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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mercredi 23 avril 1986 - Vol. 29 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Relations internationales


Étude des crédits du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes (Budget du Conseil exécutif)


Journal des débats

 

(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît! Il me fait plaisir de constater le quorum et de constater qu'il n'y a aucun remplacement à cette séance de la commission des institutions dont je rappellerai le mandat qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Relations internationales et du programme du Conseil exécutif, soit les crédits du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes pour l'année financière 1986-1987. Cette séance débutant à 10 h 9 et une période de deux heures nous ayant été allouée, nous terminerons vers 12 h 9.

M. le ministre, M. le chef de l'Opposition, bienvenue à cette séance. Nous avons réussi à obtenir les lumières du salon bleu pour, je l'espère, éclairer l'examen des crédits. J'inviterais donc, sans plus tarder, M. le ministre à s'adresser par remarques préliminaires, s'il y a lieu, à la commission.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous le permettez.

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Johnson (Anjou): J'ai eu l'occasion de discuter durant quelques minutes avec le ministre. Nous nous sommes entendus à savoir que ses remarques et notre étude de ce matin, pour l'essentiel, porteraient sur l'objectif que nous avons de compléter l'étude des crédits de la section des relations internationales cet avant-midi et que ses remarques sur les affaires canadiennes suivraient l'adoption des crédits.

Deuxièmement, nous sommes convenus de procéder à une discussion générale sur l'ensemble de ces crédits plutôt que de prendre chacun des éléments de programme, comme c'est habituellement le cas pour les ministères qui ne couvrent pas 25 pages du livre des crédits. Les secrétariats et le ministère des Relations internationales sont une partie assez condensée du livre des crédits.

M. Rémillard: M. le Président, le chef de l'Opposition a beaucoup plus d'expérience que moi dans ces circonstances. Je me rends compte qu'on s'est entendus sur beaucoup plus de choses que je ne le croyais, mais cela me va très bien. Je ne crois pas qu'il y ait de difficultés majeures. Je comprends tout simplement que, dans un premier temps, durant les deux premières heures, nous allons voir les relations internationales et...

M. Johnson (Anjou): Et nous allons procéder à l'adoption des crédits dès ce matin pour libérer vos fonctionnaires.

M. Rémillard: Cet après-midi, nous allons voir les affaires canadiennes; au lieu de faire cas par cas selon les programmes, on pourra voir cela de façon globale, quitte, bien sûr, à parfois préciser certains éléments d'un programme spécial.

Le Président (M. Filion): D'accord. Je prends acte de l'entente qui est intervenue et je vous réinvite, M. le ministre, si vous le voulez, à adresser quelques remarques préliminaires à cette commission.

Crédits du ministère des Relations internationales

Remarques préliminaires M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, le gouvernement a l'intention de fonder sa politique internationale sur la continuité et l'évolution. Depuis la révolution tranquille des années soixante, où s'est affirmée la légitimité d'une action internationale, jusqu'à la consultation populaire tenue en 1984 sur le Québec dans le monde, plusieurs événements ont façonné la personnalité internationale du Québec et l'orientation de ses politiques. Il s'agit pour le présent gouvernement d'élaborer une politique internationale qui sera conforme tant à la spécificité politique culturelle, sociale et économique du Québec qu'à sa situation d'État membre de la fédération canadienne.

Depuis 1960 la société québécoise et le gouvernement du Québec ont pris conscience de l'importance grandissante des relations internationales pour notre développement. L'ouverture du Québec sur le monde a d'ailleurs constitué un des éléments marquants de la révolution tranquille. Chacun des gouvernements qui se sont succédé au pouvoir depuis lors a apporté sa contribution à l'édification d'une politique et d'un

ensemble de moyens adaptés à nos besoins, à notre dimension et à nos possibilités sur la scène internationale.

Le besoin s'est fait sentir très tôt de confier à une instance centrale la coordination de l'ensemble des activités internationales du Québec. Ce rôle a d'abord été confié en 1965 à un comité de sous-ministres. La création du ministère des Affaires intergouvernementales en 1967 et la refonte de la loi du ministère en 1974 ont créé l'essentiel du cadre organique que nous connaissons aujourd'hui. La création du ministère des Relations internationales en 1984 a parachevé une évolution de près d'une génération sur le plan législatif et institutionnel en confiant la coordination de la politique extérieure à un ministère spécifique désormais dégagé d'autres missions.

À côté du MRI, le gouvernement a senti le besoin de se doter d'autres instances spécialisées chargées d'animer et de conduire nos politiques sectorielles dans le domaine international. Un réseau significatif de représentations à l'extérieur a été mis en place et des ressources humaines et budgétaires non négligeables sont désormais consacrées à l'engagement du gouvernement du Québec dans les affaires avec l'étranger.

L'une des initiatives les plus marquantes entreprises par le gouvernement depuis son élection le 2 décembre dernier est sans contredit l'effort d'assainissement des finances publiques et de rationalisation des dépenses. Ce besoin impérieux dans le contexte actuel se conjugue à un autre besoin, celui de réviser, à cette étape de son évolution, notre réseau de représentations à l'extérieur.

Le ministère des Relations internationales se devait de contribuer aux objectifs financiers déterminés pour l'ensemble du gouvernement. Le document d'étude des crédits déposé devant cette commission et que nous examinerons plus en détail montre que cette tâche a été accomplie» Toutefois, malgré ces compressions budgétaires importantes touchant tant les programmes du ministère que le réseau des délégations à l'étranger, je peux affirmer que l'essentiel de la vocation du ministère des Relations internationales aura été préservé. De plus, une gestion saine et efficace des ressources dont dispose le ministère nous permettra de réaliser les objectifs que s'est fixés le gouvernement sans compromettre l'action internationale du Québec. Le ministère continue donc de remplir ses fonctions les plus importantes. En fait, l'opération de rationalisation a accéléré un ensemble d'analyses et favorisé le dégagement des priorités qui seront appliquées au cours des prochaines années.

Dans le contexte décrit ci-haut, il est important que le ministère revienne à ses fonctions primordiales. Aussi, les opérations de rationalisation ont-elles affecté essentiellement deux secteurs: d'une part, les programmes de subvention du ministère à des organismes québécois et, d'autre part, le réseau de représentation à l'étranger. Au fil des années, le ministère s'était vu attribuer un ensemble de rôles d'assistance à des intervenants non gouvernementaux québécois, exercice dont l'ampleur le détournait progressivement de ses fonctions principales. L'opération de rationalisation nous permet de centrer de nouveau le ministère sur sa véritable raison d'être, soit la coordination, la planification et la conduite de relations diplomatiques.

En ce qui concerne le réseau, il était temps, après 20 ans, que l'on regarde de manière rationnelle la configuration et le mandat de chacune de nos représentations à l'étranger. Les circonstances qui avaient présidé à l'ouverture de telle ou telle délégation ou bureau ont forcément évolué. Les besoins internes du Québec et l'évolution de la situation dans les pays où le Québec est représenté affectent les types de ressources et d'organisations les plus utiles à la conduite de relations pertinentes avec chaque partenaire. Dans certains cas, l'établissement ou le maintien d'une représentation officielle du Québec peut être nécessaire. Dans d'autres, une meilleure utilisation des ressources du réseau diplomatique canadien pourrait suffire et nous permettre de procéder à des économies substantielles. On se rappellera, à cet égard, que le Québec a déjà des agents logés dans plusieurs ambassades du Canada pour des fins spécifiques. Nous pouvons ainsi profiter de l'apport diplomatique canadien tout en conservant notre latitude dans la promotion et la défense des dossiers spécifiques au Québec.

L'examen auquel j'ai procédé, en concertation avec mes collègues MacDonald, Robic et Picotte, nous a conduits à déterminer une restructuration du réseau de représentation de façon à mieux diriger et coordonner nos efforts. La mise en oeuvre de cette orientation appelle encore quelques décisions particulières, mais je suis en mesure de vous préciser aujourd'hui les grandes lignes de ce que nous entendons faire à cet égard.

Trois types de mesures ont été arrêtés. Dans plusieurs cas, le ministère a procédé à un allégement des ressources affectées à l'extérieur en ne remplaçant pas des conseillers rappelés à Québec à la fin de leur mandat normal. Dans quelques cas, nous avons décidé aussi de rappeler des conseillers avant la fin de leur mandat. Le non-remplacement de ces conseillers et la réduction correspondante des dépenses de fonctionnement nous permettront d'épargner 1 500 000 $ cette année. À Paris, les

fonctions de délégué aux affaires francophones et multilatérales seront désormais assumées par notre délégué général en France. D'autres mesures administratives permettant des économies substantielles ont également été prises. Une deuxième approche nous conduit à envisager avec le gouvernement fédéral la possibilité de loger dans certains cas des représentants dans des missions canadiennes à l'étranger, comme cela se fait déjà, ce qui pourrait nous permettre d'épargner environ 800 000 $ en 1985-1986.

Enfin, nous allons effectuer une restructuration importante de plusieurs de nos représentations en Europe, en Amérique latine et aux États-Unis. Nous avons l'intention de procéder à la fermeture de notre délégation à Caracas, dès que les démarches officielles auront été effectuées auprès du Venezuela, tout en conservant cependant un représentant au Venezuela et un bureau à Bogota. Notre action diplomatique pour l'Amérique latine sera dirigée par notre délégation générale à Mexico. Nous avons l'intention de fermer aussi notre délégation de Port-au-Prince, à Haïti, tout en gardant en poste un conseiller en immigration.

À Düsseldorf, en Allemagne, la vocation de notre représentation sera articulée autour de ses fonctions commerciales. Les autres fonctions assumées par cette délégation seront transférées à notre délégation générale de Bruxelles. Dans le cas de notre délégation en Italie, nous entendons restructurer les services existants en maintenant un bureau commercial à Milan et en regroupant les autres fonctions à Rome. Aux États-Unis, la transformation de la délégation de Lafayette en bureau responsable de la coopération éducative est en bonne voie. Dans le cas de certaines délégations aux États-Unis, j'examine avec mes collègues concernés dans quelle mesure il y a lieu de spécialiser leur vocation comme cela a été décidé pour Düsseldorf et Lafayette. Environ 800 000 $ devraient être épargnés cette année avec des mesures de ce type, qui non seulement ne toucheront pas le bon fonctionnement de notre réseau, mais le rendront plus efficace.

Même si ces compressions ne manqueront pas de créer certaines difficultés temporaires, je reste convaincu que la trame fondamentale de notre réseau de représentation restera intacte et qu'à l'issue de cet exercice nous disposerons d'un outil efficace et adapté à nos besoins. Aucun geste irrémédiable n'aura été posé et nous disposerons des bases voulues pour relancer l'expansion du réseau lorsque la situation financière du gouvernement le permettra et lorsque le besoin se fera sentir.

Avant d'aborder l'étude des crédits de façon détaillée, je voudrais aller plus loin dans la définition du cadre de la politique que le gouvernement entend suivre. II faut ici dépasser le contexte strictement théorique ou constitutionnel et envisager de façon pratique la gestion des relations internationales du Québec. Puisque la diplomatie est l'art du possible, c'est une approche pragmatique des relations internationales que je proposerai. En tant que membre de la fédération canadienne, le Québec a des intérêts particuliers qu'il lui appartient de développer et de faire valoir. Ces intérêts sont distincts de ceux de l'ensemble de la fédération tout en les complétant ou en les particularisant. Par exemple, les activités du Québec dans le cadre de la francophonie relèvent de ses compétences propres comme foyer principal des francophones en Amérique du Nord. De même, dans ses relations avec les États-Unis, le Québec a des intérêts particuliers, entre autres, dans le secteur énergétique et celui de l'environnement. Sur le plan économique ou en ce qui a trait à son développement scientifique et technologique, la situation du Québec possède également ses caractéristiques propres.

Le gouvernement a le devoir de promouvoir les intérêts spécifiques du Québec; or ceci est bien sûr compatible avec le recours aux ressources fédérales, soit pour renforcer les efforts de chacun, soit pour éviter une duplication stérile. Le recours à ces ressources doit être exploité à fond. Nous avons intérêt à tirer le meilleur parti possible de la représentation canadienne à l'étranger, particulièrement dans les régions où le Québec n'est pas représenté ou dans celles qui sont moins prioritaires, tout en veillant à faire valoir les intérêts spécifiques du Québec. Nous devons être réalistes et, parmi une multiplicité d'options, choisir en fonction des intérêts du Québec et des possibilités d'action les plus efficaces.

L'intérêt du public pour les questions internationales constitue également un facteur important de la conjoncture et nous devons en tenir compte. Le nombre d'intervenants sur la scène internationale s'est accru considérablement au cours des dernières années. Les entreprises, les organisations non gouvernementales et le public en général s'impliquent de plus en plus au niveau international. Cet intérêt pour les questions internationales constitue un capital non négligeable qu'il nous appartient d'exploiter et de développer. Le gouvernement se propose donc d'encourager la concertation entre un secteur gouvernemental qui jouera avant tout un rôle d'animateur et un secteur non gouvernemental qui devrait développer de plus en plus sa capacité autonome d'intervention.

Le ministère se propose de déterminer, au cours de l'année à venir, les voies les plus indiquées pour donner corps à cette

concertation. Si, virtuellement, chaque ministère a intérêt à conduire des relations et activités internationales dans son secteur propre, voire même le devoir de le faire, il devient d'autant plus impératif qu'une articulation des mandats soit réalisée par une seule instance centrale. Le gouvernement ne peut avoir qu'une seule politique internationale. Les textes organiques successifs traitant de cette question depuis 1965 ont toujours été très explicites à cet égard. Il incombe actuellement au ministère des Relations internationales d'assumer cette fonction en vertu de sa loi constitutive.

Le ministère a comme mandat fondamental la coordination et l'animation de l'action internationale de l'ensemble des intervenants gouvernementaux québécois, la conduite des relations internationales du gouvernement du Québec, la constitution d'un bassin d'expertises et d'analyses pour l'ensemble du gouvernement sur les questions internationales et la promotion du Québec à l'étranger. Cette coordination est d'autant plus essentielle qu'elle est fondée sur l'inévitable interdépendance des secteurs les uns avec les autres: le culturel, le social, l'économique, la science et la technologie, etc.

La diminution des moyens financiers à ta disposition du ministère des Relations internationales ne devrait pas nous faire oublier que sa principale ressource demeure intacte. Il s'agit des ressources humaines sans lesquelles aucun des programmes que nous discuterons aujourd'hui ne pourrait être mis sur pied ou fonctionner. Pour jouer pleinement son rôle de coordonnateur et d'animateur, le ministère des Relations internationales doit pouvoir compter sur un personnel qualifié et motivé. C'est pourquoi le gouvernement a l'intention de privilégier le développement des ressources humaines en favorisant un plan de carrière qui permettra aux fonctionnaires d'exercer pleinement leurs compétences. Des comités de travail se penchent actuellement sur la réalisation de ce plan.

Pour conclure de façon pratique, je voudrais passer en revue les. dossiers qui seront en tête de liste au cours des mois qui viennent. Je voudrais d'abord souligner l'importance toute particulière que nous allons accorder, au cours de l'année à venir, à nos relations avec l'ensemble des États francophones au premier rang desquels figure tout naturellement la France. Nous allons continuer à développer les relations directes et privilégiées du Québec avec la France. Le premier sommet des chefs d'État et de gouvernements francophones réunis à Paris au mois de février dernier a été un événement tout à fait exceptionnel et une grande réussite diplomatique pour le Québec sur le plan international. Assurer la mise en oeuvre des décisions intervenues à Parts et préparer le deuxième sommet que nous allons accueillir ici à Québec à l'automne 1987, voilà des tâches à la fois exaltantes et très exigeantes que nous aurons à remplir au cours des prochains mois. Le ministère des Relations internationales entend assumer cette responsabilité avec toute la diligence et la vigueur dont il est capable.

Le sommet nous a aussi permis de réamorcer le dialogue avec plusieurs gouvernements africains. Au cours de l'année à venir, nous entendons poser des gestes pour concrétiser les liens qui se sont noués au niveau le plus élevé à Paris et qui nous permettront en tant que francophones de relever avec succès le défi de la modernité.

Les relations avec les États-Unis constituent également une priorité pour le gouvernement. La tenue récente du colloque sur les perspectives énergétiques de la région du Nord-Est du continent aura illustré à quel point des solidarités régionales très puissantes sont en train de se tisser entre le Québec, la Nouvelle-Angleterre et l'État de New York. Les institutions mises en place depuis une dizaine d'années nous permettent de nous concerter de manière régulière avec ces partenaires naturels que sont les dirigeants de ces États. (10 h 30)

L'interdépendance énergétique et les négociations commerciales qui se dérouleront soit sur le plan bilatéral, dans le cadre d'un accord de libre-échange, soit sur le plan multilatéral au GATT, nous amèneront à travailler de plus en plus étroitement avec une région qui constitue pour nous un marché et un bassin de ressources de premier plan. Le ministère continuera par ailleurs à suivre de très près des dossiers qui touchent des ensembles plus larges comme ceux de l'environnement qui impliquent la région des Grands Lacs ou le développement des relations scientifiques et technologiques avec l'ensemble des régions américaines.

Il y a une autre question qui me paraît particulièrement importante dans les circonstances actuelles. Il s'agit de l'interrelation qui doit exister entre les activités prioritaires du gouvernement dans le secteur économique et les autres secteurs d'activités du gouvernement à l'étranger. Pour mon ministère, l'appui à l'objectif de croissance économique du gouvernement est prioritaire. Notre rôle consiste à créer un environnement favorable au développement des échanges économiques par le développement des liens scientifiques culturels, éducatifs, technologiques et universitaires. Créer une image de marque pour le Québec, faire ressortir notre spécificité culturelle pour mieux faire valoir notre potentiel économique et technique, voilà une approche dont nos entreprises ne pourront que profiter dans la lutte difficile qui les oppose à leurs concurrents sur les marchés étrangers.

Enfin, je voudrais, au cours de l'année à venir, mettre l'accent sur le développement de nos relations avec les institutions multilatérales les plus importantes telles que l'ONU, l'UNESCO, l'OCDE et l'OIT.Même s'il est de bon ton d'affirmer que le multilatéralisme est en crise, les organisations internationales représentent un forum d'échanges et de discussions irremplaçable avec un grand nombre d'interlocuteurs étrangers.

C'est dans ce cadre aussi que je situerai mes efforts en vue de donner à notre capitale, Québec, la place qui lui revient sur le plan international. Le Canada et le Québec pourraient au cours des prochaines années obtenir une part beaucoup plus grande des conférences internationales organisées par les instances multilatérales. Nous collaborerons avec la diplomatie canadienne pour promouvoir la tenue de rencontres internationales au Québec. La ville de Québec présente quant à elle un potentiel intéressant pour les réunions internationales et nous entendons le faire valoir pleinement.

Voilà esquissées quelques perspectives que nous pourrons développer de manière plus détaillée en regardant les budgets des différentes unités du ministère. Les priorités que je viens d'esquisser se retrouvent traduites concrètement en chiffres dans les budgets des directions et représentations à l'étranger. En examinant les programmes détaillés pour les affaires internationales, on constatera que les perspectives du ministère des Relations internationales pour le proche avenir sont excellentes et de nature à préparer la voie pour une expansion rationnelle de l'ensemble de nos activités internationales au cours des prochaines années.

Le Président (M. Filion): M. le ministre, merci. M. le chef de l'Opposition.

M. Pierre Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): M. le Président, merci. Je remercie le ministre de son exposé et des efforts considérables, dans un contexte très difficile, qu'ont dû faire ses fonctionnaires. Je remercie ceux-ci en particulier d'avoir répondu rapidement et de façon tout à fait adéquate aux quelques questions que l'Opposition a adressées par écrit et de nous avoir fait parvenir des documents adéquats en réponse à nos questions.

Le ministère des Relations internationales de toute évidence, et je dirais incontestablement, est le ministère qui sort le plus affaibli des quatre mois de pouvoir du nouveau gouvernement. Un chiffre résume malheureusement très brutalement cette réalité: une amputation de 11 600 000 $ en 1986-1987, ce qui signifie une chute de près de 20 %, alors que les dépenses de l'ensemble des autres ministères du gouvernement du Québec augmentent de 3,8 %. Les crédits du ministère que dirige le député de Jean-Talon reculent de près de 20 %, alors que l'ensemble des dépenses de l'État augmente de 3,8 %.

Étant donné que, selon le quotidien Le Soleil, le ministère avait de plus des projets d'augmentation de ses crédits de l'ordre d'environ 3 570 000 $, on peut dire, dans le fond, que les décisions prises par le président du Conseil du trésor à l'égard de ce ministère sont, en fait, de réduire les expectatives de ce ministère de près de 15 000 000 $.

Recul, M. le Président, d'abord et avant tout à l'égard de la représentation du Québec à l'étranger. Comment faire fonctionner 24 délégations ou bureaux à l'étranger si les dépenses non salariales de fonctionnement chutent de 23 %? Comment fonctionner avec un budget réduit de près d'un quart dans 17 pays qui ne sont pas tous exempts, soit dit en passant, d'inflation, quand on pense notamment à l'Amérique latine? Comment fonctionner avec une diminution de 30 % dans les frais de communication?

Recul aussi dans la coopération internationale qui est menée par des Québécois. Là aussi, un chiffre manifeste, 6 700 000 $, soit 45,7 % de réduction dans les transferts aux organismes de coopération, dont 3 000 000 $, il faut bien le dire, à l'égard de deux institutions privées, Marie de France et Stanislas, ce qui, d'ailleurs, en fera sans doute sourciller quelques-uns chez nos partenaires français à l'égard de qui on tient de magnifiques discours depuis le sommet, alors qu'on va amputer le budget de fonctionnement de ces deux institutions de 3 000 000 $.

Le ministre retire également 1 800 000 $, soit 41 %, aux organismes non gouvernementaux qui réalisent des projets de coopération internationale. Ah, il nous dit bien dans son texte qu'il va réfléchir pendant l'année, qu'il va faire des comités de travail pour savoir comment on accentuerait la coopération internationale, mais le fait brutal, c'est 1 800 000 $ de diminution de budget pour les organismes non gouvernementaux qui s'occupent de coopération internationale.

À l'égard de cette question, d'ailleurs, comme de celle de l'expansion, voire même du simple maintien des délégations, je reprends les propos du ministre qui nous dit: La trame principale sera conservée et on va attendre que le gouvernement ait plus d'argent. Dans le fond, il nous dit: Le ministère des Relations internationales sera mis dans les boules à mites tant qu'on n'aura pas d'argent. Je vais vous dire qu'il risque

d'être dans les boules à mites un petit bout de temps.

Je ne pense pas que le Québec ait les moyens de connaître des reculs en matière de relations internationales et je crois que ce ministère, qui est un des joyaux de la spécificité québécoise dans le contexte canadien, écope avec 20 % de coupures d'une façon injuste. Je trouve regrettable que le ministre n'ai pu opposer aux appétits de couperet de son collègue du Trésor une résistance un peu plus sérieuse.

Recul de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, 10,5 % de réduction des crédits. Recul du ministère lui-même. Les employés du ministère voient diminuer leurs moyens d'action. Quand les dépenses non salariales de fonctionnement baissent de 12 %, on limite en soi la motivation et le dynamisme des employés du ministère. Le ministère le reconnaît, d'ailleurs, lui-même. On apprend, à la page 20 de son livre des crédits, que, dans le domaine de la francophonie "le ministère entend éviter le plus possible que la conjoncture budgétaire actuelle crée une impression de recul chez nos partenaires." Ce n'est pas une impression de recul qu'auront nos partenaires, M. le Président; ils constateront la réalité de ce recul sous l'actuel ministre responsable des Relations internationales quand on voit les coupures de postes comme celui du délégué aux affaires francophones et multilatérales à Paris, la fermeture anticipée de certains bureaux et la menace qui pèse sur l'ensemble du réseau.

Ce réseau, le ministre l'a rappelé lui-même, a été développé depuis une vingtaine d'années et il a été renforcé de 1977 à 1985 par le gouvernement précédent. Ce n'est pas fortuit si les gouvernements successifs ont consenti des efforts financiers pour assurer l'ouverture du Québec sur le monde, pour assumer sa responsabilité en ce qui touche la francophonie et pour remplir pleinement ses fonctions dans ses champs de compétences.

Par ailleurs, on peut être inquiet lorsqu'on voit, d'une part, que le ministère des Relations internationales veut "une collaboration soutenue avec le gouvernement fédéral" et, d'autre part, que ce même ministère veut "la rationalisation du réseau de représentation à l'étranger" (page 14) sans que soit précisé le cadre de cette collaboration et de cette rationalisation.

Le fait que le gouvernement actuel ait déjà reculé sur certaines compétences du Québec, notamment à l'égard des politiques de main-d'oeuvre, inquiète tous ceux qui défendent les intérêts du Québec, y compris sur le plan international.

Y aura-t-il, par exemple, recul dans les compétences qui sont considérées, dans leur prolongement sur le plan international, comme légitimes et constitutionnelles pour le Québec, notamment dans le secteur de l'éducation? Y aura-t-il recul, aussi, dans le dynamisme montré par le Québec à l'intérieur de la francophonie? Ah, on me servira bien le sommet. J'en sais quelque chose, M. le Président, de ce sommet. Je me souviens d'avoir négocié une entente qui a permis au Québec d'y participer. Mais le Québec aura-t-il les moyens d'agir avec efficacité, notamment dans l'Agence de coopération culturelle et technique? Le Québec aura-t-il d'autres moyens aussi pour participer aux projets qui ont été élaborés lors du premier sommet francophone ou est-ce qu'on assistera simplement à de beaux mots? Je pense, ici, à l'Agence internationale francophone d'images télévisées.

En fait, y aura-t-il encore le Québec dans le monde ou si on devra se contenter d'un Québec dans le Canada et d'un Canada dans le monde, ce qui serait une contradiction, notamment avec les propos tenus par l'actuel délégué général du Québec à Paris, M. Jean-Louis Roy, le 21 janvier dernier, qui, lors d'une conférence sur l'internationalisation du Québec, déclarait que l'existence du réseau international du Québec "ne peut pas et ne doit pas être remise en cause"? On nous diras Son existence n'est pas remise en cause; on ne fait que le mettre dans les boules à mites. Pourtant, quand les crédits tombent de 20 % ou de 30 %, ou de 45 % à certains chapitres, c'est l'existence même du réseau qui nous semble remise en cause, parce qu'un réseau comme celui des Relations internationales ne peut pas vivre d'eau fraîche. Il a besoin de moyens. Et cela présuppose que, dans l'ensemble des priorités gouvernementales, on accorde à cet instrument absolument unique, développé au Québec depuis 20 ans, les ressources dont il a besoin pour se développer.

