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(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous
plaît! Il me fait plaisir de constater le quorum et de constater qu'il
n'y a aucun remplacement à cette séance de la commission des
institutions dont je rappellerai le mandat qui est de procéder à
l'étude des crédits budgétaires du ministère des
Relations internationales et du programme du Conseil exécutif, soit les
crédits du ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes pour l'année financière
1986-1987. Cette séance débutant à 10 h 9 et une
période de deux heures nous ayant été allouée, nous
terminerons vers 12 h 9.
M. le ministre, M. le chef de l'Opposition, bienvenue à cette
séance. Nous avons réussi à obtenir les lumières du
salon bleu pour, je l'espère, éclairer l'examen des
crédits. J'inviterais donc, sans plus tarder, M. le ministre à
s'adresser par remarques préliminaires, s'il y a lieu, à la
commission.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous le
permettez.
Le Président (M. Filion): Oui.
M. Johnson (Anjou): J'ai eu l'occasion de discuter durant
quelques minutes avec le ministre. Nous nous sommes entendus à savoir
que ses remarques et notre étude de ce matin, pour l'essentiel,
porteraient sur l'objectif que nous avons de compléter l'étude
des crédits de la section des relations internationales cet avant-midi
et que ses remarques sur les affaires canadiennes suivraient l'adoption des
crédits.
Deuxièmement, nous sommes convenus de procéder à
une discussion générale sur l'ensemble de ces crédits
plutôt que de prendre chacun des éléments de programme,
comme c'est habituellement le cas pour les ministères qui ne couvrent
pas 25 pages du livre des crédits. Les secrétariats et le
ministère des Relations internationales sont une partie assez
condensée du livre des crédits.
M. Rémillard: M. le Président, le chef de
l'Opposition a beaucoup plus d'expérience que moi dans ces
circonstances. Je me rends compte qu'on s'est entendus sur beaucoup plus de
choses que je ne le croyais, mais cela me va très bien. Je ne crois pas
qu'il y ait de difficultés majeures. Je comprends tout simplement que,
dans un premier temps, durant les deux premières heures, nous allons
voir les relations internationales et...
M. Johnson (Anjou): Et nous allons procéder à
l'adoption des crédits dès ce matin pour libérer vos
fonctionnaires.
M. Rémillard: Cet après-midi, nous allons voir les
affaires canadiennes; au lieu de faire cas par cas selon les programmes, on
pourra voir cela de façon globale, quitte, bien sûr, à
parfois préciser certains éléments d'un programme
spécial.
Le Président (M. Filion): D'accord. Je prends acte de
l'entente qui est intervenue et je vous réinvite, M. le ministre, si
vous le voulez, à adresser quelques remarques préliminaires
à cette commission.
Crédits du ministère des Relations
internationales
Remarques préliminaires
M. Gil
Rémillard
M. Rémillard: M. le Président, le gouvernement a
l'intention de fonder sa politique internationale sur la continuité et
l'évolution. Depuis la révolution tranquille des années
soixante, où s'est affirmée la légitimité d'une
action internationale, jusqu'à la consultation populaire tenue en 1984
sur le Québec dans le monde, plusieurs événements ont
façonné la personnalité internationale du Québec et
l'orientation de ses politiques. Il s'agit pour le présent gouvernement
d'élaborer une politique internationale qui sera conforme tant à
la spécificité politique culturelle, sociale et économique
du Québec qu'à sa situation d'État membre de la
fédération canadienne.
Depuis 1960 la société québécoise et le
gouvernement du Québec ont pris conscience de l'importance grandissante
des relations internationales pour notre développement. L'ouverture du
Québec sur le monde a d'ailleurs constitué un des
éléments marquants de la révolution tranquille. Chacun des
gouvernements qui se sont succédé au pouvoir depuis lors a
apporté sa contribution à l'édification d'une politique et
d'un
ensemble de moyens adaptés à nos besoins, à notre
dimension et à nos possibilités sur la scène
internationale.
Le besoin s'est fait sentir très tôt de confier à
une instance centrale la coordination de l'ensemble des activités
internationales du Québec. Ce rôle a d'abord été
confié en 1965 à un comité de sous-ministres. La
création du ministère des Affaires intergouvernementales en 1967
et la refonte de la loi du ministère en 1974 ont créé
l'essentiel du cadre organique que nous connaissons aujourd'hui. La
création du ministère des Relations internationales en 1984 a
parachevé une évolution de près d'une
génération sur le plan législatif et institutionnel en
confiant la coordination de la politique extérieure à un
ministère spécifique désormais dégagé
d'autres missions.
À côté du MRI, le gouvernement a senti le besoin de
se doter d'autres instances spécialisées chargées d'animer
et de conduire nos politiques sectorielles dans le domaine international. Un
réseau significatif de représentations à
l'extérieur a été mis en place et des ressources humaines
et budgétaires non négligeables sont désormais
consacrées à l'engagement du gouvernement du Québec dans
les affaires avec l'étranger.
L'une des initiatives les plus marquantes entreprises par le
gouvernement depuis son élection le 2 décembre dernier est sans
contredit l'effort d'assainissement des finances publiques et de
rationalisation des dépenses. Ce besoin impérieux dans le
contexte actuel se conjugue à un autre besoin, celui de réviser,
à cette étape de son évolution, notre réseau de
représentations à l'extérieur.
Le ministère des Relations internationales se devait de
contribuer aux objectifs financiers déterminés pour l'ensemble du
gouvernement. Le document d'étude des crédits
déposé devant cette commission et que nous examinerons plus en
détail montre que cette tâche a été accomplie»
Toutefois, malgré ces compressions budgétaires importantes
touchant tant les programmes du ministère que le réseau des
délégations à l'étranger, je peux affirmer que
l'essentiel de la vocation du ministère des Relations internationales
aura été préservé. De plus, une gestion saine et
efficace des ressources dont dispose le ministère nous permettra de
réaliser les objectifs que s'est fixés le gouvernement sans
compromettre l'action internationale du Québec. Le ministère
continue donc de remplir ses fonctions les plus importantes. En fait,
l'opération de rationalisation a accéléré un
ensemble d'analyses et favorisé le dégagement des
priorités qui seront appliquées au cours des prochaines
années.
Dans le contexte décrit ci-haut, il est important que le
ministère revienne à ses fonctions primordiales. Aussi, les
opérations de rationalisation ont-elles affecté essentiellement
deux secteurs: d'une part, les programmes de subvention du ministère
à des organismes québécois et, d'autre part, le
réseau de représentation à l'étranger. Au fil des
années, le ministère s'était vu attribuer un ensemble de
rôles d'assistance à des intervenants non gouvernementaux
québécois, exercice dont l'ampleur le détournait
progressivement de ses fonctions principales. L'opération de
rationalisation nous permet de centrer de nouveau le ministère sur sa
véritable raison d'être, soit la coordination, la planification et
la conduite de relations diplomatiques.
En ce qui concerne le réseau, il était temps, après
20 ans, que l'on regarde de manière rationnelle la configuration et le
mandat de chacune de nos représentations à l'étranger. Les
circonstances qui avaient présidé à l'ouverture de telle
ou telle délégation ou bureau ont forcément
évolué. Les besoins internes du Québec et
l'évolution de la situation dans les pays où le Québec est
représenté affectent les types de ressources et d'organisations
les plus utiles à la conduite de relations pertinentes avec chaque
partenaire. Dans certains cas, l'établissement ou le maintien d'une
représentation officielle du Québec peut être
nécessaire. Dans d'autres, une meilleure utilisation des ressources du
réseau diplomatique canadien pourrait suffire et nous permettre de
procéder à des économies substantielles. On se rappellera,
à cet égard, que le Québec a déjà des agents
logés dans plusieurs ambassades du Canada pour des fins
spécifiques. Nous pouvons ainsi profiter de l'apport diplomatique
canadien tout en conservant notre latitude dans la promotion et la
défense des dossiers spécifiques au Québec.
L'examen auquel j'ai procédé, en concertation avec mes
collègues MacDonald, Robic et Picotte, nous a conduits à
déterminer une restructuration du réseau de représentation
de façon à mieux diriger et coordonner nos efforts. La mise en
oeuvre de cette orientation appelle encore quelques décisions
particulières, mais je suis en mesure de vous préciser
aujourd'hui les grandes lignes de ce que nous entendons faire à cet
égard.
Trois types de mesures ont été arrêtés. Dans
plusieurs cas, le ministère a procédé à un
allégement des ressources affectées à l'extérieur
en ne remplaçant pas des conseillers rappelés à
Québec à la fin de leur mandat normal. Dans quelques cas, nous
avons décidé aussi de rappeler des conseillers avant la fin de
leur mandat. Le non-remplacement de ces conseillers et la réduction
correspondante des dépenses de fonctionnement nous permettront
d'épargner 1 500 000 $ cette année. À Paris, les
fonctions de délégué aux affaires francophones et
multilatérales seront désormais assumées par notre
délégué général en France. D'autres mesures
administratives permettant des économies substantielles ont
également été prises. Une deuxième approche nous
conduit à envisager avec le gouvernement fédéral la
possibilité de loger dans certains cas des représentants dans des
missions canadiennes à l'étranger, comme cela se fait
déjà, ce qui pourrait nous permettre d'épargner environ
800 000 $ en 1985-1986.
Enfin, nous allons effectuer une restructuration importante de plusieurs
de nos représentations en Europe, en Amérique latine et aux
États-Unis. Nous avons l'intention de procéder à la
fermeture de notre délégation à Caracas, dès que
les démarches officielles auront été effectuées
auprès du Venezuela, tout en conservant cependant un représentant
au Venezuela et un bureau à Bogota. Notre action diplomatique pour
l'Amérique latine sera dirigée par notre délégation
générale à Mexico. Nous avons l'intention de fermer aussi
notre délégation de Port-au-Prince, à Haïti, tout en
gardant en poste un conseiller en immigration.
À Düsseldorf, en Allemagne, la vocation de notre
représentation sera articulée autour de ses fonctions
commerciales. Les autres fonctions assumées par cette
délégation seront transférées à notre
délégation générale de Bruxelles. Dans le cas de
notre délégation en Italie, nous entendons restructurer les
services existants en maintenant un bureau commercial à Milan et en
regroupant les autres fonctions à Rome. Aux États-Unis, la
transformation de la délégation de Lafayette en bureau
responsable de la coopération éducative est en bonne voie. Dans
le cas de certaines délégations aux États-Unis, j'examine
avec mes collègues concernés dans quelle mesure il y a lieu de
spécialiser leur vocation comme cela a été
décidé pour Düsseldorf et Lafayette. Environ 800 000 $
devraient être épargnés cette année avec des mesures
de ce type, qui non seulement ne toucheront pas le bon fonctionnement de notre
réseau, mais le rendront plus efficace.
Même si ces compressions ne manqueront pas de créer
certaines difficultés temporaires, je reste convaincu que la trame
fondamentale de notre réseau de représentation restera intacte et
qu'à l'issue de cet exercice nous disposerons d'un outil efficace et
adapté à nos besoins. Aucun geste irrémédiable
n'aura été posé et nous disposerons des bases voulues pour
relancer l'expansion du réseau lorsque la situation financière du
gouvernement le permettra et lorsque le besoin se fera sentir.
Avant d'aborder l'étude des crédits de façon
détaillée, je voudrais aller plus loin dans la définition
du cadre de la politique que le gouvernement entend suivre. II faut ici
dépasser le contexte strictement théorique ou constitutionnel et
envisager de façon pratique la gestion des relations internationales du
Québec. Puisque la diplomatie est l'art du possible, c'est une approche
pragmatique des relations internationales que je proposerai. En tant que membre
de la fédération canadienne, le Québec a des
intérêts particuliers qu'il lui appartient de développer et
de faire valoir. Ces intérêts sont distincts de ceux de l'ensemble
de la fédération tout en les complétant ou en les
particularisant. Par exemple, les activités du Québec dans le
cadre de la francophonie relèvent de ses compétences propres
comme foyer principal des francophones en Amérique du Nord. De
même, dans ses relations avec les États-Unis, le Québec a
des intérêts particuliers, entre autres, dans le secteur
énergétique et celui de l'environnement. Sur le plan
économique ou en ce qui a trait à son développement
scientifique et technologique, la situation du Québec possède
également ses caractéristiques propres.
Le gouvernement a le devoir de promouvoir les intérêts
spécifiques du Québec; or ceci est bien sûr compatible avec
le recours aux ressources fédérales, soit pour renforcer les
efforts de chacun, soit pour éviter une duplication stérile. Le
recours à ces ressources doit être exploité à fond.
Nous avons intérêt à tirer le meilleur parti possible de la
représentation canadienne à l'étranger,
particulièrement dans les régions où le Québec
n'est pas représenté ou dans celles qui sont moins prioritaires,
tout en veillant à faire valoir les intérêts
spécifiques du Québec. Nous devons être réalistes
et, parmi une multiplicité d'options, choisir en fonction des
intérêts du Québec et des possibilités d'action les
plus efficaces.
L'intérêt du public pour les questions internationales
constitue également un facteur important de la conjoncture et nous
devons en tenir compte. Le nombre d'intervenants sur la scène
internationale s'est accru considérablement au cours des
dernières années. Les entreprises, les organisations non
gouvernementales et le public en général s'impliquent de plus en
plus au niveau international. Cet intérêt pour les questions
internationales constitue un capital non négligeable qu'il nous
appartient d'exploiter et de développer. Le gouvernement se propose donc
d'encourager la concertation entre un secteur gouvernemental qui jouera avant
tout un rôle d'animateur et un secteur non gouvernemental qui devrait
développer de plus en plus sa capacité autonome
d'intervention.
Le ministère se propose de déterminer, au cours de
l'année à venir, les voies les plus indiquées pour donner
corps à cette
concertation. Si, virtuellement, chaque ministère a
intérêt à conduire des relations et activités
internationales dans son secteur propre, voire même le devoir de le
faire, il devient d'autant plus impératif qu'une articulation des
mandats soit réalisée par une seule instance centrale. Le
gouvernement ne peut avoir qu'une seule politique internationale. Les textes
organiques successifs traitant de cette question depuis 1965 ont toujours
été très explicites à cet égard. Il incombe
actuellement au ministère des Relations internationales d'assumer cette
fonction en vertu de sa loi constitutive.
Le ministère a comme mandat fondamental la coordination et
l'animation de l'action internationale de l'ensemble des intervenants
gouvernementaux québécois, la conduite des relations
internationales du gouvernement du Québec, la constitution d'un bassin
d'expertises et d'analyses pour l'ensemble du gouvernement sur les questions
internationales et la promotion du Québec à l'étranger.
Cette coordination est d'autant plus essentielle qu'elle est fondée sur
l'inévitable interdépendance des secteurs les uns avec les
autres: le culturel, le social, l'économique, la science et la
technologie, etc.
La diminution des moyens financiers à ta disposition du
ministère des Relations internationales ne devrait pas nous faire
oublier que sa principale ressource demeure intacte. Il s'agit des ressources
humaines sans lesquelles aucun des programmes que nous discuterons aujourd'hui
ne pourrait être mis sur pied ou fonctionner. Pour jouer pleinement son
rôle de coordonnateur et d'animateur, le ministère des Relations
internationales doit pouvoir compter sur un personnel qualifié et
motivé. C'est pourquoi le gouvernement a l'intention de
privilégier le développement des ressources humaines en
favorisant un plan de carrière qui permettra aux fonctionnaires
d'exercer pleinement leurs compétences. Des comités de travail se
penchent actuellement sur la réalisation de ce plan.
Pour conclure de façon pratique, je voudrais passer en revue les.
dossiers qui seront en tête de liste au cours des mois qui viennent. Je
voudrais d'abord souligner l'importance toute particulière que nous
allons accorder, au cours de l'année à venir, à nos
relations avec l'ensemble des États francophones au premier rang
desquels figure tout naturellement la France. Nous allons continuer à
développer les relations directes et privilégiées du
Québec avec la France. Le premier sommet des chefs d'État et de
gouvernements francophones réunis à Paris au mois de
février dernier a été un événement tout
à fait exceptionnel et une grande réussite diplomatique pour le
Québec sur le plan international. Assurer la mise en oeuvre des
décisions intervenues à Parts et préparer le
deuxième sommet que nous allons accueillir ici à Québec
à l'automne 1987, voilà des tâches à la fois
exaltantes et très exigeantes que nous aurons à remplir au cours
des prochains mois. Le ministère des Relations internationales entend
assumer cette responsabilité avec toute la diligence et la vigueur dont
il est capable.
Le sommet nous a aussi permis de réamorcer le dialogue avec
plusieurs gouvernements africains. Au cours de l'année à venir,
nous entendons poser des gestes pour concrétiser les liens qui se sont
noués au niveau le plus élevé à Paris et qui nous
permettront en tant que francophones de relever avec succès le
défi de la modernité.
Les relations avec les États-Unis constituent également
une priorité pour le gouvernement. La tenue récente du colloque
sur les perspectives énergétiques de la région du Nord-Est
du continent aura illustré à quel point des solidarités
régionales très puissantes sont en train de se tisser entre le
Québec, la Nouvelle-Angleterre et l'État de New York. Les
institutions mises en place depuis une dizaine d'années nous permettent
de nous concerter de manière régulière avec ces
partenaires naturels que sont les dirigeants de ces États. (10 h 30)
L'interdépendance énergétique et les
négociations commerciales qui se dérouleront soit sur le plan
bilatéral, dans le cadre d'un accord de libre-échange, soit sur
le plan multilatéral au GATT, nous amèneront à travailler
de plus en plus étroitement avec une région qui constitue pour
nous un marché et un bassin de ressources de premier plan. Le
ministère continuera par ailleurs à suivre de très
près des dossiers qui touchent des ensembles plus larges comme ceux de
l'environnement qui impliquent la région des Grands Lacs ou le
développement des relations scientifiques et technologiques avec
l'ensemble des régions américaines.
Il y a une autre question qui me paraît particulièrement
importante dans les circonstances actuelles. Il s'agit de l'interrelation qui
doit exister entre les activités prioritaires du gouvernement dans le
secteur économique et les autres secteurs d'activités du
gouvernement à l'étranger. Pour mon ministère, l'appui
à l'objectif de croissance économique du gouvernement est
prioritaire. Notre rôle consiste à créer un environnement
favorable au développement des échanges économiques par le
développement des liens scientifiques culturels, éducatifs,
technologiques et universitaires. Créer une image de marque pour le
Québec, faire ressortir notre spécificité culturelle pour
mieux faire valoir notre potentiel économique et technique, voilà
une approche dont nos entreprises ne pourront que profiter dans la lutte
difficile qui les oppose à leurs concurrents sur les marchés
étrangers.
Enfin, je voudrais, au cours de l'année à venir, mettre
l'accent sur le développement de nos relations avec les institutions
multilatérales les plus importantes telles que l'ONU, l'UNESCO, l'OCDE
et l'OIT.Même s'il est de bon ton d'affirmer que le
multilatéralisme est en crise, les organisations internationales
représentent un forum d'échanges et de discussions
irremplaçable avec un grand nombre d'interlocuteurs
étrangers.
C'est dans ce cadre aussi que je situerai mes efforts en vue de donner
à notre capitale, Québec, la place qui lui revient sur le plan
international. Le Canada et le Québec pourraient au cours des prochaines
années obtenir une part beaucoup plus grande des conférences
internationales organisées par les instances multilatérales. Nous
collaborerons avec la diplomatie canadienne pour promouvoir la tenue de
rencontres internationales au Québec. La ville de Québec
présente quant à elle un potentiel intéressant pour les
réunions internationales et nous entendons le faire valoir
pleinement.
Voilà esquissées quelques perspectives que nous pourrons
développer de manière plus détaillée en regardant
les budgets des différentes unités du ministère. Les
priorités que je viens d'esquisser se retrouvent traduites
concrètement en chiffres dans les budgets des directions et
représentations à l'étranger. En examinant les programmes
détaillés pour les affaires internationales, on constatera que
les perspectives du ministère des Relations internationales pour le
proche avenir sont excellentes et de nature à préparer la voie
pour une expansion rationnelle de l'ensemble de nos activités
internationales au cours des prochaines années.
Le Président (M. Filion): M. le ministre, merci. M. le
chef de l'Opposition.
M. Pierre Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, merci. Je remercie le
ministre de son exposé et des efforts considérables, dans un
contexte très difficile, qu'ont dû faire ses fonctionnaires. Je
remercie ceux-ci en particulier d'avoir répondu rapidement et de
façon tout à fait adéquate aux quelques questions que
l'Opposition a adressées par écrit et de nous avoir fait parvenir
des documents adéquats en réponse à nos questions.
Le ministère des Relations internationales de toute
évidence, et je dirais incontestablement, est le ministère qui
sort le plus affaibli des quatre mois de pouvoir du nouveau gouvernement. Un
chiffre résume malheureusement très brutalement cette
réalité: une amputation de 11 600 000 $ en 1986-1987, ce qui
signifie une chute de près de 20 %, alors que les dépenses de
l'ensemble des autres ministères du gouvernement du Québec
augmentent de 3,8 %. Les crédits du ministère que dirige le
député de Jean-Talon reculent de près de 20 %, alors que
l'ensemble des dépenses de l'État augmente de 3,8 %.
Étant donné que, selon le quotidien Le Soleil, le
ministère avait de plus des projets d'augmentation de ses crédits
de l'ordre d'environ 3 570 000 $, on peut dire, dans le fond, que les
décisions prises par le président du Conseil du trésor
à l'égard de ce ministère sont, en fait, de réduire
les expectatives de ce ministère de près de 15 000 000 $.
Recul, M. le Président, d'abord et avant tout à
l'égard de la représentation du Québec à
l'étranger. Comment faire fonctionner 24 délégations ou
bureaux à l'étranger si les dépenses non salariales de
fonctionnement chutent de 23 %? Comment fonctionner avec un budget
réduit de près d'un quart dans 17 pays qui ne sont pas tous
exempts, soit dit en passant, d'inflation, quand on pense notamment à
l'Amérique latine? Comment fonctionner avec une diminution de 30 % dans
les frais de communication?
Recul aussi dans la coopération internationale qui est
menée par des Québécois. Là aussi, un chiffre
manifeste, 6 700 000 $, soit 45,7 % de réduction dans les transferts aux
organismes de coopération, dont 3 000 000 $, il faut bien le dire,
à l'égard de deux institutions privées, Marie de France et
Stanislas, ce qui, d'ailleurs, en fera sans doute sourciller quelques-uns chez
nos partenaires français à l'égard de qui on tient de
magnifiques discours depuis le sommet, alors qu'on va amputer le budget de
fonctionnement de ces deux institutions de 3 000 000 $.
Le ministre retire également 1 800 000 $, soit 41 %, aux
organismes non gouvernementaux qui réalisent des projets de
coopération internationale. Ah, il nous dit bien dans son texte qu'il va
réfléchir pendant l'année, qu'il va faire des
comités de travail pour savoir comment on accentuerait la
coopération internationale, mais le fait brutal, c'est 1 800 000 $ de
diminution de budget pour les organismes non gouvernementaux qui s'occupent de
coopération internationale.
À l'égard de cette question, d'ailleurs, comme de celle de
l'expansion, voire même du simple maintien des délégations,
je reprends les propos du ministre qui nous dit: La trame principale sera
conservée et on va attendre que le gouvernement ait plus d'argent. Dans
le fond, il nous dit: Le ministère des Relations internationales sera
mis dans les boules à mites tant qu'on n'aura pas d'argent. Je vais vous
dire qu'il risque
d'être dans les boules à mites un petit bout de temps.
Je ne pense pas que le Québec ait les moyens de connaître
des reculs en matière de relations internationales et je crois que ce
ministère, qui est un des joyaux de la spécificité
québécoise dans le contexte canadien, écope avec 20 % de
coupures d'une façon injuste. Je trouve regrettable que le ministre n'ai
pu opposer aux appétits de couperet de son collègue du
Trésor une résistance un peu plus sérieuse.
Recul de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, 10,5
% de réduction des crédits. Recul du ministère
lui-même. Les employés du ministère voient diminuer leurs
moyens d'action. Quand les dépenses non salariales de fonctionnement
baissent de 12 %, on limite en soi la motivation et le dynamisme des
employés du ministère. Le ministère le reconnaît,
d'ailleurs, lui-même. On apprend, à la page 20 de son livre des
crédits, que, dans le domaine de la francophonie "le ministère
entend éviter le plus possible que la conjoncture budgétaire
actuelle crée une impression de recul chez nos partenaires." Ce n'est
pas une impression de recul qu'auront nos partenaires, M. le Président;
ils constateront la réalité de ce recul sous l'actuel ministre
responsable des Relations internationales quand on voit les coupures de postes
comme celui du délégué aux affaires francophones et
multilatérales à Paris, la fermeture anticipée de certains
bureaux et la menace qui pèse sur l'ensemble du réseau.
Ce réseau, le ministre l'a rappelé lui-même, a
été développé depuis une vingtaine d'années
et il a été renforcé de 1977 à 1985 par le
gouvernement précédent. Ce n'est pas fortuit si les gouvernements
successifs ont consenti des efforts financiers pour assurer l'ouverture du
Québec sur le monde, pour assumer sa responsabilité en ce qui
touche la francophonie et pour remplir pleinement ses fonctions dans ses champs
de compétences.
Par ailleurs, on peut être inquiet lorsqu'on voit, d'une part, que
le ministère des Relations internationales veut "une collaboration
soutenue avec le gouvernement fédéral" et, d'autre part, que ce
même ministère veut "la rationalisation du réseau de
représentation à l'étranger" (page 14) sans que soit
précisé le cadre de cette collaboration et de cette
rationalisation.
Le fait que le gouvernement actuel ait déjà reculé
sur certaines compétences du Québec, notamment à
l'égard des politiques de main-d'oeuvre, inquiète tous ceux qui
défendent les intérêts du Québec, y compris sur le
plan international.
Y aura-t-il, par exemple, recul dans les compétences qui sont
considérées, dans leur prolongement sur le plan international,
comme légitimes et constitutionnelles pour le Québec, notamment
dans le secteur de l'éducation? Y aura-t-il recul, aussi, dans le
dynamisme montré par le Québec à l'intérieur de la
francophonie? Ah, on me servira bien le sommet. J'en sais quelque chose, M. le
Président, de ce sommet. Je me souviens d'avoir négocié
une entente qui a permis au Québec d'y participer. Mais le Québec
aura-t-il les moyens d'agir avec efficacité, notamment dans l'Agence de
coopération culturelle et technique? Le Québec aura-t-il d'autres
moyens aussi pour participer aux projets qui ont été
élaborés lors du premier sommet francophone ou est-ce qu'on
assistera simplement à de beaux mots? Je pense, ici, à l'Agence
internationale francophone d'images télévisées.
En fait, y aura-t-il encore le Québec dans le monde ou si on
devra se contenter d'un Québec dans le Canada et d'un Canada dans le
monde, ce qui serait une contradiction, notamment avec les propos tenus par
l'actuel délégué général du Québec
à Paris, M. Jean-Louis Roy, le 21 janvier dernier, qui, lors d'une
conférence sur l'internationalisation du Québec, déclarait
que l'existence du réseau international du Québec "ne peut pas et
ne doit pas être remise en cause"? On nous diras Son existence n'est pas
remise en cause; on ne fait que le mettre dans les boules à mites.
