Journal des débats de la Commission des finances publiques
Version préliminaire
42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Le
jeudi 17 mars 2022
-
Vol. 46 N° 16
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 12, Loi visant principalement à promouvoir l'achat québécois et responsable par les organismes publics, à renforcer le régime d'intégrité des entreprises et accroître les pouvoirs de l'Autorité des marchés publics
Aller directement au contenu du Journal des débats
11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, à l'ordre s'il vous plaît! Je constate que nous avons quorum.
Je vous souhaite la bienvenue. Nous sommes en mesure de reprendre nos auditions
publiques et nos consultations particulières sur le projet de loi n° 12, Loi
visant principalement à promouvoir l'achat québécois et responsable par les
organismes publics, à renforcer le régime d'intégrité des entreprises et à
accroître les pouvoirs de l'Autorité des marchés publics. Mme la secrétaire,
heureux de vous retrouver, vous nous avez manqué. Est-ce qu'il y aurait des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Alors, M. Reid (Beauharnois) est remplacé par M. Allaire
(Maskinongé); et M. Ouellet (René- Lévesque) est remplacé par M. Gaudreault
(Jonquière).
Le Président (M. Simard) : Alors,
ce matin, nous entendrons donc deux groupes avant la pause, et nous commençons
par Me Geneviève Dufour, professeure titulaire à l'Université de Sherbrooke.
Chère collègue, soyez la bienvenue. Vous savez que vous disposez de...
Mme Dufour (Geneviève) : Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Simard) : ...de
10 minutes pour faire votre présentation.
Mme Dufour (Geneviève) : Merci.
M. le Président, Mme la Ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de
m'avoir invitée à intervenir devant vous. Comme M. le Président a dit, je suis
professeure à la Faculté de droit de l'Université de Sherbrooke et je concentre
mes recherches sur les liens entre le commerce, et l'environnement, et les
droits humains. Je suis surtout, donc, experte en droit du commerce
international, mais j'ai eu à me pencher sur les acquisitions durables depuis
2014. En fait, je mène des recherches sur la question des acquisitions durables
en plus de donner fréquemment des formations ou des conseils aux entreprises
ainsi qu'à divers groupes d'acheteurs.
Plus précisément, dans le cadre de mes
recherches, j'ai analysé le cadre normatif d'une trentaine d'entités dans le
monde, donc des villes, des provinces, des États, des pays qui ont fait le pari
de rendre leurs acquisitions plus responsables, et mon constat est simple, le
Québec est en retard. J'attendais donc avec grande impatience le projet de loi
qui est à l'étude aujourd'hui, parce que mes recherches m'ont aussi amenée à
constater que les entités que je qualifie de championnes en matière
d'acquisitions responsables le sont toutes à la suite d'un changement législatif.
Autrement dit, les organismes publics ne décident pas du jour au lendemain de
faire des acquisitions responsables, ils le font quand on les oblige d'abord et
avant tout. Bon. Évidemment, ensuite, il est important de les former, de les
outiller et de les accompagner, ce que la stratégie gouvernementale prévoit,
évidemment que je ne commenterai pas aujourd'hui. Bref, j'attendais donc avec
impatience ce projet de loi, car il a le potentiel de changer enfin le paysage
de l'approvisionnement au Québec, et je pense qu'on peut se réjouir que le
projet de loi fasse une place à l'acquisition responsable. Pour moi, le message
est clair: on veut évoluer, on veut rendre les acquisitions plus durables, plus
socialement responsables, plus inclusives.
Toutefois, au regard de mes recherches, ma
lecture du projet de loi me laisse croire qu'il doit être beaucoup plus
directif et beaucoup plus précis. Sans ça, les changements ne s'opéreront pas,
et nous continuerons à prendre du retard par rapport à un nombre important de
pays dans le monde, et qui dit retard dit impossibilité d'être compétitif tant
sur les marchés nationaux que sur les marchés étrangers, alors même que les
traités de commerce et les accords de libre-échange nous permettent de plus en
plus d'accéder aux marchés publics étrangers, mais que ces derniers ajoutent de
plus en plus aussi, souvent, des considérations...
Mme Dufour (Geneviève) : ...donc,
évidemment, qu'il faut y aller progressivement. Évidemment, qu'on doit laisser
une certaine souplesse, évidemment, qu'on ne peut pas rattraper 15 ans de
retard en trois ans, mais on doit néanmoins être ambitieux. Et pour ça, il faut
être directif et renverser le fardeau de preuve. Les organismes publics
devraient avoir le fardeau d'inclure du développement durable et, à défaut, de
s'expliquer, de consigner, comme on exige d'eux de le faire pour l'achat
québécois ou régional sous les seuils de l'Accord de libre-échange canadien
prévu à l'article 14.2.
Dans mon mémoire, je propose, bien
humblement, sept recommandations. Certaines de mes recommandations seront
peut-être plus pertinentes dans le cadre des règlements ou de la stratégie. Le
législateur va en décider. Mais je souhaite rappeler à la commission que, si on
regarde ce qui s'est passé à l'étranger, dans divers pays qui ont un pas
d'avance sur nous, lorsqu'ils se sont contentés de stratégies ou de politiques
sans insérer le tout de manière très précise dans le cadre normatif en tant que
tel, ils se sont rendu compte qu'ils n'atteignaient pas leurs cibles.
Cela étant dit, je vais maintenant revenir
avec vous rapidement sur mes sept recommandations. La première d'entre elles,
c'est de privilégier fortement la règle de l'offre la plus économiquement
avantageuse plutôt que le plus bas soumissionnaire et, à défaut, d'exiger une
justification. C'est important d'évaluer la qualité d'un produit. Les études
démontrent que d'insérer du développement durable uniquement à titre de
spécifications techniques constitue un obstacle majeur pour l'accroissement des
acquisitions durables. Au niveau de l'Union européenne et dans une majorité de
pays européens, on privilégie explicitement l'offre la plus économiquement
avantageuse. Et on définit ce mode-là en précisant qu'il inclut de prendre en
compte le cycle complet, le cycle de vie complet et le meilleur rapport
qualité-prix, lui-même évalué sur la base de critères comprenant des aspects
évidemment qualitatifs, environnementaux et/ou sociaux liés à l'objet du
marché. Donc, c'est clair, c'est précis.
Deuxième recommandation, définir les
objectifs précis de développement durable que le gouvernement cherche à
poursuivre par ses acquisitions. Le projet de loi 12 réfère à divers
instruments pour définir le concept de développement durable. C'est une
technique, la technique du renvoi, qui est bien connue des juristes, mais qui
est imprécise et qui va surtout laisser ici probablement plusieurs organismes
publics hésitants. Donc, à l'instar de ce qui se fait, par exemple, à Oslo, on
doit préciser les objectifs précis poursuivis concernant les droits humains,
les normes fondamentales du travail ou de l'environnement qui doivent être
poursuivis dans le cadre des acquisitions responsables. La directive
européenne, elle, inclut en annexe les conventions internationales pertinentes.
Il me semble qu'on devrait s'en inspirer.
Troisième recommandation, identifier
explicitement les voies de passage au sein desquelles le développement durable
peut être inséré et offrir des balises claires. Pour avoir souvent formé des
acheteurs publics, ceux-ci ne connaissent pas les voies de passage par
lesquelles ils peuvent insérer du développement durable. Donc, le projet de loi
devrait être clair, il devrait nommer ces voies de passage. L'objet du marché,
les exigences de conformité, les critères d'évaluation de la qualité, les
critères d'exécution du contrat, les critères d'exclusion de certains
fournisseurs, le développement durable peut être inséré à chacune de ces
étapes. Ça devrait être mentionné et le règlement devrait, lui, les baliser. Je
n'ai évidemment pas le temps de passer en revue comment il devrait les baliser,
mais à ce titre-là, on peut aussi s'inspirer de ce que font les autres pays.
Quatrième recommandation, imposer la prise
en compte du coût du cycle de vie complet des produits et des services. J'ai
bien compris, Mme la ministre, que vous acceptez l'idée de prendre en compte le
coût du cycle de vie et je m'en réjouis, parce qu'il est acquis à travers le
monde que les marchés publics doivent aujourd'hui prendre en compte le coût du
cycle de vie complet. À ce titre, le projet de loi devrait être plus ambitieux
puis envoyer un message clair à l'effet que les organismes doivent
systématiquement prendre en compte les coûts monétisables du cycle de vie, les
coûts en amont, les coûts durant et les coûts en aval de la possession
devraient être pris en compte. Autrement dit, il arrive trop souvent que le
prix d'acquisition ne reflète pas la réalité. Donc, on se retrouve, comme
Québécois, à acheter des produits peu chers, mais extrêmement dispendieux à
long terme, ou encore des produits qui doivent être remplacés à courte échéance
ou qui ne peuvent tout simplement pas être recyclés ou réutilisés. Donc, on
devrait pouvoir prendre en compte les coûts de l'eau, de l'énergie consommée
lors de la production, lors de l'extraction des matières premières, les coûts
de dépollution ou les coûts de maintenance, les coûts pour réduire la
consommation d'énergie ou de polluants, les coûts de retrait, les coûts de
récupération, etc. Évidemment, une fois que c'est dit, on doit trouver des
outils qui vont permettre de calculer ces coûts. Encore ici, on peut s'inspirer
de ce qui se fait à l'étranger ainsi que de ce qui se fait déjà ici...
Mme Dufour (Geneviève) : ...dans...
Mais il n'en demeure pas moins que le projet de loi, lui, doit affirmer le
principe. La stratégie ensuite pourra permettre d'outiller les organismes
publics.
• (11 h 40) •
Cinquième recommandation : Préciser
la portée de l'exigence de prendre en compte les éléments du développement
durable liés à l'objet du marché.
Le projet de loi insiste sur le lien entre
la considération développement durable et le lien avec l'objet du marché, et
une telle exigence va de soi. Toutefois, le projet de loi ne précise pas
suffisamment. Et j'ai peur que cette exigence mène les organismes publics à
limiter leur marge de manoeuvre à insérer du développement durable. Et c'est ce
qui s'est passé dans plusieurs pays, ça a retardé la prise en compte du
développement durable de 10 ans dans certains pays. En Europe, il a fallu
plusieurs décisions de la Cour de justice de l'Union européenne pour déterminer
la portée de l'exigence d'être lié à l'objet du marché.
Encore une fois, prenons l'exemple sur
ceux qui sont passés par là puis ajustons-nous dès maintenant. Précisons par
exemple que sont considérées comme liées à l'objet du marché les considérations
de développement durable relatives à tous les stades du cycle de vie d'un
produit et d'un service, et ce, même lorsque ces considérations
environnementales ou sociales n'ont pas un impact sur les qualités intrinsèques
des travaux, fournitures ou services.
Sixième recommandation : Instaurer un
mécanisme de suivi par l'insertion du développement durable dans les marchés
publics. Il y a plusieurs entités dans le monde qui l'ont fait et celles qui ne
l'ont pas intégré dans leur cadre normatif considèrent que ça les a empêchés de
faire le suivi.
Septième recommandation : Prévoir un
principe de non-régression en cas d'appels fructueux d'offres insérant du
développement durable. Le Québec est en retard. Avec le projet de loi, on a des
chances d'évoluer vers le mieux. Chaque appel d'offres qui va inclure du
développement durable va être une petite victoire pour l'environnement...
l'économie, l'innovation au Québec. Donc, il faut s'assurer qu'on ne puisse pas
revenir en arrière. Le principe de non-régression donne un effet de cliquet qui
permet, de manière progressive, d'aller toujours plus loin dans le
développement durable et l'innovation.
Alors, en conclusion, évidemment mon travail
de chercheuse vise à comparer les États entre eux, évidemment que je vous
présente les meilleures pratiques et évidemment que tout ça doit être adapté à
notre réalité puis à nos priorités. Mais, s'il y a des pays comme la France, le
Bénin, la Tunisie ou encore des villes comme Barcelone, Berlin ou San Francisco
qui arrivent à affirmer clairement leur volonté de rendre leurs acquisitions
responsables en visant le cycle de vie et la chaîne d'approvisionnement, si la
France ambitionne d'atteindre 100 % de ses acquisitions vertes et
30 % de...
Une voix : ...
Mme Dufour (Geneviève) : Il
me reste à peu près 20 secondes, M. le Président?
Le Président (M. Simard) : Oui,
allez, vous pouvez poursuivre parce que la ministre vous offre une partie de son
temps. On vous écoute.
Mme Dufour (Geneviève) : Merci,
Mme la ministre. Donc, ce que je disais, c'est que la France ambitionne
d'atteindre 100 % de ses acquisitions vertes et 30 % de ses
acquisitions socialement responsables pour 2025. La Tunisie est en mesure
d'atteindre 30 % d'acquisitions durables pour la fin 2022. Donc, il
n'y a rien qui empêche de prendre un virage à 180 degrés au Québec pour
faire du plus important acheteur de biens services, le gouvernement, ces
organismes, des acheteurs responsables et exemplaires. Et ça, ça joue d'abord
et avant tout devant vous, car vous êtes en mesure de déterminer si le projet
de loi va avoir un réel impact sur l'approvisionnement responsable au Québec
dans les années à venir. Je vous remercie.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, maître. Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, Me Dufour.
Je dois avouer que j'aurais préféré vous avoir comme professeure que comme
adversaire dans un tribunal parce que vous êtes très inspirante dans votre
façon de vous exprimer. Mais ceci étant dit, c'est parce qu'il y a beaucoup de
choses qui rejoignent justement la volonté du gouvernement, là, suite au dépôt
de cette stratégie, que je mène d'ailleurs cette volonté, présentement, là,
surtout au dépôt de la stratégie du projet de loi. Donc, il y a beaucoup de
mécanismes très intéressants.
Puis j'aimerais peut-être voir avec
vous... Parce que je suis toujours préoccupée par le fait d'être capable
d'affirmer clairement sa volonté pour pouvoir donner une réelle impulsion,
c'est-à-dire une réelle direction et pas juste avoir des belles déclarations de
principes, là, qui vont rester pratico-pratiques, sur le terrain, lettre morte,
ce n'est pas l'objectif. Mais j'ai aussi le souci et la compréhension, le fait
de savoir que, bon, il y a beaucoup de ministères et organismes, il y a
beaucoup de secteurs qui vont être touchés par ce projet de loi là. C'est une
bonne chose parce qu'on va avoir un impact plus large, mais d'un autre côté,
c'est un paquebot à adapter, à faire tourner, et je le dirais, avec beaucoup de
respect pour les gens de la fonction publique, c'est à géométrie variable
aussi, l'expertise des gens dans les différents secteurs. Il y a des endroits
où on fait beaucoup plus d'appels d'offres et qu'on a peut-être... on est
peut-être plus ouverts ou plus rompus à la nécessité de regarder le cycle de
vie, des choses comme ça, il y en a d'autres où c'est peut-être plus...
Mme LeBel : ...donc, moi, ma
préoccupation, c'est de voir avec vous... parce que vous nous parlez de pays
qui sont beaucoup plus avancés, mais d'une certaine façon, ils ont fait
beaucoup d'essais-erreurs. Vous avez raison, il faut apprendre de ces
essais-erreurs, mais en même temps, l'avantage d'un essai-erreur, savoir
vouloir réduire, c'est que quand on l'expérimente et on... bon, on a comme...
on acquiert une certaine expertise quand même, au fur et à mesure, à l'interne.
Donc, moi, c'est de voir avec vous comment
on peut faire cette transition. Puis je vais y aller peut-être avec... je vais
commencer par votre recommandation numéro 4, mais je pense que tout ça
s'emboîte, là, dans un tout. Quand on dit, entre autres, d'imposer la prise en
compte du cycle de vie complet des produits et services, à terme, j'en suis, à
terme, bon, quand, mais toute cette prise en compte du cycle de vie, que ce
soit dans l'objet du marché, à titre d'exemple, parce qu'on parle de
développement durable, dans tous les secteurs. Comment on peut s'assurer
d'avoir des mécanismes qui permettent d'atteindre l'objectif de façon réelle,
c'est-à-dire de forcer l'objectif, mais de permettre une transition? Parce
qu'il y a des...
Donc, et vous avez parlé, tantôt, je fais
du coq à l'âne, de la loi du plus bas soumissionnaire conforme, nous, qu'on
appelle ici, et que vous connaissez très bien. On a déjà discuté du fait qu'on
pouvait peut-être, dans cette loi-là, qui, bon, on va tous admettre d'entrée de
jeu qu'elle n'est pas... qu'elle est surutilisée et qu'elle ne rend pas de
service dans tous les cas de figure, disons le comme ça, mais je pense qu'on
peut, dans cette loi-là... dans cette règle-là, quand on parle de conformité,
commencer à amorcer peut-être une certaine transition, amorcer un certain
virage vers des modes d'adjudication plus performants au sens des critères de
développement durable, entre autres. Est-ce qu'on peut se servir de cette
règle-là pour graduellement, peut-être, la bonifier pour pouvoir l'abandonner?
Et quand je parle de la modifier, c'est-
à-dire que dans les critères de conformité, il est possible d'avoir des
niveaux, de demander certains niveaux de qualité. Il possible d'avoir des
exigences envers les entreprises qui soumissionnent pour être conformes, des
exigences, d'écoresponsabilité, à titre d'exemple, de recyclage. Bon, c'est
peut-être la base, vous allez me dire, mais j'essaie de trouver des exemples
qui sont clairs. Donc, est-ce que ça pourrait être une façon d'amorcer le
virage? Parce que d'encarcaner dans un projet de loi une obligation, je
comprends l'objectif, ma crainte, c'est comment je fais pour être capable aussi
d'amorcer le virage. Donc, j'ai la réglementation, j'ai des directives, j'ai un
tas d'outils, là, mais moi, c'est que ça soit aussi opérationnalisable, là, sur
le terrain, tant dans les effets positifs que dans la l'espace pour s'adapter.
Mme Dufour (Geneviève) : C'est
tout à fait pertinent, vos questions, Mme la ministre. Quand je donne des
formations aux acheteurs publics, c'est les questions qu'ils me posent. Ils me
disent : C'est bien beau vos grands principes universitaires de cycle de
vie complet, mais comment est-ce qu'on peut le concrétiser? Et je leur donne
des exemples en leur montrant que, finalement, il faut arrêter de penser que la
question durable, c'est de tout mesurer en partant des émissions de gaz à effet
de serre. Qui peut vraiment mesurer toutes ses émissions de gaz à effet de
serre quand il produit du matériel de bureau dans un petit village du fond du
Québec? Donc, il faut arrêter de penser que c'est compliqué.
Quand on dit qu'il faut viser le cycle de
vie complet, par exemple, si on est en matière alimentaire et qu'on commande
des produits alimentaires, pourquoi est-ce qu'on ne demanderait pas qu'ils
soient livrés dans des contenants en vrac, réutilisables, et que le fournisseur
va venir rechercher les contenants à la fin? On vient de viser le cycle de vie.
On ne vise pas la pomme, on vise ici le cycle de vie complet. Donc, c'est
possible de le faire. Quand on parle d'acheter certains produits, puis je sais
que vous avez reçu Jean Simard, hier, qui vous a parlé d'aluminium, mais je
pense que c'est souvent l'exemple qui nous revient au Québec, mais c'est un
exemple exemplaire. Un exemple exemplaire, c'est très bon, ça. Mais de
l'aluminium fait au Québec ou de l'aluminium fait en Chine, c'est de l'aluminium,
de l'aluminium, c'est de l'aluminium. Quand on vise le cycle de vie complet, on
regarde avec quel genre d'énergie il a été produit. On vise aussi à regarder
combien de temps ça va être durable puis qu'est-ce qu'on va pouvoir faire avec
ce produit-là une fois que c'est fini. L'aluminium, c'est recyclable. On le
sait qu'aujourd'hui, on recycle l'aluminium, on le transforme. On peut lui
donner une deuxième vie puis une troisième vie.
• (11 h 50) •
Donc, ce n'est pas si compliqué que ça de
regarder le cycle de vie complet. Et c'est pour ça que je vous ai dit que je
suis très consciente qu'il faut y aller progressivement. En France, quand on
dit qu'on vise 100 % des acquisitions avec des considérations
environnementales, on parle d'une considération par appel d'offres. On ne dit
pas qu'il faut que ça du mur à mur. Mais on dit : Organismes publics,
faites l'effort, une considération. Que ce soit l'objet du marché, là, ça,
c'est le nec plus ultra, on achète quelque chose d'écologique, mais ça peut être
une exigence, ça peut être un critère de qualité, ça peut...
Mme Dufour (Geneviève) : ...être
un critère d'exécution du contrat. C'est faisable de le faire. Et j'ai pensé à
votre deuxième point, vous me dites : Oui, la règle du plus bas
soumissionnaire, ce n'est quand même pas si mal parce qu'on peut ajouter des
exigences qui sont en lien avec des considérations environnementales ou
sociales. Mais c'est plus compliqué. C'est plus compliqué d'exiger de
l'environnement que de le mettre comme critère qualité finalement, où on va...
on donne une certaine marge de manoeuvre, donc... Et, selon les études, on se
rend compte que ce n'est pas la bonne façon parce que les organismes publics
sont ultraréticents à mettre des exigences, des certifications, des normes, une
obligation de se conformer. Alors que, quand on est dans l'exigence, bien là,
on peut donner un petit peu plus de points, un petit peu moins de points, puis
on peut justement faire en sorte que le marché va s'adapter avec...
Mme LeBel : ...parce qu'en
vertu de la loi du plus bas soumissionnaire conforme, c'est une exigence
qu'elle n'existe pas, il n'est plus conforme, donc il est, d'entrée de jeu, de
facto éliminé. Alors que, dans l'autre cas, il peut peut-être... il continue à
être considéré, mais va remporter moins de points dans certains secteurs, et
d'autres points, d'autres critères pourraient finir par l'avantager quand même.
Donc, c'est ce que vous dites, là.
Mme Dufour (Geneviève) : Exact.
C'est une façon d'amener l'économie, le marché à se transformer
progressivement.
Mme LeBel : Donc... Parfait.
Puis c'est peut-être... Je peux peut-être faire un autre lien avec le principe
de non-régression dont vous venez de parler. Donc, ça peut permettre aussi de
commencer, peut-être timidement dans certains cas, mais quand... mais ne plus
jamais reculer en bas de la marche... du pas qui a été franchi. Donc, chaque
appel d'offres va devenir de plus en plus ou, en tout cas, pas de moins en
moins, définitivement, là. Donc, on peut... avec ce principe de non-régression
là, on a, par le fait même, la considération de la progression et de la
transition, là.
