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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le jeudi 19 mars 1987 - Vol. 29 N° 45

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi 104 - Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse


Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je déclare donc ouverte cette séance de la commission permanente des institutions de l'Assemblée nationale. Je rappellerais notre mandat qui est de poursuivre la consultation générale sur le projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse. Cette consultation a commencé il y a déjà une quinzaine de jours et nous en sommes à notre septième journée d'audition des groupes qui ont décidé de nous faire connaître leur point de vue sur ce projet de loi.

Je demanderais à la secrétaire, Me Giguère, de bien vouloir annoncer les remplacements.

Le Secrétaire: M. Johnson (Anjou) est remplacé par Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Kehoe (Chapleau) par M. Hamel (Sherbrooke), M. Laporte (Sainte-Marie) par M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata) et M. Vallières (Richmond) par M. Thérien (Rousseau).

Le Président (M. Filion): Je rappellerais rapidement notre ordre du jour pour aujourd'hui. Nous avons devant nous le Conseil général des élèves de la commission scolaire catholique de Sherbrooke. Bonjourl Après, nous entendrons le Club de placement de Sherbrooke, centre de recherche d'emploi pour jeunes adultes. Après la suspension de nos travaux, à 15 heures, le Regroupement régional des maisons de jeunes de l'Estrie; à 16 heures, la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie Inc.; à 17 heures, les Productions québécoises Pro-Art et, après le souper, à 20 heures, la Table de concertation du Saguenay--Lac-Saint-Jean et, à 21 heures, l'Association nationale des étudiants du Québec.

Je voudrais souhaiter la bienvenue aux membres de la commission, ainsi qu'aux représentants des organismes que nous avons devant nous. Je remarque que les représentants du Conseil régional des élèves de la commission scolaire catholique de Sherbrooke ont déjà pris place à la table des invités. Je leur demanderais, à la fois pour le bénéfice des membres de cette commission, ainsi que pour le bénéfice du Journal des débats - car nos débats sont enregistrés - de bien vouloir s'identifier.

Conseil général des élèves

de la commission scalaire catholique

de Sherbrooke

Mlle Moore (Marie-Hélène): Bonjour! Je suis Marie-Hélène Moore, 17 ans, je suis représentante du secondaire V à l'école Montcalm.

M. Méhu (Marc-Olivier): Marc-Olivier Méhu, j'ai 12 ans, je suis le représentant du secondaire I à l'école Mitchell.

M. Dubois (François): Je suis François

Dubois, j'ai 17 ans, je suis conseiller au conseil étudiant de l'école de métiers Camirand, à Sherbrooke.

M. Nelisse (Nicolas): Bonjour! Je suis Nicolas Nelisse, j'ai 16 ans, je suis président de l'école Le Triolet, à Sherbrooke.

Mlle Lefebvre (Josée): Je m'appelle Josée Lefebvre, je suis étudiante à la polyvalente Le Phare et j'ai 16 ans.

Le Président (M. Filion): Pour le bénéfice du Journal des débats, ce sont uniquement les personnes appelées à intervenir qui doivent s'identifier. Je dois comprendre qu'il y a cinq intervenants dans votre groupe.

Une voix: On va peut-être intervenir après.

Le Président (M. Filion): D'accord. Si vous intervenez après, vous pourrez vous identifier au moment de votre intervention. Pour le moment, l'identification est donc satisfaisante pour les besoins de la commission.

Bienvenue. Malgré le décorum de cet édifice et de cette salle de commissions, soyez très à l'aise ici. Les parlementaires sont présents pour recueillir votre point de vue. Le temps alloué est d'une heure, partagée de la façon suivante: 20 minutes pour la présentation de votre mémoire et 40 minutes qui sont destinées à une période d'échanges avec les parlementaires. Évidemment, si vous prenez moins de temps pour présenter votre mémoire, cela donne plus de temps pour les échanges. En ce sens-là, soyez très à l'aise. Je vous inviterais

donc à bien vouloir présenter le mémoire que vous avez préparé, mais que les parlementaires ont déjà lu. Je cède donc la parole à mademoiselle...

Mlle Moore: Marie-Hélène Moore.

Le Président (M. Filion): Mlle Moore, allez-y.

Mlle Moore: M. le Président, mesdames et messieurs les ministres et députés, le présent groupe, qui s'est donné comme objectif de présenter un mémoire dans le cadre des auditions sur le projet de loi 104, a été constitué à partir du Conseil général des élèves de la commission scolaire catholique de Sherbrooke. Ainsi donc, la commission scolaire, dont notre groupe est issu, est une commission scolaire nouvellement intégrée qui compte 20 000 élèves et où sont regroupés les secteurs du primaire, du secondaire et de l'éducation des adultes. Le niveau secondaire dénombre 7000 jeunes répartis dans près de dix écoles secondaires ou polyvalentes.

La délégation de la CSCS est composée de représentants et de représentantes du conseil général des élèves. Ces jeunes proviennent à la fois du 1er cycle du secondaire (secondaire I et II) et du 2e cycle du secondaire (secondaire III, IV et V).

Notre présence s'explique par le fait que l'objet de la consultation, la création d'un Conseil permanent de la jeunesse, nous paraît des plus pertinents dans ce contexte de la nécessité d'une insertion professionnelle, sociale et politique des jeunes.

Mlle Croteau (Pascale): Bonjour! Pascale Croteau. J'ai 16 ans. Je suis représentante du secondaire IV à l'école Montcalm.

La position du Conseil général des élèves de la commission scolaire catholique de Sherbrooke. D'entrée de jeu, nous voulons vous communiquer les sentiments qui nous animent depuis le moment où nous avons pris connaissance du fait que le gouvernement avait déposé à l'Assemblée nationale un projet de loi spécifique à la jeunesse et qu'il était prêt à tenir des audiences publiques à ce sujet.

C'est donc à la fois avec crainte à cause des délais très restreints de préparation et d'envoi des mémoires, mais également avec beaucoup d'espoir que nous entendons faire connaître le point de vue des jeunes du secteur de l'éducation et ce, en rapport avec le projet de loi 104.

Je cède maintenant la parole à Marc-Olivier Méhu, qui vous présentera la première partie du mémoire.

M. Méhu: Nous avons remarqué que ce projet de loi reconnaît officiellement le groupe jeunesse, mais ne tient pas toujours compte de ce que nous sommes et de ce que nous vivons en régions.

Ce que nous comprenons du projet de loi, c'est qu'il veut dire à la population du Québec que ta jeunesse occupe une place importante et qu'il devenait très urgent qu'elle ait une présence plus marquée auprès des décideurs.

Un conseil de la jeunesse fait partie de ces mesures spécifiques qui permettraient aux jeunes d'exercer pleinement leurs droits politiques, économiques et sociaux. Nous sommes donc d'accord avec la création d'un conseil de la jeunesse qui pourra exprimer nos préoccupations et nos projets non seulement au gouvernement du Québec, mais aussi à l'ensemble de la population.

Nous sommes convaincus que la jeunesse, ça commence à 12 ans et non pas seulement à 15 ans. En effet, dès cet âge, nous nous retrouvons au secondaire pour passer progressivement de l'enfance à l'âge adulte, de la dépendance de nos parents à l'autonomie. Bien sûr, ce passaqe est long et se fait à l'aide d'apprentissages de toutes sortes: pédagogiques, sociaux, affectifs, etc. C'est aussi à cet âge que nous commençons à nous intéresser à la vie sociale et politique. C'est important que vous reconnaissiez ce fait, car si vous mettez de l'avant d'autres propositions politiques se rapportant à la jeunesse, vous devrez tenir compte de nous, les 12-15 ans.

Nous voulons un conseil qui soit représentatif de toutes les jeunesses. Il y a non seulement plusieurs groupes d'âge dans la jeunesse, mais aussi de nombreux styles de jeunes. Vous n'avez qu'à regarder ou à visiter nos écoles pour vous en apercevoir. Les besoins sont donc très différents.

D'autre part, les 12-15 ans, les 15-20 ans et les 20-30 ans sont animés de projets, de valeurs et de divers points de vue qui, loin de se ressembler, vont jusqu'à se contredire parfois. Les jeunes de 12-15 ans ont besoin d'un très bon soutien dans leur formation, tandis que les plus âgés ont aussi besoin d'un bon soutien dans leur formation, mais ils se préoccupent plus de leur avenir professionnel.

Nous nous sommes rendu compte, en lisant ce projet de loi, qu'une fois mis en place, le Conseil permanent de la jeunesse serait très loin de notre vie de tous les jours, à nous, les jeunes qui vivons à l'extérieur de Québec. Comme nous voulons vraiment que ce conseil représente les intérêts de tous les jeunes Québécois, nous vous demandons de prévoir dans ce conseil des divisions régionales qui, elles, délégueront l'un de leurs membres au conseil permanent. De cette façon, même en régions, la population saura qu'il y a des jeunes qui sont impliqués dans leur milieu: culture,

éducation, social, loisirs, économie-emploi, etc.

Ces conseils régionaux seraient en quelque sorte l'équivalent d'un collège électoral régional qui pourrait déléguer des personnes au Conseil permanent de la jeunesse. Ces mêmes conseils régionaux seraient alors en mesure d'informer adéquatement le conseil sur tous les aspects relatifs aux problèmes que rencontrent les jeunes d'aujourd'hui. Ils apporteraient, de plus, une vision régionale dont on pourrait tenir compte dans les avis à émettre au gouvernement. Il est important de dire que, en procédant ainsi, nous serons sûrs qu'il y aura au moins un jeune de chaque région dans le conseil permanent.

Mlle Croteau: Rappel des recommandations: 1° Prendre en considération le fait que la jeunesse, ça commence à 12 ans et qu'il faudra prévoir donner une place et du support pour ce groupe d'âge des 12-15 ans. 2° Mettre sur pied des conseils régionaux qui seraient l'équivalent d'une collège électoral régional et qui pourraient alimenter le Conseil permanent de la jeunesse sur toute question relative à la problématique jeunesse grâce à la désignation de délégués régionaux.

Place à François Dubois qui vous présentera la deuxième partie du mémoire.

M. Dubois (François): Merci. La deuxième partie: un projet de loi qui risque d'encourager la participation de quelques jeunes au détriment de la démocratie régionale si des correctifs ne sont pas apportés.

La première section: non à une participation sans influence. Nous savons qu'au plan de la démocratie scolaire ou gouvernementale la participation est la solution proposée pour diminuer, en quelque sorte, la distance entre l'école ou l'État et sa clientèle.

Toutefois, quand les jeunes investissent des énergies et du temps dans un conseil étudiant, par exemple, c'est parce qu'ils espèrent changer des choses ou améliorer certains aspects de la problématique jeunesse et ce, au nom des jeunes qu'ils représentent. C'est le même phénomène qui joue ici dans le cas du Conseil permanent de la jeunesse. Les jeunes le voudraient plus influent comme le sont le Conseil du statut de la femme ou le Conseil supérieur de l'éducation. Mais selon nous, c'est impossible sans un ancrage régional.

La mise sur pied de conseils régionaux aurait pour effet d'empêcher les idées, les projets et les revendications des jeunes de se perdre en chemin et de passer par des chemins sinueux avant d'arriver au conseil permanent. Nous avons peur que quelque chose se perde en chemin et pour que les jeunes soient plus confortables face au conseil permanent, qu'il soit crédible à leurs yeux, il faut prendre en considération les réalités régionales. Le tableau I qui est à la page suivante - si vous voulez aussi suivre -explique le choix des membres et la dynamique de la structure. Les conseils régionaux pourraient être formés comme on l'avait dit, c'est-à-dire que ce serait proposé soit par le Secrétariat à la jeunesse ou par le ministre; c'est une première possibilité qu'on pourrait regarder. La deuxième qui, pour nous, est prépondérante, c'est vraiment le conseil régional qui formerait un genre de collège électoral, comme c'est dit dans le projet de loi, sauf qu'au lieu d'être à Québec, vraiment loin de nous, ce serait en régions.

La dynamique de la structure, c'est que les conseils régionaux pourraient mettre sur pied des dossiers en fin de compte et les passer au Conseil permanent de la jeunesse qui pourrait les soumettre aux comités spéciaux ou au ministre concerné.

Le Président (M. Filion): Excusez-moi de vous interrompre. Vous faites allusion au tableau I qui est contenu à la page 10 de votre mémoire, c'est bien cela?

M. Dubois (François): Oui.

Le Président (M. Filion): Merci. Vous pouvez continuer.

Mlle Croteau: Rappel de la recommandation. Une participation efficace des jeunes à partir de la filière démocratique des conseils régionaux et du Conseil permanent de la jeunesse.

M. Dubois (François): La deuxième section: un lieu démocratique crédible et légitime. Si le gouvernement veut que le conseil de la jeunesse soit crédible et légitime aux yeux des jeunes, il lui faudra penser à implanter une double structure à la fois nationale et régionale. Cela signifie la mise en place d'un conseil permanent de la jeunesse chargé d'aviser le ministre sur toute question relative à la jeunesse et la mise en place de conseils régionaux soucieux de refléter le point de vue de la problématique jeunesse en régions.

Par ailleurs, il est bien connu que les jeunes craignent d'être récupérés et cela, par tous les niveaux de pouvoir. Aussi, pour éviter la méfiance, les candidats et candidates habilités à faire partie du conseil de la jeunesse devraient, en toute logique, provenir des conseils régionaux et ils devraient compter sur l'apport du Secrétariat à la jeunesse pour assurer une coordination interministérielle.

Le tableau qui suit, le tableau 2...

Une voix: À la page?

M. Dubois (François): À la page 12.

Le Président (M. Filion): Entre les pages 11 et 12 du mémoire déposé par le conseil.

M. Dubois (François): Alors, la double structure dont je parlais, ce serait les conseils régionaux qui auraient directement affaire avec le Conseil permanent de la jeunesse. Le Secrétariat à la jeunesse deviendrait le secrétariat à la coordination interministérielle, vu que le secrétariat est plus dans la machine gouvernementale que nous, les jeunes en régions. Le secrétariat pousserait les dossiers que les conseils régionaux donnent au conseil permanent. Vraiment, il les pousserait et s'assurerait que le dossier est pris au sérieux, est pris en main et que le premier ministre fait vraiment son devoir de le regarder et de l'étudier. Le même secrétariat donnerait suite aux développements. Il donnerait des renseignements aux répondants régionaux qui, eux, seraient en contact avec les conseils régionaux.

La troisième section: un espace permanent pour s'exprimer. Les conseils régionaux constitueraient, à n'en pas douter, la base d'un collège électoral régional qui serait capable de propulser les jeunes aux niveaux national et régional. Le choix des membres du conseil s'effectuerait ainsi à partir des conseils régionaux et consacrerait le principe d'une participation de jeunes continuellement enracinés dans leurs milieux respectifs.

Ce serait des plus respectueux de la filière démocratique des jeunes, soucieux de sauvegarder leurs acquis régionaux - les bureaux régionaux du Secrétariat à la jeunesse, par exemple - tout en ayant une tribune nationale qui est le Conseil permanent de la jeunesse.

Mlle Croteau: Rappel des recommandations. Implantation d'une double structure du genre d'un organisme conseil doublé d'un organisme chargé de la coordination interministérielle et, deuxièmement, un collège électoral issu des conseils régionaux.

Pour faire suite, écoutons maintenant Nicolas Nelisse qui vous fera part de la troisième partie de notre mémoire.

M. Nelisse: Merci. En premier lieu, j'aimerais m'excuser, car, pour l'instant, je n'ai pas mes lunettes. Donc, si vous entendez un léger bafouillage ou quelques erreurs, je vous prierais de m'excuser et de prendre votre mal en patience!

M. Gratton: Vous êtes comme les députés et les ministres, à ce moment-là!

M. Nelisse: Je vais présenter la troisième partie: un projet de loi qui donne à la jeunesse des outils efficaces ou illusoires pour intervenir ou interpeller, dépendamment du statut et du mandat dévolus au Conseil permanent de la jeunesse. Comme premier point, c'est l'influence du mandat. En ce qui concerne l'attribution des fonctions et des pouvoirs du conseil, le mandat juridique est large, mais peu influent. Nous pensons qu'il est plus illusoire que réel. Nous pensons, d'ailleurs, que les pouvoirs du conseil varient directement selon le bon vouloir des ministériels.

On peut constater, au tableau III, à ta page suivante, que, dans le cas du Conseil du statut de la femme et du Conseil supérieur de l'éducation, l'impératif "doit" est employé pour en définir les fonctions, tandis que son homologue pour le Conseil permanent de la jeunesse est le verbe "peut". Nous pensons que cela diminue considérablement les pouvoirs du conseil envers le gouvernement.

D'ailleurs, l'expression "s'il y a lieu", au dernier paragraphe de cette même page, diminue considérablement l'influence dudit mandat. C'est, d'ailleurs, par un parallèle entre les trois conseils inscrits ici qu'on peut s'apercevoir de la piètre performance des pouvoirs du conseil par rapport au gouvernement.

Comme deuxième point, la nécessité d'un budget suffisant. Nous pensons qu'un budget suffisant serait primordial pour le bon fonctionnement du Conseil permanent de la jeunesse. Comment, d'ailleurs, un bon organisme peut-il fonctionner sans un bon budget? Une marge financière suffisante lui permettrait de mettre sur pied des qroupes de recherche qui pourraient aller puiser en régions, même éloignées, les différentes attentes et les besoins des jeunes du Québec. (10 h 30)

Pour ce faire, des recherchistes compétents seraient engagés et des conseillers juridiques qui pourraient faire valoir les attentes des jeunes auprès des autorités gouvernementales, car un jeune est beaucoup moins considéré devant un adulte qu'un adulte lui-même. C'est pour cela que le chiffre approximatif de ] 500 000 $ serait demandé, ce qui me semble des plus respectables. D'ailleurs, le Québec ne compte-t-tl pas 1 700 000 jeunes?

Comme dernier point: un conseil "aviseur" qui, en collaboration avec le Secrétariat à la jeunesse, veille à l'application des recommandations à Québec et en régions. Nous pensons que la double structure expliquée par François précédemment donnerait aux jeunes une voix de plus pour se faire entendre aux autorités gouvernementales si, bien sûr, ils en connaissent l'existence. Rappelons les mots

de l'humoriste Jean-Marc Chaput sur les jeunes et le marché du travail, citation qui peut aussi bien s'appliquer à l'impact du conseil, tel que présenté, sur les jeunes. "Le marché du travail ressemble à une parade: 5 % des gens y participent; 15 % la regardent passer et 80 % ne savent même pas qu'il y a une parade," Nous pensons que, si on n'implante pas une double structure, les jeunes n'en connaîtront tout simplement pas l'existence, tandis que, si on en implante une, ils vont être beaucoup plus informés en régions et cela va les inciter à participer. Tout cela, bien sûr, faciliterait l'acheminement des recommandations des jeunes jusqu'au gouvernement du Québec.

Rappelons, d'ailleurs, que les jeunes veulent s'impliquer eux-mêmes dans la résolution de leur propre problématique.

Mlle Croteau: Rappel des recommandations: un mandat fort et influent, la nécessité d'un budget suffisant et l'établissement d'une double structure devant assurer le suivi des recommandations à Québec et en régions. Nous vous remercions de votre attention.

Le Président (M. Filion): Je remercie Pascale, Marie-Hélène, Marc-Olivier, François et Nicolas. Je voudrais, d'abord, vous féliciter à la fois pour l'excellence du contenu de votre mémoire et pour la qualité remarquable de la présentation que vous en avez faite autant par écrit que verbalement, ici ce matin. On peut dire que vous êtes dans la parade en ce qui concerne la jeunesse au Québec. Soyez en sûrs.

Sans plus tarder, je passe la parole aux parlementaires qui amorceront avec vous les échanges sur votre mémoire.

M. le député de Sherbrooke.

M. Hamel: Merci, M. le Président. Bonjour et félicitations pour l'excellence à la fois de votre mémoire et de la présentation que vous avez faite. Il est important de noter aussi que vous êtes le premier groupe du milieu de l'éducation à venir nous faire des représentations en commission parlementaire sur ce projet de loi. Avec votre permission, j'enverrais votre mémoire avec une note au ministre de l'Éducation, M. Ryan, pour lui signaler votre intérêt à tout ce secteur.

Vous avez très bien saisi l'objectif du projet de loi, soit que la jeunesse, c'est très important. Il faut qu'elle soit présente auprès des décideurs. Je note aussi, évidemment, avec satisfaction que vous êtes d'accord avec cette création d'un Conseil permanent de la jeunesse.

Vous avez soulevé, dans votre mémoire trois points que vous considérez comme importants: la représentativité des 12-15 ans, la représentativité du milieu de l'éducation et aussi des conseils régionaux, tout l'aspect réqional.

Concernant la problématique des 12-15 ans, antérieurement d'autres groupes sont venus nous dire que 15 ans, c'était déjà un peu jeune; vous nous dites que vous devriez être là. On est d'accord avec vous que la problématique des 12-15 ans est très importante, mais est-ce que l'éligibilité formelle de ce groupe d'âge répondrait au but que vous recherchez? Pouvez-vous expliciter cela davantage?

M. Méhu: On va dire pourquoi on aimerait que la jeunesse commence à 12 ans. C'est parce qu'on commence à devenir plus autonome vers cet âge-là; on a plus de droits qu'au primaire, plus de devoirs aussi. Dès cet âge, on commence à passer graduellement de l'enfance à l'âge adulte. On est aussi dans les conseils étudiants. Il y a des conseils étudiants qui sont offerts déjà à 12 ans. Si on n'avait pas assez de maturité pour cela, on ne serait pas dedans.

M. Dubois (François): Si je comprends bien la question vous demandez ceci: Si le conseil permanent était vraiment comme il est dit dans le projet de loi, les 12 ans auraient-ils moins d'influence que les 30 ans ou quelque chose comme cela, s'il y aurait une perte d'influence, en fin de compte?

M. Hamel: Comment voyez-vous cette représentativité des 12 ans? Comment, dans les faits, le groupe des 12-15 ans pourrait-il être présent?

M. Dubois (François): Nous y avons pensé. Ce serait par, justement, la formation de conseils régionaux. Dans les conseils régionaux, il y aurait, justement, les 12-15 ans qui seraient là. Ce serait moins épeurant pour eux que d'aller dans des grands conseils et ils pourraient quand même faire valoir leur point de vue dans ces conseils. Ce ne serait pas perdu, comme s'il n'y avait pas de conseils régionaux.

M. Hamel: Concernant, justement, l'implantation de ces conseils régionaux, si on inscrit une telle structure dans le projet de loi, est-ce qu'il n'y a pas risque d'uniformité pour toutes les régions du Québec?

M. Méhu: Les régions n'ont pas toutes les mêmes problèmes, ce sont des problèmes diversifiés. Ce n'est pas du tout la même chose dans chaque réqion. Il n'y aura pas les mêmes problèmes dans la Beauce que dans l'Estrie ou dans les Laurentides.

M. Hamel: C'est très juste et c'est pour cela que, si on inscrivait dans la loi les conseils régionaux, il y aurait danger

d'uniformiser par une structure la représentativité. Les différents secteurs, par exemple, loisirs, éducation et autres, seraient-ils représentés adéquatement dans cette structure que vous souhaitez régionale? Avez-vous l'impression qu'ils seraient représentés? N'y aurait-il pas danger, par exemple, qu'on retrouve uniquement des gens des loisirs et pas les autres?

Mlle Moore: C'est peut-être ce qui arriverait avec un collège électoral tel que proposé dans le projet de loi. C'est ce que l'on craint. Les conseils régionaux seraient formés à l'aide de tous les organismes jeunesse de tous les différents secteurs et de tous les différents groupes d'âge des régions. C'est ce qui donnerait une meilleure représentation de toute la jeunesse de chaque région.

M. Hamel: II n'y a rien qui empêche une région, si elle est très dynamique, de s'organiser et d'avoir sa représentativité aussi, comme on l'a prouvé déjà.

Mlle Moore: Nous craignons, nous, que le secteur de l'éducation ne soit pas représenté, ait une moins grande chance d'être représenté dans le collège électoral et encore une moins grande dans le Conseil permanent de la jeunesse.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie. Merci, M. le député de Sherbrooke. Mme la députée de Chicoutimi, porte-parole de l'Opposition.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais, mesdames et messieurs, vous souhaiter la bienvenue, au nom de l'Opposition. Je dois dire que j'ai l'impression que vous avez impressionné fort votre député parce que les réponses sont fort pertinentes et très justes. Je voudrais vous féliciter pour la qualité de votre réflexion, vous féliciter pour être venus nous présenter un mémoire et vous dire que, dans toute occasion, lorsqu'on ne répond pas à un appel de venir se présenter devant une commission parlementaire ou encore de réagir à un projet de loi, on laisse passer une occasion d'exprimer sa voix, d'exprimer ses besoins, d'exprimer ses attentes. Quand on ne vient pas parler, c'est comme à l'école: il y a quelqu'un d'autre qui parle à votre place. C'est pourquoi c'est important que vous soyez là aujourd'hui et je pense que, comme expérience, ce doit être pour vous tout à fait exceptionnel. Je suis d'avance assurée que les personnes que je vois ici, on les reverra probablement dans dix ans, quelque part, en fonction ici, en cette Chambre. Je prétends que l'école est bonne, mais c'est parmi les meilleurs, l'exercice que vous êtes en train de faire.

Votre mémoire est intéressant à plusieurs points. Je vais reprendre, en poursuivant les questions du député de Sherbrooke, celui touchant l'âge. Vous nous dites qu'il faudrait vraiment qu'on puisse aussi reconnaître que la jeunesse, cela commence à 12 ans. Il y en a d'autres qui sont venus nous dire; La jeunesse, ça se termine à 35 ans. Je disais en boutade tantôt: De 12 à 35 ans, on risque de trouver la mère et son enfant, le père et son fils au conseil. C'est très possible, car vous avez peut-être des parents qui ont à peu près cet âge.

Au-delà de cela, j'estime qu'effectivement, mais je ne sais pas encore trop comment aborder cette question, vous avez raison de dire que de plus en plus l'adolescence arrive vite et que les jeunes sont matures beaucoup plus tôt. Il nous faut le reconnaître et en on a vu tout à l'heure un exemple frappant avec la réflexion et la qualité des réponses de Marc-Olivier.

Ce qu'il faudrait constater, c'est que, si on étale trop les objets de réflexion ou la couche de population sur laquelle devra porter la réflexion du conseil, de 12 à 35 ans, on se retrouve avec une gamme quasi infinie de problèmes qui vont aller de la jeune mère chef de famille à celui qui est décrocheur, à celui qui est étudiant, à celui qui est sans emploi. Cela pose un certain nombre de difficultés. Par ailleurs, je trouve cela intéressant.

Mais, selon vous, cela permettrait aux jeunes de cet âge d'avoir accès aux conseils régionaux. J'aimerais mieux comprendre la structure que vous nous proposez. Vous proposez des conseils régionaux, un collège électoral et un conseil permanent ou est-ce que vous proposez seulement des conseils régionaux et un conseil permanent?

M. Dubois (François): C'est cela. Le collège électoral, finalement, se trouverait à être amené ou formé par les conseils régionaux. C'est que chaque conseil régional nommerait une personne qui représenterait, justement, cette région. Celle-ci siégerait au conseil permanent.

Mme Blackburn: Au conseil permanent, d'accord.

M. Dubois (François): Au lieu d'avoir le collège électoral formé...

Mme Blackburn: Somme toute, il n'y aurait pas de collège électoral; on passerait directement du régional au national.

M. Dubois (François): C'est cela.

Mme Blackburn: Qui nommerait les membres des conseils régionaux? Quel serait le nombre de membres?

Mlle Moore: Premièrement, les représentants issus des conseils régionaux seraient élus dans leurs conseils respectifs. On n'avait pas vraiment pensé à un nombre exact de représentants par région, mais je crois que l'on pourrait probablement s'entendre pour que cela fasse - je ne sais pas - au moins deux représentants par région pour qu'on soit bien assurés, comme je le disais tantôt, que tous les secteurs et les groupes d'âge également soient le mieux représentés possible.

Mme Blackburn: Mais dans le conseil régional de votre grande région, qui représenterait les élèves du secondaire, par exemple? Est-ce qu'il y aurait un, deux ou trois représentants? Comment éliriez-vous votre représentant au conseil régional? Par école? Par commission scolaire? Par polyvalente?

M. Nelisse: C'est-à-dire que ce serait, comme c'est présenté dans le projet de loi, le premier ministre qui déciderait à partir des candidatures des différentes personnes, tout en choisissant, bien sûr, une personne de chacun des secteurs: l'éducation, les jeunes chômeurs, etc. Le premier ministre choisirait lui-même une personne de chacun de ces secteurs pour les conseils régionaux. Ensuite, à l'intérieur des conseils, on désignerait une ou deux personnes pour le conseil permanent.

Mme Blackburn: D'accord.

Mlle Croteau: Aussi, le conseil général des élèves pourrait choisir un représentant qui pourrait aller les représenter.

Mme Blackburn: Je vais retrouver ma question, un instant. Donc, les conseils régionaux auraient comme responsabilités, entre autres, de mieux présenter à la structure nationale, le conseil permanent, les différents problèmes vécus dans la région par les jeunes de tous les groupes et de tous les âges. Bien. Donc, c'est le Conseil permanent de la jeunesse qui viendrait arbitrer les dossiers entre toutes les régions. D'accord.

Mlle Rouillard (Lise): J'aimerais revenir sur la question de la représentativité. Je ne suis pas certaine que c'était très clair pour les jeunes.

Mme Blackburn: Oui.

Mlle Rouillard: Je pense qu'au niveau d'une représentativité scolaire, par exemple...

Le Président (M. Marcil): Excusez-moi, madame. Si vous voulez vous approcher au microphone, parce qu'en étant loin comme cela... Si vous voulez vous identifier également pour le Journal des débats. Assoyez- vous tout près de M. Dauphin...

Mlle Rouillard: Non, cela va. Lise Rouillard.

Le Président (M. Marcil): Assoyez-vous tout près de M. le député de Marquette. (10 h 45)

Mlle Rouillard: Je voulais dire que, quant à la représentativité locale, dans le milieu scolaire, c'est assez facile pour les jeunes de l'établir, entre autres, parce qu'il existe déjà la possibilité d'un regroupement de conseils d'école, c'est ce qu'ils appellent leur conseil général, d'accord? C'est un ou deux représentants de chacun de ces conseils d'école qui siègent au conseil général. Ce même conseil général peut en déléguer un; autrement dit, ce serait le président du conseil générai, entre autres, comme exemple, qui pourait être délégué et, dans le fond, c'est la même formule qui peut être appliquée aux autres milieux comme le loisir et le culturel.

Mme Blackburn: Mais il y en aurait donc un par commission scolaire parce que, sur le grand territoire, vous avez plusieurs commissions scolaires.

Mlle Rouillard: À ce sujet, je me dis qu'il y a certainement des possibilités de s'entendre.

Mme Blackburn: Là, cela nous donne une idée un peu plus juste de l'importance que pourrait avoir le conseil régional.

Mlle Rouillard: Oui... Mme Blackburn: D'accord.

Mlle Rouillard: ...parce que le conseil régional a déjà existé auparavant, évidemment, au niveau de la défunte commission scolaire régionale; il existait pour l'ensemble du territoire. Alors, ce ne serait pas nécessairement plus compliqué de le faire fonctionner de cette façon-là si c'était plus facile d'avoir une représentativité ainsi. Merci.

Mme Blackburn: II y avait le choix des membres, je pense que cela va. Si je comprends bien les propos de Mme Rouillard, c'est que le choix des personnes ne serait plus fait par le gouvernement, mais davantage par les pairs, par les étudiants eux-mêmes pour les étudiants, par les jeunes chômeurs et ainsi de suite.

J'aimerais que vous me parliez un peu de votre situation d'étudiants. On a profité, quand même, de la présence de différents organismes, ici à cette commission, pour qu'ils nous parlent non seulement des problèmes, mais de la situation, du vécu des

jeunes dans leur milieu. Pourriez-vous m'identifier, peut-être à tour de rôle ou comme vous le voulez, selon les règles que vous avez certainement établies, ce que vous estimez comme étant le meilleur à l'école par rapport à ce que vous avez et ce qui pose le plus de difficulté? On n'est pas sans savoir qu'un conseil permanent, par exemple, devrait examiner toutes les questions touchant le décrochage, les échecs, les abandons, la mésadaptation scolaire, les difficultés d'apprentissage et ainsi de suite. On peut tirer avantage de ce qui se fait de bien dans un coin pour voir si on ne pourrait pas aussi l'appliquer ailleurs. J'imagine que le conseil permanent pourrait aussi faire cela, comme le fait le conseil supérieur. À présent, j'aimerais que vous me parliez un peu de votre école.

Mlle Boisclair (Isabelle): Je m'appelle Isabelle Boisclair, je viens de la polyvalente Le Ber, de Sherbrooke. J'ai 16 ans. Je travaille au service de prévention du suicide de mon école. Cela peut peut-être vous donner une idée des problèmes que les étudiants peuvent vivre. Le suicide chez les jeunes est très élevé. Cela diffère avec les régions. Si on parle du Saguenay—Lac-Saint-Jean, le taux de suicide est quatre fois inférieur à celui de l'Abitibi-Témiscamingue. C'est pour cela que, dans nos écoles, il y a déjà des structures d'implantées pour régler un peu ces problèmes, sauf que c'est d'une ampleur provinciale. Donc, on pense que des problèmes comme le suicide auraient leur place dans des discussions au sein du Conseil permanent de la jeunesse, entre autres.

Mme Blackburn: Y a-t-il dans votre région une situation particulière qui vous a amenés à penser cela ou si, dans votre école même, vous avez eu connaissance de cas qui vous auraient amenés à en faire une priorité?

Mlle Boisclair: Dans toutes les écoles, c'est plus ou moins dit ou plus ou moins caché: il y a des suicides. Dans notre école, il y en a eu deux dans une année; donc, on a constaté le problème et il a fallu réagir. M. Claude Thibeault, qui a gagné la bourse Hilroy, de la fédération des étudiants l'année dernière, a implanté un projet de prévention du suicide en milieu scolaire qui a permis, depuis deux ans qu'il est instauré, d'enrayer les suicides dans notre école. Cela commence è se répandre tranquillement dans les autres écoles de la même commission et dans tout le Québec aussi.

Mme Blackburn: Y a-t-il d'autres expériences ou d'autres questions sur lesquelles vous travaillez et sur lesquelles vous auriez le goût d'attirer notre attention?

M. Dubois (François): Étant donné que je suis dans une école professionnelle, c'est-à-dire que je suis en train de faire mon cours de métiers après le secondaire, ce qui est important pour moi, c'est, justement, après la sortie de l'école, de trouver de l'emploi. C'est très important. C'est bien beau de faire des études, mais si, au bout, on ne peut pas se trouver d'emploi, on ne peut pas commencer une carrière... Je trouve que c'est important. Nous, à l'école, on n'a pas beaucoup de documentation sur cela.

Je pense aussi que l'information au point de vue économique, social, ce serait important dans les écoles que cela passe. Il ne faut pas rester dans la petite cage scolaire où on pense juste à ce qui se passe scolairement, mais il faut que, dans les écoles, on nous donne plus d'information sur l'économie, sur la façon dont le monde extérieur fonctionne; comment fonctionne le marché du travail. Je pense que c'est une lacune qu'il y a aussi dans les écoles. On n'a pas beaucoup de documentation sur ce problème.

Alors, les jeunes sortent de l'école et arrivent à 18 ans. C'est le temps de se trouver un emploi ou des choses comme cela et ils ne savent pas comment cela fonctionne. C'est pour cela qu'il y a beaucoup de chômage. Les jeunes ne sont pas habitués, ne sont pas prêts encore à arriver sur le marché du travail.

Mme Blackburn: Ce que tu nous dis, François, c'est que l'inquiétude est grande chez les jeunes étudiants au professionnel actuellement par rapport aux possibilités de se trouver un emploi à la sortie?

M. Dubois (François): Justement. Tout le monde veut trouver un emploi, mais où aller, les choses à chercher et les gens à contacter, on ne le sait vraiment pas. Il faut vraiment avoir un coup de chance pour trouver de l'emploi.

Mme Blackburn: Dans quel métier es-tu?

M. Dubois (François): Je suis en design vestimentaire.

Mme Blackburn: II y a Marc-Olivier, je pense, M. le Président.

M. Méhu: Je trouve que les jeunes n'ont pas assez d'information, parce que, des fois, à des jeunes, on dit: Vous avez 18 ans maintenant, allez voter, allez faire ceci, allez faire cela. Ils n'ont pas assez d'information sur le choix, sur ce qu'ils doivent faire, sur ce qu'ils peuvent faire.

Mlle Boisclair: J'aimerais juste revenir sur un point. On dit que la jeunesse, cela

commence à 12 ans. Mats une preuve de cela, c'est que, comme Marc-Olivier le disait précédemment, des conseils étudiants sont instaurés dans les écoles où il y a des gens de secondaire I jusqu'à secondaire V, ce qui prouve que les jeunes de l'âge de Marc-Olivier, de 12 à 14 ou 15 ans, sont intéressés à s'impliquer dans leur milieu et à changer des choses.

Moi, je me dis que plus on commence à les responsabiliser tôt, à leur donner des responsabilités, plus vite ils vont être capables de prendre des décisions avec un bon jugement et avec un "background" d'expérience en arrière. Plus on commence tôt, mieux on est capable de réagir.

À 15 ans, si on n'a pas d'expérience en arrière, on ne sera pas plus capable qu'une personne de 12 ans. C'est sûr qu'il y a une question de jugement et de maturité, mais plus on commence tôt, mieux c'est.

Mme Blackburn: J'imagine que, dans vos écoles, comme dans toutes les écoles de la province, il y a certains problèmes de décrochage. Vous, comme étudiants, vous les voyez venir. Vous êtes mieux capables d'identifier les causes. Est-ce que vous pourriez nous en parlez un peu ou si, finalement, parce que vous êtes probablement dans les premiers de classe, vous ne les avez pas vus débarquer?

Mlle Moore: C'est certain qu'on est conscient qu'il y a des décrocheurs dans nos écoles, mais on n'a pas, comme tels, de représentants ou de comités d'anciens décrocheurs qui font partie de notre conseil. Alors, on est dans l'impossibilité de vous en parler.

M. Biron (Jean-Marc): Jean-Marc Biron, coordonnâtes pour le groupe. Je voulais compléter votre question. Il y a un autre jeune du Triolet qui voudrait intervenir. Le Triolet - je vous le fais remarquer - c'est la plus grosse polyvalente en régions, tout près de 2000. Je veux simplement vous dire qu'il y a des systèmes de motivation, d'encadrement et de suivi des élèves qui sont implantés depuis quatre ans en régions pour donner suite aux attentes des parents, entre autres, et également aux attentes des élèves, parce qu'ils sont clients de la commission scolaire et ils veulent, ni plus ni moins, être davantage encadrés et motivés.

Je vous laisse là-dessus: De plus en plus, on met de côté les comités de discipline dans les écoles pour les remplacer par des comités d'écoute active des jeunes, pour mieux comprendre leurs blocages, pour les aider à mieux se motiver et à être autonomes. Je vous passe maintenant Richard.

M. Turcotte (Richard): Richard

Turcotte. J'ai 17 ans; je suis étudiant à la polyvalente Le Triolet, à Sherbrooke, qui, en passant, est la plus grande, comme Jean-Marc l'a dit précédemment. Par rapport à ce que vous avez dit juste avant, qu'on est sûrement des premiers de classe, eh bien, non. Je pense que la plupart, on est dans la moyenne et même il y en a certains qui sont inférieurs à la moyenne. On est là parce qu'on a du leadership. Le leadership, cela ne se voit pas toujours dans les notes de la classe, mais bien par les activités sociales organisées dans l'école et à l'extérieur de l'école aussi. Ce n'est pas parce que tu es premier de classe que tu va être premier avec une bande d'amis ou plutôt dans une assemblée. Je suis sûr que certains d'entre vous étaient loin d'être premiers de classe.

Le Président (M. Marcil): Au Triolet comme tel, vous êtes divisés par niveaux, je crois. Vous avez secondaire I à secondaire V; vous n'êtes pas divisés par niveaux? C'est comme si on avait créé cinq écoles dans une école. Est-ce un peu cela?

M. Turcotte: Disons plutôt qu'on a deux pavillons: un pavillon qui est le 1er cycle, soit secondaire I et II et l'autre pavillon pour le secondaire III, IV et V et le professionnel.

Le Président (M. Marcil): Est-ce que vous retrouvez un conseil étudiant à tous les niveaux?

M. Turcotte: On a un représentant pour chaque niveau. On a un représentant de I jusqu'à V et on a le comité exécutif, si on veut.

Le Président (M. Marcil): Mais votre représentant de niveau, est-il élu par l'ensemble du secondaire ou si c'est un conseil étudiant qui, lui, se nomme un représentant pour former le conseil de l'école?

M. Turcotte: C'est justement là qu'est la question. Le représentant est élu par son niveau, parce que ce sont eux qui voient s'il est meilleur dans son leadership, parce que, si on ne le voit pas dans son niveau, le jeune, on ne sait pas si réellement c'est lui qui serait le meilleur pour faire notre ouvrage. Alors, il est élu par son niveau.

Le Président (M. Marcil): Quel est votre pouvoir à l'école à ce moment-là comme conseil étudiant? Est-ce que vous intervenez souvent auprès de la direction de l'école ou auprès du conseil d'école? Le conseil d'école, pour ceux qui ne connaissent pas cela, cela fait partie des conventions collectives. Ce sont les enseignants et la direction.

M. Turcotte: Oui. Premièrement, on a un directeur adjoint qui est avec nous dans toutes nos réunions et tous les représentants de niveau, plus l'exécutif, peuvent donner leurs idées, leurs opinions, autant que le vice-président ou le secrétaire.

Le Président (M. Marcil): Êtes-vous consultés aussi de la part des enseignants et de la direction de l'école en tant qu'étudiants, par exemple, sur le programme d'activités étudiantes ou sur les modifications au régime pédagogique de l'école ou sur l'évaluation?

M. Turcotte: Peut-être pas par rapport au régime pédagogique, mais par rapport aux activités sociales de l'école et surtout ce qui concerne l'étudiant comme tel, souvent on est consultés.

Le Président (M. Marcil): Faites-vous partie d'organismes autres que scolaires comme tels? On vous retrouve comme étant des représentants du milieu scolaire, mais faites-vous partie d'autres organismes municipaux ou religieux?

M. Turcotte: Comme on l'a dit précédemment, il y en a au moins deux par conseil étudiant de chaque école qui représentent leur école au comité régional.

Le Président (M. Marcil}: Je vais être plus précis, Des maisons de jeunes, vous en avez chez vous?

M. Turcotte: Oui.

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'il y a des étudiants de l'école qui font partie de l'organisation comme telle de la maison des jeunes?

M. Turcotte: S'il y a des étudiants de l'école?

Le Président (M. Marcil): De l'école.

M. Turcotte: Je ne suis pas au courant. Sûrement qu'il y en a, mais, par rapport au conseil étudiant, on n'a pas réellement d'obligations extérieures juste par l'école.

M. Quintin (Claude): Mon nom est Claude Quintin. Je suis probablement un des seuls professeurs, à ma connaissance, dans la province, qui enseigne ce que l'on appelle un conseil étudiant. Alors, à l'école Le Ber où j'enseigne, il y a déjà huit ans, on a fait un contenu, lequel a, d'ailleurs, été approuvé par le ministère de l'Éducation. Au fil des années, on est même arrivés à avoir la reconnaissance de crédits pour ce cours que l'on donne chez nous que l'on appelle "initiation à la démocratie scolaire".

Ce cours-là se donne déjà depuis plusieurs années et c'est un cours qui, à la différence des conseils étudiants des autres écoles, ne se fait pas le midi ou à 16 heures, à la course avec les sandwiches et le lunch; c'est un cours comme tous les autres qui se donne sur le temps de classe avec un contenu. Le contenu de ce conseil leur permet d'abord de fonctionner, c'est-à-dire de tenir des assemblées avec ordre du jour, procès-verbal et ainsi de suite, avec un suivi. Cela leur permet aussi d'apprendre à présider des assemblées. Cela leur permet aussi d'apprendre à fonctionner de a à z, c'est-à-dire coordination de tous les comités de l'école. Ce sont eux qui voient à former le comité du bal, le comité de l'album; ils voient à la formation de tous les comités et ils voient également à la coordination de tout ce qui se fait dans l'école. Par exemple, au conseil étudiant, il y a des représentants du comité du journal, de la radio, du comité du sport, du comité social qui organise les soirées, qui organise le culturel. Il y a également un représentant de chaque niveau, plus l'exécutif. (11 heures)

Ces gens ont une place. Même si c'est III, IV et V chez nous, il y a des représentants de III qui sont quand même relativement jeunes par rapport aux autres, mais qui apportent quand même le point de vue de leur niveau et qui sont capables de le défendre. Ces jeunes sont élus. Là encore, on parle d'initiation à la démocratie. C'est une élection et ces gens doivent faire des discours électoraux. II y a une cabale électorale. Ils doivent faire des discours et écrire des textes pour dire pourquoi ils se présentent. Ils doivent défendre un programme. Lorsqu'ils sont élus, ils sont automatiquement inscrits à ce cours qui se donne.

