Journal des débats de la Commission des finances publiques
Version préliminaire
42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)
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Le
mardi 15 mars 2022
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Vol. 46 N° 14
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 12, Loi visant principalement à promouvoir l'achat québécois et responsable par les organismes publics, à renforcer le régime d'intégrité des entreprises et accroître les pouvoirs de l'Autorité des marchés publics
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9 h 30 (version non révisée)
Le mardi 15 mars 2022 — Vol. 46 N° 14
Consultations particulières et auditions publiques sur le
projet de loi n° 12, Loi visant principalement à promouvoir l'achat québécois
et responsable par les organismes publics, à renforcer le régime d'intégrité
des entreprises et accroître les pouvoirs de l'Autorité des marchés publics
(Neuf heures
cinquante-deux minutes)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, bienvenue à toutes et à tous. Très, très heureux de vous
retrouver ce matin en ce retour de travaux parlementaires. Je constate que nous
avons quorum. Nous sommes donc en mesure de pouvoir amorcer nos travaux.
Comme vous le savez, la commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions
publiques sur le projet de loi numéro 12, Loi visant principalement à
promouvoir l'achat québécois et responsable par les organismes...
Le Président (M. Simard) :
...organismes publics à renforcer le régime d'intégrité des entreprises et à
accroître les pouvoirs de l'Autorité des marchés publics.
Mme la secrétaire, bonjour.
La Secrétaire : Bonjour.
Le Président (M. Simard) : Y
aurait-il des remplacements ce matin?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Alors, M. Reid (Beauharnois) est remplacé par M. Allaire
(Maskinongé); et M. Ouellet (René- Lévesque) est remplacé par M. Gaudreault
(Jonquière).
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Alors, cet avant-midi, nous aurons quatre groupes qui seront avec
nous en présentiel. Avant de les entendre, comme le veut la tradition, nous
ferons nos remarques préliminaires, et je cède immédiatement la parole à la
présidente du Conseil du trésor. Chère collègue, vous disposez de six minutes.
Mme LeBel : Bien, merci, M.
le Président. Alors, c'est vraiment un plaisir... D'ailleurs, bonjour à tout le
monde, merci d'être présents, et bonjour surtout dans cette nouvelle ère qui
est... qui nous rappelle et qui nous démontre que, bon, on s'en va vers le
mieux, et on l'espère tous.
Donc, très contente de vous retrouver,
surtout après cette relâche parlementaire, surtout pour amorcer aujourd'hui la
consultation sur le projet de loi 12, loi visant principalement à promouvoir
l'achat québécois responsable par les organismes publics, à renforcer
l'intégrité des entreprises et accroître les pouvoirs de l'Autorité des marchés
publics, qu'on entendra d'ailleurs en premier en consultation, loi qui est très
importante pour moi, qui s'insère dans une stratégie beaucoup plus large, qui
est la stratégie des marchés publics, qui a plusieurs objectifs, et j'ai très
hâte qu'on puisse, là, comme on le fait toujours d'ailleurs dans nos dossiers,
dans mes dossiers, pouvoir entendre tout ce qu'il y a à se dire sur ce projet
de loi là, toujours le situer d'ailleurs dans le cadre plus large de la
stratégie, qui a divers objectifs, et pouvoir voir par la suite, là, comme on
le fait et comme j'ai l'expérience de le faire avec tous mes collègues jusqu'à présent
dans les projets de loi que j'ai à étudier, être capable dans l'article par
article... pouvoir le faire de façon constructive et voir à améliorer le tout,
parce que tout est perfectible dans la vie. Ça, je suis d'accord avec ça.
La seule chose où j'ai... je ne...
habituellement où je ne divague pas ou ne déroge pas, pardon - divaguer, ça
peut m'arriver, mais pas en commission, j'espère – ne déroge pas, c'est sur les
objectifs. Mais, quand on est capable de trouver des moyens ou de raffiner des
moyens pour y parvenir, habituellement, les discussions sont très ouvertes, et
je suis très encline à le faire.
Donc, je pense que ça va bien de rappeler
brièvement le bien-fondé, là, de l'approche et pourquoi on le fait. L'idée est
de répondre à la fois aux attentes des entreprises québécoises, des ministères
et organismes du gouvernement, qui ont une part de responsabilité, de la
population québécoise... Il ne faut pas oublier que les marchés publics sont...
appartiennent aux Québécois, et je pense que tout ce qu'on fait avec nos
marchés publics doit bénéficier au sens large pour... aux Québécois, donc avoir
une valeur ajoutée aux Québécois. Donc, on peut penser à du développement
durable, on peut penser à de l'innovation, on peut penser à de l'achat québécois.
Il faut aussi penser à respecter les accords de libéralisation du marché, parce
qu'à terme tout ça bénéficie aux Québécois d'une façon ou d'une autre.
Donc, si on veut revoir en profondeur
cette approche, là, en matière d'acquisition de biens et de services,
particulièrement, bien, c'est vraiment dans un souci de favoriser l'achat
québécois, je l'ai dit, d'augmenter nos marges de manoeuvre actuelles et de
pouvoir injecter plus d'argent sur notre territoire. Je pense qu'il faut
accorder aussi aux entreprises de chez nous un meilleur accès aux contrats
gouvernementaux. Ça a été beaucoup de discussions qui ont eu lieu par mon
collègue, d'ailleurs, de Maskinongé et adjoint parlementaire, qui a eu
l'occasion de faire une tournée dans ce sens-là, promouvoir l'achat
responsable, on en a entendu parler, et moi, je pense que le corollaire de tout
ça pour le gouvernement, pour les organismes publics, c'est de s'assurer que le
chien de garde des contrats publics, l'AMP, ait les pouvoirs nécessaires à sa
disposition pour être capable de faire son travail et de bien avoir... d'avoir
le regard qu'il se doit d'avoir sur les contrats publics, les marchés publics
gouvernementaux et nous permettre d'utiliser tous les outils dans ce coffre à
outils d'achats gouvernementaux, tous les outils qui sont permis par la loi.
Donc, le contexte de la pandémie a
démontré... Je pense que ce n'est pas le point de départ de cette stratégie,
parce que ça fait longtemps qu'on entend les doléances de par les entreprises,
particulièrement, surtout en matière d'innovation, de développement durable,
etc., donc c'était le temps de faire bouger nos marchés publics, mais je pense
que ça a démontré l'importance de réduire notre dépendance extérieure vis-à-vis
certains marchés et de renforcer notre capacité d'assurer une disponibilité de
plusieurs éventails des chaînes d'approvisionnement, surtout en matière de
santé - on parle d'équipements de protection personnelle - et nos chaînes
d'alimentation. Je pense que la pandémie a démontré que ce sont deux secteurs
qui sont stratégiques et sur lesquels je pense qu'il est de bon aloi de mettre
l'accent, M. le Président. C'est une de nos priorités, bon, notre premier
ministre en a fait une priorité, et je pense qu'il faut que l'État québécois
donne l'exemple. Donc, à terme, ce seront des augmentations de près de 10% de
points de pourcentage. On est à 38% d'achats québécois en matière de biens. Je
suis heureuse...
Mme LeBel : ...de dire qu'en
matière d'achat de services et en matière de construction on est à 99 et
92 %, là. Je pense que là, au niveau de l'exemplarité, on en est... on
marque la cible, on atteint la cible, mais je pense que là où on a un effort
supplémentaire à faire, c'est en matière d'acquisition de biens. Donc, c'est
pourquoi cette stratégie là accompagnée du projet de loi, parce que le projet
de loi est un ensemble de la stratégie, est une extension, un outil, une
composante de la stratégie, je peux le dire... je peux sortir une liste de
synonymes, mais je pense que vous comprenez bien ce que je veux dire. Et
l'idée, c'est d'aller un peu plus loin, justement, en matière d'acquisition
d'achats québécois.
Donc, je vais conclure mon intervention
parce qu'on aura le temps d'en parler beaucoup avec les gens qui sont en
consultation, mais aussi en article par article. Mais ce sont les grands
objectifs, l'achat québécois, développement durable, et un meilleur accès à nos
entreprises, et surtout aussi favoriser l'innovation, que ce soit dans les
acquisitions de biens, dans les biens comme tels ou les achats qu'on fera et
dans les processus aussi d'acquisition gouvernementale, donc l'innovation dans
ces processus-là également. Donc, merci beaucoup. Et j'ai très hâte de
commencer cet exercice avec mes collègues et avec les gens qui vont revenir en
consultation.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, Mme la ministre. M. le député de Mont-Royal Outremont.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. J'en profite évidemment pour saluer le ministre, aujourd'hui, pour
l'étude de ce projet de loi 12, ces consultations d'abord. Et j'en profite
également pour saluer le député de Mercier, mais peut-être plus
particulièrement le député de Jonquière qui nous a fait une annonce il y a déjà
quelques jours, et je voudrais simplement le remercier pour 15 années de
brillants débats à l'Assemblée nationale. Alors, c'était un des points que je
voulais faire.
D'abord, premièrement, le projet de loi 12
comme tel, c'est un projet de loi qui... évidemment, sur la question de l'achat
québécois, il n'y a personne qui peut être contre le fait de privilégier
l'achat québécois. La question sur laquelle on s'est posés à un moment donné,
lorsqu'on a regardé ce projet de loi, c'était essentiellement de se dire qu'on
avait vraiment besoin... jusqu'à quel point on avait besoin d'un projet de loi.
Il nous a semblé a priori que via des directives du Conseil du trésor, il y
avait certainement moyen de pouvoir privilégier l'achat québécois. Il y avait
des efforts qui avaient été faits déjà par le passé en ce sens là. Alors, c'est
la première question qu'on s'est posée. On a vu, ce matin, également, les
informations à l'effet que le projet de loi n'allait pas assez loin. Nous,
évidemment, sur le principe, comme je l'ai dit, nous ne sommes pas en désaccord
avec ce principe, mais il y a certains éléments à l'intérieur de ça qui sont
pour nous sujet de préoccupations, et je vais profiter de l'occasion pour
véritablement vous en faire part.
Un des enjeux, ce qui nous apparaît
l'enjeu le plus important actuellement, c'est toute la question de l'absence du
paiement rapide, là, pour la construction. C'était une des recommandations
entre autres de la commission Charbonneau. On aura l'occasion d'en discuter
plus en détail avec la ministre, mais c'est clair que ça, c'est un enjeu qui nous
apparaît l'enjeu majeur. Ce qu'on ne comprend pas, c'est qu'à l'époque où on
était au gouvernement on avait lancé des projets pilotes pour payer les
fournisseurs de services dans plusieurs domaines de la meilleure façon
possible. Et on sait jusqu'à quel point le gouvernement du Québec, à cet égard,
est un cancre en ce domaine. Alors, je pense que c'est un des enjeux qui va
devenir important. Parce qu'on a beau vouloir encourager les entrepreneurs
régionaux, ces entrepreneurs régionaux là ne sont pas payés rapidement et
promptement. Il est clair que ça va rester un enjeu.
Deuxièmement, on s'est rendu compte que la
ministre a évidemment voulu respecter les ententes internationales de
libre-échange. Donc, c'est sûr que le projet de loi est un peu plus limité en
ce sens-là parce qu'on n'a pas le choix que de respecter les clauses des
accords de libre-échange. Alors ça, c'est un des éléments également. La
question, on est bien d'accord pour que l'Autorité des marchés publics ait plus
de pouvoirs, plus de finance, mais on va devoir également poser les questions
en ce sens là. Et je sais qu'aujourd'hui on a l'Autorité des marchés publics
qui va intervenir.
• (10 heures) •
Alors, essentiellement, ce sont les points
qui nous apparaissaient à ce stade-ci importants. On a vu également que, comme
je l'ai dit tout à l'heure, dans ce projet de loi là, tout peut se faire, mais
nous sommes ouverts à discuter avec la ministre et on aura certainement des
amendements à proposer...
10 h (version non révisée)
M. Arcand : ....pour faire en
sorte que ce projet de loi là soit le meilleur possible et en ce sens là, on va
travailler en équipe. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci beaucoup.
J'ai 10 minutes, c'est ça? Non?
Le Président (M. Simard) : En
fait, 4...
Mme Ghazal : 4? Ah!
excellent.
Le Président (M. Simard) : Oh!
pardon, excusez-moi, 1.
Mme Ghazal : Oui, c'est ça.
Je pensais que les règles ont changé dans tout.
Le Président (M. Simard) : Vous
savez, ce matin, j'étais...
Une voix : ...
Le Président (M. Simard) : Non,
c'est ça. Non, 30 secondes. Non.
Mme Ghazal : Oui, c'est ça.
Bon, j'y vais, alors. Bien, merci beaucoup. Écoutez, je suis vraiment très,
très heureuse d'être ici. Je me sens vraiment comme à la rentrée scolaire, là.
Il n'y a plus de plexiglas, etc. Je pourrais en rajouter aussi pour saluer le
collègue de Jonquière, mais je sentais qu'il commençait à pleurer, donc je vais
le laisser tranquille. Alors, écoutez, chers collègues, évidemment, le projet
de loi 12, nous sommes en faveur du principe. Ça participe d'une tendance
mondiale de favoriser les économies locales. La COVID nous a montré à quel
point on est dépendants des marchés internationaux. On se rappelle à quel point
on avait peur de manquer de médicaments, de manquer de tout, et il ne faut pas
revivre ça.
Maintenant, les bonnes intentions, c'est
bien, les actions, c'est mieux. Il faut sortir aussi des slogans. Je veux dire
à quel point... Quelle est la marge de manoeuvre du Québec pour atteindre les
objectifs avec les accords internationaux qui ont été signés? On dit qu'on n'a
pas le choix, mais ils ont été signés. Nous nous sommes lié les mains à travers
les années. C'est une tendance depuis les années 80 qui a fait qu'on a cette
dépendance-là.
Donc, j'ai très, très hâte de voir à quel
point on va pouvoir aller au-delà des slogans avec ce projet de loi 12. Je n'ai
plus de temps. Donc, on va avoir l'occasion d'en... je vais avoir l'occasion d'en
parler plus longtemps, et j'ai très, très hâte d'entendre les intervenants qui
vont venir en commission. Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Merci. Je ne
m'attendais pas à avoir ces bons mots des collègues. Je les remercie, notamment
le député de Mont-Royal qui a été élu en même temps que moi. Alors, on aura l'occasion
d'en reparler sûrement, mais je veux intervenir sur le projet de loi 12. Avec
le peu de temps que j'aie, un mot : Écoconditionnalité, conditions
écologiques. Je suis retourné dans un article de La Presse, à la suite, je
pense, c'était à l'étude des crédits, le 30 mars 2021, où nous avions eu l'occasion
d'échanger là-dessus, la ministre et moi, et elle s'était engagée à imposer des
critères écologiques contraignants pour les appels d'offres.
L'enjeu de la crise climatique ne peut pas
faire autrement que d'apparaître dans les critères d'acquisition du gouvernement
dans les politiques d'acquisition. Alors, la ministre parle de la recherche d'un
développement durable. Je lui dis tout de suite, ce sera insuffisant. Il va
falloir avoir des critères beaucoup plus contraignants et beaucoup plus
obligatoires, je ne sais pas si ça peut se dire comme ça, quant aux politiques
d'acquisition dans une optique de grille d'analyse climatique, de test de
climat. Et, s'il y a une institution au Québec qui doit être exemplaire à cet
égard, c'est le gouvernement du Québec qui doit donner l'ordre de marche en
matière d'acquisition écologique. Et j'avise la ministre qu'on va avoir
clairement des amendements là-dessus. Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, chers collègues. Alors, nous en sommes maintenant à l'étape des
auditions et nous commençons par recevoir des représentants de l'Autorité des
marchés financiers. Monsieur Trudel, bonjour.
M. Trudel (Yves) : Bonjour.
Le Président (M. Simard) : Bienvenue
parmi nous. Vous êtes un habitué, mais néanmoins, auriez vous l'amabilité de
vous présenter ainsi que la personne qui vous accompagne?
M. Trudel (Yves) : Bien sûr.
Une petite correction, nous sommes de l'Autorité des marchés publics.
Le Président (M. Simard) : Excusez-moi.
M. Trudel (Yves) : Pas «financiers».
Le Président (M. Simard) : Bien
oui.
M. Trudel (Yves) : Mon nom
est Yves Trudel. Je suis président-directeur général de l'Autorité des marchés
publics.
Mme Hamel (Chantal) : Alors,
je suis Chantal Hamel, je suis la directrice de l'admissibilité et du soutien
juridique à l'Autorité des marchés publics.
Le Président (M. Simard) : ...vous
disposez de dix minutes.
M. Trudel (Yves) : Merci.
Alors, M. le Président, Mme la ministre, mesdames, messieurs les députés, il me
fait plaisir de m'adresser à vous dans le cadre des consultations particulières
du projet de loi 12. D'emblée, je tiens à vous préciser que l'Autorité des
marchés publics est favorable aux dispositions du projet de loi concernant plus
spécifiquement l'intégrité des marchés publics. Par cette allocution, je vais
vous énoncer dans quelle mesure ces changements législatifs sont non seulement
pertinents et essentiels, mais comment l'AMP profitera de ces modifications
pour accroître son rôle de surveillance des marchés publics. Par ces
changements, le Québec continue de se donner les moyens nécessaires pour
favoriser l'équité, la transparence et la saine concurrence dans les marchés
publics.
Dès que nous avons entrepris nos activités
en 2019, nous nous sommes aperçus des limites de nos pouvoirs qui nous
empêchent de répondre entièrement à notre mission de surveillance des marchés
publics. Un comité de travail auquel a participé l'AMP et le Secrétariat du
Conseil du trésor a profité...
M. Trudel (Yves) : ...la
volonté ministérielle de revoir la Loi sur les contrats des organismes publics
et la Loi sur l'Autorité des marchés publics, également de notre expérience
vécue sur le terrain depuis 2019, en plus des échanges avec plusieurs de nos
partenaires, dont l'Unité permanente anticorruption. Nos commentaires devant
cette commission, aujourd'hui, porteront sur quatre éléments spécifiques du
projet de loi, soit l'élargissement des pouvoirs de l'AMP, la déclaration
d'intégrité des entreprises, le rapatriement des activités de vérification de
l'intégrité menées par l'UPAC et les sanctions administratives pécuniaires.
Au regard de l'élargissement des pouvoirs
de l'AMP. La Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure
a conféré à l'AMP des pouvoirs additionnels lui permettant de faire des
vérifications et des enquêtes sur l'ensemble des projets identifiés à
l'annexe 1 de la loi. Un peu plus d'un an depuis qu'AMP dispose de ces
nouveaux pouvoirs, nous avons été à même de constater à quel point ceux-ci
seraient pertinents pour tous les autres projets pour lesquels les fonds
publics sont investis. C'était d'ailleurs l'essence de notre positionnement
devant les membres de cette même commission alors que nous souhaitions, par
souci de cohérence, que ces pouvoirs soient étendus à l'ensemble des contrats
publics. L'expérience de la dernière année a démontré comment le fait d'être
présent sur les chantiers fait en sorte de nous alimenter et de nous permettre
d'exécuter notre travail de surveillance comme il se doit. Concrètement, ces
pouvoirs, dans le cadre du p.l. 12, nous permettraient d'effectuer une
veille des sous contrats publics en plus de celle des contrats publics, de
requérir des documents et des renseignements des soumissionnaires, des contractants
et des sous-contractants, en plus de pouvoir le faire auprès des organismes
publics, d'enquêter de notre propre initiative sans avoir l'obligation de
constater des manquements répétés afin de s'assurer que l'organisme public agit
en conformité avec le cadre normatif, et de rendre de nouvelles ordonnances,
notamment d'exiger que l'organisme public surveille adéquatement l'exécution
d'un contrat et en présence d'un manquement grave, de suspendre ou de résilier
un contrat public.
• (10 h 10) •
Concernant la déclaration d'intégrité des
entreprises. Advenant l'adoption du projet de loi, les entreprises auraient
l'obligation d'attester de leur intégrité avant de conclure un contrat public.
Peu importe la valeur ou la nature du contrat, qu'il s'agisse d'un contrat de
service, d'un contrat de construction ou d'approvisionnement. Cette mesure
n'aurait pas pour effet de remplacer les autorisations nécessaires pour toute
entreprise souhaitant obtenir un contrat public dont la valeur est égale ou
supérieure au seuil prévu à la LCOP, mais constituerait un levier additionnel à
notre disposition pour s'assurer de l'intégrité des entreprises qui obtiennent
des contrats publics. Il faut savoir que les entreprises dans le secteur des
approvisionnements n'ont pas à obtenir d'autorisation de contracter, peu
importe la valeur des contrats, et ne font donc l'objet d'aucune vérification
d'intégrité malgré l'importance que ce secteur représente au chapitre des
marchés publics. Avec le p.l. 12, l'AMP pourrait imposer des mesures
correctrices d'accompagnement ou de surveillance. Toute entreprise dans les
secteurs des services, de la construction ou de l'approvisionnement qui ferait
défaut de respecter son engagement s'exposerait à une inscription au Registre
des entreprises non admissibles aux contrats publics pour une période de cinq
ans. Cette mesure découle du fait que nous nous retrouvons parfois avec des
entreprises qui soumissionnent sur des contrats sous les seuils visés par une
autorisation de contracter et qui échappent ainsi à toute vérification. Avec la
loi actuelle, à moins d'être reconnu coupable d'une infraction prévue à
l'annexe 1 de la LCOP, ce qui occasionne une inscription automatique au
RENA, nous ne pouvons empêcher une entreprise d'obtenir des contrats publics
sous les seuils d'autorisation prévus à la LCOP. Nous pourrions également
contraindre une entreprise ou un administrateur à nous fournir tout document ou
renseignement permettant de vérifier l'intégrité de l'entreprise et de ses
dirigeants.
En ce qui concerne les autorisations de
contracter, nous estimons que la durée de validité qui serait prolongée de
trois à cinq ans est aussi une excellente mesure qui réduirait d'emblée le
fardeau administratif des entreprises. Je vous rassure à l'effet que cette
mesure n'aura pas pour conséquence de négliger les vérifications. Au contraire,
les nouvelles dispositions feraient plutôt en sorte que les vérifications
d'intégrité seraient effectuées en continu sur une base ponctuelle et annuelle.
L'AMP pourra donc investir encore plus d'efforts dans ses interventions sur le
terrain plutôt qu'en gestion administrative de dossiers...
M. Trudel (Yves) : ...fait
important à porter à votre attention, nous avons identifié, jusqu'à maintenant,
plus de 1 300 entreprises qui ont retiré leur demande d'autorisation
après l'avoir déposée auprès de l'AMP, évitant ainsi de se soumettre aux
vérifications d'intégrité. Nous constatons que plusieurs d'entre elles
obtiennent tout de même des contrats publics sous les seuils d'autorisation.
Nous estimons que les mesures d'intégrité qui sont prévues au p.l. 12 feraient
en sorte d'assainir le marché. Elles favoriseraient ainsi les entreprises
intègres qui méritent d'obtenir des contrats publics.
En ce qui concerne le rapatriement des
activités de vérification de l'intégrité menées par l'UPAC, soulignons que,
dans le cadre de ses responsabilités au regard de l'admissibilité des
entreprises aux marchés publics, l'AMP est impliquée au tout début du processus
pour recueillir les informations nécessaires et pour constituer le dossier de
l'entreprise qui effectue une demande d'autorisation ou de renouvellement. Ce
dossier est ensuite soumis à l'UPAC, qui effectue des vérifications d'intégrité
auprès des différents partenaires, tels la Régie du bâtiment du Québec, la
Sûreté du Québec, Revenu Québec et la Commission de la construction du Québec.
Suivant cette analyse, l'UPAC retransmet un avis à l'AMP, qui doit alors rendre
sa décision d'autoriser ou de refuser la demande. Nous estimons qu'en rapatriant
cette activité à l'AMP, cela permettrait d'améliorer l'efficacité et
l'efficience des différentes étapes d'analyse d'un dossier puisqu'il sera
assumé du début jusqu'à la fin par l'AMP. Cela éviterait aux entreprises de
devoir échanger avec deux agences différentes et réduirait également les délais
de traitement des demandes d'autorisation et de renouvellement. Étant
l'organisme qui prend la décision finale, l'imputabilité d'une telle décision
serait donc entièrement assumée par notre organisation. La sanction du
p.l. 12 répondrait également à la recommandation 29 du rapport du
comité consultatif sur les réalités policières du 25 mai 2021, qui
stipulait, et je cite : «De confier à l'Autorité des marchés publics la
responsabilité d'évaluer la probité des entreprises faisant affaire avec le
secteur public.»
En ce qui concerne les sanctions
administratives pécuniaires, nous y voyons des bénéfices permettant de
renforcer davantage le régime d'intégrité. Par ce projet de loi, les sanctions
pourraient être imposées dès qu'il y a un manquement, ce qui aurait pour
conséquence de constituer un incitatif à respecter les règles établies et à se
conformer aux dispositions de la LCOP. Mentionnons également que l'AMP tiendra
un registre public des entreprises sanctionnées, ce qui constituerait encore
une fois une mesure de dissuasion. Ce projet de loi viendrait d'ailleurs
renforcer le principe de transparence auquel nous adhérons et que nous prônons
puisque ce registre contiendrait des informations accessibles sur notre site
Web.
En conclusion, l'AMP estime que l'adoption
de ce projet de loi permettrait de renforcer et de rehausser la qualité du
régime d'intégrité des marchés publics au Québec. La population est d'ailleurs
en droit de s'attendre à ce que l'argent qu'elle verse en taxes et en impôts
soit investi de la meilleure façon possible pour des services et des
infrastructures publics. Elle permettrait également de donner à l'AMP les
moyens additionnels lui permettant de réaliser sa mission et d'assurer la transparence,
l'équité et la saine concurrence dans les marchés publics. Elle permettrait
également d'élargir ses pouvoirs de surveillance et d'intervention, tant en
matière de surveillance... de surveillance des marchés publics. L'AMP entend
donc continuer à jouer pleinement son rôle de surveillance des marchés publics
et n'hésite pas à intervenir dans toute situation où le cadre normatif ou les
règles contractuelles n'apparaissent pas avoir été respectés. Soyez assurés que
tout notre personnel est investi, mobilisé et déterminé à réaliser la mission
de l'AMP. Équité, transparence, saine concurrence demeurent nos principes
fondamentaux.
Nous sommes maintenant disponibles à
répondre à vos questions. Merci de votre attention.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, monsieur Trudel. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre. Et
votre groupe parlementaire dispose de 16 minutes 30 secondes.
Mme LeBel : O.K., merci.
On va essayer d'en faire bon usage, M. le Président. Alors, merci, monsieur Trudel,
merci, Madame Hamel, d'être présents. On a eu l'occasion, d'ailleurs, depuis
mon arrivée au Trésor, d'avoir quelques discussions sur l'AMP et ses pouvoirs,
particulièrement dans le cadre du projet de loi 66, qui est maintenant une
loi, qui est la Loi sur l'accélération de certains projets d'infrastructures,
où il était fort important, pour notre gouvernement, pour moi, d'accélérer des
processus, mais d'avoir un contrepoids à ça, c'est-à-dire le pouvoir de
surveillance de l'AMP...
Mme LeBel : ...on a eu
beaucoup de discussions, à l'époque, sur la pertinence d'étendre ou non. Et
vous conviendrez que dans le cadre du projet de loi 66, au moment où on se
parle, on a quand même fait un grand bout de chemin, hein? Si je ne me trompe
pas, ce sont tous les projets du PQI, maintenant, du Plan québécois des
infrastructures, qui sont soumis à votre autorité. Est-ce que vous considérez
que le bout de chemin supplémentaire, présentement, qu'on fait avec le
p.l. 12... en bon français, est-ce qu'on finit le travail pour s'assurer
que vous avez le regard sur l'ensemble des contrats publics qui sont donnés par
le gouvernement?
M. Trudel (Yves) : Tout à
fait. À l'image de ce que... des pouvoirs que nous avons obtenus, eut égard au
projet de loi... à la Loi accélérant certains projets d'infrastructures, ce qui
est prévu au projet de loi actuel, en plus des pouvoirs d'enquête, nous
permettrait d'enquêter sur toute, toute question se rapportant à notre mission.
C'est un grand changement dans ce projet de loi là, parce qu'au-delà des
pouvoirs d'enquête, il y a également tout le pouvoir d'enquêter sur l'intégrité
des entreprises faisant affaire avec le secteur public. Et ça, c'est très
important.
Si je pouvais donner l'exemple de ce que
ça nous aura donné, les pouvoirs additionnels dans le p.l. 66, depuis novembre
2019, le mandat... le gouvernement nous a mandatés pour faire un examen de
gestion contractuelle au ministère des Transports du Québec avec les pouvoirs
de la loi actuelle que nous avons au niveau de la Loi sur l'Autorité des
marchés publics. Nous avions fait des plans de travail et, suivant la sanction
du projet de loi 66, donc la Loi accélérerant certains projets
d'infrastructures, qui nous donnait des pouvoirs additionnels, nous avons
identifié, à l'annexe I, tous les projets visés dans la loi qui doivent être
exécutés par le MTQ. Ça nous a permis de modifier notre plan de travail et se
servir plus tôt des pouvoirs qui nous ont été accordés dans le p.l. 66 pour
faire notre travail d'examen de gestion contractuelle au niveau des du MTQ.
Mme LeBel : Ça ça couvre, si
je ne me trompe pas, parce qu'on pourra en parler par la suite, là, quand on
parle de l'autorisation de contracter, là, qui se fait au-dessus de certains
seuils, on le comprend, mais ce que vous venez de dire, ça couvre tout contrat,
que ce soit des contrats qui soient visés par une entreprise qui doit avoir une
autorisation de contracter ou non à ce moment-là. Donc, vous avez un regard
supplémentaire aussi sur ces entreprises-là, ces contrats-là.
M. Trudel (Yves) : Sur les
processus de contrats, oui, tout à fait, même en bas des seuils, nous avons des
pouvoirs additionnels, effectivement, de vérifier et d'enquêter.
• (10 h 20) •
Mme LeBel : OK Très
important, je pense, vous l'avez mentionné, l'intégrité des entreprises est
aussi importante que l'intégrité du processus qui contracte. Donc, il y a
plusieurs... il y a deux choses, je pense, particulières pour lesquelles je
veux... vous avez pris la peine de les mentionner dans votre déclaration
d'ouverture, dans votre présentation, mais je pense que c'est important pour
les Québécois d'illustrer un peu plus qu'est ce que ça veut dire puis qu'est ce
que ça comporte. Et on va parler de deux choses: il y a la déclaration
d'intégrité des entreprises, qui est nouvelle dans le cadre du projet de loi,
et l'autorisation de contracter ou on fait certaines modifications aussi.
Commençons peut-être par l'autorisation de
contracter qui existe déjà. On ira à la prolongation au préalable, mais je
comprends qu'également on prend une portion présentement des... Le processus
est une chaîne. Une portion de la chaîne présentement est entre les mains de
l'UPAC. Si je comprends bien, on se propose de rapatrier ça à votre niveau,
parce que la décision finale, si je comprends bien, appartient à l'Autorité des
marchés publics. Donc, peut-être nous expliquer le processus. Qu'est-ce qui
était fait à l'UPAC? Qu'est-ce qui sera fait maintenant chez vous? Et pourquoi
c'est une bonne chose de le faire?
M. Trudel (Yves) : Oui.
Alors, le processus actuel fait en sorte qu'à l'Autorité des marchés publics
nous accueillons la demande d'une entreprise qui souhaite contracter avec le
secteur public au-delà des seuils prévus par la LCOP, soit 1 million pour
les contrats de service et 5 millions pour les contrats de construction.
Donc, nous accueillons la demande, nous recueillons les documents utiles à la
vérification d'intégrité et à l'obtention de l'autorisation et/ou du
renouvellement, le cas échéant, et nous accompagnons l'entreprise, parce que ça
prend un certain temps avant de recueillir toute l'information des entreprises.
Donc, nous accompagnons également l'entreprise pour l'aider à documenter son
dossier. Quand le dossier complet, nous soumettons la demande pour des
vérifications d'intégrité à l'UPAC qui, eux, comme je l'ai dit dans mon
allocution, s'adressent à différents partenaires pour s'assurer de l'intégrité
de l'entreprise qu'elles doivent vérifier. Par la suite, l'UPAC a fait une
analyse et nous retransmet un avis qui sera soit favorable, soit défavorable
pour autoriser ou non une entreprise. Lorsque l'avis défavorable nous devons,
c'est une question d'équité procédurale, agir par préavis de refus auprès de
l'entreprise et...
M. Trudel (Yves) : ...donc,
nous posons des questions additionnelles à l'entreprise, qui répond à nos
questions, et nous analysons les réponses et nous décidons d'émettre ou ne pas
émettre l'autorisation de contracter dans le secteur public, au-delà des
seuils.
Mme LeBel : O.K. Donc là,
présentement, ce qu'on se propose dans le projet de loi 12, s'il est
adopté, c'est de prendre toute la portion d'analyse du dossier et d'avis et de
vous remettre ça entre les mains pour que maintenant, l'AMP ait tout le
contrôle du processus, contrôle est peut-être un mot fort, mais tout le
processus entre les mains, de la demande à l'autorisation en passant par la
vérification. C'est exact?
M. Trudel (Yves) : Exact. Par
exemple, le Bureau de l'inspecteur général pourrait rendre une décision dans un
contrat avec la Ville de Montréal. Je lis le rapport, je lis la décision. Les
gens chez nous font ça. Nous analysons tout ça, et là, nous devons en ce moment
communiquer avec l'UPAC pour leur dire : Bien, je t'invite à aller
chercher le rapport du Bureau de l'inspecteur général, analyse-le, et fais-moi
une vérification d'intégrité, alors que je l'ai déjà lu. On pourrait aller
directement. C'est un autre exemple du fait que nous souhaitons que cette
activité-là soit rapatriée à l'AMP.
Mme LeBel : Je pense
important que les gens comprennent également que ce n'est pas la... puis vous
me corrigerez, là, mais je pense que vous le connaissez, l'organisme,
assez, ce n'est pas la section enquêtes policières de l'UPAC qui fait ça, c'est
la branche vérification. Donc, c'est important de le mentionner. Est-ce que
vous considérez qu'à l'AMP, vous avez tous les outils nécessaires pour cette
vérification là? Parce que dans l'imaginaire populaire, on se dit : L'UPAC
est peut être mieux placée. C'est un corps de police. Peut-être expliquer qu'il
y a une différence entre une vérification et une enquête criminelle et que...
Est-ce que vous pensez que vous avez tous les outils? Puis je pense qu'il reste
une section, de toute façon, à l'UPAC, qui est la vérification, là, qui va
tout, là... sur la banque de renseignements policiers, là, auxquels ils ont
accès. Donc, peut-être juste démystifier tout ça dans la tête des gens, s'il
vous plaît.
M. Trudel (Yves) : Exactement.
Donc, lorsque nous transmettons la demande, une fois que le dossier est
complété, nous transmettons la demande au commissaire associé aux
vérifications. Donc, ce n'est pas au département criminel, mais bien au
département de vérification. Et est-ce que nous aurions tous les outils? En
fait, le commissaire aux vérifications fait des demandes auprès de différents
partenaires, ce que nous pouvons également faire, bien entendu. Et
effectivement, le secteur vérifications de l'UPAC demeurerait en collaboration
avec nous eu égard à une demande d'autorisation, puisque nous leur demanderions
les vérifications au niveau des états financiers, s'assurer que les argents ne
proviennent pas du blanchiment d'argent et des dossiers criminels des
dirigeants et des entreprises.
Mme LeBel : Donc, la section
des vérifications, qui est propre à l'UPAC, à sa mission, demeurerait à l'UPAC
et deviendrait, eu égard à l'AMP et dans la section Analyse, un partenaire
comme les autres auquel vous vous adresseriez pour une fonction particulière,
une vérification particulière.
M. Trudel (Yves) : C'est
exact, M. le Président.
Mme LeBel : O.K. J'ai eu...
Outre le fait que ça semble beaucoup plus pratique, là, d'avoir le contrôle du
processus compte tenu que vous êtes celui qui recevez la demande et émettez
l'autorisation ou non, là, dépendamment à l'avis, est-ce que vous avez vu
certains enjeux, justement passer par l'UPAC? Je vais vous donner un exemple
très concret. J'ai eu à quelques reprises, comme présidente du Conseil du
Trésor, à autoriser, là, des prolongations de contrat pendant que la
vérification était en cours, alors que la demande était faite. Est-ce que vous
avez constaté qu'il y avait peut-être justement une question d'efficacité du
processus? Et l'idée, ce n'est pas de jeter le blâme, là, c'est de faire un
constat et de voir si vous pensez que ça sera plus efficace, là. Est-ce qu'on
va avoir plus de délais, finalement? C'est ça, la question.
M. Trudel (Yves) : En fait,
l'enjeu est autour des délais. Effectivement, vous avez à rendre certaines
dérogations. Nous avons des échanges réguliers avec des entrepreneurs qui
considèrent que les délais sont beaucoup trop longs et nous pensons qu'en
rapatriant l'activité, on pourra être plus en continu. Pendant qu'on reçoit la
demande, qu'on attend la documentation, qu'on accompagne l'entreprise, on
pourrait déjà amorcer les délais de vérification. Donc, les délais
commenceraient à la réception. Nous pourrions déjà analyser sur sources
ouvertes s'il y a des problématiques d'intégrité avec l'entreprise. Un
enquêteur pourrait se déplacer pour aller poser des questions utiles pendant le
processus, alors que maintenant... Nous avons toute la documentation. Parfois,
il y a des... certaines corporations qui ont des structures corporatives très
importantes. Nous pourrions déjà amorcer le volet vérification d'intégrité sur
la structure corporative. En ce moment, on attend ces documents-là. On les transmet,
et une fois transmis, la vérification d'intégrité commence lorsqu'un analyste à
l'UPAC est assigné au dossier. Ça prend un certain temps, donc il y a un délai
additionnel très important.
Mme LeBel : Et, entre autres,
je vais rentrer peut-être dans une autre modalité, le fait d'augmenter, de
prolonger la durée de validité des autorisations de contracter de 3 à
5 ans. À prime abord, encore une fois, ça pourrait sembler inquiétant...
Mme LeBel : ...on est... On
autorise pour cinq ans, beaucoup de choses peuvent se passer en cinq ans. Vous
avez dit : Je tiens à vous rassurer dans votre allocution. Peut être,
détaillez encore plus. Qu'est-ce que ça implique et pourquoi c'est une bonne
chose, finalement, de le faire, là, en plus de rapatrier, là, des analyses chez
vous?
M. Trudel (Yves) : C'est que
présentement, avec la loi actuelle, c'est trois ans, comme vous le savez, et
c'est au bout de trois ans que recommencent, lors de la demande de
renouvellement, les vérifications d'intégrité. Avec le projet de loi actuel,
les vérifications d'intégrité seraient menées en continu, entre autres, de
façon ponctuelle. Donc, s'il y a un changement de structure important pendant
l'année, l'entreprise aura l'obligation de nous en informer. Par la suite, il y
aura une déclaration annuelle, ce qui fait qu'à toutes les années, on pourra
connaître les changements qui auront eu lieu dans l'entreprise parce qu'ils
vont nous en informer par une déclaration annuelle, et mener les vérifications
d'intégrité, le cas échéant. Donc, c'est un avantage qu'il y a au projet de loi
actuellement autant pour l'entrepreneur que pour nous en termes de vérification
d'intégrité.