Mme Dufour (Geneviève) : Exact.
Tout à fait. Et je pense qu'il faut quand même laisser une certaine marge de
manoeuvre. Si un organisme public ne peut pas appliquer le principe de
non-régression, il faut lui demander de le consigner et de s'expliquer.
Mme LeBel : Peut-être faire
une petite parenthèse pour laisser mon collègue de Saint-Jérôme, là. Il a une
question par rapport à la discussion qu'on a. Merci.
Le Président (M. Simard) : Cher
collègue.
M. Chassin :Merci, M. le Président. Merci. Madame Dufour, en fait,
c'est une question sur justement cette dernière recommandation qui est la
vôtre, du principe de non-régression. En cas d'appel d'offres fructueux...
Puis, là, je veux juste être certain de bien comprendre. Est-ce que c'est parce
qu'on a appliqué, par exemple, un critère environnemental, on a trouvé
chaussure à son pied, disons, puis on va continuer, donc, d'exiger ce même
critère, ou est-ce que la définition d'appel d'offres fructueux est un peu plus
large? Par exemple, le fait que, oui, on a eu une réponse à notre appel
d'offres, mais une seule entreprise propose quelque chose qui respecte nos critères.
À ce moment-là, ça ne favorise pas la concurrence, si on le maintient tel quel.
Quelle flexibilité vous donnez à cette définition d'appel d'offres fructueux?
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
pour moi, un appel d'offres fructueux, c'est un appel qui permet justement à
plusieurs entités de soumettre, à plusieurs fournisseurs. On parle
habituellement d'au moins trois fournisseurs, là, sauf exception. Mais, oui, je
parle d'un vrai appel d'offres où il y a une vraie compétition. Voilà.
M. Chassin :Donc, autrement dit, une façon de montrer que le marché est
rendu là. Donc, on ne reviendra pas à l'imposition... mais la non-régression,
c'est vraiment quand, effectivement, on peut constater que le marché est rendu
là aussi.
Mme Dufour (Geneviève) : Exact.
M. Chassin :Merci. C'était une petite question de précision que je
voulais poser.
Mme LeBel : Bien, c'était une
question excellente parce qu'effectivement, quand on applique un principe comme
celui de la non-régression, bien, quand est-ce qu'on a la permission de faire
le pas arrière, bien, il faut le comprendre également, là, dans le principe.
Il y a plusieurs choses. Vous parliez de
définir, entre autres, les objectifs précis, là, du développement durable que
le gouvernement cherche à poursuivre par ses acquisitions responsables. Bon,
c'est sûr que nous, on fait... on a le principe de renvoi. Mais, dans le fond,
ce que vous nous dites, c'est que, même si par le renvoi, juridiquement, on
parvient aux mêmes objectifs, vous dites qu'il y a quand même une plus-value à
affirmer de façon plus explicite dans le cadre de la loi, la loi dans laquelle
on fait ce renvoi-là, les principes auxquels on fait référence, là, quitte à
faire le renvoi de toute façon, mais à préciser au moins quelques critères, là.
Parce que c'est vrai que, juridiquement, quand on se parle entre avocats, on se
dit : Bien, c'est la même chose, là. On s'en va... la loi, puis on va lire
la Loi sur le développement durable. Mais ce que vous nous dites, c'est qu'il y
a une plus-value à le faire de façon plus claire, donc, plus explicite.
Mme Dufour (Geneviève) : Plus
claire et plus adaptée. Parce que votre Loi sur le développement durable, c'est
super, puis, entre juristes, on comprend très bien ce que c'est, le développement
durable, puis c'est assez...
Mme Dufour (Geneviève) : ...précis
dans les objectifs, mais il y en a, lorsqu'on les lit, ne s'adaptent pas... ne
sont pas très adaptés au marché public. Tu sais, je pense que ça serait
important qu'on parle du recours aux énergies renouvelables, de la composition
des produits à leur caractère écologique, polluant, toxique, le caractère
réutilisable, recyclé, reconditionné des produits. Donc, la prévention de la
production des déchets, la valorisation des déchets aussi, certaines pratiques
environnementales qu'on va appliquer à l'exécution. Donc, je vous parlais, là,
de la livraison en vrac... Puis au niveau social, c'est la même chose, là, on
devrait référer... bien, le projet de loi parle déjà de l'insertion de publics
éloignés, mais on devrait y référer plus directement, des personnes en
situation de handicap, de la lutte contre les discriminations, des droits et
principes fondamentaux du travail. Il y en a quatre. Il y en a juste quatre,
mais ces principes et droits fondamentaux, on devrait les réaffirmer.
Mme LeBel : Peut être vous
amener dans un... bien pas dans une autre direction parce qu'on est dans la
même conversation, mais là, vous êtes... Naturellement, votre champ d'expertise
est encore plus en droit international. J'imagine que nos accords de
libéralisation du marché, nos accords internationaux, vous les connaissez aussi
dans le projet de loi, dans la stratégie aussi, mais dans le projet de loi, on
se propose... bon, naturellement, on s'est fait mettre en garde de respecter
les accords, ce qui ne veut pas dire qu'on ne peut pas exploiter de façon plus
judicieuse toutes les marges de manœuvre qui s'y trouvent.
Est-ce que vous pensez qu'on va assez loin
dans le projet de loi ou est-ce qu'on pousse la ligne trop loin? Est-ce qu'on
va dans... est-ce qu'on exploite les marges de manœuvre de façon adéquate?
C'est ça que... en théorie, pour l'instant, on s'entend là, mais dans la
pratique, on pourra le faire, mais les principes qui sont exposés...
Mme Dufour (Geneviève) : Excusez-moi.
Oui, je pense que vous avez très, très bien écrit cette partie du projet de
loi. On respecte tout à fait nos accords de libre-échange et nos engagements
spécifiques du Canada, du Québec. Vous êtes allés jouer dans la marge de
manœuvre. C'est très bien fait avec trois échelons. Je n'ai rien à dire sur ça
et c'est rare.
Mme LeBel : Bien, donc, vous
pensez... bien, c'est ça. Puis je vous jure, ce n'était pas une question
plantée, là, mais donc... c'est parce que je me demandais : Est-ce qu'on va
assez loin? Est-ce qu'on va trop loin? Ce que vous dites, c'est qu'on va
chercher, maximiser. On va chercher l'espace disponible sans franchir la ligne
qui pourrait nous nuire, disons-le comme ça.
Mme Dufour (Geneviève) : Exact,
mais si vous vouliez... comment le dire? Si vous vouliez aller encore plus loin
dans la marge de manœuvre qui vous est laissée, vous feriez une place
grandissante aux considérations environnementales et sociales...
Mme LeBel : Parce qu'on a de
la marge dans les accords par rapport à ça.
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
toute la marge est là. Il n'y a aucune limite. Si on le fait vraiment pour des
considérations sociales et environnementales, il n'y a aucun problème. Et si on
est capable de se distinguer des usines du Bangladesh ou de la Chine, c'est
bien, parce qu'on a des lois en matière environnementale et sociale qui sont
très respectueuses des accords internationaux.
Mme LeBel : Parfait. Merci
beaucoup. Merci, c'était très éclairant. Merci.
Mme Dufour (Geneviève) : ...plaisir.
Le Président (M. Simard) : Monsieur
le député de Mont-Royal–Outremont.
M. Arcand : Merci, Me Dufour.
Encore une fois, bienvenue parmi nous. J'avais quelques questions pour vous
qui... je sais, évidemment, sur le principe et les principes que vous avez mis
de l'avant. Je pense que probablement toutes les formations politiques sont
d'accord sur le principe, mais évidemment, le diable est toujours un peu dans
les détails. Comment est-ce qu'on applique ça? Vous avez vous-même reconnu
qu'il fallait y aller de façon progressive.
J'aimerais, comme première question...
Vous avez dit, dans votre mémoire, que 15 %, ce n'était pas suffisant
comme cible. Est-ce que vous avez une idée de ce que ça devrait être? Qu'est-ce
qu'on devrait proposer comme cible éventuellement?
• (12 heures) •
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
c'est difficile de répondre à la question parce que comme on n'a aucun
mécanisme de suivi clair au Québec, ou en tout cas, moi, je ne connais pas
d'études qui ont été faites, on ne sait pas à combien on est rendu, mais je
pense qu'on est... c'est peu. Je pense que c'est très peu. Donc, c'est
difficile de se dire qu'on veut atteindre un pourcentage x si on ne sait pas
d'où on part. Bon, la France, 100 %, clairement, on ne peut pas y arriver
en 2025 parce qu'on a déjà 10 ans de retard au moins. Mais lorsque je vois
la Tunisie qui va atteindre 30 % en 2022, je me dis qu'on devrait quand
même essayer, nous, de se donner des objectifs ambitieux. Est-ce que...
12 h (version non révisée)
Mme Dufour (Geneviève) : ...Switch
a fait des recommandations, ça ne me semblait pas fou, puis encore là, ils vous
l'ont bien dit: Ils ne savent pas d'où on part. Mais on devrait avoir des
cibles ambitieuses.
Puis, comme je le disais à Mme la
ministre, ce n'est pas compliqué, de mettre du développement durable dans les
appels d'offres, dans les contrats, ce n'est pas compliqué. Une considération,
commençons par ça. Mais donnons-nous surtout un mécanisme de suivi et ça, c'est
une de mes recommandations, donnons-nous un mécanisme de suivi pour que, chaque
année, il y ait des rapports qui soient rendus des organismes publics et que
ces rapports-là soient vérifiés et transparents, rendus publics pour qu'on
sache où on en est.
M. Arcand : Donc, des
rapports annuels qui pourraient être présentés à ce moment-là. On a parlé de
faire jouer un rôle encore plus important au Commissaire au développement
durable, qui pourrait être une façon aussi de faire les choses. Je pense que
c'est une option qui a été déjà discutée par le passé.
Moi, la problématique que j'y vois,
actuellement, dans ce sens-là, c'est que... À moins que la ministre me disent
le contraire, mais moi, je ne suis pas convaincu que les gens qui sont impliqués,
hein... On s'entend qu'il y à quatre endroits importants, au sein du
gouvernement, où on donne des contrats. Vous avez la Société québécoise
d'infrastructures, le ministère de la Santé, le ministère des Transports du
Québec. Qui donne pas mal de contrats, également, et vous avez évidemment le
Centre d'acquisitions gouvernementales. Alors. Vous savez ces principaux
organismes là. Je ne suis pas certain que les gens qui sont impliqués à
l'intérieur de ces organismes-là ont une connaissance très importante de
l'environnement et de la façon d'évaluer justement ces éléments-là, qui peuvent
être, à certains niveaux, assez compliqués. Même si vous nous dites: Écoutez,
il ne faut pas pour compliquer les choses... mais, quand même, ça demande une
certaine analyse ou expertise. Est-ce que ça ne serait pas une recommandation,
puis je vous dis ça comme ça, mais d'avoir... chaque fois qu'on prend une
décision pour donner un contrat, qu'on ait quand même une validation d'un
comité quelconque ou, enfin, d'un groupe ou d'un individu qui serait... qui
pourrait donner au moins une opinion environnementale sur chaque décision qui
est prise?
Mme Dufour (Geneviève) : Ça
dépasse largement mon seuil de compétences, mais ce que je peux vous dire,
c'est que la Corée du Sud et la Hollande ont mis en place, pour justement
accompagner les acheteurs publics, des logiciels très, très, très précis.
Alors, l'acheteur public a... et c'est un site gouvernemental, un logiciel qui
a été développé par les gouvernements de la Corée et de la Hollande. L'acheteur
sélectionne le produit qu'il veut acheter, et ensuite, il arrive à toute une
série de critères d'exigences, de considérations sociales et environnementales
qu'il peut ajouter à son appel d'offres.
Mais c'est sûr, vous avez raison, ça
demande une certaine expertise. Mais je pense que, dans la stratégie, le
gouvernement a aussi bien prévu d'accompagner, produire des guides, donner des
formations, faire des forums, je ne sais plus si c'est comme ça qu'on
l'appelle. Mais, bref, il y a cette conscience qu'il faut un accompagnement
très serré des acheteurs publics. Le nec plus ultra, c'est la Corée et la
Hollance. Si on s'en allait vers là, bien, ça ne se monte pas en deux jours. Ça
ne se monte pas en six mois non plus. Ça demande des expertises très variées.
M. Arcand : C'est ça. Mais
donc, vous dites, ce sont les pays un peu modèles, actuellement, de ce point de
vue là.
Mme Dufour (Geneviève) : Oui.
Au titre de l'accompagnement des acheteurs publics. Pas au titre normatif, nécessairement,
parce que ça, il y en a plein d'autres qui sont des champions.
M. Arcand : O.K. O.K. Très
bien. Maintenant, vous avez mentionné l'obligation, bon, qu'il fallait
expliquer ne pas avoir recours à l'offre uniquement la plus économiquement
avantageuse, etc. Étant donné que la valeur économique d'un bien, ou d'un
service, ou un produit, enfin, parfois, c'est difficilement mesurable... Et on
se demande toujours si la porte de sortie n'est pas trop grande, à un moment
donné, et s'il y a des façons de... parce que, finalement, plus on met de
critères, les acheteurs publics vont finir toujours par se réfugier en disant:
Bien, je vais me sécuriser, je vais prendre le prix le plus bas ou, enfin, à
moins que, vraiment, il y ait des différences très minimes. Mais comment est-ce
qu'on fait pour s'assurer justement de minimiser son...
M. Arcand : ...dans les
organismes publics.
Mme Dufour (Geneviève) : On
fait, comme l'Europe, c'est-à-dire quand on dit que c'est l'offre la plus...
économiquement la plus avantageuse qui est privilégiée et qu'à défaut, ça doit
être expliqué et consigné. Il y a tout un système de rapports qui doit être
donné.
M. Arcand : O.K. Et ça,
dans votre expertise, de ce que vous connaissez qui a été fait en Europe,
qu'est ce qui a été le plus difficile? Quels ont été les... Vous avez dit on
fait des essais, erreurs et ainsi de suite. Qu'est-ce qui... Comment c'est
fait? Parce que je ne pense pas que ça puisse se faire aussi rapidement qu'on
le voudrait. Mais, en tout cas, comment ça s'est... Comment le travail s'est
fait au fil des années? Qu'ils ont commencé par quoi exactement? À un moment
donné, je pense que c'est hier ou avant-hier, on parlait d'une entreprise qui
aurait... C'est Écotech qui nous disait que les entreprises devraient avoir une
carte Nexus verte pour dire au moins que ce sont des entreprises qui sont
écoresponsables de façon générale, avant qu'on pousse l'analyse plus loin.
Est-ce que... comment les pays européens, ou enfin ceux qui sont les champions,
comme vous dites, comment ils ont procédé? Qu'elles ont été, d'après l'analyse
que vous avez pu en faire, les meilleures formules?
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
ils ont fait plusieurs erreurs au début. Puis, comme la ministre le disait,
c'est normal de faire des erreurs, puis c'est par le biais des erreurs qu'on
finit par développer le droit. En tout cas, nous, les juristes, on est bien
habitués à ça, hein? Mais, en Europe, ce qui s'est passé, c'est qu'il y a eu
énormément de jurisprudences et ça a fait en sorte que ça a retardé l'inclusion
du développement durable dans les marchés. Par exemple, au début, on se posait
des questions aussi simples que : Si on peut imposer une certification,
une norme, une carte Nexus écologique, ou si, finalement, n'importe quelle
entreprise qui répond aux normes incluses dans une certification pourrait
gagner l'appel d'offres? Ils ont eu aussi à clarifier ce dont je vous ai parlé,
l'exigence d'être en lien avec l'objet du marché. C'est une vraie
question : Est-ce que... Finalement, c'est ce que je disais tantôt,
del'aluminium qui a été produit en Chine avec du charbon ou au Québec avec de
l'énergie renouvelable, c'est le même produit? Et être en lien avec l'objet du
marché, est ce que ça veut dire qu'il faut qu'il y ait un impact de notre
critère sur les caractéristiques finales du produit? Mais l'Europe a pris du
temps à clarifier, et c'est uniquement sur le tard qu'ils ont réussi à
clarifier que, non, on n'avait pas besoin de ça un impact sur les
caractéristiques du produit, même si on visait l'ensemble du cycle de vie.
C'était lié à l'objet du marché, et ce, même si on ne l'avait pas mis dans
l'objet du marché.
Donc, c'est un paquet de questionnements
qui ont qui ont donné lieu à des retards et à des appels d'offres qui ont été
contestés, et nous, on est chanceux, on peut prendre appui sur ce qui s'est
passé. J'étais en Tunisie la semaine passée et j'ai discuté avec le ministre de
l'Environnement, avec les gens qui étaient responsables des politiques
d'acquisition responsable. En 2014, ils étaient en avance sur tout le monde et,
aujourd'hui, ils se disent : Bien, on n'était pas... on n'est plus si en
avance parce qu'on a fait des erreurs. On a oublié de demander des rapports à
chaque année. On a oublié d'inclure ça dans le cadre normatif. On a oublié de
définir quels étaient précisément les objectifs de développement durable parce
que c'est important. Et tout ça, ils sont en train de réviser leur cadre
normatif. Puis, nous, on est chanceux, on peut s'en inspirer.
M. Arcand : O.K. Je
reviens encore à la cible parce que j'aimerais que vous... vous dites :
Elle ne va pas assez loin, on est trop timide. Dites-moi ce que vous voyez si
vous étiez à la place de la ministre.
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
ça nous prend des cibles claires et progressives. Là, on a un plan stratégique
qui va jusqu'en 2026. Il me semble qu'on devrait avoir des objectifs pour 2024.
On devrait ensuite avoir des objectifs pour 2026. Ça devrait être échelonné. Il
faut se donner des cibles ambitieuses parce que, sinon, il n'y arrivera pas.
Mais il faut aussi, comme je le disais, ne pas négliger d'expliquer aux
acheteurs publics que ça peut ne pas être compliqué d'émettre des considérations
sociales et environnementales, et on y va tranquillement, on y va
progressivement, et tout le long qu'on y va, on accompagne les acheteurs
publics qui, la plupart, veulent faire du développement durable.
• (12 h 10) •
Le Président (M. Simard) : Merci,
merci à vous. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci.
Merci beaucoup, beaucoup, Mme Dufour. Très, très intéressante, votre
présentation...
Mme Ghazal : ...le
mémoire, puis les discussions et les échanges. Moi, je voudrais revenir à la
notion de l'analyse du cycle de vie où vous dites qu'il faut vraiment le
préciser, il faut faire ça en amont, pendant l'utilisation du produit, en aval.
Moi, je me rappelle, j'ai fait une maîtrise en environnement, puis j'avais
fait... ce n'était pas un moment de maîtrise, c'était un essai sur l'analyse du
cycle de vie, on disait qu'il fallait analyser les produits du berceau au
tombeau, c'est l'expression qui était utilisée, donc tout le long. Puis il y a
eu aussi beaucoup d'expertise qui est développée au Québec. Je pense, par
exemple, au CIREQ, le Centre international de référence sur le cycle de vie, de
Polytechnique, il y a des logiciels, etc.
Si on le met, là, de façon très, très
sérieuse, là, dans le projet de loi, est-ce que les ministères et organismes,
est-ce qu'au Québec on aurait l'expertise? Ou est-ce que, par exemple, si on ne
l'a pas à l'interne, on va dire : Bien, on va aller à l'externe pour faire
ces analyses-là? Normalement, il faut se fier à ce que l'entreprise nous dit.
Mais, si on veut s'assurer que ce que l'entreprise nous dit sur l'analyse du
cycle de vie de son produit est vrai, il faut contre-vérifier. Est-ce que ça ne
pourrait pas, par exemple, coûter trop cher et ça pourrait être un frein?
Mme Dufour (Geneviève) : Mais
habituellement, quand on prend en compte l'ensemble du cycle de vie, ça ne
coûte pas nécessairement plus cher parce qu'on se retrouve avec des produits
qui sont plus durables, qui coûtent moins cher d'entretien, qui coûte moins
cher pour les...
Mme Ghazal : ...parle de
faire l'évaluation. Parce que, l'évaluation, il faut qu'elle soit neutre.
Comment est-ce qu'on peut se fier... Si, par exemple, le ministère et
organisme, il dit : Bien, moi, ça va être l'analyse du cycle de vie du
produit que j'achète, et il se fie sur quoi? Parce que c'est quand même, vous
dites, les intrants, le coût sur l'eau, etc., c'est beaucoup, beaucoup de
données. Comment est-ce qu'on peut s'assurer qu'on a la bonne information pour
le ministère et organisme qui fait l'évaluation? Est-ce qu'on a l'expertise à
l'interne pour le faire?
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
je ne sais pas si on a l'expertise à l'interne pour le faire dans les
différents organismes. Mais ce que je sais, c'est que, dans certains pays, ces
coûts-là, les coûts d'analyse du cycle de vie sont inclus dans le budget du
marché parce qu'on considère que c'est très, très important. De la même façon
qu'on va inclure des coûts lorsque, par exemple, on veut un dialogue
compétitif, etc. Donc, c'est très important d'inclure ça. Si on veut construire
un pont, il faut que, dans le budget du pont, on inclue cette analyse du cycle
de vie, que ce soit à l'interne ou à l'externe.
Mme Ghazal : Donc, vous
ne voyez pas ça comme quelque chose de compliqué, là, à faire, puis ça serait
possible, puis d'avoir les bonnes données, puisque ça se fait ailleurs. C'est
ça, vous nous parlez aussi des expériences d'ailleurs, donc on n'est pas plus
fous que les autres.
Mme Dufour (Geneviève) : Je
ne vous dis pas que ce n'est pas compliqué.
Mme Ghazal : Non, c'est
ça, exact.
Mme Dufour (Geneviève) : C'est
compliqué, mais on n'est pas moins bons que les autres.
Mme Ghazal : O.K. Très
bien. Bien, juste rapidement, à vous entendre, vous dites qu'il y a quand même
beaucoup de marge de manoeuvre pour les critères environnementaux et sociaux.
