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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 2 juin 1998 - Vol. 35 N° 130

Étude détaillée du projet de loi n° 422 - Loi modifiant la Loi sur les cours municipales et la Loi sur les tribunaux judiciaires


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Table des matières

Journal des débats


(Vingt heures quatorze minutes)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Mesdames, messieurs, nous allons débuter la séance. Je rappelle le mandat de la commission, de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 422, Loi modifiant la Loi sur les cours municipales et la Loi sur les tribunaux judiciaires.

M. le secrétaire, pourriez-vous nous annoncer les remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Leduc (Mille-Îles) est remplacée par M. Baril (Berthier); Mme Signori (Blainville) par Mme Caron (Terrebonne).


Remarques préliminaires

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, merci. J'inviterais maintenant M. le ministre à nous faire part de ses remarques préliminaires.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 422, dont le principe a été adopté le 20 mai dernier, modifie la Loi sur les cours municipales et la Loi sur les tribunaux judiciaires. Il comporte trois sortes de modification: premièrement, et c'est la plus importante, la création du poste de juge en chef des cours municipales; deuxièmement, les règles applicables à l'exercice de la fonction de juge municipal lorsqu'est abolie la cour municipale à laquelle il est affecté - et, dans ce domaine, nous avons pris des mesures pour rassurer les juges municipaux et améliorer l'indépendance de la fonction de juge municipal; troisièmement, diverses modifications d'ordre technique visant à bonifier la loi.

Ce projet de loi en est aujourd'hui à l'étape de son étude détaillée par la commission des institutions. J'aimerais, M. le Président, faire quelques remarques préliminaires avant de procéder à cette étude détaillée. Ma première remarque concerne la nécessité d'instituer le poste de juge en chef des cours municipales. Il ne pas s'agit ici de créer simplement une structure de plus, mais plutôt de répondre à un besoin réel. Il n'existe en effet actuellement aucune véritable structure de coordination des juges municipaux. La Conférence des juges municipaux remplit, pour sa part, un rôle de représentation et de soutien, notamment par l'organisation de sessions de formation et la préparation de documents d'information. C'est d'ailleurs la Conférence elle-même qui a manifesté le besoin de créer la fonction de juge en chef.

En effet, depuis 1995, les juges municipaux estiment essentiel au bon fonctionnement de la justice dans les cours municipales qu'un juge en chef des cours municipales soit nommé. La présidente de la Conférence des juges municipaux précisait d'ailleurs, et je la cite: «Ce juge pourra notamment faire le lien entre nous tous et, ainsi, faciliter la normalisation de nos règles de pratique.» C'était dans Le Journal du Barreau du 15 mars 1998. Elle ajoutait: «Enfin, cela améliorerait encore le sentiment d'appartenance de nos membres à une institution commune.» Fin de la citation.

La création de ce poste permettra en outre: de rattacher les juges municipaux à une structure de coordination qui leur soit propre et qui favorise l'encadrement de leurs activités tout en préservant leur indépendance judiciaire; de rompre l'isolement des cours municipales et favoriser une meilleure cohésion des activités judiciaires, notamment par l'élaboration de politiques générales des cours municipales; de favoriser une plus grande cohérence sur tout le territoire du Québec dans l'application et l'interprétation des règles communes aux cours municipales, et ce, dans l'intérêt des justiciables; pour les juges municipaux, de s'adresser à une autorité fonctionnelle pouvant les conseiller sur les questions relatives à la déontologie; d'assurer aux juges municipaux, une représentativité qui tienne compte de leur spécificité et de la particularité des cours municipales, notamment par un appui dans leurs démarches auprès des autorités afin d'améliorer le fonctionnement des cours; de fournir aux juges municipaux un interlocuteur privilégié auprès des instances administratives et gouvernementales, des juges des autres juridictions et du public en général.

Ma deuxième remarque concerne les règles de pratique. Le projet de loi propose de permettre aux juges municipaux d'adopter des règles de pratique commune. L'objectif recherché est l'adoption par les juges eux-mêmes de règles minimales communes en vue d'une plus grande cohérence dans l'ensemble des cours.

Actuellement, les juges municipaux n'ont pas le pouvoir d'adopter des règles de pratique. Toutefois, dans les faits, chaque cour municipale en vient à définir ses propres règles de fonctionnement, qui ne sont pas publiées, qui diffèrent d'une cour à l'autre et qui peuvent être modifiées sans avis préalable. La pratique actuelle crée donc de la confusion et de l'incertitude chez les justiciables et les avocats.

Le rapport Hétu sur les cours municipales reconnaissait cette lacune dès 1988 et proposait formellement que les juges municipaux puissent adopter à la majorité de telles règles communes. On y écrivait, et je cite: «L'absence de règles de pratique dans une cour municipale - c'est ainsi qu'il s'exprimait, mais je pense qu'il l'exprimait dans l'ensemble des cours municipales, c'est ce qu'il voulait dire, en tout cas - entraîne la confusion chez les justiciables, les témoins et les procureurs, qui s'interrogent sur la manière de faire valoir leurs droits et leurs moyens de défense devant une cour municipale.

«Certes, chaque cour municipale en vient à adopter de facto certaines règles de fonctionnement, mais ces règles ne sont pas définies ni publiées et peuvent être modifiées sans avis préalable au gré du juge municipal ou du greffier. Même publiées et connues, ces règles de fonctionnement sont différentes d'une cour à l'autre, et cela ajoute à la confusion et à l'incertitude des personnes appelées à comparaître devant les cours municipales.» Fin de la citation. C'était dans le rapport du Groupe de travail sur les cours municipales, volume II, septembre 1988, page 480.

En 1989, lors de l'adoption de la Loi sur les cours municipales, le législateur n'a pas octroyé aux juges municipaux, malgré la recommandation du rapport Hétu, le pouvoir d'adopter des règles de pratique, parce que, en l'absence d'un juge en chef des cours municipales qui assurerait la concertation et la coordination, il craignait l'adoption de règles de pratique disparates d'une cour à l'autre. Dans cette recherche de cohérence et d'harmonisation, le juge en chef aura un rôle clé, celui d'assurer la concertation des juges en vue d'établir ces règles communes.

La Conférence des juges municipaux du Québec a demandé cette modification dès 1994. Les règles de pratique ne devraient pas avoir pour effet d'alourdir l'administration de la justice municipale ni d'en augmenter les coûts.

En effet, ces règles devront être compatibles avec les principes contenus dans la Loi sur les cours municipales - par exemple, l'obligation de siéger en soirée dans une proportion d'au moins une séance sur deux - ainsi qu'avec les règles du Code de procédure civile et du Code de procédure pénale.

(20 h 20)

Enfin, ma troisième remarque préliminaire concerne les préoccupations du monde municipal quant aux implications financières découlant de la création du poste de juge en chef des cours municipales. Je pense que je pourrais résumer cette partie en disant une seule chose: Ça ne leur coûtera rien.

Les préoccupations des organismes représentatifs des municipalités sont parfaitement légitimes, et je les comprends. Le monde municipal souscrit à l'ensemble du projet de loi, mais voudrait éviter que la création du poste de juge en chef entraîne une charge financière additionnelle pour les municipalités. Je tiens maintenant à les rassurer, le projet de loi ne leur imposera pas une telle charge.

D'abord, la rémunération du juge en chef et ses dépenses personnelles de fonction, frais de déplacement et de séjour seront payés directement au juge en chef par le gouvernement. Peut-être que, là-dessus, nous amenderons un petit peu. Mais peu importe la mécanique, que ce soit la municipalité où siégera le juge municipal qui sera nommé juge en chef, quitte à être remboursée entièrement par le gouvernement à la suite d'une entente que nous signerons avec cette municipalité, ou bien que le gouvernement paie lui-même, le résultat est le même. Il n'est pas question que ça coûte un sou de plus à la municipalité qui abritera celui qui, parmi les juges de la cour municipale, sera leur juge en chef.

Ensuite, les dépenses de soutien administratif reliées aux fonctions du juge en chef, frais d'aménagement de bureau, loyer, secrétariat, seront payées par la municipalité et ensuite remboursées à celle-ci par le gouvernement. À cet égard, j'entends présenter un amendement à l'article 21 du projet de loi afin de prévoir que ces dépenses seront remboursées par le gouvernement du Québec à la municipalité, et ce, conformément à une entente à intervenir entre la municipalité et le gouvernement, et non plus, comme le propose le projet de loi dans sa version présentée, dans la mesure établie par décret du gouvernement.

Telles sont donc, M. le Président, les quelques remarques préliminaires que je tenais à faire avant que nous débutions nos travaux, en souhaitant que l'opposition officielle travaille avec le gouvernement de manière constructive tout au long de l'étude détaillée du projet de loi n° 422.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci, M. le ministre. M. le député de Chomedey et porte-parole de l'opposition officielle.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, au nom de l'opposition officielle, il me fait plaisir de prendre la parole concernant le projet de loi n° 422, Loi modifiant la Loi sur les cours municipales et la Loi sur les tribunaux administratifs. Je prends tout de suite l'invitation qui est formulée par le ministre à la fin et je la lui retourne, en ce sens qu'en arrivant ce soir pour faire l'étude détaillée, on vient de nous déposer en liasse une quinzaine de modifications dans un projet de loi qui contient à peine une quarantaine d'articles. Ce qui est donc à dire que, toutes proportions gardées, c'est énormément de modifications. Et ça aurait été autrement plus simple de procéder en transmettant ces modifications à l'opposition avant l'arrivée ici, au salon rouge, ce soir. Ça nous aurait permis de faire une analyse qui est sans doute nécessaire, mais on va la faire au fur et à mesure ce soir. Donc, l'opposition exprime à son tour le souhait que le gouvernement travaille constructivement avec l'opposition.

Le ministre a mentionné au début de ses remarques que le projet de loi n° 422 a été adopté. Il a raison, mais c'était sur division. L'opposition officielle cherchait et cherche encore, je vous avoue, M. le Président, la motivation profonde pour la création de cette nouvelle fonction de juge en chef des cours municipales. On va avoir l'occasion de regarder les commentaires qui sont formulés par l'Union des municipalités régionales de comté du Québec et par l'Union des municipalités du Québec, par son président M. Laframboise.

Le ministre a mentionné, pour justifier l'ajout de cette nouvelle structure, de cette nouvelle entité, qu'aucune réelle structure de coordination des juges municipaux n'existe. Puis! C'est une réponse très bureaucratique. À un moment où on est en train de sabrer dans l'aide juridique, à un moment où on est en train de couper les services directs à la population, c'est un réflexe vraiment bureaucratique que de dire: Voilà, ce qui nous manque dans notre système de justice au Québec, c'est une autre structure, une nouvelle fonction, une nouvelle personne, avec un compte de dépenses, le ministre vient d'y faire référence. Ce n'est pas notre manière de voir les choses. On ne demande qu'à être convaincus que ça répond à un réel besoin, mais on n'a rien entendu dans les remarques préliminaires du ministre qui ait changé notre point de vue là-dessus.

Le ministre, autre argument massue pour nous convaincre que la création de cette nouvelle structure est une bonne affaire dans l'intérêt du public, je l'ai pris en note tantôt, il citait, bien entendu, la présidente, il disait: Ça améliorerait le sentiment d'appartenance des juges. Puis! «C'est-y» pour ça qu'on peut dépenser l'argent des payeurs de taxes? Le ministre a beau dire qu'il va trouver une formule... Puis ça démontre une certaine improvisation parce qu'il n'est même pas sûr si ça va être le gouvernement qui va payer ou la municipalité qui paierait puis qui serait remboursée par le gouvernement. Mais il dit: Ne vous inquiétez pas, ça ne coûtera pas de l'argent.

Ça me rappelle ce qui s'est passé quand le gouvernement du Parti québécois a pelleté des centaines de millions de dollars vers les municipalités. Ils ont dit: Vous voyez, on vient de réduire les dépenses au niveau provincial, on est en train d'assainir les finances publiques. Comme si le fait que l'argent du même payeur de taxes... Ça sort des mêmes poches, là, ça sort de vos poches, M. le Président, ça sort des miennes. Plutôt que ce soit dépensé au provincial, ça va être dépensé au municipal. Puis le ministre des Finances s'est levé, en Chambre, et il a dit: Je suis en train d'assainir les finances publiques, avec ça. C'était délirant.

Alors, le ministre a beau nous dire: Ne vous inquiétez pas, ça ne coûtera pas une cenne de plus aux municipalités, on le croit sur parole, je n'ai jamais eu de problème avec ça, je prends la parole de ce ministre de la Justice, mais qu'il n'essaie pas pour autant de nous convaincre que ça ne coûterait rien, ça va coûter des sous, ça va sortir des poches du même contribuable. Que ce soit par son gouvernement municipal, avec les taxes à ce niveau-là, ou par le gouvernement provincial, avec les taxes à ce niveau-là, c'est le même qui paie, le même contribuable.

Le ministre, après nous avoir donné ces deux raisons-là, a dit: C'est pour ça qu'on a besoin d'une nouvelle structure. On ne partage pas son point de vue là-dessus. Il a dit aussi qu'on avait besoin de règles minimales communes. Il a évoqué les problèmes structurels réels qui existent pour pouvoir adopter une législation déléguée qui aura force de loi. Il a raison, là-dessus, c'est un problème technique qu'on peut régler.

Mais ça me rappelle, encore une fois, M. le Président, un autre argument que j'ai entendu, non pas avec ce ministre de la Justice mais avec son prédécesseur, lors de l'adoption du projet de loi créant le nouveau Tribunal administratif du Québec. Vous vous souvenez, c'était un débat épique, M. le Président, vous étiez là pour une bonne partie de ce débat-là. Et c'était un des arguments qui nous avaient été servis à l'époque: Ah! non, ça va être bon pour le contribuable parce qu'il va y avoir des règles communes.

Est-ce que vous connaissez qui que ce soit, dans votre comté de Bonaventure, qui déambule sur la rue, le samedi soir, en disant: Bordel! si seulement il y avait des règles communes dans les divers tribunaux administratifs du Québec, là, ça commencerait à aller mieux? Est-ce que vous connaissez quelqu'un qui a déjà été à deux cours municipales différentes pour se dire: Ça irait drôlement mieux dans ma vie si, entre Carleton et Gaspé, il n'y avait pas des petites différences, c'est 20 jours à une place puis 15 jours à l'autre? Ce n'est pas de réelles préoccupations du monde.

Et ce que le ministre oublie de dire dans ses remarques préliminaires et que nous tenons à dire à chaque fois qu'on regarde ce dossier-là, c'est que ça marche bien. La Cour municipale, M. le Président, c'est une institution dans une municipalité puis, généralement parlant, ça va bien.

Puis j'invite le ministre à le faire. Le ministre a pratiqué le droit pénal et criminel pendant de très nombreuses années. Je soupçonne que, vers la fin de sa carrière, il devait passer le plus clair de son temps devant la Cour supérieure ou devant la Cour d'appel. Il ne devait pas passer beaucoup de temps à la Cour municipale de Saint-Jérôme ou de Lachute. Mais c'est une bonne place, si on est un législateur, c'est une bonne place où passer un peu de temps parce que c'est là qu'on se rend compte que ce n'est pas nécessairement la vision bureaucratique qui devrait toujours prévaloir. La vision de gros bon sens a aussi droit de cité dans notre société, M. le Président. Et, la vision de gros bon sens des juges à la Cour municipale fait en sorte qu'il y a des règles qui, dans la vraie vie du vrai monde, dans les vraies municipalités au Québec, fonctionnent. Ça marche.

Alors, avant de nous embarquer dans une réforme qui vise à créer une nouvelle structure, ce qui est tout à fait le propre du Parti québécois... Ils aiment ça, les structures. Ils nous ont vendu le Tribunal administratif du Québec comme étant une sorte de panacée qui allait régler tous les problèmes imaginables et possibles. Encore là, on allait créer des règles de pratique communes, on allait être content et ça allait sauver de l'argent. Ça allait être bon, bon, ça allait sauver de l'argent. En fait, à la défense des crédits avec le ministre de la Justice, il a été obligé d'admettre que ça va coûter énormément plus cher que les organismes que c'est venu remplacer; il l'a dit. Il l'a dit lors de la défense des crédits. Il a été obligé de le dire, c'est ça que les chiffres disaient, de toute façon; il pouvait difficilement le nier.

Alors, de notre côté, M. le Président, on n'a jamais entendu qui que ce soit dans la société réclamer des règles minimales communes de pratique dans le domaine des cours municipales. Peut-être que le ministre entend ça tout le temps, nous on ne l'entend pas.

Pour ce qui est de la confusion que tout ça serait censé créer chez les justiciables, encore une fois, je ne demande pas mieux que d'être convaincu, mais on n'a rien vu qui nous donne raison de croire la version du ministre là-dessus.

(20 h 30)

Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous, on aurait vivement souhaité que, si le gouvernement a de l'argent à mettre dans le domaine de la justice, il le mette pour donner plus de chances à des familles comme la famille Bernier de Laval, qui était aux prises avec un refus dans le domaine de l'aide juridique; des gens réels avec des problèmes réels qui rencontrent un mur de résistance faute de ressources dans le système de justice au Québec. Les tribunaux, tout ce dont on parle aujourd'hui, ça ne vise qu'une chose, ça vise à faire en sorte que les lois qui sont votées ici par les élus à l'Assemblée nationale soient appliquées correctement par des autorités compétentes. C'est ça qu'on vise, que ça soit au niveau municipal, que soit à la Cour du Québec, la Cour provinciale, ou à la Cour supérieure, ou autre. On espère que le ministre va s'attarder un petit peu plus sur les explications, les raisonnements, disons, qui ont présidé à l'élaboration du projet de loi et que ça sera plus convainquant que ce qu'on a entendu jusque-là, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci. Autres remarques préliminaires? Oui, M. le ministre, qu'est-ce qu'il y a?

M. Ménard: Très court. Les choses dont les citoyens se plaignent, ce sont les choses dont ils ne connaissent pas la cause.

M. Mulcair: ...directive. La période des remarques préliminaires étant terminée, est-ce que vous pouvez me dire à quelle démarche on procède maintenant?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Non, mais il m'a demandé la parole, alors je voulais vérifier ce qu'il voulait.

M. Ménard: Ah! je pensais que vous vouliez des réponses. C'est correct. Si vous ne voulez pas les réponses, je pourrai vous les donner en cours de route. Parce que j'ai des réponses faciles à toutes vos inquiétudes.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Effectivement, lorsqu'on a la période des remarques préliminaires, M. le ministre, on les fait d'un seul trait.

M. Ménard: Alors, passons au premier article.


Étude détaillée


Loi sur les cours municipales


Établissement d'une cour municipale


Cour municipale commune

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien. Alors, l'article 1. Il y a le dépôt d'un amendement. M. le ministre, si vous voulez présenter votre article.

M. Ménard: Oui. J'ai demandé de le refaire. Le sens n'est pas différent du projet que vous avez devant vous, mais je pense que l'amendement viserait à être plus clair. Ça aussi, c'est un problème pour lequel les gens ne se battent pas dans la rue, parce qu'ils ne savent pas que le problème dont ils souffrent, parfois, provient de ce problème particulier. Mais cette disposition vise justement à permettre à des municipalités... enfin qu'une municipalité locale, qui ne peut établir une cour municipale locale selon les diverses modalités prévues par la loi ni être desservie par une cour municipale commune établie dans les limites des MRC où se trouve son territoire, peut conclure une entente relative à la cour municipale ou adhérer à une entente existante soit avec une MRC limitrophe soit avec une municipalité locale située dans une MRC ou une communauté urbaine limitrophe.

Et j'ai demandé que l'article soit réécrit par un amendement parce qu'il exprimait mal ce que je viens de dire. C'est que beaucoup de municipalités sont trop petites, au Québec, et même certaines MRC ne sont pas assez nombreuses pour justifier l'existence d'une cour municipale. Il leur est donc plus pratique de passer des ententes avec soit une MRC voisine soit même une municipalité dans une MRC voisine qui a déjà sa cour municipale. Alors, nous voulons quand même que ces municipalités ne soient pas trop éloignées, dans la mesure où ces municipalités sont situées dans une MRC limitrophe. Même si la municipalité n'a pas de frontières communes avec la MRC à côté de cette MRC, on voudrait qu'elles puissent passer des ententes. C'est une des améliorations mineures que nous apportons à la loi en profitant des amendements que nous devons apporter pour son but principal, qui est de créer le poste de juge en chef des cours municipales.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Cet article étant effectivement dans l'intérêt du public et ne visant pas à créer inutilement une nouvelle structure, l'opposition est en faveur, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, c'est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Maintenant, l'article 1, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Mulcair: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Nous en sommes maintenant à l'article 2.

M. Ménard: L'article 2 est une conséquence directe de l'amendement qui est apporté à l'article 1. Il faudra évidemment que l'entente en question contienne l'adresse du lieu où siégera la cour pour les affaires relatives à une ou plusieurs municipalités, le cas échéant.

M. Mulcair: La modification proposée étant purement d'ordre technique, on est pour.


Demandes relatives aux cours municipales à l'occasion d'un regroupement ou d'une annexion de territoires municipaux

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, l'article 2 est adopté. L'article 3. Nous avons maintenant une proposition d'amendement à l'article 3.

M. Ménard: Bien, d'abord, si on regarde l'amendement lui-même qui est proposé, on comprendra l'utilité d'un sous-amendement. C'est que l'article 18.2 de la Loi sur les cours municipales prévoit les cas où une cour existante devient sans formalité la cour d'une nouvelle municipalité issue d'un regroupement ou d'annexion de territoires.

En somme, la seule chose qui fait que la cour municipale devrait changer de nom, c'est le fait que des municipalités se regroupent entre elles. Alors, s'il y a une entente entre cette municipalité et d'autres municipalités de la MRC... On me donnait l'exemple: mettons qu'il y en a 24 et que, maintenant, au lieu d'y avoir 24 municipalités, il va y en avoir 23. Ça suppose qu'il y a 23 règlements qui vont se passer, simplement pour changer le nom de la cour municipale.

Alors, on pense que ce serait plus simple de dire, et là, si on le lit le début de l'article, on comprend: «Devient, sans autre formalité, la cour municipale de la municipalité issue du regroupement de territoires municipaux - c'est une autre façon de parler de fusion des municipalités - à compter de l'entrée en vigueur du décret pris en application de l'article 108 de la Loi sur l'organisation territoriale municipale...»

Donc, on ajoutait un paragraphe pour dire que la cour municipale commune qui, au moment de la demande commune de regroupement de territoires municipaux fondée sur l'article 85 de cette loi... cette cour municipale commune a maintenant compétence sur le territoire des municipalités parties à la demande commune de regroupement, pourvu que le seul changement que ce regroupement occasionne, dans l'entente relative à la cour municipale, consiste en le remplacement du nom des municipalités par celui de la nouvelle municipalité issue du regroupement.

Mettons un exemple simple: trois municipalités - je ne sais pas, moi - Saint-Lambert, Greenfield Park puis Longueuil. Alors, vous avez les cours municipales de Longueuil, de Saint-Lambert et de Greenfield Park. Greenfield Park et Saint-Lambert fusionnent pour s'appeler «Saint-Lambert». Alors, la seule modification, ce serait que la cour desservira maintenant les municipalités de Longueuil et de Saint-Lambert. Si c'est ça, le seul fait qu'il y ait une entente de regroupement de territoires municipaux amènera le changement de facto, sans qu'on ait besoin de règlement. Alors, pour les sous-amendements...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'article 3, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté.


Approbation et entrée en vigueur des règlements et des ententes

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien. L'article 4.

(20 h 40)

M. Ménard: Bon, l'article 4 est un article de concordance avec ce qui va suivre. Lorsqu'une municipalité locale ou régionale de comté adopte un règlement portant sur la conclusion d'une entente relative à l'établissement d'une cour municipale, le gouvernement peut approuver le règlement ou, selon le cas, l'entente, sur recommandation du ministre de la Justice et du ministre des Affaires municipales.

La modification législative proposée prévoit que dorénavant le ministre de la Justice donne avis de cette approbation au juge en chef des cours municipales. C'est nécessaire, puisque, avant, il n'y avait pas de juge en chef des cours municipales et que maintenant il y en aura un.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Oui, effectivement, c'était une démarche qui n'était pas nécessaire avant parce que la personne n'était pas là. Puis on est en train de prouver que non seulement on crée la structure, mais on crée tout ce qu'on appelle en anglais «the paperwork», la paperasse qui va avec, toutes les démarches administratives, et autres.

