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(Quinze heures vingt minutes)
Le Président (M. LeSage): à l'ordre, s'il vous
plaît! je déclare la commission des institutions ouverte et je
vous rappelle le mandat de notre commission, soit de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 38, loi sur
l'application de la réforme du code civil. est-ce qu'il y a des
remplacements, mme la secrétaire?
La Secrétaire: Oui, M. Dauphin (Marquette) est
remplacé par Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrance (Iberville) est
remplacé par M. Forget (Prévost) et M. Beaulne (Bertrand) est
remplacé par M. Holden (Westmount).
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la secrétaire.
Nous en sommes maintenant à l'étape des remarques
préliminaires. M. le ministre.
Organisation des travaux
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Après
discussion, nous avons convenu avec l'Opposition que nos travaux pourraient
avoir lieu cet après-midi où nous pourrions faire nos remarques
préliminaires ou nos remarques d'ouverture, peut-être plus nos
remarques d'ouverture, et ensuite revenir dans la soirée comme
prévu. Si c'était possible, M. le Président, de revenir
à 20 h 15 au lieu de 20 heures, nous pourrions, à ce
moment-là, aborder les premiers articles ou quelques commentaires,
à la suite de nos interventions, et continuer, donc, en commission
parlementaire dans la soirée, selon le rythme du travail que nous aurons
à faire, incluant les rencontres avec les experts, que nous aurons
à faire au fur et à mesure de l'évolution de nos
discussions.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, je voudrais bien
savoir: est-ce que je dis les choses telles qu'elles ont été
convenues?
Le Président (M. LeSage): Alors, il y a consensus pour
qu'à la fin de nos travaux, cet après-midi, on suspende à
20 h 15 et...
Mme Harel: On reprend à 20 h 15.
Le Président (M. LeSage): C'est-à-dire qu'à
la fin de cet après-midi, à la suspension, nous allons suspendre
à 20 h 15 ce soir. On s'entend?
Mme Harel: Très bien.
M. Rémillard: Mais je crois que le président a
raison. On suspend à 20 h 15, ce qui veut dire, M. le Président,
qu'on recommence à 20 h 15.
Le Président (M. LeSage): Exactement, M. le ministre.
M. Rémillard: Ah oui, voilà!
Le Président (M. LeSage): On s'entend. Blanc bonnet,
bonnet blanc. Mme la ministre... Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, vous avez des commentaires à faire
également?
Mme Harel: Oh! Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Est-ce que c'est une pointe à mon
égard, M. le Président?
Une voix: Ça fait deux fois dans la même
semaine.
Mme Harel: Ha, ha, ha!
Une voix: Ça commence bien.
Mme Harel: M. le député de Hull, on ne va pas vous
le reprocher.
Le Président (M. LeSage): Merci. Remarques
préliminaires Mme Louise Harel
Mme Harel: D'abord, M. le député de Hull, c'est
pour vous saluer. Vous savez que vous siégez dans une fonction qui a
été occupée par le député d'Iberville
pendant de longs mois et de très, très longues semaines. Vous
devez savoir certainement le climat de franche collaboration, pour ne pas dire
de camaraderie, qu'il avait introduit au sein de notre sous-commission des
institutions, mais je comprends qu'il en sera tout autant cet automne.
M. le Président, d'abord, pour saluer les personnes qui vont
à nouveau reprendre le collier, cette fois, sur la loi d'application.
Comme vous pouvez voir, il s'agit, du côté de l'Opposition,
également des mêmes collaborateurs et, cette fois-ci, nous pouvons
compter sur la présence, la collaboration et sur la
responsabilité du député de Westmount dans le dossier de
la loi d'application, sur l'expertise, l'expérience du
député de Westmount - vous faites bien de le souligner - et,
évidemment, du député d'Anjou, puisque le
député d'Anjou, étant élu après la fin de
nos travaux l'année passée, s'est donc joint à
nous au début du printemps passé. Alors, maintenant, nous
avons littéralement doublé la présence des avocats au sein
de la deputation de l'Opposition. Nous sommes passés de deux à
quatre, et vous en avez trois présents cet après-midi.
M. Holden: Ça comprend le député de
Lévis, aussi.
Mme Harel: Évidemment, il y a le député de
Lévis qui n'est pas des nôtres, en fait, qui est le
quatrième. Je vous dirais qu'il y a presque quelqu'un qui pourrait
passer ses examens tellement elle a fait un travail assidu et consciencieux au
sein de notre commission, et c'est, évidemment, la députée
de Terrebonne. Ha, ha, ha!
Ceci dit, plus sérieusement, là, M. le Président,
nous allons travailler avec le même esprit qui nous a animés au
moment de l'examen du projet de loi 125. D'autre part, nous avons un certain
nombre de questions à formuler, dès l'ouverture de nos travaux,
sur lesquelles nous souhaiterions, notamment pour les fins du Journal des
débats, avoir des réponses qui engageront d'une certaine
façon, évidemment, le ministre. Il s'agit parfois de questions
sur lesquelles nous avons échangé, soit dans le Parlement ou dans
une quelconque de nos intermissions, mais nous pensons qu'il est utile,
à ce stade-ci, pour les fins du Journal des débats,
d'avoir des réponses aux questions que nous nous posons, notamment
en matière d'hypothèque mobilière sans
dépossession.
Je rappelle que, lorsque nous terminions nos travaux, l'an passé,
le ministre responsable du dossier avait annoncé la tenue d'une
commission parlementaire, au printemps dernier, commission au cours de laquelle
devait se tenir une consultation sur cette question de l'hypothèque
mobilière sans dépossession, en vue d'une législation qui
pouvait prendre soit la forme de modifications au Code civil ou la forme de
modifications à la loi de protection du consommateur. En fait,
l'hypothèse des modifications était restée ouverte. Alors,
nous souhaiterions, à ce stade-ci de nos travaux, évidemment,
connaître les intentions du législateur à cet
égard.
D'autre part, nous savons, évidemment, que nous nous engageons,
là, dans un compte à rebours, et nous y avons collaboré
activement. On peut dire que, dans ce dossier, l'attitude de l'Opposition a
été proactive. Donc, nous aimerions savoir qu'est-ce que le
ministère a déjà prévu en matière de mise en
marché grand public du nouveau Code. Nous comprenons que les chambres
professionnelles ont mis en branle le travail qui consiste à transmettre
à leurs membres, n'est-ce-pas, la formation adéquate et qu'il en
va ainsi des facultés universitaires. Mais, à l'égard de
la population et à l'égard du rôle que le ministère
de la Justice doit assumer, nous aimerions connaître quelles sont les
stratégies d'information que le ministre entend adopter pour faire
connaître ces nouvelles dispositions, en fait, ce régime de droit,
là, qui sera mis à la disposition de nos concitoyens.
D'autre part, également, vous vous rappelez peut-être que,
au moment où nous terminions nos travaux, c'est avec beaucoup
d'insistance que nous avions souhaité la création de l'institut
permament de réforme du droit. Nous l'avions dit, dès l'ouverture
des travaux. Nous l'avons répété et nous avons d'ailleurs
collaboré, au printemps passé, à l'adoption du projet de
loi créant cet institut permanent de réforme du droit, il y a
déjà maintenant six mois. Alors, est-ce que nous devons conclure
que le ministre n'a pas obtenu du Conseil du trésor les crédits
qui sont nécessaires pour que cet institut permanent voie le jour avant
le prochain exercice financier qui ne débute qu'en avril prochain? C'est
la conclusion que nous sommes amenés à tirer si tant est que la
mise en place, l'implantation de l'Institut ne voie, finalement, le jour qu'en
1993. Alors, il est nécessaire de demander au ministre quand il entend
annoncer la création de cet institut permanent de réforme du
droit. (15 h 30)
Nous sommes conscients - je pense que le ministre l'est tout autant que
nous - que la meilleure contribution qu'on puisse faire au Code civil, à
partir de maintenant, c'est de lui permettre d'évoluer constamment et
que le danger consisterait, évidemment, encore une fois à pousser
un grand ouf de soulagement et à penser que le travail est fait pour
très, très longtemps, puis à laisser, finalement, le Code
vieillir, comme ce fut le cas dans le passé. Au contraire, étant
donné, d'ailleurs, la rapidité avec laquelle notre
société évolue, c'est évident que c'est dès
maintenant sûrement qu'il faut recommencer à
réfléchir sur des dispositions qui ont déjà
peut-être elles-mêmes vieilli. Alors, ce serait donc la
deuxième question. La première, je la rappelle, c'est
l'hypothèque mobilière sans dépossession, la
deuxième étant l'implantation de l'institut permanent de
réforme du droit.
D'autre part, nous sommes certainement contents que, dès demain,
en commission parlementaire, nous puissions faire un état de la
situation quant à l'implantation des systèmes informatiques.
Ça nous semble extrêmement important, à ce moment-ci, au
moment où nous examinons la loi d'application, que nous cherchions
à comprendre où en est l'application de ces supports
informatiques qui sont indispensables, n'est-ce pas, pour tous ces changements
qui vont s'opérer dans la publicité des droits et dans
l'implantation des nouveaux registres. Alors, de toute façon, nous
allons réserver nos questions pour demain là-dessus. Il en va
autant pour la réforme cadastrale. C'est évident que, sur ce
plan-là, également, nous avons besoin de con-
naître l'état de la situation.
Voilà.
Alors, simplement un dernier mot avant d'aborder le projet
de loi 38. Simplement pour vous dire notre satisfaction de pouvoir poursuivre,
avec l'équipe d'experts mise à la disposition de l'Opposition par
le ministre et le ministère de la Justice, les travaux que nous avions
entrepris. Vous savez, il ne s'agit pas de reprendre le droit substantif
à l'occasion de la loi d'application. Alors, ça nous a
semblé important de pouvoir poursuivre, et je dois vous dire que nous
l'apprécions.
Quant au projet de loi qui est devant nous, peut-être
signaler tout de suite, là, qu'une des difficultés que nous
aurons à résoudre comme commission, c'est certainement celle qui
a trait à l'application immédiate de la loi, et ça vaut
particulièrement pour l'effet d'application de la loi en matière
de sûretés. Alors, je comprends que nous aurons l'occasion, ce
soir, en séance de travail, d'échanger sur cette question. En
fait, c'est évident qu'il y a une sorte de cohabitation de deux
systèmes juridiques pendant une certaine période. Personne ne
souhaite que ça dure longtemps, mais il va falloir aménager cette
cohabitation certainement de façon qu'il n'y ait pas de perte de droits
et que personne ne soit affecté, finalement, particulièrement
dans le domaine des sûretés déjà accordées,
où il faudrait tout au moins que les dispositions actuelles continuent
de s'appliquer pendant un certain temps. Ça, on aura l'occasion d'y
revenir.
D'autre part, je comprends également qu'en
matière contractuelle, au niveau des contrats, il y aura
également certains éclaircissements sur lesquels nous pourrons
échanger ce soir. Et, en matière particulièrement de
protection de la vie privée - c'est là peut-être ma
troisième question et mes collègues, je pense, ont
travaillé plus particulièrement cet aspect-là - il est
évident que, lorsque nous avons adopté les articles du Code
traitant du respect de la réputation et de la vie privée, il
avait été, je crois, entendu qu'au moment de la loi d'application
nous pourrions connaître les dispositions par lesquelles on entendait
appliquer ces articles traitant du respect de la réputation et de la vie
privée. Alors, on sait très bien qu'un droit ne vaut que dans la
mesure où il peut s'exercer et, évidemment, les dispositions qui
traitent du respect de la réputation et de la vie privée ne
trouvent dans la loi d'application, là, aucune disposition qui viendrait
en faciliter l'exercice. Alors, il s'agira, évidemment, là, de
clarifier cette question.
Dans les journaux, j'ai lu que le ministre des
Communications allait déposer un projet de loi. Mais, il y a deux ans,
je m'étais rendue à un banquet du vingtième anniversaire
de la Charte des droits et libertés, où le ministre de la Justice
avait aussi annoncé un projet de loi sur la confidentialité ou
plutôt sur le respect de la réputation et de la vie privée.
Alors, il faudrait certainement, là, qu'à ce stade-ci de nos
travaux on ait plus que des annonces qu'un jour il y aura un projet de loi.
Est-ce qu'il y a un projet qui est en élaboration? Est-ce qu'il y a une
proposition gouvernementale qu'il faudrait attendre bientôt, en fait? Sur
ça, on aimerait avoir des éclaircissements.
Et, également, un autre aspect. J'en avais
parlé au moment du débat en deuxième lecture. Ici
même, le ministre s'était engagé, en commission des
institutions, à ce qu'on examine, en même temps que la loi
d'application, le règlement qui allait permettre l'accès aux
registres. C'était dans le cadre de tout ce débat sur la
confidentialité, en particulier sur l'accès. Cet engagement a
été pris par le ministre au moment où nous examinions les
demandes qui venaient des milieux des sociétés
généalogiques et des groupes d'historiens.
Alors, est-ce que le règlement est
déjà élaboré? En fait, il y a déjà
presque un an que nous avions tenu cet échange. Alors, ce
règlement que nous devions examiner en même temps que la loi
d'application, est-ce qu'il est prêt? À défaut, est-ce
qu'on peut obtenir un engagement du ministre qu'on va pouvoir l'examiner en
commission parlementaire? Si ce n'est pas maintenant, tout au moins il faudrait
accepter qu'il y ait un contrôle parlementaire sur cette
question-là, parce que ça reste quand même du droit nouveau
et ça va avoir un effet quand même important. Imaginez-vous, les
registres d'état civil, c'est finalement notre vie, la vie de tous les
gens, de tous nos concitoyens qui y est condensée, bon.
Avec, évidemment, la rapidité des
bouleversements, des changements technologiques, il y a tout un
équilibre à maintenir entre l'accès et la
confidentialité. Alors, nous souhaiterions, soit, évidemment,
qu'on puisse, à l'occasion de la loi d'application, examiner
également la proposition de règlement ou, à défaut,
qu'il puisse y aveir un examen en commission parlementaire des institutions du
projet de règlement. Ça ne sera pas un précédent.
Je me rappelle que, nouvellement nommée au dossier de la justice, une de
mes premières responsabilités avait été
d'étudier en commission le règlement, je crois, concernant le
Tribunal des droits de la personne.
Alors, donc, nous souhaiterions que le ministre consente le
même examen parlementaire. Je disais à mes collègues,
aujourd'hui, que je croyais qu'on allait revenir au printemps prochain pour
terminer l'étude du Code civil, et eux me disaient qu'il n'en
était rien et que, vraisemblablement, on allait terminer dès
cette présente session. Mais là, vous voyez, j'ai trouvé
quelque chose d'autre qui va nous y ramener, si le ministre consent, à
moins qu'il puisse tout de suite déposer le règlement, comme
d'ailleurs il s'était engagé à le faire au moment
où on examinait ces articles-là, l'an dernier. (15 h 40)
Alors, ça complète, M. le Président, l'intervention
d'ouverture et je vous rappelle que je fais d'une certaine façon le pont
avec les travaux que nous avions faits l'an passé et que,
dorénavant, mon collègue de Westmount va assumer tout l'examen de
la loi d'application. Je vous remercie.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme fa
députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le ministre.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Je vous remercie, M. le Président. M.
le Président, vous me permettrez, tout d'abord, de dire tout le plaisir
que j'ai de me retrouver dans cette salle, un an après nos travaux de
près de cinq mois en commission parlementaire, qui nous ont permis, le
18 décembre dernier, de faire voter par l'Assemblée nationale un
nouveau Code civil sanctionné la même journée, donc, pour
le Québec.