Puis là je me disais : Mon Dieu, les accords internationaux ne sont pas
aussi pires que ce qu'on pourrait penser. Mais il y a quand même des États qui
appellent... qui sont inquiets du... ils disent que c'est du protectionnisme,
d'utiliser ça. Puis je voulais savoir s'il y avait des... Bien, écoutez, je
n'ai pas le temps, ça fait que je ne peux pas poser la question, mais je vous
appellerai. C'est triste de même.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Merci, Mme Dufour. C'est extrêmement, extrêmement, extrêmement
intéressant. Bon, il y a beaucoup de notions, et ce n'est pas tout le monde qui
ont nécessairement la même définition, analyse de cycle de vie, développement
durable, même on pourrait parler d'économie circulaire. Vous parlez, dans votre
recommandation numéro 2, de définir les objectifs précis de développement
durable que le gouvernement cherche à poursuivre par les acquisitions. Comment
on intègre ça? Dans le sens qu'est-ce que c'est suffisant de faire référence à
la Loi sur le développement durable, mais qui elle-même n'est pas en adéquation
exacte avec, par exemple, les 17 objectifs de l'ONU? Alors, comment on
fait pour bien intégrer les objectifs de développement durable dans le projet
de loi 12? Je ne sais pas si... Puis j'aurais une autre question après,
alors je n'ai vraiment pas beaucoup de temps non plus, là, donc voilà.
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
pour moi, ce n'est pas compliqué. Vous avez référé aux objectifs de
développement durable. On devrait tous les prendre en ligne de compte. Le
Canada est parti à plusieurs conventions internationales, on devrait les
prendre en compte. Il faut faire un choix, mais ce n'est pas si compliqué que
ça. On le sait, quels sont les droits et principes fondamentaux du travail
qu'on veut respecter au Québec. On le sait, quels sont nos objectifs
environnementaux. Il faut juste être très explicite. Parce que vous l'avez dit,
quand on dit «développement durable», c'est trop flou.
M. Gaudreault : Deuxième
question. Je ne me souviens plus de quel chapitre, là, dans le projet de
loi 12, on parle, évidemment, du développement durable. Est-ce qu'on ne
devrait pas monter un peu plus hélicoptère et parler de lutte contre les
changements climatiques...
M. Gaudreault : ...Pour
intégrer ça dans l'atteinte des objectifs plus larges de réduction de gaz à
effet de serre que s'est donné le Québec. Et comme outil, bien, c'est
d'atteindre évidemment nos objectifs de développement durable par des moyens
d'analyse de cycle de vie, etc. Est-ce que vous trouvez que le projet doit être
assez ambitieux quant à son intégration avec les cibles de réduction de gaz à
effet de serre du gouvernement?
Mme Dufour (Geneviève) : Bien,
encore là, il faut juste le dire. Parce que c'est prévu par l'article 5
ajouté à l'article 14 points 9, le changement climatique dans
l'espace d'innovation. C'est déjà prévu, c'est dans nos objectifs de
développement durable. Mais, encore là, qu'est-ce que c'est, réduire, pardon,
nos émissions de gaz à effet de serre pour une entreprise, une microentreprise
québécoise? Donc, il faut être beaucoup plus précis que ça. Qu'est-ce que ça
veut pour nous? Et c'est là qu'il faut avoir des objectifs très précis.
M. Gaudreault : O.K.
Merci.
Le Président (M. Simard) : Eh
bien, Pre Dufour, merci pour votre très belle présentation. Et à chaque fois, votre
contribution est fort positive à nos travaux. Alors, merci à nouveau.
Sur ce, nous allons suspendre quelques
instants, le temps de faire place à nos prochains invités.
(Suspension de la séance à 12 h 17)
(Reprise à 12 h 19)
Le Président (M. Simard) :
Alors, nous poursuivons nos travaux. Nous sommes maintenant en présence de
représentants de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec. Madame,
Monsieur, bienvenus parmi nous. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous
présenter?
Mme Robitaille (Mélissa) : Bonjour.
Mélissa Robitaille. Je suis présidente du conseil d'administration de la CEGQ
et coprésidente-directrice générale de l'entreprise Syscomax.
Le Président (M. Simard) : Bienvenue.
M. Côté (Eric) : Éric
Côté, président-directeur général de la Corporation des entrepreneurs généraux
et aussi vice-président de l'Alliance canadienne des entrepreneurs généraux du
Canada.
Le Président (M. Simard) : Bienvenue
à vous également. Vous disposez de 10 minutes.
Mme Robitaille (Mélissa) : Merci.
Alors, bonjour et merci, M. le Président. Nous vous remercions de nous recevoir
pour nous permettre d'offrir nos commentaires concernant le projet de
loi 12, en virtuel comme la dernière fois pour le projet de loi 66,
en espérant que nous aurons l'occasion de pouvoir le faire prochainement devant
vous.
Depuis 25 ans cette année, la
Corporation des entrepreneurs généraux, la CEGQ, représente exclusivement des
entrepreneurs généraux du Québec qui oeuvrent principalement dans le secteur
ICI, soit institutionnel, commercial et industriel, et qui réalisent près de
85 % des projets de bâtiment au Québec à chaque année.
• (12 h 20) •
Notre mission, c'est de défendre les
intérêts des entrepreneurs généraux et de l'industrie de la construction par sa
contribution au développement du Québec, notamment, au niveau économique et
durable. Et la CEGQ cherche à soutenir de manière proactive les entrepreneurs
généraux dans la réalisation d'ouvrages de qualité... et de leur production...
Mme Robitaille (Mélissa) : ...la
CEGQ a élaboré les recommandations dans ce mémoire grâce à plusieurs rencontres
avec ses comités de travail au cours des récentes semaines, auprès
d'entrepreneurs généraux de toutes tailles et provenant de toutes régions. Nous
remercions tous les membres de leur engagement, à leur contribution à ce
mémoire. Et nous sommes certains qu'il reflète leurs attentes et surtout leur
expérience collective et quotidienne en tant qu'entrepreneur général sur les
chantiers de construction au Québec. La CEGQ salue les efforts du gouvernement.
Toutefois, nous souhaitons communiquer aux parlementaires certaines
observations pour permettre au projet de loi n° 12 de favoriser réellement
l'achat de produits québécois ainsi que d'améliorer la gestion des contrats
publics sur les chantiers de construction.
M. Côté (Eric) : Nous allons
entrer dans le vif du sujet par rapport à nos recommandations. Je remercie
aussi les membres de la commission. Nous sommes préoccupés, évidemment, comme
membres fondateurs de la Coalition contre les retards de paiement, nous sommes
là depuis les débuts, qu'il manque dans ce projet de loi, une opportunité qui a
été manquée. À notre avis, c'est peut-être une question de timing, le rapport
des projets pilotes est sorti peut-être trop tard par rapport au projet de loi.
C'est l'espoir qu'on a. On a entendu la présidente faire les commentaires cette
semaine, là, à nos collègues de la Coalition, et nous souhaitons évidemment
porter notre voix à celle de la Coalition pour souhaiter que le projet de loi
n° 12 puisse intégrer des éléments qui touchent les paiements contre les
retards de paiement. C'est indéniable de notre côté. C'est un dossier que nous
travaillons depuis de nombreuses années.
Sur la question de l'achat québécois,
évidemment, on est heureux enfin que ce qu'on appelle la clause «Buy American»,
que le Québec ait enfin sa clause «Buy American», si on peut dire ainsi.
Beaucoup de gens nous déploraient que les Américains avaient des moyens pour
justement encourager leur économie. Et je pense que le Québec se dote de moyens
pour le faire est une bonne chose. Toutefois, on doit indiquer qu'en cette
matière, le secteur de la construction, les projets de construction sont
réalisés à plus de 90 % par des entrepreneurs du Québec. Donc, c'est vraiment
au niveau des produits québécois qu'à notre avis qu'il y a un effort qui doit
être fait de ce côté-là. Malheureusement, ce qu'on doit constater, c'est que
les ententes intercommerciales et tout ça limitent quand même ces efforts-là.
Nous sommes d'avis que peut-être qu'il faudrait regarder peut-être plus en
amont dans les projets. On peut bien spécifier, souhaiter qu'il y ait plus de
produits qui seront québécois, mais il faut comprendre que dans le secteur de
l'industrie de la construction, les entrepreneurs doivent utiliser les
matériaux qui sont spécifiés dans les devis. Donc, c'est aux professionnels
qu'il faut, dans le fond, envoyer le signal d'utiliser ces produits-là. Les
entrepreneurs ont toutefois l'opportunité d'utiliser ce qu'on appelle des
reconnaissances d'équivalence, c'est-à-dire que quand l'appel d'offres est
sorti, on peut à ce moment-là proposer des produits équivalents. Il faudrait
que dans le fond, c'est un processus qui est très complexe, je vous dirais, et
souvent il sert à proposer des produits peut-être qui sont moins chers, mais
qui sont d'équivalente qualité. Peut-être qu'on pourrait avoir un cadre, et
c'est notre première recommandation, qu'on ait un cadre qui permet justement de
proposer des produits québécois quand les plans et devis ne le spécifient pas.
Donc, je pense que nous sommes tous fiers de ce qu'on produit au Québec. Et si
parfois des professionnels auraient omis ou n'auraient pas spécifié que ça
pourrait être des produits québécois, bien, comme entrepreneur, je pense que
nous pouvons le faire à qualité égale, évidemment. Ça nous pose évidemment des
défis sur la disponibilité de ces matériaux-là et tout ça. C'est un enjeu qu'il
faudra évidemment... sur lequel il faudra prévoir des modalités. On ne nous a
pas parlé aujourd'hui nécessairement de la question des pénuries de matériaux.
C'est quelque chose qu'on vit actuellement, clairement, de ce côté là.
Nous avons aussi des préoccupations sur
tout ce qui touche aussi les pouvoirs de l'Autorité des marchés publics. Juste
avant, je voudrais dire aussi, il y a des dispositions qui étaient proposées
pour faciliter l'encouragement de l'économie régionale. À cet effet-là, notre
position est un peu mitigée. Il peut avoir un effet positif de vouloir encourager
régionalement certaines entreprises, mais... je n'aime pas le terme, mais il ne
faudrait pas que ça devienne une prison pour qu'un entrepreneur soit confiné à
sa propre région, particulièrement dans le secteur de la construction. Ça
pourrait devenir un incitatif à ne pas sortir de sa région. Et parfois dans des
cycles de projets, il peut y avoir moins de projets dans une région, donc une
entreprise serait un peu coincée dans sa région, et serait désavantagée dès
qu'elle sort de sa région. Alors, il faudrait faire attention à ces
mesures-là...
M. Côté (Eric) : ...pour ne
pas créer une nouvelle problématique à cet effet-là. L'autre chose aussi, c'est
que ça peut réduire le nombre de soumissionnaires, peut-être que pour des
fournisseurs de matériaux ou si on veut acheter des choses pour une école,
c'est une chose, mais pour le secteur de la construction, ça implique des
risques qui ont déjà été présentés, je le rappelle, avec l'OCDE, la commission
Charbonneau. Je pense qu'on veut le plus de choix possible donc, je dirais...
Nous recommandons qu'on utilise ces méthodes pour les marchés régionaux de
manière très prudente et qu'il y ait une surveillance accrue pour justement ne
pas créer des marchés fermés, où il y a des entrepreneurs qui auraient accès...
qui seraient les seuls à accéder des contrats et qui pourraient peut-être, à
terme, augmenter le prix. On sait l'effet des prix des marchés de ce côté-là.
Par rapport à l'innovation, développement
durable aussi, on a beaucoup d'éléments qui nous préoccupent. On a beaucoup
parlé du plus bas soumissionnaire, durant cette commission-là, je pense que le
gouvernement et les parlementaires doivent constater que dans le secteur de la
construction, il y a des règles qui sont mises en place, notamment avec le Bureau
des soumissions déposées, qu'il est obligatoire pour les entrepreneurs généraux
d'aller chercher leur prix dans la plupart des temps. Et la règle au BSDQ,
c'est toujours d'avoir le plus bas soumissionnaire. Alors, si on veut de la
place à l'innovation, à des critères, en termes de développement durable ou
social, il faudrait qu'on ne puisse suspendre ces règles du plus bas
soumissionnaire aussi au Bureau des soumissions déposées...
Comment y arriver? Bien, écoutez, il y a
deux ans, à peu près jour pour jour, nous avions déposé, pour le projet de
loi 66, des documents qui expliquaient qu'il y a un plan d'action qui
était fait par le comité interministériel. Alors, ce qu'il faudrait, c'est
mettre en place les travaux qui ont été avancés par ce comité-là, et notamment,
justement, pour qu'on puisse amender le Code des soumissions ou qu'on le fasse
avec les propriétaires en collaboration à cet effet là.
Il y a aussi d'autres éléments qu'on
voulait couvrir dans notre mémoire. Je voudrais rapidement arriver sur les
nouveaux pouvoirs de l'Autorité des marchés publics. Nous avons des
préoccupations quant à cet élément-là, et nous souhaitons, à cet effet là, que
ça soit mieux encadré. Et enfin, je vous dirais que, sur la question de la
nouvelle... ce qu'on appelle la nouvelle déclaration d'intégrité qu'on va
exiger, on se pose vraiment la question si ça va devenir un nouveau fardeau
administratif. On connaît la règle du un pour un avec la politique. Donc, M. le
Président, essentiellement, c'est qu'on souhaiterait ne pas ajouter du fardeau
administratif par rapport à ça.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous, M. Côté. Nous pouvons donc poursuivre. Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, M. Côté, de votre présentation. Alors, je vais réitérer les
mêmes commentaires que j'ai fait à tous ceux qui l'ont mentionné, surtout aux
gens de la Coalition sur les retards de paiement, là, sur notre intention de
mettre en oeuvre les résultats positifs du projet pilote le plus rapidement
possible. Donc, on est en train de regarder toutes les possibilités, dont celle
qui est suggérée. Donc, on pourra... Donc considérez que votre point est fait à
ce stade-ci. Donc, permettez-moi de ne pas élaborer sur cette question-là puis
peut-être d'aborder d'autres questions, là, qui sont plus propres à vos
commentaires dans votre mémoire.
Entre autres, bon, là où il y a, je
dirais, un écart marqué ou, je vais dire, il y a déficit de retombées
économiques ou un déficit d'achats sur le territoire québécois, quand on parle
des marchés publics, hein, il y a trois grands secteurs, construction, services
et biens, vous les connaissez aussi bien que moi. Là où on a du... on doit
faire un effort marqué, c'est matière d'acquisition. Naturellement, on est à 38 %
d'acquisitions, là, sur le territoire québécois, quand on parle d'entreprises
québécoises, à titre d'exemple, ou d'achat québécois.
• (12 h 30) •
En matière de construction, on est
beaucoup mieux positionnés, c'est 99 %. Ce qui ne veut pas dire qu'on ne
peut pas faire un effort, vous avez raison, surtout à travers ce que vous
mentionnez être le cadre de référence pour définir ce qui constitue un produit
québécois. J'aimerais que vous nous en parliez. Prenez plus de temps, là, pour
nous expliquer quelle est la difficulté. Je comprends que vous êtes capable,
présentement, quand, dans un appel d'offres, on fait référence à un type de
produits, que ce soit un plancher, peu importe, là, peut-être que je manque
d'imagination, là, mais vous comprenez, qui peut être un produit étranger, vous
avez quand même la possibilité de dire : Moi, j'ai accès à un produit
québécois équivalent dans ce qu'on recherche au niveau, à tout le moins,
esthétique et technique, là, je vais le dire comme ça. Mais quel est le processus
actuel? Donc, c'est plus un... c'est un allégement du processus, une
simplification du processus que vous recherchez? Parce que la possibilité
existe. Maintenant, je comprends que c'est très complexe. Donc, je veux juste
comprendre le processus et où est-ce que vous pensez qu'on peut agir, là...
12 h 30 (version non révisée)
M. Côté (Eric) : ...en fait...
je vous remercie pour la question, l'élément, c'est qu'il existe déjà un
processus qui est en place et l'entrepreneur a dix jours après le dépôt de sa
soumission pour proposer des équivalences. Donc, après dix jours, si on n'a pas
trouvé le produit, bien, il est trop tard. Donc, il faudrait que dès le début,
dans le fond... moi, je pense aux fournisseurs de ces produits-là. Il faut que
ces gens-là puissent présenter leurs produits, des produits innovants dès le
début, même au niveau de la conception.
Donc, un moyen d'atteindre ça, c'est que
les projets qu'on met de l'avant soient connus à l'avance, un peu plus, pour
donner une chance à ces fournisseurs-là de faire valoir... que ces produits-là
soient dans les appels d'offres. Parce que si le produit est dans l'appel d'offres,
bien, écoutez, le défi, il n'est pas à l'entrepreneur d'essayer de proposer un
produit québécois, il est au concepteur de l'intégrer dans son concept, si on
veut. Donc dès que c'est fait en amont, c'est plus facile.
On le voit dans les projets à valeur
environnementale, là, c'est clair, il y a des points attribués, il y a des
choses qui sont mises en place, mais dans ce cas ci, pour un entrepreneur de
dire : Moi, je veux choisir un produit québécois, très souvent, ce n'est
pas de son choix. C'est livré au concepteur. Alors il faut faciliter, étendre
la période dans laquelle on peut le faire, peut-être le mettre en période de
soumission aussi, que les gens puissent la proposer dès le début et que ça soit
facilité et que ça ne soit pas une entorse au travail du concepteur, mais que
ça soit vraiment reconnu, pour dire : Il faut donner une valeur québécoise
à cet ouvrage-là. Et il y a tout de sortes de moyens de le faire. Mais je pense
que ça se fait en collaboration avec les concepteurs et ultimement, le client
aussi qui doit l'exiger auprès de son concepteur, qu'il y ait des produits
québécois.
L'autre élément, c'est : Est-ce que
ces produits-là seront disponibles en qualité? Et est-ce qu'ils répondront aux
critères de quantité aussi? C'est là le défi. On le vit, en ce moment, la
pénurie des matériaux, ce n'est pas facile. On a de la misère à avoir des
produits de Chine. Imaginez, les produits québécois. On s'est battu après les
deux par quatre pour les courir après puis les trouver, alors qu'ils étaient
vendus aux États-Unis. Alors, c'est un beau défi, mais je pense qu'il faut
aller dans cette voie là parce que l'impact économique pour le Québec, il est
sûrement positif. Ça va demander plus de travail de tout le monde, mais l'Impact
va se faire sur toute notre économie, puis, je pense, là-dessus, on ne peut pas
être contre.
Mme LeBel : Non, puis, donc,
c'est un peu aussi dans la portion que vous me disiez... que vous mentionnez
dans une de vos recommandations, faciliter les demandes d'équivalence. Donc,
vous êtes conscients, bon, que quelques fois, il y aura peut-être des moments
où on va se tourner vers un produit, puis, peut-être parce que... bon, pour
toutes sortes de raisons et que l'entrepreneur pourrait avoir l'intention ou
vouloir nous offrir un produit québécois. Donc, ce que vous dites, c'est
également de permettre cette possibilité-là, mais d'étendre peut-être la
période ou de voir comment on peut faciliter le processus, là, pour les entreprises,
démontrer que le produit qu'elles ont en tête va être équivalent , là, en
termes de ce qu'on recherche, là, soit par... tant par la qualité que par l'esthétique,
aussi, il y a plusieurs choses, là.
M. Côté (Eric) : Bien, si on
parle de qualité égale, là, si on parle de qualité qui a les caractéristiques
nécessaires minimales, là, bien, je pense qu'on ne veut pas dire que les
produits québécois sont moins bons, sont moins bonne qualité. Ils ont des
standards minimums pour un bâtiment, ça, c'est normal. On est livrés à des
exigences, là, du Code du bâtiment. Mais je pense qu'on peut se donner un
espace additionnel qui nous permettrait de, j'allais dire : Déjouer,
peut-être, les ententes intercommerciales, puis de pouvoir continuer à proposer
des produits québécois tout au long du processus dans l'élaboration des
projets, là.
Ça fait que ça... c'est de faciliter ce
processus-là, puis d'avoir une conscience particulière pour le faire. Et
surtout, si les produits sont là, c'est un peu... on le voit dans les
produits... on le voit dans les grands projets, là, on va chercher des
équipements à l'étranger, des choses comme ça. Peut-être que si on pouvait dire :
Bien, on veut du bois québécois, on veut des produits innovants québécois, qu'on
leur laisse une place. Donc,, c'est quelque chose qui est assez difficile avec
les concepteurs de venir changer quelque chose dans un concept, parce que nous ne
sommes pas le concepteur. Nous sommes un entrepreneur, nous sommes l'exécutant,
donc on n'a pas... on ne nous reconnaît pas une expertise d'aller chercher ces
produits québécois là.
Mme LeBel : Ce qui rend le
dialogue difficile par la suite, c'est ce que vous dites, là?
M. Côté (Eric) : Voilà.
Mme LeBel : Peut-être aborder
un autre aspect qui a été peu abordé. Quand on parle de l'Autorité des marchés
publics, une question en particulier, vous faites une recommandation, entre
autres, ou, en tout cas, il y a un passage dans votre mémoire qui dit :
Afin de respecter le plan d'action gouvernemental en matière d'allégement
réglementaire... bon, on en est là. D'ailleurs, un de mes collègues ici de
Saint-Jérôme en est un des porteurs et des instigateurs. Donc, il est
recommandé que l'AMP ne mette pas en place un nouveau processus lié à la
déclaration d'intégrité, ce qui est très différent de l'autorisation de
contracter, on se comprendra, sous la responsabilité des entrepreneurs
généraux, mais plutôt de chercher à mettre en place un service centralisé d'autorisation
à guichet unique en collaboration.... Bon, je ne lirai pas la fin de la phrase.
Mais là, écoutez, je veux juste
comprendre. L'idée, c'est... l'objectif n'est certainement pas d'ajouter au
fardeau. L'objectif est de s'assurer que même sous les seuils d'autorisation,
on est capables d'avoir... d'aller chercher les entreprises les plus... avec un
niveau d'intégrité démontré ou à tout le moins le plus haut niveau d'intégrité.
Je pense que c'est...
17
847
Mme LeBel : ...on
ne peut pas être contre la vertu. Donc, l'idée, c'est d'avoir ce type de
mécanisme là. Ça existe ailleurs, ça existe, entre autres, à New York, pour la
ville de New York, pour la... Quand on parle des approvisionnements dans ce
sens-là, c'est une déclaration d'intégrité également, où l'entrepreneur se
déclare intègre. Donc, qu'est ce que vous voulez dire, au juste, là? Est-ce que
vous dites : Ne le faites pas, ou si vous le faites, attention à la
paperasse? Je veux juste comprendre. Parce que l'idée, c'est d'aller chercher
tout le monde sous les seuils, là.