C'est, évidemment, une structure qui, à mon avis, parce que cela fait déjà douze ans que je me bats pour elle, devrait se répandre plus et qu'on devrait retrouver dans d'autres endroits. Si on a confiance aux jeunes, on devrait être capable de leur donner des ressources minimales, c'est-à-dire au moins un bureau et une chaise pour pouvoir travailler et au moins un local de réunion où ils peuvent avoir la paix. Pas un local qui change tout le temps parce qu'à midi il y en a un qui en a besoin et que, le lendemain, il y en a un autre. Il faut qu'ils aient un local à eux pour être capables de s'identifier à quelque chose qui leur appartient dans l'école.

À partir de ce moment-là, vous êtes capables de les avoir comme des interlocuteurs valables, c'est-à-dire qu'ils vont défendre les objectifs spécifiques, qu'ils élaborent chaque année. Ce n'est pas moi. Je discute avec eux et ils le préparent. Mais quand ils vont le discuter, c'est eux, pas

moi. Ils vont recontrer le conseil de l'école, ils vont rencontrer le comité de parents, le conseil de gestion, fis vont défendre leur budget qui peut se chiffrer è environ 5000 $ et qu'ils administrent eux-mêmes. Les revenus des soirées qu'ils organisent à l'école leur reviennent. Ils assument également leurs déficits quand ils en font. ILs doivent les analyser et essayer de prévoir te coût suivant pour que ce ne soit pas un autre déficit. Alors, ils doivent s'assumer de a à z. Les jeunes dont je vous parle ont 14, 15 ou 16 ans, 18 ans au maximum. C'est un groupe d'une quinzaine d'élèves qui le font. Lorsqu'on parle de représentativité au conseil permanent, je pense que c'est important. Cela peut amener un changement d'attitude chez les gens. Qu'on arrête de croire qu'on peut tout régler pour les jeunes. Chez nous, ce sont eux qui prennent leurs décisions et je vous prie de croire qu'elles ne font pas toujours mon affaire. Mais ce sont des décisions qu'ils prennent et ils les assument. L'important, c'est de leur montrer à les assumer et d'être capable de questionner le résultat à la fin, qu'ils l'aiment ou qu'ils ne l'aiment pas.

Mme Blackburn: Vous savez que le projet de loi qui fait l'objet de cette commission parlementaire prévoit que, pour faire des recommandations au collège électoral, c'est-à-dire pour faire une recommandation de candidature pour appuyer une candidature, l'organisme doit être incorporé en vertu de la troisième partie de la Loi sur les compagnies. Est-ce que les associations étudiantes sont incorporées?

M. Quintin: Non, la seule chose qui donne une certaine légalité à l'association étudiante, en tout cas, celle que nous avons chez nous, c'est que la direction a accepté la constitution que nous nous sommes donnée, que nous avons rédigée ensemble. Le conseil étudiant et la direction l'ont acceptée. On fonctionne en vertu de cela, ce qui fait que chez nous les étudiants sont un groupe qui est reconnu officiellement et qui doit être consulté toutes les fois qu'il y a une variation dans l'horaire, un changement dans le régime pédagogique et pour toutes les décisions qui touchent la vie des étudiants. Cela peut être la répartition des locaux, faire disparaître des options, n'importe quoi qui touche la vie des étudiants.

Mme Blackburn: J'aurais deux questions, une à laquelle on peut répondre assez brièvement et une peut-être un peu plus longue. J'aurais aimé que vous me disiez, vous les jeunes, quels seraient, à votre avis, les deux ou trois plus grands problèmes qui se posent à la société et plus particulièrement aux jeunes.

M. Méhu: Le chômage.

Une voix: II y a aussi le suicide.

Mme Blackburn: Oui.

M. Netisse: Comme on vous en parlait plus tôt, il y a aussi l'information des jeunes.

Mme Blackburn: Une dernière question, parce que mon temps est écoulé. On a des règles ici aussi. Vous disiez tout è l'heure -dans votre mémoire, cela revient à quelques reprises - que vous craignez d'être récupérés par une structure centralisée qui essaierait de parler au nom de tous les jeunes du Québec. Vous proposez donc comme alternative la constitution de conseils régionaux. S'il n'y avait pas de structure régionale, est-ce que vous accorderiez, quand même, votre appui à la création d'un conseil permanent?

Mlle Moore: Oui. Je crois que cela nous motiverait beaucoup.

Mme Blackburn: S'il n'y en avait pas de structure.

Mlle Moore: S'il n'y en avait pas, non. L'efficacité du Conseil permanent de la jeunesse serait peut-être moindre et, par implication, je crois qu'on serait moins motivés à faire partie de ce conseil.

M. Dubois (François): Probablement que les jeunes croiraient moins aussi à l'efficacité de ce conseil.

Mlle Boisclair: Ce n'est pas parce qu'on est jeunes qu'on serait d'accord pour embarquer dans quelque chose qui ne serait pas satisfaisant pour nous autres.

Mme Blackburn: Bien. Je voudrais à nouveau vous remercier au nom de ma formation politique pour avoir participé au travaux de notre commission et avoir accepté de venir enrichir notre réflexion. Comme le disait tout à l'heure le député, vous êtes le seul groupe du milieu de l'éducation. Je dois dire qu'on en a eu, mais de niveau collégial et universitaire. Du niveau secondaire, vous êtes vraiment le premier qroupe. Je trouve que les informations que vous nous avez apportées en ce sens ont beaucoup d'importance, ainsi que la qualité de votre réflexion et de votre mémoire. J'ai constaté, comme mes collègues, d'ailleurs, que vous vous étiez bien préparés pour venir défendre ce mémoire. Vous avez illustré par vos propos et votre maturité que vous étiez aussi tout à fait prêts et suffisamment articulés - si vous me passez le terme - pour participer aux débats

d'un éventuel Conseil permanent de la jeunesse ou encore d'une structure régionale. J'espère avec vous que le gouvernement acceptera de prendre en sérieuse considération les différentes recommandations que vous nous avez faites ici. J'espère également que vous resterez longtemps actifs et dynamiques au sein de vos écoles et au sein de la société plus tard. Veuillez me croire qu'on a besoin des jeunes. Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Je vous remercie beaucoup, Mme la députée. Est-ce que vous voulez ajouter quelque chose? Ensuite, M. le ministre va compléter.

Mlle Moore: D'accord. Avec votre permission, je vais faire un dernier rappel des recommandations qui n'ont pas nécessairement été touchées à la période des questions. Puisqu'on a déjà un Secrétariat à la jeunesse, on tient à le garder. À l'aide du Conseil permanent de la jeunesse, on tient à améliorer cette acquisition. On tient vraiment à ce qu'il y ait un lien entre les conseils régionaux, s'ils sont implantés, et le Secrétariat à la coordination interministérielle. On tient aussi à ce que le collège électoral soit issu des conseils régionaux. On tient aussi à avoir un mandat fort et influent parce que, sans cela, on croirait moins à l'instauration d'un Conseil permanent de la jeunesse. Pour nous, un budget suffisant serait indispensable au bon fonctionnement du Conseil permanent de la jeunesse.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, évidemment, je suis très impressionné par le sérieux et la qualité du mémoire et, surtout, de sa présentation. À ceux qui pourraient douter de la relève, je pense que vous êtes une belle preuve qu'on n'a pas à s'inquiéter, dans la mesure où on vous donne les outils et toute la liberté nécessaires pour vous faire valoir.

Vous avez fait des recommandations et des suggestions qui ne sont pas sans nous impressionner et sans nous amener à nous poser, nous aussi, des questions. Sur l'à-propos de la création d'un Conseil permanent de la jeunesse, on se rejoint, mais sur l'à-propos de la structure régionale, il y aura sûrement une réflexion à faire du côté du gouvernement pour en arriver à atteindre les objectifs que vous visez.

Il y a une question que je voudrais vous poser parce que vous n'en avez pas fait état ce matin. Dans vos conseils, quelle est la répartition entre les filles et les garçons? Est-ce qu'on est soucieux d'assurer une égalité de représentation ou si cela vient de soi? Comment cela fonctionne-t-il? J'aimerais avoir l'avis d'un gars et d'une fille, au moins.

Mlle Moore: En tant que fille, je vais vous dire que la répartition se fait d'elle-même. Le taux de présentation aux élections des filles et des garçons est sensiblement égal. On ne peut pas distinguer de majorité de chacun des côtés. C'est égal dans notre école, en tout cas. Comme vous pouvez le voir, dans le conseil, c'est quand même assez bien réparti.

M. Gratton: L'implication des filles ou des garçons n'a pas à être suscitée de façon artificielle.

Mlle Moore: Non, pas du tout.

M. Gratton: Est-ce que vous souhaiteriez qu'on prenne des moyens pour assurer cette égalité au Conseil permanent de la jeunesse? Dans le modèle du projet de loi ou même dans le vôtre, il n'y a rien qui l'assurerait, à moins que le collège électoral ou que les conseils régionaux se fassent l'effort de recommander des candidatures qui assureraient une représentation égale. Croyez-vous nécessaire que le gouvernement prenne des moyens pour assurer cette égalité de représentation entre filles et garçons?

Mlle Moore: Je crois que si tout se passe bien comme dans notre conseil général, il ne devrait pas y avoir de problèmes au Conseil permanent de la jeunesse.

M. Méhu: Cela devrait aller de soi. S'il y a une trop forte majorité d'un côté, peut-être qu'on aurait besoin de faire des choses, mais cela m'étonnerait. Dans notre école aussi, c'est aussi bien réparti d'un côté que de l'autre.

M. Gratton: C'est à se demander si la région de Sherbrooke n'est pas unique dans ce sens. Je regarde la députation et je vois que la région de Sherbrooke est divisée entre un homme et une femme à l'Assemblée nationale. Ce n'est pas le cas des autres régions.

M. Turcotte: Je voudrais faire une remarque à ce sujet. On est là pour nos idées et non pas parce qu'on est un homme ou une femme. Quiconque a de bonnes idées ou de bons projets peut tes mettre sur la table, on n'a pas à discriminer si c'est un homme ou une femme. On marche par élection, la même chose que pour vous, c'est comme cela que cela marche. Si c'est une femme qui ressort, c'est parce qu'elle a été élue qu'elle est là. C'est ce qui lui donne sa force. On ne fait pas de discrimination.

M. Gratton: Vous êtes-vous posé la question... Oui?

Mlle Boisclain Marie-Hélène disait que dans son école c'était pas mal égal, mais dans la polyvalente Le Ber où je suis, il y a une majorité de filles. Je ne veux pas faire du féminisme, non plus, mais je veux juste dire que ce qui est important, c'est que ce ne soit pas nécessairement une femme ou un homme qui nous représente au Conseil permanent de la jeunesse, mais que cette personne soit consciente des priorités et des problèmes des deux sexes. C'est cela qui est important.

M. Gratton: On sait qu'à l'Assemblée nationale c'est loin d'être très représentatif. Évidemment, je présume que c'est parce que les femmes sont moins intéressées et je constate volontiers que c'est plus difficile pour une femme de s'impliquer. Avez-vous l'impression que, quand vous arriverez au moment de vous impliquer en politique active, cela va changer de soi sans que personne ait à faire d'efforts et qu'effectivement, dans dix ou quinze ans, on verra une Assemblée nationale plus représentative des deux sexes?

M. Turcotte: Je pense que oui. La représentation va être quasi égale d'ici dix ans. Cela va nous suivre. Parce que je pense que les femmes s'impliquent dans tous les secteurs. Elles ne sont pas restreintes maintenant à tel secteur, comme le stéréotype qu'on s'était donné il y a dix ans. Plus cela va, plus les hommes sont ouverts à cela, à faire entrer des femmes dans les conseils, les assemblées et tout cela.. Je pense que cela va devenir égal d'ici, je ne peux pas dire le nombre d'années, mais cela va devenir égal bientôt.

Mlle Boisclair: Je suis d'accord avec Richard. Je pense que les jeunes, nous sommes conscients qu'il y a un problème là-dessus à des niveaux plus élevés. Mais je pense que, quand on regarde ce qui se passe dans nos écoles et ici, présentement, on peut s'apercevoir que cette discrimination tend à diminuer. C'est juste que rendu à un niveau de pouvoir plus élevé, il y a peut-être des chances ou des moyens moins grands pour les femmes. Ne me demandez pas pourquoi, je ne le sais pas, sauf que je pense que plus cela va aller, plus cette discrimination va s'enrayer. Parce que, chez les jeunes, cela paraît moins. En tout cas, nous sommes plus conscients de cela.

M. Dubois (François): De toute façon, je me dis que, si les femmes veulent vraiment être représentées, elles vont prendre pied. Je peux parler de mon cas. L'école Camirand est une école de 250 élèves. Il y a 250 filles et 5 garçons à l'école. J'aurais pu dire: C'est juste des filles, je vais les laisser toutes seules, mais je me suis dit: Non, il faut vraiment que le point de vue des gars soit reconnu. C'est un exemple qui est peut-être un peu ridicule, mais on arrive et, comme c'est juste des filles, donc les toilettes des filles sont grandes; les toilettes des hommes... Cela fait que l'aménagement est... Le problème des garçons là-dedans est moins regardé parce que c'est plus des filles qui vont là. Alors, j'ai dit: On a des problèmes, les garçons ont des besoins aussi et il faut aller faire valoir cela, justement. On a besoin d'aller aux toilettes.

M. Gratton: M. le Président, je souhaiterais qu'on puisse disposer de plus de temps pour continuer cet échange des plus intéressants et surtout des plus enrichissants, je parle pour moi, en tout cas. Je voudrais à nouveau vous remercier de votre présence. Je puis vous assurer que le gouvernement va prendre en très sérieuse considération les suggestions et les recommandations que vous nous avez faites et que, dans la mesure où on trouvera des moyens d'atteindre les objectifs que vous visez, on va sûrement faire en sorte que cet effort que vous avez fait ait des résultats concrets.

Mlle Moore: Je tiens à vous remercier tous de votre attention, M. le ministre et les députés. On est bien heureux que vous soyez ouverts à nos recommandations. Merci.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. Donc, on va suspendre pour 60 secondes afin de permettre...

(Suspension de la séance à 11 h 16)

(Reprise à 11 h 18)

Le Président (M. Marcil): A l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir. Nous allons entendre immédiatement le Club de placement de Sherbrooke, centre de recherche d'emploi pour jeunes adultes. Cela va, messieurs les députés? Voulez-vous vous asseoir, s'il vous plaît? Merci. Le temps presse. Mme Denise Marquis et Mme Sylvie Allaire, nous vous souhaitons la bienvenue à cette commission parlementaire. Donc, vous avez une vingtaine de minutes pour exposer votre mémoire et, ensuite, nous procéderons à la période de questions.

Club de placement de Sherbrooke,

centre de recherche et d'emploi

pour jeunes adultes

Mme Marquis (Denise): Alors, bonjour;

mon nom est Denise Marquis, comme vous l'avez dit. Je suis la directrice du Club de placement de Sherbrooke. Je voudrais, dans un premier temps, situer un peu ce qui se fait chez nous, à l'intention des personnes qui sont ici et, à la suite de cela, je vais céder la parole à ma collègue Sylvie, qui est responsable de l'animation et qui souhaitait intervenir, d'une façon plus spécifique, parce qu'elle fait partie des critères d'âge; elle a 26 ans encore et comme intervenante auprès des jeunes elle a des choses à dire aussi. Alors, je voudrais vous signaler que le club de placement, d'abord, ce n'est pas un endroit où on parle de placements financiers, c'est du placement en main-d'oeuvre, c'est un centre de formation à la recherche d'emplois, c'est-à-dire que ce qu'on fait, c'est qu'on instrumente des jeunes au niveau de tous les outils de base pour une recherche d'emploi efficace.

On organise des sessions qui durent trois semaines. On a, pour l'année en cours, 17 sessions au programme; les sessions durent trois semaines, ce sont des groupes de douze personnes. Les sessions se font et il y a très peu de temps entre chacune et on a une équipe de quatre personnes, ce qui veut dire que c'est énormément de travail pour satisfaire la clientèle parce qu'on passe à peu près 200 jeunes par année avec une équipe de quatre personnes.

Je voudrais donner quelques éléments d'information sur la clientèle que nous voyons, parce que je trouve cela important. On rencontre des jeunes de tous les niveaux de scolarité, on travaille avec les 18-30 ans et la moyenne d'âge est de 23-24 ans. Ce sont des gens qui ont eu des petites "jobines", c'est-à-dire, des emplois de courte durée, pour une période d'à peu près six mois ou un an, différents emplois, mais très rarement un emploi qui avait un caractère permanent.

Ce sont des jeunes qui sont, évidemment, dans une situation financière assez difficile. Il y a des gens qui sont bénéficiaires de l'aide sociale, il y a des gen3 qui sont prestataires de l'assurance-chômage, d'autres qui n'ont aucun revenu. Et, par rapport au profil de la clientèle, au niveau de la scolarité, ce qu'on remarque, c'est qu'on a toujours essayé d'avoir une répartition relativement équilibrée, Alors, on a à peu près 50 % de personnes qui ont des diplômes d'études secondaires, 25 % des DEC et 25 % des bacs. Par ailleurs, ce qu'on remarque depuis quelques mois, c'est que le niveau de scolarité augmente. Autrement dit, pour les chercheurs d'emploi, la difficulté de se trouver un emploi est de plus en plus marquée même chez les gens scolarisés. Qu'est-ce que je voulais vous dire à part cela? La seule chose que je voudrais ajouter, c'est que nous existons depuis près de trois ans, on a vu passer près de 400 jeunes chercheurs et chercheuses d'emploi. La réalité qu'ils connaissent, nous la vivons de très près avec tout ce que cela comporte de hauts et de bas. Alors, c'est la raison pour laquelle on avait le goût de venir parler à la présente commission, parce qu'on trouve extrêmement important que les jeunes chercheurs et chercheuses d'emploi aient, en tout cas, une certaine tribune et qu'ils soient représentés à certains paliers du gouvernement. Il y a des gros problèmes et on espère qu'il va se passer des choses à très court terme. Alors, je cède la parole à Sylvie qui va vous parler plus précisément du contenu du mémoire.

Le Président (M. Marcil): Mme Allaire.

Mme Allaire (Sylvie): Par rapport au mémoire, nous, au club de placement, nous sommes d'accord d'une certaine façon avec la création du Conseil permanent de la jeunesse pour autant que c'est un moyen... Bon, c'est parce qu'on considère que c'est un moyen de faire progresser la condition des jeunes. On est conscient que ce n'est pas "la" solution aux problèmes. Par rapport au niveau de l'emploi surtout, on est conscient que ce n'est pas le Conseil permanent de la jeunesse qui va compenser l'absence d'une politique cohérente sur la problématique jeunesse. Pour nous, c'est bien important de le dire au début.

Le mérite d'un Conseil permanent de la jeunesse serait d'abord que les jeunes aient une tribune provinciale pour pouvoir exprimer leurs positions. Il pourrait assurer une plus grande visibilité à la problématique jeunesse et, par conséquent, sensibiliser les instances gouvernementales, les intervenants et la population à leur situation; favoriser une concertation entre les différents organismes jeunesse; obtenir une représentation régionale à l'intérieur d'une mécanique consultative provinciale.

Nos réserves, c'est-à-dire les petites failles qu'on trouve au Conseil permanent de la jeunesse: D'abord, on s'interroge sur le sérieux d'un tel projet, sur la volonté politique des décideurs et décideuses de lui donner une place réellement importante. Lorsqu'on constate qu'une telle mécanique relèvera du premier ministre directement qui a manifestement de gros chats à fouetter, il risque de faire passer le Conseil permanent de la jeunesse en dernier Heu. On est conscient que le premier ministre a beaucoup de choses à faire. On n'est pas sûr qu'il aurait vraiment beaucoup de disponibilité et beaucoup d'écoute par rapport à un dossier aussi gros que ce dossier.

Le projet, tel que présenté, ne prévoit aucune mécanique de continuité puisque tous les mandats sont de deux ans, ce qui nous fait nous interroger sur la volonté du gouvernement de faire du Conseil permanent

de la jeunesse une structure crédible et efficace à long terme. Le projet, tel que présenté, ne prévoit aucunement des critères précis en regard de la nomination des membres, ce qui laisse énormément de place à des interprétations vagues et à des nominations partisanes, d'autant plus que ces nominations pourraient relever du premier ministre lui-même. Le projet ne prévoit aucune mécanique de collaboration entre le Conseil permanent de la jeunesse et les groupes jeunesse régionaux qui sont souvent les mieux placés pour identifier les problèmes et les besoins des jeunes.

Nous nous interrogeons donc sur les moyens que le Conseil permanent de la jeunesse aura à sa disposition pour aller chercher le pouls de ceux et celles qu'il devra représenter, surtout lorsqu'on considère que cette tâche serait confiée à onze personnes seulement, avec un budget limité. Le projet pourrait créer une ambiguïté par rapport aux structures du Secrétariat à la jeunesse qui sont déjà en place. Il n'existe, dans le projet, aucune précision quant à la complémentarité des rôles que pourraient jouer les deux organismes. On s'interroge sur la place qu'entend donner le gouvernement au Secrétariat à la jeunesse et nous n'accepterions pas que le Conseil permanent de la jeunesse soit mis sur pied au détriment des bureaux régionaux du Secrétariat à la jeunesse.

Les limites qu'on trouve à ce projet: Une telle structure ne possède aucun pouvoir décisionnel et le poids des recommandations qui pourraient en émaner risque peu d'ébranler les instances décisionnelles si on tient compte de l'absence de répondant ministériel et du peu de réceptivité que les jeunes ont connu jusqu'à maintenant à travers leurs revendications. On peut faire référence au rapport de la commission Beaudry, on peut aussi faire référence à tous les symposiums qui ont lieu en province. Demander à onze jeunes plus ou moins expérimentés de se faire les porte-étendards de la problématique jeunesse du Québec, en ces années de restrictions budgétaires et de chômage et de le faire efficacement à l'intérieur d'un mandat de deux ans, voilà qui exige des performances quasiment surhumaines, ce que nous retrouvons rarement, même chez des personnes dites compétentes et expérimentées sur le plan politique. Mettre sur pied le Conseil permanent de la jeunesse ne changera en rien la dure réalité que vivent les jeunes en regard de l'emploi. Cette structure permettra au plus à quelques personnes de porter sur la place publique des problèmes qui ont maintes fois été dénoncés, mais pour lesquels les gouvernants et gouvernantes ne semblent toujours pas avoir trouvé de solutions. En fait, en un mot, ce qu'on voudrait... Qu'on en parle, c'est bien beau, mais qu'on agisse aussi, à un moment donné. La clientèle jeunesse change et, à un moment donné, ils vont devenir des adultes et il n'y aura peut-être pas grand-chose qui va avoir été fait. Donc, qu'on en parle, mais qu'on fasse quelque chose aussi.

Nos recommandations: Attendu que le projet de loi comporte des failles importantes quant à la nomination du porteur ou de la porteuse du dossier, quant aux critères de sélection des membres et quant aux modalités de continuité, attendu qu'il existe déjà dans les régions des bureaux reliés au Secrétariat à la jeunesse, attendu que le gouvernement a été saisi depuis quelques années de nombreuses revendications de la part des jeunes, que ce soit par le biais des représentations auprès de la commission Beaudry ou des nombreuses représentations tenues à l'occasion de l'Année internationale de la jeunesse, attendu que le présent gouvernement a promis, au moment de la campagne électorale de l'automne dernier, de jouer gagnant en misant sur l'emploi, nos recommandations aux instances gouvernementales sont: De mettre sur pied une structure qui permettrait de rejoindre les objectifs visés et par le Secrétariat à la jeunesse et par le Conseil permanent de la jeunesse et que ces deux créneaux puissent être maintenus en complémentarité avec des moyens financiers adéquats et en tenant compte des besoins exprimés par les groupes jeunesse; de prévoir un porteur de dossier ou répondant ministériel autre que le premier ministre, de modifier le projet de loi de façon que les mandats ne se terminent pas tous en même temps pour assurer une continuité dans la connaissance des dossiers; de prévoir un comité de sélection des membres composé également de membres du gouvernement et de membres de l'Opposition et d'insérer dans le projet de loi des critères précis concernant la nomination des membres en assurant que les onze personnes sont représentatives de toutes les catégories de jeunes, indépendamment de leurs alléqeances politiques; de définir une politique claire sur les actions que le gouvernement entend mettre de l'avant à la lumière des besoins tant de fois exprimés par les jeunes, parfois entendus, mais rarement écoutés, et encore moins solutionnés; de donner au CPJ les moyens de se brancher concrètement sur la problématique jeunesse et de favoriser une liberté d'expression qui ne soit pas limitée par des considérations partisanes; de passer à l'action et de mettre en oeuvre des moyens concrets pour aider les jeunes adultes à faire leur place dans le monde du travail et ce, avec dignité; de prévoir, à l'intérieur du CPJ, un sous-comité qui serait rattaché à l'emploi uniquement et qui aurait la possibilité de travailler en concertation avec un répondant ministériel du ministère de la

Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour mettre en oeuvre des solutions concrètes et à court terme.

En conclusion, on est d'accord avec la création d'un Conseil permanent de la jeunesse dans la mesure où certaines modifications et précisions seront apportées au projet de loi. Ce que l'on veut précisément du gouvernement, c'est qu'il s'attaque dès maintenant aux problèmes qui sont déjà sur la table. On considère que le temps de la consultation est terminé et ce que l'on veut, nous autres, c'est de l'action, du concret. Merci.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer au député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Mes premiers mots sont pour souhaiter la bienvenue aux porte-parole du Club de placement de Sherbrooke. Ils sont en plein dans le bain, ils sont dans une situation où ils sont en mesure de toucher du doigt une des préoccupations vitales de la jeunesse, c'est-à-dire avoir les moyens, finalement, de gagner sa vie, de le faire compte tenu de ses capacités, compte tenu de ses aptitudes, compte tenu de ses goûts, et cela est extrêmement important. (11 h 30)

Chez les nombreux intervenants qui sont passés devant nous, s'il y a un commun dénominateur qui se dégage quelque part, c'est l'inquiétude vis-à-vis de l'avenir, vis-à-vis de ce qu'ils vont faire pour élever une famille, s'établir d'une façon économiquement stable de façon à pouvoir donner à la société ce qu'ils pensent pouvoir lui donner. Vous autres, dans la situation dans laquelle vous vous trouvez, c'est votre spécialité. Vous êtes là pour cela, vous êtes là pour aider des jeunes que vous formez, que vous guidez, à qui vous donnez des outils pour pouvoir vendre, finalement, ce qu'ils sont et ce qu'ils sont capables de faire, et c'est là l'important. Nous sommes tous ici convaincus que tout le monde, et en particulier les jeunes parce qu'on parle d'eux, a quelque chose à apporter à la société, un apport économique, un apport à tous les niveaux. Ce qu'il faut, c'est établir la connexion entre leur potentiel et le besoin qu'il y a quelque part pour ce potentiel. C'est une vue optimiste des choses qui est absolument nécessaire si on veut qu'il y ait une lumière quelque part au bout du tunnel. Si on ne croit pas fondamentalement, premièrement, que les jeunes ont une capacité de donner et qu'en même temps notre société, globalement, a un besoin d'aller chercher ce potentiel, on n'arrive nulle part. Il est réconfortant de voir que des gens comme vous se spécialisent là-dedans et permettent, justement, cette connexion.

Vous nous parlez de votre accord de principe. Je pense que vous l'exprimez d'une façon claire. Bien sûr, vous dites que vous avez des réserves, vous avez des inquiétudes, vous les exprimez aussi. Il est bien sûr que, quand on entre sur un terrain qui est aussi miné que celui de la jeunesse - il y a beaucoup de gens qui ont pataugé là-dedans, il y a eu beaucoup de tentatives... on ne veut pas s'imaginer qu'on va trouver la solution miracle du jour au lendemain. Quand vous nous parlez du mérite du projet de loi, vous parlez d'une tribune, vous parlez d'une façon pour les jeunes de faire connattre leur point de vue. Comment voyez-vous cette tribune? Est-ce que les jeunes, par le biais du Conseil permanent de la jeunesse, vont parier aux jeunes, vont parler à la société en général, ou vont s'adresser en particulier aux décideurs politiques de façon à influer sur ces décisions ou est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse aura un double rôle? Quelle est votre idée là-dessus?

Mme Allaire: II est clair que, pour ce qui est d'écouter les jeunes, ils vont être là pour entendre ce que les jeunes veulent dire, sauf que les jeunes, ce qu'ils ont à dire, ils le disent depuis longtemps. Je pense que c'est quand même relativement clair. Ce qu'on pense qui est surtout important, c'est que les jeunes qui représenteraient les autres jeunes soient aussi là pour influencer les décideurs, pour qu'il y ait des positions concrètes qui soient prises à différents niveaux, autant au niveau de l'éducation, du syndicat, du patronat que pour tout ce qui peut toucher à la jeunesse, autant en ce qui concerne l'emploi, les affaires sociales, etc. Autrement dit, c'est vraiment pour s'assurer qu'il y ait quelque chose de fait concrètement. C'est sûr que c'est un double rôle, mais c'est surtout pour être là pour prendre part aux activités.

Mme Marquis: Me permettez-vous d'intervenir? Quand vous me parliez de double rôle, je me dis que les jeunes qui seront au conseil permanent, si cela se concrétise, auront le mandat, je pense, d'aller prendre le pouls de ce qui se vit sur le terrain. Mais, dans mes normes, le mandat qu'ils auront à ce moment sera de faire des représentations auprès des gouvernants en espérant être écoutés. Mais leur mandat est beaucoup plus dans le sens d'aller porter auprès des décideurs les résultantes de ce qu'ils auront entendu sur une base plus régionale. En tout cas, je vois beaucoup plus leur rôle comme une tribune pour se faire les porte-étendards des problèmes qui auront été décelés dans les régions. C'est pour cela que la plupart des groupes de jeunes insistent tellement sur la nécessité d'avoir une mécanique régionale qui leur permette de rester connectés à la réalité des jeunes. J'aurais le goût de vous

relancer la question: Si vous n'aviez pas comme députés la possibilité de vous connecter sur ce qui se vit dans vos comtés, je ne sais pas comment vous pourriez vous faire les représentants des régions. Alors, je me dis: Qu'il y ait un petit groupe de jeunes - et c'est ce qu'on dit dans le mémoire, à un moment donné - et qu'on leur donne le mandat de se faire les porte-parole des milliers de jeunes qu'il y a au Québec sans qu'ils aient la possibilité de se connecter directement à la base, cela va devenir une petite clique élitiste, je pense, qui sera incapable de faire valoir les vrais problèmes.

M. Doyon: Oui. Je pense qu'on s'entend bien sur la nécessité que le Conseil permanent de la jeunesse ne s'isole pas de la jeunesse et des problèmes qu'elle vit. C'est essentiel et je pense qu'on s'entend facilement là-dessus. On ne se chicanera pas longtemps sur les principes. C'est sûr qu'on est complètement d'accord. Vous dites: Vous, les députés, si vous n'étiez pas dans votre comté pour savoir ce qui se passe, seriez-vous capables de le représenter adéquatement à l'Assemblée nationale? La réponse est, bien sûr, non. C'est pour cela qu'on fait la navette, qu'on se promène dans le plus d'endroits possible et qu'on essaie de rencontrer le plus de gens possible, que ce soit en faisant notre épicerie, en allant acheter notre journal, tout comme en visitant les clubs de l'Âge d'or.

C'est le principe des vases communicants. Les députés sont des éponges. Ils absorbent ce qu'ils peuvent dans leur comté et ils essaient de venir tordre l'éponge auprès du gouvernement et de lui donner ce qu'ils ont recueilli. J'imagine que c'est un petit peu comme cela que vous voyez le rôle des membres du Conseil permanent de la jeunesse. Là-dessus, on s'entend parfaitement.

Comment cela se fera-t-il? Avez-vous analysé des mécanismes? Comment voyez-vous la réalisation de ce qu'est finalement ce souhait que je partage intégralement avec vous? Comment cela devra-t-il se faire?

Mme Marquis; Je ne peux pas aller loin au niveau de la mécanique parce que c'est une chose sur laquelle nous n'avons pas eu le temps de nous arrêter. Nous avons à nous prononcer davantage sur un principe que sur une mécanique. Cependant, j'aurais le goût de vous dire qu'on essaie de consolider et de grossir les structures en place via le secrétariat à la jeunesse, si on ne peut pas parler de conseils régionaux ou de mécaniques régionales.

J'aimerais qu'on puisse renforcer les structures régionales par le biais du Secrétariat à la jeunesse, qu'on leur donne les moyens de faire des interventions et de la recherche de façon adéquate pour qu'elles puissent alimenter le conseil au niveau provincial. Je vous dirai qu'avec les 200 personnes qu'on voit chaque année au club de placement on n'a pas le temps de s'arrêter à la mécanique. Toutefois, on souhaiterait que, quelque part, quelqu'un prenne le temps de s'arrêter et de dire: Cela pourrait ressembler à cela.

On se dit que, dans le projet actuel, tout se passe à Québec, en tout cas au niveau de la structure du conseil. Rien ne prévoit une mécanique quelconque dans les régions. Cela pourrait être une structure parallèle au secrétariat comme celle qui a été proposée par les jeunes tout à l'heure, mais cela pourrait aussi être une modification ou un réaménagement du mandat des secrétariats à la jeunesse qui sont déjà là, qui accomplissent déjà un bon boulot et qui ont déjà un certain nombre de moyens. Sauf que, encore là, il faut leur donner tous les moyens nécessaires.

J'ai le goût de rajouter quelque chose par rapport à cela. Vous me disiez tantôt que vous faisiez des tournées régionales. J'ai le goût de vous relancer la question: Avec les moyens qui seront mis à la disposition de ces jeunes, auront-ils la possibilité de se promener et de s'alimenter adéquatement sur ce que cela représente au niveau de leur mandat? Je veux bien qu'on soit d'accord sur le principe, mais êtes-vous prêts, vous les décideurs, à donner à cette équipe de jeunes les moyens qui leur permettront de remplir leur mandat adéquatement? Je me questionne, car 850 000 $, tel que prôné dans le dossier, c'est bien, mais quelles seront les limites? Qu'est-ce que cela implique, ces 850 000 $? Je pense que les jeunes ont énormément de potentiel, mais ils auront besoin d'appui, de consultants. Que seront-ils obligés de payer avec cette somme? Alors, je m'interroge et je me dis: Si on veut économiser, qu'on trouve des mécaniques, peut-être, plus via les secrétariats, mais qu'on leur donne les moyens d'agir adéquatement.

M. Doyon: II n'y a pas de doute que le rôle du conseil... Et je fais suffisamment confiance aux jeunes pour qu'ils se donnent les moyens d'agir et de le faire avec crédibilité, évidemment, on est toujours au niveau des budgets, on peut discuter longtemps et dire: Bon, c'est 850 000 $, ne serait-ce pas mieux 1 000 000 000 $? Ne serait-ce pas mieux 2 000 000 000 $? Je comprends que, plus on a d'argent, plus on dispose de moyens et c'est l'éternel problème qu'on vit, que le gouvernement vit, de faire le partage des fonds des contribuables.

Maintenant, une fois qu'on a reconnu ce principe - et la difficulté n'est pas grande à ce niveau - je pense que les jeunes qui vont siéger au conseil permanent vont faire la même constatation spontanément et, à partir

de là, vont utiliser leurs ressources de façon à garder ce contact. L'autonomie du Conseil permanent de la jeunesse qui est aussi vitale, primordiale - vous n'en parlez pas dans votre mémoire comme tel, mais j'imagine que vous y croyez aussi - cette autonomie empêche, finalement, une intervention directe, qu'elle soit par voie administrative, législative ou réglementaire, qui viserait à dicter des lignes de conduite ou des façons de faire au conseil permanent. Je suis d'accord qu'il doit avoir les moyens nécessaires pour agir, je pense que le gouvernement fait la preuve, actuellement, qu'il croit au Conseil permanent de la jeunesse et qu'à partir de là il va s'organiser pour lui donner des moyens qui vont être suffisants pour accomplir son mandat. De ce câté-là, je comprends vos réflexions, mais je veux vous rassurer sur le fait que la volonté politique gouvernementale, ministérielle, est là. Ce n'est pas un exercice bidon que l'on fait ici, c'est un véritable exercice de consultation et le conseil permanent ne sera pas un conseil permanent bidon non plus parce que tout le monde y perdrait. Les jeunes y perdraient à coup sûr et le gouvernement y perdrait à coup sûr parce que le gouvernement a besoin de ce conseil pour se faire aviser, se faire conseiller parce que c'est un comité "aviseur" et, en tant que tel, le gouvernement a besoin d'aller chercher des conseils, des avis de ce comité. Il y a une concertation qui est nécessaire, elle va se faire. Dans votre mémoire, vous indiquez, à plusieurs endroits que je n'ai pas le temps de relever ici, que vous souhaitez que le CPJ ne soit pas limité par des considérations partisanes, etc. D'où viennent ces inquiétudes? Avez-vous dans l'idée "partisanes" au sens de partis politiques, libéral versus péquiste? Est-ce cela, votre inquiétude? Pouvez-vous me donner des détails concernant cette inquiétude que je retrouve à deux ou trois reprises dans votre mémoire? De quoi s'agit-il exactement?

Mme Marquis: La réponse que je peux faire par rapport à cela, c'est que je n'ai pas le goût de mettre d'étiquette de parti, sauf que je voudrais dire, par ailleurs, que c'est facile, quand on a à s'entourer d'une équipe de travail, d'aller chercher des gens qui correspondent davantage à l'image qu'on se fait d'un collaborateur ou d'une collaboratrice. Par rapport à cela, je ne vous apprendrai rien en disant qu'il y a actuellement des groupes de jeunes qui sont plus revendicateurs que d'autres et je pense, en tout cas, que cela pourrait peut-être être facile, à un moment donné, d'aller chercher des personnes qui reflètent davantage notre schème de pensée que d'autres groupes qui ont peut-être développé d'autres sortes de culture, d'autres types d'idéologie avec lesquels on n'est pas nécessairement d'accord. Je ne veux pas avoir l'air de prôner quelque idéologie que ce soit, mais ce que je veux dire, c'est que cela serait important qu'il y ait des critères clairs, nets et précis et qu'il y ait des comités de sélection qui peuvent représenter des personnes de différents partis, si c'est pour aider, mais c'est beaucoup plus par rapport à un schème de pensée, par rapport à une vision d'une problématique que je souhaiterais qu'il n'y ait pas de... en cas d'écartement. (11 h 45)

M. Doyon: À ce sujet, je voudrais tout simplement vous dire, Mme Marquis, que le gouvernement fait un effort considérable pour aller au devant de cette objection que vous formuliez. Normalement - et vous le savez - les conseils consultatifs sont formés de personnes qui sont nommées par le gouvernement. Le gouvernement fait une consultation. Il la fait comme 11 le veut, auprès des organismes qu'il veut bien consulter et il procède, en vertu du pouvoir qu'il a, à nommer les membres d'un conseil quelconque, que ce soit le Conseil du statut de la femme ou un autre.

Ici, dans le cas du Conseil permanent de la jeunesse, le gouvernement va au-delà de cela et innove de façon considérable. Je conçois que le gouvernement se conserve un certain pouvoir, mais il va au-delà de ce qui s'est fait au niveau de la participation de la base dans le processus de nomination. Il forme un collège électoral. Il indique comment se forme ce collège électoral et c'est à partir de ce bassin que sont choisis les membres du conseil permanent.

Les inquiétudes que vous avez se traduisent par la question suivante: Est-ce qu'on ne sera pas porté, en tant que gouvernement ayant le dernier mot, à trouver, à un conseil permanent tel que celui de la jeunesse, des gens qui sont plus qu'autrement à notre image et qui, finalement, seront plus malléables, etc.? Mais dans ce cas-ci - je pense que cela vaut la peine de le souligner et vous serez la première à le reconnaître - le gouvernement fait un effort considérable avec le collège électoral pour aller au-delà de ce qui s'est fait au niveau des nominations pour les conseils consultatifs. Cela demeure une garantie. Cela demeure, en tout cas, un pas qui va au-delà de ce qu'on a connu jusqu'à maintenant.

Je voudrais vous rassurer en vous disant que le conseil permanent qui est proposé par le gouvernement n'est pas une bebelle politique. Cela serait aller à l'encontre des fins que nous poursuivons que de faire un comité permanent qui serait composé de gens qui partageraient, soit notre idéologie politique, soit notre façon d'approcher les problèmes. Je veux vous rassurer de ce câté-là et je veux vous assurer que ce n'est pas du tout l'intention qu'il y a là-dedans. Je pense que Mme Allaire a quelque chose à dire.

Mme Allaire: J'aimerais ajouter quelque chose là-dessus. Vous parlez beaucoup de nous rassurer. J'aime beaucoup ce terme, parce que nous parlons beaucoup avec les jeunes et nous leur disons que c'est important de rassurer l'employeur sur ce qu'ils ont à offrir, s'ils veulent qu'on les embauche.

Ce sur quoi j'aimerais qu'on me rassure - ce que vous dites est bien beau, je trouve cela bien correct - c'est davantage sur le fait que le gouvernement est vraiment prêt à faire quelque chose pour les jeunes. On est porté à parler des jeunes comme si c'était une clientèle à part, c'est comme si on les isolait et on disait: Les pauvres jeunes, il faut faire quelque chose pour eux. Mais les jeunes font partie de la société. Ce sont eux qui formeront la société de demain. Si on ne les prépare pas tout de suite, je ne sais pas ce qui arrivera demain, parce que, présentement, les jeunes ont davantage des restants. Il y a beaucoup de jeunes qui se sentent déphasés. On voit des jeunes qui ont 14, 15, 16, 17 ou 18 ans de scolarité, qui ont terminé leurs études depuis un an et qui ne travaillent pas. Ils veulent que des choses concrètes se passent. Lorsque je parle de choses concrètes, c'est partout, autant dans le domaine du travail, de l'éducation que de l'écologie. C'est dans tout le monde qui les entoure. C'est sur ce point que j'aimerais que l'on me rassure. Fera-t-on quelque chose, oui ou non? Je sais que ce n'est pas une "passe" politique. Je ne sais pas comment vous appelez cela. J'espère que ce n'est pas ça, parce qu'il y a des choses qui sont importantes à faire. On est peut-être un pays qui agit seulement lorsque les coups sont faits, mais il serait peut-être important que l'on commence à penser en termes de prévention. On est très curatif, mais ce serait peut-être bien de commencer à penser aux jeunes qui ont dix ans aujourd'hui, qui auront notre âge dans dix ans et qui auront des problèmes dans la recherche d'un emploi.

Présentement, il y a des jeunes qui souffrent. Il y a des jeunes qui ne réussissent même pas à satisfaire leurs besoins fondamentaux, c'est-à-dire de se nourrir, avoir le minimum pour vivre. On ne peut pas leur demander d'en faire davantage. J'aimerais qu'on me rassure en disant: Oui, on va faire quelque chose. Cela presse. Ce n'est pas dans dix ans qu'il faut agir.

M. Doyon: À ce sujet, les assurances que je peux vous donner, c'est que le gouvernement va poser les gestes en fonction des besoins qui auront été identifiés, qui auront été définis. Il y a quand même un certain processus qui doit être fait. Il ne s'agit pas nécessairement de jouer aux pompiers.

Mme Allaire: Cela fait longtemps qu'on identifie les besoins.

M. Doyon: Oui, je comprends tout cela. Mais le conseil permanent va quand même avoir un rôle vital à jouer, à ce moment-là, dans l'identification par des jeunes des problèmes de jeunes. Je comprends qu'on en connaît plusieurs.

Mme Allaire: ...aussi.