M. le Président, j'ai donc le plaisir d'avoir avec moi mes
collègues. Tout d'abord, l'adjoint parlementaire au ministre de la
Justice, le député de Chapleau, le député de Viger,
qui est adjoint parlementaire du ministre aux Affaires intergouvernementales
canadiennes, le député d'Or-ford, qui a suivi attentivement tous
nos travaux de la réforme du Code civil, et la députée de
Vachon, aussi, qui a été impliquée dans bien de nos
discussions concernant la réforme du Code civil. On se souvient de
toutes ces grandes questions que nous avons eu à discuter l'an dernier,
M. le Président, puisque, à tous les jours, on avait, finalement,
des questions d'orientation de société à discuter ici et
de grandes questions auxquelles on devait évidemment apporter de grandes
réponses.
La tâche était très difficile, M. le
Président. Je regardais certaines coupures de presse qui avaient
été faites, à ce moment-là, brièvement,
parce que, des fois, ça nous met en perspective de regarder ce que les
journalistes, ces observateurs impartiaux de la scène politique et de
nos travaux, peuvent donner comme aperçu de nos travaux. Je regardais
des articles parus dans la journal La Presse, où on disait: Mais
Gil Rémillard n'aura pas la partie facile. Le Barreau juge la
réforme bien secondaire. Les notaires, qui voulaient profiter de la
réforme pour accroître leurs privilèges, n'ont jamais
été d'un enthousiasme délirant. Ils n'ont pas de position
officielle pour l'instant. Or, sans l'appui des deux professions juridiques qui
en sont les premiers utilisateurs, la réforme est impensable. C'est que
la chose n'est pas mince.
Citation: Ce n'est pas une grosse loi, c'est un projet de
société, dit le professeur Paul-André Crépeau de
McGill. Un autre petit passage: II s'agit maintenant de savoir si on peut faire
la chose tout d'un coup ou morceau par morceau.
De tous les pays de droit civil qui ont tenté de réformer
en bloc leur code, seule la Hollande y est parvenue. Les Français y ont
renoncé depuis longtemps. Et puis, je pourrais citer bien d'autres
passages, M. le Président.
Nous avons eu une collaboration exceptionnelle des avocats et des
notaires qui nous a permis, finalement, de réussir cette réforme
du Code civil. Nous avons eu, bien sûr, la collaboration de l'Opposition
et du côté ministériel. Du côté de
l'Opposition, nous avons travaillé en fonction des mêmes
objectifs. Une collaboration essentielle et tellement exceptionnelle aussi des
légistes et des juristes du ministère de la Justice. Et je veux
saluer et vous indiquer, M. le Président, que je suis accompagné
aujourd'hui de Mme la sous-ministre, Use Morency, qui est avec moi, de Mme
Marie-José Longtin et Me André Cossette, les légistes qui
sont ici, et de Me Aidée Frenette qui est ici, d'Yves Pleau et Pierre
Charbonneau, qui sont ici donc et qui nous ont accompagnés l'an dernier
dans tous nos travaux. Je dois dire qu'ils m'ont accompagné depuis que
je suis ministre de la Justice. Le lendemain de mon assermentation, il y a
quatre ans et demi, on commençait les travaux pour la réforme du
Code civil et ils étaient avec moi pour travailler. Je les retrouve dans
cette dernière étape. Et Me Jean Pineau, professeur de droit
à l'Université de Montréal, eminent spécialiste de
droit civil, qu'on a le plaisir d'avoir avec nous.
Et je salue les experts de l'Opposition - je dis «les experts de
l'Opposition», mon expression n'est pas juste - les experts qui
travaillent avec l'Opposition pour qu'on puisse en arriver au meilleur
résultat possible. C'est Me Monique Ouellet, Me Claude Masse, Me
François Frenette qui, chacun dans leur domaine, donc, ont
déjà travaillé avec nous pour le Code civil et qui seront
donc avec nous pour cette loi d'application.
Je souligne aussi le plaisir que nous avons d'avoir encore pour cette
loi d'application la grande collaboration du Barreau et de sa
représentante qui est ici, Me Suzanne Vadboncoeur, de même que la
représentante de la Chambre des notaires, Me Mireille Bessette, qui est
avec nous, et Me Lise Nadeau, qui est avec nous aussi. Alors, M. le
Président, nous avons donc la possiblité d'avoir Me Nadeau qui
est avec nous au nom de la Confédération des caisses populaires.
Alors, M. le Président, nous étions tous ensemble, il y a un an.
On se retrouve maintenant pour cette loi d'application.
Une loi d'application, c'est la loi qui nous permet de franchir la
dernière étape pour que l'on puisse avoir ce Code civil nouveau
à l'image du Québec et que nous puissions respecter les
échéanciers extrêmement serrés qu'on s'était
donnés. M. le Président, je peux dire, et je le dis avec beaucoup
de fierté, que nous allons respecter notre échéancier et
que, dès le 1er
janvier 1994, le Code civil pourrait être en
application.
M. le Président, c'est un tour de force que nous
faisons tous comme parlementaires, mais vous me permettrez de saluer d'une
façon toute particulière le travail qui se fait au
ministère de la Justice, travail que je dirais exceptionnel à
tous les niveaux, parce que je sais qu'on pousse beaucoup, beaucoup, beaucoup.
Souvent, on me dit: Ce n'est pas possible, M. le ministre, ce n'est pas
possible. Et, finalement, on trouve des moyens pour y arriver. Donc, M. le
Président, avec la collaboration que nous avons eue de l'Opposition, on
peut dire que nous pourrons mettre en application, dès le 1er janvier
1994, ce Code civil en entier, ce qui est certainement remarquable dans une
perspective parlementaire comme la nôtre.
M. le Président, je dis remarquable parce que
souvenons-nous que c'est en 1955 qu'on a débuté les travaux de
réflexion sur la réforme du Code civil. C'était avec
l'adoption d'une loi qu'on appelait la Loi concernant la révision du
Code oivil, dès 1955. Et, en 1978, souvenons-nous qu'il y a eu le
dépôt du rapport de l'Office de révision du Code civil
à l'Assemblée nationale, rapport qui avait été
rédigé sous la direction de M. le professeur Paul-André
Crépeau. Ce rapport nous a servi comme l'une des premières
références lorsque nous avons élaboré nos
discussions en fonction, donc, de ce nouveau Code civil que nous avons
accepté l'an dernier.
M. le Président, dans cette loi d'application, nous
avons des discussions importantes à avoir avec nos experts et nous avons
des décisions importantes à prendre, des décisions qui ne
sont pas faciles. Nous avons un nouveau Code civil dont nous pouvons être
fiers. Nous pouvons en être fiers, M. le Président, d'autant plus
que ça fait maintenant un an qu'on l'a adopté. Et, depuis un an,
je n'ai pas souvenir, en tout cas, je n'ai pas eu connaissance qu'on ait pu
relever des erreurs qu'on aurait pu commettre, parce qu'on était tous
soucieux, membres de cette commission parlementaire, de ne pas faire d'erreur.
On se disait tous: Bien, il ne faut pas faire d'erreur; on a une
responsabilité face à la société. Soyons le plus
méticuleux possible. Avec la collaboration de nos experts, de nos
légistes, on peut dire, après un an, en tout cas, jusqu'à
présent, qu'on n'a pas trouvé de faille dans le nouveau Code
civil du Québec.
Mme Harel: Des imperfections, mais pas de faille.
Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Pas de faille. Des imperfections, je dirais
des situations qui pourront tendre vers une amélioration
éventuelle dans une perspective globale d'amélioration de nos
conditions de vie dans notre société moderne, M. le
Président. Mais il reste qu'on a fait un bon travail et qu'on va
continuer à faire un bon travail avec la collaboration de tout le monde,
en ce qui regarde cette loi d'application.
(15 h 50)
On a à prendre des décisions importantes,
entre autres, en ce qui regarde, bien sûr, l'application de ce droit
nouveau. Comme la députée de Hochelaga-Maisonneuve le mentionnait
tout à l'heure, ce que nous avens à décider, à
toutes fins pratiques, c'est de respecter les droits de chacun, de chaque
justiciable de pouvoir avoir une situation juridique conforme aux
décisions qu'il a prises lorsqu'il a décidé de se lier
juridiquement.
Je parle, par exemple, de ceux qui ont fait des contrats et
qui continuent à faire des contrats, et qui le font en perspective d'un
droit tel qu'il existe, tel qu'il est en vigueur maintenant. Et, tout à
coup, on arrive avec un nouveau droit, qui n'est pas une révolution, qui
est une évolution, mais qui, quand même, change des choses et
quelquefois d'une façon considérable. Alors, comme
législateurs, ce qu'en a à prendre comme décision, c'est
de savoir comment ce passage doit se faire sans léser dans leurs droits
les personnes engagées dans une situation juridique, mais tout en ayant
bien à l'esprit que l'on doit donner à notre
société les moyens, évidemment, d'âtre
gouvernée par ce droit nouveau le plus tôt possible, sans avoir
à continuer en fonction de deux régimes juridiques,
c'est-à-dire un nouveau droit et un ancien droit qui continuerait quand
même à s'appliquer dans certaines circonstances. Il faut donc
être particulièrement soucieux, concernant ce problème, et
conscients de notre responsabilité en ce qui regarde, d'une part, les
droits individuels dos personnes engagées dans des situations juridiques
et, d'autre part, le droit d'une société à avoir ce droit
nouveau en application le plus tôt possible et de la façon la plus
uniforme.
M. le Président, nous apporterons des amendements,
il y a des amendements qui sent envisagés, et ce sont des amendements
qui sent de divers ordres et qui sont d'importance variable. Le principal
amendement est certainement celui qui vise à restreindre l'application
de l'article 3 du projet, article qui prévoit l'effet immédiat de
la loi nouvelle à toutes les situations juridiques en cours, y compris
aux situations contractuelles. Tant la Chambre des notaires que le Barreau du
Québec nous ont fait valoir que la portée de cette règle
était trop large, notamment en ce qui concerne le contenu du contrat,
qu'il soit exprimé au contrat ou qu'il soit tacite. Notre drett actuel,
tout comme le droit futur, d'ailleurs, reconnaît que le contrat est la
loi des parties qui s'impose à elles. On réserve, cependant, tant
dans le droit actuel que futur, les règles imperatives de la loi,
l'article 13 du Code civil du Bas Canada et l'article 9 du Code civil du
Québec, c'est-à-dire le nouveau droit.
Le contrat étant la loi des parties, toujours
sous la réserve des règles imperatives, ce qui
définit leurs droits et obligations et gouverne leur conduite est soit
ce qu'elles ont expressément stipulé, soit, si elles se sont
tues, ce que l'on appelle les dispositions supplétives de la loi. Par
exemple, en matière de vente, le Code civil actuel admet que l'on
puisse, par convention, exclure les garanties légales,
c'est-à-dire celles énoncées au Code. Si les parties n'ont
rien dit, ces règles trouvent application, ces règles
s'appliquent.
C'est donc en tenant compte des représentations faites sur ce
point que je me propose de présenter un amendement à l'article 3
qui viendra en tempérer l'application en matière contractuelle,
respectant les deux principes que j'ai évoqués tout à
l'heure, c'est-à-dire le droit des individus impliqués dans une
situation juridique et le droit d'une société d'avoir un droit
nouveau qui est applicable de la façon la plus universelle, uniforme
possible.
Ce tempérament, M. le Président, qui vise à faire
survivre la loi ancienne, ne peut cependant être absolu, car, outre que
l'on doive tenir compte du fait que le temps joue en faveur du droit nouveau,
on doit aussi tenir compte des impératifs liés à une
administration simple, efficace et correcte de la justice et des rapports ou de
l'effet qu'un contrat peut avoir sur les tiers. Il faut donc, dans cette
recherche du juste équilibre qui m'est chère, tenter de
déterminer le point-charnière où il convient de soumettre
ce que l'on peut appeler des effets du contrat ou plutôt, à bien
des égards, des conséquences possibles du contrat à la loi
nouvelle. Ce point, ce moment dans la vie du contrat me semble être celui
de l'exercice des droits et de l'exécution des obligations. Ce moment de
l'exercice ou de l'exécution détermine, si l'exécution
n'est pas volontaire, le moment où l'on doit mettre en oeuvre les
modalités prévues par la loi pour entraîner cette
exécution.
De même, seraient visées par le droit nouveau la mutation
ou la transmission des droits et obligations - et on parie ici des cessions de
créances, de la subrogation, de la novation - ou encore leur preuve ou
leur extinction; exemple, la prescription. C'est là le point essentiel
du projet de droit transitoire. Les autres aménagements sont d'un ordre
qu'on peut qualifier d'autre: précisions ou corrections formelles ou
encore compléments apportés aux règles par suite d'oublis
que l'on nous a signalés ou encore de situations particulières
vécues par les intervenants et qu'ils ont portées à notre
connaissance.
Parmi ces compléments, certains découleront aussi de la
nouvelle règle que j'entends proposer en matière contractuelle,
et cela, notamment en droit des biens. En effet, en matière de biens,
les règles du Code civil visent, au-delà des contrats, des
institutions juridiques et des droits réels, et la durée de ces
situations juridiques, contractuelles ou extracontractuelles, peut être
fort longue. En raison de cet ajout qui mitigera la portée de
l'application de la loi nouvelle, faisant survivre la loi ancienne
jusqu'à une certaine limite, je proposerai également un ajout
pour préciser que la loi ancienne demeure applicable aux contrats
antérieurs à la loi nouvelle, quand il s'agit d'apprécier
et d'appliquer des garanties légales ou conventionnelles que se doivent
les parties contractantes.
Des aménagements divers sont aussi prévus, au fil des
articles, pour clarifier la règle, en préciser la portée
ou en ajuster l'application. Ainsi, en matière de mariage, de succession
et de sûretés, des précisions seront apportées sur
les moments où une liquidation commence, où un partage est
effectué ou encore le début du processus de réalisation de
la sûreté. En matière d'obligation de contrat, des
clarifications seront apportées sur la confirmation des contrats, la
responsabilité civile ou encore sur le moment à considérer
pour déterminer la loi applicable aux régimes de garantie contre
les pertes dans un contrat d'entreprise.
Même si le droit transitoire est au coeur du projet de loi, il
faut aussi tenir compte des deux autres volets. Le Code de procédure
civile est, à bien des égards, profondément modifié
par le projet, notamment dans ses dispositions générales, par
exemple, en ce qui regarde les règles de désignation des parties,
en matière d'exécution des jugements, pour apparier
principalement ces règles au droit nouveau des sûretés. Il
l'est aussi au titre des procédures spéciales et des
matières non contentieuses, pour tenir compte du nouveau droit des
personnes, des successions, des biens et des sûretés.
Plusieurs amendements seront proposés à ces dispositions
pour tenir compte des représentations qui nous ont été
faites par les milieux intéressés et, au premier chef, le Barreau
du Québec, la Chambre des notaires, la Chambre des huissiers de justice,
la Confédération des caisses populaires et l'administration des
greffes. Ces amendements ne modifient pas les orientations du projet, mais ils
apportent des tempéraments et des assouplissements qui visent à
assurer une meilleure protection des droits des parties et un
déroulement plus efficace et moins coûteux de la
procédure.