Mme LeBel : Merci. Bon, M. le
Président, mon collègue, le député de Saint-Jérôme, aurait peut-être une
question sur cet enjeu-là. Je peux peut-être ouvrir une parenthèse et, si vous
permettez, s'il reste du temps, je reviendrai sur un autre aspect à la suite.
Le Président (M. Simard) : Avec
plaisir. M. le député de Saint-Jérôme.
M. Chassin :Merci, M. le Président. Merci, Mme la ministre, et merci à
vous de votre présentation. Je trouve ça très intéressant de vous sentir
sensibles et préoccupés par les délais et par la complexité pour les
entreprises d'obtenir l'autorisation. Puis là, dans le fond, effectivement, on
parle justement d'un processus qui est amélioré, qui est notamment continu.
Est-ce que, dans le fond, je crois comprendre que votre préoccupation, pour que
ce soit le plus simple possible, notamment pour des entreprises qui auraient
peut-être tendance à ne pas aller chercher l'autorisation parce que c'est
compliqué, est-ce que vous diriez que, dans le fond, que ça limite la
concurrence? Qu'au contraire, vous avez cette intention de simplifier, dans le
fond, le processus pour les entreprises pour que le maximum puisse se qualifier
et appliquer donc, sur, par exemple, les appels d'offres et maximiser la
concurrence? Est-ce que c'est ça, la préoccupation de l'AMP?
M. Trudel (Yves) : À l'AMP,
évidemment, notre plus grande préoccupation, ce sont nos principes
fondamentaux. C'est la transparence, la saine concurrence et l'équité.
Effectivement, l'équité, bien, ça passe par les autorisations. Donc, c'est
important de les avoir actuellement au-delà des seuils. Et oui, notre objectif
est de simplifier le plus possible tout le processus de demande,
d'autorisation, et de renouvellement.
M. Chassin :Et spécifiquement sur, dans le fond, le suivi de la
déclaration annuelle, en quelque sorte, est ce que ça va être simple à remplir?
Autrement dit, si je n'ai pas de changement dans ma structure, j'imagine que ça
ne prendra pas une demi-journée.
M. Trudel (Yves) : Tout à
fait. C'est ce que nous sommes en train de regarder. C'est de rendre ça le plus
simple possible s'il n'y a pas de changements dans la structure. S'il y en
avait en cours d'année qui sont importants, bien, ponctuellement, ils doivent
nous les déclarer, devraient nous les déclarer et annuellement, par une
déclaration qui pourrait être simple, effectivement, bien, nous en informer.
C'est ce qui nous permettrait, à chaque année, de faire les vérifications, donc
en continu.
M. Chassin :Merci beaucoup.
Mme LeBel : Merci. Peut-être
juste compléter sur mon collègue. Dans votre principe de saine transparence...
de saine concurrence, je lis en filigrane le mot intégrité de la concurrence,
intégrité des marchés publics. Donc, je comprends de vos propos... parce que
c'est à votre demande, hein, cette prolongation-là de délai. Donc, je comprends
de vos propos, ce que vous ne dites, ce n'est pas que la simplification ne
viendra pas limiter l'intégrité ou notre possibilité de vérifier, là, on
contrebalance les deux objectifs.
M. Trudel (Yves) : Tout à
fait.
Mme LeBel : O.K. Peut être y
aller sur... pendant qu'il reste... Il reste peu de temps, mais je veux vous
entendre sur la déclaration... des entreprises, qui est fort différente de
l'autorisation de contracter, vous l'avez dit. En quoi vous pensez que c'est
une plus-value dans l'ajout qu'on vient de faire?
M. Trudel (Yves) : En fait,
deux choses. La première, c'est que ça vise également les contrats en
approvisionnement, donc l'intégrité des entreprises qui donnent des biens,
fournissent des biens. Donc, un volet très important. Et par ce projet de loi
là, nous pourrions vérifier l'intégrité de toutes les entreprises qui
contractent avec le secteur public, peu importe la valeur du contrat. En ce
moment, c'est seulement au-dessus des seuils, donc 1 million,
5 millions. Avec le projet de loi, s'ils étaient sanctionnés, nous aurions
donc la possibilité de vérifier l'intégrité de l'ensemble des entreprises qui
font affaire avec l'État ou une municipalité.
Mme LeBel : Puis peut être
rapidement, en quoi est-ce que c'est différent de l'autorisation de contracter?
Est-ce que c'est des vérifications différentes? Est-ce que c'est un pouvoir
plus large? Qu'est-ce que ça vous donne comme possibilité? Parce que certaines
vont avoir aussi l'autorisation de contracter, là, il va y avoir un chevauchement
des fois des deux mesures, là.
• (10 h 30) •
M. Trudel (Yves) : En fait,
ce que ça permet, c'est les mêmes pouvoirs de vérification eu égard aux
demandes d'autorisation. Donc, il n'y a pas de pouvoir...
10 h 30 (version non révisée)
M. Trudel (Yves) : ...élargi.
On utiliserait les mêmes pouvoirs d'enquête avec les mêmes barèmes d'intégrité,
si vous voulez. Et ça fait juste que l'ensemble des entreprises seraient
soumises à une vérification d'intégrité, le cas échéant. Et ce n'est pas en
amont. Ce n'est pas un amont. C'est important de retenir. C'est qu'en ce
moment, il devrait se déclarer intègre, donc devrait compléter un formulaire, j'imagine
qu'il sera fait par nos collègues du Conseil du trésor, qui sera élaboré par
eux, et se déclarer intègre d'emblée, ce qui nous permettrait, par une veille,
de déterminer s'ils le sont, ils ne le sont pas.
Mme LeBel : O.K., mais ça
pourrait se faire en continu également, là.
M. Trudel (Yves) : Tout à
fait. Et si les entreprises ne le sont pas ou leurs dirigeants ne le sont pas,
l'avantage avec le projet de loi actuel, c'est que nous pourrions imposer des
mesures correctrices, des mesures d'accompagnement et des mesures de
surveillance à ces entreprises-là. Et si, et comme je l'ai mentionné, s'ils ne
se conforment pas aux mesures correctrices, il tombera au RENA.
Le Président (M. Simard) : Merci,
Monsieur Trudel. M. le député de Mont-Royal—Outremont.
M. Arcand : Merci beaucoup, M.
le Président. Monsieur Trudel, également Madame Hamel, bienvenue parmi nous,
aujourd'hui. Votre mémoire est très... il y a beaucoup de louanges dans votre
mémoire envers le projet de loi. Est-ce qu'il y a des choses que vous auriez
aimé avoir que vous n'avez pas eu dans ce projet de loi?
M. Trudel (Yves) : Non. Je
dois vous dire que dans le projet de loi actuel... le projet de loi actuel nous
permettrait de répondre à notre mission à 100 %, ce qui n'est pas le cas
actuellement avec la loi que nous avons.
M. Arcand : O.K. est-ce
que... vous comprenez, je pense, que l'une des craintes que nous avons, nous, c'est
que... on veut bien qu'on augmente la mission, que ça va augmenter le nombre...
l'importance au niveau du travail... peut être qu'une des personnes
importantes, en plus de la ministre, c'est peut-être le ministre des Finances
qui, la semaine prochaine, va présenter un budget. Est-ce que vous avez fait
des demandes d'ajustements? Parce que ce qu'on considère, c'est que c'est une
charge de travail plus importante pour l'autorité. Est-ce que vous avez fait
des demandes en ce sens là? Est-ce que vous vous attendez à une augmentation de
votre budget total?
M. Trudel (Yves) : Alors, M.
le Président, nous allons définitivement faire des demandes.
M. Arcand : Dépêchez-vous,
là, parce qu'il reste une semaine.
M. Trudel (Yves) : Elles n'ont
pas encore été adressées. Nous sommes présentement dans un processus d'optimisation.
Nous regardons ce que nous pouvons faire de façon... des choses de façon
différente. On ne connaît pas encore entièrement le processus puis la
méthodologie utilisée par nos collègues de l'UPAC si jamais le projet de loi
était sanctionné. Donc, nous rapatrierions cette activité-là. Il y a des
comités de travail qui commencent dès vendredi pour voir comment on peut
optimiser le processus. Je suis à revoir présentement ma structure. On regarde
où est-ce qu'on aura des besoins. Et oui, il y aura des besoins qui seront
adressés. Mais le volet optimisation, ce n'est quand même pas rien, parce que je
vous donne un exemple, au niveau des enquêtes, à mon arrivée, on a mis beaucoup
d'efforts pendant le processus d'appel d'offres, donc nous sommes très en
amont. Ce que ça permet de faire cette optimisation-là, ça nous permet de ne
pas faire d'enquête, de ne pas mettre d'efforts en termes juridiques, et moi de
ne pas rendre une décision publique. Donc, ces efforts-là sont plutôt mis en
amont. Ce qui nous permet de réguler la situation en temps opportun. Et ça, c'est
important parce que... on pourrait demander plein de monde, mais si on ne
regarde pas pour optimiser comment nous effectuons notre travail. On passe
souvent à côté de volets super importants. Évidemment, en régulant la situation
pendant le processus, on ouvre les marchés à la concurrence, et on rend ça plus
équitable. Donc, ça fait... Et ça, écoutez, je vous dirais que deux fois par
semaine, on intervient au niveau d'un processus. Et le processus et le
ministère ou l'organisme en question corrigent le tir. C'est quand même
beaucoup deux fois par semaine. Ce qui nous permet de revoir notre structure.
Ça va nous prendre des gens, là, définitivement, mais on est plus en train de
regarder en ce moment comment on pourra optimiser davantage, et la méthodologie
utilisée par l'UPAC. L'avantage également, c'est qu'on a des partenaires avec
qui nous travaillons de façon très étroite, c'est... Entre autres, avec le p.l.
66, nous effectuons beaucoup de visites de chantiers, mais nous le faisons avec
des partenaires qui ont aussi de l'intérêt dans les marchés publics.
M. Arcand : O.K. Si j'avais à
vous demander, parallèlement à ça, est-ce qu'au niveau des effectifs, par
exemple, est-ce que vous avez une idée? D'abord, vous avez combien d'effectifs
actuellement?
M. Trudel (Yves) : Présentement,
167 postes autorisés...
M. Trudel (Yves) : ...puis
je dépasse un petit peu.
M. Arcand : Et est-ce
que ce que vous avez une idée de ce que vous pouvez prévoir, disons, d'ici les
trois prochaines années si ce projet de loi là est adopté?
M. Trudel (Yves) : En
fait, comme je vous le disais, nous sommes à le regarder, donc on est en train
de revoir la structure. Je dirais que, dans les prochaines semaines, j'aurai
une idée du nombre d'effectifs requis pour accomplir toute ma mission si jamais
le projet de loi était sanctionné.
M. Arcand : Mais vous
êtes d'accord pour dire que ça va prendre une augmentation, quand même, des
effectifs pour remplir votre mission d'ici les prochaines années?
M. Trudel (Yves) : Absolument,
M. le Président.
M. Arcand : O.K., mais,
pour l'instant, vous ne savez pas exactement de quoi on parle à ce niveau-là.
M. Trudel (Yves) : On
n'a pas terminé l'analyse encore, mais ce sera fait dans les prochaines
semaines. Tout à fait.
M. Arcand : O.K. Vous
dites également qu'il y a 1 300 entreprises qui se sont retirées de
la vérification de l'Autorité des marchés publics, mais elles ont quand même
accès à des contrats. Combien de cas, dans le passé, ces entreprises-là ont été
sanctionnées sous les seuils... qu'on a eu sous les seuils, là, des entreprises
qui ont été sanctionnées, est-ce qu'il y en a eu beaucoup?
M. Trudel (Yves) : Sous
les seuils, on ne peut pas sanctionner les entreprises en ce moment.
• (10 h 40) •
M. Arcand : Non, non,
mais qui auraient été sanctionnées, disons?
M. Trudel (Yves) : Non.
Ce que je comprends, non, puisqu'il n'y a pas de vérifications d'intégrité qui
sont effectuées lorsque les entreprises ne demandent pas d'autorisation parce
qu'elles n'ont pas l'obligation de le faire. C'est ça, notre constat. Et on ne
dit pas qu'ils ne sont pas intègres, on fait juste dire qu'ils se privent de
contrats qui m'apparaissent intéressants et qui n'ont donc pas eu à subir une
vérification d'intégrité. Par contre, elles contractent quand même sous les
seuils.
M. Arcand : C'est ça. Et
est-ce que, dans les différentes mesures qu'il y a dans le projet de loi et
dans ce que vous avez fait au cours, disons, de la dernière année, est-ce qu'au
niveau des entreprises il y a eu beaucoup de résistances à certaines choses? Tu
sais, je vais vous donner un exemple, là, les sanctions administratives
pécuniaires qui sont rendues publiques, est-ce que c'est quelque chose que les
entreprises peuvent avoir certaines réticences? Parce que quelqu'un peut avoir
fait une erreur, et puis il dit : Bon, vous êtes en train de nuire à ma
réputation parce que c'est rendu public, etc. Est-ce qu'il y a des... il y a-tu
des choses dans ça qui démontrent une certaine résistance de la part des
entreprises?
M. Trudel (Yves) : Bien,
ce qui est important, c'est, premièrement, en ce moment, il n'y a pas de
sanction administrative pécuniaire. Mais, en plus, pour répondre à l'inquiétude
que pourrait avoir une entreprise telle que vous le soulevez, l'avantage avec
le projet de loi actuel, s'il était sanctionné, c'est que l'AMP, nous aurions
discrétion pour émettre ou non une sanction pécuniaire en fonction du
manquement. Donc, si c'était une erreur, par exemple, et que l'entreprise nous
expliquait son erreur, je ne serais pas très, très porté à émettre une sanction
pécuniaire à ce moment-là.
M. Arcand : C'est ça.
Mais, moi, je me rappelle, parce qu'en 2010 on avait fait... à un moment donné,
on avait introduit cette notion-là de sanction administrative pécuniaire en matière
d'environnement. Et il y avait différents niveaux, là, il avait été établi, à
l'époque, un certain nombre de niveaux. Si quelqu'un, par exemple, faisait une
erreur très faible, bon, c'était vraiment minime, etc. Est-ce qu'il y a
différents niveaux de votre côté?
M. Trudel (Yves) : Il y
aura définitivement différents niveaux de prévus. Et je dois vous dire qu'en ce
moment même nos équipes de juristes avec les équipes du Secrétariat du Conseil
du trésor travaillent, en ce moment même, à l'élaboration des montants de
l'infraction, du manquement. Donc, on est là-dedans présentement.
M. Arcand : Mais donc la
décision de rendre ça public va être une décision de l'Autorité des marchés
publics en fonction de l'importance de la faute.
M. Trudel (Yves) : En
fait, lorsque nous émettrons une sanction pécuniaire, elle sera rendue
publique, lorsque nous l'émettrons. En réponse à votre première question, c'est
en cas d'inquiétude d'une entreprise de se voir inscrite au registre des
sanctions administratives pécuniaires, sur notre registre, à ce moment-là,
c'est ça.
Mme Hamel (Chantal) : ...on
va avoir une discrétion. Donc, si d'emblée l'entreprise réussit à nous
démontrer qu'elle a commis une erreur, que c'était de bonne foi, bien,
l'Autorité des marchés publics n'imposera pas de sanction administrative
pécuniaire à cette entreprise-là, le cas échéant.
M. Arcand : Parce que
vous savez qu'aujourd'hui, avec les médias sociaux, avec tout ce qui se passe,
les réputations, il faut être prudent au niveau de certaines réputations...
M. Arcand : ...on s'aperçoit
que quelqu'un peut avoir commis une erreur très mineure et se voir inscrit,
etc. Donc, c'est vous qui allez décider si l'infraction est suffisamment
importante pour pouvoir inscrire ça publiquement?
M. Trudel (Yves) : Tout à
fait. Et notre réflexion aurait également porté sur les réseaux sociaux. Donc,
l'impact que ça pourrait avoir sur une entreprise qui aurait commis une erreur,
ça a fait partie de notre réflexion, tout à fait.
M. Arcand : O.K. Sur les
délais de traitement des dossiers, comme tel, je sais que vous l'avez abordé
avec le ministre, vous avez dit: Les délais vont être réduits. J'aimerais que
vous me parliez justement de ces délais, actuellement, puis ce vers quoi vous
allez tendre.
M. Trudel (Yves) : En fait,
actuellement, au niveau des demandes d'autorisation et de renouvellement, les
délais moyens sont de 368 jours. Ce qui fait que c'est beaucoup, donc ça a un
impact, non seulement sur l'entreprise qui attend d'obtenir son renouvellement
ou son autorisation, mais également sur le donneur d'ouvrage qui, lui, est en
appel d'offres, et donc sur la concurrence dans les marchés, même, pour
quelqu'un qui attendrait son autorisation. Ce qui fait que la présidente du Conseil
du trésor doit, à l'occasion, émettre une dérogation pour que l'entreprise qui
n'a pas encore obtenu son autorisation puisse soumissionner sur un contrat
public. Donc, les délais sont grands.
Nous pensons que nous arriverions à
réduire les délais, comme je l'expliquais tantôt, en commençant la vérification
d'intégrité dès la réception d'une demande d'autorisation ou de renouvellement,
le cas échéant.
M. Arcand : O.K. Dites-moi,
moi, je... Pas sûr de bien comprendre encore la nuance que vous faites entre la
déclaration, l'autorisation de contracter, etc. Juste pour que vous me
réexpliquiez, il reste 30 secondes, à peu près, là, alors...
Une voix : 10.
M. Trudel (Yves) : Donc, la
loi actuelle prévoit une demande d'autorisation qui est renouvelable aux trois
ans lorsque les contrats sont prévus, en termes de services, donc, 1 million et
plus, c'est prévu à la LCOP. Et construction, 5 millions et plus. Ça prend une
demande d'autorisation et un renouvellement aux trois ans, le cas échéant.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci beaucoup. C'était presque 30 secondes, cher collègue. Mme la
députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre présence. Votre mémoire est très
éclairant. À la page 5, vous parlez... vous dites que c'est important de
réduire les délais administratifs parce que ça va vous permettre d'être, vous,
sur le terrain, de prolonger le trois à cinq ans. Puis vous dites quelque chose
d'inquiétant, qu'il y a 1300 entreprises qui avaient retiré leur demande
d'autorisation parce qu'elles ne voulaient pas faire face à toutes les
vérifications. Et vous constatez qu'elles obtiennent quand même des contrats
publics sous les seuils d'autorisation. Est-ce que les modifications qui sont
faites à la loi, là, avec le projet de loi 12, ça va empêcher ça? Est-ce qu'on
ne devrait pas revoir les seuils sous lesquels on peut contracter sans avoir de
vérification?
M. Trudel (Yves) : En fait,
nous considérons que le projet de loi, c'est la meilleure solution,
présentement, au projet de loi. De revoir les seuils, ça obligerait qu'on soit
en amont dans les vérifications, et ma crainte, peu importe le seuil, c'est
qu'il y aura toujours quelqu'un qui va vouloir contracter sous les seuils, donc
échapper au volet d'intégration d'intégrité.
Présentement, peu importe la valeur du
contrat, si le projet de loi était sanctionné, nous pourrions intervenir auprès
d'une entreprise si on avait l'information qu'elle n'avait pas l'intégrité
utile pour contracter avec l'État. Et...
Mme Ghazal : ...quand elle
est sous les seuils. O.K., je comprends.
M. Trudel (Yves) : Non, nous
ne pouvons pas en ce moment. Et nous pourrions, avec le projet de loi, imposer
des mesures correctrices à l'entreprise pour la ramener dans un volet
d'intégrité à notre satisfaction.
Mme Ghazal : O.K. Merci.
Puis, par rapport aux sanctions administratives et pécuniaires, là, dans le
projet de loi, il y a des montants, là, comme d'habitude. Qu'est-ce que vous
pensez si ces sanctions-là... qu'est-ce que vous pensez de l'idée, si les
sanctions étaient proportionnelles aux revenus de l'entreprise, pour que ça ait
vraiment un impact, au lieu que ce soit des montants fixes que vous déterminez?
M. Trudel (Yves) : Si vous
permettez, Me Hamel pourrait répondre à cette question-là.
Mme Hamel (Chantal) : Oui. En
fait, c'est difficile de déterminer les revenus d'entreprise. En fait, ça
ferait en sorte qu'il y aurait une charge administrative importante pour faire
l'analyse des revenus d'entreprise. Donc, oui, dans le cadre des demandes
d'autorisation et des demandes de renouvellement, on demande les états
financiers des entreprises, mais il n'en demeure que, dans la vie de
l'entreprise, il y a souvent une fluctuation importante. De sorte que
l'Autorité des marchés publics serait toujours obligée...
Mme Hamel (Chantal) : ...à
chaque fois qu'on veut imposer une sanction administrative pécuniaire, faire
des validations qui sont longues et très laborieuses.
Mme Ghazal : Donc, si je dis
les revenus, même si c'est, par exemple, basé sur le chiffre d'affaires,
admettons, ça serait les mêmes tarifications?
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
Mme Hamel (Chantal) : Mais,
en fait, le chiffre d'affaires, c'est un peu difficile. Ce n'est pas parce
qu'une entreprise a un gros chiffre d'affaires que, nécessairement, c'est une
entreprise qui fait des revenus. Alors, je trouve que la question est très
difficile.
Le Président (M. Simard) :
Très bien. Merci. Merci beaucoup. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
pour votre mémoire et votre présence. Depuis l'adoption du projet de loi n° 66 et des 180 ou 181 projets dans l'annexe, combien de
contrats vous avez examinés?
M. Trudel (Yves) : On a
examiné, je dirais, au 31 janvier, 400 contrats sur 655 qui sont publiés au
SEAO. Donc a regardé ce qui avait été publié 400...
M. Gaudreault : Mais ces 400
contrats-là, c'est 400 contrats qui découlent directement du projet de loi n° 66.
M. Trudel (Yves) : Directement
du projet de loi 66, en plus d'avoir effectué plus de 20-25 visites chantier en
plus. Donc, ça nous a amenés sur le terrain. C'est ce que le projet de loi nous
a donné comme pouvoir.
M. Gaudreault : Mais 25 sur
400, 25 visites de chantier sur 400, est-ce que c'est une bonne proportion?
M. Trudel (Yves) : C'est très
bien, très bien. Et, en ce moment, dans le cadre du projet de loi n° 66, c'est important de le dire, on n'a pas reçu de
dénonciations puis de plaintes. Les informations, on va les cueillir sur les
chantiers. Donc, ça semble assez conforme.
M. Gaudreault : La Loi sur
l'Autorité des marchés publics, prévoit son article 68, qui ne peut pas y avoir
de concurrence, si on veut, là, entre l'AMP le Bureau de l'inspecteur général.
Donc, il y a comme un partage des fonctions. Est-ce que le projet de loi n° 12 risque de nous amener dans de la confusion ou un
chevauchement dans les fonctions du BIG vers les vôtres?
• (10 h 50) •
M. Trudel (Yves) : Ah! pas du
tout. Donc, le BIG a juridiction sur l'île de Montréal avec les contrats
municipaux de la ville de Montréal. Donc, on laisse aux BIG la ville de
Montréal, puisqu'elle a juridiction, puis on s'occupe du reste de la province.
M. Gaudreault : Mais il y a
quand même des contrats qui peuvent être concomitants, je dirais, là, sur le
territoire de la ville de Montréal.
M. Trudel (Yves) : Il y a des
entrepreneurs qui font affaire, bien entendu, avec d'autres municipalités et/ou
l'État québécois, qui font également affaire sur l'île de Montréal. Et,
effectivement, on s'échange l'information si jamais il y avait de l'information
utile à obtenir ou à donner à nos collègues.
M. Gaudreault : Mais qu'est
ce que va amener de façon différente le projet de loi n° 12
là-dessus?
M. Trudel (Yves) : Au niveau
de la Ville de Montréal et de notre relation avec le Bureau de l'inspecteur
général, aucune différence.
M. Gaudreault : O.K.
Maintenant... Est-ce qu'il me reste du temps, M. le Président?
Le Président (M. Simard) : Oui,
il vous reste 30 secondes, cher collègue.
M. Gaudreault : O.K. Sur les
projets de la Caisse de dépôt et placement, est-ce que... il y a quand même
beaucoup d'argent et de contrats qui sont accordés. Est-ce que vous voudriez
avoir compétence là-dessus aussi ?
M. Trudel (Yves) :
Présentement, nous n'avons pas juridiction. Puis je vous laisserais le soin,
les élus, de débattre, si on devrait avoir ou pas juridiction. Je n'ai pas pas
d'intérêts ou de l'intérêt. Donc, je reste neutre dans ça. Je vous laisse à
vous le soin de déterminer...
M. Gaudreault : O.K., c'est
parce que vous voulez beaucoup de pouvoir sur plein de choses, mais sur la
Caisse de dépôt, non.
M. Trudel (Yves) : En fait,
ce n'est pas dans notre juridiction actuellement. Pis je vous laisse le soin de
débattre de ce volet-là.
M. Gaudreault : C'est bon.
Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
M. Trudel, Mme Hamel, merci beaucoup pour votre présentation très constructive.
Alors, nous allons suspendre nos travaux momentanément, le temps de faire place
à nos prochains invités, et au plaisir de vous revoir parmi nous.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 10 h 56)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Bienvenue à
toutes et à tous. Nous sommes en présence des représentants de la Chambre de
commerce du Montréal métropolitain ainsi que du groupe Propulsions Québec.
Madame, Monsieur, bienvenue à vous deux. Vous savez que vous disposez de
10 minutes pour faire votre présentation. Mais pour les fins de nos
travaux, vous auriez vous d'abord l'amabilité de vous présenter?
M. Leblanc
(Michel) :Alors, je suis Michel Leblanc,
le président et chef de direction de la Chambre de commerce du Montréal
métropolitain. Bonjour.
Mme Houde (Sarah) : Sarah
Houde, présidente-directrice générale de Propulsion Québec, la grappe des
transports électriques et intelligents du Québec.
Le Président (M. Simard) : Merci
d'être là. Nous vous écoutons.
M. Leblanc
(Michel) :Alors, d'abord, merci beaucoup
de nous accueillir. Vous avez un deux pour un aujourd'hui. Je vais référer un
peu à notre collaboration. Mais, d'abord, je tiens à souligner à quel point je
pense qu'au nom du milieu des affaires je dois dire qu'on est très heureux que
le Parlement regarde ce projet de loi, on est très heureux du projet de loi et
c'est un exercice qu'on espérait voir depuis longtemps. Et donc on est
confiants que vous saurez mener à terme pour qu'on arrive enfin à avoir un
outil qui va nous permettre d'atteindre un objectif qu'on devrait avoir tous,
ce qui est d'utiliser les marchés publics, le gouvernement comme pilier de
développement économique au Québec. Beaucoup de sociétés à travers le monde ont
déjà fait ça. On sait que les accords de libre-échange permettent de le faire
quand c'est bien fait, et c'était une question de temps pour qu'on s'organise
ici...
M. Leblanc
(Michel) :...faire nous-mêmes. Ce que
vous avez devant vous aujourd'hui, c'est... je pense qu'on est un peu connus
quand même, mais c'est un représentant du milieu des affaires de la région de
Montréal et une représentante d'un secteur de force pour tout le Québec, mais
aussi pour la région de Montréal. Et, à travers le temps, ce qu'on a fait,
c'est de se poser la question : Comment on pourrait utiliser ce secteur
qui se développe pour illustrer l'importance des marchés publics. Et donc, en
2019, on a fait une première étude sur les façons de renforcer le secteur. Et,
en 2020, on a fait une étude qui y faisait suite, parce que, dans la première,
on disait : Les marchés publics sont un levier qu'on devrait utiliser et
on devrait se doter de critères qui, tout en étant des critères nobles, des critères
acceptables aux ententes de libre-échange, vont permettre de renforcer la base
économique. Et l'étude de 2020, qui s'intitulait Faire des marchés publics un
outil stratégique de développement économique et de renforcement d'innovation
au Québec, bien, portait directement sur l'objet de ce projet de loi.
On identifiait dans cette étude trois conditions
essentielles. La première, une volonté politique claire et un alignement des
politiques publiques et des processus opérationnels, et ça fait référence, dans
le fond, aux déclarations de stratégie du gouvernement. Et on est très heureux
que cette première condition ait été tout de suite remplie, on va se doter d'un
cadre stratégique. Ensuite, le deuxième élément, c'était qu'il fallait... iI
faut modifier l'encadrement juridique. Et c'est pour ça que le projet de loi
est essentiel. La volonté politique ne suffira pas. Et le troisième, qui est
aussi important, et ce sera par les règlements peut-être, mais ce sera surtout
par les pratiques, c'est de transformer la culture organisationnelle au
gouvernement pour aller dans la direction où on veut aller, c'est-à-dire
d'utiliser les processus des marchés publics, des marchés publics eux-mêmes,
comme étant un levier de développement économique.
• (11 heures) •
Je vais être très, très rapide, je veux
laisser le maximum de temps à Sarah, mais c'est clair qu'à travers ses
approvisionnements, le gouvernement a la possibilité de changer bien des choses
pour beaucoup d'entreprises. Et le premier élément, c'est de sortir de ce qu'on
a toujours connu historiquement comme étant une bonne pratique, et, récemment,
on sait que ce n'est pas nécessairement la meilleure pratique, qui est la
question des de l'appel au plus bas soumissionnaire. Notre étude dit qu'on doit
carrément migrer vers ce qu'on va appeler les offres les plus économiquement
avantageuses. Par économiquement avantageux, évidemment, ça tombe sous le sens
de considérer tous les coûts du cycle de vie d'un équipement. Ça veut dire de
considérer tous les effets qu'il peut y avoir, ce qu'on va appeler parfois des
externalités négatives, donc des coûts qui sont reproduits ou qui sont produits
sur le reste de la société. Et le meilleur exemple, c'est évidemment, si on y
va aussi vers l'impact sur l'environnement, bien, c'est un exemple typique où,
si on intègre les coûts de transport et l'impact carbone d'un bien qu'on
achète, bien, possiblement que de l'acheter localement va devenir rapidement
plus rentable, peut-être au niveau des coûts, mais sûrement au niveau des coûts
sociaux complets.
Donc, à partir du moment où on se dote
d'une stratégie qui nous permet de sortir du plus bas soumissionnaire, la
question que je pose, c'est : Est-ce qu'on aurait pu aller, dans le projet
de loi, plus loin? Et non pas de dire que la règle, c'est le plus bas
soumissionnaire, on est très ouverts à ce que les gens adoptent d'autres
processus et on va les former pour qu'ils le fassent régulièrement. On aurait
pu aller plus loin en disant : La règle, c'est de ne pas faire le plus bas
soumissionnaire, mais lorsque c'est pertinent de le demander, de renverser la
demande d'exception, que le plus bas soumissionnaire devienne l'exception,
parce qu'on achète des feuilles lignées, parce qu'on achète des matériaux qui
ne me demandent pas d'avoir des critères d'innovation ou d'avoir des critères
d'impacts environnementaux.
Deuxième point, on se pose la
question : Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas systématiquement un critère
d'innovation qui serait intégré à tout appel d'offres, sauf exception? Donc,
encore une fois, de renverser le fardeau qui est : on demande de
l'innovation, sauf lorsque, dans les processus, on démontre que ce n'est pas
pertinent.
Et le dernier point par rapport à la
stratégie, je l'ai évoqué, il a été question d'un pourcentage d'appels d'offres
qu'on voudrait voir octroyer en région versus Montréal et Québec. On questionne
ce qu'il y a derrière ce chiffre de 60 %. Notre préoccupation, c'est
simplement qu'une entreprise de Montréal ou Québec qui arriverait à
41 % : Bien non, sais-tu, on a atteint notre limite de 40 % puis
tu n'es plus admissible. On questionne concrètement ce que ça voudrait dire.
Je terminerai en disant tout simplement
qu'on devrait se donner comme objectif de réviser, d'ici cinq ans, l'impact
réel. Donc, autrement dit, il y a des décisions qu'on prend là, c'est dans
quelques années qu'on pourra voir si ça fonctionne et si la culture
organisationnelle s'est transformée. Sarah.
Mme Houde (Sarah) : Merci,
Michel. Donc, peut-être rapidement vous parler de Propulsion Québec. On est,
depuis 2017, la grappe des transports électriques intelligents. Nous regroupons
250 membres...
11 h (version non révisée)
Mme Houde (Sarah) : ...qui
sont de la start-up à la grande entreprise, mais qui sont aussi des centres de
recherche, des universités ou des opérateurs de mobilité du Québec. Nos 250
membres manufacturent, assemblent des véhicules électriques, de la trottinette
au train, et tout ce que vous pouvez imaginer entre les deux, sauf des
voitures, bien sûr, assemblent des infrastructures de recharge, manufacturent
des pièces, des composantes pour ces véhicules ou infrastructures, mais aussi
pour des véhicules intelligents ou des infrastructures intelligentes, et ont
développé et offrent des nouveaux services de mobilité, là, des nouveaux
modèles d'affaires en mobilité comme l'autopartage, le vélopartage. Donc, on
est très axé sur le futur de la mobilité. Et nous avons réalisé effectivement,
avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, avant la pandémie, cette
étude sur l'approvisionnement public. Déjà, à cette époque, nous pensions que l'approvisionnement
public, les marchés publics pouvaient être utilisés comme un levier stratégique
pour le développement économique, mais aussi pour l'atteinte de nos objectifs
environnementaux. Et nous avons utilisé notre industrie, le secteur des
transports électriques, comme étude de cas, et notamment parce qu'on pense que
c'est un secteur extrêmement stratégique pour l'avenir de l'économie du Québec.
Un jour, nous aurons absolument besoin de nous déplacer en véhicule électrique
et, si on les assemble ici, qu'on s'organise pour ne pas avoir à les importer
dans les prochaines années, bien, on pense que ce sera une stratégie gagnante
pour le Québec.
Donc, nous avons réalisé cette étude
effectivement et, nous aussi, nous sommes très heureux de ce projet de loi 12,
nous pensons que c'est un pas important pour les entreprises de notre
écosystème, que cela aura un impact majeur sur notre secteur. On tient à
souligner la volonté du gouvernement de favoriser l'innovation et l'approvisionnement
local, qui sont deux éléments clés qui permettront, là, d'atteindre nos
objectifs. Nous pensons cependant qu'il est nécessaire de poser des gestes
concrets pour renforcer la place de l'innovation et du développement durable,
tout en assurant l'exemplarité de l'État dans la formulation du projet de loi,
et donc qui nous permettront vraiment de passer à l'action pour mettre en place
des critères de développement durable obligatoires qui permettront de répondre
aux objectifs du Plan pour une économie verte.
Donc, je vais revenir plus précisément sur
nos recommandations que vous avez pu lire dans notre mémoire lié d'abord à l'innovation.
Nous proposons de préciser dans quelles circonstances et selon quels critères
la présidente du Conseil du trésor exigera qu'un organisme public procède à un
appel d'offres sur invitation pour acquérir un prototype ou pour... qui
comporte un dialogue compétitif dans le but que cette pratique devienne une
pratique courante et non une pratique exceptionnelle. Nous pensons qu'un
pouvoir discrétionnaire, évidemment, ce n'est pas une obligation, ça constitue
encore une application volontaire, c'est un gain, c'est un pas vers l'avant,
mais nous sommes inquiets que la pratique demeure marginale et nous vous
demandons de préciser les circonstances dans le but d'augmenter le recours à
ces pratiques et éviter que ça demeure une pratique marginale. Nous proposons
également d'ajouter la mention Innovation à l'article 2 de la Loi sur les
contrats des organismes publics. Parmi la liste des objectifs, nous pensons que
d'ajouter ce mot-là dans les objectifs de la LCOP permettra de bien positionner
l'innovation comme un objectif réel.
Nous voulions vous donner, à cet égard, l'exemple
d'un de nos membres, Ambulances Demers, qui a développé une ambulance
électrique, qui est vraiment un produit innovant et qui a de belles perspectives
d'être exporté à l'étranger. C'est quand même un défi de construire une
ambulance électrique qui est sécuritaire, sur laquelle on peut se fier, qui
est, évidemment, un haut besoin de fiabilité puisque c'est une ambulance, mais
ça permet quand même de réduire l'empreinte carbone et de positionner le Québec
comme un leader en innovation dans notre secteur. Comment est-ce qu'on va
pouvoir s'assurer que les organismes publics, que les hôpitaux du secteur de la
santé vont pouvoir profiter de ces ambulances-là? Nous pensons qu'il faudrait
que... si ça demeure optionnel, nous sommes inquiets que, peut-être, les
gestionnaires vont encore aller vers la pratique la plus courante et ne vont
pas nécessairement exiger des critères environnementaux dans leur appel d'offres.
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
Mme Houde (Sarah) : Oui, en
conclusion, nous recommandons également d'instaurer un mécanisme de suivi plus
global. Oui, le projet de loi prévoit un mécanisme de suivi pour les marchés
décrétés par la présidente du Conseil du trésor, mais nous recommandons un
mécanisme de suivi de façon plus globale pour le système d'approvisionnement,
un peu à l'image des recommandations du G15+. Nous recommandons également que
le développement durable soit pris à travers les différentes voies de passage
du projet de loi. Encore une fois, là, nous pensons que la notion de cycle de
vie de chaîne d'approvisionnement devrait devenir une obligation, actuellement,
ce n'est pas explicite. Nous proposons également d'ajouter un principe de
non-régression qui permettrait de ne pas reculer une fois qu'on a réalisé des
avancées. Et évidemment, comme l'a précisé Michel, nous proposons...
Mme Houde (Sarah) : ...D'ajouter
un mode d'adjudication fondé sur la règle de l'offre la plus économiquement
avantageuse plutôt que la loi du plus bas soumissionnaire.
Et un dernier point très important.
Le Président (M. Simard) : Oui,
vraiment, en conclusion.
Mme Houde (Sarah) : Un
dernier, dernier, dernier point.
Le Président (M. Simard) : Oui.
Mme Houde (Sarah) : C'est
qu'en fait, on aimerait voir un bâton et une carotte. Qu'est-ce qui fait que
les gens vont avoir... vont être incités, finalement, à aller vers d'autres
façons de fonctionner que le plus bas soumissionnaire? Comment on peut les
inciter à aller de cette façon-là?
Le Président (M. Simard) : ...On
pourra poursuivre durant l'échange.
Mme Houde (Sarah) : Oui,
absolument.
Le Président (M. Simard) : Si
ça ne vous dérange pas.
Mme Houde (Sarah) : Tant
de choses à dire.
Le Président (M. Simard) : Mme
la ministre, vous avez 16 minutes.
Mme LeBel : Bien,
justement, écoutez, je voulais... J'essayais de faire en disant :
N'accélérez pas trop parce que j'ai quand même 16 minutes de discussion
avec vous. Puis je vais vous donner l'occasion de compléter. D'ailleurs, je
vais peut-être juste cadrer un peu la discussion. C'est important de
mentionner, pas de comprendre, parce que vous le comprenez donc le terme est mal
choisi, mais de mentionner que le projet de loi est une composante d'une
stratégie. D'ailleurs, monsieur Leblanc, vous faisiez... Mentionnez la cible de
60 %. Elle n'est pas au projet de loi, la cible, mais dans la stratégie.