M. Côté (Eric) : L'intégrité,
écoutez, c'est une question de vertu, évidemment qu'on souhaite. On souhaite
évidemment parce que les gens qui troublent les règles du marché pénalisent
tous les autres. Alors ça, il n'y a pas de doute. Ce n'est pas qu'on veut cacher
de l'intégrité, au contraire. Mais ce qui nous impose, c'est la question du
fardeau administratif. Je ne sais pas si vous le savez, mais avec l'attestation
de Revenu Québec, là, l'entrepreneur général est responsable de vérifier si ses
sous-traitants ont payé l'argent à Revenu Québec et il est pénalisé s'il ne l'a
pas fait.
Alors, on ne veut pas devenir le... autant
qu'on n'a pas été très appréciés d'être le percepteur d'impôt du gouvernement
auprès des sous-traitants, je pense que l'entrepreneur général ne devra pas
devenir le gardien de l'intégrité pour tous ces sous-contrats. Imaginez si
quelqu'un nous ment et il nous fait défaut, alors nous, comme exécutants des
travaux, on va devoir trouver quelqu'un d'autre. Peut-être que cette
personne-là devait de l'argent à la CCQ, puis là, on va se retrouver dans une
situation fâcheuse.
Nous, ce qu'on dit, c'est que quand on
engage un entrepreneur avec une licence, il a déjà été enquêté à la Régie du
bâtiment. Il a déjà été enquêté à la CCQ. Il a déjà été enquêté à l'Agence de
revenu du Québec. Il a peut-être été vérifié par la Santé publique durant la
pandémie parce qu'il ne mettait pas les masques et ces choses-là. Est-ce qu'on
pourrait avoir un endroit où on a une lumière verte qui nous dit : Prenez
cet entrepreneur-là, il passe le test à tous les endroits? Puis qu'il y ait une
lumière verte AMP sur le site de la Régie du bâtiment qui dit : Celui là,
vous pouvez le prendre puis... Parce qu'on comprend que l'AMP n'a pas les
moyens d'aller chercher une autorisation... de faire faire une autorisation aux
45 000 détenteurs de
licence à travers la... aux 25 000 détenteurs
de licence RBQ au Québec, là.
On comprend qu'on veut arriver à un
objectif par un autre moyen. Qu'on puisse vérifier les gens qui font des contrats
publics, j'en suis, mais il faut trouver un moyen pour pas que ça soit à la
charge de l'entrepreneur, mais que ça soit à la charge de l'État de le faire
parce que ce n'est pas l'entrepreneur qui en bénéficie, c'est l'État. Alors, je
pense que c'est pour ça la règle du un pour un. Puis écoutez, M. Chassin
était là à la rencontre, quand on lui a dit, le un pour un, c'était nécessaire.
On a sorti une lettre qui existait d'il y a 20 ans où on souhaitait
l'allègement réglementaire. Vous demanderez à nos collègues de l'ACQ, ils l'ont
signée, cette lettre-là, et je pense qu'il faut qu'on trouve un moyen de rendre
ça facile, mais d'avoir les meilleures exigences en termes d'intégrité. Et ça,
je pense, il n'y a pas de compromis à faire, mais il faut trouver le meilleur
moyen.
17
847
Mme LeBel : Je vais
conclure... dire : Vous êtes pour l'objectif, mais vous nous mettez en
garde de ne pas ajouter au fardeau. C'est ça?
M. Côté (Eric) : Ne
soyons pas en contradiction d'une politique à une autre...
17
847
Mme LeBel : Exact.
Merci. Bien, merci beaucoup de votre contribution.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, madame la ministre. D'autres interventions de la part des collègues du
côté ministériel? Sans quoi, je cède la parole au député de Mont-Royal–Outremont.
M. Arcand : Merci,
Monsieur le Président. Bonjour, Monsieur Côté, bonjour, madame Robitaille.
Bienvenue à cette commission. On vit actuellement dans un monde un peu
complexe, particulièrement au niveau de la construction, des entrepreneurs
généraux. C'est... On assiste à des hausses de prix de matériaux. On assiste à
des pénuries de main-d'œuvre. On assiste à des bouleversements un peu partout.
Dans le contexte actuel, ma question est
simple, on... Moi, si je suis le donneur d'ouvrage, je vais vouloir me
sécuriser, puis je vais me sécuriser, évidemment, en me réfugiant derrière le
plus bas prix. Or, au cours de cette commission, ce qu'on a tenté de démontrer,
c'est que ce n'était certainement pas la seule valeur et qu'il fallait
évidemment qu'il y ait d'autres critères, l'innovation, l'environnement, etc.
Alors, ma question est bien simple : Comment, dans le contexte actuel, on
peut sécuriser ces donneurs d'ouvrage là et s'assurer qu'ils paient le juste
prix, à tout le moins? Même si ce n'est pas nécessairement le plus bas prix,
comment peut-on les sécuriser pour qu'ils paient quand même un prix qui est
juste?
• (12 h 40) •
Mme Robitaille (Mélissa) : En
fait, il y a différentes façons. Si ces... là sont intéressés à aller soumissionner,
c'est déjà un plus. Un des freins majeurs aux entreprises pour aller
soumissionner pour l'État, c'est les délais de paiement, le manque de
collaboration puis la gestion administrative. Dans l'optique où est-ce que vous
avez plus de joueurs qui vous déposent des prix, vous avez déjà au moins une
plus grande répartition de coûts qui va venir aider pour pouvoir le faire,
d'adresser les projets différemment, avec la pénurie de main-d'œuvre, la
pénurie de matériaux, ça demande que les projets de construction soient...
Mme Robitaille (Mélissa) : ...travailler
beaucoup plus en amont, beaucoup plus en mode préparation. Ça nécessite aussi
de faire de la précommande d'achat de matériaux, de l'entreposage, pour être en
mesure d'avoir les ressources prêtes au moment où st-ce qu'elles sont requises
en chantier. Mais ça nécessite aussi de les payer. Donc, ça amène une dynamique
qui sort peut-être du cadre habituel de ce qui est en fonction dans le contexte
actuel. Une fois la chaîne d'approvisionnement rétablie puis les niveaux de
mises en chantier plus stabilisés, ça va être plus facile de revenir à un mode
conventionnel par la suite.
M. Arcand : La question de
l'achat québécois, qui est la volonté derrière ce projet de loi là, plusieurs
gens dans le domaine nous disent: Écoutez, c'est parfois difficile de définir
certains produits puis de les identifier comme étant québécois. Comment
pensez-vous qu'on peut s'assurer justement de cette prévalence de produits
québécois? Parce que, parfois, il y a certains produits qui sont faits au
Québec, mais qui viennent de l'extérieur, retransformés au Québec et ainsi de
suite, là. Est-ce que, pour vous, ça représente un enjeu d'avoir des produits
québécois ou si vous pensez qu'on est presque autosuffisants dans cette
matière?
Mme Robitaille (Mélissa) : On
n'est pas autosuffisants, mais, dans la mesure où est-ce que c'est clarifié,
chacune des étapes, comme au niveau alimentaire, quelle étape ça fonctionne, ça
aide. Puis, quand c'est clair, c'est facile de pouvoir le proposer.
Je vais prêcher pour ma façon de faire, je
n'oeuvre pas dans le public, donc j'ai une façon de travailler différente. Si
je suis en mesure... si le produit disponible, s'il rentre dans les paramètres
puis il rentre dans les performances, je suis capable de le faire parce que le
timing est bon. Si je l'extrapole au niveau du public, bien, faut s'assurer
qu'il y ait la même flexibilité. Ça fait que, si la définition d'un produit
québécois, avec la transformation, elle est claire au départ, un, les
professionnels vont pouvoir les choisir, puis, deux, s'il y a la latitude de
pouvoir moduler en termes de l'évolution de chances de pouvoir les rentrer,
bien là, ça va être plus facile de dire si la disponibilité est là. Parce qu'on
n'est pas autosuffisant, on ne le sera pas, mais, au moins, qu'on soit capable
d'aller chercher le maximum qu'on peut aller chercher dans la province. Mais il
faut avoir une prévisibilité pour savoir quand est-ce que le projet arrive.
Sinon, bien, il faut avoir la latitude de pouvoir s'adapter en cours de route,
si la disponibilité devient présente, mais qu'elle n'était pas nécessairement
présente en cours d'appel d'offres.
M. Arcand : Il y a une des
critiques que j'entends sur le projet de loi de la part de certaines personnes,
qui disent qu'on n'insiste pas assez sur la qualité. C'est-à-dire qu'il n'y a
pas beaucoup de mentions. On a parlé d'environnement, d'innovation, mais sur la
question de la qualité, ce n'est pas quelque chose... Et pourtant, c'est quand
même important d'avoir de la qualité dans le domaine, parce que, parfois... On
dit toujours: Tu es mieux de payer quelque chose un peu plus cher, mais qui va
durer plus longtemps et qui va avoir meilleure valeur. Est-ce que vous avez une
opinion par rapport à ça?
Mme Robitaille (Mélissa) : J'y
vais ou tu y vas?
M. Côté (Eric) : Bien, on est
sur la même opinion, mais... les questions de la qualité, là, et des matériaux
qui seront à spécifier, et des manières de faire, elles sont spécifiées dans
les plans et devis. On ne peut pas déroger à ça. La conception, à la base,
là... après ça, son exécution, c'est une autre étape. Est-ce que les… Et il y a
une surveillance des travaux qui est prévue dans la plupart... dans les projets
publics, et tout est fait selon... conforme. Et, écoutez, l'entrepreneur qui ne
fait pas des travaux selon les termes, bien, il va être pénalisé. Donc, la
qualité, elle est là aussi. Il y a une surveillance des travaux qui se fait, et
tout ça. Si vous parlez de choix aussi, bien, je pense que c'est des choix,
quand on fait des projets, d'est-ce qu'on veut des projets et on veut des
matériaux nobles ou on veut des matériaux fonctionnels? Est-ce que la question
de la qualité de l'esthétique est importante aussi ou on parle juste de
solidité et d'utilité des matériaux, là, tout ça? Non, mais je ne pense pas
qu'on remet en cause la qualité du travail des entrepreneurs, mais, beaucoup
plus, je pense que, si on a un processus qui facilite des plans et devis qui
sont vraiment clairs puis qui spécifient ce qu'on veut, bien, on va l'exécuter,
comme entrepreneur général, selon les termes du contrat.
M. Arcand : Et dans
l'expérience que vous avez dans les appels d'offres gouvernementaux, est-ce que
vous avez le sentiment qu'on recherche vraiment la qualité ou si c'est
uniquement le prix?
M. Côté (Eric) : Bien,
écoutez, c'est une bonne question. Moi, je pense qu'il y a des devis de
performance, il y a des éléments qui sont précisés, il y a des ouvrages qui
nécessitent un certain niveau de qualité. Quand on construit un hôpital...
M. Côté (Eric) : ...hôpital ou
un centre de cancérologie, on ne veut pas y aller avec des matériaux qui
sont... mais c'est en fonction de la durée de l'ouvrage, là. Puis ça nous
rappelle, je pense, à l'intervenant précédent qui parlait de cycle de vie, là,
c'est bien de pouvoir bâtir pour longtemps avec la meilleure qualité, mais
parfois est-ce qu'on a besoin de bâtiments pour qu'il dure 75 ans,
100 ans, 50 ans? Je pense qu'aussi il y a une durée de vie aussi, là,
qu'il faut considérer.
Donc, il y a des ouvrages qui nécessitent
des niveaux de perfection qui sont plus importants que d'autres, là, mais je
pense qu'il faut regarder aussi en termes de la capacité de la population
d'assumer ces ouvrages-là, là. Ça ne sert à rien d'avoir le plus beau pont, le
meilleur pont le plus solide au monde si on a plus d'argent pour acheter des
voitures pour rouler dessus parce qu'on a été trop taxés, là. Je pense qu'il
faut... Il y a un équilibre de fonctionnalité et aussi qu'il faut examiner.
C'est un équilibre qui est difficile et, bien, je pense que ça repose dans les
mains des concepteurs et du gouvernement, de choisir, là, le niveau de qualité,
bien, en fonction de l'usage qui en est fait, là, puis de l'utilité pour le
public.
M. Arcand : Dans vos
recommandations... Je regarde la recommandation quatre puis la recommandation
cinq. Dans la recommandation quatre, vous dites : «Encadrer la mesure qui
vise à... le développement régional en limitant la taille des contrats» et
ainsi de suite. Et, dans la recommandation 5, vous dites, il faut «limiter les
dépenses scindées dans le cadre des projets de construction» Je ne sais pas, je
voyais un peu quelque chose de contradictoire. Vous dites, à quelque part, il
faudrait presque des plus gros contrats pour que ce soit plus efficace puis, en
même temps, il faudrait avoir des plus petits contrats pour favoriser certaines
régions du Québec ou des entrepreneurs à ce niveau-là. Est-ce que ce que
j'interprète mal, actuellement, ces deux recommandations-là?
M. Côté (Eric) : Il y a un
point de jonction, justement, ce que vous dites. Premièrement, le
fractionnement des contrats au niveau régional, je pense qu'on l'indique, là,
c'est un facteur de risque à notre avis, et l'effet positif, pour les petits
entrepreneurs, qu'il n'est pas nécessairement là... Vous avez des gens qu'on
connaît, le secteur de la construction, là. Les gens de la Côte-Nord ne se
limitent pas à venir travailler sur la Côte-Nord. Les travailleurs se promènent
partout où il y a des chantiers. C'est un peu le propre, là... Je ne veux pas
dire que les gens de l'industrie de la construction sont nomades, mais ils
sortent de leur région parce qu'ils vont où il y a des projets. Donc ça, c'est
important, par rapport à ça. Donc, l'idée aussi... Mais c'est... Il y a un
risque en fractionnant les contrats, puis en donnant ça, puis en limitant
certaines régions... On a vu l'expérience. On ne veut pas des marchés fermés.
D'un autre côté, la politique d'essayer de ne pas... Quand on fractionne des
contrats, bien, on augmente le risque que la coordination soit problématique
aussi.
Alors, ce qu'on dit, c'est ne pas
fractionner des grands projets en... Ce n'est pas ça, l'idée, mais c'est parce
ce qu'il faut être prudents quand on ferme des marchés, d'une part. Et, quand
on a des marchés, d'essayer de fractionnés pour donner accès à des plus petits
joueurs à ces marchés-là, bien, il faut avoir... il faut réaliser qu'il y a un
risque au niveau de la coordination puis que la réalisation d'ouvrages soit
complexifiée ou qu'il y ait des risques.
Alors, nous, ce qu'on souhaite, c'est
qu'il y ait des contrats pour le plus grand nombre d'entrepreneurs de toutes
les grandeurs possibles parce que les gens qu'on représente sont grands et
petits et ils travaillent dans toutes les régions du Québec. Alors, ce qu'on
souhaite, c'est que tout le monde ait du travail et puisse contribuer à
l'économie du Québec avec ces travaux-là.
M. Arcand : Donc, pas une
centralisation excessive.
M. Côté (Eric) : Voilà. Il ne
faut pas centraliser puis il ne faut pas décider à un seul endroit, mais je
pense qu'au niveau régional il faut y aller quand même avec parcimonie, parce
que l'effet, ça va faire en sorte qu'il y a un entrepreneur qui va avoir tous
les contrats dans une région à terme, là, parce que les autres n'y auront pas
accès. Ça fait qu'on ne veut pas ça. Il n'y a personne qui veut avoir qu'un
seul soumissionnaire. Ça, c'est quelque chose que même l'OCDE nous dit :
Il ne faut pas avoir juste un seul, il faut avoir de la diversité. Alors,
protégeons la diversité, protégeons la compétition. Et, à ce moment-là, on a
plus de joueurs de ce côté-là qui vont le rendre possible et... Oui.
M. Arcand : Et
exceptionnellement, au cours de la dernière année, est-ce que c'est un enjeu
d'avoir des problèmes de soumissionnaires, dans votre expérience, de ce que
vous voyez? Je vois...
M. Côté (Eric) : Bien, c'est
la quantité de travail, c'est la quantité de travail qui nous... Je vais
laisser Mme Robitaille en parler aussi parce qu'elle a aussi vécu ça, mais...
M. Arcand : Elle sourit un
peu quand je pose la question.
M. Côté (Eric) : Je vous
dirais... Puis je vais laisser la parole à Mélissa, mais on a beaucoup de
travail.
Le Président (M. Simard) : ...s'il
vous plaît.
• (12 h 50) •
M. Côté (Eric) : Bon, oui,
Mélissa, si... en conclusion.
Mme Robitaille (Mélissa) : Il
y a beaucoup de travail en marché... Je m'excuse, on s'entend en écho. Puis il
y a beaucoup de travail en marché, ce qui fait que les gens sont plus occupés à
effectuer les chantiers qui sont déjà en cours que de soumissionner ce qui s'en
vient dans le futur, donc ça limite. Ceux qui soumissionnent puis qui se
retrouvent seuls, bien, c'est dur de valider après ça si le prix est juste ou
pas, là.
M. Arcand : Très bien...
M. Arcand : ...Donc, il
faut faire attention pour trop monter le PQI au prochain budget.
Mme Robitaille (Mélissa) : Pas
nécessairement trop le monter, mais d'être en mesure de pouvoir le planifier
dans le temps ou de le partager en amont. On est capable de pouvoir s'organiser
en conséquence. Les ressources... en non pas tout en même temps.
Le Président (M. Simard) : Merci,
Mme Robitaille. Alors, nous poursuivons... mais message bien entendu, cher
collègue. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Oui, merci.
Merci beaucoup pour votre présence et votre présentation et mémoire. Vous avez
dit que 90 % de votre marché est comblé par les entrepreneurs québécois.
Les autres, ils travaillent où? Est-ce que dans le reste du... ailleurs au
Canada ou aux États-Unis, les autres entrepreneurs, est-ce que vous faites
beaucoup de contrats ailleurs ou les entrepreneurs québécois ailleurs au Canada
ou aux États-Unis? J'aimerais en savoir un peu plus.
M. Côté (Eric) : Bien,
je pense que quand on dit : 90 % des entrepreneurs. C'est qu'on dit
que les projets de construction au Québec sont réalisés à 90 % par des
entrepreneurs du Québec.
Mme Ghazal : O.K., O.K.,
O.K. Donc, les entrepreneurs au Québec ne font pas beaucoup de contrats à
l'extérieur ou pas du tout.
M. Côté (Eric) : Au
contraire, au contraire, on a des opportunités sur le marché ontarien, sur le
marché du reste du Canada, les Maritimes. On a des gens qui sont même sur le
marché américain, qui se développent. Il y a des gens qui ont développé des
spécialités, là. On a un entrepreneur qui est dans le secteur privé qui
travaille avec un client du secteur bancaire, que je ne suis pas obligé de vous
nommer, mais ils ont des succursales à travers le Canada. Et il a développé une
expertise et il est devenu l'entrepreneur de choix pour cette institution
financière de construire ses succursales. Donc, ça fait en sorte...
Mme Ghazal : Est-ce
qu'ils vont sur les marchés publics aussi?
M. Côté (Eric) : Pas
tellement, pas tellement. Ça, je laisserais Mme Robitaille répondre parce
qu'elle est dans le secteur privé. Elle pourrait vous en parler.
Mme Ghazal : Puis c'est
surtout, dans le fond, ailleurs au Canada, si je comprends bien. Vous avez
parlé de l'Ontario tout ça, moins aux États-Unis. Je suis curieuse.
M. Côté (Eric) : Le
marché américain, c'est d'autre chose.
Mme Ghazal : O.K., O.K.
Très bien. Écoutez, j'ai... je ne suis pas sûre d'avoir compris très bien la
recommandation numéro 5, là, en la lisant. Je l'ai lue plusieurs fois.
Peut-être parce que je connais moins le marché, puis là j'ai entendu vos
discussions avec le collègue. Si vous vouliez peut-être l'expliquer rapidement.
«Limiter les dépenses scindées dans le cadre de projets de construction pour
assurer que les échéanciers et l'exécution des travaux ne soient pas compromis
sur le plan opérationnel.» C'est quoi le problème, exactement, que vous voulez
régler, là, avec le projet de loi? Oui.
M. Côté (Eric) : Oui. Je
pense que ce qui est important, et on l'a mentionné au projet de loi n° 66,
on l'a mentionné à plusieurs moments auprès des gouvernants. La prévisibilité
des coûts, la prévisibilité des contrats à venir, c'est quelque chose
d'important. Et j'en profite, puis malheureusement, j'aurais aimé apporter la
question à votre collègue. En Ontario, ils ont... au Québec, on a un PQI, mais
qui est fait une fois par année. En Ontario, il en ce qu'ils appellent «une
mise à jour du marché» qui est publiée à tous les trimestres, qui dit c'est
quoi les projets qui s'en viennent. Alors, au lieu d'un PQI statique, là, avec
peu de dates, l'Ontario, Infrastructures Ontario propose un calendrier en
expliquant quel mode de réalisation va être utilisé, c'est quoi l'ampleur du
projet, dans quelle région il va être, est-ce qu'il est à l'étape de la
conception, est-ce qu'il est à l'étape... Écoutez... et c'est sur le site
d'Infrastructures Ontario. Il est en français. Vous pouvez l'obtenir. Et je
pourrais vous le transmettre à la commission si vous le voulez, mais c'est un
outil qui permettrait...
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Côté (Eric) : ...notamment
aux grands joueurs, mais aux petits joueurs de savoir qu'est-ce qui s'en vient
comme travail.
Mme Ghazal : Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. Alors, M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Bonjour à vous deux. Merci beaucoup d'être là. Moi, je me souviens très bien de
l'étude du projet de loi n° 66. Nous y étions. Vous y étiez. Et déjà vous
nous avez allumé un feu rouge, là, je dirais, sur l'application des
recommandations de la commission Charbonneau en lien avec le Bureau des
soumissions déposées. Vous en parlez dans votre mémoire. Vous en faites même la
recommandation 8, là. Alors, j'aimerais ça vous entendre un petit peu plus
là-dessus. Est-ce qu'il y a eu un suivi au moins depuis l'adoption du projet de
loi n° 66?