M. Doyon: Je comprends cela. Mais il va falloir les privilégier. Il va falloir en faire une liste. Il va falloir savoir. On ne peut pas commencer partout en même temps. Le Conseil permanent de la jeunesse va avoir un rôle vital à jouer là-dessus. Je suis convaincu qu'il y a des choses qui doivent être faites rapidement pour la jeunesse, dans des délais très courts, mais je suis aussi convaincu qu'on ne doit pas s'en aller à peu près. Il faut s'en aller et poser des gestes en fonction d'un plan dans lequel les jeunes auront eu leur mot à dire, auquel ils auront participé et auquel, d'une certaine façon, ils auront accordé leur adhésion parce que cela viendra en grande partie d'eux. C'est cela, la gageure qu'on prend. On ne prétend pas soigner les besoins et les bobos des jeunes sans que les mêmes jeunes nous aient dit: C'est par cela qu'il faut commencer. C'est là qu'est le besoin en premier. C'est un des rôles fondamentaux qui va être accordé au Conseil permanent de la jeunesse.

Pour terminer parce que je sais que mon temps est écoulé, M. le Président...

Le Président (M. Marcil): II y en a d'autres qui veulent intervenir aussi.

M. Doyon: Je veux vous remercier. Je sais que vous faites un bon travail. Je sais que Mme Marquis a probablement deux mots à dire, mais l'échange a été extrêmement intéressant. Je veux simplement vous dire que je n'ai pas voulu vous rassurer dans le sens de vous mettre du baume sur des plaies ou quelque chose comme cela, mais j'ai senti que chez vous, vous demandiez un peu: Qu'est-ce que cela vient faire? J'ai senti une certaine inquiétude quelque part. Je veux tout simplement essayer de dissiper cette inquiétude. Je ne prétends pas l'avoir fait totalement parce que cela sera fait totalement si jamais on se rencontre à nouveau dans deux ou trois ans et que vous pouvez nous dire: Vous vous souvenez qu'on s'est parlé en commission parlementaire et le Conseil permanent de la jeunesse a fait telle ou telle chose et cela a été bon. Là, on pourra être rassuré totalement, vous comme moi. Tant que cela n'a pas marché, on ne le sait pas trop.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le député de Louis-Hébert. Je reconnais le

député des Îles-de-la-Madeleine. Vous pourrez intervenir immédiatement après, madame.

M. Farrah: Merci, M. le Président. Je serai très bref. Tantôt, je vous entendais dire que vous étiez peut-être contre le fait que le ministre responsable du dossier jeunesse ait d'autres fonctions également. En l'occurrence, dans ce dossier, c'était le premier ministre. J'aimerais vous poser la question suivante. Dans l'Estrie, à Sherbrooke, vous avez un ministre de la Jeunesse au fédéral. Sans vouloir m'attarder personnellement à M. Charest parce que je ne le connais pas - mais j'ai entendu de très bonnes choses à son égard - est-ce que vous avez remarqué un changement depuis qu'il y a un ministre délégué au fédéral, en tout cas, au moins du côté fédéral, parce que vous oeuvrez dans le mouvement jeunesse depuis un certain temps? Est-ce que vous avez senti un changement important, soit en ce qui concerne les programmes ou dans le concret depuis qu'il y a eu une nomination d'un ministre?

Mme Marquis: J'ai le goût de dire que, depuis qu'il y a eu des remaniements dans la commission de l'emploi et de l'immigration en termes de programmes accessibles aux jeunes, il y a des choses intéressantes. Je ne m'aventurerai pas sur le terrain de vous dire que c'est depuis qu'il y a un ministre de la jeunesse. Je pense qu'on a effectivement un ministre de la Jeunesse qui est très près des besoins des jeunes. Je me dis: Ma préoccupation aujourd'hui, ici, c'est de m'adresser au gouvernement provincial et non pas au gouvernement fédéral.

M. Farrah: Ce à quoi je veux en venir, c'est qu'on a eu beaucoup de revendications disant qu'on devrait peut-être créer un ministère de la jeunesse...

Mme Marquis: Oui.

M. Farrah: ...au provincial. Ma question est dans le sens suivant, pour faire une comparaison, peut-être, à savoir si c'est vraiment important d'avoir un ministère de la jeunesse ou si, comme vous le dites, on devrait avoir des programmes dans divers ministères où, concrètement, sur le terrain, il y aurait des bénéfices pour les jeunes et que ce ne soit pas juste le fait de nommer un ministre. Ce n'est pas une solution comme telle.

Mme Marquis: D'accord. Je vais vous répondre de façon indirecte. Qu'il y ait un ministre de la jeunesse au Québec, pour moi, ce n'est pas extrêmement important. Ce qui est important pour nous autres, c'est qu'il y ait une politique qui touche la jeunesse et qu'il y ait une politique de plein emploi qui permette aux jeunes de devenir des adultes respectés qui vivent dans la dignité et qui ont l'impression que les gens reconnaissent ce qu'ils sont et ce dont ils sont capables. La réalité que nous vivons, ce sont des jeunes qui viennent nous voir et qui ont de la misère à manger le lendemain matin, dans certains cas. Alors l'autre monsieur - je m'excuse, je ne connais pas votre nom -disait tantôt: On veut. Je veux bien croire que vous voulez beaucoup, sauf que, lorsqu'on pense que, dans le Conseil du statut de la femme, cela a pris six ans avant qu'il y ait des dossiers exhaustifs qui sortent sur la table parce qu'on sait ce qu'est tout le "red tape", je m'inquiète de mes jeunes qui vont avoir de la misère è manger demain matin. Ma préoccupation est beaucoup plus au niveau des politiques de plein emploi qui pourraient permettre aux jeunes d'intégrer le marché du travail de façon un peu plus harmonieuse que le fait d'être obligés de le faire par des programmes qui leur permettent d'entrer par la porte d'à côté avec un PSMT - excusez le jargon -Programme stage en milieu de travail, 20 heures par semaine, avec l'impression qu'ils s'en vont quêter une "job".

Ce que je voudrais, c'est qu'on leur reconnaisse leur potentiel et qu'on leur donne la chance de vivre le processus... Tantôt, Sylvie parlait d'estime de soi. J'aurais le goût de vous référer à la théorie des besoins de Maslow qui dit, è un moment donné, qu'on a besoin de sécurité physique avant d'arriver à ce qu'on puisse parler d'estime de soi et qu'après cela on peut parler d'actualisation. Les jeunes ont l'impression qu'on leur donne des restes, nous autres, les adultes installés avec des bonnes "jobs", des privilèges et des droits acquis. C'est au nom de ces jeunes qu'on vous parle aujourd'hui et cette réalité, on la vit tous les jours et on remarque beaucoup de décrochages au niveau du cégep et de l'université parce qu'ils s'essaient et que cela ne marche pas. Ils nous reviennent et nous disent: Je ne suis pas bon parce que cela n'a pas marché chez tel employeur. On leur dit: Ce n'est pas parce que tu n'es pas bon, c'est parce qu'il y en avait 133 à côté de toi qui voulaient la même "job". Il y a une différence entre les deux. Alors, moi, je voudrais vous sensibiliser à ce problème parce que, je vous le dis, en tout cas, j'ai le goût de vous dire que, probablement, sur la colline parlementaire, vous êtes loin de cela, mais, nous autres, on le vit concrètement et moi, cela joue dans mes tripes en "p'tit pépère".

Le Président (M. Marcil): M. le ministre.

M. Gratton: Si la députée de Chicoutimi me le permet, je devrai malheureusement quitter pour une réunion

avant, possiblement, qu'on ne puisse revenir et je voudrais, dans un premier temps, remercier Mme Marquis et Mme Allaire de leur présentation et leur dire que, effectivement, la création du Conseil permanent de la jeunesse n'empêche pas le gouvernement d'agir de façon concrète. C'est déjà commencé, notamment par le biais de l'assainissement des finances publiques, en faisant en sorte que ceux qui devront payer la note, tantôt, puissent le faire dans des conditions plus acceptables que celles existant présentement. Tous les efforts que fait le gouvernement du côté du développement économique visent à créer les emplois nécessaires, à susciter un climat favorable aux investissements qui permettra la création d'emplois où les jeunes seront les premiers à en bénéficier.

Je suis très conscient qu'on doive également pallier les problèmes qui existent présentement et qu'on ne doit pas attendre la création du Conseil permanent de la jeunesse pour y voir et agir concrètement. J'ai confiance que des gestes tangibles seront posés avant même que le Conseil permanent de la jeunesse ne soit à l'oeuvre. Cependant, nous avons cru que c'était là un outil de plus qui pourrait permettre au gouvernement, justement, de ne pas se limiter au genre de programmes auxquels vous faites allusion qui sont souvent élaborés en l'absence d'une connaissance valable de la problématique. C'est dans ce sens que les recommandations que vous nous faites rejoignent les objectifs; il s'agit d'essayer de traduire cela, non pas tant dans le projet de loi 104 que dans des politiques gouvernementales qui rejoignent ces objectifs. Je pense que votre présentation aura sûrement contribué à nous éveiller encore plus à la situation et à l'urgence de la situation.

Le Président (M. Marcili): Merci, M. le ministre. Je vais passer la parole...

M. Gratton: Je m'excuse à l'avance de devoir quitter avant, possiblement, que vous n'ayez terminé votre présentation.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Je vais passer la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mme Allaire, Mme Marquis, cela me fait plaisir, au nom de ma formation politique, de vous souhaiter la bienvenue à cette commission.

Je dois dire que c'est un des avantages de la démocratie au Québec de permettre aux gens de venir nous exprimer ce qu'ils pensent fondamentalement sur certains projets de loi ou sur certaines questions. (12 heures)

Je dois féliciter particulièrement ceux et celles qui, malgré que cela ne soit pas toujours facile, le font avec sincérité et avec honnêteté. Vous avez, Mme Marquis, livré un plaidoyer vibrant en faveur des jeunes. Je suis comme vous, j'ai eu l'occasion de le dire, je craignais que cette espèce d'attention qu'on accordait à ce que le député de Louis-Hébert, le député de Mille-Îles - c'est le député de Mille-Îles, je ne voudrais pas citer le mauvais député -hier qualifiait de projet de loi majeur, de loi majeure... On est en train de créer un conseil consultatif. J'aurais préféré entendre autre chose. Une bonne politique majeure de création d'emplois m'aurait paru préférable et plus souhaitable qu'un projet de création d'un Conseil permanent de la jeunesse qui est un organisme consultatif et qui, comme vous l'avez bien dit tout à l'heure, peut prendre plusieurs mois, pour ne pas dire plusieurs années, avant d'être un peu efficace. Son efficacité repose essentiellement, il faudrait le rappeler - les jeunes l'ont fait avant vous - sur la vigueur et le dynamisme des organismes locaux et régionaux. Il n'y a rien qui nous donne cette garantie actuellement.

En fait, je dirais que, dans le projet de loi sur le Conseil permanent de la jeunesse -il serait peut-être important de le rappeler -il me semble qu'il y a une grande méprise. On a voulu apporter ce projet de loi comme étant très significatif par rapport à l'avenir des jeunes et, en fait, les jeunes ne l'avaient pas demandé. Ce n'est pas cela que les jeunes avaient demandé et ce n'est pas cela qu'ils viennent nous demander quotidiennement au cours de cette commission parlementaire. Ce qu'ils demandent, c'est un organisme bien branché sur le milieu et capable d'agir rapidement. Je dirais qu'on peut presque résumer l'essentiel des recommandations des jeunes par ces deux mots. On a besoin que cela passe à l'action. Mais, surtout, ne passez pas à l'action complètement décrochés des régions, essayez de vous accrocher un peu où le vrai monde vit.

Autrement dit, quand on examine les propositions qui sont apportées ici par les jeunes de tantôt et ceux d'hier, d'avant-hier et ainsi de suite, si on tenait compte de toutes les propositions de modification qui nous sont faites, cela n'aurait pour ainsi dire rien à voir avec un conseil permanent, quel qu'il soit, de la jeunesse ou autre, avec ce qu'on appelle en administration publique les fonctions consultatives de l'administration publique. C'est tout à fait autre chose que les jeunes viennent nous demander. C'est un peu le reproche que je faisais à la commission jeunesse du Parti libéral. Je me disais: Ils sont jeunes. Il aurait été intéressant, plutôt que d'examiner une structure qui est davantage une structure que les adultes se sont donnée pour répondre à

des besoins particuliers, qu'ils examinent ce que serait une structure qui puisse le mieux répondre aux besoins des jeunes. Je trouvais cela un peu déplorable.

J'écoutais le député de Louis-Hébert qui nous disait avoir une préoccupation pour la jeunesse. Malheureusement, les décisions du gouvernement depuis sa création n'ont pas favorisé les jeunes, non plus que les plus démunis. Je ne recommencerai pas à citer les chiffres; ils parlent d'eux-mêmes. Juste au Secrétariat à la jeunesse, on a coupé SQ % des ressources. Pour le groupe de soutien aux initiatives jeunesse, on se proposait de faire la même chose jusqu'à ce que les jeunes sortent. Pour les maisons d'hébergement pour les jeunes, on a répondu à 50 % des demandes. On pourrait continuer ainsi indéfiniment. Le ministre nous dit: On va assainir les finances publiques et cela permettra à ces gens, quand ils auront 50 ans, que cela coûte moins cher pour qu'on puisse leur payer une retraite. C'est demain matin qu'ils veulent manger, vous avez raison.

Dans ce sens, je dirais que l'exercice qu'on fait ici, en commission parlementaire, a cet avantage: il nous permet de nous rappeler, nous parlementaires, mais plus particulièrement les membres du gouvernement, à la réalité. La réalité, pour environ 50 000 jeunes itinérants - non pas 50 000 jeunes itinérants, mais, sans statut, dans la région de Montréal... Les 10 000 ou 12 000 itinérants, c'est aujourd'hui; ce n'est pas dans cinq ou six ans, quand on se sera donné une politique sur la jeunesse.

C'est pourquoi j'estime que, sur le fond, je dois dire que ce sont sensiblement les réserves et les remarques que j'avais faites au moment où on a ouvert la commission parlementaire. C'est peut-être pourquoi j'explique un peu mon malaise pour essayer de trouver et de cerner les questions particulières. Je ne pourrais donner mieux que vous le portrait de ce qu'est la situation des jeunes sans travail, qui perdent leur dignité et la confiance qu'ils pourraient avoir en eux-mêmes. Attendre un conseil consultatif pour proposer des solutions, cela m'apparaît comme une insensibilité certaine à la situation de ce que les jeunes font aujourd'hui. Également, attendre que les finances du Québec soient plus saines pour le faire, en disant: C'est ce que l'on fait pour les jeunes, je vous te dis, cela ne donne pas à manger demain matin.

Je rappellerais, par ailleurs, ce qui est malheureux aussi: le gouvernement, en même temps qu'il coupait dans certains services aux jeunes, prenait des mesures en matière d'impôt qui favorisaient nettement les plus favorisés et les hauts salariés. C'est tout cela que je déplore. En même temps qu'il faisait cela, il endettait de 24 000 000 $ par année les jeunes Québécois qui sont aux études. On sait ce que cela va donner sur dix ans. Je partage tout à fait votre préoccupation et vous l'avez signifiée de façon claire. C'est cette invitation que je voudrais faire au gouvernement en m'appuyant beaucoup sur ce qui a été dit par d'autres organismes: Avant de créer un conseil permanent, donnons-nous, donnez-vous, donnez-nous un minimum de politique de la jeunesse et, au premier titre, une politique de l'emploi. L'urgence est là. Je pense que l'urgence est également où Mme Allaire l'a située en disant qu'il va falloir qu'on apprenne à intervenir un peu en prévention. Fermons le robinet quelque part. C'est dans ce sens que je suis très sensible aux recommandations que vous avez apportées, à votre analyse, dirais-je plutôt, et à la lecture de la situation actuelle des jeunes.

J'aimerais quand même revenir un peu sur vos recommandations. Je ne le ferai pas nécessairement dans l'ordre. En page 5, vous demandez que le gouvernement donne à ce conseil consultatif les ressources qui lui permettent effectivement d'être plus efficace et les moyens financiers adéquats. Ce qu'on propose, c'est environ 850 000 $; au Conseil du statut de la femme, ils ont 3 700 000 $. Ce n'est pas exclusivement une question d'argent. Le moindrement qu'on voudra décentraliser il est certain qu'avec 800 000 $ vous n'allez pas loin. Je dirais qu'au cours des audiences qu'on a eues depuis déjà huit jours le Secrétariat à la jeunesse est revenu comme une des structures qui avaient le mieux servi la cause des jeunes dans les régions. On sait qu'il y a eu des coupures importantes. Qu'est-ce que cela signifie dans votre région? Est-ce que vous utilisez souvent le Secrétariat à la jeunesse pour des informations ou de l'animation?

Mme Marquis: Nous recevons régulièrement de l'information sur la situation des jeunes au Québec et en régions. Maintenant, je ne peux pas dire qu'on utilise les ressources matérielles parce que, comme organisme, nous avons déjà les instruments dont nous avons besoin pour fonctionner. Mais il est clair que, dans la région, le Secrétariat à la jeunesse est un instrument privilégié pour rassembler tous les intervenants qui sont préoccupés par la problématique pour statuer sur un problème ou une situation qui touche les jeunes particulièrement.

Mme Blackburn: Ce qu'a fait le gouvernement, c'est qu'il a coupé dans le Secrétariat à la jeunesse et avec l'argent ainsi dégagé il est capable de créer un Conseil permanent de la jeunesse. Si vous aviez le choix, diriez-vous qu'il aurait été préférable de maintenir des ressources financières suffisantes et même peut-être

d'en ajouter au Secrétariat à la jeunesse plutôt que de se donner une structure nationale?

Mme Allaire: Le Secrétariat à la jeunesse, c'est bien beau. Je trouve cela difficile de répondre à une question comme celle-là: Est-ce qu'on met un conseil, est-ce qu'on met un secrétariat? Ma préoccupation est qu'ils fassent vraiment quelque chose. Qui va le prendre en main? J'aurais le goût de dire que cela va vraiment dépendre de la structure qu'on va lui donner. Je fais confiance aux gens pour dire qu'il faut qu'on ait une structure qui répond à des besoins qui pressent. Que cela soit le Secrétariat à la jeunesse ou un autre, cela n'a pas vraiment d'importance pour moi, je vais être bien sincère avec vous. Mais je me dis qu'il y a déjà le Secrétariat à la jeunesse qui est en place. Logiquement, cela doit prendre moins de temps et moins de ressources si on l'équipe comme il faut pour répondre à ce besoin que si on commence à repenser à la roue et former un autre comité et ci, et ça. La structure et toute la bureaucratie, c'est lourd, c'est très lourd. J'ai 26 ans et depuis l'âge de 20 ans que je m'intéresse aux problèmes des jeunes, entre autres, étant donné que je suis une jeune, il ne s'est pas fait grand-chose. Je ne sais pas si mes enfants vont voir cela un jour. Je ne sais même pas si je veux des enfants avec ce qui se passe présentement. Que ce soit l'un ou l'autre, mais qu'il se passe quelque chose!

Mme Blackburn: Donc, vous dites de façon claire dans votre mémoire que ce n'est plus le temps de la consultation. Tout est connu, on connaît la problématique. Je reprends quelques-uns de vos propos tantôt. La problématique est connue, les solutions ont été proposées, le temps de la consultation est finie, ce que les jeunes ont à dire, ils l'ont dit depuis longtemps, que ce soit en éducation, par rapport au syndicalisme, au patronat, et ainsi de suite. C'est le temps de l'action. En fait, c'est ce que je résume. Je voudrais revenir sur votre septième recommandation. Vous dites: "de passer à l'action et de mettre en oeuvre des moyens concrets pour aider les jeunes adultes à faire leur place dans le monde du travail, et ce avec dignité". Est-ce que vous avez des hypothèses? Pourriez-vous nous dire ce qui pour vous... Là, on le sait bien, vous nous avez dit que c'est le travail. Quels sont les outils pour faciliter ou favoriser cela le plus rapidement possible? Vous avez une expérience intéressante. Mais si on vous disait: Demain, vous avez à vous imaginer certaines voies de solution, elles iraient de quel côté?

Mme Allaire: Quand on parle de moyens concrets pour nous, entre autres, bien sûr ce qui entre dans cela, c'est le plein emploi. Mme Blackburn: D'accord.

Mme Allaire: On y aspire, on y croit. Je me dis: Si au moins on commence à y croire, c'est déjà bon, on va peut-être l'atteindre un jour, il y aurait de la place pour cela. On a assez d'idées, on a assez d'imagination pour créer cela, on a les ressources économiques et financières et je crois à cela pleinement, des mesures sociales aussi pour permettre au moins aux jeunes le minimum de vie ou de survie dans certains cas. Donc, des moyens concrets. Je ne peux pas vous mettre un nom de programme, mais cela pourrait toucher à cela, entre autres, des politiques de plein emploi et des programmes pour aider les jeunes à intégrer le marché du travail, pas juste des bonbons, pas juste des petits nanans, et ce que ce soit pour toutes les classes de jeunes. On a des beaux programmes - je pense à Soutien à l'emploi scientifique, qui est un très beau programme, très bien fait, sauf que cela s'adresse à une classe assez élitiste, je veux dire, des jeunes avec un DEC scientifique spécialisé et des jeunes avec un bac en génie, etc. C'est un beau programme, sauf que cela serait le fun que toutes les classes de jeunes puissent profiter d'un programme aussi "cute" que cela et qui donne d'aussi bons résultats, parce qu'il donne de très bons résultats; donc, qu'il soit équitable pour toutes les classes de jeunes, non pas qu'on endorme, qu'on engourdisse les jeunes qui sont plus défavorisés.

Mme Blackburn: Est-ce que vous avez réfléchi... Je sais qu'il se fait des réflexions sur la question de savoir s'il ne faudrait pas légiférer en matière de travail, parce qu'on estime dans la plupart des études les plus récentes que le chômage n'est plus conjoncturel. Le chômage des jeunes ce n'est pas vrai que c'est à cause d'une conjoncture économique. C'est là pour rester, il est d'ordre structurel. La seule façon d'agir sur la structure, c'est par des législations qui pourraient toucher, par exemple, la durée de la semaine de travail, le temps supplémentaire, le travail à temps partagé, un certain nombre de mesures de cet ordre. Est-ce que vous y avez déjà réfléchi?

Mme Marquis: Je peux vous répondre de deux façons et j'ai même le goût de vous référer à ce document qui est le rapport final de la commission consultative sur le travail, commission où j'ai siégé au nom d'un autre groupe socio-économique. J'ai le goût de vous dire par rapport à cela qu'il y a des choses extrêmement intéressantes qui sont sorties de cela et il y a énormément de demandes. Quand, tantôt, on référait à des voeux, à des souhaits qui ont déjà été

exprimés, je pense qu'on pourrait peut-être sortir ce document qui n'a pas été beaucoup utilisé. Il y aurait, en tout cas, des pistes de solutions dans cela.

Je vous répondrais aussi par le biais d'une initiative qui a été mise de l'avant l'an passé dans la région de Sherbrooke et qui s'appelle le Conseil régional de l'emploi de l'Estrie. Il avait pour mandat d'explorer des nouvelles politiques de temps de travail et on devait, entre autres, sensibiliser les employeurs à des nouvelles pratiques du style travail partagé, retraite anticipée, et tout, et tout. Ce qui s'est passé malheureusement - je fais partie du conseil d'administration -c'est que notre mandat a été carrément coupé, c'est-à-dire notre budget, notre subvention a été coupée sous prétexte qu'on n'a pas encore créé un seul emploi. Personnellement, je suis convaincue que c'est une démarche qui va aboutir à moyen et à long terme. Pour moi, c'était un moyen parmi d'autres qui pourrait permettre de développer de nouvelles mentalités face au travail. Dans ce sens, je pense que c'est un moyen qui ne donnera peut-être pas de résultat concret le mois prochain, mais qui tend vers des nouvelles pratiques. Par rapport à cela, j'ai le goût de dire, en tout cas, pour répondre plus précisément à votre question, que je ne sais pas s'il va falloir arriver à une législation dans ce sens, mais ce que je sais, par exemple, c'est que toutes les parties impliquées - et quand je dis parties impliquées, je dis beaucoup secteurs patronal et syndical - par rapport à de nouvelles pratiques ont tendance énormément à dire: Oui, oui, oui, c'est bien beau, les nouvelles pratiques de temps de travail, mais ne me demandez pas, par exemple, de concéder un pouce de privilège, parce que mon plein salaire, je veux bien le garder et tous les privilèges qui vont avec. Ce que je vous dis, je ne sais pas si cela prendra une législation, mais cela prendra un réaménagement et une nouvelle conscience collective par rapport aux problèmes. Si on est poigné avec le chômage d'une façon chronique, on devra développer de nouvelles attitudes et de nouveaux aménagements, si l'on veut partager un peu notre richesse. (12 h 15)

De la manière que cela va, il y a deux pôles qui s'en vont comme cela. Il y a un clan de personnes qui vivent très confortablement et il y a l'autre clan qui s'appauvrit de plus en plus.

Mme Blackburn: Vous proposez, à la huitième recommandation, la création d'un sous-comité rattaché uniquement à l'emploi. Au moment 06 on ouvrait cette commission parlementaire, je suggérais au gouvernement qu'en l'absence de toute politique et de toute priorité d'action dans le dossier jeunesse il serait important qu'on inscrive dans le projet de loi 104, qu'on prévoit la création de deux commissions; une commission de l'emploi et une commission de l'adolescence.

Une commission de l'emploi, on sait très bien pourquoi. Cela m'apparaissait majeur. Vous le partagez également. Une commission de l'adolescence, parce que les problèmes que vivent les jeunes, soit des problèmes de mésadaptation, le suicide, la drogue et le décrochage scolaire, prennent leur origine beaucoup dans l'enfance et dans l'adolescence.

Une des meilleures façons d'intervenir était de créer cette commission permanente, car une commission a plus de pouvoir qu'un comité et qu'elle soit déjà prévue dans la loi. Vous proposez un sous-comité rattaché uniquement à l'emploi que vous verriez davantage en rapport avec le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Ne voyez-vous pas quelque chose d'un peu plus large qui aurait aussi des rapports avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, le monde de l'éducation ou les affaires sociales?

Mme Allaire: C'est vraiment un ensemble. On veut un comité qui s'occupe de l'emploi. Quand on pense aux jeunes, on pense automatiquement emploi. Tout se relie à l'emploi. Quand tu as un emploi, tu peux penser à faire autre chose après, autant au niveau culturel, éducationnel ou autre. Logiquement, je me dis qu'il faut qu'il y ait aussi un rapport avec tous les autres ministères. Si on parle de faire quelque chose pour les jeunes, c'est global, ce n'est pas parcellaire.

Mme Marquis: Je pourrais rajouter ceci; Quand on voit dans le projet de loi que le conseil relève directement du premier ministre, n'y aurait-il pas lieu de penser qu'il pourrait y avoir un autre répondant quelque part? Je ne sais pas lequel est le plus pertinent. Je ne connais pas suffisamment la machine pour être en mesure de me prononcer là-dessus, mais ne pourrait-il pas y avoir quelque part une personne ayant plus de disponibilité qui pourrait être le répondant et qui pourrait s'occuper de refiler les dossiers concernant les jeunes aux différents ministères, à partir du moment où c'est...

Mme Blackburn: Le comité auquel vous faisiez référence tout à l'heure, c'était le comité de suivi à l'emploi qui avait été mis sur pied après les symposiums. Est-ce que c'était cela?

Mme Marquis: Non, pas du tout. Comme je le disais tantôt, tout ce que je souhaite, c'est qu'il y ait une personne qui soit responsable de ce dossier et qui achemine les demandes à l'intérieur des

différents ministères.

Mme Blackburn: J'ai mai formulé ma question. Tout à l'heure, vous faisiez allusion à un comité dont on a coupé les ressources sous prétexte qu'il n'avait pas créé d'emploi.

Mme Marquis: Le Conseil régional de l'emploi de l'Estrie, qui était subventionné par le Secrétariat à l'emploi et à la concertation et par le MMSR. C'était une initiative dans la région de Sherbrooke pour trouver de nouvelles pratiques.

Mme Blackburn: Mon temps est écoulé. Je voudrais vous remercier de votre participation aux travaux de cette commission. Je pense bien que le gouvernement ne peut qu'être sensible à l'appel que vous venez de lancer.

Je voudrais rappeler brièvement les quelques dernières phrases de votre mémoire. Vous dites - je trouve cela important et je me permets de le rappeler parce que cela restera consigné aux procès-verbaux: "Nous ne voulons pas d'un CPJ qui reprendra l'étude des besoins tant de fois exprimés par les jeunes, auxquels le gouvernement n'a pas réagi véritablement. Nous ne voulons pas que le gouvernement utilise le CPJ comme "bonbon" à l'égard des jeunes alors que ceux-ci et celles-ci vivent des problèmes aigus qui exigent un traitement en profondeur. "Nous demandons au gouvernement de s'attaquer dès maintenant aux problèmes qui sont déjà sur la table. Le temps de la consultation est terminé. Nous voulons de l'action!"

J'espère deux choses; je pense que le gouvernement va vouloir qu'il y ait un Conseil permanent de la jeunesse, mais je souhaite, comme vous, que cela ne le distraie pas de ses obligations de voir à trouver des solutions dans les meilleurs délais.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée. Vous avez 30 secondes, M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Ce n'est que pour remercier les intervenants de nous avoir présenté fort éloquemment le portrait de ce qu'ils vivent. D'ailleurs, cela a été dit et je pense qu'il faut le répéter, les problèmes de la jeunesse ne datent pas d'hier, le gouvernement précédent a été neuf ans au pouvoir. On s'est retrouvé dans une situation que vous avez vécue et que vous avez vue qui est allée en empirant. On a essayé toutes sortes de cataplasmes en passant par le bon d'emploi, en passant par toutes sortes d'inventions qui n'ont pas donné de résultat.

Notre gouvernement a une autre approche, une approche fondamentale où il s'agit de ne pas créer les emplois artificiellement. Il s'agit de créer un climat économique avec des investissements privés qui vont aller chercher la jeunesse qui est capable de remplir les emplois, qui est capable de produire et de créer cette richesse collective qui est là. C'est notre approche.

Nous ne croyons pas que nous allons régler le problème d'une autre façon, d'une façon permanente. Nous pouvons nous faire reprocher que les résultats ne sont pas aussi rapides qu'ils devraient l'être, mais une chose est sûre, c'est que les résultats que nous atteindrons seront assis solidement et les problèmes de la jeunesse, ce n'est pas ce gouvernement-ci qui les a créés, contrairement à ce que peut croire la députée de Chicoutimi. Ils ont été vécus pendant des années et les neuf années précédant notre prise du pouvoir...

Le Président (M. Marcil): Si vous voulez conclure.

M. Doyon: ...n'ont pas été des années plus roses pour la jeunesse. Je voudrais tout simplement assurer les intervenants que leurs cris ont bien été entendus, que nous allons continuer de poser les gestes qui s'imposent. Nous allons le faire avec conviction et dans la plus grande efficacité possible. Je comprends que vous faites un travail extrêmement utile, absolument nécessaire et je vous encourage à continuer et je vous encourage, d'ailleurs, à continuer de faire valoir votre point de vue et de dire les choses telles que vous les dites. Je sais que je n'ai pas besoin de vous le dire, que vous allez le faire et c'est extrêmement utile et votre intervention est prise de très bonne part. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député de Louis-Hébert. Mme Marquis et Mme Allaire, merci beaucoup de vous être présentées à cette commission. Soyez assurées que vos commentaires et votre réflexion, de même que vos recommandations seront sérieusement analysés. Merci beaucoup. Je suspends les travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 12 h 23)

(Reprise à 16 h 15)

Le Président (M. Després): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente des institutions reprend ses travaux. Nous entendrons trois groupes cet après-midi. Tout d'abord, nous entendrons le Regroupement régional des maisons de jeunes de l'Estrie, ensuite, la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie et, finalement, les

Productions québécoises Pro-Art.

J'inviterais tout d'abord le premier groupe, le Regroupement régional des maisons de jeunes de l'Estrie, à se présenter devant la commission, s'il vous plaît.

J'inviterais maintenant te responsable du groupe à présenter son équipe, s'il vous plat t.

Regroupement régional des maisons de jeunes de l'Estrie

M. Pitre (Daniel): Merci de nous accueillir à votre commission parlementaire. J'aimerais d'abord vous présenter Alain Roy, qui représente la Maison des jeunes d'Asbestos. Il y a également Richard Plante, qui représente la Maison des jeunes du Val Saint-François, Lyne Gendron, de la Maison des jeunes de Windsor, et moi-même, Daniel Pitre, de la Maison des jeunes de Danville.

Le Président (M. Després): Je voudrais vous rappeler que vous avez vingt minutes pour faire votre exposé, après quoi il y aura discussion avec la députation ministérielle et l'Opposition. Chacun aura 20 minutes pour discuter de votre mémoire. La parole est maintenant à vous.

M. Pitre: Nous sommes le porte-parole du Regroupement des maisons de jeunes de l'Estrie dont un des principaux mandats consiste à mettre en commun les ressources disponibles afin de favoriser l'acquisition des connaissances relatives aux aspects juridique et politique de la jeunesse.

Nous devons avouer que si le gouvernement nous avait demandé ce qu'il pourrait faire pour améliorer la situation des jeunes au Québec, nous n'aurions sans doute pas inscrit sur notre liste de priorités le Conseil permanent de la jeunesse.

Selon nous, un tel conseil fonctionnant selon les dispositions prévues par le projet de loi 104 ne pourrait être crédible à la fois auprès des autorités gouvernementales qu'il conseille et auprès des groupes et intérêts qu'il représente. Ainsi, nous demandons que soit interrompu le processus en cours devant mener à la création du Conseil permanent de la jeunesse.

Nous vous prions donc de ne pas tenir compte des recommandations que formule le résumé de notre mémoire. Cela est dû à une erreur qui s'est glissée lors de la production du document, le stress du délai aidant.

Veuillez également considérer que les notes de la page 11, c'est-à-dire celles qui suivent notre recommandation d'interrompre le processus, ne sont que des indications pour alimenter une démarche possible visant à supprimer les lacunes du projet de loi. Nous ne pouvons pas nous permettre de discuter ici d'un scénario possible. Ce n'est pas notre priorité à cette commission.

Même si le Conseil permanent de la jeunesse n'a jamais constitué pour nous une revendication, nous nous sommes intéressés au projet dans la mesure où la voie du terrain politique peut faciliter la résolution de problèmes relatifs à la jeunesse. Très vite, cependant, la déception s'est installée. La situation nous est même apparue totalement déconcertante. D'abord, à cause de l'inconvenance de la démarche entourant la diffusion du projet de loi: une documentation pauvre, des délais inhumains compte tenu de l'envergure du problème et une stratégie de consultation boiteuse. Ensuite, par le contenu même de la loi 104 qui ne respecte pas, somme toute, quelques principes démocratiques assurant une représentation efficace.

Nous vous faisons part de ces constatations dans l'espoir d'améliorer le sort de la jeunesse québécoise. Nous affirmons donc que le Conseil permanent de la jeunesse tel que présenté sous la forme du projet de loi 104 ne peut être crédible à nos yeux en raison des lacunes recensées à trois différents niveaux, que vous pouvez retrouver dans le mémoire, soit la représentativité comme premier point, l'autonomie et la légitimité comme deuxième point et, comme troisième point, l'impact sur les structures déjà existantes. C'est dans cet ordre que seront abordés les éléments de notre présentation.

Mme Gendron (Lyne): En effet, le projet de loi 104 a soulevé plusieurs interrogations dans notre milieu, notamment pour ce qui est de la représentativité au sein du Conseil permanent de la jeunesse. Plusieurs points retiennent notre attention, en voici donc la nomenclature.

Premièrement, le mode de nomination des membres du collège électoral et du Conseil permanent de la jeunesse ne permet à aucun organisme de jeunes de participer à leur choix. Notamment, certains articles énumérés dans notre mémoire montrent que le gouvernement a juridiction sur la composition de ce Conseil permanent de la jeunesse. Comment pourra-t-on alors s'en remettre à des gens que nous n'avons même pas choisis? Est-ce que notre rôle se limitera à distribuer des extraits de procès-verbaux pour être, par la suite, complètement évacués de tout le processus? Est-ce là un reflet de la perception que nos dirigeants entretiennent vis-à-vis des groupes de jeunes et un avant-goût du rôle que nous serons appelés à jouer au cours des années à venir?

Cela nous amène à nous interroger aussi sur la représentativité régionale, d'une part, et sectorielle, d'autre part. Dans le projet de loi qui nous a été remis, il n'y a aucun organisme formel de liaison avec les régions qui nous est proposé. Bien sûr, notre crainte est de voir les intérêts du CPJ se

concentrer dans les milieux urbains, et ce, de façon plus prioritaire. À cela s'ajoute le fait de ne pas pouvoir compter rencontrer les membres de ce conseil dans nos milieux régionaux respectifs. Quel sera donc le labyrinthe emprunté afin d'obtenir une audience auprès de ce Conseil permanent de la jeunesse?

En ce qui concerne la responsabilité sectorielle, le fait que les candidats auront à recevoir l'appui de trois organismes dont deux de secteurs différents afin d'être admissibles à une nomination nous semble quelque peu farfelu. Nous imaginons difficilement de quelle façon la sélection des candidats pourra être faite tout en accordant une importance à la représentativité des différents groupes de jeunes au sein du Conseil permanent de la jeunesse. Il en est de même de l'authenticité et de la reconnaissance des appuis des organismes qui auront été sollicités par les candidats. Dans quelle mesure ces organismes seront-ils vraiment aptes à recommander un candidat? Seront-ils vraiment en mesure de juger de la pertinence du mandat donné au Conseil permanent de la jeunesse? Il en ressort donc une forte probabilité de voir apparaître une élite provinciale sans antenne régionale au sein du CPJ, puisqu'il n'aura pas été élu par la base, c'est-à-dire par les jeunes eux-mêmes.

Nous déplorons sincèrement le manque d'attention porté aux regroupements et aux associations de jeunes dans l'élaboration de ce projet de loi. Si le gouvernement en place avait été plus soucieux de préserver un certain niveau de qualité de vie démocratique au sein de la communauté, il se serait préoccupé davantage des associations afin de les impliquer plus directement dans les questions qui nous concernent. En plus, si le gouvernement avait consulté directement les jeunes que nous représentons, il aurait été à même de constater que le projet de loi est incomplet, en ce sens qu'il ne tient pas compte de la représentativité des différents groupes de citoyens. À titre d'exemple, nous voudrions vous faire remarquer qu'une attention particulière aux groupes d'âge aurait dû être prévue. Il faut être conscient qu'il existe un écart entre la réalité des gens de 30 ans et celle qui est vécue par les jeunes de 15 ans.

D'autre part, nous considérons essentiel d'assurer une représentation de la gent féminine au sein du Conseil permanent de la jeunesse. En fait, les citoyennes ont encore des intérêts à défendre et à promouvoir.

En terminant, nous tenons à vous faire savoir que nous doutons sincèrement que trois travailleurs permanents et huit bénévoles puissent arriver à combler les exigences du mandat donné. Par conséquent, de par son contenu le projet de loi actuel n'offre pas de cadre d'action nous permettant de nous y reconnaître.

M. Roy (Alain): Tel que mentionné dans notre mémoire, nous doutons de l'autonomie que possédera le Conseil permanent de la jeunesse dans l'exercice de ses fonctions. Au départ, nous constatons le peu de place réservée aux associations et aux groupes jeunesse dans la formation du CPJ. Nous croyons que le ministre responsable devrait laisser plus d'espace de manoeuvre aux jeunes en ce qui a trait à la sélection des membres qui les représenteront.

Un autre point que nous soulevons, c'est que les membres du conseil n'auront pas nécessairement libre cours dans le choix des études ou des recherches qu'ils voudront effectuer. Ainsi, ils devront demander la permission au ministre responsable avant de traiter chaque cas qu'ils jugeront important et prioritaire. De plus, le - ministre responsable pourra exiger du CPJ de faire les études ou recherches que lui-même jugera prioritaires. À ce sujet, nous croyons que les membres du CPJ devraient avoir libre choix des questions à traiter pour le bien de la jeunesse qu'ils représentent et, ainsi, donner leur avis au ministre même si ces questions vont à l'encontre de l'intérêt du ministre, à moins, naturellement, que le CPJ ne représente le gouvernement auprès de la jeunesse.

Il faut aussi se demander comment les organismes et les groupes jeunesse seront entendus par le gouvernement avec un CPJ en fonction. Nous pouvons constater que les associations de jeunes occupent peu d'espace dans la démarche visant à mettre sur pied le CPJ. Est-ce que cette politique qui consiste à faire jouer des rôles de second plan aux organismes jeunesse se poursuivra? Rien ne nous permet de croire le contraire. Ces associations continueront de revendiquer leurs droits comme elles le font déjà depuis plusieurs années. Est-ce que le gouvernement leur imposera une étape de plus à franchir en les renvoyant au CPJ ou s'il décidera enfin de les écouter?

II ne faudrait pas perdre de vue qu'un conseil représentant la jeunesse devra coopérer avec les organismes et les groupes jeunesse pour être efficace. Encore faudra-t-il que ces derniers soient toujours en place, fonctionnels et autonomes. Nous doutons fortement de la légitimité du Conseil permanent de la jeunesse puisque ses membres auront un mandat limitatif. Comment pourront-ils prendre connaissance des différents dossiers apportés par les nombreuses associations jeunesse et, par la suite, les traiter efficacement face au gouvernement en seulement deux ans?

En ce qui concerne le dossier des maisons de jeunes, nous défendons nos intérêts auprès de l'appareil gouvernemental depuis plus de dix ans déjà sans pour autant

avoir obtenu les résultats escomptés. Alors, comment le CPJ réussira-t-il un tel tour de force pendant un mandat aussi court? Donc, quelle sera la marge de manoeuvre du CPJ?

M. Plante (Richard): L'impact au niveau des structures déjà existantes. Les mécanismes de concertation et d'échange existent déjà au sein de la majorité des organismes jeunesse du Québec et se développent continuellement avec l'accumulation des années et l'expérience acquise. Ces structures se spécialisent et approfondissent une réflexion qui colle à la spécificité de leurs membres. C'est le cas du Regroupement provincial des maisons de jeunes. Incidemment, la création du CPJ suscite chez nous certaines craintes en ce qui concerne l'impact de ce dernier sur les structures déjà existantes.

Permettez-nous de vous exprimer plus spécifiquement nos phobies à ce niveau. Première phobie: nous craignons que le gouvernement ne se déresponsabilise par rapport aux revendications des différents mouvements jeunesse et, par le fait même, qu'il refuse de les entendre et les renvoie au CPJ. Ce dernier servira-t-il alors d'entrepôt pour les exigences des groupes de jeunes qui seront empilées et traitées à la pièce selon les priorités du premier ministre? La deuxième phobie, c'est que nous craignons aussi que le Regroupement des maisons de jeunes du Québec, qui possède une structure solide, n'obtienne plus l'attention nécessaire à son évolution auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux. Il faut savoir aussi que ce regroupement et ses membres réclament depuis belle lurette la création d'une structure consultative entre le MSSS et les maisons de jeunes en ce qui a trait à une politique de financement et à son application ultérieure. Cela ne nous a jamais été accordé.

Troisièmement, compte tenu que le gouvernement ne prévoit pas la nomination d'un ministre de la jeunesse pour appuyer les revendications du CPJ, nous doutons de la pertinence et de l'efficacité d'un tel conseil. Le CPJ sera-t-il une structure rattachée à rien et à tout?

Quatrièmement, nous nous interrogeons à savoir si le gouvernement a un intérêt réel pour la jeunesse ou bien s'il veut se donner bonne conscience. Est-ce que le CPJ constitue un bonbon pour compenser les coupures effectuées au sein des maisons de jeunes et des autres organismes jeunesse? Comment accorder une crédibilité à la mise sur pied d'une structure voulant favoriser l'expression des jeunes si on coupe les jambes aux associations d'où cette expression peut émaner?

Finalement, il semble évident que pour nous, le Regroupement des maisons de jeunes de l'Estrie, ce projet de loi visant la création d'un Conseil permanent de la jeunesse constitue une étape inutile à franchir, tant - au niveau de nos revendications que de la reconnaissance que nous tentons d'obtenir depuis des années. Au moment où on se parle, nous sommes davantage préoccupés par notre situation précaire car nous ignorons totalement si le mois prochain nous obtiendrons les subsides nécessaires pour payer le loyer et le téléphone de nos locaux respectifs.