Puisqu'il s'agit de la première fois qu'on rencontre ce nouveau personnage, si le ministre ne change pas d'avis, ce nouveau personnage qui verrait le jour au terme de l'adoption du projet de loi n° 422, je me permets, M. le Président, de partager avec vous et les autres membres de cette commission l'avis du président de l'Union des municipalités du Québec et maire de Notre-Dame-de-la-Paix et préfet de la MRC de Papineau, M. Mario Laframboise.

«Nous avons pris connaissance du projet de loi n° 422 que vous avez présenté à l'Assemblée le 5 mai dernier.» La lettre s'adresse bien entendu au ministre. «Nous constatons que les modifications apportées sont loin d'être en harmonie avec l'initiative prise par votre gouvernement afin de rationaliser le nombre d'organismes, de conseils et de commissions. En effet, la création d'une fonction de juge en chef des cours municipales nous apparaît comme l'embryon d'une nouvelle structure qui ne pourra répondre adéquatement aux récriminations et problèmes soulevés par les élus municipaux dans la gestion de ce service municipal.»

On l'a vu tantôt, M. le Président, je l'ai mentionné d'emblée, le ministre propose une quinzaine de modifications ce soir. Peut-être, certaines de ces modifications vont venir rencontrer les préoccupations soulevées par l'UMQ. Mais toujours est-il que c'est ce bout de phrase là, «l'embryon d'une nouvelle structure», qui correspond à notre préoccupation aussi.

«Avant de mettre en place cette nouvelle structure, le ministre a-t-il envisagé de confier cette responsabilité à d'autres? Par ce projet de loi, le ministère vise-t-il les modalités de gestion les plus économiques possible? Il nous faut absolument trouver un juste équilibre entre les besoins des juges municipaux et ceux des contribuables que les élus municipaux représentent. Nous ne voulons pas nous fermer les yeux sur la situation actuelle ni nous contenter uniquement de formuler des oppositions, mais nous croyons sincèrement que les dispositions du projet de loi qui traitent de la création d'un poste de juge en chef des cours municipales n'atteindront pas la fin recherchée par les municipalités.

«Notre objectif commun devrait consister à améliorer les services que nous dispensons, à accroître l'efficacité au niveau de l'administration et à réaliser des économies au profit des contribuables québécois.» Ça aurait été difficile de dire mieux, M. le Président: «Notre objectif commun devrait consister à améliorer les services que nous dispensons, à accroître l'efficacité au niveau de l'administration et à réaliser des économies au profit des contribuables québécois.» C'est ça, gérer adéquatement l'argent du contribuable, n'est-ce pas? Pas créer une nouvelle structure pour le plaisir de le faire. C'est drôle que la première chose qui est toujours coupée, lorsqu'on coupe dans les services au gouvernement, c'est le service direct à la population. La dernière chose qui est coupée, c'est la structure, la machine, l'appareil bureaucratique. Ici, ce soir, on est face à la création d'une nouvelle structure. C'est ce que nous rappelle Mario Laframboise, le président de l'Union des municipalités du Québec. C'est un point extrêmement bien soulevé, M. le Président.

«La perspective de créer un poste de juge en chef des cours municipales ne nous engage pas dans cette voie.» Ça, c'est l'opinion de l'UMQ. «Le défi que nous devons relever est de trouver une solution à long terme aux lacunes dénoncées par la Conférence des juges municipaux en regard de l'encadrement des activités des juges municipaux, mais aussi aux difficultés rencontrées par certaines municipalités face à ces derniers - ça, c'est un chemin à deux voies - et ce, toujours dans le respect de leur indépendance judiciaire. L'UMQ est résolue à participer à tous travaux qui auraient pour but la recherche de moyens novateurs afin de disposer de cette question au bénéfice de toutes les parties en cause.

«Par ailleurs, nous vous soulignons que le texte de loi proposé soulève de nombreuses interrogations - je présume qu'on va y répondre avec certaines des modifications proposées - quant aux modalités financières du projet, et nous vous proposons donc de retirer les dispositions traitant de la création d'une fonction de juge en chef des cours municipales du projet de loi afin qu'un groupe de travail conjoint soit chargé d'en étudier les modalités plus en profondeur.» Il finit ses salutations là-dessus.

Ça, c'est une suggestion à laquelle l'opposition se rallie sans hésitation, M. le Président: retirer du projet de loi tout ce qui concerne cette nouvelle structure. Le ministre, à notre point de vue, devrait accepter l'invitation qui lui est faite par Mario Laframboise, le président de l'UMQ, de s'asseoir à une table, de regarder avec un groupe de travail vraiment les modalités qui pourraient être élaborées si jamais on décidait de créer cette nouvelle fonction.

Je me permets, par ailleurs, une très courte citation d'une lettre envoyée à peu près simultanément par Mme Jacinthe B. Simard, qui est la présidente de l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Et ce n'est pas du fond de son mémoire que je veux vous donner une citation, M. le Président, mais c'est plutôt de la lettre d'accompagnement. Elle dit: «Tel que discuté entre la responsable du service juridique de l'Union et Mme... - Unetelle - nous comprenons que des contingences de temps vous empêchent de tenir des auditions particulières dans le cadre de la commission parlementaire.»

De notre côté, M. le Président, il n'y aurait jamais eu de contingentement côté temps. On aurait été vraiment capable, facilement, au moins de rencontrer ces deux groupes-là puis peut-être quelques-unes des grandes municipalités représentatives de ce qui est devant nous aujourd'hui. Et je vous avoue, M. le Président, que je pense que c'est le gros bon sens qui parle lorsque M. Laframboise invite le ministre à retirer du projet de loi tout ce qui concerne cette nouvelle structure.

Dans le domaine de la santé et des services sociaux, les coupures se font sentir immédiatement. On sait si un membre de notre famille attend pour une intervention chirurgicale depuis un temps qui n'a plus de bon sens; ça, ça se sait tout de suite. On sait, dans les écoles de Montréal, que les enfants n'ont plus de manuels scolaires. Le gouvernement veut qu'ils les partagent, qu'il y en ait un qui l'apporte un soir, l'autre, le soir prochain, parce qu'on n'a plus d'argent pour les services de base, les services directs à la population. On n'a plus d'argent pour ça.

Dans le domaine de la justice, pour emprunter à une théorie plutôt économique, «it's trickle-down». Ça prend un petit peu plus de temps pour se faire ressentir, dans le domaine de la justice. Pourtant, on a eu des indices intéressants, au cours de la dernière année. Les associations de détaillants sont en train de dénoncer le fait qu'à Montréal notamment, il y a une recrudescence importante dans le vol à l'étalage et que ça vous coûte de l'argent, M. le Président, que ça coûte au ministre et aux gens qui l'accompagnent. Quand il y a plus de vol à l'étalage, ça nous coûte de l'argent de nos poches parce qu'il faut que le commerçant fasse son profit pareil.

Et pourtant, il n'y a plus suffisamment de ressources à la cour, il n'y a plus suffisamment de ressources pour appliquer les peines. On sort les gens non seulement après un sixième de la peine, mais, en bas de six mois, très souvent, les gens ne font même pas une journée de leur peine. Le ministre est au courant de la situation, il la réalise comme nous.

Et pourtant, le ministre ne trouve rien de mieux que de nous arriver avec une proposition qui va coûter, pas des millions de dollars mais des sommes importantes quand même. Si on regarde, dans le mémoire qui est présenté au Conseil des ministres - il y a une partie de ces mémoires-là qui est accessible au public - on trouve que le salaire devrait être de 128 246 $ par année, et les frais afférents - c'est-à-dire les dépenses du bureau, les coûts de secrétaire, etc. - à l'exercice de cette charge sont évalués à un minimum - une merveille, dans la fonction publique, on donne rarement un maximum, mais on est prêt à donner un minimum - de 23 000 $ pour les frais d'aménagement du bureau une fois tous les sept ans et à 20 000 $ récurrents. C'est des sommes importantes, M. le Président, des sommes qui auraient pu être appliquées à d'autres fins, à des services directs à la population. Nous donnons raison à M. Laframboise et à son groupe.

Donc, dans un premier temps, non seulement on n'est pas d'accord avec le projet de loi lorsqu'il vise à créer cette structure-là, mais évidemment, à l'article 4 qui modifie l'article 23 de la loi principale, nous allons être contre la modification proposée par le ministre parce que nous voulons évacuer du projet de loi toute référence à ce juge en chef. Et on aurait préféré que le ministre prenne le temps de s'asseoir avec les groupes en question et qu'il nous ramène une modification ou un projet qui fasse l'objet d'un consensus.

(20 h 50)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Ménard: Ce consensus a été réalisé il y a 10 ans. À l'époque, les unions municipales réclamaient cette chose-là. Ça a toujours été réclamé aussi par la Conférence des juges municipaux. Mon collègue de l'opposition utilise beaucoup le mot «structure», par rapport à des structures beaucoup lourdes, mais qu'il me donne une structure qui coûte moins de 45 000 $ par année pour régler des problèmes aussi importants que ceux qui ont été dénoncés depuis une dizaine d'années. Je pense qu'il n'y en a pas beaucoup.

Pourquoi ça coûte si peu? Parce que les montants qu'ils donnent ne sont pas des montants qui seront additionnés à ce qui est payé actuellement. Au contraire, le juge en chef sera l'un des juges municipaux qui recevra déjà un revenu comme juge municipal et à qui on donnera un excédent pour atteindre la même rémunération qu'un juge coordonnateur, je pense, de la Cour du Québec, parce que, justement, à ce juge municipal nous demanderons de consacrer tout son temps à sa fonction de juge municipal et de juge en chef. Alors que les autres juges de cours municipales dont nous parlons ici, ce ne sont pas des juges permanents, ce sont des juges à temps partiel, lesquels peuvent continuer une pratique d'avocat en plus des honoraires qu'ils reçoivent déjà.

Donc, la municipalité en question continuera de payer le salaire de juge municipal comme elle le payait auparavant, ça ne lui coûtera donc pas un sou de plus. Et c'est parce qu'on n'a pas compris, je pense, du côté de l'Union des municipalités du Québec, cette disposition. Mais je suis convaincu que, dès qu'ils verront le système appliqué... et même, s'ils s'étaient donné la peine de répondre aux demandes que nous leur avons faites en février dernier, ils auraient déjà compris. Il suffisait d'un téléphone à mon attaché politique pour qu'ils le comprennent.

C'est évident que cet excédent va être payé par le gouvernement. Le gouvernement est prêt aussi à payer une partie supplémentaire du loyer qui sera donné au bureau du juge en chef en question, lequel occupe déjà des locaux dans une municipalité. Et puis les frais de secrétariat, vous les évaluez à 20 000 $, 25 000 $, dans le mémoire, vous avouerez que, comme structure, c'est à peu près ce qui se fait de plus léger par rapport aux avantages qui sont donnés.

C'est évident, il nous dit que le citoyen dans la rue, ce qu'il verra dans la justice... Puis, au fond, les remarques de mon collègue de Chomedey rejoignaient ces observations, le citoyen constate le résultat, mais il ne sait pas la cause. Mais il tient, par contre, par exemple, à la déontologie des juges. Eh bien, c'est de l'avis de tous les experts. En 1988, le rapport Hétu le mentionnait. Et le rapport Hétu avait été tenu... il y avait eu une commission parlementaire comme nous en avons une. Sauf que, comme c'était dans le temps où c'était un gouvernement qui ne prenait jamais de décisions, bien, il n'a jamais pris les décisions qui s'imposaient, même si celle-là, pour un montant vraiment infime, n'est-ce pas, d'à peu près 50 000 $ par année, aurait pu régler des problèmes qui étaient dénoncés déjà par tous les intervenants.

Mais, par exemple, donc, le juge en chef aura un rôle de conseiller en déontologie judiciaire et aura un rôle dans l'application de la déontologie des juges municipaux. Je pense que les citoyens - vous n'avez qu'à lire les journaux une fois de temps en temps - quand ils voient la moindre erreur déontologique d'un juge, ça fait tout un plat, et les citoyens s'en plaignent amèrement. Ce qui est bon, c'est que, évidemment, si ça fait tout un plat, c'est parce que ces écarts sont rares. Mais il est important d'avoir justement un système où il y en a de moins en moins.

Ensuite, c'est la même chose pour les règles de pratique. Les règles de pratique, c'est ce qui indique quand même aux avocats comment présenter les procédures, comment demander une remise lorsqu'on prévoit que, pour une raison majeure, on ne peut procéder dans un dossier, et comment ainsi éviter l'assignation inutile de témoins. Entre autres, ça prévoit aussi, dans d'autres tribunaux, le port de la toge et le décorum que l'on doit tenir. Ça prévoit aussi la façon dont les procédures doivent être rédigées pour être reçues. Vous avouerez qu'il est préférable qu'il y ait une seule façon de rédiger les procédures pour les 134 cours municipales que d'avoir 134 façons différentes, décidées parfois par des greffiers qui vont accepter de les recevoir ou de ne pas les recevoir.

Évidemment, c'est sûr que le citoyen ne se mettra pas dans la rue pour demander des règles de pratique communes qui permettraient aux avocats de savoir dans quel format ils doivent présenter les procédures devant telle cour plutôt que devant telle autre. Mais il sera très heureux de savoir que ces règles sont connues de l'avocat qu'il peut consulter, ou encore qu'il peut lui-même trouver, s'il veut présenter ces procédures lui-même, les formules les plus faciles et profiter justement du coût réduit et de la convivialité, de la facilité à présenter son dossier devant une cour de justice par des règles de pratique qui sont les plus simples possible, les moins contraignantes et surtout qui ont une certaine cohérence d'une cour municipale à l'autre. Ce sont des avantages. Franchement, des avantages de cet ordre, pour 40 000 $ à 50 000 $ par année, je pense que...

M. Mulcair: C'est un bargain.

M. Ménard: C'est un bargain. Voilà, n'est-ce pas? Alors, comme structure, je pense que... Mais je comprends. Évidemment, je vois tout de suite que mon confrère pensait à une structure d'un autre ordre, quand il comparait ça à la santé, au Tribunal administratif du Québec avec je ne sais trop combien de décideurs permanents, alors qu'ici on est en présence, quand même, de 99 juges, je crois, à temps partiel pour couvrir 134 cours municipales.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, j'aimerais, mesdames, messieurs, attirer votre attention aussi sur le mémoire quand même de l'UMRCQ. Cette union-là, au contraire, n'est pas opposée à la nomination d'un juge en chef mais en réclamait même un à temps plein, si vous avez bien lu. Alors, j'ai l'impression qu'on se situe à mi-chemin entre les deux unions.

M. Mulcair: Si notre devoir était de rechercher des formules comme celle-là, c'est sûr qu'être situé à mi-chemin serait quelque chose de confortable. Mais ce n'est pas ça notre tâche, n'est-ce pas, M. le Président?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Mais, parfois, ça peut être au milieu de nulle part, lorsqu'on est au milieu.

M. Mulcair: Oui, exactement. Puis, venant de votre gouvernement, je vous comprends de le dire comme ça. Mais, M. le Président, je pense que...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Je vous dirais, là-dessus, M. le député de Chomedey, qu'en ce domaine-là nous n'avons sûrement pas le monopole.

M. Mulcair: Ah! faites attention, vous êtes en train de compromettre votre neutralité, M. le Président. Mais vous nous conviez à consulter le mémoire de l'UMRCQ. Je vais me plier à votre invitation parce que vous dites qu'ils sont d'accord avec la création de ce poste-là. Mais, si on lit attentivement le mémoire, on voit que ce n'est pas un appui sans limite. Je me permets de vous référer notamment à la page 3, où on peut lire ceci: «Le rôle d'arbitre que devra jouer le juge en chef auprès des juges municipaux nécessite une impartialité qui serait entachée, du moins en apparence, si la loi indique par ailleurs qu'il doit jouer en quelque sorte un rôle s'apparentant à celui d'un représentant syndical.»

À la page 4, on peut lire ceci: «Or, les cours municipales ne sont pas dotées d'une équipe de juges comme les tribunaux supérieurs. Il en résulte que le juge en chef accaparé par cette fonction ne pourra choisir de ralentir ses activités judiciaires pour assumer sa nouvelle tâche sans que cela ait des répercussions sur sa cour municipale. Soit que les activités de sa cour seront différées, soit que le juge en chef recourra davantage au juge suppléant pour siéger à sa place et, dans ce cas, la municipalité pourra en subir des inconvénients financiers. En effet, le recours abondant à la suppléance peut devenir coûteux, puisque deux juges seront susceptibles de recevoir la rémunération maximale fixée par le décret.»

Alors, vous voyez, M. le Président, vous avez raison quand vous dites que l'UMRCQ avait l'air d'être plus favorable à la création de cette nouvelle fonction que l'UMQ...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Elle est favorable, sauf qu'elle souligne trois inconvénients.

M. Mulcair: Oui, effectivement, et on va voir. Mais je pense que l'UMQ a vraiment montré la voie en disant: Écoutez, on devrait sortir ça du projet de loi, régler les problèmes qui en sont et, pour ce qui est de cette nouvelle charge-là, de cette nouvelle fonction, on pourrait y revenir en temps et lieu, si vraiment la nécessité était prouvée suite à un travail en groupe.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ça va?

M. Mulcair: Oui.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

(21 heures)

Mme Houda-Pepin: Une question de vérification, M. le Président. Je voudrais savoir du ministre: Qu'est-ce qui ne fonctionne pas dans le système actuel des cours municipales qui justifierait à vos yeux d'introduire ce dispositif-là?

M. Ménard: Bien, c'est ce que j'ai expliqué tout à l'heure avant votre arrivée. D'abord, c'est une observation qui a été faite il y a 10 ans au cours de la commission Hétu, en 1988. Ça a été redemandé depuis par la Conférence des juges municipaux, depuis longtemps, pour un ensemble de cours municipales qui ont pris énormément d'importance à travers les âges. Elles sont maintenant rendues à, je pense... je ne me souviens plus si c'est 100 ou 99. Oui, c'est ça, elles sont rendues à 100 juges pour 134 cours municipales, parce qu'il y a des juges évidemment qui siègent à deux cours municipales et qui en ont deux ou trois même de front. Ils avaient besoin d'abord d'avoir une structure qui les unifierait pour établir une cohérence entre eux. C'est vrai sur le plan de la déontologie, les exigences déontologiques qu'on a à l'égard des juges sont de plus en plus grandes; on sent qu'on avait besoin d'un juge senior, comme le serait le juge en chef, pour servir de conseil dans ce domaine-là.

Ensuite, dans l'assignation des suppléances et des intérims, nous avons observé encore là - et je veux être poli, là - une certaine incohérence aussi dans cette distribution. Nous croyons qu'un juge en chef, qui aura le statut d'un juge permanent pour sept ans en tout cas, pourra avoir l'indépendance pour régler dans l'intérêt public, pour prendre ses décisions, voir à remplacer les juges municipaux, locaux lorsqu'il y a besoin - ça peut arriver pour toutes sortes de raisons; ça peut arriver, par exemple, pour accident, pour maladie ou quoi que ce soit.

Et puis, on a besoin aussi de quelqu'un qui coordonnerait un certain nombre de choses, comme l'entente pour qu'on arrive à des règles de pratique communes. Il faut comprendre que toutes les cours ont des règles de pratique. Les règles de pratique, c'est ce qui détermine tout ce qui n'est pas prévu par la loi, mais qui est, je dirais, la petite cuisine des cours, mais qui, en pratique, fait une grande différence. Par exemple, c'est la forme que doivent avoir les procédures, le format, enfin tous ces détails. Bien là, c'est ce qui détermine le décorum dans la cour, c'est ce qui détermine la façon de demander une remise lorsqu'il est impossible à une partie pour une raison majeure, pour une raison jugée valable de procéder en temps et lieu, de façon à ce que les témoins qui auraient été assignés ne le soient pas et ne viennent pas perdre leur temps à la cour, ce qui détermine beaucoup de ces petites choses qui, quand même, sont très importantes pour que les citoyens qui sont assignés devant les cours municipales n'y perdent pas leur temps de façon totalement inutile.

Je vous signale aussi que toutes les cours, mais absolument toutes les cours ont leur juge en chef, n'est-ce pas. L'ensemble des cours municipales, c'est la seule institution judiciaire qui n'en a pas. C'est donc ce qui explique que c'est demandé. Et je vous rappelle que la solution que nous avons choisie est la moins coûteuse de toutes parce qu'il est évident que, contrairement à ce que pense l'UMRCQ sur laquelle nous pourrons peut-être revenir... Mais, vous savez, le juge en chef du Canada entend lui-même les causes. Le juge en chef de la Cour d'appel du Québec, il entend aussi les causes. Alors, c'est un peu normal que le juge en chef des cours municipales entendent lui aussi les causes. Et le principe des juges en chef de toutes les cours, en tout cas dans le système anglais, c'est que c'est primus inter pares, n'est-ce pas, le premier parmi des égaux. Et je pense que le même principe doit s'appliquer aux cours municipales. Ça doit être un juge municipal qui exerce, qui entend des causes, lui aussi comme les autres juges municipaux, mais qui, par contre, a cette fonction de coordination qui est celle de tout juge en chef. En somme, mettre un juge en chef aux cours municipales, c'est mettre un capitaine sur un bateau qui a maintenant au-delà de 100 marins.

Mme Houda-Pepin: Il se trouve que les municipalités au Québec, c'est plusieurs bateaux et de différentes grandeurs, de différentes tailles, de différents volumes...

M. Ménard: Oui, ça serait plutôt comparable à une armada. C'est une armada.

Mme Houda-Pepin: ...et elles ont une spécificité qui justifie une flexibilité qui existe dans le système actuel. Et le fait de vouloir, sous prétexte d'incohérence, uniformiser les cours municipales d'une certaine manière en essayant de les chapeauter, de les encarcaner dans une structure, je dirais, rigide et hiérarchique, ça me paraît un peu incohérent - puisque vous parlez d'incohérence. En fait, c'est ce que je vois là-dedans.

Et quand je lis, en fait, la lettre qui est signée par Mario Laframboise, préfet de la MRC de Papineau et président de l'Union des municipalités du Québec - c'est une lettre qui est datée du 27 mai et qui est adressée à vous, au ministre de la Justice, vous l'avez lue - au paragraphe 2, on dit: «En effet, la création d'une fonction de juge en chef des cours municipales nous apparaît comme l'embryon d'une nouvelle structure qui ne pourra répondre adéquatement aux récriminations et problèmes soulevés par les élus municipaux dans la gestion de ce service municipal.»

Alors, moi, je me pose une question: Si quelqu'un qui est dans la fonction de président de l'Union des municipalités du Québec, donc qui représente en premier lieu les municipalités du Québec, porte un jugement aussi sévère sur le projet de loi que vous avez déposé, qu'est-ce que le commun des mortels peut en comprendre? Et deuxième question, qui est toujours mon paramètre fondamental: Qu'est-ce que ça apporte aux citoyens, un projet de loi comme ça, en termes d'amélioration de qualité des services, en termes d'accessibilité de la justice, en termes d'intégrité du système?

Vous parlez de déontologie. Je suis d'accord avec vous, je suis extrêmement préoccupée par la question de déontologie, sauf que la déontologie ne nécessite pas des structures. On peut se donner des règles de conduite, on peut se donner des façons de fonctionner, on peut adhérer à un certain nombre de valeurs, etc., sans nécessairement se doter d'une structure comme telle. Alors, je dois vous avouer, M. le Président, que le ministre ne me convainc pas par les arguments qu'il a apportés parce que je trouve que c'est encore une structure de plus.

J'ai eu l'occasion d'échanger avec le ministre à différents endroits, sur d'autres dossiers: la structure, par exemple, de la Commission de développement économique de Montréal qui nous a pris énormément de temps, d'énergie, vous vous rappelez. Le ministre est venu en consultation rencontrer des groupes, on en a parlé. On lui a dit: C'est une structure de plus qui ne réglera pas le problème comme tel; le problème, c'est le développement économique; il faut investir dans le développement économique. Le ministre nous a proposé une structure. Cette structure-là, elle est sur le carreau parce que son successeur a dit que ce n'était pas une priorité. On est dans le même gouvernement, M. le Président, on n'a pas changé de gouvernement, mais le discours et les priorités changent juste en changeant de ministre à l'intérieur même du gouvernement.