M. Côté (Eric) : Et bien
M. le Président, malheureusement, il y a eu peu de suivi. On attend un retour
de la part du gouvernement. On est en discussion avec les propriétaires du BSDQ
pour essayer de trouver des solutions, mais du côté gouvernemental, on n'a pas
eu d'information à cet effet là. Je vous dirais qu'on nous envoie un signal en
donnant des pouvoirs de surveiller les sous-contrats à cet effet là. Et nous,
ce qu'on propose dans le projet de loi, c'est justement au lieu de tourner
autour du pot, nommons le BSDQ comme organisme qu'on devrait surveiller tout
simplement. Le BSDQ est créé par une loi, par deux lois, alors pourquoi le
gouvernement ne s'arroge pas le pouvoir d'aller vérifier? Qu'il donne le
pouvoir à l'AMP d'aller vérifier au BSDQ.
M. Gaudreault : Oui,
puis l'AMP nous a dit ici qu'ils étaient bien prêts à prendre plus de
responsabilités, là, ça fait que... c'est comme un tant qu'à y être, là. Donc,
je comprends que depuis l'adoption de la loi 66, le...
M. Gaudreault : ...le
gouvernement s'est traîné les pieds sur le suivi du rapport de la commission
Charbonneau versus le BSDQ. C'est un peu ça que vous nous dites, là?
M. Côté (Eric) : Mais je
pense que le gouvernement a travaillé sur d'autres priorités. On avait une
pandémie. Le BSDQ n'était peut-être pas dans les priorités à ce moment-là. Mais
je pense que... en fait, là, M. le Président, la question, c'est : Qui
doit s'occuper du Bureau des soumissions déposées? Nous ne oe savons pas, au
gouvernement, qui est titulaire. On nous dit que c'est le ministère des
Affaires municipales, on nous dit que c'est le Conseil du trésor, on nous dit
que c'est le ministère du Travail, ou on nous dit que c'est la SQDI. Le rapport
est signé par quatre organismes. On toujours pas la réponse qui s'occupe du
BSDQ.
M. Gaudreault : Être ou
ne pas être, telle est la question du BSDQ. J'espère que la ministre va pouvoir
nous déposer un suivi des recommandations de la commission Charbonneau, en lien
avec le BSDQ, entre autres pour l'étude des crédits. Ça s'en vient. Peut-être
qu'elle pourra faire ça.
Mme LeBel : ...
M. Gaudreault : Non,
non, non, c'était un commentaire. Je pense que monsieur Côté aimerait avoir ça
peut-être à l'étude des crédits qui s'en vient bientôt. Oui ou non?
M. Côté (Eric) : Comme
toutes les études de crédits, on écoute, on lit et on n'y trouve pas
grand-chose. Alors oui, j'ai espoir, j'ai espoir que ça peut être aux crédits.
Mais il faudrait qu'on nous dise qui, dans les titulaires ministériels, était
responsable du BSDQ, parce que nous n'avons pas la réponse en ce moment.
M. Gaudreault : O.K.
Alors, la question est lancée dans le vaste univers gouvernemental. On va aller
chercher la réponse. Merci.
Le Président (M. Simard) : Bien,
M. Côté et Mme Robitaille, ce fut un grand plaisir que de vous
recevoir dans le cadre de nos délibérations. Merci d'avoir été là. Sur ce, nous
allons suspendre et nous serons de retour cet après-midi à 14 heures. À
nouveau merci.
(Suspension de la séance à 12 h 58)
14 h (version non révisée)
(Reprise à 14 h 4)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers amis, bienvenue à nouveau à tous. Nous sommes en mesure de reprendre nos
travaux. Je constate que nous avons en effet le quorum nécessaire pour le
faire. Nous nous retrouvons en ce moment en présence de représentants de l'Association
de la construction du Québec. Alors, messieurs, bienvenue parmi nous et merci d'avoir
répondu à notre appel. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?
M. Arbour (Jean-François) : Bonjour
à tous! Jean-François Arbour, ingénieur, je suis le président du conseil d'administration
de l'Association de la construction du Québec.
M. Hamel (Pierre) :Et Pierre Hamel, directeur affaires juridiques et
gouvernementales à l'ACQ.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Nous vous écoutons. Vous disposez de 10 minutes.
M. Arbour (Jean-François) : Merci
à tous. M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, comme vous
l'avez mentionné, je suis Jean-François Arbour, ingénieur et entrepreneur depuis
plus de 25 ans et président du conseil d'administration de l'ACQ. Je suis
accompagné aujourd'hui de Me Pierre Hamel, directeur des affaires juridiques et
gouvernementales de notre association. Je voudrais d'abord remercier la
commission de nous donner l'opportunité de vous présenter nos commentaires et
recommandations visant le projet de loi 12.
Les aspects d'innovation et de
développement durable évoqués au projet de loi sont fort intéressants et
prometteurs. Rendre les donneurs d'ouvrage plus agiles au niveau du mode d'attribution
des contrats demeure un objectif louable qui sera bénéfique pour tous les
intervenants de l'industrie. Me Hamel vous fera part de nos recommandations
dans quelques instants, mais avant tout, je dois joindre ma voix à celles des
milliers d'entrepreneurs et fournisseurs québécois travaillant pour les
organismes publics qui souhaitent non seulement avoir accès aux marchés
publics, mais être respectés pour le travail réalisé. Et nous respecter, pour
nous, les fournisseurs, ça veut dire être payé dans les délais. Il nous
apparaît donc incontournable...
M. Arbour (Jean-François) : ...dans
le cadre d'une stratégie en matière de marchés publics, de mettre à
l'avant-plan une procédure de paiement rapide et de résolution de conflits tout
aussi rapide pour mettre un terme aux délais qui s'étirent de plus en plus et
qui, n'ayons pas peur des mots, font fuir plusieurs bons entrepreneurs des
marchés publics. Bref, une stratégie gouvernementale des marchés publics
devrait reposer d'abord sur un engagement du respect des fournisseurs en
adoptant les dispositions de l'arrêté ministériel de 2018 de façon permanente.
Les objectifs du gouvernement pour 2026
pourraient dépasser 1,5 milliard à plus de 5 milliards de retombées
positives pour la même période. Vous avez compris dans notre propos que nous
appuyons sans réserve la position de la coalition qui a paru devant vous mardi
dernier. Voilà donc pour mes quelques commentaires d'ouverture. Je cède
maintenant la parole à Me Hamel.
M. Hamel (Pierre) :Merci, M. Arbour. Alors, M. le Président, Mme la ministre,
membres de la Commission, merci de nous permettre de comparaître aujourd'hui.
Donc, les entreprises en construction sont
pragmatiques et, par les temps qui courent, elles sont très, très pragmatiques,
tout comme le sont les donneurs d'ouvrage. Et ce qui interpelle les
entreprises, dans le cadre de l'analyse des dispositions du projet de loi,
c'est des réponses aux questions tout aussi terre à terre. Alors, les questions
sont les suivantes, et c'est en répondant à ces questions que nous aurons
l'opportunité de vous faire part de nos recommandations.
D'abord, comme fournisseur, quand et
comment je serai payé? Également, quels impacts les dispositions auront sur la
gestion de mes opérations? Quels impacts auront-elles sur le développement de
mes affaires? Et quelles dispositions dois-je prendre pour demeurer compétitif
et répondre aux demandes des donneurs d'ouvrage. Et subsidiairement, là, s'il y
a des outils pour me permettre de demeurer compétitif et répondre aux demandes
des donneurs d'ouvrage, j'aimerais bien y avoir accès.
Donc, d'abord, en ce qui a trait à quand
et comment je serai payé, bon, l'adoption rapide des dispositions en matière de
délais de paiement, c'est un incontournable. Compte tenu de la position des
autres intervenants, à moins que vous ayez des questions, pour nous, c'est
réglé, ça doit faire partie du projet de loi 12. C'est une loi qu'on ouvre très
peu fréquemment et on a une importante opportunité de le faire, il faut le
faire maintenant.
Pour ce qui est des impacts sur la gestion
des opérations des entreprises, je vous amène sur le terrain des dispositions
relatives à l'Autorité des marchés publics, qui souhaite modifier la façon dont
elle procède au maintien de l'autorisation. Actuellement, l'autorisation est
délivrée pour une période de trois ans et, si vous avez des modifications entre
temps, bien, vous en faites part à l'autorité. Là, ce qui est proposé, c'est
que l'autorisation soit valable pour une période de cinq ans, mais qu'elle soit
maintenue sur une base annuelle. Donc, ça préoccupe certaines entreprises quant
au fardeau administratif supplémentaire que ça représente. On parle de cinq
formulaires à remplir, qu'on ne connaît pas, et le fardeau va dépendre en bonne
partie de ce qui va être inclus au règlement qui doit être adopté. Mais ça
soulève plusieurs questions. Le fait d'avoir à remplir à chaque année
différents formulaires pour le maintien de l'autorisation, est-ce que ça va
compliquer la gestion des affaires de l'entreprise? Les formulaires sont-ils
plus ou aussi laborieux à remplir que la demande initiale?
Si la demande initiale a été adoptée et
que les mises à jour sont traitées annuellement, pourquoi limiter ça à cinq
ans? Pourquoi ne pas faire comme la RBQ et faire une demande initiale et, par
la suite, faire un maintien annuel? Et pourquoi refaire une demande complète
après cinq ans? Actuellement, l'AMP, avec les nouveaux pouvoirs qui lui sont
attribués, peut intervenir en tout temps auprès des entreprises qui sont
autorisées, qu'elles soient en contrat ou pas avec une autorité publique.
Bref, plutôt que de placer les formulaires
sur une éventuelle liste de demandes d'allègements qu'on aura à faire
éventuellement, pourquoi ne pas réfléchir immédiatement à la question?
• (14 h 10) •
Maintenant, quels impacts auront-elles sur
le développement des affaires? Et ça, c'est l'aspect le plus important.
Actuellement, au niveau national, les autres provinces, là, vu la
réglementation du Québec, c'est à dire de la Commission de la construction du
Québec et la RBQ, qui sont uniques au Québec, ça n'existe nulle part ailleurs
au Canada, ces mesures-là sont déjà jugées comme des barrières à l'entrée et ça
nous a créé, au cours des années, des problèmes assez importants. Il ne faut
pas l'oublier.
L'entente Québec-Ontario en matière de
mobilité de main-d'oeuvre a été conclue en 2006, quand même après sept années
de mesures assez importantes contre les entreprises du Québec, et il s'agissait
de mesures tout simplement politiques. Or, sur le plan provincial, il ne faut
pas sous-estimer l'impact que la...
M. Hamel
(Pierre) :...des mesures protectionnistes
ou anticoncurrentielles que pourraient... à laquelle pourraient prétendre les
autres provinces, peuvent avoir sur nos entreprises qui œuvrent en Ontario, au
Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve, partout au Canada, et même à New York.
L'industrie de la construction, ce n'est pas une industrie qui est visée par le
projet de loi, et selon nous, ça devrait être exclu pour éviter tout quiproquo
susceptible de fermer les frontières ou limiter l'accès aux marchés publics des
autres provinces, comme ce fut le cas de 1999 à 2006.
Pour ce qui est des... et là, quand je
parle de l'industrie de la construction, comprenons-nous bien, je ne fais
référence qu'aux contrats d'entreprises entre un entrepreneur et un donneur
d'ouvrage, un entrepreneur général ou spécialisé. Je ne fais pas référence à la
fourniture de matériaux, la fabrication du Québec, pas du tout. Pour ce qui est
des appels d'offres régionaux, pour les contrats non assujettis à un accord de
libéralisation, l'industrie n'a pas besoin des dispositions pour se développer,
au contraire. On parle de contrats de moins de 100 000 $ environ, là, et pour 2020, on parlait
de 2 000 contrats
qui représentaient environ 100 millions. Ça, c'est les contrats des
organismes publics. Je ne suis pas certain que ça regroupait les municipalités,
je ne crois pas.
Mais quand même, ce sont un bon nombre de
contrats qui font vivre plusieurs petites et moyennes entreprises au Québec et
bien qu'elles soient présentes au niveau local, dans leur propre région, pour
vivre, elles doivent également œuvrer dans les régions limitrophes.
L'entreprise de Rimouski n'œuvre pas uniquement dans le Bas-Saint-Laurent, mais
également, elle doit aller en Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, et toute la
région de Chaudière-Appalaches jusqu'à Québec. C'est la même chose pour le
Saguenay, c'est la même chose que la Basse-Côte-Nord. Et bref, on doit voyager
et on doit travailler dans les zones limitrophes.
Or, en exigeant que tous les contrats
fassent l'objet d'appels d'offres régionalisés, on interdit systématiquement
l'accès aux entreprises des régions limitrophes. On interdit à ces entreprises
d'une région d'aller dans une autre région. En d'autres termes, on enclave nos
propres entreprises dans notre propre province. Alors, on comprend qu'il y a
des moyens qui ont été mis en place pour permettre aux donneurs d'ouvrage de ne
pas faire d'appel d'offres régionalisés si, bon... ou de contrats gré à gré
s'ils ne sont pas en mesure de le faire. Puis encore là, si on est pour toujours
utiliser un moyen pour éviter d'appliquer les dispositions, pourquoi ne pas
simplement soustraire les contrats de construction à ces dispositions-là?
Alors, voilà notre tellement élément le plus important.
Maintenant, quant à la question :
Quelles dispositions je dois prendre pour demeurer compétitif et répondre aux
demandes des donneurs d'ouvrage? Bien là, on fait référence à la notion de
prévisibilité. Par exemple, le virage numérique s'est engagé dans la voie de
l'utilisation du... par les donneurs d'ouvrage publics, et le gouvernement a
mis en place une feuille de route qui permet aux entreprises, sur une période
de cinq ans, je crois... quelles seront les exigences des donneurs d'ouvrage au
cours de cette période. C'est très intéressant et ça nous permet de suivre et
d'être accompagnés par les donneurs d'ouvrage pour atteindre les objectifs
qu'ils se sont eux-mêmes fixés.
Alors, ça va être la même chose en matière
de développement durable. Les entreprises vont s'adapter au marché dans la
mesure où les entreprises sont accompagnées, comprennent bien les besoins des
donneurs d'ouvrage et la façon dont ils doivent contribuer. Alors, s'il y a des
outils qui peuvent être développés, il serait important qu'ils le soient.
Alors, pour nous, ça répond à la question : Existe-t-il des outils pour
permettre de demeurer compétitifs et répondre aux demandes des donneurs
d'ouvrage? On est un peu plus précis dans notre mémoire, mais ça s'applique aux
différents modes d'octroi de contrats de construction...
Alors, voilà nos principales
préoccupations. Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous deux, messieurs. Mme la ministre.
17
847
Mme LeBel : Merci
beaucoup. Merci, Me Hamel. Merci, M. Arbour, c'est ça? Désolée, c'est
tellement petit à l'écran que mes yeux ne me permettent pas, mais Me Hamel, on
se connaît depuis une autre époque, donc, là où j'ai compris la différence
entre la CQ et la CGRTQ, mais... Donc, ça me fait plaisir de vous voir à
nouveau et de vous rencontrer.
Écoutez, il y a beaucoup de points dans ce
que vous abordez. Naturellement, un des gros points, la stratégie est
d'augmenter la part des achats gouvernementaux québécois en matière
d'approvisionnement. On a quand même un beau taux de retombées québécoises, je
vais le dire au sens large, quand on parle la construction, mais c'est sûr
qu'il y a beaucoup d'enjeux qui vont s'appliquer dans le domaine de la
construction. Et quand vous parlez de ce que, nous, on appelle la
régionalisation des offres, des appels d'offres, on comprend très bien que vous
nous mettez en garde de ne pas faire en sorte qu'on vienne limiter le nombre de
soumissionnaires possible, là, dans certains cas et... dans certains cas de
figure, et ce n'est certainement pas l'intention.
Donc l'idée, c'est de fournir des outils
supplémentaires pour être capable, quand on peut le faire et qu'il y a une
présence suffisante — surtout en approvisionnement, parce que c'est là où on
doit augmenter notre apport — il y a une présence suffisante de
soumissionnaires possibles, d'être capable d'aller, peut être, avoir un...
Mme LeBel : ...économique
ciblé dans certaines régions. Donc, je peux vous dire que votre point a été
bien entendu, puis il a été fait par quelques autres intervenants, mais je me
permettais de préciser.
Peut-être parler un peu du régime
d'intégrité de l'AMP. Vous l'avez abordé, vous l'avez... celui qui nous fait...
bon, entre autres pour la question d'obtenir une autorisation sous...
au-dessus, pas sous, mais au-dessus, puis on parlait des accords
internationaux, on est sous, mais là on est au-dessus de certains seuils. On se
propose justement, entre autres... on veut, entre autres, simplifier ou à tout
le moins s'assurer qu'on ne fait pas un tour de roue pour rien, trop souvent,
là, à tous les trois ans, puis il y a des délais d'attente, puis il y a des
entreprises qui sont limitées parce que, des fois, elles ne sont pas capables
d'avoir l'autorisation à temps, on connait toute la... Donc, l'idée, c'est de
pallier à certains enjeux. Est-ce que je comprends, là, que d'entrée de jeu, ce
que vous nous dites, c'est que vous ne voyez... oublions la mécanique pour
l'instant, vous ne voyez pas de problème à ce qu'une autorisation de contracter
soit d'une durée plus grande, là, d'entre trois et cinq ans, là? Vous pensez
que ça peut quand même... Parce qu'il pourrait y avoir certaines inquiétudes du
public de dire: Bien là, on laisse aller pendant cinq ans. Comment peut-on
s'assurer que l'entreprise demeure intègre pendant ces cinq ans là? Puis on
pourra parler après ça de la mise à jour annuelle, là.
M. Hamel (Pierre) :
Écoutez, nous, ce qu'on pense, c'est que la demande initiale, qui est déjà très
lourde, devrait servir de base, et par la suite c'est un maintien de façon
indéfinie. Comme la Régie du bâtiment a l'obligation de voir si les
entrepreneurs méritent la confiance du public, l'AMP, elle, parle d'intégrité.
Essentiellement, c'est de la conformité, là, mais... et, partant, si à chaque
année on remplit les documents, puis qu'il n'y a pas de changements majeurs,
puis qu'il n'y a pas de plaintes relativement aux activités de l'entreprise, il
serait... il est inutile de redemander et de redemander à tous les cinq ans, ou
trois ans, ou quatre ans, peu importe, de refaire le tour de roue. Quand on fait...
Quand on propose et... ou quand on le fait actuellement, bien là, on reçoit un
courriel puis on dit: Bien, pour l'instant, ce courriel-là est valable comme
votre autorisation. Et en plus, quand on ne la demande pas dans les délais,
bien, on se retrouve face à toutes sortes, toutes sortes de pénalités
administratives qui ne sont pas de l'intégrité, que c'est juste de la
conformité à l'égard de procédures supplémentaires que personne dans le monde
n'a, sauf nous.
Alors, moi... ce qu'on veut, on dit: Écoutez,
je comprends que c'est une préoccupation fondamentale, et on comprend que c'est
important que l'Autorité des marchés publics intervienne, mais trouvons une
façon maintenant de regarder ça d'une façon appropriée. Et est-ce que ça ne
serait pas mieux, tout simplement, de... à chaque année, d'avoir de
l'information pertinente et de suivre l'ensemble des entreprises qui souhaitent
avoir une accréditation de cette façon-là? C'est peut-être une façon plus
simple d'aborder un problème, sans avoir peur que le public nous dise: Ça ne
fonctionnera pas, etc. De toute façon, si ça ne fonctionne pas, ça va
apparaître à un moment donné et ça ne sera pas nécessairement dans la demande
d'autorisation qui est faite par l'entreprise en question.
Mme LeBel : Parfait. On se
propose dans le projet de loi de créer un espace de... On l'appelle «espace
d'innovation», là, mais l'idée de cet espace-là est de se permettre d'avoir un
espace où on se permet, et non pas à la grandeur des marchés publics - et,
encore là, il ne faut pas le voir en termes de volume, il faut le voir en
termes de façons de faire - c'est-à-dire de pouvoir expérimenter. Bon. Il y a
toute la question des produits, des technologies innovantes - vous avez parlé
tantôt du BIM - mais entre autres également de pouvoir faire évoluer notre
cadre normatif. Il y a la fameuse loi du plus bas soumissionnaire, il y a
plusieurs types de règles d'adjudication, on a eu l'occasion d'en parler dans
un autre forum pendant longtemps.
Pour diverses raisons, des raisons
d'efficacité, d'efficience et d'avoir la meilleure règle possible, et des
questions d'intégrité et de contrer la collusion aussi dans certains cas, il
est très approprié que les donneurs d'ouvrage ou les acheteurs publics aient
une panoplie d'outils d'adjudication de contrats à leur disposition. Plusieurs
nous demandaient de l'abolir. Est-ce que... Bon. Qu'est-ce que vous en pensez?
Qu'est-ce que vous pensez d'ailleurs de l'espace d'innovation puis de la règle
du plus bas soumissionnaire? Vous êtes un des groupes qui ne l'avez pas abordée
de front. Là, peut-être, je me permets de vous poser la question, là.
• (14 h 20) •
M. Hamel (Pierre) :
Oui. Bien, je vous remercie. Écoutez, d'abord, bravo pour l'espace innovation
pour donner de l'air puis faire respirer nos donneurs d'ouvrage, qui selon moi
avait quand même certaines possibilités, là, mais là vous les écrivez noir sur
blanc, même avec le...
M. Hamel (Pierre) :...le dialogue compétitif, je crois, ou quelque chose comme
ça. Je reconnais M. Chassin là-dedans un petit peu. Mais je vous dirais que
c'est fantastique. Il faudrait les aborder un peu en projet pilote. Il faudrait
aussi pour permettre... parce que ça prend des gestionnaires quand même
aguerris pour changer la donne et développer toute la gestion de... ou ces
nouveaux modes de gestion là et d'attribution de contrats comme tels.
