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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 10 février 2000 - Vol. 36 N° 44

Consultation générale sur l'avant-projet de loi sur la sécurité incendie


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Table des matières

Auditions

Mémoires déposés

Remarques finales


Autres intervenants
M. Roger Bertrand, président
M. Henri-François Gautrin
M. Jacques Côté
M. Michel Morin
M. Marc Boulianne
*M. Raymond Medza, BAC
*M. Louis H. Guay, idem
*Mme Brigitte Corbeil, idem
*M. André Drolet, Association canadienne des enquêteurs incendie
*M. Jean-François Halley, idem
*M. Donald Martel, ADGMRCQ
*M. Guy Charland, idem
*Mme Sylvie Cossette, idem
*M. Pascal Caron, Association des ingénieurs en sécurité incendie
*M. Gaston Brosseau, idem
*M. Yves Thibault, idem
*M. Gaston Fauvel, RAPQ
*M. Claude Leblanc, idem
*M. Daniel Rancourt, Municipalité régionale de comté d'Abitibi-Ouest
*M. Jaclin Bégin, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance ouverte. La commission des institutions est réunie afin de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur les ingénieurs et d'autres dispositions législatives.

Une voix: Loi sur la sécurité incendie.

Des voix: ...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je crois que...

Une voix: ...sécurité incendie.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Ha, ha, ha! Oui, effectivement.

M. Dupuis: On a des ingénieurs avec nous ce matin, par contre. C'est ça, on a des ingénieurs avec nous.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): C'est ça, je pense qu'il y a...

M. Dupuis: ...à la Loi sur les ingénieurs, d'ailleurs.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): ...une petite erreur d'aiguillage. Alors, Loi sur la sécurité incendie, effectivement.

Tout d'abord, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Aucun remplacement.

Nous en venons donc à l'ordre du jour. Cet avant-midi, d'abord, nous recevons des représentants du Bureau d'assurance du Canada; suivront l'Association canadienne des enquêteurs incendie et l'Association des directeurs généraux des municipalités régionales de comté du Québec; ensuite, le dernier groupe ce matin, l'Association des ingénieurs en sécurité incendie. Nous suspendrons nos travaux vers 12 h 15 pour reprendre à 14 heures avec le Regroupement des associations de pompiers du Québec et, ensuite, avec la Municipalité régionale de comté d'Abitibi-Ouest. Et nous procéderons aux remarques finales vers 15 h 15. Est-ce que cet ordre du jour est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Gautrin: Adopté, M. le Président.


Auditions

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Adopté. Alors nous amorçons donc la partie auditions. Tout d'abord, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux représentants du Bureau d'assurance du Canada. Je rappelle que nous avons à notre disposition 45 minutes, dont une quinzaine de minutes pour la présentation proprement dite. Alors, vous avez la parole, en vous priant de vous identifier, s'il vous plaît.


Bureau d'assurance du Canada (BAC)

M. Medza (Raymond): Merci, M. le Président. Mon nom, c'est Raymond Medza, je suis directeur général au Bureau d'assurance du Canada. Je suis accompagné ce matin de Mme Brigitte Corbeil, qui est la directrice à la recherche et au développement des politiques, de Me Louis Guay, qui est notre conseiller juridique, et de Me Louis Morrisseau, qui est analyste des normes et pratiques.

Nous tenons d'abord à vous remercier de nous permettre de commenter l'avant-projet de loi. Peut-être vous présenter le BAC davantage. Nous représentons la majorité des sociétés d'assurance de dommages au Québec. Nous sommes dirigés par des chefs de direction de sociétés qui y ont leur siège social ou leur principale place d'affaires.

Quelques données sur notre industrie au Québec. Je vous donne les données de 1998 parce que ce sont les dernières disponibles au bureau de l'inspecteur général des institutions financières. C'est 4 300 000 000 $ de primes, c'est 4 500 000 000 $ d'indemnités versées, des pertes, 1 400 000 000 $ de salaires, de loyers et autres frais d'exploitation, dont certaines taxes; 700 000 000 $ en taxes et impôts directs, payés par les assureurs, et le gouvernement provincial, en plus, évidemment, des revenus qui proviennent des 21 000 employés, ou à peu près, de notre industrie.

Nous sommes également un partenaire du gouvernement québécois, plus particulièrement du ministère de la Sécurité publique, dans le cas de sinistres majeurs, par exemple, ou de catastrophes, dont les plus célèbres sans doute sont le Saguenay et la crise du verglas. Au niveau de la prévention de la criminalité, depuis de très nombreuses années, nous sommes ensemble, et plus particulièrement depuis les cinq dernières années, dans des programmes conjoints de financement d'initiatives locales qui visent la réduction du crime. Alors, vous comprendrez donc que, ce matin, à nouveau, nous sommes là pour discuter avec vous dans un esprit de collaboration.

M. le Président, permettez-nous, premièrement, de féliciter – je sais que c'est difficile, mais... normalement – féliciter le ministre du dépôt d'un projet de loi qui est aussi critique que celui sur la sécurité incendie. Je pense que c'est un projet de loi qui était attendu avec impatience par plusieurs, et certainement avec raison. Deuxièmement, on aimerait souligner aux membres de la commission que nous souscrivons aux objectifs visés dans le projet de loi, qui sont de réduire les pertes humaines et matérielles, d'accroître l'efficacité des services incendie et, bien sûr, dans la mesure où il y a une amélioration soutenue, de réduire les coûts d'assurance.

Alors, nous allons limiter nos propos à deux points: l'exonération de responsabilité des municipalités et les obligations de déclarer, qu'on voudrait imposer aux assureurs. Immédiatement, j'aime mieux vous dire que, si ces deux points-là étaient adoptés, à notre avis, ça constituerait des irritants majeurs pour notre industrie.

D'abord, l'exonération. Le BAC s'étonne que le ministère se serve en fait d'un tel incitatif pour forcer les municipalités à se doter d'un plan de mise en oeuvre de schéma. En fait, le BAC s'oppose à toute exonération de responsabilité. Une autorité locale ou régionale qui établit un service d'incendie devient assujettie aux règles de droit commun et doit en assumer la responsabilité. Et, à l'instar des unions municipales qui sont venues ici, nous ne voyons aucune raison d'exempter le milieu des incendies, ou même les municipalités, de cette responsabilité.

Nous voyons mal comment une municipalité pourrait être exonérée de toute poursuite, comme le stipule l'avant-projet de loi, ni comment aucune compagnie ou citoyen pourrait poursuivre une municipalité qui aurait commis une faute. Par exemple, est-ce que ça veut dire qu'une famille qui vient de perdre tous ses biens puis qui juge que le travail des pompiers a été mal fait n'aurait pas le droit de poursuivre, ou que quelqu'un qui a vu un être cher périr n'a pas droit de poursuite? C'est-u ça qu'on veut dire? Je ne suis pas sûr. En tout cas, selon nous, ça va complètement à l'encontre des principes d'accès à la justice auquel tout citoyen, même corporatif, a droit.

(9 h 40)

Le deuxième point, c'est qu'on croit que c'est risqué aussi pour la sécurité des citoyens. Vous savez, quand on exonère quelqu'un de quelque chose, c'est ouvrir la porte à la déresponsabilisation, et ça, ça entraîne souvent de la négligence, du laxisme. L'un ou l'autre, les deux ensemble peuvent se manifester. Et d'ailleurs, vous savez que les tribunaux actuellement reconnaissent déjà que l'intervention des pompiers durant un sinistre requiert des décisions urgentes, alors qu'ils n'ont pas nécessairement en possession toutes les informations, et qu'il ne faut pas retenir la moindre erreur contre eux. Les pompiers doivent d'ailleurs s'acquitter de leur tâche en bon père de famille. Ils ont une obligation de moyens, ils n'ont pas une obligation de résultat. Donc, présentement, même s'il est établi que les pompiers n'ont pas agi selon les règles de l'art, la victime a le fardeau d'établir que les dommages auraient été moindres si les pompiers n'avaient pas commis de faute. Les tribunaux ne sont donc pas enclins à condamner les municipalités facilement et les principes établis par la jurisprudence nous apparaissent très raisonnables, et on pense qu'ils ne devraient pas être mis de côté.

Nous croyons aussi qu'il faut relativiser le nombre de poursuites: 211 entre 1989 et 1995 dont 22 désistements puis 39 dossiers réglés hors cour, ça, c'est sur six ans, ça veut dire une moyenne de 25 par année. Pour la même période, on a connu 67 000 incendies. Ça fait moins de 0,5 %. C'est quoi? Y a-tu un problème, là? En tout cas, à notre point de vue...

Puis le dernier point, je pense qu'avec le projet de loi, comme les municipalités seront mieux organisées, les pompiers mieux formés, l'efficacité des services d'incendie va être meilleure, puis, si c'est le cas, bien, il va y avoir moins de poursuites.

Pour terminer sur ce point, mentionnons que la lecture des articles 35 et 46 nous amène à deux questions. Comme toutes les autorités régionales vont être assujetties avec un schéma de couverture et un plan de mise en oeuvre, est-ce que ça veut dire que toutes les municipalités vont devoir avoir un service d'incendie? Et la deuxième question qu'on se pose, c'est: Comme on veut confier aussi aux services d'incendie d'autres charges, comme la lutte contre les catastrophes, le secours aux victimes d'accidents, aux personnes sinistrées, est-ce que l'exonération qu'on prévoyait, ça s'appliquerait aussi à l'exercice de ces autres activités là? C'est une question.

Notre second point, ça concerne les obligations de déclarer, de rapporter et de communiquer. D'abord, l'avant-projet de loi crée pour toute personne une obligation de déclarer à la municipalité locale un risque élevé. Il serait peut-être intéressant de savoir qu'est-ce qu'on veut dire par ça, un risque élevé ou particulier d'incendie? Est-ce que le fait d'avoir un restaurant avec une hotte de ventilation et des patates frites dans une bâtisse en bois, ça constitue un risque différent? Pour nous, chez les assureurs, on fait des inspections spéciales pour ça, et ça constitue un risque spécial, mais, au niveau de la loi, est-ce que ça va être la même chose? En vertu des articles 7, 150 et 151, la loi confère des pouvoirs particuliers au ministre dont celui d'obliger les assureurs et les experts de lui communiquer des informations particulières après les... Bon.

Premièrement, la façon dont on demande aux assureurs de rapporter des informations, c'est-à-dire au cas par cas, dans un délai très court, nous apparaît extrêmement coûteuse. On l'a expérimenté dans d'autres dossiers, par exemple avec des accidents de la route, c'est des mécanismes coûteux et difficiles à gérer.

Deuxièmement, les informations sont souvent de nature confidentielle parce qu'elles peuvent servir en cas de litige contre un assureur et son assuré. Et même la Loi sur la protection des renseignements personnels nous protège de les divulguer même à l'assuré. Alors, si on la transfère au ministre, est-ce que l'information deviendrait assujettie à la Loi d'accès aux documents publics puis le ministre serait obligé de la transférer à quelqu'un d'autre, si bien que la personne aurait accès à une information par voie détournée?

De plus, l'autre point, c'est que les assureurs ne sont pas toujours en possession des informations après les 90 jours du sinistre. C'est le cas souvent des causes probables d'incendie. Les enquêtes sont souvent très longues à réaliser, et la nature et l'étendue des dommages causés, souvent ça dépend de l'ampleur des sinistres et à quel moment ils surviennent.

L'autre point, c'est que l'article 151 ne doit pas engendrer un niveau additionnel de contrôle chez les assureurs ou de tracasseries administratives. D'ailleurs, ça irait à l'encontre du groupe de travail sur l'allégement réglementaire qui était présidé par M. Lemaire, je pense. Ainsi, dans l'éventualité où le ministre de la Sécurité publique aimerait avoir des analyses ou des études sur l'industrie de l'assurance, il existe déjà une quantité de données qu'on doit donner, en vertu de la loi, à l'Inspecteur général. D'ailleurs, il y a plusieurs de nos représentants qui auraient été ici aujourd'hui s'ils n'avaient pas été en train de compléter ces documents-là qu'ils doivent remettre avant la fin de février à l'Inspecteur général, en vertu de la loi, et ça relève du ministère des Finances. Alors, peut-être qu'une entente avec le ministre des Finances pourrait vous permettre d'obtenir tout ça. D'un autre côté, on ne peut pas non plus transmettre des informations, passer notre temps à donner des informations et se rapporter à tout le monde. Pour solutionner le problème de transmatique, s'il y avait des informations dont le ministère de la Sécurité publique avait besoin des assureurs, nous suggérons de remplacer le mécanisme de l'avant-projet par un système d'envoi sommarisé, qui pourrait se faire une fois par année, avec des spécifications, et nous sommes disponibles pour discuter des voies qui pourraient être utilisées.

Avant de conclure, aussi, M. le Président, nous aimerions vous faire part d'une certaine inquiétude sur le silence de l'avant-projet de loi sur la question de financement. Parce que, au-delà des coûts que cette réforme pourrait entraîner pour les assureurs au niveau des frais d'exploitation et à cause des obligations additionnelles, à cause des dépenses et des obligations additionnelles qu'on impose aux autorités régionales et municipales pour le schéma, la formation, l'élargissement... tout ça va entraîner des coûts importants. Quelqu'un va devoir les payer.

Et, bien que l'objectif visé par le ministre soit la réduction des dommages occasionnés par l'incendie, il faudra quelques années, sinon... Et d'ailleurs, tout le monde, dans tous les rapports qui ont été présentés, parle de cinq, six ans avant qu'on puisse voir un impact réel sur l'amélioration du bilan. Le dossier Feu vert faisait également référence à des réductions de primes très importantes. Bon. C'est possible qu'à long terme, même à moyen terme, la portion de la prime d'assurance incendie qui est attribuée dans les bilans s'améliore, mais on doute que le montant de la réduction soit aussi important que celui qu'on envisage. Puis il se peut même aussi que ça soit moindre encore à cause des frais qui seront engendrés, contrebalancés par l'augmentation des autres frais: les frais d'administration internes et les frais imposés au ministère.

Et le dernier point, si vous pouvez nous le permettre, M. le Président, c'est: si la formation des pompiers doit être augmentée et que c'est souhaitable, le BAC estime que le ministère ne devrait pas négliger de déployer d'importants efforts dans la prévention des incendies et l'éducation du public. Je sais qu'on l'a fait, là, dans plusieurs dossiers, mais il ne faut surtout pas oublier ça, parce qu'il est encore très inquiétant de constater qu'aujourd'hui, en l'an 2000, 37 % des pertes incendie sont toujours causées par la négligence humaine: cigarette, poêle ouvert, graisse. Et on peut avoir les meilleurs schémas d'aménagement, les meilleurs pompiers, ça ne réglera pas ce 37 % là d'incendies.

Alors, voilà. En terminant, M. le Président, nous voulons réitérer notre intention et notre désir de collaborer à élaborer un projet de loi qui réponde aux aspirations de notre Québec. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. Medza. M. le ministre.

M. Ménard: Merci beaucoup de votre mémoire. J'accepte volontiers vos félicitations. Je vous dirais peut-être que, s'il avait été... vous devez réaliser cependant que, des fois, si le projet de loi avait été aussi complet que tous l'avaient désiré, peut-être qu'il n'aurait pas encore vu le jour. Et pendant ce temps-là, l'opposition aurait continué à dire: Le ministère ne fait rien, le ministre ne fait rien, même s'ils savent qu'on ne fait pas rien, mais qu'on travaille à préparer des choses qu'on rendra publiques. Mais, tant qu'elles ne sont pas rendues publiques, on ne fait rien. Mais c'est difficile, à un moment donné, de vouloir atteindre la perfection dans ce domaine-là, c'est se vouer à l'impuissance, et c'est une des choses d'ailleurs que nous voulons corriger dans certaines municipalités. Mais vous avez soulevé des questions sérieuses, vous les soulevez de façon responsable, comme on doit s'y attendre des gens qui assurent nos biens. On est ouvert à une plus large discussion que celle que nous aurons le temps de tenir ici ce matin et à une collaboration plus étroite sur certains des sujets que vous avez soulevés.

(9 h 50)

Notamment, je vous dis tout de suite que nous voudrions que ce soit le plus facile et le moins coûteux possible, l'échange d'informations. Mais je pense que vous admettez avec moi que l'industrie, elle aussi, a besoin des informations sur les incendies que le ministère compile, n'est-ce pas? Alors, là-dedans, on se rend service tous les deux. Vous avez l'information sur le terrain... plutôt, les compagnies qui vous forment ont cette information, mais elle est nécessairement partielle. Alors, il faut que quelqu'un la compile pour ensuite en faire bénéficier l'ensemble de la société, donc l'ensemble des assureurs.

Or, notre but, ce n'est pas de vous coûter de l'argent. Notre but, c'est que le bien que vous allez recevoir de l'accès à ces statistiques soit équivalent et même supérieur, en fait supérieur, dans la mesure du possible, aux coûts que cela va engendrer. Alors, là-dessus, on pourra discuter des détails. Déjà, vous êtes sûrement informatisés; les municipalités le sont. Mais, vous savez, quand on retarde pour faire les rapports au fur et à mesure, généralement c'est beaucoup plus de travail par la suite pour les faire. C'est ça qui nous inquiète. Alors, disons que cet aspect-là est réglé.

L'autre dont je voudrais parler avec vous puis qui est très sérieux, c'est l'exonération de poursuites. Nous sommes dans un domaine où il faut que les gens qui interviennent dans la lutte aux incendies puissent le faire avec confiance et puissent donner le meilleur d'eux-mêmes le plus rapidement possible. Parce que, dans le domaine de l'incendie, comme dans le domaine policier dans certains cas, mais particulièrement dans le domaine de l'incendie, la rapidité des décisions, des interventions qui sont faites en cette matière ont, grosso modo, un effet réducteur sur les pertes. Ça, je pense que – je vous vois hocher de la tête – vous le reconnaissez volontiers. Vous êtes conscients aussi que la situation est telle, causée par les peurs de poursuites au Québec, que nous sommes dans la situation paradoxale où, pour éviter les poursuites, certaines municipalités décident de se départir de leur service d'incendie. C'est évidemment une chose qui n'est pas souhaitable.

Alors, l'exonération vise le but que, justement, les acteurs, devant l'intervention de l'incendie, le fassent rapidement. Mais vous avez constaté quand même que cette exonération, elle est balisée. Il faut qu'il y ait un schéma de couverture de risques approuvé par le ministère, donc dans le sens des orientations qui seront nécessairement celles de l'industrie en général en Amérique du Nord, avec des adaptations particulières. Donc, il faut qu'il y ait un schéma de couverture de risques. Il faut qu'il y ait un plan d'intervention du responsable, donc de la municipalité, du service d'incendie, puis il faut qu'il s'en tienne à ce plan. Mais, au-delà de ça, s'ils font ça, je pense que vous reconnaissez que nous allons améliorer le bilan d'incendie au Québec. S'il y a des schémas de couverture de risques qui sont faits, s'il y a des plans d'intervention qui sont conformes aux schémas et si les municipalités s'en tiennent à ces plans-là, nous allons sûrement améliorer le bilan des pertes matérielles, et même des pertes de vies humaines, d'incendie au Québec, n'est-ce pas, totalement.

M. Medza (Raymond): En principe, vous avez raison. M. le Président, dès lors qu'on a un schéma d'aménagement, qu'on a des éléments de combat, c'est certain que ça devrait, théoriquement en tout cas, améliorer le bilan, si je ne suis pas capable d'intervenir à quelque part. Ce qui m'inquiète, par contre, et peut-être que mon collègue, Me Guay, pourra commenter sur les questions d'aspect juridique, mais une municipalité qui, actuellement, se départirait des services d'incendie au seul fait qu'elle a peur des poursuites, c'est parce que, ou alors son service d'incendie n'est pas compétent, ou alors elle n'engage pas des services d'incendie compétents. Et, si elle le fait, elle n'aura pas de poursuites. Et c'est pour ça que l'exonération, pour nous, ce n'est pas une solution. C'est comme dire aux gens: Regardez, vous n'avez pas de police parce que vous avez peur des poursuites; ça fait qu'on va enlever les poursuites, comme ça vous allez... C'est quoi? Pourquoi donner ça? C'est quoi? Ce n'est pas un bonbon.

M. Ménard: Non, ce n'est pas un bonbon, mais ça crée un climat de confiance à vouloir faire ce qu'il faut faire pour améliorer l'intervention. Donc, tout ce qui reste, et qui est quand même ce pourquoi on s'assure aussi, c'est que, si, dans le cours de l'intervention, dans l'anxiété, l'adrénaline d'une intervention qui doit être faite nécessairement rapide, on commet une erreur, qu'un juge pourra, après moult études dans son bureau et après avoir entendu des parties pendant plusieurs heures, décider, lui, que l'intervention aurait dû être faite de façon différente, eh bien, je serai protégé. Je serai protégé si j'ai agi de bonne foi dans un cadre bien établi. Est-ce que ce n'est pas pour ça qu'on s'assure généralement?

M. Guay (Louis H.): Si vous permettez. Je pense qu'à l'heure actuelle, et tout à l'heure, M. le Président, j'entendais M. le ministre dire que, justement en situation d'incendie, il y a un sinistre, il y a une urgence, et les pompiers sont appelés à prendre des décisions qui ne sont pas faciles parce qu'ils n'ont pas toute l'information requise. Vous citez sans le savoir les juges de la Cour d'appel qui, dans des décisions récentes, ont exactement utilisé ce critère-là pour évaluer les responsabilités des pompiers et du service d'incendie. Donc, c'est déjà le critère qui est utilisé par les tribunaux actuellement, et je pense qu'il est tout à fait adéquat.

Alors, l'autre chose aussi, l'autre phénomène qui peut être trompeur quand on parle de poursuites contre les municipalités et qui peut donner à penser à première vue qu'il y a des poursuites, disons, frivoles, c'est que le délai de prescription pour prendre la poursuite est de six mois, et ça, c'est un petit peu hors du commun. Quand on parle en droit civil québécois, normalement les poursuites en responsabilité, c'est trois ans. Mais, dans un délai de six mois, que ce soit un assureur, que ce soit n'importe quel enquêteur, ce n'est pas un délai suffisant pour mener une enquête complète sur un sinistre. Et ce qui arrive dans la plupart des cas d'incendie, c'est que, après quatre ou cinq mois, un assureur n'aura pas complété son dossier et, pour protéger ses droits, il va demander à son procureur d'instituer une poursuite contre la municipalité en attendant de compléter son enquête. Et il y a de nombreuses poursuites qui sont abandonnées en cours de route.

Donc, il faut tenir compte aussi de ce phénomène-là d'urgence qui fait qu'il y a peut-être un surcroît de poursuites au départ contre les municipalités. Mais, selon les chiffres qu'on a cités d'ailleurs tout à l'heure, pour le nombre d'incendies qui se produisent versus le nombre de poursuites, je pense qu'il y a quand même un ratio qui démontre qu'il n'y a pas un nombre absolument incontrôlable de poursuites.

M. Ménard: Correct. J'ai peut-être pris trop de temps là. Bon. Cet argument n'est pas dans votre mémoire. C'est la première fois que j'entends parler du délai de six mois. On va le considérer.

M. Medza (Raymond): Puis les municipalités sont assurées, M. le Président.

M. Ménard: Pardon?

M. Medza (Raymond): Puis les municipalités sont assurées, M. le Président, pour se faire défendre contre ça.

M. Ménard: Mais comprenez bien que vos arguments s'adressent comme si on donnait une exonération qui n'est pas balisée. Alors, on est prêt à recevoir vos arguments sur les balises. L'argument du six mois en est un. J'ai pratiqué assez longtemps comme avocat, même si je ne faisais pas de... je faisais juste du droit criminel, pour le comprendre, mais comprendre son importance pratique. Mais il n'est pas dans votre mémoire; on est ouvert à le considérer. Si vous trouvez qu'il est mal balisé, on est prêt à accepter vos suggestions. Mais je vous assure, par la réaction des municipalités, que c'est un incitatif très fort à amener la majorité des intervenants, sinon la totalité des intervenants en matière de sécurité incendie au Québec, à faire ce qu'il faut faire pour se donner une bonne sécurité incendie.

Alors, comme il y en a beaucoup d'autres qui veulent poser des question, je vais les laisser.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Dubuc, il nous reste une minute et demie.

(10 heures)

M. Côté (Dubuc): Oui, alors je vais essayer d'être bref. Madame, messieurs, bonjour. Vous dites dans votre mémoire, à la page 5: «La collecte d'informations incendie par incendie nous paraît une ingérence du gouvernement dans le traitement des dossiers sinistres des assureurs.» Présentement, la Loi sur la prévention des incendies vous demande déjà des renseignements. Est-ce que ça veut dire que vous vivez déjà cela comme une ingérence actuelle du gouvernement? Et j'aimerais aussi que vous me disiez qu'est-ce qui se fait en dehors du Québec, dans les autres provinces.

Mme Corbeil (Brigitte): Pour ce qui est de la collecte des données incendie cas par cas, pourquoi on dit que c'est une ingérence... Et on parlait de confidentialité d'information puis on se dit: Si on donne l'information, une personne pourrait avoir accès à cette information-là en vertu de la loi d'accès à l'information. Donc, c'est là-dessus qu'on s'objecte à donner l'information. Présentement, il y a peu d'assureurs, je pense, qui, effectivement, soumettent les données au ministère de la Sécurité publique. D'ailleurs, dans votre rapport, dans le rapport de 1997, c'est mentionné qu'il y a peu de compagnies d'assurances, donc pas tous les assureurs, qui donnent l'information. De même, il y a 868 municipalités qui n'ont pas fait de déclaration au ministère de la Sécurité publique ou qui ont fait des déclarations qui n'étaient pas complètes, que le ministère de la Sécurité publique pouvait utiliser dans l'élaboration de son rapport sur les statistiques. Donc, c'est un peu ça.

M. Côté (Dubuc): À l'extérieur du Québec, est-ce que c'est exigé également, ça?

Mme Corbeil (Brigitte): Je ne peux pas vous répondre.

M. Côté (Dubuc): Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il vous resterait encore un peu de temps, étant donné que le député de Rivière-du-Loup n'entend pas intervenir à ce moment-ci. Oui, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin: Oui. Bonjour, M. Medza, madame, messieurs. J'aimerais intervenir sur la formation. Dans votre mémoire, vous parlez de formation, mais il me semble que vous n'insistez pas assez au niveau de la formation des pompiers. Nous avons reçu, avant-hier, les gens du projet-pilote de la MRC de Nicolet-Yamaska qui nous ont parlé de formation, parce qu'ils se sont aperçus, à l'utilisation de leurs ressources humaines, que le tiers de leurs pompiers volontaires n'étaient pas formés du tout. Ils ont suivi le module 1... je pense, trois modules de formation, et ont vu déjà une amélioration. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur la formation, parce qu'il me semble que c'est primordial. Vous avez parlé de prévention tantôt, mais c'est important aussi, je pense, la formation de nos pompiers.

M. Medza (Raymond): Sur la question de la formation, on a été très limité dans nos propos, effectivement. Comme M. le ministre disait tantôt, M. le Président, c'est un projet de loi qui ne pouvait pas tout comprendre et, dans notre mémoire, on a tenté de concentrer nos interventions sur les sujets qui nous étaient un peu plus sensibles.

Sur la question de la formation, le seul commentaire que nous avons fait, c'est de faire attention sur la création des superstructures. Et là c'est mon expérience de citoyen qui me dit: À chaque fois que j'ai vu quelque chose de créé, c'est toujours devenu des gros monstres. Et, quand je regarde la loi n° 188, avec le BSF, on est en train de faire exactement la même chose, et ça va coûter – là, je pense qu'ils sont rendus à 6 000 000 $ ou 7 000 000 $, ça devait coûter 2 000 000 $ – 20 000 000 $ et quelques avant que ça soit fini. C'est ce que j'ai dit en commission parlementaire sur cette structure-là. Je vous dis que dans l'école nationale de formation, si on veut faire quelque chose, une école nationale de pompiers, c'est présomptueux de penser que ça va se limiter à 9 000 000 $. C'est présomptueux. Ça va coûter beaucoup plus cher que ça, parce que ça coûte très cher.

Il y a déjà des équipements qui sont là, il y a déjà des endroits où ça existe, pourquoi est-ce qu'on ne fait pas strictement – et je pense que c'est ça qu'on mentionne dans notre mémoire – un encadrement de la formation? Est-ce que ce qui est donné présentement, ce n'est pas bon, là? Ceux qui sortent actuellement, ils ne sont pas bons? Tout ce qu'on veut, c'est qu'il y en ait plus qui sortent de là. C'est tout. Ça prend-u une école nationale pour ça? Je ne comprends pas, là. C'est ça, le point sur la formation. Oui, de la formation, mais il y en a; puis elle est bonne, celle qui est donnée. D'ailleurs, on recherche les gens qui sortent de là, on les embauche. Donc, ça doit être bon.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Alors, bonjour, M. Medza, bonjour, Mme Corbeil, M. Guay, M. Morrisseau. Il faut que je vous dise qu'on vous attendait un petit peu avec la dent longue, mais pas dans le sens agressif du terme, dans le sens suivant: On s'est tous rendu compte que le ministre avait trois objectifs à sa réforme, l'un des objectifs traitant de vos affaires à vous particulièrement, l'objectif de faire baisser les primes d'assurance.

Moi, je suis un peu inquiet de la pensée magique qui souvent anime ce gouvernement-là lorsqu'il propose des réformes ou des programmes particuliers. Je vais attirer votre attention sur le fait qu'ils ont fermé des prisons en espérant qu'il y ait moins de détenus, ça n'a pas été le cas; ils ont fermé des hôpitaux en espérant qu'il y ait moins de malades, ça n'a pas été le cas; et, dans les deux cas, les institutions qui sont restées ouvertes ont débordé.

Là, voici qu'on nous propose une réforme de la sécurité incendie avec laquelle, comme vous, l'opposition est d'accord au niveau des principes. Pas de doute là-dessus. Mais voilà une réforme au sujet de laquelle on dit, M. Medza, qu'elle va automatiquement apporter des baisses de primes d'assurance. Et là il y a une espèce de pensée magique qui s'abat encore une fois sur ce gouvernement-là et qui fait en sorte qu'on est en train ou on s'apprête à vendre la réforme de la sécurité incendie en faisant croire à la population que les investissements qu'on va mettre dans cette réforme-là, ceux que vous avez mentionnés dans votre présentation, à tous les titres, que ce soit en formation, que ce soit en équipements, que ce soit en dépenses pour confectionner les schémas de couverture de risques, en engagement de personnel supplémentaire, en formation pour les pompiers, que tous ces coûts-là, qui représentent un montant x qui est aussi virtuel parce que personne ne nous en a donné la teneur, vont être compensés par la baisse des primes d'assurance aux consommateurs. Moi, là, j'émets des doutes sur cette affirmation-là. Non seulement j'émets des doutes, j'affirme que c'est de la pensée magique.