Nos inquiétudes ne sont pas, non plus, apaisées à la lecture du texte d'orientations contenu dans le livre des crédits, ni par le discours du ministre qui, il faut le dire cependant, est un peu plus précis. Nous y voyons même une certaine incohérence. Le ministère se donne quatre priorités sectorielles: science, technologie, éducation et diffusion culturelle, et trois priorités géographiques, États-Unis, Asie et pays francophones. Je ne prendrai que la diffusion culturelle; il ampute le budget de diffusion culturelle: dont il fait pourtant une priorité.

À la lecture du texte, par ailleurs, on s'aperçoit que le ministère va continuer d'agir dans d'autres domaines sectoriels et d'autres régions du globe. Dans la mesure où le ministre a été incapable d'éviter l'amputation dramatique des Relations internationales, a-t-il un plan précis pour réorienter son ministère vers ces quatre priorités sectorielles et vers ce qu'il considère être ses trois priorités géographiques? Comment va-t-il éviter que les maisons du Québec ne deviennent des maisonnettes ou des cabanes du Québec?

(10 h 45)

Le ministre entend-il mobiliser au profit des relations internationales du Québec les ressources qui subsistent encore dans différents ministères sectoriels pour s'assurer au moins qu'au niveau central, alors que ce ministère est en train de se faire amputer et dégarnir par l'incapacité du gouvernement d'accorder la priorité qu'il devrait accorder à cette mission, on maintient des masses critiques au niveau des nombres, qu'on s'assure d'un niveau d'expertise, de renouvellement, de diversité et qu'on ne laisse pas l'éparpillement à travers les autres ministères, finalement, réaliser un niveau d'activités sur le plan international qui soit l'équivalent de ce qui resterait du ministère des Relations internationales?

Cela prendra du courage de la part du ministre pour faire face à ses collègues et obtenir d'eux qu'ils acceptent que ce soit son ministère qui s'occupe des relations internationales. Il sait qu'il pourra compter sur nous s'il fait cet effort pour nous assurer que ce joyau de l'administration publique québécoise ne sombre pas dans la banalité. Encore faudrait-il que le ministre sache lui-même rapidement, et le démontre, où il s'en va en matière de relations internationales, ce qui ne semble pas évident depuis quelques mois.

Le Président (M. Filion): M. le chef de l'Opposition, merci. Étant donné l'entente intervenue, j'appelle donc les crédits de l'ensemble des trois programmes du ministère des Relations internationales. J'inviterais donc les membres à poser leurs premières questions ou à faire leurs premières interventions.

Discussion générale

M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai une série de questions qui permettront sans doute au ministre de répliquer en partie à mes propos, je n'en doute pas. Il disait tout à l'heure qu'il sait que j'ai un peu plus d'expérience. Ce n'est qu'à cause du temps que j'en ai plus. Il en aura un jour, pour à peu près trois ans. Je peux lui dire qu'il profitera sûrement d'un certain nombre de questions que je lui pose pour répliquer sans doute en partie à mon exposé.

Aide aux sinistrés

J'ai une première question de nature un peu technique. J'aimerais savoir du ministre combien de fonctionnaires de son ministère travaillent à mettre en application l'idée qu'a eue M. Bourassa de disposer des surplus alimentaires européens par un plan Marshall destiné au tiers monde.

M. Rémillard: M. le chef de l'Opposition, vous faites référence à un moment particulièrement important dans l'histoire des relations internationales du Québec. Vous faites référence, justement, à cet événement qui a été un grand succès pour le Québec sur la scène diplomatique internationale. Comme vous le savez, nous avons eu à reprendre une entente qui avait été peut-être discutée rapidement en campagne électorale. Nous avons pris cette entente. Nous avons rediscuté de cette entente avec le gouvernement fédéral et nous en sommes arrivés, finalement, à des compromis intéressants, permettant au Québec et à son premier ministre de jouer un rôle de premier plan tel que jamais un premier ministre du Québec n'avait pu en jouer sur une scène aussi importante sur le plan international et multilatéral.

Dans ce contexte, M. le chef de l'Opposition, je peux vous dire que nous sommes extrêmement satisfaits de la façon dont les choses se sont passées et de la façon dont le Québec a su prendre sa place, lorsque l'on pense que le premier ministre du Québec a été rapporteur général pour cette conférence historique dans l'histoire de la francophonie. C'est l'histoire qui a été marquée à ce moment. Le premier ministre du Québec était rapporteur général, le premier ministre du Québec a parlé en tout dernier pour inviter la francophonie à cette rencontre de Québec en 1987. Alors, c'est dans ce contexte que l'on doit situer cette intervention de M. Bourassa, disant qu'on pourrait penser à mettre en oeuvre un plan Marshall pour faire en sorte que les surplus alimentaires des pays industrialisés et bien nantis puissent être disponibles pour les pays moins nantis.

C'est une idée extrêmement intéressante qui avait été mise de l'avant par M. Delors lorsqu'il était ministre français. M. Bourassa a repris cette idée en citant M. Delors et nous travaillons à cette idée en collaboration avec nos collègues fédéraux et avec d'autres pays.

Vous savez, M. le chef de l'Opposition, qu'il y aura une première réunion du suivi de ce premier sommet sur la francophonie et c'est dans ce contexte qu'on pourra situer, bien sûr, les suites que l'on doit donner à cette intervention majeure qu'a faite M. Bourassa lors de ce sommet historique.

M. Johnson (Anjou): Une remarque et je reviens avec ma question, rapidement. D'abord, dans l'ensemble, le premier ministre le sait, l'Opposition a offert sa collaboration totale et son appui étant donné que la question de la présence internationale du Québec, a nos yeux, doit faire l'objet d'un consensus entre les partis politiques et qu'il faut maintenir ce consensus comme il existe depuis 20 ans. Cela étant dit, le premier ministre a eu l'occasion en Chambre, lors d'une motion non annoncée félicitant le

nouveau gouvernement français de M, Chirac, de parler de mon accord sans réserve pour ce qu'il avait fait à Paris.

Je me suis permis, cependant, d'exprimer une réserve, notamment, sur cette question du plan Marshall. L'écoulement des surplus alimentaires dans les pays en voie de développement reste une question assez fondamentale qui préoccupe des économistes comme Dumont et les autres depuis de nombreuses années. De toute évidence, le vrai plan Marshall, pour le tiers monde ou les pays en voie de développement, serait un plan qui viserait à des investissements massifs venant des pays occidentaux pour permettre à ces pays de trouver les moyens de s'autosuffire à un plus haut niveau, notamment, sur le plan alimentaire.

Le simple déversement des surplus alimentaires des pays occidentaux, d'une part, peut être une façon un peu simple pour les pays occidentaux d'acheter leur propre conscience à l'égard de ce qui se passe dans le tiers monde, mais surtout le simple déversement de ces produits dans les pays en voie de développement peut avoir des effets macro-économiques considérables, y compris des effets de déstabilisation des revenus agricoles là où Us sont susceptibles de croître à l'avenir. C'est pour cela que je posais une question très précise au ministre, à savoir si des fonctionnaires de son ministère travaillaient autour de cette question extrêmement complexe ou si nous avons eu droit à un morceau de rhétorique de la part du premier ministre.

M. Rémillard: Ce que je pourrais dire à ce sujet, c'est bien sûr que nous travaillons sur ce point-là comme on travaille aussi sur d'autres points qui ressortent de ce premier sommet sur la francophonie. C'est un point très important. Vous savez, lorsqu'on parle de coopération, des relations nord-sud, c'est un point qui est très délicat. Il y a plusieurs philosophies qui peuvent s'affronter. C'est à nous de trouver celle qui peut le mieux convenir à notre situation de pays riche, bien nanti, faisant partie aussi de certaines alliances, de certains groupes de pays et pouvant aider d'autres pays qui sont moins bien nantis que nous. C'est dans ce contexte que nous devons faire en sorte que notre richesse puisse aussi profiter à ceux qui ont besoin de l'essentiel et qui meurent de faim, actuellement.

Bien sûr qu'on pense toujours à cette phrase: Donnez un poisson un jour vous nourrissez pour une journée; montrez à pêcher, vous nourrissez pour la vie. C'est sûr, c'est certain, c'est intéressant de montrer, d'éduquer, mais il faut aussi nourrir les gens qui meurent de faim à tous les jours, comme on sait que cela se passe actuellement en Afrique et dans d'autres pays aussi. Dans un premier temps, je crois qu'un plan Marshall est un plan qui repose sur une philosophie d'aide bien pragmatique, directe, pour faire face à un problème qui se passe actuellement aux yeux de tout le monde. À la télévision, on voit cette situation telle qu'elle se produit maintenant. D'autre part, aussi, c'est un plan qui prévoit donner à ces pays le moyen de faire en sorte qu'ils puissent venir à s'autosuffire dans des éléments aussi essentiels que donner à manger à leur peuple.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que c'est pour cela qu'on ne voit rien dans le livre des crédits sur l'aide aux sinistrés?

M. Rémillard: L'aide aux sinistrés. On ne peut pas prévoir de l'aide quand les sinistres ne sont pas arrivés. Il faut au moins attendre les sinistres...

M. Johnson (Anjou): II peut y avoir une réserve.

M. Rémillard: ...ensuite on prévoit de l'aide. Entre autres, lorsque vous parliez tout à l'heure...

M. Johnson (Anjou): Au cas où vous n'en seriez pas certain, il y en a un qui est permanent au Sahel.

M. Rémillard: C'est pour cela que, tout à l'heure, lorsque vous m'avez demandé combien de fonctionnaires travaillent à préparer le plan Marshall, c'est ça que je vous ai dit. Vous dites justement qu'au Sahel il y a un problème permanent, mais pas seulement au Sahel. La famine, c'est un phénomène qui est extrêmement difficile en Afrique et pas seulement au Sahel. C'est pour cela que le plan Marshall doit être en vigueur sur certains aspects, dans certaines considérations, pour faire en sorte que ces gens puissent manger. Qu'on arrête les enfants de mourir comme on le voit maintenant. Tout le monde voit à la télévision ces choses-là.

Ce que j'essaie de vous dire, c'est qu'il est intéressant de situer notre coopération en fonction d'une philosophie d'aide, d'une philosophie de collaboration avec ces pays, non pas dans un esprit de colonisateurs ou de néo-colonialisme, mais dans une philosophie d'aide qui pourrait permettre à ces pays de devenir éventuellement autosuffisants pour faire en sorte que leurs peuples puissent manger à leur faim. Voilà l'essentiel de notre objectif.

M. Johnson (Anjou): Je comprends les objectifs et on est tous pour la vertu et la tarte aux pommes par définition. Je constate que les transferts aux organismes non gouvernementaux sont amputés et qu'il n'y a pas de réserve pour l'aide aux sinistrés. Pour

avoir vécu et avoir participé à l'évolution -avec vous, d'ailleurs, M. le Président, ainsi qu'avec d'autres - d'un organisme de développement international, OXFAM et l'avoir créé au Québec au début des années soixante-dix, je constate que très concrètement, entre le discours du ministre sur la faim dans le monde et les ressources que son ministère est en train de mettre pour prétendre répondre et apporter cette contribution modeste, il faut bien le dire, que le Québec peut apporter à la solution de cette tragégie humaine, il y a un hiatus. Je ne vois pas de crédits dans son ministère pour l'aide aux sinistrés et je vois une amputation des crédits aux organismes de coopération internationale. Alors, où est le plan Marshall dans les crédits du ministre? Je le cherche. Je ne dis pas que je suis contre l'aide au tiers monde. Il faudrait peut-être se comprendre. Je dis juste: Qu'est-ce que vous faites au lieu d'en parler?

M. Rémillard: Ah, bon, j'avais l'impression de vous étiez contre l'aide au tiers monde. Je suis content que vous le précisiez.

M. Johnson (Anjou): Franchement, je ne suis quand même pas ridicule.

M. Rémillard: Bon, écoutez, je trouve intéressante votre remarque dans le cadre, bien sûr, que vous êtes pour l'aide au tiers monde. Je prends bonne note de votre intervention. Évidemment, vous savez très bien que, dans la dernière période de l'année, par exemple, le Québec a donné 500 000 $ pour aider les sinistrés de Mexico. On a aidé aussi les sinistrés à la suite de l'éruption volcanique de Colombie pour 150 000 $. Voilà de l'aide. Vous savez, on ne peut pas prévoir quels volcans vont éclater dans les prochains mois, les prochaines années. C'est assez difficile; alors, on verra au fur et à mesure. Il y a un fonds de prévu à cet effet-là et ce fonds fera en sorte...

M. Johnson (Anjou): De combien?

M. Rémillard: C'est un fonds qui varie selon les circonstances. Il est toujours possible, vous savez, de faire appel au Conseil du trésor ou à un fonds de suppléance en particulier pour donner un effort particulier dans les circonstances qui nécessiteraient un apport du Québec.

Mais d'une façon plus globale, M. le Président, l'aide au tiers monde doit se situer de par les liens de coopération que nous avons avec le tiers monde, et, dans ce cadre-là, nous avons conservé les mêmes programmes d'aide au tiers monde. Que le chef de l'Opposition me donne des endroits précis, des endroits essentiels où on a touché cette aide au tiers monde.

Entente sur le deuxième sommet francophone

M. Johnson ( Anjou): M. le Président, pour revenir au sommet francophone, est-ce que le ministre pourrait déposer et rendre public le texte de l'entente avec le gouvernement fédéral concernant la participation du Québec au deuxième sommet francophone? Y a-t-il une telle entente?

M. Rémillard: Oui, il y a eu une entente. Vous savez, je dois vous avouer qu'il a fallu partir de loin. Pour négocier cette entente pour le deuxième sommet, il y avait beaucoup de points à discuter. On s'était donné comme objectif d'en arriver à une entente avec le gouvernement fédéral avant d'inviter la francophonie à venir à Québec.

Nous partions de loin, M. le Président, parce que l'entente qui avait été négociée et rendue publique lors de la dernière campagne électorale ne valait que pour le huis clos. On n'avait pas pensé à négocier une entente pour la partie publique de ce sommet. Je me suis retrouvé, je dois le dire, quelques heures après mon assermentation comme ministre, j'ai dû prendre l'avion. Je me suis rendu à Paris et j'ai été en première négociation, donc, avec mes homologues des autres pays francophones et avec les instances gouvernementales fédérales. (11 heures)

Je faisais face à une situation où j'avais une entente signée par le gouvernement du Québec alors dirigé par le chef de l'Opposition et par M. Mulroney où on ne prévoyait que la partie à huis clos. On ne parlait pas de l'ouverture, on ne parlait pas de la clôture. On donnait au Québec certains droits qui pouvaient être considérés comme intéressants dans certaines circonstances, mais qui ne s'appliquaient que pour la période à huis clos. On ne parlait pas de l'ouverture, on ne parlait pas de la clôture. On savait qu'on avait là un sommet de plus de 42 chefs d'État et de gouvernement, un moment historique pour la francophonie, et on n'avait pas déterminé avec le gouvernement fédéral quelle serait la place du Québec dans l'ouverture et dans la clôture de ce sommet. C'est à partir de cela que nous avons dû, tout d'abord, négocier la place du Québec, tant à l'ouverture qu'à la clôture, et qu'ensuite, à partir de cette première entente et de la pratique de cette première entente au premier sommet de la francophonie, nous avons négocié avec le gouvernement fédéral une entente pour l'organisation du deuxième sommet de la francophonie, et il me fait grand plaisir de déposer cette entente. Il y a ici un communiqué public - je dois vous dire qu'il a été rendu public à Paris même, par le gouvernement fédéral et par nous

également, par nos instances - et il me fait plaisir d'en déposer un exemplaire.

M. Johnson (Anjou): Et quelle est la modification...

Le Président (M. Filion): Avec votre permissions M. le chef de l'Opposition, en vertu de l'article 162, il me fait plaisir de recevoir le document déposé par le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, en quoi cette entente est-elle différente de la précédente?

M. Rémillard: II y a une différence bien importante parce que, justement, dans cette entente, on prévoit l'introduction et on prévoit la conclusion; on ne prévoit pas simplement le huis clos. Le huis clos, c'est intéressant, parce que c'est au huis clos que les ministres peuvent discuter ensemble, qu'ils peuvent échanger. Il n'y a pas la presse, il n'y a pas la...

M. Johnson (Anjou): C'est la partie publique par opposition â la partie diplomatique, si je comprends bien.

M. Rémillard: Laissez-moi terminer, s'il vous plaît! Je vous disais que le huis clos est intéressant parce que, vous savez, on est loin de la presse, on est loin des caméras et il peut y avoir des échanges extrêmement fructueux et intéressants. Pour le Québec, je crois que c'est intéressant de pouvoir participer d'une façon pleine et entière à ces discussions, mais il reste quand même qu'il faut prévoir la participation du Québec, comme foyer principal de la francophonie au Canada, comme foyer principal de la francophonie en Amérique, comme seul gouvernement d'un État fédéré, mais d'un Etat en Amérique, qui est un État francophone, aux événements qui sont publics devant le monde entier, devant les caméras, devant les journalistes et c'est ce que nous avons prévu.

Il y a une place pour le Québec à l'ouverture, il y a une piace pour le Québec à la clôture. Voilà une grande différence! Nous n'avons pas simplement négocié avec le gouvernement fédéral l'intervention du Québec, à ce deuxième sommet, en fonction du huis clos, mais nous l'avons fait aussi pour les deux périodes majeures publiques de ce deuxième sommet de la francophonie, l'ouverture et la clôture.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, puisque le ministre s'exprime un peu comme s'il était à la période des questions, il n'y a pas de caméra, je veux juste le rassurer là-dessus. Peut-être que je pourrais revenir, puisque je l'ai devant moi, à la page 3 de l'entente. On nous dit que la présidence générale du sommet sera assurée par le premier ministre du Canada. Ce sommet, comme on le sait, se tiendra à Québec. Le premier ministre du Canada présidera les travaux du premier volet. À la conclusion...

M. Bélisle: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M- Filion): Excusez, M. le chef de l'Opposition. M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Étant donné que, conformément à l'article 162 de notre règlement, vous avez permis le dépôt du document, les membres de la commission apprécieraient grandement en avoir une copie.,

Le Président (M. Filion): M. le député de Mille-Îles, nous faisons actuellement le nécessaire pour tenter d'en obtenir des copies, à moins que ces copies n'existent déjà de votre côté, du côté de votre équipe, M. le ministre.

M. Rémillard: Vous n'avez pas d'autres coptes?

M. Johnson (Anjou): On pourrait peut-être continuer pendant ce temps, M. le Président.

Le Président (M. Filion): C'est bien. M. le chef de l'Opposition, vous pouvez continuer.

M. Johnson (Anjou): Je remarque, à la page 3 du document...

M. Bélisle: Je crois comprendre, M. le Président, qu'on va en avoir une copie. C'est exact?

Le Président (M. Filion): M. le député de Mille-Îles, je pense que vous m'avez entendu, on fait le nécessaire pour fournir à tous les membres de cette commission une copie du document aussitôt que ce sera prêt. M. le chef de l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): À la conclusion desdits travaux, il demandera à l'assemblée de confier la présidence au premier ministre du Québec pour le second votet. On nous dit qu'il y aura une cérémonie d'ouverture -c'est une bonne idée - que le chef du gouvernement du Canada ouvrira la séance, suivi immédiatement du chef du gouvernement du Québec. Je comprends! Si c'est dans la ville de Québec, je voudrais bien que le premier ministre du Québec ne parle pas! C'est évidentl On ne nous annonce pas ce que sera la séance de clôture, cependant. On nous dit: II y aura une cérémonie de clôture.

Si je comprends bien les distinctions fondamentales qu'évoque le député de Jean-Talon, ministre des Relations internationales, c'est qu'il y aun début et une fin au sommet; ce n'est pas si mai. Deuxièmement, on nous dit que le premier ministre du Québec, comme cela se passe dans la ville de Québec, en territoire québécois, va pouvoir présider la deuxième partie du sommet. Je ferai remarquer au ministre, qui a déjà suivi ce dossier pendant la campagne électorale ou à l'époque où il était engagé par le gouvernement canadien, qu'il n'y avait pas de problème sur la participation du Québec au deuxième volet du sommet de Paris, s'il y avait eu un sommet en deux volets comme le prévoyait initialement le gouvernement canadien. C'est cela qu'on a changé. Je pense que le ministre devrait se le rappeler. S'il considère qu'il est de quelque utilité d'avoir l'appui de l'Opposition dans ces questions, faudrait-il qu'il réfère à ces questions avec justesse.

M. le Président, on a aboli le poste de M. Claude Roquet à Paris. On sait que M. Roquet, qui avait un rang assez assimilable à celui du délégué général du Québec à Paris...

M. Rémillard: Est-ce que vous me permettez de vous répondre? Vous me posez des questions sur l'ouverture et sur la clôture.

M. Johnson (Anjou): Enfin, théoriquement, j'ai 20 minutes.

M. Rémillard: On pourrait parler de M. Roquet ensuite.

M. Johnson (Anjou): Non, je donnerai l'occasion au ministre... Je vais poser une question sur le multilatéral et cela touche aussi le sommet. Il pourra peut-être ramasser cela pour qu'on puisse procéder.

M. Rémillard: Oui, sur le sommet. J'aimerais pouvoir vous répondre, vous donner des informations.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, on a aboli le poste de M. Claude Roquet à Paris. J'essaie de voir comment, au-delà des grands mots, on peut s'assurer du suivi du premier sommet francophone, celui de Paris, alors qu'on sait que les sherpas qui préparent le deuxième sommet sont à Paris et que les ambassades africaines sont pour le moins un peu plus présentes à Paris que les consulats ne le sont à Québec. Est-ce que le ministre ne croit pas qu'en abolissant le poste occupé par M. Roquet et semble-t-il, en écartant les services de ce remarquable fonctionnaire, de cet homme de carrière dans la fonction publique fédérale et québécoise, il risque de faire perdre du temps, un temps précieux et important, au niveau des contacts que nous devons avoir, notamment avec les pays africains, par la disparition de son poste à Paris?

M. Rémillard: Vous permettez, M. le Président, que je donne quelques informations concernant le deuxième sommet de la francophonie. Pour vraiment comprendre les résultats des négociations que nous avons eues avec le gouvernement fédéral, il faut voir l'entente dans son ensemble et, lire l'article premier. Tout d'abord, il faut savoir que l'invitation officielle aux chefs d'État et de gouvernement à participer à ce deuxième sommet a été faite à la fois par le gouvernement fédéral et le Québec. Je peux vous dire que c'est la première fois que cela se fait de cette façon.

M. Johnson (Anjou): En 1967, 48 chefs d'État ont été invités par le gouvernement du Québec à venir à Québec.

M. Rémillard: L'invitation avait été faite par le gouvernement fédéral. C'est cela, la différence. Chacun des chefs d'État et de gouvernement a reçu une invitation officielle du Québec en même temps qu'une invitation officielle du Canada.

M. Johnson (Anjou): Comme en 1967.

M. Rémillard: Pas comme en 1967. De toute façon, vous savez, il faut se rappeler ce rôle historique entre le Canada et le Québec en ce qui a trait aux relations internationales. Cela s'est produit lorsqu'on a discuté cette première entente. Vous avez discuté la première entente avec le gouvernement fédéral. Il fallait savoir à ce moment-là que le Nouveau-Brunswick était une province qui avait été acceptée à l'Agence de coopération technique et culturelle depuis 1971 - le sommet a commencé - et le Nouveau-Brunswick, depuis 1978. Alors, à un moment donné, vous me dites: Qu'est-ce qui se passe, le Nouveau-Brunswick a le même statut que le Québec? Oui, mais, quand la négociation a été faite avec le gouvernement fédéral sur le fondement même de la création de l'Agence de coopération technique et culturelle, il fallait savoir à ce moment que le Nouveau-Brunswick avait aussi le même statut que te Québec. Il ne faut pas ensuite se dire: Voici, le Nouveau-Brunswick a le même statut que le Québec. C'est tout à fait normal, si on se réfère, bien sûr, pour négocier une entente, à l'Agence de coopération technique et culturelle.

Je puis vous dire qu'il faut lire l'article 1 de l'entente qui dit ceci, et je me permets de le lire pour ceux qui n'ont pas le texte ici, pour qu'ils comprennent le sens de notre discussion: Le Canada comme puissance invitante et l'un des deux gouvernements

hôtes - l'autre gouvernement hôte, c'est le Québec, et voilà aussi un point majeur - fait parvenir, avant la fin des travaux du sommet, une lettre d'invitation, copie conjointe à tous les chefs d'État des gouvernements participants et des délégations, leur proposant que le second sommet francophone se tienne dans la ville de Québec. Cette invitation fait référence à la déclaration que fera le premier ministre du Québec, en sa qualité d'un des deux gouvernements hôtes - un des deux gouvernements hôtes - lors de la cérémonie de clôture. Le Québec est l'un des deux gouvernements hôtes. Trouvez-moi un précédent à cet effet dans les relations internationales du Québec.

C'est dans ce contexte que vous devez situer la séance d'ouverture où le premier ministre du Québec parlera à la suite du premier ministre du Canada. C'est le premier ministre du Canada qui est le chef de l'État souverain et il y a des chefs de gouvernement et des chefs d'État qui sont là, c'est tout à fait normal. Le chef du gouvernement du Québec parlera ensuite et, là aussi, c'est un événement très important et un point essentiel de cette entente que nous avons conclue.

Délégation du Québec à Paris

Maintenant, en ce qui regarde la situation de la délégation à Paris, M. le Président, je voudrais tout d'abord qu'on comprenne bien la situation, qu'on comprenne qu'à Paris il y avait deux déléguésî un délégué général qui est maintenant M. Roy et un délégué au multilatéral et à la francophonie qui était M. Roquet, donc, une délégation qui a été créée comme cela, à un moment donné, à la suite de différents événements et qui impliquait un délégué avec appartement et services d'un maître d'hôtel, avec tout ce qui entoure normalement, bien sûr - c'est tout à fait normal - les services qu'on doit donner à un délégué à Paris.