Bref, le spectre des coupures au ministère de la Santé et des Services sociaux nous préoccupe davantage que le Conseil permanent de la jeunesse. A-t-on demandé aux jeunes quels sont leurs vrais besoins? C'est ici que se termine notre discours. (16 h 30)

Le Président (M. Després): Merci, M. Plante. Je vais maintenant céder la parole au côté ministériel, soit au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Merci, M. le Président. M. Roy, M. Plante, Mme Rendron et M. Pitre, c'est avec beaucoup de plaisir que nous vous accueillons aujourd'hui. Il est bien évident -et vous l'avez démontré très clairement -que vous n'êtes pas trop favorables à la mise en place du Conseil permanent de la jeunesse. Sauf que je pense que ce qu'il y a de bon en démocratie, c'est quand même qu'on peut se faire entendre. Je vous dis également qu'on peut apprécier vos critiques, jusqu'à un certain point du moins. Il faut admettre également que jusqu'à un certain niveau vos critiques peuvent être justes. Mais la première chose que je déplore c'est que vous ne faites aucunement mention du mémoire que vous nous avez présenté. Je pense que c'est difficile de suivre le dossier, en ce qui nous concerne en tout cas, parce qu'on travaillait par rapport à un mémoire et vous nous arrivez ici avec un changement de cap radical. Vous indiquez quand même en guise d'entrée de jeu, en introduction, que vous êtes en désaccord avec la formation du CPJ. Ce que je déplore dans votre approche, c'est le pessimisme que vous démontrez. Nous n'avons jamais dit que la création du Conseil permanent de la jeunesse réglerait tous les problèmes. Ce qui est important, en plus, c'est que c'est un complément. Cela n'enlève rien aux organismes, aux institutions ou aux outils auxquels le député de Mille-Îles faisait allusion hier. C'est un outil additionnel dans le coffre à outils. Le ministre l'a mentionné à maintes reprises, ce n'est pas cela qui va régler tous les problèmes. Nous pensons que l'addition de cet outil peut nous aider et peut aider les jeunes surtout -c'est cela qui est important - à voir éventuellement le bout du tunnel. Comme vous le mentionniez dans vos revendications, cela fait au-delà de dix ans que vous revendiquez vos droits et même votre

reconnaissance, vous en faites état dans votre mémoire. À ce moment-là, pourquoi ne pas donner une chance au Conseil permanent de la jeunesse qui se veut très objectif en soi? Cela sera peut-être cet outil qui vous permettra effectivement de défendre vos droits et d'être reconnus à votre juste valeur. C'est cet aspect que vous ne dégagez pas dans votre intervention et, honnêtement, j'aime moins cela. En fin de compte, je vois plus votre dans intervention des critiques que des suggestions que vous pourriez nous faire. On l'a dit à maintes reprises, ce n'est pas nous qui avons la vérité non plus. La raison pour laquelle nous avons une commission parlementaire, c'est justement pour bonifier le projet de loi afin qu'il puisse être mieux adapté aux prolèmes de la jeunesse.

Mme Gendron faisait allusion è la façon dont on pourrait avoir une représentativité des hommes et des femmes, par sexe. Cela peut être très juste comme argument. Ce que nous voulons, ce sont vos suggestions pour bonifier ce projet de loi. Honnêtement, je trouve qu'il faut avoir du courage pour venir faire des critiques comme vous le faites. Je peux vous en être reconnaissant jusqu'à un certain point, sauf que d'autre part j'aimerais que vous ayez une vision plus optimiste et nous présentiez des suggestions. Ce matin, justement, un groupe d'une polyvalente de la région de l'Estrie nous indiquait également qu'une représentativité de chaque sexe était peut-être importante, hommes et femmes. L'âge aussi; que fait-on des moins de 18 ans, et tout? Je pense que c'est une approche beaucoup plus positive.

Ce que j'aimerais vous demander, ce sont des suggestions concrètes. Parce que, en fin de compte, on ne vous enlève rien. C'est un nouveau complément, un nouvel outil qu'on veut vous donner. Que nous suggérez-vous pour bonifier ce projet de loi?

M. Pitre: La raison pour laquelle on n'a pas vraiment de suggestions - vous dites que nous n'avons que des critiques - c'est qu'on part du fait qu'on aurait aimé qu'il y ait beaucoup plus de temps consacré à la consultation pour qu'on ait vraiment du jeu pour étudier la question et consulter les personnes à la base, surtout entre nous. Nous, les représentants des maisons de jeunes de l'Estrie, nous n'avons pas eu vraiment le temps de consulter tous nos membres pour que cela soit intéressant d'exploiter différentes avenues et de voir quel serait vraiment l'organe essentiel qui pourrait faire le pont entre les associations et le gouvernement. C'est la raison pour laquelle on ne voulait pas trop s'avancer non plus. On aurait aimé avoir beaucoup plus de temps pour recueillir toutes les données, toutes les informations nécessaires, les traiter, les soumettre aux différents intervenants dans notre milieu et arriver vraiment avec le texte le plus objectif possible pour et vous le présenter. On déplore le fait de ne pas avoir eu le temps de faire cela.

Deuxièmement, je voudrais répondre au deuxième aspect, le lien entre... Vous dites que le Conseil permanent de la jeunesse est un outil, je pense que cela serait intéressant de le vérifier. On aurait aimé voir de quelle façon le lien entre cet outil, ce nouvel outil, et les associations et les différents organismes du Québec se fait. De quelle façon se font les liens? On peut voir un danger. Si le ministre peut dire au Conseil permanent de la jeunesse d'étudier tel cas, qu'il y a une étude à faire sur tel aspect et que nous en même temps nous apportons une chose qui devrait être étudiée par le gouvernement à ce moment, qui a la priorité? Cela peut ne pas être la même chose, il peut peut-être y avoir des délais ou des retards. C'est un peu cela.

Le Président (M. Marcil): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: La consultation qu'on a eue a quand même été très positive. Mais, effectivement, au sujet du projet de loi peut-être que ce n'était pas clair que les conseils et les mémoires comme tels provenant du CPJ, dans le sens suivant... Peut-être que vous avez raison quand vous dites: Bon, c'est peut-être le ministre responsable qui va demander des directives au CPJ et non pas l'inverse. D'accord? Juste pour dire combien la consultation peut être positive - le ministre l'a confirmé à maintes reprises - effectivement, il y aurait peut-être lieu d'ajouter un article dans le projet de loi pour confirmer que le CPJ peut se donner des mandats. En fin de compte, de sa propre initiative il pourrait apporter des mandats au ministre et que cela fonctionne dans les deux sens. Non pas que seul le ministre demande des avis au Conseil permanent de la jeunesse mais aussi l'inverse. C'est dans ce sens, je pense, que la consultation est très positive. On la voit d'une façon positive également parce que -le ministre l'a confirmé et je pense qu'on peut s'engager dans ce sens - il va y avoir des modifications dans le projet de loi pour justement prouver que ce n'est pas une consultation bidon qu'on a ici. Il y a eu des points très intéressants qui ont été apportés. Je vous donne un exemple; il va y avoir un article dans le projet de loi pour que le lien se fasse des deux côtés, non pas juste -excusez l'expression anglaise - "one-way". Il faut que cela aille dans les deux sens. C'est dans cet esprit que je voulais vous orienter un peu dans le sens que cela peut être plus constructif d'apporter des suggestions. Comme on l'a toujours dit, et comme le ministre l'a dit d'ailleurs, on n'est pas parfait. Il y a peut-être lieu d'apporter des

améliorations et c'est le but de la commission.

M. Plante: J'aurais le goût de vous répondre un peu par rapport à ce que vous soulevez. Bon, vous trouvez qu'on est peut-être un petit peu négatifs par rapport à cette commission. C'est sûr qu'au départ on reflète la position de nos membres et c'est évident qu'on opine dans ce sens, c'est-à-dire qu'on ne sait pas à quoi s'attendre chaque année. On est toujours dans l'insécurité. On reflète un peu ce vécu. D'un autre côté, pour imager un peu, la loi 104 pour nous c'est comme si j'habitais dans un bungalow, qu'on m'annonce demain matin qu'on construit un immeuble devant chez moi et que je n'ai pas le choix qu'il se construise ou pas. Aussi bien que je décide de la couleur des murs tant qu'à être pris avec. C'est un peu ce principe. Nous n'avons pas nécessairement des suggestions à faire, parce que cela ne vient pas nécessairement de nous cette idée.

Comme disait Daniel au début, si vous nous demandez ce qu'on veut faire pour les jeunes, ce n'est sûrement pas cela qu'on verrait comme idéal, nous, les maisons de jeunes. Alors, on est ici pour dire: Bien, au moins, pour les murs, mettez-les comme cela au pis aller; pour les fenêtres, essayez au moins de les faire assez jolies. C'est ce principe qu'on vient de voir ici.

M. Farrah: De toute façon, en terminant, M. le Président, ce n'est pas que je doute de votre bonne foi ni de votre légitimité, loin de là, mais je veux juste dire que la majorité des mémoires étaient quand même très réceptifs, très positifs vis-à-vis du CPJ, Sans être parfaits... Il y avait des revendications mais dans l'ensemble c'était quand même très positif quant à la création du Conseil permanent de la jeunesse. De toute façon, sur ce je n'irai pas plus loin.

Je vous remercie, au nom de ma formation politique, de la présentation de votre mémoire et de votre courage. Comme je vous l'ai dit, ce n'est pas facile d'arriver et de critiquer. C'est quand même un rôle qu'on doit tenir de temps à autre. Je vous remercie encore une fois et je passerais la parole à M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Je remercie M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Mme la députée de Chicoutimi,

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je pense qu'il y avait un intervenant qui voulait répliquer. J'ai cru voir une main levée distraitement, M. le Président. Cela va?

Une voix: C'est fait, madame.

Mme Blackburn: Bien, je vous remercie. Mesdames, messieurs, cela me fait plaisir au nom de ma formation politique de vous accueillir à cette commission parlementaire. Comme le rappelait tout à l'heure le député de Mille-Îles, effectivement, vous participez à un exercice démocratique extrêmement important et cela nous permet - c'est votre droit le plus absolu - de vous entendre et d'entendre des opinions convergentes comme des opinions divergentes. Mais j'ai rarement vu, pour ne pas dire exceptionnellement vu, qu'on pouvait améliorer une situation en se fondant exclusivement sur des propos louangeurs ou flatteurs. Je pense que si on tient des commissions parlementaires, c'est pour avoir le pouls le plus juste possible de la situation.

Je divergerais d'opinion cependant avec le député de Mille-Îles qui dit que - des Îles-de-la-Madeleine, pardon, qui dit: à ne pas confondre - la grande majorité des mémoires qu'on a entendus ici étaient favorables au Conseil permanent de la jeunesse. De ceux qu'on a entendus ici, effectivement, le tiers est favorable. On en entendra un tout à l'heure.

Le tiers est favorable, mais avec des modifications telles que, si on les acceptait, on aurait un tout autre organisme. Est-ce qu'il faut qualifier ces mémoires de favorables? Je n'en suis pas certaine. Ils sont favorables à une structure, mais qui n'est pas une structure de conseil permanent. Le troisième groupe est défavorable. Selon le côté où on se situe, on estime que c'est favorable.

Je pense que vous avez soulevé un certain nombre de points qui méritent d'être retenus. En particulier que le Conseil permanent de la jeunesse, le projet qui est sur la table, n'a effectivement pas été demandé par les jeunes. J'ai trouvé intéressant dans votre mémoire que vous disiez: Si vous nous aviez consultés avant de proposer une telle structure, on aurait peut-être pu vous proposer quelque chose qui nous convenait mieux et qui aurait été plus adapté à la situation des jeunes.

Je trouve cette approche positive, contrairement à ce que dit le député des Îles-de-la-Madeleine. Vous nous dites: Arrêtez cela pour le moment, pour qu'on s'interroge de façon un peu plus approfondie sur ce qui serait le meilleur outil pour répondre aux besoins des jeunes et, après cela, on pourra regarder si c'est un conseil, un office, un ministère, si cela prend un ministre et quels rapports cela devra avoir avec les régions. Je trouve votre démarche beaucoup plus rationnelle.

Par ailleurs - je ne l'ai jamais rappelé ici, mais il est peut-être important de le faire - ce conseil permanent, c'est un engagement du Parti libéral. Cela vient de la Commission jeunesse du Parti libéral. Il va

ainsi respecter un engagement pris à l'endroit de ses membres, mais il ne faut pas s'imaginer que c'est plus que cela et que cela a été demandé par les jeunes. La Commission jeunesse du Parti libéral s'appuie sur le fait que la Commission des droits de la personne avait demandé qu'il y ait un organisme, un forum, pour les jeunes qui pourrait être un Conseil permanent de la jeunesse. À ce moment-là, la commission disait en même temps: Cela permettrait à ce conseil de se prononcer sur les grandes priorités du gouvernement à l'endroit de la jeunesse. Il n'y a pas de priorités, mais on a le conseil.

Je trouve, comme vous, qu'on est allé un peu à l'inverse de ce qui serait une démarche qui nous permettrait de donner un meilleur éclairage là-dessus. J'ajouterais également que c'est ce qui a créé la grande confusion concernant ce que les organismes viennent nous demander. Ce qu'ils viennent nous demander, c'est un organisme qui a peu à voir avec un organisme consultatif. On connaît les organismes consultatifs au Québec. Ils ont une fonction qu'on appelle la fonction consultative en administration publique. Il y a des modèles dont le Conseil supérieur... Ce sont des organismes exclusivement de conseil.

Les jeunes viennent ici demander des structures régionales, des tables de concertation régionales permanentes, décentralisées, avec des pouvoirs. Cela n'a absolument rien à voir avec un conseil permanent, un conseil consultatif. Dans ce sens, je ne ferai pas la même lecture en disant que c'est favorable. C'est favorable, mais pour autre chose qu'un conseil permanent.

Quand on vous dit que cela ne vous enlève rien, je dis que ce n'est pas juste, pour ne pas dire que c'est faux. Pour créer le Conseil permanent de la jeunesse, pour dégager les budgets pour créer le Conseil permanent de la jeunesse, on a coupé 50 % des services donnés par le Secrétariat à la jeunesse. On dégage la marge de manoeuvre, mais le Secrétariat à la jeunesse - tout le monde vient le dire ici - est utile et il joue un rôle important. Il est apprécié, on est obligé de le reconnaître ici. J'ai eu moins de contacts avec cet organisme, mais les jeunes le connaissent et ils l'utilisent.

En gros, si le gouvernement entendait bien les mémoires qui ont été présentés ici, il accepterait votre recommandation de reporter la création du conseil pour s'interroger de façon un peu plus articulée sur ce qui servirait le mieux les intérêts des jeunes au Québec. S'il avait été aussi un peu plus soucieux de respecter les organismes jeunesse, il aurait donné un délai qui vous aurait peut-être permis de proposer des solutions de rechange.. Ce n'est pas le délai qui a été imparti aux jeunes pour répondre à la consultation qui leur permettait de donner un avis articulé là-dessus. Le premier délai, c'était du 1er octobre au 30 octobre et les lettres sont parvenues à certains organismes entre le 22 et le 27 octobre. On a demandé une prolongation. C'est allé jusqu'au 17 novembre. Ce n'est pas beaucoup quand on considère les moyens que les jeunes ont. (16 h 45)

Étant donné que votre position est très claire par rapport à ce conseil consultatif, j'aurais quelques questions. Une première, d'abord, sur votre mémoire. Je voulais savoir exactement... Vous pourriez peut-être nous donner quelques explications. A la page 8 de notre mémoire, parlant du "travail terrain" -c'est dans la représentativité - vous dites: Faisant suite à nos craintes précédentes, plus aucune structure de concertation ne permet de recueillir et d'échanger sur le quotidien particulier à chacune des régions. Est-ce que vous faites allusion à la situation actuelle qui se serait modifiée ou détériorée ou à ce que pourrait être ce conseil, advenant qu'il soit créé?

Une voix: ...

Mme Gendron: Je peux vous répondre en ce sens que...

Mme Blackburn: Ils sont capables de répondre.

Mme Gendron: ...notre crainte est surtout basée sur le choix des gens qui vont siéger au sein du Conseil permanent de la jeunesse. Rien ne stipule qu'il y aura une représentation régionale. À ce sujet, nous, du Regroupement régional des maisons de jeunes du Québec, considérerions important qu'il y ait une représentativité régionale pour ramener plus près de nous ce qui peut se dérouler et se décider. C'est à ce niveau que nos craintes se situent.

Mme Blackburn: J'aimerais peut-être que vous nous parliez davantage de la situation des maisons de jeunes, que vous nous donniez un peu le profil des jeunes que vous accueillez, que vous aidez. Je voudrais vous demander si vous avez pu faire des relances pour savoir où on retrouve les jeunes qui sont allés chez vous deux ou trois ans plus tard. Vous êtes dans un regroupement, mais vous êtes tous dans des maisons de jeunes, je présume.

Une voix: Oui.

Mme Blackburn: Vous pourriez peut-être commencer...

Une voix: Est-ce qu'on répond chacun de notre côté?

Mme Blackburn: Oui, parce que c'est différent, je pense, d'une maison à l'autre.

M. Pitre: D'accord. Oisons que, brièvement, on se situe dans un milieu semi-rural, dans un village d'environ 2500 habitants et, avec le canton qui l'entoure, cela fait une population d'à peu près 5500 à 6000. Il n'y a aucune ressource disponible pour les jeunes. Nous sommes le seul organisme intervenant auprès des jeunes de façon quotidienne, ce qui fait que notre rôle s'est accru au fil des années, de telle sorte que nous avons même à prendre en considération tous les aspects de la vie du jeune. En ce sens, pour lui, ce n'est pas seulement un local; c'est vraiment un milieu de vie parce que c'est le seul qui existe dans notre coin.

On s'implique beaucoup dans la communauté. On est appelé à participer vraiment activement, en tenant compte, par exemple, des activités, de l'aspect communautaire, que ce soit pour prendre en charge les activités de la fête de la Saint-Jean ou la patinoire, peut-être, un peu de tout. Tout cela pour amener le jeune à se prendre en main et à développer une espèce de responsabilité face à son milieu, mais aussi face à son avenir. Il ne faut pas se le cacher, les jeunes s'en vont. C'est une zone où 60 % de la population est en chômage. Nous aimerions bien les garder. C'est quand même le milieu où ils sont nés et où ils vivent. Ils aimeraient bien avoir des choix pour pouvoir se développer. Sauf que, après le secondaire V, c'est le cégep, à l'extérieur. Si ce n'est pas le cégep, c'est l'attente d'un emploi. Disons que, grosso modo, c'est un peu cela.

Mme Blackburn: La scolarité des jeunes que vous recevez, c'est secondaire V et moins? Quel est leniveau de scolarisation?

M. Pitre: C'est secondaire V et moins; oui, c'est cela. Secondaire I à V.

Mme Blackburn: Oui, monsieur Plante.

M. Plante: Je voudrais ajouter que notre mission finale est axée sur la prévention de la délinquance. Dans les milieux où l'on intervient, les jeunes ont le choix entre le coin de la rue et le centre commercial. Souvent, après 5 heures, les CLSC et les CSS ne sont pas ouverts. Alors, le jeunes en situation de crise n'ont qu'un lieu où se réfugier, c'est la maison de jeunes. Avec les moyens précaires qu'on a, on tente quand même d'intervenir par la relation d'aide, le suivi, l'accueil surtout et les références, par la suite.

Mme Blackburn: Est-ce que votre maison de jeunes est la même que celle de monsieur?

M. Plante: Non. La nôtre est située à Richmond et à Windsor.

Mme Blackburn: Ah! Oui, c'est cela.

M. Plante: Notre organisme chapeaute deux maisons de jeunes: Asbestos-Danville et Windsor.

Mme Blackburn: Vous recevez combien de jeunes environ par année?

Une voix: Question-piège.

M. Roy: C'est embêtant d'évaluer combien de jeunes on accueille par année.

Mme Blackburn: Oui, parce que cela circule.

M. Roy: On peut dire que, journalièrement, on reçoit une vingtaine de jeunes. Les fins de semaine environ 30 à 40 jeunes passent au local. Les jeunes auprès desquels on fait vraiment des interventions sont ceux qui veulent s'impliquer, ceux avec qui on peut faire un cheminement plus concret.

Mme Blackburn: Est-ce que vous avez un peu suivi les jeunes pour évaluer ce qu'a donné ce lieu de rencontre, de réunion, d'animation? Est-ce que vous êtes capable de faire des comparaisons? C'est difficile à faire, j'imagine?

M. Plante: Est-ce que vous pourriez reposer votre première question? On n'a pas saisi le sens de la question.

Mme Blackburn: Avez-vous essayé d'évaluer les retombées concrètes de cette forme d'animation auprès des jeunes un peu désoeuvrés qui n'ont pas d'autres lieux où se retrouver ou auprès des jeunes en difficulté d'intégration sociale?

M. Plante: Je peux peut-être répondre, Après quatre ans, je peux affirmer que des jeunes qui sont passés par là, des jeunes qui se sont sentis, à un moment donné, en position d'instabilité ont soit réintégré le marché du travail ou l'école ou ont pris une autre orientation quelconque. Je pense qu'ils viennent chercher une ressource temporaire, le temps de s'ajuster et de trouver une personne "signifiante" prête à l'écouter et à faire un bout de chemin avec lui.

Mme Blackburn: Quel est le niveau de chômage des jeunes chez vous?

M. Plante: Si on parle de Richmond, le niveau de chômage est très élevé parce que c'est situé à 40 kilomètres de Sherbrooke, parce que c'est un secteur mou qui fait vivre la municipalité, la Brown Shoe. Les

jeunes qui ont beaucoup d'énergie et de dynamisme ne restent pas à Richmond. Dès qu'ils atteignent 15 ou 16 ans, ils vont à la polyvalente de Windsor pour compléter le secondaire IV et V et ils vont ensuite au cégep de Sherbrooke. Ils ne reviennent pas dans le milieu. Les jeunes qui restent dans le milieu sont vraiment des jeunes que je considère moins favorisés, plus "décrochés" et un peu plus pessismistes par rapport à l'avenir ou optimistes en croyant obtenir un emploi à la Brown Shoe. C'est un milieu de vie peu énergique où il y a des jeunes peu motivés par rapport à l'avenir et trop peu impliqués par rapport au CPJ pour venir. C'est pourquoi on est venu ici. Lorsqu'on dit qu'on a consulté les jeunes à la base, je suis convaincu qu'il n'y a pas un jeune de Richmond qui sait ce qu'est la loi 104.

Mme Blackburn: Si vous aviez - la question est longue et importante - à déterminer une priorité ou à suggérer une structure, quelle serait-elle? Est-ce que les jeunes en ont besoin davantage que ce qu'ils ont présentement? Qu'est-ce qui vous apparaîtrait le plus urgent, aujourd'hui, au moment où on se parle?

M. Roy: On pourrait dire que ce qui serait le plus urgent serait justement d'écouter les jeunes et, pour les écouter, il faudrait les consulter. Si les organismes jeunesse pouvaient se retrouver, se consulter et prendre le temps de définir concrètement leurs besoins, ce serait la meilleure façon de le savoir.

Mme Gendron: II est aussi important, comme Alain le dit, de consulter la base qui sont les jeunes eux-mêmes. Nous, à titre de regroupement des maisons de jeunes, il est certain que nous favorisons une stabilité dans notre fonctionnement quotidien, c'est-à-dire une reconnaissance de financement pour pouvoir poursuivre notre mission et notre travail.

Mme Blackburn: La reconnaissance et le financement des organismes et des ressources alternatives?

Mme Gendron: Exactement. Mme Blackburn: D'accord.

Mme Gendron: Nous, on parle du regroupement des maisons de jeunes plus particulièrement, parce que ce sont les difficultés que l'on vit présentement.

M. Plante: Aussi, il existe déjà une foule d'organismes jeunesse; on a l'impression qu'on en parachute un autre et qu'on balaie du revers de la main ceux qui existent déjà. Mon opinion sur ce sujet est un peu ambiguë.

Mme Blackburn: Vous avez soulevé -nous n'aurons pas le temps d'approfondir longuement - un aspect important, celui du vieillissement de la population dans certains villages périphériques à cause de la désertion des jeunes de leur milieu. Est-ce que les milieux sont sensibilisés à cette situation? Comment réagit-on dans vos villages?

M. Plante: Je vais parler de ce que je connais, c'est-à-dire d'où j'interviens. Je pense que oui, c'est-à-dire qu'il y a des mesures et des concertations locales qui sont faites, entre autres, par des entrepreneurs ou des groupements sociaux pour créer un milieu plus sain au niveau de l'emploi et au niveau social. Évidemment, les ressources sont limitées, mais il y a une volonté de régler cela. Pour vous illustrer cela, le dossier chaud présentement concerne la possibilité que les niveaux IV et V du secondaire soient donnés par l'école secondaire, parce que cela se termine en secondaire III. Les jeunes doivent embarquer dans le "péril jaune" en secondaire IV.

Mme Blackburn: Ecoutez, je sais qu'on est un peu en retard sur notre horaire -malheureusement, vous n'en êtes pas responsables - ce qui nous oblige à écourter notre période de questions. Je pense que ce qu'il faut retenir de la présentation de votre mémoire et des éléments que vous nous apportez aujourd'hui, c'est que vous parlez non pas en groupe complètement décroché d'une situation, mais très au fait de situations réelles, concrètes, vécues dans votre milieu et c'est ce que je trouve important. Une jeune intervenante me disait, une fois l'audition de ce matin terminée: Vous savez, une fois rendus à Québec, on a l'impression que tout se passe au niveau de la tête, de façon très intellectuelle, et vous finissez par être complètement décrochés du quotidien, de la réalité de ce que font les jeunes, du désoeuvrement dans lequel ils se trouvent. Pourquoi je trouve que c'est important que vous soyez venus ici et, je voudrais le rappeler, c'est que vous savez qu'une commission parlementaire... Tout à l'heure, le député des Îles-de-la-Madeleine disait: On connaît un bon succès. Effectivement, le succès est plus important qu'il ne l'aurait vraisemblablement été si l'Opposition ne s'était pas mise de la partie aussi en allant solliciter des mémoires; le délai était trop court, il y avait vraiment des problèmes, des problèmes réels. On se serait retrouvé, peut-être, avec dix ou quinze mémoires, probablement tous favorables. Ce que je trouve important, indépendamment de ce que les qroupes ont à dire, c'est qu'ils viennent se faire entendre; sinon, il y a des gens qui parlent en leur nom.

C'est pour cela que je voudrais vous remercier pour le courage dont vous faites

preuve parce que j'estime que cela vous demande du courage pour venir nous dire ici, de façon très franche, que cela ne serait pas là votre priorité, sachant qu'en plus vous êtes financés à même des deniers publics et que ces subventions sont alléatoires. Elles ne sont jamais garanties, ce n'est pas récurrent, ce n'est pas automatique et je connais les problèmes d'insécurité que cela pose dans les maisons de jeunes.

On sait, par exemple, que l'an passé, on a accordé au moins l'équivalent de l'augmentation du coût de la vie à tous les fonctionnaires de la fonction publique, y compris les députés, et qu'on n'a pas indexé l'enveloppe des maisons de jeunes, ce contre quoi on s'était élevé parce qu'on disait: Ce sont les moins bien payés et, en plus, on ne leur donne même pas la petite augmentation de 3 %. 11 y a un jeune ici qui a attiré notre attention de façon importante, je pense, sur l'insécurité que vivaient même les coordonnateurs des maisons de jeunes. C'est à la petite semaine et ils passent une partie de leur temps à faire des levées de fonds et pendant qu'ils font des levées de fonds ils ne sont pas en train de travailler è faire un peu plus d'animation auprès des jeunes et à rendre tes services pour lesquels ils sont là.

Votre mémoire ajouté aux nombreux autres qu'on a entendus devrait, je l'espère, faire beaucoup réfléchir la partie ministérielle. Et j'espère qu'ils viendront à se demander sincèrement si c'est de cet outil que les jeunes ont besoin.

Alors, au nom de ma formation politique je voudrais vous remercier de votre présence ici et vous inviter à continuer votre action.

Le Président (M. Marcil): Merci, Mme la députée. J'avais une question à poser: Tantôt, Mme Gendron vous avez dit que vous représentiez également le Regroupement national des maisons de jeunes du Québec.

Mme Gendron: Non, on est ici à titre de représentants de l'Estrie, de la région 05.

Le Président (M. Marcil): Parce que la semaine prochaine on a...

Mme Gendron: C'est que, dans notre région, on est membre du regroupement provincial.

Le Président (M. Marcil): Est-ce à dire que le mémoire qui va être déposé la semaine prochaine va être le même?

Mme Gendron: Non, le mémoire produit par la région de l'Estrie est typique à notre région.

Le Président (M. Marcil): Typiquement à votre région.

Mme Gendron: Et à notre situation aussi.

Le Président (M. Marcil): Cela va. Vous concluez...

M. Farrah: Juste pour conclure, lorsque vous disiez que, peut-être, les jeunes n'ont pas été consultés, je pense que la commission comme telle, ici, c'est une preuve qu'on a demandé l'avis des jeunes et je pense qu'avec la qualité des mémoires reçus l'exercice auquel nous travaillons présentement a démontré vraiment son utilité dans le sens suivant parce que je pense que le projet de loi va en bénéficier de façon très importante et sera bonifié en conséquence parce qu'il y a eu, quand même, de très bons arguments apportés à cette commission. Donc, je pense qu'il y a quand même eu une consultation de faite.

En terminant, c'est bien évident qu'on aurait bien aimé que vous auriez été d'accord avec le projet de loi 104, quoique c'est te voeu de la démocratie. Je pense que vous avez été très francs et, de eôté-lè, on l'apprécie. Par contre, si à un moment donné vous voudriez faire des suggestions au niveau de la bonification du projet 104, alors, faites-nous signe n'importe quand, on sera prêt à recevoir vos suggestions et vos commentaires si cela peut nous être utile pour bonifier la loi.

En terminant, peut-être qu'il serait bon de donner une chance au Conseil permanent de la jeunesse, justement, de naître et après, à la lumière du fonctionnement, on pourra peut-être le critiquer d'une façon beaucoup plus objective. Et, en terminant, encore une fois, je veux vous féliciter pour l'excellent travail que vous faites dans vos milieux respectifs auprès de la clientèle jeune. Je pense que c'est un travail très bénéfique et je vous encourage à continuer.

Alors, merci de votre présence ici.

Le Président (M. Marcil): Eh bien, Mme Gendron, M. Plante, M. Roy et M. Pitre, merci beaucoup de votre présence et nous avons grandement apprécié vos commentaires et votre opinion sur ce projet de loi. Merci beaucoup. On va suspendre pour 60 secondes afin de permettre au groupe de la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie de s'avancer.

(Suspension de la séance à 17 h 1)

(Reprise à 17 h 3)

Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous plaît!

Maintenant, nous allons entendre la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie, M. Michel Bisson et Mme

Johanne Santarosa. C'est cela?

Nous vous souhaitons la bienvenue et nous allons immédiatement vous laisser la possibilité de vous exprimer sur votre mémoire. Ensuite, on procédera à la période de questions.

Jeune Chambre économique et du commerce de l'Eatrie

Mme Santarosa (Johanne): C'est parfait.

Pour débuter, j'aimerais vous situer sur ce qu'est la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie. La Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie fut créée en novembre 1986 par des jeunes gens d'affaires principalement intéressés par le développement économique de la jeunesse en Estrie. Elle a comme principaux buts de regrouper, représenter et défendre les jeunes gens présentement en affaires et désireux de le devenir en Estrie. Il s'agit aussi de susciter, promouvoir et entretenir l'entrepreneurship en Estrie, intervenir auprès des divers intervenants économiques locaux, régionaux, provinciaux, nationaux et internationaux afin de créer et entretenir un climat entrepreneurial propice à la création d'entreprises. Donc, à cette fin, nous prévoyons organiser des assemblées, colloques, forums et tout événement favorisant la diffusion et l'interaction des idées. Par ces actions et ces prises de position, la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie a comme objectif d'amenuiser les iniquités entre les sous-régions de l'Estrie. Enfin, dans les principaux objectifs de la jeune chambre, nous avons à représenter et défendre les intérêts des membres auprès des divers pouvoirs politiques, des différents paliers gouvernementaux, local, provincial, national et international. Dans cet esprit, nous sommes très favorables à la création d'un Conseil permanent de la jeunesse qui, nous croyons, permettra finalement à la jeunesse de prendre part aux débats et discussions qui influenceront leur destinée.

Sur ce, la Jeune chambre économique et du commerce de l'Estrie propose que le Conseil permanent de la jeunesse devienne un outil qui reflète les priorités que veut se donner la jeunesse québécoise. Également, nous proposons que le collège électoral ait des secteurs d'office tels l'éducation, l'entrepreneuriat jeunesse, l'économie, agriculture, social, emploi et autres et que des organismes soient nommés par le cabinet du premier ministre pour nommer un représentant. De plus, nous proposons une formule tenant compte de ce que 50 % dudit collège électoral soit composé de représentants de l'extérieur de Montréal et Québec et que chaque région du Québec soit représentée, idéalement. Il est soutenu aussi que ledit conseil ait un rôle d'ombudsman de la jeunesse auprès de tous les ministères afin que l'application des lois et décisions du Parlement le soit dans leur esprit et non contorsionnée par des interprétations.

Nous aimerions aussi que le conseil ait à réfléchir sur des recommandations se rapportant à diverses problématiques jeunesse et sur le devenir du Québec et puisse tancer des débats de fond relatif à certaines institutions.

Enfin, il serait particulièrement intéressant que le conseil puisse se pencher sur certaines lois et réglementations qui vont à rencontre de la jeunesse québécoise.

En conclusion, le Québec a beaucoup évolué ces 20 dernières années. Cette évolution nous permet aujourd'hui de passer à une autre étape. La question est de savoir ce que l'on veut devenir dans les 20 prochaines années. La solution de nos problèmes est en chacun de nous, mais nous croyons que dans l'état actuel des choses les ressources humaines, qui sont les ressources les plus précieuses qui soient, ne sont pas mises à contribution comme elles le devraient. Cela, peut-être parce que les outils dont nous nous sommes dotés ces 20 dernières années ne correspondent plus aux nouvelles réalités qui prennent forme au Québec. C'est pourquoi le Conseil permanent de la jeunesse se doit d'être le reflet de la jeunesse québécoise.

Sur ce, je vais céder la parole au président de la Jeune chambre économique.

Le Président (M. Marcil): Merci, madame. Monsieur.

M. Bisson (Michel): Je vous remercie beaucoup. M. le Président, M. le leader, Mme la responsable de l'Opposition pour la question jeunesse, la Jeune chambre économique n'est pas seulement le fait d'une jeunesse qui se veut plus entreprenante, mais aussi le symbole d'une volonté de gens qui veulent faire autrement, qui sont prêts à remettre en question beaucoup de choses qui ont été faites jusqu'ici et qu'il serait temps de remettre en question.

Je vais essayer de situer un peu la Jeune chambre économique en Estrie et dire pourquoi elle a pris forme en novembre plutôt qu'avant. Pour faire une histoire courte, je dirai qu'en Estrie, depuis 1982, 1983, il existe des clubs de jeunes entrepreneurs. Ces clubs de jeunes entrepreneurs, il y en a pas mal dans toutes les villes au moment où on se parle et ce sont des clubs fermés, d'environ 25 membres, qui visent à regrouper des jeunes gens d'affaires, qui partagent ce qu'ils vivent et qui se donnent un peu un coup de main sur le plan des affaires. Chaque année, chaque fois qu'on avait un recrutement quelconque, qu'on amenait des nouveaux membres, il y avait des gens qui politisaient ou qui

voulaient amener le mouvement plus à s'extérioriser qu'à travailler vers l'intérieur. On a donc pressenti que c'était le "timing" afin de créer une jeune chambre économique où ces priorités pourraient être exprimées. Pour faire un bref résumé, on vit un peu trois réalités en Estrie. Je vais essayer de faire une histoire courte avec cela. Vous avez la métropole régionale qui compte plus de 75 000 habitants, vous avez aussi l'axe de la 55 vers Valcourt et Bromont, jusqu'à Windsor, qui se caractérise par des entreprises de 50 000 000 $ ou 100 000 000 $ et qui a un développement certain. Vous avez ce qu'on peut appeler le croissant de lune de l'Estrie, qui est toujours l'éternelle ombre de l'Estrie, qui est Asbestos, Lac-Mégantic, Coaticook. La volonté de représenter ce territoire au conseil d'administration de la Jeune chambre économique reflète la volonté de faire de la Jeune chambre économique un organisme représentatif territorial afin que toutes les sous-régions, les régions et la région complète soient représentées, qu'il puisse vraiment y avoir des débats de fond à cet effet.

Les interventions qu'on a eu à faire depuis novembre ont été auprès des groupes de soutien associés à la jeunesse. Nous sommes intervenus aussi à l'appui du mémoire présenté par ces organismes dans le cadre de la Société d'investissement jeunesse. Nous sommes aussi intervenus, mais plus par lettre que par mémoire complet, dans le cadre du projet de loi 119 modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Vous verrez prochainement que nous allons présenter un mémoire afin qu'il se crée une SPEQ jeunesse afin de combler un créneau en termes de capital de risque pour les entreprises qui démarrent dans notre région. Nous aurons sûrement l'occasion d'ici la fin du printemps de toucher le ministre concerné par ce projet de loi.

Une nouvelle commission vient aussi d'être mise sur pied au niveau des affaires internationales afin de jumeler les jeunes chambres économiques de chacune des MRC avec certains pays de la francophonie, comme la France, la Belgique et certains pays d'Afrique du Nord. On voit aussi poindre le libre-échange. Cet automne, il y aura sûrement certains débats - à moins qu'on ne soit dans le feu de l'action sur la question du libre-échange si une entente de principe est signée en juin - afin d'explorer de nouvelles pistes et d'informer la jeunesse québécoise sur ce qui arrivera au niveau du libre-échange. Si 20 % ou 25 % des emplois doivent être modifiés, les gens devront avoir davantage de formation et ils devront se repenser et tenter de voir ce qui s'en vient en termes de changements structurels au niveau de l'emploi.

Il y a un point que j'aimerais aussi souligner et qui me tient particulièrement à coeur. Le droit de veto du Québec est particulièrement important, mais nous ne souhaitons pas qu'il soit le cheval de bataille dans le cadre d'une éventuelle négociation pour l'adhésion du Québec à la constitution. Nou8 croyons que le libre-échange est important; c'est l'un des plus vieux débats au Canada, on l'a eu durant les années 1800, cela fait un certain bout de temps. C'est peut-être bien parce que l'Angleterre, la Grande-Bretagne, à cette époque, avait elle-même décrété le libre-échange dans tout le Commonwealth et les États-Unis, pour avoir accès à ce marché, sont venus développer davantage chez nous l'aspect économique et industriel de nos matières premières. Il ne faudrait quand même pas que le libre-échange soit, selon nous, un cheval de bataille. Il y a tellement d'autres bagarres à faire pour s'en servir à cet effet. Nous croyons aussi que ce ne sont pas deux ou trois ans de plus qui vont changer quelque chose à notre droit de veto. Donc, une parenthèse en passant.

J'en viens directement à ce qui nous amène ici aujourd'hui, le Conseil permanent de la jeunesse. Nous voyons trois points principaux. Premièrement, nous croyons que le Conseil permanent de la jeunesse devrait être un groupe visionnaire. Deuxièmement, nous voyons aussi, en plus d'un rôle d'"aviseur", le Conseil permanent de la jeunesse comme un ombudsman de la jeunesse. Des décisions politiques sont souvent prises dans l'espoir de régler une problématique bien précise. On se retourne, lors de l'application, et on s'aperçoit qu'on passe souvent un peu à côté de la "track", et on voit souvent des distorsions notoires entre les régions du Québec dans l'application de certaines lois.

Un Conseil permanent de la jeunesse pourrait peut-être avoir un comité où certains membres pourraient veiller à l'application des lois ou des décisions qui sont prises par notre Parlement. Selon nous, cette question est très importante.

Quant aux avantages visionnaires, on entend par là autant aux plans international, national, provincial, régional et local. On croit que, si le Québec se veut vraiment souverain, il se doit avant tout de développer et de renforcer ses individus, ses localités, ses régions et sa province et non de parachuter, comme cela a trop souvent été fait autrefois, par en haut, des megaprojets. Si les mégaprojets sont importants, le développement par la base est aussi important sinon essentiel, selon nous.

Quant au plan international, ce qui est très important aussi, on voit que le Québec a une fenêtre sur le monde international, une fenêtre qui vient du côté américain ou du Globe and Mail ou ce que vous voulez, ce

qui rend notre grille d'analyse du monde international assez limitée. On aurait plusieurs questions à nous poser relativement... Si vous me permettez de prendre un peu d'eau, j'ai la gorge un petit peu sèche, s'il en reste dans ce pot. (17 h 15)

Même si les télécommunications relèvent du CRTC, du gouvernement fédéral, il est quand même surprenant de constater qu'un réseau comme TVA n'a presque pas, ou pas du tout, de représentants de son réseau à travers le monde. Il prend l'information telle qu'elle vient, sur des réseaux électroniques, ou il achète l'information à gauche et à droite, du côté américain, ce qui fait que le Québec n'a pas tellement une forte vision de l'aspect international.

Au niveau national, il y a des débats qui s'en viennent, autant au niveau de l'éducation... Nous avons vu, lors du dernier - certains termes me manquent - discours inaugural, qu'il va se tenir à l'automne 1987 un colloque national sur ce que devrait devenir l'université. Plusieurs universités s'imaginent qu'il va se discuter là un peu le financement de ces institutions, mais on s'attend que cela aille plus loin. Étant donné que le gouvernement fédéral finance largement les études postsecondaires, il entend jouer un rôle davantage important en termes de formation. À cet effet, il compte intervenir auprès des universités. Il s'attendait, entre autres, à un certain tollé de la part des provinces mais, à sa surprise, aucun communiqué, rien n'a été reçu à cet effet.

Donc, il y a des débats fondamentaux qui s'en viennent, autant au niveau universitaire... Un autre qui devrait être important... On voit du côté américain les lois anticoalitions. C'est beau les mégaentreprises, les contrôles, les cartels, et ces choses-là, mais le système capitaliste repose sur la libre concurrence. D'accord? Il est essentiel qu'il n'y ait pas intégration de tout le monde financier, le monde de la production, des communications. C'est peut-être bien moins le cas au Québec mais, si on regarde du côté du Nouveau-Brunswick, il y a peut-être un seul journal qui n'appartient pas à la même famille. Donc, ce sont des concentrations qui sont, selon nous, en tout cas, très dangereuses. Même si on se dit de bons capitalistes, le capitalisme ne pourrait survivre à une concentration excessive qui donnerait le goût à un gouvernement, soit de gauche ou un peu visionnaire, s'il l'on veut, de nationaliser ces organismes. Le peuple ne verrait même pas à rouspéter ou à dire quoi que ce soit et on reviendrait à vouloir contrôler l'ensemble de son économie, comme on a déjà vu par le passé.

Donc, dans l'ensemble, on voit que le Québec est en voie... Il a toujours été en évolution, mais on voit qu'il y a des choix importants qui vont être faits, que ce soit par la volonté intérieure, ou que ce soit par les pressions extérieures, par le libre-échange. Si le libre-échange venait à ne pas passer, il y a quand même les accords du GATT qui vont venir, c'est juste une question de temps.

Donc, on doit s'engager, on doit travailler. L'héritage le plus intéressant, le plus prometteur qui pourrait être laissé à notre jeunesse, c'est la capacité de s'exprimer, leur laisser la chance de se battre. Si elle se cogne le nez, elle se cognera le nez. La jeunesse se doit d'apprendre à se battre. C'est le plus bel héritage, développer la volonté, la détermination, s'habituer à faire des débats et s'intéresser à la chose politique, économique, sociale et à tout ce qui la touche de près ou de loin. Et nous croyons que le Conseil permanent de la jeunesse est un lieu très intéressant pour analyser cette perspective.

