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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le vendredi 25 septembre 2009 - Vol. 41 N° 27

Interpellation : Des mesures efficaces pour lutter contre les crimes économiques


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Table des matières

Journal des débats

(Huit heures une minute)

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. La commission est réunie afin procéder à l'interpellation de la députée de Joliette à la ministre de la Justice sur le sujet suivant: Des mesures efficaces pour lutter contre les crimes économiques.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Mme la Présidente, Mme Beaudoin (Rosemont) est remplacée par M. Aussant (Nicolet-Yamaska), et M. Drainville (Marie-Victorin) est remplacé par M. St-Arnaud (Chambly).

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Je vous rappelle brièvement le déroulement de cette interpellation: dans un premier temps, la députée de Joliette disposera d'un temps de parole de 10 minutes, suivie de la ministre de la Justice, qui aura également un temps de parole de 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante: un député de l'opposition officielle, la ministre, un député du groupe formant le gouvernement. Si un intervenant n'utilise pas totalement son temps de parole, cela ne réduit pas pour autant la durée de l'interpellation. Je vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement, se prolonger après 10 heures.

Sur ce, Mme la députée de Joliette, vous avez la parole pour 10 minutes.

Exposé du sujet

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Merci, Mme la Présidente. Alors, je tiens d'abord à vous saluer ainsi que les membres de la commission, Mme la ministre, MM. les députés du parti ministériel, mes collègues, ainsi qu'évidemment toute l'équipe du ministère de la Justice qui accompagne la ministre ce matin. Donc, bonjour à tous.

Mme la Présidente, nous sommes ici aujourd'hui pour interpeller le gouvernement, par la voie de la ministre de la Justice, au sujet du dossier fort important des crimes économiques et surtout des mesures pour permettre qu'on y mène une lutte efficace: pas des mesures d'apparence, pas des mesures de communication, pas des mesures réchauffées, mais bien des mesures efficaces, des véritables mesures, des mesures innovatrices, audacieuses, pour montrer qu'on s'attaque au problème des crimes économiques de manière sérieuse et soutenue.

Il nous semblait opportun que ce soit la ministre de la Justice qui soit avec nous, ce matin, parce que, malgré le rôle important qu'elle joue, qu'elle doit jouer en fait dans le dossier, on l'a bien peu entendue, à ce jour, sur toute la question des crimes économiques. Et pourtant on pense que le rôle de la ministre de la Justice comme première responsable de la justice au Québec et comme Procureur général doit être central dans tout le dossier.

On sait, Mme la Présidente, à quel point les gens sont outrés à la lumière des événements des crimes économiques qu'on voit se multiplier qui, oui, sont très médiatisés, et il y a une bonne raison à; ça, c'est parce que, de plus en plus d'honnêtes citoyens semblent être victimes de fraudes, de mécanismes, de supercheries variées, et on voit d'honnêtes citoyens faire totalement confiance à des conseillers qui, d'une part, peuvent se présenter comme des conseillers d'expérience ou des personnes tout à fait honnêtes et se retrouver dans de bien mauvais draps après leur avoir confié leurs économies.

On pense évidemment au cas Norbourg qui, je le rappelle, a fait plus de 9 000 victimes, je pense qu'on en connaît tous ou on a tous entendu des histoires d'horreur. Et on comprend à quel point la population est outrée de voir de tels crimes se multiplier. Traditionnellement, les fraudes, on les voyait davantage comme des crimes qui pouvaient concerner des initiés, des compagnies, des gens d'affaires. Or, ce dont on se rend compte aujourd'hui, c'est qu'avec, je dirais, l'importance que l'économie... que les retraites ont prise, le fait que les gens maintenant ne se réfèrent pas seulement à bâtir un bas de laine mais essaient de diversifier leur portefeuille ou, en fait, de faire des placements avisés, ils ont de plus en plus recours à des conseillers financiers. Et, malheureusement, tous ces conseillers ne sont pas blancs comme neige, et on en voit les résultats.

Donc, on constate aisément que c'est un problème qui prend de l'ampleur; on le voit dans les médias, on le voit dans le quotidien. Et ce qu'on pense, c'est que c'est essentiel que le gouvernement envoie un signal très fort qui montre un véritable leadership dans ce dossier-là pour rassurer la population, pour rassurer les citoyens face à leur système de justice et de sécurité publique et face à leurs institutions financières qui, on doit le dire, sont quand même mises à mal par tout ce qu'on entend par les temps qui courent. Quand on voit, je pense, les ravages qui sont causés dans la vie de ces gens-là, on comprend facilement que les crimes économiques ne peuvent pas être considérés comme des crimes de second ordre, parce qu'effectivement ils ruinent des vies, ils ruinent des rêves, ils ruinent des projets de retraite et ils anéantissent beaucoup de choses sur leur passage.

C'est la même chose pour toute la question évidemment de la malversation, de la corruption, de la collusion. Encore une fois, je pense qu'on n'est pas ménagés ces jours-ci avec les révélations qui s'accumulent. Donc, Mme la Présidente, on se demande quelle est la réponse du gouvernement face à l'ampleur du problème. Alors qu'on attendait un signal fort, on a dû se contenter d'une belle annonce fort bien, je dirais, organisée en termes de communication, le dimanche 13 septembre dernier, alors qu'on monopolisait les médias avec trois ministres par un beau dimanche après-midi, le président de l'Autorité des marchés financiers, le directeur de la Sûreté du Québec. Mais je ne sais pas quelle impression cette opération vous a laissée, Mme la Présidente, mais, en ce qui nous concerne, en ce qui concerne l'opposition officielle, on est vraiment, mais vraiment restés sur notre faim. On s'attendait à des mesures innovatrices, audacieuses, à du leadership, eh bien, on a dû se contenter de bien peu de chose finalement, de bien peu de choses mises de l'avant pour contrer ce terrible fléau.

Donc, au-delà de quelques beaux messages porteurs de belles intentions sans moyens, de quelques policiers de plus, de la poursuite du fédéralisme de correspondance, on cherche toujours la véritable chair, les véritables mesures efficaces pour lutter contre les crimes économiques. Parce que qu'est-ce qu'on a annoncé véritablement? La ministre de la Justice a annoncé qu'elle écrivait une lettre à son homologue fédéral pour demander des peines plus importantes, pour demander l'abolition de la règle de la libération automatique au 1/6. Donc, encore une fois, belle poursuite du fédéralisme de correspondance.

Qu'est-ce qu'on a annoncé d'autre? On a annoncé quelques nouveaux policiers avec un budget de 6 millions, mais qui avait déjà été annoncé dans les mesures budgétaires du printemps dernier. Et on ne sait pas trop d'où vont venir non plus ces policiers. Est-ce que ce sont de nouveaux policiers ou des policiers qui sont déjà affectés à d'autres types de crimes?

Et pour ce qui est de la prévention qui, selon nous, est véritablement le nerf de la guerre, eh bien, on a dû se contenter de l'annonce d'une campagne de sensibilisation et de cybersurveillance. Eh bien, je dois vous dire, Mme la Présidente, que, si la cybersurveillance est présentée comme une nouveauté, on est plutôt estomaqués, parce qu'on pense que tout corps d'enquête, tout corps de police qui se respecte doit faire depuis de nombreuses années, pardon, de la cybersurveillance, particulièrement avec l'importance que le Web prend pour les criminels, bien évidemment.

Donc, en plus d'être bien insuffisantes, on pense que ces mesures-là ont été annoncées de manière très tardive. Je rappellerais à la ministre que l'ancien ministre des Finances, Michel Audet, au sortir encore une fois d'une réunion fédérale-provinciale en 2006, donc il y a plus de trois ans, avait dit, et je le cite: «Les crimes économiques sont tout aussi graves que d'autres types de crimes, et c'est avec le même niveau de sévérité qu'ils doivent être traités.» Il ajoutait même: «Il est inacceptable de laisser croire aux fraudeurs qu'ils peuvent s'en tirer facilement au Québec.» Alors, force est de constater qu'en trois ans, le gouvernement n'a pas bougé, n'a rien annoncé de concret et d'efficace pour lutter contre les crimes économiques. Il semble avoir attendu d'avoir le couteau sous la gorge pour annoncer, le 13 septembre, des mesures, mais qui, je le répète, nous apparaissent comme de véritables mesures d'apparence plutôt que de vraies mesures efficaces.

Donc aujourd'hui, la population, je crois, est en droit d'être rassurée. L'opposition officielle s'attend à de véritables réponses. On se serait attendu à une véritable vision intégrée des choses, à un plan de match qui soit cohérent, qui implique tous les acteurs d'une manière unifiée. Or, on n'a pas eu droit à ça. On pense que c'est le temps d'agir, d'agir sur le front des crimes économiques comme on les entend avec ce qu'on a vu dans les dossiers Norbourg et dans le présumé dossier d'Earl Jones, notamment. On s'attend aussi à des gestes concrets pour lutter contre la malversation et la collusion, et on espère véritablement que la ministre aujourd'hui n'entrera pas dans le mode du monologue, comme le gouvernement le fait trop souvent lors des interpellations, mais qu'elle va vraiment apporter des réponses à nos questions et qu'on va pouvoir avoir droit à un dialogue.

Et d'entrée de jeu je lui partage certaines de ces questions qui nous occupent. Dans un deuxième temps, on va aussi, avec mes collègues, lui faire part de certaines propositions, et on espère qu'elle va avoir une écoute attentive, contrairement à certains de ses collègues qui semblent avoir jugé qu'ils ont la science infuse. On espère que la ministre va quand même se montrer ouverte à nos propositions aujourd'hui.

n (8 h 10) n

Donc, d'entrée de jeu, j'aimerais lui demander, au-delà des demandes qu'elle fait au gouvernement fédéral, ce qu'elle entend faire sur son propre terrain, parce qu'aux dernières nouvelles, elle est quand même la première responsable de la justice au Québec, comme je le mentionnais d'entrée de jeu. Qu'est-ce qu'elle entend faire concrètement pour les victimes d'actes criminels qui, je le répète, s'attendent à un véritable leadership? Il y a la population également qui se dit: Si un jour ça m'arrive, à quoi vais-je être confrontée? Qu'est-ce qu'elle compte faire en matière pénale? Elle a dit, lors de la conférence de presse, qu'elle voulait agir autant en matière criminelle que pénale. Or, on n'a rien vu de ses intentions en matière pénale. Est-ce qu'elle veut revoir la question de la consécutivité des peines? Est-ce que, comme Procureur général, elle veut qu'il y ait une meilleure intégration entre l'AMF et le DPCP lors du dépôt de poursuites, pour qu'on évite tout dérapage possible? Est-ce qu'elle pense que des mesures devraient être mises en place pendant les enquêtes pour mettre de côté l'argent des présumés fraudeurs?

Donc, on lui demande aujourd'hui de nous dire qu'elle a refait ses devoirs depuis le 13 septembre dernier et de nous donner de véritables réponses. Merci.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. Je cède maintenant la parole à la ministre de la Justice pour une période de 10 minutes.

Réponse de la ministre

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi d'entrée de jeu de saluer mes collègues, le député de Marquette, mon adjoint parlementaire, M. François Ouimet, et le député de Jacques-Cartier, M. Geoffrey Kelley. Messieurs, votre contribution à ce débat aujourd'hui sera importante, et je vous en remercie d'avance. Je tiens également à saluer la députée de Joliette.

Alors, Mme la Présidente, comme vous le savez, le gouvernement du Québec est extrêmement préoccupé par la criminalité financière...

Une voix: ....

Mme Weil: ... ? oui, merci ? et par ses répercussions sur les citoyens et sur notre société. Dans mon intervention aujourd'hui, j'exposerai les mesures que nous avons prises et que nous prenons sur les plans du soutien psychologique et financier et sur le plan législatif afin de répondre aux besoins des victimes des crimes économiques et pour contrer avec vigueur ce type de crimes aux impacts souvent dévastateurs.

Les expressions «crime économique» et «criminel en col blanc» ou «criminel à cravate» peuvent peut-être laisser croire à certains que les fraudes financières sont des crimes moindres que les crimes commis avec violence physique, que leurs conséquences sont moins éprouvantes pour les individus et la société, qu'ils méritent des peines moins sévères puisqu'ils sont accomplis sans contrainte physique. Or, les événements des dernières années nous prouvent qu'au contraire les victimes de ces crimes économiques sont atteintes au plus profond de leur être. Sur le plan social, les crimes économiques sont aussi la source importante de dysfonctionnements et d'injustices. En plus de ruiner des individus souvent vulnérables, ils minent la confiance et faussent les règles des marchés au profit de quelques-uns et au détriment de la société et des administrations publiques.

Afin de venir en aide aux victimes, nous avons mis en place plusieurs mesures qui sont conduites par plusieurs ministères, dont celui de l'Emploi et de la Solidarité sociale, du Revenu, des Finances et du ministère de la Justice. Ces mesures sont destinées à soutenir financièrement et psychologiquement les victimes de fraude afin de leur permettre de passer au travers les moments très difficiles suivant parfois l'extorsion de toutes leurs économies. Pour lutter contre les crimes économiques, le gouvernement du Québec a annoncé, le 13 septembre dernier, une série de mesures qui nous donneront plus de moyens sur le terrain.

Nous créons une nouvelle équipe mixte de lutte contre le crime économique chargée d'enquêter sur toute forme de malversation et de corruption concernant les institutions publiques au Québec. Elle comprendra des enquêteurs de la Sûreté du Québec, ainsi que des experts du ministère du Revenu, du ministère des Transports et du ministère des Affaires municipales. De son côté, la Sûreté du Québec a créé une équipe spéciale de six enquêteurs spécialisés, en lien étroit avec l'Autorité des marchés financiers, pour combattre spécifiquement les fraudes financières. Enfin, nous accentuons la surveillance sur les sites Internet qui servent aux fraudeurs pour annoncer leurs services et rejoindre leurs éventuelles victimes.