Nous avons considéré que le délégué général à Paris pouvait jouer ce rôle de délégué auprès de la francophonie sur le plan du multilatéral, représenter le Québec auprès de l'Agence de coopération technique et culturelle, le représenter aussi parmi les sherpas qui auront à organiser et à planifier le contenu du deuxième sommet de la francophonie- C'est un rôle que M. Roy peut très bien jouer, conjointement avec son rôle de délégué général. Donc, nous n'abolissons pas une délégation à Paris comme telle. Nous demandons à M. Roy de jouer aussi le rôle de délégué à la francophonie et au multilatéral. C'est ce que nous faisons.

En ce qui regarde M. Roquet, je voudrais tout d'abord lui rendre hommage parce qu'il s'agit, comme vient d'ailleurs de le dire le chef de l'Opposition, d'un fonctionnaire qui est l'un des piliers de notre diplomatie. Il a joué un rôle majeur et extrêmement efficace lors du premier sommet de la francophonie et il a permis au Québec de jouer ce rôle de premier plan. Je tiens à le remercier, comme je tiens, d'ailleurs, et je voudrais le préciser, M, le Président, à remercier tous les fonctionnaires qui ont joué un rôle tout à fait exceptionnel. Je parle de M» Roquet. Il y a aussi M. Léger qui a été nommé Commissaire général à la francophonie, qui doit être situé dans ce contexte. Je parle de M. Duhaime, de M. Tardif. Je parle de tous ces gens qui ont contribué d'une façon extrêmement efficace au succès de ce premier sommet de la francophonie. (11 h 15)

Je peux vous dire que, comme ministre et comme Québécois, je suis très fier de la qualité et de la compétence des fonctionnaires de mon ministère. Ils le prouvent, je pense, tous les jours, en faisant en sorte qu'avec le peu de moyens que nous avons nous prenons une place de plus en plus évidente, importante et efficace pour le Québec sur la scène internationale. Il ne s'agit pas de mettre de côté M. Roquet, mais de lui donner de nouvelles fonctions qui ne seront pas moindres, loin de là - oui, c'est décidé, mais je n'ai pas à vous l'annoncer le jour des crédits - que les fonctions qu'il exerce actuellement. Je peux vous dire que je partage avec vous toute l'admiration que vous avez pour ce haut fonctionnaire du Québec.

M. Johnson (Anjou): Le ministre nous dit, dans le fond, que la carrière de M. Roquet étant reconnue et la valeur de ce remarquable fonctionnaire étant reconnue à juste titre, on le verra bien dans ses annonces subséquentes, l'ensemble de ses fonctions sera donc maintenant exercé par M. Jean-Louis Roy. Pour avoir eu l'occasion de discuter assez longuement avec à la fois le délégué du Québec et le délégué au multilatéral alors que j'étais premier ministre, il s'agit vraiment de deux fonctions très différentes qui, je crois, exigent un niveau d'intervention et une énergie à déployer absolument phénoménale. Quand on sait qu'il y aura un deuxième sommet qui se tiendra à Québec et que le gros de l'action se passera à Paris, d'ici ce temps-là, à cause des ambassades, notamment, des pays africains et du rôle très impartant que joue la France, ce que nous dit le ministre, c'est, dans le fond, que le délégué général du Québec peut assumer les deux fonctions. J'ai bien peur qu'il ne se prive de ressources importantes et j'ai bien peur que des éléments d'une des deux fonctions de M. Roy ne soient négligés par la force des choses.

Il faut bien revenir au caractère assez modeste de notre présence internationale. Le

Québec ne se fait jamais donner de cadeaux. Il faut qu'il se batte pour chaque pouce qu'il gagne. Il faut même qu'il se batte, de ce temps-ci, pour ne pas en perdre. Amputer la coopération multilatérale d'une ressource, au-delà de la personnalité remarquable de M. Roquet, amputer cette fonction au multilatéral, à nos yeux, je tiens à le dire au ministre, est une erreur qui pourrait coûter cher à la préparation du sommet. Je souhaite simplement que mon appréhension ne se réalise pas étant donné que nous souhaitons que le prochain sommet soit également un succès.

M. le Président, vous me permettrez de passer la parole à mon collègue, le député de Saint-Jacques, qui a quelques questions additionnelles à adresser au ministre.

Le Président (M. Filion): M. le député de Saint-Jacques, auparavant je voudrais reconnaître... D'accord. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Toujours au niveau de la délégation générale du Québec à Paris, M. le ministre, est-ce que le poste de conseiller scientifique est maintenu?

M. Rémillard: Le poste de conseiller scientifique et celui de conseiller à la coopération seront fondus en un seul poste. Il est donc maintenu et sera exercé par une même personne, celui qui est responsable de la coopération.

M. Boulerice: Vous êtes en train de favoriser le double emploi quand, en définitive, on s'achemine vers des accroissements de charges au niveau de la délégation, puisqu'à l'issue du sommet, l'on proposait la création d'un institut de l'énergie des pays de langue française qui aurait pour mandat de former des gestionnaires, de diffuser les travaux de recherche et de parrainer certaines études. Vous croyez que nos ressources humaines sont suffisamment compressibles, à ce niveau-là, pour leur permettre de faire à la fois A, B, C et D. Je ne doute pas de la qualité et de la valeur des gens qui sont là, mais il y a quand même 24 heures dans une journée, six jours dans une semaine, si on leur accorde au moins le dimanche.

M. Rémillard: C'est une bonne question. Tout d'abord, en ce qui regarde les deux postes, parce que votre question est reliée aussi, bien sûr, aux deux délégations à Paris, jusqu'en 1981, vous savez, il y avait un seul délégué, qui était le délégué général, qui accomplissait les deux mandats, les deux tâches: délégué à la francophonie et délégué à Paris pour voir aux intérêts du Québec en fonction de Paris. Nous avons à prendre des décisions. Nous faisons en sorte que la même personne puisse accomplir ces deux tâches, comme nous faisons la même chose en ce qui concerne le conseiller scientifique et celui de la coopération. Nous allons le faire dans d'autres domaines aussi.

Mais vous devez comprendre que l'organisation du deuxième sommet de la francophonie ne se fera pas seulement de Paris. Nous avons aussi un conseiller, le commissaire général à la francophonie, M. Jean-Marc Léger, qui a un rôle à jouer. Nous avons aussi les fonctionnaires de la direction francophone du ministère des Relations internationales qui ont un rôle extrêmement important et déterminant à jouer dans l'organisation de ce deuxième sommet. En prenant en considération ces ressources, à la fois du ministère à Québec et en ce qui regarde M. Léger, les ressources que nous avons à Paris et aussi, devrais-je ajouter, M. le Président, notre intention d'ouvrir dans un avenir quand même pas très éloigné une délégation en Afrique, ce qui nous permettra aussi d'avoir une action dans la francophonie africaine, tout cela... Pardon?

M. Boulerice: Mais avant que son action porte, M. le ministre, vous admettrez que cela va prendre quelques années...

M. Rémillard: Oui.

M. Boulerice: ...quand le terrain a été vraiment bien déblayé par M. Roquet depuis un certain nombre d'années.

M. Rémillard: Ce que je peux vous dire aussi, c'est que M. Roquet travaillait avec une seule personne, M. Duhaime, un autre excellent fonctionnaire. M. Duhaime va travailler avec M. Roy et va avoir en particulier ce domaine de préoccupation principale qu'est le multilatéral et la francophonie.

M. Boulerice: Qu'est-ce qui motive la création d'un poste supplémentaire à la délégation générale du Québec à Paris?

M. Rémillard: Je m'excuse. Je n'ai pas compris.

M. Boulerice: Pourquoi y a-t-il eu un poste supplémentaire créé à Paris à la délégation générale?

M. Rémillard: Un poste supplémentaire, vous voulez peut-être parler d'un secrétaire?

M. Boulerice: Je ne sais pas, secrétaire du délégué.

M. Rémillard: Un délégué? Non.

M. Boulerice: Secrétaire du délégué?

M. Rémlllard: Secrétaire du délégué, oui. On n'a pas créé un poste nouveau. C'est strictement un rôle qui existait avec la précédente déléguée et qui existe maintenant avec M. Roy. C'est un délégué qui est recruté localement, qui gagne un salaire en conséquence, donc un très petit salaire si on considère le coût de la vie à Paris, qui n'a aucune allocation de logement» Ce n'est pas un nouveau poste C'est tout simplement un poste qui est occupé par une autre personne» L'autre personne est rappelée ici parce qu'elle termine son mandat. Il n'y a pas vraiment de nouveau poste de créé.

M. Boulerice: Quand vous dites que l'autre personne sera rappelée ici et termine son mandat, vous faites allusion au directeur de cabinet?

M. Rémillard: Directeur de cabinet, je pense que c'est cela. Qui jouait ce rôle de directeur de cabinet? C'est M. Brunet qui, je pense, était directeur de cabinet de Mme Beaudoin et qui revient au Québec parce qu'il a terminé son mandat.

M. Boulerice: Un mandat de combien de temps pour M. Brunet?

M. Rémillard: Je pense qu'on l'a étiré un peu. Il est demeuré un petit peu plus longtemps. On lui a demandé de demeurer un peu plus longtemps que prévu, mais il doit rentrer comme prévu.

M. Boulerice:D'accord.

M. Rémillard: Ce sont normalement des mandats de trois ans, comme vous le savez, en poste à l'étranger.

M. Boulerice: Est-ce que le directeur de cabinet peut être une personne, comme vous l'avez exprimé tantôt, dont le statut est différent, c'est-à-dire qui obtient le statut de résident en France et est recrutée localement?

M. Rémillard: Écoutez! Cela coûte certainement moins cher, vous savez. Cela coûte moins cher parce qu'on n'a pas un appartement, des frais de transport, etc., à payer. Si on peut trouver quelqu'un de compétent... C'est un choix qui relève du délégué général et, si c'est le délégué qui trouve quelqu'un qui peut s'accommoder d'une telle situation, ce que je peux dire, c'est que j'en suis tout à fait satisfait, car les conditions sont remplies et, pour l'État, cela coûte beaucoup moins cher. Cela coûte moins cher de prendre quelqu'un qui gagne 28 000 $ par année que de prendre quelqu'un qui a un salaire plus élevé, mais, en plus, qui aussi a tous les avantages reliés à son poste.

M. Boulerice: Est-ce qu'il y a des précédents au niveau de nos délégations générales où le directeur de cabinet du délégué général est recruté localement?

M. Rémillard: II faudrait que je m'informe. Attendez. Je vais m'inforrner de cela»

M. Boulerice: J'aimerais bien.

M. Rémillard: On me dit qu'il y a beaucoup de précédents dans la diplomatie. D'une façon générale, cela se fait régulièrement, mais je ne pourrais pas vous donner un cas particulier spécial.

M. Johnson (Anjou): Cela arrive régulièrement qu'un directeur de cabinet est recruté localement?

M. Rémillard: Oui.

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Rémillard: On me dit que cela se fait dans le monde diplomatique. Cela se fait très bien.

M. Boulerice: Pas dans le monde diplomatique, mais dans le nôtre.

M. Rémillard: II faudrait que je vous trouve un cas particulier. Je pourrais chercher longtemps. Qu'est-ce qui vous pose des problèmes? Est-ce que c'est le fait que cela nous coûte moins cher qui vous cause un problème ou si c'est la compétence? Je voudrais simplement savoir le problème que vous voyez dans cela.

M. Johnson (Anjou): Ce ne sont pas des problèmes. Ce sont des questions. D'ailleurs, le ministre devrait s'habituer. Cela va être comme cela pendant une couple d'années.

M. Rémillard: Vous posez des questions, mais je voudrais savoir la...

M. Johnson (Anjou): À moins que le ministre n'y voie un problème, M. le Président.

M. Rémillard: J'essaie de voir parce que j'ai des questions qui me paraissent intéressantes.

M. Boulerice: Bien, je ne sais pas. Quelqu'un qui est sorti d'une grande école, l'ENA, qui est là depuis deux ans et qui doit normalement accueillir un délégué général qui, avouons-le, n'avait malheureusement aucune expérience diplomatique, donc nouveau dans le milieu, quoique parlant la langue des indigènes là-bas, cela peut toujours aider, mais, quand même, aucune

expérience. J'aurais cru, moi, que cela aurait peut-être été préférable de maintenir le directeur de cabinet qui était là. Je ne pense pas qu'il y ait obligation de changer le directeur decabinet. Ce ne sont pas des cabinets politiques, les directions générales du Québec. Ce sont des ambassades. C'est bien différent.

Je pense qu'au niveau de la continuité et au niveau du soutien à un nouveau délégué générai, cela me serait apparu peut-être plus efficace ou, tout au moins, plus pertinent que d'aller dans un engagement local, local étant relatif. Mais si cela fait partie du ménage que vous voulez faire à la délégation générale du Québec.

M. Rémillard: Si vous voulez dire un ménage et si vous voulez faire référence à des éléments politiques, regardez ce qu'on a fait jusqu'à présent en ce qui regarde mon ministère et vous allez voir que des gens qui viennent des cabinets politiques viennent d'avoir des nominations et je ne crois pas que ce soit un élément... Pour nous, je peux vous assurer qu'il y a un élément qui compte, c'est la compétence essentiellement.

En ce sens, je peux vous dire que, de fait, le délégué général à Paris est le seul qui ait un chef de cabinet et M. Brunet devait rentrer au Québec l'an dernier. Cela a été prolongé. Maintenant, il veut rentrer. Écoutez, il faut respecter aussi le voeu et les intentions des gens dans la mesure où les gens veulent rentrer et veulent venir au Québec. Quand les gens sont en poste depuis un certain temps, c'est bon qu'ils reviennent prendre contact avec la réalité du Québec. Alors, il n'y a rien qui a été brusqué. Tout a été fait très normalement. M. Brunet a collaboré aussi au sommet sur la francophonie. Tous ces gens ont collaboré entièrement avec nous et nous en sommes extrêmement heureux. Il n'y a pas de problème à ce niveau.

M. Johnson (Anjou): Qui remplace M. Brunet, finalement? Quel est le nom de la personne qui remplace M. Brunet?

M. Rémillard: M. Alain Massicotte.

M. Boulerice: Et c'est lui qui nous fait faire des économies, comme vous le dites.

M. Rémillard: Bien, écoutez. Bien sûr que le statut, je pense, administrativement parlant, n'est pas la même chose. Donc, il y a des économies qui se font.

Une voix: D'accord.

M. Rémillard: Pourquoi refuserait-on de faire des économies?

M. Boulerice: Est-ce qu'on peut avoir copie de son contrat? On pourra voir de visu les économies et vous en féliciter peut-être sans doute plus tard.

M. Rémillard: Si ce sont des choses qui se font, on va le faire.

M. Boulerice: Cela se fait. C'est public.

M. Rémillard: On me dit qu'il n'y a pas de problème. Je ne voudrais pas faire des choses qui ne se font pas, mais les choses qui se font, c'est avec grand plaisir qu'on les fait... Il n'y a pas de problème. (11 h 30)

M. Boulerice: M. le ministre, j'aimerais connaître dans quelle enveloppe budgétaire se retrouvent les 1 450 000 $ qui ont été demandés conjointement par le ministère des Affaires culturelles et le ministère des Relations internationales afin d'amorcer une véritable politique québécoise de diffusion et de promotion de la culture québécoise à l'extérieur du Québec.

M. Rémillard: On me dit que cela a été abandonné. Il n'y a pas de suite à cela.

M. Boulerice: Vous avez abandonné?

M. Rémillard: C'est dans le plan de développement et il n'y a pas eu de développement.

M. Boulerice: Je ne sais pas si c'est l'abandon... Votre collègue des Affaires culturelles a répondu qu'elle n'avait pas... J'espère que vous, au moins, vous avez lu le document. Vous l'avez vu? Vous l'avez lu?

M. Rémillard: Ah oui!

M. Boulerice: Vous auriez été charitable de lui en prêter une copie parce qu'elle a avoué, en commission parlementaire, qu'elle ne l'avait malheureusement pas vu, ne l'avait pas lu, et elle ne savait pas où il était. Dommage, si elle vous avait parlé, vous auriez pu lui en prêter une copie. Donc, au chapitre de la culture, ces 1 450 000 $ ne s'y retrouvent pas. Il n'y a que 450 000 $ qui ne sont pas des sommes neuves, mais qui proviennent de compressions qui ont été faites à l'intérieur d'autres programmes au ministère des Affaires culturelles. Promotion et diffusion de la culture québécoise à l'extérieur du Québec: 500 000 $. Ce n'est pas demain la veille qu'on va obtenir les résultats qu'on veut. Quand vous dites abandon, en fonction de votre réponse et en fonction de la réponse de votre collègue des Affaires culturelles ou même celle de votre collègue des Communications, je trouve que vous abandonnez tous très facilement quand vient le temps de rencontrer M. le président du Conseil du trésor.

M. Rémillard: Ce sont des abandons qui ne sont pas vraiment des abandons parce que c'est un projet qui n'a jamais été officiel comme tel et qui, finalement, est tombé en cours de route. Voilà.

Arrêt des subventions aux collèges Stanislas et Marie de France

M. Boulerice: II y a une coupure de 3 000 000 $ dans les subventions accordées aux collèges Stanislas et Marie de France. Est-ce que la coupure signifie que ces collèges privés québécois ne seront plus aidés par le gouvernement du Québec?

M. Rémillard: Écoutez, c'est intéressant votre question. Tout d'abord, je vaudrais faire une petite remarque. Quand on parle d'un titre comme 20 % de coupure, il faut penser qu'il faut nuancer un peu. Ce n'est pas vraiment 20 % de coupure parce qu'il y avait au programme budgétaire du ministère des Relations internationales des postes qui vont simplement passer à d'autres instances gouvernementales. Ce qu'on fait, on ne coupe pas vraiment l'essentiel du programme comme tel. Il ne faut pas penser... Ce n'est pas 20 %, c'est beaucoup plus nuancé et, entre autres, l'exemple que vous donnez est particulièrement intéressant. On peut dire aussi, dans la même veine... On pourrait penser que les 1 500 000 $ dépensés pour venir en aide aux sinistrés du Mexique, de la Colombie ou d'ailleurs, comme ces programmes, maintenant, ne s'appliquent plus, il y a une économie de 1 500 000 $.

Si on met cela ensemble, cela vous fait à peu près 5 000 000 $ qui sont simplement un transfert de fonds ou des fonds qui sont récurrents et non récurrents. Alors, lorsqu'on parle de 20 %, il faudrait peut-être tenir compte de cet élément. En ce qui regarde les collèges Marie de France et Stanislas, vous savez que ce sont des collèges français qui reçoivent une subvention importante du gouvernement québécois. Ce n'est pas du bilatéral parce que la France ne fait pas la même chose du côté français, mais c'était une façon qui dure depuis nombre d'années. Maintenant, on étudie la possibilité de faire en sorte que ce budget passe à la responsabilité d'un autre ministère qui, vraisemblablement, pourrait être l'Éducation.

M. Boulerice: Vous avez l'accord de M. le ministre de l'Éducation à savoir que c'est lui qui assumera les 3 000 000 $ et plus, enfin l'entité, au moins 3 000 000 $ pour Stanislas et Marie de France.

M. Rémillard: Vous connaissez M. Ryan, il veut toujours assumer ses responsabilités. Dans la mesure, bien sûr, où ces collèges pourront répondre aux normes normales au Québec pour recevoir des subventions comme institutions privées d'enseignement, ils recevront, à ce moment-là, le même traitement que les autres établissements québécois de la part du ministère de l'Éducation.

M. Boulerice: Est-ce que le gouvernement français a été prévenu de cette hypothèse nouvelle?

M. Rémillard: J'aurai l'occasion d'en discuter avec un représentant du gouvernement français, et c'est une situation qui, actuellement, est discutée entre le ministère de l'Éducation, le MRI et différentes autres instances.

Il s'agit de ne rien brusquer. On n'est pas intéressé à brusquer quoi que ce soit ou mettre en cause, même, les existences de ces écoles, de ces collèges, mais bien de faire en sorte que ce budget puisse appartenir à des instances qui sont plus appropriées pour gérer de tels budgets. C'est tout.

M. Johnson (Anjou): Je dois comprendre de ce que vient de dire le ministre que les gens de Stanislas et de Marie de France, de ces institutions privées, y compris nos amis français qui les fréquentent, qui les dirigent, qui y enseignent, ainsi que les nombreux Québécoises et Québécois qui y suivent des cours, peuvent être rassurés. Il n'y a pas de coupure de 3 000 000 $.

M, Rémillard: Voici, tout d'abord vous avez fait une remarque en disant "les nombreux Québécoises et Québécois", c'est intéressant de noter que 95 % des étudiants qui sont dans ces collèges sont des Québécois. Ce sont de jeunes Québécois et Québécoises qui fréquentent ces collèges. Il s'agit donc de faire en sorte que ce poste budgétaire puisse aller à un ministère susceptible de gérer pleinement ce genre de budget. Il faudra, bien sûr, que les collèges entament des négociations avec le ministère de l'Éducation pour voir dans quelle mesure ils peuvent se conformer à ses normes pour recevoir ces subventions. Ce sont des choses que nous discutons actuellement, mais il ne s'agit pas de mettre en cause des éléments fondamentaux en ce qui regarde, bien sûr, l'éducation qu'on peut recevoir, ici, au Québec dans ces établissements.

M. Boulerice: Vous n'excluez donc pas des coupures.

M. Rémillard: Écoutez! Là comme ailleurs, vous savez, nous, au gouvernement, nous n'excluons pas les coupures.

M. Johnson (Anjou): Je voudrais simplement demander au ministre... On comprend bien que Marie de France et Stanislas, dans la mesure où ils dispensent de l'enseigne-

ment, sont comme toutes les autres boîtes d'enseignement privées au Québec, des endroits où se dispense un enseignement dans une très forte proportion, en l'occurrence près de 90 %, à des Québécois comme c'est le cas de dizaines d'autres institutions privées.

Cependant, Marie de France et Stanislas ont un historique de relations entre la France et le Québec. Ce sont des établissements administrés par des gens qui viennent de France. Est-ce que je comprends, dans ce que le ministre nous dit, que, non seulement il n'y a pas de coupure, que c'est envoyé à l'Éducation, mais qu'il les traitera comme tous les autres établissements privés? Est-ce que c'est bien ça?

M. Rémillard: Non...

M. Johnson (Anjou): Et son ministère n'entend pas tenir compte du fait particulier de la spécificité de ces deux établissements?

M. Rémillard: Non, ce n'est pas cela que j'ai dit. J'ai dit que ce sera transféré au ministère de l'Éducation et que le ministère de l'Éducation verra à négocier avec ces gens, ces collèges, ces institutions, la situation qu'il veut leur donner et que ces institutions veulent avoir, aussi.

Moi, je ne suis pas ministre de l'Éducation. Je ne connais même pas ses normes. Ce sera au ministre concerné de négocier cette situation.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le ministre, en tant que ministre responsable des relations du Québec avec le reste du monde, ne fera pas des recommandations au ministre de l'Éducation quant au type de traitement qu'il doit donner à ces deux établissements qui sont très particuliers et qui ne sont pas des établissements privés comme les "autres", en ce sens-là?

M. Rémillard: Comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, cela relève des Relations internationales pour un seul motif, finalement. C'est que l'enseignement qu'on donne là n'aboutit pas au diplôme de collèges tels que nous les connaissons, ici, dans notre système d'éducation.

C'est en ce sens-là que j'ai commencé à en discuter avec M. Ryan et que nous allons trouver les solutions que M. Ryan voudra bien appliquer, parce que c'est lui le ministre de l'Éducation, ce n'est pas moi.

M. Boulerice: M. le ministre, la présence internationale du Québec ne se fait pas uniquement par des délégations générales et des délégués généraux, elle peut se faire aussi par des individus, par des professionnels. Vous n'êtes pas sans savoir, puisque vous y avez fait allusion à la page 11, lorsque vous avez parlé de l'ONU, qu'il existe une école pour l'ONU qui s'appelle UNIS, United Nations International School, qui avait le privilège d'avoir, jusqu'à très récemment, un directeur général qui était canadien-français, québécois. Or, depuis trois ans, il y a dans cette école trois enseignants en provenance du Québec, privilège immense, d'ailleurs, quand on songe que 150 pays demandent chaque année d'y envoyer des enseignants originaires de leur pays à leurs frais, etc.

Donc, il y a trois enseignants québécois qui enseignent aux garçons et aux filles des diplomates et fonctionnaires, dont ceux qui dirigeront sans aucun doute ces pays demain. Il y a actuellement possibilité que l'on rappelle ces trois merveilleux ambassadeurs officieux du Québec. Est-ce que vous avez l'intention d'intervenir auprès de votre collègue, le ministre de l'Éducation, de façon que les trois enseignants québécois soient maintenus à UNIS?

M. Rémillard: Nous sommes en discussion présentement avec le ministère de l'Éducation pour voir ce qu'on peut faire. Je ne peux pas vous en dire plus long à ce moment-ci, je ne sais pas si on pourra les maintenir, ce qu'on pourra faire, mais je considère, bien sûr, qu'une présence québécoise dans une instance de l'ONU est toujours très importante. Nous voulons développer justement, nos relations avec l'ONU et vous pouvez être assuré que je vais étudier la situation à son mérite. J'ai déjà eu des discussions avec mon collègue à ce sujet et j'en aurai d'autres, mais il n'y a rien d'arrêté encore.

M. Johnson (Anjou): Je voudrais simplement ajouter que j'ai été étonné de voir que le ministre, dans son texte de présentation, parlait d'accentuer nos relations avec les Nations Unies, à moins qu'il n'anticipe que le Québec y occupe un siège bientôt. Je pense qu'encore une fois nos appétits et nos objectifs de ce côté doivent être modestes et que c'est un acquis considérable de voir qu'il y a trois enseignants qui proviennent du Québec qui enseignent à UNIS. Pour une économie de bout de chandelle de quelque 120 000 $, en rappelant ces trois enseignants, le Québec perd une occasion extraordinaire qui ne se représentera pas, hormis peut-être le jour où il y occupera un siège, d'assumer une présence très concrète au centre et au coeur même de l'activité, au moins de celle de l'enseignement auprès de celles et ceux qui sont les enfants de ceux qui dirigent un certain nombre de pays et qui, dans bien des cas, sont voués à des carrières dans le secteur public, que ce soit la fonction publique, car ce n'est pas la carrière politique, dans certains pays.