Alors, je me balise avec ça et je me pose des questions par rapport au projet de loi qui est devant nous, si c'est vraiment pertinent, M. le Président. La pertinence d'un projet de loi, c'est fondamental. Est-ce qu'on est en train d'étudier un projet de loi qui va améliorer l'accessibilité des citoyens à la justice?

M. Ménard: Certainement.

Mme Houda-Pepin: Si le ministre est capable de me prouver ça, je vais commencer à réfléchir autrement. Mais, jusqu'à maintenant, M. le Président, ce que j'ai vu et ce que j'ai lu, par les personnes qui sont concernées au premier chef... Ce n'est quand même pas un moindre organisme, ça, l'Union des municipalités du Québec, qui porte un jugement aussi sévère sur le projet de loi. Ils sont concernés au premier chef et ils disent au ministre: C'est une structure et rien d'autre.

M. Ménard: Or, elle a dit: C'est un embryon de structure. Je pense que...

Mme Houda-Pepin: Bien, un embryon de structure. Savez-vous ce que ça fait, un embryon, M. le Président? Un embryon, ça pousse.

M. Ménard: Justement. Et c'est là son erreur. Je pense que le mot «embryon» lui a été inspiré par, justement, la petitesse de la structure que nous apportons à un problème. Mais vous allez voir, ce n'est pas un embryon, c'est un aboutissement, c'est l'animal à sa maturité. Exactement. Enfin, il me semble vous avoir donné plusieurs arguments, peut-être qu'ils ne vous convainquent pas, mais je vous dirai que toutes les cours ont des juges en chef. La Cour du Québec a 279 juges; 270, je pense, actuellement. Elle a un juge en chef, elle a trois juges... Bien, évidemment, je ne pourrai jamais vous convaincre si vous ne m'écoutez pas, n'est-ce pas?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, nous en sommes maintenant à l'article 5, M. le ministre.

M. Ménard: O.K.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui.

(21 h 10)

M. Mulcair: Pendant qu'on est toujours aux articles préliminaires traitant du juge en chef des cours municipales, est-ce que le ministre de la Justice et Procureur général aurait l'amabilité de nous indiquer les fruits de la consultation interministérielle qui a été évoquée à la page 10 du mémoire qu'il a déposé au Conseil des ministres pour convaincre ses collègues? Je l'aide en le lisant: «L'article neuvième prévoit que le ministre des Affaires municipales est présentement consulté relativement aux diverses modifications proposées par le projet de loi.» Lorsqu'on a démontré tantôt que l'UMRCQ avait de sérieuses réserves et que l'UMQ était carrément contre. Alors, qu'en pense le ministre des Affaires municipales? Quel a été le fruit de la consultation?

M. Ménard: Oui, il est d'accord.

M. Mulcair: Il est d'accord.

M. Ménard: Oui.

M. Mulcair: O.K. Et, à la dernière ligne du mémoire, M. le Président, on lit la chose suivante: «Que le Conseil de la magistrature et le Barreau du Québec seront consultés». Quel a été le fruit de cette consultation-là?

M. Ménard: Ils sont également pour, avec des réserves dont nous tiendrons compte dans les amendements que nous allons apporter.

M. Mulcair: Est-ce que le ministre a reçu ces réserves de la part du Conseil de la magistrature et du Barreau du Québec verbalement ou par écrit?

M. Ménard: Par écrit.

M. Mulcair: Dans les deux cas?

M. Ménard: Le Barreau, je ne me souviens plus, mais le Conseil de la magistrature, je me souviens, je les ai vues.

M. Mulcair: Est-ce que le ministre pourrait les déposer pour qu'on puisse tous les lire?

M. Ménard: Correct.

M. Mulcair: Mais le Barreau n'a présenté aucune observation écrite, c'est bien ça que le ministre est en train de nous dire?

M. Ménard: Non, non, il y a eu des représentations écrites.

M. Mulcair: Est-ce qu'on pourrait avoir les deux, à ce moment-là?

M. Ménard: Correct.

M. Mulcair: Merci.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, je vous rappelle que nous sommes rendus à l'article 5.

M. Mulcair: Oui. On va, avec votre accord, M. le Président, prendre dépôt des documents pour qu'on puisse les avoir des deux côtés?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, aussitôt qu'on me les remet, j'en accepte le dépôt, et là on pourra vous les faire reproduire.

M. Mulcair: Très bien. Merci.


Documents déposés

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, alors je reçois le dépôt.


Organisation de la cour municipale


Juge municipal


Nomination, destitution et cessation des fonctions

On poursuit. Alors, M. le ministre, votre article 5?

M. Ménard: Pardon? Oui, on va passer à l'article 5.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui, oui. Est-ce qu'il y a des commentaires sur cet article 5?

M. Ménard: L'article 5, c'est très simple. C'est que maintenant qu'il y aura un juge en chef des cours municipales il pourra assermenter un nouveau juge, de la même façon qu'un juge de la Cour du Québec pourra continuer à le faire. Ce sera plus pratique dans les cas où le juge nommé sera à une grande distance du juge en chef. Mais probablement que, dans les cas où le juge en chef ne sera pas très éloigné, il préférerait les assermenter lui-même.

M. Mulcair: À notre point de vue, M. le Président, nos autres remarques continuent à s'appliquer ici.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Sur division.

M. Mulcair: Dans les 20 ans que je suis au Barreau, je n'ai jamais entendu quelqu'un se plaindre de la distance à parcourir pour aller se faire assermenter devant un juge de la Cour du Québec. C'est complètement inutile, à notre point de vue, mais on peut procéder au vote là-dessus, ça va être sur division.

M. Ménard: Une fois de plus, vos remarques démontrent que vous ne comprenez pas le projet de loi. Le projet de loi, ce n'est pas les empêcher de se déplacer devant un juge de la Cour du Québec pour se faire assermenter, c'est d'ajouter qu'ils peuvent se faire assermenter devant un juge de la Cour du Québec ou devant le juge en chef des cours municipales.

M. Mulcair: Et youpi! Ça répond à quel besoin? Il n'y en a pas. Ça ne répond à aucun besoin réel, M. le Président.

M. Ménard: Non, mais habituellement, très souvent, les juges en chef aiment bien assermenter les juges de leur cour. Alors, comme maintenant les cours municipales vont avoir un juge en chef, ce juge en chef pourra les assermenter, comme les autres juges en chef assermentent les juges qui sont nommés à leur cour. Par contre, comme le Québec est grand et qu'il s'agit d'emplois à temps partiel et que le juge en chef lui-même... Ce sera la cour qui va couvrir le plus grand... En tout cas, comme ce sont des juges à temps partiel, ils pourront aussi se faire assermenter par un juge de la Cour du Québec. Ça n'enlève rien à la situation antérieure, ça ne fait qu'ajouter une personne de plus. Ce n'est évidemment pas pour ça qu'on fait le projet de loi, mais, puisque la fonction va exister, on peut lui ajouter cette tâche qui ne prendra pas beaucoup de son temps et qui ne coûtera rien aux contribuables.

M. Mulcair: M. le Président, on a écouté attentivement ce que vient de dire le ministre de la Justice et, loin de diminuer nos peurs vis-à-vis du projet de loi, il vient de les augmenter. Le ministre vient de parler d'un juge en chef des cours municipales qui va assermenter les juges qui seront nommés, comme les autres juges en chef... ils aiment assermenter les juges, et je le cite, qui sont nommés à leur cour. C'est la phrase que vient de prononcer le ministre de la Justice. Et c'est exactement la préoccupation que partageait avec nous tantôt ma collègue la députée de La Pinière quand elle évoquait la nécessité de respecter l'individualité et la spécificité de ces institutions que sont les cours municipales, car elles ont toujours su s'adapter à certaines réalités locales. C'est l'idiome local, c'est le génie de chaque endroit, leur manière de faire les choses qui se retrouvent souvent reflétés dans la cour municipale.

Mais peu importe que le ministre soit d'accord avec ça ou pas, il y a quand même une erreur fondamentale dans ce qu'il vient de dire, parce qu'à moins que ce soit vraiment ça qu'ils veuillent du côté du gouvernement du Parti québécois le ministre vient de se tromper, parce que, si c'est effectivement ce qu'ils veulent, ils veulent vraiment que ça devienne des juges de sa cour, au juge en chef, au même titre qu'on a un juge en chef de la Cour du Québec, et là on peut à très juste titre dire que ce sont les juges de leur cour, ce sont tous des juges nommés à une même fonction, avec un même salaire, pour le même travail, peu importe où ils sont dans la province, la même charge, les mêmes règles... Ça, c'est une chose. Mais ici, que le ministre nous dise... c'était un lapsus sans doute. Je veux l'entendre là-dessus, parce que, si c'est vrai que sa vision, c'est que le juge en chef va assermenter des gens qui sont nommés à leur cour, là, on a un sérieux problème, M. le Président.

M. Ménard: Bon. C'est vrai que c'est une erreur de langage, parce qu'il faut dire que chaque cour municipale est unique. Maintenant, ce n'est pas parce qu'elle est unique qu'elle doit être systématiquement différente des autres. Ce sont des cours de justice, donc qui doivent appliquer le même droit de la même façon partout. Il serait impensable qu'un citoyen soit traité différemment dans une accusation de conduite d'un véhicule avec facultés affaiblies à Baie-Comeau qu'à Huntingdon. Il doit bénéficier des mêmes droits. Ensuite, justement, c'est important que les avocats qui vont plaider devant eux et dont les honoraires sont fixés en fonction, nécessairement, du travail qu'ils ont à faire aussi, hein, que justement la procédure pour les règles de pratique ne varie pas d'une cour à l'autre et d'où la nécessité, bien que ce soient des cours et que chaque juge est indépendant dans sa cour, qu'il y ait des choses communes. Et généralement, il y aura beaucoup plus de choses communes que de choses distinctes.

(21 h 20)

La spécificité des cours municipales, ce n'est pas d'être différentes à Sept-Îles, à Longueuil, ou bien à Valleyfield, ou bien au Lac-Saint-Jean. Leur spécificité, c'est d'être plus accessibles aux citoyens parce qu'elles peuvent siéger aux heures où les citoyens peuvent se présenter devant elles sans perdre de temps de travail. Ce sont les seules cours, à date, qui acceptent de siéger le soir. D'ailleurs, elles sont obligées de par la loi à ce qu'au moins une séance sur deux soit le soir. C'est ce qui en fait leur spécificité. C'est aussi que le décorum est moins important, qu'elles vont siéger dans des endroits plus accessibles aux citoyens, elles ne siègent pas nécessairement dans les palais de justice. Mais cette spécificité, elles la partagent. C'est sûr que ça ne sera pas dans les mêmes locaux, ça peut ne pas être dans le même type de locaux à Sept-Îles qu'à Valleyfield, mais il y a cette préoccupation commune que ce sont des cours qui sont plus facilement accessibles aux citoyens. Mais certainement que pour les règles de pratique, les règles de déontologie, la façon de recevoir les témoins, il doit y avoir... enfin, les citoyens doivent être traités essentiellement de la même façon partout au Québec dans chaque cour municipale.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, quand j'écoute le ministre, je l'écoute très attentivement et je suis de moins en moins sûre qu'il a raison de présenter ce projet de loi, et je suis de plus en plus réconfortée dans ma position et celle de mon collègue. J'écoutais le ministre tantôt qui disait qu'on ne voulait pas comprendre. Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas comprendre, c'est parce qu'on comprend bien, justement, ce qu'il y a derrière ce projet de loi qu'on a des questionnements d'ailleurs assez légitimes.

Je suis intriguée quand il dit... Tantôt, dans sa réponse, il a dit: Puisqu'il y a cette fonction, on va lui attribuer sa tâche. C'est comme si c'était un mal nécessaire, M. le Président. C'est la preuve que ça ne correspond pas vraiment à une priorité. Il existe une boîte, puis on va la remplir, alors que, moi, j'interroge toujours et je questionne la pertinence de cette structure.

Le ministre dit: Il faut que le même droit s'applique partout. J'espère que le même droit s'applique partout. Moi, je ne suis pas juriste, je ne suis pas avocate, je ne suis pas juge, mais, jusqu'à nouvel ordre, c'est le même droit qui s'applique partout. Il s'applique différemment, bien entendu. Je présume que n'importe quel juge, qu'il soit dans n'importe quelle région du Québec, va prendre en considération le contexte, va prendre en considération la preuve, va écouter les témoins. Ça se passe de la même façon, sauf qu'il y a une certaine flexibilité qui correspond à la réalité du milieu et que vous voulez enlever par ce projet de loi, parce qu'il y aura une certaine uniformisation du processus décisionnel en matière de justice dans toutes les municipalités, abstraction faite si c'est des petites, des grosses, des moyennes, etc.

Mais, moi, je trouve que ça enlève, en fin de compte, tout l'aspect de l'adaptation de la justice au contexte dans lequel vit la communauté et se vit aussi cette justice-là. Alors, M. le Président, je suis vraiment loin, loin d'être rassurée par rapport aux propos qui sont tenus par le ministre, en tout cas de ce que j'ai entendu de lui depuis qu'il donne des réponses à mon collègue.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'article 5 est adopté?

M. Ménard: Adopté, M. le Président.

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 6.

M. Ménard: «Le mandat du juge en chef est de 7 ans et il ne peut être renouvelé.

«Il demeure en fonction malgré l'expiration de son mandat jusqu'à ce qu'il soit remplacé.»

Je pense que c'est une proposition qui est claire en soi, qui n'a pas besoin d'explications.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, dans l'article 6, il y a...

M. Ménard: Ah! je m'excuse, il y a un 36.1.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 36.1.

M. Ménard: Ah bon! Alors: «Le gouvernement nomme, parmi les juges municipaux et par commission sous le grand sceau, le juge en chef des cours municipales.»

Je pense qu'encore là, c'est une proposition qui est claire et qui a besoin de peu d'explications.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Questions ou commentaires?

M. Mulcair: Bien, de notre côté, M. le Président, voilà qu'on arrive dans le vif du sujet. C'est la création de cette nouvelle structure, de ce nouveau rôle, de ce nouveau personnage qui va être introduit sur la scène de l'administration de la justice au Québec au niveau municipal. Et de notre côté, il n'y a rien qu'on a entendu dans les réponses du ministre jusqu'à date qui nous a convaincus de la nécessité de la démarche. Le ministre, tout à l'heure, disait: Voici l'article 6. En fait, l'article 6 apporte l'ajout d'un nouvel article: 36.1, 36.2, 36.3, 36.4 et 36.5 avec six sous-alinéas, à la loi en question. C'est une indication concrète de ce que nous sommes en train de faire ici, sur proposition du gouvernement du Parti québécois, de dire: On alourdit ce qui existe déjà, on est à court d'arguments pour justifier cet ajout et on est prêt à procéder un par un, toujours sous réserve des mêmes objections qu'on a formulées jusqu'à maintenant.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, est-ce que 36.1 est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Sur division.

M. Ménard: Adopté. 36.2. «Le mandat du juge en chef est de 7 ans et il ne peut être renouvelé.

«Il demeure en fonction malgré l'expiration de son mandat jusqu'à ce qu'il soit remplacé.»

Je pense que créer un poste de juge en chef, il fallait mettre la durée d'un mandat. C'est le même que pour tous les autres juges en chef.

M. Mulcair: Mêmes commentaires de notre côté, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division.

M. Ménard: L'article 36.3.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): À 36.3, il y a un amendement.

M. Ménard: D'abord, l'amendement vise le deuxième alinéa de l'article 36.3. Alors, à 36.3, le premier alinéa expose bien la légèreté, tellement petite d'ailleurs qu'on confond l'animal adulte avec un embryon, dans certains milieux, jusqu'à ce qu'on comprenne véritablement la nature du projet. C'est que le juge en chef va continuer d'exercer ses fonctions de juge municipal pendant la durée de son mandat, comme d'ailleurs le juge en chef de la Cour suprême du Canada ainsi que le juge en chef du Québec qui préside la Cour d'appel du Québec, qui continue d'exercer ses fonctions de juge de la Cour suprême, dans un cas, et de juge de la Cour d'appel, dans l'autre. Et justement, exerçant ses fonctions de juge municipal, il ne coûtera rien de plus à la municipalité qui aura l'honneur, car je suis convaincu que beaucoup de municipalités trouveront que ce sera pour elles un honneur que d'abriter le juge en chef des cours municipales. Mais, justement, le travail supplémentaire qui lui sera demandé sera payé par le gouvernement pour atteindre le même prix, comme on le verra plus loin, qu'un autre, que les juges, je pense, coordonnateurs... que les juges en chef adjoints de la Cour du Québec.

Maintenant, le deuxième alinéa, c'est celui qu'on cherche à amender parce que, justement, cette disposition qui assure aux contribuables une institution aussi utile à un coût aussi dérisoire n'avait pas sauté aux yeux de M. Laframboise dans les mois où il aurait gardé ce dossier sur son bureau. Alors, pour bien le rassurer, on écrit: «Il exerce ses fonctions de juge en chef à la cour à laquelle il est affecté dans son acte de nomination à titre de juge municipal, s'il en est ainsi convenu par le gouvernement et la municipalité responsable de l'administration de cette cour. À défaut d'entente, il exerce ses fonctions de juge en chef à l'endroit déterminé par le gouvernement.»

L'amendement concerne donc l'endroit où le juge en chef des cours municipales exercera ses fonctions. Il prévoit qu'il exercera ses fonctions à la cour municipale où il est déjà affecté comme juge municipal s'il y a une entente à cet effet entre le gouvernement et la municipalité responsable de l'administration à la cour municipale. S'il n'y a pas d'entente, le juge en chef exercera ses fonctions à l'endroit déterminé par le gouvernement.

Puis enfin, il y a un troisième paragraphe qui est habituel dans ces situations, c'est qu'il continue à exercer ses fonctions même si sa cour est abolie.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

M. Mulcair: On va parler sur l'amendement de notre côté, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ah! oui, oui, c'est possible. Sans problème, monsieur.

(21 h 30)

M. Mulcair: M. le Président, je ne veux pas passer trop longtemps à faire l'exégèse de l'intervention de Mario Laframboise, le président de l'UMQ, mais je pense que ça vaut la peine de s'y attarder quelque peu. La phrase où le ministre semble avoir trouvé tantôt un peu de confort est un peu moins claire que ce qu'il semblait croire. «En effet, la création d'une fonction de juge en chef des cours municipales - nous écrit M. Laframboise - nous apparaît comme l'embryon d'une nouvelle structure qui ne pourrait répondre adéquatement aux récriminations et problèmes soulevés par les élus municipaux dans la gestion de ce service municipal.» Il faut présumer que même Godzilla a commencé comme embryon. Mais le point est dans la lettre de M. Laframboise, M. le Président. C'est que, M. Laframboise étant un homme d'expérience en matière gouvernementale, en matière de structure, en matière de bureaucratie, il est en train de nous servir un avertissement, il est en train de dire: Ça a l'air d'être juste le début de votre patente, à vous autres, c'est l'embryon, c'est le début, on amorce quelque chose, puis je ne suis pas sûr que ça répond adéquatement aux problèmes qui sont soulevés. C'est ça que nous dit M. Laframboise.

Alors, merci beaucoup, par votre entremise au ministre, d'avoir partagé avec nous cette révélation, que l'embryon, c'est le début. C'est sûr. Mais c'est exactement ce qui inquiète l'Union des municipalités du Québec, que la création de cette nouvelle structure, ce ne soit qu'un début. C'est ça qu'ils sont en train de nous dire, c'est ça qui les inquiète. Ça va être quoi d'autre?

Puis, M. le Président, si on regarde le sous-amendement que vient de nous présenter le ministre de la Justice, il va vite réaliser que M. Mario Laframboise, le président de l'UMQ, a raison d'être inquiet parce que, loin d'être rassurante, sa modification est plutôt préoccupante. Regardons-la, M. le Président.

L'article 36.3 proposé par le projet de loi se lisait comme suit à son deuxième paragraphe: «Il - le juge en chef - exerce ses fonctions de juge en chef à la cour à laquelle il est affecté dans son acte de nomination à titre de juge municipal ou à tout autre endroit que le gouvernement détermine.»

Maintenant, qu'est-ce qu'on va dire? «Il exerce ses fonctions de juge en chef à la cour à laquelle il est affecté dans son acte de nomination à titre de juge municipal, s'il en est ainsi convenu par le gouvernement et la municipalité responsable de l'administration de cette cour.»

Ça va bien. Ça a l'air d'être de la flexibilité, de la bonne entente. Qu'est-ce qu'on dit, après? À défaut d'entente, c'est le gouvernement qui décide. C'est ça que ça dit.

Je lis la phrase au complet pour que personne ne me dise que je l'ai oubliée: «À défaut d'entente, il exerce ses fonctions de juge en chef à l'endroit déterminé par le gouvernement.» Bang!

M. le Président, le ministre a beau dire que c'est un exemple de mouvement de sa part, à notre point de vue, ça ne répond pas aux préoccupations qui sont exprimées. Et ça démontre, au contraire, la détermination de la part du gouvernement de garder le rôle prédominant là-dedans. C'est exactement ce qui inquiète Mme Simard de l'UMRCQ, et évidemment, on vient de le citer, c'est ce qui préoccupe M. Laframboise de l'UMQ.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Autres commentaires? Ça va? Alors, est-ce que l'amendement à l'article 6, modifiant l'article 36.3, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien. Est-ce que l'article 36.3...

M. Mulcair: Sur l'article, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'article...

M. Mulcair: Non, j'aimerais parler sur l'article. On vient de procéder à l'adoption sur division de l'amendement. Maintenant, moi, je voudrais me prononcer sur l'article.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien. Allez-y.

M. Mulcair: Je tiens juste à soulever un point que le ministre a fait remarquer tout à l'heure et que j'ai trouvé regrettable. Il a parlé d'un coût aussi dérisoire, la création de cette nouvelle structure. Un coût aussi dérisoire. Nous, on ne trouve pas ça, un coût dérisoire, M. le Président. On parle de dizaines de milliers de dollars pour des bureaux, on parle de dizaines de milliers de dollars en secrétariat. Puis, n'en déplaise au ministre, notre calcul n'est pas le sien. Lui, il évalue ça à 45 000 $. Au bas mot, ça va être 45 000 $ de plus pour cette nouvelle structure, juste en salaires, additionné aux autres choses.

On regarde par ailleurs que les gens qui ont pris la peine d'étudier ça en détail et qui nous ont fait des commentaires, notamment Mme Simard, notent - je suis à la page 4 du mémoire de l'UMRCQ, en bas de page, elle dit: «Comme la notion de dépenses de soutien administratif n'est pas définie, la municipalité aura à assumer les dépenses réclamées à ce titre par le juge en chef et elle ne sera remboursée que dans la mesure établie par décret, donc peut-être partiellement.»

M. le Président, dans un premier temps, je ne pense pas que ce soit correct, à l'époque où on vit, de dire qu'une dépense de plusieurs dizaines de milliers de dollars, c'est un coût dérisoire. Peut-être que le ministre voit les choses de cette manière-là, pas nous. Moi, je reçois, à mon bureau de comté, comme tous les députés d'ailleurs, des gens qui sont refusés à l'aide juridique, qui ne peuvent pas se permettre un avocat. Ces coupures-là font mal au monde ordinaire, aux gens qui avaient auparavant les services. Et c'est le service qui est en train d'être coupé. Je trouve ça cavalier d'avoir fait cette référence-là à un coût aussi dérisoire.

Par ailleurs, pour le deuxième point, on aimerait bien entendre le ministre parce que, de notre côté, on n'a rien entendu jusqu'à date qui réponde à cette préoccupation de Mme Simard. C'est tout.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): C'est tout? Commentaires?

M. Ménard: On n'a pas de commentaires.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, je viens de prendre connaissance du document qui vient de nous être distribué. Je fais référence ici à la lettre du Barreau du Québec en date du 29 mai 1998 adressée au ministre.

Et, à la page 2, je cite: «Nous constatons l'intérêt du gouvernement à vouloir avoir un meilleur fonctionnement des cours municipales en rattachant les juges à une structure de coordination qui favorise l'encadrement des activités de ces derniers. Cependant, nous pensons que la fonction de représentation des juges auprès des diverses autorités et des organismes concernés est inopportune. À notre avis, cette disposition fait double emploi avec la Conférence des juges municipaux, qui a jusqu'à maintenant toujours exercé ce rôle.»