Pourtant, quand les crédits tombent de 20 % ou de 30 %, ou de 45 %
à certains chapitres, c'est l'existence même du réseau qui
nous semble remise en cause, parce qu'un réseau comme celui des
Relations internationales ne peut pas vivre d'eau fraîche. Il a besoin de
moyens. Et cela présuppose que, dans l'ensemble des priorités
gouvernementales, on accorde à cet instrument absolument unique,
développé au Québec depuis 20 ans, les ressources dont il
a besoin pour se développer.
Nos inquiétudes ne sont pas, non plus, apaisées à
la lecture du texte d'orientations contenu dans le livre des crédits, ni
par le discours du ministre qui, il faut le dire cependant, est un peu plus
précis. Nous y voyons même une certaine incohérence. Le
ministère se donne quatre priorités sectorielles: science,
technologie, éducation et diffusion culturelle, et trois
priorités géographiques, États-Unis, Asie et pays
francophones. Je ne prendrai que la diffusion culturelle; il ampute le budget
de diffusion culturelle: dont il fait pourtant une priorité.
À la lecture du texte, par ailleurs, on s'aperçoit que le
ministère va continuer d'agir dans d'autres domaines sectoriels et
d'autres régions du globe. Dans la mesure où le ministre a
été incapable d'éviter l'amputation dramatique des
Relations internationales, a-t-il un plan précis pour réorienter
son ministère vers ces quatre priorités sectorielles et vers ce
qu'il considère être ses trois priorités
géographiques? Comment va-t-il éviter que les maisons du
Québec ne deviennent des maisonnettes ou des cabanes du
Québec?
(10 h 45)
Le ministre entend-il mobiliser au profit des relations internationales
du Québec les ressources qui subsistent encore dans différents
ministères sectoriels pour s'assurer au moins qu'au niveau central,
alors que ce ministère est en train de se faire amputer et
dégarnir par l'incapacité du gouvernement d'accorder la
priorité qu'il devrait accorder à cette mission, on maintient des
masses critiques au niveau des nombres, qu'on s'assure d'un niveau d'expertise,
de renouvellement, de diversité et qu'on ne laisse pas
l'éparpillement à travers les autres ministères,
finalement, réaliser un niveau d'activités sur le plan
international qui soit l'équivalent de ce qui resterait du
ministère des Relations internationales?
Cela prendra du courage de la part du ministre pour faire face à
ses collègues et obtenir d'eux qu'ils acceptent que ce soit son
ministère qui s'occupe des relations internationales. Il sait qu'il
pourra compter sur nous s'il fait cet effort pour nous assurer que ce joyau de
l'administration publique québécoise ne sombre pas dans la
banalité. Encore faudrait-il que le ministre sache lui-même
rapidement, et le démontre, où il s'en va en matière de
relations internationales, ce qui ne semble pas évident depuis quelques
mois.
Le Président (M. Filion): M. le chef de l'Opposition,
merci. Étant donné l'entente intervenue, j'appelle donc les
crédits de l'ensemble des trois programmes du ministère des
Relations internationales. J'inviterais donc les membres à poser leurs
premières questions ou à faire leurs premières
interventions.
Discussion générale
M. Johnson (Anjou): M. le Président, j'ai une série
de questions qui permettront sans doute au ministre de répliquer en
partie à mes propos, je n'en doute pas. Il disait tout à l'heure
qu'il sait que j'ai un peu plus d'expérience. Ce n'est qu'à cause
du temps que j'en ai plus. Il en aura un jour, pour à peu près
trois ans. Je peux lui dire qu'il profitera sûrement d'un certain nombre
de questions que je lui pose pour répliquer sans doute en partie
à mon exposé.
Aide aux sinistrés
J'ai une première question de nature un peu technique. J'aimerais
savoir du ministre combien de fonctionnaires de son ministère
travaillent à mettre en application l'idée qu'a eue M. Bourassa
de disposer des surplus alimentaires européens par un plan Marshall
destiné au tiers monde.
M. Rémillard: M. le chef de l'Opposition, vous faites
référence à un moment particulièrement important
dans l'histoire des relations internationales du Québec. Vous faites
référence, justement, à cet événement qui a
été un grand succès pour le Québec sur la
scène diplomatique internationale. Comme vous le savez, nous avons eu
à reprendre une entente qui avait été peut-être
discutée rapidement en campagne électorale. Nous avons pris cette
entente. Nous avons rediscuté de cette entente avec le gouvernement
fédéral et nous en sommes arrivés, finalement, à
des compromis intéressants, permettant au Québec et à son
premier ministre de jouer un rôle de premier plan tel que jamais un
premier ministre du Québec n'avait pu en jouer sur une scène
aussi importante sur le plan international et multilatéral.
Dans ce contexte, M. le chef de l'Opposition, je peux vous dire que nous
sommes extrêmement satisfaits de la façon dont les choses se sont
passées et de la façon dont le Québec a su prendre sa
place, lorsque l'on pense que le premier ministre du Québec a
été rapporteur général pour cette conférence
historique dans l'histoire de la francophonie. C'est l'histoire qui a
été marquée à ce moment. Le premier ministre du
Québec était rapporteur général, le premier
ministre du Québec a parlé en tout dernier pour inviter la
francophonie à cette rencontre de Québec en 1987. Alors, c'est
dans ce contexte que l'on doit situer cette intervention de M. Bourassa, disant
qu'on pourrait penser à mettre en oeuvre un plan Marshall pour faire en
sorte que les surplus alimentaires des pays industrialisés et bien
nantis puissent être disponibles pour les pays moins nantis.
C'est une idée extrêmement intéressante qui avait
été mise de l'avant par M. Delors lorsqu'il était ministre
français. M. Bourassa a repris cette idée en citant M. Delors et
nous travaillons à cette idée en collaboration avec nos
collègues fédéraux et avec d'autres pays.
Vous savez, M. le chef de l'Opposition, qu'il y aura une première
réunion du suivi de ce premier sommet sur la francophonie et c'est dans
ce contexte qu'on pourra situer, bien sûr, les suites que l'on doit
donner à cette intervention majeure qu'a faite M. Bourassa lors de ce
sommet historique.
M. Johnson (Anjou): Une remarque et je reviens avec ma question,
rapidement. D'abord, dans l'ensemble, le premier ministre le sait, l'Opposition
a offert sa collaboration totale et son appui étant donné que la
question de la présence internationale du Québec, a nos yeux,
doit faire l'objet d'un consensus entre les partis politiques et qu'il faut
maintenir ce consensus comme il existe depuis 20 ans. Cela étant dit, le
premier ministre a eu l'occasion en Chambre, lors d'une motion non
annoncée félicitant le
nouveau gouvernement français de M, Chirac, de parler de mon
accord sans réserve pour ce qu'il avait fait à Paris.
Je me suis permis, cependant, d'exprimer une réserve, notamment,
sur cette question du plan Marshall. L'écoulement des surplus
alimentaires dans les pays en voie de développement reste une question
assez fondamentale qui préoccupe des économistes comme Dumont et
les autres depuis de nombreuses années. De toute évidence, le
vrai plan Marshall, pour le tiers monde ou les pays en voie de
développement, serait un plan qui viserait à des investissements
massifs venant des pays occidentaux pour permettre à ces pays de trouver
les moyens de s'autosuffire à un plus haut niveau, notamment, sur le
plan alimentaire.
Le simple déversement des surplus alimentaires des pays
occidentaux, d'une part, peut être une façon un peu simple pour
les pays occidentaux d'acheter leur propre conscience à l'égard
de ce qui se passe dans le tiers monde, mais surtout le simple
déversement de ces produits dans les pays en voie de
développement peut avoir des effets macro-économiques
considérables, y compris des effets de déstabilisation des
revenus agricoles là où Us sont susceptibles de croître
à l'avenir. C'est pour cela que je posais une question très
précise au ministre, à savoir si des fonctionnaires de son
ministère travaillaient autour de cette question extrêmement
complexe ou si nous avons eu droit à un morceau de rhétorique de
la part du premier ministre.
M. Rémillard: Ce que je pourrais dire à ce sujet,
c'est bien sûr que nous travaillons sur ce point-là comme on
travaille aussi sur d'autres points qui ressortent de ce premier sommet sur la
francophonie. C'est un point très important. Vous savez, lorsqu'on parle
de coopération, des relations nord-sud, c'est un point qui est
très délicat. Il y a plusieurs philosophies qui peuvent
s'affronter. C'est à nous de trouver celle qui peut le mieux convenir
à notre situation de pays riche, bien nanti, faisant partie aussi de
certaines alliances, de certains groupes de pays et pouvant aider d'autres pays
qui sont moins bien nantis que nous. C'est dans ce contexte que nous devons
faire en sorte que notre richesse puisse aussi profiter à ceux qui ont
besoin de l'essentiel et qui meurent de faim, actuellement.
Bien sûr qu'on pense toujours à cette phrase: Donnez un
poisson un jour vous nourrissez pour une journée; montrez à
pêcher, vous nourrissez pour la vie. C'est sûr, c'est certain,
c'est intéressant de montrer, d'éduquer, mais il faut aussi
nourrir les gens qui meurent de faim à tous les jours, comme on sait que
cela se passe actuellement en Afrique et dans d'autres pays aussi. Dans un
premier temps, je crois qu'un plan Marshall est un plan qui repose sur une
philosophie d'aide bien pragmatique, directe, pour faire face à un
problème qui se passe actuellement aux yeux de tout le monde. À
la télévision, on voit cette situation telle qu'elle se produit
maintenant. D'autre part, aussi, c'est un plan qui prévoit donner
à ces pays le moyen de faire en sorte qu'ils puissent venir à
s'autosuffire dans des éléments aussi essentiels que donner
à manger à leur peuple.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que c'est pour cela qu'on ne voit rien
dans le livre des crédits sur l'aide aux sinistrés?
M. Rémillard: L'aide aux sinistrés. On ne peut pas
prévoir de l'aide quand les sinistres ne sont pas arrivés. Il
faut au moins attendre les sinistres...
M. Johnson (Anjou): II peut y avoir une réserve.
M. Rémillard: ...ensuite on prévoit de l'aide.
Entre autres, lorsque vous parliez tout à l'heure...
M. Johnson (Anjou): Au cas où vous n'en seriez pas
certain, il y en a un qui est permanent au Sahel.
M. Rémillard: C'est pour cela que, tout à l'heure,
lorsque vous m'avez demandé combien de fonctionnaires travaillent
à préparer le plan Marshall, c'est ça que je vous ai dit.
Vous dites justement qu'au Sahel il y a un problème permanent, mais pas
seulement au Sahel. La famine, c'est un phénomène qui est
extrêmement difficile en Afrique et pas seulement au Sahel. C'est pour
cela que le plan Marshall doit être en vigueur sur certains aspects, dans
certaines considérations, pour faire en sorte que ces gens puissent
manger. Qu'on arrête les enfants de mourir comme on le voit maintenant.
Tout le monde voit à la télévision ces
choses-là.
Ce que j'essaie de vous dire, c'est qu'il est intéressant de
situer notre coopération en fonction d'une philosophie d'aide, d'une
philosophie de collaboration avec ces pays, non pas dans un esprit de
colonisateurs ou de néo-colonialisme, mais dans une philosophie d'aide
qui pourrait permettre à ces pays de devenir éventuellement
autosuffisants pour faire en sorte que leurs peuples puissent manger à
leur faim. Voilà l'essentiel de notre objectif.
M. Johnson (Anjou): Je comprends les objectifs et on est tous
pour la vertu et la tarte aux pommes par définition. Je constate que les
transferts aux organismes non gouvernementaux sont amputés et qu'il n'y
a pas de réserve pour l'aide aux sinistrés. Pour
avoir vécu et avoir participé à l'évolution
-avec vous, d'ailleurs, M. le Président, ainsi qu'avec d'autres - d'un
organisme de développement international, OXFAM et l'avoir
créé au Québec au début des années
soixante-dix, je constate que très concrètement, entre le
discours du ministre sur la faim dans le monde et les ressources que son
ministère est en train de mettre pour prétendre répondre
et apporter cette contribution modeste, il faut bien le dire, que le
Québec peut apporter à la solution de cette tragégie
humaine, il y a un hiatus. Je ne vois pas de crédits dans son
ministère pour l'aide aux sinistrés et je vois une amputation des
crédits aux organismes de coopération internationale. Alors,
où est le plan Marshall dans les crédits du ministre? Je le
cherche. Je ne dis pas que je suis contre l'aide au tiers monde. Il faudrait
peut-être se comprendre. Je dis juste: Qu'est-ce que vous faites au lieu
d'en parler?
M. Rémillard: Ah, bon, j'avais l'impression de vous
étiez contre l'aide au tiers monde. Je suis content que vous le
précisiez.
M. Johnson (Anjou): Franchement, je ne suis quand même pas
ridicule.
M. Rémillard: Bon, écoutez, je trouve
intéressante votre remarque dans le cadre, bien sûr, que vous
êtes pour l'aide au tiers monde. Je prends bonne note de votre
intervention. Évidemment, vous savez très bien que, dans la
dernière période de l'année, par exemple, le Québec
a donné 500 000 $ pour aider les sinistrés de Mexico. On a
aidé aussi les sinistrés à la suite de l'éruption
volcanique de Colombie pour 150 000 $. Voilà de l'aide. Vous savez, on
ne peut pas prévoir quels volcans vont éclater dans les prochains
mois, les prochaines années. C'est assez difficile; alors, on verra au
fur et à mesure. Il y a un fonds de prévu à cet
effet-là et ce fonds fera en sorte...
M. Johnson (Anjou): De combien?
M. Rémillard: C'est un fonds qui varie selon les
circonstances. Il est toujours possible, vous savez, de faire appel au Conseil
du trésor ou à un fonds de suppléance en particulier pour
donner un effort particulier dans les circonstances qui nécessiteraient
un apport du Québec.
Mais d'une façon plus globale, M. le Président, l'aide au
tiers monde doit se situer de par les liens de coopération que nous
avons avec le tiers monde, et, dans ce cadre-là, nous avons
conservé les mêmes programmes d'aide au tiers monde. Que le chef
de l'Opposition me donne des endroits précis, des endroits essentiels
où on a touché cette aide au tiers monde.
Entente sur le deuxième sommet
francophone
M. Johnson ( Anjou): M. le Président, pour revenir au
sommet francophone, est-ce que le ministre pourrait déposer et rendre
public le texte de l'entente avec le gouvernement fédéral
concernant la participation du Québec au deuxième sommet
francophone? Y a-t-il une telle entente?
M. Rémillard: Oui, il y a eu une entente. Vous savez, je
dois vous avouer qu'il a fallu partir de loin. Pour négocier cette
entente pour le deuxième sommet, il y avait beaucoup de points à
discuter. On s'était donné comme objectif d'en arriver à
une entente avec le gouvernement fédéral avant d'inviter la
francophonie à venir à Québec.
Nous partions de loin, M. le Président, parce que l'entente qui
avait été négociée et rendue publique lors de la
dernière campagne électorale ne valait que pour le huis clos. On
n'avait pas pensé à négocier une entente pour la partie
publique de ce sommet. Je me suis retrouvé, je dois le dire, quelques
heures après mon assermentation comme ministre, j'ai dû prendre
l'avion. Je me suis rendu à Paris et j'ai été en
première négociation, donc, avec mes homologues des autres pays
francophones et avec les instances gouvernementales fédérales.
(11 heures)
Je faisais face à une situation où j'avais une entente
signée par le gouvernement du Québec alors dirigé par le
chef de l'Opposition et par M. Mulroney où on ne prévoyait que la
partie à huis clos. On ne parlait pas de l'ouverture, on ne parlait pas
de la clôture. On donnait au Québec certains droits qui pouvaient
être considérés comme intéressants dans certaines
circonstances, mais qui ne s'appliquaient que pour la période à
huis clos. On ne parlait pas de l'ouverture, on ne parlait pas de la
clôture. On savait qu'on avait là un sommet de plus de 42 chefs
d'État et de gouvernement, un moment historique pour la francophonie, et
on n'avait pas déterminé avec le gouvernement
fédéral quelle serait la place du Québec dans l'ouverture
et dans la clôture de ce sommet. C'est à partir de cela que nous
avons dû, tout d'abord, négocier la place du Québec, tant
à l'ouverture qu'à la clôture, et qu'ensuite, à
partir de cette première entente et de la pratique de cette
première entente au premier sommet de la francophonie, nous avons
négocié avec le gouvernement fédéral une entente
pour l'organisation du deuxième sommet de la francophonie, et il me fait
grand plaisir de déposer cette entente. Il y a ici un communiqué
public - je dois vous dire qu'il a été rendu public à
Paris même, par le gouvernement fédéral et par nous
également, par nos instances - et il me fait plaisir d'en
déposer un exemplaire.
M. Johnson (Anjou): Et quelle est la modification...
Le Président (M. Filion): Avec votre permissions M. le
chef de l'Opposition, en vertu de l'article 162, il me fait plaisir de recevoir
le document déposé par le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, en quoi cette entente
est-elle différente de la précédente?
M. Rémillard: II y a une différence bien importante
parce que, justement, dans cette entente, on prévoit l'introduction et
on prévoit la conclusion; on ne prévoit pas simplement le huis
clos. Le huis clos, c'est intéressant, parce que c'est au huis clos que
les ministres peuvent discuter ensemble, qu'ils peuvent échanger. Il n'y
a pas la presse, il n'y a pas la...
M. Johnson (Anjou): C'est la partie publique par opposition
â la partie diplomatique, si je comprends bien.
M. Rémillard: Laissez-moi terminer, s'il vous plaît!
Je vous disais que le huis clos est intéressant parce que, vous savez,
on est loin de la presse, on est loin des caméras et il peut y avoir des
échanges extrêmement fructueux et intéressants. Pour le
Québec, je crois que c'est intéressant de pouvoir participer
d'une façon pleine et entière à ces discussions, mais il
reste quand même qu'il faut prévoir la participation du
Québec, comme foyer principal de la francophonie au Canada, comme foyer
principal de la francophonie en Amérique, comme seul gouvernement d'un
État fédéré, mais d'un Etat en Amérique, qui
est un État francophone, aux événements qui sont publics
devant le monde entier, devant les caméras, devant les journalistes et
c'est ce que nous avons prévu.
Il y a une place pour le Québec à l'ouverture, il y a une
piace pour le Québec à la clôture. Voilà une grande
différence! Nous n'avons pas simplement négocié avec le
gouvernement fédéral l'intervention du Québec, à ce
deuxième sommet, en fonction du huis clos, mais nous l'avons fait aussi
pour les deux périodes majeures publiques de ce deuxième sommet
de la francophonie, l'ouverture et la clôture.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, puisque le ministre
s'exprime un peu comme s'il était à la période des
questions, il n'y a pas de caméra, je veux juste le rassurer
là-dessus. Peut-être que je pourrais revenir, puisque je l'ai
devant moi, à la page 3 de l'entente. On nous dit que la
présidence générale du sommet sera assurée par le
premier ministre du Canada. Ce sommet, comme on le sait, se tiendra à
Québec. Le premier ministre du Canada présidera les travaux du
premier volet. À la conclusion...
M. Bélisle: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M- Filion): Excusez, M. le chef de
l'Opposition. M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Étant donné que,
conformément à l'article 162 de notre règlement, vous avez
permis le dépôt du document, les membres de la commission
apprécieraient grandement en avoir une copie.,
Le Président (M. Filion): M. le député de
Mille-Îles, nous faisons actuellement le nécessaire pour tenter
d'en obtenir des copies, à moins que ces copies n'existent
déjà de votre côté, du côté de votre
équipe, M. le ministre.
M. Rémillard: Vous n'avez pas d'autres coptes?
M. Johnson (Anjou): On pourrait peut-être continuer pendant
ce temps, M. le Président.
Le Président (M. Filion): C'est bien. M. le chef de
l'Opposition, vous pouvez continuer.
M. Johnson (Anjou): Je remarque, à la page 3 du
document...
M. Bélisle: Je crois comprendre, M. le Président,
qu'on va en avoir une copie. C'est exact?
Le Président (M. Filion): M. le député de
Mille-Îles, je pense que vous m'avez entendu, on fait le
nécessaire pour fournir à tous les membres de cette commission
une copie du document aussitôt que ce sera prêt. M. le chef de
l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): À la conclusion desdits travaux, il
demandera à l'assemblée de confier la présidence au
premier ministre du Québec pour le second votet. On nous dit qu'il y
aura une cérémonie d'ouverture -c'est une bonne idée - que
le chef du gouvernement du Canada ouvrira la séance, suivi
immédiatement du chef du gouvernement du Québec. Je comprends! Si
c'est dans la ville de Québec, je voudrais bien que le premier ministre
du Québec ne parle pas! C'est évidentl On ne nous annonce pas ce
que sera la séance de clôture, cependant. On nous dit: II y aura
une cérémonie de clôture.
Si je comprends bien les distinctions fondamentales qu'évoque le
député de Jean-Talon, ministre des Relations internationales,
c'est qu'il y aun début et une fin au sommet; ce n'est pas si
mai. Deuxièmement, on nous dit que le premier ministre du Québec,
comme cela se passe dans la ville de Québec, en territoire
québécois, va pouvoir présider la deuxième partie
du sommet. Je ferai remarquer au ministre, qui a déjà suivi ce
dossier pendant la campagne électorale ou à l'époque
où il était engagé par le gouvernement canadien, qu'il n'y
avait pas de problème sur la participation du Québec au
deuxième volet du sommet de Paris, s'il y avait eu un sommet en deux
volets comme le prévoyait initialement le gouvernement canadien. C'est
cela qu'on a changé. Je pense que le ministre devrait se le rappeler.
S'il considère qu'il est de quelque utilité d'avoir l'appui de
l'Opposition dans ces questions, faudrait-il qu'il réfère
à ces questions avec justesse.
M. le Président, on a aboli le poste de M. Claude Roquet à
Paris. On sait que M. Roquet, qui avait un rang assez assimilable à
celui du délégué général du Québec
à Paris...
M. Rémillard: Est-ce que vous me permettez de vous
répondre? Vous me posez des questions sur l'ouverture et sur la
clôture.
M. Johnson (Anjou): Enfin, théoriquement, j'ai 20
minutes.
M. Rémillard: On pourrait parler de M. Roquet ensuite.
M. Johnson (Anjou): Non, je donnerai l'occasion au ministre... Je
vais poser une question sur le multilatéral et cela touche aussi le
sommet. Il pourra peut-être ramasser cela pour qu'on puisse
procéder.
M. Rémillard: Oui, sur le sommet. J'aimerais pouvoir vous
répondre, vous donner des informations.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, on a aboli le poste
de M. Claude Roquet à Paris. J'essaie de voir comment, au-delà
des grands mots, on peut s'assurer du suivi du premier sommet francophone,
celui de Paris, alors qu'on sait que les sherpas qui préparent le
deuxième sommet sont à Paris et que les ambassades africaines
sont pour le moins un peu plus présentes à Paris que les
consulats ne le sont à Québec. Est-ce que le ministre ne croit
pas qu'en abolissant le poste occupé par M. Roquet et semble-t-il, en
écartant les services de ce remarquable fonctionnaire, de cet homme de
carrière dans la fonction publique fédérale et
québécoise, il risque de faire perdre du temps, un temps
précieux et important, au niveau des contacts que nous devons avoir,
notamment avec les pays africains, par la disparition de son poste à
Paris?
M. Rémillard: Vous permettez, M. le Président, que
je donne quelques informations concernant le deuxième sommet de la
francophonie. Pour vraiment comprendre les résultats des
négociations que nous avons eues avec le gouvernement
fédéral, il faut voir l'entente dans son ensemble et, lire
l'article premier. Tout d'abord, il faut savoir que l'invitation officielle aux
chefs d'État et de gouvernement à participer à ce
deuxième sommet a été faite à la fois par le
gouvernement fédéral et le Québec. Je peux vous dire que
c'est la première fois que cela se fait de cette façon.
M. Johnson (Anjou): En 1967, 48 chefs d'État ont
été invités par le gouvernement du Québec à
venir à Québec.
M. Rémillard: L'invitation avait été faite
par le gouvernement fédéral. C'est cela, la différence.
Chacun des chefs d'État et de gouvernement a reçu une invitation
officielle du Québec en même temps qu'une invitation officielle du
Canada.
M. Johnson (Anjou): Comme en 1967.
M. Rémillard: Pas comme en 1967. De toute façon,
vous savez, il faut se rappeler ce rôle historique entre le Canada et le
Québec en ce qui a trait aux relations internationales. Cela s'est
produit lorsqu'on a discuté cette première entente. Vous avez
discuté la première entente avec le gouvernement
fédéral. Il fallait savoir à ce moment-là que le
Nouveau-Brunswick était une province qui avait été
acceptée à l'Agence de coopération technique et culturelle
depuis 1971 - le sommet a commencé - et le Nouveau-Brunswick, depuis
1978. Alors, à un moment donné, vous me dites: Qu'est-ce qui se
passe, le Nouveau-Brunswick a le même statut que le Québec? Oui,
mais, quand la négociation a été faite avec le
gouvernement fédéral sur le fondement même de la
création de l'Agence de coopération technique et culturelle, il
fallait savoir à ce moment que le Nouveau-Brunswick avait aussi le
même statut que te Québec. Il ne faut pas ensuite se dire: Voici,
le Nouveau-Brunswick a le même statut que le Québec. C'est tout
à fait normal, si on se réfère, bien sûr, pour
négocier une entente, à l'Agence de coopération technique
et culturelle.
Je puis vous dire qu'il faut lire l'article 1 de l'entente qui dit ceci,
et je me permets de le lire pour ceux qui n'ont pas le texte ici, pour qu'ils
comprennent le sens de notre discussion: Le Canada comme puissance invitante et
l'un des deux gouvernements
hôtes - l'autre gouvernement hôte, c'est le Québec,
et voilà aussi un point majeur - fait parvenir, avant la fin des travaux
du sommet, une lettre d'invitation, copie conjointe à tous les chefs
d'État des gouvernements participants et des délégations,
leur proposant que le second sommet francophone se tienne dans la ville de
Québec. Cette invitation fait référence à la
déclaration que fera le premier ministre du Québec, en sa
qualité d'un des deux gouvernements hôtes - un des deux
gouvernements hôtes - lors de la cérémonie de
clôture. Le Québec est l'un des deux gouvernements hôtes.
Trouvez-moi un précédent à cet effet dans les relations
internationales du Québec.
C'est dans ce contexte que vous devez situer la séance
d'ouverture où le premier ministre du Québec parlera à la
suite du premier ministre du Canada. C'est le premier ministre du Canada qui
est le chef de l'État souverain et il y a des chefs de gouvernement et
des chefs d'État qui sont là, c'est tout à fait normal. Le
chef du gouvernement du Québec parlera ensuite et, là aussi,
c'est un événement très important et un point essentiel de
cette entente que nous avons conclue.
Délégation du Québec à
Paris
Maintenant, en ce qui regarde la situation de la
délégation à Paris, M. le Président, je voudrais
tout d'abord qu'on comprenne bien la situation, qu'on comprenne qu'à
Paris il y avait deux déléguésî un
délégué général qui est maintenant M. Roy et
un délégué au multilatéral et à la
francophonie qui était M. Roquet, donc, une délégation qui
a été créée comme cela, à un moment
donné, à la suite de différents événements
et qui impliquait un délégué avec appartement et services
d'un maître d'hôtel, avec tout ce qui entoure normalement, bien
sûr - c'est tout à fait normal - les services qu'on doit donner
à un délégué à Paris.
