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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 2 mai 2002 - Vol. 37 N° 71

Étude détaillée du projet de loi n° 54 - Loi portant réforme du Code de procédure civile


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

Le Président (M. Boulianne): Alors, je constate qu'il y a quorum. Nous allons donc procéder à nos travaux. Alors, je déclare la séance ouverte, de la commission des institutions.

Des voix: ...

Le Président (M. Boulianne): S'il vous plaît! Je me permets aussi de rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile.

Alors, M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement d'annoncé.

Étude détaillée

Code de procédure civile

Dispositions générales

Dispositions introductives (suite)

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup. Nous avions donc commencé l'étude, nous en étions à l'article 1, et, Mme la députée de Bourassa, vous aviez la parole. Alors donc, je vous redonne la parole pour l'article 1.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Me permettez-vous d'ouvrir mes livres, M. le Président?

Le Président (M. Boulianne): Oui, on vous permet, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, la clarification. Je crois avoir mal interprété les commentaires dont j'avais fait lecture, qui émanaient du Barreau du Québec et qui sont à la page 22 du mémoire. La question qu'il reste à clarifier: Que veut dire l'expression «les délais sous le contrôle du tribunal»? Est-ce qu'on doit comprendre que, lorsque les parties se sont entendues et ont convenu de délais, évidemment à l'intérieur d'un échéancier... et il y avait un problème, le tribunal intervient, fixe un délai et que celui-ci n'est pas respecté... Qu'est-ce qui arrive?

Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, Mme la députée de Bourassa. M. le ministre.

M. Bégin: Alors, je pense, M. le Président, qu'il y avait eu une méprise, parce que, lorsque je parlais, je disais, moi, que ça n'empêchait pas les parties de convenir de quoi que ce soit, n'ayant jamais attribué aux mots «sous le contrôle du tribunal» le sens d'une telle interdiction. Alors, après avoir échangé, je comprends que ça, ça peut créer un problème.

J'ai parlé avec mes juristes qui effectivement l'interprètent plus dans le sens de dire que, si on garde les mots «sous le contrôle du tribunal», ça voudrait dire que les parties ne peuvent pas s'entendre autrement, et, en conséquence, ce n'est pas l'intention qui était visée, ce n'était pas l'esprit dans lequel je travaillais, et je vais proposer que nous enlevions ces mots de manière à éviter toute équivoque, de sorte que les parties pourront la faire, une telle entente. Et on se comprend bien ? et je le dis pour qu'on s'en rappelle ? que, si on veut permettre ça, c'est pour permettre aux parties de faire avancer leur dossier comme elles l'entendent.

Cependant, ils doivent toujours se rappeler que le délai de 180 jours est là et que l'entente qu'ils font ne doit pas avoir pour effet de les empêcher ou de rendre pratiquement impossible l'atteinte du résultat, de sorte qu'un juge qui serait appelé à regarder une demande de prolongation et où les parties diraient: Écoutez, M. le juge, nous le pouvions, et nous l'avons fait, fait une entente, mais nous avons pris deux mois pour faire telle chose, en conséquence, maintenant nous ne sommes pas capables de rencontrer l'échéance de 180 jours, le juge devrait être en mesure de dire: Vous aviez le droit de faire le choix, mais pas celui de ne pas respecter les délais. Et, à mon point de vue, à ce moment-là, il devrait sanctionner l'entente de manière négative. Alors, l'esprit est vraiment de permettre l'entente entre les parties. En tout cas, c'était le sens que j'y voyais.

Le texte semble présenter une difficulté. Comme l'intention est claire, on va mettre le texte clair puis on va l'enlever purement et simplement. Alors, vous avez entre les mains le texte qu'on pourrait adopter tel quel, si c'est votre intention, parce que je croyais que c'était ça, le sens de votre démarche.

Le Président (M. Boulianne): Donc, nous avons un amendement de la part de M. le ministre. L'amendement est recevable, alors donc on a à discuter...

Mme Lamquin-Éthier: On pourrait en faire lecture.

Le Président (M. Boulianne): Oui, alors discuter sur l'amendement. Mme la députée de Bourassa, vous avez la parole.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, l'amendement devrait se lire: «Les parties peuvent en première instance convenir, dans le calendrier des échéances qui régit l'instance, de délais différents de ceux qui sont prescrits par le Code, à moins qu'ils ne soient de rigueur.»

Une voix: C'est ça.

Mme Lamquin-Éthier: Parfait. Alors, je pense que ça correspond aux préoccupations qu'avait le Barreau du Québec.

Le Président (M. Boulianne): Est-ce que ça va, Mme la députée de Bourassa?

Mme Lamquin-Éthier: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Boulianne): M. le ministre, autre chose là-dessus?

M. Bégin: Non.

Le Président (M. Boulianne): Donc, est-ce qu'on est prêt à voter sur l'amendement?

M. Bégin: Peut-être juste sur un aspect technique, là. Cet amendement-là remplace l'amendement qui avait déjà été proposé. Alors, pour les fins de ceux et celles qui ont à travailler, là, il faudrait savoir que ça enlève l'ancien amendement.

Le Président (M. Boulianne): Je pense que l'amendement n'avait pas été encore proposé.

M. Bégin: Ah! O.K. Alors, on en convient, là. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté. Merci.

Le Président (M. Boulianne): C'est beau. Alors, est-ce que cet amendement est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Boulianne): Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Boulianne): Alors donc, nous continuons, après cette adoption, le débat sur l'article 1. Alors, toujours Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce qu'il y avait un autre segment, M. le Président, au niveau de l'article 1?

Le Président (M. Boulianne): Non, c'était l'article 1...

M. Bégin: Je pense qu'on s'entendait sur le reste.

Le Président (M. Boulianne): Mme la députée, nous sommes à l'article 1 tel qu'amendé, alors il n'y avait pas d'autre segment que ça. Alors, si vous êtes prête à procéder au vote...

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui.

Le Président (M. Boulianne): Alors, est-ce que l'article 1, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Boulianne): Adopté.

M. Bégin: M. le Président, étant donné l'état de ma voix, si vous me le permettez, je demanderais peut-être à quelqu'un...

Le Président (M. Boulianne): Bien, je peux le lire, moi, si vous voulez.

M. Bégin: Le lire vous-même? Parce que, je m'excuse, là, je ne me rendrai pas à la fin de la journée si je lis beaucoup. Merci.

Les tribunaux

De la compétence des tribunaux

Le Président (M. Boulianne): Bien. Alors, nous en sommes donc à l'article 2. Alors, l'article 26 de ce Code est modifié:

1° par le remplacement du paragraphe 1 du premier alinéa par le suivant:

«1. les jugements finals de la Cour supérieure et de la Cour du Québec, sauf dans les causes où la valeur de l'objet du litige en appel est inférieure à 100 000 $ s'il s'agit d'une réclamation monétaire uniquement ou à 50 000 $ si le litige comporte également des questions de droit;»;

2° par le remplacement, dans le deuxième alinéa, des mots ? je cite ? «lorsque la question en jeu en est une qui devrait être soumise à la Cour d'appel:» par les mots «lorsqu'une question de principe, une question nouvelle ou une question de droit faisant l'objet d'une jurisprudence contradictoire est en jeu ou lorsque le jugement de première instance paraît contenir une erreur manifeste de droit ou de fait déterminante au point de l'infirmer:»;

3° par le remplacement du paragraphe 4 du deuxième alinéa par le suivant:

«4. les jugements rendus en application de l'article 846;»; et enfin

4° par la suppression du troisième alinéa.

Alors, Mme la députée de Bourassa, vous avez la parole. Oui, M. le ministre.

M. Bégin: Nous venons de lire le projet de loi n° 54. Comme je l'ai déjà mentionné, il y a eu des rencontres tripartites, et le juge en chef de la Cour d'appel avait demandé et d'autres parties également avaient demandé qu'on modifie ce texte pour ne pas avoir cette distinction entre la valeur monétaire... ou si ça comporte des questions de droit, et j'avais acquiescé à cette demande. Donc, j'aurai un amendement à cet égard. On pourrait le relire, Mme la députée de Bourassa a en main le texte, et ça fait l'objet d'une entente dans ce sens-là. C'est le remplacement, dans la deuxième ligne du paragraphe 1, de «20 000» par «50 000», et remplacer le deuxième par le suivant... Et là je ne le lirai pas, si vous me le permettez.

Alors, essentiellement, là-dessus, il y a des modifications qui sont apportées, qui rendent, en principe, conforme à ce que nous avions convenu là-dessus. Je dois dire cependant que bien sûr ça pose la question du niveau de la Cour du Québec. 50 000, c'est dans le cas où nous avons 70 000 pour la compétence de la Cour du Québec. C'est pour ça que je le mentionne, même si ce n'est pas l'enjeu spécifique. Mais je ne voudrais pas induire les membres de la commission dans un piège, parce qu'on pourrait penser que ça ne met rien d'autre que ça en cause, alors que ça le fait.

Le Président (M. Boulianne): Alors donc, il y a le dépôt d'un amendement. Alors, sur l'amendement, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: L'amendement, c'est celui dont vous venez de faire lecture, là, les jugements finals de la Cour supérieure et de la Cour du Québec, sauf dans les causes où la valeur de l'objet en litige en appel est inférieure à 50 000?

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Boulianne): Oui, c'est ça.

Mme Lamquin-Éthier: Pour qu'on se retrouve là, parce que...

Le Président (M. Boulianne): On l'avait dans la liasse des amendements.

M. Bégin: C'est les grands amendements, là, Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui. C'est parce que vous aviez vos amendements au préalable également. C'est parce que là on suit beaucoup de textes.

M. Bégin: C'est parce que... Permettez-moi une suggestion.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui. De n'en suivre qu'un seul?

n(9 h 50)n

M. Bégin: De prendre le projet de loi et les amendements qui sont faits, parce que sinon on va se perdre, là. Et comme, voyez-vous, moi-même, j'ai oublié de vous faire la remarque, l'amendement est plus grand que ce que je vous ai dit, puisque le juge Michaud avait demandé que nous supprimions le quatrième critère qui avait été proposé, qui se lisait «lorsque le jugement de première instance paraît contenir une erreur manifeste de droit ou de fait déterminante». Il nous avait fait valoir que la cour appliquait déjà ce critère, et de le mettre de manière aussi formelle entraînerait probablement une augmentation du nombre de dossiers, alors que l'esprit dans lequel on travaillait était plutôt de, au mieux, maintenir, mais peut-être de réduire un peu le nombre d'appels. Alors, là-dessus, on avait acquiescé, et c'est le sens du deuxième membre de l'amendement.

Le Président (M. Boulianne): Bien. Alors, Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Permettez-moi, M. le Président... Je note votre efficacité, mais permettez-moi de pouvoir lire.

O.K. Bon, ce que vous devez comprendre, M. le Président, c'est que, nous, on avait reçu les amendements, lesquels j'avais pris la peine d'annoter pour ne pas retarder les travaux de personne. Alors là j'aime bien m'en référer à mon premier texte. Je dois aussi regarder le second texte qui a été monté...

Le Président (M. Boulianne): Prenez votre temps, Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: ...et les commentaires qui ont été déposés par le Comité de révision et également notamment par le Barreau du Québec. Alors, ça fait beaucoup de choses à faire, hein?

Bon. Alors, il apparaît, quant au premier paragraphe, que la limite fixée à 50 000 $ serait justifiée en autant que la limite de compétence monétaire de la Cour du Québec est à 70 000 $.

M. Bégin: Ça, c'est les commentaires du Barreau.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Bégin: Prenons ça en deux temps, si vous me permettez. Prenant pour acquis 70 000, compte tenu de ce qu'il y avait dans le texte, tout le monde était d'avis qu'on devait supprimer ce double critère.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. D'ailleurs, le Barreau est d'accord.

M. Bégin: Ça, là-dessus, je pense qu'on s'entend. Si on s'entendait toujours pour 70 000 et qu'on... quel était le montant qu'on voulait mettre, 50 000, ça allait. On se comprend. Le seul questionnement, c'est que le Barreau mentionnait que 70 000 était un montant plus élevé. Je ne crois pas me tromper en disant qu'il favorisait plutôt 4 à 5 000 sans trancher nécessairement, comme le faisait d'ailleurs le comité. Et voilà ce qu'il en était. Et ce qui...

Une voix: 40 000, 50 000.

M. Bégin: J'ai dit quoi, là?

Mme Lamquin-Éthier: Quatre à 5 000. Vous parliez des Petites créances.

M. Bégin: Excusez-moi, j'étais aux Petites créances.

Mme Lamquin-Éthier: Ce n'est pas grave, on vous suit.

M. Bégin: Vous aviez compris, 40 000, 50 000. Alors, c'était ça, l'enjeu fondamental. Voilà.

J'ai perdu l'idée que je voulais mentionner, mais, en tout cas, ça me reviendra.

Mme Lamquin-Éthier: Parce que le Comité de révision, à la recommandation R.2-2, avait formulé... avait recommandé plutôt de hausser le seuil monétaire d'appel de plein droit, actuellement fixé à 20 000, à 30 000 ou à 35 000, selon la limite monétaire de compétence de la Cour de Québec, selon qu'elle serait fixée à 40 000 ou à 50 000.

M. Bégin: À 40 000 ou 50 000. Je pense qu'il y avait ce même ratio.

Mme Lamquin-Éthier: Évidemment, il y a une interrelation aussi avec la question des petites créances.

M. Bégin: Oui.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, selon ce que je comprends, un consensus a été atteint lors de la rencontre magistrature-Justice-Barreau, et il y a un papillon qui fait en sorte qu'on ne prévoit qu'un seul... que le seuil des appels de plein droit sera de 50 000, et ça...

M. Bégin: En autant que la compétence sera de 70 000.

Mme Lamquin-Éthier: ...c'est avec l'assentiment du Barreau du Québec. C'est ça.

Deux, le Barreau, comme je le disais précédemment, dit que ce montant est justifié, comme vous venez de le rappeler, en autant toutefois que la limite de compétence de la Cour du Québec est à 70 000. O.K. Et il reste la question, dans le deuxième paragraphe...

M. Bégin: Du quatrième critère.

Mme Lamquin-Éthier: Pardonnez-moi?

M. Bégin: Du quatrième critère.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, c'est ça. Bon, ça, là, c'est...

M. Bégin: Ça, je vous avoue honnêtement, là, que c'est à la demande du juge en chef Michaud, qui a regardé en long et en large... et m'a écrit une lettre de 10 pages faisant état de modifications qu'il souhaitait, au nom de la Cour, apporter au projet de loi. Je l'ai rencontré. On est convenus, je pense, mettons, de 80 % ou 85 %, et ça, ça s'est fait entre lui et moi. Par la suite, nous sommes allés en tripartite, et là on a repris ces modifications-là et on en a convenu. Je ne crois pas qu'il y ait de litige entre le Barreau, la Cour supérieure et la Cour du Québec sur un des aspects qui étaient là, chacun, je pense, sans l'avoir dit tel quel, disant: Bon, bien, quand même, c'est la Cour d'appel qui connaît mieux ces choses. Et, effectivement, le rendement de la Cour d'appel est excellent en termes de changement d'orientation. Depuis quelques années, le nombre de dossiers s'accélère, qui sont entendus chaque année. Les délais raccourcissent considérablement. Ils sont partis de 48 mois en cour à Montréal à 22 ou 23 mois, puis le juge Michaud parlait de 19 pour cette année. À Québec, ils sont partis de 24 à 11. Donc, il y a eu une amélioration considérable. Alors, quand le juge de la Cour d'appel nous mentionne que ce serait mieux comme ça, disons que c'est assez compréhensible.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa.

M. Bégin: ...

Mme Lamquin-Éthier: Vouliez-vous ajouter quelque chose? Non?

M. Bégin: Non, non, c'est parce que je pensais qu'il avait dit «Mme la ministre». Ha, ha, ha!

Une voix: Pas encore.

Le Président (M. Boulianne): Je n'ai pas dit «Mme la ministre», non.

M. Bégin: Je trouvais que ça s'était fait vite un peu.

Le Président (M. Boulianne): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Permettez-moi, M. le Président. Je suis en train de faire lecture des commentaires formulés par le Barreau quant au deuxième paragraphe et quant au consensus dont vient de parler M. le ministre.

Bon, vous savez, c'est toujours bien embêtant quand vous nous représentez une position et que le Barreau du Québec formule des arguments. Me permettez-vous de regarder en direction de Me Vadboncoeur en ce qui a trait au deuxième paragraphe et au retrait du texte «ou lorsque le jugement de première instance paraît contenir une erreur manifeste de droit ou de fait»? On se retrouve bien à la page 23 de votre mémoire. C'est bien ça?

(Consultation)

Mme Lamquin-Éthier: Je m'aperçois que ce n'est pas conforme à la recommandation. Vous avez pris lecture, hein, M. le ministre, des commentaires qui ont été formulés par le Barreau en ce qui a trait au deuxième paragraphe?

M. Bégin: Oui.

Mme Lamquin-Éthier: C'est quoi, votre opinion?

M. Bégin: Ce que dit le Barreau, c'est qu'ils aimeraient mieux garder le texte, et ils espèrent que le mot «notamment» permettra à la Cour, dans les cas qui le permettent, d'interpréter comme étant un motif ou non d'appel. La Cour d'appel pense, elle, que de faire ça, c'est comme dire à l'avance son jugement. En fait, dans son appréciation, c'est ? comment je dirais? ? c'est rendre jugement, à sa face même, et ils ne sont pas d'accord. Vous avez le commentaire dans la feuille d'amendement comme telle.

En fait, le juge, en autorisant l'appel, rendrait jugement sur le fond en disant: Il n'y en a pas, d'erreur manifeste, ou bien: Il y en a une. S'il y en a une, il rejette la cause et, s'il n'y en a pas, dans son avis, ça veut dire qu'il n'y en a pas. Donc, les juges sont liés par ça, d'une certaine manière. Ça crée un problème. Moi, là-dessus, je serais porté à penser que la Cour d'appel est la mieux placée pour nous donner son opinion et, moi, je vous dis franchement, on est dans un cas où on n'est pas ? comment je dirais? ? peinturé dans le coin de part et d'autre. Moi, je donnerais le bénéfice à la Cour d'appel, qui connaît bien comment elle travaille puis comment les appels sont entendus, quels outils elles doivent avoir et que la Cour... C'est pour ça. Ce n'est pas un choix idéologique, c'est un choix de dire: Bon, dans ce cas-ci, là, je pense que la Cour d'appel devrait être suivie.

Mme Lamquin-Éthier: D'ailleurs, c'est ce que vous rappelez dans le texte en disant: Il me semble inopportun de maintenir ce critère, puisque, si tel était le cas, à l'étape de l'autorisation, le juge autorisateur pourrait déterminer que le jugement de première instance paraît contenir une erreur manifeste de droit.

M. Bégin: Ce n'est pas de notre cru, c'est ce que le juge Michaud nous disait.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, ce que je lis à l'heure actuelle, c'est du cru du juge Michaud.

M. Bégin: C'est-à-dire, je ne veux pas dire que je le cite au mot à mot, là...

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, non, mais c'est...

M. Bégin: ...mais l'esprit dans lequel il a travaillé.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Je suis sensible aux arguments de M. le juge Michaud, qui est à la Cour d'appel, je suis également sensible à l'argumentaire formulé par le Barreau, je suis sensible à l'argumentaire que vous avez repris. Alors, si vous nous permettez deux secondes de réflexion...

(Consultation)

Mme Lamquin-Éthier: C'est principalement parce que la rédaction proposée semblait retirer au juge sa discrétion d'autoriser l'appel ou pas lorsque la partie répond à l'un des critères. La discrétion est essentielle à l'exercice de filtrage des permissions d'appel. C'est essentiellement, je crois... Bon. Alors, écoutez, on est dans une situation où on ne peut que prendre connaissance des commentaires, là.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: On va l'adopter sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Est-ce que l'article 2, tel qu'amendé, est adopté?

n(10 heures)n

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. À l'article 3...

M. Bégin: M. le Président, j'ai fait, avant que vous n'arriviez, le voeu que le président lise à ma place le texte, compte tenu de l'état de ma voix, et votre prédécesseur avait accepté. Je ne sais pas si vous allez faire pareil.

Le Président (M. Lachance): Avec plaisir, M. le ministre.

Mme Lamquin-Éthier: Pensez-vous, M. le ministre, que ça pourrait aider également si M. le président lisait les commentaires?

Le Président (M. Lachance): Ah bien là...

M. Bégin: Ah, si vous pensez...

Mme Lamquin-Éthier: Parce que là vous n'avez pas de voix.

M. Bégin: Je n'ai pas d'objection parce que j'ai déjà, dans d'autres circonstances, lu en entier les commentaires, pensant faciliter la compréhension mutuelle du texte.

Le Président (M. Lachance): Alors, nous en sommes à l'article 3. Il y a un amendement: Remplacer, dans la première ligne de l'article 3 du projet de loi, le chiffre «29» par le chiffre «26» et, dans la deuxième ligne, le numéro «29.1» de l'article proposé par le numéro «26.0.1».

Commentaires sur l'amendement: cet amendement vise à déplacer l'article proposé, qui se retrouve dans le projet de loi à la suite de l'article 29 relatif au jugement interlocutoire, après l'article 26 ? C.P.C. ? relatif à l'appel de plein droit et l'appel sur permission afin d'assurer la cohérence de la structure du Code.

M. Bégin: M. le Président, il faut aller en deux temps là-dessus. Tout le monde s'entend sur le contenu de l'article. Quand je dis «tout le monde», c'est le Barreau, la magistrature. Cependant, il y a une divergence entre le Barreau et la magistrature. Le juge en chef de la Cour d'appel, le juge Michaud, demanderait que cet article soit placé à 26.0.1; le Barreau pense que ce serait à 29. De la même manière que je vous ai dit, de la rencontre que j'avais eue, que j'ai convenu de donner ? je dis ça, mais ce n'est pas le bon mot, là ? de donner suite à ce que le juge Michaud me recommandait, j'ai pris...

Mme Lamquin-Éthier: Donc, 26.0.1.

M. Bégin: C'est ça. Alors, on comprend, là, encore une fois que ce n'est pas une question idéologique, c'est qu'on estime, l'un que c'est mieux là, l'autre, que c'est mieux là. Moi, je vous dis honnêtement, je suis, dans ce cas-ci, la Cour d'appel.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, je comprends bien que le Barreau est d'accord avec l'ajout qui reprend la recommandation du Comité de révision.

M. Bégin: Oui. Parce que le fond du débat, c'est: lorsqu'une partie va en appel, est-il besoin que chacune des parties fasse la même chose alors qu'elles n'ont qu'à prendre le même véhicule et ça évite beaucoup de papiers, de procédures, de coûts et puis que je pense que tout le monde s'entend là-dessus? Alors, c'est pour ça, c'est la localisation qui pose problème.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Bon, écoutez, nous, on ne peut qu'observer qu'il y a une divergence entre M. le juge Michaud et le Barreau quant à la localisation de l'article. C'est très délicat pour nous de pouvoir convenir... Alors, on va l'adopter sur division.

Le Président (M. Lachance): Alors, l'amendement est adopté sur division. Est-ce que l'article 3, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 4, et j'en fais la lecture: L'article 34 de ce Code est modifié par le remplacement, dans les paragraphes 1 à 3 du premier alinéa, de «30 000 $» par «70 000 $». M. le ministre, à l'article 4, il n'y a pas d'amendement.

M. Bégin: Là-dessus, la problématique est simple. Le Comité a recommandé 40 000 ou 50 000. Le Barreau croyait qu'on devait prendre cette recommandation-là. J'ai mis un montant supérieur. Lorsque nous avons entendu le Barreau, ils ont déposé un rapport d'un expert indépendant qui a fait valoir une argumentation à l'encontre de cela, et j'avais déposé, et je n'ai pas l'intention de les reprendre ici, mais j'ai déposé... Et j'avais étudié les chiffres qui se retrouvaient là et où on voyait qu'un appel... pardon, pas un appel, un montant de 8 000, dans le passé, ou de 3 000, dépendamment, quelques années après, se retrouvait à être disparu, mangé par l'inflation. Mon argument pour l'année qui court n'est pas valable, en ce sens que, s'il n'y avait jamais plus d'inflation que cette année, on pourrait penser que, pour 10 ou 15 ans, on aurait un montant relativement stable. Par contre, l'expérience passée nous indique que ce n'est pas le cas et que vite le montant est grugé par l'inflation, et on se retrouve à ne pas avoir atteint l'objectif qu'on visait. Oui, pour deux, trois ans, mais non par la suite. Alors, c'est pourquoi, M. le Président, je suis allé un peu plus loin.

Deuxièmement, il y a eu dans le débat un argumentaire qui a été fait à l'effet que ça pourrait être inconstitutionnel de monter à ce montant-là. Ça, c'est un débat que j'ai eu en 1995 avec mon vis-à-vis de la justice d'alors, le député de... Voyons!

Une voix: De Chomedey.

M. Bégin: De Chomedey. J'avais Châteauguay, mais je savais que ce n'était pas ça. De Chomedey. Et, en invoquant la décision de la Cour suprême de 1965 dans le renvoi où on avait discuté spécifiquement de cette question de la cause de la compétence de la Cour du... dans le temps, ce n'était pas la Cour du Québec, c'était la Cour provinciale ? de mémoire, je pense que c'est de 200 $ à 500 $ ? le juge Fauteux avait fait évidemment certaines remarques, et nous avions eu un débat très, très, très intense là-dessus. Alors, le député de Chomedey nous disait que c'était évident que c'était inconstitutionnel, ce que nous faisions, que ce serait attaqué et que ce serait annulé. Je lui disais que, d'après moi, le critère qu'il invoquait n'était pas aussi absolu que ce qu'il mentionnait et qu'il y avait, dans le jugement de la Cour suprême, de la place pour faire en sorte que ce soit constitutionnel. J'ai eu raison avec le temps, mais je n'ai pas eu de jugement qui confirme mon interprétation, puisqu'il n'y a pas eu de poursuite qui a été faite. Et le temps a passé, cependant, mais, si on regarde au niveau de l'argent, il est évident que j'avais raison d'avoir augmenté à ce moment-là la juridiction, si on prend en termes d'argent purement et simplement. Alors, je pense, M. le Président, que, compte tenu de cet argumentaire que nous avions eu à l'époque...

Il ne s'agit pas d'avoir raison, il s'agit de dire que ça a été fait par un vrai débat là-dessus, parce que, à l'époque, j'avais doublé carrément la compétence de la Cour du Québec, et l'argumentaire était à l'effet que ce serait inconstitutionnel. Deuxièmement, il y a eu vraiment l'inflation qui a mangé à toutes fins pratiques l'augmentation que nous avions faite. Alors, je prétends qu'on devrait faire ça.

Cependant, je suis sensible à l'argument que le Barreau a fait valoir, et je l'avais mentionné l'autre jour. Je pense que, une fois que nous aurons fixé ce montant-là, nous devrions mettre une mécanique qui permettrait de réviser sur une base, je ne dirais pas automatique, mais, en tout cas, régulière, avec des critères objectifs, la révision qui s'en viendrait. Par exemple, dans quatre ans, bon, dans trois ans, dans deux ans, on dirait... Et là le Barreau, si j'ai bien compris, proposait qu'on s'assoie ensemble puis qu'on regarde de quelle manière ça pourrait être fait. Moi, je n'ai pas d'objection. Est-ce que c'est en faisant l'inflation? Est-ce que c'est en tenant compte de divers autres critères, des rapports avec ce qui se passe ailleurs? Je ne le sais pas, peu importe. Des critères de scientifiques, etc.? Moi, je n'ai pas d'objection à faire ça.

Il est évident que nous ne pouvons pas compléter le travail avant la fin de l'adoption de ça. Cependant, il y aura des phases ultérieures à nos travaux. Il y aura la phase II, certainement. Rien ne nous empêchera, à ce moment-là, d'ici là, d'avoir bâti un mécanisme pour la détermination éventuelle de ça. Moi, je suis d'accord là-dessus pour le futur. Mais aujourd'hui je maintiens la proposition que nous avons faite de mettre la compétence à 70 000, quitte à réviser si jamais, par exemple, selon les critères qu'on pourrait examiner, établir, quitte à constater que peut-être partir de là, ce serait... Comment je dirais? J'ai de la misère à m'exprimer. Ce serait un peu comme revoir a posteriori ce qui s'est passé si on appliquait les nouveaux critères. Avec des nouveaux critères, est-ce qu'on serait passé de 30 à 65, mettons, ou à 60 ou bien si on serait arrivé à 70 ou à 75, peu importe?

Alors, on pourrait, à ce moment-là, tenir compte de ça pour dire qu'on ne bouge pas, même s'il y avait lieu, théoriquement, si on partait à zéro, là, à 70, de l'augmenter ? on ne bougerait pas, mettons, pour trois ans ou quatre ans ? à une seconde révision, de sorte qu'on vivrait avec ce que nous avons pendant plus longtemps que requis pour rattraper ce qui a été fait, peut-être qui aurait été fait prématurément. Alors, c'est ce que je propose que nous fassions, que nous le mettions à 70 000, que nous mettions le seuil d'appel à 50 000, que nous établissions un comité avec le Barreau et que rapidement on se mette à l'oeuvre et, d'ici quelques mois...

n(10 h 10)n

Je ne pense pas qu'on ait besoin de plus que ça, c'est un problème relativement simple, facile à cerner. Il y a des techniciens qui peuvent nous aider là-dedans, il y a des ? comment est-ce que t'appelles ça? ? des actuaires, il y a des comptables, il y a d'autre monde, et on pourra regarder ça rapidement puis faire les amendements qui s'imposeraient de toute façon dans un projet de loi qui serait déposé à l'automne, par exemple, si on étudie ça à l'automne.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci beaucoup, M. le Président. Ça, évidemment, c'est la recommandation 2-13 du Comité de révision, et vous vous en écartez radicalement. Le Comité de révision avait recommandé d'augmenter de 30 à 40 ou à 50 la limite monétaire de la compétence de la Cour du Québec. Vous, vous avez pris la décision de l'augmenter à 70 000. Évidemment, comme le soulève le Barreau, c'est plus que le double, c'est absolument considérable.

Évidemment, on est fondé de se demander pourquoi une telle augmentation ou pourquoi cette augmentation substantielle. La sous-question, c'est: Qu'est-ce qui peut la justifier? Donc, quels critères ont été considérés pour en arriver à cette augmentation qui est plus que du double, donc, encore une fois, qui est considérable? Et est-ce qu'elle est proportionnelle avec la hausse, notamment...

Si on regarde les critères, il y en a un qui est la hausse de la valeur courante du dollar. Là, vous nous dites, dans les explications, que vous seriez disposé, en bout de ligne, là ? je retiens ? notamment à mettre en place un comité à y siéger avec le Barreau. Est-ce que le Barreau s'est déclaré satisfait de cette solution-là?

M. Bégin: C'est-à-dire que je n'ai pas discuté avec le Barreau là-dessus. C'est le Barreau qui, je pense, au moment de la comparution, a dit qu'il voulait avoir un comité, puis j'ai dit que je serais d'accord pour un comité. Je n'ai pas entendu de commentaires additionnels. J'ai, en tout cas, présumé que l'idée du comité, ça rejoignait l'idée. Pas la proposition que je viens de faire, là, ce n'est pas ça. C'est simplement que pour le futur il y ait un comité. Alors, je ne veux pas en dire plus que ce que j'en ai conclu à l'époque.

Mme Lamquin-Éthier: Parce que le Barreau soulève, encore une fois, je pense, avec raison, dans le mémoire la nécessité de considérer... Et je vous lis le texte: «De plus, d'autres facteurs économiques mériteraient peut-être d'être analysés avant de prendre une décision finale à cet égard.» Donc, un, est-ce que c'est une décision finale? Deux, quels facteurs vous avez considérés? Puis, trois, dans ces facteurs, n'y aurait-il pas lieu d'y faire intervenir d'autres facteurs économiques?

«Le Barreau du Québec estime qu'en l'absence de ce genre d'analyse faite par le gouvernement le législateur devrait se limiter à ce qui a été proposé dans le rapport final du Comité de révision, soit une hausse de 40 000 ou de 50 000, selon que la valeur maximale d'une petite créance sera portée à 4 000 ou à 5 000.» Alors, je pense que c'est important, là.