Il y a beaucoup de choses sur lesquelles on aurait pu s'entretenir et qu'on aurait pu développer, entre autres que le conseil permanent pourrait travailler au niveau de la réglementation. Hier, je rencontrais un jeune promoteur qui vient de se lancer en affaires dans le domaine de la construction, qui développe une espèce de concept de billots de bois rond pour des chalets en Estrie pour les gens qui veulent développer des camps de villégiature. Il me disait que cela lui prenait 6000 heures de travail. C'est une expertise qu'il a développée lui-même, que personne n'a et il faut qu'il ait travaillé 6000 heures pour pouvoir passer certains examens, tout le tralala. II m'a expliqué, c'est tout un chapelet de ribambelles... Nous croyions qu'avec le projet de loi 119 il était pour y avoir certaines modifications. Si modifications il y a eu, ce n'est pas tout à fait ce que la jeunesse attendait. On s'attendait à beaucoup plus. Dans le contexte politique, avec la puissance des grandes centrales syndicales, il est très difficile de faire avancer les idées, de faire avancer les projets de loi, de faire avancer notre jeunesse. Mais il va falloir sûrement revenir à la charge dans ce sens, parce qu'on est vraiment très réglementés. C'est beau de couper les subventions, c'est vrai que cela coûte très cher de tenter de financer toutes les entreprises, d'essayer de financer tout le monde et qu'on a pressenti... En tout cas, on entend M. Johnson et M. Vallerand dire que ce que les entrepreneurs désirent le plus, c'est la déréglementation. Mais il faudrait passer aux actes et commencer à travailler très fortement dans ce sens parce que la jeunesse est fortement brimée par cet état de fait.

En ce qui a trait à la réglementation, on se rend compte de toute la paperasserie et on se demande même, de façon

caricaturale, si on ne devrait pas commencer à imposer des frais modérateurs au gouvernement afin de le responsabiliser lorsqu'il impose des réglementations, des taxes, etc. S'il avait à défrayer tous ces coûts, il pourrait voir exactement le coût relié à cette réglementation et ces taxes, et ce, à tous les niveaux, que ce soit municipal, provincial ou national. Donc, je vais vous remercier particulièrement pour nous avoir entendus.

Le Président (M. Marcil): Nous allons passer maintenant la parole au député de Mille-Îles... Excusez-moi, au député des Îles-de-la-Madeleine. C'est que je mêlais les îles.

M. Farrah: Merci, M. le Président. M. Bisson, Mme Santarosa, je voudrais vous souhaiter la plus cordiale des bienvenues et vous remercier pour la présentation de votre mémoire qui, à mon avis, est un excellent mémoire. Je ne tomberai pas dans le débat partisan de ma collègue de Chicoutimi, parce que je pourrais citer des passages de votre mémoire qui est assez éloquent à l'endroit de notre gouvernement - à juste titre, je pense - sauf que ma collègue de l'autre côté ne serait certainement pas d'accord. Je ne voudrais pas faire comme ma collègue et tomber dans un débat partisan. Quoi qu'il en soit, en introduction, en guise d'entrée dans votre mémoire, vous semblez dire que l'aspect économique est très important au niveau de la problématique des jeunes, dans le sens suivant. C'est que je pense que le problème majeur des jeunes, et plusieurs groupes qui sont venus ici l'ont mentionné, c'est peut-être le chômage. C'est là que le domaine économique devient très important pour pouvoir pallier ce chômage, et en ne créant pas d'emplois artificiels par des subventions quelconques. C'est là, je pense, que tout le côté économique prend son sens, en laissant, peut-être, l'entreprise jouer le rôle qu'elle doit jouer. Votre mémoire a une tendance essentiellement économique et cela justifie, justement, votre organisme. Vous êtes un organisme économique, donc c'est normal que votre mémoire ait cette tangente.

Je prends l'introduction dans votre première page ici, à la page 5. Vous dites; "Cette tendance du gouvernement provincial actuel de vouloir mettre à contribution notre jeunesse, que ce soit dans le cadre du présent projet de loi, par la Société d'investissement jeunesse ou le projet de loi 119" sur la construction qui peut faciliter l'entrée des jeunes dans la construction, et le reste, et le reste... Je pense que c'est un peu le même langage que le premier ministre a tenu à l'ouverture de nos travaux ici il y a quelques semaines, où il a dit que, par des gestes économiques, il peut y avoir des retombées concrètes pour les jeunes.

C'est là, je pense, une excellente approche dans votre mémoire.

Je pourrais peut-être lire trois lignes pour ma collègue de Chicoutimi, alors que vous dites: "Maintenant, les discours se font plus rares, mais les actions concrètes se multiplient, ce qui devrait mobiliser toutes les ressources de notre jeunesse."

Au début de votre mémoire, vous procédez secteur par secteur, vous parlez de l'éducation de la jeunesse, du monde agricole et, lorsque vous parlez du monde agricole, vous dites que peut-être les politiques antérieures ont fait que les agriculteurs ont investi beaucoup, ils sont peut-être "pris", entre guillemets, avec de gros investissements, avec de grosses fermes. Cela devient peut-être difficile pour la relève, pour les jeunes de devenir propriétaires de ces fermes. Je pense que la situation est juste, vous la décrivez très bien sauf que j'aurais aimé entendre ce que vous proposez pour pallier ce problème.

M. Bisson: Je suis fils de pomiculteur. Je suis natif de la région de Rougemont. Je peux vous dire qu'on a pressenti... Entre autres en pomiculture, comme dans bien d'autres domaines, on se demandait si ce n'était pas volontaire de créer une telle surproduction. On se souvient qu'à un moment donné il y a eu une approche qui a été faite par le gouvernement pour acheter certaines terres au Québec, On se demande si, dans certains secteurs, on n'a pas voulu "loader" le marché, si on peut dire, entre guillemets, afin que cela devienne intenable, afin que le gouvernement puisse récupérer ces terres. On peut du moins se poser la question. Quand on voit la surproduction dans le domaine des porcs, à part le domaine où c'est superprotégé, dans le domaine laitier... Dans le domaine de la pomiculture, il va y avoir une surproduction qui va être épouvantable d'ici à peine cinq à six ans. Vous savez qu'un acre de pommes... Il y a quelques années, dans les pommiers standard, on produisait 400 boîtes à l'arpent et, maintenant, on peut en produire 2500 boîtes à l'arpent. On a recoupé, on a replanté, on a agrandi. N'importe quel professionnel arrivait à avoir une carte d'agriculteur pour planter des pommiers. Vous pouvez aller en Estrie, vous pouvez aller partout, c'est plein de pommiers. Il va y avoir une surproduction qui va être épouvantable. Je croîs que c'est la jeunesse et les jeunes de ce secteur qui vont en souffrir à un moment donné, avant longtemps.

Le Président (M. Marcil): Quels seraient les palliatifs?

M. Bisson: II y a déjà suffisamment de mal de fait. Les palliatifs auraient dû être

pris il y a un certain temps. Par contre, pour le moment, si c'est à se poser... En tout cas, ce que l'on ne souhaite pas, c'est que cela fasse comme en France; à un moment donné, le gouvernement a forcé les pomiculteurs à couper tous leurs pommiers afin de planter des vignes pour baisser la production. Je n'ose même pas penser ce que l'on aura à faire. Disons qu'on aura à traverser le pont à ce moment-là, mais ce n'est pas tellement rose comme...

M. Farrah: On peut dénoncer la situation présente.

M. Bisson: Je crois que tout ce que l'on tente d'énoncer, pour le moment, ce sont des problématiques. Le conseil permanent sera un lieu où il devra y avoir des idées pondues afin d'aller chercher de nouvelles solutions à ces problèmes qui se créeront. Il va y en avoir; ce n'est sûrement pas le seul.

M. Farrah: Un autre point qui m'a frappé dans votre mémoire, c'est dans le fonctionnariat. Vous n'avez pas été trop tendre pour les fonctionnaires. Je pourrais vous citer ici: "Un autre point particulier à soulever est la transparence de notre fonctionnariat, qui indirectement peut entacher un gouvernement." Un peu plus loin vous dites: "II serait intéressant de s'assurer que les programmes, plus particulièrement en région, seraient administrés de façon objective et ne servent pas d'instrument de pression, de manipulation et d'influence de la part de certains fonctionnaires." J'aimerais vous entendre davantage à ce sujet-là.

M. Bisson: D'accord. Je m'attendais à cela, mais c'est un sujet qui devrait être traité par le Conseil permanent de la jeunesse, selon moi, parce qu'il y a certaines recherches, certaines preuves et certains faits qui pourraient être démontrés. Vous savez qu'il y a énormément de disparités entre les régions dans l'application des programmes.

Vous dites à certains directeurs régionaux de certains ministères qu'il y a peut-être conflit d'intérêts et on vous lance: Qui dans la vie n'est pas en conflit d'intérêts? Il y a de sérieuses questions à se poser. Nous avons des faits et des preuves, mais ce serait au Conseil permanent de la jeunesse de rétablir les positions et peut-être même directement avec les ministres concernés.

M. Farrah: Un autre point dont vous faites état, ce sont les frais de scolarité.

M. Bisson: C'est juste pour imager, messieurs...

M. Farrah: Ce sont des sujets que vous aimeriez que la CPJ traite.

M. Bisson: Entre autres, mais c'est pour montrer l'ampleur des réformes qu'il y a à apporter. C'est bien beau dire: D'accord, on fait des coupures. C'est vrai qu'il faut faire le ménage. Avant de construire quoi que ce soit, un pays ou une maison, il faut commencer par faire le ménage, enlever le bois mort et drainer le sol et tout cela. Donc, il y a des changements fondamentaux, des grands ménages à faire au Québec auprès de différentes institutions, de différents secteurs, afin que l'on puisse reconstruire. Couper pour couper, cela ne vaut pas grand-chose; on ne changera pas les problèmes, mais il faut faire le ménage afin de reconstruire sur du solide et faire en sorte que les outils qu'on va se donner vont s'adapter davantage à nos réalités d'aujourd'hui.

C'est juste un exemple, c'est-à-dire que ce que l'on dit là-dedans c'est: D'accord, nos universités nous coûtent très cher, coupez-nous-en, c'est vrai. On sort du milieu universitaire. On a fait partie des associations nationales d'étudiants; on en a vu de toutes les couleurs; on sait comment cela fonctionne dans les boîtes. Il y aurait peut-être lieu de faire ce qui se fait depuis 100 ans en France où, entre autres, au niveau administratif, on voit les chambres de commerce et d'industrie financer à 30 % les HEC (hautes études commerciales). Il y aurait peut-être lieu de compartimenter et de mettre ensemble ceux qui ont des visées communes et de plus concentrer dans les centres-villes ou dans certains milieux urbains certaines facultés de sociologie, de sciences politiques et tout, car si on a mis des universités dans nos périphéries c'est afin de s'adapter aux besoins et aux réalités de ces périphéries. Que le cours de sociologie soit donné à Rimouski, Chicoutimi ou à Montréal, il pourrait se donner entièrement à Montréal, mais faire du développement économique régional; ce serait très important que les universités de la périphérie répondent aux besoins de la périphérie.

Pour vous donner un exemple très concret là-dessus, regardez l'Université du Québec à Rimouski où il y a une maîtrise en développement régional. Mais croyez-le ou pas, messieurs, mesdames, il n'y a pas un professeur d'économie dans le cours et c'est le département des sciences, des lettres et de l'histoire qui contrôle la maîtrise en développement régional. Les personnes qui sortent de là et qui viennent pour travailler pour une MRC, elles n'ont aucune notion de chiffres, aucune notion d'économie. Elles font des analyses, des thèses sur le développement du syndicalisme chez F.F. Soucy à Rivière-du-Loup, pour savoir lequel de la poule ou l'oeuf aurait dû venir avant ou est venu

avant, mais c'est une problématique. II va falloir penser à se spécialiser, mais encore là c'est un débat que devra poser le Conseil permanent de la jeunesse. C'est un sujet sur lequel il sera très intéressant, très captivant et très motivant de travailler.

M. Farrah: En page 16 de votre mémoire ce sont les recommandations. Au début vous demandez que des amendements soient apportés audit projet de loi pour que le collège électoral soit le reflet des priorités que se donne le Québec, soit la création de secteurs de représentation permanente, tels l'éducation, l'entrepreneuriat, l'économie, l'agriculture et le reste. J'aimerais vous entendre sur ce que vous voulez dire exactement par représentation permanente. (17 h 30)

M. Bisson: Dans la représentation permanente de secteurs, il y a peut-être certains organismes, et encore là cela reste très relatif, lorsque l'on parle, entre autres, du secteur de l'entrepreneurship et aussi des secteurs comme - je ne le connais pas plus qu'il ne faut - la Jeune chambre de commerce de Montréal qui est plutôt un regroupement de cadres qui voient plus au développement et à la situation des jeunes cadres dans l'entreprise montréalaise et environnante et comme les jeunes chambres économiques des régions qui sont plus des modèles européens et américains... Chez nous, on a un exode des jeunes énorme. C'est devenu intenable, il y a un exode énorme. Il s'agit juste de regarder notre MRC. II y a eu 10 % de diminution de la population ces 20 dernières années. Il y a quelque chose à faire. Il faut faire quelque chose. Vous savez que quand une population vieillit à un tel point on tombe dans une espèce de mécanique et dans une certaine redondance, ce qui fait que cela devient très difficile d'amener des changements, du nouveau. On voit l'importance des répercussions que cela a sur l'emploi. En un mot, on dit que les secteurs permanents sont essentiels. Ce serait intéressant pour les organismes permanents qui pourraient y siéger.

M. Farrah: Sur ce plan, ces secteurs d'activités, éducation, entrepreneurial, économie et agriculture, je vois plus cela comme un plan d'action du CPJ, le Conseil permanent de la jeunesse, et non pas une représentation permanente. Je verrais plus cela comme un plan d'action, que le CPJ doit s'occuper de ces secteurs. Encore là, c'est à eux de le décider. Comme le ministre l'a mentionné à maintes reprises, on n'a pas voulu créer la loi de façon à étouffer - excusez l'expression - les membres du CPJ. On a voulu leur laisser la plus grande latitude possible afin que ce soient les jeunes eux-mêmes qui déterminent leurs priorités et leur plan d'action et non pas nous qui l'imposerions. Dans ce sens, il serait plus propice d'étudier ces secteurs dans un plan d'action plutôt qu'à une commission permanente. En tout cas, c'est une opinion personnelle.

M. Bisson: C'est très intéressant comme piste, mais je pourrais, moi aussi, vous poser une question sur l'article 29, "Le conseil peut, avec l'autorisation du ministre". Lorsqu'on parle de l'autorisation du ministre et lorsqu'on parle, entre autres... D'accord. On va s'en tenir à cela pour le moment. En ce qui concerne l'autorisation du ministre, on se pose la question suivante: Jusqu'à quel point y aura-t-il de la souplesse? Vous savez qu'un organisme trop structuré, trop réglementé, il est très difficile de le faire fonctionner. La question qu'on se pose aussi, c'est: Jusqu'à quel point le gouvernement va-t-il être prêt è laisser du pouvoir et du poids à cet organisme? C'est bien beau de former un organisme avec des beaux objectifs, mais jusqu'à quel point le gouvernement est-il prêt à donner du lest afin de permettre à cet organisme d'avoir la crédibilité pour intervenir? L'approche, les réflexions et le travail que ce dit conseil devra faire ne fera peut-être pas toujours l'affaire du gouvernement.

Deux. Etes-vous prêt à aller jusqu'à lui laisser un pouvoir d'ombudsman afin que les décisions et les projets de loi qui seront adoptés puissent être vérifiés, qu'il puisse y avoir une espèce de contrôle pour voir à défendre l'uniformisation, en tout cas, qu'il y ait des chances égales dans toute la province? Je pourrais descendre ma liste d'épicerie dans ce sens. En gros, jusqu'où êtes-vous prêt à aller pour laisser les mains libres à ce conseil permanent?

M. Farrah: De toute façon, je pense que vos revendications sont très légitimes également. Je pense que d'autres groupes sont venus aussi manifester les mêmes intentions et les mêmes craintes peut-être. Avant de terminer, je donnerais la parole à la députée de Chicoutimi, si le président veut bien. En terminant, peut-être que j'aborderai ces points, si vous n'avez pas d'objection.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le député. Habituellement, c'est le président qui donne la parole. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mme Santarosa, monsieur, il me fait plaisir de vous accueillir au nom de ma formation politique. Vous êtes la deuxième chambre de commerce des jeunes qui se présente devant cette commission. Je me permets de vous

dire un peu ce que j'ai dit à celle qui vous a précédés. Je trouve intéressante l'idée que ces jeunes chambres renaissent et recommencent leurs activités. C'est probablement un signe des temps également parce qu'on a l'impression qu'il y a une couple de décennies de jeunes du Québec qui ont été absentes des grands débats. Je dirais que c'est entre 25 et 35 ans. Évidemment, c'est toujours un peu arbitraire de placer cela dans ces âges. Quand même, il s'est passé quelque chose qui fait que ces gens ne se retrouvent pas beaucoup dans l'action, comme ils ne se retrouvent pas beaucoup non plus dans les emplois très payants. J'ai l'impression qu'il y a une espèce de renaissance de tous les mouvements de jeunesse et je trouve cela particulièrement intéressant, rassurant et prometteur.

J'aimerais immédiatement aborder votre mémoire. Comme il se doit, je pense bien, on devait s'y attendre, il est largement axé sur les questions è caractère économique. Vous portez un certain nombre de jugements que je trouve relativement sévères - en Chambre on appellerait cela des accusations à l'endroit des fonctionnaires en particulier, je pense. J'aimerais peut-être revenir un peu sur cette question-là.

Vous dites également dans votre présentation que le meilleur service qu'on peut rendre aux jeunes c'est de leur apprendre à se battre, à se défendre et à entrer dans l'action. Vous n'avez pas beaucoup abordé la question du chômage, sauf sur la fin tout à l'heure en réponse à une question du député des Îles-de-Ia-Madeleine en disant: Le chômage est extrêmement élevé chez nous. Vous avez l'impression que cela peut se résorber sur l'unique volonté des jeunes. Cela ne paraît pas dans votre mémoire, cette question du chômage qui est finalement chronique et qui, selon les experts, n'est pas conjoncturel mais structurel. On ne peut pas voir de modification à moins qu'on agisse sur la structure de l'emploi. On a vu peu de choses là-dedans. Vous reconnaissez quand même un vieillissement dramatique de la population avec les effets qu'on connaît, c'est-à-dire une détérioration de la qualité des services offerts dans ces régions-là, en particulier pour les personnes âgées et évidemment au premier titre pour les jeunes.

Un mémoire comme le vôtre, qui est par ailleurs, bien fait, je pense qu'il faut lui donner ça, il est bien écrit également, ne pouvait pas aborder toutes les questions et, évidemment, il prend de grands raccourcis. J'ai quelques questions parce que le temps passe rapidement. Je vais les prendre plus dans l'ordre de votre mémoire.

M. Bisson: Est-ce que je pourrais répondre à la question relativement au chômage?

Mme Blackburn: Oui, je vous en prie.

M. Bisson: D'accord. C'est plus que du chômage. Ce serait un petit peu folklorique de parler juste de chômage. Tout le monde parle de chômage mais c'est beaucoup plus grave que ça. La question est une sous-utilisation systématique des ressources humaines. Combien de gens travaillent, qui ont une certaine formation universitaire parce qu'au Québec de plus en plus de gens ont des formations universitaires, à des jobs de crève-faim et qui ne répondent même pas au marché du travail? On forme des gens en sociologie, en toutes sortes d'affaires mais où vont-ils travailler, dans quoi vont-ils travailler? Pourtant, on dépense quand même des fortunes dans ces domaines-là.

On disait une restructuration complète; ce serait long de commencer à en parler, mais le chômage en est une parmi tant d'autres. Il est égal aux autres parce qu'à un moment donné on se met à analyser et tout est imbriqué un dans l'autre. Donc, il y a des changements fondamentaux à faire dans tous les secteurs auprès de tous les ministères et tout le monde va devoir s'y mettre afin d'y travailler et de trouver des solutions.

Mme Blackburn: Vous me permettrez de ne pas partager votre opinion sur le...

M. Bisson: Peut-être.

Mme Blackburn: ...trop grand nombre de diplômés dans les sciences humaines, dans les sciences sociales. De plus en plus, aux États-Unis, dans les pays industrialisés qui sont toujours à peu près dix ans en avant de notre courant, on estime que c'est précisément dans ces secteurs-là que vont se faire connaître les plus grands besoins éventuellement. Il faudrait peut-être éviter de changer nos affaires avant qu'on soit encore en arrière des mouvements.

J'ai échappé ce que j'allais dire. Je vais revenir aux questions d'éclaircissement. Vous suggérez que le Conseil permanent de la jeunesse puisse être, en quelque sorte, l'ombudsman des jeunes, c'est-à-dire un redresseur de torts. Je relis quelques lignes de votre mémoire. Pour justifier cela, vous dites: "II y a souvent une dichotomie entre ce que préconise le gouvernement et l'application qui est faite de ses législations." Vous dites qu'il serait parfois peut-être plus sûr de faire exécuter par un ordinateur, les correctifs surviendraient plus rapidement et avec des préjugés en moins. Vous ajoutez: "Un autre point particulier à soulever est la transparence de notre fonctionnariat, qui indirectement peut entacher un gouvernement." Vous allez beaucoup plus loin parce qu'il y a une espèce d'accélération. Vous dites: "II serait intéressant de s'assurer que

les programmes, plus particulièrement en régions, seraient administrés de façon objective, et ne servent pas d'instrument de pression, de manipulation et d'influence de la part de certains fonctionnaires." Vous allez très loin en disant qu'ils utilisent des méthodes, et je cite: II faudrait "faire la lumière sur certaines façons de faire qui ne sont même plus admises en Sicile italienne. J'aimerais que vous nous disiez à quoi vous vous référez parce que je trouve que c'est sérieux comme...

M. Bisson: Je vais essayer de répondre en termes généraux, autrement dit ne pas répondre en termes spécifiques pour aujourd'hui, en tout cas dans le cadre de la présente commission. Des gens sont mandatés pour faire du développement régional -encore là, on se demande si ce ne sont pas juste des métropoles régionales qu'il est question quand on parle de développement régional dans certains cas - et nous disent: Pourquoi donner des outils aux jeunes, pourquoi faire des groupes de soutien aux initiatives jeunesse, pourquoi donner un conseil permanent, pourquoi une Société d'investissement jeunesse? On dit que cela ne sert qu'à marginaliser la jeunesse. Je crois que pendant trop longtemps la jeunesse - pas juste ici, dans d'autres pays aussi, dans le restant du pays - a été marginalisée. Ces gens ne veulent pas suivre la réalité. On croit, on a vu - très souvent, moi j'ai oeuvré dans le domaine universitaire au niveau des associations étudiantes - on se rend compte, à un moment donné, lorsque c'est le temps de confronter ou de mettre certains fonctionnaires au pas, on dirait que les ministres ont peur de leurs employés.

Ils ont peur qu'à un moment donné certaines informations... Je ne sais pas de quoi ils ont peur. Des fois je trouve cela drôle. On dit: Tel parti a mis telle personne à tel endroit. Je trouve cela un peu normal lorsqu'on voit ce qui se passe dans bien des cas où il y a des fuites d'information. On n'a qu'à penser à l'enquête qu'il y a eue sur la boxe, à un moment donné, au Québec, le rapport confidentiel était rendu dans le Journal de Montréal, lorsqu'on voit toutes sortes de choses. On pourrait en parler, faire une liste d'épicerie, il y a tellement de questions à se poser, avoir peut-être un resserrement et peut-être plus de cohésion. Les ministres devraient avoir davantage de poigne sur les fonctionnaires.

Mme Blackburn: En page 13, et cela revient à la page 15 de votre mémoire, vous parlez d'un problème majeur dans les éléments que vous citez. Vous dites: Cela se situe au niveau des individus, des leaders, des institutions et des priorités politiques qu'on se donne en tant que peuple. La question des priorités revient. À la fin de la page 15 vous dites: "C'est pourquoi la constitution dudit conseil ainsi que le choix des membres qui le composent est de la plus haute importance et doit être le reflet des priorités que doit se donner le Québec pour son avenir." C'est précisément ce qu'on reproche dans la présente démarche, et que plusieurs ont reproché, c'est l'absence de priorités en matière de jeunesse.

Comment pourront-ils choisir les membres du conseil consultatif en fonction des priorités qu'ils se sont données puisqu'ils ne s'en sont pas donné? C'est d'ailleurs l'essentiel, je dirais. C'est un des grands reproches qu'on fait à l'actuelle démarche. Vous, vous suggérez que, pour nommer les membres, pour choisir les membres, il est de la plus haute importance qu'ils soient choisis en fonction de priorités. Il n'y a pas de priorités. Tout à l'heure, le député des Îles-de-la-Madeleine disait que précisément il n'avait pas l'intention d'indiquer de priorités. Il voulait laisser cela au Conseil permanent de la jeunesse. Cela n'est pas une attrape. C'est en le disant que j'ai...

M. Bisson: Vous voulez que je réponde à cela. Dans le mémoire, on demande au gouvernement de donner certaines priorités en termes de "guide line", d'accord? Ne pas dire un carcan, il faut que ce soit ça, ça, ça. On parle d'emploi, d'accord que je trouve que c'est un ghetto. C'est vrai l'emploi, mais c'est beaucoup plus large dans la perspective d'un traité de libre-échange. Deuxièmement, on dit que le gouvernement devrait aussi tenir compte, en termes de développement économique... On dit plus spécifiquement que l'économie doit se développer d'abord et avant tout dans les localités pour renforcer les régions et notre province au complet et que tout le monde va en avoir, en tout cas, va être mis à contribution dans la perspective d'un développement économique de tout le Québec et non seulement des capitales régionales.

Mme Blackburn: En page 16 de votre mémoire, vous identifiez un certain nombre d'activités qui devraient relever du Conseil permanent de la jeunesse. Vous dites que ce conseil devrait intervenir auprès - cela veut dire probablement intervenir auprès des ministères touchant les projets de loi qui intéressent la jeunesse. Mais, dans le projet de loi qui nous est soumis, il n'y a rien qui ferait obligation au ministre de consulter le conseil sur une politique ou sur des lois concernant...

M. Bisson: ... mais cela devrait être ajouté. C'est de cela qu'on parlait tantôt. C'est quoi les priorités? C'est quoi les pouvoirs? Jusqu'à quel point cela peut-il aller? Ce qu'on me dit entre autres c'est qu'il puisse aller voir de lui-même et pas

nécessairement recevoir tout, se faire "loader", mais donner certains pouvoirs. J'ai dit tantôt au député des Îles-de-la-Madeleine que le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités spéciaux pour des questions... Il faudrait davantage laisser audit conseil la latitude voulue et la capacité de donner certains pouvoirs à ces comités ou à ces commissions, appelons-les comme on voudrait; il serait important de penser à cet aspect.

Mme Blackburn: Vous dites également qu'il serait important que ce conseil puisse faire des tournées de consultation régionale, donc tenir des espèces de forums régionaux pour mieux traduire les besoins des jeunes dans les régions. En même temps, vous demandez que le collège électoral soit en fait l'assemblée générale dudit conseil. Pour l'un et pour l'autre, cela demande beaucoup de ressources financières et je me demandais, étant donné que vous êtes une jeune chambre de commerce, probablement davantage encline à examiner les coûts de vos demandes... Est-ce que vous avez examiné ce que cela pouvait coûter un conseil permanent si vous lui proposez d'être à la fois protecteur du citoyen et à la fois...

M. Bisson: Cela peut demander... Disons qu'il ne faut pas avoir peur d'investir dans notre jeunesse car c'est notre relève. Ce sont les enfants qui vont prendre la relève. Je crois que cela prendrait un budget... Je ne connais pas tellement la fonction publique. Je regarde aller les groupes de soutien qui se débrouillent très fortement avec un petit budget, mais je ne crois pas que ce soit tous les organismes qui aient ce dynamisme et toute la détermination que les groupes de soutien ont. Je pourrais vous dire que cela prendrait quelque chose aux alentours de 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ si le gouvernement entend donner tout ce qu'on demande, en tout cas, en termes de capacité d'intervention, tout ce que cela peut demander en termes de recherchistes, de capacité de déplacement, tout cela. Je ne connais pas tellement les coûts de la fonction publique et ces choses-là, mais cela prend une enveloppe assez importante afin de laisser suffisamment de latitude.

Mme Blackburn: Vous êtes assez proche de ce qui m'apparaît une évaluation raisonnable. Ce qu'ils offrent ici, on parle de 850 000 $, à peu près, mais le Conseil du 3tatut de la femme, pour 1986-1987, c'est 3 400 000 $ en arrondissant les chiffres.

M. Bisson: C'est 3 400 000 $, vous dites.

Mme Blackburn: Oui.

Écoutez, je voudrais vous remercier au nom de ma formation politique pour votre participation aux travaux de cette commission et vous rassurer, contrairement à ce que disait tout à l'heure le député des Îles-de-la-Madeleine, c'est toujours avec beaucoup d'intérêt que je reçois les commentaires et que j'entends les explications qui me viennent des groupes, quelle que soit leur opinion, je le rappelle. On n'enrichit jamais sa pensée lorsqu'on utilise exclusivement ceux qui pensent de la même façon que nous. Je trouve que les jeunes qui partagent ou qui ont des opinions divergentes sur ce projet, il est important qu'ils soient entendus.

Merci également de l'effort que vous avez fait de venir vous présenter à cette commission parlementaire et je vous invite à poursuivre votre travail dans votre région et peut-être essayer de trouver avec les différents paliers de gouvernement, local, régional ou provincial, les solutions qui permettront tantôt de résorber les nombreuses difficultés auxquelles est confrontée la jeunesse. Je vous remercie.

Le Président (M, Marcll): Merci beaucoup, M. Bisson et Mme Santarosa, de vous être présentés ici à la commission parlementaire. Vos commentaires de même que votre exposé ont été très enrichissants pour les deux parties de cette commission parlementaire, autant en ce qui a trait à la partie ministérielle que du côté de l'Opposition. Nous vous remercions de votre présence et soyez assurés que vos recommandations seront analysées sérieusement par la commission parlementaire et que, sûrement, il y aura des amendements apportés à ce projet de loi. Merci.

Nous allons suspendre soixante secondes pour permettre au groupe Productions québécoises Pro-Art de s'avancer. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 17 h 49)

(Reprise à 17 h 50)

Le Président (M. Marcil): Je demanderais aux gens de reprendre leur place. Je demanderais au groupe Les Productions québécoises Pro-Art de s'avancer et de prendre place. M. Jacques Béland?

Les Productions québécoises Pro-Art Inc.

M. Béland (Jacques): Oui.

Le Président (M. Marcil): Mme Nancy Morency?

Mme Morency (Nancy): Oui.

Le Président (M. Marcil): M. Yvan

Côté?

M. Côté (Yvan): Oui.

Le Président (M. Marcil): Aucun lien de parenté?

M. Côté (Yvan): Non.

Le Président (M. Marcil): Non? Soyez les bienvenus à cette commission parlementaire. Sans plus tarder, nous allons vous permettre de faire votre exposé. Vous avez vingt minutes environ. Ensuite, nous pourrons commencer les échanges.

M. Béland: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de cette commission, il nous fait plaisir de venir vous entretenir de notre organisme et surtout du projet de loi 104. Permettez-moi tout d'abord de vous présenter, comme il se doit, mes collègues: Nancy Morency, à ma droite, étudiante en droit et administratrice de notre corporation, et M. Yvan Côté, aussi administrateur de notre corporation et diplômé en sciences économiques de l'Université de Montréal»

Notre intention aujourd'hui est de vous faire des recommandations sur l'inclusion du secteur culturel comme champ d'activité reconnu, comme l'entend l'article 16; deuxièmement, sur une représentativité améliorée en ce qui concerne le collège électoral; ensuite, sur les fonctions et pouvoirs tels que décrits à l'article 26 et, finalement, sur la proposition d'un ministre délégué à la jeunesse.

Avant de vous parler de ces points, j'aimerais vous présenter notre organisme et ses activités, tels qu'ils apparaissent dans le mémoire, très brièvement. Les Productions québécoises Pro-Art sont une corporation sans but lucratif fondée en avril 1982 pour venir en aide a la jeunesse québécoise dans le domaine culturel. Notre principale intervention se caractérise par l'organisation annuelle du Festival des jeunes de Québec qui, à l'été 1987, en sera à sa cinquième édition. Par ce festival, où l'immense potentiel de notre jeunesse québécoise est clairement démontré, les Productions québécoises Pro-Art se donnent en même temps la chance d'aller rejoindre le plus grand nombre de jeunes et ce, dans leur propre milieu. De plus, nous travaillons depuis septembre 1986 à la mise sur pied d'une première galerie d'art éducative en milieu scolaire, ce qui, avec le festival, constituera les deux premières phases de notre plan d'intervention culturelle en milieu scolaire. C'est ainsi qu'avec le concours attendu de l'État, des commissions scolaires et de l'entreprise privée, nous comptons implanter une galerie d'art éducative dans chacune des régions administratives du

Québec, ce qui nous permettra de rejoindre au minimum une clientèle de 50 000 jeunes, en plus de créer de nouveaux emplois. C'est ainsi que nous pourrons étendre notre soutien aux initiatives culturelles de notre jeunesse québécoise. Plus tard, notre intention est de proposer à la société québécoise d'autres types d'intervention en faveur de notre jeunesse, tels ceux touchant entre autres au développement de l'emploi et aux richesses naturelles.

Maintenant, j'aimerais m'inspirer des propos qu'a tenus le premier ministre lors de l'ouverture de cette commission. Ceci me permettra de vous révéler dans quel esprit je veux vous faire part de cette réalité jeunesse qui est nôtre et l'urgence à laquelle nous sommes annuellement confrontés et que nous aimerions partager avec vous dans l'espoir d'y trouver lumière et intérêt.

Ce n'est que cet après-midi que j'ai pris connaissance de cette allocution du premier ministre quand il mentionnait, par rapport aux recommandations que les groupes jeunesse vont faire devant la commission, que ces propositions sont d'autant plus utiles qu'elles sont non seulement susceptibles d'alimenter nos discussions et nos réflexions, mais qu'elles constituent également pour les jeunes et les parlementaires une occasion priviléqiée d'accroître leur compréhension mutuelle de la problématique jeunesse au Québec. Plus loin, il disait que cette commission devait se tenir dans un esprit de confiance. Quant à nous, aux travaux de cette commission parlementaire, nous souhaitons vivement un échange franc et fructueux avec tous ceux et celles qui ont manifesté le désir de se faire entendre. Nous souhaitons ardemment un échange marqué du sceau de l'ouverture et de la responsabilité. Bref, un véritable échange entre partenaires soucieux d'assurer une véritable compréhension de leurs rôles respectifs que déjà l'avenir leur trace.

M. le Président, chaque année, les Productions québécoises Pro-Art sont confrontées au même problème. Pourtant, les réussites qui sont nôtres ne font plus de doute. Nous avons une intervention auprès de la jeunesse, nous sommes un instrument de formation et, pourtant, nous n'arrivons que très difficilement à évoluer par rapport aux différentes institutions qui sont présentes lors de nos démonstrations. Le festival des jeunes, c'est le côté positif de notre action. Nous voulons démontrer le potentiel des jeunes. Que ce soit le potentiel dans le secteur culturel ou dans d'autres secteurs, l'important est de montrer ce qui se fait de bien. On parle tellement des problèmes de la jeunesse, notre action veut montrer ce qui est sain, ce qui est beau et rendre à la jeunesse la possibilité d'aider celle qui est en difficulté. Cela fait partie de notre rôle de formation. Nous formons les gens qui sont

capables d'aider et, ainsi, ceux qui sont miséreux et ceux qui ont besoin d'aide auront des gens pour les aider.

Pourquoi parler de cela en premier lieu? Pourquoi ne pas tout de suite s'attaquer aux raisons mêmes de notre présence ici, à savoir le projet de loi 104? C'est parce que nous vous apportons du concret; notre groupe existe depuis cinq ans et les portes auxquelles nous avons frappé nous restent quasiment closes. Il n'y a pas de politique ni de programme qui peuvent nous permettre de fonctionner dans un cadre sain et ce, chaque année. Nous pensons avoir fait nos preuves sur tous les plans. Nous aimerions que la commission nous éclaire sur ce qui nous reste à faire pour nous faire reconnaître et qu'on puisse aider davantage les jeunes. Notre clientèle, ce sont tous les jeunes du Québec. On veut montrer le potentiel de tous les jeunes du Québec. Notre aspect fondamental est de former le jeune par la culture. Nous avons un triple râle dans le secteur de l'éducation, celui d'éduquer la population en ce qui a trait aux mentalités par des activités qu'on offre comme les marches pour la paix et des choses comme cela, pour éveiller les mentalités. En montrant aux jeunes leur potentiel, nous formons davantage les jeunes, nous leur donnons de l'expérience et l'équipe qui organise le festival comme les autres activités est formée de jeunes qui ont fini leurs études ou qui sont en train de les faire et qui sont à même d'expérimenter quelles sont les finances dans un organisme, quelles sont les relations publiques, quelles sont... Je pense qu'à l'intérieur d'un festival on est capable de voir un peu une microsociété; il y a beaucoup d'interventions possibles à tous les paliers. C'est pour cela que nous sommes très liés à l'éducation et que notre mémoire en fait mention aussi.

En fin de compte, je voudrais attirer l'attention - d'ailleurs vous l'avez sans doute remarqué - que je ne suis plus de ceux qu'on appelle jeunes, moi, j'ai dépassé cela, sauf que j'ai toujours été très sensible à la formation que j'ai reçue. J'ai eu des maîtres quand j'avais dix, quinze ans et j'en ai encore. J'imagine que c'est la même chose pour tout le monde.

L'aspect culturel dans l'éducation est très important. Personnellement, je n'ai pas de problème: j'ai un emploi, je travaille, cela va bien. Je suis enseignant et je m'occupe des jeunes. Ayant visité tout le Québec, je me suis aperçu de ce dont les jeunes avaient besoin. Et aussi, quand on parle de problèmes de chômage, quand on parle des différentes situations jeunesse, je me suis aperçu que ce dont les jeunes avaient le plus besoin, c'était d'être éclairés, c'était de trouver en eux les valeurs qui vont leur permettre de passer à travers. L'histoire nous rappelle qu'il y a eu des époques qui n'ont pas toujours été faciles, et pas simplement la période que nous vivons. Je parle au point de vue des jeunes aussi. (18 heures)

Mais ce qu'il faut surtout, c'est donner aux jeunes les éléments intérieurs pour qu'ils puissent passer à travers, se débrouiller, trouver les solutions et, pour cela, l'aspect culturel est très important. Aujourd'hui, devant des problèmes aussi complexes où la société appelle une spécialisation, nous nous apercevons de la fragmentation des esprits. Telle personne va connaître telle spécialité, mais, dans son ensemble, on s'aperçoit d'une brisure dans la personnalité.

Des solutions au problème du chômage, au problème de l'emploi, nous en parlons dans notre document. Le problème de l'emploi n'est qu'une réalité symptomatique. Pour régler ce problème-là, il faut questionner les institutions qui gouvernent notre société sur la place qu'elles veulent donner aux jeunes. C'est seulement à partir de cela qu'après on va pouvoir agir sur l'emploi. C'est pour cette raison qu'à peu près aucune solution n'est trouvée, parce qu'on n'a pas une vision globale de la situation jeunesse. À titre d'exemple, simplement pour vous montrer et mettre en lumière ce que je vous dis, pensons aux municipalités. Si chaque conseil municipal donnait 25 000 $ pour une initiative jeunesse, qu'est-ce qui pourrait arriver? Ce serait incroyable tout le dynamisme qui se dégagerait. Il est fait mention dans ce mémoire de l'État-providence. Il faut donner à nos jeunes les instruments pour se développer et pour agir dans cette société. Il y a des jeunes qui ne croient plus à la façon d'intervenir. Ils ne croient plus dans les institutions qui les régissent et se coupent de la réalité. Nous disons que notre intervention est là, entre autres, pour "autonomiser" les jeunes, les rendre autonomes et les rendre capables de changer le cours des choses.

J'aimerais maintenant passer la parole à mes collègues pour qu'ils puissent, à leur façon, témoigner de leur expérience et de leur motivation à travailler au sein de notre groupe. M. Yvan Côté.

M. Côté (Yvan): M. le Président, j'aimerais vous parler un peu de mon vécu en tant que jeune dans un organisme de jeunes qui veut aider les jeunes. Ma première expérience avec l'organisme a été lors d'un emploi d'été en 1984. Â ce moment, mon travail était de mettre de l'ordre dans les états financiers et, en plus, de travailler à la troisième...

Le Président (M. Marcil): Excusez-moi. Cela prendrait le consentement de cette assemblée pour pouvoir continuer. Oui, cela va? II y a consentement? Excusez-moi, vous pouvez y aller. C'est seulement une règle de

procédure parce qu'on avait dépassé 18 heures.

M. Côté (Yvan): D'accord, merci. Mon travail, à ce moment-là, était de mettre de l'ordre dans les états financiers et de travailler à la réalisation du troisième Festival des jeunes de Québec. Ayant vécu plusieurs émotions lors de cet été-là et prenant conscience que la relève artistique canadienne avait besoin d'un tel appui, je me suis dit: Pourquoi ne pas continuer dans cette voie-là? C'est ainsi qu'un poste au conseil d'administration me fut offert et que, depuis maintenant deux ans et demi, je fais partie de cet organisme et que je m'implique sans réserve à la survie de cet organisme. La satisfaction que j'y trouve est d'autant plus forte qu'elle est pour moi une formation active qui m'aide à trouver une place dans la société. Je crois énormément en ce genre de formation où toutes sortes de défis nous sont proposés comme le fait de collaborer à la rédaction du mémoire qu'on vous présente aujourd'hui. Lorsque j'ai été mandaté par ma corporation pour faire ce mémoire, je ne m'attendais pas vraiment au temps et à l'énergie que j'aurais à déployer pour pondre ce papier qui est, à mon avis, assez remarquable, malgré les moyens dont nous disposons comme organisme. Je pense peut-être juste à moi en vous disant cela, mais je dois vous dire que ce travail et toutes les autres réalisations que j'ai accomplis à l'intérieur de ma corporation ont toujours été dans un même sens, soit celui d'un rôle formateur auprès des gens que j'ai à côtoyer et surtout d'aider notre jeunesse.

Vous avez sans doute remarqué dans notre mémoire notre souci de l'aspect de la culture pour les jeunes. Je suis convaincu de son importance et je sais que c'est la voie à offrir et ce, pour toutes les idées que nous y défendons - que je ne reprendrai pas ici, qui sont dans le mémoire.

M. le Président, malgré tout l'épanouissement que je retrouve dans mon travail bénévole auprès de cet organisme, je reste inquiet. Je suis inquiet des efforts que j'y mets parce que depuis que je fais partie de l'organisme, nous nous butons toujours d'année en année à des problèmes d'ordre financier. Je me pose la question: Pourquoi un organisme comme le nôtre, avec toutes les lettres de noblesse qu'il a su gagner durant toutes ces années reste-t-il toujours au même point? C'est toujours à recommencer d'une année à l'autre. Personnellement, je sens que j'avance, mais l'organisme dans lequel je suis, on dirait qu'il traîne de la patte. J'avance plus que mon organisme et je voudrais faire avancer l'organisme avec moi.

Malgré tous ces efforts, nous devons tenir le Festival des jeunes de Québec, qui a lieu tous les ans et qui aura lieu dans quelques mois, mais nous sommes dans l'impasse. Les qens veulent cette activité. Jusqu'à maintenant, ils l'ont eue et en sont satisfaits; nous aussi, d'ailleurs, si ce n'est que sur le plan financier jamais nous n'avons accusé de déficit, chose qui - je suis certain que vous en êtes conscients - est très valable et prouve que vous pouvez avoir confiance en notre action.

J'aimerais aussi ajouter que le festival des jeunes n'est qu'un premier pas de notre invervention auprès de la jeunesse. D'autres projets pourraient être mis de l'avant et le sont dans une certaine mesure, mais ils doivent en rester là parce qu'ils ne peuvent cadrer dans les programmes existants. Je me demande, en dernier lieu, si, moi, jeune è vos yeux, je suis fou de continuer à vouloir aider mes semblables, sinon - c'est ce que je pense - existe-t-il des portes où frapper et, s'il en existe, où sont-elles? Merci.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. Il vous reste quelques minutes.

