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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mercredi 21 janvier 1987 - Vol. 29 N° 35

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen de propositions de réforme en matière de délimitation des circonscriptions électorales


Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît!

La séance est ouverte. Il me fait plaisir de constater encore une fois le quorum. Je rappellerai le mandat que nous avons amorcé hier, à savoir de procéder à l'examen de toute proposition de réforme en matière de délimitation des circonscriptions électorales en vue de dégager les consensus qui pourront faire l'objet de modifications â la Loi sur la représentation électorale.

Je rappellerais, pour le bénéfice des membres et de nos invités, que l'horaire de nos travaux pour aujourd'hui est de 10 heures à 13 heures et de 15 heures à 18 heures. Je demanderais au secrétaire, M. Comeau, de bien vouloir nous faire part des remplacements.

Le Secrétaire: Merci, M. le Président. On m'a avisé que M. Boulerice (Saint-Jacques) était remplacé par M. Dufour (Jonquière), M. Doyon (Louis-Hébert) par M. Poulin (Chauveau), M. Godin (Mercier) par M. Rochefort (Gouin), M. Johnson (Anjou) par M. Desbiens (Dubuc), M. Kehoe (Chapleau) par M. Camden (Lotbinière), M. Laporte (Sainte-Marie) par M. Audet (Beauce-Nord), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) par M. Chagnon (Saint-Louis) et M. Vallières (Richmond) par M. Saintonge (Laprairie).

Le Président (M. Filion): D'accord. Permettez-moi de saluer à nouveau M. Côté, le Directeur général des élections, ainsi que MM. Lemieux, Fournier et Giguère qui S'accompagnent et leur équipe qui les entoure. Je vous rappelle que nous poursuivons l'examen des questions contenues au document de travail daté de janvier 1987 qui nous a été remis. J'avais déjà inscrit, comme prochain intervenant, M. le député de Laprairie. Cependant, je crois comprendre que M. le ministre a certaines informations à livrer aux membres de la commission à la suite des questions qui ont été posées hier par M. le député de Gouin.

Mise au point sur le Secrétariat â la réforme électorale

M. Gratton: En effet, M. le Président. Hier, le député de Gouin s'interrogeait sur le personnel qui travaille au Secrétariat à la réforme électorale. Je n'ai pas saisi s'il suggérait qu'il y avait eu changement dans le statut du secrétariat depuis le changement de gouvernement en décembre 1985. Je voudrais simplement rappeler qu'au lendemain de l'élection de 1976 le secrétariat relevait d'un ministre d'État, soit M. Robert Burns. Le secrétariat a toujours relevé du Conseil exécutif. Il n'y a donc eu aucun changement dans le statut du secrétariat depuis le 2 décembre 1985 si ce n'est que c'est maintenant un ministre déléqué. D'ailleurs, je pense que mon prédécesseur était également ministre délégué, soit M. Marc-André Bédard. C'est dire que le secrétariat, dans son fonctionnement, dans son statut juridique, a toujours été le même.

En ce qui a trait aux personnes qui sont présentement à l'emploi du secrétariat, il y a d'abord Mme Francine Barry, une professionnelle - non, vous allez voir, ce n'est pas long - agent de recherche qui est au secrétariat qui avait été créé en 3 976. Mme Barry est arrivée en décembre 1977 et y est toujours. Il y a également une secrétaire, une responsable du secrétariat -secrétaire du secrétariat, il faut s'entendre -Mme Muriel Tessier qui est là depuis 1980. Il y a eu depuis le 2 décembre dernier deux personnes qui ont travaillé à contrat...

Une voix: 1986?

M. Rochefort: Décembre 1985.

M. Gratton: Oui, 1985, pardon.

M. Rochefort: Le décembre important.

M. Gratton: Oui, décembre 1985, important pour certains, moins pour d'autres.

M. Rochefort: Important pour tout le monde.

M. Gratton: II y a eu Me Louis Rémillard qui a agi à titre de secrétaire général associé. Il y a maintenant Me Louise Cobetto qui est à contrat jusqu'au 1er mai, à titre de conseiller juridique. Comme secrétaire, rémunéré à même l'enveloppe budgétaire de mon cabinet politique, il y a Mme Liliane Chalifour.

M. Rochefort: Secrétaire de quoi'?

M. Gratton: Secrétaire au secrétariat: dactylographie, ce genre-la. Il y a également eu pendant une période de six mois un fonctionnaire qui a été prêté par le ministre des Affaires municipales, M. Michel Mercier, qui a réintégré le ministère des Affaires municipales.

C'est dire, M. le Président, que c'est là l'ensemble des gens qui travaillent ou ont travaillé au secrétariat depuis la dernière élection en 1985.

Si vous me le permettez, je voudrais simplement inviter le député de Gouin - je le faisais hier - à éviter la partisanerie dans nos discussions. Hier, il semblait laisser sous-entendre que le fait que Me Louis Rémillard ait été président de la commission politique du Parti libéral avait une incidence quelconque. Je lui rappellerai simplement que le fait que Me Louis Rémillard ait servi comme président de la Commission politique du Parti libéra! du Québec ne remet aucunement en cause sa capacité de faire le travail. Je vais simplement rappeler au député de Gouin que son prédécesseur était un personnage associé de très près au Parti québécois et que nous n'en avons jamais de notre côté fait état dans le sens de prêter quelque connotation partisane que ce soit au travail qu'effectuait cet ex-candidat à la chefferie du Parti québécois qui, pendant un certain temps, a été sous-ministre et secrétaire général associé. C'est dire, quant è moi, qu'il n'y a aucun élément pertinent qu'on peut tirer des personnes qui ont oeuvré ou qui oeuvrent présentement au Secrétariat à la réforme électorale. Il n'y a aucune pertinence sur le contenu des discussions qui nous amènent ici en commission parlementaire aujourd'hui. J'ose souhaiter qu'on pourra continuer de débattre les propositions à leur mérite plutôt qu'en fonction de qui les a formulées.

M. Rochefort: M. le Président...

Le Président (M. Filion): Oui, M. le député de Gouirt.

M. Rochefort: M. le Président, mon intention n'était pas de soulever un débat, mais, puisqu'on nous fournit les informations, j'aurai sûrement certains commentaires à faire. Dans un premier temps, concernant la première intervention du ministre, j'ai cru comprendre au début de sa présentation qu'il se demandait si les questions que j'avais soulevées sur ce sujet hier pouvaient être reliées au fait que je voulais laisser sous-entendre que le secrétatiat avait changé de statut. C'est bien cela que vous vouliez dire.

Oui, M. le Président, la réponse du ministre et les faits nous prouvent que le secrétariat a changé de statut. Dans le passé, le Secrétariat à la réforme électorale était un secrétariat spécifique comme celui du secrétariat de la ministre déléguée à la Condition féminine, par exemple, et pour lequel on avait des crédits a part. Ces crédits étaient étudiés en commission parlementaire dans le cadre de l'étude des crédits de l'ensemble des ministères et des activités gouvernementales de façon spécifique et ad hoc. On sait que, maintenant, ce n'est plus le cas.

Non, mais écoutez! Je m'excuse de vous l'apprendre. Vous n'avez plus de crédits spécifiques identifiés au Secrétariat à la réforme électorale. Vos crédits sont maintenant intégrés aux crédits du Conseil exécutif et sont étudiés dans le cadre des crédits du premier ministre responsable du Conseil exécutif.

M. Gratton: Mais cela n'a pas toujours été comme cela?

M. Rochefort: Non, avant le ministre responsable de la Réforme électorale avait des crédits ad hoc et venait les défendre comme le ministre des Affaires sociales...

M. Gratton: II venait les défendre où?À la commission parlementaire qui étudiait les crédits du Conseil exécutif.

M. Rochefort: Oui, mais, comme pour la ministre déléguée à la Condition féminine, un moment spécifique était prévu. Ce n'était pas étudié dans le lot.

M. Gratton: Je regrette, M. le Président.

M. Rochefort: II y a eu un changement.

M. Gratton: Je regrette, mais je dois rappeler au député de Gouin que la façon d'étudier les crédits du Conseil exécutif - on sait que c'est le premier ministre qui en répond - c'est à la demande de l'Opposition, c'est comme cela que ça se passait avant décembre 1985 et c'est encore comme cela que ça se passe 'aujourd'hui. Il appartient à l'Opposition d'inviter les membres du Conseil exécutif, qui répondent d'une partie des crédits du Conseil exécutif, de venir les défendre ici à la commission parlementaire. Si, l'an dernier - parce que c'est le seul exercice, c'est la seule occasion où on a étudié des crédits depuis l'arrivée du nouveau gouvernement - l'Opposition n'a pas choisi de m'inviter à titre de ministre délégué à la Réforme électorale a venir défendre les crédits du Secrétariat à la réforme électorale, ce n'est pas à nous qu'il faut le reprocher. Les crédits du Secrétariat à la réforme électorale sont comptabilisés séparément, de façon distincte dans les crédits du Conseil exécutif, et cela n'a pas changé, je l'affirme, M. le Président. Il appartient à l'Opposition ou à un membre de

l'équipe ministérielle également qui voudrait faire l'étude exhaustive des crédits du Secrétariat a la réforme électorale de simplement l'indiquer au moment où les partis, le gouvernement et l'Opposition, s'entendent sur la façon de procéder à l'étude des crédits du Conseil exécutif.

M. Rochefort: Si on me permet...

M. Gratton: Absolument rien n'a changé, je pense qu'il est important de le souligner.

M. Rochefort: Si on me permet de poursuivre, M. le Président, oui je maintiens qu'il y a eu un changement, notamment celui que j'ai décrit, et, contrairement à ce que le ministre affirme, on ne vient pas défendre des crédits; on ne parle pas de crédits additionnels supplémentaires pour lesquels les ministres doivent être convoqués pour venir pendant cinq heures étudier les crédits en commission plénière où, là, ils doivent être convoqués. On parle des crédits réguliers des ministères. On n'a jamais eu besoin, dans le passé, de convoquer le ministre délégué à la Réforme électorale. Ses crédits étaient identifiés et il devait venir au même titre que n'importe quel autre ministre comme c'était le cas pour l'ensemble des crédits du Conseil exécutif, qui étaient ventilés de façon spécifique. Il est faux de prétendre que le premier ministre venait défendre les crédits de la ministre déléguée à la Condition féminine, du Secrétariat à la réforme électorale et des choses comme cela.

Deuxièmement, M. Président...

M. Gratton: M. le Président, je m'excuse.

M. Rochefort: Laissez-moi au moins compléter mon intervention, M. le Président.

M. Gratton: Sur une question de règlement.

M. Rochefort: Sauf erreur, je n'ai pas interrompu le ministre pendant sa présentation.

M. Gratton: Bien oui, mais si vous affirmez des choses qui ne sont pas...

M. Rochefort: Non, non, mais quand même...

M. Gratton: ...véridiques.

M. Rochefort: Puis-je poursuivre mon intervention?

Le Président (M. Filion): M. le député de Gouin, vous pouvez poursuivre.

M. Rochefort: Deuxièmement, M. le Président, depuis le départ de M. Rémillard, si je comprends bien, il n'y a pas de secrétaire général associé qui coordonne les activités du Secrétariat à la réforme électorale. Qui coordonne cette équipe? II serait important de le savoir.

Finalement, M. le Président, je dois souligner ma très grande surprise et ma désapprobation totale quant au fait que la personne payée par la masse salariale de cabinets politiques se retrouve dans le personnel d'un secrétariat gouvernemental pour y exercer des fonctions gouvernementales. Pour moi, c'est mêler les genres de façon dangereuse et c'est prêter flanc inutilement, si jamais on n'a pas une mauvaise intention, ce que je peux être prêt à croire de la part du ministre.

M. Gratton: Peut-être, oui.

M. Rochefort: C'est faire exprès pour prêter flanc à des situations qui soulèvent de la controverse. Je pense que la masse salariale du ministre, comme ministre, de son cabinet politique et pour des fins politiques, devrait être distincte et des activités et du personnel du Secrétariat à la réforme électorale.

Quant à M. Louis Rémillard, oui, pour nous, c'est une donnée... D'abord, je veux rectifier un élément qui a dû échapper au ministre: M. Rémillard n'était pas président de la commission politique, M. Rémillard était président de la commission juridique, donc, l'avocat en chef du Parti libéral et, à ce titre, il n'avait pas la distance que, par exemple, le président de la commission politique avait sûrement entre sa responsabilité dans sa formation politique et l'activité électorale sur le plancher des vaches, qui est celle qu'a obligatoirement l'avocat en chef d'une formation politique, parce que, tous les jours, il est en contact avec les organisateurs électoraux sur les plans national, régional et local du parti et il est en contact avec les bureaux du Directeur général des élections et avec ses vis-à-vis, partisans politiques des autres formations politiques. Pour nous, ce n'est de même nature.

C'est une donnée qui, pour nous, fait partie du décor. Mais c'est clair que les débats qu'on a menés jusqu'à ce jour sont sur le fond des arguments du document.

M. Marcil: II a nommé un ancien ministre...

M. Gratton: Est-ce que M. le député a terminé?

M. Rochefort: Est-ce que vous remettez en question le processus de nomination des juges?

M. Marcil: Non, non. Je voudrais...

M. Gratton: Est-ce que le député de Gouin a terminé?

M. Marcil: Est-ce que la nomination d'un ancien ministre juge...

M. Rochefort: Est-ce que vous remettez en question le processus de nomination des juges?

Le Président (M. Filion): M. le député de...

M. Marcil: Je ne le remets pas en question, je vous pose une question.

M. Rochefort: Je vous dis que vous êtes au gouvernement.

M. Marcil: Est-ce que le fait de nommer un ancien ministre juge perpétue pour vous également sa partisanerie et ainsi de suite?

M. Rochefort: Absolument pas. Mais, pour moi, M. le député, si vous souhaitez remettre en question le mode de nomination des juges...

M. Marcil: Je ne le remets pas en question, je vous ai posé la question.

M. Rochefort: ...vous êtes membre de la majorité ministérielle, procédez.

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Beauharnois, vous savez fort bien que si voulez poser une question au dernier intervenant, notre règlement prévoit une façon de le faire. Entre-temps, la parole est toujours à M. le député de Gouin...

M. Rochefort: J'ai terminé mon intervention, M. le Président.

Le Président (M. Filion): ...qui a terminé son intervention.

M. Marcil: C'est ce que j'avais cru, M. le Président.

Le Président (M. Filion): M. le ministre, voulez-vous ajouter à vos propos?

M. Gratton: M. le Président, je vais peser mes mots très soigneusement. Je pense que le député de Gouin a une façon très subtile de faire des procès d'intention, en faisant simplement précéder ses remarques par la phrase: Je ne fais pas de procès d'intention, ou: II ne faut peut-être pas faire de procès d'intention...

Une voix: On appelle cela une litote.

M. Gratton: ...et en faisant ensuite des affirmations du genre qu'il vient de faire.

D'abord, sur le point des crédits du secrétariat, j'ai demandé qu'on vérifie cela. J'affirme toujours qu'il n'y a absolument rien de changé. Lorsque le député de Gouin fait référence à des crédits supplémentaires où il y a des ententes entre les deux parties pour la façon d'organiser les débats, il lui échappe sans doute que c'est le même genre de discussion... Il fait signe que non, peut-être qu'à titre de leader du gouvernement je suis un peu au courant de la façon dont ça fonctionne. C'est exactement le même genre de discussion qu'on a avec le leader de l'Opposition au moment d'organiser l'étude des crédits non pas supplémentaires, mais des crédits tout court du Conseil exécutif. C'est l'Opposition qui décide quels sont les ministres qui ont des responsabilités à l'intérieur du Conseil exécutif et qui doivent venir défendre les crédits des éléments de programme qui les concernent. Je vérifie cela et je le confirmerai ou l'infirmerai tantôt.

Deuxièmement, le député de Gouin dit ne pas faire de procès d'intention à l'égard de Me Louis Rémillard, mais souligne que dans son cas ce n'était pas du tout la même chose que ce qu'on a vu précédemment, parce que Me Rémillard était président de la commission juridique. D'ailleurs, je le reconnais, ce n'était pas de la commission politique qu'il était président, mais bien de la Commission juridique du Parti libéral du Québec. Son prédécesseur était un ancien permanent du Parti québécois. Donc, je pense que ce que reproche, semble reprocher ou ne veut pas reprocher le député de Gouin à Me Rémillard quant à ses liens avec le Parti libéral s'applique mutatis mutandis, en en mettant un peu plus, au prédécesseur de Me Rémillard. (10 h 30)

Je ne veux pas qu'on s'éternise là-dessus, mais le député de Gouin, depuis le début de nos travaux, nous parle de recul dans les propositions du gouvernement, sans jamais préciser là où on recule. Il laisse sous-entendre, finalement, sans le dire, que, d'un côté, il y a la vertu, ceux qui font bien les choses, ceux qui ont tout fait et qui sont les seuls qui ont fait quelque chose pour améliorer le processus de délimitation de la carte électorale, et il y a les autres qui ont des...

Une voix: De mauvaises intentions.

M. Gratton: Non. Enfin, ils ont peut-être de mauvaises intentions en remettant en cause certaines des modalités du processus établi en 1979. Je dis simplement qu'il n'y a pas d'intention. C'est clair, c'est net, c'est

sur la table ce que je propose à titre de ministre délégué à la Réforme électorale. Qu'on débatte cela sur le fond. Le député de Gouin a beau jeu. Il n'a pas à s'inquiéter, lui dont la méfiance est proverbiale; qu'il soit tout a fait rassuré quant aux résultats concrets qui vont découler de nos travaux. Il n'a pas à s'inquiéter qu'on va lui en glisser une entre les dents sans qu'il s'en aperçoive. C'est sur la table, c'est clair, on va tirer des conlusions au fur et è mesure qu'on va aborder le sujet. Je l'invite à se limiter à cela. Il me semble que cela serait plus bénéfique pour ceux qu'on veut servir ici,

M. Rochefort: M. le Président, deux minutes. D'abord, j'annonce immédiatement au ministre qu'il sera convoqué à l'étude des crédits du Secrétariat à la réforme électorale à l'occasion des crédits du printemps. Deuxièmement, je reconnais, comme je l'ai fait hier, que le ministre a effectivement pris l'engagement de ne légiférer que sur la base des accords intervenus entre les deux formations politiques et qu'en conséquence... Étiez-vous ici, vous, hier?

M. Gratton: Oui.

M. Rochefort: Est-ce que vous suivez quand vous êtes là? Oui? Bon. Parfait!

Le Président (M. Filion): S'il vous plaît!

M. Rochefort: En conséquence, je ne remets pas en question les intentions ou la parole que le ministre nous a donnée. Je dois dire qu'autant je lui suis reconnaissant de la façon dont il a mené les travaux du dossier jusqu'à aujourd'hui, je l'ai dit à plusieurs reprises, autant je pense qu'il peut reconnaître que, justement, nous ne nous sommes pas assis sur cette entente et que nous avons travaillé rigoureusement et sérieusement sur le fond des questions tout au cours de la journée d'hier. On aurait pu simplement dire qu'on n'était pas d'accord et on aurait mal utilisé son ouverture d'esprit, ce qu'on n'a pas fait. D'ailleurs, je pense qu'on a débattu largement le fond des questions hier. On est prêt à poursuivre. Quant à nous, oui, il y a des reculs, et ce sont des reculs à partir du fond des questions. On en a parlé hier et, dès qu'on reprendra, on poursuivra.

Le Président (M. Filion): D'accord.

Étude du document de travail

M. Gratton: M. le Président, puis-je proposer, si cela agrée aux membres de la commission, qu'on pourrait peut-être pour clore le débat sur le premier élément dont on discute, soit la base de la représentation... Je pense que vous avez déjà inscrit le député de...

Une voix: Le député de Laprairie.

M. Gratton: Le député de Laprairie. Le député de Gouin pourrait intervenir et je pourrais clore le débat.

Le Président (M. Filion): Si cela convient aux membres de la commission, cela nous permettrait de passer à d'autres sections de notre document de travail. M. le député de Laprairie.

La base de la représentation (suite)

M. Saintonge: Je vous remercie, M. le Président. Il me fait plaisir d'apporter mon point de vue à ce débat qui nous préoccupe, qui concerne principalement la question de la base de la représentation électorale. Le ministre avait annoncé son intention de procéder à l'évaluation de la Loi électorale et principalement la Loi sur la représentation électorale. Il l'a fait dans une forme qui veut que toute modification à une loi à venir soit faite sur la base de consensus. À ce moment-ci, ce que je veux souligner à la commission, c'est que le ministre a ouvert son jeu d'emblée, au départ, en disant qu'il voulait une réflexion commune, une réflexion hors de la partisanerie politique. Si on parle d'un consensus, il est évident qu'on ne peut pas se cacher derrière des critères que des formations politiques pourraient défendre; sinon, il va de soi qu'un consensus du côté ministériel pourrait difficilement être atteint dans certains cas.

Ce que je retiens des discussions que nous avons eues hier, ce que je voudrais souligner, c'est qu'on a posé certaines questions au ministre, on a fait état de certains commentaires. Je pense au député de Dubuc, entre autres, qui demandait: Pourquoi voulez-vous modifier la loi telle qu'elle existe actuellement au niveau de la représentation électorale, par exemple, sur la base d'aller à la population plutôt que de demeurer au niveau des électeurs? Avez-vous eu des demandes en ce sens? Est-ce que des gens vous ont contacté pour vous dire que c'est essentiel de le faire, pour vous dire que le processus qui existe actuellement, qui a été mis en place par le précédent gouvernement, par le biais de certaines lois qu'il a adoptées, ne satisfait pas les gens? Est-ce une critique du processus? Je ne penserais pas.

Je pense que notre rôle de législateur dans ce cas - c'est vraiment le rôle des députés qui va s'appliquer - c'est de tenter, au niveau de la représentation électorale, d'assurer le meilleur équilibre possible de nos institutions démocratiques, de rehausser le rôle du Parlement et de redonner au pouvoir

législatif, ou aux députés, si on veut, l'importance qui lui revient. Si on examine la situation dans un premier temps, sur la base de la représentation électorale, le système actuel, vis-à-vis de ce qui nous semble exister dans les faits, est-il juste et équitable, est-ce qu'il correspond à la plus juste représentation? Je pense que c'est ce qu'il faut examiner.

Disons, au départ, au sujet de la représentation des élus, que c'est l'essence même de notre démocratie, c'est-à-dire que nous avons un système démocratique, une démocratie représentative dans le sens que nos élus représentent une population. Une population de quel ordre? Est-ce qu'à ce moment-ci on doit dire qu'on représente simplement les gens qui ont voté pour nous, est-ce qu'on représente simplement les électeurs ou si on représente l'ensemble de la population? Je pense que c'est ce qu'il faut examiner fondamentalement.

Le député de Jonquière est ici et je suis heureux de le constater. Hier, il a mentionné une citation qu'on entend fort souvent quand on parle de choses politiques. On dit aux gens: Si vous ne voulez pas vous occuper de la politique, la politique va s'occuper de vous. Si je pars de cet exemple, est-ce que les gens qui s'occupent de politique sont seulement des gens qui ont le droit de voter, est-ce que ce sont seulement des gens qui ont la qualité d'électeur selon la Loi électorale? Je dirais que non. Je dirais que les gens qui peuvent s'occuper de politique, c'est l'ensemble de la population. C'est important dans le processus qu'on doit regarder de voir que les gens de toutes les régions, de tous les secteurs d'activité, c'est eux qu'un député représente et l'Assemblée nationale doit tenter de rendre cette image dans les décisions qu'elle a à prendre.

Le député de Gouin mentionnait ici, hier, que les gens prennent conscience... Je cite un petit peu ad lib ce qu'il a dit, mais je pense que je suis assez exact. On dit, en parlant de la population, que les gens élus les représentent. Les gens - la population -prennent conscience que les gens élus les représentent. Ceci assure le respect de nos lois, ceci assure, vis-à-vis de la population, le respect du rôle de député. Justement, dans ce sens-là, je pense que le député de Gouin mentionnait exactement - quand il parle des gens, de la population - qu'ils prennent conscience que les députés les représentent. C'est l'ensemble de la population, même ceux qui n'ont pas voté, même ceux qui ne sont pas considérés comme électeurs, même ceux qui n'ont pas la qualité d'électeur. Si je regarde la Loi électorale, on dit: "Possède la qualité d'électeur, toute personne qui: "1° a 18 ans accomplis; "2 ° qui est citoyen canadien; "3 ° est domiciliée au Québec depuis douze mois; "4° n'est pas interdite, n'est pas en cure fermée suivant la Loi sur la protection du malade mental (chapitre P-41) ou n'est pas sous la juridiction du curateur public; "5° et n'est frappée d'aucune incapacité de voter prévue par la présente loi."

Donc, c'est une qualité d'électeur et je dirai que le Directeur général des élections n'a pas le droit de vote, donc, n'a pas la qualité d'électeur.

À ce moment-là, le Directeur général des élections et ceux qui, ici, possèdent la qualité d'électeur, ne sont-ils pas des citoyens, ne sont-ils pas des gens qui sont représentés par ceux qui sont élus à l'Assemblée nationale, ne sont-ils pas des gens qui participent à la politique, n'ont-ils pas une place importante dans la politique? Évidemment, le Directeur qénéral des élections ne pourrait pas participer activement, cela va de soi, mais il reste quand même que je veux démontrer qu'on a parlé, au niveau des électeurs, d'avoir un poids égal à l'électeur, que l'électeur ait un pouvoir. À mon humble opinion, l'électeur n'a pas un pouvoir. 11 détient ni plus ni moins que le privilège d'être appelé à déterminer qui va représenter un bassin de population. Je pense que c'est ce qu'il faut comprendre comme électeur. C'est donc un privilège que la loi accorde. On dit fort bien - ça m'apparaît clair - à l'article 54 de la Loi électorale: "Possède la qualité d'électeur..." Donc, cette qualité est un privilège qu'on accorde à certaines personnes de venir déterminer qui va les représenter.

Ce qu'il est important de souligner à ce moment-ci, c'est que, si celui qui est électeur possède le privilèqe d'envoyer certaines personnes pour représenter un bassin de population sur un territoire donné, ça ne veut pas dire que le député représente uniquement les électeurs. Il représente l'ensemble d'une population. M. le Président, quant à ce qu'a proposé le Secrétariat à la réforme électorale à propos du choix de la population électorale comme base de la représentation, ce qui traduit le mieux, je cite le rapport de la commission: "On peut dès lors se demander si le choix de la population électorale comme base de - la représentation traduit le mieux les exigences de la démocratie représentative qui repose essentiellement sur la délégation du pouvoir de décision de l'ensemble de la population à ses représentants élus. "En effet, une fois élu, le député représente l'ensemble de la population de sa circonscription et non seulement les électeurs qui se sont inscrits sur la liste électorale."

Vous me permettrez une espèce de digression, je vais faire lecture d'une certaine brochure. J'ai fouillé hier - ça m'est revenu simplement, en écoutant les propos qu'on avait ici - j'ai fait une

recherche pour retrouver une brochure: Le Député québécois, Assemblée nationale du Québec, qui date quand même de 1979; cette brochure nous a été envoyée par le président de l'Assemblée quand j'ai été élu en 1981 -je pense que c'est la même chose pour le député de Gouin, qui a été élu en 1981. La préface de la brochure est signée par M. Clément Richard, qui était président, à l'époque, de l'Assemblée nationale.

Je citerai ici quelques passages où on parle du rôle du député. Le rôle du député est donné en trois points principaux. Le premier rôle du député, c'est celui de député législateur. Je pense que cela va de soi. On comprend ce que c'est. Le deuxième rôle, le député contrôleur. Le contrôleur est celui qui peut poser des questions, soit à la période des questions, soit au moment de l'étude des crédits, soit également au moment des engagements financiers. C'est donc un rôle de contrôleur. Le troisième rôle du député, c'est celui de député intermédiaire.

Vous me permettrez, M. le Président, de prendre quelques minutes pour citer certains passages de cette fameuse brochure. Je me réfère principalement ici à la page 32 où on parle du député intermédiaire. On dit ce qui suit: "Médiateur, ombudsman, animateur, agent d'information, travailleur social, promoteur, agent de développement, autant d'appellations utilisées ces dernières années pour désigner l'aspect le plus complexe et le moins bien défini du "métier" de député, celui qui consiste à être un lien entre l'administration et le citoyen. Nous avons choisi de désigner ce rôle par le mot "intermédiaire" dont le sens est assez large pour englober la quasi-totalité des activités dont il sera question ci-dessous. "Ce rôle présente certaines différences par rapport aux deux précédents. Ainsi, alors que le législateur et le contrôleur évoluaient dans le respect de la discipline de parti, l'affiliation politique a moins de conséquence sur le député en tant qu'intermédiaire. Certes, l'appartenance à la majorité modifiera les techniques ou l'efficacité du député; elle jouera cependant beaucoup moins sur l'ensemble du rôle d'intermédiaire. C'est beaucoup plus la personnalité du député, la perception de son rôle comme fiduciaire ou mandataire ainsi que la configuration géographique, sociologique et économique de sa circonscription qui détermineront son intérêt et ses responsabilités envers le "travail de comté"."

Un peu plus loin, on continue: "Encore une fois, il est difficile de tracer le profil du député intermédiaire, les études étant fort rares sur le sujet." D'après moi, le passage qui suit est important: "D'après les travaux de Clarke, Price et Krause, 30 % des députés québécois consacraient plus de 50 % de leur temps aux "problèmes de comté" et seulement 13,3 % y allouaient moins de 25 % de leur temps."

Ici, on parle maintenant des activités du député: "Quelles sont donc les activités du député en tant qu'intermédiaire?Globalement, on peut dire qu'il sert de représentant pour son comté et sa région, de "lobbyist" pour les groupes et les communautés locales, et de protecteur des citoyens de son comté." J'attire ici l'attention qu'à mon point de vue on ne parle pas d'électeurs, on parle de la population, des groupes du comté. Le rôle du député s'identifie donc à la population globale de sa région. (10 h 45) "L'une des principales préoccupations du député consiste à s'assurer que son comté reçoit "sa part de considérations de l'ensemble des ministères." Dans cette optique, le député se transforme en agent de développement régional et fait valoir, auprès des ministres et des fonctionnaires responsables de l'allocation des ressources financières de l'État, les besoins de sa circonscription dans tous les domaines où l'État intervient, que ce soit le loqement, les équipements hospitaliers, la voirie, les loisirs sportifs ou culturels ou les subventions aux entreprises créatrices d'emplois. Le député profitera de son droit de parole durant les débats ouverts (débats sur le message inaugural et sur le budget), de l'étude des crédits ou des mécanismes extra-parlementaires (rencontres avec ministres et fonctionnaires) pour attirer l'attention sur les problèmes de son comté. "Ce rôle d'animateur régional met le député en relation avec des groupes représentant des communautés locales (conseils municipaux, commissions scolaires, groupes culturels, etc.) ou des secteurs particuliers de la population du comté (âge d'or, jeunes, syndiqués, agriculteurs, etc.) qui requièrent ses services pour transmettre leurs idées, demander ou fournir des informations, obtenir de l'aide ou des services. Souvent, le député guidera ces requérants à travers les dédales de l'administration, les informera sur les services gouvernementaux à leur disposition ou prendra lui-même l'affaire en main."

M. le Président, on voit clairement ici qu'on parle de personnes qui souventefois ne sont pas nécessairement celles qui possèdent la qualité d'électeur, de personnes qui ne sont pas simplement celles qui ont le privilège de voter pour déléguer certaines personnes à l'Assemblée nationale. Le député, dans son rôle fondamental, représente ces gens, agit pour ces gens-là. Cela, c'est dit finalement par l'Assemblée nationale, c'est dit par une brochure qui a été rédigée par l'Assemblée sous la direction du président. Il m'apparaît clair à ce moment-ci que le rôle du député comme tel en est un de représentant de l'ensemble de la population.

Je continue le texte: "Enfin, tous les députés consultés par le Comité consultatif sur les indemnités et les allocations (1974) ont déclaré qu'ils recevaient régulièrement à leur bureau leurs électeurs, souvent plusieurs heures par semaine, et considéraient avec raison que cette forme d'activité est essentielle à leur mandat"." Ici, on parle d'électeurs. Je ferai part ici que c'est une citation, C'est la citation 36. Je vous la cite exactement. On a interviewé certains députés. On a fait référence à certaines études qui existaient antérieurement et c'était ici une citation de M. Fabien Roy qui disait qu'il recevait des électeurs. Mais je parle de ce qui précède là-dessus. On comprend que ce ne sont pas seulement des électeurs, mais c'est l'ensemble de la population qu'il recevait à ses bureaux.

Je continue: "D'après une étude récente, les électeurs et les organismes interviennent auprès de leur député pour régler d'abord des problèmes personnels (en relation, le plus souvent, avec les services gouvernementaux) et pour obtenir des biens et services (subventions, octrois, contrats ou permis); ensuite, viennent les demandes d'emplois et de renseignements. "Les électeurs vous confient des choses qu'ils ne confieraient à personne d'autre, déclare un député. Vous êtes à la fois travailleur social et ombudsman"." Je rappelle ici, dans le contexte, que c'est vrai quand on parle d'électeurs, on parle de la population plutôt que simplement des électeurs. Cela va de soi d'après les citations qu'on a vues auparavant.

Je continue quelque peu la citation dans la même plaquette du Député québécois, à la page 35: "Au cours des deux dernières décennies, les conditions d'exercice du rôle d'intermédiaire se sont modifiées. En effet, l'intervention massive de l'État dans des secteurs comme l'éducation, les affaires municipales, les affaires sociales, la culture et le loisir a nécessité l'établissement de normes de telle sorte que l'attribution de subventions dans tous ces domaines se fait de façon moins arbitraire qu'auparavant. Les procédures d'embauche et d'attribution de contrats dans le secteur public ont aussi été soustraites à l'arbitraire. Il s'en faut pour que toutes les situations et toutes les facettes des relations État-citoyens deviennent automatiques mais, ces normes et ces procédures ont réduit les possibilités d'intervention des hommes politiques. Parallèlement, les services rendus sont devenus moins politisés qu'autrefois. "On rend visite au député pour les raisons les plus variées mais, en général, c'est pour faire aboutir une demande administrative. Le député ne se demande pas alors à quel parti appartient son visiteur mais il cherche à lui rendre service." Enfin, le gouvernement et ses services communiquent directement avec les électeurs, et particulièrement avec les groupes qui s'adressent de plus en plus aux ministres; le député conserve un rôle d'informateur mais, avec la diversification des sources d'information, "il ne peut renseigner la population avec le parti pris dont on pouvait faire preuve autrefois"." Je cite ce passage pour démontrer quand même un rôle non partisan du député. À ce moment-ci, on rejoint aussi qu'on représente l'ensemble de la population.

Je terminerai par deux brèves citations, deux paragraphes aux pages 38 et 46. Dans un premier temps, on dit: "Certains députés n'hésitent pas à comparer leur bureau de comté à un confessionnal. Des gens de toutes les classes sociales viennent y exposer des problèmes de toute nature. Le député y accumule les "cas" à résoudre mais aussi des informations qui lui donnent le pouls du comté et qui contribuent à orienter son action personnelle et celle de son parti."

Finalement: "Le député continue d'exercer un rôle d'intermédiaire que ni les services gouvernementaux, ni la dépolitisation des moeurs administratives (établissement de normes, services d'achats quasi automatiques, embauche dépolitisée) n'ont pu rendre inutile. Ce rôle a même pris de nouvelles dimensions, des députés se transformant, par exemple, en médiateurs de conflits ouvriers."

Donc, si on reqarde, M. le Président, le texte que j'ai cité sur le rôle du député québécois, celui-ci représente réellement l'ensemble de la population. Dans ce sens, en vue d'assurer la plus juste représentation possible, le député de Gouin ne considérerait-il pas à ce moment-ci, eu égard au rôle confié au député, qu'on ne doive pas étendre cette représentation, cette démocratie représentative, non seulement par rapport à l'électeur lui-même, de celui qui a la qualité d'électeur, mais plutôt par rapport à l'ensemble de la population, comme le suggère le rapport du Secrétariat à la réforme électorale?