Il nous apparaît important que cet

acquis de la présence de trois Québécois à UNIS ne soit pas mis en péril par une vision à courte vue qui, peut-être, nous amènerait à faire de grands discours sur notre participation à l'ONU, et on perdrait peut-être un acquis.

M. Rémillard: Je pourrais ajouter, cependant, qu'il ne faut pas exagérer le rôle de ces gens. Ce sont des éducateurs à l'école des Nations Unies; ce ne sont pas des gens qui sont en place dans des endroits stratégiques. Mais je comprends les préoccupations que vous avez et, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, j'ai déjà rencontré mon collègue du ministère de l'Éducation et je dois le revoir sur ce point.

Statut du Québec à Washington

M. Johnson (Anjou): Une dernière question, M. le Président. Le ministre va comprendre que j'essaie de suivre un peu les priorités géographiques qu'il a lui-même établies dans son document en page 20. À Washington, où est-ce qu'on en est rendu quant au statut, aux ressources, au titre de nos gens qui y travaillent?

M. Rémillard: Nous avons, depuis la semaine dernière, un conseiller à temps plein à Washington, qui dépend de la délégation de New York et qui voit aux intérêts du Québec directement de la capitale américaine.

M. Johnson (Anjou): Le ministre sait sans doute - ou, en tout cas, il aura l'occasion d'en discuter avec ses hauts fonctionnaires - qu'il se pose un problème de statut quant à la présence québécoise à Washington. Il n'est pas question dans l'esprit des Américains de nous accorder un statut qui ressemblerait ou s'apparenterait même vaguement à celui que nous avons à Paris au niveau politique. Le Québec doit toujours avoir recours à un certain nombre de pirouettes sur le plan administratif, donnant tantôt le titre de conseiller en tourisme pour éviter de tomber sous la loi des lobbyistes américains... Je voudrais simplement savoir si le ministre a l'intention de régulariser cette situation. Dans quel sens iront ses efforts, surtout à la lumière de possibilités de négociations qui pourraient nous amener à être intéressés à ce qui se passe au Sénat américain de ce temps-ci? (11 h 45)

M. Rémillard: D'abord, je dois vous dire que ce n'est pas la même personne qui est conseiller au tourisme. Nous avons un bureau à cet effet. Je dois vous dire qu'on n'a pas ouvert une nouvelle délégation. C'est strictement quelqu'un, un conseiller de New York qui, maintenant, est en place d'une façon permanente à Washington.

M. Johnson (Anjou): II est dans le même édifice physique que le conseiller au tourisme.

M. Rémillard: Oui, dans le même édifice.

Le Président (M. Fïlion): Cela va? M. le député de Mille-Îles.

Retombées économiques des délégations à l'étranger

M. Bélisle: Merci, M. le Président. Il me paraît, M. le ministre, à la lecture du document sur les crédits qui a été déposé ce matin en commission parlementaire, que votre ministère se situe au même chapitre que tous les autres ministères du Québec eu égard à la conjoncture budgétaire difficile. Je lis à la page 10 de votre discours d'ouverture que le nouvel objectif de votre ministère, c'est "de créer une image de marque pour le Québec, faire ressortir notre spécificité culturelle pour mieux faire valoir notre potentiel économique et technique". J'aimerais savoir, M. le ministre, lorsqu'on parle des délégations du Québec à l'étranger, s'il existe au ministère des Relations internationales une grille de décision des méthodes d'évaluation quant à la performance des délégations du Québec à l'étranger en termes de retombées économiques ou techniques pour le Québec. Si je comprends bien, les objectifs spécifiques de votre ministère sont avant tout de créer des avantages économiques et techniques pour le Québec. J'aimerais savoir si, lorsqu'il y a telle délégation à tel endroit... Vous avez parlé d'une future délégation en Afrique. Donc, vous envisagez un marché avec des retombées économiques et techniques éventuelles pour le Québec. Si vous envisagez la fermeture de telle ou telle délégation à tel autre endroit, c'est donc qu'il y a eu une analyse de performance qui a été faite. J'aimerais que vous nous exposiez la grille de décision de votre ministère relativement à nos antennes sur le plan international, c'est-à-dire nos délégations à l'étranger.

M. Rémillard: Sur ce point, M. le député, je dois vous dire que nous travaillons en étroite collaboration avec le ministère du Commerce extérieur, le ministère de l'Industrie et du Commerce et le ministère du Tourisme pour apprécier, à leur juste valeur, les perspectives économiques qu'on peut avoir dans différents pays.

Cependant, il ne faut pas faire de cloison étanche entre l'activité économique et l'activité culturelle, c'est-à-dire que nous, comme ministère des Relations internationales, avons à établir la politique internationale du Québec et le cadre d'action à l'intérieur

duquel les ministères sectoriels peuvent agir pour faire valoir la spécificité du Québec. Quand je pense à la spécificité du Québec, bien sûr, je pense à la spécificité culturelle, mais aussi à la spécificité économique.

Lorsque qu'une ambassade du Canada fait valoir les intérêts de la fédération du Canada, cette ambassade peut très bien faire valoir les intérêts du Québec. Cependant, il arrive dans certains cas que deux, trois ou plus de provinces sont en concurrence entre elles pour obtenir un contrat important dans un pays. C'est là que c'est important et c'est là que la différence peut se faire, lorsque nous avons quelqu'un qui est en place, qui connaît le pays, qui a déjà ses contacts et qui peut faire cette petite différence pour que ce soit le Québec qui rapporte ce contrat.

C'est dans ce contexte que nous développons une expertise tout à fait particulière au Québec, capable de faire profiter le Québec de ces marchés internationaux. Il est certain qu'une bonne action d'ordre commercial doit tout d'abord se situer dans un cadre beaucoup plus large d'échanges culturels. C'est lorsqu'on se connaît bien qu'on peut mieux échanger et avoir des relations commerciales satisfaisantes et intéressantes pour le Québec.

En ce qui regarde l'Afrique, ce premier sommet de la francophonie qui a eu lieu à Paris en février dernier nous a amenés à vérifier les possibilités du Québec en Afrique. L'Afrique est un très grand marché potentiel pour le Québec, un marché commercial de très grande importance. Nous sommes présents en Afrique depuis maintenant plusieurs années, mais, bien avant d'avoir des délégations, nous l'étions avec les frères des Écoles chrétiennes, nous l'étions avec nos religieux, et, lorsqu'on rencontre des Africains, très souvent ils nous disent: Oui, j'ai été éduqué par un frère des Écoles chrétiennes. J'ai été éduqué par soeur Unetelle.

Nous avions là des ambassadeurs déjà depuis très longtemps. Nous avons maintenant la possibilité d'établir des liens diplomatiques plus directs, plus étroits, avec beaucoup de pays africains, ce que nous allons faire dans un avenir prochain. Il est certain que c'est un marché très prometteur. Déjà, plusieurs de nos firmes internationales font des affaires très importantes en Afrique et nous allons développer ce marché en ne négligeant pas, bien sûr, les relations culturelles.

Quant à savoir comment nous apprécions la valeur économique de nos marchés, des rapports bimestriels nous parviennent et, à la lumière de ces rapports, nous pouvons apprécier véritablement l'impact économique que peut avoir chacune de nos délégations.

M. Bélisle: Une autre question, M. le Président.

Le Président (M. Filion): M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Je lisais à la page 20 du cahier des crédits de votre ministère, M. le ministre, que la ville de Québec sera le siège, en février 1987, d'un colloque sur l'informatique municipale. J'aimerais savoir, toujours dans la perspective des retombées économiques pour le Québec et également du sommet de la francophonie qui va venir bientôt, si vous avez déjà à votre ministère des études quant aux retombées économiques que rapporteront ces deux sommets internationaux qui auront lieu au Québec à très court terme?

M. Rémillard: On me dit que ce sont les ministères du Tourisme et du Commerce extérieur qui font ces analyses et qui doivent nous les faire parvenir dans un avenir prochain.

M. Bélisle: Merci, M. le ministre. Adoption des crédits

Le Président (M. Filion): Est-ce que les programmes 1, 2 et 3, et leurs éléments, sont adoptés?

M. Johnson (Anjou): Adopté.

Le Président (M. Filion): Adopté. Est-ce que les crédits budgétaires du ministère des Relations internationales...

M. Johnson (Anjou): Adopté sur division. Le Président (M. Filion): Sur division.

M. Johnson (Anjou): Pour manifester notre désaccord avec l'amputation de 20 %.

Une voix: Charcuterie.

Le Président (M. Filion): Est-ce que l'ensemble des crédits budgétaires du ministère des Relations internationales pour l'année financière 1986-1987 sont adoptés? Sur division.

J'appelle maintenant le programme 4 du ministère du Conseil exécutif, soit les crédits du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes pour l'année financière 1986-1987. Je crois comprendre que le ministre voudrait adresser à la commission certaines remarques préliminaires.

M. Rémillard: Oui, si vous voulez.

M. Johnson (Anjou): Nous pouvions normalement aller jusqu'à 12 h 9. Nous

n'avons pas d'objection à peut-être continuer jusqu'à 12 h 15 pour que le ministre ait ses 20 minutes, s'il en a besoin.

Le Président (M.Filion): ...M. le chef de l'Opposition, que vous consentiriez à ce que le ministre ait la chance de terminer l'ensemble de son exposé.

M. Rérnillard: II y a quelque chose que je ne comprends pas. Je pense que cela peut prendre un peu plus d'une vingtaine de minutes. Est-ce qu'on pourrait proposer simplement d'ajourner nos travaux? On pourrait prolonger cet après-midi. Si c'était possible de prolonger cet après-midi...

Le Président (M. Filion): Si vous me permettez, M. le ministre, on avait déjà...

M. Johnson (Anjou): Si vous me te permettez, encore une fois, je n'ai pas d'objection à ce que le ministre commence maintenant, quitte à poursuivre jusqu'à 12 h 15 ou 12 h 20. Je pense que cela nous permettrait d'avoir un premier tour de piste. Étant donné que nous n'avons que deux heures cet après-midi et que la section des affaires canadiennes porte sur beaucoup beaucoup de choses - c'est un domaine extrêmement riche sur lequel nous avons beaucoup de questions à poser - nous n'avons pas d'objection à amputer sur l'heure du lunch plutôt que de s'imaginer qu'on va retarder cela. Ce sera un peu plus compliqué à 18 heures. Il y a le Conseil des ministres pour le ministre auquel il devra peut-être aller à partir de 18 heures. Je préférerais que ce soit maintenant. Je pense que ce serait plus simple.

M. Rémillard: II y a deux problèmes qui se posent actuellement. D'abord, mes fonctionnaires; on leur avait dit que c'était à 14 heures. C'était entendu, 14 heures pour les affaires canadiennes. Il faut que tout le monde soit ici.

M. Johnson (Anjou): Tout simplement l'énoncé préliminaire du ministre. On ne commencera pas les questions ce midi, je comprends cela.

M. Rémillard: Oui, mais l'exposé préliminaire, M. le Président, est-ce que ce ne serait pas une bonne chose que je puisse le donner et que tout de suite on puisse en discuter? Je vais faire mes remarques, ensuite on va retourner pour le déjeuner, et je vais revenir. Est-ce que ce ne serait pas mieux d'ajourner tout de suite et de rallonger notre période cet après-midi d'autant? Je pense que ce serait beaucoup plus efficace et ce serait plus intéressant pour tout le monde. 11 est déjà 11 h 55, 11 h 56. C'était convenu comme tel. Alors, pourquoi ne pas respecter cela? J'aimerais mieux, M. le Président, qu'on fasse l'exposé cet après-midi.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, il me semble que le ministre n'a pas besoin de ses fonctionnaires pour faire son exposé préliminaire. II doit savoir ce que va être son exposé préliminaire. Je présume qu'il a d'ailleurs préparé un texte, comme il l'a fait dans le cas des Relations internationales. Il nous a livré un texte où, de toute évidence, il avait fait le tour de l'ensemble de la problématique en matière internationale. Je présume que ce sera la même chose pour le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes. Évidemment, je ne ferai même pas ma réaction ce matin, s'il le désire. Je pourrais attendre cet après-midi et, ensuite, on pourra poser les questions quand ses fonctionnaires l'accompagneront.

Le Président (M. Filion): M. le ministre et M. le chef de l'Opposition, si vous me le permettez. On a déjà quinze minutes en banque.

M. Rémillard: Écoutez! On n'est pas prêt à procéder comme ça, M. le Président. D'abord parce que ce sont simplement des notes que je veux livrer et on s'était dit jusqu'à midi. Personnellement, quelqu'un m'attend à 12 h 15. J'ai une rencontre à mon bureau. Si vous le permettez, je ne vois pas quel problème cela pourrait causer que l'on puisse commencer normalement à 14 heures, quitte à prolonger si on veut. Je n'ai pas d'objection, mais qu'on s'en tienne donc à ce qui a été décidé. Ce qui avait été décidé, M. le Président, c'est de siéger jusqu'à midi, ensuite d'ajourner pour le déjeuner et de reprendre après. J'aimerais mieux qu'on procède comme ça. Je pense qu'on pourrait en tirer plus de profit. De toute façon, il n'y a pas grand-chose à décider et à discuter aux Affaires intergouvernementales canadiennes. Cela va aller rapidement.

Le Président (M. Filion): Si vous me le permettez, M. le député de Mille-Îles, M. le ministre et M. le chef de l'Opposition. D'une part, on avait décidé d'arrêter nos travaux à 12 h 9. Deuxièmement, pour cet après-midi, M. le ministre, nous dépendons de l'avis que le leader pourrait nous transmettre. Nous fonctionnons ici ce matin de 10 h 9 à 12 h 9 sur convocation, mais nous n'avons pas reçu d'avis du leader pour cet après-midi. Je ne crois pas que, de toute façon, ce soit à 14 heures cet après-midi qu'on siège. Le mercredi, la période des questions est à 15 heures. Donc, ce sera après la période des affaires courantes à l'Assemblée nationale. Maintenant, cela étant dit...

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous permettez. Je comprends que, ultime-ment, avec 99 députés, legouvernement peut bien décider ce qu'il veut et nous l'imposer. Jetrouvais que c'était peut-être normal que le ministre fasse son exposé préliminaire, en présumant qu'il est prêt. Deuxièmement, tout en comprenant qu'ultimement il peut décider de nous imposer de ne pas le faire et de nous demander un délai additionnel à l'heure du souper, je dirai cependant que je n'accepte pas comme raison qu'il ait un rendez-vous à 12 h 15. Je suis sûr que le ministre ne s'est peut-être pas attardé au caractère un peu étonnant de ce qu'il nous a dit. Quand le Parlement siège, le Parlement a priorité. J'ai toujours donné priorité au Parlement quand j'étais ministre et je suis sûr que le ministre saura donner priorité à l'Assemblée nationale.

M. Rémillard: M. le Président, je dois dire que moi aussi je donne priorité au Parlement. Jesuis conscient que le chef de l'Opposition a toujours donné priorité au Parlement. C'est quelque chose qu'il faut continuer. Je sais que le chef de l'Opposition a toujours donné priorité aussi aux ententes qui ont été faites entre les leaders parlementaires des deux côtés et respecté ces ententes. C'est dans ce cadre que j'ai pris un engagement, bien sûr, parce qu'il y a une entente qui a été conclue entre les deux leaders en ce sens que c'est à 12 heures qu'on termine. Alors, je me suis simplement fondé sur ce principe et je voudrais finalement demander à l'Opposition qu'on puisse le respecter. On pourrait commencer tout simplement d'une façon bien calme, bien détendue. J'ai appris qu'on n'était pas devant les caméras, comme l'a dit le chef de l'Opposition au départ, que c'est très détendu et que, pour les affaires canadiennes, ce sera un échange de bons procédés qui ira très rapidement. Alors, on pourrait commencer cela tranquillement tout à l'heure. Peut-être que cela sera beaucoup plus bénéfique pour le respect de la démocratie.

M. Johnson (Anjou)i M. le Président, je prends acte de la difficulté qu'on a à obtenir la collaboration du ministre sur cette question aujourd'hui. Si vous désirez ajourner nos travaux, on va ajourner.

Le Président (M. Filion): M. le député de Mille-Îles, est-ce que, compte tenu de ce que le chef de l'Opposition vient de dire, vous voulez quand même intervenir?

M. Bélisle: Oui. Dans la même veine de respecter le Parlement, de donner priorité au Parlement et aussi, peut-être, de respecter le droit des parlementaires qui siègent à cette commission d'avoir l'information qui leur est déposée, pourrait-on demander, soit au chef de l'Opposition ou au ministre, s'ils ont des discours d'ouverture ou des remarques préliminaires écrites cet après-midi, de nous en faire faire des copies pour qu'on puisse suivre au moins au début? Cela serait tout au moins une des raisons pour lesquelles on pourrait ajourner à 14 heures. C'est une demande que je fais.

Le Président (M. Filion): Alors, j'ajourne nos travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 16 h 35)

Crédits du ministre

délégué aux Affaires

intergouvemementales canadiennes

Le Président (M. Filion): Je rappelle le mandat de la commission des institutions qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère des Relations internationales et du programme 4 du ministère du Conseil exécutif. Nous avons procédé ce matin à l'adoption des crédits budgétaires du ministère des Relations internationales. J'ai déjà appelé le programme 4 du ministère du Conseil exécutif, soit les crédits du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes pour l'année financière 1986-1987.

Une entente étant intervenue entre l'Opposition et le parti ministériel, je comprends de nos travaux qu'ils devront s'ajourner à 18 h 45. J'inviterais donc sans plus tarder le ministre à adresser ses remarques préliminaires à la commission.

Je profite également des quelques secondes d'intervalle pour signaler aux gens qui sont avec nous aujourd'hui que tous les fumeurs comme moi doivent s'abstenir de le faire, le salon bleu n'ayant pas prévu de commodités pour les gens qui ne se sont pas débarrassés de cette mauvaise habitude.

M. le ministre.

Déclarations liminaires M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, créé en 1984, Je Secrétariat aux Affaires intergouvernementales canadiennes a comme mandat principal la coordination des activités du gouvernement du Québec dans ses rapports avec le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces du Canada. Pour assumer cette responsabilité, le secrétariat comporte cinq directions, c'est-à-dire la planification et recherche, les affaires économiques et financières, les affaires sociales, éducatives et culturelles, les

affaires institutionnelles et constitutionnelles, la francophonie, coopération et coordination des bureaux.

Le secrétariat a la responsabilité des bureaux du Québec au Canada qui sont situés à Edmonton, Toronto, Ottawa et Moncton. Ces bureaux ont pour mandat de promouvoir les intérêts du Québec de même que de faciliter les relations avec les autres gouvernements. De plus, ils sont d'une aide précieuse au secrétariat pour assurer sa reponsabilité quant aux relations avec les francophones hors Québec de même qu'en ce qui regarde les accords de coopération avec les autres provinces du Canada.

Le budget du secrétariat est sensiblement le même que celui de l'an dernier, soit 7 518 900 $ comparativement à 6 799 900 $ en 1985-1986. Signalons ici que le budget de l'an dernier a été rajusté au cours de l'année à 7 480 400 $.

Le 2 décembre dernier, les Québécois ont exprimé clairement leur volonté d'avoir un gouvernement capable d'entretenir avec le gouvernement fédéral des relations qui tiennent compte à la fois de l'appartenance du Québec à la communauté canadienne et de son plein épanouissement économique, culturel et social dans le cadre d'une constitution renouvelée. Les conditions de l'adhésion du Québec à l'accord constitutionnel de 1982 ont été clairement énoncées dans le programme du Parti libéral. Elles sont, notamment, la reconnaissance du Québec comme société distincte, l'orientation et l'obtention d'un droit de veto pour le Québec dans la formule d'amendement, une limite au pouvoir fédéral de dépenser, un encadrement, la confirmation constitutionnelle des droits du Québec en matière d'immigration et la participation du Québec à la nomination des juges à la Cour suprême.

Fort de ce mandat clair que lui a confié la population québécoise, le gouvernement a immédiatement repris le dialogue avec le gouvernement fédéral en confirmant sa réelle détermination d'en arriver à une entente sur le plan constitutionnel. À plusieurs reprises, le premier ministre du Canada, M. Brian Mulroney, a manifesté son intention de négocier avec le gouvernement du Québec les changements constitutionnels qui lui permettraient de signer "avec honneur et enthousiasme". Je me réfère au fameux discours de M. Mulroney, à Sept-Îles, en campagne électorale, concernant la Loi constitutionnelle de 1982. Plusieurs provinces ont d'ailleurs manifesté leur intérêt quant à une éventuelle reprise des négociations dans le dossier constitutionnel qui pourrait amener le Québec à adhérer à la Loi constitutionnelle de 1982 et ainsi compléter le compromis inachevé de 1982.

Compte tenu de l'importance qu'attache le nouveau gouvernement du Québec au dossier constitutionnel, les principaux mécanismes ont déjà été mis en place afin d'assurer que le Québec s'engage dans ce dossier avec toute la préparation requise et nécessaire. C'est ainsi qu'un comité spécial du Conseil des ministres a été formé à cette fin et sera responsable de définir les politiques, les orientations et les stratégies pertinentes. Sous la présidence du premier ministre, ce comité est composé du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, du ministre de l'Éducation, du ministre de la Justice et, au besoin, d'autres ministres.

En outre, un groupe de travail a été mis en place au sein du secrétariat dans le but d'effectuer des études appropriées et d'établir des liaisons intergouvernementales nécessaires à la bonne évolution de ce dossier. Ces groupes de travail s'appuieront, entre autres, sur des études spécifiques effectuées par différents spécialistes chargés d'examiner en profondeur les conséquences politico-juridiques d'un certain nombre de sujets fondamentaux comme, entre autres, le préambule de la loi constitutionnelle de 1982, la formule d'amendement, la Cour suprême, la charte des droits, les droits linguistiques, l'immigration, etc. Ces études nous permettront de mieux cerner dans leur juste perspective les éléments majeurs d'une telle entente constitutionnelle pour le Québec.

La protection des droits et libertés fondamentales des Québécois et Québécoises est une priorité pour le nouveau gouvernement du Québec. C'est ainsi que le gouvernement a pris la décision de ne plus avoir recours systématiquement à la clause "nonobstant" qui soustrayait toutes les lois québécoises à l'application des articles 2 et 7 à 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Parmi ces droits et libertés fondamentales, on retrouve notamment le droit à la vie, le droit à ta sécurité de sa personne, le droit à un procès juste et équitable, le droit à l'égalité. Cette première décision du nouveau gouvernement québécois est la conséquence directe de ses engagements pris lorsqu'il formait l'Opposition et lors de la dernière campagne électorale.

En agissant ainsi, notre gouvernement ne faisait que permettre aux Québécois et Québécoises de bénéficier des mêmes droits que les autres Canadiens. Il est bien entendu, comme le spécifie la décision du Conseil des ministres, que le gouvernement pourra avoir recours à la clause de dérogation lorsque les intérêts des Québécois seront en cause. De plus, évidemment, cela ne constitue absolument en rien une acceptation de la loi constitutionnelle de 1982.

Un autre dossier majeur a retenu l'attention du secrétariat au cours des derniers mois, celui de la libéralisation des échanges avec les États-Unis. C'est en

septembre dernier que le premier ministre du Canada annonçait l'intention de son gouvernement d'entreprendre des négociations à cette fin entre le Canada et les États-Unis. L'importance de ce dossier pour l'avenir économique, social et culturel du Québec ne fait aucun doute. Aussi, le secrétariat est-il déjà engagé dans ce dossier en concertation avec les autres intervenants du gouvernement et, en particulier, avec le ministère du Commerce extérieur.

Le mandat du secrétariat est relié plus spécifiquement au respect des compétences des provinces en ces matières et à la définition des modalités d'adhésion du Québec à un éventuel traité de libéralisation des échanges entre les États-Unis et le Canada. On se rappellera qu'à la suite de la conférence des premiers ministres à Halifax, en novembre dernier, les dix provinces se sont entendues, se sont vu reconnaître par Ottawa le principe d'une pleine participation aux négociations. La réelle signification de cette pleine participation, cette expression "pleine participation" utilisée par le premier ministre du Canada reste toutefois à définir, à préciser dans sa réelle signification. La position du Québec a été clairement stipulée. Elle se résume de la façon suivante:

Premièrement, le gouvernement du Québec ne s'oppose pas à l'amorce de négociations commerciales avec les États-Unis.

Deuxièmement, le gouvernement du Québec appuie les autres provinces dans leur effort pour faire reconnaître le principe de la pleine participation. Concrètement, une telle reconnaissance implique, tout d'abord, que l'on tienne nettement et effectivement compte des intérêts provinciaux dans l'établissement du mandat canadien de négociations, de même qu'au cours des négociations elles-mêmes.

Deuxièmement, que les intérêts du Québec ne se limitent pas au domaine de compétence provinciale, mais qu'ils incluent toutes les questions qui peuvent influencer l'avenir économique du Québec.

Troisièmement, que le gouvernement du Québec, réserve sa position sur les résultats globaux et particuliers des négociations avec les États-Unis.

La troisième considération de notre politique concernant les négociations relativement à un marché plus libre avec les États-Unis est à savoir que la formule qui permettrait aux provinces d'assurer cette participation, mes collègues des autres provinces et moi-même avons confié à M. Getty, premier ministre de l'Alberta le soin de la négocier avec M. Mulroney dans toutes ses modalités utiles pour qu'il puisse ensuite nous faire rapport et qu'on puisse en discuter.

Pour le Québec, cette pleine participation signifie qu'il faudra tenir compte de ces intérêts dans l'établissement du mandat canadien de négociations. Elle signifie également que les intérêts du Québec ne se limitent pas au domaine de compétence provinciale, mais qu'il inclut toutes les questions qui peuvent influencer son avenir économique. Parmi les événements qu'il importe en outre de signaler, on peut également mentionner la concrétisation de diverses ententes auxiliaires qui résultent de l'entente-cadre de développement économique et régional signé avec le gouvernement fédéral. Cette entente-cadre a permis aux deux gouvernements d'identifier les possibilités de développement économique et d'entreprendre conjointement une série de mesures précises par la voie d'ententes auxiliaires.