Donc, ça confirme l'argument que mon collègue et moi-même avons apporté, à l'effet que c'est une structure de plus, une duplication.

«Nous pensons que cette fonction est en contradiction avec le rôle confié au juge en chef lorsqu'il doit veiller au respect de la déontologie judiciaire, au perfectionnement des juges municipaux et gérer le fonctionnement des cours municipales. En conséquence, le Barreau du Québec serait beaucoup plus à l'aise si cette fonction était laissée au libre exercice de la Conférence des juges municipaux.»

Qu'est-ce que le ministre répond au Barreau du Québec par rapport aux commentaires qui sont émis sur ce point-là?

M. Ménard: Nous en avons tenu compte. Et vous verrez qu'à 36.5 nous proposons un amendement pour répondre à cette préoccupation du Barreau. Vous aurez remarqué cependant que le Barreau, lui, trouve que c'est une bonne idée, quand il parle de «l'intérêt du gouvernement à vouloir avoir un meilleur fonctionnement des cours municipales en rattachant les juges à une structure de coordination qui favorise l'encadrement des activités de ces derniers».

Mme Houda-Pepin: On peut être d'accord avec une idée, mais pas nécessairement avec la façon de l'appliquer.

M. Ménard: Exactement. Donc, eux, ils trouvent que c'est une bonne chose d'avoir un juge en chef qui assure «une structure de coordination qui favorise l'encadrement des activités de ces derniers», comme le rapport Hétu, comme la Conférence des juges municipaux et, à date, comme tous ceux qui ont compris le projet de loi, dont n'est pas M. Laframboise. Mais je suis certain que, quand M. Laframboise le comprendra, il va être d'accord.

Mais, quant à la façon, nous en tenons compte dans 36.5, comme d'ailleurs nous tenons compte des suggestions faites par Mme Simard au bas de la page 4 et au haut de la page 5. Et nous verrons, à l'article 21 du projet de loi, que nous apportons aussi une modification pour tenir compte de ces préoccupations.

Mme Houda-Pepin: Mais je pense...

M. Ménard: Vous voyez, quand les gens critiquent le gouvernement avec un véritable esprit d'améliorer la législation, nos oreilles sont plus réceptives que quand, systématiquement, vous faites semblant de ne pas comprendre pour critiquer sur n'importe quoi. Et ça s'applique à la majorité des critiques que j'ai entendues ce soir de la part de l'opposition, ce qui est...

Mme Houda-Pepin: M. le Président, c'est le...

M. Ménard: ...une attitude différente et regrettable, remarquez...

Mme Houda-Pepin: Une question de règlement...

M. Ménard: ...parce que vous perdez toute crédibilité pour convaincre des amendements que vous pourriez apporter.

(21 h 40)

Mme Houda-Pepin: M. le Président, je constate que le ministre a la peau sensible parce qu'il n'est même pas capable de supporter une critique constructive, d'une part. Deuxièmement, au lieu d'essayer de comprendre le point de vue qu'on lui amène, il fait un procès d'intention. Ce n'est pas le cas du tout, ce que vous avez interprété, c'est votre compréhension et elle est malheureusement erronée. Et, troisièmement, vous venez de dire que M. Laframboise n'a pas compris le projet de loi. Moi, je trouve que c'est une insulte à l'intelligence de M. Laframboise. M. Laframboise n'est pas qu'un seul individu et, même s'il n'était qu'un seul individu, il est muni d'une intelligence qui lui permet de lire et de comprendre un projet de loi.

Or, il se trouve qu'il représente une organisation qui, elle aussi, est dotée de ressources, y compris de ressources juridiques, de gens qui sont capables de rendre intelligible un texte de loi, de le décortiquer, de l'analyser, de le critiquer, de le commenter et de le bonifier, s'il y a lieu. Donc, moi, ce que je trouve, c'est que le ministre, au lieu d'être à l'écoute des commentaires qui lui sont présentés par les différents organismes et par l'opposition, il prend ombrage de tout ce qu'on lui dit, il a la peau très sensible, et il essaie de faire de la diversion au lieu d'avoir une attitude constructive, de prendre le positif dans ce qui lui est présenté et de voir à améliorer le projet de loi, puisqu'on est devant un projet de loi, de toute façon, qu'il a présenté et que la majorité va faire qu'il va le faire voter. Mais, nous, cela ne nous soustrait pas à notre rôle de vigilance et d'opposition constructive qui va faire tout ce qui est humainement possible pour voir qu'un projet de loi, avant d'être adopté, soit dans l'intérêt des citoyens. Puis on est là pour ça, pour dire ce qu'on pense au ministre.

M. Ménard: ...prouvé exactement le contraire, je vous expliquais le contraire. Je vous montrais l'attitude que j'ai à l'égard des différentes critiques qui nous ont été apportées de façon constructive pour vous démontrer, par la somme des amendements que nous présentons, que nous savons en tenir compte. Mais...

Mme Houda-Pepin: Mais vous semblez prendre...

M. Ménard: ...ce n'est pas le cas quand, systématiquement, n'est-ce pas, vous prenez l'envers de ce que l'on veut dire, vous faites semblant de ne pas comprendre, vous comparez des structures qui coûtent 40 000 $ à des structures qui coûtent des millions, pour ne pas dire des milliards, vous laissez entendre que le sort des gens à l'aide juridique serait amélioré du fait qu'il n'y aurait pas de juge en chef des cours municipales parce que le gouvernement disposerait d'une somme faramineuse d'environ 50 000 $ à consacrer de plus à l'aide juridique. Je veux dire, ce genre d'exagération... Je pense que je vais effectivement me calmer. Ma meilleure réponse à ces choses-là, c'est probablement de les ignorer, quoique mes oreilles restent toujours ouvertes aux suggestions constructives, comme je vous en ai donné la preuve à bien d'autres commissions parlementaires que vous avez attaquées avec un autre esprit que celui-ci, et comme d'ailleurs, je pense, je vais le démontrer à toutes les personnes qui nous ont fait des critiques constructives.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, le ministre...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ceci étant dit, autre élément sur l'article 36.3 précisément?

Mme Houda-Pepin: Oui, juste pour répondre aux commentaires du ministre, M. le Président. Je constate que le ministre a une très mauvaise attitude face au travail des parlementaires. Il prend ce qui fait son affaire et il refuse d'entendre les critiques quand elles ne vont pas dans le sens de ce que, lui, il veut entendre, et ça, c'est très regrettable. Venant d'un ministre de la Justice, c'est encore inquiétant.

Ceci étant dit, M. le Président, nous, on essaie d'améliorer le projet de loi, on essaie de dire au ministre que les structures, ça participe de la même philosophie. Qu'elles coûtent 1 000 000 $ ou 10 000 000 $, qu'elles soient grosses ou petites, quand on a la manie et la maladie de la structurite, comme c'est le cas de ce gouvernement, alors, c'est la multiplication des petits pains avec la multiplication des structures. On en trouve partout, au niveau régional, au niveau local, au niveau provincial. Dans tous les domaines, c'est la même philosophie, parce que, au lieu de régler les problèmes par des moyens appropriés, bien, on crée des structures en se donnant l'illusion qu'on a réglé les problèmes. Ça, le ministre, il faut qu'il le comprenne, il faut qu'il l'entende aussi.

M. Ménard: Nous répondons à 10 ans d'attente, à la suite d'un gouvernement qui ne savait pas prendre de décisions. Nous prenons des décisions.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'article 36.3, tel qu'amendé...

M. Mulcair: Sur l'article 36.3, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui.

M. Mulcair: Le deuxième alinéa de 36.3, tel que formulé à l'heure actuelle, contenait un problème, et le ministre tente de répondre à cette difficulté avec l'ajout d'un nouveau paragraphe qui viendra remplacé le 36.3, deuxième.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Lequel amendement a été adopté sur division.

M. Mulcair: Exact, M. le Président. Mais ce que je tente de dire quand même, puisque c'est mon droit de parole sur 36.3 qui est en cause ici, c'est que lorsque le ministre fait ce remplacement-là, ce qu'il est en train de faire, c'est de s'assurer que c'est le gouvernement qui garde le dernier mot.

Pour revenir à ce que le ministre vient de dire dans le cadre de son analyse de l'article 36.3, en disant que l'opposition compare des structures qui n'ont rien à voir parce qu'il y en a une qui coûte très cher et l'autre moins cher, ça doit être sa fatigue parce que le ministre n'a pas réalisé que ce que nous avons dit tout à l'heure, ce n'est pas que cette nouvelle structure coûte la même chose, par exemple, que le Tribunal administratif du Québec. Ce que nous avons tenté de lui faire comprendre, en vain, de toute évidence, c'est que la tendance de son gouvernement, la tendance lourde de son gouvernement, c'est d'inventer des structures, de les justifier en disant: Vous savez, c'est une bagatelle, ou, dans le cas qui nous occupe: C'est un coût aussi dérisoire, c'est un bargain, cette affaire-là, et, après, on voit ça monter, monter, monter.

On a fait ça avec le Tribunal administratif du Québec, du côté de Parti québécois. On nous a dit: C'est un bargain, on va prendre un tas d'entités qui décident dans le domaine du droit administratif et on va toutes les fusionner, encore une fois, sans tenir compte de leur spécificité, mais ça va être une bonne chose, ça va sauver de l'argent. Ça va coûter énormément plus cher, des millions, dans ce cas-là.

Loin de tenter de convaincre le ministre que la somme dérisoire, à ses dires, changerait le pot global de l'argent disponible à l'aide juridique, ce qu'on tente de lui faire comprendre c'est la chose suivante. C'est que, lorsqu'on a un cas comme Mme Sylvie Bernier, cette mère de plusieurs enfants dont un des enfants avait une cause valable à faire valoir devant les tribunaux, mais qui ne pouvait pas y arriver parce qu'elle avait été refusée à l'aide juridique parce que le sujet n'était plus couvert, même si la famille était admissible par ailleurs, on dit que c'est une illustration du fait que, lorsqu'on parle de services à la population avec l'argent qui vient de la population, on a un devoir, comme dit si bien ma collègue la députée de La Pinière et, n'en déplaise au ministre de la Justice, avec sa peau sensible, on a le devoir de s'assurer qu'on est en train de faire la meilleure dépense possible de cet argent du public.

Alors, il a beau se taper les bretelles en disant: C'est un bargain, c'est un coût dérisoire, le fait est que, pour Mme Bernier, les 50 000 $ qu'on est en train de dépenser inutilement ici, auraient pu servir à ce qu'elle puisse se pourvoir devant les tribunaux et obtenir justice. Et il n'y a rien de drôle là-dedans, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que 36.3, tel qu'amendé, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 36.4.

M. Ménard: C'est un article qui va de soi, une fois que la fonction est créée, pour être appliqué dans les circonstances décrites à l'article.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Des questions ou commentaires?

M. Mulcair: La question est de savoir, à 36.4, qui prévoit ce qui suit à son premier alinéa: «En cas d'absence ou d'empêchement du juge en chef, il peut être remplacé par un autre juge municipal nommé par le gouvernement pour exercer les fonctions du juge en chef jusqu'à ce que celui-ci reprenne l'exercice de ses fonctions ou qu'il soit remplacé», si la personne reçoit la même rémunération pendant cette période-là. Est-ce que c'est prévu, par ailleurs?

M. Ménard: C'est prévu plus loin. À 49.1, c'est prévu.

M. Mulcair: D'accord.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): L'article 36.4 est-il adopté?

M. Mulcair: Non, attendez, M. le Président, on va prendre la référence qu'on vient de nous faire.

(Consultation)

M. Mulcair: Alors, en lisant 49.1 en rapport à 36.4, M. le Président, la question demeure entière pour savoir, la personne...

(21 h 50)

M. Ménard: Deuxième alinéa de 49.1.

M. Mulcair: Oui. La personne qui remplacerait, en application du deuxième alinéa de 36.4, pour une période d'un mois et demi, mettons, cette personne-là n'aurait droit à aucune rémunération additionnelle.

M. Ménard: C'est le deuxième alinéa de l'article 49.1.

M. Mulcair: Non, avec respect, ça ne couvre pas ce cas-là, parce que le deuxième alinéa de 49.1 ne couvre que le premier alinéa de 36.4.

M. Ménard: Non.

M. Mulcair: Si. «Le gouvernement fixe également, par décret, la rémunération additionnelle à laquelle a droit le juge nommé en vertu du premier alinéa de l'article 36.4...», ce qui couvre celui qui est nommé par décret du gouvernement. Mais quelqu'un qui viendra le remplacer pendant un mois et demi n'a pas droit, d'après notre lecture, sauf erreur, à cette rémunération additionnelle, à moins que ça...

M. Ménard: Lisez le premier alinéa de 36.4.

(Consultation)

M. Mulcair: Ça va.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ça va? Est-ce que 36.4 est adopté?

M. Mulcair: On aimerait quand même comprendre le jeu entre 36.4, premier et deuxième, M. le Président, pour ce qui est de celui «qui est nommé par le gouvernement pour exercer les fonctions du juge en chef jusqu'à ce qu'il reprenne l'exercice»...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): C'est différent.

M. Mulcair: ...et celui «pour exercer jusqu'à ce» qu'il reprenne l'exercice. Oui.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): La seule différence, M. le député de Chomedey, c'est que, dans le premier cas, c'est le gouvernement qui le nomme, dans le second cas, c'est le juge en chef qui se nomme un remplaçant pour moins de 45 jours.

M. Mulcair: Est-ce que c'est la compréhension du ministre?

M. Ménard: Oui.

M. Mulcair: Auquel cas, je reviens à notre lecture de 49.1, juste pour m'assurer qu'on est tous sur la même longueur d'ondes. Alors, le 36.4, on va le lire d'un trait pour que l'on soit tous du même avis sur ce que c'est en train d'opérer comme changement: «En cas d'absence ou d'empêchement du juge en chef, il peut être remplacé par un autre juge municipal nommé par le gouvernement pour exercer les fonctions du juge en chef jusqu'à ce que celui-ci reprenne l'exercice de ses fonctions ou qu'il soit remplacé.»

Donc, on peut imaginer un cas qui peut même être plus court que 45 jours, mais où le juge en chef doit être remplacé: maladie subite, quelque chose qui exige une intervention chirurgicale. Donc, c'est le gouvernement qui va pourvoir à son remplacement, même à l'intérieur de 45 jours, s'il n'est pas en mesure physiquement d'y pourvoir lui-même. On s'entend, M. le Président?

Dans le deuxième cas, on peut imaginer un juge en chef qui quitte pour fins de vacances, par exemple, n'est-ce pas? Il est en train de prendre quatre ou cinq semaines de vacances. Il tomberait sous le coup du deuxième alinéa de 36.4. D'accord? «Toutefois, en cas d'absence ou d'empêchement du juge en chef pour une période de moins de 45 jours, ce dernier - il faut entendre, c'est notre lecture aussi, comme vous, M. le Président, que «ce dernier» réfère au juge en chef, non pas au gouvernement, dans le paragraphe antérieur - désigne parmi les juges municipaux un juge pour exercer ses fonctions de juge en chef jusqu'à ce que celui-ci reprenne l'exercice de ses fonctions.»

Donc, en vertu de 36.4 deuxième alinéa, notre juge en chef vient de quitter, en vacances pour six semaines, sept semaines - une bonne fonction, celle-là - il est parti pour un peu moins de 45 jours, c'est lui-même qui décide qui va le remplacer pendant ce temps-là.

On réfère à 49.1. C'est là où le ministre nous a envoyé tout à l'heure, au premier alinéa. On dit: «Le gouvernement fixe, par décret, la rémunération additionnelle attachée à la fonction de juge en chef, laquelle ne peut être inférieure au traitement et à la rémunération additionnelle que reçoit un juge en chef adjoint de la Cour du Québec. Toutefois, la rémunération additionnelle du juge en chef est réduite du montant de la rémunération qu'il reçoit à titre de juge suivant l'article 49.»

C'est notre discussion de tantôt, où le ministre a plaidé que c'était 45 000 $ et pas la somme qui paraissait.

«Le gouvernement fixe également, par décret, la rémunération additionnelle à laquelle a droit le juge nommé en vertu du premier alinéa de l'article 36.4 pour remplacer le juge en chef en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci.»

Je veux juste m'assurer qu'on est tous sur la même longueur d'ondes là-dessus. Est-ce que le ministre peut nous dire, dans le deuxième cas, 36.4, deuxième alinéa, c'est le juge en chef qui nomme son remplaçant pour six semaines... Six semaines, oui, ça serait le maximum, sept ça serait un peu trop. Il nomme son remplaçant pour six semaines. Où est-ce qu'on détermine son salaire additionnel? On est dans 36.4, deuxième alinéa. Je veux m'assurer qu'on suit, là-dessus.

M. Ménard: On a estimé que ce sont des fonctions qui ne demandent presque pas de temps, dans ces circonstances-là, et qu'il ne devrait pas y avoir de rémunération additionnelle.

M. Mulcair: Donc, la référence, le renvoi que le ministre nous faisait tantôt avec insistance sur le fait que la réponse se retrouvait à l'article 49.1 était erroné.

M. Ménard: Non, c'était pour celui qui était nommé par le gouvernement.

M. Mulcair: Non, on était bel et bien, nous, dans 36.4, deuxième. Et le ministre...

M. Ménard: Plutôt que des numéros d'articles, parlons des réalités. Si l'absence du juge en chef dure plus de 45 jours, il est évident qu'il va y avoir plus de travail à faire et que, là, ça vaut la peine de rémunérer quelqu'un. Mais, en bas de 45 jours, désigné par le juge en chef qui est en fonction, on suppose que toutes les grandes décisions que le juge en chef a à prendre, etc., seront prises et que, dans les 45 jours maximum que peut durer son absence, au juge en chef, ce sera très peu de choses qui vont être laissées à un collègue qui, pendant son absence, va le remplacer et que, donc, très probable qu'il trouvera facilement un collègue qui sera prêt à assumer ce peu de choses sans rémunération. Parce que c'est ça qu'il faut comprendre, voyez-vous.

Vous, évidemment, vous avez dans l'idée que c'est une grosse structure, que ça va devenir une grosse affaire. Nous, on sait que ça va être une chose qui est gérable. C'est vraiment l'utilisation intelligente, maximum des ressources qui sont déjà en place. D'ailleurs, les inquiétudes qui sont manifestées par les représentants du monde municipal sont irréalistes. Ce n'est pas un travail qui va prendre énormément de temps. Il est important, il sera extrêmement utile, il va, à long terme, présenter beaucoup d'avantages, mais ce n'est pas un travail qui va prendre énormément de temps, de sorte qu'un juge municipal pourra très bien l'additionner à ses autres fonctions.

D'ailleurs, si vous voulez, pour avoir une idée, comparez la différence de rémunération qu'il y a entre le juge en chef de n'importe quelle cour et la rémunération des autres juges de cette même cour, regardez le pourcentage puis vous allez voir que c'est un pourcentage qui n'est pas très élevé. Alors, c'est du même ordre. Quand on connaît la structure judiciaire puis quand on connaît ce que c'est qu'un juge en chef, on a une idée du travail qui va être à faire.

Alors, si, en plus, on estime quand même que ça mérite une rémunération additionnelle, parce que, dans ce cas-ci, ce juge devra consacrer tout son temps, il ne pourra pas avoir, comme les autres juges municipaux, de pratique du droit, donc on lui donne une rémunération équivalente à un juge qui occupe des fonctions équivalentes à la Cour du Québec.

Mais, en dedans de 45 jours, on pense bien que ça va être un homme responsable ou une femme responsable qui va occuper cette fonction et qu'elle laissera, quand elle devra laisser la place pour des vacances ou parce qu'elle est malade pour un temps et que sa convalescence prévue est courte, vraiment très peu de choses, comme travail, à la personne qui va la remplacer et que cette personne sera heureuse de le faire sans rémunération supplémentaire.

Alors, c'est pourquoi il y a une distinction selon que c'est le gouvernement qui nomme pour une période de plus de 45 jours ou le juge en chef qui désigne un de ses collègues pour moins de 45 jours. Dans le cas où le gouvernement nomme pour plus de 45 jours, il prévoit une rémunération additionnelle. Dans le cas où c'est pour moins de 45 jours puis que c'est désigné par le juge en chef, il n'y a pas de rémunération additionnelle.

M. Mulcair: Pour ce qui est de l'interprétation erronée qu'avait faite le ministre tantôt, une chose qui est bien dans nos travaux, M. le Président, c'est qu'il y a toujours une transcription verbatim, et ça va être facile de le constater.

Par ailleurs, pour ce qui est de l'argumentation que vient de développer sur le champ le ministre de la Justice, je pense qu'encore une fois, une fois qu'il aura eu l'occasion de lire la transcription de tous ces arguments, il va réaliser, comme nous avons réalisé, qu'il est en train de plaider contre la création de cette nouvelle fonction de juge en chef.

(22 heures)

Il vient de nous dire je ne sais plus combien de fois que c'était quasiment rien, cette affaire-là: Presque pas de différence. Il vient de nous parler, la différence proportionnelle entre le salaire d'un juge à la Cour supérieure, par exemple, et d'un juge en chef, que c'était à peu près du même ordre ici, ce n'est pas le cas. Et il nous dit que - encore une fois en insistant lourdement - ce n'est vraiment presque pas de travail additionnel et que, finalement, ce n'est pas grand-chose, la différence de salaires. On parle de quelqu'un qui va gagner 128 000 $ par année et plus. C'est beaucoup d'argent.

Alors, que le ministre soit là en train de nous dire: Ah! de toute façon, même s'il n'est pas là pour 45 jours, l'autre le ferait parce que ça ne représente presque pas de travail... Moi, M. le Président, je vais me contenter de donner une copie de la transcription du propos du ministre aux autres intervenants. Et je sais que c'est un peu son habitude, il dit: Bien, je me suis fait piéger, j'ai trop parlé, j'ai dit des choses que je n'avais pas l'intention de faire. On l'a vu dernièrement dans l'affaire du juge Dubreuil; il parle, il parle, il parle, il donne son opinion sur quelque chose qui est devant le Conseil de la magistrature. Puis il dit: Ah! je me suis fait piéger par l'opposition. Mais il est gentil, il nous flatte un peu quand même en le disant, il dit: Bien, c'était astucieux, c'était rusé; il est capable, le député de l'opposition, mais il m'a encore piégé. Il n'y a personne qui le piège, sauf lui-même.

Ce qu'il vient de dire là plaide complètement le contraire de ce qu'il espérait. Sur le fond, M. le Président, ça dit: Cette fonction-là, les 130 000 $ par année qui vont avec, ce n'est pas vraiment nécessaire, ça ne représente pas cette charge de travail là. Et tout ce qui nous reste comme mystère maintenant, c'est de savoir quel bon membre de sa formation politique va être nommé à cette fonction-là.

On est prêt à procéder au vote sur 36.4, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que 36.4 est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Bien. L'article 36.5. Il y a un amendement.

M. Ménard: À 36.5, il y a un amendement proposé. Cet amendement, justement, tient compte des remarques du Barreau et de l'UMRCQ qui craignaient justement que cette fonction puisse entrer en contradiction avec les autres responsabilités du juge en chef, notamment en matière de perfectionnement et de déontologie. Alors, cette fonction de représentation continuera d'être exercée par la Conférence des juges municipaux. Donc, nous proposons de supprimer le paragraphe 6° de l'article 36.5 proposé.

M. Mulcair: M. le Président, on va voter sur l'amendement avec le gouvernement parce que ça n'avait pas de bon sens de prévoir ça. Un juge en chef, ce n'est pas un délégué syndical, pour reprendre le terme employé par Mme Simard. Et le thème est développé aussi par le Barreau. Un juge en chef n'est pas là pour faire du lobbying pour et au nom des juges. Une erreur incroyable. Alors, on va voter pour la modification, mais, évidemment, l'article, ça va être sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): L'amendement au paragraphe 6° de l'article 36.5, tel que proposé par l'article 6 du projet de loi, est-il adopté?

M. Mulcair: Adopté.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, nous revenons à 36.5 maintenant.

M. Ménard: Alors, l'article 36.5 proposé énumère les fonctions qu'exercera le juge en chef.

M. Mulcair: M. le Président, de notre côté, on va prendre l'exemple du premier paragraphe, 36.5.1° donc, et on va réitérer quelque chose qui a été soulevé lors de la première lecture en Chambre.

«Le juge en chef a notamment pour fonctions:

«1° d'élaborer, en concertation avec les juges municipaux, des politiques générales des cours municipales et de voir à leur respect.»