Ici, M. le Président, curieusement, comme le ministre l'a mentionné, on rejoint quand même les conclusions d'un rapport de 1962 qui disait que, dans le fond, il fallait tenter d'assurer une représentation équitable aux diverses régions de la province. On parlait d'une représentation équitable des diverses régions et d'évaluation des facteurs démographiques, géographiques et économiques dans ce cas-là. Je pense qu'il va de soi qu'il faut tenir compte de ces facteurs qui ne sont pas compris dans la seule qualité d'électeurs, mais représentent plutôt l'ensemble des régions du Québec. Si on regarde l'ensemble des régions du Québec pour déterminer les niveaux de population... Le poids des régions, c'est en fonction de la population. On ne compare pas le poids de Montréal par rapport au poids de Québec, par rapport au poids du Lac-Saint-Jean, ou

même les besoins de ces régions par rapport aux électeurs qui sont inscrits sur une liste électorale. C'est par rapport à la population globale, à l'activité économique, à l'activité sociale, à l'activité culturelle qui existent dans ces régions. Et ces activités culturelles, politiques, sociales, économiques sont exercées par l'ensemble de la population, autant ceux qui participent, à mon point de vue, aux élections que ceux qui n'y participent pas parce qu'ils n'ont peut-être pas la qualité d'électeurs qu'ils pourront acquérir éventuellement.

On parle des lois que le Parlement va adopter, on parle du rôle du député vis-à-vis de ces lois, on parle du rôle du député vis-à-vis du pouls qu'il doit amener non seulement à son caucus politique, mais également à l'Assemblée nationale. Quand on parle de cet élément, du pouls que le député doit donner, on fait référence en certain cas aux lois éducatives qui regardent une partie importante de la population qui est en bas de 18 ans. La majorité de nos étudiants sont au niveau de la maternelle, du primaire et du secondaire et n'ont pas le droit de vote; parfois au cégep, mais ils n'ont pas le droit de vote non plus. Ces gens-là ont un rôle important à jouer. Devrait-on dire à ce moment-là, si on veut assurer la représentation la plus équitable possible aux citoyens, qu'on est plus ou moins citoyen selon qu'on est électeur ou pas? Je ne le penserais absolument pas. Devrait-on payer plus ou moins de taxes selon qu'on est électeur ou pas? Je ne le penserais pas. Le député de Mille-Îles faisait allusion hier au "no taxation without representation". Une personne ici est l'ancien président de l'union des municipalités de comté, le député de Jonquière, et le député de Gouin, qui est le porte-parole de son parti dans le présent dossier, a été adjoint parlementaire au ministre des Affaires municipales. C'est un principe fortement reconnu qu'au niveau municipal, on dit "no taxation without representation".

C'est un peu la même chose ici. Est-ce que la représentation des gens vis-à-vis du gouvernement, la représentation que les gens peuvent faire valoir vis-à-vis des élus gouvernementaux, que ce soit à Québec, à Ottawa ou dans les municipalités sont simplement des représentations de personnes qui ont la qualité d'électeur et qui ont un privilège que la Loi électorale leur accorde pour élire les représentants de l'ensemble de la population? Je dirai absolument non là-dessus. Si on veut respecter ce principe, on se rend fortement compte que l'ensemble de la population est vraiment représentée par un député et que celui-ci ne représente pas seulement celui qui a la qualité d'électeur. En ce qui a trait au "no taxation without representation", il est important de noter que l'ensemble des citoyens ont leur mot à dire, l'ensemble des citoyens est affecté. Beaucoup de politiques gouvernementales concernent des compagnies et des personnes morales qui n'ont pas le droit de vote. Je dirai là-dessus, si on parle de celui qui a la possibilité de voter; Est-il le seul qui a un rôle à jouer dans l'État? Je dirais que non, ce serait "préjudicier" du rôle que les femmes ont joué dans notre société pendant longtemps, même si elles n'avaient pas le droit de vote, puisque les femmes ont le droit de vote depuis pas tellement longtemps. C'était une partie de la population qui était importante et qui avait des choses à dire au législateur, qui avait des points à soulever pour tenter d'influencer certaines politiques. Ces personnes, même si elles n'avaient pas le droit de vote, étaient quand même responsables, elles présentaient un point de vue important que le gouvernement ou les élus devaient prendre en considération.

Dans ce sens, la proposition faite par le ministre délégué à la Réforme électorale d'étendre la base de la représentation électorale à la population et non seulement aux électeurs m'apparaît plus fondamentale pour assurer une meilleure démocratie et une plus juste représentation de la population en général et, également, pour refléter davantage le rôle que le député peut jouer.

Dans ce sens, je pense qu'on rejoint pertinemment certains propos, comme le député de Gouin l'a mentionné tantôt, selon lesquels les gens prennent conscience que les élus les représentent, l'ensemble de la population. Je suis convaincu que le député de Gouin, comme moi, ne reçoit pas seulement des électeurs à son bureau. Il a à agir avec des gens qui ne possèdent pas nécessairement la qualité d'électeur mais qui sont importants au point de vue de la population. Ces gens sont soumis aux mêmes lois. Électeurs ou pas électeurs, nous sommes soumis aux mêmes lois. C'est la société globalement qui est prise en considération.

Avant de terminer, je voudrais citer un passage qui m'apparaît extrêmement important du fameux rapport, si on s'en tient aux notes introductives du ministre - je voulais simplement attirer l'attention là-dessus - quand il nous parlait des conclusions du comité présidé par Fernand Grenier pour ce qui est de la représentation électorale, de la base de la représentation. Ce comité avait estimé que, dans le cas de la province de Québec, il y avait lieu de choisir la méthode fondée sur l'utilisation du chiffre qlobal de la population. Plusieurs raisons militent en faveur d'une telle recommandation. En premier lieu, on peut faire appel au concept même de la représentation. En effet, si le député est élu par des électeurs, il faut reconnaître qu'il n'en représente pas moins l'ensemble de la population de la circonscription. Ce que j'ai dit antérieurement témoignait un peu de cet

élément. Aussi, du strict point de vue de la représentation, il semble plus logique de délimiter les circonscriptions électorales en utilisant le chiffre total de la population. Quand je parle de cela, je reviens à certaines notes qui étaient contenues dans l'arrêté en conseil qui a donné le mandat à ce fameux comité Grenier où on parlait d'évaluation de facteurs démographiques, géographiques et économiques. Enfin, les statistiques sur la population sont beaucoup plus précises et évidemment plus complètes que celles portant sur l'inscription des électeurs, puisque les recensements sont préparés avec soin longtemps d'avance, etc. Ce n'est pas pour "préjudicier" sur la façon dont les listes électorales sont maintenant représentées.

Si je soutiens, à la limite, l'argument que la seule valeur potentielle qu'on devrait retenir est au niveau non pas de la base de la population, mais simplement de la population électorale, je devrais dire, M. le Président, que, comme député, pour tenir compte du partage des comtés, il y a trois points importants: il y a ceux qui ont le droit d'être inscrits sur une liste électorale, il y a ceux qui font le processus nécessaire pour s'inscrire sur la liste électorale, donc, ceux qui sont inscrits, mais ceux qui sont inscrits ne représentent pas nécessairement tous ceux qui peuvent avoir la qualité d'électeur; troisièmement, il y a ceux qui votent. Si, à la limite, chaque électeur doit avoir un poids égal et qu'on doive se baser uniquement là-dessus, je dirai que la représentation des comtés, le partage des comtés au niveau des électeurs devrait se faire uniquement sur ceux qui ont voté. À ce moment, on devrait tenir compte uniquement de ceux qui ont voté si un veut un poids égal à l'électeur, parce que celui qui est sur la liste et qui n'a pas voté n'a pas plus de droit, n'a pas exercé un droit plus fondamental et ne mérite pas qu'on considère qu'il a un poids plus important que celui qui a le droit d'être sur la liste et qui ne s'est pas fait inscrire, à mon point de vue. Je parle, évidemment, de la limite extrême.

Alors, dans ce sens, si on veut regarder véritablement le poids égal d'un électeur, il faudrait donc regarder dans chaque comté, après chaque élection, combien de personnes ont voté et, à partir de là, dans les différents territoires que représente une délimitation territoriale, voir exactement qui pourra être considéré: uniquement celui qui a voté, le véritable électeur et non pas l'électeur sur la liste. Là, on arrive dans un processus absolument aberrant. Je pense que c'est beaucoup plus important que chaque citoyen ait un poids égal. C'est un peu cela, dans le fond, quand on dit qu'au niveau de la base de représentation, c'est l'ensemble des citoyens. C'est que chaque citoyen doit avoir un poids égal.

(11 heures)

Au niveau des régions, les citoyens, ce sont tous ceux qui participent à notre vie -je l'ai dit tantôt - non seulement politique, mais économique, sociale et culturelle. C'est dans ce sens qu'on doit refléter les besoins de la population et je maintiens que le rôle du député, fondamentalement, c'est de représenter l'ensemble des citoyens. Ce n'est pas simplement moi, comme député de Laprairie, qui le dis, je me suis basé là-dessus. Pour terminer mon intervention, je vous dirai que je n'ai jamais si bien compris le point essentiel que chaque député devait représenter son comté sur la base de la population que depuis que je suis député. Je m'en suis vraiment rendu compte à ce moment-là, à cause du travail que j'ai à accomplir.

Prenons l'exemple que donnait le Directeur général des élections tantôt en parlant du comté de Châteauguay où le ratio électeurs-population globale était de 0,59, tandis que, dans le comté d'Ungava, il était à 0,83, je pense, ou quelque chose comme ça. On parlait du comté de Lévis où il y a 53 000 électeurs; dans le comté de Laprairie que je représente, il y a environ 53 000 électeurs sur une population globale de 85 000 actuellement. Le ratio est de 0,61. Si je disais que, comme député, je représente seulement 53 000 électeurs, j'en laisserais tomber beaucoup.

Au niveau du mécanisme entre l'électeur et le citoyen, je suis d'accord qu'il y ait un certain ratio à respecter, mais je dirai quand même que le plus important pour un député, c'est la population globale qu'il va représenter: autant les jeunes, ceux qui ne sont pas encore devenus électeurs et qui le deviendront éventuellement, que ceux qui n'ont pas certaines qualités d'électeurs. Avec le temps, la population globale influence drôlement la vie dans un milieu donné. Ce n'est pas pour rien qu'on reqroupe des gens dans un territoire donné. C'est parce qu'il y a une certaine vie culturelle, sociale, économique qui se déroule. Ces gens viennent parce qu'ils y sont intéressés et ils y prennent activement part. Autrement, ce serait décourager des gens, en leur disant qu'ils ne sont pas vraiment des citoyens à part entière capables de participer à l'élaboration de certaines politiques gouvernementales.

Je termine sur cela, M. le Président, et j'espère que le député de Gouin pourra me faire part de ses réflexions en regard des propos que j'ai tenus. Je pense que je rejoins en partie certains des propos que lui-même a tenus. Je retourne l'argument parce que, à mon point de vue, certains des propos cités démontreraient davantage une représentation de la population qu'une représentation des électeurs.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Laprairie. Avant de céder la parole aux principaux intervenants, avec votre permission, j'aimerais vous faire part de certaines remarques, les plus restreintes possible et les plus personnelles sur le sujet. D'abord, je pense qu'il est absolument indubitable que le député, une fois élu, représente l'ensemble de la population de sa circonscription électorale. C'est clair. D'ailleurs, c'est tellement vrai que, comme députés, on représente ceux qui ont voté pour nous, ceux qui ont voté contre nous, ceux qui n'ont pas voté, ceux qui étaient inscrits sur la liste électorale, ceux qui ne se sont pas fait inscrire sur la liste électorale et qui avaient le droit d'y être et ceux qui ne se sont pas fait inscrire sur la liste électorale et qui n'avaient pas le droit d'y être. Le député représente toute la population de son comté; je pense que c'est clair et indubitable.

C'est normal parce que le député est le résultat, il ne faut pas l'oublier, d'un mécanisme d'exercice de la délégation de la souveraineté qui appartient au peuple. Les trois pouvoirs sont le pouvoir judiciaire, le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Si, dans notre système, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire découlent, d'une certaine façon, de la formation du pouvoir législatif, il demeure quand même que la souveraineté n'appartient qu'au peuple.

Il faut être bien conscient qu'une élection est déjà une contrainte au plein exercice de la souveraineté. Idéalement, on devrait réunir l'ensemble des citoyens québécois dans une même salle, leur demander de prendre des décisions concernant l'avenir de leur communauté. Évidemment, ce n'est pas possible et, à moins que notre taux de dénatalité continue à descendre de façon spectaculaire, je pense bien que ce ne sera jamais possible. À partir de ce moment-là, il faut se donner des mécanismes d'exercice de la souveraineté du peuple et une élection en soi est déjà une contrainte, un mécanisme qui restreint la pleine souveraineté du peuple.

Quand, comme législateurs, on a défini ce qu'était une élection, on a défini en même temps quelles étaient les qualités requises pour voter, on a défini ce qu'était une circonscription électorale. Ce matin, on s'attaque au sujet déterminé: de quelle façon devrait être délimitée cette circonscription électorale. Un comté en soi est déjà, également, une restriction à la pleine souveraineté du peuple. Pourquoi y a-t-il 9000 électeurs aux Îles-de-la-Madeleine et quelque 50 000 dans le comté de Laprairie ou dans celui de Lévis? C'est déjà en soi une restriction au principe du plein exercice de la souveraineté du peuple. C'est normal, parce qu'il faut que le peuple délègue sa souveraineté. À partir du moment où il y a délégation, il y a un mécanisme.

Depuis hier, nous sommes en train d'étudier une partie du mécanisme qui, déjà, restreint la souveraineté du peuple et qui s'appelle la délimitation des circonscriptions électorales. À partir de ce moment, il faut faire la distinction entre la façon dont le peuple exerce sa souveraineté et ce qui se passe une fois que le député est élu. Une fois que le député est élu, l'élection est terminée, le mécanisme est terminé. C'est la démocratie qui joue au maximum avec, évidemment, les restrictions qui sont normales. En ce sens, je pense qu'il nous faut tous autour de la table réaliser que la responsabilité du député est de représenter la totalité de la population. Mais ce principe n'a rien à voir ou a peu de chose à voir avec le principe ou le mécanisme que nous sommes en train d'étudier, celui de la délégation de ta souveraineté. À partir du moment où on parle de mécanisme, on parle de contraintes.

Pour aller encore plus au vif du sujet, dans ce cas-ci, un comté, c'est pourquoi? On fixe une limite géographique où les électeurs, un bassin électoral, un corps électoral, vont nommer un représentant. Déjà, c'est une contrainte, il faut s'en rendre compte, parce que, idéalement, tout le monde devrait choisir en même temps, mais cela n'aurait pas d'allure. Donc, le comté en lui-même, c'est la première restriction. La deuxième, c'est que les comtés ont des formes et des nombres. Il y a des gens qui peuvent aller voter et il y en a d'autres qui ne peuvent pas y aller.

Lorsque, comme législateurs, on a pris la décision d'accorder les qualités requises d'électeur à certaines catégories de personnes et pas à d'autres, c'est à ce moment-là qu'on a fait le choix de déterminer le corps électoral qui, lui, nous permet de déterminer le poids électoral de chacun des électeurs. Je pense qu'à ce moment-là ce serait intéressant, si on voulait continuer, de ramener la discussion aux qualités requises pour être électeur. C'est cela qui est le bassin électoral et qui entre à l'intérieur de l'ensemble du processus de la délégation de la souveraineté du peuple, plutôt que de prendre le principe que la population est souveraine, que le peuple est souverain et essayer de l'appliquer à l'une des parties du mécanisme qui, lui, s'enclenche au moment, encore une fois, de la détermination des qualités requises pour être électeur.

Ce qui compte dans tout le processus électoral, ce sont les qualités requises pour être électeur. Dans toute la loi électorale, on ne parle que de ceux qui ont le droit de vote; on ne parle pas de ceux qui ne l'ont pas. Si on veut en parler, qu'on retourne à la base de l'enclenchement du processus électoral, qui est l'article 50, je crois, peu

importe, qui définit quelles sont les qualités requises. C'est à partir de ce moment qu'on détermine le paramètre qui sert à l'ensemble de la Loi électorale, qui sert à l'ensemble de la délimitation des circonscriptions électorales. Encore une fois, cela ne change rien au fait qu'une fois que le mécanisme a fini d'être enclenché, que le député est élu, ce député répond à des obligations, à des responsabilités qui n'ont rien à voir avec l'élection, mais qui ont à voir avec ses responsabilités de délégué de la souveraineté du peuple.

Je pourrais ajouter bien des choses, mais c'est ma modeste contribution à vos débats de ce matin, en espérant que cela puisse créer un consensus.

Cela dit, je cède la parole au député de Gouin.

M. Rochefort; Oui, merci, M. le Président. Compte tenu de l'entente intervenue, j'imagine que c'est probablement ma dernière intervention sur cette recommandation de M. Rémillard.

Dans un premier temps, j'aurai un certain nombre de commentaires à faire à la suite de l'intervention du député de Laprairie. Ce dernier a tenté de nous convaincre qu'un député était là pour travailler pour tout le monde, au nom de tout le monde et que ce qu'il faisait concernait tout le monde. Tout le monde ici est d'accord avec cela. Personne ne met cela en doute et d'aucune façon les arguments qui ont été invoqués d'un côté comme de l'autre de la table n'ont pour but, pour effet ou n'auraient comme conséquence de remettre cela en question. C'est une "évidence évidente".

Cela dit, ce n'est pas à partir de là que cela doit fonctionner, mais à partir vraiment de la délégation de pouvoirs dans notre société. J'y reviendrai tantôt.

Le député de Laprairie a utilisé le rapport Grenier. Moi aussi, j'ai lu le rapport Grenier. Je dirai d'abord que c'est un rapport qui date de 1962, de 25 ans. Deuxièmement, ce rapport ne doit pas être lu à rebours, à partir d'aujourd'hui, pour aller voir ce que c'était à l'époque, il y a 25 ans, mais doit beaucoup plus être regardé en tenant compte de ce qui s'est passé auparavant. Il était l'aboutissement de quoi, le rapport Grenier? En ce sens, le rapport Grenier constitue un pas en avant majeur dans la démocratisation de nos institutions parce que le rapport Grenier a fait en sorte qu'on se préoccupe d'avoir des circonscriptions dont la taille soit comparable non pas au plan géographique, mais quant au nombre de personnes qu'elles regroupaient. Par rapport aux situations antérieures, par rapport aux mécaniques antérieures, c'était un rapport qui faisait un pas en avant.

Troisièmement, il faut reconnaître, pour quiconque l'a lu en entier - il ne faut pas en extraire trois ou quatre phrases qui font son affaire ou sur lesquelles on a porté son attention, mais lire le rapport Grenier d'un couvert à l'autre - qu'autant il est vrai que le rapport Grenier nous dit que cela devrait être la population, autant, tout au long du rapport Grenier, il y a une confusion absolue, totale entre l'expression "population" et l'expression "électeur". Je m'excuse, M. le député, mais c'est à un point tel que, si on veut comprendre le rapport Grenier dans l'ensemble des autres chapitres et des autres paragraphes qu'on y retrouve, il faut, dès le départ, qu'on accepte que "population" et "électeur" sont synonymes; sinon, ce rapport est incompréhensible. À l'occasion, on utilise le mot "population", à d'autres occasions, le mot "électeur", pour les mêmes fins, pour définir les mêmes choses.

Je le répète. Mise à part cette recommandation que je reconnais, d'utiliser la base de la population pour définir les comtés, si on n'accepte pas que "population" et "électeur" sont synonymes, on est incapable de comprendre ce que veulent nous dire le rapport et les commissaires membres de la commission Grenier. Je pense que c'est une donnée importante qui doit aussi être dite lorsqu'on nous cite à satiété le rapport Grenier qui, je le répète, date de 25 ans. Il doit être regardé non pas en fonction de ce qui se passe aujourd'hui, mais en fonction de ce qui se passait avant. Qu'est-ce qui avait donné lieu au rapport Grenier et que voulait corriger le rapport Grenier? Sauf erreur, le rapport Grenier n'a pas pour but de corriger ce qui s'est fait depuis ce temps, mais avait pour but de corriger ce qui était et de constituer un pas en avant par rapport à ce qui avait existé avant 1962 et non pas à partir de 1987.

J'ai écouté le débat avec beaucoup d'intérêt, hier, les arguments, etc. et je vais essayer de revoir modestement comment cela fonctionne. Que sont nos institutions démocratiques? Il y a à peu près 6 500 000 Québécois, Ce sont eux qui constituent 100 % de la population du Québec. Ce peuple, comme bon nombre d'autres peuples, a décidé que, pour prendre des décisions en son nom, que pour prendre des décisions qui affecteraient sa vie, que pour prendre des décisions qui orienteraient son développement, il y aurait environ 4 000 000 de personnes qui décideraient; ce sont les électeurs. Il y a eu déjà là une délégation, un transfert de pouvoir à 4 200 000 ou 4 300 000 personnes qui décident au Québec au nom de l'ensemble.

Deuxième donnée importante: ils décident sur quelle base? Sur la base de la majorité simple. Si vous êtes onze et que nous sommes dix, vous avez gagné, c'est réglé. Mais deux ne bat pas deux. Deux n'est pas plus fort que deux et huit n'est pas plus

fort que huit; cela prend une majorité. Il faut au moins un de plus d'un côté pour qu'un des deux groupes, sur n'importe quelle question dans notre société, voie son point de vue triompher. (11 h 15)

Troisièmement, ces quelque 4 000 000 de décideurs, de détenteurs d'un pouvoir délégué, ils sont tous sur le même pied. Quel que soit leur sexe, leur âge, leur profession, leur richesse, leur contribution fiscale, leur formation, leur langue, quel que soit le critère qu'on voudra utiliser, ils sont tous sur le même pied, ils ont la même force politique. Quand vient le temps de choisir un gouvernement, ils ont droit à un bulletin de vote, pas plus, pas moins fort que le bulletin de vote de n'importe quel autre des quelque 4 200 000 électeurs. Lorsqu'ils décident quelque chose, automatiquement ça concerne les 6 500 000 sans même se poser la question de savoir si, des fois, ça ne les concernerait pas tous ou si ça les concernerait tous. C'est automatique.

Évidemment, pour des raisons pratiques, on ne réunit pas trop souvent les 4 300 000 parce que c'est compliqué. On le fait deux fois: quand il y a des élections générales et quand il y a des référendums, des consultations populaires. Ce n'est pas le nombre de comtés qui a gagné au "oui" ou au "non" au référendum de 1980 qui a décidé de la victoire, c'est le nombre de votes exprimés en fonction d'une option par rapport à une autre. On n'a pas dit: Le "oui" a gagné dans 17 comtés et le "non" a gagné - faites l'addition - dans 105 comtés et, en conséquence, c'est le "non" qui gagne à 105 contre 17. Ce n'est pas vrai. On a dit: II y a eu plus de 2 000 000 d'un bord et plus de 1 000 000 de l'autre bord; ça donne comme résultat, puisqu'ils sont au moins un de plus d'un côté que de l'autre, que c'est ça qui a triomphé. Donc, chaque électeur, à l'occasion d'une consultation populaire, a un poids parfaitement équivalent, aussi fort, pas plus fort et pas moins fort que n'importe quel autre électeur, quelle que soit son origine, sa langue, son sexe, sa profession, sa richesse, sa contribution fiscale, sa religion. Pour les élections comme pour les référendums, ils ont tous le même poids.

Il n'y a personne dans la population électorale du Québec qui accepterait que son voisin soit plus fort que lui, pèse plus, dans la décision politique qui va être prise, que lui-même. Est-ce qu'il y a quelqu'un au Québec qui aurait accepté qu'un certain nombre de citoyens du Québec détiennent trois, quatre ou cinq bulletins de vote dans leur poche et que d'autres en détiennent juste un? Personne n'aurait accepté ça; il y a unanimité au Québec pour dire que c'aurait été profondément antidémocratique. Il fallait que tout le monde ait le même poids. Et après, on compte, et ça finit là. Tout le monde se rallie parce que le résultat est clairement démocratique.

C'est la même chose quand les quelque 4 000 000 disent: On va confier la permanence du pouvoir décisionnel temporaire sur quatre ans, la permanence du pouvoir décisionnel que nous possédons comme électeurs, à 122 personnes. Il n'y a pas un citoyen qui veut que le député de Laprairie ait plus de poids que le député de Saint-Louis, le député de Jonquière ou le député de Dubuc. Personne ne va accepter que le poids du député de Gouin, quand il se lève en Chambre pour voter, compte plus que le vote du député des Îles-de-la-Madeleine. Tout le monde veut s'assurer, parce qu'on délègue son pouvoir, qu'on va être 122 sur un pied d'égalité et, donc, que chaque citoyen aura autant de poids, pas plus, pas moins que son voisin ou que son vis-à-vis, pour peser dans la balance.

C'est ça, le fondement de nos institutions politiques et c'est ça, le grand principe de l'égalité du poids électoral qui a toujours été. Je défie qui que ce soit de me citer un cas de refonte de la carte électorale qui ne s'est pas fait sur la base de cette préoccupation dans les 25 dernières années. Chaque fois qu'il y a des problèmes, des pressions publiques, politiques, partisanes des formations politiques ou de députés pour changer la carte électorale, c'est pour dire: Ça va faire, je représente trois fois plus d'électeurs que le député d'en face et ce gars-là a autant de pouvoir que moi dans le processus décisionnel au Parlement. Ca s'est toujours absolument et parfaitement fait exclusivement et è 100 % à partir de cette préoccupation, de ce qu'on appelle les distorsions, les inéquités. Rien ne nous indique qu'il faut changer ça, bien au contraire.

Prenons deux autres références. Les États-Unis. On a des représentants qui, eux, représentent la population électorale, qui vont siéger au Congrès, ils sont élus pour deux ans. Bon. Tout le monde connaît la suite. Les sénateurs ne représentent pas les électeurs. Ils ne représentent même pas la population. Ils représentent les États parce qu'on a décidé que cela prenait deux niveaux de pouvoir législatif, un qui représente la population par tête de pipe, les représentants, et aussi parce qu'on veut que les États ne soient pas oubliés et ne soient pas défavorisés les uns par rapport aux autres.

Les petits États comme les gros ont tous deux sénateurs parce que c'était une donnée fondamentale de ceux qui ont bâti la constitution américaine et qui a fait consensus jusqu'à aujourd'hui, personne ne remet cela en question. Indépendamment du nombre d'électeurs ou de citoyens qu'ils regroupent, personne ne remet en question que les États, à la Chambre des sénateurs,

au Sénat américain, soient tous sur un même pied d'égalité. C'est clair et, en conséquence, on dit: C'est deux par État. C'est réglé parce qu'on veut aussi que les États aient une force politique dans la vie institutionnelle américaine,

De la même façon, dans la mesure où on aurait un mode de scrutin à la proportionnelle, plus il y aurait des grandes circonscriptions moins il y aurait de circonscriptions, à la limite, pas de circonscriptions comme en Israël. C'est clair que, sur la question qu'on se pose ce matin, i! n'y a pas de problème parce que chaque élu aurait le même poids politique. En Israël, les élus ont tous le même poids politique. On obtient 42 % du vote, on a 42 % des élus. On obtient 44 % du vote, on a 44 % des élus. Or, c'est la perfection totale, même mieux que nous autres du point de vue de notre préoccupation parce qu'on n'a pas la règle du plus ou moins 25 %. On sait, évidemment, mes positions sur ces questions à cause des problèmes d'autre nature, d'instabilité politique que cela crée et tout cela. Mais cela ne pose pas de problème. C'est parfaitement respecté, le poids par tête de pipe, un peu comme dans le cadre d'un référendum.

Si on décide que les députés ne reflètent pas seulement le nombre de têtes de pipe globales du Québec, mais représentent des coins du Québec, il faut bâtir ce qu'on appelle ces circonscriptions électorales pour savoir qui représente ici le député des Îles-de-la-Madeleine par rapport au député de Saint-Louis ou par rapport au député de Jonquière. Là, il faut diviser, un peu comme le président le disait tantôt, le Québec en comtés. C'est clair que cela prend des critères. On veut s'assurer en même temps tout aussi fortement, tout aussi solidement et tout aussi rigoureusement, qu'il n'y a pas un député ici qui va avoir plus de force qu'un autre quand va venir le temps de voter en Chambre sur quoi que ce soit.

Le premier ministre n'a pas plus d'importance quant aux votes que le député des Îles-de-la-Madeleine, que le président de la commission ou que le député de Jonquière. Il a un vote. Quand le secrétaire de l'Assemblée se lève, il a calculé le vote du premier ministre au même titre que le vote de n'importe quel autre député membre de l'Assemblée nationale. Donc, ce n'est pas un principe qu'on a sorti comme un lapin du chapeau d'un magicien. C'est fondamental, c'est ce autour de quoi on a toujours bâti les révisions de cartes électorales depuis 25 ans et c'est ce que, quant à nous, on va continuer d'utiliser pour délimiter des circonscriptions électorales.

Pour nous, M. le Président, cela constitue un recul important de ramener cela à la population parce qu'on va retourner à ce à quoi on s'est toujours opposé unanime- ment et consensuellement, libéraux comme péquistes, comme unionistes, comme créditistes, soit le poids des électeurs. Jamais, à l'occasion d'une refonte de la carte électorale au Québec depuis 25 ans, quelqu'un ne nous a dit: On est d'accord pour remettre en question le poids électoral de chaque électeur et on privilégie la notion de population.

En conséquence, cela constituerait pour nous un recul majeur inadmissible et auquel jamais nous ne souscrirons en termes de démocratisation de nos institutions. Je le répète: Si on doit retoucher à ces questions, c'est pour progresser. Il y a sûrement encore du progrès à faire, rien n'est parfait. Mais nous n'accepterons même pas de faire du sur-place et encore moins de reculer en la matière.

En conséquence, M. le Président, nous disons: Non, pour nous, le critère de la population n'est pas un critère démocratique, sûrement pas aussi démocratique que ne le serait et ne l'est le critère de la population électorale pour délimiter les circonscriptions électorales. Nous sommes profondément attachés aux acquis démocratiques car nous avons participé à leur élaboration et à leur mise en place. Nous souhaitons le maintien de la base électorale comme critère de délimitation des circonscriptions électorales. Nous considérons que le modèle québécois est le modèle a suivre et non pas le modèle fédéral. Quant à nous, c'est une situation vers laquelle nous ne souhaitons jamais évoluer comme cadre d'institution démocratique au plan de la délimitation des circonscriptions électorales.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Gouin. M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, je vais tenter, dans un premier temps, de relever un certain nombre d'affirmations qui ont été faites et d'y apporter des réponses. Je prends tout de suite note qu'il n'y a pas consensus. Je pense que c'est clair à la suite des propos du député de Gouin. Je le reqrette en le constatant, mais je suis loin de penser que ce que nous proposons était un recul. Au contraire, je maintiens qu'il s'agit d'une mesure qui aurait pu nous faire avancer et nous faire proqresser dans la plus grande démocratisation du processus d'exercice du droit de vote.

M. le Président, le député de Jonquière et le député de Dubuc, reprenant les propos du député de Gouin hier, ont dit, a la suite de la publication du rapport Rémillard, que personne n'était venu endosser la proposition quant à la base de la représentation. Effectivement, cela a peut-être semblé aller de soi pour ceux qui s'intéressent à ces choses compte tenu que toutes les études qui ont été faites depuis 1962 par le comité

Grenier arrivaient à la même conclusion. Je m'explique mal qu'on dise qu'il s'agirait de reculer, aujourd'hui, alors qu'on n'a jamais considéré la population globale comme base de la représentation.

Évidemment, même l'Opposition, après avoir été saisie de !a proposition du comité Rémillard, n'y a pas réagi. Effectivement, si le débat s'était engagé avant aujourd'hui, ce que moi-même je souhaitais, mais ce à quoi on a renoncé à la demande de l'Opposition, peut-être bien qu'on aurait pu faire ou entendre des représentations à l'appui ou à l'encontre. J'avais, d'ailleurs, proposé qu'on tienne une commission parlementaire pour consultation, soit générale, soit particulière. L'Opposition n'en sentant pas le besoin, j'ai acquiescé qu'on pourrait le faire entre nous. Je ne suis pas sûr que je ne le regrette pas aujourd'hui.

Le député de Gouin disait: La situation fédérale est une situation que nous ne voudrions jamais revivre, en alléguant le fait que la carte... Pas celle qui servira à la prochaine élection, le député de Gouin en conviendra, puisque, justement, on est à l'étape finale du processus de délimitation de la carte électorale. Donc, en vue de la prochaine élection, une nouvelle carte électorale devrait normalement être utilisée. Mais il est important de souligner que, s'il n'y a pas eu une nouvelle délimitation de la carte fédérale, c'est parce que le Parlement en a décidé ainsi. Il aurait pu y avoir au moins une révision de la carte électorale fédérale, mais le Parlement - et je présume qu'on a dû procéder, sinon à l'unanimité, sûrement par consensus - en a décidé autrement. (11 h 30)

En modifiant la loi en 1973, 1974, 1975, 1976, 1978, 1979 et, encore tout récemment en 1985, la redistribution des sièges était déjà commencée quand le Parlement l'a interrompue et a adopté la loi de 1985 sur la représentation électorale, entrée en vigueur en mars 1986. C'est là qu'on retrouve l'explication du long délai entre la confection de deux cartes électorales fédérales. Ce n'est pas à la base de la représentation qu'il faut attribuer la situation actuelle au gouvernement fédéral, mais bien à des décisions éclairées sans doute, mais démocratiques du Parlement du Canada.

On a fait état également des trop grandes variations ou distorsions qui pourraient exister si on devait adopter la population globale comme base de la représentation, le ratio population-électeurs. On pourrait pallier à cette inquiétude de l'Opposition tout simplement en ajoutant un nouveau critère à ceux qui servent à la délimitation, en spécifiant que le ratio électeurs-population devrait être pris en considération lors de la délimitation des circonscriptions. On le fait avec combien d'autres critères et en ajouter un nouveau permettrait de répondre aux interrogations de l'Opposition à ce sujet. Donc, il ne s'aqit pas d'une objection fondamentale à laquelle il n'existe pas de réponse.

Le député de Gouin a parlé du référendum et de l'élection en disant: Au référendum, on n'a pas compté le nombre de comtés dont la majorité était pour le oui ou pour le non. D'abord, je lui ferai remarquer que, si on compare un référendum en 107 ans avec des élections qui ont lieu normalement aux quatre ans, le moins qu'on puisse dire, c'est que la tradition référendaire n'est pas très implantée au Québec. Mais le fait demeure qu'il nous parle là d'un mécanisme. Dans le cas d'un référendum, il y aurait pu y avoir des conditions qui nous auraient amenés à vouloir identifier des tendances régionales. On aurait pu - d'ailleurs la loi du référendum le permet - spécifier que les résultats pourraient être comptabilisés pour fins décisionnelles, pour fins de consultation uniquement, pour fins d'information seulement à partir des circonscriptions électorales qui, elles, pourraient être délimitées sur la base de la population globale sans aucune espèce d'atteinte à la validité des résultats référendaires.

On a beaucoup parlé du pouvoir ou de ce que le député de Laprairie préfère appeler "le privilège" que les électeurs détiennent pour agir au nom de la population entière. On a parlé des 6 000 000 de citoyens québécois qui confient, qui délèguent à environ 4 000 000 d'électeurs l'exercice de leur souveraineté. Mais encore là, M. le Président, il s'agit là d'un mécanisme sur lequel on est d'accord, que personne ne remet en cause. Personne n'a suggéré qu'on élargisse ou qu'on rétrécisse la définition de l'électeur ou la façon pour cet électeur d'exercer son pouvoir ou son privilège.

Ce que ces électeurs ont, c'est le privilège ou le pouvoir d'agir au nom de la population, à partir d'une base qui devrait être la plus globale, la plus complète passible. L'élection elle-même - c'est M. le Président, je pense, qui le soulignait - est un mécanisme qui impose des contraintes à l'exercice de la souveraineté du peuple, mais il n'y a pas de nécessité que cet exercice ne se fasse pas sur la base de l'ensemble de la population. La base de la représentation ne fait pas partie du mécanisme. La base de quoi que ce soit ne fait pas partie des moyens, des outils qu'on utilise.

La Loi électorale, les dispositions quant aux listes électorales, ce sont là des outils qu'on s'est donnés pour permettre à la population globale de déléguer son pouvoir à des électeurs. Mais la base, elle, le fondement du système, c'est la population. Je constate que l'Opposition refuse qu'on aille jusqu'au bout de la démarche et qu'on fasse en sorte que l'ensemble des citoyens soit pris

en considération.

Pour revenir au fait qu'il n'y a pas eu de grandes représentations à l'appui de cette mesure, rappelons-nous que 25 ans, ce n'est pas tellement long. C'est seulement depuis 25 ans qu'on a commencé à agir dans ce domaine. Dieu sait qu'il n'y a personne qui suggère qu'on retourne 25 ans en arrière.

En fait, je ne voudrais même pas retourner 15 ou 16 ans en arrière, avant 1970, où il a fallu la collaboration du Parti québécois et du Parti libéral du Québec pour en arriver à abolir les comtés protégés. Qui s'était opposé à cette abolition des comtés protégés, qui était une entrave on ne peut plus complète à la possibilité de nous donner une représentation adéquate? C'étaient les gouvernements qui ont été là pendant un bon bout de temps.

