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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 22 janvier 2003 - Vol. 37 N° 105

Consultation générale sur le document intitulé Entente de principe d'ordre général entre les premières nations de Mamuitun et de Nutashkuan et le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

 
M. Claude Lachance, président
M. Marc Boulianne, président suppléant
M. Rémy Trudel
M. Normand Duguay
M. Geoffrey Kelley
M. Christos Sirros
M. François Corriveau
M. Stéphane Bédard
Mme Françoise Gauthier
M. Stéphan Tremblay
M. Benoît Laprise
* M. Jacques Gauthier, Nation Innu Matimekush-Lac John
* M. Nadir André, idem
* M. Jean-Charles Piétacho, premières nations de Mamit Innuat
* M. Marcel Lalo, idem
* M. Philippe Piétacho, idem
* M. Guy Bellefleur, idem
* M. Marc Dubé, Le Réseau de scieries indépendantes du Saguenay-Lac-Saint-Jean
* M. Denis Lebel, ville de Roberval
* M. Jacques Potvin, MRC de Maria-Chapdelaine
* M. Réjean Boivin, idem et CRCD du Saguenay-Lac-Saint-Jean
* M. Denis Brassard, CRCD du Saguenay-Lac-Saint-Jean
* M. Pierre Boutet, FTGQ
* M. Philippe Tambourgi, idem
* Mme Marianne Gagnier, idem
* Témoins interrogés par les membres de la commission
 

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons débuter nos travaux. Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur l'Entente de principe d'ordre général entre les premières nations de Mamuitun et de Nutashkuan et le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Beaumier (Champlain) est remplacé par M. Duguay (Duplessis); Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière) est remplacée par M. Bédard (Chicoutimi); M. Dion (Saint-Hyacinthe) par M. Tremblay (Lac-Saint-Jean); Mme Leduc (Mille-Îles) par M. Laprise (Roberval); M. Gautrin (Verdun) par M. Sirros (Laurier-Dorion); Mme Lamquin-Éthier (Bourassa) par M. Kelley (Jacques-Cartier); Mme Mancuso (Viger) par M. Brodeur (Shefford); M. Pelletier (Chapleau) par Mme Gauthier (Jonquière); et, finalement, M. Dumont (Rivière-du-Loup) par M. Corriveau (Saguenay).

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le secrétaire. Alors, j'invite toutes les personnes qui sont présentes dans la salle à bien vouloir fermer leur appareil de téléphone cellulaire, si c'est le cas.

Et je vous indique immédiatement l'ordre du jour de nos travaux pour cet avant-midi. D'abord, nous entendrons les représentants de la Nation Innu de Matimekush-Lac John, par la suite les premières nations de Mamit Innuat et, pour terminer nos travaux cet avant-midi, le Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Et j'invite immédiatement les représentants du groupe Nation Innu de Matimekush-Lac John à bien vouloir prendre place à la table des témoins.

Auditions (suite)

Alors, mesdames, messieurs, bonjour et bienvenue à cette commission parlementaire. Et je demande au porte-parole de bien vouloir s'identifier ainsi que les personnes qui l'accompagnent. Et je vous indique que vous avez une présentation d'une durée de 20 minutes, et, par la suite, ce seront des échanges avec les parlementaires des deux côtés de la table.

Nation Innu Matimekush-Lac John

M. Gauthier (Jacques): (S'exprime dans sa langue)

M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, mon nom est Jacques Gauthier. Je suis un élu et je suis accompagné de mon conseil qui sont ici: M. Léon McKenzie, conseiller et vice-chef; Marie-Aimée Einish, conseillère; Anne-Marie Ambroise, qui est conseillère aussi; conseiller, Daniel Gabriel. Et je voudrais commencer peut-être par... La personne qui est ici, à ma droite, c'est Nadir André, qui est membre de la communauté aussi de Matimekush-Lac John.

Permettez-moi, M. le Président, de présenter les salutations des membres de notre communauté aux chefs et membres des délégations de la Nation Innu du Québec. Nous voulons, dans un premier temps, remercier cette commission de nous donner l'opportunité de faire valoir notre position à l'égard de l'entente de principe intervenue entre le gouvernement du Québec, celui du Canada et certaines communautés membres du Conseil tribal Mamuitun et la communauté de Nutashkuan dans le cadre d'une négociation territoriale globale.

Je tiens à préciser que notre mémoire a été étudié, commenté et approuvé par voie d'une résolution signée par tous les membres élus du conseil de bande de la Nation Innu Matimekush-Lac John. Nous avons tenu à nous faire entendre parce que notre communauté a connu son lot d'injustices et de souffrances depuis plus de 50 ans. Aucune autre communauté innue du Québec n'a vécu ce que nous avons traversé. Voilà pourquoi nous constituons un cas particulier dans l'ensemble de la dynamique des relations entre les membres de la grande nation innue et les deux paliers du gouvernement.

Malgré tout, nous avons quand même su relever les défis et nous donner des outils de développement destinés à forger une communauté où règne un désir profond de créer un cadre de vie harmonieux et porteur d'espoir sur le plan culturel, social et économique. Certes, il y a encore beaucoup à faire, mais nous sommes fermement déterminés à prendre les mesures nécessaires pour assurer un avenir meilleur à tous les membres de notre communauté et aux générations à venir. Cette volonté, tout comme celle de nos voisins, les Naskapis de Kawawachikamach, a permis à Schefferville de survivre à la fermeture de la mine et même de prospérer, permettant ainsi au Québec d'occuper pleinement son territoire.

n (9 h 40) n

La négociation nous apparaît comme une des voies empruntées dans la recherche de solutions de règlement des contentieux et des différends. Nous estimons, à l'instar du ministre d'État à la Population, aux Régions et aux Affaires autochtones, que la négociation offre une opportunité de développer des relations harmonieuses entre les nations autochtones et les populations locales et régionales. C'est d'ailleurs dans cet esprit d'ouverture que nous avons entrepris une démarche de planification stratégique en prévision de négociations avec les gouvernements du Québec et du Canada.

Toutefois, nous avancerons comme prérequis la reconnaissance non équivoque de nos droits. Car, même si le législateur prétend avoir éteint nos droits, et ce, sans notre consentement, nous rappelons qu'aucun règlement n'est jamais intervenu avec notre communauté relativement à l'article 2.14 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois ni sur les droits que les Innus de Matimekush-Lac John revendiquent sur des terres hors territoire couverts par la Convention.

Nous avons de plus l'intention de suivre attentivement le projet mis de l'avant par votre gouvernement relativement à la révision des frontières inscrites dans la Convention. Tout comme nos frères de la nation attikamek, nous demanderons certainement d'être entendus dans le cadre de ce processus. Bien que Matimekush ne soit pas partie aux présentes négociations, nous en avons suivi l'évolution et porté attention aux réactions qu'elles suscitent. Voilà pourquoi il nous est apparu pertinent de nous inscrire dans la présente réflexion sur le contexte et les enjeux en cause et de formuler notre point de vue en réponse aux questions soulevées par le projet d'entente de principe. Notre position est d'autant plus stratégique que les ententes finales résultant de la poursuite des négociations ne pourront être menées à terme sans que la question des chevauchements ne fasse l'objet de négociations avec notre communauté.

Parce que nous sommes tout autant préoccupés de notre avenir que nous sommes fiers de notre passé, nous saluons la volonté du gouvernement du Québec de vouloir, par la négociation, créer un climat harmonieux de relations avec les communautés composant la nation innue du Québec. Tout comme nos concitoyens du Québec et du Canada, les membres de la communauté innue de Matimekush-Lac John veulent être en mesure de mettre en valeur leurs terres, de développer leur potentiel économique, d'éduquer leurs enfants et planifier leur avenir.

Je veux, en terminant, formuler le souhait que notre message soit accueilli et compris par cette commission et les instances que ses membres représentent, car notre relation avec la terre, le Nitassinan, n'est pas uniquement une question de pratique de nos activités ancestrales, mais bien un élément essentiel à notre identité et à notre bien-être.

J'aimerais aussi que l'on retienne le fait que de négocier avec les peuples autochtones, reconnaître des territoires autochtones, ce n'est pas d'amputer le Québec ou le Canada, c'est faire une place à chacun. Le Canada l'a compris avec le Nunavut, le Québec avec le Nunavik, il vous reste à le reconnaître avec les Innus de Matimakush-Lac John.

Je vais maintenant demander à un fils de notre communauté, Me Nadir, de vous livrer l'essentiel de la teneur de notre mémoire.

M. André (Nadir): Mon rôle aujourd'hui sera de vous exposer le mémoire et d'appuyer les représentants de Matimakush-Lac John dans la période de questions qui suivra. Essentiellement, notre exposé consistera à résumer le mémoire que vous avez en main, tout en mettant l'emphase sur l'objet de vos travaux, soit la position de notre communauté à l'égard de la négociation et de l'entente de principe intervenue.

Il nous est apparu important de bénéficier de la tribune que vous nous avez offerte pour situer, dans un premier temps, notre communauté sur l'échiquier de la nation innue et de vous décrire la réalité d'une communauté qui a été durement affectée par divers événements survenus au cours des 30 dernières années. Ces préliminaires nous apparaissent importants, puisqu'ils vous permettront de mieux cerner et comprendre le contexte unique qui est le nôtre ainsi que notre position en regard de l'entente de principe intervenue entre certaines communautés du Conseil tribal Mamuitun, la communauté de Natashquan et les deux paliers de gouvernement.

En rappel historique, située au Nouveau-Québec à 510 kilomètres au nord de Sept-Îles, la communauté de Matimekush-Lac John est l'une des neuf composantes de la nation innue au Québec. Les Innus de Matimekush-Lac John sont, depuis des temps immémoriaux, associés aux territoires nordiques du Québec. Pendant des siècles, nos ancêtres ont parcouru le Nouveau-Québec et le Labrador pour pratiquer leurs activités traditionnelles. Nomades, ils suivaient les troupeaux, assurant ainsi leur subsistance et même leur survie. Autonomes et organisés en groupes sociaux et politiques reflétant les attributs particuliers d'une nation, ils contrôlaient leur territoire de façon exclusive.

Au début des années cinquante, nos ancêtres qui gravitaient autour de Fort McKenzie s'établirent à demeure aux limites du Labrador, dans une région qui allait être plus tard connue sous le nom de Schefferville. Ils y furent rejoints par les Innus qui habitaient le bassin de la rivière Moisie et par des familles en provenance des réserves du littoral du Saint-Laurent.

Au moment de la fondation de la ville, en 1956, les 40 familles innues en ont été chassées pour être relocalisées sur les rives du lac John, à 5 kilomètres. Nous vivions sous des tentes et dans des cabanes, sans système d'aqueduc ni d'égout et sans l'aide du gouvernement fédéral, puisque notre établissement n'était pas reconnu comme réserve au sens de la Loi sur les Indiens. Cette situation a perduré jusqu'en 1972, alors que furent construits des blocs d'habitation à Matimekush. La plupart des familles innues ont déménagé dans ce complexe qui n'avait rien en commun avec notre culture, mais qui offrait un confort relatif. Il avait également le mérite d'être situé à proximité des services. C'est ainsi que les Innus de notre communauté sont maintenant répartis, selon les priorités et les goûts de chacun, entre deux localités qui forment la réserve de la Nation Innu Matimekush-Lac John.

À leur arrivée, les non-autochtones ont imposé leur vision et leur façon de faire. Soucieux de maintenir des bonnes relations, nous nous sommes accommodés de leur culture et nous avons enduré la discrimination dont nous avons été victimes en matière d'embauche, d'éducation, d'accès aux loisirs et de transport, puisque, sur le train, à titre d'exemple, nous ne pouvions monter dans les mêmes wagons que les non-autochtones. Malgré tout, nous avons su conserver notre culture et notre langue.

Si nos ancêtre ont lutté toute leur vie pour leur subsistance, nous, nous continuons de nous battre pour nous assurer un avenir meilleur. En effet, notre communauté a été durement touchée par les décisions unilatérales prises à Québec et Ottawa et par l'imposition de politiques et de règlements bureaucratiques non adaptés à notre réalité.

Afin de bien comprendre la situation unique dans laquelle les Innus de Matimekush-Lac John se retrouvent, il est essentiel de rappeler ces faits et de décrire certaines autres réalités. L'an dernier, on a célébré, dans certains milieux, le 25e anniversaire de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. À Matimekush-Lac John, nous n'avons pas fêté. La raison est fort simple, notre communauté est la grande perdante de cette Convention et de la loi fédérale la mettant en oeuvre. En ratifiant la Convention, les gouvernements ne se sont pas contentés d'éteindre les droits des signataires, ils ont aussi voulu abolir unilatéralement les droits d'autres communautés non signataires, dont les nôtres, sur les territoires ancestraux. Ces terres ont été conventionnées, marquant ainsi la fin d'une époque historique pour nous.

Nous n'avons jamais reconnu la validité de cette Convention dont les retombées affectent durement notre existence. Nous avons été privés de la jouissance de notre territoire ancestral, nous ne pouvons plus exercer nos activités traditionnelles et nous ne retirons aucun bénéfice ou avantage découlant de cette Convention.

La manifestation la plus récente des préjudices de la Convention réside dans certaines dispositions de l'entente de partenariat d'avril 2002 conclue entre le Québec et les Inuits du Nunavik. En effet, elle prévoit une mise de fonds de 50 millions de dollars pour la réalisation d'études préliminaires à la construction de centrales hydroélectriques sur des rivières, dont certaines s'alimentent au coeur même de nos propres territoires ancestraux.

En adoptant sa Loi de mise en oeuvre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, appelée aussi loi C-9, en 1977, le gouvernement fédéral a décrété de façon unilatérale l'extinction des droits des Innus de Matimekush-Lac John sur leurs terres ancestrales. Par cette décision, le gouvernement fédéral, qui, selon les tribunaux, remplit, tout comme les provinces d'ailleurs, une obligation de fiduciaire envers les Indiens, a rompu le lien de confiance que nous entretenions à son endroit. Nous n'avons pas reconnu et nous ne reconnaîtrons jamais cette extinction.

n (9 h 50) n

Notre position est, au surplus, appuyée par les organismes internationaux. En 1980, le Tribunal international Russel a condamné le Canada pour l'extinction unilatérale de nos droits et en est venu à la conclusion que la loi C-9 contredisait le droit international. En 1999, c'était au tour des Nations unies d'en arriver au même constat en demandant au Canada de revoir sa politique visant l'extinction des droits aborigènes au territoire.

La supposée extinction des droits des Innus de Matimekush-Lac John par le Canada, et ce, sans le consentement de ces derniers, est une initiative législative sans précédent. Bien que les tribunaux canadiens aient reconnu le droit de la couronne fédérale d'éteindre unilatéralement le titre aborigène d'une première nation avant l'enchâssement de la Loi constitutionnelle de 1982, cette décision demeure néanmoins une grave injustice, une triste réalité historique qui demande correction et réparation. Voilà pourquoi notre communauté entreprendra sous peu une démarche en ce sens.

La fermeture de la mine de l'Iron Ore, en 1986, nous a aussi gravement affectés. Nous en subissons encore les retombées. Pendant 30 ans, de 1950 jusqu'au début des années quatre-vingt, nous avons été témoins du développement rapide d'une ville minière avec toute sa gamme de services et d'entreprises satellites qui prospéraient. À partir du moment où il a été décidé de fermer la ville, on a tout fait pour rendre Schefferville invivable et la rayer de la carte. Pourtant, on y comptait quelque 1 000 autochtones. N'eût été de l'intervention de nos jeunes qui érigèrent une barrière humaine devant les engins destructeurs qui s'apprêtaient à raser l'aréna, il ne serait rien resté de la ville. Cet incident eut des échos à Québec, qui se ravisa en ordonnant qu'on mette un terme à l'oeuvre destructrice. Au moment de la fermeture de la mine, certains non-autochtones ont refusé de quitter la région, mais la grande majorité reçut de généreuses compensations pour se relocaliser. Ce ne fut pas le cas pour nous.

La présence, pendant 30 ans, de l'Iron Ore à Schefferville nous aura laissé en héritage des montagnes de déchets miniers et des trous de mine béants au fond desquels pourrissent des épaves de pelles mécaniques, de concasseurs et des débris de toutes sortes, et surtout une blessure profonde non encore cicatrisée.

À ces faits historiques s'ajoute l'attitude attentiste des appareils gouvernementaux. Malgré le fait que nos deux peuples vivent ensemble depuis plusieurs centaines d'années, il n'existe pas de véritable mécanisme pour permettre d'aborder les différends et de formuler des éléments de solution. Jusqu'à présent, les tribunaux ont accepté d'établir des paramètres visant à régler les enjeux reliés aux droits fonciers des premiers peuples, mais le système politique et bureaucratique est trop souvent passif. On attend qu'un conflit éclate avant de régler un problème souvent vieux de plusieurs années. On se contente de faire du cas par cas tout en évitant de créer de précédent.

Par ailleurs, nous déplorons la distorsion qui règne entre la volonté politique et l'application de la réglementation par la bureaucratie. Trop souvent, nous constatons que les discours éloquents des politiciens ne connaissent pas de lendemain. De plus, les lois adoptées par les Parlements font l'objet de règles d'application décidées et appliquées par d'autres paliers. C'est là que les choses se corsent. Cette réalité se vérifie particulièrement au niveau fédéral en ce qui regarde l'actuelle négociation. M. Claude Ryan disait un jour que la politique est de rendre l'impossible possible. Les bureaucraties semblent plutôt poser comme principe de base que l'impossible doit demeurer impossible. Or, c'est sous leur joug que nous vivons, car nous sommes lourdement administrés, le plus souvent de loin, par une nuée de fonctionnaires fédéraux ou provinciaux issus d'une foule de ministères.

Les Innus de Matimekush-Lac John ont contribué à donner une signature internationale à une région isolée que les Québécois connaissent trop peu. En effet, nous devons constamment rappeler aux gens du sud qu'on retrouve à Schefferville des hommes et des femmes autochtones et non autochtones qui contribuent à leur manière à l'évolution de l'ensemble de la société. Notre réalité, elle, est encore plus méconnue.

Par rapport aux travaux de la commission, les négociations territoriales entre le gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada et les nations innues débutèrent en 1979, lorsque fut créé le Conseil Attikamek-Montagnais. Les Innus de Matimekush-Lac John ont pris place à cette table jusqu'à sa dissolution. On vit naître plus tard deux regroupements de communautés innues: le Conseil tribal Mamuitun et Mamit Innuat. Nous ne nous sommes pas joints à une de ces entités de négociations.

Comment, en effet, pourrions-nous envisager de siéger à une table de négociations portant sur des ententes territoriales globales sans que nos droits territoriaux soient reconnus par l'ensemble des parties? En voulant éteindre de façon unilatérale des droits par sa loi C-9 de 1977, le gouvernement du Canada désirait nous amputer de ce que nous avions de plus cher, notre titre. De connivence avec les autres signataires de la Convention, il a tracé pour cette dernière une frontière qui longe notre communauté, nous privant ainsi des territoires que nous avions occupés depuis des temps immémoriaux.

Vingt-cinq ans après l'entrée en vigueur de la Convention de la Baie James, la question de l'extinction de nos droits demeure, aux yeux de notre population, un sujet d'actualité, tout comme l'est devenu le projet d'entente de Mamuitun aux yeux des Québécois. Il n'y a pas de mots pour traduire le sentiment de colère et d'humiliation vécu par la plupart de nos membres suite aux gestes qui ont été posés par les gouvernements du Canada et du Québec lors de la signature de la Convention de la Baie James. Parce que notre culture accorde une importance capitale à la relation que nous entretenons avec notre mère la terre, l'occupation respectueuse de nos territoires ancestraux a toujours fait partie de ce que nous sommes jusqu'au jour où un paragraphe d'une convention et, plus tard, celui d'une loi est venu nous enlever notre richesse collective la plus importante.

Les Innus de Schefferville n'ont pas entamé de négociations parce qu'ils n'ont jamais voulu reconnaître la légitimité d'une telle injustice sur leurs droits ancestraux et leur titre. Envisager de nous asseoir et de négocier avec les gouvernements qui n'ont pas hésité à vouloir éteindre nos droits nous a toujours apparu comme une ironie cruelle. Voilà pourquoi, tout en respectant la démarche entreprise par nos frères innus, nous sommes restés chez nous. Connaissant notre réalité, les parties autochtones à la table n'ont pas insisté pour que nous les rejoignions.

Existe-t-il une solution à la question unique des Innus de Matimekush-Lac John telle que nous venons de vous l'exposer? Nous déclarons que la décision de nous joindre à une table de négociations d'un traité avec la nation innue ou avec une de ses composantes, le gouvernement du Québec et celui du Canada sera prise lorsque nous constaterons une ouverture sincère des gouvernements du Québec et du Canada afin de corriger les erreurs du passé, notamment en ce qui a trait à la question de la présumée extinction de nos droits préconisée par la loi C-9. Pour nous, cette ouverture se vérifiera lorsque les gouvernements du Québec et du Canada se seront entendus pour amender la loi C-9 afin d'éliminer toute velléité d'extinction de nos droits.

Quant au volet de la négociation sur l'autonomie gouvernementale, nous jugeons qu'il est intrinsèquement lié à la question territoriale. Il faudra donc régler la question du territoire avant de pouvoir finaliser celle du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des Innus de Matimekush-Lac John.

Nonobstant ces réserves, nous avons voulu apporter notre contribution à l'exercice de réflexion mené sur le projet d'entente de principe ratifié par nos frères et soeurs de certaines communautés de Mamuitun et de celle de Natashquan. Nous avons voulu le faire par considération pour le bien-fondé de l'exercice mené par le gouvernement du Québec et les communautés concernées. Nous saluons cette initiative destinée à reconnaître la portée des droits ancestraux des Innus, de convenir des effets et des modalités d'exercice de ces droits, de permettre aux Innus de prendre en charge leur propre destinée et d'établir un équilibre et un rapport harmonieux entre les droits des Innus et ceux des Québécois. Nous sommes particulièrement heureux que vous ayez mis de l'avant ce processus sans exiger, au préalable, que les parties autochtones renoncent à leurs droits.

D'emblée, nous affirmons que la majorité des membres de notre communauté considèrent que la négociation s'avère le processus à privilégier dans une démarche de règlement des contentieux et de mise en valeur de solutions aux problématiques que nous vivons. C'est pourquoi nous reconnaissons des mérites à l'exercice présentement mené entre les gouvernements du Québec et du Canada et certaines des communautés innues.

Le Président (M. Lachance): Me André, je m'excuse de vous interrompre, mais je vous prierais de conclure, s'il vous plaît.

M. André (Nadir): Pour conclure, je veux juste réitérer que la position de Matimekush-Lac John est qu'un traité avec la nation innue, c'est une négociation de nation à nation et que la totalité des communautés innues doivent participer à ce processus avant qu'il puisse y avoir un traité, et que la communauté de Matimekush-Lac John est prête à considérer la négociation à condition, comme je l'ai dit, que les gouvernements reconnaissent les erreurs du passé sur l'extinction des droits sur le territoire et procèdent à l'amendement de la loi C-9. C'est, en gros, le coeur du mémoire. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): Merci pour votre présentation. Et nous allons maintenant amorcer la période d'échange. M. le ministre d'État à la Population et aux Affaires autochtones, vous avez la parole.

n (10 heures) n

M. Trudel: Merci, M. le Président. Chef Gauthier et votre conseiller, mesdames qui accompagnez aujourd'hui dans la présentation, Mme Ambroise et également Mme Einish, et M. le vice-chef, bienvenue à l'Assemblée nationale du Québec et devant cette commission parlementaire qui vise à examiner ce projet d'entente de principe avec le Conseil tribal Mamuitun et, éventuellement, en vue de conclure un traité avec la nation innue.

Très certainement prendre quelques secondes pour louer l'ouverture, la confirmation de la nécessité pour nos deux nations et votre communauté d'utiliser la voie de la négociation pour parvenir à une entente et d'abandonner en quelque sorte, mais très clairement, la voie de la confrontation et celle des tribunaux qui n'est pas un processus qui ne donne pas de résultat, mais qui est beaucoup plus lourd, coûteux et ne permet pas de définir souventefois toutes les règles qui doivent présider à l'occupation harmonieuse du territoire et au développement de nos deux nations. D'autant plus, notons-le, que sur les quelque... au-delà de 700 personnes que comporte votre communauté, 50 % ont moins de 25 ans, ce sont des jeunes, et qu'à cet égard nous avons une responsabilité commune à l'égard de l'avenir, tel que vous venez de le mentionner.

La question, la première question qui se pose, puisque déjà nos travaux nous ont permis de constater qu'à peu près tous vont dans la même direction: oui, à la nécessaire négociation, oui, à une entente de principe pour faire progresser et atteindre éventuellement la signature d'un traité et, dans le rapport qui nous a été soumis, hier, suite à l'exercice réalisé par M. Chevrette, d'y inclure certains éléments spécifiques dans la poursuite des négociations avec des priorités pour en arriver, avec ce traitement spécifique à la table de négociations, à ce que certaines questions puissent trouver réponses harmonieuses le plus rapidement possible.

Ma question d'ordre général en tout premier lieu, et nous allons revenir sur cette question importante, la question territoriale: Est-ce que, dans la pratique quotidienne de votre population au niveau des activités traditionnelles de la communauté de Matimekush-Lac John, vous percevez qu'il y a de réelles possibilités d'ententes pour l'exercice des activités traditionnelles et, en même temps, aussi une réelle participation réelle à la mise en valeur des ressources au profit des deux nations et de votre communauté? Est-ce qu'il vous apparaît des possibilités réelles et dans la voie de l'actuelle négociation et pour le futur?

M. André (Nadir): La communauté, le Conseil a adopté la position, déjà depuis quelques années, que les discussions relatives à la question territoriale concernant Schefferville ne peuvent faire l'objet d'une négociation qu'à condition que les gouvernements quelque part reconnaissent qu'il y a une erreur qui a été commise, il y a 25 ans, quand les droits ont été éteints. Il m'apparaît fondamental que ce pas-là soit franchi parce que sinon il existe une inégalité dans la négociation avec les autres communautés innues, c'est qu'on ne peut pas se mettre dans une position d'aller négocier des droits territoriaux, alors que les gouvernements ont toujours affirmé que ces droits avaient été éteints. Il est très difficile d'envisager le cadre légal de telles discussions sans revenir sur la question de l'extinction. Très difficile. On va se heurter constamment à la convention. D'ailleurs, Guy Chevrette, votre mandataire, l'a très bien expliqué, dans une de ses recommandations concernant le droit des autochtones qui ont signé la convention, qu'il ne faut pas que leurs droits soient affectés. Alors, tant que cette question des territoires conventionnés ne sera pas adressée de façon directe, il sera très difficile de s'asseoir à une table de négociations, parce qu'on va se heurter à cette première barrière là.

M. Gauthier (Jacques): Peut-être rajouter quelque chose aussi. Ce n'est pas qu'on n'a jamais été en négociation. Il y a eu le CAM, puis Matimekush a été inclus dans le CAM. Puis il n'y a jamais rien... On n'a jamais rien trouvé pour Matimekush. Puis le CAM a disparu dans ce temps-là. Il n'y a pas eu de travail de fait ou quoi que ce soit.

M. Trudel: Alors, je comprends très bien que vous joignez votre voix à tous ceux et celles que nous avons entendus jusqu'à maintenant ou qui ont donné des indications publiques de la nécessité de la négociation et de la nécessité d'emprunter cette voie, oui, à la négociation; mais il y a comme un signe que vous recherchez. Il y a comme un signe que vous recherchez, et je veux vous en donner un, signe, ce matin, à l'égard de la suite de l'article 2.14.

Je vous indique, chef Gauthier, que j'ai désigné, la semaine dernière, M. Michel Crête, l'ex-président-directeur général de Loto-Québec et qui est maintenant, avec nous de l'équipe du Secrétariat aux affaires autochtones, spécifiquement chargé d'examiner avec vous la question des chevauchements territoriaux. J'en ai informé le ministre fédéral des Affaires indiennes, M. Nault, de façon à ce que cette question puisse être traitée dans le contexte de la suite de ce qui était prévu à l'article 2.14 de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et que nous puissions également la traiter avec, bien sûr, ceux qui actuellement ont constitutionnellement la responsabilité fiduciaire au niveau des communautés autochtones, au niveau des nations autochtones.

Ce geste très concret de désigner ce haut fonctionnaire chargé de cette mission des chevauchements territoriaux, en particulier avec votre communauté, j'espère que ce sera vu comme un signe d'ouverture, ce signe que vous recherchez pour faire progresser sur la voie de la négociation et que nous puissions atteindre le résultat recherché d'une entente qui tienne compte et de l'histoire que vous venez de nous mentionner et qui tienne compte également de la situation et de votre volonté de développement de votre communauté de la Nation Innu.

Dans ce contexte-là, en la transformant en quelque sorte en une question, vous comprendrez que nous n'avons pas la capacité constitutionnelle ou juridique d'intervenir et de corriger, pour prendre vos termes, la situation créée par la loi fédérale, mais nous entendons cependant exercer nos pleines responsabilités à l'égard de la suite à donner à l'article 2.14 de la convention à l'intérieur de ce que nous pouvons faire, et nous pouvons beaucoup faire pour votre communauté et la nation innue. Quelle est votre réaction en montrant ce signe d'ouverture à la communauté?

M. André (Nadir): C'est sûr que d'emblée on est toujours heureux d'entendre qu'il y a des initiatives de la part du gouvernement du Québec pour essayer d'amener une solution au problème. Puis on est heureux de l'entendre aujourd'hui. Toutefois, concernant spécifiquement l'article 2.14, pour la Nation Innu Matimekush-Lac John, l'article 2.14 n'est qu'une stipulation pour autrui dans un contrat. On n'est pas lié par la convention. On n'a pas à s'asseoir avec le gouvernement du Québec sur une disposition d'un contrat, d'une entente à laquelle on n'a pas été partie. Donc, si la démarche du gouvernement du Québec s'inscrit essentiellement sur la base de l'article 2.14, on risque également de se heurter à certaines difficultés. Il va falloir trouver quelque chose qui mette une fin à cette humiliation que la nation de Matimekush a vécue sans devoir accepter, même de façon implicite, les dispositions de cette convention-là. On respecte les nations qui l'ont signée, mais, pour le cas de Matimekush-Lac John, il n'est pas question de reconnaître une de ces dispositions. Mais le dialogue, ça ne veut pas dire que la porte est fermée puis que le dialogue ne se fera pas, mais il faudra que le gouvernement du Québec soit plus subtil dans la façon d'approcher la nation de Matimekush pour établir un dialogue, parce que 2.14, ça va être difficile.

n (10 h 10) n

M. Trudel: Très bien, M. Nadir, et également le représentant de la communauté, chef Gauthier. Je note donc cette ouverture, cette ouverture à poursuivre, dans une nouvelle phase plus intensive, les travaux à l'égard de cette question en notant que cela doit correspondre, oui, bien sûr, à un nouveau traité, à un nouveau traité avec la nation et avec votre communauté pour tenir compte des éléments spécifiques particuliers qui concernent votre communauté.

Assez curieusement, comme quelqu'un l'a souligné hier, je trouve qu'on est bien organisé en quelque sorte pour vous comprendre. Il nous est arrivé la même histoire en 1982 avec le rapatriement unilatéral de la Constitution que nous ne reconnaissons pas toujours, mais ce qui signifie par ailleurs que l'ouverture aux autres nations et, le cas échéant, ici, l'ouverture à la nation, il est manifeste. Et cette question, au niveau de l'occupation harmonieuse du territoire et surtout avec l'indication que vous nous donnez qui est éminemment précieuse au niveau de l'intégrité du territoire, que la reconnaissance de l'effet des droits et la détermination des règles pour leur exercice, ça n'entache en rien, ça n'entache en rien, comme vous l'avez dit dans votre introduction, le territoire québécois ou l'intégrité du territoire québécois. Ce sont des principes et des éléments de base qui sont importants dans le choix que nous avons fait de la négociation.

Il y a des collègues qui veulent poser des questions. Ce que je vous indique donc formellement aujourd'hui, c'est que nous avons la capacité de tenir compte de ces éléments particuliers et poursuivons dans la voie de la négociation en tenant compte de votre histoire et des éléments particuliers avec ce que je viens d'énoncer aujourd'hui.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Duplessis.

M. Duguay: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, chef Gauthier, je suis très heureux de vous rencontrer ici aujourd'hui avec les membres de votre communauté et de votre Conseil.

Alors, je profite de l'occasion également pour saluer Mme Einish et Mme Ambroise ainsi que M. Mckenzie et M. Gabriel. Et, pour moi, c'est sûr que c'est un secteur où je n'ai pas l'occasion d'aller vous rencontrer souvent. Et, pour le bénéfice de la commission, je vais me permettre quelques secondes pour vous situer un petit peu Schefferville et les contextes dans lesquels ces gens-là ont été obligés de se déplacer.

C'est sûr que Schefferville, on l'a vu tout à l'heure, c'est situé à 510 km au nord de Sept-Îles. Mais, une fois qu'on a dit ça, comment on s'y rend? Alors, la seule façon de s'y rendre, c'est par train et c'est un train de compagnie. Donc, je vais vous laisser le bénéfice de schématiser un petit peu qu'est-ce que c'est que ça peut représenter. Ça prend quand même 12 heures de temps pour se rendre là, dans des conditions qui ne sont pas toujours faciles. Et, également, par avion. L'avion, juste pour vous donner un ordre de grandeur, ça coûte 1 100 $ pour se rendre à Schefferville. Alors, c'est à partir de Sept-Îles, et ce n'est pas toujours facile non plus.

Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Moi, j'ai eu l'occasion de lire votre mémoire et, dans le condensé de votre mémoire, vous nous amenez la dure réalité que vous vivez sur le territoire. Et, moi, j'ai eu l'occasion bien sûr de faire le tour et de regarder ce qui est aujourd'hui Schefferville. Et votre réalité décrite est entièrement réelle. Quand on regarde ce que vous vivez, c'est inimaginable dans un contexte de 2003.

Comment maintenant on peut aborder toute la question de la négociation? Je suis heureux également de prendre conscience que, en ce qui concerne la réalité autochtone, vous nous l'avez démontré, ce que vous êtes prêts à faire, et les contraintes dans lesquelles vous vivez. Vous avez également, dans votre mémoire, visé un item très important pour nos jeunes. Alors, c'est sûr, j'aurais eu des questions bien sûr à vous poser là-dessus, mais je vais m'arrêter sur une question fondamentale concernant le développement.

Le développement, vous avez fait référence à toute la problématique du train. Or, pour votre information, on a eu aussi, du côté de la communauté non autochtone, il me semble, une démarche pour essayer de trouver des solutions. Donc, bien sûr, on va être appelés à travailler conjointement. Et j'ai eu l'occasion aussi de vous supporter dans certains dossiers, notamment dans les dossiers des loisirs avec nos jeunes. Alors, ça, je l'apprécie beaucoup. Cependant, en ce qui concerne certains travaux que vous avez projetés, à votre mémoire, à la page 19, on voit que vous avez énuméré certaines orientations. Alors, j'aimerais vous entendre un petit peu sur votre avenir en ce qui concerne le développement. Comment vous voyez ça?

M. Gauthier (Jacques): Au point de vue du développement d'avenir, les gens s'en vont beaucoup encore chasser dans le territoire, mais il y a eu un changement vraiment d'essayer de se développer. Comment est-ce qu'on va faire aujourd'hui vu que la chasse de fourrures est quasiment complètement disparue? Les gens ont commencé à aller vers le tourisme, à se servir du territoire pour attirer les touristes. C'est sûr que c'est loin.

Il y a déjà quelqu'un, une personne de ma communauté, qui a déjà un genre de pourvoirie, puis j'en ai une autre qui est dans l'écotouristique, à la rivière Georges, qui montre à des gens qui viennent de l'extérieur du pays, de l'Europe, qui leur fait voir les traditions, les coutumes qu'on a, qu'on a vécues, qu'ont vécues nos ancêtres auparavant, puis c'est comme ça qu'on essaie de se développer, de trouver des moyens à aller chercher.

On a créé un genre de centre de formation pour former nos jeunes de la communauté. Présentement, la commission scolaire a participé à une formation de guides, 16 guides qui ont été formés et reconnus par la commission, qui vont se trouver... C'est toujours par rapport à la région. On a contacté les pourvoyeurs pour qu'ils commencent vraiment à regarder les gens de la communauté ici, à les embaucher pour des jobs. Puis là on recherche aussi, pour cette année, à créer un genre de cours de cuisine pour aussi trouver de l'ouvrage à des pourvoiries, pour que les cuisinières aillent dans les pourvoiries pour travailler.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de Jacques-Cartier et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, bienvenue au chef Gauthier et aux représentants de la Nation Innu Matimekush-Lac John. Dans votre mémoire, vous avez cité mon ancien patron, M. Claude Ryan, qui dit que la politique, c'est l'art de rendre l'impossible possible. Et à écouter toute l'histoire et toute la saga de C-9 et de la Convention de la Baie James, je me demande ? il y a beaucoup d'impossible dans cette histoire ? comment rendre la réponse à votre question à 23 de votre mémoire.

Vous nous avez posé la question et je pense que je vais vous poser votre propre question: Comment en effet les Innus de Schefferville pourront-ils siéger à une table de négociations portant sur des ententes territoriales globales sans que leurs droits territoriaux soient reconnus par l'ensemble des parties? Je comprends vraiment votre condition préalable pour s'asseoir à la table, mais, pratico-pratique, comment est-ce qu'on peut se rendre là?

Je comprends que ça prend un changement d'attitude par le gouvernement fédéral. Il y avait l'ouverture que le ministre vient d'évoquer contre le gouvernement du Québec. Est-ce que ça prend également une certaine ouverture chez vos voisins cris, inuits et naskapis? Et, si oui, est-ce qu'il y avait des discussions? Je cherche comment rendre tout ça possible parce que je vous écoute et, honnêtement, je suis dans un certain désespoir. On ne peut jamais arriver au moment que vous avez même souhaité dans votre mémoire: d'être signataires d'un traité. Vous avez évoqué, je pense, à la page 26, que ce serait souhaitable d'avoir un seul et unique traité pour la nation innue, mais je regarde tous les obstacles pour en arriver et je dis: Comment est-ce qu'on va donner suite à la commande de mon ancien patron et rendre l'impossible possible?

n (10 h 20) n

M. André (Nadir): Pour vous donner un exemple concret de rendre l'impossible possible, la loi C-9 a été adoptée au mois de novembre... bien, elle a été adoptée pendant l'été de 1977, mise en application au mois de novembre 1977. La nation naskapie a signé la Convention du Nord-Est au mois de février 1978, soit trois mois après que le gouvernement fédéral ait éteint tous les droits des Indiens dans les terres de la Convention. Alors, si c'est possible pour certains, ça doit être possible pour d'autres. Il s'agit simplement d'une volonté politique d'amender une loi et de rendre justice à la communauté en remettant de l'avant les droits que la communauté possède en vertu de son titre et de ses droits ancestraux. C'est une volonté politique.

La loi C-9 date de 25 ans. Bien des choses se sont passées depuis 25 ans, entre autres: l'adoption de l'article 35 de la Loi constitutionnelle, le développement du droit international, les ententes de la «Paix des Braves» puis tout ce qui s'est fait au Québec puis ailleurs au Canada depuis la signature des traités modernes. Vingt-cinq ans plus tard, je pense que les gouvernements peuvent, politiquement et juridiquement, revenir en arrière puis corriger les erreurs.

M. Kelley: Je regarde la recommandation 5 de M. Chevrette, déposée hier, que... Est-ce que c'est possible de faire ça de manière à ne pas heurter les droits reconnus aux autochtones visés par cette partie du territoire québécois? Alors, est-ce qu'on peut gérer le chevauchement avec vos voisins naskapis et vos voisins cris? Est-ce que c'est possible? Encore une fois, au niveau pratico-pratique, tout est possible, à la table de négociations, mais est-ce que ça va poser un énorme problème avec vos voisins conventionnés ou est-ce que c'est quelque chose qui est faisable?

M. André (Nadir): Bien, autant que le dialogue doit être fait entre la communauté et les gouvernements, autant que le dialogue doit également s'établir avec la nation crie, la nation naskapie et la nation inuite, parce que, évidemment, s'il y a lieu d'amender la Convention de la Baie James, évidemment, ça prend l'accord de toutes les parties, et il suffit qu'une s'oppose pour que l'amendement à la Convention ne puisse pas se faire.

Mais maintenant, j'aimerais quand même rappeler que la plupart des territoires qui ont été soi-disant éteints par la loi C-9 sont dans des terres de catégorie 3 de la Convention, et ces terres-là sont des terres qui ont été cédées par les nations signataires de la Convention. Alors, dans quelle mesure il y aurait des droits qui seraient affectés? Bien, ça aussi, il faudrait étudier cette question-là. Compte tenu que ce sont des terres qui ont quand même été cédées par voie de traité, il faudrait regarder le degré de droit qui reste puis de quelle façon les droits de Schefferville pourraient heurter les droits des autres nations.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président. Sur la même voie. Vous avez évoqué le fait que, préalablement, vous aviez déjà participé dans une négociation à travers le CAM. Le CAM reconnaissait... La base juridique de la négociation du CAM était la reconnaissance des droits que les autochtones avaient, de la nation innue, qui inclut votre communauté. Vous êtes arrivés, je pense, à une conclusion politique, à un moment donné, que ça n'a pas donné de résultats.

Mais il y a deux voies par lesquelles on peut arriver à régler cette question-là. La première était celle de la négociation préalable quant à l'exercice des droits reconnus, y inclus sur l'hypothèse de l'exercice des droits sur le territoire conventionné... de la Convention de la Baie James, pour que, par la suite, une fois une entente arrivée, on puisse trouver une façon de la mettre en oeuvre. L'autre... Et c'est la voie que vous aviez utilisée lors du CAM. Là, vous dites finalement: Il y a donc maintenant un préalable; ouvrez la possibilité pour qu'il y ait un exercice des droits sur le territoire conventionné de la Baie-James avant qu'on s'assoie pour négocier.

Et là vous avez une ouverture du côté québécois qui dit: Bon, on est prêts à s'asseoir avec vous pour examiner quels sont ces chevauchements et comment est-ce que... Sur cette ouverture, s'il y avait même une discussion bilatérale entre Québec et Matimekush-Lac John, qui serait comme un miroir un peu de ce qui se faisait lors du CAM en quelque sorte, est-ce que c'est une voie que vous envisagerez et pour que, par la suite, on puisse s'asseoir avec l'autre partenaire puis dire: Bien, voici ce qui pourrait être les droits qu'on voudrait exercer sur le territoire conventionné. Trouvons maintenant une façon d'opérationnaliser ça sur les territoires de catégorie 3. C'est-à-dire... C'est parce que si... Il me semble tout simplement que, si on reste sur une position qui dit: À moins qu'il y ait un amendement à la loi C-9, ça revient à ça finalement, il n'y a aucune négociation possible. C'est la question que posait mon collègue à ce moment-là: Où sont les Cris et les Inuits puis les Naskapis? Il faut qu'on s'assoie aussi avec eux.