Dans votre présentation – c'est pour ça que je veux aller au coeur du problème – vous dites: Tut, tut, tut, il faut faire attention, là! D'abord, l'assurance incendie en tant que telle, si j'ai bien compris, ça existe, oui, mais à l'intérieur d'une plus grande couverture qui est une couverture d'habitation. Une partie de la couverture qu'on a en assurance habitation, c'est la partie incendie, première chose. C'est exact?

Deuxième chose. Ce n'est pas tout le monde qui est assuré, je pense, au Québec. J'aimerais savoir la proportion des gens qui sont assurés.

Et, troisièmement, vous avez dit dans votre présentation... Et j'aimerais ça que vous nous expliquiez mieux ça, parce que, moi, je ne veux pas que vous repartiez d'ici puis qu'on puisse, parce qu'on ne vous a pas posé la question, continuer à véhiculer auprès de la population, auprès des élus municipaux: Faites-la, la réforme, peu importent les coûts, de toute façon, il va y avoir une adéquation dans la baisse des primes d'assurance. Je ne veux pas que vous repartiez comme ça si ce n'est pas la vérité. Si c'est la vérité, dites-le; mais si ce n'est pas la vérité, il faut le dire, il faut que la population le sache.

Donc, vous avez dit: Il faut faire attention, la réforme de la sécurité incendie, oui, ça peut avoir des effets bénéfiques sur la partie incendie de la prime à l'assurance habitation, mais ça va prendre du temps, et c'est difficile d'en connaître la nature. Et j'aimerais ça, que vous l'expliquiez et il faudrait que ça soit clair, M. Medza.

Puis je termine en vous disant: Vous risquez de devenir les vilains dans cette affaire-là, si ce n'est pas bien expliqué à la population et aux élus locaux, les effets que pourrait avoir la réforme de la sécurité incendie sur les primes d'assurance. On a, les consommateurs, une relation d'amour et de haine avec les assureurs, vous le savez. On vous aime donc quand on a eu une catastrophe et que vous nous payez. Puis, encore là, on se chicane souvent parce qu'on pense toujours que vous devriez nous en donner plus que vous nous en donnez, hein, premièrement. Deuxièmement, on trouve donc que les primes coûtent cher quand la catastrophe n'arrive pas. Donc, on a une relation d'amour et de haine avec vous.

Et là, si on fait une belle réforme de sécurité incendie, qu'on y investit beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent et que la population est convaincue qu'elle devrait s'assurer parce que les primes vont être basses puis ça va baisser toutes les primes d'assurances, tantôt c'est vous autres qui allez être les vilains. Alors, je termine, là. J'aimerais ça que vous nous donniez le portrait puis que vous sachiez, quand vous retournerez dans votre voiture à Montréal cet après-midi, que la pensée magique, là, vous l'avez démystifiée.

M. Medza (Raymond): Je suis content de savoir, M. le Président, qu'au moins il y a une partie d'amour envers nous, que tout n'est pas haine, et je remercie le député de nous rappeler cela.

Moi, je suis un vulgarisateur, je ne suis pas un technicien. Je vais demander à ma collègue de vous le donner. Je vous dirai ceci: Quand ils m'expliquent quelque chose, j'essaie de l'expliquer d'une façon simple, des fois je ne le comprends pas moi-même, mais celui-là, je le comprends bien.

(10 h 10)

Les primes d'assurance habitation... Restons dans le domaine de l'habitation, si vous voulez, ça va faire la même chose dans les entreprises. Dans les contrats d'assurance, quand vous achetez un contrat d'assurance pour votre propriété, ça comprend l'assurance incendie, le vol, les catastrophes, le verglas, les refoulements d'égouts, la responsabilité, bon. Cette prime-là, je ne vous apprends rien, je vous ai donné les chiffres tantôt, si vous regardez, année après année dans le rapport de l'Inspecteur général, les primes aux biens des particuliers et les pertes aux biens des particuliers, vous allez voir que c'est presque identique, les montants. Donc, ça veut dire qu'il y a une carence de primes. Les primes ne sont pas assez élevées au départ.

Donc, sur la prime globale, quand on dit qu'il y aura des réductions de primes, il faut bien s'entendre que la réduction de primes, oui, elle est possible, mais sur la partie qui touche l'incendie. Ce qui veut dire que globalement, si j'ai besoin de plus d'argent, j'augmente mes primes en vol. Le résultat net: peut être que la prime globale est plus élevée, mais elle aura quand même baissé en incendie. Alors, il faut faire attention de ne pas expliquer qu'il va y avoir des baisses de primes, point. C'est la partie incendie. Peut-être que ma collègue pourrait préciser.

Mme Corbeil (Brigitte): Peut-être au niveau des paiements d'indemnité qui sont faits par les assureurs. En 1995, on estimait à 42 % la portion des sinistres qui était payée pour de l'incendie. Si on prend les données de 1998 – bon, 1998 est une année particulière – on est tombé à 15 %, mais, en 1998, on avait toutes les indemnités qui étaient liées au verglas. Les données préliminaires qu'on a obtenues des assureurs, c'est qu'en 1998-1999 on tourne aux alentours de 32 % des indemnités versées qui sont versées pour l'incendie. Une des causes de ça, c'est que, depuis 1996, on voit une augmentation – c'est un autre débat – des paiements d'indemnité qui sont versés pour les dommages par l'eau. C'est pour ça qu'on veut dire: Faites attention quand vous parlez de réduction de primes. Il va probablement y avoir, s'il y a une amélioration du bilan de l'incendie, une réduction de la prime incendie, mais c'est seulement une petite... Bien, «une petite proportion», c'est quand même 30 % de la prime d'assurance. Mais il y a d'autres facteurs qui viennent influencer la prime. Une autre question...

M. Dupuis: Excusez-moi, Mme Corbeil. Allez-y!

Mme Corbeil (Brigitte): Vous aviez posé la question à savoir quel était le pourcentage de gens qui étaient assurés. Les données qu'on a estimées, c'est qu'environ 90 % de la population des propriétaires se trouvent à être assurés, alors qu'au niveau des locataires on parle de 55 % de la population.

M. Dupuis: Un petite question additionnelle avant de passer la parole au député de Verdun. On est évidemment dans du virtuel, mais, moi, j'ai entendu le ministre dire à un groupe: Oui, il va falloir investir dans la sécurité incendie, compte tenu de l'avant-projet de loi qui est devant nous, mais inquiétez-vous pas, cet investissement-là va être compensé par les baisses des primes d'assurance. Ça a été ça, son affirmation.

Moi, ce je comprends de ce vous me dites – je veux que ce soit clair là – c'est: Wo, wo, wo! ce n'est pas exactement ça qui va arriver. Mais il faut le dire. Est-ce que c'est ça que vous dites? Et je parle de l'adéquation. Évidemment, on ne sait pas quel investissement est nécessaire. Puis, vous autres, vous tempérez la baisse de la partie incendie de la prime. Mais vous mettez en garde sur ces déclarations-là, n'est-ce pas?

M. Medza (Raymond): Oui, ce que nous voulons préciser, M. le Président, c'est que, si on dépense 100 000 000 $, par exemple, pour instaurer les mesures prévues dans le projet de loi, il est peu probable que ce soit 100 000 000 $ de retour.

La question qu'il faut se poser là, ce n'est pas ça, c'est: Est-ce qu'on fait de la prévention d'incendie juste parce qu'on va le récupérer ailleurs ou bien non si on le fait parce qu'on a besoin de sécurité puis de se sentir à l'aise? Moi, je pense qu'on doit le faire d'abord pour notre propre sécurité, pour sauver des vies. Ça ne se paie pas, ça. Ça ne vaut pas de l'argent, premièrement.

Et deuxièmement, une fois qu'on a fait ça, si en plus on voit les dépenses réduites par une réduction des primes, alléluia! Et c'est presque inévitable qu'il y en ait parce que – le ministre l'a mentionné tout à l'heure, nous l'avons mentionné et d'autres groupes l'ont fait – des pompiers mieux formés, des schémas de défense mieux faits, mieux planifiés, une plus grande conscience de la prévention et une meilleure formation vont faire qu'on va avoir des incendies... probablement, on espère, moins d'incendies. Il y en a qu'on n'est pas capable d'éviter. Le 37 % de négligence, on pourrait peut-être l'aider, mais ça... Bon. Mais il y en a qu'on ne pourra jamais éviter. Mais, quand il y en aura un, on sera mieux équipé, mieux préparé et mieux connaissant pour l'arrêter, et donc ça devrait avoir des résultats positifs qui vont se refléter inévitablement dans nos coûts.

M. Dupuis: Mme Corbeil, est-ce que les baisses éventuelles de la partie incendie des primes interviendraient au moment où la réforme entrerait en vigueur? Est-ce qu'il y a un certain temps avant que... Est-ce qu'il y a un historique des primes? Comment ça fonctionne? L'influence que la réforme pourrait avoir sur les primes est-elle immédiate?

Mme Corbeil (Brigitte): La réponse, c'est non. Ce n'est pas immédiat. Les assureurs basent leur tarification sur une expérience des cinq années antérieures. Donc, naturellement, pour qu'on voie une réduction des primes, il faut encore que l'assureur ou les assureurs soient en mesure de voir: Est-ce que la réforme amène les réductions récurrentes au niveau de la sinistralité? Si cette sinistralité-là n'est pas récurrente, bien, on n'aura pas d'amélioration au niveau des primes.

M. Medza (Raymond): M. le Président, on a un bel exemple dans le projet de Nicolet-Yamaska. On a eu une année terrible, l'année passée, au niveau incendie. Il y a eu de la foudre. Des poulaillers, il y en a deux, trois qui ont sauté. Bon. On a beau avoir les schémas d'aménagement qu'on voudra, quand ça, ça arrive, on les a pareil, les pertes. Et là on ne peut pas espérer que l'impact de ce qu'on a fait pendant trois ans à peu près maintenant, quatre ans, M. Lemieux, que... Nous autres, on travaille sur ce dossier-là. On espère qu'il va y avoir des résultats positifs; sans ça, on n'y serait pas allés. Puis on pense qu'il va y en avoir, des résultats positifs. Mais malheureusement, il y a des impondérables avec lesquels... Alors, des garanties, là...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je suis d'accord avec vous, on ne fait pas de la prévention strictement pour faire des économies de prime. On est bien d'accord là-dessus. Vous comprenez qu'on est aussi amené à essayer de mesurer – ça a été le sens de l'intervention du député de Saint-Laurent – le coût du projet de loi et éventuellement les économies possibles.

Je vais rentrer avec vous sur l'article 46. L'article 46 est celui qui parle de l'exonération. Vous vous êtes dits, vous êtes contre actuellement un tel article d'exonération, et votre argument est: parce que l'exonération va avoir un effet sur la qualité du service. C'est un peu: si les gens ne sont pas responsables, il risque d'y avoir un effet un peu moindre.

Ce que je voudrais savoir de vous: Est-ce que vous pourriez me dire combien les municipalités actuellement paient en assurances pour se prémunir contre les risques de poursuite en responsabilité incendie? Est-ce que vous avez un chiffre à ce niveau-là? Première question.

Deuxième question: Est-ce que la rédaction de l'article 46 tel qu'il est, qui ne supprime pas complètement la possibilité de poursuites, mais qui balise les poursuites contre des municipalités dans le cadre où la municipalité ou le service d'incendie n'aurait pas suivi le schéma de couverture de risques, à ce moment-là... Dans ce cadre-là, y a-t-il une possibilité de baisse sur les assurances en responsabilité que les villes ont prises pour couvrir ce type de responsabilité?

M. Medza (Raymond): En réponse à la première question, la plupart. Je veux dire, je ne pense pas qu'il y ait de municipalités même qui ne soient pas assurées. En fait, on a eu des débats assez intenses avec les municipalités sur la question d'accès à l'assurance responsabilité. Et, comme c'est toujours basé sur des bases théoriques, les prévisions de pertes, si on avait des pompiers mieux formés et des schémas d'aménagement mieux, il y aurait moins de chances de poursuites. On n'a pas besoin d'un article de loi pour que la prime baisse. On aurait une certitude...

M. Gautrin: Mais est-ce que vous pouvez me donner le montant d'assurances globalement payé par l'ensemble des municipalités en primes?

M. Medza (Raymond): Malheureusement pas. Mais, si vous désirez l'obtenir, M. le Président, ça nous fera plaisir de nous enquérir auprès des assureurs principaux.

M. Gautrin: M. le Président, ça serait une information – si vous pouvez nous la transmettre – qui, à mon sens, pourrait être pertinente dans nos débats.

M. Medza (Raymond): Quant à la facture de l'article 46, vous me permettrez de laisser un avocat l'attaquer. Je n'oserais pas m'y aventurer. Louis.

(10 h 20)

M. Guay (Louis H.): Merci, M. le Président. Personnellement, quant à la rédaction de l'article, je n'ai rien contre la rédaction de l'article. Je comprends le but qu'on veut atteindre, de limiter peut-être le nombre de poursuites, etc. On n'est pas certain si c'est vraiment nécessaire, compte tenu des principes actuels. Mais, personnellement, je crois qu'au niveau juridique l'article 46 pourrait tout simplement ne pas être dans la loi et on atteindrait, à mon avis, l'objectif quand même de protection de la municipalité, puisque le fait que la loi prévoit la mise en place d'un schéma de couverture, etc., c'est un élément sans doute – sans nul doute, je devrais dire même – dont les tribunaux tiendraient compte éventuellement pour évaluer les responsabilités de la municipalité sans que ça soit nécessaire d'être écrit textuellement dans le projet de loi. Alors...

M. Gautrin: Excusez-moi. Alors, sa rédaction n'exclut pas la possibilité, pour le citoyen qui juge que sa municipalité n'a pas combattu un incendie d'une manière correcte, de pouvoir éventuellement poursuivre en responsabilité la municipalité.

M. Guay (Louis H.): J'ai déjà agi dans des causes, dans des litiges avec des municipalités. J'en ai représenté en défense et j'en ai poursuivi, et je peux vous dire – je connais très bien la jurisprudence sur le sujet – que c'est plus facile à dire qu'à faire, d'obtenir la condamnation d'une municipalité, et les juges sont très réceptifs aux défenses. C'est une obligation de moyens, c'est une obligation de bon père de famille et, même quand un incendie...

J'ai déjà vu des dossiers où, même quand un incendie a pris naissance, les pompiers arrivent sur les lieux, vont faire leur travail, éteindre le feu, et, même quand l'incendie repart, autrement dit, même quand il y a un deuxième incendie, le juge – il y a des décisions de la Cour d'appel là-dessus – évite de conclure automatiquement une responsabilité puis il y a un feu mal éteint.

M. Gautrin: Essentiellement, ce que vous craignez, vous dites: L'article 46 ne protège pas ou n'exonère pas plus les municipalités, mais ça peut avoir l'effet psychologique dont vous avez...

M. Guay (Louis H.): Non. Ce que je dis, c'est que la rédaction de 46 actuellement va rendre presque impossible la condamnation d'une municipalité parce qu'il faudra prouver – c'est un fardeau de preuve très, très lourd – faute lourde ou intentionnelle. Et c'est certain que le deuxième paragraphe vient apporter un bémol, mais je pense que, compte tenu des principes jurisprudentiels actuels et compte tenu de l'obligation de mettre en place un schéma de couverture, l'article 46 pourrait tout simplement ne pas être là et je pense qu'on arriverait à un résultat équivalent.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il me reste malheureusement à remercier, parce qu'on n'a plus de temps à notre disposition, les représentants du Bureau d'assurance du Canada, dont M. Medza, son directeur général, pour votre contribution à nos travaux.

J'inviterais également immédiatement les représentants de l'Association canadienne des enquêteurs incendie, dont son président, M. André Drolet, à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je rappelle que la présente commission est réunie afin de procéder à une consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la sécurité incendie.

Nous en sommes au deuxième groupe ce matin avec les représentants de l'Association canadienne des enquêteurs incendie, dont M. André Drolet, président, que je salue. Je rappelle que nous avons à notre disposition 45 minutes, dont une quinzaine de minutes pour la présentation proprement dite. Alors, à ce moment-ci, M. le président Drolet, je vous inviterais à bien vouloir nous présenter votre mémoire, en nous présentant la personne qui vous accompagne.


Association canadienne des enquêteurs incendie

M. Drolet (André): Merci beaucoup, M. le Président, de nous recevoir aujourd'hui, membres du conseil. J'ai avec moi aujourd'hui M. Jean-François Halley, qui est mon premier vice-président.

Pour débuter, je vais vous faire connaître un peu ce qu'est l'Association canadienne des enquêteurs incendie. C'est une Association, on pourrait dire, qui connaît son évolution depuis les dernières 50 années au niveau canadien. Maintenant, malheureusement au Québec, on n'avait pas cette Association-là. Alors, depuis 1996, on a fondé l'Association canadienne des enquêteurs incendie, secteur Québec. Cette Association-là regroupe environ 200 membres qui viennent de tous les différents paliers et tous les différents intervenants au niveau des enquêtes incendie. Alors, je parle des policiers-enquêteurs, des enquêteurs privés, des experts en sinistre, des pompiers, des avocats, et même des polygraphistes.

Aujourd'hui, je viens vous donner nos opinions un peu sur les différents articles qui vont vous être présentés. Je dois souligner aussi que ce mémoire est présenté avec le soutien de l'Association des experts en sinistre, qui nous a remis son plein support à la présentation de notre mémoire.

Pour débuter, je vais aller directement au but parce que j'ai à peu près sept articles que j'aimerais pouvoir discuter. Je vais le faire brièvement. Tout d'abord, j'aimerais faire une mention au ministre: D'avoir pris la décision d'avoir un projet de loi sur la sécurité incendie, c'est plus que louable présentement.

Si nous allons directement à l'article 7, l'article 7, je vais le mettre en relation avec les articles 148 et 158. Alors, l'article 7 où on parle que: «Tout assureur ou tout expert en sinistre dont les services ont été requis à la suite d'un incendie ou d'une explosion doit communiquer au ministre, dans les 90 jours du sinistre, ses constatations ainsi que les renseignements qu'il possède sur le point d'origine du sinistre, ses causes probables et ses circonstances, la nature et l'étendue des dommages.»

Alors, nous, essentiellement, on est en accord avec le fond de cet article. Cependant, ce que nous comprenons est que nous devons communiquer au ministre tous ces renseignements dans les 90 jours du sinistre. On trouve ça un peu trop court, dépendamment... Lorsque c'est un incendie accidentel qui est très facile d'examen et qu'il n'y a aucun problème, ça, il n'y a pas de problème. Mais, lorsque ça va plus loin, on trouve ça très court comme production de documents ou de statistiques. Par contre, ce qu'on suggère en premier lieu, c'est l'utilisation d'un rapport préliminaire comportant des informations de base, qui serait appuyé par la suite par des données validées de l'enquête complétée et l'établissement de la perte.

Quand on regarde l'article 148 où le ministre peut faire des analyses des données statistiques et des études sur la situation de la sécurité incendie à l'échelle nationale, régionale ou locale, on est d'accord avec le fait qu'on procède à l'analyse des dossiers, mais, comme à l'article 150 qui découle de l'article 148, pour établir tout formulaire, bien, nous demandons que le règlement découlant de cette loi précise les données utilisées en recherches et causes d'incendie.

De plus, on suggère fortement de tenir compte des formulaires existants. C'est ce qui permet des comparaisons avec les autres provinces. Les assureurs déjà, comme le disait tantôt M. Medza, peut-être qu'ils n'en soumettent pas tous, mais la majorité des assureurs, et je parle des experts en sinistre, des gens mandatés pour faire l'enquête soumettent un rapport. Ils doivent en soumettre un, un rapport aussi, à la DGSP.

Si vous le désirez, M. le Président, j'ai des copies de ce formulaire qui est assez condensé et qui donne des indications. Alors, faire des formulaires pour faire des formulaires, je pense qu'il y en a déjà d'établis. Si jamais vous me le permettez tout à l'heure, je pourrai en distribuer une copie.

Dans l'article 7 – on revient – lorsqu'on parle de ses causes probables, de ses circonstances, de la nature, de l'étendue des dommages et du point d'origine, j'aimerais porter à votre attention que le «point d'origine», c'est une chose qui pourrait être changée en «secteur d'origine», parce que le secteur d'origine va déterminer l'endroit, dans le sens où le feu a pris naissance dans la cuisine, dans le salon, dans le sous-sol, tandis que le point d'origine nous amène à l'enquête précise du point de détermination du feu: en arrière du poêle ou dépendamment de l'endroit. Alors, je pense que le terme ici, en haut, à l'article 7, pourrait être changé de «point d'origine» à «secteur d'origine».

(10 h 30)

Lorsque je parlais tantôt de ramener les articles 7, 148 et 158... lorsqu'on parle, à l'article 158, qu'«un assureur ou un expert en sinistre qui ne fait pas rapport au ministre conformément à l'article 7 commet une infraction et est passible d'une amende de 500 $ à 3 000 $», on est d'accord dans un sens avec cet article. C'est entendu, s'il y a des règlements... il y a une punition aussi si on ne suit pas les règlements. Sur ce principe-là, on est d'accord. Maintenant, là où on n'est pas d'accord: Pourquoi un assureur puis un expert en sinistre sont sujets à cette loi, alors que les services d'incendie en sont exclus? Donc, on devrait aussi y incorporer et en préciser les autorités définies à l'article 8 du présent avant-projet de loi.

Présentement, on sait que, comme je vous disais tout à l'heure, les experts en sinistre, la plupart des enquêteurs soumettent des rapports de statistiques, qu'on pourrait appeler. Puis, de cette façon, bien, il faut penser qu'il n'y aura pas autant de municipalités qui ne transmettent pas de déclarations à la DGSP ou qui transmettent des déclarations insuffisantes pour en permettre la compilation statistique. Alors, je pense que les gens n'ont pas... le fait de soumettre un rapport pour des statistiques, ça va aussi. Sur ce côté-là, il n'y a pas de problème. Par contre, il faudrait que tout le monde soit inclus aussi, non pas seulement taxer les enquêteurs qui, eux, déjà, la plupart, en soumettent, un rapport.

Maintenant, nous allons à l'article 44: «Le chef pompier ou la personne désignée doit, sans délai et avant d'entreprendre ses recherches, rapporter au service de police compétent sur le territoire du sinistre tout incendie ou toute explosion.» Si on se reporte seulement à l'article 44, on suggérerait de remplacer le mot «rapporter» par «transmettre le dossier», ce qui est plus précis. Puis le terme «rapporter», bien, ça laisse place un peu à l'interprétation. Appeler quelqu'un, on peut rapporter quelque chose. Transmettre le dossier, c'est clair. Il faut transmettre le dossier. Et, si on regarde à l'article 44, bien, c'est dans les choses très spécifiques: cas de décès et, aussi, il y a soupçon concernant l'incendie qui serait volontaire.

Maintenant, nous parlions aussi de l'École nationale des pompiers du Québec. Ici, je dois rapporter que, dans notre mémoire qu'on a soumis, il s'est glissé une petite, légère erreur quand on dit, à l'article 54:

«La formation professionnelle qualifiante du personnel municipal travaillant en sécurité incendie comporte deux aspects: la formation professionnelle de base et le perfectionnement professionnel.

«La formation professionnelle de base est celle qui permet d'acquérir les compétences nécessaires dans un domaine donné de pratique en sécurité incendie.»

Là où s'est glissée notre erreur, c'est qu'on a remarqué «La formation professionnelle» et on doit lire: «Le perfectionnement professionnel est la formation ayant pour objet, dans un domaine de pratique, la mise à jour des compétences ou l'acquisition d'une spécialité particulière.»

Alors, nous, en tant qu'association d'enquêteurs, on dit que c'est excellent, une formation professionnelle de base, le perfectionnement professionnel, c'est super, mais il faut ajouter quelque chose à ça: c'est une formation professionnelle continue. C'est bien d'éduquer les gens, c'est bien de leur donner la formation et c'est bien de développer des champs d'activités particulières. Mais elle doit être continue. Et, si je peux me permettre des exemples, un polygraphiste doit s'évaluer tous les ans, les désamorceurs de bombes aussi. Tous les gens qui ont une spécialité doivent quand même être capables d'exercer et de démontrer qu'ils ont toujours les qualifications pour le faire.

L'École nationale des pompiers. On sait que, présentement, créer une nouvelle structure, c'est très, très coûteux. Mais on sait bien qu'ici, au Québec, et compte tenu de tout ce qui existe présentement en matière de formation au Québec, nous sommes d'avis que nous pouvons facilement remplir les objectifs de formation prévus par la loi avec les organismes en place, actuels.

Je sais que, notre Association étant plus concernée par les incendies volontaires, il va de soi que les intervenants soient formés par des professionnels et que cette formation soit continue et encadrée par des organismes responsables. À ce sujet, bien, pour terminer, j'ai l'article 62 qui dit: «Le conseil d'administration de l'École est formé de quatorze membres.» Si je peux me permettre, M. le ministre, M. le Président, notre Association qui est directement impliquée dans la formation continue des gens sur le Guide des enquêtes d'incendies et d'explosions , ce que nous appelons le NFPA 921 dans notre milieu... nous demandons l'ajout d'un quinzième membre au sein du conseil d'administration, qui serait nommé par le gouvernement pour un mandat de deux ans, tel que stipulé par l'article 62. Cette personne serait naturellement un représentant de l'Association canadienne des enquêteurs incendie de la section de Québec, compte tenu que nos membres proviennent de tous les paliers directement reliés au mécanisme d'enquête d'incendies, en conformité avec l'article 53, paragraphe 5° traitant de la recherche du point d'origine, des causes probables et des circonstances d'un incendie ou d'une explosion.

Donc, en terminant, comme nous le disions tout à l'heure, le projet de loi, en somme... nous sommes d'accord. Il y aura probablement quelques correctifs à apporter à certains articles de la loi. Et vous pouvez considérer notre appui, notre support. Et ce que nous avons discuté ce matin, bien, j'espère que c'est pris de façon constructive. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le président André Drolet. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ménard: Alors, je vous remercie beaucoup de votre mémoire et de votre présentation, ici. C'est évident que nous l'attendions avec une certaine impatience à cause de l'expertise pointue que vous avez en matière de sécurité incendie. Et je dois vous dire que vos paroles nous confortent dans la conviction que nous allons dans la bonne direction, et nous cherchons à y aller, le plus loin possible, dans cette direction, et, pour cela, vos suggestions nous sont utiles. Elles vont rester par écrit. Nous avons 15 minutes pour discuter ensemble, je m'attaquerai donc à certains sujets, ce qui ne veut pas dire que nous n'apprécions pas les diverses suggestions que nous avons par écrit et dont certainement nous tiendrons compte d'une bonne partie d'entre elles.

Mais je voudrais avoir votre éclairage sur un certain nombre de points. Vous trouvez que le délai de 90 jours est trop long, pour communiquer certains renseignements. Est-ce que vous pourriez nous dire, nous suggérer un délai qui serait plus raisonnable?

M. Drolet (André): Je vais vous dire, une date, un délai raisonnable... Lorsque c'est un incendie qui est vraiment accidentel et que tout est en bonne et due forme, le 90 jours est suffisant. C'est simplement si ça se développe à d'autres incendies volontaires ou d'autres choses. Soumettre un rapport dans le sens... Il faut bien considérer, si on comprend bien, il faut que ça soit un rapport de statistiques? Alors, si c'est un rapport de statistiques, 90 jours peut être suffisant dans un cas, comme on disait, bien naturel. Mais, outre ça, ça peut aller des fois à six mois, un an, ça dépend de l'incendie. Si on parle de rapport, il faut peut-être se comprendre sur la forme de rapport, c'est un rapport de statistiques? Probablement 90 jours; un rapport préliminaire peut être soumis dans 90 jours.

M. Ménard: O.K. Bon, en somme, dans tous les cas, vous seriez prêts à produire un rapport au moins préliminaire, quoique, dans la plupart des cas, il serait définitif. Mais, dans certains cas, qu'on vous autorise à produire un rapport plus complet dans un délai que vous demanderiez.

M. Drolet (André): Oui.

M. Ménard: O.K. Ça va. On en prend bonne note. Vous comprenez évidemment le but de ces rapports. Le but de ces rapports, c'est de compiler des statistiques qui sont utiles à l'ensemble de l'industrie et à l'exercice de vos fonctions aussi.

M. Drolet (André): Oui, ça, on comprend ça.

M. Ménard: Bon. Vous parlez aussi de l'article 151 sur lequel vous soulevez des interrogations quant à son fondement, notamment le fait qu'il ne respecterait pas la loi n° 68. Aussi, vous parlez de son impact sur le projet de loi C-6 du gouvernement fédéral. J'aimerais que vous élaboriez sur vos inquiétudes à ce sujet. Les explications sont un peu courtes dans votre mémoire, j'aimerais avoir une meilleure idée.

(10 h 40)

M. Drolet (André): Oui. Bien, ce qu'on voulait apporter ici, c'est que, lorsqu'on regarde, puis vous demandez les rapports... Si on parle toujours de statistiques, les informations qui sont soumises, ça va. Si on parle de rapports complets, etc., on rentre directement dans un dossier où les rapports sont tenus confidentiels, où les rapports vont aux commettants, à ceux qui demandent de faire l'enquête. Alors, de vous soumettre les rapports complets, ça devient une publication, alors, à ce moment-là, on enfreint certaines lois. C'est une chose qui peut-être devrait être portée à l'étude, devrait être regardée, le genre de document qui pourrait être retransmis sans le consentement de l'assuré, ou vice versa. Parce que tout dépend de la définition que vous voulez avoir de «rapport». Alors, comme on dit, on y revient toujours, ça a été soumis dans le fait de porter à votre attention que, si vous désirez avoir des rapports, des informations, alors il y a différentes lois, comme on sait, la loi n° 68, et on sait qu'éventuellement il y a le bill C-6 qui va nous arriver, alors ça va être à travers le Canada, qui n'existe pas dans les autres provinces présentement.