Donc... Qu'on fasse la part des choses, pas parce que je pense que ce n'est pas
pertinent, mais il y a ce qu'on peut faire dans le cadre de l'étude du projet
de loi, puis, effectivement, vos préoccupations par rapport aux cibles. On a eu
l'occasion d'en discuter antérieurement, mais je les comprends très bien. Mais
ça fait partie de la stratégie et ce sont des cibles qui sont visées,
naturellement, à terme, sur cinq ans.
• (11 h 10) •
Je veux juste qu'on... parce qu'il y a
beaucoup de choses. Il y a beaucoup de choses qui sont importantes puis il y a
beaucoup de choses dans le projet de loi qui doivent se lire aussi avec la
stratégie pour être capable de bien comprendre l'objectif gouvernemental et la
direction qu'on souhaite prendre et atteindre. Je peux vous rassurer. Bon, on
vient de recevoir vos mémoires respectifs, donc mes questions vont peut-être
être moins pointues que je l'aurais souhaité. Mais on va prendre le temps de
les analyser.
Je dois aussi mentionner que quelques-unes
de vos recommandations s'adressent à la réglementation et non pas au projet de
loi. Vous faisiez référence, monsieur Leblanc, à la règle du plus bas
soumissionnaire. Vous ne vouliez pas qu'elle soit la règle habituelle. Ce n'est
pas réglementation qu'on pourra poursuivre le travail. Je vous rassure, j'ai la
même sensibilité. Maintenant, de voir si on doit, dans un cadre, un projet de
loi, être trop encarcané... Parce que je pense qu'on a la même préoccupation de
faire évoluer les marchés publics le mieux possible, le plus rapidement
possible. Donc, je pense qu'il y a différents motifs de le faire, mais je veux
juste recadrer la discussion.
D'ailleurs, dans une des... la
Recommandation... une des recommandations dans la section du mémoire de
Propulsion Québec, c'est justement de revoir le règlement, donc, dans ce
sens-là pour la loi sur le plus bas soumissionnaire.
Ceci étant dit, je vous donne encore
quelques minutes peut-être pour terminer votre présentation puis ça va me
permettre d'alimenter ma discussion avec vous, compte tenu que je prends un
petit peu connaissance de votre mémoire au fur et à mesure que vous parlez.
Donc, ça va me permettre de bien intégrer certaines choses et d'avoir une
meilleure... Peut-être une meilleure discussion avec vous.
Mme Houde (Sarah) : Merci,
c'est apprécié. Bien, c'était simplement pour... toujours, toujours dans cet
esprit d'éviter que ces... parce qu'on l'a précisé plus tôt, on cherche à
changer une culture, à... Oui, on dit : Bien, on va vous former à mieux
utiliser le système actuel pour vous sortir de la loi du plus bas... de la
règle du plus bas soumissionnaire lorsque ce n'est pas nécessaire, lorsqu'on ne
commande pas une tablette de papier ligné, pour reprendre cet exemple.
Mme LeBel : ...
Mme Houde (Sarah) : Pour
reprendre cet exemple. Seulement, ce qu'on se demande, c'est d'abord est-ce
qu'on se donne suffisamment d'indicateurs pour suivre ça, année après année,
pour suivre l'avancement puis cette transformation de culture? Puis est-ce
qu'on donne assez... Est-ce qu'on met en place un cadre suffisamment incitatif
et même, je dirais, tu sais, un cas de bonus-malus pour récompenser finalement
ceux qui vont vraiment s'engager dans cette transformation de culture là?
Donc, à la fois, peut-être, nous, ce qu'on
recommandait, c'est peut-être d'ajouter une obligation de se justifier quand on
utilise la loi... la règle du plus bas soumissionnaire, alors je dois
l'expliquer : Ceci est un produit qui, bon, est plus applicable à
l'utilisation de cette règle-là, et un incitatif pour ceux qui vraiment se sont
donné la peine deviennent des ambassadeurs auprès de leurs collègues. Parce
qu'on pense que c'est aussi par la pratique que ce processus-là, ce réflexe-là
va se développer. Donc, est-ce qu'il y a moyen d'intégrer un bâton et une
carotte? Voilà.
M. Leblanc (Michel) :Je peux compléter moi aussi. D'abord, vous avez
parfaitement raison. Puis, avec le temps, on a bien compris qu'on discute d'un
projet de loi à chaque fois qu'on est en consultation. Mais c'est très
difficile pour nous d'en discuter sans aborder la question de l'application,
donc, des règlements et, dans bien des cas comme dans celui-ci, sans discuter
de la vision globale qui est d'ordre stratégique. Donc, c'est pour ça quand on
vient puis on discute des trois en même temps.
Mais je voudrais juste revenir sur ce que
Sarah évoquait, qui est le changement de culture au gouvernement dans le cadre
de l'application du projet de loi...
M. Leduc (Michel) : ...et
notamment sur la volonté qu'on intègre les PME. Et cette notion de dire qu'on
va intégrer des PME, donc on va briser, si on veut, les lots, les rendre d'une
façon qui sont plus accessible aux PME va avoir un impact sur les coûts. Parce
qu'en général, si on va avec des grands fournisseurs qui ont des grandes
économies d'échelle par opposition à des petits fournisseurs et souvent des
petits fournisseurs aussi qui ont des modèles innovants... Alors, la question,
derrière tout ça, va devenir aussi la question du suivi. Et je pense que le
projet de loi doit être très explicite sur les mécanismes de suivi parce qu'il
faut qu'on ait l'occasion, dans cinq ans, de faire le point sans que ça soit un
gros débat politique, mais un débat d'efficacité : Est-ce qu'on y arrive?
Ça ne sera pas automatique, ça ne sera pas si facile. Je peux vous dire, dans
le privé, les changements de culture organisationnelle, c'est souvent vu comme
étant le plus gros défi, bien plus que de changer la règle de l'entreprise.
Mme LeBel : Je comprends très
bien l'idée, je comprends. Puis l'idée, d'ailleurs, je l'ai dit dans ma
présentation lors de mon allocution de départ aux consultations, c'est de bien
situer tout ça dans l'ensemble. Et je pense que c'est important de le dire,
qu'il y a une stratégie. Mon commentaire n'était pas vous dire :
Limitez-vous au projet de loi, mais plutôt que c'est bon de le spécifier, parce
que pour ne pas donner l'impression que, parce que ce n'est pas fait dans le
projet de loi, ça ne peut pas se retrouver ailleurs. Parce que pour moi, il y a
l'objectif poursuivi, et le meilleur véhicule pour l'atteindre, et ce n'est pas
toujours dans le cadre du projet de loi. Pour avoir une meilleure agilité, des
fois, c'est dans une directive, dans une stratégie, dans un règlement qu'on
doit décliner les différentes façons de faire, les objectifs, pour garder, je
dirais, un bel équilibre entre une structure très cadrée et une agilité
d'évoluer. Donc, c'était simplement l'objet de mon commentaire.
D'ailleurs, j'aimerais d'ailleurs
peut-être revoir, avec vous, un peu aussi tout ce qui est la question du coût
du cycle de vie, de la juste valeur, dans le fond, et j'aimerais qu'on en
discute un peu plus. Je suis d'entrée de jeu d'accord avec cette idée-là. J'ai
eu l'occasion de l'expliquer, de l'exposer. Ma grande préoccupation est de
s'assurer que c'est à l'avantage du Québécois. L'avantage étant très large et
pas juste l'avantage du prix brut, mais ça peut-être, comme vous le disiez, les
retombées économiques, l'avantage environnemental, le développement durable.
Pour moi, ça doit s'évaluer avant de se décliner dans l'ensemble des marchés
publics, et c'est un peu la raison d'être de l'espace d'innovation que l'on
crée à l'intérieur du projet de loi. C'est une façon que nous avons trouvée
d'enfin aller de l'avant avec une évolution des marchés publics. Je pense que
je suis capable de comprendre. Arrivant d'une culture où, bon, faire bouger des
règles qui sont des règles de saine gestion, de saine concurrence, d'intégrité,
on doit le faire quand on est certain qu'on va dans une direction qui maintient
ces principes-là. Et souvent on peut se priver d'innovation et d'ouverture par
prudence, mais je pense que la prudence est de mise quand on parle des marchés
publics.
Donc, l'idée derrière la création de cet
espace d'innovation là est de justement se permettre d'avoir, je dirais, un
dôme, un endroit, parce que, je le dis, ce n'est pas une proportion, c'est un
endroit où on peut se permettre de faire ce genre d'innovation là, de se donner
l'opportunité de l'évaluer et que, si elle rencontre bien les objectifs ou les promesses
que l'on y voit, qu'on puisse, après ça, intégrer ces principes-là.
Et je veux voir si, avec vous, c'est bien
compris, si vous pensez que c'est que c'est adéquat. Et, bon, j'ai eu
l'occasion, par contre, peut-être pas votre mémoire, mais de voir, là,
différents rapports d'étude, entre autres, en septembre 2020. Je ne sais pas si
ça vient de la Chambre de commerce, je pense, sur l'affaire des marchés
publics... Un outil stratégique de développement économique et de renforcement
de l'innovation au Québec. Donc, on s'est quand même inspirés beaucoup de ces
objectifs-là en essayant de trouver le moyen de garder cet équilibre que je
vous mentionne. Puis pour moi, c'est exactement ça l'objectif. Donc, peut-être
vos commentaires là-dessus de façon un peu plus large, parce que je vous dis,
on va vraiment examiner toutes vos recommandations pour l'étude détaillée. Je
vous le confirme. Mais là c'est un peu plus complexe pour moi d'en discuter,
là.
Mme Houde (Sarah) : Bien,
nous, on pense que pour le Québécois, on devrait toujours favoriser la valeur
plutôt que le prix, toujours. La...
Mme LeBel : Mais la question,
c'est l'évaluation de cette valeur-là. La théorie, j'y adhère à la théorie.
Mme Houde (Sarah) : Bien,
effectivement, la notion de cycle de vie d'un produit, c'est une bonne façon de
mesurer la valeur parce que ça nous donne une perspective beaucoup plus large.
D'ailleurs, encore une fois, nous pensons que cette notion-là devrait être
systématiquement évaluée. D'ailleurs, on a certains de nos membres, juste pour
revenir sur le point des PME dont parlait Michel, on a certains de nos membres
qui, s'ils constatent que la règle du plus bas soumissionnaire conforme est
nommée dans l'appel d'offres, ne participent....
Mme Houde (Sarah) : ...
simplement pas parce que leur produit ne sera pas compétitif. Un véhicule
électrique, c'est plus cher qu'un véhicule à essence encore, malgré le fait que
sur le cycle de vie, on peut épargner sur les coûts d'opération et les coûts
d'entretien et que sur un cycle de vie complet, et sans compter les
externalités environnementales et sociales, puisque ces véhicules-là sont faits
ici, embauchent des gens d'ici, donc ne vont simplement pas participer à ces
appels d'offres là. Donc, selon nous, le calcul du cycle de vie, c'est vraiment
une bonne façon de mesurer la valeur.
M. Leblanc
(Michel) :Deux choses. Premièrement,
c'est clair que le coût du cycle de vie, le coût sur le cycle de vie, il n'est
pas toujours facile à estimer dès le départ. Puis, évidemment, pour un
responsable d'approvisionnement qui recevrait des évaluations différentes, de
distinguer la bonne de la mauvaise, c'est très difficile. Donc je ne suis pas
en train de dire que c'est simple. Je suis en train de dire par là qu'on n'est
pas les premiers et qu'ailleurs dans le monde, il y a des meilleures pratiques
qui sont en train de se développer. Et donc, peut-être qu'à travers le
gouvernement, il devrait y avoir une unité qui va aller s'inspirer concrètement
des meilleures pratiques ailleurs. Ça, c'est la première chose.
Deuxièmement, moi, j'appuie beaucoup votre
concept d'avoir des espaces d'innovation, de se permettre d'avoir des endroits
où on pourrait aller en appel d'offres, où on demande aux gens de proposer des
solutions pour obtenir des résultats, eux, très bien définis, mais de laisser
aux entreprises le loisir d'arriver avec des propositions qui sortiraient de
l'ordinaire. Et je vous dirais, puis là, je pense que ça va nous prendre la
maturité d'admettre qu'à certains moments, c'est bon de consulter des
entreprises avant de faire l'appel d'offres pour voir comment on peut faire un
appel d'offres qui va stimuler le plus possible une réponse de la part des
entreprises. Et je dis que ça va nous prendre de la maturité, parce que d'un
point de vue politique, ça exposera toujours à cette perception qu'il y a
collusion, qu'il y a copinage, qu'il y a des entreprises qui sont plus proches
des décideurs. Mais dans les faits, si on veut aller de l'avant vers une vraie
société innovante, il y a des moments où le fonctionnaire, le gouvernement ne
pourra pas savoir exactement comment je définis mon appel d'offres pour
stimuler cette réponse. Et donc, je vais aller vous consulter. Et si c'est fait
de façon transparente, si c'est fait avec toutes les meilleures pratiques, moi,
je pense qu'on va y arriver, mais ça va nous prendre un peu de maturité
collective.
• (11 h 20) •
Mme LeBel : Bien, je pense
que c'est exactement... puis mon objectif n'est pas d'argumenter, mais de
voir... C'est exactement l'objectif de l'Espace Innovation. C'est pour ça qu'il
n'est pas défini en termes de proportion, mais en termes de dire :
Identifions les secteurs, les moments où c'est important d'aller, j'allais
dire : Expérimenter ces bonnes pratiques là, de se donner l'occasion
d'aller voir ailleurs ce qui se fait, se donner l'occasion.
Parce que je suis très... je reviens sur
le calcul du cycle de vie. Puis pour moi, c'est fort important quand on parle
de l'intégrité des marchés publics et je ne veux pas être simpliste, mais c'est
facile de voir que l'item X qui coûte 2 dollars et l'item X, le même item
X qui coûte 1, 50 $, pour tout le monde, c'est facile de voir qu'à
première vue, on fait une économie de 0,50 $, bon. Mais quand on parle de
l'item X qui dure plus longtemps, qui coûte moins cher en transport, qui coûte,
na, na, na, coûte 2 dollars et l'autre, bon... comment on est... et là,
1,50 $, puis qu'on fait la proportion. Je pense que ce calcul-là, on doit
se donner l'occasion de l'expérimenter, de voir comment le faire. Parce que mon
autre question est : Est-ce que le donneur d'ouvrage ou le donneur... le
ministère et organisme doit à toutes les fois se fier aussi à l'entreprise? La
réponse, c'est : Un peu des deux, mais il faut se donner... Puis vous
parliez de former des unités à l'intérieur du gouvernement, mais c'est aussi
l'objectif de l'Espace d'innovation d'acquérir cette maturité qui va être
nécessaire, justement.
Et c'est pour ça que je voulais voir, un
peu vous entendre. Puis l'idée, c'est d'y avoir une certaine souplesse, et je
ne sais pas si vous avez noté la possibilité qu'on s'est donné, de façon
réglementaire, de ne pas revenir en projet de loi quand une bonne idée ou une
bonne façon de faire est, je ne dirais pas : Avérée, parce que le fardeau est
peut-être trop élevé, mais disons que remplit des promesses qu'on lui imputait.
Et on peut. Par voie réglementaire, à ce moment-là, à l'instar de la loi sur le
plus bas soumissionnaire et de toutes les autres méthodes d'adjudication, en
faire une méthode privilégiée du gouvernement. Donc, je comprends, là, parce
que ça fait longtemps que vous attendez. Vous aimeriez qu'on aille plus
rapidement, plus loin. Mais j'aimerais juste qu'on constate... en tout cas, je
ne vous force pas à le dire, mais qu'on a quand même... on prend la direction
qu'on doit prendre, là, par rapport à vos rapports précédents.
M. Leblanc
(Michel) :On arrive... en fait, les deux,
là, mais moi, je vais parler pour moi, on arrive extrêmement supportant de la
démarche. On pense qu'on pourrait aller un petit peu plus vite, mais dans les
faits, là, ça ne doit pas être perçu comme étant une critique. Ça va être perçu
comme étant, je pense, un signe qu'on est rendus là. Puis c'est la bonne façon
de faire. Je terminerais juste en vous disant qu'un des défis, c'est donner
la...
M. Leblanc
(Michel) : ...prévisibilité, et c'est là qu'il risque d'y avoir
un petit enjeu. Sarah disait : Il y a des entreprises qui sont dans
l'innovation qui disent, moi, si vous allez vers le plus bas soumissionnaire,
je n'y vais juste pas, c'est une perte de temps. Par ailleurs, ça donne une
certaine prévisibilité. Quand on va ouvrir les appels d'offres avec des
environnements où on veut de l'innovation, où on veut tenir compte du cycle de
vie, ça peut créer chez certains une impression qu'il y a comme une loterie.
Est-ce que mes critères vont être les bons? Alors je vous dirais on va
apprendre ensemble.
Mais un des défis va être de dire :
O.K. quand est ce qu'on veut donner de la prévisibilité pour que les gens
s'engagent dans une démarche de définir une offre puis qu'ils sentent qu'ils
comprennent comment ça va ê re donné, et d'autres qui vont dire à certains
autres moments : O.K., c'est ouvert, tant mieux, je vais pouvoir y avait
quelque chose d'innovant qu'on n'a jamais vu. Donc, on va apprendre ça. Donc,
il va y avoir des critiques. Moi, je vous dis il y a du privé qui va
dire : Moi, je veux plus de prévisibilité. Il y en a d'autres qui vont
dire : Moi, je veux qu'on tienne absolument compte de ma capacité
d'innover, d'arriver avec une solution innovante. Ça nous prendre de la
maturité
Mme LeBel : Et un équilibre
entre les deux. Je veux juste vous vous réitérer le fait qu'on va prendre
connaissance dans les détails de mon mémoire, puis on pouvoir voir à quel point
on peut, je dirais, améliorer les choses dans le même objectif, là. Puis il
reste quelques secondes, si vous voulez conclure.
Mme Houde (Sarah) : Effectivement,
vous pouvez y voir... vous pourrez voir dans notre dans notre étude que nous
recommandons des meilleures pratiques prises à l'étranger. Donc, il y a des
suggestions, notamment sur le dialogue compétitif qu'on a évoqué un petit peu
plus tôt, le développement d'outils pour calculer le cycle de vie à l'intérieur
même des organismes publics donc pour vraiment outiller nos donneurs d'ouvrage
à le calculer ce cycle de vie là. Et aussi, si on exige une justification
lorsqu'on a recours à la règle du plus bas soumissionnaire, mais c'est vraiment
là qu'on veut s'assurer que la valeur a toujours été prise en compte plutôt que
le prix.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup, M. le député de Mont-Royal—Outremont.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. M. Leblanc, Mme Houde. M. Leblanc, depuis... et on se connaît depuis
longtemps et je sens dans vos propos, et vous me direz si je vous interprète
correctement, je sens dans vos propos, parce que ça fait plusieurs années que
vous êtes à la tête de la Chambre de commerce de Montréal métropolitain, mais
vous dites essentiellement, là, je prends ce que vous avez dit, vous avez
dit : «Écoutez, moi, je suis très heureux de voir le projet de loi. Je
supporte les objectifs, mais entre guillemets, j'espère qu'il y aura un
changement dans la culture organisationnelle du gouvernement». Donc,
évidemment, vous êtes en faveur, mais vous avez des grands doutes par rapport à
ça. Et je pense moi aussi que c'est le diable va être dans les détails et de
façon très claire, c'est ça.
Puis tout le monde est d'accord ici sur un
principe, mais j'aimerais qu'on essaie aujourd'hui d'aller plus loin. Tout le
monde dit : Ça prend des appels d'offres, puis il faut qu'il y ait une
offre économique avantageuse. Sur le plan du principe, tout le monde trouve ça
extraordinaire. C'est un concept super intéressant. Mais, dans le concret,
j'essaie de voir comment ce qu'on peut l'appliquer parce que n'importe quel
économiste à qui on parle va dire : Oui, c'est correct, là, mais c'est
quelque chose de difficile à faire.
Est-ce que vous avez quand même une
certaine idée ou une certaine comparaison de ce qui a pu se faire ailleurs et
qui peut représenter... qui peut représenter une offre économique avantageuse
quand on étudie un projet?
M. Leblanc
(Michel) :Mais je vais rapidement céder
la parole à Sarah parce que ce n'est pas pour rien qu'on l'a fait en interne.
C'est parce que la chose la plus évidente, c'est le fameux véhicule électrique.
Le seul coût d'acquisition, là, bien, ce n'est pas compliqué, présentement, ça
coûte moins cher que les véhicules à essence. Très rapidement, quand on regarde
l'ensemble des enjeux liés au véhicule lui-même, que ce soit l'entretien, que
ce soit éventuellement les coûts d'énergie, je vais laisser Sarah en parler,
mais c'est une évidence.
Moi, je vous amènerais sur d'autres cas à
travers le temps. Dans une vie antérieure, j'ai dirigé une grappe, à l'exemple
de Sarah, qui était celle des sciences de la vie, Montréal InVivo, et on avait
à ce moment-là des entreprises d'équipements médicaux qui essayaient... puis je
vous parle de mon époque, mais depuis ce temps-là, ça n'a pas changé, qui
essayaient de vendre des équipements médicaux innovants à des entreprises, à
des hôpitaux et à des fournisseurs... enfin à l'État et qui n'y arrivaient
juste pas et qui arrivaient aux États-Unis... Et c'est que dans le produit, il
y avait encore de l'innovation à valider, et aux États-Unis ils trouvaient des
hôpitaux qui étaient prêts à les accompagner de ce cheminement-là, tandis
qu'ici, on se cachait derrière : Attends, attends, mais tu n'es pas
capable de me garantir que ça fonctionne exactement comme tu me le dis, donc,
moi, je n'y touche pas. C'est cette mentalité-là qui était comme...
M. Leblanc
(Michel) :...sous le couvert de protéger
le citoyen, le client d'hôpital, on ne voulait pas toucher à ça. Et donc, je
vous dis juste, l'innovation était testée, développée, confirmée, vendue en
plus grand nombre aux États-Unis. Il y avait une entreprise aux États-Unis qui
détectait la valeur, qui achetait l'entreprise du Québec ou sa technologie puis
on en perdait l'innovation qu'on avait développée ici. C'est un exemple typique
de se dire : Dans la mentalité de la personne responsable des approvisionnements,
est-ce que je suis ouvert à faire un approvisionnement? Oui, il y a un certain
risque parce que c'est innovant, parce que ça n'a pas été testé des milliers de
fois, mais oui, il y a une énorme valeur pour le Québec si c'est le produit
qui, éventuellement, prend le marché.
M. Arcand : Oui, mais
dans le domaine de l'auto électrique ou de... ça, c'est quand même quelque
chose de plus facile parce que d'une part, c'est vraiment deux technologies. Je
veux dire, c'est clair, on lutte contre les GES en ayant un véhicule
électrique, etc. Donc ça, c'est quand même... Mais il y a des secteurs où c'est
pas mal plus compliqué. Puis à un moment donné, comme vous le savez, les
gouvernements gèrent l'argent du monde. Et donc, à partir de ce moment là, moi,
je suis le premier à vouloir... et on a fait des projets pilotes, nous, à
l'époque, pour changer ce concept uniquement du prix le plus bas, là, mais
j'essaie de voir est-ce qu'il y a une formule qui, à votre avis, Mme Houde
ou M. Leblanc, qui vous apparaît plus consensuel, je dirais, qui ont été
adoptés, peut être, par d'autres gouvernements?
Mme Houde (Sarah) : Dans
notre étude, on fait référence à plusieurs exemples, notamment européens,
notamment tirés de l'OCDE, et on en revient toujours à cette notion de valeur
plutôt que prix. Cette... donc, de bien préciser l'importance cruciale de la
valeur plutôt que le prix et de l'innovation, de bien les préciser. Ça, déjà,
ça envoie un message qui favorise la transformation de culture
organisationnelle. Il y a plusieurs exemples concrets qui sont nommés dans
notre étude, notamment lorsqu'on parle de projets plutôt technologiques.
L'innovation est tellement rapide, les donneurs d'ouvrage peuvent avoir du mal
à suivre l'évolution du marché tellement il évolue rapidement que de faire
une... c'est inclus, là, de faire une demande de solution. Donc, j'aurai
besoin de tel, tel, tel résultat plutôt que je demande que le logiciel ait
telle, telle, telle caractéristique. On fait plutôt un appel de solutions
plutôt que, vraiment, un appel... ça, c'est une solution qui est proposée dans
notre étude.
On propose également le dialogue
compétitif, on en a parlé un peu plus tôt. Donc, quand on a un appel d'offres à
faire, encore une fois, sur un dossier, peut-être, où la technologie a évolué
rapidement, qui comporte plus de complexité, d'avoir un dialogue compétitif,
ouvert et transparent des différentes potentielles entreprises pour vraiment
comprendre et améliorer l'appel d'offres par le dialogue compétitif. Si je ne
me trompe pas, ça a été utilisé au Danemark, cette solution-là. Puis, de façon
générale, encore une fois, là, vraiment, de favoriser la valeur plutôt que le
prix, ça... en formant les donneurs d'ouvrage et en leur donnant des outils
pour calculer cette valeur-là., la notion de cycle de vie étant une façon
objective de mesurer cette valeur-là plutôt que le prix. Ce sont toutes des
manières très concrètes, là, pour répondre à votre question, qui peuvent être
mises de l'avant pour répondre à l'objectif.
M. Leblanc
(Michel) :...un exemple. En milieu
urbain, des gens à Montréal me disent : Michel, on ramasse la neige
exactement comme il y a 50 ans. Et ça veut donc dire qu'on ramasse la
neige avec un véhicule qui est une souffleuse, avec des camions qui passent à côté.
Dans les champs, nos agriculteurs ne récoltent plus comme il y a 50 ans,
et il y a de l'innovation en milieu agricole qui se fait parce qu'il y a un
marché qui est planétaire. On devrait avoir une obligation de résultat,
d'améliorer l'efficacité de la cueillette de la neige dans les milieux urbains,
et de poser, donc, dans le cadre d'appels d'offres, des objectifs. Est-ce qu'on
pourrait, à l'exemple des moissonneuses-batteuses, arrêter de prendre deux
véhicules qui bloquent deux voies, mais d'en avoir un qui suit puis de le tirer
par en arrière? Des gens à Montréal me disent : Comment ça se fait qu'on
n'est pas la capitale mondiale de l'innovation de la cueillette de la neige en
milieu urbain?
Mme Houde (Sarah) : Puis...
c'est ça, penser à l'intérêt du citoyen puis... ou l'intérêt du payeur de
taxes, c'est de s'assurer qu'on utilise toujours les techniques les plus
innovantes pour aller plus vite, payer moins cher, donc maximiser notre
investissement. Si on fonctionne juste sur le plus bas soumissionnaire, on ne
pense pas à l'intérêt du payeur de taxes, une bonne partie du temps.
• (11 h 30) •
M. Arcand : Si je vous
comprends bien, là, quand les règlements vont suivre, ça va être...
11 h 30 (version non révisée)
• (11 h 40) •
M. Arcand : ...aussi
important que le projet de loi lui-même.
M. Leblanc
(Michel) :Les règlements et la culture
organisationnelle, la formation des équipes à l'intérieur... ça va être
essentiel.
M. Arcand : J'avais d'autres
questions qui touchaient, entre autres, des choses que vous n'avez pas beaucoup
abordées. C'était, entre autres, la question que j'ai posée tout à l'heure aux
gens de l'Autorité des marchés publics, c'était sur la question du registre, qu'ils
voulaient rendre public un registre de sanctions pécuniaires, etc. Et
évidemment, moi, dans les consultations que j'ai pu faire, ça a amené des
craintes auprès de certaines entreprises qui disaient : Bien, écoutez, c'est
parce que si on a fait une erreur qui est relativement mineure... Et à cette
question-là, le président de l'Autorité des marchés publics m'a dit :
Écoutez, on regarde ça, puis, si ce n'est pas nécessaire de le rendre public,
on ne le rendra pas public. Alors, ma question, c'est : Est-ce que c'est
public ou ce n'est pas public, là, selon le bon vouloir de l'Autorité des
marchés publics? Est-ce que vous avez cette préoccupation-là actuellement?
M. Leblanc
(Michel) :Bien, je vous ai entendu la
poser, j'ai entendu réponse puis j'étais inquiété par la réponse qui donnait
vraiment l'impression qu'on irait un peu à l'oeil, qu'on irait un peu au
jugement. Ça me donnait l'impression, c'est ça : On trouve que ça a l'air
grave, on va le mettre, si on trouve que ça n'a pas l'air grave, on ne le
mettra pas. Ça, ça m'a inquiété. Ça m'inquiète d'abord parce que ça donne
beaucoup de pouvoirs à un individu, puis ça peut varier d'un individu à l'autre,
ce qui est donc, en régime de droit, inquiétant.
La deuxième chose qui est inquiétante
là-dedans... Puis il faut bien se comprendre, nous sommes totalement en faveur
de mesures qui font en sorte que ceux qui trichent ou ceux qui ne se conforment
pas soient identifiés, punis. Ça, on est en faveur de ça. Ce qu'on dit par
ailleurs, c'est que, si on fait ça puis que, dans les autres juridictions, on
ne le fait pas, nos entreprises qui sont sur plusieurs juridictions vont être
en désavantage par rapport à leurs concurrents dans les autres juridictions.
Les concurrents ailleurs vont se servir de cette information-là. Donc là, c'est
simplement pour dire : Qu'est-ce qu'on veut faire pour s'assurer qu'il y
ait de l'intégrité, que ceux qui trichent soient identifiés et punis, mais qu'en
même temps on se ne mette pas à être en désavantage compétitif quand on est
dans des domaines où les entreprises sont actives sur d'autres marchés, où les
tricheurs ne sont ni identifiés ni punis?
M. Arcand : J'ai une
dernière question parce qu'il me reste peu de temps. La question aussi qui nous
préoccupe, nous, le plus dans ce projet de loi, c'est le côté mauvais payeur de
la part du gouvernement. Et ce projet de loi ne va pas très loin de ce côté-là.
Et on voulait savoir si vous avez également cette préoccupation-là.
M. Leblanc
(Michel) :On a cette préoccupation.
Est-ce que ça devrait être un projet de loi qui dit au gouvernement de payer
correctement ses fournisseurs en temps raisonnable? On pense que non. On pense
que c'est le gouvernement qui devrait simplement décréter que ses meilleures
pratiques, c'est de payer le monde correctement dans des délais raisonnables. C'est
pour ça qu'on partage cette crainte, mais ce n'est pas nécessairement par le
projet de loi qu'on pense que ça doit être corrigé.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : ...dans le
fond, ce que je comprends de ce que vous dites, puis là je vais l'interpréter,
puis vous me dites si j'ai bien compris, vous dites que, pour les critères
autres que le prix, là, qui devrait être même fait de façon systématique, puis
le prix, ça serait en dernier lieu, les critères environnementaux, l'obligation
de faire une analyse de cycle de vie, tout ça, et comme des intentions du
gouvernement, il y a des bonnes intentions, mais il n'y a pas assez d'obligation,
pas assez de carottes. Est-ce que je vous comprends bien? Pas assez de bâtons,
pardon.
Mme Houde (Sarah) : Bien,
d'abord, juste pour reprendre, le prix, c'est important. C'est un élément
extrêmement important, tout comme les critères environnementaux, critères environnementaux
qui vont souvent avoir un effet collatéral sur la proximité, donc sur l'approvisionnement
local, sur l'achat local, donc d'autres externalités. Effectivement, l'esprit
est là. Nous, on recommanderait d'aller, effectivement, un peu plus loin pour
ajouter plus d'obligations, moins de pouvoirs discrétionnaires. Comme l'a dit
Michel, pouvoir discrétionnaire égale pouvoir à un individu qui peut changer
avec le temps. Donc, nous, on recommanderait, là, de toujours favoriser la
valeur plutôt que le prix.
Mme Ghazal : Puis j'ai
une autre question. Parce que vous avez parlé, par exemple, pour l'ACV, l'analyse
du cycle de vie, ce qui se fait ailleurs, des bonnes pratiques, notamment en
Europe. Et maintenant, en Europe, ils veulent, pour tenir compte des
externalités que comportent, là, les échanges de longues distances... Est-ce
que vous serez d'accord avec une tarification carbone sur les importations pour
favoriser nos entreprises locales? Ça peut être...
M. Leblanc
(Michel) :Absolument pas, absolument pas.
On est une société qui vit des marchés étrangers. Notre croissance...
M. Leblanc
(Michel) :...la croissance de nos
fleurons, ce n'est pas de vendre à 8 millions de Québécois. L'achat local,
c'est important, mais on s'inscrit dans un marché planétaire. Chaque fois qu'on
va mettre des critères qui vont réduire les importations, on doit s'attendre à
ce que nos marchés réagissent, puis ça... Puis c'est des jobs, c'est des jobs
partout sur le territoire.
Ça fait que moi, ce que je pense, c'est
qu'on doit s'assurer qu'on prend des bonnes pratiques. Puis Sarah le disait, il
y a moyen de favoriser l'achat local en intégrant le critère environnemental,
mais d'une façon qui n'amènera pas les marchés étrangers à réagir puis à fermer
l'accès qu'on a.
Mme Ghazal : Mais si les
marchés étrangers le font aussi, je veux dire, c'est une tendance.
Mme Houde (Sarah) : C'est
justement ce que j'allais dire. Le gouvernement du Canada, suite à la dernière
COP, elle s'est engagée à se pencher sur cette question-là avec les autres
pays. Donc, je dirais plutôt que ça relève du fédéral, bien honnêtement, cette
décision-là. Et ça tombe sous le sens seulement si tout le monde s'engage. Il y
a quand même une très grande majorité des pays industriels qui se sont engagés
pour la carboneutralité d'ici 2050, donc ça devient, je pense, quelque chose de
beaucoup plus pensable, là, à moyen terme, mais je dirais que ça relève
davantage du fédéral.
Mme Ghazal : Bien, on aurait
quelque chose à faire, parce qu'en ce moment on utilise le SPED et, après ça,
on va exempter des entreprises. Donc, les objectifs qu'on veut atteindre sur
notre marché local pour nos cibles environnementales, on n'est pas capables de
les atteindre parce qu'on donne des passe-droits, entre guillemets, à nos
entreprises locales.
Le Président (M. Simard) :
Mme Ghazal : C'est terminé,
oui?
Le Président (M. Simard) : Malheureusement.
Alors, M. le député de Jonquière?
M. Gaudreault : Oui. Merci
beaucoup. Je n'ai pas beaucoup de temps non plus. Un commentaire, deux
questions. Premier commentaire, bien, je suis content de vous voir ensemble, je
veux dire, il faut tellement que ça soit plus ça, le secteur de l'innovation
verte, de l'économie verte puis le secteur de l'économie, qu'on arrête de
s'opposer l'un et l'autre. Bravo! O.K., il faut continuer dans ce sen-là. Je
sais, on va avoir le G15, tout à l'heure, le Conseil du patronat aussi, go!
Bon, ça, c'était mon commentaire.
Question. Propulsion Québec, je vous sens
que vous auriez le goût d'aller un petit peu plus loin, parce que vous nous
dites : Bon. Il faut donner une bonne définition du développement durable,
prendre en compte le cycle de vie, le principe de non-régression, systématiser
les critères ESG, une adéquation entre la Loi sur les contrats des organismes
publics et la Loi sur le développement durable. Allez-y, là, dites-nous, là,
qu'est-ce qu'on doit faire pour qu'on soit cohérent là-dedans?
Mme Houde (Sarah) : Bien, je
vous en ai fait part, là, dans mon long laïus, sur nos différentes
recommandations. Effectivement, on est vraiment heureux que cette
discussion-là, on est heureux de de la volonté du gouvernement. On voudrait
effectivement aller un peu plus loin et rendre la valeur systématique, le plus
bas soumissionnaire, la marge pour certains produits non critiques, non moins
importants, tablettes de papier. Mais pour la très grande majorité des
produits, nous souhaiterions avoir plus d'innovation pour éviter du déneigement
du XXe siècle et favoriser une valeur qui prend en compte les externalités
environnementales, qui a comme impact collatéral de favoriser
l'approvisionnement local en tout respect des ententes internationales de
commerce.
M. Gaudreault : Monsieur
Leblanc, le gars des régions s'adresse à vous. Vous plaidez pour le cycle de
vie, parfait, il faut le systématiser, mais dans l'analyse du cycle de vie, on
tient compte des impacts environnementaux, donc d'avoir une portion consacrée
au développement des régions, moi, j'aime mieux que le lait, par exemple, qui
va à l'hôpital de Jonquière, soit acheté par Nutrinor, qui est au Saguenay, que
par une laiterie à Québec ou à Montréal, puis qui retraverse le parc des
Laurentides. Alors là, je comprends qu'il y a comme une contradiction, vous
plaidez pour le cycle de vie, mais en même temps, vous voulez protéger le
territoire de Montréal?
M. Leblanc
(Michel) :Non, ce que je voulais
empêcher, c'est qu'on se donne un objectif rigide de proportions qui viendrait
des régions. Et, par contre, je suis complètement d'accord pour qu'on tienne
compte des externalités, qu'on tienne compte de l'impact de tous les coûts,
incluant les coûts de transport. Alors, tout ce que je vous dis, c'est le
fameux, on dit, on a un... de 60 %, ça fait que, moi, je dis aux
entreprises : O.K., moi, quand je vais être le 41e % à Montréal,
qu'est-ce qu'on fait...
M. Gaudreault : Comment qu'on
gère d'abord?
Le Président (M. Simard) : ...
M. Leblanc
(Michel) :On le rentre dans des critères
qui valorisent l'approvisionnement local, en mettant en évidence les coûts de
transport, en mettant en évidence les effets environnementaux. Ça fait qu'on le
fait, un peu comme on le veut le faire internationalement, par des critères qui
sont nobles puis qui finissent par favoriser l'achat local, mais pas...
M. Gaudreault : Mais 40 %, ce
n'est pas noble?
M. Leblanc
(Michel) :Non, non.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, merci à vous, cher collègue. Donc, Mme Houde, M. Leblanc, merci
beaucoup pour votre présence parmi nous aujourd'hui, ce fut fort intéressant...
Le Président (M. Simard) : ...Au
plaisir de vous retrouver bientôt, j'espère. Sur ce, nous allons suspendre
momentanément nos travaux, le temps de faire place à nos prochains invités. Au
plaisir de vous revoir.
(Suspension de la séance à 11 h 43)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, nous sommes de retour. Nous pouvons reprendre nos travaux. Et
nous sommes en présence de représentants de Medtech Canada. Messieurs, bonjour.
Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter, s'il vous plaît?
M. Larose (Benoit) : Certainement.
Je suis Benoit Larose, vice-président de Medtech Canada, ici, au Québec.
M. Verrault (Marc-Sébastien) : Bonjour,
je suis Marc-Sébastien Verrault. Je suis du comité exécutif de Medtech Canada.
Le Président (M. Simard) : Alors,
vous disposez de 10 minutes.
M. Larose (Benoit) : Merci,
M. le Président. Alors, bonjour à la présidence. Bonjour, à vous tous. Donc,
mon nom est Benoit Larose, je suis vice-président Québec chez Medtech Canada.
C'est Monsieur Marc Verrault, ici, membre de l'exécutif de notre association,
qui m'accompagne aujourd'hui.
