je
m'intéresse beaucoup à ces questions
et je dirais que, de façon générale, l'opposition officielle croit qu'on est
maintenant au point, au Québec, d'avoir
un vaste exercice de réflexion sur notre système carcéral, sur sa sécurité, sur
sa surpopulation, sur les conditions de
détention, sur la formation du personnel qui sont des enjeux qui interpellent
les Québécois et qui interpellent, je n'en ai aucun doute, là, le
ministère également.
Alors,
aujourd'hui, ça nous permet
d'approfondir un autre dossier qui est plus pointu. D'entrée de jeu, effectivement, je salue votre présence. Je m'étonne un
peu de l'absence de Mme Élaine Raza. Pouvez-vous me confirmer qu'elle est toujours
à la Direction générale adjointe aux programmes?
Mme Beausoleil
(Johanne) : Oui, Mme Raza est toujours avec nous. Elle est
présentement en vacances.
M.
Bérubé :
Très bien. Merci. Alors...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Vous êtes rassuré?
M.
Bérubé : Oui, oui.
Alors, quant à la capacité carcérale, alors, le rapport, il mentionne à quelques
reprises que des peines d'emprisonnement pour amendes impayées
ont été abolies par la loi. Ça, c'est clair. Il faut savoir que la même loi a créé une nouvelle infraction, vous y avez
fait référence, entraînant, si on est reconnu coupable, l'emprisonnement.
2008‑2009, on indique qu'il reste 561
infractions qui entraînent la radiation d'une amende impayée à la sécurité
routière qui ont été réglées par l'incarcération. C'est bien ça? 561. Alors,
on explique que les personnes actuellement incarcérées en vertu d'une amende impayée relative à la
sécurité routière le sont pour des mandats d'emprisonnement remis avant
le 16 mai 2004. Alors, ces personnes auraient été, j'imagine, condamnées
antérieurement à la loi.
Mais là on est en 2014. Alors, comment se fait-il
que ces personnes se trouvent encore en prison cinq ans plus tard? Hypothèse : Est-ce que
les personnes se trouvent encore en prison ou est-ce que leur emprisonnement
a tardé jusqu'à récemment?
Puis on fait référence également à un tableau, le tableau 2, mais on n'y a
pas accès, on ne l'a pas.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, en fait, pour les bénéfices de ceux qui nous écoutent, M. le député de Matane-Matapédia fait référence au rapport qui a été produit à l'Assemblée nationale en 2011 et qui notamment référait à un
tableau 2, et le tableau n'apparaît pas dans le document. Alors, c'est
bien ça, M. le député de Matane-Matapédia?
M.
Bérubé :
Oui.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci.
M.
Bérubé :
C'est juste. C'est une préoccupation partagée.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Alors, Mme Langlois.
Mme Langlois (Marlène) : C'est bien évident qu'on s'est posé exactement
la même question. Ce qu'on pense... dans ces statistiques-là, en fait, c'est sûrement des mandats et c'est
des mandats de cinq ans. Ce sont certains mandats qui ont été... des mandats d'incarcération qui ont
été reconduits. D'ailleurs, on a quelques personnes qui, je dirais, font partie
de ces statistiques-là, qui ont un mandat d'incarcération qui date d'avant la
loi.
Quand
on parle de nombre d'infractions au Code
de la sécurité routière, ce serait, à notre avis... Et, comme je vous dis, nos
statistiques ne sont pas fines, fines par rapport à ça. Ce qu'on sait, ce sont des infractions qui ne sont pas concernées
par la nouvelle loi, qui ont un lien avec
les infractions avec les infractions au Code de la sécurité routière
et, au moment de la saisie au système informatique, elles
apparaissent de cette façon-là. Donc, c'est les informations qu'on a par
rapport aux 128 que j'ai en ma
possession. Mais, en tout cas, c'est la limite un peu de notre statistique par
rapport aux 128, ce seraient des
mandats... certains, ce seraient des mandats qui ont été émis avant l'entrée en
vigueur de la loi et qui ont été, je dirais, reconduits, là, après cinq
ans, faute de les avoir exécutés. Disons ça comme ça.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : ...
M.
Bérubé : Question : Quant au tableau 2, est-ce
qu'il pourra nous être rendu disponible aujourd'hui, pour fins de
photocopie?
Mme Langlois
(Marlène) : C'est une bonne question, parce que ça date de 2011.
M.
Bérubé :
Ou à la commission lorsqu'il sera disponible, là.
Mme Langlois
(Marlène) : J'aimerais ça. On va vérifier. On va faire nos
vérifications, effectivement.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Alors, vous allez faire votre possible et
tenir le secrétariat...
Une voix :
Oui, tout à fait.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Oui, M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Je vais poser une autre question, M. le Président,
si vous le permettez. Vous avez indiqué tout à l'heure que, quotidiennement, c'est 150 places de plus qui
seraient occupées dans le réseau si cela n'avait été de cette modification
législative... environ 150. Malgré le
réinvestissement massif — j'y ai fait référence également à l'étude des crédits, vous y
étiez, Mme Beausoleil — pour s'attaquer à la surpopulation
carcérale, le gouvernement a annoncé, l'année dernière, la construction de trois prisons — Sorel, Amos, Sept-Îles — et la signature du Leclerc à Laval, que j'ai
saluée, de la part du ministère, qui était une excellente décision pour
faire face à la surpopulation.
Mais
le Québec devra tout de même faire face à des défis en regard de la
surpopulation carcérale, alors je vous pose
une question plus générale : Relativement à ce sujet qu'on étudie
aujourd'hui, est-ce que vous pensez qu'on pourrait faire mieux ou avez-vous d'autres idées qui
pourraient permettre de libérer... ou des hypothèses qui ont été envisagées
par le ministère pour libérer des places dans le système ou faire mieux avec
l'espace qu'on a présentement?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Mme Beausoleil.
• (14 h 40) •
Mme
Beausoleil (Johanne) : Oui. Alors, effectivement, Sorel, Amos,
Sept-Îles; j'ajouterais juste : On est à l'aube de recevoir Roberval aussi. Alors, c'est quatre
établissements plus le Leclerc, ça va en faire cinq. Alors, c'est effectivement
beaucoup de nouvelles places, mais il faut comprendre que nos
quatre projets de construction, ce sont des constructions beaucoup
pour la désuétude de certains établissements, alors que l'Établissement Leclerc de Laval
est vraiment un tout nouveau.
Donc,
pour répondre à votre question, évidemment, on l'a regardé, ce qu'on appelle un peu une
approche globale, on a regardé, oui,
toutes des choses en termes
d'infrastructure à savoir est-ce que les constructions suffisent. Il a été une
époque où est-ce qu'on a installé des
bâtiments modulaires qui ont été installés à l'intérieur de nos enceintes et on
a regardé nos produits. Présentement,
on est à évaluer nos produits d'évaluation de la clientèle, on est à travailler
différentes choses par rapport à
qu'est-ce qui peut être fait autrement, qu'est-ce qui peut être fait pour
évaluer la clientèle, pour donner des permissions
de sortie ou regarder avec nos ressources communautaires aussi l'utilisation
des ressources. On a augmenté beaucoup
l'utilisation des ressources communautaires au cours de la dernière année.
Donc, ça fait partie de nos pistes de solution. On le travaille vraiment
avec nos partenaires, je vous dirais.
Donc,
oui, il y a l'infrastructure, mais il y a tous nos outils qui sont en cours
d'évaluation, des projets de recherche qu'on
a mis en place aussi pour encore mieux connaître puis répondre plus à des
particularités, entre autres les autochtones.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Oui. Alors, Mme Beausoleil, est-ce que dans ce
contexte on vous a précisé jusqu'à maintenant la hauteur des
compressions auxquelles vous devrez faire face pour ce qui est du système
carcéral au Québec?
Mme
Beausoleil (Johanne) : Bien, ce que je vous dirais, la hauteur des
compressions... nous, dans les dernières années, on est en développement, alors on n'a pas subi nécessairement de
compression. Notre budget ne cesse d'augmenter. On a eu des effectifs, on a eu différentes choses. Et, pour la prochaine
année, c'est encore en augmentation, parce que j'ai des projets de livraison que vous avez cités d'entrée de jeu, un
projet de livraison de nouveaux établissements. Donc, pour nous, on
n'est pas à la baisse en termes de budget, bien au contraire, on est en
augmentation.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie pour ces
informations. Tout simplement rappeler que le but de l'exercice porte sur l'étude du rapport de la
mise en application de la loi de... chapitre 5 de la loi de 2003, les
compressions budgétaires 2014‑2015, simplement, là.
M.
Bérubé : ...élément de contexte pertinent pour bien
comprendre les défis auxquels fait face le ministère. Alors, je
comprends qu'il n'y a aucune compression cette année en Sécurité publique.
Le nombre de
jugements reçus par le Bureau des infractions et amendes, le BIA, il a
augmenté. En 2004‑2005, c'est
55 394 puis, en 2008‑2009, c'est 201 937. C'est 264 % d'augmentation.
Au cours des cinq dernières années de la loi, on indique dans le rapport qu'on a réglé
92,9 % des dossiers pour le recouvrement financier, des travaux
compensatoires ou, de manière
résiduelle, pour un emprisonnement dans les cas où ce n'était pas possible de
faire les deux premiers. De ces
92,9 %, 94,8 % ont été réglés financièrement. Le BIA estime que ce
recouvrement a généré plus de 83 millions. Donc, il y a 55 232 jugements qui sont toujours
actifs. Là, il faut considérer la date du rapport, c'est sûr. En date
d'aujourd'hui, combien de jugements
sont toujours actifs? Est-ce que vous êtes capable de nous l'évaluer? Et
qu'est-ce qui explique un si grand nombre?
Puis aussi, selon le rapport, si
on indique que c'est 94,8 % des jugements qui ont été réglés
financièrement, j'imagine que c'est une
amélioration sur ce qui prévalait avant la loi. Donc, quelle était la
proportion avant 2003, lorsque la loi a été adoptée?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Mme Beausoleil.
Mme
Beausoleil (Johanne) : ...vous référer au BIA pour répondre à la
question parce qu'on n'a pas cette donnée directement.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Très bien. Merci. M. le député.
M.
Bérubé :
Oui. Bien, je veux compléter. Tout à l'heure, vous avez fait référence à 13
organismes qui sont en partenariat
avec le ministère pour les travaux. Est-ce que c'est possible de nous fournir
cette liste-là? Et j'imagine que c'est
des organismes qui sont un peu partout au Québec, donc toutes les régions sont
couvertes. Et il y a probablement des
critères pour choisir ces organisations, par exemple des rapports, par exemple
la probité des organisations, leur disposition
géographique. Est-ce qu'il y a aussi des critères quant à la distance maximale
qu'une personne doit faire pour aller
s'acquitter de ses travaux, par exemple? Je pense à quelqu'un qui serait à
Matane, dans ma circonscription, qui devrait aller à Rimouski, par exemple, donc 100 kilomètres pour y aller,
100 kilomètres pour revenir. En principe, il ne peut pas prendre sa
voiture.
Donc,
comment on s'organise dans ces cas-là pour la proximité des travaux qu'on doit
faire? Puis, dans le cas où il y a des frais qui sont occasionnés,
comment ça fonctionne? C'est à la charge de la personne ou de l'organisation?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
En une minute.
Mme
Beausoleil (Johanne) : C'est
clair que, pour l'ensemble des critères, on travaille avec ce qu'on appelle le
ROC, qui est le Regroupement des organismes communautaires. Alors, on va vous transmettre toutes les
demandes par rapport
aux 13 ressources, par rapport au ROC aussi, qui s'occupe des ressources, qu'est-ce qu'on fait, quels sont les critères en
termes de distance, en termes de coût ou en termes de tout ce qu'on peut. On va
tout vous transmettre ça rapidement.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Auprès du secrétariat de la commission?
Une voix : ...
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. C'est bon? Excellent. Alors, Mme la députée de Montarville, pour huit minutes.
Mme Roy
(Montarville) :
Merci beaucoup. Bonjour, mesdames. Merci pour votre présence.
D'entrée de jeu, j'aimerais vous dire que,
lorsqu'on parle de l'article 364 du Code de procédure pénale et des mesures qui ont été inscrites justement pour
faciliter le recouvrement des amendes
impayées, entre autres la suspension du permis de conduire ou encore
refuser de renouveler l'immatriculation, je peux juste vous dire, d'expérience
de praticienne, que c'est très, très, très
efficace lorsqu'un client nous arrive parce qu'on a suspendu son permis ou on
ne veut pas renouveler les
immatriculations. Donc, on comprend ici les résultats auxquels vous arrivez,
tous les intervenants arrivent, là, en ce qui a trait au recouvrement
des amendes. Alors, à cet égard-là, c'est efficace.
Ma question portera cependant un petit peu
davantage sur le fait qu'en diminuant l'incarcération avec ces nouvelles sanctions qui sont efficaces parce que
pratiques et qui touchent le contrevenant directement vous nous dites dans le rapport qui nous est présenté que le
nombre de places occupées par jour était, en 2003‑2004, de 151 places, donc,
dans les établissements de détention en
20003‑2004, et, selon les derniers chiffres que vous nous avez donnés, c'est à
2,6 en 2013‑2014. Donc, ça, ce sont les chiffres les plus récents :
diminution totale.
Par
contre, ma question est la suivante : Ces places libérées là ont-elles
atteint l'objectif et permettent-elles de faire en sorte que ce sont des détenus plus criminalisés qui les
occupent? Mon collègue qui n'est plus là parlait de, justement, la surpopulation des établissements. Est-ce que ça
a été comblé rapidement et y a-t-on placé des détenus plus criminalisés?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Mme Beausoleil.
Mme
Beausoleil (Johanne) : Alors, oui, ces places-là ont permis
d'incarcérer 150 autres personnes, et même plus, parce qu'on a vécu d'autres changements législatifs aussi dans les
dernières années qui font en sorte que le recours à l'incarcération maintenant, avec les peines
minimales, par exemple, est différent, je vous dirais. Alors, je pense que moi,
je répondrais oui à la question. Est-ce que
nos incarcérés sont des incarcérés à leur place? Je pense que oui. Au niveau
de la justice, on a
mis plein de choses en place. Maintenant, avec ce qu'on appelle les c.24, comparutions téléphoniques, tout ça, donc, les prévenus peuvent avoir droit à
comparaître rapidement. Donc, notre clientèle est environ 48 % prévenus,
52 % détenus. Alors, à la question, oui, ces 150 places là sont utilisées.
Mme Roy
(Montarville) : Alors, j'aimerais poursuivre dans la même
veine. Nous allons recevoir jeudi la ville de Montréal, le Service juridique de la ville de Montréal. Dans son
rapport qu'il va nous présenter, la ville nous dit : «...nous nous questionnions sur la pertinence d'avoir
encore recours à l'incarcération pour des infractions en matière pénale. Nous
croyons qu'il n'est pas nécessaire d'emprisonner
un défendeur qui a fait défaut de payer la licence pour son chien ou qui
retourne des livres en retard à la bibliothèque.»
Est-ce que ce
sont des cas qui sont encore, effectivement, en application au moment où on se
parle? Est-ce qu'on retrouve des gens incarcérés pour ça actuellement,
dans les deux ans moins un jour?
Mme
Beausoleil (Johanne) : C'est possible, c'est possible. Ce n'est pas la
masse, mais c'est fort possible. Ça arrive
occasionnellement que certaines personnes vont être incarcérées pour ne pas
avoir retourné, par exemple, leurs livres à la bibliothèque puis que,
là, ça s'est cumulé avec le temps. Oui.