M. Bégin: Oui. On a déjà eu le débat là-dessus. Je ferai remarquer que le Comité a fait une recommandation qui n'est pas basée sur des critères objectifs comme ceux que réclame le Barreau. Autrement dit, ce n'est pas le fruit d'une étude scientifique qui a amené cette conclusion-là. Ils ont fixé le montant comme ça. On sait que, quand on arrive à des chiffres comme ça, c'est un compromis entre différentes propositions. Bon. Parfait.

Je dis ceci: nous devons prendre position à ce stade-ci. Le rapport même du Barreau, et qui est scientifique, qui nous a été remis, nous indique qu'il est évident que l'inflation a grugé substantiellement tout ce qui a pu se faire dans le passé, et qu'il va falloir l'augmenter. Je propose donc de le faire tout de suite et d'établir les... ? de toute façon, on a la loi ici maintenant ? et de faire un comité, d'établir des critères qui vont nous régir dans l'avenir, pour ne pas avoir à répéter ce débat-là.

Et il ne s'agit pas d'avoir raison ou tort. Si jamais on se rendait compte qu'on a trop augmenté, on retiendra la hausse dans le futur, le temps qu'on rattrape ça. Et, si, inversement, c'est correct, on verra ce que ça donnera. Alors, il y a une prudence là-dedans. Mais, moi, je ne crois pas que le sort de la Cour supérieure ou de la Cour du Québec soit en jeu si on met 60 000 ou 70 000. Ce n'est pas du tout ça. Je ne crois pas que le sort des avocats soit en jeu non plus, compte tenu du nombre de dossiers que ça représente à travers tout le Québec. C'est 3 000 dossiers. Je ne crois pas que personne puisse prétendre qu'ils vont perdre leur gagne-pain à travers le Québec dans une telle situation. Alors, je crois que nous devons maintenir minimalement le statut de la Cour du Québec. Ça ne se fait pas au détriment de la Cour supérieure, ça permet aussi aux gens d'aller devant cette Cour, et, moi, je pense que c'est légitime. Si jamais il y avait une imprudence ou une hausse trop grande, je vous propose une mécanique pour le contrôler à l'avenir, et je pense que c'est légitime.

Mme Lamquin-Éthier: Mais, M. le ministre, est-ce que ce ne serait pas préférable pour vous d'aller d'abord chercher toutes les études qui sont nécessaires, de prendre en compte tous les facteurs importants, notamment d'autres facteurs, tel que le soulève le Barreau du Québec? Est-ce que vous ne pensez pas que votre façon de procéder peut s'apparenter à de l'improvisation? C'est une question qui est extrêmement importante, et je ne pense pas que le Comité de révision... D'ailleurs, le Comité le dit, hein, il dit s'être interrogé sur l'opportunité d'augmenter la limite monétaire de compétence en prenant en considération les questions d'ordre constitutionnel. Vous, vous dites: Je n'ai pas de jugement qui confirme cet aspect-là. Donc, c'est aussi un aspect important à considérer. Les questions... la question de la hausse du coût de la vie, le maintien du rapport proportionnel de compétences entre la Division des petites créances, et la chambre civile, et l'institution du Tribunal unifié de la famille en Cour supérieure... Alors donc, le Comité de révision a pris en considération de nombreux facteurs, là. On ne peut pas dire qu'ils ont établi à la faveur du temps ou je ne sais quoi, là, d'augmenter de 30 à 40 ou à 50. Je suis persuadée que cette recommandation-là s'appuie sur des considérations qui sont sérieuses, considérations d'ailleurs que le Barreau, lui, il reprend, avec raison, estimant que d'autres facteurs économiques mériteraient d'être analysés avant de prendre une décision finale à cet égard.

Vous, vous prenez une décision finale, et il ne semble pas qu'au moment où vous la prenez vous ayez en main tous les éléments, analyses, que vous ayez considéré tous les facteurs importants à être considérés. Vous, vous l'établissez à 70 et vous m'offrez, pour partir, une explication en disant: Bien, écoutez, le Comité de révision, de toute façon, là, ils l'ont établie comme ça, là, ou c'est ce que je semble croire de ce que vous venez de me dire, et j'en doute particulièrement, là.

M. Bégin: ...

Mme Lamquin-Éthier: Ça prendrait de l'eau chaude puis du miel.

M. Bégin: De l'eau chaude puis du miel. Il est évident... Ouille, ouille, ouille! Donnez-moi deux secondes.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, est-ce qu'on va pouvoir terminer la journée?

Mme Lamquin-Éthier: Écoutez, c'est une hausse absolument substantielle, c'est plus que le double. C'est considérable. Et les justiciables, notamment, la pratique, tout le monde va vivre avec cette décision-là que vous prenez et qui semble être finale. Et on ne pense pas que vous ayez en main tout ce qu'il faut pour l'arrêter, à ce moment-ci.

M. Bégin: Oui. Je vais demander une suspension de quelques minutes pour voir si ça se corrige, parce que là c'est évident que je ne pourrai pas parler, comme ça. Alors, pourrions-nous suspendre? Oui, c'est ça.

Le Président (M. Lachance): Oui, très bien, nous allons suspendre pour quelques minutes et on verra.

(Suspension de la séance à 10 h 18)

(Reprise à 10 h 21)

Le Président (M. Lachance): Alors, on va reprendre les travaux.

Mme Lamquin-Éthier: Attendez un petit peu, là.

Le Président (M. Lachance): Oui, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Juste clore l'inquiétude que nous avons. C'est que le Barreau est contre l'augmentation de la limite monétaire à 70 000. Le Comité de révision était contre également, puisqu'il avait lui-même recommandé 30 à 40 ou à 50. Alors, le ministre, lui, écarte la recommandation du Barreau, écarte la recommandation du Comité et fixe à 70 000... Vous savez, il ne faut pas y aller à tâtons, et c'est ça, notre préoccupation.

M. Bégin: Elle en a profité pendant que je ne pouvais pas parler.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Ha, ha, ha! Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 11 heures.

(Suspension de la séance à 10 h 22)

 

(Reprise à 11 h 16)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! La commission des institutions reprend ses travaux. Alors, nous allons vérifier avec M. le ministre de la Justice si sa voix, v-o-i-x, est réapparue.

M. Bégin: Pas tout à fait, mais, si on me permet d'augmenter le son, ce sera possible de m'entendre et je serai capable de parler, comme ça, sans problème.

M. Pelletier (Chapleau): Vous avez une voix très sensuelle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Écoutez, là, je ne fais pas l'union civile aujourd'hui, là, moi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Alors, nous en étions à l'article 4 du projet de loi n° 54. Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, nous en étions à regarder les arguments qui nous ont été servis par le ministre de la Justice et à nous demander spécifiquement si ces arguments-là tiennent la route.

Écoutez, M. le ministre, je suis un petit peu embêtée parce que j'ai de la... Je comprends, là, que vous vous apprêtez à prendre une décision finale, c'est-à-dire en ce qui a trait à la compétence monétaire de la Cour, vous vous apprêtez à l'établir à 70 000. Je ne sais pas exactement qu'est-ce qui peut justifier votre décision. Je ne sais pas ce qui peut vous avoir incité à une telle augmentation qui est absolument... qui est extrêmement importante, hein, c'est plus du double. Et j'aimerais revenir un petit peu sur la constitutionnalité et savoir précisément si vous avez obtenu, si vous avez avec vous, en main, un avis légal sur cette question-là qui est importante. Je sais que vous nous avez parlé que, bon, vous n'aviez pas été contredit ou vous ne sembliez pas être contredit, mais, au-delà de ça, est-ce que vous avez en main un avis sur la constitutionnalité de la disposition, à savoir de l'article 4?

Et le Barreau, vous avez lu le mémoire, sans le reprendre, le Barreau vous appelle à la prudence et vous incite très fortement à obtenir d'un spécialiste un avis sur la constitutionnalité de la disposition. Le Barreau semble vous inciter très fortement à avoir une étude économique en main. Est-ce que vous avez... Votre augmentation, ou la décision finale que vous vous apprêtez à prendre, est-ce que ça s'appuie sur une étude économique? Si oui, est-ce que vous pouvez la déposer? Et il est évident, comme le soulève le Barreau du Québec, que l'augmentation de la compétence monétaire de la Cour d'appel à 70 000 ne sera pas sans avoir d'impact. Est-ce que vous y allez à tâtons, un peu comme on a fait dans le réseau de santé quand on a mis à pied des médecins et des infirmières? Il n'y avait pas eu d'étude d'impact, il n'y avait pas eu de coordination, de planification. Vous, là, est-ce que vous avez mesuré les impacts que peut avoir la décision que vous prenez, plus spécifiquement sur l'organisation des tribunaux, la pratique des avocats? Et est-ce que vous avez envisagé l'impact que ça peut avoir au niveau des avocats qui pratiquent en région? Parce que ce sont des points... Je pense que, particulièrement en région, la situation est moindre que les grands centres urbains, et ça ne peut pas ne pas avoir d'impact. Donc, avez-vous des études?

n(11 h 20)n

M. Bégin: Bon, vous avez plusieurs points dans votre approche. Je vous rappelle qu'en 1995 on a regardé cette question-là, et l'opposition l'a regardée également. Il y a eu de longues plaidoiries faites par le député de Chomedey, à l'effet que ce serait inconstitutionnel, basées sur la cause de la Cour suprême où le juge Fauteux avait eu à se prononcer sur une augmentation de juridiction de la Cour. J'avais, à l'époque, déposé des opinions à l'effet que nous pensions que tout ça pouvait passer très bien le test en question, et on s'était donné un rendez-vous: Attendons voir; s'il y a une cause qui vient dire que vous avez raison, vous avez raison. Il n'y a pas eu de telle cause. Mais on nous menaçait, à l'époque ? je dis bien «menaçait» ? qu'il y ait des décisions qui viennent casser cette chose-là et qu'elles mettent le système en difficulté, un. Deux, le Comité semble avoir été influencé fortement par cette crainte de l'inconstitutionnalité, ce qui a modéré énormément sa recommandation. Ils ont eu peur qu'à un moment donné on franchisse un seuil au-delà duquel la Cour pourrait être appelée à trancher négativement.

Je crois que la première réaction que j'avais eue en 1995 est encore valide maintenant parce que, ne serait-ce que sur l'évaluation de l'argent ? on l'a vu dans le rapport du Barreau qui portait principalement sur les petites créances mais aussi sur la juridiction ? c'est que le temps mange à toutes fins pratiques le montant. C'est tellement vrai que, par exemple, de mémoire, je sais qu'une année on avait augmenté à 3 000 $ la juridiction en question. Cette journée-là, la valeur réelle du montant de petites créances n'était pas de 3 000 $, elle était de 2 200 $, quelque chose comme ça, ce qui veut dire que le temps avait déjà mangé le montant. C'était 1 000 $avant, on le monte à 3 000. On ne dit pas: C'est 3 000 que vous avez, c'est 2 200 comme juridiction. Alors, à chaque fois qu'il y a eu des augmentations dans le passé, on a assisté au même phénomène, que le temps passé a grugé le montant en question. Donc, on met 30 000.

Dans le fond, des fois on est juste à 10 000... On met 70 000; peut-être que nous sommes à 65, peut-être que nous sommes aussi à 35 ou à 40. Donc, il y a un problème qui est là. Et, sans avoir fait une étude exhaustive scientifique avec ça d'épais, ce que le Comité n'a pas fait non plus, soit dit en passant... Le Comité n'a fait état d'aucune étude, c'est simplement un débat qu'il y a eu entre eux, avec la crainte de l'inconstitutionnalité, qui a modéré leurs transports pour les ramener à 4 000 ou 5 000. C'est dans le rapport lui-même. Je ne vous cite pas les pages, là, mais c'est clair...

Une voix: ...

M. Bégin: Oh, ce n'est pas moi, je retiens l'esprit et non pas le mot à mot, et c'est clair que le Comité a modéré sa recommandation en craignant l'inconstitutionnalité. Je n'ai pas cette crainte, donc je n'ai pas cette modération comme telle.

Je pense sincèrement par ailleurs qu'il y a justice rendue par la Cour du Québec autant que quand elle est rendue par la Cour supérieure. Je n'ai pas d'inquiétude quant à la capacité de la Cour du Québec de le faire. Donc, entendre une cause de 50 000 $ ou de 70 000 $ par la Cour du Québec, je pense que c'est très faisable. Je vous ferai remarquer que la Cour du Québec entend des causes de plusieurs millions de dollars, hein? Quand il s'agit de taxes municipales, par exemple, hein, vous pouvez avoir des dossiers de 1 million de dollars. Alors, il n'y a pas de crainte à avoir au niveau de la compétence de la Cour. Un avocat qui se présente devant un juge de la Cour du Québec, j'aimerais l'entendre me dire: Je n'ai pas confiance. J'aimerais ça qu'il me dise ça, parce qu'il se ferait parler sérieusement. Et je dirais à la Cour: Est-ce qu'il a raison ou bien si c'est moi qui ai raison de croire en vous? Vous êtes capable d'entendre ces causes-là et rendre justice, et c'est ça qui est important.

Par ailleurs, la Cour du Québec est partout au Québec et elle peut rendre justice dans tous les dossiers qu'elle a, et je pense que nos juges rendent de bonnes décisions. Il y en a qu'on ne partage pas nécessairement, mais il y a des appels pour ça, mais elle rend justice. Alors, je n'ai aucun problème à donner à la Cour du Québec des dossiers, surtout quand la seule différence, c'est le montant. Le montant, bon, ce qui compte, en principe, ce n'est pas le montant, c'est les principes qui sont en cause. Alors, qu'on ait une cause de 50 000 $ sur un billet ou qu'on ait une cause de 75 000 $ sur un billet, ça reste toujours une cause sur un billet. Alors, si elle est capable de l'entendre à 50 000, 70 000...

Alors, c'est pour ça que je vous proposais tantôt qu'avec le Barreau on le regarde, pour éviter ce débat qui ? ce n'est pas de votre faute ni de la mienne ? est relativement stérile, parce que, en bout de piste, il faut prendre une décision. Alors, pour éviter dans le futur de tels débats, je proposais tout à l'heure de donner suite à la recommandation du Barreau, et de faire un comité, et d'avoir les effets qu'il y a là. Bien sûr, on peut le faire, le comité; on peut ne pas le faire, aussi. Il va falloir que nous tranchions, ici, ce que nous faisons. Et, moi, je pense que la recommandation de 70 000 $ que j'ai mise dans la loi repose sur des fondements aussi solides que la recommandation du Comité.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Moi, j'ai un petit peu de difficulté avec ce que vous me dites. Vous vous apprêtez à prendre une décision finale, à arrêter à 70 000... à augmenter à 70 000 la compétence monétaire de la Cour. C'est une augmentation qui est plus du double et c'est une augmentation qui est extrêmement substantielle. Vous nous dites: Bon, on va faire ça, là, puis on va voir avec le temps, avec l'usage, qu'est-ce que ça va donner. Vous n'avez pas obtenu de la part d'un spécialiste un avis légal sur la constitutionnalité de cette décision-là. Bon, vous dites: Bon, on n'a pas eu de problème. Vous présumez que...

M. Bégin: ...on pourra en demander d'autres parce que le problème est le même.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, il m'apparaît que ce serait plus prudent, si vous permettez, M. le ministre, d'en obtenir un auprès d'un spécialiste, d'avoir une idée très claire quant à la constitutionnalité, deux, d'avoir une étude également économique. C'est important ? écoutez, vous augmentez, encore une fois, à plus du double, et c'est une augmentation très substantielle ? de pouvoir mesurer les impacts que ça va avoir sur l'organisation des tribunaux. On ne dit pas qu'ils ne font pas bien leur travail...

M. Bégin: ...3 000 dossiers.

Mme Lamquin-Éthier: ...qu'ils ne sont pas capables de le faire, on dit que ça va avoir un impact qui n'est certainement pas négligeable, un impact aussi au niveau de la pratique du droit pour les avocats puis enfin un impact pour les avocats qui sont en région. Écoutez, tant qu'à aller à tâtons, est-ce qu'il ne serait pas préférable pour nous d'avoir tout ça en main?

M. Bégin: Lorsque des décisions sont prises ? par exemple, je dis: Est-ce qu'on met 40, ou 50, ou 60? ? je prends une décision basée sur des critères. Quand les rédacteurs se mettent à la tâche, vous savez, ils vont dire à un moment donné: M. Bégin, on pense que ça, là, ça ne passera pas sur le plan constitutionnel. Il n'y a pas une opinion de 20 pages qui est écrite, mais ils le regardent, ils se font une opinion et ils me la disent. Sur chacun des dossiers, il arrive des moments où justement on a à prendre des décisions plus corsées, si vous me permettez cette expression-là, et c'est leur responsabilité de m'amener les problématiques que ça peut poser. Je n'ai pas ici de problématique.

Je vais vous donner un exemple qu'on a traversé ensemble. Est-ce que, oui ou non, l'union civile, par exemple, est un contrat civil? Est-ce que, si nous le faisons de telle façon, ça risque d'affaiblir la position du Québec parce que ça pourrait être inconstitutionnel, empiétant sur le champ du fédéral par le biais du mariage, par exemple? Bon. Ça a été regardé, on m'a fait des représentations. Généralement, ce n'est pas blanc et noir, c'est: Nous pensons que, si nous faisons ça, ça augmente les risques; si, par contre, nous le faisons de telle manière, les risques seront moins grands. C'est ce type d'évaluation qui est faite constamment dans les dossiers. Et, ultimement, face à ces recommandations, je dois prendre la décision. Je ne dis pas prendre des décisions terribles, téméraires; je prends des décisions sur la foi de recommandations. Mais, à toutes les occasions que nous prenons une décision, nous assumons les conséquences de ça, et c'est ça, notre rôle.

Vous connaissez ces situations où il y a des juges qui ne sont pas capables de prendre une décision, pas capables de prendre une décision. Ils voient les deux côtés, ils les mettent dans la balance puis ils n'agissent pas, alors que souvent ces gens-là, comme avocats, étaient extraordinaires. Pourquoi étaient-ils extraordinaires? Parce qu'ils n'avaient pas à choisir, ils représentaient l'intérêt de leurs clients, ils avaient à faire valoir leurs clients. Mais, quand tu es un juge, c'est autre chose. Il faut balancer et, à un moment donné, il faut trancher. Moi, je pense qu'aujourd'hui, en certaines circonstances, j'ai à prendre cette responsabilité-là, pas de façon cavalière ou téméraire, mais correctement et en espérant que ce soit la bonne décision.

Mme Lamquin-Éthier: En tout cas, moi, je pense que, pour un ministre de la Justice, vous ne pouvez pas nous dire: J'espère que ça a été la bonne décision.

M. Bégin: Je le pense.

Mme Lamquin-Éthier: Vous devez nous donner l'assurance que c'est la bonne décision et que vous l'avez prise, cette décision-là, de façon éclairée, réfléchie...

M. Bégin: Je le crois.

Mme Lamquin-Éthier: ...parce que vous aviez en main tous les éléments vous permettant de la prendre, d'autant plus que, le Comité, moi, je ne pense pas qu'il soit tatillon ou peureux. Enfin, ce n'est pas ce qu'il a dénoncé...

M. Bégin: Ce n'est pas les mots que j'ai dits.

Mme Lamquin-Éthier: Bien non, enfin, ça équivaut à ça, là, «la crainte de».

M. Bégin: Non, j'ai dit «influencé par la crainte de l'inconstitutionnalité».

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Et vous, l'influence, qui vous incite? Est-ce qu'il y a une influence derrière votre décision? Est-ce qu'il y a un groupe...

n(11 h 30)n

M. Bégin: J'écoute ce que c'est qui est dit. Je vous le répète, j'ai eu à regarder ça en long et en large. En 1995, le juge Fauteux avait parlé de cette question monétaire, et on l'a épluchée. J'ai eu à prendre une décision. Je disais blanc, d'autres disaient noir, et, bon, voilà, l'avis me donnait raison. Je ne prétends pas plus que ça, mais je pense qu'aujourd'hui il n'y a pas d'arguments différents pour le justifier. Rappelez-vous que la dernière fois je doublais la compétence de la Cour du Québec. Donc, ce n'était pas augmenter de 3 à 4 000, je doublais. Alors, aujourd'hui, on fait un peu plus que doubler, mais le principe est le même, qui est derrière ça, et personne ne m'a montré à date d'opinion en disant: M. Bégin, là, vous savez, on est sûrs que c'est inconstitutionnel. J'ai eu des craintes, des sentiments, mais je n'ai pas eu d'opinion qui me dirait: Paul, t'es en train de faire quelque chose que tu ne devrais pas faire.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: Je vais céder la parole tout de suite au député de Chapleau. Je crois qu'il a beaucoup à dire par rapport à la constitutionnalité. Donc, je vais passer après.

Le Président (M. Lachance): Oui. Selon le règlement, madame, il appartient au président, je vous le fais remarquer aimablement, de donner les droits de parole. M. le député de Chapleau. Mais ce n'est pas une critique méchante. M. le député de Chapleau.

Mme Mancuso: Non, non, je comprends. Je vais apprendre. Tôt ou tard, je vais apprendre.

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Je comprends la réponse du ministre qui nous dit que finalement il est prêt à courir en quelque sorte le risque d'une déclaration d'inconstitutionnalité éventuelle, qui nous dit qu'il a soupesé le pour et le contre et qu'il fait un choix qui est en soi un choix ministériel, et un choix gouvernemental, et un choix politique. Je comprends cela. Je pense que, pour les galées, cependant, et le débat qui s'en vient en Chambre, et ainsi de suite, je pense que c'est important de bien dire quelle est la position de l'opposition officielle sur ce dossier-là.

Ce n'est pas une question de confiance, soit dit en passant, en la Cour du Québec. Ce n'est pas du tout une question de confiance. La question est autre. Dans le Renvoi touchant la constitutionnalité de la Loi concernant la juridiction de la Cour du magistrat de 1965, le principe qui a été posé, c'est le suivant: si le changement de la compétence de la Cour du Québec équivaut à transformer la Cour du Québec en une Cour supérieure, à ce moment-là le Québec n'a pas la capacité de le faire parce que la Cour supérieure voit ses compétences, et son statut, et son rôle historique être confirmés par la «common law» et être confirmés par l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867. Et il est prévu que les juges de la Cour supérieure doivent être nommés non pas par le Québec mais bien par le fédéral. C'est ça, le principe. En d'autres termes, si on change la compétence de la Cour du Québec et on le fait à un point tel qu'à un moment donné on en fait une Cour supérieure sans le dire, il y a un risque d'inconstitutionnalité parce que ça va à l'encontre de l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867, puisque les juges de la Cour supérieure sont nommés par le fédéral, ceux de la Cour du Québec sont nommés par le Québec.

Alors, ce n'est pas du tout une question de confiance en la Cour du Québec. Ce n'est pas de dire aux juges de la Cour du Québec: On ne reconnaît pas vos qualités pour juger des causes de 70 000 $. Ce n'est pas ça du tout. C'est plutôt un principe-clé qui veut que, lorsqu'on change la compétence de la Cour du Québec, il faut notamment tenir compte de la valeur courante du dollar et il faut que le changement de la compétence de la Cour du Québec soit ajusté en fonction justement de la valeur courante du dollar, c'est-à-dire l'évolution même de la valeur du dollar. Et, dans la mesure où on change cette compétence-là en respectant la valeur courante du dollar, ça va, de dire la Cour suprême en 1965. Si on va trop loin, à ce moment-là il y a un danger ? je dis bien «il y a un danger» ? que ce soit interprété comme une tentative de transformer la Cour du Québec en une Cour supérieure et d'aller à l'encontre, je le répète, de l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867. Alors, c'est ça, le principe.

Nous, ce que nous disons, dans l'opposition, c'est que ce danger-là, il est réel. Il est bien réel, puisqu'ici on fait plus que doubler la compétence de la Cour du Québec, on fait passer ça de 30 000 $ à 70 000 $. Donc, le danger, il est bien réel. Nous ne disons pas: Ce que le ministre envisage de faire, c'est inconstitutionnel. Nous ne disons pas: Ce que les ministres envisagent de faire, c'est constitutionnel. Nous soulevons une problématique qui est une problématique fondamentale et nous demandons au ministre finalement de s'assurer lui-même de la constitutionnalité de sa démarche, parce que ça relève de lui de s'en assurer. Nous demandons donc au ministre de s'assurer lui-même de la constitutionnalité de sa démarche et nous disons nous-mêmes, dans l'opposition officielle, que, puisque nous avons des doutes quant à la constitutionnalité de cette disposition-là, nous avons des réserves par rapport à cet article-là.

Et, bien entendu, nos réserves ne tiennent pas qu'à des questions de constitutionnalité, ça tient aussi à d'autres questions de pertinence, d'autres questions de bien-fondé, mais ça, c'est autre chose. Ce n'est pas le débat dont... enfin ce n'est pas la chose dont je parle actuellement. Je parle surtout de la question de constitutionnalité. Alors, puisque nous avons des réserves qui sont de nature constitutionnelle, nous les exprimons au ministre et nous lui demandons au moins de prendre quelques démarches personnelles pour s'assurer de la constitutionnalité d'une disposition qu'il veut faire adopter par l'Assemblée nationale. C'est ça.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Bon. Regardez, M. le Président, la question qu'on doit se demander, c'est: Est-ce qu'on change la nature des cours, celle de la Cour du Québec, celle de la Cour supérieure? Le juge Fauteux, en 1965, il nous a dit: L'augmentation de la limite pécuniaire affectant la juridiction d'une de ces cours n'a pas, en soi, pour effet de transformer le caractère de cette cour. Donc, augmenter la compétence monétaire n'a pas pour effet de changer le caractère de la cour.

Qu'est-ce que ça veut dire, alors, «changer le caractère de la cour»? Je vais vous donner des exemples. On changerait la nature de la Cour, entre autres choses, mais surtout, je pense, si on voulait attribuer à la Cour du Québec ce qui est contenu dans l'article 33 du Code de procédure civile, si on changeait ce qui est dans l'article 33 du Code de procédure civile. Qu'est-ce que c'est que 33? C'est le pouvoir de surveillance et de contrôle. Autrement dit, si on voulait donner ce pouvoir de surveillance et de contrôle ou une partie de celui-ci à la Cour du Québec, alors on aurait un problème parce que là on changerait la nature de la Cour.

Par exemple, 33: À l'exception de la Cour d'appel, les tribunaux relevant de la compétence de la Législature du Québec ainsi que les corps politiques et les personnes morales, bon, etc., sont soumis au droit de surveillance et de réforme de la Cour supérieure, en la manière et dans la forme prescrites par la loi, sauf, etc., dans les matières déclarées du ressort exclusif de. Si on touche à ça, c'est évident qu'on est dans le trouble constitutionnel. Si on disait, maintenant: Dorénavant, la tutelle puis la curatelle, ça s'en va à la Cour du Québec, ah bien là on aurait un problème. C'est sûr, on change la matière, ou les matières. Ça, ça met en cause la nature du tribunal. Mais l'argent ne met pas en cause. Et ce n'est pas moi qui l'invente, là, c'est la Cour suprême. C'est le mot à mot.

Je répète encore, page 782: «...et, enfin, que l'augmentation de la limite pécuniaire affectant la juridiction d'une de ces cours inférieures n'a pas, en soi, pour effet de transformer le caractère de cette cour.» Si ça, ce n'est pas clair, j'ai un problème. Parce que ça l'est, clair. Et on ne change pas la nature de la Cour, on augmente les montants d'argent. Puis je ne reviendrai pas sur tout cet argumentaire. Alors, les matières ne sont pas touchées là-dedans. On ne dit pas «des matières différentes», on laisse les mêmes affaires. C'est comme mon chèque de tantôt, là. Un chèque de 30 000 ou un chèque de 50 000, c'est encore un chèque, hein? Voilà. Alors, c'est pour ça que je vous dis qu'il n'y a pas de problème constitutionnel.

Nous ne pensons pas qu'il y a un problème constitutionnel, et, en droit, c'est pour ça que je dis: Je prends la décision, il n'y a personne qui peut donner une certitude absolue. Le jour où quelqu'un aura la vérité, il faudra qu'il aille ailleurs, parce qu'il aura un problème. Nous avons des prétentions, nous les soumettons à un tribunal qui nous fait gagner, qui nous fait perdre, totalement ou avec des nuances, et il y a les cours d'appel puis les cours suprêmes pour régler les problèmes. Donc, la vérité, là, toute absolue, c'est bien rare. Mais nous pensons que, compte tenu de ce qu'a dit la Cour suprême, nous sommes en mesure de faire cette modification-là sans problème.

n(11 h 40)n

Le Président (M. Lachance): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Bien, M. le ministre, avec respect, moi, je pense que vous avez une interprétation complètement erronée du renvoi, complètement erronée. Ce qui était en cause dans le renvoi, c'était justement un changement de la compétence monétaire de la cour. C'était ça qui était en cause. Et la Cour a très bien dit que, si le changement de la compétence monétaire était fait en fonction de la valeur courante du dollar, ça ne posait pas de problème. Si on va au-delà de cela, attention, il peut y avoir un problème d'inconstitutionnalité. C'est ça qu'a dit la Cour. On n'a pas parlé de changement de matière, on a parlé de compétence pécuniaire de la cour dans le renvoi de 1965. Et d'ailleurs le juge Fauteux a dit ceci, et je cite, dans le même renvoi: «En l'espèce [...] l'extension, par l'augmentation du nombre de dollars, de cette juridiction de la Cour de magistrat, considérée à la lumière de la valeur courante du dollar, n'a pas en soi pour effet, lorsque ajoutée à la juridiction qui lui est propre comme cour inférieure non visée par l'article 96, de faire de cette cour une cour tombant sous cet article ? l'article 96.»

Une voix: ...

M. Pelletier (Chapleau): Non, non, «considérée à la lumière de la valeur courante du dollar», c'est ça, la nuance qui est apportée par la Cour. Quand vous ne considérez plus à la lumière de la valeur courante du dollar...

M. Bégin: ...

M. Pelletier (Chapleau): M. le ministre, vous n'avez pas le droit d'être téméraire comme cela, là, avec l'interprétation d'un jugement.

M. Bégin: Ce n'est pas l'augmentation... Ce que ça dit, ce n'est pas l'augmentation en soi du dollar qui pose problème. Prenez votre page 783 où le même juge nous dit «considérée à la lumière de la valeur courante du dollar, n'a pas en soi», mais continuez: «Il s'ensuit que la loi sous étude n'est pas inconstitutionnelle. De cette conclusion, on ne doit pas inférer que je tienne comme constitutionnellement valides les diverses lois provinciales qui étendent [...] la juridiction de la Cour de magistrat ? sauf par l'augmentation du nombre de dollars.» Ce qu'il nous dit, c'est que, quand on joue sur la juridiction ? j'ai dit «les matières», tout à l'heure, mais c'est la même chose ? si je joue sur les matières, la juridiction ? ça, c'est de ta compétence, ça, ça ne l'est pas ? autrement que par le biais de l'argent, j'ai un problème. Là, la Cour dit: Vous auriez un problème, mais, sur l'argent, vous n'en avez pas. Elle ne dit pas n'importe quoi, pas n'importe quel montant. Ce n'est pas ça qu'elle dit non plus. Mais elle dit qu'en soi il n'y a pas là matière à inconstitutionnalité.

Mais je suis d'avis que, si je mettais 1 million de dollars, j'aurais un problème basé uniquement... Parce qu'il y a une façon indirecte d'exclure la juridiction de la Cour supérieure, par un biais qui est absolument ceci: il s'agirait de dire, par exemple, de regarder combien il y a de dossiers en haut de 1 million, et je pourrais peut-être arriver que, si je regarde la juridiction de la Cour supérieure, elle est disparue à hauteur de 90 %.

M. Pelletier (Chapleau): Qui met la barre entre 1 million ou 70 000, là? Vous, vous l'augmentez de 70 000.

M. Bégin: La Cour n'a pas donné de critères, mais elle a dit: Vous pouvez augmenter, et on verra selon les circonstances. Dans le temps, il est passé de 200 $ à 500 $, puis ils ont dit: Il n'y a pas de problème. Mais ils ont dit aussi: Peut-être y aurait-il un chiffre, qui n'est pas devant nous aujourd'hui, où nous aurions une attitude différente, parce qu'ils ont dit «en soi». Donc, «en soi», ce n'est pas ça, mais, en réalité, dans certaines circonstances, ça pourrait entraîner l'inconstitutionnalité. Je ne connais pas plus que vous le chiffre que la Cour suprême mettrait, mettons, entre 180 ou 300 000. Je pense que, les deux cas, elle dirait que c'est inconstitutionnel. Mais il n'est pas évident qu'en bas de 100 000 $ aujourd'hui la Cour suprême dirait: C'est inconstitutionnel, parce qu'il n'y a pas de barème établi. Alors, on peut pencher d'un côté comme de l'autre, mais il n'y a personne qui peut, ici, dire de façon péremptoire: C'est inconstitutionnel quand ce n'est qu'une question d'argent, et ici ce n'est qu'une question d'argent. Il n'y a pas de matière, il n'y a pas de juridiction... d'affectée.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Chapleau.