Et là je ne sais pas si, pratico-pratique, vous ne risquez pas de vous retrouver dans une situation qui va traîner longtemps par rapport à la possibilité d'avoir quelque chose de concret qu'on voudrait appliquer. Et là on pourrait s'asseoir peut-être plus facilement avec les Cris puis les Naskapis puis les Inuits aussi.

M. André (Nadir): La condition qui est posée est à l'effet... Le résultat qui est escompté dans la condition, c'est de se joindre à une table de négociations en vue d'un traité avec la nation innue.

Si, de façon préalable, pour arriver à cet objectif-là, il y a un besoin de dialoguer pour travailler vers cet objectif, c'est sûr qu'il pourrait y avoir une ouverture de la communauté à des rencontres préliminaires avec les parties de la Convention pour en arriver à l'objectif escompté. Mais c'est aussi loin qu'on peut aller.

Regardez la politique fédérale, la politique fédérale sur les revendications globales, il faut que la première nation ait une revendication à un titre. Comment même répondre aux critères de la politique? Il y a vraiment un cas unique qui...

M. Sirros: ...répondu à ces critères lors de votre participation au CAM. Il me semble que la reconnaissance de votre droit était acceptée et que, vous aussi, vous l'aviez acceptée en participant au CAM. Donc, tout le monde avait dit: Il y a des droits. On va négocier à travers le CAM pour exercer ces droits-là puis, si on arrive à une entente quelconque, bien, on va voir comment est-ce qu'on va l'appliquer sur le territoire qui est aussi régi par la Convention de la Baie-James. Qu'est-ce qui a changé juridiquement? Politiquement, je comprends ce qui a changé dans votre perception des choses mais, juridiquement, qu'est-ce qui a changé?

M. André (Nadir): Bien, juridiquement, je pense, puis je ne veux pas aller trop loin parce que je n'étais pas là à l'époque du CAM ? je pense que je n'avais même pas l'âge pour voter ? mais je crois que les discussions qu'il y a eu, selon les informations que j'ai eues, c'est que ça se dirigeait pour Matimekush vers une négociation du 2.14, spécifiquement.

Pour le reste, ils auraient adhéré à un traité avec la nation innue. Mais, spécifiquement, la volonté des gouvernements, c'était de les amener vers un 2.14. Alors, il n'était pas question de reconnaître des droits de territoires déjà éteints, c'était d'y aller soit avec des compensations ou sous d'autres considérations. On ne sait pas encore ce que 2.14 peut donner. Il n'y a pas une première nation qui s'en est servi formellement. Alors, c'est l'information que j'ai eue. Ça n'a pas été plus loin que ça.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste sur un autre ordre d'idées. Vous avez dit, dans votre mémoire à la page 26, que force est de constater que les parties gouvernementales n'ont pas péché par excès de transparence dans comment expliquer l'Approche commune.

n (10 h 30) n

Avec la triste histoire de la ville de Schefferville, vous avez beaucoup d'expérience de comment consulter les intérêts divergents parce que l'histoire du démantèlement de la ville de Schefferville... J'ai eu l'occasion de la visiter une fois, je comprends de mon collègue de Duplessis à quel point c'est difficile de s'y rendre, et l'isolement, et d'avoir une ville qui était là avec toute une vie communautaire, et maintenant c'est les fantômes d'un passé en grande partie qui sont là.

Mais qu'est-ce que vous proposez pour une mécanique de consultation? Vous avez l'expérience de le faire chez vous, mais la mécanique proposée par M. Chevrette hier, je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de la regarder, mais comment est-ce qu'on peut s'assurer qu'il y aura une approche commune-commune?

M. André (Nadir): Ça, c'est une autre problématique d'un cas unique pour Matimekush-Lac John. Parce que, contrairement aux autres communautés innues dont leur territoire est... il y a une cohabitation avec une population non autochtone majoritaire, à Matimekush-Lac John, 90 % de la population est autochtone, 10 % est non autochtone.

Alors, il va falloir... Je ne peux pas donner une réponse aujourd'hui, mais les recommandations de Guy Chevrette d'avoir des tables sectorielles puis des consultations qui seraient faites autour d'une minorité pour examiner, dans le cas de Matimekush, les droits d'une majorité, il va falloir regarder ça attentivement pour voir justement les effets. Mais je pense que l'attitude du Conseil depuis plusieurs années ? puis c'est ce qu'ils entendent continuer à faire pour l'avenir ? c'est de continuer un dialogue puis d'essayer d'avoir une forme de partenariat avec les non-autochtones qui résident à Schefferville, parce que c'est... il y a un intérêt régional de cohabiter de façon respectueuse et harmonieuse ensemble. C'est dans l'intérêt de tout le monde.

Alors, une forme de consultation est souhaitable dans tous les cas, mais dans quel cadre puis dans quel contexte, il va falloir regarder les recommandations qui sont faites et les recommandations qui vont émaner de cette commission.

M. Kelley: Et peut-être juste une dernière question très rapide. Vos confrères et consoeurs de Uashat hier évoquaient les problèmes de composer avec une frontière provinciale. Ça pose quoi comme problème pour Matimekush d'être à côté de la frontière avec Terre-Neuve?

M. Gauthier (Jacques): Frontière de?

(Consultation)

M. Gauthier (Jacques): Ah! Nous, vraiment, la Nation de Matimekush-Lac John, je pense qu'elle ne reconnaît aucune frontière. Même si les frontières existent, on fait nos chasses traditionnelles dans n'importe quelle direction où est-ce que nos territoires sont là. Mais c'est sûr que c'est... Au point de vue de travail administratif, c'est très difficile.

Une voix: Alors?

M. Gauthier (Jacques): Comme, présentement, bien, le chemin de fer que l'Iron Ore veut délaisser, c'est toute dans la région du Labrador que le chemin de fer passe, puis là, c'est là la difficulté qui est, vu qu'on est installé dans la province de Québec, ici. C'est ça qui est peut-être la difficulté au point de vue de travail seulement, mais pas avec la communauté de chasse ou d'activités traditionnelles.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Saguenay.

M. Corriveau: Oui. Vous avez mentionné tout à l'heure, au niveau du cas unique pour ce qui est d'avoir eu des droits qui ont été éteints par la Convention de la Baie James, est-ce qu'il y en a plusieurs, des communautés comme ça, au Québec, qui se sont vu vraiment perdre leurs droits et finalement se ramasser dans une espèce de vide juridique, là, comme le vôtre?

M. André (Nadir): En fait, il y a trois nations spécifiquement qui sont affectées par la Convention: il y a la nation innue de façon générale, la nation attikamek puis la nation algonquine, dans trois régions différentes, là, bordant les frontières de la Convention.

Au niveau de... Si on ne... en termes de communauté, c'est la communauté Matimekush qui est la plus affectée en superficie, là, de territoire conventionné. Les autres communautés, c'est des parties de territoires au nord de leur territoire qui sont affectées. Mais au niveau de Matimekush, c'est parce qu'on est en plein milieu, on est en plein dedans, tandis que les autres, c'est vraiment au niveau des frontières. Alors, c'est pour ça qu'il y a plusieurs communautés qui sont affectées par la Convention, mais, particulièrement Matimekush est la plus affectée, en termes de superficie territoriale.

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, merci, mesdames, messieurs, pour votre participation aux travaux de cette commission, au nom de la Société innue de Matimekush-Lac John. Merci beaucoup.

M. Gauthier (Jacques): Merci. (S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Lachance): Alors, je vais inviter maintenant les représentants des premières nations de Mamit Innuat à prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, bienvenue, messieurs. J'invite votre porte-parole à bien vouloir s'identifier ainsi que les autres personnes qui l'accompagnent, et je vous indique également que nos règles établissent une présentation d'une durée maximum de 20 minutes.

Premières nations de Mamit Innuat

M. Piétacho (Jean-Charles): (S'exprime dans sa langue)

Merci, M. le Président, puis salutations à vous tous, et, comme je le dis d'emblée en introduction, nous aimons tellement parler notre langue, c'est là qu'on est très articulés. Excusez-nous.

Pour ma part, là, c'est dans la langue seconde que je vais tenter de vous expliquer les préoccupations qui nous occupent aujourd'hui. Je pense qu'on va tout faire notre possible en si peu de temps, et, comme je le dis souvent, nous sommes venus à toutes les tribunes, peu importent les tribunes, que ce soit local, régional, national et même international. Nous nous sommes fait entendre à tous les niveaux, et, encore une fois, nous avons pensé peut-être ne pas y être, à cette commission, de façon très sincère, limpide, mais les circonstances nous obligent à venir ici.

Ceux qui nous accompagnent aujourd'hui. À ma droite, il y a le porte-parole, M. Guy Bellefleur, qui a le mandat au niveau de la négociation territoriale pour les communautés que nous représentons; le chef Pakua Shipu, Marcel Lalo, à l'extrême gauche; le vice-chef de Unamen Shipu, M. Lionel Hervieux. Je suis accompagné de deux aînés de nos communautés: à ma gauche, Philippe Piétacho. En passant, c'est tellement beau, la définition du mot «piétacho», dans la langue, «piétacho»: «qui vient avec le vent».

n (10 h 40) n

Peut-être essayer, à une autre occasion, je vais essayer de tenter de vous expliquer pourquoi. Et M. William Pierre Mark, aîné de la communauté d'Unamen Shipu. D'autres devaient être avec nous, mais la température, la nature nous a obligés... ont été obligés de rester dans leur communauté.

Et, comme vous le dites si bien aussi, le facteur temps semble être un irritant quand on a tellement de choses à dire. Mais nous allons commencer tout de suite; nous allons nous permettre d'introduire les deux aînés comme début de ces discussions.

Et, encore une fois, nous sommes un peu... C'est sûr, ça va prendre du temps et il va falloir aussi qu'on traduise. Dans ce monde moderne, comment qu'on n'a pas pu trouver une façon d'accélérer les choses si le temps aurait permis. Je pense qu'un système de traduction, nous avons des spécialistes de la traduction. Je pense que ça va être une évidence, même ici.

(S'exprime dans sa langue).

M. Lalo (Marcel): Mon nom est Marcel Lalo, chef de Pakua Shipu. Les deux aînés vont faire un petit commentaire. Moi, je vais le traduire au fur et à mesure qu'ils vont donner leurs commentaires sur le mode de vie traditionnel et occupations des territoires et attachement au territoire.

(S'exprime dans sa langue).

Piétacho (Philippe): (S'exprime dans sa langue).

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Piétacho. Alors, M. Lalo, si vous voulez traduire, s'il vous plaît.

M. Lalo (Marcel): Oui. Oui, salutations à tout le monde. Ça fait plusieurs fois que j'assiste à des commissions et à d'autres rencontres comme ça.

J'ai été chef, moi aussi, plusieurs années. Ma principale bataille a été la protection de notre territoire, de la terre que nous utilisons aujourd'hui. Et, aussi, j'ai un problème avec les gouvernements qui ne reconnaissent pas notre statut en tant que peuple. Même aujourd'hui, nous utilisons encore la terre présentement. Les communautés de Ekuanitshit, Mingan, Natashquan, La Romaine, Pakua Shipu, nos gens sont encore là, ils utilisent encore le territoire.

Mais tout ce qui se passe aujourd'hui me dérange, par exemple la rivière Romaine qui a été voulue harnachée sans notre consentement, et notre consentement est nécessaire pour les projets qui sont mis devant par les gouvernements. La rivière Romaine est encore très utilisée par nos gens ? cette rivière va vers le Labrador ? et d'autres rivières sont encore utilisées. Les rivières Pakua Shipu, Nutashkuan, La Romaine sont encore très, très, très utilisées par nos gens; on est encore là.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci. Est-ce que vous avez... Oui, vous pouvez continuer, monsieur... Oui.

M. Piétacho (Philippe): (S'exprime dans sa langue).

1940, même été 1926, 1927... (S'exprime dans sa langue).

1940... (S'exprime dans sa langue).

n (10 h 50) n

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Philippe Piétacho. Alors, M. Lalo, s'il vous plaît.

M. Lalo (Marcel): Oui. Il y a beaucoup de lacs sur le territoire. Nos utilisations de ces ressources, nous, les Innus, on a... tous les Innus ont la même conception de ces ressources: par exemple, l'eau.

Je comprends que les gouvernements veulent du travail pour leurs gens. Aujourd'hui, j'ai 66 ans. Je suis encore dans le bois; j'y vais à tous les automnes. En 1926, le barrage au Labrador a été érigé. C'est là qu'ont commencé les problèmes.

En 1926-1927, c'est là que les problèmes ont commencé pour nous. Nous avons tracé le chemin pour nous, et les gouvernements du Québec et du Canada ne nous ont jamais demandé s'ils pouvaient utiliser ces chemins-là. Ils ne nous ont pas demandé s'ils pouvaient tracer leurs chemins à côté de nous autres. Alors, ça, c'est en 1926, 1940.

Ensuite, ça a été... ils voulaient nous déplacer. Les gens de Mingan, ils voulaient nous déplacer à Uashat. On a maintenu notre position; on a décidé de rester là où on est. La même chose à la réserve, pour les gens de Pakuashipi, on voulait les déplacer à La Romaine. Ils ont réussi, mais ils sont retournés à pied un an plus tard. Quatre familles ont été retournées à Pakuashipi. Même chose pour La Romaine, Mingan a été... les gens voulaient les envoyer à Uashat.

Ça, c'était le plan du gouvernement fédéral. Ils nous ont promis plein de choses. Par exemple, on va vous amener par avion dans vos territoires après votre déplacement. Ça n'a jamais été fait. On a été obligés de retourner à pied.

Après ça, c'était les programmes sociaux: l'allocation familiale, le bien-être social. Toutes ces promesses, nous autres, ce que nous comprenions: Bougez pas, restez dans votre coin sur les réserves qu'on vous a données; allez pas dans vos territoires; 8 $ pour chaque personne, 40 $ pour chaque famille ont été distribués aux gens, à nos gens pour que nous restions dans un petit coin, dans un petit lopin de territoire que le gouvernement nous donnait.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Juste pour gérer comme il faut le temps, M. Jean-Charles Piétacho, est-ce que vous avez d'autres personnes à faire entendre parce que...

M. Piétacho (Jean-Charles): On a repris la journée. Mais vous comprenez que...

Le Président (M. Boulianne): ...il nous reste à peu près trois ou quatre minutes...

M. Piétacho (Jean-Charles): Mais on doit s'adapter, encore une fois. Je pense que... je ne sais pas combien de temps qu'il nous reste à peu près?

Le Président (M. Boulianne): Il vous reste à peu près quatre minutes, mais je vais laisser quand même un peu de temps, le temps de vous laisser vous exprimer si vous avez d'autres...

M. Piétacho (Jean-Charles): O.K. Je vais procéder. En tout cas, c'est sûr qu'on va essayer d'aller le plus rapidement dans notre présentation.

Je remercie encore une fois les gens qui nous accompagnent, les gens qui nous écoutent.

(S'exprime dans sa langue).

M. le Président, mesdames, messieurs, parlementaires de l'Assemblée nationale, membres de la commission, nous voulions d'abord remercier la commission des institutions de l'Assemblée nationale de nous accueillir afin que nous puissions exprimer notre opinion sur l'entente de principe d'ordre général entre les premières nations de Mamuitun et de Nutashkuan et le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada, paraphée en juin 2002 par les négociateurs.

Cette entente de principe présente un vif intérêt pour Mamit Innuat qui, par l'entremise de l'Assemblée Mamu Pakatatau Mamit, poursuit des négociations territoriales parallèles avec les gouvernements du Québec et du Canada, en vue d'en arriver éventuellement à sa propre entente de principe avec ces derniers.

Comme nous sommes dans le même processus de négociation que les premières nations de Mamuitun et de Nutashkuan, nous allons nous permettre de vous parler de nos communautés de Nitassinan, de notre population. Ensuite ? c'est sûr que, ici, je vais y aller de façon peut-être un peu moins élaborée ? nous aborderons aussi les droits des peuples autochtones qui ont été reconnus par les tribunaux. En quelques paragraphes, nous vous exprimerons les éléments ? et ça, je pense, c'est le point important ? en quelques paragraphes, nous vous exprimerons les éléments fondamentaux qu'on doit retrouver dans une entente de principe devant mener à un traité, à la reconnaissance des droits territoriaux ainsi que le droit à l'autonomie gouvernementale.

Ces événements devraient nous permettre de sortir du marasme socioéconomique dans lequel nous nous retrouvons à l'heure actuelle. Un traité qui respecte nos préoccupations va enfin remettre entre nos mains notre destinée et non de celles de gouvernements qui nous sont étrangers. De plus, une entente négociée devrait permettre à nos populations de coexister dans le partage et l'harmonie.

Je vous fais fi un peu de l'historique des négociations; je pense que les autres membres de la nation innue vous l'ont exprimé. Mais je vais aller à ce qui nous préoccupe, qui nous tient à coeur, c'est: le lien avec le territoire est au centre de notre mode de vie et de notre identité.

Nous avons occupé Nitassinan depuis des temps immémoriaux. Les noms que nous avons donnés aux lacs, aux rivières, aux montagnes de Nitassinan et que nous utilisons encore témoignent de notre attachement au territoire. Pour nous, comme pour bien d'autres peuples autochtones, les droits ancestraux constituent la traduction juridique, l'essence même de notre identité. Posséder des droits ancestraux, c'est d'avoir des droits en tant qu'autochtones. Les droits ancestraux, comme l'a confirmé la Cour suprême, sont au coeur de la spécificité autochtone ou de l'indianité.

Nous considérons ces droits comme incessibles. En fait, nous avons autant de droits que de devoirs envers la terre, une cession de ces droits qui voudrait abandonner nos responsabilités et à renier notre identité. Dans la philosophie autochtone, un traité constitue une alliance qui doit être renouvelée périodiquement et dont les conditions sont appelées à être modifiées selon les circonstances. L'établissement d'une relation de confiance est plus important que le contenu précis des droits transigés. Or, l'exigence posée par les gouvernements que nous consentions à abandonner nos droits ancestraux heurte de plein fouet notre philosophie concernant le territoire, en raison de son caractère total et définitif. Cette exigence a été dénoncée, tant pas la commission Dussault-Erasmus que par le Comité des droits de l'homme des Nations unies.

n (11 heures) n

Certes, nous reconnaissons que la certitude et la sécurité juridiques sont des préoccupations légitimes. Nous récusons toutefois l'idée que l'abandon ou l'extinction de nos droits constitue le seul moyen et même le moyen le plus efficace de tenir compte de ces préoccupations. Nous refusons aussi toute formule qui, sans comporter des dispositions expresses d'extinction et d'abandon, constituerait néanmoins une manière indirecte de mettre fin irrévocablement à l'existence de l'ensemble ou d'une partie de nos droits ancestraux. Nous avons à l'esprit ces remarques du chef national, Matthew Coon Come, qui avertissait récemment les chefs autochtones que «de nouvelles mutations du virus d'extinction apparaissent inlassablement dans les laboratoires fédéraux. La dernière de ces mutations s'intitulerait "technique de non-revendication et de repli". Ces virus d'extinction sont ensuite testés sur les premières nations, que ce soit aux tables portant sur les traités ou au cours de négociations, afin de voir s'ils les accepteront ou s'ils vont y succomber.» C'est pourquoi nous ne jugeons pas acceptables certaines approches retenues dans les accords récents conclus ailleurs au Canada et dans certains projets d'entente mis de l'avant dans d'autres négociations.

Très largement inspiré du travail de ce comité ? là, on parle du comité de juristes ? l'entente de principe Mamuitun-Nutashkuan ne contient pas de clause de nature à opérer l'extinction expresse ou implicite de tout effet ou modalité des droits ancestraux non mentionné au traité. Au contraire, il est solennellement déclaré à l'article 3.3.1 que les droits ancestraux, y compris le titre aborigène, seront «reconnus, confirmés et continués sur Nitassinan par le traité». Le traité confirmera que nos droits ont une existence juridique autonome en ce sens qu'ils ne sont pas octroyés par les gouvernements et que nous les tenons de nos sociétés pré-étatiques.

Par ailleurs, l'article 3.3.1 ajoute que les droits ancestraux ainsi reconnus «auront les effets et s'exerceront selon les modalités prévues par le traité». Les Innus s'engagent donc à ne pas exercer leurs droits, y compris leur titre, selon certaines modalités et des effets autres que ceux prévus au traité. Deux tempéraments sont apportés à ce principe. Les Innus pourront se prévaloir de modalités de droits ancestraux qui, bien non expressément mentionnées au traité, en découlent selon l'usage et l'équité et sont compatibles avec ses dispositions. De même, le traité n'empêchera pas les Innus de prendre des mesures de protection et de promotion de leur langue et de leur culture non prévues au traité si ces mesures sont compatibles avec ce dernier.

Et ici, je veux me permettre d'aller à la conclusion. Nous sommes d'avis qu'il est important pour nous de venir nous exprimer sur un sujet fondamental pour les Innus. Il est aussi important que les Québécois et Québécoises comprennent que la nation innue est une grande nation qui occupait, qui occupe aujourd'hui et qui occupera encore demain un grand territoire avec lequel elle entretient une relation étroite et qu'il y a au sein de cette nation plusieurs communautés avec des spécificités.

Notre mode de vie, notre culture, notre langue, nos valeurs sont en danger. Contrairement à ce qu'affirmait un ex-politicien québécois, on ne peut plus attendre. Il faut permettre à notre peuple de se développer socialement, culturellement et économiquement afin que nous puissions renforcer notre identité innue et réaffirmer notre fierté innue. Nous pouvons atteindre cet objectif par la signature d'un traité entre les deux peuples. Nous sommes actuellement en négociation en vue d'en venir à une entente de principe qui mènera à la signature d'un traité et nous sommes prêts à faire des compromis, mais pas à n'importe quel prix.

Les premières nations de Mamuitun et de Nutashkuan ont négocié une entente de principe d'ordre général avec les gouvernements qui ouvre la voie aux autres groupes ou communautés autochtones. Cette entente prévoit un processus de reconnaissance des droits ancestraux, dont le titre aborigène, et qui permet aux gouvernements non autochtones d'atteindre leurs objectifs de sécurité et de certitude juridique. Cependant, il faut se rappeler que les autres groupes, dont nous sommes, ont des spécificités et que l'entente de principe de Mamuitun-Nutashkuan telle que négociée ne sera pas acceptable pour d'autres groupes ou communautés.

À titre d'exemple, les points suivants ne font pas encore l'objet d'un consensus à la table centrale de négociations de Mamit Innuat: les Innu Assi dont on exclut la propriété des ressources hydrauliques, la participation de Mamit à la gestion de Nitassinan et l'absence de comités paritaires pour la cogestion du territoire et l'évaluation environnementale, le chapitre sur la fiscalité dont l'abandon de l'exemption fiscale, le financement du gouvernement innu pour la prestation de programmes et services et la référence aux communautés environnantes pour déterminer le niveau de financement, les terres qui ne seront pas des terres de l'article 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 et, par le fait même, la fin de l'obligation de fiduciaire de la couronne, et ce, sous réserve du traité, l'application des lois provinciales d'application générale aux terres de Nitassinan, à Mamit Innuat, à la première nation ou aux Innus de cette première nation, et la formule du partage des redevances limitatives qui exclut des ressources naturelles. Tous ces sujets demeurent à négocier, je le précise.

Nous sommes d'avis que ce serait une erreur de demander aux autres de s'en tenir à un modèle qui ne saurait les satisfaire. La partie la plus intéressante de l'entente de principe de Mamuitun est le mécanisme de reconnaissance des droits sans extinction, et nous sommes fiers d'avoir largement contribué, via notre représentant au comité des juristes, à atteindre l'objectif de tous les peuples autochtones de reconnaissance des droits dont le titre aborigène. À ce sujet, le temps nous aura donné raison, puisque notre proposition d'entente de novembre 1995 comprenait les éléments qu'on retrouve aujourd'hui dans l'entente de principe, soit la reconnaissance des droits ancestraux et du titre aborigène dans un traité évolutif. D'ailleurs, quel peuple accepterait de négocier une entente qui aurait pour effet d'éteindre indéfiniment ses droits? Imaginez le tollé que soulèverait le gouvernement fédéral s'il demandait au gouvernement québécois d'éteindre ses droits historiques en retour de pouvoirs additionnels au sein de la fédération canadienne.

Nous vous remercions encore une fois d'avoir pris le temps de nous écouter. Merci beaucoup. Tshinashkumitinan.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Jean-Charles Piétacho. Alors, sans plus tarder, je vais passer la parole à M. le ministre. M. le ministre.

M. Trudel: Bien, merci beaucoup, M. le Président. Souhaiter la bienvenue aux premières nations de Mamit Innuat et aux chefs des trois communautés de la nation concernée ainsi qu'aux aînés qui vous accompagnent et qui, ce matin, d'entrée de jeu, M. Piétacho... D'abord, la langue et la fierté de la présentation, c'est comme un baume qui est répandu sur l'ensemble de la salle, la fierté de sa langue pour communiquer et nous faire de l'histoire pour que nous puissions faire de l'histoire, réaliser davantage d'histoire avec les négociations dans lesquelles nous sommes engagés pour en arriver à un traité dans la paix et le respect et surtout le développement, tel que ça nous a été indiqué par M. Piétacho dans son intervention. Il y a une remarque que mon collègue le député de Lac-Saint-Jean me faisait pendant votre présentation: vous en avez épais sur le coeur. Vous en avez épais sur le coeur, et ça fait partie de l'histoire, et on ne doit pas l'oublier.

Et ce sera ma première question en notant aussi que, dans votre présentation, je pense que vous situez, quant à moi, parfaitement bien ce que signifie s'asseoir à une table de négociations, c'est-à-dire être prêts à des compromis et non pas, au départ, renoncer à des éléments essentiels de ce qui constitue les éléments de base pour l'avenir de vos communautés, de votre nation. Or, je note précieusement cette définition, cette approche qui concorde parfaitement à ce qu'il faut entendre en général avec l'esprit d'une négociation.

Je vais me rattacher maintenant aux éléments historiques cités à votre mémoire mais aussi au témoignage de M. Piétacho. Il y a eu sur le territoire des interventions sans que vous n'y consentiez. Il y a eu des interventions sans que vous ne soyez consultés, sans que vous soyez de la partie pour que l'action puisse être réalisée. Est-ce que, dans le projet d'entente de principe, parce que ce n'est pas... on l'a indiqué pour l'exercice des droits, nous en sommes à l'étape de la reconnaissance mutuelle de principes fondamentaux pour nous entendre éventuellement sur l'application de ces droits ancestraux, de ces pratiques ancestrales et du titre aborigène en particulier... est-ce que le chapitre 6.1 à l'égard de la participation réelle de la nation innue et des communautés dans tout éventuel projet de développement sur le territoire concerné répond à vos aspirations de la nécessité de la participation de la nation et des communautés au développement sur le territoire?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, M. Piétacho.

n (11 h 10) n

M. Piétacho (Jean-Charles): Idéalement, si la définition d'une participation réelle était une participation de façon... en partenaires, deux partenaires doivent décider, idéalement, et, comme on vous le dit, c'est encore dans les discussions, dans les sept points qui restent en suspens. Idéalement, si on reconnaît des peuples, ces peuples-là doivent décider. Je pense que, dans le monde idéal, et c'est ce qui devrait être, pouvoir participer de façon pleine et entière à un développement harmonieux, et je pense que notre porte-parole travaille très fort aussi à essayer d'amener les solutions. Et, compte tenu qu'on est encore en négociation, je me permets de vous dire que, si nos considérations que nous avons mises de l'avant... qui est dans la suite, la poursuite de nos discussions.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. Piétacho. M. le ministre.

M. Trudel: Très rapidement, j'ai aussi des collègues qui veulent poser des questions. Si vous voulez, abordons aussi toute la question de la fiscalité. C'est évidemment une question très épineuse au sein des nations, compte tenu des droits ancestraux et de la façon d'examiner et d'approcher cette question, de la regarder. Cependant, et cela constitue aussi très nettement, très clairement pour votre nation et pour la nation québécoise, et pour l'avenir, une question stratégique d'importance... M. Piétacho, est-ce que la possibilité que, dans l'exercice de votre autonomie gouvernementale, il puisse exister, et que nous en convenions, une fiscalité propre à la nation innue, propre à la communauté et pleinement administrée par la communauté, c'est une idée qui, pour vous, est importante et doit être traitée, et en arriver à une conclusion à cet égard?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, M. Piétacho.

M. Piétacho (Jean-Charles): Sans me répéter, dans les sept points, effectivement, c'est un point qui est important et, au moment où on se parle, il est, encore une fois, dans la poursuite des discussions, et nous considérons toutes les options. Et, si je peux me permettre, c'est un dossier... Juste le mot «fiscalité» dans nos communautés, voilà encore une fois une décision unilatérale d'autres gouvernements que, aujourd'hui, on doit réparer à travers des formules qui seront négociées. C'est une autre décision externe, et, encore une fois, nous devons réparer, si je peux me permettre ainsi de l'interpréter.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Piétacho. Alors, maintenant, je donnerais la parole à M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui, ça va être très bref d'ailleurs. C'est un peu sur le même thème qu'abordait mon collègue. Je vous remercie de la présentation, et là je constate de votre mémoire qu'on a eu ? donc, je l'ai lu au fur et à mesure que vous le présentiez ? que vous êtes, dans l'ensemble, heureux des négociations et de la plupart des discussions qui se déroulent et que vous avez, bon, des points très précis. Et je vais faire un peu de pouce sur aussi, au niveau fiscal, où là vous dites très clairement que l'abandon de l'exemption fiscale est un sujet sur lequel, bon ? c'est ce que j'ai compris des commentaires du chef ? est difficilement acceptable chez vous. J'aimerais savoir quelle est votre vision... de celle de demander cette autonomie gouvernementale, de pouvoir avoir des sources de financement adéquates que vous jugez d'ailleurs pertinentes et adéquates pour vos communautés, mais que vous sembliez si réticents à justement accepter le principe de l'abandon, là, de l'exemption fiscale.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, monsieur, oui.

M. Piétacho (Jean-Charles): Je pense qu'il y a une autre province pas loin de chez nous qui a reconnu, dans le domaine fiscal, qu'elle détenait des fonds au nom des premières nations, c'est le Nouveau-Brunswick, dans un dossier sur les Micmacs. Pour répondre à votre question, je vais permettre à M. Guy Bellefleur, notre porte-parole, de donner la suite de la réponse.

Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Bellefleur, oui, vous avez la parole.

M. Bellefleur (Guy): Merci, M. le Président. (S'exprime dans sa langue). Sur la question de la fiscalité, c'est une question, disons, qui est fondamentale pour les communautés innues de Mamit Innuat. Quand on regarde les négociations territoriales et gouvernementales avec les premières nations, juste au niveau de nos voisins les Cris, ou les Mohawks, vous avez... en tout cas, le gouvernement du Québec a signé des ententes avec ces nations-là, l'exemption fiscale continue. Quand on regarde du côté de Mamit, l'exemption fiscale, si on la faisait sauter... quand on regarde au niveau de la scolarité, au niveau de l'historique des communautés de Mamit, ça fait juste une trentaine d'années que la communauté de Pakuashipi a été sédentarisée. Donc, au niveau de l'éducation, au niveau du marché du travail, ces gens-là... la plupart de nos communautés vivent sur l'assistance sociale, trois quarts de nos populations vivent de l'assistance sociale. La balance, c'est des personnes qui travaillent à partir des paiements de transfert et d'autres personnes qui travaillent sur des projets comme la construction de maisons ou de routes. Donc, pour nous, c'est impensable de penser, disons, à accepter de faire disparaître l'exemption fiscale. Étant donné que nous négocions dans un traité évolutif, pourquoi ne pas reporter cette question-là, laisser aux générations futures de régler ces questions-là? Mais, pour nous, ce serait irresponsable, disons, d'accepter l'exemption fiscale.

De toute façon, il y a des précédents qui existent au Québec donc, vous les louangez très souvent, la Convention de la Baie James... Quand M. Trudel a posé la question sur la participation réelle... La participation réelle, il y a un des modèles qui existe au Québec, la Convention de la Baie James. Pourquoi ne pas prendre ce modèle-là, l'amener du côté des Innus de Mamit ou de la nation innue, puis ce serait moins compliqué pour les développeurs, déjà ils connaissent les règles du jeu au niveau de la Convention de la Baie James? Donc, ça va être des règles, disons, que tout le monde va connaître, donc au lieu de créer à nouveau une participation réelle. On sait très bien qu'on doit composer avec des fonctionnaires, puis, connaissant les fonctionnaires, ils sont très bien assis, et puis, eux autres, ils sont tellement habitués à travailler avec des règles très strictes, puis là on va essayer de changer la mentalité et la façon de travailler? Je ne pense pas, moi, que ces fonctionnaires l'acceptent. Donc, il y a des modèles qui existent, prenons-les. C'est ce qu'on dit. Je pense que ça va être plus simple d'y aller comme ça que de se compliquer...

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Bellefleur. Il reste une minute et demie. Le député de Duplessis a demandé la parole. M. le député de Chicoutimi, est-ce que vous lui laissez? Alors, pas plus que... question et réponse, deux minutes.

M. Duguay: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Merci, Stéphane. Moi également, je désire bien sûr souligner la présence des deux chefs et du vice-chef, qui font partie également de mon comté, un immense comté, et j'ai eu l'occasion tout à l'heure de situer la partie du nord, maintenant la partie de l'est, les trois communautés ici présentes, notamment au niveau de Mingan, La Romaine et puis Pakuashipi, c'est-à-dire Saint-Augustin. C'est bien évident que, pour ce secteur-là, pour l'information des membres de la commission, à partir de Natashquan, pour avoir accès aux deux autres communautés à l'est de la Basse-Côte, les seuls moyens de transport sont le bateau, pour une certaine saison, et, en hiver, c'est la motoneige, et, plus souvent qu'autrement, ça peut se faire aussi par hélicoptère. Alors, vous êtes à même de constater que, pour eux autres, ça a été tout un voyage. Alors, merci beaucoup pour la participation.

Et aussi, au niveau du mémoire que vous nous avez déposé, c'est un immense mémoire dans lequel vous relatez un peu toute la problématique. Alors, c'est un excellent mémoire qui va nous aider, surtout au niveau de la commission.

Cependant, on sait également... Puis j'ai eu l'occasion de rencontrer M. Piétacho à quelques reprises dans le domaine du hockey. Alors, ils ont des équipes de jeunes; au niveau du hockey, ils sont excellents. Juste pour vous donner aussi le contexte, au niveau de Saint-Augustin, on a, avec la communauté blanche, réussi à construire un aréna pour faciliter un petit peu l'accès des jeunes hockeyeurs autant autochtones que non autochtones. Alors, c'est juste pour vous démontrer que la collaboration entre les groupes se fait.

n (11 h 20) n

Dans le développement, M. Bellefleur, c'était beaucoup plus pour savoir comment vous voyez ça dans le futur en fonction... Je sais que vous en parlez dans votre traité, mais, pour le développement économique et le partenariat, j'aurais aimé vous entendre peut-être une minute là-dessus.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Bellefleur, rapidement.

M. Bellefleur (Guy): O.K., très rapidement. Sur la question du développement économique, c'est sûr que, quand on regarde, disons, le développement économique, les communautés autochtones de Mamit ont subi beaucoup de développements, de bouleversements des personnes qui arrivent de l'extérieur. Mais, avec une nouvelle approche au niveau de la négociation nous reconnaissant des droits au niveau du territoire de Mamit, ça va être plus facile pour les développeurs de reconnaître les règles du jeu au niveau, disons, des régions, au niveau de l'environnement. Quand on regarde uniquement la question du développement économique, c'est sûr qu'il y a beaucoup au niveau du tourisme qu'on pourrait regarder, l'écotourisme. Au niveau des ressources qui se trouvent sur le territoire, c'est sûr que, quand on regarde, disons... M. Piétacho, l'aîné de Mingan, a parlé de la Rivière Romaine, donc il y a des projets de développement hydroélectrique qui ont été ciblés, des rivières qui ont été ciblées par la société d'État. Donc, ces projets-là peuvent aller de l'avant, mais ça va nécessiter la participation des Innus.

Quand on regarde les jugements de la Cour suprême, on parle d'informer, consulter et aller chercher le consentement des Innus. Ça, c'est des choses qui existent. Les tribunaux ont fait avancer la cause autochtone, sauf que le niveau politique, il va falloir qu'il suive les institutions que vous avez créées vous autres mêmes.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Bellefleur. Alors, je vais passer la parole au député de Jacques-Cartier. Alors, allez-y, M. le député, on vous écoute.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, je veux dire bienvenue aux représentants de Mamit Innuat, les gens de l'Est, c'est bien expliqué dans votre mémoire. Et je veux faire écho aux commentaires du député de Duplessis pour vous remercier pour la qualité des mémoires, toute la recherche qui a été faite à la fois juridique et historique pour bien comprendre le contexte des négociations. Alors, je pense que c'est vraiment un travail qui a enrichi la réflexion des membres de la commission.

Je vais aller peut-être directement à la solution, la voie de l'avenir, parce que, hier, quand M. Chevrette a fait sa présentation, je pense qu'il a indiqué qu'il serait souhaitable d'avoir un seul traité pour la nation innue, que c'est vraiment... je pense, il y a une valeur ajoutée si quelque chose est rare et, si on a mille et un traités au Québec, ça va d'une certaine façon diluer la valeur d'un traité. Alors, je pense qu'on a tout intérêt qu'on ne signe pas trop souvent les traités... parce que ça augmente son importance.

Vous avez évoqué dans vos commentaires qu'il y a sept obstacles ou sept sujets qui sont très litigieux pour empêcher Mamit Innuat de procéder à la prochaine ronde de négociations. Pouvez-vous juste... Parmi ces obstacles, c'est quoi, en priorité, les choses qu'il faut préalablement régler avant de prévoir peut-être une signature d'une entente de principe similaire ? je ne dis pas identique? Mais c'est quoi, les problèmes ou c'est quoi, la possibilité qu'on peut arriver avec un processus qui, peut-être, un jour, peut nous amener vers un traité commun pour la nation innue?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Alors, oui, M. Bellefleur répond?

M. Bellefleur (Guy): J'aime beaucoup la question. Cette question-là en tout cas mérite, disons, d'avoir des réponses. Mais, dans notre cas, quand on regarde les sept points qui restent à régler, c'est la question de l'Innu Assi, qui est le territoire en propre aux Innus. On parle beaucoup que les communautés autochtones doivent se développer, doivent se prendre en main, O.K.? Mais, quand on leur enlève tout... La question des forces hydrauliques... Quand Québec dit: C'est Québec qui conserve toutes les forces hydrauliques même à l'intérieur de l'Innu Assi, c'est un non-sens. Québec nous invite à faire du développement économique, mais comment on va faire pour se développer si on n'a pas les ressources? Alors, c'est une des questions, nous autres, qu'on ne s'entend pas avec le Québec dans le moment.

En dehors de l'Innu Assi, ce qui est important aussi, c'est: De quelle façon les autochtones vont être impliqués dans le développement? Ça, c'est quelque chose de fondamental pour les Innus parce qu'il y a un attachement au niveau du territoire qui est très évident pour les communautés de Mamit, là. Quand je parlais de Pakuashipi, ça fait juste une trentaine d'années qu'ils sont sédentarisés. Donc, les gens vivent beaucoup sur le territoire. On sait qu'on va subir le développement sur Nitassinan, donc c'est important que les Innus soient informés, consultés, et même, disons, aller chercher leur consentement. Quand on parle de consentement sur des développements majeurs, c'est important que les Innus puissent connaître en détail... quand ils vont dire oui au développement, ils vont savoir pourquoi ils disent oui et, quand ils vont dire non, ils vont savoir pourquoi ils disent non. Alors, c'est important que Mamit puisse jouer un rôle important.

Il y a des modèles qui existent, comme la Convention de la Baie James, au niveau des comités paritaires, c'est ce qu'on avait proposé. Mais Québec ne veut pas accepter, disons, ce qu'on avait proposé. Pourtant, il y a des précédents qui sont là. Nous, on essaie de faire progresser la négociation. La participation réelle, on a des doutes là-dessus, là.

Puis l'autre affaire, c'est 91(24) qui n'est pas réglé. 91(24), disons, on a une relation avec le fiduciaire fédéral, qui est historique, au niveau des différents rapports qui existent et qui ont été commandés par différents gouvernements, en tout cas la Commission royale sur les peuples autochtones, puis il y a des jugements qui sont sortis qui disaient que ça va être regrettable que les premières nations laissent tomber la question des relations fiduciaires avec le gouvernement fédéral. Donc, pour nous, il y a des choses qui sont importantes. Avant de dire: On va laisser tomber, je pense que cette question-là mérite, disons, une bonne réflexion du côté de Mamit.

Puis l'autre, c'est la question du partage des redevances. Le partage des redevances, c'est important. Quand on dit 3 %, c'est-u ça, la valeur du titre aborigène sur le grand territoire qui est Nitassinan? O.K.? De quelle façon ça a été quantifié? On ne le sait pas. Mais on sait très bien que le titre qu'on va laisser, disons, au gouvernement décider tout seul sur le développement qui va se faire sur Nitassinan, ça a une valeur, ça, une grosse valeur. Pas 3 % à partir des redevances. Je pense que ça mérite d'autres discussions avec les négociateurs du Québec, ceux du fédéral aussi. Donc, il y avait celle-là.

Il y a l'autre affaire, c'est la question, vous l'avez abordée un peu, c'est la question de l'exemption fiscale. Je pense que j'ai fait pas mal le tour des points où on ne s'entend pas encore avec les deux paliers de gouvernement, Québec et Canada.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Bellefleur. Alors, M. le député de Jacques-Cartier

M. Kelley: Oui. Je comprends, merci beaucoup pour ces précisions. Encore une fois, à ce stade-ci, on n'est pas obligé de les... tout régler, mais c'est juste d'avoir assez de... un terrain d'entente pour procéder à une prochaine ronde. Mais ça, c'est les obstacles majeurs. Et vous nous invitez, entre autres, à regarder la Convention de la Baie James pour peut-être une autre façon de voir la notion de la participation réelle, si j'ai bien compris, un des obstacles majeurs.

Autre chose, parce que vous êtes négociateur à une autre table de négociations. M. Chevrette en avait long à dire hier sur la consultation des voisins, les autres parties intéressées, soit chasse et pêche, soit les intérêts forestiers, miniers, etc. Il a fait un genre de proposition pour mieux impliquer les populations concernées. À votre table de négociations, est-ce que cette question a été soulevée et comment est-ce que vous voyez la notion d'avoir des tables sectorielles et les autres mécaniques pour s'assurer que les autres gens de la Basse-Côte-Nord sont également impliqués ou au moins informés de qu'est-ce qui se passe à la table?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Bellefleur.