Mme Roy
(Montarville) : Revenons dans les centres d'incarcération.
On parle toujours de deux ans moins un jour
qui sont de juridiction québécoise, on parle de surpopulation. Actuellement, au
moment où on se parle, ça dit quoi?
• (14 h 50) •
Mme Beausoleil (Johanne) : La
surpopulation est d'environ, bon an, mal an, 400 à 500 détenus par jour en surpopulation présentement. Alors, on est à l'aube
d'ouvrir l'établissement de détention Leclerc, de Laval, qui va nous permettre, dans un premier temps, rapidement, d'ici Noël, d'aller chercher environ 250 places
additionnelles, puis plus les mois vont avancer, plus les travaux vont
se concrétiser à l'établissement, on va augmenter jusqu'à éventuellement 775
places. Alors, avec ça, plus nos quatre autres projets de construction, on va
arriver à répondre à la surpopulation.
Mme Roy
(Montarville) : ...peut-être
du mandat, mais on parle ici d'ouverture de places, d'arrivée de nouveaux détenus. Est-ce
que vous avez les budgets pour
engager du nouveau personnel? J'imagine qu'on va avoir besoin également de nouveaux gardiens.
Mme
Beausoleil (Johanne) : Oui. Ça a été
entériné, entre autres, pour le Leclerc, là, qui est le prochain à être
livré. Alors, oui, nous avons obtenu les crédits.
Mme Roy
(Montarville) :
...l'embauche de combien de membres du personnel?
Mme
Beausoleil (Johanne) : Bien,
il y a de l'embauche, il y a du transfert, et tout ça, parce que
l'établissement de détention Leclerc étant à Laval fait en sorte
qu'on est allés chercher beaucoup de nos propres effectifs de la région de Montréal,
Saint-Jérôme. Donc, à terme, c'est environ, bien, à 400 effectifs additionnels,
éventuellement.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie pour ces précisions. Simplement peut-être
retourner au rapport.
Mme Roy
(Montarville) :
C'est complet.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
C'est terminé? C'est complet?
Mme Roy
(Montarville) :
Oui, c'est complet.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Excellent. Dernier bloc, avec le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui. Merci
beaucoup, M. le Président. Bien, merci beaucoup pour votre présence ici aujourd'hui et de prendre le temps de
répondre à nos questions.
J'ai été particulièrement intéressé sur les travaux compensatoires. Évidemment, on reconnaît l'objectif
de diminuer la population
carcérale, de un; de deux, évidemment d'avoir un minimum de justice sociale : une
personne qui ne peut payer parce qu'elle n'a pas les fonds, de se retrouver
en prison, versus une qui peut, elle, payer et qui évite la prison, c'est
évidemment socialement condamnable, si je
peux utiliser l'expression. Ceci dit, les travaux compensatoires, vous avez
donné la statistique : 4,6 millions
d'heures de travaux. C'était 4,6 millions d'heures de travaux compensatoires supplémentaires
pour quelle période, cette statistique que vous avez citée un peu plus tôt?
Une voix : ...
M. Tanguay :
Oui. Et, pendant que vous cherchez, j'aurai des questions, puis vous pourrez
peut-être... et ainsi, évitant
d'avoir un échange saccadé, j'aurais des questions sur le mode de
fonctionnement. Est-ce que vous pouvez nous dire... Parce que par
ailleurs, évidemment, on évite les coûts d'une incarcération. Avant ça, on est
davantage juste en n'incarcérant pas des gens parce qu'ils n'ont pas les moyens
de ne pas l'être. Donc, les coûts de l'incarcération. Mais également
c'est un système, les travaux compensatoires, où vous avez
mentionné que vous donnez 26 millions. J'ai noté ça.
Alors, pouvez-vous m'expliquer un peu comment ça fonctionne? Parce que
je trouve ça intéressant, et j'ai plusieurs
petites questions.
Mme Langlois (Marlène) : En fait, le 4,6 millions d'heures, c'est depuis 2008‑2009, O.K.? La façon de fonctionner : on a des organismes de
référence. En fait, on est à contrat avec ces organismes de référence là, et le
contrat est à peu près de 2,2 millions pour ces organismes de référence
là pour administrer le programme. Ces organismes de référence là font affaire avec des organismes d'accueil qui sont partout
sur le territoire. On a plusieurs milliers d'organismes. Alors, ces organismes-là en fait bénéficient de
main-d'oeuvre par le fait que les contrevenants font des travaux compensatoires.
Alors, c'est pour ça qu'on parle d'une main-d'oeuvre.
Quand on parle de ce que ça représente, là, au niveau monétaire, c'est beaucoup.
C'est qu'on a pris, je dirais, le travail
à 10 $ l'heure, et on a dit ce
que ça pouvait représenter en termes d'investissement social, les travaux
compensatoires. Alors, en bout de
piste, c'est un gain social et un gain économique, du fait que ces gens-là, plutôt
que de faire de l'incarcération comme
c'était auparavant... Puis, quand ils faisaient leur incarcération, ça ne
radiait pas, en plus, l'amende, donc il y avait des coûts d'incarcération, en plus du fait qu'ils n'avaient plus leur
amende à payer. Aujourd'hui, bien, ils font des travaux compensatoires, donc ils retournent à la société,
si je pourrais dire, l'amende impayée, en faisant des travaux au profit de
cette société-là, donc.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Gain social. C'est ça, le gain. Vous avez ajouté une
information, peut-être pour le bénéfice du député de Matane également. Donc, vous avez 13 organismes
de référence mais qui, eux, ont sous leur influence des milliers
d'organismes où une personne...
Mme Langlois
(Marlène) : Peut aller faire ses travaux compensatoires.
M. Tanguay :
...pourrait aller faire quelques heures.
Quelle
est la réception? On a déjà parlé du financement des organismes
communautaires. De un, ce n'est pas, puis j'aimerais que vous étayiez
là-dessus, ce n'est pas tous les organismes communautaires qui sont aptes à
recevoir une personne qui a du temps à
faire, compensatoire, de un. De deux, est-ce
qu'il y a, ceci dit, plusieurs
organismes qui disent : Bien, effectivement,
nous, on aimerait ça pouvoir bénéficier de cette force de travail là parce que,
bon, au niveau du financement, c'est
toujours un défi? Alors, j'aimerais savoir la logique parce que je trouve ça
extrêmement intéressant.
Mme Langlois (Marlène) : C'est-à-dire, c'est quand même un processus assez
rigoureux. Un organisme communautaire
qui voudrait bénéficier de travaux compensatoires doit vraiment manifester son
intérêt et ne sera pas reconnu juste par le fait qu'il a un intérêt à le
faire. C'est vraiment via nos organismes de référence. C'est certains normes et
critères qu'on a établis qui vont lui
permettre de se qualifier, si je peux dire, pour faire faire des travaux
compensatoires, tenant compte du fait
qu'on souhaite que ces travaux compensatoires là soient faits de façon
rigoureuse. Et en fait ça sert à rembourser une amende.
Alors, c'est dans ce contexte-là, je dirais, que
les organismes peuvent se qualifier pour être des organismes d'accueil pour faire faire des travaux compensatoires, mais
c'est vraiment par les organismes de référence que se fait, je dirais, ce
processus-là.
M.
Tanguay : Et donc, annuellement, vous accordez donc
26 millions, c'est cela, aux 13 organismes de référence?
Mme
Beausoleil (Johanne) : Bien, c'est-à-dire que le 26 millions est
pour l'ensemble des partenaires communautaires. C'est ça. Donc là, ça inclut nos CRC, nos centres communautaires, ça
inclut l'hébergement, et tout ça, et non pas juste pour les travaux
compensatoires, là.
M.
Tanguay : Que vient couvrir cette somme? Je veux juste
comprendre la logique. L'organisme communautaire a besoin d'une force de travail qui lui est donnée gratuitement. Nous
transférons un montant d'argent en même temps que la force de travail.
Que vient couvrir ce 26 millions?
Mme
Beausoleil (Johanne) : Bien, on va parler, par exemple, des CRC qui
vont héberger la clientèle qui va sortir en programme. Ils vont leur
offrir des programmes particuliers, soit des thérapies sur la violence, la toxicomanie,
des programmes, des choses comme ça. On fait
de l'achat de programmes. Par exemple, les évaluations pour nos délinquants
sexuels, des choses comme ça, ça fait partie
des achats de programme dans le 26 millions. Et il y a, entre autres
choses, pour le sujet qu'on est là
aujourd'hui, les travaux compensatoires qui sont à part... bien, qui sont
inclus dans le grand 26 millions.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète le
temps qu'on a. Malheureusement, le temps est écoulé. On a d'autres groupes. Alors, je vous remercie pour cette
présentation très intéressante. On va attendre avec impatience et
intérêt vos documents.
Sur
ce, la commission suspend ses travaux quelques minutes, le temps de permettre
aux prochains intervenants de s'avancer. Merci.
(Suspension de la séance à 14 h 58)
(Reprise à 15 heures)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, nous reprenons nos
travaux et nous accueillons maintenant les représentants du Bureau des infractions et des amendes, c'est bien,
communément appelé le BIA. Alors, merci d'être avec nous. Je vais vous
demander, dans un premier temps, de vous présenter, pour le bénéfice de nos téléspectateurs
et des membres de la commission, et de nous faire votre présentation. Vous
disposez d'un temps maximum de 20 minutes.
Bureau des infractions
et amendes (BIA)
Mme
Bouchard (Lyne) : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à tous, Mmes et MM. les députés. Au ministère de la Justice... Bien, d'abord me présenter; Lyne Bouchard, sous-ministre associée à la Direction générale des services à l'organisation, une direction qui compte, à l'intérieur de ses effectifs, un bureau bien spécial, celui de la perception
des amendes, entre autres, le Bureau des
infractions et des amendes, justement. Et, pour vous rencontrer cet après-midi, mettre à jour, sans doute, les données du rapport sous étude, j'ai avec
moi le directeur général du Bureau des infractions et des amendes, M. Jacques Vachon. Nous avons également
avec nous le directeur d'une des unités, d'une des directions du BIA,
qui s'appelle M. Michel Breault, directeur de la perception des amendes.
Au ministère de la Justice, on intervient avant le ministère de la Sécurité publique, donc on est en amont, et ce qu'on fait à travers nos actions, c'est d'essayer
d'éviter que justement les contrevenants aillent en prison. Et l'équipe
de M. Vachon est au fait de toutes
ces activités, alors, sans plus tarder, si vous me permettez, je
céderais la parole à M. Vachon qui pourra faire quelques introductions.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Merci. M. Vachon.
M. Vachon (Jacques) : Merci beaucoup,
M. le Président. Mon intervention portera sur le rôle du Bureau des infractions et amendes, le processus
d'exécution des jugements, les résultats obtenus concernant les sommes dues à l'État et la responsabilisation de la
personne à l'égard de ses dettes, sujet qui a été couvert par le rapport.
Le Bureau des
infractions et amendes est une agence gouvernementale qui relève de la ministre
de la Justice. Il a pour mission de
voir au traitement des rapports et des constats d'infraction donnant lieu à des
poursuites. Ces poursuites proviennent principalement de la part du Directeur
des poursuites criminelles et pénales, le DPCP, conformément au Code de procédure pénale. Le bureau doit exécuter
les jugements rendus par les
tribunaux en matières criminelle et
pénale et comportant une condamnation
à une amende ou à une suramende. Le bureau vise aussi à assurer l'exécution de
tous les jugements dans un délai
raisonnable de façon à maintenir le caractère dissuasif des peines imposées et
la crédibilité du système judiciaire.
Le bureau vise également à optimiser le processus de recouvrement des sommes
dues à l'État. Nous souhaitons offrir
un service de qualité à la clientèle et aux autres intervenants participant à
l'administration de la justice. Pour
exécuter pleinement notre mission, nous nous associons à différents
intervenants tels que la Société de l'assurance automobile du Québec, l'Agence du revenu du Québec, le ministre des
Finances, les agents de la paix ainsi que différents organismes reliés à
l'administration de la justice.
J'aimerais
rappeler la principale différence entre le processus d'emprisonnement entre la
loi modifiée et celle qu'on avait auparavant. Avant la modification de
la loi, le défendeur pouvait aller en prison, et les jours effectués en prison
permettaient de payer le montant de l'amende. Le percepteur avait à compléter
une demande d'imposition de peine d'emprisonnement
et à inscrire le dossier au rôle de la cour pour audition. Lorsque le rapport
du geôlier était produit et indiquait
que la peine avait été effectuée par le défendeur, le dossier était fermé.
Depuis la mise en oeuvre de l'article 366, le percepteur ne peut plus faire une demande d'imposition de peine
d'emprisonnement pour une infraction au CSR, une nouvelle infraction doit être constatée. Le percepteur doit soumettre un
rapport d'infraction au procureur, prouvant que le défendeur veut délibérément se soumettre au paiement
de l'amende. Le procureur peut émettre un constat d'infraction. Si le défendeur est trouvé coupable, les jours de
prison effectués ne peuvent servir à compenser l'amende. Le défendeur
doit toujours payer son amende.
En ce qui
concerne le processus d'exécution des jugements, des percepteurs désignés en
vertu du Code de procédure pénale ont
la responsabilité de mettre en oeuvre les mesures d'exécution prévues pour le
recouvrement des amendes. Dans un
premier temps, un avis de jugement est transmis au défendeur, l'informant des
sommes dues et du délai accordé pour s'acquitter
du paiement. Lorsque le jugement découle d'une infraction en matière de
circulation routière ou de stationnement et que le défendeur n'a pas payé la somme due à l'expiration des délais
ou n'a pas respecté les ententes ou engagements pris, les percepteurs, que ce
soit des municipalités ou du Bureau des infractions et amendes, transmettent un avis d'amende
impayée à la SAAQ qui applique alors les sanctions énumérées à l'article 364.
Si je résume l'article
364, on dit que le défendeur qui n'a pas payé la somme due à l'expiration du
délai prévu ou que le défendeur qui
s'est engagé à effectuer des travaux compensatoires mais qui n'a pas respecté
cet engagement... dans
ce cas le percepteur doit aviser la Société
de l'assurance auto du Québec de ce
fait afin que celle-ci puisse, conformément
au Code de la sécurité routière, un,
suspendre le permis d'apprenti conducteur ou le permis probatoire ou le permis
de conduire du défendeur; deux, interdire de mettre ou de remettre en
circulation tout véhicule routier immatriculé au nom du défendeur; trois, interdire la mise au rancart
de tout véhicule routier immatriculé au nom du défendeur; quatre, refuser
d'immatriculer tout véhicule routier au nom
du défendeur; ou, cinq, lors de la cession du droit de propriété d'un véhicule
routier immatriculé au nom du défendeur, refuser d'effectuer une nouvelle
immatriculation au nom du cessionnaire.
Le
percepteur peut transmettre à la SAAQ un avis de non-paiement d'amendes et
recourir aux autres mesures de recouvrement
dont il dispose. Donc, parmi ces recours, le percepteur peut convenir d'une
entente de paiement avec le défendeur, il peut
pratiquer une saisie, il peut offrir des travaux compensatoires et, pour les
infractions en matière de circulation
routière et de stationnement, il peut demander la délivrance d'un constat
d'infraction en vertu de l'article 366. Un inventaire des mesures de perception a été remis au secrétariat de la
commission dans le document intitulé Processus de perception
des amendes en matière pénale. L'avis de non-paiement d'amendes associé
avec les autres moyens de perception permet
au BIA d'exécuter les jugements dans la grande majorité des cas. Le percepteur
peut prendre plusieurs actions avant d'obtenir un règlement
final, et il n'est pas possible de déterminer laquelle de ces actions a été
efficace pour les clientèles qui sont
négligentes ou délinquantes. Donc, le percepteur peut utiliser l'ensemble
ou une partie des outils qui sont mis à sa disposition.