Ça, ça préoccupe plusieurs municipalités qui nous ont contactés. Et j'ai donné l'exemple en Chambre de gens... l'exemple venait de plusieurs municipalités qui font ça de cette manière-là. Admettons qu'une politique générale, ce serait de dire qu'un agent de la paix, un policier doit toujours être présent lors des audiences de la cour municipale. Les exemples existent bel et bien - c'est concret, ce n'est pas théorique - de cours municipales qui sont situées... je peux vous en nommer au moins deux, d'expérience, qui sont situées au-dessus de postes de police. Quand on parlait d'une vision bureaucratique, d'une vision qui tend à uniformiser même là où ça fonctionne bien, c'est exactement ce dont on a peur, et on tient à le souligner ici. On a peur qu'avec ce pouvoir-là, sous la rubrique de politiques générales, l'on puisse retrouver une manière d'intervenir qui risquerait d'enlever cette spécificité locale et cette capacité d'adapter. Car, dans la vraie vie, ça ne change pas grand-chose que les policiers soient en bas, dans le poste de police, ou que la gendarmerie soit située en dessous de la cour municipale. Ça ne change pas grand-chose. Alors, on ne voudrait pas qu'en guise d'élaborer des politiques d'ordre général des cours municipales ce juge en chef puisse justement venir occasionner des dépenses additionnelles pour les municipalités ou enlever quelque chose qui existe déjà qui est bien adapté à la situation locale.

Par ailleurs, si on regarde l'intervention qu'a faite le Barreau du Québec auprès du ministre, on dit qu'«on peut supposer que la création de règles de pratique uniformes à travers la province - ça, c'est pour le deuxième paragraphe - serait assujettie à toutes les cours municipales puisse poser...» Je m'excuse, j'ai de la difficulté avec la phrase, je vais la reprendre: «Par ailleurs, on peut supposer que la création de règles de pratique uniformes à travers la province auxquelles seraient assujetties toutes les cours municipales puisse poser certains problèmes tant dans l'organisation matérielle des cours que sur l'acceptation par les juges municipaux de ces nouvelles règles.» Alors, vous voyez, M. le Président, on n'est pas les seuls à avoir cette crainte-là, c'est partagé par le Barreau.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Autres commentaires sur 36.5?

M. Mulcair: Si on regarde dans le mémoire qui a été présenté par l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, Mme Simard, la présidente, elle dit, en bas de la page 5 de son mémoire, que «l'UMRCQ aimerait être consultée préalablement à l'adoption de ces politiques et règles de pratique. C'est pourquoi nous demandons l'introduction d'un amendement au projet de loi prévoyant la consultation des unions municipales préalablement à l'adoption de toute politique générale ou règle de pratique ayant une incidence administrative ou financière sur les cours municipales.» On aimerait savoir ce que le ministre répond à Mme Simard là-dessus.

M. Ménard: Bien, je pense qu'il serait préférable qu'il fasse toutes ses remarques, je répondrai d'un seul coup.

M. Mulcair: Pour ce qui est de veiller au respect de la déontologie judiciaire, M. le Président, il manque un peu de détails, mais on attend les remarques pertinentes du ministre là-dessus.

Finalement, on dit que le juge en chef aura pour fonction «de promouvoir, en collaboration avec le Conseil de la magistrature [...], le perfectionnement des juges municipaux». Et un dernier élément est «d'apporter son soutien aux juges dans leurs démarches en vue d'améliorer le fonctionnement des cours municipales».

On voit dans ce dernier paragraphe quelque chose qui s'apparente quand même un peu au volet représentation qui vient d'être enlevé au 6°, et on tenait à exprimer nos préoccupations à cet égard-là. Et on aurait aimé entendre le ministre sur ce dernier point aussi. Est-ce qu'il partage notre préoccupation là-dessus?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le ministre.

M. Ménard: La réponse à la première préoccupation est à l'article, au paragraphe 1° lui-même, c'est «en concertation avec les juges municipaux».

Quant à la deuxième préoccupation, qui réfère à l'opinion du Barreau, le paragraphe cité dit justement que «l'uniformisation des règles de pratique et l'assujettissement des juges municipaux à l'autorité d'un juge en chef sont donc des avantages». C'est ce que pense le Barreau. C'est comme ça que se termine le paragraphe que citait mon confrère pour dire que le Barreau critiquait cette disposition.

Quant à la troisième préoccupation, celle qui concerne l'UMRCQ, je dois signaler que des règles de pratique, de toute façon, doivent être prépubliées dans la Gazette officielle , justement afin que le gouvernement qui doit les approuver reçoive les commentaires adéquats. Ça, ça va être prévu à l'article 18 du projet de loi, dans un amendement que nous allons proposer.

(22 h 10)

M. Mulcair: Ça démontre encore une fois, M. le Président, la pertinence de notre remarque de départ, qu'on aurait eu avantage à connaître les modifications avant de commencer ce soir.

Pour ce qui est de l'interprétation que vient de faire le ministre, il confond juges municipaux et unions municipales. Je me permets de relire la phrase pertinente dans le mémoire de l'UMRCQ: «C'est pourquoi nous demandons l'introduction d'un amendement au projet de loi prévoyant la consultation des unions municipales préalablement à l'adoption de toute politique générale.»

M. Ménard: Je vais répondre que c'est pour ça qu'elles seront prépubliées, qu'il y aura un avis de prépublication de 45 jours.

M. Mulcair: Ce que dit 36.5, premier paragraphe, ça dit que «le juge en chef a notamment pour fonctions d'élaborer, en concertation avec les juges municipaux...» Je pense que le ministre éprouve de la difficulté à comprendre que non seulement ce n'est pas la même chose, mais tout le contraire, c'est extrêmement dangereux, et c'est confondre, c'est jouer dans la séparation des pouvoirs que de dire que les unions municipales, qui sont là pour représenter les intérêts des municipalités, et les juges municipaux, qui doivent avoir une certaine distance et une certaine autonomie... Si le ministre confond les deux, on s'inquiète pour leur autonomie.

Finalement, pour ce qui est de la compréhension que pouvait avoir le ministre du propos du Barreau, qui vient à la page 3, il a effectivement lu le dernier bout de phrase qui dit que certaines choses peuvent être des avantages. Alors, pour éviter toute ambiguïté, je vais me permettre de lire le paragraphe au complet. «Par ailleurs, on peut supposer que la création de règles de pratique uniformes à travers la province auxquelles seraient assujetties toutes les cours municipales puisse poser certains problèmes tant dans l'organisation matérielle des cours que sur l'acceptation par les juges municipaux de ces nouvelles règles.» Point. Nouvelle phrase: «Compte tenu des modifications qui sont de plus en plus importantes au Code criminel - nouvelle phrase, nouvelle idée, on parle du Code criminel maintenant - et qui créent notamment plusieurs infractions pouvant être poursuivies en vertu de la partie XXVII du Code criminel, l'uniformisation des règles de pratique et l'assujettissement des juges municipaux - dans le domaine criminel - à l'autorité d'un juge en chef sont donc des avantages.» Deux idées différentes.

M. Ménard: Bien, voyons donc!

M. Mulcair: Mais, au début, on dit que, sur le plan de l'organisation matérielle, ça peut poser certains problèmes. C'était exactement notre propos quand on lui a cité l'exemple...

M. Ménard: On peut penser, mais l'uniformisation est un avantage.

M. Mulcair: ...de la cour municipale située au-dessus de la gendarmerie.

M. Ménard: C'est exactement. Ils disent: On pourrait penser ou on peut penser que la création de règles de pratique uniformes causerait des problèmes. Mais, à cause de ce qu'ils expliquent, ce serait un avantage.

M. Mulcair: Je laisserais au ministre sa propre interprétation.

M. Ménard: D'ailleurs, il suffit d'avoir pratiqué un peu devant les cours municipales pour le savoir...

M. Mulcair: Je vais laisser le ministre se conforter avec sa propre interprétation.

M. Ménard: ...que des règles de pratique préparées par des greffiers, vous savez, ce n'est pas ce qu'il y a de plus souhaitable.

M. Mulcair: Face à des arguments aussi bien présentés que ceux-là, M. le Président, on est aussi bien de procéder au vote.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que 36.5, tel qu'amendé, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Nous sommes maintenant rendus à l'adoption globale de l'article 6. Est-ce que l'article 6, tel qu'amendé, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 7.

M. Ménard: Il prévoit essentiellement que le juge en chef exerce ses fonctions et celles de juge municipal de façon exclusive.

M. Mulcair: Nous sommes d'accord avec l'interprétation du ministre, mais on aimerait bien savoir qu'est-ce qu'il a en tête lorsqu'il dit: «Toutefois, il - le juge en chef - peut exécuter tout mandat que lui confie par décret le gouvernement»? Est-ce qu'il a des exemples en tête quand il dit ça?

M. Ménard: Ce sera un juge permanent, et c'est un pouvoir qui est donné au gouvernement dans le cas de tous les juges permanents. Et il se pourrait, à un moment donné, qu'on décide ou qu'on trouve utile que le juge en chef des cours municipales fasse une étude et nous donne son opinion, au gouvernement, sur un certain nombre de choses, ou encore qu'une situation particulière se présente et que le gouvernement qui commande l'action du juge en chef des cours municipales... Nous voulons laisser cette liberté, cette souplesse au juge en chef et au gouvernement, qui pourrait se retrouver devant une situation où il aurait besoin de donner un mandat... que lui confierait le gouvernement, comme c'est laissé pour tous les autres juges permanents.

M. Mulcair: Notre question était un peu plus précise que ce qu'on vient d'entendre. On veut savoir si le ministre peut nous donner des exemples. Quelle sorte de mandat pourrait, à son avis, être confié à un juge en chef des cours municipales du Québec par décret du gouvernement?

M. Ménard: Bien, on pourrait lui demander d'étudier une question et de faire rapport au gouvernement. Ce serait évidemment une question qui concernerait les cours municipales. Mais, même, ça pourrait être d'autre chose. Mais ne serait-ce que la première raison justifierait que l'on ne fasse pas exception dans le cas de ce juge permanent à ce pouvoir qui est donné par le gouvernement... au gouvernement dans le cas de tous les autres juges.

M. Mulcair: Est-ce que les légistes qui accompagnent le ministre...

M. Ménard: Ça pourrait être étudier des propositions d'amendements, ça pourrait être...

M. Mulcair: Est-ce que sur le plan légistique, M. le Président, les personnes qui accompagnent le ministre pourraient nous indiquer si le libellé est exactement le même dans le cas des autres juges en chef auxquels on vient de nous référer?

M. Ménard: On avait vérifié, puis je ne crois pas...

(Consultation)

M. Ménard: L'article 132 de la Loi des tribunaux judiciaires dit: «Tout juge peut exécuter tout mandat que lui confie par décret le gouvernement après consultation du juge en chef.»

M. Mulcair: Donc, ici, ça demeure à la discrétion entière du juge en chef lui-même. Il peut. Ou est-ce que le «peut» devient «doit» une fois que le décret est pris? Parce que, dans l'autre cas, il y avait quelqu'un d'autre à qui ce juge est subordonné. Ici, il n'y aura personne d'autre, il n'y aura pas de tampon entre un gouvernement et le juge en chef.

M. Ménard: Mais, généralement, ces choses-là se font avec le consentement du juge en chef, mais comme il est le juge en chef...

M. Mulcair: Oui, effectivement, comme il est le juge en chef, est-ce que c'est pertinent de calquer une autre disposition législative qui prévoit l'existence d'une autre personne qui intervient entre le gouvernement et le juge?

M. Ménard: Bien, on n'a jamais cru bon dans le passé, mais, à ma souvenance, il y a eu des mandats qui ont été donnés au juge en chef de la Cour provinciale, à l'époque.

M. Mulcair: Comme quoi, par exemple?

M. Ménard: Bien, le juge Alan B. Gold s'est bâti une solide réputation de médiateur alors qu'il était juge en chef de la Cour provinciale, et c'étaient tous des mandats qui étaient donnés par le gouvernement.

M. Mulcair: Et notre question demeure entière: Lorsqu'on dit qu'«il - le juge en chef - peut exécuter tout mandat», est-ce qu'il a la discrétion de le refuser, le mandat? Ou est-ce que le «peut» devient «doit» une fois que le décret est pris?

M. Ménard: Généralement, ce genre de chose se fait après consultation du juge en chef et après consultation du juge concerné. Je ne me souviens pas et je ne crois pas que ce soit très utile d'imposer cette exigence au gouvernement, parce que c'est évident que de donner un mandat à quelqu'un qui n'en veut pas, vous ne risquez pas d'avoir un mandat très bien exécuté. Alors, dans le passé, ça fait peut-être, je dirais, plus d'un demi-siècle qu'on vit avec une situation où on peut donner des mandats, puis, généralement, on s'assure que la personne est prête à l'accepter avant de lui donner un mandat. D'ailleurs, si je me souviens bien, le mot «mandat» lui-même dans le Code civil suppose que le mandataire accepte de l'exercer et est prêt à tout moment pendant l'exercice de son mandat de l'exercer. C'est ce qui distingue le mandat des autres contrats consensuels, n'est-ce pas? Pour se maintenir, le mandat suppose que les volontés du mandant et du mandataire se maintiennent.

(22 h 20)

M. Mulcair: Parler de mandant et mandataire dans un contexte d'indépendance des instances judiciaires est, à mon sens, délicat. Ceci étant dit, M. le Président, on est prêt à procéder au vote sur le 7.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'article 7 du projet de loi est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 8. Il y a un amendement.

M. Ménard: Bon. Alors, ici, je voudrais vous signaler que la quatrième ligne n'est pas celle qui apparaît dans votre cahier parce que, malheureusement, le traitement de texte, je pense, prend toute la place qui lui est donnée. Il s'agit de la quatrième ligne du projet de loi tel que présenté à l'Assemblée nationale, donc celle-ci. Quand j'ai lu cet article, j'ai eu une certaine difficulté à le comprendre et j'ai voulu que d'autres n'aient pas la même difficulté. Je me suis aperçu qu'en ajoutant deux virgules le texte serait plus clair. Est-ce que vous avez le texte ici?

M. Mulcair: Nous, on a le texte sur Internet et pas le texte imprimé.

M. Ménard: Bien, voilà.

M. Mulcair: Ce n'est pas la même quatrième ligne non plus.

M. Ménard: Alors, voilà. C'est le système de traitement de texte qui...

Le Président (M. Landry, Bonaventure): «D'exercer ses compétences à la cour à laquelle il a été désigné, - virgule - avant...»

M. Ménard: ...en voulant nous rendre service, des fois, nous nuit dans ce genre de circonstances. Mais, évidemment, ce qui est valide, M. le Président, c'est le projet de loi tel qu'imprimé par l'Éditeur officiel. Je vois que vous l'avez en main, c'est pour ça que je vous l'ai signalé tout de suite d'ailleurs.

Alors, là, si vous l'avez en main, regardez l'article 39.1, vous allez à la quatrième ligne, et, après les mots «a été désigné», vous mettez une virgule, puis vous en mettez une autre après le mot «abolition». Puis là, si vous lisez l'article 39.1, vous avez plus de chances de le comprendre, une fois que les virgules y sont, parce que, justement, «avant l'abolition» ne qualifie pas les mots «a été désigné» qui le précèdent.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, l'amendement 39.1 est-il adopté?

M. Mulcair: Sur division.

M. Ménard: Ces deux virgules, vous n'en voulez vraiment pas des deux virgules?

M. Mulcair: Non, parce qu'on ne veut pas de l'article, alors on ne veut pas de la modification.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ménard: Ça va. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, 39.1 tel qu'amendé, maintenant.

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): L'article 39.2.

M. Ménard: L'article 39.2 proposé permet au juge dont la cour est abolie de soumettre sa candidature à un poste à combler à une cour municipale, auquel cas il sera reconnu automatiquement apte à être nommé juge à cette cour. Je pense que cette disposition améliore considérablement l'indépendance des juges de la cour municipale, tout en ne leur donnant pas, je le reconnais, la même sécurité que les juges de la Cour du Québec. Mais il faut comprendre que, par rapport à la situation antérieure, qui a toujours existé, ça constitue une nette amélioration, parce que ça implique justement que, d'une part, puisqu'il est déjà juge d'une cour municipale, bien, on suppose qu'il est donc apte à être juge d'une cour municipale. Par contre, on ne veut pas le nommer à une cour municipale où il ne voudrait pas aller. Alors, c'est pourquoi il faut quand même qu'il pose sa candidature. Mais, ayant posé sa candidature, il suffit de constater qu'il est déjà juge pour considérer qu'il est apte à être nommé juge et, ensuite, on verra ce qui lui arrive au deuxième article, et là, je pense avoir singulièrement... enfin, que l'Assemblée, à ma suggestion, améliorera sensiblement les conditions d'indépendance d'un juge de la cour municipale.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, est-ce que 39.2 est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Sur division. L'article 39.3.

M. Ménard: Il ne s'agissait pas du juge en chef, hein, là. Il s'agissait d'une disposition qui visait à renforcer l'indépendance des juges municipaux.

Enfin, l'article 39.3 complète ce tableau, car on dit que ce juge dont la cour a été abolie sera considéré en priorité par le gouvernement pour tout autre poste de juge municipal. Alors, c'est un bon équilibre entre la prérogative traditionnelle, toujours exercée en droit anglo-saxon, de l'Exécutif de nommer les juges, mais aussi l'obligation ici de le considérer en priorité. C'est évident que, si on ne le fait pas, il y a un poids politique à payer, un prix politique à payer, ce qui devrait être une incitation à renommer tout candidat qui est satisfaisant.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Je crois qu'actuellement il y a 99 juges municipaux, d'après les données que j'ai, qui sont affectés à 132 cours et régies, etc. Quel est l'impact de ce projet de loi sur les juges qui sont là? On parle de 99. Est-ce qu'il y en a qui vont perdre leur emploi? Combien? Où? Dans quelle région?

M. Ménard: Bien, la réponse à votre première question rend inutile la réponse aux questions suivantes. Non, il n'y en aura pas qui perdront leur emploi à la suite de ce projet de loi.

Mme Houda-Pepin: Alors, quelles sont les motivations derrière les articles du projet de loi qui sont devant nous?

M. Ménard: Bien, c'est parce qu'ils prévoient le cas où des cours municipales sont abolies, ce qui arrive. Ce n'est pas ce projet de loi qui va abolir des cours municipales, mais il y a régulièrement des cours municipales qui sont abolies. Nous n'en avons aboli aucune, mais le gouvernement antérieur en a aboli quelques-unes, les gouvernements antérieurs en ont aboli quelques-unes, pour toutes sortes de raisons. Des fois, c'est à cause de fusions qui créent une plus grande cour. Il faut comprendre qu'il y a certaines de ces cours qui siègent très peu, c'est pourquoi ce sont des juges à temps partiel. Alors, parfois, pour des raisons de meilleure efficacité, enfin les municipalités décident de fusionner et, ce faisant, il y a un juge ou deux qui se trouvent à perdre la cour municipale à laquelle ils se trouvaient.

Mme Houda-Pepin: Mais, derrière cette nouvelle structure que vous proposez par le projet de loi, est-ce qu'il y a aussi une idée de fusion de certaines cours municipales? Est-ce qu'on peut s'attendre à ça comme résultat?

M. Ménard: Pas du tout, c'est absolument indifférent à cette problématique de fusion. Ça ne donne aucune indication ni dans un sens ni dans l'autre. C'est vraiment pour régler... Mais particulièrement les dispositions que nous étudions présentement, qui n'ont rien à voir avec la fonction du juge en chef, les articles que nous étudions présentement sont des articles qui sont vivement souhaités par le milieu pour donner aux juges municipaux une plus grande sécurité et donc une plus grande indépendance. Mais je peux ajouter que, quant à moi, depuis que je suis en fonction, je me suis assuré que tous les juges municipaux qui avaient ainsi perdu leur cour à cause de fusion ou d'abolition de leur cour ont effectivement retrouvé une autre cour municipale.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que 39.3 est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'article 8, tel qu'amendé, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 9.

(22 h 30)

M. Ménard: Alors, cette modification prévoit que, dorénavant, il appartiendra au juge en chef plutôt qu'au ministre de la Justice de désigner parmi les autres juges un juge par intérim pour présider les séances d'une nouvelle cour jusqu'à la nomination par le gouvernement d'un juge pour celle-ci. Alors, on voit déjà qu'il y a un avantage du côté de l'indépendance de la magistrature à avoir un juge en chef. J'imagine que c'est ce qui motive plusieurs organismes à bien recevoir ce projet de loi.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division? Article 10.

M. Ménard: Lorsqu'un juge décède, démissionne, devient incapable ou cesse autrement d'exercer ses fonctions, il est normal maintenant que la municipalité, en plus d'informer le ministre de la Justice, informe aussi le juge en chef.

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division. Article 11.

M. Ménard: Cet article est important. Il introduit dans la Loi sur les cours municipales des critères dont devra tenir compte le juge en chef lors de la désignation d'un juge par intérim, suivant les articles 41 ou 42 de cette loi. Ces deux critères sont les impératifs d'une bonne administration de la justice et d'une gestion efficace des fonds publics qui y sont affectés.

Auparavant, ces situations étaient réglées par entente entre divers juges municipaux, et nous trouvions qu'il pouvait se développer des situations dans lesquelles ils avaient un certain intérêt à s'échanger des bons services. Alors, nous voulons actuellement qu'ils n'aient aucune tentation de ce côté. Et ça sera donc le juge en chef qui désignera les juges par intérim pour des motifs qui sont évidemment d'intérêt public.

M. Mulcair: Sur division.


Juge suppléant

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division. Article 12. Il y a un projet d'amendement modifiant l'article 46.

M. Ménard: Oui. D'abord, le but de cet article vise à ce que, évidemment, ce soit une des fonctions aussi du juge en chef de nommer les juges suppléants et, encore une fois, en vertu des mêmes critères: une bonne administration de la justice et une gestion efficace des fonds publics qui y sont affectés. Et, encore une fois, nous avions observé que les juges, disons, pouvaient être placés dans des situations où ils étaient tentés d'échanger des suppléances, surtout quand ils arrivaient au maximum de la rémunération qu'ils pouvaient obtenir. Alors, en ayant un juge en chef qui propose les suppléances, nous pensons que ces tentations disparaîtront d'elles-mêmes et que les décisions de suppléance ne seront prises vraiment que dans l'intérêt public.

Mais l'amendement était nécessaire ici parce que, quand même, parfois, les motifs de récusation peuvent être les mêmes pour le juge d'une cour et le suppléant qui a été nommé à cette cour. Alors, il fallait prévoir plus clairement la situation qui arrivait à ce moment-là. Parce que, des fois, la récusation peut avoir une cause commune, notamment la connaissance des parties, et des juges qui habitent la même région peuvent avoir tous les deux les mêmes motifs de récusation. Donc, il fallait à ce moment-là aller chercher un juge ailleurs. Alors, l'amendement clarifie vraiment comment on va nommer ce deuxième juge suppléant, dans ces cas-là, sans compter que l'article, dans son entier, maintenant, prévoira tous les cas où on prévoit la suppléance.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, l'amendement est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Sur division. Est-ce que l'article 46...

Une voix: Article 12.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): L'article 12, tel qu'amendé, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division. Article 13.

M. Ménard: Il précise les droits, pouvoirs et privilèges du juge suppléant et prévoit que, dorénavant, il appartient au juge en chef de révoquer cette désignation.

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division. L'article 14. Il y a, là aussi, un amendement. On a eu l'occasion d'échanger au préalable sur cet article fixant la rémunération du juge en chef.

M. Mulcair: Et que le ministre avait mal compris. Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, l'amendement est adopté sur division. Est-ce que l'article 14, tel qu'amendé, est adopté?

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 15.

M. Mulcair: Sur division.

M. Ménard: Article 16.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 16.

M. Mulcair: Sur division.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): À l'article 14, en passant, il y avait... O.K. Il est adopté en bloc, oui?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, article 15, adopté sur division?

M. Mulcair: Oui.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 16.

M. Mulcair: Sur division.


Fonctionnement de la cour

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 17.

M. Mulcair: Sur division.


Politiques générales et règles de pratique

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Article 18. Nous avons ici un amendement. Oups! Non, l'amendement est à 56.2. Article 18, première section, 56.1.