M. Pelletier (Chapleau): Je vous ferai remarquer qu'on n'a pas dit que c'était inconstitutionnel. On n'a pas dit que c'est constitutionnel non plus. On a dit que ça pose une problématique majeure. Si vous étiez en mesure de justifier votre augmentation de 30 000 à 70 000 sur la base du dollar courant, là, la progression du dollar courant avec les années, vous auriez une thèse qui constitutionnellement serait beaucoup plus solide. Ne pouvant pas le faire, donc vous vous exposez à des contestations judiciaires qui pourraient éventuellement donc amener une déclaration d'inconstitutionnalité. Je ne vous dis pas que ça va être le cas nécessairement, mais je vous dis que vous vous exposez, que vous devez en être très conscient.

Quand vous nous dites: J'en suis conscient, je prends le risque politique, je m'incline. Nous, dans l'opposition, nous avons une autre attitude. Nous disons: Nous sommes conscients du risque et, pour ce motif-là, nous demandons au ministre de prendre des garanties additionnelles, et c'est ce qui explique donc le fait que nous soyons, dans ce dossier-là, dans des positions qui sont bien campées de part et d'autre mais néanmoins opposées.

Par ailleurs, si je reviens au renvoi brièvement, vous me demandiez: Est-ce que... Il n'y en a pas, de critère qui nous permet de savoir quelle est la frontière entre l'inconstitutionnalité et la constitutionnalité. À mon avis, il y en a un, c'est la valeur courante du dollar. C'est aussi simple que ça.

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Pelletier (Chapleau): Oui.

Le Président (M. Lachance): Alors, je me rends compte que nous sommes comme sur une voie ferrée avec deux rails qui ne se rencontrent jamais. Alors, est-ce que...

M. Bégin: ...reprendre en d'autres mots. Compte tenu de l'état de ma voix, vous comprendrez que je n'ai pas le goût de reprendre ça.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a d'autres... Oui, Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: Merci, M. le Président.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, excusez-moi. Excusez-moi, ma collègue. Est-ce qu'on peut avoir copie complète de la décision de la Cour Suprême?

M. Bégin: ...

Mme Lamquin-Éthier: Pourriez-vous nous en remettre copie, s'il vous plaît?

M. Bégin: Oui, je l'ai ici au complet. On va en faire, M. le Président, des photocopies.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: Oui. Donc, M. le Président, j'ai le plus grand respect pour le processus qu'on entame ce matin, c'est-à-dire adopter une loi. Ça prend du temps, ça prend beaucoup de recherche. Je comprends que le ministre a fait beaucoup de consultations, a travaillé en étroite collaboration avec ses fonctionnaires, mais j'ai beaucoup de la misère à accepter que le ministre nous dise ce matin que le Comité n'a pas fait d'étude spécifique en ce qui concerne qu'est-ce que ça peut ou pourrait apporter comme effet après. J'ai beaucoup de misère à accepter que le ministre, en tant que ministre de la Justice, qui est responsable de s'assurer que nos lois tiennent, il nous dit ce matin qu'on va former un comité, on va former un comité après qu'on adopte la loi pour voir quel effet ça aura. On va demander au Barreau de participer, on va demander l'opinion des techniciens, des actuaires. J'ai beaucoup de misère à comprendre comment on pourrait justifier cette position-là. Moi, j'ai l'impression que le ministre n'a pas vraiment l'intention de faire en sorte que ça va se former, le comité, parce que je ne vois pas comment, après...

M. Bégin: Vous mettez ma parole en doute, si je comprends bien.

Le Président (M. Lachance): Non. Je voulais juste vous mettre... je voulais tout simplement vous mettre en garde, parce que, dans notre règlement, même s'il y a des députés qui s'échappent de temps en temps, on ne doit pas mettre en doute la parole d'autres collègues. Alors, quand vous avez dit «ne pas avoir l'intention», dans le règlement, là, c'est une petite entorse au règlement qui peut devenir assez grosse.

Mme Mancuso: Je m'excuse, je m'excuse. Parfait. J'apprends, j'apprends, comme j'ai dit, tranquillement pas vite et je vais m'assurer que j'ai le règlement en main pour la prochaine fois. Mais ce que je soulevais, ce que je soulevais, c'est que, en tant que ministre de la Justice, on a une responsabilité à mettre en oeuvre des lois qui tiennent, donc. Maintenant, on soulève beaucoup de points et on a dit ce matin qu'on va former un comité après que la loi est déjà passée. Pourquoi on ne l'a pas fait avant? C'est ça, ma question. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas former cette équipe-là, former ce comité-là et voir à ce que, avant qu'on adopte la loi, on est sûrs de notre position?

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur la question de Mme la députée.

M. Bégin: Il y a plusieurs réponses. D'une part, il y a eu un comité de formé, qui a travaillé pendant trois ans et qui n'a pas fait de mesure exacte de cette question-là. Ça aurait pu être une partie de leur travail. Ils ne l'ont pas fait. Je ne leur en tiens pas rigueur. Deuxièmement, le Barreau, en commission parlementaire, ici, il y a trois semaines, un mois, je ne me rappelle plus quand, là, a fait lui-même la proposition du comité. Ce n'est pas mon idée à moi, c'est le Barreau qui l'a faite.n(11 h 50)n

Bon, tout à l'heure, j'ai dit que j'étais prêt à accepter une telle chose, de créer un comité ? je l'ai mentionné ? mais ce n'était pas mon idée à moi. Alors, pourquoi? Bien, vous avez la réponse très clairement. De la même manière, le comité, vous savez, même à 40 000 ou 50 000, on se demande si, oui ou non, ce sera constitutionnel. On n'est pas sûr de ce qu'il propose. Quarante ou 50 000, entre vous et moi, pourquoi devrais-je choisir 40 et/ou 50? Je n'ai pas d'indication. Je prendrais 50, vous pourriez dire: Pourquoi pas 40? je prendrais 40, vous pourriez dire: Pourquoi pas 50? parce qu'il n'y a rien qui nous permet de faire une distinction dans le rapport. Donc, ce que j'ai convenu, je serais prêt à le faire avec le Barreau pour, à l'avenir, éviter qu'on ait à reprendre des débats comme ceux qu'on a aujourd'hui, et qu'on a eus en 1995, et qu'on pourrait penser avoir dans trois, quatre ans d'ici encore. Alors, c'est simplement pour ça.

Mme Mancuso: Donc, ce que vous me dites ce matin, c'est que ça a été établi de façon arbitraire, qu'on a choisi le 70 000 parce que c'est un chiffre, et ça ne signifie rien.

M. Bégin: Non. Les chiffres nous indiquent très clairement qu'on a gagné sur la valeur du dollar depuis de nombreuses années, y compris antérieurement, en 1995. Je vous ai donné l'exemple tout à l'heure que, quand on a augmenté la valeur des petites créances à 3 000 $, on pensait de mettre 3 000, mais... Le chiffre était 3 000, mais, dans la réalité, par rapport à la valeur du dollar des autres années antérieures, c'était 2 200 $ qu'on mettait. Alors, voyez-vous...

Mme Mancuso: Vous avez les chiffres que ça représente pour...

M. Bégin: C'est dans le rapport du Barreau qui a été déposé, venant d'un de leurs experts, qui a été déposé lors de la même commission parlementaire que j'ai mentionnée tantôt. Alors, c'étaient des chiffres qui étaient mentionnés. Parce que, il n'y a pas de surprise là-dedans, hein, l'inflation, ça gruge, et ça gruge des fois rapidement, et, si vous ne rattrapez pas toute l'inflation, bien, vous traînez votre retard pendant toutes les années, même si vous... une correction. Alors, c'est ça.

Et, deuxièmement, il n'y a personne qui a dit: Vous savez, la valeur qui a été fixée ? je ne sais pas, moi ? il y a 20 ans, c'est la valeur absolue, parfaite de la compétence de la Cour du Québec, et dorénavant nous ne pouvons que l'indexer. Il n'y a personne qui a dit ça, il n'y a personne qui a prétendu ça non plus. Et c'est ce qu'on me soumet là en me disant: Vous aviez 30 000, donc c'était le bon chiffre. Qu'est-ce que vous faites, maintenant? Vous doublez? Est-ce que l'argent a perdu la moitié de sa valeur? Non, c'est impossible, voyons. Il n'y a personne qui a dit que le chiffre de 30 000 était le bon chiffre. C'était le chiffre que nous avons mis en 1995. C'est moi qui l'ai mis. Mais est-ce que c'était...

Est-ce que j'aurais pu mettre 40 000, est-ce que j'aurais pu mettre 50 000? La réponse, c'est oui. Mais ce n'est pas un absolu, le chiffre qui est là. Le point de départ, ce n'est pas ce que Paul Bégin a décidé. En fait, on est en train de me dire que la bonne valeur, c'est la valeur qu'on contestait comme n'étant pas bonne en 1995. C'est ça, la base du raisonnement que vous avez. Je ne vous en tiens pas grief, mais je vous dis que la base n'est pas la bonne, et ce n'est pas comme ça qu'il faut l'établir.

Mme Mancuso: Donc, vous proposez de l'établir, à l'avenir, comment?

M. Bégin: Bien, dans l'avenir, je suis d'avis que nous pourrions prendre une décision que le montant qu'on évalue aujourd'hui comme étant, mettons, 70 000 serait le point de départ et dire de quelle façon dans l'avenir les choses vont se passer, quels sont les éléments qu'on va tenir en compte. Est-ce qu'on va tenir compte juste de l'inflation? Peut-être y a-t-il d'autres valeurs que celle-là. Je ne suis pas l'expert qui veut jouer à l'expert. Si quelqu'un pense qu'il y a un seul critère, bien, il le dira. Si d'autres pensent qu'il y en a quatre, on l'évaluera, si c'est des bons critères. Alors, là-dedans, on verra bien. Et, si on fait un comité, c'est parce qu'on n'a pas la réponse.

Mme Mancuso: En pratique, comment est-ce que ça va être applicable... les lois de temps en temps? C'est pour ça que je vais voir la loi dans un autre cinq ans.

M. Bégin: Dans ce cas-ci, la réponse, pour moi, est facile parce que nous entamons aujourd'hui la première tranche de la révision du Code de procédure civile. Le rapport qui est ici, on en touche peut-être le tiers, et tout le monde est d'avis qu'on devrait faire les trois tiers. Donc, on va rapidement entamer la deuxième partie. À l'automne, il y aura cette deuxième partie, et on pourra, si nos travaux fonctionnent bien...

Je pense que, compte tenu de l'envergure du dossier, on est capables de régler ça dans deux ou trois mois. Ce n'est quand même pas la mer à boire, d'établir des critères. Moi, j'ai confiance. Et on établirait ces choses-là. On verra à ce moment-là. Puis, s'il faut mettre un amendement dans le Code de procédure, on le mettra, moi, ça ne me dérange pas du tout, du tout; au contraire, même, je le ferais.

Mme Mancuso: De mettre un amendement au Code de procédure?

M. Bégin: Oui. On pourrait, par exemple, à l'automne, indiquer que nous... Là, je ne ferai pas le texte de loi, mais je dirais, en explication au texte de loi que je soumettrais: Nous avons établi un mécanisme qui nous permettrait de déterminer comment le plafond, le plancher, le seuil de la Cour sera fixé dans l'avenir, par exemple, aux trois ans. On aura évalué l'indice des prix à la consommation par rapport à l'année x. Ça, c'est notre base, et, à ce moment-là, le gouvernement haussera le niveau d'un montant arrondi ? parce que des fois peut-être que ça n'arrivera pas à un chiffre rond ? arrondi à tant, en plus ou en moins. C'est un exemple. Il peut y en avoir 20 autres, si vous voulez.

Mme Mancuso: On se comprend que le Code de procédure civile, c'est la base avec ce qu'on travaille à tous les jours. Donc, en principe, c'est une loi qui ne devrait pas se changer tant que ça par des amendements.

M. Bégin: Je ne suis pas d'accord avec ce principe-là.

Mme Mancuso: Je pense que le Code de procédure civile, c'est un outil qui ? c'est dans notre tradition ? requiert une certaine continuité, donc, revenir changer ça par des amendements, j'ai...

M. Bégin: Je ne partage pas votre point de vue à l'effet que le Code de procédure civile comme d'ailleurs le Code civil ne doivent pas être modifiés. Je dis que, lorsqu'une loi, quelle qu'elle soit, cause un problème et qu'on a une solution, on doit modifier cette loi pour mettre la solution. Ce n'est pas vrai qu'on va endurer un problème pendant 10 ans sous le prétexte qu'il ne faut pas toucher à une loi parce que ça fait bien l'affaire du monde. Or, le contraire est sur la table: par hypothèse, on sait qu'il y a un problème. Alors, je suis de la théorie que, quand on a un problème, si on a une solution, on n'attend pas cinq ans, on le règle tout de suite.

Mme Mancuso: Je suis d'accord, mais on est à un moment de notre histoire où on est en train de revoir le Code de procédure civile. Donc, on devrait faire des études, comme on a suggéré ce matin. C'est d'aller en profondeur, aller en profondeur pour trouver des solutions qui pourraient nous amener pour un autre bon bout de temps.

M. Bégin: ...je vais vous apporter une réponse. Je prends le Code de procédure civile 1985. Modifié, en 1986, deux, trois, quatre, cinq... cinq fois en 1986. En 1986, nous étions au pouvoir. 1987, un, deux, trois, quatre, cinq. Cinq projets de loi en 1987. Un, deux, trois, quatre, cinq projets de loi en 1988. Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept en 1989. En 1990, un, deux, trois. En 1991, deux. Alors, vous voyez?

Mme Mancuso: Je comprends, mais...

M. Bégin: Je pense que ça parle par soi-même.

Mme Mancuso: On est d'accord, mais on est d'accord que c'est une réforme majeure. Ce n'est pas une tâche qui...

M. Bégin: Une réforme majeure, quand on met un article pour dire qu'il y a un comité qui avait été formé et qu'on ajoute une modification, ce n'est pas une réforme majeure.

Mme Mancuso: Ce n'est pas une réforme majeure qu'on est en train de faire?

M. Bégin: Ah oui, ce que nous sommes en train de faire, oui.

Mme Mancuso: Oui. Donc, c'est ça que je dis. C'est pour ça que je dis que ce serait intéressant que le ministère...

M. Bégin: Mais ce que je vous dis, c'est qu'au mois de novembre on pourra faire un amendement, au mois d'octobre. Et vous m'avez dit: Bien oui, mais il ne faut pas modifier la loi souvent. Moi, je vous dis qu'il n'y a aucun problème, après avoir fait cette réforme-ci, de le faire. Vous savez, par exemple, le Code civil, en 1994, il a été adopté. Il a été adopté en 1994. Il est modifié, par exemple, en 1994. J'ai dû refaire complètement tout le volet de l'enregistrement. J'ai déposé une loi ici qui a été adoptée. Pourquoi? Parce que, de bonne foi, les parlementaires avaient adopté une réforme complète sur le Code civil, mais le bordel était pris ? excusez-moi l'expression ? dans tous les bureaux d'enregistrement. Il n'y avait plus rien, personne qui comprenait. Alors, on a formé un comité, on est revenu aux anciennes techniques pendant un an, deux ans, on a modifié la loi pour revenir aux anciennes, et par la suite on a retrouvé la solution. Est-ce que c'est un problème, ça, où j'aurais dû continuer à avoir dans chaque bureau d'enregistrement une agression à l'égard de tous les notaires qui se présentaient puis des notaires à l'égard de chaque régistrateur parce que ça ne marchait pas pantoute, le système, ou bien c'était plus logique de dire: On a un problème, on va essayer de le résoudre? Je suis de cette école pratico-pratique.

Et je fais ici les meilleurs textes possible, mais, si on se rend compte, par exemple, au mois d'octobre que, avec ce travail consciencieux que nous avons fait, le Comité, le Barreau, les intervenants, nous autres ici, nous nous sommes tous trompés, tous ? je ne prends pas un sujet où on ne s'entend pas, je vais prendre un point sur lequel on s'entend ? si on s'est tous bien entendus, pensant bien faire, puis tout à coup il y a un fin finaud quelque part qui vient nous dire: Ha, ha! ça ne marche pas, votre affaire, pour telle raison, puis M. le juge qui dit: Bien oui, c'est vrai, il a raison, qu'est-ce qu'on va faire à l'automne? On va-t-u dire: On a fait une grosse réforme, on n'y touche pas, ou bien on va dire: On va corriger tout de suite la lacune qu'on a faite? Moi, je n'ai aucune pudeur à faire ça. Je trouve que c'est un rôle tout à fait gratifiant comme législateur.

n(12 heures)n

Mme Mancuso: On diverge d'opinions. Moi aussi je vais dire que je suis quelqu'un qui est pratico-pratique, mes collègues aussi, et la logique me dit qu'avant de faire quelque chose, avant de changer quelque chose, on l'étudie en profondeur et on prend les étapes nécessaires pour s'assurer qu'il n'y aura pas ces erreurs à corriger dans deux, trois mois. Donc, c'est ça qui est l'étendue de mon intervention pour l'instant. Je pense qu'on pourrait continuer.

Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce que l'article 4 est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Non, non. J'aimerais juste, M. le Président, si vous me permettez, rappeler, en ce qui a trait au travail qui a été fait par le Comité, citer... Le Comité dit: Pour certains... Et il parle des considérations. Donc, le Comité s'était interrogé, comme je l'ai dit précédemment, et je le rappelle, sur l'opportunité d'augmenter la limite monétaire de la compétence de la Cour du Québec en prenant en considération les questions d'ordre constitutionnel, la hausse du coût de la vie, le maintien du rapport proportionnel de compétences entre la Division des petites créances, et la chambre civile, et l'institution d'un tribunal unifié de la famille en Cour supérieure: «Pour certains, ces considérations ne suffisent pas à justifier une augmentation substantielle en se fondant sur l'arrêt de la Cour suprême de 1965 sur la compétence de la Cour de magistrat.» Ils soutiennent que l'augmentation envisagée doit être proportionnelle à la hausse de la valeur courante du dollar. Et c'est ça, la question qui est importante. Et, ma collègue, je pense qu'elle avait raison, et mes collègues ont raison. On comprend bien la décision que vous vous apprêtez à prendre.

Par ailleurs, il est nécessaire, il aurait été nécessaire, c'était raisonnable, souhaitable et responsable que vous ayez en main, avant, toutes les assurances, notamment celles relatives à la hausse, pour qu'on soit certain qu'elle soit proportionnelle à la hausse de la valeur courante du dollar. Et j'imagine que vous avez pris en considération l'étude économique qui a été commandée par le Barreau du Québec...

M. Bégin: J'en ai parlé moi-même à plusieurs reprises.

Mme Lamquin-Éthier: ...et dont on vous a remis...

M. Bégin: J'en ai parlé moi-même tout à l'heure à deux reprises.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, mais...

M. Bégin: Et vous allez retrouver le chiffre que je mentionnais, là, tantôt. Mme la députée... Excusez-moi, madame...

Mme Mancuso: De Viger.

M. Bégin: Elle me questionnait, là. C'est dedans que j'ai pris les chiffres. Vérifiez-le, je suis certain que vous allez trouver que, quand on a fait le passage à 3 000, l'argent valait 2 200 $.

Mme Lamquin-Éthier: Et il est également dit que l'augmentation de juridiction est de beaucoup supérieure, proportionnellement, à la valeur courante du dollar, ce qui aujourd'hui modifierait peut-être l'opinion du juge Fauteux. Et le Barreau ajoutait, il soulignait que le gouvernement, que vous ne disposez pas, semble-t-il, d'une étude économique à ce sujet-là. Et le rapport, l'étude économique commandée par le Barreau, donc le rapport de M. Boucher, concluait que les indicateurs que sont l'indice des prix à la consommation et la valeur réelle du dollar canadien ne traduisent pas la réalité des litiges entre agents économiques et ne constituent pas des indicateurs utiles pour la fixation des seuils monétaires. Alors, je pense que c'est des commentaires importants.

Et c'est dommage que vous n'ayez pas obtenu soit un avis d'un professionnel quant à la fonctionnalité, soit une étude économique, soit une évaluation des impacts quant à l'organisation des tribunaux, quant à la pratique et plus particulièrement quant aux avocats qui ne sont pas en milieu urbain. On comprend que ça relève de votre discrétion, mais c'est une augmentation qui est plus du double. C'est substantiel. Et c'est pour le moins étonnant que vous n'ayez pas choisi d'avoir tout ça en main.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: Oui. Je voulais juste revenir sur le mémoire du Barreau du Québec sur la Loi portant réforme du Code de procédure civile. À la page 25, on dit: «En outre, il y aurait lieu d'éliminer le jumelage qui existe entre la compétence monétaire de la Cour du Québec et celle confiée à d'autres tribunaux judiciaires ou administratifs par des lois particulières, telles que la Régie du logement ou la cour municipale. Augmenter à 70 000 la compétence de la Régie du logement en matière de litige civil relié à un bail ? par exemple, une action en dommages-intérêts intentée par un assureur subrogé contre le locataire d'un logement suite à un incendie ? nous semble imprudent eu égard à la procédure très sommaire qui y a cours.» Donc, encore une fois, c'est un exemple que le Barreau nous a amené.

Il nous met en égard de considérer qu'est-ce que ça pourrait avoir comme effet, ces genres de décisions qui sont faites par des compétences, des tribunaux judiciaires qui ne sont pas nécessairement si bien encadrés que la Cour du Québec. On est en train de donner à ces régisseurs-là beaucoup plus de compétences... Est-ce que les tribunaux sont prêts à accueillir toute cette... Parce que, évidemment, il va y avoir beaucoup plus de matière qui va être devant ces régies-là. Est-ce qu'ils sont prêts à recevoir cette augmentation de travail?

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Excusez-moi. Excusez-moi, je ne contrôle pas ma voix. Ce que vous soulevez a été pris en compte de la même manière que le reste. Tout ça a été regardé, et la décision a été prise en tenant compte de ça. Et je rappelle que les augmentations, dans le passé, en ce qui concerne la Régie ont suivi le même rythme que celui de l'augmentation pour la Cour du Québec. Alors, il est tout à fait légitime... à moins que vous me disiez: On devra augmenter à 70 000 pour la Cour du Québec puis le laisser à 30 000 pour la Régie du logement. J'aurais beaucoup de questions à vous poser, à ce moment-là. Mais je ne pense pas que ce soit ça que vous disiez. Alors, on a regardé l'ensemble, puis le même argumentaire ? je ne le reprendrai pas ? qu'on a eu tout à l'heure a été utilisé.

Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 4? Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Pardonnez-moi, sur division.

De la compétence du juge et du greffier

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Alors, l'article 5. Il y a un amendement. Alors, l'article 5, il y a un amendement, et je vais en faire lecture: Remplacer l'article 5 du projet de loi par le suivant:

5. L'article 44.1 de ce Code est modifié:

1° par l'insertion, dans le paragraphe 1 du premier alinéa et après ce qui suit: «amendement,», de ce qui suit: «modification d'une entente en vertu de l'article 151.2,».

2° par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant:

«Le greffier spécial peut, lorsqu'il s'agit de demandes relatives à la garde d'enfants ou à des obligations alimentaires, homologuer toute entente entre les parties portant règlement complet de ces questions. L'entente homologuée a le même effet et la même force exécutoire qu'un jugement de la Cour supérieure.»

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, excusez-moi, juste pour m'éclairer. Je sais que c'est extrêmement complexe, compliqué. Est-ce qu'on doit d'abord lire le texte et lire le texte tel que modifié et l'amendement? Comment est-ce qu'on procède, là?

M. Bégin: Je pourrais peut-être faire une suggestion. Si vous allez dans l'amendement qui est là et que vous allez au bas de la page puis que vous lisez le texte qui est souligné en noir, en bas, et ce qui a été souligné dans le premier paragraphe, ça vous donne les amendements. Le dernier texte est celui final.

Mme la députée, Mme la députée, c'est une suggestion du Comité qui a été reprise par le Barreau, que nous n'avions pas incluse et que nous...

Mme Lamquin-Éthier: Non, c'est juste au niveau de la procédure, pas du contenu. Je veux juste savoir, M. le Président. Je demandais à M. le président, au niveau de la façon de procéder: Est-ce qu'on lit d'abord la disposition, donc l'article et, après, l'amendement, ou si on lit d'abord l'amendement puis l'article après?

Le Président (M. Lachance): Écoutez, j'aurais dû probablement faire lecture de l'article 5 tel qu'il apparaît dans le projet de loi n° 54. Vous avez raison, Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: ...c'est parce que je veux juste me retrouver.

Le Président (M. Lachance): Oui. Parce qu'il reste encore plusieurs heures, il faut s'entendre sur une méthode de travail. Est-ce que vous voulez que j'en fasse lecture, de l'article 5 tel qu'il est libellé dans le projet de loi n° 54?

Alors, l'article 5 se lit comme suit: L'article 44.1 de ce Code est modifié par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant:

«Le greffier spécial peut, lorsqu'il s'agit de demandes relatives à la garde d'enfants ou à des obligations alimentaires, homologuer toute entente entre les parties portant règlement complet de ces questions.»

Commentaires sur l'amendement: le premier amendement ajoute une modification à l'article 44.1, Code de procédure civile, et assure la concordance avec l'article 151.2 proposé afin de permettre au greffier spécial de statuer sur toute demande de modification du calendrier des échéances.

n(12 h 10)n

Le deuxième amendement comprend l'article 5 du projet de loi... reprend l'article 5 du projet de loi et ajoute une modification afin de préciser que l'entente homologuée a le même effet et la même force exécutoire qu'un jugement de la Cour supérieure. Alors, le texte modifié, avec l'amendement au projet de loi n° 54...

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Ah, ce que j'ai lu auparavant?

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Je reprends la lecture de l'amendement: Remplacer l'article 5 du projet de loi par le suivant:

L'article 44 de ce Code est modifié:

1° par l'insertion, dans le paragraphe 1 du premier alinéa et après ce qui suit: «amendement,», de ce qui suit: «modification d'une entente en vertu de l'article 151.2,»;

2° par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant:

«Le greffier spécial peut, lorsqu'il s'agit de demandes relatives à la garde d'enfants ou à des obligations alimentaires, homologuer toute entente entre les parties portant règlement complet de ces questions. L'entente homologuée a le même effet et la même force exécutoire qu'un jugement de la Cour supérieure.»

M. Bégin: Alors, M. le Président, je propose que nous regardions à la gauche de notre cahier, on a le texte actuel de la loi. Dans le premier paragraphe, on ajoute, à la troisième ligne, après le mot «amendement», on ajoute «modification d'une entente en vertu de l'article 151.2». On nous a fait remarquer qu'il pourrait y avoir des ententes, et le greffier, si on ne mettait pas cet extrait-là, ne serait pas capable de faire le suivi pour faire en sorte que le dossier revienne et suive son cours normal. Tout à fait d'accord ? sur le plan fonctionnel, c'est vraiment un article de fonctionnement ? pour l'ajouter. C'est ça que l'on fait, qu'on ajoute.

Si on veut, pour la compréhension globale, pour le deuxième paragraphe, deuxième alinéa du deuxième paragraphe qui commence par «Le greffier spécial», à toutes fins pratiques, on garde le même texte, mais on ajoute, à la fin: «L'entente homologuée a le même effet et la même force exécutoire qu'un jugement de la Cour supérieure.» Donc, c'est simplement donner de la vigueur... pas de la vigueur mais donner un effet à une entente qu'il aurait pu y avoir... une décision que le greffier spécial aurait pu rendre pour que ça ait toute sa portée. Alors, c'est un jeu... c'est ? voyons! ? une modification que tout le monde accepte, que ce soit le Comité, le Barreau ou nous-mêmes, puis je pense que ça va avoir un effet bénéfique d'inscrire ces deux amendements-là au Code.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Effectivement, c'est la recommandation formulée par le Comité, c'est la recommandation R.2-39. J'observe cependant une distinction dans le texte, M. le ministre. On a retiré... vous n'avez pas retenu «et déposées au greffe», donc «les ententes homologuées et déposées au greffe». Pourquoi on n'a pas retenu... Est-ce que c'est parce que ça n'ajoutait...

M. Bégin: Je n'ai pas la réponse. Peut-être que M. Frenette pourrait vous la fournir.

Mme Lamquin-Éthier: Le texte original comprenait...

M. Bégin: Non, je comprends, vous avez fait une vérification que, moi, je n'ai pas faite, parce que j'ai regardé et on m'a dit: Le texte, il est conforme. Alors, je l'ai pris tel qu'il était.

Mme Lamquin-Éthier: Le texte, je vous le donne au long: «De prévoir qu'en matière de garde d'enfants et d'obligation alimentaire les ententes homologuées par le greffier spécial et déposées aux greffes ? ça, ça n'apparaît pas dans le texte ? ont le même effet et la même force exécutoire qu'une ordonnance rendue par un juge de la Cour supérieure.»

M. Bégin: On me dit que ça devenait redondant, puisque, comme c'est homologué, c'est déjà au greffe. Alors, ça s'y trouve. Là, je pense que c'est probablement une question de rédaction, et les légistes ont dit: On respecte parfaitement bien l'intention du Comité en l'exprimant comme suit, et je crois que le Barreau a perçu la même chose et l'a accepté de cette façon-là.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Vous nous dites donc que, puisqu'elles sont homologuées, elles sont déposées.

M. Bégin: ...déposées au greffe, donc elles s'y trouvent.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, c'était redondant, donc il n'était pas utile de le reprendre.

M. Bégin: Voilà.

Mme Lamquin-Éthier: Parfait.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que ça va? Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 5, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des pouvoirs des tribunaux et des juges

Le Président (M. Lachance): Adopté. Article 6. Je vais en faire lecture.

6. L'article 46 de ce Code est remplacé par le suivant:

«46. Les tribunaux et les juges ont tous les pouvoirs nécessaires à l'exercice de leur compétence.

«Ils peuvent, en tout temps et en toutes matières, tant en première instance qu'en appel, prononcer des ordonnances de sauvegarde des droits des parties, aux conditions qu'ils estiment justes, eu égard aux circonstances de chaque dossier. De plus, ils peuvent, dans les affaires dont ils sont saisis, prononcer, même d'office, des injonctions ou des réprimandes, supprimer des écrits ou les déclarer calomnieux, et rendre toutes ordonnances appropriées pour pourvoir aux cas où la loi n'a pas prévu de remède spécifique.

«Ils peuvent de même, en toutes matières, à l'exception de celles touchant l'état ou la capacité des personnes, de celles qui intéressent l'ordre public et des recours en matière de surveillance et de contrôle de la Cour supérieure, tenter de concilier les parties qui y consentent.»

Et l'amendement se lit comme suit: À l'article 6 du projet de loi:

1° remplacer, dans les troisième et quatrième lignes du deuxième alinéa de l'article 46 proposé, les mots «aux conditions qu'ils estiment justes, eu égard aux circonstances de chaque dossier» par les mots «pour le temps et aux conditions qu'ils déterminent»;

2° supprimer le troisième alinéa de l'article 46 proposé.

Des commentaires sur l'amendement?

M. Bégin: Oui, M. le Président. Dans un premier temps, d'enlever les mots «aux conditions qu'ils estiment justes, eu égard aux circonstances», pour les remplacer par «pour le temps et aux conditions qu'ils déterminent», c'est une demande qui a été faite pour rendre concordant le vocabulaire utilisé à cet article-là avec celui qui est utilisé aux articles 152... 151, paragraphe 6°. Alors, c'est une concordance. On ne veut pas avoir deux... pour exprimer le même concept puis avoir deux formulations distinctes.

En ce qui concerne le troisième alinéa, si on le lit, vous allez voir, ça revient... C'est les principes que nous avons étudiés au tout début, à 4.1, 4.2, 4.3. C'est donc transféré à cet endroit-là. Nous l'avons déjà étudié. Ça devient redondant de l'avoir ici. Alors, c'est le sens de ces modifications.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Est-ce que, M. le ministre, vous pouvez nous dire si cet article-là...

M. Bégin: Quel article?

Mme Lamquin-Éthier: L'article 6.