À l'égard
de la récupération des sommes dues, la mise
en oeuvre, par les percepteurs du BIA,
des mesures d'exécution prévues par
le recouvrement des sommes dues à la suite d'infractions en matière de circulation routière et de stationnement
a permis d'obtenir les résultats suivants. Et je comprends que vous ne les
aurez pas. C'est des données que nous
avons mises à jour, donc, ce n'est pas celles qui sont incluses dans le rapport
que vous aviez déjà, mais nous les avons transmises à la Sécurité
publique. Je comprends que, lorsqu'ils vous transmettront le rapport à jour,
vous aurez ces données. Au cours des ans, il y a eu une augmentation du
nombre de jugements reçus au BIA, passant de 146 000 pour l'année financière 2009‑2010 à 160 000 en 2013‑2014.
Nous avons remarqué une certaine constance au cours des dernières années.
Donc, on pourrait dire que 160 000,
c'est à peu près notre vitesse de croisière, là, depuis trois ans. Au cours des
cinq dernières années d'application
de la loi, le BIA a reçu 807 000 jugements. Les diverses mesures de
perception administrées par le BIA ont favorisé le règlement de
90 % des jugements relatifs à la circulation routière et au stationnement.
Au
fil des années, nous avons aussi remarqué une constante dans le comportement
des gens, c'est-à-dire que les paiements
monétaires suivent l'évolution du nombre de jugements, et les paiements en
travaux compensatoires suivent aussi l'évolution du nombre de jugements
reçus. Des 90 % de jugements réglés relatifs à la circulation routière et
au stationnement, la très grande majorité,
soit 97 %, a été réglée financièrement, et le reste, le 3 % ou à peu
près, en travaux compensatoires.
• (15 h 10) •
À
ce jour, il reste seulement 86 000 jugements actifs en cours d'analyse par
le percepteur des amendes. Des moyens d'exécution
sont entrepris. Le solde de ces jugements, en juillet 2014, se chiffre à 32
millions pour les cinq dernières années... ou pour les cinq années dont on a fait la mise à jour. L'avis de
non-paiement d'amendes transmis à la SAAQ semble une mesure efficace,
puisqu'il nous permet de régler en moyenne 42 % des jugements dans un
délai de 45 jours.
En
ce qui concerne la responsabilisation de la personne à l'égard de ses dettes,
l'article 23 de la loi a modifié le Code
de procédure pénale afin que l'emprisonnement ne puisse plus radier la dette
d'une personne contrevenante qui est en défaut de payer des sommes suite à une infraction relative à la
circulation routière et au stationnement. Cet article a aussi créé une
infraction rendant passible d'emprisonnement la personne qui se soustrait
délibérément du paiement de ses amendes — l'article 366.
Au
cours des cinq dernières années, les poursuites intentées par le Directeur des
poursuites criminelles et pénales en
vertu de l'article 366 ont eu les résultats suivants : le directeur a
délivré 100 constats d'infraction pour des personnes contrevenantes se soustrayant à leur
responsabilité; la Cour du Québec a déclaré coupables 66 défendeurs et leur a
imposé des peines d'emprisonnement
exécutoires sans pour autant radier leurs amendes impayées — 66 sur les 100. Chaque constat vise un défendeur. Plus particulièrement pour le
BIA, depuis l'entrée en vigueur de la loi, nous avons entraîné l'émission
de 55 constats d'infraction. La cour a
déclaré coupables 30 défendeurs — 30 sur 55 — se soustrayant à leur responsabilité et leur a imposé des peines d'emprisonnement
exécutoires variant d'un à 25 jours. Deux défendeurs ont été acquittés. Sur
les 30 défendeurs reconnus coupables, 25
n'ont toujours pas acquitté leur amende à ce jour. En ce qui concerne les
23 cas où des constats
d'infraction ont été émis, pour lesquels aucun verdict n'a été prononcé, il
s'avère que les dossiers ont été réglés par des paiements ou des travaux
compensatoires avant jugement.
Ces
résultats révèlent que le recours à l'article 366 du Code de procédure pénale a
permis d'atteindre l'objectif de
responsabilisation des personnes à l'égard de leurs dettes dans 50 % des dossiers
où des constats d'infraction ont été émis.
À cet égard, il nous apparaît que les démarches doivent être poursuivies afin
de favoriser l'application de l'article 366. Les décisions qui ont été
rendues récemment par les tribunaux concernant l'application de l'article
366 devraient faciliter le fardeau de la preuve, puisque la passivité du
défendeur à l'égard des démarches du percepteur permet d'inférer son intention
de se soustraire au paiement de ses amendes.
En conclusion. À l'origine, les modifications à la loi visaient trois objectifs :
s'assurer d'une meilleure récupération
des amendes par la mise en place de mesures
relatives aux permis de conduire et à l'immatriculation, responsabiliser la personne à l'égard de ses dettes en n'annulant plus par
l'emprisonnement les sommes dues à l'État et améliorer l'utilisation de la capacité
carcérale en abolissant l'emprisonnement par le non-paiement des amendes. Ma
collègue du MSP, tout à l'heure,
a identifié plusieurs gains sociaux, notamment ceux concernant l'utilisation des espaces carcéraux. Par
ailleurs, nous, l'expérience nous démontre que ces modifications à la loi ont rejoint les objectifs, car le percepteur applique l'article
366 aux défendeurs les plus
récalcitrants. Et là je le souligne ou je le mets en gras; ce sont les plus
récalcitrants. Il s'agit d'un petit volume de dossiers qui sont
complexes à exécuter mais pour lesquels nous réussissons quand même à avoir des
résultats dans 50 % des dossiers, donc à récupérer l'amende dans 50 %
des dossiers.
Alors, ça conclut ma
présentation, M. le Président.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Mme Bouchard, est-ce que vous voulez ajouter
quelque chose? Ça va?
Mme Bouchard
(Lyne) : Ça va pour moi. Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Avant d'entreprendre le premier bloc, vous me permettrez une question
pour préciser les chiffres, là. En
fait, je comprends que vous avez transmis les données pour faire la mise à jour
des informations depuis
le rapport, vous avez envoyé ça au
ministère de la Sécurité publique, mais, bon, on ne sait pas quand est-ce qu'on
va obtenir ces informations-là. Est-ce qu'il
y a une difficulté à ce vous puissiez les transmettre directement, aussi, à la
commission? Et là je ne veux pas soulever... je pose la question de façon
innocente, là, sans...
Mme
Bouchard (Lyne) : ...revenir
sur les chiffres qu'on vous a communiqués, cet après-midi. Il n'y a pas
d'enjeu, donc on fera suivre ça...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Directement?
Mme Bouchard (Lyne) : ...rapidement,
oui.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Parfait. Merci. En fait, une
précision. M. Vachon, vous avez parlé de 100 constats émis, en vertu de l'article 366, pour des contraventions
à l'article 366 par le DPCP, j'ai noté ça, sans constat. Mais ensuite vous avez parlé, de la part du BIA, de
55 constats. Alors, vous pouvez peut-être faire la différence entre les
deux pour nous permettre de bien suivre votre présentation?
M. Vachon
(Jacques) : Oui, M. le
Président. Dans le fond, le total était de 100 constats émis par le DPCP, donc,
incluant le BIA et les municipalités. C'est
traité par le Directeur des poursuites pénales et criminelles. Et, au niveau du
BIA, de ceux-là, il y en avait 55,
c'est ça; ce qui nous permet de dire que, bon, il y avait 30 défendeurs
qui ont été condamnés, deux non
coupables et 23 qui nous ont payés soit juste avant l'audition. Et puis il y en
a 25 sur les 30 coupables qui n'avaient pas encore payé, mais cinq qui ont payé. Donc, 23 plus cinq : 28;
la moitié de ce qu'on avait eu comme constats d'infraction.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Alors, avec
ces précisions, je cède maintenant la parole au député d'Ungava pour un
premier bloc d'échange.
M.
Boucher : Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. À la première page du
document qui s'intitule Processus de perception des amendes en matière pénale, on a les mesures d'application générale. En amont
de ça, bon, il y a évidemment l'émission
du constat d'infraction en question, et puis le délai pour plaider coupable ou
non coupable, et le fait d'être reconnu coupable par un juge. Bon, si on regarde... puis on peut le voir un peu
comme une cascade d'événements dont certains peut-être viennent s'intercaler, entre le moment où quelqu'un est
déclaré coupable par un juge à aller jusqu'au moment où, bon, il se rend dans un organisme pour faire les
travaux compensatoires, on peut parler d'une échelle de combien de temps,
en moyenne, là? On parle de mois, d'années?
Comment ça se passe, puis quels sont les efforts qui sont... Parce que, c'est
sûr, bon, c'est des travaux compensatoires,
c'est bien, mais, bon, je suppose que de l'argent, ce n'est quand même pas
négligeable non plus.
Donc, quels sont les efforts qui sont mis avant
d'arriver à la conclusion que, bon, monsieur ou madame X, la solution pour
vous, ça serait peut-être les travaux compensatoires?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. Vachon.
M. Vachon (Jacques) : Oui. Bon,
merci. Effectivement, il y a une cascade. À partir du moment où il y a un
jugement, normalement, en sécurité routière, il y a 30 jours pour le défendeur
pour s'acquitter de son amende.
Après ce 30
jours là, si le défendeur n'a pas communiqué avec nous, il peut payer, il peut
ne pas payer et il peut aussi
communiquer avec nous. Celui qui communique avec nous et qui n'a pas payé, bon,
peut, pour diverses raisons, dire qu'il est dans une situation
budgétaire qui ne lui permet pas de payer son amende. Avant de l'envoyer en
travaux compensatoires, à ce moment-là il va
y avoir quand même une évaluation de sa situation financière, et on va
favoriser une entente de paiement.
Donc, si c'est une amende de 300 $, ça va être 50 $ par mois, pendant
six mois. Les travaux compensatoires vont
être une étape un peu plus loin à ce moment-là. Il faut que le défendeur puisse
nous démontrer qu'il n'a pas la capacité financière de prendre entente avec nous. Habituellement, c'est le
défendeur qui nous appelle. Sinon, bien, dans la cascade des événements aussi, si on n'a pas eu de
nouvelles de notre défendeur, bien là c'est l'autre processus : on va
envoyer un avis de non-paiement
d'amendes, on va envoyer l'avis de rappel et après on va aussi lui offrir... on
va lui demander de communiquer avec nous pour prendre une entente de
paiement.
À ce
moment-là, il y a des bonnes chances que le dossier se règle à peu près à cette
étape-là. Combien de temps ça peut prendre? Il y a le 30 jours, il y a
une lettre de 10 jours, 45 jours. Donc, à peu près cinq, six mois, là, facile.
• (15 h 20) •
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. le député d'Ungava.
M.
Boucher : Merci. Dans la
cascade d'événements, on parle à un moment donné que, bon, on
peut conclure une entente de
paiement. Puis, à défaut, aussi le percepteur peut pratiquer une saisie. On
sait très bien que la saisie de biens meubles, dans probablement la majorité des
cas, est assez illusoire, là, parce
que les gens n'ont pas grand-chose de
saisissable.
Les saisies sont probablement presque toujours
des saisies-arrêts, je suppose, ou...
Une voix : Dans beaucoup de
cas, et c'est...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Non. Allez-y, allez-y. Vous faites bien ça.
M. Vachon
(Jacques) : Dans beaucoup
de cas, ça va être la saisie-arrêt. Et nous avons eu un rapport du Vérificateur général à l'automne — j'ouvre la porte sur ça — sur l'optimisation de la perception des
amendes, et il y a de ces processus-là dans
les recommandations du rapport du Vérificateur général que nous avons commencé
à mettre en place et notamment d'essayer
de systématiser un peu plus la saisie-arrêt, les saisies, enfin, parce que,
vous le disiez tout à l'heure, l'argent, c'est quand même mieux que les
travaux compensatoires.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Simplement pour le bénéfice de
ceux qui nous écoutent, M. le député d'Ungava, peut-être expliquer ce
qu'est une saisie-arrêt.
M.
Boucher : En 2 min 15 s, même pas, en trente secondes;
une saisie-arrêt, c'est une saisie de salaire, donc, c'est un ordre de la cour où un huissier va procéder à
une saisie directement sur les revenus de la personne, la partie saisissable
qui est comptée selon une formule fort
complexe que je ne sais pas par coeur, donc, et puis souvent une façon, là,
assez efficace, là, d'obtenir de l'argent. Et puis souvent le justiciable qui
voit son salaire saisi dit : Non, non, regarde, ce n'est pas vrai que tu vas me prendre 100 $ par
paie, là, combien je te dois? Puis il va régler ça, puis c'est probablement des
choses que vous observez aussi, là, à l'occasion.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Merci pour ces explications.
M.
Boucher : Bon, on parle saisie-arrêt. On voit aussi dans la cascade
des événements que vous pouvez contraindre un ministère ou un organisme à divulguer des informations pour localiser
un individu qui est introuvable ou qui est un petit peu comme un
fantôme, là : quand on pense qu'on l'a, woups, il est déjà disparu.
Est-ce que vous procédez aussi à des échanges
d'information comme ça pour être capables de récupérer des sommes dues par les organismes gouvernementaux à
cet individu-là en question, que ça soit remboursements d'impôt, prestations, bon, allocations familiales, comme on
disait dans le bon vieux temps? Je ne me souviens plus du nouveau terme.
Est-ce que c'est des genres de choses auxquelles vous faites ou vous n'avez pas
accès à ça?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. Vachon.
M. Vachon
(Jacques) : C'est des choses
que l'on ne fait pas pour l'instant. Je m'explique. Parce que, quand même
une partie de la clientèle n'est pas
toujours fortunée, là, et puis parfois sur l'aide sociale, donc, il y a quand
même peu à saisir. Mais il existe un outil que nous n'avons pas encore
mais qui demande une disposition réglementaire et qui est toujours dans nos plans, qui est la compensation
fiscale. Donc, on ne fait pas d'échange avec les autres sur de la compensation entre des sommes dues à l'État, mais
il existe un outil qui est la compensation fiscale avec l'Agence du revenu. Et nous, pour toutes sortes de raisons, on
ne l'a pas encore fait, mais ce n'est pas quelque chose qui est impossible
non plus.
M. Boucher : Une petite dernière, si
vous permettez.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Oui, je vous permets, je vous permets.
M.
Boucher : Vous dites que c'est un outil; parce que présentement la
réglementation ne vous le permet pas ou volontairement vous avez décidé
de ne pas aller là pour l'instant?
M. Vachon
(Jacques) : Il y a un peu
des deux. Le règlement devrait être modifié, et nous ne l'avons pas fait encore
parce qu'on a mis les efforts sur des
modifications à nos processus, notamment, justement, sur les saisies. Et les
saisies, dans le fond, c'était une
des remarques importantes, là, du Vérificateur général. Donc, on a mis, dans un
premier temps, l'action... ou on s'est fait un plan d'action sur le
suivi des mesures du Vérificateur général.
M. Boucher : O.K. Merci beaucoup.
C'est tout pour moi.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est tout pour vous? Est-ce
qu'il y a quelqu'un... Oui, M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, merci
beaucoup.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) : 1
min 30 s, dans ce bloc.