Mme Morency: Je vais faire cela court» En résumé, je pense que mes collègues ont vraiment bien cerné le problème, sauf que, moi, cela fait cinq ans que je suis au sein de cet organisme, c'est un peu mon bébé. J'ai adhéré à cela parce que... Cela aurait peut-être été plus plaisant pour moi d'écouter la télé, peut-être Montréal en direct, à 17 heures, mais je me disais: J'ai beaucoup d'énergie, j'ai beaucoup de potentiel, je voyais beaucoup de gens amorphes, je voyais beaucoup de gens qui, chaque fois qu'on parlait de la problématique jeunesse, se demandaient d'où cela venait, qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui est à l'origine de cela. On ne savait rien. On ne sait pas trop quelle direction prendre. J'ai pris Pro-Art, dans le fond, comme instrument pour développer mon potentiel énergétique, parce que je pense que la jeunesse, son point fort, c'est l'énergie, pour développer aussi mon originalité et un peu ce que j'ai dans le ventre, comme on dit. Moi aussi, cela m'aide à aboutir à beaucoup de choses personnellement, cela me permet de me dépasser et je trouve cela extraordinaire, sauf qu'il faudrait qu'il y ait un suivi quelque part et c'est ce que je déplore. M'aider moi-même, je suis capable de le faire seule, sauf que mon organisme a comme but d'aider mes semblables, et je trouve cela important. Je suis à l'université depuis quatre ans, je vis avec des gens qui, chaque fois que je leur dis que je fais partie d'un orqanisme, me disent: Ah oui! tu es bonne... Qu'est-ce qui se passe? C'est peut-être pour cela qu'on est ici actuellement. En résumé, c'est cela. Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci

beaucoup, Mme Morency. Maintenant, je vais laisser la parole au député de Marquette.

M. Dauphin: Oui, merci beaucoup, M. le Président. M. Béland, Mme Morency et M. Côté, je tiens, au nom de l'équipe ministérielle, à vous remercier d'avoir participé à cette consultation générale qui a pour objet d'étudier le projet de loi 104. J'ai lu attentivement votre mémoire, fort intéressant d'ailleurs, et l'objectif de cet exercice démocratique est de tenter de bonifer le projet de loi qui est devant nous actuellement.

Premièrement, j'aimerais vous féliciter pour ce que vous faites pour les jeunes en général, vous féliciter aussi pour la cinquième édition de ce qui sera cet été le Festival des jeunes de Québec. J'ai très bien compris votre message de tantôt et également lu le mot "attendu", lorsque vous parlez du gouvernement, à votre première page. Je peux vous dire tout de suite que mes collègues et moi saurons faire des représentations auprès des instances appropriées pour vous aider, notamment, sur le plan financier. Vous avez des projets très intéressants, notamment, des galeries d'art dans les régions administratives de la juridiction québécoise. Au nom de tous mes collègues, je vous encourage, non seulement à continuer, mais à faire tout ce qui est possible pour que cela se concrétise éventuellement.

Revenons maintenant au mémoire. Comme vous le savez, il y a une dizaine ou une quinzaine d'années, on entendait parler très rarement des problèmes des jeunes au Québec. Un festival comme le vôtre ou un organisme comme celui dont vous faites partie contribue à cet éveil de la société sur les problèmes des jeunes. Cela s'est accentué, un peu en 1982, avec la récession économique. On a vu le taux de chômage des jeunes grimper à 22 %, 24 % et même 27 %, chez les 15-25 ans, selon les statistiques du gouvernement fédéral. C'est à ce moment-là qu'on a vu les partis politiques, les organismes de jeunes se multiplier pour revendiquer des choses auprès des gouvernements et de la société en général.

Maintenant, revenons au projet de loi 104. Si je regarde la première page de votre mémoire, vous vous déclarez satisfaits des gestes que tente de poser le gouvernement du Québec. Vous notez qu'il faut que ce Conseil permanent de la jeunesse soit crédible, c'est bien évident. Il y a deux mots qui sont extrêmement importants personnellement, cela fait six ans que je suis député; dans l'Opposition j'en parlais fréquemment et j'en parle même du côté ministériel, aujourd'hui - c'est la "volonté politique". Il faut absolument, malgré les discours, malgré les engagements électoraux - cela s'applique autant à l'ancien régime -une volonté politique. Tout de suite à votre première page, ce sont les deux mots qui, à mon point de vue, sont les plus importants au sein des différents paliers de gouvernement. Cela prend la volonté politique. De mon côté, je peux vous dire qu'on a cette volonté politique. Évidemment, au fur et à mesure que les mois et les années passeront, nous serons et vous serez en mesure de juger si, effectivement, le gouvernement actuel du Québec avait et a cette volonté politique.

Maintenant, comme première question que j'ai à vous poser, et c'est dans l'ordre de votre mémoire, vous dites qu'à l'article 26 du projet de loi 104, on devrait lire "doit" au lieu de "peut", c'est-à-dire que le Conseil permanent de la jeunesse dans ses fonctions et attributions devrait obligatoirement exercer les quatre sous-alinéas compris à l'article 26. Ma question est la suivante: C'est sûr que le Conseil permanent de la jeunesse, les 11 ou 15 membres que vous proposez auront à aviser, à conseiller le gouvernement. Est-ce que, selon vous, on n'enlève pas une forme d'autonomie au Conseil permanent de la jeunesse en exigeant de lui de faire ces quatre choses-là? C'est vrai que c'est discrétionnaire, c'est vrai que le conseil "peut" faire une de ces quatre choses-là, mais j'aimerais que vous explicitiez un peu sur ce que vous entendez par le mot "doit". C'est sûr qu'ils ne peuvent pas faire les quatre en même temps. C'est impossible, mais, étant donné les problèmes qui vont surgir et les problèmes que nous connaissons actuellement, j'aimerais que vous explicitiez un petit peu là-dessus.

Mme Morency: C'est moi qui vais répondre là-dessus. J'ai demandé le remplacement du mot "peut" par "doit". À mon avis, quand on parle de pouvoirs, de devoirs, etc., si je demande le mot "doit", c'est pour m'assurer d'une certaine réalisation positive. Ce que je veux dire par là, je vais prendre un exemple très concret: Supposons que dans cinq ans, dans le futur, le conseil a des difficultés évidentes, qu'il n'a pas réussi à remplir les différents pouvoirs qui actuellement lui sont confiés. On constate un problème évident. Alors, on dit au gouvernement qui sera en place: écoutez, le conseil devait faire telle chose, il ne l'a pas fait. Il y a un problème. (18 h 15)

Maintenant, prenons la situation actuelle. On dit: Le conseil pouvait faire cela et il ne l'a pas fait. Alors, à mon avis, le mot perd complètement son poids. Quand on exige quelque chose, on exige quelque chose de précis, alors on doit le faire. Tandis que, lorsqu'on met le mot "peut", il reste toujours une éventualité. On ne peut rien exiger de quelqu'un qui peut le faire. On peut exiger quelque chose de quelqu'un

qui doit le faire. C'est dans cette perspective que je voulais mettre le mot "doit" au lieu du mot "peut".

Maintenant, je croyais - c'est là que je vais avoir la réponse - que le conseil pouvait faire en même temps les quatre pouvoirs énoncés dans cet article. Je crois que c'est important qu'il informe et qu'il effectue des recherches, autant qu'il soumette des études au ministre. Je crois que c'est important dans un ordre logique que ces quatre fonctions soient faites en même temps. On sait qu'au point de vue juridique, lorsqu'on met le mot "doit", on peut exiger par recours certaines choses. Ce n'est pas dans cette perspective que je veux que cela soit mis. Je pense qu'il n'y a personne ou aucun organisme qui ait intérêt à demander qu'on nous fournisse des informations. Je pense que cela ne sera même pas susceptible de s'appliquer, sauf que vous comprenez un peu, c'est une volonté, dans le fond, qu'on veut avoir dans cet article par le mot "doit". La société veut exiger quelque chose de ce conseil, alors qu'on nous le permette.

M. Dauphin: D'accord. Je suis également, comme je l'ai dit tantôt, l'ordre chronologique. À l'article 16 du projet de loi, vous proposez que l'on ajoute le mot "culturel". Sans avoir consulté mes collègues, moi, personnellement, je n'aurais aucune objection à ce que le mot "culturel" soit inclus à l'article 16, avec loisirs et éducation. De toute façon, je suis persuadé que les gens qui s'affairent à recueillir toutes vos recommandations verront à agir en conséquence. Je n'ai pas de questions précises à poser sur cela. Je voulais juste vous mentionner que je suis d'accord avec vous sur cela. La culture, c'est important. Il ne faut jamais omettre de le mentionner.

M. Béland: Est-ce que je peux parler un peu sur cela? Ça me donne une idée.

M. Dauphin: Oui.

M. Béland: Trop souvent, on a tendance à penser que la culture, c'est pour les gens bien nantis, les riches, etc. C'est complètement faux. La culture, c'est l'ensemble de toutes les institutions, c'est l'ensemble de toutes les connaissances acquises par une personne. À vrai dire, la culture résume tous les secteurs qui se trouvent dans l'énoncé. Si l'on veut quand même s'accommoder de ce que les gens en perçoivent, ce serait tout ce qui n'est pas inclus dans les quatre autres secteurs. Je pense qu'on devrait aussi insister sur l'expression d'une société, d'une jeunesse par rapport à des médiums commes les arts. Cela est très important. Sans cela, on fausse tout le débat. On dit: Nous, notre action devient une action de riches, de superflu, attardons-nous à d'autres problèmes plus urgents. Ce n'est pas cela la réalité. Il faut voir la culture en tant que formation qui permet à l'individu d'être capable de discerner ce qu'il doit faire.

M. Dauphin: Un autre point, si vous me permettez, avant de permettre à d'autres membres de la commission de poser des questions. C'est revenu d'ailleurs dans plusieurs mémoires relativement à la création d'un nouveau ministère pour débattre et défendre le dossier des jeunes. Évidemment, vous en parlez dans votre mémoire. Notre collègue des Îles-de-la-Madeleine a posé la question à un groupe, je pense, hier. Avec ce qui se vit au fédéral, vous savez que depuis 1984 il y a un ministère d'État à la Jeunesse. Malheureusement, on a su, à un moment donné, que ce ministère n'avait presque pas de budqet et qu'il se contentait... C'est sûr qu'un ministère délégué, ça se contente de coordonner ou de quêter auprès des autres ministres sectoriels ce qui peut se faire pour les jeunes, de donner quelques chèques une fois de temps en temps pour des activités quelconques. J'aimerais savoir de vous ce que serait un ministère de la jeunesse.

M. Béland: Quand on parle d'un ministre délégué à jeunesse dans le mémoire, je n'ai pas tendance à voir tout de suite le ministère parce qu'il est plus important d'avoir un porte-parole au sein de la formation ministérielle que d'avoir un ministère comme tel. Je me méfie, et nous nous méfions de tout ce qui s'appelle bureaucratie. Cependant, on pense que, tel qu'il est dit dans le mémoire aussi, puisqu'on ne peut plus ignorer les jeunes, puisque c'est une réalité à laquelle veut s'attaquer le gouvernement, il nous semble loqique qu'avec un instrument comme le conseil permanent, où les jeunes vont pouvoir se faire entendre, il existe, dans le gouvernement, une personne jeune, qui soit députée, homme ou femme, et qui va pouvoir prôner ce qu'il est. Cela fait référence à une logique pure. Certaines personnes auront tendance à dire: C'est le premier ministre qui est le ministre délégué à la jeunesse. C'est déjà là, je pense, un atout. Non pas que le premier ministre ne s'occupe... On sait que le rôle du premier ministre est de s'occuper de tous les dossiers de l'État. Le fait qu'il l'ait sous sa juridiction dénote que c'est cher pour lui, mais rien ne pourra remplacer un jeune qui est élu pour pouvoir exprimer la volonté des jeunes. Nous pensons que c'est une suite logique à la création du Conseil permanent de la jeunesse. S'il est vrai que les jeunes sont importants en termes d'instrument pour la société, pour la population en général et pour les jeunes, cela l'est aussi pour les parlementaires. C'est pour cela que nous avons proposé cela.

Vous faisiez référence tantôt au gouvernement fédéral. Au point de vue de la structure administrative et dès pouvoirs de ce ministre, il me semble que le premier pouvoir de ce ministre serait... j'aurais tendance à dire de contaminer les ministères, c'est-à-dire de faire valoir à tous ses collègues et partout dans les ministères la réalité jeunesse, et c'est un ministre qui peut faire cela, ce n'est pas quelqu'un qui est là, qui peut être tassé ou qui fait partie d'une structure bureaucratique.

M. Dauphin: Merci. Je vais laisser la parole à d'autres et je reviendrai éventuellement.

Le Président (M. Després): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je cède maintenant la parole à la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique. J'aimerais faire quelques brefs commentaires sur votre mémoire, pour revenir ensuite à des questions se rapportant un peu plus à vos recommandations. Je dois dire que vous avez un discours qui est rafraîchissant. Parmi ceux qu'on a entendus ici, malheureusement... Je dirais que ce n'est pas exclusivement le fait des jeunes. On confond culture et loisir. Ce qui faisait dire aux jeunes: Le loisir est là-dedans, donc la culture devrait s'y retrouver. La définition que vous donnez de la culture dépasse, comme il se doit, largement les cadres du loisir, c'est beaucoup plus englobant. Je dois dire que la définition que vous en donnez, qui se rapporte à des écrits connus, est suffisante pour qu'on reconnaisse que votre recommandation touchant au fait que la présidence pourrait être occupée par quelqu'un qui vient du secteur culturel, je trouve cela intéressant parce que ta culture, c'est l'ensemble des activités humaines, y compris celle de la production du travail. Je trouve que l'idée est intéressante. Cela élargit, à mon avis, beaucoup plus l'approche de quelqu'un qui est à ce poste-là, sa vision plus intégrée du développement d'une société.

Vous nous rappelez, avez raison, et je l'ai rappelé à quelques occasions à cette commission, que la culture, l'éducation à la culture, c'est parmi les moyens estimés indispensables pour accroître le degré d'autonomie et de créativité d'un peuple, donc de productivité. C'est hautement utile et cela influence la capacité d'un peuple de produire, donc de devenir rentable au plan économique. Cela a été prouvé dans les pays qui sont actuellement les plus avancés, les plus avant-gardistes.

J'aimerais, parce que le temps passe, que vous me parliez un peu de votre orqanisme, de son budget, de ses modes de financement, de son mode de financement, parce que je dois dire que je le connais moins bien. J'ai été plus en contact avec un autre groupe qui a fait beaucoup de pressions auprès de nos bureaux et auprès de tous les parlementaires et qui s'appelle Festival Création Jeunesse, à Montréal. Je sais que ce n'est pas de même nature, d'après les explications que j'ai entendues. Je sais que ce festival doit se tenir incessamment, mais je sais également qu'ils ont des problèmes de financement. C'est toute la question de l'encouragement à la relève. Il y a un autre groupe qui est venu nous en parler longuement ici. J'aimerais que vous m'en parliez un peu plus.

M. Béland: Le festival est une activité de notre corporation et non pas une fin en soi, ce qui différencie toute autre activité de ce type-là. Elle s'intègre à l'intérieur d'un plan d'intervention culturelle en milieu scolaire. Autrement dit, le festival des jeunes, c'est la première phase. Ensuite, il y a autre chose.

Chaque année, depuis - on a fait le premier festival en 1983 - nos façons de nous financer, il n'y en a pas 75: il y a l'État et l'entreprise privée qui peuvent nous aider. Ceci a toujours fait l'objet de notre préoccupation, à savoir de sensibiliser l'État et l'entreprise privée à nos réalisations, ce qui est très difficile, parce qu'il y a déjà des activités qu'on pourrait confondre ou on pourrait, nous, nous confondre à travers certaines de nos activités et dire: Cela existe déjà une activité comme ça.

Le festival des jeunes a cette difficulté-là. C'est qu'il se situe à l'intérieur d'autres activités auxquelles on serait souvent tenté de l'apparenter. Nous avons tendance à dire que, s'il doit exister une activité de ce type, comme le festival des jeunes... Si on se sert du mot festival, cela devrait d'abord être le nôtre qui existe puisqu'on s'occupe d'éducation, de formation.

Donc, à travers l'activité économique, touristique et tout cela, il y a des jeunes qui se forment. En ce qui concerne le financement, nous avons été subventionnés par l'État depuis 1984. De temps en temps, c'était le fédéral, de temps en temps, le provincial. De temps en temps, ce n'était ni l'un ni l'autre. De temps en temps, c'était l'entreprise privée. Là, nous commençons à avoir vraiment une structure au niveau de l'entreprise privée, des gens d'affaires, des hommes ou des femmes d'affaires qui commencent à s'intéresser à nos activités, qui commencent à faire une base en ce qui concerne un comité de souscription. Nous espérons, naturellement, ne pas toujours, chaque année, demander à l'État: Est-ce que vous pouvez nous subventionner? Comme si nos réalisations antérieures ne comptaient

pas. Se faire dire un groupement jeunesse: Nos programmes? Il n'y a plus d'argent, il y a un moratoire. Les programmes aux Affaires culturelles ou aux Relations extérieures existent, mais il n'y a plus d'argent à mettre là-dedans. Donc, comment faire, nous, pour être dans ces programmes si on n'accepte plus personne? C'est là où nous en sommes présentement. Il faut une volonté politique qui va dire: Oui, aux Affaires culturelles, il y a de l'argent pour une manifestation culturelle pour former les jeunes. C'est cela qu'il faut.

Mme Blackburn: Avez-vous également des budgets qui vous viennent du ministère de l'Éducation, des commissions scolaires? Je présume que oui.

M. Béland: Le ministère de l'Éducation m'a permis, Mme la députée, de me libérer, moi. Je suis enseignant à une commission scolaire. En 1963, j'ai été libéré deux semaines; en 1984, six mois? en 1985, un an, et ainsi de suite. Présentement, je suis à l'école et le plan dont nous parions ici aujourd'hui, c'est un plan qui n'est pas fini. C'est un plan qui est à venir. Si bien que le ministère de l'Éducation, c'est cela qu'il a apporté comme contribution, il a permis que, moi, je puisse être libéré pour travailler a cela. Mais ceux qui ont fourni, les ministères qui ont fourni - je pense, entre autres, à l'année passée - c'est par des budgets discrétionnaires. Alors, les Affaires culturelles, les Communications, tout le monde y a passé. Mais, cette année, c'est qu'on ne peut pas... On est en face d'une problématique différente. C'est qu'on ne veut plus, c'est discrétionnaire. On veut que nous soyons dans des programmes, mais les programmes sont fermés. Alors, c'est pour cela que nous voudrions avoir une solution.

Mme Blackburn: Bénéficiez-vous encore d'une libération pour travailler à... (18 h 30)

M. Béland: Non, pas présentement. Oisons que le travail que je fais auprès des jeunes dans ma commission scolaire bénéficie à ces jeunes-là. Il se trouve que des idées que j'ai ou que j'ai eues veulent le bien-être de tous les jeunes au Québec et j'espère, dans un proche avenir, qu'on puisse reconnaître cela.

Mme Blackburn: Bien. Je vais revenir sur vos recommandations et un peu sur ce que j'appellerais de l'ordre des commentaires. En page 6 de votre mémoire, vous dites au paragraphe du centre: "Qu'on le veuille ou non, le futur conseil aura un effet centralisateur des différentes réalités jeunesse ce qui comporte divers avantages, mais aussi, reconnaissons-le, de sérieux désavantages. Pour contrer ces derniers, nous préconisons que le futur conseil procède plus souvent qu'autrement à une délégation de pouvoirs envers les organismes jeunesse existants. Il est évident, dans cette optique, que le conseil permanent devra fournir aux organismes jeunesse concernés les moyens financiers appropriés pour effectuer ces recherches et cela pour la satisfaction de tous."

Vous savez que, dans le cadre d'une loi comme celle-là, ce n'est pas beaucoup de l'ordre du possible. Cependant, je trouve votre approche intéressante, mais, dans le cadre de ce projet, je ne pense pas qu'il soit possible de déléguer des pouvoirs. Vous pouvez toujours passer des contrats de recherche, mais il faut que ce soit approuvé, avec la longue démarche qu'on connaît, et le problème a souvent le temps d'avoir trouvé sa solution ou de s'être résorbé de lui-même. C'était plutôt au niveau des remarques parce que, parfois, beaucoup d'organismes qui se sont présentés ici ont eu tendance à confondre les rôles - je ne dirais pas que c'est vraiment le ' cas pour celui-ci, cependant - d'un organisme consultatif avec un ministère, avec une société ou avec un office. On veut lui confier, souvent, à ce conseil, des rôles qui ne sont pas compatibles avec la loi qui le constitue.

En page 10 de votre mémoire également, vous rappelez, et c'est important, qu'avant toute chose il va falloir que la société se prononce sur la place qu'elle veut accorder aux jeunes. En d'autres termes, vous dites qu'il est impossible de développer des mécanismes, des projets concrets en faveur des jeunes sans savoir au préalable ce que l'ensemble de nos institutions, l'expression même de notre culture veut faire comme place aux jeunes. Je dirais que cela a beaucoup été la revendication de plusieurs organismes. En l'absence de grandes orientations sur la jeunesse au Québec, le conseil permanent pourra mettre des années avant de faire consensus autour de telles questions. D'autant plus que, pour prendre comme exemple ce que vous disiez tout à l'heure, si le gouvernement, dans ses programmes, est peu sensible au développement de la culture et à des outils tels que le vôtre, un conseil permanent peut tout juste se donner un avis, n'a pas le pouvoir d'aller plus loin que cela.

C'est pourquoi, avant qu'on n'amène un conseil à se prononcer sur de grandes orientations ou sur des questions de cette nature, il faudra absolument que le gouvernement, qui a une philosophie de la gestion et du développement de la société, ait fait connaître cette philosophie. Ce qui nous fait dire et qui a fait dire à plusieurs intervenants que la démarche est à l'inverse de ce qu'elle aurait dû être, c'est-à-dire qu'il aurait dû d'abord y avoir une grande orientation et ensuite création du conseil

permanent, si tant est que c'était cette structure que cela prenait.

Dans vos propositions, vous dites, et vous avez touché du doigt un problème, que le conseil permanent, telle que la loi est rédigée, n'oblige pas le conseil à faire les quatre points du mandat prévu. Il y a un autre organisme qui a souligné cela ce matin, un organisme de la région de l'Estrie, en nous faisant remarquer que la Loi sur le conseil du statut de la femme, précisément, indiquait qu'il "doit" et non pas qu'il "peut". Je dirais que c'est l'inverse dans le libellé de cette loi, mais le ministre nous dit qu'il y a moyen de le corriger. Généralement, vous obligez le conseil à faire un certain nombre de travaux, donc vous indiquez le "doit" et, ensuite, vous dites: Le ministre "peut". Ici, c'est juste inversé, c'est le ministre qui demande des choses, le conseil doit et, par rapport à son mandat, il peut. Là-dessus, je voudrais faire confiance au gouvernement et, si tant est qu'il s'obstine à vouloir adopter le projet de loi, on pourra peut-être faire apporter ces modifications.

Pour ce qui est de la question d'inclure le secteur culturel parmi les autres secteurs déjà mentionnés, je voudrais juste vous dire que je vais me porter à la défense de cette modification au projet de loi. Cela m'apparaît majeur. Je le répète, l'essentiel du développement économique du Québec des sociétés modernes va passer, je dirais, particulièrement par ce volet. Les secteurs où on pourra encore créer des emplois c'est la recherche et le secteur culturel. Tout le reste va très vite. Tout à l'heure, on avait un exemple éloquent, je pense, quand le jeune nous parlait de la productivité des pommiers. C'est la même chose que pour construire une table à présent, ou une voiture, ou un ordinateur, cela va à une vitesse effarante. Sur cela, je voudrais juste vous dire ma position. Pour ce qui est de la création d'un ministère ou d'un ministre associé ou délégué, pour vous, est-ce un ministre délégué que vous voulez ou un ministre, et donc un ministère? Tantôt, vous avez répondu, mais j'étais un peu distraite.

M. Béland: Un ministre délégué. Je ne connais pas les jargons dans ce sens. Je ne sais pas si c'est ministre d'État, ou ministre délégué, ou ministre sans portefeuille. L'important, c'est que cette personne devrait indiquer au gouvernement la volonté qui s'exprime, c'est-à-dire que le conseil fasse ses études au nom de ce ministre qui, lui, aura à défendre avec le Conseil exécutif ou avec les députés les priorités, mais que cela passe par une personne. C'est important que cela passe par une personne de la députation.

Mme Blackburn: D'accord. Il s'agirait, en fait, d'un ministre délégué comme la ministre déléguée à la Condition féminine...

M. Béland: Oui.

Mme Blackburn: ...où il y a petit secrétariat mais où il n'y a pas de budget.

M. Béland: Le moins gros ministère possible, s'il devait y avoir ministère. On pense que la personne qui sera ministre, ce sera à elle à faire jouer ses cartes.

Mme Blackburn: Bien. Comme on doit recommencer tantôt, même s'il y a encore beaucoup de questions qui vont rester en suspens, j'aurais terminé. Je voudrais à nouveau vous remercier de votre participation à cette commission. Je sais ce que cela exige que de participer à une commission. Nous, ici, on finit par oublier -je le rappelais - que ce n'est pas facile de venir présenter un mémoire et que ce n'est pas facile de venir le défendre. J'ai déjà été assise là et je le sais, sauf que je l'oublie, malheureusement. Je voudrais vous remercier et rappeler que je suis particulièrement heureuse que vous soyez là. Comme je l'ai dit à plusieurs occasions, quand il y a une telle consultation et qu'on boude la consultation, ou encore qu'on l'ignore, il y en a d'autres qui parlent en votre nom. Il est toujours préférable de venir s'exprimer soi-même. Alors, pour votre contribution, je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Oui, à mon tour de vous remercier de votre participation. Si ce n'est déjà fait, je vais m'assurer que votre mémoire soit notamment au ministère des Affaires culturelles le plus rapidement possible. Je crois que c'est déjà fait. Je m'en doutais fort bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marcil): Moi de même. Nous vous remercions de votre présence et de votre participation à cette commission. Naturellement, nous vous souhaitons un bon retour. Donc, nous allons suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 38)

(Reprise à 20 h 6)

Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous voulez, nous allons commencer immédiatement les travaux de cette commission, compte tenu du fait que nous avons deux groupes à rencontrer ce soir. Le premier groupe sera la Table de concertation jeunesse Lac-Saint-Jean-Est. Si vous voulez vous avancer à la table.

Cela va? Je demanderais donc le

consentement pour que M. Brassard (Lac-Saint-Jean) remplace M. Godin (Mercier). Y a-t-il consentement? M. Maltais, M. Fradette et Mme Maryse Grenon - c'est cela? - nous vous souhaitons la bienvenue à cette commission parlementaire. Sans plus tarder, nous allons vous entendre. Vous avez vingt minutes pour exposer votre mémoire et, ensuite, on procédera à la période des questions. Allez!

Table de concertation jeunesse Lac-Saint-Jean-Est

Mme Grenon (Maryse): Maryse Grenon. J'aimerais préciser que nous sommes un groupe d'intervenants auprès de la clientèle jeunesse. On s'est regroupé parce que, d'abord, on avait le souci de se rencontrer, de se concerter entre intervenants parce qu'on s'apercevait que, autant dans le réseau des affaires sociales qu'à l'éducation et au centre de main-d'oeuvre, on travaillait tous auprès de la même clientèle qui, parfois, faisait plusieurs services, mais, comme intervenants jeunesse, on se voyait rarement. Cette table de concertation jeunesse, qui regroupe le secteur d'Alma et des territoires, nous permet d'échanger, d'avoir de la formation en commun, de prendre position sur différents dossiers. Ce n'est pas un regroupement d'organismes, je précise bien, mais un regroupement d'intervenants. On va faire le résumé de nos principales recommandations sur le Conseil permanent de la jeunesse, surtout en donnant les commentaires, les sommaires, les réflexions que cela a suscités auprès de nos intervenants.

D'abord, la grosse question quand on a préparé le mémoire, cela a été: Consulter pour consulter. La création d'un conseil permanent de la jeunesse, afin de consulter ou de conseiller le gouvernement sur les attentes et besoins exprimés par les jeunes est une mission qui nous apparaît comme étant noble. Personne n'avait rien contre cela. Sauf qu'on croit que cette étape est déjà franchie et qu'il faut maintenant passer à des actions plus concrètes. Nous pensons que nous avons déjà des données quantitatives, qualitatives et des prospectives sur la problématique des jeunes. Entre autres, à la dernière réunion de la table, chaque membre avait pour mandat d'apporter de la documentation faisant état de ta problématique jeunesse. Ce soir, on a apporté quelques documents, mais il faut être bien conscient que c'est la petite pointe de l'iceberg, pas tout ce qui dépasse, mais vraiment un petit morceau, parce qu'il y a de la documentation dans le réseau.

Ainsi, les nombreux intervenants oeuvrant auprès des jeunes, les nombreuses institutions ainsi que le gouvernement possèdent maintenant toutes les informations et avis pouvant permettre aux différents intervenants et instances de prendre des décisions et, des orientations en ce qui a trait aux besoins des jeunes.

M. Maltais (Réal): Le Conseil permanent de la jeunesse a une mission qui nous paraît extrêmement noble et intéressante. En résumé, on ne peut pas être contre la vertu. Par contre, cette vertu nous apparaît comme pouvant avoir des effets pervers dans le sens qu'elle pourrait permettre au Conseil permanent de la jeunesse de s'asseoir sur ses lauriers et de penser que ce conseil permanent représente vraiment l'ensemble de la pensée des jeunes.

Pour appuyer les documents qu'on a devant nous, je vais vous présenter quelques statistiques. On aurait pu vous en présenter des tonnes et des tonnes, mais je vais vous en présenter seulement quelques-unes pour vous exposer un peu la réalité dans laquelle, nous, les quinze intervenants jeunesse d'Alma, vivons et évoluons.

Je tiens à préciser que, pour nous, les jeunes, c'est à partir de 12 ans, ce sont les 12-29 ans. Pourquoi les 12-29 ans? Pour nous, une fille de 9 ans qui demande un avortement, une fille de 12 ans qui demande un avortement, un garçon de 14 ans qui a des problèmes de drogue, c'est aussi important qu'un bonhomme de 18 ans qui a des problèmes de drogue ou qu'une fille de 17 ans aux prises avec des problèmes d'avortement. Il nous apparaît que cette catégorie, nous au CLSC, au CSS et dans tous les secteurs qu'on représente, de plus en plus, prend de l'ampleur. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que de plus en plus les jeunes s'affranchissent très très tôt.

Donc, les 15-29 ans, parce que c'est là-dessus qu'on a des statistiques, les 15-29 ans, au Saguenay--Lac-Saint-Jean représentent 29 % de notre population. C'est évident que cette partie de la population, chez nous, reçoit des services très pertinents: l'école, les familles, les services de santé, les services sociaux et tous les organismes bénévoles, les organismes de santé, de soutien, etc. Les jeunes reçoivent beaucoup de bons services.

Malheureusement, on a fait état, très souvent, du chômage qui, chez nous, atteint 23,3 %. C'est le CRSSS-02 qui nous donne cela comme information en termes de statistiques. Pour ce qui est des moins de 30 ans qui bénéficient de l'aide sociale, chez nous, c'est 15 %. C'est une proportion importante. De cela découlent des problèmes de santé importants en ce qui concerne l'alimentation, des problèmes de santé en ce qui a trait au logement et, aussi, de plus en plus, ce qui est criant, ce sont les problèmes de santé mentale qui sont très importants, des problèmes de santé très importants en ce qui a trait à l'intégration. Comment ces

jeunes vont-ils s'intégrer dorénavant dans le monde des adultes, dans le monde du travail, tous ces jeunes dont on vous parleaujourd'hui? Comment ces jeunes vont-ils se valoriser sans travail, dans un monde où le chômage et l'assistance sociale deviennent de plus en plus un phénomène qui se cristallise? C'est ce qui est grave, c'est ce qui est important. Ces jeunes, dans leur famille, à 22 ou 23 ans, qui ont un cours universitaire - on ne parlera pas des mal-nantis - brisent actuellement les milieux familiaux. Quelqu'un qui a 23 ou 24 ans, qui revient d'un cours universitaire et qui ne se trouve pas d'emploi, on s'aperçoit dans nos services que la dynamique du milieu familial change et se transforme énormément.

Vous n'êtes pas sans connnaître les problèmes extrêmement importants en ce qui a trait au suicide. Avant de partir tout à l'heure, chez nous, cet avant-midi, je correspondais avec une coordonnatrice du CLSC qui me disait qu'elle avait sur sa table de travail quinze cas suicidaires de jeunes entre 12 et 25 ans, des cas graves. En dehors de cela, il y a ceux qui sont pris en main. Ce ne sont pas des statistiques, ce sont des faits. En plus de cela, il y a les jeunes qui sont mariés et qui ont charge d'enfants. Les jeunes qui sont mariés et qui ont charge d'enfants, cela représente 28 % des bénéficiaires de l'aide sociale qui sont aptes au travail. Je travaille principalement au niveau de la protection de la jeunesse, de l'évaluation des signalements. Je vous dirai que cette partie de la population, les moins de 30 ans qui ont charge d'enfants, représente une partie importante des signalements qu'on reçoit d'enfants battus, maltraités, abusés sexuellement.

Ce que je peux dire après cela, c'est comment les jeunes, depuis les années soixante-dix, ont réagi par rapport à tous les problèmes. Les jeunes n'ont pas été inefficaces et inactifs par rapport aux problèmes qu'ils connaissent depuis les années soixante-dix. Je lisais dans un article du Devoir, du 23 juillet 1986, signé par Caroline Beaulieu, que depuis les années soixante-dix il y a 700 organismes qui ont commencé, qui ont mis fin à leurs activités, mais qui ont été enclenchés par les jeunes. Ces organismes se sont occupés d'hébergement, de culture, de sport, de maisons de jeunesse et de tout autre phénomène préoccupant les jeunes, pas seulement en matière de misère sociale, mais aussi en matière de culture et de sport.

Ce qu'il faut se mettre en tête, c'est qu'entre les jeunes de 12 ans et ceux de 29 ans, la problématique est extrêmement différente et extrêmement variée selon l'époque, selon les sociétés et selon l'évolution. En 1950, on évaluait que ceux qui étaient jeunes, c'était la proportion probablement des 12-18 ans. À 18 ans, on pouvait aller bûcher, travailler, souder, faire n'importe quoi. Aujourd'hui, cela s'étend jusqu'à 29 ans. (20 h 15)

Les jeunes de 12 à 29 ans sont une population qui, en soi et entre eux, est extrêmement hétérogène, il faut en être conscient. Les principes et les valeurs qui animent les jeunes, c'est extrêmement différent. La philosophie d'un jeune "straight" de 20 ans et la philosphie d'un jeune punk de 20 ans, c'est extrêmement différent. Il y a des élites et il y a des gens qui sont bien pensants et qui sont aussi des punks. Et cela, on se demande, nous, comment à l'intérieur du CPJ, toute cette catégorie-là va s'infiltrer. On se demande comment le Conseil permanent de la jeunesse pourra analyser complètement toutes ces problématiques, alors que ce dont on est conscient uniquement à l'intérieur de nos services, c'est qu'il y a énormément d'études. On a juste à les consulter et on vous parle ici uniquement de ce qu'on a pu rassembler ces derniers jours, et je suis sûr qu'ici, au Parlement, vous avez beaucoup plus de recherches que nous.

Mme Grenon: On pense que c'est une structure qui ne correspond pas aux besoins des jeunes. Vouloir regrouper leurs besoins, leurs demandes, leurs problèmes sous une même entité nommée Conseil permanent de la jeunesse et en faire leur porte-parole est un exercice purement intellectuel et c'est connaître mal les jeunes que de penser qu'ils vont se sentir touchés nécessairement par cela.

Les questions qu'on s'est posées là-dessus, c'est comment la structure proposée sera-t-elle en mesure de tenir compte a la fois des disparités régionales et des besoins spécifiques de chacune des régions, comment tenir compte des écarts, comme le disait mon confrère, d'âges entre 18 et 29 ans, de la grande complexité et de la grande diversité des problèmes reliés à ces caractéristiques, les jeunes étant de plus en plus diversifiés dans leurs principes, . leurs valeurs et leurs statuts.

Comment le Conseil permanent pense-t-il pouvoir représenter les écarts entre les générations, entre jeunes de 12 et 29 ans? On pense que cela peut être utile comme porte-parole des jeunes, mais que ce n'est pas vraiment nécessaire, parce qu'une évaluation exhaustive des besoins des jeunes a déjà été identifiée et nous constatons qu'il existe une contradiction manifeste entre la création du conseil et les coupures de subventions aux organismes jeunesse et la reconnaissance des organismes jeunesse.

M. Maltais (Réal): Ce que l'on pense, finalement, c'est que ce n'est pas une structure qui va jouer aux alentours du

million dont on a besoin; on a parlé de quelque 800 000 $ dont les jeunes ont besoin. Sur ce plan, si on pense qu'une structure qui doit exister, il y a déjà le Secrétariat à la jeunesse qui a une certaine fonction et qui pourrait sûrement être remanié. Je pense qu'on n'a pas à recréer, en dehors du Secrétariat à la jeunesse, une autre structure qui pourrait soit être plus haute, plus basse ou chapeautée. Je pense que ce million pourrait servir ailleurs. C'est à peu près cela.

Ce qu'on pense, c'est qu'il y a déjà dans le milieu - on va parler du milieu que nous connaissons - de nombreux organismes, des regroupements d'organismes, des regroupements de jeunes qui, eux, sont capables, ils sont capables de très bien parler au nom des jeunes et de les représenter tout à fait adéquatement. Ces organismes-là, eux, je pense qu'ils sont capables de transmettre, par un intermédiaire qui pourrait être le Secrétariat à la jeunesse, toutes les statistiques et données qu'ils ont en main. Pourquoi alors vouloir créer une telle structure? C'est la question qu'on se pose. Pour nous, ce serait vraiment un organisme très artificiel, compte tenu de sa super grande rigidité. Est-ce qu'il serait en mesure - je me répète - d'évaluer les besoins, d'évaluer les valeurs des jeunes et de vraiment représenter toute la diversité que représentent ces jeunes-là?

Mme Grenon: L'accent doit être mis prioritairement sur des actions concrètes pouvant soulager des situations déjà largement documentées, comme on en faisait état; il faut favoriser des regroupements autour de préoccupations multiples ou spécifiques laissant place à l'imprévu et à l'imprévisible avec une clientèle jeunesse.

M. Fradette (Alain): À ce stade-ci de notre argumentation, M. le Président, je voudrais vous présenter quelques cas concrets. Cela peut sembler un peu farfelu d'amener cela ici. Naturellement, ce n'est pas dans le but de les régler, mais vous allez comprendre un peu mieux notre philosophie.

Je vous parlerai de Johanne, d'Alma, qui est une jeune étudiante en éducation spécialisée et qui, à cause des coupures dans les bourses et prêts d'études, est obligée d'arrêter ses études parce que ses parents ne sont pas capables non plus de prendre la relève parce qu'ils vivent plus souvent qu'autrement de l'assurance-chômage. En fait, Johanne est obligée de revenir à des petites jobines qu'elle pourra prendre d'un bord et de l'autre et sûrement qu'elle va revenir à l'aide sociale et au cercle vicieux. Pour Johanne, c'est impossible de s'en sortir. Notre question, M. le Président: Qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse peut apporter de plus à Johanne?

À Jonquière, Martin, après avoir fait tous les projets possibles et imaginables, est toujours sans travail. Martin vit actuellement une situation de découragement qui est très profonde. Il pense même au suicide. M. le Président, qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse peut apporter à Martin?

Raymond vient de suive une cure de désintoxication pour alcooliques en prison. On l'a laissé sortir l'an passé, juste au temps des fêtes, sans argent, sans aucune ressource; il n'avait aucun soutien familial. La seule issue qu'il y avait pour Martin, c'était le retour à la boisson. Qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse va apporter de plus à Martin?

Hélène, de Chicoutimi, a des problèmes avec son partenaire. Elle a eu à faire face à de la violence physique et verbale. Elle-même a de graves problèmes psychologiques. La garde de son enfant est mise en doute, mais, pour elle, c'est le seul moyen de justifier le besoin de plus de revenus de la part de l'aide sociale. Qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse peut apporter de plus à Hélène?

À Chicoutimi, quatre jeunes étaient toujours d'un projet à l'autre, ils ont décidé de lancer ensemble leur propre entreprise à partir d'une nouvelle méthode d'enregistrement dans un système de son. Le problème, c'est que personne n'a voulu les financer. Ils ont essayé quand même de lancer leur entreprise comme ils ont pu. Ils ne sont admissibles à aucun programme de subvention ou d'aide venant des gouvernements, tant fédéral que provincial. Ils vivent une situation de découragement; on voit venir une faillite à court terme et le retour à l'aide sociale. Qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse peut apporter à ces quatre jeunes entrepreneurs?

À Alma, dans la rue Moreau, Laval est propriétaire d'un immeuble à logements complètement désuet et détérioré. Les jeunes se retrouvent là en pension parce que, avec ce qu'ils ont d'aide sociale, ils n'ont pas le moyen de se payer autre chose. Les jeunes qui vivent là font face à des situations de logement absolument infect. Ils font face à de la malnutrition. Il n'y a aucun loisir possible pour eux parce qu'il ne leur reste plus rien. Il y a une promiscuité dans cela qui n'est vraiment pas favorable et, en plus, cela donne l'occasion à un commerce assez illicite de la part du propriétaire. Encore là, on est dans le cercle vicieux et on ne s'en sort pas. Qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse peut apporter de plus à ces gens?

Sylvie, une jeune mère de famille avec deux enfants à charge, a un revenu de 690 $ par mois. Elle a un loyer, que j'ai vu en passant et qui est moins que passable, qui lui coûte 360 $. Il lui reste 330 $ pour

l'épicerie pour trois personnes, pour habiller ses enfants, pour se payer du loisir. Si son ex-mari lui paie une pension alimentaire, l'aide sociale coupe son chèque et, une fois que l'aide sociale a coupé, le mari décide de ne plus payer la pension alimentaire. Sylvie est encore plus mal prise qu'elle ne l'était avant. Qu'est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse va apporter à Sylvie?

En fait, on pourrait vous donner des exemples comme cela toute la soirée. Tout cela pour vous dire qu'on vit à côté de ces jeunes; on est près d'eux, on voit leur misère et on essaie de partager leur vécu. Ce qui nous intéresse, ce sont des actions concrètes, c'est d'apporter du pain et du beurre à ces personnes. Pendant qu'on va créer des structures et qu'on va encore alourdir le système, tout le temps et l'argent qu'on va investir dans cela, ces jeunes ne verront jamais le bout du tunnel.

M. Maltais (Réal): Lorsqu'on a été appelés à venir ici, on a lu la documentation sur les recherches qui ont été faites et les jeunes qui ont été appelés à venir ici ont dit leur mot. La principale réflexion qui ressort de ces lectures, c'est que les jeunes disaient: Cela va nous donner un haut-parleur intéressant que d'avoir un Conseil permanent de la jeunesse on trouve cela le fun, on trouve cela intéressant. Ce dont il faut être conscient, c'est que, quand quelqu'un crie dans le haut-parleur, par exemple, ceux qui sont en arrière sont moins bien entendus.

Lorsque M. Bourassa est venu parler à cette commission, il a dit dans ses mots que le Conseil permanent de la jeunesse aiderait les jeunes à participer pleinement à la vie politique et aux projets sociaux. Je trouve extraordinaire qu'on puisse dire cela, sauf que ce dont il faut être conscient, c'est que les jeunes qui vont pouvoir participer à la vie politique et aux progrès sociaux, ce sont les jeunes élites. Je n'ai rien contre l'élite, c'est extraordinaire. Il faut en avoir des élites dans la société, sauf qu'il faut être honnête, par exemple. Il faut être honnête en ce sens que, si c'est juste l'élite qui a le droit de parler, donnons-lui une voie particulière pour qu'elle puisse se faire entendre au plan politique. Il faut être honnête aussi. Ce ne sont pas tous les jeunes qui sont capables d'utiliser cette voie et, finalement, parler au niveau politique. Si le Conseil permanent de la jeunesse se veut un rassemblement uniquement d'élites, là, je n'en suis plus, par exemple. Je n'en suis vraiment plus. II ne faut vraiment pas s'asseoir sur ses lauriers et penser que le Conseil permanent de la jeunesse va représenter tout le monde.

Finalement, le rôle du Conseil permanent de la jeunesse m'apparaît comme vraiment un rôle d'éteignoir en ce sens qu'on va avoir l'impression qu'en écoutant ce conseil permanent, en arrière, les jeunes vont se tirailler. J'ai entendu tout à l'heure les deux groupes de jeunes qui ont précédé et on s'est rendu compte qu'il n'y avait pas une commune mesure entre les jeunes qui ont passé tout à l'heure. Les maisons de jeunesse et la chambre de commerce des jeunes, ce sont deux besoins. Je n'ai rien contre l'un ou contre l'autre. Au contraire, j'ai tout pour, sauf qu'il faut être conscient que, pendant qu'ils se battent entre eux pour définir leurs priorités, les problèmes demeurent sur la table. C'est ce dont j'ai peur principalement du Conseil permanent de la jeunesse, qu'il joue un rôle d'éteignoir.