M. Bégin: J'avais référé moi-même à d'autres articles.

Mme Lamquin-Éthier: Vous aviez référé à 151.6. O.K. Alors, est-ce que l'article 6... Pouvez-vous nous dire si ça présente un problème de concordance avec d'autres articles du Code de procédure qui traiteraient des ordonnances de sauvegarde?

(Consultation)

M. Bégin: C'est qu'on me dit qu'effectivement il y avait possiblement dans le Code certaines dispositions qui pouvaient reprendre cette idée de la mesure de sauvegarde. Une de celles-ci, l'article 523 qui a été soulevé par le juge Michaud, va être reprise plus loin, effectivement. En ce qui concerne les autres, je n'ai pas les numéros.

Une voix: ...

M. Bégin: 766 et autres. Nous n'avons pas actuellement de texte qui nous permettrait de dire que nous y donnons suite tel quel parce qu'on va au-delà d'une vérification complète de toutes les implications que ça requiert. En fait, là, autrement dit, la remarque n'est pas non pertinente, au contraire, mais elle soulève une série d'autres questions qui peuvent nous amener loin de l'objectif. À ce stade-ci, nous ne le modifierions pas, mais il est évident qu'il faut qu'on complète cette recherche, et ça pourra faire l'objet d'une nouvelle modification à l'automne si on reprend notre débat. Si vous êtes capable de faire une oeuvre parfaite du premier coup, bonne chance! Nous, on n'est pas si bons. On va le reprendre plus tard, à un autre moment. Mais, pour ce stade-ci, ce qu'il importe de retenir, c'est qu'éventuellement il ne faudrait pas qu'il y ait dans le Code des formulations qui prêtent à interprétation parce qu'elles ne sont pas les mêmes. Le principe, donc, est clair. On le reconnaît tout de suite pour 523. Il y aurait peut-être une telle situation dans d'autres cas, c'est possible, mais on n'en est pas absolument convaincus à ce stade-ci. Si une réflexion additionnelle, une vérification additionnelle nous amenait à conclure qu'il faille le faire, nous le ferons. Là, on n'est pas capables de le faire aujourd'hui.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Je porte à votre attention les commentaires formulés par le Barreau du Québec qui a fait un examen de cette problématique-là, problématique qu'il dénonce spécifiquement. Le Barreau estime, effectivement, est d'accord avec l'article quant au fond. Il estime cependant que ça présente un problème de concordance avec d'autres articles évidemment du Code où il est question d'ordonnances de sauvegarde. Le Barreau évoque nommément, pour faciliter les travaux l'article 394.1 qui traite de la représentation d'un mineur ou d'un majeur, l'article 754.2 en ce qui a trait à l'injonction, 814.9, la médiation, 815.2.1, référence en médiation, 863.10, procédure de notaires, 878.1, représentation d'un majeur inapte. Le Barreau ajoute que certains autres articles, dont l'article 523, ont été corrigés ou simplement abrogés.

n(12 h 20)n

Cependant, le Barreau en arrive à la conclusion: «Vu la disposition générale de l'article 46 prévoyant les ordonnances de sauvegarde, il faudrait ? de l'avis du Barreau ? retrancher des dispositions particulières toute référence à telles ordonnances.»

M. Bégin: Écoutez, il ne s'agit pas de dire qu'on a raison ou tort. Dans ce cas-ci, je pense qu'il y a des représentations pertinentes qui ont été faites. Si on prend 394.1 puis qu'on l'appliquait intégralement à la recommandation... Nous avons l'impression qu'il y a des mesures qui sont prévues, là, qui doivent être conservées. Autrement dit, il faut faire un examen complet de chacun des articles disposés pour être certain que la formulation que nous aurons ne créera pas plus de problèmes que nous en solutionnons. Si on fait ça aujourd'hui, nous sommes sous l'impression qu'on va faire une erreur. Ce n'est pas parce que ce n'est pas bon, c'est parce qu'on n'a pas le bon texte, et ça, ça demande une réflexion, je crois, qui est amorcée puis qui va se compléter rapidement quand on aura fini l'étude du projet de loi.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Donc, vous...

M. Bégin: On peut le mettre ? excusez-moi ? pour les fins du débat futur, que nous acceptons très bien de regarder de près chacune de ces dispositions-là et de voir les modifications qui devraient être faites pour tenir compte de ça.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Parfait.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): L'amendement est adopté. Est-ce que l'article 6, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Nous avons maintenant un nouvel article qui est introduit. Il y a un amendement, c'est 6.1. Oui. Je ne sais pas si vous l'avez, Mme la députée de Bourassa, 6.1?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Insérer, après l'article 6 du projet de loi, l'article suivant:

6.1 L'article 53.1 de ce Code est modifié par le remplacement, dans le second alinéa, des mots «L'intimé» par les mots «Le défendeur». M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, c'est simple, nous avions fait un choix de mettre «défendeur» et il s'est glissé cet oubli que nous tentons de corriger. C'est ça. Donc, harmonisation du vocabulaire pour ne pas se retrouver avec des termes «intimé», «défendeur», et ainsi de suite.

Mme Lamquin-Éthier: Une harmonisation dans le but de simplifier.

M. Bégin: À l'intérieur de la réforme, de toute façon, tout simplement.

Le Président (M. Lachance): Ça va? Est-ce que cet amendement est adopté? Est-ce que le nouvel article 6.1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Règles applicables
à toutes les demandes en justice

De l'action, des parties, des procureurs

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 7. Il y a un amendement. Alors, l'article 7 se lit comme suit: L'article 65 de ce Code est modifié par l'insertion, après le mot «demandeur», des mots «ou l'appelant» et, après le mot «demande», des mots «ou de son appel».

Alors, l'amendement se lit comme suit: Remplacer l'article 7 du projet de loi par le suivant:

7. L'article 65 de ce Code est modifié par l'insertion, après le mot «demandeur», des mots «ou le demandeur-appelant». M. le ministre.

M. Bégin: Bon. Alors, il y avait un problème qui pouvait se soulever quand on lisait le texte pour savoir qui devait fournir un cautionnement lorsqu'il était de l'extérieur. Alors, au départ, c'est sûr que c'est la personne qui est de l'extérieur et les défendeurs, par hypothèse. Mais, s'il gagne sa cause et qu'il devient intimé ou défendeur, est-ce qu'il devra fournir un cautionnement, à ce moment-là? Alors, la rédaction posait un problème, et on le remplace par le «demandeur-appelant», et, à ce moment-là, le demandeur qui est du Québec puis qui a perdu, c'est lui qui est appelant, hein, ce n'est pas l'autre. Donc, on corrige le texte pour le faire. On me dit que c'est convenu. Je ne suis pas l'expert sur ce point-là, mais il semblerait que ce soit convenu entre les parties.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Une première question, M. le Président: Est-ce que l'amendement est conforme à la jurisprudence?

M. Bégin: Il n'y a pas de jurisprudence, je pense, là-dessus.

Mme Lamquin-Éthier: Pouvez-vous me dire... Là, je peux mal interpréter ou mésinterpréter.

M. Bégin: C'est que je n'étais pas conscient qu'il y avait déjà eu une décision. Certains pensent que ce n'est pas nécessaire de faire ce que nous faisons, mais il a été proposé quand même et nous sommes prêts à donner suite à cette demande pour éviter l'ambiguïté dans le futur. Vous savez, c'est ce genre de situation où ça pourrait aller dans ce sens-là ou ça pourrait aller dans le sens inverse. Pourquoi ne pas le corriger tout de suite? C'est ce que l'on fait.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, je crains, là, de... Est-ce que le texte, tel qu'amendé, est conforme à la jurisprudence?

M. Bégin: Vous permettrez, peut-être, M. le Président...

Le Président (M. Lachance): M. Frenette.

M. Frenette (Aldé): C'est parce que ce n'est pas évident. Le Barreau dit qu'il est d'accord avec ça. Quand on avait préparé la modification à 54, on n'avait pas couvert exactement ce qu'on voulait, c'est-à-dire qu'on exigeait un cautionnement de l'étranger qui avait été demandeur en première instance au Québec, qui avait gagné et qui se retrouvait défendeur. Donc, ce n'est pas lui qui traîne l'autre en appel. Donc, celui-là, on ne veut pas qu'il soit pénalisé et qu'il soit obligé de fournir cautionnement, et, de la façon dont on l'avait écrit, avec l'expression qu'on utilisait, on se trouvait à couvrir plus que ce qu'on voulait. Mais le deuxième aspect, c'était surtout pour ça. Le Barreau...

Mme Lamquin-Éthier: Vous en couvriez plus avec l'utilisation du terme «demandeur ou l'appelant»?

M. Frenette (Aldé):«Demandeur-appelant», là, c'est vraiment le demandeur.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Frenette (Aldé): L'étranger était demandeur en première instance, et là il est demandeur-appelant, et donc il est demandeur en appel aussi. Quand il sera défendeur, c'est qu'il aura gagné en première instance, et là il n'aura pas à fournir un cautionnement. C'est ça.

Et la jurisprudence, ce que le Barreau dit, c'est que, en vertu de 497, dans le bout de l'appel au Code de procédure, il y a déjà des gens qui pourraient obtenir un cautionnement, et la jurisprudence était dans ce sens-là, qui considérait que le fait que le demandeur soit étranger, c'était pour quelque autre raison spéciale. C'est vrai que la jurisprudence a confirmé ça, et donc ce n'était peut-être pas absolument nécessaire de modifier l'article 65, sauf que même ce qui va sans dire va encore mieux en le disant, et je pense que...

Mme Lamquin-Éthier: Permettez-moi de regarder Me Vadboncoeur.

Le Président (M. Lachance): Oui, Mme la députée de Viger, en signalant qu'il reste deux minutes avant la fin de nos travaux.

Mme Mancuso: Donc, ce que je comprends de la question était à savoir qu'on ne va pas étendre cette protection... qu'il n'y a pas lieu d'étendre cette protection-là aux résidents du Québec. Donc, il n'y a pas cette crainte-là. Le défendeur qui habite au Québec, il n'aura pas à craindre qu'il devra déposer un cautionnement.

M. Bégin: En fait, on garde les choses dans l'état où elles sont actuellement. On ne l'étend pas, on le garde tel quel.

Mme Mancuso: C'est beau.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 7, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté, et là-dessus j'ajourne les travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 15 h 19)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! La commission des institutions reprend, cet après-midi, ses travaux pour l'étude du projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile. Lors de l'ajournement de nos travaux, nous en étions à l'article 7. Je crois que la discussion était terminée, mais on m'indique que, techniquement, à moins d'indication contraire, l'article, tel qu'amendé, n'avait pas été adopté.

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Oui, l'amendement avait été adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, il restait à adopter...

Une voix: L'article avait été adopté.

Le Président (M. Lachance): Ça va. Est-ce que l'article 7, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Une voix: Adopté.

Du lieu d'introduction de l'action

Le Président (M. Lachance): Adopté. Alors, il y a un nouvel article, maintenant, l'article 7.1. Donc, insérer, après l'article 7 du projet de loi, l'article suivant:

7.1. Ce Code est modifié par l'insertion, après l'article 75 et avant «Chapitre III.1», de l'article suivant:

«75.0.1. Exceptionnellement et dans l'intérêt des parties, le juge en chef ou le juge qu'il désigne peut, à toute étape d'une instance, ordonner la tenue, dans un autre district, de l'instruction de la cause ou de l'audition d'une demande relative à l'exécution du jugement.» M. le ministre.

n(15 h 20)n

M. Bégin: Merci, M. le Président. Alors, c'est un article qui est inséré à la demande du Barreau, et je pense que, dans cette terminologie, il est conforme à ce qu'ils avaient demandé. Cependant, le Barreau aurait préféré le mettre plutôt à l'article 437.1, alors que nous choisissons de le mettre à 75.0.1 parce qu'il se retrouve au niveau des principes, au niveau de la territorialité. Remarquez que là on est dans des questions d'appréciation. Je pense que le choix que nous faisons, c'est de le laisser là où nous l'avions prévu. Mais on comprend parfaitement bien ce que dit le Barreau. Là, c'est une question de choix, et nous maintenons le choix que nous avions fait. Je ne crois pas qu'il y ait une guerre là-dessus.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Dans quelle section du Code sommes-nous, là? Nous sommes au chapitre III?

M. Bégin: Chapitre III, le lieu de l'introduction de l'action. Alors, comme on parle de la territorialité, d'entendre dans un autre endroit, nous pensons que c'est là qu'il devrait se retrouver, et d'autant plus que c'est une exception au principe.

Mme Lamquin-Éthier: Alors, j'aimerais rappeler que le Barreau dit, comme vous venez de l'évoquer, d'ailleurs ? puis vous dites que c'est une question de choix ? le Barreau est d'avis que l'article ne devrait pas se retrouver dans cette section du Code parce qu'il ne s'agit pas d'une disposition relative à la compétence territoriale des tribunaux. Et le Barreau est d'avis également que cet article ne devrait pas non plus se retrouver à l'article 151.26.

M. Bégin: Non, pas se retrouver là, il était là initialement.

Mme Lamquin-Éthier: Il était là l'origine. O.K.

M. Bégin: Et le Barreau demande... Enfin, c'est quasiment comme si on avait pris deux directions opposées. C'était 151.26, le Barreau demande d'aller vers 400. Nous, on descend vers 75. Alors, c'est vraiment...

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Et le Barreau, quant à 75, dit que l'article ne devrait pas se trouver là parce qu'il ne s'agit pas d'une disposition relative à la compétence territoriale des tribunaux. Ça, je comprends ce que vous venez de dire là. Alors là le Barreau dit que l'article doit être maintenu dans la section du Code relative à l'instruction dans un autre district. On doit donc, selon lui, conserver cette section au Code et, par conséquent, le retirer de l'article 75. Je comprends que tel n'est pas votre choix. Mais qu'est-ce qui milite en faveur du choix que vous arrêtez?

M. Bégin: Bien, nous pensons que, si la règle du lieu d'introduction de l'action ou de l'audition devrait être... C'est déterminé au tout début. Si exceptionnellement on en arrive pour faire entendre dans un autre district la cause ou la demande relative à l'exécution du jugement, bien, il me semble que c'est par rapport au territoire qu'on doit se pencher, autrement nous pensons qu'il est difficile de se raccrocher à quelque chose de logique dans le choix du procureur de dire: Où est-ce que je vais trouver la disposition pour changer de district? Il la trouvera, à mon point de vue, naturellement là où on parle du lieu d'introduction de l'action parce que le lieu d'introduction de l'action, c'est lui qui détermine le lieu d'audition et de l'exécution du jugement. Alors, si on veut se démarquer par rapport à cette règle, il nous apparaît tout à fait logique de mettre l'exception à côté de la règle.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur cet article, sur cet amendement?

Mme Lamquin-Éthier: Je comprends l'explication que nous donne M. le ministre, évidemment. Je comprends également les observations qui sont formulées par le Barreau du Québec. Je comprends que c'est une question de choix, là, mais... C'est une mesure exceptionnelle, hein, ici, là?

M. Bégin: Je pense que... ni nous ne mourrions si c'était ailleurs et je ne pense pas que le Barreau meure si nous le laissons à cet endroit. Notre option à nous, c'est de le mettre là où il est.

Mme Lamquin-Éthier: Je pense que ce serait difficile de...

Une voix: ...

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, ce n'est pas une question de mort, là, je pense que ça peut être traité d'une autre...

M. Bégin: Bien non, je taquine. On peut avoir le droit de rire.

Mme Lamquin-Éthier: Bien non, mais ce n'est pas drôle, là.

M. Bégin: Ha, ha, ha!

Mme Lamquin-Éthier: Un drôle d'humour, hein! Un humour macabre.

M. Bégin: Ce n'est pas un humour macabre.

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, vous allez en mourir.

M. Bégin: Bien, voyons donc!

Le Président (M. Lachance): Bon. Je comprends que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Alors, 7.1 est adopté?

Une voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Des règles générales relatives
à la procédure écrite

Le Président (M. Lachance): Sur division. L'article 8. Il y a aussi un amendement. Je fais lecture de l'article 8:

8. L'article 82.1 de ce Code est modifié:

1° par le remplacement, dans le premier alinéa, des mots «pour les fins de dépôt au greffe, de signification ou de preuve» par les mots «à des fins de notification, de signification, de dépôt au greffe ou de preuve» et par l'ajout, à la fin de cet alinéa, de la phrase qui suit: «La signature sous le serment d'office de l'avocat, du notaire ou de l'huissier de justice suffit pour attester l'authenticité du document ainsi transmis.»;

2° par le remplacement, dans le deuxième alinéa, des mots «L'attestation d'authenticité» par les mots «Lorsque la transmission est faite par la partie, l'attestation d'authenticité exigée».

Et l'amendement se lit comme suit: À l'article 8 du projet de loi:

1° supprimer, dans les quatrième et cinquième lignes du paragraphe 1°, les mots «sous le serment d'office»;

2° supprimer le deuxième paragraphe.

Des commentaires, M. le ministre?

M. Bégin: Oui. Encore une fois, ce sont des suggestions faites par le Barreau. Alors, «sous le serment d'office». Nous avons enlevé les mots «sous le serment d'office», nous croyons effectivement qu'il n'est pas nécessaire d'exiger le serment d'office dans un tel cas. Le serment de l'avocat comme tel, en soi, il existe.

Par ailleurs, pour le deuxième amendement qui conteste l'authenticité, ce n'est pas tellement celui qui envoie le fax comme le récipiendaire du fax qui, lui, va faire des copies à partir de là, et c'est, pas généralement, mais c'est un notaire, un huissier, un avocat, donc ils pourront authentifier le document. Alors, à ce moment-là, le membre de phrase que nous avions en tout début du deuxième alinéa, qui disait: «Lorsque la transmission est faite par la partie, l'attestation d'authenticité exigée», ce n'est pas nécessaire de mettre une telle phrase, suggestion faite par le Barreau, et nous la suivons.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, au premier paragraphe, si je comprends bien, il y a les ratures «sous le serment d'office». C'est un assouplissement, en quelque sorte, parce que la signature en elle-même comporte l'attestation. Ça, je pense que ça rejoint également... Je regarde, là. Oui, ça rejoint la recommandation du comité à R.1-24.

Maintenant, dites-moi, on va voir souvent dans le texte à la fois l'utilisation de «notification» et «signification». Là, c'est nécessaire, j'imagine, de les...

M. Bégin: Vous référez sans doute au débat que nous avons eu avec les huissiers, si je me souviens bien, qui demandaient d'être beaucoup plus précis quant à l'utilisation du mot «signification» et du mot «notification». Nous avions dit, et nous allons en tenir compte dans la deuxième phase, nous allons travailler sur ce concept afin de faire en sorte que tout le monde soit heureux. Dans ce cas-ci, nous n'en sommes pas là et on ne prétend pas vouloir régler toute cette question-là, puis ça va être fait dans la deuxième phase.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, je faisais effectivement référence au mémoire des huissiers. Je crois que c'est à la page 14 de leur mémoire.

M. Bégin: Moi, j'ai fonctionné de mémoire simplement.

Mme Lamquin-Éthier: Ils demandaient d'apporter une attention à l'article 8.

M. Bégin: Oui, ils insistaient beaucoup pour dire que la signification n'était pas la notification et qu'il fallait, dans l'utilisation des termes, être plus circonspect, ce qui n'est pas mauvais comme recommandation, mais ça impose un exercice de révision dans l'ensemble du Code, ce que nous n'avons pas fait à ce stade-ci.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, ça va revenir dans la deuxième phase subséquemment. Parfait. Attendez que je regarde.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 8, tel qu'amendé, est adopté?

n(15 h 30)n

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Des causes intéressant l'État

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 9: L'article 94.5 de ce Code est abrogé. Est-ce qu'il y a des commentaires là-dessus? M. le ministre, l'article 9.

M. Bégin: Comme vous pouvez voir, M. le Président, l'article est court, il s'agit d'abroger l'article 94.5, mais l'explication est plus complexe. Il s'agit des situations où l'État est impliqué, et la règle générale, en principe, c'est 10 jours. Cependant, dans le cas du Procureur général, le délai était de 30 jours. On nous a demandé de ramener le délai à 10 jours, ce que nous avons accepté. Donc, en abrogeant l'article 94.5, c'est la règle générale qui s'applique, c'est donc le délai de 10 jours.

Plus loin, il y a un autre débat pour savoir si c'était 20 jours ou 30 jours. On aura le débat à un autre article et on verra. Ce que nous proposons, c'est de garder 10 jours pour la comparution et 30 jours pour...

Une voix: ...

M. Bégin: Ah oui, 30 jours pour considérer un défaut. Par exemple, pour ceux qui ne sont pas des techniciens, là, vous avez la signification d'une procédure par un demandeur. Si c'est le Procureur général qui est en cause, comme si c'était un autre individu, nous aurons dorénavant 10 jours pour faire un geste qui s'appelle la comparution, que nous déposerons à la cour. Là, ça veut dire que nos droits sont protégés pour être en mesure de faire une défense. Mais le Procureur général a un délai de 30 jours pour ce faire, ce qui veut dire que l'autre partie, le demandeur, ne pourrait pas inscrire par défaut, c'est-à-dire sans que le Procureur général puisse offrir de défense, avant 30 jours après l'expiration du délai de 10 jours. Donc, jamais il ne sera en défaut, à moins que 40 jours ne se soient écoulés depuis la signification de l'action. Alors, c'est plus long que pour un citoyen ordinaire, mais c'est compte tenu de la complexité des dossiers et aussi de la consultation qui doit être faite, parce que le Procureur général n'est pas nécessairement au fait de tous les dossiers, il faut qu'il aille voir ses collègues, il faut qu'il prenne connaissance du dossier. Et c'est une règle tout à fait légitime qui n'a pas pour effet de retarder le débat, mais de faire en sorte que le Procureur général prenne une position adéquate.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, en quelque sorte, vous nous confirmez que cette disposition-là, cet article-là... Ou est-ce que c'est ce que vous nous confirmez, là, que ça a pour effet de donner un délai additionnel?

M. Bégin: ...

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

M. Bégin: Avant, avant...

Mme Lamquin-Éthier: Alors, ça ne donne pas l'équivalent d'un délai additionnel.

M. Bégin: Non, au contraire. Avant, c'était un délai de 30 jours pour la comparution. Les gens ont demandé que l'État soit traité, pour la comparution, de la même manière...

Mme Lamquin-Éthier: Au même niveau que tout le monde.

M. Bégin: En supprimant 94.5, on fait en sorte que c'est la règle générale qui s'applique à tout le monde, donc 10 jours. Par contre, il y avait un deuxième traitement différent, c'était pour être en défaut. Pour un citoyen ordinaire, les entreprises, c'est 10 jours. L'État avait 30 jours. De ce côté-là, nous ne changeons pas notre point de vue, nous maintenons que l'État a besoin de 30 jours pour se faire une idée et pour agir en conséquence. Pour les fins de notre discussion, techniquement, là, ce que nous faisons, c'est donner raison à ceux qui demandaient de raccourcir le délai pour la comparution.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, techniquement parlant, le Procureur général dispose d'un délai...

M. Bégin: De 10 jours pour comparaître, comme n'importe qui d'autre.

Mme Lamquin-Éthier: O.K., pour comparaître à compter de la signification?

M. Bégin: Exactement, comme les autres.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 9 est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Je me permettrai de regarder Me Vadboncoeur. Bien non, mais c'est parce que c'est des matières extrêmement complexes, là. C'est parce que, dans le mémoire du Barreau, ils disent qu'il y aurait lieu de rétablir l'article 94.5, mais de le modifier, et la modification avait pour but, si je lis bien ce qui est écrit... Ce n'est pas un délai de 10 jours pour comparaître, mais c'est un délai de 20 jours.

M. Bégin: Excusez-moi, j'ai été distrait une seconde, Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: C'est plutôt moi qui aurais dû attendre.

M. Bégin: Non, mais allez-y.

Mme Lamquin-Éthier: Dans le mémoire du Barreau... Je me permets toujours de regarder Me Vadboncoeur parce que c'est des matières extrêmement complexes. Il y a une observation qui est faite. Le Barreau dit qu'à son avis il y aurait lieu de rétablir l'article 94.5, mais de le modifier, et la modification, si j'en fais lecture, se lit comme suit: «Le Procureur a 20 jours pour comparaître, à compter de la signification de la requête.» Vous, vous parlez de 10 jours, et, eux, ils inscrivent «20 jours», là.

M. Bégin: Mais je vais vous dire pourquoi. Je connais la proposition du Barreau et je vais vous dire pourquoi je maintiens 10 jours.

Mme Lamquin-Éthier: Il propose évidemment d'abroger plutôt l'article 94.6.

M. Bégin: C'est ça, oui, puis l'abroger, c'est... L'enjeu est le suivant: Quand on reçoit une procédure, quel est le temps que nous avons pour aller voir un procureur, un avocat et poser un geste qui va protéger nos droits? C'est ce qu'on appelle la comparution, vous le savez très bien. Il n'y a rien qui empêche le Procureur général, qui reçoit signification d'une procédure, d'immédiatement comparaître. Donc, il n'y a pas de motif pour lequel le Procureur général n'agirait pas dans un délai de 10 jours.

Mme Lamquin-Éthier: Même la complexité des dossiers dont il est saisi?

M. Bégin: Non, parce que le pire qui peut arriver au bout de 10 jours: s'il se rend compte qu'il est tout à fait d'accord avec la demande, il a juste à arrêter les procédures, et c'est fini. Il n'y a pas de problème. Inversement, s'il a besoin de temps, il met sa procédure à la cour, donc à ce moment-là il a 10 jours ? même s'il comparaît la cinquième journée, il a 10 jours ? et à l'expiration du délai de 10 jours commence un second délai. Ce second délai, c'est le délai qui est requis normalement pour faire une défense. Et un citoyen, normalement, on fait 10 jours.

Écoutez, quelques avocats au Québec ont essayé de faire respecter par d'autres ce délai de 10 jours pour faire une défense. Ils n'ont pas eu beaucoup de chance. Ils l'ont demandé à la cour, ils se sont fait refuser. Et, généralement, les avocats du coin se sont entendus pour lui demander le respect intégral des délais, et ce n'est pas long que la personne comprend que ce n'est pas de même que la vie en société se passe.

Le Procureur général est le représentant de tous les ministères. C'est donc des dossiers qui peuvent venir de n'importe où, d'une complexité extrême, comme, à l'autre extrême, des dossiers relativement faciles. Mais souvent il a besoin de colliger l'information, faire une recherche, se faire une tête pour savoir qu'est-ce qu'il va faire, par exemple. Va-t-il offrir une défense ou bien, au contraire, il va s'entendre? Doit-il modifier la loi? Bref, c'est des choix importants. Et, comme on représente l'État, le Procureur général doit, à mon point de vue, avoir ce temps-là ? je dis «je», le Procureur général, mais c'est tous les procureurs généraux, quels qu'ils soient, à quelque époque que ce soit ? a besoin de ce délai-là. Le Barreau pensait peut-être 20 jours-20 jours; ça arrive au même total. Moi, je préfère, et de loin, 10 jours pour la comparution, parce que c'est un acte purement technique, alors que le 30 jours, lui, c'est du travail, de la réflexion, un moment pour se faire une idée, une tête, et ça, je pense que l'État...

Écoutez, on est au mois de juillet, là, où il faut rencontrer les gens. C'est ce que l'on fait. On est en n'importe quelle période de temps. Avant de contacter dans les ministères les personnes qui sont en mesure de fournir des informations et se dire: On y va, on n'y va pas... Souvent, c'est des questions de constitutionnalité, des questions complexes, extrêmement difficiles. Il m'apparaît tout à fait légitime d'avoir ce délai-là. C'est pour ça qu'on a fait ce choix-là.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, si je comprends bien, vous avez pris connaissance de l'argumentaire qui est soulevé par le Barreau. Vous ne partagez pas le point de vue...

M. Bégin: Je partage le délai global, mais pas la façon de le donner.

Mme Lamquin-Éthier: Non, et ça, c'est votre discrétion, j'imagine.

M. Bégin: Oui, je pense.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 9 est adopté?

Une voix: Adopté.

Une voix: ...

Mme Lamquin-Éthier: Pardon?

Des voix: ...

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. À l'article 10, il y a un amendement. Alors, voici comment se lit l'article 10: L'article 94.6 de ce Code est modifié par le remplacement des mots «suivant l'expiration du délai prévu à l'article 94.5» par les mots «suivant la date fixée dans l'avis au défendeur pour la présentation au tribunal de la requête introductive d'instance».

M. Bégin: Là, M. le Président...

Le Président (M. Lachance): L'amendement.

M. Bégin: Ah! Excusez-moi.

Le Président (M. Lachance): À l'article 10 du projet de loi, remplacer les mots «la date fixée dans l'avis au défendeur pour la présentation au tribunal de la requête introductive d'instance» par les mots «l'expiration du délai fixé pour comparaître». M. le ministre.

M. Bégin: Bon. Alors là semble-t-il qu'il y a eu une erreur de notre part.

Une voix: ...

M. Bégin: Pardon? Je n'ai pas compris, Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce que vous revenez à ce qui était ou...

M. Bégin: Non, c'est parce que je l'ai dit sans référer au texte. Ce que nous mettons, c'est la règle générale, à savoir que...

Écoutez, d'expérience, là, il y a eu un long débat pour savoir: Si je comparais le troisième jour après la signification de la procédure, est-ce que mon délai pour produire ma défense commence à courir de là ou bien commence à courir de l'expiration du délai de 10 jours? Ça a fait bien des discussions, il y a un temps, et ça a été réglé que c'était de la date de l'expiration du délai pour comparaître, donc après le 10 jours. C'est de là. Là, on introduit non pas «suivant la date fixée dans l'avis au défendeur», mais «suivant la date ? c'est quoi qu'on a marqué, là? ? ...

Une voix: ...

M. Bégin: ...de l'expiration du délai fixé pour comparaître». Donc, on revient, à moins d'erreur de ma part, à la règle qui s'applique à tout le monde. C'est une erreur technique de notre part, on n'en fait pas un mystère.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 10, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: ...

Le Président (M. Lachance): Ça va? Adopté. L'article 10, tel qu'amendé, est adopté. Il y a introduction d'un nouvel article 10.1. Insérer, après l'article 10 du projet de loi, l'article suivant:

10.1. L'article 94.8 de ce Code est abrogé. M. le ministre.

M. Bégin: Bon, nous sommes cohérents avec ce que nous venons de faire. Il faut maintenant abroger cette disposition-là pour revenir aux délais 10-30.

Une voix: ...

n(15 h 40)n

M. Bégin: 10-30. Alors, ce texte-là devient inutile, il faut l'abroger.

Mme Lamquin-Éthier: C'est une concordance.

M. Bégin: C'est vu ce qu'on a fait, si on veut être logique, parce que, avant, on avait 30 jours, alors on tombe à 10. Il faut donc faire disparaître 94.8.

Le Président (M. Lachance): Cet amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 10.1 est adopté? Adopté.

Procédure ordinaire en première instance

Introduction de l'action et comparution

De l'assignation

L'article 11. Il y a un amendement. L'article 11: Les intitulés du titre I, du chapitre I et de la section I précédant l'article 110 de même que les articles 110 et 111 de ce Code sont remplacés comme suit:

«Titre I. Introduction d'une demande en justice, comparution et gestion de l'instance.

«Chapitre I. Dispositions préliminaires.

«Section I. De la procédure applicable aux demandes en justice.»

Et là ça introduit une série d'articles, 110, 110.1, 110.2, 110.3, 111, 111.1. Alors, de quelle façon voulez-vous qu'on procède?

M. Bégin: Je suggérerais, M. le Président, de parler du contenu comme tel, puisqu'il nous permettrait de comprendre ce qu'il y a à l'intérieur du texte.

Le Président (M. Lachance): De l'amendement.

M. Bégin: Oui, de la manière suivante: c'est qu'il y a deux choses là-dedans. Il y a une modification technique de rédaction, mais c'est le fond, l'article peut-être de fond le plus important du projet de loi, en ce sens que c'est là qu'on indique que les procédures dorénavant sont instruites par requête, alors qu'on se rappellera que, dans le temps... À moins qu'il n'en soit prescrit autrement, une demande en justice est introduite par une déclaration. Donc, c'est là qu'on vient de... Un des piliers de la réforme, c'est de changer de l'action à la requête. Alors, c'est extrêmement important et c'est ce qu'on retrouve. «Les demandes en justice sont introduites par requête», ça, ça va très bien.