M. Tanguay : 1 min 30 s qui
reste?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Oui, dans ce bloc.
M. Tanguay :
Je vais rapidement sur votre site pour mieux vous connaître. Donc, vous avez
été créés par la loi de 2000, vous
êtes en action depuis 2001. Note brève sur votre site : «À moins
d'ententes spécifiques avec le BIA, les constats d'infractions émis par les municipalités et les
avis de jugements rendus par les cours municipales ne peuvent être payés
sur ce site — donc,
à moins d'ententes spécifiques.»
Au
niveau de votre mode de fonctionnement, je ne veux pas trop déborder du mandat qui est devant nous, mais
je vois votre création comme étant intimement liée et contemporaine à cette
loi-là de 2003. Est-ce que vous avez des recommandations justement pour améliorer votre efficacité, ne serait-ce qu'au niveau des ententes avec les municipalités, votre
mode de fonctionnement, si vous avez une réflexion étayée à ce chapitre,
avec le peu de temps qu'il nous reste?
M. Vachon (Jacques) : En ce qui concerne...
peut-être juste faire un petit aparté sur les ententes que nous avons avec les municipalités. Ces ententes-là venaient,
à l'origine, d'une entente entre le ministère de la Sécurité publique et les
municipalités pour que des infractions qui
sont données par la police, la Sûreté du Québec, sur des routes numérotées
soient entendues dans des cours
municipales. On a à peu près 50 ententes avec des cours municipales. On fait la
perception de ces cours-là.
Par
ailleurs, dans l'amélioration de nos processus, à toutes les années, étant
donné qu'on est une unité autonome de service,
on doit faire approuver un plan d'action par la ministre qui est déposé à
l'Assemblée nationale. Et, dans ce plan d'action là, il y a toujours les actions qu'on veut faire pour
s'améliorer. Et, dans le contexte actuel budgétaire, il y a aussi des pistes d'amélioration toujours qui sont
explorées. Et, dans les ententes, je fais le lien rapidement, mais, dans les
ententes ou en termes de projets pour améliorer le rendement
ou optimiser ce que l'on fait, au BIA, on étend notre offre... ou notre échange
électronique. Je vous donne un exemple. Avec la SAAQ, on travaille à améliorer
le processus d'échange électronique pour que le contrôleur routier qui va donner un billet d'infraction sur le
terrain... ce billet-là va pouvoir nous être transmis électroniquement.
Donc,
ça, ça sera l'équivalent quand même de passer à peu près
30 000 dossiers directement dans la ligne, là, pour les
rentrer dans le système de justice plutôt que d'avoir à les traiter à la main
autant à la SAAQ qu'au Bureau des infractions et amendes.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète le bloc
d'intervention. Je me tourne vers l'opposition officielle. M. le député
de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. Alors, une seule question,
la même que j'ai posée tout à l'heure, je la répète. Le nombre de jugements reçus par votre bureau a
augmenté, il est passé de 55 394 en 2004‑2005 à 201 937 en 2008‑2009,
une hausse de 264 %. Au cours des cinq
années d'application de la loi, 92,9 % des dossiers ont été réglés pour
recouvrement financier, travaux
compensatoires ou, de manière résiduelle, par un emprisonnement. De ces
92,9 %, 94,8 % ont été réglés financièrement. Donc, ce
recouvrement générait plus de 83 millions. 55 232 jugements demeurent
actifs.
Mes
questions tout à l'heure étaient : Si on considère la date du rapport, en
date d'aujourd'hui combien de jugements sont toujours actifs? Qu'est-ce qui explique un si grand nombre? Et,
selon le rapport, 94,8 % des jugements ont été réglés financièrement. Quelle était la proportion avant
2003? C'est pour voir s'il y a une augmentation significative du taux de
règlement.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce que vous avez saisi
toutes les questions? Parce qu'il y avait plusieurs questions.
M. Vachon
(Jacques) : Bien, je reprendrais peut-être la composition de la
question.
M.
Bérubé : Bon. Alors, en date d'aujourd'hui, combien de
jugements toujours actifs? Comment on explique ça?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Est-ce qu'on peut y aller...
M.
Bérubé :
Bien, on peut y aller d'abord pour celle-là, puis je vais poser l'autre à
nouveau, ensuite.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Oui, ça va être plus simple peut-être pour nos
témoins.
M. Vachon (Jacques) : Combien de jugements actifs? Tout à l'heure, j'ai
dit, parce qu'on avait mis les cinq dernières années en perspective pour
le ministère de la Sécurité publique... C'est ce qu'on nous avait demandé.
Alors, pour les cinq dernières années, donc,
je n'ai pas tout l'historique, là, les cinq dernières années, combien de
jugements toujours actifs? 86 077 jugements actifs. La valeur
monétaire : 32,8 millions.
M.
Bérubé :
Parfait. Ça, c'est en date presque d'aujourd'hui, là.
M. Vachon
(Jacques) : Oui, presque.
M.
Bérubé :
O.K.
M. Vachon
(Jacques) : Puis c'était pour les cinq ans, là, les cinq derniers.
M.
Bérubé : Donc,
c'est le premier volet. Merci d'y avoir répondu. Alors, si 94,8 % des jugements ont été réglés financièrement, quelle était la proportion qu'on
avait avant 2003? Est-ce que c'est beaucoup moins, ou ça se rapproche,
ou il y a un changement...
M.
Vachon (Jacques) : Je ne comprends pas bien la...
• (15 h 30) •
M.
Bérubé : On en règle 94,8 % financièrement avec,
disons, la loi actuelle, les
procédures actuelles. Avant 2003, c'était quoi?
M. Vachon
(Jacques) : O.K.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : En fait, peut-être, parce
que, là, nous utilisons le rapport de
2009 alors que vous avez des données récentes, alors peut-être
s'entendre sur les données de base sur lesquelles on travaille.
M.
Bérubé : Parce que
c'est les seules données auxquelles on a accès. Donc, c'est pour ça que ma
référence est de là.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. Vachon.
M. Vachon
(Jacques) : Je sais comment on pourrait les comparer, parce que, nous,
dans ce que je disais, les cinq dernières
années, la mise à jour de ça, ce que ça nous donne, c'est 90,4 %.
Donc, vous aviez 92,9 %, je
crois, dans ce temps-là.
M.
Bérubé :
94,8 %.
M. Vachon (Jacques) : Oui. Là, j'avais un ensemble. L'ensemble était 90,4 %
de dossiers réglés, et, de ça, il y
en avait 97 % qui étaient réglés en argent, de façon monétaire, là,
disons.
M.
Bérubé :
O.K.
Mme Bouchard
(Lyne) : Pour ce qui est de 2003, nous n'avons pas les données avec
nous.
M.
Bérubé :
Donc, 2003 et antérieurement aussi.
Mme Bouchard
(Lyne) : Avant. On n'a pas les données avec nous.
M.
Bérubé :
On n'a aucune donnée là-dessus? C'est étonnant.
M. Vachon
(Jacques) : Bien, en fait, en 2004...
M.
Bérubé :
Avec vous, vous voulez dire.
M. Vachon (Jacques) : En 2004, on a mis en place un système, la solution SGIPA, qui s'appelle
le Système de gestion des infractions
et de perception des amendes, et, avant 2004, c'était un autre système qui
n'est plus utilisé. Il y a des suivis, par le plumitif, là, de ce
système-là, mais c'est bien rare qu'on retourne là, là.
M.
Bérubé : Si c'était possible, à la commission... lorsque
vous aurez des données disponibles, là — je comprends que vous ne les avez pas avec vous, c'est un ancien système — juste pour pouvoir comparer l'efficacité de
la loi actuelle et puis pouvoir en faire une appréciation, à la
commission. Donc, c'est tout, M. le Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. En fait, juste en suivi à
votre question. Vous avez mentionné : Donc, 90 % des dossiers
réglés, et 91 % des dossiers réglés le sont en argent. Donc, on a à peu
près...
Une voix :
97 %.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : 97 %. Donc, on est proche de... c'est
88 % en argent.
M. Vachon
(Jacques) : Oui.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : C'est ça. Bon. Alors, M. le député de
Matane-Matapédia.
M.
Bérubé :
En complémentaire.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Vous avez encore le droit.
M.
Bérubé :
Oui, oui. Donc, on a 86 077 dossiers actifs. Qu'est-ce qui explique qu'on
en a autant?
M. Vachon
(Jacques) : Et ça, c'est sur les cinq ans.
M.
Bérubé : Oui, sur
les cinq années de référence.
M. Vachon (Jacques) : Donc, il y a des dossiers qui, bon, en termes de
dossiers actifs... donc ce sont ceux qui ne sont pas fermés. Donc, de ce nombre de dossiers là, il y en a
certainement un grand nombre qui sont soit en attente de paiement ou qui
sont des dossiers encore assez récents, donc, mais probablement aussi en
attente de paiement.
M.
Bérubé : Donc, tant que le paiement n'est pas fait
totalement, il demeure actif, même s'il restait un mois ou...
M. Vachon (Jacques) :
Oui.
M.
Bérubé :
O.K.
M. Vachon (Jacques) : Tout à fait. Et, il y a ça aussi avec l'article 366 maintenant, là,
tant que le paiement... même si quelqu'un va en prison, tant que le
paiement n'est pas fait, le dossier va demeurer ouvert.
M.
Bérubé :
O.K. C'est bien. Pas d'autre question, M. le Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça va? En fait, je vais me
tourner vers le deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de
Montarville.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci beaucoup. Madame, monsieur,
merci, merci pour votre présence. C'est assez complexe, tout ça, il y a beaucoup de chiffres, des chiffres nouveaux
que vous nous avez soumis. Si je récapitule, je vais aller dans la même
veine que mon collègue, j'avais prévu quelque chose ici puis je vais faire un
lien avec ce que le Vérificateur général a mentionné, entre autres, dans son
rapport en novembre dernier.
Donc,
si je comprends bien, il y a 83 millions de dollars qui ont été recouvrés
par vos services entre 2004 et 2009 et
il y avait un solde qui était de 19 millions en février 2010. Ce solde a
augmenté à 32 millions en 2013. Et, les derniers chiffres que vous venez de nous donner,
naturellement il y a une augmentation, là, des jugements, des jugements à traiter :
de 55 000 en 2010, on est maintenant à 86 077 jugements à traiter
maintenant, donc les chiffres les plus récents. Il y a le Vérificateur général qui dévoilait en novembre
2013 que l'organisation du travail au Bureau des infractions et des amendes
ne favorise pas un recouvrement rapide ni
optimal des créances. Alors là, je ne vous lance pas la pierre, mais je vais me
faire l'avocat du diable : Y a-t-il un
lien à faire avec ce que le Vérificateur général a dit sur la façon de
travailler au bureau et le fait qu'il y ait une problématique ou du moins un
retard dans le recouvrement de ces jugements à traiter? Parce qu'il y en a de plus en plus. C'est déjà une partie de
la réponse, j'imagine. Mais comment peut-on expliquer, là, ce «caseload»? Pardonnez-moi
l'anglicisme.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. Vachon.
M. Vachon
(Jacques) : Le Vérificateur général s'est penché sur l'ensemble du
bureau, donc l'ensemble des dossiers aussi,
donc il n'a pas traité les dossiers de sécurité routière à part des autres. Et,
dans les dossiers que l'on doit traiter,
évidemment il y a des dossiers qui... je pourrais dire que les dossiers de sécurité routière, d'infraction pénale en sécurité
routière, ce ne sont pas nos plus complexes.
On
a des dossiers, bon, pour toutes les autres lois pénales, bon, que ce soient la
construction, là, les dossiers de R-20,
CCQ, RBQ, bon — Commission
de la construction, Régie du bâtiment. Ça peut être des dossiers de l'Autorité des marchés financiers, des
dossiers du Revenu qu'on doit traiter aussi — tabac et des choses comme ça. Donc, ces
dossiers-là sont complexes.
Le vérificateur s'est
penché sur tout ce que l'on faisait et effectivement il a relevé qu'il y avait
des choses qui devaient être faites
autrement ou des processus qui devaient être améliorés. Notamment,
j'ai parlé tout à l'heure... on a parlé
des saisies-arrêts tout à l'heure. Ce processus-là, nous l'avons travaillé de façon
à l'améliorer et le systématiser aussi un
peu plus parce que
le vérificateur avait trouvé des dossiers dans lesquels il n'y avait
pas eu saisie et l'information était quand
même disponible. Elle aurait pu être
faite. Ce sont des choses que l'on essaie... que l'on modifie, là. On a eu le
rapport au mois de novembre. Donc, on va les modifier.
En ce qui concerne les dossiers, évidemment le nombre de dossiers augmente. Par contre,
ce sont quand même, souvent, les mêmes défendeurs qui sont des mauvais
payeurs. Vous savez, on a ajouté, par
exemple, les dossiers de radar photo.
Donc, ça vient s'ajouter à ça. Mais ça
demeure quand même que les mauvais payeurs, en bout de ligne, vont
être les mêmes. C'est du Code de sécurité routière.
Mme Bouchard (Lyne) : Peut-être attirer l'attention de la commission sur un des éléments d'information qui a été communiqué un petit peu plus tôt.
Quand
on s'intéresse particulièrement aux infractions au Code de la sécurité routière, il y a
des contrevenants qui vont choisir par eux-mêmes de s'acquitter de
l'amende à laquelle ils ont été condamnés et il y en a d'autres qui vont retarder. Au finish, au total, à la fin, quand on
va avoir épuisé tous les recours qu'on peut mettre de l'avant, quand on va
avoir dûment informé le contrevenant que,
s'il ne s'acquitte pas de son amende, il pourrait perdre son permis de conduire
ou son immatriculation, éventuellement, quand il a peur, peut-être parce
qu'il est récalcitrant... on a
démontré qu'il était récalcitrant, il a peur d'aller en prison, quand
toutes ces mesures-là sont en place, il reste très peu de jugements pour
lesquels les amendes n'ont pas été payées soit financièrement soit avec des
amendes compensatoires.
Donc, au
niveau de la sécurité routière, comme le mentionne M. Vachon, ce sont des
amendes qui sont relativement
faciles à recouvrer, et, si on peut utiliser ce terme, la performance est très,
très élevée. Mais il reste qu'il y a quand même seulement
90 % des citoyens qui décident
de s'acquitter de leurs amendes une fois qu'ils ont été condamnés avec
un jugement dès le départ, immédiatement.
Mme
Roy
(Montarville) : Demeurons, justement, dans les
amendes pénales au Code de la sécurité routière et relativement au stationnement. Ma question est la
suivante : Les fameuses suramendes compensatoires qui sont obligatoires,
est-ce qu'elles jouent un rôle dans le
nombre un petit peu plus élevé d'incarcérations qu'on a vu avec les données
toutes récentes que vous venez de nous donner, là? Est-ce que
ça joue, le fait qu'il y ait ces suramendes compensatoires, qu'on
ajoute le 30 % à l'amende initiale?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. Vachon.
M. Vachon
(Jacques) : La suramende, si je ne me trompe pas, elle est uniquement
dans le dossier criminel.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : ...
Mme Roy
(Montarville) :
Il n'y en a pas dans le Code de la sécurité routière ou en cas d'infraction
pénale?
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Il y a des frais qui sont
imposés sur les constats, mais il n'y a pas de suramende. La suramende, c'est une création dans le Code
criminel, là. Il n'y a pas de suramende libellée comme ça. Il y a des frais imposés
sur les constats d'infraction, là, le 10 $ ou 14 $, là, qui
s'ajoutent. C'est ça?