Quatre ententes auxiliaires sont ainsi intervenues au cours de 1985-1986 dan3 les secteurs suivants: le développement forestier, pour 300 000 000 $; le développement technologique et scientifique, pour 100 000 000 $; le développement minéral, pour 100 000 000 $; et le développement des transports, pour 170 000 000 $. Au terme de ces ententes, les sommes versées sont partagées à parts égales entre les deux gouvernements - le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral. Jusqu'à présent huit ententes auxiliaires d'une durée de cinq ans ont été conclues pour un total de 1 200 000 000 $. L'accord Canada-Québec sur la formation professionnelle des adultes, expirant le 31 mars dernier, a donné lieu à de nombreuses discussions. Des négociations se poursuivent toujours, et une entente semble sur le point d'être signée prochainement.

Quant aux programmes de création d'emplois, un accord est intervenu à ce sujet. En ce qui concerne le dossier constitutionnel autochtone, il a fait l'objet de plusieurs rencontres. Au cours de la conférence des ministres qui s'est tenue le mois dernier à Ottawa, j'ai rappelé au nom du gouvernement que le Québec ne reconnaît pas la Loi constitutionnelle de 1982 mais, quand même, se déclare favorable à la reconnaissance constitutionnelle du droit des autochtones à l'autonomie gouvernementale sous réserve d'ententes avec les provinces concernées.

J'ai précisé aussi que le Québec entendait jouer un rôle plus actif dans ces discussions, notamment, en ce qui concerne les solutions à apporter aux problèmes constitutionnels, juridiques et financiers inhérents à la conclusion d'ententes avec les autochtones.

La situation des francophones hors Québec est une préoccupation majeure du gouvernement du Québec. Nous entendons jouer pleinement notre rôle de foyer principal de la francophonie au Canada et en Amérique. L'actuel gouvernement du Québec,

en collaboration avec les gouvernements provinciaux, peut agir d'une façon d'autant plus efficace, face aux problèmes que peuvent éprouver les francophones hors Québec, qu'il n'est pas en contradiction, comme l'était l'ancien gouvernement, avec ses politiques en particulier en ce qui regarde sa clause Québec dont l'application du principe aurait causé des conséquences graves pour ies francophones hors Québec. Les activités de coopération permettent au Québec d'assurer son rayonnement dans les autres provinces canadiennes, de favoriser la connaissance réciproque des Québécois et des résidents des autres provinces, de promouvoir les échanges de vue et d'expertise ainsi que de contribuer à l'épanouissement de la langue et de la culture française ailleurs au Canada. Les projets qui ont pu être réalisés grâce à ce programme se sont situés principalement dans les domaines de l'éducation, de la culture et des communications.

En résumé, quelles sont les perspectives qui s'ouvrent à nous dans le domaine des affaires intergouvernementales en 1986-1987? Ainsi qu'il l'annonçait dans son discours d'ouverture, le gouvernement entend mener à terme les négociations avec le gouvernement fédéral pour adhérer, sur la base des conditions déjà indiquées, à la Loi constitutionnelle de 1982, modifiée en fonction des revendications du Québec et de la reconnaissance des droits historiques du Québec.

Le gouvernement s'engage à développer, avec le gouvernement fédéral et les autres gouvernements provinciaux des relations harmonieuses et positives avec, comme dominante, la défense vigoureuse des intérêts propres au Québec tout en travaillant à améliorer la situation des francophones hors Québec et l'ensemble du fonctionnement de la Fédération canadienne.

Cet objectif s'inscrira certes au premier rang des priorités du secrétariat dont j'ai la responsabilité. Il rejoint d'ailleurs une préoccupation maintes fois exprimée par le premier ministre du Canada pour la réconciliation nationale. Celle-ci ne saurait, bien sûr, se concevoir sans l'accord du Québec à la Loi constitutionnelle de 1982. Le premier ministre du Québec, pour sa part, émettait le souhait que nous puissions présenter tout d'abord devant l'Assemblée nationale des propositions dans les mois qui viennent.

Dans cette perspective, le gouvernement a mis en place, comme je vous l'ai exposé, les mécanismes requis pour faire en sorte que ce dossier d'une portée considérable pour l'avenir du Québec puisse comporter les meilleures garanties de succès. On sait que te présent gouvernement a mis au premier rang de ses préoccupations la relance de la situation économique et financière du Québec. C'est pourquoi, en concertation avec les autres ministères québécois, le secrétariat proposera au gouvernement fédéral les voies et moyens d'une meilleure coordination au niveau du développement économique et régional du Québec. Le secrétariat entend y consacrer une part importante de ses efforts et de ses ressources.

En gardant ces faits à l'esprit, le gouvernement du Québec tient à faire savoir qu'il ne s'oppose pas à l'amorce des négociations commerciales avec les États-Unis et il appuie les autres provinces dans leur effort pour faire reconnaître le principe de la pleine participation des provinces dans le cadre de ces éventuelles négociations. Il exige toutefois que l'on tienne compte des intérêts provinciaux dans l'établissement des mandats de négociation et qu'aucune décision qui puisse le concerner ne soit prise sans son consentement.

En 1986-1987, M. le Président, le secrétariat intensifiera ses efforts dans la poursuite des négociations de plusieurs ententes entre le Québec et Ottawa, notamment dans les domaines du financement de l'enseignement postsecondaire, du dossier constitutionnel autochtone, de la culture et des communications. On se rappellera qu'en février dernier le ministre des Finances du Canada a déposé une loi visant à réduire les taux de transfert aux provinces. Cette réduction entraînera un manque à gagner pour le Québec, d'une façon générale, de l'ordre de 2 000 000 000 $ d'ici à 1990-1991. Ce sont l'enseignement postsecondaîre et la santé qui feraient les frais de ces coupures.

Le gouvernement du Québec juge ces coupures inacceptables et injustifiées. Il s'inquiète grandement des conséquences de cette décision et est fermement déterminé à faire toutes les démarches nécessaires pour que les Québécois et les Québécoises reçoivent leur juste part dans ces deux domaines essentiels à l'épanouissement de la collectivité québécoise.

Quant au dossier autochtone, il fera à nouveau l'objet d'une conférence des ministres en juin prochain. Le Québec ne sera cependant en mesure de signer aucun accord constitutionnel tant que la situation à l'égard de la loi constitutionnelle de 1982 ne sera pas normalisée. Dans le domaine culturel, la prochaine année sera marquée de nombreuses interventions fédérales. En effet, Ottawa songe à publier un livre vert sur la politique culturelle canadienne. Dans le domaine des communications, par ailleurs, le gouvernement fédéral a entrepris un vaste processus de révision des politiques nationales des télécommunications qui comportera vraisemblablement des impacts politiques, sociaux et économiques qu'il y aura lieu de bien évaluer. Il importera au gouvernement du Québec d'être vigilant dans ces deux

domaines de juridiction qui lui sont propres à bien des égards.

De 1986 a 1987, le secrétariat, ainsi que nous l'avons signalé, maintiendra ses budgets, tout en les rationalisant, en retenant le principe d'une meilleure définition des besoins des communautés francophones du Canada conjointement avec celles-ci. C'est dans cette perspective que nous avons effectué certains changements à l'intérieur des structures du secrétariat. Nous avons rattaché la direction de la francophonie et de la coopération à la direction de la coordination des bureaux. Cela s'est fait dans le cadre d'une décentralisation de notre politique à l'égard de la francophonie et d'un rapprochement des bureaux par rapport à la clientèle francophone sur leur territoire. Cette dernière profitera sûrement du fait que son interlocuteur québécois sera plus près d'elle, donc à même de mieux évaluer ses besoins propres et de prendre plus rapidement des décisions la concernant.

Signalons enfin que les responsabilités accrues qu'on entend donner aux bureaux du Québec témoignent éloquemment de l'importance du rôle que nous leur reconnaissons. Les orientations dont je viens de vous rendre compte sauront, je l'espère, illustrer la nouvelle attitude du Québec dans le domaine des relations fédérales-provinciales, fondée sur le respect mutuel des ordres de responsabilité des uns et des autres de même que sur le respect des droits historiques du Québec. Cette attitude fondée sur une appréciation claire et réaliste des objectifs se veut active et constructive.

Voilà, M. le Président, une présentation générale des objectifs du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes pour la prochaine année.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le ministre. M. le chef de l'Opposition.

M. Pierre Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): Merci, M. le Président, Permettez-moi d'abord de remercier te ministre de l'exposé qu'il vient de faire. Je dois constater cependant que le ton était légèrement moins enthousiaste que celui que j'ai entendu ce matin en matière de relations internationales et je me demande pourquoi. Peut-être qu'à l'occasion de la discussion que nous aurons, nous pourrons comprendre pourquoi.

M. le Président, permettez-moi aussi de mentionner et de remercier les fonctionnaires qui accompagnent le ministre qui, j'en suis convaincu, ont eu à travailler très fort pour préparer ces crédits. J'ai déjà été témoin de leur travail alors que j'occupais le poste que le ministre occupe en ce moment. Je pense qu'il peut compter sur le dévouement, la loyauté et la très grande compétence de l'équipe du secrétariat qui, comme on le sait, a été mise sur pied il y a environ deux ans et dont j'ai eu l'honneur de présider à la création.

Est-il besoin de rappeler, M. le Président, un certain nombre des articles de la Loi sur le ministère du Conseil exécutif quant au mandat du ministre? Je pense qu'il n'est pas inutile de les répéter.

L'article 3.2 prévoit que le ministre conseille le gouvernement sur toute question qui a trait aux relations intergouvernementales canadiennes; "3.3 que le ministre, en accord avec les ministères et organismes intéressés, a pour fonction de favoriser le développement culturel, économique et social des Québécois par l'établissement de relations intergouvemementales au Canada; "3.5 le ministre, dans la conduite des affaires intergouvernementales canadiennes, veille à ce que soit respectée la compétence constitutionnelle du Québec; "3.7 le ministre veille à la négociation et à la mise en oeuvre des ententes intergouvernementales canadiennes et administre les programmes d'échanges intergouvernementaux qui en résultent, sauf dans la mesure prévue par le gouvernement; "3.8 malgré toute autre disposition législative, les ententes intergouvernementales canadiennes doivent, pour être valides, être approuvées par le gouvernement et être signées par le ministre:"

L'article 3.14 dit que "le ministre dirige la représentation du Québec au Canada".

Ce sont là, M. le Président, les principales responsabilités que la loi confère au titulaire du poste de ministre délégué, donc responsable du Secrétariat aux Affaires intergouvernementales canadiennes, et c'est à l'exercice de ce mandat que je me suis attaché lorsque j'occupais les fonctions que le ministre occupe aujourd'hui.

Au cours des deux dernières années, le secrétariat a participé activement à l'amélioration des relations avec les partenaires canadiens et ce n'est sûrement pas le fruit d'une génération spontanée ou d'un vote du 2 décembre. Après une période plutôt difficile sous le régime de M. Trudeau, il nous aura fallu travailler avec une certaine énergie, il faut bien le dire, pour rétablir un climat de confiance mutuelle minimale. Nous y avons mis beaucoup d'efforts en ayant constamment à l'esprit la sauvegarde des intérêts et des droits du Québec.

Le secrétariat a connu une implication progressive mais absolument irréversible dans l'ensemble de l'activité gouvernementale du Québec. Ainsi, dans les dossiers dits horizontaux, le secrétariat a participé à l'élaboration de nombreuses politiques et de

stratégies en vue de défendre les intérêts du Québec. En donnant une meilleure cohésion à l'action du Québec, nous avons pu inscrire plusieurs gains, notamment au chapitre de la main-d'oeuvre et de l'économie. Certains résultats sont maintenant palpables pour les Québécois, par exemple, l'entente cadre sur le développement économique et les ententes auxiliaires qui ont suivi, comme les a citées le ministre tout à l'heure-

De façon plus globale, le projet d'accord constitutionnel de mai 1985 constitue également une autre réalisation du secrétariat. Ce projet est inachevé, on le sait, comme plusieurs autres puisqu'il est dorénavant sous la responsabilité du nouveau gouvernement. (17 heures)

Le gouvernement précédent a choisi comme assise de ses revendications constitutionnelles la reconnaissance du caractère distinct du peuple québécois. Je rappelle au nouveau ministre que ce préalable demeure pour nous une base incontestable sur laquelle doivent s'appuyer les pourparlers avec nos partenaires canadiens. Une fois la reconnaissance de cette réalité acquise, il sera moins difficile d'établir les modalités et les instruments qui peuvent conduire à un accord qui soit librement négocié et qui tienne compte de la spécificité du Québec. Les discussions et la conclusion de cet accord ne devront jamais, cependant, aliéner les voies d'avenir qui appartiennent à notre peuple., La volonté d'établir des relations étroites avec l'ensemble canadien ne peut pas se réaliser au détriment de nos droits historiques. Les efforts à déployer seront considérables et, pour réussir, le gouvernement aura besoin de solidarité et aussi de l'appui des forces vives du Québec.

Pourtant, ce que nous annonce le ministre n'a rien de rassurant. À ce jour, il a refusé de prendre des engagements fermes et clairs sur le rôle de l'Assemblée nationale dans tout ce processus. Le gouvernement fera-t-il comme dans une multitude d'autres dossiers, c'est-à-dire va-t-il préférer s'en remettre à des comités de non-élus, pompeusement appelés "comités de sages", pour décider des orientations fondamentales de l'avenir du peuple québécois? Et qui décidera dans ce dossier? Comment, quand? Ferons-nous comme pour certaines autres décisions de l'actuel gouvernement, verrons-nous donc le gouvernement décider en catimini, annoncer à la sauvette et esquiver le débat ensuite, particulièrement lors de la brève période des questions que nous avons tous les jours?

J'ai bien peur, M. le Président, que ce soit là la réalité à laquelle nous serons confrontés. Il appartiendra au ministre de nous démontrer le contraire et d'amener ses collègues à considérer que ce dossier est suffisamment sérieux pour se passer du type d'attitude qu'on voit dans ce gouvernement, dans les autres dossiers.

Déjà, on a procédé ainsi pour reconnaître une partie substantielle du "Canada Bill", c'est-à-dire la Charte canadienne des droits et libertés, et, à ce titre, je suis convaincu que le ministre se rappellera un certain nombre d'écrits qu'il a commis sur cette question, évoquant, entre autres, le 5 novembre 1982, dans le journal Le Soleils "Au lendemain du rapatriement, le fait fançais au Canada dépend plus que jamais de la force du Québec et de ses possibilités de défendre et de promouvoir la langue française." Il ajoutait également! 'Plus le nationalisme québécois sera fort et intense, plus le fait francophone et, par conséquent, le bilinguisme seront une réalité concrète au Canada."

Force nous est de constater que dans ce domaine l'attitude suivant laquelle le ministre a assumé une partie de la responsabilité à l'égard de la reconnaissance de la charte canadienne, et peut-être ce qu'on s'apprête à nous faire avec l'article 23 en regard de la loi 101, est plutôt contradictoire avec les convictions de l'ancien professeur de l'Université Laval.

Il déclarait également en 1981: "II est impossible de consacrer dans la constitution des droits linguistiques qui pourraient entraver la francisation du Québec. De plus, cette charte des droits fondamentaux ne devrait pas comprendre de droits linguistiques, si ce n'est au niveau de l'autorité fédérale et de son administration."

C'est le même ministre, M. le Président, qui disait, en 1984, sous le titre "Le Québec doit tourner la page", dans le journal Le Soleil, et je cite l'article: "M. Rémillard n'a évidemment pas été surpris de voir la Cour suprême trancher en faveur de la clause Canada. Il est clair que le Parlement fédéral et les neuf provinces cosignataires de l'accord constitutionnel de 1981 avaient la loi 101 à l'esprit en enchâssant une charte des droits et libertés, et la Cour suprême a tout de suite clairement indiqué dans son jugement qu'elle a parfaitement compris cette intention." Fin de la citation.

M. le Président, je disais que j'avais bien peur que la réalité avec laquelle nous serons confrontés, c'est celle que je décrivais tout à l'heure. On ne sait ni où ni comment ni par qui la décision, notamment de reconnaître la charte canadienne, a été prise. On l'a annoncé presque par accident, dans une entrevue à un journaliste, et on a tout fait par la suite pour noyer le débat. C'était là, M. le Président, le premier geste important du nouveau ministre responsable de ce dossier au gouvernement du Québec. Il aura sûrement atteint un objectif, celui de passer à l'histoire, mais à quel prix? Il a

traité le dossier constitutionnel à la pièce et sans vue d'ensemble jusqu'à maintenant. Il a, d'une façon, nous croyons dogmatique, appliqué les orientations du Parti libéral en faisant fi d'une perspective claire, au-delà de la rhétorique, de défense des intérêts du Québec. Son propre conseiller senior et plusieurs experts ont, par la suite, qualifié ce geste d'improvisation, d'erreur stratégique, d'imprudence. Son conseiller principal en la matière a même choisi de démissionner dès le premier geste d'importance posé par le ministre.

Depuis, plus de nouvelles. A-t-il été remplacé, va-t-il l'être et par qui, et selon quels critères? Rien, sauf une manchette à savoir qu'il y aurait des discussions préliminaires. On nous dit récemment, dans un article de Michel Vastel - M. Vastel, semble-t-il, a la chance d'être plus renseigné que les membres de l'Assemblée nationale -que le Québec serait prêt à reprendre les négociations constitutionnelles sous forme de discussion préliminaire, le mois prochain, l'article étant daté du 17 avril dernier. Est-ce que ces discussions préliminaires ont commencé? Vont-elles commencer? Quels sont les interlocuteurs? Quels sont les contenus? Est-ce le projet rendu public par le gouvernement au mois de mai 1985, ou autre chose que nous ne connaissons pas, car jusqu'à maintenant, on nous a simplement référés au programme du Parti libéral, quand ce n'est pas à des déclarations données à l'occasion d'entrevues?

L'avenir du Québec mérite mieux que cela, M. le Président. II mérite une position claire de ce gouvernement. Il mérite que soit déposée devant l'Assemblé nationale une vision d'ensemble. Il mérite un débat et un débat important puisqu'il s'agit de notre avenir comme peuple.

Je souhaite que le ministre, après en avoir pris conscience, passe aux actes. Le ministre aura besoin de la solidarité, de l'appui des Québécois, car aucun gouvernement, quel qu'il fut depuis que nous existons sur ce continent comme société, aucun gouvernement, aucun mouvement populaire n'a réussi, compte tenu de notre situation démographique minoritaire, tantôt dans l'empire britannique, tantôt à l'intérieur de la fédération canadienne, aucun gouvernement n'a réussi sans l'appui de la population. De nous renvoyer à l'appui du 2 décembre alors que l'enjeu, c'était une marge de manoeuvre inexistante, des ponts sur la rivière des Prairies, des hôpitaux à Laval...

Une voix: Des baisses de taxes.

M. Johnson (Anjou): ...des baisses d'impôt... Je crois que les Québécois n'ont pas donné de mandat, ni au ministre ni au gouvernement, en matière constitutionnelle, pas plus d'ailleurs que celui qui vous parle ne pourrait prétendre que ce projet était issu d'un mandat de la population. Ce projet était issu de la volonté d'un gouvernement, ce qui m'amènera à écouter attentivement le ministre quand il référera à des choses auxquelles il semble déjà avoir tenu - par exemple, des référendums en matière constitutionnelle - ce qui m'amènera à être intéressé à savoir si le ministre entend, en matière constitutionnelle, procéder par référendum avant de signer une entente qui risquerait de lier le Québec pour longtemps.

Le ministre a d'autres responsabilités en plus du dossier constitutionnel. Je ne remets pas ici en question sa loyauté personnelle à l'égard du peuple québécois mais je doute malheureusement de son poids au sein du gouvernement. J'en veux comme preuve le peu de succès qu'il semble avoir eu lors de la préparation des crédits, alors que certaines coupures imposées par son collègue du Conseil du trésor risquent fortement de remettre en question la sauvegarde d'un certain nombre d'intérêts québécois.

La plus évidente de ces coupures, qui a un impact important sur les droits et l'exercice des droits du Québec, c'est celle qui entraîne la cessation des activités de placement du réseau de Travail-Québec. Par ce geste, afin d'épargner 9 600 000 $, non seulement retournons-nous à l'ancien système des centres de main-d'oeuvre du Canada qui, de façon générale, faisaient peu de cas des bénéficiaires de l'aide sociale mais nous cessons dans les faits d'occuper un champ pour lequel nous avons toujours demandé une compétence exclusive.

Même le programme du Parti libéral, auquel on aime nous renvoyer de temps en temps, propose que le placement soit une compétence exclusive du Québec. Pourtant, n'était-il pas dans les mandats prévus aux articles 3 et suivants de la loi du Conseil exécutif, n'était-il pas dans le mandat du ministre de voir, dans ces activités de coupures de l'ensemble du gouvernement, qu'on était en train de banaliser un certain nombre de dossiers fondamentaux par des coupures inconsidérées, faites par des gens, d'ailleurs, dans certains cas, puisque je parle de quelques collègues du ministre, pour qui il n'y a pas de différence entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral?

Dans le domaine de l'enseignement supérieur, 52 000 000 $ non seulement sont des coupures discutables pour les intervenants car elles touchent un domaine de développement important mais, de plus, elles risquent aussi de bien mal nous positionner en négociation, compte tenu des coupures annoncées par le fédéral dans le financement des programmes établis. Comment convaincre le fédéral de ne pas couper dans le financement de l'éducation post-secondaire - le ministre connaît ce dossier, il l'a évoqué tout à l'heure - alors que le gouvernement

québécois, lui, coupe la veille des négociations?

Est-ce que le ministre ne voit pas qu'il y a là un risque de voir le gouvernement fédéral récupérer nos efforts de rationalisation? Car c'est cela, l'histoire des relations fédérales-provinciales. Ce ne sont pas que des coeurs tendres, des coups de violon ou des drapeaux. C'est aussi très concrètement sur le terrain» Comment deux ordres de gouvernement peuvent-ils coexister quand on sait que les forces qui déterminent l'action fédérale sont en général hors de notre contrôle? D'où l'importance que le ministre et le secrétariat accomplissent leur mandat de bien voir, à travers l'activité de l'ensemble du gouvernement, à ce qu'il n'y ait pas de recul dans des domaines d'activité qui ont fait l'objet de combats incessants pour le Québec pour mieux se doter d'un contrôle sur son territoire. Pas besoin d'être séparatiste pour dire cela. Mais il ne faudrait pas, parce qu'on est fédéraliste, par exemple, comme le ministre et ses collègues, fermer les yeux sur les conséquences graves de ces interventions unilatérales, "uncalled-for", comme on dit à Montréal depuis deux semaines et qui, à toutes fins utiles, mettent le Québec dans un état de vulnérabilité dans des dossiers de grande importance. Si on n'est pas conscient de l'importance du rôle de l'État québécois en matière de développement économique, entre autres, ce gouvernement, cette chaise, deviendra le lieu de l'administration d'un système de santé intéressant et peut-être un peu, le programme de bilinguisme pancanadien. (17 h 15)

Le rôle du ministre et le rôle d'un gouvernement du Québec, c'est de s'assurer que, dans tous les domaines où l'État québécois, en matière économique, a fait connaître à notre collectivité des progrès, il n'y ait aucun recul. Comment le gouvernement pourra-t-il s'opposer à l'intervention du gouvernement fédérai dans le développement des régions du Québec, dans l'aménagement du territoire, alors qu'il coupe 50 000 000 $ dans l'agriculture, 10 000 000 $ dans la forêt, 5 000 000 $ dans l'aménagement des parcs et des réserves, 6 500 000 $ dans le Fonds de développement régional, 4 500 000 $ dans PECEC et 92 500 000 $ dans les transports?

Avec ces 170 000 000 $ de coupures, sans compter celles qui ne sont pas identifiées, et qui restent impossibles à identifier malgré nos efforts, le gouvernement du Parti libéral laisse tomber les régions. Dans ce contexte, il ne sera pas surprenant de voir celles-ci se retourner vers l'État fédéral. Le ministre, en ce sens, a manqué à une partie manifeste, évidente de ses responsabilités en laissant s'effectuer ainsi aveuglément dans des secteurs comme la forêt ou l'agriculture, ou la main-d'oeuvre, ou le développement régional des coupures dont les conséquences seront de paralyser les efforts de développement régional, de créer un vacuum et de permettre aux forces - qui jouent dans notre système - de l'État fédéral d'intervenir.

C'est un maigre bilan en matière de relations fédérales-provinciales pour quatre mois? l'adhésion du gouvernement à la charte constitutionnelle, toutes ces coupures dans des domaines stratégiques pour le Québec qui veulent faire de l'État québécois autre chose qu'une grosse municipalité. Tout cela, ce sont des indices de faiblesse à l'égard de la défense des droits du Québec, au-delà des discours et de la rhétorique. Son bilan en matière de relations fédérales-provinciales en est également un autre. Jamais n'aura-t-on vu un gouvernement fédéraliste avec un chef qui se dit bon négociateur échouer aussi lamentablement dans la conduite des négociations avec le gouvernement fédéral.

Il aura beau dire qu'on ne l'interroge pas, pendant la période de questions, sur la question des transferts et des 95 %, dossier qu'on connaît et que j'ai défendu à Halifax, je ne donnerai pas la chance au premier ministre du Québec de poser en défenseur des intérêts du Québec car je sais ce qu'il est en train de faire à l'État québécois. Par manque de stratégie, le premier ministre a failli faire échouer le premier sommet francophone. Il risque d'ailleurs de payer cher son accroc aux ententes implicites entre les deux ordres de gouvernements au point, d'ailleurs, où ces ententes implicites non respectées ont fait l'objet de gorges chaudes dans bien des salons diplomatiques à Paris et ailleurs.