Sur le plan pénal, force est de constater que plusieurs citoyens et organismes sont d'avis que les lois actuelles ne sont pas assez sévères. En ce qui concerne les crimes économiques, les peines ne sont pas assez dissuasives. Certains les voient comme des peines quasi insultantes pour les victimes, qui n'ont aucun moyen ou presque pour récupérer ce qu'elles ont perdu. Cependant, dans ce domaine, la liberté d'action de l'État québécois est mince, car le Code criminel est de juridiction fédérale. C'est le Parlement du Canada qui a le pouvoir constitutionnel de modifier les peines prévues, notamment pour la fraude et autres crimes à caractère économique. Le régime de libération conditionnelle des personnes condamnées à des peines de deux ans et plus d'emprisonnement est lui aussi du domaine fédéral.

En tant que ministre de la Justice du Québec, je soulèverai plusieurs questions lors de la prochaine rencontre fédérale-provinciale-territoriale de mes homologues canadiens qui aura lieu à la fin du mois d'octobre. Je proposerai de discuter de mesures qui touchent à trois aspects importants: un, les conditions de la libération conditionnelle; deux, les peines maximales d'emprisonnement; trois, le régime des produits de la criminalité. Nous allons demander que les auteurs de crimes économiques condamnés pour la première fois au pénitencier à des peines de deux ans ne puissent en sortir après six mois d'incarcération, particulièrement quand il s'agit de fraudes et de d'infractions commises dans les marchés financiers, car elles sont lourdes de conséquences pour leurs victimes et causent un tort considérable à l'économie.

Dans le cas d'une condamnation de plus de trois ans de pénitencier, ces personnes sont admissibles à sortir au 1/6 de leur peine. Nous souhaitons que les juges puissent plus facilement imposer aux auteurs des crimes à caractère économique l'obligation de purger la moitié de leur peine sans que la poursuite ait à démontrer qu'une telle mesure s'impose.

J'aimerais aussi que la discussion porte sur la possibilité de hausser les peines maximales d'emprisonnement pour certains crimes à caractère économique. Nous demandons que les peines maximales de 10 ans soient portées à 14 ans et que celles qui sont à cinq ans soient augmentées à 10 ans. L'objectif est d'envoyer un message sans équivoque aux fraudeurs sur la gravité objective de leurs crimes à caractère économique.

n (8 h 20) n

Enfin, à l'instar de ce qui se passe pour certaines infractions graves d'organisations criminelles, je proposerai une modification facilitant la confiscation des produits de la criminalité dans les cas de crimes économiques. Nous l'avions proposé en 2005, mais nous revenons à la charge cette année, forts d'un consensus parmi les provinces et la population québécoise et canadienne.

Depuis 2005, le gouvernement a posé plusieurs gestes afin de combattre concrètement les fraude et de protéger davantage le public. La loi n° 64 a permis de renforcer les pouvoirs de surveillance et de poursuite de l'Autorité des marchés financiers. Le projet de loi n° 19, adopté en juin 2007, a permis la mise en place d'un nouveau régime de recours en responsabilité civile sur le marché secondaire pour les investisseurs. Le projet de loi n° 8, adopté en juin 2009, permettra l'adoption du Règlement 31-103 sur l'obligation d'inscription des firmes et des représentants. Ce règlement obligera les gestionnaires de fonds d'investissement à s'inscrire auprès de l'Autorité.

Nous encourageons aussi le consommateur à faire preuve de vigilance, car un consommateur averti en vaut deux. La prévention constitue un excellent moyen de réduire l'incidence des crimes économiques tout en contribuant à la protection effective des citoyens.

Nous avons demandé à l'Autorité des marchés financiers d'intensifier ses efforts d'information et de sensibilisation des investisseurs, notamment auprès des clientèles les plus vulnérables comme les jeunes, les retraités et les préretraités. Une campagne média majeure sera lancée cet automne pour accroître la vigilance des investisseurs et éviter ainsi la multiplication des fraudes. Le gouvernement du Québec est déterminé à ne ménager aucun effort pour contrer les crimes à caractère financier. Pour le public comme pour les victimes, il y va de leur confiance dans le fonctionnement de notre système de justice. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. Je voudrais faire un rappel de ne pas utiliser le nom des parlementaires, mais leur titre. Nous allons maintenant entamer la période d'échange. Mme la députée de Joliette, vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes.

Argumentation

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Merci, Mme la Présidente. Alors, on voit que la ministre est très bonne pour relire les communiqués de presse qui ont été émis le 13 septembre dernier. Ce qu'on lui demande aujourd'hui, ce n'est justement pas ça, c'est de nous dire ce qu'elle va faire de plus, et que ces mesures que l'on qualifie d'apparence de mesures... ce qu'elle va faire véritablement pour lutter contre les crimes économiques sur son propre terrain à elle. Alors, c'est magnifique de nous dire qu'il va y avoir plein de représentations de faites auprès du gouvernement fédéral, mais je ne sais pas si je dois lui rappeler qu'à ce jour la pratique du fédéralisme de correspondance par l'actuel gouvernement a donné de bien piètres résultats, et les exemples se multiplient.

Et encore, précisément dans le cas qui nous occupe, la semaine dernière, le ministre fédéral de la Justice, M. Nicholson, faisait l'annonce qu'il avait l'intention de mettre de l'avant un projet de loi. Or, pas un mot, lors de cette annonce, lors de ce point de presse, sur les demandes du gouvernement du Québec, sur les demandes de la ministre de la Justice, pas un mot sur les demandes de hausse de peine, pas un mot sur la demande d'abolition de la règle de la libération conditionnelle au 1/6 de la peine qui, je le rappelle, fait consensus au Québec. D'ailleurs le Bloc québécois, ça fait plusieurs années qu'il réclame l'abolition de cette règle-la. Il a même déposé il y a quelques semaines un projet de loi en ce sens. Or, je pense qu'il y a une belle preuve d'un manque d'écoute, encore une fois, du gouvernement fédéral dans ce dossier-là. Et il y a aussi, je pense que du propre aveu de la ministre qui dit que, depuis 2005, que ces prédécesseurs ont demandé des mesures. Or, on est en 2009 et on voit qu'il n'y a toujours pas eu de mesure adoptée dans le sens des demandes du Québec.

Donc, plutôt que de s'en remettre uniquement au gouvernement fédéral et au fédéralisme de correspondance, ce qu'on aimerait, c'est que la ministre de la Justice montre un véritable leadership, et elle sait sans doute qu'elle a tout le loisir de le faire. Évidemment, la ministre actuelle nous rappelle toujours l'indépendance du Directeur des poursuites criminelles et pénales, mais je veux lui rappeler que, lorsque cette loi-là a été adoptée, son prédécesseur, l'actuel député de Vaudreuil, a bien fait ressortir à quel point la ministre, la Procureur général, demeurait imputable et à quel point elle conservait un certain pouvoir d'orientation. Et ce que je lui demande aujourd'hui, c'est qu'elle donne une véritable orientation au Directeur des poursuites criminelles et pénales comme elle est en droit de la faire, comme ça a été fait quand on a décidé de vraiment marquer le coup pour certains crimes qui apparaissaient particulièrement odieux aux yeux de la population et pour lesquels on voulait travailler fort. On pense notamment aux agressions sexuelles, on pense à la violence conjugale, on pense aux facultés affaiblies, c'est autant de dossiers sur lesquels un jour le gouvernement a décidé qu'il se relevait les manches. Et la Procureur général donnait une directive aux procureurs pour leur envoyer un signal fort et puissant, pour leur dire à quel point le gouvernement prenait ces crimes-là au sérieux, et qu'elle leur demandait d'agir en conséquence.

Donc, on s'explique mal que la ministre refuse de se mouiller sur son propre terrain et qu'elle donne une orientation au Directeur des poursuites criminelles et pénales, parce qu'on sait à quel point c'est une chose de demander que les peines soient modifiées dans le Code criminel, mais c'est la pratique des peines en matière de crimes économiques qui doit être revue au complet pour justement ne plus en faire des crimes de second ordre. Alors, trop souvent on voit que ce sont des peines minimales, des peines de moindre importance qui sont demandées, des amendes. Alors, ce qu'on dit à la ministre de la Justice, c'est qu'elle pourrait très bien dire à ses procureurs qu'elle leur lance un signal clair et qu'elle veut que, désormais, ces crimes-là soient considérés avec tout le sérieux qu'ils méritent et qu'ils aient des peines... et qu'ils demandent des peines en conséquence, donc des peines importantes; c'est quelque chose qu'elle pourrait faire.

En termes d'aide aux victimes, je suis étonnée du peu de mesures, encore une fois, qu'on met de l'avant. La ministre semble s'en remettre au ministère du Revenu, au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Je ne sais pas si je dois lui rappeler que c'est elle qui est responsable de l'aide aux victimes d'actes criminels avec les centres d'aide aux victimes d'actes criminels avec la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, le régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels, dont on attend toujours d'ailleurs le fameux rapport, qui est reporté d'année en année.

Alors, j'aurais aimé qu'elle nous dise vraiment ce qu'elle entend faire. Parce que, la semaine dernière, on entendait qu'une fondation privée, Opération Enfant Soleil, ramassait de l'argent pour aider les victimes. Je pense que c'est plutôt le rôle du gouvernement d'essayer d'aider ces victimes-là, et, à ce jour, on attend toujours des signaux à cet effet.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Justice pour une période de cinq minutes.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais amorcer mon intervention en mettant l'accent sur l'aide apportée aux victimes des crimes économiques et ensuite j'expliquerais les demandes que j'ai faites au gouvernement fédéral en ce qui a trait à ce type de crimes.

Le gouvernement du Québec a récemment mis en place plusieurs mesures destinées à aider les victimes de fraudes financières. Les centres d'aide aux victimes d'actes criminels, les CAVAC, offrent un soutien psychologique aux victimes. Pour certaines victimes alléguées de fraude financière, j'ai demandé à mon ministère de coordonner un comité interministériel qui appuie le CAVAC de Montréal dans l'aide qu'il leur apporte. Ce comité assure les arrimages requis entre tous. À cet effet, une rencontre d'information s'est tenue le 10 septembre dernier permettant de transmettre l'information sur certains programmes et services gouvernementaux offerts aux victimes.

De son côté, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale offre un accès à des liquidités d'urgence aux victimes dans le dénuement afin de leur permettre de défrayer le coût de nécessités comme le logement et la nourriture.

Quant au ministère du Revenu, il s'est doté d'une équipe spéciale afin d'examiner de façon prioritaire le dossier des personnes qui auraient payé des impôts sur de faux rendements, comme c'est le cas, par exemple, de nombreuses victimes de fraude financière.

Sur une note plus personnelle, j'ai moi-même rencontré le mois dernier, en compagnie de plusieurs de mes collègues députés et ministres, certaines victimes alléguées de crimes économiques. J'ai ainsi pu constater le désarroi et la terrible souffrance que vivent ces personnes. En effet, cette criminalité, qui ne recourt pas en apparence à la violence physique, est pourtant la source de drames humains d'une grande ampleur. Le public est de plus en plus choqué par l'inéquité de certaines situations actuelles. Les victimes de crimes économiques, par exemple, acceptent mal que ceux qui les ont dépouillé d'une partie de leurs avoirs, parfois d'une part importante de leur retraite, quand ce n'est pas des économies de toute une vie, puissent quitter la prison avant d'avoir purgé complètement la période d'incarcération à laquelle le juge les a condamnés. Certains citoyens estiment par ailleurs que la loi elle-même ne prévoit pas des peines assez sévères pour ce genre de crimes; d'autres pensent que l'on devrait faire davantage pour empêcher que les criminels profitent de l'argent qu'ils ont soutiré à leurs victimes.

À titre de ministre de la Justice, je suis effectivement très sensible à ces points de vue et considère qu'il y a lieu de réfléchir à ces questions. Rappelons tout de même que la sévérité des peines à elle seule ne constitue qu'une mesure parmi plusieurs autres pour la prévention et la répression des crimes à caractère économique. Les peines plus sévères doivent s'inscrire dans un plan diversifié de mesures destinées à prévenir la perpétration des crimes économiques et à dissuader ceux qui envisagent de les commettre. Autrement dit, des peines plus sévères ne sont pas une panacée, elles doivent partie d'une stratégie plus vaste qui fait appel à une multitude de moyens.

De plus, des peines plus sévères ne peuvent procurer aux victimes la réparation du mal qu'elles ont subi. Toutefois, nous sommes conscients que le préjudice psychologique et même physique causé à certaines d'entre elles est parfois si important qu'il peut se comparer aux séquelles laissées par des crimes violents. Les victimes ressentent une injustice profonde du fait que les malfaiteurs semblent s'en tirer plutôt bien, alors qu'elles-mêmes ne peuvent obtenir réparation du préjudice ni retrouver leur argent. Leurs économies ont disparu sans espoir de retour.

Ajoutons que les crimes économiques ne font pas que du tort aux individus. La corruption, la malversation, les détournements de fonds entraînent des dommages très considérables à l'économie qu'ils fragilisent. Cette conséquence accroît d'autant leur gravité objective. Ne nous leurrons pas, les impacts de ces crimes sont dévastateurs; qu'ils soient physiques ou psychologiques, ils causent un tort irréparable aux victimes, à leurs proches et, bien sûr, à l'économie. Bref, on constate qu'il y a un consensus social à l'effet d'imposer aux fraudeurs des peines qui correspondent à la gravité de leurs crimes. Ces peines doivent aussi être proportionnelles à ce que la population pense de ce genre de crimes.

D'une part, en tant que ministre de la Justice, j'ai une double responsabilité à l'égard des crimes à caractère économique: d'une part, surveiller toute matière qui concerne l'administration de la justice au Québec et, à ce titre, veiller à ce que justice soit rendue en toute impartialité et sans ingérence avec les acteurs du système de justice; d'autre part, prendre des mesures en matières criminelle et pénale, notamment pour dissuader les personnes qui seraient tentées de passer à l'acte et perpétrer des crimes de cette nature.

n (8 h 30) n

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Jacques-Cartier.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, Mme la Présidente. I think this first bloc I'd like to use to talk to the people, the citizens of my riding, because economic crime is something that, as an MNA in this Assembly, I ran into many people... I think of a couple I met, from Baie-d'Urfé, in the last election campaign, who would work all their life to build up a company, had turned sixty or sixty-five, and decided to sell their business, and they trusted the fruits of all that to one of these investment funds. And then, two years later, he called the office, the phone was disconnected, the files were gone, the computers were gone, and the person had disappeared with allegedly a 100 millions dollars, never heard from again. And just the dislocation in their lives ? he had also convinced his mother to have her money managed by the same individual ? so, it was tragic.