M. Bellefleur (Guy): En tout cas, nous respectons les institutions que la société québécoise a mises au monde, le gouvernement, son Assemblée nationale. Donc, c'est des personnes qui sont mandatées. Même des gens de la Basse, je veux dire, les non-Innus. Donc, nous, si on commençait à négocier avec différents comités ou différentes municipalités, les négociations risquent de traîner en longueur, sans avoir des résultats.

n (11 h 30) n

Donc, pour nous... en tout cas, la préoccupation des gens, c'est beaucoup plus, disons, un manque de transparence par des personnes qu'ils ont mandatées. Nous, de la façon dont on travaille, on informe beaucoup les gens puis on les consulte. On les rencontre régulièrement. Mais vos gens, ce qu'ils demandent, c'est d'être informé, et ce n'est pas à nous, disons, de les informer. Mais là de les voir à la table centrale de négociations, moi, je... Non, je trouve que ce serait inacceptable. Ça va rendre compliqué ce qui est complexe déjà.

Le Président (M. Boulianne): Alors, Mme la députée de Jonquière.

Mme Gauthier: Sur le même sujet, si vous me permettez. M. Bellefleur, au niveau de la consultation, la communauté québécoise au Saguenay?Lac-Saint-Jean comme sur la Côte-Nord... Il y a une partie de la communauté qui voudrait être consultée par référendum. On voit, dans le traité, qu'à l'article 18.2.1 vous, vous prévoyez de consulter votre communauté par référendum. Comment pensez-vous qu'on pourrait le faire, nous, du côté québécois, de consulter notre population sur la signature de ce traité?

Le Président (M. Boulianne): Oui, M. Bellefleur.

M. Bellefleur (Guy): En tout cas, nous, lorsqu'on avait fait, disons, la tournée dans nos communautés, en février 1995 ? je suis content que M. Duguay ait parlé, disons, de motoneige ? on avait fait une tournée en motoneige dans les quatre communautés de la Basse-Côte, Mingan, Natashquan, Romaine et Pakuashipi, puis, en tout cas, nous, ce que les gens nous ont demandé... Quand on va être rendu à l'entente de principe, une des conditions que les gens nous ont dites, c'est eux autres qui ont à accepter l'entente de principe par référendum. Mais, moi, en tout cas, je suis mal placé, je veux dire, pour dire au gouvernement du Québec, là, qu'il doit faire un référendum, c'est...

Mme Gauthier: ...ma question, c'est: Vous, de votre côté à vous, est-ce que vous voyez une objection à ce que nous, du côté québécois, on consulte la population par référendum?

M. Bellefleur (Guy): Bien, je ne veux pas m'ingérer dans vos affaires, c'est à vous autres à décider de quelle façon que vous voulez faire accepter l'entente de principe. Si vous m'invitez à m'ingérer, je vais le faire.

Mme Gauthier: Pardon?

Le Président (M. Boulianne): Oui.

Mme Gauthier: Juste une dernière question, si vous permettez.

Le Président (M. Boulianne): Une dernière question. Allez-y, Mme la députée de Jonquière.

Mme Gauthier: À l'article 5.8.1, qu'est-ce que vous entendez par «terrains privés»? Parce que vous prévoyez, avant la signature du traité, des ententes complémentaires sur le Nitassinan pour vos activités traditionnelles sur les terrains privés, qu'est-ce que vous entendez par «terrains privés»?

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, M. Bellefleur.

M. Bellefleur (Guy): Bien, «terrains privés», c'est les municipalités. Il y a beaucoup de zones, là, que le gouvernement du Québec a fait des concessions ou loué des terrains à des CLAP. Donc, souvent, ce qui arrive, c'est que, nous, on est continuellement lésé dans nos activités traditionnelles. Donc, il y a des municipalités qui ont une grande zone. Mais nous, ce qu'on avait proposé dans notre négociation, c'est que nous, pour des raisons de sécurité, on accepte, disons, de ne pas pratiquer des activités traditionnelles dans des zones habitées. Il y a des terrains privés... Prenons l'exemple, disons, des pourvoiries à droits exclusifs. Du côté de Mamit, il y a des pourvoiries à droits exclusifs qui ont été cédées par le gouvernement du Québec, mais nous, on continue à y aller dans ces pourvoiries-là à droits exclusifs puis on a toujours respecté le pourvoyeur en question, tu sais. On n'a pas dérangé les clients, eux aussi ne nous dérangent pas. Donc, il y a une forme d'entente: Fais tes affaires; nous aussi, on veut continuer à préserver, disons, notre mode de vie, notre culture, à aller chercher, disons, notre poisson ou... En tout cas, pour notre subsistance, des fois, pour s'alimenter.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Bellefleur. Oui. Alors, député de Saguenay, oui, vous avez une question. Alors, allez-y.

M. Corriveau: Oui. Bien, ça concerne Anticosti. Hier, M. Chevrette mentionnait qu'il lui semblait, disons, possible, là, d'écarter l'île d'Anticosti des négociations au niveau de l'Approche commune parce que ça faisait déjà partie, selon la proposition du Nitassinan, de Natashquan. Vous ? Natashquan, il ne demeure pas moins qu'il fait un peu partie aussi de Mamit, là ? qu'est-ce que vous pensez de ça, du fait qu'on puisse exclure Anticosti des négociations actuelles?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Bellefleur.

M. Bellefleur (Guy): J'ai eu... En tout cas, on l'avait écouté, M. Chevrette, disons, quand il a fait sa présentation de rapport, là, il parlait beaucoup de M. Meunier puis, en tout cas, qui a implanté, disons, les orignaux, chevreuils, etc. Mais, quand les non-Innus sont arrivés sur Nitassinan, ils n'ont pas amené du caribou, ils n'ont pas amené du saumon, ils n'ont pas amené du castor, c'est des espèces, des animaux qui étaient déjà là avant. Donc, nous... Où je veux m'en venir, c'est que nous... Le Québec se permet d'avoir une juridiction sur les espèces que j'avais énumérées tantôt. Nous, à l'Île d'Anticosti, c'est un territoire qui a été fréquenté par les Innus, tu sais. Les Innus qui l'ont fréquenté sont encore vivants. L'histoire, disons ? M. Chevrette l'avait dit ? l'histoire démontre que, quand on regarde, disons, au niveau des fouilles archéologiques, il y a eu une présence innue sur l'île d'Anticosti. Je comprends que les Innus ne se sont pas établis de façon permanente comme dans des réserves indiennes, mais c'est un territoire, disons, qui est important pour les Innus aussi. Ce n'est pas une question, disons, d'accessoire.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup, M. Bellefleur. Alors, je veux m'adresser à votre aîné, Philippe Piétacho. Peut-être que M. Lalo peut traduire. Alors, on le remercie de son témoignage. On n'a peut-être pas compris ses paroles, mais il y a certains gestes qu'on a très bien compris. Alors, merci beaucoup.

Alors, je demanderais donc au Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean de se présenter, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Alors, s'il vous plaît, je demanderais donc encore une fois au Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean de s'approcher pour présenter son mémoire. Merci.

n (11 h 40) n

Alors, la commission, donc, reprend ses travaux. Alors, bienvenue, donc, aux représentants du Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Alors, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Alors, j'aimerais que la personne responsable se présente et présente son équipe. Alors, vous avez la parole.

Le Réseau de scieries indépendantes
du Saguenay
? Lac-Saint-Jean

M. Dubé (Marc): M. le Président, bonjour. M. le ministre, MM. les députés, mesdames, messieurs, mon nom est Marc Dubé. J'ai le plaisir d'être président du Réseau des scieries indépendantes. On se chargera, un petit plus avant, de présenter qui on est. Le directeur du Réseau des scieries, M. Bernard Gagnon, m'accompagne ainsi que M. Gérard Lachance, qui est un industriel du sciage. Et on a un de nos collègues qui est un petit plus timide, qui est dans la salle actuellement, M. Claude Godin, de Scierie P.H. Lemay.

Si vous permettez, on va lire la première partie qui s'intitule Introduction. Vous devez normalement, je pense, tous avoir notre mémoire. Le Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean est un regroupement d'entreprises issues de milieux familiaux oeuvrant dans le domaine du sciage depuis plus d'un siècle pour les plus anciennes. Ces entreprises se sont regroupées pour mieux affronter les défis futurs en favorisant l'échange de connaissances, en regroupant des achats, des ressources et des opérations, en envisageant des projets communs de transformation du bois.

Ces entreprises ont en commun d'être bien implantées dans leurs municipalités respectives ? évidemment, certaines d'entre elles sont là depuis 100 ans, elles sont nées presque en même temps que la région; créatrices d'emplois dans leur milieu, plus de 1 200 emplois directs et indirects; indépendantes, pas en ce qui concerne l'allégeance politique, mais bien dans le sens de non affiliées à la grande entreprise; détentrices de contrats d'approvisionnement et d'aménagement de moins de 100 000 m³ de résineux; résistantes à la vague d'acquisition et de fermeture des scieries PME. Nous représentons, en fait, neuf des 10 dernières scieries indépendantes de la région de petite taille. Il y en avait des dizaines à une certaine époque, elles ont graduellement disparu une à une. Et ces entreprises-là sont compétitives dans un environnement qui évolue rapidement.

Quelques noms et dates de fondation, si vous le permettez, dans le tableau qui suit: Scierie Gauthier, de La Baie, fondée en 1855; Scierie Lachance, en 1894; Scierie P.H. Lemay, 1925; Entreprises Lionel Lessard et Fils, 1947; Scierie Gaston Morin, 1950; Scierie E. Tremblay, 1953; Scierie Martel, 1954; ainsi que Scierie Girard, 1954; et Scierie Lac-Saint-Jean, le bébé dans notre groupe, fondée en 1980.

Ces entreprises génèrent une masse salariale directe de plus de 17 millions en usine et en forêt. Le chiffre d'affaires du groupe dépasse les 80 millions en 2002. Ces entreprises locales ne cessent d'investir pour améliorer leur efficacité. En effet, elles ont investi plus de 30 millions de dollars au cours des trois dernières années et prévoient ajouter plus de 8 millions de dollars cette année, ce qui est considérable compte tenu de la taille de nos entreprises et de la taille de nos CAAF aussi. C'est assez remarquable que la grande entreprise définit le seuil de rentabilité d'une scierie à 350 000 m³ quand neuf entreprises avec moins de 100 000 m³, actuellement, sont en mesure de fonctionner. Scierie P.H. Lemay a 185 000 m³ mais est née de la fusion de deux de nos membres. Donc, on revient à des scieries en deçà de 100 000 m³.

Nos préoccupations d'ordre général. Malgré ces investissements, qui ont permis aux membres du groupe d'améliorer leur position concurrentielle, les augmentations considérables de redevances forestières, des obligations réglementaires plus importantes et la surtaxe sur le bois d'oeuvre imposée par les États-Unis ont contribué à annuler les gains obtenus sur le plan de la compétitivité. Le groupe lutte toujours pour sa survie.

Le Réseau est inquiet et se sent menacé par l'entente commune avec les Innus, car les promesses faites aux Innus sur l'attribution des volumes de bois et sur la gestion commune des ressources naturelles nous laissent anxieux face à notre avenir. C'est pour ces raisons que le Réseau présente ce mémoire, afin d'attirer l'attention de la commission sur quelques points cruciaux qui préoccupent ses membres. Nous pensons que la commission, par des recommandations appropriées, pourrait aider les industriels du Réseau à contribuer encore longtemps à leurs milieux respectifs.

Nous sommes un groupe qui nous rencontrons assez régulièrement, en fait pratiquement à tous les mois. Et, à chacune de nos rencontres, on se donne comme devoir de s'instruire et de s'informer. Dans ce cadre-là, nous avons rencontré déjà M. Rémy Kurtness, que vous connaissez tous, M. Réjean Simard, de la Fondation Équité Territoriale, que la plupart d'entre vous... si vous ne le connaissez pas, vous allez le connaître bientôt ainsi que M. Chevrette lors de ses tournées régionales. Évidemment, tous nos membres ont également les documents, autant l'entente de principe que le document de M. Russel Bouchard, que le dernier publié par le gouvernement du Québec. On a donc tenté de dresser un portrait global pour se faire une idée dans une situation qui est très complexe et très émotive, vous en conviendrez.

On a dégagé une position, au Réseau de scieries indépendantes, suite aux différentes rencontres et à la recherche d'information. On en est venu à la conclusion que la façon dont les relations entre le pays et les Innus avaient été faites au cours des dernières années avait été un échec assez retentissant. On n'a qu'à regarder les problèmes sociaux, les problèmes économiques auxquels ils font face, et on n'a pas besoin d'être docteur en sociologie pour comprendre qu'il y a un problème majeur. Pour modifier cette situation-là, il faut leur donner les outils. Qui dit outils dit pouvoirs. Puis qui dit pouvoirs dit changements. Le fait qu'il faut leur donner les outils pour se développer va sûrement amener une modification très importante au niveau des relations que les non-autochtones ont eues et va amener évidemment des changements avec celles que nous allons avoir avec eux dans le futur. Et ça, on en est conscient et on pense qu'on doit en arriver là.

Ceci dit, en ce qui nous concerne, le fait de réparer une situation ne devrait pas créer de préjudice à ceux qui sont déjà en place. Et le fait qu'on veuille que ces gens-là soient en mesure d'assurer leur développement, ce n'est pas une raison pour donner tout, n'importe quoi et surtout n'importe comment. Il va y avoir une période d'apprentissage à faire, une période où on va s'étudier, une période où le niveau d'agressivité va finir par disparaître, une période où on finir par faire des affaires avec eux, mais cette période-là va prendre du temps, et on va devoir en tenir compte.

On aurait pu, dans notre mémoire, présenter différents points et essayer de toucher à plusieurs aspects, là, qui peuvent éventuellement nous influencer, mais on a volontairement choisi de toucher un seul aspect qui, au fil des discussions, nous apparaît le principal, puisqu'il en regroupe plusieurs, mais c'est également l'aspect qui touche le plus directement la survie de nos organisations. Donc, on compte vous entretenir sur l'approvisionnement de nos usines, la qualité, la disponibilité, son exploitation ainsi que ses coûts.

Et je reprends la lecture du point 3. Le gouvernement du Québec prévoit, dans l'entente de principe d'ordre général avec les Innus: de mettre en disponibilité pour les Innus de Piékuakami, parce que c'est cette partie-là qui nous touche le plus, 250 000 m³ de bois; faire participer les Innus aux projets en leur donnant une participation réelle lors de la mise en oeuvre des plans d'aménagement forestier; lorsqu'il n'y a pas d'accord et que le gouvernement approuve le projet malgré les objections des premières nations, le promoteur ? et ça, là, c'est important ? le promoteur doit compenser les premières nations pour le bénéfice de leurs membres s'il y a atteinte à leurs droits; accorder des territoires qui seront soit exclusifs, soit protégés; ils comprendront les sites patrimoniaux, ancestraux et autres, comme les lignes de trappe.

Le Réseau est d'accord avec l'importance de favoriser l'amélioration des conditions de vie et de développement économique des Innus, on l'a mentionné tout à l'heure. Cependant, le Réseau s'inquiète des engagements des gouvernements envers les Innus, car il y voit une menace certaine à son propre développement et surtout à la consolidation de ses entreprises.

Dans le contexte actuel, les informations provenant du ministère des Ressources naturelles du Québec font état qu'il ne peut y avoir d'augmentation des volumes d'approvisionnement en bois consentis aux scieries, car, dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, il n'y a pas de volume de bois disponible à le faire. À moins que le gouvernement du Québec ait dans son chapeau des tours de magie, le 250 000 m³ qu'il leur a accordé ? et ça, on ne revient pas là-dessus, on n'a pas de problème avec ça ? il va falloir qu'il le prenne en quelque part. Et, c'est là où, nous, on est inquiet, où va-t-il le prendre? Comment va-t-il le transférer? Et, bon, qu'est-ce qui va arriver des autres industriels? On va y revenir un petit peu plus tard.

Dans cet état de fait, il nous apparaît difficile de répondre aux engagements de l'entente sans remettre en question les garanties d'approvisionnement dont nos usines ont besoin pour survivre. Cette situation représentera alors une perte nette de revenus pour des gens qui doivent déjà conjuguer avec des ressources forestières limitées ? on l'a bien indiqué tout à l'heure, les gens en bas de 100 000 m³ ? et un contexte économique difficile imposé par la surtaxe américaine qui est un événement ponctuel, on en convient. Mais, lorsque le paravent de la surtaxe va être enlevé, ils vont se rendre compte qu'il y a encore des problèmes.

Nos industriels recherchent depuis de nombreuses années des volumes additionnels pour survivre et pour trouver la motivation d'investir dans leurs usines afin qu'elles demeurent compétitives. Pendant des années, tous nos membres ont fait des demandes systématiques et répétitives au ministère des Richesses naturelles pour demander des volumes additionnels, et on avait toujours la même réponse: Il n'y en a pas de disponible.

n (11 h 50) n

Le Réseau caresse des projets de développement en deuxième transformation. Il ne veut pas voir disparaître les possibilités de les rendre réels. Les inquiétudes et les incertitudes vis-à-vis les approvisionnements nécessaires à la consolidation de la première transformation lui dictent la plus grande prudence. Pour s'engager dans des projets de deuxième transformation, il faut que notre base soit forte. Il faut donc consolider la première transformation de nos scieries.

En multipliant le nombre d'intervenants en ce qui a trait à la gestion du territoire et à l'analyse des plans d'aménagement forestier, nous croyons que le processus d'évaluation actuel, qui est déjà très lourd, ne soit encore plus contraignant et que nous ayons à subir les contrecoups d'une situation de réparation historique par la favorisation d'un groupe. Nous croyons devoir payer le fort prix, car notre possibilité de développement nous semble enrayée pour longtemps.

Maintenant, recommandations et précisions. Le Réseau voudrait que la commission analyse attentivement les suggestions suivantes. Des engagements et des précisions devraient être apportés et ajoutés à l'entente de principe d'ordre général entre les premières nations de Mamuitun et Nutashkuan et le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada. Pour ma prononciation en innu, vous m'excuserez, hein, chers collègues innus, là, ce n'est pas ma langue seconde, disons. Dans ces engagements-là, le reste vient préciser, là... Le reste des paragraphes vient préciser, là, cet élément-là. C'est le premier paragraphe.

Lorsque disponible dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, le bois de résineux devrait être utilisé pour consolider en priorité les scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean. On ne prétend pas être prioritaire aux Innus, c'est suite à l'accord des Innus. Mais on va proposer un mécanisme, tout à l'heure, de cession de volume aux Innus avec une participation au volume qui sera libéré. On y reviendra un petit peu plus tard.

L'engagement d'attribution d'approvisionnement de 250 000 m³ aux Innus de Piekuakami devra inclure les approvisionnements déjà octroyés à la scierie de Mashteuiatsh, les industries Piekouagame. Actuellement, les industries Piekouagame détiennent un CAAF de 78 000 m³. Il reste donc 172 000 m³ à trouver pour, selon nous, selon notre proposition, respecter l'engagement du gouvernement.

L'engagement de volume de 250 000 m³ pour les Innus de Piekuakami devra être attribué selon un calendrier qui s'échelonne dans le temps. Et, lorsqu'il y aura des volumes de bois de disponibles pour les approvisionnements, ils devront être attribués en partage avec les scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean, car elles en ont besoin pour consolider leurs opérations.

Ce qu'on prétend, nous, c'est que... Supposons qu'il n'y a pas de volume ? peut-être qu'il y en a, ils en ont dans leur chapeau, je ne le sais pas ? on va devoir attendre qu'il se libère du volume. Le processus va prendre combien de temps? Un an, deux ans, cinq ans, 10 ans? Ça veut dire que nous, pendant cette période-là, on ne peut espérer aucune augmentation de volume. Nos coûts montent continuellement. On n'a aucun, nous, impact sur le coût de notre bois et notre prix de vente. Le seul endroit où on doit performer, où on peut performer librement, c'est dans notre transformation du bois, nos coûts de transformation, la performance de nos usines. Et, lorsque c'est le temps d'investir, on doit, nous, compter notre retour sur l'investissement. Et, plus nous avons des mètres cubes, plus on est en mesure d'amortir nos investissements. Je l'ai déjà présenté à une commission précédente, il n'y a pas de petits équipements pour les petites scieries, il n'y a que des Cadillacs. Mais, quand ton compte en banque, quand ton compte de mètres cubes n'est pas suffisant pour être capable de te payer la Cadillac, bien on fait comme on fait, nous, on achète des équipements usagés puis on est toujours une génération ou deux en retard sur la grande industrie. Et ça, à la longue, ça mine notre rentabilité systématiquement.

En plus, ce qui touche le 250 000 m³, nous on dit, bon: Est-ce que c'est dans le Nitassinan, dans l'Innu Assi? Comment ça va être compté? On dit: Bien, on pense que le 250 000 m³ devrait être considéré dans l'ensemble des territoires appartenant aux autochtones ou cédés aux autochtones, là, aux Innus, appelons ça comme... si on dit «cédé» ou «qui leur appartient en propre». Et ils devraient considérer également tout le bois exploitable. On reviendra tout à l'heure sur ce qu'on entend par le bois exploitable.

La juridiction du Québec devra être clarifiée. Elle devra primer lorsqu'il s'agira d'utilisation et d'exploitation des ressources naturelles. Vous savez, au début, on va avoir à négocier avec nos collègues innus toutes sortes de choses. Déjà, dans le fonctionnement du régime forestier, il y a des gens qui sont en mesure de bloquer nos opérations. On pourra vous donner des exemples, on a un exemple dans une aire commune où il y a des gens qui partent, bon, en utilisant la loi puis en faisant preuve, je dirais, de rigidité...

Une voix: ...

M. Dubé (Marc): Il me reste ou j'ai cinq minutes d'écoulées? Il me reste. O.K. Faisant preuve de rigidité, réussissent à nous mettre un couteau sur la gorge en disant: Regarde, vous n'aurez pas d'approvisionnement. Parce que, tant qu'il n'y a pas entente, on n'a pas l'autorisation d'aller chercher notre bois. Quand tu es huit ou neuf industriels du sciage autour de la table, tu le sais ça, que toi, là, tu ne rentreras pas de bois dans ton usine puis que, demain matin, tu vas mettre tes gens à pied. Mais, quand tu n'as pas d'usine, tu t'en fous un peu ou tu risques de t'en fouter un peu.

On ne veut pas faire l'objet... ou travailler avec des gens qui peuvent avoir un droit de veto sur l'approvisionnement. Il faut donc que le gouvernement soit en mesure de trancher. On fait appel actuellement à l'arbitrage, à la conciliation, puis ça ne marche pas, ça n'avance pas, ça ne bouge pas. Puis, quand c'est politique puis qu'il y a des gens connus dans le domaine, le gouvernement n'ose pas bouger. Puis, là, bien on va aller ailleurs, puis on n'affronte jamais le problème.

Avec nos collègues innus, surtout au début, il va falloir s'apprivoiser. Il va y avoir de la méfiance, il va y avoir... Bon, il va y avoir toutes sortes de choses. Il faut avoir un mécanisme qui nous permet de régler le problème quand il va s'en présenter. Il ne manquera sûrement pas de s'en présenter, parce que, bon, on ne comprend pas toujours comment ils veulent fonctionner, on n'accepte pas toujours comment ils veulent fonctionner, puis, eux autres, ils nous regardent puis ils ne comprennent pas pourquoi on fonctionne comme on fonctionne, vous le savez tous. Il va falloir s'accepter, il va y avoir une période d'apprentissage.

Et, si nous, on se présente pour négocier avec des gens qui sont toujours en mesure d'avoir une espèce de droit de veto sur notre fonctionnement, il va se créer de l'agressivité, hein? Ils vont nous faire ça deux, trois, quatre fois, puis, quand ça va être à notre tour, on va vouloir se venger, puis ils vont... Après 20 ans, là, ça va être qui va s'être vengé de qui, là, ça ne finira pas. Donc, il faut avoir un mécanisme qui va nous permettre d'avoir une entente, un compromis, hein? Un compromis étant une situation où les deux parties sont également insatisfaites. C'est ça qu'on recherche, c'est ça qu'on veut, et le gouvernement du Québec va devoir mettre ses culottes et dire: Bon, il va y avoir un mécanisme, nous, on va trancher. Et, quand on va être tanné d'avoir ce mécanisme-là dans nos pattes, on va apprendre ensemble à régler nos problèmes. C'est ce qui se passe dans le monde des affaires pas mal.

Les nations autochtones devront être soumises aux mêmes droits de coupe applicables aux autres utilisateurs. Question d'équité. On est en affaires. S'il y a quelqu'un qui est capable de produire à moins cher que nous, bravo! Si c'est parce qu'il ne paie pas les mêmes droits de coupe puis il n'a pas les mêmes charges fiscales, il n'a pas le même système de taxation, là ça ne marche plus.

Étant donné que les Innus participeront à la gestion du territoire et au processus de participation réelle au projet de développement, soit lors de la mise en oeuvre des principaux processus de planification, notamment l'affectation des terres du domaine de l'État et la gestion de l'aménagement des forêts, il faudra démontrer clairement que, s'il n'y a pas d'entente entre les autochtones et les autres intervenants, le gouvernement du Québec a le dernier mot et approuve ainsi qu'il assume ? je m'excuse ? tout ce qui est associé à sa prise de décision lors de la demande d'application et que le promoteur n'a aucune forme de compensation à effectuer dans cette situation. On s'est dit: Regarde, nous, on veut participer à la négociation. On a dit: Bien non, regarde, c'est de gouvernement à gouvernement. Bien, si c'est gouvernement à gouvernement, quand il va y avoir des impacts, quand il va y avoir de l'arbitrage, quand il va y avoir des frais, bien réglez ça gouvernement à gouvernement. Ce n'est pas à nous autres à régler ça.

Le Réseau des scieries du Saguenay?Lac-Saint-Jean devra faire partie de la table forêt sur la gestion du territoire. On a, bien humblement, la prétention d'être un acteur propre, différent de la grande entreprise, implanté dans son milieu. On l'a dit, on est là depuis 100 ans pour plusieurs d'entre nous. Quand le bébé a 23 ans, pour une entreprise, c'est déjà une entreprise historique. Et, on pense qu'on a des choses à amener, on a... Puis vous parlez directement à des propriétaires, directement à des décideurs, et on pense qu'on pourra amener quelque chose. On pourra amener quelque chose d'intéressant, une vision différente et une vision qui, au niveau de la foresterie, se rapproche, je pense, pas mal des visions innues en ce qui concerne...

Le Président (M. Boulianne): En conclusion, M. Gagnon, s'il vous plaît.

n (12 heures) n

M. Dubé (Marc): O.K. Les territoires d'exploitation forestière et les sites patrimoniaux, ancestraux et autres, etc., ainsi que les particularités, comme les lignes de trappe et les ravages, bon, devront être identifiés. Essentiellement, les paragraphes 8, 9 et 10 disent: Écoutez, une ligne de trappe, là, ça prend combien d'espace? On ne le sait pas. On va perdre combien de bois dans cette entente-là? On ne le sait pas. On va perdre l'accès à des infrastructures, des ponts, des choses comme ça. Ce n'est pas à l'industrie à absorber ces pertes-là. S'il y a des pertes forestières, O.K., comme il va sûrement y en avoir, il y a des mécanismes à mettre en place pour réussir à récupérer ce bois-là. On a entendu parler de rendement accru, on a entendu parler de toutes sortes de choses. Je pense que des mécanismes peuvent être mis en place pour compenser les industriels qui ont mis argent et temps pour s'implanter dans une région avec, dans leur poche, un certain contrat d'approvisionnement. S'il est coupé, on change les règles du jeu, il faut ramener à la situation initiale. Nous vous remercions.

Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup, M. Gagnon. Alors, M. le ministre, en vous rappelant que votre collègue de Lac-Saint-Jean aussi a demandé la parole. Alors, allez-y.

M. Trudel: C'est bien, il y a une prévention ici. Rapidement, merci de votre présentation, M. Gagnon, ainsi que bienvenue à vos collègues des scieries indépendantes. Votre présentation est importante parce qu'elle implique une activité fondamentale en matière de développement et pour la nation innue, et pour la nation québécoise, et les régions concernées. C'est un élément essentiel de notre socioéconomie.

J'imagine que vous devez être très satisfaits des recommandations de M. Chevrette hier, puisque j'y retrouve presque intégralement ce que vous nous avez mentionné aujourd'hui. Je veux cependant vous entendre sur une chose. À la recommandation n° 13, à la troisième disposition traitant de l'allocation, traitant du traitement des volumes de bois à être alloués éventuellement dans le traité, on nous fait la recommandation que tout cela soit assorti d'une clause de priorité de transformation de la ressource dans les régions concernées et, deuxièmement, une invitation à ce qu'il y ait des partenariats d'affaires innus, québécois, en particulier évidemment à votre secteur d'activité industrielle. Êtes-vous ouverts? Est-ce que cette perspective vous apparaît constructive, avoir de l'avenir? Et est-ce qu'on peut en arriver à des partenariats réels qui favoriseraient le développement économique, social et culturel, mais le développement économique, des deux nations, et en particulier dans les deux régions concernées?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. M. Gagnon, vous avez la parole.

M. Dubé (Marc): Dubé.

Le Président (M. Boulianne): Dubé?

M. Dubé (Marc): Dubé.

Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): M. Gagnon, c'est le directeur général. Je n'ai pas de honte à m'appeler Gagnon, mais on m'a appelé Dubé. Ça fait que j'aime autant continuer comme ça.

Le Président (M. Boulianne): Allez-y.

M. Dubé (Marc): Évidemment, vous comprendrez que nous sommes des gens d'affaires, hein, nous ne sommes pas des Québécois assis... puis, bien honnêtement là, si on avait des affaires profitables à faire avec des Martiens, on en ferait avec des Martiens. Ça fait que vous comprendrez bien qu'avec les Innus qui sont dans notre communauté et qu'on croise pratiquement tous les jours, non seulement on n'aurait pas de réticence, mais ce serait avec beaucoup de plaisir qu'on aimerait s'asseoir avec eux puis parler d'affaires. Il y a eu déjà des invitations de lancées à cet effet. On n'a pas attendu cette entente-là, mais il s'est présenté, disons, une opportunité, puis il y a effectivement des invitations de lancées, invitations qui, je l'espère, vont finir par aboutir, et je le crois sincèrement, au moins des discussions. Au moins, quand tu amorces des discussions, là, tu avances. Je ne sais pas si on va se rendre au bout, puis, s'il y a des possibilités, je pense qu'il y a des avantages énormes, puis il peut y avoir des perspectives extrêmement intéressantes pour les deux communautés.

Maintenant, il va falloir s'apprivoiser, hein. Il va falloir voir comment on fonctionne, il va falloir se comprendre, puis... Bon. Si je m'associe avec n'importe lequel d'entre vous, on va faire pareil. On va commencer par se rencontrer, puis on va se faire beau, puis on va dire ce qu'il faut dire, puis essayer de plaire, puis, après ça, on va gagner la confiance. On va s'avancer. C'est un processus, ça, qui est un processus qui est naturel, qui devrait se faire naturellement. Nous, c'est sûr qu'on n'a pas d'objection, au contraire, au contraire, puis on pense qu'on a une façon de fonctionner, une dimension puis une présence régionales qui pourraient être un avantage certain pour les gens de la communauté innue. Nous, on ne les avalera pas jamais. Je veux dire, ça va vraiment être une entente d'égal à égal.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Dubé. Alors, M. le ministre.

M. Trudel: Cette expression, votre dernière expression, nous engage vraiment dans la réalité du passage de voisin à partenaire, gagnant-gagnant, qu'il y ait des résultats positifs pour l'entreprise, pour vos entreprises, pour les jeunes de la région, pour les jeunes de la nation innue, qu'il y ait de l'avenir.

Question supplémentaire générale, vous l'avez abordée d'une certaine façon: Est-ce que le fait de convenir d'un traité qui va déterminer des règles pour l'exercice de droits qui existent déjà, qui sont déjà reconnus, ne va pas créer ? on va prendre votre expression peut-être ? un climat d'affaires qui va favoriser le développement? Parce que, en général, ce que je remarque dans le monde des affaires, ce qu'on nous répète continuellement, c'est: des règles d'abord, des règles d'abord et des règles constantes pour qu'on puisse s'y référer. Est-ce que cela n'est pas de nature à créer un climat propice au développement sur les territoires concernés?

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, oui. Qui est-ce qui veut répondre?

M. Dubé (Marc): Il va y avoir un climat d'affaires. Et les meilleures affaires... J'ai eu l'occasion, dans une carrière précédente, de travailler pour un fonds de capital de risque qui ne faisait que de l'investissement et que du démarrage d'entreprises. Les meilleures négociations qui se sont faites, c'étaient les négociations quand la personne de l'autre bord de la table, elle est à peu près de force égale et là qu'il n'y avait pas personne qui était capable de mettre un fusil sur la tempe en disant: Regarde là, si ça ne marche pas, il va arriver telle chose. Donc, les meilleures négociations, c'est quand les partenaires sont d'égal à égal. Et c'est ce que je disais tout à l'heure. Il faut avoir un certain équilibre dans les forces en présence, il faut avoir une obligation de s'entendre. Si je veux m'associer avec quelqu'un et que lui veut s'associer avec moi, on a une obligation de s'entendre. Pas une obligation légale dans ce cas-ci, parce que c'est des affaires qui sont faites de gré à gré. Mais la clé du succès, c'est qu'on ait intérêt à s'entendre, et non obligation de s'entendre, et qu'on ait la volonté de s'entendre. Évidemment, quand les choses sont claires, ça aide. Mais, si, dans cet éclaircissement de situation, il y a un des partenaires qui se sent lésé, qui se sent inférieur, qui se sent obligé, les négociations vont être plus difficiles, parce que c'est de la méfiance, puis... Bon.

Que j'aie quelqu'un en face de moi qui veut faire des affaires, qui est dur en affaires, puis qui veut négocier, puis qui est toffe, puis qui ne me lâche pas, puis... bon, on vit avec ça, parce qu'on veut s'entendre puis on va négocier. Mais, s'il y a quelqu'un qui dit: Regarde, si on ne s'entend pas, il va t'arriver telle chose, ton usine va fermer, ça ne marche plus là. Ça, ce n'est pas de la négociation, c'est de la menace. Donc, il faut que, dans cette entente-là, on tienne compte de ces éléments-là. Et, lorsque ces éléments-là seront clairement définis et qu'on aura un processus de règlement, laissez faire les gens d'affaires, vous allez voir que ça va fonctionner. Ça va fonctionner.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Dubé.

M. Trudel: En vous remerciant. Pour ma part, j'aimerais revenir en vous indiquant que, quand nous emprunterions cette voie... La Colombie-Britannique a mené des études d'impact de telles ententes; pour chaque dollar investi dans un traité, dans une entente, cela provoque des retombées de 3 $ en développement économique en établissant des règles et des voies de développement pour les nations concernées.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Dubé, M. Lachance, M. Gagnon. La moitié de vos scieries sont dans mon comté. J'ai une grande admiration pour le travail que vous faites et la gestion forestière. Quand on dit «small is beautiful» et quand on voit le nombre d'années que vous opérez vos scieries, ça prouve certainement que vous avez respecté les normes forestières. Et, si vous êtes encore là, vous avez une expérience acquise qui n'est certainement pas négligeable, et soyez assurés de mon soutien à cet égard.

Quand vous dites: S'il n'y a pas de volumes de bois cachés, ce ne sera pas à nous autres à céder des volumes qu'on a déjà; quand vous dites que vous êtes prêts à faire affaires avec la nation innue, est-ce que vous dites que les petites scieries que vous êtes sont pas mal mieux placées que la grande industrie et que, si, éventuellement, il n'y a pas de volumes de bois cachés et qu'il fallait en trouver absolument dans le cadre d'une entente, vous souhaiteriez qu'on aille le chercher ailleurs que dans votre cour? Poser la question, c'est presque d'y répondre, mais j'aimerais vous entendre à cet égard.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): Et là il faut que je pèse mes mots, hein, pour ne pas faire d'impair. On ne dit pas d'aller chercher le bois dans d'autres industries. Au Saguenay?Lac-Saint-Jean seulement, au moment où on se parle, il y a 1 million d'hectares non productifs. Les remettre en production générerait 1 million de mètres cubes. Il y a peut-être des choses à faire là. Et je siégeais au CRCD avec les MRC et je leur disais: Faites l'évaluation des terres improductives que vous avez sur votre territoire, et je vous garantis que vous allez manquer de gens pour les aménager. Et il y a quelqu'un qui a levé la main qui a dit: C'est le cas, on n'a pas pu aménager tous les territoires qu'on voulait aménager, on a manqué de monde. Il y en a, du territoire à aménager. Ça prend de l'argent. On a entendu parler de rendement accru. Il y a des pistes là, il y a des pistes intéressantes. Mais ce qu'il ne faut pas non plus, c'est de dire: Regarde, on va redistribuer 250 000 m³, on va t'en enlever 10 à toi, puis aménage, là, puis là, dans 20, 30, 40 ans, tu auras ton 10 000 m³. Nous, là, c'est demain matin que ça prend notre bois.

n (12 h 10) n

Il faudra donc trouver une façon, composer avec ça pour que, tout en respectant les engagements du gouvernement présent dans l'entente, ce ne soit pas l'industrie qui en souffre, parce que l'industrie, contons-nous pas d'histoires, c'est l'économie, là. Je ne pense pas que les Innus, ce qu'ils veulent, c'est un transfert d'activités économiques des non-autochtones aux autochtones. La guerre va prendre tout de suite, c'est bien sûr. J'ai une industrie, moi, où mes employés, à un moment donné ? puis je l'ai déjà déclaré ? ils étaient en maudit: Ils vont nous enlever notre bois, puis là... Attends un peu, attends un peu, attends un peu là, ce n'est pas de même que ça se passe. Mais, quand ça décolle dans la population, il faut faire attention, là. Quand je disais tout à l'heure que ça va prendre du doigté, c'est ça que je veux dire. Si les gens ont l'impression qu'ils se vont voler leurs jobs, ce ne sera plus gérable, ça, cette entente-là, ni pour nous ni pour les Innus, puis, ce que M. Kurtness me disait, c'est bien la dernière chose qu'ils désireraient avoir. On a la chance, au Lac-Saint-Jean, d'avoir une communauté innue et une non-autochtone qui s'entendent relativement bien. Je pense que c'est presque un modèle si on compare à ce qui se passe à d'autres endroits où ça se tape sur la gueule assez régulièrement. Écoute, on a ça là, on a ça comme capital, il ne faudrait pas le débâtir. Il faut agir intelligemment.

Donc, il y a effectivement les industriels qui ne veulent pas perdre de volumes. Évidemment, quand tu as 1 million de mètres cubes, tu perds 10 000 m³, ça fait mal, c'est achalant, mais ça fait moins mal que quand tu en as 45 puis que tu en perds 10. De là ce qu'on disait tout à l'heure au niveau des territoires de trappe, les sites, tout ça. C'est le même principe. Tu sais, deux lignes de trappe dans un territoire de 1 million de mètres cubes... Nous autres, on a une aire commune de 70 000 m³. Sur une aire de trappe, il y a deux, trois sites patrimoniaux, tout ça, puis on perd 3, 4, 5 000 m³. Tabarnouche, ça va nous faire mal en maudit!

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Dubé. M. le député de Lac-Saint-Jean, ça va? Alors, M. le député de Roberval, vous avez trois minutes.

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je tiens à saluer les messieurs qui se présentent aujourd'hui: M. Lachance, M. Dubé et M. Gagnon. Je tiens à saluer également M. Godin, directeur général de l'entreprise P.H. Lemay.

Lorsque vous donnez votre liste de CAAF maintenant, est-ce que ça comprend, ça, également le bois des lots privés? Parce que vous avez quand même un potentiel.... Est-ce que vous en prenez, du bois des lots privés?

M. Dubé (Marc): Certainement.

M. Laprise: Vous en prenez.

M. Dubé (Marc): Certainement.

M. Laprise: C'est en plus de ce que vous avez déjà comme CAAF?

M. Dubé (Marc): Oui.

M. Laprise: Ça, c'est sur les terres publiques.

M. Dubé (Marc): Exact.

M. Laprise: Identifié sur les terres publiques.

M. Dubé (Marc): Exact, parce que le territoire privé, ce n'est pas une garantie. Tu en as une année; l'année d'après, tu ne l'as pas. Quelqu'un qui investit en disant: Je vais acheter du bois du privé, il peut être mal pris, là.

M. Laprise: Maintenant, je suis très heureux d'avoir devant nous ce matin des gens d'affaires qui sont prêts peut-être à collaborer, à ouvrir la voie à des partenariats avec les autochtones. Sachant que, au niveau de la main-d'oeuvre, dans la région comme dans bien d'autres régions, bientôt on en manquera, et sachant également que, du côté autochtone, il y a une clientèle de jeunes qui ne demanderaient pas mieux qu'à être formés puis à travailler, peut-être que vous aurez besoin également d'ouvrir des possibilités à ces jeunes-là, ce serait peut-être une alternative, autant dans la régénération de la forêt, dans le travail en forêt comme dans le travail des scieries. Parce que vous parliez tout à l'heure qu'il y a des secteurs qui n'ont pas été aménagés. Il y aurait peut-être, justement, cette ouverture-là pour donner du travail et puis, ensuite de ça, permettre à vos entreprises de récupérer des approvisionnements dans cinq ans, dans 10 ans, supplémentaires à ce que vous avez aujourd'hui.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): À cet égard-là, évidemment, nous, en ce qui concerne nos usines, on a évidemment un certain pouvoir décisionnel, on a une certaine action à faire. En ce qui concerne la remise en valeur de la forêt, c'est aux MRC puis c'est au gouvernement à y voir. Il va y avoir bientôt une autre commission parlementaire sur le rapatriement des redevances en région. Ce sera une très, très, très belle occasion d'aborder ce projet-là. On n'y manquera pas, nous, de le souligner de toute façon dans le mémoire qu'on va présenter à ce moment-là.

M. Laprise: Alors, deuxièmement, très rapidement, je poserais une question maintenant au ministre: Est-ce que le gouvernement va être en mesure d'accompagner ces gens-là dans une démarche de partenariat avec les autochtones? Est-ce qu'on va être en mesure d'accompagner ces gens-là?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. le ministre, une minute pour répondre.

M. Trudel: Tout à fait, tout à fait, parce que ça fait partie de la réalité. L'établissement des partenariats doit inclure l'accompagnement de l'État lorsque c'est souhaité, lorsque c'est souhaitable, lorsqu'on est avec l'entreprise privée. Fixer des règles, établir des mécanismes pour le règlement des différends, voilà des objectifs que nous poursuivons avec vous et avec les autres aussi.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, je vais donner la parole au député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, bienvenue aux représentants des scieries de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Et c'est très intéressant de vous entendre ce matin parce que, comme députés, on a besoin de votre aide. Parce qu'on a des grands principes, on a des décisions de la Cour suprême, on a un grand enjeu qui est devant nous, c'est-à-dire comment régler nos différends avec les premières nations du Québec, du Canada.