M. Vachon (Jacques) : Ça, c'est la contribution, oui, le 14 $. À mon avis, il n'y a pas de... C'est
peut-être pour les grands excès de
vitesse, peut-être, ou des amendes doublées, parce que, la suramende, on en a
dans tous les dossiers criminels, là, qui ont une suramende. Donc, ça,
il y a eu une augmentation cette année.
Mme
Roy
(Montarville) : J'avais cru en voir dans les grands
excès de vitesse, mais je peux me tromper, là, sous toutes réserves.
M. Vachon
(Jacques) : Peut-être, je suggérerais de poser la question à ceux qui
vont nous suivre.
Mme
Roy
(Montarville) : Il y a les gens du DPCP qui vont venir. Je leur poserai
la question. Je vous remercie
infiniment.
M. Vachon
(Jacques) : Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour le deuxième groupe d'opposition.
Ah! M. le député de Masson.
M. Lemay :
Oui. Oui, parfait. Donc...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Bien, avec plaisir.
• (15 h 40) •
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Moi, j'aurais besoin d'un éclaircissement. Vous
avez mentionné tantôt... mais en fait
c'est écrit à l'article 366, là, que «quiconque tente de façon
délibérée». C'est sur le mot «délibérée» que j'aimerais avoir des précisions. Vous sembliez dire tantôt
dans votre allocution que vous parliez que la passivité du défendeur permet
d'inférer ses intentions. J'aimerais juste
avoir un peu de précisions. Quand vous mentionnez ça, est-ce que
vous avez une recommandation à ce que le mot «délibérée» ici nuise à certains
dossiers et, dans le fond, que vous vous dites que, dans le fond, simplement le fait que le défendeur ne veut pas
payer, ne fait pas ses travaux, ça serait suffisant pour dire que c'est
délibéré? Ou le mot «délibérée» devrait être changé dans l'article?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. Vachon.
M. Vachon (Jacques) : Ce que je voulais... pas proposer, ce que je soulignais, c'est que
c'était une preuve qu'il est important
à faire quand on veut faire la preuve que le défendeur veut délibérément se
soustraire à son obligation. Et, dans l'expérience que l'on avait,
c'était difficile quand même à prouver, même si on trouve qu'on a eu un bon
score parce qu'on en a eu 30 sur 55 qui ont eu des constats
d'infraction émis. Mais c'était une preuve qui était difficile à faire. Par exemple, si je voulais, moi, accuser ou faire un constat d'infraction pour
Jacques Vachon, et que j'envoie quelque
chose par poste certifiée à son adresse, et que c'est sa conjointe qui accuse
réception, ça ne passait au niveau de la preuve, alors que maintenant il y a un peu de jurisprudence qui nous fait croire que ça va
passer, que ça pourra passer. Et là, bien, le défendeur qui faisait toujours
la sourde oreille ne pourra plus invoquer ce genre de comportement là.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : En complémentaire? Oui, allez-y.
M. Lemay :
Une autre question.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Allez-y.
M. Lemay : Merci.
Vous avez parlé tantôt que, dans les outils possibles, pourrait être la
compensation fiscale. Qu'est-ce qui
m'apporte à penser, c'est... En réalité, vous mentionniez tantôt que, parmi les
55 constats d'infraction que vous
avez donnés, il y en a 30 qui ont été déclarés coupables parmi ceux-là. Même
après leur incarcération, 28 des 30 n'ont toujours pas payé, dans le fond, c'est ça? L'objectif de la compensation
fiscale, ça serait un moyen ultime après l'emprisonnement pour encore
aller chercher les sommes dues? Est-ce que ça serait ça que vous parliez par
cet outil supplémentaire qui pourrait être dans votre boîte d'outils?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. Vachon.
M. Vachon
(Jacques) : Oui. Quand je
parlais de 25 sur les 30 qui n'ont pas encore payé, si on avait mis en place
cet outil-là ou si on le met place, à ce
moment-là la compensation fiscale qui se ferait avec l'Agence du revenu
permettrait, par exemple, si la personne
devait recevoir, je ne sais pas, moi, son crédit de solidarité sociale... bien,
ça permettrait d'aller saisir ça et de se compenser.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est beau? Merci. En fait, sur
la question de la jurisprudence, nous aurons les spécialistes du DPCP
dans quelques minutes pour en discuter.
Simplement
pour revenir à la question de la suramende, le BIA... nous nous penchons sur le
rapport qui porte sur le mécanisme
pour récupérer les amendes imposées et des contraventions au Code de la
sécurité routière, la question. Le BIA
a également juridiction sur la perception des amendes qui découlent du volet
criminel. Alors, c'est un peu compliqué, là, mais il faut essayer de...
En ce qui nous concerne aujourd'hui, on ne parle que du volet récupération des
amendes découlant des infractions au Code de
sécurité routière. On a évoqué plus tôt aujourd'hui la possibilité d'élargir la
portée de ces dispositions-là dans la
loi de 2003. Est-ce que vous avez des observations à faire sur... Ah! bien
voilà. Je m'excuse, M. le député de
Sherbrooke. Est-ce que vous avez des observations à faire sur cette idée qui a
été évoquée plus tôt, d'élargir la
portée du mécanisme, là, l'article 366 et les autres, l'article 364, à d'autres
dispositions que les infractions au Code de la sécurité routière?
M. Vachon
(Jacques) : En fait, je n'ai
pas d'idée ou de proposition à faire, mais effectivement, et puis je pense
que les gens qui vont nous suivre ou
peut-être la ville de Montréal, les municipalités vont vous soulever ces
commentaires-là, il y a peut-être des lois sur lesquelles on n'applique
pas des mesures comme l'avis de non-paiement d'amendes, qui pourraient être, bon... puis qui sont liées aussi
à la sécurité routière, par exemple la Loi sur les véhicules hors route, où on
pourrait peut-être facilement étendre cette mesure-là.
Par ailleurs, on a soulevé souvent... on a discuté souvent de l'étendre à d'autres
lois, mais ça demande un débat peut-être, là, qui n'était pas au niveau
du BIA, là. Ça pourrait être étendu à des lois... je donne juste en exemple, là...
mettons, des lois comme R-20, là, les lois
sur la construction ou des lois sur la Régie du bâtiment, ou encore les
personnes morales. Donc, l'avis de
non-paiement d'amendes s'applique présentement sur les personnes physiques,
mais ça pourrait, selon nous, s'appliquer aux personnes morales. Vous
savez, les... mettons, je prends l'exemple, là, mais les gens qui travaillent sur la construction, qui ont des
amendes et qui, comme le camion va être au nom de la compagnie... bien ils
ne vont pas les payer. On ne peut pas faire...
en tout cas, on ne peut pas utiliser ce mécanisme-là de l'article 364. Ce
seraient des pistes probablement qui pourraient être porteuses.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Merci. M. le député de Sherbrooke, est-ce que vous aviez une question
additionnelle?
M. Fortin
(Sherbrooke) : Bien, peut-être, très rapidement, j'irais de manière un
petit peu plus générale, M. le Président,
et puis un petit peu dans la même veine que mes collègues l'ont fait
précédemment, concernant la question de l'efficacité de votre organisation, mais pas au niveau de l'organisation
de travail de votre bureau, mais plutôt dans l'aspect du cadre légal dans lequel vous devez opérer. Il y
a plusieurs dispositions qui vous permettent, justement, de percevoir les sommes qui sont dues, mais je voudrais tout
simplement savoir de votre part si vous jugez qu'on a un bon équilibre entre, justement, notre volonté de vouloir punir
les contrevenants, puis on comprend que dans notre société on ne peut pas
laisser les gestes impunis, donc, ça, il
faut être très clairs là-dessus... mais, en même temps, les dispositions qui
sont là, c'est certain qu'elles mobilisent beaucoup de ressources,
beaucoup de coûts également, beaucoup de délais.
Alors, est-ce
qu'on a un bon équilibre à ce niveau-là? Et donc, finalement, est-ce que le
cadre légal dans lequel vous opérez pourrait être bonifié ou modifié
pour faciliter votre travail, le rendre encore plus efficace?
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. Vachon.
M. Vachon
(Jacques) : Dans notre
travail de BIA, on travaille beaucoup sur les procédures administratives que
l'on a en place, les procédures. On utilise
le cadre légal comme outil, mais on travaille beaucoup avec nos procédures
administratives et, dans nos interrogations
ou dans notre cheminement, surtout notre focus est d'améliorer nos processus
administratifs. Je n'ai pas une
recommandation, là, de modification à la loi ou pour qu'elle soit meilleure ou
pas. Je pense qu'il y a déjà
plusieurs outils qui sont en place et dont on doit, à tout le moins, optimiser
l'utilisation. Et, quand on parlait de
l'article 366 tout à l'heure, là on est vraiment sur un petit nombre. Parce que
déjà c'est des gens qui ont des infractions en sécurité routière. Ils
n'ont plus de permis de conduire, ils n'ont plus le droit d'immatriculer un
véhicule. Ça nous semblerait déjà être une mesure assez décourageante pour le
défendeur.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça va? Du côté gouvernemental,
ça va? M. le vice-président.
M.
Lisée : Oui. Bonjour. Je serais intéressé à savoir... Pour ce
qui est des travaux communautaires, alors, souvent on entend des
questions : Est-ce que ce sont des vrais travaux? Est-ce que c'est
vraiment lourd? Est-ce que les gens considèrent
qu'ils ont fait un effort ou est-ce que c'est seulement de l'occupationnel, du
temps passé? Alors, on entend des avis positifs. Mais comment est-ce que
vous contrôlez ça? Est-ce qu'il y a des bons organismes qui les utilisent vraiment? Est-ce qu'il y en a des moins bons que
vous retirez de la liste parce que vous vous rendez compte que l'encadrement
n'est pas bon? Comment jugez-vous de la qualité des travaux communautaires qui
sont prescrits?
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. Vachon.
M. Vachon (Jacques) : En fait, les travaux communautaires, c'est pour les dossiers criminels.
On les envoie, nous, en travaux
compensatoires, donc, compensatoires : pour compenser l'amende à payer. Et
c'est le ministère de la Sécurité publique
qui est responsable du programme. Donc, on ne fait pas l'évaluation, nous, au
BIA, si les travaux ont été bons ou pas.
Ce
qu'on reçoit, c'est un rapport qui nous dit que les travaux ont été réalisés.
Si les travaux n'ont pas été réalisés, on
va savoir pourquoi aussi et est-ce qu'il faut les refaire ou il faut prendre
d'autres... À ce moment-là, ce sera d'autres moyens, parce que les
travaux compensatoires sont quand même faits sur une base volontaire par le
défendeur.
• (15 h 50) •
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le vice-président.
M. Lisée :
Donc, s'il y a absentéisme, refus d'accomplir la tâche, ça, vous le savez dans
le rapport.
M. Vachon
(Jacques) : Nous allons recevoir un rapport négatif, effectivement.
M.
Lisée : ...on se rend
compte que, justement, le volontariat du défendeur n'est pas assez fort, à ce moment-là qu'est-ce qu'on fait?
M. Vachon (Jacques) : Comme je vous le disais, on ne fait pas cette vérification-là, c'est vraiment
la Sécurité publique qui le fait.
M. Lisée :
...rapports reviennent négatifs deux ou trois fois?
M. Vachon (Jacques) : Si ça revient deux, trois fois, on ne retournera pas quelqu'un
en travaux compensatoires à ce
moment-là, mais on va utiliser d'autres...
De toute façon, après une fois, on va essayer d'autres outils,
soit une saisie ou quelque chose d'autre, et, si tous ces moyens-là ne réussissent pas, on va se rendre
ultimement à l'article 366 pour... on va avoir affaire à quelqu'un qui
est délinquant, là, sur toute la ligne.
M. Lisée :
Est-ce que vous avez une idée de la proportion de rapports négatifs que vous
recevez?
Une voix :
Sur l'ensemble des rapports.
M. Vachon
(Jacques) : On me dit que c'est moins de 10 %. Ce serait peu.
M. Lisée :
Moins de 10 %?
M. Vachon
(Jacques) : Oui.
M. Lisée :
D'accord. Très bien. Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, ça complète de ce côté et
ça complète de ce côté? Alors, il me reste à vous remercier infiniment pour ces
observations très pertinentes. Vous allez nous transmettre dès que possible les
données pour qu'on puisse bien les analyser. Donc, merci.
Et on va suspendre
quelques instants pour permettre au groupe suivant de s'approcher. Merci. On
suspend.
(Suspension de la séance à 15
h 52)
(Reprise à 15 h 56)
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, la commission reprend ses travaux, et nous recevons les représentants du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Alors, merci d'être là, bienvenue à la Commission des institutions. Je vous
cède la parole en vous demandant, dans
un premier temps, de vous identifier
pour les fins de l'enregistrement et faire votre présentation. Vous
disposez d'une période maximale de 20 minutes. Je vous cède la parole.
Directeur des poursuites
criminelles
et pénales (DPCP)
Mme Bédard (Karen) : M. le Président, Mmes et MM. les députés, je vous remercie pour l'invitation, du DPCP, à participer à vos travaux. D'abord, je me
présente, je suis Karen Bédard, procureure en chef aux poursuites criminelles
et pénales par intérim pour le Bureau des
affaires pénales du Directeur des poursuites criminelles et pénales. À partir
de ce moment, je vais utiliser l'acronyme DPCP pour alléger un petit peu
ma présentation. Je suis accompagnée de...
Mme
Frenette (Catherine) : Catherine Frenette. Je suis procureure aux
Poursuites criminelles et pénales. C'est moi qui s'occupe de la loi
sur... en matière d'emprisonnement, là, l'article 366, dont des constats
d'infraction.
Mme Bédard (Karen) : Alors, dans un premier temps, j'aimerais peut-être rappeler un peu le
mandat du DPCP. De par sa loi
constitutive, c'est un organisme qui a été créé en 2007 par l'entrée en vigueur
de la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales qui
instituait la charge, là, de Directeur des poursuites criminelles et pénales et
lui confiait le mandat de diriger pour
l'État toutes les poursuites criminelles et pénales au Québec et en lui
donnant, dans le cadre de ses fonctions, une garantie d'indépendance,
là, pour agir en cette matière.
De
par sa loi constitutive, le DPCP a pour mandat notamment d'agir comme
poursuivant dans toute affaire où le Code
de procédure pénale trouve application, sous réserve par contre des lois
particulières qui pourraient conférer le statut de poursuivant à d'autres organismes. Parmi nos collègues poursuivants,
on a des municipalités, là, pour des infractions municipales, on a également l'Agence du revenu, l'Autorité des marchés
financiers, le Directeur général des élections. C'est juste à titre
d'exemple, là. Ce sont nos collègues.
Le
DPCP, à titre de poursuivant en matière pénale, intente annuellement, environ,
500 000 poursuites pénales par année. La majorité des
poursuites pénales visent des infractions au Code de la sécurité routière, et,
pour les autres infractions, ce sont des
infractions à caractère pénal, pour les distinguer des infractions à caractère
criminel, donc, qui sont prévues par
les lois provinciales et qui proviennent d'environ 275 mandants. Donc, des
mandants, c'est ceux qui nous soumettent
les dossiers. Et, à titre d'exemple, nos mandats, bien ce sera la Commission de
la construction du Québec... bien, d'abord et avant tout, les corps
policiers, le contrôle routier, la Commission de la construction du Québec. On
a également le MAPAQ, l'Environnement, la
Faune. Et il y a environ 90 lois qui sont régies par le Code de procédure
pénale. Parmi les mandants que nous
avons, il y a le percepteur des amendes, donc le percepteur avec un grand P, ou
les percepteurs des amendes qui proviennent des différentes
municipalités également.