And then again my colleague the Minister of Justice and I attended, with the Minister of Finance and the Minister of Immigration and Cultural Communities, a larger meeting with the alleged victims of another scheme that made many headlines this summer, and once again the stories that we're told break your heart.

There were people who were often widows, were people who were talking about managing inheritances, and husbands, for example, who would work all their life to make sure that there was some protection left for their spouse when they were gone, and have someone come along and... I think it's something that is... Perhaps they're more vulnerable people in the English-speaking community because, in English-speaking community, many of the sons and daughters have moved away, and many of the sons and daughters of these victims live in Toronto, or Boston, or San Francisco. So, they have an elderly, often woman, who's left, who had money to manage, and the kind of poor advice they received, the kind of lengths these people went to take these people for all their money possible, and stories of people who were 75 or 80 years of age, who where convinced to remortgage their home, Mme Chairman... So, here's someone who has paid off their house, who are living very comfortably, but where convinced by people to make another decision, and who, now today, woke up to find not only a huge mortgage to pay but often their municipal taxes weren't paid, the insurance on their home wasn't paid, all sorts of consequences, because of the poor advice and the activities of these people who where allegedly managing their affairs.

So, it's very sad, and I think one of the things that it... There's a message, particularly for the AMF, would be to go out and particularly look at the English-speaking community and try to... up with communication through seniors' groups, through The Senior Times, through community groups. And, on that score, I'd like to single out two community groups who, this summer, have done an extraordinary job in reaching out to help the victims. Because the thing that struck us is there were... Whether it's from their basic needs, that there was... people who had prescription drug that needed to be renewed, down to housing questions, social service questions, questions of income tax, it's a very complicated mess to unwind. And I think of the West Island Community Resource Center in Pointe-Claire and Sun Youth as two organizations that have, in terms of those emergency situations, worked very well. The Government has worked with them as well, the Minister responsible for Seniors has kindly come up with some help financially to the West Island Community Resource Center and its director Ann Davidson, because they were the first people.

And I think it's something that... often, it is community organizations that the type of emergency... they're the first line, they're the people that we have to support. And we've had excellent cooperation with the West Island Community Resource Center working with these victims. We have to look harder, we have to look further to try to find other help, but I'd like to single out that one group in particular.

And, as I say, just to get back, je pense, c'est un message qui est très important pour l'Autorité des marchés financiers, que, dans la communauté anglophone, il y a peut-être des personnes encore plus vulnérables, parce que souvent le reste de leur famille demeure dans le reste du pays, soit en Ontario, ou également aux États-Unis, et je pense qu'on a tout intérêt de faire un genre de communication destinée à cette clientèle, parce qu'on a juste à constater dans les, environ, 200 victimes qu'on a fait les manchettes cet été, et souvent, les enfants demeurent à l'extérieur du Québec. Alors, ce sont des personnes qui sont encore plus vulnérables, et si, via les médias anglophones on peut faire un effort additionnel, je pense, c'est très important.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Nicolet-Yamaska.

M. Jean-Martin Aussant

M. Aussant: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais d'abord dire que je suis un peu abasourdi et... voire déçu des réponses que la ministre nous donne. On aurait pu demander n'importe quoi, je pense, ce matin, puis son texte était déjà tout prêt. Elle n'a fait que lire une feuille qui est déjà préparée. Donc, la prochaine fois, peut-être qu'elle peut nous envoyer ça par courriel, puis on va tous épargner du temps, puis on va pouvoir faire autre chose ailleurs. C'est assez étonnant.

De mon côté, je vais me... je vais m'en tenir à des aspects plus techniques, ou plus pratiques, et je vais laisser l'aspect légal à mes deux collègues, qui sont tout à fait en contrôle de leur dossier, eux. Et, moi, je vais me pencher sur deux suggestions qu'on a déjà faites au gouvernement et sur lesquelles j'aimerais entendre la ministre, si par hasard elle a déjà une feuille déjà préparée là-dessus, je l'espère. On avait suggéré, nous, des améliorations au système actuel sur l'aspect de l'inscription et on a aussi suggéré un fonds d'assurance universelle.

Donc, je pense que j'ai deux blocs d'intervention; je vais me réserver le fonds d'assurance pour le deuxième et je vais parler tout de suite du fait de l'inscription. Je voudrais aussi dire que le système financier, actuellement, il y a une immense crise de confiance en fait de la part des investisseurs. Le système financier repose, c'est un système fiduciaire, ça repose entièrement sur la confiance des investisseurs envers les institutions financières et réglementaires ou gouvernementales, et, en ce moment, je pense que les fondements de cette confiance-là sont gravement ébranlés. Et c'est pourquoi il faut agir assez rapidement et arrêter peut-être les discours vides que le gouvernement nous sert depuis quelque temps, y compris cette conférence de presse qui semblait faire l'affaire de quelques personnes de l'autre côté mais qui était une grande façade, à notre avis.

Donc, côté prévention, on avait suggéré, nous, et j'aimerais entendre la ministre là-dessus, qu'il devienne carrément impossible au Québec de recevoir de l'argent des épargnants sans être inscrits à l'AMF. Évidemment, il ne faut pas se fier aux fraudeurs pour leur dire que c'est obligatoire de s'inscrire, c'est des fraudeurs par définition, ça ne marchera pas. Sauf qu'il est possible de faire en sorte avec la technologie de 2009, bientôt 2010, que, dès qu'un épargnant remet son argent à un consultant, un conseiller, un planificateur, qu'il doive recevoir automatiquement une preuve d'inscription de cette personne-là, de cet individu-là à l'AMF. On sait, dans un cas récent qui suit son cours, l'individu en question a pratiqué pendant des années, a géré l'argent des gens pendant des années sans être inscrit à l'AMF. Ça devrait être impossible de faire ça au Québec.

Et il n'y a personne qui va me faire croire que la technologie n'est pas assez avancée pour que ça se fasse très rapidement, mettre en place un système par lequel les épargnants doivent recevoir une preuve d'inscription de la personne qui va gérer leur argent. Pour ce faire, il faudrait mettre dans le coup les institutions financières évidemment qui, à mon avis, ne devraient pas s'opposer à ça non plus. Les institutions financières font partie d'un système, elles ont des responsabilités autant que des droits, et ça ferait partie de leurs responsabilités aussi de faire en sorte que ces inscriptions-là soient fournies de façon rapide et simple et faire en sorte aussi que, s'il y a des choses, des anomalies visibles dans les comptes en fidéicommis ou du côté des fiduciaires, que ce soit tout de suite signalé automatiquement, et non qu'on puisse laisser passer des choses qui par la suite s'avèrent être très graves.

Sur la confiance des investisseurs aussi, le ministre des Finances disait récemment que l'État n'avait pas les moyens de rembourser les victimes. Ce n'est peut-être pas faux, mais il va falloir voir les alternatives à ça; et ça, ça va être dans ma deuxième intervention, le fonds d'assurance universelle.

Il y avait récemment un reportage à LCN, je ne sais pas si la ministre l'a vu, que 12 % seulement des personnes qui étaient inscrites dans la section Finances, Planification et Conseillers étaient enregistrées auprès de l'AMF. Seulement 12 % de ceux qui s'annonçaient comme des professionnels en finances étaient dûment inscrits à l'AMF, ce qui est absolument inacceptable. Il faut faire en sorte que, dès qu'on appelle une de ces personnes-là ou qu'on lui confie de l'argent plutôt, il doive y avoir une preuve d'inscription à l'AMF, ce qui n'est pas le cas actuellement et ce qui est quelque chose de pas très difficile à mettre en place.

n (8 h 40) n

Et cette inscription-là, comme je le disais, devrait devenir obligatoire du point de vue de l'épargnant. Donc, c'est l'épargnant qui aurait la preuve que l'autre personne est inscrite, parce qu'on ne va évidemment pas se fier au fraudeur. Et c'est la même chose pour tout ce qui est prospectus: personne ne devrait pouvoir émettre des instruments financiers sans qu'il y ait eu dûment des prospectus d'émis. Donc, le système financier, dans les règlements actuels, doit être en fait automatiquement appliqué, et actuellement les épargnants peuvent remettre à des personnes qui ne sont pas inscrites à l'AMF leurs épargnes de toute une vie, et ça, c'est quelque chose qui est très facile à changer rapidement.

Donc, j'aimerais entendre dans un premier temps la ministre là-dessus et je reviendrai tout à l'heure avec l'autre élément de mon intervention.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Marquette. Oups! c'est à la ministre. Alors, je cède la parole à Mme la ministre avant.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. Je dirais au député de Nicolet-Yamaska: il aurait peut-être dû préparer son texte, car il aurait fallu interpeller le ministre des Finances quant aux mesures prévues par le ministère des Finances pour protéger les investisseurs, en particulier en ce qui concerne un fonds d'investissement, un fonds d'assurance pour protéger les investisseurs. Pour ma part, je prépare toujours mes textes et je le fais avec beaucoup de réflexion. On est dans un domaine qui est très technique. Je représente le ministère de la Justice, je représente le gouvernement. Nous avons pris une approche transversale de collaboration entre ministères pour avoir des mesures plus efficaces pour contrer ce genre de crimes qui devient de plus en plus complexe au fil des années.

Alors, je voudrais mettre l'accent plus sur les demandes que j'ai formulées auprès de mon homologue fédéral afin d'accroître la sévérité des peines reliées aux crimes économiques. Dans l'état actuel des choses, la liberté d'action, comme je l'ai dit, de l'État québécois est limité. Ceci étant dit, l'évolution du droit criminel s'est fait beaucoup, au fil des années, en collaboration avec le gouvernement fédéral et avec les partenaires des provinces. Le Québec a joué d'ailleurs un rôle de leadership, au fil des années, dans l'évolution du droit criminel.

Donc, c'est le Parlement du Canada qui a le pouvoir constitutionnel de modifier les peines prévues au Code criminel, notamment pour la fraude et autres crimes à caractère économique. C'est aussi le gouvernement fédéral qui peut modifier le régime de libération conditionnelle des personnes condamnées à des peines de deux ans et plus d'emprisonnement. C'est pourquoi je suis déterminée à soulever ces questions dans le cadre de la prochaine rencontre fédérale-provinciale-territoriale des ministres de la Justice, qui aura lieu à la fin du mois d'octobre.

À ce sujet, j'ai récemment écrit à mon homologue fédéral, Robert Nicholson, ministre de la Justice et Procureur général du Canada. On s'est aussi parlé. Il a reçu ma communication avec beaucoup d'ouverture. Il a d'ailleurs émis un communiqué de presse le jour de notre annonce pour dire qu'il recevait ma communication avec beaucoup d'ouverture et trouvait que la solution efficace passe en effet par la collaboration. D'ailleurs, tout récemment mon prédécesseur Jacques Dupuis a pu amener d'intéressantes modifications au Code criminel en ce qui concerne le rehaussement des sanctions en matière de facultés affaiblies. Et c'est une des illustrations de l'évolution constante du Code criminel au fil des années par une relation de collaboration et non de confrontation.

Alors, je souhaiterais vous lire l'extrait de la lettre que j'ai transmise au ministre Nicholson. Alors:

«...nous avons demandé que soit abordé le sujet des peines en matière de crimes à caractère économique, lors de la prochaine réunion des ministres fédéral, provinciaux, territoriaux [...] qui doit se tenir à Fredericton ? Nouveau-Brunswick ? en octobre prochain.

«J'aimerais préciser quelque peu dans quel sens nous entendons présenter ce sujet.

«Tout d'abord, suivant une lettre ouverte que vous avez publiée récemment dans un quotidien (lettre cosignée par le Secrétaire parlementaire de la Justice, M. Daniel Petit), il appert que votre gouvernement, prenant très au sérieux la criminalité financière et estimant qu'il faut traiter ce problème le plus rapidement possible, est disposé à examiner toutes les options dont il dispose pour lutter contre la criminalité financière [...].

«Pour notre part, nous estimons aussi que le gouvernement fédéral devrait entreprendre rapidement un examen de la législation dans ce domaine...»

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Un instant. Question de règlement.

Mme Hivon: Est-ce qu'on pourrait... Est-ce que la lettre pourrait être déposée, s'il vous plaît?

Mme Weil: J'ai l'intention de déposer la lettre.

Document déposé

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Consentement? D'accord. La ministre peut poursuivre.

Mme Weil: Bon. «Pour notre part, nous estimons aussi que le gouvernement fédéral devrait entreprendre rapidement un examen de la législation dans ce domaine en général. Plus particulièrement, nous aimerions que soit discutée avec nos collègues des provinces et territoires l'opportunité de prévoir éventuellement des modifications à la loi en regard des préoccupations suivantes: la possibilité de modifier le régime des libérations conditionnelles en ce qu'il permet actuellement une sortie de prison au 1/6 de la peine imposée par un juge dans le cas de personnes condamnées au pénitencier pour fraude et pour des infractions commises dans les marchés financiers, même lorsque ces crimes ont été perpétrés dans des circonstances aggravantes, notamment lorsque la valeur du crime est supérieure à 1 million de dollars ou que des dommages ont été causés à un nombre élevé de victimes; la possibilité qu'un juge puisse, dans le cas de certains crimes à caractère économique, imposer à leurs auteurs de purger la moitié de leur peine avant d'être admissibles à la libération conditionnelle [totale]; le rehaussement éventuel des peines maximales d'emprisonnement pour les crimes à caractère économique...»