Enfin, divers autres amendements seront proposés au
troisième volet du projet de loi portant sur la législation en
général. La quasi-totalité des amendements
envisagés sont d'ordre technique. Il convient cependant de mentionner
qu'en accord avec les chambres professionnelles concernées et l'Office
des professions des amendements seront apportés de manière
à habiliter les corporations professionnelles à régir, en
vue de permettre une bonne application du Code civil, la formation des
juristes, notaires et avocats, et des arpenteurs-géomètres. (16
heures)
M. te Président, la députée de
Hochelaga-Maisonneuve a soulevé certains points lorsqu'elle a fait ses
remarques, tout à l'heure. J'aurai l'occasion, bien sûr, d'y
revenir et de discuter plus avant ces différents points lorsque nous
aurons à étudier article par article le projet de loi. Je veux,
peut-être brièvement, répondre à certaines de ses
interrogations. En ce qui regarde, tout d'abord, la stratégie
d'information, il est clair que ça demande, ce nouveau Code civil, que
nous puissions informer adéquatement la population. Je veux, comme
ministre de la Justice, être très actif dans ce dossier, bien
sûr. J'irai dans toutes les régions du Québec et je ferai
tout ce que je peux faire pour informer la population des changements
principaux qu'on peut trouver dans ce nouveau Code civil du Québec.
J'aurai aussi la collaboration de tous les députés et je sais que
je peux compter sur la collaboration des membres de l'Opposition comme sur la
collaboration du côté ministériel qui est
déjà très actif dans la connaissance et l'étude de
ce nouveau droit civil.
Mais nous aurons aussi à développer des moyens de
communication. Il y a présentement des projets qui se développent
de plus en plus. En fonction des moyens que nous avons, nous prévoyons
demander conseil auprès des experts et procéder avec des
stratégies de communication qui pourraient être les plus efficaces
possible et qui impliqueraient aussi les corporations professionnelles:
avocats, notaires, huissiers dont je vous parlais tout à l'heure, qui
impliqueraient aussi des corporations professionnelles qui sont
impliquées comme... Tout à l'heure, je parlais des
arpenteurs-géomètres; on peut parler aussi des ingénieurs,
des architectes; on peut parler aussi, dans le domaine des assurances, de toute
la responsabilité des assureurs. Il va falloir que cette campagne de
sensibilisation, d'information puisse se faire en collaboration étroite
avec les différents intervenants qui sont impliqués dans cette
réforme du Code civil. Alors, nous sommes à élaborer ce
plan d'intervention en matière d'information, et j'aurai probablement
l'occasion d'en parler avec Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve dans les prochains mois et les prochaines semaines
puisque nous aurons à finaliser toutes ces
démarches-là.
En ce qui regarde l'Institut permanent de réforme du droit, j'ai
comme date cible le début d'avril pour qu'on puisse avoir un
président, avoir des membres de cet Institut.
Mme Harel: Ou une présidente.
M. Rémillard: Oh! Excusez-moi! Oui, bien sûr! Un
président ou une présidente. Oui, bien sûr! Et des
différents membres et membres...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Juste une parenthèse. J'ai entendu,
je crois que c'est hier, un discours où on parlait d'humains et
humaines.
Mme Harel: Ici, dans cette Assemblée?
M. Rémillard: Oui. Enfin... Alors, M. le Président,
j'aurai l'occasion, donc... Je suis en consultation. J'ai commencé
à recevoir des représentations de certaines personnes, de
certaines institutions qui m'ont suggéré des noms. Alors, je suis
en consultation pour avoir des noms. Alors, pour cet institut
québécois de réforme du droit, la date cible serait au
mois d'avril prochain.
En ce qui regarde la vie privée, il y a un projet de loi qui est
en préparation et qui serait parrainé par mon collègue, le
ministre des Communications. J'ai été associé de
près, de même que des légistes du ministère de la
Justice ont été associés de très près
à l'élaboration de ce projet de loi et, ce projet de loi, on
m'informe qu'il pourrait être présenté dès les
prochains jours, à cette session-ci, avant l'ajournement des
fêtes. Alors, c'est donc une possibilité qu'on puisse avoir ce
projet de loi dans les prochains jours.
En ce qui regarde, maintenant, les règlements d'accès aux
registres, si ma mémoire est bonne, j'avais dit qu'on pourrait regarder
les possibilités d'étudier ces règlements en commission
parlementaire. Oui, c'est très vrai, mais je ne crois pas avoir dit que
ce serait à cette commission-ci pendant qu'on étudie la loi
d'application, parce que c'est matériellement impossible. Cependant, il
serait possible, dès l'étude de ce projet de loi, de pouvoir
entendre les responsables des registres nous parier des grandes orientations et
de plusieurs éléments qu'on pourra retrouver dans cette
réglementation. Alors, dès demain, on pourra vous faire part des
grandes orientations, des principes et puis y aller même assez
précisément dans certaines préoccupations que je sais
qu'on peut avoir comme parlementaires. Ce qui veut dire que, bien que la
réglementation ne soit pas complète au moment où nous nous
parlons, il y a encore du travail à faire pour finaliser ces
règlements, il reste que, dès demain, nous pourrons en parler
quand même, je pense, en ayant la possibilité d'avoir des
informations très pertinentes en fonction des -questions qu'on peut se
poser comme parlementaires.
Alors, voilà, M. le Président, je termine mes remarques
sur ces mots. Je veux donc remercier mes collègues du côté
ministériel et mes collègues parlementaires de l'Opposition pour
leur collaboration très importante que nous avons eue jusqu'à
présent. On me souligne aussi que je pourrais parier de
l'hypothèque mobilière. En ce qui regarde l'hypothèque
mobilière, c'est un sujet que nous avons beaucoup discuté
lorsqu'on a parlé de la réforme du Code civil, et j'ai dit que
j'y reviendrais en commission, qu'il y aurait une commission parlementaire sur
l'hypothèque mobi-
lière. C'est certainement, je crois, toujours pour moi une
grande, grande possibilité; c'est toujours le moyen que je
privilégie.
Du côté de l'Opposition, je sais qu'on poursuit la
réflexion. De notre côté, on l'a poursuivie aussi. Je ne
crois pas que l'on procède à cette commission parlementaire dans
les prochains, prochains mois, parce qu'on a énormément de
travail à faire. Je ne peux pas demander l'impossible, quand même,
aux gens du ministère de la Justice et aux juristes, aux experts. Ce
n'est pas possible, mais je veux quand même confirmer que j'envisage
toujours une commission parlementaire sur l'hypothèque mobilière,
comme je l'avais prévu. Quand? Pour le moment, je ne m'aventurerais pas
dans une date précise parce que ça dépendrait... Je viens
de parier des règlements; juste faire ces règlements et
l'étude que ça implique, c'est beaucoup, beaucoup de travail. De
par les explications qu'on va avoir demain et les questions qu'on va avoir,
vous allez voir que ce n'est pas simple et que ça demande beaucoup,
beaucoup de travail. Alors, c'est une question qu'on puisse ajuster notre
travail, mais il y aurait une commission parlementaire.
On me parle ici de la rénovation du cadastre, qui relève
du ministère de l'Énergie et des Ressources. Je crois que vous en
avez parié aussi, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Alors, demain, nous aurons un représentant, donc, de ce ministère
qui a la responsabilité de la rénovation du cadastre, qui sera
ici aussi pour répondre aux questions à ce niveau-là.
Attendez que je regarde: rénovation cadastrale, application
immédiate de la loi... Je pense que j'ai tout couvert. Bon! Alors, on
m'assure... Lorsque Mme la sous-ministre me dit que j'ai tout couvert, c'est
parce que j'ai tout couvert, M. le Président. Je peux vous dire
merci.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. Vous avez
d'autres remarques, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve?
Mme Harel: Je vais corriger, M. le Président, une
omission. Me Fernande Rousseau, qui a travaillé avec l'Opposition
pendant de très nombreuses années, nous a quittés. Elle
est maintenant chez le Protecteur du citoyen. Vous savez peut-être
qu'elle avait, après un congé de maternité, regagne pour
quelques semaines son travail et là elle nous quitte
définitivement. Je voudrais vous présenter Me France
Thériault qui, dorénavant, aura la responsabilité au
service de recherche des dossiers de justice et autres, protection du
consommateur, tourisme, corporations professionnelles. Alors, je tenais
à souligner sa présence parmi nous.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, vous me permettrez
donc de souhaiter la bienvenue à Me Thériault. D'ailleurs, j'ai
déjà entendu des commentaires fort élogieux à son
égard et je veux souligner le plaisir que j'ai toujours eu, moi,
à travailler avec Mme Julienne Pelletier, du cabinet. Alors, je suis
convaincu qu'il y aura une relation très fructueuse pour la
qualité de nos travaux, M. le Président. (16 h 10)
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. Alors, si
je comprends bien, vous voulez entendre les experts. Est-ce qu'il y en a
d'autres qui veulent s'exprimer? M. le député de Westmount?
M. Holden: J'ai une intervention...
Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. le
député de Westmount, la parole est à vous. On est tout
ouïe.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Oui, M. le Président. Moi aussi, j'ai
été un membre de la sous-commission sur le Code civil, dans une
autre incarnation.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Holden: Et là je suis un peu plus près de la
présidence, toujours à sa gauche, mais c'est à peu
près le même monde qui était avec nous l'année
dernière, sauf que le député de Viger n'y était
pas. Alors, ça me fait plaisir d'être de retour cette
année, et on veut travailler dans le même esprit de
coopération; je l'ai déjà mentionné lors de mon
intervention à la deuxième lecture.
Et je dois vous dire, M. le Président - c'est un peu pour votre
compréhension - que j'ai reçu une lettre, l'autre jour, d'un
professeur de la Faculté de droit de McGi!!, qui s'appelle Nick Kaserer
- je vais répeler parce que j'ai toujours des appels
téléphoniques du Journal des débats: K-a-s-e-r-e-r
- et John Brierly, B-r-i-e-r-l-y. Bon, John Brierly et Nicolae, son père
est roumain. Ils ont formé un groupe de travail à McGill, qui est
une espèce d'archives sur le nouveau Code civil. Ils m'ont même
demandé si j'avais un dossier avec des notes personnelles et des
documents qu'on pourrait appeler les «Holden papers» et ils m'ont
invité à vous dire, tous ceux et celles qui étaient ici
avec nous et qui n'ont pas pensé à donner leurs papiers à
une autre faculté, à une autre université, qu'eux ils
cherchent la documentation pour ces archives qui vont être
étudiées par des recherchistes à l'avenir, probablement
des gens à travers le monde qui veulent peut-être établir
un système de droit civil, qui veulent étudier le meilleur code
civil du monde.
Et c'est un peu pour ça, M. le Président,
que je vous le dis, parce que, des fois, on va dire des
affaires qui semblent être un peu redondantes. C'est ça, le mot?
Mais, quand on parle de Code civil après toutes ces
années-là, c'est important parce que, justement, ce n'est pas
seulement les intellectuels et les juristes québécois qui vont
suivre nos travaux, ça peut être des juristes à travers le
monde. Et, des fois, même nous autres, quand on pratique le droit, on
regarde ce qui a été dit lors des discussions sur l'institution
du Code civil, même avant la Confédération. Les codes
civils, surtout le nôtre, ont servi comme exemples dans bien des cas pour
d'autres législations, et je trouve que c'est important. Alors, des
fois, vous allez trouver peut-être qu'on parle trop de tel article et,
sur requête, le ministre va dire que c'est bon et la
députée de Hochelaga-Maisonneuve va dire que c'est meilleur et,
mol, je vais dire que c'est incroyable. Alors, vous allez vous dire: Pourquoi
ces gens-là retardent nos délibérations?
C'est un peu pour ça, M. le Président, que je
veux faire une petite intervention. C'est que je peux répéter un
peu ce que la députée de Hochelaga-Maisonneuve a dit, mais on
vient de recevoir un commentaire. Si je me souviens bien, on lisait les
commentaires dans le dossier du Code civil, du bill 125. Je vais juste lire le
premier paragraphe, parce que ça me semble important pour suivre nos
travaux: «La réforme du Code civil aura assurément un
impact profond sur l'ordonnancement juridique existant sous l'empire du Code
civil du Bas Canada, du Code civil du Québec de 1980, du Code de
procédure civile et des lois sectorielles. Les relations juridiques en
cours lors de la mise en vigueur des changements législatifs qu'elles
supposent seront, en effet, dès ce moment, confrontées sur plus
d'un point à un régime de droit différent, en conflit, si
l'on veut, avec le régime de droit jusqu'alors applicable. Or,
l'état actuel du droit québécois ne permet pas d'apporter
les solutions qui s'imposent aux nombreux conflits de lois qui vont ainsi se
présenter dans le temps, avec l'entrée en vigueur du nouveau Code
civil.»
J'ai toujours été impressionné. Avec
notre société juridique, comment peut-on trouver les champs
d'expertise? Ils sont multiples et, comme je le disais lors de mon intervention
à l'Assemblée nationale, j'en ai trouvé un nouveau. C'est:
expertise en droit de transition. Je ne sais pas si ça va être
très rentable, mais c'est quand même une expertise. D'après
ce que nos experts m'ont dit, c'est tout un champ de droit et il y a des tomes
qui ont été écrits là-dessus. Et je ne crois pas
qu'on va entrer dans toutes les discussions théoriques là-dessus,
mais je dois dire que c'est important, ce que nous faisons, malgré que
ce soit un droit de... Comment on dit ça en français? Le droit
de... La loi sur l'application de la réforme, c'est quand même
important.
J'ai vu que les notaires, le notariat voulait que ça
fasse partie du Code, probablement dans l'optique d'une loi normale où
on met à la fin des dispositions transitoires, mais c'est tellement
massif, ce qu'on a fait l'an dernier, que je suppose que le ministre et les
légistes ont décidé qu'il fallait une loi tout à
fait spéciale. Et je sais que, pendant qu'on parlait du Code civil, le
ministre disait que le travail se faisait déjà sur cette loi-ci.
Alors, c'est une loi qui est très importante du point de vue juridique
et du point de vue historique, et il faut qu'on se rende compte de ça.
Et, encore, je crois qu'on approche ça de notre côté comme
on a approché le Code civil. On ne peut pas avoir une attitude
partisane. Cherchons si on veut, mais il n'y a pas moyen; surtout pour
quelqu'un qui a un entraînement dans le droit, ce n'est pas partisan. On
peut avoir des attitudes sur tel ou tel article de loi, mais ce n'est pas
partisan. C'est sur un niveau intellectuel.
Je ne vois pas autant de questions. Le ministre a
mentionné quelques détails. Surtout, la députée de
Hochelaga-Maisonneuve a formulé certaines questions qu'on va discuter,
et le ministre a dit que très bientôt il va fournir les
amendements qui vont probablement répondre à quelques-unes de ces
questions de la députée et de nous autres.
Je vois que le ministre a parlé pendant plusieurs
minutes avant d'arriver aux termes «juste équilibre», mais
il s'y est rendu, finalement, en parlant de l'article 3 qui va être
amendé, et c'était une des questions qu'on allait poser. C'est
sûr qu'on va expliquer, je suppose, pour les fins du dossier,
l'arrière-plan de ce qui est dans le projet de loi et les raisons pour
que l'on comprenne pourquoi on a fait des amendements. (16 h 20)
Le principe que le projet de loi énonce sur la
rétroactivité semble ne pas être tout à fait suivi
dans la loi même, parce qu'on voit, à l'article 2, que la loi
nouvelle n'a pas d'effet rétroactif, elle ne dispose que pour l'avenir.
Mais, en lisant la loi, on réalise qu'il y a des exceptions. Il y a des
dispositions qui semblent être rétroactives, et on va demander au
ministre pourquoi, surtout dans le domaine des sûretés que la
députée de Hochelaga-Maisonneuve a discuté et que les
légistes ont déjà commencé à discuter, et je
présume qu'on va avoir plusieurs discussions, mais ça va
être une des questions qu'on va poser lors de nos discussions.