Ce que nous avons changé par rapport au projet de loi n° 54, c'est que, dans le premier projet de loi, la phrase se continuait, «par requête suivant la procédure prévue au présent titre», alors que là on a mis un point après «par requête» puis on a dit: «Elles suivent la procédure prévue au présent titre, sous réserve des règles particulières...» Donc, quant au fond, cet amendement-là ne change rien par rapport au projet de loi n° 54. On me dit que c'est vraiment une question de phraséologie. Quelle est la difficulté, M. Frenette, que soulevait cette rédaction-là? Je ne connais pas la réponse théorique. Permettez-vous, Mme la députée, que M. Frenette...

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, je permets.

M. Frenette (Aldé): O.K. C'est parce que, en principe, tout est par requête, suivant ces règles-là, sauf que certaines matières, comme les matières familiales, sont couvertes par ces règles-là mais ont des règles particulières pour compléter ? ça, c'est la deuxième catégorie ? et qu'on a dit: Elles suivent les procédures prévues au présent titre, sous réserve des règles particulières autrement prévues, parce que ça prend des choses de détail.

À côté de ça, il y a une autre catégorie, et là il y a vraiment quatre matières: les non-contentieux, l'habeas corpus, les petites créances, qui ont... Ce n'est pas des règles particulières qui complètent ça, c'est que c'est tout un régime particulier. Et c'est pour ça qu'on dit que là elles ont leurs règles propres. Et l'article du 54 portait à confusion parce qu'on disait: «...à moins que des règles particulières ne soient prévues. De telles règles sont prévues, notamment...» Ça laissait entendre qu'on mettait tout sur le même pied, les procédures familiales, les petites créances, etc., alors que ce n'est pas vrai. C'est qu'on conserve un régime particulier pour les petites créances.

M. Bégin: Donc, si je vous saisissais bien, M. Frenette, la règle générale, c'est la requête. On aura des règles propres pour l'habeas corpus, les quatre items, et, dans certains cas, des règles particulières.

Le Président (M. Lachance): Alors, il y a un amendement à l'article 110.

M. Bégin: C'est ce que je viens d'expliquer, M. le Président.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, ça, c'est le premier.

Le Président (M. Lachance): Oui. Bon, est-ce que vous avez fait lecture de cet article?

M. Bégin: Non, ma voix est toujours... On peut le faire, mais...

Le Président (M. Lachance): À l'article 11 du projet de loi, remplacer l'article 110 proposé par le suivant:

«110. Les demandes en justice sont introduites par requête. Elles suivent la procédure prévue au présent titre, sous réserve des règles particulières autrement prévues. Toutefois, les demandes visant l'outrage au tribunal, l'habeas corpus, les matières non contentieuses et le recouvrement des petites créances sont exceptées; elles obéissent à leurs propres règles.»

Est-ce qu'il y a des commentaires là-dessus?

Une voix:«À leurs règles propres».

Le Président (M. Lachance): Excusez, «à leurs règles propres», oui.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, je comprends bien. Juste une petite question: Pourquoi le terme «exceptées»? Est-ce qu'il est habituel? Oui?

M. Frenette (Aldé): Disons que c'est français, c'est correct. Mais, dans une proposition d'amendement qu'on avait dans l'autre pile, on commençait la phrase par «Sont exceptées», et là il y en a certains dans notre groupe qui se sont objectés, et là on a trouvé que ça se disait mieux si on les reformulait un peu plus... On déplace le verbe, les mots «sont exceptées», mais c'est français, et c'est pour bien marquer qu'elles ont leurs règles propres et que ce n'est pas les mêmes qu'on vise dans la phrase d'avant.

Mme Lamquin-Éthier: Mais le terme «exceptées» n'apparaissait pas avant, là?

M. Frenette (Aldé): Non, c'est dans les amendements qui vous avaient été distribués, et c'est là qu'on avait déjà décidé de clarifier vraiment la distinction entre les deux. Et, quand on est passés des premiers amendements qui ont été distribués à l'amendement d'aujourd'hui, là on a fait des changements à la rédaction.

Mme Lamquin-Éthier: Vous aviez utilisé «Sont exceptées celles visant l'outrage au tribunal».

M. Frenette (Aldé): C'est ça, oui.

Mme Lamquin-Éthier: Là, vous me dites qu'au lieu de le mettre devant vous l'avez mis...

M. Frenette (Aldé): Mais déjà la clarification était là, mais cette rédaction-là qu'on propose aujourd'hui est meilleure, à notre point de vue.

Mme Lamquin-Éthier: Je veux juste voir ce que dit... Le Comité est plus... Ils disent «sauf en certaines matières», le Comité de révision.

M. Bégin: Bien là le Comité n'a pas voulu faire la rédaction fine.

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, non, non. Je le vérifie tout simplement, là. Il y a donc... Là, vous êtes fidèle à la recommandation qui est formulée par le Comité.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Oui.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que 110, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Oui.

Le Président (M. Lachance): Adopté.

«110.1. Les demandes en justice doivent, si elles sont contestées oralement, être entendues ou fixées pour enquête et audition ou, si elles sont contestées par écrit, être inscrites pour enquête et audition, dans un délai de 180 jours à compter de la signification de la requête.

«Ce délai ne peut être prolongé que par le tribunal, pour une période maximale de 90 jours et dans le seul cas où la partie démontre qu'elle était dans l'impossibilité absolue d'agir. La décision qui prolonge le délai doit être motivée.

«La loi peut, dans tous les cas, fixer un délai plus court que celui prévu au premier alinéa.» Et là on indique aussi...

M. Bégin: Est-ce que je peux vous suggérer de lire également l'amendement? Parce qu'il y a un amendement qui est là, et on devra l'étudier. Peut-être devrions-nous en être saisis.

Le Président (M. Lachance): Oui. Alors, j'en fais lecture. À l'article 110.1, voici l'amendement:

1° insérer, dans la deuxième ligne du premier alinéa de l'article 110.1 proposé et après le mot «audition», les mots «et, dans ce dernier cas, être référées sur ordonnance au greffier pour fixation d'audition», remplacer, dans la troisième ligne de cet alinéa, le mot «un» par le mot «le» et insérer, après le mot «délai», les mots «de rigueur»;

2° remplacer le deuxième alinéa de l'article 110.1 proposé par les suivants:

«Le tribunal peut, sur demande présentée au plus tôt dans les 30 jours précédant l'expiration du délai de 180 jours, prolonger ce délai lorsque la complexité de l'affaire ou des circonstances spéciales le justifient.

«Le tribunal peut également relever une partie des conséquences de son retard si cette dernière démontre qu'elle a été, en fait, dans l'impossibilité d'agir dans le délai prescrit.

«La décision doit, dans tous les cas, être motivée.»;

3° supprimer le troisième alinéa de l'article 110.1 proposé.

Voilà. M. le ministre, des commentaires?

n(15 h 50)n

M. Bégin: Oui. Alors, deux ordres de choses. Pour me faire comprendre, je réfère au texte modifié avec l'amendement au projet de loi dans le texte amendé, dans l'amendement. Je vais dans le carré du bas. Ce qui est souligné dans le premier paragraphe, ce sont les mots «et, dans ce dernier cas, être référées sur ordonnance au greffier pour fixation d'audition». C'est une suggestion du Barreau que nous trouvons très opportune, puisqu'elle fait en sorte que le dossier puisse revenir et suivre son cours normalement, autrement il aurait pu se perdre dans les limbes parce qu'il pourrait ne pas y avoir de procédure de rappel. Donc, on pense que c'est sage que d'introduire ce membre de phrase là. Est-ce que c'est clair?

Mme Lamquin-Éthier: On vous suit.

M. Bégin: O.K. Bon. Alors, quant au reste, le débat est plus complexe et plus... Oui, il est plus complexe. Quand j'avais introduit, dans le projet de loi n° 154, le délai de 180 jours de rigueur ? parce que c'est peut-être la phase critique, là; c'est pour ça que j'aimerais bien l'expliquer au complet ? quand j'avais introduit le délai de rigueur, à ce moment-là il y avait une possibilité d'un allongement de délai une seule fois, de 90 jours. Ça a fait un tollé, et le Barreau s'est objecté fortement à la chose. Alors, il y a eu donc report au printemps du projet de loi, et je pense que, essentiellement, tout ça tournait autour de ça. Et nous avons eu le comité tripartite. Alors, après discussion au comité tripartite, j'ai accepté de faire disparaître la rigidité qu'il y avait, qui était voulue, et de faire en sorte de revenir, en principe, à ce qui existait au niveau de la procédure allégée, donc de faire en sorte qu'on ait la possibilité pour le juge de permettre un autre délai que celui de 180 jours. À ce moment-là, on voulait absolument permettre de le faire.

Entre le moment où j'ai déposé le projet de loi et celui où on a eu cette discussion, j'ai proposé au Barreau et à d'autres de suggérer le nom de certaines procédures qui pouvaient faire l'objet de cas exceptionnels, des cas qui auraient pu être jugés. J'avais donné, à titre d'exemple, moi-même le recours collectif en disant: Bon, bien, ça va presque de soi, on est dans une situation exceptionnelle. Alors, tout ça étant dit, on l'a, au comité tripartite, suggéré, et j'ai accepté de mettre ce délai moins strict et de pouvoir, dans les cas prévus, le prolonger, l'idée étant cependant à la fois de permettre, dans des cas visés par la loi, de dépasser le 180 jours, mais avec toujours le même esprit de s'assurer que les parties font diligence pour que le dossier soit en état non pas, par hypothèse, dans le délai de 180 jours, mais dans le plus bref délai possible au-delà du 180 jours.

Autrement dit, dans tous ces débats, il y a deux intérêts qui souvent... bien, pas souvent, ils sont toujours contradictoires, et le demandeur est généralement plus pressé d'aller de l'avant que le défendeur, pour qui, à l'occasion, le temps est un avantage. Alors, entre le temps qui est un avantage et la capacité de faire des procédures dans un délai respectable, il y a une nuance. Alors, j'ai donc dit: Oui, nous devons présenter une requête pour demander de ne pas être contraints par le délai de 180 jours, mais par un autre délai. C'est soulevé, et là, moi, je dis que cette requête-là devrait être présentée devant la cour dans les 30 jours précédant l'expiration du délai de six mois. Pourquoi? Pourquoi le faire comme ceci? Pour respecter ce que je viens de mentionner comme principe.

Je suis devant un dossier d'une complexité évidente telle que c'est évident que je... pas dans 180 jours. Bon. Parfait. Mais il y a bien des cas où ce ne sera pas aussi évident, où, en tout cas, les deux parties n'auront pas le même point de vue. L'une va considérer que ça va demander beaucoup de temps, l'autre va dire: Non, je ne pense pas. Il suffit qu'on fasse diligence, et on est en mesure de respecter le délai de 180 jours. Alors, il va falloir que ça s'évalue, ça. Est-ce que, oui ou non, on est, en soi, devant une cause tellement importante et complexe que ça va prendre plus, ou bien qu'on est dans un cas où peut-être ça pourrait prendre plus que ça? Mais ce n'est pas clair.

Alors, qu'est-ce que l'on fait? Le recours est le suivant: Devons-nous ou pouvons-nous présenter la requête dès le début, c'est-à-dire qu'on fait le recours puis on dit: Ah! c'est complexe, donc on demande l'autorisation de dépasser le 180 jours, ou bien on donne aux parties les mêmes règles qui s'appliquent aux autres, c'est-à-dire de faire diligence, de préparer leur dossier avec diligence et d'être le plus prêts possible, pensant que, possiblement, au bout de cinq mois sur six, on n'aura pas complété ou on aura complété? Si on a complété, la requête n'aura pas eu cours, ou, si on n'a pas complété, on sera en mesure d'être devant le juge et de dire: M. le juge, on a fait vraiment diligence, on a fait ce qu'il y avait à faire ? les deux parties parlent, ce n'est pas une, là ? nous avons fait diligence puis on est incapables d'arriver dans les délais; on demande un délai additionnel ? mettons ? de deux mois ou de trois mois. Le juge, informé par les deux parties de la diligence, va être là.

Mais imaginons le cas ou un des deux procureurs dit: M. le juge, on nous demande une prolongation, mais parce qu'on pensait, une des parties pensait que c'était une cause extrêmement complexe et difficile, mais, moi, je vous dis qu'on aurait été prêts, n'eût été les lacunes de mon collègue qui n'a pas fait diligence, qui n'a pas fait... de respecter les ententes ? parce que, par hypothèse, ça veut dire qu'on ne suit pas la règle, ça. Alors là je m'objecte, M. le juge, à une prolongation de délai. Oh! il faut donc permettre à quelqu'un de s'exprimer ainsi, parce qu'il y a l'intérêt des deux. Il y a l'intérêt de l'un, mais il y a intérêt de l'autre aussi. Alors, je pense que des parties qui auront fait ce qu'elles peuvent faire et qu'une tierce personne juge pourra apprécier en disant: Oui, définitivement, on a fait diligence et on est incapable d'y arriver, donc je donne un délai, ou bien dire: J'écoute un des procureurs et je constate que l'autre partie n'a pas fait diligence, auquel cas je ne suis pas d'accord... Alors, c'est ça, la nuance qu'il y a entre les deux.

Et je pense qu'il n'y a pas de coûts additionnels, comme le souligne le Barreau, parce que, dans les deux cas, il faut faire une requête. Alors, faire une requête la première semaine ou faire une requête 15 jours ou un mois avant, ça ne change rien. Le seul élément, c'est: Est-ce que le procureur va y penser? Bien là je m'excuse, mais je pense que, quand on prépare un dossier, qu'on suit son dossier, on est facilement capable de mettre à l'ordre du jour, à son agenda un délai, comme on met un délai de prescription. Et, dans un bureau d'avocats qui se respecte, il y a un registre des prescriptions, quel qu'il soit, pour s'assurer qu'on ne défonce pas les délais, ce qui fait que, trois semaines avant, lors de l'appel des causes...

Je vais référer à ce que j'ai bien connu moi-même dans mon bureau pour l'avoir instauré: trois semaines, un mois avant l'expiration d'un délai, le lundi matin, lors des rencontres de tous les avocats du bureau, un rappel était fait, disant: Dans tel dossier, Me Tremblay, il y a un délai d'échéance de prescription... il y a un délai de prescription. Est-ce que la procédure a été signifiée? Oui? Parfait, on annule. Ou bien: Non? Alors, on remet à 15 jours... N'oubliez pas de faire votre procédure, parce que c'est un délai de prescription. Bref, un bureau structuré, organisé le fait au niveau de sa secrétaire et le fait au niveau de l'organisation pour qu'on respecte... Alors, ça permettra aux parties, aux deux parties, pas juste à une, de faire valoir: Oui, on n'a pas été capables, puis, oui, c'est un dossier complexe, puis on a fait diligence. Le juge va donner ça comme lettre à la poste. Inversement, s'il y a un débat, bien, les parties auront l'occasion de le faire, ce qui ne serait pas le cas si c'était donné depuis le point de vue.

C'est ça que j'ai mentionné, à l'époque. Je pense encore, après réflexion, qu'il faut s'assurer que, même si on est dans une cause complexe, on fasse diligence. Je me vois mal arriver dans un dossier où après six mois une des parties pourrait dire au juge: Vous savez, M. le juge, nous sommes dans une cause complexe, nous n'avons rien fait, mais il n'y a pas de problème. Bien, il y a une des parties qui peut être comme ça; l'autre, elle, ne sera pas contente. Et, si on dit dès le point de départ que le libre champ... Il n'y aura plus de balises, après, s'il n'y a plus de contrôle. Il n'y aura plus de contrôle, en aucun moment.

n(16 heures)n

Comment l'avocat qui est placé devant un autre qui ne fait plus diligence va-t-il pouvoir s'adresser au juge? Il ne pourra plus s'adresser au juge. Par hypothèse, dès le point de départ, il aura eu son break, hein, l'autre partie aura eu son break, on dépasse les délais. Alors, comment va-t-il se plaindre? Où est, dans le Code, la disposition qui va dire: Hé, hé, hé! wo, wo, wo! ça ne marche pas, alors que, dans tout ce que nous faisons, nous nous assurons que les parties, les deux parties soient de bonne foi, fassent diligence et atteignent le résultat escompté? C'est pour ça que je ne peux pas agréer à la demande du Barreau.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: Juste une précision: Est-ce que c'est à la discrétion du juge? Quand on fait la requête pour prolongation du délai, le juge refixe le délai à sa discrétion ou est-ce que...

M. Bégin: C'est-à-dire, il y a deux aspects dans votre question. Il doit avoir un motif. Il faut qu'il soit dans les circonstances prévues. Le texte dit... Un instant.

(Consultation)

M. Bégin: Bon. Alors, il faut être... Si vous le prenez dans le bas, là, Mme la députée, on dit: «Le tribunal peut, sur demande présentée au plus tôt dans les 30 jours précédant l'expiration du délai [...] prolonger ce délai lorsque la complexité de l'affaire ou des circonstances spéciales le justifient.» Alors, il «peut relever une partie des conséquences de son retard si cette dernière démontre qu'elle a été, en fait, dans l'impossibilité d'agir dans le délai prescrit». C'est donc qu'il y a des moyens pour permettre à un procureur ou à une partie de ne pas être coincés. C'était l'esprit de la demande, que j'ai acceptée parce que je trouvais ça correct de le faire. Mais, de l'autre côté, il faut s'assurer que le cheminement se fasse correctement. Alors, le juge va avoir: complexité de l'affaire, circonstances spéciales justifiées et, un autre cas, s'il y a un retard qui entraîne des dépassements, il pourra, dans certaines circonstances, l'accorder, première partie de la réponse.

Deuxième partie, il y avait, dans le projet de loi initial, un délai unique de 90 jours. Il pourra, à mon point de vue, avec la rédaction qui est là, donner le délai qu'il jugera à propos, ce qui est un argument de plus en faveur de mettre ça dans les 30 jours qui précèdent l'expression du délai parce que, à ce moment-là, il pourra prendre connaissance de l'état d'avancement du dossier et dire, par exemple, avec justesse: Ouais, je pense que vous avez besoin encore de cinq mois, hein? Ou bien: Je pense que 30 jours... Le temps de faire ci, ça, les parties auront donné leurs prétentions, et vous aurez besoin peut-être d'un délai de 30 jours. Ou peut-être qu'il pourra dire, à la limite, dans un cas exceptionnel, en bas d'un an. Est-ce qu'il pourrait encore même dire: Je vous donne un délai de cinq mois à charge, dans cinq mois, de venir me voir au cas où vous n'auriez pas pu terminer pour des raisons x, y, z? Je ne vois pas ce qui empêcherait un juge de faire ceci. Mais, dans toutes les circonstances, le juge est habile à recevoir les prétentions des parties et d'entendre les deux côtés pour dire: Oui, je dois l'accorder, les parties ont vraiment fait ce qu'elles avaient à faire, mais, pour des raisons qui ne leur sont pas nécessairement propres, des raisons extérieures, des raisons tout à fait légitimes, elles n'ont pas pu y arriver. Alors, moi, je trouve ça correct. C'est le cadre dans lequel ça se fait.

Mme Mancuso: Mais je veux juste comprendre une autre chose.

(Consultation)

Mme Mancuso: Ah oui, on peut aller en appel de cette décision-là, par exemple?

M. Bégin: Je ne croirais pas. Je ne croirais pas.

Mme Mancuso: Donc, une partie serait privée de ses droits si, par exemple, le juge refuse...

M. Bégin: Bien, vous savez, quand vous êtes... Oui, mais, quand un juge vous a donné un délai additionnel et que vous ne l'avez pas rempli, la décision du juge, elle se vérifie dans sa justesse non pas au moment où il la prend, mais plus tard. Vous êtes en train de me dire, par exemple ? prenons une hypothèse simple: Nous sommes au bout du cinquième mois, les parties sont rendues à tel niveau dans la préparation de leur dossier. Il est manifeste que ce ne sera pas suffisant pour mettre le dossier en état, et elles demandent, les parties conviennent, ou le juge le permet, de donner trois mois additionnels. D'accord? Au bout de trois mois, le dossier n'est pas en état. Alors, la décision, c'est: quand le juge a donné trois mois, si une des parties dit: Je m'excuse, mais j'ai besoin de six mois, bien là on n'est quand même pas pour permettre à quelqu'un de monter en Cour d'appel, prendre six mois de plus pour se faire dire qu'il n'y avait pas de délai additionnel. Là, là, ce serait une tactique qui serait utilisée par un procureur.

On a soulevé ensemble, hier, le député de Chapleau, pas tout à fait dans la même situation, mais quelque chose qui ressemblait à ça, une utilisation abusive des procédures d'appel, ou d'évocation, ou de recours spéciaux afin de gagner des délais. Alors, on ne doit pas jouer avec ça. On doit permettre aux parties d'avoir des délais raisonnables. Moi, j'ai confiance qu'un juge bien informé par les parties de l'état de la situation et qui dit: Moi, je crois que vous devriez être bons pour terminer dans trois mois... On devrait utiliser le trois mois au meilleur escient. Et, si ? et, moi, je ne vois rien dans le texte qui l'empêche ? au bout de trois mois ou à la veille du trois mois, une des parties dit: Écoutez, il m'a fourni ces documents il y a 15 jours puis j'ai besoin de faire faire une vérification qui va prendre trois semaines, je pense bien qu'il n'y a personne qui va s'objecter à ce qu'il aille devant le juge pour l'obtenir, son délai. Alors, il ne faut pas encarcaner le monde de manière telle qu'il soit pris dans une souricière, mais, d'un autre côté, il faut s'assurer que ce monde agisse. Je le rappelle, il y a toujours deux parties, et les deux parties n'ont pas les mêmes intérêts.

Mme Mancuso: Mais, justement, les parties n'ont pas les mêmes intérêts, et une partie pourrait se voir subir des préjudices à cause d'une telle décision et perdre des droits. Donc, je me demande pourquoi est-ce qu'on ne permettrait pas de faire ça dès le début du processus. Si on avait le droit de faire la requête en prolongation du délai dès le début de la cause, on saurait dans qu'est-ce qu'on s'embarquerait puis il y aurait moins de chances qu'on augmenterait le nombre de procédures. Parce que ça peut arriver qu'on dise, après le trois mois... puis à chaque trois mois on fait une autre requête en prolongation des procédures. Donc, ça devient un peu de la procédurite et...

M. Bégin: Au contraire, c'est pour éviter la procédurite. Je vais prendre quelques scénarios puis je pense que je vais être assez clair. Un dossier complexe, prenons des cas où il y a des expertises. Bon. On se présente devant le juge trois semaines après le début des procédures. On dit: M. le juge, dossier complexe, on demande de ne pas exiger un délai de 180 jours. Alors, première question: Est-ce qu'il y a un délai s'il n'y a plus de délai de 180 jours? Ou, s'il y en a un, quel est-il? Alors, le juge va dire: Vous pensez quoi? Alors, on va dire, mettons, un an et demi. Si une des parties ne bouge pas ? mettons qu'on dit: Parfait, tout le monde s'en va avec le jugement, un an et demi ? et un an se passe, puis une des parties niaise, ne fait rien, ne produit pas ses documents, ne produit pas ses expertises, ne fait pas ses interrogatoires, l'autre partie va être en mesure de faire quoi? D'attendre que le délai soit presque expiré ou soit expiré pour agir, alors qu'il me semble que, si le juge dit: Écoutez, je comprends, d'accord avec vous, ça fait...

Non. C'est-à-dire, si vous êtes à 30 jours de l'expiration du six mois et que toutes les parties savent qu'elles ont un devoir de diligence, le juge, au bout de cinq mois, va dire: Oui, oui, c'est évident que vous êtes devant un dossier complexe, ça va de soi, mais qu'est-ce que vous avez fait aujourd'hui à date? Qu'est-ce que vous avez fait? Comparution? Défense? Maître, vous avez des expertises. Les avez-vous demandées? Quel est le nom de l'expert? Dans quel délai doit-il produire son expertise? Bien, M. le juge, savez-vous, justement, je m'attendais de les prendre la semaine prochaine. Ah bon! Bien là un juge peut dire: Monsieur, qu'avez-vous fait pendant cinq mois? Rien.

Vous savez, c'est un peu comme la fable de la cigale et de la fourmi, hein, à un moment donné il faut commencer. Il y en a un qui emmagasine, puis un autre qui n'emmagasine pas, d'autres qui dépensent à mesure. Il faut commencer pour arriver. Alors, au bout de cinq mois, le juge peut voir ce qu'il en est et doser aussi la prolongation qu'il pourrait accorder, s'il y a lieu d'en accorder une. Sinon, on prêche pour dire: Regardez, on fait une réforme, là, mais il y a quelques cas particuliers qui ne seront pas dans la réforme, c'est-à-dire qu'on ne s'assurera pas du respect des mêmes principes tout en tenant compte des caractères particuliers de certains dossiers. Est-ce qu'on veut donner un chèque en blanc à l'une des parties, une fois que le juge a donné son autorisation, qu'il va pouvoir continuer à traîner pendant des années sans que l'autre partie qui en subit un préjudice ne puisse intervenir? Je pense que non. Alors, l'idée de faire ça au bout du cinq mois, ça permet de voir ce qu'il en est.

n(16 h 10)n

Et, dans cinq mois, vous savez, vous avez déjà plaidé, on en a fait pas mal, de choses, généralement, hein? Entre autres, on a demandé nos experts, si on en a, puis, normalement, dans cinq mois, on en a eu une première idée de ce qu'il en est ou, en tout cas, quand est-ce que ça va arriver puis si ça va nécessiter une contre-expertise et à peu près. Alors, les choses avancent et on sait si les parties sont diligentes, pour ne pas dire de bonne foi. Alors, moi, je crois à ça, parce que, autrement, c'est chèque en blanc et c'est faire comme si on ne faisait pas une réforme et dire: On retourne à ce que c'était avant. Ce n'est pas ça que nous voulons. Nous voulons nous assurer que les délais soient suffisants aux parties pour faire ce qu'elles ont à faire, mais on veut aussi qu'une des parties qui se voit préjudiciée par l'attitude de l'autre en termes de temps soit capable de faire une intervention pour s'assurer qu'on respecte ses droits, à lui aussi, parce qu'il y a l'un, mais il y a l'autre.

Mme Mancuso: ...l'autre, là. On est en train de dire: C'était trop long, avant. Là, on commence, on dit: Faites ça vite, vite, vite. Dépêchez-vous pour finir ça tout dans l'espace de six mois.

M. Bégin: C'est le contraire, ce qu'on vient de dire, là. Ce qui est prévu, c'est que, dans certains cas... Et on laisse ça aux juges, le soin de l'apprécier, selon des critères qui vont se développer de plus en plus, pour ne pas dire qu'ils le sont déjà, et on va évaluer que, dans certains cas, effectivement, la règle est trop sévère et qu'en conséquence il faut plus de temps. Mais, une fois qu'on a dit ça, ça ne veut pas dire qu'on est libre de tout; parce qu'on a dit qu'on a un dossier complexe, on n'a plus besoin de respecter les règles.

J'en ai eu des tonnes de dossiers avec des expertises. Il y en a qui ont pris quelques années, d'autres ont pris quelques mois. Parce qu'une expertise, vous savez, ça peut être complexe puis ça peut être simple aussi, hein? Alors, ça ne veut pas dire que, parce que j'ai dit que j'avais un dossier complexe avec une expertise, donc, M. le juge, donnez-moi l'autorisation de ne pas être astreint au délai de six mois, mais que je prends trois ans alors que ça aurait pu en prendre huit... Il y a un problème. Mais là...

Une voix: ...extrême à l'autre.

M. Bégin: Bien, c'est ça, il ne faut pas tomber d'un extrême à l'autre. Il faut donc permettre à quelqu'un d'arbitrer ça. Qui peut le faire? Le juge. À quel moment? Au moment où les parties ont utilisé du temps, et c'est du temps important, c'est les cinq premiers mois. C'est là que ça commence, ça bouge, là. C'est là qu'on fait ses orientations. On consulte nos experts, on se fait une tête si on va contester ou pas. C'est là que ça se décide. Mais on peut aussi ne pas le faire parce que ça nous intéresse de gagner du temps. Alors, moi, je pense qu'il faut que le juge ait cette capacité d'arbitrer. C'est plus lourd comme responsabilité pour le juge, mais c'est dans le sens de l'intérêt des parties. Et le débat, c'est ? tout le monde l'a dit: On pense que ça prend trop de temps pour certains débats, et le temps, ça coûte cher. Alors, ce n'est pas l'intérêt des justiciables que ça prenne trop de temps, mais donnons-leur la possibilité d'avoir le temps qu'il faut. Et le meilleur arbitre là-dedans, ce n'est pas l'une des deux parties, c'est le juge.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Lorsqu'on lit: «Le tribunal peut, sur demande présentée au plus tôt dans les 30 jours», vous avez arrêté à 30 jours, hein? Bon. L'avis du Barreau et de la magistrature... Le Barreau est contre l'introduction du nouveau délai de 30 jours, il est d'avis que ça va constituer un carcan et que ça va créer une difficulté qu'on voulait précisément enlever. Quel est l'avis de la magistrature quant à l'introduction...

M. Bégin: Au moment du débat, quand ça s'est fait, au moment où on a fait la chose, Me Vadboncoeur a dit elle-même qu'elle n'était pas d'accord. Quant aux autres parties, sur le coup, elles ne se sont pas évidemment prononcées de manière significative, soit un vote, là. Bon. Récemment, il y a 10 jours ou 15 jours, j'ai reçu une lettre avec le même paragraphe des juges de la Cour du Québec et de la Cour supérieure, disant qu'on aimerait mieux ne pas avoir cette règle-là, mais je reste persuadé encore qu'il s'agit là d'une mesure qui n'est pas un carcan mais qui est la logique et la contrepartie de l'ouverture que j'ai manifestée pour éviter que les parties considèrent être prises dans un entonnoir trop étroit. Oui, il faut l'enlever. Je l'ai enlevé. Mais la contrepartie, ce n'est pas carte blanche, ce n'est pas liberté absolue, ce n'est pas: nous avons maintenant fait sauter le délai, et on recommence comme c'était avant. Je m'excuse, ce n'est pas ça qui est l'esprit de la réforme.

Et, je le répète, je pense que le juge est là pour arbitrer ces questions-là. Et le Barreau dit à plusieurs reprises qu'il faut faire confiance au juge. À mon point de vue, ils ont raison là-dessus, il faut faire confiance au juge. Et les parties, celles qui le feront, ça ne coûtera pas plus cher pour elles, mais elles pourront saisir le juge d'une vraie situation et qui sera non pas basée sur une estimation comme ça, mais sur des faits concrets, c'est-à-dire l'avis de cinq mois entre tes deux procureurs.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Le Barreau, effectivement, se permet de dénoncer encore une fois quel est l'esprit de la réforme et il ajoute: Si on veut que la réforme fonctionne, c'est bien sûr, ça requiert de la flexibilité et de la souplesse. On considère... Le Barreau semble le considérer. Vous avez même dit, en ce qui a trait à la magistrature, que, du côté de la Cour supérieure et de la Cour du Québec, on semble également favoriser le retrait, du second alinéa, des mots «présentée au plus tôt dans les 30 jours précédant l'expiration du délai de 180 jours».

Pourquoi est-ce qu'il est nécessaire de réintroduire ce carcan, «au plus tôt dans les 30 jours», si justement l'esprit de la réforme requiert flexibilité et souplesse, si, oui, effectivement, les juges sont capables d'exercer une juridiction ou une discrétion?

M. Bégin: Écoutez, je pense avoir été très clair. Il y avait une disposition qui faisait en sorte que les juges... Il y avait une possibilité d'extension qui était limitée. Bon, très clair.

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Mais là... dans les 30 jours...

M. Bégin: Oui. Mais le 30 jours, ce n'est pas le fruit du hasard ni quelque chose, là, qui est dans l'abstrait, il est très concret. Quand les parties vont demander au juge de prendre plus de six mois, elles devront avoir travaillé pendant cinq mois à faire en sorte que le dossier soit le plus avancé possible. Par hypothèse, nous considérons qu'à ce moment-là les parties vont être en mesure de dire au juge: Regardez, M. le juge, Mme la juge, nous ne pouvons pas y arriver, et le juge va être en mesure de dire: Je suis d'accord avec vous. Mais il va être aussi en mesure de dire: Vous me demandez une extension de délai, je suis tout à fait d'accord, maître. Vous voulez combien? Maître, combien de temps pensez-vous que ça peut prendre? Et là, comme ça va être généralement le cas devant un juge, il y en a un qui va dire, mettons, un an, puis l'autre va dire: Bien non, M. le juge, dans deux mois on est capables de terminer ça si tout le monde s'y met. Alors, le juge va apprécier. Ce n'est pas un...