Nous avons considéré que le délégué
général à Paris pouvait jouer ce rôle de
délégué auprès de la francophonie sur le plan du
multilatéral, représenter le Québec auprès de
l'Agence de coopération technique et culturelle, le représenter
aussi parmi les sherpas qui auront à organiser et à planifier le
contenu du deuxième sommet de la francophonie- C'est un rôle que
M. Roy peut très bien jouer, conjointement avec son rôle de
délégué général. Donc, nous n'abolissons pas
une délégation à Paris comme telle. Nous demandons
à M. Roy de jouer aussi le rôle de délégué
à la francophonie et au multilatéral. C'est ce que nous
faisons.
En ce qui regarde M. Roquet, je voudrais tout d'abord lui rendre hommage
parce qu'il s'agit, comme vient d'ailleurs de le dire le chef de l'Opposition,
d'un fonctionnaire qui est l'un des piliers de notre diplomatie. Il a
joué un rôle majeur et extrêmement efficace lors du premier
sommet de la francophonie et il a permis au Québec de jouer ce
rôle de premier plan. Je tiens à le remercier, comme je tiens,
d'ailleurs, et je voudrais le préciser, M, le Président, à
remercier tous les fonctionnaires qui ont joué un rôle tout
à fait exceptionnel. Je parle de M» Roquet. Il y a aussi M.
Léger qui a été nommé Commissaire
général à la francophonie, qui doit être
situé dans ce contexte. Je parle de M. Duhaime, de M. Tardif. Je parle
de tous ces gens qui ont contribué d'une façon extrêmement
efficace au succès de ce premier sommet de la francophonie. (11 h
15)
Je peux vous dire que, comme ministre et comme Québécois,
je suis très fier de la qualité et de la compétence des
fonctionnaires de mon ministère. Ils le prouvent, je pense, tous les
jours, en faisant en sorte qu'avec le peu de moyens que nous avons nous prenons
une place de plus en plus évidente, importante et efficace pour le
Québec sur la scène internationale. Il ne s'agit pas de mettre de
côté M. Roquet, mais de lui donner de nouvelles fonctions qui ne
seront pas moindres, loin de là - oui, c'est décidé, mais
je n'ai pas à vous l'annoncer le jour des crédits - que les
fonctions qu'il exerce actuellement. Je peux vous dire que je partage avec vous
toute l'admiration que vous avez pour ce haut fonctionnaire du
Québec.
M. Johnson (Anjou): Le ministre nous dit, dans le fond, que la
carrière de M. Roquet étant reconnue et la valeur de ce
remarquable fonctionnaire étant reconnue à juste titre, on le
verra bien dans ses annonces subséquentes, l'ensemble de ses fonctions
sera donc maintenant exercé par M. Jean-Louis Roy. Pour avoir eu
l'occasion de discuter assez longuement avec à la fois le
délégué du Québec et le
délégué au multilatéral alors que j'étais
premier ministre, il s'agit vraiment de deux fonctions très
différentes qui, je crois, exigent un niveau d'intervention et une
énergie à déployer absolument phénoménale.
Quand on sait qu'il y aura un deuxième sommet qui se tiendra à
Québec et que le gros de l'action se passera à Paris, d'ici ce
temps-là, à cause des ambassades, notamment, des pays africains
et du rôle très impartant que joue la France, ce que nous dit le
ministre, c'est, dans le fond, que le délégué
général du Québec peut assumer les deux fonctions. J'ai
bien peur qu'il ne se prive de ressources importantes et j'ai bien peur que des
éléments d'une des deux fonctions de M. Roy ne soient
négligés par la force des choses.
Il faut bien revenir au caractère assez modeste de notre
présence internationale. Le
Québec ne se fait jamais donner de cadeaux. Il faut qu'il se
batte pour chaque pouce qu'il gagne. Il faut même qu'il se batte, de ce
temps-ci, pour ne pas en perdre. Amputer la coopération
multilatérale d'une ressource, au-delà de la personnalité
remarquable de M. Roquet, amputer cette fonction au multilatéral,
à nos yeux, je tiens à le dire au ministre, est une erreur qui
pourrait coûter cher à la préparation du sommet. Je
souhaite simplement que mon appréhension ne se réalise pas
étant donné que nous souhaitons que le prochain sommet soit
également un succès.
M. le Président, vous me permettrez de passer la parole à
mon collègue, le député de Saint-Jacques, qui a quelques
questions additionnelles à adresser au ministre.
Le Président (M. Filion): M. le député de
Saint-Jacques, auparavant je voudrais reconnaître... D'accord. M. le
député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: Toujours au niveau de la délégation
générale du Québec à Paris, M. le ministre, est-ce
que le poste de conseiller scientifique est maintenu?
M. Rémillard: Le poste de conseiller scientifique et celui
de conseiller à la coopération seront fondus en un seul poste. Il
est donc maintenu et sera exercé par une même personne, celui qui
est responsable de la coopération.
M. Boulerice: Vous êtes en train de favoriser le double
emploi quand, en définitive, on s'achemine vers des accroissements de
charges au niveau de la délégation, puisqu'à l'issue du
sommet, l'on proposait la création d'un institut de l'énergie des
pays de langue française qui aurait pour mandat de former des
gestionnaires, de diffuser les travaux de recherche et de parrainer certaines
études. Vous croyez que nos ressources humaines sont suffisamment
compressibles, à ce niveau-là, pour leur permettre de faire
à la fois A, B, C et D. Je ne doute pas de la qualité et de la
valeur des gens qui sont là, mais il y a quand même 24 heures dans
une journée, six jours dans une semaine, si on leur accorde au moins le
dimanche.
M. Rémillard: C'est une bonne question. Tout d'abord, en
ce qui regarde les deux postes, parce que votre question est reliée
aussi, bien sûr, aux deux délégations à Paris,
jusqu'en 1981, vous savez, il y avait un seul délégué, qui
était le délégué général, qui
accomplissait les deux mandats, les deux tâches:
délégué à la francophonie et
délégué à Paris pour voir aux intérêts
du Québec en fonction de Paris. Nous avons à prendre des
décisions. Nous faisons en sorte que la même personne puisse
accomplir ces deux tâches, comme nous faisons la même chose en ce
qui concerne le conseiller scientifique et celui de la coopération. Nous
allons le faire dans d'autres domaines aussi.
Mais vous devez comprendre que l'organisation du deuxième sommet
de la francophonie ne se fera pas seulement de Paris. Nous avons aussi un
conseiller, le commissaire général à la francophonie, M.
Jean-Marc Léger, qui a un rôle à jouer. Nous avons aussi
les fonctionnaires de la direction francophone du ministère des
Relations internationales qui ont un rôle extrêmement important et
déterminant à jouer dans l'organisation de ce deuxième
sommet. En prenant en considération ces ressources, à la fois du
ministère à Québec et en ce qui regarde M. Léger,
les ressources que nous avons à Paris et aussi, devrais-je ajouter, M.
le Président, notre intention d'ouvrir dans un avenir quand même
pas très éloigné une délégation en Afrique,
ce qui nous permettra aussi d'avoir une action dans la francophonie africaine,
tout cela... Pardon?
M. Boulerice: Mais avant que son action porte, M. le ministre,
vous admettrez que cela va prendre quelques années...
M. Rémillard: Oui.
M. Boulerice: ...quand le terrain a été vraiment
bien déblayé par M. Roquet depuis un certain nombre
d'années.
M. Rémillard: Ce que je peux vous dire aussi, c'est que M.
Roquet travaillait avec une seule personne, M. Duhaime, un autre excellent
fonctionnaire. M. Duhaime va travailler avec M. Roy et va avoir en particulier
ce domaine de préoccupation principale qu'est le multilatéral et
la francophonie.
M. Boulerice: Qu'est-ce qui motive la création d'un poste
supplémentaire à la délégation
générale du Québec à Paris?
M. Rémillard: Je m'excuse. Je n'ai pas compris.
M. Boulerice: Pourquoi y a-t-il eu un poste supplémentaire
créé à Paris à la délégation
générale?
M. Rémillard: Un poste supplémentaire, vous voulez
peut-être parler d'un secrétaire?
M. Boulerice: Je ne sais pas, secrétaire du
délégué.
M. Rémillard: Un délégué? Non.
M. Boulerice: Secrétaire du
délégué?
M. Rémlllard: Secrétaire du
délégué, oui. On n'a pas créé un poste
nouveau. C'est strictement un rôle qui existait avec la
précédente déléguée et qui existe maintenant
avec M. Roy. C'est un délégué qui est recruté
localement, qui gagne un salaire en conséquence, donc un très
petit salaire si on considère le coût de la vie à Paris,
qui n'a aucune allocation de logement» Ce n'est pas un nouveau poste
C'est tout simplement un poste qui est occupé par une autre
personne» L'autre personne est rappelée ici parce qu'elle termine
son mandat. Il n'y a pas vraiment de nouveau poste de créé.
M. Boulerice: Quand vous dites que l'autre personne sera
rappelée ici et termine son mandat, vous faites allusion au directeur de
cabinet?
M. Rémillard: Directeur de cabinet, je pense que c'est
cela. Qui jouait ce rôle de directeur de cabinet? C'est M. Brunet qui, je
pense, était directeur de cabinet de Mme Beaudoin et qui revient au
Québec parce qu'il a terminé son mandat.
M. Boulerice: Un mandat de combien de temps pour M. Brunet?
M. Rémillard: Je pense qu'on l'a étiré un
peu. Il est demeuré un petit peu plus longtemps. On lui a demandé
de demeurer un peu plus longtemps que prévu, mais il doit rentrer comme
prévu.
M. Boulerice:D'accord.
M. Rémillard: Ce sont normalement des mandats de trois
ans, comme vous le savez, en poste à l'étranger.
M. Boulerice: Est-ce que le directeur de cabinet peut être
une personne, comme vous l'avez exprimé tantôt, dont le statut est
différent, c'est-à-dire qui obtient le statut de résident
en France et est recrutée localement?
M. Rémillard: Écoutez! Cela coûte
certainement moins cher, vous savez. Cela coûte moins cher parce qu'on
n'a pas un appartement, des frais de transport, etc., à payer. Si on
peut trouver quelqu'un de compétent... C'est un choix qui relève
du délégué général et, si c'est le
délégué qui trouve quelqu'un qui peut s'accommoder d'une
telle situation, ce que je peux dire, c'est que j'en suis tout à fait
satisfait, car les conditions sont remplies et, pour l'État, cela
coûte beaucoup moins cher. Cela coûte moins cher de prendre
quelqu'un qui gagne 28 000 $ par année que de prendre quelqu'un qui a un
salaire plus élevé, mais, en plus, qui aussi a tous les avantages
reliés à son poste.
M. Boulerice: Est-ce qu'il y a des précédents au
niveau de nos délégations générales où le
directeur de cabinet du délégué général est
recruté localement?
M. Rémillard: II faudrait que je m'informe. Attendez. Je
vais m'inforrner de cela»
M. Boulerice: J'aimerais bien.
M. Rémillard: On me dit qu'il y a beaucoup de
précédents dans la diplomatie. D'une façon
générale, cela se fait régulièrement, mais je ne
pourrais pas vous donner un cas particulier spécial.
M. Johnson (Anjou): Cela arrive régulièrement qu'un
directeur de cabinet est recruté localement?
M. Rémillard: Oui.
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Rémillard: On me dit que cela se fait dans le monde
diplomatique. Cela se fait très bien.
M. Boulerice: Pas dans le monde diplomatique, mais dans le
nôtre.
M. Rémillard: II faudrait que je vous trouve un cas
particulier. Je pourrais chercher longtemps. Qu'est-ce qui vous pose des
problèmes? Est-ce que c'est le fait que cela nous coûte moins cher
qui vous cause un problème ou si c'est la compétence? Je voudrais
simplement savoir le problème que vous voyez dans cela.
M. Johnson (Anjou): Ce ne sont pas des problèmes. Ce sont
des questions. D'ailleurs, le ministre devrait s'habituer. Cela va être
comme cela pendant une couple d'années.
M. Rémillard: Vous posez des questions, mais je voudrais
savoir la...
M. Johnson (Anjou): À moins que le ministre n'y voie un
problème, M. le Président.
M. Rémillard: J'essaie de voir parce que j'ai des
questions qui me paraissent intéressantes.
M. Boulerice: Bien, je ne sais pas. Quelqu'un qui est sorti d'une
grande école, l'ENA, qui est là depuis deux ans et qui doit
normalement accueillir un délégué général
qui, avouons-le, n'avait malheureusement aucune expérience diplomatique,
donc nouveau dans le milieu, quoique parlant la langue des indigènes
là-bas, cela peut toujours aider, mais, quand même, aucune
expérience. J'aurais cru, moi, que cela aurait peut-être
été préférable de maintenir le directeur de cabinet
qui était là. Je ne pense pas qu'il y ait obligation de changer
le directeur decabinet. Ce ne sont pas des cabinets politiques, les
directions générales du Québec. Ce sont des ambassades.
C'est bien différent.
Je pense qu'au niveau de la continuité et au niveau du soutien
à un nouveau délégué générai, cela me
serait apparu peut-être plus efficace ou, tout au moins, plus pertinent
que d'aller dans un engagement local, local étant relatif. Mais si cela
fait partie du ménage que vous voulez faire à la
délégation générale du Québec.
M. Rémillard: Si vous voulez dire un ménage et si
vous voulez faire référence à des éléments
politiques, regardez ce qu'on a fait jusqu'à présent en ce qui
regarde mon ministère et vous allez voir que des gens qui viennent des
cabinets politiques viennent d'avoir des nominations et je ne crois pas que ce
soit un élément... Pour nous, je peux vous assurer qu'il y a un
élément qui compte, c'est la compétence
essentiellement.
En ce sens, je peux vous dire que, de fait, le
délégué général à Paris est le seul
qui ait un chef de cabinet et M. Brunet devait rentrer au Québec l'an
dernier. Cela a été prolongé. Maintenant, il veut rentrer.
Écoutez, il faut respecter aussi le voeu et les intentions des gens dans
la mesure où les gens veulent rentrer et veulent venir au Québec.
Quand les gens sont en poste depuis un certain temps, c'est bon qu'ils
reviennent prendre contact avec la réalité du Québec.
Alors, il n'y a rien qui a été brusqué. Tout a
été fait très normalement. M. Brunet a collaboré
aussi au sommet sur la francophonie. Tous ces gens ont collaboré
entièrement avec nous et nous en sommes extrêmement heureux. Il
n'y a pas de problème à ce niveau.
M. Johnson (Anjou): Qui remplace M. Brunet, finalement? Quel est
le nom de la personne qui remplace M. Brunet?
M. Rémillard: M. Alain Massicotte.
M. Boulerice: Et c'est lui qui nous fait faire des
économies, comme vous le dites.
M. Rémillard: Bien, écoutez. Bien sûr que le
statut, je pense, administrativement parlant, n'est pas la même chose.
Donc, il y a des économies qui se font.
Une voix: D'accord.
M. Rémillard: Pourquoi refuserait-on de faire des
économies?
M. Boulerice: Est-ce qu'on peut avoir copie de son contrat? On
pourra voir de visu les économies et vous en féliciter
peut-être sans doute plus tard.
M. Rémillard: Si ce sont des choses qui se font, on va le
faire.
M. Boulerice: Cela se fait. C'est public.
M. Rémillard: On me dit qu'il n'y a pas de
problème. Je ne voudrais pas faire des choses qui ne se font pas, mais
les choses qui se font, c'est avec grand plaisir qu'on les fait... Il n'y a pas
de problème. (11 h 30)
M. Boulerice: M. le ministre, j'aimerais connaître dans
quelle enveloppe budgétaire se retrouvent les 1 450 000 $ qui ont
été demandés conjointement par le ministère des
Affaires culturelles et le ministère des Relations internationales afin
d'amorcer une véritable politique québécoise de diffusion
et de promotion de la culture québécoise à
l'extérieur du Québec.
M. Rémillard: On me dit que cela a été
abandonné. Il n'y a pas de suite à cela.
M. Boulerice: Vous avez abandonné?
M. Rémillard: C'est dans le plan de développement
et il n'y a pas eu de développement.
M. Boulerice: Je ne sais pas si c'est l'abandon... Votre
collègue des Affaires culturelles a répondu qu'elle n'avait
pas... J'espère que vous, au moins, vous avez lu le document. Vous
l'avez vu? Vous l'avez lu?
M. Rémillard: Ah oui!
M. Boulerice: Vous auriez été charitable de lui en
prêter une copie parce qu'elle a avoué, en commission
parlementaire, qu'elle ne l'avait malheureusement pas vu, ne l'avait pas lu, et
elle ne savait pas où il était. Dommage, si elle vous avait
parlé, vous auriez pu lui en prêter une copie. Donc, au chapitre
de la culture, ces 1 450 000 $ ne s'y retrouvent pas. Il n'y a que 450 000 $
qui ne sont pas des sommes neuves, mais qui proviennent de compressions qui ont
été faites à l'intérieur d'autres programmes au
ministère des Affaires culturelles. Promotion et diffusion de la culture
québécoise à l'extérieur du Québec: 500 000
$. Ce n'est pas demain la veille qu'on va obtenir les résultats qu'on
veut. Quand vous dites abandon, en fonction de votre réponse et en
fonction de la réponse de votre collègue des Affaires culturelles
ou même celle de votre collègue des Communications, je trouve que
vous abandonnez tous très facilement quand vient le temps de rencontrer
M. le président du Conseil du trésor.
M. Rémillard: Ce sont des abandons qui ne sont pas
vraiment des abandons parce que c'est un projet qui n'a jamais
été officiel comme tel et qui, finalement, est tombé en
cours de route. Voilà.
Arrêt des subventions aux collèges
Stanislas et Marie de France
M. Boulerice: II y a une coupure de 3 000 000 $ dans les
subventions accordées aux collèges Stanislas et Marie de France.
Est-ce que la coupure signifie que ces collèges privés
québécois ne seront plus aidés par le gouvernement du
Québec?
M. Rémillard: Écoutez, c'est intéressant
votre question. Tout d'abord, je vaudrais faire une petite remarque. Quand on
parle d'un titre comme 20 % de coupure, il faut penser qu'il faut nuancer un
peu. Ce n'est pas vraiment 20 % de coupure parce qu'il y avait au programme
budgétaire du ministère des Relations internationales des postes
qui vont simplement passer à d'autres instances gouvernementales. Ce
qu'on fait, on ne coupe pas vraiment l'essentiel du programme comme tel. Il ne
faut pas penser... Ce n'est pas 20 %, c'est beaucoup plus nuancé et,
entre autres, l'exemple que vous donnez est particulièrement
intéressant. On peut dire aussi, dans la même veine... On pourrait
penser que les 1 500 000 $ dépensés pour venir en aide aux
sinistrés du Mexique, de la Colombie ou d'ailleurs, comme ces
programmes, maintenant, ne s'appliquent plus, il y a une économie de 1
500 000 $.
Si on met cela ensemble, cela vous fait à peu près 5 000
000 $ qui sont simplement un transfert de fonds ou des fonds qui sont
récurrents et non récurrents. Alors, lorsqu'on parle de 20 %, il
faudrait peut-être tenir compte de cet élément. En ce qui
regarde les collèges Marie de France et Stanislas, vous savez que ce
sont des collèges français qui reçoivent une subvention
importante du gouvernement québécois. Ce n'est pas du
bilatéral parce que la France ne fait pas la même chose du
côté français, mais c'était une façon qui
dure depuis nombre d'années. Maintenant, on étudie la
possibilité de faire en sorte que ce budget passe à la
responsabilité d'un autre ministère qui, vraisemblablement,
pourrait être l'Éducation.
M. Boulerice: Vous avez l'accord de M. le ministre de
l'Éducation à savoir que c'est lui qui assumera les 3 000 000 $
et plus, enfin l'entité, au moins 3 000 000 $ pour Stanislas et Marie de
France.
M. Rémillard: Vous connaissez M. Ryan, il veut toujours
assumer ses responsabilités. Dans la mesure, bien sûr, où
ces collèges pourront répondre aux normes normales au
Québec pour recevoir des subventions comme institutions privées
d'enseignement, ils recevront, à ce moment-là, le même
traitement que les autres établissements québécois de la
part du ministère de l'Éducation.
M. Boulerice: Est-ce que le gouvernement français a
été prévenu de cette hypothèse nouvelle?
M. Rémillard: J'aurai l'occasion d'en discuter avec un
représentant du gouvernement français, et c'est une situation
qui, actuellement, est discutée entre le ministère de
l'Éducation, le MRI et différentes autres instances.
Il s'agit de ne rien brusquer. On n'est pas intéressé
à brusquer quoi que ce soit ou mettre en cause, même, les
existences de ces écoles, de ces collèges, mais bien de faire en
sorte que ce budget puisse appartenir à des instances qui sont plus
appropriées pour gérer de tels budgets. C'est tout.
M. Johnson (Anjou): Je dois comprendre de ce que vient de dire le
ministre que les gens de Stanislas et de Marie de France, de ces institutions
privées, y compris nos amis français qui les fréquentent,
qui les dirigent, qui y enseignent, ainsi que les nombreux
Québécoises et Québécois qui y suivent des cours,
peuvent être rassurés. Il n'y a pas de coupure de 3 000 000 $.
M, Rémillard: Voici, tout d'abord vous avez fait une
remarque en disant "les nombreux Québécoises et
Québécois", c'est intéressant de noter que 95 % des
étudiants qui sont dans ces collèges sont des
Québécois. Ce sont de jeunes Québécois et
Québécoises qui fréquentent ces collèges. Il s'agit
donc de faire en sorte que ce poste budgétaire puisse aller à un
ministère susceptible de gérer pleinement ce genre de budget. Il
faudra, bien sûr, que les collèges entament des
négociations avec le ministère de l'Éducation pour voir
dans quelle mesure ils peuvent se conformer à ses normes pour recevoir
ces subventions. Ce sont des choses que nous discutons actuellement, mais il ne
s'agit pas de mettre en cause des éléments fondamentaux en ce qui
regarde, bien sûr, l'éducation qu'on peut recevoir, ici, au
Québec dans ces établissements.
M. Boulerice: Vous n'excluez donc pas des coupures.
M. Rémillard: Écoutez! Là comme ailleurs,
vous savez, nous, au gouvernement, nous n'excluons pas les coupures.
M. Johnson (Anjou): Je voudrais simplement demander au
ministre... On comprend bien que Marie de France et Stanislas, dans la mesure
où ils dispensent de l'enseigne-
ment, sont comme toutes les autres boîtes d'enseignement
privées au Québec, des endroits où se dispense un
enseignement dans une très forte proportion, en l'occurrence près
de 90 %, à des Québécois comme c'est le cas de dizaines
d'autres institutions privées.
Cependant, Marie de France et Stanislas ont un historique de relations
entre la France et le Québec. Ce sont des établissements
administrés par des gens qui viennent de France. Est-ce que je
comprends, dans ce que le ministre nous dit, que, non seulement il n'y a pas de
coupure, que c'est envoyé à l'Éducation, mais qu'il les
traitera comme tous les autres établissements privés? Est-ce que
c'est bien ça?
M. Rémillard: Non...
M. Johnson (Anjou): Et son ministère n'entend pas tenir
compte du fait particulier de la spécificité de ces deux
établissements?
M. Rémillard: Non, ce n'est pas cela que j'ai dit. J'ai
dit que ce sera transféré au ministère de
l'Éducation et que le ministère de l'Éducation verra
à négocier avec ces gens, ces collèges, ces institutions,
la situation qu'il veut leur donner et que ces institutions veulent avoir,
aussi.
Moi, je ne suis pas ministre de l'Éducation. Je ne connais
même pas ses normes. Ce sera au ministre concerné de
négocier cette situation.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le ministre, en tant que ministre
responsable des relations du Québec avec le reste du monde, ne fera pas
des recommandations au ministre de l'Éducation quant au type de
traitement qu'il doit donner à ces deux établissements qui sont
très particuliers et qui ne sont pas des établissements
privés comme les "autres", en ce sens-là?
M. Rémillard: Comme je vous l'ai mentionné tout
à l'heure, cela relève des Relations internationales pour un seul
motif, finalement. C'est que l'enseignement qu'on donne là n'aboutit pas
au diplôme de collèges tels que nous les connaissons, ici, dans
notre système d'éducation.
C'est en ce sens-là que j'ai commencé à en discuter
avec M. Ryan et que nous allons trouver les solutions que M. Ryan voudra bien
appliquer, parce que c'est lui le ministre de l'Éducation, ce n'est pas
moi.
M. Boulerice: M. le ministre, la présence internationale
du Québec ne se fait pas uniquement par des délégations
générales et des délégués
généraux, elle peut se faire aussi par des individus, par des
professionnels. Vous n'êtes pas sans savoir, puisque vous y avez fait
allusion à la page 11, lorsque vous avez parlé de l'ONU, qu'il
existe une école pour l'ONU qui s'appelle UNIS, United Nations
International School, qui avait le privilège d'avoir, jusqu'à
très récemment, un directeur général qui
était canadien-français, québécois. Or, depuis
trois ans, il y a dans cette école trois enseignants en provenance du
Québec, privilège immense, d'ailleurs, quand on songe que 150
pays demandent chaque année d'y envoyer des enseignants originaires de
leur pays à leurs frais, etc.
Donc, il y a trois enseignants québécois qui enseignent
aux garçons et aux filles des diplomates et fonctionnaires, dont ceux
qui dirigeront sans aucun doute ces pays demain. Il y a actuellement
possibilité que l'on rappelle ces trois merveilleux ambassadeurs
officieux du Québec. Est-ce que vous avez l'intention d'intervenir
auprès de votre collègue, le ministre de l'Éducation, de
façon que les trois enseignants québécois soient maintenus
à UNIS?
M. Rémillard: Nous sommes en discussion
présentement avec le ministère de l'Éducation pour voir ce
qu'on peut faire. Je ne peux pas vous en dire plus long à ce moment-ci,
je ne sais pas si on pourra les maintenir, ce qu'on pourra faire, mais je
considère, bien sûr, qu'une présence
québécoise dans une instance de l'ONU est toujours très
importante. Nous voulons développer justement, nos relations avec l'ONU
et vous pouvez être assuré que je vais étudier la situation
à son mérite. J'ai déjà eu des discussions avec mon
collègue à ce sujet et j'en aurai d'autres, mais il n'y a rien
d'arrêté encore.
M. Johnson (Anjou): Je voudrais simplement ajouter que j'ai
été étonné de voir que le ministre, dans son texte
de présentation, parlait d'accentuer nos relations avec les Nations
Unies, à moins qu'il n'anticipe que le Québec y occupe un
siège bientôt. Je pense qu'encore une fois nos appétits et
nos objectifs de ce côté doivent être modestes et que c'est
un acquis considérable de voir qu'il y a trois enseignants qui
proviennent du Québec qui enseignent à UNIS. Pour une
économie de bout de chandelle de quelque 120 000 $, en rappelant ces
trois enseignants, le Québec perd une occasion extraordinaire qui ne se
représentera pas, hormis peut-être le jour où il y occupera
un siège, d'assumer une présence très concrète au
centre et au coeur même de l'activité, au moins de celle de
l'enseignement auprès de celles et ceux qui sont les enfants de ceux qui
dirigent un certain nombre de pays et qui, dans bien des cas, sont voués
à des carrières dans le secteur public, que ce soit la fonction
publique, car ce n'est pas la carrière politique, dans certains
pays.