Il y aura encore des discussions sur l'enregistrement, sur
le système d'ordinateurs qui va, finalement, s'appliquer à nos
vies futures et à la vie future des juristes, des avocats, des notaires
surtout. Déjà, il y a des ordinateurs au palais de justice et,
nous autres, les avocats plus âgés, nous avons de la
difficulté. J'espère que ça va être un
système qui sera compréhensible pour les gens qui ne sont pas des
adeptes dans le domaine des ordinateurs. Je comprends que ça va
être un système très compliqué, j'espère
très sophis-
tiqué. On m'a dit qu'on va partir avec les enfants nés
à partir de 1960. Alors, ça va couvrir mes enfants, mais pas moi.
J'espère que je ne serai pas trop longtemps sans dossier dans ces
ordinateurs de l'État.
Mme Harel: As-tu l'intention de te marier? On y accède par
le mariage, je crois.
M. Holden: Ha, ha, ha! Alors, c'est une question. On va en
discuter avec les experts, je présume, demain.
Vous avez parlé de changements aux contrats qui vont nous
intéresser. Vous nous avez parlé, M. le ministre, de la
publicité, de la communication publique. Il va y avoir certainement le
départ de tout cet effort de faire connaître le Code. Ça va
commencer avec les avocats et les notaires qui vont suivre les cours, qui vont
devenir des experts dans le Code pour, ensuite, avoir les connaissances pour -
est-ce qu'on dit ça? - l'impartir au public par voie d'avis
professionnels. Alors, il y aura ça et il y aura aussi le
côté, je suppose, du public pour qu'il connaisse et sache ce qu'il
a comme droits nouveaux dans le Code.
Ça va prendre des sous, M. le Président. Il me semble que
le gouvernement doit commencer à penser à trouver des sous pour
la justice. Quand même, c'est important. Il y a bien des affaires, au
gouvernement, qui sont moins importantes que la justice. Alors, quand votre
collègue de...
Mme Pelchat: Lesquelles...
M. Holden: ...qui sont moins...
Mme Pelchat: ...sont moins importantes, oui?
Le Président (M. LeSage): Vous pouvez poursuivre, M. le
député de Westmount.
Mme Harel: Le référendum?
M. Holden: Ha, ha, ha! J'espère que la
députée de Vachon a entendu la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Pelchat: Oui.
M. Holden: Ça, c'est une vérité absolue.
Non, mais il faut trouver des sous pour le système d'ordinateurs. Il
faut trouver des sous pour la publicité de nos lois et il faut qu'on
sache un peu quelles sont les intentions du gouvernement et jusqu'à quel
point le ministre va taper sur la tête de ses collègues pour
avoir... Parce que, à la base du système de justice, il y a quand
même... Dans le public, ils ne comprendront pas qu'on adopte un code
nouveau et qu'il n'y ait pas moyen de l'appliquer. Le public ne comprendra pas
ça. Alors, je souhaite que le ministre trouvera... Le ministre en a
parlé, d'ailleurs, et on va insister là-dessus plusieurs fois
pendant nos délibérations.
Quant à la vie privée, on attend avec
«anticipation» le projet de loi qui va sortir. C'est toujours le
cas. Moi, j'entends ça souvent. J'arrive a une commission, on demande
des questions et il y a un paquet de choses qui vont arriver très
bientôt, dans les jours, dans les semaines et dans les mois qui suivent.
Ça, c'est une expression que j'entends souvent. J'espère qu'on va
avoir la loi sur la vie privée, la date pour l'inauguration de
l'institution sur la réforme du droit. Toute affaire est
spécifique. Je sais que ce n'est pas facile, mais, un jour, il faut
agir. Alors, c'est ça qu'on va demander au ministre: de l'action.
Pour revenir à la loi 38, j'espère que, comme l'an
dernier, on va tous être là un soir avant Noël, à 1
heure du matin, à faire des discours sur la troisième lecture
pour qu'elle soit adoptée avant la fin de la session. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le
député de Westmount.
Maintenant, je vais reconnaître le député de
Chapleau.
M. John J. Kehoe
M. Kehoe: M. le Président, comme les autres membres de la
commission, il me fait énormément plaisir d'être autour de
la table et de commencer de nouveau la dernière étape vers
l'adoption pour mettre en vigueur le nouveau Code civil. J'ai entendu avec
beaucoup d'intérêt les propos des membres de l'Opposition, des
porte-parole et du député de Westmount. Bien sûr, je pense
qu'on va continuer comme on l'a fait dans le passé avec beaucoup de
collaboration, sans partisanerie, dans le but, justement, de rendre plus
parfait le Code civil que nous avons.
Moi, personnellement, quand on a commencé à étudier
le Code civil, vers le 15 août l'année passée, et quand
j'ai vu des briques, ce qui était des briques, les livres qu'ils m'ont
donnés pour étudier pour tenter de comprendre les 3144 articles,
à ce moment-là, j'ai dit: C'est «mission impossible».
Personnellement, je n'aurais jamais pensé que, le 18 décembre,
quelque cinq mois plus tard, tout serait accompli, qu'on aurait passé
à travers tous ces articles-là, qu'on les aurait bonifiés
dans bien des cas; on a fait des amendements, on les a étudiés en
profondeur. Je pense que c'était, comme le ministre l'a dit
tantôt, un vrai tour de force. Il fallait le faire. Il fallait faire
partie de cette équipe-là qui l'a fait pour vraiment comprendre.
Ça fait 30 ans que j'ai le plaisir de pratiquer le droit, puis 13 ans
comme député et, pour moi, c'était la plus belle
expérience dans les deux domaines, soit juridique ou soit politique, que
de participer à
cette commission parlementaire qui a étudié la
réforme du nouveau Code.
Je pense que, si ce n'était de la ténacité, de la
détermination et de la patience de tous les membres, y compris et
surtout le ministre lui-même qui avait décidé: peu importe,
ça va passer pour la fin du mois de décembre... Il fallait que ce
soit étudié article par article. À ce moment-là, je
le dis encore, dans l'Opposition, avec beaucoup de rigueur et avec beaucoup
d'expérience, ils ont étudié chacun des articles, ils ont
proposé des amendements, tout le monde a participé.
C'était, je pense, pour tout le monde, une expérience
extraordinaire. (16 h 30)
Je pense que le ministre a cité des articles de journaux qui
indiquaient, avant qu'on ait commencé notre travail,
l'impossibilité de terminer dans un délai aussi court. Avec le
travail qu'on a fait, on peut dire bravo à tout le monde, et surtout au
ministre qui a vraiment tenu le coup, ainsi qu'au parti de l'Opposition. On a
fait toute l'étude avec sérénité et avec beaucoup
de compréhension des deux côtés. Mais il reste d'autre
ouvrage à faire. Il y a une autre étape, celle du projet de loi
38, la loi d'application. Ça constitue une autre étape importante
de nos travaux parlementaires visant à doter la société
québécoise d'un nouveau Code civil adapté aux
réalités contemporaines.
Comme vous vous en souviendrez, M. le Président, c'est le 18
décembre 1991 que le Code civil du Québec était
adopté à l'unanimité par les membres de l'Assemblée
nationale et sanctionné la même journée. L'adoption de
cette loi venait mettre fin à un long processus d'études et de
consultations ayant débuté il y a 35 ans et au cours duquel de
nombreux juristes et experts ont été mis à contribution.
Même le député d'Anjou, qui a été
ajouté à notre équipe après qu'on a fait
l'étude de la réforme du Code civil, à la dernière
étape, quand ça a commencé, je ne suis pas sûr qu'il
était né à ce moment-là.
Comme on le sait, le Code civil du Québec viendra régir,
en harmonie avec la Charte des droits et libertés de la personne, les
multiples facettes de notre vie en société. La loi fondamentale
porte sur les droits et obligations des individus, ainsi que sur les rapports
qu'ils ont entre eux de leur naissance à leur décès. Le
nouveau Code civil se veut à l'image de la société
québécoise. Il consacre le respect de la dignité humaine
et la recherche d'un juste équilibre dans les rapports juridiques qui
lient les personnes entre elles, dans la constante recherche d'une
société de liberté et de justice.
Le Code civil prévoit, dans ses dispositions finales, entrer en
vigueur suite à l'adoption d'une loi d'application. Le projet de loi 38,
dont cette commission débute les travaux, s'inscrit dans la
continuité de ces dispositions. Le projet de loi comporte trois volets
distincts, soit celui d'une loi transitoire, celui des modifications au
Code de procédure civile et celui des règles de
correspondance pour interpréter le corpus législatif et les
modifications nécessaires aux lois sectorielles. La loi transitoire,
soit 155 articles, est essentiellement destinée à assurer le
passage harmonieux de l'ancienne loi à la nouvelle loi. Elle comporte
trois objectifs, dont celui de minimiser les risques de confusion et les
procès inutiles entre les parties concernées par une relation
juridique au moment du changement législatif, celui de permettre aux
personnes de bénéficier le plus rapidement possible des avantages
du nouveau droit et celui de ne pas bouleverser inutilement les relations
juridiques nées sous l'empire de l'ancienne loi.
La réforme du Code civil comporte des incidences majeures sur la
procédure civile, ne serait-ce que dû aux nouveaux droits qu'elle
a créés. Le projet de loi d'application propose ainsi des
modifications au Code de procédure civile, 240 articles qui visent
à préciser les modes de présentation des demandes et, le
cas échéant, la juridiction devant laquelle elles doivent
être présentées. Il prévoit de plus des dispositions
visant à ajuster tes concepts et la terminologie - un exemple: greffier
au lieu de protonotaire, personne morale au lieu de corporation - et des
règles générales sur la procédure par requête
et la réclamation de dommages-intérêts additionnels en
réparation d'un préjudice corporel. Il contient également
des règles devant régir l'appel et l'exécution du
jugement, d'autres sur des procédures spéciales, ainsi que des
modifications aux matières non contentieuses.
La mise en application du Code civil du Québec nécessite,
de plus, des modifications aux lois sectorielles, soit 297 articles. Certaines
sont essentielles pour en permettre la mise en application. Il en est ainsi des
dispositions visant à abroger les lois intégrées au Code
civil du Québec ou à supprimer, par exemple, la notion de
privilège, qui n'y a pas été reprise.
Telles sont les caractéristiques du projet de loi 38 que nous
nous apprêtons à étudier. Bien que le projet de loi ne soit
pas aussi imposant que celui qui a donné lieu à l'adoption du
nouveau Code civil, il s'avère, cependant, sous certains aspects, tout
aussi important. Il soulève, en effet, des enjeux dont nos tribunaux
devront tenir compte, telle que l'atténuation de la règle de
l'effet immédiat par sa survie dans certaines situations contractuelles
de la loi ancienne.
Je demeure confiant que les règles qui seront adoptées
répondront aux besoins de la société et rendront justice
aux intérêts de toutes et de tous. J'en suis sûr, M. le
Président, nous allons commencer à étudier cette loi avec
la même attitude et avec les mêmes intentions que nous avions quand
on a commencé, vers le milieu d'août l'année passée,
à étudier la réforme du Code civil. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le dé-
puté de Chapleau. M. le député d'Anjou. Mme la
députée de Terrebonne, nous sommes tout ouïe.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, je participe,
moi aussi, M. le Président, avec beaucoup de plaisir, à ces
retrouvailles entre parlementaires qui ont participé à ce projet
de loi 125 qui était, en fait, un projet de loi exceptionnel, on l'a
tous reconnu, mais retrouvailles également avec les légistes,
avec les juristes, avec nos experts qui ont vécu de très
près avec nous cette étape bien particulière. La lecture
du député de Chapleau me rappelait - et je regardais la
sous-ministre qui souriait - nos nombreuses heures de lecture laborieuse.
Autant ce fut pour moi un cours accéléré de droit, autant
ce fut pour le député de Chapleau un cours
accéléré de lecture tout au long de ces mois.
Vous savez, M. le Président, pour ceux et celles qui n'ont
peut-être pas suivi nos travaux, on peut peut-être se surprendre de
ce climat qui est extrêmement différent de ce qu'on connaît
habituellement dans nos commissions parlementaires, mais je pense que cette
attitude devrait nous servir d'exemple et devrait être utilisée
bien davantage. Elle nous permettrait, je pense, de part et d'autre, de
réaliser des projets de loi beaucoup plus intéressants pour la
population du Québec.
J'ai toujours considéré ma participation, M. le
Président, n'étant pas avocate de formation, comme une
participation un petit peu différente, peut-être. Je ne le faisais
pas à titre de membre d'une corporation professionnelle ou à
titre professionnel; c'était beaucoup plus pour moi la vision, la
perception des citoyens et des citoyennes du Québec. Parce qu'on sait
que le Code civil est, évidemment, un outil de travail extrêmement
important, extrêmement précieux pour les corporations
professionnelles, mais c'est aussi - et il ne faut jamais le perdre de vue - la
loi fondamentale, la base de notre société, le projet de
société qui est vécu par tous les citoyens et les
citoyennes du Québec.
Nous sommes maintenant rendus à l'étape de l'application.
Cette application demande, évidemment, autant de vigilance puisqu'on
doit s'assurer que nos longs débats de l'an dernier, qui ont
été traduits dans le Code civil, doivent évidemment
refléter la pensée que nous avions, les commentaires que nous
avions faits. Nous devons retrouver dans la loi 38 cette même
cohérence, cette même vision, ces mêmes buts que nous avions
tous ensemble. Et je pense qu'avec cet esprit de collaboration que nous avons
l'intention de maintenir, M. le Président, ces travaux devraient se
faire - mais on devrait prendre beaucoup moins de temps que l'an dernier pour
le faire -dans le même climat, M. le Président. Je vous remercie.
(16 h 40)
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. M. le député d'Anjou.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le
Président. À entendre les commentaires de mes collègues
des deux côté de la Chambre, si je peux me permettre l'expression,
je me sens un peu comme un invité a une réunion de famille. En
effet, on sent une certaine émotion de la part des participants au
projet d'élaboration du Code civil et au moins une certaine
fierté. Alors, peut-être que le seul regret que j'ai à
propos de mon élection dans Anjou, c'est qu'elle soit arrivée en
1992 et non pas en 1991. Ça m'aurait permis, à ce
moment-là, de participer aux travaux d'élaboration de ce Code
civil. Heureusement, je vais pouvoir me rattrapper et je vais pouvoir au moins
participer a l'élaboration, disons à la naissance du projet de
loi 38 qui, lui, va permettre l'application de ce nouveau Code civil.
Je peux même vous dire que, dans ma courte vie parlementaire, je
trouve ça rafraîchissant de participer à des commissions
parlementaires sur la justice, parce qu'on sent vraiment un esprit construct et
non partisan qui, parfois, est absent de certains autres débats auxquels
on peut assister en commission parlementaire. Et je pense que c'est toujours
une bouffée d'air frais que de voir ça. Et je pense que ça
se traduit d'une façon éloquente, cet esprit, si on regarde
uniquement le nouveau Code civil qui comporte 3168 articles et qui a pu
être adopté, quand même, dans un délai que je
considère très court. Quand on voit certains autres projets de
loi qui n'ont que deux articles et qui prennent parfois une semaine à
être adoptés, alors je pense que... Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bélanger (Anjou): Alors, je pense que c'est tout dire
de l'esprit qui anime et qui doit, je pense, animer les débats quand on
a des projets de loi qui touchent le domaine de la justice.