M. Mulcair: Sur ce point, M. le Président, on est en train d'ajouter, après l'article 56, une section I.1 intitulée Politiques générales et règles de pratique. 56.1 se lirait comme suit: «La majorité des juges municipaux peuvent adopter les politiques générales des cours municipales, soit à une assemblée convoquée à cette fin par le juge en chef, soit par tout autre mode permettant à celui-ci de les consulter. Ces politiques générales doivent être compatibles avec les dispositions de la présente loi.»

Ça renvoie à des discussions qu'on a eues tantôt et au point qui a été soulevé par ma collègue la députée de La Pinière lorsqu'elle a dit qu'elle voulait s'assurer que les manières de faire, les pratiques locales puissent continuer et que ça ne soit pas une vision qui cherche à standardiser pour le plaisir de standardiser.

Je pense qu'on ne saura jamais insister trop là-dessus, M. le Président. Je pense qu'il est extrêmement important que le ministre soit sensible à cette réalité-là. Et ce n'est pas parce qu'une majorité des juges municipaux pourrait décider une chose qu'on va pouvoir l'imposer à l'ensemble des municipalités. Je pense que la suggestion qui est faite par certains des intervenants du monde municipal vaut vraiment la peine d'être écoutée. Ils suggèrent de faire ça d'une manière collaborative et de concert avec le ministère, ici. Ce sont les juges eux-mêmes qui vont décider ça. Et, la nature humaine étant ce qu'elle est, parfois, ils vont prendre des décisions qui vont dans l'intérêt des juges municipaux et pas nécessairement dans l'intérêt des gens qui apparaissent devant les cours municipales. Alors, je pense que ça aurait été sage pour le ministre d'écouter cette suggestion qui a été faite par plusieurs intervenants. Et on aimerait l'entendre là-dessus.

M. Ménard: Bien, d'abord, on est dans un domaine judiciaire, il faudrait peut-être suivre les habitudes judiciaires. Vous savez, les cours de pratique, c'est ce qui reste après la loi et les règlements, c'est relativement peu de choses, mais c'est ce qui reste, qui appartient au juge. Mais, même, ici, on ne prend pas tellement de chances parce que, dans ce cas-ci, vous allez voir, par l'article suivant, l'article 56.2 que nous amendons, nous allons les prépublier et ces règles de pratique devront être approuvées par le gouvernement. Donc, il y aura une période pendant laquelle le gouvernement pourra recevoir les commentaires de l'Union des municipalités, ou, enfin, de toute personne qui voudrait émettre ses commentaires, et en tenir compte avant d'approuver avec ou sans modification les règles de pratique proposées par les juges.

(22 h 40)

Mais, dans toutes les cours, c'est une réunion des juges de ce type qui établit les règles de pratique. Et mon collègue qui, au début de ses interventions, faisait tant confiance et vantait tellement la spécificité et la valeur des juges municipaux, comment peut-il penser qu'ils ne seront pas sensibles non seulement aux besoins de la cour municipale dans laquelle ils siègent, mais aux besoins des citoyens? Je ne crois pas que les juges soient par essence égoïstes et ne pensent qu'à se faciliter la tâche. Les règles de pratique sont faites justement pour qu'il soit facile pour les plaideurs et les citoyens qui s'adressent à la cour de faire valoir leurs droits, de connaître dans quel ordre, sur quel papier, dans quel délai, qui on doit avertir et de quelle façon, et ainsi de suite.

Les mots «politique générale» sont peut-être des mots qui en effraient quelques-uns, mais, il ne faut pas oublier, quand on parle de politique générale, c'est, encore une fois, à l'intérieur des dispositions de la loi et de toutes les lois - il n'y a pas une de ces politiques qui pourrait être contraire à une loi existante - et de la réglementation.

Écoutez, dans peut-être toutes les juridictions anglo-saxonnes et dans la nôtre, nous avons toujours fait confiance à l'assemblée des juges pour élaborer des règles de pratique. Pourquoi ne pas leur faire confiance, dans ce cas-ci? D'autant plus que le résultat de leurs délibérations sera publié et qu'un temps sera donné aux citoyens pour manifester leur opinion au gouvernement avant qu'il ne les approuve.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui, ma collègue la député de La Pinière désire intervenir.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Très bien, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Oui. Est-ce que le ministre pourrait nous donner une illustration concrète de ce que c'est qu'une politique générale? Ça comprendrait quoi exactement, une politique générale d'une cour municipale?

M. Ménard: Par exemple, à quelle heure on siège, quoique cela peut varier d'une cour à l'autre, mais, quand même; la manière de confectionner les rôles d'audience, de façon à accommoder les justiciables, mais justement de façon à ce qu'on puisse les consulter facilement; le format dans lequel on doit présenter les procédures et la façon dont on doit... Est-ce que les procédures écrites sont nécessaires? J'ai parlé du mode d'assignation des témoins, mais je pense même que cela est prévu par la loi et que, par conséquent, il ne pourrait même pas là-dessus déterminer le mode d'assignation des témoins. D'autant plus que, comme je l'ai annoncé, hier, je tiens à ce qu'on adjoigne maintenant au subpoena, au traditionnel subpoena, qui est la convocation à la Cour, un résumé de notre Charte des droits des témoins, mais que je voudrais bien que ça s'applique aux cours municipales comme ailleurs, mais...

Mme Houda-Pepin: Donc, sommes toutes, c'est très technique, c'est vraiment la procédure, comment on doit procéder, les règles de décorum, etc., le scénario dans lequel fonctionne une cour. C'est bien ça, les politiques générales?

M. Ménard: Même le scénario, ça ne va pas aussi loin que ça, parce que le scénario, il est essentiellement prévu par la loi ou par le type de système que nous avons, qui est un système adversaire et qui fait par exemple que la poursuite présente sa preuve avant la défense, que la défense aura le choix de présenter une preuve ou de ne pas en présenter, que, dans sa façon de présenter sa preuve, elle doit le faire d'abord par témoins, que ces témoins sont d'abord interrogés par la partie qui les produit, ensuite par la partie adverse, et ainsi de suite, ce qui est essentiellement le scénario d'un procès. Et tout ça est prévu par le droit en général.

Mme Houda-Pepin: Est-ce que la politique générale serait l'équivalent d'un mode de fonctionnement? Je cherche à comprendre.

M. Ménard: Non plus. Même là, le mode de fonctionnement relève des règles de droit générales. C'est vraiment des détails.

Mme Houda-Pepin: Des détails.

M. Ménard: Oui, mais qui peuvent causer des problèmes procéduriers très embêtants pour les plaideurs lorsqu'ils sont trop différents d'une cour à l'autre. C'est pourquoi il y a vraiment avantage à ce qu'ils soient les mêmes.

Mme Houda-Pepin: Mais, s'ils étaient uniformisés, ça faciliterait la procédure, l'accessibilité à la justice. C'est ça?

M. Ménard: Oui. En tout cas, certainement que ça favorise. Les plaideurs connaîtront rapidement quelles sont les exigences des cours municipales. Par exemple, je pense que les demandes de remise sont prévues par les règles de pratique. On peut aussi déterminer, dans certaines cours, ce qu'on appelle les appels du rôle, où les plaideurs sont convoqués pour les procès à venir, de façon à ce qu'on puisse confectionner les rôles pour s'assurer que les procès que l'on fixe à telle date pourront être entendus, qu'il n'y en aura pas trop mais qu'il y en aura assez pour que la séance soit bien occupée, des choses comme celle-là. C'est vraiment ce qu'on appelle entre avocats de la cuisine, si vous voulez. Mais, comme, vous savez, des fois, les détails de cuisine peuvent faire ruiner complètement le plat, c'est important que...

Mme Houda-Pepin: Donc, si c'est des détails, des règles de fonctionnement, en tout cas, des politiques générales qui amélioreraient le système, pourquoi, à ce moment-là, ça s'appliquerait seulement à la majorité des juges et pas à tous les juges?

M. Ménard: Non, non, non, ce seraient des décisions qui seraient prises à la majorité des juges.

Mme Houda-Pepin: Ah! D'accord.

M. Ménard: C'est pour ça qu'on dit: «La majorité des juges municipaux peuvent adopter les politiques générales des cours municipales...»

Mme Houda-Pepin: C'est ce qui est entendu par l'article, la majorité des juges?

M. Ménard: Oui, mais je comprends la confusion qui a pu se créer dans votre esprit par cette rédaction. Mais, si vous lisez au complet, je pense que vous n'aurez plus de doute, puisque cette approbation doit être faite soit à une assemblée convoquée à cette fin par le juge en chef soit par tout autre...

Mme Houda-Pepin: Vas-y.

M. Mulcair: Je pense que...

M. Ménard: Mais nous avons utilisé un langage qui est courant dans ce genre de situation.

M. Mulcair: ...la question de ma collègue la députée de La Pinière est importante parce que ce qu'elle est en train de soulever, c'est le fait que, contrairement à ce que le ministre pouvait laisser entendre tantôt quand il disait: Non, non, ne vous inquiétez pas, les juges, s'ils ne sont pas d'accord, ils vont pouvoir s'exprimer, ça me surprendrait que les gens raisonnables, etc., ce que ma collègue vient de démontrer très clairement avec les réponses obtenues du ministre, c'est que, malgré une objection formelle d'une partie substantielle des juges municipaux, ils vont être astreints à suivre la règle adoptée par la majorité.

(Consultation)

M. Mulcair: C'est bien ça? M. le Président, tout à l'heure, le ministre disait qu'on est dans le domaine judiciaire. Dans son mémoire, le Barreau rappelle que la Cour suprême confirmait, en 1991, que le système québécois des cours municipales permettant aux juges à temps partiel de continuer à pratiquer le droit satisfaisait aux exigences de l'impartialité institutionnelle prévue à l'article 11d de la Charte canadienne et à l'article 23 de la Charte québécoise. C'est important, ça, parce que c'est sûr qu'on est dans le domaine judiciaire, mais la Cour suprême, en rendant cette décision-là, a reconnu le caractère spécifique des cours municipales. La Cour suprême a reconnu, en fait, qu'on n'avait pas les mêmes exigences pour les cours municipales que pour les autres tribunaux, le reste du domaine judiciaire qu'évoque le ministre. On n'est pas à la Cour supérieure ici, justement.

Alors, les renvois que fait le ministre lorsqu'il nous parle du fait que, dans les autres cours, c'est comme ça, les juges se mettent ensemble, ils décident, ce n'est pas la même chose qu'ici. Ici, la Cour suprême a déjà clairement indiqué qu'elle pouvait tolérer un niveau différent d'indépendance. La Cour suprême nous convie à respecter ces différences dans nos choix.

Ici, à 56.1, on prévoit que «la majorité des juges municipaux peuvent adopter les politiques générales des cours municipales», et elles «doivent être compatibles avec les dispositions de la présente loi». Il n'y a aucune marge pour la spécificité, là-dedans. Il n'y a aucune marge pour les règles individuelles, là-dedans. À moins que le ministre ait une compréhension différente, mais c'est la lecture que nous faisons de ce côté-ci. Alors, on aimerait l'entendre là-dessus.

M. Ménard: Mais, moi, je serais curieux de vous entendre sur ce que vous craignez. Donnez-moi donc l'exemple d'une règle qui serait adoptée dans les règles de pratique par l'ensemble des juges et qui, vous estimeriez, ne serait pas...

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que vous pourriez inviter le ministre à s'adresser à la présidence, conformément à notre règlement?

M. Ménard: Oui, alors, M. le Président, c'est vrai. Je serais plus confortable si je comprenais. Je pense que je pourrais mieux comprendre les objections de l'opposition, s'il me donnait un exemple de règle qu'il...

M. Mulcair: De toute évidence, M. le Président, le ministre ne...

(22 h 50)

M. Ménard: J'imagine, M. le Président, que, si l'opposition veut me comprendre, il faudrait d'abord qu'elle m'écoute.

M. Mulcair: Bien, c'est justement ça, le problème, on n'arrête pas de donner des exemples qu'il ne comprend pas.

M. Ménard: Si on m'interrompt, évidemment, je ne peux pas terminer. Mais on n'avait pas l'air intéressé à me comprendre. Remarquez que je m'en doute depuis le début de cette séance, mais... Parce que je ne vois vraiment pas en quoi... je trouve qu'on fait... On ne fait pas une tempête dans un verre d'eau, on cherche à faire une tempête sur une goutte d'eau, littéralement.

M. Mulcair: M. le Président, si le ministre veut vraiment entendre l'exemple, on va le répéter, parce qu'il s'agit effectivement d'une répétition. Ça fait au moins trois fois qu'on lui fournit le même exemple réel qui nous a été communiqué par des municipalités en ce qui concerne ce projet de loi. L'exemple concret qui nous est donné est le suivant.

Dans la municipalité, il y a une gendarmerie, il y a toujours des policiers, des agents en présence. La cour municipale est située au-dessus. Quand la cour siège, il y a toujours des gendarmes, des agents de police à proximité. Cependant, on ne juge pas nécessaire d'exiger leur présence en cour. À cause d'un événement quelconque, il est décidé par une majorité des juges des cours municipales d'exiger dorénavant la présence constante, lors des séances de la cour municipale, d'un agent de la paix. Ça renvoit aux préoccupations exprimées par l'Union des municipalités du Québec, ça renvoit aux préoccupations exprimées par l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Ils disent: On a peur de cette bibite-là, on a peur qu'en uniformisant vous nous occasionniez des dépenses où on n'aura pas notre mot à dire.

Alors, le ministre, qui dit que l'opposition n'écoute pas, j'espère que cette fois-ci il a écouté, parce que quiconque a suivi nos travaux ce soir l'aurait entendu à plusieurs reprises. Quiconque consultera la transcription de nos débats va pouvoir constater que le même exemple lui a été fourni à plusieurs reprises. C'est un exemple réel. Ce n'est pas de la fiction, ce n'est pas tiré par les cheveux, c'est un exemple concret qui nous a été donné pour illustrer les préoccupations tout aussi réelles du monde municipal. Alors, est-ce que le ministre va les écouter? Et est-ce qu'il va mettre de la souplesse là-dedans pour laisser les gens locaux tenir compte de la réalité locale?

M. Ménard: Alors, c'est vrai, c'est un bon exemple, d'ailleurs, et vous faites bien de le rappeler maintenant, parce que j'avoue que c'est vrai que l'attitude que vous avez prise ce soir rend ma compréhension plus difficile. Je ne crois pas que mon intelligence soit différente de ce qu'elle est habituellement. Probablement que mon caractère peut affecter ma compréhension. Mais c'est un bon exemple. Et les gens qui nous ont regardé siéger ce soir devraient certainement se demander si une décision comme celle-là, à savoir si un policier doit être présent en cour même quand une cour municipale siège au-dessus d'un poste de police, ça doit être pris, ce genre de décision, dans l'atmosphère adversaire qui est celle de nos commissions ou bien s'il n'y a pas un autre lieu où il est préférable de prendre une pareille décision.

Et, à ce moment-là, regardons le processus que l'on propose, à supposer que le nôtre, à regarder la façon dont nous discutons ce soir, ne convainque personne que ce soit vraiment le meilleur endroit pour prendre une pareille décision, ayant tendance à penser que ce serait plutôt les gens qui sont plus impliqués, qui connaissent mieux les problèmes, qui sont les mieux en mesure d'apprécier cette situation qui devraient être appelés à prendre une pareille décision.

Quels sont les gens qui seraient les plus concernés, les gens qui auraient le plus de chances d'être objectifs, les gens qui auraient le plus de chances de ne pas avoir de motifs de politique partisane petite de tuer le temps, de provoquer l'adversaire, de faire des débats inutiles? Quels sont ces-gens-là? Je crois qu'une bonne partie penserait que ce sont les juges qui président les cours municipales, qui ont l'expérience quotidienne, qui en connaissent les problèmes de sécurité qui peuvent juger si, oui ou non, une pareille mesure doit être inscrite dans des règles en cours de pratique. Mais, la nature humaine étant ce qu'elle est et errer étant humain, il se pourrait peut-être que la majorité se trompe. Dès lors, qui devrait décider?

Alors, regarderons l'article que nous allons ensuite adopter pour nous apercevoir que le langage utilisé fait que de telles règles de pratique, fussent-elles prises par des gens plus compétents que nous, plus près de la situation et mieux en mesure de juger des exigences de la sécurité, de concilier ces exigences de la sécurité avec la plus grande efficacité dans l'utilisation des fonds publics et de mettre tout en... tous ces motifs d'intérêt public le plus objectivement possible aussi, sans avoir aucune espèce d'intérêt partisan d'aucune sorte...

Mais, même s'ils se trompaient, alors le résultat de leurs délibérations serait publié. Et, si les municipalités estimaient qu'elles ont, elles, des revendications à faire valoir, bien, elles connaîtraient cette disposition et elles pourraient certainement s'adresser au gouvernement et dire et exposer pourquoi le gouvernement ne devrait pas avoir confiance dans l'assemblée des juges municipaux et les décisions qui ont été prises à leur majorité, et faire valoir si, effectivement, leurs préoccupations financières l'emportent sur les préoccupations de sécurité qui ont animé les juges municipaux. Je pense que c'est la meilleure solution que je vois.

C'est pourquoi je proposerai l'amendement, tout à l'heure, à l'article 56.2, pour justement prévoir qu'il y aura pareille prépublication. Et je crois que ce sera, pour le moment, à moins qu'on me convainque du contraire - je suis capable d'être convaincu du contraire, la preuve c'est que j'ai proposé plusieurs amendements, je suis capable de me rendre à des arguments logiques quand ils sont présentés dans un désir réel d'améliorer la loi - le genre de décision qui doit être laissée au niveau local et aux gens les plus désintéressés, aux gens les plus compétents, aux gens les plus conscients des besoins.

M. Mulcair: On ne saurait être plus en accord avec le ministre. Sauf que, malheureusement pour lui, ce n'est pas ça que dit son projet de loi. Il vient de dire que de telles décisions devraient être laissées au niveau local; c'est exactement notre propos. Mais, en laissant ça entre les mains de la majorité des juges municipaux, ça veut dire que, même si dans votre localité, vous n'êtes pas d'accord, vous venez de perdre droit au chapitre, droit de cité.

M. le Président, le ministre vient de nous renvoyer à la modification qu'il va proposer tantôt à 56.2, de dire que les règles... 56.2 traite des règles de pratique. 56.1 traite des politiques générales. Il nous renvoie à la modification qu'il va proposer à 56.2, qui ferait en sorte que les règles de pratique - non pas des politiques générales, où nous sommes en ce moment - seront soumises à l'approbation du gouvernement.

Si le ministre désire vraiment respecter l'autonomie locale, s'il veut vraiment que les décisions se prennent à ce niveau-là et qu'elles soient respectées, pourquoi alors ne propose-t-il pas justement une modification similaire à ce qui va être proposé à 56.2, ici, à 56.1? Là on le suivrait, là, il serait cohérent, là, son discours tiendrait, car, effectivement, les politiques générales ne pourraient pas entrer en vigueur tant et aussi longtemps qu'elles n'ont pas été entérinées par le gouvernement. On le suit. Si le ministre veut faire la même chose à 56.1 qu'il s'apprête à faire à 56.2, on lui donne raison. Il serait en train de respecter le niveau local. C'est ce qu'il vient de nous dire, à la fin de son intervention, qu'il veut respecter le niveau local.

(23 heures)

Tout à l'heure, en réponse à ma collègue la députée de La Pinière, il a donné d'autres exemples de ce que ce serait, la politique générale. Il a dit à quelle heure on siège. Il a dit la manière de confectionner les rôles d'audience. Si ce sont des choses que le gouvernement juge d'intérêt public et nécessaires, on peut le suivre. Si le gouvernement, après avoir tenu compte de l'avis favorable d'une majorité des juges de la cour municipale, décide que, malgré les objections de certaines autorités locales il va passer outre, on ne peut pas l'empêcher d'exercer son autorité. Mais, ici, on a une majorité des cours municipales qui peut imposer sa volonté à l'ensemble, et ça sera, à notre point de vue, une erreur que de procéder ainsi.

On désire avoir une réaction de la part du ministre sur la possibilité de faire la même chose à 56.1, et ça résoudrait une préoccupation que nous ne cessons de soulever depuis le début de la soirée. On accepterait que le gouvernement maintienne cette responsabilité-là de la même manière qu'il s'apprête à le mettre à 56.2. Soyons cohérents, faisons exactement la même chose à 56.1! Est-ce que le ministre est prêt à faire ça? Auquel cas, M. le Président, une de nos objections majeures vient d'être dissipée.

M. Ménard: Moi, j'ai répondu à l'exemple qu'on m'a donné, et l'exemple qu'on m'a donné m'apparaît relever des règles de pratique.

M. Mulcair: Alors, à ce moment-là, M. le Président...

M. Ménard: C'est vous qui avez choisi l'exemple.

M. Mulcair: ...il me fait plaisir de proposer la modification suivante. À l'article 18 du projet de loi, remplacer la dernière phrase de l'article 56.1 proposé par la suivante:

«Ces politiques sont soumises à l'approbation du gouvernement. Les dispositions de la Loi sur les règlements (chapitre R-18.1), à l'exception de la section V, s'appliquent à ces politiques.»

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Ça m'apparaît recevable. Alors, en fait, en changeant ce qui doit être changé, c'est le même texte que l'amendement à 56.2.

M. Mulcair: Exact. C'est ce que nous souhaitons, M. le Président.

Alors, ayant déclaré notre proposition de modification recevable, M. le Président, on va maintenant y aller sur le fond.

Il nous semble que, si le ministre veut être conséquent avec lui-même, il devrait accepter la modification proposée par l'opposition. Le ministre nous renvoie effectivement à la modification qui va être débattue tantôt, qui ferait en sorte que ce ne serait plus seule la majorité des juges municipaux qui peut adopter les règles de pratique et que cela entre en vigueur. Il garde un pouvoir beaucoup plus clair pour le gouvernement. Et nous souhaitons garder ce même pouvoir, ici, c'est-à-dire que les politiques générales... Le ministre l'a dit tantôt, il a dit: Oui, mais ils pourront toujours faire valoir qu'ils préfèrent leurs règles locales vis-à-vis de la sécurité. Mais, si jamais c'était vraiment ça, effectivement, le gouvernement pourrait assumer ses responsabilités et dire: Bien, on vous a bien entendus, mais on ne voit pas pourquoi on interviendrait.

Avec le 56.1, ici, même s'il y a deux ou trois douzaines de municipalités qui viennent frapper à la porte du ministre, il ne pourra rien faire, car la rédaction proposée de 56.1 a pour effet de priver ces autres municipalités de tout recours. C'est prévu que c'est la majorité des juges qui décide pour l'ensemble, et, à notre point de vue, c'est une erreur. C'est une erreur que le ministre s'apprête à corriger, et on va l'aider, là-dessus. Il s'apprête à la corriger à 56.2. Et on voit vraiment très difficilement pourquoi il ne se rend pas à l'évidence que les arguments qu'il va utiliser tantôt à 56.2 s'appliquent ici.

Si on veut éviter que les municipalités aient à engager des dépenses qui ne sont pas nécessaires dans leur cas spécifique, pourquoi est-ce qu'on ne leur laisse pas l'occasion de faire exactement ce que le ministre prétendait tout à l'heure qu'elles allaient pouvoir faire, c'est-à-dire de faire valoir leur point de vue? Il n'y a aucun mécanisme possible pour elles pour faire valoir leur point de vue, du moment que la majorité des juges municipaux exprimaient leur volonté. C'est clair comme l'eau de roche, à 56.1: «La majorité des juges municipaux peuvent adopter les politiques générales des cours municipales - l'ensemble - soit à une assemblée convoquée à cette fin par le juge en chef, soit par tout autre mode permettant à celui-ci de les consulter. Ces politiques générales doivent être compatibles avec les dispositions de la présente loi.»

Personne n'est en train de sortir des exemples qui sont incompatibles avec la présente loi. Donc, du moment qu'il y a une majorité qui est en faveur, du moment que ce n'est pas incompatible avec la présente loi, ça s'applique à tout le monde. Contrairement à ce que le ministre semblait croire tantôt, il n'y a pas de manière pour les municipalités de faire valoir leur point de vue. Alors, on espère que le ministre, au nom du gouvernement, va réaliser que ce serait une amélioration du projet de loi que d'accepter la proposition que nous faisons.