Mais au moment de les abolir, de poser le geste à l'Assemblée nationale, la formation de l'Union Nationale s'y est opposée vigoureusement, farouchement. Comme cela prenait les deux tiers des votes des membres de l'Assemblée nationale pour en arriver à abolir les comtés protégés, cela a pris la collusion du Parti québécois et du Parti libéral pour en arriver à vaincre cette résistance traditionnelle et historique des gouvernements précédents et, notamment, surtout des gouvernements de l'Union Nationale jusqu'alors.

M. le Président, si on n'en a pas parlé beaucoup avant 1970, c'est un peu pour cela. Si, aujourd'hui, on se retrouve dans des situations où on a, depuis lors, utilisé la population électorale comme base de la représentation, je maintiens que c'est surtout, sinon seulement, à cause de raisons circonstancielles que j'évoquais hier, en ce sens qu'au moment où on a confié à la Commission permanente de la réforme des districts électoraux le soin de procéder à une nouvelle délimitation en 1971, le juge Drouin disait dans son rapport: On n'avait tout simplement pas les données du recensement de 1971.

M. le Président, j'en arrive tout simplement, en concluant, à constater qu'au principe du droit fondamental de toute personne d'être représentée à l'Assemblée nationale, qu'au principe de la délégation du pouvoir de décision de la population à ses représentants élus par l'intermédiaire de ceux qui sont électeurs, qu'au principe qu'on connaît bien aux États-Unis, de "no taxation without representation"... Dieu sait que ce ne sont pas seulement les électeurs qui sont taxés; les mineurs ou les gens de moins de dix-huit ans, les autochtones, les gens qui ne sont pas citoyens canadiens sont tous affectés par les taxes que nous décrétons à l'Assemblée nationale. Or en maintenant le système actuel, nous ne respectons pas ce principe: "no taxation without representation".

À ces trois principes, l'Opposition soumet qu'on doit parler de ce que le député de Gouin appelait hier le poids électoral équivalent...

Une voix: De chaque électeur.

M. Gratton: ...ce qu'il a aujourd'hui qualifié ou redéfini comme étant le qrand principe de l'éqalité du poids électoral. M. le Président, je ne vous cache rien en vous disant que je préfère d'emblée aller du côté du principe du droit fondamental de toute personne à être représentée à l'Assemblée nationale. En maintenant le système actuel, on prive un certain nombre de citoyens de ce droit fondamental au nom du principe de l'éqalité du poids électoral. Je le constate et je le regrette. Nous maintiendrons donc la base de représentation comme étant la population électorale jusqu'à ce que les esprits évoluent et que le temps soit mûr. Je pensais que le moment était mûr d'aller plus loin dans le processus de démocratisation. Ce n'est pas le cas. Alors, soit, je le constate et allons-y avec la périodicité de la délimitation.

M. Bélisle: Je suis convaincu que, dans cinq, sept, huit ans, la règle au Québec -peut-être que je ne serai pas là, que nous ne serons plus là - ce sera la règle du poids de la population. Vous serez obligés par la force des choses, surtout à cause du phénomène de la dénatalité, de reconnaître cette importance.

Une voix: Est-ce que ce sera à la livre ou au kilogramme?

M. Rochefort: Au-delà des prophéties, est-ce que vous me permettriez de constater qu'il n'existe pas de consensus sur la section 1?

M. Rochefort: M. le Président, je pense qu'il faut formuler cela comme le ministre l'a fait tantôt. Je serais parfaitement d'accord avec sa formulation de conclusion. N'ayant pas de consensus pour utiliser la population globale comme base de délimitation de la carte électorale, nous maintenons la population électorale comme base de délimitation des circonscriptions électorales. C'est ce qu'a dit le ministre. Je pense que la formule est parfaite.

M. Gratton: M. le Président, je ne voudrais surtout pas que cela porte à méprise et qu'on puisse interpréter de quelque façon que ce soit, de la part du parti ministériel, un appui au maintien. Je pense qu'on doit tout simplement constater qu'en vertu de nos mandats on doit dégager des consensus. Il n'y a pas de consensus sur

la proposition d'utiliser la population globale comme base de représentation.

M. Rochefort: M. le Président, le ministre maintient ses propos de tantôt et, en conséquence...

M. Gratton: C'est une conséquence, mais la constatation...

M. Rochefort: Non, parfait, on s'entend bien. J'ai dit que j'étais d'accord avec vos propos.

Le Président (M. Filion): M. le député de Gouin, M. le ministre, je me réfère à une des décisions qui ont été prises lors de notre séance de travail. Je la rappelle pour le bénéfice de tout le monde. Ce qui a été adopté c'est que les consensus qui seront dégagés lors de l'examen des propositions de réforme en matière de circonscription électorale, les 20 et 21, etc., seront inscrits formellement dans le procès-verbal de la commission. À ce moment-là, avec votre permission, est-ce que l'inscription qui sera faite au procès-verbal est la constatation par le président qu'il n'y a pas de consensus sur la proposition portant sur la base de la représentation? D'accord? Cela va, M. le ministre?

M. Gratton: Oui, M. le Président.

Le Président (M, Filion): Est-ce que cela va, M. le député de Gouin?

M. Marcil: C'est conforme au procès-verbal, aux ententes préétablies entre les deux formations.

Le Président (M. Filion): Vous êtes d'accord, M. le député de Gouin?

M. Rochefort: Oui, M. le Président, y compris sur l'ensemble des propos de conclusion tenus par le ministre.

Le Président (M. Filion): À ce moment-ci, j'attire donc l'attention des...

M. Rochefort: C'est un homme précis.

Une voix: II y a la "pusillani...té". (11 h 45)

La périodicité de la délimitation

Le Président (M. Filion): II n'y a que le député de Terrebonne qui est capable de dire cela comme il faut. À ce moment-ci, je vous réfère donc au chapitre 2, la fréquence de la délimitation ou la périodicité de la délimitation, comme on veut. Selon le texte de base du rapport, "Au Québec, une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales est obligatoirement entreprise après chaque élection générale." Vous aurez compris que cette lecture a pour but de bien situer le débat. "Ailleurs au Canada, cette périodicité varie: dix ans au fédéral, au Manitoba, à Terre-Neuve, huit ans en Saskatchewan et après deux élections générales en Alberta et en Colombie britannique. Malgré cette fréquence plus grande au Québec, en pratique, les modifications importantes à la carte électorale n'ont eu lieu qu'à toutes les deux élections, soit aux huit ou neuf ans, tel qu'en témoigne l'expérience passée. L'hypothèse de réduire la fréquence de la délimitation des circonscriptions électorales n'est pas nouvelle. En 1978-1979, il avait été suggéré d'opter pour une périodicité décennale. Le Directeur général des élections se montrait lui-même ouvert à cette idée en 1985 lors de l'étude de ses crédits lorsqu'il déclarait que cette suggestion "assurerait une certaine continuité de la carte et des changements moins fréquents." Il nous paraît donc souhaitable de porter à dix ans l'intervalle entre les délimitations de la carte électorale et de faire coïncider cette opération avec la tenue du recensement fédéral décennal."

Les questions qui sont posées dans le document de travail qui vous a été remis sont: "La périodicité de la délimitation des circonscriptions fédérales doit-elle être modifiée? Si oui, la délimitation des circonscriptions électorales ne devrait-elle pas être effectuée tous les dix ans, soit au lendemain du recensement fédéral décennal?" Je laisse donc la parole à M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, les deux questions, évidemment, sont intimement liées à l'élément premier, soit la base de la représentation, parce qu'effectivement, si nous avions obtenu un consensus pour utiliser la population globale comme base de la représentation, il aurait fallu nécessairement, à cause des mécanismes, à cause des outils qui auraient changé, c'est-à-dire recensement décennal plutôt que liste électorale, procéder à des modifications à la périodicité. La base de la représentation ne changeant pas, évidemment, la question ne se pose plus dans les même termes. Cependant, rappelons les deux objectifs que poursuivait le rapport, c'est-à-dire celui de pousser plus avant la démocratisation du processus de délimitation tout en conservant, cela va de soi, les acquis, il y avait également l'objectif de réduction des coûts. Nul doute que le fait que nous ayons l'obligation de procéder à la délimitation de la carte électorale après chaque élection implique des coûts non seulement du fait que cette délimitation doit être faite tous les quatre ans plutôt que tous les dix ans ou tous les huit ans, comme c'est le cas partout ailleurs au Canada, mais aussi

parce que c'est probablement l'élément majeur qui nécessite, j'Imagine, dans une grande mesure, le caractère permanent de la Commission de la représentation.

Je sais que le député de Gouin, parce qu'il m'en a informé, avait demandé au Directeur général des élections de se pencher sur les coûts qui sont impliqués. On sait qu'à diverses reprises, lors d'auditions du Directeur général des élections sur ses prévisions budgétaires, on a essayé de cerner combien il en coûtait pour les travaux afférents à la Commission de la représentation. Depuis l'intégration des diverses fonctions électorales au sein du bureau du Directeur général des élections, il est impossible, à l'étude des crédits ou même à l'examen des prévisions budgétaires du DGE, de statuer très exactement sur les coûts qui sont spécifiquement affectés aux travaux de la Commission de la représentation. Si les membres de la commission étaient d'accord, on pourrait peut-être interroger le Directeur général des élections; l'information qu'il pourrait nous transmettre nous permettrait d'avancer non seulement en ce qui concerne la fréquence de la délimitation, mais également en ce qui concerne d'autres questions que nous poserons en cours de route.

Le Président (M. Marcil): M. le député de Gouin.

M. Rochefort: II est juste que j'avais demandé au Directeur général des élections de préparer, pour la présente commission, l'état des frais reliés aux travaux de la Commission de la représentation, incluant les frais permanents qui sont attribués à son bureau comme Directeur général des élections. Cela étant dit, quant à l'ordre des travaux, je suis d'accord avec la proposition du ministre. Si je comprends bien, compte tenu des préoccupations importantes du gouvernement sur la question des coûts, on essaierait de faire le tour complet de la question des coûts pour que ce soit réglé, pour le reste.

M. Gratton: C'est cela.

M. Rochefort: Je suis d'accord, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Cela va?Donc, on va demander au Directeur général des élections de donner les renseignements pertinents aux questions posées par les deux partis.

M. Côté (Pierre-F.): Oui, M. le Président. Au préalable, on me permettra, puisque je viens de comprendre qu'on voudrait discuter de l'ensemble de cette question, de rappeler certains points se rapportant à la dernière question, en fait, de ce document, celle des rapports. Je pense qu'il est important de se rappeler d'abord que, dans la Loi sur la représentation électorale, il n'y a pas de disposition précise stipulant qu'il doit y avoir un rapport des dépenses et des coûts qui découlent des activités de la Loi sur la représentation électorale. Qu'on se propose d'en inclure, je dis tout de suite que, pour ma part, je serais très heureux que cela se fasse. Cependant, je voudrais vous souligner que, malgré qu'il n'y ait pas de disposition à cette fin, depuis l'intégration de l'administration du système électoral en 1983, j'ai compris que la signification à donner aux articles 483 et suivants de la Loi électorale oblige te Directeur général des élections à soumettre des prévisions budgétaires et à remettre un rapport préliminaire. J'ai compris qu'à l'égard de l'administration de tout le système électoral, il est nécessaire de faire état de prévisions budgétaires et de rapports financiers qui englobent toute l'administration dont j'ai la responsabilité.

En conséquence, depuis 1983, ce qui est remis à tous les membres de l'Assemblée nationale, c'est un rapport financier préliminaire ainsi que des prévisions budgétaires. Il y a également, dans le rapport annuel, un rapport intégré des dépenses. Dans ces prévisions budgétaires et dans ces rapports financiers préliminaires, depuis trois ans ou quatre ans, on retrouve toujours des détails concernant la Commission de la représentation. J'ai devant moi tous ces rapports, si jamais vous voulez qu'on précise. Depuis plusieurs années, même s'il n'y a pas d'obligation, dans la Loi sur la représentation électorale, j'ai cru qu'il était dans la logique de l'intégration de faire part de ces dépenses aux membres de l'Assemblée nationale et de leur faire part des prévisions budgétaires. Donc, on les retrouve depuis quelques années.

Une des raisons pour lesquelles j'ai cru qu'il fallait que ce soit présenté, même si ce n'était pas exigé par la loi, donc, dans les rapports financiers, les prévisions budgétaires et dans le rapport annuel, en plus des comptes publics, c'est que l'article 22 de la Loi sur la représentation électorale stipule que le personne! du Directeur général des élections est à la disposition de la Commission de la représentation. Il y a d'autres articles de la Loi sur la représentation électorale qui nous amènent à effectuer certaines dépenses, comme l'article 12 et l'article 26 sur l'information qui doit être donnée et la diffusion qu'on doit faire à la suite de l'adoption d'une nouvelle carte électorale. L'article 27 parle de la tournée d'information qu'on doit faire et l'article 19 dit que la commission peut retenir les services de toute personne; par exemple, elle peut retenir les services d'une agence de

publicité pour diffuser l'information.

Or, à quoi se résume la majeure partie des coûts de la commission? Elle se résume aux honoraires des commissaires et aux frais de communication, de publicité, de diffusion et d'impression du rapport. Les autres frais, car il y a d'autres frais pour les travaux qui sont effectués, sont intégrés dans les travaux que fait le personnel du Directeur général des élections.

Que l'on demande è l'avenir qu'il y ait un rapport distinct et détaillé, je l'ai mentionné au départ, pour ma part, je n'y vois, évidemment, pas d'objection, parce que j'ai toujours eu comme principe - et j'ai l'intention de continuer - que l'administration du système électoral soit ouverte et disponible. Quant à moi, on n'a rien à cacher. Cependant, cela voudrait dire la contrainte suivante que je voudrais vous préciser, contrainte que, si c'est votre désir, on assumera. Cela voudrait dire que le personnel chez nous, qui occupe des fonctions diverses, devra à l'avenir - je vais vous donner des exemples concrets - tenir un compte rendu détaillé du temps qu'il met, par exemple, pour travailler à la Loi sur la représentation électorale, du temps qu'il met à travailler pour l'application de la Loi sur les élections dans certaines municipalités, du temps qu'il met à travailler pour l'application de la Loi électorale, par exemple, pour l'établissement des sections de vote. Cette situation découle de l'intégration.

Cela signifie qu'il est très difficile d'identifier de façon - sauf pour un certain nombre - très spécifique les employés qui travaillent uniquement pour les fins de la Loi sur la représentation électorale. Par exemple, les gens du contentieux travaillent également pour l'application du titre VII du financement. Les gens des communications travaillent également pour le scrutin et le financement. Les gens des services auxiliaires travaillent également pour ces deux autres responsabilités. Les gens de l'organisation et méthode de la recherche... Tous les services chez nous - c'est comme cela qu'est comprise l'intégration, c'est comme cela qu'on fait l'administration électorale - sont au service de trois grandes responsabilités qui sont les nôtres: celle du scrutin, celle du financement et celle de la représentation.

Si on nous demande des états financiers plus détaillés et distincts, je pose la question: Si on veut être logique, il faudrait peut-être qu'on fasse la même chose pour les autres responsabilités, à un moment donné. Si vous demandez aujourd'hui qu'on vous donne un rapport détaillé et distinct des travaux que font les employés pour la représentation électorale, je pense qu'il faudrait - c'est juste une réflexion, mais je dépasse un petit peu les cadres de la présente étude - un jour pousser la logique aussi loin et aller jusqu'à dire qu'il faudrait qu'on ait chez nous des feuilles de temps qui démontreraient qu'un membre du contentieux a travaillé deux heures au dossier de la représentation, qu'il a travaillé trois heures à l'application du titre VII, qu'il a travaillé quatre heures à une autre responsabilité. Ce n'est pas impossible de le faire, mais cela veut dire des rapports financiers et l'état de notre situation qui seraient morcellés tout en ayant une administration intégrée.

Comme je vous le dis, je veux juste vous présenter le problème. Ce n'est pas une objection de ma part, c'est une remarque, une observation que je fais. Je trouve juste la remarque qui est faite, à savoir qu'il n'y a pas d'exigence formelle - évidemment, ce n'est pas dans la loi - à ce qu'on fasse ces rapports, mais je dois souligner qu'ils ont quand même été faits jusqu'à maintenant et que vous disposez de plusieurs occasions, je pense, de pouvoir m'interroger ou vous interroger sur ces dépenses ou ces prévisions que l'on fait à l'occasion des prévisions budgétaires et aussi dans le cadre de l'application d'un article de votre règlement qui dit que vous pouvez nous convoquer au moment où vous le jugez à propos. (12 heures)

Cela étant dit, j'ai certains chiffres qui peuvent peut-être vous éclairer sur les coûts pour les années antérieures et aussi sur les effectifs. Je voudrais commencer par établir de quelle façon on peut approximativement, présentement, parler d'un partage de responsabilités ou de répartition. Mais ceci est absolument approximatif parce que cette méthode de comptabilisation n'est pas systématique chez nous. C'est une approximation à cause, justement, de cette intégration administrative. Ce que je vais vous donner, c'est une approximation du nombre de personnes qui - si je peux retrouver mon document - sont appelées à travailler de façon plus spécifique à la Loi sur la représentation électorale. Je vous demande juste une minute, M. le Président, pour retrouver le bon document et vous donner ce chiffre.

Si on veut faire ce partaqe concernant le personnel, le temps de travail - et je tiens à préciser que ce n'est qu'une approximation - qui est requis dans le cadre de la Loi sur la représentation électorale, actuellement, cela requiert a temps plein des travaux pour douze employés. Évidemment, vous savez comment se font ces calculs. Cela se fait en termes de personnes-années. Alors, ce n'est pas formellement douze noms que je peux vous donner. C'est en termes de personnes-années.

Quant aux autres personnes des services auxiliaires, des communications, du contentieux, de la gestion financière, d'organisation et méthode, de la recherche, en termes encore de personnes-années, on arrive à la conclusion, par exemple, que ce

sont plusieurs personnes, mais cela peut représenter un employé à temps plein plus deux mois, Bon, alors, à temps plein pendant une année donc, c'est pour quatorze mois.

Mon adjoint me signale un point qui peut être important, Ce que je viens de vous donner comme chiffres, c'est la projection que l'on fait pour l'année 1987, si nous accomplissons le travail de la prochaine carte électorale. Si on regarde, par exemple, l'allocation... Oui?

M. Rochefort: Recommencez cela comme il faut, je veux être sûr d'avoir bien compris.

M. Côté (Pierre-F.): Quand j'ai parlé de douze employés, par exemple, tout à l'heure, c'est le nombre requis de personnes-années ou d'employés si on effectue le travail à partir des prochains mois. Si, par exemple, on regarde le travail qui a été fait l'an dernier, il n'y a pratiquement pas eu de travail de fait. On n'avait pas à effectuer des travaux. Cela représente trois personnes-années pour l'an dernier. On peut essayer de remonter comme cela pour les autres années, mais cela vous donne un aperçu du personnel requis.

Quant à requérir les services d'autres personnes ou des services ailleurs pour accomplir ce travail, il n'a pas été nécessaire de le faire ni en 1981 ni en 1985 pour les deux derniers rapports que nous avons déposés sauf, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, dans le cas de requérir les services d'une firme de publicité. Alors, il y a des frais d'information. Si vous me le permettez, je vais m'informer si on en a eu d'autres de cette nature, mais je ne le crois pas. Je vous donne cela sous réserve, mais on me donne l'information qu'il n'y en a pas eu d'autres. Par exemple, on n'a pas engagé de spécialistes de l'extérieur, on n'a pas engagé d'autres personnes, ni requis, non plus, les services d'autres ministères, d'autres organismes ou institutions. Le personnel qui est chez nous suffit à la tâche.

Je vous ai signalé également que ce même personnel peut - enfin, j'insiste là-dessus également - lorsqu'il n'effectue pas ce travail, effectuer d'autres tâches. Par exemple, ces temps-ci, ce qui nous demande passablement de temps et de responsabilités, c'est du travail dans le cadre de la Loi sur les élections dans certaines municipalités. L'an dernier, en particulier, cela a été une période assez considérable parce que c'est l'année qui précédait le changement des districts électoraux municipaux pour un grand nombre de municipalités. Cette année, on prévoit avoir un peu moins de travail dans ce domaine.

Il y a aussi certaines catégories d'employés... Je peux vous dire en quoi consiste ce personnel. C'est du personnel qui, chez nous, est à la division territoriale. Ce sont des professionnels, du personnel de bureau, des techniciens, du personnel dans le domaine cartographique. Encore là, il y a un professionnel et des techniciens. Ceux-ci travaillent également à l'établissement des sections de vote dans l'application de la Loi électorale et à un travail qu'on a entrepris avant les dernières élections générales concernant les ressources institutionnelles pour savoir quels endroits il serait plus approprié d'utiliser à des fins électorales, soit pour les bureaux des directeurs du scrutin, les bureaux de votation, les bureaux de dépôt ou les bureaux de scrutin, évidemment. C'est un travail qui a été fait par ce personnel.

Comme coûts, qu'est-ce que cela représente cette évaluation, cette approximation du nombre d'employés? On a établi la moyenne des salaires qui doivent être payés chez nous, On va vérifier si ma moyenne est exacte. Mais si je ne me trompe pas, de mémoire, c'est une moyenne de 28 000 $. Par exemple, un professionnel peut être payé plus cher qu'une secrétaire, mais c'est de 28 000 $ à 30 000 $. Pour les treize employés dont j'ai parlé tantôt, soit les douze plus un et deux mois, en salaires, cela représente 391 714 $. Évidemment, c'est basé sur une année de travail.

Des voix: Combien?

M. Côté (Pierre-F.): 391,714 $ Évidemment, ce même personnel, comme je l'ai mentionné tantôt, effectue également d'autres travaux. Il effectue des travaux pour la Loi sur les élections dans certaines municipalités et la Loi électorale.

Le Président (M. Marcil): M. le ministre.

M. Gratton: M, Côté, je voudrais qu'on se comprenne. Vous nous avez dit tantôt dans vos approximations de personnel que, si vous procédiez au travail, ce serait l'équivalent de 12 ou 13 employés, en fait 13,2 employés, qui seraient affectés, en termes de personnes-année à la délimitation des circonscriptions électorales. Par contre, vous venez de nous dire que, s'ils ne procèdent pas à ce travail ou même dans le cours de ces travaux, ils peuvent faire autre chose. Est-ce que je dois comprendre que, si on y procède, les 13,2 employés vont être spécifiquement affectés à la délimitation et ne feront pas d'autres travaux? Ils pourraient, à titre d'individus, être affectés ailleurs, comme vous l'avez expliqué, mais le nombre de 13,2 personnes-années représente vraiment un coût attribuable directement à la délimitation électorale.

M. Côté (Pierre-F.): Oui, mais, M- le ministre, je voudrais être bien clair sur un point. On pourra vous le dire de façon formelle et précise après qu'on aura effectué les travaux parce que ce genre de comptabilité n'est pas établi. C'est pour cela que j'ai apporté une nuance là-dessus. Par exemple...

M. Gratton: Je m'excuse, M. Côté. M. Côté (Pierre-F.): Je vous en prie.

M. Gratton: J'ai compris tout cela, mais je veux, au moins, comprendre quand vous me parlez de 13,2 personnes-années. Si on procède en 1987 au travail de délimitation, c'est vraiment 13,2 personnes approximativement. On pourrait peut-être, quand on aura fait l'exercice, si jamais on le fait, se retrouver à 5 personnes-années ou à 20 personnes-années, mais dans l'hypothèse où c'est approximativement 13,2, c'est 13,2 pour la délimitation et non pas pour la délimitation et d'autres choses.

M. Côté (Pierre-F.): C'est exact, ce que vous dites.

M. Gratton: D'accord, merci.

Le Président (M. Marcil): Si on a bien compris, 13,2 personnes-années, c'est pour le travail de la délimitation, c'est cela?

M. Côté (Pierre-F.): C'est cela.

M. Gratton: Me permettrait-on, M. le Président, de continuer? Donc, j'en conclus que vous nous dites que, si on ne procède pas en 1987, c'est environ 3 personnes-années.

M. Côté (Pierre-F.): Je m'excuse, ce n'est pas cela que j'ai mentionné tout à l'heure. Bien oui, cela peut revenir à cela parce que, l'an dernier, c'est ce que cela a pris. Si on l'appliquait, oui, cela pourrait revenir au même.

M. Gratton: Je conviens qu'on parle de façon très théorique. On n'a aucune indication et on ne vous prête surtout pas l'intention de nous dire qu'il s'agit là de données très exactes.

M. Côté (Pierre-F.): Non, mais, si vous le permettez, M. le ministre, seulement une précision: par exemple, supposons que les travaux commencent bientôt, il est évident que ce personnel sera affecté de façon plus intense à la tâche pendant les premiers mois avant d'en arriver à la proposition d'une carte. Pendant la tournée que la commission fait, ils sont encore au travail, mais il y a des périodes où ils sont un peu plus libres et où ils peuvent faire autre chose.

M. Gratton: S'il y en a 13,2 approximativement si on procède et qu'il y en a 3 seulement si on ne procède pas, il en reste 10 environ qui sont affectés par la périodicité, parce que, là, on parle de cela; on ne parle pas de la question à savoir si la commission doit être permanente ou non.

M. Rochefort: On fait toute la discussion sur les coûts qui serviront à l'ensemble des autres questions.

M. Gratton: Oui, toute la discussion sur les coûts...

M. Rochefort: Oui, oui, cela va.

M. Gratton: ...mais moi, je voudrais me limiter, dans le cadre de ma question, à constater qu'il y a donc une dizaine de personnes-années qui sont affectées par la périodicité.

M. Côté (Pierre-F.): Me permettriez-vous une autre précision, M. le ministre? Je l'ai précisé tout à l'heure, je pense que c'est important: quand on établit, par exemple, une dizaine de personnes, c'est dans le cadre - et je veux être bien clair là-dessus - d'une administration intégrée. Si jamais cette responsabilité était assumée par une autre organisation, il faudrait voir de quelle façon, pour un certain nombre - là je vous parle des douze, mais il y a aussi la personne-année et quelques mois - on répartit l'organisation, par exemple: les services administratifs, les services financiers, le contentieux. Il est possible de soustraire une personne du contentieux quelques heures pour l'affecter à cela. Si je reprends, par exemple, ce qui existait avant l'intégration -ce que je veux mentionner, c'est cela - il y avait nécessité d'avoir, par exemple, un service d'information propre à I'orqanisation telle qu'elle existait. A ce moment-là, en se basant sur l'expérience antérieure, je pense que cela voudrait dire plus de personnes requises. (12 h 15)

M. Gratton: Je conviens de cela, mais dans la mesure où je me limite pour le moment à tenter de cerner l'implication des coûts par rapport à la périodicité, je dis simplement: Si on la faisait moins souvent, évidemment, cela coûterait moins cher. Je ne peux pas imaginer, si on la faisait aux deux élections plutôt qu'à chaque élection, que tout ce monde serait nécessaire pour faire un travail une fois aux huit ans plutôt qu'une fois aux quatre ans, quelles que soient les formules qu'on emploie: qu'on aille emprunter des fonctionnaires dans d'autres ministères, qu'on fasse appel à l'expertise qui existe ailleurs ou qu'on mette à contribution des

gens du bureau du Directeur général des élections, qui n'ont rïen à voir, de façon permanente, avec la Commission de la représentation. Bref, il y a moyen d'envisager des économies de coûts si on procède moins souvent.

Je voudrais essayer de cerner un ordre de grandeur. Je parle de dix personnes-années ne.t annuellement pour chaque année pendant laquelle on ne fait pas de délimitation. Vous nous parlez d'une moyenne de 28 000 $ à 30 000 $. J'aurais plutôt été enclin à parler de 35 000 $ à 40 000 $ en y incluant les avantages sociaux et les coûts d'échelle. Je ne sais trop quel jargon on emploie pour en arriver à déterminer le coût réel d'une personne-année dans ta fonction publique.

Ces sommes, je les situe à - vous nous parlez de 391 000; à dix, cela ferait un peu moins - 400 000 $ ou 500 000 $. Je ne suis pas en train d'essayer de l'établir de façon très précise, puisqu'on marche avec des approximations.

Je présume que je dois ajouter cela aux sommes qui sont dans les prévisions budgétaires et qui ne sont pas pour la rémunération du personnel. Notamment, par exemple, dans vos dernières prévisions budgétaires, on parlait d'un total de 202 000 $ dont la moitié, environ, aux communications, le quart aux services et le reste en fournitures et aux dépenses...

M. Côté (Pierre-F.): Excusez, M. le ministre. Je voudrais juste retrouver le document que vous utilisez.

M. Gratton: Prévisions budgétaires du Directeur général des élections, 1986-1987, en page 6, administration du système électoral. Variations par catégories au niveau du programme 3, personnes désignées par l'Assemblée nationale, élément 2, Commission de la représentation électorale. Alors, en 1985-1986, c'était 245 000 $. Cette année, c'est 202 000 $. Donc, j'en arrive, en ajoutant 200 000 $ à 400 000 $, à 600 000 $ ou 700 000 $.

Par contre, quand j'étudie le rapport du comité technique d'évaluation des institutions et organismes reliés à l'administration des lois électorales de septembre 1982, à la page 56, on retrouve la synthèse des dépenses réelles de la CRE pour les deux derniers exercices financiers. On constate qu'en 1980-1981, avant l'intégration, de la Commission de la représentation au bureau du Directeur général des élections, le budget était de 2 796 000 $. En 1981-1982, ce budget était de 1 972 000 $. On voit qu'en 1980-1981, avant la délimitation de 1981, cela frisait les 3 000 000 $. Dois-je conclure qu'on aurait théoriquement réalisé des économies de 700 000 $ ou 800 000 $ par le seul fait d'intégrer la CRE au DGE?

M. Côté (Pierre-F.): On a, évidemment, réalisé des économies, mais pas tout à fait de la façon dont vous le calculez, parce que, dans les chiffres que vous avez évoqués tout à l'heure, pour les prévisions budgétaires de 1986-1987, les montants que vous avez cités de 245 000 $, évidemment, ce sont des prévisions. Il faudrait vérifier ce qui a été dépensé effectivement. Cela ne couvre pas les salaires des employés. Les salaires des employés apparaissent dans la section des prévisions du Directeur général des élections parce que la commission n'a pas d'employés.

M. Gratton: C'est ce que je disais.

M. Côté (Pierre-F.): C'est cela. Dans les coûts que vous avez évoqués tout à l'heure - je vous les donne de mémoire, quitte à les vérifier de façon plus précise -de 2 000 000 $ et 1 000 000 $ et quelques en 1980-1981, évidemment, la grosse part de ces montants, ce fut le travail effectué pour la carte de 1981. Je n'essaie pas de justifier ou d'expliquer tout ce qui s'est passé à cette époque-là, mais je veux juste vous rappeler que cela s'est fait dans une période très courte, avec des exigences de communication assez fortes qui venaient de la part de membres de l'Assemblée nationale. Cela a été la grosse partie. On a dépensé près de 1 000 000 $ à l'époque simplement pour informer la population. C'était la grosse partie des dépenses. Si on regarde la part des salaires des employés, ce n'est pas là qu'a été le plus gros coût à cette période, en 1980-1981.

Cependant, je veux ouvrir une petite parenthèse juste pour vous signaler notre préoccupation à cet égard; je vous ai fait part qu'à la suite des demandes, il y a quelques mois, du Conseil du trésor, on a procédé à une diminution des effectifs chez nous, en particulier, par exemple, l'an dernier. Parce qu'il n'y avait pas de responsabilité sur le plan de la carte électorale, cela nous a amenés, pour l'année courante, à diminuer un peu le nombre d'employés permanents chez nous, dans le cadre des compressions budgétaires. J'ai ouvert cette parenthèse; je ne sais pas si elle répond bien à votre question, M. le ministre.

M. Gratton: Cela va. Je ne sais pas s'il y a d'autres questions de l'Opposition.

M. Rochefort: M. le Président, j'avoue que j'aimerais mieux qu'on...

Le Président (M. Marcil): M. le député de Gouin, vous avez la parole.

M. Rochefort: Oui, mais c'est au ministre que je veux m'adresser.

M. le Président, je préférerais qu'on

revienne à !a façon dont on doit faire la discussion. Est-ce qu'on fait le tour de tous les coûts, sous toutes leurs facettes, dont on pourra se servir dans le document? Tantôt, j'avais compris qu'on faisait la discussion sur tous les coûts et dans son intervention, le ministre dit: Pour l'instant, c'est la question de la fréquence qui m'intéresse.

M. Gratton: M, le Président, on peut poser des questions particulières; j'en aurai d'autres, tantôt, sur les coûts.

M. Rochefort: Je comprends que, depuis hier, vous montrez clairement que vous avez une préoccupation légitime. Au-delà des questions et réponses auxquelles on a eu droit de la part du ministre et du Directeur général des élections, j'aimerais voir plus et mieux la nature des préoccupations du ministre. Y a-t-il d'autres coûts-problèmes, d'autres éléments, selon le ministre, qu'on doit prendre en considération maintenant pour faire le tour de la question des coûts?

M. Gratton: L'objectif que je vise, c'est de tâcher de savoir combien il en coûte au gouvernement.

M. Rochefort: Vous n'avez pas d'étude, de votre côté, qui vous amènerait à la conclusion que c'est cher ou que ce n'est pas cher, des choses comme cela.

M. Gratton: Je n'ai pas d'autres données que celles qui ont été fournies par le Directeur général des élections.

M. Rochefort: Par exemple, ce qu'on retrouve dans le rapport Gobeil. Dans ce rapport, on fait allusion aux coûts générés par l'administration de nos différentes lois électorales. Est-ce que c'est une affirmation qui s'arrête là ou si M. Gobeil vous a fourni des données vous permettant... On n'a pas de données de M. Gobeil là-dessus? D'accord. Cela va.

M. Gratton: Non, en vertu du fait que le Directeur général des élections est une personne désignée, il n'a pas à répondre au Conseil du trésor de son administration.

M. Rochefort: Mais vous n'avez pas de chiffres.

M. Gratton: Effectivement, les seuls chiffres dont je dispose sont ceux que nous fournit le Directeur général des élections. Ils nous ont, d'ailleurs, été fournis de façon approximative dans le passé à l'occasion de rencontres semblables à celle d'aujourd'hui.

M. Rochefort: Deuxièmement, on s'entend qu'on fait toute la discussion sur les coûts et, par la suite, on reprendra les élé- ments qui nous intéresseront selon les différents points. J'aimerais d'abord savoir du Directeur général des élections s'il a en sa possession des données - si cela existe, j'aimerais qu'on puisse y avoir accès - par exemple, quant à ce que cela coûte au fédéral. Je sais qu'au fédéral il y a dix commissions, une par province, et, en plus, il y a les services du Directeur général des élections, M. Hamel. Pour avoir déjà un peu pataugé dans cela, on sait qu'on s'y réfère souvent en disant que cela ne coûte pas cher mais, quand on gratte un peu, on s'aperçoit qu'il y a des gens permanents aussi chez M. Hamel. Est-ce qu'on a des données pour pouvoir, justement, établir une relation, relativiser les coûts du Québec? Est-ce qu'on a des données là-dessus?

M. Côté (Pierre-F.): Il va de soi qu'on s'est également posé cette question, parce que c'est une comparaison qu'on fait assez facilement. On a essayé d'obtenir des informations. Par exemple, une chose assez surprenante, seulement pour mentionner un fait récent: les commissions qui ont existé... Vous savez qu'avant la date qu'a mentionnée le ministre tout à l'heure - c'est en 1984, je pense, qu'il y a eu des changements - il y a eu un rapport d'un certain nombre de commissions qui ont existé et il y en eu de nouvelles de créées avec le chanqement de gouvernement. L'information qu'on a - mais on n'est pas capable de le retrouver de façon précise dans aucun document du gouvernement fédéral pour le moment - c'est que l'ensemble des commissions pour le Canada a coûté entre 5 000 000 $ et 7 000 000 $ pour les travaux effectués en 1982-1983. Du côté du Directeur général des élections, les informations qu'on a au fédéral sont les suivantes... Je m'excuse, il y a un document sur lequel je voudrais mettre la main pour vous donner un chiffre précis. Actuellement, au bureau du Directeur qénéral des élections, il y a quatre employés permanents qui s'occupent de ce secteur. Cependant, depuis six ans, il y a quinze employés temporaires pour s'occuper de ces questions.