Ce gouvernement a d'ailleurs connu plus d'échecs que de réussites, déjà, dans les relations fédérales-provinciales: fermeture de Gulf, non-participation du fédéral au financement à Port-Cartier, le projet de Matane qui tarde à débloquer, la péréquation qui traîne. En contrepartie, qu'avons-nous récolté sauf quelques vagues promesses sur la pétrochimie? Et on ignore toujours où en sont les dossiers qui portent sur la main-d'oeuvre, à moins que le ministre ne puisse déposer une entente. Le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes a le mandat de préparer des stratégies en matière de relations fédérales-provinciales et non pas de se contenter de faire des constatations. Je n'ose pas dire qu'il a effectivement des stratégies ou que celles-ci ont conduit à des reculs du Québec. Je dirais plutôt, pour être un peu plus clément, qu'il n'a pas de stratégies. La nature a horreur du vide, le ministre le verra rapidement en politique. Et dans ce gouvernement que l'on veut mener comme une "business", ce vide est rempli par des personnes qui font bien peu de cas des droits du Québec et pour qui le gouvernement du Québec ou le

gouvernement fédéral c'est la même chose. J'en veux pour preuve le discours récent que livrait M. Gobeil, président du Conseil du trésor, le 16 avril dernier, devant l'Association canadienne des conseillers en administration. Dans ce discours portant sur la révision des fonctions gouvernementales, nulle part, pas une ligne ne traite, ne fait mention de la mission de l'État québécois dans la protection des intérêts de la collectivité québécoise, cela faisant partie quant à nous des fonctions aussi d'un gouvernement.

M. le Président, le gouvernement s'est engagé sur une piste dangereuse pour ne pas dire une pente savonneuse en matière de relations fédérales-provinciales. Leur liane est graissée comme disait quelqu'un. C'est le rôle et le devoir du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes de faire en sorte que les droits du Québec soient protégés, qu'ils ne soient pas abandonnés pour des raisons partisanes ou à cause de nécessités comptables. On est forcé cependant d'admettre qu'à venir jusqu'à maintenant le ministre a eu quelques difficultés à faire triompher ce type de point de vue dans son gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le chef de l'Opposition. Questions?

Secrétariat aux Affaires intergouvemementales canadiennes

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je commencerais avec un certain nombre de questions qui sont plus de la nature du détail. Juste pour orienter le ministre et ses collaborateurs à: Dépenses no 4 de l'élément de programme 2, on avait là des crédits l'an dernier de 576 426 $ en crédits initiaux et...

M. Rémillard: Pouvez-vous répéter s'il vous plaît?

M. Johnson (Anjou): Dépenses 4 de l'élément de programme 2.

Le Président (M. Filion): De l'élément 2 du programme 4. C'est cela.

M. Johnson (Anjou): Non, catégorie de dépenses 4.

Le Président (M. Filion): C'est cela, les services.

M. Johnson (Anjou): À l'élément 2, les services professionnels, est-ce que cela va?

M. Rémillard: Une minute, on l'a pas trouvé encore. Cela doit être dans "avant le 2 décembre" cela. Non?

M. Johnson (Anjou): Je vous dis simplement... je veux juste faire une comparaison. Il y a là une augmentation. Le chiffre que vous avez c'est 1 095 100 $, cela va?

M. Rémillard: 1 095 100 $ oui, d'accord.

M. Johnson (Anjou): Voilà, bon! M. Rémillard: J'ai cela.

M. Johnson (Anjou): À la même rubrique l'an dernier cela était 576 000 $; c'est une augmentation du simple au double ou presque. Est-ce qu'on peut savoir en gros ce que couvre l'augmentation de 500 000 $ au chapitre des crédits pour les services professionnels?

M. Rémillard: Voilà, M. le Président, c'est une bonne question, c'est une question très précise et bien faite. Il s'agit des crédits que nous prévoyons pour la présentation, l'étude... vous connaissez toutes ces dépenses qui entourent ces propositions constitutionnelles et ces négociations constitutionnelles que nous allons avoir avec le gouvernement fédéral et les autres provinces. C'est à ce niveau qu'on inclut ces 300 000 $ et cela nous a permis d'inclure ce montant dans les crédits du ministère parce que, sans causer de problème sur la masse globale du ministère même si nous avons, nous aussi, fait nos coupures, je n'ai pas de cabinet spécialement désigné pour les affaires canadiennes. Ce qui veut dire que nous faisons une économie de plus de 600 000 $.

M. Johnson (Anjou): Vous avez un seul cabinet, c'est cela?

M. Rémillard: Pardon?

M. Johnson (Anjou): Vous avez un seul cabinet?

M. Rémillard: Nous avons un seul... Oui. Alors quand vous étiez ministre...

M. Johnson (Anjou): ...il y avait la Justice et les affaires canadiennes.

M. Rémillard: ...de la Justice et délégué aux Affaires intergouvemementales canadiennes, vous aviez deux cabinets.

M. Johnson (Anjou): C'est cela.

M. Rémillard: Alors que j'ai un cabinet, ce qui nous permet d'épargner...

M. Johnson (Anjou): Et vous prenez à peu près la masse de 500 000 $ et vous

mettez cela dans les services de consultation professionnelle...

M. Rémillard: ...et de fabrication et tout ce qui regarde la traduction également, enfin toutes ces choses que vous connaissez très bien parce que, l'an dernier à cette époque, vous étiez en grande préparation, bien sûr, de votre livre bleu.

M. Johnson (Anjou): Nous avons mis environ 500 000 $ pour cela.

M. Rémillard: 500 000 $. M. Johnson (Anjou): Au total.

M. Rémillard: Alors nous prévoyons moins.

M. Johnson (Anjou): Cette année, vous prévoyez 1 000 000 $.

M. Rémillard: Non.

M. Johnson (Anjou): Il semble que cela coûte plus cher d'être fédéraliste.

M. Rémillard: Non, non, attention! Attendez une minute là, je vous reviens là-dessus. Il y a l'ensemble, oui, il faut bien comprendre bien sûr - et compris, j'en suis sûr - que l'ensemble des contractuels de tous les bureaux sont compris aussi là-dedans.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Y a-t-il un gros morceau pour le... C'est cela dans le fond, ce que vous avez à Toronto, à Calgary...

M. Rémillard: C'est cela, exactement.

M. Johnson (Anjou): ... Pardon, pas à Calgary, à Edmonton, je m'excuse.

M. Rémillard: Edmonton, bien sûr, Calgary n'est pas envisagé.

M. Johnson (Anjou): C'est qu'il souhaite bien en avoir une à Calgary, mais...

M. Rémillard: Oui, oui.

M. Johnson (Anjou): II y a quand même du simple au double qui passe là. Donc, vous prévoyez surtout que ce sera des contrats en matière constitutionnelle...

M. Rémillard: Non, non.

M. Johnson (Anjou): ...des experts...

M. Rémillard: Pas nécessairement. Vous savez, il y a la traduction, il y a aussi l'imprimerie, le round public, la tournée que nous devons faire pour publiciser et ces choses-là, aller voir les autres provinces parce que nous avons à négocier, comme vous le savez, non seulement avec le gouvernement fédéral, mais avec neuf autres provinces; alors il faut se déplacer, il faut aller les voir. II ne s'agit pas simplement de leur envoyer les propositions par courrier spécialisé, il faut aussi aller voir ces gens et discuter avec eux. C'est donc dans ce contexte que nous avons ce montant. Comme je vous dis, ce montant est possible parce que je fais une économie de plus de 600 000 $ parce que je n'ai qu'un cabinet politique.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Mais comprenez-moi bien, je ne vous fais pas le reproche de mettre un peu de ressources là-dedans, ce serait bien le bout de la chandelle si vous n'en mettiez pas. La question, c'est de savoir ce que vous allez faire avec.

M. Rémillards Tout cela.

M. Johnson (Anjou): Et c'est cela qui m'intéresse. Le ministre, dans son exposé préliminaire, a évoqué la formation d'un comité. D'abord, il a parlé du comité ministériel comprenant lui-même son collègue de la Justice, le ministre de l'Éducation aussi, je crois, et à l'avenant d'autres ministres. Il a parlé aussi d'un comité d'experts... Non? Je n'ai peut-être pas très bien saisi.

M. Rémillard: Non, je n'ai pas parlé d'un comité d'experts, mais d'un comité de fonctionnaires! il y a un comité de fonctionnaires, il y a aussi des spécialistes que nous consultons pour nous donner des avis sur différents points, mais il n'y a pas de comité, il n'y a pas de groupe de l'extérieur structuré formellement.

M. Johnson (Anjou): Pourrait-on avoir, de la part du ministre, la liste des spécialistes qui sont consultés au niveau central à son ministère?

M. Rémillard: Vous comprendrez, M. le chef de l'Opposition, que cela fait partie des stratégies. Vous me demandez d'avoir des stratégies pour les négociations, alors vous comprenez que...

M. Johnson (Anjou): Des tactiques, ce ne seraient pas des stratégies, ce seraient des tactiques.'

M. Rémillard: Ce ne sont pas des tactiques, ce sont des stratégies... de savoir quels sont nos spécialistes, quels sont nos conseillers. Je pense que vous comprenez très bien - et je sais que vous avez fait la

même réponse l'an dernier lorsque vous avez aussi défendu vos crédits - que ce n'est pas tellement opportun à ce moment-ci de dévoiler ces noms.

M. Johnson (Anjou): Autrement dit, il faut attendre qu'ils démissionnent pour savoir qui ils sont.

M. Rémillard: Quant aux démissions, vous savez, dans la mesure où on voit que ce sont des démissions de gens qui travaillent encore avec nous, ce ne sont pasde grandes démissions.

M. Johnson (Anjou): Dans le journal Le Soleil du samedi 22 mars, à l'occasion d'une entrevue que le premier ministre donnait à un journaliste de la Presse canadienne qui était sous le titre: "Bourassa a d'autres priorités que la baisse des taxes", il y a cette phrase: "M. Bourassa a précisé que son ministre des Relations internationales, M. Gil Rémillard, amis sur pied un comité spécial d'experts qui s'affaire à mettre au point les documents de base de la négociation qui s'amorcera éventuellement avec le gouvernement fédéral." J'ai demandé au ministre, tout à l'heure, s'il avait un comité d'experts ou non. (17 h 30)

M. Rémillard: Je pense que ce que M. le premier ministre a voulu dire, c'est que c'est un groupe d'experts qui, de fait, est consulté, ce qui va nous permettre de rédiger nos propositions et la position du Québec.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que cela se pourrait que le ministre ait le goût de faire une espèce de commission publique sur la question constitutionnelle?

M. Rémillard: Quelle sorte de commission publique? À quoi pensez-vous?

M.. Johnson (Anjou): Â une commission créée par décret du Conseil des ministres. On donne un mandat... Au fédéral et la plus connue, la plus coûteuse, cela a été la commission Macdonald. Est-ce que cela se pourrait que le ministre soit intéressé, en matière constitutionnelle, à créer une commission publique qui entendrait des mémoires à partir d'un document initial provenant du ministre ou d'une série de résolutions de l'Assemblée nationale? Est-ce que le ministre envisage cette démarche dans le dossier constitutionnel?

M. Rémillard: Non.

M. Johnson (Anjou): Non?

M. Rémillard: Non. Dans le dossier constitutionnel, on n'envisage pas du tout une commission de ce genre. Je me réfère toujours à l'entrevue qu'a donnée M. Bourassa, premier ministre du Québec, où il a mentionné que l'Assemblée nationale sera, bien sûr, saisie des propositions que nous allons présenter en matière constitutionnelle. Mais nous n'avons nullement l'intention de faire une commission publique ou quoi que ce soit de ce genre. Vous savez, nous avons un mandat qui est clair et bien précis et vous faites un très bon travail dans l'Opposition. Vous pouvez me poser des questions; vous le faites régulièrement. Je pense que la démocratie va jouer son jeu pleinement.

M. Johnson (Anjou): Le ministre est bien condescendant, M. le Président. Il est bien condescendant. On est bien heureux.

Une voix: Est-ce que c'est une question?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, toujours à l'élément de programme no 2 qui touche au fonctionnement régulier du secrétariat, on constate que ies transferts passent de 340 000 $, en 1985-1986, à 882 900 $, en 1986-1987, soit une hausse de 160 %. Est-ce que c'est simplement une question de présentation, une modification à la présentation des crédits, ou s'il y a de nouveaux programmes de transferts qui sont envisagés?

M. Rémillard: C'est une autre bonne question. Il s'agit...

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Johnson (Anjou): On est contents.

M. Rémillard: Oui, vraiment. Je vous trouve vraiment en forme, cet après-midi. Je trouve que c'est mieux que ce matin.

M. Johnson (Anjou): Peut-être une petite étoile dorée en haut de la page, aussi, ou un petit ange peut-êtrel

M. Rémillard: C'est dommage que les caméras ne soient pas ici.

Une voix: II va avoir une image tantôt.

M. Rémillard: Ce que je peux vous dire, c'est qu'il faut, de fait, ajouter 300 000 $ qui représentent le budget au Secrétariat des peuples francophones, qui dépendra maintenant du secrétariat comme tel.

M. Johnson (Anjou): Cela relevait de quelles dépenses, auparavant?

M. Rémillard: Du cabinet du premier ministre.

M. Johnson (Anjou): C'est cela.

M. Rémillard: Oui. Vous devriez savoir cela, vous.

L'avenir de Travail-Québec

M. Johnson (Anjou); C'est simplement un transfert de crédits du conseil. Parfait! Merci.

Concernant le secteur de la main-d'oeuvre, j'ai évoqué, dans ma présentation préliminaire, la préoccupation - pour ne pas dire l'inquiétude - que soulève, chez nous, le fait que le Québec se retire du placement, qui est l'une des clés d'une politique de main-d'oeuvre au niveau de Travail-Québec. On connaît les appétits du gouvernement central dans ce domaine. Est-ce que le ministre a été consulté à propos de cette coupure avant qu'elle ne soit présentée au Conseil des ministres? Est-ce que le CCRI, le Comité consultatif des relations intergouvernementales, qui est présidé normalement par son sous-ministre, a été saisi de cette question? Est-ce que le ministre est conscient que cette décision va rendre un peu plus difficile la revendication traditionnelle du Québec en matière de main-d'oeuvre, d'autant plus, d'ailleurs, encore une fois, que, même dans le programme du Parti libéral, on retrouve cette revendication?

M. Rémillard: Tout d'abord, j'aimerais vous préciser qu'il ne s'agit pas de se retirer du champ du placement, absolument pas. On ne se retire pas du placement. Le Québec continue de faire du placement, mais il va le faire d'une façon plus efficace.

Il s'agit tout simplement de faire du placement en rationalisant nos activités, en aidant les gens qui en ont besoin, les handicapés, les jeunes, les femmes, les gens qui sont dans des situations où ils doivent avoir le recours de l'État pour avoir ce placement. Nous allons avoir une activité de placement plus importante que celle que nous avions avant, et surtout plus efficace.

Il s'agit simplement de ne pas faire de dédoublement avec le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral fait du placement, vous le savez, et on peut se poser des questions quant au choix de placement qu'il peut faire et au succès que peut avoir ce genre de placement. D'ailleurs, le comité Nielsen s'est posé cette question. Alors nous considérons plus efficace et plus intéressant d'exercer cette juridiction à laquelle nous tenons. Nous tenons à cette juridiction sur le placement. C'est une juridiction que nous avons, que nous allons conserver et que nous exerçons pleinement d'une façon plus appropriée, plus efficace que lorsqu'on faisait du dédoublement avec le gouvernement fédéral dans un domaine de placement qui, finalement, n'était pas efficace en lui-même.

Il ne s'agit pas de laisser tomber le placement, absolument pas. Il s'agit de continuer à faire du placement, mais sous une forme différente pour qu'il soit plus effectif et qu'il permette au Québec de jouer vraiment son rôle dans ce domaine.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je suis obligé de constater que dans les documents du président du Conseil du trésor, on dit pourtant; Cessation du placement par le réseau Travail-Québec.

M. Rémillard: Oui, par le réseau Travail-Québec...

M. Johnson (Anjou): Voilà.

M. Rémillard: ...cessation, pas cessation du placement par le Québec. C'est différent.

M. Johnson (Anjou): Oui, mais le placement au Québec, M. le Président, se fait par le réseau Travail-Québec.

M. Rémillard: Bon, alors il y a...

M. Johnson (Anjou): II ne se fait pas par le ministère des Finances.

M. Rémillard: ...c'est une partie, une cessation en partie... Écoutez, cessation dans ces circonstances que je vous ai expliquées, mais non pas cessation des activités du Québec en matière de placement. Je pense que vous aviez compris cela de toute façon, vous le savez très bien. On l'a expliqué et on continue de le faire. C'est une politique qui s'applique et que mon collègue, le ministre du Travail, applique. Il s'agit d'être plus effectif, de laisser tomber ce dédoublement qui, en lui-même, était improductif et inconséquent avec le gouvernement fédéral et de concentrer nos efforts dans un domaine de placement que nous considérons beaucoup plus intéressant...

M. Johnson (Anjou): Qu'auprès des assistés sociaux.

M. Rémillard: ...et qui va aider les Québécois qui en ont besoin, les assistés sociaux, les handicapés, les jeunes et les femmes, ceux qui en ont besoin. C'est l'État qui va...

M. Johnson (Anjou): Les jeunes et les femmes.

M. Rémillard: Pardon?

M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, Travail-Québec va continuer à faire du placement pour les femmes?

M. Rémillard: Bien sûr, oui. Pourquoi

pas?

M. Johnson (Anjou); Bon. À ce moment, on va interroger le président du Conseil du trésor, je présume.

M. Rémillard: Oui, oui.

Le développement régional

M. Johnson (Anjou): M. le Président, en matière de développement régional, l'ensemble des coupures annoncées par le gouvernement, je l'ai dit, aura un impact négatif considérable sur les régions. On ne pense pas seulement à Radio-Québec qui en est un exemple, notamment, mais à un certain nombre d'instruments comme le Fonda de développement régional et PECEC qui ont subi des coupures de 6 500 000 $ et 4 500 000 $ respectivement.

Le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes sait sans doute que tes gouvernements du Québec se sont toujours opposés a la mainmise fédérale dans le secteur du développement régional. L'OPDQ a été mis sur pied, d'ailleurs, en partie, pour que le Québec occupe ce champ d'activité où la présence fédérale, en général, n'entraîne que double emploi quand ce n'est pas carrément la confusion et la perte d'efficacité.

Est-ce que je pourrais connaître un peu quels sont les grands principes qui guident le ministre dans sa réflexion quant au rôle de chacun des gouvernements en matière de développement régional et où en sont les négociations avec le gouvernement fédéral concernant la décentralisation vers les provinces de l'administration de PEDIR?

M. Rémillard: En ce qui regarde le développement régional, c'est une priorité pour notre gouvernement - on l'a mentionné à plusieurs reprises - de voir un développement régional équilibré, de faire en sorte que les régions du Québec puissent se développer en fonction des objectifs de gouvernement que nous avons. Bien sûr, nous devons collaborer avec le gouvernement fédéral qui doit aussi assumer sa part, parce que les Québécois et Québécoises patent des impôts et il doit nous revenir de ces impôts que nous payons une partie importante, justement pour développer les régions et avoir des projets de développement régional adéquats.

Mon collègue responsable du Développement régional est justement à penser une politique globale d'intervention au point de vue régional, en concertation avec les instances fédérales et avec d'autres ministères concernés, pour faire en sorte que nous puissions avoir les moyens... Je vous avoue que ce n'est pas toujours facile. Bien sûr on doit défendre nos projets, on doit se battre pour les faire valoir, mais on doit faire en sorte que le gouvernement fédéral puisse y participer. Tout à l'heure, je vous ai parlé des ententes auxiliaires. Nous avons à compléter ces ententes auxiliaires sur plusieurs points et nous avons à discuter ces ententes. Je ne peux pas vous dire aujourd'hui où nous en sommes exactement dans chacune de ces ententes, parce que nous avons à les discuter avec les collègues qui sont responsables sectoriellement de chaque domaine et avec le gouvernement fédéral. Je dois rencontrer M. Stevenson du fédéral prochainement... Je veux dire M. Stevens...

M. Johnson (Anjou): Je l'ai déjà appelé M. Sinclair, moi. Vous n'avez pas à vous en faire.

M. Rémillard: On doit parler de ces sujets-là, discuter des problèmes du gouvernement fédéral et de son intervention au niveau du développement régional.

M. Johnson (Anjou): Donc, si je comprends bien, vous n'avez pas eu l'occasion encore de rencontrer M. Sinclair Stevens?

M. Rémillard: Non. Je dois renconter M. Stevens dans les prochaines semaines, mais nous sommes à compléter nos dossiers. Nous voulons voir .l'ensemble de nos dossiers de près pour pouvoir passer en revue chacun de nos dossiers sur les ententes que nous voulons négocier avec Ottawa.

Les forêts

M. Johnson (Anjou): Concernant la forêt, je pense que personne, surtout pas le ministre, ne contestera le fait que la forêt est un domaine de juridiction exclusivement provinciale en vertu de la constitution canadienne. Le gouvernement fédéral n'a cependant jamais caché, comme on le sait, son ambition de doter le Canada d'un "national policy" en cette matière, comme dans d'autres. Est-ce qu'il ne croit pas qu'en ralentissant par des coupures de 10 300 000 $ Le reboisement des forêts le gouvernement pourrait être en train de justifier l'action fédérale?

Deuxièmement, le ministre a-t-il analysé les impacts que pourrait avoir cette coupure sur l'entente auxiliaire sur les forêts qui prévoit, comme on le sait, un partage 50-50 de la plupart des activités qui sont affectées par les coupures?

M. Rémillard: Oui, le chef de l'Opposition a raison de dire que les forêts relèvent de la compétence du Québec, bien sûr des provinces, excepté dans certains domaines où le territoire relève de la compétence du gouvernement fédéral. Mais, d'une façon

générale, au Québec, on peut dire que les forêts relèvent de la compétence de la province. De fait, le gouvernement fédéral légifère sur certains aspects concernant nos forêts toujours par ce fameux pouvoir de dépenser qu'il utilise dans bien d'autres domaines. Cela fait en sorte, dans bien des secteurs, qu'il nou3 est difficile, comme gouvernement provincial, d'avoir une véritable politique qui corresponde à nos objectifs, car le gouvernement fédéral utilise ce pouvoir de dépenser dans des domaines qui ne relèvent pas de sa juridiction et ce, d'une façon conditionnelle, ce qui nous oblige quelquefois à modifier certains objectifs qui ne correspondent plus au plan global de développement que nous voulons poursuivre. (17 h 45)

C'est dans ce cadre-là que, dans nos revendications constitutionnelles, nous insistons tellement pour que ce pouvoir de dépenser soit circonscrit et qu'on puisse en limiter la portée ce pouvoir de dépenser que le gouvernement fédéral utilise, comme on le sait, dans à peu près tous les secteurs. II n'y a plus, à toutes fins utiles, de juridictions strictement exclusives qui appartiennent aux provinces. Ces juridictions exclusives, que ce soit dans le domaine de l'éducation, dans le domaine des forêts - le sujet que nous discutons actuellement - ou dans le domaine de la santé, sont sujettes à ces subventions conditionnelles du gouvernement fédéral et nous devons revoir ce processus d'action du gouvernement fédéral. Dans le domaine de la forêt, les coupures ou réaménagements, je devrais dire le réaménagement de l'action du gouvernement provincial en ce qui regarde le reboisement ou la politique de la forêt, qui dépend aussi d'un collègue qui a la responsabilité de ce secteur, ne met nullement en cause la responsabilité du Québec sur les forêts. L'impact que peuvent avoir ces politiques n'est que bénéfique, parce que nous prenons nos responsabilités en déterminant nous-mêmes nos objectifs de reboisement. L'entente que nous avons en matière de forêt, qui est une des ententes les plus intéressantes qu'on a de 50-50, comme vous le mentionniez, se fait aux meilleurs intérêts du Québec. Cela ne remet nullement en cause cette entente que nous avons.

M. Johnson (Anjou): Ce que je demande au ministre, M. le Président, c'est: Est-ce qu'il a analysé les impacts que pourrait avoir cette coupure sur l'entente auxiliaire dans le secteur de la forêt qui prévoit un financement à 50-50 dans la plupart des activités qui sont affectées par les coupures?

M. Rémillard: C'est une des ententes qui fonctionnent le mieux et l'impact dont vous parlez est à peu près nul. Il n'y en a pas d'impact.

M. Johnson (Anjou): II n'y en a pas d'impact. D'accord.

M. Rémillard: Mais il n'y en a pas d'impact, absolument pas.

M. Johnson (Anjou): Merci.

M. Rémillard: Comme je vous dis, on fait notre politique de foresterie et cette politique n'implique aucun impact sur l'entente auxiliaire que nous avons qui est une des ententes les plus intéressantes.

M. Johnson (Anjou): C'est vrai, négociée par celui qui vous parle d'ailleurs.

M. Rémillard: Alors, bravo! Je vous en félicite.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'enseignement supérieur. Je pense que vous avez raison d'ailleurs, cela n'a pas d'impact dans le cas de la forêt.

M. Rémillard: Mais pourquoi toutes ces questions que vous m'avez posées?

M. Johnson (Anjou): Je vous écoute et je me dis; Probablement que vous avez raison sur celle-là.

M. Rémillard: Oui. Vous me faites faire mes classes. Eh bien, je suis heureux d'avoir un maître aussi brillant.

M. Johnson (Anjou): Ne vous en faites pas. Moi, je ne démissionnerai pas.

M. Rémillard: J'aurais du travail pour vous.

L'enseignement postsecondaire

M. Johnson (Anjou): L'enseignement supérieur est un autre domaine. Je n'ai pas à revenir sur les coupures, 24 000 000 $ dans le régime de prêts et bourses, alors qu'on avait promis aux gens d'améliorer les prêts et bourses, 5 400 000 $ dans le financement de l'enseignement collégial, 15 000 000 $ dans l'enseignement universitaire. Tout cela place, évidemment, le gouvernement dans une situation assez paradoxale face au fédéral au moment où il négocie avec le fédéral le financement du postsecondaire. Est-ce que le ministre pourrait nous dire l'état du dossier en ce qui concerne les transferts fédéraux 1986-1987 pour le financement de l'enseignement postsecondaire?