M. Ménard: La loi n° 68 dont vous parlez, c'est la Loi sur la protection des renseignements personnels, n'est-ce pas?

M. Drolet (André): C'est ça. C'est exact.

M. Ménard: O.K. Bon, on en a parlé, suite à votre mémoire, je crois que les dispositions de la loi n° 68 du Québec prévoient quand même ce que vous devez faire quand vous êtes requis, par une autre loi, de fournir des renseignements qu'autrement vous devriez garder secrets, et l'obligation est que, si légalement vous devez les communiquer à un autre organisme gouvernemental, l'autre organisme gouvernemental est tenu de garder cette partie des renseignements secrète, mais, évidemment, peut diffuser la partie statistiques qui, elle, est dans l'intérêt public. Mais C-6, si je comprends bien, il n'est pas encore en vigueur.

M. Drolet (André): Il n'est pas encore en vigueur, il est en troisième lecture présentement.

M. Ménard: Mais c'est dans le même sens.

M. Drolet (André): C'est dans le même sens.

M. Ménard: C'est exactement dans le même sens.

M. Drolet (André): Ça va être la même loi qui va s'appliquer à travers le Canada.

M. Ménard: O.K. Ça va. On va voir à faciliter la concordance des deux lois, mais je pense que c'était déjà prévu dans ces deux lois...

M. Drolet (André): Ah! d'accord.

M. Ménard: ...qu'il y aura des circonstances où vous serez obligés de communiquer certains renseignements qu'autrement vous êtes obligés de garder secrets.

M. Drolet (André): Oui, effectivement.

M. Ménard: O.K.

M. Drolet (André): Bien, il y a des lois déjà qui existent pour ça.

M. Ménard: Bon, maintenant, une dernière question quant à moi. Votre Association est canadienne. Donc, vous fréquentez, j'imagine, à l'intérieur de votre Association, des gens qui ont la même profession que vous, les mêmes fonctions que vous à travers le Canada. Vous êtes au courant que notre bilan est relativement bon quant au nombre d'incendies et aux pertes de vies humaines, nous sommes même un peu inférieurs à la moyenne canadienne, mais il est très élevé. Alors, dans votre profession, quelle est la cause principale qui est identifiée? Vous devez en discuter, vous devez vous comparer d'une province à l'autre de temps en temps. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle est la cause principale, pour vous, de ce triste bilan que nous avons dans le nombre des pertes matérielles par incendie?

M. Drolet (André): Oui, on en discute effectivement. Dans bien d'autres provinces, des fois l'accent est mis beaucoup sur la prévention des incendies. Aussi, le fait d'avoir des statistiques, le fait d'avoir des choses en main qui démontrent la problématique de l'incendie permet de canaliser des fois mieux les intervenants. Sur des scènes d'incendie, un problème qu'on a – je ne dirais pas un problème majeur, mais c'est un problème – c'est beaucoup d'intervenants, peu de collaboration. Alors, l'Association qui a été formée est venue ici, au Québec, comme ça, et, si je peux me permettre, M. Jean-François Halley est un des fondateurs avec moi-même... qu'il y avait peu de collaboration entre les intervenants. Alors, ça crée que tout le monde veut mettre le nez dans une scène d'incendie ou un incendie et, par le fait même, ça augmente les coûts.

M. Ménard: C'est drôle, j'avais l'impression que, si on fait plus de prévention, on va diminuer le nombre d'incendies et que, par conséquent, si nous avons le même bilan quant au nombre d'incendies par habitant, c'est donc que les mesures de prévention sont... Moi, je suis convaincu que, par contre, simplement la préparation d'un schéma de couverture de risques va amener les gens à faire de la prévention, en faire plus qu'ils en faisaient, puis je vois que vous partagez cette opinion. Mais je dois donc comprendre que le problème, nous l'avons, c'est au niveau de l'intervention, lorsque l'incendie se crée, et que c'est là que nous avons vraiment une faiblesse par rapport aux autres. Et même si on peut améliorer encore notre bilan sur le plan des pertes de vies puis sur le nombre d'incendies – puis, si on peut le faire, je pense qu'on va chercher à le faire – nous avons un problème vis-à-vis l'intervention. Je vois M. Halley, comme vous dites, votre fondateur, peut-être qu'il veut répondre.

M. Drolet (André): Allez-y, M. Hallé.

M. Halley (Jean-François): Je pourrais vous dire, M. le ministre, que j'ai parlé avec l'Ontario en ce qui regarde évidemment l'incendie et plus spécifiquement des «fire marshalls». Eux, ils ont opté, en Ontario, pour travailler énormément sur des choses que, moi, j'accepte bien, qui sont l'éducation – et ça part au niveau des écoles – la formation puis le combat. Pour eux, c'est très important de suivre l'ordre des mots, ce qui veut dire: éducation en premier, beaucoup d'énergie, beaucoup d'énergie sur la formation, puis le combat va venir par la suite.

Ce que j'ai remarqué au Québec, moi, lors de mes enquêtes incendie, il y a des retards à informer, le monde manque un peu d'éducation face à... Il y a un début d'incendie, c'est la panique, on fait quoi? Parce que c'est tout de même quelque chose qui est paniquant. Alors, l'intervention des pompiers, souvent, est retardée à cause de ce fait premier là qui fait en sorte que nos bâtiments subissent des dommages encore plus considérables et également son contenu. C'est une chose qu'on constate au niveau des pertes d'incendie, matérielles, le temps, entre autres, qui rentre en ligne de compte.

Aussi, dans certaines municipalités, ce que j'ai constaté lors des enquêtes, c'est que policiers, pompiers, des fois ça peut être problématique lors d'un combat d'incendie. Il y aurait peut-être lieu, au niveau d'une formation, de regarder aussi une formation interne municipale, qui est de la pratique assidue pour l'utilisation de l'équipement. Ce n'est pas le temps d'improviser sur une scène, il faut être prêt. C'est juste des petites choses comme ça qui feraient en sorte qu'on pourrait probablement améliorer les résultats, et je suis convaincu d'une très grande collaboration des municipalités. Puis c'est un coût qui est moindre, juste le fait de penser qu'est-ce qu'on fait lors d'un combat et non pas improviser lors du combat.

M. Ménard: Alors, je vous remercie beaucoup. Remarquez que c'était l'opinion dont on m'a convaincu pour préparer ça. Je crois que le schéma de couverture de risques va amener exactement cette nouvelle attitude, et vous croyez qu'on peut obtenir un bien meilleur taux de sécurité incendie pour la même dépense que l'on fait actuellement. C'est ça.

M. Halley (Jean-François): Bien, M. le ministre, par cette façon de penser là, le pompier, l'officier qui va arriver sur une scène va déjà reconnaître son bâtiment, son plan d'attaque va déjà être pensé en regard avec son schéma.

M. Ménard: Puis il va y avoir des pompiers mieux formés autour de lui.

M. Halley (Jean-François): Ça devrait.

M. Ménard: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Bonjour, M. Drolet, M. Halley. Souvent, on reçoit des gens en commission parlementaire et on oublie de leur poser des questions essentielles, par exemple qui ils sont, etc. L'Association des enquêteurs incendie, d'abord vous regroupez combien de membres en tout à peu près?

M. Drolet (André): Deux cents membres.

M. Dupuis: O.K. Vos gens sont à l'emploi de quelles organisations en général?

M. Drolet (André): En général, on des experts en sinistre...

M. Dupuis: Donc, employés par des assureurs.

M. Drolet (André): ...employés par des assureurs, des policiers-enquêteurs.

M. Dupuis: Ça, c'est important. Vous avez des policiers-enquêteurs dans votre Association.

M. Drolet (André): Oui.

M. Dupuis: O.K. Est-ce que tous les policiers qui font de l'enquête en incendie sont membres de votre Association?

M. Drolet (André): Non.

M. Dupuis: De plusieurs corps de police?

M. Drolet (André): À travers la province. J'ai des gens aussi loin que la Gaspésie, à Matane.

M. Dupuis: Alors donc, des assureurs sont vos employeurs, des corps de police.

M. Drolet (André): Là, il faut faire attention. On n'est pas à l'emploi de l'Association parce qu'on a des emplois...

M. Dupuis: Non, je comprends, j'ai compris.

M. Drolet (André): O.K. Je veux bien qu'on se comprenne là.

M. Dupuis: Oui, oui, j'ai compris. L'Association, pour vous, c'est bénévole...

M. Drolet (André): Oui, monsieur.

M. Dupuis: ...mais vous avez un emploi ailleurs.

M. Drolet (André): Oui.

M. Dupuis: O.K. Très bien. Ça va. Alors donc, vos gens sont employés par les assureurs, ils sont employés par des corps de police. Est-ce que vous avez des entreprises? Non? Oui?

M. Drolet (André): Oui... bien, on a des entreprises... oui, des ingénieurs légistes, on a des gens du Laboratoire scientifique.

M. Dupuis: O.K. Alors, vous autres, dans le fond, votre intérêt, l'intérêt de votre profession, de votre métier, c'est l'incendie qui est causée volontairement. C'est exact?

M. Drolet (André): Effectivement, oui.

M. Dupuis: Alors, comment ça fonctionne? Il y a un incendie en quelque part. Les premières constatations sont à l'effet que, coudon, ça n'aurait pas dû arriver puis c'est arrivé. Alors, les gens vous appellent, vous disent: Nous autres, ça n'aurait pas dû arriver chez nous, on n'est pas capables de voir quelle est la cause; venez-vous-en puis venez regarder ça. J'imagine que ça doit être à peu près comme ça que les demandes se font.

(10 h 50)

M. Drolet (André): Bien, en général, écoutez, s'il y a un feu, il y a une alerte. S'il y a une alerte, il y a une alarme, bien les pompiers vont se rendre sur les lieux. Puis les pompiers, bien ils vont procéder à l'arrosage, hein. Ils vont essayer d'éliminer les dégâts le plus possible. Suite à leur intervention, bien il y a des gens qui vont entrer en scène, ils vont constater s'il y a eu des foyers d'incendie, s'il y a eu quelque chose qui est anormal. Par la suite, ils vont transmettre, s'il y a lieu, à la police s'il y a des choses anormales. Et là l'enquête va commencer, le processus d'enquête. Et là les enquêteurs des assureurs vont être appelés et les assureurs vont mandater des experts en sinistre qui, eux, vont venir à leur tour, et les chimistes et les ingénieurs, et là tous les intervenants vont procéder à l'enquête. Et là où vient l'Association, c'est d'avoir la participation de tous ces intervenants-là à collaborer.

M. Dupuis: O.K. La formation que vos membres ont reçue, en général... d'abord, est-ce que c'est la même formation pour tout le monde?

M. Drolet (André): La formation, je réponds, c'est qu'ils ont tous la même formation. Ce qu'ils ont, c'est que ce sont tous des enquêteurs ou des intervenants reliés au mécanisme d'enquête d'incendie.

M. Dupuis: Mais, M. Drolet, ça ne me dit pas quel cours ils ont suivi, quelle formation ils ont suivie.

M. Drolet (André): Ah, mon Dieu! oui, vous avez des gens de l'Institut de police.

M. Dupuis: O.K.

M. Drolet (André): Vous avez les pompiers qui ont été à l'IPIQ.

M. Dupuis: Bien, pour les policiers, c'est certain.

M. Drolet (André): Pour les policiers. Les pompiers qui sont allés à l'Institut des pompiers, pour les pompiers. Les enquêteurs, on pourrait dire les experts en sinistre, ils ont leur formation d'expert en sinistre et ils suivent aussi des cours, comme nous, on donne des cours de session de formation sur NFPA 921.

M. Dupuis: O.K. Alors donc, vos membres à vous, ils ont suivi une formation qui est disparate, et il n'y a pas de préjudice à votre endroit dans ce que je dis, mais il y a des policiers qui ont suivi Techniques policières, l'Institut de police, puis qui, ensuite, dans leur carrière, se sont plus spécialisés...

M. Drolet (André): En incendie.

M. Dupuis: ...en incendie. Est-ce qu'il y a encore des escouades spécialisées à la Sûreté du Québec en incendie?

M. Drolet (André): Oui.

M. Dupuis: Oui, encore. Bon. Vous avez des gens qui ont suivi le cours à l'IPIQ et qui ont une formation de base de pompier, puis vous avez des gens qui ont continué leur formation d'eux-mêmes. Est-ce que je dois comprendre que ce que vous recommandez... ou est-ce que vous recommandez que soit ajouté au cours de formation de base à l'École de pompiers, à l'IPIQ par exemple, un cours sur l'enquête en incendie? Est-ce que c'est ça que vous demandez?

M. Halley (Jean-François): Pas nécessairement parce que ce n'est pas évident que le pompier... Le pompier peut participer à l'enquête, il peut avoir un rôle à jouer vis-à-vis la recherche de causes d'incendie. Mais son rôle devrait s'arrêter à ce moment-là sur la scène et il ne se rendra pas nécessairement, lui, à l'interrogatoire, à la prise de déclaration, etc. Parce que, en incendie, il y a deux volets qui sont importants. Notre Association d'ailleurs voit que c'est important que ce soit comme ça. On ne veut pas faire de police parallèle. Le policier sur un incendie suspect, son travail va être de démontrer la chose avec l'équipe de travail, et là il y a des accusations qui sont portées au criminel. Ça, c'est vraiment le rôle du policier. Maintenant, il y a d'autres gens qui travaillent dans le mécanisme d'enquête et, eux autres, c'est la partie civile. Alors, il y a une demande d'indemnité à un assureur, il y a un incendie, il est démontré que c'est suspect, ça, c'est la partie civile. Mais le policier, effectivement, il a un rôle versus criminel.

Alors, ce que je vois d'important chez le pompier au niveau de l'enquête, c'est d'avoir une formation globale sur le combat d'incendie, et tout ce qu'on appelle. Également, c'est qu'il soit sensibilisé – on en a parlé tout à l'heure – sur les secteurs d'origine pour informer les enquêteurs et, également, qu'il ait une formation sur de la recherche de causes, s'il est appelé à être pompier préventionniste, parce que le préventionniste, qui a normalement une formation de technicien en prévention incendie pour une municipalité, va travailler également sur la scène d'incendie pour faire de la prévention. Si on parle d'un incendie, friture dans une résidence, et que le préventionniste a constaté que dans x nombre de mois, de jours, il y a eu un certain nombre déterminé d'incendies, avec blessures ou pas, bien il va l'apporter dans sa formation, dans son éducation au public, il va mettre l'accent, donc la même chose qu'on a vécue dans les années quatre-vingt avec le chauffage au bois dans la province de Québec où ça brûlait partout. Alors, c'est de là que le préventionniste, le technicien en prévention incendie, s'est impliqué pour donner de la formation puis de l'éducation au public. Alors, chacun a son rôle à jouer dans l'enquête.

M. Dupuis: Dites-moi, il y a combien de pourcentage d'incendies volontaires, allumés volontairement, par rapport au total d'incendies par année au Québec, en moyenne là, bien sûr?

M. Drolet (André): On parle de 20 % environ d'incendies qui pourraient être volontaires.

M. Halley (Jean-François): Le pourcentage varie d'une personne à une autre, dépendamment qui nous en parle.

M. Dupuis: Oui, ça, je comprends. Il faut faire les nuances. Il y a des nuances qui s'imposent là. Mais c'est juste un ordre de grandeur que je veux.

M. Drolet (André): On va parler de 20 %.

M. Dupuis: O.K.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. Je vais essayer de comprendre une partie de votre mémoire que je n'ai pas bien comprise. C'est à la page 2, à la fin, ce qui touche l'École nationale des pompiers et la formation. Est-ce que vous demandez que, à l'intérieur de l'École nationale des pompiers, il y ait en formation continue un certain nombre de cours pour les enquêteurs d'incendie? Est-ce que c'est ça que vous demandez?

M. Drolet (André): Ce qu'on demande concernant la formation professionnelle continue, c'est que l'enquêteur d'incendie... C'est parce que, à différents niveaux, l'enquête, la personne... Et, quand on parle de formation professionnelle continue, la personne qui fait la recherche des causes de l'incendie dans un endroit, naturellement, a besoin d'une formation encore plus spécialisée que l'enquêteur qui va essayer de découvrir, si par hasard il y a une victime, le suspect à enquêter. C'est de s'assurer que les gens qui vont commencer à rentrer sur une scène d'incendie aient la formation, plus qu'une formation de base ou une formation de dire, comme on connaît: J'ai fait deux semaines de cours dans, je ne sais pas là, la recherche des causes d'incendie. Et combien de scènes d'incendie vous avez faites, monsieur? Dernièrement, aucune; les derniers cinq ans, j'en ai fait deux. Alors, c'est lui qui va venir déterminer notre scène. C'est pour ça qu'il doit y avoir une...

M. Gautrin: Mais, dans votre esprit, ça serait l'École des pompiers qui aurait la responsabilité de ces cours de perfectionnement continu?

M. Drolet (André): Ça pourrait être...

M. Gautrin: Parce que vous l'avez inclus dans votre mémoire dans le chapitre qui porte sur l'École nationale des pompiers.

M. Drolet (André): Oui.

M. Gautrin: Donc, c'est l'École des pompiers.

M. Drolet (André): Ça devrait être inclus ou ça peut être fait en partenariat avec l'École nationale... éventuellement, l'École nationale des pompiers, faire une formation, dans laquelle les gens devront suivre le cours et être, disons, annuellement...

M. Gautrin: À l'heure actuelle, à l'IPIQ ou au collège Notre-Dame-de-Foy, est-ce que ce type de cours existe ou pas? Non. Donc, ça devrait être inscrit dans les responsabilités qu'on devrait donner à l'École nationale des pompiers. Alors, je comprends la logique maintenant. Vous dites: Puisque c'est l'École nationale des pompiers qui doit donner ce type de cours, il serait important que notre Association soit représentée aussi sur le conseil d'administration. Je vous remercie. Ça clarifie la question pour moi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, il me reste, au nom des membres de la commission, à remercier les représentants de l'Association canadienne des enquêteurs incendie, M. Drolet, président, et M. Halley, premier vice-président, pour leur contribution à nos travaux.

Et j'aimerais inviter les représentants de l'Association des directeurs généraux des municipalités régionales de comté du Québec à bien vouloir s'avancer et prendre place. Nous allons suspendre quelques minutes, disons cinq minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 59)

(Reprise à 11 h 4)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions reprend ses travaux dans le cadre des consultations générales sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la sécurité incendie.

Nous en sommes donc à recevoir les représentations des membres de l'Association des directeurs généraux des municipalités régionales de comté du Québec, dont son président, son vice-président de même que Mme Cossette, administratrice.

Alors, à ce moment-ci, je rappelle qu'on a 45 minutes, 15 minutes pour la présentation. Si vous voulez procéder, nous vous écoutons.


Association des directeurs généraux des municipalités régionales de comté du Québec (ADGMRCQ)

M. Martel (Donald): Merci. Bonjour, tous les membres de la commission. Puis, je voudrais remercier aussi le secrétaire de la commission, M. Comeau, d'avoir accepté notre mémoire, même s'il est arrivé sur le tard.

Moi, je me présente, je suis Donald Martel, le

président de l'Association des directeurs généraux des MRC du Québec. Il y a le vice-président, M. Charland, qui est directeur général de la MRC de Coaticook; et Mme Cossette, qui est directrice générale de la MRC de Champlain.

C'est une première expérience pour nous autres de présenter un mémoire en commission. On est une toute jeune Association qui n'a même pas deux ans encore. Donc, on est à notre première présentation devant une commission parlementaire. Et, sur ce, je vais laisser au soin de M. Charland de vous faire la présentation de notre mémoire.

M. Charland (Guy): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, membres de la commission. Vous savez qu'essentiellement l'Association des directeurs généraux des MRC du Québec est une jeune association d'à peine deux ans qui a pris quand même de l'essor à travers les années et espère effectivement dans le futur de pouvoir émettre son opinion sur un nombre croissant de projets de loi qui pourraient affecter les MRC et d'autant évidemment le quotidien des directeurs généraux et des employés des MRC en soi.

Évidemment, le projet de loi sur la sécurité incendie aborde les MRC de front par l'élaboration des schémas de couverture de risques. Sous cet angle-là, nous vous disons au départ que les MRC ont une expertise relativement importante depuis les 20 dernières années en matière de planification et de concertation dans l'aménagement et le développement du territoire. Et, à ce titre, nous pensons que le projet de loi tel qu'il a été inscrit donne aux MRC non pas un pouvoir mais une compétence en matière de planification régionale, et c'est donc, de notre côté, bien perçu.

Nous allons essentiellement aussi aborder le projet de loi selon deux volets: un volet qui s'appelle les commentaires généraux et un volet qui touchera plus particulièrement certains articles du projet de loi. Somme toute, l'Association est favorable, dans son ensemble, aux divers paramètres de la sécurité incendie dans les aspects que sont la prévention, l'organisation des secours, l'intervention, la formation du personnel des services de sécurité incendie. Toutefois, elle s'interroge sur les moyens mis en place concernant particulièrement l'espèce d'attribution bureaucratique qui sera faite autour d'un certain nombre d'éléments, de modalités tels les registres, les transmissions d'avis et les formulaires.

Vous comprendrez que, même s'il y a un schéma, même s'il y a des plans de mise en oeuvre, les petites municipalités vont demeurer de petites municipalités avec un nombre restreint d'employés, ce qui augmente encore la tâche de travail de certains d'entre eux sans nécessairement qu'on ait à octroyer des ressources humaines pour gérer un ensemble de ces éléments-là. Toutefois, nous pensons quand même qu'il y a un aspect fort intéressant dans la façon de procéder pour s'assurer d'une meilleure connaissance des points importants sur notre territoire.

L'Association est également favorable à la création d'une école nationale des pompiers, car elle croit que cette école n'aura pas un effet strictement virtuel, mais qu'elle agira promptement vu l'importance qui lui est accordée dans la Loi sur la sécurité incendie.

Toutefois, on s'interroge sur un des éléments qu'on considère peut-être perturbateur, c'est lors de la nomination, par commune renommée, d'un pompier lors d'un incendie ou d'un sinistre. D'un côté, on met beaucoup l'accent sur la formation mais, en même temps, parce qu'on a un besoin express, on peut faire en sorte de mettre quelqu'un qui a des connaissances fort limitées sur le lieu d'un sinistre ou d'un incendie, voire une explosion en soi. On ne pense pas nécessairement que ça va à l'encontre, mais on pense quelque part qu'il y a une ambiguïté qu'il faudrait probablement davantage expliciter par le projet de loi ou par les orientations qui seront mises en place par le gouvernement à cet effet-là, par des mesures réglementaires ou autrement.

On croit que le ministre s'est doté d'un pouvoir de persuasion du fait qu'il a attaché l'exonération avec l'adoption d'un plan de mise en oeuvre. Vous comprendrez que, dans la simple mesure où il n'y aurait eu qu'un schéma avec la possibilité en place en mettre des plans de mise en oeuvre sans plus, on aurait peut-être, dans certains territoires au Québec, fait l'exercice et remis très rapidement le schéma sur des tablettes. Or, on comprendra que l'immunité est une chose très recherchée de la part des municipalités depuis un certain nombre d'années si on considère qu'il y a au Québec un certain nombre de poursuites devant les tribunaux compétents et que ces poursuites totalisent au-delà de 1 000 000 000 $ actuellement. Alors, c'est peut-être un élément, à notre avis, fort intéressant et pertinent de la Loi sur la sécurité incendie d'attacher les municipalités au schéma tel quel.

(11 h 10)

D'autre part, on considère que les grands bénéficiaires demeureront encore les citoyens, puisqu'on aura l'assurance que, sur un territoire de MRC, les citoyens dans leur ensemble auront une couverture adéquate et appropriée et que chacun pourra profiter d'un service compte tenu des taxes qu'il paye. Évidemment, par rapport à ça, il demeure qu'il y aura toujours des zones qui seront toujours des zones un petit peu plus difficiles à atteindre, et on pense qu'on devrait davantage, de par la loi, axer sur des modèles de prévention dans ce qu'on appelle les régions éloignées, dans des secteurs qui soient ruraux, question d'accessibilité évidemment des services pour ces gens-là.

Maintenant, au niveau des commentaires particuliers, plus relativement au chapitre I, à l'article 5, nous aimerions que la loi précise davantage l'encadrement concernant les déclarations faites par les personnes «dont les activités ou les biens présentent [...] un risque élevé ou particulier d'incendie». Mais, en même temps, on est préoccupé par les contrôles administratifs. On comprend l'essence même de l'intervention du ministre mais, dans les faits, comment tout ça va s'articuler sur le terrain, c'est un questionnement relativement important, mais, en même temps, ça suppose des contrôles administratifs et ça suppose, en bout de ligne, des ressources humaines pour administrer cette portion-là des déclarations.

Au niveau particulièrement des autorités régionales et locales, chapitre III, plus particulièrement à l'article 9, l'Association appuie cet article de l'avant-projet qui autorise plus d'une MRC à élaborer conjointement un schéma de couverture de risques. Je pense que, actuellement, les preuves sont faites qu'entre territoires de MRC les collaborations sont évidentes dans plusieurs cas, ne serait-ce qu'en matière d'aménagement du territoire, et prochainement dans la gestion des matières résiduelles où effectivement le projet de loi n° 90 permet ce genre de collaboration inter-MRC.

Par rapport à l'article 10, l'Association croit que ça s'inspire largement de l'expérience-pilote des MRC de la Matapédia et de Nicolet-Yamaska dont évidemment, sur ma droite, vous avez le représentant à titre de directeur général. Et nous croyons que le diagnostic tel qu'annoncé est essentiel à la définition d'objectifs de protection optimale contre les incendies.

Également, nous nous interrogeons par contre sur la mise à niveau du schéma dans la mesure où celui-ci interpellera les municipalités qui devront s'y conformer. Nous portons à l'attention de la commission la nécessité de mettre en place des paramètres pour en assurer l'application à l'intérieur même des trois ans.

Par rapport aux articles 12 et 17, l'Association croit que le ministre aurait dû s'appuyer davantage sur la procédure de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme de manière à utiliser un seul mécanisme qui a déjà fait ses preuves par le passé. Vous comprendrez que, en ce qui nous concerne, une procédure relative à l'aménagement du territoire, une procédure relative à la gestion des matières résiduelles et une procédure relative à la sécurité incendie, ça fait beaucoup de façons de faire et chacune a ses propres nuances, ce qui fait qu'en en bout de ligne le citoyen risque de s'y perdre, lors des périodes de révision ou de modification, d'une procédure à une autre, parce que les mécanismes ne sont pas toujours similaires entre eux. La façon de procéder des fois, la nomination des commissions ou représentants qui vont de part et d'autre en consultation publique n'est pas, d'une fois à l'autre, évidente. Alors, ceci dit, nous aimerions particulièrement qu'il y ait concordance entre les différentes lois de manière à s'assurer d'une procédure unique et universelle qui permettrait, en n'importe quel moment, de s'effectuer.

Plus particulièrement à l'égard de l'article 18, l'Association croit qu'un tel schéma devrait se réviser à tous les cinq ans, évidemment toujours dans le processus tel que connu par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

En ce qui concerne l'article 22, nous croyons que cette mesure vise à uniformiser les interventions et les opérations sur un même territoire tout en assurant une équité entre citoyens et citoyennes d'une même région et d'une même municipalité. Et, pour notre groupe, c'est d'une importance capitale que l'ensemble de nos citoyens reçoivent un service équivalent sur un même territoire donné.

Article 25. Toujours dans l'esprit de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, nous aimerions que le 90 jours devienne un 120 jours.

En ce qui concerne les articles 35 et 42 concernant l'attribution des responsabilités aux services municipaux, nous pensons que le projet de loi réussit assez bien à cerner l'ensemble des rôles et responsabilités de chacun, et nous approuvons largement l'initiative du ministre. Et c'est souvent, au niveau des services d'incendie, un problème, la question des responsabilités. J'en parle en connaissance de cause, puisque jadis j'étais directeur dans une municipalité où j'avais un service d'incendie de 46 pompiers, deux casernes, etc. Je vous assure qu'il est important d'avoir de bonnes précisions quant aux responsabilités et rôles, également en ce qui concerne l'absence d'un chef de pompiers ou encore l'utilisation d'un service d'incendie hors municipalité.

En ce qui concerne l'article 46, cette mesure a deux effets positifs en ce qui nous concerne: une réduction des poursuites contre les municipalités et une baisse de prime d'assurance. Évidemment, je vais aller un petit peu plus vite parce qu'il doit me rester environ trois minutes.

En ce qui concerne l'école nationale des pompiers, nous l'avons dit en introduction, nous sommes favorables à l'école, mais, en même temps, nous pensons que les partenariats qui pourraient s'instituer entre l'école et d'autres institutions de même nature pourraient peut-être faire en sorte d'avoir une façade sur les MRC qui pourraient jouer un rôle au niveau de la formation sur le terrain lui-même dans la coordination et la mise en place de programmes pour l'ensemble des pompiers d'un même territoire.

Enfin, à titre de recommandations, nous vous en suggérons trois. La première, c'est de mettre sur pied un programme de financement conjoint en immobilisations d'équipements incendie afin d'aider les municipalités à construire des casernes requises aux endroits ciblés, à couvrir les besoins urgents en équipements de première ligne et à remplacer certains véhicules contre les incendies.

Deuxièmement, fournir des ressources financières suffisantes pour l'embauche d'un coordonnateur dans l'élaboration du schéma et des plans de mise en oeuvre, la conception de programmes de formation adaptés aux divers types de risques ainsi que le support aux services de sécurité incendie dans l'établissement de programmes de prévention, dans l'organisation des secours et dans les interventions.

Et, troisièmement, mettre en place un programme de financement conjoint avec l'entreprise privée où celle-ci sera mise à contribution pour l'engagement de techniciens en prévention des incendies dans l'application des règlements relatifs à la protection contre les incendies.

Finalement, en guise de conclusion, nous sommes favorables au projet, mais nous aimerions que l'article 144 ait une légère modification en modifiant l'expression «peut accorder» par le mot «accordera» l'aide financière, de façon à s'assurer que le travail se fera au sein des MRC. Merci, M. le Président. Merci, membres de la commission.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. Charland. Merci également M. Martel, qui est intervenu. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ménard: Je vous remercie de votre mémoire. Je pense que ça annonce un rôle important, dans l'intérêt public, de votre jeune Association, un rôle que vous pouvez jouer à cause de l'expertise particulière que vous avez développée. Et, au fond, vous êtes dégagés des intérêts politiques et des tendances avec lesquelles nous avons à composer – et aussi vos élus locaux – pour nous révéler uniquement l'expertise.

Votre dernière remarque quant à l'article 144, je l'accueille avec beaucoup de plaisir et je vais la transmettre au président du Conseil du trésor. Ha, ha, ha!