Je n'appellerais pas cela des recommandations, mais des réflexions tout haut, les derniers points que j'ai abordés. C'est évident que les problèmes des 15-30 ans, ce sont des problèmes très importants et que le gouvernement semble vouloir s'y attarder un peu. Donc, les réflexions qu'on fait par rapport à cela, c'est qu'on nous avait promis une réforme de l'aide sociale. Où est-elle cette réforme de l'aide sociale? C'est une mesure concrète et je pense qu'il faudrait s'y attarder. Je l'ai fait ressortir tout à l'heure, c'est une proportion importante de la population jeunesse.

Une politique de financement pour les organismes jeunesse, on en a parlé aussi. Où est cette politique de financement d'organismes jeunesse pour arrêter les jeunes de se tirailler pour ce qui est des maisons de jeunesse, des tables de concertation jeunesse?

Une politique en matière de santé mentale. Cela fait longtemps aussi qu'on parle de cette politique de santé mentale en ce qui concerne les jeunes. Je vous soulignais tout à l'heure qu'en matière de santé mentale c'est là où la détérioration est la plus grave présentement, non pas en ce qui a trait à la santé physique, mais à la santé mentale.

Là où cela nous apparaît aussi important, c'est dans la consolidation des réseaux des CLSC, pour ce qui est des intervenants jeunesse. Je vous parlais tantôt de la situation des enfants qui font partie de la problématique du suicide. Ce n'est pas des farces, c'est grave, c'est important, et je pense qu'il faut s'alarmer à ce niveau.

En octobre 1984, il y a eu une consultation sur la politique familiale. Sûrement que, lors de cette consultation qui s'est faite en régions, on s'est interrogé sur les conditions du logement. Je faisais part tout à l'heure des conditions de logement des moins de 30 ans qui avaient charge d'enfants. Je pense qu'il faut se poser des questions là-dessus et on attend de voir comment la politique familiale va se développer là-dessus.

Finalement, à titre d'autres recommandations, s'il vous apparaît que la

diversité des problèmes des jeunes est aussi grande et aussi volumineuse qu'on semble, nous, le prétendre, je pense qu'il faudrait songer à la création d'un ministère propre à la jeunesse. Pourquoi alors vouloir créer une autre structure? C'est ma dernière question. J'ai terminé.

Le Président (M. Marcil): Cela va? M. Maltais (Réal): Oui.

Le Président (M. Marcil): Compte tenu qu'on a dépassé le temps en ce qui concerne l'exposé, pour les partis, il y a 23 minutes d'utilisées. Il s'agirait de répartir les deux dix minutes de chaque côté.

M. le député de Mille-Îles? (20 h 30)

M. Bélisle: Merci pour votre présentation. Le trait frappant de votre présentation, de votre document, c'est qu'il table sur le vécu concret de ce que vous vivez chaque jour sur le terrain. C'est ce que je sens quand on parle des Johanne, des Hélène et de tout ce monde. Je veux savoir comme question préliminaire depuis quand la table de concertation jeunesse Lac-Saint-Jean-Est est formée.

M. Maltais (Réal): Trois ans.

M. Bélisle: Trois ans. Depuis que la table de concertation est formée, essayez de nous décrire quelles sortes de résultats concrets cette table a pu atteindre pour les jeunes du Lac-Saint-Jean, comparativement au fait où la table de concertation n'aurait pas existé.

M. Maltais (Réal): Oui.

M. Bélisle: Je ne parle pas des groupes, je parle de la table.

M. Maltais (Réal): Non. Je comprends bien votre question.

M. Bélisle: D'accord.

M. Maltais (Réal): À mon avis, les réalisations ont été peu concrètes. La seule réalisation importante sur laquelle on tablait, c'était sur ce qu'on appelle une espèce de réseau permanent d'information qui a existé pendant un an. Ce réseau permanent d'information se voulait pour nous une espèce d'endroit où les jeunes - et là, on voulait toucher principalement les 17 ans et plus -pourraient être informés de tous les projets gouvernementaux qui existent et pour qu'ils puissent les utiliser au maximum. Malheureusement, ce projet a existé uniquement pendant une période d'environ huit mois faute de fonds et faute de ressources, et, nous, travaillant chacun dans nos secteurs, cela s'est terminé. Il y a eu beaucoup de sensibilisation qui a été faite dans le milieu, mais cela n'a jamais été des situations concrètes auprès des jeunes. Il y a eu énormément de sensibilisation, comme on le fait présentement. C'est un mandat principal qu'on se donne dans le moment, dans notre région, de sensibiliser énormément les organismes, les gens et même le monde politique sur la situation de misère assez importante dans laquelle vivent ces jeunes de 12 à 29 ans.

M. Bélisle: Je dois comprendre que le deuxième volet de vos objectifs, l'information au cours d'une période de huit mois, l'échange d'avenues précises pour améliorer le vécu concret des jeunes d'un organisme à l'autre, c'est un échange d'informations.

M. Maltais (Réal): Sur cela, je ne vous cacherai pas que l'espèce de collégialité qui s'est établie depuis trois ans entre les organismes qu'on représente, pour nous, cela nous apparaît quelque chose de presque unique dans le sens que, lorsqu'un cas arrive chez nous ou dans chacun de nos services, cela évite de faire l'éternel ping-pong dans chacun des services. On s'en parle aux tables de concertation et, si ce n'est que cela comme réalisation concrète, il nous apparaît que chez nous cela est une réalisation très importante de connaître nos intervenants et ce que fait chacun des milieux. Vous n'êtes pas sans savoir toute la complexité des services dans lesquels on travaille.

M. Bélisle: Une autre question précise avant d'aller un peu plus en profondeur Quand vous dites: "...de nombreuses études et de nombreux projets faits par les jeunes ont été à même de nous décrire leurs besoins comme étudiant, consommateur, travailleur...", est-ce que la table de concertation a produit pour la région du Lac-Saint-Jean des analyses? Est-ce que vous avez produit des documents qui précisent les priorités et les choix de la jeunesse pour la région du Lac-Saint-Jean? A qui les avez-vous remis, s'il y en a eu de faits?

M. Maltais (Réal): Dans le cadre du projet, je vous en informais tout à l'heure, effectivement, il y a eu une recherche de faite. À qui cela a-t-il été remis? Aux membres de la table uniquement. Si vous voulez en avoir une copie éventuellement, on pourra vous la faire parvenir. Il y a eu cette recherche de faite. Je vous ai dit qu'on avait bâti un projet qui s'appellait RIAJ, un projet d'information, de réseau d'information qui a vécu pendant huit mois. À l'intérieur de ce projet, il y a eu effectivement une recherche qui a été faite.

Mme Grenon: Chacun de nos organismes

établit des données statistiques et des prospectives de services. Par exemple, au niveau collégial, il y a des recherches qui ont été faites par des étudiants relativement è la santé. En ce qui concerne la réforme des prêts et bourses, on a des données sur cela. Je pense qu'il s'agit de s'asseoir et de regarder ce qu'on fait. Dans le réseau, il y a de cela. À la table de concertation, c'est peut-être l'avantage qu'on a eu, d'échanger et de parler sur des problématiques. On s'est donné une formation commune sur la drogue. Chacun dans nos secteurs, on avait des choses à partager sur cela. On est aussi en contact direct avec la clientèle jeunesse.

M. Bélisle: D'accord. Moi, ce que j'aimerais savoir, c'est quand vous faites des analyses dans chacun de vos secteurs, puisque à la table il y a eu simplement un échange d'informations, est-ce qu'à partir de chacun des secteurs, par la suite, l'information est allée directement, supposons - on va parler de politique à un certain moment - aux canaux appropriés, aux ministères? Vous dites que non?

Mme Grenon: On n'était pas rendus là.

M. Bélisle: D'accord. Ce qui m'amène à vous poser la question, c'est que, si vous n'en êtes pas là, vous me dites dans votre document que l'étape est déjà franchie. Moi, je dis que l'étape n'est pas franchie. Si vous nous dites que vous faites des analyses secteur par secteur, et c'est ce qu'il faut faire... Les maisons d'hébergement, l'itinérance, les sans-abri, les problèmes de toxicomanie chez les jeunes, d'accord, il y a une multitude de problèmes, je vous l'accorde. Chacun des secteurs a une expertise concrète dans chacun des domaines. Vous identifiez des solutions, mais, vous, au lac, vous avez une particularité régionale spéciale. Peut-être que des solutions du lac s'appliqueraient à une autre région, peut-être que c'est différent par rapport au contexte d'une région comme Québec ou Montréal. Mais ne pensez-vous pas que c'est le contraire de ce que vous avez écrit dans votre document quand vous nous dites que l'étape du Conseil permanent de la jeunesse est franchie? Je vous dis ce soir que cette étape n'est pas franchie parce que, ce que vous devez faire, c'est justement de ramasser tout cela, de prendre un certain délai très limité, non pas d'étendre cela dans le temps, un délai limité pour... Vous me dites, jusqu'à un certain point, vous utilisez le terme d'éteignoir, que cela va filtrer l'ensemble des besoins exprimés par les jeunes pour en faire ressortir les priorités. Il est sûr qu'il va y avoir des petites particularités qui vont nous échapper dans le processus. C'est évident. Quand on agrège des problèmes, c'est normal, c'est cela qu'on fait. Mais je pense que la fonction principale du Conseil permanent de la jeunesse, c'est justement de faire cette étape intermédiaire avant d'en arriver à une vraie politique de la jeunesse. Cette étape n'est pas franchie présentement, justement à cause de ce que vous nous dites ce soir.

M. Maltais (Réal): Ce que je pense à ce sujet, c'est qu'il y a vraiment énormément d'études qui ont été faites là-dessus, vous en convenez. Je pense qu'il y a déjà des réseaux naturels qui existent à l'intérieur de nos services que sont les CLSC, les CSS, les regroupements de jeunes. Si vous vouliez demain matin savoir quels sont les problèmes des jeunes dans les polyvalentes, je connais Donald Tremblay, à Alma, et des Donald Tremblay, il y en a sûrement de 200 à 300 dans la province de Québec qui sont capables, en l'espace de deux ou trois semaines, de vous donner l'heure juste à ce sujet. Si vous voulez savoir ce qui se passe en matière d'abus sexuels dans chacune des réqions, venez me voir, Réal Maltais, et allez les voir les Réal Maltais dans 200 régions de la province et vous allez avoir l'heure juste au sujet des abus sexuels. À ce sujet, je comprends très bien votre question et il est vrai que l'ensemble des données n'ont pas été regroupées, mais, là où elles sont facilement regroupables, je pense que ce n'est pas au niveau d'un Conseil permanent de la jeunesse. Il y a déjà des organismes en place qui sont capables de vous donner cette information, et vite. On refuse d'écouter les gens actuellement qui sont dans ces secteurs. Vous refusez d'écouter Donald Tremblay, vous refusez de m'écouter quand je veux vous donner des statistiques concernant le suicide à Alma.

M. Bélisle: Monsieur...

M. Maltais (Réal): C'est une figure de style que j'utilise.

M. Bélisle: Oui, je suppose que c'est une figure de style, je comprends bien, mais veuillez croire que, pour plusieurs d'entre nous, si on se donne la peine de faire cela, ce n'est pas simplement pour la frime politique. C'est correct? On va essayer de faire un petit pas en avant, s'il y a possibilité. Il y en a peut-être qui ne croient pas à cela, c'est une vision que je respecte, mais, quant à moi, ma vision n'est pas celle-là, sinon je ferais autre chose.

L'arrimage de l'institutionnel et du communautaire. Vous êtes trois personnes qui êtes incorporées aux structures? Vous êtes des professionnels dans le domaine, vous êtes payés par les structures. Expliquez-moi comment il se fait qu'il y ait tant de jeunes qui perçoivent le fait que des structures

existent tout partout à travers ta province et qu'on vienne nous dire très souvent qu'on ne devrait pas investir de l'argent dans les structures mais qu'on devrait donner l'argent directement aux jeunes. Est-ce parce que vous êtes mal perçus? Est-ce parce que les jeunes ont une mauvaise vision de ce que vous faites ou s'ils comprennent mal ce que vous faites? Je m'excuse de poser la question brutalement.

M. Maltais (Réal): Je peux vous répondre.

M. Bélisle: Mais on s'est fait dire cela. Cela fait sept jours qu'on est ici et la "toune" revient souvent. Je trouve cela "cute", vous remettez le système en question, parfait on va le remettre en question, mais il y a autre chose aussi à remettre en question. J'aimerais avoir votre réaction face à cela.

M. Maltais (Réal): Je suis mal placé pour vous parler du domaine où je travaille, je suis à la protection de la jeunesse. Évidemment que je suis mal perçu, je fais des enquêtes sur les enfants battus, maltraités et abusés sexuellement. Il faudrait demander à Maryse qui travaille en milieu scolaire, elle va vous répondre.

M. Bélisle: Alors, posons la question à Maryse d'abord.

M. Maltais (Réal): C'est cela.

Mme Grenon: C'est sûr qu'on a des données.

M. Bélisle: Je vais passer à une autre question. Je veux corriger une impression. J'espère que c'est une perception et je voudrais la corriger. Vous nous dites, à la page 2: "Premièrement: On veut ainsi avoir un seul porte-parole officiel pour exprimer l'ensemble des besoins des jeunes." Si c'est l'impression donnée par le bout de papier qui est devant vous et qui porte le numéro 104, c'est la mauvaise impression. C'est un des porte-parole. Il y a d'autres porte-parole. Il y en a qui sont dans la salle en arrière et qui vont nous parler tantôt. Je pense que ce sont des porte-parole assez articulés de la jeunesse du Québec et il y en a beaucoup d'autres qui sont venus nous voir au cours des dernières semaines. Je peux vous dire, pour ma part, que, quand vous pensez ou percevez qu'on veut que ce soit un seul porte-parole officiel, non, ce n'est pas vrai. Cela devrait être un des porte-parole et les autres porte-parole devraient continuer à fonctionner exactement comme ils fonctionnent présentement. Mais ils devraient se trouver un porte-parole qui est là et qui a des moyens que d'autres n'ont pas nécessairement. Ils auraient une tribune qui serait l'alliée des autres porte-parole qui existent dans le domaine du dossier jeunesse. C'est comme cela que nous percevons cela.

Juste pour terminer, avant de passer la parole à d'autres collègues, vous avez posé souvent la question - c'est vous qui l'avez posée: Qu'est-ce que cela va donner le Conseil permanent de la jeunesse pour les Johanne, les Hélène? Je vais vous répondre de la façon suivante: C'est sûr que ce n'est pas une panacée, c'est sûr que cela ne peut pas régler tous les problèmes. Ce soir, vous nous avez parlé de la prostitution chez les jeunes, des itinérants, des sans-abri, de l'insalubrité des logements, des jeunes femmes battues, de la drogue, des suicides. Mon Dieu! Je suis d'accord qu'il y a beaucoup de problèmes, on en est très conscient. Le Conseil permanent de la jeunesse ne réglera pas tout cela, pas du tout. Ce n'est pas cela du tout le but du projet de loi 104. Je vais vous dire quel est le but du projet de loi 104. C'est de permettre à la Hélène du Lac-Saint-Jean, à la Hélène de Trois-Rivières, à la Hélène de Rimouski, à la Hélène de Val-d'Or, par le poids du nombre... Il y a un groupe qui va venir devant nous tantôt et qui va nous parler du poids du nombre, du rapport de forces. Il sourit en ce moment, en arrière. Le Conseil permenant de la jeunesse, c'est pour être capable d'en arriver avec le poids du nombre à frapper plus fort sur la table et que la jeunesse soit mieux écoutée.

Je dois vous dire que, pour ma part, quand je vois cela, c'est sûr que le conseil permanent va être jugé d'après ses actions. Le gouvernement qui va l'avoir mis en place va être jugé sur la façon de fonctionner du Conseil permanent de la jeunesse, s'il aura des coudées franches ou des coudées liées. C'est un risque assez important pour un gouvernement quand il ne laisse pas libre ce qui doit être libre au départ. Mais c'est un risque que nous sommes prêts à courir, parce qu'on pense que c'est très important. C'est ce que j'avais à vous dire.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le député de Mille-Îles. Maintenant, on va passer la parole a Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, madame et messieurs. Il me fait plaisir, au nom de ma formation politique et à titre de porte-parole officielle de la jeunesse à l'Opposition, de vous souhaiter la plus cordiale bienvenue et je veux vous remercier d'avoir pris la peine et fait l'effort de venir en commission parlementaire nous faire part d'abord de la connaissance que vous avez de la situation des jeunes dans votre région. Je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup ici à cette table qui aient été très

collés ou très proches des jeunes, et particulièrement des jeunes en difficulté. Je ne parle pas des étudiants ni des jeunes travailleurs, je parle des jeunes en difficulté. C'est important que vous nous appreniez un peu, que vous nous donniez un meilleur éclairage sur ce qu'est la situation des jeunes.

Ce que je trouve intéressant, je pense que c'est le premier organisme qu'on a qui réunit des intervenants jeunesse. On a eu des organismes de regroupements de jeunes, de maisons de jeunes. Mais, pour ce qui est des intervenants jeunesse, je trouve que la formule est particulièrement intéressante. C'est peut-être un peu là-dessus que j'aimerais vous entendre tantôt. Cependant, un peu avant, je me permettrais de commenter un peu les propos du député de Mille-Îles, mais, en même temps, le contenu de votre réflexion. Ce que vous venez nous dire, c'est que vous nous offrez une structure dont on n'a pas vraiment besoin et qui risque d'être artificielle, illusoire et peut-être même aussi nuisible, parce que vous dites que les études, les statistiques et les données existent. (20 h 45)

Je voudrais dire au député de Mille-Îles, s'il l'ignore, que toutes les statistiques sur la violence, la négligence, les enfants battus, les abus sexuels, le chômage, sur l'itinérance, sur les sans-statut, c'est connu et cela existe. Tous les ministères ont en leur possession tous les renseignements et je dirais que sur le chômage et l'assistance sociale, on les a plutôt par deux bureaux que par un: on les a à la fois par le canadien et par le québécois. Cela existe amplement et les gens sont venus le dire à maintes et maintes reprises. Le caractère d'urgence de la situation actuelle appelle des interventions rapidement. Toute la journée, je pense, à l'exception d'un mémoire, c'est ce qu'on a entendu.

Pourquoi cela m'étonne qu'on ne soit pas en train de se demander si, effectivement... Je crois à la bonne volonté du gouvernement quand il a voulu présenter son projet de loi; là-dessus, je n'en doute pas. Je pense qu'il faut lui donner cela. Je ne pense pas que c'est de façon malhonnête qu'il a présenté un projet de loi, je ne le crois pas. Il y a cru et il l'a présenté, sauf que je trouverais encore beaucoup plus honnête s'il acceptait de reconnaître qu'il s'est trompé sur l'outil qu'on offre. C'est juste ce que j'avance. Dans le fond, c'est ce que les mémoires sont venus nous dire. Ce n'est pas une défaite, il n'est pas trop tard pour se demander quelle structure ou quelle aide on pourrait apporter de façon plus utile aux jeunes du Québec. Personne n'y perdrait la face. Je pense que, quand on est capable de reconnaître une erreur, c'est tout aussi noble. Comme le dirait le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur: savoir qu'on est dans l'erreur et y persévérer, c'est malhonnête. M. Ryan nous disait cela en parlant du dégel des frais de scolarité. Sur cette question, c'est la raison pour laquelle j'ai plus de difficulté à intervenir sur le fond parce que l'analyse que vous faites m'apparaît fort pertinente.

Vous dites également qu'il est difficile de saisir la problématique jeunesse, d'essayer de mettre cela ensemble parce que c'est extrêmement varié. Vous dites que cela devrait commencer à 12 ans. Il y en a d'autres qui sont venus nous dire qu'il faudrait que cela se termine à 35 ans. Imaginez-vous, on ne vient pas d'améliorer la capacité de lecture. Dans ce sens, je suis d'accord avec vous qu'il faudra s'interroqer sérieusement sur ce que serait le meilleur outil pour répondre aux besoins des jeunes.

Plusieurs organismes ont fait valoir ici qu'il serait utile d'avoir un ministre et, de préférence, en même temps, un ministère. Ce qu'ils demandaient aussi, c'est un lieu où on peut prendre de vraies décisions. Une des premières décisions à prendre, c'est de dire: Si, effectivement, vous voulez prouver que vous reconnaissez la valeur des organismes jeunesse, arrêtez de couper dans les budgets des jeunes, des maisons de jeunes, et ainsi de suite. En gros, ce discours est revenu souvent.

J'aimerais revenir, si vous îe permettez, sur votre organisme et vous demander deux choses. Tout à l'heure, à la question du député de Mille-Îles, vous disiez que c'était davantage des informations... Évidemment, comme vous avez des organismes là-dedans qui sont à caractère plus régional et d'autres à caractère plus local, je pense à la Sûreté municipale, je pense au CLSC, est-ce que vous avez déjà pensé à un organisme d'invertenants jeunesse qui serait davantage local pour permettre une plus rapide circulation de l'information sur la situation des familles en difficulté, des jeunes en difficulté? C'est ce que je me demandais parce que je sais que cela existe, mais cela n'existe pas de façon systématique. L'école prend un enfant qui a un problème, elle règle cela dans l'école et elle renvoie l'enfant dans le même milieu. C'est le système que je connaissais quand j'ai vu fonctionner cela un peu au CSS dans le temps. Je me demande si vous avez déjà essayé de vous mettre ensemble pour voir s'il n'y avait pas moyen de traiter des cas un peu plus en concertation.

M. Maltais (Réal): Là-dessus, je vous dirais que, dans les projets, on y a grandement sonqé. Le problème qu'on a, c'est un problème de libération, de manque de permanence. Chacun de nous avons notre "job" particulière. On est en train de s'apprivoiser entre nous et on a quand même

plusieurs projets. Il y a eu des colloques régionaux qu'on a mis sur pied. Le problème que vous abordez plus spécifiquement, à savoir si entre nous on est capable de prendre charge de cas ou de prendre charge d'une problématique, il y a eu quelques analyses de situations semblables, par exemple, s'acharner sur le cas de Laval dont on parlait, c'est-à-dire Laval qui tient une maison... Il y a des situations concrètes comme celle-là qu'on essaie d'analyser, qu'on essaie de voir en avisant la sûreté, etc. Il y a des situations concrètes comme celle-là qu'on essaie de voir. Comment fait-on face à tel problème de ressources? Oui, on essaie d'y voir, comment tel programme, La Bivoie, entre autres, qui s'occupe de jeunes de plus de 18 ans qui ont des problèmes de travail, comment ces jeunes peuvent s'intégrer parmi les jeunes qui sont en probation chez nous au Centre de services sociaux. Oui, il y a ce genre de collaboration de façon non pas systématique, mais de façon informelle. Oui, il existe ce genre d'échanges qui donne des résultats concrets auprès de notre clientèle.

Mme Blackburn: Cela a tendance à se développer ce genre de rapport entre les différentes institutions. Est-ce que vous en avez également avec les commissions scolaires?

M. Maltais (Réal): Très peu avec les commissions scolaires. Il y avait des gens qui faisaient partie de notre table de concertation et qui, finalement, se sont désistés. Actuellement, il y a des gens de la table de concertation qui sont de l'éducation permanente. Avec eux aussi, les jeunes qui ont plus de 18 ans, qui sont en probation ou qui sont à La Bivoie et qui veulent profiter des services de l'éducation permanente vont être transférés. On informe des différents services par l'intermédiaire de la table de concertation. Il y a des échanges professionnels qui se font là et la clientèle des ex-détenus ou celle des jeunes contrevenants vont en profiter directement par l'intermédiaire de notre table de concertation.

Mme Blackburn: Avez-vous également des rapports avec les maisons de jeunes, les maisons d'hébergement et avec les groupes de soutien aux initiatives jeunesse, ou si on s'en va dans un autre secteur?

M. Maltais (Réal): C'est un rôle que j'ai oublié. La table de concertation jeunesse a participé aux tout débuts de la formation de la maison des jeunes, à Alma. Elle a participé très activement à la mise sur pied de la Maison jeunesse d'Alma. Il y a des membres qui faisaient partie du conseil d'administration et elle les a soutenus très fortement à la présentation de projets. Il y a quelqu'un du CLSC qui est à la table de concertation et qui les a chapeautés tout le long de leur développement. Actuellement, il n'y a plus personne qui s'occupe de ce projet, c'est en marche maintenant.

Mme Blackburn: Dans nos petites villes, est-ce qu'on connaît des problèmes d'itinérance?

M. Maltais (Réal): Très peu étant donné que ce sont de petits milieux, les réseaux naturels sont très fermés: familles, voisins, amis. C'est un problème moins criant. Le sujet qui a été soulevé, soit le problème de Laval, cela en était un. Finalement, cela a été démantelé tout dernièrement par la Sûreté municipale. C'est trop petit des villes comme chez nous pour qu'il y ait vraiment des problèmes d'itinérance, c'est désamorcé et, l'hiver, il fait beaucoup trop froid pour coucher dans la rue.

Mme Blackburn: II y a quand même des gens qui sont sans adresse et qui se promènent d'un ami à une soeur?

M. Maltais (Réal): Oui, mais ce sont des problèmes moins criants à cause des réseaux naturels qui existent: familles, voisins, amis. On les connaît très peu.

Mme Blackburn: Écoutez, M. le Président, avec votre permission, je sais que mon collègue de Lac-Saint-Jean...

Le Président (M. Marcil): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Si vous me permettez, moi aussi, je voudrais d'abord remercier les représentants de la table de concertation jeunesse, d'autant plus que - je n'ai pas besoin de vous le dire - ils viennent de ma circonscription.

J'ai bien apprécié votre mémoire et vos témoignages. Je pense que cela a pour effet de relativiser le projet de loi et le Conseil permanent de la jeunesse quand on vous écoute exposer les problèmes vécus par les jeunes. Quand on vous écoute décrire les situations vécues par les jeunes, il faut le dire, une institution comme celle-là nous apparaît quelque peu artificielle, pour ne pas dire futile.

Cependant, la question que je voudrais vous poser est la suivante: Si le gouvernement juge bon d'aller de l'avant avec son projet de loi et de créer le Conseil permanent de la jeunesse, il y a quand même des remarques que l'on retrouve dans votre mémoire concernant la structure proposée dans le projet de loi actuel. Vous nous indiquez très clairement que cette structure ne vous apparaît pas suffisamment représentative et que cela aurait pour effet

de créer une institution peu crédible dans les milieux de jeunesse. Partant du fait que le projet de loi franchit les étapes et que le gouvernement décide de créer un conseil permanent de la jeunesse, est-ce que vous avez des recommandations à faire concernant la structure que devrait adopter cette institution pour qu'elle apparaisse davantage crédible qu'elle ne le serait si le projet de loi, tel qu'il est présentement, était adopté?

M. Maltais (Réal): Je pense qu'éventuellement le Conseil permanent de la jeunesse - et on lui attribuait quand même des vertus - devrait avoir, pour l'écart d'âge chez les jeunes et l'écart des problèmes, la possibilité d'entendre chacune de ces parties. J'ai dit et je le répète, je n'ai rien contre l'élite et je ne veux pas que les jeunes de 12 ans qui ont des problèmes importants soient plus entendus, je veux juste que ces gens-là soient tous entendus, et tous entendus également. Je ne veux pas que le CPJ soit un endroit où les jeunes se tiraillent entre eux pour savoir quel est le problème le plus prioritaire: s'organiser pour que, à l'université, les frais de scolarité diminuent ou s'organiser pour les jeunes de 17 ans qui ont des problèmes d'hébergement. C'est cela qui crie le plus, c'est cela qui m'embête, ce ne sont pas les jeunes qui viennent ici ou la chambre de commerce qui veut avoir son créneau, ce n'est pas cela, cela est correct. Si on m'assure que le Conseil permanent de la jeunesse sera en mesure d'écouter tout le monde, et de bien le faire en utilisant très fermement tout ce qu'il y a dans le milieu et d'y aller rapidement, je n'ai rien contre, sauf que j'en doute. C'est cela.

M. Brassard: Certains groupes, plusieurs même, ont proposé la mise en place de structures régionales ou de collèges électoraux régionaux, par exemple, qui éliraient eux-mêmes les représentants ou les membres du Conseil permanent de la jeunesse. Contrairement à ce qu'on retrouve dans le projet de loi actuel où la constitution ou la composition se fait de haut en bas, c'est le gouvernement qui nomme, plusieurs souhaitent, pour donner davantage de crédibilité au conseil, que cela parte de la base, qu'on régionalise davantage la structure et que ce soient les organismes, les groupes jeunesse dans le milieu qui constituent des collèges électoraux régionaux et que ces derniers désignent les membres du Conseil permanent de la jeunesse. Pensez-vous que, si le gouvernement choisit de mettre en place une telle institution, il faudrait cependant prévoir que, en termes de composition et de nomination des membres, ce soit davantage démocratique que ce ne l'est présentement dans le projet de loi?

M. Maltais (Réal); Dans mes recommandations, quand je parlais de politique de financement pour les organismes de jeunesse, c'est un peu à cela que je faisais allusion dans le sens que, dans chacune des régions - et on en fait allusion dans le mémoire - des groupes naturels sont représentatifs, dans chacune des régions, des groupes naturels sont déjà là et sont capables d'exprimer les besoins des jeunes. Si, à un conseil permanent de la jeunesse, on venait chercher chez nous un représentant de la table de concertation jeunesse, cela nous paraîtrait un représentant valable. Quand on parle de politique de financement pour les organismes, il y a cela et, aussi, ta possibilité pour que, nous, dans le futur, on puisse continuer; il y a ces deux éléments-là. Si le conseil permanent devait exister, si on introduisait à l'intérieur de cette politique une façon de venir chercher dans chacune des régions les représentants d'organismes et les représentants d'organismes associés, comme nous on l'est, cela nous paraîtrait une solution valable, effectivement.

Le Président (M. Marcil): Cela va? Si vous voulez continuer...

Mme Blackburn: Je me permettrais, madame, messieurs, de vous remercier encore une fois de vous être présentés à cette commission et de vous dire - ce que j'ai eu l'occasion de dire à d'autres - qu'il est important que, lorsqu'il se tient une telle consultation, il y ait le plus grand nombre d'organismes possible qui y participent. Les absents ont toujours tort et, de toute façon, il faut savoir que, lorsqu'on ne vient pas exprimer son opinion, il y en a d'autres qui parlent à notre place, et ce n'est pas toujours le même son de cloche qu'on entend. Parce que je sais ce que cela suppose de préparer un mémoire, de réfléchir, de consulter, de le rédiger, de venir le défendre également, quand on est en région éloignée, je voudrais vous remercier. On aurait souhaité, à l'Opposition, que la commission parlementaire soit itinérante, parce que cela aurait permis probablement une participation plus large des groupes. Cela a été refusé pour des raisons qui appartiennent au gouvernement. Par ailleurs, on a eu quand même un certain nombre d'organismes qui sont venus des régions et, pour cet effort remarquable, je voudrais vous remercier.

Le Président (M. Marcil): Merci, Mme la députée. M. le député de Mille-Îles, pour conclure?

M. Bélisle: Je vous remercie de votre présence ici ce soir. C'est très important qu'on entende le son de cloche qui vient du terrain. Moi, j'ai noté beaucoup de choses.

Je vais tenter d'influencer les gens qui vont modifier le projet de loi et apporter de petits amendements.

Il y a quelque chose, par exemple, qui m'embarrasse dans vos remarques, en réponse au député de Lac-Saint-Jean. Cela m'embarrasse profondément, quand vous dites: Je ne veux pas que le Conseil permanent de la jeunesse devienne un endroit où il va y avoir des luttes pour établir des priorités et où il y aura une sorte d'échange plutôt viril qui va se faire et où il va y avoir des gens qui vont tenter d'imposer leurs vues au détriment d'autres. Vous dites: J'en doute, je doute que cela se passe correctement, j'ai un doute dans mon esprit. C'est drôle, ce doute-là, je ne le partage pas, parce que le pari qu'on fait avec le Conseil permanent de la jeunesse, c'est le pari d'essayer... J'espère que mon pari est juste, qu'il va se révéler vrai et que je gage correctement. Ma gageure, c'est de voir les jeunes être assez responsables - je suis sûr qu'ils le sont, les jeunes que je vois, que je connais et avec lesquels je vis et qui ont des problèmes; d'autres en ont moins, d'autres qui n'en ont pas - pour être capables d'être au-dessus de ces luttes. Moi, contrairement à vous, je ne doute pas qu'ils vont réussir. C'est le pari que je fais avec cela. Merci.

Le Président (M. Marcil): M. Maltais, M. Fradette et Mme Grenon, nous vous remercions sincèrement de votre présence et soyez assurés que vos recommandations de même que vos opinions seront analysées de façon sérieuse. Merci et bon retour.

Nous allons suspendre la séance 60 secondes.

(Suspension de la séance à 21 h 2)

(Reprise à 21 h 3)

ANEQ

Le Président (M. Marcil): Maintenant nous allons entendre l'Association nationale des étudiants et étudiantes du Québec. M. François Giguère, est-ce vous?

M. Giguère (François); Oui.

Le Président (M. Marcil); Cela va, et M. Jean-Pierre Paquet. Nous vous souhaitons la bienvenue à cette commission parlementaire. Vous connaissez un peu les règles du jeu. Vous avez 20 minutes pour faire l'exposé de votre mémoire et ensuite nous procéderons à une période de questions. Si vous voulez débuter.

M. Paquet (Jean-Pierre); Comme on connaît les règles du jeu, parfois la période de 20 minutes est un peu courte.

Le Président (M. Marcil): Dites-vous qu'au départ les gens ont pris connaissance du mémoire.

M. Paquet: C'est cela. D'abord, on tient à dire qu'il est quand même étonnant de voir qu'une commission parlementaire qui porte sur un conseil permanent de la jeunesse n'ait été précédée d'aucune déclaration gouvernementale concernant la situation générale de la jeunesse. Habituellement, avant une commission parlementaire sur un projet de loi, on a au moins un énoncé de politique qui situe ce que le gouvernement pense de la situation, par exemple, socio-économique des jeunes, son appréciation de l'intégration de la problématique jeunesse à l'appareil gouvernemental, ou encore on remarque que le gouvernement n'a pas présenté son idée, par exemple, des grands mandats prioritaires qui pourraient être donnés à un éventuel conseil permanent de la jeunesse. Cette commisson nous semble un peu parachutée. Le projet de loi arrive comme cela sans savoir vers quoi s'enligne l'actuel gouvernement et, finalement, è quelle lacune du fonctionnement démocratique ce projet de loi est censé venir répondre. Tout cela c'est inconnu.

Toujours est-il qu'on va tout de même vous présenter notre appréciation du projet de loi, mais notre mémoire porte d'abord et avant tout sur ce qu'on peut appeler les relations entre les jeunes et l'État; nous allons essayer de faire une analyse à savoir comment ces relations ont évolué au cours des dernières années, donc dans quel contexte politique il nous semble que ce projet de loi apparaît.

D'abord, il faut dire que la façon dont on a toujours présenté le Conseil permanent de la jeunesse c'était de donner aux jeunes une voie forte et crédible, et pour nous cela représente un postulat de base de l'actuel gouvernement en ce sens que les jeunes n'auraient pas, en 1987 au Québec, une voie forte et crédible. C'est un peu un postulat qui est très présent parce que cette déclaration est revenue constamment avec ces mots clés: "une voie forte et crédible".

Pour nous, ce n'est pas du tout le cas. Il nous semble que les jeunes ont toujours pris les moyens qu'il fallait pour se faire entendre et ont ces moyens, ont la capacité. Ils se sont organisés de tout temps dans des organisations démocratiques pour faire valoir leur point de vue.

Il faut voir que les jeunes, historiquement, pour faire valoir leur point ont bien évidemment procédé par le biais des consultations officielles ou sont venus en commission parlementaire. Ce qui nous a toujours garanti, historiquement, de faire progresser notre situation économique, sociale è tous les niveaux, c'est de prendre des

moyens de pression. Je pense que M. le député a pris les devants tout à l'heure quand il disait qu'on allait parler de la question du rapport de forces et de la force du nombre. Effectivement, il a bien lu le mémoire qu'on lui a présenté. Je pense que cette question de faire des pressions, c'est quelque chose qui va de soi. Dans notre société, on remarque que les groupes d'intérêt font des pressions. Il y en a, par exemple, qui n'ont pas besoin de descendre dans la rue avec des pancartes pour avoir bonne audience auprès du gouvernement. Il y en a qui ont seulement besoin de faire quelques appels téléphoniques. Par contre, il y a d'autres groupes qui, par exemple, on besoin d'être plus visibles et faire des moyens de pression. Il semble que cela se vérifie et que c'est la façon dont la vie politique fonctionne de nos jours.

Pour faire valoir tant nos intérêts auprès du gouvernement que de faire connaître notre situation auprès de la population, pour donner un exemple très récent et concret, c'est la question du dégel des frais de scolarité. On a, effectivement, en ce qui concerne l'ANEQ, procédé par tous les processus habituels, commissions parlementaires, représentations, mémoires, etc., et on avait même une promesse électorale en ce sens que les frais de scolarité seraient gelés. Quelle situation meilleure peut-il y avoir? Il a quand même fallu faire la grève pour forcer le gouvernement à respecter son engagement. Cet exemple, il faut bien dire qu'il n'est pas unique au Québec et il n'est pas seulement conjoncturel. On peut regarder ce qui s'est passé dans le monde cette année dans plusieurs pays sur la question spécifique de l'accès à l'éducation. On se rend compte que - c'est un principe, c'est la réalité politique qu'on remarque partout - cela prend des moyens de pression, des rapports de forces pour obtenir des améliorations de notre sort.

On peut mettre cela en contradiction avec la grande déclaration du premier ministre Bourassa lors de l'ouverture de cette commission qui disait qu'avec le projet de loi 104 il espérait en venir à développer un modèle de partenariat entre les jeunes et le gouvernement et que cette coopération serait un jour meilleur, un jour nouveau. Nous on dit qu'on n'est pas dupe du gouvernement qui, avec un projet de loi de quelques pages, prétend vouloir réécrire l'histoire au complet et redéfinir entièrement les rapports sociaux et la dynamique entre les jeunes et l'État.

En quelques lignes, pour résumer, évidemment il faut s'organiser et la seule façon qu'ont les jeunes de faire valoir leur point de vue, c'est de s'organiser de façon démocratique et de prendre les moyens qu'il faut. Évidemment, le gouvernement ne voit pas la chose du même oeil, et on remarque que de tout temps les organisations démocratiques dont s'est dotée la jeunesse ont subi des actes de répression importants pour faire en sorte que notre voix forte et crédible soit moins forte, justement.

Si on prend des exemples récents, le gouvernement nous a dit dans son discours officiel qu'il veut donner aux jeunes une plus grande place, que le Conseil permanent de la jeunesse est un peu le symbole de cela. Cela c'est dans le discours, mais dans le concret ce qu'on remarque c'est que les groupes de jeunes ont connu d'importantes coupures budgétaires qui font en sorte, justement, qu'ils ont une moins grande capacité d'intervention dans notre société. Ce sont encore là des exemples très récents et concrets.

Aussi, quand on parle de répression, on peut parler de tout ce qu'a vécu le mouvement étudiant parce que c'est important de le prendre comme exemple, comme peut-être un des lieux les plus orqanisés. Dans la jeunesse, on remarque qu'au cours des dernières années les mesures se sont accumulées pour nous affaiblir, qu'on parle d'expulsions de militantes ou militants, d'adoption d'un cadre juridique, ce qu'on appelle la loi 32, qu'on parle aussi de manoeuvres politiques des gouvernements ou des partis politiques pour mettre en place des pions sur l'échiquier du mouvement étudiant et créer de toutes pièces des organisations étudiantes. Tout cela, ce sont des exemples qui démontrent bien à quel point la politique très réelle est très différente des grands discours qu'on retrouve souvent autour de tables et dans des projets de loi de quelques pages.

L'objectif politique, finalement, quand un gouvernement veut s'assurer de pouvoir faire passer ses politiques il s'arrange toujours pour avoir des appuis dans le milieu et, des fois, il les crée de toutes pièces. On remarque que dans le passé il n'y a jamais eu aucune éthique politique qui a empêché -que ce soit le qouvernement précédent ou le gouvernement Bourassa à l'époque - n'importe quelle manoeuvre pour s'assurer et tirer les ficelles du mouvement de la jeunesse.

Ce qui est plus que tout dans ce projet de loi et dans l'actuel discours du gouvernement, c'est la tentative qui existe de récupérer politiquement le mouvement des jeunes, les organisations et les jeunes en général. On sait que la jeunesse, pour quelque gouvernement que ce soit, ça représente toujours un facteur d'insécurité politique. C'est toujours quelque chose de très menaçant la jeunesse pour un gouvernement parce qu'il peut y arriver des choses. C'est un mouvement un peu imprésivible des fois et qui souvent est très combatif. Donc, si le gouvernement est intelligent il va essayer d'amenuiser ce facteur d'incertitude.

Dans les dernières années on a vu, entre autres, des tentatives nombreuses pour récupérer politiquement les jeunes. Qu'on pense au Sommet québécois de la jeunesse, par exemple, évidemment qui a été un flop monumental parce qu'il y a eu une méfiance de la part de la jeunesse à l'endroit de cette activité qui était parachutée d'en haut et qui ne visait finalement qu'à faire prendre par les jeunes des politiques contraires à leurs intérêts; que l'on pense, par exemple, aux symposiums sur les jeunes et l'emploi qui ont été organisés dans le cadre de l'Année internationale de la jeunesse par le Secrétariat à la jeunesse, lesquels visaient cette fois à faire la promotion de la concertation entre intervenants et à dire: II ne faut plus s'affronter dans notre société, il faut se concerter parce que tout le monde a les mêmes intérêts. On a vu à quel point là encore cela n'a pas été un grand succès parce que dans plusieurs régions les jeunes se sont retirés ou les ont carrément boycottés parce qu'il voyaient très bien qu'ils étaient l'objet d'une manipulation.

Ces activités, entre autres, par le biais des symposiums visaient principalement à faire la promotion d'un objectif qui était de laisser croire que les problèmes des jeunes sont dus à un conflit de générations; entre autres, cela visait à isoler les syndiqués en laissant croire que nous si on n'avait pas de job c'est parce qu'il y avait des méchants plus âgés qui étaient syndiqués et qui protégeaient jalousement leur job avec la permanence. Donc, c'était essayer de tourner les jeunes contre les plus anciens et de tout ramener cela à un conflit de générations. On peut dire que c'est le même discours aujourd'hui que c'était à l'époque et lequel le ministre Pierre Paradis a employé dans le dossier de l'abolition de la carte de placement dans l'industrie de la construction. Il est allé attaquer un secteur syndiqué en disant que c'était pour les jeunes qu'il faisait cela, n'est-ce pas? Pour donner des jobs aux jeunes, on va abolir la permanence ou la carte de placement pour les autres. Sauf qu'on ne nous a jamais démontré que cela avait créé des emplois, par exemple, l'abolition de la carte de placement. Cela va nous donner peut-être accès à des emplois par contre mais qui vont être dévalorisés et qui vont être moins bien protégés et où la sécurité va être moins grande. Tout ce que cela vise à faire c'est d'accentuer la concurrence entre un bassin plus large de travailleurs et de travailleuses pour faire pression à la baisse sur les conditions de travail. Tout cela au nom des jeunes et en nous prenant comme otages contre des gens qui ont passé leur vie à se battre pour améliorer leurs conditions de travail.