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): C'est terminé, Mme la ministre. J'aimerais faire un deuxième rappel de ne pas utiliser le nom des parlementaires, mais leur titre seulement. Maintenant, la parole est au député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Alors, merci, Mme la Présidente. Bon matin à tous. J'aimerais juste revenir sur l'intervention de notre collègue le député de Nicolet-Yamaska. J'ai de loin préféré la deuxième partie de son intervention tantôt, et non pas la première partie, que j'estimais, Mme la Présidente, être à la limite d'une attaque personnelle à l'endroit de la ministre. Je pense que vaut mieux s'attarder à des mesures concrètes, à une intervention de façon plus concrète, comme il l'a fait; il l'a bien fait d'ailleurs.

Et sa collègue la députée de Joliette sait très bien à quel point la ministre de la Justice a un rôle névralgique dans un gouvernement; il faut toujours être extrêmement prudent. La députée de Joliette a conseillé pendant de nombreuses années la ministre de la Justice Linda Goupil à l'époque, et je suis convaincu qu'elle se rappelle les nombreuses fois où elle faisait des rappels à la prudence à sa propre ministre, qui était Procureur général de la province.

Moi, j'aimerais peut-être revenir brièvement sur les mesures qui ont été prises par le gouvernement depuis 2005, parce que la députée de Joliette, dans son intervention, laisse entendre que rien n'a été fait ou à peu près rien n'a été fait par le gouvernement, mais il y a des gestes très concrets qui ont été posés, et je pense que même sa formation politique a été associée à ces gestes-là. Depuis 2005, le gouvernement a posé plusieurs gestes pour renforcer le secteur financier et combattre, dans la mesure du possible, les fraudes. Ce que nous voulons toutefois, c'est que l'encadrement au Québec soit parmi les plus efficaces au monde, et nous entendons continuer à travailler sans relâche afin d'atteindre cet objectif.

C'est donc dans la foulée de l'affaire Norbourg, auquel faisait référence la députée de Joliette, qu'au début de 2007 l'Assemblée nationale a demandé à la Commission des finances publiques de tenir des audiences publiques sur la protection des épargnants. Ainsi, le projet de loi n° 64 qui portait particulièrement sur les pouvoirs de surveillance et de poursuite de l'Autorité des marchés financiers a permis un certain nombre de choses.

Premièrement, une augmentation des amendes et des sanctions administratives: par exemple, l'amende minimale pour l'exercice illégal de l'activité de représentant a été haussée de 1 000 $ à 3 000 $ alors que l'amende maximale est passé de 25 000 $ à 200 000 $; la possibilité d'imposer une peine d'emprisonnement, qu'une amende ait été déjà imposée ou non; le renforcement des pouvoirs d'enquête de l'Autorité, notamment le pouvoir d'obtenir des documents comptables dans le cadre des enquêtes; et la création du Fonds pour l'éducation et la saine gouvernance, dédié spécifiquement à l'éducation des consommateurs et à la protection du public.

Aussi, un deuxième projet de loi, le projet de loi n° 8, a été adopté en juin dernier, qui permettra l'adoption du règlement 31-103 sur les obligations d'inscription des firmes et des représentants. Ce règlement obligera notamment les gestionnaires des fonds d'investissement à s'inscrire auprès de l'Autorité des marchés financiers qui encadrera leurs activités.

L'adoption du projet de loi n° 19, en juin 2007, a permis la mise en place d'un nouveau régime de recours en responsabilité civile sur le marché secondaire pour les investisseurs. Alors, ce nouveau régime leur permet d'intenter plus facilement une action en dommages et intérêts lorsqu'un émetteur publie une information fausse ou trompeuse ou ne divulgue pas un changement important concernant sa situation. Cette mesure a pour effet de forcer les émetteurs assujettis à faire preuve de plus de rigueur dans leurs déclarations publiques.

Il faut signaler aussi que, depuis sa création il y a cinq ans, l'Autorité des marchés financiers a fait de la répression des crimes économiques une de ses priorités. En l'espace de cinq ans, les effectifs de l'Autorité dédiés aux enquêtes ont plus que doublé, passant de 47 il y a cinq ans à 112 personnes aujourd'hui, et les délais moyens d'enquête sont passés de quatre ans à 12 mois.

n(8 h 50)n

L'Autorité a aussi créé deux services d'enquête spécialisés: le Service de la surveillance des marchés, chargé de détecter les activités boursières qui sont suspectes, et le Service des enquêtes concernant la manipulation de marchés et délits d'initié... sont chargés de combattre les infractions de manipulation de marchés et délits d'initié. De plus, uniquement au niveau de la dernière année, l'Autorité a intenté le tiers de tous les recours en valeurs mobilières à travers le Canada. Cela témoigne bien de sa ferme détermination à poursuivre et punir les délinquants du marché financier. Merci.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Nicolet-Yamaska.

M. Jean-Martin Aussant

M. Aussant: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je voudrais corriger le fait que j'aie voulu attaquer personne évidemment. C'était simplement le fait que j'étais déçu de voir que le gouvernement ne s'est pas très bien préparé pour l'interpellation de ce matin. Le titre de l'interpellation, c'est sur les crimes économiques. Il y a un mot «économique» là-dedans, là; l'aspect financier ne peut pas être ignoré, et on parle juste de la loi et des mesures à changer du côté légal.

Donc, nous, de notre côté, on a trois représentants: justice, sécurité publique et institutions financières. Et la ministre m'a répondu qu'il fallait que je demande au ministre des Finances; bien il aurait peut-être dû être ici. Et la couronne...

Une voix: ...

M. Aussant: Non, le titre de l'interpellation, c'est «crimes économiques». Il y a une partie criminelle et une partie économique, ça semble assez évident, et ça a trait aux services financiers, les crimes économiques. Donc, en fait, le gouvernement est mal préparé, c'est un fait, et je n'attaque personne là-dessus. La couronne, d'ailleurs, est indivisible, donc la ministre devrait être prête à répondre à d'autres questions que son seul secteur.

Donc, sur le deuxième aspect que je voulais aborder qui est encore une fois un aspect pratique et qui est un aspect d'aide aux victimes, disons, le premier aspect de l'inscription incontournable était un aspect préventif. Parce que c'est bien de parler des peines évidemment, mais ce n'est pas ça qui empêche que ça se reproduise. Ce n'est pas parce qu'on punit plus sévèrement ceux qui ont été pris qu'on empêche d'en prendre d'autres. Donc, il faut absolument qu'on fasse qu'on n'ait plus à en prendre d'autres dans l'avenir.

Donc, l'autre aspect, c'était le fonds d'une assurance universelle. Au Québec actuellement, il y a des milliards qui sont placés en épargne par la population. C'est un total d'environ 150 milliards de dollars, les épargnes des Québécois, qui sont divisés dans diverses classes d'actif.

Donc, juste pour vous donner quelques détails sur les 150 milliards de dollars ou à peu près: il y en a plus de 82 dans des régimes de retraite d'employeurs; il y a 33 milliards dans des REER, des FERR ou d'autres types de régimes de retraite privés; il y en a 13 milliards en dépôts dans les institutions financières; un peu plus de 8 en capital-actions; un peu plus de 5, près de 6 en fonds mutuels, fonds de placement ou en fiducie de revenu, les «income trust» qu'on appelle en anglais; il y en a en obligations aussi, donc, 2 à 3 milliards en obligations.

Donc, il y a lieu de se questionner sur l'établissement, en fait, d'un fonds universel qui coûterait simplement quelques points centésimaux de ces épargnes-là à la population québécoise. Un point centésimal, pour l'information de la ministre, c'est un centième de 1 %. Donc, dans les épargnes d'un individu, ça ne paraît à peu près pas si on prend un ou deux ou trois points centésimaux: ça représente 0,01 $ pour chaque 100 $. Ou, en fait, un autre exemple qui illustre encore mieux, pour 10 000 $, ça coûte 1 $. Donc, c'est vraiment un genre de fonction qui ne paraît absolument pas dans les épargnes de chaque individu, mais qui globalement peut représenter des sommes assez élevées pour potentiellement compenser chaque fraude.

Parce qu'il ne faut pas oublier que les événements de fraude, même s'ils font la manchette et qu'ils sont absolument graves dans chaque cas pour les victimes, heureusement sont plutôt rares. La grande majorité des gens ne se feront pas frauder dans leur vie, en fait, avec leurs épargnes. Donc, oui, quand ça arrive, c'est absolument dramatique, mais ça n'arrive pas à toutes les semaines et à tout le monde. Donc, la rareté de ces événements-là pourrait être couverte par la petite somme qu'on pourrait prendre dans les épargnes de ces gens-là pour payer le fonds, par exemple. Et ces fonds-là pourraient être placés dans des instruments très solides, à la Caisse de dépôt ou ailleurs, ce serait à déterminer.

C'est pourquoi d'ailleurs on avait demandé une commission, nous, une commission parlementaire rapide sur les éléments techniques, les éléments, des mesures à mettre en place, que ce soit à la fois l'inscription incontournable ou ce fonds d'assurance. Donc, on a demandé une commission dès la rentrée de quelques jours, ça n'a pas besoin de s'éterniser, une commission rapide là-dessus avec des experts qui viendraient nous parler des points techniques de comment un tel fonds pourrait être établi.

Je vous rappelle qu'à chaque fois qu'il y a eu des fonds d'assurance qui ont été suggérés dans l'histoire, il y avait une forte opposition pour ensuite réaliser que c'était absolument nécessaire. Ça a été le cas de la Régie des rentes, ça a été le cas de la SAAQ en assurance automobile; à chaque fois, il y avait des oppositions fortes, et on se rendait compte par la suite que c'était vraiment la bonne chose à faire. Donc, ce n'est pas parce qu'un tel fonds n'existe pas que ce n'est pas la bonne chose à faire. J'aimerais beaucoup entendre la ministre sur ce qui a été fait au gouvernement ou ce qui a été discuté au gouvernement depuis qu'on a émis cette idée-là il y a plusieurs semaines.

Aussi, il ne faut pas se dire qu'un fonds d'assurance déresponsabilise les gens qui sont couverts; ça, c'est un argument que, moi, je trouve faux. Ce n'est pas parce qu'on assure notre maison qu'on veut qu'elle passe au feu, puis ce n'est pas parce que notre voiture est assurée qu'on aime la faire abîmer par le pare-chocs d'une autre voiture. Les assurances sont là en cas d'événement grave et malheureux, ne sont pas là pour se déresponsabiliser. Donc, on pense que l'étude d'un fonds d'assurance universelle pour les victimes de fraude financière devrait définitivement être étudié en commission parlementaire rapide, et j'aimerais entendre la ministre sur ce qui a été discuté au gouvernement là-dessus.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant à la ministre de la Justice.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. Depuis les deux dernières années, plusieurs questions ont été soulevées quant aux fondements de l'indemnisation et aux possibilités de mettre en place de nouveaux programmes d'indemnisation au Québec.

L'analyse de l'AMF conclut qu'à première vue l'indemnisation pour les victimes de fraude apparaît comme une solution attrayante, mais les analyses nous démontrent plutôt que cette solution comporte des inconvénients majeurs: premièrement, les programmes d'indemnisation sont coûteux pour l'industrie; deuxièmement, ils entraînent une déresponsabilisation de la part des investisseurs; finalement, cette solution demeure incomplète, puisqu'elle ne règle pas les conséquences de la malversation faite par les personnes qui exercent sans permis.

Moi, je voulais en réponse... suite à l'interpellation sur les actions que j'entreprends vis-à-vis mon champ d'action qui est la justice, je voulais aller plus en détail sur les demandes que je fais, que je transmets au ministre fédéral de la Justice, car je pense que c'est une demande très pertinente, c'est suite à beaucoup d'échanges avec des spécialistes, des criminalistes, ça fait beaucoup consensus, ça représente la position du gouvernement.

Le Québec a une grande crédibilité en matière de droit criminel. Une grande crédibilité par rapport à l'apport que le Québec amène pour l'évolution du droit criminel. Donc, je pense que c'était important que je m'y attarde.

L'opposition semble déjà, comment dire, a une attitude de défaitisme d'ailleurs par rapport au fédéralisme. Au contraire, moi, j'ai beaucoup d'optimisme et je dirais que la réaction du ministre de la Justice fédéral, Rob Nicholson, m'a beaucoup encouragée.

Évidemment, on ne connaît pas leurs positions, ils ont annoncé une intention d'être plus sévères envers les criminels à cravate. Ils ont annoncé cette intention. Nous, à la table fédérale-provinciale, on aura l'occasion évidemment d'échanger entre nous.

Et je suis très intéressée aussi à entendre l'opinion de mes collègues, parce que les collègues ont tous une expérience avec la fraude. Vous avez vu récemment la grande cause, d'ailleurs c'était en Alberta. Donc, c'est important, c'est comme ça que le droit criminel avance. Je pense beaucoup aux années quatre-vingt, lorsque le Québec a beaucoup contribué à faire avancer tout le domaine des agressions sexuelles où, à l'époque, on traitait la victime d'agression sexuelle quasiment comme un criminel. Toutes les règles de preuve ont été beaucoup... ont changé pour justement protéger la victime de ce genre de crime. On a parlé récemment de contributions aussi de mon collègue le ministre de la Sécurité publique.

Donc, je voudrais m'attarder un peu plus donc aux mesures que, moi, je demande, très rapidement. Alors d'abord, la loi fédérale prévoit actuellement donc que les personnes condamnées soient admissibles à sortir au 1/6 de leur peine. Des exceptions sont prévues dans la loi empêchant l'application de cette mesure. Les auteurs de crimes violents ou d'autres crimes qui sont énumérés ne peuvent profiter de cette mesure.

n(9 heures)n

Alors, la liste des exceptions ne renferme pas actuellement de crimes à caractère économique. Nous demandons en conséquence qu'on les y ajoute, particulièrement quand il s'agit de fraudes et d'infractions commises dans les marchés financiers, car elles entraînent chez les victimes d'importantes séquelles physiques et psychologiques et causent un tort considérable à l'économie. Les criminels ne deviendraient ainsi admissibles à la libération conditionnelle qu'au tiers. Alors, on demande que le Code criminel soit modifié afin que le juge puisse plus facilement imposer aux auteurs des crimes à caractère économique l'obligation de purger la moitié de leur peine. Nous désirons également que soit supprimée, dans ces cas-là, l'obligation pour le poursuivant de démontrer au juge qu'une telle mesure s'impose.