M. Rémillard: En ce qui regarde l'enseignement postsecondaire, d'une façon très précise, je vais me référer à des documents. Je vais vous donner cette information, M. le chef de l'Opposition. Je

vais vous lire ici l'information que j'ai parce que, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, j'ai des fonctionnaires extrêmement compétents et brillants qui m'ont tout préparé. J'ai toute la préparation sur toutes les questions que vous pouvez me poser. 11 reste simplement à les acheminer.

Vous me permettez de vous en lire une ici qui est particulièrement précise: Depuis 1977, les transferts fédéraux au titre de l'enseignement postsecondaire ont été intégrés au financement des programmes établis. Le Québec devait recevoir en 1985-1986 à ce chapitre 1 175 000 000 $. Or, è partir du début des années quatre-vingt, la volonté du gouvernement fédéral d'accroître ses pouvoirs en cette matière de juridiction strictement provinciale n'a pas cessé de se manifester. La loi C-12, adoptée en avril 1984, le rapport Johnson, rendu public en février 1985, le rapport de la commission Macdonald et celui du groupe Nielsen sont autant de plaidoyers en faveur d'une présence accrue du fédéral dans le secteur de l'enseignement postsecondaire et d'une utilisation plus structurante de son financement.

Depuis la nomination de M. Bouchard comme secrétaire d'État, ces volontés fédérales étaient en veilleuse • mais M. Bouchard a déclaré à plusieurs reprises croire et vouloir respecter à tout prix la compétence provinciale exclusive en matière d'éducation. Le 14 avril dernier, cependant, M. Bouchard déclarait à la presse que les provinces jouaient mal leur rôle dans ce dossier et qu'il voulait discuter à court terme d'un nouveau rôle du fédéral dans ce secteur.

J'ai rencontré M. Bouchard. Nous avons discuté de ce sujet. M. Bouchard m'a assuré de la volonté du gouvernement fédéral de respecter la compétence exclusive des provinces en matière d'éducation et que ses commentaires étaient strictement pour faire le point d'une façon générale sur l'action des différentes provinces en matière d'éducation postsecondaire. Il était donc conscient des responsabilités du Québec comme des autres provinces d'ailleurs. Il avait bien l'intention de respecter ces juridictions.

Alors, c'est dans ce contexte que nous devons négocier avec le gouvernement fédéral les subsides nécessaires pour l'évolution de notre postsecondaire mais je ne vois pas en quoi les coupures qu'on pourrait faire " actuellement pourraient affecter ces négociations. Elles sont présentement ralenties, bien sûr, à cause du dépôt, comme vous le savez, de ce projet de loi C-96 sur les transferts en ce qui regarde l'éducation postsecondaire et en ce qui regarde aussi le domaine social.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le ministre favorise le maintien de la formule actuelle ou plutôt le système de transfert de points d'impôts dans ce domaine?

M. Rémillard: Voulez-vous me répéter cela?

M. Johnson (Anjou): Oui. Dans ce domaine, je ne pense pas qu'il trouve un papier qui prévoie la réponse toute faite parce que c'est une question d'opinion. C'est une question vraiment fondamentalement politique, elle n'est pas technique. Est-ce que le ministre, comme conseiller principal, responsable en vertu de la loi de conseiller le gouvernement en matière fédérale-provinciale, favorise le maintien de la formule actuelle de financement des programmes établis ou le transfert de points d'impôts additionnels?

M. Rémillard: Savez-vous que c'est une excellente question encore une fois qui mérite réflexion. Je vais prendre avis de votre question. Je vais consulter mes fonctionnaires compétents. Je pourrai me faire une idée sur la question et je pourrai vous en reparler.

La stabilisation des revenus agricoles

M. Johnson (Anjou): Bon. Alors, on va parler un peu d'agriculture d'abord. L'ancienne loi fédérale de stabilisation des prix agricoles qui existait, on le sait, depuis de nombreuses années prévoyait une assistance financière des agriculteurs lorsque les prix étaient trop bas. Le Québec, pour sa part, a choisi dans certains secteurs de mettre en place plutôt des programmes de stabilisation des revenus négociés avec les producteurs. De façon générale, d'ailleurs, selon le rapport Macdonald, au moment où on parle de libre-échange... Incidemment, est-ce qu'on a le résultat du vote? Cela a passé au Sénat? Oh oui! Est-ce que cela a passé au Sénat? Vous n'avez pas eu de renseignements?

M. Rémillard: Le vote n'a pas encore eu lieu, je crois. Tout à l'heure, en entrant, il y avait cependant des conditions qui avaient été établies, mais on n'avait pas encore voté formellement.

M. Johnson (Anjou): Disons qu'on peut présumer que ça va se parler entre le Canada et les États-Unis, quoi qu'il advienne. Le rapport Macdonald disait, d'ailleurs, que la formule québécoise était moins contestable sur le plan du commerce international que le formule fédérale de stabilisation des revenus... des "prix" dans la mesure où on agissait plus sur les revenus des producteurs que sur le prix de la production. Donc, l'influence quant aux marchés sur les effets de la concurrence internationale dans la

formule québécoise n'était point menaçante ou moins hérétique face aux principes généraux de libéralisation du commerce.

On se souviendra aussi que, sous l'ancienne loi fédérale, le Québec tenait compte des indemnités qui étaient versées par le fédéral aux producteurs avant d'établir le seuil de sa participation, ce qui réduisait, évidemment, d'autant le coût des programmes de stabilisation des revenus des agriculteurs qui participaient à ce programme du gouvernement du Québec. La loi C-25 remet en question le fonctionnement du régime actuel - C pour Canada. Il entend mettre en place des programmes nationaux dits tripartites de stabilisation des prix agricoles, et non pas des revenus. Son soutien financier aux agriculteurs, d'ailleurs, serait conditionnel à la participation des provinces aux programmes, et des programmes nationaux comme ceux-là, on le sait, défavorisent de façon générale l'agriculture au Québec parce qu'ils remettent en question les programmes de stabilisation qu'on a mis sur pied ici, qui sont des programmes de stabilisation du revenu et qui sont de façon générale considérés comme plus adéquats par les agriculteurs québécois eux-mêmes. Or, quelle est la position du ministre à l'égard de l'application de la loi C-25?

M. Rémillard: La position que nous avons est demeurée finalement la même. C'est que le gouvernement fédéral doit respecter le droit des provinces de mettre à la disposition des producteurs des programmes de stabilisation des revenus qui tiennent compte de leur situation spécifique et ces programmes seraient complémentaires à un programme fédéral de base universel et gratuit. Le Québec a indiqué au gouvernement fédéral et aux autres provinces, lors d'une réunion des ministres de l'Agriculture, le 30 janvier 1986, qu'il continuera d'offrir la protection des régimes de stabilisation actuellement en vigueur tant que la loi fédérale n'aura pas été modifiée dans le sens désiré. En cas de refus du gouvernement fédéral, ce dernier devra reconnaître un droit de retrait avec pleine compensation financière.

M. Johnson (Anjou): Donc, votre position, c'est, dans le fond, la position du Québec avant.

M. Rémillard: C'est ça, et cette position a été approuvée par le Conseil des ministres.

M. Johnson (Anjou): Un certain nombre de dossiers contentieux... je ne sais pas s'il y a des collègues de l'autre côté qui ont quelques questions. Je peux peut-être leur permettre cela après déjà 40 minutes. Ça va? Je peux continuer, j'en ai d'autres, mais je me demandais si notre collègue de Mille-Îles ne voulait pas intervenir. D'accord.

La pétrochimie

La pétrochimie. On sait qu'entre Noël et le 1er de l'An, le ministre fédéra! de l'Expansion industrielle et régionale, M. Sinclair Stevens, et le ministre de l'Industrie et du Commerce, annonçaient en même temps la fermeture de Gulf et que les deux gouvernements avaient conclu une entente en vue de venir en aide à la pétrochimie québécoise. Est-ce que l'entente a été signée et quand?

M. Rémillard: Oui, en décembre 1985 le Canada et le Québec se sont entendus pour offrir un programme d'assistance financière à la société Pétromont, par laquelle Pétromont recevra 55 800 000 $ d'aide fédérale pour améliorer et moderniser son usine. Cette aide, jumelée à l'aide déjà acquise du gouvernement du Québec dans le cadre de l'entente du 10 septembre 1984, devrait permettre à Pétromont de retrouver sa rentabilité. Les fonds fédéraux devront être utilisés dans le cadre du programme de modernisation, donc, à des fins d'investissements. Il n'est pas du tout question pour le gouvernement fédéral de subventionner le transport des liquides du gaz naturel et ainsi les 55 800 000 $ de subvention promis par le gouvernement fédéral viseront à aider la modernisation de Pétromont seulement. Au Québec, on estime que l'ensemble des projets de modernisation atteindrait les 40 000 000 $; ce qui importe pour le Québec actuellement, c'est de récupérer cette différence de 15 000 000 $. Par conséquent, il n'est pas question que Pétromont signe cette entente sans avoir l'assurance qu'il pourra toucher le plein montant de la subvention, soit 55 800 000 $, Mais il y a eu de fait une entente entre les deux gouvernements.

M. Johnson (Anjou): ... Il y a une entente signée entre les deux gouvernements?

M. Rémillard: II y a une entente qui est une première entente qui n'a pas encore été signée formellement. (18 heures)

M. Johnson (Anjou): D'accord. Est-ce qu'elle doit l'être bientôt? Parce que c'est un peu difficile pour un Trésor d'adresser des chèques de 50 000 000 $ à un autre, sans un document qui fait que le Vérificateur général n'est pas hors de lui. Est-ce pour bientôt?

M. Rémillard: On négocie actuellement très activement. Il y a ce problème de 15 000 000 $ de différence et il n'est pas

question que Pétromont...

M. Johnson (Anjou): Plus que dans Matane?

M. Rémillard: J'aurais de la difficulté à vous faire la comparaison, mais je peux vous dire qu'on négocie vigoureusement, très bien et qu'on est optimiste.

M. Johnson (Anjou): Ah, j'en prends bonne note.

Ententes de développement économique

Ententes de développement économique. Dans le tableau que le ministre nous a remis, en ce qui concerne les ententes de développement économique, on constate qu'il manque 80 000 000 $ que le gouvernement fédéral avait inclus dans les montants disponibles pour les ententes auxiliaires. Est-ce que ce serait par hasard le fonds La Prade? On va voir M. Morin à la batte.

M. Rémillard: II s'agit de pêcheries et d'agriculture; ce n'est pas encore signé. On m'informe que le fonds La Prade n'est pas compris dans cela.

M. Johnson (Anjou): Mais où est le fonds. La Prade? Il a toujours été quelque part entre les limbes et le purgatoire, mais où est-il en ce moment, le fonds La Prade? Est-il rendu en enfer?

M. Rémillard: Le fonds La Prade reste, bien sûr, à discuter, comme vous le savez; ce qu'il en reste. Nous devons rencontrer le gouvernement fédéral et discuter de la répartition de cette somme qui, je le sais, a été au purgatoire et devrait être au ciel bientôt.

M. Johnson (Anjou): Ah oui! Car le ciel est bleu, c'est bien connu.

Je me dis, M. le Président, que, dans le cas du fonds La Prade, on verra claudiquant, avec des problèmes articulaires, deux ministres se dire: Te souviens-tu du fonds La Prade? Donc, il n'est toujours pas réglé. Et le ministre est aussi pessimiste que ses prédécesseurs.

M. Rémillard: Non, il n'est toujours pas réglé.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Rémillard: Et après quelque quatre mois au gouvernement, je peux vous dire que c'est quelque chose qu'on n'a pas encore réglé, mais qu'on va régler.

M. Johnson (Anjou): Dans la mesure où

Domtar et Hyundai ont donné l'occasion au gouvernement d'aller faire des ponctions assez sérieuses dans le cadre du solde du volet 2 de l'entente de développement industriel sur les projets majeurs, on se souvient, le ministre a-t-il l'intention de demander à son collègue fédéral, M. Stevens, de mettre un peu plus d'argent dans les projets majeurs?

M. Rémillard: C'est exactement la situation. On doit persuader le gouvernement fédéral de mettre un peu plus d'argent .pour développer ces projets majeurs. Cela fera partie des discussions que j'aurai avec le gouvernement fédéral.

M. Johnson (Anjou): Toujours dans le cadre des ententes, au niveau du financement conjoint, il y avait l'Institut d'optique et le Laboratoire de technologie électrochimique. L'Institut d'optique, d'ailleurs, préoccupe sûrement le député de Jean-Talon, étant donné que c'est dans la région de Québec. Je ne me trompe pas, c'est bien cela? Quel est l'état du dossier? Est-ce que ces affaires-là avancent?

M. Rémillard: Oui, je peux faire le point.

M. Johnson (Anjou): Si on les a négociées, vous devez certainement être à la veille de les annoncer.

M. Rémillard: On me dit que, dans le cas de l'électrochimie, c'est déjà très avancé. Cela se présente très bien. Dans le cas de l'optique, c'est financé à 100 % par le gouvernement fédéral. Là, nous avons à négocier, c'est encore un sujet que nous devons négocier, mais qui est en bonne voie de parachèvement.

M. Johnson (Anjou): 100 % par le gouvernement fédéra! pour l'Institut d'optique?

M. Rémillard: Pour l'immobilisation, c'est 100 %, par le gouvernement fédéral.

M. Johnson (Anjou): Ah oui, oui! Mais pas pour les frais de fonctionnement?

M. Rémillard: Les frais de fonctionnement doivent être partagés.

M. Johnson (Anjou): Je veux seulement savoir si vous allez couper un ruban bientôt.

M. Rémillard: Je l'espère.

M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, allez-vous nous inviter?

M. Rémillard: J'espère que j'aurai le

plaisir de couper ce ruban bientôt.

M. Johnson (Anjou): A liez-vous nous inviter? On a travaillé tellement fort dans ces dossiers. Vous allez nous inviter, j'espère?

M. Rémillard: Vous savez que je me fais toujours un devoir, même comme ministre des Relations internationales, d'inviter les gens de l'Opposition à tout ce à quoi on peut les inviter.

M. Johnson (Anjou): Même si c'est dans votre comté ou dans ce coin?

M. Rémillard: Même si c'est dans mon comté, ce sera avec grand plaisir qu'on vous invitera.

M. Johnson (Anjou): J'en prends bonne note et j'espère que le ministre parle au nom de tous ses collègues, à part cela.

M. Rémillard: Ce n'est pas dans mon comté, mais c'est dans la région de Québec»

M. Johnson (Anjou): Le ministre aura sûrement besoin, car je comprends qu'il ne peut pas savoir tout cela par coeur... Dans le secteur du transport, le gouvernement, au moment du dépôt de ses crédits, a annoncé des compressions de 56 000 000 $ dans les dépenses directes et connexes de construction des réseaux routiers, le tout conformément au mandat que les députés sont allés chercher lors de la dernière élection. Ils ont promis pour 1 000 000 000 $ d'autoroutes.

Alors, il y a 56 000 000 $ de coupures dans la construction de routes. Est-ce que cela remet en question - et là, j'énumère; vous pourriez peut-être permettre à vos collaborateurs de prendre cela en note - la route 138 sur la Basse-Côte-Nord, c'est-à-dire le prolongement de Havre-Saint-Pierre à Natashquan, pour que Gilles Vigneault puisse enfin chanter que la route s'est rendue, l'autoroute 170 d'AIma à La Baie, n'est-ce pas, qui intéresse une forte proportion de notre députation, les ouvrages de protection du pont Laviolette à Trois-Rivières, l'amélioration de la route Joutel-Authier-Nord, en Abitibi?

Je vois les collaborateurs du ministre qui ont pris des notes. Peut-être que je pourrais procéder à d'autres questions et, si jamais ils peuvent avoir les réponses, ils pourraient nous les donner un peu plus tard. On va peut-être se faire répondre de les inscrire au feuilleton.

M. Rémillard: La route de la Misère, près de Baie-Saint-Paul aussi. En fait, on pourrait en nommer. Je me demande, M. le chef de l'Opposition...

M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas prévu dans l''entente, cela.

M. Rémillard: Pardon?

M. Johnson (Anjou): Écoutez, je n'ai pas juste dit cela parce que je m'intéresse à la voirie.

M. Rémilliard: Oui, mais vous croyez...

M. Johnson (Anjou): Je m'intéresse à la voirie, mais je m'intéresse aussi aux ententes.

M. Rémillard: Oui.

M. Johnson (Anjou): Ces grands ouvrages qui coûtent cher pour des régions éloignées, dans la plupart des cas, quand on pense à la Côte-Nord, quand on pense au Saguenay— Lac-Saint-Jean, qui n'est pas exactement périphérique, mais qui est quand même éloigné, et à l'Abitibi, c'est prévu carrément dans le cadre des ententes.

Alors, le ministre des Transports ne peut pas juste dire: Je ne fais pas de "garnotte" cette année. ïl y a des ententes et c'est financé conjointement avec le gouvernement fédéral. D'où l'importance... Je n'ai pas parlé du rang de Saint-Éleuthère et de la rue principale, à Saint-Pie de Bagot; je vous ai parlé de ce qui est prévu dans les ententes.

M. Rémillard: Écoutez, ne croyez-vous pas que, si vous posiez cette question à mon collègue, le ministre des Transports, vous pourriez avoir une réponse beaucoup plus claire? Ce que je peux vous dire, c'est simplement en fonction des ententes.

M. Johnson (Anjou): En vertu de la loi...

M. Rémillard: Laissez-moi terminer juste une petite minute, si vous le permettez.

M. Johnson (Anjou): Pardon, je m'excuse.

M. Rémillard: Notre politique de gestion dans ce cas prévoit que chaque ministre sectoriel doit, évidemment, faire le point lui-même sur les ententes qu'il doit avoir en relation avec le secrétariat, avec moi-même, et nous le présentons au Conseil des ministres chaque fois. Mais, vous savez, l'expertise directe dans chacun des secteurs, ce n'est quand même pas au ministre délégué au secrétariat de connaître tous ces arrangements.

Je ne sais pas si mon collègue des Transports a déjà défendu ses crédits ici. Est-ce fait?

M. Johnson (Anjou): Cet après-midi ou demain.

M. Rémillard: II serait peut-être intéressant de lui poser la question.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. S'il nous renvoie à l'article 3.7 de la Loi sur l'exécutif qui dit que le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes veille à la mise en oeuvre des ententes, on lui dira que c'est à lui d'y voir.

M. Rémillard: Bien sûr que je vois à la mise en oeuvre, mais, sur le contenu de ces ententes, d'une façon précise, comme les questions que vous me posez, je pense qu'il est tout à fait normal de vous dire: Pour avoir une réponse claire, pour que vous soyez très bien renseigné, posez donc la question à mon collègue, le ministre des Transports.

M. Johnson (Anjou): Non, non. Je n'en tiens pas rigueur et je ne veux pas que le ministre m'en tienne rigueur, non plus, d'insister. C'est juste parce que parfois le train passe dans les affaires fédérales-provinciales. Comme il n'y a plus beaucoup de manne à Ottawa, pas plus qu'à Québec d'ailleurs - on vous l'a dit pendant toute l'élection, vous ne vouliez pas nous croire -il faut que, lorsque le train passe, tu ne le manques pas. S'il y a des ententes qui prévoient que tu peux compléter une route comme celle qui mène à Natashquan, tu es mieux de ne pas te tromper en disant: C'est cela, on va faire une économie de 10 000 000 $ ici et on oublie d'aller ramasser 10 000 000 $ au fédéral, parce que c'est financé à 50-50. Je pense que c'est le rôle du ministre et du secrétariat de bien mettre en garde chacun des ministères quand ils appliquent les compressions imposées par le détenteur de la faux au Conseil du trésor. Lorsqu'on dit: Voici, je livre au Trésor 52 000 000 $ de coupures, à toutes fins utiles, il y a peut-être des endroits où il ne faut pas livrer 52 000 000 $ de coupures parce que cela nous prive de sommes qui viendraient du fédéral. Je dis qu'il s'agit là d'une responsabilité du ministre d'attirer l'attention de ses collègues sur ces questions; je le fais par souci d'efficacité et aussi parce que j'aime bien les gens de la Côte-Nord.

M. Rémillard: Écoutez, je peux vous dire que c'est déjà fait. J'ai présenté un mémoire au Conseil des ministres dans ce sens. Tous mes collègues sont très bien informés de la situation. Nous allons avoir une stratégie d'ensemble. C'est pour cela que je rencontrerai M. Stevens plus tard, au mais de mai ou au début de juin. Nous allons pouvoir discuter de chacun de ces projets. Mais mes collègues sont très bien informés et ils sont très soucieux, justement, de protéger ces possibilités de financement que nous avons avec le gouvernement fédéral.

Programmes d'emploi

M. Johnson (Anjou): D'accord, Le ministre nous disait, dans une réponse touchant le placement, qu'une des raisons pour lesquelles on se retirait sans se retirer du placement, sauf dans le cas des femmes, des jeunes et des assistés sociaux - on va essayer de démêler cela avec le ministère de la Main-d'Oeuvre et le Trésor - c'était pour être plus efficace, parce qu'il y avait du double emploi et tout cela. C'est une querelle, d'ailleurs, qui dure depuis Maurice Bellemare, si je me souviens bien, en 1967, au moment de la création du ministère, en même temps que celle du CCTMO et où le Québec a décidé d'occuper sa place dans ce domaine. C'est vrai que cela a donné lieu, de temps en temps, à du dédoublement.

Le ministre n'est pas sans savoir qu'en juin dernier le fédéral a annoncé une batterie de dédoublements en matière de planification de l'emploi: ces belles annonces à la TV avec des gens et des guitares. Et la ministre du gouvernement fédéral, Mme MacDonald, à ce moment-là, annonçait qu'il y aurait une série de programmes nouveaux en matière de formation professionnelle et de création d'emplois. Alors, nous, on a brassé la cage, comme le ministre a dû le voir d'ailleurs et comme il va le voir dans les dossiers. Normalement, cela aurait dû donner lieu à une entente, pour être sûr que là, c'est clair, c'est le fédéral qui débarque avec ses gros sabots, qui va dépenser l'argent de vos taxes, des miennes et de celles des autres "Canadiens", entre guillemets, mais qui s'en vient carrément dans un domaine pour faire de la duplication de l'intervention ou bien de l'OPdQ, ou du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, ou de l'ensemble des programmes qu'on a et qui relèvent de la formation professionnelle, notamment en ce qui touche le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ou encore, dans certains cas, du Fonds de développement régional ou d'autres.

Est-ce qu'il y a une entente de signée avec les fédéraux là-dessus?

M. Rémillard: Alors, de fait, il n'y a pas encore d'entente de signée, mais on négocie très fort et cela va très bien. Il y a déjà des ententes sur trois programmes et il reste deux programmes à terminer; donc, cela va très bien. On devrait pouvoir compléter l'entente prochainement.

M. Johnson (Anjou): Je crois comprendre qu'en date du 12 décembre on avait l'entente de principe sur trois des cinq

ou six programmes, je ne me souviens pas; mais, tout ce que je sais, c'est que je regarde à la télévision de ce temps-ci et les programmes fédéraux sont partis. Cela marche, cela roule.

M. Rémillard: Ce sont les mêmes programmes.

M. Johnson (Anjou): En tout cas, cela roule à la TV. Je ne sais pas si cela marche dans les centres de main-d'oeuvre du Canada. Alors, il faudrait peut-être savoir: Est-ce que les programmes fédéraux sont en application en ce moment, au Québec?

M. Rémillard: Écoutez, actuellement...

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le fédérai, dans le fond, tient vos négociateurs occupés, mais, en pratique, est en train de les appliquer? (18 h 15)

M. Rémillard: Certains sont déjà en application. Ceux qui ont fait l'objet d'une entente sont déjà en application. Mais il en reste deux qui sont à négocier.

M. Johnson (Anjou): Des ententes ont été conclues et signées?

M. Rémillard: Il y a trois programmes dont les ententes... Nous en sommes à une entente avec le gouvernement fédéral. C'est même signé. Mais il y a deux programmes qui ne sont pas encore signés.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Rémillard: Mais il y a deux programmes qui ne sont pas encore signés.

M. Johnson (Anjou): Lesquels?

M. Rémillard: Lesquels de façon plus précise: acquisition de compétence et pénurie de main-d'oeuvre- M. Paradis et Mme MacDonald doivent se rencontrer encore prochainement. Ils négocient sur ces sujets. On devrait arriver à une entente prochainement.

M. Johnson (Anjou): Cela accroche encore sur les mêmes affaires?

Matane, est-ce que vous allez en discuter avec M. Stevens ou si le ministre considère que ce dossier est entre les mains de son collègue de l'Énergie et des

Ressources? Il peut me répondre. J'accepterais cela.

M. Rémillard: Non, écoutez, c'est un dossier qui est certainement dans les mains de mon collègue de l'Énergie, M. Ciaccia. J'ai à regarder l'évolution de ce dossier en ce qu'il implique différents éléments d'ordre intergouvernemental, bien sûr. À ce niveau, nous devons là aussi discuter avec te gouvernement fédéral. Je vais vous laisser discuter. Allez. On reprendra après.

M. Johnson (Anjou): C'est parce que j'ai mon collègue critique en matière de main-d'oeuvre et de sécurité du revenu, je m'excuse, qui arrive un peu en état presque d'apnée.

M. Rémillard: II arrive comment?

M. Johnson (Anjou): En état d'apnée, en état de difficulté respiratoire à la fois parce qu'il a dû courir pour venir me rejoindre et parce qu'il était estomaqué de vous entendre, par le perroquet. Il me dit que votre collègue de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu dans une autre commission lui disait tout à l'heure que ça n'allait pas très bien dans la négociation des deux programmes avec Mme MacDonald.

M. Rémillard: Écoutez, ça ne va pas très bien! Vous savez, des négociations, ça ne se déroule pas du jour au lendemain, avec le gouvernement fédéral, hein, vous en savez quelque chose.