Il nous apparaît important que cet
acquis de la présence de trois Québécois à
UNIS ne soit pas mis en péril par une vision à courte vue qui,
peut-être, nous amènerait à faire de grands discours sur
notre participation à l'ONU, et on perdrait peut-être un
acquis.
M. Rémillard: Je pourrais ajouter, cependant, qu'il ne
faut pas exagérer le rôle de ces gens. Ce sont des
éducateurs à l'école des Nations Unies; ce ne sont pas des
gens qui sont en place dans des endroits stratégiques. Mais je comprends
les préoccupations que vous avez et, comme je vous l'ai mentionné
tout à l'heure, j'ai déjà rencontré mon
collègue du ministère de l'Éducation et je dois le revoir
sur ce point.
Statut du Québec à Washington
M. Johnson (Anjou): Une dernière question, M. le
Président. Le ministre va comprendre que j'essaie de suivre un peu les
priorités géographiques qu'il a lui-même établies
dans son document en page 20. À Washington, où est-ce qu'on en
est rendu quant au statut, aux ressources, au titre de nos gens qui y
travaillent?
M. Rémillard: Nous avons, depuis la semaine
dernière, un conseiller à temps plein à Washington, qui
dépend de la délégation de New York et qui voit aux
intérêts du Québec directement de la capitale
américaine.
M. Johnson (Anjou): Le ministre sait sans doute - ou, en tout
cas, il aura l'occasion d'en discuter avec ses hauts fonctionnaires - qu'il se
pose un problème de statut quant à la présence
québécoise à Washington. Il n'est pas question dans
l'esprit des Américains de nous accorder un statut qui ressemblerait ou
s'apparenterait même vaguement à celui que nous avons à
Paris au niveau politique. Le Québec doit toujours avoir recours
à un certain nombre de pirouettes sur le plan administratif, donnant
tantôt le titre de conseiller en tourisme pour éviter de tomber
sous la loi des lobbyistes américains... Je voudrais simplement savoir
si le ministre a l'intention de régulariser cette situation. Dans quel
sens iront ses efforts, surtout à la lumière de
possibilités de négociations qui pourraient nous amener à
être intéressés à ce qui se passe au Sénat
américain de ce temps-ci? (11 h 45)
M. Rémillard: D'abord, je dois vous dire que ce n'est pas
la même personne qui est conseiller au tourisme. Nous avons un bureau
à cet effet. Je dois vous dire qu'on n'a pas ouvert une nouvelle
délégation. C'est strictement quelqu'un, un conseiller de New
York qui, maintenant, est en place d'une façon permanente à
Washington.
M. Johnson (Anjou): II est dans le même édifice
physique que le conseiller au tourisme.
M. Rémillard: Oui, dans le même édifice.
Le Président (M. Fïlion): Cela va? M. le
député de Mille-Îles.
Retombées économiques des
délégations à l'étranger
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Il me
paraît, M. le ministre, à la lecture du document sur les
crédits qui a été déposé ce matin en
commission parlementaire, que votre ministère se situe au même
chapitre que tous les autres ministères du Québec eu égard
à la conjoncture budgétaire difficile. Je lis à la page 10
de votre discours d'ouverture que le nouvel objectif de votre ministère,
c'est "de créer une image de marque pour le Québec, faire
ressortir notre spécificité culturelle pour mieux faire valoir
notre potentiel économique et technique". J'aimerais savoir, M. le
ministre, lorsqu'on parle des délégations du Québec
à l'étranger, s'il existe au ministère des Relations
internationales une grille de décision des méthodes
d'évaluation quant à la performance des délégations
du Québec à l'étranger en termes de retombées
économiques ou techniques pour le Québec. Si je comprends bien,
les objectifs spécifiques de votre ministère sont avant tout de
créer des avantages économiques et techniques pour le
Québec. J'aimerais savoir si, lorsqu'il y a telle
délégation à tel endroit... Vous avez parlé d'une
future délégation en Afrique. Donc, vous envisagez un
marché avec des retombées économiques et techniques
éventuelles pour le Québec. Si vous envisagez la fermeture de
telle ou telle délégation à tel autre endroit, c'est donc
qu'il y a eu une analyse de performance qui a été faite.
J'aimerais que vous nous exposiez la grille de décision de votre
ministère relativement à nos antennes sur le plan international,
c'est-à-dire nos délégations à
l'étranger.
M. Rémillard: Sur ce point, M. le député, je
dois vous dire que nous travaillons en étroite collaboration avec le
ministère du Commerce extérieur, le ministère de
l'Industrie et du Commerce et le ministère du Tourisme pour
apprécier, à leur juste valeur, les perspectives
économiques qu'on peut avoir dans différents pays.
Cependant, il ne faut pas faire de cloison étanche entre
l'activité économique et l'activité culturelle,
c'est-à-dire que nous, comme ministère des Relations
internationales, avons à établir la politique internationale du
Québec et le cadre d'action à l'intérieur
duquel les ministères sectoriels peuvent agir pour faire valoir
la spécificité du Québec. Quand je pense à la
spécificité du Québec, bien sûr, je pense à
la spécificité culturelle, mais aussi à la
spécificité économique.
Lorsque qu'une ambassade du Canada fait valoir les intérêts
de la fédération du Canada, cette ambassade peut très bien
faire valoir les intérêts du Québec. Cependant, il arrive
dans certains cas que deux, trois ou plus de provinces sont en concurrence
entre elles pour obtenir un contrat important dans un pays. C'est là que
c'est important et c'est là que la différence peut se faire,
lorsque nous avons quelqu'un qui est en place, qui connaît le pays, qui a
déjà ses contacts et qui peut faire cette petite
différence pour que ce soit le Québec qui rapporte ce
contrat.
C'est dans ce contexte que nous développons une expertise tout
à fait particulière au Québec, capable de faire profiter
le Québec de ces marchés internationaux. Il est certain qu'une
bonne action d'ordre commercial doit tout d'abord se situer dans un cadre
beaucoup plus large d'échanges culturels. C'est lorsqu'on se
connaît bien qu'on peut mieux échanger et avoir des relations
commerciales satisfaisantes et intéressantes pour le Québec.
En ce qui regarde l'Afrique, ce premier sommet de la francophonie qui a
eu lieu à Paris en février dernier nous a amenés à
vérifier les possibilités du Québec en Afrique. L'Afrique
est un très grand marché potentiel pour le Québec, un
marché commercial de très grande importance. Nous sommes
présents en Afrique depuis maintenant plusieurs années, mais,
bien avant d'avoir des délégations, nous l'étions avec les
frères des Écoles chrétiennes, nous l'étions avec
nos religieux, et, lorsqu'on rencontre des Africains, très souvent ils
nous disent: Oui, j'ai été éduqué par un
frère des Écoles chrétiennes. J'ai été
éduqué par soeur Unetelle.
Nous avions là des ambassadeurs déjà depuis
très longtemps. Nous avons maintenant la possibilité
d'établir des liens diplomatiques plus directs, plus étroits,
avec beaucoup de pays africains, ce que nous allons faire dans un avenir
prochain. Il est certain que c'est un marché très prometteur.
Déjà, plusieurs de nos firmes internationales font des affaires
très importantes en Afrique et nous allons développer ce
marché en ne négligeant pas, bien sûr, les relations
culturelles.
Quant à savoir comment nous apprécions la valeur
économique de nos marchés, des rapports bimestriels nous
parviennent et, à la lumière de ces rapports, nous pouvons
apprécier véritablement l'impact économique que peut avoir
chacune de nos délégations.
M. Bélisle: Une autre question, M. le
Président.
Le Président (M. Filion): M. le député de
Mille-Îles.
M. Bélisle: Je lisais à la page 20 du cahier des
crédits de votre ministère, M. le ministre, que la ville de
Québec sera le siège, en février 1987, d'un colloque sur
l'informatique municipale. J'aimerais savoir, toujours dans la perspective des
retombées économiques pour le Québec et également
du sommet de la francophonie qui va venir bientôt, si vous avez
déjà à votre ministère des études quant aux
retombées économiques que rapporteront ces deux sommets
internationaux qui auront lieu au Québec à très court
terme?
M. Rémillard: On me dit que ce sont les ministères
du Tourisme et du Commerce extérieur qui font ces analyses et qui
doivent nous les faire parvenir dans un avenir prochain.
M. Bélisle: Merci, M. le ministre. Adoption des
crédits
Le Président (M. Filion): Est-ce que les programmes 1, 2
et 3, et leurs éléments, sont adoptés?
M. Johnson (Anjou): Adopté.
Le Président (M. Filion): Adopté. Est-ce que les
crédits budgétaires du ministère des Relations
internationales...
M. Johnson (Anjou): Adopté sur division. Le
Président (M. Filion): Sur division.
M. Johnson (Anjou): Pour manifester notre désaccord avec
l'amputation de 20 %.
Une voix: Charcuterie.
Le Président (M. Filion): Est-ce que l'ensemble des
crédits budgétaires du ministère des Relations
internationales pour l'année financière 1986-1987 sont
adoptés? Sur division.
J'appelle maintenant le programme 4 du ministère du Conseil
exécutif, soit les crédits du ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes
pour l'année financière 1986-1987. Je crois comprendre que le
ministre voudrait adresser à la commission certaines remarques
préliminaires.
M. Rémillard: Oui, si vous voulez.
M. Johnson (Anjou): Nous pouvions normalement aller
jusqu'à 12 h 9. Nous
n'avons pas d'objection à peut-être continuer
jusqu'à 12 h 15 pour que le ministre ait ses 20 minutes, s'il en a
besoin.
Le Président (M.Filion): ...M. le chef de l'Opposition,
que vous consentiriez à ce que le ministre ait la chance de terminer
l'ensemble de son exposé.
M. Rérnillard: II y a quelque chose que je ne comprends
pas. Je pense que cela peut prendre un peu plus d'une vingtaine de minutes.
Est-ce qu'on pourrait proposer simplement d'ajourner nos travaux? On pourrait
prolonger cet après-midi. Si c'était possible de prolonger cet
après-midi...
Le Président (M. Filion): Si vous me permettez, M. le
ministre, on avait déjà...
M. Johnson (Anjou): Si vous me te permettez, encore une fois, je
n'ai pas d'objection à ce que le ministre commence maintenant, quitte
à poursuivre jusqu'à 12 h 15 ou 12 h 20. Je pense que cela nous
permettrait d'avoir un premier tour de piste. Étant donné que
nous n'avons que deux heures cet après-midi et que la section des
affaires canadiennes porte sur beaucoup beaucoup de choses - c'est un domaine
extrêmement riche sur lequel nous avons beaucoup de questions à
poser - nous n'avons pas d'objection à amputer sur l'heure du lunch
plutôt que de s'imaginer qu'on va retarder cela. Ce sera un peu plus
compliqué à 18 heures. Il y a le Conseil des ministres pour le
ministre auquel il devra peut-être aller à partir de 18 heures. Je
préférerais que ce soit maintenant. Je pense que ce serait plus
simple.
M. Rémillard: II y a deux problèmes qui se posent
actuellement. D'abord, mes fonctionnaires; on leur avait dit que c'était
à 14 heures. C'était entendu, 14 heures pour les affaires
canadiennes. Il faut que tout le monde soit ici.
M. Johnson (Anjou): Tout simplement l'énoncé
préliminaire du ministre. On ne commencera pas les questions ce midi, je
comprends cela.
M. Rémillard: Oui, mais l'exposé
préliminaire, M. le Président, est-ce que ce ne serait pas une
bonne chose que je puisse le donner et que tout de suite on puisse en discuter?
Je vais faire mes remarques, ensuite on va retourner pour le déjeuner,
et je vais revenir. Est-ce que ce ne serait pas mieux d'ajourner tout de suite
et de rallonger notre période cet après-midi d'autant? Je pense
que ce serait beaucoup plus efficace et ce serait plus intéressant pour
tout le monde. 11 est déjà 11 h 55, 11 h 56. C'était
convenu comme tel. Alors, pourquoi ne pas respecter cela? J'aimerais mieux, M.
le Président, qu'on fasse l'exposé cet après-midi.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il me semble que le
ministre n'a pas besoin de ses fonctionnaires pour faire son exposé
préliminaire. II doit savoir ce que va être son exposé
préliminaire. Je présume qu'il a d'ailleurs préparé
un texte, comme il l'a fait dans le cas des Relations internationales. Il nous
a livré un texte où, de toute évidence, il avait fait le
tour de l'ensemble de la problématique en matière internationale.
Je présume que ce sera la même chose pour le Secrétariat
aux affaires intergouvernementales canadiennes. Évidemment, je ne ferai
même pas ma réaction ce matin, s'il le désire. Je pourrais
attendre cet après-midi et, ensuite, on pourra poser les questions quand
ses fonctionnaires l'accompagneront.
Le Président (M. Filion): M. le ministre et M. le chef de
l'Opposition, si vous me le permettez. On a déjà quinze minutes
en banque.
M. Rémillard: Écoutez! On n'est pas prêt
à procéder comme ça, M. le Président. D'abord parce
que ce sont simplement des notes que je veux livrer et on s'était dit
jusqu'à midi. Personnellement, quelqu'un m'attend à 12 h 15. J'ai
une rencontre à mon bureau. Si vous le permettez, je ne vois pas quel
problème cela pourrait causer que l'on puisse commencer normalement
à 14 heures, quitte à prolonger si on veut. Je n'ai pas
d'objection, mais qu'on s'en tienne donc à ce qui a été
décidé. Ce qui avait été décidé, M.
le Président, c'est de siéger jusqu'à midi, ensuite
d'ajourner pour le déjeuner et de reprendre après. J'aimerais
mieux qu'on procède comme ça. Je pense qu'on pourrait en tirer
plus de profit. De toute façon, il n'y a pas grand-chose à
décider et à discuter aux Affaires intergouvernementales
canadiennes. Cela va aller rapidement.
Le Président (M. Filion): Si vous me le permettez, M. le
député de Mille-Îles, M. le ministre et M. le chef de
l'Opposition. D'une part, on avait décidé d'arrêter nos
travaux à 12 h 9. Deuxièmement, pour cet après-midi, M. le
ministre, nous dépendons de l'avis que le leader pourrait nous
transmettre. Nous fonctionnons ici ce matin de 10 h 9 à 12 h 9 sur
convocation, mais nous n'avons pas reçu d'avis du leader pour cet
après-midi. Je ne crois pas que, de toute façon, ce soit à
14 heures cet après-midi qu'on siège. Le mercredi, la
période des questions est à 15 heures. Donc, ce sera après
la période des affaires courantes à l'Assemblée nationale.
Maintenant, cela étant dit...
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous permettez. Je
comprends que, ultime-ment, avec 99 députés, legouvernement peut bien décider ce qu'il veut et nous l'imposer.
Jetrouvais que c'était peut-être normal que le ministre
fasse son exposé préliminaire, en présumant qu'il est
prêt. Deuxièmement, tout en comprenant qu'ultimement il peut
décider de nous imposer de ne pas le faire et de nous demander un
délai additionnel à l'heure du souper, je dirai cependant que je
n'accepte pas comme raison qu'il ait un rendez-vous à 12 h 15. Je suis
sûr que le ministre ne s'est peut-être pas attardé au
caractère un peu étonnant de ce qu'il nous a dit. Quand le
Parlement siège, le Parlement a priorité. J'ai toujours
donné priorité au Parlement quand j'étais ministre et je
suis sûr que le ministre saura donner priorité à
l'Assemblée nationale.
M. Rémillard: M. le Président, je dois dire que moi
aussi je donne priorité au Parlement. Jesuis conscient que le
chef de l'Opposition a toujours donné priorité au Parlement.
C'est quelque chose qu'il faut continuer. Je sais que le chef de l'Opposition a
toujours donné priorité aussi aux ententes qui ont
été faites entre les leaders parlementaires des deux
côtés et respecté ces ententes. C'est dans ce cadre que
j'ai pris un engagement, bien sûr, parce qu'il y a une entente qui a
été conclue entre les deux leaders en ce sens que c'est à
12 heures qu'on termine. Alors, je me suis simplement fondé sur ce
principe et je voudrais finalement demander à l'Opposition qu'on puisse
le respecter. On pourrait commencer tout simplement d'une façon bien
calme, bien détendue. J'ai appris qu'on n'était pas devant les
caméras, comme l'a dit le chef de l'Opposition au départ, que
c'est très détendu et que, pour les affaires canadiennes, ce sera
un échange de bons procédés qui ira très
rapidement. Alors, on pourrait commencer cela tranquillement tout à
l'heure. Peut-être que cela sera beaucoup plus bénéfique
pour le respect de la démocratie.
M. Johnson (Anjou)i M. le Président, je prends acte de la
difficulté qu'on a à obtenir la collaboration du ministre sur
cette question aujourd'hui. Si vous désirez ajourner nos travaux, on va
ajourner.
Le Président (M. Filion): M. le député de
Mille-Îles, est-ce que, compte tenu de ce que le chef de l'Opposition
vient de dire, vous voulez quand même intervenir?
M. Bélisle: Oui. Dans la même veine de respecter le
Parlement, de donner priorité au Parlement et aussi, peut-être, de
respecter le droit des parlementaires qui siègent à cette
commission d'avoir l'information qui leur est déposée,
pourrait-on demander, soit au chef de l'Opposition ou au ministre, s'ils ont
des discours d'ouverture ou des remarques préliminaires écrites
cet après-midi, de nous en faire faire des copies pour qu'on puisse
suivre au moins au début? Cela serait tout au moins une des raisons pour
lesquelles on pourrait ajourner à 14 heures. C'est une demande que je
fais.
Le Président (M. Filion): Alors, j'ajourne nos travaux
sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 1)
(Reprise à 16 h 35)
Crédits du ministre
délégué aux Affaires
intergouvemementales canadiennes
Le Président (M. Filion): Je rappelle le mandat de la
commission des institutions qui est de procéder à l'étude
des crédits budgétaires du ministère des Relations
internationales et du programme 4 du ministère du Conseil
exécutif. Nous avons procédé ce matin à l'adoption
des crédits budgétaires du ministère des Relations
internationales. J'ai déjà appelé le programme 4 du
ministère du Conseil exécutif, soit les crédits du
ministre délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes pour l'année financière 1986-1987.
Une entente étant intervenue entre l'Opposition et le parti
ministériel, je comprends de nos travaux qu'ils devront s'ajourner
à 18 h 45. J'inviterais donc sans plus tarder le ministre à
adresser ses remarques préliminaires à la commission.
Je profite également des quelques secondes d'intervalle pour
signaler aux gens qui sont avec nous aujourd'hui que tous les fumeurs comme moi
doivent s'abstenir de le faire, le salon bleu n'ayant pas prévu de
commodités pour les gens qui ne se sont pas débarrassés de
cette mauvaise habitude.
M. le ministre.
Déclarations liminaires
M. Gil
Rémillard
M. Rémillard: M. le Président, créé
en 1984, Je Secrétariat aux Affaires intergouvernementales canadiennes a
comme mandat principal la coordination des activités du gouvernement du
Québec dans ses rapports avec le gouvernement fédéral et
les gouvernements des provinces du Canada. Pour assumer cette
responsabilité, le secrétariat comporte cinq directions,
c'est-à-dire la planification et recherche, les affaires
économiques et financières, les affaires sociales,
éducatives et culturelles, les
affaires institutionnelles et constitutionnelles, la francophonie,
coopération et coordination des bureaux.
Le secrétariat a la responsabilité des bureaux du
Québec au Canada qui sont situés à Edmonton, Toronto,
Ottawa et Moncton. Ces bureaux ont pour mandat de promouvoir les
intérêts du Québec de même que de faciliter les
relations avec les autres gouvernements. De plus, ils sont d'une aide
précieuse au secrétariat pour assurer sa reponsabilité
quant aux relations avec les francophones hors Québec de même
qu'en ce qui regarde les accords de coopération avec les autres
provinces du Canada.
Le budget du secrétariat est sensiblement le même que celui
de l'an dernier, soit 7 518 900 $ comparativement à 6 799 900 $ en
1985-1986. Signalons ici que le budget de l'an dernier a été
rajusté au cours de l'année à 7 480 400 $.
Le 2 décembre dernier, les Québécois ont
exprimé clairement leur volonté d'avoir un gouvernement capable
d'entretenir avec le gouvernement fédéral des relations qui
tiennent compte à la fois de l'appartenance du Québec à la
communauté canadienne et de son plein épanouissement
économique, culturel et social dans le cadre d'une constitution
renouvelée. Les conditions de l'adhésion du Québec
à l'accord constitutionnel de 1982 ont été clairement
énoncées dans le programme du Parti libéral. Elles sont,
notamment, la reconnaissance du Québec comme société
distincte, l'orientation et l'obtention d'un droit de veto pour le
Québec dans la formule d'amendement, une limite au pouvoir
fédéral de dépenser, un encadrement, la confirmation
constitutionnelle des droits du Québec en matière d'immigration
et la participation du Québec à la nomination des juges à
la Cour suprême.
Fort de ce mandat clair que lui a confié la population
québécoise, le gouvernement a immédiatement repris le
dialogue avec le gouvernement fédéral en confirmant sa
réelle détermination d'en arriver à une entente sur le
plan constitutionnel. À plusieurs reprises, le premier ministre du
Canada, M. Brian Mulroney, a manifesté son intention de négocier
avec le gouvernement du Québec les changements constitutionnels qui lui
permettraient de signer "avec honneur et enthousiasme". Je me
réfère au fameux discours de M. Mulroney, à
Sept-Îles, en campagne électorale, concernant la Loi
constitutionnelle de 1982. Plusieurs provinces ont d'ailleurs manifesté
leur intérêt quant à une éventuelle reprise des
négociations dans le dossier constitutionnel qui pourrait amener le
Québec à adhérer à la Loi constitutionnelle de 1982
et ainsi compléter le compromis inachevé de 1982.
Compte tenu de l'importance qu'attache le nouveau gouvernement du
Québec au dossier constitutionnel, les principaux mécanismes ont
déjà été mis en place afin d'assurer que le
Québec s'engage dans ce dossier avec toute la préparation requise
et nécessaire. C'est ainsi qu'un comité spécial du Conseil
des ministres a été formé à cette fin et sera
responsable de définir les politiques, les orientations et les
stratégies pertinentes. Sous la présidence du premier ministre,
ce comité est composé du ministre délégué
aux Affaires intergouvernementales canadiennes, du ministre de
l'Éducation, du ministre de la Justice et, au besoin, d'autres
ministres.
En outre, un groupe de travail a été mis en place au sein
du secrétariat dans le but d'effectuer des études
appropriées et d'établir des liaisons intergouvernementales
nécessaires à la bonne évolution de ce dossier. Ces
groupes de travail s'appuieront, entre autres, sur des études
spécifiques effectuées par différents spécialistes
chargés d'examiner en profondeur les conséquences
politico-juridiques d'un certain nombre de sujets fondamentaux comme, entre
autres, le préambule de la loi constitutionnelle de 1982, la formule
d'amendement, la Cour suprême, la charte des droits, les droits
linguistiques, l'immigration, etc. Ces études nous permettront de mieux
cerner dans leur juste perspective les éléments majeurs d'une
telle entente constitutionnelle pour le Québec.
La protection des droits et libertés fondamentales des
Québécois et Québécoises est une priorité
pour le nouveau gouvernement du Québec. C'est ainsi que le gouvernement
a pris la décision de ne plus avoir recours systématiquement
à la clause "nonobstant" qui soustrayait toutes les lois
québécoises à l'application des articles 2 et 7 à
15 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Parmi ces droits et libertés fondamentales, on retrouve notamment
le droit à la vie, le droit à ta sécurité de sa
personne, le droit à un procès juste et équitable, le
droit à l'égalité. Cette première décision
du nouveau gouvernement québécois est la conséquence
directe de ses engagements pris lorsqu'il formait l'Opposition et lors de la
dernière campagne électorale.
En agissant ainsi, notre gouvernement ne faisait que permettre aux
Québécois et Québécoises de
bénéficier des mêmes droits que les autres Canadiens. Il
est bien entendu, comme le spécifie la décision du Conseil des
ministres, que le gouvernement pourra avoir recours à la clause de
dérogation lorsque les intérêts des Québécois
seront en cause. De plus, évidemment, cela ne constitue absolument en
rien une acceptation de la loi constitutionnelle de 1982.
Un autre dossier majeur a retenu l'attention du secrétariat au
cours des derniers mois, celui de la libéralisation des échanges
avec les États-Unis. C'est en
septembre dernier que le premier ministre du Canada annonçait
l'intention de son gouvernement d'entreprendre des négociations à
cette fin entre le Canada et les États-Unis. L'importance de ce dossier
pour l'avenir économique, social et culturel du Québec ne fait
aucun doute. Aussi, le secrétariat est-il déjà
engagé dans ce dossier en concertation avec les autres intervenants du
gouvernement et, en particulier, avec le ministère du Commerce
extérieur.
Le mandat du secrétariat est relié plus
spécifiquement au respect des compétences des provinces en ces
matières et à la définition des modalités
d'adhésion du Québec à un éventuel traité de
libéralisation des échanges entre les États-Unis et le
Canada. On se rappellera qu'à la suite de la conférence des
premiers ministres à Halifax, en novembre dernier, les dix provinces se
sont entendues, se sont vu reconnaître par Ottawa le principe d'une
pleine participation aux négociations. La réelle signification de
cette pleine participation, cette expression "pleine participation"
utilisée par le premier ministre du Canada reste toutefois à
définir, à préciser dans sa réelle signification.
La position du Québec a été clairement stipulée.
Elle se résume de la façon suivante:
Premièrement, le gouvernement du Québec ne s'oppose pas
à l'amorce de négociations commerciales avec les
États-Unis.
Deuxièmement, le gouvernement du Québec appuie les autres
provinces dans leur effort pour faire reconnaître le principe de la
pleine participation. Concrètement, une telle reconnaissance implique,
tout d'abord, que l'on tienne nettement et effectivement compte des
intérêts provinciaux dans l'établissement du mandat
canadien de négociations, de même qu'au cours des
négociations elles-mêmes.
Deuxièmement, que les intérêts du Québec ne
se limitent pas au domaine de compétence provinciale, mais qu'ils
incluent toutes les questions qui peuvent influencer l'avenir économique
du Québec.
Troisièmement, que le gouvernement du Québec,
réserve sa position sur les résultats globaux et particuliers des
négociations avec les États-Unis.
La troisième considération de notre politique concernant
les négociations relativement à un marché plus libre avec
les États-Unis est à savoir que la formule qui permettrait aux
provinces d'assurer cette participation, mes collègues des autres
provinces et moi-même avons confié à M. Getty, premier
ministre de l'Alberta le soin de la négocier avec M. Mulroney dans
toutes ses modalités utiles pour qu'il puisse ensuite nous faire rapport
et qu'on puisse en discuter.