Medtech Canada représente l'industrie des
technologies médicales au pays. C'est le secteur qui compte, au Québec, plus de
369 entreprises et près de 14 000 emplois. Depuis plus de
40 ans, nous faisons le lien entre les entreprises et les systèmes de
santé canadiens. Nous sommes le partenaire de choix des gouvernements
concernant les politiques publiques qui touchent le domaine de la santé.
En premier lieu, nous saluons la volonté
du gouvernement du Québec de donner accès aux contrats publics à un plus grand
nombre de PME, de favoriser l'achat local et le développement économique de
toutes les régions du Québec. Aussi, nous remercions les membres de la
Commission de nous permettre de représenter nos recommandations au sujet du
projet de loi 12. La présence en commission de représentants du secteur de
la santé est tout aussi importante que celle des milieux de la construction et
de l'environnement, d'autant plus que le ministère de la Santé, selon notre
connaissance, ne figurait pas aux consultations internes préalables lors de
l'élaboration du projet de loi.
Le domaine de la santé représente près de
6 milliards de tous les contrats publics, annuellement. Donc, à peu près
le tiers des achats du gouvernement du Québec. Les approvisionnements en
technologies médicales représentent, eux, environ 2,4 milliards, soit près
de 41 % de la valeur des contrats publics en santé. Donc, notre secteur
compte pour beaucoup dans le domaine des approvisionnements en santé. On parle
ici des dispositifs, des équipements, des fournitures médicales, comme bien sûr
les fameux EPI que tout le monde connaît aujourd'hui, et le matériel nécessaire
pour injecter les vaccins ou faire les tests COVID rapides ou non. Notre domaine
d'activité touche même les applications numériques de plus en plus répandues.
Donc, on est très heureux de représenter ici cet important secteur. On
aimerait, aujourd'hui, vous aider à améliorer le projet de loi.
Donc, le projet doit impérativement être
examiné en tandem avec la stratégie gouvernementale des marchés publics, donc
la stratégie qui a été lancée récemment. Le projet de loi est donc l'outil
législatif qui est choisi pour concrétiser les objectifs de la stratégie. Notre
association souscrit aux objectifs poursuivis par la stratégie et le projet de
loi qui en découle, bien sûr. Nous avons souligné positivement la mise en place
de l'Espace d'innovation des marchés publics. Nous avons aussi souligné la
mesure tremplin aux contrats publics, et celle qui vise à faciliter et stimuler
l'accès à l'innovation, parce que ce sont des demandes de longue date de notre
secteur. En général, les 21 mesures de la stratégie sont toutes
pertinentes et constructives. Mais cela dit, au quotidien, c'est bien davantage
dans le cadre normatif des contrats publics que la partie se joue, ainsi que
dans le travail du Centre d'acquisitions gouvernementales. Sans cadre normatif
efficace, la portée de la stratégie, à notre avis, sera limitée. Nous nous
serions attendus à ce que le projet de loi n° 12 comprenne des dispositifs
structurants pour permettre d'atteindre efficacement les objectifs de la
stratégie. On aurait voulu que le projet de loi touche sous le capot de la
mécanique des contrats publics. Or, force est de constater que le projet de loi
évite de toucher à la mécanique. Hormis l'article 14.6 qui oblige les
organismes publics à procéder à une évaluation des besoins s'inscrivant dans la
recherche d'un développement durable, on reste dans l'incitation, la bonne volonté,
la persuasion. On mise sur la sensibilisation, la formation et
l'accompagnement, mais on ne touche pas aux règles du jeu. Même l'idée tout à
fait judicieuse de tirer parti des possibilités permises par les accords de
libération pour privilégier l'achat chez les fournisseurs locaux n'est pas
contraignante. On pourrait être plus affirmé en ce sens. On se demande pourquoi
on ne profite pas de l'occasion de la stratégie pour aligner la Loi sur les
contrats des organismes publics avec les objectifs gouvernementaux. Pourtant,
tout le milieu sait que ce sont les limites dans les principes de la loi et son
application qui sont le principal problème. C'est normal qu'on ait recours
presque systématiquement à l'adjudication au prix plus bas conforme parce que la
loi et son règlement poussent dans cette direction. Puis vous allez l'entendre
d'autres groupes, puis vous l'avez probablement déjà entendu. Nous suivons ces
choses-là. Selon notre estimation, 9 contrats sur 10 sont attribués selon
ce mode. On...
M. Larose (Benoit) : ...confond
conformité et qualité. On s'imagine qu'en mettant des critères minimaux de
qualité, on choisit la qualité, mais c'est faux. On choisit toujours la qualité
minimale le moins cher parmi les produits acceptables. Ce recours systématique
à la qualité minimale est un frein à l'innovation et à la qualité clinique, à
la recherche de valeur pour les citoyens contribuables et les usagers. C'est un
non-sens pour le développement économique et le savoir-faire québécois, et en
particulier pour les PME, qu'on aimerait pourtant appuyer pleinement.
Ainsi, nous recommandons que le projet de
loi, au même titre que pour le développement économique et les considérations
environnementales, apporte des modifications à la Loi sur les contrats des organismes
publics et ajoute l'innovation et la valeur pour le contribuable dans les
objectifs explicitement nommés dans l'article 2 de la LCOP.
Par ailleurs, le Règlement sur certains
contrats d'approvisionnement des organismes publics est déjà modifié par le
projet de loi 12. Il faut donc en profiter pour enfin introduire dans le
règlement un nouveau mode d'adjudication fondé sur l'évaluation de l'offre
soumise en fonction des critères pondérés, mais qui inclut le prix. Ainsi, le
prix demeure un critère, mais pas le seul. Il est présent avec la qualité,
l'innovation, l'efficience globale du produit, du service ou du traitement,
puis les conséquences en termes d'achat local. On peut mettre ce qu'on veut
dans les critères. Bref, un mode d'adjudication fondé sur la valeur réelle de
l'achat pour le contribuable qui, au bout du compte, paie la note et mérite
d'en avoir pour son argent.
Il faut souligner que les autres
juridictions canadiennes, la Communauté européenne, donc nos partenaires de
libre-échange permettent des modes, ces modes-là, et s'en servent pour
favoriser leur industrie locale. Nos propres exportateurs en profitent.
Pourquoi ne pas mettre à niveau nos pratiques?
Également, pour s'assurer que le prix plus
bas conforme ne soit plus la norme, il faut prévoir l'obligation, lorsqu'on
l'utilise dans un appel d'offres, qui demeure toujours possible, d'inclure une
justification de la part de l'organisme public à l'effet que c'est le mode le
plus avantageux en regard des objectifs de la loi pour ce cas-là.
De plus, considérant son importance
incontournable comme acheteur clé dans le marché, nous estimons que le mandat
législatif du Centre d'acquisitions gouvernementales, sous la responsabilité du
Conseil du Trésor, devrait être formellement modifié pour inclure les objectifs
poursuivis par la stratégie gouvernementale. Le centre doit aussi avoir comme
mandat de générer de la valeur pour le contribuable puisque l'optimisation des
acquisitions qu'on lui demande de faire dans la loi est interprétée uniquement
en termes du prix le plus bas possible.
À notre sens, sur la base de notre
quotidien dans le monde des contrats publics, c'est uniquement en modifiant le
cadre réglementaire et le mandat du Centre d'acquisitions gouvernementales que
la stratégie pourra atteindre ses objectifs. Même une récente rencontre avec la
direction du centre nous a permis de constater que, tant que son seul critère
de mesure de performance sera basé sur les plus bas prix, elle ne tiendra pas
compte des objectifs de la stratégie. Ce n'est pas son rôle.
Nous anticipons très peu de changements
sur le terrain. Il faut accoler aux orientations gouvernementales les leviers
législatifs nécessaires à leur concrétisation. La Loi sur les contrats des
organismes publics, ses règlements et le mandat du Centre d'acquisitions
gouvernementales sont ces leviers. Or, ce que le projet de loi 12 propose,
c'est un levier qui ploie et crisse sous l'effort de faire bouger un système
d'approvisionnement alourdi par des décennies de consolidation du pouvoir
d'achat. C'est la seule stratégie qu'on a suivie depuis 25 ans, consolider les
achats.
Enfin, notre mémoire suggère diverses
pistes d'action pour améliorer le traitement des plaintes des fournisseurs...
dont la loi constitutive nous semble trop limitante en ce qui a trait à sa
capacité d'offrir des recours aux fournisseurs qui se sentent lésés tout au
long de la gestion contractuelle.
Ces recommandations ne datent pas d'hier.
Nous nous impliquons en faveur des nouveaux modes d'adjudication et en particulier
de la valeur depuis près d'une dizaine d'années. Nous l'avions déjà exprimé
lors des consultations relatives au projet de loi 37 sur le Centre
d'acquisitions gouvernementales. Nous l'avions également évoqué lors de l'étude
du projet de loi 108 sur l'AMP. On le dit à chaque budget du Québec.
En fait, nous nous permettons de vous le
rappeler, Mme la ministre, ce constat était déjà clair en 2018, lors de
l'élection du présent gouvernement. C'est d'ailleurs pour cela que le parti qui
allait accéder au gouvernement avait pris l'engagement formel et écrit d'abolir
la règle du plus bas soumissionnaire conforme à ce moment. D'ailleurs, on a
annexé cet engagement à notre mémoire.
Les faits sont là. Les organismes de santé
n'utilisent pas autre chose que le prix plus bas conforme, malgré certaines
possibilités que leur offre le cadre légal. Depuis plusieurs années, le
gouvernement et de nombreux partis envisagent d'aller dans cette voie, mais
sans jamais poser les gestes nécessaires. Nous estimons, devant un projet de
loi qui souhaite clairement aller dans cette direction, qu'il est temps enfin
d'agir, parce que l'approche incitative a des limites. On ne peut pas espérer
une évolution dans les pratiques si les objectifs et les outils ne sont pas
bien adaptés. Si on veut que l'État puisse...
M. Larose (Benoit) : ...aller
plus loin en privilégiant l'acquisition de biens fondés sur la qualité,
l'innovation, l'achat local et économique, on doit permettre des alternatives
aux prix plus bas conformes. Il faut que les contribuables québécois
bénéficient pleinement de chaque dollar investi. C'est une occasion qui nous
est offerte aujourd'hui.
Rapidement, récapitulons nos principales
recommandations : modifier l'article de loi 2 de la Loi sur les contrats
des organismes publics pour inclure l'innovation et la valeur pour les
contribuables; ajouter aux règlements un mode d'adjudication fondé sur
l'évaluation de l'offre soumise en fonction des critères pondérés, incluant le
prix, c'est-à-dire la valeur dans le jargon; l'obligation, lors de
l'utilisation d'un mode d'adjudication fondé uniquement sur les prix plus bas
conformes d'inclure une justification à cet effet; modifier la Loi sur le CAG
pour intégrer les objectifs de la stratégie à sa mission; et enfin modifier la
Loi sur l'Autorité des marchés publics pour améliorer le processus de
traitement des plaintes des fournisseurs et leur offrir des recours efficaces.
Merci pour votre écoute.
Le Président (M. Simard) :
Merci. Merci à vous, M. Larose. Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, Monsieur
Larose. Merci, Monsieur Verrault. Contente qu'on ait pu vous inviter parce que
je trouvais important que votre secteur soit également représenté, secteur qui,
je le comprends très bien, pour lequel la règle du plus bas soumissionnaire
n'est pas la meilleure règle pour faire valoir les avantages, disons, pour la
population de ce que vous avez à offrir. Et je le comprends très bien. Et c'est
pour ça que je suis très satisfaite aussi que vous ayez conclu en disant :
Fournir des alternatives, parce que je pense qu'on est capables, vous puis moi,
de stipuler d'entrée de jeu que la règle du plus bas soumissionnaire n'est pas
adéquatement utilisée au moment où on se parle, mais qu'elle n'est pas une
règle qu'il faut abolir. Elle doit demeurer dans le coffre à outils. Et il y a
des produits pour lesquels le critère de qualité est minimal et le prix devient
essentiel pour le gouvernement. Puis je pense qu'on peut le comprendre, mais je
comprends très bien votre votre argumentaire à l'effet que malheureusement puis
c'est un constat qu'on fait, elle est peut-être utilisée beaucoup trop
fréquemment, systématiquement et surtout dans des domaines qui demanderaient à
ce qu'on ouvre nos horizons et qu'on parle plus peut-être de valeur ou... plus
avantageuses plutôt que moins cher, disons-le comme ça, je le comprends très
bien.
Je suis contente aussi de constater que
vous ayez mentionné, à la fin, dans votre recommandation, qu'on devra modifier
le règlement. Parce que c'est important de préciser, hein, la Loi sur les
contrats publics ne précise pas les modes d'adjudication. Puis je pense qu'il y
a une bonne raison à ça. Il y a plusieurs années, la règle du plus bas
soumissionnaire semblait pour tous la meilleure. On évolue, les marchés
évoluent, les règles d'adjudication évoluent. Je suis partisane du fait qu'on
doit en avoir le plus possible dans notre coffre à outils pour une tonne de
raisons, ne serait-ce aussi pour ne pas toujours télégraphier nos interventions
aux marchés, être capable d'avoir des marchés publics plus intègres. Mais c'est
dans la réglementation qu'on pourra faire la suite des choses, les ajustements.
Mais je le comprends très bien qu'il y a
ce qui est... Dans le PL 12 et dans la stratégie, est-ce qu'il y a ce qui va se
passer sur le terrain? Donc, c'est pour ça que peut-être je voulais en parler
un peu plus avec vous. Comment, quand on parle... Souvent, dans la règle du
plus bas soumissionnaire ou dans n'importe quel mode d'adjudication, un des
enjeux, c'est une bonne définition des besoins au départ. Et dans, souvent,
dans les exemples qui nous sont donnés, où on veut démontrer que la règle du
plus bas soumissionnaire n'était pas adaptée ou adéquate, je pourrais répondre
dans plusieurs cas de figure : Oui, mais c'est probablement parce que les
besoins, au départ, avaient été mal définis, donc l'appel d'offres a été mal
construit, comme ça.
Donc, comment vous voyez... parce qu'on...
Je pense qu'il faut mieux définir ces enjeux-là au départ. Quand on parle de la
valeur réelle de l'achat commun, comment vous voyez ça, cette relation là avec
le gouvernement tout en maintenant l'intégrité des marchés publics? Comment on
peut mieux travailler ensemble pour s'assurer à la fois d'avoir des marchés
publics intègres et à la fois être capables d'avoir cette meilleure définition
des besoins là? Comment vous envisagez ça au pratico pratique, là, au-delà des
recommandations, pour pousser? Si je comprends vos objectifs, on trouvera les
solutions, là, si c'est possible de le faire.
M. Larose (Benoit) : Merci
pour la question. J'inviterais mon collègue à parler peut-être de l'exemple
qu'on discutait ce matin.
M. Verrault (Marc-Sébastien) : Merci.
En fait, Mme la ministre, je me permettrais peut-être de vous offrir, à titre
d'exemple, quelque chose qui se produit dans une juridiction voisine où le
dialogue compétitif est utilisé, à titre d'exemple, là, comme moyen de
communication entre le donneur d'ordres et l'industrie. C'est dans le contexte
de cet échange là qu'on est capable de mieux comprendre le besoin, et on donne
l'odieux de soulever les différents enjeux qu'on souhaite adresser avec notre
appel d'offres ou un notre appel aux solutions plutôt à travers ce dialogue-là.
Je titrais... à titre d'exemple, excusez-moi, donc cette juridiction-là qui est
juste à côté...
12 h (version non révisée)
M. Verrault
(Marc-Sébastien) : ...on fait un appel aux solutions où on a décelé, c'est
l'établissement qui a décelé 14 indicateurs de performance qui vont de,
par exemple, le nombre de cas cancellés, le nombre de réadmissions, le nombre d'erreurs
médicales. Et tous ces indicateurs de performance là ont été pondérés dans la
mesure de l'appel aux solutions, et le prix ne recommandait... ne représentait,
excusez-moi, que 30 % de la décision d'approvisionnement. Ce qu'on
constate, c'est que cet appel aux solutions là a été adjugé, le fournisseur qui
est en place réalise les objectifs auxquels il s'était engagé. Il y a une
notion de partage de risques. Et tout ça, c'est arrivé parce qu'à la base il y
avait dialogue compétitif, un échange ouvert entre l'établissement, le donneur
d'ordres et l'industrie en général. Pas juste une compagnie, là, plusieurs.
Mme LeBel : Je sais que
ce dialogue compétitif là, cette notion existe déjà. Ici, au gouvernement, en
matière de technologies de l'information, on est beaucoup plus dans la... j'allais
dire dans la mentalité d'aller avec des appels de solutions, de discuter avec
les fournisseurs, de voir qui peut offrir, bon, des solutions. Donc, ce que
vous nous dites, c'est que vous le préconisez également dans d'autres secteurs.
Je vous dirais, moi, que c'est un des objectifs de l'espace d'innovation. Parce
qu'il ne faut pas comprendre, l'espace... J'aime bien placer les choses un peu
dans nos intentions. Après ça, on verra si elles sont bien remplies ou
véhiculées par ce qui est écrit. Mais l'idée, c'est vraiment d'avoir cet espace
d'innovation là, qui ne se traduit pas en termes de proportion de marchés, mais
en termes de possibilités, justement, dans certains secteurs, pour certains
domaines, de donner une meilleure place à l'innovation, que le gouvernement
soit le premier acheteur de certaines innovations, que le gouvernement puisse
discuter, d'ailleurs, avec le marché, de dire : Voici quels seront mes
besoins futurs, toi, industrie, comment penses-tu pouvoir y répondre? Je
qualifie un peu le... Donc, c'est un peu ça, l'idée de l'espace d'innovation,
et c'est ce qu'on veut se permettre de faire.
Mais vous comprendrez qu'il y a toujours l'espèce
d'équilibre aussi qu'on doit avoir pour s'assurer qu'entre dialogue compétitif,
et conflit d'intérêts, et influence indue, et, bon, je le sais que ce n'est pas
ça que vous nous préconisez, pas du tout, et je le comprends, puis je pense qu'il
faut le dire clairement, mais c'est l'équilibre à atteindre entre tout ça, parce
que ce sont les marchés publics. Dans le domaine privé, ça va bien, hein,
chacun des partenaires a la libre latitude des sommes d'argent qu'il investit,
et des mouvements qu'il fait, et des erreurs potentielles qu'il pourrait faire,
même si elles sont toujours nécessaires, des fois, dans l'apprentissage. Donc,
vous ne pensez pas que cet espace d'innovation là peut nous permettre,
justement, d'atteindre ça, d'atteindre... quelqu'un avant vous parlait de
maturité, donc d'atteindre une certaine maturité et d'accepter qu'il y ait un
dialogue ouvert, et ensuite, si ça fonctionne bien, de l'intégrer dans l'ensemble
de nos marchés publics? Parce qu'on aura, je dirais, peut-être que c'est un peu
gros, là, mais une certaine sécurité ou paix de l'esprit qu'on est dans la
bonne zone, la bonne façon de faire.
M. Larose (Benoit) : Je
peux me permettre la réponse. En fait, l'espace innovation, c'est certainement
une bonne idée, mais c'est très comparable au pouvoir de dérogation qui existe
déjà dans les pratiques actuelles. Parce qu'il y a des dérogations qui sont
données assez fréquemment, là, par le Conseil du trésor aux organismes publics
qui veulent déroger, là, de certains paramètres du cadre normatif. En fait, l'espace
innovation, c'est une bonne idée, évidemment, on a hâte de voir comment ça va s'appliquer
dans la pratique, mais ça reste ad hoc. Nous, on vous dit : Le jour un où
l'espace innovation va être ouvert, on parie que vous allez voir des
établissements qui vont dire : On a besoin de pouvoir faire un appel d'offres,
comme M. Verrault l'a décrit, donc avec plusieurs critères pondérés. C'est
la norme au Canada, puis même en Europe, là, le prix, c'est souvent 10 %,
20 %, peut-être 30 % de la note, ce n'est jamais 100 % de la
note comme ici, ce n'est pas du tout la même approche. Donc, le jour un, là, de
l'espace innovation, là, on va vous dire : Ça prend un règlement qui nous
permet de le faire.
Donc, on vous dit : Pourquoi attendre
davantage, alors que vous avez créé huit nouveaux règlements si vous voulez? Je
veux dire, ce n'est pas... En fait, on ne vous dit pas de remplacer le
règlement sur le prix le plus bas conforme. C'est sûr que, comme vous le disiez
dans certaines présentations, les crayons HB, puis les «pads» de papier notes,
oui, le prix plus bas forme, ça peut être la bonne façon, pas question de
remplacer ça par un autre mode. Mais donnez plus d'outils. Puis là vous ouvrez
déjà le règlement sur des contrats avec le p.l. 12. Alors, tant qu'à le
réouvrir, profitez-en pour en ajouter un mode. Vous pourriez même mettre des
balises pour que les gens ne l'utilisent pas avant d'avoir un espace innovation
qui va peut-être permettre de l'utiliser. Mais au moins, le message que vous
allez donner aux organismes publics, c'est : si vous avez une initiative
intéressante, vous êtes capables de justifier... Parce que vous êtes redevables
des résultats que vous obtenez avec les budgets qui vous sont répartis, n'est-ce
pas? Je veux dire, les organismes publics sont normalement imputables pour
leurs actions. Bien là, vous...
M. Larose (Benoit) : ...décourage.
Vous allez encourager en fait un établissement universitaire, par exemple, qui
voudrait aller de l'avant avec un projet d'approvisionnement mieux adapté à ses
besoins en utilisant un mode qui est déjà possible. Aujourd'hui, ce n'est pas
possible. Il va être obligé d'aller à Espace innovation. C'est les gens au
Conseil du trésor qui vont décider si ça a du sens ou pas. Ça ne sera même pas
réglé au niveau du ministère de la Santé. C'est un peu singulier quand même.
Là, on parle de produits de technologie médicale, mais c'est le Conseil du
trésor qui a le pouvoir de déterminer c'est quoi la meilleure façon de procéder
à l'acquisition, donc on aimerait ça que vous...
Évidemment, vous voulez mettre tous les
contrats... les contrôles possibles en place. On est tous d'accord là-dessus.
Mais pourquoi, en Ontario puis dans les autres provinces canadiennes, puis en Europe,
qui sont nos partenaires commerciaux, qui sont des économies de marché avec les
mêmes préoccupations puis les mêmes enjeux sur la probité, puis la façon de...
l'éthique et tout ça, pourquoi eux se donnent cette latitude-là dans leurs
contrats publics puis, nous, on est probablement la seule juridiction, parmi
tout notre espace commercial, qui... à qui on contraint autant les organismes
publics? Je peux vous le dire là, on ne fait quand même pas des analyses
comparatives. Là, c'est remarquable. O. K. Donc, on a un projet de loi
aujourd'hui qui veut... qui a des... qui sert à mettre en... qui sert à... on a
une belle stratégie, un projet de loi qui va la mettre en application. Le fait
de ne pas s'attaquer à la mécanique des contrats publics, c'est une occasion
manquée pour nous. Donc, on est l'occasion de le faire. Allez-y, mettez toutes
les balises que vous voulez, mais créez-le, le mode d'adjudication.
M. Verrault
(Marc-Sébastien) : Puis, si je peux me permettre, Mme la ministre,
dans le concret, l'emploi que j'ai le jour quand je ne supporte pas les
activités de Medtech Canada, ça arrive très fréquemment. M. Larose faisait
référence à neuf contrats sur 10, là, très, très fréquemment que la réponse de
l'organisme public, c'est : J'aimerais vraiment ça, mais je ne peux pas.
L'article 10 dicte que je dois... je dois procéder par le prix le plus bas
conforme, puis il n'y a pas d'éléments de justification qui viennent supporter
cette décision-là. Alors, l'industrie doit se conformer à ça, puis c'est là qu'on
rentre dans une discussion qu'on souhaiterait en fait aujourd'hui recommander
une modification au niveau du règlement également.
Mme LeBel : À
l'article10.
M. Verrault
(Marc-Sébastien) : Oui.
• (12 h 10) •
Mme LeBel : C'est très bien
compris. Mais merci. Écoutez, M. le Président, c'est vraiment... à moins que
mes collègues aient d'autres questions, votre point est assez... est très clair
et très complet. Merci.
Le Président (M. Simard) : D'autres
interventions? Sans quoi nous cédons la parole au député de
Mont-Royal-Outremont.
M. Arcand : Merci.
Merci, M. le Président. Alors bienvenue, M. Larose, bienvenue,
M. Verreault. C'est un plaisir de vous avoir avec nous aujourd'hui.
Ma première question porte sur justement
le secteur de la santé. Ce que je comprends, c'est qu'il y a des contrats qui
sont donnés par le gouvernement, oui. Il y a des contrats qui viennent des
CIUSSS, etc. Pouvez-vous m'expliquer un peu comment... votre expérience dans ce
domaine? Parce que les CIUSSS, on me dit : Ils ne suivent pas toujours les
critères du gouvernement ou, enfin, il y a comme un peu de confusion dans ce
domaine-là.
M. Larose (Benoit) : Bien,
peut être que je peux prendre cette question au bond. En réalité, dans le
quotidien du réseau de la santé, l'organisme qui regroupe la majorité des
achats dans notre secteur, c'est le Centre d'acquisitions gouvernemental. Les
établissements en fait ont relativement peu de latitude pour aller au marché
directement lorsque les produits dont elles ont besoin sont... figurent à des
listes, là, puis l'arrêté ministériel. Donc, il y a une mécanique en place pour
obliger les établissements à aller au marché à travers les contrats d'achats
regroupés gérés par le CAG. Sinon, ils peuvent aller au marché
individuellement, mais ils doivent respecter les mêmes règles. Mais en fait ils
sont tous assujettis à la Loi sur les contrats des organismes publics. Donc,
c'est des processus standards d'approvisionnement avec les caractéristiques
dont on a parlé, donc, oui.
M. Arcand : O.K. si vous
pouvez m'expliquer, parce que j'ai lu avec attention l'annexe 2 que
vous avez dans votre document et dont une des conclusions est assez
spectaculaire, c'est-à-dire que vous êtes essentiellement que pour
110 dossiers d'appels d'offres, il y a un à 88 % dont on n'a pas tenu
compte de la qualité dans le domaine des appels d'offres. C'est quand même
assez, assez impressionnant.
M. Verrault
(Marc-Sébastien) : En fait, M. le député, c'est effectivement ce qui
se produit en lien avec l'article 10 qui prévoit une adjudication au prix
le plus bas conforme. On ignore d'autres... d'autres éléments de qualité qui,
par exemple, raccourcissent la trajectoire de soins...
M. Verrault (Marc-Sébastien) : ...qui
réduisent des taux de réinfection ou de réadmission à l'hôpital, et c'est ces
critères-là qui font qu'en bout de piste, un programme clinique pourrait être
moins coûteux, même si l'achat de l'équipement au départ, lui, est plus
coûteux. Alors, ce qu'on constate ici, c'est des statistiques où l'adjudication
s'est faite sur le prix uniquement, sans prendre en ligne de compte les
éléments de qualité qui auraient pu contribuer à un meilleur résultat clinique
pour le contribuable, pour le patient.
M. Arcand : C'est parce que
j'ai fait des consultations un petit peu quand le projet de loi a été déposé,
puis, à un moment donné, j'ai reçu un appel d'un fabricant de couches pour
adultes qui n'avait pas eu le contrat, qui... mais dont plusieurs des éléments
étaient fabriqués en Chine, mais c'était un fabricant québécois, etc. Donc, il
a eu le contrat, mais avec le prix le plus bas, mais ça prenait deux fois plus
de ce produit-là puisque... bon, etc., là, vous voyez où je m'en vais. C'est ce
directement à quoi vous faites allusion, c'est vraiment la notion de qualité
qui doit prévaloir.
M. Verrault (Marc-Sébastien) : Tout
à fait. Surtout dans un domaine comme la santé, où on touche... le geste qu'on
pose sur un individu, sur un contribuable, sur un patient va avoir un impact
sur sa qualité de vie, plus souvent qu'autrement.
M. Larose (Benoit) : On
simplifie beaucoup les processus, on essaie de... tu sais, la tendance, là, on
a un budget à boucler, alors c'est sûr qu'on veut montrer, là... On réalise des
bonnes affaires, mais ce n'est pas parce qu'on achète au prix plus bas qu'on
réalise nécessairement des bonnes affaires. Dans notre vie à tous, c'est ce
qu'on... on le vit dans le quotidien. Alors, c'est la même chose pour les
établissements, mais le système pousse vers ça, puis la façon qu'on finance nos
services pousse vers ça. Donc, c'est des silos budgétaires. Les gains qui sont
réalisés dans un département ne sont pas valorisés pour un autre, puis là,
pourquoi je prendrais un produit qui coûte plus cher si c'est un autre département
qui va avoir les gains, même si au total, c'est plus intéressant de faire ça,
c'est mon budget qui va être obligé d'absorber l'excédent. Donc, tu sais, il y
a beaucoup de problèmes. Mais ici, dans la loi, on pense que de proposer un
nouveau mode d'adjudication va permettre de régler ce problème-là en grande
partie.
M. Arcand : Et est-ce que
vous avez un cas en tête où, vraiment, ça s'est fait correctement, c'est-à-dire
que ce n'est pas le prix le plus bas qui a nécessairement gagné? Il y a-tu
un... parce que là, vous me donnez des listes de tout ce qui a mal été, mais
est-ce qu'il y a quelque chose qui a été, par exemple, je ne le sais pas, moi,
un appel d'offres et finalement, ce n'était pas nécessairement le prix le plus
bas, mais c'était vraiment un investissement dans la qualité? Tout à l'heure,
quand j'étais avec la Chambre de commerce, on me disait : Bon, bien, quand
on fait un appel d'offres pour des autos électriques plutôt que des autos à
l'essence, on sait que ça coûte plus cher, les autos électriques, mais ça a été
un bon investissement parce qu'on réduit les GES et tout ça. Est-ce que vous
avez, dans le domaine de la santé, un cas qui a été positif? À votre
connaissance, là, si vous n'en avez pas, vous me le dites.
M. Larose (Benoit) : Bien,
c'est un peu... en fait, il ne faut pas penser que tout se fait mal dans le
réseau, là, les gens font du mieux qu'ils peuvent avec les règles qu'ils
doivent suivre, mais notre point, c'est qu'ils pourraient faire beaucoup mieux
si les règles leur permettraient, comme ailleurs au Canada, de choisir des
produits en fonction de la valeur globale que ça procure au système de santé ou
aux patients. Mais notre système pousse vers le prix plus bas à l'achat.
M. Arcand : Vous avez parlé
d'un... d'appels de solutions, un système d'appels de solutions. Alors, quand
je vois qu'il y a, par exemple, aux États-Unis, certains modèles qui existent
où, disons, un tel organisme lance un appel de solutions. Et là, il dit
essentiellement : Voici le bon montant qu'on propose, voici l'appel de
solutions, et là on sélectionne la meilleure offre, qui n'est pas
nécessairement basée sur le prix uniquement. Est-ce que c'est un modèle dans ce
que vous connaissez qui est un modèle qui pourrait être proposé? Est-ce que
c'est valable?
M. Verrault (Marc-Sébastien) : Tout
à fait, tout à fait, M. le député. En fait, si on commence, fondamentalement,
un appel aux solutions, ça démarre avec l'énoncé, un énoncé d'un problème et on
laisse l'industrie avec toute la créativité, la recherche et le développement
qu'ils peuvent amener à la table, démontrer comment eux, ils se proposent de
supporter cet enjeu-là. Par exemple, un appel de solutions pour réduire les
listes d'attente dans les blocs opératoires. C'est très simple comme énoncé,
mais très complexe à régler. On peut lancer cet appel-là aux solutions à
l'industrie et attendre de voir ce qu'ils vont proposer. Et...
M. Verrault (Marc-Sébastien) : ...vous
allez pouvoir remarquer, c'est que, oui, il va y avoir de la technologie
médicale, mais il v y avoir aussi un échange des meilleures pratiques de ce que
nos organisations voient à travers le monde. Et on va pouvoir amener ces
meilleures pratiques-là ici, au Québec, faire avancer la cause de la santé pour
les patients localement en faisant autre chose que juste en achetant un item
médical.
M. Arcand : Et à votre
connaissance, est-ce qu'il y a beaucoup d'entreprises québécoises dans votre
secteur qui n'ont pas pu évoluer parce que... qui auraient.. si elles
obtenaient des contrats, pourraient certainement faire profiter son innovation,
certains de ces éléments-là, mais qui sont littéralement bloqués, actuellement,
par ce qui se passe?
M. Larose (Benoit) : On a
deux cas de figure classiques : la PME innovante qui frappe à plusieurs
portes pour entrer son innovation dans le réseau de la santé au Québec puis qui
a beaucoup de difficulté, des fois, ils vont réussir dans un projet de
recherche ou dans le cadre d'un projet pilote, puis qui perd patience, qui va
en Ontario ou dans d'autres juridictions puis qui est capable d'avoir un succès
commercial, puis que, dans le fond, qui mettent une croix sur le Québec pour se
concentrer ailleurs. Ça, malheureusement, là, je peux en nommer plusieurs. Je
ne pense pas que c'est l'objectif ici, mais on en connaît plusieurs.
• (12 h 20) •
Puis l'autre cas de figure, c'est
l'entreprise du Québec qui fabrique au Québec, O.K., puis qui se trouve à
devoir faire une offre au prix plus bas, conforme contre, parfois, des
distributeurs ou des entreprises qui fabriquent à l'extérieur. Puis c'est les
règles du jeu, mais on ne valorise pas du tout le fait qu'elles fabriquent
localement. Et, encore là, ça devrait être tenu en compte dans l'équation. En
Europe, ils le font, là. Par exemple, la France a une politique
d'approvisionnement pour ces EPI qui tient compte... en fait, le prix, c'est
20 % de la note. Donc, ils veulent vraiment appuyer leurs entreprises
locales.
On n'a pas parlé beaucoup de ça dans notre
allocution, mais on a quand même pas mal d'entreprises qui fabriquent ici, là,
tout récemment avec les EPI, mais toutes sortes de produits ici. Mais
présentement, parce qu'on se limite aux prix comme facteur de comparaison,
bien, on ne leur donne pas de chance, parce que, je veux dire, ils sont en
concurrence avec des joueurs qui parfois fabriquent en Asie, puis des
entreprises qui ont des économies d'échelle appréciables. La situation
actuelle, en fait, nuit aux PME, nuit aux entreprises innovantes puis nuit
encore plus aux PME innovantes. Puis, dans notre secteur, il y en a beaucoup,
de PME innovantes. Donc, c'est pour ça qu'on pense que les règles du jeu
doivent être changées.
M. Arcand : Il me reste?
Le Président (M. Simard) : 1 min 10 s
M. Arcand : 1 min 10 s
Alors, écoutez, j'avais une question, moi, sur... puis j'aimerais que vous me
répondiez au fait qu'il y a beaucoup de gens qui me disent que c'est un peu
compliqué de définir, des fois, ce qui est québécois, c'est-à-dire que, compte
tenu que dans le domaine, il y a des pièces qui sont faites à l'extérieur, les
fournisseurs sont québécois, mais avec des pièces faites à l'extérieur. Il y a
même des fournisseurs canadiens qui nous ont dit qu'écoutez, il y a des pièces
qui sont faites au Québec et on est un fournisseur basé en Ontario, mais on
devrait être capable aussi d'appliquer, parce que notre produit, il est
québécois, etc. Est-ce que ça représente, pour vous, un enjeu de bien définir
ce qui est québécois?
M. Larose (Benoit) : C'est clairement
un enjeu. Vous avez raison, c'est complexe. Les chaînes d'approvisionnement
sont globales dans notre secteur, ne sont pas régionales. Écoutez, quand on....
si on est capable de faire des critères d'appel d'offres qui tiennent compte de
la robustesse de la chaîne d'approvisionnement, de la proximité de la source,
des matières premières, puis etc., si on valorise ça dans l'équation, on va
automatiquement donner plus de chances aux entreprises qui sont proches de chez
nous. Puis ça peut être des entreprises de propriété étrangère qui sont actives
au Québec. Je veux dire, on a plein d'entreprises, là, par exemplecelle qui emploie M. Verrault,
qui a 650 employés à Montréal, là, qui n'est pas de propriété québécoise,
mais qui emploie bien du monde. On a d'autres cas dans notre membership. On
représente ce genre d'entreprises-là, là, qui ont des... soit d'origine
québécoise ou canadienne ou étrangère, mais qui sont très impliqués ici.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Alors, j'ai cru comprendre durant la pause qu'il y avait un consentement afin
que notre collègue de Jonquière ici présent puisse récupérer le temps qui était
initialement dévolu à notre collègue de Mercier. J'avais bien compris? Ah bien!
Formidable! M. le député de Jonquière, vous voyez comment vous faites
l'unanimité.
M. Gaudreault : Vous avez
très, très bien compris, M. le Président. Merci beaucoup d'être là. J'ai trouvé
votre...
M. Gaudreault : ...votre
mémoire et vos propositions très, très intéressants. Et vous avez dit, tout à
l'heure, un mot, une expression, là, bien importante: C'est une occasion
manquée. Puis là je ne veux pas vous mettre mal à l'aise, mais c'est une grosse
critique, quand même, envers le projet de loi 12. Je veux dire, on est tous
pour la vertu, puis en est tous pour les orientations, pour les objectifs
poursuivis par le projet de loi. Mais c'est comme si vous disiez: Bien, il ne
va pas au bout de ses ambitions. Et puis là je reprends une autre de vos
expressions, là, le projet de loi ne touche pas à la mécanique, il ne touche
pas aux règles. Il devrait toucher aux règles du jeu. Alors, c'est quand même
une critique importante. Il faut qu'on en tienne compte, parce que c'est bien
beau d'avoir des objectifs, mais il faut se donner les moyens de les atteindre.
Je veux vous amener sur des éléments dont
on a moins discuté avec les collègues, précédemment. Vous dites que, quand le
gouvernement doit quand même faire une adjudication au plus bas prix, bien là,
vous dites: Il devrait quand même le justifier. Alors, j'aimerais ça vous
entendre un petit peu plus là-dessus.
M. Larose (Benoit) : En fait,
on veut renverser, je dirais, la position par défaut. Aujourd'hui, par défaut,
c'est le prix le plus bas conforme qui l'emporte. L'organisme public sollicite
uniquement un prix puis on adjuge au prix le plus bas conforme. C'est ça par
défaut.
Nous, on dit: Ça ne devrait pas être la
règle par défaut, en tout cas, certainement pas dans notre domaine. Par défaut,
ça devrait être la valeur, puis on tient compte de plusieurs critères, puis on
fait une adjudication au mérite dans le fond. Mais si on veut quand même faire
une adjudication sur le prix... Parce qu'on est d'accord avec la ministre, là,
cette façon de faire a sa place encore, dépendant de... Parce que, là, il ne
faut pas oublier que ce projet de loi là s'adresse à tous les achats
gouvernementaux. Donc, dans certains secteurs autres que notre domaine, ça peut
s'appliquer plus souvent que ça soit légitime d'utiliser le prix plus bas.
Bien, à ce moment-là, qu'on oblige l'organisme public au moins à l'expliquer,
pourquoi il a choisi ce mode d'adjudication là plutôt qu'un mode, je dirais,
plus adéquat pour ce qu'on achète.