Maintenant, j'aimerais avoir votre opinion sur une chose. Quand nous avons conçu le système que nous avons conçu, nous étions très soucieux au départ de ne pas donner prise à une critique qui est souvent justifiée, que, devant un problème général, nous imposons à tout le monde une solution mur à mur. Au fond, la seule chose que nous imposons, c'est l'obligation de se rencontrer, de faire son inventaire de risques, de ressources, de décider à ce moment-là, quand on sera bien informé des risques et des ressources de la région, quel est le niveau de sécurité qu'on peut vendre à notre population.

(11 h 20)

Nous estimons que dans ce processus les gens vont se responsabiliser en s'informant bien. Et alors là les informations qu'ils ont sur leur milieu vont jouer aussi pour élaborer un programme qui leur convient et qui est le mieux susceptible d'atteindre l'objectif général, qui est de diminuer les pertes d'incendie et, si possible évidemment les pertes de vie, et, si possible le nombre... Est-ce que vous trouvez que ce système que nous élaborons est susceptible d'atteindre ce résultat, c'est-à-dire d'obtenir le niveau de sécurité optimal au meilleur coût, en tenant compte des diversités régionales, géographiques, des diversités de risques, etc.?

M. Charland (Guy): Je vais vous parler à titre personnel, ce qui n'engage pas nécessairement l'Association ou encore mon poste de directeur général. Essentiellement, l'ensemble des objectifs qui sont transmis à travers le projet de loi répond, à mon avis, à l'ensemble des préoccupations qu'on peut avoir sur un territoire. L'important, lorsqu'on a une population sur un territoire, c'est que celle-ci soit couverte de façon égale, qu'il n'y ait pas des classes à l'intérieur d'un même territoire.

Lorsqu'on est en situation de milieu urbain... Je prends l'exemple de la ville de Sherbrooke, puisque je suis évidemment de ce territoire. Elle a une organisation très effective en matière d'incendie, la cote le démontre largement. La prime d'assurance pour une maison d'environ 100 000 $ à Sherbrooke est d'environ 230 $ par année. Je demeure dans un milieu rural, très rural, et ma prime est de quatre fois le prix. Les raisons: l'éloignement, mais en même temps les services d'incendie que nous avons n'ont pas nécessairement la capacité. Je suis à 7,5 km d'une caserne, ce qui fait que le temps de réaction est d'autant plus grand.

Nous pensons que, par la façon de faire les choses, l'obligation que les gens auront à se parler, l'obligation qu'ils auront à échanger puis aussi à utiliser de façon efficiente, efficace et performante certains équipements vont permettre d'avoir un service de meilleure qualité sur nos territoires. Nous le pensons sérieusement.

D'autre part, l'accent mis par la loi sur la formation nous apparaît nettement essentielle. On pourra mettre n'importe quel beau projet sur terre, si les gens qui ont à intervenir n'ont pas la formation nécessaire pour intervenir, compte tenu des divers risques et de la multiplicité des risques qu'on encourt de plus en plus, on aura toujours le même problème en bout de ligne, c'est qu'on aura autant de sinistres qu'on en avait auparavant. On aura, comme on dit, un coffre d'outils, mais on ne saura pas utiliser notre coffre d'outils. Un bon menuisier sait quand utiliser certains outils et, dans d'autres cas, éliminer certains outils. Nous pensons que c'est la même chose qui peut se passer en matière d'incendie.

M. Ménard: Je ne suis pas sûr que vous répondez tout à fait à la question exacte que je vous ai posée, quoique j'aime bien votre réponse, mais vous soulevez quand même un autre problème. Et, puisque vous nous entraînez sur des questions techniques, j'aimerais profiter de votre expertise. Est-ce que vous croyez vraiment que l'on peut assurer la même rapidité d'intervention sur tout le territoire du Québec ou est-ce qu'il ne faut pas accepter, dans certaines MRC, qu'il y ait certains endroits où nécessairement il serait irréaliste de penser que l'on pourra... Et il faut dans ce cas-là que les gens soient informés, qu'ils soient peut-être incités à prendre plus de précautions qu'ailleurs, mais c'est un choix qu'ils auront fait en s'installant si loin.

Et puis même, bien, si vous pensez à l'immense territoire du Québec... Moi, j'ai connu la Basse-Côte-Nord, je suis allé jusqu'à Natashquan et à «Saint-Augustine» – parce qu'il faut le prononcer à l'anglaise, paraît-il – et puis ainsi de suite. Je ne vois pas comment est-ce qu'on pourra là-bas même avoir des services d'incendie. C'est pour ça que l'exemple que vous nous donnez, vous ne vous attendez pas à ce que, dans un milieu éloigné, à 7 km d'une caserne, que cette loi-là force les autorités à vous emmener une caserne aussi près de chez vous que les gens qui sont dans le centre-ville de Sherbrooke?

M. Charland (Guy): Je vous dirais que, vu sous cet angle, il est sûr qu'on ne pourra jamais avoir une couverture totale, à 100 %, puisque ça supposerait... Mais il reste qu'il y a actuellement ce qu'on appelle une «centralisation» qui fait que la diffusion du service est inégale dépendamment de l'endroit où c'est centralisé, ce qui fait qu'il y a une distorsion. Nous pensons à quelque part que les gens devront agir en conséquence, soit en faisant des ententes avec une municipalité, même dans une autre MRC à proximité, qui pourrait donc accorder un certain service eu égard aux ententes intermunicipales.

D'autre part, j'ai vécu en Gaspésie, M. le ministre. Pour vous dire qu'effectivement, lorsque vous restez en Gaspésie du nord, il ne faut pas espérer avoir une caserne à tous les 25 km en Gaspésie du nord. Ça serait impossible à imaginer. On ne peut même pas imaginer le nombre de pompiers dont on aurait besoin pour s'exercer à travers ça. Quand on sait qu'une intervention en général demande au minimum, quand c'est une intervention légère, autour de cinq ou six pompiers, alors essayez d'imaginer demain matin une brigade à peu près à tous les 25 km lorsque la population est diffusée sur des dizaines et des dizaines de kilomètres en ligne droite. Parce qu'en Gaspésie on parle de ligne droite le long de la Côte plus qu'à l'intérieur des terres. Donc, effectivement il y a des problèmes qui seront évidents et des choix devront être faits par les autorités municipales en place, toujours dans l'esprit quand même de la prévention et de la diminution des risques autant que chose se peut.

M. Ménard: O.K. Certains ont mis en doute devant nous le fait que la MRC aurait l'expertise pour faire ce que cette loi va lui demander de faire, c'est-à-dire l'élaboration du schéma de couverture de risques. Quelle est votre opinion là-dessus?

Mme Cossette (Sylvie): Je pourrais peut-être intervenir là-dessus. Au même titre qu'on avait mis en doute, en fin de compte, au moment où les MRC ont été créées, au début des années quatre-vingt, leur façon de pouvoir mener à bien tout le processus d'aménagement du territoire – la loi est jeune, on avait peu d'expertise, mais il n'y a personne au Québec qui l'avait – au même titre, le schéma de couverture de risques, c'est un nouveau défi, je pense, pour l'ensemble des acteurs tant du milieu municipal...

Mais, par ailleurs, ce qu'on pourrait dire là-dessus, c'est que la MRC s'est quand même imposée comme organisme de planification territoriale. Les gens autour d'une table régionale, oui, on les a assis au cours des 20 dernières années. Donc, c'est à ce niveau-là, je pense, qu'il y a une concertation qui s'est faite à l'échelle de la MRC. Et ce qui est intéressant dans votre projet de loi versus ce qu'on vit au quotidien dans les MRC, c'est tout le volet où, en fin de compte, et de un, c'est ça, on assoit les gens autour d'une table de concertation, mais ce qui avait été introduit dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, là où on parle de nuisance, de contraintes de nature entropique, ça a comme un lien avec ce que vous voulez mettre en fin de compte en branle versus cette loi-là. Donc, on développe de plus en plus d'expertise. Et, là-dessus, je m'amènerais sur un commentaire.

Vous avez un volet en matière d'incendie, mais il y a également des MRC, dont la nôtre, la MRC Champlain, qui est sur la rive sud de Montréal, où on travaille le volet des risques industriels sur le territoire. Donc, pour moi, ça touche en fin de compte un aspect qui est en matière d'incendie. Mais, les MRC, déjà là, on est comme sollicitées, entre guillemets, pour aller plus loin. Notamment – je prends sur notre territoire – on a Pratt & Whitney qui est là, on a Sico, on a des entreprises qui présentent certains risques majeurs pour les résidents de notre territoire. Pour moi, oui, bravo! c'est un premier pas, mais je pense qu'on pourrait aller aussi peut-être un petit peu plus loin, notamment au niveau des risques industriels.

Champlain, c'est la deuxième MRC la plus à risque en Montérégie. Nommez tout, on les a: les aéroports, la voie navigable, les transports ferroviaires, des autoroutes en fin de compte assez développées, et ce, même pour des MRC limitrophes: le Haut-Richelieu. Je vois ici que le député y est. Donc, on a une problématique en soi où on a des parcs industriels également qui sont assez bien structurés.

(11 h 30)

Donc, pour aussi répondre rapidement à votre question de tout à l'heure – vous demandiez: Obtenir le niveau de sécurité optimale – là-dessus, ce que je pourrais vous dire, c'est que les informations via une structure régionale partagée entre les services d'incendie, si vous voulez, il n'y en a pas eu beaucoup. J'avais justement, la semaine dernière, à la table régionale, M. La Madeleine, qui est le président de l'Association des chefs de services incendie, qui venait dire: Moi, je ne sais pas ce qu'on a dans la cour de Brossard, je ne sais pas plus ce que Saint-Hubert a. Donc, ça va être en fin de compte une table où on va pouvoir échanger ces informations-là.

M. Ménard: O.K. Vous m'avez pratiquement précédé. Mais, comme il ne nous reste pas beaucoup de temps, je vais tout simplement dire que, si vous êtes à l'aise avec cette méthode de travailler, vous réalisez qu'il n'y a pas un grand pas à franchir pour qu'on fasse en même temps la sécurité civile. O.K. Alors, je vais laisser quand même à d'autres de poser des questions.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. À la page 3, vous parlez de la nomination d'un pompier par commune renommée. Vous reconnaissez que le législateur a un souci de performance – vous autres aussi, j'en suis convaincu, vous avez ça – sauf que vous vous interrogez. Selon vous, ça va à l'encontre de la formation. Est-ce que vous êtes contre cette formule-là? Et, si oui, est-ce que vous avez d'autres choses à suggérer?

M. Charland (Guy): Je vous dirais que, lorsqu'on prépare un plan, un schéma, avec en bout de ligne un plan, on devrait donc travailler en fonction des effectifs potentiels à intervenir. On devrait donc aller faire le recrutement nécessaire et former, s'assurer que lors des interventions on ait un groupe minimal de première ligne et ce qu'on appelle de deuxième ligne, c'est-à-dire ceux qui sont plus éloignés qui se rassemblent. J'ai toujours beaucoup de difficultés...

Je vais vous donner une explication. À un moment donné, c'est arrivé dans mon propre corps, à l'époque, où on a fait justement ça, on a nommé de commune renommée un pompier sur le coup. Malheureusement, il y a eu une intervention puis on a failli le perdre dans le bâtiment. Je vous assure que les gens deviennent très blancs, on devient tous blancs, et on a tous le même problème derrière la tête par la suite.

L'idée n'est pas mauvaise, mais comment on va l'enrober et comment on va s'assurer de bien protéger à la fois les autres pompiers? Parce qu'il faut toujours parler en termes de sécurité des autres pompiers. Quelqu'un qui intervient dans un incendie alors qu'il ne sait pas quels sont les gestes, les bons gestes à poser, pendant que ces gens-là, sur diverses pratiques, ont constamment posé des gestes pour s'assurer que ces gestes-là, c'étaient les bons gestes devant telle chose... Comment demain matin quelqu'un peut improviser? Je vous dirais que les incendies, ce n'est pas une plate-forme d'improvisation.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Bonjour madame, bonjour messieurs. Pour faire référence à l'une des questions que M. Ménard vous a posées il y a quelques instants, si vous avez suivi les travaux de la commission depuis qu'elle est commencée, vous savez que certaines personnes, comme le ministre l'a mentionné, ont soumis à sa bonne attention que peut-être les MRC n'avaient pas l'expertise nécessaire pour se voir attribuer cette nouvelle responsabilité. Moi, je ne porte pas de commentaires sur cette affirmation-là, mais je l'ai reçue au même titre que tous les membres de la commission l'ont reçue.

Or, il arrive que certaines de ces personnes-là étaient des élus, des élus locaux, des représentants de certaines unions, et, en toute justice à leur égard, je pense qu'il faut dire que ce qu'ils sont venus dire, entre autres, au ministre, c'est qu'ils s'objectaient à l'imposition du transfert de responsabilités à l'autorité régionale qu'est la MRC. C'est ça, le message qu'ils sont venus transmettre.

Alors, évidemment, votre Association, j'imagine, ne peut pas ignorer que ces représentations-là ont été faites auprès du ministre, et vous n'êtes pas sans ignorer non plus que, lorsque vous allez retourner ou lorsque vos membres directeurs généraux de MRC vont retourner dans leurs MRC respectives, une fois que cette commission-là sera terminée, il va y avoir une suite. Le ministre doit réfléchir à ce qu'il a entendu, j'imagine et je l'espère, et peut-être y aura-t-il d'autres discussions qui interviendront, soit avec les élus, soit avec toute personne, tout groupement qui est venu faire des représentations à la commission.

Mais, vous-mêmes, depuis que vous savez que ces critiques-là ont été faites à votre endroit – et encore une fois je ne porte pas de jugement – est-ce que vous avez prévu un mécanisme ou est-ce que vous considérez qu'il serait intéressant de prévoir un mécanisme par lequel vous retourneriez vers vos élus, vos différents élus, pour essayer de voir quelle suite pourrait être donnée ou comment vous pourriez vous entendre, dans chacune de vos MRC, pour opérationnaliser ce qui pourrait devenir le projet de loi du gouvernement suite à cette consultation?

M. Martel (Donald): Nous, on travaille, chacun dans nos MRC, avec plusieurs élus, notamment les maires, donc on est habitués de vouer le plus grand respect à ces gens-là. L'Association n'est certainement pas intéressée à embarquer dans un débat politique, à savoir: Il faut que ça soit les MRC qui aient ça, il ne faut pas que... Nous autres, on ne veut pas se mêler de ça. La seule affaire qu'on vient dire à la commission, c'est: Si vous voulez qu'on fasse ce travail-là, nous allons être en mesure de le faire. Comme Mme Cossette vous a dit tantôt, on a fait nos preuves à plusieurs égards. Je vais souffler un petit peu dans ma trompette, là, mais, au niveau de Nicolet-Yamaska, on n'avait aucune expertise au niveau de la sécurité incendie, on a quand même réussi à développer un projet qui est intéressant, même chose au niveau de la Vallée-de-la-Matapédia.

Donc, ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a un certain débat qu'on laisse au niveau politique. Nous, au niveau de notre Association, on vous dit: Si vous voulez nous donner ce mandat-là, oui, on est capables de le faire.

M. Dupuis: Est-ce qu'il y a, dans votre esprit et dans l'esprit de votre Association, une ouverture d'esprit au fait que l'une des critiques qui a été adressée, c'est que le transfert de responsabilités, il est comme imposé, dans l'avant-projet de loi, à l'autorité régionale ou aux autorités régionales partout sur le territoire, et que certains élus sont venus dire: Bien, écoutez, laissez-nous donc nous organiser entre nous autres. C'est vrai que, dans une MRC particulière, pour des raisons particulières, on pourrait confier à la MRC la responsabilité de la confection du schéma de couverture de risques, etc., alors que, dans une autre MRC – je vais vous laisser aller, M. Charland, je vous vois, vous êtes déjà impatient; alors, nos deux impatiences se confrontent, mais la mienne achève – parce qu'une municipalité a acquis une expertise particulière, parce qu'elle a des pompiers permanents, par exemple, parce qu'elle a un directeur de service d'incendie qui est extrêmement compétent et qu'elle a les moyens financiers de le faire, on pourrait lui confier, à elle, la responsabilité de la confection du schéma. Êtes-vous ouverts à ça?

M. Charland (Guy): Vous faites référence à la ville de Québec fort probablement dans son mémoire, justement où la ville entre autres, dans la... Écoutez, d'abord, je vais revenir en arrière. Ça fait 20 ans qu'on entend religieusement, chaque fois où la MRC pourrait recevoir une compétence ou une responsabilité, qu'elle n'est pas en mesure de le faire. Je dois dire également que, lorsqu'on reçoit certaines compétences, on n'a même pas, dans le monde municipal en général, les ressources ou la connaissance, on l'apprend au fur et à mesure. Ce qu'on possède, c'est la planification; ce qu'on possède, c'est la concertation; et ça, en bout de ligne, personne ne peut nous l'enlever en tant que MRC.

D'autre part, l'avant-projet de loi 90 sur les matières résiduelles en est arrivé à la conclusion qu'il pouvait arriver qu'une MRC donne à un tiers la possibilité de faire le plan, ce qui ne dégage pas la MRC d'être responsable, au plan légal, de la procédure. Donc, ce que vous me dites, c'est qu'il y a une partie du travail qui doit se faire. Je n'ai pas de problème à ce que, demain matin, on confie à un tiers, s'il a les compétences et la capacité d'aller chercher des informations, de monter la chose, mais il reste que la procédure totale complète demeure – au niveau qu'on l'entend par la loi, comme n'importe quelle autre loi – une responsabilité régionale des élus de prendre la décision finale sur le règlement, le schéma. Ça, ça ne change rien. Un tiers ne peut pas avoir cette responsabilité-là au sens de la loi, et ça, on s'entend sur cette question-là. C'est impossible qu'un tiers puisse avoir une responsabilité légale. C'est la MRC qui a la responsabilité ou, à défaut de ça, ce que le ministre va faire dans la loi, c'est de dire quelque part: Il n'y a que des plans de protection incendie que les municipalités devront conséquemment adopter dans leur territoire. Donc, autant de municipalités, autant de plans potentiels.

Ce que la loi dit, c'est... Comme l'aménagement du territoire, lorsque, en 1979-1980, on est intervenu, au gouvernement du Québec, on a dit: Il y a une forme d'incohérence au Québec en ce qui concerne l'aménagement du territoire. On a mis une loi, on a dit à quelqu'un: Ton travail, c'est de faire ça. Aujourd'hui, tout le monde a des plans d'urbanisme au Québec et tout le monde est capable, eu égard à des orientations et des objectifs qui ont été de commune mesure faits, tout le monde est en fonction, est capable de vivre avec ça.

En ce qui concerne les matières résiduelles, ils ont eu le même réflexe dans certaines municipalités puis la loi dit encore une fois: Il y a quelqu'un qui va faire un plan puis il y a quelqu'un qui va le mettre en oeuvre.

(11 h 40)

Et je reviens aussi sur un aspect bien important de la façon dont Québec travaille. Québec, depuis un certain temps, travaille par trois paliers: le palier national, le palier régional, le palier local. Toutes ses interventions depuis quelques années sont strictement orientées sur trois paliers. Parfois, le palier régional, c'est un palier au sens de la région administrative, genre développement économique; parfois, le palier régional, c'est une MRC; puis, parfois, le palier local, c'est la MRC ou la municipalité. Il y a une cohérence à travers ça et quelque part il y a un planificateur puis il y a quelqu'un qui coordonne, mais ce n'est pas lui qui intervient puis ce n'est pas lui qui exécute.

Donc, il y a un service que j'appelle un palier II qui fait la grande fresque et il y a quelqu'un en bout de ligne qui doit s'organiser, s'exécuter. Mais les gens sont habitués de se parler, ils sont habitués de se concerter puis ils sont habitués de trouver des solutions ensemble. Je ne vois pas pourquoi, dans le cas suivant, ils ne seraient pas capables de faire le même exercice. La plus belle preuve à mon avis, c'est la MRC de La Matapédia et la MRC de Nicolet-Yamaska qui, dans les projets-pilotes, ont nettement démontré la capacité de réaliser cet objectif-là.

M. Dupuis: Alors, je constate que non seulement vous êtes impatients, mais que vous pouvez même être véhéments à l'occasion, ce qui est une qualité.

M. Charland, malheureusement, le temps qui nous est imparti ne permet pas de continuer des discussions sur un même sujet. Je ne voudrais pas que vous quittiez avant qu'on ait parlé de l'aspect prévention qui, je vous le soumets, pourrait apparaître, quand on étudie plus avant l'avant-projet de loi, peu présent dans l'avant-projet de loi – je ne dis pas absent, là, dans les schémas de couverture de risques, il y a une partie de prévention, etc. – mais qui pourrait être moins absent que la partie extinction ou combat des incendies.

Et, tantôt, je pense que vous avez été d'accord avec le ministre lorsqu'il vous a dit: C'est difficile de croire, de penser, que, partout au Québec, on pourrait avoir le même genre d'intervention, dans un temps d'intervention qui serait le même, avec les mêmes moyens. Je pense qu'il faut savoir que ça ne serait pas possible que ça soit homogène partout au Québec. Et donc il faut accepter, je pense – et c'est la géographie qui nous force à le faire, c'est les moyens financiers qui nous forcent à le faire, c'est toutes sortes de facteurs qui nous forcent à le faire – qu'on ne peut pas avoir la même couverture partout au Québec. Vous êtes d'accord avec ça? Bon. Évidemment, la caméra me désigne, moi, alors je veux indiquer à la caméra que vous avez dit que vous étiez d'accord avec moi.

Pour m'amener à vous poser la question suivante: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, compte tenu de cela, qu'effectivement dans l'avant-projet de loi on fasse une plus large place à l'aspect prévention par rapport à évidemment la place qui est faite dans l'avant-projet de loi à toute la partie combat et extinction des incendies?

M. Martel (Donald): Moi, ce que je pourrais avancer par rapport à ça, c'est que, dans le schéma de couverture à produire, il n'est pas exclu qu'on puisse parler de ça, de prévention. Moi, je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous accordez une attention très grande à la prévention parce que c'est un niveau, nous autres, chez nous, qu'on avait évalué aussi important que le combat, que la formation, que les communications, etc.

Mais, à mon avis, tout ça peut se retrouver quelque part à l'intérieur d'un schéma: c'est quoi, les normes? Comment on devrait attaquer un problème à un endroit précis où, d'un côté, ça va être difficile d'avoir une intervention rapide puis, deuxièmement, en plus d'avoir une intervention rapide difficile, c'est qu'il n'y a pas de source d'eau dans les alentours, on va avoir de la difficulté à aller chercher de l'eau pour éteindre le feu. Donc, il y a une solution par rapport à ces endroits-là, c'est au niveau de la prévention. Moi, je pense que, dans un bon schéma bien monté, il y a un aspect de prévention qui va être intégré à ça.

M. Dupuis: Je ne veux pas vous interrompre, M. Martel. Compte tenu de votre intérêt, celui de votre MRC, et, je pense, celui de votre Association en général pour la prévention, est-ce que ça ne serait pas un incitatif encore plus grand que de l'inclure de façon nommément désignée dans le projet de loi éventuel, l'aspect prévention?

Mme Cossette (Sylvie): Là-dessus, je pourrais vous dire qu'à la lecture de l'article 10 de l'avant-projet de loi, quand on parle d'objectifs de protection optimale contre les incendies, on doit, au préalable, en fin de compte, dresser un inventaire, un portrait très exhaustif de tous les risques potentiels sur un territoire donné. Donc, pour moi, en tout cas, de la façon dont je comprends l'article 10, ça inclurait, là, le volet qui vous préoccupe.

M. Dupuis: Mme Cossette, je suis obligé – je termine là-dessus – d'être en désaccord avec vous, mais c'est un désaccord que j'exprime avec le sourire parce que, quand on parle de protection optimale, on parle de protection optimale en fonction des ressources disponibles. Donc, dans mon esprit, c'est une protection optimale en ce qui concerne le combat plutôt que les moyens de prévention. Mais on pourrait en discuter longtemps en dehors des caméras, si vous voulez.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Malheureusement, il ne nous reste plus de temps. Il me reste donc à remercier les représentants de l'Association des directeurs généraux des municipalités régionales de comté du Québec pour leur contribution à nos travaux.

Et j'inviterais les représentants de l'Association des ingénieurs en sécurité incendie à bien vouloir s'avancer et prendre place, s'il vous plaît, afin de nous permettre de poursuivre nos travaux.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je rappelle que la commission est réunie dans le cadre de la consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la sécurité incendie et que nous avons le plaisir de recevoir les représentants de l'Association des ingénieurs en sécurité incendie, notamment représentée par M. Pascal Caron, premier vice-président, ingénieur au Service d'incendie de la ville de Montréal.

Alors, si vous voulez bien vous installer, nous avons, pour la présentation et les échanges, réservé une période de 30 minutes. Normalement, votre présentation devrait tenir à l'intérieur d'une dizaine de minutes. Vous avez la parole et je vous invite, M. Caron, à nous présenter les personnes qui vous accompagnent.


Association des ingénieurs en sécurité incendie

M. Caron (Pascal): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les députés du gouvernement et de l'opposition, je me présente, mon nom est Pascal Caron, je suis ingénieur spécialisé en protection incendie. Je suis membre de l'Ordre des ingénieurs du Québec et je suis, tel que le président l'a mentionné, premier vice-président du Conseil St-Laurent de l'Association des ingénieurs en sécurité incendie, connu également sous le nom de Society of Fire Protection Engineers.

Je suis accompagné ce matin de M. Gaston Brosseau, ingénieur, ainsi que de M. Yves Thibault, technicien. Chacun va se présenter à son tour.

M. Brosseau (Gaston): Alors, je suis Gaston Brosseau. J'ai travaillé plusieurs années au gouvernement, quelques années à la Régie du bâtiment, à la Société immobilière et 16 ans à la Prévention des incendies. Alors, ça m'a permis de rencontrer bien du monde dans le secteur et puis d'acquérir une certain expérience dans le domaine.

M. Thibault (Yves): Bonjour. Mon nom est Yves Thibault. Je suis actuellement inspecteur en prévention d'incendie pour la ville de Montréal-Est, pompier. J'enseigne également au collègue Montmorency dans le cadre du D.E.C. en sécurité incendie. Je suis technicien en prévention d'incendie et je complète actuellement un diplôme de deuxième cycle en environnement à l'Université de Sherbrooke.

M. Caron (Pascal): Merci. Bien que je sois à l'emploi du Service de la prévention des incendies de la ville de Montréal en tant qu'ingénieur, cependant, ce matin, c'est mon opinion personnelle qui sera exprimée, celle d'ingénieurs oeuvrant dans ce domaine et de membres de la Society of Fire Protection Engineers. Mes opinions vont aussi exprimer mon intérêt direct en tant que citoyen intéressé comme tout autre Québécois et Québécoise.

Tel que mentionné dans notre mémoire, notre intervention sera limitée aux chapitres II et III, et ce, compte tenu du temps qui nous a été alloué pour la rédaction de ce mémoire ainsi qu'à notre présence à cette séance d'audiences publiques.

La Society of Fire Protection Engineers, si je ne m'abuse, au congrès de la National Fire Protection Association, à Denver, ce printemps, célébrera ses 50 ans d'existence. C'est un organisme qui est voué principalement au développement et à la diffusion des connaissances techniques concernant le domaine de la sécurité incendie. Elle regroupe plusieurs ingénieurs, des techniciens ainsi que des étudiants oeuvrant dans cet important domaine. Le chapitre St-Laurent fait partie des chapitres qui constituent, si on veut, cette Association. C'est une association qui se veut mondiale mais avec prédominance en Amérique du Nord.

(11 h 50)

Pour résumer le mémoire, on peut le résumer en deux points qui sont très brefs, deux éléments. C'est une bonne intention. On retrouve, entre autres, à l'article 4, une obligation qui confirme pour tous l'obligation de veiller à supprimer ou à réduire les risques d'incendie, ce qui est une évidence, mais le retrouver en termes dans une loi, c'est excellent. Le deuxième point est beaucoup plus délicat, si on veut, c'est le schéma. C'est un processus intéressant, mais compliqué. La question qu'on se pose, c'est: Pourquoi faut-il user d'un tel stratège pour réaliser une évidence, soit la réalité de la mise en commun des ressources? Quand je parle de mise en commun des ressources, ce n'est pas nécessairement l'intégration ou la fusion, mais plutôt l'optimisation des ressources existantes. D'ailleurs, c'est beaucoup plus une question de mentalité, de perception.

Puis, peut-être un élément que je peux mentionner: On n'avait pas nécessairement besoin d'une enquête publique, suite à ce qui est survenu dans l'accident tragique d'Acton Vale, pour noter les manques et les faiblesses de certaines municipalités en termes de sécurité incendie, et ce, je tiens à le noter, malgré, et j'insiste, une très grande volonté d'amélioration et d'engagement par tous les pompiers, parce que, à la base même, c'est une question de ressources.

Je profite justement de cette occasion, du temps qui m'est alloué, pour rappeler, pour le gouvernement ainsi que pour l'ensemble des citoyens, l'obligation morale de former et d'équiper adéquatement les pompiers pour notre sécurité ainsi que pour leur sécurité. Donc, si vous avez des questions, on peut débattre du mémoire, si on veut, puis on peut apporter notre collaboration au meilleur de notre connaissance et de notre compétence.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Oui. Je vous remercie pour votre mémoire que j'ai lu avec beaucoup d'attention et d'intérêt, conscient que vous pouvez apporter un apport particulier, étant donné votre formation pointue évidemment la plus pertinente, à l'atteinte des objectifs que nous nous sommes fixés.

J'ai trouvé cependant que – je pense bien que c'est le vôtre – vous posez beaucoup de questions pour lesquelles je pourrais avoir des réponses à beaucoup de choses. Mais, à un moment donné, quand on est législateur, il faut faire un choix. Et il y a des choix qui nous amènent... Même dans la nature même du projet qu'on a, indépendamment des difficultés politiques qu'on peut rencontrer avec les élus locaux, il y a des choix qu'on doit faire, qui vont nécessairement influencer un projet de loi qui vise les objectifs qu'on vise, conscients que, dans ce domaine-là, on n'atteindra jamais la perfection, parce que c'est une question d'équilibre. C'est une question d'équilibre sans doute, pas seulement entre les ressources disponibles par rapport aux objectifs qui sont visés, à l'acceptation des risques, à la connaissance des risques par la population pour qu'elle accepte ces risques ou qu'elle accepte, au contraire, de payer un peu plus pour les couvrir, mais aussi dans le choix des expertises.