Mais il y avait l'aspect pratico-pratique, et votre son de cloche ce matin, comment... C'est notre grand devoir comme députés de retrouver ces genres de solutions. Est-ce qu'on peut le faire, mais sans vous mettre à terre? Ce n'est pas l'intérêt de faire faillite, vos entreprises. Ce n'est pas ça, l'objectif cherché non plus. Alors, comment faire les arbitrages nécessaires? Comment faire le partage nécessaire? Parce que, même dans votre présentation, vous avez dit dès le départ: Le statu quo, c'est inacceptable. On a juste à regarder à l'intérieur de ces communautés, tous les indicateurs qu'on peut choisir, il y a des problèmes quant au chômage, la pauvreté, espérance de vie, santé, formation. Alors, il y a un problème à régler ici.

Dans votre mémoire, c'est dit clairement qu'on cherche des choses claires. Les hommes d'affaires, si je peux généraliser, on veut mettre les choses, les règles sur la table, on va procéder comme ça. Si c'est ça que je dois protéger comme un site patrimonial, c'est ça que je vais faire, mais je veux quand même m'assurer que, quand j'envoie mes employés dans le bois pour couper, les choses sont claires et il n'y a pas un avocat à tous les 10 pieds à côté d'un arbre qu'il faut régler le différend: Est-ce que l'arbre est... Alors, je pense qu'on est...

Mais, par contre, quand on parle de partage de volumes, qui est la richesse en question dans votre industrie, vous êtes un peu réticents, et il faut étaler ça dans le temps. Et comment est-ce qu'on peut... C'est quoi, les conditions que les politiciens peuvent mettre en place pour assurer un meilleur partage? C'est quoi, les conditions peut-être que les politiciens peuvent mettre en place aussi pour s'assurer ces genres de partenariat? Parce qu'on ne veut pas le chômage dans vos entreprises. Ce n'est pas notre désir, ce n'est pas ça. Par contre, on a un fait historique à corriger. On a également des problèmes, entre autres, de chômage à l'intérieur des communautés autochtones au Québec. Alors, c'est quoi, les choses qu'on peut faire pour vous aider dans vos affaires, mais, en même temps, régler ce grand différend que nous sommes appelés comme société à faire?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): C'est une vaste question, hein? O.K., commençons par le début. D'abord, au niveau du 250 000 m³ qui... En fait, on parle de 172; il y en a déjà... Bon. Il faut s'asseoir avec les gens de la communauté innue pour voir. D'abord, si on dit... Il faut avoir un certain étalement, puis, quand il va s'en dégager un gros paquet, bien, nous autres, on va en prendre un petit paquet, puis, eux autres, un plus gros paquet. Il faut qu'ils soient d'accord. S'ils ne sont pas d'accord, le problème, on discute rien pour rien.

Est-ce qu'il y a des possibilités? Bien, eux, ils ramassent un gros paquet de bois puis... bon, est-ce qu'on peut s'entendre pour l'utilisation puis sur le prix? Ils peuvent faire l'exploitation; nous autres, l'avoir... Si on pouvait s'asseoir avec eux puis regarder, si on pouvait s'asseoir avec eux puis dire: Écoutez, avez-vous une ouverture? On peut-u parler un petit peu pour voir? On peut-u explorer peut-être les choses qu'on pourrait faire pour qu'on puisse, nous, essayer d'éliminer ou de diminuer nos inquiétudes puis, vous autres, atteindre vos objectifs? On ne l'a pas fait. Alors, tout le monde est poigné dans cette grande négociation-là, et peut-être que ce n'est pas demain matin que ça peut se faire, mais peut-être qu'en cours de négociations ça vaudrait la peine de s'asseoir puis voir. Peut-être qu'on va arriver à la conclusion en disant: Non, regarde, ce n'est pas possible là, ça va être une solution politique qui va embarquer là-dedans. Mais tout à coup qu'on pourrait passer au-delà de la politique puis régler ça nous autres mêmes avec eux autres. Si on enlève cette inquiétude-là, tabarnouche! c'est la moitié de nos problèmes qui est réglée.

n (12 h 20) n

M. Kelley: Je trouve ça très intéressant, parce qu'il y a une chose que les Innus ont dite hier, c'est... ils veulent aussi être traités d'égal à égal. Et vous avez dit la même chose aujourd'hui, qu'en affaires, à la table, on veut que tout le monde soit sur le même... Et je regarde dans le défi de... les projets de deuxième transformation par exemple où le bois, le volume accordé aux Innus ne sort pas de la région. Est-ce que c'est possible d'envisager les partenariats, qu'on peut travailler ensemble pour s'assurer que la deuxième transformation se fait en région? Je pense que c'est quelque chose que nous avons écouté, pas nécessairement à l'intérieur de ce dossier, mais c'est une demande qui vient des régions aussi. Est-ce que c'est possible de... Et je suis heureux d'entendre d'égal à égal, mais je veux juste souligner que les Innus ont dit la même chose, qu'ils veulent être à la table comme égal et que, dans le passé, ils n'avaient pas ce sentiment. Alors, dans le processus qui est proposé par M. Chevrette, hier, d'avoir des tables sectorielles, des consultations, soit à l'intérieur de ça ou même à part, vous êtes confiants qu'on peut en arriver aux solutions qui vont à la fois protéger vos intérêts, mais également aller de l'avant avec un meilleur avenir pour nos voisins autochtones.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): Une chose est sûre, on peut en discuter. On ne se connaît pas beaucoup, hein. On ne se connaît pas beaucoup, les Innus puis nous autres. On a rencontré M. Kurtness, très sympathique, M. Moar. Bon. Mais, un jour, on va s'asseoir pour parler argent, pour parler revenus. On ne le sait pas, peut-être que, lui, il est plus habitué à négocier avec des non-autochtones. Mais ils ont leur façon de faire, puis, je l'ai dit tout à l'heure, il y a des choses qu'on n'accepte pas chez eux puis il y a des choses qu'ils n'acceptent pas chez nous, puis, avec le temps, on va apprendre à passer par-dessus ça, puis... Bon. Mais il faut apprendre. On ne s'est pas assis avec eux autres, ils ne se sont pas assis avec nous autres, puis on n'a pas négocié, puis on ne sait pas comment ils marchent, puis on ne sait pas... une confiance puis... On s'assoit avec des non-autochtones des fois puis on n'a pas confiance. Il faut s'asseoir avec des autochtones puis gagner la confiance. Mais il faut avoir la chance de le faire. On ne l'a pas fait, on ne l'a pas essayé. Là, il y a un 250 000 m³ de bois qui s'en vient. Ah! bien là, on peut s'asseoir puis négocier, parler. On va parler. On va-tu s'entendre? Je ne le sais pas. J'ai négocié avec des non-autochtones puis j'ai eu l'occasion de négocier avec des Allemands, avec des Français, avec toute sorte de monde, puis, des fois, on s'entendait puis, des fois, on ne s'entendait pas. Bon. Puis ça va être pareil là, là. Si, moi, je ne m'entends pas avec, peut-être que M. Lachance va s'entendre avec. Ça dépend comment est-ce que chacun veut mener sa négociation. Mais, au moins, là, ils ont des choses qu'ils peuvent négocier puis des choses... on peut s'asseoir avec eux autres, puis apprendre à se connaître, puis apprendre à se faire confiance aussi, parce que, une fois que tu t'es connu, tu te fais confiance. Au début, ça prend quatre avocats puis des documents épais de même, puis, plus ça va, plus tu t'entends, moins ça en prend, puis, en dernier, ça prend un coup de téléphone. Mais, ça, il faut l'apprendre.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci. Il y a...

M. Kelley: Juste avant de passer la parole à ma collègue, juste pour dire que vous avez également beaucoup d'expertises à partager, et je pense que, quant à la formation, quant à comment gérer une scierie, c'est intéressant pour l'avenir un certain partage de vos expertises avec les Innus. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, Mme la députée de Jonquière, vous avez quatre à cinq minutes, pas plus.

Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Alors, merci, M. Dubé, M. Lachance et M. Gagnon. Moi, ma question, c'est que, au moment où on se parle, on a déjà les Industries Piekouagame qui détiennent un contrat d'approvisionnement sur une aire commune. Donc, la gestion de cette aire commune là se fait avec des représentants québécois, des industries québécoises. Comment ça se passe sur le terrain, cette gestion d'aire commune?

M. Dubé (Marc): Ça, je ne peux pas vous répondre, Mme Gauthier. Il faudrait poser la question à Charles Paul ou, bon, à des gens du ministère. Eux, ils pourraient vous dire comment ça fonctionne, alors.

Mme Gauthier: Sauf qu'on peut comprendre qu'il y a déjà une expérience de covoisinage ensemble sur l'exploitation de la forêt, sur cette aire de gestion.

M. Dubé (Marc): Oui, mais, à ce que je comprends... Mais là vous me demandez de m'avancer sur des choses que je ne suis pas certain. Moi, ce que je comprends, puis c'est une méthode de gestion qui semble tout à fait similaire à la nôtre, et, quand j'écoute les revendications innues, je ne sais pas si ça correspond exactement à la façon dont ils veulent gérer, mais, ça, ça leur appartient, c'est à eux autres. On devrait leur demander à eux comment ça se passe avec eux autres parce qu'ils ont le bon exemple, ils ont une scierie de 78 000 m³ sur leur territoire, avec leurs gens. Je pense que les meilleurs interlocuteurs pour vous répondre, c'est eux. Je ne veux pas m'avancer...

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Dubé. Mme la députée.

Mme Gauthier: Oui, une autre question. Vous avez parlé avec... vous avez manifesté de l'inquiétude sur les volumes disponibles sur le territoire du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Moi, j'imagine qu'effectivement le gouvernement du Québec va faire une étude d'impact sur toutes les réalités et les inconvénients qu'on a dans nos forêts, à savoir... vous avez parlé de zones de protection, vous avez parlé des lignes de trappe, maintenant des volumes qu'on devra rendre disponibles pour la communauté innue. Est-ce que vous voulez participer à ces études d'impact?

M. Dubé (Marc): Certainement.

Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la députée. M. Dubé.

M. Dubé (Marc): Je m'excuse. Certainement, certainement, parce qu'on est touché. D'ailleurs, il devrait, à mon avis, y avoir plusieurs industriels d'impliqués et, évidemment, les gens de la communauté innue. Plus on va se parler, plus on a des chances de s'entendre et de se comprendre, parce que, des fois, on s'entend mais on ne se comprend pas.

Mme Gauthier: Le Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est une adhésion qui est volontaire? Est-ce que vous avez demandé effectivement à la scierie qui est sur le territoire de Mashteuiatsh de faire partie du Réseau?

M. Dubé (Marc): Oui.

Mme Gauthier: Oui?

M. Dubé (Marc): Oui, parce que, à l'époque, il y avait 11 scieries indépendantes et, malheureusement, après plusieurs tentatives ? puis on respecte ça ? M. Charles Paul a décidé qu'il ne voyait pas vraiment d'intérêt pour le moment à intégrer notre groupe. Est-ce que ça a changé aujourd'hui? Je ne le sais pas, on n'a pas, bien honnêtement, fait d'autres démarches pour l'intégrer à notre groupe. Mais, ça, c'est un choix qu'il faut respecter.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Dubé. Merci, Mme la députée. Alors, M. le député de Saguenay, vous avez la parole.

M. Corriveau: Oui. Au niveau des programmes d'emplois, je sais que, par exemple, dans mon comté, la compagnie Kruger a fait des ententes pour ce qui est d'avoir de l'employabilité pour les Innus. Est-ce que dans le cas de vos scieries, là, celles qui sont membres, vous avez exploré cette possibilité-là, déjà, actuellement, sans même qu'il y ait des contraintes rattachées à l'Approche commune, de façon volontaire là, d'embarquer dans l'idée d'offrir des programmes d'emplois pour que certains Innus de la région puissent travailler dans les scieries qui sont membres chez vous?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): À ma connaissance, non. Peut-être que mon collègue de la Scierie P.H. Lemay pourrait... Non plus? Bon, à ma connaissance, donc, dans nos organisations, il n'y a pas eu de démarches. Ça ne signifie pas que certains de nos entrepreneurs n'emploient pas d'Innus, ça signifie qu'il n'y a pas eu de programme ou d'action systématique de faite pour intégrer des Innus à notre personnel.

Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député.

M. Corriveau: Oui, bien, peut-être... J'imagine que vous êtes quand même disposé à explorer ça, selon ce que vous avez mentionné tantôt au ministre, là.

Dans le comté de Saguenay, il y a également des petites scieries qui sont indépendantes. Je pense à Boisaco, Bowater, puis PHL, qui est Produits forestiers... plutôt PFL, Produits forestiers Labrieville. Est-ce que vous avez des discussions avec eux afin de voir s'ils étaient pas mal du même son de cloche que le vôtre concernant la position que vous avez prise, là, par les propos que vous avez tenus ici aujourd'hui?

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, M. Dubé.

M. Dubé (Marc): Non. Ce sont des organisations qui possèdent plusieurs 100 000 m³ d'approvisionnement. Le regroupement de nos organisations, c'est un regroupement... on appelle ça... nous, on qualifie d'intérêt, hein, on a à peu près les mêmes intérêts, on est à peu près de la même taille, à peu près le même fonctionnement, on se spécialise un peu dans les mêmes produits. Et, à l'époque, on n'avait pas jugé pertinent d'intégrer des entreprises de grande taille à notre groupe.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, merci, M. Dubé, M. Gagnon, M. Lachance. Alors, la commission des institutions suspend ses travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi en cette même salle, pour les reprendre dans cette même salle. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

 

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Lachance): S'il vous plaît, à l'ordre! Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte et je rappelle le mandat de la constitution...

Une voix: De la commission.

Le Président (M. Lachance): De la commission. Oh! Ha, ha, ha! Le mandat de la commission des institutions, c'est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur l'Entente de principe d'ordre général entre les premières nations de Mamuitun et Natashquan et le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada.

Alors, nous en sommes maintenant à la deuxième partie de cette journée. Et, tour à tour, nous entendrons le représentant de la ville de Roberval; ensuite, ce sera au tour de la MRC de Maria-Chapdelaine; par la suite, le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay?Lac-Saint-Jean; et la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec.

Alors, je souhaite la bienvenue à M. Denis Lebel, maire de ville de Roberval, et je vous indique que vous avez une période de 20 minutes pour nous faire part de vos commentaires sur ce projet d'entente. M. Lebel.

Ville de Roberval

M. Lebel (Denis): Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre Trudel, Mmes, MM. membres de la commission ? je vais saluer, bien sûr, le député du comté de Roberval, M. Benoît Laprise, que je salue particulièrement ? donc, j'ai le plaisir de représenter aujourd'hui la ville de Roberval.

Élu en novembre 2000, je me suis fait un devoir, depuis mon élection, de suivre religieusement tous les travaux alentour du projet qui a été mis sur la table avec les Innus. Toute la littérature, toutes les rencontres auxquelles j'ai pu assister, je me suis fait un devoir d'en prendre connaissance pour essayer de me faire une tête là-dessus et qu'on ne me dise pas que nous étions favorables à une entente que parce que nous étions les voisins. On a assimilé, on a regardé qu'est-ce qu'il en était là-dedans, et la position de la ville de Roberval l'est par choix et par connaissance du sujet, et la certitude que ces choix-là permettront à nos enfants et à nos petits-enfants d'avoir un meilleur futur.

J'ai commencé à analyser d'abord le contexte. Je n'ai pas vu beaucoup, depuis mes deux ans d'élection, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial s'entendre sur quelque chose pour filer vers un règlement. Ça m'a tout de suite interpellé et ça m'a dit... ça m'a permis de constater que c'était peut-être parce que ça a du bon sens.

Deuxième étape, hier, je m'aperçois que les trois partis présents ici sont aussi d'accord avec une entente éventuelle. Ça doit avoir encore plus de bon sens. Je ne dois pas être tout seul à penser que ça a de l'allure. Donc, c'est sur ces principes-là et en regardant l'avenir que la ville de Roberval vous propose son opinion.

M. Chevrette a rapporté très fidèlement, je pense, ce qui a été véhiculé sur le terrain et ce qu'il a senti. Et, bien sûr, vous pourrez constater, avec la lecture et les éléments que je vous amènerai dans le mémoire de la ville de Roberval, que nous allons réaffirmer beaucoup de choses que vous avez évidemment entendues depuis le début de l'ouverture des travaux.

Au Saguenay?Lac-Saint-Jean, la municipalité dont le territoire est le plus touché par l'entente de principe, c'est Roberval. Il est donc du devoir du conseil municipal de vous faire part de son opinion et de ses recommandations sur cette entente de principe.

Roberval et Mashteuiatsh, c'est un vieux couple. En 2005, Roberval et, en 2006, Mashteuiatsh, bien sûr la communauté comme nous la connaissons... Je ne veux pas revenir sur le débat des années millénaires des Innus sur nos territoires, là, mais je vous dis que ce qu'on connaît des communautés actuelles, les deux communautés fêteront leurs 150 ans d'existence. Donc, il y a depuis au moins 150 ans où nos populations se côtoient et vivent en harmonie, et ce, malgré des contextes sociaux et économiques différents.

C'est sur la base de cette cohabitation qu'il doit y avoir une entente permettant aux deux peuples de continuer à vivre dans le plus grand respect. Toutes les régions du Québec réclament davantage d'autonomie, de nouvelles sources récurrentes de financement, de la décentralisation et, voire même, des gouvernements régionaux. Alors, comment ne pas comprendre la volonté des Innus de se donner plus d'autonomie gouvernementale et financière?

La vie de tous les jours avec les Innus à Roberval, bien c'est une réalité territoriale qui est pas mal différente de la plupart des autres milieux touchés par l'entente de principe et ce que j'ai entendu depuis que je suis ici, hier matin. Chez nous, nos deux populations vivent ensemble le quotidien. Nos jeunes partagent les bancs d'école, des activités sportives et de loisir. Sans brimer leur culture, nos voisins participent activement à notre vie culturelle et l'enrichissent de leur présence. Plus encore, nos jeunes se fréquentent et forment souvent des couples et des familles.

La population de Mashteuiatsh s'implique aussi, bien sûr, dans de nombreux organismes et clubs sociaux de notre ville de Roberval. Que dire de la Traversée internationale du lac Saint-Jean, qui est le plus important et le plus prestigieux marathon de nage longue distance au monde, qui a acquis ses lettres de noblesse, entre autres, par la sécurité sur le lac qui est offerte grâce à la présence des guides autochtones qui, grâce à leurs connaissances de navigation de ce merveilleux plan d'eau, sont capables de nous aider à assurer cette sécurité? Il faut vivre aussi un départ du marathon de la relève de la plage Robertson, à Mashteuiatsh, pour voir les milliers de personnes présentes partager ensemble l'amour que nous avons pour ce grand lac.

De nombreux exemples peuvent vous être donnés. Grâce au partenariat de nos deux communautés, notre région accueille annuellement le raid Harricana, le plus grand raid de motoneige au monde. Et, cette année, notre milieu accueillera pendant trois jours les préambules au départ, et le départ se fera de chez nous, et c'est toujours dans le partenariat que nous avons ensemble. La liste des exemples de bon voisinage inclut des tournois de hockey comme dans bien des milieux, le partage de notre maison de jeunes, notre agence Grands Frères, Grandes Soeurs. J'ai le plaisir d'être président du comité de sécurité incendie de notre MRC. Nous sommes la première MRC, le Domaine-du-Roy, au Québec où la communauté autochtone travaille avec nous sur la table pour le schéma de risque en incendie. Et il y en a une longue lignée d'éléments qui démontrent le partenariat que nous vivons ensemble.

Élu en novembre 2000, notre conseil travaille à diversifier l'économie locale. En novembre 2001, nous avons tenu des états généraux municipaux auxquels 200 décideurs de notre milieu ont participé. Notre population nous a alors demandé avec conviction de renforcer nos liens économiques avec nos partenaires de Mashteuiatsh. Dans cet élan, une rencontre historique eut lieu en février 2002. Pour la première fois en 150 ans, les élus des deux communautés se rencontraient pour partager ensemble leurs projets et leur vision d'avenir.

En novembre 2002, tout récemment, la ville de Roberval faisait l'acquisition de 3,5 millions pi² de terrain pour créer un nouveau parc industriel. Ces terres sont situées volontairement entre Mashteuiatsh et Roberval, et nous espérons que cette acquisition permettra à des entreprises de créer de l'emploi pour nos jeunes sans égard des frontières géographiques d'où ils proviennent. Ce projet est accueilli favorablement par le Conseil des Montagnais du Lac-Saint-Jean qui nous a fait parvenir une lettre d'appui en ce sens et qui nous assure de son partenariat pour continuer les démarches pour réaliser ce parc industriel.

Un exemple qui peut être anodin, mais, pour imager l'importance de la présence des Innus à Roberval ? des Innus et des Attikameks, devrais-je dire, parce que je parlerai d'aspect commercial ? voici un exemple. Comme la plupart des centres commerciaux de nos municipalités, le message d'accueil du Carrefour jeannois de Roberval est bilingue, sauf que ce n'est pas «welcome et thank you ou bienvenido et gracias» qu'on peut y lire, c'est «kuei» et «niaut». Ce qui démontre bien l'importance de la population autochtone dans nos places d'affaires de Roberval.

n (14 h 10) n

Comme vous le constatez, nos liens avec les Innus sont très étroits, et l'histoire qui les supporte devrait crédibiliser notre position. Nous trouvons particulier que des milieux qui n'ont aucun contact, aucune vie quotidienne avec les Innus veulent nous faire la leçon et nous enseigner quelle devrait être notre réaction vis-à-vis de ce partage de vie.

Pourquoi une entente est-elle nécessaire? Qui n'a pas entendu ces affirmations: Les Indiens, ils sont heureux. Ils ne paient pas de taxes, ils ne paient pas d'impôts. On les paie à rien faire. À Mashteuiatsh, le taux de chômage flirte avec les 40 %. Le taux de suicide est l'un des plus élevés au monde. Les dépendances de toutes sortes y sont omniprésentes. Les Indiens sont-ils vraiment si heureux? Et l'avenir, ça ressemble à quoi? Une démographie qui explose, une population dont 60 % a moins de 30 ans, et 30 % de celle-ci, moins de 15 ans. Si rien n'est fait, quelle sera la pression sociale et financière dans 20 ans? Nous entendons dire régulièrement dans nos milieux: Demain matin, il faut qu'ils deviennent, à part entière, des citoyens de notre province comme vous et moi.

Il y a beaucoup de partenaires d'affaires qui aimeraient bien se débarrasser de leurs partenaires d'affaires le lendemain matin en disant: Tu n'as aucun droit, va-t'en. Il y a bien des couples, quand ils pensent à divorcer, qui pensent que, le lendemain matin, tu aurais... Mais ce n'est pas comme ça que ça se passe dans la vraie vie. Il y a des droits, et ces gens-là ont des droits, et il faut absolument qu'ensemble nous ayons une vision d'avenir pour empêcher... On entend parler, quelquefois, du futur de façon très dure en se disant... Bien, moi, je pense qu'on doit, aujourd'hui, prendre des décisions qui, demain, auront permis à ces jeunes-là d'avoir du travail.

La vraie vie, c'est aussi... Parce que j'insiste parfois là-dessus, puis on me dit: Vous en parlez trop. Toutes les communautés du nord de la province, incluant Roberval et les villages alentour, on a tous des problèmes sociaux et économiques importants. Oui, c'est très vrai. On travaille à dynamiser l'économie de nos secteurs, et ce n'est pas facile. Mais je peux vous dire qu'il y a des choses qui se passent à Mashteuiatsh qui ne se passent pas à Roberval. Et ça, c'est la vraie vie. Quand la communauté, avec le chef M. Moar et son conseil de bande, organise une marche pour contrer le suicide puis qu'une semaine après il y a un jeune qui s'enlève la vie, ça, c'est la vraie vie. Quand, l'année dernière, cinq jeunes se sont ramassés aux soins intensifs, à l'Hôtel-Dieu, à Roberval, pour avoir consommé du PCP de mauvaise qualité puis qu'on a réussi à en sauver une... de toute la misère du monde, les médecins ont réussi à la sauver puis, un mois après, elle s'est enlevé la vie, ça, c'est aussi la vraie vie. Il y a un mois, il y a un jeune de 21 ans de Mashteuiatsh qui s'est encore enlevé la vie. C'est sûr qu'on va me dire: Tu joues du mélo. Mais c'est ça qui se passe sur le terrain. Et, si on ne fait rien, qu'est-ce que ça va être demain?

Comment vouloir bâtir un avenir à ces jeunes en n'ayant pas la possibilité d'être propriétaires des terres qu'ils occupent? Comment créer de l'emploi pour les jeunes si les entrepreneurs ont de la difficulté à avoir accès à du financement?

Quels sont les droits actuels des autochtones pour la chasse, la pêche, le piégeage, l'occupation du territoire? Les jugements récents de la Cour suprême ont reconnu ces droits très clairement. Ne vaut-il pas mieux clarifier ces pratiques pour éviter une escalade de l'incompréhension?

Nous ne sommes pas historiens ou avocats, les membres du conseil de Roberval, mais, pour les raisons énoncées précédemment, nous pensons qu'il doit y avoir une entente négociée et permettre un processus de consultation avec les personnes et les organismes concernés. Et vous comprendrez, bien sûr, quand j'ai entendu, hier, dire par M. Kurtness que les Innus étaient d'accord et que M. Chevrette en rajoute avec les recommandations 1 et 26 de son mémoire, nous sommes en total accord avec ça et nous avons la certitude que c'est un élément important qui va faire cheminer les populations québécoises des régions concernées.

Le projet d'entente de principe, maintenant. Pour le conseil municipal de Roberval, le contenu de l'entente de principe confirme la volonté des Innus d'assumer leurs responsabilités en regard du futur de leur peuple. L'autonomie gouvernementale demandée leur permettra la mise en place de mesures fiscales, brisant ainsi les cercles vicieux actuels. Nous reconnaissons le courage des leaders innus de vouloir instaurer des impôts sur le revenu et des taxes à la consommation leur permettant à long terme les moyens de leurs ambitions et on sait que, dans leurs communautés, ce ne sera pas une lutte facile. Puis, avec ce que j'ai entendu ce matin puis hier de d'autres communautés innues, on voit que c'est un peu innovateur dans les communautés innues, et je trouve ça très courageux. Les capitaux versés par les deux paliers de gouvernement permettront l'amorce d'un développement socioéconomique nécessaire pour enrayer ou, au moins, diminuer les fléaux sociaux touchant ces communautés.

La question des redevances sur les ressources naturelles est aussi très claire pour notre conseil. Nous sommes d'accord avec le principe, sauf qu'il doit être aussi applicable aux habitants des régions dites régions-ressources. M. Trudel, je vous ai bien entendu hier et j'en étais heureux. À ce jour, cette dénomination ne correspond qu'à des paroles, mais elle prendrait tout son sens par la mise en place de cette mesure. Pourquoi les redevances des Innus ne feraient pas partie d'une enveloppe régionale gérée par le CRCD qui remettrait les pourcentages aux instances concernées? Les modalités sont à voir, mais je comprends que le cheminement se continue et que la commission qui fera son travail tout autour des régions-ressources du Québec aura sûrement des choses à ramener sur la table.

Nous pensons aussi que les 250 000 m³ de bois consentis à Mashteuiatsh permettront des partenariats qui seront créateurs d'emplois par l'implantation d'entreprises de deuxième, troisième et quatrième transformation. Bien sûr, dans notre esprit, ce n'est pas d'amputer, entre autres, les scieries indépendantes de ces CAAF là, mais c'est de trouver des façons de le faire. Et j'ai entendu la question qui a été amenée à M. Trudel aussi ce matin qui était celle: Où est-ce qu'on va prendre les 250 000 m³ de CAAF de bois? Il y en a peut-être encore de disponible, M. Kelley en a parlé aussi ce matin. On verra qu'est-ce qu'il en est, mais c'est très important de ne pas habiller Jacques... Vous connaissez l'adage.

Nous trouvons aussi intéressant de prévoir un mécanisme permettant la révision de l'entente après sept ans. Nous pensons qu'il y a plus d'avantages que de risques à le faire, et ça va éviter que, dans le temps, perdurent des choses qui ne portent pas le voyage.

Quels sont les impacts pour la population de Roberval maintenant? Pour la ville de Roberval, l'impact le plus important est causé par l'agrandissement de l'Innu Assi vers la route 169. Vingt et une propriétés... 21 parties de propriétés totalisant, en 2003, une évaluation foncière de 1 719 300 $ et des revenus annuels de taxes foncières de 31 463,19 $. Pour une ville de 11 000 habitants ayant perdu 9 % de sa population dans les 10 dernières années et n'ayant aucun surplus accumulé à notre arrivée au conseil de ville en l'an 2000, cette somme de 31 000 est importante. Si les Innus ont un horizon de 30 ans pour arriver à une autonomie financière, nous nous servirons du même horizon pour vous faire savoir que la ville de Roberval désire recevoir 1 419 351 $ en compensation pour cette perte de territoire. Cette somme serait versée à la ville de Roberval, libre d'engagement, qui l'utiliserait pour favoriser son développement économique sous toutes ses formes. Ce qui pourrait se jumeler à ce que M. Chevrette a amené hier, parce que je pense qu'il a entièrement raison de dire que les communautés voisines devront avoir les moyens aussi d'être partenaires en affaires avec les Innus, et qu'à l'intérieur du fonds sur les ressources naturelles régionales les communautés voisines puissent avoir un avantage, je pense que c'est important.

Nous devons aussi nous assurer du respect des droits des 21 propriétaires touchés par l'entente de principe. Pour quelques-uns d'entre eux, voir morceler leur terre agricole en deux parties est inacceptable. Nous devons trouver un mécanisme permettant à ces propriétaires d'être écoutés et que les objectifs de paix sociale soient maintenus. Encore là, M. Chevrette en a parlé hier, et c'était intéressant de voir que M. Chevrette vous a soumis une proposition dans ce sens-là. Nous avons, sur le territoire, un propriétaire dont la maison et une partie de ses bâtiments, sa grange, demeurent à Roberval, et le reste de ses terres seront à Mashteuiatsh. Donc, trouvons un mécanisme qui permettra à tout le monde d'être bien là-dedans. Et on trouvera sûrement, j'en suis certain, une façon de le faire.

Notre conseil pense qu'il faut se doter d'une vision d'avenir et favoriser l'avancement des travaux pour en arriver à une entente. Cependant, il est de notre devoir de nous assurer que les droits territoriaux et financiers de notre population soient respectés.

Dans l'accompagnement des populations concernées par la mise en oeuvre de l'entente, il sera nécessaire de bien faire comprendre que cette mise en place se fera graduellement. Dans l'esprit des spécialistes que j'entends, moi, depuis que j'écoute et que je lis là-dessus, on parle d'un horizon de 30 ans pour arriver à l'autonomie financière. Je pense qu'on devra faire comprendre ça à nos gens pour qu'on comprenne que ce n'est pas demain matin que tout va se régler.

Un questionnement demeure entier aussi ? puis on l'entend régulièrement dans nos milieux ? c'est la capacité des communautés autochtones à gérer cette entente de principe et les argents nouveaux qui arriveront. Nos populations locales devront, selon nous, être considérées lorsque viendra le temps d'associer des partenaires à ces projets de développement. Cela prendra beaucoup d'ouverture de la part des leaders innus, parce que des consultants dans tous les domaines, il y en a aussi des gens compétents dans nos régions et dans les voisins des terres innues.

Nous pensons aussi qu'un comité régional de suivi devra être mis en place. Il y aura sûrement des zones grises et des périodes plus tumultueuses dans la mise en oeuvre d'un éventuel traité. Il faut prévoir un fonctionnement qui permettra aux régions de faire face à ces situations et d'effectuer les changements le plus rapidement possible. Encore là, M. Chevrette y fait référence aux recommandations 28 et 29.

n (14 h 20) n

Si le Innu Aitun ? la pratique de la chasse, de la pêche, du piégeage, de la cueillette des petits fruits ? est un patrimoine essentiel pour les Innus, il l'est aussi pour les populations non autochtones des régions concernées. Puisque la négociation n'est pas terminée pour ces sujets, incluant aussi... ? on connaît la participation réelle et les autres ? nous estimons que les populations régionales devraient être associées à ces discussions pour éviter toute controverse et assurer la viabilité de l'après-traité. Il y a aussi l'aspect de la subsistance qui est un élément important sur les terrains voisins. Pour nos populations, puis ce que j'entends souvent, quand des Innus financièrement aisés vont abattre un orignal à l'extérieur des périodes de chasse... Les gens, chez nous, trouvent ça anormal. Encore là, M. Chevrette vous recommande qu'il y ait plus de transparence à ce niveau-là puis que les pratiques soient connues.

Par contre, je dois vous dire quelques mots sur la ouananiche. J'ai le plaisir d'être coordonnateur d'un comité sur faire le point et la relance de la ouananiche sur le lac Saint-Jean, et les premiers qui ont parlé d'arrêter la pêche, si le besoin était là, si le besoin était essentiel, c'est les Innus de Mashteuiatsh. Donc, la conscience sur la pérennité des ressources, ce n'est pas quelque chose qu'on va leur imposer, ils l'ont déjà et depuis longtemps.

La stratégie de communication devrait faire valoir aussi les avantages de conclure une entente négociée de façon beaucoup plus marquée. Dans notre région, la tribune de la polémique devrait être occupée aussi par des représentants du gouvernement du Québec et du Canada. Ce n'est pas aux Innus à venir défendre l'entente devant notre nation. Les représentants désignés par les gouvernements devront répondre aux faussetés qui pourront être véhiculées et fournir l'argumentaire nécessaire pour favoriser la compréhension des populations. Et, là-dedans, bien sûr, les médias ont un rôle très important à jouer.

Quand j'ai écouté, hier, à la télévision, à une station importante, que, pour faire avancer le dossier dans les communautés québécoises, on a assis trois personnes qui sont contre l'entente, ça fait pas mal avancer les débats, ça. Quand ce que j'entends, c'est des gens qui connaissent très peu les éléments de l'entente et qui ne sont pas capables d'argumenter sur le fond de l'entente, mais qui sont contre pour être contre, je pense qu'on a un gros, gros travail à faire au niveau de la communication, où il y a un effort qui a été fait avec la présence de M. Chevrette sur nos terrains, mais on n'a pas débattu, et il y a encore des gens qui animent des stations... des lignes ouvertes où on entend dire pas n'importe quoi, mais pas très loin. Je lisais, ce matin, dans un journal que l'entente permettrait aux Innus de chasser et de pêcher sur 300 000 km². Ils ont déjà ces droits-là, ce n'est pas l'entente qui leur donne. Donc, ça démontre encore à quel point il y a de l'incompréhension de la part même des médias importants.

Conclusion. Pour la ville de Roberval, l'un des éléments les plus importants, c'est qu'au terme de l'actuel processus nos liens avec nos voisins et amis de Mashteuiatsh soient encore plus forts, plus harmonieux et respectueux des attentes de nos deux communautés. Nous savons tous que l'ignorance est source d'endoctrinement. Ne laissons pas des esprits mal renseignés, pas plus que des visées politiques ou électoralistes, saborder ce projet. Nous sommes condamnés à vivre ensemble, et il serait souhaitable de le faire dans une paix sociale durable. Le développement des régions du Québec est essentiel, et il doit être fait en partenariat avec les peuples qui y habitent. C'est dans la dignité et la fierté que les populations de Roberval et Mashteuiatsh ont vu naître, grandir et vieillir leur population, et nous souhaitons qu'il en soit ainsi encore très longtemps. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le maire Lebel, de Roberval. Votre message est très clair et très limpide. Cependant, j'imagine qu'il y aura des questions et des échanges et, tout de suite, j'indique au ministre, qui va débuter, que deux des collègues du côté du groupe parlementaire formant le gouvernement ont manifesté le désir d'intervenir. M. le ministre.

M. Trudel: Merci beaucoup, M. le Président. M. le maire de Roberval, bienvenue. Il y a une belle expression anglaise: «You make my day.» Mon Dieu...

Une voix: ...

M. Trudel: Oui. Il y a, en vous écoutant, la fierté de notre nation, la fierté d'appartenir aussi à cette formidable région, Saguenay?Lac-Saint-Jean. C'est tout un reflet que vous nous présentez aujourd'hui, et vous êtes, quant à moi, parfaitement le reflet de l'ouverture des Québécois aux nations, à l'établissement de règles pour vivre harmonieusement sur notre territoire et vous manifestez un sens des responsabilités civiques qui doit être cité en exemple à travers tout le Québec et qui nous encourage tous à poursuivre nos efforts de compréhension pour en arriver à ce que mutuellement nous convenions d'ententes sur l'exercice des droits des uns et des autres sur le même territoire.

Je pense que votre attitude, l'attitude de votre conseil municipal doit être louée publiquement, et la façon dont vous envisagez la suite du monde, la suite des choses est un puissant stimulant pour ceux et celles qui ont les responsabilités de toutes parts, dans les nations concernées, au gouvernement, dans l'opposition, dans les partis politiques, de poursuivre le travail avec grande intensité et que, s'il y a des moments où on se demande, comme vous, suite à des remarques que j'ai entendues, moi aussi, ce matin de certains autres leaders de votre région, là, vous y avez fait allusion... Mais, ma foi, il faut compter sur la détermination d'hommes et de femmes comme ceux et celles qui se retrouvent à votre conseil et sous votre direction pour poursuivre le travail intensément pour en arriver à un traité qui nous permettrait d'avoir des règles pour le vivre en commun, le vivre en commun sur notre territoire.

M. le maire, vous nous avez aussi aiguillés, en quelque sorte, sur déjà une expérience de partenariat que vous avez mise en marche, que vous êtes à mettre en marche, un parc industriel conjoint, commun avec la communauté de la Mashteuiatsh. Pouvez-vous élaborer davantage? Quel est ce projet? Comment il pourrait fonctionner? Et comment ce partenariat peut-il être vécu par une municipalité avec, bien, ses voisins qui deviennent partenaires?

M. Lebel (Denis): D'abord, M. le ministre, présentement, c'est un parc industriel qui serait propriété de la ville de Roberval. C'est un choix que nous avons fait pour bâtir ce nouveau parc là en direction de la communauté de Mashteuiatsh. Bretelle de voie ferrée, possibilité d'un boulevard industriel qui rattacherait la route 169 à la route qui mène à Mashteuiatsh, mais ça demeure une propriété robervaloise.

Au niveau du partenariat, les discussions que nous avons eues sont celles d'un support de la communauté et d'éventuelles démarches de support à nos démarches. Par contre, je dois vous dire que l'Innu Assi qui s'agrandirait à Roberval, des terres qui deviendraient autochtones vont vraiment nous créer l'opportunité de développer ensemble un parc industriel qui sera, celui-là, plus conjoint, peut-être dans une deuxième phase.

Mais, au moment où on se parle, ce qui est sur la table, c'est que nous avons acquis des terrains qui ne sont pas tellement loin de la communauté de Mashteuiatsh et nous avons l'intention d'établir avec eux des partenariats. Et on a déjà créé l'ouverture que nous allons agrandir, parce que prochainement nous avons une autre rencontre de prévue, les deux conseils, pour continuer nos réflexions. Et ce n'est que, présentement, une volonté de partenariat qui n'est pas assortie présentement d'entente spécifique, concrète, mais qui ouvre des voies d'avenir intéressantes.

M. Trudel: Très bien. Par ailleurs, vous nous amenez aussi sur le terrain du réel, du concret. Lorsqu'on est maire de la municipalité et qu'on a un projet d'entente auquel on souscrit si généreusement au niveau des principes, et de l'application, et des règles à établir, bien cela n'empêche pas, bien au contraire, de vous intéresser, je dirais, à votre propre bien. Les prévisions de l'entente au niveau de l'Innu Assi de Mashteuiatsh prévoient effectivement qu'il y a des parties de territoire qui sont actuellement sous la responsabilité ou... C'est ça, la responsabilité dans... qui sont sur le territoire municipal. Vous nous indiquez qu'il serait souhaitable qu'il y ait compensation pour les revenus qui ne seront plus assurés parce qu'il y aurait un changement de territoire. Je vous indique tout de suite que nous ne sommes pas fermés, on n'est pas fermés à cette possibilité-là.

n (14 h 30) n

Voilà un autre élément dans la suite des choses, comme le disait M. Chevrette, hier, dans sa suggestion. Il nous disait: Ratifiez la proposition d'entente qui est sur la table au niveau des principes pour qu'on puisse construire les autres éléments d'un éventuel traité avec certains éléments spécifiques qu'il relève et certaines balises qu'il nous indique et un certain nombre de priorités dans les ententes complémentaires. L'entente est la suite des choses pour faire progresser et se diriger vers un traité.

Comment vous avez fait ce calcul, à titre indicatif, avec l'ouverture que nous manifestons et l'orientation qui est la nôtre?

M. Lebel (Denis): C'est bien sûr que c'est des revenus qui seront actualisés sur une période de 30 ans. Le montant de taxe qui est annuel, projeté sur 30 ans, actualisé avec les augmentations d'évaluations foncières ainsi que les augmentations de taxes qui sont prévisibles dans ce qu'on peut prévoir à partir des moyennes des neuf dernières années au niveau de ces trois rôles d'évaluation qui nous permettent de situer une moyenne, et, à partir de ça, bien, on a établi ce que ça pouvait représenter.

Et je tiens à dire que la pertinence aussi que nous amenons, c'est que c'est dans le périmètre urbain de notre municipalité. Ce n'est pas quelque part dans des terres qui ne sont pas connexes à notre vie quotidienne. C'est quelque chose qui est dans notre quotidien, c'est à peu près à 2 km du centre-ville de Roberval. Donc, ce n'est pas au bout du monde. Je tiens à le dire, parce qu'on n'est pas la seule ville qui verra des terres possiblement être annexées à des Innu Assi, mais c'est aussi des choses dont on se sert tous les jours. C'est à partir de ces bases-là, M. le ministre, comme je viens de vous le dire, le taux de taxe annuel sur 30 ans avec actualisation.

M. Trudel: Incluant, à la blague, les baisses de taxes éventuelles, s'il y en avait.

M. Lebel (Denis): Absolument, qui se feront payer peut-être avec nos baisses d'impôts, M. le ministre.

M. Trudel: Je vais passer à mes collègues.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, M. le député de Roberval et ex-maire de Roberval, vous avez la parole.

M. Laprise: Maire de Saint-Félicien.

Le Président (M. Lachance): Oh, excusez! Excusez-moi. Saint-Félicien.