Ce projet de loi 38, qui vise à permettre l'application de la
réforme du Code civil et qui comporte des dispositions transitoires,
doit, d'après moi, absolument assurer un passage harmonieux de notre
ancien système de Code civil à notre nouveau. Il faut admettre
que notre système... C'était d'ailleurs un sujet de blagues
à l'université de voir dans cet ancien système des
situations qui étaient décrites, qui existaient en 1865 et qui,
en 1980 ou 1990, étaient tout à fait folkloriques. Et
c'était dû, comme on dit, pour un grand ménage et une
grande jeunesse qui devait y être apportée.
Et, donc, on peut comprendre le choc qui est créé et qui
va être créé aussi par la mise en
application de ce nouveau Code civil. Donc, c'est important que
ça se fasse d'une façon harmonieuse, qu'il n'y ait pas de perte
de droits, et je suis très content d'entendre le ministre de la Justice,
qui en a parlé, dire que c'est aussi une de ses préoccupations.
Aussi, on doit préserver cette stabilité des contrats qui ont
été conclus de bonne foi, qui ont été conclus entre
personnes consentantes. Je pense que ces personnes-là ne veulent pas que
ces contrats se sentent menacés ou déséquilibrés
suite à l'avènement du nouveau Code. Je suis, à cet effet,
aussi très content de voir qu'il va y avoir des modifications
apportées à l'article 3. Parce que, on le sait, à la
lecture de cet article et en regardant les remarques qui étaient
apparues dans certains mémoires présentés, en particulier
par la Chambre des notaires, cet article 3 inquiétait beaucoup de gens.
Je suis content de voir, donc, qu'on a répondu, qu'on va tenter au moins
de répondre à ces craintes.
Je disais l'importance pour moi que cette transition se fasse de
façon harmonieuse. Je peux vous dire que, moi, j'ai vécu en
pratique privée l'avènement du nouveau droit de la famille, en
particulier la loi créant le patrimoine familial. Pourtant, ce
n'était qu'un petit aspect du droit civil qu'on modifiait par cette loi,
et je peux vous dire toutes les commotions que ça a créées
dans le milieu juridique et dans certains couples, et l'importance des mesures
transitoires. À l'époque, il était très important
de permettre à certains couples de pouvoir déroger au nouveau
système. Et je peux vous dire, donc, toute l'importance que ces mesures
transitoires soient adéquates et rassurent les gens.
Donc, M. le Président, je pense qu'on va devoir vraiment faire un
travail minutieux pour voir à ce que toutes les situations, ou au moins
la majorité de celles-ci - je pense qu'on doit vraiment couvrir toutes
les situations - soient couvertes par cette loi de transition. Nous devons
chercher à atteindre le juste équilibre; ça semble
être le leitmotiv du ministre de la Justice et, ce juste
équilibre, je pense, suite à notre travail, pourra être
atteint.
Et je terminerais tout simplement par une question que j'adresse au
ministre: On me dit que le ministre, au niveau des dispositions touchant la vie
privée... On avait parlé de sanctions particulières
relativement aux manquements à ces obligations sur la vie privée,
il devait y avoir des sanctions spécifiques qui seraient
apportées relativement à ces nouvelles dispositions. Je ne sais
pas si ça devait être apporté dans un nouveau projet de loi
ou dans cette disposition-là. Est-ce que le ministre pourrait
répondre à cette question?
Le Président (M. LeSage): M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Dans le projet
de loi de mon collègue, le ministre des
Communications, il y a, donc, ces dispositions qui répondront aux
questions du député d'Anjou. Ce que nous avons dans le Code
civil, ce sont les grands principes et, à partir de là, donc, le
projet de loi devra les actualiser en fonction, bien sûr, de toutes les
préoccupations qui ont été, entre autres,
énoncées en commission parlementaire puisqu'il y avait une
commission parlementaire l'an dernier qui s'est tenue. J'y ai participé
à quelques occasions, mais pas entièrement parce que
j'étais avec le droit civil, bien sûr, qui a eu lieu aussi
l'automne dernier. Et cette commission parlementaire, donc, est directement
liée par ses travaux à ce projet de loi qui sera
présenté en Chambre dans un avenir très, très
prochain.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. M. le
député d'Anjou.
M. Bélanger (Anjou): Je remercie le ministre pour ces
précisions. Alors, tout simplement, en terminant, dire que je suis
très content de pouvoir, donc, participer à ma façon
à l'élaboration du nouveau régime de droit civil qui va
gouverner au Québec, et j'espère que les travaux lors de cette
commission sauront aller dans le même esprit que celui qui avait
animé les travaux de la commission sur la réforme du Code civil.
Merci.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le
député d'Anjou. Est-ce que d'autres membres de cette commission
veulent exprimer certains points de vue? M. le ministre?
M. Rémillard: m. le président, je pourrais
suggérer qu'on ajourne à ce moment-ci pour revenir comme
prévu à 20 h 15; alors, ça nous donnera un petit peu de
temps pour faire le point avec nos experts et préparer la rencontre de
ce soir.
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a consentement
à cette demande du côté de l'Opposition? Alors, je suspends
les travaux de cette commission jusqu'à 20 h 15.
(Suspension de la séance à 16 h 49)
(Reprise à 20 h 31)
Le Président (M. LeSage): La commission des institutions
reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de cette commission qui est de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 38, Loi sur l'application de la réforme du Code civil. M. le
ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, à la
suite de discussions que nous avons eues, je me permets de vous proposer que
nous pourrions
procéder comme ceci. Je pourrais lire les notes d'introduction et
aussi les commentaires en ce qui regarde les dispositions transitoires pour les
fins de l'enregistrement du Journal des débats. Ensuite, nous
pourrions aborder l'article 1, qui est la disposition préliminaire qui
ne pose pas de difficulté, l'article 2, lire l'article 3 et, ensuite, M.
le Président, je crois qu'il serait utile, avec votre permission, qu'on
puisse suspendre pour quelques minutes pour avoir une séance de travail
avec les experts, les légistes, pour revenir ensuite et continuer.
Le Président (M. LeSage): Parfait. Ça va, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve?
Mme Harel: M. le Président, la façon de
procéder proposée par le ministre est tout à fait
souhaitable. Mais, à l'article 2, il serait peut-être
préférable... Excusez-moi, M. le Président, mais j'ai tout
à fait un blanc de mémoire. Le blanc de mémoire consiste
tout simplement à avoir oublié ce que l'on fait quand on veut
simplement mettre en suspens un article.
Le Président (M. LeSage): On le suspend.
Mme Harel: Alors, on le suspend. Imaginez! Croyez-vous que c'est
de l'ordre du début d'Alzheimer?
Le Président (M. LeSage): Non, du tout. Mme Harel: Non.
Une voix: La fatigue.
Mme Harel: Alors, on pourrait simplement, peut-être,
justement, le lire et lire le commentaire et le suspendre. Non pas que nous ne
sommes pas en faveur du principe - évidemment, c'est le principe de
non-rétroactivité - mais il y a peut-être, au niveau de la
formulation, un échange ultérieur à poursuivre.
Le Président (M. LeSage): D'accord. Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Alors, M. le ministre, on vous
écoute.
Étude détaillée
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Alors, le 18
décembre 1991, l'Assemblée nationale adoptait le Code civil du
Québec destiné à remplacer le Code civil du Bas Canada,
adopté par le chapitre 41 des Lois de 1865, de même que l'article
premier du chapitre 39 des Lois de 1980, Loi instituant un nouveau Code civil
et portant réforme du droit de la famille, et le chapitre 18 des Lois de
1987, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des
personnes, des successions et des biens.
Comme il est prévu dans les dispositions finales du nouveau Code
civil, le Code entrera en vigueur à la date qui sera fixée par le
gouvernement, conformément à ce qui sera prévu dans la loi
relative à l'application de la réforme du Code civil.
L'intention législative sous-jacente à cette disposition
indiquait la nécessité préalable d'adopter une
législation d'application de la réforme, législation,
d'ailleurs, inévitable compte tenu de l'ampleur de la réforme du
Code civil ?>ii égard aux changements apportés au droit civil
actuel et aux liens entre cette réforme et l'ensemble de la
législation dont le Code civil constitue le fondement conceptuel.
Pour mieux mesurer l'ampleur de cette réforme, il convient de
rappeler non seulement le fait qu'elle compte 3168 articles substantiels, mais
aussi son esprit et sa portée qui sont exprimés par le texte de
la disposition préliminaire du Code civil du Québec. Le Code
civil du Québec régit, en harmonie avec la Charte des droits et
libertés de la personne et les principes généraux du
droit, les personnes, les rapports entre les personnes, ainsi que les
biens.
Le Code est constitué d'un ensemble de règles qui, en
toutes matières auxquelles se rapportent la lettre, l'esprit ou l'objet
de ces dispositions, établit en termes exprès ou de façon
implicite le droit commun. En ces matières, il constitue le fondement
des autres lois qui peuvent elles-mêmes ajouter au Code ou y
déroger.
Le présent projet de loi vise à permettre l'application de
la réforme du Code civil. Il comprend les dispositions essentielles
à la mise en application de la réforme et couvre trois volets. Le
premier volet ou titre porte sur les dispositions de transition
nécessaires pour assurer le passage harmonieux de l'ancien droit au
nouveau droit, alors que le deuxième volet comporte d'importantes
modifications à la procédure civile, de manière à
ajuster cette procédure, qui sert de support au droit substantiel, aux
nouvelles règles de droit. Enfin, le troisième volet comprend des
règles de correspondance pour interpréter le corpus
législatif et les modifications nécessaires aux lois
particulières. Enfin, le projet, dans ses dispositions finales, exprime
les règles d'entrée en vigueur. Voilà, M. le
Président, ce qu'il en est des remarques d'introduction.
Titre premier: Dispositions transitoires, articles 1 à 155. La
réforme du Code civil aura assurément un impact profond sur
l'ordonnancement juridique existant sous l'empire du Code civil du Bas Canada,
du Code civil du Québec de 1980, du Code de procédure civile et
des lois sectorielles. Les relations juridiques en cours, lors de la mise en
vigueur des changements législatifs qu'elles supposent, seront, en
effet, dès ce moment, confrontées sur plus d'un point à un
régime de droit différent, en conflit, si l'on veut, avec le
régime de droit jusqu'alors appli-
cable. Or, l'état actuel du droit québécois ne
permet pas d'apporter les solutions qui s'imposent aux nombreux conflits de
lois, dans le temps, qui vont ainsi se présenter avec l'entrée en
vigueur du nouveau Code civil.
D'une part, la Loi d'interprétation (L.R.Q., chapitre 1-16), qui
est pratiquement la seule source législative de droit transitoire au
Québec, ne comporte que très peu de règles en cette
matière et ces règles, du reste, ont surtout été
conçues en fonction du droit public, non du droit privé. D'autre
part, si la jurisprudence et la doctrine ont dégagé un certain
nombre de principes valables, encore là surtout en droit public, elles
n'ont pas développé une base conceptuelle suffisante pour qu'on
puisse en dégager des règles susceptibles de répondre aux
besoins que va créer la mise en vigueur du Code civil nouveau.
Le présent titre sur les dispositions transitoires tire sa raison
d'être de la nécessité de combler ces lacunes actuelles du
droit québécois en matière de droit transitoire
privé aux fins de l'application de la réforme du Code civil. Il
présente, à partir des quelques sources québécoises
de droit transitoire et surtout de l'expérience étrangère,
notamment celle du droit français, des principes et des règles
destinés à résoudre harmonieusement les conflits
susceptibles de surgir entre l'ancien et le nouveau droit avec l'entrée
en vigueur du Code civil du Québec.
Dans l'ensemble, les principes et règles que comporte ce titre
premier de la loi d'application de la réforme visent à minimiser
les risques de confusion et les procès inutiles entre les parties
concernées par une relation juridique au moment du changement
législatif. Conçus dans le souci de ne pas bouleverser
inutilement tes relations juridiques créées sous l'empire de
l'ancien droit, ces principes ou règles tiennent compte néanmoins
de la nécessité d'éviter la coexistence, sur une trop
longue période, de deux systèmes de droit différents, car
une telle coexistence serait elle-même une source de confusion. Ils
favorisent également l'application du droit nouveau afin de permettre
aux citoyens d'accéder le plus rapidement possible aux avantages qu'il
leur confère.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. Alors,
j'appelle l'article 1. M. le ministre.
Dispositions transitoires Disposition
préliminaire
M. Rémillard: nous avons une proposition de modification,
m. le président, qui, je crois, n'a pas encore été
distribuée. si vous me permettez, je vais attendre quelques instants
que...
Le Président (M. LeSage): Parfait.
M. Rémillard: ...cette proposition soit distribuée
à tous les membres de la commission.
Alors, M. le Président, je lis donc cet amendement que nous
proposons. L'article 1 est modifié par l'ajout, à la fin du
second alinéa, de ce qui suit: «ou précisent, dans certains
cas, l'application ou la portée de ces règles».
M. le Président, cet amendement vise à indiquer clairement
que certaines règles particulières, contenues dans le chapitre
deuxième du titre premier, ne viennent que préciser, en contexte,
l'application ou la portée des règles générales
énoncées dans le chapitre premier. (20 h 40)
En raison de cet amendement, l'article 1 se lirait comme suit: «1.
Les dispositions du présent titre ont pour objet de régler les
conflits de lois résultant de l'entrée en vigueur du Code civil
du Québec et des modifications corrélatives apportées par
la présente loi. «Le chapitre premier pose les règles
générales de droit transitoire. Le second présente les
règles particulières à chacun des livres du Code,
lesquelles contiennent des ajouts ou des dérogations aux règles
générales ou précisent, dans certains cas, l'application
ou la portée de ces règles.»
Le Président (M. LeSage): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. Ça va?
Mme Harel: II y a peut-être des collègues qui
aimeraient...
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Westmount, vous avez des commentaires?
Mme Harel: ...avoir un commentaire.
M. Holden: Je présume, M. le Président, que
l'amendement est là simplement pour détailler une confusion
possible.
M. Rémillard: C'est ça. Dans un souci de la plus
grande clarté, il a été finalement convenu qu'un tel
amendement apporterait plus de précision. Alors, c'est dans ce
sens-là que l'amendement a été proposé. Maintenant,
les commentaires généraux que je retrouve au niveau de l'article
1, pour les fins de l'enregistrement, peut-être qu'il vaudrait mieux que
je les lise, M. le Président. Ils ont toujours leur application et, avec
votre permission, je pourrais les lire aussi, pour nous assurer que ce soit
bien dans le Journal des débats.
Alors, comme commentaires, donc, concernant cet article premier: Cet
article précise l'objet et le champ d'application du titre
consacré aux dispositions transitoires. Le premier alinéa
souligne le caractère général des dispositions
introduites. Celles-ci, en effet, sont destinées à régler
non seulement les conflits de lois, dans le temps, qui pourraient surgir de
l'application des dispositions nouvelles du Code civil même, mais
aussi les conflits résultant des modifications que propose la
présente loi au Code de procédure civile et aux autres lois, en
vertu des titres deuxième et troisième.
Le second alinéa annonce le contenu des deux chapitres que
comporte ce titre premier. Le premier chapitre, d'ordre général,
est ainsi réservé aux principes, aux grandes règles de
droit transitoire, alors que le deuxième chapitre énonce, en
rapport avec chacun des livres du Code civil du Québec, des
règles particulières de droit transitoire, qui viennent, soit
ajouter des éléments visant à préciser ou confirmer
l'application d'une règle générale, dans un cas
particulier, soit prévoir une règle spécifique pour y
faire exception.