Par ailleurs, M. le Président, ayant écouté, avec ma collègue la députée de La Pinière, attentivement et avec beaucoup de patience les sorties parfois assez virulentes du ministre, tantôt, sur la charge qui consiste, pour lui, à être obligé de supporter l'existence d'une opposition, ce serait une excellente occasion pour lui, enfin, de démontrer que lui-même est conscient que son rôle d'élu fait en sorte qu'il doit accepter d'entendre raison, surtout quand la raison vise à émuler quelque chose qu'il va lui-même proposer. Alors, il n'a strictement aucune raison, sauf, effectivement, la croyance ferme qui semble l'habiter que l'opposition est là pour nuire, pour marquer du temps; il vient de le dire tantôt, c'était très insultant. C'est lui qui est chronophage, il n'arrête pas de bouffer du temps. C'est lui, tout à l'heure, qui n'arrêtait pas de donner des explications, malgré le fait qu'on lui disait que ça pouvait être adopté sur division. Je n'ai jamais vu ça, un ministre se filibuster lui-même.

Mais, peu importe, c'est son occasion de se racheter maintenant. Il peut maintenant réaliser que l'opposition est en train de faire une suggestion constructive et positive, qu'il peut difficilement nier être constructive et positive. Ça vise à instaurer exactement la même règle ici que, lui, il va mettre dans quelques instants à 56.2. Alors, j'espère que le ministre entendra raison, en l'occurrence sa propre raison, et admettra la proposition faite par l'opposition officielle.

M. Ménard: Partout, dans toutes les cours, les politiques générales relèvent des juges, ça fait partie de l'indépendance judiciaire. Les règles de pratique sont parfois approuvées par le gouvernement, parfois par d'autres juges. Je ne pense pas que l'opposition, surtout par le choix des exemples qu'elle a donnés et auxquels j'ai répondu amplement, nous ait convaincus qu'il y a lieu d'être différents dans ce cas-ci d'avec les autres cours de justice. Et je craindrais qu'une pareille disposition soit perçue par les juges comme une ingérence dans ce qui relève de leur indépendance. Par conséquent, je vais voter contre l'amendement proposé.

M. Mulcair: Il reste, M. le Président, que, encore une fois, tout ce qui est dit en commission parlementaire demeure, comme on dit en anglais, «on the record», ça demeure par écrit. Et le ministre, tout à l'heure, dans une de ses envolées, a dit que, s'ils ne sont pas d'accord, ils vont pouvoir faire valoir leur point de vue. Éventuellement, lorsque viendront des cas, on va donner cette transcription-là aux municipalités, on va leur dire: Écoutez, le ministre est sûr que vous pouvez faire valoir votre point de vue. Et ce sera à eux de vérifier si le ministre disait des choses qui étaient conformes à la vérité lorsqu'il a dit qu'ils allaient avoir l'occasion de faire valoir leur point de vue.

M. Ménard: Oui, j'ai donné mon opinion sur les règles de pratique, telles que l'exemple que vous m'avez donné, et je suis certain que les municipalités vont la comprendre. Si la question du policier les énerve tellement, je pense que ça relève plutôt des règles de pratique que des politiques générales de la cour. Parce que je sais bien que les municipalités ont surtout des craintes financières, la plupart du temps, tandis que les juges ont des craintes, et c'est compréhensible, d'administration de la justice. Parfois, l'administration de la justice, il faut en payer le prix; un prix raisonnable, mais il faut en payer le prix.

(23 h 10)

M. Mulcair: Par sa réponse, le ministre vient de confirmer toutes les craintes du monde municipal. C'est exactement ça. C'est le rouleau compresseur. C'est une vision uniformisante: tout le monde porte du 42 régulier. C'est du mur-à-mur. C'est la même chose pour tout le monde, dès qu'une majorité le veut. Et, encore une fois, M. le Président, ce n'était pas en regard avec les règles de pratique, tantôt, que le ministre a dit que les municipalités allaient pouvoir faire valoir leur point de vue. Ça va être très facile de vérifier dans les transcriptions de cette commission parlementaire, il parlait bel et bien dans le cadre des politiques générales. Ce n'est pas aussi simple que ça de dire que la présence ou non d'un policier va relever plutôt d'une règle de pratique que d'une politique générale. Parce que sa réponse à cet égard-là laisse planer une confusion éventuelle majeure entre les deux.

S'il y a de tels vases communicants entre le 56.1 et le 56.2, ça va toujours être intriguant de voir si les gens vont passer par la voie la plus rapide, c'est-à-dire le 56.1, sans approbation du gouvernement, en essayant de dire: Voyez, ça relève plutôt d'une question de politique générale que d'une règle de pratique. S'il y a une telle fluidité entre les notions employées en termes rédactionnels, dans ce projet de loi là, on aurait intérêt, comme législateurs, sans partisanerie, à enlever cette équivoque immédiatement. Parce qu'on est train de ne rendre service à personne, si c'est fluide à ce point-là.

M. Ménard: Cette fluidité existait dans les lois qui ont été votées par le gouvernement antérieur et par bien d'autres gouvernements, puisque la rédaction de ces articles s'inspire de ces lois, et ça ne semble avoir dérangé personne, jusqu'à date. Mais, justement, les gens doivent comprendre que les politiques générales sont des politiques générales et que les politiques particulières sont particulières. C'est ça qu'il veut entendre, n'est-ce pas?

M. Mulcair: Donc, les politiques...

M. Ménard: C'est sûr que les politiques générales s'appliquent généralement, tandis que des politiques particulières s'appliquent particulièrement. Mais on compte sur le bon jugement des juges. Vous savez, c'est une des raisons pour lesquelles on les nomme, généralement, c'est parce qu'ils ont un bon jugement. On compte sur le bon jugement des juges pour savoir déterminer ce qui doit être général et ce qui doit être particulier.

M. Mulcair: Fascinant. En termes rédactionnels, M. le Président, c'est fascinant parce que non seulement le ministre laisse entendre que, selon lui, on n'a qu'à décider dans quelle case envoyer une idée ou une règle de conduite, tantôt dans la case «règles de pratique», tantôt dans la case «politiques générales», mais, à l'intérieur des politiques générales, il est en train d'inviter la création d'une nouvelle distinction: politiques particulières versus politiques générales.

M. Ménard: La distinction, c'est une distinction qui existe depuis longtemps. De toute façon, je vous signale que les politiques générales ne lient que les juges, elles encadrent leur travail de juge, pas le fonctionnement de leur cour. Alors, ça ne devrait pas inquiéter les municipalités. De toute façon, si ça les inquiète, avant de consulter l'opposition, je leur suggère de consulter leur avocat, qui leur expliquera sûrement, qui saura les rassurer.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce sur l'amendement?

Mme Houda-Pepin: Non, j'ai une question, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Oui.

Mme Houda-Pepin: J'attendais que vous me reconnaissiez. Quelle est la différence entre une règle de pratique commune et une politique générale?

M. Ménard: C'est difficile à dire parce que, au fond, les règles de pratique, c'est d'abord une question formaliste. Les règles de pratique sont des règles écrites, donc qui peuvent être consultées et qui lient. Les politiques générales, bien qu'elles puissent être dans les écrits, ne sont pas nécessairement publiées et concernent les choses comme les vacances des juges. Même, au fond, comme je disais, la manière de confectionner les rôles d'audience, en principe, est plutôt une politique générale, quoiqu'elle pourrait être écrite dans les règles de pratique et devenir une règle de pratique.

Mme Houda-Pepin: Donc, la différence entre la politique générale et la règle de pratique commune, c'est l'écrit?

M. Ménard: Oui, il y a une différence formaliste. Parce que c'est vrai qu'il y a des choses qui pouvaient être considérées comme des politiques générales, qui sont devenues... qu'on a préféré écrire dans les règles de pratique, mais que les avocats connaissaient et que les juges appliquaient. Et ce sont des distinctions qui se sont faites au cours des âges. Mais, de façon générale, ce qui reste dans les politiques générales maintenant, c'est ce qui concerne les juges eux-mêmes plutôt que ce que doivent connaître les plaideurs ou les gens qui se présentent sans avocat.

Mme Houda-Pepin: Donc, les politiques générales, c'est tout ce qui touche les juges. Et les règles de pratique communes, ça touche qui, exactement?

M. Ménard: Je vais vous dire franchement, je ne me suis jamais posé beaucoup de distinctions là-dessus. Comme je vous dis, ces dispositions-là, à peu de choses, elles ne sont pas copiées, mais elles sont adaptées de ce qui existe déjà dans les autres tribunaux.

Mme Houda-Pepin: Oui, mais vous vous dites le ministre de la Justice, vous présentez un projet de loi, vous ne connaissez pas à quoi réfère la terminologie du projet de loi que vous êtes en train de défendre? Moi, j'aurais un peu de misère à comprendre ça. Je serais même gênée de ne pas savoir ce que je soutiens.

M. Ménard: Mais c'est vrai qu'on doit avoir une certaine gêne parfois...

Mme Houda-Pepin: Parce qu'il y a votre nom qui est collé à ce projet de loi là.

M. Ménard: La complexité des lois est telle, vous savez, qu'elle nous rend humble, quand on est ministre de la Justice...

Mme Houda-Pepin: C'est vrai que...

M. Ménard: ...même si parfois les sursauts d'orgueil d'en face incitent les nôtres. Mais c'est vrai que c'est une fonction qu'il faut accepter avec beaucoup d'humilité, acceptant que parfois il faut se fier à l'expérience de ceux qui nous ont précédés car on ne peut pas tout connaître. Et, avant de déranger les équilibres qui ont été établis au cours des âges, il faut avoir de bonnes raisons. Et, dans ce cas-ci, les politiques générales sont généralement reconnues comme relevant de la discrétion des juges. Mais, dès que le législateur est intervenu dans les domaines qui relevaient de leur discrétion, les juges s'y sont soumis très volontiers.

Mais eux-mêmes ont compris, au cours des âges, qu'il était préférable de publier certaines choses, et c'est ce qu'ils ont appelé les règles de pratique. Tandis que les politiques générales, même si parfois ils vont les consigner dans un procès-verbal et ils vont se les écrire dans un mémo, elles n'auront pas la même diffusion, elles n'auront pas la même connaissance publique parce qu'elles peuvent être changées rapidement.

Mme Houda-Pepin: Donc, si je comprends bien, la nuance se trouve dans l'impact de ces décisions-là. Certaines demeurent à l'interne, d'autres peuvent être rendues publiques même, puisque c'est écrit puis ça peut être diffusé. Je ne suis pas plus informée que ça, je dois avouer, M. le Président.

M. Ménard: Vous l'êtes autant que moi.

Mme Houda-Pepin: Le ministre avoue son incompétence, d'une certaine manière, à différencier les deux concepts. J'ai beaucoup de difficulté à le croire parce qu'il n'est pas tout seul, le ministre de la Justice, il a tout un arsenal d'experts autour de lui et il ne sait pas, peut-être, l'exploiter. C'est ce que ça veut dire. Mais j'aurais souhaité, M. le Président, avoir une clarification, je dirais, par rapport à cette terminologie pour m'aider à comprendre c'est quoi, la différence entre les deux et à quoi servent les règles de pratique communes par rapport aux politiques générales. Ça nous aurait certainement éclairés.

M. Ménard: Alors, je vous ai donné des exemples qu'on me donne, d'ailleurs, les vacances...

Mme Houda-Pepin: Oui, mais les vacances, ça relève de la gestion du personnel, ça, les vacances.

M. Ménard: N'allez jamais traiter les juges de personnel. Ça, je sais que c'est une erreur qu'il ne faut pas faire.

Mme Houda-Pepin: En management, M. le Président, le personnel, ça s'applique à tout le monde.

M. Ménard: Ah! non, non, non, ça ne s'applique pas aux juges.

Mme Houda-Pepin: Évidemment, on peut avoir des personnels professionnels, on peut avoir des... On parle de la gestion du personnel. C'est ça que ça veut dire. C'est un concept qui réfère à la gestion du personnel. Et, donc, les vacances et tout ce qui touche à ça, aux conditions de travail, sont régies par le management, par la gestion et par les directions du personnel, et tout ça.

M. Ménard: Non.

Mme Houda-Pepin: Mais ça ne répond pas à ma question. Vraiment, là, je reste sur mon appétit. Je ne suis pas éclairée.

M. Ménard: Moi aussi, mais je sais que c'est un problème qui, très honnêtement, n'a pas beaucoup d'importance, parce qu'il existe la loi, il existe la jurisprudence, il existe les règlements, tout ça est déjà supérieur aux règles de pratique. Il existe des règles de pratique et il reste certaines politiques générales à déterminer. Alors, moi, je vais vous dire franchement, j'ai pu pratiquer le droit pendant plus de 30 ans sans vraiment connaître ces distinctions, j'en apprends même ce soir que je ne savais pas d'avance, et ça ne m'a jamais dérangé.

Mme Houda-Pepin: Voyez-vous que l'opposition peut servir à quelque chose, notamment à vous instruire, hein?

(23 h 20)

M. Ménard: Oui, oui, oui, mais vous savez, la connaissance qu'on peut avoir du droit est infinie. Et on peut se mettre à compter les virgules aussi, dans un article de loi, et je ne crois pas que ce soit très utile. Alors, il est préférable de consacrer son temps à quelque chose qui serait plus significatif. Mais je vous assure que ça n'a pas beaucoup d'importance, ça, j'en suis convaincu, que les politiques... Mais c'est une question sur laquelle les juges aiment bien avoir généralement une certaine autonomie, n'est-ce pas?

Mme Houda-Pepin: Alors, vous soumettez des articles dans un projet de loi et vous considérez que ça n'a pas d'importance. Alors, il y a quelque chose qui ne marche pas.

M. Ménard: Non, non, ce n'est pas ça. Le projet de loi, ici, permet maintenant une coordination de ces politiques générales comme ailleurs.

Mme Houda-Pepin: Non, non, mais vous venez de dire que ces nuances-là par rapport...

M. Ménard: Comme je vous ai dit, ça a beaucoup grandi. Quand ils n'étaient que quelques juges municipaux, ils n'avaient pas besoin d'avoir une politique sur les vacances. Maintenant qu'ils sont beaucoup, ils sentent le besoin d'en discuter entre eux et puis de le faire sous la direction de leur juge en chef. C'est essentiellement ce qui est prévu ici. Ça va se décider à la majorité à une assemblée convoquée à cette fin par le juge en chef. Il va faire ça en même temps que les règles de pratique. Avez-vous d'autres exemples, à part des vacances? Franchement! On me dit que c'est un peu comme le pouvoir de directive à la Cour du Québec.

(Consultation)

Le Président (M. Paquin): Ça va, M. le ministre? Vous voulez compléter?

M. Ménard: C'est ça. C'est parce que, dans les autres cours, comme il n'y a qu'une cour, le juge en chef peut avoir des directives puis les juges en chef adjoints peuvent en émettre aussi. Alors, ici, pour qu'ils restent autonomes, on veut que ces politiques générales...

Le Président (M. Paquin): M. le député de Chomedey?

M. Ménard: Mais, si vous pensez vraiment que c'est important que ça soit publié, ce genre d'affaire, n'est-ce-pas... Moi, je ne crois pas, très honnêtement. Je ne crois pas et je pense que ça offenserait les juges inutilement.

Le Président (M. Paquin): Alors, la parole est au député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Je pense qu'il y a une distinction, une nuance importante qu'il vaut la peine de retenir ici. Le ministre nous renvoie au pouvoir de directive qui peut exister devant un autre tribunal. Mais le ministre sait fort bien que les juges à la Cour du Québec, par exemple, ne peuvent pas, même la majorité d'entre eux, commencer à décider de dépenser l'argent du gouvernement du Québec.

M. Ménard: Je vais expliquer pourquoi tout à l'heure.

M. Mulcair: Et, ici, le ministre trouve que c'est normal que la majorité des juges des cours municipales puisse décider que ça y va d'une question de sécurité. Ça va toujours être ça, ça va être une question d'intérêt supérieur qui va être invoquée. Ils vont décider que ça y va de leur sécurité d'exiger la présence - dans notre exemple - constante d'un agent de la paix. Et, à ce moment-là, le ministre trouve ça bien normal que, eux, ils puissent décider de dépenser l'argent des contribuables municipaux, même sans passer par les élus de quelque ordre que ce soit, alors que le ministre semble assez lucide à 56.2, surtout avec son amendement, non seulement lucide, mais sensible, au fait que ce sont les élus qui devraient avoir un mot à dire là-dessus. On renvoie, dans le deuxième cas, au gouvernement.

Ici, ce que nous demandons, c'est la même sensibilité pour l'argent des payeurs de taxes au niveau municipal. Et le ministre, semble partager notre point de vue là-dessus, parce qu'il dit - il l'a dit, c'est dans les transcriptions de notre commission de ce soir, il l'a dit tout à l'heure: Bien, les municipalités qui ne sont pas d'accord avec ça, elles vont pouvoir faire valoir leur point de vue, elles vont pouvoir dire pourquoi l'argent devrait passer devant une question de sécurité.

Ce que nous disons, c'est que la validité de cette préoccupation de sécurité et la dépense de l'argent public, ça relève des élus. Et, si le ministre tient à garder au moins le pouvoir et la majorité de décider de ces questions-là, on ne lui en tient pas rigueur, on peut l'accepter, pourvu que le ministre accepte de suivre son propre modèle, le modèle qui est proposé dans la modification que nous nous apprêtons à voir dans le prochain article et que nous voulons transposer ici en matière de politiques générales.

M. Ménard: Mais, justement, je ne crois pas que les politiques générales entraînent des dépenses de deniers publics.

M. Mulcair: Avec respect, M. le Président, je pense que le ministre oublie l'exemple qu'on suit depuis tantôt. Il oublie le fait que, dans son propre exemple... Parce que, là, il parle de vacances, mais, tout à l'heure, le premier exemple qu'il a donné quand ma collègue la députée de La Pinière lui a demandé d'énumérer ce que c'était, des politiques générales, il a donné deux exemples derechef, il a dit: À quelle heure on siège et la manière de confectionner les rôles d'audience. Mais, quand on parle de l'heure à laquelle on va siéger, on parle des dépenses afférentes, on parle peut-être de la présence de certains officiers, on parle peut-être de la présente d'un concierge pour ouvrir et fermer, on parle de dépenses au niveau municipal, ça, c'est sûr. Et ce qu'on dit, c'est que, même si on est dans le domaine judiciaire, on est dans le domaine judiciaire au plan municipal.

La Cour suprême a déjà accepté qu'il fallait avoir une certaine flexibilité en appliquant les règles constitutionnelles exigeant la séparation des pouvoirs et l'autonomie des juges. Et cette même flexibilité devrait être préservée, ici, lorsqu'on est en train de déterminer le point auquel les juges seuls, par majorité ou autrement, devraient décider de leurs règles, et surtout lorsque ces règles peuvent avoir une influence sur les dépenses, les dépenses d'argent des payeurs de taxes au niveau municipal, alors qu'il y a des élus.

Dans les réponses qu'il a données tantôt, le ministre fait fi de l'obligation des élus de rendre compte devant la population, et c'est à tort. Il ne faut pas regarder les élus municipaux comme si c'étaient juste des amanuensis qui étaient là pour appliquer aveuglément et venir inscrire leur approbation. Ils sont là pour exercer une charge, tout comme le ministre et nous ce soir. Et, nous, on trouve, là-dedans...

Mme Houda-Pepin: ...

M. Mulcair: Justement. L'important, comme le souligne ma collègue la députée de La Pinière, c'est l'imputabilité. C'est notre devoir, c'est notre charge, c'est notre fonction, on est imputable devant les élus. De notre côté, M. le Président, ce n'est pas pour déplaire au ministre sensible qu'on n'est pas d'accord avec le 56.1, tel que rédigé. Lui-même n'est pas d'accord avec le principe ici évoqué à 56.1, qui est contenu par ailleurs au prochain article, en ce qui concerne les règles de pratique, car il propose de le modifier.

Alors, il lui reste à déterminer s'il veut être conséquent avec ses propres propositions ou si, justement, il va faire preuve... il va afficher ce genre d'entêtement qu'il semblait vouloir reprocher à l'opposition tantôt, simplement parce que c'est son projet de loi et que c'est ce qui a été proposé par lui et son gouvernement. La proposition que nous faisons et que nous débattons en ce moment, M. le Président, l'amendement proposé par l'opposition bonifie le projet de loi. Libre au ministre de décider s'il veut le suivre ou pas.

M. Ménard: À mon avis, M. le Président, c'est que ça risque de briser un équilibre qui a été éprouvé par l'âge. Et les raisons que donne l'opposition ne me convainquent pas du tout. Les exemples d'ailleurs qu'ils donnent me semblent relever plus des règles de pratique que d'autre chose. Sans compter que... Non, c'est suffisant.

M. Mulcair: M. le Président, juste pour revenir là-dessus, et encore une fois, une chance que cette fois-ci il y a non seulement transcription, mais il va même y avoir ruban, le ministre va pouvoir se voir le dire, ce n'était pas en rapport avec les règles de pratique qu'il a donné les exemples, là.

M. Ménard: Je n'ai pas l'habitude de me regarder ni de me relire à satiété. Je pense plutôt à l'avenir.

M. Mulcair: C'est les exemples que lui-même a fournis en réponse à ma collègue la députée de La Pinière. Il va pouvoir le voir, il va pouvoir le lire. Ce n'était pas par rapport aux règles de pratique. C'était par rapport aux politiques générales. Ma collègue la députée de La Pinière, a dit: Mais qu'est-ce que c'est, une politique générale? Et il a donné deux exemples sur-le-champ: à quelle heure on siège et la manière de confectionner les rôles d'audience. Maintenant, lui-même est en train de nous dire que ça peut être shippé dans les règles de pratique. Il est juste en train de prouver à quel point c'est dangereux d'avoir une règle pour régir l'entrée en vigueur et l'édiction des règles de pratique - elles seront prises par décret du gouvernement - et une autre série de règles pour les politiques générales, surtout lorsque lui-même, comme ministre responsable, n'arrête pas de nous dire qu'il y a vases communicants, que ça passe de l'un à l'autre comme on veut bien le faire. Alors, je vois que mon collègue le député de Saint-Jean... Je viens de voir la lumière s'allumer au-dessus de sa tête. C'est pour ça que ça brille. Alors, on va lui laisser, avec votre approbation, son intervention, M. le Président.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Ma compréhension, c'est que les politiques générales, c'est ni plus ni moins les affaires courantes du vécu même de la fonction et de l'exercice de juge, et je pense qu'il leur revient de s'entendre sur la façon dont ils vont fonctionner dans leurs affaires courantes, tandis que les pratiques comme telles sont des règles qui lient le fonctionnement des cours, ça a des effets sur la manière de pratiquer le droit dans la cour, de présenter les différentes requêtes, de s'adresser, de convoquer, etc. Donc, quand ça consiste en des pratiques du tribunal, en des règles de fonctionnement, en des dispositions qui font en sorte que la cour doit fonctionner d'une façon plutôt que d'un autre, c'est 56.2, puis à ce moment-là les règles doivent être soumises à l'approbation des imputables.

(23 h 30)

Mais, quand il s'agit du vécu des juges, dans la façon générale dont ils vont fonctionner, s'ils vont prendre leurs vacances en rotation ou pas, ils doivent siéger tantôt le soir, tantôt le jour, est-ce qu'ils vont siéger en quinconce de manière à ce qu'il y ait toujours une cour ouverte les soirs puis toujours une ouverte les jours, etc., des éléments de vécu, d'affaires courantes, on leur dit: Vous êtes des grands garçons, vous êtes des grandes filles, vous êtes capables de gérer ça entre vous autres, et ça vous revient de vous entendre. Il peut arriver que des éléments éventuellement aient besoin d'être codifiés, auquel cas ils deviennent des pratiques et, quand ils deviennent des pratiques, ils sont liés aux règles. Moi, c'est comme ça que je l'interprète et c'est comme ça que je comprends la distinction entre les deux types de disposition.

M. Ménard: Quand on cherche à comprendre, on comprend.

Mme Houda-Pepin: Je vois bien que le ministre est satisfait de l'éclairage qui lui a été donné par son collègue le député de Saint-Jean. N'est-ce pas?

M. Ménard: Exact.

Mme Houda-Pepin: Ceci étant, M. le Président, ça ne répond pas aux critiques et aux commentaires qui ont été faits par mon collègue et moi-même. La nuance n'est pas très claire entre ce que c'est qu'une politique générale et ce que c'est qu'une règle de pratique commune. Si, dans l'esprit du ministre qui présente le projet de loi, ces différences ne sont pas plus précises que ça, on peut s'imaginer comment ça peut s'interpréter dans l'esprit d'une majorité de juges. Parce qu'on ne parle pas d'une seule tête mais de plusieurs.