Dans
notre mandat, il faut dire qu'on reçoit les dossiers. Donc, on a des bureaux à
Québec où il y a le traitement des
500 000 dossiers d'infraction. Nous traitons avec le BIA, c'est-à-dire la
direction générale... la direction générale; la Direction de la gestion des infractions, qui nous aide à traiter les
500 000 dossiers, là, parce que ça en fait effectivement beaucoup pour une équipe de procureurs qui est
assez limitée. Le DPCP donc reçoit les dossiers, les analyse, les traite et
émet les constats, donc, par la suite, fera
les représentations devant les tribunaux lorsque requis, lorsque c'est
contesté, et son rôle va s'arrêter,
là, au terme des procédures d'appel, là, s'il y en a eu. En matière de
perception, le DPCP n'est pas impliqué
dans le processus de perception, il ne l'a jamais été. Il ne l'était pas plus
avant même sa création. C'est-à-dire, à l'époque où nous représentions le Procureur général pour assumer à peu
près les mêmes fonctions, nous étions dans un service différent de celui du Bureau des infractions et amendes, là, qui
s'occupe de la gestion des infractions, mais il a son volet perception
également.
• (16 heures) •
Ce
qu'on veut vous rappeler ici aujourd'hui, c'est aussi que l'article 366 du Code
de procédure pénale, qui a été créé, là, par le projet de loi n° 6
dont on parle aujourd'hui, ce n'est pas une mesure de perception, c'est vraiment
une infraction distincte qui a été ajoutée
dans le cadre de l'abolition d'emprisonnement pour non-paiement d'amendes. On
a réservé ce recours-là, mais il
devait s'exercer d'une façon tout à
fait extraordinaire, et on a ajouté
des éléments supplémentaires justement
pour le distinguer de l'emprisonnement pour non-paiement d'amendes tel qu'on le
connaissait auparavant et tel qu'il
existe encore au Code de procédure pénale à l'égard d'autres infractions que
les infractions visées par le Code de la sécurité routière ou encore par
le stationnement municipal.
Donc,
les exigences qui sont particulières de l'article 366, M. Vachon en a discuté un petit peu tout à l'heure, c'est qu'on
doit maintenant démontrer que le défendeur se soustrait
délibérément du paiement de ses amendes, donc c'est-à-dire qu'il a l'intention
ou l'élément intentionnel, l'intention coupable de ne pas payer ses amendes.
C'est ce qu'on appelle, dans le
jargon juridique, les infractions de mens rea. On n'en retrouve pas beaucoup
en matière provinciale, mais c'est quand
même... Ce n'est pas inconnu de notre
législature provinciale, là, mais il
n'y en a pas beaucoup,
mais elles sont particulières parce qu'on n'est pas habitué à ce type d'infractions. Et, ce qui est arrivé au
début, donc, on a commencé à recevoir
des dossiers des percepteurs provenant des municipalités, et la sensation
qu'on a eue, c'est peut-être qu'on avait mal saisi l'élément supplémentaire. Donc, ce n'étaient pas les critères,
tels qu'ils sont définis pour l'emprisonnement, de non-paiement
d'amendes, qui est la mesure ultime au terme du processus de perception où on
n'a pas à démontrer l'élément mental de l'individu, mais donc on recevait des
dossiers de ce type-là, c'est-à-dire on énonçait différents comportements d'inaction et on nous demandait
d'intenter des poursuites pour avoir contrevenu à l'article 366. Donc, au début,
ça a été un processus un peu
d'éducation, c'est-à-dire on a rencontré les percepteurs, l'Association des
greffiers — on
est allé en 2004, on est allé en 2006 — pour expliquer l'élément supplémentaire qu'exigeait
l'article 366, et, bon, ça avait porté
fruit. On a reçu des dossiers qui reflétaient davantage, par preuve
circonstancielle, on s'entend, la plupart du temps, là, mais la mens
rea, l'élément, l'intention coupable, là, de l'individu de se soustraire au
paiement des amendes.
Alors, c'est sûr que, dans le rapport, on
faisait état de 388 dossiers qui avaient été transmis au Directeur des poursuites criminelles et pénales. Et, de ces 388
dossiers, 167 constats avaient été délivrés. Donc, il faut comprendre que
le début avait été un
petit peu plus difficile, mais, au fil du temps, là, la preuve s'était
améliorée dans les dossiers. Et ce qu'on
peut dire, c'est qu'on a... quand le dossier est porté devant le tribunal,
c'est un dossier qui est bien monté, parce
que, manifestement, toutes les déclarations, tous les dossiers qui ont été
portés devant les tribunaux, on a eu, comme M.
Vachon l'a dit tout à l'heure, des déclarations de culpabilité, sauf dans deux cas. Alors, on
est en train de développer une
jurisprudence quand même par
rapport aux éléments qui ont été
introduits par l'article 366 et par
rapport aux dossiers que les percepteurs nous soumettent, et ça va
assez bien à ce niveau-là. Il faut juste se rappeler que ce n'est pas une
mesure de perception, que les
percepteurs peuvent continuer leur processus de perception en parallèle avec
cette infraction-là pour laquelle on aurait pu intenter une poursuite.
C'est ça.
Donc, nous,
on analyse ces dossiers-là selon nos convictions, nos directives, c'est-à-dire on a l'obligation d'être moralement
convaincus que le défendeur est coupable et de pouvoir le démontrer devant le
tribunal, et on doit décider également de l'opportunité d'intenter une
poursuite dans des cas qui nous sont soumis, sans faire de particularité ici aujourd'hui.
Mais donc c'est des critères qui nous guident dans l'évaluation des dossiers.
Il y a
un autre aspect qui a été mis de l'avant par l'article 366, c'est que le
législateur a précisé son intention qu'il n'y ait qu'un seul poursuivant pour cette infraction-là, et c'est dans un
souci, bon, d'uniformité, d'objectivité, d'indépendance, là, par
rapport aux dossiers, vraiment
une unicité, là, de la façon de traiter les dossiers à la grandeur de la province pour qu'ils soient tous traités sur le
même pied d'égalité, étant une mesure tout
à fait exceptionnelle qui est prévue, parce
qu'on ne voulait plus, c'est ce qu'on
a compris, nous, de cette disposition-là, que les gens qui ne payaient pas leurs amendes pour des infractions au Code de
la sécurité routière ne fassent plus d'emprisonnement, là, sur simple
défaut de paiement d'amendes, mais qu'on devait exiger davantage.
Alors, quant
à nous, il s'agit d'une politique qui est générale, qui est unifiée, qui est
équitable pour tous, le fait que ce
soit le poursuivant DPCP, donc le poursuivant public par défaut, si on peut
dire, mais également précisé et pointé dans l'article 366. Nous savons que certaines municipalités avaient
fait, au cours des années... je ne
sais pas si elles le font encore, mais avaient fait, au cours des années,
des démarches pour pouvoir avoir le droit de poursuite. C'est pour ça que je
vous expliquais le point de vue, c'est-à-dire que, 366, on a décidé... le législateur à l'Assemblée nationale a voulu que ce soit un seul et unique
poursuivant, c'est-à-dire le poursuivant provincial.
Conséquemment,
nous, on est satisfaits parce qu'on n'est pas impliqués dans les mesures de
perception. Le rapport nous semble
positif. L'article 366, ça va bien. Donc, on a réussi à établir des balises
pour lesquelles les tribunaux nous suivent très bien parce qu'on a des
condamnations à peu près dans chaque dossier qui est présenté devant le
tribunal. Ça termine.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Merci pour ces
observations. En fait, ça fait très plaisir de vous recevoir et de
parler de droit, droit pénal, de jurisprudence. Je ne bouderai pas mon plaisir.
Peut-être une
précision. Vous avez parlé de la distinction entre 366, qui est véritablement
une infraction distincte avec ses
éléments et qui peut mener à une peine d'incarcération, qui n'est pas une
mesure de recouvrement, c'est-à-dire que ça s'inscrit dans un processus,
c'est en lien avec des mesures de recouvrement... mais l'objectif de 366, c'est
de sanctionner un comportement par une peine
qui est en sus de la peine qu'on voulait recouvrer au départ, mais il y a
également, et vous y avez fait
référence, là, dans le Code de procédure pénale, l'incarcération pour
non-paiement de l'amende qui demeure.
Alors,
peut-être juste revenir sur bien camper la distinction entre les deux, parce
que vous avez insisté sur l'idée que
le procureur... bien, le DPCP demeure le seul poursuivant autorisé pour
l'article 366, et je pense qu'il serait important de bien comprendre la
différence des mécanismes, là, pour se positionner sur cette question.
Mme Bédard
(Karen) : Alors, avant le
projet de loi n° 6, avant l'entrée en vigueur de ce projet de loi là et l'introduction des nouvelles dispositions,
c'est-à-dire 363 et suivants, il existait, comme mesure de perception, l'emprisonnement pour non-paiement d'amendes à
l'égard de toute infraction régie par le Code de procédure pénale. Peu importe, on ne les distinguait pas. Donc, que
ce soit une infraction de règlement municipal ou une infraction plus grave,
d'Autorité des marchés financiers, par
exemple, où des millions pourraient être en jeu, ça existait, cette
disposition-là, au terme du processus de perception. Quand le percepteur
n'y arrivait plus puis il avait épuisé ses recours, il pouvait demander un mandat d'emprisonnement tout
simplement en disant, en présentant au tribunal qu'il n'était pas en mesure
de percevoir la dette autrement et qu'il avait épuisé ses recours.
Cette
disposition-là existe encore au Code de procédure pénale aujourd'hui, mais elle
n'est simplement pas applicable à
l'égard des infractions qui concernent la sécurité routière, la circulation
routière et le stationnement, pour reprendre
les termes de l'article en question. Alors, il faut comprendre que ça existe
encore, la mesure d'emprisonnement à défaut de paiement d'amendes, mais pour
toute autre loi qui ne concerne pas la sécurité routière ou le stationnement.
Donc, oui, en matière, par exemple... M.
Vachon a mentionné la loi sur les relations au travail dans l'industrie de la
construction. Dans ces cas-là, s'il y avait un défaut de paiement
d'amendes et qu'on épuise les mesures de perception, on pourrait demander
l'émission d'un mandat d'emprisonnement pour non-paiement d'amendes sans avoir
à prouver l'intention délibérée de se
soustraire au paiement de ces amendes. Mais, pour les infractions de circulation
et de stationnement, on doit prouver
l'intention délibérée, coupable, de ne pas vouloir payer son amende, de se
soustraire à ce paiement-là, et c'est ce qui est plus difficile à
démontrer.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, juste pour compléter le
portrait, alors, je comprends que c'est en vertu de... c'est la section II, l'article 345.3 et suivants, qui prévoit la
possibilité de l'imposition d'une peine d'incarcération lorsque le
paiement de l'amende est impossible.
Et
il y a des critères qui sont prévus. Et, sauf erreur, c'est l'article 347 qui
prévoit le pouvoir du juge d'imposer l'emprisonnement
pour défaut de paiement d'amendes. Et, à cet article, on n'exige pas un défaut
délibéré, et c'est ce qui distingue
l'infraction de l'article 366 de l'emprisonnement imposé pour le valoir paiement de l'amende à 347. C'est ça?
• (16 h 10) •
Mme Bédard (Karen) : Exactement.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, avec ces précisions,
maintenant que vous êtes des experts en la matière, je me tourne vers le
député d'Ungava.
M.
Boucher : Alors, bonjour, mesdames. Je ne me souviens plus laquelle de
vous deux parlait que grosso modo, bon an, mal an, on parle d'à peu près
500 000 infractions pénales qui sont traitées chez vous. C'est bien ça? De
ces 500 000 infractions ne découlent pas nécessairement
500 000 jugements. Est-ce que vous savez la proportion, là?
Mme Bédard
(Karen) : Des 500 000 poursuites pénales qui sont intentées
par année, il y a environ 65 % des gens qui plaident coupables sur réception d'un constat d'infraction, le
reste se répartit par des plaidoyers de non-culpabilité. Je dirais que c'est dans une proportion... là,
c'étaient les statistiques qui proviennent du Bureau des infractions et
amendes, mais il y a probablement
20 % des gens qui plaident non coupables et 15 % qui demeurent
silencieux, ce qui devrait donner, je ne suis pas très bonne dans les
chiffres, mais qui devrait donner l'équivalent de 100 %.
M.
Boucher : O.K. Mon intention coupable en vous posant cette
question-là, c'est de savoir, parmi les gens qui vont plaider, là, est-ce que... je veux dire, il y en a 20 000,
100 000, dossiers qui sont acquittés par un juge parce qu'il n'a
pas la preuve, parce que... peu importe. Avez-vous les chiffres là-dessus ou...
Mme Bédard (Karen) : ...les
acquittements, vous voulez dire.
M.
Boucher : Il y a 500 000 infractions. Vous dites : 65 %
de 500 000 plaident coupables, paient. Là, il y a à peu près les deux tiers qui sont réglés. Il y en a
l'autre tiers qui ne fait rien, qui néglige, mais vous parliez tantôt d'à peu
près 20 %, là, qui va plaider
non coupable puis qui va se rendre à la cour pour dire : Bien, M. le juge,
ce n'est pas vrai, je n'ai pas fait ça, etc., et qui sera acquitté.
Savez-vous de combien d'acquittements par année, à peu près, on peut parler?
Mme Bédard
(Karen) : Je n'ai pas la
statistique, mais je crois que, dans le cadre des procès contestés, nos... Ça
dépend des lois. En fait, ça dépend des domaines dans lesquels on oeuvre. J'ai
lu récemment, là, par exemple, dans le domaine
de la construction, qu'on a un taux de succès ou un taux de déclaration de
culpabilité qui est supérieur à 75 %. Mais ça dépend. Donc,
peut-être la question aurait pu être posée au Bureau des infractions et amendes
qui détiennent toutes les statistiques concernant les résultats de causes.
M. Boucher :
O.K. C'est bien. Vous parliez aussi que la majorité de ces 500 000
infractions là était en regard avec
stationnement et circulation routière. Est-ce que c'est la vaste majorité, les
deux tiers, avez-vous une idée, à peu près?
Mme Bédard
(Karen) : ...400 000
dossiers qui concernent la sécurité routière. Au DPCP, il n'y a pas beaucoup
de stationnements, par contre, ce sont
vraiment des infractions surtout sur les autoroutes. Les infractions de
stationnement relèvent davantage de la compétence municipale.
M. Boucher : Donc, c'est à peu près
400 000 sur 500 000 qui regardent la...
Mme Bédard (Karen) : ...la sécurité
routière, oui.
M.
Boucher : O.K. C'est bien. Vous parliez tantôt, bon, de l'article 366,
puis M. le président m'a scoopé quelques questions, donc, mais, vu que
c'est le président...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
C'est le privilège du président.
M.
Boucher : C'est ça, c'est le choix du président, comme on dit. Donc,
on parlait d'intention coupable, la personne qui refuse délibérément ou essaie délibérément de se soustraire. Bon,
j'ai quelques sous-questions. Est-ce que, premièrement, c'est un article 366 par infraction ou vous
regroupez ça en un groupe d'infractions : bien, voici, tel individu a
trois, quatre, cinq infractions non payées, et puis, en vertu de ça, on
demande une condamnation en vertu de 366?