M. Gaudreault : Donc, que la
règle du plus bas prix devienne l'exception plutôt que la règle.
M. Larose (Benoit) : Absolument.
M. Gaudreault : O.K. Vous
parlez aussi de l'importance d'améliorer le traitement des plaintes, je pense
que c'est via l'AMP, et vous dites également que l'AMP devrait se doter de spécialistes
par secteur. Alors, quid.
M. Larose (Benoit) : Nous, on
a salué l'arrivée sur la scène de l'AMP parce qu'effectivement il y a besoin,
pour les fournisseurs qui se sentent lésés dans les processus d'adjudication de
contrat, de pouvoir aller chercher un peu l'équivalent d'un ombudsman. Nous, on
aurait aimé ça, que ça soit un rôle d'ombudsman un peu plus affirmé. Bon, on
comprend qu'il y a un mandat de surveillance, s'assurer que les règles du jeu
sont suivies, mais on aimerait ça que l'AMP soit plus ouverte à recevoir des
plaintes de fournisseurs qui disent: Écoutez, ce processus-là n'est pas
adéquat, il est contre l'intérêt public. Si l'organisme public avait fait ses
devoirs mieux, bien, il y aurait une meilleure décision d'acquisition de prix.
Mais là, ce n'est pas le cas, alors on vous demande de regarder ça pour juger
si l'organisme public, vraiment, a fait ses devoirs pour aller au marché. Mais,
pour ça, ça prend une certaine expertise pour comprendre le domaine de la
santé.
M. Gaudreault : O.K. Et vous
sentez qu'à l'AMP, présentement, il manque un peu de cette expertise. En tout
respect de l'AMP, là, ce n'est pas ça, on n'est pas là pour ça, là, mais, je
veux dire... Donc, dans des secteurs plus spécifiques, comme les vôtres, là.
M. Larose (Benoit) : Ils la
développent rapidement, parce que le domaine de la santé génère une bonne
partie des dossiers à l'AMP, pas pour des questions de malversations, hein,
c'est souvent des affaires de cadres normatifs qui ne sont pas respectés. Puis,
des fois, on se demande pourquoi les organismes publics ne pensent pas... en
fait, des fois, on trouve qu'ils sont un peu brouillons, là, tu sais. Ils
pourraient être un peu plus rigoureux dans certains cas. D'ailleurs, c'est pour
ça que l'AMP intervient.
Mais nous, on voit ça d'un bon oeil, là,
d'avoir un organisme public neutre, tu sais, qui peut recevoir... comme l'AMP,
qui peut recevoir les doléances des fournisseurs qui s'estiment lésés. Écoutez,
on génère des milliers de contrats par année, notre secteur. Donc, tu sais,
c'est du quotidien, là, transiger avec les établissements ou avec le Centre
d'acquisitions gouvernementales. Tu sais, moi, comme représentant de
l'association, j'ai beaucoup d'entreprises qui m'appellent, qui me disent:
Voyons! On ne comprend pas pourquoi ils font ça comme ça. Ça ne fonctionne pas,
on n'a pas de réponse, le contrat arrive à échéance, on n'est pas encore...
bon.
M. Gaudreault : ...je peux
vous dire que, comme député, je l'entends beaucoup aussi, il y a des entrepreneurs,
dans ma région, qui cognent à la porte pour dire: Bien là, je veux dire, c'est
la maison des fous, là, et il y a beaucoup de difficulté à percer le marché.
On a eu une discussion, tout à l'heure,
avec les...
M. Gaudreault : ...Propulsion
Québec puis la Chambre de commerce de Montréal sur l'enjeu du cycle de vie, on
pourrait même aller jusqu'à l'économie circulaire. Puis je pense que dans votre
domaine, ça sera un bel exemple. Votre analyse là-dessus par rapport au projet
de loi?
M. Larose (Benoit) : Bien,
c'est parce qu'il n'y a rien de contraignant, ç'est ça, on aimerait ça que ce
soit...
M. Gaudreault : On revient au
point de départ.
M. Larose (Benoit) :
Absolument. Je pense qu'encore une fois la stratégie, la vision de la ministre,
elle est superbe, là. On est enthousiastes, là, dans l'idée de la soutenir pour
le mettre en place. Ce qu'on trouve, c'est que, puisqu'il y a des règles du jeu
qui sont limitantes, bien, changeons-les pour permettre de concrétiser plus
vite. C'est ça qu'on vous demande.
Alors, sur cette note positive, M. Larose,
M. Verreault, merci pour votre présence parmi nous aujourd'hui. Sur ce, nous
allons suspendre nos travaux pour l'heure du repas. On se donne rendez-vous
tout de suite après les affaires courantes. À plus tard.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
15 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 59)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, bienvenue à tous. Après cette période des questions, la
commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et
auditions publiques sur le projet de loi n° 12, Loi visant principalement
à promouvoir l'achat québécois et responsable par les organismes publics et à
renforcer le régime d'intégrité des entreprises et à accroître les pouvoirs de
l'Autorité des marchés publics.
Alors, nous sommes maintenant en présence
de représentants du Conseil du patronat du Québec. Nous sommes en distance,
bien sûr. Alors, auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter s'il vous
plaît?
M. Blackburn (Karl) : Karl
Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec.
Mme Kozhaya
(Norma) :et Norma Kozhaya,
vice-présidente à la recherche et économiste en chef au Conseil du patronat.
Le Président (M. Simard) : ...à
vous deux et vous disposez de 10 minutes.
• (16 heures) •
M. Blackburn (Karl) : Merci, M.
le Président. Mme la ministre, Mesdames et messieurs les parlementaires, de
manière générale, le Conseil du patronat du Québec accueille favorablement le projet
de loi n° 12 et la stratégie gouvernementale des marchés publics dont fait
partie le projet de loi. Les marchés publics constituent des leviers
considérables pour encourager le développement durable ainsi que l'innovation
et la croissance de nos entreprises en vue de bâtir une économie plus
innovante, plus prospère, plus verte et plus solidaire. C'est pourquoi le CPQ
invite le gouvernement du Québec depuis plusieurs années, et encore davantage
dans le contexte de la COVID-19, à utiliser les marchés publics de façon plus
stratégique en vue d'encourager l'atteinte de différents objectifs. L'achat
québécois peut répondre à des objectifs comme le développement de filières
industrielles, de régions et de bénéfices environnementaux ou sociaux. Aussi,
un rapprochement régional des chaînes de valeur est souhaitable dans des
domaines stratégiques ou dans des domaines où le rapprochement de la
productivité est devenu économiquement efficient, surtout lorsqu'on tient
compte de l'utilisation des ressources et des émissions de gaz à effet de serre
à toutes les étapes de production et de distribution. Évidemment, les achats
publics doivent toujours se faire dans le respect des règles de libre-échange.
C'est dans cet esprit que le CPQ a prôné à plusieurs reprises le recours à un
mode d'octroi des contrats publics qui prenne en compte adéquatement des
notions de qualité, de valeur et de durabilité de performance environnementale
qui soient ouvertes à l'innovation et qui évitent de favoriser quasi
systématiquement le plus bas soumissionnaire. La règle du plus bas
soumissionnaire accorde une prépondérance aux coûts comme critère de sélection
qui peut se faire malheureusement au détriment d'autres retombées positives
potentielles, notamment au niveau de la qualité de l'environnement et du
développement régional. Dans cette logique du plus bas prix, les solutions les
moins dispendieuses ne sont pas nécessairement les plus durables. Le p.l. 12
amène un changement de paradigme bienvenu, et représente une belle ouverture
allant dans le sens des contrats et des constats et impératifs que je viens de
soulever précédemment. Il permettrait notamment aux gouvernements de déroger
aux règles d'adjudication et d'attribution traditionnelles, que ce soit afin de
lutter contre les changements climatiques, d'améliorer la représentativité des
entreprises et travailleurs autochtones ou encore de promouvoir l'innovation.
Le p.l. 12 favorise aussi l'achat québécois et régional, la participation des
petites entreprises et le développement durable. Le CPQ note que plusieurs des
avancées proposées par le projet de loi s'inscrivent dans le cadre d'arrêtés...
16 h (version non révisée)
M. Blackburn (Karl) : ...de
directives, de programmes établis par le Conseil du trésor, ou font partie du
cadre de l'espace innovation des marchés publics.
En résumé, ces avancées relèvent
essentiellement d'un pouvoir discrétionnaire de la présidente du Conseil du
Trésor. Des règlements viendraient également préciser certains éléments. À ce
sujet. Le CPQ reconnaît que modifier les façons de faire ne se fait pas en
claquant des doigts et peut requérir d'expérimenter et d'y aller de façon
graduelle. Il faudrait toutefois garder à l'esprit l'importance de pouvoir
normaliser, dans un horizon relativement rapproché, les mesures qui s'avéreraient
porteuses selon les contrats et qui apporteraient une certaine prévisibilité.
Le p.l. 12 représente donc un premier pas fort pertinent qui pourrait toutefois
être amélioré pour augmenter nos ambitions tout en demeurant réalistes. De
plus, l'élaboration des directives et des règlements gagnerait à être faite en
collaboration avec les acteurs économiques concernés pour refléter la réalité
du terrain.
Permettez-moi maintenant d'aborder
quelques éléments plus en détail. Au niveau du développement durable, le projet
de loi prescrit aux organismes publics de tenir compte, lors de l'évaluation de
leurs besoins, des objectifs qu'ils se sont fixés en vertu de la Loi sur le
développement durable et de ceux déterminés par le gouvernement dans la
stratégie de développement durable adoptée en vertu de cette loi. Il s'agit d'une
avancée intéressante par rapport à la situation actuelle. Dans la pratique, au-delà
de l'évaluation des besoins, qui est un bon point de départ, il faut que les
organismes publics donneurs d'ouvrage valorisent dans leurs appels d'offres la
recherche d'un développement durable et l'intégration de critères sociaux et
environnementaux. Cela implique également une plus grande cohérence dans les
actions des différents ministères et organismes et des règles qui favorisent
plus souvent le recours à d'autres modes d'octroi des contrats publics que le
plus bas soumissionnaire conforme, tout en reconnaissant que différents types d'adjudication
de contrats sont pertinents selon les circonstances propres au projet.
Le CPQ recommande donc de systématiser l'utilisation
de critères sociaux et environnementaux par les ministères et organismes et les
rendre obligatoires dans l'adjudication ou l'attribution des contrats publics.
Bien évidemment, dans le respect des ententes internationales et lorsque c'est
applicable, afin que l'octroi des contrats publics mise désormais sur des
critères de valeur plutôt que principalement le choix du plus bas
soumissionnaire conforme. Je le souligne également, le fait que l'espace
innovation des marchés publics proposé dans le projet de loi va rendre possible
l'intégration d'autres considérations en lien avec le développement durable. À
cet effet, le CPQ s'est souvent prononcé en faveur de la prise en compte et la
valorisation dans les contrats publics des notions de qualité, de performance
environnementale, de valeur et de durabilité des ouvrages. On réfère, par
exemple, à l'évaluation à l'échelle du cycle de vie ou au coût total de
possession.
Toujours en lien avec l'espace d'innovation
des marchés publics, le projet de loi précise que le but est de favoriser l'évolution
des règles contractuelles pour permettre aux organismes publics de mieux
contribuer à l'atteinte d'objectifs gouvernementaux par le biais des marchés
publics, soit, notamment, l'accroissement des acquisitions responsables et une
meilleure intégration du développement durable et de l'innovation dans le
processus contractuel. Pour le CPQ, il s'agit sûrement d'une avancée. La
présidente du Conseil du trésor aura ainsi le pouvoir d'obliger un organisme
public à recourir à certaines mesures, adopter et intégrer certains critères,
entre autres, en lien avec le développement durable.
Aussi bien que la règle du plus bas
soumissionnaire demeure, ce qui peut être justifié dans certains cas, la mise
en place de modes de réalisation de projets alternatifs plus collaboratifs, au-delà
du plus bas soumissionnaire, pourra ainsi être encouragée. Il est espéré que la
présidente du Conseil du trésor fera large usage de sa discrétion établie dans
le nouvel article 14.9. Pour l'atteinte des objectifs, il faudrait que l'expérimentation
et l'apprentissage puissent se faire relativement rapidement, et avec un nombre
adéquat de contrats ou de projets pour pouvoir aboutir à un cadre qui soit
applicable de façon plus généralisée et prévisible aux différents types de
contrats. Un engagement clair et concret en ce sens est extrêmement important.
Pour tenir compte de la diversité des contrats publics et de la réalité du
terrain, la collaboration entre les différentes parties prenantes, de l'industrie...
M. Blackburn (Karl) : ...est
nécessaire pour identifier les mesures les plus pertinentes selon les
différentes situations et les divers contrats. Ce dialogue tôt dans le
processus, qui fait partie d'ailleurs des principes prônés par l'OCDE, pourrait
contribuer de mettre en évidence tout potentiel d'amélioration ou de signaler
des problèmes.
Maintenant, au niveau de la
régionalisation et des appels d'offres. Pour le CPQ, l'utilisation des marchés
publics pour dynamiser les régions est sûrement souhaitable. Une attention
devrait toutefois être portée à ce que l'obligation du recours à la procédure
d'appel d'offres régionalisée, dont l'objectif est louable, n'ait pas de
conséquences indésirables, par exemple, d'exclure des fournisseurs de régions
voisines, qui ont bien souvent des activités qui dépassent les frontières
administratives de leur région. Une conséquence pourrait alors être de réduire
la concurrence, ce qui n'est pas souhaitable.
Par ailleurs, le gouvernement doit
s'assurer, à travers ses appels d'offres et acquisitions, d'appuyer le développement
de chaînes de valeur régionales, en particulier dans le domaine des énergies
renouvelables, qui représentent un fort potentiel de développement dans de
nombreuses régions, tout en encourageant l'économie circulaire.
Je termine en abordant les conditions de
succès nécessaires, selon le CPQ, pour atteindre les objectifs du projet de loi
12. On observe depuis plusieurs années une diminution de la capacité des
fournisseurs à répondre à la demande et aux appels d'offres publics, surtout
dans le secteur de la construction. Cela est dû à plusieurs raisons
interdépendantes. Problèmes de disponibilité de main-d'oeuvre, formules
contractuelles décourageantes, besoins et conditions souvent irréalistes,
tarifications désincitatives, réglementations improductives et enjeux répétés
en matière de contestations et de retards de paiement ne sont là que quelques
exemples. Pour augmenter le nombre de soumissionnaires et améliorer la
participation des PME et la concurrence dans les marchés publics, il faut
adopter rapidement les solutions requises à ces sujets.
• (16 h 10) •
Les délais pour recevoir son paiement, qui
demeurent longs, représentent un irritant important pour les fournisseurs de
l'État. Certaines entreprises, notamment en construction, ont abandonné l'idée
de participer aux appels d'offres du gouvernement, entre autres parce que les
délais de paiement sont trop longs. Pour le CPQ, le p.l. 12 devrait être
l'occasion de régler la problématique des délais de paiement une fois pour
toutes.
Je termine rapidement en mentionnant que
la formation et l'expertise des fonctionnaires seront décisives pour permettre
de prendre le virage souhaité. En ce sens, je souligne qu'il est intéressant de
voir que la stratégie prévoit des mesures de formation...
Le Président (M. Simard) : En
conclusion, s'il vous plaît.
M. Blackburn (Karl) : ...tout
en rappelant qu'une... en manoeuvre efficace de ces éléments sera cruciale pour
répondre et atteindre ces objectifs. Merci de votre attention.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Merci, Monsieur Blackburn. Je cède maintenant la parole à la présidente du
Conseil du Trésor.
Mme LeBel : Merci. Merci,
Monsieur Blackburn, de votre présence. On a d'ailleurs eu l'occasion de
discuter, là, de ce type de questions là sur d'autres projets de loi. Je vais
peut-être commencer par la fin de votre commentaire. Je suis... Vous parlez des
retards de paiement qui ne sont pas nécessairement directement visés par le
projet de loi 12. Mais je comprends très bien que vous souhaitez à tout le
moins qu'on réfléchisse à une façon d'agir rapidement suite au... j'allais dire
projet de loi, suite au projet pilote qui vient de se terminer et de voir si on
peut évaluer les possibilités d'agir dans le présent projet de loi.
Je peux vous rassurer sur une chose, je
suis très satisfaite des conclusions du projet pilote. Je pense que ça démontre
tant dans l'établissement d'un calendrier de paiement que d'avoir des
mécanismes de règlement des différends, je pense que c'est important d'agir. Et
d'ailleurs quelques-uns se posaient la question ce matin en disant :
Pourquoi on doit... on a besoin d'un projet de loi? Le gouvernement devrait
payer, point final, dans les délais. Bon, c'est sûr qu'on... Personne n'est
contre la vertu. Mais on sait que, des fois, c'est plus compliqué dans la
réalité. Donc, si on peut avoir des mécanismes et instaurer des choses qui nous
aident à aller de l'avant, je pense que c'est souhaité et souhaitable.
Peut-être juste là-dessus. Je me suis
déclarée satisfaite, mais je ne voulais pas vous mettre des mots dans la
bouche. Est-ce que vous pensez que les conclusions du projet pilote sont quand
même somme toute positives? J'ai peut-être donné mon opinion trop rapidement
là-dessus, là, mais je pense qu'on va être d'accord à tout le moins sur cet
aspect-là.
M. Blackburn (Karl) : Je vous
rassure tout de suite, Mme la ministre, nous sommes d'accord effectivement sur
les conclusions. Et, comme nous l'avons mentionné dans notre présentation de
mémoire, vous avez une belle occasion de pouvoir légiférer en lien avec ces
délais de paiement, entre autres, qui, malheureusement, malgré la bonne vertu
qu'on peut avoir, dans certains cas, peuvent décourager des entreprises de
participer à des appels d'offres parce que celles-ci n'ont pas nécessairement
les capacités financières de supporter des longs délais de paiement. Si les
montants sont plus élevés...
M. Blackburn (Karl) : ...évidemment
que ça devient un peu fragilisant pour leur structure. Alors, si les
conclusions de votre test sont positives et si vous avez l'occasion de faire
des modifications dans votre projet de loi, nous vous invitons effectivement à
les apporter pour les inclure dans le projet de loi.
Mme LeBel : Je peux vous
garantir, en tout cas, vous assurer que notre gouvernement a l'intention d'agir
dans cet aspect-là. D'ailleurs, dans le projet de loi 66, on a, outre le
projet pilote, on a quand même étendu le même mécanisme, si vous voulez, à tous
les projets de loi de l'annexe, qui est devenue une loi maintenant puis un
projet de loi, mais on le connaît sous le nom de 66, donc je me permets de
continuer à le citer sous cet aspect-là. On a déjà étendu ces mécanismes-là à
tous les contrats et sous-contrats d'ailleurs du... qui sont à l'annexe, qui sont
pour les projets à l'annexe du projet de loi. Donc, je voulais juste vous
rassurer que je suis... Que j'en prends bonne note. Qu'on va d'ailleurs
recevoir ici la Coalition sur les retards de paiement également. Donc, c'est un
enjeu pour lequel on est très sensible. Et on est à la recherche, avec les
équipes et les gens concernés... D'ailleurs, vous faites... Certaines des
entreprises qui font partie de votre groupe sont en discussion aussi avec nous,
à la recherche d'une solution la plus rapide possible et aussi la plus complète
possible. Donc, je voulais juste clore là-dessus, compte tenu que ce n'est pas
nécessairement l'objet du projet de loi, mais je comprends la préoccupation.
Puis vous avez raison, des fois, tout est dans tout, hein? Donc, comme on parle
de saine concurrence, d'augmenter les bassins d'entreprises capables de
soumissionner aux contrats publics, c'est un aspect qui est un frein, alors je
pense qu'il faut le comprendre. Maintenant, on verra dans quelle... De quelle
façon et dans quelle séquence on pourra adresser cet enjeu.
Donc, peut-être aller sur l'autre frein,
qui a été mentionné d'ailleurs dans la consultation qui a été menée entre
autres par mon collègue de Maskinongé, député de Maskinongé, qui est l'adjoint
parlementaire, mon adjoint parlementaire également, sur l'accès des
entreprises, c'est-à-dire aux appels d'offres, la capacité de soumissionner.
Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu plus, des préoccupations de
certaines entreprises? Vous l'avez mentionné en fin de parcours dans votre
allocution, sur, des fois, la complexité des appels d'offres, des fois, bon...
Disons qu'on va mettre de côté ce qui est intrinsèque aux entreprises, le
manque de main-d'œuvre, des choses comme ça, parce que je la comprends très
bien.
Mais au niveau des appels d'offres, il y a
plusieurs aspects qui sont proposés dans le projet de loi qui doit se lire avec
la stratégie naturellement : le tremplin, l'accompagnement, donner un
meilleur accès aux entreprises, la formation, tant pour les les fonctionnaires
et ministères et organismes, mais aux entreprises aussi, pour un peu les
prendre par la main et leur donner accès à leurs premiers contrats publics,
qui, après ça, peut leur donner une expérience, des équipes multidisciplinaires
pour le faire, peut-être des appels d'offres plus standardisés dans les cas où
c'est possible de le faire. Quel est votre positionnement là-dessus?
M. Blackburn (Karl) : Je
vais demander à ma collègue Norma de répondre à votre question précisément.
Mais avant, j'aimerais quand même ajouter quelques éléments.
D'abord sur la stratégie qui accompagnait
le projet de loi, nous avons démontré que nous étions très ouverts à cette
stratégie-là pour favoriser le développement régional, pour permettre aux
entreprises dans toutes les régions du Québec, avec les moyens qu'elles
avaient, de pouvoir participer à des contrats publics et ainsi permettre de
créer de l'activité économique dans les régions.
Mais plus précisément, pour répondre
vraiment à la question, je demanderais à Norma, qui est en contact étroit avec
nos membres, de peut-être apporter certains éléments de réponse.
Mme Kozhaya
(Norma) :Effectivement. Merci, Mme la
ministre, M. le Président. Effectivement, il y a plusieurs éléments qui ont été
soulevés. Et les irritants, mettons entre guillemets, dépendent aussi des
entreprises. Il y a des éléments, par exemple, comme les garanties
personnelles, c'est un enjeu, les clauses, des fois, contractuelles. On l'a vu
beaucoup aussi avec la COVID. Des fois, s'il y a un retard, c'est qui... La
responsabilité? On comprend que le gestionnaire public veut réduire son risque
en même temps mais il y a des clauses qui ne permettaient pas un bon partage de
risque et mettaient, mettons, tout le fardeau du risque sur l'entrepreneur. Des
éléments aussi comme par exemple la possibilité de porter plainte des
fournisseurs, pas juste des cocontractants. Donc, encore là, c'est tous des
éléments qui ont été soulevés.
Bien sûr, les retards de paiement, c'est
quand même important parce que c'est le nerf de la guerre et ça pénalise
notamment les PME. Et peut-être aussi, comme vous l'avez mentionné, la
complexité ou du moins la perception de complexité. Parce qu'ils se
disent : Dans quoi je m'embarque? Je commence, mais je ne sais pas comment
ça va aboutir. Donc, tous ces volets-là. Et c'est pour cela... Et
L'utilisation... Tout ce qui est aussi technologique, électronique, c'est
quelque chose sur lequel le gouvernement peut également travailler.
Donc, ces éléments-là, qui étaient
peut-être mentionnés le plus souvent, les clauses contractuelles dans certains
cas, donc, les garanties personnelles.
Mme Kozhaya
(Norma) :...les retards et puis les... un
peu le risque que, des fois, ces entrepreneurs prennent. C'est sûr que, surtout
dans un contexte où ça va plutôt bien, elles vont choisir peut-être quelque
chose de plus sécuritaire avec le secteur privé plutôt que le secteur public.
Mme LeBel : Merci. Vous
avez mentionné, monsieur Blackburn, une phrase qui m'a beaucoup plu parce que
c'est la philosophie derrière l'espace d'innovation qui est créé dans le projet
de loi. C'est-à-dire je comprends qu'il faut le faire quand même de façon
soutenue, mais vous parlez d'expérimenter, y aller de façon graduelle, et pour
ensuite se donner l'occasion de normaliser les pratiques ou les bonnes
pratiques, je vais le dire de façon générale, là, les bonnes idées ou les
bonnes... les choses positives qui ressortent de cet espace d'innovation là où
on a pu expérimenter différents critères, d'ailleurs, de cycle de vie, de
valeur ajoutée, de valeur globale, là, qui comprennent aussi les coûts de
possession. Et j'en passe, là, on pourrait en discuter longtemps.
• (16 h 20) •
Si vous aviez à me proposer des premiers
types d'appels d'offres, des premiers types d'expérimentation à faire dans cet
appel, dans cet espace d'innovation, au lendemain de l'adoption du projet de
loi, disons, vous comment seriez par quoi? Les objectifs sont clairs dans la
loi, naturellement. L'idée, c'est de se garder une agilité aussi puis ne pas
revenir en commission parlementaire à tous les deux ans pour modifier la loi.
Donc, il fallait trouver un équilibre entre un encadrement suffisant pour que
l'intégrité des marchés publics soit soit respectée, c'est-à-dire qu'il y a des
balises à l'espace d'innovation, mais y avoir, je dirais, un flou, dans le sens
positif, suffisant également pour se permettre d'expérimenter, parce que c'est
l'objectif, là. Et des fois c'est contre-intuitif, quand on parle de contrats
publics, de se laisser un espace. Alors, vous prendriez ça... si vous étiez
président du Conseil du trésor au lendemain de l'adoption du projet de loi,
vous commenceriez par quoi, là, pour commencer à expérimenter de façon
graduelle toujours, là? Parce qu'il faut aussi renverser la vapeur dans
plusieurs domaines, puis, des fois, il faut le faire graduellement. Rondement,
mais graduellement.
M. Blackburn (Karl) : D'abord,
votre question, elle est excellente. D'abord, on souligne la sagesse que vous démontrez
en lien, justement, avec la capacité que vous avez d'adapter au fur et à mesure
de l'évolution des résultats, de l'atteinte des résultats, vous faites preuve
de sagesse parce que c'est vrai que le gouvernement, du jour au lendemain, n'a
pas la science infuse et n'a pas nécessairement toute l'expertise pour être
capable d'aller de l'avant avec : Voici de quelle façon ça devrait
fonctionner, puis respectez ces règles. Alors, vous avez la sagesse de vous
donner cette capacité d'ajuster puis d'adapter. Et on souhaite que ça soit le
plus court possible pour, justement, apporter aux entreprises cette
prévisibilité qui est importante en termes d'investissement puis de
mobilisation.
Maintenant, pour répondre plus précisément
à la question que vous poser, il faudra aussi identifier quelles seraient les
priorités du gouvernement. Et je m'explique. Chacune des régions du Québec
n'ont pas les mêmes outils entre les mains pour être capable... ou les
entreprises de chacune des régions du Québec n'ont pas les mêmes outils en main
pour être capables de relier ou de réaliser l'ensemble des contrats unifiés à
travers le Québec. Alors, vous pourriez certainement, comme gouvernement,
identifier quelles sont les forces du Saguenay-Lac-Saint-Jean et quelles sont
les forces de la Côte-Nord, quelles sont les forces du Centre-du-Québec pour
être capables de développer des secteurs qui permettraient à des entreprises,
dans ces régions, qui ont développé une expertise, qui ont développé un savoir,
qui ont développé une capacité en lien avec leur empreinte régionale, vous
seriez en mesure de pouvoir identifier des secteurs qui permettraient,
justement, à ces entreprises de pouvoir participer à des appels d'offres. Dans
certains cas, ça pourrait être lié avec la technologie vidéo, lié avec le
développement technologique. Dans le Bas-Saint-Laurent, dans la Gaspésie, il y
a des secteurs extrêmement importants reliés à ça. Dans le Centre-du-Québec, ça
pourrait être des éléments reliés avec l'énergie, l'énergie renouvelable. Je
pense, entre autres, à des entreprises qui sont dans ces régions-là. Vous
auriez la capacité, tout en étant agiles, d'identifier des forces de chacune
des régions et de tenter de prioriser des appels d'offres qui mettraient en
valeur les entreprises dans ces régions. Et je pense que ça pourrait être un
choix extrêmement judicieux et intelligent de la part du gouvernement.
Mme LeBel : Merci. On a
parlé beaucoup aussi, ce matin, dans un autre domaine en particulier, je pense
c'est Medtech, mais d'autres, sur cette espèce de dialogue compétitif dans
certains secteurs qui devait se mettre en place. Souvent, on l'a par contre, ce
principe-là est déjà intégré, au gouvernement, en matière de technologies de
l'information où on se donne le loisir d'être capable de discuter. On parle
d'appels de solutions souvent pour... Je dois vous dire, quand on prend un pas
de recul, souvent, cette notion de dialoguer avec les entreprises, quand on
parle du secteur public, de l'argent des Québécois, des contrats publics et de...
Mme LeBel : ...allégué avec
le secteur privé peut souvent être perçu comme étant dangereux, hein, dans le
sens de l'intégrité. Puis je le dis parce que c'est un peu la raison de la zone
d'espace d'innovation, c'est de se permettre de le faire dans certains cas de
figure, en annonçant nos couleurs et en disant qu'on allait le faire.
Mais est-ce que vous ne pensez pas
qu'effectivement, dans le cadre de l'espace d'innovation, ce sont des pratiques
qu'on peut expérimenter ou, à tout le moins, mettre de l'avant et, au moins...
Il y a aussi se donner la chance de démontrer aux Québécois que ça fonctionne,
là. Moi, je le vois dans les deux sens, cette zone d'innovation là, prendre de
l'expérience, pour le gouvernement, aider à identifier nos besoins, permettre
aux entreprises de s'adapter aux besoins du gouvernement, et vice versa, donner
au gouvernement l'occasion de connaître l'innovation pour pouvoir l'acquérir en
temps opportun, mais aussi rassurer le public qu'on fait les choses
correctement avant de normaliser les pratiques dans l'ensemble des marchés
publics. Est-ce que vous avez un peu... est-ce que vous pensez que c'est une
vision qui peut se défendre?
M. Blackburn (Karl) : D'abord,
les préoccupations que vous avez, Mme la ministre, sont justifiées et
justifiables. Il est clair que, dans le domaine public, on se doit d'être
respectueux des plus hauts standards et on se doit de rassurer la population en
lien avec la gestion des sommes publiques.
Mais j'aimerais me baser sur un exercice
ou un exemple qui s'est produit dans les deux dernières années. Prenez
l'exemple de la participation des entreprises dans la campagne de vaccination.
Alors, cette campagne a été orchestrée en grande partie par le gouvernement du
Québec, par le ministère de la Santé, entre autres, avec M. Dubé. Mais il y a
eu des rencontres au préalable qui ont été amorcées avec des entreprises qui
avaient des outils entre les mains ou des équipements qui pouvaient aider ou
faciliter la vaccination. Alors, l'expertise des entreprises a été mise à
contribution avec l'objectif gouvernemental. Le tout s'est fait dans le respect
des règles, mais ça a permis d'aller chercher une efficience que, n'eût été de
cette collaboration en amont... N'aurait pas été capable. Alors, on le voit, ça,
ça a été l'exemple de la vaccination.
Mais on a vu d'autres exemples, en lien,
par exemple, avec la fabrication d'équipements aidant à la respiration des
malades qui étaient plus affectés. Des entreprises, avec leur expertise, leurs
équipements, leur savoir, ont collaboré à établir des grands objectifs
gouvernementaux en lien avec la protection de la santé. Et, sincèrement, ça a
donné des résultats positifs de cette façon. Si on s'en inspire, on est capable
de réaliser des éléments tout en assurant que le respect des règles est fait de
la façon la plus stricte possible.
Mme LeBel : Bien. Merci.
Puis, écoutez, j'ai vu qu'il y avait des recommandations plus précises sur des
amendements à certains articles, donc on va en prendre connaissance avec
beaucoup de sérieux. Merci de votre participation.
M. Blackburn (Karl) : Merci à
vous.
Le Président (M. Simard) : ...Mme
la ministre. D'autres interventions de la part des collègues du côté
ministériel? Alors, M. le député de Mont-Royal-Outremont, à vous la parole.
M. Arcand : Merci beaucoup,
M. le Président. Écoutez, d'abord, M. Blackburn, c'est un plaisir de vous
revoir, et également Mme Kozhaya, et ce n'est pas la première fois qu'on
participe comme ça dans une commission parlementaire.
Alors, ma première question... Il y avait
un groupe patronal qui est venu, ce matin, également, et qui a mis un peu en
doute, malgré les bonnes intentions de ce projet de loi, la capacité, si on
veut, organisationnelle du gouvernement, la culture, je dirais,
organisationnelle du gouvernement de vraiment faire des offres, des appels
d'offres qui sont basés sur autre chose que le bas prix. Et je voulais savoir
si les membres du Conseil du patronat perçoivent ça également de la même façon.
M. Blackburn (Karl) : D'abord,
c'est un plaisir partagé de vous retrouver, M. le député. Mais sachez que les
préoccupations que nous avons concernant l'agilité de l'État à s'adapter, à
réagir, à avoir une certaine flexibilité, c'est toujours dans notre esprit.
Mais je dirais que les deux dernières années ont démontré que lorsqu'on veut,
c'est possible. Alors, je pense que, dans ce contexte, on peut effectivement
s'améliorer. La volonté du gouvernement, dans le projet de loi, c'est de faire
en sorte que des expériences vont nous permettre d'aller chercher, d'aller
soutirer le meilleur du fonctionnement, et ça va nous permettre d'adapter des
critères qui vont assurer cette flexibilité et cette agilité-là.
Je donnais quelques exemples, tantôt, à la
ministre concernant une régionalisation encore plus grande, en fonction
peut-être de certains critères en lien avec les capacités régionales de se
forger leurs propres photos économiques. Donc, ça, c'est des éléments qui sont
concrets, qui peuvent faire partie de la différence.
Maintenant, ceci étant dit, on ne peut
plus faire comme avant et exclure des critères d'évaluation...
M. Blackburn (Karl) : ...des
soumissions, les critères environnementaux, des critères de durabilité dans le
temps. On ne peut plus faire comme si ça n'existait pas, alors. Le CPQ et
d'ailleurs participe de façon très étroite avec le G15, et on aura l'occasion
d'en parler tout à l'heure avec les représentants du G15. Mais il est clair
qu'on se doit maintenant de continuer de jouer un rôle de leader et de faire
que ces critères environnementaux de durabilité puissent être partie prenante
pour le gouvernement dans son processus de réflexion et d'appels d'offres parce
qu'à long terme, nous sommes convaincus que ça va être bon pour les finances
publiques, ça va être bon pour notre société, et les retombées vont être
également bonnes dans l'ensemble des régions du Québec.
M. Arcand : Peut être
une question à Mme Kozhaya qui étudie plusieurs peut-être formules
parfois. Est-ce qu'il y a des pays, un peu dans le monde, qui ont adopté des
formules? On parlait des États-Unis, entre autres, là, où certains États ne
regardaient pas la question du bas prix seulement. Est-ce qu'il y a d'autres
endroits que vous connaissez, dans le monde, où on est quand même pas mal plus
avancé qu'au Québec par rapport à l'inclusion de ces différents critères-là
actuellement?
Mme Kozhaya
(Norma) :Oui, tout à fait. Il y a
plusieurs pays de l'OCDE et les États unis, bien sûr, mais aussi en Europe, le
Royaume-Uni, l'Allemagne et même plus près de chez nous, même l'Ontario. Ils
ont dans certains cas des formules qui sont plus innovantes, mettons, qu'on
parle de propositions non sollicitées ou d'autres appels de solutions où ce
n'est pas nécessairement strictement par rapport à l'inclusion de critères
environnementaux, mais c'est dans un cadre qui est plus flexible par rapport à
répondre à des besoins donc de marchés publics tout en répondant à un ensemble
de questions et qui évite dans ce cas simplement le plus bas soumissionnaire
parce qu'on vient avec une solution à un problème. Donc, on compare des projets
globalement, pas juste sur la base de prix.
• (16 h 30) •
M. Arcand : D'accord, en
tout cas, si jamais vous avez certains... certaines informations à donner au
ministère en ce sens là, je pense qu'au Conseil du Trésor ça serait très
apprécié parce que ça va... les règlements vont suivre après le projet de loi.
Ce serait donc important de savoir exactement s'il y a une formule qui est un
peu plus consensuelle qu'une autre. De ce côté-là, est-ce qu'il y a quelque
chose qui... Évidemment, on le disait ce matin, quand on parle par exemple d'un
produit de base, c'est évidemment le plus bas prix qui est nécessaire. Mais
dans plusieurs cas, ce n'est pas la même... on ne doit pas voir ça de la même
façon et en ce sens là, je pense que c'est important.
La ministre a aimé des choses. Moi aussi,
j'ai aimé des choses dans votre mémoire dont, entre autres, M. Blackburn,
la préoccupation que vous avez pour les régions et évidemment pour la question
énergétique. Il me semble qu'au Québec on pourrait avancer plus vite en matière
de biocarburants, on pourrait avancer plus vite en matière d'hydrogène. Notre
formation politique a des projets, entre autres projet ÉCO qui est un projet
important important dans ce domaine-là. Et il y a une foule de possibilités
régionales qui ne se feront pas, à moins que le gouvernement, à moins que
l'État, soit un joueur de premier plan. Et je voulais que vous donniez un peu
votre vision des choses dans la mesure où est ce qu'elles sont les opportunités
actuellement qui font qu'on n'en profite pas au Québec?
M. Blackburn (Karl) : Mais,
d'abord, vous le savez que je suis un fervent régionaliste. J'ai l'eau du
Lac-Saint-Jean qui circule dans mes veines, alors c'est clair que j'ai à coeur
le développement économique des régions. Et comme je l'ai mentionné tout à
l'heure, les régions, elles sont différentes les unes des autres. Dans le
Bas-Saint-Laurent, il y a des avantages qui leur sont propres. Le
Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, la Gaspésie, l'Abitibi ont toutes et
tous des avantages qui leur sont propres. Et l'énergie est indéniablement un
point porteur pour les entreprises et l'économie du Québec.
Nous avons la capacité d'avoir une énergie
qui est propre, qui est renouvelable. Nous avons un territoire qui est immense.
Nous avons accès à des ressources qui sont, ma foi, quasiment illimitées, mais
qui peuvent générer des retombées extrêmement positives pour le Québec et les
régions du Québec. Et il est clair que la situation dans laquelle on évolue, et
malheureusement, on voit que la fragilité dans laquelle on est avec la
mondialisation, et cette fragilité dépend bien évidemment des combats ou des
situations géopolitiques qui se produisent actuellement et qui ont des
répercussions et des conséquences sur nous. Alors nous avons la capacité
d'avoir accès, comme je le mentionnais, à un territoire qui est vaste, qui est
riche. On a...
16 h 30 (version non révisée)
M. Blackburn (Karl) : ...accès
à des hommes et des femmes qui détiennent de l'expertise, des capacités et des
qualités extrêmement importantes. Tout ce qu'on a besoin d'être capable de
faire, c'est de les accompagner. L'État a un rôle clé à jouer en lien avec ces
nouveaux secteurs-là qui, souvent, demandent beaucoup plus d'efforts, de
recherche, de positionnement, avant d'être capable de commercialiser, par
exemple, certains produits ou certains biocarburants ou certaines nouvelles
sources d'énergie. L'État doit pouvoir contribuer de façon significative à
supporter le développement de ces filières parce qu'elles sont porteuses et
elles sont porteuses pour les régions, pour l'économie du Québec dans son
ensemble, et pour le futur. Et moi, je suis convaincu qu'on peut jouer un rôle
extrêmement important et beaucoup plus grand que ce qu'on peut faire
actuellement avec les entreprises au Québec.