Alors, voilà, M. le Président, en ce qui regarde donc
l'article 1.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. Oui, Mme
la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Incidemment, M. le Président, la question que
j'aimerais poser au ministre, à ce moment-ci, porte sur le
dépôt à l'Assemblée nationale des commentaires du
Code civil. C'est un aspect de la question qui nous a échappé,
depuis le début de nos travaux en commission, aujourd'hui. Alors,
peut-il m'indiquer quel est le calendrier des travaux qui permettrait que ce
dépôt ait lieu avant la clôture de l'Assemblée
nationale?
M. Rémillard: Alors, il y a simplement certains de nos
experts, je pense, qui n'ont pas encore complété leur
étude des commentaires. Dès que les experts... On nous a
assuré que, dans les prochains jours, les experts nous feraient
connaître leurs réactions au projet soumis. Ça ne devrait
pas tarder, mais je ne crois pas que ce soit dans la présente session.
Je ne crois pas. Ça irait... J'aimerais bien pouvoir les déposer
pendant, évidemment, que l'Assemblée siège, ce qui
voudrait dire qu'on les déposerait fin mars, début avril.
Mme Harel: Oui, parce que je crois comprendre qu'il y a eu des
versions successives, là, qui ont été transmises.
Peut-être que la version finale ne l'a pas encore été, mais
il y a eu un certain nombre de versions, et il devra y avoir des rencontres.
C'est ce qui pourrait...
M. Rémillard: Oui, oui.
Mme Harel: ...amener, finalement, le ministre à les
déposer seulement en mars. C'est ce qu'il faut comprendre?
M. Rémillard: II y a des rencontres... Moi, je voudrais
les déposer en mars, dans le sens que j'aimerais les déposer
solennellement à l'Assemblée nationale. On veut en faire un
document solennel, comme élément de référence, et,
après beaucoup de questions qu'on a reçues et beaucoup
d'hésitations, aussi, qu'on avait au départ, on est
arrivés à la conclusion, finalement, qu'il serait souhaitable de
déposer à l'Assemblée nationale, d'une façon
officielle, ces commentaires pour qu'ils puissent servir de
référence. Mais on n'a pas encore tout reçu, donc, les
commentaires des experts et on n'a pas encore eu, donc, les rencontres qui
s'imposent, mais, normalement, fin mars, début d'avril, ça
devrait être déposé.
Mme Harel: Et quel est le statut des commentaires du
présent projet de loi? Je crois comprendre que, d'une façon assez
exceptionnelle, le ministre en a fait lecture. Je voyais le visage de notre
président s'allonger. J'avais l'impression qu'il se demandait si,
à l'examen de chaque article, on allait procéder à la
lecture du commentaire. Est-ce que vous pouvez nous indiquer, là, quelle
sera la façon de procéder que vous proposez?
M. Rémillard: La façon de procéder, on a
finalement convenu, tout à l'heure en discutant, que, pour les fins de
l'enregistrement, pour l'introduction des dispositions transitoires, on pouvait
lire les commentaires, mais je ne vois pas la nécessité de lire
tous les commentaires que nous avons dans ce document-là. Est-ce qu'il
vaudrait mieux que ces commentaires soient déposés aussi à
l'Assemblée nationale? Je pense que c'est une question qui
mériterait qu'on la discute parce qu'on pourrait penser aussi, on
pourrait voir, de par les séances de travail qu'on pourrait avoir, s'il
serait opportun... Étant donné qu'il y a les commentaires du Code
civil, est-ce que la loi d'application nécessite aussi qu'on
dépose les commentaires? Je crois que c'est un sujet qu'on devrait
discuter avec nos légistes, nos experts afin de voir quelle serait la
meilleure façon de procéder. Mais, avec votre permission, M. le
Président, je considère que c'est là une exception que
j'ai faite et j'espère que vous comprenez que ce ne serait pas notre
intention de lire tous les commentaires qu'il y a dans ce projet de loi.
Le Président (M. LeSage): C'est ce que j'avais compris, M.
le ministre. M. le député de Westmount.
M. Holden: M. le Président, j'ai remarqué, cet
été, je crois, que Communication-Québec a une disquette
sur le Code civil. Je ne sais pas si vous savez ce qu'il y a... Moi, je ne l'ai
pas vue, je ne l'ai pas visionnée. Qu'est-ce qu'il y a sur la disquette?
Est-ce que c'est simplement le texte du Code ou est-ce que les commentaires
sont dedans?
Le Président (M. LeSage): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, je vais m'informer.
Je regrette de dire que le député de Westmount est très
bien informé de ce que fait Communication-Québec en ce qui
regarde le Code civil. Moi, on ne m'a pas informé.
M. Hoîden: On a envoyé un dépliant à
tout le monde.
M. Rémillard: Ah oui! C'est comme avocat ou comme
député que vous l'avez eu?
M. Holden: Je ne sais pas comment je l'ai eu. Je crois que c'est
50 $ ou 60 $, ou quelque chose pour la disquette.
M. Rémillard: Bien, je vais m'informer. On m'informe que
ce ne sont pas mes commentaires.
M. Holden: Non. O.K.
Le Président (M. LeSage): Alors, est-ce que l'amendement
à l'article 1 est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'article 1, tel
qu'amendé, est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Alors, j'appelle l'article 2. M.
le ministre.
Dispositions générales
M. Rémillard: Oui, M. le Président. L'article 2:
«La loi nouvelle n'a pas d'effet rétroactif: elle ne dispose que
pour l'avenir. «Ainsi, elle ne modifie pas les conditions de
création d'une situation juridique antérieurement
créée ni les conditions d'extinction d'une situation juridique
antérieurement éteinte. Elle n'altère pas non plus les
effets déjà produits par une situation juridique.»
Mme Harel: Alors, ce que je vous propose, M. le
Président...
Le Président (M. LeSage): Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Merci. Ce que je proposerais au ministre, c'est de
faire la lecture des dispositions générales du chapitre premier
et de ne pas faire la lecture des commentaires de l'article 2, de le suspendre,
et nous y reviendrons au moment où nous poursuivrons nos travaux,
étant donné qu'il pourrait y avoir une reformulation surtout du
deuxième alinéa.
M. Rémillard: Remarquez que, si on lit le chapitre
premier, il faudrait peut-être lire aussi les chapitres 2,3, 4 avec tout
ça.
Mme Harel: C'est ce qu'on faisait, si ma mémoire est
bonne...
M. Rémillard: Au Code civil, oui.
Mme Harel: On ne lisait que les notes introductives des
chapitres, mais pas les commentaires. (20 h 50)
M. Rémillard: Très bien. Alors, M. le
Président, à la suggestion de la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, je pense qu'elle a parfaitement raison, je vais lire,
donc, le chapitre premier, Dispositions générales, articles 2
à 10.
Donc, ça précède, M. le Président, l'article
2, qui est le premier article du chapitre premier. Je lis donc le chapitre
premier, les commentaires. Ce chapitre énonce les principes
généraux ou les règles de base applicables dans la
résolution dee conflits de règles entre l'ancien et le nouveau
droit. On y retrouve ainsi des dispositions qui affirment le principe de la
non-rétroactivité de la loi nouvelle et, en corollaire, celui de
son effet immédiat sur les situations juridiques en cours.
D'autres dispositions portent sur l'effet des règles imperatives
de la loi nouvelle, sur le sort des stipulations qui renvoient à la loi
ancienne ou reprennent des énoncés de cette loi ou sur le calcul
des nouveaux délais introduits par la loi nouvelle. Enfin, des
dispositions visent à valider certains actes nuls sous l'empire de la
loi ancienne ou déterminent les effets de la loi nouvelle sur tes
instances en cours et sur les règles de procédure.
De façon générale, les principes ou règles
de base que comporte ce chapitre sont destinés à faciliter la
détermination, par les juristes et autres utilisateurs, de la loi
ancienne ou nouvelle applicable à une situation juridique donnée
ou encore de la portée de la loi nouvelle sur les situations juridiques
en cours. Ils visent, de ce fait, à favoriser le passage harmonieux de
l'ancien droit au nouveau droit.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre.
M. Rémillard: Alors, là, M. le Président, je
devrais lire les commentaires de l'article 2. C'est bien ça qu'on a
convenu.
Le Président (M. LeSage): Non, je pense que...
M. Rémillard: Non, on n'a pas convenu ça?
Le Président (M. LeSage): ...Mme la
députée
de Hochelaga-Maisonneuve avait une suggestion à faire.
Mme Harel: Je crois qu'on pourrait en discuter et,
éventuellement...
M. Rémillard: Parfait.
Mme Harel: ...voir s'il faut les déposer, certainement,
mais les lire, vous verrez, en fait.
M. Rémillard: Alors, donc, M. le Président, avec
votre permission, je demanderais qu'on puisse suspendre nos travaux pour
réunion avec légistes et experts, et on vous reviendrait dans
quelques minutes; c'est-à-dire que ça peut nous prendre
peut-être une demi-heure, 45 minutes de discussion.
Le Président (M. LeSage): Parfait. Alors, les travaux de
cette commission sont suspendus temporairement.
(Suspension de la séance à 20 h 53)
(Reprise à 23 h 19)
Le Président (M. LeSage): La commission des institutions
reprend ses travaux. Je vous rappelle que nous en sommes à
l'étude de l'article 2 du projet de loi 38. M. le ministre.
M. Rémillard: Oui. Alors, M. le Président, je vous
proposerais de procéder en appelant les articles à partir de
l'article 2. Nous avions suspendu l'article 2. Alors, si vous le permettez, M.
le Président, vous pourriez appeler simplement les articles et on
pourrait voir si... Je pourrais les lire, lire l'article. C'est bien ça
qu'on a convenu, M. le député de Westmount, M. le
député d'Anjou? C'est ça?
M. Holden: C'est ça.
M. Bélanger (Anjou): C'est ça.
M. Rémillard: Alors, on lit l'article, et vous verrez s'il
y a des commentaires au niveau de chaque article, à ce
moment-là.
Le Président (M. LeSage): Très bien, M. le
ministre. Alors, l'article 2 est suspendu. J'appelle donc...
M. Rémillard: Non. Nous pouvons procéder. Vous
pouvez appeler l'article 2, et je vais le lire, M. le Président.
Le Président (M. LeSage): D'accord. J'appelle donc
l'article 2. M. le ministre.
M. Rémillard: Alors, M. le Président, l'article 2:
«La loi nouvelle n'a pas d'effet rétroactif: elle ne dispose que
pour l'avenir. «Ainsi, elle ne modifie pas les conditions de
création d'une situation juridique antérieurement
créée ni les conditions d'extinction d'une situation juridique
antérieurement éteinte. Elle n'altère pas non plus les
effets déjà produits par une situation juridique.» (23 h
20)
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires sur l'article 2? M. le député de Westmount.
M. Holden: Oui. M. le Président, on n'a pas
d'objection quant au principe de l'article, sauf qu'il y avait une
reformulation qui était pour être préparée par nos
experts et...
M. Rémillard: Alors, bon, suspendu. On va le suspendre, M.
le Président.
M. Holden: On va le suspendre.
Le Président (M. LeSage): L'article 2 est suspendu.
J'appelle donc l'article 3. M. le ministre.
M. Rémillard: «La loi nouvelle est applicable
à toutes les situations juridiques en cours lors de son entrée en
vigueur, y compris aux situations contractuelles. «Ainsi, les situations
en cours de formation ou d'extinction sont, quant aux conditions de
création ou d'extinction qui n'ont pas encore été
remplies, régies par la loi nouvelle; celle-ci régit
également les effets à venir des situations juridiques en
cours.»
Ah, on m'informe, M. le Président, en dernière heure,
qu'il y a une proposition d'amendement. Alors, je vous lis la proposition
d'amendement.
Le Président (M. LeSage): Très bien.
M. Rémillard: L'article 3 est modifié: 1° par
le remplacement, dans la première ligne du premier alinéa, des
mots «à toutes les» par le mot «aux»; 2° par
la suppression, à la fin du premier alinéa, de ce qui suit:
«, y compris aux situations contractuelles»; 3° par le
remplacement, dans la première ligne du second alinéa, du mot
«formation» par le mot «création».
M. le Président, les deux premières modifications
résultent de l'amendement proposé à l'article 3.1 qui
suit, amendement destiné à introduire la survie de la loi
supplétive ancienne comme principe applicable, sur certains aspects, aux
situations juridiques contractuelles en cours.
La dernière modification est d'ordre formel seulement. Elle
assure la cohérence terminologique avec le texte de l'article 2 et celui
du
présent article, où le mot «création»
est utilisé de préférence au mot
«formation».
En raison de ces modifications, l'article 3 se tirait comme suit:
«3. La loi nouvelle est applicable aux situations juridiques en cours
lors de son entrée en vigueur. «Ainsi, les situations en cours de
création ou d'extinction sont, quant aux conditions de création
ou d'extinction qui n'ont pas encore été remplies, régies
par la loi nouvelle; celle-ci régit également les effets à
venir des situations juridiques en cours.»
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires sur l'amendement? Est-ce que l'amendement à l'article 3 est
adopté? Est-ce que l'article 3, tel qu'amendé, est adopté?
Alors, l'article 3, tel qu'amendé, est adopté. J'appelle donc
l'article 4. M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Je viens
d'évoquer, évidemment, l'article 3.1. L'article 3.1 doit
être retravaillé. Donc, je reviendrai plus tard, M. le
Président, avec l'article 3.1. C'est parce que, dans mon amendement
à l'article 3, j'évoque l'article 3.1. Alors, je veux simplement
vous dire que je ne suis pas prêt à procéder avec l'article
3.1 pour le moment. J'y reviendrai un peu plus tard lorsque des rencontres
auront eu lieu avec les experts et les légistes.
Le Président (M. LeSage): Parfait, M. le ministre. Nous
prenons note que l'article 3.1 sera déposé
ultérieurement.
M. Rémillard: Voilà, M. le Président.
Le Président (M. LeSage): J'appelle donc l'article 4.
M. Rémillard: M. le Président, il y a un amendement
qui est proposé à l'article 4. L'article 4 est modifié par
le remplacement, dans la première ligne, du mot
«contractuelles» par les mots «d'un acte
juridique».
M. le Président, cet amendement comble une omission du projet. Il
vise à couvrir expressément les actes juridiques
unilatéraux, principalement les testaments qui, comme les contrats,
peuvent eux aussi contenir des stipulations que n'admet plus la loi nouvelle,
telles les clauses dites de «viduité» que vise l'article 757
du nouveau code, ou les clauses pénales dont il est question à
l'article 758 du même code.
En raison de cet amendement, l'article 4 se lirait comme suit: «4.
Les stipulations d'un acte juridique antérieures à la loi
nouvelle et qui sont contraires à ses dispositions imperatives sont
privées d'effet pour l'avenir».
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires à l'amendement à l'article 4? M. le
député d'Anjou.
M. Bélanger (Anjou): Si je comprends bien, le terme
«acte juridique» est plus vaste et englobe l'expression
«stipulations contractuelles». C'est ça?
M. Rémillard: C'est ça, M. le député.
Ça comprend, entre autres, les testaments.
M. Bélanger (Anjou): Ah bon! D'accord. Quant à moi,
ça va.
Le Président (m. lesage): ça va, m. le
député d'anjou?
M. Bélanger (Anjou): Oui.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'amendement à
l'article 4 est adopté?
M. Holden: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'article 4, tel
qu'amendé, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Alors, l'article 4, tel
qu'amendé, est adopté. J'appelle donc l'article 5. M. le
ministre.
M. Rémillard: M. le Président, j'ai un amendement.
L'amendement dit ceci: L'article 5 est supprimé.
M. le Président, cet amendement découle de l'amendement
introduisant l'article 3.1 dont je vous ai parié tout à l'heure.