M. Laprise: C'est la ville voisine de Roberval, de l'autre bord de Saint-Prime. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à M. Denis Lebel qui, dans une autre vie, a été appelé à travailler, dans le milieu hospitalier sans doute, à travailler beaucoup avec les autochtones de Mashteuiatsh, de même que, dans une autre vie, au niveau du tourisme, a eu l'occasion de connaître justement sur le plan culturel ce peuple voisin de chez lui qui lui a sans doute apporté beaucoup de belles choses.

Et je pense que votre mémoire, en plus de regarder toute la dimension économique, met en valeur cette dimension-là, humaine, et je crois que vous nous faites percevoir justement comment il est important... La revalorisation d'un peuple, c'est quelque chose de noble, quelque chose de profond. Et je crois que votre mémoire nous fait percevoir justement cette préoccupation-là que vous avez due au fait sans doute que vous vivez très près de Mashteuiatsh depuis nombre d'années, percevoir l'importance de donner à ces gens-là la chance d'avoir leur place au soleil.

Maintenant, dans votre mémoire ? je m'en reviens à votre mémoire ? vous soulignez également qu'il y aurait besoin peut-être d'améliorer les communications dans la démarche qui se continue présentement. Vous constatez sans doute que, peut-être, au point de départ, ça a manqué peut-être de transparence, et j'aimerais que vous élaboriez un peu là-dessus. Comment est-ce que vous voyez ça, actuellement, dans la continuité des événements?

M. Lebel (Denis): Vous avez bien raison, M. Laprise, que mon passé m'a permis... Mashteuiatsh est un produit d'appel pour la clientèle européenne pour notre région. Dépendamment toujours des clientèles, les produits d'appel sont différents, et les Européens qui viennent dans notre région, Mashteuiatsh, c'est un produit d'appel.

M. Laprise, j'ai eu le plaisir de rencontrer M. Trudel, avec les maires de la Côte-Nord et du Saguenay?Lac-Saint-Jean, ici, à la salle La Fontaine, le 4 juin 2002, avant la réunion de Saguenay, où j'étais présent aussi, où la réunion n'a pas pu se tenir, puis, la veille, il y avait celle de Roberval, et, déjà à ce moment-là, M. le ministre, suite à des démarches qui avaient été faites avec les négociateurs, on nous avait comme annoncé qu'on divulguerait l'entente de principe et qu'il y aurait un processus à ça.

Les perceptions populaires sont que tout s'est fait en catimini. Ce matin, j'entendais quelqu'un de notre région, qui est un journaliste, parler que, déjà en l'an 2000, il faisait valoir le projet d'entente. On a sûrement eu en quelque part un problème de communication important.

Hier, je me suis fait un devoir d'écouter ce qui se disait dans les télés, au radio, et bien sûr qu'il est plus intéressant de soulever la polémique des gens qui sont contre et trouver des façons que ça ne se fasse pas que de peut-être projeter les horizons vers 20 ans, puis que ceux qui chialent que ça coûte trop cher aujourd'hui parce qu'on paie les autochtones à ne rien faire, que, dans 20 ans, s'ils sont cinq fois plus, ça va peut-être en coûter encore pas mal plus.

Donc, je pense que vous devrez avoir une stratégie agressive de communication, et, lorsqu'il y aura des faussetés, qu'on y réponde immédiatement. Vous avez eu une belle invitation hier chez nous et vous avez un défi, là. Vous avez le défi, par M. Russel Bouchard, de faire la preuve que la carte qui sert actuellement pour Nitassinan a des bases juridiques. Bien, j'espère que vous allez relever le défi puis que quelqu'un, quelque part, viendra répondre.

Si c'était la stratégie du passé, on ne répondrait pas, de peur de soulever de la polémique, peut-être. Sauf que sur le terrain, nous, ce qu'on vit dans notre région, c'est que les gens qui ont beaucoup d'écoute ont pris la tribune et que les auditeurs... et la population se fait une idée à partir de ce qu'elle entend. Que M. Chevrette nous rencontre puis que nous émettions nos opinions, ça amène un rapport qui est intéressant, mais ça n'a pas fait changer d'idée nos populations qui entendent dire qu'on a donné la moitié du Québec, puis, que l'entente, ça peut être bien mauvais.

Ça fait que, moi, je pense que vous devrez en quelque part faire face à ces difficultés-là. Des fois, ce n'est pas l'évidence, d'aller dans les lignes ouvertes puis de débattre, mais on aura besoin de courage là-dedans puis de faire sortir les vraies choses. Et, si on est contre le fond puis si on est contre le sujet, bien, on débattra du fond et du sujet. Mais on ne parlera pas de racisme et de choses qui sont des chasses aux sorcières.

M. Laprise: ...collègues pour peut-être poser des questions.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Oui. Merci, M. le Président. Alors, merci, M. le maire. Effectivement, c'est bien... Bien, avant d'aborder l'autre, là, peut-être continuer sur le même thème. Vous avez dit: Vous, vous avez cette responsabilité-là. J'aurais tendance à vous dire: Nous avons cette responsabilité-là, comme élus, moi, comme élu d'une circonscription, M. le député aussi de Roberval. Mais vous, comme élu directement touché et qui, à la lecture, je vois, du mémoire, voit d'un bon oeil ce qui arrive actuellement, est-ce que c'est ce que vous sentez aussi, M. le maire, tout d'abord?

M. Lebel (Denis): Je suis sur toutes les tribunes et de toutes les conférences depuis un an, un an et demi, M. Bédard. Puis je ne pense pas...

M. Bédard: Comprenez que ce n'est pas...

M. Lebel (Denis): Je ne pense pas qu'on les ait partagées beaucoup, depuis un an.

M. Bédard: Vous comprenez que ce n'est pas un reproche, c'est une constatation.

M. Lebel (Denis): O.K.

M. Bédard: Alors, je pense que c'est un devoir que nous devons tous avoir. J'ai fait partie de certaines tribunes, nous y avons tous donné, et on sait qu'effectivement chez nous il y a des difficultés, et je pense que c'est la responsabilité de chacun de prendre part de façon intelligente et intelligible au débat.

Vous avez peut-être donné comme exemple aussi... Vous représentez quand même une ville qui est directement touchée, où il y a eu des réactions, suite au dépôt de l'entente. Et là, ce que je conçois aussi, c'est le rapport de la ville, du conseil municipal; donc il y a une position commune qui approuve le processus, qui approuve l'entente, des gens directement touchés qui vont même voir des terres expropriées en propre ? parce que, là, on parle du Innu Assi et pas du Nitassinan ? mais qui, encore là, y voient... bon, évidemment, en ayant certaines compensations monétaires, mais y voient un avantage de voir, à côté d'eux et avec eux surtout, des gens avoir accès, bon, à des ressources, à des moyens.

J'aimerais savoir quelle a été la réception de la population pour que vous en arriviez, comme ça, à une position aussi ferme avec les réserves que vous m'avez mentionnées, que vous avez mentionnées, qu'on retrouve dans le rapport de Guy Chevrette mais qui est quand même favorable, là, au processus actuel?

M. Lebel (Denis): En premier lieu, sur l'aspect de la communication, M. le ministre, c'est clair que, plus on sera ensemble, plus on sera solidaires et que notre argumentaire sera valable, intelligent et vrai, on aura des chances de réussite. Première chose.

Deuxième chose. Moi, je n'ai pas eu beaucoup de citoyens concernés ? les 21 propriétaires ? qui sont venus m'en parler. J'ai un agriculteur qui, lui, depuis le début, me fait part de ses préoccupations; j'en ai quelques autres qui se sont présentés devant M. Chevrette. Ce n'est pas majeur, comme intervention auprès de nous.

Maintenant, notre rôle à nous, en tant qu'élus, nous amène à prendre, comme il vous amène tous et toutes ? vous êtes tous des gens élus ? à prendre des décisions pour le bien de nos communautés. Et il est clair pour le conseil de ville que nous devons voir l'avenir dans tout ça, et qu'actuellement on doit tendre à essayer de diminuer les irritants puis de permettre à nos jeunes de rester en région puis de créer de l'emploi. Et les terres qui seraient annexées au côté de Mashteuiatsh seraient un beau secteur de développement économique, industriel ou autres. Ce n'est pas tellement loin des Industries Piekouagami, il y a sûrement... Il y a une raison pourquoi on a voulu avoir accès à la route 169, et c'est sûrement commercial ou industriel. On ne l'a pas partagé véritablement officiellement. Donc, nous, nous voyons là-dedans un avenir pour nos communautés et du partenariat économique éventuel et de la création d'emplois.

Donc, certains citoyens, évidemment à Roberval comme dans d'autres communautés, ne sont pas d'accord et trouvent qu'on donne ci ou que... Mais notre devoir civique, à nous, et les raisons pour lesquelles on a été élus nous amènent à dire que, pour le bien de notre communauté...

Mais, majoritairement, les gens sont d'accord avec ce qu'on a fait. Je l'ai déposé en conseil de ville lundi soir, parce qu'il était important pour moi de le partager à notre population locale, d'abord. Et vous connaissez bien la réalité médiatique de nos régions; le lendemain matin, à CHRL, je ne me suis pas fait crucifier sur la place publique, les gens ont trouvé quand même correct qu'est-ce qui se faisait et ont bien partagé le tout. Donc, je pense que je peux dire que ça s'est quand même bien passé, M. Bédard.

n (14 h 40) n

M. Bédard: Très heureux de l'entendre. Il me reste un peu de temps? Dans votre mémoire, et c'est un élément intéressant, par rapport justement aux règles de voisinage qui guident, et c'est à la fin, là, où on parle des pratiques, on parle beaucoup du piégeage, bon, de la chasse, qui existent comme activités traditionnelles mais, chez nous ? quand je parle chez nous, dans toute la région qui est bien présente ? j'imagine que vous n'avez pas attendu l'Approche commune pour prévoir, je vous dirais, des mécanismes ou des façons d'aplanir certains difficultés. Est-ce que ça existe chez vous, ça, déjà?

M. Lebel (Denis): Pas véritablement, M. Bédard. Par contre, évidemment, hier, quand j'entendais M. Chevrette, on devra absolument, si on veut avancer là-dedans, trouver des façons de faire. Et je ne sais pas où je vais situer la barre, là.

Quand 80 % des territoires de trappe sont occupés par 20 % des trappeurs, là, c'est inévitablement conflictuel. Donc, il n'y a pas chez nous présentement de mesures qui ont été mises en place, mais on sait qu'on doit se parler. Et on a de l'ouverture là-dedans des deux côtés, donc en personnes intelligentes. Mais, pour l'instant, la réponse, c'est: Non, il n'y a pas de mesures comme telles, si ce n'est qu'au Lac-Saint-Jean, alentour du CLAP, de la pêche, il y a un partenariat qui est très présent. Le comité que j'ai le plaisir de coordonner, il y a deux représentants innus qui sont sur cette table-là. On regarde comment assurer la pérennité de la ressource ouananiche. C'est la même lutte qu doit se faire dans le saumon, dans d'autres endroits. Mais on prend aussi, là, nos responsabilités.

Et le futur s'annonce intéressant. La pisciculture, tantôt, je l'espère, restera présente dans notre région, dans notre MRC. Et on produira peut-être tout à l'heure d'autres espèces puis qui permettra d'avoir des secteurs de villégiature encore plus intéressants et des pourvoiries qui seront encore plus attrayantes pour que l'économie soit encore plus florissante. Et c'est tout ça vers un avenir qu'on se lance, et même chose pour ça.

M. Bédard: Heureux de l'entendre.

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, M. le député de...

M. Bédard: Seulement un petit... Pardon, M. le Président. Mais ce qu'on retrouve dans le rapport de Guy Chevrette, dans l'ensemble des recommandations, recoupe vraiment les... Parce que je lisais votre mémoire, ça a vraiment, ça représente les préoccupations que vous aviez. Je pense qu'on peut répondre oui à cette question-là?

Mme Lebel: On peut répondre que M. Chevrette a été bien à l'écoute des milieux qu'il a visités.

M. Bédard: Merci.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, bienvenue, maire Lebel, pour votre présence aujourd'hui, votre mémoire, que je pense aussi, juste la fierté de Roberval. J'ai eu l'occasion une fois d'être à Mashteuiatsh, au moment de l'arrivée de l'Harricana. Alors, nous avons fait le tour du lac pour arriver à Roberval. Belle journée chaude comme aujourd'hui, à moins 25, moins 30, et de voir des milliers et des milliers de personnes qui sont là pour recevoir à l'arrivée de l'Harricana, on voit à quel point c'est un bel exemple d'une activité régionale très importante.

Je ne sais pas, hier, M. Chevrette est venu proposer les comités directeurs régionaux de négociation. Je ne sais pas si le ministre est prêt à recevoir les nominations, mais je propose que peut-être le maire Lebel serait un candidat idéal d'être parmi les trois représentants municipaux. Parce qu'il y a beaucoup d'éléments qui sont fort intéressants dans les mémoires qui sont présentés aujourd'hui.

Mais je veux revenir sur deux volets de la question de participation, d'information, de consultation. Premièrement, à votre niveau à vous, c'est-à-dire les élus municipaux, il y a une proposition de M. Chevrette, sans trop aller dans les détails. Tout le long de ce processus, vous avez dit que vous avez pris votre propre devoir de vous informer. Mais qu'est-ce que le gouvernement peut faire, qu'est-ce que les négociateurs peuvent faire dans l'avenir pour s'assurer que vous avez accès, à titre de maire, à tout ce qu'il faut pour être bien renseigné? Parce que, comme M. Chevrette a dit hier qu'il y a beaucoup de faussetés qui circulent, qui alimentent une réaction négative quant au processus, alors, c'est quoi les choses, au niveau du maire, qu'on a besoin?

Et le deuxième volet de la question ? vous avez déjà abordé ça ? mais je pense, un autre point qui est très important: M. Chevrette a fait une tournée ? c'est fait maintenant ? mais ce n'est pas dire que tout est réglé. Il a fait un inventaire de certains des problèmes, mais le devoir de consulter, le devoir d'informer les citoyens, entre autres de Roberval, demeure entier. Alors, c'est quoi les outils qu'il faut mettre en place pour assurer une meilleure compréhension à votre niveau à vous, comme maire, mais également à la population que vous représentez?

Le Président (M. Lachance): ...la liberté...

M. Lebel (Denis): D'abord, M. Kelley, j'ai eu le plaisir de faire partie, depuis que je suis élu, de la Table régionale du Saguenay?Lac-Saint-Jean. J'aimerais peut-être préciser comment les événements se passaient lors de ces rencontres-là. On nous partageait de l'information, tel que M. Bernard l'a dit hier, qui était ramassée tout de suite après, et nous n'avions pas le mandat de véhiculer ce qui était discuté. Il ne fallait pas bloquer le processus, évidemment. Je suis certain qu'on ne négocie pas sur la place publique, ce qui est très vrai. Donc, déjà là, l'idée des tables régionales était intéressante. Maintenant, effectivement aussi, je suis d'accord avec M. Bernard que, de se rencontrer auparavant et de ne pas savoir de quoi nous aurions parlé, ç'aurait été peut-être parler pour parler.

Là, il y a des sujets qui sont sur la table, en tout cas, une bonne partie, et il faudra continuer. Ça rallonge un processus, c'est plus lourd. Mais, si on veut que les sensibilités... c'est vraiment à fleur de peau dans certains domaines. Le partage de nos activités, qui sont patrimoniales, de chasse et de pêche, de piégeage, c'est très fragile sur nos territoires. Donc, même si ça rallonge le processus, on devra regarder ensemble pour trouver des solutions. Puis, peut-être, les solutions, elles sont déjà là dans la tête des Innus: peut-être que leur réglementation serait encore plus forte que celle des Québécois. Je ne le sais pas. Mais, au moins, que nous le partagions et que les craintes puissent être mises sur la table et qu'on puisse échanger, ce sera beaucoup. Oui, peut-être plus long, mais je ne pense pas qu'il y ait d'autres solutions miracles que dans la discussion, la compréhension et l'échange qu'on arrivera à quelque chose. Donc, je pense que c'est la seule façon de faire.

M. Kelley: Et je pense que c'est très intéressant, la présentation précédente des scieries; c'est autant dans les choses qui sont très techniques quant au partage des volumes du bois. Et ça va prendre un endroit très précis, avec l'expertise autour de la table, pour régler ces genres de différends. Alors, je pense, vous avez bien décrit ça comme un passage obligatoire si on veut une meilleure compréhension sur la mécanique. On va continuer de tester l'hypothèse de M. Chevrette ou d'autres hypothèses auprès des témoins; mais je suis de votre avis que c'est vraiment la voie de l'avenir.

Dans le même ordre d'idées, je trouve très intéressant la question de la compensation pour la ville de Roberval. Parce que qu'est-ce qu'on veut ici faire? C'est un différend qui interpelle l'ensemble de la société québécoise. Le fait qu'il n'y ait pas de traité, les ZEC entre autres, aller loin dans le passé pour voir les obligations qui n'ont pas été respectées, ce n'est pas uniquement un dossier de Roberval, si je peux traiter ça comme ça, mais c'est quelque chose qui interpelle l'ensemble de la société québécoise.

Et je pense qu'au niveau des compensations pour les manques à gagner et tout le reste, sans trop aller dans les détails, je pense qu'il faut prévoir une mécanique pour ce genre de compensation. Je pense que c'est tout à fait légitime que ça ne tombe pas sur quelques employeurs ou ça ne tombe pas sur quelques municipalités d'assumer les frais de ces genres de compensation.

Alors, je trouve tout à fait légitime la demande de la ville de Roberval de trouver une mécanique, comment on peut... On ne sait pas comment... On a parlé d'expropriation, mais ce n'est pas nécessairement l'expropriation. Je pense, M. Chevrette, dans son rapport, propose certaines alternatives qu'il faut explorer avec Mashteuiatsh, entre autres. Mais je pense quand même que la notion que la ville de Roberval ne perde pas des revenus à cause d'une entente est tout à fait recevable. Et comment on va utiliser ces argents, c'est à discuter. Mais je pense, au moins du côté de l'opposition officielle, on voit d'un très bon oeil cette proposition. Alors, merci de l'avoir faite.

(Consultation)

Mme Gauthier: M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui, Mme la députée.

Mme Gauthier: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Jonquière.

Mme Gauthier: Merci. Bonjour, M. le maire. Je suis contente de vous voir, M. le maire. Et j'aurais souhaité, M. le maire, que vous nous entreteniez... parce que vous nous avez dit, vous avez relaté que la ville de Roberval et Mashteuiatsh, autrefois Pointe-Bleue, vous avez cohabité pendant 150 ans. Vous allez fêter bientôt votre 150e anniversaire de fondation.

Pendant tout ce temps, je suppose, il existe des projets que vous avez faits ensemble, la communauté innue avec la communauté québécoise, robervalloise, qui ont fait en sorte qu'on est capables de travailler ensemble pour faire développer, de façon harmonieuse, nos deux communautés. Avez-vous ce genre d'exemple qui pourrait nous éclairer?

M. Lebel (Denis): Tout à l'heure, je vous mentionnais celui qui vient le plus rapidement en tête, c'est, bien sûr, la Traversée du Lac-Saint-Jean. Si nous sommes les meilleurs au monde dans ce domaine-là, c'est ensemble que nous l'avons réalisé.

Mme Gauthier: J'en profiterais pour inviter mon collègue de venir à l'arrivée des nageurs; là, c'est vrai qu'il fait chaud, hein? Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Kelley: C'était à moins 40. Ha, ha, ha!

Mme Gauthier: Ha, ha, ha!

n (14 h 50) n

M. Lebel (Denis): Au lieu de moins 25, ce sera 25, M. Kelley. Bon.

C'est clair que le partage du territoire, madame, il y a eu, pendant de nombreuses années, chez nous comme... mais il y a moins présent, la venue... si M. Beamer, au début des années 1900, a fait de Roberval un paradis de la pêche à la ouananiche, si les gens venaient de partout au monde pour pêcher la ouananiche à Roberval, au lac Saint-Jean, c'était beaucoup grâce aux guides autochtones qui amenaient les gens pêcher tout partout, par leur grande connaissance des habitats fauniques, des habitudes de la faune, qu'elle soit aquatique d'ou autres, et on peut projeter ça à toutes nos forêts où, pendant des années, ça a été des endroits où les pêcheurs et les chasseurs de partout au monde venaient chez nous. Et, si, aujourd'hui, on est aussi amateurs de la forêt, j'ai la certitude que c'est beaucoup grâce aux gens qui nous ont donné cette habitude-là et ces connaissances-là.

Je vais me permettre une expérience personnelle: mon père était directeur de l'usine de sciage de bois au lac Chigoubiche, et son bras droit était Gordon Moar, le frère de Clifford, le chef. Et ça fait partie de nos vies, et c'est assurément une tradition de perpétuer, des plus âgés aux plus jeunes, des choses, et je suis certain que les autochtones nous ont aidés.

Si, aujourd'hui, la forêt est aussi importante pour nous, assurément que les gens qui sont arrivés de France à ce temps-là n'avaient peut-être pas l'habitude d'aller chasser l'orignal. Donc, il y a eu une transmission de données et de connaissances au fil des ans qui s'est faite entre nous, et c'est une cohabitation quotidienne. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de problèmes, ça ne veut pas dire qu'il n'y en aura pas encore.

Donc, c'est aussi bête que la vie de tous les jours qui nous permet de vivre plein de choses ensemble. Il y a des commerces en partenariat. Il y a présentement une usine qui va très bien à Mashteuiatsh. Un fort nombre d'employés sont des gens de Roberval qui y travaillent. C'est comme ça à Roberval dans les industries, dans les usines, dans les magasins. À l'Hôtel-Dieu, où j'ai eu le plaisir de travailler des années, beaucoup de membres du personnel sont autochtones, et c'est comme ça tous les jours.

Mme Gauthier: ...M. le maire, tantôt, je vous ai entendu en réponse à une question du député de Chicoutimi, dire qu'on devrait prendre le courage, le gouvernement devrait prendre ses responsabilités et son courage et venir expliquer le fondement, les fondements juridiques de cette entente à la population saguenéenne et jeannoise.

Je comprends que ceux qui sont contre l'entente dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean nient le fait, le titre aborigène de la communauté innue au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Alors, je comprends, de vos propos, que vous souhaiteriez effectivement que ce débat-là se fasse chez nous?

M. Lebel (Denis): Effectivement, Mme Gauthier. Et là, je nous retournerai la boutade que M. Bédard m'a servie tantôt: c'est aussi notre responsabilité, ensemble, collective, c'est celle du gouvernement mais la nôtre aussi.

J'ai pu assister à des conférences, qui m'ont fasciné au niveau de l'histoire, de l'histoire autochtone, de ces titres-là, par des historiens réputés. Ce que j'entends chez nous, c'est des historiens qui ont... On n'a toujours qu'un côté de la médaille, et de le débattre serait très important.

La base, nous, de notre réflexion, on va laisser aux avocats et aux juristes le soin d'évaluer si, effectivement, il y a des droits. Je ne pense pas qu'on fasse ça d'un côté électoraliste. Les Innus représentent ? les Innus qui sont concernés par l'entente ? 9 000 personnes qui, souvent, ne doivent pas aller voter parce que c'est leur peuple. On ne le fait pas pour intérêt électoraliste, on le fait parce que ça doit être fait puis pour régulariser des choses.

Donc, à partir de ça, au conseil de ville, chez nous, la question d'analyse sur les raisons, les pertinences, on s'est dit que ça avait été fait par le gouvernement, et que, si on en est rendus là, aujourd'hui, avec une entente de principe, c'est parce que tout a été débattu et analysé.

Par contre, chez nous, il y a d'autres gens qui ne réagissent pas comme ça, et absolument qu'on doit clarifier tout ça. Parce que les éléments qui sont négatifs vont travailler sur quoi? La reconnaissance du titre. Le Nitassinan, les raisons historiques qui amènent à reconnaître ce territoire-là puis d'autres éléments, mais c'est souvent ça.

Bon, là, on va embarquer dans tout ce qui touche la forêt et la pêche, qu'on parle régulièrement, donc, si on veut être capables de faire avancer le dossier en étant vrais, justes et honnêtes, de parler des vraies choses et de faire valoir ce qui est aujourd'hui la base de l'argumentaire pour laquelle on est rendus là.

Mme Gauthier: Une dernière question, si vous permettez. Vous avez entendu, ce matin, comme nous, le représentant du Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui se questionnait sur la façon dont on allait pouvoir répartir les mètres cubes de bois en forêt, parce qu'ils disent: Au Saguenay?Lac-Saint-Jean, on n'en a plus de disponibles.

On a parlé aussi d'études d'impact. Êtes-vous au courant, savez-vous si, effectivement, la MRC, les MRC, de concert avec le ministère des Ressources naturelles, avez des études d'impact qui supposeraient qu'on a effectivement des mètres cubes disponibles pour la communauté innue?

M. Lebel (Denis): J'ai posé une petite question à M. Trudel tout à l'heure; peut-être qu'il me glissera une réponse ou pas. Mais où on prendra les 250 000 m³ de CAAF de bois qui seront là? Nous, ce qu'on dit: On ne connaît pas la réponse, madame, et on ne connaît pas les... Peut-être que... Bon, demain matin, je serai devant vous avec la MRC. Là, on aura peut-être une position plus «MRCenne», là, mais, au moment où on se parle, pour ville de Roberval, je n'ai pas plus d'information que de vous dire que, nous, on souhaite que ce ne soit pas amputé, entre autres, dans les scieries indépendantes. Puis, si je me fis aux «success...» en tout cas, il y a au moins un succès que je connais qui est celui d'Opitciwan où c'est fait avec la grande entreprise puis qui semble être un succès. On ne peut que souhaiter que les emplois qui soient créés par ça soient chez nous, qu'il y ait de la deuxième, troisième, quatrième transformation, mais je n'ai pas la réponse. C'est probablement vos voisins d'en face qui peuvent vous la donner, madame.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Saguenay.

M. Corriveau: Oui. Peut-être, d'abord, étant donné qu'on parle beaucoup de ce devoir de publicité du gouvernement que M. Lebel nous présente, un mot à M. Trudel. C'est: Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais le Conseil de bande de Mamuitun a produit, au cours de la dernière année, deux publicités télévision, dont une a été tournée à Papinachois, d'une qualité vraiment surprenante, là, et c'est ce genre de message là, je pense, qui pourrait être une bonification, là, dans nos rapports mutuels entre les communautés blanches puis les communautés autochtones.

Puis, là-dessus, bien, je salue les gens du Conseil de bande qui sont ici, parce que c'est vraiment, là, une production d'une qualité, là, que, moi, j'ai appréciée énormément, puis c'est un manque de fonds, je crois, là, qui a fait en sorte que ça n'a pas pu rouler vraiment longtemps, mais ça mérite certainement votre attention.

Concernant, M. le maire, les propos tenus hier par M. Chevrette concernant particulièrement sa proposition 26, là, qui était celle de la création d'un comité où il y aurait trois élus, moi, une de mes préoccupations, c'est: je me demande ? puis là, mon collègue, tantôt, de Jacques-Cartier, disait que ce serait bien que vous siégiez là-dessus ? advenant le mauvais sort, là, qui ferait en sorte que vous ne soyez pas une de ces personnes, un de ces trois élus, j'aimerais savoir si de votre côté, là, vous trouvez que cette recommandation-là apporte suffisamment de représentativité au niveau des électeurs... pas des électeurs mais au niveau des élus régionaux au sein de ce comité-là pour ce qui s'en vient dans la suite des événements, là. Parce que, moi, j'ai... en tout cas, je me pose des questions. Je me demande si on ne devrait pas avoir un petit peu plus d'élus qui pourraient participer davantage en première ligne.

M. Lebel (Denis): Je vous avoue, M. Corriveau, que je n'ai pas beaucoup réfléchi à ça depuis hier, là. Je l'ai lu effectivement, hier. Ce qu'on dit puis ce qu'on entend régulièrement, c'est l'imputabilité des gens.

Je pense que l'objectif, tout le monde le partage. Dans les moyens, il faudra voir. Peut-être. Peut-être que oui, là. Là, il va arriver la question des maires. Mais, tout à l'heure, comme c'est le territoire, on va arriver avec les préfets aussi. On n'a pas parlé... On a parlé de représentativité politique. Il y a peut-être quatre préfets qui sont concernés par les deux territoires. En tout cas. Non, il y en a plus, il y en a quatre chez nous. Mais, en tout cas, il faut voir. On est peut-être rendus à six, là.

Non, je vous avoue que je n'ai pas réfléchi à ça. Mais une chose qui est sûre, c'est que dans notre région il y a des rencontres qui ne se sont pas tenues parce qu'on disait qu'on voulait avoir des élus. Peut-être qu'on serait mieux de prévoir que, si on veut que ces gens-là soient imputables, il y ait un petit peu plus d'élus. Ça peut avoir du sens, ce que vous dites.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. Lebel, maire de Roberval, pour votre participation aux travaux de cette commission. Merci beaucoup.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, j'invite immédiatement les représentants de la MRC de Maria-Chapdelaine pour la suite de nos travaux cet après-midi. Alors, bienvenue.

MRC de Maria-Chapdelaine

M. Boivin (Réjean): Alors, bonjour, M. le Président, mesdames et messieurs. Je me présente, mon nom est Réjean Boivin, je suis maire de la ville de Normandin et préfet de la MRC de Maria-Chapdelaine. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Jacques Potvin, qui est urbaniste et coordonnateur à l'aménagement et au développement à la MRC de Maria-Chapdelaine.

n (15 heures) n

Le Président (M. Lachance): Alors, bienvenue, M. Boivin et M. Potvin. Vous avez 20 minutes pour nous faire part de vos commentaires.

M. Boivin (Réjean): Alors, préalablement, permettez-moi de situer rapidement la MRC de Maria-Chapdelaine. Elle est située au nord-ouest du Lac-Saint-Jean; elle commence, au Lac-Saint-Jean, à la hauteur de Dolbeau-Mistassini et s'en va vers le nord jusqu'à au-delà du 52e parallèle. C'est une MRC qui a la grandeur de la Suisse, soit environ 38 000 km², et couvre une bonne partie du Nitassinan. Également, ce territoire de la MRC de Maria-Chapdelaine comprend au-delà de 3 300 baux de villégiature, donc des gens qui sont éparpillés à la grandeur de ce territoire-là.

Beaucoup de nos gens nous ont fait part de leurs préoccupations au cours des dernières semaines, et de là notre désir de participer à la commission parlementaire. Je dois vous dire que, déjà en 2000, la MRC de Maria-Chapdelaine avait fait venir M. Bernard, négociateur, pour déjà transmettre aux gens de la MRC jusqu'où on en était dans les négociations, et beaucoup de personnes à l'intérieur de notre MRC... puisque la séance avait eu lieu à l'hôtel de ville de Dolbeau ? je dis «Dolbeau» tout court, puisque ce n'était pas encore fusionné avec Mistassini à l'époque ? il y avait énormément de gens qui avaient assisté à la présentation de M. Bernard, et ce, dès l'an 2000.

Alors, l'introduction. Dans le cadre du processus de consultation initié par le gouvernement du Québec suite à la levée de boucliers que semble avoir déclenchée l'annonce d'une entente de principe avec l'Approche commune, le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine juge opportun de présenter sa vision de l'entente et ses attentes. D'entrée de jeu, le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine souhaite la poursuite des négociations basées sur un partage équitable, sur une compréhension mutuelle, sur le respect des droits et privilèges de chacun. Le conseil estime très important de régler une fois pour toutes ce climat d'incertitude qui prévaut depuis plusieurs décennies et d'en arriver à un traité définitif. Ce court mémoire traitera du cadre de l'entente de principe, de son contenu, des ajustements souhaités, pour finalement conclure sur la nécessité de s'entendre.

Le cadre de l'entente de principe. N'en déplaise à certains qui ont fait la manchette pendant tout l'automne 2002, le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine considère que les peuples autochtones ont des droits fournis au fil des ans par les tribunaux, plus particulièrement par la Cour suprême du Canada. Nous considérons également que les peuples autochtones habitaient le pays au moment de l'arrivée des Européens, qu'ils fréquentaient le territoire, qu'ils y vivaient de l'économie de cueillette, c'est-à-dire de chasse, de pêche et de la présence de fruits sauvages, que ces mêmes peuples autochtones nomades se déplaçaient au gré de la facilité à pourvoir à leurs besoins.

Ce qui est négocié présentement n'est pas une entente définitive, et bien des points restent à négocier, et une entente définitive acceptée par les parties concernées ne pourra qu'être profitable. Cette entente finale concrétisera les objectifs poursuivis par les négociateurs et que le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine endosse, c'est-à-dire: déterminer et encadrer les limites des droits ancestraux, trouver comment ces droits pourraient s'exercer, permettre aux autochtones de prendre en main leur destin et finalement harmoniser les relations entre Québécois et peuples autochtones.

Le contenu de l'entente de principe. L'entente de principe nous définit deux types de territoires amérindiens avec les caractéristiques qui s'y rattachent, le Innu Assi et le Nitassinan.

Innu Assi. La reconnaissance de Innu Assi, territoire en propriété entière autochtone, soit les actuelles réserves avec un certain agrandissement, et l'autonomie administrative qui y est reconnue aux autochtones sont tout à fait acceptables à quelques nuances près, nuances que nous aborderons plus loin dans la partie qui traitera des ajustements souhaités. Si la reconnaissance d'Innu Assi et l'autonomie administrative s'y rattachant nous apparaissent acceptables, c'est qu'elles correspondent exactement à l'autonomie administrative revendiquée par le monde municipal depuis fort longtemps.

Le Nitassinan. La reconnaissance du Nitassinan fait peur à première vue. Cependant, si l'on se fie à l'affirmation très souvent répétée par les représentants du gouvernement du Québec, cet immense territoire continuera d'être sous pleine juridiction provinciale. Il y a aura enfin harmonisation des usages des autochtones avec ceux des Québécois. On ne peut qu'être enclin à aller de l'avant dans la reconnaissance du Nitassinan.

En regard des redevances sur les ressources naturelles, certains affirment que les Québécois devraient revendiquer un pourcentage pour contrebalancer les 3 % consentis aux autochtones. À ce sujet, notez que, lors du Rendez-vous des régions à l'automne 2002, nos représentants régionaux ont réitéré le désir de voir les redevances sur les ressources naturelles augmenter pour chacune des régions du Québec.

Ainsi, permettez-nous de signaler ici que notre MRC ainsi que toutes les MRC du Saguenay?Lac-Saint-Jean et la réserve amérindienne de Mashteuiatsh reçoivent annuellement plusieurs millions de dollars à même les redevances payées par les compagnies forestières dans le cadre des premiers programmes de mise en valeur du milieu forestier. Donc, notre milieu en reçoit déjà dans le cadre des volets 2 qu'on connaît bien. Et le Rendez-vous des régions a confirmé également les nouvelles attentes des régions-ressources.

Les autochtones n'auront pas la possession de ce vaste territoire ni même l'administration. Ils ne pourront participer aux différents processus gouvernementaux de gestion du territoire comme d'autres organismes existants.

Permettez-nous une comparaison pour illustrer l'harmonie qui devrait exister entre Québécois et peuples autochtones. Je suis moi-même musicien et j'appartiens à un groupe d'une quarantaine de personnes qui participent régulièrement à des concerts, à des préparations de concerts. Alors, on appelle un groupe de musiciens qui jouent des instruments à vent une harmonie. Pourquoi ce nom? Malgré que les instruments aient une tonalité différente, malgré qu'on attribue des partitions différentes à chacun des instruments, le groupe musical parvient à donner des concerts très appréciés tout simplement parce que le tout est harmonisé. C'est compris que, si l'auditeur se contentait d'assister à la première lecture de la pièce musicale, il entendrait des sons discordants peu harmonieux, voire même cacophoniques.

Il doit en être de même pour la bonne entente entre les peuples qui cohabitent. Trop d'exemples contemporains sautent malheureusement aux yeux et nous montrent que l'absence d'harmonie conduit à des situations désastreuses irréconciliables. Pensons ici à l'Irlande du Nord, à la Palestine et Israël, à l'ex-Yougoslavie, et on pourrait en nommer beaucoup d'autres.

Est-ce qu'on doit nier la reconnaissance d'un peuple sous prétexte qu'il est minoritaire? Si oui, il y a longtemps que le peuple québécois, minoritaire dans le Canada, aurait dû s'effacer au profit de l'immense majorité canadienne. Pourtant, tous les gouvernements québécois, d'Adélard Godbout en passant par Duplessis, Jean Lesage, Daniel Johnson, Robert Bourassa, René Lévesque, etc., ont toujours revendiqué, et cela, en dehors de l'obéissance à une ligne de parti, un statut particulier pour le Québec tout simplement parce que le Québec est distinct. On réclame des droits pour protéger notre langue, notre culture, nos moeurs, nos traditions. Les différences existent entre les peuples et ces différences doivent être perpétuées tout en vivant ensemble.

n (15 h 10) n

À tous ceux qui disent que l'Approche commune privilégierait des citoyens de deux ordres différents, que c'est anormal d'avoir deux catégories de citoyens, nous disons: Les Québécois doivent-ils être intégrés sous prétexte qu'ils ont des droits et privilèges différents du restant du Canada? Le Code civil strictement québécois, appliqué au Québec seulement, alors qu'ailleurs au Canada on procède différemment, constitue un exemple frappant qu'on peut vivre avec deux catégories. Les villages hongrois, ukrainiens, allemands, etc., de l'Ouest canadien, villages qui ont, comme tous les autres villages du pays, leur administration propre, qui ont conservé leur langue d'origine, leurs traditions, leur culture, leurs coutumes, ont-ils le droit de continuer ainsi sans se fondre à la majorité? Ils maintiennent ces traits distinctifs tout en étant à l'intérieur d'une province, tout en étant à l'intérieur du pays. Alors, pourquoi les autochtones n'auraient-ils pas les mêmes droits, les mêmes avantages et les mêmes privilèges?

Les ajustements souhaités. Dans Innu Assi, le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine souhaite que la cession des territoires de Pointe-Racine et de Pointe-Taillon soit revue, quitte à proposer d'autres territoires ailleurs en remplacement ou, à tout le moins, à établir une forme de partenariat entre les deux collectivités dans l'administration de ces deux sites.

Pointe-Taillon a déjà abrité une paroisse structurée et fait donc partie d'un passé de colonisation encore présent chez plusieurs. Même l'actuel maire de la municipalité de Péribonka a eu un de ses ancêtres maire de cette municipalité qui s'est appelée Saint-Amédée de Péribonka, si ma mémoire est bonne. Pointe-Racine fait partie également d'un territoire déjà très utilisé par les gens de la MRC de Maria-Chapdelaine et constitue un des rares accès publics directement au lac Saint-Jean pour les gens de chez nous, accès que nous aimerions conserver ou, à tout le moins, partager en partenariat.

Dans Nitassinan, certaines portions de territoires sont à la fois réclamées par les autochtones et par les Québécois. Prenons comme exemple ici le lac au Foin, sur la rivière Mistassibi. Comment l'entente parviendra-t-elle à départager les désirs des deux communautés et à combler leurs attentes respectives?

D'autres lieux sont ou seront décrétés aires protégées. Le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine souhaite vivement un partenariat entre les deux communautés pour la mise en valeur de ces territoires, le tout dans une cohabitation harmonieuse. C'est le cas, entre autres, de notre fameuse rivière Ashuapmushuan qui sépare la MRC de Maria-Chapdelaine de la MRC du Domaine-du-Roy.

Sur une base plus générale, le conseil de la MRC de Maria-Chapdelaine souhaite que la reconnaissance du Nitassinan favorise une harmonisation des usages et des pratiques au bénéfice des deux communautés qui pourront y trouver les mêmes avantages dans le respect des devoirs qui s'y rattachent.

La conclusion. Dans un processus d'harmonisation avec les Québécois, nous voyons les autochtones diriger leur peuple tout en reconnaissant la province de Québec, tout en reconnaissant le Canada et en étant soumis aux lois qui régissent ces deux administrations.

Les communautés québécoises se sont développées à côté des autochtones; elles ont établi leurs lois ici, elles ont divisé le territoire selon leur vouloir, pas selon le vouloir des premiers occupants; elles ont appliqué leur propre gérance des ressources, etc., tout cela en maintenant volontairement à l'écart les autochtones. Pourquoi aujourd'hui nierait-on leur existence? Pourquoi ces gens-là devraient-ils s'intégrer totalement à nous, n'avoir que nos lois, n'avoir que notre culture, alors qu'elle est bien loin de la leur, cette culture, alors qu'un monde nous sépare?

De plus, l'explosion démographique des peuples autochtones nous interroge fortement et nous incite à leur donner une chance réelle de se développer et de prendre leur place dans une société qui les a toujours tenus à l'écart. Il est temps de leur laisser l'opportunité de se prendre en main, de développer, probablement en partenariat avec des Québécois, des entreprises qui créeront des emplois pour ainsi permettre une meilleure intégration à la vie du XXIe siècle.

Depuis la reconnaissance des droits ancestraux avec le rapatriement de la Constitution et la nouvelle constitution qui en suivit, il nous apparaît impérieux de continuer les négociations pour en arriver en temps et lieu à un traité définitif qui enchâssera les droits respectifs des utilisateurs du territoire et permettra à chacune des communautés de prospérer avec les différences qui les distinguent, le tout dans un esprit de compréhension et d'harmonie.

Depuis le dépôt du mémoire, le C.A. s'est réuni, et même si la MRC de Maria-Chapdelaine a participé aux tables de consultation, le conseil désire être partie prenante d'une manière plus importante à l'entente à venir et aux négociations à venir en raison des préoccupations et du rôle de la MRC en matière de développement et d'aménagement, et tout ça dans l'esprit d'arriver à une meilleure harmonisation particulièrement dans la prise en main de notre développement dans une région-ressource. Et Dieu sait si ce mot est à la mode depuis le dernier Rendez-vous des régions.

Alors, il est également essentiel que la population soit mise au courant à mesure que les négociations progressent pour éviter les accusations de vouloir régler dans le dos de la majorité. Pour ce faire, il serait souhaitable d'agrandir la représentation autour de la table d'information et de consultation. Il serait également souhaitable que les médias soient renseignés régulièrement par des communiqués précis. Alors, merci de votre bienveillante attention.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le préfet Boivin, merci, M. Potvin, pour cette présentation. Alors, nous amorçons maintenant la période d'échanges avec M. le ministre d'État à la Population et aux Affaires autochtones. M. le ministre.

M. Trudel: M. le préfet, M. Boivin, M. Potvin, qui êtes l'urbaniste, coordonnateur, d'abord, quel plaisir de vous revoir. Votre discours, en privé et en public, est le même, il est constant, de mai à juin, en passant l'été et avec l'automne, il y a toujours la même constance, l'ouverture, la reconnaissance, le respect de l'autre et la nécessité de se donner des règles lorsque l'on vit sur le même territoire, en commençant par la première de ces règles: la reconnaissance des droits de l'autre. C'est une belle démonstration que vous ajoutez à tous ceux et celles qui sont venus nous le dire ici depuis le début de cette commission, publiquement, ouvertement, la nécessité de cette reconnaissance et de se donner des règles à l'intérieur d'un traité, comme vous le dites, pour régler des choses ? pour régler des choses.