Vous aurez remarqué que ce qui doit être centralisé l'est. L'école nationale des pompiers va assurer une formation uniforme à travers le Québec. Mais il y a des choses qui ne doivent pas être centralisées: c'est la détermination du niveau de sécurité incendie et les moyens qui doivent être pris à travers le Québec, dans un territoire aussi vaste, parfois très densément peuplé, avec des vieux bâtis, parfois avec un bâti moderne, parfois avec d'énormes distances, parfois avec des obstacles géographiques importants. Donc, c'est pour ça que...

Mais nous prenons le pari que, si on met des élus locaux autour d'une table d'une même région et qu'ils font eux-mêmes, avec leurs experts, avec des experts, s'ils le veulent, l'inventaire des risques incendie qui sont sur leurs territoires, ils découvriront une réalité et ils agiront de façon responsable.

Et nous avons testé la méthode à deux endroits. Et, justement, c'est exactement ce que les élus locaux ont découvert et c'est ce qu'ils sont venus nous expliquer: Quand on s'est aperçu des risques – il y en a même un qui a dit: C'était comme un écran de fumée qui nous empêchait de le voir avant – on a commencé à prendre les moyens. Puis, nous, on a accepté non pas de baisser, mais on était même prêts à augmenter les ressources pour atteindre le niveau de sécurité incendie qu'on voulait, qu'on était prêts à vendre à notre population.

M. Caron (Pascal): Est-ce que c'est nécessaire d'avoir un projet de loi ou c'est plutôt une réalité, une obligation que les services incendie font, en fait? Je présume que la plupart des chefs pompiers, pour ne pas dire l'ensemble, ont déjà une connaissance intrinsèque des risques, ils ont déjà une idée; les pompiers également, aussi. Ils savent que, si tel bâtiment à risque – par exemple, pour le nommer, un couvent de soeurs ou une industrie pétrochimique – brûle... bien ils vont dire: Oups! J'espère ne pas être là quand ça va arriver. Les gens ont cette intuition-là. Il faut juste mettre en commun les ressources, il faut juste, si on veut, qu'il y ait une espèce d'encadrement. Puis c'est pour ça, le projet de loi... Écoutez, nous, on est là pour collaborer. C'est un bon pas en avant.

M. Ménard: Certainement. C'est pourquoi les chefs de pompiers, remarquez, appuient beaucoup ce projet de loi et la méthode. Parce qu'il leur manque un pouvoir de décision: c'est l'allocation des ressources et c'est les ententes intermunicipales. Donc, il fallait trouver un moyen. Est-ce que c'était nécessaire? Je vous dirais: Oui, c'était nécessaire parce que ça ne s'est pas fait assez au Québec, avec les résultats que l'on constate.

M. Caron (Pascal): Effectivement, c'est un constat.

M. Ménard: Voilà. Et donc il fallait mobiliser d'une façon ou d'une autre les élus locaux, si on veut qu'ils exercent les responsabilités pour lesquelles ils ont été élus avec un certain sens des responsabilités. Il fallait les amener à faire une démarche eux-mêmes. Parce que, si j'avais réuni les chefs de pompiers d'une MRC, je sais très bien que j'aurais eu probablement la meilleure des... Mais ils ne peuvent pas traduire leurs intentions en budgets, en décisions d'acheter des équipements, et ainsi de suite. Seuls les élus locaux veulent le faire, et c'est normal.

Mais en tout cas. C'est parce que vous dites: C'est une question de ressources. L'une des constatations que l'on fait, c'est qu'il y a des dédoublements de ressources et, avec les mêmes ressources, si elles étaient mieux coordonnées, on obtiendrait un meilleur niveau d'incendie. Par exemple, pourquoi faut-il que ce soit les pompiers de Sainte-Anne-de-Bellevue qui aillent éteindre les incendies à Sainte-Geneviève-de-Pierrefonds alors que les pompiers de Pierrefonds sont à côté, n'est-ce pas?

M. Caron (Pascal): C'est sûr, ce que vous avez enclenché est louable parce que ces éléments-là, on les retrouvait au rapport Coderre de 1972 et l'on est en l'an 2000, 28 ans après, puis on est toujours, si on veut, au même pas. Donc, espérons-le, qu'avec un tel projet de loi on va finalement faire optimaliser les ressources sur l'île de Montréal et à la grandeur du Québec pour assurer une sécurité adéquate aux citoyens.

Je ne suis pas tout à fait d'accord, en termes de niveaux de sécurité, avec le fait que certaines municipalités peuvent être moins ou plus protégées ou que certains citoyens peuvent être plus ou moins protégés. Remarquez, il y a des paramètres. Il faudrait voir. À l'intérieur d'un même territoire, c'est difficilement justifiable qu'un citoyen qui habite à Outremont soit moins bien protégé qu'un citoyen qui habite à Montréal, à cause des conditions, d'une situation limitrophe, tout ça. Donc, c'est là l'importance de mettre en commun, si on veut, les ressources.

M. Ménard: O.K. En tout cas, j'ai pris bonne note de vos interrogations. Disons que chacun son métier, à un moment donné. Puis le métier d'homme politique, il n'y a pas de cours pour ça. On apprend ça sur le tas, hélas!

M. Caron (Pascal): En parlant de cours...

M. Ménard: Mais on s'aperçoit quand même que ça a ses exigences. C'est correct. Alors, je vais laisser les autres poser les questions.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Dubuc.

M. Côté (Dubuc): Oui. Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais savoir: Combien y a-t-il de membres dans le Conseil St-Laurent?

M. Caron (Pascal): Le Conseil St-Laurent, on a des listes de contacts, si on veut, il n'y a pas un membership comme tel. Il y a un membership pour être membre de la Society of Fire Protection Engineers, mais les gens sont invités à se joindre à nos activités. Nous organisons des conférences – on en fait deux par année – on discute d'éléments techniques concernant la sécurité incendie et il y a des publications. Donc, c'est plutôt par contact, à peu près 300 personnes. À la dernière rencontre, on a rassemblé 200 personnes du domaine de l'incendie.

M. Côté (Dubuc): Merci. Ma question. Vous dites dans votre mémoire que la prévention n'est que brièvement traitée dans cet avant-projet de loi. Vous ne trouvez pas que le fait d'établir un schéma de couverture de risques, le fait d'établir une école nationale de formation, c'est de la prévention? J'aimerais peut-être que vous m'expliquiez un petit peu...

(12 heures)

M. Thibault (Yves): Au niveau de la prévention, j'aimerais apporter juste une nuance. Pour le vivre dans mon milieu, pour être sur le terrain, pour faire appliquer des codes de prévention et des lois, et dans le sens aussi de la notion de risque que vous apportez dans le document, ça ne veut pas dire, parce qu'une usine est conforme à des normes, que ça soit à un code national de prévention d'incendie ou à NFPA, qu'elle n'apporte pas un risque, qu'il n'y a pas un risque. Et de là l'interrogation qui me passe en tête: le risque que la municipalité doit assumer. Par exemple, si j'ai dans ma ville une usine de recyclage de liquides inflammables qui vient s'installer, est-ce que mon schéma d'aménagement voudrait dire que mon service d'incendie devrait être équipé pour répondre à ce risque-là, même si l'usine est conforme de A à Z à un règlement de prévention d'incendie et que nous n'avons rien à dire face à ça? Ça arrive.

Une de mes surprises, à un moment donné, ça a été d'arriver et de dire: Bon, c'est bien conforme, puis m'apercevoir, deux ans après, que c'était un produit toxique qui était bien dangereux et qui constituait un risque éventuel pour une population près de ces installations-là, donc un risque considéré peut-être moyen ou majeur en étant aussi conforme à des règlements d'installation, et tout ça.

Donc, pour moi qui travaille sur le terrain, si j'avais à faire une étude de risques, ça ne serait pas clair dans ma tête: Qu'est-ce que je dois faire, comme municipalité? Est-ce que je dois me limiter à un bon règlement de prévention ou si la portée de la loi va m'amener, comme municipalité, ou comme MRC, ou comme entité responsable, à avoir les équipements pour ces risques-là?

Dans un deuxième volet, je me pose une question aussi... J'extrapole dans deux ans, trois ans. Je fais mon étude de risques, je suis conforme selon les normes du ministère, il y a une nouvelle industrie qui vient s'installer sur mon territoire, qui m'emmène de nouveaux risques. J'imagine, par logique, que je devrais refaire une étude de risques. Et, si mes équipements ou ma capacité de répondre dans des critères qu'on ne connaît pas, des critères qui seraient: Est-ce que c'est logique... Est-ce que je dois avoir d'autres systèmes de production? Est-ce que c'est à la municipalité d'accepter de prendre ces frais-là ou ça serait à l'industrie? C'est des questionnements, en tout cas, qui sont actuellement sans réponse, qui sont peut-être un peu difficiles à «manager», si on veut, si vous me permettez le terme.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Je remercie le député de Dubuc de sa question, parce que, évidemment, en 10 minutes je n'aurai pas le temps de discuter de tous les sujets dont je veux discuter avec vous, puis la prévention fait partie de mes préoccupations. Et je me considère satisfait de la réponse que vous venez de donner, satisfait tout en étant insatisfait parce qu'on n'a pas assez de temps. Alors, je le remercie, j'aurais parlé de ce sujet-là.

Il y en a un deuxième dont j'aimerais discuter avec vous pendant le peu de temps qu'on a et profiter de l'expertise des ingénieurs, profiter du fait que vous êtes des ingénieurs: l'article 5. Et, vous l'avez abordé un petit peu, M. Thibault, dans votre réponse au député de Dubuc, la question du risque.«Toute personne dont les activités ou les biens présentent, selon un règlement du gouvernement, un risque élevé ou particulier d'incendie.» Le terme «élevé». Moi, j'ai compris de votre mémoire que vous prévenez le gouvernement de la complexité de la tâche de définir ce qu'est le risque élevé.

Et j'ai bien lu dans votre mémoire que vous dites au gouvernement: Écoutez là, si vous voulez vous embarquer là-dedans, c'est de vos affaires, mais ce n'est pas simple. Et, moi, j'aimerais mieux comprendre ce que vous voulez dire au gouvernement quand vous dites: Ce n'est pas simple de s'embarquer dans la définition de «risque élevé». Mais plus particulièrement, M. Thibault, M. Caron ou M. Brosseau – vous pouvez même vous échanger les réponses si vous voulez: Quels facteurs doit-on considérer quand on cherche à définir ce qu'est un risque élevé, le terme «élevé»?

M. Brosseau (Gaston): Parmi les ingénieurs en prévention incendie, il y en a qui travaillent dans différents domaines de l'incendie. Alors, ce n'est pas des gens qui sont regroupés dans un emploi. Ça, ça m'amène à dire qu'il y a une expertise d'acquise, mais diversifiée.

Pour répondre plus particulièrement à votre question sur les définitions – par exemple: Qu'est-ce que c'est qu'un risque élevé? – il existe des normes actuellement, par exemple, des normes américaines de la NFPA ou du Code de prévention des incendies du Canada. On croit qu'il y a déjà beaucoup de définitions qui sont données dans ces documents-là qui pourraient être adoptées par règlement, adaptées aux circonstances aussi, s'il y a des choses qui ne conviennent pas.

Et puis, moi, je voudrais signaler un petit point: c'est que les ingénieurs en prévention incendie regroupent aussi des gens qui travaillent pour l'assurance. Alors, on ne voudrait pas nécessairement venir en conflit avec nos membres, mais on veut spécifier à la commission que le schéma de couverture de risques qui est déjà proposé dans la loi, si la loi devient effective, il y a des gens qui peuvent le réaliser, et avec les documents techniques qui existent, ça va aider. Mais l'expertise qui est acquise dans l'Association des ingénieurs serait disponible.

Alors, le mémoire, c'est un peu aussi pour faire la promotion de ça, la promotion des ingénieurs, mais aussi pour vous mettre en garde contre des organismes qui sont déjà dans l'assurance spécifiquement et puis qui prétendent être les plus compétents pour faire les schémas de couverture de risques. Mais ils sont déjà payés pour le faire dans le cadre de l'assurance, tandis qu'ils pourraient devenir en conflit d'intérêts s'il y avait le schéma de couverture de risques et l'application, par la suite, de la prime d'assurances.

M. Caron (Pascal): Oui. Je voudrais juste...

M. Dupuis: Bien, je vais laisser M. Caron compléter.

M. Caron (Pascal): Oui. C'est ça. C'est parce qu'on parle de schéma de risques. Les risques sont connus. Je vous ai parlé tantôt qu'un chef pompier ou qu'un pompier tout simplement a déjà une idée, une intuition de qu'est-ce qui est dangereux pour lui, qu'est-ce qui est risqué. Est-ce que ça va être un gros incendie, un petit incendie, cette bâtisse-là, de par sa dimension, de par ses activités ou quoi que ce soit? Les compagnies d'assurances ont aussi cette information-là. Naturellement, cette information-là concerne beaucoup plus la propriété que les pertes de vies humaines comme telles. Mais tout assureur doit, si on veut, avoir une appréciation qualitative du risque. C'est-u un «hoax»? C'est-u un bon risque, un mauvais risque ou un risque acceptable?

M. Dupuis: M. Caron, je vais vous poser une question que, dans mon ancien métier, dans mon ancienne vie, on appelait une question suggestive. Moi, j'ai compris de votre mémoire que, quand on veut chercher à définir ce que c'est un risque élevé, il y a un certain nombre de facteurs dont il faut tenir compte. Et je veux savoir si vous êtes d'accord avec ce que je vous dis là, parce que c'est ce que j'ai compris de votre mémoire, mais je ne suis pas un ingénieur. Quand on cherche à définir ce qu'est un risque élevé, il faut évidemment considérer le risque objectif. On ajoute à ça quels systèmes de détection sont en place, quels systèmes de protection sont en place, quelles sont les procédures d'évacuation, quelle est la probabilité que le risque se produise, quelles sont les conséquences éventuelles si le risque se produit, si la catastrophe arrive. Est-ce que, ça, ce sont tous des facteurs dont il faut tenir compte dans la définition de risque élevé? Et il y en a-tu d'autres?

M. Caron (Pascal): Oui. Il y en a beaucoup d'autres. Mais effectivement, M. le député, ce sont les principaux éléments dont il faut tenir compte. Tantôt, on a parlé de responsabilités, bien, ça implique aussi la responsabilité de la personne qui fait le schéma, hein, entre autres qu'elle a la responsabilité des municipalités et des services d'incendie. La personne qui va réaliser le schéma engage aussi sa responsabilité. Il y a une notion là... d'où l'importance d'une rigueur à ce processus-là.

M. Dupuis: M. Thibault, essayez de me faire ça court parce que j'ai...

M. Thibault (Yves): On est habitués depuis... Ça fait 20 ans que je suis pompier. Il y a 20 ans, les pompiers, on éteignait des feux, puis on avait une hache puis une «hose». Aujourd'hui, les pompiers, on intervient sur des matières toxiques, sur un tas d'interventions. Dans l'idée du ministre, est-ce que l'étude de risque comprend tous ces éléments-là? Intervenir sur un feu, tout le monde est capable. Intervenir sur des matières toxiques, si ça veut dire ça aussi, étudier les risques, là on s'embarque – parce qu'on le fait à Montréal-Est, ça fait deux ans, trois ans qu'on le fait – dans quelque chose de gros. Une usine de crème glacée qui a 60 000 kilos d'ammoniaque, dans mon petit village – je dis toujours ça à mes élèves, Sainte-Planche-de-Plywood, ils ne se reconnaissent pas – qui s'établirait là, est-ce que les pompiers de la place devraient avoir des équipements de classe A? Est-ce que? Est-ce que? Est-ce que? Est-ce que ça veut dire ça? On ne parle même plus de feu, on parle d'intervention. On parle de risque à ma population dans le sens...

M. Dupuis: Alors, ce que vous dites au gouvernement, c'est: Quand, dans votre projet de loi, vous vous embarquez dans la définition du risque élevé, sachez que ce n'est pas simple, que ça prend des ressources importantes pour arriver à la définition, puis que non seulement ça prend des ressources importantes pour arriver à la définition, mais tantôt ça va prendre des moyens importants aussi pour rencontrer le risque. C'est ça que vous dites? M. Thibault, est-ce que c'est ça que vous dites?

M. Thibault (Yves): Oui, oui.

M. Dupuis: O.K. Oui, M. Caron.

M. Caron (Pascal): Oui, effectivement, c'est ça. Mais ce n'est pas impossible, c'est possible.

M. Dupuis: Non, non. Je comprends ça.

M. Caron (Pascal): Et c'est même souhaitable, parce qu'on partage l'objectif du gouvernement, qui est d'améliorer la sécurité incendie à cet effet-là, sauf qu'il faut être conscient aussi que ce n'est pas plus de camions de pompiers ou plus de pompiers. À certains endroits, effectivement, ça prend plus de camions de pompiers, plus de pompiers, mais il y a des risques que, malgré un nombre impressionnant de pompiers ou de camions ou quoi que ce soit, à la base même, ils vont exiger des éléments d'autoprotection, des systèmes de détection, des murs coupe-feu, des gicleurs.

(12 h 10)

Donc, il y a une suite à ça. Ce n'est pas uniquement pour les pompiers, mais c'est aussi pour les industries et les propriétaires. Si j'ai une industrie X, qui a un procédé dangereux X, qui crée un risque X, bien, ça va prendre quelque chose pour minimiser, pour mitiger, si on veut, ce risque-là, puis ce n'est pas nécessairement plus de pompiers.

M. Dupuis: M. Caron...

M. Brosseau (Gaston): Permettez-moi d'ajouter...

M. Dupuis: M. Brosseau, je ne veux pas vous interrompre. Juste une petite... Après ça, je vous laisse aller, je vous promets, jusqu'à la fin. M. Caron, quand vous dites: Ce n'est pas impossible, je comprends que ce n'est pas impossible, je suis d'accord avec vous, mais il y a des moyens importants à mettre, en termes de ressources humaines, ressources financières et ressources matérielles pour le combat.

M. Caron (Pascal): C'est une question de priorité qu'on va accorder à la sécurité incendie, hein. Le problème, c'est ça. C'est ça, le problème.

M. Dupuis: O.K. M. Brosseau, je vous l'ai promis, allez-y.

M. Brosseau (Gaston): Alors, je voulais signaler qu'il y avait...

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Il vous reste 30 secondes, M. Brosseau.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brosseau (Gaston): ... – oui – une distinction entre risque et puis danger. Un ingénieur peut très bien établir le danger, mais le risque, c'est une probabilité que ça survienne. La probabilité, c'est un pourcentage qu'une chose survienne, alors ce n'est pas nécessairement un danger. Le risque et le danger, il y a une distinction entre les deux.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je vous félicite. M. Thibault, oui.

M. Thibault (Yves): Un volet très important: la sensibilisation. Sensibiliser les gens, c'est très important. Si je prends une auto, si je prends un conducteur, avec la même auto, un va avoir 12 accidents puis l'autre n'en aura pas. C'est la même chose. Une compagnie bien gérée – on parle de gestion – il n'y aura pas d'accident; mal gérée... Tout ça est sur la sensibilisation des gens à la sécurité.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, je vous félicite pour votre esprit de synthèse. Et, là-dessus, il me reste, au nom des membres de la commission, à vous remercier pour votre contribution à nos travaux. Et je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 13)

(Reprise à 14 h 3)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des institutions reprend ses travaux dans le cadre de la consultation générale et des auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la sécurité incendie.

Nous avons donc, cet après-midi, deux groupes à recevoir. Tout d'abord, le Regroupement des associations de pompiers du Québec, dont son président M. Gaston Fauvel. Je rappelle que nous allons consacrer 45 minutes à l'ensemble de cette période de nos travaux, dont une quinzaine de minutes pour la présentation proprement dite. Alors, vous avez la parole.


Regroupement des associations de pompiers du Québec (RAPQ)

M. Fauvel (Gaston): Merci, M. le Président. Vous me permettrez, dans un premier temps, de vous présenter les gens qui m'accompagnent: à ma gauche, M. Claude Coutu, qui est président des pompiers de Laval et secrétaire-trésorier du Regroupement des associations de pompiers du Québec; à mon extrême droite, M. Claude Leblanc, qui est le procureur du Regroupement; et, à ma droite, M. Martin Morency, qui est président de la Fraternité des pompiers de Québec et également vice-président du Regroupement des associations de pompiers du Québec.

Alors, pour débuter, vous me permettrez juste de situer qui est le Regroupement. Finalement, le Regroupement des associations de pompiers du Québec est un regroupement de syndicats autonomes qui négocient eux-mêmes généralement leurs conventions collectives de travail, mais par contre dont le Regroupement travaille à tenter de développer une certaine philosophie, autant au niveau des conditions de travail, et plus particulièrement au niveau de la lutte contre l'incendie et ce qu'on appelle aussi les conditions en santé et sécurité du travail. Également, nous sommes mandatés par le groupe pour faire des représentations lorsqu'il y a, autant ici ou au niveau du ministère du Travail, des commissions parlementaires où on demande également notre participation. Ça nous fait plaisir d'y participer.

Le Regroupement représente 2 300 pompiers permanents dans une dizaine de municipalités qui recouvrent, entre autres, Laval, Québec, Montréal-Nord, Montréal, et ainsi de suite.

Alors, permettez-moi de passer tout de suite aux grandes lignes du mémoire que nous vous avons présenté. D'abord, nous partageons l'objectif que le ministre s'est donné dans cet avant-projet de loi. Nous sommes heureux de participer au processus de consultation, suite à la demande faite par le ministère, comme nous l'avons fait lors du premier document qui s'appelle Feu vert , qui précédait finalement l'avant-projet de loi. Évidemment, ici, quand nous disons: Nous partageons la philosophie, nous partageons les trois objectifs, celui d'être plus efficaces, plus efficients, celui de réduire les pertes et celui également d'amener, si possible, une réduction des primes d'assurance, ultérieurement.

Mais, pour ce faire, et tout comme le disait le ministre lors de son discours d'ouverture, il y a des choses qui sont fondamentalement importantes dont, entre autres, quand on parle d'intervention, on va parler du premier appareil arrivé sur les lieux, on va parler de la force de frappe et on va parler finalement du type d'intervention et comment on diversifie et comment on s'organise en fonction des divers risques, tout comme on le voit ou on le prévoit à l'intérieur de certains schémas. Sauf que, pour nous, pour être efficaces, il va falloir qu'effectivement on ait le courage de mettre des balises très, très strictes, parce que sinon, on a l'impression qu'il y a des gens qui risquent de s'en servir – et on verra ultérieurement – de ce schéma-là, strictement pour aller chercher une immunité, pour aller chercher une exonération plutôt que de chercher véritablement à améliorer le service d'incendie.

Alors, dans ce cadre-là, et pour essayer de le définir un petit peu plus clairement, évidemment qu'il y a des normes. Quand je parle des normes NFPA, ce sont des normes nord-américaines – National Fire Protection Association – qui inspirent à peu près tous les corps de pompiers à travers le Canada et les États-Unis. Ce sont des normes qui ont été validées suite à des expériences pratiques ou des expériences en laboratoire, des expériences théoriques qui déterminent finalement, juste à titre d'exemple, ce qu'on appelle le point d'embrasement généralisé.

Alors, pour faire bien comprendre aux gens de la commission, c'est qu'un début d'incendie dans une poubelle, si vous n'intervenez pas en dedans de cinq minutes, l'appartement au complet où se situe la poubelle, bien, finalement devient en flammes. Donc, votre point d'embrasement généralisé, il est important. Votre intervention, votre première équipe qui arrive sur les lieux doit, dans un premier temps, être à l'intérieur de ce point d'embrasement généralisé pour permettre de réduire la chaleur, pour éviter que ces gaz chauds là se transforment et que ça devienne un incendie incontrôlable. Et de là où maintenant vient votre force de frappe qui doit être à l'intérieur d'un certain temps donné, sinon vous vous ramassez malheureusement avec des incendies, ce qu'on appelle des incendies majeurs qui, eux-mêmes, au seul nombre de 25 % viennent contribuer pour environ 75 % des dommages. Alors, il y a lieu de faire cette analyse-là, il y a lieu de faire une analyse de risques – et ça, c'est fondamental et diversifié – et de déterminer quel genre de force de frappe ça nous prend en vertu de tel et tel risque.

Si vous me permettez encore une fois de le préciser, si j'ai un feu dans un bungalow, il est évident que je n'ai pas besoin de dépêcher le même nombre de pompiers que je vais avoir à dépêcher si j'ai un incendie soit dans une église, soit dans un cinéma et plus particulièrement dans un hôpital, ou bien donc un centre pour personnes âgées où les gens sont plus ou moins autonomes. Alors, ça me prend plus de monde dès le départ pour pouvoir évacuer et, après ça, passer à l'attaque. Et, des fois, simultanément, pour protéger mes gens, il faut que je passe également à l'attaque pour réduire ma température pour me permettre de sortir les gens. Donc, tout ça, là, c'est tout, et ça a tout été analysé. Et ça, c'est des normes très strictes et, si on ne se conforme pas à ces normes-là, on aura beau faire n'importe quoi, on va arriver, et malheureusement, ça va être terminé dans le sens que ça va avoir pris une ampleur où on ne va avoir qu'à vérifier pour empêcher les maisons extérieures ou les logements extérieurs – à l'extérieur de l'origine – pour empêcher finalement que ça devienne une conflagration globale et totale.

Alors, pour nous, c'est fondamentalement important que le ministère, dans le schéma, nous amène définitivement... qu'on applique intégralement les normes NFPA, sinon, à ce moment-là, on considère, quant à nous, comme pompiers, qu'on vient de manquer le bateau.

(14 h 10)

Et, quand je regarde, si vous permettez, l'article 8 où on parle... On va regarder les risques sur le territoire, mais finalement on va voir, ensuite de ça, au niveau régional, et le local va appliquer en fonction des ressources. Et là où j'ai un petit problème comme pompier, je pense qu'il va falloir délimiter c'est quoi que ça prend comme couverture minimale ou/et couverture optimale et, à ce moment-là, qu'on se donne les ressources nécessaires pour pouvoir y parvenir. Sinon, il est évident qu'on ne réduira pas les pertes, et on n'augmentera pas l'efficacité et on ne réduira pas non plus les primes d'assurance, ultérieurement. Je pense que c'est fondamental.

Maintenant, dans un autre ordre d'idées, on a été surpris de constater, à l'article 48, qu'en matière de sécurité incendie, que ce soit au niveau de la protection des vies ou de celle du matériel, la notion de «responsabilité publique» ne peut pas cohabiter avec une notion de «privatisation» ou de «commerce» alors que l'élément profit entre en ligne de compte, comparativement à une gestion publique et redevable envers les citoyens. Ça, pour nous là, ça nous paraît inacceptable qu'on puisse, avec l'article 48 qu'on retrouve à l'intérieur du projet – et je pourrai en reparler ultérieurement aussi... finalement qu'on s'en aille vers un type de privatisation, alors que le même gouvernement, au moment de la commission parlementaire sur les sociétés d'économie mixte, avait convenu qu'effectivement, même au niveau des sociétés d'économie mixte, au niveau des pompiers, au niveau des policiers, on ne devait pas permettre cette pratique-là. Pour éviter cette notion-là, il fallait absolument les exclure, alors que le projet de loi pourrait permettre finalement qu'on s'en aille au niveau privé.

Et ça nous apparaît, en plus de ça, être une ouverture, une sorte de privatisation où on s'en va dans des services parallèles ou bien, non, si vous aimez mieux, de la sous-traitance qui nous apparaît comme une atteinte fondamentale au droit du travail, et plus particulièrement une attaque déguisée de l'article 45 du Code du travail. Même si ça fait plaisir – et on entend beaucoup la partie patronale venir le demander – il est clair qu'à ce moment-là on ne peut pas associer ça en fonction du rôle et du travail de pompier – on doit éviter le mot «profit» – en fonction des risques qu'on doit avoir, on doit y aller en fonction de la protection du public.

Quant à l'exonération, il y a deux aspects desquels on se préoccupe. Le premier, on se pose comme question la façon dont sont formulés les paragraphes 46 et 47. En tout cas, première réflexion – et on vous la soumet tout simplement respectueusement – il nous apparaît être à l'encontre de l'article 1457 du Code civil et à l'encontre de l'article 604.6 des cités et villes. Ça, c'est le premier aspect.

Sur l'autre aspect, il nous apparaît bizarre qu'on puisse donner une immunité aux municipalités en autant qu'elles aient le schéma et qu'on ait un transfert de responsabilités où quelqu'un, en cas de faute lourde, pourrait être amené devant les tribunaux au point de vue de responsabilité civile, alors que, même présentement, l'employeur est toujours redevable et responsable finalement de ses employés. Et là on est en train de lui donner une immunité s'il fait un schéma et de retransporter, si vous voulez, une possibilité de poursuite contre les pompiers qui vont exécuter le travail sur les lieux. Ça me paraît un petit peu bizarre quand on regarde ça. Et permettez-nous de vous dire que ça nous paraît à l'inverse de tout ce qu'on peut voir dans les relations employeur-employés au moment où on se parle.

Quant à la formation, il me semble aussi très important de parler de la formation. Évidemment, un ne va pas sans l'autre: si vous n'avez pas de formation, même si vous arrivez rapidement, vous ne serez pas capable d'exécuter un travail rapidement; en contrepartie, même si vous avez beaucoup de formation, si vous n'êtes pas dans des temps minimums prescrits pour éviter cette conflagration, éviter finalement le point d'embrasement généralisé, on a un problème.

Au niveau de la formation, on a été surpris comme Regroupement de voir, suite à 1997... Parce qu'il y avait eu beaucoup de travaux. Il y a eu le premier forum où on parlait essentiellement... Parce qu'il y avait quand même eu des situations où on avait démontré, suite à Warwick, qu'il y avait une faiblesse au niveau de la formation plus particulièrement des pompiers volontaires et des pompiers à temps partiel. Quelle ne fut pas notre surprise de voir que le règlement sur la formation attaquait ou demandait une augmentation, une amélioration au niveau des officiers permanents, alors que chez les officiers qui sont temporaires, qui sont bénévoles présentement, au moment où on se parle, tout a été démontré qu'effectivement elle est là, notre faiblesse, ou une partie de la faiblesse. Donc, il est important qu'on ait cette formation-là et qu'en plus de ça on applique aussi les règles fondamentales dans le milieu de l'incendie. Qu'il y ait une formation continue qui normalement varie entre 24 et 28 heures par mois pour être certain qu'on a toute la nouvelle technologie, pour être à date. Et je ne vous parle pas d'équipe de spécialisation pour qui, elle, on augmente à ce moment-là, en plus de ça, la pratique et la formation. Mais strictement de la formation continue dans les normes NFPA, on voit de 24 à 28 heures mensuellement. Et ça, je pense qu'il ne faut pas l'oublier.