Un autre exemple de la politique actuelle, prenons la Société d'investissement jeunesse, la loi 103 qui a été adoptée. Je pense que c'est là !e reflet véritable des vraies intentions des politiques gouvernementales à l'endroit des jeunes. Là, c'est toujours l'élite, les jeunes qui veulent démarrer en affaires et qui veulent démarrer des entreprises. Là on s'assure de leur donner un cadre où ils vont pouvoir avoir l'appui des grands de ce monde, comme on peut les appeler. Je pense que c'est vraiment l'objectif politique, c'est-à-dire de laisser la majorité se débrouiller avec ce qu'ils ont soit avec l'aide sociale et avec pratiquement rien, mais quand il est question par exemple, d'avoir des gens qui vont reproduire le modèle d'exploitation d'une majorité par une minorité de privilégiés là on met le paquet et les politiques sont très cohérentes. Finalement, c'est pour dire que le mot le plus à la mode, sans doute, c'est "entrepreneurial" ou "entrepreneurship". Je crois que c'est vraiment l'objectif des politiques gouvernementales de laisser croire aux jeunes qu'ils peuvent s'en tirer en lançant leur propre entreprise mais, encore là, c'est créer des illusions parce qu'on se rend compte qu'il y a près de 80 % des jeunes qui tentent de lancer une entreprise et qui font faillite dans la première année. Ce n'est pas grave, c'est de donner l'impression qu'on peut s'en tirer en ne revendiquant pas du gouvernement ou de l'État, mais en se prenant en main soi-même. C'est vraiment le grand discours à la mode, les initiatives originales provenant des jeunes, mais ne jamais revendiquer les choses du gouvernement, par exemple. Il s'agit de démarrer sa propre entreprise. C'est vraiment, à l'heure actuelle, créer l'illusion que tout le monde peut s'en tirer en se servant de ce modèle et ce sont vraiment des illusions développées à ce moment par le gouvernement. (21 h 15)

Quand on parle par contre de mesures concrètes et qui ne sont pas des illusions, parlons des options Déclic, les jeunes qui bénéficient de l'aide sociale, on leur dit: Allez sur les options Déclic. Maintenant, quels sont ces programmes? C'est de se servir d'un vaste bassin de main-d'oeuvre à bon marché pour aller remplacer les ouvriers, les ouvrières qui ont été congédiés des fois, plus souvent qu'autrement qui ont été congédiés et qu'on vient remplacer par du monde qu'on paie 0,50 $ l'heure et qui n'ont pas d'autre choix pour survivre.

On peut donner d'autres exemples aussi de ce qu'ont été dans le passé des tentatives gouvernementales de se servir des jeunes ou d'infiltrer les groupes jeunesse. Parlons du petit voyage à Strasbourg qui a été organisé en 1984 par l'ancien gouvernement, allons-nous dire, qui visait à former une délégation de groupes de jeunes pour aller en France faire la promotion de notre paradis terrestre qui est le Québec, un éden pour les investisseurs. Je pense que c'est un exemple

très significatif à quel point il n'y a pas de morale politique quand il s'agit d'intervenir et de mettre de côté - le plus possible l'autonomie des groupes de jeunes.

Comme on l'a dit, le gouvernement va nous dire sans doute que c'est l'exemple du passé, tout cela. Il y en a beaucoup des exemples du passé. Il faut dire que son mandat est encore jeune. Peut-être que dans deux ans on pourra donner plus d'exemples. Il faut dire que dans le passé le gouvernement actuel, quand il était dans l'Opposition, n'a jamais levé le petit doigt pour dénoncer tout ce qui s'est fait parce qu'il savait bien qu'il allait récolter les fruits du travail de son prédécesseur.

Entre autres, quand on parle de l'exemple de la Société d'investissement jeunesse, je pense que c'est un exemple très caricatural pour démontrer le très grand lien entre le PQ et le PLQ. Dans le temps de la campagne électorale, le PQ faisait la promotion de la Société d'investissement jeunesse et le Parti libéral disait: Non, c'est notre idée. On nous l'a volée. Finalement, cela n'a pas été passé avant l'élection et c'est maintenant le gouvernement actuel qui a mis en place la Société d'investissement jeunesse.

Tout cela pour dire que la jeunesse c'est toujours une cible de premier choix au niveau électoral, au niveau politique c'est vraiment un enjeu, et il y a beaucoup de choses qui sont faites. On l'a vu lors de la dernière campagne électorale, la jeunesse a été vraiment un élément important de la campagne électorale: les affiches, les dépliants, les promesses, surtout, à l'endroit des jeunes. Il y en a eu de nombreuses. C'est pour dire qu'on attend encore les 28 000 000 $ de plus dans les prêts et bourses. Il faut rappeler aussi que le printemps dernier vous avez coupé 24 000 000 $ au lieu d'en ajouter 28 000 000 $. On attend encore la parité de l'aide sociale pour les moins de 30 ans. Il faut dire également que le gouvernement ne semble pas se vanter trop trop d'avoir respecté son engagement du gel des frais de scolarité. C'est sans doute parce qu'il a dû y avoir une grève étudiante. Aussi, il faut dire qu'en ce qui concerne la partisanerie il y a la Commission jeunesse du Parti libéral qui revendique d'avoir fait tout le travail pour s'assurer que le gouvernement actuel maintienne sa promesse du gel des frais de scolarité. Il faut dire que cette Commission jeunesse du Parti libéral, finalement, joue très bien son rôle de paravent pour donner l'impression que c'est à l'intérieur même du parti que les jeunes peuvent se faire représenter par une commission jeunesse très trè3 efficace, qu'il y a beaucoup d'audiences. Combien de fois des représentants de l'ANEQ, dont nous-mêmes, nous nous sommes fait dire par des membres de l'actuel gouvernement: Devenez jeunes libéraux. C'est la meilleur façon d'influencer le gouvernement. Tout cela pour dire que cela ne correspond pas du tout à notre analyse de la situation.

Sur la question spécifique, pour terminer en quelques minutes, du Conseil permanent de la jeunesse proprement dit, donc du projet de loi, il faut dire que cela semble être pour nous un petit peu un tournant, une nouvelle stratégie d'intervention dans le dossier de la jeunesse alors qu'à l'époque vous sembliez avoir une volonté plus grande d'essayer de contrôler ou d'infiltrer les groupes de jeunes. Il me semble qu'à cause de l'échec des tentatives du passé le gouvernement veuille maintenant rapatrier sous son aile protectrice la problématique jeunesse et intégrer la question de la jeunesse beaucoup plus à l'appareil étatique et, en un mot, institutionnaliser le mouvement de la jeunesse, ce facteur d'insécurité politique.

Pour citer quelques phrases, dans les documents de présentation du bureau du premier ministre sur le Conseil permanent de la jeunesse, on nous dit, on nous promet quasiment que cela va nous assurer une présence influente dans le processus décisionnel, que cela s'imposait pour qu'on puisse faire part plus concrètement de nos besoins, que cela a été conçu afin de nous consentir un support efficace dans nos démarches auprès du gouvernement. On nous dit même que cela va être un lieu où il sera possible d'établir de nouvelles règles sociales. On nous dit aussi que cela va nous donner les moyens d'une participation concrète et active en nous assurant un canal de communication privilégié avec l'État. C'est beaucoup de choses pour un conseil permanent avec onze jeunes qui vont y siéger. On nous promet beaucoup de changements, beaucoup de concret, beaucoup de pouvoirs et d'actions, tout cela à cause d'un Conseil permanent de la jeunesse.

On nous dit aussi que ce sera un outil entre nous mains, un outil entre les mains des jeunes et, pour vous dire le fond de notre pensée, on a tout à fait l'impression que ce sera l'inverse, que ce ne sera pas un outil entre les mains des jeunes, mais bel et bien entre les mains du gouvernement et ce, pour la simple et bonne raison, non seulement du libellé de cette loi, mais de ce qu'on a vu par le passé. On a l'impression que cela va servir d'écran protecteur. Plutôt que de nous donner la possibilité d'aller vers le gouvernement, à toutes les fois que les groupes de jeunes vont vouloir intervenir auprès du gouvernement, il va y avoir le tampon administratif, l'écran protecteur, et on va nous dire: Inutile de nous faire des représentations, allez voir le Conseil permanent de la jeunesse. Ils vont nous faire des petits résumés, des petites études, et on

reverra cela dans un ou deux ans. Vraiment, on est sûr et certain qu'à ce sujet-là cela va servir de mesure dilatoire pour retarder l'application de mesures concrètes.

Une autre menace que comporte ce conseil, c'est que ce sera une menace à notre autonomie et à l'existence de groupes autonomes de jeunes. Le gouvernement a essayé de prendre les devants en nous disant qu'on a des garanties, qu'il nous dit, d'autonomie et de non-partisanerie du Conseil permanent de la jeunesse et tout cela, à cause du collège électoral parce que les onze personnes qui seront au conseil ne seront pas nommées directement par le ministre, mais vont être suggérées par un collège électoral formé de 40 personnes. Mais encore faut-il préciser que ces 40 personnes seront choisies par le gouvernement. C'est vraiment tout simplement contourner la procédure habituelle de nomination directe et, pour nous, cela ne constitue d'aucune façon une garantie d'autonomie du conseil par rapport au gouvernement. Tout cela pour dire que c'est tout simplement de la frime, de la poudre aux yeux, une illusion d'optique qu'on tente de créer avec ce conseil électoral.

Il faut dire également que, de tout temps, le gouvernement a toujours succombé à la tentation de faire de la politique partisane avec les conseils consultatifs. Qu'on parle du Conseil des collèges - Mme Blackburn en est un bon exemple; avant d'être députée péquiste, elle était présidente du Conseil des collèges. M. Benjamin, qui était au Conseil supérieur de l'éducation, est rendu au cabinet de M. Ryan et celui qui était sous-ministre avant, M. Lucier, est rendu maintenant au Conseil supérieur de l'éducation. Le jeu de la chaise musicale se fait à de nombreuses places et des limogeages, on en a vu également dans des conseils consultatifs. D'après cette expérience du passé, il serait très étonnant que, parce que maintenant on parle de jeunes, ce sera un conseil consultatif qui sera différent des autres. Il sera très étonnant que le jeu politique ne se répète pas et que le gouvernement ne succombe pas à la tentation de nommer des gens qui lui sont proches et qui vont l'aider dans sa tâche. Même le Secrétariat à la jeunesse, dans un des textes qui portent sur le Conseil permanent de la jeunesse, le dit lui-même. On ne le citera pas, mais on l'a mis dans notre mémoire.

Il y a donc l'exemple du passé par rapport à l'intervention des gouvernements dans les groupes de jeunes et les exemples par rapport à ce qui se passe réellement dans les organismes consultatifs. Tout cela nous fait dire qu'il va y avoir de la politique qui va se faire là et que l'autonomie, ce n'était qu'un gros mot et cela ne se réalisera pas dans le concret. Également, ce que plusieurs ont remarqué, c'est que les groupes consultatifs comme cela ne viennent plus représenter les organismes de leur milieu, mais deviennent vraiment, au contraire, des porte-voix du ministère auprès des groupes qui sont censés être consultés.

Ce qu'on remarque aussi, c'est que ces groupes, à la longue, deviennent autosuffisants et vivent par eux-mêmes. J'attire votre attention là-dessus principalement. On a la certitude que le Conseil permanent de la jeunesse sera quelque chose de très politisé, surtout à cause de l'accent qui est mis sur le collège électoral. Le collège électoral, quand il a été présenté, c'est pour donner un semblant de démocratie à cet organisme en disant: Voyez, ce sera électif, ce seront des gens qui vont venir du milieu; ce sera donc représentatif des groupes de jeunes. Cela est très dangereux parce que la façon dont le gouvernement actuel veut présenter le Conseil permanent de la jeunesse, c'est comme étant une instance représentative des groupes de jeunes et donc pour venir pratiquement se substituer aux organisations actuellement existantes. Tout cela pour dire que ce ne sera pas un conseil consultatif qui va conseiller le gouvernement, mais bel et bien une structure qui va venir faire de la politique et qui va vouloir passer outre aux organisations autonomes dont les jeunes se sont dotés au cours des années. On est tout à fait opposé à cette démarche.

J'en ai pour deux minutes, sur quelques éléments du projet de loi. Entre autres, on remarque que le projet de loi est extrêmement vague; il ne contient que quelques pages. Le pouvoir de réglementation laissé entre les mains du ministre responsable, l'actuel premier ministre, est très large, très déterminant. Comment fonctionnera ce Conseil permanent de la jeunesse et quel sera son degré d'autonomie par rapport au gouvernement? Quels seront ses budgets, sur quoi pourra-t-il travailler, etc.? Tout cela est très flou et il y a donc des incertitudes.

Pour dire à quel point il n'y a rien dans ce projet de loi, l'article 28 nous dit que le conseil s'assure, s'il y a lieu, qu'on donne suite à ses avis. Dans le discours officiel on nous disait que ce conseil avait beaucoup de pouvoirs mais, quand on regarde le libellé du projet de loi, on se rend compte que ses seuls pouvoirs sont de donner des conseils aux ministres, de faire des études, d'aller chercher des documents et de se prononcer sur des problèmes jeunesse. Dans le libellé du projet de loi, rien ne se retrouve de tout cela, c'est absolument vide. On nous dit qu'il a tellement de pouvoirs qu'il s'assure qu'on donne suite à ses avis. Il n'y a absolument pas de chair autour de l'os. Finalement, le gouvernement se donne toute l'assurance qu'il ne sera jamais obligé de donner suite à des avis de ce Conseil

permanent de la jeunesse. On peut dire que le rôle politique du conseil dépendra finalement du processus de nomination, à savoir qui sera nommé.

Un dernier élément au niveau des articles du projet de loi. On emploie l'expression "organisme jeunesse". Cela nous semble très large parce que dans la définition on définit un organisme jeunesse comme étant un organisme qui oeuvre auprès des jeunes âgés entre 15 et 30 ans dans les secteurs des affaires sociales, de l'éducation, des loisirs ou du travail. C'est très différent de ce qu'on reconnaît comme des groupes de jeunes, c'est-à-dire qu'ils sont contrôlés par des jeunes et non seulement qui oeuvrent auprès des jeunes. C'est très différent.

En conclusion, depuis de nombreuses années on remarque qu'une grosse attention publique est portée sur le problème des jeunes mais que ce n'est pas l'effet du hasard. Ce n'est pas à cause d'une sollicitude qui tomberait du ciel mais bel et bien parce que les jeunes se sont pris en main, ont créé des organismes et ont fait en sorte de faire valoir leurs revendications. Ils ont crié bien haut quelle était leur situation. C'est pour cela que l'attention s'est portée sur le problème des jeunes. Un nombre infini d'études, de colloques et d'analyses ont porté sur le sujet. On en a eu un exemple tout à l'heure. Tout cela pour dire, comme nos prédécesseurs l'ont dit, que le temps n'est pas aux études mais bel et bien aux gestes concrets, à l'action, et non pas de se réfugier derrière une structure consultative.

Toutes ces études démontrent que le problème que vivent les jeunes... Évidemment, les jeunes vivent une crise de façon particulière et cette crise est générale dans le sens que c'est un problème de sous-emploi, un problème général de mauvaise redistribution des richesses dans la société. Cette crise est également vécue par l'ensemble de la population. Il faut donc se demander, quand on met des solutions de l'avant, si elles sont réservées et restrictives quant aux jeunes ou s'il ne faudrait pas chercher des solutions pour l'ensemble de la société.

Le gouvernement nous dit qu'il a besoin d'étudier les dossiers, qu'il veut ramasser les études pour savoir où il s'enligne. Il sait très bien où il s'enligne quand vient le temps d'exploiter les jeunes, de les mettre sur des options Déclic et de faire en sorte qu'ils bénéficient aux entreprises. Il sait très bien où il s'en va quand il crée ces sociétés d'investissement jeunesse et, quand vient le temps d'appliquer des mesures comme cela, il n'y a pas beaucoup d'études et de conseils permanents de la jeunesse.

En conclusion, le Conseil permanent de la jeunesse nous apparaît comme simplement un gadget pour que le gouvernement donne l'impression qu'il s'occupe des jeunes, qu'il a une préoccupation pour les jeunes alors que dans le concret il n'y a pas de volonté politique réelle de s'occuper des jeunes. Le collège électoral est un mauvais paravent qui ne dissimule aucunement la mainmise du gouvernement. Celui-ci pourra toujours tenter de donner une certaine crédibilité à ce conseil en nommant quelques jeunes critiques par rapport aux politiques gouvernementales si des jeunes critiques veulent être candidats ou candidates mais, d'après nous, si ce Conseil permanent de la jeunesse vient à être mis sur pied, il sera toujours en mal de légitimité auprès des jeunes. D'aucune façon les jeunes n'ont revendiqué la mise sur pied de ce conseil. Autrement, qu'on nous en fasse la démonstration.

Finalement, comme on le dit et comme le titre de notre mémoire l'indique, cela vise à institutionnaliser le mouvement et les revendications des jeunes, parce que la logique même des organismes consultatifs, leur économie, leur raison d'être liés à l'appareil gouvernemental sont toujours, non pas de mettre de l'avant ce qui est revendiqué de façon légitime par les jeunes ce que les jeunes considèrent comme essentiel et ce qui doit être appliqué par le gouvernement... Les organisations consultatives et, a fortiori, le Conseil permanent de la jeunesse, s'il vient à être mis sur pied, ce qui est évident c'est qu'il ne mettra pas de l'avant nos revendications légitimes mais bel et bien ce qu'il serait réaliste de demander au gouvernement et finalement recommander au gouvernement des choses selon ce qu'on évalue qu'il est prêt à faire. Cela, c'est un fossé énorme entre les revendications des organisations légitimes s'occupant des jeunes et ce qui sera mis de l'avant par un Conseil permanent de la jeunesse.

C'était là notre mémoire et notre présentation. (21 h 30)

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup de votre présentation. J'aimerais rappeler aux deux partis qu'il leur reste treize minutes chacun et deux minutes pour conclure. M. le ministre.

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier M. Giguère et M. Paquet d'être venus nous faire part de leurs réflexions sur le projet de loi 104 et sur la situation des jeunes. Je vous remercie d'autant plus - et là je risque peut-être de vous déplaire - que j'ai retrouvé dans votre mémoire une solution à un problème que nous avions identifié, ici à la commission parlementaire, à l'écoute des organismes qui ont précédé le vôtre. Je pense que vous nous faites une suggestion qu'on risque de retenir dans le projet de loi 104, lorsque vous nous

suggérez une définition pour un organisme jeunesse autre que celle que contient le projet de loi 104. Quand vous nous suggérez: un organisme qui oeuvre auprès des personnes âgées entre 15 et 30 ans dans le secteur des affaires sociales, de l'éducation, des loisirs et du travail, je pense que vous avez touché du doigt une formulation qu'on pourrait faire nôtre parce qu'on s'est fait dire ici, à la commission parlementaire, que le libellé du projet de loi était trop restrictif, excluait des organismes qui oeuvrent auprès de la jeunesse, soit qu'ils ne sont pas incorporés ou ne sont pas composés de jeunes, du processus du choix des membres du collège électoral et éventuellement des membres du Conseil permanent de la jeunesse. On risque de retrouver votre suggestion dans le projet de loi et on vous en est reconnaissant.

Votre mémoire a d'autres mérites, il y a celui d'être très direct et très franc. Je l'ai lu avec une grande attention de la page 1 à la page 17. Je constate que vous considérez que le projet de loi 104 vise à institutionnaliser le mouvement jeunesse en lui enlevant son autonomie. Évidemment, je vous répondrai que ce n'est pas là l'intention du gouvernement et je suis sûr que je ne vous en convaincrai pas. Donc, je n'insisterai pas plus longuement.

Vous posez une question dans votre introduction. Vous nous dite: "Qui des jeunes ou du gouvernement a réellement besoin d'un Conseil permanent de la jeunesse?" Vous êtes venus nous dire que la jeunesse n'en a pas besoin. Soit, c'est votre opinion, ce n'est pas l'opinion qui est partagée par une majorité de groupes qu'on a entendus. Je vous concède que c'est votre opinion, vous y avez droit.

Moi, je suis ici pour vous dire que le gouvernement pense qu'il en a besoin, non pas pour récupérer, comme vous le prétendez, l'ensemble du mouvement jeunesse, mais simplement pour avoir un conseil consultatif, un conseil "aviseur" à qui on pourra demander des avis. On est loin de prétendre que les avis qu'on obtiendra du Conseil permanent de la jeunesse, quelle que soit la méthode qu'on prendra pour choisir les membres du CPJ, cela va nécessairement être parfait, que cela va répondre à tout. Ce n'est sûrement pas un mouvement ou un regroupement national des jeunes qu'on veut créer avec le Conseil permanent de la jeunesse. C'est tout simplement un conseil consultatif, un comité "aviseur" auprès duquel le gouvernement pourra prendre des avis lorsqu'il le jugera opportun et qui lui-même pourra émettre des avis de sa propre initiative. On a déjà indiqué, d'ailleurs, qu'on va améliorer le libellé du projet de loi pour s'assurer que le Conseil permanent de la jeunesse aura toute son autonomie.

Donc, on ne prétend pas réécrire l'histoire, comme vous le prétendez, avec notre projet de loi 104 ou redéfinir la problématique jeunesse. On veut tout simplement se donner un outil de plus, un outil qui, on le pense, peut nous être utile.

Quand vous disiez tantôt que le gouvernement actuel ne respecte pas ses engagements électoraux, il y en a qu'on a respectés à ce jour. Il y en a d'autres qui nous restent à respecter. Vous avez parlé, par exemple, du gel des frais de scolarité. Je n'irai pas jusqu'à dire que vous vous en attribuez le mérite du maintien du gel des frais de scolarité, mais je voudrais vous dire très franchement qu'à un caucus qui s'est tenu le 2 octobre, à Trois-Rivières, le caucus des députés a décidé ou, en tout cas, a insisté mauditement fort auprès du ministre de l'Éducation pour qu'on respecte l'engagement qu'on avait pris. Et cela, je vous prie de noter que c'est avant que les étudiants sortent en grève.

Jamais une fois, à ma connaissance -j'ai été présent durant toutes les délibérations - la raison invoquée pour respecter notre engagement n'a été la menace d'une grève des étudiants. Mais ce qui a été répété à plusieurs reprises, par exemple, c'était le souci qu'on avait de respecter notre engagement. On avait obtenu manifestement des appuis électoraux. Soit dit en passant, il n'y a rien de mal à cela qu'un parti politique prenne des engagements auprès de clientèles, que ce soit la jeunesse ou d'autres clientèles, et surtout les respectent. Je ne vois rien de réprehensible là-dedans. C'est à partir de cela qu'au caucus du 2 octobre, à Trois-Rivières, on a décidé qu'il n'était pas question de renier cet engagement.

Aujourd'hui, avec le projet de loi 104, on respecte un autre engagement. On vient nous dire: Vous n'auriez pas dû le prendre. Oui, mais on l'a pris. Évidemment - et on en est à notre septième journée - si les représentations qu'on avait reçues ici à la commission parlementaire, avaient été, par exemple, majoritairement dans le sens que vous vous faites valoir... Ce n'est pas un reproche que je vous fais. Je vous dis simplement que votre point de vue n'est pas partagé par les gens qu'on a entendus jusqu'à maintenant. Personne n'est venu nous dire que c'était une panacée, que c'était parfait. On est très conscient qu'il faudra bonifier le projet de loi. C'est, d'ailleurs, pourquoi on a tenu la commission parlementaire. Ce que je vous dis, c'est que votre point de vue exprimé ce soir ne semble pas rejoindre celui des groupes qui sont venus nous rencontrer.

Alors, vous nous dites: Oui, mais ils ne sont pas représentatifs, eux. Moi, je pense qu'ils le sont. Tout le monde a eu la même chance de venir se faire entendre. D'ailleurs, on a même donné toute la latitude voulue. La preuve, c'est qu'on a reçu votre mémoire, aujourd'hui, alors que les règles prévoient

que cela doit être déposé dans des délais prescrits dans le règlement de l'Assemblée nationale.

Donc, je dis tout simplement que j'ai bien l'impression que le gouvernement va procéder avec son projet de loi 104, un projet de loi 104 amélioré, bonifié. Â partir de là, la question que je veux vous poser: Connaissant cette intention du gouvernement, est-ce que vous pouvez vous imaginer que cela puisse être utile, le Conseil permanent de la jeunesse, dans le contexte actuel, que cela puisse être un outil utile au gouvernement? Vous allez me dire: Oui, c'est un outil utile pour que le gouvernement fasse fi de tout le reste et dise: On vient de régler le problème des jeunes, on a créé le Conseil permanent de la jeunesse. Vous ne me croirez pas, mais je vous dis que ce n'est pas le but. Mais une fois que le Conseil permanent de la jeunesse existera, ne pensez-vous pas qu'il pourrait être utile à faire connaître au gouvernement le point de vue des divers secteurs d'activités, des diverses régions, sur la situation des jeunes?

M. Paquet: C'est votre question? M. Gratton: Oui.

M. Paquet: Juste pour dire, d'abord, que si, dans le cas du gel des frais de scolarité, vous teniez tant à faire respecter l'engagement électoral, le 2 octobre aussi, nous étions en réunion extraordinaire du mouvement étudiant pour voter la grève. C'est un drôle de hasardl C'était partout dans les journaux. Je ne sais pas sur quoi portaient les discussions dans votre caucus. Je ne suis pas dans le secret des dieux. C'est pour dire que, si vous aviez tant à coeur de faire respecter vos engagements, vous auriez pu penser aux 24 000 000 $ dans les prêts et bourses qui ont été coupés le printemps dernier. On verra aussi, lors de l'étude des crédits prochainement, ce que vous en faites, de vos engagements électoraux.

Une chose est claire. Tantôt, un autre député dont je ne connais pas le nom a dit à plusieurs reprises. Cela va être le porte-parole des jeunes. Il y aura d'autres porte-parole, mais cela en sera un parmi d'autres. C'est une volonté très claire de faire en sorte que le Conseil permanent de la jeunesse devienne le porte-parole des jeunes. Pour nou3, cela n'est pas du tout la même chose qu'un conseil consultatif. Ce sont deux choses tout à fait distinctes.

Quant à savoir si, le jour où le Conseil permanent de la jeunesse sera sur pied, cela pourra être utile au gouvernement pour mieux écouter les jeunes, ce que nous disons, c'est que le gouvernement de tout temps a eu toutes les occasions souhaitées pour écouter les jeunes, s'il avait voulu le faire.

Les jeunes ont toujours dit ce qu'ils avaient à dire. Nous l'avons dit: Tous les ministères ont des données innombrables sur l'ensemble de la problématique jeunesse rattachées spécifiquement à leur champ d'activités: à l'éducation, à la santé, au transport et à tout ce que vous voulez. Dans le fond, ce que nous vous disons, c'est à partir du moment où il n'y a pas de volonté politique réelle, qu'est-ce que cela peut bien changer qu'il y ait onze jeunes qui siègent autour d'une table?

M. Gratton: Vous ne croyez pas qu'un Conseil permanent de la jeunesse avec des ressources puisse en arriver à formuler des choses peut-être inédites et qui peuvent être utiles dans la solution de certaines situations.

M. Paquet: Je ne sais pas quel usage un gouvernement ou un autre pourrait en faire dans le détail. Ce que nous pouvons vous donner, ce sont des exemples de ce que d'autres conseils consultatifs ont fait. Encore une fois, si on prend l'exemple du dégel des frais de scolarité, c'est le Conseil des universités qui a battu la chamade à la place du gouvernement et qui a préparé le terrain. Ce qui est très clair également, c'est que, dans la logique de ces conseils, cela va chercher, évidemment, à rendre tout à fait uniformes les positions des jeunes et à tout ramener, justement, au plus petit dénominateur commun. C'est un aspect très dangereux que de niveler les positions des jeunes et de chercher à faire fi des distinctions qui existent. Comme on a l'a dit tout à l'heure, la logique même de ces conseils et ce qu'on a toujours observé par le passé, c'est que c'est non pas les revendications des jeunes qui vont transiter par un Conseil permanent de la jeunesse, mais bel et bien des recommandations de gens nommés par un gouvernement pour leur sens des responsabilités et leur compréhension du fonctionnement de la machine gouvernementale; ils vont faire des recommandations allant dans le sens de ce qu'ils croient possible pour le gouvernement de faire en fonction de ses intérêts et de sa volonté politique. Donc, ce n'est pas un organisme qui va faire les pressions nécessaires pour que le gouvernement bouge. C'est là toute la distinction qui existe entre une instance comme celle-là et des organismes autonomes de jeunes.

M. Gratton: Est-ce que vous ne concédez pas que les deux peuvent exister? Il n'est pas question que le Conseil permanent de la jeunesse, par exemple, empêche l'ANEQ de continuer à faire son boulot. Je pense bien que vous n'accepteriez jamais cela. Je ne vois pas pourquoi d'autres regroupements ou organismes de jeunes se sentiraient tout à coup muets et muselés

devant le gouvernement parce qu'il existe un Conseil permanent de la jeunesse. Je ne vois vraiment pas quel est le problème à créer un Conseil permanent de la jeunesse. Cela va enlever quoi aux organismes qui existent déjà?

M. Paquet: Cela va faire en sorte, tout simplement, comme il a été répété à de nombreuses reprises dans les documents du Secrétariat à la jeunesse, dans le discours du premier ministre ou même ici autour de la table, que dorénavant le Conseil permanent de la jeunesse va être un peu le porte-parole des jeunes du Québec, va être à l'avant-plan et cela va faire l'affaire d'un gouvernement qui va profiter de l'existence d'un Conseil permanent de la jeunesse, justement, pour tasser des revendications et des représentations qui pourraient venir d'ailleurs pour se concentrer sur ce qui proviendrait d'un conseil permanent de cet ordre. C'est le sens de notre intervention. Quand on dit: Est-ce que les deux pourraient cohabiter et se compléter l'un et l'autre? Non, il nous semble que ce ne sera pas le cas. Cela ne va pas être un jeu de complémentarité, mais bel et bien de substitution. Pour nous, il est très clair que, dans la politique, si le gouvernement actuel est le moindrement stratégique et a un sens de l'observation un peu développé, il a fait la même analyse que nous de ce qu'on a écrit dans le mémoire.

M. Gratton: Évidemment, on peut faire la même analyse, mais arriver à des conclusions différentes, connaissant les intentions et n'en prêtant pas aux autres. Moi, tout ce que je vous dis, c'est que l'intention du gouvernement ne va pas dans le sens de ce que vous suggérez. Je vous prie d'être observateurs, vous l'êtes toujours. Observez et on verra. Je fais le pari que vous ne serez peut-être pas confondus, mais vous allez peut-être être surpris de ce qui va en découler. Soit dit en passant, il ne faut pas s'imaginer qu'il faudra attendre la création du Conseil permanent de la jeunesse pour voir des gestes concrets. D'ailleurs, ils sont déjà commencés.

Je vous remercie. On pourra y revenir tantôt s'il reste du temps. (21 h 45)

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Paquet et M. Giguère, bonsoir. Il me fait plaisir, au nom de ma formation politique, de vous souhaiter la bienvenue. On a eu l'occasion à quelques reprises d'échanger à la fois sur la condition des étudiants, des associations étudiantes et sur un certain nombre de questions de cette nature. Je dois dire que j'ai été à même de constater que, chaque fois, vous avez présenté de façon très directe ce que vous aviez à dire.

Dans votre document, vous dites: Antérieurement, l'autre gouvernement visait à investir le mouvement jeunesse; celui-ci vise à l'institutionnaliser. Je dirais, pour reprendre les propos de mon collègue d'Abibiti-Ouest, M. Gendron: Vous prenez un râteau bien large et vous ramassez pas mal d'affaires en même temps; vous ne risquez pas gros d'en oublier. Par ailleurs, je dois dire que je partage tout à fait non pas votre lecture, mais votre conclusion parce que j'estime que ce n'est pas l'outil dont les jeunes auraient besoin actuellement, pas pour les mêmes raisons, évidemment, mais cela est autre chose. Il y a des conseils consultatifs qui demeurent performants, mais il y a des préalables. L'un des préalables les plus importants, c'est que la performance du Conseil du statut de la femme, par exemple, repose quasi essentiellement sur la vigueur et le dynamisme des organismes jeunesse.

Les associations jeunesse sont très dynamiques en éducation; quasiment à tous les niveaux et même au niveau secondaire, cela bouge déjà pas mal, de façon de plus en plus intéressante, mais moins articulée, évidemment. Ce n'est malheureusement pas le cas pour les jeunes assistés sociaux et les jeunes chômeurs, ils ont plus de difficulté à s'organiser. C'est ce qui me fait douter, pour une bonne partie, de l'efficacité d'un Conseil permanent de la jeunesse, parce que c'est consultatif. L'erreur, je pense, du gouvernement a été de laisser penser comme le disait le député de Mille-Îles, que c'était un projet de loi majeur, extrêmement important, qu'on ne voyait pas une consultation comme cela à travers le monde. Et il en mettait, tant qu'à y être - vous n'étiez pas là - il était parti. Dans ce sens-là, je dois dire que cela a créé des illusions. Les gens pensent que, effectivement, cela va régler les problèmes. C'est un centre de recherche comme un autre, sauf que, chez la population des jeunes, cela a créé des attentes qui dépassent largement ce qu'un conseil consultatif peut effectivement faire. À la limite, un conseil consultatif, cela peut être un bon centre de recherche, pour être juste, pour donner les bons avis. Mais faut-il vraiment faire toute cette démarche pour créer un centre de recherche? Je dirais que c'est autre chose.

J'aurais quelques questions, si vous le permettez. Vous dites: La CEQ est venue ici et nous a dit que, si vraiment il y avait une volonté gouvernementale de permettre aux jeunes d'investir les structures qui leur permettraient d'avoir un certain pouvoir, d'avoir une voix à l'intérieur des décisions, la meilleure façon aurait été une politique qui aurait réservé des postes aux jeunes de 15-30 ans dans tous les conseils d'administration des services publics,

parapublics et péri publics: les commissions scolaires, les collèges, les universités, les écoles, etc. Que pensez-vous d'une proposition de cette nature?

M. Paquet: Tout ce que je peux dire, c'est que la proposition soulève un débat, à tout le moins, sans qu'on puisse nécessairement le trancher et y répondre. Cela va un peu dans le sens possiblement - je n'ai pas lu le mémoire en question - de ce qu'on soulève dans notre conclusion, soit que le Conseil permanent de la jeunesse représente un danger de "ghettoïsation". On soulève, dans notre conclusion, que souvent les jeunes vivent des problèmes de façon spécifique, mais qui découlent d'un problème plus général. Si, effectivement, on crée un Conseil permanent de la jeunesse exclusivement et que toutes les politiques jeunesse se définissent là, possiblement que ce sera en vase clos et que ce ne sera pas du tout applicable ou utile. Si, en contrepartie, on cherche plutôt à faire en sorte que les problèmes et les besoins des jeunes soient pris en considération à l'intérieur de chacun des ministères, par exemple, par le biais d'une représentation ou d'une volonté, cela peut être une approche différente qui peut avoir des côtés positifs également.

Vous parlez d'une représentation à tous les niveaux. J'imagine qu'il peut y avoir des difficultés de s'assurer qu'il y ait une représentation jeunesse à chacun des ministères et à tous les niveaux administratifs et scolaires, partout. Je ne sais pas de quelle façon on pourrait s'y prendre. Notre vision générale de la chose, c'est que c'est rarement par le biais d'un délégué à des instances, par le biais d'une personne qui a un droit de vote à une table avec 15 personnes qu'on a réussi à faire valoir nos points de vue. Habituellement, la personne qui avait le droit de vote autour de la table, qui était jeune ou étudiante, si elle réussissait à faire passer quelque chose, c'est parce qu'il y en avait une couple de centaines derrière elle qui, par des moyens de pression, faisaient en sorte que son vote avait un poids, vu que les autres tiraillaient. Tout cela pour dire que ce n'est jamais nécessairement par le biais de la représentation sous cette forme-là qu'on fait avancer les choses, quant à nous.

Mme Blackburn: Us préconisaient que leur nombre soit proportionnel au poids qu'ils représentaient dans la population, c'est-à-dire environ 30 %, ce qui pourrait donner effectivement un peu plus de visibilité et de poids aux jeunes, je suis d'accord avec vous, au sein des organismes quels qu'ils soient. C'était dans cette perspective-là qu'ils le situaient en disant, un peu comme vous: II faudrait éviter qu'on ne fasse des ghettos de jeunes eommes des ghettos de femmes, des ghettos de personnes handicapées ou des autres ethnies.

Vous dites: Tout ce qu'il faut, c'est une volonté politique réelle. Plusieurs organismes nous ont fait valoir qu'il serait important, pour marquer l'intérêt qu'on a effectivement pour cette question, que l'on nomme un ministre associé et d'autres disent: un ministre et un ministère. Comment réagissez-vous?

M. Paquet: Disons qu'on peut s'inspirer de ce qui s'est passé au fédéral avec l'exemple de Jean Charest ou de celle qui était là avant, Donalda, Mme Champagne. Ce ne sont pas des exemples très reluisants parce que, même en nommant un ministère et un ministre, ils ont quand même trouvé le moyen de ne pas avoir de volonté politique d'agir; ce sont souvent des ministères sans portefeuille. Dernièrement, j'ai discuté au téléphone avec M. Charest. Il a appelé au bureau et a dit: Allô! c'est Jean. Qui est-ce? II n'avait rien à faire, semble-t-il. II nous a appelés comme cela pour nous demander comment cela allait. Il n'avait pas l'air d'être très occupé comme ministre. Si le ministre est nommé et n'a rien à faire, s'il n'a pas de possibilité et de marge de manoeuvre...

Quant à nous, cela peut être une façon un peu plus évoluée de déterminer des responsabilités. À l'heure actuelle, si c'est la responsabilité de tout le monde, ce n'est la responsabilité de personne. On nomme un conseil consultatif avec un ministre responsable, mais c'est un ministre sans portefeuille. Selon le projet de loi, on n'indique pas qu'il pourrait y avoir création d'un ministère un jour. C'est bien sûr que ce ministre responsable serait ministre designé ou je ne sais trop quel statut il aurait. Ce n'est pas quelqu'un qui décide, qui a un portefeuille, ce n'est pas défini de cette façon dans le projet de loi. Ce n'est l'affaire de personne. C'est à se demander où vont aboutir ces recommandations. Si on ne peut jamais pointer du doiqt, blâmer ou s'assurer que quelqu'un prenne des responsabilités dans le dossier, c'est sûr que c'est un peu peine perdue.

C'est sûr que nommer un ministère, c'est un peu comme s'il n'y avait pas de ministère des Transports, pas de ministère de l'Éducation, etc. Je pense que rien n'avancerait. Habituellement, c'est la forme la plus achevée ou la plus accomplie d'assurer qu'un dossier avance, sauf que le fait de nommer quelqu'un - on a l'exemple du fédéral - ne démontre pas que c'est là un signe d'une volonté politique réelle. C'est plutôt, encore là, un paravent et un qadget pour donner l'impression qu'on se préoccupe des jeunes, tout à fait à l'exemple du Conseil permanent de la jeunesse et du projet de loi 104.

Mme Blackburn: Je dois vous dire que vous ne risquez pas de recevoir un téléphone du porte-parole du dossier jeunesse qui serait désoeuvré et qui aurait le goût d'appeler l'ANEQ, c'est le premier ministre. J'imagine qu'il doit avoir un peu plus d'ouvrage.

M. Gratton: Est-ce qu'il vous appelle de temps en temps?

Une voix: Robert.

Mme Blackburn: II y a deux hypothèses sur la table: celle d'un ministre associé, donc un ministre sans portefeuille, comme l'était Mme Champagne, comme l'est actuellement le porte-parole du dossier au fédéral, et un ministre avec un ministère. Sur l'hypothèse d'un ministre avec un ministère, j'aimerais avoir votre réaction.

M. Paquet: Si c'est là une éventualité, il faudrait qu'elle soit soumise et qu'on en discute à nos instances. On n'a pas pu se prononcer sur cette éventualité-là. Ce n'est pas là-dessus qu'on a débattu.

Mme Blackburn: Avez-vous déjà songé à ce que pourrait être la meilleure façon d'aider les jeunes? Vous avez un certain nombre d'opinions, que je respecte et, je dirais, qui expriment plus des réserves que des solutions, mais si vous étiez responsables de nous apporter quelque solution, elle serait de quelle nature?

M. Paquet: Je m'excuse, le dernier élément?

Mme Blackburn: Si vous étiez en mesure de proposer des solutions concrètes et de les faire appliquer, où commencenez-vous?

M. Paquet: D'abord, quand on parle de la jeunesse, je pense que c'est un concept un peu récent, entre autres, en fonction des âges, des 15-30 ans. Ce dont on se rend compte de plus en plus, c'est que la notion de jeune n'est plus tellement rattachée à l'âge, mais bien à la situation économique, c'est-à-dire que quelqu'un de 30 ans qui est sur le chômage, cela va être un jeune, mais quelqu'un de 30 ans qui a une "job" à temps plein avec le bungalow ne sera pas un jeune. Souvent, c'est la perception.

C'est pour dire que de plus en plus la notion de jeune se rapporte au statut socio-économique, on a l'impression. C'est à ce niveau qu'il faut travailler le plus et à tous les problèmes rattachés à l'emploi. La question de l'emploi nous semble être une priorité prioritaire, si on peu dire, parce que, si ce n'est pas l'absence d'emploi, c'est l'absence d'un revenu minimum décent - avec 170 $ par mois sur l'aide sociale, on n'arrive pas - qui amène les problèmes de santé, les problèmes d'insertion sociale.

Quand on parle de solutions concrètes, on pense qu'il faudrait absolument développer une politique de plein emploi qui peut passer par des mesures comme la réduction de la semaine de travail; ce qu'on appelle la semaine de 35 heures, par exemple, sans perte de salaire peut être un objectif. On peut également parler de la question du temps supplémentaire; donc, il y a plein de mesures qui impliquent que le gouvernement légifère et, finalement, prenne ses affaires en main et agisse, parce que c'est de cette façon que cela s'est toujours passé historiquement et que cela va devoir continuer à se passer pour développer une politique de plein emploi.

Il y a une liste incommensurable et innommable de choses qu'il faut faire parce que la situation est urgente à bien des niveaux pour les jeunes. Si on parle d'insertion, l'emploi cela nous semble être quelque chose au-dessus de la liste.

Mme Blackburn: Je voudrais vous remercier de votre participation aux travaux de cette commission parlementaire. J'espère avec vous que le gouvernement va réfléchir avant de poursuivre son projet et peut-être prendre en sérieuse considération les réserves nombreuses qui ont été exprimées à ce sujet, prendre aussi en considération les différentes propositions qui ont été avancées. Il y a des choses qui sont fort intéressantes, qui ont beaucoup de bon sens et beaucoup d'utilité.

Dans ce sens, j'espère que, pas à la fin de ces travaux, mais probablement d'ici les prochains mois, la question aura considérablement évolué, que ce gouvernement sera en mesure d'offrir quelque chose d'utile aux jeunes pour essayer de corriger une situation qui dure et qui perdure, et qui ne nous permet pas, ne serait-ce que pour rappeler le mémoire du groupe précédent, de donner aux jeunes des situations de vie leur permettant de vivre dans la dignité. Je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée de Chicoutimi. En conclusion, 30 secondes, M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Trente secondesl D'abord, mon nom, c'est Jean-Pierre Bélisle, député de Mille-Îles, c'est ce que vous vouliez dire tantôt. Je pense que vous venez de faire la preuve de ce que vous avez écrit à la page 2. Je vous lis votre texte: "Sans systématiquement rejeter du revers de la main les diverses consultations gouvernementales, les organisations de la jeunesse s'en remettent à d'autres moyens pour se faire entendre et promouvoir leurs idéaux." Cette fois-ci, vous êtes venus nous voir en

commission parlementaire, vous avez émis votre opinion...

M. Paquet: Directement, pas par le biais d'un conseil.

M. Bélisle: ...directement, pas par le biais d'un conseil, je l'admets, mais définitivement vous avez appliqué cela.

Ma petite question finale, c'est celle-ci, cela m'intrigue: L'ANEQ va-t-elle susciter ou appuyer des candidatures au Conseil permanent de la jeunesse? Si vous avez des membres, des jeunes chez vous que vous êtes censé représenter, qui viennent vous voir et qu'eux croient en cela, est-ce que vous allez, à cause des formulaires de candidature, leur accorder un appui?

M. Paquet: Je pense qu'on est reconnus pour être cohérents. Dans ce sens, je ne comprends pas tellement votre question.

M. Bélisle: Pourtant, c'est bien clair.

M. Paquet: C'est bien évident - notre mémoire, vous l'avez lu comme moi - que s'il y a des personnes qui viennent pour recevoir notre appui et qu'on ne considère pas que le Conseil permanent de la jeunesse, c'est quelque chose de louable et de souhaitable, on ne fera pas ce que vous voudriez bien, c'est-à-dire qu'on cautionne des candidatures pour donner un peu de crédibilité à ce conseil. Ne comptez pas sur nous pour cela.

Le Président (M. Marcil): M. Giguère, M. Paquet...

M. Gratton: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait de remercier M. Paquet et M. Giguère? Je trouve cela stimulant, intéressant, le "fun". Merci.

Le Président (M. Marcil): M. Giguère, M. Paquet, merci beaucoup de vous être présentés à cette commission et bon voyage de retour.

Nous allons ajourner les travaux à mardi, après les affaires courantes, c'est-à-dire à 15 heures. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 22 h 1)

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