M. Rochefort: Temporaires à temps plein.

M. Côté (Pierre-F.): Cela revient à cela.

M. Rochefort: Ils n'ont pas un poste permanent dans la fonction publique, mais ils travaillent 40 heures par semaine.

M. Côté (Pierre-F.): Oui, c'est cela. C'est pour cela que cela peut prêter à confusion quand on demande des informations à Ottawa, parce qu'ils nous répondent qu'ils ont quatre personnes, mais en fait... En plus,

il y a une quinzaine d'employés au ministère de l'Énergie, des Mines et des Ressources qui travaillent aussi à plein temps là-dessus, uniquement pour la carte, ce qui fait 34 employés. Il y en a d'autres qui y travaillent également, mais Statistique Canada n'a pas le nombre précis. On retrouve facilement 30 à 40 employés permanents qui travaillent sur les cartes fédérales. De plus...

M. Rochefort: Refonte de la carte ou pas.

M. Côté (Pierre-F.): Oui, oui, et cela de façon permanente, pendant la période de dix ans entre la constitution des différentes commissions. De plus, chaque commission engage les employés dont elle a besoin. Mais, avant tout - je veux être bien clair là-dessus, c'est l'une des caractéristiques du système fédéral - chacune des commissions des provinces a recours au personnel du Directeur général des élections fédéral. S'ils ont à faire faire des travaux, par exemple, en cartographie, ils les font faire à cet endroit, mais ils ont un certain nombre de personnes, des secrétaires, qui leur permettent de faire leurs tournées, ce qui explique que, finalement, il est très difficile... Quand j'ai mentionné le chiffre de quelques millions tantôt, on nous l'a donné sous toute réserve parce qu'il ne semblait pas très connu et il semblait très difficile de le retracer pour les commissions. On ne sait pas trop où fouiller dans les comptes publics pour le retrouver. Il n'y a pas d'obligation de faire de rapport. Mais au montant que j'ai donné, il faut ajouter cette trentaine d'employés permanents.

M. Rochefort: Comme me le faisait remarquer mon collègue de Jonquière - on connaît son passé, sa préoccupation et son bon sens - en plus, ils ne s'occupent pas de délimiter les districts municipaux.

M. Côté (Pierre-F.): Non. Ils n'ont pas cette responsabilité et, au Québec, il y a 75 circonscriptions, on en a 122; ils en ont 284 pour l'ensemble du Canada.

M. Rochefort: À la remarque du ministre qui me dit: Ils s'occupent de tout le Canada, oui, je veux bien, mais reconnaissons qu'en plus ils bénéficient de tous les services de Statistique Canada.

M. Gratton: J'en conviens, mais tous les chiffres que nous donne le Directeur général des élections doivent être au moins divisés par quatre si on veut savoir ce que cela coûte au prorata des électeurs ou des citoyens du Québec. Il ne faudrait pas partir avec 34 personnes permanentes pour...

M. Rochefort: II y a quatre personnes à temps plein...

M. Gratton: ...comparer cela à quinze ici.

M. Rochefort: ...au bureau, plus quinze postes temporaires permanents, plus une quinzaine au ministère de l'Énergie, ries Mines et Ressources plus X à Statistique Canada. Admettons que cela fait une quarantaine. On divise par quatre, si vous voulez, cela fait dix.

Une voix: Ce n'est pas comme cela.

M. Rochefort: Pardon?

M. Gratton: C'est moins de 40.

M. Rochefort: Cela fait dix. Non mais ici, c'est trois pour assumer la permanence. (12 h 30)

M. Gratton: Oui, mais est-ce annuellement, M. Côté? Bon an, mal an?

M. Rochefort: Oui, annuellement, bon an, mal an, refonte ou pas refonte.

M. Côté (Pierre-F.): Oui.

M. Rochefort: Donc, je me dis: Voilà une donnée importante.

M. Côté (Pierre-F.): Je m'excuse, M. le député. Si vous me le permettez, je veux être bien clair sur la source des renseignements. J'ai demandé à mon personnel d'aller à Ottawa, de rencontrer le personnel d'Ottawa, et c'est l'information que l'on nous a donnée. Comme je vous le dis, la difficulté - ils l'avouent eux-mêmes parce qu'ils ont une façon assez particulière, pas particulière, mais différente de la nôtre, d'administrer -c'est de pouvoir retracer et vous donner la liste complète avec les salaires et le reste. Je vais vous donner un exemple de la façon dont on procède au bureau du Directeur général des élections du Canada. Il y a un très grand nombre de travaux dans le cours normal de l'exercice de ses fonctions qui ne sont pas imputés à l'année courante, mais qui sont imputés à un événement à venir. C'est une façon très astucieuse de procéder.

Par exemple, ils vont effectuer des travaux sur les sections de vote au Canada. Ce n'est pas imputé à l'année courante, c'est inclus dans les dépenses de l'élection générale à venir. C'est donc une autre façon de procéder. Ici, c'est beaucoup plus évident parce que c'est intégré dans le même rapport, sous la responsabilité d'une même personne. Là-bas, c'est différent.

M. Rochefort: J'aurais peut-être une autre question reliée à l'intéqration. On se rappelle les débats entourant l'intégration en

1982-1983. Est-ce que vous avez fait des études sur ce que cela impliquerait comme coûts de revenir à une structure parallèle non intégrée comme avant 1983?

M. Côté (Pierre-F.): Ce serait difficile. Je n'ai pas fait d'étude spécifique, je ne peux que vous soumettre quelques réflexions qui explicitent un peu ce que J'ai mentionné tout à l'heure. J'ai ici un tableau qui pourrait m'aider à vous répondre plus clairement. Avant l'intégration - c'est un tableau qui parle des dépenses globales - en 1981-1982, le total des budgets était de 10 588 000 $. En 1982-1983, l'intégration s'est faite et, sur un certain nombre d'années, vous allez voir non pas la progression, mais la diminution après cela, en 1983-1984, en 1984-1985, 1985-1986 et 1986-1987. Je parle de 10 000 000 $ au départ, en 1981-1982, pour l'ensemble. En 1982-1983, 8 424 000 $, je parle toujours des dépenses; en 1983-1984, 8 217 000 $; en 1984-1985, 8 022 000 $; en 1985-1986, 8 421 000 $; et les prévisions pour 1986-1987, 7 645 000 $.

Pour moi, il ne fait aucun doute que, si on dissociait de l'intégration les responsabilités qui incombent actuellement au Directeur général des élections face à la confection de la carte électorale, cela coûterait plus cher parce que cela requerrait tes services d'autres personnes que celles qui ont été mentionnées tantôt. Si je prends les chiffres qu'on a précisés, si, par exemple, on dit que ça prend une dizaine de personnes-années, cela va prendre plus de monde que cela. Je reprends les différents postes ou les personnes. Quand on dit, par exemple, qu'on va utiliser les services trois mois par année d'une personne dans le domaine des communications, je vois difficilement comment, si cela n'est pas intégré, si ce n'est pas quelqu'un qui a d'autres responsabilités, qui a des responsabilités partagées pendant l'année, un organisme indépendant va pouvoir utiliser les services d'une personne seulement trois mois par année. Il va falloir qu'il engage une personne responsable, par exemple, des communications ou qu'il fasse appel à quelqu'un d'autre qui va faire de même. Si un organisme comme celui-là fait appel à un autre ministère ou à un autre organisme, le coût va revenir au même. À tout le moins, il va revenir au même, mais l'intégration permet assurément des économies.

On pourrait toujours essayer de faire l'exercice dont vous parlez et voir cela de façon beaucoup plus précise, mais, pour ma part, selon l'expérience que j'ai vécue... Parce que j'ai vécu l'expérience antérieure, avant l'intégration, j'ai été membre de la Commission permanente de la réforme des districts électoraux et de la Commission de la représentation. Je peux vous donner les résultats de cette expérience. Il n'y a aucun doute que cela coûterait plus cher.

M. Gratton: Le moins qu'on puisse dire, M. le Président, c'est qu'il est très difficile - je n'en fais reproche à personne - de s'y retrouver à cause de la nature même du mandat du Directeur général des élections et du fait qu'on a fait l'intégration. Les comparaisons, forcément, doivent être boiteuses entre, par exemple, la délimitation au fédéral et ici puisque le système n'est pas du tout le même et que la façon de procéder est également différente.

Pour revenir à ce qu'on disait tantôt, on a identifié qu'environ 400 000 $ à 500 000 $ en salaires pouvaient être affectés au moment où il y a travail de délimitation, en prenant les approximations de personnes-années que nous a données le Directeur général des élections. Si je prends, par exemple, le résultat de l'opération 1985-1986, le dernier exercice où on a fait une délimitation, on doit ajouter à cette somme quelque 250 000 $ qui apparaissaient dans les sommes autres que salaires affectées à la Commission de la représentation. Donc, on parle de 650 000 $, 750 000 $.

On se rappellera qu'en 1985 tout l'exercice a donné comme résultat le déplacement d'un total de 6000 électeurs. Il y a eu, bien sûr, des modifications à une trentaine de circonscriptions, 33 si je ne m'abuse, mais d'ordre très mineur. La plupart n'impliquaient aucun citoyen. Il s'agissait de changements ayant trait à des territoires non organisés. Il y a seulement une ou deux exceptions qui impliquaient des populations électorales de plus de 500 personnes. Donc, déplacement de 6000 électeurs, ce qui nous a coûté au bas mot 700 000 $ ou 750 000 $.

À défaut de chiffres plus précis, on a quand même là une indication des coûts engendrés qui sont considérables. À défaut, justement, je pense, de pouvoir aller plus loin, à moins qu'on n'y consacre des efforts que nous n'avons ni le temps ni le loisir de faire, quant à moi, on pourrait laisser la partie des coûts tout en y revenant, si nous le jugeons nécessaire, au cours de nos débats et aborder les autres arguments qui peuvent militer en faveur du maintien ou du changement de la périodicité actuelle.

M. Rochefort: M. le Président, je suis parfaitement d'accord avec la proposition du ministre d'aller de l'avant. Je pense qu'on a eu les informations qui pouvaient être utiles à ce moment-ci. Je veux faire un commentaire sur les dernières remarques du ministre. Je veux bien, et c'est juste intrinsèquement, qu'en 1985 on ait modifié à peu près une trentaine de circonscriptions pour à peu près 6000 électeurs, à un coût que le ministre évalue è peu près à 700 000 $. Je trouve qu'il faut regarder ce

qu'on a dû faire pour arriver à cette conclusion de ne modifier qu'une trentaine de circonscriptions pour déplacer à peine 6000 électeurs. Ça aussi, ça coûte des choses.

M. Gratton: J'en conviens.

M. Rochefort: La personne qui va faire son marché et qui n'achète rien, ça ne veut pas dire qu'elle n'est pas entrée dans le magasin et qu'elle n'a pas pendant deux heures regardé ce qu'il y avait sur les rayons. On a procédé à des études très importantes, à des recherches sûrement considérables. Des travaux ont été faits et par le personnel et par les commissaires pour brasser tout ça, bien réfléchir de façon rigoureuse, responsable et cohérente avec les réformes passées, avec la loi, pour arriver à la conclusion qu'on ne transférait que 6000 électeurs, que ça n'impliquait qu'une trentaine de comtés, mais aussi et beaucoup pour en arriver à une décision, la justifier et la rendre acceptable, qu'on ajoutait des exceptions: Lévis, Laprairie et quelques autres. C'est évident que, finalement, on peut dire que 700 000 $ pour 6000 électeurs, c'est cher l'électeur, mais ça n'a pas pris une demi-heure comme décision. Cela a nécessité beaucoup de travaux, beaucoup de recherches, beaucoup de réflexions, d'études pour en arriver non seulement à ces conclusions, mais aussi à l'ajout des exceptions.

On sait que les exceptions, ça ne doit pas être simple quand la Commission de la représentation décide d'en faire parce que cela va à l'encontre du grand principe du poids électoral dont on a discuté longuement ce matin et hier. Donc, par définition, faire une exception, ce n'est sûrement pas une chose simple et facile. Il faut rationaliser cela et bien peser cela à tous égards avant de poser le geste. Je pense que cela nous permet de mieux voir comment on peut expliquer le coût de 700 000 $. Cela dit, M. le Président, je suis d'accord pour poursuivre.

M. Gratton: J'enchaîne sur ce qu'a dit le député de Gouin pour dire que je reconnais effectivement qu'on a dû faire des efforts très sérieux pour en arriver à cette conclusion. Mais, justement, un des arguments qui nous amènent à endosser la proposition du rapport Rémillard de réduire la périodicité - on ne parle plus de dix ans à partir des recensements décennaux, mais on parle de réduction; on pourra quantifier cette réduction tantôt si on le veut - de la délimitation, c'est justement qu'en pratique l'expérience vécue tend à démontrer qu'en réalité il se passe deux élections avant que des modifications substantielles soient apportées à la carte électorale.

Regardons ce que cela a donné très spécifiquement. Les élections de 1973 et 1976 ont été tenues avec la même carte électorale qui était issue du deuxième rapport de la commission déposé en 1972. Il n'y a pas eu de changements. L'élection de 1981 a eu lieu en vertu d'une nouvelle carte élaborée un an plus tôt. Elle apportait des modifications substantielles à la carte précédente en créant notamment douze nouvelles circonscriptions.

Enfin, l'élection de 1985 - on vient d'en parler - s'est tenue, elle aussi, avec une nouvelle carte, mais les modifications apportées à la carte précédente n'étaient pas substantielles, du moins quant aux impacts sur les électeurs, puisqu'elles n'impliquaient le transfert que de 6256 électeurs, tout en affectant les limites de 33 circonscriptions. Dans 25 de ces 33 circonscriptions, le nombre d'électeurs transférés était même inférieur à 500. La source de cette information, on la retrouve à l'annexe 7 du rapport de la commission sur la carte électorale du Québec d'avril 1985.

Donc, je pense qu'il y a lieu de nous poser la question, aujourd'hui, non pas de savoir si on doit procéder à tous les dix ans à partir du recensement fédéral, mais bien s'il n'y a pas lieu d'examiner la possibilité de procéder à une nouvelle délimitation à toutes les deux élections en vertu du facteur de l'expérience vécue des dernières années.

On ne dérogerait pas à ce qui se fait ailleurs. Je ne le dis pas parce qu'on doit imiter ce qui se fait ailleurs. Je dis simplement que nous n'innoverions pas en limitant la périodicité puisque le Québec est la seule province à procéder à une nouvelle délimitation après chaque élection générale. Au fédéral, au Manitoba, à Terre-Neuve et en Saskatchewan, la périodicité est de dix ans. En Alberta et en Colombie britannique, la délimitation s'effectue à toutes les deux élections générales et, en Ontario, la périodicité n'est pas fixée dans la loi, mais, en termes pratiques, il s'est écoulé dix ans entre les deux dernières délimitations. Pourtant, que je sache, le Québec ne présente pas une situation démographique si différente de celle du reste du Canada pour expliquer cette distinction ou cette façon de faire.

Il y a l'aspect des coûts. Il est très difficile d'en arriver à cerner de combien on parle. Mais, je pense bien qu'il n'y a personne qui ne reconnaîtra pas que, si on fait l'exercice deux fois moins souvent, cela devrait coûter moins cher. On pourrait prendre le soin d'établir exactement combien, mais je maintiens que cela doit nécessairement représenter une somme annuelle qui est loin d'être négligeable. Je m'en limite à cela, faute de pouvoir faire mieux.

Même avec une périodicité plus longue qu'actuellement, chaque nouvelle délimitation ne risque pas d'apporter des modifications plus nombreuses qui se traduiraient par

d'importants dépiecements de population, vu que les données à la disposition de la commission devraient permettre d'évaluer avec suffisamment de précision l'évolution démographique. D'ailleurs, la commission tient compte déjà, dans les critères inscrits dans la loi actuelle, des prévisions démographiques, (12 h 45)

En réponse à une question précise que lui posait le député de Charlesbourg sur l'hypothèse de porter à dix ans la fréquence de la délimitation des circonscriptions électorales - disons huit ans, faisons le même exercice - lors de l'étude des crédits en 1985, le Directeur général des élections répondait: Pour ma part, je ne serais pas réfractaire à une telle suggestion, je pense que cela assurerait une certaine continuité de la carte et des changements moins fréquents. Également, dans ses réflexions sur le rapport Rémillard, à la page ]0, le Directeur général des élections réitère son appui - je le mets entre guillemets - à une périodicité décennale dans les termes suivants: "Cette proposition présente l'avantage de changements moins fréquents à la carte électorale comme cela peut être le cas s'il y a une nouvelle carte après chaque élection générale".

M. le Président, je dirai qu'à ce propos la position des ministériels n'est pas née du rapport Rémillard, puisqu'à plusieurs reprises cette idée a été émise à l'Assemblée nationale ou en commission parlementaire. Notamment à la suite du dépôt du cinquième rapport de la Commission permanente de la réforme des districts électoraux en 1978 et lors de l'étude en commission parlementaire du projet de loi 10, Loi sur la représentation électorale, en 1979, des députés libéraux avaient fait valoir qu'une périodicité décennale aurait l'avantage de réduire les coûts et d'éviter de bousculer trop fréquemment les habitudes des électeurs.

Plus récemment, lors du débat de cinq heures sur le rapport de la commission de la délimitation tenu le 2 mai 1985, le député de Charlesbourg, alors porte-parole de l'Opposition libérale, faisait remarquer que le nombre peu élevé d'électeurs transférés à la suite de la nouvelle délimitation montrait bien qu'une délimitation après chaque élection n'était pas nécessaire et entraînerait des coûts difficiles à justifier.

M. le Président, il me semble que voilà un point où on peut rallier ces deux objectifs de maintenir les acquis sur le plan de la démocratisation du processus et de réduire les coûts. Je ferais mienne une proposition qui pourrait déboucher sur un consensus, celle d'examiner la possibilité d'amender la loi pour que la délimitation ne se fasse qu'à toutes les deux élections, qu'après deux élections.

Le Président (M. Marcil): M. le député de Gouîn.

M. Rochefort: Oui.

Le Président (M. Marcil): Si on retenait cette formule, il faut prendre en considération que la fréquence pourrait être de deux, trois, quatre ou cinq ans. On peut avoir deux élections en dedans de six ans.

M. Rochefort: Avez-vous des idées comme cela en tête?

Le Président (M. Marcil): Non... M. Rochefort: Ah!

Le Président (M. Marcil): ...mais si on retient que c'est obligatoirement après deux élections, cela pourrait être après cinq, six ou huit ans.

M. Rochefort: On devient journaliste. M. Dufour: Ou après trois ans.

Le Président (M. Marcil): C'est ce que je veux dire.

M. Rochefort: Oui, je comprends ce que vous dites. M. le Président, la question de la fréquence de la délimitation est effectivement une question importante. Il est, quant à nous, pertinent de la poser. Dans un premier temps, il est clair que l'une des conséquences de la décision qui a été prise tantôt, c'est qu'on ne peut plus penser à la faire aux dix ans, après le recensement fédéral; cela ne serait d'aucune utilité, cela ne correspondrait à absolument rien dans notre loi.

Deuxièmement, effectivement, on peut se poser la question à savoir si cette délimitation doit se faire après chaque scrutin ou à une fréquence plus qrande, qui peut être après deux scrutins. Je dirai qu'il est difficile d'aborder cette question posée de cette façon sans aussi aborder la question de la nature du statut de la commission, à savoir si nous devons avoir, comme c'est le cas actuellement, une commission permanente, mais qui n'est pas un qros organisme public qui est là à longueur d'année avec toutes ses équipes de conseillers juridiques, de responsables de relations publiques et le reste. Ce n'est pas du tout le cas de la Commission de la représentation. Des commissaires sont nommés pour agir chaque fois qu'il est nécessaire.

Le Président (M. Marcil): Continuez.

M. Rochefort: Bien non, M. le Président, cela m'intéresse trop puisque je veux arriver à un consensus ayec le ministre.

On va suspendre pour deux minutes et je pense que je vais aller siéger au même comité que vous.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Marcil): On suspend pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 51)

(Reprise à 12 h 53)

Le Président (M. Marcil): On continue.

M. Rochefort: M. le Président, ce que je disais, c'est donc que, pour nous, il faut aussi poser la question du statut de la commission. Est-ce que ce sera une commission qu'on mettra sur pied ad hoc, chaque fois qu'on doit réfléchir à une révision éventuelle de la carte électorale, un peu comme ce qui se fait au fédéral?

Parce que, dans le fond, on peut s'entendre pour dire que, toutes proportions gardées, les deux niveaux ont du personnel en permanence et tout cela, mais, au fédéral, on crée carrément un nouveau groupe, des nouveaux commissaires qui n'ont pas nécessairement de préparation particulière pour faire cela, à qui on dit: Penchez-vous là-dessus, faites-nous une nouvelle révision de la carte et amenez-nous vos conclusions. Ou bien on dit qu'on veut que des commissaires assurent une certaine continuité, une certaine cohérence dans le travail qui se fait et, surtout, intègrent leurs réflexions, leurs responsabilités aux autres responsabilités en matière de découpage électoral.

Nous, je vous le dis immédiatement M. le Président, d'emblée, nous privilégions une commission - je le répète, non pas dans les ressources, c'est la même chose - où les commissaires occupent leur fonction de façon permanente. Pour nous, il est effectivement dangereux - je dis bien dangereux - que trois commissaires sortis un peu de nulle part - ce n'est pas négatif ou péjoratif quand je dis cela - par rapport à un mandat de découpage de la carte électorale arrivent un matin et se fassent dire: Écoutez, cela fait huit ou neuf ans qu'on n'a pas regardé cela. Penchez-vous donc sur la question de la carte électorale.

On le sait - c'est notre cas et c'est le cas des commissaires actuels, j'en suis convaincu, et c'est le cas de tout le monde qui s'intéresse à ce genre de questions comme à d'autres questions - tout le monde a un peu ses dadas. Moi, je vais avoir l'occasion de faire part à la fin des travaux d'un de mes dadas qui est l'appellation des comtés. Je ne comprends pas que, dans mon comté, on appelle cela le comté de Gouin, car jamais ni Lomer, ni Paul Gouin n'ont fait quoi que ce soit de relié à la circonscription que je représente. Et, tout le monde pense que le boulevard Gouin traverse mon comté et que c'est pour cela que ça s'appelle Gouin, alors que le boulevard Gouin ne le traverse pas. Cela fait partie de mes dadas. On y reviendra tantôt. Je pense qu'il y a des choses qu'on pourrait peut-être...

Donc, tout le monde a un peu ses dadas.

M. Gratton: On a tous des idées fixes.

M. Rochefort: C'est cela, exactement. Je suis heureux d'entendre cela, vous allez voir.

Une voix: Saint-Louis.

M. Rochefort: Des Saint-Louis, il y en a partout. Je t'expliquerai pourquoi.

Ma crainte, c'est le fait de voir de nouveaux commissaires, à chaque coup, apparaître dans le décor et repartir cela de zéro. Ma crainte, c'est qu'à partir de quelque sensibilité particulière, de quelque préoccupation spécifique qu'ils ont par rapport à ces questions, à partir du moment où on leur dit: Est-ce que cela vous intéresserait de vous pencher là-dessus? Là, ils nous orientent une carte qui tient compte particulièrement et, pour l'essentiel peut-être, de ce genre de préoccupation à l'intérieur des critères contenus dans la loi. Huit ou neuf ans plus tard, on arrive avec trois nouveaux commissaires qui ont d'autres types de préoccupations et ils nous orientent une carte dans un autre sens. C'est donc une absence totale de continuité, d'intégration.

Vous, M. le Président, souligniez au moment de la suspension de nos travaux: II y a une municipalité dans mon comté qui change de comté à peu près à chaque révision de la carte. Qui mieux que quelqu'un qui a fait la carte précédente peut dire: II faut faire attention, la prochaine fois - je ne sais pas le nom de votre municipalité - ...

Le Président (M. Marcïl): La ville de Léry.

M. Rochefort: ...la ville de Léry, dans Beauharnois, ce n'est pas bon qu'on la déplace encore, essayons donc de trouver quelque chose, quitte à faire une exception qui ferait en sorte que cette ville sente qu'elle appartient à une circonscription électorale pour plus que le temps d'un droit de vote.

Je suis sensible à cela. En conséquence, pour moi, la continuité et la cohérence sont importantes. Cela nécessite à la fois que les commissaires et le personnel travaillent à longueur d'année là-dessus. Ce n'est pas vrai, non plus, qu'on peut partir de zéro, il

faut toujours qu'il y ait du personnel. On en a la preuve au fédéral; même s'il y a des commissions ad hoc, il y a du personnel permanent qui travaille là-dessus. On ne commence pas en disant: Bon, où est-ce qu'on est rendu en nombre d'électeurs dans Châteauguay ou dans Beauharnois? Ça prend quelqu'un qui tient cela à jour, en permanence, et en réflexion permanente, comme me le souffle avec raison le député de Dubuc.

De plus, je pense que le fait qu'ils se penchent aussi sur la délimitation des districts électoraux municipaux, c'est un élément important de cohérence et de développement d'expertise en la matière. La commission qui aurait délimité les districts électoraux de la ville de Lévis serait drôlement bien placée pour ensuite se pencher sur la révision de la délimitation de la circonscription électorale de Lévis. Non seulement se seront-ils penchés sur les données statistiques, mais probablement qu'ils auront tenu une consultation dans la municipalité concernée, qu'ils auront rencontré des groupes, le conseil municipal sensible à ces questions et qu'ils auront entendu des choses qu'ils pourront emmagasiner et utiliser avec une pleine pertinence dans une refonte qui suivrait: ou le municipal suivrait le provincial ou le provincial suivrait le municipal. Pour nous, c'est important qu'une commission soit là en permanence.

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on poursuive quelques minutes de plus?

M. Rochefort: Oui, j'aimerais mieux. J'avoue que j'affectionne peu mes discours en deux étapes.

M. Gratton: II vous en reste pour combien de temps?

Le Président (M. Marcil): Consentement?

M. Rochefort: Pas longtemps, cinq ou six minutes.

M. Gratton: D'accord.

M. Rochefort: La question de la permanence est donc pour nous une question importante et sur laquelle, j'en conviens, on reviendra. Mais je voulais inscrire cela immédiatement.

Deuxièmement, avec tout le respect que j'ai à la fois pour le Directeur général des élections, qui est président de la commission, pour les deux autres commissaires et le personnel qui lui est attribué, l'adjoint à la carte, le secrétaire de la commission, etc., je pense que l'élection de 1985 est une belle illustration de la nécessité qu'au minimum on se repenche là-dessus après chaque élection. Aujourd'hui, on s'entend tous pour dire qu'on est dû pour une révision de la carte. Cela fait consensus, M. le ministre? Bon, le ministre hoche la tête. Donc, cela fait consensus.

M. Gratton: Oui.

M. Rochefort: Si on s'entend que cela fait consensus, on ne sort pas cela de notre chapeau. On part des données du 2 décembre 1985. Donc, c'est le 2 décembre 1985 qu'on observe qu'il y a des inéquités et des distorsions ou des inégalités pour faire plaisir au député de Laprairie; c'est synonyme. Cela revient à mon grand principe. Donc, merci! Quelle autre preuve si ce n'est celle-là que, ce qu'on vient dire aujourd'hui et ce que la commission sûrement nous dit aujourd'hui que, dans le fond, la refonte qu'on nous propose pour la prochaine élection et les prémisses de départ qui la justifient et qui font consensus, sinon l'unanimité à l'Assemblée nationale du Québec, ce sont celles de la dernière élection générale. Cela découle de situations qu'on a juqées être allées trop loin en termes de distorsions et d'inégalités au cours du dernier scrutin. En conséquence, les changements qu'on a proposés, que je respecte et que j'ai partagés, moi aussi, à l'époque, particulièrement les exceptions qu'on a faîtes, nous ont menés, à l'intérieur d'un mandat, entre deux élections et non pas après deux élections, à cette situation d'inéquité ou des électeurs dans Matapédia, dans Richmond représentent deux électeurs de Laprairie et de Lévis, par exemple. Là, il n'y a pas eu deux scrutins entre les deux. Il y en a eu un.

On le savait. Il ne s'est rien passé entre le rapport de la Commission de la représentation et le 2 décembre 1985 qui a créé des changements dans le nombre d'électeurs dans votre circonscription. Dès après 1981 et, parce qu'on avait suspendu un an pour réfléchir sur le mode de scrutin, dès le moment où la commission l'a observé, elle a décidé de faire de votre comté une exception. Donc, dès ce moment, on avait pris conscience qu'il y avait déjà une situation qui ne respectait pas la loi, qui nécessitait d'en faire une exception. C'est le pouvoir des commissaires, que je veux maintenir et conserver aux commissaires.

Donc, on a là une preuve irréfutable que, dans te fond, il y aurait été tout aussi pertinent, disons, et opportun de procéder immédiatement après le scrutin de 1981 à une refonte de la carte. Je répète que je respecte la décision des commissaires, je l'ai moi-même partagée à l'époque. Ce que je dis aujourd'hui, c'est: Qu'on ne vienne pas me dire que c'est parce qu'il y a eu deux élections qu'on conclut qu'il est temps qu'on

regarde cela. C'est faux. Il y a eu une élection parce qu'il ne s'est rien passé entre les deux qui a justifié un accroissement comme cela. On le voyait venir. D'abord, il était déjà observable en 1981 et, deuxièmement, on le voyait venir et on en avait tellement les données quand les commissaires ont fait le rapport qu'ils ont dits On va faire des exceptions avec ces comtés.

Donc, que ce soit après deux élections, je trouve cela une mauvaise idée et je trouve cela une idée... Et que le ministre me laisse continuer parce que je pense que j'ai une proposition qui peut nous permettre d'arriver à un consensus. Je pense qu'en conséquence c'est, encore une fois, maintenir une situation où on va à l'encontre des principes de base qui ont toujours guidé l'action de tous les commissaires qui se sont penchés sur la révision de la carte électorale et de toutes les formations politiques qui se sont intéressées à cela depuis 20 ou 25 ans, soit de dire: On va se retrouver avec des électeurs qui en représentent deux ou trois autres. Et c'est cela qui fait qu'il faut revoir nos cartes et tout.

On sait combien c'est important une élection; rien qu'une, cela chanqe les gouvernements, cela change l'orientation et le développement d'une société. On reconnaît cela, on est ici pour cela.

Une voix: Cela change les députés aussi.

M. Rochefort: Absolument aussi. Donc, M. le Président, je dis non. Je veux qu'après chaque élection la Commission de la représentation réfléchisse, se penche là-dessus. Cela dit, je suis prêt à faire une proposition que j'ai déjà évoquée avec le ministre.

Je ne suis pas en train de vous dire, par contre, que cela prend refonte de a à z de la carte électorale après chaque élection générale. Ce que je veux, c'est qu'après chaque élection générale la commission dite permanente de la représentation s'assoie et, à partir des données compilées par les quelques personnes qui assurent la permanence des données, qu'elle observe les phénomènes observables à l'occasion du scrutin qui vient de se passer, disons le 2 décembre 1985. Cela a effectivement été dans le sens de ce qui était prévu dans Laprairie et dans Lévis et dans le sens de ce qui était prévu dans Richmond et dans Matapédia. Il n'y avait rien qui nous indiquait qu'il y aurait un accroissement de population électorale dans ces coins.

Que là, ils viennent nous dire, en commission, tout en leur maintenant le pouvoir décisionnel, s'il y aura ou non une révision de la carte, moi, jamais je ne voudrai remettre cela entre les mains des élus, quels qu'ils soient. Je veux que ce soit maintenu entre les mains de la commission. Je souhaiterais - et on pourrait apporter quelques amendements à la loi qui pourraient peut-être tenir compte, d'ailleurs, de la loi 71 - qu'après chaque élection les commissaires se réunissent, comme le veut l'actuelle loi, regardent ce qui se passe et là, qu'ils produisent rapidement non pas une nouvelle carte, mais un rapport de quatre, cinq, dix ou douze pages, dans lequel ils nous diraient: Écoutez, d'abord, il ne s'est rien produit qui nécessite un changement de carte, auquel cas, il n'y en aura pas. Cela n'a pas coûté 700 000 $ pour faire cela. On s'entend tous sur cela.

Ils pourraient faire exactement ce qu'ils ont fait la dernière fois. Ils ne nous ont pas bâti une grande nouvelle carte et ils n'ont pas tenu des consultations partout au Québec en faisant trois tournées. Ils ont dit: Nous, on pense qu'en faisant quelques exceptions et en modifiant quelques délimitations beaucoup pour des raisons municipales, on pourrait y arriver facilement. Donc, qu'ils se penchent sur cela et qu'ils nous fassent non pas un rapport privé, mais un rapport public. D'ailleurs, il pourrait très bien être discuté pendant cinq ou six heures à la commission des institutions pour donner, au fond, le fardeau public à la commission de venir justifier politiquement s'il y aura ou non une révision, mais sans donner cela aux élus.

Ce ne sont pas les élus qui, au terme de la commission parlementaire qui aurait entendu la Commission de la représentation, viendraient dire: Oui, il va y en avoir ou non il n'y en aura pas. Là, on retombe dans nos vieux travers. Par définition, il y a une "gang" qui est majoritaire et une "ganq" qui est majoritaire, dès qu'il y en a un de plus, pourrait imposer le fait qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas de réforme de la carte. Donc, que les commissaires décident, mais qu'ils viennent soutenir publiquement leur recommandation qui va dans le sens de oui ou non il faut faire une refonte à partir de ce qu'ils ont observé. Là, ils nous disent: Écoutez, oui, mais on a observé que, dans Laprairie, on est rendu à 52 000 électeurs. Compte tenu de ce qu'il y a autour, on pense qu'on pourrait peut-être faire une exception et cela réglerait tout cela. Les députés donneront leur opinion. Ils en tiendront compte s'ils le veulent, mais la décision leur reviendra selon qu'ils décideront de faire ou de ne pas faire une refonte. Cela s'arrêtera là ou commencera là. D'après moi, cela pourrait se faire dans les mois qui suivent une élection générale. Là, la préoccupation coût, qui est celle du ministre, je pense, peut être rejointe facilement, tout en ne créant d'aucune façon un écart à cette nécessité de se repencher sur la carte après chaque scrutin général, en ce qui nous concerne. C'est une proposition avec laquelle nous serions d'accord et que nous sommes

prêts à envisager.

Cela dit, M. le Président - si je peux avoir l'attention du ministre, je conclus sur cela - il est clair que notre proposition demande de la rédaction législative etc. Mais compte tenu que, de toute façon, cela ne s'applique pas à la situation présente, pour nous, la rédaction de ces articles ne retarderait en d'aucune façon l'enclenchement du processus de révision de la carte. On s'entend tous pour dire qu'il faut le faire. On pourrait se revoir dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois, nous deux, sur le libellé de ce qu'on retrouverait au projet de loi qui doit être déposé avant le 1er mai 1987, lequel tiendrait compte des discussions qu'on aurait ici aujourd'hui.

M. Gratton: M. le Président, si le député de Gouin a terminé, je constate qu'on avance plutôt que reculer. Donc, dès le moment où on reprendra les travaux, je réagirai à la proposition du député de Gouin.

Le Président (M. Marcil): Nous suspendons les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 9)

(Reprise à 15 h 13)

Le Président (M. Filion): À l'ordre! La séance est donc ouverte. Je vous rappelle que nous poursuivons l'exécution de notre mandat. Nous en étions à la fréquence de la délimitation. La parole est donc à M. le ministre.

M. Gratton: Comme le député de Gouin, je parlerai de cette question de la périodicité, mais aussi, de façon accessoire, de la question de savoir si on doit maintenir une commission permanente ou pas. Je voudrais d'abord réagir à ce que disait le député de Gouin. Je trouve très intéressante la formule qu'il nous a proposée et je pense sincèrement qu'on va pouvoir s'entendre sur une façon d'en arriver aux fins que l'on vise.

D'abord, il nous a parlé de la continuité de la commission, ou des membres de la commission, qui est extrêmement importante, j'en conviens. Je tiens pour acquis qu'on a avantage à faire en sorte que les travaux de la Commission de la représentation ne soient pas l'éternel recommencement que pourrait constituer une commission ad hoc dont les membres seraient différents à chaque délimitation, qui n'aurait pas les données et qui devrait recommencer à zéro chaque fois, et qui ne tiendrait pas compte de nos marottes respectives par rapport à nos comtés ou à nos régions respectives.

Je signale au député de Gouin que cette continuité est assurée d'abord et avant tout par la présence obligatoire du Directeur général des élections comme membre de la commission et, dans le cas de la loi actuelle, comme président de la commission. Je pense qu'il est important de noter aussi que, quant aux deux autres membres de la commission, il n'est pas du tout prévu ou assuré dans la loi qu'ils puissent être un facteur de continuité puisque leur mandat, à l'article 16 de la loi, est de cinq ans. Selon la date des élections et la date de nomination de ces personnes, il y a probablement plus de chances qu'autrement que leur mandat vienne à échéance avant qu'ils ne soient chargés de commencer le processus de délimitation après une élection.