Pour le Québec, cette pleine participation signifie qu'il faudra
tenir compte de ces intérêts dans l'établissement du mandat
canadien de négociations. Elle signifie également que les
intérêts du Québec ne se limitent pas au domaine de
compétence provinciale, mais qu'il inclut toutes les questions qui
peuvent influencer son avenir économique. Parmi les
événements qu'il importe en outre de signaler, on peut
également mentionner la concrétisation de diverses ententes
auxiliaires qui résultent de l'entente-cadre de développement
économique et régional signé avec le gouvernement
fédéral. Cette entente-cadre a permis aux deux gouvernements
d'identifier les possibilités de développement économique
et d'entreprendre conjointement une série de mesures précises par
la voie d'ententes auxiliaires.
Quatre ententes auxiliaires sont ainsi intervenues au cours de 1985-1986
dan3 les secteurs suivants: le développement forestier, pour 300 000 000
$; le développement technologique et scientifique, pour 100 000 000 $;
le développement minéral, pour 100 000 000 $; et le
développement des transports, pour 170 000 000 $. Au terme de ces
ententes, les sommes versées sont partagées à parts
égales entre les deux gouvernements - le gouvernement provincial et le
gouvernement fédéral. Jusqu'à présent huit ententes
auxiliaires d'une durée de cinq ans ont été conclues pour
un total de 1 200 000 000 $. L'accord Canada-Québec sur la formation
professionnelle des adultes, expirant le 31 mars dernier, a donné lieu
à de nombreuses discussions. Des négociations se poursuivent
toujours, et une entente semble sur le point d'être signée
prochainement.
Quant aux programmes de création d'emplois, un accord est
intervenu à ce sujet. En ce qui concerne le dossier constitutionnel
autochtone, il a fait l'objet de plusieurs rencontres. Au cours de la
conférence des ministres qui s'est tenue le mois dernier à
Ottawa, j'ai rappelé au nom du gouvernement que le Québec ne
reconnaît pas la Loi constitutionnelle de 1982 mais, quand même, se
déclare favorable à la reconnaissance constitutionnelle du droit
des autochtones à l'autonomie gouvernementale sous réserve
d'ententes avec les provinces concernées.
J'ai précisé aussi que le Québec entendait jouer un
rôle plus actif dans ces discussions, notamment, en ce qui concerne les
solutions à apporter aux problèmes constitutionnels, juridiques
et financiers inhérents à la conclusion d'ententes avec les
autochtones.
La situation des francophones hors Québec est une
préoccupation majeure du gouvernement du Québec. Nous entendons
jouer pleinement notre rôle de foyer principal de la francophonie au
Canada et en Amérique. L'actuel gouvernement du Québec,
en collaboration avec les gouvernements provinciaux, peut agir d'une
façon d'autant plus efficace, face aux problèmes que peuvent
éprouver les francophones hors Québec, qu'il n'est pas en
contradiction, comme l'était l'ancien gouvernement, avec ses politiques
en particulier en ce qui regarde sa clause Québec dont l'application du
principe aurait causé des conséquences graves pour ies
francophones hors Québec. Les activités de coopération
permettent au Québec d'assurer son rayonnement dans les autres provinces
canadiennes, de favoriser la connaissance réciproque des
Québécois et des résidents des autres provinces, de
promouvoir les échanges de vue et d'expertise ainsi que de contribuer
à l'épanouissement de la langue et de la culture française
ailleurs au Canada. Les projets qui ont pu être réalisés
grâce à ce programme se sont situés principalement dans les
domaines de l'éducation, de la culture et des communications.
En résumé, quelles sont les perspectives qui s'ouvrent
à nous dans le domaine des affaires intergouvernementales en 1986-1987?
Ainsi qu'il l'annonçait dans son discours d'ouverture, le gouvernement
entend mener à terme les négociations avec le gouvernement
fédéral pour adhérer, sur la base des conditions
déjà indiquées, à la Loi constitutionnelle de 1982,
modifiée en fonction des revendications du Québec et de la
reconnaissance des droits historiques du Québec.
Le gouvernement s'engage à développer, avec le
gouvernement fédéral et les autres gouvernements provinciaux des
relations harmonieuses et positives avec, comme dominante, la défense
vigoureuse des intérêts propres au Québec tout en
travaillant à améliorer la situation des francophones hors
Québec et l'ensemble du fonctionnement de la Fédération
canadienne.
Cet objectif s'inscrira certes au premier rang des priorités du
secrétariat dont j'ai la responsabilité. Il rejoint d'ailleurs
une préoccupation maintes fois exprimée par le premier ministre
du Canada pour la réconciliation nationale. Celle-ci ne saurait, bien
sûr, se concevoir sans l'accord du Québec à la Loi
constitutionnelle de 1982. Le premier ministre du Québec, pour sa part,
émettait le souhait que nous puissions présenter tout d'abord
devant l'Assemblée nationale des propositions dans les mois qui
viennent.
Dans cette perspective, le gouvernement a mis en place, comme je vous
l'ai exposé, les mécanismes requis pour faire en sorte que ce
dossier d'une portée considérable pour l'avenir du Québec
puisse comporter les meilleures garanties de succès. On sait que te
présent gouvernement a mis au premier rang de ses préoccupations
la relance de la situation économique et financière du
Québec. C'est pourquoi, en concertation avec les autres
ministères québécois, le secrétariat proposera au
gouvernement fédéral les voies et moyens d'une meilleure
coordination au niveau du développement économique et
régional du Québec. Le secrétariat entend y consacrer une
part importante de ses efforts et de ses ressources.
En gardant ces faits à l'esprit, le gouvernement du Québec
tient à faire savoir qu'il ne s'oppose pas à l'amorce des
négociations commerciales avec les États-Unis et il appuie les
autres provinces dans leur effort pour faire reconnaître le principe de
la pleine participation des provinces dans le cadre de ces éventuelles
négociations. Il exige toutefois que l'on tienne compte des
intérêts provinciaux dans l'établissement des mandats de
négociation et qu'aucune décision qui puisse le concerner ne soit
prise sans son consentement.
En 1986-1987, M. le Président, le secrétariat intensifiera
ses efforts dans la poursuite des négociations de plusieurs ententes
entre le Québec et Ottawa, notamment dans les domaines du financement de
l'enseignement postsecondaire, du dossier constitutionnel autochtone, de la
culture et des communications. On se rappellera qu'en février dernier le
ministre des Finances du Canada a déposé une loi visant à
réduire les taux de transfert aux provinces. Cette réduction
entraînera un manque à gagner pour le Québec, d'une
façon générale, de l'ordre de 2 000 000 000 $ d'ici
à 1990-1991. Ce sont l'enseignement postsecondaîre et la
santé qui feraient les frais de ces coupures.
Le gouvernement du Québec juge ces coupures inacceptables et
injustifiées. Il s'inquiète grandement des conséquences de
cette décision et est fermement déterminé à faire
toutes les démarches nécessaires pour que les
Québécois et les Québécoises reçoivent leur
juste part dans ces deux domaines essentiels à l'épanouissement
de la collectivité québécoise.
Quant au dossier autochtone, il fera à nouveau l'objet d'une
conférence des ministres en juin prochain. Le Québec ne sera
cependant en mesure de signer aucun accord constitutionnel tant que la
situation à l'égard de la loi constitutionnelle de 1982 ne sera
pas normalisée. Dans le domaine culturel, la prochaine année sera
marquée de nombreuses interventions fédérales. En effet,
Ottawa songe à publier un livre vert sur la politique culturelle
canadienne. Dans le domaine des communications, par ailleurs, le gouvernement
fédéral a entrepris un vaste processus de révision des
politiques nationales des télécommunications qui comportera
vraisemblablement des impacts politiques, sociaux et économiques qu'il y
aura lieu de bien évaluer. Il importera au gouvernement du Québec
d'être vigilant dans ces deux
domaines de juridiction qui lui sont propres à bien des
égards.
De 1986 a 1987, le secrétariat, ainsi que nous l'avons
signalé, maintiendra ses budgets, tout en les rationalisant, en retenant
le principe d'une meilleure définition des besoins des
communautés francophones du Canada conjointement avec celles-ci. C'est
dans cette perspective que nous avons effectué certains changements
à l'intérieur des structures du secrétariat. Nous avons
rattaché la direction de la francophonie et de la coopération
à la direction de la coordination des bureaux. Cela s'est fait dans le
cadre d'une décentralisation de notre politique à l'égard
de la francophonie et d'un rapprochement des bureaux par rapport à la
clientèle francophone sur leur territoire. Cette dernière
profitera sûrement du fait que son interlocuteur québécois
sera plus près d'elle, donc à même de mieux évaluer
ses besoins propres et de prendre plus rapidement des décisions la
concernant.
Signalons enfin que les responsabilités accrues qu'on entend
donner aux bureaux du Québec témoignent éloquemment de
l'importance du rôle que nous leur reconnaissons. Les orientations dont
je viens de vous rendre compte sauront, je l'espère, illustrer la
nouvelle attitude du Québec dans le domaine des relations
fédérales-provinciales, fondée sur le respect mutuel des
ordres de responsabilité des uns et des autres de même que sur le
respect des droits historiques du Québec. Cette attitude fondée
sur une appréciation claire et réaliste des objectifs se veut
active et constructive.
Voilà, M. le Président, une présentation
générale des objectifs du Secrétariat aux affaires
intergouvernementales canadiennes pour la prochaine année.
Le Président (M. Filion): Merci, M. le ministre. M. le
chef de l'Opposition.
M. Pierre Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): Merci, M. le Président, Permettez-moi
d'abord de remercier te ministre de l'exposé qu'il vient de faire. Je
dois constater cependant que le ton était légèrement moins
enthousiaste que celui que j'ai entendu ce matin en matière de relations
internationales et je me demande pourquoi. Peut-être qu'à
l'occasion de la discussion que nous aurons, nous pourrons comprendre
pourquoi.
M. le Président, permettez-moi aussi de mentionner et de
remercier les fonctionnaires qui accompagnent le ministre qui, j'en suis
convaincu, ont eu à travailler très fort pour préparer ces
crédits. J'ai déjà été témoin de leur
travail alors que j'occupais le poste que le ministre occupe en ce moment. Je
pense qu'il peut compter sur le dévouement, la loyauté et la
très grande compétence de l'équipe du secrétariat
qui, comme on le sait, a été mise sur pied il y a environ deux
ans et dont j'ai eu l'honneur de présider à la
création.
Est-il besoin de rappeler, M. le Président, un certain nombre des
articles de la Loi sur le ministère du Conseil exécutif quant au
mandat du ministre? Je pense qu'il n'est pas inutile de les
répéter.
L'article 3.2 prévoit que le ministre conseille le gouvernement
sur toute question qui a trait aux relations intergouvernementales canadiennes;
"3.3 que le ministre, en accord avec les ministères et organismes
intéressés, a pour fonction de favoriser le développement
culturel, économique et social des Québécois par
l'établissement de relations intergouvemementales au Canada; "3.5 le
ministre, dans la conduite des affaires intergouvernementales canadiennes,
veille à ce que soit respectée la compétence
constitutionnelle du Québec; "3.7 le ministre veille à la
négociation et à la mise en oeuvre des ententes
intergouvernementales canadiennes et administre les programmes
d'échanges intergouvernementaux qui en résultent, sauf dans la
mesure prévue par le gouvernement; "3.8 malgré toute autre
disposition législative, les ententes intergouvernementales canadiennes
doivent, pour être valides, être approuvées par le
gouvernement et être signées par le ministre:"
L'article 3.14 dit que "le ministre dirige la représentation du
Québec au Canada".
Ce sont là, M. le Président, les principales
responsabilités que la loi confère au titulaire du poste de
ministre délégué, donc responsable du Secrétariat
aux Affaires intergouvernementales canadiennes, et c'est à l'exercice de
ce mandat que je me suis attaché lorsque j'occupais les fonctions que le
ministre occupe aujourd'hui.
Au cours des deux dernières années, le secrétariat
a participé activement à l'amélioration des relations avec
les partenaires canadiens et ce n'est sûrement pas le fruit d'une
génération spontanée ou d'un vote du 2 décembre.
Après une période plutôt difficile sous le régime de
M. Trudeau, il nous aura fallu travailler avec une certaine énergie, il
faut bien le dire, pour rétablir un climat de confiance mutuelle
minimale. Nous y avons mis beaucoup d'efforts en ayant constamment à
l'esprit la sauvegarde des intérêts et des droits du
Québec.
Le secrétariat a connu une implication progressive mais
absolument irréversible dans l'ensemble de l'activité
gouvernementale du Québec. Ainsi, dans les dossiers dits horizontaux, le
secrétariat a participé à l'élaboration de
nombreuses politiques et de
stratégies en vue de défendre les intérêts du
Québec. En donnant une meilleure cohésion à l'action du
Québec, nous avons pu inscrire plusieurs gains, notamment au chapitre de
la main-d'oeuvre et de l'économie. Certains résultats sont
maintenant palpables pour les Québécois, par exemple, l'entente
cadre sur le développement économique et les ententes auxiliaires
qui ont suivi, comme les a citées le ministre tout à l'heure-
De façon plus globale, le projet d'accord constitutionnel de mai
1985 constitue également une autre réalisation du
secrétariat. Ce projet est inachevé, on le sait, comme plusieurs
autres puisqu'il est dorénavant sous la responsabilité du nouveau
gouvernement. (17 heures)
Le gouvernement précédent a choisi comme assise de ses
revendications constitutionnelles la reconnaissance du caractère
distinct du peuple québécois. Je rappelle au nouveau ministre que
ce préalable demeure pour nous une base incontestable sur laquelle
doivent s'appuyer les pourparlers avec nos partenaires canadiens. Une fois la
reconnaissance de cette réalité acquise, il sera moins difficile
d'établir les modalités et les instruments qui peuvent conduire
à un accord qui soit librement négocié et qui tienne
compte de la spécificité du Québec. Les discussions et la
conclusion de cet accord ne devront jamais, cependant, aliéner les voies
d'avenir qui appartiennent à notre peuple., La volonté
d'établir des relations étroites avec l'ensemble canadien ne peut
pas se réaliser au détriment de nos droits historiques. Les
efforts à déployer seront considérables et, pour
réussir, le gouvernement aura besoin de solidarité et aussi de
l'appui des forces vives du Québec.
Pourtant, ce que nous annonce le ministre n'a rien de rassurant.
À ce jour, il a refusé de prendre des engagements fermes et
clairs sur le rôle de l'Assemblée nationale dans tout ce
processus. Le gouvernement fera-t-il comme dans une multitude d'autres
dossiers, c'est-à-dire va-t-il préférer s'en remettre
à des comités de non-élus, pompeusement appelés
"comités de sages", pour décider des orientations fondamentales
de l'avenir du peuple québécois? Et qui décidera dans ce
dossier? Comment, quand? Ferons-nous comme pour certaines autres
décisions de l'actuel gouvernement, verrons-nous donc le gouvernement
décider en catimini, annoncer à la sauvette et esquiver le
débat ensuite, particulièrement lors de la brève
période des questions que nous avons tous les jours?
J'ai bien peur, M. le Président, que ce soit là la
réalité à laquelle nous serons confrontés. Il
appartiendra au ministre de nous démontrer le contraire et d'amener ses
collègues à considérer que ce dossier est suffisamment
sérieux pour se passer du type d'attitude qu'on voit dans ce
gouvernement, dans les autres dossiers.
Déjà, on a procédé ainsi pour
reconnaître une partie substantielle du "Canada Bill",
c'est-à-dire la Charte canadienne des droits et libertés, et,
à ce titre, je suis convaincu que le ministre se rappellera un certain
nombre d'écrits qu'il a commis sur cette question, évoquant,
entre autres, le 5 novembre 1982, dans le journal Le Soleils "Au lendemain du
rapatriement, le fait fançais au Canada dépend plus que jamais de
la force du Québec et de ses possibilités de défendre et
de promouvoir la langue française." Il ajoutait également! 'Plus
le nationalisme québécois sera fort et intense, plus le fait
francophone et, par conséquent, le bilinguisme seront une
réalité concrète au Canada."
Force nous est de constater que dans ce domaine l'attitude suivant
laquelle le ministre a assumé une partie de la responsabilité
à l'égard de la reconnaissance de la charte canadienne, et
peut-être ce qu'on s'apprête à nous faire avec l'article 23
en regard de la loi 101, est plutôt contradictoire avec les convictions
de l'ancien professeur de l'Université Laval.
Il déclarait également en 1981: "II est impossible de
consacrer dans la constitution des droits linguistiques qui pourraient entraver
la francisation du Québec. De plus, cette charte des droits fondamentaux
ne devrait pas comprendre de droits linguistiques, si ce n'est au niveau de
l'autorité fédérale et de son administration."
C'est le même ministre, M. le Président, qui disait, en
1984, sous le titre "Le Québec doit tourner la page", dans le journal Le
Soleil, et je cite l'article: "M. Rémillard n'a évidemment pas
été surpris de voir la Cour suprême trancher en faveur de
la clause Canada. Il est clair que le Parlement fédéral et les
neuf provinces cosignataires de l'accord constitutionnel de 1981 avaient la loi
101 à l'esprit en enchâssant une charte des droits et
libertés, et la Cour suprême a tout de suite clairement
indiqué dans son jugement qu'elle a parfaitement compris cette
intention." Fin de la citation.
M. le Président, je disais que j'avais bien peur que la
réalité avec laquelle nous serons confrontés, c'est celle
que je décrivais tout à l'heure. On ne sait ni où ni
comment ni par qui la décision, notamment de reconnaître la charte
canadienne, a été prise. On l'a annoncé presque par
accident, dans une entrevue à un journaliste, et on a tout fait par la
suite pour noyer le débat. C'était là, M. le
Président, le premier geste important du nouveau ministre responsable de
ce dossier au gouvernement du Québec. Il aura sûrement atteint un
objectif, celui de passer à l'histoire, mais à quel prix? Il
a
traité le dossier constitutionnel à la pièce et
sans vue d'ensemble jusqu'à maintenant. Il a, d'une façon, nous
croyons dogmatique, appliqué les orientations du Parti libéral en
faisant fi d'une perspective claire, au-delà de la rhétorique, de
défense des intérêts du Québec. Son propre
conseiller senior et plusieurs experts ont, par la suite, qualifié ce
geste d'improvisation, d'erreur stratégique, d'imprudence. Son
conseiller principal en la matière a même choisi de
démissionner dès le premier geste d'importance posé par le
ministre.
Depuis, plus de nouvelles. A-t-il été remplacé,
va-t-il l'être et par qui, et selon quels critères? Rien, sauf une
manchette à savoir qu'il y aurait des discussions préliminaires.
On nous dit récemment, dans un article de Michel Vastel - M. Vastel,
semble-t-il, a la chance d'être plus renseigné que les membres de
l'Assemblée nationale -que le Québec serait prêt à
reprendre les négociations constitutionnelles sous forme de discussion
préliminaire, le mois prochain, l'article étant daté du 17
avril dernier. Est-ce que ces discussions préliminaires ont
commencé? Vont-elles commencer? Quels sont les interlocuteurs? Quels
sont les contenus? Est-ce le projet rendu public par le gouvernement au mois de
mai 1985, ou autre chose que nous ne connaissons pas, car jusqu'à
maintenant, on nous a simplement référés au programme du
Parti libéral, quand ce n'est pas à des déclarations
données à l'occasion d'entrevues?
L'avenir du Québec mérite mieux que cela, M. le
Président. II mérite une position claire de ce gouvernement. Il
mérite que soit déposée devant l'Assemblé nationale
une vision d'ensemble. Il mérite un débat et un débat
important puisqu'il s'agit de notre avenir comme peuple.
Je souhaite que le ministre, après en avoir pris conscience,
passe aux actes. Le ministre aura besoin de la solidarité, de l'appui
des Québécois, car aucun gouvernement, quel qu'il fut depuis que
nous existons sur ce continent comme société, aucun gouvernement,
aucun mouvement populaire n'a réussi, compte tenu de notre situation
démographique minoritaire, tantôt dans l'empire britannique,
tantôt à l'intérieur de la fédération
canadienne, aucun gouvernement n'a réussi sans l'appui de la population.
De nous renvoyer à l'appui du 2 décembre alors que l'enjeu,
c'était une marge de manoeuvre inexistante, des ponts sur la
rivière des Prairies, des hôpitaux à Laval...
Une voix: Des baisses de taxes.
M. Johnson (Anjou): ...des baisses d'impôt... Je crois que
les Québécois n'ont pas donné de mandat, ni au ministre ni
au gouvernement, en matière constitutionnelle, pas plus d'ailleurs que
celui qui vous parle ne pourrait prétendre que ce projet était
issu d'un mandat de la population. Ce projet était issu de la
volonté d'un gouvernement, ce qui m'amènera à
écouter attentivement le ministre quand il référera
à des choses auxquelles il semble déjà avoir tenu - par
exemple, des référendums en matière constitutionnelle - ce
qui m'amènera à être intéressé à
savoir si le ministre entend, en matière constitutionnelle,
procéder par référendum avant de signer une entente qui
risquerait de lier le Québec pour longtemps.
Le ministre a d'autres responsabilités en plus du dossier
constitutionnel. Je ne remets pas ici en question sa loyauté personnelle
à l'égard du peuple québécois mais je doute
malheureusement de son poids au sein du gouvernement. J'en veux comme preuve le
peu de succès qu'il semble avoir eu lors de la préparation des
crédits, alors que certaines coupures imposées par son
collègue du Conseil du trésor risquent fortement de remettre en
question la sauvegarde d'un certain nombre d'intérêts
québécois.
La plus évidente de ces coupures, qui a un impact important sur
les droits et l'exercice des droits du Québec, c'est celle qui
entraîne la cessation des activités de placement du réseau
de Travail-Québec. Par ce geste, afin d'épargner 9 600 000 $, non
seulement retournons-nous à l'ancien système des centres de
main-d'oeuvre du Canada qui, de façon générale, faisaient
peu de cas des bénéficiaires de l'aide sociale mais nous cessons
dans les faits d'occuper un champ pour lequel nous avons toujours
demandé une compétence exclusive.
Même le programme du Parti libéral, auquel on aime nous
renvoyer de temps en temps, propose que le placement soit une compétence
exclusive du Québec. Pourtant, n'était-il pas dans les mandats
prévus aux articles 3 et suivants de la loi du Conseil exécutif,
n'était-il pas dans le mandat du ministre de voir, dans ces
activités de coupures de l'ensemble du gouvernement, qu'on était
en train de banaliser un certain nombre de dossiers fondamentaux par des
coupures inconsidérées, faites par des gens, d'ailleurs, dans
certains cas, puisque je parle de quelques collègues du ministre, pour
qui il n'y a pas de différence entre le gouvernement du Québec et
le gouvernement fédéral?
Dans le domaine de l'enseignement supérieur, 52 000 000 $ non
seulement sont des coupures discutables pour les intervenants car elles
touchent un domaine de développement important mais, de plus, elles
risquent aussi de bien mal nous positionner en négociation, compte tenu
des coupures annoncées par le fédéral dans le financement
des programmes établis. Comment convaincre le fédéral de
ne pas couper dans le financement de l'éducation post-secondaire - le
ministre connaît ce dossier, il l'a évoqué tout à
l'heure - alors que le gouvernement
québécois, lui, coupe la veille des
négociations?
Est-ce que le ministre ne voit pas qu'il y a là un risque de voir
le gouvernement fédéral récupérer nos efforts de
rationalisation? Car c'est cela, l'histoire des relations
fédérales-provinciales. Ce ne sont pas que des coeurs tendres,
des coups de violon ou des drapeaux. C'est aussi très
concrètement sur le terrain» Comment deux ordres de gouvernement
peuvent-ils coexister quand on sait que les forces qui déterminent
l'action fédérale sont en général hors de notre
contrôle? D'où l'importance que le ministre et le
secrétariat accomplissent leur mandat de bien voir, à travers
l'activité de l'ensemble du gouvernement, à ce qu'il n'y ait pas
de recul dans des domaines d'activité qui ont fait l'objet de combats
incessants pour le Québec pour mieux se doter d'un contrôle sur
son territoire. Pas besoin d'être séparatiste pour dire cela. Mais
il ne faudrait pas, parce qu'on est fédéraliste, par exemple,
comme le ministre et ses collègues, fermer les yeux sur les
conséquences graves de ces interventions unilatérales,
"uncalled-for", comme on dit à Montréal depuis deux semaines et
qui, à toutes fins utiles, mettent le Québec dans un état
de vulnérabilité dans des dossiers de grande importance. Si on
n'est pas conscient de l'importance du rôle de l'État
québécois en matière de développement
économique, entre autres, ce gouvernement, cette chaise, deviendra le
lieu de l'administration d'un système de santé intéressant
et peut-être un peu, le programme de bilinguisme pancanadien. (17 h
15)
Le rôle du ministre et le rôle d'un gouvernement du
Québec, c'est de s'assurer que, dans tous les domaines où
l'État québécois, en matière économique, a
fait connaître à notre collectivité des progrès, il
n'y ait aucun recul. Comment le gouvernement pourra-t-il s'opposer à
l'intervention du gouvernement fédérai dans le
développement des régions du Québec, dans
l'aménagement du territoire, alors qu'il coupe 50 000 000 $ dans
l'agriculture, 10 000 000 $ dans la forêt, 5 000 000 $ dans
l'aménagement des parcs et des réserves, 6 500 000 $ dans le
Fonds de développement régional, 4 500 000 $ dans PECEC et 92 500
000 $ dans les transports?
Avec ces 170 000 000 $ de coupures, sans compter celles qui ne sont pas
identifiées, et qui restent impossibles à identifier
malgré nos efforts, le gouvernement du Parti libéral laisse
tomber les régions. Dans ce contexte, il ne sera pas surprenant de voir
celles-ci se retourner vers l'État fédéral. Le ministre,
en ce sens, a manqué à une partie manifeste, évidente de
ses responsabilités en laissant s'effectuer ainsi aveuglément
dans des secteurs comme la forêt ou l'agriculture, ou la main-d'oeuvre,
ou le développement régional des coupures dont les
conséquences seront de paralyser les efforts de développement
régional, de créer un vacuum et de permettre aux forces - qui
jouent dans notre système - de l'État fédéral
d'intervenir.
C'est un maigre bilan en matière de relations
fédérales-provinciales pour quatre mois? l'adhésion du
gouvernement à la charte constitutionnelle, toutes ces coupures dans des
domaines stratégiques pour le Québec qui veulent faire de
l'État québécois autre chose qu'une grosse
municipalité. Tout cela, ce sont des indices de faiblesse à
l'égard de la défense des droits du Québec, au-delà
des discours et de la rhétorique. Son bilan en matière de
relations fédérales-provinciales en est également un
autre. Jamais n'aura-t-on vu un gouvernement fédéraliste avec un
chef qui se dit bon négociateur échouer aussi lamentablement dans
la conduite des négociations avec le gouvernement
fédéral.
Il aura beau dire qu'on ne l'interroge pas, pendant la période de
questions, sur la question des transferts et des 95 %, dossier qu'on
connaît et que j'ai défendu à Halifax, je ne donnerai pas
la chance au premier ministre du Québec de poser en défenseur des
intérêts du Québec car je sais ce qu'il est en train de
faire à l'État québécois. Par manque de
stratégie, le premier ministre a failli faire échouer le premier
sommet francophone. Il risque d'ailleurs de payer cher son accroc aux ententes
implicites entre les deux ordres de gouvernements au point, d'ailleurs,
où ces ententes implicites non respectées ont fait l'objet de
gorges chaudes dans bien des salons diplomatiques à Paris et
ailleurs.