Maintenant, pour la règle du plus bas
soumissionnaire, écoutez, selon nous, c'est un faux débat. Sincèrement, là,
pour moi, personnellement, d'abord, c'est un faux débat. Actuellement, c'est...
le Québec est tout à fait en ligne avec ce qui se passe au Canada. J'ai parlé
hier avec des gens de la Colombie-Britannique. On me dit que 95 % des contrats
sont octroyés au plus bas soumissionnaire en Colombie-Britannique, 90 % au
Manitoba, 90 % en Ontario et que dans la pondération de la Ville d'Ottawa, où
il y a 80 % pour le prix, puis 20 % pour l'expertise du vendeur, bien, sur les
300 soumissions qu'ils ont eues l'an dernier, il y en a sept qui sont allées au
deuxième plus bas, il y en a 293 qui étaient au plus bas soumissionnaire
conforme. Alors, donc, il ne faut pas rejeter.
Et moi, ce que je pense, c'est que ce
débat-là, ça occulte la vraie question qu'on doit se poser, c'est que pour que
ça fonctionne, peu importe l'octroi, il faut que ça soit préparé en amont. Et
ça, on ne met jamais les efforts suffisants pour bien préparer en amont. On est
pressés soit technologiquement, soit financièrement, à cause de budgets, ou
pour des raisons politiques. Et, dans ce contexte-là, ça force les donneurs
d'ouvrage publics à aller trop vite et, évidemment, à préparer des plans et
devis où les entrepreneurs... où les professionnels n'ont pas eu le temps de
les préparer, il n'y a pas eu de plans fonctionnels et techniques qui ont été complétés,
et j'en passe, et des bonnes, et des meilleures.
Et on parlait de la commission
Charbonneau. Il y a une panoplie d'expertises qui ont été déposées et il y en a
une qui disait : Quand c'est pas bien préparé, les plans et devis, c'est
une source de collusion et de corruption parce que, là, il se passe des
situations... on appelle ça, là, l'immatériel, là. Bon, ah, j'ai oublié quelque
chose dans mes plans et devis, l'entrepreneur le corrigera. Mais je te l'ai
corrigé, peux-tu m'aider à avoir mon... peux-tu avoir mon paiement plus rapide?
On a des problèmes de paiement. O.K., ça va. Alors, il se crée toutes sortes de
situations parce qu'en amont, ça n'a pas été préparé. C'est déjà une source
comme telle. Ça, c'est très important.
L'autre élément, les entrepreneurs, ils
veulent faire les travaux, puis ils veulent s'en aller. Les enjeux,
actuellement, on parle du délai de paiement, mais l'autre, le chapitre 2, c'est
comment négocier ses ordres de changement. On n'en veut pas, c'est trop
compliqué, on perd de l'argent avec ça. C'est très sérieux.
Alors, moi, je vous dis, là, si on prépare
bien en amont les projets puis on prend le temps de les préparer de façon
appropriée et complète, on va arriver à un appel d'offres, que vous prenez
l'appel d'offres qui sourit le mieux au projet du donneur d'ouvrage, peu
importe ça va être quoi, ça va être bien fait. Mais, si c'est mal fait, peu
importe le mode d'octroi, on va avoir des problèmes en bout de piste.
Mme LeBel : Ça me dit
vaguement quelque chose. Non, mais, effectivement, on parle...
M. Hamel (Pierre) :Mais il ne faut pas l'oublier. Il ne faut pas l'oublier.
Mme LeBel : Non, c'est ça.
M. Hamel (Pierre) :On a tendance à l'oublier.
Mme LeBel : Mais,
naturellement, on en parlait, puis on en a discuté avec d'autres intervenants,
la clé du succès est souvent dans une meilleure évaluation des besoins. Donc,
quand on parle de préparer en amont, ça fait partie de la solution. Hein, il y
a le dicton qui dit : Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. Donc,
habituellement... et c'est la même chose pour le choix du mode d'adjudication.
Donc, si on est capables d'avoir une meilleure préparation, bien, on peut
peut-être faire un meilleur choix ou un choix différent, disons-le, dans certains
cas de figure. C'était très clair. Merci.
Le projet de loi propose également de s'en
aller vers l'augmentation de la prise en considération, surtout dans
l'évaluation des besoins, donc, évidemment, dans les critères d'appel d'offres
ou d'achats, de demandes d'achats particuliers, par la suite, de prendre en
compte beaucoup plus le développement durable et d'y avoir des notions de
développement durable, des critères de développement durable. Je sais que votre
association y est favorable, là, mais est-ce que vous pensez que les
constructeurs du Québec sont prêts à pouvoir répondre à cette demande-là aussi,
quand on parle de développement durable? Il y a... bon, les critères sont aussi
nombreux que le temps de discussion qu'on pourrait prendre, là, mais...
M. Hamel (Pierre) :Écoutez, sans aucun doute. Sans aucun doute, les
entrepreneurs vont faire ce qu'on leur demande. Écoutez, c'est sûr qu'au
niveau...
M. Hamel
(Pierre) :...maintenant il y a des
immeubles zéro émission qui peuvent même vendre l'électricité aux voisins, là.
On est rendu là. Alors, il n'y a pas de problème, c'est rendu dans les moeurs.
Maintenant, c'est sûr que les certifications qui sont requises, on est capable
de les atteindre. Ça dépend évidemment des plans et devis beaucoup. Alors, on
n'a pas de problème à atteindre comme tel. En termes de récupération de
matériaux, c'est... on est toujours prêt. D'ailleurs, nous avons fait des
rénovations. On a construit un bâtiment LEED. On fait des rénovations. On voit
sur des programmes pour séparer le gypse des autres déchets, etc. Mais quand il
n'y a pas de programme, on ne peut pas rien y faire. Puis, au Québec, on n'a
pas vraiment les infrastructures pour arriver là, mais les entrepreneurs vont
le faire. Il n'y a pas de problème comme tel.
Il y a un élément qui est important, par
exemple, c'est qu'en matière de développement durable, on parle surtout
d'écologie, mais l'éthique et l'intégrité en font partie. Et nous, on considère
que les mesures de l'AMP, c'est beaucoup de conformité. On parle d'intégrité,
là, mais c'est beaucoup de conformité. Est-ce que vous avez payé vos factures?
Est-ce que vous avez payé vos... est ce que vous payez vos choses? Est-ce que
vous êtes en loi? Est-ce que vous êtes en règle? Mais c'est juste un volet, ça,
de l'intégrité comme telle. Et et il n'y a pas de mesure qui est proposée dans
l'espace innovation ou au niveau du développement durable de souligner l'effort
des entreprises qui implantent des programmes d'intégrité, que ce soient les
programmes d'intégrité qui sont prévus sur le plan privé ou que ça soit 37001,
ISO 37001. Ces programmes d'intégrité ne sont pas reconnus, et ça prend
des efforts importants pour ces entreprises-là pour participer et, selon nous,
ça donne des entreprises significativement plus, je dirais, intègres que si on
ne s'en fiche. Et je ne dis pas que les autres ne sont pas intègres, mais ce
que je dis, c'est qu'il y a un effort particulier de ces entreprises-là qui
devrait être qui devraient être noté ou, à tout le moins, à encouragé.
Mme LeBel : Écoutez,
c'était très clair comme toujours. Merci beaucoup. Merci à vous deux.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Mont-Royal—Outremont,
et nous aurons tout à l'heure à statuer sur la répartition éventuellement du
temps qui appartenait à la députée de Mercier.
M. Arcand : Très bien.
Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord premièrement vous saluer,
M. Arbour, Me Hamel. Ma première question : Est ce qu'il y a beaucoup
dans... Quelle est la proportion de contrats que les entreprises en
construction ont en Ontario, par exemple? Est-ce qu'il y a vraiment des
échanges importants à ce niveau-là?
M. Hamel
(Pierre) :Absolument. Écoutez, les toutes
les entreprises de l'Outaouais travaillent à Ottawa. Toutes les entreprises de
l'Abitibi travaillent dans le nord de l'Ontario comme tel. Il y a beaucoup
d'industriel qui se fait dans le nord de l'Ontario et il y a beaucoup
d'institutionnel important, puis je parle de la capitale nationale et Travaux
publics Canada qui se font à l'Ontario. Alors, les entreprises n'ont pas le
choix de travailler dans... et il y a des entreprises qui ne travaillent que
pour le fédéral des deux côtés de la frontière comme telle, et je parle des
entreprises, là, qui ont 500 000 $ ou 600 000 $ de chiffre
d'affaires. C'est des petites entreprises qui travaillent sur les deux côtés.
Par contre, et e n'ai pas les chiffres,
par exemple, sur le nombre d'entreprises québécoises qui font des travaux,
mettons, publics en Ontario. Mais les chiffres qu'on a ici par rapport aux
contrats que les Ontariens viennent faire au Québec, là, c'est des statistiques
des contrats des organismes publics du Secrétariat du Conseil du
Trésor 2019-2020. Alors, ils sont disponibles. Mais on voit qu'au Québec,
il y a 5 000 contrats qui sont accordés pour une valeur de
5 milliards à des Québécois, mais il y a 18 contrats qui sont
accordés à des Ontariens pour 39 millions. Alors, 18, c'est juste... c'est
juste assez pour dire : Écoutez, si vous nous empêchez de faire ces
travaux-là, bien là, on a une barrière, puis là, ça va créer des enjeux.
• (14 h 30) •
La même chose pour ailleurs au Canada,
c'est des petits contrats. On a trois contrats pour 460 000 $ et on
n'appelle pas sa mère pour ça. Mais, par contre, si on leur coupe, si ont les
empêche de venir, on donne... on donne, je veux dire, on donne du gaz, on donne
de l'air à ceux qui veulent aller à l'encontre de nous. Au Nouveau-Brunswick,
on a un contrat de 26 000 $ parce qu'on a une entente
interprovinciale comme telle. Alors donc, selon nous, c'est important de
regarder, il y a des... puis, des fois, c'est l'Alberta. Vous savez qu'on a des
enjeux avec l'Alberta. On a des enjeux politiques avec l'Alberta. Nous, on ne
veut pas faire les frais de ces enjeux-là, en nous disant : Bien, parce
que l'une des... Vous, vous avez des...
14 h 30 (version non révisée)
M. Hamel (Pierre) :...des conditions difficiles ou des règles
anticoncurrentielles, bien, nous, on va empêcher à nos gens de travailler en
Alberta. Il y en a une panoplie, qui travaille en Alberta, à Terre-Neuve, en
Colombie-Britannique, partout au Québec, des petites et moyennes entreprises.
Pour que nos entreprises de moyenne taille deviennent grosses, elles doivent
travailler en Ontario. Elles doivent travailler ailleurs au Québec. Et je parle
des entrepreneurs généraux et spécialisés, et c'est une bonne proportion des
entreprises.
Alors, pour nous, c'est un enjeu
véritable. Quand ils ont fermé des frontières de 1999 à 2006, puis ils
obligeaient, alors c'était juste les contrats privés qui étaient autorisés. Et
ces contrats privés là, ils avaient inventé des processus de... juste nous
mettre des poids dans les roues, essentiellement. Alors, nous, ce qu'on dit :
Vu qu'on n'est pas visés par ça, pouvez-vous nous exclure de ça pour éviter ces
éléments-là, comme tels? On va baisser la pression puis on va enlever des...
comment je dirais, des poignées politiques à des gens qui auraient, pour
quelque raison, représailles. Et, dans les temps qui courent, il y a toutes
sortes de situations qui se passent. Les temps sont déjà difficiles. On ne voudrait
pas ajouter une couche à ça.
M. Arcand : Donc, si j'ai
bien compris, il faudrait, dans la préparation de ce projet de loi là, que le
gouvernement regarde autant les accords canadiens que les accords
internationaux, là, pour être bien sûr que ce qu'on s'apprête à faire est
conforme et ne nuise pas aux entreprises québécoises à l'extérieur.
M. Hamel (Pierre) :Écoutez, absolument, absolument. C'est très important, et
surtout les accords canadiens. Et je lisais, un jugement a été rendu dans le
dossier de la Saskatchewan et de l'Alberta pour des travaux de route de 2 millions.
Bien là, il y a eu le bureau d'arbitrage de l'accord. Il y a eu un arbitre qui
a rendu décision. La décision a dit : Effectivement, la façon d'accorder
le contrat par la Saskatchewan était à l'encontre de la section 5 de l'accord
de libre-échange canadien.
Alors, donc, c'est déjà... déjà, il y a
des pressions qui se font pour libérer tous les marchés au Canada, pour que
tout le monde puisse travailler dans toutes les provinces. Et nous, on vit déjà
avec cette photo qu'on est... on a nos barrières avec la CCQ puis la RBQ qui n'existent
nulle part ailleurs. Alors,c'est ça qu'on veut éviter.
M. Arcand : Alors, si je vous
suis très bien, sur le principe de l'achat québécois, vous êtes... évidemment,
on ne peut pas être contre le principe, mais dans la pratique, vous dites :
Faites très attention. C'est un peu ça que vous dites?
M. Hamel (Pierre) :On ne veut pas que ça se retourne contre les entrepreneurs
généraux et spécialisés qui ont besoin de l'extérieur pour se développer.
M. Arcand : Parfait. J'aimerais
vous poser une question aussi, parce que je pense que c'était clair, si ça peut
vous rassurer, on a eu des discussions avec d'autres groupes et je pense qu'ils
étaient relativement clairs que, lorsqu'on parle, par exemple, de donner des
contrats à des entreprises... puis là je vais vous donner un exemple bien
simple, là, c'est peut-être plus problématique, mettons que quelqu'un achète
des pommes, si les pommes viennent de l'État de Washington, c'est peut-être
plus problématique que si elles viennent de l'Ontario. En voulant dire, je
pense qu'il y a comme une entente comme quoi, quand ça vient du Canada, c'est
quand même... on fait partie encore du Canada. Alors, c'est quand même quelque
chose qui est quand même reconnu et qui ne devrait pas comme tel poser de
problème. Et, dans l'adoption de la loi, on va regarder ça pour être bien sûrs
que c'est conforme.
Pour ce qui est de la hausse des
matériaux, de la main-d'oeuvre dans le cadre de ce projet de loi là,
évidemment, tout le monde est venu nous dire : À un moment donné, bien, il
faudrait avoir des considérations environnementales, il faudrait avoir des
considérations d'innovation, de qualité aussi, qui sont importantes. Et le prix
le plus bas n'est pas nécessairement le seul critère qui devrait guider les
gens. Parce que dans le fond, on parle de quatre groupes principaux qui sont le
ministère des Transports, qui sont le Centre d'acquisitions gouvernementales,
le ministère de la Santé et également la SQI, là, qui donnent des ententes.
Alors, les quatre principaux, je dirais...
M. Arcand : ...et donc, ma
question, par rapport à ça, c'est: Dans le contexte actuel, est-ce qu'on peut
sécuriser? Parce que, dans le contexte actuel, vous le savez, c'est un peu la
folie dans le milieu de la construction. Peut-on sécuriser les donneurs
d'ouvrage qu'ils vont obtenir un prix juste à l'intérieur de ça? Parce que ce
que vous nous avez dit, tout à l'heure, c'est que c'est beau, vos principes,
là, vos principes d'écologie, mais vous n'êtes pas réalistes tant que ça, parce
que, dans toutes les autres provinces, c'est le prix le plus bas qui semble
être déterminant. Alors, moi, la question, c'est: Est-ce qu'il y a une façon
d'obtenir un prix juste, en construction? Il y a-tu une façon de sécuriser? Si
moi, je suis acheteur, j'ai toujours l'impression qu'on me surcharge, ce qui
explique d'ailleurs souvent les délais de paiement, en passant.
M. Hamel (Pierre) :Écoutez, c'est très intéressant comme question. Je vous
dirais que ce qui fait en sorte que ça fait fuir les soumissionnaires ou que ça
gonfle le prix des soumissions, c'est le partage du risque. Et là, si un
entrepreneur est obligé d'assumer 100% du partage, du risque, du coût des
matériaux, bien, il va se mettre des bretelles, une ceinture, un... vous
comprenez? Donc, le prix va être tellement déraisonnable qu'on ne pourrit pas
avoir des soumissions réalistes. Mais il ne le connaît pas, parce que son
fournisseur, lui, il lui garantit ses prix pour deux jours, deux semaines, mais
pas 90 jours, comme c'est demandé par les donneurs d'ouvrage.
Avec la... l'Industrie a développé un
projet à l'égard duquel, pour le prix des matériaux, il pouvait y avoir un
ajustement en cours de réalisation de projet. Le propriétaire assume une partie
des coûts, mais l'entrepreneur aussi, jusqu'à hauteur de 5%. Et s'il y a une
baisse de 5%, elle vient au donneur d'ouvrage, s'il y a une hausse, bien, la
partie de la hausse est payée à l'entrepreneur. Ça débute, depuis janvier,
février, on commence avec ça et on espère que ça va faire des petits. Et on
utilise les indices de Statistique Canada, qui travaille avec nous pour avoir
les meilleurs indices possibles pour... Et ça, on le fait pour une trentaine de
produits. Alors donc, on a vraiment travaillé pour essayer d'ajuster, je
dirais, ce risque-là qui est important.
Pour le reste, bien, les donneurs
d'ouvrage, c'est important qu'ils utilisent un langage contractuel qui est
aussi équilibré. Si on dit: Vous devez livrer à telle date, puis c'est plus ou
moins réaliste, et vous allez avoir 5% par jour de pénalités, bien,
assurez-vous que les pénalités vont être de la soumission, parce que c'est
irréaliste, parce qu'on n'est pas en mesure de garantir la chaîne
d'approvisionnement, etc. Alors, les donneurs d'ouvrage qui enlèvent ça, qui
comprennent ça, qui se retrouvent... Et il faut... Ça prend des gens impliqués
dans ce projet-là.
Le Président (M. Simard) : À
ce stade-ci, je dois vous reposer la question que je vous avais adressée en
début de séance: Comment souhaitez-vous répartir le temps de la députée de
Mercier? Équitablement entre le Parti libéral et le Parti québécois?
M. Arcand : Je vais donner la
chance au député de Jonquière, pour qui j'ai une profonde admiration...
Le Président (M. Simard) : Mais
néanmoins, cela prend consentement. Ça repose sur vous, Mme la ministre,
entièrement, comme tant d'autres choses.
Mme LeBel : Alors, je suis
d'accord. Qu'on le retienne. Qu'on le retienne.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous tous pour cette précieuse collaboration.
M. Gaudreault : ...de
pression.
• (14 h 40) •
Le Président (M. Simard) : C'est
presque un cadeau de départ...
M. Gaudreault : Oui, c'est
ça, un cadeau de Grec. Merci. Merci au collègue de consentir. Alors, bonjour.
Merci beaucoup pour votre présence. Et on a des grandes entreprises qui sont
sûrement membres de votre association, dans les différentes régions du Québec,
notamment au Saguenay-Lac-Saint-Jean. J'en ai plein en tête.
Petite question, vraiment, là, pour avoir
votre point de vue de l'industrie. Moi, il y a des firmes de génie ou des
entrepreneurs, dans ma région, qui m'ont dit: Sylvain, quand ça vient le temps
d'appliquer les principes de développement durable ou les certifications LEED,
monsieur, vous avez fait mention tout à l'heure de la certification LEED, bien
là, il arrive des dépassements de coûts ou on a des dépassements de délais.
Puis la pression est justement... Première chose qu'on coupe, c'est là, pour
aller plus...
M. Gaudreault : ...vite,
est-ce que c'est quelque chose que vous remarquez? En tout cas, moi, il y a un
certain nombre de chantiers, là, même dans ma circonscription, où j'ai eu ces
témoignages, je ne veux pas donner d'exemples précis, là, pour éviter de mettre
du monde dans le trouble, mais... où on m'a dit : Sylvain, surveille ça,
ça n'a pas de bon sens, quand ça vient le temps d'appliquer le LEED ou le
développement durable, c'est là qu'ils vont couper en premier pour être capable
de rencontrer des délais ou... Moi, comme député, je suis le premier à
dire : Respecons les délais, respectons les délais puis les budgets, mais
c'est toujours le développement durable ou les certifications environnementales
qui écopent.
M. Hamel (Pierre) :Écoutez, je ne sais pas. Peut-être, Jean-François peut
répondre, mais...
M. Arbour (Jean-François) : Oui...
je pourrais peut-être... Pour appuyer votre dire, vous avez raison. Souvent,
dans les projets, évidemment, les choses qui vont... les éléments les plus
faciles, si... je vais utiliser l'expression, et j'ai été consultant dans mon
ancienne vie, bien, les choses les plus faciles à couper, évidemment, c'est ça,
c'est les critères LEED qui, sûrement, sont vus superflus ou sont vus... où
quoi que ce soit. Mais je reviens, encore une fois, ça ne vient pas de
l'entrepreneur évidemment, c'est le donneur d'ouvrage.
M. Gaudreault : Bien, ce
n'est pas ça que je dis. Oui.
M. Arbour (Jean-François) : C'est
ça, c'est le donneur d'ouvrage qui décide de prendre cette décision-là avec ses
professionnels et qui décide : Écoute, on va couper, dans ce cas là, dans
ces critères-là, on va permettre... on va oublier des matériaux qu'il y avait
peut-être une moins grande influence au niveau... une meilleure influence,
pardon, au niveau énergétique, mais on va les remplacer par des matériaux plus
usuels qui vont coûter moins cher et qui vont permettre de respecter le budget.
M. Gaudreault : Mais vous
comprenez qu'à mon point de vue si on veut, dans une loi, se donner des
critères puis des conditions de respect des valeurs ou des engagements de
développement durable, c'est inacceptable qu'on ne soit pas capable... Tu sais,
je veux dire, on se pète les bretelles, c'est monsieur, tout à l'heure, qui
parlait de bretelles, de ceintures, puis de «full face», on se pète les
bretelles, les ceintures puis les «full face» en disant : On est
développement durable, on va se mettre des conditions, c'est la première chose
qu'on coupe. Alors, il faut s'assurer d'un suivi assez serré là-dessus. Puis je
sais que ce n'est pas les entrepreneurs, là, ce n'est pas vous que j'attaque,
c'est l'ensemble du... c'est plus en amont, là, comme vous dites, là, le
donneur d'ouvrage ou le chef de chantier qui va couper là-dessus. Alors, il
faut qu'on se donne des... Ça, vous êtes à l'aise avec ça, qu'il y ait des
normes, je dirais, ou des suivis, là, pour s'assurer quand même que c'est appliqué?