En effet, la règle de l'article 5 se fonde essentiellement sur la
présomption que les parties à un contrat, lorsqu'elles font
référence dans leur acte aux dispositions de la loi pour le
compléter, entendent y référer dans un sens
évolutif, c'est-à-dire avec toutes les modifications qui
pourraient éventuellement leur être apportées. Or, le
nouvel article 3.1 renverse cette présomption, puisqu'il établit
désormais le principe de la survie de la loi supplétive ancienne
en matière contractuelle. L'article 5 devient donc sans objet,
d'où sa suppression.
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires sur cet amendement? M. le député d'Anjou.
M. Bélanger (Anjou): m. le président, puisque
l'article 3.1 va être vu plus tard, on pourrait peut-être voir en
même temps l'article 5 à ce moment-là?
M. Rémillard: C'est une possibilité, mais,
même si on regarde l'article 3.1, celui-ci devrait,
de toute façon, disparaître. Les petits
éléments que nous avons à discuter sur l'article 3.1 -
vous pourrez y revenir - ne mettent pas en cause l'article 5.
M. Bélanger (Anjou): Ah, donc, ils ne sont pas
reliés outre mesure?
M. Rémillard: II y a un lien.
M. Bélanger (Anjou): Oui, il y a un lien.
M. Rémillard: C'est pour ça qu'on le suspend, en
fait, qu'on l'abolit.
M. Bélanger (Anjou): Oui.
M. Rémillard: Mais les discussions que nous avons sur 3.1
ne mettent pas en cause le fait qu'on doit l'abolir ou pas. On peut
toujours...
M. Bélanger (Anjou): Mais, si on n'adoptait pas l'article
3.1, il n'y aurait pas de problème, à ce moment-là,
à retirer 5 pareil?
M. Rémillard: Là, on aurait un problème.
Là, on aurait un problème.
M. Bélanger (Anjou): Ah, c'est ça. O.K.
M. Rémillard: C'est pour ça que, voyez-vous, on
s'entend toujours au niveau de cette commission et que, même si on
acceptait 5 et que tout à coup on se rend compte que 3.1, ça
cause un problème avec 5 qu'on abolit, on peut revenir. Contrairement
aux autres commissions, nous autres, on a une règle, ici...
M. Bélanger (Anjou): Ah bon! D'accord.
M. Rémillard: ...qui fait qu'on peut toujours revenir sur
un article. Même si on l'a accepté, on y revient. Ça ne
cause aucun problème.
M. Bélanger (Anjou): Merci de me le préciser.
Parfait! Parfait! Alors, à ce moment-là, pas de
problème.
M. Rémillard: Alors, aucun problème.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'amendement
proposé ayant pour objet de supprimer l'article 5 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Alors, l'article 5 est donc
supprimé. J'appelle donc l'article 6. M. le ministre.
M. Rémillard: Alors, à l'article 6, il n'y a pas de
modification, M. le Président. Alors, je lis l'article: «Lorsque
la loi nouvelle allonge un délai, le nouveau délai s'applique aux
situations en cours, compte tenu du temps déjà
écoulé. «Si elle abrège un délai, le nouveau
délai s'applique, mais il court à partir de l'entrée en
vigueur de la loi nouvelle. Le délai prévu par la loi ancienne
est cependant maintenu lorsque l'application du délai nouveau aurait
pour effet de proroger l'ancien. «Si un délai, qui n'existait pas
dans la loi ancienne, est introduit par la loi nouvelle et prend comme point de
départ un événement qui, en l'espèce, s'est produit
avant son entrée en vigueur, ce délai, s'il n'est pas
déjà écoulé, court à compter de cette
entrée en vigueur.»
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires à l'article 6? M. le député de Westmount.
M. Holden: M. le Président, peut-être que le
ministre pourrait nous donner un exemple de ce que ça veut dire
«compte tenu du temps déjà écoulé», en
donnant un exemple concret.
M. Rémillard: Je vais demander à Me Longtin, si
vous voulez, M. le Président, de répondre à la question du
député de Westmount.
Le Président (M. LeSage): Me Longtin, est-ce que vous
pourriez vous identifier pour les fins du Journal des débats?
Mme Longtin (Marie-José): Je dis quoi, M. le
Président? Mon nom? Marie-José Longtin, ministère de la
Justice.
Un exemple d'un nouveau délai serait, par hypothèse, en
matière délictuelle, de responsabilité civile, où
le délai pour un dommage, un préjudice matériel est de
deux ans, alors que dans le nouveau droit il serait porté à trois
ans. Alors, ce nouveau délai de trois ans s'appliquerait aux situations
en cours, mais, s'il y avait déjà un an d'écoulé
sous la loi ancienne, il demeurerait deux ans à courir. On ne part pas,
donc, de l'entrée en vigueur. On tient compte du délai
déjà écoulé de prescription.
M. Holden: M. le Président, si je peux demander à
madame...
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Westmount.
M. Holden: On parle de situations en cours. On ne veut pas dire
en cours, en litige devant les tribunaux.
Mme Longtin: Non.
M. Holden: Une situation où on sait quelle est la date du
fait qui donne lieu à une réclamation. C'est ça?
Mme Longtin: En fait, c'est toute situation qui ne serait pas
éteinte.
M. Holden: Oui.
(23 h 30)
Mme Longtin: Parce que, évidemment, dans ce cas-là,
on peut avoir eu le préjudice et ne pas avoir encore intenté la
poursuite. Et la situation est encore en cours juridiquement.
M. Holden: Oui. En anglais, vous parlez de «existing
situations», les situations existantes, oui, et, en français,
vous...
Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le
député de Westmount?
M. Holden: Peut-être que madame pourrait donner un autre
exemple, au paragraphe suivant: «Si elle abrège un
délai»; quel serait l'exemple de l'application de l'article 6?
Mme Longtin: Nous en aurions un exemple en matière... Bon,
enfin, le délai général de prescription, qui était
de 30 ans, passe à 10 ans. Alors, si on a une réclamation sur un
droit réel immobilier, il y a toujours... Bon, disons qu'il y avait 18
ans déjà d'écoulés et qu'il reste donc 12 ans,
normalement, sous le droit ancien, on va appliquer le nouveau délai,
mais à compter de l'entrée en vigueur, donc, pour une
période de 10 ans. Alors, on va perdre deux ans, là, sur la loi
ancienne.
M. Holden: En d'autres termes...
Mme Longtin: Mais il n'y aura jamais moins que 10 ans, que le
nouveau délai.
M. Holden: Mais, en général, l'intention du
législateur, c'est d'aider ou de donner le plus d'avantages possibles
dans le cas d'un délai de prescription qui pourrait être plus
long, donc, de donner plus de continuité a un réclamant et, dans
le cas d'une propriété, de donner un avantage pour que quelqu'un
devienne propriétaire le plus vite possible.
Mme Longtin: De manière générale...
M. Holden: C'est l'intention du législateur de faire
bénéficier l'individu, le citoyen, si possible.
M. Rémillard: C'est ce que sous-tend le principe.
M. Holden: O.K. M. Rémillard: Ça va?
Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le
député de Westmount?
M. Holden: Une question. Madame a donné l'exemple d'un
délai de 18 ans qui se serait écoulé dans une prescription
de 30 ans, mais disons que 25 ans se seraient écoulés dans une
situation de 30 ans. Est-ce que, par le deuxième paragraphe, il ne
resterait que 5 ans pour avoir la prescription au lieu des 10 que ça
implique dans la loi?
M. Rémillard: Cinq ans.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Westmount.
M. Holden: Peut-être que je voudrais continuer, si M. le
ministre peut demander à Mme Longtin de revenir pour une question
finale.
M. Rémillard: Me Longtin.
M. Holden: Le troisième paragraphe mentionne «un
délai, qui n'existait pas dans la loi ancienne». Pourriez-vous
donner un exemple, madame, d'une situation où il y aurait un fait
antérieur à la nouvelle loi et qui impliquerait un délai
sous la nouvelle loi?
Mme Longtin: Oui, en fait, j'en prendrai un autre que ceux qui
sont mentionnés. C'est celui, par exemple, en matière
d'indivision. Actuellement, on sait que l'indivision n'est pas
réglementée d'une façon très précise par le
Code civil. L'article 1013 introduit un délai en disant que les
indivisaires peuvent reporter le partage pour une période
n'excédant pas 30 ans, donc d'une durée de 30 ans. Il s'agit
là d'un délai nouveau qui n'existe pas en droit actuel.
Alors, le délai n'existant pas dans la loi ancienne est
introduit, donc, par la loi nouvelle à l'article 1013 et il prend comme
point de départ un événement qui s'est produit avant son
entrée en vigueur, donc, une convention d'indivision qui existe
peut-être depuis 10 ans. Ce délai, donc, s'il n'est pas
déjà écoulé... Ici, on aura 10 ans
d'écoulés à compter de cette entrée en vigueur.
Donc, on va appliquer pour partir...
M. Holden: II y aurait un autre 20 ans, en d'autres termes.
Mme Longtin: Oui. C'est ça. Il n'est pas
déjà écoulé? Ah nonl D'accord. Il doit partir de
l'entrée en vigueur.
M. Rémillard: II part de l'entrée en vigueur de la
loi.
Mme Longtin: II doit partir de l'entrée en vigueur de la
loi parce qu'il n'est pas écoulé sur la loi ancienne.
M. Rémillard: De la loi. Alors, comme il n'est pas
écoulé sur la loi ancienne, à ce mo-
menMà...
M. Holden: Oui, mais... Ah, parce que ça n'existait pas
dans la loi ancienne.
Mme Longtin: C'est ça. C'est tout nouveau.
M. Holden: Alors, à partir du moment de la nouvelle
loi...
M. Rémillard: Là, le délai...
M. Holden: ...le délai commence à couler.
Mais...
Mme Longtin: Mais, s'il y avait déjà eu 30
ans...
M. Holden: ...madame a dit que ça existait
déjà.
Mme Longtin: Si la convention d'indivision avait
été faite en 1960 et, donc, qu'on avait reporté
indéfiniment la durée du partage, on aurait 30 ans qui sont
déjà écoulés et, donc, on pourrait, à ce
moment-là, redemander...
M. Rémillard: Est-ce que ça va, M. le
député?
M. Holden: II n'y aurait pas tellement de situations de ce
genre-là, madame? Elles ne seraient pas nombreuses, les situations que
vous avez décrites tout à l'heure.
Mme Longtin: II existe, semble-t-il, mais on n'a aucune
donnée, en fait, précise, plusieurs conventions d'indivision. Et,
effectivement, semble-t-il, le report du partage est une pratique, mais je ne
pourrais pas vous répondre autrement, plus
précisément.
Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le
député de Westmount?
M. Holden: Merci, M. le Président.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'article 6 est
adopté? L'article 6 étant adopté, j'appelle l'article 7.
M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. «Les
actes juridiques entachés de nullité lors de l'entrée en
vigueur de la loi nouvelle ne peuvent plus être annulés pour un
motif que la loi nouvelle ne reconnaît plus.»
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires? M. le député d'Anjou.
M. Bélanger (Anjou): En tout cas, c'est une question que
je me pose. Est-ce que, par cet article, on pourrait faire revivre certains
con- trats qui seraient de nullité absolue en vertu de l'ancien code, vu
que ce motif de nullité absolue n'existerait plus dans le nouveau code,
à ce moment-là? Est-ce qu'on pourrait faire revivre d'anciens
contrats qui seraient nuls en vertu de l'ancien code?
M. Rémillard: Si l'annulation n'a pas déjà
été prononcée...
M. Bélanger (Anjou): Oui.
M. Rémillard: ...ça pourrait s'appliquer.
M. Bélanger (Anjou): Sauf que je reviens à
certaines notions que j'ai apprises en droit des obligations, qui sont celles
de la nullité absolue et de la nullité relative,
c'est-à-dire que, si c'est absolu, c'est nul, tandis que la
nullité relative, on doit la prononcer pour qu'elle existe, finalement.
Est-ce que, à ce moment-là, quand on a un contrat de
nullité absolue, de par l'effet de cet article, on pourrait le faire
revivre? C'est juste la question que je me pose.
M. Rémillard: Bien, il y a un exemple qui est
donné, le quatrième exemple dans nos commentaires où on
dit ceci: Le testament notarié est nul parce que reçu devant un
notaire assisté d'un seul témoin, alors que la loi exigeait
l'assistance de deux témoins dans le Code civil du Bas Canada, aux
articles 843 et 844, lorsque la loi nouvelle ne requiert l'assistance que d'un
seul témoin. Donc, la nullité de l'acte ne pourra plus être
invoquée. Alors, voilà un exemple de nullité absolue.
M. Bélanger (Anjou): Et on ne fait pas de
différence entre nullité pour cause de fond ou de forme.
Nullité, point.
M. Rémillard: Non. Toute forme de nullité. M.
Bélanger (Anjou): Toute forme de nullité. M.
Rémillard: Oui. M. Bélanger (Anjou): D'accord.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Westmount.
M. Holden: Oui, M. le Président. La Chambre des
notaires avait soulevé des objections à l'article 7. Est-ce que
le ministre est au courant de ces objections? Quelle est la réaction du
ministre? (23 h 40)
M. Rémillard: Je prends toujours bonne note des remarques
que nous font parvenir la Chambre des notaires comme le Barreau, d'ailleurs, M.
le Président. Alors, il y avait, oui, des commentaires qui ont
été faits par la Chambre des
notaires.
Je pourrais peut-être demander à Mme la sous-ministre de
faire le commentaire.
Le Président (M. LeSage): Mme la sous-ministre.
Mme Morency (Lise): C'est toujours suivant le même
principe: la Chambre des notaires veut que les contrats soient respectés
dans leur totalité. Alors, évidemment, la disposition dont il est
question présentement intervient d'une certaine façon sur les
conditions juridiques qui s'attachaient à un acte déjà
passé. Alors, nous avons effectivement examiné les commentaires
de la Chambre des notaires, et il nous a semblé que cette approche que
l'article en question privilégie était souhaitable dans le cadre
d'une loi comme celle qui est actuellement étudiée par la
présente chambre.
M. Holden: Alors, il n'y a pas d'amendement de prévu
à l'article 7?
Mme Morency: M. le ministre n'a pas considéré,
après analyse, qu'il y avait lieu d'en apporter.
M. Rémillard: Oui, après étude attentive, M.
le Président, avec les légistes, les experts, nous en sommes tous
arrivés à la conclusion...
M. Holden: si je comprends bien, il y avait une contradiction
avec l'article 9 ou une conciliation avec l'article 9, mais il y aurait un
amendement à l'article 9.
M. Rémillard: C'est ça. Il y a une modification
à 9.
M. Holden: Oui. Un procès qui est déjà en
cours sur une nullité, quand la nouvelle loi est adoptée et
promulguée, où la nullité n'existe plus, qu'est-ce que
c'est le dénouement d'une telle situation?
M. Rémillard: Si je comprends bien votre question, s'il y
a en cours déjà un problème de nullité qui est
devant la cour, est-ce que, avec le droit nouveau, on se référera
au droit nouveau pour régler la question de la nullité? C'est
ça que vous me demandez?
M. Holden: Hum, huml
M. Rémillard: alors, c'est l'article 9, finalement, qui
répond à la question. peut-être qu'en lisant l'article 9 on
pourrait avoir la possibilité de reprendre votre question, si vous
permettez. ça va?
Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le
député de Westmount?
M. Holden: O.K., M. le Président, oui.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'article 7 est
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. LeSage): L'article 7 étant
adopté, j'appelle l'article 8. M. le ministre.