À titre d'exemple, les membres de la commission actuelle termineront leur mandat le 1er janvier 1988 ou, en tout cas, en janvier 1988. Je pense que c'est le 1er janvier 1988, en effet. On pourrait supposer qu'on va entreprendre les travaux de délimitation, mais, s'il advenait que les membres de la présente commission ne soient pas reconduits dans leur mandat, il se pourrait qu'une nouvelle commission assume la responsabilité de terminer les travaux, à moins qu'une période de transition soit prévue. Peu importe, ce n'est pas de cela dont il s'aqit ici, de toute façon. Le point central, c'est de convenir entre nous que l'élément le plus important de continuité qui existe au sein de la commission, c'est la présence obligatoire du DGE qui n'est remis en cause ni dans le rapport Rémillard, ni dans ce que nous proposons comme amendement à la loi actuelle.

L'élément de l'implication de la Commission de la représentation dans le processus des élections municipales. Je pense avoir clairement indiqué mon intention hier de recommander au gouvernement de faire en sorte que tout cet aspect des responsabilités actuelles de la Commission de la représentation relève dorénavant de la Commission municipale. En supposant, comme je pense qu'on doit le faire, que cette recommandation sera entérinée par le gouvernement, cela fait tout au moins disparaître cette exigence de maintenir une commission permanente... Pardon?

M. Dufour: II faut qu'il y ait un consensus à la commission.

M. Gratton: Non, je pense que le député de Jonquière conviendra avec moi que cela ne fait pas partie de la Loi sur la représentation électorale. Donc, cela ne fait pas partie des consensus qu'on doit dégager ici.

Je signale que le député de Gouin nous soumet une formule intéressante. II nous dit, à toutes fins utiles, que, pour lui, il n'est peut-être pas nécessaire de procéder

automatiquement à une nouvelle délimitation après chaque élection. Il nous proposait ce matin, dans le cadre du maintien d'une commission permanente, que la commission, après chaque élection, fasse une évaluation sommaire de la situation. II l'a très bien cerné, c'est quelque chose qui peut se faire assez rapidement. On l'a d'ailleurs fait entre janvier et mars, au moment où on s'est réuni en commission parlementaire pour entendre le Directeur général des élections sur le projet de loi 23. On l'a fait dans une période de trois mois et je pense qu'on aurait pu le faire plus rapidement puisque les données du Directeur général des élections nous étaient parvenues avant même que nous nous réunissions en commission, le 18 mars, si je ne m'abuse.

Je signale que c'est le Directeur général des élections qui nous avait fourni les informations à partir desquelles nous avons pu tous convenir, unanimement, qu'il y aurait des changements majeurs à apporter à la carte électorale pour la prochaine élection. À ma connaissance, on ne s'est pas adressé à la Commission de la représentation, mais au Directeur général des élections. Moi, je fais rarement la distinction entre son rôle d'administrateur des lois électorales et de président de la Commission de la représentation. Toujours est-il que c'est la même personne qui est venue nous dire et nous convaincre, sans trop de difficultés d'ailleurs, que, si nous n'agissions pas, si nous n'apportions pas des modifications a la loi actuelle et que nous ne procédions pas à une délimitation, on aurait plusieurs comtés d'exception. Il nous a même évoqué certains scénarios quant à l'augmentation de la moyenne d'électeurs, quant à la possibilité d'élargir l'écart de plus ou moins 25 %. II nous a donné son estimation des conséquences de l'une et l'autre de ces solutions. Ce sont d'ailleurs ces informations qui nous ont amenés à convenir qu'il fallait pousser plus loin la réflexion et qui nous amènent aujourd'hui en commission parlementaire.

À la proposition du député de Gouin, je serais tenté d'aller dans le sens de dire: Modifions la loi pour que, dorénavant, la délimitation soit faite à toutes les deux élections, et non pas à chaque élection, et aménageons le processus ou la disposition dont parlait le député dans le sens que le Directeur général des élections serait tenu de venir devant la commission de l'Assemblée - nationale. Celle-ci pourrait, comme c'est le cas aujourd'hui, déléguer cette responsabilité à la commission des institutions plutôt qu'à une commission parlementaire et entendre le DGE. Elle pourrait ensuite décider d'une recommandation du...

M. Rochefort: Qui décide?

M. Gratton: C'est la commission de l'Assemblée nationale qui déciderait de la pertinence d'une recommandation du Directeur général des élections et non pas de la Commission de la représentation. Voyons si cela ne nous permettrait pas d'atteindre tous les objectifs que nous visons, outre peut-être celui - et j'en conviens qu'évoquait le député de Gouin ce matin, à savoir qu'il faut éliminer l'intervention des parlementaires ou de l'Assemblée nationale dans le processus de décision. Je lui dirai là-dessus qu'il me semble qu'il appartient aux parlementaires de juger de l'opportunité d'investir les ressources nécessaires è faire une délimitation, mais toujours sur la base d'une recommandation du Directeur général des élections. Il me semble qu'on pourrait, a ce moment, au vu et au su de tous, en commission parlementaire, justifier ou non l'acceptation d'une recommandation du Directeur général des élections qui pourrait recommander, le cas échéant, l'institution d'une commission pour procéder ou qui recommanderait, d'autre part, au contraire, tout simplement de ne pas procéder à une délimitation.

M. Rochefort: M. le Président...

Le Président (M. Filion): Oui, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, il y a un certain nombre de commentaires que je veux faire sur les réactions du ministre. Je dirai que je suis assez heureux de l'entendre parler de la nécessaire continuité, de la cohérence, du caractère au-delà du statut de permanence qui doit exister. Je pense que c'est un pas important qui est franchi par rapport au contenu des recommandations Rémillard et de ce qu'on pouvait en interpréter.

Je dirai aussi qu'il faut être bien conscient que la permanence n'est pas assumée par le Directeur général des élections, ni la continuité en ce qui me concerne. Le Directeur général des élections est un facteur de permanence et de continuité, mais n'incarne pas à lui seul cette continuité, pas plus le fait que certains de ses fonctionnaires soient à temps plein, en tout temps, sur ce dossier, donc, puissent fournir aux nouveaux commissaires les données pour qu'il y ait une certaine continuité, un peu comme - et je distingue le Directeur général des élections de ses fonctionnaires, je parle des fonctionnaires -oui, les fonctionnaires de l'Etat québécois assurent une certaine continuité de l'État, d'un gouvernement et d'une Législature à l'autre, mais ce sont les élus qui orientent, et là, il y a changement. Pour nous, oui, les fonctionnaires de la Commission de la représentation qui sont chez le DGE assurent

une certaine continuité, mais ils ne sont pas en mesure d'assurer la continuité, la permanence parce que ce sont les commissaires qui peuvent l'orienter dans un sens ou l'autre. Pour nous, ce sont les commissaires, trois personnes ensemble, pas seulement le Directeur général des élections. Deuxièmement, je dirai, M. le Président, que, quant à nous, en tout cas, on a compris que les remarques, les commentaires que nous a faits le Directeur général des élections entre janvier et mars derniers, c'était beaucoup plus à titre de président de la Commission de la représentation qu'il nous les faisait, même si la commission ne s'était pas réunie - ce que je reconnais - parce que soyons conscients que la commission ne pouvait pas nous fournir ses commentaires. Il y avait une loi de l'Assemblée qui avait suspendu les responsabilités de la commission. Oui, la loi 23.

M. Gratton: Oui, mais la loi n'avait pas encore été adoptée. On a entendu les représentations du Directeur général des élections...

M. Rochefort: Vous parlez de la loi 23 ou de la loi 147 parce que, de janvier à mars derniers, c'est...

M. Gratton: La loi 23. Au moment où on a entendu le Directeur général des élections nous dire quelles étaient les incidences de tel ou tel scénario...

M. Rochefort: D'accord. C'est vrai que légalement le projet de loi n'avait pas été adopté, mais tout le monde avait bien compris, à commencer par les trois commissaires, que, vu que la loi s'en venait, on leur avait demandé de suspendre.

M. Gratton: Le député de Gouin ne conviendra-t-îl pas que la raison pour laquelle on a adopté le projet de loi 23, c'est parce qu'on avait des indications du Directeur général des élections, et non l'inverse?

M. Rochefort: Non.

M. Gratton: Bien oui! On a voulu, avant d'adopter le projet de loi 23, connaître les tenants et aboutissants.

M. Rochefort: Parfaitement, mais reconnaissez que le premier élément intervenu, c'est une annonce d'une décision gouvernementale ferme qui était de suspendre le début des travaux de la Commission de la représentation visant à redélimiter les circonscriptions électorales. Par la suite, on a entendu le Directeur général des élections pour qu'il puisse nous dire quelles seraient les conséquences de notre décision en termes de calendrier et d'une refonte possible ou non de la carte avant les prochaines élections et quels seraient les types de conséquences que le maintien de la loi actuelle ou de l'amendement d'un certain nombre de dispositions, notamment pour ce qui est du quotient électoral, amènerait comme ampleur de réforme. Mais ce n'est pas cela qui a été le déclencheur. Le déclencheur, cela a été un projet de loi déposé, une intention gouvernementale ferme dans un projet de loi qui dit: On suspend cela jusqu'à nouvel ordre.

M. Gratton: Je demanderais au député de Gouin au moins de reconnaître que le projet de loi 23, c'est seulement au moment où il a été adopté que la décision a vraiment été prise. L'intention gouvernementale, le député le sait mieux que quiconque, cela ne veut absolument rien dire jusqu'à ce que le geste légal soit posé, le geste de l'adoption du projet de loi. Dans le contexte où on se parle aujourd'hui, c'est sûrement le cas parce que l'intention gouvernementale, dans tout ce que nous discutons depuis deux jours, ne veut absolument rien dire en termes de conséquences, à moins qu'il n'y ait consensus. J'ai déjà clairement indiqué à plusieurs reprises que c'est comme cela que ça va se passer en tout temps. En tout cas, on n'est pas pour faire un long débat là-dessus. Ce que je dis, M. le Président, c'est que la suspension des travaux de la commission a été décidée unanimement à partir de considérations que nous avait soumises le Directeur général des élections qui nous ont convaincus que l'adoption du projet de loi 23, c'est-à-dire le report des travaux de la commission, n'entraînerait aucune conséquence quant à la possibilité d'adopter une nouvelle carte à temps pour les prochaines élections.

M. Rochefort: D'accord. Mais, là, M. le Président, on parle d'une nouvelle chose. Cela n'entraînerait pas de conséquences quant à la possibilité d'apporter une refonte à la carte électorale à partir des critères actuels, oui, cela nous a convaincus. Sa participation à nos travaux nous a convaincus de cela. Reconnaissons que la Commission de la représentation n'a pas respecté la Loi sur la représentation électorale après le 2 décembre 1985 parce que, rapidement, après l'élection, il y a eu une intention clairement énoncée de ne pas faire enclencher le processus; c'est cela qui a été le départ de l'affaire.

M. Gratton: Oui, d'accord.

M. Rochefort: De la même façon, reconnaissons qu'autant, et avec raison - je

respecte bien sa rigueur de ce point de vue-là - le leader nous a répété que, dans le dossier du projet de loi 147, même si on s'était entendus tous les deux et même si le Directeur général des élections, président de la Commission de la représentation, et les commissaires ne réenclencheraient pas automatiquement le 2 décembre 1986 le processus, même si la loi 147 n'avait pas été adoptée ce jour-là, tout le monde acceptait que, même si c'était adopté trois semaines plus tard, il est clair que personne ne partirait le 2 décembre 1986 comme, pourtant, la loi 23 le dictait. (15 h 30)

Reconnaissons que cela a été le facteur... Ce n'est pas le Directeur général des élections qui est venu nous demander de suspendre, et patati et patata. Non, non, je sais que ce n'est pas ce que le leader nous dit, mais je veux être très clair. Le départ s'est fait à partir d'une initiative parfaitement légitime du gouvernement qui a dit: Nous voulons suspendre cela, nous ne voulons pas faire de refonte de la carte - je m'en souviens tellement - parce qu'on veut réfléchir à cela. J'ai dit moi-même au ministre dans mon discours de deuxième lecture sur la loi 23: Si, pour vous autres -et je l'avais répété en commission parlementaire - la chose qui vous inquiète, c'est le nombre de circonscriptions, je vous dis tout de suite qu'on est d'accord pour limiter cela è 122 et qu'en conséquence, si c'est cela votre problème, on n'a pas besoin de la loi 25, on est prêt à amender la loi tout de suite pour que le processus s'enclenche. Là, vous nous avez dit: Non, on veut revoir l'ensemble des questions. On a dit: D'accord, dans la mesure où on a l'assurance que cela va se faire en consensus et à l'intérieur de délais. Là, il y a eu les recommandations du rapport Rémillard et tout cela. Mais reconnaissons que l'enclenchement du processus n'est pas venu d'une réflexion ou d'un rapport de commentaires du Directeur général des élections, qui nous a dit: Voici ce que cela impliquerait comme refonte, comme nouveau calendrier, c'est venu d'une décision parfaitement légitime du gouvernement.

M. Gratton: Est-ce que je peux...

M. Rochefort: Oui, et après cela on ira sur le fond.

M. Gratton: ...spécifier tout de suite que, ce que je viens de proposer, ce n'est pas de suivre le processus qu'on a suivi»

M. Rochefort: ...

M. Gratton: Ce que je propose, c'est d'inscrire dans la loi l'obligation du Directeur général des élections de faire rapport sans aucune intervention du gouvernement. On se comprend là-dessus?

M. Rochefort: Très bien. Ceci dit, M, le Président, je vais commenter - comment pourrais-je qualifier cela - la contre-proposition du ministre délégué à la Réforme électorale en lui disant d'emblée que, malheureusement, cette contre-proposition n'est pas acceptable à nos yeux parce qu'elle enfreint un certain nombre de principes fondamentaux. D'abord - je le répète - nous ne voulons pas que ce soit le Directeur général des élections qui se repenche sur la question après une élection. Nous voulons que ce soit la Commission de la représentation, donc, trois personnes nommées par l'Assemblée nationale.

Deuxièmement, ce que nous voulons, ce n'est pas qu'il vienne nous justifier... Au fond, la proposition du ministre est que cela se fera à toutes les deux élections. Cependant, après chaque élection, le Directeur général des élections viendra nous dire que, là non plus, cela ne prend pas une réforme. Il aurait maintenant le fardeau de nous dire: Oui, mais, cette fois, je vous le dis tout de suite: Je pense que cela prend une réforme absolument. Il faudrait qu'il vienne convaincre les parlementaires que cela prend une réforme, alors que dans ma proposition, c'est l'inverse: ils auront le fardeau après chaque élection de venir nous dire: Cette fois, on pense qu'on peut traverser les quatre prochaines années sans réforme. Il faudra qu'il fasse une démonstration convaincante. Non pas convaincante pour les parlementaires, parce que, je le répète - et là aussi c'est une distinction entre la proposition du ministre et la mienne - pour moi, le processus décisionnel complet demeure entre les mains de la Commission de la représentation, ce qui donne toute sa portée à la notion de commission indépendante. Jamais nous n'accepterons, d'aucune façon, que les formations politiques, que les élus de l'Assemblée nationale se réinsèrent dans un processus décisionnel en vue d'enclencher une refonte de la carte électorale. Ce n'est pas une décision qui appartient aux élus. C'est une décision qui doit revenir à la commission. Cela va bien comme ça et nous savons à quoi nous nous exposerions si une formation politique disait: Cette fois, je n'ai pas intérêt à ce qu'il y ait refonte de la carte. En conséquence, parce que je suis majoritaire à l'Assemblée, je décide qu'il n'y aura pas de révision de la carte. On retomberait dans nos vieux travers d'avant 1979. Pour nous, il n'est pas question qu'on remette entre les mains des élus ou des formations politiques quelque étape décisionnelle que ce soit du processus de délimitation des circonscriptions électorales. J'ai été très précis, j'ai fait des nuances et

des distinctions, hier, dans mon intervention d'ouverture sur la définition de commission indépendante. Pour nous, elle est indépendante non seulement parce qu'elle est composée de commissaires nommés par l'Assemblée nationale du Québec, mais parce qu'elle prend toutes les décisions de A à Z sans interférence aucune du pouvoir politique. C'est beaucoup plus pour cela, d'ailleurs, pour nous qu'elle est indépendante qu'à cause de son processus de nomination. En ce sens, pour nous, aucune proposition qui vise à redonner aux élus de l'Assemblée nationale un pouvoir décisionnel sur une facette ou une autre... Une facette drôlement déterminante ici qui est de dire: Est-ce qu'il va y avoir ou non refonte de la carte? Pour nous, il n'en est pas question. Ce n'est pas acceptable et il faut que soit maintenue comme telle une commission complètement décisionnelle et qui n'a pas à recevoir de directives de la part des élus.

Ma proposition, M. le Président, c'est qu'on maintienne la loi telle qu'elle est actuellement, à laquelle nous ajoutons une étape préliminaire à la première étape prévue qui s'échelonne sur une année où les commissaires de la Commission de la représentation feraient une étude rapide, un peu de la même nature que celle qu'a pu faire le Directeur général des élections entre janvier et mars, et viendraient en commission parlementaire justifier et soutenir leur décision qui, fort probablement, après chaque élection, serait de dire qu'on va sauter, è l'occasion, que cette fois-ci ce n'est pas nécessaire, mais ils auraient le fardeau de venir justifier publiquement le fait qu'après, disons, dans le cas qui nous occupe, 1985, il n'y aurait pas eu de refonte de la carte électorale. À l'élection suivante, ils n'auraient pas à venir justifier s'il y en aura ou non; c'est automatique, il y en aura une. Aux deux élections, il est possible qu'il n'y en ait pas, mais ils doivent venir le justifier. La décision leur appartient. Mais ils viennent soutenir leur décision plutôt que la prendre en catimini et à huis clos tout simplement. C'est la proposition qu'on fait.

Donc, on maintient la loi telle qu'elle est, on ajoute une disposition, un peu de la nature de celle qui existait dans la loi de 1971, à l'article 7 qui disait: "La commission doit, dans l'année qui suit les élections générales au Québec, déterminer si les districts électoraux doivent être délimités de nouveau pour être conformes aux principes indiqués dans la présente loi et transmettre son avis au président de l'Assemblée nationale qui le communique aux députés dans les cinq jours au cours desquels sîège l'Assemblée après réception de cet avis. "Si la commission estime que des changements doivent être apportés, elle doit, dans les six mois qui suivent l'expédition de son avis au président de l'Assemblée nationale, lui présenter un projet indiquant les nouvelles délimitations qu'elle propose et le président doit les communiquer aux députés..." et patati et patata.

Pour nous, ce serait à peu près cela. De plus, si sa décision est de ne pas refaire la carte, parce que, finalement, on est peut-être capable, par deux ou trois exceptions additionnelles, de respecter les critères qu'on retrouve déjà dans la loi, elle nous le couche sur papier, elle vient soutenir cette décision cette "décision" et non pas cette recommandation - de la Commission de la représentation en commission parlementaire. Les députés peuvent échanger avec elle, la commission repart et c'est réglé. Nous, c'est la proposition que nous faisons. Pour nous, cela maintient les qualités et les caractéristiques éminemment positives des mécanismes actuels. Ce sont les commissaires, donc, dans la continuité, par une certaine permanence, dans le cadre d'une commission totalement et parfaitement indépendante du pouvoir politique à tous points de vue et dans un cadre qui fait qu'il y aura toujours obligation, après chaque élection, de se pencher sur l'évolution démographique électorale qu'a connue le Québec au cours des années précédentes. Là, je pense qu'on atteint aussi l'objectif du ministre qui est de dire: S'il y a moyen qu'on sauve quelques centaines de milliers de dollars, tant mieux. C'est évident que, nous, on ne s'opposera pas à ce qu'on puisse faire des économies, bien au contraire.

M. Gratton: Dans la proposition du député de Gouin, on dit: La commission, qui doit absolument demeurer permanente, viendrait justifier devant l'Assemblée nationale la nécessité ou pas de faire une délimitation. Supposons que la recommandation de la commission permanente est de ne pas procéder à une délimitation, la commission permanente va faire quoi jusqu'à la prochaine élection?

M. Rochefort: Elle fera ce qu'elle fait actuellement.

M. Gratton: Elle ne fera pas ce qu'elle fait actuellement, elle ne s'occupera pas d'élections municipales. En tout cas, l'Assemblée nationale étant souveraine jusqu'à l'adoption d'un projet de loi, si le député de Gouin me dit: Elle fera ce qu'elle fait présentement, c'est-à-dire attendre les décisions de l'Assemblée nationale quant aux amendements apportés à la loi, soit! Mais en termes d'exécution de travaux, elle fera quoi? Et où est la nécessité absolue de maintenir une commission permanente? Je pose la question, M. le Président.

M. Rochefort: M. le Président, je pense qu'il y a un peu de confusion dans la

discussion et il faut préciser les choses. On est sur quelque chose d'important. La commission permanente - on se comprend bien - ce sont trois commissaires dont le Directeur général des élections qui préside la commission. Le Directeur général des élections a été très précis ce matin. Quand il y a refonte de la carte, quand on entreprend le mécanisme de refaire les délimitations des circonscriptions électorales, là, on monte à douze ou treize personnes. Quand il n'y a pas refonte de la carte, il y a trois personnes chez le DGE. Le ministre nous a dit ce matin qu'il était d'accord pour dire qu'il faut quand même qu'on suive l'évolution, qu'on ait des dossiers toujours prêts. Ce n'est pas à la dernière minute que tu te mets à préparer une nouvelle carte; donc, cela nécessite quand même un certain personnel qui suit l'évolution démographique, les déplacements d'électeurs, les cartes et ces choses-là.

Pour nous, il faut bien se comprendre, la commission permanente, ce ne sont pas 82 000 personnes à temps plein. Au fond, même les commissaires sont disponibles en tout temps, mais ne siègent pas et ne sont pas rémunérés à temps plein. Ce n'est pas une fonction à temps plein, rémunérée à temps plein par l'État, d'être commissaire à la Commission de la représentation. Tu es payé pour ce que tu as à faire. Dans le cas qui nous occupe si, après l'élection de 1981, cela avait été le processus, ma proposition aurait été dans la loi, les trois commissaires se seraient réunis quelques jours à partir des données préparées par le personnel qui est là en permanence quand on ne fait pas de refonte, ils seraient peut-être venus passer une journée en commission parlementaire soutenir la décision et ils auraient refermé les livres jusqu'à l'élection suivante en ce qui concerne les commissaires.

Pour nous, M. le Président, je pense que c'est important de préciser là-dessus que ça concilie les différentes préoccupations, celle des coûts et celle du caractère permanent de la continuité, de la cohérence et de l'absolue nécessité de se questionner chaque fois pour aborder la question, à savoir s'il doit y avoir ou non refonte de la carte après chaque élection générale. On est sur la fréquence, mais je sens qu'on déborde beaucoup sur le caractère permanent. J'aurai peut-être autre chose à dire sur le caractère permanent. Est-ce que le ministre souhaite qu'on fasse ça maintenant ou pas? Je ne le sais pas, c'est à sa guise.

M. Gratton: M. le Président, peu importe ce qu'on a pu entendre ou ce qu'on peut conclure des informations quant aux coûts, j'ai de la difficulté à accepter que, si on a une commission permanente, il n'y ait aucun coût additionnel. Il y a trois personnes. À titre d'exemple, le secrétaire de la Commission de la représentation et le Directeur général des élections, à titre de président de la Commission de la représentation, reçoivent une rémunération additionnelle à titre de membres de la commission permanente. Il y a sûrement ce coût-là et ce n'est sûrement pas l'élément le plus important dans les coûts. On n'est sûrement pas en train de dire que, qu'on ait une commission ou pas, les coûts sont les mêmes. Dans la mesure où on veut vraiment faire notre travail consciencieusement par rapport à la disposition des fonds publics, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il faut se poser des questions sur la pertinence de maintenir une commission permanente qui pourrait, pendant huit ans, n'avoir qu'à venir justifier devant l'Assemblée nationale la décision de ne pas procéder à une délimitation. (15 h 45)

II me semble qu'avec un petit effort on pourrait sûrement trouver une formule qui pourrait satisfaire les appréhensions du député de Gouin, mais je commence à sentir que sa position est coulée dans le béton quant au caractère permanent de la commission. Si oui, je voudrais entendre les arguments qui l'amènent à cette position ferme autres que ceux qu'il m'a évoqués quant à la périodicité. J'avoue sincèrement que, dans le cas fort probable - c'est d'ailleurs ce qui s'est produit dans les années récentes - où il y a effectivement délimitation significative seulement après deux élections, je ne vois vraiment pas comment on peut justifier le maintien d'une commission permanente. Je suis prêt à déborder tout de suite, M. le Président, sur le... Je pense que c'est d'ailleurs le prochain élément ou peut-être pas... Alors, sautons et essayons de traiter les deux questions en même temps, si ça peut accélérer les débats.

M. Rochefort: M. le Président, mon collègue de Jonquière veut intervenir depuis un moment. Je reviendrai après,

M. Dufour: C'est surprenant...

Le Président (M. Filion): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: ...de pouvoir s'intégrer à la commission. Je prends tout de même bonne note que le ministre s'est engagé sur certains éléments où il faut absolument qu'il y ait consensus. Je constate que d'autres éléments sont apportés dans ce rapport qui font que, déjà, la décision est prise dans le sens que c'est certainement la Commission municipale qui va intervenir ou que, à l'avenir, c'est elle qui va s'occuper du processus électoral...

M. Gratton: Vous vous ferez expliquer cela par le député de Gouin.

M. Dufour: ...aux élections municipales. Je peux dire que j'aurai un certain nombre d'éléments à soulever à la Commission municipale dans ce temps-là.

M. Rochefort: On va en discuter avant la fin de la commission.

M. Dufour: Pardon?

M. Rochefort: On va en discuter avant la fin de la commission.

M. Dufour: Bon. On va en discuter avant la fin de la commission. Je dis déjà que j'aimerais apporter certains éléments là-dessus, d'abord, par l'expérience que j'ai vécue, par la connaissance de ce dossier et des rouages des commissions.

En ce qui regarde le processus de délimitation des circonscriptions électorales tel qu'il nous est proposé, je pense que, depuis le début, il y a un élément important qui semble nous échapper. On semble prendre le problème par la queue au lieu de le prendre par la tête. On a décidé, au départ, qu'il y avait des économies d'argent à faire. Depuis hier, j'entends parler du processus tellement important - pas seulement par l'Opposition, mais aussi par le gouvernement - de la démocratie municipale et de tout le respect de l'ensemble des citoyens. On a tenu ce langage pendant une journée et plus. Actuellement, c'est une question d'argent.

Comment fera-t-on pour concilier l'aspect financier d'une question et l'importance de la démocratie? La démocratie, ce n'est pas juste l'importance qu'on accorde aux citoyens, c'est aussi l'équité qui s'exerce envers les citoyens. À mon point de vue, si on veut enclencher le processus selon les besoins et si on laisse le processus fonctionner au fur et à mesure, à ce moment-là, il y a des coûts dont on aura à tenir compte ou dont on tient compte dans l'immédiat. Sinon, on empêche le processus démocratique de s'exercer.

S'il y a vraiment des anomalies, c'est qu'assez souvent cela a été occasionné par des prises de position à des commissions où tout le monde s'est entendu pour dire qu'il y avait des distorsions. Il y a eu des décisions ou des prescriptions selon lesquelles on acceptait que des comtés soient en dehors des normes. Il semble qu'on l'ait fait en 1983. C'était connu à l'élection de 1985. Après 1985, on s'est rendu compte qu'il y avait distorsion et qu'on devait apporter des correctifs à cette décision.

Donc, faire en sorte qu'un commissaire ou qu'une personne seulement soit à l'origine de ce processus de continuité dans les études qui nous amènent à prendre des décisions concernant cette délimitation ou ces délimitations différentes de circonscriptions électorales, à mon sens, c'est ne pas donner tellement d'importance à ces éléments clés.

On a déjà écarté du revers de la main le fait que, à l'avenir, la Commission municipale devra porter ce jugement. Mais il faut comprendre que la commission n'a pas seulement une fonction. Le Directeur général des élections et sa commission n'ont pas juste une fonction. Il y a aussi à travers ces élections tout le financement des partis politiques. C'est là un élément important. Cela prend du monde pour faire cela. Il n'y a pas juste la question de dire si les choses sont différences ou non. C'est vrai aussi au point de vue municipal. Il y a d'autres fonctions, et Dieu sait si la commission met de l'attention, met du temps pour effectuer ces opérations. Donc, on semble dire que seulement une personne va obtenir tout ce pouvoir. Il me semble que cela demanderait un peu de réflexion et qu'on devrait se dire: Est-ce qu'une personne peut faire cela ou est-ce qu'elle devrait détenir tous ces pouvoirs? Avoir deux ou trois commissaires à cette commission qui sièqent au fur et à mesure des besoins qui sont manifestés, qui ont à déterminer ou à justifier régulièrement leurs décisions ou leurs actions à une commission parlementaire, me semble beaucoup plus valable et plus intéressant, et répond beaucoup plus aux critères de la démocratie, comme vous voulez le proposer. J'ai peur que, si on laisse ces décisions-là seulement dans les mains des parlementaires, tantôt on ait des problèmes qu'on aura à vivre presque volontairement, en entrant dans un processus administratif, surtout dans les aspects très politiques.

Je pense qu'avant de rejeter la proposition qui a été présentée par mon collègue, il y a d'autres aspects et d'autres éléments qui nous seront apportés et qu'on devra étudier jusqu'au bout, pas juste en disant: Là, il y a une économie à faire et au diable la démocratie. Je pense que ce n'est pas ce que le ministre veut faire, j'en suis convaincu. Quelque chose doit lui avoir échappé quelque part. On dit dans un même souffle qu'on est pour la démocratie et en même temps qu'on est pour l'économie. Je sais comment on doit fonctionner dans des budgets. On fonctionne par objectifs. On a l'objectif que cela coûte moins cher. Après cela, on trace toutes nos démarches en fonction de l'argent dont on a à disposer. Je pense qu'il y a beaucoup trop de travail, d'efforts et d'énergies qui ont été mis dans le régime parlementaire dans lequel on vit pour qu'on remette tout cela en question en disant: Là, ce n'est plus juste une question d'un sou et d'une piastre.

Ce n'est pas parce qu'on ne tient pas à ce que les éléments financiers ne soient pas tenus en ligne de compte. Ce n'est pas l'élément principal, à mon point de vue. On pourrait ne rien faire. Cela ne coûte rien.

Mais est-ce que la démocratie serait mieux servie? Est-ce qu'on doit avoir juste une préoccupation? Et je pense que cette préoccupation est importante dans les jours qui nous occupent. D'une façon ou de l'autre, je n'ai jamais vu de gouvernement, que je sache, qui ait eu tellement d'argent qu'il ne savait pas quoi faire avec. En tout cas, je vous mets au défi de me trouver des années où les gouvernements ont tenu le discours suivant à la population: Venez piger dans les coffres, on a beaucoup d'argent.

Depuis que j'entends les hommes ou les femmes politiques parler de politique, cela a toujours été la même question: l'argent est rare, on est surtaxé, il ne faudrait pas qu'on dépense trop. On pourrait parler d'Alexandre Taschereau, en 1924, qui tenait ce discours. Le monde était surtaxé. Il aurait fallu qu'on apporte des changements quelque part depuis 1924, parce qu'en 1987 on n'a pas fait varier notre discours. On dit encore que le monde est trop taxé. On n'a jamais eu le courage de se dire entre nous: Est-ce que les services qu'on donne sont suffisants, sont bien donnés? À ce moment, on doit taxer. C'est un devoir et c'est une question de justice de le faire. Mais, si on donne de mauvais services, on taxe toujours trop. Si les gens sont prêts à recevoir ces services, je pense qu'ils doivent les payer. Je pense que les hommes politiques sont irresponsables jusqu'à un certain point quand ils disent: Vous payez trop de taxes. A ce moment, ils peuvent se demander s'ils font leur travail.

Pour moi, la réforme parlementaire est un élément extrêmement important de la démocratie tout court, de la démocratie au point de vue de l'Assemblée nationale, au point de vue électoral, que ce soit dans le domaine municipal, que ce soit dans le domaine du gouvernement québécois actuel. À mes yeux, on ne devrait pas se limiter à une question d'argent. Si, en fin de compte, le processus est suivi et si les objectifs qu'on poursuit sont corrects, à ce moment, si on peut épargner de l'argent, tant mieux. Mais si c'est pour épargner de l'argent, moi, je dis: On ne peut pas embarquer là-dedans. C'est plus important, à mon sens, qu'on applique un processus démocratique et que, comme responsables, comme élus, on décide ce qu'on veut. Par la suite, on ajustera l'argent. C'est cela, le prix de la démocratie. La démocratie se paie. Il y a des places où il n'y a pas de démocratie et cela ne coûte rien. Mais ce n'est pas là qu'on veut vivre. Il y a un processus qui est devant nous, qui est bien logique. À chaque élection, on aura à faire cette réflexion-là, on aura à décider ce qu'on fait, on aura à examiner et on aura à décider ensemble. La commission viendra nous dire ce qu'elle en pense, comment elle voit ce processus, mais ce n'est pas mathématique à chaque élection. Ce sera aux trois ou quatre élections. Il y a de l'argent qui sera économisée quelque part. Il ne faut pas éliminer cela du revers de la main. Bien non! Vous nous avez tenu un discours durant toute une journée, vous nous avez dit: Écoutez, c'est important la démocratie. C'est vrai que c'est important aussi pour nous. Nous, on dit: Il y a un prix à cela. Vous autres, vous dites: Non, on va rendre cela bon marché, on va couper les prix. Moi, je dis: Regardez le processus que vous déclenchez. Si vous le regardez en fonction des économies d'argent, à ce moment-là, la démocratie n'y trouvera pas son compte.

Je pense qu'on ne peut pas poursuivre deux objectifs en même temps. On doit les dissocier. Vous ne me ferez pas accroire qu'on peut parler de démocratie à 100 %, qu'on est de grands démocrates et qu'à ce moment-là on limite cela à un montant d'argent en disant: L'objectif qu'on poursuit, c'est d'économiser de l'argent. Tenons un certain langage et essayons d'ajuster cela d'après ce qu'on veut. Après cela, on fera l'analyse des coûts et possiblement qu'on va économiser de l'argent, mais on l'aura fait sans avoir sacrifié sur l'autel monétaire les grands principes démocratiques avec lesquels tout le monde veut s'identifier. Mais, parfois, quand on regarde la démarche qu'on poursuit, elle est loin d'être aussi mathématique et aussi vraie.

À mon sens, la réforme qui nous est proposée ou la suggestion de mon collègue de Gouin est acceptable et pourrait aller selon les objectifs que le gouvernement actuel poursuit, mais pas en éliminant systématiquement le processus qui a déjà fait ses preuves et qui demande sûrement à être amélioré, mais avec lequel il serait plus facile de vivre que les nouvelles méthodes qui nous seraient proposées.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Jonquière. Avant de passer la parole au député de Laprairie, je rappellerais aux membres de la commission qu'il nous reste 120 minutes de travaux avant l'échéance que nous nous sommes fixée, soit 18 heures ce soir, à moins que vous ne reveniez sur l'intention qui était la vôtre de ne pas siéger demain.

Nous en sommes au point II d'un document. Je comprends que tout cela s'imbrique et qu'au fur et à mesure qu'on avance, peut-être que les discussions seront moins longues sur chacun des sujets. Il demeure qu'il reste certains blocs importants qui n'ont pas encore été abordés.

Ces réserves étant faites, je passe donc la parole au député de...

M. Rochefort: M. le Président. Le Président (M. Filion): Oui,

M. Rochefort: J'ai un commentaire concernant vos avertissements, disons donc. Quant à nous, c'est clair qu'on aurait souhaité que cela soit réglé avant 18 heures, compte tenu des contraintes d'horaire que nous aurons demain. Mais, compte tenu de l'importance de la commission, c'est clair que nous serons ici demain, si nécessaire, parce qu'il faut que ce soit étudié de façon sérieuse et rigoureuse.

Le Président (M. Filion): Je passe donc la parole au député de Laprairie.

M. Saintonge: Oui, M. le Président. Je vais être bref quand même. Je veux soulever juste une notion. On semble bien sceptique vis-à-vis des possibilités pour l'Assemblée nationale de se prononcer parfois sur certaines décisions. Cela me paraît curieux parce que je pense que, comme député - en tout cas, personnellement - j'ai toujours tenté de m'impliquer et, quand c'étaient des questions non partisanes, d'avoir un esprit ouvert et non partisan. Je pense que, de prime abord, on ne peut pas présumer que l'ensemble des députés ne peuvent pas agir de cette façon.