Vous estimez donc, à l'instar de plusieurs, je dois le dire, que la bonne entente qui règne avec les voisins, actuellement, eh bien, ça nécessite de passer à une autre étape, celle de convenir de règles écrites plus claires pour dessiner un avenir, pour qu'il y ait davantage d'avenir pour la communauté et le gouvernement que vous dirigez, parce que vous dirigez un gouvernement régional, et pour la nation innue en particulier, Mashteuiatsh. Pourquoi cette nécessité, selon vous, de fixer ça dans des règles à l'intérieur d'un traité?

M. Boivin (Réjean): C'est une question sur laquelle on s'est souvent penchés. C'est que, deux peuples distincts qui cohabitent et qui ont des particularités distinctes, qui ont des droits, parfois, qui sont différents, c'est important d'enchâsser tout ça, c'est important qu'on puisse avoir tout ça dans des documents écrits pour savoir à quoi se référer et perpétuer la bonne entente et, également, pour pouvoir faire bénéficier au peuple autochtone qui a toujours été un peu défavorisé dans l'essor, dans le développement, lui permettre d'occuper sa place.

n (15 h 20) n

M. Trudel: M. le préfet, vous avez noté avec justesse que, quand on dirige un gouvernement régional de MRC, on a de l'expérience en matière d'aménagement et de développement. C'est pour ça que vous avez amené votre urbaniste. Certains ne sortent jamais sans leur avocat; vous, vous ne sortez jamais sans votre urbaniste.

Est-ce que vous pensez que les MRC, ayant maintenant ? 77, 78 ? au-delà de 20 ans d'expérience en matière d'aménagement et de développement, donc de conciliation sur le même territoire des usages, parce que vous avez à réaliser un schéma d'aménagement ? et ce n'est pas tout le monde qui est d'accord pour faire tel type d'activité sur telle partie du territoire, et on ne fait pas, on ne pratique pas, on n'exerce pas les mêmes activités sur telle partie du territoire par rapport à une autre... Les MRC peuvent-elles être non seulement utiles, mais comment pourraient-elles être impliquées dans la consultation et l'implication des citoyens québécois, de la nation québécoise, pour la suite des choses? Comment pourriez-vous contribuer sous cet aspect-là?

M. Boivin (Réjean): Alors, ici, un conseil de MRC est formé de l'ensemble des maires qui sont sur le territoire. Et cet ensemble de maires répond d'un conseil municipal d'abord, avec six ou huit conseillers, selon la grosseur des municipalités. Chez nous, à l'heure actuelle, c'est six dans toutes, même si une en a déjà eu huit. Alors, on est capable d'avoir le pouls de la société, on est capable d'avoir le pouls de notre milieu par la participation à la collectivité, par la participation à la MRC. Également, dans le développement du territoire, comment on peut rejoindre notre monde? Alors, il y a tous nos médias qui sont capables de le faire. On a également, dans chacune de nos municipalités, des petits journaux locaux, et Dieu sait si c'est lu. Alors, ça, c'est une autre facilité qu'on a à rejoindre notre monde et de diffuser ce qu'on a à répandre.

Et en quoi la MRC maintenant pourrait-elle favoriser l'aménagement, favoriser le développement en collaboration avec les autochtones? Je vais laisser, entre autres, à mon aménagiste, à mon urbaniste, M. Potvin, le soin d'élaborer ici.

Le Président (M. Lachance): M. Potvin.

M. Potvin (Jacques): Alors, bonjour. Je pense, pour répondre à votre question, M. le ministre, qu'il y a deux éléments particuliers: d'une part, le rôle de conciliateur à un moment donné dans les différends, que la MRC est appelée à jouer régulièrement et, d'autre part, en termes d'expertise qu'on a par rapport à l'application puis au vécu sur un territoire donné. Donc, techniquement, c'est deux éléments, si on peut dire, ou deux exemples qui peuvent répondre à votre question.

M. Trudel: J'entends aussi, vous ajusterez si nécessaire, lorsque arriveront d'autres moments de consultation de la population, que nous pourrons compter sur le gouvernement régional de MRC lorsqu'il s'agirait, pour les autres étapes, de connaître le pouls de la population.

D'autre part, très clairement, M. le préfet, M. Chevrette à qui on a demandé d'effectuer cette tournée de consultation, d'écouter, de revenir ici nous faire un certain nombre de recommandations, il est très clair à la dernière recommandation, il nous dit: Ratifier les principes, l'entente de principe générale qui vous a été présentée par les parties concernées et, subséquemment, par la suite, enclencher les autres éléments spécifiques, les éléments spécifiques sur lesquels doit porter l'entente, de manière plus précise, avec un certain nombre de priorités, par exemple, les activités de chasse et de pêche, parce que c'est très sensible.

Vous, là, avez-vous la même vision des choses, c'est-à-dire ratifier l'entente de principe et, par la suite... Parce que Guy Chevrette émet un communiqué d'ailleurs, cet après-midi, pour dire qu'il n'a jamais prôné la réouverture de l'entente de principe qui nous est présentée. Il indique ce que subséquemment on devrait traiter. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette proposition?

M. Boivin (Réjean): On entend très souvent des gens dire: Balançons tout ça puis recommençons. Je pense qu'il y a suffisamment de chemin de parcouru pour ratifier cette entente générale, pour être d'accord dans les grandes lignes et, comme vous l'affirmez à l'intérieur de votre question, s'en aller, se diriger vers le processus pour régler les différents éléments sur lesquels on ne s'est pas encore entendu. Donc, je pense que l'essentiel du mémoire qu'on vous a livré nous dit de continuer les négociations, d'aller de l'avant. Et, en disant d'aller de l'avant, bien, on disait: On endosse ce qui a été défini jusqu'à maintenant dans un cadre général bien entendu.

On ne pouvait pas, d'ores et déjà, avoir tout négocié puis être capable de tout dévoiler dès les premiers mois. Alors, c'est compréhensible qu'il reste énormément d'éléments à négocier. Et, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, la MRC de Maria-Chapdelaine sera très ouverte également pour favoriser des rencontres avec les citoyens pour apporter des éclaircissements et apporter, au fur et à mesure, les développements qui pourraient subvenir.

M. Trudel: Un élément en particulier que vous avez soulevé, qui est de la réalité, je dirais, plus quotidienne, plus terre à terre, c'est la proposition, dans l'entente de principe général, à l'égard de l'Innu Assi de Mashteuiatsh qui inclut la partie de la Pointe-Taillon ? magnifique, magnifique pour tout le monde, d'ailleurs, pour toutes les nations ? pour avoir accès au lac. Pour l'avoir fréquenté, cette traversée du parc de Pointe-Taillon à vélo est un miracle en soi; le matin tôt en plus. Et là...

M. Boivin (Réjean): Merci pour la publicité.

M. Trudel: Oui. Bien, ça mérite bien ça. Ça mérite bien ça. Mais c'est très curieux, la façon dont cependant vous véhiculez les choses, et c'est parfaitement illustratif de la situation: à la fois une adhésion mais enthousiaste au projet d'entente et à l'éventuel traité, et cette considération tout à fait pratique de l'accès public. Mais vous savez que le projet d'entente de principe, il prévoit la protection de l'accès à ces lieux publics à l'intérieur... lorsque ces lieux publics seraient inclus dans Innu Assi. D'autre part, vous avez la précaution d'ajouter que c'est le seul accès public qu'on a au lac sur le territoire, le territoire concerné de la MRC, et vous prenez soin d'ajouter: «et que nous sommes prêts à partager». Vous êtes prêts à le faire dans les deux sens, j'imagine, de partager à partir d'une base d'Innu Assi ou d'une base de territoire de MRC.

M. Boivin (Réjean): On peut s'asseoir et en discuter. Mais disons qu'on est très, très, très ouverts à toute forme de partenariat.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Oui, M. le Président. Je tiens à saluer M. Boivin, le préfet et maire de Normandin, ainsi que M. Potvin, qui est attaché à la MRC. Je pense que je tiens à vous féliciter parce que votre rapport, dû à la maturité de vos propos, nous laisse présager... et je pense que c'est un signe assez significatif de votre part au gouvernement comme quoi les MRC sont en mesure d'assumer des responsabilités sans pour autant avoir rajouté des structures supplémentaires pour le faire. Et ça, ça me plaît énormément.

Maintenant, moi, j'aurais une question à poser. Considérant que vous avez un territoire immense puis vous avez quand même beaucoup de villégiature, je pense, au-delà de 3 000 personnes qui sont dans ces territoires-là, est-ce que le fait... Parce qu'on entend dire ça: Si l'Approche commune se signe, ça va tout changer, on ne sera plus chez nous. Vous autres, comment est-ce que vous voyez ça? Votre réaction de votre monde, là. Votre vrai monde qui sont autour de vous autres, est-ce qu'ils ont peur de ça? De quelle façon vous les rassurez? Quel est votre langage là-dessus? Quelle est votre approche?

n (15 h 30) n

M. Boivin (Réjean): Alors, c'est réel que le monde des élus est très, très, très renseigné aujourd'hui, très informé. On rencontre encore énormément de gens qui ont des craintes, qui ont des peurs et qui les ont manifestées lors du passage de M. Chevrette, par exemple. L'Association des trappeurs, par exemple, et d'autres associations qui ont eu peur, les pourvoyeurs, par exemple, qui ont eu peur et qui ont des peurs qui sont parfois très justifiées. Quand on s'assoit puis qu'on détermine qu'est-ce que c'est exactement, le Nitassinan, hop, il commence à s'effacer des peurs, ici. Mais je sens qu'une très grande partie de nos gens sont d'accord à partager le territoire et à avoir une harmonisation à l'intérieur de ces territoires-là. Je ne suis pas inquiet pour ça.

M. Laprise: Depuis que ce projet de loi là est sur la table, est-ce qu'il y a eu des gestes qui ont été posés qui peuvent des fois aller vers des affrontements? Est-ce qu'ils peuvent provoquer des affrontements ou des oppositions majeures de part et d'autre?

M. Boivin (Réjean): À ma connaissance, à l'intérieur de notre MRC, il ne s'est rien produit de tel. Pour le moment, c'est demeuré tout le temps des formulations orales, puis peut-être loin d'être orageuses, là. Alors, je ne veux pas dire que c'est une entente à 100 %, mais présentement on n'a pas de menace ou quoi que ce soit. Je ne sais pas si M. Potvin, de son côté, en a perçu.

M. Potvin (Jacques): Moi, ce que je pourrais dire là-dessus, c'est sûr que la cohabitation, des fois, et même entre non autochtones, il y a toujours certains points, sauf que, jusqu'à maintenant, il ne semble pas y avoir eu de problèmes majeurs, comme a mentionné M. le préfet. Et lorsqu'il y a eu des discussions avec soit les officiers des ministères ou avec les représentants de la communauté de Mashteuiatsh, on a réussi à régler les points entre nous autres.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Roberval, vous pouvez poursuivre.

M. Laprise: Qu'est-ce que vous entendez... Comment est-ce que vous voyez l'encadrement des droits ancestraux? De quelle façon vous voyez ça?

M. Boivin (Réjean): Je vois que... À l'intérieur, par exemple, d'une municipalité, on a notre réglementation municipale. On ne peut pas dire qu'on est maîtres chez nous à 100 %, mais on a tout de même beaucoup de décisions à prendre qui touchent notre population. On dit souvent que le gouvernement municipal est le gouvernement le plus proche du peuple, et c'est peut-être le gouvernement qui est le plus suivi, qu'on a le plus à l'oeil, parce qu'il est prêt justement du citoyen. Alors, moi, je vois que les peuples autochtones, dans leur autonomie administrative, aient une autonomie qui ressemble en quelque sorte à l'autonomie municipale qu'on a, aux latitudes qu'on a à l'intérieur du monde municipal, et qu'ils soient responsables de leur administration. Mais le tout, comme je le disais dans mon... je dis «mon», dans notre mémoire, c'est dans le respect des lois canadiennes et des lois québécoises.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. C'est un peu la même question. Vous avez comme maire, comme préfet, des objectifs, vous faites preuve d'une grande ouverture, puis on aimerait savoir jusqu'où la population en général est prête à vous suivre dans ça. Quand vous parlez de partenariat comme M. Chevrette parlait, jusqu'où, par exemple, votre population est prête à aller et la population innue aussi?

M. Boivin (Réjean): C'est une question à laquelle il est assez difficile de répondre, ici, jusqu'à quel point la population va nous suivre. Présentement, disons que le mémoire a été rendu public chez nous depuis une quinzaine, et je n'ai eu que des éloges jusqu'à maintenant. Je n'ai pas eu de personnes, sauf une, qui s'opposaient ou disaient: Voici, ils en ont assez de droits de même, il ne faudrait pas leur en rajouter; des choses comme ça, là. Mais, c'est une personne. Dans l'ensemble, je n'ai pas eu d'autres... si ce n'est des commentaires positifs. Et les médias auxquels j'ai eu affaire m'ont tous dit également qu'ils appréciaient le mémoire tel que présenté puis qu'ils appréciaient la présentation de la MRC de Maria-Chapdelaine.

Alors, jusqu'à quel point maintenant la population en général, si jamais elle a à se prononcer... Je pense que, si elle est bien renseignée, cette population, si elle est bien informée, si on ne laisse pas toute la place aux gens qui veulent mettre la hache dans l'entente, qui veulent l'annuler tout simplement puis repartir sur une autre base parce que, aux yeux de certaines personnes, ce qui n'est pas négocié par eux n'a aucune valeur, ce qui est négocié par les autres n'a aucune valeur, il faudrait qu'ils soient absolument sur la négociation et il faudrait que la négociation se fasse sur la place publique, chose qui n'est pas toujours possible... Alors, avec un esprit de transparence et avec les informations au fur et à mesure, comme on le disait également dans le mémoire, que les médias soient bien informés et qu'ils soient capables de véhiculer jusqu'où en sont les négociations, je pense qu'on est capables d'avoir notre population derrière nous. Et notre population n'a jamais été réfractaire à la population de Mashteuiatsh ou aux peuples autochtones en général.

M. Boulianne: Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de Jacques-Cartier et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, je veux dire bienvenue au chef d'orchestre, si j'ai bien compris, de la MRC de Maria-Chapdelaine.

Juste pour revenir sur un des points que vous avez soulevés, c'est ma faute, je n'ai pas encore accepté la belle invitation de ma collègue de Jonquière pour venir dans le coin et faire le tour du lac en vélo, mais c'est une invitation qui est lancée. Alors, je n'ai pas la même expérience que le ministre. Pouvez-vous juste m'expliquer davantage la situation? Vous avez soulevé Pointe-Taillon et Pointe-Racine. Alors, pour ceux qui n'ont pas encore eu l'occasion de venir visiter, c'est quoi la problématique qui se pose par l'entente et c'est quoi la solution que vous aimeriez avoir, aux yeux de la MRC de Maria-Chapdelaine?

M. Boivin (Réjean): Alors, Pointe-Taillon est actuellement un parc exploité par le gouvernement du Québec. Il est situé entre la rivière Péribonka qui vient se jeter dans le lac mais qui le longe à quelques kilomètres pendant plusieurs kilomètres, d'où la création de cette pointe-là qui s'avance entre le lac Saint-Jean proprement dit et la rivière Péribonka, d'autre part. Alors, c'est un parc, comme je vous disais tout à l'heure.

Pour ce qui est de Pointe-Racine, il y a une autre grande rivière qui vient se jeter dans le lac Saint-Jean, un petit peu plus à l'est, et c'est la rivière Mistassini qui, elle, reçoit, un peu avant son embouchure, la rivière Mistassibi. Et la rivière Mistassini, au moment où elle entre dans le lac Saint-Jean, fait une pointe également qu'on appelle la Pointe-Racine, et la MRC y possède déjà des exploitations de TPI et, également, la MRC, il y a des intérêts privés également sur cette Pointe-Racine, entre autres, il y a déjà eu des installations de villégiature pour permettre des colonies de vacances et tout ça, là. Alors, je ne sais pas si ça vous situe suffisamment.

M. Kelley: Et la question, c'est avant tout l'accès à ces endroits ou le partage de gestion? Je cherche juste à mieux comprendre la problématique qui est soulevée.

M. Boivin (Réjean): Je vais laisser répondre l'aménagiste, parce que le territoire, il le connaît.

Le Président (M. Lachance): Pas de problème.

M. Potvin (Jacques): Je pense que l'exemple va... En tout cas, on vous a informés au plan géographique. Ce qu'il faut retenir, je pense que c'est deux points d'intérêt dans le milieu. M. le ministre, tantôt, le mentionnait que, pour Pointe-Taillon, il y avait énormément d'activités, mais c'est aussi le site d'une ancienne municipalité où il reste des vestiges de ça. Et, dans une éventuelle mise en valeur, le questionnement qui se pose, bon: De quelle manière ça s'intégrera? Ça fait que c'est pour ça que le mémoire de la MRC dit: Bon, bien, soit qu'on choisisse un autre territoire, soit qu'on en fasse une forme de gestion partagée.

Pour ce qui est de Pointe-Racine, c'est un territoire, comme M. le préfet l'a mentionné, qui est occupé depuis le début de la colonisation. C'est sûr que les autochtones y ont pensé préalablement, mais il y a, là aussi, des aménagements: aires de mise à l'eau, il y a des baux d'émis, différentes choses. Donc, ça fait partie un peu de l'activité d'un milieu, et c'est des éléments qui sont importants pour la communauté de la MRC de Maria-Chapdelaine.

M. Kelley: Alors, dans l'optique d'avoir... Parce que, hier, M. Chevrette a parlé d'un meilleur processus de consultation, soit les tables sectorielles. On peut prendre ces deux exemples comme un endroit où on aimerait avoir un genre de mécanisme de consultation entre les négociations et la MRC de Maria-Chapdelaine pour que tout le monde puisse trouver son compte à l'intérieur d'une entente finale, si j'ai bien compris?

n (15 h 40) n

M. Boivin (Réjean): ...très d'accord avec ça.

M. Kelley: Un deuxième exemple. Encore une fois, moi, je viens d'un comté où il y a, à ma connaissance, très peu de baux de villégiateurs. Alors, encore une fois, si vous pouvez juste m'éclairer un petit peu, parce que... Peut-être sur l'île Dorval? Non, je pense, même pas sur l'île Dorval on a ces baux. Alors, si vous pouvez m'expliquer les enjeux encore et c'est quoi, les préoccupations que l'entente peut poser pour les détenteurs de ces baux.

M. Boivin (Réjean): Oui. Allez-y, M. Potvin.

M. Potvin (Jacques): Oui, je vais tenter de vous répondre. D'abord, c'est des gens qui détiennent des droits fonciers émis par le ministère des Ressources naturelles, secteur du territoire. Donc, ces gens-là occupent une certaine superficie de terrain, pratiquent des activités récréatives, soit de prélèvement faunique ou autre ou d'autres types d'activités de récréation, et, un petit peu ? il y a une question qui a été mentionnée tantôt ? les gens s'interrogeaient, quels vont être les changements à l'intérieur de ça, parce qu'il y a certains de ces 3 300 qui vont se retrouver à l'intérieur de sites identifiés comme sites patrimoniaux, etc. Donc, c'est tout ce questionnement-là qui se passe et sur lequel, éventuellement, les gens attendent des réponses.

D'autre part, on a parlé aussi de cohabitation tantôt, je pense que c'est M. le député de Roberval qui le mentionnait. Les gens disent: Si on s'entend pour établir une distance ou une marge entre un équipement autochtone et un équipement non autochtone, il faudra qu'il y ait une forme de réciprocité. C'est un petit peu le discours qu'on entend de la part de ces 3 000 occupants du territoire, à part tous les autres qui les occupent de façon plus temporaire, si on peut dire.

M. Boivin (Réjean): Sans avoir de résidence ou d'établissement.

M. Potvin (Jacques): Sans avoir d'occupation permanente, parce qu'il y a des gens qui vont avec des véhicules... Disons, on les appelle les «itinérants». Là, ce n'est pas le même qualificatif ou définition qu'on voit dans d'autres milieux, mais des gens qui occupent de façon temporaire le territoire.

M. Kelley: Et un autre... Plusieurs témoins ont soulevé l'importance d'avoir une population bien informée, bien renseignée, et c'est un petit peu dans le vide où les rumeurs peuvent circuler, et, si elles ne sont pas niées ou si elles ne sont pas corrigées, elles prennent de plus en plus de l'ampleur. D'une façon pratico-pratique, avez-vous des suggestions concrètes, des gestes que soit le gouvernement peut poser, ou les négociateurs, ou je ne sais pas qui? Mais qu'est-ce qu'on peut faire pour... Ça fait partie de l'introduction de M. Chevrette. Hier, on a vu qu'il attaquait les mythes qui circulent. Il y avait le document dont je viens de prendre connaissance, de la Commission des droits de la personne, qui est Mythes et réalités des autochtones au Québec. Mais avez-vous d'autres suggestions? Qu'est-ce qu'on peut faire? Parce que c'est une problématique qui est soulevée à maintes reprises que, quand la population se sent exclue, quand la population sent qu'elle n'a pas accès aux renseignements, ça cause des problèmes. Alors, avez-vous d'autres suggestions concrètes que vous pouvez nous formuler?

M. Boivin (Réjean): C'est bien évident qu'on ne s'est pas penché sur cette question-là puis commencé à élaborer tout un processus, mais c'est certain que d'envoyer des fréquents communiqués de presse bien précis pour dire où on en est, qu'est-ce qu'on propose, ce sur quoi on s'entend, ce sur quoi on est en voie de s'entendre, je pense que les médias sont capables de nous diffuser ça puis que les gens sont capables d'en prendre connaissance. Également, lors des... on peut appeler ça des réunions, des assemblées de consultation ou de vulgarisation, permettre justement aux médias d'y assister, les inviter à assister, qu'ils soient ni plus ni moins partie prenante, parce que c'est tout le peuple québécois qui va s'entendre, ce n'est pas uniquement des petits groupes de personnes et ce n'est pas en dehors des médias qu'on va s'entendre, c'est avec les médias, ils sont partie prenante également.

Alors, quel autre procédé? Peut-être qu'en y songeant comme il faut on va en trouver d'autres, puis j'imagine qu'il y a d'autres personnes qui vont s'asseoir à ma place dans quelques minutes, et demain, et après-demain, et qui vont vous en donner également.

M. Kelley: ...mais merci beaucoup parce que, je pense, ce sont encore une fois des suggestions qui sont très terre à terre, et c'est ça qu'il faut. Il y avait le sentiment d'exclusion. On a tout intérêt de corriger cette situation pour nous amener vers une entente où les règles du jeu sont connues, sont claires, parce que c'est le meilleur garant de l'avenir.

Alors, juste en terminant parce que ma collègue veut poser une question. Si le ministre garde toujours ouverte sa liste des nominations pour le comité régional directeur pour les représentants municipaux, peut-être que je vais proposer M. Boivin de la ville de Normandin comme un autre candidat potentiel pour ce poste. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Jonquière.

Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Bonjour, M. le préfet. Bonjour, M. Potvin.

D'entrée de jeu, une question très technique: Est-ce que la pointe de Vauvert ferait partie du territoire du Innu Assi?

M. Potvin (Jacques): La partie de Pointe-Racine est l'extrémité, justement, de ce que les gens appellent Vauvert dans le secteur, là. Donc, l'extrémité de la pointe, c'est ce qu'on appelle Pointe-Racine, Vauvert étant tout le secteur qui longe le lac Saint-Jean à partir, si vous voulez, de Péribonka jusqu'à la rivière Mistassini.

M. Boivin (Réjean): Mais le secteur chalets de Vauvert n'est pas compris dans l'Innu Assi.

Mme Gauthier: Dites-moi, on a entendu ce matin le Réseau des scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je sais que la MRC de Maria-Chapdelaine comprend une activité industrielle, au niveau forêts, importante. Avez-vous rencontré effectivement les industriels forestiers pour discuter avec eux de leurs craintes concernant les mètres cubes qui seraient alloués à la communauté innue?

M. Boivin (Réjean): On a rencontré déjà à plusieurs reprises les industriels ? peut-être pas les représentants des petites scieries, mais plutôt les gens de la grosse entreprise ? et ils nous ont toujours manifesté des inquiétudes, des inquiétudes d'ordre général. Les aires protégées, ça leur fait peur. Ça leur fait peur, mais ça fait peur peut-être à des élus aussi. Mais on sait que ça en prend. On sait qu'à un moment donné il va falloir aller vers des aires protégées pour être à l'image des autres nations sur la terre. On sait que les gens du milieu forestier sont inquiets également. Ils ont dit: Oups! Il y a eu la «Paix des Braves» qui a été signée dans le courant de l'année dernière et il y avait des mètres cubes qui risquaient de disparaître. Alors, ce n'est pas sans inquiéter.

Et on va parler aujourd'hui de protection, par exemple, de l'aire du caribou des bois. Alors, ça aussi, c'est quelque chose qui chatouille, puis les gens du milieu forestier veulent avoir une espèce d'approvisionnement continu ou avoir l'assurance d'un approvisionnement continu. Je pense que c'est une chose qu'il est assez difficile d'envisager. Cependant, aujourd'hui on est capable d'avoir du rendement accru, on est capable de faire du reboisement sur une plus haute échelle qu'on le fait à l'heure actuelle.

On a vécu des feux gigantesques l'été dernier et, n'en déplaise à bien des gens qui pensaient que c'était très loin du Lac-Saint-Jean, c'était dans notre territoire, dans la MRC de Maria-Chapdelaine pour une très, très grande partie. Et ces feux-là, on est en train de ramasser le bois, mais il va falloir le plus rapidement possible remettre ça en production. Et, pour le remettre en production, ça veut dire qu'il faut multiplier les plantations, il faut produire plus de plants. Alors, je pense que l'industrie forestière nous encourage fortement, le monde des élus, à pencher vers cette possibilité-là, vers même cet objectif-là.

Et également, dans notre territoire, il y a des feux qui ont passé il y a des années et, entre autres, il y a eu des feux qui sont arrivés à une dizaine d'années d'intervalle, de telle sorte que, lorsque le feu est passé pour une deuxième fois, les arbres n'étaient pas encore assez matures pour produire des cônes et aujourd'hui c'est des immensités qui sont... on ne peut pas dire désertiques, mais ça ressemble drôlement à une zone qui est totalement improductive.

n (15 h 50) n

Alors, les gens de forêts demandent aux élus de travailler beaucoup dans cet objectif-là d'avoir une meilleure... un rendement accru grâce à un reboisement accéléré puis grâce à la facilité qu'on a de produire davantage de plants. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Saguenay.

M. Corriveau: Oui. Eh bien, bonjour. À la vitesse à laquelle mon collègue de Jacques-Cartier fait les nominations, ça m'oblige ? parce que, là, il va juste rester un poste au niveau du secteur Lac-Saint-Jean ? ça m'oblige à reposer un peu la question que je posais tantôt au maire de Roberval, c'est que la composition du comité qui est suggéré par M. Chevrette, la composition du comité directeur régional de négociation, il parle de trois représentants de la faune et de la villégiature, trois représentants municipaux, un représentant du secteur forêt, un représentant du secteur minier, un représentant du développement économique, un adjoint au négociateur puis le président de la conférence. Alors, ça fait en fait un poids relatif, pour les élus régionaux, de trois sur 11.

Avez-vous une opinion quant à cette recommandation-là? Parce que, comme je le mentionnais tantôt, moi, ça m'apparaît nettement insuffisant au niveau de la représentativité des élus sur ce comité-là qui est au front. Eh bien, comme il ne reste plus rien qu'une place, je me demande bien qui... Je sais qu'il y a d'autres gens du Lac tantôt qui vont venir, mais...

Une voix: Du Saguenay.

M. Corriveau: Du Saguenay, oui, aussi. Excusez-moi. Parce que Saguenay, je pense toujours à mon comté. Alors, c'est ça. Qu'est-ce que vous en pensez, vous?

M. Boivin (Réjean): Alors, votre question qui s'adresse à un élu: Y a-t-il assez de places pour les élus? En tant qu'élu, c'est certain qu'on veut toujours qu'il y en ait le plus possible, exactement comme dans le monde de l'éducation, quand on me disait: Pensez-vous qu'il devrait y avoir plus de professeurs sur tel comité? Eh bien, j'étais de ceux qui disaient: Oui, oui, ça en prend, puis il faut grossir le nombre, parce que j'étais moi-même enseignant.

Alors, c'est réel que plus on serait d'élus au niveau de l'ensemble des élus, c'est quelque chose qui paraît bien, c'est quelque chose qu'on souhaite, mais il faut travailler avec d'autres types de monde également, d'autres types de personnes. Il n'y a pas seulement les élus dans la société, il y a tous les autres secteurs. D'ailleurs, vous parlez de faune, vous parlez de représentants du monde minier, de représentants du monde industriel, de l'industrie forestière et tout ça. C'est officiel qu'il faut travailler avec ces gens-là. S'il y a moyen de rajouter, de monter à 13 et puis de rajouter deux élus, je serais très d'accord, mais disons que, pour le moment, je m'en satisfais.

Le Président (M. Lachance): Tout à l'heure, M. le préfet, M. Lebel, le maire de Roberval, faisait allusion à certains individus qui s'opposent vigoureusement à l'entente ou au projet d'entente et qui ne se gênent pas pour utiliser les ondes ou encore la presse écrite pour faire valoir leur point de vue, des gens que je pourrais qualifier de pyromanes, des gens qui exacerbent les passions, qui chauffent la marmite, qui enveniment la situation. Est-ce que vous croyez qu'il est possible de contrer ça et, si oui, de quelle façon ça pourrait être fait? Est-ce que vous avez des suggestions là-dessus?

M. Boivin (Réjean): Très souvent, quand on essaie de contrer cette situation, les gens qui se sentent lésés là-dedans et qui se sentent attaqués là-dedans vont dire: On nous accuse de racisme. On nous accuse d'être racistes. Alors, ça, je l'ai entendu souvent de la part des personnes qui se défendent d'être ces négateurs, d'être ces gens qui voudraient repartir à zéro puis avoir une entente qu'ils négocieraient finalement eux-mêmes.

De quelle façon contrer ça? Moi, je sais que j'ai déjà été un adepte de l'écoute de ces stations ou encore de lire les médias qui propageaient cette mauvaise nouvelle. Aujourd'hui, je me suis guéri; j'écoute d'autres postes.

Des voix: Ha, ha, ha!.

M. Boivin (Réjean): Tout simplement parce que, bien souvent, ça nous crée une situation où ça nous vire à l'envers, ça nous indispose et, si c'est de bonne heure le matin, eh bien, la journée risque de mal se passer. Les arrêter, c'est difficile, mais arrêter de les écouter, ça, c'est possible.

Le Président (M. Lachance): Sage conseil. Alors, merci beaucoup, M. Potvin et M. Boivin, pour votre présentation ici, cet après-midi. Merci.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Boulianne): Je demande donc au Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay?Lac-Saint-Jean de s'approcher, s'il vous plaît.

Une voix: ...

Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, la commission va suspendre ses travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 59)

 

(Reprise à 16 h 1)

Le Président (M. Boulianne): Donc, la commission reprend ses travaux. Alors, il nous fait plaisir d'accueillir le Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Alors, si vous voulez vous présenter et nous présenter votre partenaire.

Conseil régional de concertation et
de développement du Saguenay
? Lac-Saint-Jean
(CRCD du Saguenay
? Lac-Saint-Jean)

M. Boivin (Réjean): Alors, bonjour, M. le Président. Bonjour à tous et à toutes, mesdames et messieurs. Le président du CRCD de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean s'appelle Réjean, Réjean Bergeron, et il ne pouvait être présent aujourd'hui. Donc, il se replie sur un autre Réjean, Réjean Boivin. Et je suis accompagné aujourd'hui du permanent, du directeur général du CRCD du Saguenay?Lac-Saint-Jean, M. Denis Brassard.

Le Président (M. Boulianne): Bienvenue. Alors, allez-y.

M. Boivin (Réjean): Alors, ce n'est pas vraiment un mémoire, c'est une lettre qui avait été adressée à M. Chevrette, et on a cru bon de la présenter publiquement dans le cadre des mémoires.

Alors, en regard du sujet mentionné en rubrique, c'est-à-dire la proposition d'entente de principe avec les Innus et les travaux de la commission parlementaire des institutions qui siégera sur ces questions au cours du présent mois, nous désirons vous faire part des réflexions du Conseil régional de concertation et de développement ? le CRCD ? du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Avant toute chose, nous tenons à rappeler que notre organisation est reconnue légalement ? Loi sur le ministère des Régions ? depuis 1996, à titre d'interlocuteur privilégié du gouvernement du Québec sur toute question relative au développement régional.

Notre mandat principal consiste à favoriser la concertation chez nos partenaires régionaux, à dégager les grandes orientations du développement au Saguenay?Lac-Saint-Jean ? plan stratégique régional ? et à formuler des avis au gouvernement du Québec ? ministre des Régions ? sur tout ce qui touche à son développement. C'est donc à ce titre que nous souhaitons inscrire la présente intervention.

Une entente essentielle. De prime abord, nous encourageons et incitons fortement le gouvernement du Québec à poursuivre, sur la base des principes énoncés dans l'Approche commune, les négociations avec les représentants des populations innues concernées afin de convenir, à terme, des ententes accessoires ? traités ? sur toutes les questions afférentes. Il s'agit, à notre avis, d'une démarche empreinte de rigueur, d'objectivité, à l'enseigne d'une grande maturité politique et qui pave la voie à une reconnaissance responsable des droits respectifs des communautés innues et blanches et à un usage réfléchi et balisé, comme il se doit, de tels droits et de tels privilèges.

En ce sens, nous souscrivons d'emblée à la volonté des parties de solutionner, par le dialogue et la négociation raisonnée, les différends historiques qui ont trop souvent été à l'origine de rapports tendus et discordants entre les communautés autochtones et blanches.

Au-delà des obstacles qui demeurent à aplanir, des inquiétudes, légitimes ou non, exprimées et, dans certains cas, largement médiatisées ainsi que des impacts appréhendés, réels ou fictifs qui découleront de l'application éventuelle des ententes accessoires conclues en marge de l'entente générale, nous croyons fermement qu'il est dans l'intérêt de nos communautés respectives de mener à terme ce processus audacieux et porteur d'espoirs.

Une information appropriée. Cependant, de manière à réduire les tensions observées à ce jour, d'éviter le durcissement des positions, de même que pour faciliter l'adhésion du plus grand nombre par une information valide et conforme, nous ne saurions trop insister auprès des autorités gouvernementales sur la nécessité d'inscrire dorénavant la suite des choses sous le signe d'une plus grande transparence ? il me semble avoir entendu ça, ha, ha, ha! ? en privilégiant notamment une communication structurée et régulière avec les publics visés. À cet égard et compte tenu de l'importance des enjeux en cause, il nous apparaîtrait indiqué et raisonnable d'user du temps nécessaire afin de permettre aux populations concernées de cheminer à une cadence adaptée à l'apprentissage et à la compréhension des tenants et des aboutissants de cette démarche complexe et ardue. Il serait déplorable et autant préjudiciable que la précipitation dans l'action conduise à un cul-de-sac et qu'elle scelle définitivement le sort d'une initiative, au demeurant, exemplaire.

Aussi, est-il besoin de divulguer, dès que disponibles, toutes informations pertinentes à même de permettre une juste appréciation des impacts économiques, sociaux et environnementaux réels et prévus des ententes résultant de l'Approche commune. Cette connaissance devrait également s'accompagner, si requise, de précisions sur les mesures d'atténuation et de compensation pour tels impacts. Cette façon de faire devrait être assurée. Ainsi, certaines garanties à l'effet que la mise en application des ententes et leur gestion au quotidien s'exerceront, eu égard aux droits et privilèges consentis, le tout associé, le cas échéant, à une juste compensation pour la perte ou la restriction d'exercice de tels privilèges et droits. En ce sens, on ne saurait faire abstraction des inquiétudes et des prétentions légitimes exprimées par les individus et les entreprises qui pourraient être lésés par la conclusion éventuelle de traités et nier à cet égard leur droit à une compensation juste et raisonnable.

Dans un même sens et tout en reconnaissant que certains aspects de la négociation s'accompagnent d'un caractère résolument confidentiel, il y aurait lieu assurément de revoir le mécanisme de liaison et de communication avec les milieux régionaux et locaux, de manière à favoriser l'élargissement des rencontres d'information et de sensibilisation à un plus grand nombre d'intervenants et d'intervenantes ? élus et non élus ? à rejoindre, par des outils de communication appropriés, des clientèles plus diversifiées ? exemples, les utilisateurs des ressources, les médias ? et à outrepasser le cadre unique des sessions de consultation pour susciter une participation davantage orientante et engageante pour les milieux concernés.

Les bases d'un partenariat prometteur. Au-delà de cet objectif incontournable, c'est-à-dire la conclusion heureuse de la négociation entreprise dont l'atteinte demeure un prérequis essentiel à l'établissement de relations cordiales et durables, nous appuyons sans réserves l'objectif ultime de permettre aux populations autochtones d'assumer une part grandissante des responsabilités en matière de développement social, culturel et économique sur le territoire par l'appropriation de pouvoirs et de moyens d'intervention adéquats ainsi que de capacités financières adaptées. En cela, reconnaissons une parfaite adéquation avec le discours véhiculé et les attentes maintes fois exprimées, tant par notre organisation que par nos partenaires, en regard du développement global du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

n (16 h 10) n

Aussi percevons-nous au travers des lignes directrices de l'Approche commune un modèle de développement qui s'apparente grandement à la vision promulguée par nos plans stratégiques régionaux 1996-2001 et 2001 jusqu'à 2006 et qui rappellent, à juste titre, notre volonté collective et partagée de construire une société régionale plus équitable et plus efficace. De fait, ce projet de société ne saurait être exclusif et y soustraire nos partenaires autochtones de Mashteuiatsh. Nul doute que les relations privilégiées développées de longue date entre nos cultures, le jumelage des expertises et la conjugaison des ressources, des outils et des moyens additionnels dévolus par les ententes accessoires à l'Approche commune viendront enrichir le projet collectif régional et en faciliter, voire en accélérer la concrétisation, et ce, au bénéfice des deux collectivités.

À l'évidence, les liens historiques et conviviaux, voire économiques, développés ici, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, entre les communautés autochtone et blanche, ainsi que le partage d'un même territoire, d'objectifs de développement similaires et de problématiques apparentées deviennent pour ainsi dire les garants d'un partenariat d'affaires solide et constructif. En ce sens, l'intention manifestée par la communauté innue de Mashteuiatsh de s'associer à la communauté blanche dans le cadre d'un nouveau fonds régional d'investissement à risque ? le Rendez-vous national des régions du mois de novembre ? devient riche d'enseignement sur la solidité et la permanence des liens de confiance existants et le désir d'une participation active et solidaire de deux communautés en regard du développement de tout le territoire.

Voilà, pour l'essentiel, la teneur du message que les membres du Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay?Lac-Saint-Jean ? le CRCD ? souhaitent traduire dans le cadre de la consultation gouvernementale sur l'Approche commune. Nous espérons contribuer ainsi à enrichir le débat actuel et à participer dans la continuité et le respect mutuel à l'avènement d'une relation solide, généreuse et durable entre nos communautés.

Vous remerciant de l'attention que vous porterez à la présente, veuillez recevoir nos salutations distinguées. Et c'est signé M. Réjean Bergeron, président du CRCD Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. Boivin. Est-ce que vous avez autre chose à ajouter? On peut procéder à la période de questions?

M. Boivin (Réjean): C'est beau. Allons.

Le Président (M. Boulianne): Ça va?

M. Boivin (Réjean): Alors, pour la période des questions, vous vous référez surtout à mon collègue, à M. Denis Brassard, puisque je suis le lecteur du mémoire, quoique je partage entièrement ses visions.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. le recteur. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Trudel: M. le recteur?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boivin (Réjean): Ha, ha, ha!

M. Trudel: M. le recteur.

Une voix: Nouveau titre.

M. Boivin (Réjean): Aïe! On m'en donne, des titres, aujourd'hui!

M. Trudel: C'est très exactement cela, le recteur étant celui qui fixe une direction.

Le Président (M. Boulianne): C'est ça.

M. Trudel: Qui fixe une direction que l'on cherche à atteindre avec des objectifs. Merci, M. Boivin, à ce titre, et bienvenue, M. Bergeron. M. Bergeron, la candidature du vice-président et par ailleurs préfet et maire a déjà été posée pour la représentation régionale pour une implication régionale éventuelle dans les autres phases de la négociation vers ce traité.

Depuis le début de l'après-midi, que ce soit au niveau local, donc municipal, milieu urbain, Roberval, et je ne le dis pas uniquement pour faire une image, mais le maire d'une municipalité plus rurale, Normandin, et le préfet de toute une MRC sont venus nous indiquer qu'il y a un mouvement très clair en faveur de cette entente, des personnes qui sont élues au suffrage universel et qui, au moins, minimum, une fois chaque lundi d'un mois, rencontrent leur population dans les séances publiques du gouvernement local, du conseil municipal. Maintenant, vous ajoutez, il faut le dire, je pense, la puissante voix d'un conseil régional de concertation, le CRCD.

Pour qu'on puisse mesurer l'ampleur, combien de monde, à ce conseil d'administration du CRCD? Comment s'est prise la décision de ce mémoire? Parce que c'est fort important, là, ce qui... On a véhiculé, non pas de façon dominante, mais il s'est véhiculé ici des éléments qui sont vécus quotidiennement et qui nous sont rapportés par mes collègues de l'Assemblée nationale. On a parfois l'impression que, si on n'a pas fermé le bon bouton, comme dirait M. Boivin, ou pesé sur le mauvais bouton, on serait en train de penser qu'il n'y aurait qu'une seule école de pensée et que, finalement, ce projet d'entente, il ne requiert pas... enfin, il ne recueille pas des appuis dans toutes les couches de la population. En tout cas, c'est ce qu'on entend, depuis le début de l'après-midi.

C'est important que vous nous disiez le processus de décision qui a été utilisé pour véhiculer cette position. Parce que c'est une vision qui, étant le reflet d'une grande partie de la population, est importante pour le signal de la poursuite des efforts en vue d'en arriver à une paix durable avec des règles, des droits reconnus et leur exercice, reconnus par les uns et les autres, à l'intérieur d'une société de droit.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, M. Brassard.