Mme Bédard (Karen) : Me Frenette
traite les dossiers. Je vais la laisser répondre sur cette question.
Mme
Frenette (Catherine) : Oui. Ce qu'on fait habituellement, c'est qu'on
va prendre un constat d'infraction par
personne, la dette totale. Donc, si la personne, elle a eu trois constats
d'infraction non payés, c'est le nombre total qu'on va prendre, parce que de toute façon, même s'il y
avait condamnation, ça serait par rapport au montant de l'amende, là, total. Donc, le nombre de jours d'incarcération
reviendrait au même. Mais de toute façon on ne va utiliser seulement qu'un
constat d'infraction par personne.
M. Boucher : O.K. Et puis
est-ce que le mot «délibérément», bon... c'est sûr que l'inaction totale, le
fait de ne pas s'en occuper, de jeter
son courrier à la poubelle, de ne pas se présenter au rendez-vous, de... est-ce
que ça, c'est considéré comme délibéré ou quel est le niveau de preuve
que vous devez faire à ce moment-là, là?
Mme
Frenette (Catherine) : Quand on a commencé, il a fallu se poser la
question : Qu'est-ce qu'on peut utiliser
comme étant délibéré? Comment est-ce qu'on démontre ça? Parce que souvent c'est une preuve plus documentaire. C'est
des documents qu'on a. Habituellement, les dossiers qu'on a,
c'est des défendeurs qui ne se présentent pas à la cour, qui ne plaident pas non coupables, qui ne plaident pas
coupables. On a de la difficulté à les retrouver. Donc, le percepteur souvent
ne lui parle pas, à cette personne-là, a de
la misère à la rejoindre. Il a fallu se poser la question : Comment est-ce qu'on va appliquer cette loi-là avec les moyens qu'on a? Donc, nous, ce qu'on
s'est dit, c'est qu'on va prendre exactement la même méthode que le percepteur. Donc,
tous les éléments que le percepteur doit passer à travers pour obtenir une
condamnation, un emprisonnement, nous aussi, on les exige du percepteur. Donc,
il doit y avoir une offre de travaux compensatoires,
et on doit passer par l'article 364 du Code
de procédure pénale, l'avis à la
SAAQ, et il doit passer par la saisie.
On
s'assure aussi que, tout ce qui est fait, le défendeur est conscient de ça et
il sait que ces mesures-là sont prises. Et au final, à la fin, avant de nous envoyer le dossier, on exige du
percepteur qu'il envoie un avis au défendeur pour l'aviser que, si jamais il ne paie pas, le dossier sera
envoyé au DPCP, et un constat d'infraction demandant un emprisonnement de deux ans moins un jour... au maximal, de deux
ans moins un jour pourrait lui être signifié. De cette façon-là, on s'assure
que la personne a une connaissance de l'infraction et de ce qui peut lui
être imputé. Mais donc, tous ces éléments-là mis en face, si la personne ne fait toujours rien, on considère que c'est
fait de façon délibérée. Et, de ça, justement, pour en venir un peu à la jurisprudence, il n'y en a pas,
des décisions écrites, il n'y en a pas. Mais j'ai fait mon travail, j'ai écouté
les jugements des juges, là, sur le banc
pour justement essayer de me fonder une manière de penser des juges, qu'est-ce
qui est accepté des juges pour, nous, après
ça, nous guider dans la façon de gérer les dossiers. Et justement il y a une
juge qui dit exactement ça, que la
mens rea s'infère de l'inaction du défendeur. Donc, après avoir reçu divers
avis, des... pas des menaces, mais
pratiquement... du percepteur que, si la personne ne fait rien, on va envoyer
le dossier au DPCP, on va demander
l'emprisonnement pour vous, et la personne ne fait rien, ça démontre la mens
rea qui est requise pour l'article 366.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député d'Ungava, juste sur la réponse
de... vous permettez?
Une voix :
...
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Me Frenette, je comprends que ce que vous nous
dites, c'est qu'à votre connaissance il n'y a aucun jugement écrit sur
l'article 366.
Mme Frenette
(Catherine) : Je n'en ai pas répertorié.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : M. le député d'Ungava.
M.
Boucher : Petite dernière question. Vous disiez tantôt, bon, en
précisant, M. le Président, que l'emprisonnement pour non-paiement
d'amendes existe quand même pour toute une autre catégorie qui est non reliée à
l'automobile, la circulation routière, etc. Est-ce que vous avez des
statistiques sur est-ce qu'on emprisonne aujourd'hui des gens pour non-paiement d'une amende reliée à la construction
ou avoir pêché un poisson trop petit, trop gros en dehors de la saison? Dans les faits, est-ce qu'il y a encore de
l'emprisonnement pour ça ou si toutes ces amendes-là se paient? Peut-être que
j'aurais dû poser cette question-là à vos prédécesseurs, là. Mais à votre
connaissance, là?
Mme Bédard (Karen) : Effectivement, bien c'est ça, comme on dit, le DPCP n'est pas impliqué
dans les mesures de perception, et
l'emprisonnement à défaut de paiement d'amendes est une mesure de perception
pour laquelle, malheureusement, on
n'est pas impliqués, donc on ne prend pas part. Alors, oui, effectivement, M.
Vachon, le Bureau des infractions et
des amendes aurait pu répondre à cette question-là. On l'utilise encore, je le
sais. Mais quelles sont les statistiques par rapport à ça? Je ne peux
pas vous le dire.
M. Boucher :
Merci.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : On fera revenir le BIA. Je me
tourne vers le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : M. le Président, j'ai trois questions à poser.
D'abord, suite à la présentation, quels éléments juridiques sont nécessaires pour prouver qu'une personne se soustrait
délibérément au paiement des sommes dues? En quoi cette preuve est difficile à faire? Quels sont les
écueils, par exemple, que vous pouvez rencontrer pour... parce qu'il y a une
part de subjectivité, par exemple, dans le
jugement de chacun des cas. Pouvez-vous nous évoquer un peu comment ça se
passe pour démontrer que quelqu'un veut se soustraire délibérément du paiement?
• (16 h 20) •
Mme Bédard (Karen) : Me Frenette avait commencé à répondre à... vous a donné des éléments de
réponse tout à l'heure, mais je veux juste peut-être, avant de lui céder
la parole, vous mentionner que chaque cas est un cas particulier. Il y en a, dans certains dossiers, où quelques
actions vont nous démontrer... on sera convaincus qu'on sera en mesure de
démontrer l'intention coupable, alors que,
dans d'autres dossiers, il va y avoir une multitude d'actions, puis ce ne sera
pas évident de démontrer l'intention coupable.
Une voix :
...
Mme Bédard (Karen) : La mens rea.
Une voix : ...les juristes,
l'intention. C'est ça?
Mme Bédard (Karen) : Oui, le...
Une voix : C'est bien.
Mme Bédard (Karen) : Exactement.
Donc, Me Frenette, concernant les éléments du dossier requis.
Mme
Frenette (Catherine) : Bien,
comme j'avais dit un peu tout à
l'heure, là, on y a été un peu avec
les éléments du percepteur qu'il doit
déjà faire, qu'il faisait avant, là, tout ce qu'il y a par rapport aux règles, là, vraiment, au niveau de la perception, et, de ça, quand la personne ne faisait rien, bien il
fallait s'assurer au moins que la personne les reçoive, donc, que ce soit par courrier certifié ou par
huissier. Donc, l'huissier qui va aller faire une saisie mobilière, je dois
avoir les documents puis m'assurer
que vraiment il ait tous les documents. On a exigé aussi le
dernier avis, qu'on appelle, l'avis qui
dit qu'on va envoyer le dossier au DPCP si jamais il n'y a
pas de paiement. Mais, comme Me Bédard le disait, chaque cas est un cas
d'espèce, et c'est vraiment le cas dans ces dossiers-là. Justement à cause de
l'intention coupable, il faut vraiment s'attarder à chaque dossier. On n'a pas de grille
d'analyse aussi facile que dans d'autres dossiers, c'est vraiment complexe, là. Des fois, la limite
est mince entre ce qui n'est pas de l'intention et ce qui en est. Donc, il faut
vraiment s'assurer, là, qu'on soit moralement convaincus, finalement, là.
M.
Bérubé :
L'assurance morale.
Mme Bédard (Karen) : Ça fait partie
de nos directives.
M.
Bérubé : Ça a déjà
été prononcé à cette Assemblée dans d'autres contextes.
Considérant qu'il y a seulement 167 constats
d'infraction pour des personnes contrevenantes se soustrayant à leurs responsabilités — ça, c'est selon les données qu'on a, comme
parlementaires — considérez-vous
que cette mesure est utile? Est-ce que c'est encore beaucoup pour vous,
167, ou...
Mme Bédard
(Karen) : Une mesure utile?
Le DPCP, son rôle, c'est de recevoir les dossiers puis de les analyser selon ce qu'on lui soumet et de mener à terme la
procédure. Maintenant, est-ce que c'est une mesure utile? On a mentionné :
Ce n'est pas une mesure de perception. Donc, en principe, elle ne devrait pas
être utile à la perception. On s'entend qu'il
y a une connexité, ça, c'est sûr. Mais est-ce qu'on considère que c'est une
mesure utile pour responsabiliser les gens à l'égard du fait que de ne pas
payer ses amendes, bien ça devient une infraction dont on doit répondre et on
doit répondre gravement lorsqu'on le fait de façon délibérée? Oui, je
pense que c'est utile de responsabiliser les gens.
M.
Bérubé : O.K.
L'absence serait plus préjudiciable pour la société ou pour le signal qu'on
envoie que de l'appliquer, c'est ça?
Mme Bédard
(Karen) : Oui. Je pense que
ça a été bien de garder une mesure quand même qui est une mesure extraordinaire mais d'en garder une concernant les
infractions en sécurité routière parce qu'il ne faut pas oublier que c'est
quand même un fléau, là, il y en a beaucoup. Comme on disait tout à l'heure, on
en a 400 000, poursuites pénales qui concernent
la circulation routière. Et puis ça tue beaucoup de personnes. Alors, je pense
qu'il faut responsabiliser les gens à l'égard des conséquences de ce
qu'on a fait.
M.
Bérubé :
Maintenant, vous avez sûrement une réflexion quant à des solutions, des
modifications qui pourraient être
apportées quant aux difficultés relatives de l'article 366. Est-ce que vous
pouvez nous partager des hypothèses de solution que vous pourriez avoir,
qui pourraient améliorer le processus?
Mme Bédard
(Karen) : Pour améliorer le
processus? Bien, je pense que c'est encore de continuer la communication
et la formation. Parce qu'ils ont
l'information, les percepteurs sont capables de constituer les dossiers.
Peut-être que des fois c'est
considéré comme lourd parce qu'on doit étaler par écrit, vraiment rédiger, coucher nos idées, toutes les actions
qui ont été prises, sans rien oublier non
plus parce qu'on doit avoir tous les éléments, là, autant
inculpatoires que disculpatoires, dans les dossiers, et je pense que
c'est vraiment ça qui pourrait améliorer. Parce qu'une modification
législative, par exemple, pour enlever le fardeau de démontrer la mens rea...
C'est un retour en arrière, revenir à l'emprisonnement pour non-paiement d'amendes tel qu'il existe pour
d'autres infractions. Moi, je pense, c'est la communication, la formation,
l'échange entre les partenaires qui vont
aider à assouplir ou à rendre ça plus convivial, la façon dont est monté le
dossier.
M.
Bérubé : Je suis convaincu que la commission retiendra ce
genre d'observations de votre part, là. C'est ce qui nous permet d'avancer puis d'être des parlementaires qui contribuent
constamment à améliorer nos processus et puis nos interventions. Merci
beaucoup. Pas d'autre question, M. le Président.
Le Président (M.
Ouimet, Fabre) : Merci. Vous permettez, juste pour revenir...
Bien, en fait, avant...
M.
Bérubé : Allez-y,
on vous donne de notre temps.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Ah! c'est gentil. Je reviens à la question, parce que,
là, on parle des lacunes de 366, et
je reviens à cette information qui m'a troublé, de l'absence de jugements écrit
sur l'article 366. En fait, j'avais compris qu'en vertu
du code le juge doit motiver par écrit l'imposition d'une peine d'emprisonnement
à 347 mais qu'à 366 ça ne s'applique pas. Et donc le juge peut déclarer
coupable et incarcérer sans motiver par écrit sa décision.
Mme
Frenette (Catherine) : Les dossiers de l'article 366 apparaissent sur le
rôle... ce qu'on appelle le rôle régulier, là, le... voyons, le...
Une voix : La salle à
volumes.
Mme
Frenette (Catherine) : ...la salle à volumes. Donc, les juges, sans la salle
à volumes, ça rend des jugements sur
le banc, immédiatement. Et c'est un peu pour ça. Ils vont motiver leurs
jugements de façon orale mais pas par écrit.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : O.K. En fait, c'est juste parce
que, là, il me semble qu'il y a une incohérence entre le régime qu'on impose à 347, où, lorsque le juge incarcère un
contrevenant pour le défaut de paiement de son amende, on impose au juge l'obligation de motiver par
écrit la peine... alors qu'à 366 le juge peut déclarer coupable et envoyer
en prison une personne sans avoir l'obligation de motiver.
Mme Bédard (Karen) : À notre
connaissance, ils n'ont pas prévu cette obligation-là.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, merci, M. le député de
Matane-Matapédia, pour cette question. Je me tourne maintenant vers la
députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames,
merci pour votre présentation. Moi, je vais
m'attarder, oui, à l'article 366 mais plus spécifiquement à la prescription et
je vais le lire pour le bénéfice des auditeurs. On nous dit que «cette poursuite se prescrit par un an depuis la date de
la connaissance par le poursuivant de la perpétration de l'infraction. Toutefois, aucune poursuite ne
peut être intentée s'il s'est écoulé plus de cinq ans depuis la date de la
perpétration de l'infraction.» Donc, c'est ce qu'on appelle la
prescription.
Ma question
est la suivante : Est-ce qu'on sait il y a combien de dossiers, en vertu
de l'article 366, qui ont dû être abandonnés
compte tenu du fait qu'ils étaient prescrits? On connaît l'engorgement des rôles,
surtout lorsqu'on parle de cours
municipales à Montréal, entre autres, et également les fameuses requêtes pour
délai déraisonnable. Donc, est-ce qu'on sait combien de dossiers
auraient pu ne pas aller jusqu'au bout à cause de la prescription?
Mme Bédard
(Karen) : ...quand ça court
à compter de la connaissance du poursuivant, c'est dès le moment où le Directeur des poursuites criminelles et pénales reçoit le dossier. Donc, lorsqu'il
rentre chez nous, le délai de prescription commence à courir à ce moment-là.
Les délais de traitement au DPCP ne sont pas nécessairement
longs, surtout pas ce type de dossiers là. Donc, c'est le temps de prendre la
saisie... prendre le temps de saisir le dossier à l'informatique parce que les
dossiers sont numérisés au Bureau des
infractions et amendes, transmettre le dossier assez rapidement, là, au
procureur responsable du dossier,
c'est-à-dire Me Frenette, et les décisions sont prises assez rapidement. Le
problème qu'on rencontre par contre, c'est
dans la signification, c'est-à-dire que souvent c'est des personnes qui sont...
justement, elles sont silencieuses et elles peuvent être très mobiles,
elles peuvent être difficiles à joindre, et là on va avoir des difficultés à
signifier le constat d'infraction, même si on a pris la décision de poursuivre.