Un deuxième point sur le sujet spécifique. Je n'ai pas compris que l'intention du ministre était de partir à l'envers, c'est-à-dire de dire qu'on veut économiser et qu'on veut aller là. On regarde l'expérience passée. On regarde ce qui se vit actuellement au Canada et dans certaines provinces canadiennes où cela se fait à tous les dix ans. Dans d'autres provinces, cela arrive après deux élections générales. Au Québec, la moyenne, si je ne m'abuse, est de huit ou neuf ans.

Le Président (M. Filion): En pratique.

M. Saintonge: En pratique. C'est après chaque élection, mais en pratique c'est huit ou neuf ans. Ce qu'on propose actuellement, c'est que cela soit après deux élections générales. Deux élections générales, cela correspond à huit ou neuf ans. Au Québec, la moyenne de la durée d'un mandat gouvernemental, si je ne m'abuse, jusqu'aux élections de 1985 - elle avait été calculée - c'était 42 mois. Donc, c'est trois ans et demi depuis la Confédération. J'avais lu cela dans un document public, mais je pense que je ne me trompe pas en disant que c'était environ trois ans et demi. Mettons-le à 45 mois, mais, si je me souviens bien, c'était 42 mois. Donc, c'est inférieur à cela, ce qui veut dire qu'une révision de la carte se ferait dans 42 mois; trois et demi plus trois et demi, cela fait sept ans. Normalement, la tradition veut que les élections se fassent à tous les quatre ans, même si le mandat de notre constitution est de cinq ans. (16 heures)

Cela ne cause pas de problème majeur. De dire que, dans certains comtés, il y a des inégalités après deux élections générales, je le perçois fort bien. C'est le cas, je représente l'un des comtés qui est visé. Après l'élection de 1981, on a donné pour le comté de Laprairie et le comté de Lévis des exceptions, mais je pense bien que les gens qui faisaient la délimitation savaient pertinemment bien... En tout cas, dès 1981-1982, j'étais convaincu que le nombre d'électeurs dans mon comté serait au-dessus de 50 000 pour l'élection suivante qui devait se tenir en 1984 ou 1985. Cela aurait pu peut-être aller en 1986. Mais c'était une chose connue. Ce n'était pas inconnu sauf qu'on veut avoir des changements moins fréquents, on veut aussi assurer une continuité de la carte, on veut que la population se retrouve. Mais je pense que c'est cela qui est fondamental, que les gens se retrouvent dans un comté. Les comtés ne sont pas modifiés pour deux élections. Certaines inégalités vont arriver, mais elles ne sont pas majeures. De comparer les exceptions les plus lointaines, c'est-à-dire les comtés les plus nombreux avec les plus petits, pour dire que, dans certains cas, c'est un vote qui en vaut deux, c'est une chose qu'on ne devrait pas faire parce qu'on devrait aller plutôt avec la moyenne parce qu'il est convenu qu'il y aura toujours des extrémités, des plus et des moins. Donc, la proposition est fondée sur l'expérience pratique de huit ou neuf ans au Québec, de dix ans parfois dans certaines provinces du Canada et, au minimum, dans d'autres provinces, sur deux élections qénérales; c'est ce qu'on veut amener. Cette situation-là va évidemment amener une diminution de frais importante. Cela a coûté environ 700 000 $ en 1981 pour dire: On regarde cela et on l'amène là, mais je ne pense pas que la démocratie va en souffrir. Cela m'étonnerait énormément qu'on puisse raisonner de cette façon-là. De deux en deux élections générales, on sait fort bien la propension que cela va prendre. L'important, c'est d'assurer la continuité. La continuité va s'assurer en minimisant les changements. Je ne pense pas que, démocratiquement, je le dis encore une fois, on diminue la perception qu'on pourrait donner aux gens en disant qu'on y va simplement aux deux élections. Ce sont mes remarques, M. le Président, dans cet élément-ci du débat.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Laprairie.

M. Gratton: M. le Président, si on me permet.

Le Président (M. Filion): Oui, M. le ministre.

M. Gratton: On pourrait constater qu'il n'y a pas consensus sur la proposition Rémillard.

M. Rochefort: À ce moment-là, M. le Président, j'ai une intervention à faire.

M. Gratton: Pardon?

M. Rochefort: J'ai dit: À ce moment-là, si on veut passer à autre chose, j'ai une intervention à faire.

M. Gratton: Ce que j'allais suggérer, c'est comme il n'y a pas d'urgence à ce que nous décidions de la disposition de la proposition du député de Gouin, qu'il semble vouloir maintenir très ferme sans trop d'ouverture, je dirais qu'il est inutile de poursuivre là-dessus ici pour essayer de cerner toutes les conditions de la traduction de sa proposition dans un texte juridique. Cela ne tire pas à conséquence sur les travaux pour la délimitation de la carte immédiate qui nous intéresse pour la prochaine élection. On pourrait y réfléchir chacun de son côté et, avant même qu'on présente le projet de loi pour modifier la loi actuelle au début de la prochaine session, on pourrait se revoir de façon formelle ou informelle et établir entre nous s'il y a des possibilités que nous puissions en arriver à un accommodement quelconque. Mais, pour le moment, constatons qu'il n'y a pas consensus et passons à autre chose.

M. Rochefort: M. le Président. Rapidement, d'abord, je dirai que, oui, je suis d'accord avec la conclusion du ministre pour autant qu'on s'entende bien, que cela aussi, même si cela ne se fait pas au cours des deux présents jours, se fera par consensus puisque ce sera dans le cadre du projet de loi du printemps.

Une voix: ....

M. Rochefort: Merci, M. le Président, c'est plus que j'en demandais. Les précisions, ce n'est pas nécessairement de la méfiance, cela évite la confusion ou l'interprétation par la suite. Merci, M. le Président.

M. Gratton: ...aussi souvent que possible, que nécesaire, mes intentions...

M. Rochefort: Deuxièmement, M. le Président, en ce qui nous concerne, comme je l'ai dit, notre proposition, oui, comme la ministre l'a compris, est toujours là, et nous proposons toujours cette modification qui, je pense, pourrait nous permettre d'atteindre bon nombre des objectifs qui étaient visés.

Je me permettrai, M. le Président, rapidement, de dire sur l'intervention du député de Laprairie, encore une fois, malheureusement, que je dois m'inscrire en faux avec l'essentiel de son intervention. Quand il nous dit que la continuité sera assurée par la minimisation du nombre de changements, oui, la continuité des distorsions, des iniquités...

M. Saintonge: Je n'ai jamais dit cela.

M. Rochefort: Rien oui, vous avez dit cela.

M. Saintonge: Vous interprétez des propos que j'ai dits, mais pas de la bonne façon.

M. Rochefort: M. le Président, je n'ai pas interrompu le député, je ne pense pas.

Non? Alors, je vais poursuivre. Donc, oui, c'est ce que vous avez dit.

M. Saintonge: ...

M. Rochefort: Non, mais on peut sortir le Journal des débats, si vous voulez. Oui, c'est ce qu'il a dit. Pour moi, on assure la continuité des problèmes, ce n'est pas la continuité des solutions. Deuxièmement, le député de Laprairie dit: Moi, je suis surpris de voir le député de Gouin nous dire que les élus ne devraient pas se pencher sur ces questions. Quand il y a des questions qui nécessitent de se mettre au-dessus de ta partisanerie, je suis capable de faire cela, etc. Mais, tel n'est pas le passé de l'Assemblée nationale du Québec. Il faut se rappeler ce que c'était avant 1979. J'avoue que je me souviens très bien d'un cas que j'ai vu non pas à titre de député mais à titre de citoyen. À la suite du rapport de la commission Drouin de ]972, puisque le rapport devait être traduit dans une loi, je me souviendrai jusqu'à la fin des temps d'avoir vu le leader parlementaire du gouvernement - et je ne nommerai pas les individus ni même les formations politiques en présence - je me souviens d'avoir vu le leader parlementaire du gouvernement qui pilotait le projet de loi et d'avoir vu le chef de l'Opposition ou d'une des formations politiques de l'Opposition proposer des amendements ici et là: ajouter telle ou telle municipalité à la proposition et retrancher telle ou telle municipalité ou tel quartier de milieu urbain. Le leader du gouvernement qui, visiblement et avec raison, n'était pas capable de décider parce qu'il n'avait pas entre les mains en Chambre... Cela se faisait en Chambre, et il regardait en haut dans les galeries où il y avait son organisateur électoral qui lui faisait siqne si, oui ou non, c'était acceptable. Cela ne fait pas 30 ans, c'était en 1972 ou 1973. Donc, moi, je dis non. On ne réinscrira pas un processus qui faisait défaut et qui est réglé aujourd'hui par les nouveaux mécanismes dont on s'est doté.

Pour moi, c'est absolument essentiel qu'on continue de fonctionner positivement comme c'est le cas actuellement et donc qu'on ne réinsère pas les élus dans des décisions qui auront un effet sur le découpage des circonscriptions électorales, donc, sur l'établissement du poids relatif des électeurs d'une circonscription par rapport à celui des électeurs d'une autre circonscription électorale.

Le Président (M. Filion): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le même sujet?

M. Saintonge: Je me retire.

Le Président (M. Filion): Je constate donc qu'en ce qui concerne la fréquence ou la périodicité de la délimitation la commission n'a pu atteindre un consensus sur les questions qui lui étaient soumises et je vous invite donc...

M. Rochefort: M. le Président, avant qu'on passe au point suivant, je pense que le ministre sera d'accord... En sortant de la commission ce matin, nous avons tous les deux eu une discussion avec M. Côté. Ce dernier nous disait qu'il avait peut-être des précisions à apporter à des coûts qui avaient été évoqués ce matin en dehors, justement, d'une discussion, d'un point précis. Ce serait peut-être l'occasion de lui permettre d'apporter cette précision. M. le ministre.

Le Président (M. Filion): M. le ministre, est-ce que vous seriez d'accord que M. Côté fasse part...

M. Rochefort: Du coût dont il nous a fait état ce matin.

Le Président (M. Filion): ...immédiatement des précisions sur les coûts à la suite des discussions de ce matin?

M. Côté.

M. Côté (Pierre-F.): Oui, M. le Président. Je suis content de l'occasion que vous me donnez parce que, peut-être, ce matin, y a-t-il eu confusion qui a résulté des explications que j'ai données qui n'étaient pas suffisantes, pas assez complètes. On a dit que le coût de la dernière carte, en avril 1985, en faisant certains calculs, pouvait être évalué à 700 000 $. On a établi ce chiffre de la façon suivante et c'est là où je n'ai pas fourni d'explications suffisamment claires. Si on dit que c'est 13,2 personnes, on arriverait au chiffre d'environ 450 000 $. Ce sont ajoutés à cela, pour arriver au chiffre de 700 000 $, 245 000 $ de prévisions pour 1986-1987. Avec cela, on arrivait au chiffre de 700 000 $. Ce qu'il faut bien réaliser, c'est que la carte de 1985, le coût de la confection de !a carte, des travaux de 1983-1985 est établi de la façon suivante: II y a eu de 7 à 8 personnes-années - on parle encore en termes de personnes-années, comme on l'a fait ce matin - au lieu de 13,2 qui ont travaillé, parce que le travail a été moins considérable. Quand on parle des prévisions pour 1987, il va certainement y avoir plus de travail à faire que pour la carte de 1983-1985. Le chiffre des coûts pour le personnel est de 234 225 $. On ajoute à cela les autres coûts - j'ai le détail ici, si jamais cela vous intéresse - de 8l 243 $, de sorte que la confection du rapport et de la dernière carte de 1985 coûte 315 468,24 $.

D'autres précisions. Dans les prévisions qui ont été mentionnées, il y a des prévisions de 245 000 $ pour 1986-1987. Je voudrais vous préciser que, sur ces prévisions, qui ont été établies l'an dernier, dans la perspective où on effectuait des travaux sur la carte électorale, il n'y a de dépensé jusqu'à maintenant que 31 030 $. L'autre point que je voudrais clarifier, parce que je n'ai certainement pas été assez clair, c'est le fait suivant: Quand on a parlé des 13,2 personnes, on a dit: Comme cela, il est possible d'envisager qu'il en reste 10 à ne rien faire. Je voudrais préciser comment on procède, en pratique chez nous.

Il y a une année où on met l'accent sur telle sorte de travaux et une autre année sur d'autres travaux. Par exemple, en 1987, on mettrait davantage l'accent, si c'était le cas, sur la fabrication de la carte électorale. Pour vous donner un exemple, parlons de quelle façon, une année portant l'autre, se font les affectations du personnel requis dans le domaine municipal. Pour nous donner certains chiffres, en 1985, 43 municipalités sur 127 ont été traitées; en 1986, 62 sur 149. En 1987, on en envisage, au lieu de 62, une trentaine sur 160, du fait que les élections municipales ne se tiennent pas à la même périodicité. On envisage, en 1988, recommencer avec un chiffre plus élevé, au-delà de 60 sur environ 160; mais, là encore, il peut y avoir plus de municipalités affectées.

Ces travaux fluctuent. Je me réfère toujours au chiffre des 10 personnes qui seraient en trop, si on peut employer cette expression. Il y a ces travaux découlant des responsabilités de la Loi sur les élections dans certaines municipalités. Vous savez, en 1978, il y avait trois municipalités assujetties; il y en a présentement 149. De plus, il y a des travaux de mise à jour des indicateurs, des travaux de délimitation des secteurs et leur mise à jour. Il y a le travail préparatoire pour les délimitations des districts électoraux municipaux, les rencontres avec les officiers municipaux, la publication de documents, les lettres aux municipalités, les envois de documents, les calendriers d'opération et les procédures de

délimitation.

Dans le domaine de la législation électorale, plus proprement dite, j'ai mentionné qu'il y avait trois secteurs d'activité: la carte électorale, la Loi sur les élections dans certaines municipalités et la Loi électorale. Il y a les travaux qui sont faits par ces personnes aussi sur la délimitation des sections de vote, la mise à jour des indicateurs des sections de vote, la cartographie des sections de vote, la préparation d'instructions à l'intention des directeurs de scrutin pour la délimitation des sections de vote et, finalement, l'aide au directeur de scrutin pour faire ce travail.

Je voudrais simplement illustrer par là, en vous donnant un certain nombre d'activités, que si j'ai dit qu'il y avait, par exemple, trois personnes l'an dernier qui ont travaillé là-dessus, c'était juste sur la carte électorale. Par exemple, depuis que les travaux sont suspendus, ce personnel ne reste pas à ne rien faire. En plus d'assurer ce qui a été mentionné, la continuité, il y a d'autres travaux dont ils assument la responsabilité. Ce sont les précisions que je voulais apporter, surtout celles concernant les budgets, les prévisions et les sommes effectivement dépensées. Je pense qu'il était opportun de le clarifier, j'ai peur de ne pas avoir été assez clair ce matin là-dessus. Je vous remercie, M. le Président. (16 h 15)

Les critères de délimitation et le nombre de circonscriptions

Le Président (M. Filion): Je vous remercie, M. Côté. Nous passons donc au chapitre suivant de notre travail. À ce moment-ci, je vous inviterais, comme moi, à constater qu'en ce qui concerne d'abord le rapport du Secrétariat à la réforme électorale, communément appelé le rapport Rémillard, le paragraphe 3 touche le nombre de circonscriptions et le paragraphe 4, les critères sociogéographiques. Dans le document de travail qui nous a été remis, de janvier 1987, ces deux paragraphes ont été regroupés dans une troisième tête de chapitre; Les critères de délimitation et le nombre de circonscriptions. À ce moment-ci, avec votre permission, je vais procéder à lire à la fois le paragraphe 3 et le paragraphe 4 du rapport du secrétariat et je vous inviterais à traiter des deux sujets en même temps. Est-ce que vous préféreriez que je...

M. Rochefort: Je ne sais pas si le ministre est d'accord, mais je préfère qu'on prenne cela sujet par sujet pour éviter qu'on en traite deux à la fois, ce qui, souvent, prend plus de temps que de faire les deux distinctement.

Le Président (M. Filion): D'accord. Est- ce que ça va? Nous allons donc nous concentrer à ce moment-ci sur le nombre de circonscriptions. En ce qui concerne le document de travail, les questions qui vous sont posées sont contenues à 111,1 et 111,2 du document de travail de janvier 1987, III,3 étant une question découlant plutôt du paragraphe 4 du rapport.

Le nombre de circonscriptions

Donc, en ce qui concerne le nombre de circonscriptions, il peut être ou bien fixé dans la loi ou bien obtenu en divisant le chiffre de la population par un quotient électoral prédéterminé. Cette seconde formule est celle actuellement prévue dans la loi. Selon l'évolution démographique et selon que les circonscriptions se situent plus ou moins près de la moyenne fixée, le nombre total de circonscriptions peut alors varier.

Il nous apparaît cependant que la première formule est préférable en ce qu'elle affirme de façon non équivoque la responsabilité de l'Assemblée nationale de déterminer les règles régissant sa composition et en ce qu'elle est plus simple et plus transparente, la population connaissant dès le départ le nombre de ses représentants.

Quant au nombre de circonscriptions, le nombre actuel de 122 pourrait être maintenu ou augmenté de quelques unités pour tenir compte de l'évolution démographique et laisser une certaine marge de manoeuvre à la commission. Une autre formule pourrait consister à laisser à la commission le soin d'arrêter le nombre de circonscriptions à l'intérieur de limites minimales et maximales fixées dans la loi. L'Ontario a adopté cette dernière formule en donnant mandat à sa commission de limiter entre 125 et 130 le nombre de circonscriptions électorales pour l'ensemble de la province.

Les questions qui nous sont soumises: "Le nombre de circonscriptions ne devrait-il pas être fixé d'avance dans la loi plutôt qu'obtenu en divisant le chiffre de la population par un quotient intellectuel..."

Une voix: Un quotient électoral.

Une voix: II n'y aura pas grand électeurs.

Le Président (M. Filion): Il ne faut pas sous-estimer le quotient intellectuel de l'électorat mais vous avez quand même raison, il faut lire: "par un quotien électoral prédéterminé, ce qui a pour effet de laisser flottant le nombre de circonscriptions? Si oui, le nombre de circonscriptions ne devrait-il pas être fixé dans la loi à 125 pour tenir compte de l'évolution démographique?"

M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, je pense qu'il y a consensus là-dessus, sur la réponse à la première question à savoir: Le nombre de circonscriptions ne devrait-il pas être fixé d'avance dans la loi plutôt qu'obtenu en divisant un chiffre de la population par un quotient électoral prédéterminé, ce qui a pour effet de laisser flottant le nombre de circonscriptions? À cette question stricte, sans préciser comment, on pourrait répondre oui tout de suite et passer à la prochaine question.

M. Rochefort: Je veux bien, mais quand va-t-on régler le nombre?

M. Gratton: À la question suivante.

M. Rochefort: Excusez-moi, je comprenais au point suivant. Oui, comme j'ai eu l'occasion de le dire dès mon discours sur la loi 23, nous sommes d'accord pour envisager le fait qu'on fixe carrément le nombre ou, en tout cas, la fourchette à l'intérieur de laquelle le nombre de circonscriptions électorales pourrait varier. Donc, on est d'accord avec la question 1.

Le Président (M. Filion): À savoir que le nombre de circonscriptions devrait être fixé d'avance dans la loi.

M. Rochefort: Oui.

Le Président (M. Filion): Cette question ayant eu sa réponse, je vous invite à fixer ce nombre.

M. Gratton: Si on me permet un commentaire là-dessus, je saisis l'occasion pour préciser pourquoi je demeure optimiste quant à l'évolution des esprits par rapport à certaines propositions qui ne font pas consensus présentement. Voilà l'exemple d'une argumentation qui a été faite en 1979, qui avait été rejetée par le parti qui forme maintenant l'Opposition et qui, aujourd'hui, est acceptée d'emblée sans discussion. Je me dis qu'il y a toujours de l'espoir et on le verra avec les années, comme le soulignait le député de Mille-Îles ce matin. Cela prendra cinq ans, six ans, sept ans, mais j'ai l'impression qu'on va en arriver éventuellement à revenir là-dessus.

Je vous cite très brièvement, M. le Président, le Journal des débats du 22 novembre 1979 où je posais ô ce moment, à titre de député de l'Opposition, une question au ministre responsable de la Réforme électorale qui était M. Marc-André Bédard, député de Chicoutimi. Je lui disais: "Ce qui m'intéresserait, c'est de savoir si le ministre est prêt à considérer la possibilité d'inscrire dans la loi un maximum quant au nombre de comtés." La réponse sibylline du ministre avait été: "Non, certainement pas."

Je constate, M. le Président, qu'on a évolué, qu'on a reconnu le bien-fondé d'une... Je faisais l'intervention de façon interroqative. Nous avions développé l'argumentation qu'à notre avis il n'appartenait pas à une commission indépendante des élus de déterminer le nombre de députés qui devaient siéger à l'Assemblée nationale. Je suis content que, de novembre 1979 à janvier 1987, neuf ans ou sept ans, je ne sais pas trop mais en tout cas... Cela prouve que cela finit par aboutir quand cela a du bon sens. Alors, allons-y, M. le Président.

M. Rochefort: On vous écoute sur la question suivante.

M. Gratton: Bien, la question suivante, il faudrait d'abord la lire.

Le Président (M. Filion): Oui. Cela a déjà été fait mais si vous voulez la reprendre...

M. Rochefort: On va la relire.

Le Président (M. Filion): Si oui, le nombre de - alors, on a déjà un oui -circonscriptions ne devrait-il pas être fixé dans la loi 125 pour tenir compte de l'évolution démoqraphique? Évidemment, c'est un chiffre.

M. Gratton: M. le Président, si on me le permet, il y a une possibilité qu'on a évoquée qui m'intéressait beaucoup plus que celle-là. J'ai demandé d'ailleurs, et j'en ai informé l'Opposition, au Directeur général des élections de nous préparer, pour cette commission, des hypothèses de travail. Dans le cadre où on lui demanderait de délimiter une nouvelle carte électorale, dans quelle fourchette pourrions-nous lui indiquer ce que seraient les minimums et maximums qui pourraient faire en sorte que la commission puisse procéder à une nouvelle délimitation sans faire disparaître de circonscriptions électorales dans aucune région et tout en limitant le plus possible le nombre de circonscriptions additionnelles aux 122 existantes? Cela m'intéresserait de connaître le résultat des réflexions du Directeur général des élections là-dessus.

M. Rochefort: M. le Président.

Le Président (M. Filion): Oui. M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Si le ministre me le permet, je souhaiterais faire une intervention avec son accord avant que le directeur général ne nous donne les réponses aux questions du ministre parce qu'il y a, dans un premier temps, pour nous une question de principe importante que je veux énoncer maintenant,

même si je dirai par la suite que, compte tenu des réponses du Directeur général des élections, on est prêt à regarder.

Pour nous, notre position est claire. On souhaiterait que le nombre de circonscriptions soit fixé à 122 dans la Loi sur la représentation électorale. On trouve qu'il est un peu anormal que, de révision en révision, même si la population électorale et la population globale du Québec sont à peu près semblables, le nombre de circonscriptions continue de progresser. Pour nous, on pense que, comme je l'ai dit dans mon intervention préliminaire, quand on se compare aux sociétés qui nous ressemblent quant au nombre, au territoire, tout cela, 122 députés pour représenter les Québécois à leur Assemblée nationale, c'est suffisant, il n'y a pas de problème là-dessus. Cela fonctionne. C'est parfaitement comparable è ce qui se fait ailleurs.

Deuxièmement, il y a aussi une question de principe. Au fur et à mesure où on dit: Oui, mais il ne faut pas qu'il y en ait trop, il faut dans la mesure du possible éviter qu'on abolisse des circonscriptions électorales... On sait que c'est un "mosus" de problème pour une formation politique ou pour un député de se faire annoncer que son comté est aboli ou pour une formation politique de dire: Écoutez, là on est rendu avec deux députés pour un seul comté, lequel des deux va-t-on prendre? On est conscient que cela peut créer des problèmes. On est peut-être disposé à regarder pour cette fois-ci, compte tenu des réponses que va nous faire le Directeur général des élections, mais je dis d'emblée, puisqu'un jour le ministre délégué à la Réforme électorale viendra peut-être nous citer quelles étaient nos positions neuf ou huit ans antérieurement... Pour nous, c'est clair que notre position de principe serait de dire: 122, point à la ligne, et ensuite c'est le nombre d'électeurs par comté qui variera par le haut plutôt que le nombre de circonscriptions électorales qui continue d'augmenter et le nombre d'électeurs qui varie de plus en plus, qui connaît des écarts de plus en plus grands entre une circonscription et une autre, et, donc, qui ajoute, qui atteint encore une fois le grand principe du poids électoral entre chacun des électeurs d'une circonscription à une autre.

Je souhaitais le faire parfaitement avant qu'on aborde la question particulière et précise du cas qui nous occupe cette année. Est-ce que cela prendrait 124 comtés pour encore une fois régler le problème d'élimination de circonscriptions électorales, ou patati, patata? Je vous dis qu'en termes de principe notre position est claire et, si telle était un jour la position du ministre, on serait prêt à légiférer tel quel: 122, point à la ligne, et le nombre minimum et maximum, autour du quotient de 25 % plus ou moins, devra aller à la hausse selon les variations démographiques. Pour nous, ce serait respecter nos principes et les grands principes qu'on veut voir retenus, respectés et appliqués dans l'ensemble des éléments de discussion qui sont devant nous.

Cela étant dit, on est prêt, évidemment, à entendre les réponses du Directeur général des élections et è rediscuter de la question d'une façon un peu plus précise cette fois-ci.

Le Président (M. Filion)s M. le ministre.

M. Rochefort: À l'intérieur, évidemment, de certains paramètres qu'on verra.

M. Gratton: Je ne voudrais pas moi non pour la postérité que nos propos prêtent à équivoque quant aux motifs qui nous amènent à suggérer une fourchette plutôt que de se limiter à 122. Il n'y a pas seulement le cas de la disparition de circonscriptions électorales actuelles. Il y a aussi le cas qu'évoquait le député de Jonquière ce matin concernant des chambardements trop nombreux qui peuvent survenir. On verra tantôt, quand le Directeur général des élections nous donnera ses informations, que si on se limite à 122 il y a beaucoup plus de circonscriptions électorales qui seront affectées, qui feront l'objet de modifications alors que, si on donne une certaine latitude à la commission, on élimine ces chambardements, surtout qu'on ne s'entend pas sur la périodicité. On voudrait éliminer autant que faire se peut des changements de paroisses qui, d'une élection è une autre, ne se retrouvent souvent pas dans la même circonscription.

Il nous semble que fixer un minimum et un maximum ne signifie pas que la commission doive nécessairement se rendre au maximum. Je pense qu'on pourrait indiquer très clairement ici à la commission que c'est le souhait des parlementaires qu'on se limite le plus possible à 122, à 123 ou a 124. Cette latitude qu'on pourrait accorder à la commission d'un minimum et d'un maximum, je pense, pourrait - et ce serait laissé à l'appréciation de la commission et sans aucune intervention, outre celle qui est prévue dans la loi, des parlementaires - être de décider de l'opportunité de porter à 125, à 124, à 123 plutôt que de le geler à 122.

Le Président (M. Filion): M. le Directeur général des élections, (16 h 30)

M. Côté (Pierre-F.): M. le Président, effectivement, on me l'a demandé et j'ai préparé certaines réflexions ou considérations si on fixe dans la loi le nombre des circonscriptions électorales. Je veux préciser peut-être au départ les points suivants: Les

données que je vais vous exposer sont basées sur l'hypothèse qu'on tient compte encore, dans ces hypothèses, du pourcentage de plus ou moins 25 %. Cela me semble important de le préciser, parce que si la donnée de critère numérique disparaît: II me semble quand même qu'à mon avis le plus ou moins 25 % doit demeurer. Si jamais ce critère disparaît, parce que cela ne veut pas nécessairement dire que cela va disparaître... Si on donne une fourchette, cela indique simplement le minimum et le maximum, sans nécessairement faire disparaître les critères numériques.

Deuxièmement, je veux préciser que les réflexions que je vais faire sont des considérations chiffrées. Pourquoi ai-je donné cette appellation et pourquoi ai-je fait la même mise en garde, si j'ai bonne mémoire, au mois de mars? C'est le même genre de réflexion que j'ai soumis au mois de mars et que je veux vous soumettre aujourd'hui. Ces considérations ne sont basées que sur des données mathématiques. Or, il ne faut pas oublier que la responsabilité de la commission, cela va apparaître surtout dans la troisième réflexion que je vais vous faire, la troisième hypothèse d'un maximum de 125 circonscriptions. La commission, dans le passé et jusqu'à présent, a tenu compte - et, à mon avis, elle devrait continuer à le faire - du deuxième alinéa de l'actuel article 3 de la loi, qui dit qu'il faut fonder les décisions en tenant compte de considérations, et on en énumère un certain nombre: l'ordre démographique, géographique, sociologique, la densité de la population, le taux relatif de croissance de la population. Peut-être qu'il faudrait être plus explicite sur nos considérations. On l'a fait un petit peu dans le rapport de 1985, mais à la suite des échanges de ce matin, on pourrait peut-être se permettre d'être plus explicite sur notre analyse, disons relative, de croissance de la population, même si c'est la base des électeurs que vous avez décidé de maintenir ce matin.

Donc, les hypothèses seraient les suivantes. J'élimine pour le moment, mais je pourrais y revenir si vous le voulez... Je peux bien vous le donner, mais il y a des... Je pense à 123, 124, 125 circonscriptions, à l'hypothèse d'une fourchette. Si on retenait l'idée de 123 circonscriptions, les conséquences pourraient être les suivantes...

M. Rochefort: 123.

M. Côté (Pierre-F.): 123. Je vais être clair. Je ne veux pas me substituer aux responsabilités de la commission. Ce sont des considérations chiffrées et je les donne sous toutes réserves. Les conséquences seraient l'ajout d'une circonscription sur la rive sud de Montréal et une autre sur la rive nord de Montréal.

M. Rochefort: Je m'excuse, mais est-ce que vous avez un document où c'est...

M. Côté (Pierre-F.): Ce sont des notes que j'ai ici.

M, Rochefort: D'accord. Alors, vous dites deux de plus...

M. Côté (Pierre-F.): Je vais aller plus tranquillement si vous me le permettez.

M. Rochefort: Deux de plus...

M. Côté (Pierre-F.): Deux de plus dans la région de Montréal, une sur !a rive nord et l'autre sur la rive sud, et il y a une hypothèse très sérieuse pour maintenir le nombre à 123, c'est la possibilité d'élimination d'une circonscription sur l'île de Montréal.

M. Rochefort: À 123?

M. Côté (Pierre-F.): C'est cela. Le nombre de circonscriptions affectées par cette limite de 123 serait au minimum de 43 circonscriptions dans l'ensemble de la province. Évidemment, cela aurait comme conséquence des changements assez considérables sur l'île de Montréal et particulièrement au centre de l'île de Montréal. Sur l'île de Montréal, il se produit le phénomène suivant: Il y a une diminution de la population et une augmentation des électeurs globalement et, au centre de Montréal, il y a une diminution des électeurs et on retrouve une augmentation aux deux extrémités de l'île.

Le Président (M. Filion): Pourriez-vous être plus précis quand vous dites "au centre de Montréal"?

M. Côté (Pierre-F.): Oui.

Le Président (M. Filion): Le centre de l'île ou le centre de la ville?

M. Côté (Pierre-F.): Le centre sud. Je vais demander qu'on retrouve le document, si vous me permettez.

Le Président (M. Filion): Je ne veux pas le nom des comtés, je veux savoir si c'est le centre de l'île,où...

M. Côté (Pierre-F.): C'est ce qu'on appelle, nous, le centre sud, le centre au sud de l'île.

Le Président (M. Filion): D'accord.

M. Côté (Pierre-F.): C'est là où il y a une diminution d'électeurs. L'hypothèse de 124.

M. Rochefort: Je veux juste m'assurer qu'on suit bien. Donc, si je résume: 123, cela veut dire deux circonscriptions de plus dans la région de Montréal, une sur la rive nord et l'autre sur la rive sud, et une de moins sur l'île de Montréal et 43 circonscriptions environ seraient affectées et il y aurait des changements considérables sur l'île et plus particulièrement au centre de l'île de Montréal. Cela, c'est la conséquence de 123.

M. Côté (Pierre-F.): C'est cela, M. le député.

M. Rochefort: D'accord. Maintenant, l'hypothèse de 124.

M. Côté (Pierre-F.): Pour 124 circonscriptions, si on tient compte de considérations toujours...

M. Rochefort: Je m'excuse! Juste une minute!

M. Côté (Pierre-F.): Je vous en prie. M. Rochefort: Avec 123... M. Côté (Pierre-F.): Oui.

M. Rochefort: ...il y en a seulement une sur l'île de Montréal qui disparaîtrait dans tout le Québec.

M. Côté (Pierre-F.): Oui. Si vous me le permettez, je peux peut-être le dire tout de suite, j'aurais peut-être dû le dire avant, si on maintenait 122...

M. Rochefort: C'est cela.

M. Côté (Pierre-F.): ...il y en aurait au moins deux d'éliminées.

M. Rochefort: Vous pouvez aller à 124, mais j'aimerais que tantôt vous nous disiez 122...

M. Côté (Pierre-F.): On pourrait revenir à 122.

M. Rochefort: Oui.

M. Côté (Pierre-F.): D'accord. Avec 124, toujours sur des considérations chiffrées, il y aurait la création de deux circonscriptions, toujours l'une sur la rive sud de Montréal et l'autre sur la rive nord de Montréal. Il y aurait, à ce moment-là, dans l'ensemble de la province 37 circonscriptions touchées. Ce sont les commentaires que j'ai à faire sur 124.

Avec 125, cela permettrait toujours d'ajouter les deux mêmes circonscriptions dans les deux mêmes régions plus - et la, cela dépendra des considérations de la commission qui tiendraient compte des critères, plus particulièrement des critères du deuxième alinéa de l'article 3, je parle des critères socio-économiques, démographiques et le reste. Ici, je vais être plus précis parce qu'il y a une analyse très appronfondîe qui reste à faire. L'ajout de la troisième circonscription pourrait se faire dans la région de Québec. Il y a deux hypothèses dans la réqion de Québec: sur la rive sud ou sur la rive nord, mais pas pour les mêmes raisons. Sur la rive sud, ce serait pour des considérations d'ajustement des chiffres, d'ajustement mathématique et, sur la rive nord, afin qu'il n'y ait pas modifications dans un trop grand nombre de circonscriptions. La situation évolue de la façon suivante dans la région de Québec. On envisage qu'il y a au moins une dizaine de circonscriptions qui sont touchées. Il y a un phénomène particulier, juste pour donner un exemple, qui est très compliqué dans la région de Québec, ce qu'on appelle la grande région de Québec. Il y a Charlevoix, par exemple, qui descend dans Montmorency et Montmorency qui empiète sur des comtés de la région de Québec. Seulement pour vous donner un petit exemple: on parlait ce matin d'une municipalité... Le phénomène se pose pour Beaupré, par exemple, qui est un casse-tête pour toutes les cartes et qui le sera pour la prochaine carte. Ces considérations peuvent peut-être, si le maximum était de 125, amener la commission è dire: Très bien, on va réagencer les circonscriptions dans la région nord de Québec en créant une nouvelle circonscription pour éviter de trop grands chambardements par effet d'entraînement et on pourrait réajuster - là encore je le donne sous beaucoup de réserves - la rive sud de la région de Québec, c'est-à-dire la région de Lévis, en diminuant - mais là encore je ne vous cache pas que ce sera des moyens maux de tête - la grosseur de la circonscription électorale de Lévis.

M. Dufour: Combien y en aurait-il d'affectées, avec 125?

M. Côté (Pierre-F.): Ah! Le nombre de circonscriptions affectées dans l'ensemble de la province avec 125 serait d'environ 35. Mais, par ailleurs, ce que je veux préciser quand je donne le nombre de circonscriptions qui peuvent être affectées, c'est que pour 123, le nombre de circonscriptions affectées est non seulement plus grand, mais les changements sont considérables. En augmentant à 124 ou 125, le nombre de circonscriptions diminue, mais les changements sont aussi moins considérables, cela va de soi, cela a un effet d'entraînement.

Je vois le député des Îles-de-la-Madeleine, si je ne me trompe pas, qui est présent, on tient toujours compte du fait que les îles, dans ce que je viens de donner,

constituent une exception.