Une voix: ...

M. Bégin: Oui. Mais c'est ça. C'est leur métier. Il va évaluer. Maître... L'un dit telle affaire. C'est évident, maître, que ça n'a pas de bon sens, un an, voyons donc! Vous êtes capable de faire ça dans trois mois. Maître, deux mois, je pense que vous êtes trop sévère, je pense qu'un mois de plus serait suffisant. Le juge va exercer son jugement. Le cas qui peut arriver, c'est que deux parties, de bonne foi, avec un juge qui a trouvé trois mois, se disent: Oh non, on n'en n'a pas assez. Pourquoi ne pourraient-ils pas retourner devant un juge, à ce moment-là, et dire: M. le juge, regardez, on a eu tel pépin, toute la gang, là, puis on ne peut pas arriver? Pouvez-vous nous donner un délai additionnel? Qu'est-ce qui empêche ça? Rien. Mais là on aura eu une chose correcte, les droits des deux parties seront respectés, la partie qui demande plus de temps comme l'autre partie qui croit qu'on abuse du temps ou qu'on en prend trop, sans prendre le mot «abuser», qu'on en prend trop. Les deux ont des intérêts qui sont souvent divergents, et ça, là, personne ne pourra me convaincre que ce n'est pas la vie réelle.

Quand l'économie va mal, il y a beaucoup de procédures et elles prennent beaucoup de temps, pour une raison qui s'appelle bien simple, c'est qu'il y a une des parties qui n'a pas intérêt à payer. Elle veut du temps, et il y a eu des longueurs de temps dues à ça. Ce n'est pas méchant, mais ça existe. Mais la partie qui a le droit d'avoir son argent, qui doit attendre un an et demi de plus que le temps normal, trouvez-vous que c'est correct? Non. Alors, moi, je veux faire cet équilibre-là. Comme ce n'est pas moi qui peux le déterminer ni vous, il faut qu'il y ait quelqu'un: c'est le juge. Et je donne la possibilité aux parties de faire les représentations ad hoc dans chaque cas pour tenir compte de leur situation. J'ai donc enlevé le verrou qui était là, mais je n'ai pas donné la clé des champs, par exemple.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Viger avait une question, ou Mme la députée de Bourassa, une ou l'autre.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui. Vas-y, vas-y, vas-y.

Le Président (M. Boulianne): Allez-y. Toujours sur l'amendement?

Mme Mancuso: Oui. Mais, M. le ministre, vous devez être conscient que, particulièrement vu qu'il n'y a pas d'appel de cette décision, il y a des possibilités que des parties vont perdre des droits. On dit aussi ? c'est l'avis du Barreau, je crois, aussi ? on dit: De plus, le législateur n'a pas retenu... Je m'excuse. De plus, le législateur n'a pas retenu le critère du préjudice sérieux causé à une partie, tel que recommandé par le Comité de révision à la recommandation 3-46 de son rapport. Ce critère existe actuellement dans la procédure allégée. Il est important qu'il soit ajouté au second alinéa, puisqu'il n'est pas nécessairement couvert par les deux autres critères. Le préjudice peut être important pour la partie.

M. Bégin: Vous venez de me donner le plus bel argument que je ne pouvais pas avoir. Une...

Le Président (M. Boulianne): M. le ministre, on va laisser terminer madame.

M. Bégin: Ah! excusez. Je pensais qu'elle avait terminé son point de vue.

Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, terminez, Mme la députée. Ça va? Alors, M. le ministre, allez-y.

n(16 h 20)n

M. Bégin: Oui. Alors, je pense que c'est le plus bel argument que vous pouviez m'offrir. On a une procédure qui était entamée et d'une complexité x. On pense qu'on ne sera pas capable de faire respecter le délai. Alors, comment pourrait-on évaluer le critère d'un préjudice sérieux, à ce moment-là? Comment pourrait-on évaluer le critère de préjudice sérieux? Comment pourrait-on dire: Vous savez, M. le juge, la procédure vient d'être prise il y a une semaine, on a un dossier complexe puis j'ai un préjudice sérieux qui est en cause. «Oh boy»! Je ne vois pas comment le juge pourrait tenir compte d'un tel critère. Ça ne peut pas s'appliquer. Si vous êtes à 30 jours, ah, là, par exemple, ça pourrait être le cas. Mais pas si vous l'accordez dès le point de départ, c'est impossible. Ça ne peut pas être un préjudice sérieux, le temps n'a pas encore commencé à courir.

Mme Mancuso: À l'intérieur des cinq mois, avant...

M. Bégin: Bien, si vous le dites à l'envers, peut-être que là, s'il a passé cinq mois, et que vous êtes au moment de présenter une requête, et vous dites: M. le juge, je ne suis peut-être pas dans le premier critère, complexité, je ne suis peut-être pas dans des circonstances spéciales, mais je pourrais subir un préjudice ? pour reprendre cet exemple-là ? là le juge, compte tenu des faits qui seraient exposés là, pourrait dire: Effectivement, ouais, il pourrait y avoir un préjudice sérieux; en conséquence, je l'accorde. Ça, ça pourrait. Mais, au bout de 15 jours après la procédure, comment pourriez-vous invoquer un motif sérieux? De quoi vous parlez? Il n'y a personne qui pourrait dire ça devant le juge.

Mme Mancuso: Disons que l'expert nous dit qu'il n'aura pas à faire son expertise... son rapport d'expertise ne sera prêt avant un an.

M. Bégin: Ça ne va pas dans le critère du préjudice sérieux, ça va rentrer dans le critère, le premier, là, complexité de l'affaire.

Mme Mancuso: Oui, mais on est au courant de ça dès le début de la procédure, donc...

M. Bégin: À ce moment-là, vous allez invoquer la complexité de l'affaire, point à la ligne, puis le juge va l'évaluer ou pas. Mais, si vous voulez invoquer le préjudice sérieux, ça ne peut pas exister, c'est impossible, impossible.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Alors, ça va, Mme la députée de Viger? Oui? Alors, Mme la députée de Bourassa, d'autres questions?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Si, pour une raison ou pour une autre, le tribunal est saisi d'une demande de prolongation et qu'il la refuse, est-ce que ça veut dire que ça place le défendeur dans une position où il pourrait être déclaré forclos?

M. Bégin: Oui. C'est de la même manière...

Mme Lamquin-Éthier: Donc, il y a perte de droits.

M. Bégin: ...de la même manière que, quand la loi prévoit que vous devez faire un acte de procédure dans un délai prescrit et que vous ne respectez pas ce délai, vous êtes forclos. Ce n'est pas la première fois, vous savez. Dans la réforme que j'ai faite en 1995, on a eu à discuter à plusieurs reprises de cette question-là, à la fois pour la voie accélérée mais également pour la production de mémoires en Cour d'appel et l'exécution de certains actes devant la Cour d'appel, et ça s'est appliqué. Il y a des gens qui n'ont pas respecté les nouveaux critères, il y a eu jusqu'à 17 dossiers en même temps devant la Cour d'appel sur la question des productions de mémoires. Il y a eu quelques cas qui ont été jugés comme étant particulièrement exceptionnels, et donc la règle ne s'y appliquait pas. Mais, quant au reste, ça s'est appliqué, et les gens qui ne produisent plus leur mémoire en temps voulu, bien, ils sont incapables de le produire.

Est-ce que ça entraîne une conséquence? Bien sûr que ça entraîne une conséquence, comme quand un avocat a un délai d'un an, puis qu'il oublie la prescription, et qu'il est poursuivi en dommages et intérêts. C'est sûr qu'il a perdu un droit. Mais que la personne soit obligée de faire un acte dans un délai, c'est important. S'il y a un délai que le juge a trouvé...

D'abord, première hypothèse, il faut qu'il ait sorti du premier délai, qui est de celui de six mois. Donc, il a voulu tenter de convaincre un juge qu'il était dans un cas autre que celui-là. Le juge lui dit non. Bien oui, mais, écoutez, il faut qu'il suive les règles qui sont là, hein, donc il faut qu'il s'exécute. Mais, s'il est dans une hypothèse où vraiment il y a un préjudice, où vraiment il y a telle affaire, à ce moment-là il va avoir eu gain de cause de la part du juge. Et, s'il perd, là il y aura un appel possible devant la Cour d'appel et il invoquera les motifs qui sont pertinents à ce moment-là. Ça deviendra l'équivalent d'un jugement final.

Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le ministre. Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Pour reprendre l'exemple que vous venez de donner du défendeur qui serait déclaré forclos, il y a une règle qui veut que nul justiciable, si je peux ainsi dire, perde un droit en raison d'une question de procédure. Alors là est-ce qu'on peut prétendre que ce serait le cas? Et est-ce qu'on peut dire que ça fait en sorte que l'article 2 du Code, qui, je crois, selon ce que dénonce le Barreau, suivi très scrupuleusement... Il y a une difficulté de conciliation entre le fait que, si, pour une raison ou pour une autre, le tribunal refuse la prolongation, le défendeur se trouve forclos, il est forclos sur une simple question de procédure, donc on ne respecte pas une règle...

M. Bégin: Non, il y a des procédures qui peuvent vous faire perdre des droits. Si vous ne faites pas ce que vous avez à faire dans le délai prescrit puis que vous voulez invoquer un moyen plus tard, vous ne l'avez pas fait en temps voulu, vous allez perdre des droits. Vous allez perdre votre cause, point à la ligne.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Si je comprends bien ce que vous me dites, donc, cet argument-là également, utilisé par le Barreau, vous ne le retenez pas.

M. Bégin: C'est tout à fait exact. Ce n'est pas...

Mme Lamquin-Éthier: Le Barreau a tort, là, et vous avez raison. La magistrature... Si je comprends bien, vous avez reçu une lettre de la Cour supérieure et de la Cour du Québec qui, à l'instar du Barreau, vous recommande de retrancher du second alinéa les mots «présentée au plus tard dans les 30 jours», mais c'est vous qui avez raison.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Non. Ce n'est pas ce que j'ai dit du tout. Sur la forclusion...

Mme Lamquin-Éthier: Savez-vous, en bout de ligne, ça équivaut à revenir que c'est vous qui avez raison, parce que, toutes les argumentations qui vous sont soumises par le Barreau, par la magistrature, par le Comité de révision, vous ne les retenez pas.

M. Bégin: Toute la forclusion est une question autre que celle que vous venez de dire. Je veux y répondre parce que ce n'est pas exact, ce qui a été mentionné. Ça existe, la forclusion, et la Cour d'appel l'applique, et je pense que la Cour d'appel est bien consciente... comme d'ailleurs la Cour suprême a eu à se prononcer là-dessus, et on trouve ça tout à fait correct dans certaines circonstances. Et, oui, la conséquence de la forclusion, c'est la perte de droits. Donc, il va arriver des cas où effectivement la forclusion va entraîner des pertes de droits, c'est sûr, parce que quelqu'un n'aura pas fait ce qu'il a à faire.

Mme Lamquin-Éthier: ...sur une question de simple procédure.

M. Bégin: Il y a des cas de procédure qui entraînent ça.

Mme Lamquin-Éthier: Non, mais là c'est une forclusion...

M. Bégin: Regardez, madame, quand vous dites qu'est forclos de produire son mémoire devant la Cour d'appel quelqu'un qui ne l'a pas fait en temps voulu ? hein, il est forclos de le faire ? êtes-vous d'accord avec moi que ceci est une question de procédure et que ceci peut entraîner des conséquences pour la partie qui est forclose? La réponse c'est oui, et ça, ça existe. Ce n'est pas une méchanceté, c'est une façon de s'assurer du respect des règles.

«503.1. Lorsque le mémoire n'est pas signifié et produit dans le délai prévu par l'article 503, l'appel est réputé déserté, à moins que l'appelant, avant l'expiration du délai, n'ait signifié et produit au greffe [...] une demande de prolongation de délai», qui peut être rejetée, qui peut être rejetée. Et, si le juge rejette la demande de prolongation de délai, à supposer qu'elle ait été faite dans le délai, admettez qu'une question de procédure entraîne la perte de droits. Donc, ce n'est pas un monstre, ça, c'est simplement une sanction qui est sévère pour le manque de respect d'une règle de procédure qui est importante, parce que le fait de ne pas respecter des règles, ça a des conséquences chez l'autre partie aussi. Donc, peut-être qu'une des parties dit: Moi, je perds des droits. Bien oui, mais quels droits faites-vous perdre aux autres, monsieur ou madame, par votre comportement? Alors, il faut que les balances s'équilibrent. Alors, c'est ça qu'on vise.

Là-dessus, concernant le délai, ce que les gens m'ont mentionné, c'était que la...

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Bégin: Les gens, je parle de l'ensemble: la magistrature, le Barreau. Ce qu'ils m'ont mentionné, c'est: Nous trouvons que la barrure que vous avez mise, c'est trop serré, enlevez-la, mettez-la plus souple, ce que j'ai accepté de faire. Mais j'ai dit cependant...

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Bégin: Je ne suis pas obligé de retenir tout ce qu'il y a, parce que je représente autant sinon plus l'intérêt de la justice et la conception de ce que doit être le fonctionnement de certaines choses que d'autres parties. Je suis membre du Barreau, je suis ministre de la Justice, et l'intérêt de la justice est perçu d'une certaine manière, et je vous dis que ce qui a été considéré comme étant d'une très grande sévérité au moment de son adoption fait aujourd'hui la fierté et la base de toutes nos demandes d'aujourd'hui. Je ne veux pas dire que j'ai raison, Mme la députée, mais, quand je faisais la voie accélérée, quand je faisais la requête pour l'appel, celui qui vous précède dans votre rôle disait que c'était, bon, terrible. Maintenant, tout le monde considère que c'est une très grande amélioration, au point qu'on dit: Ce qui était exceptionnel, on va l'étendre à l'autre. Alors, c'est parfois possible qu'on ait raison même si d'autres pensent le contraire.

n(16 h 30)n

Dans ce cas-ci, je soumets respectueusement, pour l'avis contraire, que j'ai, dans l'esprit de la réforme, fait en sorte que les parties qui seront dans des dossiers exceptionnels doivent respecter quand même la diligence parce qu'il n'y a pas qu'une seule partie qui est en cause mais deux parties, et que ce qui fait l'affaire de l'une ne fait pas nécessairement l'affaire de l'autre, et qu'on doit permettre qu'une personne arbitre ces choses-là, et que le moment pour faire l'arbitrage n'est pas au début mais près de l'arrivée du terme, et où on est en mesure de juger ça. Je soumets respectueusement que ceci est plus conforme à l'esprit de la réforme. Le Comité de révision ne peut pas avoir discuté de ça parce qu'il ne savait pas ce que j'allais proposer.

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Bégin: Bien oui, mais il dit: On décrit des choses.

Mme Lamquin-Éthier: ...de prévoir que le délai peut être prorogé, ils l'ont examiné avant ou après l'expiration. Et la recommandation R.3-46 dit bien: «De prévoir que ce délai peut être prorogé avant son expiration, lorsque la complexité de l'affaire, des circonstances spéciales ou un risque élevé de préjudice sérieux pour une partie le justifie; après son expiration, lorsque la partie démontre qu'elle est dans l'impossibilité d'agir.» Alors, il n'y a pas le carcan de 30 jours auquel, nous, on fait face présentement. Ce carcan-là a été dénoncé par le Barreau, a été dénoncé par la magistrature...

M. Bégin: Je trouve le mot fort.

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, dénoncé, dénoncé, dénoncé. Écoutez, ils vous envoient une lettre. Ils vous disent...

M. Bégin: Madame, j'ai entendu ici tellement de choses...

Mme Lamquin-Éthier: Pouvez-vous la déposer, d'ailleurs, M. le ministre, la lettre?

M. Bégin: Je ne sais pas si je peux déposer les lettres de la magistrature. Normalement, ça ne se dépose pas, à moins qu'on ait leur autorisation, et je n'ai pas discuté de la possibilité. Mais je vous ai dit franchement ce qu'il en est, alors je pense que c'est suffisant, en principe.

Mais j'ai entendu beaucoup de choses ici, beaucoup de groupes faire des représentations concernant des projets de loi. J'ai entendu des langages incendiaires puis j'ai entendu des langages tout à fait «soft» pour dire, en bout de piste, la même chose. On peut dire: Je dénonce quelque chose, comme je peux dire: Je ne suis pas d'accord avec le texte qui est là et je propose qu'il soit remplacé par un autre qui... On a dit, en principe, la même chose. Mais une dénonciation au sens propre, ce n'est pas ça. De dire qu'on n'est pas d'accord, ce n'est pas une dénonciation.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors, à tout événement, le Barreau et la magistrature vous ont recommandé que soient retranchés du second alinéa les mots dont on parle, à savoir «présentée au plus tôt dans les 30 jours précédant l'expiration du délai de 180 jours». Et, si je regarde la recommandation formulée par le Comité de révision de la procédure civile à la page 273, R.3-46, je suis en mesure de voir que le point de vue est différent. Mais je comprends bien que vous maintenez votre décision à l'intérieur de la discrétion ou des pouvoirs dont vous disposez comme ministre.

Le Barreau, écoutez, soulève, mentionne qu'il existe plusieurs districts en région où la division de pratique ne siège qu'une fois par mois ou une... R.3-46.

M. Bégin: Me permettez-vous de le relire avec vous?

Mme Lamquin-Éthier: Oui. R.3-46?

M. Bégin: Oui. «De prévoir que ce délai peut être prorogé...

Mme Lamquin-Éthier: ...avant son expiration...

M. Bégin: ...avant son expiration, lorsque la complexité de l'affaire, des circonstances spéciales...» C'est avant. Et «après son expiration, lorsque la partie démontre qu'elle était dans l'impossibilité d'agir». Je prétends que je suis dans cette foulée.

Mme Lamquin-Éthier: C'est avant...

M. Bégin: Bien oui! Moi, je dis: C'est 30 jours avant l'expiration du délai de 180 jours.

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui, mais, vous, vous mettez un carcan. Le Comité n'impose pas tel...

M. Bégin: Le Code de procédure est bourré de carcans: 10 jours pour comparaître, 10 jours pour produire sa défense, 30 jours pour rendre un jugement, 90 jours pour faire ça. Ce n'est que ça, le Code de procédure civile.

Mme Lamquin-Éthier: L'objectif que vous poursuivez lorsque vous entreprenez la réforme, c'est quoi? Un allégement? Un assouplissement?

M. Bégin: Oh, il y a des fois que c'est un allégement, mais il y a des fois que ce qui peut paraître un alourdissement est le respect d'une règle de justice. Je prétends qu'un délai de 30 jours précédant l'expiration de six mois n'est pas une question d'allégement réglementaire, c'est une question de faire en sorte que les parties aient justice, et ça, s'il faut mettre un délai, on met le délai.

Mme Lamquin-Éthier: Alors, vous, ce que vous voulez, finalement, c'est que les parties respectent les délais auxquels elles sont soumises?

M. Bégin: Oui.

Mme Lamquin-Éthier: Bon, c'est bien, sauf que ce souci-là vous amène à ajouter un carcan qui est à l'expiration du délai de 30 jours.

M. Bégin: Une exigence.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, écoutez, c'est une exigence qui est jugée...

M. Bégin: Je vous le dis, c'est une question de vocabulaire. Mais je prétends que mettre une exigence de 30 jours, ce n'est pas un carcan, comme de dire que le délai de 10 jours pour comparaître, ce n'est pas un carcan, comme le délai de 90 jours pour produire un... quatre mois pour produire un jugement, ce n'est pas un carcan, c'est une exigence. Alors, je dis simplement que le vocabulaire utilisé est souvent un abus de termes. Parce qu'on peut dire ce que l'on pense sans tomber dans le coup de canon à chaque coup. Et, quand je dis «dénonce», quand je dis «carcan», c'est un vocabulaire guerrier que je ne crois pas utile d'utiliser.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, ça, vous vous en prenez à la lettre, hein, au vocable utilisé par le Barreau...

M. Bégin: Oui, parce que la lettre est écrite.

Mme Lamquin-Éthier: Écoutez, moi, je ne vois pas, dans l'utilisation de ce terme-là, un problème majeur, là, je ne prête pas d'intentions particulières. Lorsque je l'ai lu, j'ai compris que ça faisait image, que l'image se devait d'être forte pour qu'on puisse bien saisir la difficulté que ça risque de créer. Et, je ne le sais pas, là, écoutez, je pense que ce n'est pas nécessaire de prêter des intentions à personne, y compris au Barreau ou à quelque autre groupe, personne, association qui possède une expertise dont vous pouvez bénéficier et dont vous avez intérêt, je pense, à vous saisir, là.

Écoutez, là, Seigneur... Et, «dénoncé», c'est correct qu'on dise «dénoncé». Je comprends que vous préférez prendre bonne note. Ce qui est important, ce n'est pas le terme, c'est l'objet de la recommandation qu'on vous formule. Le Barreau du Québec et la magistrature, Cour supérieure et Cour du Québec, vous recommandent, hein: On va biffer le terme «de retrancher du second alinéa», mais vous ne la suivez pas, la recommandation.

M. Bégin: C'en est, un cas.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, ça n'arrive pas! C'est majeur! Écoutez, je ne comprends pas. Je veux bien qu'on se bute à l'utilisation d'un terme, mais ce qui est important, c'est le fond et le problème que ça risque de créer.

Tout à l'heure, je vous soulevais qu'il existe plusieurs districts en région où la division de pratique ne siège qu'une fois par mois, une fois à toutes les deux semaines. Le Barreau illustre en disant: La présentation de la requête en prolongation à l'intérieur du délai de 30 jours, il est impossible pour les raisons qu'on vient d'y dénoncer, parce que la division de pratique, elle ne siège qu'une fois par mois ou une fois à toutes les deux semaines. Donc, ce n'est pas possible, à ce moment-là, de répondre et, dans les délais, à l'intérieur d'un délai de 30 jours, d'agir.

Si la cour de division ne siège qu'une fois par mois ou une fois à toutes les deux semaines, comment voulez-vous que quelqu'un soit en mesure d'agir? Il est, je pense, clair que dans un cas comme ça ils sont dans une impossibilité absolue.

M. Bégin: Mais non. Et vous savez très bien que les fonctionnements dans les districts tiennent compte de différentes contraintes, y compris celle dont vous venez de parler. Ce n'est pas que sur ce cas que ça pose un problème, que les juges siègent aux 15 jours ou à des dates moins rapprochées que Québec.

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Bégin: Il est à l'intérieur... Mais vous pensez sincèrement que, si, par exemple, par hypothèse, pour une raison x, il y a une session qui est prévue exactement au centre de ce délai-là et que la cour, pour une raison x, n'ouvre pas, la personne perdrait ses droits parce qu'elle n'a pas présenté son... dans ce délai-là? Vous pensez ça?

Mme Lamquin-Éthier: Si la cour ne siège pas ou qu'elle siège une fois à toutes les deux semaines? Écoutez, c'est factuel, ça.

M. Bégin: Vous pensez que, si la personne présente sa requête quatre mois, 15 jours et non pas cinq mois... devant le tribunal en disant: Le tribunal ne siégeant pas dans la période qu'il y a et je suis dans un délai important... que la Cour va refuser et va dire: Non, non, on va attendre que vous soyez dans le délai, et là vous allez perdre votre droit? Vous pensez qu'un juge va se comporter comme ça? Vous pensez qu'ils vont faire perdre des droits comme ça? Voyons donc!

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce qu'on ne la fournit pas, cette opportunité-là, justement, puisqu'on dit «au plus tard dans les 30 jours précédant l'expiration du délai de 180 jours»? Il va l'interpréter comment, le «au plus tard dans les 30 jours précédant l'expiration du délai de 180 jours»? La lettre, l'importance de la lettre, là, la lettre de la loi...

M. Bégin: Je pense, madame, que toutes les accommodations requises par... Ce n'est pas un délai qui fait perdre les droits formellement. Si on n'a pas eu une audition, madame, vous savez très bien qu'un juge ne se comportera jamais comme ça, et, moi, je n'ai aucune inquiétude. Et chaque district, s'il y a des problèmes, va s'accommoder très bien de ces choses-là.

n(16 h 40)n

Il y a aussi des choses qui existent, comme ? on va en reparler plus tard ? la possibilité de faire un téléphone, ou il y a la vidéoconférence. Il y a toute une série d'éléments modernes. Il y a, par exemple, qu'on écrit à M. le juge pour lui dire: Vous ne siégez pas présentement, mais j'ai un délai qui court et je vous demande de me donner 15 jours de plus pour le présenter devant vous. Et je suis persuadé qu'un juge va lui accorder le délai sans aucun problème.

Mme Lamquin-Éthier: Le texte dit bien: «Le tribunal peut également relever une partie des conséquences de son retard si cette dernière démontre qu'elle a été, en fait, dans l'impossibilité d'agir dans le délai prescrit.»

M. Bégin: C'est un autre exemple pour dire qu'en toutes circonstances le juge va avoir l'instrument requis, et même au-delà d'un texte comme celui-là l'aurait de toute façon, pour éviter l'absurdité devant laquelle on serait placé. Alors, je vous donnais des moyens techniques, vous me donnez un argument de droit qui est aussi valable et même meilleur, puisque ça dit que le juge, en toutes circonstances, pourrait... M. le juge, vous savez, la semaine passée s'expirait mon délai pour demander une prolongation. Comme vous le savez, la cour n'a pas siégé la semaine passée et je n'ai pas pu donc la présenter. Je suis placé devant ce texte. Qu'est-ce que c'est que je dois dire?

Mme Lamquin-Éthier: Parce que là vous établissez une borne, hein? Vous ne voulez pas le mot «carcan», alors permettons-nous de dire... Bien, à tout événement, c'est marqué «au plus tard dans les 30 jours précédant l'expiration». Alors, ce que le Barreau soulève: c'est bien quand on fixe une règle, sauf qu'il faut tenir compte de la réalité aussi, de voir comment ça se passe. Or, en plusieurs districts en région la division de pratique ne siège qu'une fois par mois ou une fois toutes les deux semaines.

M. Bégin: Donc, théoriquement, une fois par mois, vous êtes dans le délai de 30 jours: soit au début, soit à la fin, soit au milieu. Vous êtes dans le délai où la cour siège.

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui... Écoutez, la cour siège une fois sur 30 jours, et il faut...

M. Bégin: Bien oui. Donc, vous allez être dans le 30 jours.

Mme Lamquin-Éthier: ...au plus tard dans les 30 jours... Bien oui... Franchement, là... Ça reste à voir.

M. Bégin: Bien oui. C'est comme vouloir présenter un injonction, puis vous êtes devant la cour de pratique, puis la cour vous dit: Monsieur, on ne pourra pas vous entendre, tous les juges sont pris, et vous allez être entendu mercredi prochain. Bon. Bien...

Mme Lamquin-Éthier: Écoutez, moi, je pense que le Barreau du Québec, et je pense que c'est la même chose pour la Chambre des notaires... Là, nous avons devant nous le mémoire du Barreau. Il regroupe des avocats, des praticiens, des juristes dans tous les domaines, dans toutes les régions. Lorsqu'ils déposent un mémoire... Il y a un comité qui a été mis en place. Ce comité-là regroupe des spécialistes, les spécialistes proviennent de partout. Il m'est toujours difficile de penser que ce qu'ils ont écrit, en quelque sorte, ça n'a pas lieu. Comme là vous l'écartez. Bon. Si la division de pratique siège une fois par mois, bien, c'est ça, ils vont rencontrer le délai de 30 jours.

M. Bégin: Exact.

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui, mais, écoutez, Seigneur du bon Dieu, est-ce que le Barreau peut avoir tort à ce point lorsqu'il avance...

M. Bégin: Je ne veux pas savoir s'il a tort ou raison...

Mme Lamquin-Éthier: Ah! il n'a pas... Bien, écoutez, si vous...

M. Bégin: Est-ce que, oui ou non, quand vous avez un délai de 30 jours puis que quelqu'un siège quelque part dans le 30 jours, vous avez le temps? La réponse, c'est oui.

Mme Lamquin-Éthier: Il faut voir où ça tombe, l'expiration du délai. Écoutez, on ne peut pas, vous et moi, convenir...

M. Bégin: Ça va tomber...

Mme Lamquin-Éthier: C'est sûr que 30 jours... Bien, ça va tomber où, dans le 30 jours?

M. Bégin: Bien, n'importe quand.

Mme Lamquin-Éthier: Ça va-tu tomber la journée où il est là? C'est ça, là.

M. Bégin: Bien là nécessairement. Le 30 jours va tomber dans le délai de 30 jours, c'est sûr. C'est peut-être la première journée ou c'est peut-être la trentième, mais ça va tomber dedans, c'est sûr et certain.

Mme Lamquin-Éthier: Ça va tomber à l'intérieur, sur une journée, hein, mais vous ne pouvez pas l'arrêter de façon...

M. Bégin: Bien non. Je ne la fixe pas non plus.

Mme Lamquin-Éthier: Bien non...

M. Bégin: Je ne la fixe pas parce que ça va tomber le jour où ça siège. Dans les districts, quand ça siège le troisième lundi du mois, ce n'est pas marqué «tous les treizièmes», c'est marqué «le troisième lundi». Bien, des fois c'est le 14, des fois c'est le 16, des fois c'est le 15, ça dépend. Alors, ils le marquent à l'agenda si c'est cette journée-là. Tout le monde sait ça. Ils pratiquent en fonction de ça. Il n'y a de problème. Quand vous voulez prendre une procédure, vous dites: Quand est-ce que la cour Unetelle siège? Mettons en cour de pratique. Des places, c'est mardi...

Mme Lamquin-Éthier: C'est sûr qu'ils ne se présenteront pas si le tribunal n'est pas là.

M. Bégin: ...des places, c'est jeudi, des places, c'est mardi, mercredi, jeudi. Bien oui, mais on s'organise en fonction de ça.

Mme Lamquin-Éthier: Mais, là, sachant... Le Barreau, les membres qui on constitué les comités qui ont fait l'étude le sachant, sachant ce que vous énoncez, ont trouvé utile, malgré ce que vous dites, de soumettre cette difficulté-là comme étant une difficulté additionnelle.

M. Bégin: De soumettre. J'en prends connaissance, je trouve qu'il y a...

Mme Lamquin-Éthier: Ils l'ont dit en parfaite connaissance de cause, ils ne l'ont pas dit...

M. Bégin: J'ai dit qu'il y avait une réponse. Le Barreau aimerait mieux? Parfait. Je dis que ce n'est pas nécessaire. Bon.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Puis la magistrature aimerait mieux, hein, que soit retranché du second alinéa... Puis là vous dites que ce n'est pas nécessaire.

M. Bégin: Oui. Quand nous avons eu une rencontre, il n'y a personne qui s'est objecté, sauf le Barreau, à ça. Et je ne sais pas si c'était une position du Barreau, puisque c'était Mme Vadboncoeur qui a parlé sans qu'il y ait eu de longue consultation. Ça s'est fait sur place. Bon. Non, non, elle ne pouvait pas l'avoir fait, je ne l'avais pas dit avant. Alors, elle ne pouvait pas l'avoir faite, la consultation, ni... Bon. Mais les personnes qui étaient présentes, sauf le Barreau, Mme Vadboncoeur, n'ont pas dit ça, elles n'ont pas dit mot, que ça n'avait pas de bon sens. Depuis, je l'ai dit, ils ont dit: Nous aimerions mieux que ce ne soit pas là. Bon. J'en prends note. Mais je ne pense pas que, parce que ça a été dit, que ça règle tout. Moi, vous savez, je ne crois pas que le Barreau ait raison tout le temps, voyez-vous.

Mme Lamquin-Éthier: Non, puis vous non plus.

M. Bégin: Bon. Alors...

Mme Lamquin-Éthier: Puis vous non plus.

M. Bégin: Non plus.

Mme Lamquin-Éthier: Vous non plus. C'est ex cathedra des deux côtés.

M. Bégin: Je change à l'occasion. Ce matin, j'ai changé, mais des fois je ne change pas.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, en tout cas, à date...

M. Bégin: Sur le délai, j'ai changé.

Mme Lamquin-Éthier: Là, vous n'avez pas changé.

M. Bégin: Ah bien oui, j'ai changé, parce que avant il y avait le délai de rigueur.

Mme Lamquin-Éthier: Mais le 30 jours est maintenu, là.