En deuxième lieu, je crois important de discuter de la possibilité de hausser les peines maximales d'emprisonnement pour certains crimes à caractère économique, donc de cinq ans à 10 ans dans certains cas, de 10 ans... de cinq ans à 10 ans, de 10 ans à 14 ans, et tel qu'a fait le Royaume-Uni, d'éviter l'écart de peine entre différents types de crimes économiques, par exemple pour le blanchiment d'argent où, au Royaume-Uni, c'est 14 ans. On demanderait aussi de réduire cet écart et ces genres de crimes qui seraient haussés à 14 ans.

Dans le cas de certains délits, le Code criminel prévoit, donc, un maximum de cinq ans: l'agiotage sur les actions, le fait pour un courtier de réduire le nombre d'actions en vendant pour son propre compte, par exemple.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): C'est terminé, Mme la ministre.

Mme Weil: C'est parfait.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Jacques-Cartier.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, Mme la Présidente. Je dois avouer un certain étonnement des propos, certains propos des députés de l'opposition, parce qu'au mois de septembre les trois ministres sont ensemble et ça semble qu'ils ne sont pas satisfaits du fait que la ministre de la Justice, le ministre de la Sécurité publique et le ministre des Finances ont fait les activités ensemble. Moi, j'ai évoqué l'exemple contraire dans mon comté où, quand la ministre de la Justice, le ministre des Finances, la ministre de l'Immigration à titre de députée de Nelligan a passé l'après-midi avec un groupe de victimes, alors je pense qu'on a une évidence que le gouvernement travaille ensemble dans ce dossier.

Cependant, notre instrument qui s'appelle une interpellation, l'opposition a le loisir de choisir une ministre qu'elle aimerait interpeller, alors qu'ils sont surpris que la ministre de la Justice arrive ici et parle beaucoup de la loi, qui parle beaucoup des procureurs de la couronne, qui parle beaucoup des tribunaux, je pense que c'est le domaine de la justice. Et si on veut questionner la ministre responsable pour l'Autorité des marchés financiers, l'opposition officielle a beaucoup d'outils qui sont disponibles pour questionner le ministre des Finances. Mais c'est un petit peu l'opposition qui a décidé de donner une saveur juridique à notre interpellation ce matin. Elle a le loisir, parce qu'il y a d'autres interpellations dans la session, il y a d'autres moments, il a la période de questions à tous les jours, si on veut avoir une saveur plus économique, on a juste à interpeller le ministre responsable pour les dossiers économiques. Mais on a décidé d'interpeller la ministre de la Justice, alors ce n'est pas trop surprenant qu'on va parler beaucoup d'avocats, des procureurs de la couronne, des tribunaux, et tout le reste. Mais ça, c'est le choix que l'opposition a fait.

Et, dans le même ordre d'idées, je pense que mon collègue de Marquette et moi sont les deux seuls aujourd'hui qui ont joué les deux côtés. Alors, nous avons joué le rôle de l'opposition dans les interpellations dans le passé; aujourd'hui, on est dans ce côté à l'Assemblée nationale. Et je suis certain que mon collègue le député de Chambly bientôt va prendre la parole pour dire qu'encore une fois le verre est à moitié vide et les annonces du 13 septembre sont insatisfaites. Moi, j'ai déjà joué le rôle de l'opposition, j'ai souvent évoqué le verre à moitié vide en mon temps, mais je pense que c'est très important de revenir sur l'annonce du 13 septembre.

Moi, je mets maintenant mon chapeau comme adjoint parlementaire au ministre de la Sécurité publique, où il y avait l'annonce de trois équipes qui vont lutter contre diverses parties du crime économique. Il y en a un que nous avons discuté mercredi, qui était une équipe mixte de la lutte contre la malversation et la corruption, qui est un enjeu très important et que le gouvernement a mise en place, une escouade qui va travailler pour détecter des problèmes liés à la malversation et la corruption. Je pense que ça, c'est un élément qui est très important.

Plus spécifiquement aujourd'hui, il y avait une équipe mixte de lutte contre les fraudes financières qui a été mise en place: six agents de la Sûreté du Québec, quatre de l'Autorité des marchés financiers et un directeur des poursuites criminelles et pénales avec un budget annuel de 1,5 million. Est-ce que c'est suffisant? On verra. Je pense qu'il faut laisser la chance au coureur. Mais nous avons mis en place une équipe qui va prendre les spécialistes de l'Autorité des marchés financiers, les spécialistes de la Sûreté du Québec pour essayer de détecter ces fraudes, parce que, comme j'ai évoqué dans ma première intervention, de ce côté de la Chambre, on est très sensible des conséquences graves du crime économique, de la façon que ça touche des familles, surtout les personnes âgées dans notre société, on est très conscient. Alors, je pense qu'on a mis en place... et encore une fois axé ça sur la collaboration entre diverses instances du gouvernement, dans le cas ici la Sûreté du Québec et l'Autorité des marchés financiers.

Mais nous avons également créé une équipe intégrée des renseignements financiers qui a neuf ressources: quelqu'un de l'AMF, trois enquêteurs de l'AMF, la Sûreté du Québec et la Gendarmerie royale canadienne, parce que souvent... sont les crimes qui ne sont pas uniquement au Québec, mais qui sont à l'origine à l'extérieur. On a juste à penser aux grands crimes aux États-Unis: il y a dans La Presse ce matin une compagnie d'Arizona qui avait des liens avec certaines entreprises québécoises. Alors, de dire que c'est quelque chose qu'on peut juste régler ici, qu'il y a une solution «Made in Québec»... Je pense qu'il faut regarder à l'extérieur de nos frontières aussi, et encore une fois les éléments de l'histoire qui sont racontés dans La Presse ce matin quant aux liens entre certaines entreprises québécoises et une compagnie, une banque dans l'Arizona, ça fait preuve qu'il faut travailler ensemble, et, je pense, le gouvernement a fait preuve de sa volonté de collaborer et de travailler en équipe. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Chambly.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: Merci, Mme la Présidente. Le 13 septembre dernier, Mme la Présidente, le gouvernement a senti le besoin, vous savez, après des mois où les cas de fraude à la Vincent Lacroix se multipliaient, d'une part, et où, d'autre part, les allégations de malversation et de corruption faisaient les manchettes, alors que la grogne populaire était importante et alors qu'on était à 48 heures de la reprise parlementaire et que le gouvernement savait qu'il serait interpellé là-dessus, le 13 septembre dernier, donc à 48 heures de la reprise parlementaire, le gouvernement nous a donné, un dimanche midi, tout un spectacle: trois ministres, le P.D.G. de l'AMF, le directeur général de la Sûreté du Québec pour dire: Oui, oui, oui, sachez qu'on fait quelque chose, population, sachez que nous allons agir eu égard aux fraudes financières et aux cas de collusion et de malversation. Quand on entendait ce spectacle du dimanche midi, on se disait, et je suis sûr qu'il y a plusieurs citoyens qui ont dit: Bien, bravo! Et je voyais la manchette du Devoir le lendemain: Québec annonce qu'il intensifiera sa lutte contre les crimes économiques. Alors, je suis sûr que les citoyens ont dit: Bien, bravo! Le gouvernement va y aller, va faire quelque chose là-dessus.

Mais, quand on regarde ça de plus près, Mme la Présidente, quand on regarde ça de plus près et qu'on analyse ce que le gouvernement a annoncé dans ce grand spectacle médiatique du dimanche midi pour nous dire qu'il s'en préoccupait, des crimes économiques, quand on regarde ça de plus près, non seulement le verre n'est-il pas rempli à moitié, il n'y a dans le verre que quelques gouttes, Mme la Présidente, il n'y a dans le verre, que quelques gouttes, un tout petit pas dans la bonne direction.

Regardons d'abord les fraudes financières. Ça, c'est, Mme la Présidente, pour débusquer tous les cas à la Vincent Lacroix dans tout le Québec, sur tout le territoire du Québec. C'est monter des dossiers, on sait que c'est complexe, c'est faire condamner tous les gens qui sont accusés de fraude financière, le gouvernement a annoncé la formation d'une équipe composée savez-vous de combien d'enquêteurs, Mme la Présidente? Six enquêteurs, six enquêteurs d'ailleurs dont on ne connaît ni l'expérience, ni la compétence pour agir vraiment, six enquêteurs pour couvrir toutes les fraudes financières du type Vincent Lacroix sur l'ensemble du territoire québécois. Ce n'est pas sérieux et ce n'est pas le vrai coup de barre auquel la population s'attendait. Ça, c'est pour les fraudes financières.

En matière de malversation et de corruption, j'avoue que le gouvernement... C'est un petit peu mieux, un petit pas supplémentaire: ils ont annoncé 17 policiers. Mme la Présidente, pour tous les cas de corruption et de malversation au Québec, on a annoncé 17 policiers de plus. Encore une fois, c'est déjà mieux que six, mais pensez-vous... Et je lisais le directeur général de la Sûreté du Québec qui disait, lui, ce pauvre directeur général de la Sûreté du Québec, là, il en a plein son bureau, de ce genre de dossiers, il disait: «Ce sont des enquêtes complexes qui ne peuvent pas se faire rapidement. Elles nécessitent beaucoup d'analyses de documents, de rencontres de personnes. Disons qu'on a pas mal de dossiers. Nos gens sont très occupés présentement.» Et parlant du nombre d'enquêteurs qu'il avait, il disait: «Ce n'est pas énorme, c'est sûr et certain. On évalue présentement où l'on va prendre des enquêteurs d'autres groupes pour leur donner un coup de main.»

Écoutez, c'est des dossiers complexes qui demandent une analyse complexe, une analyse fine, et on dit, on annonce en grande pompe: Oui, on va s'en occuper. En fait, dans les faits, pour tous les cas de corruption, de malversation et de collusion au Québec, on nous annonce non pas de nouvelles mesures, d'ailleurs le ministre de la Sécurité publique a dit: Non, non, ce n'est pas des nouvelles mesures, on fait juste... on intensifie ce qui existe déjà, on nous ajoute 17 policiers de plus. Pas besoin de vous dire, Mme la Présidente, que c'est insuffisant.

n(9 h 10)n

Nous, ce qu'on propose depuis plusieurs semaines, c'est une vraie solution qui, selon nous, serait beaucoup plus efficace, c'est la création d'une véritable escouade mixte intégrant à la fois un nombre très important de policiers et d'enquêteurs spécialisés, compétents, qualifiés, qui sont spécialisés dans le domaine, mais aussi des experts comptables, des experts financiers, des avocats, une équipe multidisciplinaire qui couvrirait l'ensemble du secteur des crimes économiques et qui serait définitivement plus efficace que ce saupoudrage de quelques effectifs, quelques enquêteurs ici pour les fraudes financières, quelques enquêteurs de plus pour la collusion, la corruption et la malversation.

Alors, je demande à la ministre de la Justice: Est-ce qu'elle ne croit pas que le genre de coup de barre que nous proposons, que nous avons proposé tout au long de l'été, c'est le genre de coup de barre auquel la population s'attend? Et est-ce qu'elle ne croit pas que ce n'est pas sérieux que de ne donner que quelques enquêteurs de plus pour s'occuper de plus pour s'occuper des fraudes financières, quelques enquêteurs de plus pour s'occuper de tous les cas de corruption et de collusion à travers le Québec? C'est complexe, ça prend beaucoup plus d'effectifs que ça, et je dis à la ministre de la Justice: Est-ce qu'elle ne pense pas qu'elle n'a mis de l'avant qu'une toute petite, qu'une demi-mesure, pour ne pas dire...

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci, votre temps est écoulé.

M. St-Arnaud: ...un quart de mesure par rapport à ce qu'il faut dans les faits?

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. Alors, je cède la parole maintenant à la ministre de la Justice.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. Je dois dire juste, d'entrée de jeu, moi aussi, je suis un peu déçue, aujourd'hui, parce que je sais que j'ai en face de moi un criminaliste avec beaucoup d'expérience, et j'aurais espéré avoir du contenu sur les propositions, plus de contenu. Peut-être que ça viendra, peut-être qu'on aura l'occasion d'échanger éventuellement. Et je voudrais poursuivre sur les mesures très concrètes qu'on amène, qui sont suite à beaucoup de consultations. Et je pense que la position du Québec, elle est importante. Le Québec a beaucoup de crédibilité dans ce champ d'action, et je souhaiterais avoir plus de contenu du côté de l'opposition.

Avant d'en venir aux mesures additionnelles qu'on demande, de modifications au Code criminel et des mesures de sécurité publique, je voudrais défaire un commentaire qui a été fait par rapport à l'inaction du gouvernement avant le 13 septembre dernier. Pour résumer l'action du gouvernement des dernières années, le gouvernement du Québec, depuis 2005, a agi rapidement afin de fournir une réponse adéquate pour enrayer les pratiques douteuses et éviter les cas de fraude financière. Le projet de loi n° 19, adopté en 2007, visait à harmoniser les mécanismes de protection des investisseurs avec les autres législations canadiennes, notamment en introduisant un nouveau régime de recours en responsabilité civile sur le marché secondaire pour les investisseurs, permettant à ceux-ci d'intenter plus facilement une action en dommages et intérêts lorsqu'un émetteur publie une information fausse ou trompeuse, ou ne divulgue pas un changement important. L'Assemblée nationale a tenu, dans la foulée du scandale Norbourg, une commission des finances publiques sur la protection des épargnants. Au début de 2007, la commission a alors entendu une trentaine de participants, dont des citoyens, des experts, des groupes de protection des épargnants et des participants du marché financier. La commission a produit un rapport intérimaire en février 2007, dans lequel elle faisait une série de recommandations sans toutefois formuler de conclusions à l'égard de l'indemnisation. Certaines recommandations de la commission portaient sur des modifications législatives auxquelles a donné suite le projet n° 64, adopté en mai 2008.