M. Hamel (Pierre) :Bien, de façon plus générale, oui, mais essentiellement
c'est les questions budgétaires. C'est des questions en amont : Est-ce que
ça a été bien planifié, est-ce que le budget est réaliste, est-ce que les
délais sont réalistes? Parce que là, si on a un problème de délais puis on est
obligés de couper à cause des délais, c'est sûr qu'on va... la salle de repos
des employés ou tel autre élément qui fait partie... qui donne des points de
certification vont prendre le bord, assurément, là, comme tel. Mais donc,
encore, on revient toujours à une planification fonctionnelle et ne pas avoir
besoin de revenir pour avoir des budgets additionnels parce que là, on a des
problèmes d'adoption des budgets, etc. Mais je suis d'accord avec vous.
M. Gaudreault : Je d'accord
avec vous. O.K., on est d'accord, tout le monde est d'accord. Maintenant,
deuxième sujet, je vous ai dit, d'entrée de jeu, et vous le savez, je suis
député d'une région où il y a des entreprises importantes, où on a des défis de
main-d'oeuvre, où on a parfois des taux de chômage un petit peu plus élevés, où
on veut diversifier notre économie. On est très dépendant de la grande
entreprise, donc, quand on a des chantiers publics, nos entrepreneurs sont
contents. Je vous entends sur ce que vous dites sur la régionalisation, mais il
y a des entrepreneurs en région qui peuvent être frustrés de voir arriver aussi
des grands entrepreneurs de Montréal ou de Québec pour des chantiers ou dans
des régions. Alors, jusqu'où on va, là, en matière de régionalisation? Jusqu'où
on est capable de tirer une ligne, là? Moi, je vous le dis très franchement,
moi, comme député, il y a du monde qui cogne à ma porte, des entrepreneurs qui
disent : Sylvain, regarde, là, tel chantier dans ton comté, là, c'est un
gros entrepreneur de Montréal. Tu sais, je veux dire, c'est un peu frustrant,
là.
M. Hamel (Pierre) :Bien, je peux comprendre, mais l'entrepreneur du Saguenay,
l'entrepreneur général va engager des sous-traitants de Montréal, des sous-traitants
de Québec, des sous-traitants de Rimouski pour faire ses travaux, et ça va être
un représentant de Rimouski qui va faire de la structure métallique. C'est très
trompeur. En 2006, quand il y a eu des pressions par des ministres pour que la
Gaspésie, ça soit juste donné à la Gaspésie, bien, il y avait juste une
entreprise qui pouvait faire le contrat puis c'est des entreprises du Saguenay
qui ont fait les travaux. Alors, vous comprenez? Alors, c'est trompeur, ça. Il
ne faut pas s'arrêter à ça, comme tel, il faut être plus, je dirais, plus
global.
M. Gaudreault : Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. Alors, M. Arbour, M. Hamel, à nouveau, merci pour votre présence. À
chaque fois, c'est fort instructif que de vous avoir parmi nous.
Sur ce, nous allons suspendre nos travaux
quelques moments, le temps de faire place à nos derniers invités, mais pas les
moindres. Au revoir.
(Suspension de la séance à 14 h 46)
(Reprise à 14 h 48)
Le Président (M. Simard) : ...nous
en sommes rendus à notre dernière présentation dans le cadre de ses
consultations. Et nous recevons à l'instant des représentants de l'Association
des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. M. Tremblay et
M. Tremblay soyez tous les deux les bienvenus parmi nous. Auriez-vous
d'abord l'amabilité de vous présenter?
M. Tremblay (Pierre) : Oui,
bonjour. Mon nom est Pierre Tremblay. Moi, je suis le directeur du secteur
science, technologie, innovation à l'ACRGTQ depuis bon nombre d'années. Merci
de l'invitation que vous nous faites.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous.
M. Tremblay (Mathieu) : Oui,
bonjour à tous. Mathieu Tremblay, je suis avocat pour l'ACRGTQ, l'Association
des constructeurs de routes et grands travaux du Québec.
Le Président (M. Simard) : Alors,
messieurs, vous disposez d'une période de dix minutes.
M. Tremblay (Pierre) : Merci.
M. le Président, Mme la ministre et présidente du Conseil du Trésor, mesdames
et messieurs les députés, nous vous remercions de l'occasion qui nous est
offerte aujourd'hui pour vous présenter le point de vue de l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec, l'ACRGTQ, à l'égard du projet
de loi n° 12.
Je me permets de vous présenter brièvement
notre association. L'ACRGTQ a été incorporée en 1944 et représente la majorité
des principaux entrepreneurs et fournisseurs œuvrant dans la construction de
routes, d'ouvrages de génie civil et de grands travaux. À ce titre, elle
représente plus de 2 500 employeurs actifs au sein de l'industrie de
la construction de routes, d'ouvrages de génie civil et de grands travaux,
lesquels emploient plus de 40 000 salariés ayant travaillé plus de
31 millions d'heures estimées par la CCQ en 2020. De plus, l'ACRGTQ
représente aussi les principaux exploitants de carrières et de sablières du
Québec via son Regroupement professionnel des producteurs de granulats, le
RPPG. Il s'agit de près de 60 propriétaires possédant plus de 270 carrières,
sablières et gravières au Québec. Annuellement, ils produisent plus de
85 millions de tonnes d'agrégats, et ce, sur l'ensemble du territoire du
Québec. Plus de 75 % de ses membres font actuellement de la récupération
et du recyclage de béton et d'asphalte.
• (14 h 50) •
À titre introductif, l'ACRGTQ salue la
volonté du gouvernement de favoriser l'acquisition auprès d'entreprises
québécoises, et une meilleure prise en compte du développement durable dans le
cadre des appels d'offres...
M. Tremblay (Pierre) : ...elle
est aussi favorable à la création d'un espace permettant l'innovation dans les
marchés publics, qui était d'ailleurs réclamée par l'industrie depuis plusieurs
années. Elle désire toutefois vous communiquer ses commentaires et propositions
concernant la priorisation des entreprises québécoises et d'innovation :
la prise en compte du développement durable et du droit de l'environnement, et
l'adoption des dispositions concernant la nomination d'un intervenant expert,
et l'imposition d'un calendrier de paiement.
D'entrée de jeu, nous sommes d'avis que
les modifications législatives visant à favoriser l'innovation est un important
pas dans la bonne direction. Ces mesures peuvent être entre autres imposées aux
donneurs d'ouvrage publics, d'adopter, par des contrats plus collaboratifs, ou
permettre aux entrepreneurs du secteur génie civil et voirie de proposer des
solutions aux donneurs d'ouvrage qui sont non seulement innovantes, mais qui
peuvent aussi s'avérer plus efficientes et plus respectueuses de
l'environnement. Cela dit, les moyens préconisés, à savoir l'adoption d'arrêtés
ou de directives en ce sens, devraient au préalable avoir fait l'objet de
consultations auprès de toutes les parties prenantes. À ce titre, dans le
domaine du génie civil et de la voirie, les connaissances que détiennent
l'ACRGTQ et ses membres bénéficieraient sans contredit à l'ensemble de
l'industrie.
Par ailleurs, ces façons de faire pour
l'adoption de modes alternatifs d'octroi de contrats à la pièce, bien
qu'offrant une souplesse dans l'octroi des contrats permettant de tester
plusieurs méthodes d'adjudication, devraient être accompagnées d'objectifs
permettant d'adopter des règles d'encadrement pérennes. L'ACRGTQ est d'avis
qu'il est primordial qu'au terme de ces essais, un cadre normatif à l'égard de
ces nouveaux modes d'octroi de contrats soit adopté afin de permettre à
l'industrie de connaître précisément les règles qui les gouvernent. Ce faisant,
nous proposons qu'un canal de discussion soit établi, dès à présent, permettant
aux acteurs concernés de soumettre leurs idées. Nous soumettons que le projet
de loi devrait aussi prévoir qu'après la réalisation d'un ou de plusieurs
projets octroyés sous l'une ou l'autre de ces mesures ou à l'issue d'un terme
de deux ans, un rapport soit publié, évaluant précisément la mise en œuvre d'un
cadre réglementaire à cet effet.
Deuxièmement, l'ACRGTQ appuie les mesures
proposées relativement à la prise en compte du développement durable par les
organismes publics en amont des projets. Néanmoins, nous craignons qu'elle ne
soit pas suffisante pour résoudre des problématiques que vit notre industrie,
au regard de la production et de la valorisation des granulats. Aux dires des
propriétaires de carrières et de sablières du Québec, l'écoulement des matières
résiduelles entreposées sur leur site est ardu, considérant que les donneurs
d'ouvrage n'acceptent qu'une petite quantité de matière recyclée sur les
chantiers de génie civil. Considérant que l'air... pardon, considérant que
l'air est au changement et que la volonté du gouvernement doit être porteuse
d'actions concrètes en cette matière, nous proposons que soit ajoutée au
pouvoir du Conseil du trésor cette faculté d'obliger les donneurs d'ouvrage
publics dans le cadre de contrats à effectuer la valorisation des matières
résiduelles.
En troisième lieu, l'ACRGTQ ne peut taire
sa déception de ne pas voir dans cette pièce législative d'importance une
disposition permettant au gouvernement d'adopter un cadre réglementaire en
matière de délais de paiement et de règlement des différends, considérant les
recommandations favorables émises par toutes les parties impliquées au projet
pilote contre les retards de paiement du Conseil du Trésor. Ainsi, notre
recommandation à cet effet, à l'instar de la Coalition contre les retards de
paiement de l'industrie de la construction, est d'ajouter au projet de loi un
amendement intégrant un article donnant le pouvoir à la présidente du Conseil
du Trésor d'imposer, par règlement, le calendrier de paiement et un mécanisme
de règlement rapide des différends aux organismes soumis à la SCOP afin de
faciliter les paiements aux entreprises contractant avec les donneurs d'ouvrage
publics et leurs sous-traitants et fournisseurs.
En conclusion, l'ACRGTQ appuie les nouvelles
mesures permettant l'innovation et l'achat local dans le projet de loi 12.
Considérant que ces principes ne trouvent pas d'applications concrètes sans
l'adoption de règlements, d'arrêtés ou de directives par le gouvernement, nous
espérons que ceux-ci seront adoptés en prenant en compte l'opinion de
l'industrie afin que ce projet de loi ait un impact positif dans le domaine de
l'acquisition de biens, de services et d'ouvrages de construction par les
organismes publics. Nous réitérons d'ailleurs notre intérêt à être consultés
dans le développement de ces nouvelles mesures. Les membres de l'ACRGTQ
possèdent une expertise certaine et ont la volonté de contribuer à l'innovation
et à l'avancement des règles contractuelles au Québec.
Enfin, tout comme le gouvernement,
l'ACRGTQ reconnaît que la préoccupation constante doit être de demeurer... doit
demeurer le maintien de l'intégrité de l'industrie ainsi que la protection des
entrepreneurs honnêtes et respectueux des lois et des règlements en vigueur que
représente la majorité de l'industrie de la construction. Nous vous remercions
de votre attention.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, M. Tremblay. Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, M. Tremblay...
Mme LeBel : ... de votre
présentation. Je n'aborderai pas avec vous la question des retards de paiement,
on en a discuté beaucoup, beaucoup. La coalition est venue. Beaucoup d'autres
ont ajouté leurs voix à la leur, alors j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur
le sujet. On est en train de regarder la meilleure façon de le faire le plus
rapidement possible, et rien n'est exclu, disons-le comme ça.
Donc, je peux peut-être aller dans un
sujet qui est peut-être un peu plus collé, là, sur le projet de loi comme tel.
Puis je vais peut-être commencer par vos dernières paroles, sur le fait que,
bon, vous favorisez naturellement le maintien de l'intégrité, là, je n'en ai
aucun doute. L'ACQ, qui vient de nous faire une présentation, s'est prononcée
quand même, elle, sur la portion où on se propose de modifier, là, certains
aspects de l'AMP, dont la question de l'autorisation de contracter. La
question... la déclaration d'intégrité qui va être demandée aux différentes
personnes qui veulent soumissionner sur un contrat public, nous mettait en
garde contre certains problèmes administratifs ou fardeaux administratifs.
Est-ce que vous, vous avez une inquiétude par rapport à cette modification là
du régime, quand on parle de l'AMP ou...
M. Tremblay (Pierre) : Je
vais laisser la parole à Me Tremblay qui s'est occupé de ce dossier,
particulièrement, donc ça va être plus simple comme ça.
Mme LeBel : Aucun problème.
M. Tremblay (Mathieu) : Oui,
donc. Bien, en effet, nous nous sommes posé la question également de notre
côté. On considère que c'est quand même intéressant, par contre, d'avoir
prolonger la durée de l'autorisation de contracter de 3 à 5 ans, ce qui
est quand même un certain allègement, considérant la quantité de documents qui
doit être faite et les conséquences également à dépasser le délai pour demander
le renouvellement. Donc, pour cet élément-là, on considérait ça intéressant.
Au niveau du renouvellement annuel, eh
bien, c'est sûr qu'il y a certaines inquiétudes qui pourraient survenir.
Cependant, je ne crois pas que ce soit un très grand enjeu de notre côté. Notre
rapport, notre mémoire en fait également effet de certains autres éléments. On
a analysé entre autres, les nouveaux pouvoirs de l'inspecteur. Pour ça, on a
peut-être une petite mise en garde, là, au niveau des pouvoirs de l'AMP
d'enquêter durant l'exécution des contrats. On se demande jusqu'où ça peut
aller, considérant que les contrats publics en génie civil et voirie, qui
constituent notre secteur, sont quand même hautement déjà surveillés. Il y a
différents surveillants de chantier. Il y a des obligations des clients. Il y a
certaines redditions de compte des entrepreneurs sont... déjà, quand même assez
bien surveillés. Je pourrais dire, donc, que la seule inquiétude qu'on avait un
peu de notre côté, c'est de se demander : Est-ce que ces efforts-là de...
si l'intervenant expert vient surveiller les chantiers, est-ce que c'est des
efforts qui sont mis au meilleur endroit? Parce qu'on pense à l'autorisation de
contacter que nos membres doivent avoir, entre autres, d'avoir l'attestation
d'intégrité aussi qui doit être remplie au dépôt de la soumission. On a le
renouvellement annuel. Et puis, par la suite, on va quand même surveiller ces
entrepreneurs-là.
Donc, ce n'est pas nécessairement une...
ce n'est pas un enjeu qui est principal, je pense que ça mérite seulement
peut-être, au niveau de l'allègement réglementaire, une mise en garde. Par
contre, pour les entrepreneurs qui ont l'autorisation de contracter, c'est
certain qu'on considère que ça peut faire quand même beaucoup, là, c'est une
accumulation des garanties qui... dont je laisserai à l'appréciation des
parlementaires de considérer si c'est nécessaire.
Mme LeBel : O.K. Bien, vous
parliez des nouveaux pouvoirs de l'AMP, entre autres. Il y a tout le régime
d'intégrité, c'est-à-dire l'autorisation de contracter qui est, bon, modifier
de 3 à 5 ans, qu'on se propose de modifier dans la façon de faire. Il y a
toute la déclaration de... pas la déclaration de conformité, mais la déclaration
d'intégrité qu'on se propose d'ajouter aussi pour être capable d'aller sous les
seuils, avoir une autre garantie. Garantie, c'est un mot, mais d'avoir des
balises nous permettant d'assurer une meilleure intégrité de nos entreprises
qui contractent.
• (15 heures) •
Mais vous me parliez des nouveaux pouvoirs
de l'AMP d'inspection, entre autres, des chantiers. Ces pouvoirs-là, on se
propose de les prolonger dans le p.l. 12, ou plutôt de les étendre à tous les
contrats publics. Mais ça faisait partie des pouvoirs déjà qui avaient été
accordés à l'AMP dans le cadre du projet de loi 66, le projet de la Loi
sur l'accélération de certains travaux... certains projets d'infrastructures,
la LACPI. Et à l'annexe... et ça devait... Donc, à tous les projets du PQI,
mais particulièrement, là, ceux qui sont à l'annexe. Beaucoup de projets du
PQI, je peux vous le dire, on est en train de le préparer. Le PQI est une
grande partie de travaux et de grands travaux routiers. Le directeur de l'AMP
nous disait qu'ils avaient déjà, dans le cadre des nouveaux pouvoirs, effectué
des visites de chantiers, des inspections. Est-ce que vous avez eu des...
15 h (version non révisée)
Mme LeBel : ...des feed-back
de ça, des retours disant : Ça ne fonctionne pas, ça fonctionne, mais il y
a quand même quelque chose, là, parce que l'AMP n'a pas le même regard que les
autres organismes d'inspection, il faut le dire. Et l'exécution d'un contrat en
matière d'intégrité... Tu sais, on a-tu mis vraiment ce qu'on doit mettre sous
l'asphalte avant qu'on l'étende, là? Tu sais, on se comprend. Donc, d'être
capable de voir, en cours de chantier, ce qui se passe. Mais est-ce que ça a
posé des problèmes à vos entrepreneurs, ces quelques inspections là? Est-ce que
vous avez eu des retours par rapport à ça?
M. Tremblay (Mathieu) : Pierre,
est-ce que tu voulais...
M. Tremblay (Pierre) : Oui.
On a eu quelques retours, effectivement, là-dessus, où, ce qu'on en comprenait,
puis évidemment, là, c'est reporté, évidemment, on... Je dirais, ce qu'on en
comprend, c'est que les inspecteurs comprennent leur rôle de façon différente,
parce que, là, quand on arrive au point, là, où on se dit : Certains membres...
Puis là je comprends ce que vous voulez mentionner par rapport au fait que :
Est-ce qu'on a bien fait le contrat? Est-ce qu'on l'a réalisé tel qu'il devait
être fait, évidemment, selon les exigences qu'on retrouve dans le contrat? Ce
qu'on se disait essentiellement, c'est : Le fait qu'il y ait déjà des
gens... Il y a déjà de l'inspection, il y a déjà des contrôleurs qualité, des
gens qui travaillent pour le compte des donneurs d'ouvrage dans le contexte du
génie civil et voirie en nombre, je dirai, assez important. Ce qu'on se faisait
rapporter, c'est qu'il y avait un genre de dédoublement du questionnement
concernant justement : Est-ce qu'on a mis le demi-pouce qu'on devait
mettre d'épaisseur d'asphalte nécessaire? Ce qu'on se disait, c'est :
Est-ce que c'est vraiment nécessaire que ce soit refait par, je dirais, les
représentants de l'AMP? C'était cet élément-là, là, qui nous était resoulevé
par nos membres.
Mme LeBel : ...comme telle, c'est
de dire : C'est peut-être... Bien, d'ailleurs, l'AMP en a parlé de s'allier
des partenaires puis peut-être de travailler en collaboration avec d'autres
organismes qui font déjà ce type d'inspection là et quitte à se servir de ces
renseignements-là ou de ces inspecteurs-là pour avoir l'information ou le
regard requis.
M. Tremblay (Pierre) : Exact.
Mme LeBel : Donc, ce n'est
pas sur le principe de l'inspection, c'est sur la façon de faire.
M. Tremblay (Pierre) : Exact.
Mme LeBel : J'aime bien quand
on est capables de bien recadrer. C'est mieux pour tout le monde. Donc, vous
avez parlé de l'espace d'innovation comme étant, bon, une idée dont vous aviez
déjà beaucoup de fois réclamé, là, la venue. Très contente de l'entendre, parce
que je pense qu'effectivement, ça va nous permettre de faire évoluer nos
marchés publics dans toutes sortes de bonnes directions. Quand on parle
particulièrement de grands travaux routiers, innovation, je pense qu'on est
dans une bonne... dans un terreau qui peut être fertile, si on parle... Et je
comprends très bien ce que vous nous dites quand vous dites : Bien,
assurez-vous de ce que vous expérimentez dans l'espace d'innovation, vous avez
des mécanismes pour l'intégrer dans l'entièreté des marchés publics et, si vous
le faites, que, par la suite, il y ait un cadre normatif clair, que ce soit par
voie réglementaire ou autre, pour qu'on puisse savoir comment se comporter,
disons-le comme ça, eu égard aux règles. C'est bien compris. C'est ce qu'on a l'intention
de faire, quand on parle des rapports, des choses comme ça, mais on pourra voir
si on peut aller un pas plus loin. Mais l'intention de faire ce que vous dites
est déjà présente dans la stratégie, dans le projet de loi. Maintenant, c'est
de voir si elle est bien traduite par les mesures ou par les termes qui sont
employés. Ça fait que j'en prends bonne note.
Mais je vais y aller peut-être un peu plus
pratico-pratique. Demain matin, l'espace d'innovation est créé, le projet de
loi est adopté. Qu'est-ce que vous pensez qu'on devrait expérimenter en premier
ou quelles sont, justement, les premières expérimentations qu'on devrait faire?
Comment on devrait procéder dans votre secteur pour faire les premiers pas?
Parce qu'il faut le faire, on nous l'a dit beaucoup, progressivement, pour être
capable... il faut que tout le monde s'adapte, autant les donneurs d'ouvrage
que l'industrie. Mais qu'est-ce qu'on devrait faire en premier dans votre
secteur?
M. Tremblay (Pierre) : Sans
rentrer évidemment dans le détail, parce qu'il existe effectivement une multitude
de nombre de contrats, mais je dirais très certainement les contrats à titre
collaboratif. Puis, quand je parle de contrats collaboratifs, c'est, je dirai,
de pouvoir impliquer... parce que je sais qu'il y a déjà des choses qui sont
faites là-dessus, je dirai, en amont de l'appel d'offres. Mais, quand je dis
«en amont de l'appel d'offres», ce n'est pas à l'étape de la conception.
Souvent, on arrive, la conception est assez bien réalisée, conçue, je vais le
dire comme ça. Ce que nous, on préconise, c'est que la collaboration de l'entrepreneur
à la finalisation de la conception puisse être possible. Et c'est à ce
moment-là que l'entrepreneur, lui, de par son expertise d'exécutant, d'installateur,
passez-moi l'expression, et de proposition de matériaux, c'est là que toute sa
puissance, je vais le dire de même, pourrait être mise à contribution, pour s'assurer
que la conception a été bien faite.
Puis, l'autre élément important... d'impliquer
l'entrepreneur dans, justement, l'étape de finalisation de la conception, c'est
qu'on va gagner énormément de temps au niveau de la mise en œuvre. Et on sait
très bien, les échéanciers étant tellement serrés aujourd'hui, que les manières
de faire sont importantes, de la manière dont l'entrepreneur peut imaginer une
mise en œuvre d'une poutre de pont, par exemple, au lieu de l'étendre sur deux
ou trois ou quatre semaines, on pourrait le faire dans une fin de semaine...