M. Brassard (Denis): Alors, M. le ministre, en tant que ministre des Régions, je pense que vous vous doutez d'une partie de la réponse. Évidemment, le CRCD regroupe une quarantaine de membres et représente toute la société civile. Que ce soit, bien sûr, le monde municipal par les MRC, que ce soit le milieu syndical, les milieux patronaux, les milieux ouvriers par les syndicats et les différentes commissions, que ce soit du côté agroalimentaire, du côté des commissions scolaires et toute la députation régionale qui se retrouve également autour de cette grande table, on y retrouve, bien sûr, toutes les facettes de la société et même, je vous dirais, à maintes reprises, on a eu aussi... on a la communauté de Mashteuiatsh qui siège avec nous. Alors, tous, autour de la même table, vous retrouvez les différents groupes de la région qui sont présents.

Évidemment, on a été, je vous dirais, au départ, associés à la formation de certains comités lorsqu'il y a eu toute la préparation de la négociation. Certaines choses ont été vérifiées auprès de gens autour de la table du conseil. Mais, ce qui est important, c'est qu'on a été, je vous dirais, dans les premiers à demander une meilleure information quand de la fausse information est sortie, et on a eu droit, bien sûr, à de bons échanges avec le gouvernement sur ce sujet-là, mais on a surtout, sur la base où était le respect de deux communautés, invité la communauté Mashteuiatsh. M. Moar a déjà rencontré le CRCD, entre autres à l'assemblée annuelle, où son principal discours a été justement sur le respect des deux communautés, et, je vous dirais, cette journée-là, à notre assemblée annuelle, on a eu deux discours, un qu'on a apprécié, l'autre moins. Et celui qu'on a apprécié était celui de la communauté de Mashteuiatsh

Évidemment, on a eu droit à toutes sortes de questions, toutes sortes de discussions. Vous comprendrez, quand on parle du côté des petites scieries, de l'approvisionnement forestier, de toutes ces questions-là, elles tournent toujours autour du conseil d'administration, que ce soit dans n'importe quelle de nos commissions. Donc, l'ensemble des dangers, on les connaît.

On connaît également ou on ne connaît malheureusement pas mais on a peur un peu de l'ampleur de l'ensemble des dangers s'il n'y a pas d'entente. Parce que, pour nous, quand on vous mentionne que le premier lien de confiance a été créé entre le gouvernement et la communauté innue, les négociations, pour nous, doivent continuer dans ce respect-là parce que, si elles n'aboutissaient pas, on a beaucoup plus peur des conséquences d'un non-aboutissement que de négociations qui seraient bien menées. Parce que, évidemment ? vous l'avez mentionné souvent, votre représentant M. Chevrette également ? présentement, les droits sont flous. On ne les connaît pas, on ne sait pas qu'est-ce qui peut arriver, et il y a là un danger, là, du côté des deux populations, de s'affronter sur des choses plutôt qu'en discuter. Alors, on vous l'affirme et on vous le réaffirme: Nous, on trouve important qu'on arrive à une entente sur une base de discussion.

Souvent, pour replacer les propos autour d'un large conseil d'administration comme un conseil d'administration régional, nous nous sommes posé la question que, si on avait pris la communauté Mashteuiatsh puis elle s'était appelée Saint-Joachim et qu'on avait fait le portrait de cette poussée de jeunesse qu'il y a parmi cette population-là, ce besoin de travail, ce besoin de se prendre en main et de, je vous dirais, travailler économiquement à l'essor de ce groupe-là et, par le fait même, à l'essor de la région, je crois qu'il n'y aurait eu aucune contestation dans la région. Les gens auraient abondé dans le sens où il faut donner des moyens à ces gens-là de participer à l'économie régionale et à leur économie locale.

n (16 h 20) n

Alors, je pense que, des fois, quand on sort un peu de ce genre de situation là, on se rend compte de ce qu'on pourrait avoir. Et on peut même, je vous dirais, du côté régional, on peut même remercier M. Kurtness, le négociateur, qui a fait une belle avancée quant aux redevances forestières, puis on va sûrement, comme avancée régionale, se servir de cet exemple-là pour demander nous aussi à améliorer notre économie. Alors, ce C.A. là, donc, a eu la chance de consulter toutes ces commissions, de rencontrer les gens, de s'assurer que l'information passait, que ce soit au niveau des MRC ou ailleurs, et, bien sûr, nous avons entériné cette lettre d'appui là, lors d'un conseil d'administration.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. M. le ministre.

M. Trudel: C'est important, en tout cas, pour la partie gouvernementale d'avoir ces explications dans le processus de prise de décision, pas que nous mettions en cause l'opinion qui est véhiculée là. Mais, parfois, il est essentiel de savoir que ce n'est pas le directeur général, M. Bergeron... le président M. Bergeron qui a pris sa plume puis qui a dit: Moi, personnellement, je suis très porteur de ce projet.

Écoutez, il y a un aspect très rassurant à ce que vous nous dites dans l'appui au processus et à la nécessité d'en arriver à conclure une entente et un traité, puis il y a, en même temps aussi, des aspects inquiétants sur le fait qu'il semble bien que publiquement la divergence s'exprime aussi de façon tonitruante, d'une autre façon et à travers d'autres moyens, et là, à moins que le porte-parole de l'opposition puis le ministre soient affectés à temps plein à l'animation de lignes ouvertes ? et nous avons les responsabilités quotidiennes, la période de questions à l'Assemblée nationale ? il est important de constater ce mouvement, et c'est là qu'on se rend compte que le Conseil régional de concertation, il a effectué son travail tel que vous venez de nous le dire et qu'il a consulté et que les gens ont pris la décision en toute connaissance de cause, tout en indiquant qu'il y a des aspects ? M. Chevrette en a souligné plusieurs, on lui avait demandé de faire ce travail-là ? des aspects qui devraient être davantage balisés, balisés de façon prioritaire, de façon à assurer la confiance d'un maximum de personnes dans les sociétés régionales concernées dans le processus, dans les objets d'entente.

C'est intéressant aussi de vous entendre, et j'aimerais en avoir un tout petit peu plus, quand vous dites... et si on a des craintes quant aux changements, quant aux nouvelles choses qui vont apparaître lorsqu'il y a l'instauration de nouvelles règles, vous dites: C'est pire situation s'il n'y a de ces règles.

On a parlé aux milieux d'affaires, ce matin. Est-ce que vous sentez ça dans la région aussi et qu'est-ce que ça évoque pour vous? On ne serait pas dans une meilleure situation s'il n'y avait pas de processus d'entente, d'entente et de traité?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. M. Brassard.

M. Brassard (Denis): Merci beaucoup. Alors, dans les discussions, lorsque je vous dis ce serait pire, c'est tout simplement qu'il y a un plan B. On a un plan A, on négocie, on est capables de mettre les choses sur table, de se parler avec confiance et d'essayer de les négocier.

Le jour où on rejette, que l'une des deux parties rejette l'autre partie en disant: Je préfère ne pas m'entendre pour toutes sortes de raisons, bien, évidemment, on s'en vient dans un flou légal et également dans une, je vous dirais, probablement une réaction d'une population ou d'une autre qui se sentira rejetée et donc qui affirmera ses droits, qui, si elle avait été négociée, l'aurait probablement faite de façon, je vous dirais, de façon plus équitable, plus juste, aurait compris qu'il y a des choses qu'il faut respecter et des choses qu'on fait attention, et, le jour où on doit affirmer nos droits autrement que par des discussions, bien, on les affirme habituellement de façon pas nécessairement habile et on va peut-être des fois... Il peut y avoir, je vous dirais, des choses... ça peut tout simplement monter en épingle.

Il y a un danger à ça, il y a un danger de confrontation. Il y a un danger aussi si les gens... et ça, je vous parle entre gens mais je vous parle aussi si on prend les forestiers, si on prend tous les chemins, toutes les fois où on va dans les lieux publics, tout ce qui est pourvoirie, c'est qu'au lendemain d'une rupture, je dirais, de négociation ou on ne poursuit pas les négociations pour les raisons qui sont souvent émises par les gens qui sont contre cette négociation-là, pour nous, du côté régional, qui travaillons dans la concertation et qui savons combien c'est payant de s'entendre, on sait aussi combien c'est payant de ne pas s'entendre.

Et ça, c'est très difficile pour nous de vous dire: Faites... C'est tellement mal reçu présentement par ceux qui ont des micros de dire: Ne continuez pas parce qu'en général ceux qui écoutent, ceux qui sont sensés, qui sont habitués à ces choses-là savent que mieux vaut une entente que pas d'entente du tout.

Et ça, c'est très important. Ça s'est dit de façon régulière autour du conseil d'administration et c'est, je vous dirais, une des choses qui est la plus importante pour nous, de s'assurer que les parties se parlent dans le respect et dans l'objectif d'en arriver à une harmonie.

Et ce qu'on vous a dit, c'est que, jusqu'à maintenant, c'est harmonieux, au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Il n'y a pas de problème majeur, et je vous dirais: D'après nous, une rupture des négociations pourrait faire que ça devienne dangereux.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. M. le ministre.

M. Trudel: C'est une balise extrêmement importante que vous nous indiquez, là. Les dangers, les dangers de la rupture et de la non-conclusion d'un traité nous donnent courage et élèvent notre détermination à poursuivre le travail qui a été entrepris, sachant que des organismes et les opinions de tous doivent être pris en compte.

Mais des organismes comme le CRCD avec la panoplie d'organismes et de personnes qu'on retrouve autour de la table donnent leur adhésion. Je note que ça va se transformer en question autour d'une question, quant au sort d'une initiative, au demeurant, exemplaire. Et là, en pareille question, en termes d'intérêts supérieurs de la nation, j'ai été directement en face de l'ex-premier ministre Bourassa pendant cinq ans et je l'ai vu tellement souvent utiliser cette expression «les intérêts supérieurs de la nation». Il y a de ces questions ? puis on le voit bien ici, dans cette commission ? qui transcendent les intérêts politiques partisans et qui doivent faire l'objet d'un traitement prioritaire.

Mais, par ailleurs, vous nous dites dans votre lettre, dans votre mémoire «...d'user du temps nécessaire afin de permettre aux populations concernées de cheminer à une cadence adaptée à l'apprentissage et à la compréhension des tenants et des aboutissants de cette démarche complexe et ardue.» Puis, par ailleurs, vous ajoutez dans l'autre phrase: «Il serait déplorable et d'autant préjudiciable que la précipitation dans l'action conduise à un cul-de-sac et qu'elle scelle définitivement le sort d'une initiative, au demeurant, exemplaire.»

Vous êtes en train de nous dire: Prenez votre temps mais pas trop de temps. Hâtez-vous mais pas trop lentement parce qu'il y a plus d'avantages que d'inconvénients à ce que nous en arrivions à la conclusion d'un traité dans le respect des droits et des intérêts et la façon d'être sur le territoire, mais, par ailleurs, prenez aussi le temps nécessaire pour réaliser le processus d'information avec nos populations.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. M. Brassard.

M. Brassard (Denis): La réponse que je vous ai faite tout à l'heure va vous servir encore une fois. Ce que nous mentionnons au CRCD, c'est qu'on a tout intérêt à réussir. Mais on a encore plus d'intérêt à ne pas manquer notre coup. Et, je vous dirais. dans la précipitation de réussir, il faut faire attention pour ne pas, je vous dirais, précipiter des choses, s'assurer qu'on ne se trompera pas dans cette discussion-là.

On entend souvent des commentaires, de dire: On sait bien, ils signeront quelque chose puis après ça ils vont revendiquer encore d'autre chose. On ne le saura pas. On entend aussi du côté d'autres populations qui disent: J'ai des droits. On parlait de villégiature tantôt, des choses. Comment on va me toucher?

Alors, c'est important que, en plus d'en arriver à une entente... Une bonne entente qui ne serait pas bien acceptée par l'ensemble des parties, ça devient une mauvaise entente. Alors, nous, on comprend très bien que le travail a été fait de façon mature. Nous, on croit que, ce qu'on a lu présentement lorsqu'on se fie sur les documents qui nous ont été envoyés, les documents officiels, il y a eu du bon travail, du travail mature.

On a dit, dans le reste de notre lettre, que, bien sûr, du côté des communications avec les gens, bien, c'est là où on a peut-être eu la moins bonne note. Je vous dirais: Je comprends que ce n'est pas facile. Quand on négocie... négocier sur une place publique, c'est presque impossible. Alors, comment doser l'information et doser la négociation? Je ne vous apprendrai pas que c'est quelque chose d'extrêmement difficile.

n(16 h 30)n

Évidemment, si on ne fait pas suivre les populations et si on ne réussit pas à avoir leur adhésion, ce qu'on vous dit, c'est que, même si l'entente est bonne, ça ne fera pas l'harmonie au travers de nos populations. Donc, il faut réussir ces deux choses-là. Donc, il faut essayer d'arriver le plus rapidement à une entente, mais on comprend très bien qu'il faut prendre notre temps pour que cette entente-là soit acceptée par toutes les parties.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. Merci, M. le ministre. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux de constater par votre mémoire que les représentants du Lac-Saint-Jean ont une très heureuse influence au CRCD, notre organisme régional, j'en suis fort aise, et puis je constate également que votre mémoire reflète bien, je pense, la pensée de ceux qui ont vécu près des nations autochtones, qui ont collaboré avec eux autres dans plusieurs domaines.

Maintenant, à la lecture de votre mémoire, je vois que vous semblez d'accord avec l'ensemble du projet de l'Approche commune, mais, par contre, vous dites: Dans le temps qui vient, dans la suite des choses, on aimerait une implication plus grande de la population. Est-ce que je comprends bien ce que vous voulez dire? J'aimerais avoir des explications là-dessus. Comment est-ce que vous la voyez, l'implication de la population?

M. Brassard (Denis): Tout à fait. Ce qu'on dit à l'intérieur... Nous, le constat qu'on fait et qu'on vous mentionne, les écrits qui sont là, il y a eu une bonne négociation, il y a eu une bonne maturité. La problématique qu'on a actuellement, c'est que la population ne l'a pas suivie et a peur, a peur souvent par de la mauvaise information, et, on l'a dit, ceux qui ont de la mauvaise information ont souvent l'écoute plus facile ou tout simplement plus de tribune. Lorsqu'on prend le temps de dire qu'on est pour cette négociation-là ou qu'on est pour l'Approche... J'avais une réunion la semaine passée dans la ville de Saguenay avec un groupe qui nous demandait qu'est-ce que c'est, le CRCD... On faisait la présentation. On nous a demandé quelle était notre position face à l'Approche commune. Et lorsqu'on l'appuie ? on dit: On l'appuie; le CRCD, pour telle raison, l'appuie ? je vous dirais, on en a toujours deux ou trois qui déblatèrent sur ce qu'ils ont entendu, comme disait M. Boivin, le matin à la radio, et, une fois qu'ils ont bien déblatéré, on sent qu'il y a 50 % du reste de la salle qui est mal à l'aise des propos. Lorsqu'on rectifie des choses ? parce qu'on dit un paquet de mensonges, souvent, dans ce qu'on répète là ? lorsqu'on rectifie des choses, on se retrouve avec 80 % de la salle qui trouve que ça a du bon sens. Et, lorsqu'on prend le temps de discuter et d'en jaser, bien, c'est là où les craintes se font sentir et c'est souvent, ces craintes-là, sur ce qui touche réellement la personne, c'est-à-dire sur des points bien précis: Est-ce que je vais toujours pouvoir aller à tel lac et pêcher sans problème? Est-ce que l'autochtone va, lui, pouvoir vider le lac sans aucune contrainte? Toutes sortes de questions qui sont pratiques demain matin et que les personnes veulent bien comprendre puis dire: Si je suis rassuré sur ces choses-là, ces grands principes là que vous m'avez énoncés, il n'y a pas de problématique.

Alors, bien sûr, quand on vous mentionne l'importance que la population soit entendue, c'est l'importance aussi que la population entende les choses vraies, soit informée et que ces réponses-là aux questions viennent. Mais nous comprenons aussi au CRCD que c'était très large, ce qu'on avait à négocier, et, juste arriver avec une entente de principe, ça a pris quand même plusieurs années, rétablir une confiance, arriver à un principe, et ce que nous avons vu dans l'Approche commune, c'est que la table est mise tout simplement, et là plusieurs gens partent sur des questions hypothétiques, à savoir: Est-ce qu'il va pouvoir venir trapper sur mon terrain de chalet? Est-ce qu'il va pouvoir faire ci, faire ça? Ces questions-là ne sont pas présentement éclaircies là-dedans, et elles doivent être faites, c'est-à-dire, on doit savoir quelles règles vont s'appliquer, et c'est ce que les gens ont besoin d'entendre. Maintenant...

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. Merci, M. le député, on n'a plus...

M. Laprise: C'est fini? O.K.

Le Président (M. Boulianne): Je regrette. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Peut-être, avant de poser les questions à nos témoins, juste un rappel. Dans le rapport de M. Chevrette hier, on a dit clairement qu'il y avait une nécessaire vulgarisation des informations, il y avait un genre de vide d'information, un vide politique dans l'an 2002, et je cite quelques extraits du rapport: Les derniers mois nous ont démontré que la proposition d'entente de principe n'a pas été suffisamment expliquée ni vulgarisée. Et plus soin: Je ? M. Chevrette ? constate que le gouvernement du Québec... et le gouvernement du Québec ait l'humilité de l'admettre, que le devoir d'information des gouvernements supérieurs auprès de la population n'a pas été rempli. Alors, je pense que c'est très important de rappeler qu'un des problèmes ou une des choses que M. Chevrette a constatées sur le terrain est qu'il y a un manque d'information, il y avait un vide politique dans l'an 2002. Ce n'est pas uniquement que le ministre n'a pas fait une couple de lignes ouvertes, ni le député de Jacques-Cartier. Je pense qu'il doit y avoir une stratégie de communication; c'était vraiment un devoir qui demeure entier. Et le fait que M. Chevrette est allé sur le terrain, a fait sa tournée, c'est d'une certaine importance, mais, maintenant, il va retourner sur ses terres, j'imagine, et on a toujours cette obligation de bien informer la population. Alors, toutes les autres démarches... si on veut une réussite, je pense que c'est très important de mettre les conditions gagnantes sur le terrain et, entre autres, d'avoir une beaucoup meilleure stratégie quant à la communication, de bien informer la population, que ce que nous avons vu à date. Je ferme la parenthèse.

Et bienvenue encore, M. Boivin et M. Brassard, merci pour votre mémoire et vos commentaires. Une couple de questions. J'essaie de balancer aussi la question: Il faut prendre le temps qu'il faut, il ne faut pas manquer le bateau, mais... qu'est-ce que j'ai dit, il y a une obligation de résultat quand même. Je pense qu'après 23 ans, pour éviter d'aller devant les tribunaux, qui peut être un processus laborieux, dispendieux... et, si on pense que les politiciens ne comprennent rien, ils n'ont pas rencontré un juge encore. Alors, je pense qu'on a tous intérêt autour de la table à trouver des solutions pratiques aux questions. Et peut-être rappeler aussi qu'il n'y a jamais une entente parfaite. Si on cherche la perfection, si on cherche la clarté à 100 %, on va être voué à l'échec. Alors, il y a le vieux concept de «give and take», que, dans toute négociation, on arrive à un certain moment qu'on peut vivre avec ça. Ce n'est pas peut-être la façon que, moi, je rédigerais ça, mais je peux vivre avec ça, et le temps est venu pour faire un genre de risque parce que c'est dans l'intérêt de l'ensemble de la région d'aller de l'avant.

Alors, je ne sais pas si vous avez des commentaires, mais je comprends votre avis de prendre le temps qu'il faut. Je pense qu'on a un devoir de bien informer la population, mais il faut être reconnaissant que ça ne va être jamais une entente parfaite et, à un certain moment, il faut aller de l'avant.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Alors, M. Brassard.

M. Brassard (Denis): Alors, la réponse, vous l'avez bien mentionnée également. Je pense que, après la tournée, après les rencontres qu'on a faites, on s'aperçoit que le document qui était là, l'Approche commune, était loin d'être mauvais. Au contraire, c'était, pour nous, un bon document. Et ça a failli tout glisser, à cause du manque de communication, vous avez raison. Il y a un travail qu'on doit faire, qui est stratégique; on doit s'assurer que ça passe, et tout ça. Et sans porter de blâme ? je vous l'ai expliqué tout à l'heure ? dans une négociation, c'est toujours difficile de savoir quand est-ce que je peux sortir quelque chose ou quand est-ce que je ne peux pas? Est-ce que ça va le faire déraper ou si ça va l'améliorer? Mais on peut dire que, le constat, il y a eu un manque de communication.

Évidemment, je suis d'accord avec vous qu'une entente n'est jamais parfaite, qu'elle doit donc laisser place à de la continuelle négociation puis y aller du côté plus dynamique. Et, même si on la croit parfaite au moment où on la signe, bien, c'est à l'usage souvent qu'on se rend compte qu'il y a des choses qu'on n'avait pas pensé ou qu'on avait oublié de négocier. Alors, quand on dit de prendre le temps, le temps était dans le sens où on veut s'assurer que, lors de ces discussions-là, on soit capable de faire suivre la population le plus possible pour que, lorsque l'entente sera là, s'il y a des problèmes à l'usage, qu'on ne la rejette pas, mais qu'on sache qu'on est capable de travailler avec ça puis qu'on est capable de discuter, les deux parties, pour s'assurer qu'on va aller dans le bien commun.

Je vous dirai qu'on n'a pas beaucoup d'inquiétude au niveau du CRCD quant au bien commun parce que, jusqu'à maintenant, avec notre communauté, les relations ont été extraordinaires, et, là-dessus, il est vrai que le Lac-Saint-Jean nous a influencés beaucoup dans ce sens-là. Alors, les relations ont été bonnes. On n'a pas de raison de croire qu'elles ne le seront pas dans le futur, mais mieux vaut une bonne entente pour s'assurer qu'elles le seront dans le futur. Et, comme je vous le disais tout à l'heure, s'il y a une adhésion, bien, c'est plus facile après ça de faire quelques erreurs et de les corriger que si on part avec un document où il n'y a pas d'adhésion de la population.

Alors, pour nous, les deux choses sont extrêmement liées: un bon plan de communication, une bonne adhésion, s'assurer qu'on arrive à l'objectif et s'assurer qu'on ne manque pas l'objectif. Et je reviens toujours à ce que je vous ai dit auparavant, ce serait plus dur de le manquer que de le réussir, alors prenons le temps qu'il faut pour le réussir.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. M. le député de Jacques-Cartier.

n(16 h 40)n

M. Kelley: Et peut-être dans le même ordre d'idées, une preuve tangible des choses qu'on peut faire à l'avenir, et c'est toujours dans le domaine des partenariats économiques. Il y avait la présentation, ce matin, du Réseau de scieries indépendantes du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui ont soulevé des problèmes réels. Ils ont 1 200 travailleurs, de mémoire, alors c'est des enjeux qui sont importants, c'est des industries d'au-delà de 80 millions de dollars. Alors, l'idée, c'est de ne pas les mettre à terre non plus. Mais je me demande si le CRCD, ou il y a d'autres instances, qui peut favoriser les partenariats, qui peut aider un petit peu, une liaison, qui peut briser la glace un petit peu. Parce que M. Dubé, qui a fait la présentation ce matin, a avoué qu'il connaît très peu la nation innue. Peut-être qu'on a besoin des brise-glace, peut-être qu'on a besoin des personnes qui peuvent établir la liaison. Parce qu'on a des exemples: à Obedjiwan, de mémoire, à Waswanipi, chez les Cris, où il y a des partenariats sur la gestion des scieries. Peut-être qu'il y a des exemples qui peuvent fonctionner à l'intérieur des scieries qui étaient représentées par M. Dubé ce matin. Alors, je ne sais pas si vous avez des pistes ou des idées où le CRCD peut fonctionner comme catalysateur pour faire la promotion des partenariats économiques, où, encore une fois, qu'est-ce qu'on recherche, c'est que tout le monde puisse sortir gagnant avec l'entente de l'Approche commune.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. Alors, M. Brassard.

M. Brassard (Denis): Tout à fait. M. Dubé, de l'association des petites scieries, siège bien sûr sur notre commission du côté de la ressource forestière, siège au niveau de notre négociation sur l'entente spécifique pour la filière bois. Alors, M. Dubé est quelqu'un que je rencontre à peu près à toutes les semaines. Je vous dirais que, oui, peut-être qu'il a une méconnaissance de la communauté, mais, quand on parle à... peut-être aussi que c'est une question de territoire et de lieu d'approvisionnement, parce que, quand je parle à M. Girard, de l'Abitibi-Consol, il les connaît très bien. Puis, je vous dirais, il y a déjà des ententes de négociées entre cette compagnie-là et les Innus pour certains approvisionnements, ou de la main-d'oeuvre, ou de la formation de main-d'oeuvre. Alors, oui, il est possible qu'il ne l'ait pas beaucoup croisé dans son territoire.

Mais ce que je vous dis, c'est que, oui, nous sommes disponibles. Parce que, lorsque vous rencontrez le CRCD et que, l'ensemble de ses commissions... Parce que j'ai parlé des administrateurs tout à l'heure, ce n'était qu'une quarantaine de personnes. Mais, si on parle de l'ensemble des commissions et de tous ces gens-là, on peut parler d'à peu près 200 personnes. Et, lorsque je parle à M. Dubé de toute la contrainte forestière, où il arrive à me dire que, bon, la limite nordique est pour lui un problème, les aires protégées, les CAAF qui diminuent, la pression environnementale ainsi que, bien sûr, les surtaxes et les taxes américaines, et tout ça, quand on jase de tout ça, évidemment, la pression sur l'industrie du sciage au Saguenay?Lac-Saint-Jean n'a jamais été aussi grande. Alors, ils sont présentement, je vous dirais, à la place où, plus on en rajoute, puis il y a un ressort là, c'est sur le bord de sauter là, leur affaire. Alors, évidemment, quand on parle avec Marc, il est toujours très inquiet de quelles que soient les contraintes qui peuvent lui arriver sur son approvisionnement. Parce que vous comprendrez que nos scieries à l'heure actuelle roulent à des pourcentages très faibles, et ces pourcentages très faibles là, par rapport à leur capacité, sont déjà faibles par rapport à leur capacité d'approvisionnement. Alors, tout ce qui touche ça, ça les rend nerveux.

Maintenant, quand il dit qu'il ne connaît pas beaucoup quelles sont les ententes, bien, à part leur avoir dit qu'il y avait des mètres cubes qui seraient alloués et des redevances qui seraient allouées, on n'a pas mentionné d'où venaient ces mètres cubes là. Est-ce que ça le touche, lui? Est-ce qu'il est obligé d'en enlever dans sa capacité forestière? Alors, évidemment, ça fait partie de tout l'ensemble de questions, qu'on vous disait à l'intérieur de notre mémoire, où on peut être d'accord sur les principes, mais, quand arrive le temps de négocier des choses pratiques, ça nous fait voir: Est-ce que mes grands principes vont... combien ils vont me coûter dans ma scierie, puis est-ce que j'ai les moyens de les appliquer dans l'heure actuelle des choses? Et, je vous dirais, vous avez l'industrie la plus sensible présentement qui est venue vous voir ce matin. Et, quand on vous parle d'inquiétude de certains de nos membres, il faisait partie de ceux-là.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. Alors, votre collègue aussi a demandé la parole, et le député de Saguenay, alors...

M. Kelley: Très brièvement, juste dire que je suis très conscient, entre autres, du litige du bois d'oeuvre avec les Américains, qui doit peser lourd dans plusieurs régions du Québec. C'est vraiment un enjeu qui cause problème. Merci pour ces clarifications.

Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, Mme la députée de Jonquière.

Mme Gauthier: Merci. Moi aussi, j'ouvrirais une parenthèse, parce que je commence à être un peu mal à l'aise d'entendre ce que j'entends ici. C'est comme si, à quelque part, dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, on est en train d'assister à un clivage entre les gens du Saguenay, entre les gens du Lac-Saint-Jean. Et, aussi, il y a les bons et les mauvais, ceux qui sont pour l'entente, ceux qui sont contre l'entente. Il y a des gens de bonne foi, vous conviendrez avec moi, qui saisissent mal le contenu de l'entente. Ce n'est pas quelque chose d'accessible à tout le monde. C'est quelque chose de très... je dirais, de compliqué. J'ai une formation juridique, je connais bien l'histoire de ma région, et je vous avouerai que, le projet d'entente, je l'ai lu, je l'ai lu, je l'ai relu, et, je vous dirais, je n'en maîtrise pas tout le contenu. Et c'est pour ça d'ailleurs que je veux participer à la commission, pour entendre et me faire une idée sur le contenu.

Ceci étant dit, moi, j'aimerais qu'on ramène le discours pour faire en sorte que ce soit démocratique, que les gens puissent s'exprimer. Et je pense que c'est dans cette voie d'aller qu'on va pouvoir avoir le meilleur des résultats. Il faudrait peut-être arrêter de clouer au pilori ceux qui comprennent mal ou qui sont contre cette entente-là. Il faut davantage, je pense, moi, user de pédagogie et expliquer. Et, dans ce sens-là, est-ce que le CRCD, vous auriez quelque chose, un mécanisme, vous avez prévu des moyens effectivement de pédagogie pour mieux valoriser, expliquer le projet de l'entente à la communauté saguenayenne et jeannoise?

Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la députée. M. Brassard.

M. Brassard (Denis): Alors, évidemment, quels que soient les dossiers que l'on a, je vous dirais, à piloter, on a toujours dit que le CRCD était une courroie de transmission, dans un sens ou dans l'autre, avec le gouvernement, et on devait prendre l'information, la monter au gouvernement. Pour ce qui est de ce côté-là, on n'a pas de difficultés quand il y a quelque chose qui ne fait pas notre affaire, ou quelque chose qui fait notre affaire, de le faire savoir, et l'inverse également, essayer de le faire au niveau régional.

Par contre, je vous avouerai que, malgré le clivage, bien sûr nos moyens de communication en dehors de tout l'ensemble de notre organisation, bon, ils sont minimes. C'est-à-dire, lorsqu'on doit aller vers la presse, lorsqu'on doit aller dans le sens de communications régulières, je pense que, du côté d'une entente comme celle qui est là, le travail doit être fait en général par celui qui négocie l'entente. Pour ce qui est de l'intérieur de nos groupes, puisque je vous parlais de l'ensemble de nos commissions, bien, évidemment que cette information-là se fait. Lorsqu'il arrive des questions sur l'approvisionnement forestier et qu'il y a des questions qui sont soulevées ? et présentement, il y en a qui sont soulevées du côté des feux de forêt, et on vous disait: l'entente crie amène certaines difficultés à aller chercher des bois ? bien, évidemment, ces questions-là sont posées au ministère des Ressources naturelles, les questions sont posées aussi aux gens qui sont autour de la table, qui sont les scieries, pour savoir qu'est-ce qui achoppe, quel est le problème pour ne pas qu'on répète ce genre de problématique là à l'intérieur d'une entente. Donc, évidemment, on fait ce côté-là. Du côté large population, je vous dirais, à l'intérieur de nos mandats, ce n'est pas vraiment notre travail. On le fait sur le plus de tribunes possible, où ces gens-là pourront avoir les communications.

Je ne fais pas de clivage. Je vous dis juste que, évidemment, on a eu une influence du Lac-Saint-Jean, puisque la communauté est là. Pour nous, on n'a qu'une région, le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Mais, évidemment, dans différents mandats, l'influence du Saguenay est plus forte et, dans d'autres, l'influence du Lac, dépendant de ce qu'on vit. Lorsqu'on parle bien sûr d'aluminium, on avait plus souvent l'influence du Saguenay que du Lac, puis, quand on parle de la forêt, on a plus l'influence du Lac que du Saguenay. Alors, je ne voulais pas que mes propos soient interprétés dans ce sens-là. Et, lorsque j'ai dit à M. Laprise, à sa réponse... que, oui, en effet, il y a eu beaucoup plus d'intérêt au départ des gens du Lac-Saint-Jean à cette négociation-là, il y a eu beaucoup plus de facilité à communiquer de ce côté-là que dans l'autre sens. Évidemment, maintenant, je vous dirais, l'ensemble de la population du Saguenay?Lac-Saint-Jean est inquiète et c'est ce qu'on mentionne à l'intérieur. Et, je vous dirais, le problème de communication est plus criant dans la partie du Saguenay, au niveau de la région, parce qu'ils ont été moins impliqués au départ.

Mme Gauthier: Je vous remercie.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. Mme la députée, ça va?

Mme Gauthier: C'est beau.

Le Président (M. Boulianne): Alors, M. le député de Saguenay.

M. Corriveau: Bien, ce que je retiens de vos propos essentiellement, c'est que la population qui fait partie, disons... qui est représentée au sein du CRCD chez vous, est plutôt bien informée, généralement bien informée. Puis, une fois qu'on est bien informé, bien, on comprend l'entente puis on est d'accord avec. Et je comprends aussi que la population en général, elle, qui ne siège pas, disons, peut être moins bien informée, donc moins d'accord.

Les questions que je veux vous poser, c'est... À votre avis, en fonction de la connaissance des gens sur le milieu, parce que, bon, vous avez déposé une lettre tantôt, on comprend de cette lettre-là que les représentants régionaux, eux, sont d'accord... Mais est-ce que ce serait une erreur que, au sortir de cette commission-ci, de tout de suite arriver... par exemple, que le gouvernement pose le geste de dire: On adopte cette entente-là et, maintenant, on engage des négociations en fonction peut-être du rapport Chevrette ou de d'autres recommandations qui ont été faites ici afin d'en arriver à un traité? Donc. est-ce que ce serait une erreur de l'adopter trop vite, cette entente-là? Moi, je pense que, selon ce que vous nous dites, c'est qu'il faudrait qu'on fasse une grosse campagne de sensibilisation et d'information sur l'entente actuelle avant que le gouvernement ne l'adopte. Est-ce que je me trompe?

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Saguenay. Alors, M. Brassard.

n(16 h 50)n

M. Brassard (Denis): Alors, les propos de notre lettre disaient qu'il fallait l'adopter, et je crois qu'à notre sens nous sommes rendus là pour poursuivre. Évidemment, je vous dirais, les manques de communication, c'est un boulet qu'on a à traîner présentement et on a à corriger le plus rapidement possible. Mais ça ne sert pratiquement à rien d'attendre trop longtemps à partir de cette base-là pour poursuivre le reste des questions, parce que la plupart des questions qui sont adressées sont des questions qui viennent à la suite de cette entente-là. C'est des questions pratiques. Je vous dirais, les gens ne s'arrêtent pas, là, quotidiennement aux grands principes qui sont contenus dans l'entente, mais plutôt à qu'est-ce que ça va refléter, ça. Pour la majorité des gens, c'est: Qu'est-ce que ça va refléter dans mon quotidien? Où je m'en vais avec ça? Est-ce qu'ils possèdent la moitié du territoire? C'est ces questions-là qu'on entend. Et je vous dirais, pour nous, pour le CRCD, présentement, avec nos connaissances que nous avons, nous, on pense qu'il faut partir avec ça puis il faut continuer la négociation.

Maintenant, je vous dirais, pour vous bien sûr, il y a présentement un boulet du côté des communications qui n'ont pas été assez présentes, et il y a une correction à faire de ce côté-là. Alors, est-ce que ça se corrige en quelques semaines ou pas? Je ne le sais pas, je ne pourrais pas vous le dire. Mais je peux vous dire qu'à l'heure actuelle, du côté des gens qui sont autour de la table du CRCD, on doit signer puis on doit aller de l'avant.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Brassard. M. le député, ça va? Alors, merci beaucoup, M. Boivin, M. Brassard.

Alors, la commission suspend ses travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 52)

 

(Reprise à 16 h 54)

Le Président (M. Boulianne): Alors, la commission reprend ses travaux. Alors, je demanderais donc à la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec de bien vouloir s'avancer pour présenter leur mémoire.

Alors, bienvenue, madame, bienvenue, messieurs, à la commission. Alors, nous demandons au responsable de se présenter et de présenter les personnes qui l'accompagnent, et vous savez que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et, par la suite, il y aura des questions du parti ministériel et de l'opposition officielle.

Fédération des trappeurs
gestionnaires du Québec (FTGQ)

M. Boutet (Pierre): Alors, bonjour. J'aimerais vous présenter tout d'abord Philippe Tambourgi, qui est biologiste chez nous, à la Fédération des trappeurs, ainsi que Marianne Gagnier. C'est les deux personnes qui ont travaillé pour la rédaction de notre mémoire.

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup. Alors, on vous écoute, M. Boutet.

M. Boutet (Pierre): M. le ministre responsable, membres de la commission, dans l'esprit de l'Approche commune et d'une éventuelle entente de traité, je peux vous assurer que nous accueillons les recommandations de M. Chevrette d'un bon oeil. Ses recommandations reflètent en grande partie les questions qui demeurent sans réponse et qui doivent être mises en évidence, car nous ne pouvons rester avec ces incertitudes. Les 33 recommandations que nous a fait ressortir M. Chevrette représentent en quelque sorte les barreaux de l'échelle à gravir pour atteindre les objectifs visés.

Agir avec les régions est essentiel. Nous évoluerons peut-être plus lentement mais sûrement. La Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec souhaite que ce mégaprojet débouche sur un traité, mais, évidemment, pas à n'importe quel prix. Notre mission comme Fédération est de promouvoir le piégeage en tant qu'activité économique et professionnelle, d'en assurer la gestion, le développement ainsi que la perpétuation dans le respect de la faune et de ses habitats.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais laisser la parole à M. Philippe Tambourgi qui va vous faire une présentation sommaire de notre mémoire.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Boutet. Alors, M. Tambourgi, allez-y.

M. Tambourgi (Philippe): La Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec est un organisme provincial sans but lucratif qui regroupe 13 associations régionales et compte environ 2 000 membres parmi les quelque 8 200 trappeurs non autochtones actifs au Québec. Nous représentons l'ensemble des trappeurs qui peuvent avoir des opinions bien divergentes quant à savoir comment le Québec doit s'entendre avec les communautés autochtones et tenons à souligner que notre mémoire ne concerne que les points qui pourront affecter, de près ou de loin, les règles actuelles et les droits des piégeurs non autochtones, la gestion de la forêt et de la faune ainsi que la protection des habitats et de l'environnement. Ces points représentent donc les inquiétudes de nos membres envers cette entente au niveau de la pratique du piégeage.

La Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec est convaincue que le gouvernement doit s'entendre avec les communautés autochtones. Les gouvernements du Québec et du Canada doivent faire très attention dans la rédaction d'un tel traité, car les engagements et les droits qu'ils concèdent seront permanents et ne pourront être modifiés unilatéralement.

Nous croyons que, pour en arriver à une entente avec les premières nations, les gouvernements du Québec et du Canada doivent leur accorder une certaine autonomie gouvernementale qui favoriserait l'essor économique de ces communautés. Toutefois, nous demeurons en désaccord avec l'approche actuelle Innu Assi qui concède des terres appartenant à tous les citoyens du Québec et du Canada. Ces terres doivent demeurer une propriété publique pour tous, aussi bien autochtones que non-autochtones. Nous ne pouvons donner notre appui à un projet qui a pour but d'attribuer en propriété exclusive à des communautés des terres présentement comprises dans le domaine public. Nous croyons que ceci sera une cause de conflit ethnique et pourra nuire à toute autre négociation. Nous ne nous objectons pas à ce que les autochtones administrent une partie du territoire québécois, mais uniquement si cela est réalisé dans les limites administratives du gouvernement du Québec. Advenant que la gestion de certaines terres leur soit attribuée, nous proposons que celle-ci soit effectuée à la manière des 17 régions administratives du Québec déjà existantes.

Dans l'approche Innu Assi, on constate que l'agrandissement prévu des terres empiéterait sur les zones de territoire libre de piégeage qui sont déjà très restreintes sur la Côte-Nord. De plus, il englobera certaines terres où des non-autochtones sont propriétaires. Si ces derniers décident de garder leurs propriétés, ils devraient aussi garder leurs droits de piégeage sur celles-ci. Actuellement, un propriétaire ayant son cours et son permis de piégeage a le droit de piéger sur sa propriété. Il est très important que ce droit demeure si l'Innu Assi et le Nitassinan entrent en vigueur.

n(17 heures)n

Pour le territoire du Nitassinan, nous tenons à ce que les autochtones respectent les terrains privés sous baux ou déjà aménagés lors de la pratique de leurs activités ancestrales ou culturelles: chasse, pêche, piégeage, cueillette, accès au territoire. Par exemple, dans notre cas, les terrains de piégeage sous baux et leur droit d'exclusivité devront être respectés et maintenus. On peut retrouver ces terrains sur les terres du domaine de l'État: les zecs, les pourvoiries et les réserves fauniques. De plus, les Québécois veulent garder un libre accès sur les territoires publics qui seront inclus dans un Nitassinan, et ce, sans coût supplémentaire par rapport à ce qu'ils paient actuellement. Les permis de piégeage, de chasse et de pêche du Québec devront être reconnus dans tous les Nitassinan, sans avoir besoin de permis supplémentaires autres que ceux en vigueur actuellement pour pratiquer ces activités.

Les réserves à castors. C'est un point très important soulevé par M. Chevrette, hier. Ces réserves représentent 79 % du territoire québécois et sont utilisées, encore aujourd'hui, uniquement par les autochtones. Toutefois, leurs récoltes d'animaux à fourrure ne représentent qu'environ 12 % de l'ensemble des captures effectuées dans l'ensemble du territoire du Québec. Le reste du territoire québécois, 21 %, est disponible à tous les piégeurs et se divise soit en territoire libre soit en terrains de piégeage. Nous tenons à souligner que les réserves à castors ne sont pas un droit autochtone et que le piégeage devrait y être permis à l'ensemble de la population. Ce serait un très grand enjeu de l'entente de principe.

Le droit à la pratique d'Innu Aitun. Nous croyons que le piégeage n'est plus pratiqué comme une activité de subsistance actuellement. En effet, les piégeurs, tant autochtones que non autochtones, ne pratiquent plus cette activité uniquement dans le but de se nourrir ou de se vêtir. En dehors de la déprédation, ils pratiquent le piégeage comme un loisir, une activité culturelle et sociale et, bien entendu, dans le but de faire le commerce de la fourrure afin de rentabiliser leurs activités et de mettre en valeur la ressource utilisée. Il est donc primordial que cette activité soit régie de façon à faire un développement durable de cette ressource.

Notre Fédération tient à participer à toutes les négociations et ententes complémentaires concernant la pratique du piégeage et croit avoir un rôle important à jouer. Nous percevons positivement l'implication des autochtones, de notre Fédération et des gouvernements dans l'établissement d'un développement durable du piégeage permettant d'harmoniser la pratique du piégeage de l'Innu Aitun avec la gestion des animaux à fourrure ? périodes de récolte, protection des habitats, etc. De plus, nous pensons qu'il faut tenir compte de la priorité de prélèvement des ressources fauniques des Innus pour répondre à des besoins alimentaires, rituels et sociaux tout en favorisant le partage des ressources fauniques avec les autres utilisateurs des Nitassinan. Nous croyons qu'il est très important de faire appel aux connaissances des Innus et des milieux scientifiques dans l'établissement de la gestion du piégeage afin d'en faire profiter l'ensemble de la population.