Et, comme ce qui est politique générale peut aussi déborder sur une pratique courante, une règle de pratique commune, et vice versa, il y a certainement des décisions qui vont relever des politiques générales qui auraient des incidences économiques et financières, entre autres, et pour lesquelles il n'y a aucune balise. Et, moi, j'appuie fortement les commentaires qui ont été faits par mon collègue le député de Chomedey parce que ça se justifie.

Si les territoires étaient clairement déterminés entre ce qu'est une politique générale et ce qu'est une règle de pratique commune, dans le texte de la loi - parce qu'il ne faut pas laisser de l'espace pour toutes sortes d'interprétations - à ce moment-là, on aurait pu regarder ça autrement. Mais, de la façon dont le texte est libellé, M. le Président, c'est la confusion la plus totale, là. On sort de cette pièce puis on comprend chacun à notre manière. Ici, il s'agit d'un texte de loi, ce n'est pas de la poésie. Il vous est déjà arrivé de réciter de la poésie en Chambre. Mais ce n'est pas de la poésie.

M. Mulcair: Quand il est mal pris...

M. Ménard: Fort à propos, d'ailleurs. Fort à propos!

Mme Houda-Pepin: Quand il est mal pris, il récite de la poésie. Non, mais, là, vraiment, c'est un texte de loi, M. le Président, ça doit être clair dans notre esprit puis dans l'esprit de toute personne qui va lire ce texte. Et le ministre n'a pas été en mesure de dissiper tous les problèmes qui entourent ces deux notions-là, dans ces deux articles.

M. Ménard: Consolez-vous, ce sont des juges expérimentés qui vont interpréter ces dispositions. Et, de toute façon, ça n'affectera aucun...

Mme Houda-Pepin: M. le Président, on ne doute pas de la sagesse des juges.

M. Ménard: Et de leur compréhension.

Mme Houda-Pepin: On doute de la compétence du ministre, qui soumet un texte de loi que lui-même n'arrive pas à comprendre.

M. Mulcair: C'est ça, exactement.

M. Ménard: Ou à exprimer avec autant de clarté que vous l'auriez voulu. Mais c'est justement parce qu'il y a un certain flou dans ça.

Mme Houda-Pepin: Oui, mais, s'il y a un flou, c'est votre rôle de le dissiper.

M. Ménard: Non.

Mme Houda-Pepin: Mais, voyons! M. le Président, le ministre nous invite à voter sur un article, sur un projet de loi puis il n'est pas capable de l'expliquer. Il y a quand même un respect à notre intelligence.

M. Ménard: Ah! Mais mon collègue a très bien compris mes explications, c'est donc que je suis capable d'expliquer.

M. Mulcair: Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: Oui, mais votre collègue l'a interprété...

M. Ménard: Mais c'est vrai qu'il y a une zone grise. Ce n'est pas la première fois, en droit, qu'il y a une zone grise, vous savez.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, il y a une nuance entre avoir des zones grises, sachant que c'est des zones grises, le prenant comme tel et compris de tous que c'est des zones grises, et à ce moment-là on navigue dans les zones grises chacun selon ses boussoles, et avoir un texte de loi qui doit être clair et précis et signifier quelque chose qui est compréhensible du commun des mortels.

M. Ménard: Non, non, du commun des juges.

Mme Houda-Pepin: On ne peut pas faire de la broderie avec un texte de loi.

M. Ménard: Il suffirait que le commun des juges comprenne...

Mme Houda-Pepin: Je peux, M. le Président, suspendre la discussion sur ces articles-là, donner le temps au ministre de consulter ses experts, arriver avec des exemples et des explications, et on pourrait revenir pour discuter de ce projet de loi, pour avancer. C'est une façon de l'aider.

M. Mulcair: On est prêt, justement, M. le Président, à faire une proposition formelle. On peut passer outre le 56.1 et notre modification à celui-ci et passer outre 56.2 et la modification que le ministre s'apprête à proposer à celui-ci, et, donc, procéder à l'étude du reste du projet de loi, ce qui nous permettrait d'avancer. Parce que, de toute évidence, chaque fois que le ministre en parle, il s'enlise. Et lui et ses proches collaborateurs et collaboratrices vont pouvoir sortir les transcriptions. Parce que, outre la bouée de sauvetage que, si bravement, son collègue le député de Saint-Jean a tenté de lui jeter tantôt, le ministre n'a jamais réussi à jeter le moindre éclairage sur ses intentions, ici. Et je pense que ce n'est pas juste vis-à-vis les élus municipaux, M. le Président, de procéder avec cet article-là dans cette forme-là.

Vous savez, depuis le jugement de la Chambre des lords dans l'affaire Pepper and Hart on a recours, en «common law», à des travaux préparatoires, un peu à l'instar de ce qui se faisait en France depuis très longtemps. Et je plains les pauvres juges qui devraient décider dans un avenir quelconque entre les municipalités dissidentes minoritaires, dans une telle décision, qui seraient appelées à engager des dépenses parfois importantes, et...

M. Ménard: Parfois...

M. Mulcair: Sans doute, pour l'application de ces dispositions-là...

M. Ménard: C'est exactement le contraire. Je suis absolument assuré du contraire.

M. Mulcair: Alors, si le ministre est assuré du contraire, pourquoi il n'accepte pas ses responsabilités et il met la même chose ici? Et, puisqu'il ne veut même pas suivre sa propre logique, qu'au moins il accepte de surseoir à l'application, parce que, effectivement, ce qui va se passer un jour, c'est que, entre les municipalités qui vont le contester et les juges qui vont tenter de dire: Non, non, ça rentre dans la catégorie politique générale, on n'avait pas besoin de le soumettre en tant que règle de pratique, il va y avoir un différend un jour. Puis je plains, donc - pour terminer là-dessus, M. le Président - le pauvre juge qui aura à essayer de savoir - diantre! - ce que pouvait bien vouloir dire le ministre à 56.1 par rapport à 56.2, parce que, effectivement, il n'est pas capable de l'expliquer lui-même.

Alors, est-ce qu'il peut au moins avoir la décence de surseoir à ces deux articles-là, pour l'instant? On peut continuer un peu plus loin dans le texte du projet de loi. Le ministre aurait le temps de s'abreuver à la sagesse de ses collaborateurs et collaboratrices. Il va pouvoir avoir des exemples autres que les exemples qu'il a donnés tantôt et qu'il a tenté de renier lui-même, par la suite. Et ça nous permettrait d'avancer bien dans le projet de loi en passant par-dessus ces deux articles-là. Le ministre, qui n'arrête pas de dire que l'opposition marque du temps, il verrait qu'on veut éviter qu'il soit obligé de rester sur les mêmes articles, et on pourrait procéder sur le reste.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que la suggestion vous agrée?

M. Ménard: Non, actuellement, M. le Président.

M. Mulcair: Si j'ai bien compris, M. le Président, le ministre vient de refuser.

M. Ménard: On peut voter.

M. Paquin: Bien, il y a quand même une alternative à ce que proposait le député de Chomedey, c'est qu'on dispose de l'article et qu'on ait le poids politique de la décision qu'on prendra comme commission là-dessus.

M. Mulcair: Ah! si le député de Saint-Jean est prêt à voter avec nous en faveur de notre amendement, si c'est bien le message qu'il est en train de nous envoyer, on pourrait bien voter là-dessus tout de suite. Est-ce que c'est ça, M. le Président? Est-ce que c'est ça que nous dit le député de Saint-Jean?

M. Paquin: Non, non. Ce que je dis, M. le Président, c'est qu'on a une vision claire de ce que pensent les uns et les autres de l'article et qu'on pourrait tout aussi bien voter dessus à ce moment-ci.

(23 h 40)

M. Mulcair: M. le Président, de notre côté, on tient à souligner à notre collègue le député de Saint-Jean qu'on n'est pas prêts, nous, à dépenser l'argent des payeurs de taxes d'une municipalité, de Saint-Jean-sur-Richelieu ou d'une autre, sans donner aux élus, leurs autorités locales, droit de cité, voix au chapitre. Ce n'est pas vrai qu'on va laisser des gens qui sont des juges à temps partiel au niveau municipal décider par une majorité d'entre eux autres de dépenser l'argent des payeurs de taxes des municipalités. Et c'est précisément ce qui va se passer, si on permet à l'article 56.1 d'être adopté tel que proposé.

Ce que nous voulons, c'est de s'assurer que c'est au moins en dernier ressort des élus, d'autres élus qui vont avoir le dernier mot. M. le Président, puisque les municipalités sont justement des organismes créés par législation provinciale, c'est normal que le gouvernement de la province ait ce dernier mot. C'est pour ça que le ministre s'apprête à faire la proposition dont on a déjà parlé à 56.2.

Mais ici à 56.1, M. le Président, il y a deux problèmes majeurs. Il y a le problème bien accepté maintenant par tous ceux qui ont suivi nos travaux ce soir, de la fluidité, du caractère flou des termes utilisés dans les deux. Le ministre trouve ça bien correct, bien normal. Moi, j'opine plutôt dans le même sens de ma collègue la députée de La Pinière quand elle dit que le ministre n'est pas en train d'introduire une zone grise intentionnelle, le ministre ne sait pas ce que l'article veut dire. Ce n'est pas la même chose, pas du tout la même chose.

Dans les exemples qu'il a lui-même donnés tantôt, c'est-à-dire à quelle heure on siège et la manière de confectionner les rôles d'audience, il dit: Tantôt, ça peut être pitché à 56.1 - règles générales - tantôt, ça peut être pitché à 56.2 - règles de pratique. Même, si la distinction qu'a tenté d'élaborer le député de Saint-Jean tout à l'heure a une certaine logique, ce n'est pas une logique qui est suivie par le ministre responsable de l'application de cette loi-là et de son édiction, qui, lui, semble trouver que tu pitches ça dans l'un ou dans l'autre comme bon te semble.

Nous, on dit: ça aurait beaucoup plus de bon sens de préciser que c'est le gouvernement qui a le dernier mot là-dessus aussi. Quand je dis «aussi», je renvoie au fait que c'est le principe même que le ministre semble vouloir suivre au prochain article.

Par ailleurs, M. le Président, et c'est important de le retenir, le ministre semble croire, parce qu'il l'a dit tantôt, que les élus municipaux vont pouvoir faire valoir leur point de vue. Ils vont pouvoir contester une décision prise en prétextant la sécurité, si, eux, ils trouvent qu'il n'en est rien. Mais on met au défi le ministre de nous dire où ils vont pouvoir faire valoir ça, car notre lecture de 56.1, c'est que, dès qu'il y a une majorité des juges municipaux qui sont d'accord, on a politique générale, et ça va être appliqué à l'ensemble. C'est notre lecture de 56.1 que cette politique générale engendre ou non des dépenses. Et, si ça engendre des dépenses, je pense qu'on aurait intérêt à suivre, pas l'opposition mais le ministre lui-même, qui tantôt a évoqué la modification qu'il va proposer à 56.2 et qui vise à assurer que le gouvernement conservera le dernier mot là-dessus.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Merci. M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: M. le Président, simplement mentionner que je pense que la distinction que j'ai faite est opportune et que, dans les cas où il s'agit des pratiques des juges entre eux, sur la façon de fonctionner, il est opportun de leur laisser une latitude. Et je rappelle que l'article dit, tel que libellé, que ces politiques générales doivent être compatibles avec les dispositions de la loi et qu'une des dispositions de la loi, c'est une bonne administration de la justice et une gestion efficace des fonds publics qui sont affectés.

Donc, je pense qu'il est bon de laisser de la latitude aux juges dans la façon de faire en sorte que la bonne administration de la justice, la disponibilité aux justiciables... et que les fonds soient utilisés de la meilleure façon possible. Sur ces questions-là, je pense que c'est tout à fait de leur latitude, de leur juridiction, ça fait partie des politiques générales. Quant à moi, je pense que, lorsqu'il y aura des dispositions codifiées qui entraîneront des façons de fonctionner d'une façon précise ou rigoureuse sur l'ensemble, toutes les dispositions, y compris les amendements qui ont été prévus dans ce cas-là, feront en sorte qu'effectivement ce que souhaite le député de Chomedey sera assuré. Et, quant à moi, je suis disposé et je suis prêt à voter.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, moi, je pense qu'on est en train de tourner autour du pot parce que le ministre refuse de nous donner vraiment une explication convaincante pour clarifier le débat. Alors, le député de Saint-Jean, qui essaie d'apporter de l'eau au moulin du ministre, finalement, n'avance pas le débat, à mon avis, parce que nous, on parle des exemples que le ministre a lui-même donnés et qui démontrent finalement que «règles de pratique communes» et «politiques générales», c'est à peu près la même chose, sauf que c'est dans deux articles différents. Et il ne sait pas, finalement, ce qui différencie l'une de l'autre.

Ceci étant dit, on parle ici de politiques qui ont des incidences financières. Et on parle aussi... le député de Saint-Jean a fait référence à la latitude des juges. On ne conteste pas la latitude des juges; on conteste le fait qu'il y a un enjeu qui touche l'imputabilité. Et, lorsqu'on touche aux fonds publics, la règle de l'imputabilité doit s'appliquer. Et la meilleure façon de la mettre en pratique, cette règle-là, c'est de baliser le texte du projet de loi de façon claire, de façon à ce qu'il soit significatif pour les juges qui auraient à en disposer et aussi pour le législateur. Et, tant et aussi longtemps que le ministre s'obstine à refuser de donner une réponse claire par rapport à ça... Et on lui en a donné la chance. Généralement, c'est le ministre lui-même qui demande la suspension des articles pour avancer le débat. On lui a donné la chance et le ministre a refusé de profiter de cette occasion qu'on lui donne pour avancer dans l'étude du projet de loi.

Alors, M. le Président, je suis personnellement très mal à l'aise avec ces deux articles-là. Et je ne comprends pas pourquoi le ministre n'est pas en mesure de nous donner plus de clarifications que ça et pourquoi il veut maintenir le flou autour de ça. Est-ce que c'est volontaire que le texte soit rédigé de cette façon-là, de façon à ce que ça puisse être interprété de multiples façons? Si c'est ça, qu'il nous le dise; au moins, on aura une explication. Mais, si ce n'est pas ça, bien, je pense qu'il a l'obligation devant la commission de nous éclairer sur les nuances qu'il faut apporter à ces deux notions-là.

M. Mulcair: Est-ce que vous pouvez nous donner une indication de notre temps sur l'amendement, M. le Président?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Votre temps est épuisé, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: D'accord.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Mme la députée de La Pinière, il vous reste 10 minutes.

Mme Houda-Pepin: Alors, je voudrais attendre d'avoir une réponse du ministre, s'il veut bien s'avancer.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Autres commentaires, Mme la députée de La Pinière?

Mme Houda-Pepin: Bien, sauf revenir sur le fait qu'on a demandé la suspension des deux articles en litige afin d'avancer dans le débat - je pense que c'est une proposition constructive qui démontre l'intérêt que nous avons à continuer l'étude du projet de loi - et attendre que le ministre puisse avoir les réponses pour nous, et on reviendra, M. le Président. C'est une pratique, comme vous le savez comme président, qui est assez courante parfois, quand on arrive et qu'on arrête sur certains projets de loi. D'habitude, c'est le ministre lui-même qui le demande pour faire avancer l'étude de son projet de loi. Nous, on lui propose parce qu'on voit qu'il est dans une impasse. Il n'est pas capable de répondre aux questions qu'on lui a posées. On lui dit: Prenez le temps de consulter puis de nous revenir avec une explication plus cohérente et plus éclairante. Et, nous, en attendant, on va continuer d'étudier le projet de loi. Parce que, M. le Président, c'est très problématique, là, ces deux notions-là sont très, très problématiques.

Je regarde, ici, l'article 18, Politiques générales et règles de pratique. «Règles de pratique», même le titre, évidemment, il est là. «La majorité des juges municipaux peuvent adopter les politiques générales des cours municipales - on parle en général, de toutes les cours municipales - soit à une assemblée convoquée à cette fin par le juge en chef, soit par tout autre mode permettant à celui-ci de les consulter. Ces politiques générales doivent être compatibles avec les dispositions de la présente loi.»

(23 h 50)

Et, lorsqu'on regarde 56.2, eh bien, il est libellé de la façon suivante: «La majorité des juges municipaux peuvent, de la manière prévue à l'article 56.1 - donc, on nous renvoie à l'article qu'on vient de lire - adopter des règles de pratique communes...»

J'ai demandé au ministre: Quelle est la différence entre «règles de pratique communes» et «politiques générales»? Il m'a répondu que les règles de pratique communes, c'est écrit. Mais les politiques générales aussi peuvent être écrites. Ce n'est pas une réponse, ça. J'ai demandé: Qu'est-ce que contient une politique générale? Alors, il m'a parlé des règles d'audience, du rôle, du décorum, etc. Mais ça reste très, très flou parce que, dans la réalité, concrètement, on n'arrive pas à distinguer les règles de pratique communes des politiques générales. Et le ministre se satisfait de ça, il est d'accord avec cette zone grise. Il semblerait que ça fait son affaire, même. Mais, nous, ça ne fait pas notre affaire, on aimerait être éclairés là-dessus.

Alors, M. le Président, je reviens à la proposition que j'ai faite, que je refais à nouveau. Je demande qu'on suspende l'étude des deux articles en litige jusqu'à temps que le ministre puisse nous donner une réponse satisfaisante, et, nous, on va continuer de procéder avec l'étude des articles subséquents.

M. Ménard: ...

Mme Houda-Pepin: Ça va aller? Enfin! Enfin! M. le Président, on aurait pu aller dans cette direction depuis longtemps.

M. Ménard: Alors, 56.2, vous voulez passer, le suspendre aussi?

Mme Houda-Pepin: Oui. M. le Président peut peut-être le confirmer.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Nous suspendons, en fait, l'article 18, donc, incluant les amendements proposés.

Mme Houda-Pepin: C'est ça. Exactement.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Nous suspendons l'amendement. Nous suspendons 56.1. Nous suspendons pour l'instant, aussi, 56.2...

Mme Houda-Pepin: Tout à fait.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): ...avec la proposition d'amendement.

Mme Houda-Pepin: C'est ça.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Donc, nous suspendons l'article 18. Nous revenons à 19.

Mme Houda-Pepin: Voilà. Il a fini, finalement, par comprendre.

M. Ménard: Alors, 19, c'est de concordance.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): C'est une concordance.

M. Mulcair: Sur division.

M. Ménard: Dans 66, il s'agit d'une disposition d'harmonisation avec le Code civil du Québec.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): L'article 19 est adopté sur division. L'article 20.

M. Ménard: L'article 20? Oui. C'est aussi une disposition d'harmonisation avec le Code civil du Québec. On utilise les mêmes termes. C'est un petit ménage qu'on fait à l'occasion de...

M. Mulcair: Sur division.


Financement, administration et contrôle

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Adopté sur division. Article 21. Il y a un...

M. Ménard: À l'article 21, il y a un amendement.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): ...amendement.

M. Ménard: Dans ce cas-ci, l'article 86.1 vise justement à rassurer les représentants des unions municipales et des unions municipales régionales de comté qu'il y aura une entente. Alors, c'est pourquoi on ajoute que, lorsque le gouvernement a conclu une entente avec une municipalité conformément au deuxième alinéa de l'article 36.3 que nous avons déjà lu, les dépenses de soutien administratif directement reliées aux fonctions de juge en chef sont à la charge de cette municipalité et sont, dans la mesure établie dans l'entente, remboursées à la municipalité par le gouvernement. À défaut d'entente ou lorsque la cour municipale à laquelle le juge en chef est affecté à titre de juge municipal est abolie, ces dépenses sont à la charge du gouvernement.

Alors, je pense que cet amendement devrait sécuriser complètement les cours municipales parce que notre intention, c'est évident qu'on ne veut pas que les municipalités aient à payer quoi que ce soit de plus à cause du fait qu'une municipalité abriterait le juge en chef. Il faut considérer d'ailleurs que la municipalité qui va l'abriter va considérer ça comme un honneur d'avoir le juge en chef chez elle. Mais ça ne lui coûtera vraiment pas un sou. Et, de toute façon, nous négocierons une entente avec elle avant de le nommer.

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Est-ce que l'amendement à l'article 21 est adopté ou est-ce que vous avez des questions?

Mme Houda-Pepin: Est-ce que le ministre peut nous dire qu'est-ce que ça représente comme dépenses, la rémunération des juges et toutes les dépenses inhérentes à l'adoption de ce projet de loi?

M. Ménard: Moi, je crois que c'est autour de 50 000 $ par année, maximum. Mais, de toute façon, ça va être assumé par le gouvernement du Québec parce que, voyez-vous, un juge de la Cour du Québec...

(Consultation)

M. Ménard: Voyez-vous, la rémunération des juges municipaux qui sont à temps partiel est nécessairement faite à la séance. Cependant, la loi établit des maximums qu'ils peuvent atteindre. Généralement, s'ils n'occupent pas leur fonction de façon exclusive, ils ne peuvent atteindre que 80 % du salaire d'un juge de la Cour du Québec, qui est actuellement de 113 492 $, donc 80 % de ça. S'il le fait de façon exclusive - et je crois que ça arrive dans certains cas, si je ne me trompe, j'en connais au moins un - alors, là, il peut se rendre jusqu'à 113 492 $. Mais, encore là, ça veut dire qu'il a siégé le nombre de séances nécessaire pour atteindre ce montant. Au-delà de ce montant, il continue à siéger sans être payé de façon supplémentaire.

Maintenant, comme juge en chef de la Cour municipale, il fera l'équivalent d'un juge en chef adjoint de la Cour du Québec, ce qui est 128 246 $ par année, donc un petit peu moins que 15 000 $ de plus que s'il était... Et, de toute façon, la différence entre ce que la municipalité paierait pour le juge municipal et ce montant de 128 000 $ sera payée par le gouvernement. Alors, si le juge, par exemple, n'atteint pas son taux de 80 %, bien, on va payer plus. Mais, s'il atteint 80 %, on va payer moins. Puis, s'il atteint 100 %, on va payer moins.

Mme Houda-Pepin: Mais le juge en chef de la cour municipale, il ne vient pas tout seul, ça lui prend un support, un secrétariat...

M. Ménard: Bon, voilà! C'est ça. Oui, mais, vous voyez bien, le support...

Mme Houda-Pepin: Alors, donc, c'est quoi? Parce que, si vous permettez, M. le Président, je réfère au mémoire au Conseil des ministres qui est en date du 12 février 1998, à la page 3, et je cite. Au chapitre des inconvénients, on écrit ceci: «Faire supporter au gouvernement les dépenses relatives à la fonction de juge en chef ainsi que la rémunération additionnelle qui y serait rattachée: difficulté pour le gouvernement de prévoir avec exactitude les frais qu'il devrait verser à la municipalité responsable de l'administration de la cour à laquelle ce juge serait nommé juge municipal ainsi que difficulté d'anticiper précisément les variables en cours de mandat du juge en chef, de sa rémunération à titre de juge en chef eu égard à celle afférente à sa fonction de juge municipal.» Donc, c'est écrit dans le mémoire. Et le ministre est en train de m'avancer des chiffres... Je ne sais pas qui croire.

(minuit)

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Alors, mesdames et messieurs...

M. Ménard: Ce sont les chiffres que j'ai dans le mémoire. Moi, j'ai bien... En tout cas, on les a évalués à peu près à 23 000. Mais vous voyez en vertu de quoi la différence doit être établie. Le maximum qu'il va recevoir, c'est... C'est-à-dire qu'il va toujours recevoir 128 246 $ par année ou, en tout cas, le salaire d'un juge en chef adjoint. Mais, selon le nombre de séances qu'il va occuper, le maximum auquel il peut se rendre, c'est 113 492 $, qui vont être payés par la municipalité. Vous venez de comprendre que, plus il siège, généralement, plus ça rapporte à la municipalité parce qu'elle perçoit quand même, je crois, le profit des amendes qui sont imposées.

Une voix: Adopté?

Le Président (M. Landry, Bonaventure): Mesdames, messieurs, l'heure prévue pour la fin de notre séance étant arrivée, nous allons ajourner nos travaux à demain.

(Fin de la séance à 0 h 1)


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