M. Bégin: Non, non. Je n'ai pas changé sur tout. Je vous dis qu'il y avait un obstacle. J'ai donné ça et je dirais ? on va prendre un mot neutre ? qu'on a salué mon ouverture en acceptant ça, comme on a salué mon ouverture en me disant: Vous avez accepté de mettre ça au 1er janvier. Écoutez...

Mme Lamquin-Éthier: Pour l'entrée en vigueur, ça allait de soi. Dans la mesure où vous voulez avoir une réforme qui puisse fonctionner...

M. Bégin: Mais, madame...

Mme Lamquin-Éthier: ...surtout après l'expérience que vous avez connue en santé...

M. Bégin: Regardez, quelqu'un me dit: On n'a pas eu assez de temps pour se préparer, on ne l'a pas su. Moi, je réponds: Écoutez, le 6 septembre, le 7 septembre, le 8 septembre, le 9 septembre, le 10 septembre, nous avons été côte à côte sur les mêmes tribunes, et ce que vous me dites, que vous ne le saviez pas, je vous l'ai dit dans un contrat, dans un discours écrit de 15 pages que vous avez entre les mains. On dit: Oui, mais on n'y a pas donné suite. Bon, bien, on me dit qu'on n'a pas eu le temps.

Mme Lamquin-Éthier: Mais vous avez dit vous-même...

M. Bégin: Je peux bien accepter ça, mais ce n'est pas l'exacte réalité.

Mme Lamquin-Éthier: ...à l'intérieur d'un débat sur un autre projet de loi, que la pensée évolue.

M. Bégin: Oui. Mais là elle n'évolue pas, elle reste là.

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, mais, en droit, vous savez très bien que la pensée évolue. On peut avoir... Et puis je pense que l'étude qui a été faite et par le Comité de révision... Moi, j'ai le mémoire. Écoutez, ce n'est pas marqué «de Me Vadboncoeur», c'est marqué «mémoire du Barreau du Québec». D'ailleurs, on a discuté préalablement de l'augmentation de la compétence monétaire de la Cour d'appel. Là aussi il y a problème et là aussi c'est vous qui avez raison. Vous n'avez pas d'étude économique spécifique, vous n'avez pas d'avis légal sur la constitutionnalité, vous n'avez pas fait d'étude d'impact, vous n'avez pas mesuré à quel point...

M. Bégin: Mais, madame, on va se rendre jusqu'à la fin, là, un jour.

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, mais regardez, là... Mais encore là il faut que je fasse un acte de foi, puis encore là vous avez raison.

M. Bégin: Non. Vous faites votre devoir de critiquer, de dire...

Mme Lamquin-Éthier: Bien, je ne critique pas pour critiquer. Écoutez...

M. Bégin: Mais c'est positif, au moins, là. Je ne suis pas négatif. Non, je n'ai pas dit que vous chialez, là, j'ai dit...

Mme Lamquin-Éthier: Bien, vous avez besoin, parce que... Bien, changez le mot, hein!

M. Bégin: Savez-vous comment vous vous appelez, pour moi?

Mme Lamquin-Éthier: Je dénonce votre mot.

M. Bégin: Non, vous êtes la critique de l'opposition. Savez-vous ça?

Mme Lamquin-Éthier: Porte-parole.

M. Bégin: Le terme le plus souvent utilisé, c'est le «critique».

Mme Lamquin-Éthier: À ma connaissance, le terme officiel auquel on se réfère...

M. Bégin: Puis ce n'est pas pour dire que la personne est chialeuse, c'est pour dire qu'elle occupe la position...

Mme Lamquin-Éthier: Bien, ça, c'est une diversion, là. L'essentiel de la discussion, c'est qu'encore une fois vous avez eu raison en ce qui a trait à l'augmentation de la compétence monétaire. Encore une fois, le Barreau... Et, moi, j'ai bien, à l'instar de la magistrature... Alors, vous m'avez dit tout à l'heure avoir reçu une lettre de la Cour supérieure, de la Cour du Québec qui vous recommandait que soient retranchés du second alinéa les mots... Bon, vous ne l'avez pas retenu, vous ne le retenez pas.

Vous nous dites que, en ce qui a trait à la situation existant dans plusieurs districts en région, même si la division de pratique ne siège qu'une fois par mois, une fois toutes les deux semaines, il n'y a pas de problème, tout le monde sait ça, ils vont tomber... C'est difficile. J'ai hâte qu'on arrive à un article où vous allez vous ranger à une argumentation.

M. Bégin: À date, vous avez oublié, mais je me suis rangé au moins cinq fois.

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui, pour des concordances.

M. Bégin: Bien non! Pas pour des concordances, pour des questions différentes.

Mme Lamquin-Éthier: Des points majeurs comme l'augmentation monétaire?

M. Bégin: Le point le plus important, pour le Barreau comme pour la magistrature, était le fait qu'il y avait un délai de 180 jours avec 90 jours de... On m'a demandé de le changer; je l'ai changé. Bon. Alors, je l'ai fait. Là, on me dit: Oh! il y a un problème sur le 30 jours. Bon, O.K.

Mme Lamquin-Éthier: Un gros problème, un gros.

M. Bégin: Je n'ai pas donné raison. Ce matin, il y avait un cas, là, je ne me rappelle plus lequel c'était. On a commencé par ça, d'ailleurs.

Mme Lamquin-Éthier: Un très gros problème.

M. Bégin: D'accord. Ça veut-u dire que, quand je donne raison au Barreau, c'est parfait, on n'en tient pas compte, puis, quand je dis que je ne suis pas d'accord, bien là c'est épouvantable?

Mme Lamquin-Éthier: Vous dites vous-même à plusieurs reprises que ce n'est pas question d'avoir tort ou d'avoir raison. Vous êtes un législateur, vous devez vous comporter de façon responsable. Vous n'êtes pas un enfant capricieux qui va dire: Bien, je n'ai pas ce que je veux puis je vais me braquer parce que je n'ai pas ce que je veux ou je vais me braquer parce que je suis profondément contrarié dans ce que j'avance et ce qu'on réfute. Vous êtes le ministre de la Justice, vous avez une responsabilité en ce qui a trait à la réforme que vous entreprenez. On va vivre avec pendant des années. Vous devez vous assurer que celle-ci, elle va fonctionner et qu'elle rejoint les objectifs que vous poursuivez. Les objectifs... Écoutez, il y a plein de monde qui pendant trois ans ont travaillé. Ils ont travaillé de façon responsable. Ils n'ont pas toujours parlé pour errer.

n(16 h 50)n

M. Bégin: Non. Admettez, admettez que... Je prétends, moi, qu'il va y avoir à peu près 90 % à 95 % des recommandations qui ont été faites qui vont être incluses dans le ou les projets de loi.

Mme Lamquin-Éthier: Au total, sur les trois phases.

M. Bégin: Oui, oui, c'est sûr.

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui, mais, écoutez, on n'a pas une belle moyenne dans la phase I, là.

M. Bégin: Bien, vous seriez bien surprise. Vous seriez bien surprise, parce que tous les textes sur lesquels vous ne discutez pas, ça vient de là. Alors, prenez-le pour acquis. C'est accepté, c'est ça qui est fait. Le principe de base, la plus grosse affaire, là, qui est le rapport qui est là, ce n'est pas compliqué, on l'a lu tantôt, c'est une phrase.

Mme Lamquin-Éthier: Mais importante.

M. Bégin: Ça commence par une requête. La deuxième phrase qui va venir, qui va être bien importante, de la réforme, au-delà de toute la dentelle, ça va être...

Mme Lamquin-Éthier: Ce n'est pas de la dentelle, là, le délai, le nouveau délai de 30 jours. Écoutez, c'est loin d'être de la dentelle. C'est une pensée qui est réductrice, là.

M. Bégin: J'ai dit «au-delà de toute la dentelle».

Mme Lamquin-Éthier: Écoutez, c'est un délai formel à l'intérieur duquel les parties vont devoir agir, à défaut de quoi...

M. Bégin: Mme la députée, regardez, là, ce qui va être important dans le projet de loi, ça va être comment les parties, dans un délai de 180 jours, doivent mettre leur dossier en état. C'est la deuxième partie importante de la requête. Vous l'avez dans le projet de loi. Il y a d'autres mesures de taille, mais après ça on tombe dans les choses qui sont importantes mais sur lesquelles il n'est pas nécessaire d'avoir la même idée. Et je prétends qu'à un moment donné il faut faire des arbitrages.

Mme Lamquin-Éthier: Tout à fait.

M. Bégin: Et il y a quelqu'un qui est chargé de faire ça.

Mme Lamquin-Éthier: C'est ce que vous nous dites que vous faites.

M. Bégin: Eh oui!

Mme Lamquin-Éthier: En vos qualité et titre de ministre de la Justice.

M. Bégin: Et je pense que j'utilise plusieurs qualités, dont une, d'écouter, une, de parler, une, de maintenir mon point de vue quand je pense que j'ai raison, avec ténacité. J'apporte des amendements. Tout ce qu'on discute, là, qui est en amendement, la plupart de ça, c'est l'objet d'échanges qui ont eu lieu avec le Barreau, la magistrature. Ce n'est toujours bien pas parce que je n'écoute pas. Mais je ne veux pas qu'on me dise que, si je n'accorde pas tout ce qu'on me demande, je ne cède rien. Alors, il y a des points...

Mme Lamquin-Éthier: Ce n'est pas ce qu'on dit non plus. Il ne faut pas, M. le ministre...

M. Bégin: Non, non. Je termine. Il y a des points qui sont déterminants, où on a eu des grandes discussions, où je pense qu'il ne m'a pas été apporté d'arguments qui me convainquent de changer. J'ai fait le cheminement. On est rendus à la date où il faut prendre des décisions. Je soumets ces décisions-là, et je vais faire acte de modifier bien des projets qui sont là, et je suis ouvert à le faire, mais il y a des places où non, et ça, on est à un endroit où je pense que je ne dois pas le faire.

Mme Lamquin-Éthier: Moi, je ne pense pas... Écoutez... Puis je parle également pour la Chambre des notaires parce que vous avez également eu à rencontrer le ministre de la Justice, et à discuter de certains points, puis à convenir d'accommodements. Il n'y a jamais personne qui s'attend à ce qu'une demande... On espère qu'elle va être reçue, hein, mais, c'est sûr, quand on rencontre un ministre, quand on sort, on n'est pas vraiment surpris si ça n'a pas été retenu, on s'en doutait un peu en partant. Et c'est bien dommage, parce que vous devriez prêter oreille à des recommandations qui sont formulées par des personnes qui sont extrêmement importantes, qui ont l'expertise nécessaire. Je trouve ça dommage.

C'est un point qui est important, ça, ici. Ce n'est pas mineur, là, c'est un article, une disposition qui est majeure, majeure, majeure. Et, si le Barreau et la magistrature vous recommandent de retirer du second alinéa «au plus tôt dans les 30 jours», bien, j'imagine que... En tout cas, je comprends que vous ne tenez pas compte, encore une fois, de cette...

M. Bégin: Je ne suis pas convaincu par leur argumentation.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, voyons donc!

M. Bégin: D'ailleurs, la magistrature, c'est: Nous pensons que vous devriez enlever le paragraphe un tel. L'argumentaire, c'est quatre lignes au maximum. Alors, il n'y a pas d'argumentaire qui sous-tend leur demande. Le Barreau en a une. Je pense avoir pris chacun des éléments et d'y avoir répondu. Vous pouvez ne pas le partager, mon point de vue. Je peux renverser la proposition. Vous pouvez ne pas écouter ce que je dis, vous pouvez ne pas écouter... Bien non. Ce n'est pas ça que je fais. Je dis: Je ne partage pas leur point de vue, je crois aller dans le sens de la réforme et d'aller maintenir le droit des parties partout, et je suis convaincu que ça va donner de bons résultats.

Mme Lamquin-Éthier: Bon. Alors, vous nous permettrez de...

M. Bégin: De diverger, oui.

Mme Lamquin-Éthier: ...de vous faire observer que nous sommes tout à fait en désaccord.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Viger, vous vouliez intervenir?

Mme Mancuso: Oui, je voulais entendre le ministre par rapport aux 180 jours en matière familiale. Le Barreau s'est prononcé sur la matière, le Comité aussi. Le Comité a recommandé, le 180 jours, de l'étendre à un an, la recommandation 6-19 du rapport du Comité de révision de la procédure civile. On a recommandé que, en matière de divorce et de séparation de corps, le délai d'inscription soit étendu à un an. On n'a pas parlé du sujet encore. J'aimerais entendre le ministre sur ce point-là.

M. Bégin: Vous n'étiez pas présente lors de la présentation par Me Boies et Me Brodeur qui est venu faire une présentation ici, en plus de celle du Barreau qui était dans le même sens. Quand il avait été question de faire sauter l'obligation de le faire dans 180 jours et que j'avais suggéré qu'on trouve une liste de dossiers qui pouvaient être exclus, j'avais mentionné le recours collectif. Le Barreau avait dit les affaires familiales. Il l'avait suggéré. Quand on a discuté du délai de 30 jours, les deux n'étaient pas des objets séparés, mais c'était dans la même situation, et l'argumentaire que j'ai fait pour le délai de 30 jours dans les autres matières s'applique en matière familiale de la même manière et pour les mêmes considérations. Alors, je crois que je n'ai pas rajouté d'éléments à ce que j'ai dit tantôt. C'est les mêmes réponses que je peux vous donner.

Mme Mancuso: Je suis certaine que vous êtes conscient que, en matière familiale, la dynamique est complètement différente qu'en matière civile ou d'autres matières. Il faut considérer qu'il y a des enfants, les vies des enfants qui sont en jeu. Il y a des personnes qui pendant cette période de leur vie peuvent être très instables. Donc, les forcer à faire une décision, à l'intérieur de six mois, procéder à trouver une solution à un litige qui d'habitude pourrait durer un peu plus de temps parce qu'on a peu de temps pour y penser, je comprends mal comment on peut imposer cette règle en matière familiale.

M. Bégin: Le juge sera en mesure d'apprécier, dans les 30 jours précédant l'expiration du délai, si, oui, les parties se sont engagées dans un processus x, y ou z ? je réfère au témoignage de Me Brodeur ? pourra évaluer qu'effectivement, compte tenu des circonstances, il serait donc préférable de ne pas l'ajuster, de ne pas appliquer le délai. Mais, dans d'autres cas, non, il n'y a pas de motif valable pour la prolongation du délai et ils doivent procéder. Parce qu'un procès en matière familiale, c'est aussi une audition devant un juge pour trancher les parties. Alors, si les parties sont prêtes et qu'une des parties veut être entendue dans le délai de 180 jours, elle devrait pouvoir le faire. Et, s'il décide en cours de route qu'il y a des moyens autres, comme, par exemple, convenir d'une garde partagée ou d'une garde de ci ou de ça, s'il calcule que c'est bon et qu'ils doivent l'expérimenter pendant quelques mois, ils pourront aller devant la cour et convenir d'un délai plus long. Autrement dit, encore une fois, le juge sera en mesure d'apprécier les circonstances du cas et dire: Oui, nous sommes en présence d'un cas où on devrait accorder un délai additionnel, et s'appliquent les mêmes règles que tantôt.

Mme Mancuso: Oui, mais il arrive, par exemple... Je vais prendre l'exemple du partage du patrimoine familial. On sait qu'en matière familiale des fois les renseignements ne sont pas très faciles à obtenir de l'autre partie, il faut vraiment aller à la chasse pour trouver ces renseignements-là, et on découvre en cours de route qu'une des parties avait des sommes d'argent qui étaient investies dans x, y compagnies. On ne connaît pas ces renseignements-là, à cette époque où est-ce qu'on inscrit la cause pour audition. Comment est-ce qu'on peut justifier cette situation-là?

M. Bégin: Voyez-vous, on me dit: Mettez-moi une catégorie qui s'appelle les affaires familiales. Ce que vous venez de décrire là, ça existe, c'est sûr, mais le contraire aussi existe, des parties où ce n'est pas compliqué, des fois où le patrimoine familial n'est pas si complexe. Il y a des fois où on ne s'entend pas, puis on ne veut rien savoir, et ainsi de suite. Tout ça, c'est des circonstances qui existent. Pourquoi donner automatiquement la possibilité que ce soit plus loin que 180 jours alors que, si on applique les règles de 180 jours, les parties vont devoir se faire un plan de match et s'entendre?

n(17 heures)n

Vous me disiez: Des fois, c'est difficile d'obtenir de l'autre partie telle affaire. Justement, quand il y a un plan de match, là, vous êtes obligé de fournir les renseignements. Et, si vous ne respectez pas votre engagement, l'autre partie a le moyen d'aller devant le juge et de dire: Il ne me donne pas les renseignements qu'il devait me fournir. Et c'est un instrument qui est très fort. Alors, voyez-vous, c'est justement pour mettre les parties dans un équilibre qu'elle devront faire un plan de match. Et, si, dans leur plan de match, aux deux tiers du coût, elles décident que ce qu'elles n'avaient pas cru possible au départ, une possible entente, ou des tentatives de rapprochement, ou, je ne sais pas, moi, autre chose que d'aller devant le tribunal final... bien, elles diront au juge: Écoutez, nous pensons que nous devons obtenir un délai additionnel parce que là, voyez-vous, on a une possibilité de s'entendre. C'est tout.

Mme Mancuso: Mais il va y avoir la possibilité, suite à cette règle, que, après les 190 jours, il y a un jugement qui est rendu.

M. Bégin: Non, parce que... Ça ne pourra pas être le cas. Il y a deux possibilités. Ou les parties sont irréconciliablement... elles n'arrivent pas à s'entendre. Bon. Elles vont arriver, dans un délai de 90 jours, devant la cour, le dossier va être prêt, et là la cour fixera la date des auditions ? je ne sais pas quoi, ça varie selon les districts. Ou bien elles se sont engagées dans ce processus, mais, heureusement, par hypothèse, elles pensent être capables de s'entendre autrement et de faire en sorte qu'il y a une lueur d'espoir quelque part soit pour la garde des enfants, soit pour ci, soit pour ça. Bon. Elles vont devant le juge et elles disent: Regardez, on a une possibilité. Voulez-vous nous donner trois mois de plus? On pense que, si on a trois mois de plus, ça va aller. Alors, le juge va l'accorder.

Mme Mancuso: Les règles sont pour les cas exceptionnels, justement. C'est certain que, en cours de route, il va y avoir beaucoup de personnes qui vont régler leurs affaires entre eux parce que c'est dans leur intérêt de les régler avant. Mais les règles sont là pour vraiment encadrer le jeu. Donc, on peut s'assurer que tout le monde a les mêmes droits et que tout le monde peut avoir accès à des renseignements qui sont nécessaires.

M. Bégin: Oui, mais vous oubliez l'hypothèse: quand ça va arriver, il va y avoir deux avocats devant le juge ? pas un, deux ? qui vont dire: M. le juge, écoutez, là, nous nous sommes entendus sur telle façon de faire. Depuis un mois et demi, les enfants enfin peuvent voir leurs parents puis ça va bien. Nous pensons que nous ne devrions pas être devant la cour dans le délai de 180 jours parce que ça mettrait... ça gâcherait tout ça. Nous avons besoin de deux mois additionnels. Vous pensez honnêtement qu'un juge va refuser ça? S'il fait ça, on se posera des questions. Mais, moi, je n'ai pas d'inquiétude du tout.

Mme Mancuso: On leur donne l'opportunité de le faire.

M. Bégin: Oui, mais on ne leur donne pas le chèque en blanc au point de départ, disant que tout le monde a besoin de plus que 180 jours. C'est ça que vous ne voyez pas. Oui, il faut donner...

Mme Mancuso: C'est une matière très spécifique, en matière familiale.

M. Bégin: Il faut donner à ceux et celles qui ont besoin de plus que 180 jours... L'esprit de la modification, c'est de leur donner... Mais, ceux qui n'en ont pas besoin, pourquoi leur donner une possibilité de ne pas suivre ce que nous considérons comme bon dans les autres cas, c'est-à-dire qu'ils mettent leur dossier en état dans le 180 jours? Alors, à ce moment-là, ils vont respecter le même délai, tout le monde. C'est ça, l'idée. Moi, je ne comprends pas, là.

Si les parties ne veulent pas s'entendre, il faut que leur dossier soit prêt dans 180 jours. Si elles veulent trouver une porte de sortie heureuse ? parce qu'on est en matière familiale, puis je comprends bien ça ? elles ont besoin de plus, le juge va le leur donner; mais pas la première journée, quand elles auront quelque chose à proposer au juge. Si elles n'ont rien à proposer, elles n'auront pas deux ans. Il n'y aura pas une partie qui va faire niaiser l'autre. Elles vont être prêtes à 180 jours. Mais, si les deux parties s'entendent, elles vont l'obtenir, leur délai, parce que ça va dans l'intérêt des enfants, puis il n'y a pas un juge qui va refuser ça.

Mme Mancuso: Oui, mais, M. le ministre, vous savez aussi que, en matière familiale, il y a beaucoup de notions. Les gens ne sont pas nécessairement clairs de tête. Donc, leur permettre d'agir en temps et lieu, un an, c'est... Il n'y a pas une grande différence, hein, on parle d'un autre six mois, donc ce n'est pas...

M. Bégin: Non, non, mais, regardez, les parties, c'est sûr, sont émotives, et c'est pour ça qu'il y a des avocats, hein, pour prendre de la distance. Il ne faut pas que les avocats soient pareils aux parties, ça irait mal. Il faut être capable de se prendre une distance.

Mme Mancuso: On leur force la main de faire quelque chose qu'ils ne voudraient pas faire tout de suite.

M. Bégin: Mais, si elles se sont entendues, les parties, par le biais de leur procureur, il va aller l'exprimer devant le juge. Les parties n'auront pas besoin d'être là, hein, c'est les avocats qui vont parler: M. le juge, voici l'entente que nous avons, nos deux parties nous disent que ça va bien. Il ne demandera pas de faire entendre madame puis monsieur, les avocats vont parler. Mais, s'il y en a un qui dit: M. le juge, ce n'est pas vrai pantoute, hein, il vous dit, là, que ça va bien puis qu'on a besoin de délais additionnels, bien, moi, je vous dis, M. le juge, que ma cliente, là, elle est en train de se faire dépouiller de son affaire parce que ci, parce que ci, parce que ça, alors le juge va être placé devant quoi, là, hein? Devant deux parties qui ne s'entendent pas du tout, puis il y en a une qui semble jouer les règles en sa faveur contre l'autre. Bien, il va trancher en faveur de ce qu'il voudra, mais, au moins, les parties auront eu l'occasion de se faire valoir, alors qu'autrement on prive les parties de cette possibilité-là. Ça m'apparaît aussi important que de leur donner la possibilité d'avoir plus de temps si elles en ont besoin. Il faut faire l'équilibre: oui, donner les possibilités, mais, d'un autre côté, protéger aussi l'autre partie où on ferait une utilisation abusive de l'ouverture, du chèque qui est donné, de faire n'importe quoi.

Mme Mancuso: Mais, dans tous les litiges, il y a toujours une partie qui est plus forte que l'autre, donc, dans cette situation-là, on est en train de favoriser la personne qui est plus forte.

M. Bégin: C'est le juge qui va être capable de trancher.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement à l'article 110.1...

Mme Lamquin-Éthier: ...

Le Président (M. Lachance): Non? Bon. Alors, nous allons suspendre pendant cinq minutes.

Mme Lamquin-Éthier: Parfait.

(Suspension de la séance à 17 h 6)

 

(Reprise à 17 h 17)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! La commission des institutions reprend ses travaux. Mme la députée de Viger.

Mme Mancuso: M. le ministre, j'avais un autre exemple à vous rapporter. En cas de divorce, la loi fédérale prévoit que, après une séparation de corps d'un an, on a droit d'obtenir le divorce. Qu'est-ce qui arrive dans ce cas-ci avec le délai de 180 jours? On impose aux parties d'inscrire la cause pour audition et enquête en...

M. Bégin: Bien, les motifs qu'on a pour invoquer le divorce, il faut qu'on les ait avant de prendre la procédure, pas après. Alors, ça veut dire que, quand quelqu'un va prendre sa procédure en divorce, il va alléguer la séparation depuis un an s'il n'a pas d'autres motifs. S'il a d'autres motifs, ça devient sans intérêt.

Mme Mancuso: En pratique...

M. Bégin: Non, non, mais, regardez, là.

Mme Mancuso: En pratique, M. le ministre, on a des demandes, on a des demandes conjointes des fois qui sont réglées à l'intérieur de... avant l'an, donc ces personnes-là, elles se divisent le patrimoine familial. Ce n'est pas la même chose. On les force maintenant d'aller après 190 jours... 180 jours.

M. Bégin: Je pense qu'on ne se comprend pas, là. Bon, première hypothèse: le seul motif qu'il y aurait, c'est la séparation depuis un an. Bien, pour l'invoquer, il faut avoir été séparé depuis un an. Vous ne pouvez pas écrire une procédure disant: Ça fait trois mois qu'on est séparés, puis j'invoque le motif d'un an. Non, non.

Une voix: Ce n'est pas supposé.

M. Bégin: Non, mais, écoutez...

Mme Mancuso: En pratique, c'est courant. En pratique, c'est courant.

M. Bégin: Bien, non, mais, écoutez, si vous êtes en train de me dire que quelqu'un ment en faisant une procédure judiciaire puis après ça c'est le système qui va être fautif, je m'excuse, il y a un problème. C'est que, si vous voulez invoquer que ça fait un an que vous êtes séparé puis que vous avez droit au divorce, bien, vous allez le marquer, que ça va faire un an. Sinon, s'il y avait trois mois de faits, vous n'avez pas le droit d'écrire, avec un affidavit, que ça fait...

Mme Mancuso: ...

M. Bégin: Non, non, mais, écoutez ça. Vous n'avez pas le droit d'écrire que ça... Bon, première hypothèse.

Si vous avez un autre motif, vous avez un autre motif, qui est celui d'adultère ou d'incompatibilité, vous êtes obligé de faire une preuve. Bien, vous allez devant le tribunal dans un délai précis. Cette question d'un an, vous ne pouvez pas dire: On va prendre une procédure en divorce, on va attendre un an, puis là, tiens, on va être capable d'invoquer ce motif-là pour demander le divorce. Voyons donc!

Mme Mancuso: En pratique, ça se fait.

M. Bégin: Bien, non, mais, écoutez, madame, si les gens...

Mme Mancuso: En pratique, ça se fait, monsieur, c'est courant.

M. Bégin: Non, non, non, le système judiciaire n'est pas fait pour... Bien non! Voyons donc!

Mme Mancuso: C'est une pratique courante. On règle à... On règle...

M. Bégin: Madame, quand deux parties...

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, je m'excuse, là, mais j'ai été assez tolérant comme président et je pense qu'on va ramener les choses un peu plus formelles, s'il vous plaît. J'aimerais ça qu'il puisse y avoir des échanges et qu'on ne coupe pas constamment la personne qui parle, de part et d'autre.

M. Bégin: Je m'excuse de l'avoir fait. Alors, pas de problème.

n(17 h 20)n

Mme Mancuso: Je vais juste vous lire donc l'argument que le Barreau nous amène. Donc, on dit: «En outre, des arguments purement pratiques militent en faveur d'un délai plus long: en premier lieu, l'un des motifs du divorce ? de plus en plus invoqué parce qu'il évite des preuves déchirantes et accablantes devant le tribunal ? repose sur un délai d'un an de séparation au moment du prononcé du divorce.» Donc, au prononcé du divorce, ça veut dire que le juge... Quand il y a une ordonnance de divorce, quand il y a le certificat de divorce, c'est à ce moment-là que l'an est écoulé, et en autant que les époux vivent séparés à ce jour de l'introduction de l'action. Or, si l'action doit être inscrite dans les six mois de son introduction, cela signifie que les époux ne pourront plus invoquer ce motif, puisque la cause viendra sur le rôle avant la fin d'un an exigé par la loi. Donc, ça revient un an... avant le délai prévu par la loi.

M. Bégin: La loi prévoit que, si vous... bon, pendant un certain temps et que vous invoquez ça, on dit qu'au moment où...

«L'échec du mariage n'est établi que dans les cas suivants:

a) les époux ont vécu séparément pendant au moins un an avant le prononcé de la décision sur l'action du divorce et vivaient séparément à la date d'introduction de l'instance.»

Donc, il faut qu'a priori, minimalement, la date de la prise de la décision... Il faut qu'ils ne vivent plus ensemble. Alors, quelqu'un va dire: Nous ne vivons pas ensemble depuis hier, je prends une procédure, et là je m'en vais devant la cour, puis je dis: Je vais invoquer le délai d'un an. Je m'excuse, madame, là, il y a un problème dans le problème. Ça n'a pas de bon sens. Par contre, ce qu'on peut imaginer, c'est que ça fait six, sept mois que ça ne marche plus puis qu'ils sont partis, ils sont séparés, et que là on dit: Oui, c'est fini, ça ne marchera pas. Bon. Prenez votre procédure, vous allez arriver dans le délai, et, votre six mois, vous allez dire: Bon, bien, moi, mon année est écoulée, je n'ai pas de problème. Mais, au moment où vous faites votre déclaration...

(Consultation)

M. Bégin: De toute façon, vous devez faire une déclaration à l'effet que la situation est celle-là au moment où vous faites votre procédure. Vous devez donc déclarer la vraie chose, la vraie situation. Alors, moi, je vous dis que, si vous avez l'intention de vivre un an séparé pour éventuellement divorcer, vous n'êtes pas obligé de prendre votre procédure, vous avez juste à laisser écouler le temps, et c'est une preuve qui sera facilement faisable. Si vous êtes en cours de processus, vous attendrez le temps requis pour le faire. Si, à la limite, vous êtes à deux mois de l'expiration, vous dites: M. le juge, ça fait 10 mois qu'on ne vit plus ensemble, il est évident que nous n'aurons pas l'intention de le faire, nous sommes rendus à l'expiration du délai, nous demandons de prolonger de deux mois pour nous permettre d'atteindre l'expiration, qui va s'objecter à ça? Personne.

Mme Mancuso: M. le ministre, en pratique, d'habitude... en vertu de... de pratique aussi en matière familiale, et l'affidavit vient presque à la fin, à la fin du processus. Donc, ça se peut, ça arrive, en pratique, qu'il y a des gens qui sont séparés depuis hier, qui veulent régler leurs affaires tout de suite ? ils veulent avoir des solutions à leur litige tout de suite ? et qui déposent une procédure.

M. Bégin: Mme la députée, qui déposent des documents qui sont des faux? Mais, je m'excuse...

Mme Mancuso: Ils ne sont pas des faux.

M. Bégin: Bien, ce n'est pas des faux, ils ne disent pas la vérité. C'est quoi?

Mme Mancuso: Ce n'est pas des faux, c'est la façon d'aller, en pratique. Je ne peux pas vous expliquer autrement, mais c'est la façon qu'on fait en pratique.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Moi, c'est regrettable, mais je suis un avocat depuis assez longtemps puis je pense que j'ai acquis des plis qui sont des bons plis. Quand la loi dit: Vous devez faire telle chose avant de pouvoir faire telle autre chose, vous n'avez pas le droit de traficoter. Vous n'avez pas le droit de dire: Moi, ça fait mieux mon affaire autrement, puis je m'organise. Faites-le si vous voulez, mais ne demandez pas au système de vous accommoder. Et ce n'est pas vrai que dans nos procédures on va faire en sorte que ce que le législateur fédéral ? pas le mien, là ? le législateur fédéral n'a pas voulu soit fait par des techniques que, moi, j'introduirais dans mon Code de procédure. Je m'excuse, mais ça ne marchera pas. Alors, les parties peuvent bien faire des mensonges si elles le veulent, mais ce n'est pas moi qui vais les organiser puis leur permettre... Alors, la loi dit: Vous devez attendre un an, respectez le délai d'un an.

Quand j'ai commencé à pratiquer, moi, il n'y en avait pas, de droit au divorce. Après ça, on m'a dit: Ça va être le divorce avec torts. Alors, tout le monde faisait des mensonges un petit peu devant la cour en disant... Mais souvent c'était l'adultère qui était invoqué, puis même il y a des gens qui ont obtenu des divorces en invoquant l'adultère qu'ils n'avaient pas commis parce que ça faisait l'affaire. Là, on a dit: Cessons d'être hypocrites, disons les vraies choses. On a dit: Bon, un an, puis on adoucit toutes les règles. Mais, les règles, quand elles sont là, il faut les respecter. Et, moi, je ne ferai pas des accommodements dans la procédure pour permettre ces choses-là si ce n'est pas les vraies.