M. Arcand : Très bien, merci.
Et vous avez parlé, évidemment, des contrats publics en construction. C'est rendu
à un point tel, moi, j'entends des contracteurs qui nous disent, par exemple,
que si dans le prochain budget de la semaine prochaine, on augmente le Plan
québécois des infrastructures, pas sûr que ça va nécessairement nous aider
parce que les... plusieurs trouvent d'abord que les appels d'offres du
gouvernement sont trop compliqués, sont... il y a les retards de paiement, c'est
une chose, etc. Entre autres, on m'a parlé des maisons des aînés dans
lesquelles il y a des retards importants qui... Et donc, comment se fait-il...
Est-ce qu'il y a des... est-ce qu'on est les plus mauvais payeurs en Amérique
du Nord ou est ce que c'est... C'est quoi le problème, d'après vous?
M. Blackburn (Karl) : Bien,
peut-être, je vais demander à Norma de répondre plus précisément à la question
que vous posez, M. le député, mais il est clair que comme la ministre en a
parlé tout à l'heure avec le projet de loi 66, qu'on appelle 66, le projet
de loi 66, il y a eu des exemples concrets de projets qui ont été
identifiés pour être capable de les amener à bon terme de façon plus rapide,
plus efficace, avec justement certains critères de durabilité et de qualité
dans le temps. Ça donne des résultats. Alors, ça, j'espère que ça sera porteur
pour la suite. Mais plus précisément, Norma, j'aimerais ça que tu puisses
ajouter des éléments beaucoup plus concrets, là, à la question du ministre...
du député.
Mme Kozhaya
(Norma) :Oui. Effectivement, je crois qu'un
élément important est celui aussi de la main-d'œuvre et des travailleurs, et
ça, nous avons plusieurs propositions au CPQ pour s'adresser à cette question-là,
entre autres à travers l'immigration, par exemple, que ça soit les travailleurs
temporaires ou permanents. Et on sait que le secteur de la construction... et c'est
un domaine, quand même, que j'aimerais qu'on mentionne dans notre mémoire, c'est
que, oui, il y a toute la loi et les règlements sur les contrats publics, il ne
faut pas oublier aussi toutes les lois et les règlementations qui entourent
spécifiquement le secteur de la construction, la loi R-20, et etc.
Donc, comment on fait, un, pour amener
plus de travailleurs, idéalement? Et deux, pour s'assurer que tous les
travailleurs puissent travailler? Et donc, le recours aux nouvelles
technologies, on sait que ça commence... Il y a le... il y a des projets
pilotes aussi et des projets en collaboration avec l'industrie pour tout le
volet qui est plus technologique, qui peut aider aussi. À l'origine, c'est...
le... c'était juste les grandes entreprises. Là, on voit des petites
entreprises qui l'intègrent de plus en plus. Donc, ces deux éléments-là, et on
sait que le gouvernement veut travailler pour l'intégration du numérique,
attirer des gens. Donc, c'est un ensemble. Il faut s'attaquer à la question de
la main-d'œuvre, à la question technologique et à la question de la
réglementation, où est-ce qu'il y a des bouts qu'on peut peut-être alléger et
qu'on peut encourager une utilisation plus optimale de toutes... de toutes les
ressources. Et d'ailleurs, dans le... aussi, on dit : Oui, il faut
intégrer les personnes éloignées du marché du travail, mais il faut que la
réglementation le permette d'une certaine façon. Et donc comment encourager,
soutenir les entreprises et puis s'assurer que la réglementation puisse permettre
cette intégration-là?
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup, madame, monsieur. Contente de vous revoir dans cette
commission. Moi, j'aurais une question par rapport à vos recommandations 1
et 2, où vous parlez qu'il faut renforcer, il faut rendre obligatoire la tenue
en compte de critères environnementaux et sociaux. Donc, je comprends que vous
trouvez que le projet de loi n'en fait pas assez. Vous faites partie du G15,
vous en avez parlé. J'ai envie de poser une question qui peut paraître naïve :
Pourquoi est-ce que c'est important que le patronat puis que des entreprises
privées, que le gouvernement rende ces critères-là obligatoires? On pourrait
penser que c'est un fardeau supplémentaire. Pourquoi est-ce que c'est
profitable? On ne vous entend pas.
M. Blackburn (Karl) : C'est
profitable dans la mesure où le signal qui est envoyé de la part du
gouvernement, il est clair. Et dans ce contexte, bien évidemment, ceux et
celles qui vont devoir appliquer les orientations gouvernementales...
M. Blackburn (Karl) : ...elles
devraient ou devront en tenir compte, mais ce qu'on mentionne également dans
notre mémoire, et je pense que c'est important de le réitérer, nous sommes
favorables au libre-échange, au respect des règles de commerce international,
et ce qu'on mentionne, c'est que ça puisse être obligatoire dans la mesure où
c'est possible de le faire là où c'est applicable. Donc ça donne encore quand
même cette flexibilité au gouvernement, aux organisations publiques de le
faire. Mais je pense que ça serait vraiment un élément porteur, un message fort
que pourrait envoyer le gouvernement pour inciter les donneurs d'ordre, inciter
la machine gouvernementale, les ministères, les organismes publics de prendre,
en priorité, ces volontés, d'ajouter des critères de durabilité et de qualité
en lien avec le développement durable.
Mme Ghazal : Pour vous, les
accords internationaux ne nuisent pas du tout, ni à l'économie locale ni au
respect des objectifs environnementaux pour le Québec?
M. Blackburn (Karl) : Pas du
tout. Alors, comme on le mentionnait, nous, on favorise le respect des règles
internationales de commerce et on est favorable à l'ouverture des marchés. Mais
dans ce contexte, comment pouvons-nous faire en sorte que l'économie du Québec
puisse, dans ce contexte d'ouverture, mettre à profit ces avantages qui sont
ici, au Québec...
Mme Ghazal : Ça peut rester
juste des vœux pieux.
M. Blackburn (Karl) : Non,
mais si c'est indiqué de la part du gouvernement dans un contexte vraiment de
vision à long terme, bien, je pense que c'est plus que des voeux pieux.
• (16 h 40) •
Mme Ghazal : Je ne sais pas
si j'ai quelques secondes, j'ai une question par rapport aux dispositions
relatives au régime d'intégrité des entreprises, l'AMP, vous êtes inquiet de ne
pas trop alourdir le fardeau administratif, etc., vous ne pensez pas que ce qui
a été mis dans le projet de loi permet un équilibre entre... justement en
prolongeant la période, là, d'autorisation pour l'AMP, pour les entreprises, un
équilibre entre la confiance du public et s'assurer de l'intégrité des
marchés...
M. Blackburn (Karl) : Je vais
demander à ma collègue Norma...
Mme Ghazal : ...vous ne
pensez pas, on devrait alléger plus?
M. Blackburn (Karl) : ...de
répondre à votre question, Mme la députée.
Mme Kozhaya
(Norma) :Oui, on voulait, effectivement,
surtout souligner l'importance de faire attention à ce volet-là, parce
qu'effectivement l'objectif d'assurer l'intégrité, on souscrit à 100 %. Il faut
s'assurer que chaque mesure ou chaque exigence, est-ce qu'elle va vraiment dans
cet objectif-là? Est-ce qu'elle va aider à l'atteinte de cet objectif?
Effectivement, le prolongement de trois à cinq ans, on pense que c'est
bienvenu. On nous a dit qu'a priori les exigences, quand même, annuelles vont
demander plus de ressources...
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci.
Mme Kozhaya
(Norma) :...de travailler pour ne pas
alourdir indûment.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup de votre présence. Bonjour. Alors, si l'eau du lac coule dans vos
veines, après ça, il coule dans le Saguenay, qui, lui, coule dans mes veines,
donc je pense qu'on devrait bien s'entendre. J'ai remarqué, à la page 5 de
votre mémoire, la volonté de réaliser une reddition de comptes annuelle sur
l'application du chapitre 2.1 du projet de loi, qui est le chapitre sur le
développement durable et sur les espaces d'innovation», j'aimerais ça vous
entendre un petit peu plus sur cette reddition de comptes annuelle, je trouve
ça intéressant, vous êtes les premiers à l'amener. En passant, je salue
vraiment, là, le virage du Conseil du patronat vers les critères de
développement durable, l'évaluation, systématiser les critères de développement
durable. Donc, sur la reddition de comptes, comment vous voyez ça?
M. Blackburn (Karl) : D'abord,
avant de céder la parole à ma collègue, je veux vous remercier, M. le député,
et surtout vous féliciter pour votre carrière, parce que j'ai vu récemment que
vous alliez prendre une certaine retraite de la carrière politique, alors je
veux vous féliciter pour le travail que vous avez fait. On a été des fervents
opposants, des collaborateurs, et je tiens vraiment à vous féliciter pour la
carrière que vous avez faite au cours de vos années en politique. Et le
développement durable, avant de demander à Norma de répondre à votre question,
il faut le voir comme étant des opportunités pour le Québec. Les entreprises du
Québec en font déjà beaucoup, mais le développement durable, tout le
développement de la filière énergétique, de la filière énergétique peut
permettre au Québec de faire vraiment une bonne croissance économique, on en
est tout à fait convaincu. Et, Norma, pour répondre plus précisément à la
question de M. Gaudreault, je te laisserais la parole.
Mme Kozhaya
(Norma) :Effectivement, nous n'élaborons
pas beaucoup dans notre mémoire, et vous aurez l'occasion d'entendre le G15,
plus tard aujourd'hui, qui s'attaque davantage à cette question-là. C'est sûr
que là on introduit de nouvelles possibilités, une expérimentation, donc c'est
important de voir qu'est-ce que ça donne. Donc, cette évaluation-là, elle est
prioritaire, surtout si on veut, comme on le souhaite, que ce soit normalisé,
que ça devienne plus généralisé, donc pas que ça reste à l'étape de
l'expérimentation, lorsque les mesures sont concluantes et sont positives, ce
qu'on ne pense pas être le cas. Et également c'est sûr qu'il y a aussi d'autres
indicateurs qui peuvent être considérés...
Mme Kozhaya
(Norma) :...nous, évidemment, le volet
économique, c'est important, l'efficience, l'efficacité, mais également
d'autres indicateurs, comme sur le développement durable.
M. Gaudreault : Mais, par oui
ou non, là, parce que j'ai peu de temps. Est-ce que le commissaire au
développement durable pourrait être l'instance qui fait cette reddition de
comptes?
Mme Kozhaya
(Norma) :C'est ce qu'on va défendre. On
est à l'aise avec, effectivement, que ce soit en même temps, c'est sûr que la
présidente du Conseil du trésor, elle va avoir son rapport, et qu'elle s'adjoigne
également le commissaire au développement durable.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous, M. le député de Jonquière. Alors, sur ce, Mme Khozaya, M.
Blackburn, merci beaucoup pour votre présentation cet après-midi, votre
contribution à nos travaux. Au plaisir de vous retrouver, parce que vous êtes
en quelque sorte des habitués, là, de la Commission des finances publiques.
Alors, nous allons suspendre momentanément
nos travaux afin de faire place à nos prochains invités.
(Suspension de la séance à 16 h 44)
(Reprise à 16 h 48)
Le Président (M. Simard) : Alors,
nous sommes en mesure de poursuivre nos travaux. Et nous sommes maintenant en
présence de représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Messieurs, bonjour. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?
M. Milliard (Charles) : Alors,
Charles Milliard, P.D.G. FCCQ.
M. Noël
(Philippe) :Philippe Noël, vice-président
affaires publiques et économiques.
Le Président (M. Simard) : Vous
disposez de 10 minutes.
M. Milliard (Charles) : Alors,
merci M. le Président. Bonne rentrée parlementaire à tous. Alors, comme vous le
savez, la FCCQ est un organisme qui regroupe 130 chambres de commerce,
1 200 membres corporatifs, plus de 50 entreprises sur l'ensemble
du territoire québécois et dans tous les secteurs d'activité...
M. Milliard (Charles) : ...de
l'économie québécoise. Depuis janvier 2020, j'ai eu le privilège de diriger
cette belle organisation. Et, si je devais faire un palmarès des trois dossiers
dont les membres ont le plus parlé depuis mon arrivée, je dirais sans hésiter
la pandémie de COVID 19, la pénurie de main-d'oeuvre et l'accès aux marchés
publics. Alors, Philippe et moi sommes très heureux d'être avec vous et d'avoir
cette période d'échange. Et je suis convaincu d'ailleurs que plusieurs membres
nous écoutent aujourd'hui. Si je devais résumer notre pensée en une phrase, je
dirais que le PL 12 contient enfin de nombreux signes positifs pour les
entrepreneurs québécois, mais constitue aussi un rendez-vous manqué sur
certains points. Heureusement, il n'est pas trop tard pour corriger le tir dans
le cadre des présentes consultations.
Alors, débutons par les bonnes nouvelles,
si vous voulez bien. Donc, d'entrée de jeu, il est évident pour la FCCQ et la
communauté d'affaires qu'on supporte toute orientation gouvernementale qui vise
à favoriser l'achat local, l'innovation, l'harmonisation et la simplification
des appels d'offres. Plus nos entreprises remportent des contrats publics
québécois, plus les retombées économiques et fiscales pour l'État sont
importantes. Et, quand l'État québécois bénéficie de l'expertise des
entreprises d'ici, bien, c'est tout le Québec qui en sort gagnant. Mais voilà,
dans l'état actuel des choses, percer le mur de l'accès aux marchés publics
demeure, pour plusieurs entreprises, un projet ardu, rigide, déroutant et, au
final, souvent frustrant.
• (16 h 50) •
La perception que les appels d'offres
québécois sont inaccessibles et réservés à certaines entreprises est trop
régulièrement entendue chez les PME québécoises, et donc à la Fédération des
chambres de commerce. Il est donc salutaire que le gouvernement cherche à
changer ses perceptions avec le présent projet de loi. Ce n'est pas seulement
un changement législatif qui fera de la stratégie gouvernementale un succès,
c'est aussi un important changement de culture au sein de l'appareil
gouvernemental, et la mise en place d'indicateurs de performance et de
contraintes pour être condamné à réussir. Donc, oui, à uniformiser autant que
possible les documents d'appel d'offres, améliorer la communication
gouvernementale avec les entreprises, accroître la diffusion et l'échange
d'informations entre le secteur privé, secteur public via des ateliers
thématiques, notamment régionales. Alors, ce sont toutes des orientations en
adéquation avec la volonté de la communauté d'affaires québécoise.
Parlons maintenant innovation. La
valorisation d'innovation et l'exemplarité de l'État à la mettre en valeur est
cruciale pour nos membres. Dans ce dossier, la prudence excessive doit
rapidement faire place à plus d'audace. Conséquemment, la mise en place d'un
espace d'innovation des marchés publics représente, selon nous, une approche
très intéressante où le gouvernement veut manifestement penser en dehors de la
boîte. Alors, pour réussir ce projet, évidemment, les ressources et l'expertise
nécessaires devront par contre rapidement être au rendez-vous. Par ailleurs,
les matériaux non traditionnels sont très souvent écartés des appels d'offres
actuels, alors que, pourtant, certaines technologies ou certains matériaux
novateurs, je pense entre autres au secteur des conduites, de la construction,
du pavage, ont été développés, inventés, créés par des entrepreneurs québécois,
et souvent ces matériaux sont davantage vendus et utilisés ailleurs au Canada
et aux États-Unis qu'ici. C'est vraiment regrettable.
Alors, en valorisant rapidement les
innovations, si l'État envoie un signal positif et engageant aux inventeurs et
aux développeurs québécois... et on évite ainsi ce que j'appelle
affectueusement le syndrome Céline Dion, Cirque du Soleil ou Moment Factory,
c'est-à-dire de prendre pleinement conscience que quelque chose de chez nous
est exceptionnel seulement quand ce sont les autres ailleurs dans le monde qui
nous disent que c'est effectivement exceptionnel. Alors, aimons et valorisons
ce qu'on fait de bien ici maintenant et aidons nos entreprises à conquérir le
monde pas l'inverse.
Je passerais maintenant aux écueils du
projet de loi 12 selon la Fédération. Donc, pour parvenir à stimuler la
participation des entreprises québécoises à nos marchés publics en leur
permettant d'être une vitrine technologique pour notre savoir-faire, il importe
de changer rapidement et résolument la pondération des contrats publics au
Québec. Certains vous l'ont dit ce matin, je me joins à eux. Alors, le grand
absent du projet de loi 12, selon nous, et de la stratégie gouvernementale,
c'est la véritable révision des critères d'octroi des contrats publics au
Québec en misant désormais sur la valeur plutôt que sur le plus bas prix.
En cette même commission parlementaire, en
octobre 2019, lors du projet de loi 37 visant à instituer le Centre
d'acquisition gouvernemental, le précédent président du Conseil du trésor et
actuel ministre de la Santé nous laissait entendre qu'il irait de l'avant plus
tard avec les changements attendus, reconnaissant ainsi que, et je le
cite : Souvent, on n'atteint pas nos objectifs avec le plus bas
soumissionnaire conforme. Fin de la citation. Depuis le 3 février dernier,
à la suite du dépôt du projet de loi 12 et de la stratégie gouvernementale, au
sein de nos nombreux comités de travail à la Fédération, on en a 18, le mot qui
ressort est quand même «déception». Et cette déception est palpable, tellement
que je vous avoue que je m'étonne de l'enthousiasme de certains intervenants
dans le cadre de ces consultations-là qui ont débuté ce matin....
M. Milliard (Charles) : ...Il
faut dire qu'il est difficilement compréhensible que le gouvernement fasse le
choix de continuer de faire bande à part en Amérique du Nord en octroyant
principalement ses contrats publics sur la base du plus bas soumissionnaire
conforme.
Alors, je me permets ici, pour le bénéfice
des gens qui nous écoutent, de vous illustrer ce que nos membres estiment être
les conséquences d'un système basé sur le plus bas soumissionnaire conforme.
Alors, le plus bas soumissionnaire
conforme, c'est mettre au premier plan le prix dans le choix des contrats
publics plutôt que la valeur, la qualité, l'expertise, l'innovation et la
durabilité, ce qui est d'ailleurs contraire à la recommandation numéro 2
de la commission Charbonneau. Le plus bas soumissionnaire conforme, c'est
forcer les entreprises à réduire autant que possible leurs coûts, souvent au
détriment de tout le reste. Le plus bas soumissionnaire conforme, c'est
préférer les économies à court terme aux bénéfices globaux à moyen et à long
terme pour le contribuable. Le plus bas soumissionnaire conforme, c'est opter
pour des projets qui, souvent, sont à refaire plus rapidement plutôt que de
privilégier des projets qui ont un cycle de vie plus long. Le plus bas
soumissionnaire conforme, c'est nier l'opportunité pour nos entrepreneurs de
proposer des solutions plus durables, plus sécuritaires et plus audacieuses
s'ils veulent avoir une chance de remporter le contrat. Le plus bas
soumissionnaire conforme, c'est augmenter le risque de dépassement de coûts car
la littérature le démontre très clairement, la facture s'avère trop souvent
plus élevée qu'estimée. Le plus bas soumissionnaire conforme, c'est se priver
d'une expertise québécoise, car bon nombre d'entreprises préfèrent
soumissionner sur des projets dans d'autres juridictions au Canada ou ailleurs
dans le monde, qui, eux, fondent l'adjudication de leurs contrats sur la
qualité plutôt que sur les plus bas prix. Le plus bas soumissionnaire conforme,
c'est aussi assister à des situations désolantes, trop nombreuses, comme par
exemple celle d'un fournisseur dont l'expertise et la qualité sont reconnues
depuis longtemps et qui a perdu un contrat après quinze ans de service auprès
du gouvernement. La raison? Une différence de 4,5 % dans le prix tout
bêtement. Le plus bas soumissionnaire conforme, c'est, sans nécessairement le
vouloir, préférer les solutions plus traditionnelles aux solutions
d'aujourd'hui et surtout, aux solutions de demain.
Donc, bref, le plus bas soumissionnaire
conforme, c'est un frein au développement économique du Québec.
Alors, en terminant, si le gouvernement
souhaite réellement rencontrer l'objectif 3.1 de sa stratégie, soit
d'augmenter le nombre de soumissionnaires provenant du Québec, il doit
privilégier des critères de qualité, d'innovation, d'expertise, de
développement durable, de durabilité, de performance environnementale dans
l'octroi de ses contrats plutôt que simplement le plus bas soumissionnaire
conforme.
Avec les présentes consultations, mais
aussi avec les règlements à venir, nous espérons toujours que le projet de
loi 12 représente l'évolution, peut-être même la révolution tant attendue
par les entrepreneurs québécois. La pandémie aura réussi à faire prendre
conscience aux Québécois de l'importance de prendre soin de leur tissu
entrepreneurial, de leur tissu économique en région. Alors, profitons de ce
momentum pour propulser nos entreprises vers les plus hauts sommets en
participant concrètement à leur développement. Alors, ce sera un plaisir
d'échanger avec vous. Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous. Mme la ministre.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Merci, Monsieur Milliard, merci de votre participation. Je pense que
je vais prendre tout de suite le taureau par les cornes. Après avoir
abondamment démonisé la règle du plus bas soumissionnaire, je pense qu'on va
pouvoir peut-être remettre un peu les choses en perspective ensemble.
Et vous l'avez bien dit, après avoir fait
les adaptations nécessaires dans les règlements... Parce que, comme vous le
savez, vos membres le savent, ce n'est pas dans la Loi sur les contrats publics
que les modes d'adjudication sont prévus mais bien dans la réglementation.
Donc, il y aura effectivement, et ça, j'en suis très consciente, des
ajustements à faire dans la réglementation pour s'assurer d'ouvrir le coffre à
outils de façon adéquate et s'assurer que la règle du plus bas soumissionnaire
n'est plus comme c'est le cas.
On pourrait parler de plusieurs cas de
figure. On pourrait en discuter ensemble. Je pourrais dire : Oui, on
pourrait être d'accord sur certains, d'autres, non. Mais je pense que ce... la
base de discussion sur laquelle on va se mettre d'accord, c'est que la règle du
plus bas soumissionnaire n'est certainement pas la règle adaptée dans tous les
cas de figure. Et elle l'a démontré par le passé, elle est utilisée, quant à
moi, de façon beaucoup trop systématique.
Toutefois, je pense qu'on peut aussi être
honnête en disant que ce n'est pas une règle qu'on doit abolir. C'est une règle
qui doit demeurer dans le coffre d'outils. Il y a encore des cas de figure. Je
vois votre collègue hocher la tête. Il y a encore des cas de figure, peut-être
des cas plus simples, des cas très simples où cette règle doit demeurer à la
disposition du gouvernement dans certains appels d'offres. Est-ce qu'on peut,
au moins d'entrée de jeu, placer la table avec cette admission dans la
discussion?
M. Milliard (Charles) : Bien,
je suis très, très heureux d'entendre vos commentaires, Mme la ministre. Puis,
effectivement, il y a une différence entre acheter des crayons et acheter des équipements
de radiologie, alors on s'entend là-dessus.
Mme LeBel : ...Comprendre
pour la suite des événements puis je suis très contente. Mais quand on me parle
de rendez-vous manqué, de déception, je suis capable de comprendre la crainte
ou, si vous voulez, le fait que vos membres sont peut-être un peu dubitatifs
face aux intentions. Mais l'intention est bien de faire en sorte, entre autres,
dans la zone d'innovation... Et vous en avez parlé de façon positive, donc on
pourrait peut-être l'explorer un peu, entre autres dans cet espace...
Mme LeBel : ...de venir
effectivement... Comment on peut faire pour bénéficier concrètement, là du
savoir québécois, de la mise en valeur, mais aussi d'avoir toutes ces notions
dans nos appels d'offres? C'est particulièrement criant dans le domaine de la
santé, quand on parle d'innovation, entre autres, de cycle de vie, de juste
valeur, de coût de possession, de dire que, bon, si on augmente notre niveau de
qualité, peut-être qu'il coûte plus cher à l'achat, mais, compte tenu des
bénéfices pour la société, que ce soit en matière de développement durable,
environnemental... Et là, je fais une liste non exhaustive, vous me le...
voyons, vous me le permettrez. Mon Dieu! Je commence à «laguer», comme dirait
mon fils.
Et le Conseil du patronat est venu le
dire, de venir en parler comme une zone pour expérimenter, y aller de façon
graduelle. Tant et aussi longtemps que le gouvernement avait la possibilité de
normaliser, par la suite, dans le reste des marchés publics, ce genre de choses
là. Donc, ne pensez-vous pas que ça peut être aussi, cet espace d'innovation
là, une occasion de prendre peut-être un gouvernement qui, traditionnellement,
est plus frileux ou plus rigide dans ses façons d'avancer et de nous permettre
d'évoluer dans un espace qui se veut transparent et sécuritaire, dans le sens
où on avoue, là, que, dans un espace donné, pour des contrats donnés, on va y
aller de l'avant?
Puis vous parliez de votre déception, là,
de voir que l'objectif de la stratégie, d'avoir à terme 52 organismes... Bon,
ça, c'est vraiment l'objectif dans la stratégie, ce qui ne veut pas dire qu'on
ne peut pas aller plus loin puis pousser plus loin, dans tout ça. L'espace
d'innovation ne se terminera pas à la fin de la stratégie de cinq ans, elle est
incluse de façon pérenne dans le projet de loi. Donc, peut-on en parler, de cet
espace? Puis comment vous et vos membres envisagez... on pourrait l'utiliser
et, pour ne pas manquer notre rendez-vous, la pousser au maximum?
M. Milliard (Charles) : Alors,
je comprends que les mots «rendez-vous manqué» et «déception» vous déçoivent,
mais, en fait...
Mme LeBel : Ah! je n'aime pas
ça, je ne suis pas dans le négatif.
• (17 heures) •
M. Milliard (Charles) : Bien,
moi non plus. Je suis dans le constructif. Mais il reste qu'on utilise des forums
qu'on a, et, honnêtement, il y a quand même une certaine unanimité, dans nos
membres, que, tant qu'on ne verra pas les projets de règlement... Ça fait
tellement longtemps qu'on en parle. Vous n'étiez pas ministre, à l'époque, puis
on en parlait encore. Alors, c'est un projet de longue haleine.
Alors, on sent qu'il y a une impulsion
intéressante, donc c'est pour ça qu'on insiste sur la... Je voudrais laisser
Philippe parler d'espace innovation. Mais moi, je vous garantis, puis j'ai un
passé dans le secteur pharmaceutique, la santé, sciences de la vie, c'est le
meilleur banc d'essai pour valoriser l'innovation au Québec. On a vu à quel
point... dans les deux dernières années, on en a vu l'importance d'avoir un
secteur des santé, sciences de la vie qui est fort, ne serait-ce que pour avoir
une certaine souveraineté médicale. Alors, s'il y a quelque... s'il y a des
gens à valoriser, c'est exactement ce secteur-là, je pense, dans un premier
temps.
Mme LeBel : D'ailleurs, avant
de laisser votre collègue poursuivre, parce que je vais le laisser poursuivre,
vous avez constaté également que, dans la stratégie, deux secteurs que nous
avons identifiés comme étant des secteurs prioritaires ou stratégiques pour
pouvoir mener ça, c'est dans le secteur de la santé et de l'alimentation, que
vous avez pris la peine de souligner, également. Je pense qu'on est en
adéquation de pensée sur cet objectif-là ou, à tout le moins, sur ces secteurs.
M. Milliard (Charles) : Alors,
la sélection de ces secteurs n'est pas un rendez-vous manqué. Alors, Philippe.
Mme LeBel : J'aurai obtenu au
moins ça,
M. Noël
(Philippe) :Oui. Bien, d'abord, bonjour,
tout le monde. En fait, nous, on est vraiment le porte-voix de nos membres, de
nos entreprises. Charles mentionnait, tout à l'heure, qu'il y a 18 comités de
travail, chez nous, mais il y a quand même des comités infrastructure,
technologie de l'information, communication, santé, sciences de la vie, chaîne
de valeur du médicament, entrepreneuriat, économie verte, environnement,
transport logistique, manufacturier, innovation, exportation et même une
entreprise en l'approvisionnement scolaire. Ils nous ont tous interpellés pour
nous dire un peu le mot qui ressortait beaucoup, qui était «déception». Donc,
on est un peu le porte-voix aussi des chambres de commerce, également, des 17
régions au Québec.
Pour ce qui est de l'espace innovation,
nous, on trouve intéressant, en fait, le concept, il faut le dire, là. Penser
en dehors de la boîte, ça répond à ce qu'on disait aussi par le passé, contrer
la prudence excessive aussi parfois qu'on peut retrouver dans les marchés
publics, utiliser les marchés publics comme une vitrine technologique, un
levier de développement économique. Des fois, des fournisseurs peuvent solliciter
des clients, aussi, des organismes publics. Mais, dans les innovations qui sont
mises de l'avant, en fait, ils peuvent des fois aussi mettre de l'avant qu'ils
ont obtenu un contrat aussi avec le gouvernement du Québec quand ils vont du
côté du secteur privé, et donc ça stimule la demande intérieure, ultimement.
Mais on est en retard sur d'autres juridictions autour de nous. Donc, c'est un
peu notre point d'interrogation.
Et le retard est expliqué principalement à
cause des critères d'octroi des contrats publics, qui misent principalement sur
le critère du plus bas prix conforme. Donc, si les critères des contrats
publics ne sont pas modifiés dans des projets de règlements, on est d'accord,
c'est dans des règlements qu'on verra ça, bien, vos objectifs...
17 h (version non révisée)
M. Noël (Philippe) :...via l'espace d'innovation, bien, vont mettre beaucoup
plus de temps pour pouvoir y parvenir. Ça va être plus compliqué pour pouvoir y
parvenir.
Mme LeBel : Non, mais je suis
très, très consciente. Je faisais quand même une farce, mais au départ, mais je
très consciente qu'il y a une suite à donner à tout ça pour aller au bout de la
logique de nos objectifs, là, et j'en prends bonne note. Je prends le
commentaire comme étant sur cet aspect là, surtout dans la modification des
règlements. Parce qu'effectivement, l'article 10 du règlement, jusqu'à
présent, met toujours de l'avant la question du prix, de la règle du plus bas
soumissionnaire. J'en suis tout à fait consciente qu'il va falloir compléter l'exercice,
disons. Dison qu'on est à un possible rendez-vous manqué. On pourra l'affirmer
dans un autre espace. Mais j'allais vous poser la question, en tout sérieux,
cette fois-ci, sur la question du dialogue compétitif. On en a aussi beaucoup
entendu parler précédemment. Ça se passe... c'est une possibilité qui existe en
matière de technologies de l'information. C'est un peu aussi comment le
gouvernement peut avoir une conversation, je ne dirais pas une conversation
continue, mais une conversation, justement, avec les entreprises, le milieu du
développement, probablement, surtout en matière de santé également, c'est un
bel endroit pour savoir à l'inverse, quelles sont les technologies ou les
innovations qui sont en train de se développer. Et d'un autre côté, que le
gouvernement soit capable aussi de télégraphier, bon, toujours dans un cadre
qui est rigoureux, mais de télégraphier ses futurs besoins pour que l'industrie
puisse peut-être répondre par des solutions innovantes à des besoins identifiés
par le gouvernement. Donc, je pense qu'il y a un avantage à avoir ce dialogue-là.
Il a été mentionné à deux reprises, je pense, par des gens qui sont venus ici
en consultation, dont le Conseil du patronat. Donc, je pense que l'espace
innovation pourrait permettre de le faire. Mais qu'est ce que vous pensez de
cette avenue-là?
M. Noël
(Philippe) :Bien, c'est certain, en fait,
que nous on souhaiterait participer aussi, évidemment, à ce genre de
consultation-là. Je pense qu'on est des bons porte-voix à ce niveau-là. Les
entreprises... nous, on entend beaucoup des entreprises qui font bénéficier de
leurs propres innovations dans d'autres juridictions autour du Québec, dans d'autres
juridictions, dans d'autres pays de l'OCDE, mais pas au Québec, parce que les
critères d'octroi, en fait, étant donné que c'est le plus bas prix, bien, c'est
trop compliqué d'être compétitif par rapport à des solutions plus
traditionnelles. Donc, déjà là, s'il y a une prise de conscience du côté des
ministères et organismes par rapport à ce qui existe sur le marché, et ce qui
pourrait être à leur portée si les contrats publics étaient modifiés. Je pense
que ça pourrait être un très bon dialogue, effectivement.
Mme LeBel : Écoutez, merci.
Vous avez aussi certains commentaires sur l'achat québécois, miser sur des
critères de qualité, d'innovation, etc. Mais un des objectifs de la stratégie,
qui est naturellement complétée dans les... certaines modifications qu'on fait
dans le projet de loi, c'est à dire d'obliger les organismes... les ministères
et organismes qui sont soumis à la Loi sur les contrats publics d'exploiter les
marges de manoeuvre qui se trouvent déjà dans les accords de libéralisation du
marché, mais qui sont... présentement, je vous dirais que c'est une possibilité
de les exploiter. Ce qu'on veut faire, c'est renverser la vapeur et donner aux
entreprises l'obligation, à tout le moins, d'exploiter ces marges de manoeuvre,
et que, bon, de renverser un peu le fardeau, si on veut. Qu'en pensez-vous? Et
parce qu'on a déjà abordé la question aussi, est-ce que vous pensez que c'est
une bonne chose de maintenir ces accords-là? Bon, je comprends que c'est au
niveau canadien, là, mais philosophiquement, je pense qu'il faut garder nos
marchés ouverts. Il y a un prix à payer, c'est-à-dire de permettre qu'une
portion de nos marchés soit accessible à d'autres entreprises que québécoises,
mais le corollaire possible de tout ça, c'est que nos entreprises ont accès à d'autres
marchés. Donc, qu'est-ce que vous pensez de cette solution-là d'exploiter les
marges de manoeuvre, entre autres, là?
M. Milliard (Charles) : Bien,
je pense, c'est la solution avec le changement des critères de sélection, c'est
d'exploiter les marges de manoeuvre. C'est la solution. On a des accords de
libre-échange canadiens qui sont souvent méconnus, mais aussi internationaux.
Et il y a beaucoup de marge de manoeuvre. Et souvent, j'entends dans le
discours, et ça, c'est typiquement canadien comme personnalité, là, puis
peut-être que moi-même je suis comme ça, mais des fois on est un peu trop poli,
je trouve, dans notre façon d'aborder le commerce international, alors que les
autres ne se gênent jamais pour exploiter au fond les zones grises, puis d'aller
creuser dans les craques le plus possible au nom du patriotisme, au nom du
développement économique de leur juridiction. Alors, moi, des fois, j'ai envie
de nous dire : Soyons un peu plus audacieux et explorons les zones grises.
Sans jamais dépasser la ligne, bien sûr, parce que ça fait partie aussi de la
réputation du Québec et du Canada. Mais de le faire comme ça et de le faire au
bénéfice des régions. Évidemment, nous, on n'embarquera pas dans une guerre de
est ce que c'est plus les régions, Montréal ou Québec, bien évidemment. Ce qui
est important, c'est que les entreprises québécoises aient une meilleure
chance. Mais c'est une chance, hein, ce n'est pas.... il n'y a personne qui
veut faire pitié non plus. Puis il n'y a personne qui veut des choses par
dépit. Les gens veulent avoir une chance, mais veulent aussi sentir qu'elles
ont... que ça vaut la peine d'appliquer, de participer à un processus. Et ce
changement que je parlais tantôt, législatif, mais aussi de culture, on le
souhaite, va permettre ça à terme.
Mme LeBel : Bien, merci
beaucoup. Vos commentaires sont toujours très pertinents, comme d'habitude.
Merci...
Mme LeBel : ...on va
travailler avec ça. Merci beaucoup.
Le Président (M. Simard) : D'autres
interventions? Sans quoi, nous allons céder la parole au député... d'Outremont
Mont-Royal... toujours un doute. C'est Mont-Royal Outremont.
M. Arcand : C'est Mont-Royal
Outremont.
Le Président (M. Simard) : Bien,
c'est ça.
M. Arcand : Très bien. Merci,
merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, monsieur Milliard et bonjour,
monsieur Noël. Grand plaisir de vous retrouver aujourd'hui. D'abord, j'admire
la franchise de votre mémoire qui est très clair, très direct de ce côté-là.
Vous savez, toute l'obtention des contrats, j'ai encore, moi, en mémoire un
événement qui s'était passé en 2010 où on se promenait à travers le monde en
disant qu'on était en faveur du libre-échange. Et puis, à un moment donné, il y
avait eu un contrat de 3 milliards pour le métro, pour les wagons de métro
et on avait passé en quelques heures tous les partis politiques... on avait
passé un projet de loi pour donner finalement le contrat à Bombardier, alors
que c'était à peu près 3 millions par wagon, puis c'était 2,4 pour une
entreprise espagnole qui promettait d'ailleurs d'investir à peu près 60 %
du contrat dans une usine québécoise, etc., mais... Et par la suite, Bombardier
était retourné en Europe, et inutile de vous dire qu'ils n'ont jamais eu les
contrats auxquels ils s'attendaient. C'était toujours Siemens qui avait le
contrat ou un autre joueur. C'est pour ça que toutes ces questions-là, c'est
souvent des lames à deux tranchants.
Et moi, la question, c'est que vous êtes
quand même très précis dans votre mémoire, quand vous parlez, entre autres, là,
j'ai vu quelque chose qui m'a fait un peu sursauter, vous avez dit :
Écoutez... Dans les grilles de pondération, vous donnez l'exemple du
gouvernement fédéral, puis vous dites : Écoute, là, ça devrait être
90 % pour la qualité et 10 % pour le prix. Je pense qu'au Conseil du
trésor, on est pas mal loin de ça. Et j'aimerais que vous me disiez ce qui vous
guide à travers tout ça.
• (17 h 10) •
M. Noël
(Philippe) :Je peux y aller, Charles?
M. Milliard (Charles) : Vas-y,
vas-y.
M. Noël
(Philippe) :Oui, absolument. En fait, du
côté du gouvernement fédéral, on a des contrats, évidemment, qui sont octroyés
à 10 %, des fois, ça peut aller à 20 %, à 30 %, dépendamment du
domaine, mais c'est ce qui est réservé pour le critère prix. Donc, ça mise
énormément sur la qualité. Et nous, on observe qu'autour de nous, dans les provinces
canadiennes, au gouvernement fédéral, aux États-Unis, en France, au
Royaume-Uni, ils utilisent, en fait, des pondérations où est-ce qu'ils misent
dans une proportion extrêmement importante sur des critères de qualité.