En ce qui concerne l'exploitation des ressources fauniques, en particulier les animaux à fourrure, nous croyons que les autochtones devraient s'adapter à la réglementation québécoise ? périodes de récolte, utilisation de pièges certifiés, cours de piégeage, respect de quotas, etc. ? afin que les agents territoriaux innus et les agents de conservation du Québec puissent facilement faire respecter les lois en vigueur. Nous croyons que les lois et règlements qui seront adoptés par les assemblées législatives des premières nations devront s'harmoniser avec celles en vigueur au Québec. Ainsi, l'ensemble des piégeurs, chasseurs et pêcheurs devraient respecter les mêmes lois et règlements, et ce, dans tout le territoire du Québec. Cela faciliterait la gestion faunique dans l'optique d'un développement durable de cette ressource. N'oublions pas que des redevances seront offertes aux premières nations, ce qui compensera très largement la perte de certains privilèges.

Dans le cas du piégeage, nous croyons que les autochtones ne devraient pas avoir de priorité de prélèvement sur l'ensemble du territoire, car ils ont déjà l'exclusivité de 79 % du territoire, qui sont les réserves à castors, à moins que ces réserves changent de statut. De plus, les droits d'exclusivité de piégeage consentis par la location d'un terrain de piégeage ou par le titre de propriété devraient avoir préséance sur la priorité de prélèvement des autochtones.

Dans le cas des permis, certifications et autorisations, pour avoir le droit de piéger, les résidents du Québec doivent avoir le certificat du piégeur. Ils doivent donc avoir suivi le cours approuvé par la FAPAQ, Société de la faune et des parcs du Québec, sur le piégeage et la gestion des animaux à fourrure et en avoir réussi les examens. La FTGQ est responsable de donner ce cours de piégeage par l'entremise de ses associations affiliées. Notre Fédération tient à conserver la responsabilité du cours de piégeage mais est prête à partager ses connaissances avec les Innus afin de créer un cours de piégeage incluant les connaissances innues et, ainsi, en faire profiter l'ensemble des Québécois.

Pour la participation à l'utilisation du territoire, des ressources naturelles et de l'environnement. Inclure les communautés innues à la gestion du territoire, des ressources naturelles et de l'environnement est très important. Toutefois, il est primordial que les gouvernements autochtones et provincial travaillent avec les organismes participant à cette gestion. Notre Fédération se considère comme un intervenant de première ligne quant à la gestion du piégeage, et nous voulons demeurer partie intégrante de cette gestion de la ressource faunique. Nous n'accepterions pas que la gestion du piégeage ne se fasse qu'entre les communautés autochtones et le gouvernement du Québec.

Notre Fédération veut faire partie des comités qui traiteront de la gestion du piégeage et des animaux à fourrure ainsi que de l'utilisation du territoire par l'ensemble des piégeurs. Nous voulons avoir des représentants soit au niveau de nos associations régionales de trappeurs soit au niveau de notre Fédération afin de pouvoir défendre nos intérêts. Notre Fédération tient à participer, avec les gouvernements autochtones, provincial et fédéral, aux processus de décision portant sur le territoire, la forêt, la protection de l'environnement, l'eau, la conservation des espèces et la protection des habitats. Nous voulons être consultés dans l'adoption de nouvelles lois ou de nouveaux règlements et dans la modification substantielle de lois ou règlements existants portant sur la gestion du territoire, l'environnement et les ressources naturelles qui seraient établis afin de s'ajuster aux droits des premières nations et de leurs membres. De plus, nous tenons à être consultés lors de l'établissement de nouvelles politiques et de la modification de politiques existantes sur la gestion du territoire, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous nous sentons concernés et désirons participer au processus de planification concernant l'affectation des terres du domaine de l'État, le développement du territoire public, les territoires structurés et la gestion et l'aménagement des forêts.

De plus, notre Fédération veut obligatoirement faire partie des discussions portant sur la pratique et la gestion du piégeage lors des ententes d'harmonisation afin de s'assurer que les droits des piégeurs non autochtones soient respectés et qu'ils soient équivalents à ceux des autochtones. Lorsqu'il y aura des règlements de différends ou des modifications et réexamens du traité portant sur la pratique et la gestion du piégeage, nous voulons aussi être consultés.

En ce qui concerne le partage des redevances, dans la liste de redevances présentées dans l'entente de principe, nous avons ressorti les trois qui affecteront les piégeurs québécois: la location des terres du domaine public; la faune, location de droits exclusifs, pourvoiries et autres; et les permis de chasse, pêche et piégeage. Si le gouvernement du Québec décide d'attribuer des redevances, cela ne doit pas se faire aux dépens des utilisateurs fauniques. Les coûts de permis, de location ou d'exploitation de la faune ne devraient pas augmenter après la signature d'un tel traité. Si le gouvernement consent à donner 3 % de redevance aux premières nations, il ne doit pas en redonner la facture aux Québécois.

Toutefois, la situation du piégeage est particulière. En effet, comme nous l'avons déjà décrit, le Québec est constitué majoritairement de réserves à castors qui sont actuellement sous-exploitées. Le gouvernement provincial devrait envisager le démantèlement des réserves à castors qui, rappelons-le, ne sont pas un droit autochtone et où le piégeage devrait être permis à l'ensemble de la population. Cela permettrait d'avoir une source de financement importante, à long terme, qui pourrait être redistribué en partie aux Innus. En ouvrant ces territoires à tous les piégeurs, une partie de la vente des permis d'exploitation de ces UGAF, unités de gestion des animaux à fourrure, pourrait être payée aux autochtones. De plus, le gouvernement et les autochtones pourraient ouvrir des terrains de piégeage à droits exclusifs dans ces réserves et ainsi augmenter leurs sources de financement. Ainsi, on éviterait de surtaxer les utilisateurs fauniques tout en satisfaisant l'ensemble des trappeurs québécois. L'important, c'est que les règles du jeu demeurent les mêmes pour tous et que ce soient celles qui sont actuellement appliquées par la FAPAQ: coût du terrain, bail, attribution des terrains et respect de l'environnement et de la faune.

En conclusion, on constate que la faune d'autrefois n'est plus la même aujourd'hui. Les espèces et leurs populations ont beaucoup changé. Certaines sont apparues, alors que d'autres se retrouvent menacées d'extinction. On remarque aussi que les méthodes de piégeage ont beaucoup évolué. Par exemple, l'utilisation de divers engins de piégeage est réglementée en vue d'assurer une mort rapide de l'animal ou de l'empêcher de s'infliger inutilement des blessures. Finalement, les ressources naturelles disponibles, incluant les animaux à fourrure, doivent aujourd'hui être partagées par un plus grand nombre de personnes. L'ensemble des chasseurs, pêcheurs et piégeurs, tant autochtones que non autochtones, doivent ajuster leur pratique au mode de vie actuel afin de faire une bonne gestion et d'assurer la pérennité de ces ressources renouvelables.

Nous croyons que les lois innues devront respecter les termes et obligations de l'Accord des normes internationales de piégeage sans cruauté intervenu entre le Canada, l'Union européenne et la Russie et dont le gouvernement du Québec s'est lié par décret. De plus, nous suggérons que les lois innues respectent les standards minimaux en matière d'environnement, de protection des habitats et de la biodiversivité ainsi que de la protection des espèces menacées.

n(17 h 10)n

Nous demeurons à votre entière disposition dans la poursuite de consultations permettant l'élaboration d'un traité et suggérons que les consultations sur les enjeux fauniques se fassent par l'utilisation de structures déjà en place et connues des gouvernements, soit les Groupes-faune nationaux et régionaux. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci pour la présentation de votre exposé, de votre mémoire. Et nous allons amorcer maintenant la période des échanges avec les parlementaires. D'abord, M. le ministre.

M. Trudel: Merci de votre présentation. Bienvenue à cette commission parlementaire chargée d'examiner le projet d'entente de principe qui nous a été présenté avec quatre communautés de la nation innue. Bienvenue, M. Boutet, Mme Gagnier, M. Tambourgi. Bienvenue à nos travaux.

Je suis un peu perplexe. Je suis un peu perplexe devant votre présentation. Y a-t-il des problèmes, actuellement, de gestion sur le territoire avec les premières nations en matière de piégeage?

M. Boutet (Pierre): Quand vous dites des problèmes de gestion, des problèmes sur des terrains de piégeage, des problèmes où des autochtones pourraient se retrouver sur un terrain de piégeage à droits exclusifs?

M. Trudel: De toute nature, là, quand on parle de l'activité de piégeage.

M. Boutet (Pierre): On en a quelques-uns. On en a quelques-uns actuellement.

M. Trudel: Est-ce que vous le dites sous l'angle que... Ce n'est pas la question. Est-ce que vous le dites sous l'angle de: Il n'y en a pas suffisamment pour justifier une entente et la détermination de règles différentes pour la gestion de cette activité sur l'ensemble du territoire québécois avec les premières nations?

M. Boutet (Pierre): Ce n'est pas ce qu'on dit. On est pour avoir des règles égales, qui se ressemblent le plus possible des deux côtés. Actuellement, on se retrouve avec un problème. Je peux vous en signifier un, exemple, un trappeur, l'automne passé, qui se retrouve sur son territoire de piégeage à droits exclusifs et qui se fait mettre dehors de son territoire par un groupe d'autochtones. C'est des choses qu'on pense qui devraient se régler à l'intérieur, justement, de négociations pour en arriver à ouvrir, exemple, les réserves à castors autant aux Blancs qu'aux autochtones sous des lois qui seraient égales pour tous et dont les autochtones pourraient bénéficier d'un revenu substantiel par la location des baux, ainsi de suite. On est ouvert de cette façon-là à cette chose-là.

M. Trudel: Je suis heureux de vous entendre, parce que c'est la base même de la négociation qui a été entreprise avec la nation innue. C'est parce que l'absence de règles, l'absence de règles convenues, l'absence de règles écrites qui déterminent l'exercice des droits des uns et des autres, eh bien voilà pourquoi nous pensons qu'il nous faut une entente avec la nation pour que nous puissions en arriver à connaître... Je pense que l'exemple que vous donnez, sans s'y attacher en soi, est une belle démonstration. Vous voyez, l'absence de règles nous amène évidemment à des conflits qui ne sont pas drôles, avec ceux que vous soulevez. Ce n'est pas drôle, ça, de constater cela parce que... Bon, je vais vous laisser réagir là-dessus.

M. Boutet (Pierre): Vous savez, M. le ministre, je ne veux pas dire que les Indiens ne possèdent rien. Ils possèdent quand même beaucoup et beaucoup de connaissances. Il faut être plus qu'humain, et c'est facilement... Il y a des choses faciles à constater. Je vais essayer de vous donner un exemple. Ce qu'ils peuvent se donner actuellement, ce qu'ils ont, c'est des droits ancestraux. Mais, si je vous dis: Je te donne un petit radeau, t'as un radeau. Puis remplacer ce radeau-là, en fait, c'est... Imaginez-vous que le radeau, c'est des droits ancestraux, puis je veux te l'enlever, mais t'as pas d'autres choses. C'est impossible d'y penser. Là, je pense que, dans des négociations comme ça, on peut pratiquement tout leur donner, tout se donner ensemble ou presque. La chance est là, on est ouvert à ça. Mais, si je vous dis: Je vous donne ça, mais, en échange, vos droits ancestraux, je vous les enlève, mais je vous donne rien en fait... Excuse, je ne vous donne rien, en fait, puis je vous les enlève. Bien, c'est certain qu'ils vont le garder, leur petit radeau, puis ils ne voudront pas le donner. Mais, si je te dis: Je te donne un gros bateau, le radeau va prendre le bord, comme on dit, puis ils vont embarquer dans le bateau. Bien, là, on a un bateau à revirer de bord, là. Ce n'est pas nous, les piégeurs, qui vont décider comment revirer le bateau de bord, mais on est proche.

J'entendais M. Chevrette, hier ? j'ai assisté ? dire: Les autochtones sont prêts, parce que, dans le fond, ils sont près de vous, les piégeurs. Oui, parce qu'on a un sens des valeurs de la nature, de la faune, de tout ça, qu'eux ont dans le sang, puis un vrai piégeur l'a aussi dans le sang. Moi, je suis capable d'être autant frère avec un Indien que d'être frère avec un Blanc. Je pense qu'il est temps et je pense que je et nous, la Fédération des trappeurs et la génération actuelle, serions très fiers d'avoir participé à un projet de cette envergure-là si toutefois tous les gens se rendent compte de la chance qu'on a, autant les autochtones.

Ce n'est pas une question d'argent, d'avoir des territoires de baux à castors qui soient ouverts, là. Ce n'est pas une question de faire de l'argent, on le fait pour le plaisir. Mais, à l'intérieur de la Fédération, c'est l'ensemble du nombre des trappeurs qui fait aussi qu'il y a un certain nombre de fourrures qui arrivent sur le marché qui se retrouvent à Montréal, là où la transformation est faite, et qui créent un certain levier dans l'économie du Québec. Mais, actuellement, on a toute une partie qui est comme morte, qui ne sert à rien, les réserves à castors. Mais plus que ça... Je vais m'arrêter là.

M. Trudel: C'est parce qu'il se dégage... Je vais vous le dire, quant à moi, il se dégage une impression que oui à une entente, oui à des règles, mais ne touchez pas aux miennes, ne touchez pas aux miennes, à mes règles. Si nous voulons convenir de règles de vie commune sur le territoire et, par ailleurs, tout cela prenant la source dans la décision des tribunaux qui... Vous avez raison là-dessus, ça nous impose une nouvelle réalité. Les tribunaux nous ont... On est dans une société de droit, et les tribunaux nous ont dit: Il existe des droits pour les premières nations, et c'est de votre responsabilité générale, aux instances gouvernementales et responsables des nations, d'en négocier l'application. C'est là-dedans qu'on est actuellement, c'est-à-dire l'application de l'obligation que nous avons non seulement de respecter, parce qu'on est dans une société de droit, mais d'en voir à l'application.

Est-ce que vous pensez que nous pourrions... Je vais prendre votre exemple que vous venez d'utiliser, que, par exemple, dépendant du niveau d'activité de piégeage, cela fait varier l'économie, le secteur économique concerné parce qu'il y a soit une offre de produits qui est plus ou moins élevée ou trop élevée, dépendant des circonstances, là. Est-ce que vous pensez qu'on pourrait en arriver à de véritables partenariats gagnant-gagnant, nous et eux, eux et nous, en matière de piégeage sur le territoire et que nous pourrions convenir de règles qui feraient en sorte que nous pourrions en arriver à exercer cette activité harmonieusement sur le territoire?

M. Boutet (Pierre): J'espère. J'en ai confiance, c'est faisable. J'espère que je ne rêve pas. On est là pour entreprendre les discussions à venir, je pense que c'est faisable. Et ce que je réponds, M. le ministre, à votre question: Oui, c'est faisable.

n(17 h 20)n

M. Trudel: C'est là-dessus, je pense, qu'il faut se donner les espoirs, les espoirs dans le dialogue, dans l'échange, dans la volonté à ce que nous puissions exercer nos activités, qu'elles soient davantage orientées vers le plein air, par exemple, ou l'activité récréative pour une certaine partie des gens que vous représentez, davantage dans le partenariat pour en arriver à déterminer les règles qui vont présider à ce partenariat-là et que nous puissions en arriver à faire davantage pour les deux parties, pour les nations concernées dans un même secteur de la réalité. Vous en convenez, de ça, j'imagine?

M. Boutet (Pierre): Absolument. Je pense... Et je suis moi-même trappeur, d'ailleurs, là, vous l'aurez sûrement deviné, et puis en venir à des ententes comme celle-là, que j'aurais, moi, à payer mon bail aux autochtones, si le coût est décrit le même que celui actuel, qu'est-ce que ça change? Ce que ça change actuellement et où les gens se sont levés, c'est qu'ils ont vu... Ils ont dit: Mais on va perdre nos terrains de piégeage. Est-ce que c'est ça? Je ne pense pas, je ne le vois pas comme ça. Je suis peut-être rêveur, mais je ne le vois pas comme ça.

Je ne le vois pas comme ça et, de la même façon, je vous dirais: Je ne veux pas empiéter sur un autre sujet, mais le Innu Assi, quand on dit: Pas changer les règles, pas dire que je me sentais visé, là, c'est des règles pour nous. Non, on est prêt à les changer. Le fait de donner des territoires aux autochtones, ce n'est pas de leur donner qui est inquiétant, c'est le fait de créer un précédent. Et, dans cet endroit-là, le fait de donner des terres là où il y a des problèmes déjà entre les gens qui y vivent, avec les autochtones, si ces problèmes-là grandissent, s'en vont en grandissant parce qu'on a commis cette erreur-là, pour les futures négociations, on se nuit, on grossit le problème.

Par contre, si on propose, peut-être, de dire: On vous le donne, le territoire comme une régionale, une région, et puis vous avez à le gérer, à l'administrer, c'est un petit peu la même chose, sauf que... Il faut accepter, des deux côtés, de se rendre compte qu'on vit ensemble, qu'on a évolué, comme nos techniques de piégeage ont évolué, comme nos pièges ont changé. Maintenant, quand un trappeur donne la mort à un animal avec un piège, c'est comme si tu fermes une «switch» de lumière, il ne le sait même pas, ce qui lui est arrivé. Par contre, nous, on le sait, ce qu'on fait, là. Puis on n'est pas contre. En tout cas, je peux vous dire qu'on n'est pas contre.

M. Trudel: Bien, je saisis cette expression de l'espoir à placer dans l'échange, la négociation, la compréhension, et tout cela devant nous conduire à une entente sur des règles quant à vos activités et les activités de la nation concernée. Et je loue cette ouverture et je comprends donc que, sur la base des principes qui nous ont été présentés, vous semblez accompagner l'orientation de: Bon, il faut progresser puis il faut en arriver à une entente. Cette entente-là doit nous amener à conclure des règles précises qui seraient les éléments d'un traité et la prise en considération des intérêts des uns et des autres, des vôtres comme des autres. Je saisis cela en disant: Que ce soit sur les redevances, que ce soit sur ce que vous avez indiqué, par exemple les permis à l'égard de votre activité de piégeage en Nitassinan, des permis supplémentaires, je ne pense pas qu'il ait été question de ça en nulle part, de rajouter. Je vais saisir plutôt votre parole de dire: Faire les choses autrement dans la confiance et à l'intérieur de règles écrites, ne pas en ajouter à ce qui existe actuellement, mais organiser cela dans notre société différemment, vous seriez d'accord avec cela?

M. Boutet (Pierre): Oui, absolument.

M. Trudel: Très bien. Je pense, j'ai des collègues...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Duplessis.

M. Duguay: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, moi également, M. Boutet, M. Tambourgi et Mme Gagnier, je tiens à vous remercier pour l'information que vous nous transmettez. Cependant, il y a un gros point d'interrogation que je me soulève, quand... Puis, moi, je suis un Nord-Côtier, donc, quand vous parlez de bateau, de radeau, je connais très bien les termes. Et, c'est sûr, quand je veux aller sur le golfe qui est tout en face de chez moi, je n'irai sûrement pas en radeau, je vais aller en bateau, parce que, en radeau, je n'irai pas loin.

Mais je vais vous poser une petite question. Quand vous affirmez que les autochtones ont un radeau... Et c'est bien sûr que, si on leur donne un bateau, ça va être plus difficile, peut-être, à essayer de concilier quelque chose, mais, lorsque la cour, les cours ont reconnu que les autochtones ont des droits, ce n'est pas l'inverse qui se produit? C'est qu'actuellement le Québec, ils ont tous les droits, et là il faut essayer de les encadrer par une entente. Et l'entente qui est sur la table, c'est ça. Alors, c'est un peu la raison pour laquelle, moi, j'interpelle, parce que, moi, je peux vous dire que, dans la tournée de M. Chevrette, ça a été soulevé, et, effectivement les cours ont reconnu tous les droits, dans tous les domaines, surtout dans le domaine de la chasse, de la pêche et le piégeage. Alors, c'est la raison pour laquelle, en tout cas, moi, à mon avis, je pense que l'entente, c'est urgent qu'on en ait une pour éviter les situations dans lesquelles on vit, parce que j'aurais pu vous donner bien des exemples. Et, si vous avez écouté un peu les mémoires qui ont été déposés peut-être hier, on a eu l'occasion de démontrer que ça n'a aucun sens, ce qui se passe sur le territoire actuellement, et l'entente pourrait venir corriger certaines de ces anomalies-là.

Alors, c'est pour ça que j'ai de la difficulté à vous saisir, là, dans le domaine, parce que vous faites beaucoup référence... Bon, si on leur cède ci, si on leur cède ça alors qu'ils ont tous ces droits-là...

M. Boutet (Pierre): Est-ce que ça donne quelque chose d'avoir des droits si d'avoir le droit de chasser partout ou de pêcher partout, vous allez passer votre vie à vous promener partout pour le faire? Là, ces gens-là... Là, je ne veux pas avoir l'air de quelqu'un qui veut prendre la défense des autochtones, non, je veux en venir à une solution, mais ce que je veux dire un petit peu pour faire rapport à votre question, où ils vivent, il faut qu'ils se développent. C'est beau, avoir le droit de chasser puis de piéger, mais ça prend un endroit pour rester, ça prend des choses pour se développer. C'est ça qu'on veut leur donner ou que vous voulez leur donner, je pense, qu'on veut en venir à développer. Mais, quand je parle de gros bateau, là, le bateau, c'est nous autres, puis là on leur demande d'embarquer avec nous autres. Mais il est dur à revirer, le bateau. C'est juste ça que je voulais dire d'une façon plus simple, dur pour les deux parties.

M. Duguay: Est-ce qu'il reste un petit peu...

Le Président (M. Lachance): Deux minutes.

M. Duguay: Oui? Merci beaucoup. Bon, c'est sûr qu'à votre question à savoir si le traité va essayer de clarifier certaines choses, oui, parce qu'il faut quand même partir d'un principe que, au moment où les autochtones étaient reconnus comme étant les premiers résidents, c'étaient des nomades. Donc, ils pouvaient chasser, pêcher sur l'ensemble du territoire. Et le territoire que je représente, c'est un immense territoire et... Alors, c'est pour ça que les cours ont dit: Essayez de vous entendre pour, sur ce territoire-là, que les deux communautés puissent vivre en harmonie.

n(17 h 30)n

Alors, moi, je pense que l'objectif qui est visé, c'est ça. Et, moi, je suis certain, et sans trop me tromper, que l'approche qui est sur la table, les autochtones acceptent de céder certains droits qui leur ont été reconnus par la cour. Et, en retour, c'est sûr que nous, les communautés québécoises, on accepte également de changer certaines habitudes de vie qu'on a. Alors, c'est sûr que quand on est sur un lac, exemple sur le Nitassinan, et que l'on pêche... C'est bien évident qu'actuellement la situation fait en sorte qu'on est assujetti à certaines normes, la communauté québécoise, donc, qui sont réglementées. Et, actuellement, les autochtones, sur ce même lac là, il n'y a pas de règlement, il n'y a rien qui s'applique. Alors, c'est la raison pour laquelle on dit: On va essayer d'encadrer tout ça. Alors, c'est la réalité d'aujourd'hui.

Le Président (M. Lachance): C'était un commentaire plus qu'une question, M. le député de Duplessis. Très bien. Alors, je cède la parole maintenant au député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Et, moi aussi, je comprends votre image... Bienvenue ? pardon ? aux représentants de la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec, M. Boutet, Mme Gagnier, M. Tambourgi.

Mais je pense, si je prends votre exemple, qu'est-ce qu'on est en train de faire avec l'Approche commune: il y a deux bateaux sur la rivière, pas un, et on cherche à trouver les règles du jeu pour la gestion des deux bateaux. On veut éviter les collisions. On veut s'assurer qu'on n'a pas de pollution dans la rivière. On veut s'assurer qu'il y a du poisson, etc., dans la rivière. Mais je pense qu'il faut accepter...

Selon la jurisprudence de la Cour suprême, selon notre histoire, nous avons créé les réserves. Tout le reste vient... On a un héritage qu'il faut composer avec. Alors, l'idée des mêmes lois pour tous, tout le monde... La Cour suprême nous invite au contraire qu'il y a des lois, il y a une certaine reconnaissance que, certaines personnes dans un bateau, il y a une prépondérance, et il faut composer.

Alors, qu'est-ce qu'on cherche? On ne veut pas un free-for-all. On ne veut pas des conditions qui sont... ou qui pourraient amener à la confrontation, et tout le reste. Mais je pense qu'il faut prendre comme point de départ qu'on a deux bateaux sur la rivière, pas un.

Alors, qu'est-ce qu'on peut faire au niveau d'une négociation pour s'assurer que le bateau autochtone n'enlève pas de vos droits, n'empêche pas vos membres de faire leurs propres activités? Comment est-ce qu'on peut établir les règles du jeu? Parce qu'il y a des choses qui sont très communes. Les questions de la conservation que vous avez évoquées, les questions des nouvelles technologies, les ententes internationales contre les cruautés des animaux, ça, c'est les grandes choses que les deux bateaux doivent composer, à l'intérieur de tout ça.

Mais je saisis mal votre image d'un seul et unique bateau. Peut-être que je ne suis pas assez familier avec le domaine. Mais je pense qu'il faut prendre pour acquis en premier lieu qu'il y a deux bateaux sur la rivière.

M. Boutet (Pierre): Il y en a peut-être deux mais il y en a qui est très petit et l'autre qui est très gros. Je pense que je ne peux pas dire plus que ça. Je n'ai pas à dire plus que ça, là-dessus. Je pense qu'il y en a un qui est très petit et l'autre, très gros. Et le plus gros invite le plus petit à embarquer à bord.

M. Kelley: Non, non.

M. Boutet (Pierre): Non?

M. Kelley: ...

M. Boutet (Pierre): Alors, il y a quelque chose que je ne comprends pas si ce n'est pas ça.

M. Kelley: Non, non. Mais...

M. Boutet (Pierre): Parce que, là, il faut se rejoindre et en venir à une entente d'un traité.

M. Kelley: On vit ensemble et on cherche des règles du jeu pour vivre ensemble, et ça, je le comprends. Mais, comme votre objection sur les Innu Assi, par exemple, je vois sur la page 3 du mémoire... Innu Assi, c'est quand même des territoires qui sont assez restreints. C'est un agrandissement des réserves existantes.

Alors, sur le grand territoire du Québec, si je compare... Quand on projette les agrandissements, je ne vois pas comment ça va empêcher beaucoup de vos membres de pratiquer le piégeage sur l'Innu Assi.

Quand je vois dans votre mémoire que 79 % du territoire du Québec est dans une réserve à castors, ça, c'est immense. Et, moi, je comprends très bien... Je ne comprends pas bien la notion de réserve à castors; mais, pour moi, ça, c'est un énorme territoire. Et vous avez dit: Il y a un droit exclusif pour les autochtones sur 79... du territoire. Pour moi, ça, c'est un enjeu beaucoup plus important que Innu Assi, qui sont... On va prendre Mashteuiatsh et on va, je pense, doubler le territoire. On va ajouter Essipit. Mais c'est quand même les parties des communautés existantes qui sont assez développées, elles sont déjà peuplées. Alors, j'essaie de saisir pourquoi Innu Assi est un empêchement plus grave que la réserve aux castors qui touche beaucoup plus le territoire québécois, si j'ai bien compris votre mémoire.

M. Boutet (Pierre): Je vais passer la parole à Philippe pour vous répondre.

M. Tambourgi (Philippe): C'est parce que les réserves à castors, ce n'est pas un droit autochtone. Ils ont le droit de trapper là, mais ça a été par décret dans les années du temps de Duplessis que ça a été imposé, les réserves à castors. Les Blancs n'avaient plus droit de trapper dans ces réserves-là mais les autochtones ont toujours eu le droit de trapper; donc ils ont gardé leur droit. Mais l'entente de principe, comme on l'a perçue, elle n'essayait pas de remettre en question les réserves à castors, sauf qu'on ne sait pas si, à partir de cette entente-là, on va réussir à débloquer ça.

Ça peut se faire autrement que par l'entente de principe. Ce n'est pas juste les communautés innues qui sont concernées, c'est toutes les communautés autochtones et tous les Québécois. Dans le fond, c'est toutes les régions. Partout où est-ce qu'il y a une réserve à castors, normalement il faut se poser la question: Est-ce qu'on redonne le droit aux trappeurs, à tous les trappeurs, de trapper?

Nous autres, ce qu'on soulevait, c'est qu'on était déjà très restreints, en tant que piégeurs. Donc, si on se retrouvait... Puis les réserves à castors n'étaient pas rouvertes puis on avait du monde sur les Innu Assi qui se retrouvaient sur des Innu Assi; quelqu'un qui a une terre, une terre privée, son terrain est inclus dans le Innu Assi. C'est un exemple hypothétique. Je ne sais même pas s'il y a quelqu'un qui a une terre privée qui va être incluse dans le Innu Assi, mais ça m'a donné l'impression de ça quand j'ai regardé les cartes.

Si cette personne-là, c'est un cultivateur, puis il n'a plus le droit de trapper sur son terrain, puis il a son cours de piégeage, puis il a son permis de piégeage puis il n'a plus le droit de trapper les espèces qui sont là parce que les règles ont changé, on se ramasse avec un problème. Donc, ça, on a soulevé le problème pour qu'on en prenne connaissance, c'est tout.

Mais les réserves à castors, c'est un autre problème qui ne découle pas de l'entente avec les Innus. Ça découle du gouvernement qui doit réinstaurer le trappage dans les réserves à castors car elles sont sous-exploitées. On a seulement 12 % d'exploitation de piégeage qui se fait par les autochtones, puis ça, ça provoque aussi des problèmes aux industries forestières. Quand ils ont des chemins forestiers qui sont inondés à cause de barrages à castors puis qu'ils n'ont pas le droit de trapper un pourcentage de castors pour remettre les chemins forestiers en état, ils ne peuvent pas faire appel aux trappeurs québécois, ils peuvent faire appel aux trappeurs autochtones. Mais, si les autochtones ne sont pas intéressés, on a un problème. Donc, nous autres, les réserves à castors, ça peut être un enjeu de l'entente, mais ce n'est pas un problème uniquement innu, c'est un problème entre le Québec, les trappeurs et les autochtones en général.

M. Kelley: Mais, juste pour clarifier, parce que, moi, j'imagine, c'est plutôt le Nitassinan où on va trouver les réserves à castors, parce que ça, c'est les régions plus éloignées. Mais Innu Assi, c'est à côté des communautés existantes.

C'est juste pour mieux comprendre la problématique. Je suis loin d'être un expert dans le domaine de la trappe, je ne le cache pas, mais j'étais un petit peu surpris, en lisant votre mémoire, que la question Innu Assi pose encore autant de problèmes pour vos membres. Parce que, pour moi, c'est les règlements du jeu dans le Nitassinan; c'est là où on va faire la trappe, si j'ai bien compris. Mais peut-être que je suis en erreur. Mais ce n'est pas à côté de Mashteuiatsh où on fait la trappe, ça va être plutôt plus loin des communautés où on va pratiquer tout ça. Ou est-ce que je me trompe?

M. Tambourgi (Philippe): Ce n'est pas un enjeu de l'entente qui est vraiment énorme ? pour nous, en tout cas. C'est un problème qu'on a soulevé qu'il pourrait y avoir. Sur une ferme, on a souvent des animaux autour, il y a des territoires agricoles qui vont donner sur l'Innu Assi. À Roberval, d'après la carte que j'ai vue, il y a une ferme qui va être incluse dans le territoire de l'Innu Assi de Mashteuiatsh. Donc, si le propriétaire de la ferme peut avoir des problèmes avec des animaux ? parce qu'il a des animaux, mais ce n'est pas nécessairement des gros animaux, ça peut être des petits animaux ? s'il a des problèmes avec des sources, bien, il ne pourra rien faire. Mais ce n'est pas un enjeu, parce que les communautés autochtones peuvent facilement le régler en disant: Vous aurez le droit, vous ferez appel à telle personne. Ça peut se régler facilement.

En ce qui concerne le Nitassinan, c'est sûr que nous, en ce moment, dans les communautés innues, les Nitassinan qui vont toucher les trappeurs québécois, c'est surtout en bas du 48e parallèle. Sur la Côte-Nord, c'est déjà très restreint, le territoire de piégeage qu'on a. C'est la même chose pour le Lac-Saint-Jean, ça va être en-dessous du Lac-Saint-Jean, grosso modo. Il y a des fermiers au nord du Lac-Saint-Jean qui ont des problèmes avec les réserves à castors parce qu'ils n'ont pas le droit de trapper, tout simplement, puis...

n(17 h 40)n

M. Kelley: Une dernière courte question, parce que mon collègue veut poser une question. Est-ce que les règles et les pratiques existantes des piégeurs autochtones sont très différentes pour le reste du Québec et, si, oui, comment au niveau de la pratique? Parce que vous avez évoqué les ententes internationales, vous avez évoqué les considérations, quant à la conservation, qui sont très importantes, fort légitimes, mais c'est quoi la différence dans la pratique des règles du jeu existantes, qu'il faut trouver un moyen de les harmoniser et corriger?

M. Tambourgi (Philippe): Comme le soulignait M. Chevrette, hier, ce serait important justement de connaître c'est quoi les codes des Innus, les codes de pratique parce qu'on ne les connaît pas, en ce moment. Donc, s'il y a quelqu'un qui veut piéger en dehors des saisons de piégeage, on ne sait pas si c'est dans son code innu ou si ça ne l'est pas non plus, puis il n'y a aucun agent qui peut dire: Toi, tu es en dehors de la loi ou non. Donc, si c'est des codes à établir, bien, s'ils doivent être établis, c'est d'en faciliter la connaissance à tous.

M. Chevrette, hier, parlait des réciprocités du point de vue des règles de piégeage; c'est un point important à connaître. Si on n'a pas tous... On ne demande pas d'avoir tous les mêmes droits. C'est sûr que les communautés autochtones peuvent avoir des besoins culturo-sociaux qui sont ancestraux, qui vont devoir être maintenus, mais il y a certaines règles de piégeage qui devront normalement être harmonisées. Quand on parle de période de récolte, pour ne pas nuire aux espèces, je crois que ça doit être harmonisé. Quand on parle d'espèces menacées ou de quotas, d'établir un quota pour préserver les espèces, c'est un minimum de les inclure dans la gestion du piégeage avec le gouvernement et avec les autres trappeurs. En tout cas, c'est un peu mon point de vue, là.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Moi, la question que j'avais, c'était: Est-ce que, durant toute l'étape préalable à la signature par les négociateurs de l'entente de principe, est-ce qu'avant ça il y a quelqu'un du côté du Québec qui vous a approchés, qui vous a consultés, qui vous a parlé de ce qui se passait? Est-ce que vous avez été impliqués quelque part, minimalement au moins, dans le processus qui a mené à l'entente que nous avons ici?

M. Boutet (Pierre): Pour notre part à nous, qui sommes là depuis peu en place à la Fédération des trappeurs gestionnaires, c'est arrivé très rapidement.

M. Sirros: Non, mais je veux dire, ceux qui étaient là avant vous... je vois madame qui me dit non.

M. Boutet (Pierre): Bien, on commençait à préparer peut-être...

M. Sirros: Donc, si je comprends bien, juste pour me situer dans le contexte dans lequel vous vous trouvez, il y a eu des négociations, il y a eu une entente qui a été signée, qui touchait aussi beaucoup sur la question de la trappe et le piégeage, etc., mais vous étiez comme... vous ignoriez ce qui se passait.

M. Boutet (Pierre): Non. Il faut dire que M. Louis Bernard est déjà venu à un C.A. dans notre organisme, dans notre Fédération, savoir si on était pour entreprendre les négociations là-dessus. Et les gens s'étaient prononcés en faveur de foncer là-dedans et puis d'y aller.

M. Sirros: Mais vos préoccupations par rapport à toutes ces questions que vous soulevez, est-ce que vous les avez véhiculées à quelqu'un? Est-ce que vous avez eu le sentiment que quelqu'un avait reçu vos préoccupations avant d'aller à la table?

M. Boutet (Pierre): Non. Je dirais que non.

Mme Gagnier (Marianne): Personne est venu nous les demander, nos préoccupations.

M. Sirros: O.K.

Mme Gagnier (Marianne): On a comme pas été...

M. Sirros: Bon. Là, ça, c'est une chose. Deuxième chose: je vois dans votre mémoire, je décèle une certaine confusion ou appréhension par rapport à l'impact de la création de Nitassinan sur vos activités, etc., et, si je regarde à la page 14, par exemple, vous vous questionnez par rapport à la prépondérance des lois innues et vous dites: Est-ce que les lois innues auront prépondérance sur le Nitassinan, sur les non-autochtones aussi? Et, pourtant, hier, les négociateurs nous disaient clairement que la prépondérance des lois innues concernent les Innus, que Nitassinan n'est pas donné aux autochtones, que Nitassinan demeure un territoire québécois avec libre accès pour tous les Québécois, finalement. Innu Assi, oui, ça, c'est le territoire en propriété propre. Mais est-ce que vous le voyez comme ça aussi ou est-ce que vous envisagez que la création de Nitassinan va créer des problèmes pour vos membres?

M. Boutet (Pierre): Non. En fait, il y a plus d'ouverture. Mais il faut être au courant des spécifications des lois qui se rattachent aux trappeurs qui piègent déjà. Qu'ils soient au Nitassinan ou dans un futur Innu Assi, il faut savoir ce qui se passe.

M. Sirros: Mais c'est ce qu'on essaie de...

M. Boutet (Pierre): Est-ce que l'on peut donner un... Là, vous êtes en train de me dire qu'hier on nous a dit que, oui, les autochtones auront leurs lois et nous aurons notre loi?

M. Sirros: Bien, hier, on nous a dit, par exemple, qu'un agent de conservation...

Le Président (M. Lachance): Un instant, M. le député, parce que le temps... à moins d'un consentement, le temps...

M. Sirros: Bon. O.K.

Le Président (M. Lachance): ...est pas mal terminé, là. Il restait M. le député de Saguenay.

M. Sirros: Ah. Bon. En tout cas, je passe la parole...

M. Corriveau: On va quand même poursuivre dans la même veine. C'est que vous avez mentionné tout à l'heure, M. Tambourgi, que votre organisation était d'accord avec le rapport de M. Chevrette, puis, en même temps, un des faits qui m'a frappé, c'est celui au niveau du transfert des terres publiques où vous étiez contre le fait qu'on transfère des terres publiques du gouvernement aux autochtones en propriété propre. Donc, ce qu'on comprend ici, tout le monde, c'est dans le Innu Assi.

Sur l'hypothèse, qui est venue dans votre témoignage un petit peu par la suite, que ça se pourrait qu'il y ait quelqu'un qui a une ferme, qu'il y aurait peut-être une partie de son terrain qui serait dans le Innu Assi et que, là, bien... Vous supposez sans savoir ? je reprends vos termes.

Écoutez, j'ai une formation juridique puis je pense que, si votre affirmation qu'il ne faut pas que les terres publiques soient transférées aux autochtones parce qu'il y aurait peut-être un propriétaire fermier qui aurait à un moment donné des rats sur son terrain, il voudrait les pogner avec un piège, puis il faudrait qu'il demande une autorisation aux autochtones... Je pense que c'est trop important, cette négociation-là, présentement, pour se baser sur des choses comme ça.

Je m'attends, de la part de votre organisation... Un peu comme dire: Si on invite un urbanisme à venir parler d'urbanisme, je ne m'attends pas à ce qu'il me parle du prix du beurre. Alors, si vous venez pour parler d'une question telle que celle-là en disant que les terres publiques ne doivent pas être transférées dans le cadre de Innu Assi, je m'attends à ce que ce soit parce que vous avez des piégeurs qui sont membres, qui ont effectivement apporté à votre attention qu'il y aura des problématiques, et voici les problématiques, puis, dans le cadre de votre mémoire, par exemple, qu'il y ait trois, quatre, cinq, 20 piégeurs qui se sentent menacés par ça.

Comme vous demandez beaucoup de présence dans ce qui s'en vient... Puis je pense que c'est important que l'association des trappeurs que vous représentez ? la Fédération des trappeurs ? soit présente dans ce débat-là, parce que le débat concernant la trappe, au niveau des droits autochtones, c'est essentiel, ça fait partie de leur culture, et il va falloir qu'on en débatte puis il va falloir qu'on nous fixe les droits des Blancs au travers de ça, pour qu'on réussisse à cohabiter.

Donc, ce que je souhaite ? ce n'est même pas une question ? ce que je souhaite, c'est que dans le cadre de la participation à laquelle vous allez avoir, là, à contribuer dans l'avenir des négociations, vous consultiez comme il faut vos membres, que vous arriviez avec des cas concrets où il y a vraiment des problématiques identifiées, avec des lots de trappe, pour dire: Là, il y a un problème, afin que cette information-là ou les problématiques qui sont réelles, qu'on puisse travailler sur du concret, qu'on ne travaille pas sur des suppositions ou des choses qui se pourraient parce que j'ai vu une carte. Vous comprenez que, ça, ça m'inquiète un petit peu.

En tout cas, vous pouvez commenter, il me reste du temps un petit peu ? deux minutes. Mais, vous savez, je ne veux pas vous faire un blâme, là. C'est juste que je pense qu'il y a un devoir de recherche profonde, de la part de votre association, pour le débat qui s'en vient, parce que ça va être important, puis il ne faut pas qu'on embarque dans la démesure puis dans des suppositions. Il faut qu'on parle de choses réelles.

M. Tambourgi (Philippe): C'est parce que... On n'est pas contre l'Innu Assi parce que ça pourrait nous empêcher de trapper ou ça pourrait empêcher un trappeur de trapper sur sa ferme, là. Nous autres, ce qu'on a remis en question dans l'Innu Assi, c'est le fait de donner des terres en propriété exclusive. Ça n'a aucun rapport avec le piégeage, là.

M. Corriveau: Oui, mais... Bien, si ça n'a pas rapport au piégeage, là, mon garagiste ou mon urbaniste, il vient me parler du prix du beurre.

M. Tambourgi (Philippe): Bien, moi, je vous présente ? excusez-moi, là, de vous interrompre ? je vous présente l'opinion de la population, là. C'est l'impression que la population a; c'est l'impression de nos membres. Si on ne veut pas donner la propriété exclusive...

Une voix: Je pense que ça répond à...

Le Président (M. Lachance): Alors, on reste sur un point d'interrogation qui restera à préciser par la suite des choses, en espérant que la lumière se fasse. Et, là-dessus, je vous remercie, membres de la Fédération des trappeurs gestionnaires du Québec, d'être venus à notre commission parlementaire pour présenter votre opinion.

Et j'ajourne les travaux de la commission des institutions à jeudi matin, le 23 janvier 2003, à 9 h 30, ici même, dans cette salle du Conseil législatif.

(Fin de la séance à 17 h 50)


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