Moi, je voudrais revenir sur les mesures que, moi, je demande à mon collègue le ministre Nicholson, le ministre de la Justice fédéral. Donc, la troisième modification qu'on propose, c'est celle facilitant la confiscation des produits de la criminalité dans les cas de fraude et d'autres crimes économiques, comme cela se passe pour certaines infractions graves d'organisations criminelles. En 2005, le Code criminel a été modifié pour faciliter la confiscation des produits de la criminalité lorsqu'une personne est condamnée pour trafic, importation ou exportation de drogue, ainsi que pour certaines infractions graves d'organisations criminelles. Dans certaines circonstances, notamment lorsque le revenu de la personne condamnée ne peut justifier la valeur de son patrimoine, le poursuivant peut demander la confiscation de la partie de ses biens dont elle n'est pas en mesure de justifier la provenance légale.

À l'époque, le Québec, avec l'appui unanime de toutes les autres provinces, avait demandé au gouvernement fédéral de ne pas limiter ainsi l'obligation de justification de la personne condamnée aux seuls cas de drogue et de crime organisé. Nous réclamions alors que la mesure s'applique aussi à d'autres crimes particulièrement lucratifs, dont la fraude et le vol de plus de 5 000 $, le blanchiment d'argent, le vol ou la falsification de carte de crédit ou la possession de matériel à cette fin, les infractions en matière de loterie et jeux de hasard, et plusieurs autres. Le gouvernement fédéral s'était alors engagé à examiner de plus près cette proposition, notamment au plan constitutionnel.

Quatre ans plus tard, considérant que cette demande faisait l'objet d'un consensus en 2005 et que les craintes du fédéral quant aux attaques d'une telle mesure au regard de la charte ne se sont pas matérialisées, nous revenons à la charge. Nous demandons que le renversement du fardeau de la preuve prévu au Code criminel s'étende dorénavant notamment... dorénavant à une gamme plus large de crimes, incluant notamment la fraude et autres crimes à caractère économique.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Je veux revenir très brièvement sur l'intervention de notre collègue et ami le député de Chambly. Au fur et à mesure qu'il parlait, moi, je sentais que le verre devenait de plus en plus plein. Il a commencé en disant que des mesures étaient très timides, mais, par la suite, lorsqu'il a fait référence à 17 policiers, ce n'est quand même pas rien, Mme la Présidente. 17 policiers, oui, peut-être, ça couvre tout le Québec, mais, regardons, je pense que nous sommes 18 personnes ici, dans la salle aujourd'hui, moi, ce serait une équipe formidable. Si j'avais 18 personnes pour accomplir ce travail, ce n'est quand même pas rien là. Bref, comme le disait le député de Jacques-Cartier, c'est jamais assez, c'est toujours trop peu, mais, pour la population qui nous écoute, entre absolument rien et 17 policiers spécialisés dans cette escouade pour prévenir les crimes économiques, moi, je pense qu'on doit saluer le geste posé par le gouvernement du Québec.

Je reviens brièvement aussi sur l'allocution de la députée de Joliette, qui nous accusait de faire du fédéralisme de correspondance. Je ne sais pas trop à quoi elle fait référence, parce que la ministre sera présente, au mois d'octobre prochain, à cette rencontre des ministres de la Justice fédérale des provinces et des différents territoires. Moi, j'ai souvenir, M. le Président, je posais la question à mon collègue député de Jacques-Cartier, il me semble que, dans les mandats où le Parti québécois était au gouvernement, il avait une politique de chaise vide. Je ne sais pas si vous vous en rappelez, mais il arrivait que, dans le cadre de ces conférences-là, il n'y avait aucun ministre du gouvernement du Québec présent pour défendre les intérêts du Québec, alors que, là, moi, je suis très heureux de voir que la ministre va aller défendre nos intérêts. Et elle a réussi, je pense, à faire consensus avec les différents ministres de la Justice des provinces pour interpeller le gouvernement fédéral pour intervenir en ces matières.

On verra le résultat de cette conférence et on verra bien sûr le résultat de l'analyse qu'en fera le gouvernement fédéral parce que, sur notre patinoire, il est vrai que c'est le Code criminel qui s'applique, et le Code criminel est du ressort du Parlement du Canada. Cependant, on a tout le loisir d'influencer le gouvernement canadien dans ses prises de décision. C'est ce que la ministre va faire au mois d'octobre prochain, lorsqu'elle se rendra à cette conférence pour faire valoir les intérêts du Québec et pour insister sur les trois mesures auxquelles elle a fait référence.

Moi, je veux revenir à la troisième mesure concernant le renversement de la preuve, parce qu'en 2005 nous avions réussi à convaincre le gouvernement d'apporter des modifications au Code criminel. Donc, en 2005, le Code criminel a été modifié pour faciliter la confiscation des produits de la criminalité lorsqu'une personne est condamnée pour trafic, importation ou exportation de drogue ainsi que pour certaines infractions graves d'organisations criminelles. Dans certaines circonstances, notamment lorsque le revenu de la personne condamnée ne peut justifier la valeur de son patrimoine, le poursuivant peut demander la confiscation de la partie de ses biens dont elle n'est pas en mesure de justifier la provenance légale.

n(9 h 20)n

Alors, on a eu du succès en 2005 par rapport à ces demandes-là. On souhaite d'obtenir le même succès par rapport aux trois demandes qui seront formulées par la ministre de la Justice. Et, moi, je pense qu'elle intervient directement sur notre patinoire pour pouvoir donner des outils additionnels aux procureurs de la couronne qui sont chargés d'administrer la justice au Québec.

Et donc, à l'époque, le Québec, avec l'appui de toutes les autres provinces, avait demandé aussi au gouvernement fédéral de ne pas limiter ainsi l'obligation de justification de la personne condamnée aux seuls cas de drogue et de crime organisé. Je pense que le gouvernement fédéral à l'époque avait demandé une période de réflexion pour réfléchir à cela et peut-être pour évaluer également si ça pourrait résister à des validations en ce qui concerne la Charte canadienne des droits et libertés de la personne. Mais, moi, j'ai bon espoir que nous allons réussir et j'espère que la députée de Joliette, qui est porte-parole pour sa formation politique en matière de justice et qui fait un excellent travail, soit dit en passant, moi, je l'apprécie beaucoup ayant occupé ces mêmes fonctions, j'espère qu'elle sera d'accord avec notre position.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Chambly.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: Oui, Mme la Présidente. Mme la Présidente, quand on parle, et c'est notre sujet ce matin, de mesures efficaces contre les crimes économiques, on parle, entre autres, de mesures contre la corruption, la collusion et la malversation, notamment dans le domaine de la construction. Pour faire face à ces... à ces... à ces crimes, le gouvernement a effectivement créé cette petite... a ajouté 17 policiers, a ajouté 17 policiers, je l'ai dit tantôt, c'est insuffisant. Le député de Marquette qui est avocat lui-même le sait, ce sont des enquêtes d'une telle complexité, ce sont des enquêtes qui doivent être menées avec diligence, qui doivent être menées dans les règles, de façon éventuellement à ce que le dossier permette d'accuser des gens devant les tribunaux. Alors, c'est des dossiers... c'est extrêmement lourd, c'est extrêmement complexe, et je maintiens que 17 policiers de plus... le directeur général de la Sûreté du Québec déborde, je maintiens que 17 policiers de plus pour mener des dossiers, monter des... faire des enquêtes d'une telle complexité, pour l'ensemble des cas de malversation, de corruption et de collusion sur l'ensemble du territoire du Québec, ce n'est pas assez. Il fallait donner un coup de barre, il fallait faire beaucoup plus.

Cela dit, Mme la Présidente, les allégations de collusion, de malversation et de corruption se sont tellement multipliées au cours des derniers jours... au cours des derniers mois et ont pris une ampleur toute particulière au cours des derniers jours que nous en sommes maintenant rendus à constater qu'il ne semble plus que ce soient quelques cas individuels, mais qu'on soit en présence d'un véritable système. Vous avez sûrement entendu parler, Mme la Présidente, des dernières allégations qui sont à l'effet qu'il y aurait un club sélect d'entrepreneurs qui se partageraient les contrats entre eux, une collusion qui entraînerait des coûts supplémentaires de 20 % à 30 % pour les contribuables. Ça, c'est de l'argent de nos impôts, c'est l'argent des citoyens et c'est très préoccupant, surtout en ces temps où il y a de nombreux projets d'infrastructures, on a des projets pour des milliards et des milliards en matière d'infrastructures présentement au Québec.

Alors, c'est très préoccupant et, devant toutes ces allégations qui s'accumulent et qui prennent de l'ampleur, une ampleur, je le répète, qui est inquiétante, je pense que nous en sommes maintenant rendus à la nécessité d'instituer une commission d'enquête, une commission d'enquête sur la collusion et la malversation dans l'industrie de la construction. Il arrive en effet, Mme la Présidente, des moments dans l'histoire d'une société où il faut aller au-delà de certains cas individuels, et une société doit regarder l'ensemble du problème, faire enquête plus largement, et ce, afin d'établir des balises pour l'avenir. Et je pense que nous sommes rendus là à cet égard-là. Et, vous savez, j'entendais le ministre de la Sécurité publique dire: Il faut que les enquêtes policières se poursuivent. Le problème, c'est que, si on attend avant d'éventuellement avoir une commission d'enquête, le problème avec cette position, c'est qu'on risque d'attendre très longtemps, alors qu'il importe dès maintenant de faire la lumière sur ces... sur tout ce qui se passe dans l'industrie de la construction.

Et je pense que l'un ne va pas sans l'autre, Mme la Présidente. On peut très bien avoir d'une part des enquêtes policières qui visent à trouver des coupables, des cas précis, des coupables, de les amener devant les tribunaux, et parallèlement à ça, avoir d'autre part une véritable commission d'enquête qui plus largement va regarder l'ensemble de la question et va éventuellement faire des recommandations pour que cela ne se reproduise plus, des recommandations qui nous permettraient... Comme ça a été le cas dans le cadre de la commission Cliche durant les années soixante-dix. Il y a eu une commission d'enquête. Il y a eu des recommandations, ces recommandations-là ont été mises en application, et pendant plusieurs années, on a assisté à un assainissement du climat sur... dans le domaine de la liberté syndicale, dans le domaine de la construction.

Alors, je vois que mon temps s'écoule, Mme la Présidente. D'ailleurs, plusieurs citoyens et plusieurs observateurs, je ne les reprendrai pas tous, nous demandent, demandent maintenant au gouvernement d'instituer cette commission d'enquête. Je voyais ce matin, dans Cyberpresse, on a demandé aux citoyens... hier, la question du jour, c'était: Une enquête publique sur les problèmes de l'industrie de la construction au Québec devrait-elle être déclenchée? Savez-vous combien ont répondu oui à cette question-là? 87 % des gens hier, dans Cyberpresse, qui ont demandé au gouvernement d'instituer une commission d'enquête.

Mme la Présidente, je réitère notre demande formulée cette semaine, la demande formulée par le Parti québécois face à la multiplication des allégations de collusion, de corruption et de malversation dans l'industrie de la construction, et face à l'ampleur de celle-ci tout particulièrement. Il nous semble que le gouvernement n'a pas le choix, il doit instituer une commission d'enquête sur l'industrie de la construction, et ce, dès maintenant, et ce, parallèlement à la poursuite des enquêtes policières actuelles et à venir. Le gouvernement n'a pas d'excuse, il doit agir. La population attend cela.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant à la ministre de la Justice.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je dirais que le gouvernement a annoncé sa position, c'est-à-dire sa volonté de voir ces enquêtes policières suivre leur cours. Moi, en tant que ministre de la Justice, j'ai évidemment une obligation de réserve importante par rapport aux enquêtes qui sont actuellement en cours et donc je vais limiter mes commentaires. Le gouvernement a déjà annoncé sa position hier: le ministre de la Sécurité publique, qui souhaite vivement que plusieurs enquêtes policières qui sont en cours fassent leur chemin.

Évidemment, moi, en tant que ministre de la Justice, ça va être mon obligation de m'assurer qu'il y ait des dénonciations suite à ces enquêtes policières. Donc, je vais me limiter à ça, et je souhaiterais revenir sur les mesures de sécurité publique et les mesures annoncées par l'AMF. Je voudrais dire ici en commission que, moi, j'ai eu beaucoup, beaucoup de réactions extrêmement positives par rapport aux annonces qu'on a faites l'autre jour, extrêmement positives. Des gens qui sont d'ailleurs dans le milieu financier, des gens qui sont victimes. D'ailleurs, les victimes se sont prononcées publiquement pour dire qu'ils étaient très satisfaits de l'annonce, et surtout de la volonté, l'annonce de la volonté du gouvernement, par des mesures très concrètes, d'aller de l'avant.

Alors, rapidement, je vais revenir sur ces mesures, car elles ont... elles auront un impact important. Donc, au plan des activités d'enquête, le budget 2009 présenté en mars dernier a annoncé l'intention de notre gouvernement à mettre en place une nouvelle escouade dédiée spécifiquement à la répression des crimes sur les marchés financiers. Le ministre de la Sécurité publique a annoncé la création d'une toute nouvelle équipe mixte de lutte contre le crime économique. Elle aura pour mission d'enquêter sur toute forme de malversation et de corruption concernant les institutions publiques au Québec. Cette équipe sera composée de 30 personnes et comptera 17 enquêteurs de la Sûreté du Québec, qui travailleront de pair avec des procureurs rattachés au Directeur des poursuites criminelles et pénales ainsi qu'avec des experts du ministère du Revenu, du ministère des Transports, du ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire, du ministère des Finances, du ministère de la Sécurité publique et du Secrétariat du Conseil du trésor.

Face à la complexité des crimes économiques, le gouvernement mise sur le partage des informations et des compétences afin de mettre de toutes les chances de son côté. Ce partage nous permettra d'effectuer des enquêtes plus efficaces et plus approfondies. Le message que nous lançons aux fraudeurs est sans équivoque: Nous ne négligerons rien pour que cessent leurs activités aux dépends des citoyens et de l'ensemble de la société.