Et peut-être qu'on pourrait vous soumettre
peut-être l'idée d'avoir le prix médian, qui est un modèle qui est observé en
Nouvelle-Écosse qu'on trouve très intéressant, où, lorsque vous vous trouvez à
l'intérieur même du prix estimé d'un 5 %, vous avez la totalité du
10 %, par exemple, pour ce qui est du critère qualité-prix, si le critère
est à 10 %. Et si c'est à 5 à 15 % d'écart par la suite par rapport
au prix médian, bien là, il y a une proportion plus faible de la pondération
pour ce qui est du critère prix. Donc, ça, le prix médian, pour nous, c'est un
modèle qui, je pense, pourrait être très intéressant, et aussi d'avoir des
entrevues de sélection pour ce qui est des entreprises qui obtiennent en fait
les soumissions, qui obtiennent en fait les meilleures notes en termes de qualité
et de valeur... qui pourrait être envisagé, je pense, du côté du Conseil du
trésor. Donc, 10 %, ça se fait autour... dans des juridictions autour de
nous. Alors, pourquoi pas chercher à atteindre un critère... le prix doit être
un critère pour nous, mais ne devrait pas être le critère majeur et
majoritaire, en fait, je devrais dire, pour octroyer des contrats.
M. Milliard (Charles) : C'est
le principal élément de notre... cette section-là de notre mémoire, c'est de
montrer qu'il y a des exemples qui fonctionnent à côté. Donc, on ne parle pas
de cas ésotériques dans d'autres civilisations qui n'ont rien à voir avec nous,
là, c'est vraiment des exemples qui fonctionnent bien. Puis un autre exemple
que j'aime bien, c'est que pour des gros dossiers, même les trois, quatre
finalistes sont convoqués en entrevue. Alors, écoutez, on est loin de remplir
un fichier Excel, puis d'obtenir une réponse, là, d'être convoqué en entrevue
pour expliquer pourquoi, pour tel dossier, vous devriez être choisi, ça fait
entrer la notion de qualité, d'innovation par la grande porte, je dirais.
M. Arcand : Très bien. Merci
infiniment pour cette réponse. J'aimerais vous poser une question également,
parce que depuis... je me rappelle l'époque de Mme Jérôme-Forget où on parlait
des PPP. Et ce que vous dites, vous, aujourd'hui, c'est qu'on a abandonné ça
pas mal au Québec. Il y en a pas mal moins qu'il y en avait déjà eu. Et vous
dites : On fait une erreur en ne faisant pas un peu plus affaire dans un
partenariat public privé. Est-ce que vous avez des des exemples ou est-ce que
vous avez...
M. Arcand : ...si vous pouviez me préciser un peu votre opinion par rapport à ça.
M. Noël
(Philippe) :Bien, nous, historiquement,
dans les dernières années, on avait publié même un document qui s'appelle
Accélérer le rythme et qui soumet toutes sortes d'idées, en fait, pour
favoriser le développement économique du Québec et de ses régions. Et parmi les
idées, c'est de faire davantage confiance aux partenariats publics privés pour
la conception notamment de projets d'infrastructures, mais pour la conception
aussi peut-être de certains projets de services également. Ça se fait beaucoup
et ça se voit beaucoup en Ontario dans une proportion... je n'ai pas de chiffre
de mémoire, mais je pense que c'était 10 fois plus de projets en PPP du côté de
l'Ontario. C'est à vérifier, là, mais qui était réalisé en mode versus au
Québec. Donc, il y a des opportunités, peut-être, que le gouvernement et l'État
québécois peut-être ignorent via le PPP. Donc, c'est ce qu'on a dit beaucoup
par le passé et on est cohérent à ce niveau-là, ici.
M. Arcand : O.K. Et ça serait
bénéfique pour le Québec si on avait plus de contrats en PPP à ce moment-là?
M. Noël
(Philippe) : Bien, nous, c'est ce qu'on croit, c'est ce qu'on
croit, et c'est ce que les membres nous disent aussi également de différents
secteurs, comme je le mentionnais plus tôt. Donc, oui.
M. Milliard (Charles) : On
croit entendre, dans le discours du ministre de la Santé, que ça fait partie des
options sur la table pour la refondation ou, en tout cas, la réforme du système
de santé. Il y aura beaucoup d'éducation à faire parce qu'il y a beaucoup,
beaucoup de préjugés, là, sur cette appellation là. Donc, je pense qu'il
faudrait refonder aussi la définition de ce terme-là. Mais à terme, nous, on
pense que ça peut être bénéfique dans plusieurs secteurs d'activités,
assurément.
M. Arcand : Vous aviez parlé
du dossier... il y a un dossier, vous avez parlé de dossiers en éducation, là,
où une entreprise ontarienne avait littéralement pour 7 000$. Il y a également
la question du transport aérien régional que vous mentionnez comme étant un
autre exemple où... Qu'est-ce qui s'est passé dans ce dossier-là?
M. Noël
(Philippe) :En fait, après 15 ans de
contrat avec la même firme québécoise, qui est une division, en fait, de
l'AQTA, bien, ça a été rapporté aux mains d'entreprises ontariennes pour un
écart minime de 4,5%, alors que ça faisait 15 ans qu'ils avaient les mêmes
services, qui connaissent le territoire, qui offrent les mêmes services. Donc,
il y avait de la qualité et de l'expertise qui étaient offertes. Et là c'est
une entreprise québécoise qui gère les déplacements gouvernementaux par
transport aérien aux mains d'une entreprise de Toronto. Je peux vous dire que
ça a été très, très mal reçu chez bon nombre de membres. Transport et
logistique, mais aussi du côté de notre comité entrepreneurial, ça a été un cas
type qu'on a... et c'est pour ça qu'on le mentionne dans notre mémoire également.
M. Arcand : Oui, l'entreprise
québécoise avait-elle un problème?
M. Noël
(Philippe) : Non, pas du tout. En fait, c'est... ils ont
soumissionné de 4% plus cher, mais ils n'ont pas accès, évidemment, au prix
d'une autre organisation qui a soumissionnée. Et, souvent, ce qu'on observe
aussi avec le plus bas soumissionnaire conforme, c'est qu'il y a des
entreprises qui vont sous-évaluer leurs propres coûts et qui se retrouvent
après à déclarer des avenants et des dépassements de coûts parce que ce n'était
pas les coûts qui étaient estimés. Donc, l'entreprise a fait... l'entreprise
québécoise a fait une proposition en fonction de ses coûts et elle a perdu son
contrat après 15 ans de loyaux services. Et c'était reconnu, là. Même du côté
du ministère des Transports, on nous disait que c'était l'entreprise qui
était... qui offrait de bons services, là.
M. Milliard (Charles) : C'est
une aberration administrative, puis onn ne veut pas tomber dans la valse des
anecdotes. Il va toujours en avoir, des aberrations. Mais c'est une façon
d'illustrer que, pour 4.5%, le Québec se prive d'encourager une entreprise qui
l'a très bien servi durant 15 ans, justement.
M. Arcand : Moi, je comprends
très bien. Dites-moi, on a parlé d'innovation, et, moi, ce qui me semble
important, c'est qu'on dit toujours : Il faut trouver l'équilibre entre
souplesse, prévisibilité en cette matière d'innovation. Pour vous, c'est quoi,
dans ce domaine là, les éléments les plus importants pour pouvoir réussir ce
que la ministre prône actuellement?
M. Noël
(Philippe) : Bien, en fait, les critères de cycle de vie, de
modernité, des critères qui font appel, dans le fond, aux solutions les plus
innovantes, peut-être que même de tester avec des bandes essais peuvent être
des opportunités à saisir pour pouvoir faire une place davantage aux
innovations. Dans les critères, évidemment, nous, on a poussé pour la qualité,
l'expertise, l'innovation, la durabilité et la performance environnementale.
Donc, si ces pondérations-là, dans les contrats publics, sont mises de l'avant,
ça devrait faire son bout de chemin pour l'espace d'innovation. Ça, c'est sûr
et certain.
M. Arcand : Et, à part la
question du prix, si j'avais à vous demander, dans le travail qu'il y a à faire
dans le...
M. Arcand : ...projet de
loi 12, quelle est la deuxième priorité, selon vous, une fois qu'on a
parlé du prix et qu'on comprend que ça ne doit pas être le seul critère, là?
M. Milliard (Charles) : Je
dirais que la deuxième priorité, ça devrait être de réussir la première.
M. Arcand : Donc, c'est
une grosse priorité, si j'ai bien compris.
M. Milliard (Charles) : Consacrer
tous mes jetons sur réaliser les critères d'octroi des contrats.
M. Arcand : O.K. Mais il
n'y a pas d'autre chose, à part de ça, dans le projet de loi, qui vous
préoccupe?
M. Noël
(Philippe) :Bien, oui, absolument. Mais,
en fait, dans notre mémoire, on aborde différents sujets. Tantôt, on a parlé de
l'aspect... en fait, augmenter les achats alimentaires québécois. Et, de ce
côté-là, nous, on trouve intéressant. Mais, en fait, c'est comme si on visait
strictement l'intermédiaire plutôt que de s'assurer d'avoir davantage
d'aliments québécois. Donc, l'intermédiaire, le distributeur est avantagé
versus d'avoir plus d'aliments québécois, viser à avoir plus d'aliments
québécois. Il faudrait peut-être un peu plus clarifier cette notion-là, d'un
côté, sur le produit québécois. Puis d'ailleurs, via des appels d'offres
spécifiquement dédiés, que ce soit notamment la performance environnementale,
que ça soit peut-être même des innovations dans le milieu agricole, on pense
qu'il y aura plus d'entreprises québécoises qui vont pouvoir avoir les
contrats, disons, publics liés à l'alimentaire. Mais la notion «produit
québécois» n'est pas assez mise de l'avant dans la stratégie, selon ce qu'on
entend.
M. Arcand : Je souhaite
que vous interveniez quand il sera question du règlement, là. Je compte sur
vous pour intervenir.
• (17 h 20) •
Le Président (M. Simard) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, M.
le Président. Merci, messieurs, pour votre présentation et votre mémoire. Vous
avez dit qu'on est trop timides par rapport à d'autres États. On pense beaucoup
aux États-Unis, là, au sud de la frontière, avec Biden aussi, récemment, qu'il
a affirmé à quel point c'était important de favoriser l'achat américain. Donc,
vous dites qu'on est trop timides à exploiter les zones grises des accords
internationaux qu'on a signés. Je vous ai même entendu parler de souveraineté
pharmaceutique. C'est ce que j'ai compris? J'avais l'impression d'entendre Amir
Khadir nous parler de Pharma-Québec, hein, on a cette proposition-là. Et je
comprends que vous êtes donc en accord avec Québec solidaire, que les accords
internationaux qu'on a votés nuisent à notre économie locale. Est-ce que j'ai
bien compris?
M. Milliard (Charles) : Non.
En fait, sur la question de la souveraineté pharmaceutique, effectivement, la
question, c'est d'abord une certaine indépendance pharmaceutique, parce qu'on a
vu, justement, la difficulté d'obtenir des approvisionnements au début de la
pandémie. Alors, moi, je pense que c'est critique, on dépense 50 % de
notre budget en santé, ça serait bien qu'on puisse soigner notre monde. Alors,
ça, on est d'accord. Maintenant, sur les fins et moyens, on pourra en
rediscuter.
Sur la question les accords
internationaux, écoutez, on est clairement libre-échangiste à la FCCQ, on croit
à la valeur du libre marché, et tout ça.
M. Arcand : J'étais
étonnée.
M. Milliard (Charles) : Bien
oui, mais, écoutez, là, permettez-moi de rétablir les ponts. Ceci étant dit, en
même temps, je me permets de mentionner, il est temps, là, de changer
l'impression qu'on a que les chambres de commerce sont des organisations qui ne
se préoccupent pas du développement social, du développement communautaire, du
développement environnemental. On participe au G15 plus, on participe à une
tournée avec Fondaction, en ce moment, sur les milieux de vie durables. Ça n'a
pas de lien avec l'environnement, mais...
Mme Ghazal : ...question
peut-être plus précise. Oui, oui, je comprends les intentions, et tout ça. Mais
il y a, par exemple, certains secteurs, alimentation, santé, vous en avez
parlé? Est-ce que, ces secteurs-là, on n'aurait pas dû les ouvrir à ce point-là
aux marchés internationaux, puis être aussi dépendants? On l'a vu, au début de
la pandémie, comment les gens vidaient les épiceries parce qu'on avait peur. On
est trop dépendants des marchés extérieurs. Est-ce que ça, vous... Est-ce qu'il
y aurait quelque chose à faire avec ça? Je sais que c'est en dehors du projet
de loi, là.
M. Milliard (Charles) : Oui,
mais je ne pense pas que c'est en mettant des barrières dans ces secteurs-là
qu'on va y arriver, c'est en valorisant ce qui se fait ici. On est des
champions de la production alimentaire. On est des champions en santé, sciences
de la vie. Ça fait des années qu'on dépasse la moyenne de l'OCDE sur les
investissements en matière de santé, sciences de la vie. Donc, il faut juste
laisser les gens d'ici avoir une chance de subvenir aux besoins de l'État et de
leur donner une chance équitable de réussir chez eux avant de réussir ailleurs.
Donc, ce n'est pas en mettant des barrières.
Mme Ghazal : Et ça, ça
se fait, par exemple... Et ça, je comprends que ça se fait avec plus de PPP. Ça
se fait en mettant de côté la notion du plus bas soumissionnaire. C'est ce que
je comprends de ce que vous dites?
M. Milliard (Charles) : Bien,
principalement en ayant une meilleure diversité des critères pour sélectionner.
Entre autres, sur la question du développement durable, c'est une façon de
respecter les accords internationaux...
M. Milliard (Charles) : ...d'encourager
nécessairement des entreprises qui produisent plus près et donc qui sont moins
polluantes au niveau du transport, par exemple.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci beaucoup. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Merci
beaucoup pour votre mémoire. Je sais que la ministre n'aime pas ça, mais vous
avez quand même des mots très forts, là, c'est un rendez-vous manqué, vous
parlez de déception. Je pense qu'il faut insister là-dessus. Et, moi, je
voudrais ajouter un élément à votre litanie, là, sur le plus bas
soumissionnaire : en disant le plus bas soumissionnaire conforme, c'est
aussi un frein à l'atteinte des cibles de réduction des gaz à effet de serre
qui sont quand même un projet puis un plan très important pour le Québec, d'autant
plus quand on est dans une crise climatique très forte. Mais j'aimerais ça vous
entendre un petit peu plus là-dessus. Vous venez de répondre à ma collègue,
mais on dirait que vous avez le goût d'aller plus loin, là, sur les critères de
développement durable, d'analyse de cycle de vie. Est-ce qu'on parle également
d'économie circulaire? Puis là il ne faut pas faire un ragoût avec tout ça, là,
parce qu'il y a quand même différents éléments là-dedans. Comment vous voyez
qu'on... Est-ce que le projet de loi va assez loin? Sinon, qu'est-ce qu'on
pourrait faire pour aller encore plus loin, pour inclure ça dans la loi?
M. Noël
(Philippe) :Oui. En fait, le plus bas
soumissionnaire conforme, là, c'est de favoriser, en fait, la solution qui est
la moins chère, la moins dispendieuse. Donc, des éléments importants sont
souvent négligés, escamotés et donc des innovations. Et quand on parle de
performance environnementale, nous, ce qu'on veut dire, là, c'est d'avoir des
soumissions qui permettent d'avoir des technologies vertes, des solutions
d'économie circulaire, l'emplacement même pour limiter les déplacements et
réduire les émissions de gaz à effet de serre. C'est sûr que ça touche moins,
peut-être, un secteur comme les services, les critères de performance
environnementale, mais dans un bon nombre de critères ou de contrats publics,
je devrais dire, ça peut être des solutions qui seront intéressantes. Mais tant
qu'on reste avec le plus bas prix, comme principal critère d'octroi dans les
contrats publics, on n'atteindra jamais, jamais, jamais cet objectif-là de
notre côté.
M. Gaudreault : Mais vos
membres comment qu'ils reçoivent ça? Parce que c'est quand même... d'inclure
des critères d'ESG, par exemple, ou de développement durable, ça peut changer les
pratiques. Est-ce que vous sentez qu'il y a vraiment un virage qui est prêt à
être fait à cet égard? Et j'ai vu à quelque part dans votre mémoire, là, vous
dites... dans le fond, ce que vous voulez, c'est que ça devienne des critères
aussi qui sont permanents, savoir où on s'en va, tu sais.
M. Noël
(Philippe) :Absolument. Il y a beaucoup
d'ouverture, vraiment, chez nos membres, à contribuer. Je pense notamment à des
entreprises qui sont expertes en bâtiment vert, donc qui veulent, pour des
contrats d'infrastructures, amener des solutions avec des toits qui répondent
aux meilleures normes écoénergétiques, mais qui sont privées parce qu'ils
doivent... s'ils veulent obtenir le contrat, doivent faire des soumissions qui
va amener des matériaux qui ne seront pas performants, avec des matériaux plus
traditionnels qui coûtent beaucoup moins cher et qui durent moins longtemps.
Donc, le cycle de vie est affecté. Et ça, ça a un impact aussi pour
l'environnement, mais nous, ce qu'on dit, principalement pour le contribuable,
parce que les projets sont à refaire plus rapidement, à moyen, long terme qu'à
court terme, où est-ce qu'on a des économies à court terme.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci beaucoup, M. Milliard, M. Noël, de votre présence parmi nous cet
après-midi et de votre contribution à notre réflexion collective. Au plaisir de
vous retrouver.
Sur ce, nous allons suspendre
momentanément nos travaux, histoire de faire place à nos prochains invités.
(Suspension de la séance à 17 h 27)
17 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 17 h 36)
Le Président (M. Simard) : Donc,
nous sommes de retour et nous sommes en présence de représentants de la
Coalition contre les retards de paiement dans la construction. Madame,
Monsieur, soyez les bienvenus. Auriez-vous d'abord l'amabilité, s'il vous
plaît, de vous présenter?
M. Bilodeau (Marc) : Bonjour.
Mon nom est Marc Bilodeau, président de la Fédération québécoise des
associations d'entrepreneurs spécialisés dans la construction et porte-parole
de la Coalition contre les retards de paiement dans l'industrie de la
construction.
Mme Amireault (Caroline) : Bonjour.
Mon nom est Caroline Amireault. Je suis avocate et directrice générale de l'AQEI,
l'Association québécoise des entrepreneurs en infrastructure, qui est une association
membre de la coalition. Je suis ici aujourd'hui en tant que porte-parole, en
remplacement de Steve Boulanger. Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Alors, vous disposez de 10 minutes.
M. Bilodeau (Marc) : Merci. M.
le Président, Mme la ministre, chers membres de la Commission, merci à la
Commission des finances publiques de nous donner l'opportunité de présenter nos
commentaires en regard du projet de loi 12.
La Coalition contre les retards de
paiement dans la construction, c'est un regroupement d'associations d'entrepreneurs
en construction qui a vu le jour à l'automne 2013 et dont l'objectif est de
mettre un terme à l'augmentation injustifiée des délais de paiement dans ce
secteur. Notre intervention dans le cadre du projet de loi 12 se limitera donc
à cet unique aspect.
La coalition représente l'ensemble des
entrepreneurs généraux et spécialisés... des dizaines de milliers d'entreprises
qui sont pour la plupart constituées de cinq salariés au moins et qui
embauchent plus de 175 000 travailleurs et travailleuses sur les chantiers,
sans compter des dizaines de milliers d'autres qui oeuvrent dans les bureaux de
ces entreprises. C'est une action collective et historique puisque c'est la
première fois que tous les entrepreneurs généraux et spécialisés du Québec se
regroupent ensemble pour une même cause, celle de mettre un terme aux délais de
paiement.
J'ai été moi-même entrepreneur pendant
plus de 30 ans, puis je peux en témoigner, puis ça va me faire plaisir d'échanger
avec vous à ce sujet-là lors de la période de questions, car les impacts des
retards de paiement, où la moyenne s'établit à près de 80 jours, sont très,
très nombreux.
En premier lieu, on va parler de la
gestion des liquidités, qui représente un défi quotidien pour la majorité des
entrepreneurs. On a été témoin d'entreprises qui ont attendu pendant plus de
trois ans avant de recevoir leurs retenues contractuelles de 10 % ou le
paiement d'un extra d'un projet. On a des entrepreneurs qui...
M. Bilodeau (Marc) : ...lundi
que je pose la question : Comment on va faire nos paies jeudi? Pendant ce
temps-là, les entrepreneurs doivent continuer à payer leurs employés, les DAS,
les remises de taxes, l'équipement, les matériaux. Tout ça augmente la pression
sur la liquidité des entreprises. Il y a plusieurs facteurs qui sont
attribuables aux paiements... tu sais, aux retards de paiement. Entre autres,
et sans s'y limiter, là, il y a le non-respect des clauses contractuelles, il y
a la lourdeur des procédures administratives, il y a le retard dans
l'approbation des changements, l'autorisation des paiements par les... sans
oublier l'absence de prise de décision.
Selon une étude d'impact qui a été
réalisée par Raymond Chabot Grant Thornton en 2015, et qui a été mise à jour en
2019, il y a présentement 7,2 milliards de dollars d'immobilisés dans les
comptes à recevoir des entrepreneurs en construction, qui sont de plus de
30 jours. Dans le contexte économique actuel qui est très difficile, là,
O.K., pour plusieurs entreprises en raison de la pandémie, de la pénurie de la
main-d'œuvre puis de la volatilité des coûts des matériaux, toute réduction des
délais de paiement aux entrepreneurs constituera en quelque sorte une forme
d'aide. C'est de l'oxygène qu'on pourrait donner aux entreprises sans qu'il
n'en coûte un sou de plus au gouvernement. Un autre chiffre, là, qui est tout
aussi sinon plus significatif, c'est que 77 % des entrepreneurs ont
mentionné, lors de l'étude d'impact, avoir refusé de soumissionner un projet en
raison des retards de paiement. C'est... en payant des entrepreneurs dans un
délai de 30 jours, le gouvernement donnerait la chance à un plus grand
nombre d'entrepreneurs généraux et spécialisés d'avoir accès aux marchés
publics. Les entrepreneurs, ils pourraient mettre, à ce moment-là, leur savoir
et leur créativité au service de la réalisation des projets et non au service
de leurs banquiers.
• (17 h 40) •
Puis il est généralement admis qu'une
diminution du nombre de soumissionnaires a une influence à la hausse sur le
coût du projet. Des données qui ont été citées par Raymond Chabot dans l'étude
démontrent que lorsqu'il y a moins de neuf entreprises qui soumissionnent sur
un projet, chaque soumissionnaire de moins représente un coût supplémentaire
qui varie entre 1 % et 6 %. Or, selon les données du SEAO, il y a
3,6... en moyenne 3,6 soumissionnaires par appel d'offres. Raymond Chabot
Grant Thornton conclut que le prix des contrats publics de construction
pourrait diminuer de 6 % à 13 % sur le nombre de... si le nombre de
soumissionnaires augmenterait. À l'échelle des contrats de l'État, c'est
énorme.
Je terminerai simplement en résumant la
position de la coalition. Les entrepreneurs souhaitent être payés pour les
travaux dûment exécutés et acceptés dans un délai raisonnable. C'est une
solution gagnante pour l'ensemble de la société québécoise. Puis on ne l'oublie
pas, c'est à coût nul pour l'État. On ne demande pas au gouvernement de payer
les entrepreneurs d'avance ou à un prix supérieur, mais simplement de les payer
à temps. Je laisserais ma collègue, Me Caroline Amireault, vous entretenir sur
les développements récents puis les raisons pour lesquelles un article
concernant le paiement rapide devrait être ajouté au p.l. 12. Merci de votre
attention.
Mme Amireault (Caroline) : Merci
Marc. M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, merci de nous
recevoir aujourd'hui, on l'apprécie. Alors, comme le rappelait mon collègue
Marc, la coalition a été mise sur pied en 2013. Ça fera bientôt 10 ans que
les membres de la coalition rencontrent plusieurs instances afin de les
sensibiliser à cette problématique vitale de nos entreprises québécoises.
Je veux vous donner des dates importantes
en rafale, ça va mettre en contexte et expliquer notre propos aussi. 2013,
création de la coalition. 2015, rapport de Raymond Chabot Grant Thornton sur
les retards de paiements, Marc vous a donné quelques statistiques. 2015, aussi,
une date charnière qui a été la recommandation 15 du rapport de la
commission Charbonneau. Alors, ça fait sept ans qu'on attend que cette
recommandation-là soit mise en place. En 2016, ça s'est conclu le
1er décembre 2017, évidemment, il y a eu le projet de loi 108 qui
parlait de l'Autorité des marchés financiers à l'époque, mais il y a un article
tout simple qui a été ajouté dans ce projet de loi là, qui est
l'article 24.3 et suivants jusqu'à 24.7, pour faire en sorte que le Conseil
du Trésor puisse, par arrêté, autoriser la mise en œuvre de projets pilotes. Et
ce petit ajout là, tout simple, a permis de faire avancer, dans les cinq
dernières années, le dossier des retards de paiement de façon considérable.
Je me permets aussi de préciser, par
exemple, un élément important dans le projet de loi 108. Ça faisait
l'unanimité à l'époque. Ça a été d'ailleurs adopté à l'unanimité au niveau du
gouvernement. Le projet d'encadrement législatif ne faisait aucun doute, sauf
qu'on voulait... le projet pilote servait à vérifier si c'était... il ne
servait pas à vérifier si c'était bon ou pas d'aller de l'avant, le projet
pilote a été mis en place pour évaluer les modalités d'un cadre réglementaire
qui cherche à établir des mesures destinées à faciliter le paiement. C'est ce
qui a été fait. 2018, comme on disait, à l'été, l'arrêté ministériel a cadré
52 projets. 47 ont été réalisés sur une période de trois ans, et à la
toute fin de ça, il devait y avoir la production d'un bilan. Le bilan est arrivé
un petit peu plus tard, mais en 2020, les parlementaires, plusieurs d'entre
vous qui sont assis autour de la table aujourd'hui étaient là... sur le projet
de loi 61, sur le projet de loi 66. Ce qui est différent avec notre
présentation aujourd'hui, c'est qu'à l'époque, c'était difficile pour...
Mme Amireault (Caroline) : ...pour
le Conseil du trésor et le gouvernement d'aller de l'avant avec une loi alors
que le projet pilote n'était pas terminé. Aujourd'hui, bien, le 3 mars
dernier justement, le Conseil du Trésor a émis son rapport final, et je
reprends les mots, c'était de la musique à nos oreilles. Pour la coalition, ça
a été un franc succès. J'ai entendu Mme LeBel en parler toute la journée.
Aujourd'hui, elle l'a soulevée à plusieurs occasions. Elle est très satisfaite
du rapport. Elle parle de pistes de solutions qui sont concluantes. Et quand on
lit les conclusions du rapport, on voit que la faisabilité et la pertinence
d'établir une solution pérenne et globale relativement à la problématique des
délais ont été démontrées par ce projet pilote là. Alors, nos devoirs sont
faits.
Il y a des commentaires, les deux
mécanismes ont été testés le calendrier de paiement et le mécanisme des
règlements de différends évidemment qui ont été testés. Il y a des points
positifs qui sont sortis de ça et il y a des éléments, soyons transparents, qui
restent à peaufiner, mais rien qui empêcherait d'aller de l'avant avec des
modifications au projet de loi n° 12. Et les derniers
correctifs pourraient être apportés par la suite au niveau de la
réglementation. Il va avoir des éléments à préciser. On pourra peut-être
revenir pendant les échanges, des questions, notamment sur les heures de
changement, les quittances et les cautionnements et les libérations des
retenues contractuelles, mais ça, c'est du travail qui peut se faire
ultérieurement.
Rapidement, sur les autres législations,
oon sait qu'à travers le Canada, presque toutes les provinces canadiennes ont
adopté une loi sur les retards de paiement. Vous avez justement, dans le
rapport du Conseil du trésor auquel je faisais allusion tout à l'heure,
l'annexe 3, il y a une liste, un portrait complet, très exhaustif de tout
ce qui se fait dans les autres provinces canadiennes et les autres
législatures. À notre connaissance, on pense que le Québec est la seule
province qui a d'abord procédé par un projet pilote. Les autres provinces ont
tout de suite procédé par une loi. Mais qu'à cela ne tienne, on est rendu le
projet pilote est fait. Alors, voilà! Pourquoi passer par le projet de loi n° 12? La Coalition est convaincue que le projet constitue
une occasion incontournable de régler la problématique des retards de paiement.
J'entendais aussi aujourd'hui des propos à l'effet que la loi, la LCOP, on ne
l'ouvre pas souvent. On ne veut pas l'ouvrir aux deux ans. On veut l'ouvrir et
le faire correctement. Alors, de notre côté, on... le projet pilote est
terminé, le rapport est émis, les conclusions sont concluantes, c'est positif,
puis il y a quand même 10 ans d'attente pour y arriver. Alors, on salue
évidemment le désir du gouvernement de vouloir favoriser l'approvisionnement
local par les ministères et les organismes du gouvernement, mais encore
faudrait-il que ce dernier paie les entreprises québécoises dans des délais
raisonnables. C'est ce qu'on demande. Alors, voilà une véritable mesure d'aide
directe aux entreprises à coût nul pour le gouvernement comme Marc le
mentionnait tout à l'heure.
On pense ici qu'il y a un pas dans la
bonne direction a été fait avec le projet de loi n° 66
parce qu'évidemment, il y a eu 180 projets qui ont été visés, ça a été un
bon élément, où des mesures de paiement sans retard ont été introduites, mais
il est nécessaire de faire un pas de plus, d'aller plus loin, et maintenant
d'instaurer des mesures pérennes et définitives et globales pour l'industrie de
la construction. Depuis plusieurs années déjà, les mesures proposées par la
coalition pour corriger la situation sont simples et connues. Deux choses un
calendrier de paiement, un mécanisme de règlement des différends, tout ça qui a
été testé dans le projet pilote.
Dans ce contexte-là, et tel qu'on le
précisait précédemment, la coalition, on invite les parlementaires membres de
la coalition des finances publiques à profiter du projet de loi n° 12
pour régler définitivement la problématique des délais de paiement dans la
construction pour le volet des marchés publics. Par conséquent, on effectue la
recommandation suivante à l'effet qu'un amendement soit apporté à la LCOP pour
qu'il y ait un article... soit intégré dans le même principe que celui qui a
été fait en 2018, l'article 24.3 qui permettrait à la présidente du
Conseil du Trésor d'imposer par règlement un calendrier de paiement et un
mécanisme de règlement rapide des différends afin de faciliter le paiement aux
entreprises parties aux contrats publics et sous-traitances publiques — n'oublions
pas les sous-traitants parce que c'est une démarche commune — selon
des conditions et des modalités qu'elle édicterait, lesquelles peuvent différer
de celles prévues par la présente loi et ses règlements. Alors, je vous
remercie de votre écoute et M. le Président, et Marc et moi de me rendre
disponible pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous deux. Mme la ministre.
Mme LeBel : Bonjour,
bonjour, ça me fait vraiment plaisir de vous reparle à nouveau parce qu'on a eu
l'occasion d'en discuter et que ce soit dans le cadre du projet de loi n° 66 ou... merci de l'avoir souligné. On a fait un pas
supplémentaire qui était quand même un grand pas dans les circonstances de
l'époque, là, quand on était encore dans le projet de... puis le projet pilote
était encore en vigueur ou, à tout le moins, on attendait aussi le dépôt du
rapport minimalement. On a donc décidé d'introduire et d'étendre la notion de
calendrier de paiement et de mécanisme de règlement des différends à l'ensemble
des projets du PQI, du Plan québécois des infrastructures. C'est quand même un
gros morceau des contrats au Québec. Je réitère parce que je vais vous dire que,
dans le fond, notre conversation risque d'être courte parce que vous prêchez à
une convertie...
Mme LeBel : ...sur les
bienfaits de mettre en place des mécanismes qui favorisent les paiements le
plus rapidement possible, disons, dans des délais qui sont qui sont
acceptables, et c'est le cas de ce que le projet pilote a voulu mettre de
l'avant. D'ailleurs, il serait difficile pour moi de renier aussi le fait que
c'était une des recommandations de la commission Charbonneau à l'époque où j'y étais,
donc... mais il n'y avait pas d'époque où je n'y étais pas, là, genre, je ne
sais pas... j'ai rajouté ça, donc, à l'époque de la commission, mais je sais, à
l'époque où je n'y étais pas. Mais je veux discuter avec vous plutôt des
solutions. Parce que, maintenant qu'on se met d'accord sur les conclusions du
rapport, sur le fait qu'on doit faire... qu'on doit donner suite au projet
pilote, sur les faits qu'il y a... qu'on doit avoir une solution pérenne et
globale, bien, c'est le quoi faire, comment le faire et quand le faire. Donc,
c'est... Et je suis contente de voir votre proposition qu'on devra étudier avec
beaucoup de sérieux, là, voir si c'est pertinent ou on a... ou, en tout cas, si
on peut l'introduire dans le projet de loi numéro 12, pour toutes sortes de
raisons.
Mais je comprends que pour vous, ce n'est
pas nécessairement la solution globale, qu'il restera un bout de chemin à faire
par la suite. Ça répond à un aspect. Donc, est-ce que je peux le qualifier, cet
amendement-là, de solution intérimaire, mais qui demeura quand même quelque
bout de chemin à faire pour avoir une solution véritablement globale. Est-ce
que je peux comprendre ça?
• (17 h 50) •
Mme Amireault (Caroline) : Bien,
vous avez tout à fait raison, Mme LeBel, c'est exactement ça, parce que notre
demande est d'avoir une solution globale. Quand on parle de global, c'est les
sociétés d'État, c'est les organismes publics, c'est le privé, et le municipal.
C'est un gros éléphant à manger, mais le projet pilote nous a permis de régler
la problématique, en tout cas, de travailler avec les organismes publics. Si la
commission en venait à la conclusion de dire : On apporte des amendements,
vous pourriez aller dans... voir le 24.3, le changer, retirer les modalités qui
touchent au projet pilote, remplacer ça par un règlement. On ne demande pas, à
la commission, aujourd'hui, d'amender la... et de mettre tous les paramètres du
projet pilote dans la... Ce serait suicidaire de faire ça, de cette façon-là,
je crois. Allons-y avec un article général qui permettrait au Conseil du trésor
de travailler, par la suite, les règlements sur les contrats des organismes
publics d'abord. On pense aussi que de le faire de cette façon là... Puis, tu
sais, c'est une opportunité qu'il ne faut pas manquer, là. On demeure
convaincus, la coalition, qu'il faut vraiment passer par le projet de loi 12
pour à tout le moins faire ce premier pas qui va être décisif. Ça fait dix ans,
je ne le répète plus après, mais ça fait quand même bien qu'on travaille ce
dossier-là. Alors, on souhaite le faire.
Et ultimement on pense aussi que... ça
avait d'ailleurs été une question qui avait été posée sur le PL 66, de mémoire,
par M. Gaudreault, on pense que, si l'État donne l'exemple comme un organisme
public, bien, ça va permettre aux autres donneurs d'ouvrage de suivre la parade
puis de dire : Bien, il faut s'organiser, se structurer pour avoir des
délais de paiement respectables, parce que sinon l'industrie va se concentrer
au niveau des organismes publics. Alors, c'est une opportunité à ne pas manquer
de notre côté. Puis je pense que, pour avoir entendu les... Depuis le matin,
presque tous les intervenants qui ont parlé des retards de paiement...
J'applaudissais silencieusement dans mon bureau toute la journée, mais je
trouvais ça intéressant de voir que cette problématique-là, elle est soulevée
par plusieurs instances. Et vous avez une belle opportunité. On pense que tous
les parlementaires ont une très belle opportunité de le faire présentement.
Mme LeBel : Oui. Bien, merci.
Puis je voulais simplement être capable d'asseoir ma compréhension
correctement, parce qu'effectivement on a eu l'occasion d'en discuter, vous et
moi, dans une autre rencontre de cette demande, d'avoir une solution pérenne et
globale. Mais je pense que c'est important de bien cadrer la situation et de
dire que, si on attend pour avoir cette solution pérenne et globale, là, bien,
il y a des niveaux de difficulté peut être... bon, pour ne pas parler du
domaine... pour ne pas nommer le domaine municipal, à titre d'exemple, ou si on
attend de tout faire dans une seule solution où on règle, bien, naturellement,
là, dans lesquels on est pour le projet de loi 12, on n'est pas dans des délais
qui nous permet de tout faire. Et je pense, c'est vraiment le fait que je
voulais cadrer que, donc, vous n'abandonnez pas là l'objectif d'une solution
pérenne et globale, mais vous admettez, vous comprenez qu'on ne peut pas le
faire nécessairement dans une dans une seule étape.
Donc, je comprends bien, quand je vois que
la solution que vous proposez... On verra, bon, si on peut le faire puis on va
l'étudier avec beaucoup de sérieux, parce que la volonté de procéder, elle est
présente. Maintenant, je dis toujours, c'est quoi faire, comment le faire et
quand le faire. Donc, il faut quand même se poser, nous, ces questions-là avant
de prendre la décision, mais je comprends que votre proposition est quand même
une proposition par étapes, là, mais c'est une bonne étape, mais par étape.
Mme Amireault (Caroline) : Exactement.
Mme LeBel : O.K. Écoutez, ce
n'est pas parce que je ne suis pas d'accord avec vous, c'est parce que votre
point est très clair.
Mme Amireault (Caroline) : Tant
mieux.
Une voix : Tant mieux.
Mme LeBel : Alors, je n'avais
pas d'autre question que mes collègues, à moins que mes collègues, mais...
Le Président (M. Simard) : ...merci
à vous. M. le député de Vanier, ça vous va? M. le député Mont-Royal-Outremont.
M. Arcand : Merci. Alors,
bonjour, encore une fois, de votre...
M. Arcand : ...présence,
merci infiniment, monsieur Bilodeau, Mme Amireault. Évidemment, on était
là, nous, au gouvernement en 2017 lorsqu'on a établi le projet pilote. Et on
voit, et vous l'avez bien indiqué, qu'il y a d'autres gouvernements qui
semblent avoir des méthodes un peu plus précises et surtout des paiements plus
rapides. J'aimerais que vous m'expliquiez, d'après vous, cette espèce de... il
semble y avoir parfois une relation un peu toxique entre l'État et les
entrepreneurs en construction au niveau des appels d'offres. Surtout, entre
vous et moi, dans le domaine de la construction, les prix ont augmenté
beaucoup, on nous dit que les matériaux sont plus chers. Mais en même temps,
vous savez, il y a une relation où on ne sait jamais tout à fait le prix qu'on
va payer, ce n'est pas toujours clair, et ainsi de suite. Est-ce qu'il y aurait
des façons, je dirais, de sécuriser davantage les personnes qui ont des
décisions à prendre, de donner le contrat avec un certain prix? Est-ce qu'il y
a des façons, selon vous, qui existent, qui pourraient rassurer les gens qui,
souvent, veulent évidemment que le contrat qu'ils donnent soit fait au juste
prix?
M. Bilodeau (Marc) : Il
y a beaucoup de façons de procéder à travers la planète. Il y a quand même
un... Il y a un retour de son.
M. Arcand : Bien, nous,
on...
M. Bilodeau (Marc) : Excusez-moi.
Bon. Il y a beaucoup de façons de procéder à travers la planète. Il y a
beaucoup de gens qui ont expérimenté des systèmes différents. C'est bien entendu,
nous, dans le cadre... notre raison d'être aujourd'hui, c'est des délais de
paiement. Mais je peux vous dire une chose certaine, c'est plus il y aura de
soumissionnaires, plus on s'assurera d'avoir un prix juste. Parce qu'un
soumissionnaire unique... J'ai été entrepreneur pendant 30 ans. Le
soumissionnaire unique, il sait qu'il est unique. S'ils sont deux joueurs, les
gars se connaissent, ils savent qui, qu'est-ce que l'autre a en main. Puis ils
ne se parlent pas mais tout le monde sait que ça va avoir une pression vers le
haut sur les prix.