Ce gouvernement a d'ailleurs connu plus d'échecs que de
réussites, déjà, dans les relations
fédérales-provinciales: fermeture de Gulf, non-participation du
fédéral au financement à Port-Cartier, le projet de Matane
qui tarde à débloquer, la péréquation qui
traîne. En contrepartie, qu'avons-nous récolté sauf
quelques vagues promesses sur la pétrochimie? Et on ignore toujours
où en sont les dossiers qui portent sur la main-d'oeuvre, à moins
que le ministre ne puisse déposer une entente. Le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes a
le mandat de préparer des stratégies en matière de
relations fédérales-provinciales et non pas de se contenter de
faire des constatations. Je n'ose pas dire qu'il a effectivement des
stratégies ou que celles-ci ont conduit à des reculs du
Québec. Je dirais plutôt, pour être un peu plus
clément, qu'il n'a pas de stratégies. La nature a horreur du
vide, le ministre le verra rapidement en politique. Et dans ce gouvernement que
l'on veut mener comme une "business", ce vide est rempli par des personnes qui
font bien peu de cas des droits du Québec et pour qui le gouvernement du
Québec ou le
gouvernement fédéral c'est la même chose. J'en veux
pour preuve le discours récent que livrait M. Gobeil, président
du Conseil du trésor, le 16 avril dernier, devant l'Association
canadienne des conseillers en administration. Dans ce discours portant sur la
révision des fonctions gouvernementales, nulle part, pas une ligne ne
traite, ne fait mention de la mission de l'État québécois
dans la protection des intérêts de la collectivité
québécoise, cela faisant partie quant à nous des fonctions
aussi d'un gouvernement.
M. le Président, le gouvernement s'est engagé sur une
piste dangereuse pour ne pas dire une pente savonneuse en matière de
relations fédérales-provinciales. Leur liane est graissée
comme disait quelqu'un. C'est le rôle et le devoir du ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes de
faire en sorte que les droits du Québec soient protégés,
qu'ils ne soient pas abandonnés pour des raisons partisanes ou à
cause de nécessités comptables. On est forcé cependant
d'admettre qu'à venir jusqu'à maintenant le ministre a eu
quelques difficultés à faire triompher ce type de point de vue
dans son gouvernement. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Filion): Merci, M. le chef de
l'Opposition. Questions?
Secrétariat aux Affaires intergouvemementales
canadiennes
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je commencerais avec
un certain nombre de questions qui sont plus de la nature du détail.
Juste pour orienter le ministre et ses collaborateurs à: Dépenses
no 4 de l'élément de programme 2, on avait là des
crédits l'an dernier de 576 426 $ en crédits initiaux et...
M. Rémillard: Pouvez-vous répéter s'il vous
plaît?
M. Johnson (Anjou): Dépenses 4 de l'élément
de programme 2.
Le Président (M. Filion): De l'élément 2 du
programme 4. C'est cela.
M. Johnson (Anjou): Non, catégorie de dépenses
4.
Le Président (M. Filion): C'est cela, les services.
M. Johnson (Anjou): À l'élément 2, les
services professionnels, est-ce que cela va?
M. Rémillard: Une minute, on l'a pas trouvé encore.
Cela doit être dans "avant le 2 décembre" cela. Non?
M. Johnson (Anjou): Je vous dis simplement... je veux juste faire
une comparaison. Il y a là une augmentation. Le chiffre que vous avez
c'est 1 095 100 $, cela va?
M. Rémillard: 1 095 100 $ oui, d'accord.
M. Johnson (Anjou): Voilà, bon! M.
Rémillard: J'ai cela.
M. Johnson (Anjou): À la même rubrique l'an dernier
cela était 576 000 $; c'est une augmentation du simple au double ou
presque. Est-ce qu'on peut savoir en gros ce que couvre l'augmentation de 500
000 $ au chapitre des crédits pour les services professionnels?
M. Rémillard: Voilà, M. le Président, c'est
une bonne question, c'est une question très précise et bien
faite. Il s'agit des crédits que nous prévoyons pour la
présentation, l'étude... vous connaissez toutes ces
dépenses qui entourent ces propositions constitutionnelles et ces
négociations constitutionnelles que nous allons avoir avec le
gouvernement fédéral et les autres provinces. C'est à ce
niveau qu'on inclut ces 300 000 $ et cela nous a permis d'inclure ce montant
dans les crédits du ministère parce que, sans causer de
problème sur la masse globale du ministère même si nous
avons, nous aussi, fait nos coupures, je n'ai pas de cabinet
spécialement désigné pour les affaires canadiennes. Ce qui
veut dire que nous faisons une économie de plus de 600 000 $.
M. Johnson (Anjou): Vous avez un seul cabinet, c'est cela?
M. Rémillard: Pardon?
M. Johnson (Anjou): Vous avez un seul cabinet?
M. Rémillard: Nous avons un seul... Oui. Alors quand vous
étiez ministre...
M. Johnson (Anjou): ...il y avait la Justice et les affaires
canadiennes.
M. Rémillard: ...de la Justice et
délégué aux Affaires intergouvemementales canadiennes,
vous aviez deux cabinets.
M. Johnson (Anjou): C'est cela.
M. Rémillard: Alors que j'ai un cabinet, ce qui nous
permet d'épargner...
M. Johnson (Anjou): Et vous prenez à peu près la
masse de 500 000 $ et vous
mettez cela dans les services de consultation professionnelle...
M. Rémillard: ...et de fabrication et tout ce qui regarde
la traduction également, enfin toutes ces choses que vous connaissez
très bien parce que, l'an dernier à cette époque, vous
étiez en grande préparation, bien sûr, de votre livre
bleu.
M. Johnson (Anjou): Nous avons mis environ 500 000 $ pour
cela.
M. Rémillard: 500 000 $. M. Johnson (Anjou): Au
total.
M. Rémillard: Alors nous prévoyons moins.
M. Johnson (Anjou): Cette année, vous prévoyez 1
000 000 $.
M. Rémillard: Non.
M. Johnson (Anjou): Il semble que cela coûte plus cher
d'être fédéraliste.
M. Rémillard: Non, non, attention! Attendez une minute
là, je vous reviens là-dessus. Il y a l'ensemble, oui, il faut
bien comprendre bien sûr - et compris, j'en suis sûr - que
l'ensemble des contractuels de tous les bureaux sont compris aussi
là-dedans.
M. Johnson (Anjou): D'accord. Y a-t-il un gros morceau pour le...
C'est cela dans le fond, ce que vous avez à Toronto, à
Calgary...
M. Rémillard: C'est cela, exactement.
M. Johnson (Anjou): ... Pardon, pas à Calgary, à
Edmonton, je m'excuse.
M. Rémillard: Edmonton, bien sûr, Calgary n'est pas
envisagé.
M. Johnson (Anjou): C'est qu'il souhaite bien en avoir une
à Calgary, mais...
M. Rémillard: Oui, oui.
M. Johnson (Anjou): II y a quand même du simple au double
qui passe là. Donc, vous prévoyez surtout que ce sera des
contrats en matière constitutionnelle...
M. Rémillard: Non, non.
M. Johnson (Anjou): ...des experts...
M. Rémillard: Pas nécessairement. Vous savez, il y
a la traduction, il y a aussi l'imprimerie, le round public, la tournée
que nous devons faire pour publiciser et ces choses-là, aller voir les
autres provinces parce que nous avons à négocier, comme vous le
savez, non seulement avec le gouvernement fédéral, mais avec neuf
autres provinces; alors il faut se déplacer, il faut aller les voir. II
ne s'agit pas simplement de leur envoyer les propositions par courrier
spécialisé, il faut aussi aller voir ces gens et discuter avec
eux. C'est donc dans ce contexte que nous avons ce montant. Comme je vous dis,
ce montant est possible parce que je fais une économie de plus de 600
000 $ parce que je n'ai qu'un cabinet politique.
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Mais comprenez-moi bien, je ne
vous fais pas le reproche de mettre un peu de ressources là-dedans, ce
serait bien le bout de la chandelle si vous n'en mettiez pas. La question,
c'est de savoir ce que vous allez faire avec.
M. Rémillards Tout cela.
M. Johnson (Anjou): Et c'est cela qui m'intéresse. Le
ministre, dans son exposé préliminaire, a évoqué la
formation d'un comité. D'abord, il a parlé du comité
ministériel comprenant lui-même son collègue de la Justice,
le ministre de l'Éducation aussi, je crois, et à l'avenant
d'autres ministres. Il a parlé aussi d'un comité d'experts...
Non? Je n'ai peut-être pas très bien saisi.
M. Rémillard: Non, je n'ai pas parlé d'un
comité d'experts, mais d'un comité de fonctionnaires! il y a un
comité de fonctionnaires, il y a aussi des spécialistes que nous
consultons pour nous donner des avis sur différents points, mais il n'y
a pas de comité, il n'y a pas de groupe de l'extérieur
structuré formellement.
M. Johnson (Anjou): Pourrait-on avoir, de la part du ministre, la
liste des spécialistes qui sont consultés au niveau central
à son ministère?
M. Rémillard: Vous comprendrez, M. le chef de
l'Opposition, que cela fait partie des stratégies. Vous me demandez
d'avoir des stratégies pour les négociations, alors vous
comprenez que...
M. Johnson (Anjou): Des tactiques, ce ne seraient pas des
stratégies, ce seraient des tactiques.'
M. Rémillard: Ce ne sont pas des tactiques, ce sont des
stratégies... de savoir quels sont nos spécialistes, quels sont
nos conseillers. Je pense que vous comprenez très bien - et je sais que
vous avez fait la
même réponse l'an dernier lorsque vous avez aussi
défendu vos crédits - que ce n'est pas tellement opportun
à ce moment-ci de dévoiler ces noms.
M. Johnson (Anjou): Autrement dit, il faut attendre qu'ils
démissionnent pour savoir qui ils sont.
M. Rémillard: Quant aux démissions, vous savez,
dans la mesure où on voit que ce sont des démissions de gens qui
travaillent encore avec nous, ce ne sont pasde grandes
démissions.
M. Johnson (Anjou): Dans le journal Le Soleil du samedi 22 mars,
à l'occasion d'une entrevue que le premier ministre donnait à un
journaliste de la Presse canadienne qui était sous le titre: "Bourassa a
d'autres priorités que la baisse des taxes", il y a cette phrase: "M.
Bourassa a précisé que son ministre des Relations
internationales, M. Gil Rémillard, amis sur pied un
comité spécial d'experts qui s'affaire à mettre au point
les documents de base de la négociation qui s'amorcera
éventuellement avec le gouvernement fédéral." J'ai
demandé au ministre, tout à l'heure, s'il avait un comité
d'experts ou non. (17 h 30)
M. Rémillard: Je pense que ce que M. le premier ministre a
voulu dire, c'est que c'est un groupe d'experts qui, de fait, est
consulté, ce qui va nous permettre de rédiger nos propositions et
la position du Québec.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que cela se pourrait que le ministre
ait le goût de faire une espèce de commission publique sur la
question constitutionnelle?
M. Rémillard: Quelle sorte de commission publique?
À quoi pensez-vous?
M.. Johnson (Anjou): Â une commission créée
par décret du Conseil des ministres. On donne un mandat... Au
fédéral et la plus connue, la plus coûteuse, cela a
été la commission Macdonald. Est-ce que cela se pourrait que le
ministre soit intéressé, en matière constitutionnelle,
à créer une commission publique qui entendrait des
mémoires à partir d'un document initial provenant du ministre ou
d'une série de résolutions de l'Assemblée nationale?
Est-ce que le ministre envisage cette démarche dans le dossier
constitutionnel?
M. Rémillard: Non.
M. Johnson (Anjou): Non?
M. Rémillard: Non. Dans le dossier constitutionnel, on
n'envisage pas du tout une commission de ce genre. Je me réfère
toujours à l'entrevue qu'a donnée M. Bourassa, premier ministre
du Québec, où il a mentionné que l'Assemblée
nationale sera, bien sûr, saisie des propositions que nous allons
présenter en matière constitutionnelle. Mais nous n'avons
nullement l'intention de faire une commission publique ou quoi que ce soit de
ce genre. Vous savez, nous avons un mandat qui est clair et bien précis
et vous faites un très bon travail dans l'Opposition. Vous pouvez me
poser des questions; vous le faites régulièrement. Je pense que
la démocratie va jouer son jeu pleinement.
M. Johnson (Anjou): Le ministre est bien condescendant, M. le
Président. Il est bien condescendant. On est bien heureux.
Une voix: Est-ce que c'est une question?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, toujours à
l'élément de programme no 2 qui touche au fonctionnement
régulier du secrétariat, on constate que ies transferts passent
de 340 000 $, en 1985-1986, à 882 900 $, en 1986-1987, soit une hausse
de 160 %. Est-ce que c'est simplement une question de présentation, une
modification à la présentation des crédits, ou s'il y a de
nouveaux programmes de transferts qui sont envisagés?
M. Rémillard: C'est une autre bonne question. Il
s'agit...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Johnson (Anjou): On est contents.
M. Rémillard: Oui, vraiment. Je vous trouve vraiment en
forme, cet après-midi. Je trouve que c'est mieux que ce matin.
M. Johnson (Anjou): Peut-être une petite étoile
dorée en haut de la page, aussi, ou un petit ange peut-êtrel
M. Rémillard: C'est dommage que les caméras ne
soient pas ici.
Une voix: II va avoir une image tantôt.
M. Rémillard: Ce que je peux vous dire, c'est qu'il faut,
de fait, ajouter 300 000 $ qui représentent le budget au
Secrétariat des peuples francophones, qui dépendra maintenant du
secrétariat comme tel.
M. Johnson (Anjou): Cela relevait de quelles dépenses,
auparavant?
M. Rémillard: Du cabinet du premier ministre.
M. Johnson (Anjou): C'est cela.
M. Rémillard: Oui. Vous devriez savoir cela, vous.
L'avenir de Travail-Québec
M. Johnson (Anjou); C'est simplement un transfert de
crédits du conseil. Parfait! Merci.
Concernant le secteur de la main-d'oeuvre, j'ai évoqué,
dans ma présentation préliminaire, la préoccupation - pour
ne pas dire l'inquiétude - que soulève, chez nous, le fait que le
Québec se retire du placement, qui est l'une des clés d'une
politique de main-d'oeuvre au niveau de Travail-Québec. On connaît
les appétits du gouvernement central dans ce domaine. Est-ce que le
ministre a été consulté à propos de cette coupure
avant qu'elle ne soit présentée au Conseil des ministres? Est-ce
que le CCRI, le Comité consultatif des relations intergouvernementales,
qui est présidé normalement par son sous-ministre, a
été saisi de cette question? Est-ce que le ministre est conscient
que cette décision va rendre un peu plus difficile la revendication
traditionnelle du Québec en matière de main-d'oeuvre, d'autant
plus, d'ailleurs, encore une fois, que, même dans le programme du Parti
libéral, on retrouve cette revendication?
M. Rémillard: Tout d'abord, j'aimerais vous
préciser qu'il ne s'agit pas de se retirer du champ du placement,
absolument pas. On ne se retire pas du placement. Le Québec continue de
faire du placement, mais il va le faire d'une façon plus efficace.
Il s'agit tout simplement de faire du placement en rationalisant nos
activités, en aidant les gens qui en ont besoin, les handicapés,
les jeunes, les femmes, les gens qui sont dans des situations où ils
doivent avoir le recours de l'État pour avoir ce placement. Nous allons
avoir une activité de placement plus importante que celle que nous
avions avant, et surtout plus efficace.
Il s'agit simplement de ne pas faire de dédoublement avec le
gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral fait
du placement, vous le savez, et on peut se poser des questions quant au choix
de placement qu'il peut faire et au succès que peut avoir ce genre de
placement. D'ailleurs, le comité Nielsen s'est posé cette
question. Alors nous considérons plus efficace et plus
intéressant d'exercer cette juridiction à laquelle nous tenons.
Nous tenons à cette juridiction sur le placement. C'est une juridiction
que nous avons, que nous allons conserver et que nous exerçons
pleinement d'une façon plus appropriée, plus efficace que
lorsqu'on faisait du dédoublement avec le gouvernement
fédéral dans un domaine de placement qui, finalement,
n'était pas efficace en lui-même.
Il ne s'agit pas de laisser tomber le placement, absolument pas. Il
s'agit de continuer à faire du placement, mais sous une forme
différente pour qu'il soit plus effectif et qu'il permette au
Québec de jouer vraiment son rôle dans ce domaine.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je suis obligé
de constater que dans les documents du président du Conseil du
trésor, on dit pourtant; Cessation du placement par le réseau
Travail-Québec.
M. Rémillard: Oui, par le réseau
Travail-Québec...
M. Johnson (Anjou): Voilà.
M. Rémillard: ...cessation, pas cessation du placement par
le Québec. C'est différent.
M. Johnson (Anjou): Oui, mais le placement au Québec, M.
le Président, se fait par le réseau Travail-Québec.
M. Rémillard: Bon, alors il y a...
M. Johnson (Anjou): II ne se fait pas par le ministère des
Finances.
M. Rémillard: ...c'est une partie, une cessation en
partie... Écoutez, cessation dans ces circonstances que je vous ai
expliquées, mais non pas cessation des activités du Québec
en matière de placement. Je pense que vous aviez compris cela de toute
façon, vous le savez très bien. On l'a expliqué et on
continue de le faire. C'est une politique qui s'applique et que mon
collègue, le ministre du Travail, applique. Il s'agit d'être plus
effectif, de laisser tomber ce dédoublement qui, en lui-même,
était improductif et inconséquent avec le gouvernement
fédéral et de concentrer nos efforts dans un domaine de placement
que nous considérons beaucoup plus intéressant...
M. Johnson (Anjou): Qu'auprès des assistés
sociaux.
M. Rémillard: ...et qui va aider les
Québécois qui en ont besoin, les assistés sociaux, les
handicapés, les jeunes et les femmes, ceux qui en ont besoin. C'est
l'État qui va...
M. Johnson (Anjou): Les jeunes et les femmes.
M. Rémillard: Pardon?
M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, Travail-Québec
va continuer à faire du placement pour les femmes?
M. Rémillard: Bien sûr, oui. Pourquoi
pas?
M. Johnson (Anjou); Bon. À ce moment, on va interroger le
président du Conseil du trésor, je présume.
M. Rémillard: Oui, oui.
Le développement régional
M. Johnson (Anjou): M. le Président, en matière de
développement régional, l'ensemble des coupures annoncées
par le gouvernement, je l'ai dit, aura un impact négatif
considérable sur les régions. On ne pense pas seulement à
Radio-Québec qui en est un exemple, notamment, mais à un certain
nombre d'instruments comme le Fonda de développement régional et
PECEC qui ont subi des coupures de 6 500 000 $ et 4 500 000 $
respectivement.
Le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes sait sans
doute que tes gouvernements du Québec se sont toujours opposés a
la mainmise fédérale dans le secteur du développement
régional. L'OPDQ a été mis sur pied, d'ailleurs, en
partie, pour que le Québec occupe ce champ d'activité où
la présence fédérale, en général,
n'entraîne que double emploi quand ce n'est pas carrément la
confusion et la perte d'efficacité.
Est-ce que je pourrais connaître un peu quels sont les grands
principes qui guident le ministre dans sa réflexion quant au rôle
de chacun des gouvernements en matière de développement
régional et où en sont les négociations avec le
gouvernement fédéral concernant la décentralisation vers
les provinces de l'administration de PEDIR?
M. Rémillard: En ce qui regarde le développement
régional, c'est une priorité pour notre gouvernement - on l'a
mentionné à plusieurs reprises - de voir un développement
régional équilibré, de faire en sorte que les
régions du Québec puissent se développer en fonction des
objectifs de gouvernement que nous avons. Bien sûr, nous devons
collaborer avec le gouvernement fédéral qui doit aussi assumer sa
part, parce que les Québécois et Québécoises patent
des impôts et il doit nous revenir de ces impôts que nous payons
une partie importante, justement pour développer les régions et
avoir des projets de développement régional adéquats.
Mon collègue responsable du Développement régional
est justement à penser une politique globale d'intervention au point de
vue régional, en concertation avec les instances fédérales
et avec d'autres ministères concernés, pour faire en sorte que
nous puissions avoir les moyens... Je vous avoue que ce n'est pas toujours
facile. Bien sûr on doit défendre nos projets, on doit se battre
pour les faire valoir, mais on doit faire en sorte que le gouvernement
fédéral puisse y participer. Tout à l'heure, je vous ai
parlé des ententes auxiliaires. Nous avons à compléter ces
ententes auxiliaires sur plusieurs points et nous avons à discuter ces
ententes. Je ne peux pas vous dire aujourd'hui où nous en sommes
exactement dans chacune de ces ententes, parce que nous avons à les
discuter avec les collègues qui sont responsables sectoriellement de
chaque domaine et avec le gouvernement fédéral. Je dois
rencontrer M. Stevenson du fédéral prochainement... Je veux dire
M. Stevens...
M. Johnson (Anjou): Je l'ai déjà appelé M.
Sinclair, moi. Vous n'avez pas à vous en faire.
M. Rémillard: On doit parler de ces sujets-là,
discuter des problèmes du gouvernement fédéral et de son
intervention au niveau du développement régional.
M. Johnson (Anjou): Donc, si je comprends bien, vous n'avez pas
eu l'occasion encore de rencontrer M. Sinclair Stevens?
M. Rémillard: Non. Je dois renconter M. Stevens dans les
prochaines semaines, mais nous sommes à compléter nos dossiers.
Nous voulons voir .l'ensemble de nos dossiers de près pour pouvoir
passer en revue chacun de nos dossiers sur les ententes que nous voulons
négocier avec Ottawa.
Les forêts
M. Johnson (Anjou): Concernant la forêt, je pense que
personne, surtout pas le ministre, ne contestera le fait que la forêt est
un domaine de juridiction exclusivement provinciale en vertu de la constitution
canadienne. Le gouvernement fédéral n'a cependant jamais
caché, comme on le sait, son ambition de doter le Canada d'un "national
policy" en cette matière, comme dans d'autres. Est-ce qu'il ne croit pas
qu'en ralentissant par des coupures de 10 300 000 $ Le reboisement des
forêts le gouvernement pourrait être en train de justifier l'action
fédérale?
Deuxièmement, le ministre a-t-il analysé les impacts que
pourrait avoir cette coupure sur l'entente auxiliaire sur les forêts qui
prévoit, comme on le sait, un partage 50-50 de la plupart des
activités qui sont affectées par les coupures?
M. Rémillard: Oui, le chef de l'Opposition a raison de
dire que les forêts relèvent de la compétence du
Québec, bien sûr des provinces, excepté dans certains
domaines où le territoire relève de la compétence du
gouvernement fédéral. Mais, d'une façon
générale, au Québec, on peut dire que les
forêts relèvent de la compétence de la province. De fait,
le gouvernement fédéral légifère sur certains
aspects concernant nos forêts toujours par ce fameux pouvoir de
dépenser qu'il utilise dans bien d'autres domaines. Cela fait en sorte,
dans bien des secteurs, qu'il nou3 est difficile, comme gouvernement
provincial, d'avoir une véritable politique qui corresponde à nos
objectifs, car le gouvernement fédéral utilise ce pouvoir de
dépenser dans des domaines qui ne relèvent pas de sa juridiction
et ce, d'une façon conditionnelle, ce qui nous oblige quelquefois
à modifier certains objectifs qui ne correspondent plus au plan global
de développement que nous voulons poursuivre. (17 h 45)
C'est dans ce cadre-là que, dans nos revendications
constitutionnelles, nous insistons tellement pour que ce pouvoir de
dépenser soit circonscrit et qu'on puisse en limiter la portée ce
pouvoir de dépenser que le gouvernement fédéral utilise,
comme on le sait, dans à peu près tous les secteurs. II n'y a
plus, à toutes fins utiles, de juridictions strictement exclusives qui
appartiennent aux provinces. Ces juridictions exclusives, que ce soit dans le
domaine de l'éducation, dans le domaine des forêts - le sujet que
nous discutons actuellement - ou dans le domaine de la santé, sont
sujettes à ces subventions conditionnelles du gouvernement
fédéral et nous devons revoir ce processus d'action du
gouvernement fédéral. Dans le domaine de la forêt, les
coupures ou réaménagements, je devrais dire le
réaménagement de l'action du gouvernement provincial en ce qui
regarde le reboisement ou la politique de la forêt, qui dépend
aussi d'un collègue qui a la responsabilité de ce secteur, ne met
nullement en cause la responsabilité du Québec sur les
forêts. L'impact que peuvent avoir ces politiques n'est que
bénéfique, parce que nous prenons nos responsabilités en
déterminant nous-mêmes nos objectifs de reboisement. L'entente que
nous avons en matière de forêt, qui est une des ententes les plus
intéressantes qu'on a de 50-50, comme vous le mentionniez, se fait aux
meilleurs intérêts du Québec. Cela ne remet nullement en
cause cette entente que nous avons.
M. Johnson (Anjou): Ce que je demande au ministre, M. le
Président, c'est: Est-ce qu'il a analysé les impacts que pourrait
avoir cette coupure sur l'entente auxiliaire dans le secteur de la forêt
qui prévoit un financement à 50-50 dans la plupart des
activités qui sont affectées par les coupures?
M. Rémillard: C'est une des ententes qui fonctionnent le
mieux et l'impact dont vous parlez est à peu près nul. Il n'y en
a pas d'impact.
M. Johnson (Anjou): II n'y en a pas d'impact. D'accord.
M. Rémillard: Mais il n'y en a pas d'impact, absolument
pas.
M. Johnson (Anjou): Merci.
M. Rémillard: Comme je vous dis, on fait notre politique
de foresterie et cette politique n'implique aucun impact sur l'entente
auxiliaire que nous avons qui est une des ententes les plus
intéressantes.
M. Johnson (Anjou): C'est vrai, négociée par celui
qui vous parle d'ailleurs.
M. Rémillard: Alors, bravo! Je vous en
félicite.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'enseignement
supérieur. Je pense que vous avez raison d'ailleurs, cela n'a pas
d'impact dans le cas de la forêt.
M. Rémillard: Mais pourquoi toutes ces questions que vous
m'avez posées?
M. Johnson (Anjou): Je vous écoute et je me dis;
Probablement que vous avez raison sur celle-là.
M. Rémillard: Oui. Vous me faites faire mes classes. Eh
bien, je suis heureux d'avoir un maître aussi brillant.
M. Johnson (Anjou): Ne vous en faites pas. Moi, je ne
démissionnerai pas.
M. Rémillard: J'aurais du travail pour vous.
L'enseignement postsecondaire
M. Johnson (Anjou): L'enseignement supérieur est un autre
domaine. Je n'ai pas à revenir sur les coupures, 24 000 000 $ dans le
régime de prêts et bourses, alors qu'on avait promis aux gens
d'améliorer les prêts et bourses, 5 400 000 $ dans le financement
de l'enseignement collégial, 15 000 000 $ dans l'enseignement
universitaire. Tout cela place, évidemment, le gouvernement dans une
situation assez paradoxale face au fédéral au moment où il
négocie avec le fédéral le financement du postsecondaire.
Est-ce que le ministre pourrait nous dire l'état du dossier en ce qui
concerne les transferts fédéraux 1986-1987 pour le financement de
l'enseignement postsecondaire?