M. Rémillard: Alors, M. le Président, l'article 8:
«Peuvent valablement être prises avant l'entrée en vigueur
de la loi nouvelle les mesures préalables à l'exercice d'un droit
ou d'un pouvoir conféré par cette dernière, y compris
l'envoi d'un avis ou l'obtention d'une autorisation.»
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires sur cet article? Est-ce que l'article... M. le
député de Westmount.
M. Holden: Un instant, M. le Président. M. le
Président, peut-être que le ministre pourrait nous dire à
partir de quels critères l'exercice de l'article 8 va être
appliqué?
M. Rémillard: excusez-moi, m. le président,
peut-être que le député de westmount pourrait
préciser sa question. que veut-il dire par quels critères?
M. Holden: La célébration du mariage par les
fonctionnaires va être basée sur quels critères, M. le
ministre?
M. Rémillard: Écoutez, j'ai de la difficulté
à saisir. Je ne sais pas si je comprends bien votre question. Vous
voulez dire que la célébration est faite selon quelle loi?
M. Holden: Bien, on donne, dans la note additionnelle, un
commentaire sur l'article 8: L'obtention préalable, par des ministres du
culte idoines, de l'autorisation du ministre de la Justice que requiert
l'article 366 du nouveau code de façon à leur permettre de
célébrer des mariages dès l'entrée en vigueur de la
loi nouvelle. Et ma question, c'est: Sur quels critères est-ce que cette
autorisation va être faite selon la loi?
M. Rémillard: Alors, il y a des critères
très objectifs qui sont déterminés, M. le
Président, et ces critères, demain, le directeur du registre de
l'état civil pourrait venir nous les expliquer. Alors, est-ce que je
peux demander au député de Westmount de conserver sa question
pour demain et de la poser au directeur de l'état civil qui va
être ici...
M. Holden: Oui.
M. Rémillard: ...et qui va répondre? Alors, il
y a une série de critères que je n'ai pas devant moi,
là.
M. Holden: Ah bon!
M. Rémillard: II s'agit de critères très
objectifs qu'il va pouvoir nous énumérer.
M. Holden: Parfait.
Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le
député de Westmount?
M. Holden: Oui.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'article 8 est
adopté?
Une voix: Adopté. M. Holden: Oui.
Le Président (M. LeSage): L'article 8 étant
adopté, j'appelle l'article 9. M. le ministre.
M. Rémillard: Oui. Il y a un amendement, M. le
Président. L'amendement proposé est à l'effet que
l'article 9 est remplacé par le suivant: «9. Les instances en
cours demeurent régies par la loi ancienne. «Cette règle
reçoit "exemption" lorsque le jugement à venir est constitutif de
droits ou que la loi nouvelle, en application des dispositions de la
présente loi, a un effet rétroactif. Elle reçoit aussi
exception pour tout ce qui concerne la preuve et la procédure en
l'instance.»
M. le Président, cet amendement vise à clarifier et
à préciser la portée exacte de la règle d'origine,
notamment par rapport à d'autres règles du droit transitoire
proposé. S'il reprend, du texte antérieur, l'exception propre aux
jugements constitutifs de droits, il précise désormais clairement
l'«exemption» relative aux dispositions de la loi nouvelle qui se
voient conférer une portée rétroactive, telles celles que
couvre l'article 7, de même que les exceptions qui concernent les
dispositions nouvelles de preuve et de procédure, lesquelles doivent
normalement recevoir une application immédiate dans les instances en
cours.
Les précisions apportées, quant à ces
«exemptions» reconnues par le droit positif, ne viennent
qu'exprimer explicitement ce qui était implicite dans le projet. Elles
ont néanmoins paru utiles, afin de dissiper tout doute possible.
En raison de cet amendement, l'article 9 se lirait comme suit: «9.
Les instances en cours demeurent régies par la loi ancienne.
«Cette règle reçoit "exemption" lorsque le jugement
à venir est constitutif de droits ou que la loi nouvelle, en application
des dispositions de la présente loi, a un effet rétroactif. Elle
reçoit aussi "exemption" pour tout ce qui concerne la preuve et la
procédure en l'instance.»
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires à l'amendement à l'article 9? M. le
député d'Anjou.
M. Bélanger (Anjou): Oui, M. le Président.
Je me demande, comme question, si, au lieu de mettre «instance», il
n'aurait pas été préférable de mettre le terme
«audition». Je me pose cette question parce que je prends comme
exemple le cas d'une audition, d'une instance qui serait prise en
délibéré. Donc, l'audition serait terminée, mais le
jugement ne serait pas encore rendu. Alors, à ce moment-là, si on
regarde l'application de l'article 9, la procédure qui aurait dû
être mise en place pendant l'audition, c'est celle de la nouvelle loi. En
tout cas, je ne le sais pas, il me semble qu'il aurait peut-être
été préférable de parler d'audition plutôt
que de parler d'instance, parce que l'instance n'est pas terminée quand
le jugement est en délibéré, à moins que je me
trompe, là. Corrigez-moi si je me trompe, là. Il me semble que
ça aurait été préférable de parler
d'audition, de ne pas parier d'instance.
M. Rémillard: c'est parce que j'ai de la difficulté
un petit peu à vous suivre, je vous avoue, là. ce n'est pas parce
que vous n'êtes pas clair. parce que peut-être c'est l'heure. il
est un petit peu... l'élaboration de... (23 h 50)
M. Bélanger (Anjou): Moi, je me pose tout simplement la
question. L'audition des témoins, le procès est terminé,
mais le jugement est en délibéré, c'est-à-dire que
le juge est en réflexion à savoir quel jugement il va rendre.
Alors, à ce moment-là, je me demande qu'est-ce qui s'applique
dans ce cas.
M. Rémillard: C'est l'instance. C'est la loi nouvelle qui
s'applique.
M. Bélanger (Anjou): Oui, mais cet article 9 dit qu'il y a
des choses qui doivent...
M. Rémillard: Les instances...
M. Bélanger (Anjou): Est-ce que je me cause un faux
problème ou...
M. Rémillard: Ici, j'essaie de comprendre, en fait, votre
problème. Les instances en cours demeurent régies par la loi
ancienne.
M. Bélanger (Anjou): O.K.
M. Rémillard: Alors, dès que vous avez l'instance
qui est en cours, au moment de l'entrée en vigueur, c'est la loi
ancienne qui
s'applique.
M. Bélanger (Anjou): Oui. O.K.
M. Rémillard: Alors, ensuite, cette règle, elle va
recevoir exception «lorsque le jugement à venir est constitutif de
droits - alors, si, par exemple, on pense à la nomination de tuteurs,
c'est un des cas auxquels on peut se référer -ou que la loi
nouvelle, en application des dispositions de la présente loi, a un effet
rétroactif».
Bon, alors, on peut penser... Mme ' la sous-ministre me parle de
l'erreur inexcusable, un principe comme ça. Alors, dans ce
cas-là, on dit: «Elle reçoit aussi "exemption" pour tout ce
qui concerne la preuve et la procédure en l'instance». Alors, pour
tout ce qui regarde preuve et procédure...
M. Bélanger (Anjou): Oui.
M. Rémillard: ...à ce moment-là, c'est le
droit nouveau qui s'applique...
M. Bélanger (Anjou): D'accord.
M. Rémillard: ...dès la mise en vigueur du droit
nouveau.
M. Bélanger (Anjou): Sauf que, si l'audition est
terminée...
M. Rémillard: Oui.
M. Bélanger (Anjou): ...et que, lors de l'audition, il y
avait un moyen de preuve qui n'était pas permis en vertu de l'ancienne
loi - d'accord? - mais, en vertu de la nouvelle, il est permis, mais l'audition
est terminée, qu'est-ce qui pourrait être fait, à ce
moment-là?
M. Rémillard: C'est terminé. La preuve et la...
M. Bélanger (Anjou): mais l'instance, elle, ne l'est pas
terminée, et l'exception dit que c'est, normalement, les prescriptions
de la nouvelle loi qui s'appliquent.
M. Rémillard: Oui, mais le moment où, dans
l'instance, vous pouvez faire la preuve ou la procédure, ça,
c'est terminé, c'est avant. Donc, ce n'est pas un problème.
Comprenez-vous ce que je veux vous dire? C'est que...
M. Bélanger (Anjou): II ne pourrait pas y avoir de
réouverture d'enquête ou...
M. Rémillard: II ne pourrait pas y avoir de
réouverture d'enquête parce que l'instance comprend,
évidemment, l'audition.
M. Bélanger (Anjou): Je ne suis pas sûr que c'est si
évident que ça.
M. Rémillard: Oui, par le fait même. C'est que, si
vous avez une réouverture d'enquête, si le juge, à un
moment donné, constate qu'il va y avoir une réouverture
d'enquête, à ce moment-là, vous vous retrouvez au moment
où la preuve et la procédure sont en cause. Donc, par le fait
même...
M. Bélanger (Anjou): La nouvelle loi.
M. Rémillard: ...c'est la nouvelle loi qui s'applique.
Mais, normalement, quand la preuve et la procédure sont
terminées, c'est-à-dire que le juge est en...
M. Bélanger (Anjou): Délibéré.
M. Rémillard: ...délibéré, c'est,
à ce moment-là, le droit nouveau qui s'applique.
Comprenez-vous?
M. Bélanger (Anjou): Donc, ce que vous me dites,
finalement, c'est que, s'il y avait une cause en délibéré,
au moment où la nouvelle loi entre en vigueur, il y aurait
possibilité de réouverture d'enquête pour mettre...
M. Rémillard: L'ancienne loi.
M. Bélanger (Anjou): Non, la nouvelle loi, le moyen de
preuve qui n'était pas terminé.
M. Rémillard: L'ancienne. Regardez. C'est parce que les
instances en cours demeurent régies par la loi qui est ancienne.
Ça, c'est le principe.
M. Bélanger (Anjou): Oui. Il y a exception.
M. Rémillard: Mais, en ce qui regarde la preuve ou la
procédure...
M. Bélanger (Anjou): Oui.
M. Rémillard: ...à ce moment-là, c'est une
exception.
M. Bélanger (Anjou): C'est la loi nouvelle.
M. Rémillard: C'est la loi nouvelle. Mais, si on est en
période de délibéré, donc, la preuve et la
procédure ne sont plus en cause. Donc, les instances en cours demeurent
régies par la loi ancienne. C'est la loi ancienne qui s'applique. Mais,
s'il y avait une demande, une requête pour la réouverture, on
retombe dans l'exception et là ça pourrait être...
M. Bélanger (Anjou): La nouvelle loi qui
s'appliquerait.
M. Rémillard: ...donc, la nouvelle loi qui s'applique.
O.K.?
M. Bélanger (Anjou): Parfait! Je vous remercie.
Le Président (M. LeSage): Alors, si vous le permettez,
juste une rectification pour les fins de l'enregistrement du Journal des
débats. À la lecture de l'article 9, tel qu'amendé par
le ministre, j'ai peut-être mal compris, remarquez. Lors des commentaires
du ministre, on parlait d'exemption alors que le texte doit se lire comme
étant «exception», à chaque endroit où le
ministre a mentionné «exemption». J'ai peut-être mal
compris, là.
M. Rémillard: Vous n'avez pas mal compris. C'est une
erreur que j'ai faite. M. le Président, à vous, je peux vous dire
merci de corriger mes erreurs.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le ministre. M. le
député de Westmount.
M. Holden: Vous avez des oreilles ouvertes, M. le
Président. La Chambre des notaires, qui n'est pas reconnue
nécessairement pour sa connaissance des instances devant les tribunaux,
a fait une critique de l'article 9 où elle recommande simplement que les
demandes en justice présentées avant l'entrée en vigueur
de la loi nouvelle soient régies par la loi ancienne. C'était
catégorique. Je comprends que, dans l'amendement, vous essayez de faire
le juste équilibre, n'est-ce pas, mais vous agissez un peu à
l'en-contre de règles, quand il s'agit de
rétroactivité.
M. Rémillard: Oui, en fait, parce qu'il y a des
exceptions. L'exception, on s'est dit: Dans un cas de procédure et dans
un cas, donc, de preuve, est-ce qu'il n'est pas équitable qu'on puisse
quand même se référer à la loi nouvelle, puisque la
procédure est en cause et que la loi nouvelle, elfe est là pour
gouverner la situation?
M. Holden: Je suppose...
M. Rémillard: Alors, c'est les mêmes principes qu'on
a discutés, tout à l'heure, dans notre séance de travail.
C'est exactement la même situation.
M. Holden: Je suppose que ça dépend. Si j'ai bien
compris, à partir du moment où le bref a été
émis, c'est la date qu'on fixe pour déterminer quelle loi
s'applique, parce qu'on parle d'instance en cours. Ça ne veut pas dire
qu'on est devant le tribunal. Aussitôt qu'un bref est émis, c'est
une instance devant la cour.
M. Rémillard: La cour est saisie.
M. Holden: C'est ça.
M. Rémillard: La cour est saisie comment? Elle est saisie
par le bref.
M. Holden: Ça peut être il y a cinq ans...
M. Rémillard: Oui.
M. Holden: ...que le bref a été émis...
M. Rémillard: Mais la cause...
M. Holden: ...et la cause est pendante...
M. Rémillard: Oui.
M. Holden: ...et ça peut prendre cinq autres années
avant que...
M. Rémillard: Oui. C'est pour ça qu'on a mis cette
disposition d'équité.
M. Holden: Alors, ça couvre, d'après vous, les
objections des notaires.
M. Rémillard: Oui.
M. Holden: Et le Barreau aussi avait des réticences
à cet égard, mais, si j'ai bien compris, ça, c'est la
version finale du législateur.
Le Président (M. LeSage): Ça va, M. le
député de Westmount. Est-ce que l'amendement à l'article 9
est adopté?
M. Holden: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que l'article 9, tel
qu'amendé, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. LeSage): Alors, compte tenu de l'heure,
M. le ministre, je crois qu'il est dans l'ordre d'ajourner.
M. Rémillard: J'aurais le temps de lire 10, en tout
cas...
Le Président (M. LeSage): Bien, si vous voulez, M. le
ministre...
M. Rémillard: ...si vous le permettez, M. le
Président.
Le Président (M. LeSage): ...j'appelle l'article 10. On a
trois minutes.
M. Rémillard: Parce que j'ai un amendement, M. le
Président. Je vous le dis rapidement: L'article 10 est modifié
par la suppression du premier alinéa.
M. le Président, cet amendement découle de celui qui est
proposé à l'article 9, lequel précise désormais,
à la fin du second alinéa, que la loi nouvelle est applicable
à la procédure.
En raison de cet amendement, l'article 10 se lirait comme suit:
«Les demandes introduites suivant la procédure ordinaire en
première instance sont continuées conformément aux
règles nouvelles applicables à une telle procédure,
même lorsque la loi nouvelle prévoit que de telles demandes seront
désormais introduites par voie de requête, sauf aux parties
à convenir de procéder suivant la voie nouvelle.»
Voilà, M. le Président.
Le Président (M. LeSage): Est-ce qu'il y a des
commentaires à l'amendement propose à l'article 10? M. le
député de Westmount.
M. Holden: Oui, M. le Président. J'ai moi-même
rédigé un amendement que je veux montrer au ministre. J'ai
rédigé un amendement. J'avais mentionné, dans mon
intervention à l'Assemblée, que j'aurais peut-être un
amendement. Je ne l'ai pas avec moi. J'aimerais qu'on suspende l'article 10
jusqu'à demain pour que je puisse vous montrer l'amendement que j'ai
préparé.
M. Rémillard: Très bien, M. le
Président.
Le Président (M. LeSage): Alors, compte tenu de l'heure,
j'ajourne les travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à minuit)