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Rémillard: On peut être optimiste, parce que le contexte général est intéressant, mais bien sûr que c'est difficile. C'est difficile comme les négociations constitutionnelles seront difficiles. Alors, je pense qu'il n'y a pas de quoi se surprendre de cela. D'ailleurs, vous savez, c'est le propre du fédéralisme, comme vous l'avez dit tout à l'heure au début de vos interventions. Nous sommes des fédéralistes. Le fédéralisme, vous savez, c'est plus qu'un genre de gouvernement, c'est une philosophie. Alors, une philosophie fondée sur des jeux de pouvoir. Un jeu de pouvoir qui s'ajuste par des négociations. Ce sont ces négociations que nous faisons. Elles ne sont pas toujours faciles, mais on peut dire que, d'une façon générale, actuellement, ça regarde bien dans bien des secteurs. Par contre, dans d'autres secteurs, en ce qui regarde, par exemple, la loi C-96 qui a été déposée, je peux vous dire que cela soulève chez nous beaucoup de crainte. Nous aurons à discuter très fermement avec le gouvernement fédéral si on veut reprendre d'autres formes de négociations en ce qui regarde la participation fédérale au développement régional.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, le ministre m'a ouvert la porte. Il va comprendre...

M. Rémillard: C'est cela que j'ai voulu faire. J'espère que vous avez compris.

La Loi constitutionnelle de 1982

M. Johnson (Anjou); ...que j'y passe. Le ministre nous disait: Le fédéralisme, c'est beaucoup plus qu'un système politique, c'est une philosophie. C'est effectivement ce qu'il déclarait le 3 février 1981 dans le journal Le Soleil. Il allait même plus loin. Il disait que le fédéralisme, c'est une façon d'être. Une façon de penser qui est basée sur le concept du compromis. Cette philosophie, nous devons l'établir ensemble, conscients du défi que nous posent tant une situation mondiale difficile qu'une spécificité interne complexe. Jusque-là, ça va bien. Le ministre disait également que par sa charte des droits et libertés fondamentales, ses propositions de formule d'amendement, ses principes de partage de richesse, l'actuel projet - (février 1981) de résolution mettait en cause l'essence même de la philosophie du fédéralisme. Est-ce que le ministre est toujours d'accord?

M. Rémillard: En 1981, je pense que j'étais parfaitement d'accord avec ce que j'ai écrit là. D'abord, je voudrais vous dire à quel point... Laissez-moi... Oui.

M. Johnson (Anjou): Je me permets juste de poser une question spécifique au ministre, puis ensuite...

M. Rémillard: Une complémentaire, comme on dit...

M. Johnson (Anjou): Une complémentaire, comme vous voudrez.

M. Rémillard: ...en termes parlementaires. Une additionnelle, excusez-moi.

M. Johnson (Anjou): Je crois comprendre, M. le Président, qu'il n'y a pas grand-chose qui a changé entre la proposition, en février 1981, et ce qui fut adopté un an après?

M. Rémillard: Oui!

M. Johnson (Anjou): Notamment, au niveau de la charte...

M. Rémillard: Ah! Bien sûr!

M. Johnson (Anjou): ...au niveau de la formule d'amendement...

M. Rémillard: Ah! Bien oui!

M. Johnson (Anjou): Ha! Ha! Ha! et au niveau du droit de veto.

M. Rémillard: Bien sûr! C'est cela qui est toute la différence!

M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, le ministre est satisfait de la charte, de la formule d'amendement...

M. Rémillard: On va prendre cela un par un, si vous voulez. Tout d'abord, je voudrais vous dire à quel point je suis touché et honoré des références que vous faites à ce que j'ai pu écrire comme professeur. Je dois vous dire que je vous en remercie. Je pense que cela me convainc aussi. Vous savez, on se lance en politique, comme cela...

M. Johnson (Anjou): Je sais lire, j'espère.

M. Rémillard: Que vous sachiez lire, que vous lisiez ce que j'écris, j'en suis honoré, je vous le dis encore. Cela me permet de me situer aussi dans la continuité de ce que j'écris, de ce que je pense. Justement, vous vous référez à un article que j'avais écrit en février 1981. J'écrivais: "Un projet illégitime". De fait, quand on se réfère à ce projet du 3 février 1981, c'était le cas. Vous me posez la question et vous dites: II n'y a pas eu une grande différence avec l'entente qui a été finalement signée en 1982. Toute la différence est là. Ensuite, il y a eu les négociations et il y a eu des distinctions importantes qui ont été apportées en ce qui regarde la Charte des droits et libertés, en ce qui regarde la formule d'amendement. Maintenant, il demeure une chose, M. le chef de l'Opposition, je tiens à vous le préciser, c'est que la formule d'amendement, même si elle a été modifiée... N'oubliez pas que c'est te 16 avril 1981. C'est le 3 février que j'ai écrit cet article. Le 16 avril 1981, vous savez ce qui est arrivé? Trois jours après avoir été élu pour un nouveau mandat, vous avez signé ce document disant que toutes les provinces étaient égales, y compris le Québec. Vous vous souvenez de ce qui est arrivé après? C'est pour vous remémorer un peu les événements. Alors, bien sûr, quand on cite, il faut se situer aussi dans le contexte, dans le temps; comment cela s'est passé. Ce que je peux vous dire, c'est que nous, on n'a absolument rien, fondamentalement, contre l'application de la Charte des droits et libertés et la clause "nonobstant" en particulier.

Tantôt, vous faisiez référence à la clause "nonobstant". Premièrement, il faudrait bien comprendre que la clause "nonobstant" s'applique aux articles 2 et 7 à 15. Vous vous êtes opposé à l'article 6 sur le droit de circulation. Ce n'est pas touché par la clause "nonobstant". Vous vous êtes ensuite opposé à l'article 23 sur les droits linguistiques. Ce n'est pas touché par la clause "nonobstant". Vous touchiez quoi par la clause "nonobstant"? Vous touchiez à des

droits comme la liberté d'association, de pensée et de religion. Vous touchiez à des droits comme la liberté, la sécurité de sa personne, le droit à la vie. Vous touchiez à des droits comme avoir un procès juste et équitable, la présomption d'innocence; cela, c'est important, souvenez-vous de la loi 111.Et puis, vous touchiez le droit à l'égalité, l'article 15. C'est cela, la clause "nonobstant". Dires La clause "nonobstant" s'applique à l'ensemble de la charte, ce n'est pas vrai, cela. Ce n'est pas vrai.La clause "nonobstant" s'appliquait è des droits aussi fondamentaux que ceux que je viens d'énumérer aux articles 2 et 7 à 15. à quoi cela servait, l'utilisation systématique de cette clause "nonobstant" dans les projets de loi? Cela servait de symbole. C'était votre symbole pour vous opposer à ce que vous appelez faussement le "Canada Bill". Ce n'est pas le "Canada Bill", juridiquement. Vous avez d'excellents constitutionnaiistes qui vous conseillent. Demandez-leur un avis. Ce n'est pas le "Canada Bill". C'est la Loi...

M. Johnson (Anjou): C'est la loi... M. Rémillard: ...constitutionnelle... M. Johnson (Anjou): ...du Canada.

M. Rémillard: ...de 1982. Non, c'est important.

M. Johnson (Anjou): Du Canada! Du Canada.

M. Rémillard: Loi constitutionnelle de 1982, c'est cela, le titre juridique, constitutionnel. C'est dans ce contexte-là que la clause "nonobstant", pour nous, n'a aucune signification de symbole parce que la Charte canadienne des droits et libertés, nous l'acceptons.

M. Johnson (Anjou): Alors, monsieur...

M. Rémillard: La charte linguistique, vous savez, elle est là et les droits linguistiques sont là et il n'y a pas de problème à ce niveau. L'article 23 est là, c'est la "clause Canada". Nous pouvons rediscuter la clause 23 pour tenter de l'améliorer et de garantir plus de droits aux francophones hors Québec; cela, c'est notre but, mais je ne vois pas pourquoi on utiliserait la clause "nonobstant" pour mettre de côté l'application de la charte pour les lois québécoises parce qu'on veut améliorer l'article 23.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, d'abord, je remercie le ministre, mais je me permets encore une fois de lui dire que sa condescendance de salle de classe d'introduction au droit constitutionnel, je pourrais m'en passer. Je comprends que j'ai affaire à un éminent juriste en matière constitutionnelle, mais je ne me considère pas comme étant exactement un deux de pique dans certaines de ces choses! J'ai eu l'occasion de lire, y compris les livres du ministre. J'apprécierais beaucoup que, peut-être en nous faisant profiter de ses très grandes connaissances en matière constitutionnelle, il ne nous prenne pas complètement pour des tartes.

M. Rémillard: Non, je sais que vous aimez la tarte aux pommes, mais je n'irais pas jusque-là.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pourrais peut-être poser la question au ministre, puisqu'il veut parler de la clause "nonobstant" durant quelques minutes. Indépendamment du fait que la décision du gouvernement de ne plus recourir au "nonobstant"...

M. Rémillard: ...systématique.

M. Johnson (Anjou): ...ait été appliquée par le ministre du Revenu avant que le Conseil des ministres n'en prenne la décision... Les dates sont là pour le démontrer. Le décret du Conseil des ministres est subséquent à la présentation d'un amendement en commission parlementaire par le ministre du Revenu. Si le ministre veut les documents, on va les lui donner. On va lui donner le Hansard, la transcription du Journal des débats en commission, avec le ministre du Revenu, avec une date. On va lui donner la copie du décret signée par le secrétaire général du Conseil des ministres. Il va se rendre compte que le député de Gatineau, ministre du Revenu, a proposé une politique gouvernementale de non-recours au "nonobstant" avant que le Conseil des ministres ne se soit prononcé sur cette question. Je me demande même, d'ailleurs, si le ministre était au courant. Puisque le ministre veut parler de cela, je vais juste lui poser la problématique suivante. Considère-t-il que le droit, puisqu'il veut s'adonner à des considérations de théorie du droit, est une manifestation de la différenciation sociologique et culturelle entre les collectivités, oui ou non? Est-ce que, pour lui, le véhicule qu'est le droit est une des grandes manifestations de la différence qui existe entre les peuples? Je crois qu'il a déjà défendu ce point de vue à l'université.

Deuxièmement, je vais lui donner un exemple concret. Les tribunaux canadiens vont être appelés à appliquer dans les mois et les années qui viennent des principes de droit qui tentent de concilier des notions de droit collectif et de droit individuel. Je m'explique. Par exemple, le caractère

antinomique du droit d'association avec le droit de religion qu'on peut retrouver dans un groupe comme les témoins de Jéhovah, qui ne peuvent pas appartenir en vertu de leur religion, parce qu'ils ont professé de ce faire, à une autre association, et qui peuvent s'en prendre à la formule Rand en droit du travail, qui est du droit collectif qui relève du droit d'association. Quelqu'un de religion sikh, d'origine indienne, qui ne doit pas se découvrir de son turban devant des personnes qui ne font pas partie de sa religion, qui arriverait sur un chantier de construction et qui dirait: Moi, je ne veux pas enlever mon turban; ce n'est pas vrai que vous allez me mettre un casque d'acier sur la tête. Un beau problème sur le plan juridique entre la liberté de religion et ce qu'elle signifie et le droit collectif qu'on s'est donné en matière de santé et de sécurité du travail, et la réglementation afférente.

M. Rémillard: ...c'est une décision.

M. Johnson (Anjou): En refusant de recourir, notamment dans le secteur du droit du travail, à l'utilisation systématique de la clause "nonobstant", le ministre n'est-il pas conscient qu'il laisse entre les mains de la jurisprudence de la Colombie britannique, de la Saskatchewan ou d'ailleurs au Canada le soin d'affirmer les principes de conciliation du droit collectif et du droit individuel, notamment en matière de droit du travail, alors que l'application systématique de la clause "nonobstant" est le choix qui est fait par ce Parlement, qui est composé de 122 élus, ma foi! qui ont autre chose à faire que juste une période de questions de 25 minutes tous les jours et de batailles de procédure, qui ont à trancher dans un certain nombre de valeurs? Ne croit-il pas que l'application du "nonobstant" de façon systématique, en matière de droit du travail notamment, s'impose si nous croyons que le régime de droit que nous nous sommes donné en droit du travail est celui qui doit primer sur l'opinion que peut en avoir un juge de la Cour suprême de la Colombie britannique? C'est cela concrètement aussi l'application du "nonobstant". (18 h 30)

M. Rémillard:Bien non! Je ne le crois pas.

M. Johnson (Anjou): Par ailleurs, quant à la dimension symbolique du "nonobstant", je ne disconviens pas qu'en politique - il en est des symboles sur le plan politique comme il en est du langage non verbal dans la conversation - la relation entre les collectivités se fait aussi à travers des symboles. Autrement le monde se tirerait dessus à longueur de journée. Il y a déjà assez de guerres ainsi et je n'en souhaite pas une, civile ou autre, au Canada ou ailleurs. Mais les symboles ont leur importance en politique. Ils sont la solution au cassage de margoulettes; et c'est, à mon avis, une façon civilisée de voir des entités politiques traiter entre elles. Elles traitent aussi par la voie de l'utilisation des symboles. Le symbole avait tellement de sens face au reste du Canada que la première réaction du Secrétaire d'État du Canada, quand il a appris par la voie des journaux le délestage spontané, peut-être quelque peu irréfléchi du gouvernement, du recours à la clause "nonobstant", sa première réaction, dans une situation qui en est une de rapport de forces entre les collectivités, et que le ministre ne devrait jamais oublier, cela a été de dire: Écoutez! Maintenant, il faudrait peut-être qu'il mette quelque chose de l'avant dans les propositions constitutionnelles. Québec a délesté et a eu comme réaction du reste du Canada: Maintenant, il faut mettre quelque chose sur la table. Même l'abandon de ce symbole, pour reprendre le vocabulaire du ministre, avait son importance dans l'approche du dossier constitutionnel et le ministre l'a traité à la pièce. C'est d'ailleurs pour cela que le professeur Dion a démissionné.

M. Rémillard: Est-ce que cela va?

M. Johnson (Anjou): Merci, M. le Président. C'étaient mes commentaires.

M. Rémillard: Écoutezl Est-ce que vous vous rendez compte, M. le Président, qu'en utilisant systématiquement la clause "nonobstant" on privait des Québécois et des Québécoises de droits fondamentaux auxquels ils ont droit?

M. Johnson (Anjou): Faux.

M. Rémillard: Vrai.

M. Johnson (Anjou): Faux.

M. Rémillard: Vrai, et je vais vous dire pourquoi. Écoutez-moi une minute.

M. Johnson (Anjou): Cela doit être aussi vrai que votre Procureur général qui prétend qu'il fait la même chose que je faisais au sujet de la loi 101. Cela doit être du même ordre de vérité.

M. Rémillard: Laissez-moi...

M. Johnson (Anjou): J'ai poursuivi 57 fois, et il continue de répéter que je ne poursuivais pas. Aie!

M. Rémillard: Laissez-moi parler une petite minute! Laissez-moi faire! Attendez une petite minute!

M. Johnson (Anjou): Expliquez-moi cela.

M. Rémillard: Tout d'abord, première des choses, vous savez très bien que la lot qu'on appelle la Charte des droits et libertés du Québec n'a pas la même signification et valeur juridique que la Charte des droits et libertés incluse dans la constitution. Il n'y a personne, il n'y a pas un expert que vous avez consulté, j'en suis certain, ou qui sont venus témoigner qui peuvent nous dire le contraire, parce que l'interprétation est plus large et parce qu'il y a la valeur constitutionnelle - on ne peut pas la modifier à tout bout de champ; il y ala valeur de la rigidité de la constitution.

Vous savez que, par l'utilisation systématique de cette clause "nonobstant" depuis le 17 avril 1982, vous avez empêché les Québécois et les Québécoises qui avaient des droits fondamentaux de les faire valoir. Vous souleviez tout à l'heure un point très important, j'y reviens: des groupes de personnes, des gens qui appartiennent à un groupe de personnes, qui veulent faire valoir un droit comme le droit d'association. Le droit d'association est un droit reconnu à l'article 2 de la Charte des droits et libertés du Canada et qui a une interprétation plus large, précisément par une interprétation des règles constitutionnelles, qu'une simple loi qu'on peut interpréter au niveau provincial. Je me souviens très bien, comme professeur à l'université, des gens venaient me voir pour me dire: On veut contester telle loi du Québec en fonction justement de ce droit d'association. Et on ne pouvait pas le faire à cause de cette clause "nonobstant". Combien de Québécois et de Québécoises ont été empêchés de faire reconnaître leurs droits et leurs libertés à cause de l'utilisation systématique de cette clause "nonobstant"? Ce qu'on a dit dans la décision...

M. Johnson (Anjou): On peut l'utiliser par la Charte des droits et libertés du Québec

M. Rémillard: Absolument pas.

M. Johnson (Anjou): Ils pouvaient avoir un recours en vertu de la Charte des droits et libertés du Québec.

M. Rémillard: Non. Ce n'est pas la même chose. Je voudrais que vous compreniez cela aussi. Vous le savez aussi bien que moi que les règles d'interprétation...

M. Johnson (Anjou): Voulez-vous changer de ton, vous?

M. Rémillard: Attendez une petite minute. Laissez-moi parler.

Une voix: Changez de ton.

M. Johnson (Anjou): Pour l'amour du saint ciel, vous n'êtes pas dans une salle de cours à l'école primaire.

M. Rémillard: Je ne vous donne pas un cours, j'essaie de vous faire comprendre. C'est différent. J'essaie de vous dire...

M. Johnson (Anjou): Cela ne s'améliore pas.

M. Rémillard: Non, je vois que vous ne vous améliorez pas. Mais, attendez une minute, vous allez comprendre. Ce que j'essaie de vous dire est facile à comprendre. Ce que j'essaie de vous dire, c'est que les règles d'interprétation pour un droit qui est enchâssé dans la constitution sont complètement différentes des règles d'interprétation pour un droit qui appartient à une simple loi, comme c'est le cas de la Charte des droits et libertés du Québec. C'est dans ce cas, bien sûr, que si vous utilisez la clause "nonobstant" vous empêchez l'interprétation large, généreuse qu'on doit donner normalement à une charte qui doit être interprétée par des tribunaux d'une façon large et généreuse.

Maintenant, autre chose. Vous dites que c'est maintenant un juge de la Colombie britannique ou un juge de la Nouvelle-Écosse qui va venir déterminer notre droit. Voyons doncl Voyons doncl Comme si on avait deux systèmes judiciaires au Canada: un pour le Québec, un pour le reste du Canada.

M. Johnson (Anjou): Le système juridique, par exemple.

M. Rémillard: Voyons doncl On a deux systèmes juridiques en droit privé. On a un système commun en droit public et on a un même processus judiciaire qui nous aboutit au bout du compte au même intervenant qu'est la Cour suprême du Canada. Alors, si vous suivez le processus qu'on doit suivre par une contestation en utilisant la Charte québécoise des droits et libertés, c'est exactement la même chose que si vous suivez le processus qui est utilisé pour la Charte canadienne des droits et libertés. Bien, voyons doncl Vous commencez par la Cour supérieure, vous allez en Cour d'appel et ensuite vous allez en Cour suprême. Dites-moi donc le contraire de cela.

M. Johnson (Anjou): Cela n'a pas de bon sens. Cela n'a pas de bon sens.

M. Rémillard: Alors, l'interprétation e3t la même. Comment pouvez-vous arriver à la conclusion de nous dire ensuite que, parce que la Cour suprême interprète la charte, un droit venant du Québec, cela va être différent d'une interprétation qui vient d'un droit qui vient de la Charte des droits et

libertés de la personne du Québec? Voyons donc! C'est là un argument qui ne se tient pas.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, heureusement qu'il n'y a pas d'évaluation des profs par leurs élèves.

M. le Président...

M. Rémillard: J'ai la note de passage.

M. Johnson (Anjou); Est-ce que c'est pour cette raison, cette conviction profonde qu'a le ministre, qu'on a méchamment et durement empêché les Québécois de se prévaloir des droits et libertés contenus dans la charte canadienne, qu'il est solidaire de la décision du Procureur général, son collègue, le député de D'Arcy McGee, d'en appeler dans le cas de la loi 62 en Cour suprême?

M. Rémillard: II y a des principes très importants à faire valoir dans le cas de la loi 62, justement, pour savoir la réelle portée de cette clause "nonobstant". Il faut dire une chose, cette clause "nonobstant", on n'a pas décidé de ne plus l'utiliser. On a dit qu'on l'utiliserait lorsque ce serait nécessaire pour les intérêts du Québec, l'intérêt des Québécois et des Québécoises. Maintenant, bien sûr que c'est sub judice, comme vous le savez, et c'est difficile d'en parler, de discuter du fond de cette question.

M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, le ministre nous dit qu'il y a deux sortes de lois au Québec: il y en a qui méritent un "nonobstant" et il y en a qui ne le méritent pas. C'est cela?

M. Rémillard: Non. Il y a des lois, comme la loi 111, qui ne méritaient pas un "nonobstant". Vous l'avez dit et j'ai bien apprécié quand vous avez fait votre intervention. Vous avez bien dit que la loi 111, justement, empêchait les Québécois et les Québécoises d'avoir ce droit à la présomption d'innocence, qui est un droit qui est un fondement de tout notre droit pénal. Lorsque vous avez mis cette clause "nonobstant" dans la loi 111, vous n'aviez pas le droit de le faire. Et je pense que vous reconnaissez cela maintenant.

M. Johnson (Anjou): Non. Est-ce qu'on parle du droit, de l'opinion politique? C'est parce que le ministre confond les opinions ou les convictions politiques ou l'idéologie, qui ne sont pas des mauvais mots, n'est-ce pas? C'est comme l'argent et le pouvoir. Cela dépend de ce que tu fais avec. Ce n'est pas nécessairement sale. Le ministre utilise indistinctement le mot "droit" et le mot "légitimité" pour qualifier souvent ce que sont des conceptions idéologiques ou philosophiques. Qu'il me dise qu'on n'avait pas le droit, dans le cas de la loi 111, d'y inclure une clause "nonobstant", je ne pense pas que ce qui est en cause ici c'est le fondement juridique du pouvoir du Parlement du Québec que de le faire. Qu'il me dise qu'il considérait que ce n'était pas légitime, que ce n'était pas correct, que c'était issu d'une idéologie répressive, il pourra bien me le dire s'il le veut, mais je trouve qu'il utilise le mot "droit" à toutes les sauces. On va finir par penser que tout est dans tout, et inversement, à l'égard du droit.

M. Rémillard: Le droit, c'est de la moralité aussi. Ce n'est pas simplement une étude de droit positif, c'est de la moralité. Dans une société démocratique, la légitimité et la légalité doivent aller de pair. Je vous rappelle cela. La loi 111... Je pourrais vous rappeler aussi le congédiement de la présidente de la Commission des droits de la personne qui a suivi.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je prendrai simplement le dernier commentaire du ministre, qui m'a éclairé beaucoup plus sur son tempérament que sur ses idées, quand il nous parle du droit comme étant la moralité.

Une dernière question, qui touche aux retombées étranges du F-18 dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean sous forme d'un champ de tir. On se rappellera que ce dossier... Pardon?

Le Président (M. Filion): M. le chef de l'Opposition, avant que vous ne terminiez votre question, est-ce que je pourrais avoir le consentement des membres de la commission pour qu'on dépasse un peu l'heure que nous avions prévue, étant donné, entre autres, que je cherchais à ce que vous épuisiez ensemble le sujet que vous aviez amorcé il y a déjà une trentaine de minutes sur la clause nonobstant, ce que je n'ai pas réussi à faire? En ce sens-là, est-ce que je pourrais avoir le consentement des membres de la commission pour que nous débordions, afin de permettre au député de Mille-Îles d'intervenir?

M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. Je n'ai pas d'objection, M. le Président. Notre collègue voudrait cinq, dix minutes?

M. Bélisle: Je ne vois pas la nécessité, M. le Président, à cause d'une petite question que j'ai à poser, d'étendre les débats plus avant. Je pense qu'on a été très condescendant, aujourd'hui...

M. Johnson (Anjou): Ah oui! Condescendant, vous l'avez été pas mal!

M. Bélisle: Si vous me permettez, M. le chef de l'Opposition, très condescendant de

laisser aller le chef de l'Opposition à avoir presque l'entièreté du droit de questionner le ministre ici cet après-midi. En ce qui nous concerne, il n'y a pas de consentement pour continuer. Je vais moi-même me retirer mon droit de parole pour que cela se termine à l'heure prévue. Il est déjà assez tard.

M. Johnson (Anjou): Ah bon' Très bien! M. le Président, juste avant... Ce n'est pas terminé encore. Je voudrais simplement rappeler au condescendant député de Mille-Îles que je lui ai offert tout à l'heure - je pensais qu'il n'avait rien à dire - je lui ai demandé s'il voulait prendre la parole, étant donné que je ne voulais pas... M. le Président, permettez-moi de finir.

Le Président (M. Filions): Oui. Avec votre permission, M. le chef de l'Opposition. M. le député de Mille-Îles, vous m'avez dit tantôt que vous aviez besoin de quelques minutes. D'accord?

M. Bélisle: Oui, alors, donnez-moi les dernières minutes. Cela fait une demi-heure que j'ai la main levée. Vous le savez, vous m'avez noté il y a une demi-heure.

M. Johnson (Anjou): Il n'avait qu'à le dire.

Le Président (M. Filion: Il est encore temps, et j'ai toujours prévu de vous consacrer ces quelques minutes. C'est pour cette raison que j'ai interrompu le chef de l'Opposition, qui, d'ailleurs? si vous avez suivi ce que j'ai dit tantôt, était en train d'épuiser un sujet avec le ministre. Je croyais, de bonne foi, et je suis sûr que vous ne me le reprocherez pas, qu'il était d'intérêt pour Ies membres de la commission de vider cette question. Étant donné que la question est vidée, je vous offre le droit de parole, que vous déclinez, étant donné que, de notre côté, nous sommes consentants à prendre les quelques minutes supplémentaires pour vos interventions.

Adoption des crédits

M. Johnson (Anjou): M. le Président, voulez-vous appeler l'adoption des crédits, à moins que cela n'intéresse pas le ministre? Compte tenu du temps qu'il nous reste, peut-être que le ministre voudrait appeler l'adoption des crédits?

Le Président (M. Filion): Je réinvite le député de Mille-Îles à...

M. Bélisle: L'adoption des crédits, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): M. Je Président, pour notre part, les crédits sont adoptés.

Le Président (M. Filion): Le programme 4, des Affaires intergouvernementales canadiennes, du ministère du Conseil exécutif est-il adopté?

M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.

Des voix: Adopté.

Une voix: Unanime.

M. Bélisle: Merci, merci beaucoup.

Le Président (M. Filion): Adopté. J'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 44)

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