M. Rochefort: Mais cela fait toujours l'objet d'un consensus entre les membres de l'Assemblée.

M. le Président, on revient à 122, peut-être.

M. Côté (Pierre-F.): On peut revenir à 122. On pourrait envisager deux sortes d'hypothèses dans le cas de 122. On pourrait dire qu'on ne touche à rien. Je pense que vous avez exprimé assez clairement ce matin quelles seraient les conséquences. Il y aurait des exceptions phénoménales et on n'atteindrait pas les objectifs qu'on veut atteindre. Un bon nombre de... On pourrait théoriquement aboutir à un découpage qui soit purement numérique et, à ce moment-là, cela veut dire des chambardements assez considérables.

Mais l'autre hypothèse serait la suivante. On peut créer des circonscriptions mais, pour pouvoir en créer et rester à 122 et tenir compte du nombre d'électeurs, des critères numériques, il faut au minimum envisager la création de deux circonscriptions, toujours sur la rive nord et la rive sud de Montréal, et l'élimination au moins de deux circonscriptions au Québec, une à tout le moins, comme je l'ai mentionné, sur l'île de Montréal et les deux autres qu'il faudrait étudier et peut-être choisir entre l'une et l'autre - il y en a seulement une à laquelle il faudrait réfléchir longuement - dans la région de la Gaspésie et la région des Cantons de l'Est. Dans ce cas, si on maintenait 122 circonscriptions, il y aurait beaucoup de changements d'apportés sur l'île de Montréal. Évidemment, je devine qu'il y aurait un certain nombre de protestations ou de réactions devant l'hypothèse d'éliminer certaines circonscriptions. Je pense bien qu'il n'y a personne à qui cela sourirait beaucoup d'aboutir à cette solution.

D'autre part, dans cette hypothèse du maintien du nombre de 122, il y aurait au moins une cinquantaine de circonscriptions qui seraient affectées considérablement.

Voilà les considérations chiffrées que je voulais vous soumettre et sur lesquelles on s'est penché. Évidemment, je pense que j'en ai assez dit, mais je veux souligner en terminant que ce ne sont que des considérations chiffrées qui ne tiennent pas compte de deux facteurs qui me semblent extrêmement importants. Le premier, je l'ai mentionné, tient compte d'autres critères qui sont déterminés dans la loi, mais l'autre facteur qui me semble très important, qui n'est pas le moindre et dont la commission a toujours tenu compte, c'est la tournée de consultation non seulement auprès des membres de l'Assemblée nationale mais auprès de la population. Jusqu'à maintenant, la commission ne peut pas faire autrement. Non seulement c'est dans la loi, mais je dirais que c'est une question de bon sens. On ne peut pas faire autrement, en acheminant vers des recommandations, que de tenir compte de cela. C'est la raison des tournées qu'on fait, qu'exige la loi et qui nous sont -on l'a réalisé - toujours très profitables. On apprend une foule de choses sur place. Par exemple, si jamais on entreprenait le travail prochainement, nous envisageons la tournée de façon assez importante dans les régions qui seraient particulièrement touchées. S'il y a une région du Québec qui, dans nos recommandations, ne serait pas beaucoup touchée, il ne serait peut-être pas nécessaire de s'y rendre. On pourrait éviter des coûts à ce moment-là. Mais, pour les endroits qui seraient touchés, on le ferait. Donc, ce sont des considérations dont les membres de la commission doivent tenir compte.

Une voix: Moi, j'ai une question.

Le Président (M. Filion): D'accord. Je vous en prie.

M. Côté (Pierre-F.): Cela va, M. le Président. Je suis prêt à répondre à des questions mais je n'ai pas d'autres considérations pour le moment.

Le Président (M. Filion): Pardon?

M, Côté (Pierre-F.): J'ai dit que cela va, je n'ai pas d'autres considérations pour le moment. S'il y a d'autres questions, je suis prêt à répondre.

Le Président (M. Filion): D'accord. Le député de Mille-Îles s'est inscrit pour une question, M. le directeur général. (16 h 45)

M. Bélisle: M. le directeur général, on parle constamment de nombre, de ratio, de critères de population, de croissance démographique, de déplacement de clientèle, de mobilité de personnes et tout le reste. Les critères sont dans la loi et, quand vous faites des hypothèses semblables, ce sont des projections qui sont faites à partir de données que vous constatez sur le terrain et aussi à partir de tendances. Ce que je veux savoir c'est: Quels sont les critères de permanence des solutions envisagées? Vous nous dites: On recommanderait peut-être 123, 124 ou 125. Est-ce que, quand vous faites ta recommandation, vous envisagez que celle-ci devrait avoir une longueur de vie applicable de trois ans, de quatre ans, ou si, quand vous faites votre projection ou votre calcul, vous le faites pour huit ans, neuf ans ou dix ans? Pour moi, cela a une importance et une incidence a contrario sur toute la discussion qu'on a eue aujourd'hui et hier. Je vois très bien les deux positions, d'un côté et de

l'autre de la table, selon lesqelles, pour assurer une permanence, il faut faire certains travaux, et, d'un autre côté, H y a une question de coût, et tout le reste. Mais si vous demandez à quelqu'un qui fait des projections de tendance, un démographe, ou quelqu'un qui regarde une situation... Je reviens toujours au comté de Vimont, à Laval, ou au comté du député de Terrebonne que tout le monde connaît très bien, ou au comté de Rousseau, au comté additionnel qu'on veut ajouter sur la rive nord, région que je connais beaucoup mieux. Je me dis que, quand on fait une proposition sur le nombre de circonscriptions électorales, on ne fait pas une proposition simplement pour une période de quatre ou cinq ans, pour une élection, on essaie de s'assurer que les bassins de population et que les circonscriptions électorales, quant à leur nombre, puissent demeurer pour une beaucoup plus longue période de temps. Je pense au long terme, dans mon esprit, en termes économiques, si vous aimez mieux. Ce n'est pas du moyen terme, c'est du long terme. Huit ans ou neuf ans, c'est du long terme, dans mon esprit.

Je voudrais que vous m'assuriez, M. le Directeur général des élections, que ces hypothèses, quand vous nous dites 123, 124, 125 ou 122, vous les avez faites dans l'esprit que dans, les huit, neuf ou dix prochaines années - en tenant compte de ce qu'on a vécu au cours des cinq dernières années, ce qui est assez probant: augmentation phénoménale sur la rive nord, augmentation phénoménale sur la rive sud, décroissance au centre-ville géographique de Montréal - cela nous assure d'une certaine permanence dans le nombre, qu'on ne sera pas obligé, après les prochaines élections générales, de revenir et de recommencer tout ce scénario. J'aimerais que vous me livriez vos réflexions là-dessus.

M. C6té (Pîerre-F.): Je dirais, M. le député, que c'est passablement difficile de répondre.

M. Bélisle: Je vous pose la question, M. le Directeur général des élections.

M. Côté (Pierre-F.): Je vais être très prudent dans la réponse que je vais vous donner, vous donner une réponse précise. On pourrait peut-être essayer de le faire en se replaçant il y a quelques années. Il faudrait que j'y repense et que je revoie cela avec mes gens. Est-ce qu'on aurait pu prévoir, par exemple, les déplacements de population, le vieillissement des électeurs, la diminution démographique? Est-ce que, il y a dix ans, on aurait pu prévoir tout cela pour essayer de voir dans quelle situation on en est rendu aujourd'hui? Cette décroissance, par exemple, de la population sur l'île de Montréal qui est de moins 7 % avec une augmentation des électeurs de plus 4 %, est-ce que, cela, on aurait pu le prévoir? Aurait-on pu prévoir que dans le centre sud de Montréal il y aurait cette diminution?

M. Bélisle: Oui...

M. Côté (Pierre-F.): Avec les tendances démographiques, peut-être, mais sur la période d'années que vous demandez, de huit ou dix ans, je ne suis pas très sûr. Si vous me le permettez, je vais voir avec mes collègues si je peux vous donner...

M. Bélisle: Je m'excuse de la question...

M. Côté (Pîerre-F.): Non, non, elle est importante et je voudrais vous donner la réponse la plus juste possible.

M. Bélisle: Vous comprendrez, M. le Directeur général des élections, que la question que je pose a trait à tout le mécanisme de permanence de la révision de la carte électorale, aux bassins de population et aux tendances passées. Si vous me parlez du centre-ville de Montréal, je pourrais argumenter très longtemps avec vous...

M. Côté (Pierre-F.): Je vais vous donner un exemple concret. Cela me passe par la tête et cela peut illustrer, je pense, ce que j'essaie de dire. Je ne crois pas qu'il y a quelques années on aurait pu prévoir cette espèce d'explosion sur la rive sud rie Québec. La croissance aurait pu se faire un peu plus en d'autres endroits sur la rive nord de Québec? Or, elle s'est faite davantage sur la rive sud. Même si vous me dites qu'on connaissait l'existence des deux ponts, il n'y en avait qu'un autrefois et il y en a maintenant deux. Cela facilite. Il y a des exemples comme ceux-là dont on peut tenir compte. Je ne suis pas très sûr qu'on aurait pu dire, il y a une dizaine d'années, qu'on serait placé dans cette situation.

Il y a peut-être des régions au Québec où on peut l'établir plus facilement, à faible croissance, peut-être en Gaspésie, au Lac-Saint-Jean. On peut peut-être prévoir le taux de croissance, l'anticiper davantage, mais, encore là, si on regarde la région de Bécancour ou de Sorel et que tout à coup une usine surgit de terre, des gens déménageront là et feront augmenter la population électorale et le nombre d'électeurs. Il y a tellement de facteurs qui entrent en liqne de compte que je ne me risquerai pas à vous dire, en fixant le nombre de circonscriptions de façon définitive, qu'on le fait pour 10, 15 ou 20 ans.

M. Bélisle: Si vous n'êtes pas capable

de dire que vous le faites pour 10, 15 ou 20 ans, est-ce que je dois présumer que c'est à moyen terme, c'est-à-dire que vos prévisions, vos projections sont sur une base de cinq ans habituellement?

M. Côté (Pierre-F.): Oui.

M. Bélisle: Est-ce cela qu'on peut tenir pour acquis?

M. Côté (Pierre-F.): Oui. C'est plus sûr pour ma part de vous répondre cela parce que je m'en voudrais de vous donner une autre réponse qui ne soit pas suffisamment fondée sur des données. Si vous me le permettez, je peux avoir un petit conciliabule avec mes adjoints pour voir s'ils sont d'accord parce qu'il y a des spécialistes qui peuvent m'apporter des éléments supplémentaires. Juste deux minutes, si vous me le permettez.

M. le Président...

Le Président (M. Filion): M. le

Directeur général des élections, la parole est à vous.

M. Côté (Pierre-F.): ...je pense que, pour répondre de façon beaucoup plus précise et adéquate à la question posée, dire autre chose que les remarques que j'ai faites où les prévisions sont plutôt à moyen terme, quand on parle d'une période de quatre ou cinq ans, ce serait cet après-midi m'aventurer trop loin. Ce que je peux faire, si M. le député le désire ou si c'est le désir de la commission, c'est regarder davantage cette question et vous soumettre éventuellement des considérations plus précises. Pour le moment, je n'oserais pas m'aventurer plus loin.

Le Président (M. Filîon): D'accord. Pendant qu'il y a des consultations de part et d'autre...

M. Rochefort: Les consultations sont terminées. On est prêt. Vous voulez parler?

Le Président (M. Filion): J'ai quand même le goût, non pas d'intervenir, mais de vous poser une question. Dans toutes les hypothèses, que ce soit 122, 123, 124 ou 125, il y a la création, si l'on veut, de deux comtés, un sur la rive sud de Montréal et l'autre sur la rive nord de Montréal. Dans ce sens-là, sans nommer de comté, est-ce que vous pouvez être précis? Quand vous parlez de la rive sud de Montréal, est-ce que vous parlez de l'est ou de l'ouest? Quand vous parlez de la rive nord de Montréal, est-ce que vous parlez de l'île de Laval ou plus au nord?

M. Côté (Pierre-F.): En ce qui concerne le nord de Montréal, c'est au-delà de l'île Jésus - l'hypothèse, tes considérations actuelles - et, en ce qui concerne la rive sud, c'est plutôt l'ouest de la rive sud.

Le Président (M. Filion): C'est ce que je croyais. Je vous remercie. Est-ce qu'il y a d'autres questions? D'autres interventions?

M. Gratton: M. le Président.

Le Président (M. Filion): Oui, M. le ministre.

M. Gratton: Quant à moi, j'aurais une préférence à formuler ou à indiquer. D'abord, je suis très heureux qu'on soit d'accord pour fixer le nombre des circonscriptions dans la loi. Cependant, je ne suis pas enclin à recommander qu'on en fixe le nombre précis. J'ai écouté ce qu'a dit le Directeur général des élections sur les conséquences de fixer à 122, 123, 124 ou 125 le nombre de circonscriptions. Si on devait décider ici à la commission que c'est 123 ou 124, déjà, on s'insérerait dans le processus de délimitation en disant à la commission: Voici, nous préférons qu'il n'y ait pas de comtés qui disparaissent ou qui soient ajoutés dans l'île de Montréal, à Québec ou ailleurs. Donc, on priverait la commission de cette indépendance dont elle doit jouir pour continuer d'assurer le processus démocratique dans ce domaine.

Cela m'amène à dire qu'on devrait plutôt opter pour une fourchette, minimum, maximum. D'autant plus que l'on parle de chiffres que l'on connaît à partir du dernier recensement électoral. Mais on ne veut pas cette loi seulement pour la prochaine carte électorale. La loi doit servir à des délimitations qui seront faites tous les huit ans ou à toutes les deux élections, si la décision est maintenue.

Une voix: Pardon?

M. Gratton: Si la décision est maintenue. On n'a pas le consensus, effectivement, mais on a dit qu'on reparlerait de la possibilité de faire justifier par la commission sa décision de procéder ou pas à une nouvelle délimitation.

M. Rochefort: Donc, on considère qu'il y aura refonte après chaque élection.

M. Gratton: Il y aura possiblement... Mon doux Seigneur! Je pensais que cela était acquis.

M. Rochefort: Vous avez dit que ce n'était pas clair.

Une voix: Ce n'est jamais acquis, M. le ministre.

M. Gratton: C'est acquis depuis !e mois de décembre. En tout cas. Ce que je veux dire par là, c'est que, en élargissant le plus possible cette fourchette dans le domaine du raisonnable, on se donne la possibilité de procéder de cette façon. Mais, si on fixe cela tout de suite à 122, 123 ou 124, on sait d'avance ou presque quels seront les résultats pour la prochaine carte électorale et on peut presque dire d'avance que cela impliquera soit une nouvelle délimitation, soit des amendements à la loi quant au minimum et au maximum ou quant au nombre de circonscriptions après la prochaine élection. Je dis et je fais la proposition que nous fixions dans la loi un minimum de 122 circonscriptions, un maximum de 125, et que la commission soit libre d'agir à l'intérieur de ces paramètres pour la prochaine délimitation qui s'enclenchera très prochainement. On pourra ensuite réévaluer le tout au lendemain de la prochaine élection.

M. le Président, je le fais aussi pour une autre raison qui est extrêmement importante. Le Directeur général des élections a fait valoir que non seulement le nombre de nouvelles circonscriptions ou le nombre de circonscriptions qui seraient appelées à disparaître serait moins grand si on donne cette latitude, mais aussi que le nombre de modifications aux circonscriptions et l'importance des modifications seraient également atténués dans la mesure où la commission pourra jouir de cette latitude.

M. Rochefort: M. le Président, quant à nous, nous sommes prêts à appuyer la proposition du ministre pour fixer dans la loi un minimum de 122 et un maximum de 125 circonscriptions avec pleine, entière et totale latitude à la Commission de la représentation pour choisir. Évidemment, il est entendu que nous maintenons les critères numériques actuels de 36 000, plus ou moins 25 % dans la loi. C'est à l'intérieur de cela que la commission va jouer, on s'entend bien?(17 heures)

M. Gratton: M. le Président, ce n'est pas comme cela que moi je le comprends. Je pense au contraire que la latitude doit...

M. Rochefort: On maintient plus ou moins 25 %. D'accord.

M. Gratton: Oui. Le nombre des ratios...

M. Rochefort: C'est cela. Le nombre de 36 va bouger...

M. Gratton: Va bouger selon le chiffre.

M. Rochefort: D'accord, mais on s'entend qu'il y aura toujours un plus ou moins 25 %.

M. Gratton: Oui, qui ne changera pas.

M. Rochefort: D'accord, on maintient cela. Je m'excuse, on s'entend bien.

Cela va? Je me permets de poser une question au directeur. Législativement, cela va?

M. Côté (Pierre-F.): Vous me permettrez un commentaire. La solution qui est proposée va dans la ligne des réflexions que j'ai faites, la fourchette. Le maintien des 25 % me semble passablement important pour voir quelle est la marge de manoeuvre avec laquelle va travailler la commission.

M. Rochefort: Adopté,

M. Gratton: II y a un élément pratique à cette disposition. C'est qu'on n'aura pas besoin de faire agrandir le salon bleu pendant quelques années.

M. Rochefort: Oui, mais, déjà, trois sièges, cela pourrait être compliqué. C'est ce qu'on se demandait.

M. Dufour: Cela coûte presque aussi cher que ce qu'on veut épargner...

M. Rochefort: D'ailleurs...

M. Gratton: On a trouvé une partie de la solution. J'ai un plan de réaménagement des banquettes qui implique le député de Gouin.

M. Rochefort: J'en suis très heureux. M. le Président, juste une question sérieuse, de bonne foi. On se rappellera que l'ancien député de Laval était un homme très préoccupé par le coût de la création d'un nouveau siège à l'Assemblée nationale. Est-ce que le ministre délégué à la Réforme électorale a évalué la conséquence financière de porter à 125, par exemple, le nombre de députés?

M. Gratton: En fait, nous avons fait l'extrapolation que, si nous ne le fixions pas dans la loi, on risquait de se retrouver avec beaucoup plus que 125. Donc, on vient de réaliser une économie importante.

M. Rochefort: Par rapport au coût si on ne le fixait pas. Mais, par rapport a 122, il y a des coûts reliés à cela et ils n'ont pas été évalués.

M. Gratton: II ne s'agit pas de changer le chiffre 122 dans la loi par 125 présentement. Dans le moment, la loi, malheureusement, à mon corps défendant, en 1979, prévoyait que c'était laissé en l'air. Cela dépendait strictement d'une opération mathématique. On vient la circonscrire. Je

pense que c'est une décision qui s'inscrit dans la bonne voie.

M. Rochefort: Adopté,

Le Président (M. Filion): Boni M. le député de Mille-Iles.

M. Bélisle: Oui. M. le Directeur général des élections, moi, j'accepte volontiers ce que vous m'avez proposé tantôt. Ainsi, j'aimerais recevoir un petit document, pas trop long, de votre part, concernant les objectifs, les tendances et les projections que vous faites, comment vous les faites, parce que j'ai encore une question, dans le fond de mon esprit, fondamentale, quant à tout ce qui se fait là-dessus. J'aimerais avoir, pas un long document, mais un court document pour nous satisfaire sur le plan intellectuel.

M, Rochefort: M. le Président... Le Président (M. Filion): Oui.

M. Rochefort: Sur la question du député de Mille-Îles. Je comprends bien que la réponse sera fournie aux membres de la commission.

M. Bélisle: Je prends l'intérêt du député de Gouin.

Le Président (M. Filion): Non, non. C'est plus simple que cela.

M. Rochefort: Ce n'est pas l'intérêt. Ce n'est pas moi qui posais la question.

Le Président (M. Filion): Les documents sont déposés à la commission.

M. Bélisle: D'accord, d'accord.

M. Rochefort: Si je ne l'ai pas posée, c'était volontaire.

Le Président (M. Filion): M. le

Directeur général des élections, à la suite un peu de ce que vous avez soulevé comme possibilité, la commission apprécierait recevoir ces documents, à la suite de quoi elle distribuera, évidemment, une copie à chacun des membres de la commission.

Cela dit, il me fait plaisir de constater qu'un consensus s'est dégagé sur les points 3 et 4...

M. Rochefort: Non, non.

Le Président (M. Filion): Laissez-moi terminer.

M. Rochefort: D'accord. Mais, à 3 et 4, je cherche où est le consensus.

Le Président (M. Filion): Les points 3 et 4, en ce qui concerne la première partie de ce que je viens de dire, à savoir que le nombre de circonscriptions électorales ne soit pas inférieur à 122 ni supérieur à 125...

M. Gratton: M. le Président...

Le Président (M. Filion): Oui, allez-y.

M. Rochefort: Je cherche vos points 3 et 4.

M. Gratton: Vous faites référence au paragraphe du document, alors que je pense que le député de Gouin, lui, fait référence. aux questions du document de travail.

M. Rochefort: Dans les deux documents, je cherche quel est le point 4 sur lequel il y a un accord.

Le Président (M. Filion): On étudiait... M. Gratton: M. le Président...

Le Président (M. Filion): D'accord. Je vais lire le consensus et je pense qu'on va se comprendre; Que le nombre de circonscriptions électorales ne soit pas inférieur a 122 ni supérieur à 125, en maintenant la variation de plus ou moins 25 %. Est-ce que c'est suffisamment clair à votre point de vue?

M. Rochefort: Oui, oui.

M. Gratton: Surtout s'il y a consensus. Oui, cela me paraît clair, mais donnons-nous la possibilité de le relire, une fois que cela sera ...

Le Président (M. Filion): D'accord, parfait. Bien, cela sera fait au procès-verbal de notre...

M. Rochefort: Mais, compte tenu de ce qu'on s'est dit à la séance de travail, M. le Président...

Le Président (M. Filion): D'accord, peut-être. C'est cela.

M. Rochefort: ...on va adopter le procès-verbal avant de se quitter parce que cela va enclencher un processus qui ne doit pas porter à confusion ni à interprétation.

Le Président (M. Filion): D'accord. Je vous pose la question: Est-ce que c'est nécessaire d'inscire, à votre point de vue, qu'il ne doit pas être inférieur à 122? C'est parce que je me demande... Moi, j'aime bien quand je dis...

M. Rochefort: C'est la proposition du

ministre. C'est clair dans mon esprit qu'on aurait pu dire simplement un maximum de 125.

M. Gratton: Minimum 122, maximum 125.

Le Président (M. Filion): Oui, c'est parce que je voyais le maximum de 125.

M. Rochefort: Moi, j'ai bien compris...

Le Président (M. Filion): ...que cela faisait partie, que c'est important... Bon, cela va.

M. Gratton: Non, parce que, si on ne détermine plus le chiffre de 36 000, on pourrait se retrouver avec 100 circonscriptions. La commission pourrait décider que dorénavant c'est 50 000 électeurs par comté, plus ou moins 25 %.

Le Président (M. Filion): D'accord. Je répète ce qui sera inscrit au procès-verbal sur le contenu du consensus.

M. Gratton: Vous ne venez pas d'ouvrir le débat là-dessus?

M. Rochefort: Sur le nombre de comtés à la baisse?

M. Gratton: Minimum 122, maximum 125.

Le Président (M. Filion): Le dernier Parlement qui a baissé son nombre de comtés c'est juste avant la fin de la démocratie grecque. Ce que je veux dire par là, c'est que je n'ai jamais vu un Parlement diminuer le nombre de ses députés.

M. Dufour: Mais on a vu des conseils municipaux voter pour diminuer le nombre de conseillers.

Le Président (M. Filion): Bon, peu importe. Le consensus est donc que le nombre de circonscriptions électorales ne soit pas inférieur à 122 ni supérieur à 125, en maintenant la variation de plus ou moins 25 %.

Les critères saciogéographiques

Je vous invite donc maintenant à traiter des critères sociodérnoqraphiques, c'est-à-dire la question 3 de la partie III et la partie 4 du document du secrétariat que je vous lis: "Les critères sociogéographiques, qui s'ajoutent aux critères mathématiques imposés à la commission, visent essentiellement à ce que la représentation soit juste et équitable non seulement en termes mathématiques mais aussi dans le respect des réalités géographiques et sociales de la communauté d'intérêts d'une population donnée. "Au nombre de ces critères, le respect des limites des municipalités revêt une importance particulièrement grande puisqu'il s'agit de l'unité de référence la plus significative pour la majorité des citoyens. Compte tenu qu'une partie des modifications apportées à chaque nouvelle délimitation vise justement à adapter les frontières des circonscriptions électorales aux changements des limites des municipalités, notamment à la suite des annexions et regroupements de territoires, il serait opportun de prévoir un mécanisme d'ajustement automatique dans ces cas de façon à ce qu'aucune municipalité ne se retrouve partagée entre deux ou plusieurs circonscriptions lors d'une élection survenant entre deux délimitations."

M. le ministre.

M. Gratton: Le Directeur général des élections, dans ses réflexions sur le rapport Rémillard, reconnaissait d'emblée que les changements des limites des municipalités constituaient un problème réel auquel il est opportun d'apporter une solution satisfaisante. En effet, une partie des modifications apportées à chaque nouvelle délimitation repose justement sur le respect de ce critère, le respect des limites des municipalités, et consiste à adapter les frontières des circonscriptions aux changements des limites des municipalités, notamment à la suite des annexions et regroupements de territoires. Il est donc opportun de prévoir un mécanisme d'ajustement automatique dans ces cas de façon à éviter qu'aucune municipalité ne se retrouve partagée entre deux circonscriptions lors d'une élection survenant entre deux délimitations ou afin d'éviter qu'on doive procéder à une nouvelle délimitation strictement parce qu'il y a eu des changements dans les délimitations des municipalités.

Cette recommandation repose sur les considérations suivantes: Premièrement, que la loi impose à la commission de respecter les limites des municipalités dans la délimitation des circonscriptions électorales, également, l'analyse des modifications apportées à la carte électorale, en 1985, démontre que plusieurs de celles-ci visaient essentiellement à procéder à de tels ajustements aux nouvelles limites municipales sans par ailleurs affecter un nombre important d'électeurs. On l'a vu en détail tantôt - je ne sais trop - mais un très vaste pourcentage des modifications impliquait moins de 500 électeurs et visait justement à faire coïncider les limites des districts électoraux avec les limites des municipalités qui avaient subi des changements soit par annexion, soit par fusion. Il est important de

souligner qu'un tel mécanisme d'ajustement automatique aux limites municipales s'applique déjà à la délimitation des municipalités régionales de comté.

Notre recommandation, d'ailleurs, vise à transposer dans le domaine de la délimitation des circonscriptions électorales le mécanisme d'ajustement des limites des MRC. Pour faciliter la compréhension de la procédure proposée... Cela peut aller?

La transposition de cette procédure au domaine de la délimitation des circonscriptions électorales ne semble poser aucun problème législatif particulier puisque la description des limites des circonscriptions électorales est publiée dans la Gazette officielle du Québec. Il s'agirait, dès lors, d'inclure dans la loi une disposition semblable à celle contenue dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et de modifier les dispositions pertinentes du Code municipal et de la Loi sur les cités et villes. Ce mécanisme d'ajustement automatique des limites des circonscriptions électorales à la suite des annexions et regroupements des municipalités ne peut mettre en péril le principe de l'égalité de la représentation.

Il y a également un autre avantage. Si on devait s'entendre éventuellement sur la formule que proposait le député de Gouin quant à l'obligation ou à la nécessité pour la commission de venir justifier une décision de procéder ou non à une nouvelle délimitation, cela ferait une raison de moins de devoir procéder à une délimitation si, automatiquement, tous les changements de territoires des municipalités avaient déjà été incorporés à la carte électorale. Le Directeur général des élections faisait valoir, par contre, à juste titre, que de telles modifications automatiques ne devraient s'appliquer qu'au moment d'une élection générale et non au moment d'une élection partielle. Cela va de soi. La loi pourrait inclure une disposition à cet effet.

M. Rochefort: M. le Président, j'avoue que de rendre automatiques des modifications à la carte électorale à partir de changements de territoires des municipalités, cela me pose un problème qui est le suivant: Oui, c'est naturel, normal et parfaitement cohérent que le territoire d'une municipalité régionale de comté soit automatiquement modifié lorsque le territoire d'une municipalité est modifié parce que la MRC doit englober les municipalités, qu'elle est composée des municipalités et qu'y siègent les maires de l'ensemble des municipalités qu'on retrouve dans le territoire de la MRC. On ne pourrait pas se retrouver avec des territoires de MRC qui ne sont pas conformes à des territoires de municipalités regroupées. Mais, pour moi, ce n'est pas un automatisme à établir au niveau de la délimitation des circonscriptions électorales.

Pour moi, il y va un peu de la souveraineté de l'Assemblée Nationale et d'éviter justement que, le caractère automatique étant introduit, des gens - on sait que ce n'est pas exclu - aient des préoccupations de fusion municipale à d'autres fins qu'à des fins municipales, finalement.

M. le Président, je pense qu'il ne doit pas y avoir de caractère automatique. Deuxièmement, pour nous... Y compris dans le cadre de la proposition que je faisais au ministre, quand je disais que nous serions d'accord pour qu'il n'y ait pas nécessairement refonte de la carte après chaque élection et que la Commission de la représentation vienne nous dire: Écoutez, on pense que, cette fois-ci, ce n'est pas nécessaire. On pourrait très bien, dans ce même rapport où la commission nous dirait que ce n'est pas nécessaire cette fois-ci, nous dire que, par contre, vu que c'est toujours, de 400 a 500 électeurs, ce ne sont pas des chambardements qui ont des effets à rebondissement sur d'autres circonscriptions électorales. La commission nous dirait: Voici 32 circonscriptions électorales auxquelles on ferait des modifications automatiques, sans consultation, sans tournée, qui correspondent aux modifications que les municipalités ont pu connaître. Par exemple, on ajoute 200 électeurs ici, 400 là, 500 là, mais il n'y a pas d'effet boomerang qui fait qu'il y a douze circonscriptions qui sont révisées, et, que là, il faut aller consulter les gens et tout cela. Cette étape-là est normalement réalisée au moment de la fusion. Mais, pour nous, c'est important, d'autant plus, M. le Président... D'ailleurs, mon collègue, le spécialiste du monde municipal, le député de Jonquière, me corriqera si je dis une absurdité, mais d'autant plus que, si jamais le ministre donne suite à sa décision de plutôt confier à la Commission municipale du Québec qu'à la Commission de la représentation, la délimitation des districts électoraux municipaux, je pense qu'il y a là, justement, nécessité de bien distinguer l'un et l'autre, et, donc, puisque c'est la Commission municipale qui interviendra à ce niveau, je pense qu'il est préférable qu'on maintienne un droit de regard à la Commission de la représentation. (17 h 15)

En conclusion, pour moi, pas d'automatisme, mais on est d'accord pour dire que, compte tenu de la nature des changements et des effets des changements, cela pourrait très bien être intégré dans un rapport qui dit que, dans le fond, il n'y a pas de modification à la carte, mis à part une liste qui n'est pas débattue, qui n'est pas soumise à une consultation, à un nouveau recensement électoral, etc., et qui, au fond, arrive aux mêmes fins qu'à celle de l'automatisme, mais qui est quand même le fait d'une décision de la Commission de la

représentation.

Le Président (M. Filion): Est-ce que quelqu'un désire intervenir du côté ministériel? M. le ministre?

M. Gratton: M. le Président, je ne comprends pas l'inquiétude du député de Gouin, d'abord, quant à la pertinence de cette intention que nous avons de faire relever les questions de la représentation électorale de la Commission municipale. Je ne vois vraiment pas la pertinence. Je ne vois pas où cela affecte de quelque façon la délimitation des circonscriptions électorales provinciales. Ce qu'on dit finalement, c'est que la Commission de la représentation doit respecter les limites des municipalités. C'est un critère qui est inscrit dans la loi, dans la définition des circonscriptions électorales provinciales. On a des statistiques, on a les données sur ce qui s'est passé au cours des dernières années. Il serait peut-être bon de les verser au dossier, M. le Président.

Il faut se demander si l'ajustement automatique des limites des circonscriptions électorales, à la suite des annexions et des regroupements des municipalités, peut mettre en péril le principe de l'égalité de la représentation qui se traduit dans la loi par l'imposition de certains critères mathématiques. La loi prévoit en effet que les populations de différentes circonscriptions doivent tendre à se rapprocher d'un quotient moyen tout en admettant un écart de plus ou moins 25 % de cette moyenne. Il faut dès lors évaluer l'impact d'un mécanisme d'ajustement automatique sur le respect de ces normes fixées dans la loi. Les données fournies par le ministère des Affaires municipales révèlent que, depuis 1970, donc depuis seize ans, seulement 7 regroupements ou fusions sur 91 impliquaient des municipalités comprises dans des circonscriptions électorales différentes, parce qu'il faut bien le dire, pour deux municipalités qui fusionnent ou des annexions qui se produisent à l'intérieur d'une même circonscription électorale, il n'y a pas de mécanisme automatique à prévoir. C'est seulement là où les limites actuelles ou futures de ces regroupements ou annexions débordent sur plus d'une circonscription que le mécanisme d'automatisme dont on parle s'appliquerait.

Donc, il y avait seulement 7 regroupements sur 91 qui impliquaient des municipalités comprises dans des circonscriptions électorales différentes. Sur l'ensemble des regroupements effectués, quatre seulement impliquaient des populations de plus de 5000 habitants. Quant aux annexions proprement dites, elles n'impliquent le plus souvent pas de population du tout, puisqu'il s'agit de territoires non organisés qui sont ainsi annexés par une municipalité.

Dans les autres cas, la population affectée ne dépasse guère quelques milliers d'habitants. Il est donc fort peu probable que l'ajustement automatique des frontières des circonscriptions aux nouvelles limites des municipalités ait un impact important sur l'équilibre des populations entre les circonscriptions. Au pire, l'ajout de la suppression d'une portion de population dans une circonscription pourrait avoir pour effet de porter le chiffre total de la population de cette circonscription en dehors des limites de plus ou moins 25 % du quotient moyen, faisant ainsi tout simplement de cette circonscription une circonscription d'exception. Ce cas extrême ne diffère cependant pas du cas d'une circonscription qui devient d'exception entre deux délimitations par suite de son évolution démographique. C'est pourquoi il ne nous paraît pas opportun de prévoir un mécanisme de dérogation au processus d'ajustement automatique proposé, comme le suggérait le Directeur général des élections dans ses réflexions.

Il me semble qu'on pourait alléger les choses de beaucoup si on prenait la proposition du député de Gouin à l'inverse. Qu'on laisse et qu'on inscrive ce mécanisme d'ajustement automatique, qui existe déjà pour les limites des municipalités régionales de comté, qu'on l'inscrive dans la loi et que tout cas d'exception auquel cela donne naissance puisse faire l'objet du rapport dont parle le député de Gouin à l'Assemblée nationale par la Commission de la représentation. Il me semble que cela serait beaucoup moins lourd. Pourquoi la Commission de la représentation devrait-elle se soucier de cas qui impliquent, la plupart du temps, strictement des annexions de territoires non organisés ou strictement des fusions de municipalités qui impliquent quelques centaines d'électeurs? Lorsque cela n'a pas pour effet de faire déborder les limites de plus ou moins 25 %, en quoi cela pourrait-il poser des problèmes? D'autant plus que cela ne s'appliquerait qu'à compter de la prochaine élection générale et non pas pour toute élection partielle qui pourrait survenir entre-temps.

Je le propose dans un souci d'alléger et de répandre à ce que le Directeur général des élections lui-même considère comme un problème auquel on devrait apporter une solution satisfaisante. Je ne sais si le Directeur général des élections voudrait commenter cette possibilité. Ce n'est pas une question de principe, je n'y tiens pas mordicus, mais il me semble que cela va dans le sens de la simplification des travaux et du processus sans pour autant remettre en cause aucun des acquis de la loi actuelle.

Le Président (M. Filion): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: La proposition que nous avons devant nous veut circonscrire les délimitations électorales aux municipalités. Vous ne dites pas "autant que possible", vous dites que cela devrait être circonscrit aux municipalités. Vous donnez deux critères ou deux éléments différents, à mon sens: vous parlez des MRC et vous parlez des municipalités. Il est possible, même dans l'état actuel, qu'une municipalité soit suffisamment peuplée pour exiger qu'il y ait plus d'un comté. La limite d'une municipalité, pour compléter une circonscription électorale, pourrait affecter d'autres municipalités ou englober, à l'intérieur de la circonscription, d'autres municipalités. C'est donc une municipalité qui ne pourrait pas répondre au critère qui est devant nous selon lequel on doit respecter autant que possible les limites d'un comté.

Regardons ce qui s'est passé dans Chieoutimi. Je ne sais pas si vous avez regardé la façon dont le comté est délimité; il y a eu une annexion, à ce comté. Regardez la carte électorale pour voir ce que cela donne comme effet.

Personnellement, je trouve que c'est presque tiré par les oreilles. Il n'y a pas beaucoup de monde. Que 200 ou 250 personnes fassent partie d'un comté plutôt qu'un autre, au point de vue démocratique et au point de vue des résultats, cela ne m'affecte pas beaucoup. Est-ce qu'on doit parler de limites distordues? Je comprends qu'on a le critère de la population, mais on a des dessins curieux quand on regarde le comté.