De son côté, la Sûreté du Québec a créé une équipe spéciale de six enquêteurs spécialisés. Cette équipe travaillera étroitement avec le DPCP ainsi que sous la coordination de l'Autorité des marchés financiers pour combattre spécifiquement les fraudes financières. La mise en place de cette équipe mixte s'inscrit dans la foulée de l'excellente collaboration qui prévaut déjà entre les divers corps policiers et l'Autorité des marchés financiers.

Le meilleur exemple de cette convergence des forces est le centre d'intelligence composé de représentants de la Sûreté du Québec, de la Gendarmerie royale du Canada et de l'AMF, qui est déjà en oeuvre depuis le 1er mai 2009. Cette équipe mixte nous permet de mettre en commun des connaissances et d'échanger de l'information afin d'identifier des situations et des individus à risque.

n(9 h 30)n

Par rapport à l'Autorité des marchés financiers puis le volet financier, évidemment j'aimerais peut-être plus mettre l'accent sur des mesures de prévention et d'éducation, parce qu'on n'en a pas beaucoup parlé. Il y aura toutes sortes de mesures qui seront mises en place très, très prochainement pour empêcher que le consommateur... pour faire en sorte que le consommateur fasse preuve de vigilance, le respect de quelques consignes simples pour éviter de nombreuses fraudes. Il y a une campagne médias majeure qui sera lancée cet automne afin de sensibiliser les investisseurs au risque de fraude et aux moyens de les prévenir.

Nous le répéterons jamais assez, la vigilance des investisseurs demeure toujours le meilleur outil pour dépister et éviter les fraudes. D'ailleurs, un sondage en Angleterre a montré que les victimes de fraude sont généralement aussi intéressées par des mesures de prévention pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'autres victimes de fraude financière que des mesures de punition. Alors, merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. La parole est maintenant au député de Jacques-Cartier.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et, d'entrée de jeu, je veux remercier l'opposition pour soulever cette question ce matin, parce que je pense effectivement c'est un débat important. Mais je veux aussi de nouveau souligner qu'il y a des démarches qui ont été déjà prises pour confronter ça. Je pense, entre autres, à l'augmentation importante du nombre d'effectifs à l'Autorité des marchés financiers qui... et beaucoup avant le 13 septembre passé. Mais de passer de 44 à 112 effectifs est une démarche très importante que le gouvernement a prise.

Moi, je connais quelqu'un qui est un conseiller financier inscrit avec l'AMF, alors il m'a expliqué la présence continue dans leur bureau de ça, et c'est quelqu'un qui partage un nom d'origine au pays de Galles qui a fait beaucoup de manchettes cet été. Alors, c'est important pour l'ensemble de l'industrie, pour la confiance des investisseurs d'avoir cette présence accrue.

Alors, le gouvernement a réagi, a augmenté d'une façon très importante le nombre d'effectifs au AMF.

Je veux rassurer le député de Chambly parce que, quand nous avons rencontré les victimes dans mon comté, un des premiers messages était leur satisfaction avec le travail de la Sûreté du Québec, qui ont réagi rapidement après les manchettes au début du mois de juillet, et leur travail était souligné par ces victimes, qu'ils n'ont pas... ils ont répondu à l'appel très rapidement au mois de juillet.

Moi, je regarde les manchettes des récentes semaines: Québec moves on white-collar crime; Le premier ministre veut des peines plus lourdes; L'AMF prépare un train de mesures pour sensibiliser les investisseurs à la fraude; Québec prend le taureau par les cornes dans les questions... pour la création des deux escouades; Le premier ministre s'attaque aux criminels à cravate. Alors, je pense qu'on a des preuves qu'on a réagi.

Et, sur la question que le député de Chambly a soulevée, on a un autre écho ce matin, dans Le Soleil, de Brigitte Breton, sur la question d'une commission d'enquête, et je pense qu'il faut considérer ces mots aussi: «Les commissions d'enquête sont longues et coûteuses. C'est un exercice qu'un gouvernement doit enclencher uniquement si c'est le seul moyen à sa disposition pour atteindre un objectif et pour s'assurer que son cadre légal n'est pas systématiquement contourné.

«Rien ne prouve jusqu'à maintenant que la lumière ne peut pas être faite dans l'industrie de la construction par les voies déjà existantes. Rien n'indique que les délinquants resteront impunis. Si la conclusion diffère un jour, il sera toujours temps pour le gouvernement de sortir l'artillerie lourde pour procéder à un grand ménage et resserrer les règles.»

Alors, je pense, ça, c'est quelqu'un qui a regardé ça. Je pense qu'il y avait l'invitation que l'ancien ministre du Travail, Jean Cournoyer, a lancé sur les ondes de RDI, cette semaine, à la prudence. Parce que je pense, tout le monde convient, que, ça, c'est le recours ultime pour un gouvernement pour déclencher une enquête publique. Je pense, dans l'amendement que nous avons présenté en Chambre mercredi, le gouvernement n'est pas fermé à cette voie, mais «laissez les personnes en place faire leur travail» était la conclusion. On a des échos des experts, des autres personnes qui regardent ça, que c'est une approche prudente. Alors, moi, je pense...

On a dit, dans le débat que nous avons eu avec l'opposition mercredi après-midi: La porte n'est pas fermée, mais laissez les policiers font leur travail. Moi, je suis... Il y aura des résultats intéressants. On a vu les quatre descentes déjà cette année, 187 arrestations. Alors, il y a déjà la preuve que la police est à l'oeuvre, et ça donne des résultats. Alors, un appel à la prudence.

Mais, juste en conclusion, je comprends et, comme je dis, je veux souligner l'importance de ce débat. J'ai rencontré les victimes. Je pense, l'ensemble des 125 membres de cette Assemblée ont rencontré les victimes, et on ne peut pas être indifférents à leurs souffrances, aux rêves cassés, à toutes les conséquences de ces crimes. Le gouvernement le prend au sérieux. Le gouvernement travaille ensemble. Et ça, c'est toujours l'enjeu pour quelqu'un qui maintenant travaille ici, à Québec, depuis 19 ans, 15 ans comme député, de s'assurer la coordination entre les ministères est toujours un enjeu très difficile. Mais, quand je regarde les démarches que nous avons faites entre le domaine économique, entre le domaine de la sécurité publique, entre le domaine de la justice, on a une coordination accrue. On a également le fait qu'il faut travailler avec la Gendarmerie royale canadienne. Il faut travailler avec les corps policiers à travers le monde parce qu'on est dans l'ère de l'Internet, on est dans l'ère de cybercriminalité. Alors, ce n'est pas juste s'assurer que tout est propre sur notre territoire, mais il faut une collaboration accrue avec les corps de police à travers le monde pour s'attaquer à ces problèmes.

Mais je peux rassurer la population que le gouvernement de Québec prend cet enjeu au sérieux.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. M. le député de Nicolet-Yamaska, vous disposez d'environ quatre minutes et, par la suite, nous terminerons les droits de parole avec la ministre de la Justice et également la députée de Joliette. Alors, ce sera au tour du député de Chambly.

M. Bertrand St-Arnaud

M. St-Arnaud: Oui, Mme la Présidente. Je vais prendre la parole du côté de l'opposition pour répondre directement à ce que vient d'affirmer mon collègue de Jacques-Cartier.

Mme la Présidente, il a raison sur une chose, hein, quand on parle de commission d'enquête, il faut être prudent. Et c'est pourquoi l'opposition officielle, le Parti québécois, n'a pas, à la première allégation ou à la deuxième, dit: Ça nous prend une commission d'enquête. Nous avons agi avec prudence, et je dirais même avec une certaine part de sagesse. Parce que c'est vrai qu'un processus de commission d'enquête, c'est lourd, c'est coûteux, et ça peut durer longtemps.

Mais, quand on voit maintenant, à ce jour, le nombre d'allégations qui se multiplient et, quand on voit que ça ne semble plus être des cas individuels mais qu'il semble y avoir un système organisé, avec les conséquences que ça peut avoir pour nos finances publiques, je pense que nous en sommes arrivés à la conclusion, au cours des dernières semaines, que malheureusement nous avions agi avec prudence, mais là nous en étions rendus à... nous n'avions plus le choix, nous étions rendus à la nécessité d'avoir une commission d'enquête.

Et, en ce sens-là, peut-être certains disent qu'on n'est pas rendus là, mais je pourrais vous en citer des dizaines, d'observateurs, qui nous disent: Il faut une commission d'enquête. Michèle Ouimet dans La Presse, Une commission d'enquête s'impose, Yves Boisvert que tout le monde connaît, Une commission Cliche pour notre temps. Jacques Duchesneau, ancien directeur de police, qui dit carrément: «Écoutez, la corruption est une réalité bien ancrée dans la vie municipale au Québec, réveillez-vous», nous dit-il, l'ancien directeur du service de police de la CUM, comme on l'appelait à l'époque, Claude Poirier, qui est quand même quelqu'un qui suit l'actualité policière et l'actualité criminelle depuis 50 ans, nous dit: «La chef de l'opposition officielle vient de demander une enquête publique. J'endosse cette position-là.»

Mme la Présidente, et, ce matin, la population, je le disais tantôt, la population dans Cyberpresse, qui a été interrogée hier par un sondage, des milliers et des milliers de personnes qui ont répondu à cette question: Une enquête publique sur les problèmes de l'industrie de la construction au Québec devrait-elle être déclenchée? 87 % des gens répondent hier qu'il faut une enquête publique.

Alors, Mme la Présidente, je pense que nous avons agi avec prudence dans ce dossier. Nous n'avons pas demandé une commission d'enquête à la première ou à la deuxième allégation parce que nous savons que c'est un processus lourd.

Mais je pense que maintenant nous en sommes rendus à tenir cette commission d'enquête pour le bénéfice de notre société, pour qu'on règle ce problème d'une manière définitive, qu'on voit le problème dans son ampleur, qu'on arrive... qu'une commission d'enquête arrive avec des recommandations qui vont amener un assainissement du système, un assainissement de l'industrie de la construction pour de très nombreuses années, comme l'avait fait par le passé la commission Cliche dans les années soixante-dix.

Et je pense qu'on le doit également, on la doit, cette commission d'enquête là, par respect pour les travailleurs de la construction, par respect aussi pour les honnêtes entrepreneurs en construction qui sont présentement éclaboussés par toutes ces allégations qui se multiplient de jour en jour.

n(9 h 40)n

Alors, Mme la Présidente, je veux dire au député de Jacques-Cartier que, dans ce dossier, nous avons agi avec prudence et même avec sagesse: nous n'avons pas demandé cette commission d'enquête là sur un coin de table. Mais, devant l'accumulation des allégations en matière de collusion, de corruption et de malversations dans l'industrie de la construction, et tout particulièrement au cours des dernières semaines, avec les allégations voulant qu'il y ait un système véritablement organisé, nous en sommes venus à la conclusion que nous en étions... force était d'admettre que seule une commission d'enquête publique sur l'industrie de la construction pourrait nous amener à régler ce problème d'une manière définitive et pour le bien de tous pour de très nombreuses années. Merci, Mme la Présidente.

Conclusions

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. Nous en sommes maintenant aux dernières remarques. Mme la ministre, vous disposez d'un maximum de 10 minutes.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil: Merci, Mme la Présidente. Alors, tout d'abord, permettez-moi de remercier sincèrement mes collègues, le député de Jacques-Cartier et le député de Marquette, mon adjoint parlementaire.

Alors, au cours des deux dernières heures, mes collègues et moi vous ont exposé les dernières mesures qu'a prises le gouvernement du Québec afin d'intensifier la lutte contre les fraudes financières, la malversation et la corruption. Annoncées le 13 septembre dernier par le ministre des Finances, le ministre de la Sécurité publique et moi-même, ces mesures s'inscrivent dans une stratégie conçue pour agir sur plusieurs fronts à la fois.

Notre approche vise plusieurs objectifs: nous voulons d'abord renforcer la confiance du public face au fonctionnement des marchés et à la libre concurrence, car la confiance demeure le fondement incontournable des transactions effectuées sur les marchés financiers; deux, nous voulons protéger l'intégrité des institutions publiques contre l'infiltration de groupes criminels organisés; trois, nous voulons sensibiliser nos concitoyens à la nécessité de s'informer et de comprendre les règles de base qu'ils doivent suivre en ce qui concerne leurs investissements et leurs transactions financières; quatre, nous voulons développer l'expertise et l'efficacité des organismes et des professionnels responsables de détecter les fraudes financières et de lutter contre les auteurs des crimes économiques.

Afin de venir en aide aux victimes, nous avons mis en place plusieurs mesures menées par plusieurs ministères, dont celui de l'Emploi et de la Solidarité sociale, du Revenu, des Finances, du ministère de la Justice. Ces mesures sont destinées à soutenir financièrement et psychologiquement les victimes de fraude afin de leur permettre de passer au travers les moments très difficiles suivant parfois l'extorsion de toutes leurs économies. Pour certaines victimes alléguées de fraude financière, mon ministère coordonne un comité interministériel qui assure les arrimages requis entre tous les ministères et organismes impliqués.

En ce qui concerne la lutte contre les crimes économiques, le gouvernement du Québec a annoncé des mesures qui nous permettront de détecter et de réprimer la malversation et la corruption de façon encore plus efficace. La nouvelle équipe mixte de lutte contre le crime économique comprenant des enquêteurs de la Sûreté du Québec et des experts du ministère du Revenu, du ministère des Transports et du ministère des Affaires municipales enquêtera sur toute forme de malversation et de corruption concernant les institutions publiques au Québec. La Sûreté du Québec a créé une équipe spéciale de six enquêteurs spécialisés qui travailleront étroitement avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales ainsi que sous la coordination de l'Autorité des marchés financiers. Enfin, nous accentuons la cybersurveillance des individus qui offrent illégalement des produits d'investissement.