Là, je veux aussi revenir sur ce que je soulevais, la question des policiers-pompiers. Elle a été exclue du premier règlement; maintenant, on n'entend pas parler qu'on doit revenir avec ça. Je regarde plus particulièrement la décision du coroner qui a été rendue en 1990-1991, dans le cas de Shawinigan, où il y a eu deux policiers-pompiers qui sont décédés. Malheureusement, vous n'avez pas ça à l'intérieur du mémoire. Mais il n'en demeure pas moins que le coroner, M. Delâge, demandait à ce moment-là qu'on ait des équipes spécialisées, même à l'intérieur des policiers-pompiers, pour être certain qu'on puisse éviter cette situation-là. Parce que, de plus en plus, le travail du pompier est complexe. De plus en plus, les matériaux utilisés deviennent dangereux et, à ce moment-là, on demande qu'il y ait de plus en plus de spécialisation, alors qu'on continue à utiliser des policiers-pompiers et qu'on les exclut de toute forme de formation possible et imaginable. Je pense qu'on va à ce moment-là non seulement en fonction... Et ça, je pense que c'est fondamental, ce n'est pas uniquement une question de risques, de pertes matérielles, mais c'est des risques de pertes au niveau des policiers-pompiers. Il peut y avoir mort d'homme à ce moment-là, et je pense que c'est fondamental de le soulever.

Au niveau de la direction des opérations, comme on peut voir à l'intérieur du projet de loi, on parle du «chef» ou d'un «pompier désigné». Il a été démontré, il a été aussi accepté par la Commission de la santé et de la sécurité du travail que ça nous prenait un officier responsable à tous les débuts d'incendie, et cet officier-là doit avoir au préalable une formation adéquate. Alors, à ce moment-là, est-ce qu'on va l'avoir, cette formation-là, au niveau des temporaires et est-ce qu'elle va s'appliquer – c'est du questionnement – strictement à ceux à venir ou également à ceux qui sont là? Je pense que c'est fondamental et on n'a pas cette réponse-là, au moment où on se parle.

Évidemment, au niveau de l'entraide municipale et intermunicipale, je pense que, M. le ministre, nous sommes d'accord avec vous. Vous vous êtes déjà prononcé que, pour le moment, elle ne semble pas porter fruit, et je pense qu'il faut trouver une nouvelle situation, une amélioration à ça.

Quant au pouvoir ministériel aux articles 144, 146, 151 et 152, le Regroupement s'interroge sur la large discrétion qui est prévue, et il nous paraît, quant à nous, inacceptable que le pouvoir de réglementation puisse éventuellement modifier ou atténuer les teneurs des conventions collectives dûment négociées ou arbitrées avec les pompiers.

Au niveau de l'article 156, lorsque, également dans les pouvoirs ministériels, le ministre peut déterminer comment vont être nommés les officiers alors qu'encore une fois il y a ce qu'on appelle des plans de travail qui ont déjà été prédéterminés au niveau des professionnels ou au niveau des gens à temps plein, ou quel type de formation ça nous prend, lorsqu'il y a ce qu'on appelle des plans de carrière de déterminés, le ministre, par réglementation, pourrait venir modifier ça alors que tout ça a été négocié à l'intérieur des conventions collectives. Permettez-moi de vous dire que nous sommes en désaccord total là-dessus.

Maintenant, en conclusion, M. le ministre, M. le Président, M. le député, ce que nous disons, c'est: Effectivement, oui, un schéma, pas un schéma qui va donner la latitude finalement en fonction des ressources, mais un schéma qui devra faire une véritable analyse des nécessités du territoire en question et prendre les dispositions et les moyens pour s'assurer qu'on donne une protection adéquate aux citoyens. C'est la seule façon dont on va améliorer la situation dans le domaine de l'incendie. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le président, pour votre présentation. M. le ministre.

M. Ménard: Alors, je vous remercie de votre mémoire que j'ai lu avec attention et annoté abondamment. Nous n'aurons peut-être pas le temps de toucher tous les points que j'ai notés, mais soyez sûrs qu'on prend bonne note, quand même, des arguments que vous avez présentés, même si on n'y touche pas au cours de l'échange qui va suivre. Il est conforme à la préoccupation que j'ai toujours observée chez les syndicats de pompiers en particulier, mais chez aussi beaucoup d'autres syndicats, la préoccupation de formation, le souci aussi de la compétence et des avantages qu'il y a à encourager cette compétence, cette formation dans les activités de leurs membres.

(14 h 20)

Êtes-vous satisfaits que la méthode par laquelle nous allons emmener les élus municipaux à prendre conscience des risques que représente l'incendie chez eux et à prendre conscience des limites de leurs moyens va les emmener à faire les fusions que vous espéreriez entre les différents corps de pompiers?

M. Fauvel (Gaston): Nous avons confiance qu'on puisse avancer dans le domaine de l'incendie si concrètement on met des balises suffisamment serrées pour les amener à travailler. Si effectivement on ne fait que leur demander de s'amener à travailler dans un schéma pour l'ensemble de la région, mais qu'on ne met pas des précisions bien exactes pour savoir quel genre de protection, quel genre de force de frappe ça prend, comment on fait pour être à l'intérieur du temps d'embrasement généralisé, malheureusement, j'ai l'impression qu'il y a des gens qui vont faire la discussion dans le seul objectif d'aller chercher une exonération qui risque de nous amener, si on n'a pas de balises précises, finalement à une détérioration ou plutôt une déresponsabilisation.

M. Ménard: Ça, je le comprends, vous l'avez écrit, vous l'avez dit, vous le répétez. Je comprends parfaitement. Là-dessus, j'ai l'impression que votre désir intense de les voir progresser dans cette ligne ne vous fait peut-être pas voir assez que le mécanisme est à la fois assez subtil, mais assez contraignant et assez incitatif pour obtenir le résultat que vous espérez. D'ailleurs, dans les deux cas ou cas-pilotes que nous avons essayés avant, nous en sommes arrivés à cela, et les élus locaux ont fait preuve d'un très grand sens des responsabilités. Mais je comprends que, pour vous, quand même, les fusions de corps de pompiers sont un bien.

M. Fauvel (Gaston): Définitivement, M. le ministre, nous sommes loin d'être en désaccord, comme vous l'avez mentionné vous-même. Les fusions, nous sommes tout à fait d'accord. Nous sommes prêts à participer, même à y travailler, évidemment en autant que l'objectif ne sera pas qu'un exercice financier, mais un objectif finalement de donner une efficacité, de donner plus de services aux citoyens. Ça, nous sommes prêts à y participer, toujours dans le cadre des respects des normes généralement reconnues dans le monde des pompiers.

M. Ménard: Correct. Je vous rappelle d'ailleurs que les schémas devront être approuvés par le ministère pour pouvoir amener l'exonération...

M. Fauvel (Gaston): Ça, vous me permettrez de...

M. Ménard: ...et en vertu d'orientations, qu'ils seront publiés et, après qu'ils auront été publiés, qu'ils seront discutés. Mais je voudrais vous amener sur un sujet qui préoccupe beaucoup les municipalités et leurs représentants qui sont venus devant nous. On nous a fait valoir que l'un des obstacles aux fusions de municipalités auxquelles les élus seraient peut-être prêts à consentir, un des grands obstacles, c'est l'harmonisation des conventions collectives. Qu'est-ce que vous nous suggérez pour que l'harmonisation des conventions collectives... Est-ce que c'est possible d'avoir une harmonisation de conventions collectives qui soit autre chose que le meilleur des deux, que l'addition du meilleur des deux conventions, pour faciliter les fusions?

M. Fauvel (Gaston): Évidemment, M. le ministre, je me trouve à tricher un petit peu parce que, l'ayant suivi, la commission, du début presque à aujourd'hui, je connais la position plus particulièrement que vous a avancée l'Association des chefs métropolitains.

M. Ménard: Je ne voudrais pas vous en blâmer, au contraire. C'était très bien de votre part.

M. Fauvel (Gaston): Je pense qu'il faut quand même dire qu'il y a eu, M. le ministre, des fusions au niveau des policiers, il y a eu la création de la CUM. Il y a eu dernièrement encore des fusions des régies qui ont été faites dans le bout de Saint-Jérôme et d'autres endroits. Et je pense que, même avec le mécanisme qu'il y a et – ils sont suffisamment larges, les mécanismes, à l'intérieur du Code du travail – de la bonne volonté des deux parties, effectivement on peut y arriver, à un arrimage de conventions collectives, de bonne foi, en utilisant les règles normales de discussion et de négociation prévues à l'intérieur du Code.

M. Ménard: Mais, dans le cas où, malgré tout cela, il n'y aurait pas moyen d'avoir une harmonisation consensuelle des conventions collectives, est-ce que vous envisagez que quelqu'un devrait arbitrer ou trancher la question? Et, si oui, de quelle manière?

M. Fauvel (Gaston): Écoutez, au moment où on se parle, M. le ministre, moi, j'ai fait le tour d'une bonne partie – parce que, comme Regroupement, on touche à un certain nombre de conventions collectives – et on peut s'apercevoir que généralement, et un petit peu comme au niveau policier, compte tenu que c'est le même travail, la même formation, il y a une uniformisation de l'ensemble des conventions collectives. Et, à ce niveau-là, comme je vous dis, il nous apparaît, tout comme même les représentants de la ville de Montréal sont venus vous dire, qu'il y a suffisamment de possibilités à l'intérieur du Code du travail pour travailler comme tel sans nécessairement que quelqu'un ait à arbitrer. Il s'agit de la bonne foi des parties, dans ce cadre-là. Et comme nous l'avons dit tantôt, notre intention, pour nous, c'est, oui, nous sommes en accord pour mettre de l'avant tout ce qui peut amener une meilleure protection des citoyens, qui amènerait le but que vous visez par votre réforme: d'avoir de l'efficacité, de l'efficience et de réduire substantiellement les coûts rattachés à l'incendie.

Je vous ferais remarquer, M. le ministre, si vous me permettez, un petit point qui m'est passé par la tête en m'en venant. Et je suis d'accord quand vous me dites finalement: Au Québec, les pertes au niveau de l'incendie sont beaucoup plus élevées qu'en Ontario. Et je pense que c'est une perte suite à une évaluation. Et quand on regarde que le coût des maisons et le coût de l'habitation est beaucoup plus élevé en Ontario que chez nous, est-ce que le fossé n'est pas encore plus large que ce qu'il nous apparaît à prime abord? C'est pour ça que, dans ce cadre-là, nous disons que, oui, nous sommes d'accord d'aller de l'avant, mais respectueusement nous vous soumettons que l'article 8 et l'article 10 ne nous mettent pas suffisamment de balises et n'amènent pas suffisamment de... je ne dis pas de restrictions mais amener les gens à prendre leurs responsabilités en fonction du service d'incendie.

Vous savez que, d'année en année, on est les enfants pauvres au niveau des budgets, d'année en année, on réduit le budget, et c'est malheureusement de notoriété publique, au moment où on se parle, que partout, tout ce qu'on fait, on laisse croire à tout le monde que finalement les incendies, c'est chez le voisin, ce n'est pas chez nous. Et je ne suis pas tout seul, y compris le rapport Nicolet et tous les rapports dans le domaine du service d'incendie, c'est malheureusement dans la pensée, au moment où on se parle, que les gens diminuent de plus en plus le budget, vont mettre leur argent ailleurs plutôt que dans la protection, alors que, au moment où on se parle, c'est une des choses fondamentales.

M. Ménard: Bon, ça a trait à un autre sujet, puis surtout je veux laisser aussi du temps à mes autres... Vous dites, en conclusion, à la page 23, que «trop souvent les dommages matériels surviennent en raison d'une intervention initiale inadéquate en nombre et en temps de réponse». Est-ce que vous appliquez cette remarque aussi aux corps de police des grands centres, comme Montréal, Québec?

M. Fauvel (Gaston): Je vous remercie de l'apporter. Malheureusement, je vais prêcher pour ma paroisse. Nous avons participé avec la ville de Montréal, nous, à une étude justement pour s'assurer que, dans tous les points stratégiques de la ville de Montréal, ça soit dans des temps normaux. Malheureusement, nous l'admettons tous les deux, que Rivière-des-Prairies, Pointe-aux-Trembles, avec le développement qui s'est fait, nous avons cette lacune-là. Par contre, et quand je regarde et qu'on me dit que ville de Laval va quasiment être considérée comme régionale et finalement locale – parce que ça va être un comité, il va regarder tout ça – et qu'on sait que, dans toutes les villes en Ontario à peu près de même grosseur que Montréal, Laval, Québec, il y a un prorata d'environ un pompier par 650 à 700 habitants, et qu'on regarde, à Laval, on a un pompier par 2 115 habitants, il y a quelque chose qui ne marche pas, oui, effectivement, dans ces centres-là, et vous le savez très bien. On n'a rien qu'à prendre l'incident à Chomedey, voilà deux ans, la fameuse industrie de peinture où ils ont été obligés de régler ça hors cour, il y avait huit pompiers, à l'origine, sur un incendie dans une manufacture de peinture de 150 pi de long par 450 pi de profond. Il est évident que la force de frappe n'était pas là. On n'est pas intervenu, et c'est évident encore une fois que nous avons multiplié inutilement les frais et les coûts.

M. Ménard: Merci.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Merci pour votre rapport. À la page 15, en tout cas, vous dites que vous êtes complètement contre l'article 38, qui est inconciliable avec les règles de sécurité, j'imagine surtout avec le dernier paragraphe, quand on dit que le premier pompier arrivé, c'est de lui que relèvent les opérations.

Ce matin, les directeurs généraux de la MRC étaient contre aussi le fait qu'il y ait un pompier de commune renommée qui soit sur les lieux. Même la CSST dit que, si le pompier arrive et n'a pas la formation, alors il fait des travaux, il éloigne les badauds. Comment est-ce que vous pouvez concilier ça avec ce que vous disiez tout à l'heure, la force de frappe nécessaire dans les délais requis? C'est pressant, des fois, à ce moment-là.

M. Fauvel (Gaston): Non. Écoutez, évidemment, dans notre cas à nous, et plus particulièrement chez les gens à temps plein, il y a un officier responsable au moins sur chaque intervention; et plus particulièrement dans notre cas – nous sommes plus gros à Montréal – sur chaque véhicule d'intervention, il y a un officier responsable. Personne ne peut agir comme officier, chez nous, à Montréal, sans avoir préalablement non seulement réussi l'examen à Montréal, mais avoir les critères nécessaires exigés par la CSST, suite à un malheureux incident où il y a eu décès d'un officier. Et, depuis 1991-1992, on avait déjà mis des mécanismes en place.

(14 h 30)

Mais que ce soit à Laval, que ce soit à Québec ou un autre centre avec lequel nous faisons affaire – nous sommes avec les permanents – il y a toujours un officier avec une formation adéquate qui arrive sur les lieux. Alors, c'est pour ça que nous disons, par rapport au projet de loi, qu'il faut retransporter ça. Parce que je suis d'accord avec ce qui s'est dit ce matin: Comment faire prendre la responsabilité à quelqu'un, sur les lieux d'un incendie, qui n'a pas la formation, n'a pas l'habitude, n'a pas été chercher finalement tous les critères pour lui permettre de faire une analyse de la situation, savoir où il utilise ses forces, comment il fait rentrer ses gens en fonction de ce qu'il voit? Parce qu'il y a un paquet d'éléments qui doivent être considérés. On ne rentre pas nécessairement comme ça, n'importe comment; il y a un système, qui doit se faire avec la ventilation. Il y a beaucoup de choses à prendre en considération. Et, dans ce cadre-là, oui, ça nous prend quelqu'un qui va arriver sur les lieux puis qui va diriger les incendies, ou du moins jusqu'à temps que le chef arrive, mais quelqu'un qui a déjà une compétence.

Et c'est un petit peu, malheureusement, ce qui est arrivé dans plusieurs incidents à venir jusqu'ici – qu'on nous parle de Warwick et qu'on nous parle d'autres situations – c'est que les gens n'avaient malheureusement aucune formation. Alors, ils agissaient comme officiers ou ils agissaient même comme chefs, sans formation aucune.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: MM. Fauvel, Morency, Coutu et Leblanc, bienvenue. M. Fauvel, vous savez, vous avez assisté à toute la commission, on se connaît de vue parce qu'on s'est regardé à quelques reprises pendant la commission, vous avez vu la façon dont on travaille, particulièrement M. le ministre et moi-même. Quand on a un mémoire qui est aussi volumineux et aussi bien préparé, je dois le dire, que celui que vous avez apporté à la commission et qu'on sait qu'on aura 15 minutes en tout, pour la partie qui représente l'opposition, pour poser des questions, il faut choisir évidemment, dans ce qu'on lit, les choses qui nous sautent aux yeux, si vous voulez, quitte, M. Fauvel, comme on se l'est dit d'ailleurs lors d'un ajournement, à ce que nous ayons une discussion ensemble dans d'autres lieux que l'Assemblée nationale.

Alors, j'ai parcouru avec attention votre mémoire et je suis obligé de vous dire qu'il y a une affirmation ou une citation que vous faites dans votre mémoire qui a particulièrement attiré mon attention et sur laquelle j'aimerais qu'on échange pendant quelques minutes. Elle se situe à la page 13 de votre mémoire et elle est incluse dans le chapitre qui concerne l'exonération, et c'est un extrait du document que vous avez soumis suite à la consultation Feu vert que le ministre vous a soumise. Je la cite pour les fins de l'enregistrement, et c'est la suivante, et pour que les gens qui nous écoutent sachent de quoi on parle. Alors, évidemment, vous parlez de l'immunité qui est accordée et vous dites: «C'est pour cette raison que le ministère doit mettre de l'ordre dans le domaine de la sécurité incendie et ne pas laisser aux conseillers – je pense qu'il faut entendre les conseillers municipaux – ...

M. Fauvel (Gaston): Vous avez très bien saisi.

M. Dupuis: ...et aux maires le soin d'évaluer ce qui est bon pour les citoyens, car on ne parle pas ici de réfections de chaussées ou de construction de pataugeoires, mais de protection contre l'incendie.»

Honnêtement, M. Fauvel, quand j'ai lu ça, non seulement ça a attiré mon attention, mais j'ai été obligé d'avaler deux, trois fois. Pour être certain de ne pas mal comprendre ce que vous aviez dit, je suis allé voir effectivement dans l'annexe le document duquel est issue cette citation et j'y lis donc, pour ne pas faire injure aux idées que vous vouliez exprimer dans votre mémoire, la citation suivante, j'en extrais la citation suivante, qui sont les trois derniers paragraphes de votre document que je vais vous citer, M. Fauvel, page 11, à l'annexe.

«Les élus municipaux disent qu'ils sont responsables et qu'ils doivent continuer à faire les choix sur le niveau de protection incendie à offrir. Les montants des pertes matérielles par habitant montrent clairement qu'ils ne sont pas en mesure de poser ces choix fondamentaux.

«Dans un article paru dans le numéro de septembre 1999 de la revue Urba , les représentants des municipalités disent que la sécurité incendie est une responsabilité locale où le niveau de protection est déterminé par les citoyens. Ça montre à quel point les élus municipaux sont débranchés de la réalité.

«C'est pour cette raison – et là vous reprenez la citation que je donnais au début – que le ministère doit mettre de l'ordre dans le domaine de la sécurité incendie et ne pas laisser aux conseillers et aux maires le soin d'évaluer ce qui est bon pour les citoyens, car on ne parle pas ici de réfections de chaussées ou de construction de pataugeoires, mais de protection contre l'incendie.»

La première remarque qui me vient, M. Fauvel, c'est: J'espère que vous avez plus de respect pour les élus provinciaux que pour les élus municipaux. Ça, c'est la première remarque qui me vient. Ça, c'est une boutade.

Mais la deuxième, M. Fauvel, c'est la suivante: Si vous n'acceptez pas que les élus municipaux qui sont les représentants élus par la population, si vous n'acceptez pas que ces gens-là doivent exercer une représentation, est-ce que vous êtes en train de dire à la commission, et au ministre, et au gouvernement qu'on devrait laisser le soin de décider de ces questions-là à des gens qui n'ont à répondre devant personne? Est-ce que c'est ça que vous dites?

M. Fauvel (Gaston): Écoutez, M. Dupuis, je m'attendais à ce type de question là puis j'espère que je ne vous paraîtrai pas trop impoli, mais je m'y attendais parce que, quand j'ai écouté votre présentation au départ, au début de la commission parlementaire, j'ai pu comprendre qu'effectivement vous reveniez à peu près sur les conclusions du mémoire de l'UMQ où il fallait tout donner au local la décision puis regarder.

Le ministre, qu'est-ce qu'il a dit quand il a présenté Feu vert ? Et là je suis entièrement d'accord, puis ce n'est pas une flatterie. Depuis 1960, on n'a pas changé rien dans l'incendie. Ça fait des années et des années qu'on laisse ça dans les mains... sous prétexte que ce sont des élus municipaux, on leur laisse tout ça entre les mains. Ce que je vous ai expliqué tantôt, on voit d'année en année se détériorer la question d'incendie, on voit d'année en année augmenter les pertes au point de vue matériel, on voit d'année en année se minimiser et se confondre pratiquement à rien, à l'intérieur du budget municipal, tout ce qui touche la question de formation, la question incendie. Et ce que nous disons au moment où on se parle... Et quand vous me dites: C'est un choix des gens, je ne suis pas sûr, moi. Je ne suis pas sûr, moi, si on les met vraiment au courant des dangers puis qu'on leur dit: Est-ce qu'on ne devrait pas maintenir, plutôt qu'une pataugeoire, des services incendie adéquats pour tel coût? Et, à ce que je sache, à venir jusqu'ici, moi, je n'ai pas encore vu personne, malgré qu'on réduit partout, qui a vraiment réduit les taxes. Et quand on parle de sécurité, autant de sécurité incendie ou au niveau de sécurité publique, ils n'ont pas demandé. Et c'est dans ce sens-là que je pense que le gouvernement doit prendre les responsabilités. Quand il a fait la Loi de police, on n'a pas demandé aux élus, on ne demande pas aux membres: Combien de polices vous voulez dans votre municipalité? On a établi des normes, des critères qui sont généralement reconnus et on les applique. C'est ça qu'on vous demande de faire. On ne peut pas laisser des gens faire un choix politique sur le dos de la vie et des biens des citoyens. Je m'excuse, mais c'est là où je débarque et je débranche complètement.

M. Dupuis: M. Fauvel, je ne veux pas avoir avec vous une discussion philosophique, je ne veux pas que vous ayez l'impression que je vous gronde de votre citation. Mais on vit tous dans la même société qui est organisée de la même façon. En anglais, on dit, pour les citoyens: «No taxation without representation.» Ça, ça veut dire que, si tu es taxé, tu as le droit de dire à celui qui taxe si tu es d'accord avec ses décisions ou non. Et est-ce que vous admettez ce principe-là? Admettez-vous, M. Fauvel, que la population, c'est elle qui paie pour toutes ces choses-là, la population? Admettez-vous avec moi, M. Fauvel, que la population, elle a le droit, lorsqu'elle paie des taxes, de dire: S'ils ne font pas avec mes taxes ce que je veux qu'ils fassent avec mes taxes, j'ai au moins mon mot à dire à tous les quatre ans. Je peux dire: Vous, je n'aime pas ce que vous faites avec nos taxes, mes taxes; bonjour! Ou alors avoir une influence sur le processus démocratique. Est-ce que vous admettez ça avec moi que c'est la façon de faire les choses? M. Fauvel – je veux juste terminer parce qu'on n'a pas beaucoup de temps puis je vais laisser le député de Verdun poser des questions, il va m'en vouloir, lui aussi – M. Fauvel, si on laisse à des fonctionnaires ou à des chefs syndicaux, d'associations de pompiers, ou à des gens qu'on n'a pas élus et sur lesquels on n'a pas de contrôle le soin de prendre des décisions et de nous charger pour, bien on n'a plus un mot à dire. C'est ça, le principe. L'admettez-vous avec moi, M. Fauvel, ça?

(14 h 40)

M. Fauvel (Gaston): Écoutez, pour répondre à votre question parce que vous la prenez sous différents angles, pour éviter justement ce débat-là, pour éviter qu'à un moment donné on essaie de faire accroire – je dis bien «essaie de faire accroire» – aux gens: Écoutez, si j'augmente le niveau, je vais être pris pour vous augmenter... Sachant, les gens, qu'ils sont saturés, bien, des fois, ils préfèrent, justement à cause de ce qu'ils ont déjà ancré, que le feu, c'est pour les autres et non pour eux, à ce moment-là, ça détériore. C'est pour ça qu'on dit: Ne jouons pas sur la sentimentalité, ne jouons pas finalement sur le côté électoraliste. Ce n'est pas ça qu'on veut faire. La NFPA, c'est une organisation composée autant de maires, autant de chefs de pompiers, autant de personnes reconnues et qui sont crédibles à travers le monde, et on dit justement: Ces gens-là, ils ne vont pas là pour faire de la politique, ils sont là pour s'assurer et faire de l'expertise et de l'expérience pour s'assurer que les gens ont une couverture adéquate et établissent des normes. C'est ça que nous demandons au ministre de mettre à l'intérieur.

Maintenant, quand vous nous parlez d'argent – et c'est là où j'ai un petit problème aussi – puis qu'on diminue le service incendie sous prétexte qu'on n'augmente pas les taxes, mais je regrette, les taxes, ils les paient pareil. Ils les paient déguisées en augmentation de coût de polices d'assurance pour ceux qui ont les moyens de se le permettre, tout en ayant moins de services. Puis, malheureusement, on a encore 50 %, 55 % qui n'ont plus les moyens de s'assurer. Et puis ces pauvres gens là, le fait que... ensuite de ça, qu'on ait réduit la protection, c'est les gens qui n'ont pas les moyens de s'assurer, les gens qui sont les moins bien nantis dans cette société qui paient la facture au bout de la ligne. Et c'est dans ce cadre-là que nous disons: Il faut effectivement sortir la politique, sortir ces éléments-là qui sont... des fois, on peut être porté à regarder, et restons sur la question de sécurité et allons nous chercher des indicateurs qui sont fondamentalement indépendants, mais qui ont des bases solides et qui ont comme seul objectif d'améliorer la sécurité incendie et améliorer la protection des citoyens.

M. Dupuis: M. Fauvel, je vais vous faire un petit clin d'oeil, ça va être une taquinerie, mais il faut que je le dise. Pensez-vous vraiment, M. Fauvel, que, si les citoyens de la ville de Montréal élisaient leurs pompiers, ils les auraient reportés au pouvoir après avoir constaté que les boyaux d'arrosage sur les incendies étaient percés?

M. Fauvel (Gaston): M. Dupuis, je ne sais pas si vous me le sortez à la toute fin – parce que je vous ai vu regarder l'heure – parce que mes premières réponses ne font pas votre affaire, mais ça, c'est secondaire. Et je n'ai pas l'habitude de le cacher. Ça fait exactement 12 ans que je suis président de l'Association des pompiers de Montréal. Vous voulez savoir l'opinion des pompiers? À plusieurs reprises, on a même laissé des augmentations de salaires sur la table pour éviter des réductions de personnel, pour pouvoir donner notre protection la plus adéquate à la population. Puis ce n'est pas de l'altruisme, parce que moins j'ai de monde, plus je prends des risques et plus mes propres pompiers, plus mes membres peuvent risquer de mettre leur vie et leur santé en danger.

Ceci étant dit, vous avez eu un incident isolé en l'espace de 12 ans, un incident isolé. Et je me souviens très bien, et je regarde la citation de M. Trent, que vous venez de me répéter, où on parle de «les syndiqués de Montréal», «le syndicat». On vous a parlé d'un geste isolé. Et d'ailleurs, nous avons immédiatement, par la voie des journaux, donné notre plein désaccord, disant que jamais nous ne cautionnerons ça. Et nous avons même offert l'opportunité à l'employeur d'utiliser tous les représentants syndicaux pour faire le tour de toutes les casernes pour s'assurer que c'était bel et bien un incident isolé. Même, nous avons offert à l'employeur de travailler de toutes les façons possibles et imaginables pour s'assurer que jamais la sécurité de la population puisse être mise en danger. Et ça, ça a été reconnu par les tribunaux, ça a été reconnu par la ville de Montréal, ça a été reconnu également par le Conseil des services essentiels. Alors, dans ce cadre-là, qu'on veuille se servir d'un geste isolé pour minimiser le travail, que je considère fantastique, des pompiers de Montréal, j'ai un petit peu de la difficulté. Puis je suis très fier de les représenter.

M. Dupuis: M. Fauvel, on parle beaucoup d'entraide entre les municipalités, et particulièrement sur l'île de Montréal. Vous dites dans votre mémoire: Oui à l'entraide, pas de problème à l'entraide, mais il faut qu'on continue ou il faudrait qu'on respecte les conventions collectives dans tous les cas et qu'on ne vienne pas ouvrir les conventions collectives.

Allez-vous être d'accord avec moi sur le fait que le maintien à tout prix des règles qui sont prévues dans les conventions collectives favorise peu, à certains égards, l'entraide entre les municipalités? Je vous donne un exemple: Verdun, Pointe Saint-Charles, incendie à Pointe Saint-Charles, près de la caserne de Verdun – si j'ai bien compris, selon ce qu'on m'explique, mais je peux me tromper, M. Fauvel, vous me corrigerez – Verdun ne peut pas y aller tant qu'il n'y a pas un pourcentage x de pompiers de Montréal qui sont rendus sur les lieux, alors que Verdun peut être plus près du lieu de l'incendie. C'est un exemple qu'on m'a donné. Mais, apparemment, il y a beaucoup d'autres exemples dans les conventions collectives qui font en sorte que l'entraide n'est pas facilitée. Êtes-vous d'accord avec ça?