M. Rémillard: En ce qui regarde l'enseignement
postsecondaire, d'une façon très précise, je vais me
référer à des documents. Je vais vous donner cette
information, M. le chef de l'Opposition. Je
vais vous lire ici l'information que j'ai parce que, comme vous l'avez
mentionné tout à l'heure, j'ai des fonctionnaires
extrêmement compétents et brillants qui m'ont tout
préparé. J'ai toute la préparation sur toutes les
questions que vous pouvez me poser. 11 reste simplement à les
acheminer.
Vous me permettez de vous en lire une ici qui est
particulièrement précise: Depuis 1977, les transferts
fédéraux au titre de l'enseignement postsecondaire ont
été intégrés au financement des programmes
établis. Le Québec devait recevoir en 1985-1986 à ce
chapitre 1 175 000 000 $. Or, è partir du début des années
quatre-vingt, la volonté du gouvernement fédéral
d'accroître ses pouvoirs en cette matière de juridiction
strictement provinciale n'a pas cessé de se manifester. La loi C-12,
adoptée en avril 1984, le rapport Johnson, rendu public en
février 1985, le rapport de la commission Macdonald et celui du groupe
Nielsen sont autant de plaidoyers en faveur d'une présence accrue du
fédéral dans le secteur de l'enseignement postsecondaire et d'une
utilisation plus structurante de son financement.
Depuis la nomination de M. Bouchard comme secrétaire
d'État, ces volontés fédérales étaient en
veilleuse mais M. Bouchard a déclaré à plusieurs
reprises croire et vouloir respecter à tout prix la compétence
provinciale exclusive en matière d'éducation. Le 14 avril
dernier, cependant, M. Bouchard déclarait à la presse que les
provinces jouaient mal leur rôle dans ce dossier et qu'il voulait
discuter à court terme d'un nouveau rôle du fédéral
dans ce secteur.
J'ai rencontré M. Bouchard. Nous avons discuté de ce
sujet. M. Bouchard m'a assuré de la volonté du gouvernement
fédéral de respecter la compétence exclusive des provinces
en matière d'éducation et que ses commentaires étaient
strictement pour faire le point d'une façon générale sur
l'action des différentes provinces en matière d'éducation
postsecondaire. Il était donc conscient des responsabilités du
Québec comme des autres provinces d'ailleurs. Il avait bien l'intention
de respecter ces juridictions.
Alors, c'est dans ce contexte que nous devons négocier avec le
gouvernement fédéral les subsides nécessaires pour
l'évolution de notre postsecondaire mais je ne vois pas en quoi les
coupures qu'on pourrait faire " actuellement pourraient affecter ces
négociations. Elles sont présentement ralenties, bien sûr,
à cause du dépôt, comme vous le savez, de ce projet de loi
C-96 sur les transferts en ce qui regarde l'éducation postsecondaire et
en ce qui regarde aussi le domaine social.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le ministre favorise le maintien
de la formule actuelle ou plutôt le système de transfert de points
d'impôts dans ce domaine?
M. Rémillard: Voulez-vous me répéter
cela?
M. Johnson (Anjou): Oui. Dans ce domaine, je ne pense pas qu'il
trouve un papier qui prévoie la réponse toute faite parce que
c'est une question d'opinion. C'est une question vraiment fondamentalement
politique, elle n'est pas technique. Est-ce que le ministre, comme conseiller
principal, responsable en vertu de la loi de conseiller le gouvernement en
matière fédérale-provinciale, favorise le maintien de la
formule actuelle de financement des programmes établis ou le transfert
de points d'impôts additionnels?
M. Rémillard: Savez-vous que c'est une excellente question
encore une fois qui mérite réflexion. Je vais prendre avis de
votre question. Je vais consulter mes fonctionnaires compétents. Je
pourrai me faire une idée sur la question et je pourrai vous en
reparler.
La stabilisation des revenus agricoles
M. Johnson (Anjou): Bon. Alors, on va parler un peu d'agriculture
d'abord. L'ancienne loi fédérale de stabilisation des prix
agricoles qui existait, on le sait, depuis de nombreuses années
prévoyait une assistance financière des agriculteurs lorsque les
prix étaient trop bas. Le Québec, pour sa part, a choisi dans
certains secteurs de mettre en place plutôt des programmes de
stabilisation des revenus négociés avec les producteurs. De
façon générale, d'ailleurs, selon le rapport Macdonald, au
moment où on parle de libre-échange... Incidemment, est-ce qu'on
a le résultat du vote? Cela a passé au Sénat? Oh oui!
Est-ce que cela a passé au Sénat? Vous n'avez pas eu de
renseignements?
M. Rémillard: Le vote n'a pas encore eu lieu, je crois.
Tout à l'heure, en entrant, il y avait cependant des conditions qui
avaient été établies, mais on n'avait pas encore
voté formellement.
M. Johnson (Anjou): Disons qu'on peut présumer que
ça va se parler entre le Canada et les États-Unis, quoi qu'il
advienne. Le rapport Macdonald disait, d'ailleurs, que la formule
québécoise était moins contestable sur le plan du commerce
international que le formule fédérale de stabilisation des
revenus... des "prix" dans la mesure où on agissait plus sur les revenus
des producteurs que sur le prix de la production. Donc, l'influence quant aux
marchés sur les effets de la concurrence internationale dans la
formule québécoise n'était point menaçante
ou moins hérétique face aux principes généraux de
libéralisation du commerce.
On se souviendra aussi que, sous l'ancienne loi fédérale,
le Québec tenait compte des indemnités qui étaient
versées par le fédéral aux producteurs avant
d'établir le seuil de sa participation, ce qui réduisait,
évidemment, d'autant le coût des programmes de stabilisation des
revenus des agriculteurs qui participaient à ce programme du
gouvernement du Québec. La loi C-25 remet en question le fonctionnement
du régime actuel - C pour Canada. Il entend mettre en place des
programmes nationaux dits tripartites de stabilisation des prix agricoles, et
non pas des revenus. Son soutien financier aux agriculteurs, d'ailleurs, serait
conditionnel à la participation des provinces aux programmes, et des
programmes nationaux comme ceux-là, on le sait, défavorisent de
façon générale l'agriculture au Québec parce qu'ils
remettent en question les programmes de stabilisation qu'on a mis sur pied ici,
qui sont des programmes de stabilisation du revenu et qui sont de façon
générale considérés comme plus adéquats par
les agriculteurs québécois eux-mêmes. Or, quelle est la
position du ministre à l'égard de l'application de la loi
C-25?
M. Rémillard: La position que nous avons est
demeurée finalement la même. C'est que le gouvernement
fédéral doit respecter le droit des provinces de mettre à
la disposition des producteurs des programmes de stabilisation des revenus qui
tiennent compte de leur situation spécifique et ces programmes seraient
complémentaires à un programme fédéral de base
universel et gratuit. Le Québec a indiqué au gouvernement
fédéral et aux autres provinces, lors d'une réunion des
ministres de l'Agriculture, le 30 janvier 1986, qu'il continuera d'offrir la
protection des régimes de stabilisation actuellement en vigueur tant que
la loi fédérale n'aura pas été modifiée dans
le sens désiré. En cas de refus du gouvernement
fédéral, ce dernier devra reconnaître un droit de retrait
avec pleine compensation financière.
M. Johnson (Anjou): Donc, votre position, c'est, dans le fond, la
position du Québec avant.
M. Rémillard: C'est ça, et cette position a
été approuvée par le Conseil des ministres.
M. Johnson (Anjou): Un certain nombre de dossiers contentieux...
je ne sais pas s'il y a des collègues de l'autre côté qui
ont quelques questions. Je peux peut-être leur permettre cela
après déjà 40 minutes. Ça va? Je peux continuer,
j'en ai d'autres, mais je me demandais si notre collègue de
Mille-Îles ne voulait pas intervenir. D'accord.
La pétrochimie
La pétrochimie. On sait qu'entre Noël et le 1er de l'An, le
ministre fédéra! de l'Expansion industrielle et régionale,
M. Sinclair Stevens, et le ministre de l'Industrie et du Commerce,
annonçaient en même temps la fermeture de Gulf et que les deux
gouvernements avaient conclu une entente en vue de venir en aide à la
pétrochimie québécoise. Est-ce que l'entente a
été signée et quand?
M. Rémillard: Oui, en décembre 1985 le Canada et le
Québec se sont entendus pour offrir un programme d'assistance
financière à la société Pétromont, par
laquelle Pétromont recevra 55 800 000 $ d'aide fédérale
pour améliorer et moderniser son usine. Cette aide, jumelée
à l'aide déjà acquise du gouvernement du Québec
dans le cadre de l'entente du 10 septembre 1984, devrait permettre à
Pétromont de retrouver sa rentabilité. Les fonds
fédéraux devront être utilisés dans le cadre du
programme de modernisation, donc, à des fins d'investissements. Il n'est
pas du tout question pour le gouvernement fédéral de
subventionner le transport des liquides du gaz naturel et ainsi les 55 800 000
$ de subvention promis par le gouvernement fédéral viseront
à aider la modernisation de Pétromont seulement. Au
Québec, on estime que l'ensemble des projets de modernisation
atteindrait les 40 000 000 $; ce qui importe pour le Québec
actuellement, c'est de récupérer cette différence de 15
000 000 $. Par conséquent, il n'est pas question que Pétromont
signe cette entente sans avoir l'assurance qu'il pourra toucher le plein
montant de la subvention, soit 55 800 000 $, Mais il y a eu de fait une entente
entre les deux gouvernements.
M. Johnson (Anjou): ... Il y a une entente signée entre
les deux gouvernements?
M. Rémillard: II y a une entente qui est une
première entente qui n'a pas encore été signée
formellement. (18 heures)
M. Johnson (Anjou): D'accord. Est-ce qu'elle doit l'être
bientôt? Parce que c'est un peu difficile pour un Trésor
d'adresser des chèques de 50 000 000 $ à un autre, sans un
document qui fait que le Vérificateur général n'est pas
hors de lui. Est-ce pour bientôt?
M. Rémillard: On négocie actuellement très
activement. Il y a ce problème de 15 000 000 $ de différence et
il n'est pas
question que Pétromont...
M. Johnson (Anjou): Plus que dans Matane?
M. Rémillard: J'aurais de la difficulté à
vous faire la comparaison, mais je peux vous dire qu'on négocie
vigoureusement, très bien et qu'on est optimiste.
M. Johnson (Anjou): Ah, j'en prends bonne note.
Ententes de développement
économique
Ententes de développement économique. Dans le tableau que
le ministre nous a remis, en ce qui concerne les ententes de
développement économique, on constate qu'il manque 80 000 000 $
que le gouvernement fédéral avait inclus dans les montants
disponibles pour les ententes auxiliaires. Est-ce que ce serait par hasard le
fonds La Prade? On va voir M. Morin à la batte.
M. Rémillard: II s'agit de pêcheries et
d'agriculture; ce n'est pas encore signé. On m'informe que le fonds La
Prade n'est pas compris dans cela.
M. Johnson (Anjou): Mais où est le fonds. La Prade? Il a
toujours été quelque part entre les limbes et le purgatoire, mais
où est-il en ce moment, le fonds La Prade? Est-il rendu en enfer?
M. Rémillard: Le fonds La Prade reste, bien sûr,
à discuter, comme vous le savez; ce qu'il en reste. Nous devons
rencontrer le gouvernement fédéral et discuter de la
répartition de cette somme qui, je le sais, a été au
purgatoire et devrait être au ciel bientôt.
M. Johnson (Anjou): Ah oui! Car le ciel est bleu, c'est bien
connu.
Je me dis, M. le Président, que, dans le cas du fonds La Prade,
on verra claudiquant, avec des problèmes articulaires, deux ministres se
dire: Te souviens-tu du fonds La Prade? Donc, il n'est toujours pas
réglé. Et le ministre est aussi pessimiste que ses
prédécesseurs.
M. Rémillard: Non, il n'est toujours pas
réglé.
M. Johnson (Anjou): D'accord.
M. Rémillard: Et après quelque quatre mois au
gouvernement, je peux vous dire que c'est quelque chose qu'on n'a pas encore
réglé, mais qu'on va régler.
M. Johnson (Anjou): Dans la mesure où
Domtar et Hyundai ont donné l'occasion au gouvernement d'aller
faire des ponctions assez sérieuses dans le cadre du solde du volet 2 de
l'entente de développement industriel sur les projets majeurs, on se
souvient, le ministre a-t-il l'intention de demander à son
collègue fédéral, M. Stevens, de mettre un peu plus
d'argent dans les projets majeurs?
M. Rémillard: C'est exactement la situation. On doit
persuader le gouvernement fédéral de mettre un peu plus d'argent
.pour développer ces projets majeurs. Cela fera partie des discussions
que j'aurai avec le gouvernement fédéral.
M. Johnson (Anjou): Toujours dans le cadre des ententes, au
niveau du financement conjoint, il y avait l'Institut d'optique et le
Laboratoire de technologie électrochimique. L'Institut d'optique,
d'ailleurs, préoccupe sûrement le député de
Jean-Talon, étant donné que c'est dans la région de
Québec. Je ne me trompe pas, c'est bien cela? Quel est l'état du
dossier? Est-ce que ces affaires-là avancent?
M. Rémillard: Oui, je peux faire le point.
M. Johnson (Anjou): Si on les a négociées, vous
devez certainement être à la veille de les annoncer.
M. Rémillard: On me dit que, dans le cas de
l'électrochimie, c'est déjà très avancé.
Cela se présente très bien. Dans le cas de l'optique, c'est
financé à 100 % par le gouvernement fédéral.
Là, nous avons à négocier, c'est encore un sujet que nous
devons négocier, mais qui est en bonne voie de parachèvement.
M. Johnson (Anjou): 100 % par le gouvernement
fédéra! pour l'Institut d'optique?
M. Rémillard: Pour l'immobilisation, c'est 100 %, par le
gouvernement fédéral.
M. Johnson (Anjou): Ah oui, oui! Mais pas pour les frais de
fonctionnement?
M. Rémillard: Les frais de fonctionnement doivent
être partagés.
M. Johnson (Anjou): Je veux seulement savoir si vous allez couper
un ruban bientôt.
M. Rémillard: Je l'espère.
M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, allez-vous nous
inviter?
M. Rémillard: J'espère que j'aurai le
plaisir de couper ce ruban bientôt.
M. Johnson (Anjou): A liez-vous nous inviter? On a
travaillé tellement fort dans ces dossiers. Vous allez nous inviter,
j'espère?
M. Rémillard: Vous savez que je me fais toujours un
devoir, même comme ministre des Relations internationales, d'inviter les
gens de l'Opposition à tout ce à quoi on peut les inviter.
M. Johnson (Anjou): Même si c'est dans votre comté
ou dans ce coin?
M. Rémillard: Même si c'est dans mon comté,
ce sera avec grand plaisir qu'on vous invitera.
M. Johnson (Anjou): J'en prends bonne note et j'espère que
le ministre parle au nom de tous ses collègues, à part cela.
M. Rémillard: Ce n'est pas dans mon comté, mais
c'est dans la région de Québec»
M. Johnson (Anjou): Le ministre aura sûrement besoin, car
je comprends qu'il ne peut pas savoir tout cela par coeur... Dans le secteur du
transport, le gouvernement, au moment du dépôt de ses
crédits, a annoncé des compressions de 56 000 000 $ dans les
dépenses directes et connexes de construction des réseaux
routiers, le tout conformément au mandat que les députés
sont allés chercher lors de la dernière élection. Ils ont
promis pour 1 000 000 000 $ d'autoroutes.
Alors, il y a 56 000 000 $ de coupures dans la construction de routes.
Est-ce que cela remet en question - et là, j'énumère; vous
pourriez peut-être permettre à vos collaborateurs de prendre cela
en note - la route 138 sur la Basse-Côte-Nord, c'est-à-dire le
prolongement de Havre-Saint-Pierre à Natashquan, pour que Gilles
Vigneault puisse enfin chanter que la route s'est rendue, l'autoroute 170
d'AIma à La Baie, n'est-ce pas, qui intéresse une forte
proportion de notre députation, les ouvrages de protection du pont
Laviolette à Trois-Rivières, l'amélioration de la route
Joutel-Authier-Nord, en Abitibi?
Je vois les collaborateurs du ministre qui ont pris des notes.
Peut-être que je pourrais procéder à d'autres questions et,
si jamais ils peuvent avoir les réponses, ils pourraient nous les donner
un peu plus tard. On va peut-être se faire répondre de les
inscrire au feuilleton.
M. Rémillard: La route de la Misère, près de
Baie-Saint-Paul aussi. En fait, on pourrait en nommer. Je me demande, M. le
chef de l'Opposition...
M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas prévu dans l''entente,
cela.
M. Rémillard: Pardon?
M. Johnson (Anjou): Écoutez, je n'ai pas juste dit cela
parce que je m'intéresse à la voirie.
M. Rémilliard: Oui, mais vous croyez...
M. Johnson (Anjou): Je m'intéresse à la voirie,
mais je m'intéresse aussi aux ententes.
M. Rémillard: Oui.
M. Johnson (Anjou): Ces grands ouvrages qui coûtent cher
pour des régions éloignées, dans la plupart des cas, quand
on pense à la Côte-Nord, quand on pense au Saguenay
Lac-Saint-Jean, qui n'est pas exactement périphérique, mais qui
est quand même éloigné, et à l'Abitibi, c'est
prévu carrément dans le cadre des ententes.
Alors, le ministre des Transports ne peut pas juste dire: Je ne fais pas
de "garnotte" cette année. ïl y a des ententes et c'est
financé conjointement avec le gouvernement fédéral.
D'où l'importance... Je n'ai pas parlé du rang de
Saint-Éleuthère et de la rue principale, à Saint-Pie de
Bagot; je vous ai parlé de ce qui est prévu dans les
ententes.
M. Rémillard: Écoutez, ne croyez-vous pas que, si
vous posiez cette question à mon collègue, le ministre des
Transports, vous pourriez avoir une réponse beaucoup plus claire? Ce que
je peux vous dire, c'est simplement en fonction des ententes.
M. Johnson (Anjou): En vertu de la loi...
M. Rémillard: Laissez-moi terminer juste une petite
minute, si vous le permettez.
M. Johnson (Anjou): Pardon, je m'excuse.
M. Rémillard: Notre politique de gestion dans ce cas
prévoit que chaque ministre sectoriel doit, évidemment, faire le
point lui-même sur les ententes qu'il doit avoir en relation avec le
secrétariat, avec moi-même, et nous le présentons au
Conseil des ministres chaque fois. Mais, vous savez, l'expertise directe dans
chacun des secteurs, ce n'est quand même pas au ministre
délégué au secrétariat de connaître tous ces
arrangements.
Je ne sais pas si mon collègue des Transports a
déjà défendu ses crédits ici. Est-ce fait?
M. Johnson (Anjou): Cet après-midi ou demain.
M. Rémillard: II serait peut-être intéressant
de lui poser la question.
M. Johnson (Anjou): C'est cela. S'il nous renvoie à
l'article 3.7 de la Loi sur l'exécutif qui dit que le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes
veille à la mise en oeuvre des ententes, on lui dira que c'est à
lui d'y voir.
M. Rémillard: Bien sûr que je vois à la mise
en oeuvre, mais, sur le contenu de ces ententes, d'une façon
précise, comme les questions que vous me posez, je pense qu'il est tout
à fait normal de vous dire: Pour avoir une réponse claire, pour
que vous soyez très bien renseigné, posez donc la question
à mon collègue, le ministre des Transports.
M. Johnson (Anjou): Non, non. Je n'en tiens pas rigueur et je ne
veux pas que le ministre m'en tienne rigueur, non plus, d'insister. C'est juste
parce que parfois le train passe dans les affaires
fédérales-provinciales. Comme il n'y a plus beaucoup de manne
à Ottawa, pas plus qu'à Québec d'ailleurs - on vous l'a
dit pendant toute l'élection, vous ne vouliez pas nous croire -il faut
que, lorsque le train passe, tu ne le manques pas. S'il y a des ententes qui
prévoient que tu peux compléter une route comme celle qui
mène à Natashquan, tu es mieux de ne pas te tromper en disant:
C'est cela, on va faire une économie de 10 000 000 $ ici et on oublie
d'aller ramasser 10 000 000 $ au fédéral, parce que c'est
financé à 50-50. Je pense que c'est le rôle du ministre et
du secrétariat de bien mettre en garde chacun des ministères
quand ils appliquent les compressions imposées par le détenteur
de la faux au Conseil du trésor. Lorsqu'on dit: Voici, je livre au
Trésor 52 000 000 $ de coupures, à toutes fins utiles, il y a
peut-être des endroits où il ne faut pas livrer 52 000 000 $ de
coupures parce que cela nous prive de sommes qui viendraient du
fédéral. Je dis qu'il s'agit là d'une
responsabilité du ministre d'attirer l'attention de ses collègues
sur ces questions; je le fais par souci d'efficacité et aussi parce que
j'aime bien les gens de la Côte-Nord.
M. Rémillard: Écoutez, je peux vous dire que c'est
déjà fait. J'ai présenté un mémoire au
Conseil des ministres dans ce sens. Tous mes collègues sont très
bien informés de la situation. Nous allons avoir une stratégie
d'ensemble. C'est pour cela que je rencontrerai M. Stevens plus tard, au mais
de mai ou au début de juin. Nous allons pouvoir discuter de chacun de
ces projets. Mais mes collègues sont très bien informés et
ils sont très soucieux, justement, de protéger ces
possibilités de financement que nous avons avec le gouvernement
fédéral.
Programmes d'emploi
M. Johnson (Anjou): D'accord, Le ministre nous disait, dans une
réponse touchant le placement, qu'une des raisons pour lesquelles on se
retirait sans se retirer du placement, sauf dans le cas des femmes, des jeunes
et des assistés sociaux - on va essayer de démêler cela
avec le ministère de la Main-d'Oeuvre et le Trésor -
c'était pour être plus efficace, parce qu'il y avait du double
emploi et tout cela. C'est une querelle, d'ailleurs, qui dure depuis Maurice
Bellemare, si je me souviens bien, en 1967, au moment de la création du
ministère, en même temps que celle du CCTMO et où le
Québec a décidé d'occuper sa place dans ce domaine. C'est
vrai que cela a donné lieu, de temps en temps, à du
dédoublement.
Le ministre n'est pas sans savoir qu'en juin dernier le
fédéral a annoncé une batterie de dédoublements en
matière de planification de l'emploi: ces belles annonces à la TV
avec des gens et des guitares. Et la ministre du gouvernement
fédéral, Mme MacDonald, à ce moment-là,
annonçait qu'il y aurait une série de programmes nouveaux en
matière de formation professionnelle et de création d'emplois.
Alors, nous, on a brassé la cage, comme le ministre a dû le voir
d'ailleurs et comme il va le voir dans les dossiers. Normalement, cela aurait
dû donner lieu à une entente, pour être sûr que
là, c'est clair, c'est le fédéral qui débarque avec
ses gros sabots, qui va dépenser l'argent de vos taxes, des miennes et
de celles des autres "Canadiens", entre guillemets, mais qui s'en vient
carrément dans un domaine pour faire de la duplication de l'intervention
ou bien de l'OPdQ, ou du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, ou de l'ensemble des programmes qu'on a et
qui relèvent de la formation professionnelle, notamment en ce qui touche
le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu ou encore, dans certains cas, du Fonds de développement
régional ou d'autres.
Est-ce qu'il y a une entente de signée avec les
fédéraux là-dessus?
M. Rémillard: Alors, de fait, il n'y a pas encore
d'entente de signée, mais on négocie très fort et cela va
très bien. Il y a déjà des ententes sur trois programmes
et il reste deux programmes à terminer; donc, cela va très bien.
On devrait pouvoir compléter l'entente prochainement.
M. Johnson (Anjou): Je crois comprendre qu'en date du 12
décembre on avait l'entente de principe sur trois des cinq
ou six programmes, je ne me souviens pas; mais, tout ce que je sais,
c'est que je regarde à la télévision de ce temps-ci et les
programmes fédéraux sont partis. Cela marche, cela roule.
M. Rémillard: Ce sont les mêmes programmes.
M. Johnson (Anjou): En tout cas, cela roule à la TV. Je ne
sais pas si cela marche dans les centres de main-d'oeuvre du Canada. Alors, il
faudrait peut-être savoir: Est-ce que les programmes
fédéraux sont en application en ce moment, au Québec?
M. Rémillard: Écoutez, actuellement...
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le fédérai, dans le
fond, tient vos négociateurs occupés, mais, en pratique, est en
train de les appliquer? (18 h 15)
M. Rémillard: Certains sont déjà en
application. Ceux qui ont fait l'objet d'une entente sont déjà en
application. Mais il en reste deux qui sont à négocier.
M. Johnson (Anjou): Des ententes ont été conclues
et signées?
M. Rémillard: Il y a trois programmes dont les ententes...
Nous en sommes à une entente avec le gouvernement fédéral.
C'est même signé. Mais il y a deux programmes qui ne sont pas
encore signés.
M. Johnson (Anjou): D'accord.
M. Rémillard: Mais il y a deux programmes qui ne sont pas
encore signés.
M. Johnson (Anjou): Lesquels?
M. Rémillard: Lesquels de façon plus
précise: acquisition de compétence et pénurie de
main-d'oeuvre- M. Paradis et Mme MacDonald doivent se rencontrer encore
prochainement. Ils négocient sur ces sujets. On devrait arriver à
une entente prochainement.
M. Johnson (Anjou): Cela accroche encore sur les mêmes
affaires?
Matane, est-ce que vous allez en discuter avec M. Stevens ou si le
ministre considère que ce dossier est entre les mains de son
collègue de l'Énergie et des
Ressources? Il peut me répondre. J'accepterais cela.
M. Rémillard: Non, écoutez, c'est un dossier qui
est certainement dans les mains de mon collègue de l'Énergie, M.
Ciaccia. J'ai à regarder l'évolution de ce dossier en ce qu'il
implique différents éléments d'ordre intergouvernemental,
bien sûr. À ce niveau, nous devons là aussi discuter avec
te gouvernement fédéral. Je vais vous laisser discuter. Allez. On
reprendra après.
M. Johnson (Anjou): C'est parce que j'ai mon collègue
critique en matière de main-d'oeuvre et de sécurité du
revenu, je m'excuse, qui arrive un peu en état presque
d'apnée.
M. Rémillard: II arrive comment?
M. Johnson (Anjou): En état d'apnée, en état
de difficulté respiratoire à la fois parce qu'il a dû
courir pour venir me rejoindre et parce qu'il était estomaqué de
vous entendre, par le perroquet. Il me dit que votre collègue de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu dans une autre
commission lui disait tout à l'heure que ça n'allait pas
très bien dans la négociation des deux programmes avec Mme
MacDonald.
M. Rémillard: Écoutez, ça ne va pas
très bien! Vous savez, des négociations, ça ne se
déroule pas du jour au lendemain, avec le gouvernement
fédéral, hein, vous en savez quelque chose.
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Rémillard: On peut être optimiste, parce que le
contexte général est intéressant, mais bien sûr que
c'est difficile. C'est difficile comme les négociations
constitutionnelles seront difficiles. Alors, je pense qu'il n'y a pas de quoi
se surprendre de cela. D'ailleurs, vous savez, c'est le propre du
fédéralisme, comme vous l'avez dit tout à l'heure au
début de vos interventions. Nous sommes des fédéralistes.