Sur le plan pénal, j'ai mentionné que notre liberté d'action est limitée, car le Code criminel est de juridiction fédérale. C'est le Parlement du Canada qui a le pouvoir constitutionnel de modifier les peines prévues, notamment pour la fraude et autres crimes à caractère économique. C'est également lui qui gère le régime de libération conditionnelle des personnes condamnées à des peines de deux ans et plus d'emprisonnement. En tant que ministre de la Justice du Québec, je vais proposer, lors de la prochaine rencontre fédérale-provinciale-territoriale de mes homologues canadiens en octobre, des modifications qui touchent à trois aspects importants: un, les conditions de libération conditionnelle; deux, les peines maximales d'emprisonnement; et trois, le régime des produits de la criminalité.

Nous sommes d'avis que les criminels économiques condamnés pour la première fois au pénitencier à des peines de deux ans devraient purger une plus grande partie de leur peine, étant donné le tort considérable qu'ils causent à leurs victimes et à l'économie. Nous souhaitons que le gouvernement fédéral révise le régime de libération conditionnelle dans le cas de circonstances aggravantes, comme lors de fraudes impliquant de larges sommes d'argent ou causant des torts à un nombre élevé de victimes.

Nous voulons aussi que la discussion porte sur la possibilité de hausser les peines maximales d'emprisonnement pour certains crimes à caractère économique. L'objectif est d'envoyer un message clair aux fraudeurs sur la gravité objective de leurs crimes. Enfin, à l'instar de ce qui se passe pour certaines infractions graves d'organisations criminelles, nous proposons une modification facilitant la confiscation des produits de la criminalité dans les cas de crimes économiques. Notre stratégie de lutte contre les crimes économiques ne saurait être complète sans des efforts accrus pour sensibiliser le public à la nécessité d'être vigilant. Comme dans bien d'autres domaines, la prévention demeure un outil puissant afin de réduire le nombre et la gravité des crimes économiques.

L'Autorité des marchés financiers est le seul organisme de réglementation des marchés financiers au Canada à avoir une surintendance entièrement vouée à l'assistance des consommateurs. Elle intensifiera ses efforts d'information et de sensibilisation des investisseurs et pilotera une campagne média majeure cet automne, pour accroître leur vigilance et leur niveau de connaissance en matière financière.

En terminant, j'aimerais souligner que la très grande majorité des transactions qui s'effectuent chaque jour sur les marchés québécois sont faites dans le respect des règles et par des professionnels compétents et honnêtes. Toutefois, face aux infractions et aux crimes économiques, le gouvernement du Québec ne pouvait rester impassible. Je suis persuadée que les mesures que nous avons prises nous permettront de réduire l'incidence des crimes économiques et leurs répercussions sur les citoyens québécois.

Pour ma part, Mme la Présidente, évidement, mon approche vis-à-vis le fédéral, c'est une approche de collaboration. Mon champ d'action évidemment, c'est l'administration de la justice et de m'assurer... ? et je le répète, je le répète souvent ici, en Chambre, avec beaucoup d'indépendance vis-à-vis les acteurs premiers du système de justice qui sont les juges et le Directeur des poursuites criminelles et pénales ? et c'est aussi de militer ou de travailler, de promouvoir des nouveaux concepts et des modifications au niveau du Code criminel. Et je mise beaucoup sur la collaboration avec le fédéral, comme le Québec a toujours fait pour faire avancer le droit criminel. Alors, je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Joliette, qui a également un temps de parole de 10 minutes.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon: Merci, Mme la Présidente. Alors, j'imagine que vous ne serez pas surprise d'apprendre qu'on est très déçus. On est déçus pas parce que l'opposition doit toujours être déçue parce qu'en fait on avait invité la ministre de la Justice... Parce que, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, on l'a peu entendue sur le dossier. On sait que c'est quelqu'un qui veut... qui veut présenter les choses correctement. On pensait qu'aujourd'hui elle s'éloignerait des modèles préétablis de son gouvernement et de ses collègues et qu'elle n'entrerait pas dans un monologue et qu'elle serait ouverte au dialogue avec l'opposition sur ce sujet fort important des crimes économiques. Or, force est de constater, que je pense qu'on a atteint des nouveaux sommets de monologue ou de dialogue de sourds aujourd'hui. On en est excessivement déçus.

Je vous rappelle qu'on est dans un dossier où il y a des répercussions énormes sur la vie des gens. On ne parle pas de quelque chose qui est désincarné, on parle de quelque chose qui touche des milliers de personnes, qui touche la population au plus profond de sa confiance envers le système de justice. Donc, on se serait attendu à plus.

Et, oui, on a écouté. Moi, j'ai écouté attentivement ce qui m'a été dit ce matin et je constate qu'il n'y a absolument rien de neuf. On aurait souhaité que le gouvernement, que la ministre refasse ses devoirs depuis le 13 septembre dernier, qu'ils mettent de la chair autour de l'os, qu'ils nous arrivent avec des mesures... de véritables mesures efficaces, de véritables mesures concrètes, des mesures intégrées. Or, ce n'est pas ça du tout. On nous... le député mentionnait de belles manchettes; bien, justement, ça confirme exactement ce qu'on pense. L'annonce du 13 septembre visait à faire des belles manchettes. Une belle opération de communication par un beau dimanche après-midi. Mais, quand on cherche, comme l'a dit mon collègue de Chambly, on ne trouve que bien peu de chose.

Alors, qu'est-ce qu'on nous dit aujourd'hui? Qu'est-ce qu'on nous répète? Bien, on nous répète qu'on va amorcer une autre étape du fameux fédéralisme de correspondance qui est pratiqué par le gouvernement actuel, fédéralisme de correspondance qui, je veux le répéter, n'a absolument rien donné à ce jour. C'est rebuffade sur rebuffade, et la ministre semble pleine d'espoir. Nous, on est tout à fait pour ça, l'espoir, mais il faut aussi lire les signaux correctement qui sont envoyés. Pas plus tard que la semaine dernière, je le répète, le ministre fédéral a fait l'annonce de son intention de déposer un projet de loi sur les crimes économiques. Il n'a absolument rien dit sur les demandes du Québec. Il n'a même rien dit su la demande, qui fait pourtant consensus, consensus avec le Bloc québécois, d'abolir la règle de la libération automatique au 1/6 de la peine.

Donc, je pense que c'est très mal parti. Donc, je suis bien contente, là, de voir que la ministre vit d'espoir, mais je pense que l'expérience nous montre que les espoirs ont été déçus plus souvent qu'autrement et que déjà on se fait servir un camouflet par le gouvernement fédéral. Donc, je pense que, de ce côté-là, il ne faudrait pas trop espérer.

n(9 h 50)n

Et, au collègue le député de Marquette, qui nous dit qu'évidemment, de notre côté, on pratique le fédéralisme de la chaise vide, je voudrais lui rappeler que notre chef actuelle, la chef de l'opposition officielle, est la seule au cours des dernières années qui a réussi à obtenir un amendement. Et elle était d'ailleurs accompagnée, si je me souviens bien, du député de Marquette qui était alors porte-parole en matière d'opposition. Donc, je pense que c'est difficile de venir nous dire aujourd'hui qu'on pratique systématiquement le fédéralisme de la chaise vide quand notre propre chef a obtenu un amendement historique en matière de commission scolaire linguistique et que le député de Marquette était lui-même présent. Donc, on demanderait un petit peu plus de rigueur dans les propos aujourd'hui.

Alors, au-delà du fédéralisme de correspondance qui se poursuit, au-delà des quelques policiers qui sont annoncés et qui évidemment, on le répète, sont bien insuffisants quand on constate l'ampleur du problème, l'ampleur des transactions, l'ampleur des fraudes à laquelle on semble faire face. Et, quand on regarde en matière de prévention, ce qui nous est annoncé, encore une fois, c'est bien peu: une campagne d'éducation et de la cybersurveillance. Donc, on se demande bien ce qu'il y a de neuf, d'innovateur et d'audacieux là-dedans.

La ministre aujourd'hui, on lui a demandé des questions. Elle nous dit qu'en matière de justice elle peut répondre; sur le reste, en fait, qu'on aurait dû interpeller les autres collègues. Bien, on doit rappeler à la ministre que la couronne, le gouvernement est indivisible. Et on pense, comme elle l'a dit elle-même dans les dernières minutes, que la ministre de la Justice a un rôle central à jouer en matière de lutte aux crimes économiques. Elle a dit elle-même qu'elle coordonnait les efforts. Donc, on se serait attendu à ce qu'elle puisse effectivement répondre à nos questions sur l'ensemble des domaines, surtout que le titre de l'interpellation, je pense, était assez clair: Des mesures efficaces pour lutter contre les crimes économiques.

Elle-même a dit que demander des peines plus sévères, ce n'était pas une panacée et la seule solution: bien, justement, on est d'accord avec ça. Donc, on pense qu'aujourd'hui on aurait dû avoir un véritable débat sur l'ensemble des sujets, sur l'ensemble de la panoplie de mesures dont le gouvernement pourrait disposer, qui malheureusement sont tout à fait timides et pour lesquelles on n'a pas pu avoir de réponses, la ministre voulant rester seulement sur son terrain.

Or, parlons-en, de son terrain: on trouve qu'elle l'occupe très peu, son terrain. Elle nous dit aujourd'hui, à toutes les occasions, qu'elle a écrit au fédéral, qu'elle est pleine d'espoir, qu'elle va aller à la conférence fédérale-provinciale des ministres de la Justice; or, elle peut agir. Oui, le Directeur des poursuites criminelles et pénales est indépendant, oui, on a adopté la loi de concert avec le gouvernement, on est bien au fait de cette réalité-là, mais à plusieurs égards, lorsque cette loi-là a été débattue, on nous a dit à quel point la Procureur général et ministre de la Justice demeurait imputable. On nous a dit aussi ? et quand on va lire la loi, on le constate ? que la ministre de la Justice a un pouvoir d'orientation, que la ministre de la Justice peut même exceptionnellement intervenir dans des dossiers pour donner des instructions, du moment qu'elle révèle son intention.

Or, on lui demande aujourd'hui bien concrètement une mesure très simple pour envoyer un signal très clair à la population: qu'elle émette une orientation au Directeur des poursuites criminelles et pénales justement pour montrer l'importance que le gouvernement accorde aux crimes économiques, pour montrer qu'il ne veut plus que ces crimes-là soient traités comme des crimes de second ordre, pour montrer qu'elle veut des peines importantes. Parce que les procureurs de la couronne, les procureurs de la poursuite, ils sont sur le terrain, et ce sont eux qui peuvent faire la différence au quotidien, notamment, en demandant des peines importantes.

Or, aucun espèce de signal. On aurait franchement pensé que la ministre aurait sauté sur l'occasion de montrer sa bonne volonté et de dire: Oui, c'est vrai, j'ai quand même un terrain d'action, je suis quand même, aux dernières nouvelles, la première responsable de la justice au Québec et je vais envoyer une telle orientation. Dans le passé, ça a fait la différence en matière de violence conjugale, en matière d'agression sexuelle, en matière de crime pour facultés lors de... de facultés affaiblies. Donc, on lui dit, ce n'est pas sorcier, qu'elle envoie un signal comme responsable de la poursuite au Québec. Or, c'est le silence radio; il n'y a absolument rien qui nous est dit à cet égard-là.

Donc, une proposition très concrète, on lui demande, en matière pénale, parce qu'elle a indiqué qu'elle voulait agir autant au pénal qu'au criminel lors de la fameuse conférence de presse, ce qu'elle entend faire en matière pénale: aucune réponse encore une fois. Ce qu'elle entend faire concrètement pour les victimes? Elle nous dit: On a créé un comité. Bien, moi, je veux bien créer un comité, mais c'est la ministre qui est responsable des centres d'aide aux victimes d'actes criminels, c'est elle qui est responsable, la première responsable de l'aide.

Le député de Jacques-Cartier nous rappelait avec justesse que des organismes communautaires se mobilisent pour venir en aide, pour offrir les premières nécessités aux victimes de ces fraudeurs à cravate; bien, c'est extraordinaire. Je veux dire, on le sait, on le mentionnait nous autres mêmes, enfance au soleil qui récolte des dons, 100 000 $ de dons. Mais où est le gouvernement? Quel signal ça envoie aux victimes de dire: Les organismes communautaires font un travail extraordinaire, ils vont vous aider? Je pense que le gouvernement devrait quand même prendre ses responsabilités puis agir en matière d'aide aux victimes.

M. le député de Jacques-Cartier disait lui-même à quel point il y avait des cas tristes. Moi aussi, j'ai été confrontée à des cas excessivement tristes de quelqu'un qui venait de prendre sa retraite, qui a perdu toutes ses économies, qui doit maintenant ramasser des balles sur un terrain de golf pour pouvoir joindre les deux bouts. Bien, je pense qu'aujourd'hui il aurait aimé ça avoir des réponses un petit peu plus concrètes de la part de la ministre de la Justice.

Et mes collègues ont fait également, de leur côté, d'excellentes propositions concrètes. La ministre nous a dit: Je voudrais du contenu de l'opposition. On sait que c'est leur nouveau leitmotiv. Ils voulaient les deux mains sur le volant, mais ce qu'ils demandent maintenant, c'est à l'opposition de leur suggérer les réponses. Bien, on leur en suggère, des réponses, aujourd'hui. Mon député de Nicolet-Yamaska: un fonds, un fonds d'indemnisation globale pour les victimes, une inscription obligatoire, impossibilité de transiger sans inscription obligatoire. Mon collègue responsable de la sécurité publique: une véritable escouade mixte d'enquête, avec de véritables moyens, et une commission d'enquête sur les questions de malversation. Ça, c'en est, du concret. Or, on n'a aucune réponse. On est excessivement déçus, et on espère au moins que la ministre va accepter la proposition qu'on puisse débattre davantage en commission parlementaire. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Beaudoin, Mirabel): Merci. Pas d'applaudissements. Alors, merci. La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au mardi 29 septembre 2009, où elle poursuivra un autre mandat.

(Fin de la séance à 9 h 57)


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