M. Fauvel (Gaston): Je suis obligé de vous dire, le point que vous venez de soulever par rapport à l'exemple que vous me donnez, Pointe Saint-Charles et Verdun, ce n'est pas dans la convention collective. Lorsque la ville de Montréal a demandé, et qui a fait des entraides et qui a déposé des documents devant le ministre, elle a dit finalement: Tant que, moi, je n'ai pas 50 % de mon monde qui est utilisé à Montréal, je n'ai pas besoin de faire venir les autres pour payer en addition, alors que j'ai les miens, mes propres employés, à l'intérieur. Et je regrette, mais je n'ai pas bien, bien de casernes frontières, pour votre exemple, pour le moment. Mais ça peut se produire parce que, effectivement, c'est un non-sens qu'on passe des fois devant des casernes d'autres municipalités pour s'en aller dans nos propres patelins juste un petit peu plus loin. Mais ceci, ce n'est pas une question de convention collective, c'est les documents qui ont été déposés... Je vais sous réserve, je pense que c'est le ministre des Institutions où, à ce moment-là, il a été déposé, où il y a eu des ententes de services ou des choses semblables. Et, encore une fois, c'est sous réserve par rapport au ministère. Mais il n'y a aucune particularité concernant cette convention-là, et cet élément-là ne se retrouve pas à l'intérieur des conventions, M. Dupuis.

M. Dupuis: O.K.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun, brièvement.

M. Gautrin: Je vais poursuivre sur cette question, M. Fauvel. Je vais regarder non pas Verdun–Pointe Saint-Charles, je vais prendre Verdun–LaSalle. Vous savez qu'il y a eu une fusion, il y a eu création d'une régie, et les gens qui sont venus témoigner, aussi bien M. Damico que le directeur des services d'incendie et que le maire Georges Bossé, nous ont dit à quel point il avait été difficile de gérer deux conventions collectives pendant que le service de pompiers fusionnait. Vous, vous dites: Le Code du travail est équipé actuellement, on n'a pas besoin de rien faire. Ces gens-là qui ont à gérer ces deux conventions collectives disent: Non, ça se gère très mal d'avoir deux services de pompiers les uns avec les autres. Et on suggérait qu'on prenne une possibilité où, en cas de fusion, les pompiers doivent choisir l'une ou l'autre, mais qu'on ne continue pas à avoir deux conventions collectives. Comment vous réagissez à cette question-là?

M. Fauvel (Gaston): Je vais vous donner une première partie de réponse et je vais laisser M. Leblanc, Claude Leblanc, vous répondre sur le reste.

Comme on le mentionnait tantôt, j'ai entendu la proposition de M. Damico. Il y a des règles du jeu, au moment où on se parle, à l'intérieur du Code du travail, et je pense qu'on doit continuer à les respecter. Et, s'il y a des modifications ou s'il y a des représentations qui doivent se faire devant le ministre par rapport à ça, on sera prêt, on sera disposé à en faire, sauf que, en plus que les conventions soient sensiblement uniformisées au moment où on se parle, j'ai de la difficulté à comprendre comment il se fait que Verdun a tant de difficultés que ça, au moment où on se parle, à venir à bout de s'entendre pour avoir une convention collective. Pourtant, ce n'est pas les cols bleus, ça. Ils devraient être capables de s'organiser. M. Leblanc.

M. Leblanc (Claude): Si vous me permettez, M. le député, vous mentionnez également toute la question de l'harmonisation des conditions de travail à l'intérieur des conventions collectives. Il est important de mentionner que la législation du Québec, dans son état actuel, par l'application des articles, entre autres, 45 et 46 du Code du travail, prévoit déjà un mécanisme éventuellement de résolution de conflits entre deux conventions collectives. Si on voulait faire finalement une fusion de conventions collectives, il y a déjà des dispositions dans le Code du travail qui s'appliquent à ces situations-là.

L'autre point qu'il est important de mentionner, et M. le ministre en parlait tout à l'heure, il y a, je pense, un mythe véhiculé par les municipalités depuis trop d'années à l'effet de dire: Vous savez, les fusions, c'est beau de les faire, mais il va falloir que le gouvernement se dote ou dote les municipalités de certains pouvoirs pour éviter que ce soit toujours la convention collective la plus alléchante qui s'applique.

On a, du côté policiers, des dispositions dans le Code du travail qui prévoient déjà – et c'est la même chose du côté pompiers – que, lorsqu'il y a mésentente sur la conclusion d'une convention collective... on fait quoi? On s'en va devant un arbitre de différends. Les arbitres de différends, depuis 20 ans, ont été blâmés, lorsqu'ils entendent des causes... et, quand je parle d'arbitrage de différends, on parle de mécanisme quasi judiciaire, il y a des témoins assermentés qui viennent témoigner devant ces gens-là. Et on reproche aux arbitres de différends, depuis 20 ans – et là je parle des municipalités – que, lorsqu'ils s'en vont en arbitrage de différends – donc, ils l'ont, leur mécanisme de contestation éventuellement – les arbitres de différends donnent toujours des conditions de travail par l'intermédiaire des sentences qu'ils rendent en s'inspirant des conventions collectives les plus avantageuses.

(14 h 50)

Ça va prendre quoi comme moyen qu'on va donner aux municipalités? Comprenez-vous? À un moment donné, le nivellement des conditions de travail se fait même à l'intérieur des mécanismes déjà prévus dans le Code du travail. Il faut arrêter de penser que, s'il y avait davantage de fusions, on se retrouverait dans une situation catastrophique au niveau des conditions de travail. Des conditions de travail si différentes que ça entre un pompier de Montréal, ou un pompier de Québec, ou un pompier de ville de Laval, il n'y en a pas tant que ça de différence, le nivellement se fait déjà, il se fait déjà sans même parler de fusion. Mais les municipalités vous donnent l'argument: Vous savez, si on favorise les fusions, c'est une chose, mais permettez-nous d'aller jouer dans les conventions collectives. Elles n'ont pas besoin d'aller jouer dans les conventions collectives, il n'y a pas tant d'écart que ça et il n'y en a pas, de problème, à ce niveau-là. Et ça, c'est important de le dire parce que, lorsqu'on écoute les municipalités, ces paroles-là ne sont jamais dites, et c'est important de les dire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, ceci...

M. Fauvel (Gaston): En complément, si vous permettez, juste une petite seconde, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très rapidement.

M. Fauvel (Gaston): Très rapidement. C'est que, dans le fond, à peu près toutes les demandes ou toutes les études de projets de loi, au moment où on se parle, sont bonnes pour l'Union des municipalités pour revenir toujours sur les modifications du Code du travail.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Alors, j'aimerais remercier, sur ce, le Regroupement des associations de pompiers du Québec pour leur présence et leur contribution et inviter dès à présent les représentants de la Municipalité régionale de comté d'Abitibi-Ouest à bien vouloir prendre place, représentée par M. Daniel Rancourt, préfet, et M. Jaclin Bégin, maire de la municipalité de Sainte-Germaine-Boulé.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Je rappelle que la commission des institutions est réunie afin de procéder à la consultation générale et aux auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la sécurité incendie, et que nous avons le plaisir, comme dernier groupe que nous rencontrons dans le cadre de ces auditions, et non pas le moindre, j'imagine, de rencontrer donc les représentants de la Municipalité régionale de comté d'Abitibi-Ouest. Alors, M. le préfet, nous avons 30 minutes à consacrer à notre rencontre, donc une dizaine de minutes pour la présentation proprement dite. Je vous invite à y aller de votre présentation et à nous présenter bien sûr les personnes qui vous accompagnent.


Municipalité régionale de comté d'Abitibi-Ouest

M. Rancourt (Daniel): Donc, je me présente, Daniel Rancourt, préfet de la MRC d'Abitibi-Ouest et aussi maire de la ville de Macamic. J'ai aussi à mes côtés Jaclin Bégin, qui est maire d'une municipalité qui s'appelle Sainte-Germaine-Boulé, et M. Claude Piché, qui travaille au niveau de la Fédération des municipalités.

Je pense qu'on vous a remis le document. Je vous demanderais de l'ouvrir à la première carte de couleur qui est à l'intérieur.

Donc, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, avec le discours qui s'est tenu avant nous autres, on a l'impression d'être dans un autre Québec. Si on veut situer l'Abitibi-Ouest par rapport au Québec, vous avez la carte en présence. La flèche bleue qui est dans le haut, c'est le 49e parallèle qui sépare le Québec du territoire de la Baie-James pour nous autres. Ce qui est à votre gauche, c'est la frontière ontarienne. Puis, si vous prenez les petits points qui sont sur cette carte, c'est les différentes municipalités qui sont sur notre territoire.

Vingt-quatre municipalités, 23 000 de population, on ne parle pas des mêmes choses qu'on parlait tantôt. Pour situer un peu, le chef-lieu, c'est La Sarre, avec 8 000 habitants, 8 400 habitants à peu près. Puis on a un quadrilatère chez nous: on a La Sarre, qui est dans le nord-ouest; si on va plus vers le centre du Québec, on a la ville d'Amos; si on descend au sud, on va voir la ville de Val-d'Or – là, probablement qu'il y en a qui vont se retrouver – puis, si on retourne vers l'ouest, on va se retrouver à Rouyn-Noranda. Donc, un territoire relativement grand, un territoire qui est parsemé de petites municipalités.

Je dirais «petites municipalités», sur l'ensemble, nous avons 24 municipalités dont 12 ont moins de 500 habitants. Cinq cents habitants de moins, ça veut dire qu'il y en a qui sont à 200, puis il y en a d'autres qui sont à 300 puis 350. Ça fait qu'on n'est pas à Montréal ni à Québec. On est presque une rue de Montréal, puis une toute petite à part ça. On a six municipalités qui ont entre 500 et 1 000 habitants. On en a cinq qui ont entre 1 000 et 2 000 habitants, puis je vous le dis là, ce n'est pas 1 800 et 1 900, c'est plus 1 200 puis 1 300. Et, finalement, le chef-lieu, qui est La Sarre, avec 8 444. Donc, ça, c'est notre localisation.

Tout de suite, d'entrée de jeu, on parle d'un contexte qui est bien différent. Il y a quelques années, on parlait de deux Québec en un. Là, on est rendu dans la deuxième partie du Québec. On dit: Le Québec, c'est 80 % des gens qui sont rendus dans le centre Québec-Montréal-Sherbrooke et autres, puis il reste le territoire, puis, nous autres, on est presque dans l'arrière-pays, dans le Nord-Ouest du Québec.

C'est sûr que, lorsqu'on parle de changement ou lorsqu'on parle d'organisation municipale sur le territoire, vous voyez tout de suite là qu'on est dans un autre contexte. Ça fait que là je vais m'inspirer de mes notes un peu. Puis le détail de l'allocution, vous l'avez dans le document. Mais, étant donné que je n'aime pas faire des présentations littéraires, je pense que j'aime mieux avoir des choses plus concrètes ou des éléments qui sont plus à notre quotidien, c'est pour ça que je vais y aller plus avec des commentaires.

Donc, on sait que les municipalités, les fédérations, les unions avec le gouvernement du Québec ont raté, il n'y a pas tellement longtemps, le pacte fiscal. On sait qu'avec ce raté il y avait eu, je dirais, presque une entente tacite, même si elle n'était pas nécessairement voulue, où on disait: Si on veut transférer des responsabilités au monde municipal, il faudrait que les sous suivent.

Disons au départ: Les objectifs de la réforme, qui peut être contre? Je pense que tout le monde ne peut qu'être d'accord sur avoir des services d'incendie plus efficaces. Mais, quand on parle de services d'incendie plus efficaces, vous voyez là qu'on ne parle pas de pompiers permanents. Avec une municipalité de 300 habitants, on n'est pas là.

On parle aussi de réduire les pertes. C'est vrai qu'il y a des coûts importants, puis il faut être absolument capable de travailler là-dessus.

Il faut aussi diminuer les primes d'assurance. Remarquez bien que diminuer les primes d'assurance, ça paraît bien aux yeux du citoyen, mais, pour l'homme politique, on a peu d'intérêt à ça, parce que, quand on diminue le compte de taxes... tout le monde, on le sait, dans le monde municipal, puis ceux qui sont dans la politique provinciale le savent aussi, on veut diminuer les taxes, mais celui-là qui diminue la prime, ce n'est pas celui-là qui l'annonce. Nous autres, lorsqu'on va dire: Écoutez là, il va falloir augmenter la formation chez nos personnes, il va falloir augmenter la qualité de nos équipements – puis je ne dis pas que je suis contre; on est d'accord – sauf qu'avec ça on va dire aux contribuables: Bien, à cause de telle, telle ou telle raison, parce qu'on a augmenté nos services à notre population, on va augmenter les coûts; par contre, vous allez les regagner lorsque vous allez aller renégocier... Ça, ça veut dire cinq minutes? O.K. Vous allez les renégocier lorsque vous allez travailler avec les compagnies d'assurances. Sauf que, encore là, dépendant des barèmes puis dépendant du temps, dépendant des quantités d'eau disponibles en temps et lieu, ce n'est pas sûr que ces gains-là vont être effectivement là.

Donc, on dit: On reconnaît volontiers tous les objectifs de la réforme, sauf qu'il y a un élément qui nous caractérise chez nous puis qui caractérise aussi les régions du Québec, c'est l'avènement des pompiers volontaires. On ne parle pas de pompiers temporaires. On parle de pompiers qui sont volontaires. Des pompiers que c'est des hommes et des femmes – des hommes surtout – de famille qui travaillent puis qui souvent vont partir sur le feu à toute épouvante parce que la sirène est partie ou le «bellboy» a déclenché: c'est le signal, puis il faut partir. Il faut penser que c'est un élément qui est caractéristique au milieu. Les municipalités chez nous se sont développées avec beaucoup de bénévolat, puis les pompiers en sont une source importante chez nous. Donc, il faudrait, dans notre esprit à nous, si on veut faire un changement aux législations, si on veut tenir compte des centres mais aussi tenir compte des régions, ou de l'arrière-pays, si on peut l'appeler comme ça, il va falloir tenir compte d'une présence qui est importante chez nous, qu'on appelle les pompiers volontaires.

(15 heures)

On sait que la loi amène un paquet de paramètres, qu'on parle de schémas de couverture de risques, qu'on parle de cartes, puis, ça, je ne conteste pas ça en aucun temps. Par contre, il faut regarder, on a vécu puis on vit encore, au niveau des MRC, la mise en place des schémas d'aménagement, puis on apprécie quand même beaucoup – même si ça n'a pas été nécessairement facile à avaler à toutes les fois – on apprécie beaucoup la manière que les ministères... grâce à la mise en place des schémas d'aménagement, on est capable de s'ajuster. Actuellement, on dit: On a une réforme entre les mains, il va falloir s'organiser, faire un plan et autres. Nous autres, on apprécierait de le travailler dans le même sens qu'on fait le schéma d'aménagement, c'est-à-dire qu'on prépare des documents préliminaires; de ces documents-là, on a une réaction des ministères pour dire: Écoutez, à tel endroit, il y a telle chose à faire, il faudrait corriger tel élément, pour que ça puisse peut-être être plus d'un point de vue dynamique et d'une manière plus opérationnelle sur le terrain. Parce qu'il faut penser que, dans nos milieux, on n'a pas des permanents. Même, dans les municipalités, on se retrouve avec des secrétaires à temps partiel à trois jours-semaine ou quatre jours-semaine. Ce n'est pas évident.

Il faut parler aussi de la couverture de risques, il faut penser quelle couverture on va donner à notre population. Puis j'écoutais tantôt les pompiers qui disaient: Écoutez, là, ça devrait être au niveau gouvernemental de fixer tout ça. S'il vous plaît, n'allez pas là. Je pense que c'est à chacun des milieux de définir la couverture de risques. Je pense qu'il y a des risques minimaux où toute la population devrait être couverte. Par contre, laissons, s'il vous plaît, la possibilité à des milieux qui veulent se donner des services de luxe, qu'ils puissent les avoir. Mais, à ceux qui, pour des raisons x, y, z, disent: On n'est pas capables d'accéder à ces ressources-là, à services-là, il faut leur donner la possibilité de l'être aussi.

Puis là je me vois... Une minute. Je vais être obligé d'aller directement à ma conclusion. Vous avez le document, vous allez être capable de le lire. À l'intérieur de ça, on a présenté certains éléments de modifications ou d'ajustements qui seraient importants pour nous autres.

En conclusion, je dis: On n'est pas contre les objectifs de la réforme, on est pour. Il faut augmenter les services, il faut augmenter le taux de protection. Toutefois, notre particularité, nos bénévoles doivent être respectés. Nous ne pouvons souscrire à une réforme qui se traduirait par un service semblable à ce qu'on obtient avec la police, ce n'est pas ça qu'on veut. Pour nos petites municipalités, cela impliquerait la disparition pure et simple d'un service. N'oubliez pas, dans nos milieux on se retrouve avec des pompiers volontaires; si on met la braquette de formation trop haute, ils vont sortir par la porte d'en arrière puis, au lieu d'avoir un service à 55 %, ou à 60 %, ou à 70 %, ils n'y en aura plus du tout.

Puis je vous inviterais à regarder encore la carte. Vous allez voir, les codes de couleurs, ce sont les services d'incendie qu'on retrouve sur notre territoire. Puis vous allez voir que souvent il y a des éléments qui nous disent: Les pompiers sauvent juste les solages. Des fois, c'est presque vrai. Mais, lorsqu'il faut partir le camion, puis il faut des fois faire 15 km, 16 km, 20 km pour aller l'éteindre, le feu, ça prend du temps. Puis on ne pourra pas avoir une caserne à cinq minutes à chaque fois, pas chez nous. C'est trop court, ça n'a pas de bon sens, votre affaire.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le préfet pour votre présentation. Mais, en même temps, vous avez défendu aussi un peu les intérêts de la MRC de Portneuf. Même si c'est entre Québec puis Trois-Rivières, c'est 5 000 km², 25 municipalités, un territoire non organisé. Donc, M. le ministre, même si on n'est pas dans l'Abitibi-Témiscamingue ou dans Abitibi-Ouest, c'est pertinent.

M. Rancourt (Daniel): Ça se ressemble, oui.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le ministre.

M. Ménard: Alors, M. le Président, j'en suis d'autant plus déçu que la MRC de Portneuf ne soit pas venue, mais je suis très heureux que vous soyez venus, que vous ayez pris la peine de venir. J'ai lu avec beaucoup d'attention la résolution que vous nous avez envoyée. Je n'avais malheureusement pas votre mémoire, puisqu'on le reçoit aujourd'hui, je vais le lire avec autant d'attention. Mais j'ai l'impression qu'il se dégage un malentendu dans votre résolution, qu'on aura peut-être l'occasion de clarifier ici.

Justement, ce que nous proposons, c'est un processus à suivre, parce que, à la fin de ce processus, on pense que justement les autorités locales, régionales vont pouvoir mieux s'organiser. C'est l'antithèse du mur-à-mur. Si on a prévu ce processus, c'est justement parce que le Québec est diversifié, et j'en suis parfaitement conscient de ça. Je connais un peu l'Abitibi parce que j'ai été enquêter là, l'accident de Belmoral, alors j'ai été là pendant longtemps, puis j'ai enquêté les mines après. Mais j'ai été aussi à Lourdes-de-Blanc-Sablon pour défendre des policiers, et puis j'ai été en Gaspésie aussi, et je sais comment le Québec est diversifié.

M. le préfet, malgré tout ce que vous avez fait à date, vous ne croyez pas qu'il y aurait un avantage à ce que vous vous réunissiez à l'intérieur de la MRC, avec un expert – dans votre cas, c'est évident qu'on va vous financer, je pense que je peux prendre cet engagement-là tout de suite dans votre cas, puis dans des cas vraiment semblables – pour établir, pour regarder ça ensemble, les risques que vous avez d'incendie, les ressources que vous avez, puis, avec ces ressources, puis peut-être l'argent que vous décideriez de mettre, c'est à vous à décider, s'il n'y a pas moyen de faire mieux? Est-ce que ce processus qu'on vous offre... puis après, nous, on va le sanctionner. C'est évident que, quand on va le sanctionner, on va le sanctionner en fonction des régions, hein. On ne peut pas vous demander, chez vous, un corps de police permanent, j'en suis parfaitement conscient. Mais vous pourriez peut-être décider entre vous, par exemple, que l'emploi d'un préventionniste qui ferait le tour de la MRC, ou d'un professionnel qui ferait de la... puis qui pourrait prendre la direction lors d'un incendie important serait peut-être une dépense que vous pourriez vous payer au groupe et qui serait avantageuse. Ce qu'on vous demande, c'est de le regarder.

On est convaincu que c'est le sens des responsabilités des élus locaux qui, au cours de ce processus, va déterminer ce qu'on appelle le degré de sécurité incendie optimal: optimal par rapport aux besoins, par rapport aux ressources, par rapport à la capacité, mais aussi par rapport à ce que votre population est capable d'accepter et dont vous êtes les meilleurs juges. La seule chose qui est mur à mur, c'est l'obligation de se rencontrer, mais le résultat, lui, il doit être aussi diversifié que le Québec, et c'est comme ça qu'on pense que la sécurité incendie va être la mieux assurée dans l'ensemble du Québec. Puis il se pourrait que, pour certaines municipalités, vous estimiez que... ou, en dehors de certaines municipalités, bien, qu'il n'y aura même pas moyen d'aller les protéger contre la sécurité incendie, sauf qu'ils doivent le savoir, puis là, bien, on doit être plus strict sur les mesures de prévention.

M. Bégin (Jaclin): Mais, à ce moment-là, on va donner moins de service qu'on en donne actuellement, parce que, nous autres, c'est des pompiers volontaires. Donc, aussitôt qu'on parle... Il y a un projet de règlement pour la formation – en tout cas, un projet si on peut dire, parce que c'est déjà lui qui est en vigueur – de 375 heures par pompier. Dans une municipalité de 500 ou de 1 000 personnes, quand on recueille 20 pompiers puis qu'après ça on va leur demander 375 heures... O.K., il y a des acquis, mais, pour les nouveaux? Comment on va faire pour en recruter d'autres? On a beau avoir un permanent pour une MRC, mais ça va prendre des pompiers aussi, puis, si on les centralise à un endroit, on va avoir des temps d'intervention de 40 minutes.

M. Ménard: Quand vous ferez vos schémas de couverture, c'est ça que vous exposerez, et on va les approuver s'ils sont raisonnables, il y a quelqu'un qui va en discuter avec vous. C'est très pertinent ce que vous dites, mais ... ça serait de concentrer l'expertise à un endroit qui serait bien protégé, mais de ne pas en avoir ailleurs. Ce n'est pas bon, ça, pour la population. Bon, bien, c'est ça que vous direz, et puis vous le direz dans votre schéma de couverture de risques, puis le ferez avec quelqu'un. Je suis certain qu'un expert va comprendre ça, ce que vous nous dites...

M. Bégin (Jaclin): Mais, une fois qu'on va l'avoir dit...

M. Ménard: ...et puis il va vous aider à le faire. Mais peut-être que vous allez en arriver à la conclusion qu'il serait bon d'en avoir un qui est formé puis qui fait de la prévention partout dans la municipalité, puis qui serait là dans les coups durs, puis qui serait situé au centre et qui pourrait atteindre... dans les incendies importants, qui pourrait être là pour diriger les pompiers volontaires. Mais, dans votre cas, ici, je pense que c'est une illustration. Vous savez, notre méthode n'impose pas de résultats. Vous voyez les pressions qu'on reçoit ailleurs, hein. Mais faites-vous-en pas, on va y résister. C'est pour ça que c'est important que vous soyez ici.

M. Bégin (Jaclin): ...pompiers volontaires, avec le bloc A, B et D-1, puis je trouvais que ma municipalité n'investissait pas assez, donc je me suis présenté maire. Ça fait que là, après, j'ai pu ajuster les budgets.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ménard: À part de ça, je peux vous dire un petit secret. Mon sous-ministre adjoint – adjoint ou associé, le sais-tu? – ...

Une voix: Associé.

M. Ménard: ...associé, mon sous-ministre associé aux Affaires policières était lui-même pompier volontaire en Abitibi.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Dubuc.

M. Côté (Dubuc): Merci, M. le Président. Alors, M. Rancourt, messieurs, bonjour. Une simple question. Vous dites dans votre mémoire que vous voulez que le projet soit repoussé si les impacts financiers ne sont pas compensés par le gouvernement. Et je vous cite: «Nous osons le répéter, pas de transfert de responsabilité sans une compensation adéquate.» Est-ce que je dois comprendre de cette affirmation que vous voulez que tout le régime fiscal municipal soit réglé en même temps que ce projet de loi? Ou voulez-vous que ça soit inclus, ça, à travers la révision du régime fiscal municipal?

M. Rancourt (Daniel): J'aurais un commentaire là-dessus, puis je ne réponds pas à votre question, je vais répondre au ministre. C'est parce que tantôt il m'a amené puis il m'a dit: M. Rancourt, inquiétez-vous pas, ça ne sera pas du mur-à-mur. Ça fait 20 ans que je suis dans le monde municipal, puis ça fait de nombreuses années que je me fais dire: Écoutez là, on va tenir compte des particularités, il va y avoir des choses pour vous autres. Mais, lorsque ça sort, c'est dommage, mais il y en a un qui a acheté des gallons de peinture verte puis il a peinturé vert en grand, puis, à un moment donné, d'autres ont fait d'autres réglementations, puis les réglementations, elles sont sorties – c'est peut-être à cause de notre organisation – mais elles sont souvent mur à mur. Ça fait que je voulais juste amener ça à M. le ministre.

(15 h 10)

Écoutez, c'est sûr que le monde municipal, dans nos petites municipalités, actuellement on pense puis on a la certitude que le fardeau fiscal de nos citoyens est à son maximum. Avec l'étendue puis avec le nombre de population qu'on a, on n'est pas capable d'avoir le minimum vital pour vivre. Puis, à partir du moment où on n'a pas ce minimum vital là puis qu'il arrive d'autres responsabilités, on dit: On va prendre l'argent où? Moi, chez nous, je suis dans une petite municipalité de 1 800 habitants puis j'ai de ma parenté qui reste dans des centres, ici, puis je paie plus cher de taxes que lui. Ça fait que je dis: À quelque part, c'est sûr que, si je veux avoir un aréna chez nous, il va falloir que je le paie. Mais on est 1 800 pour se le payer, on n'est pas 30 000. Ça fait que c'est bien sûr que, chez nous...

Pour répondre à votre question plus spécifiquement, si vous dites: Ça veux-tu dire que vous allez bloquer tout? remarquez bien que l'Abitibi-Témiscamingue, c'est 3 % de la population de la province; si ça fait un blocus, ça ne fera pas un blocus continental, hein, on s'entend là-dessus. Donc, c'est sûr que, nous autres, on souhaite ardemment que, s'il y a des mouvements qui vont se faire, on souhaite que l'argent puisse suivre, parce que, actuellement, dans nos municipalités, ils sont là. Je ne sais pas si la réponse vous satisfait, mais c'est celle que...

M. Côté (Dubuc): Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Je vais laisser la parole au député de Verdun, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie...

M. Dupuis: M. le député de Dubuc m'a volé ma question.

M. Gautrin: Je vous remercie, M. Rancourt, pour la clarté de votre mémoire et je dois vous dire, on apprécie toujours lorsqu'il y a quelques cartes qui nous permettent de réaliser la réalité qui est la vôtre.

La première question que je voudrais bien comprendre. Vous nous dites: À l'heure actuelle, il peut y avoir des coûts liés à l'application du projet de loi et nous ne sommes pas capables actuellement d'assumer ces coûts-là. On a reçu ce matin le Bureau d'assurance, des assureurs qui nous ont bien mis en garde: Ne vous faites pas trop d'illusions sur les baises de prime; les baisses de prime, éventuellement, si elles arrivent, n'arriveront que dans cinq ans; les coûts, vous devriez les assumer tout de suite. Est-ce que je comprends bien le message que vous nous dites actuellement: Vous, dans une municipalité où les coûts pourraient être relativement importants, compte tenu de l'étendue du territoire et des distances qu'il y a entre chacune de vos municipalités, le projet de loi, s'il devait être appliqué intégralement, vous n'êtes pas financièrement en mesure de pouvoir l'assumer?

M. Rancourt (Daniel): Tout dépendant aussi, parce que là on a un projet. Quelles vont être les normes? Le service qui devrait être couvert? Ça, là, ce n'est pas connu encore. Donc, je me dis: Il va falloir... M. le ministre, il me dit: Non, non, c'est vous autres qui allez le définir, là.

M. Gautrin: Oui, ça, ça reste, et il faut bien être conscient. Vous allez avoir le schéma de couverture de risques que vous allez faire localement, bien sûr. Néanmoins, si vous me permettez de le dire, vous avez quand même le pouvoir, vous, comme ministre, de l'approuver ou de le rejeter. Donc, en quelque sorte, c'est bien beau de leur dire: Vous allez le faire. Mais, moi, je vous dirais, si je ne suis pas content: Je vais le rejeter, puis j'irai en faire un autre.

M. Rancourt (Daniel): Il y a ça aussi. Maintenant, je voulais juste rajouter ce que M. Bégin donnait tantôt comme information. Lorsque, au niveau d'une municipalité par exemple de 300 habitants, on se donne un service d'incendie avec des pompiers volontaires, donc, c'est sûr que les personnes qui y travaillent n'ont pas nécessairement la formation du 375 heures, comme on souhaite y arriver. Il y en a qui ont une longue expérience puis c'est correct, puis il y en a des nouveaux qui arrivent. Parce que le secteur socioéconomique de l'Abitibi-Ouest, on est en perte de population, on a un exode de nos jeunes qui est important. Ça fait que là on se retrouve avec une moyenne d'âge de nos pompiers, soit qu'elle augmente ou qu'elle rajeunit tout d'un coup. Puis, quand elle rajeunit, ils se retrouvent qu'ils n'ont pas de formation. Ça fait qu'il faut la faire suivre, cette formation-là.

M. Gautrin: Ça, ça revient... première question, je ne veux pas vous interrompre, mais, à l'heure actuelle, vos pompiers volontaires, est-ce qu'ils ont suivi les neuf modules de formation, tous ou...