Et on avait certaines statistiques concernant l'abandon de signification, abandon de poursuite. Ah! je ne
l'ai pas, l'abandon de signification. Refus de poursuite, abandon de poursuite,
trois acquittés, 12 retirés.
Je n'ai pas
la statistique concernant l'abandon de signification, mais on sait qu'il y a eu
un... dossier où c'était très
difficile de signifier et puis c'était parce qu'on ne retrouvait pas le
défendeur. À ce moment-là, on a été obligé d'abandonner la procédure.
Mme Roy
(Montarville) : Alors, à la lumière de ce que vous me dites,
il n'y a pas nécessairement de problématique avec la prescription, mais
plutôt la signification?
Mme Bédard (Karen) : C'est ça,
exactement.
Mme
Roy
(Montarville) : Donc, la prescription, elle est
écrite là, mais, dans les faits, elle ne change pas grand-chose?
Mme Bédard
(Karen) : Non, parce que
c'est à partir du moment où le DPCP reçoit le dossier qu'elle commence à courir, et puis ce n'est pas plus de cinq ans depuis
la perpétration, par contre, de l'infraction. Mais là c'est très rare qu'on
va avoir des dossiers qui vont être au-delà de cinq ans en perception avant
qu'ils nous soient transmis, là, donc ils ne devraient pas... Ce n'est pas un
problème de prescription, c'est un problème de signification, si problème il y
a.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vous remercie infiniment. C'est clair. Merci.
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
M. le député de Masson.
• (16 h 30) •
M.
Lemay : Bonjour, Mme Bédard. Bonjour, Mme Frenette. On parle beaucoup
de l'article 366, là, bon, c'est le
sujet du jour, mais, selon vous... d'après toutes les autres interventions que j'ai eues, je n'ai
pas... en tout cas, vous n'avez pas fait mention que, selon vous, une modification du libellé de
l'article 366... Est-ce que, selon vous, il devrait y avoir une modification
du libellé de l'article 366?
Mme Bédard
(Karen) : Je pense
que la question est venue un petit peu tantôt,
posée différemment, c'est-à-dire
que, si on modifiait l'article 366, par exemple, pour alléger le fardeau de preuve, parce que, ce qu'on dit, la distinction qu'il y a, c'est qu'on doit prouver l'élément mental de l'individu... Si
on veut l'alléger, c'est qu'on le ramène à une infraction de responsabilité stricte, donc une infraction
pour laquelle on n'est pas obligé de démontrer une intention coupable mais
pour laquelle les gens pourraient avoir des
moyens de défense, là, comme celui qui s'appelle la diligence raisonnable.
Pour moi, à mon avis, si on en fait une infraction de responsabilité stricte,
on revient exactement au régime qu'on a d'imposition
de peine d'emprisonnement pour non-paiement d'amendes tel qu'on le retrouve aux
articles 345 et suivants, là. C'est
ça. Et c'est pour ça qu'on ne suggère pas ça. Si c'est ça, bien c'est revenir
en arrière. Et, d'après le rapport du ministère de la Sécurité publique, les mesures de perception se sont améliorées.
Mais, s'il y a une volonté législative à ce niveau-là, nous, en tant que
DPCP, on va appliquer la loi telle qu'elle est rédigée au moment où on
l'applique.
M.
Lemay : O.K. Parfait. Donc, ce que je comprends de votre réponse,
c'est que, non, il n'y a pas lieu de modifier l'article 366.
Mme Bédard
(Karen) : Nous ne croyons
pas... si on veut continuer à imposer les mesures telles qu'elles ont été
pensées et suggérées, c'est-à-dire de faire
de l'emprisonnement pour une infraction au Code de la sécurité routière une
mesure tout à fait extraordinaire et en ultime et total dernier recours, bien
que ça n'efface pas la dette.
M. Lemay : O.K. Merci de la
précision. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. En complément à la question de la députée de Montarville sur le problème
de
signification, je voudrais comprendre. Quand on décide d'avoir recours à
l'article 366, dans un cas où on ne réussit pas à localiser le défendeur, j'aimerais savoir dans quel cas on va
passer par le... voyons, l'emprisonnement pour défaut de paiement, versus 366, là. Je ne sais pas si vous êtes capable de... Parce
que, la problématique de la signification, quand on a
quelqu'un qui est disparu dans la brume, je la comprends très bien.
À ce moment-là, est-ce qu'on va privilégier le passage à 366 avant de passer à l'emprisonnement pour défaut
de paiement ou comment cette mécanique-là s'opère? Et là je ne sais pas si la question...
Mme Bédard
(Karen) : En fait, c'est que
les deux ne peuvent pas coexister. Donc, il n'y a pas d'emprisonnement à
défaut de paiement d'amendes prévu à 345 et
suivants s'il y a une infraction possible à l'article 366.
L'article 366 n'existe que pour les infractions de sécurité
routière et de stationnement. Donc, on est soit dans un régime soit dans
l'autre. Alors, c'est ça. Mais, ceci étant
dit, les emprisonnements pour non-paiement d'amendes, les mandats
d'emprisonnement sont souvent
délivrés en l'absence des défendeurs aussi, hein, puis l'exécution du mandat
peut être longue des fois, alors...
Le Président (M. Ouimet, Fabre) :
Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Merci beaucoup pour votre temps et votre participation aujourd'hui en répondant
à nos questions.
Juste une
seule question qui sera l'occasion pour vous peut-être de préciser l'analyse que
doit faire la Direction des
poursuites criminelles et pénales. On sait qu'en cette matière-là il n'est pas
question de gagner ou de perdre un procès, un dossier, c'est que justice soit faite et que vous n'êtes pas partie
demanderesse qui va gagner ou qui va perdre mais que justice soit faite. Et vous avez dit une chose
importante, puis je pense que c'est important pour les gens qui écoutent à la
maison de connaître cette analyse-là que vous
faites à l'interne et qui n'est pas connue, je crois — et je vous cite : «L'obligation
d'être moralement convaincu de la culpabilité.» Et là je sors peut-être du
cadre strict des infractions en responsabilité
stricte. Mais vous avez évidemment la loi, à l'article 13, qui vous dicte
d'analyser chaque dossier en considérant l'intérêt de la justice, donc
de là découle l'obligation.
J'aimerais ça
que vous, peut-être, vulgarisiez pour les gens qui nous écoutent à la maison,
justement, les bases morales sur
lesquelles vous dites : Bien, dans ce dossier-là, est-ce que l'on rencontre
le fardeau de preuve? Puis ce n'est pas la question de dire : Bien, on y
va pareil, on force le jeu, on s'essaie, au pire aller on perdra. Non, parce
que l'on sait que, quand il y a un
dépôt d'accusation puis qu'il y a un procès, je veux dire, beaucoup de dommage
est déjà fait à la personne qui...
Même s'il y a la présomption
d'innocence, le dommage est fait dans bien des cas au niveau de la réputation.
Alors,
j'aimerais ça peut-être que vous nous expliquiez davantage
l'analyse que vous faites sur le plan moral. C'est un mot qui peut-être a perdu un peu de son actualité mais qui entre
encore dans vos analyses. Avons-nous le fardeau de la preuve. Et, également, cet esprit critique là que vous conservez à
l'interne face aux dossiers que les enquêteurs vous apportent et que vous décidiez dans certains
cas : Oui, on y va, mais dans d'autres : Non, c'est un peu ténu, on
ne va pas jusque-là, jusqu'à déposer des accusations, j'aimerais vous
entendre là-dessus.
Mme
Bédard (Karen) : Si vous
permettez, je vais lui céder la parole après parce que j'ai un document devant
moi qui pourrait peut-être vous intéresser,
c'est-à-dire les extraits des directives du Directeur des poursuites
criminelles et pénales.
Donc, quand
on parle d'être moralement convaincu, je vais vous lire les directives qui nous
guident, c'est-à-dire, dans la directive ACC-3 — c'est
même sur les sites publics, donc sur le site Internet, ce sont des directives
qui sont accessibles à tous — donc, la conviction de la culpabilité du
prévenu : «Le procureur doit, après avoir examiné toute la preuve, y compris celle qui pourrait soutenir
certains moyens de défense, être moralement convaincu qu'une infraction a été commise, que c'est le prévenu qui l'a
commise et être raisonnablement convaincu de pouvoir établir la culpabilité
du prévenu. Il doit conserver cette conviction tout au long des procédures,
même en appel.»
Ensuite, on a
la question d'opportunité. Donc, on doit également évaluer ce facteur-là. Même,
des fois, ça devient plus important
quasiment que le reste. Est-ce qu'il est opportun de poursuivre dans un dossier
donné? Donc, «lorsque le procureur
considère que la preuve est suffisante pour intenter une poursuite, il doit
autoriser le dépôt de la dénonciation ou
déposer l'accusation à moins qu'il juge inopportun de le faire, dans l'intérêt
public, soit en considération des facteurs énumérés au paragraphe 10», et là on a des facteurs d'opportunité dans
nos directives qui vont ressembler à... bien, c'est ça, disons, l'infraction technique versus une
infraction qui est plus grave. Si la disposition législative est un petit peu
désuète, on va tenir compte un peu de
l'opinion publique dans un certain... l'effet sur la société. Donc, ce sont une
série de facteurs qu'on doit évaluer,
et aussi en raison de l'application du programme non judiciaire de certaines
infractions criminelles commises par des adultes, et ça, ce sont des
programmes de mesures de rechange qui existent chez nous.
Donc,
oui, quand on évalue un dossier, il faut qu'on pense aux moyens de défense, il
faut qu'on regarde objectivement ce
qu'il en est, et effectivement, le DPCP, nous, on a une très grande distance
par rapport à ces dossiers-là parce que, comme vous dites, on n'a pas de causes à gagner, mais on n'a aucun intérêt
dans les dossiers. On ne participe pas à la perception, on ne touche pas les montants, on est vraiment...
C'est pour ça qu'il a été créé aussi, le DPCP : les garanties
d'indépendance d'un système de
poursuite qui est totalement objectif et indépendant de toute ingérence. Donc,
sur ce, peut-être Catherine pourra préciser davantage par rapport aux
dossiers qu'elle étudie dans le contexte de l'article 366.
Mme
Frenette (Catherine) : Le
critère d'être moralement convaincu a une grande importance lorsqu'on
parle de l'emprisonnement d'une
personne. À partir du moment où on
demande l'emprisonnement de quelqu'un, c'est encore plus... la peine est encore plus grande qu'une amende.
Donc, je pense que ça, ça a été vraiment le critère qui base chaque analyse de chaque dossier, c'est : Après
avoir tout lu, avoir tout vu ce que le percepteur nous a dit, il faut faire un
recul puis dire : Est-ce que je
suis convaincu que cette personne-là tente délibérément de se soustraire aux
paiements? Et c'est là-dessus. Est-ce
que moi, en tant que procureure, je suis prête à aller plaider ça devant un
juge? Est-ce que je suis moralement
convaincue? Là, c'est le critère de base, là, qui guide notre analyse dans ces
dossiers-là. Je ne sais pas si ça répond à votre question.
Mme Bédard
(Karen) : J'ajouterais
peut-être le fait qu'on se pose aussi la question : Est-ce que l'inaction
peut être due à autre chose? On
regarde le dossier sous un autre angle, on va dire : Bien, coudon,
peut-être qu'il a eu un accident, je
ne sais pas. On essaie de regarder le dossier en pensant à toutes les
possibilités. Puis, en bout de ligne, si on en vient à la conclusion qu'on est moralement convaincu qu'il se
soustrait délibérément, c'est à ce moment-là qu'on va recommander la
poursuite.
M. Tanguay :
Et, M. le Président, si vous me permettez un commentaire, je pense qu'à raison
les 125 élus de l'Assemblée nationale
sont souvent très critiques et prompts à trouver les éléments perfectibles de
tout organisme, de toute mesure, puis
je pense qu'il est important, quand on voit également l'oeuvre que vous faites...
je pense que c'est à bon droit que vous bénéficiez d'une réputation,
justement, d'indépendance, de rigueur qui rejaillit sur notre système de
justice.
Alors, moi,
je tenais à vous lever mon chapeau à ce niveau-là et à vous inviter à
poursuivre avec autant de rigueur et d'indépendance.
C'est tout à fait rassurant quant à nos institutions. Alors, voilà, M. le Président,
ça conclut mes commentaires.
• (16 h 40) •
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de
LaFontaine. D'autres questions de la part de... En complémentaire sur la question tantôt de la
difficulté de signifier certains défendeurs : Sur le lot des dossiers,
est-ce que c'est un problème important ou relativement mineur en nombre
ou en pourcentage?
Mme Bédard
(Karen) : À une année
donnée, il y a eu beaucoup de dossiers qui ont été soumis en même temps,
puis je pense qu'il y a
eu un... dossier contre un défendeur où on a eu des problèmes de signification,
donc ça a sorti... j'avais en tête, tout à l'heure, là, je voyais «Abandon de signification» sur plusieurs
lignes d'un tableau, là, mais finalement
je n'ai pas vraiment de donnée, parce que,
ce qu'on me dit du BIA, parmi les 233 constats d'infraction qu'on avait émis
depuis l'entrée en vigueur du système de
gestion des infractions et de perception des amendes, donc, qui était en 2006,
il n'y avait eu seulement que trois abandons de poursuite. Mais je ne sais pas
si ça concerne aussi la... Ça doit être la signification
aussi parce que ce n'est pas des retraits, là, c'est une autre
donnée, ça. Donc, j'ai l'impression qu'il
y en a eu juste trois depuis
2006.
Mme
Frenette (Catherine) : La
beauté avec ces dossiers-là, c'est que le percepteur, même
s'il nous a envoyé le dossier... il y a
abandon de signification, puis il continue ses démarches, il peut nous
resoumettre un autre dossier. On va l'analyser
avec ce qu'il y a de nouveau. Donc, ce n'est pas un dossier qui meurt, là. S'il y a
quand même des démarches qui sont faites, on va
pouvoir le continuer quand même, par la suite.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Mais en fait, j'aurais dû poser la question tantôt, là, je comprends que le DPCP ne garde pas de statistique sur ces poursuites relativement
à 366, c'est le BIA qui s'en occupe.
Mme Bédard
(Karen) : Le Bureau des
infractions et amendes, particulièrement la Direction de la gestion des infractions, est un peu le mandataire du DPCP
quant à la saisie, la gestion, le traitement de toutes les poursuites pénales
provinciales. Donc, on travaille en
collaboration, ensemble. Donc, parce
qu'il y en a 500 000, donc, c'est vraiment... Et le BIA relève du ministère de la Justice, mais nous
travaillons de concert, ensemble, pour le traitement de ces dossiers-là.
Donc, c'est eux qui tiennent toutes les
statistiques parce que le système de gestion des infractions et de perception
des amendes leur appartient et c'est eux qui sont capables de sortir
toutes les données.
Ceci étant
dit, on garde quelques données maison mais dont la fiabilité peut être un petit
peu... parce que, là, des fois, ça peut chevaucher des années
financières différentes, et c'est plus difficile de concilier nos données
ensemble.
Le
Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Il n'y a pas d'autres
questions de la part des membres de la commission?
Alors, il me
reste à vous remercier, au nom de la commission, d'avoir fait votre
présentation, d'être venues vous déplacer, nous rencontrer. Ça a été
très instructif, très apprécié.
Alors, sur ce, la commission suspend ses travaux
au jeudi 11 septembre 2014. Merci.
(Fin de la séance à 16 h 43)