Le fédéralisme, vous savez, c'est plus qu'un genre de
gouvernement, c'est une philosophie. Alors, une philosophie fondée sur
des jeux de pouvoir. Un jeu de pouvoir qui s'ajuste par des
négociations. Ce sont ces négociations que nous faisons. Elles ne
sont pas toujours faciles, mais on peut dire que, d'une façon
générale, actuellement, ça regarde bien dans bien des
secteurs. Par contre, dans d'autres secteurs, en ce qui regarde, par exemple,
la loi C-96 qui a été déposée, je peux vous dire
que cela soulève chez nous beaucoup de crainte. Nous aurons à
discuter très fermement avec le gouvernement fédéral si on
veut reprendre d'autres formes de négociations en ce qui regarde la
participation fédérale au développement
régional.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, le ministre m'a
ouvert la porte. Il va comprendre...
M. Rémillard: C'est cela que j'ai voulu faire.
J'espère que vous avez compris.
La Loi constitutionnelle de 1982
M. Johnson (Anjou); ...que j'y passe. Le ministre nous disait: Le
fédéralisme, c'est beaucoup plus qu'un système politique,
c'est une philosophie. C'est effectivement ce qu'il déclarait le 3
février 1981 dans le journal Le Soleil. Il allait même plus loin.
Il disait que le fédéralisme, c'est une façon
d'être. Une façon de penser qui est basée sur le concept du
compromis. Cette philosophie, nous devons l'établir ensemble, conscients
du défi que nous posent tant une situation mondiale difficile qu'une
spécificité interne complexe. Jusque-là, ça va
bien. Le ministre disait également que par sa charte des droits et
libertés fondamentales, ses propositions de formule d'amendement, ses
principes de partage de richesse, l'actuel projet - (février 1981) de
résolution mettait en cause l'essence même de la philosophie du
fédéralisme. Est-ce que le ministre est toujours d'accord?
M. Rémillard: En 1981, je pense que j'étais
parfaitement d'accord avec ce que j'ai écrit là. D'abord, je
voudrais vous dire à quel point... Laissez-moi... Oui.
M. Johnson (Anjou): Je me permets juste de poser une question
spécifique au ministre, puis ensuite...
M. Rémillard: Une complémentaire, comme on
dit...
M. Johnson (Anjou): Une complémentaire, comme vous
voudrez.
M. Rémillard: ...en termes parlementaires. Une
additionnelle, excusez-moi.
M. Johnson (Anjou): Je crois comprendre, M. le Président,
qu'il n'y a pas grand-chose qui a changé entre la proposition, en
février 1981, et ce qui fut adopté un an après?
M. Rémillard: Oui!
M. Johnson (Anjou): Notamment, au niveau de la charte...
M. Rémillard: Ah! Bien sûr!
M. Johnson (Anjou): ...au niveau de la formule
d'amendement...
M. Rémillard: Ah! Bien oui!
M. Johnson (Anjou): Ha! Ha! Ha! et au niveau du droit de
veto.
M. Rémillard: Bien sûr! C'est cela qui est toute la
différence!
M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, le ministre est
satisfait de la charte, de la formule d'amendement...
M. Rémillard: On va prendre cela un par un, si vous
voulez. Tout d'abord, je voudrais vous dire à quel point je suis
touché et honoré des références que vous faites
à ce que j'ai pu écrire comme professeur. Je dois vous dire que
je vous en remercie. Je pense que cela me convainc aussi. Vous savez, on se
lance en politique, comme cela...
M. Johnson (Anjou): Je sais lire, j'espère.
M. Rémillard: Que vous sachiez lire, que vous lisiez ce
que j'écris, j'en suis honoré, je vous le dis encore. Cela me
permet de me situer aussi dans la continuité de ce que j'écris,
de ce que je pense. Justement, vous vous référez à un
article que j'avais écrit en février 1981. J'écrivais: "Un
projet illégitime". De fait, quand on se réfère à
ce projet du 3 février 1981, c'était le cas. Vous me posez la
question et vous dites: II n'y a pas eu une grande différence avec
l'entente qui a été finalement signée en 1982. Toute la
différence est là. Ensuite, il y a eu les négociations et
il y a eu des distinctions importantes qui ont été
apportées en ce qui regarde la Charte des droits et libertés, en
ce qui regarde la formule d'amendement. Maintenant, il demeure une chose, M. le
chef de l'Opposition, je tiens à vous le préciser, c'est que la
formule d'amendement, même si elle a été modifiée...
N'oubliez pas que c'est te 16 avril 1981. C'est le 3 février que j'ai
écrit cet article. Le 16 avril 1981, vous savez ce qui est
arrivé? Trois jours après avoir été élu pour
un nouveau mandat, vous avez signé ce document disant que toutes les
provinces étaient égales, y compris le Québec. Vous vous
souvenez de ce qui est arrivé après? C'est pour vous
remémorer un peu les événements. Alors, bien sûr,
quand on cite, il faut se situer aussi dans le contexte, dans le temps; comment
cela s'est passé. Ce que je peux vous dire, c'est que nous, on n'a
absolument rien, fondamentalement, contre l'application de la Charte des droits
et libertés et la clause "nonobstant" en particulier.
Tantôt, vous faisiez référence à la clause
"nonobstant". Premièrement, il faudrait bien comprendre que la clause
"nonobstant" s'applique aux articles 2 et 7 à 15. Vous vous êtes
opposé à l'article 6 sur le droit de circulation. Ce n'est pas
touché par la clause "nonobstant". Vous vous êtes ensuite
opposé à l'article 23 sur les droits linguistiques. Ce n'est pas
touché par la clause "nonobstant". Vous touchiez quoi par la clause
"nonobstant"? Vous touchiez à des
droits comme la liberté d'association, de pensée et de
religion. Vous touchiez à des droits comme la liberté, la
sécurité de sa personne, le droit à la vie. Vous touchiez
à des droits comme avoir un procès juste et équitable, la
présomption d'innocence; cela, c'est important, souvenez-vous de la loi
111.Et puis, vous touchiez le droit à l'égalité,
l'article 15. C'est cela, la clause "nonobstant". Dires La clause "nonobstant"
s'applique à l'ensemble de la charte, ce n'est pas vrai, cela. Ce n'est
pas vrai.La clause "nonobstant" s'appliquait è des droits aussi
fondamentaux que ceux que je viens d'énumérer aux articles 2 et 7
à 15. à quoi cela servait, l'utilisation systématique de
cette clause "nonobstant" dans les projets de loi? Cela servait de symbole.
C'était votre symbole pour vous opposer à ce que vous appelez
faussement le "Canada Bill". Ce n'est pas le "Canada Bill", juridiquement. Vous
avez d'excellents constitutionnaiistes qui vous conseillent. Demandez-leur un
avis. Ce n'est pas le "Canada Bill". C'est la Loi...
M. Johnson (Anjou): C'est la loi... M. Rémillard:
...constitutionnelle... M. Johnson (Anjou): ...du Canada.
M. Rémillard: ...de 1982. Non, c'est important.
M. Johnson (Anjou): Du Canada! Du Canada.
M. Rémillard: Loi constitutionnelle de 1982, c'est cela,
le titre juridique, constitutionnel. C'est dans ce contexte-là que la
clause "nonobstant", pour nous, n'a aucune signification de symbole parce que
la Charte canadienne des droits et libertés, nous l'acceptons.
M. Johnson (Anjou): Alors, monsieur...
M. Rémillard: La charte linguistique, vous savez, elle est
là et les droits linguistiques sont là et il n'y a pas de
problème à ce niveau. L'article 23 est là, c'est la
"clause Canada". Nous pouvons rediscuter la clause 23 pour tenter de
l'améliorer et de garantir plus de droits aux francophones hors
Québec; cela, c'est notre but, mais je ne vois pas pourquoi on
utiliserait la clause "nonobstant" pour mettre de côté
l'application de la charte pour les lois québécoises parce qu'on
veut améliorer l'article 23.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, d'abord, je remercie
le ministre, mais je me permets encore une fois de lui dire que sa
condescendance de salle de classe d'introduction au droit constitutionnel, je
pourrais m'en passer. Je comprends que j'ai affaire à un éminent
juriste en matière constitutionnelle, mais je ne me considère pas
comme étant exactement un deux de pique dans certaines de ces choses!
J'ai eu l'occasion de lire, y compris les livres du ministre.
J'apprécierais beaucoup que, peut-être en nous faisant profiter de
ses très grandes connaissances en matière constitutionnelle, il
ne nous prenne pas complètement pour des tartes.
M. Rémillard: Non, je sais que vous aimez la tarte aux
pommes, mais je n'irais pas jusque-là.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pourrais
peut-être poser la question au ministre, puisqu'il veut parler de la
clause "nonobstant" durant quelques minutes. Indépendamment du fait que
la décision du gouvernement de ne plus recourir au "nonobstant"...
M. Rémillard: ...systématique.
M. Johnson (Anjou): ...ait été appliquée par
le ministre du Revenu avant que le Conseil des ministres n'en prenne la
décision... Les dates sont là pour le démontrer. Le
décret du Conseil des ministres est subséquent à la
présentation d'un amendement en commission parlementaire par le ministre
du Revenu. Si le ministre veut les documents, on va les lui donner. On va lui
donner le Hansard, la transcription du Journal des débats en commission,
avec le ministre du Revenu, avec une date. On va lui donner la copie du
décret signée par le secrétaire général du
Conseil des ministres. Il va se rendre compte que le député de
Gatineau, ministre du Revenu, a proposé une politique gouvernementale de
non-recours au "nonobstant" avant que le Conseil des ministres ne se soit
prononcé sur cette question. Je me demande même, d'ailleurs, si le
ministre était au courant. Puisque le ministre veut parler de cela, je
vais juste lui poser la problématique suivante. Considère-t-il
que le droit, puisqu'il veut s'adonner à des considérations de
théorie du droit, est une manifestation de la différenciation
sociologique et culturelle entre les collectivités, oui ou non? Est-ce
que, pour lui, le véhicule qu'est le droit est une des grandes
manifestations de la différence qui existe entre les peuples? Je crois
qu'il a déjà défendu ce point de vue à
l'université.
Deuxièmement, je vais lui donner un exemple concret. Les
tribunaux canadiens vont être appelés à appliquer dans les
mois et les années qui viennent des principes de droit qui tentent de
concilier des notions de droit collectif et de droit individuel. Je m'explique.
Par exemple, le caractère
antinomique du droit d'association avec le droit de religion qu'on peut
retrouver dans un groupe comme les témoins de Jéhovah, qui ne
peuvent pas appartenir en vertu de leur religion, parce qu'ils ont
professé de ce faire, à une autre association, et qui peuvent
s'en prendre à la formule Rand en droit du travail, qui est du droit
collectif qui relève du droit d'association. Quelqu'un de religion sikh,
d'origine indienne, qui ne doit pas se découvrir de son turban devant
des personnes qui ne font pas partie de sa religion, qui arriverait sur un
chantier de construction et qui dirait: Moi, je ne veux pas enlever mon turban;
ce n'est pas vrai que vous allez me mettre un casque d'acier sur la tête.
Un beau problème sur le plan juridique entre la liberté de
religion et ce qu'elle signifie et le droit collectif qu'on s'est donné
en matière de santé et de sécurité du travail, et
la réglementation afférente.
M. Rémillard: ...c'est une décision.
M. Johnson (Anjou): En refusant de recourir, notamment dans le
secteur du droit du travail, à l'utilisation systématique de la
clause "nonobstant", le ministre n'est-il pas conscient qu'il laisse entre les
mains de la jurisprudence de la Colombie britannique, de la Saskatchewan ou
d'ailleurs au Canada le soin d'affirmer les principes de conciliation du droit
collectif et du droit individuel, notamment en matière de droit du
travail, alors que l'application systématique de la clause "nonobstant"
est le choix qui est fait par ce Parlement, qui est composé de 122
élus, ma foi! qui ont autre chose à faire que juste une
période de questions de 25 minutes tous les jours et de batailles de
procédure, qui ont à trancher dans un certain nombre de valeurs?
Ne croit-il pas que l'application du "nonobstant" de façon
systématique, en matière de droit du travail notamment, s'impose
si nous croyons que le régime de droit que nous nous sommes donné
en droit du travail est celui qui doit primer sur l'opinion que peut en avoir
un juge de la Cour suprême de la Colombie britannique? C'est cela
concrètement aussi l'application du "nonobstant". (18 h 30)
M. Rémillard:Bien non! Je ne le crois pas.
M. Johnson (Anjou): Par ailleurs, quant à la dimension
symbolique du "nonobstant", je ne disconviens pas qu'en politique - il en est
des symboles sur le plan politique comme il en est du langage non verbal dans
la conversation - la relation entre les collectivités se fait aussi
à travers des symboles. Autrement le monde se tirerait dessus à
longueur de journée. Il y a déjà assez de guerres ainsi et
je n'en souhaite pas une, civile ou autre, au Canada ou ailleurs. Mais les
symboles ont leur importance en politique. Ils sont la solution au cassage de
margoulettes; et c'est, à mon avis, une façon civilisée de
voir des entités politiques traiter entre elles. Elles traitent aussi
par la voie de l'utilisation des symboles. Le symbole avait tellement de sens
face au reste du Canada que la première réaction du
Secrétaire d'État du Canada, quand il a appris par la voie des
journaux le délestage spontané, peut-être quelque peu
irréfléchi du gouvernement, du recours à la clause
"nonobstant", sa première réaction, dans une situation qui en est
une de rapport de forces entre les collectivités, et que le ministre ne
devrait jamais oublier, cela a été de dire: Écoutez!
Maintenant, il faudrait peut-être qu'il mette quelque chose de l'avant
dans les propositions constitutionnelles. Québec a délesté
et a eu comme réaction du reste du Canada: Maintenant, il faut mettre
quelque chose sur la table. Même l'abandon de ce symbole, pour reprendre
le vocabulaire du ministre, avait son importance dans l'approche du dossier
constitutionnel et le ministre l'a traité à la pièce.
C'est d'ailleurs pour cela que le professeur Dion a
démissionné.
M. Rémillard: Est-ce que cela va?
M. Johnson (Anjou): Merci, M. le Président.
C'étaient mes commentaires.
M. Rémillard: Écoutezl Est-ce que vous vous rendez
compte, M. le Président, qu'en utilisant systématiquement la
clause "nonobstant" on privait des Québécois et des
Québécoises de droits fondamentaux auxquels ils ont droit?
M. Johnson (Anjou): Faux.
M. Rémillard: Vrai.
M. Johnson (Anjou): Faux.
M. Rémillard: Vrai, et je vais vous dire pourquoi.
Écoutez-moi une minute.
M. Johnson (Anjou): Cela doit être aussi vrai que votre
Procureur général qui prétend qu'il fait la même
chose que je faisais au sujet de la loi 101. Cela doit être du même
ordre de vérité.
M. Rémillard: Laissez-moi...
M. Johnson (Anjou): J'ai poursuivi 57 fois, et il continue de
répéter que je ne poursuivais pas. Aie!
M. Rémillard: Laissez-moi parler une petite minute!
Laissez-moi faire! Attendez une petite minute!
M. Johnson (Anjou): Expliquez-moi cela.
M. Rémillard: Tout d'abord, première des choses,
vous savez très bien que la lot qu'on appelle la Charte des droits et
libertés du Québec n'a pas la même signification et valeur
juridique que la Charte des droits et libertés incluse dans la
constitution. Il n'y a personne, il n'y a pas un expert que vous avez
consulté, j'en suis certain, ou qui sont venus témoigner qui
peuvent nous dire le contraire, parce que l'interprétation est plus
large et parce qu'il y a la valeur constitutionnelle - on ne peut pas la
modifier à tout bout de champ; il y ala valeur de la
rigidité de la constitution.
Vous savez que, par l'utilisation systématique de cette clause
"nonobstant" depuis le 17 avril 1982, vous avez empêché les
Québécois et les Québécoises qui avaient des droits
fondamentaux de les faire valoir. Vous souleviez tout à l'heure un point
très important, j'y reviens: des groupes de personnes, des gens qui
appartiennent à un groupe de personnes, qui veulent faire valoir un
droit comme le droit d'association. Le droit d'association est un droit reconnu
à l'article 2 de la Charte des droits et libertés du Canada et
qui a une interprétation plus large, précisément par une
interprétation des règles constitutionnelles, qu'une simple loi
qu'on peut interpréter au niveau provincial. Je me souviens très
bien, comme professeur à l'université, des gens venaient me voir
pour me dire: On veut contester telle loi du Québec en fonction
justement de ce droit d'association. Et on ne pouvait pas le faire à
cause de cette clause "nonobstant". Combien de Québécois et de
Québécoises ont été empêchés de faire
reconnaître leurs droits et leurs libertés à cause de
l'utilisation systématique de cette clause "nonobstant"? Ce qu'on a dit
dans la décision...
M. Johnson (Anjou): On peut l'utiliser par la Charte des droits
et libertés du Québec
M. Rémillard: Absolument pas.
M. Johnson (Anjou): Ils pouvaient avoir un recours en vertu de la
Charte des droits et libertés du Québec.
M. Rémillard: Non. Ce n'est pas la même chose. Je
voudrais que vous compreniez cela aussi. Vous le savez aussi bien que moi que
les règles d'interprétation...
M. Johnson (Anjou): Voulez-vous changer de ton, vous?
M. Rémillard: Attendez une petite minute. Laissez-moi
parler.
Une voix: Changez de ton.
M. Johnson (Anjou): Pour l'amour du saint ciel, vous n'êtes
pas dans une salle de cours à l'école primaire.
M. Rémillard: Je ne vous donne pas un cours, j'essaie de
vous faire comprendre. C'est différent. J'essaie de vous dire...
M. Johnson (Anjou): Cela ne s'améliore pas.
M. Rémillard: Non, je vois que vous ne vous
améliorez pas. Mais, attendez une minute, vous allez comprendre. Ce que
j'essaie de vous dire est facile à comprendre. Ce que j'essaie de vous
dire, c'est que les règles d'interprétation pour un droit qui est
enchâssé dans la constitution sont complètement
différentes des règles d'interprétation pour un droit qui
appartient à une simple loi, comme c'est le cas de la Charte des droits
et libertés du Québec. C'est dans ce cas, bien sûr, que si
vous utilisez la clause "nonobstant" vous empêchez
l'interprétation large, généreuse qu'on doit donner
normalement à une charte qui doit être interprétée
par des tribunaux d'une façon large et généreuse.
Maintenant, autre chose. Vous dites que c'est maintenant un juge de la
Colombie britannique ou un juge de la Nouvelle-Écosse qui va venir
déterminer notre droit. Voyons doncl Voyons doncl Comme si on avait deux
systèmes judiciaires au Canada: un pour le Québec, un pour le
reste du Canada.
M. Johnson (Anjou): Le système juridique, par exemple.
M. Rémillard: Voyons doncl On a deux systèmes
juridiques en droit privé. On a un système commun en droit public
et on a un même processus judiciaire qui nous aboutit au bout du compte
au même intervenant qu'est la Cour suprême du Canada. Alors, si
vous suivez le processus qu'on doit suivre par une contestation en utilisant la
Charte québécoise des droits et libertés, c'est exactement
la même chose que si vous suivez le processus qui est utilisé pour
la Charte canadienne des droits et libertés. Bien, voyons doncl Vous
commencez par la Cour supérieure, vous allez en Cour d'appel et ensuite
vous allez en Cour suprême. Dites-moi donc le contraire de cela.
M. Johnson (Anjou): Cela n'a pas de bon sens. Cela n'a pas de bon
sens.
M. Rémillard: Alors, l'interprétation e3t la
même. Comment pouvez-vous arriver à la conclusion de nous dire
ensuite que, parce que la Cour suprême interprète la charte, un
droit venant du Québec, cela va être différent d'une
interprétation qui vient d'un droit qui vient de la Charte des droits
et
libertés de la personne du Québec? Voyons donc! C'est
là un argument qui ne se tient pas.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, heureusement qu'il
n'y a pas d'évaluation des profs par leurs
élèves.
M. le Président...
M. Rémillard: J'ai la note de passage.
M. Johnson (Anjou); Est-ce que c'est pour cette raison, cette
conviction profonde qu'a le ministre, qu'on a méchamment et durement
empêché les Québécois de se prévaloir des
droits et libertés contenus dans la charte canadienne, qu'il est
solidaire de la décision du Procureur général, son
collègue, le député de D'Arcy McGee, d'en appeler dans le
cas de la loi 62 en Cour suprême?
M. Rémillard: II y a des principes très importants
à faire valoir dans le cas de la loi 62, justement, pour savoir la
réelle portée de cette clause "nonobstant". Il faut dire une
chose, cette clause "nonobstant", on n'a pas décidé de ne plus
l'utiliser. On a dit qu'on l'utiliserait lorsque ce serait nécessaire
pour les intérêts du Québec, l'intérêt des
Québécois et des Québécoises. Maintenant, bien
sûr que c'est sub judice, comme vous le savez, et c'est difficile d'en
parler, de discuter du fond de cette question.
M. Johnson (Anjou): Si je comprends bien, le ministre nous dit
qu'il y a deux sortes de lois au Québec: il y en a qui méritent
un "nonobstant" et il y en a qui ne le méritent pas. C'est cela?
M. Rémillard: Non. Il y a des lois, comme la loi 111, qui
ne méritaient pas un "nonobstant". Vous l'avez dit et j'ai bien
apprécié quand vous avez fait votre intervention. Vous avez bien
dit que la loi 111, justement, empêchait les Québécois et
les Québécoises d'avoir ce droit à la présomption
d'innocence, qui est un droit qui est un fondement de tout notre droit
pénal. Lorsque vous avez mis cette clause "nonobstant" dans la loi 111,
vous n'aviez pas le droit de le faire. Et je pense que vous reconnaissez cela
maintenant.
M. Johnson (Anjou): Non. Est-ce qu'on parle du droit, de
l'opinion politique? C'est parce que le ministre confond les opinions ou les
convictions politiques ou l'idéologie, qui ne sont pas des mauvais mots,
n'est-ce pas? C'est comme l'argent et le pouvoir. Cela dépend de ce que
tu fais avec. Ce n'est pas nécessairement sale. Le ministre utilise
indistinctement le mot "droit" et le mot "légitimité" pour
qualifier souvent ce que sont des conceptions idéologiques ou
philosophiques. Qu'il me dise qu'on n'avait pas le droit, dans le cas de la loi
111, d'y inclure une clause "nonobstant", je ne pense pas que ce qui est en
cause ici c'est le fondement juridique du pouvoir du Parlement du Québec
que de le faire. Qu'il me dise qu'il considérait que ce n'était
pas légitime, que ce n'était pas correct, que c'était issu
d'une idéologie répressive, il pourra bien me le dire s'il le
veut, mais je trouve qu'il utilise le mot "droit" à toutes les sauces.
On va finir par penser que tout est dans tout, et inversement, à
l'égard du droit.
M. Rémillard: Le droit, c'est de la moralité aussi.
Ce n'est pas simplement une étude de droit positif, c'est de la
moralité. Dans une société démocratique, la
légitimité et la légalité doivent aller de pair. Je
vous rappelle cela. La loi 111... Je pourrais vous rappeler aussi le
congédiement de la présidente de la Commission des droits de la
personne qui a suivi.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je prendrai
simplement le dernier commentaire du ministre, qui m'a éclairé
beaucoup plus sur son tempérament que sur ses idées, quand il
nous parle du droit comme étant la moralité.
Une dernière question, qui touche aux retombées
étranges du F-18 dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean sous forme d'un champ
de tir. On se rappellera que ce dossier... Pardon?
Le Président (M. Filion): M. le chef de l'Opposition,
avant que vous ne terminiez votre question, est-ce que je pourrais avoir le
consentement des membres de la commission pour qu'on dépasse un peu
l'heure que nous avions prévue, étant donné, entre autres,
que je cherchais à ce que vous épuisiez ensemble le sujet que
vous aviez amorcé il y a déjà une trentaine de minutes sur
la clause nonobstant, ce que je n'ai pas réussi à faire? En ce
sens-là, est-ce que je pourrais avoir le consentement des membres de la
commission pour que nous débordions, afin de permettre au
député de Mille-Îles d'intervenir?
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. Je n'ai pas d'objection, M. le
Président. Notre collègue voudrait cinq, dix minutes?
M. Bélisle: Je ne vois pas la nécessité, M.
le Président, à cause d'une petite question que j'ai à
poser, d'étendre les débats plus avant. Je pense qu'on a
été très condescendant, aujourd'hui...
M. Johnson (Anjou): Ah oui! Condescendant, vous l'avez
été pas mal!
M. Bélisle: Si vous me permettez, M. le chef de
l'Opposition, très condescendant de
laisser aller le chef de l'Opposition à avoir presque
l'entièreté du droit de questionner le ministre ici cet
après-midi. En ce qui nous concerne, il n'y a pas de consentement pour
continuer. Je vais moi-même me retirer mon droit de parole pour que cela
se termine à l'heure prévue. Il est déjà assez
tard.
M. Johnson (Anjou): Ah bon' Très bien! M. le
Président, juste avant... Ce n'est pas terminé encore. Je
voudrais simplement rappeler au condescendant député de
Mille-Îles que je lui ai offert tout à l'heure - je pensais qu'il
n'avait rien à dire - je lui ai demandé s'il voulait prendre la
parole, étant donné que je ne voulais pas... M. le
Président, permettez-moi de finir.
Le Président (M. Filions): Oui. Avec votre permission, M.
le chef de l'Opposition. M. le député de Mille-Îles, vous
m'avez dit tantôt que vous aviez besoin de quelques minutes.
D'accord?
M. Bélisle: Oui, alors, donnez-moi les dernières
minutes. Cela fait une demi-heure que j'ai la main levée. Vous le savez,
vous m'avez noté il y a une demi-heure.
M. Johnson (Anjou): Il n'avait qu'à le dire.
Le Président (M. Filion: Il est encore temps, et j'ai
toujours prévu de vous consacrer ces quelques minutes. C'est pour cette
raison que j'ai interrompu le chef de l'Opposition, qui, d'ailleurs? si vous
avez suivi ce que j'ai dit tantôt, était en train d'épuiser
un sujet avec le ministre. Je croyais, de bonne foi, et je suis sûr que
vous ne me le reprocherez pas, qu'il était d'intérêt pour
Ies membres de la commission de vider cette question. Étant donné
que la question est vidée, je vous offre le droit de parole, que vous
déclinez, étant donné que, de notre côté,
nous sommes consentants à prendre les quelques minutes
supplémentaires pour vos interventions.
Adoption des crédits
M. Johnson (Anjou): M. le Président, voulez-vous appeler
l'adoption des crédits, à moins que cela n'intéresse pas
le ministre? Compte tenu du temps qu'il nous reste, peut-être que le
ministre voudrait appeler l'adoption des crédits?
Le Président (M. Filion): Je réinvite le
député de Mille-Îles à...
M. Bélisle: L'adoption des crédits, M. le
Président.
M. Johnson (Anjou): M. Je Président, pour notre part, les
crédits sont adoptés.
Le Président (M. Filion): Le programme 4, des Affaires
intergouvernementales canadiennes, du ministère du Conseil
exécutif est-il adopté?
M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.
Des voix: Adopté.
Une voix: Unanime.
M. Bélisle: Merci, merci beaucoup.
Le Président (M. Filion): Adopté. J'ajourne les
travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 44)