M. Bégin (Jaclin): Non, non, non, non. La majorité ont le bloc A, B et D-1, qui était là sur l'ancienne formation, qui donne des équivalences d'environ 300 heures, si je ne me trompe pas. Puis la majorité, on suit aussi la CSST. Puis, ça, je parle de la majorité, c'est dans les plus grosses municipalités, de 1 000 et plus. Ceux en bas de 1 000, les plus chanceux ont le bloc A, donc, en équivalence, ça leur donne très peu d'heures. Donc, eux autres, ils nous disent: Comment on va faire pour convaincre nos bénévoles d'aller suivre 375 heures de formation, quand il est venu le temps avec le bloc A, qui était obligatoire, de 75 heures, quand ça a tout pris pour nous le faire suivre en cinq ans? Là, on nous arrive avec un projet – moi, en tout cas, je n'appelle plus ça un projet – de 375 heures qui est bien établi, qui est bien modulé. Ils devront suivre ça dans les cinq prochaines années. Ça va éliminer des brigades, puis ceux qui vont rester... la notion du «bénévolat» change, là. La personne à qui tu demandes 375 heures, bien elle va dire: Je suis prête à te le donner, mais, en retour, tu vas m'en donner un peu. Donc, on va se ramasser, comme vous le dites si bien dans la loi, avec des pompiers à temps partiel et non plus avec des pompiers volontaires. Donc, nous autres, c'est à ce niveau-là qu'on accroche.

Puis le règlement sur la formation, même s'il n'est pas passé encore, si on s'informe avec la CSST, un pompier doit être formé pour rentrer sur un feu, et il faut suivre les cours qui se donnent présentement, et les seuls cours qui se donnent présentement, c'est le 375 heures. Donc, ça nous met des contraintes. Je ne dis pas que ça ne prend pas... il pourrait y avoir un allégement, je ne sais pas de quelle façon, mais pour les pompiers volontaires. On est des bénévoles, du monde qui a à coeur sa communauté, puis on le fait pour ça. Mais, si on met ça, on va l'ôter ça, puis on va se ramasser plus de pompiers.

M. Gautrin: Je comprends. J'ai deux autres questions, si vous me permettez, et je fais référence à la résolution que vous avez passée le 24 janvier 2000, le quatrième point. Il y a un point, j'avoue que je ne l'ai pas compris. Je vais vous le lire, peut-être qu'il y a un mot qui manque, ou quoi que ce soit. Vous dites: «De reconnaître les particularités inhérentes à l'une des composantes du Québec, soit le milieu rural, si mieux n'aime soustraire...» Vous avez ce texte-là, j'avoue que je ne le comprends pas, dans la résolution. J'imagine qu'il doit manquer quelque chose, une ligne peut-être. Voyez-vous?

M. Rancourt (Daniel): Vous parlez de quel attendu, s'il vous plaît?

M. Gautrin: Ce n'est pas un attendu, c'est: «En conséquence – dernière page – de s'assurer [...] d'ajuster [...] de maintenir [...] de reconnaître les particularités inhérentes à l'une des composantes du Québec, soit le milieu rural, si mieux n'aime soustraire les municipalités de 10 000 habitants ou moins de l'application de la loi, donc des règlements en découlant.» Qu'est-ce que vous voulez couvrir essentiellement par ça?

M. Bégin (Jaclin): C'est qu'avec les règlements qui découlent de cette loi-là, si vous obligez la formation, puis il va sûrement venir au niveau des équipements aussi, si vous l'obligez... mais, vu qu'on est dans un contexte, nous autres, qui est plus particulier, bien soustrayez-nous à ça, donnez-nous un autre cadre qu'on va pouvoir travailler.

M. Gautrin: Le cadre est un cadre au niveau de la MRC, si je ne m'abuse. Il n'est pas au niveau municipal, il est au niveau de la MRC, à l'intérieur du projet de loi. Pardon?

M. Bégin (Jaclin): Du milieu, oui.

M. Ménard: Je pense que ce que vous vouliez dire... Moi aussi, je l'ai vu ce matin. C'est parce qu'il y a des erreurs de frappe.

M. Gautrin: De frappe, hein.

M. Ménard: C'est des erreurs de frappe, ça.

M. Rancourt (Daniel): Probablement, oui.

M. Ménard: C'est: «De reconnaître les particularités inhérentes à l'une des composantes du Québec, soit le milieu rural, ou mieux, soustraire les municipalités de 10 000 habitants ou moins de l'application de la loi et des règlements.»

M. Rancourt (Daniel): Probablement, oui.

M. Gautrin: Oui. Je voulais quand même clarifier ça.

M. Ménard: C'est ça que j'ai compris.

M. Gautrin: Dernière question. Vous parlez de tout ce qui est la question d'exonération de responsabilité. L'article 46 du projet de loi accorde une certaine forme d'exonération balisée. Est-ce que ça vous suffit ou vous voulez une nouvelle rédaction de l'article 46 actuellement dans le projet de loi?

M. Rancourt (Daniel): Là-dessus, si vous lisez le mémoire que je devais vous lire, vous allez voir qu'on demande que l'immunité soit aussi accordée au niveau régional, c'est-à-dire au niveau de la MRC comme telle.

(15 h 20)

M. Gautrin: O.K. Alors, vous n'êtes pas le seul. En général, l'ensemble des municipalités régionales, des MRC, sont venues témoigner dans ce sens-là.

M. Rancourt (Daniel): Oui.

M. Gautrin: C'est-à-dire, il peut y avoir une ambiguïté. On a fait une immunité pour les municipalités, mais il faudrait non pas que ça soit seulement implicite, mais vous voulez que ça soit explicitement dans la loi...

M. Rancourt (Daniel): Exact.

M. Gautrin: ...que cette immunité couvre aussi les communautés urbaines ou les municipalités régionales de comté.

M. Rancourt (Daniel): Voilà. C'est ça.

M. Gautrin: C'est le sens de votre intervention.

M. Rancourt (Daniel): Oui.

M. Gautrin: Écoutez, je vous remercie de votre point de vue. Je dirai simplement en terminant que, même si vous êtes une petite MRC, avec peu de population, il y a au moins deux députés qui viennent de La Sarre qui siègent ici, à l'Assemblée nationale: le député d'Abitibi-Ouest et le député d'Acadie, Yvan Bordeleau, qui, lui, est aussi originaire de La Sarre. Alors, votre point de vue, quand même, se fait entendre ici, au Parlement.

M. Rancourt (Daniel): J'oserais dire qu'on vous envoie les meilleurs.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Très bien. Alors, j'aimerais, au nom des membres de la commission, remercier les représentants de la Municipalité régionale de comté d'Abitibi-Ouest. Nous allons passer dans quelques instants à l'étape des remarques finales.


Mémoires déposés

Alors, il nous reste une étape à franchir en ce qui regarde les travaux de la commission dans ce mandat, celle des remarques et des conclusions. Cependant, avant de procéder à cette étape, j'aimerais, comme il est l'habitude de le faire, déposer les mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus par la commission. Il s'agit de l'Association des pompiers instructeurs du Québec, l'Association générale des étudiants en sécurité incendie, Barreau du Québec, Normand Beauchamp, Groupement technique des assureurs inc., Robert Henri, Municipalité régionale de comté de Memphrémagog, Université de Sherbrooke et ville de Westmount.


Remarques finales

Pour la partie qui concerne les remarques finales, selon l'entente entre les leaders, environ 15 minutes seraient réservées pour chacun des groupes parlementaires. Alors, à ce moment-ci, M. le député de Saint-Laurent, pour vos remarques finales.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Je vous rassure tout de suite, M. le Président, le temps qui m'est alloué est beaucoup trop long. La synthèse qu'on peut faire des auditions qui ont été tenues devant la commission est beaucoup plus simple et moins longue à faire que de prendre un temps de 15 minutes.

D'abord, qu'il me soit permis de dire que tous les groupes se sont dit être en accord avec les objectifs de la réforme que le ministre propose, et j'ajouterai, pour les fins de la discussion, comme je l'ai dit à l'ouverture des auditions devant la commission, l'opposition officielle aussi. Je rappelle ces objectifs: réduire les pertes humaines et matérielles, accroître l'efficacité des organisations municipales et diminuer les coûts des primes d'assurance. On ne peut pas être contre ces objectifs-là.

J'ajoute qu'on ne peut pas non plus être contre l'amélioration, à toutes fins utiles, de la sécurité incendie au Québec. Je dis cependant, et nous ne sommes pas à l'étape où l'opposition officielle doit faire valoir son opinion sur un projet de loi qui sera déposé suite aux auditions qui ont été tenues ici, mais je pense qu'il est important de rappeler que ce qui se dégage des auditions qui ont été tenues, c'est la chose suivante: tout le monde est d'accord avec les objectifs, tout le monde est d'accord avec le fait qu'on doit améliorer la sécurité incendie au Québec.

Je pense qu'on peut diviser en trois groupes principaux les gens qui sont venus témoigner devant la commission. Il y a eu les pompiers bien sûr, les gens qui sont les premiers sur la ligne de feu – mais sans vouloir employer un mauvais jeu de mots – il y a eu les gens qui font de la formation et il y a eu les gens qui ont la responsabilité éventuelle de fabriquer les schémas de couverture de risques et d'appliquer les plans des mesures.

Les gens qui sont venus devant la commission. Bien sûr, les pompiers se sont dit en accord total avec la réforme. D'ailleurs, après midi, on en a eu une illustration par le témoignage de M. Fauvel, qui est bien connu dans le milieu. Les pompiers sont d'accord avec la réforme et, s'ils avaient peut-être quelque chose à ajouter, c'est que peut-être elle ne va pas assez loin. Les gens qui font de la formation bien sûr sont également d'accord avec la réforme.

Mais les élus sont venus déposer devant la commission, auprès du ministre, des représentations qui sont extrêmement importantes et qui doivent amener le ministre à réfléchir à sa réforme. Au fond, essentiellement, ce que le monde municipal, les élus sont venus dire à la commission, c'est la chose suivante: Écoutez, il y a actuellement, au Québec, des discussions importantes sur des ententes relatives à la réforme fiscale, des ententes de fiscalité, de transfert de responsabilités et de coûts associés à ces transferts de responsabilités là, et ces discussions avec ce gouvernement-là ont avorté en décembre 1999, on n'est pas contents, on voudrait être capables d'en rediscuter, et n'essayez pas de nous imposer d'autres réformes à ce moment-ci; ça, ça passe par les discussions sur la réforme fiscale. Ils sont également venus dire au ministre: Il y a des discussions aussi sur la réorganisation municipale, les fusions possibles de municipalités et regroupements, et nous sommes au coeur de ces discussions-là; s'il vous plaît, ne nous imposez pas de réformes qui, par la bande, vont venir jouer dans ce que nous avons à discuter avec le gouvernement et ce que le gouvernement doit annoncer d'ailleurs, la ministre des Affaires municipales au premier chef.

L'atmosphère actuelle qui règne entre le monde municipal et le gouvernement, pour dire le moins, est très certainement une atmosphère de suspicion et, évidemment, toute réforme, quelle qu'elle soit, qui affecte la capacité financière des municipalités passe par le prisme de cette suspicion. Mais, dans le fond, est-ce qu'il ne serait pas plus sage de la part du gouvernement de dire: Oui, on a des discussions importantes à faire au niveau de la réforme fiscale, on a des discussions importantes à faire au niveau de la réorganisation municipale et il serait sage de tenir ces discussions-là avant d'aller de l'avant avec des réformes qui, inévitablement, comme celle de la sécurité incendie, vont entraîner des coûts?

Les élus municipaux qui sont venus, moi, je ne les ai pas entendus prononcer des paroles qui sont irresponsables. Je ne crois pas que personne puisse prétendre, sauf un témoignage qu'on a entendu cet après-midi, que les élus municipaux au Québec sont irresponsables et ne prennent pas le meilleur intérêt de leurs concitoyens. Il faut bien comprendre que les élus municipaux, comme les élus provinciaux, comme les élus de toute instance, doivent prendre en compte et tenir en compte un certain nombre d'intérêts, tous des intérêts, notre société est ainsi faite, dont les implications financières sont payées par la même personne, c'est-à-dire le contribuable. Et ce que les élus sont venus dire, c'est: À ce moment-ci, les charges qui sont imposées au contribuable sont suffisantes. Je pense qu'on l'a dit à plusieurs reprises: le Québécois est la personne la plus taxée en Amérique du Nord, et les élus locaux sont venus aussi dire ce message-là au gouvernement.

(15 h 30)

Moi, je souhaite que et je sais que le ministre a entendu les remarques qui lui ont été faites par des gens qui sont redevables à la population, comme nous sommes tous, les élus, redevables aux populations, et l'opinion des élus municipaux vaut la nôtre sans aucun doute. Je pense que tout le monde est venu dire au ministre que sa réforme est méritoire, qu'elle est pavée de bonnes intentions, mais qu'à vouloir aller trop vite et en faisant fi d'un certain nombre de considérations que les élus sont venus lui porter il risque de se brûler les doigts, sans pour une deuxième fois vouloir faire un mauvais jeu de mots.

Je m'en voudrais de ne pas parler de la clause d'exonération. À première vue, il y a des gens qui ont employé l'expression: Est-ce que c'est le «bonbon» que vous voulez mettre au bout de la volonté d'adhérer à la réforme? Bon. C'était peut-être une façon particulière de l'exprimer, mais il faut aussi, je pense, se poser des questions sur le principe, pas juridique mais le principe moral de la clause d'exonération. Des gens sont venus dire – et je pense que ça vaut la peine de se poser la question – que la clause d'exonération pouvait avoir comme effet de déresponsabiliser les organisations municipales. Moi, je n'ai pas de jugement à porter là-dessus encore, je n'ai pas une opinion définitive, mais il est certain que, quand on impose à un organisme l'obligation de rendre des services et de bien les rendre, l'imputabilité est assez importante et, dans ce cas-là, bien, l'imputabilité, c'est, bien sûr, le danger que, si le travail est mal fait, il puisse y avoir des poursuites. Enfin, je pense que ça vaut la peine d'y réfléchir et j'invite le ministre à y réfléchir.

Alors, dans les circonstances, essentiellement, c'est ce que les groupes sont venus dire au ministre. On va attendre le projet de loi, mais je souhaite que les élus puissent avoir été entendus par le gouvernement et que des discussions beaucoup plus larges que la réforme de la sécurité incendie puissent avoir lieu le plus rapidement possible avec les élus et avec le monde municipal. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le député de Saint-Laurent et porte-parole de l'opposition officielle. Le député de Saint-Jean m'avait exprimé le désir d'intervenir brièvement avant le ministre. Allez-y.


M. Roger Paquin

M. Paquin: Alors, au nom de la formation politique qui forme le gouvernement, je vois que nous avons assisté vraiment aux mêmes audiences des deux côtés de cette table et, sur l'essentiel, que nos remarques coïncident.

D'abord, première chose, les intervenants qui sont venus ici nous ont dit toute l'importance qu'ils accordent à la prévention. C'est ce que nous partageons aussi, mais, au constat commun que nous faisons que, malgré que le nombre de feux et le nombre de victimes sont comparables à ce qui se fait ailleurs et que, par contre, les feux font plus de dommages, il est clair que la question de l'efficacité doit être au centre de nos préoccupations et qu'il nous faut la planifier en tenant compte des lieux, des besoins, des contraintes locales et des particularités des milieux.

Deuxièmement, les intervenants ont beaucoup insisté aussi sur la nécessité de la qualité de la formation et de sa cohérence, et je pense que l'idée d'une école fait son chemin. Je porte à l'attention de cette commission que, dans les lieux où on discute de l'ensemble des questions concernant les incendies, il y a parfois des réunions de «Fire Marshals». On n'a pas l'équivalent ici. Il y a lieu de réfléchir à cet aspect-là de façon à ce qu'on puisse s'arrimer et bénéficier aussi de ce qui se véhicule dans ces lieux-là.

Troisièmement, ce qui est important, c'est que l'action locale soit bien coordonnée, et il semble que le lieu des MRC en région ou des communautés urbaines en milieu urbain soit opportun. En tout cas, il est important que les inventaires de risques soient complémentaires, complets et cohérents et que la planification de l'intervention dans un schéma de couverture de risques puisse être faite par les intervenants qui, le mieux, connaissent les lieux, les besoins, les contraintes et les particularités du milieu.

En fait, la seule chose qui soit mur à mur à cet égard dans le projet de loi, c'est le droit de chaque milieu d'agir différemment. Je pense que ce qui est important, c'est que les agents du milieu puissent aller de façon responsable rechercher l'optimal en termes de coûts-bénéfices au niveau des couvertures de risques qui sont souhaitables, tout bien considéré, dans leur milieu.

Quatrièmement, au niveau des normes et des standards, je pense qu'il y a une nécessité qu'on se penche là-dessus et qu'on finisse par trouver la façon de faire en sorte que les tuyaux puissent s'abouter, et ainsi de suite. C'est vrai aussi pour les équipements, les procédés et les procédures. Donc, dans l'accompagnement qui est prévu par le ministère, dans les démarches des MRC par exemple, il faudrait par ailleurs qu'on prévoie réfléchir sur cette question-là de même que sur la question d'exonération. Je pense que ça mérite que l'on mûrisse cette réflexion-là. Au niveau des équipements, il est vrai qu'actuellement on se situe dans un contexte de réforme municipale, de réforme fiscale, et tout ça, et qu'il est possible qu'il y ait des enjeux qui commandent, au nom de la responsabilité commune des uns et des autres au niveau des élus des différents niveaux de gouvernement, de réfléchir sur les coûts. Alors, peut-être qu'il y a lieu de réfléchir à une question concernant le partage de coûts de certains équipements, par exemple.

Enfin, au demeurant, je pense que ce que le profil de cette législation augure, c'est une meilleure sécurité pour tout le monde à un coût optimal d'investissement en diminuant les coûts des dommages, y compris possiblement avec le bénéfice supplémentaire au niveau des assurances.

Enfin, M. le Président, j'aimerais, au nom de ma formation politique, dire au ministre que nous constatons, au dire des audiences que nous avons tenues, qu'il s'agit là d'une réforme attendue, responsable, et qu'il est nécessaire d'aller de l'avant maintenant avec cette démarche-là. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre de la Sécurité publique et député de Laval-des-Rapides.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Alors, M. le Président, chers collègues députés, messieurs et mesdames les journalistes – s'il y en a qui nous écoutent par le médium de la télé – mesdames et messieurs, M. le maire, M. le préfet, je souhaite remercier les différents intervenants qui se sont exprimés devant cette commission. Je tiens à les féliciter pour la qualité de leur présentation et à les assurer que leurs commentaires seront pris en considération. Il va sans dire que nous retiendrons les propositions qui, de notre point de vue, apparaissent susceptibles de bonifier l'avant-projet de loi.

Que doit-on dégager de ces trois jours et demi de travaux en commission parlementaire sur l'avant-projet de loi sur la sécurité incendie? Il ressort tout d'abord, comme je l'anticipais au début de nos échanges, une très grande convergence sur les orientations et sur les objectifs mis de l'avant par le gouvernement. Il ne fait aucun doute que les objectifs proposés conviennent aux problèmes et aux enjeux qui confrontent le Québec en matière de sécurité incendie: pertes matérielles importantes, organisations fragmentées et vulnérables, formation déficiente, primes d'assurance élevées, multiplication des poursuites contre les municipalités, etc. Convergence également sur la nécessité d'agir et sur l'intérêt de le faire le plus rapidement possible.

Même lorsqu'ils sont venus manifester certaines réserves sur l'un ou l'autre des moyens proposés afin d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés, les participants aux travaux de la présente commission ont admis pour la plupart qu'il était opportun de s'occuper du dossier de la sécurité incendie, étant entendu, de toute façon, que le sens général des actions à poser est tout à fait conforme, par exemple, aux recommandations de la commission Nicolet en matière de sécurité civile. J'en conclus qu'il serait irresponsable pour le gouvernement et l'Assemblée nationale de ne pas intervenir alors même que les objectifs font consensus et que les principaux éléments de solution sont immédiatement à notre portée.

Je suis confiant par ailleurs de voir le milieu municipal et le gouvernement du Québec en arriver, au courant de la présente année, à une entente sur les questions de l'organisation municipale et de la fiscalité pendant que nous progresserons dans l'adoption et la mise en oeuvre du nouveau cadre législatif de la sécurité incendie. Quant aux mesures proposées dans l'avant-projet de loi, on peut dire, au terme de nos échanges, qu'elles se situent plus ou moins au centre du spectre des différents témoignages que nous avons entendus, ce qui, somme toute, s'avère assez rassurant sur leur pertinence.

Si, d'une part, je prends bonne note des inquiétudes exprimées par les élus municipaux quant aux impacts financiers de la réforme proposée, je constate, d'autre part, que, lorsque nous prenons le soin de bien leur expliquer les choses, ceux-ci admettent que ce que nous leur proposons est tout à fait respectueux des compétences municipales. Contrairement à ce que certains auraient voulu y voir, il n'y a pas de pelletage de nouvelles responsabilités dans notre avant-projet de loi sur la sécurité incendie, pas plus que de solutions mur à mur. On aura compris que la seule obligation faite aux élus municipaux est celle de s'asseoir ensemble, autour de la table de la MRC ou de la communauté urbaine, afin de déterminer eux-mêmes le niveau de protection qu'ils souhaitent offrir à leurs concitoyens en faisant fi des frontières administratives qui gênent l'efficacité des opérations de secours et en tenant compte des équipements et des ressources dont ils disposent.

(15 h 40)

J'ai personnellement confiance qu'ainsi placés face à leurs responsabilités et devant l'évidence de certaines situations les élus municipaux ne manqueront pas de faire preuve de réalisme, d'ouverture d'esprit et de sens des responsabilités. J'espère qu'ils réalisent que cet avant-projet de loi est un acte de confiance dans leur sens des responsabilités. Incidemment, c'est ce qui s'est produit dans le cadre des deux projets-pilotes réalisés dans les MRC de la Matapédia et de Nicolet-Yamaska. Les représentants de ces deux MRC sont venus nous dire que la réflexion et la planification conduite au palier régional ont permis d'envisager une amélioration significative de l'organisation en sécurité incendie, sans pour autant nécessiter une augmentation substantielle des dépenses qui y sont consacrées.

Cela dit, je retiens néanmoins d'excellentes suggestions qui nous ont été adressées relativement au processus proposé. Plusieurs jugent trop long le délai de trois ans prévu pour effectuer un schéma de couverture de risques. Certains ont soulevé la possibilité d'étendre l'exonération des responsabilités aux instances régionales. D'autres, enfin, ont demandé à être consultés sur la teneur des orientations ministérielles qui encadreront le processus de planification demandé aux autorités régionales et locales. Ce sont là toutes des propositions faites dans un esprit constructif, qui exigent notre considération et qui devront sans doute se traduire par des ajustements au texte initial. Par exemple, je vois personnellement d'un bon oeil la perspective de soumettre les orientations ministérielles en sécurité incendie à la consultation des partenaires. Pour ceux qui ont dit souhaiter une harmonisation avec les autres processus en vigueur dans le milieu municipal, j'ajouterai qu'il s'agit là de la même procédure que celle retenue par le ministère de l'Environnement en vue de l'élaboration par les MRC de plans régionaux de gestion des matières résiduelles.

Si, comme l'ont souligné quelques personnes, la dimension de la prévention des incendies ne ressort pas suffisamment à la lecture du texte législatif, je peux tout de suite les rassurer en indiquant que les orientations ministérielles devraient faire largement état des actions réglementaires ou autres que les municipalités pourront poser en ce sens. Il en va non seulement de l'incidence du phénomène d'incendie, que l'on peut considérablement réduire par des mesures appropriées de prévention, mais également de l'importance des investissements des municipalités elles-mêmes. La prévention représente le moyen le plus sûr pour les municipalités de contrôler les risques et, ce faisant, de limiter les coûts économiques, financiers et sociaux de la sécurité incendie. Je crois aussi que, quand les élus se réuniront autour de cette table, qu'ils feront l'inventaire des risques avec les experts dont ils voudront s'entourer, de la connaissance naîtra une responsabilité éclairée et qu'ils vont en venir eux-mêmes à prévoir des mesures de prévention autant que des mesures d'intervention.

La question des coûts de la réforme proposée a été soulevée à maintes reprises, particulièrement par les représentants municipaux. Je me limiterai ici à répéter que l'avant-projet de loi prévoit, à l'article 144, des dispositions afin d'appuyer financièrement les MRC et les communautés urbaines dans la réalisation des schémas de couverture de risques. Sachant ce qui s'en vient en matière de sécurité incendie et dans d'autres domaines du ressort des municipalités, je suis persuadé que les associations qui les représentent sauront faire valoir leurs revendications lors des échanges sur la fiscalité qu'elles auront au cours des prochains mois avec le gouvernement du Québec.

Je n'exagère pas en affirmant que l'ensemble des personnes et des organismes qui se sont présentés devant cette commission ont salué l'intérêt, voire la nécessité de doter le Québec d'une structure expressément dédiée à la formation des pompiers. Cette structure, que nous avons désignée comme l'École nationale des pompiers du Québec dans l'avant-projet de loi, viendra couronner les efforts investis au cours des dernières années par de nombreux partenaires en sécurité incendie afin de mettre de l'ordre dans une situation tout à fait déplorable qui, incidemment, ne reconnaissait pas les connaissances déjà acquises par les pompiers à temps partiel ou n'offrait pas de débouchés aux finissants de programmes à temps plein.

En plus de permettre, grâce à un processus d'homologation, à tous les établissements intéressés de faire valoir leur compétence dans le domaine de la sécurité incendie, elle assurera, par l'entremise d'ententes avec les commissions scolaires ou les municipalités locales ou régionales, l'organisation d'activités de formation partout en région, à la convenance des pompiers à temps partiel, fussent-ils volontaires.

Selon quelques-uns des intervenants entendus par cette commission, le cas de la région de Montréal, et peut-être même celui de Québec, mériterait un traitement particulier. De fait, on peut bien admettre que la dynamique montréalaise est sans aucun équivalent au Québec, ne serait-ce qu'en raison des enjeux suscités par les conditions de travail différentes de plusieurs brigades de pompiers à temps plein, ce que l'on ne retrouve pas ailleurs.

Mais je ne crois pas que la formule de planification et de concertation politique proposée dans l'avant-projet de loi représente une contrainte ou une espèce de carcan pour quiconque, même pour les élus municipaux de l'île de Montréal. Bien au contraire, nous l'avons voulue suffisamment souple pour qu'elle puisse s'adapter à différentes conditions. Cependant, ce que plusieurs ont négligé de voir dans cette formule, c'est la dimension éminemment politique de l'exercice qui est demandé. Au-delà des considérations techniques sur l'inventaire des risques et l'établissement des niveaux de protection, l'élaboration des schémas a pour but d'encadrer la négociation entre les élus et subséquemment la prise de décision sur des enjeux qui, de plus en plus de gens en conviennent, débordent les frontières des municipalités locales. C'est faire de la politique dans le sens noble du terme.

Ce qui ne veut pas dire que la question des relations de travail ne doit pas être considérée. Les municipalités affirment depuis longtemps que cette question gêne les efforts de rationalisation des ressources et peut constituer dans les faits un frein puissant à la volonté des élus d'améliorer leur organisation en sécurité incendie. Des réflexions à ce sujet sont déjà en cours au ministère du Travail et au ministère des Affaires municipales et de la Métropole. Il nous intéressa sûrement d'en savoir plus long à ce sujet de manière à pouvoir en tenir compte dans la résolution des problèmes qui nous concernent.

Au sujet d'un code unique de prévention des incendies, je ne peux m'empêcher de remarquer qu'en plus d'être nombreux ceux qui réclament un tel outil se recrutent autant chez les élus municipaux que chez les préventionnistes, autant chez les directeurs de service de sécurité incendie qu'au sein des syndicats de pompiers. C'est dire tous les espoirs que l'on fonde dans un code de prévention afin de solutionner une partie des problèmes qui nous interpellent. Et, de fait, il est vrai que dans tous les domaines les organisations les plus progressistes ont compris qu'il fallait surtout agir en prévention lorsque l'on souhaite véritablement s'attaquer à un phénomène comme celui de l'incendie.

Il y a cependant un pas énorme entre le fait d'affirmer une telle intention et celui de doter le Québec d'un code unique de prévention. Les représentants de la Régie du bâtiment du Québec, qui ont suivi studieusement les auditions de cette commission, en savent quelque chose. Cela concerne également le ministère des Affaires municipales, la Commission de la santé et de la sécurité du travail ainsi que la Direction des produits pétroliers du ministère des Ressources naturelles. C'est pourquoi il me semble utopique de penser qu'une loi en sécurité incendie puisse contenir un tel code ou en tenir lieu. On m'a convaincu, en revanche, de la nécessité de poser les premiers jalons en ce sens. Le Conseil des ministres ayant déjà donné son accord pour la formation d'un comité de travail sur le sujet, je compte donc m'assurer que celui-ci entreprendra ses activités dans les meilleurs délais de manière à ce que ses conclusions et recommandations soient connues au plus tard dans un an.

Un dernier élément n'a pas fait l'objet de beaucoup de discussions au cours de ces auditions, il s'agit de la modernisation de l'institution du commissaire-enquêteur par l'intégration, dans la nouvelle Loi sur la sécurité incendie, des dispositions actuelles de la Loi concernant les enquêtes sur les incendies. On me permettra d'en déduire que les propositions à cet égard sont appropriées et que la prévention doit dorénavant être la principale finalité de la recherche, des causes et des circonstances des incendies.

En terminant, je voudrais remercier mes collègues, vous-même, M. le Président, ainsi que les députés de l'opposition pour l'excellent travail qui a été fait au cours des derniers jours. Je continue à penser que ce genre de travaux devrait remonter, dans la population, l'opinion que les gens ont de nous; malheureusement, dans d'autres endroits, on ne trouve pas toujours le moyen. Mais, ici, dans cette atmosphère, je pense que les gens peuvent être convaincus que nous cherchons à examiner tous les aspects d'une situation pour qu'enfin se dégage, à travers les débats contradictoires, la meilleure solution. Les résultats de ce travail me permettront sans aucun doute de soumettre un mémoire au Conseil des ministres au cours des prochaines semaines de manière à ce que l'Assemblée nationale soit saisie d'un projet de loi pour adoption dès la session du printemps.

Ce projet, je le rappelle, est le premier de ce que l'on pourrait qualifier de triptyque en sécurité publique, puisque son étude à l'Assemblée nationale précédera ou suivra de peu celle du projet de la Loi sur la police que j'ai déjà déposé, et sera vraisemblablement suivie d'une autre pièce législative sur la sécurité civile. Je vous remercie.

(15 h 50)

Le Président (M. Bertrand, Portneuf): À mon tour, j'aimerais remercier l'ensemble des membres de la commission pour leur excellent travail, remercier aussi les personnes qui sont venues, par leur mémoire, leur présentation, contribuer à nos travaux de même que ceux et celles qui nous assistent quotidiennement dans la progression de notre mandat.

Et, sur ce, la commission des institutions ayant complété son mandat, j'ajourne la séance sine die. Merci.

(Fin de la séance à 15 h 51)


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