M. Tremblay (Pierre) : ...on
comprend que c'est l'expertise de l'entrepreneur... vient... une bonne...
exactement à ce niveau là, donc pour s'assurer que la conception est en lien en
lien direct avec la méthode de mise en oeuvre. Donc, c'est là, quand on
préconise ou qu'on propose d'avoir une collaboration de l'entrepreneur, c'est à
ce niveau-là et évidemment au niveau des propositions faites de différents
types de matériaux. Ce qu'on a à la préfabrication, par exemple, ne pourrait
pas être... figurer dans la mesure où elle n'a pas été bien réfléchie comme
telle. C'est à ce niveau-là que, nous, on présume que les modes de... Les modes
collaboratifs devraient à mon sens à moi être les premiers à être mises à
contribution dans l'espace Innovation.
Mme LeBel : Et c'est un
peu ce que vous mentionniez tantôt. Bien, je vais essayer de voir si j'ai
bien... j'interprète bien vos propos puis, si ce n'est pas le cas,
corrigez-moi. Mais ce que vous avez mentionné tantôt, c'est qu'il y a déjà des
choses qui se font, mais il y a peut être un.... je ne disais pas malaise, mais
il y a peut être une retenue des donneurs d'ouvrage, ou des concepteurs
publics, ou des gens qui ont à concevoir les travaux de s'en aller dans ces
modes alternatifs là vu que ce n'est pas la règle générale, alors que l'espace
Innovation va peut être leur dégager l'espace, c'est le cas de le dire,
l'espace nécessaire pour pouvoir le faire en disant : Bien, regardez,
c'est ça que je le fais, je suis dans l'innovation plutôt que d'avoir l'air de
déroger aux méthodes reconnues, entre guillemets. C'est un peu ça que vous
disiez dans...
M. Tremblay (Pierre) : C'est
exactement ça. Tu sais, on va jusqu'à la proposition dans un appel d'offres, de
dire au lieu de le faire de telle manière, je vais vous proposer de la faire
sur des semaines où, exemple, je vais complètement fermer le travail... je vais
fermer une section de route. Donc, le devis ne précise pas, dans un contexte
d'appels d'offres publics plus bas soumissionnaire conforme, le devis ne
propose pas de fermer une section de route, par exemple. Je dois soumissionner
avec ces conditions-là. Quand c'est fait, l'appel d'offres est lancé, puis que
le plus bas soumissionnaire est choisi, puis que je reviens à vouloir proposer
une fermeture de route, c'est comme si je venais de déroger au contrat. Donc,
ma proposition, même si elle est intéressante et intéressante, au point de vue
du donneur d'ouvrage, de gagner du temps puis peut être même de l'argent, je ne
peux pas le faire parce que je viens de déroger du contrat public qui m'avait
été octroyé. Donc, c'était à partir de là que dans le contexte actuel, ces
opinions là, dès qu'elles dérogent du contrat, sont plus ou moins recevables.
Donc, c'est pour ça qu'on dit :Si on est en amont de ça, puis le mode
collaboratif permet aux entrepreneurs de lancer ces propositions-là, ces suggestions-là
sans retenue, bien, c'est là qu'on va gagner ce temps-là, c'est là qu'on va
gagner ces possibilités-là qui vont en faire profiter autant les entreprises
que le propriétaire lui-même, que les ingénieurs-conseils. C'est ça qu'on
souhaite.
Mme LeBel : O.K. Mais,
écoutez, c'est très intéressant. Merci beaucoup de votre collaboration, de
votre participation cet après-midi.
M. Tremblay (Pierre) : Ça
fait plaisir.
Le Président (M. Simard) : M.
le député de Mont-Royal Outremont.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. Tremblay. Plaisir de vous avoir ici aujourd'hui. Ma
question porte évidemment sur ce dont... D'abord, premièrement, juste pour bien
comprendre, votre association, vous faites surtout affaire avec le MTQ surtout.
M. Tremblay (Pierre) : Le
MTQ, les municipalités, Hydro-Québec, STM, les grands donneurs d'ordre public,
c'est principalement nos clients effectivement.
M. Arcand : Ah! bon.
Tout à l'heure, j'avais l'Association de la construction du Québec qui disait
que, globalement, là, et je ne veux pas les interpréter de façon abusive, mais
essentiellement ce qu'ils disaient, c'est que, bon, je veux bien que vous
mettiez des clauses environnementales, on est d'accord avec ça, d'innovation,
etc., mais il faut rester réaliste parce que le plus bas prix sera toujours la
norme qui sera regardée d'abord et avant tout par le gouvernement. Est-ce que
vous êtes du même avis?
• (15 h 10) •
M. Tremblay (Pierre) : C'est
inévitable que, dans l'expérience qu'on a de tous les modes dans lesquels on a
été amené à contribuer ne sont pas les plus bas soumissionnaires conformes, le
prix a toujours fait un grand espace de sélection de projets, de l'ordre de
80 % et plus, je dirais, dans certain cas, en termes de qualification, là,
les projets plutôt qualificatifs. Ça, effectivement, ça restera toujours
l'élément qu'on amène par rapport à mettre un peu d'emphase sur
l'environnement, nouveaux types de matériaux, nouveaux produits. Ça, je pense
que ça rentre dans le contexte du... je dirais, de l'implication des cycles de
vie. Donc, je pense qu'il faut de plus en plus être capable, par ces
éléments-là environnementaux et les problèmes... dire, les suggestions de
faites au niveau de la mise en oeuvre, puis des nouveaux produits, rentrent
dans le contexte de la réflexion du cycle de vie qui est fortement, je dirais,
dans notre cas, à nous au niveau du génie civil et voirie, réfléchie par les
donneurs d'ouvrage. Donc, ça devrait prendre plus de place que ça le prend
actuellement, là. C'est ce que je vous mentionne.
M. Arcand : Mais, dans
vos discussions, par exemple, est-ce que vous avez des cas où...
M. Arcand : ...si vous
permettez l'expression, votre input, là, j'ai le mot en anglais, là, votre
input a été reconnu, par exemple, par le MTQ comme étant... en disant, par
exemple : Écoutez, avant de faire cet appel d'offres là, là, vous devriez
mettre tel genre de matériaux, vous devriez... Est-ce que... ou c'est très
rigide et vous n'avez pas grand chance de passer à côté?
M. Tremblay (Pierre) : Actuellement,
très, très, très, peu. Je l'ai vu, dans les 25 dernières années, deux fois
où on a pu parce qu'on a des discussions, je dirais, d'ordre technique, qui ne
sont pas contractuelles avec les ministères. On a une panoplie de tables de
discussion avec eux pour, justement, parler de toutes ces innovations-là, ces
nouvelles manières de faire là. Ça fait qu'on l'a fait dans un cadre qui n'est
pas contractuel. On suggère des éléments, mais dès qu'on rentre dans un
contexte contractuel au ministère... j'ai un projet sur l'autoroute 40 à
Trois-Rivières, la discussion, là, ne peut pas se faire et ne se fait pas à
notre niveau actuellement. Donc, c'est très, très rare. J'ai vu ça une fois en
25 ans où on a pu donner une suggestion, mais sans plus.
M. Arcand : Mais dans la...
de la façon dont vous voyez les choses actuellement, et compte tenu de
l'expertise que vous avez parce que vous êtes dans le domaine puis vous avez
l'expertise, est-ce qu'on pourrait en faire énormément plus en matière
environnementale, actuellement, s'il y avait un peu moins d'œillères du côté
gouvernemental?
M. Tremblay (Pierre) : Il y a
effectivement de plus en plus d'intention et d'intérêt de la part des
entrepreneurs d'amener des solutions, je dirais, au niveau de l'environnement
qui sont porteuses. Ça, c'est évident, là. Puis là, je me réfère aux gens des
matériaux recyclés, là. On en parlait tout à l'heure, au niveau des bétons et
l'asphalte, ne serait-ce que ça, c'est déjà des techniques qui sont connues.
C'est déjà des matériaux qui sont normalisés, je vais aller jusque là, ou qui
sont disponibles. Mais c'est dans le contexte de la volonté de vouloir les
utiliser qu'on retrouve, des fois, des réserves.
Donc, oui, on en a, des solutions. Oui, on
en a, des propositions qui sont, au niveau de l'environnement, très
acceptables, là, je le dis comme je le pense. C'est juste la volonté de vouloir
les pousser puis de les considérer, quand on est en amont du projet, au niveau
de la conception. Ça a été dit souvent qu'on a très peu de temps pour pouvoir
faire la conception, donc les nouveaux produits deviennent un fardeau de plus à
analyser dans l'étape de conception. Donc, quand on n'a pas le temps, on se
réfère à ce qu'on connaît... on retourne dans nos habitudes puis on retombe
dans les matériaux neufs. Donc, le recyclage, par exemple, ou les nouvelles
méthodes de recyclage deviennent un peu plus difficiles à introduire quand on
est dans un mode traditionnel.
C'est pour ça qu'on vous dit, si on est collaborateurs
un peu plus, ces éléments là d'innovation dans l'environnement, entre autres,
peuvent être mieux suggérés, plus en amont, je dirais, suggérés du fait que ça
pourrait être plus inclusif dans les contrats. C'est pour ça qu'on parle de
mode collaboratif.
M. Arcand : Donc, ce que vous
nous dites, vous ne nous le dites pas directement, mais ce que je comprends un
peu, c'est que nos donneurs d'ouvrage ne connaissent pas tellement bien les
nouvelles méthodes qui peuvent exister actuellement et qui font en sorte qu'on
pouvait, par exemple, avoir des meilleures routes, qu'on pourrait avoir des
routes plus... faites avec des produits qui sont plus acceptables sur le plan
de l'environnement.
M. Tremblay (Pierre) : Je
n'oserais pas dire que tous les donneurs d'ouvrage ne le savent pas. Le
ministère des Transports est bien au fait de tout ça. Ils ont participé
énormément à des... comme je le disais tantôt, à des normes qui ont bien cadré
l'utilisation de ces matériaux-là. Le problème n'est pas dans la connaissance
de la possibilité puis de la capacité de ces matériaux-là, c'est dans la...
c'est plutôt au niveau du contrôle de la qualité une fois sur chantier. Puis
dès qu'on rentre à ce niveau là, ça demeure être les connaissances et les
compétences des inspecteurs de chantier qui vont s'assurer que le matériau, ne
serait-ce que recyclé, respecte bien les normes.
Donc, ce n'est pas la possibilité de les
utiliser, mais la crainte de ne pas être capable de bien contrôler ce
matériel-là qui est différent d'un matériel neuf bien connu qui, des fois, met
des freins à l'utilisation de ces matières-là. C'est un des éléments, là, qui
ressort souvent au niveau de la capacité de faire.
M. Arcand : D'accord. Et
pourquoi vous... Je vois que vous voulez donner du pouvoir à la présidente du
Conseil du trésor pour, entre autres, la valorisation des matières résiduelles.
Pourquoi c'est, pour vous, compliqué d'aller là-dedans? Pourquoi vous voulez
que ce soit fait par quelqu'un d'autre, si j'ai bien compris?
M. Tremblay (Pierre) : Non,
c'est qu'actuellement, comme je le disais, nos... évidemment, je vais parler
pour les gens qu'on représente, les propriétaires de carrières sablières qui
reçoivent, qui transforment, qui traitent des matériaux recyclés et qui les
revendent. Actuellement, il rentre plus de matière dans les carrières issues
des chantiers de construction évidemment. C'est transbordé vers les carrières,
puis les carrières les transforment pour les revendre. Il rentre plus de
matériel dans les carrières qu'il n'en sort...
M. Tremblay (Pierre) : ...donc
ça, ça veut dire, essentiellement, qu'on n'en demande pas assez au niveau des
contrats publics, il y a un manque de ce côté-là. Ça fait des années qu'on
essaie de promouvoir tout ça. Puis pour toutes sortes de raisons, des fois qui
sont valables puis des fois qui le sont moins, sur la volonté simplement des
individus de pas vouloir le faire, ça fait en sorte qu'on échappe des contrats
où on pourrait mieux et de manière plus importante revaloriser. Donc, le fait
de l'imposer devient une nécessité pour les donneurs d'ouvrage, je dirais,
municipaux ou autres de les obliger à considérer que le recyclé est un élément
d'importance qu'il faut remettre sur la table dans les contrats de
construction. C'est dans ce sens-là qu'on dit que, si on est obligé à
l'obliger, c'est peut-être le temps de le faire.
M. Arcand : Donc, c'est
ça, c'est dans ce sens-là que vous voudriez qu'elle agisse. Et ça, ça serait,
possiblement dans un règlement ou dans le projet de loi, là, de quelque chose
qui pourrait être mentionné, j'imagine, à ce moment-là.
M. Tremblay (Pierre) : Effectivement.
Comprenons-nous bien qu'on ne souhaite pas que tout soit réglementé. Dans la
mesure où ça se faisait de façon volontaire, et efficace, et compagnie, on
n'aurait probablement pas besoin de ça. Mais force est d'admettre qu'après tant
d'années où on essaie de pousser ces produits-là il reste qu'il y a encore un
trop, selon nous, grand nombre de propriétaires, donneurs d'ouvrage qui n'en
font pas assez référence. Donc, de là notre proposition.
M. Arcand : Juste sur la
cédule de paiement, et ce qui a été présenté par la coalition, c'est exactement
le consensus de l'industrie sur les façons de faire au niveau des paiements, ce
que vous suggérez?
M. Tremblay (Pierre) : Mathieu.
M. Tremblay (Mathieu) : Je
vais prendre le relais, Pierre, merci. Donc, oui, effectivement, il y a
consensus. L'ACRGTQ est membre de la Coalition contre les retards de paiement
également. On fait partie de ces représentations-là, on travaille activement
tous ensemble pour parler d'une même voix et demander... Quand même, le projet
de loi 12, bien, il y a minimalement une disposition habilitant le
gouvernement à adopter des mesures permanentes afin de régler les délais de
paiement puis afin de mettre en place également le règlement des différends par
un intervenant expert.
M. Arcand : Très bien.
Merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, cher collègue. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Alors, merci beaucoup pour votre présence, messieurs Tremblay au carré, c'est
ce que je comprends, sûrement avec des racines du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ah!
non. Bon, je ne voulais pas vous insulter, c'est bon. Alors, l'autre Monsieur
Tremblay, c'est parfait. On ne commencera pas à embarquer là-dedans.
Et ça me fait plaisir de vous voir, parce
que j'ai le goût de vous reposer un peu la même question que j'ai posée au
groupe précédent. Je ne sais pas si vous avez écouté la présentation
précédente. C'est ça, ce n'est pas évident quand on n'est pas en présence dans
la salle, là. Mais, moi, ce que j'entends de la part de certains entrepreneurs
ou de firmes de génie-conseil, par exemple, dans ma région ou ailleurs, c'est :
quand ça vient le temps de couper sur un projet qui est en cours, un projet
public, là, ah! on va couper sur la certification LEED, on va couper sur les
mesures de développement durable, on va couper là où on essaie d'amener de
l'innovation parce que c'est ça qui prend plus de temps, c'est ça qui coûte
plus cher. Est-ce que c'est des choses aussi, dans les grands travaux, que vous
constatez parfois, là, sans cibler de travaux en particulier, mais que, par
exemple, le donneur d'ouvrage ou le chef de chantier va souvent mettre un peu
de pression pour couper, justement, sur ces mesures-là, là, qui sont plus
d'innovation ou plus de développement durable?
M. Tremblay (Pierre) : C'est
évident de ce qu'on entend. Évidemment, je n'ai pas de quoi concret, là, en
tête qui pourrait me dire : Voici ce qui s'est déjà passé, là. Mais, oui,
effectivement, on pourrait imaginer que ces éléments-là deviennent, je dirais,
des éléments plus faciles à escamoter, pas parce que ce n'est pas une bonne
idée. C'est souvent, je dirais, l'inconnu de qui fait en sorte qu'un nouveau
matériau, un nouveau produit, une nouvelle manière de faire qui est plus ou
moins connue deviennent un peu, je dirais, sous réserve.
De là notre point quand je disais tantôt,
je vais faire un aparté, aussi au moment de la conception, la collaboration des
entreprises qui auraient des bonnes idées pourrait être faite en amont, on
pourrait déjà, je dirais, tout évaluer ces éléments-là de crainte qui
pourraient faire en sorte que, lors de l'exécution des mois plus tard, on ne
soit plus à l'aise avec de nouvelles procédures. Donc, de là le fait
d'impliquer en amont l'entrepreneur, ce serait une chose intéressante.
• (15 h 20) •
Puis il y a une chose qu'il ne faut pas
oublier, puis ça, je le comprends au niveau des donneurs d'ouvrage quand vient
le temps de prendre des décisions à ce niveau-là, ce sont des travaux qu'on
fait pour des dizaines d'années. Une route, théoriquement, c'est conçu pour 40,
50 ans, un pont, une centaine d'années. Ça fait que je peux comprendre
que, si on arrive avec des effets surprises lors d'une exécution de contrat qui
n'a peut-être pas été conçu ou...
M. Tremblay (Pierre) : ...en
amont, à la conception, que le nouveau produit pourrait faire peur, la nouvelle
manière de faire pourrait faire peur, parce qu'on va être pris avec ça pendant
50 ans. Donc, il y a du pour, il y a du contre, puis on comprend bien que
ces éléments-là peuvent refroidir des gens quand vient le temps de faire des
travaux. De là, évidemment, le point de dire : Si on est capables d'en
parler avant, on va toutes évacuer ces problématiques-là, puis on va être
capables de faire plus et de faire mieux.
M. Gaudreault : ...aussi que,
des fois, j'ai l'impression que c'est peu-être un peu le... comment je pourrais
dire, je ne pas si c'est une paresse de l'organisation ou une culture
organisationnelle de certains ministères, mais, tu sais, chez moi, là, on a un
pont en aluminium qui a 70 ans, là. Ça fait que ça veut dire ça marche
puis ça tient, là, tu sais. On est sûrement capables d'en faire d'autres
ailleurs. Mais justement, parlant d'innovation, vous en parlez dans votre
mémoire, est-ce que vous pensez que vos membres seraient ouverts ou intéressés
ou c'est ce qu'ils souhaitent, d'avoir un peu plus d'accompagnement, justement?
Quand la ministre aime bien nous dire qu'il y a de l'espace d'innovation dans
le projet de loi, est-ce qu'il faut s'assurer qu'il va y avoir de
l'accompagnement de la part du secteur privé pour aller vers cette innovation?
M. Tremblay (Pierre) : Effectivement,
quand on parle de ça, puis quand on parlait de l'encadrement, il y a plusieurs,
je veux dire, dizaines de types de contrats, je dirai, différents. Quand on
dit : Nous autres, on peut expérimenter toutes sortes de modes. C'est correct
de le faire, mais à un moment donné, je pense que la nature étant ce qu'elle
est, il va y avoir 4 ou 5 modes qui vont être les plus propices à
l'ensemble... à quasiment 100 % des travaux que l'on fait. Le plus bas
conforme en est un. Il va en avoir... des modes collaboratifs, il va y en avoir
d'autres. Donc, ce que l'on dit simplement, là-dedans, pour ce qui est de
l'accompagnement de l'industrie, puis c'est ce qui est important de saisir,
c'est que si on cible bien puis on encadre bien les quelques modes contractuels
différents, on va permettre aux gens de comprendre les règles du jeu, de
s'assurer qu'on les saisisse bien. Pour les entrepreneurs, entre autres, de
se... passez-moi l'expression anglaise, de se «set-uper», d'avoir les bonnes
personnes pour pouvoir être capables de répondre à ces demandes-là, parce qu'on
est dans un cadre contractuel différent, donc ça prend une expertise
différente, donc il faut être capables, pour les entrepreneurs, de savoir
qu'est-ce qu'on a besoin comme monde, quel équipement qu'on a besoin pour être
capables de répondre à ces nouveaux modes- là, donc être capables de grandir
ensemble, autant les donneurs d'ouvrage que les entrepreneurs, du fait qu'on le
sait qu'il va y avoir 4 ou 5 modes différents, et non pas 82, qui va
arriver rien qu'une fois, puis après 10 ans, je vais trouver... je vais
être capable de revoir le même mode que j'ai vu en 2020. Donc, j'ai perdu mon
expertise, j'ai perdu mon monde, j'ai perdu mon équipement, parce que je ne le
demande pas assez souvent. Donc, un peu moins de modes pour que... et un peu
plus de contrats pour que l'habitude embarque, puis que l'expérience embarque,
puis que les entrepreneurs soient capables de faire les choses. C'est ça qu'on
demande, d'être progressif puis, je dirai, concis et restreint dans les types
de modes qui seraient valorisés.
M. Gaudreault : Donner une
chance de développer des nouveaux réflexes, là, dans le fond, dans l'industrie.
Je comprends, peut être pour terminer en tout cas, que je... quand vous parlez
de la... je change un peu le sujet, là, mais de la valorisation des matières
résiduelles, vous avez parlé des carrières et sablières, de recyclage, en tout
cas, pour moi, ça m'a fait allumer que, tu sais, on parle de plus en plus, avec
ce projet de loi, il faut intégrer des pratiques d'analyse de cycle de vie.
Donc, c'est une façon, donc, de l'intégrer exactement là-dedans. Vous n'êtes
pas obligé de répondre, là, parce que, dans le fond, je vous exprime ce que
j'ai compris. Alors, voilà. Merci.
M. Tremblay (Pierre) : Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, M. le député de Jonquière. Alors, Me Tremblay, M. Tremblay, merci pour
votre contribution à nos travaux. Vous savez que vous étiez les derniers
intervenants dans le cadre de ce mandat qu'avait notre commission de procéder à
des auditions particulières sur le projet de loi numéro 12. Alors, ceci
étant dit, je dépose des mémoires des personnes et des organismes non entendus
pendant cette commission.
Nous nous donnons rendez-vous... nous
ajournons, bien sûr, nos travaux pour ce soir, mais on se donne rendez-vous
demain, à 10 heures, le 18 mars pour un autre mandat. Alors, à
nouveau, merci pour votre aide précieuse collaboration. Un merci particulier
pour notre précieux secrétariat et toute son équipe. Belle fin de soirée.
(Fin de la séance à 15 h 25)