Mme Mancuso: On ne vous demande pas de faire des accommodements, on vous demande de respecter la loi fédérale. Et, je vous dis, en pratique, ce n'est pas des mensonges que les gens racontent, c'est parce qu'on demande l'affidavit au moment de la séparation. Mais on peut débuter le processus avec une déclaration et attendre l'année, l'année, pour déposer l'affidavit. Donc, je ne vous demande pas de... je ne demande pas aux parties de faire des mensonges... que la loi fédérale nous impose.

M. Bégin: Madame, s'ils veulent attendre l'année, ils attendront l'année, là, hein? Mais vous comprenez que...

Mme Mancuso: ...

M. Bégin: Non. Je ne crois pas, sincèrement, et je le répète, je ne crois pas que nous devons, par des procédures qui sont des règles générales, faire en sorte que, des parties qui veulent atteindre des intérêts qu'elles trouvent parfaitement légitimes, faire en sorte de ne pas suivre les règles. Mais, je m'excuse, moi, je ne rentre pas dans ce jeu-là. Parce que, s'ils veulent attendre un an, qu'ils attendent un an avant de faire les procédures. Ils ne sont pas obligés de s'engager dans une procédure. S'ils veulent faire ce que vous venez de dire, ils ne sont pas obligés d'aller devant la cour. Puis, s'ils découvrent en cours de route qu'il se pourrait... peut-être jouer... bon, je retire mes mots, invoquer ce motif-là parce que finalement ils se rendent compte qu'ils ne vivent pas ensemble, qu'ils n'ont pas intérêt à aller devant la cour parce que ça va représenter des frais, puis qu'ils attendent leur année, bien, ils invoqueront devant le juge que, dans ce cas précis, ils n'ont pas besoin de respecter le délai parce qu'ils sont en train d'écouler leur année. Bon. Alors, ça... Mais, moi, je ne ferai pas de règle de procédure pour favoriser ça. Ça, oubliez ça.

Mme Mancuso: Je ne vous demande pas de favoriser ce genre de procédure, je vous dis qu'est-ce qui se passe en pratique et qu'est-ce que la Loi sur le divorce nous impose. La Loi sur le divorce nous impose qu'on attend un an, on a une année pour être divorcé, et on peut avoir le jugement le jour après l'année. Donc, si les parties veulent obtenir un jugement, dans les 30 jours après que l'année est écoulée, c'est possible maintenant. Présentement, c'est possible. Donc, maintenant vous imposez une règle de 180 jours, ce ne sera plus possible.

M. Bégin: Regardez, vous me dites: Le lendemain de l'expiration de l'année, vous pouvez obtenir votre affaire. Bien, faites écouler votre année moins deux mois, prenez votre procédure en divorce, attendez deux mois, puis, au bout de deux mois, vous allez être capable d'avoir ça. Vous allez dire: Regardez, M. le juge, c'est... Puis vous présentez ça devant le tribunal. Qui va s'objecter à ce que vous présentiez devant le tribunal une requête en divorce où les deux parties sont consentantes? Ça fait un an que c'est écoulé, la preuve est faite. Le juge va dire: Adjugé. Merci. Voyons donc! Aïe! on n'est pas une machine à gamiques, là, ici, on a un système judiciaire qui doit fonctionner. Non, je m'excuse, mais ça ressemble à ça.

Le Président (M. Lachance): Nous en sommes toujours à l'amendement sur l'article 110.1. Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. J'observe encore une fois que le Barreau endossait le recommandation R.6-19 du Comité de révision de la procédure civile à l'effet d'étendre à un an, pour les demandes en divorce et en séparation de corps, le délai d'inscription de 180 jours prévu à l'article 110.1 du projet de loi. Bon. Alors, ça, c'est une recommandation qui a été formulée. Le Barreau ? on était au niveau des arguments purement pratiques qui militaient en faveur de cette recommandation-là ? soulève des situations de fait pour l'illustrer. Alors, une des premières situations dont il parle, qu'il mentionne, c'est la situation où il est question du partage dans les cadres du partage familial, d'obtenir les relevés des droits accumulés dans le fonds de pension respectif des époux, et on mentionne que, pour obtenir ce relevé-là, le délai d'attente est de 120 jours. Alors, ça, c'est la réalité, les faits. La loi fixe un délai. Encore faut-il que ce délai-là puisse s'accommoder ou tenir compte, on va dire, tenir compte de la réalité.

Alors, en ce qui a trait à la réalité, donc, l'obtention du relevé nécessite une période d'attente d'au moins, d'au moins 120 jours ? c'est un minimum ? ce qui laisse, comme le soulève le Barreau, très peu de temps à courir entre le délai maximal de 180 jours... Alors, est-ce que vous pensez que cet argument ou illustration d'ordre purement pratique déposé par le Barreau... Comment le recevez-vous? Est-ce que...

n(17 h 30)n

M. Bégin: Ce que je reçois, en principe, c'est la même demande qu'on discute depuis le, je ne sais pas combien de temps, là, que votre collègue a abordé précédemment. C'est: Est-ce que nous devons avoir, dans les matières matrimoniales ou familiales, des délais différents? Vous me dites: Sur le plan pratique, il y a 120 jours. Quand des parties...

Mme Lamquin-Éthier: ...

M. Bégin: Oui, oui. Mais, quand des parties commencent une procédure comme celle-là, si elles ont à poser le geste de demander à la Régie... Je ne sais pas, l'instance, comment elle s'appelle. La Régie? Ce serait la Régie?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui, la Régie des rentes, les droits accumulés aux fonds de pension respectifs.

M. Bégin: La Régie des rentes. Bien, elles peuvent le demander, certainement. Il reste 60 jours à compter du moment où elles vont recevoir... ce qui n'empêche les parties de faire toute une série d'analyses et les procédures requises, et, quand l'élément tombe sur la table, elles ont 60 jours pour en tenir compte. C'est évident que ce n'est pas nécessairement l'idéal, mais, advenant le cas où il tomberait dans un délai qui est trop serré, qu'est-ce qui empêche les parties de dire: M. le juge, nous avons demandé avec diligence nos relevés, nous les avons reçus hier, ou il y a trois jours, ou nous ne les avons pas reçus, mais ça fait ? mettons ? 140 jours qu'on les a demandés, on est dans l'impossibilité d'agir, pouvez-vous extensionner le délai? C'est les cas exceptionnels. Est-ce qu'il y a une réponse à ça? La réponse, c'est oui.

Mme Lamquin-Éthier: Peut-être que là ça ne semble pas être un cas exceptionnel, et ça va entraîner des coûts additionnels.

M. Bégin: ...de 120 jours...

Mme Lamquin-Éthier: On dit que le délai d'attente a été constaté, là. Déjà, minimalement, c'est une période d'attente d'au moins 120 jours avant que les parties puissent l'une et l'autre obtenir le relevé des droits accumulés. Ça, qu'est-ce que vous voulez, il faut qu'ils vivent avec.

M. Bégin: Mais, s'ils le demande au départ, ce n'est pas le seul élément qui est en cause là-dedans. Quand vous dites...

Mme Lamquin-Éthier: Non, c'est un élément important.

M. Bégin: C'est un élément...

Mme Lamquin-Éthier: ...patrimoine, le partage du patrimoine... spécifique...

M. Bégin: J'en conviens.

Mme Lamquin-Éthier: C'est un exemple qui est limitatif, là.

M. Bégin: Et mettons que nous avons 10 éléments dans un partage. Il y en a un qui manque pour les raisons que vous venez de mentionner. Vous êtes quand même capable de faire la discussion sur l'ensemble. Vous n'avez pas le chiffre final, mais vous avez quand même une bonne idée de ce que vous avez. Alors, vous pouvez faire une hypothèse à partir de ce que vous avez et dire: Le reste va dépendre quand nous aurons le rapport. Bon.

Et je reviens avec mon hypothèse. Vous avez 60 jours, une fois que vous avez eu votre rapport, pour compléter vos opérations. Si vous les avez faites, vos procédures, puis qu'il n'y a que ça à traiter, vous avez suffisamment de temps. Et, dans l'hypothèse où c'est vraiment trop serré, vous pouvez demander au juge d'extensionner votre délai, et, à sa face même, vous avez un argument massue. Vous dites: M. le juge, j'ai fait ma demande... À ce moment-là, le juge, il va vous l'accorder, point à la ligne, et vous allez avoir obtenu votre délai.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Vous parlez que les parties vont être en mesure globalement de s'entendre, mais comment est-ce que les parties peuvent entreprendre des discussions sérieuses, arriver à des ententes si elles n'ont pas en main les éléments le permettant, notamment le relevé des droits accumulés dans leur fonds de pension respectif?

M. Bégin: C'est pour ça que je vous ai dit: C'était un des éléments. Puis ce n'est pas parce que la rente est de tant que le reste ne peut pas être partagé. Vous pouvez discuter: Il y a telle affaire à partager, telle affaire, telle affaire, telle affaire, ça, c'est à moi, ça, c'est à toi, non, je le garde, ça, c'est aux enfants, etc.. Tout ça, ça se discute, et on peut se chicaner longtemps, si on veut, ou faire ça vite. Mais il reste un élément, c'est le patrimoine. Personne ne va partir à zéro, là. On va dire, mettons, qu'on peut penser que c'est autour de 40 000. Bon. Personne ne va vouloir signer en disant que c'est 40 000, j'en conviens, mais il va y avoir un ordre de grandeur. Il va dire: Bon, écoute, entre 30 000 puis 40 000, ça nous permet à peu près ça... ça nous donne maximum ça. Si c'est moins, bien, ça donne minimalement ça. Il va y avoir un ordre de grandeur. Quand le chèque va tomber... pas le chèque, le chiffre va tomber, bon, ils vont être capables de trancher leur litige. Quand on veut, là, dans ces cas-là, on peut, puis, quand on ne veut pas, on ne s'entendra pas, c'est sûr. Ah, ça, c'est certain.

Mme Lamquin-Éthier: On ne peut pas présumer que les gens ne veulent pas. Il ne faut pas prêter des intentions...

M. Bégin: ...

Mme Lamquin-Éthier: Bien, écoutez, là, ou bien on veut ou on ne veut pas. On peut ou on ne peut pas. On peut quand, les délais auxquels on fait face, on est capable de composer avec. Quand, le délai, on ne peut pas le contrôler, qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse, on est obligé de le subir. Le délai ici, minimalement, c'est une période d'attente d'au moins 120 jours. Il n'y a de marge de manoeuvre, là, il n'y a pas de possibilité d'agir autrement, c'est minimalement une période d'attente d'au moins 120 jours. Mais, à tout événement, je comprends l'argument...

M. Bégin: Vous permettez, Mme la députée?

Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui. Le Barreau soulève quelque chose. Encore une fois, on n'a pas une bonne moyenne au bâton.

M. Bégin: Non, mais, regardez, là, quel est le patrimoine familial? Vous avez une maison, une automobile, un chalet, un REER et le fonds de pension, bon...

Mme Lamquin-Éthier: Bien oui, bien oui, un chalet, bien oui, une paire de skis.

M. Bégin: ...des éléments qui sont là. Une maison, c'est un gros morceau du patrimoine, ça, vous en conviendrez. L'automobile, c'est variable, le chalet, ça peut être gros, les REER, c'est... Bon. Mais vous en connaissez pas mal, et je dis que, sans connaître le chiffre exact de votre fonds de pension, vous avez régulièrement à peu près un aperçu de ce que ça va être. Bon. Alors, on peut prendre le petit morceau puis dire: C'est le tout. Pourquoi on ne peut pas regarder le tout puis dire: Bien, ça, c'est un petit morceau? Moi, je regarde par la lunette en disant: C'est un élément important, mais on n'est pas empêché d'agir, et des parties peuvent avancer leur dossier suffisamment pour que, si leur rapport rentre le cent vingtième ou le cent vingt-cinquième jour... pour faire un travail potable. Advenant le cas où...

Mme Lamquin-Éthier: On dit «au moins 120 jours».

M. Bégin: Oui. Advenant le cas où ça ne marche pas parce que vraiment ça n'a pas rentré, bien là il y a une soupape qui est là, qui est écrite: vous pouvez demander au juge d'obtenir un délai. Et vous allez l'obtenir. Ce n'est pas dramatique.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Alors donc, vous recevez un argument, vous le considérez puis vous dites: Bon, bien, écoutez...

O.K. On va en prendre un autre ? on va vérifier la moyenne au bâton ? le délai d'obtention pour les expertises psychosociales.

Le Président (M. Lachance): ...Mme la députée de Bourassa, qu'il vous reste peu de temps sur...

Mme Lamquin-Éthier: C'est-à-dire?

Le Président (M. Lachance): Une minute et demie.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Je vais faire ça vite, je vais parler extrêmement vite.

Le Président (M. Lachance): Ha, ha, ha!

Mme Lamquin-Éthier: Alors, le délai d'obtention des expertises psychosociales varie, comme vous le savez sans nul doute, d'un district judiciaire à l'autre. Vous savez également que le Barreau a fait un sondage auprès de tous les bâtonniers de section, qu'il a fait ce sondage-là en 2001, donc après l'injection de sommes d'argent supplémentaires. Or, le sondage a révélé que le délai variait entre deux et 18 mois selon les régions. Alors, comment, dans ces conditions-là, va-t-il être possible de rencontrer le délai de 180 jours?

M. Bégin: Lors de notre comité tripartite, même si ce n'était pas à l'ordre du jour, une intense discussion s'est soulevée autour de la question des rapports d'experts psychosociaux.

Mme Lamquin-Éthier: Des expertises.

M. Bégin: Des expertises, voilà, des expertises psychosociales. Il y en a en matière familiale, il y en a aussi en matière de jeunesse. J'ai ouvert moi-même le débat ? parce que ça avait été mentionné comme élément, les rapports d'expertise ? j'ai soulevé comme élément que ce n'était pas acceptable, les délais que nous avions, et que je considérais de faire la chose suivante pour régler le problème qui existe dans les deux postes, plus en matière familiale qu'en matière autre: de faire en sorte que dorénavant les rapports d'expertise devront être déposés dans un délai donné, par exemple 90 jours, et que défaut de le faire entraînerait une sanction sévère allant jusqu'à l'outrage au tribunal, parce que nous modifierions nos procédures pour qu'il y ait une liste des experts dans ce domaine, et que le juge désigne, sur recommandation des centres jeunesse, parmi les experts actuellement disponibles, celui ou celle qui devra faire l'expertise, et que vérification serait immédiatement faite de la disponibilité de la personne, avec l'engagement de cette personne de produire le rapport dans le délai.

Mme Lamquin-Éthier: Si elle ne respecte pas, qu'est-ce qui arrive?

M. Bégin: C'est ça que je vous mentionnais...

Mme Lamquin-Éthier: ...la partie va être obligée d'aller devant le tribunal...

M. Bégin: Ça pourrait être outrage au tribunal.

Mme Lamquin-Éthier: Donc, une procédure additionnelle. Puis elle n'est pas... elle est responsable du...

M. Bégin: On peut voir le problème dans la solution. Moi, c'est drôle, plutôt que de regarder ça comme ça, je me dis: Admettons que dans 95 dossiers sur 100 on obtienne un succès et que dans 5 % on ait un insuccès. Je regarde le succès dans les 95 et je ne parle pas des 5. J'en tiens compte, mais je n'en parle pas parce qu'il m'apparaît plus important de s'occuper du succès de 95 que de l'insuccès de 5. C'est une bonne moyenne. Alors, l'idée... Et tous les juges et toutes les personnes qui étaient là trouvaient que c'était une excellente idée parce qu'ils étaient fatigués ? c'est un mot léger ? fatigués d'attendre ces délais-là. Et c'est pour ça que j'ai dit: Écoutez, j'avais l'intention de le faire, pas de vous en parler aujourd'hui, mais j'en parle. Qu'est-ce que vous en pensez? Et ils étaient vraiment enchantés de la chose. J'ai fait le travail, il est prêt.

n(17 h 40)n

Mme Lamquin-Éthier: Sauf qu'en attendant on est pris avec la réalité du terrain, on est pris avec un sondage qui a été effectué auprès de tous les bâtonniers, puis, en attendant, le délai d'obtention des expertises... Et je comprends votre objectif, je peux même le partager, dans le meilleur intérêt des parties, dans l'intérêt du justiciable, mais sauf que là, en attendant, le délai varie entre deux et 18 mois.

M. Bégin: Alors, on va faire le Code de...

Mme Lamquin-Éthier: Comment voulez-vous qu'en attendant, là, les gens puissent rencontrer...

M. Bégin: ...on va faire le Code de procédure civile en tenant compte de ce qui cessera d'être dans quelques mois. Moi, je pense plutôt qu'on doit penser à long terme et qu'on doit trouver la bonne façon de faire les choses. Et il faut corriger le problème, puis le problème, il n'est pas dans le Code, il est dans les pratiques, et dans l'absence de moyens, et aussi, sans mettre de tort sur personne, dans cette division de la responsabilité en ce qui concerne ces rapports d'expertise. C'est qu'on a d'un côté la santé et de l'autre côté la justice. L'arrimage entre les deux devrait en principe permettre de faire en sorte que tout le monde y trouve son compte, c'est-à-dire que la justice demande et obtienne des rapports d'expertise, que les rapports donnent les meilleures recommandations auprès des juges et qu'on ait donc des enfants traités parfaitement. Excellent, sauf que la réalité, elle n'est pas là. Comment peut-on corriger ça? Moi, je dis: On n'attendra pas 20 ans, on va le faire tout de suite. Ma procédure est prête. À la limite, si on le veut, dans un des projets de loi que j'ai là, on pourra le greffer puis l'entrer dedans. Mais il est prêt.

Mme Lamquin-Éthier: Sans que vous puissiez vérifier si la mesure que vous allez prendre va produire les effets que vous souhaitez et dans quel délai cette procédure-là va...

M. Bégin: À l'automne au plus tard.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, en attendant, les gens vont devoir vivre avec la réalité, et la réalité... En attendant, on ne connaît pas le délai de l'entrée en vigueur.

M. Bégin: Ce que l'on va faire, madame, c'est simple. On peut dire, pour le rapport d'expertise psychosociale, si c'est vraiment une inquiétude: Nous n'avons qu'à mettre une disposition que la disposition entrera en vigueur à telle date donnée.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa...

Mme Lamquin-Éthier: Avez-vous regardé... au Tribunal administratif du Québec pour la Commission des affaires sociales? Regardez dans cette section-là. Tous les délais de soumission de rapports, aucun, aucun, aucun ? c'est 30 jours ? aucun n'est respecté.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa, je dois vous signaler que votre 20 minutes sur l'amendement est épuisé.

M. Bégin: Je vais quand même répondre parce que c'est une question qui mérite une réponse détaillée. Je trouve que la question des délais est un scandale. Je le trouve scandaleux en Cour supérieure, je le trouve scandaleux devant le Tribunal de la jeunesse, je le trouve scandaleux au TAQ. J'attaque les trois de front parce que... Pardon?

Mme Lamquin-Éthier: C'est la période en attendant. Les parties vont devoir vivre...

M. Bégin: Je sais et je viens de vous proposer que, si vous y voyez un obstacle si grand ? puis je ne vous dis pas ça en reproche, au contraire ? nous pouvons mettre une clause que cette disposition entrera en vigueur, mettons, dans six mois, ce qui fait que, pendant ces six mois-là, bien, il n'y aura pas d'application. Il n'y a rien qui nous empêche de mettre l'entrée en vigueur en même temps que certaines dispositions du Code de procédure civile, parce que ça va entrer en vigueur le 1er janvier 2003. Donc, on a le temps de préparer puis d'éviter...

On a la situation. Mettons qu'on fait ça, là. Moi, je n'ai pas de problème, on va y arriver. Ce qui m'intéresse, c'est vraiment m'assurer que personne ne fasse en sorte que des enfants soient ballottés dans l'indécision pendant des mois et des mois parce que le rapport d'expertise n'est pas rentré. Je trouve ça littéralement scandaleux.

Mme Lamquin-Éthier: On peut vérifier aussi ce qui justifie les délais.

M. Bégin: Oui, on connaît pas mal les causes. Je vous avoue honnêtement que ça a été une très belle discussion parce qu'il y avait des points de vue divergents, différents. Et il y a une expertise terrain aussi que nous avons, et ça, ça permet de voir pas mal de choses. Je ne dis pas que c'est parfait, parfait, parfait, là, mais l'objectif, lui, ne peut pas être discutable. Il faut que rapidement les enfants soient expertisés si c'est nécessaire, les parents, etc., que ce soit fait pour qu'on ait un traitement, de la part du juge, convenable par rapport à la situation de l'enfant, et ça, ça ne peut pas être un an et demi après, ce n'est pas vrai.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Dois-je comprendre, M. le ministre, que... Le Comité de révision de la procédure civile, vous savez que c'est trois années d'étude, de rencontres, de discussion. Ce n'est pas moi qui vais vous résumer la qualité et l'intensité de ces travaux-là. Encore une fois, la recommandation 6-19, elle est très spécifique. Elle survient après trois années de consultation auprès des spécialistes de tous les domaines à travers tout le Québec et elle est à l'effet d'étendre à un an pour les demandes en divorce et en séparation de corps, donc pour des matières particulières, pour les éléments dont ma consoeur, dont ma collègue a pu parler, d'autres éléments qu'on a pu évoquer. Donc, ils voulaient étendre pour les demandes en divorce et en séparation de corps le délai impératif de 180 jours prévu pour l'inscription de la cause, tel que recommandé au chapitre 3. Donc, encore une fois, vous en avez pris connaissance, sauf que vous ne partagez pas cette recommandation-là.

M. Bégin: ...

Mme Lamquin-Éthier: Bien, vous ne la retenez pas, à tout événement.

M. Bégin: Ce n'est pas tout à fait exact.

Mme Lamquin-Éthier: Bien, vous ne la retenez pas.

M. Bégin: Ce n'est pas tout à fait exact parce qu'il y a des éléments sur lesquels les membres du Comité n'avaient pas de pouvoirs, alors que, moi, j'en ai, par exemple de changer des délais, de faire en sorte que les délais changent. Eux ne peuvent en tenir compte. Ils doivent dire: Nous prenons la situation telle qu'elle est et on doit constater qu'on ne peut pas. Moi, je peux, comme législateur, vous proposer de changer ça et, en conséquence, de faire varier les données. Et je pense qu'à ce moment-là j'en tiens compte, mais parce que j'ai des données nouvelles, différentes, disons.

Mme Lamquin-Éthier: O.K., sauf que...

Le Président (M. Lachance): Mme la députée, là il y a eu une certaine tolérance, mais je dois...

Mme Lamquin-Éthier: O.K., O.K. Vous avez bien raison. Ça me préoccupe que la décision prise ne reflète pas la réalité du terrain.

Le Président (M. Lachance): À moins d'un consentement et... sur l'amendement.

M. Bégin: Je pense qu'on a fait le tour, là.

Le Président (M. Lachance): Oui? Très bien. Alors, nous allons disposer de l'amendement. Est-ce que cet amendement à l'article 110.1 est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Est-ce que l'article 110.1, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Sur division.

Le Président (M. Lachance): Sur division. Alors, est-ce que vous me libérez de l'obligation de faire lecture de l'article 110.2, étant donné l'amendement à 110.2 et 110.3? Cet amendement supprime la section I.1 comprenant les articles 110.2 et 110.3.

M. Bégin: Oui, M. le Président, d'autant plus qu'on peut le faire, étant donné que ces articles ? vous n'étiez pas là au moment de leur adoption ? sont devenus les articles 4.1 et 4.2 que nous avons étudiés dans l'article 0.1, qui était celui qui précédait l'article 1. Donc, nous avons disposé du contenu, nous avons disposé du contenu de ces articles-là, à moins que ma collègue me contredise, là. Cet amendement vise à supprimer les articles. En effet, ceux-ci sont déplacés à l'article 0.1 du projet de loi. Ils deviennent les articles 4.1 et 4.2, articles qui sont déjà adoptés.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa, est-ce que ça va?

Mme Lamquin-Éthier: Je crois que ça irait, là.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'amendement à l'article 110.2 et 110.3 est adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Nous en sommes maintenant à l'article 111, et il y a un amendement.

M. Bégin: Me donnez-vous deux petites secondes, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Oui.

(Consultation)

M. Bégin: Ça va.

Le Président (M. Lachance): Oui? Alors, je vais faire lecture de l'article 111: «La requête introductive d'instance est écrite et énonce, de manière concise, les faits sur lesquels la demande est fondée et les conclusions recherchées. La requête peut porter sur plusieurs causes d'action, sous réserve du pouvoir du tribunal de scinder l'instance.

«La requête est préparée et signée par le demandeur ou son procureur.

«Sauf lorsque la loi ou les circonstances l'interdisent, une requête peut être formulée conjointement, auquel cas aucune comparution n'est nécessaire.»

Et l'amendement à l'article 11, c'est-à-dire du projet de loi: Supprimer la dernière phrase du premier alinéa de l'article 111 proposé. M. le ministre.

M. Bégin: Alors, pour la partie du premier alinéa de 111, nous supprimons les mots «La requête peut porter sur plusieurs causes d'action, sous réserve du pouvoir du tribunal de scinder l'instance», puisque déjà l'article 66 du Code prévoit déjà ça. Alors, c'était redondant. C'est inutile, nous le supprimons. Maintenant, la deuxième partie, «sauf»...

(Consultation)

M. Bégin: Alors, c'est ce que j'avais à dire sur l'amendement qui est là.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement?

M. Bégin: Je croirais que oui.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Du premier paragraphe, M. le Président?

M. Bégin: Premier paragraphe, est-ce que...

n(17 h 50)n

Mme Lamquin-Éthier: Non. Vous nous expliquez que les ratures sont faites, vu l'article 66 du Code de procédure civile. Il y aurait redondance, donc...

M. Bégin: Écoutez, on dit, si on lit le commentaire, on dit: Déjà, le texte prévoit déjà que plusieurs causes d'action peuvent être réunies dans une même demande en justice, pourvu que les recours exercés ne soient pas incompatibles ni contradictoires, qu'ils tendent à des condamnations de même nature, que leur réunion ne soit pas expressément défendue et qu'ils soient sujets au même mode d'enquête. Alors, je pense que là on est couvert.

Le Président (M. Lachance): Oui.

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce que M. le ministre peut nous dire s'il considère que le troisième alinéa de cet article-là est en contradiction avec l'article 253.1?

M. Bégin: Le Barreau a soulevé quelque chose à cet égard. Nous ne sommes pas tout à fait en accord, mais nous ne sentons pas le besoin de le faire. C'est que le Barreau soulève que peut-être il serait préférable qu'il y ait une comparution dans ce cas-ci. Nous pensons que ce n'est pas nécessaire, mais ce n'est pas une question de vérité absolue là-dessus. S'il y a lieu, à moins qu'on ne m'objecte, là, dans mes conseillers, que c'est une erreur de fond, moi, je n'ai aucun problème à accommoder la représentation du Barreau là-dessus.

Mme Lamquin-Éthier: Pouvez-vous m'aider, s'il vous plaît, quant à la question posée? Est-ce que le troisième alinéa de cet article-là pose un problème? Est-ce qu'il est en nette contradiction avec 253.1?

M. Bégin: C'est l'argument du Barreau.

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, mais votre réponse, c'est quoi sur l'argument du Barreau?

M. Bégin: Mais, moi, je dis que, personnellement, je ne le crois pas.

Mme Lamquin-Éthier: Vous ne le croyez pas. O.K.

M. Bégin: On n'est pas nécessairement en désaccord formel.

Mme Lamquin-Éthier: Mais vous n'êtes pas nécessairement en accord.

M. Bégin: En désaccord.

Mme Lamquin-Éthier: Mais vous n'êtes pas nécessairement en accord.

M. Bégin: Non. Autrement dit, je suis relativement indifférent. Madame, tantôt, vous disiez que j'étais trop raide. Là, je vous dis: Ça ne me fait rien de l'accepter, puis là...

Mme Lamquin-Éthier: Non, non...

M. Bégin: Bien, ce n'est pas quelque chose sur lequel je me battrais.

Mme Lamquin-Éthier: Jusqu'à ce que mort s'ensuive, hein? O.K. Alors, vous n'êtes pas pour la première suggestion du Barreau, à l'effet de le retrancher, puisqu'il n'est pas question pour vous, à ce stade-ci, de retrancher ce troisième alinéa...

M. Bégin: Non, pas le troisième.

Mme Lamquin-Éthier: Excusez-moi, M. le ministre. Croyez-vous qu'il faudrait à tout le moins biffer les mots «auquel cas aucune comparution n'est nécessaire»?

M. Bégin: C'est ce que je viens de vous dire. Pour les mots «auquel cas aucune comparution n'est nécessaire», c'était là, la divergence. Je vous dis que, pour moi, je considère ça comme relativement accessoire. Je ne suis pas prêt à faire une bataille de tranchées pour avoir raison ou tort sur l'un des autres aspects. Si vous pensez que vous partagez ce point de vue là et qu'on aime mieux qu'on le supprime, je ne m'objecterai pas à le faire, à moins qu'on me dise ici qu'on me pose un gros problème.

(Consultation)

M. Bégin: Alors, écoutez, on me souligne qu'il va y avoir les articles 119 et suivants où il y a des problèmes, il y aura peut-être absence de règles, mais je pense qu'on peut s'accommoder d'une comparution parce que l'antithèse d'enlever «auquel cas aucune comparution n'est nécessaire», c'est qu'il y aurait une comparution. C'est ça que ça veut dire, à toutes fins pratiques.

Mme Lamquin-Éthier:«Auquel cas aucune comparution n'est nécessaire».

M. Bégin: Mais, si vous l'enlevez...

Mme Lamquin-Éthier: Oui, on l'enlèverait.

M. Bégin: Une requête peut être formulée conjointement. La réponse que le Barreau va devoir donner, ou l'avocat... Devant la situation, il va dire: Est-ce que je dois ou non faire une comparution? Il va devoir répondre oui, puisqu'on enlève «aucune comparution n'est nécessaire». C'est a contrario. Mais... qui va pouvoir répondre l'une ou l'autre des deux réponses. Mais le Barreau pense qu'on devrait avoir une comparution. Alors, ils feront l'acte de comparution. Peut-être que le juge dira: Monsieur, madame, on n'en a pas besoin, mais en tout cas. C'est pour ça que je dis: Là-dessus, là, ce n'est pas majeur, on comprend l'argument. Mais plus fort ne casse pas, d'avoir une comparution ne nuira certainement pas.

Mme Lamquin-Éthier: O.K. Parfait.

Le Président (M. Lachance): Alors, je veux bien comprendre. Est-ce qu'on le laisse tel quel ou si on l'enlève?

M. Bégin: On serait d'accord, si Mme la députée le propose, de l'enlever.

Mme Lamquin-Éthier: Pouvez-vous lire l'amendement que vous...

M. Bégin: Bien...

Le Président (M. Lachance): Écoutez, là-dessus, je préférerais qu'on puisse suspendre, et, lorsqu'on reviendra, il y aura un texte, pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté.

Mme Lamquin-Éthier: Excellente décision.

M. Bégin: O.K. Mais on va se comprendre dans le sens, quand même, pour ne pas qu'on travaille pour rien. Ce serait de supprimer, au troisième alinéa, dans la dernière ligne, les mots «auquel cas aucune comparution n'est nécessaire». Ce serait... à moins d'erreur de ma part.

Mme Lamquin-Éthier: Au moment de la recommandation. O.K.

Le Président (M. Lachance):«, auquel cas». On enlève la virgule aussi.

Mme Lamquin-Éthier: Bon, bien, le Barreau... M. le ministre a mentionné que c'était relativement accessoire, et là vous recevez un commentaire, alors...

M. Bégin: ...choses accessoires, pas les principales. C'est ça que vous me dites, là?

Le Président (M. Lachance): Alors, nous allons suspendre...

Mme Lamquin-Éthier: Non, non, mais, comme accessoire, là, relativement accessoire, le Barreau a eu gain de cause.

M. Bégin: ...plusieurs effets qui sont relativement accessoires.

Le Président (M. Lachance): Nous allons suspendre cet article et nous reviendrons à la prochaine séance, dont j'ignore la date. On verra à ce moment-là. Et, étant donné qu'il reste très peu de temps avant de terminer, je vais maintenant ajourner nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 56)

 


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