En tout cas, vous n'avez pas la carte dans vos poches, vous ne connaissez pas beaucoup... Je vous mets au défi de trouver où commence et où s'arrête le comté de Chicoutimi justement parce qu'on a voulu établir une relation entre la limite de l'étendue géographique et l'aspect du vote. J'ai vécu dans une municipalité qui a été divisée comme cela. Une partie de la municipalité - c'était la municipalité d'Arvida dans le temps - appartenait au comté de Chicoutimi. On a annexé et on a fait retraverser Arvida qui, à ce moment-là, faisait partie du comté de Jonquière. C'est aussi arrivé avec Saint-Jean-Eudes, où il y a eu une fusion qui affectait de 3000 à 3500 personnes. Encore là, on a essayé de délimiter un secteur électoral.

Pour moi, cela représente certaines difficultés. De fait, s'il y a plus d'un député dans une municipalité, comment faire pour l'ajuster? S'il n'y a pas assez de monde, comment faire pour compléter un comté? Comment faire pour le balancer? Cela fera encore un comté qui fera exception, j'imagine. On ne peut pas couper une municipalité et il y a des municipalités qui sont coupées par des rivières, des éléments géographiques. C'est bien plus important qu'une limite électorale comme on le propose. À mon sens, un élément géographique est bien plus important pour changer la mentalité d'une population qu'une limite électorale fictive ou qui peut varier d'une fois à l'autre, justement à cause du fait qu'on peut faire varier les nombres. C'est juste la question d'ajuster la population; c'est moins loin, à mon sens, qu'en prendre dans un comté ou dans un autre. En fait, cela fait partie du Québec et je ne vois pas de raison majeure d'utiliser cela automatiquement.

Quand on parle des MRC, je n'ai pas à me faire l'interprète de mon collègue de Dubuc, son comté fait partie de la MRC du Fjord-du-Saguenay, mais la petite municipalité de Sagard fait partie de Charlevoix. Sagard a demandé une annexion è Petit-Saguenay, ce qui n'a pas été accordé encore par la Législature. Ils font partie du comté de Charlevoix, donc, ils sont plus près de Petit-Saguenay que de Charlevoix, mais c'est comme ça. Si on veut ajuster les comtés, il faudra enlever du comté de mon collègue la municipalité de Sagard qui a déjà manifesté la volonté d'être annexée ou d'être fusionnée à la municipalité de Petit-Saguenay.

Il y a beaucoup de MRC aussi au Québec qui contestent leur appartenance. Est-ce que cela veut dire qu'on ne pourra plus changer quoi que ce soit? Plus on met de barrières - pas psychologiques, mais réelles - par des actions ratifiées par la Législature, plus c'est difficile de changer des choses. Je connais beaucoup de MRC qui contestent actuellement leur appartenance et qui disent: On devrait être ailleurs, on ne devrait pas être là. Ces MRC n'ont pas un vécu de plusieurs années. Donc, avec le temps, est-ce que des changements seront apportés qui feront qu'on devra réajuster encore tout le processus? Ce n'est pas coulé dans le béton; 94, 96 ou 98 MRC, rien ne nous garantit actuellement qu'il en sera ainsi. C'est ce qui a été établi au départ, mais est-ce que ce sera toujours ce nombre?C'est une autre histoire. Si on est pour ajuster automatiquement les comtés aux délimitations comme telles, c'est peut-être ce qu'on devrait faire idéalement, mais, au point de vue pratique, je ne suis pas convaincu qu'on n'établisse pas encore une procédure. On a dit: Moins de lois, moins de rèqlements, mais on vient de plus en plus réglementer la vie et l'organisation des citoyens. Est-ce qu'on atteint le but qu'on se fixe au départ? Je pense que cela s'inscrit dans toute la grande démarche, à mon point de vue. Encore là, quand il y aura deux comtés dans la même municipalité et que ce comté-là ira dans une autre municipalité, comment va-t-on faire?? On dit qu'il faut tenir compte des limites territoriales de la

municipalité. Comment fait-on pour diviser cela? Il y a des municipalités très grandes au Québec et, pour fins d'ajustement de comtés, qui pourraient traverser d'un comté à l'autre sans causer de dommages majeurs pour l'application de la démocratie, Des municipalités de 86 kilomètres carrés, c'est quelque chose, ce n'est pas complètement habité. On ne parle pas de la région de Montréal. C'est toujours facile de parler des régions de Québec ou de Montréal où il y a plus d'habitants que la moyenne du Québec, mais il y a d'autres endroits où il n'est pas si facile de parler d'ajustements. De temps en temps, pour compléter un comté, vous attachez tellement d'importance à cela, il faut qu'on aille emprunter à d'autres endroits, et, si la Commission de la représentation ne peut pas procéder ou doit demander un avis, une permission ou un amendement à la loi pour ce faire, je pense qu'on place des barrières qui rendent cela difficilement applicable. À mon point de vue, les embûches qu'on a, c'est que les territoires des MRC ne sont pas automatiques actuellement, ils ne sont pas coulés dans le béton et ils n'ont pas assez de vécu pour être considérés comme des territoires immuables.

Deuxièmement, dans les municipalités qui ont des populations... C'est un peu normal quand on regarde les populations qui ont grossi nos villes. Mais on assiste au phénomène contraire... De quelle façon pourrait-on ajuster ou tenir compte ou est-ce juste un voeu pieux? Je me demande pourquoi on l'inscrirait dans la loi.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Jonquière. M. le ministre. (17 h 30)

M. Gratton: Très brièvement, M. le Président, je voudrais bien qu'on se comprenne. Nous ne proposerons pas d'ajouter un nouveau critère dans la loi. Ce critère du respect des limites des municipalités existe déjà. Tout ce que nous disons, c'est que dans le but de faciliter le respect de ce critère nous inscrivons un élément d'automaticité quant à cet ajustement que la commission doit faire en fonction de la loi actuelle. Il existe déjà des municipalités qui sont incluses dans deux circonscriptions électorales différentes. Notamment, je représente seulement une petite partie de la ville de Gatineau dont la majeure partie est plutôt dans la circonscription de Chapleau.

Finalement, des critères, il y en a plusieurs; celui du respect des limites des municipalités en est un seulement. La Commission de la représentation a le devoir de les respecter dans la limite où cela ne l'amène pas à créer des circonscriptions qui dépassent cette moyenne d'électeurs qui est présentement de 36 000, plus ou moins 25 %, mais qui sera d'un chiffre qui correspondra à la division de la population électorale par le nombre de 122, 123, 124 ou 125 selon ce que la commission décidera.

Donc, M. le Président, ce que nous proposons ici, c'est strictement de rendre cet ajustement automatique. Je souhaiterais qu'on en dispose dans les meilleurs délais. Il ne s'agit pas de réinventer la roue, mais simplement de faciliter et d'alléger le processus de la délimitation.

Le Président (M. Filion): M, le député de Lapraîrie, vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Saintonge: Simplement, j'appuie en entier les propos du député de Gatineau. Le député de Jonquîère m'a inspiré ces propos. C'est contenu dans l'article 3 de la loi. Il y a un élément supplémentaire qui est important: cela contribue à intéqrer les citoyens dans leur nouveau milieu. On sait que, souvent, il y a un ajustement ou une modification de délimitation qui ne touche que quelques milliers ou quelques centaines d'habitants. Ici, à l'article 3 de la loi, on parle des frontières naturelles du milieu, ainsi que des limites des municipalités. Si, par exemple, à la suite d'une annexion, une partie d'une municipalité se trouve dans un autre comté, en l'amenant dans le comté principal où la plus grande partie de la population se trouve, je pense que vous facilitez l'intégration au nouveau milieu de vie des citoyens avec l'annexion.

On a souvent vécu, à la suite d'annexions ou de regroupements, des divergences d'opinions où on a tenté de maintenir des divisions artificielles. Enfin, elles deviennent artificielles, mais les divisions étaient là antérieurement. Si on veut vraiment regrouper les citoyens, si on veut leur donner la chance de participer au même milieu, il faut leur donner un même député au provincial. Ils ont affaire aux mêmes critères, aux mêmes normes et à ce moment je pense que cela irait de soi, ce serait un mécanisme d'application souple qui reconnaîtrait un élément qui est inscrit dans la loi actuellement et qui donnerait un plus aux municipalités en question. Je pense que toute la question des MRC est hors du propos d'ajustement...

Une voix: II en a parlé.

M. Saintonge: Oui, il en a peut-être parlé, mais je veux dire d'ajustement de MRC au niveau de... Pardon?

M. Dufour: Une MRC, c'est une municipalité au sens de la loi.

M. Saintonge: Oui, une municipalité régionale de comté. Je ne veux pas aller trop loin, mais il reste que chaque MRC est

constituée de municipalités. C'est cela qu'il faut retenir. Il n'y a pas de vote qui se fait dans une MRC. Il y a un vote au point de vue municipal. Dans une municipalité, vous avez un budget proprement municipal, il y a des délégations de certaines fonctions à une MRC qui est une entité administrative, à ce moment, distincte d'une entité de fonctionnement où les citoyens se retrouvent autour d'un corps public précis qui est le plus près d'eux qui est la municipalité, pas la MRC. Je pense que c'est dans ce sens qu'il faut le soutenir. C'est ce que j'avais à dire, M. le Président.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie, M. le député de Laprairie. M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Oui, M. le Président, nous aussi, on est prêts à conclure sur cette question. D'abord, je veux dire au ministre qu'on n'a pas de craintes qu'on utilise cela à des fins incorrectes. On n'a pas de "bebites" par rapport à cela.

M. Gratton: Pas dans ce cas-là.

M. Rochefort: Laissez-moi terminer mon intervention. Vous m'imitez de plus en plus dans vos précisions.

M. Bélisle: Est-ce un mauvais exemple à suivre?

M. Rochefort: Non. Moi, les précisions ne m'indisposent pas, mais je m'aperçois que le ministre commence à prendre cela un peu comme pli.

M. Dufour: II aime cela.

M. Rochefort: Non, non, au contraire. M. le Président, évidemment, on n'a pas de "bebites" par rapport à cela. Il y a, quand même, une question de principe qui est la souveraineté de l'Assemblée nationale qu'elle délègue à la Commission de la représentation à des fins de découpage des circonscriptions électorales, ce qui est un principe important.

J'apprécie les deux précisions que le ministre est prêt à apporter, c'est-à-dire que cela ne s'appliquerait pas pour une élection partielle complémentaire entre deux élections générales et que, si cela change le maximum ou le minimum d'électeurs dans une circonscription électorale pour en faire une circonscription d'exception, la Commission de la représentation doit se pencher là-dessus. Mais, je vous répète qu'il y a la question de principe qui, pour nous, n'est pas un principe gratuit, mais un principe important auquel on tient.

Je proposerais peut-être, tranquillement pas vite, une chose au ministre. J'ai consulté mes collègues. Nous, dans la mesure où il n'y a pas d'électeurs concernés... On sait qu'il y a beaucoup de changements à la délimitation de certaines municipalités qui n'impliquent pas d'électeurs. Quand un TNO est annexé à une municipalité, très souvent, il n'y a pas d'électeurs concernés. Or, nous, quand il n'y a pas d'électeurs concernés, oui, c'est clair, on serait d'accord avec l'aspect automatique de la modification non seulement au territoire de la municipalité, mais, en conséquence, au territoire de la circonscription électorale.

Mais, dans la mesure où il y a des électeurs concernés, nous, on souhaite que la commission se penche là-dessus, mais à partir de la procédure à laquelle je faisais allusion tantôt et qui peut être celle de son rapport après une élection, qui nous amènerait à la conclusion qu'il n'y a pas de nécessité de refondre la carte électorale, mais qui, toutefois, pourrait dire: On met en annexe 32 circonscriptions électorales qui verront leur territoire modifié parce qu'il y a eu des changements de municipalités qui touchent 200, 300, 400, 500 électeurs et qui ne font pas problème. Nous, c'est ce qu'on serait prêt à faire eu égard à cette préoccupation.

Le Président (M. Filion): M. le ministre.

M. Gratton: Je ne peux m'empêcher de sourire, M. le Président, parce qu'on parle de la représentation électorale dont les objectifs visent à établir les règles où les gens peuvent exercer leur droit de vote. Le député de Gouin nous dit: S'il s'agit de territoires où il n'y a pas d'électeurs, on serait prêt à inscrire ce mécanisme automatique. Mais c'est, justement, là où on n'en a pas besoin, finalement, sauf pour les cartographes et ceux qui s'amusent à voir des configurations de territoire. Ce qu'on vise en faisant ces ajustements automatiques, c'est à dire le plus tôt possible à des citoyens qui sont impliqués: Vous êtes maintenant électeurs dans telle circonscription plutôt que dans telle autre. S'il n'y a pas d'électeurs, on n'a personne à qui on veut le dire.

Quant à moi, M. le Président, s'il n'y a pas consensus sur ce qu'on propose, laissons tout simplement tomber et passons à autre chose.

Le Président (M. Filion): Je constate donc qu'il n'y a pas consensus sur la section 4 du rapport, soit les critères sociogéographiques, sujet qui était repris à la question 3 de la section 3 du document de travail de janvier 1987.

Secteurs électoraux

Je vous invite maintenant à examiner la question de la délimitation des secteurs

électoraux. Comme vous le savez, "la loi de 1979 introduisait une nouvelle notion, celle de secteur électoral, et imposait à la commission l'obligation de délimiter ces secteurs dans chaque circonscription électorale et de procéder à leur mise à jour périodique. Le secteur électoral est en fait une unité de regroupement des électeurs intermédiaire entre la circonscription électorale et la section de vote. "L'analyse critique du rôle réel du secteur électoral nous force à conclure qu'il n'a pas pris la signification et l'importance qu'on en attendait, que ce soit à titre de point de référence pour les électeurs ou à titre d'unité territoriale devant servir de base à d'autres délimitations. Il nous semble, en conséquence, que cette notion pourrait être abolie sans que le processus électoral n'en subisse aucun préjudice."

Les deux questions qui sont posées à la section portant ce titre dans le document de travail sont les suivantes: "La commission doit-elle être tenue de délimiter des secteurs électoraux dans chacune des circonscriptions électorales? La deuxième question: "La notion de secteur électoral ne devrait-elle pas être écartée de la Loi sur la représentation et redéfinie dans la Loi électorale en fonction de sa véritable nature et utilité, soit comme regroupement de population et de sections de vote à des fins d'organisation et d'administration électorales-?"

M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, vous aurez noté que le rapport Rémillard proposait tout simplement l'abolition de ces secteurs électoraux. Pour situer ce dont on parle, M. le Président, il est peut-être utile de rappeler que la loi de 1979 introduisait cette nouvelle notion de secteur électoral et imposait à la commission l'obligation de délimiter ces secteurs dans chaque circonscription électorale et de procéder à leur mise à jour périodique. Le secteur électoral est en fait une unité de regroupement des électeurs, intermédiaire entre la circonscription électorale et la section de vote.

Depuis la publication du rapport Rémillard, je dois admettre que ma pensée a évolué sur cette question et ce, à la connaissance de l'Opposition, car, pour moi, il ne s'agit plus d'abolir totalement la notion de secteur électoral tel que le préconisait le rapport Rémillard mais plutôt de l'écarter de la Loi sur la représentation électorale et de la redéfinir dans la Loi électorale en fonction de sa véritable nature et utilité, soit comme une unité de regroupement à des fins d'organisation électorale puisque c'est à cela que ces secteurs électoraux servent. En fait, ce concept n'est pas utile et nécessaire à la délimitation des circonscriptions électorales, mais est plutôt une contrainte étant donné l'obligation imposée à la Commission de la représentation de respecter les limites des secteurs électoraux lors de la délimitation des circonscriptions électorales.

Le Directeur qénéral des élections dans ses réflexions souligne fort è propos que les secteurs électoraux ne sont pas en réalité une unité de division territoriale, mais plutôt un regroupement de population et de sections de vote pour des fins d'organisation et d'administration électorale. II note également que "la disparition des secteurs électoraux comme critère de délimitation pourrait - et je le cite - dans plusieurs cas faciliter le travail de la délimitation." M. le Président, si le consensus se faisait sur cette façon de faire, c'est-à-dire de transposer dans la Loi électorale la définition du secteur électoral pour les fins d'organisation et d'administration électorales, et qu'on la retranchait ou qu'on l'abrogeait dans la Loi sur la représentation électorale, on maintiendrait, évidemment, l'existence des secteurs électoraux aux fins d'organisation, mais on enlèverait cette contrainte, ce que le Directeur général des élections identifie comme étant une façon de faciliter le travail de délimitation. À ce moment, plutôt que la Commission de la représentation procède à la délimitation et à la mise à jour de ces secteurs électoraux comme cela se fait présentement, ce pourrait être les directeurs de scrutin locaux qui le feraient. Ils sont déjà chargés de définir les sections de vote et, comme on sait que les secteurs électoraux sont strictement des regroupements de sections de vote, il me semble que ce serait là une façon efficace et raisonnable de procéder.

Le Président (M. Filion): M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, les secteurs électoraux tels qu'on les connaît présentement, quant à moi, ont une utilité et, par ailleurs, posent un certain nombre de problèmes. Dans un premier temps, je pense qu'il faut rappeler la raison d'être première des secteurs électoraux. Ce n'est pas à des fins d'organisation politique ou à des fins d'administration de la Loi électorale que cela a été mis en place. L'utilisation qu'en cours de route en ont faite et le personnel et ceux qui émanent du Directeur général des élections et des formations politiques a été celle-là. Je me souviens très bien qui avait imaginé la formule, c'est l'ancien député de Viau, M. Charles Lefebvre, qui était, justement, un cartographe et un homme qui s'était occupé de ce genre de questions. Il a été député de 1976 à 1981. M. Lefebvre nous disait que - et c'est l'idée qui avait été retenue par tout le monde à l'époque -quand on change la carte électorale, un jour

cela passe sur la rue Bordeaux et, à la refonte suivante, ça va plutôt passer sur la rue des Érables. Puis, à la refonte suivante, ça sera peut-être sur la rue Papineau, mais là on se promène de deux rues en deux rues. Pourquoi là plutôt qu'ailleurs? On ne le sait pas trop. Finalement, on charcute toujours, mais jamais à la même place. Lui, il disait: On devrait plutôt avoir des blocs qui ne seront pas divisibles, et, s'il y a refonte de la carte électorale, tout le bloc changera de circonscription électorale plutôt que de changer des morceaux de bloc chaque fois. Je parle du milieu urbain; voyons aussi en milieu semi-urbain et rural ce que cela veut dire en termes de quartiers, de secteurs d'une municipalité, d'une paroisse etc. C'est donc pour éviter que, justement, on n'ajoute à la contrainte, à l'effet négatif réel du découpage de la carte électorale fréquent, mais qui est drôlement important pour d'autres raisons qui fait en sorte que des gens ne se retrouvent pas toujours dans leur milieu d'appartenance à cause du jeu qu'on fait avec les secteurs électoraux. (17 h 45)

Pour moi, effectivement, cela pose un problème. Si je prends l'exemple de ma circonscription électorale, l'application stricte, respectueuse de la loi, de 2500 électeurs, fait que les secteurs électoraux sont, pour la plupart, délimités par des rues secondaires de ma circonscription électorale, comme des avenues, ce qui fait que la personne se dit: Parce que je suis du côté est de la rue, je suis dans le comté X et, parce que je suis du côté ouest de la rue, je suis dans le comté Y.

Une voix: Secteur.

M. Rochefort: Comté. Non, secteur et comté parce que, quand on divise les comtés, on promène tout le secteur. Pour moi, c'est plus cela, le problème. En ce sens-là, pour moi, on n'a pas à mettre cela dans la Loi électorale. Si les partis en ont besoin, qu'ils s'en dotent. Il y avait des secteurs d'organisation électorale avant l'existence des secteurs électoraux. Pour moi, l'utilité première et de base était celle pour des fins de délimitation électorale. J'irais plutôt dans le sens de dire d'au plus 3000 ou 4000 électeurs, mais assurons-nous que cette flexibilité quant au nombre d'électeurs qu'on trouve dans un secteur électoral fasse en sorte que, là, parfaitement, on va y aller, au moins en milieu urbain, à partir des grandes artères et que, en milieu rural ou en milieu semi-urbain, on ira par des quartiers vraiment nettement et facilement identifiables et délimitables.

Donc, on conservera l'aspect positif de dire qu'on promène un tout, au moins, dans un autre comté quand on change de circonscription électorale pour maintenir, dans la mesure du possible, ce sentiment d'appartenance, de lien qu'ont les électeurs les uns avec les autres. En contrepartie, à cause de la notion stricte des 2500 électeurs par secteur électoral, on ne créera pas de situations un peu incongrues comme celle-là, parce que j'habite du côté est de l'avenue, je suis dans le comté X et, parce que mon frère ou mon voisin habite du côté ouest de la rue, lui, est dans le comté Y. Pourquoi, lui, met-il un panneau de tel candidat du même parti que moi, alors que, moi, j'ai un panneau de l'autre candidat, de l'autre parti, parce qu'on n'est pas dans le même comté? Je prendrai l'exemple de la municipalité rurale dans laquelle j'ai ma maison de campagne. Il est clair que la rivière est une délimitation naturelle. Si c'était une grande municipalité de 8000 électeurs, le secteur électoral, au-delà des 2500, devrait être évidemment la rivière, y compris si cela donne 2894 électeurs.

Je pense que la notion de "secteurs électoraux" est utile - on l'a évoqué des deux côtés de la table à de multiples reprises depuis le début de nos travaux hier pour un tant soit peu respecter le sentiment d'appartenance, les liens qui existent entre des électeurs d'une municipalité, d'un quartier, d'un bout de village ou d'un bout de paroisse, mais rendons-la vraiment applicable dans le sens même de l'objectif de départ qui était visé et, donc, soyons plus souples sur le nombre d'électeurs qu'on doit retrouver dans dans le secteur électoral.

Nous, ce qu'on serait plus ouvert à proposer, c'est de maintenir la notion de secteurs électoraux, mais d'élever le montant. Peut-être que le directeur général pourrait nous éclairer. C'est peut-être d'au plus 4000 électeurs qu'il faut mettre pour qu'il y ait une flexibilité qui fasse qu'on respecte vraiment les grandes artères dans les grandes villes et des délimitations plus naturelles, et moins guidées par le nombre d'électeurs, mais plus par la délimitation naturelle ou géographique reconnue et facilement identifiable par les gens. Ce serait, quant à nous, notre approche par rapport à cette question.

M. Gratton: Je serais tenté de vous dire: Allons-y jusqu'à environ 50 000 comme maximum pour le secteur électoral et on va régler le problème du Directeur général des élections au point de vue de la délimitation. Je vous apprendrai peut-être quelque chose -et cela, je le devine, je n'en suis pas sûr -mais j'ai l'impression que, à l'occasion, la délimitation des secteurs électoraux est faite après la délimitation des circonscriptions électorales plutôt qu'avant.

M. Saintonge: C'est bien évident.

M. Gratton: Parce que, justement, cela pose une entrave de plus au processus. Le député de Gouin a évoqué les raisons qui ont motivé - je ne sais trop qui - M. Lefebvre.

M. Rochefort: M, Lefebvre, l'ancien député de Viau.

M. Gratton: II y avait une autre raison à laquelle le député n'a pas fait allusion, c'était aussi, si je ne m'abuse, en prévision d'une possibilité d'amendement au mode de scrutin où on parlait de proportionnelle régionale. Cette notion de secteur électoral avait une connotation dans le tout. Je pourrais retrouver des références à cela venant du ministre délégué à la Réforme électorale du temps.

La proposition que nous faisons ici, il me semble que c'est l'une des deux choses: on la maintient telle qu'elle est la ou on l'abroge tout simplement. Je serais plutôt enclin à dire: Pourquoi dépenser ces ressources à définir des secteurs électoraux pour les seules fins d'organisation et d'administration? Dans les faits, on peut bien faire toutes sortes de thèses quant au sentiment d'appartenance, mais je serais presque prêt à parier qu'il n'y a pas un seul électeur québécois qui sait dans quel secteur électoral il habite.

Pour les fins d'une délimitation de circonscriptions électorales, le député de Gouin pariait tantôt de sa circonscription et il estime souhaitable, à juste titre, selon moi, que la délimitation d'un comté se fasse dans les artères principales plutôt que dans les rues secondaires. Pourquoi faut-il qu'il y ait un secteur électoral pour en venir à cette conclusion? Au contraire, c'est mettre une contrainte de plus en disant: À l'intérieur des circonscriptions, trouvez-nous une façon d'avoir environ 2500. Ce n'est pas parce qu'on porterait le chiffre à 3000 ou 4000 qu'on changerait quoi que ce soit à la nature du problème. On ne ferait simplement que déplacer la rue secondaire X à la rue secondaire Y.

Il ne serait peut-être pas inutile d'entendre à nouveau le Directeur général des élections là-dessus parce que ce qu'on vise à faire ici, ce n'est pas régler les problèmes de la Loi électorale, on en convient. On parle de la délimitation de la carte électorale et il me semble que les observations du Directeur général des élections, chaque fois qu'on en a parlé, étaient assez éloquentes sur les contraintes que cela impose à la commission et sur -est-ce que le mot est trop fort - l'inutilité de cette agglomération qui est ni chair ni os, entre la municipalité à laquelle les électeurs s'identifient et la circonscription à laquelle les électeurs s'identifient dans la mesure où ils ne sont pas chambardés d'une élection à une autre entre des circonscriptions différentes.

Avouons-le, l'intention était peut-être noble, l'intention était peut-être fondée quand on a inscrit le secteur électoral dans la loi, mais c'est peut-être bien comme certaines autres intentions, elle n'a pas atteint le but visé. Il me semble qu'il faut le reconnaître. En tout cas, je ne pense pas qu'il y ait d'expertise plus valable que celle du Directeur général des élections et je l'invite derechef a me dire si je me trompe en disant que cela constitue une difficulté et que cela ne contribue en rien au processus de la délimitation de la carte électorale.

Le Président (M. Filion): M. le

Directeur général des élections.

M. Côté (Pierre-F.): Oui, M. le Président. Juste de mémoire, peut-être pour rappeler certaines notions ou ce qui s'est passé au sujet des secteurs électoraux quand on a mis cela en application à la suite de l'adoption de ces dispositions de la loi, en 1979.

Effectivement, les secteurs électoraux, au nombre de 3080, ont été établis subséquemment à la carte de 1980. Ils ont donc été établis à l'intérieur des circonscriptions électorales existantes. Ce qu'on a compris, à l'époque, de la signification des secteurs électoraux, c'est celle qui a été mentionnée tout à l'heure. Il s'agissait de remplacer la notion traditionnelle d'appartenance à un milieu qui était caractérisé plus particulièrement par la paroisse. C'est un concept qui a découlé, de fait, d'après les recherches qu'on a pu faire, du comité Dussault. Vous avez mentionné tantôt le nom de M. Lefebvre. C'est exact.

On a évoqué, à ce moment, la possibilité, dans la ligne des réflexions qui ont été faites, d'augmenter le nombre d'électeurs par section de vote. On voulait s'inspirer, par exemple, du regroupement des électeurs en Allemagne, je crois, qui regroupait 2500 dans la même section de vote. Au cours des discussions, on a abandonné cette notion et on a dit: II faut laisser le nombre d'électeurs par section de vote à un maximum approximatif de 300 et on a gardé cette idée de la création des secteurs électoraux.

À la commission, cela a pris presque deux ans pour accomplir ce travail qui était tellement considérable de la création des secteurs électoraux. Cependant, on rencontre effectivement des problèmes majeurs. Sur les 3080 secteurs électoraux, il y en a actuellement 262 dont le nombre d'électeurs dépasse la limite prescrite dans la loi, La commission a fait face à une difficulté majeure qui était l'interprétation de l'article qui dit qu'un secteur électoral doit comprendre un maximum approximatif de 2500. Alors, la façon de nous en tirer, cela

a été de dire, après l'étude de la situation, que le maximum approximatif acceptable pourrait peut-être aller jusqu'à 2800. Ayant établi cela, on s'est rendu compte que cela nous amènerait peut-être plus près de la réalité et de tenir compte davantage de la situation. On arrive quand même au fait que, si on dit que ce maximum approximatif peut aller jusqu'à 2800, il y a présentement 106 secteurs électoraux qui comprennent plus de 2800.

L'autre point que je veux mentionner, c'est que, même s'il n'y a pas dans la loi actuelle de disposition qui dise à la commission de le faire, à partir de la notion qu'on avait retenue à la suite des échanges qui avaient précédé la création de secteurs électoraux, on voulait que cela ait un caractère statique, un caractère d'immuabilité. Au moins pour 106, si ce n'est pas pour 262 secteurs électoraux sur les 3080 actuellement, il faut se rendre à l'évidence que cela n'a pas un caractère statique, cela a un caractère plutôt dynamique. Ce n'est pas immuable, c'est muable. Pourquoi? Parce qu'à l'intérieur de ce secteur électoral de 2500, 2700 ou 2800, il y a des modifications parce qu'il y a des mouvements de population.

Nous n'avons pas procédé, je le dis clairement - peut-être aurions-nous dû le faire - à des modifications majeures aux secteurs électoraux. Nous avons procédé à des modifications mineures à la suite particulièrement de fusions de municipalités, parce que la limite d'un secteur électoral ne doit pas excéder la municipalité, Une petite municipalité constitue en soi, d'après ta définition qu'on en donne dans la loi, un secteur électoral.

Pourquoi n'avons-nous pas procédé? J'ai mentionné que ce n'était pas dit dans la loi, mais l'autre raison est la suivante. On aurait pu le faire à la commission, mais, d'après l'analyse qu'on a faite de la situation, on s'est rendu compte qu'effectivement cette notion de regroupement d'électeurs est non pas une notion de découpage géographique, je dirais, ou uniquement de découpage sur le terrain, mais de découpage qui regroupe un nombre d'électeurs. Cela sert, à toutes fins utiles - il faut bien le préciser, c'est exact; cela a été mentionné - de base aux deux partis politiques, dans l'organisation électorale des deux partis politiques. Ce qu'il est important de mentionner, c'est que nous avons non seulement décrit les secteurs électoraux, mais nous avons établi des cartes qui démontrent le regroupement d'environ -c'est ce qu'on retrouve dans les grandes agglomérations - 8 sections de vote, 3x8 = 24, évidemment cela nous donne 2400. Cela donne 8 à 9 sections de vote.

Cependant, il y a peut-être un autre point que je voudrais souligner avec insistance et qui rejoint les remarques que j'ai soumises dans les réflexions auxquelles on a fait référence tout à l'heure. À cause du premier alinéa de l'article 3 qui dit: "Une circonscription électorale est un regroupement de secteurs électoraux," quand on envisage de modifier les limites d'une circonscription électorale, il faut prendre les 2500 ou les 2800. Alors, je vous dis tout de suite que ce n'est pas toujours facile, cela nous crée de réelles difficultés. La solution, c'est de dire: On va modifier le secteur électoral et on va le redivîser autrement. On va déménager le nombre d'électeurs dont on a besoin pour atteindre les autres fins de la délimitation des circonscriptions électorales. Mais, si on fait cela, cela va de soi qu'on ne rejoint pas l'idée que c'est immuable. Mot, je suis convaincu - et les faits nous le démontrent - que cela n'a pas un caractère d'immuabilité.

Il y a une suggestion qui a été faite tout à l'heure par M. le député de Gouin en ce sens qu'on pourrait augmenter le nombre dans certains cas, par exemple, le porter, au lieu de 2500, à 5000 ou 8000. Je croîs qu'à ce moment-là le problème serait encore plus considérable. Cela ferait des plus qros morceaux à transférer. Ce serait un casse-tête assez gros.

Je voudrais aussi peut-être préciser pourquoi le secteur électoral va dans les petites rues et ne tient pas compte des grandes voies de circulation. C'est pour la raison que j'ai donnée tout à l'heure, c'est-à-dire que la délimitation des secteurs électoraux à l'intérieur d'une circonscription électorale devant regrouper huit sections de vote, è ce moment, on est obligés de le faire à l'intérieur même. Alors, il n'y a pas moyen de procéder autrement pour respecter toujours ce critère de 2500, maximum appromixatif. Là aussi, dans les secteurs électoraux, il faut respecter l'homogénéité socio-économique et les frontières naturelles, ainsi que les limites des municipalités. Je vous assure que, parfois, c'est la quadrature du cercle que de délimiter ces secteurs électoraux. Ce sont des considérations que je vous soumets, M. le Président.

Le Président (M. Filion); D'accord, je vous remercie, M. le Directeur général des élections. J'ai le consentement des membres. Je crois comprendre que le député de Gouin désire quitter...

M. Rochefort: M. le Président, ils m'ont tous convaincus.

Le Président (M. Filion): Je pense que cela vaut la peine.

M. Gratton: Alors, prenons une heure pour formuler le consensus.

M. Rochefort: M. le Président, quant à

nous, on va être d'accord sur la recommandation d'abolir les secteurs électoraux.

M. Gratton: Tout simplement.

Le Président (M. Filion): D'abolir les secteurs électoraux. On parle d'abolir l'obligation pour la commission d'établir les secteurs électoraux.

M. Rochefort: Oui, mais si les formations politiques veulent s'en faire, c'est leur droit. Il n'y a personne qui va s'immiscer dans cela.

Le Président (M. Filion): Écoutez, je me réfère aux questions qui ont été posées, encore une fois. La première question était la suivante: "La commission doit-elle être tenue de délimiter des secteurs électoraux dans chacune des circonscriptions électorales?"

M. Rochefort: La réponse est non.

Le Président (M. Filion): La réponse est non. Bon, la deuxième question est différente et elle n'est pas comprise, non plus, dans le rapport Rémillard: "La notion de secteur électoral ne devrait-elle pas être écartée de la Loi sur la représentation et redéfinie dans la Loi électorale en fonction de sa véritable nature et utilité, soit comme regroupement de population et de sections de vote à des fins d'organisation et d'administration électorales?"

M. Rochefort: M. le Président, moi, si telle est l'intention du ministre, je suis prêt à dire oui. Si cela peut être utile dans la Loi électorale, on en rediscutera ultérieurement.

M. Bélisle: Si cela n'est pas utile à une place, pourquoi cela serait-il plus utile à une autre place?

M. Dufour: Le donner au président d'élections.

M. Gratton: À des fins d'administration et d'organisation.

M. Rochefort: Écoutez, on va essayer d'adopter quelque chose. Les formations politiques ont fait des représentations. Nous sommes d'accord avec l'idée de redéfinir cela pour le mettre dans la Loi électorale. Adopté.

Le Président (M. Filion): Or, donc le consensus est oui, à la deuxième question.

M. Gratton: Non, à la première; oui, à la deuxième question.

M. Rochefort: M. le Président, juste une question avant qu'on ajourne. Évidemment, le leader pourrait me dire que cela dépendra de moi, il a bien raison. Est-ce que, demain, on peut essayer de viser à terminer dans l'espace d'une séance de dix heures à midi trente? Je dois présider la commission de l'aménagement et des équipements à 14 heures demain.

M. Gratton: II me semble qu'avec les sujets qui restent il ne reste plus grand-chose de fondamental.

M. Dufour: II y la Commission municipale, c'est pas mal fondamental.

M. Gratton: Le malheur, c'est que cela n'apparaît pas au nombre des questions, M. le député.

M. Rochefort: M, le ministre, on s'est entendu qu'on en discuterait.

M. Gratton: Qu'on en discuterait dans le cadre de la pertinence des questions qui sont posées.

M. Rochefort: C'est cela.

M. Gratton: En ce qui concerne la permanence ou la... Je connais déjà la réponse. Alors, si vous voulez en discuter, on pourra en discuter, mais, à ce moment, dites-moi quelle sorte de...

M. Rochefort: Donc, on peut viser une séance demain matin?

M. Gratton: II me semble.

M. Rochefort: Je dois présider la commission de l'aménagement et des équipements.

M. Gratton: Je ne peux pas m'engager, au nom de l'Opposition.

M. Rochefort: C'est cela. J'ai bien précisé que le ministre pourrait me répondre: Cela dépendra de vous. Nous allons répondre à cela nous-mêmes.

M. Gratton: Moi, personnellement, je pensais qu'on finirait à 18 heures, ce soir.

Le Président (M. Filion): Écoutez, je voudrais quand même remercier les membres de la commission. Compte tenu de la matière assez énorme que nous avions sous la dent, je pense que les travaux ont bien fonctionné. Je vous invite donc à reprendre ces travaux demain, à dix heures, à la même salle. Merci, M. Côté.

(Fin de la séance à 18 h 4)

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