Lorsqu'on est six, 7, 8 joueurs qui
soumissionnent sur un même projet, les entrepreneurs doivent faire preuve
d'innovation, doivent faire preuve de... doivent se réinventer pour réussir à
être le plus bas soumissionnaire. Parce qu'ils ne peuvent pas contrôler ce qui
se passe dans 8 entreprises. Donc, ça va avoir nécessairement une pression
sur les prix vers le bas.
Maintenant, le processus pour choisir
l'entrepreneur, le plus bas soumissionnaire, le meilleur prix, ça, il y a
d'autres associations qui vont venir vous rencontrer dans les prochains jours
qui sauront vous aider avec cette question-là.
Mais nous, ce qui est vraiment important
pour nous, c'est de s'assurer d'ouvrir le marché public. Et pour ouvrir le
marché public, pour qu'il y ait plus de joueurs qui puissent venir jouer dans
la cour du marché public, il faut que les entrepreneurs aient plus le fardeau
du financement à supporter.
Moi, j'étais... comme je vous ai dit, j'ai
été entrepreneur 10 ans puis j'ai... Pendant 20 ans, je n'ai pas fait
de projets publics uniquement à cause qu'on n'était pas bien payé. J'avais deux
choix, je choisissais un projet public ou un projet privé, j'allais vers le
privé parce que je le savais que la paie serait meilleure, que mes travaux
supplémentaires rentreraient plus vite et que ma retenue contractuelle
n'arriverait pas au bout de trois ans.
M. Arcand : O.K. mais
moi, la question fondamentale derrière ça aussi, c'est que c'est quand même,
pour les gens au gouvernement, puis je n'essaie pas de défendre les gens au
gouvernement nécessairement, mais c'est quand même... On parle souvent de
beaucoup d'argent. On fait des évaluations. Le milieu de la construction est un
milieu qui est toujours très mouvant à cause du prix, à cause de tout ce qui se
passe de ce côté-là. J'essaie juste de voir au-delà de la question du paiement
si, pour... parce qu'il faut essayer de trouver une solution. À mon avis, pour
pouvoir sécuriser des paiements dans l'avenir, il faut qu'il y ait un lien de
confiance qui soit un peu meilleur par rapport à ce qu'il est actuellement.
C'est pour ça, le sens de ma question.
M. Bilodeau (Marc) : Je
comprends très bien. Je pense qu'il faut peut-être s'asseoir et revoir un peu
le processus d'octroi de contrats. On parle des appels d'offres, on parle des
documents d'appel d'offres, des professionnels qui sont préparés. Ça, je pense
qu'il faut que, un... peut-être plus de temps. Il faut qu'il y aie... Il faut
que ça soit revu. Souvent, on a des dossiers qui arrivent en appel d'offres,
qui ne sont pas complets. C'est sûr que ça va être dur de vous donner le juste
prix si on n'a pas les documents complets qui changent avec des addendas et
toutes sortes de choses. Donc, je pense que c'est important de commencer à
avoir un processus d'appel d'offres où les documents que des entrepreneurs
reçoivent soient clairs...
M. Bilodeau (Marc) : ...ensuite
de ça, on établit un processus d'appel d'offres, plus bas soumissionnaire, peu
importe la façon, et on paye bien des entrepreneurs. On les intéresse au
marché. Les entrepreneurs vont arriver plus nombreux avec des documents clairs.
Donc, ça va nous aider à avoir des prix plus précis. On a vu des appels
d'offres où on nous rajoutait une salle d'opération dans un hôpital, et en
addenda. Donc, on est rendu à l'étape où on présente un projet aux
entrepreneurs, puis après ça on vient en addenda demander des travaux
additionnels majeurs. Ça a une influence sur les prix. Donc, il faut régler ce
cas-là en partant pour avoir des prix encore plus justes. Puis, en payant bien
les entrepreneurs, on va intéresser les gens.
M. Arcand : Écoutez, depuis
le début, les gens qui viennent... puis, je comprends que votre objectif de la
coalition, c'est d'abord et avant tout de se faire payer, là, d'abord et avant
tout ça. Ça, je comprends très bien ça. Mais est-ce que vous avez une opinion
sur l'idée qui... dont on n'arrête pas de parler depuis le début de la journée,
sur le fait qu'on ne peut pas juste regarder le prix? Il faut... il y aurait la
qualité, est un élément important et l'innovation, etc. Est-ce que vous avez
une opinion par rapport à ça?
• (18 heures) •
M. Bilodeau (Marc) : Bine,
bien sûr, bien sûr qu'on a une opinion par rapport à ça. C'est... je ne veux
pas mettre personne en... je ne veux pas peinturer personne dans le coin, mais
c'est sûr et certain qu'il y a peut-être une révision du mode... le prix,
est-ce qu'il doit être uniquement le prix qui est à considérer, de l'expérience
des entrepreneurs, beaucoup de choses. Mais comme je vous ai expliqué tantôt,
j'ai des collègues qui vont venir vous rencontrer qui, eux, ont vraiment
planché sur cet aspect-là. Et puis nous on va vraiment essayer de se concentrer
uniquement sur vraiment l'aspect de paiement.
M. Arcand : Vous avez dit que
pour régulariser les retards de paiement, vous avez dit : Bien, si on fait
ça au municipal, qu'au... etc., c'est un gros éléphant à manger, là. Si j'ai
bien compris ce que vous avez dit. Selon vous, où on devrait intervenir plus
rapidement? Et surtout combien de temps vous pensez qu'on peut prendre pour
vraiment régulariser les problèmes? Est-ce que vous voyez des délais possibles,
là? Je sais que le projet pilote a duré longtemps, là. Mais est ce que vous
voyez de certains délais de ce côté là?
Mme Amireault (Caroline) : Bien,
à cette question-là, c'est une excellente question, je pense que le projet
pilote, quand on nous l'a présenté en 2017, en était un peu déçu, la coalition,
parce qu'on souhaitait que la loi soit changée tout de suite, puis que des
dispositions d'ordre public arrivent dans la loi. On s'est plié au projet
pilote, puis avec du recul, bien, on peut dire que ça nous a permis de tester
les mécanismes. Puis, je crois que rapidement, si un amendement est apporté au projet
de loi n° 12 pour permettre au Conseil du trésor de prévoir les règlements
adjacents, ces règlements-là, il ne reste pas beaucoup de choses à corriger
dans les paramètres, parce qu'on avait plusieurs pages, là, dans les paramètres
des dispositions sur le calendrier de paiement, l'intervenant, etc. Mais ce
sont des petites choses qui restent à... du «fine tuning.» Je n'aime pas
l'expression en anglais, là, mais vous comprenez ce que je veux dire. Ce sont
des petits éléments qui ne sont pas contradictoires dans le... puis même ça
ressort du rapport du Conseil du trésor, là. Ce sont des petits éléments qui
peuvent se mettre en place. Je pense que le projet pilote nous a permis
d'acquérir une maturité au niveau de l'industrie de la construction. Les entrepreneurs
qui ont participé à ces projets pilotes là avaient le goût de participer à ces
projets de construction là. Ça leur a montré comment ça fonctionnerait. Puis ça
a été vraiment une réussite, là, sur toute la ligne pour faire en sorte que
les... Mais pour répondre à votre question est-ce qu'il y aurait des délais? Ça
pourrait quand même se faire assez rapidement, à tout le moins au niveau des
organismes publics, si on a cet article-là dans le p.l. 12.
M. Arcand : D'accord. Si
j'avais à vous demander, simplement, parce qu'il nous reste à peu près deux
minutes, là, le calendrier de paiement, pour les gens qui écoutent, est-ce que
vous pourriez nous expliquer de façon simple, ce que vous voyez? Et en quoi
c'est différent de l'Ontario ou du fédéral de ce côté-là? Est-ce que c'est une
formule qui est déjà employée ailleurs, ce que vous proposez? Ou si vous
vouliez juste nous l'expliquer de façon simple.
M. Bilodeau (Marc) : D'accord.
J'ai... en fait, ce calendrier de paiement là, c'est un calendrier qui est
prévu dans la plupart des contrats de construction. C'est-à-dire qu'un décompte
progressif est présenté le 25 aux entrepreneurs généraux. On s'entend sur un
décompte au 1er du mois. Les factures s'envoient. Le 1er du mois,
l'entrepreneur envoie la facture au client. Le client reçoit la facture, a
jusqu'au 20, le 21 pour prendre action. Recevoir la facture, et dire :
Bon, bien, écoute, vous m'avez facturé 100 000 $. Moi, je reconnais
les travaux...
18 h (version non révisée)
M. Bilodeau (Marc) : ...et il
présente, il dit : Je vais vous payer 90 000 le 30 du mois parce que
je considère qu'il y a 10 000 qu'il n'y a pas d'affaire, mais c'est
justifié.
Donc, l'entrepreneur reçoit son paiement à
la fin du mois, a cinq jours pour payer le sous-traitant et cinq jours le sous
sous traitant. Donc, c'est un calendrier qui est assez clair. Aujourd'hui, ce
qui se passe, c'est que lorsqu'on reçoit une demande de paiement, si, souvent,
le montant ne balance pas ou on n'est pas d'accord avec le décompte, le
montant... la facture s'en va sur le côté, puis là, ça prend du temps à le
régler, d'où la moyenne qui est rendue à 80 jours. Dans le... au niveau
des retenues contractuelles, il y a aussi un mécanisme qui fait en sorte qu'on
peut recevoir nos retenues plus rapidement, qu'on les facture à la fin de nos
travaux. En ce moment, les retenues, quand on parle d'entrepreneurs qui
attendent leurs retenues pendant trois ans, ça commence à être beaucoup d'argent.
C'est 10 %... ce n'est pas le profit, c'est plus que le profit que les
entrepreneurs font.
Donc, l'entrepreneur, il a soumissionné
sur des projets publics puis son cash flow diminue, ses liquidités diminuent. C'est
ça qu'il faut changer. Il faut que les entrepreneurs aient accès à ces
liquidités-là pour continuer à pouvoir dépenser de l'argent, pour pouvoir
commencer à investir dans leur entreprise, dans de l'équipement neuf, dans la
modernisation et dans la formation de sa main-d'œuvre.
M. Arcand : Est-ce qu'il y a
beaucoup d'extra, parfois, dans les contrats avec le gouvernement actuellement?
M. Bilodeau (Marc) : Il y a
beaucoup d'extra, notamment dans... au ministère des Transports, hein, Caroline
pourra le justifier, mais il y en a aussi dans le bâtiment. Il y en a un peu
partout, c'est des travaux supplémentaires. Puis ces travaux supplémentaires
là, souvent, dans bien des cas, vont être faites à temps matériel. Et puis, là,
on envoie des factures, et puis, là, la guerre... pas la guerre, mais la valse
des échanges commence. C'est-à-dire que, là, tu... C'est beaucoup trop cher, ce
n'est pas assez cher...
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci, M. Bilodeau. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Merci, M. le
Président. Merci pour votre présentation. Écoutez, c'est très, très clair, là,
votre recommandation est claire, nette et précise, puis vous l'avez déjà
mentionné aussi dans l'espace public. Et de ce que je comprends de la ministre,
c'est qu'il y a quelque chose qui va être fait, il y a une ouverture. Peut-être
pas dans un amendement dans le projet de loi, mais par un autre mécanisme. Je
suis quand même curieuse. Je me dis, c'est qui, d'abord, qui soumissionne pour
le gouvernement si c'est si compliqué d'être payé? C'est les plus gros, c'est
ça que je comprends.
Mme Amireault (Caroline) : Bien,
je veux répondre à une portion, Marc, s'il te plaît. Avant de dire que nous, on
souhaite que ça soit par amendement dans le projet de loi 12. Puis vous
auriez même l'opportunité, comme législature de voir à peut-être modifier aussi
certains articles. Parce que, quand il y a eu le projet de loi 108, il y a
des articles 24.3 à 24.7 qui ont été ajoutés dans la LCOP, mais certains
de ces articles-là sont devenus désuets maintenant parce que le projet-pilote
est terminé. Alors, en faisant l'amendement qu'on vous propose, vous pourriez
aussi également profiter de l'occasion, puis retirer certains articles. Et,
comme on le disait, tout à l'heure, ce n'est pas à tous les 2 ans, 3 ans
qu'on ouvre la LCOP. C'est une belle opportunité. Je voulais juste faire cette
parenthèse-là... on demande qu'il y ait un amendement.
Mme Ghazal : La ministre
écoute.
Mme Amireault (Caroline) : Oui,
je suis convaincue.
M. Bilodeau (Marc) : Mais
pour répondre à votre question...
Mme Ghazal : Oui, oui,
allez-y.
M. Bilodeau (Marc) : Ce sont
des plus gros entrepreneurs qui sont capables de soumissionner. Il faut être
capables, ça prend des reins solides pour travailler pour l'État. Ça prend
quelqu'un qui est capable de supporter du crédit, qui est capable de payer ses
employés à toutes les semaines, ses équipements et attendre son paiement 80 jours
et sa retenue 300 jours.
Mme Ghazal : Dans le fond,
vos membres, là, de la coalition, je ne sais pas, pour avoir un ordre de
grandeur, c'est des gens qui ont des, je ne sais pas, des chiffres d'affaires
de combien? Est-ce que...
M. Bilodeau (Marc) : Bien, ça
dépend. Il y a de toutes les grosseurs. On a... on représente l'entièreté de l'industrie
de la construction.
Mme Ghazal : Sauf les plus
gros, qui ont les reins solides, c'est ce que je comprends?
M. Bilodeau (Marc) : Non,
non, ils sont membres également.
Mme Ghazal : Parce qu'eux
aussi ils veulent être payés vite, quand même, là.
M. Bilodeau (Marc) : Bien,
certainement, c'est légitime.
Mme Ghazal : Puis...
Mme Amireault (Caroline) : En
fait...
Mme Ghazal : Oui, oui. Non,
allez-y, allez-y.
Mme Amireault (Caroline) : ...ça
a été une constatation qui a été faite au début, parce que les entrepreneurs
pensaient que c'étaient les généraux qui retenaient les sommes des
sous-traitants. À un moment donné, on s'est parlé, puis on a fait, comme, bien,
nous aussi, les généraux, on a des problématiques, c'est le donneur d'ouvrage.
L'argent ne vient pas. Ça fait qu'on n'était pas capables de payer les
sous-traitants. C'est pour ça que la solution pérenne qu'on souhaite englobe
autant les généraux que les sous-traitants. On travaille en collaboration.
Mme Ghazal : O.K. Je
comprends. Puis là je ne sais pas il me reste combien de temps.
Le Président (M. Simard) : ...secondes.
Mme Ghazal : Oui, bien, en
fait, écoutez, je voulais savoir si, par exemple, il y avait d'autres éléments
que vous vouliez ajouter, autre que ce problème-là, quoi que c'est le sujet qui
vous occupe, c'est le nom aussi de votre coalition, donc l'inflation, tout ça.
Bien, on pourra en parler une autre fois, de toute façon, on n'a plus le temps.
Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup pour votre présence. Ce n'est pas la première fois qu'on se rencontre.
Je vous écoutais, puis je me disais : Quand ils ont créé la coalition
contre les retards de paiement, en...
M. Gaudreault : ...il ne
devait pas penser de se retrouver en 2022 encore à plaider ça. Tu sais, c'est
le genre de... j'avais un de mes oncles qui avait un chalet, quand j'étais
jeune, puis il faisait des travaux qui étaient temporaires. Puis, au bout de
dix ans, la rallonge était toujours là, qui était temporaire, puis ça devenait
permanent. Tu sais, ça fait que c'est un peu ça, c'est... Je ris, mais ce n'est
pas drôle, dans le sens que vous continuez votre votre travail. Heureusement
que vous êtes là.
Moi, j'aimerais ça vous amenez sur le
privé. Moi, je viens d'une région qui est très dépendante de la grande
industrie, où, on le sait, il y a eu aussi des délais de paiement plus longs,
et ça affecte toute la chaîne, hein, en aval, là. Donc, l'entrepreneur général,
le sous-traitant, le sous sous-traitant, puis moi, il y a des entrepreneurs qui
cognent à ma porte de député pour dire : Écoutez, là, ça n'a plus de bon
sens, je ne suis plus capable de payer mes employés. C'est ça, la réalité.
Alors, j'aimerais ça que vous nous disiez ce qui en est présentement avec le
privé et comment on peut agir également à cet égard.
M. Bilodeau (Marc) : Le privé
fait pas... au niveau du paiement normal, le privé est en moyenne aussi à
80 jours. Où le privé fait beaucoup mieux, c'est sur le règlement des
extras et le règlement de la retenue contractuelle. C'est là que le privé se
démarque et c'est là que ça devient plus intéressant de faire affaire avec le
privé. Parce qu'en dedans de 90 jours, grosso modo, après la fin d'un
contrat, on le sait qu'on va avoir notre argent complet et on pourra passer à
un autre projet. Et puis, c'est vraiment là que ça se démarque. Ça fait que,
quand on a le choix entre aller à un projet public ou un projet privé, on va au
privé. C'est plus simple, l'argent est là.
M. Gaudreault : Mais ce
que... aussi des plus longs délais de paiement. Je voudrais... Ce que je veux
dire, c'est que les délais de paiement s'allongent, entre guillemets, au privé.
Est-ce que c'est encore ça?
M. Bilodeau (Marc) : Ah! bien
oui.
M. Gaudreault : Oui, bien,
c'est ça. Donc, comment on peut agir sur...
• (18 h 10) •
Mme Amireault (Caroline) : Les
chiffres de notre étude ont été mis à jour, puis, en 2019, on voit que l'écart
continue à s'accentuer au privé et au public. Là, ce n'est pas... Ça ne s'est
pas amélioré. Puis même en 2021, on a fait une autre étude économique avec
Raymond Chabot Grant Thornton dans un autre regroupement, mais il y a encore la
problématique des délais de paiement qui ressort, là. Et deux des quatre
solutions qui ont été présentées dans cette étude-là, c'est le calendrier de
paiement encore et l'intervenant expert. Alors, ça vient reconfirmer, en 2021,
la portée du propos qu'on traîne depuis 2013. Je sais que monsieur Gaudreault,
vous allez prendre... vous allez laisser bientôt vos fonctions, j'aimerais ça
ne pas me rendre à... j'aimerais ça que ça se fasse avant que nous-mêmes
prenions notre retraite.
M. Gaudreault : Avant que je
parte. O.K. On va essayer.
M. Bilodeau (Marc) : En fait,
ce qu'on chercherait, c'est une loi d'ordre public qui encadre l'ensemble des
travaux de construction, publics, privés. Bien c'est sûr que c'est ça qu'on
recherche, comme il s'est fait en Ontario.
M. Gaudreault : Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
monsieur Bilodeau, madame Amireault, merci beaucoup pour la contribution à
cette commission. Sur ce, nous allons suspendre momentanément, le temps de
faire place à nos prochains invités. Et, à vous deux, au plaisir de vous
retrouver à nouveau. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 11)
(Reprise à 18 h 15)
Le Président (M. Simard) : Alors,
nous sommes de retour et nous sommes... Nous allons finir en beauté avec une
présentation du groupe G15+. Madame, Monsieur, bienvenue parmi nous.
Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter?
M. Blackburn (Karl) : Karl
Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec.
Le Président (M. Simard) : Rebienvenue
parmi nous, Monsieur Blackburn.
M. Blackburn
(Karl) :
Merci.
Mme
Alain (Béatrice) : Béatrice Alain, directrice générale du Chantier de
l'économie sociale.
Le Président (M. Simard) : Nous
vous écoutons, et vous disposez d'une période de dix minutes.
M. Blackburn (Karl) : Alors,
merci. Mme la ministre, encore une fois, bonjour. Messieurs, mesdames les
députés. Alors, c'est toujours un plaisir de vous rencontrer de nouveau. Et
cette fois-ci, c'est dans le contexte de notre partenariat, de notre
collaboration avec le G15.
Le G15+ s'appuie sur le dialogue social
pour favoriser la transformation de l'économie québécoise vers une société plus
solidaire, prospère et verte, et placer le bien-être de la population au cœur
des politiques publiques. Fondé en mars 2020, il est composé de leaders
économiques, syndicaux, sociaux et environnementaux du Québec. En janvier 2022,
le G15+ a dévoilé les indicateurs du bien-être au Québec, visant à mettre le
bien-être au cœur de nos politiques publiques.
C'est avec un grand intérêt que nous avons
pris connaissance du projet de loi 12. D'ailleurs, c'est ma deuxième
participation à votre commission, mais nous remercions les membres de la
Commission des finances publiques de nous donner l'occasion de nous présenter
et de présenter nos commentaires et recommandations.
Les leaders économiques, sociaux,
syndicaux et environnementaux du G15 saluent le dépôt de la stratégie
gouvernementale des marchés publics et du présent projet de loi numéro 12.
Cette stratégie était attendue depuis longtemps. Le collectif apprécie l'écoute
de la présidente du Conseil du trésor à l'égard de plusieurs propositions ayant
inspiré le gouvernement du Québec.
Tout d'abord, le G15+ tient à souligner
les mesures prévues par le projet de loi, au sein du volet achat québécois, qui
envoient un signal clair aux fournisseurs de l'État québécois et aux
gestionnaires des organismes publics à cet égard.
Concernant le volet achat responsable, le
collectif qualifie son contenu de bon premier pas pour revoir la règle du plus
bas soumissionnaire, mais qui devra aller beaucoup plus loin si l'État
québécois souhaite contribuer à l'atteinte de l'immense défi de construire une
société durable.
En 2022, le signal doit être clair. Au
même titre que l'intégrité constitue le prérequis normal pour se qualifier au
processus d'appel d'offres, les projets devraient être sélectionnés selon les
plus hauts standards d'efficacité économique, de progrès social et de
protection de l'environnement. Prendre cette décision constituerait un levier
considérable pour rendre tangibles le développement durable, l'innovation et la
croissance de nos entreprises et accélérer le virage vers une société plus
solidaire, prospère et verte.
Le G15+ formule plusieurs recommandations
à l'égard du projet de loi 12. La recommandation qui est de satisfaire aux plus
hauts standards sociaux et environnementaux par l'utilisation de critères
obligatoires. Pour favoriser justement l'achat responsable, la présidente du
Conseil du trésor se donne le pouvoir de fixer aux conditions qu'elle
déterminerait les acquisitions gouvernementales...
M. Blackburn (Karl) : ...pour
lesquelles un organisme public devrait mettre en place certaines mesures
avantageuses. Or, un pouvoir discrétionnaire n'est pas une obligation. Si le
pouvoir accordé à la présidente du Conseil du Trésor lui permettant de
favoriser les achats responsables constituait un gain, son application
resterait encore volontaire. Ce pouvoir d'agir de la présidente du Conseil du
trésor repose sur l'hypothèse d'un niveau d'exemplarité des organismes publics.
Or, la Commission au développement durable note, depuis plus de 10 ans,
que l'un des motifs d'échec de l'intégration du développement durable dans
l'administration publique repose sur une faible volonté des organismes publics.
Le paradoxe du projet de loi 12 est qu'il recourt à des dispositions
prescriptives, par exemple pour privilégier l'intégrité des marchés publics et
l'achat québécois, alors qu'il se retient d'agir avec la même détermination à
l'égard de l'achat responsable.
Le G15+ souhaiterait que le même niveau
d'engagement soit exigé des organismes publics à l'égard des achats
responsables. Et la première recommandation que nous vous faisons à cet
égard-là : systématiser l'utilisation de critères sociaux et
environnementaux par les ministères et organismes et les rendre obligatoires
dans l'adjudication ou l'attribution des contrats publics, toujours dans le
respect des ententes internationales et lorsque c'est applicable, afin que
l'octroi des contrats publics mise désormais sur des critères de valeur plutôt
que principalement le choix du plus bas soumissionnaire.
• (18 h 20) •
Le G15+ constate que si le concept d'achat
québécois est défini dans la stratégie, permettant de mieux apprécier le
périmètre visé par les actions du législateur, aucune définition du concept
d'achat responsable n'est prévue au projet de loi 12. Pourtant, des
définitions pourraient inspirer le législateur. Voir à la page 7 de notre
mémoire. Le législateur recommande de réduire la discrétion accordée à
l'administration publique et d'augmenter plutôt la prévisibilité à l'endroit
des fournisseurs de biens, services et travaux de construction.
Notre deuxième recommandation :
intégrer une définition d'une acquisition responsable favorisant l'adéquation
entre la Loi sur les contrats des organismes publics et la Loi sur le
développement durable. Cette définition devrait mettre en lumière le caractère
indissociable des piliers économiques, sociaux et environnementaux et la prise
en compte des impacts tout au long du cycle de vie des produits et services.
Cette absence de définition et des achats
responsables au projet de loi 12 est d'autant plus problématique que
l'article 14.7, proposé à la Loi sur les contrats d'organisations
publiques, délègue aux gestionnaires des organismes publics le soin de
déterminer, au gré de l'objet du contrat, ce qui constitue une acquisition
responsable.
Notre troisième recommandation :
amender le nouvel article 14.7, proposé à la Loi sur les contrats des
organismes publics, en balisant le caractère responsable d'une acquisition
grâce à un renvoi à la définition proposée à la recommandation. 2.
Enfin, la définition de biens, services ou
travaux de construction innovants, proposée au nouvel article 14.9,
tiret 5, ne reflète pas l'amélioration de la concordance entre la LDD et
la LCOP, un objectif poursuivi par la stratégie gouvernementale des marchés
publics.
Notre quatrième recommandation :
amender le nouvel article 14.9,5 proposée à la LCOP, pour apporter une clause
interprétative venant préciser la définition de biens, services et travaux de
construction innovants qui tiendra compte des principes juridiques du
développement durable et de la définition proposée à la recommandation 2.
Reconnaître une économie sociale. Maintenant, je cède la parole à ma collègue
Béatrice.
Mme Alain (Béatrice) : Merci,
Karl. Bonjour, tout le monde, députés, Mme la ministre. Le Chantier de
l'économie sociale est heureux de présenter les principales recommandations du
G15+ aux côtés du Conseil du patronat.
Sur la question de l'économie sociale,
comme vous le savez sans doute, j'espère, les entreprises d'économie sociale,
elles appartiennent à leurs membres ou à la communauté. Elles sont donc de
propriété collective et 100 % québécoise. La vaste majorité, 76 %,
dessert une communauté locale ou... clientèle locale ou régionale, et leur
redevabilité envers leurs membres et la communauté garantit leur impact social.
Donc, il n'y a pas plus local que l'économie sociale, et c'est pourquoi le G15
s'étonne que les entreprises d'économie sociale ne se trouvent pas dans les
pratiques d'adjudication de contrats de l'article 14.1 ni dans
l'article 14. 9. C'est des dispositions qui visent...
Mme Alain (Béatrice) : ...justement
à favoriser l'achat québécois ou favoriser l'achat responsable. Donc, le G15
propose que les entreprises d'économie sociale soient considérées pour
contribuer à l'atteinte des objectifs du projet de loi. C'est ici, les recommandations
6 et 7 du mémoire du G15.
Autre point, parler de... donc, on nomme
l'atteinte de la croissance du PIB et la création d'emplois pour évaluer les
impacts. En fait, le G15+ dresse plusieurs constats à l'égard des indicateurs
et méthodes d'analyse qui sont utilisés pour mesurer les effets de la stratégie
et du projet de loi.
D'abord, on déplore que seuls le PIB réel
et la création d'emplois à temps plein fassent l'objet d'une modélisation
d'impact. On questionne aussi que le seul indicateur de la stratégie
gouvernementale de développement durable qui est utilisée, soit le taux
d'acquisitions écoresponsables des ministères et organismes. Les parlementaires
conviendront qu'il s'agit ici d'un problème au regard des importants objectifs
que se donne le projet de loi.
Aucun suivi des coûts et gains
économiques, sociaux ou environnementaux n'est prévu. Pourtant, ce n'est pas
les indicateurs qui manquent. Le G15+, qui regroupe des groupes variés et
présents sur le terrain, s'est mis d'accord sur une série de 51 indicateurs
économiques, sociaux et environnementaux qui permettent de mesurer le niveau de
bien-être au Québec. On propose au législateur d'arrimer ses indicateurs à la
planification budgétaire et stratégique de l'État. On propose donc qu'ils soient
utilisés pour mesurer l'impact du projet de loi. Il s'agit des recommandations
8 et 10 de notre mémoire.
Sur la question de la reddition de
comptes, le G15 salue la volonté de la stratégie de réaffirmer, et je cite,
«que le développement durable est une priorité gouvernementale et qu'elle vise
à améliorer l'adéquation entre la LCOP et la LDD.» Le législateur a une
occasion de démontrer concrètement l'application de cette volonté en mandatant
le commissaire au développement durable de faire les suivis de l'application du
chapitre II.I dédié... XI.I dédié à l'Espace d'innovation des marchés publics.
La présidence du Conseil du trésor est présentement la seule instance mandatée
pour faire ce suivi. Pour éviter qu'elle soit juge et partie, on propose donc
qu'elle s'adjoigne les services du commissaire dont l'évaluation du respect de
la Loi du développement durable est de son ressort. Il s'agit ici de la
recommandation 13 de notre mémoire.
En conclusion, je pense qu'on a devant
nous un projet de loi qui vise juste mais qui doit se donner des meilleurs
outils. On partage ses objectifs. Le G15 partage aussi la volonté de la
présidente du Conseil du trésor de rendre nos marchés publics plus québécois et
plus responsables. Et nous partageons avec l'ensemble des parlementaires
l'urgence de se doter de meilleures pratiques possibles. On est donc prêt à
répondre à vos questions.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Et votre chat va bien, toujours?
Mme Alain (Béatrice) : Oui.
Constamment dans les mauvais moments. Désolée.
Le Président (M. Simard) : C'est
des choses qui arrivent. Mme la ministre.
Mme LeBel : ...vous rassurer,
j'ai reconnu le geste parce que j'ai à le faire fréquemment quand je suis en
Teams, et elle m'ignore le reste du temps. Donc, allez savoir. Allez savoir.
Écoutez, beaucoup de choses, beaucoup de
recommandations très précises, là, sur des articles. Donc, peut-être que je
vais me permettre d'aller peut-être à plus haut niveau avec vous parce que vos
recommandations sont, comme je le disais, très précises, là, sur des
amendements, des mots à ajouter, des choses comme ça. Donc, on va en prendre
connaissance naturellement. Mais allons-y à plus haut niveau. Puis je vais
peut-être faire, pour continuer dans ma sensation de déjà-vu, monsieur
Blackburn, peut-être faire un lien avec notre conversation précédente.
Quand on parlait d'expérimenter, d'y aller
de façon graduelle et d'ensuite normaliser nos façons de faire, je pense que ça
peut s'appliquer ici aussi quand on parle de développement durable. Et tout ça,
ce n'est pas de vouloir ralentir les objectifs mais de vouloir bien faire les
choses. Parce que je pense qu'il y a... Je pense ne pas me tromper puis ne pas
dire d'insanités en disant qu'il y a une expertise à développer, disons, au
sein des ministères et organismes. Certains en ont une meilleure que d'autres
puis c'est normal. Mais je pense que, quand on veut aller dans une direction ou
en amont dans la réflexion et la définition des besoins, qu'on prenne en compte
les critères de développement durable, environnementaux, d'impact économique,
d'économie sociale, entre autres, d'économie circulaire, et tout ça, je pense
qu'il y a aussi de l'apprentissage à faire parce que ce n'est pas évident autant
pour tout le monde que pour vous qui baignez là-dedans constamment.
Donc, peut-être me donner des exemples,
aussi pour le bénéfice des gens, de critères qu'on peut...
Mme LeBel : ...intégré, de
critères environnementaux que les organismes pourraient utiliser, de questions
que les organismes doivent se poser dans la définition de leurs besoins quand
vient le temps de faire l'utilisation et de faire des acquisitions plus
responsables. Bon, vous avez parlé des entreprises d'économie sociale. Il y a
des choses qui sont plus évidentes, mais j'aimerais qu'on l'illustre et que
vous nous en parliez pour qu'on puisse avoir une meilleure compréhension. Des
gens qui sont plus initiés au langage, on comprend de quoi on parle, là,
mais... Pour nous donner une idée, qu'est-ce que ça veut dire concrètement,
dans un exemple donné que vous pourriez m'illustrer, d'avoir en tête des
critères sociaux et des critères environnementaux? Et quels pourraient être des
types de critères qu'on pourrait intégrer, là?
Mme Alain (Béatrice) : Bien,
je vais me lancer, puis, Karl, tu compléteras. Je pense qu'en fait il existe
plein d'exemples au Québec d'instances, de ministères comme d'acteurs
municipaux, qui ont mis en place des critères intéressants pour regarder, par
exemple, sur les questions environnementales, le coût du cycle de vie, les
mesures, à quel point ça favorise ou renforce la biodiversité, sur les
questions sociales, sur évidemment la Chaire en économie sociale, par des
marges préférentielles ou des marchés réservés. On les voit, là, à Montréal, à
Longueuil. Mais aussi des questions comme la place des femmes dans les
entreprises, sur les conseils d'administration, comme propriétaires de ces
entreprises quand elles sont privées. Il y a une série de mesures. Puis il faut
savoir que, partout au monde, de plus en plus de gouvernements s'efforcent de
trouver des leviers qui vont répondre à la fois à leurs objectifs
gouvernementaux plus larges. Donc, je pense qu'on ne manque pas d'exemples,
mais on manque peut-être d'incitatifs pour que les gens le fassent plus
systématiquement. C'est pourquoi on pense que...
• (18 h 30) •
Mme LeBel : Bien,
excusez-moi, je ne voulais pas vous interrompre, il y a un petit décalage.
Mais, dans le fond, c'est un peu l'objet de la... Je vais résumer de façon très
succincte, mais l'ensemble de vos recommandations, entre autres, sont pour
modifier les articles de loi pour aller un peu plus loin, là, dans l'incitatif,
là, si je peux le résumer de cette façon-là. Est-ce que je comprends bien,
votre position générale pourrait être celle-là, là?
Mme Alain (Béatrice) : Ça
fait 15 ans que la Loi sur le développement durable existe puis la loi sur les
contrats des organismes a été adoptée. Je pense qu'on est capable d'aller un
brin plus engagé.
M. Blackburn (Karl) : Si je
pouvais me permettre, d'ajouter, Mme la ministre, aussi, suite à la discussion
que nous avons eu, tout à l'heure, d'autres critères... lien, par exemple avec les
coûts de transport ou les méthodes de transport utilisées pour les marchandises
ou les matières entrant dans la fabrication, c'est des éléments qui peuvent
permettre d'avoir une certaine conscientisation par rapport, justement, à des
coûts sur l'environnement, dépendamment du système de transport utilisé. La
source d'énergie utilisée également peut faire une grosse différence.
Alors, vous voyez, comme on faisait, tout
à l'heure, référence aux avantages que le Québec a, en termes, entre autres,
d'énergie, bien, ces sources d'énergie peuvent certainement être des critères
qui peuvent guider les orientations d'achats ou de contrats publics en lien
avec des impacts environnementaux.
Mme LeBel : Il y a ... puis
je lance la question, il y a toujours la préoccupation aussi, quand on fait les
achats gouvernementaux, d'avoir... J'allais dire, le meilleur prix, mais ce
n'est pas ça, c'est la... actuelle. On veut évoluer vers la juste valeur.
Je vais vous demander de le réitérer. M.
Blackburn, si c'est le cas, parce que vous avez parlé au nom du Conseil du
patronat, maintenant, vous parlez plus au nom du G15... Est-ce que vous
pensez... puis probablement, peut-être, vous allez vous répéter, peut-être que
vous allez nuancer votre position, mais je vais quand même la répéter, même si
on a eu cette discussion-là.
Moi... Ce qu'on a voulu mettre en place,
c'est vraiment cet espace d'innovation là. Puis dans toute la question du
développement durable, des critères responsables, d'économie, des retombées
plus sociales et environnementales qu'on pourrait avoir, bien, c'est une
approche graduelle. Et on a eu l'occasion d'en discuter, je sais que c'est
comme une répétition, mais on va se placer avec votre nouvelle présentation.
Est-ce que vous pensez... Puis l'engagement qui est pris, dans le projet de
loi, c'est aussi d'être capable de faire évoluer, puis je le disais tantôt,
quand ça fonctionne, et que c'est avéré, et que c'est une bonne idée, et qu'on
peut le démontrer aussi... Parce que ça peut être un enjeu gouvernemental de
pouvoir avoir du discours pour justifier d'aller dans une direction ou une
autre, et on le comprend. Est-ce que vous pensez que c'est aussi favorable
quand on parle de ces critères-là et de la position du G15, d'avoir cette
approche graduelle là? Puis, est-ce que ce n'est pas une bonne façon,
justement, de permettre le développement de l'expertise nécessaire au sein des
organismes publics?
Il y a qui l'ont déjà, cette expertise, je
ne le nie pas. Mais quand on parle de l'expertise de tous les organismes,
ministères et organismes qui sont sous le coup de la loi sur les contrats
publics, on n'est pas partout au même niveau, puis c'est normal, ce n'est pas
toujours le quotidien ou la même préoccupation. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Blackburn (Karl) : Alors,
ma réponse va être la même que celle...
18 h 30 (version non révisée)
M. Blackburn (Karl) : ...et
je soupçonne que vous me demandez de la refaire parce que j'ai parlé de la
sagesse et que vous avez évoquée dans le projet de loi.
Mme LeBel : Vos mots...
le choix des mots vous appartient, M. Blackburn. Puis effectivement, j'ai
mentionné, puis je le répète, que c'était sage de la part du gouvernement, de
votre part, de justement... de pouvoir se permettre de s'améliorer et de bâtir
notre positionnement sur des expériences concrètes basées sur les meilleures pratiques
connues ou sur les meilleures sciences connues, mais pour nous permettre
d'améliorer le processus. Et cette sagesse-là que vous amenez dans le projet de
loi, je le répète, je pense que c'est sain. Mais ce qui est surtout important,
c'est que ça puisse aussi nous servir d'exemple concret rapidement. Et pourquoi
rapidement? Parce que cette rapidité va permettre d'apporter cette stabilité ou
cette prévisibilité qui est importante au monde économique, monde social ou au
monde environnemental. Alors, on se rejoint tous à ces endroits-là. Des fois,
ça peut paraître moins vite, des fois, ça peut paraître plus vite, dépendamment
duquel côté on regarde l'objectif. Mais ce que vous présentez dans le projet de
loi va rechercher les positions qu'on souhaite voir retrouver en termes de
qualité, d'achat, de durabilité dans le temps, d'impacts environnementaux, de
maximisation sur le côté social également sur les communautés, et de vous
donner cette capacité d'ajuster le tir en cours de route, puis je pense que
c'est sage encore une fois.
Mme LeBel : Et puis je
vais juste...
Mme Alain (Béatrice) : Si
je peux?
Mme LeBel : Oui,
allez-y. Absolument.
Mme Alain (Béatrice) : Je
veux juste renchérir sur les propos de Karl. Je pense qu'il faut, oui, tu sais,
se donner du temps pour faire des bonnes choses, pour les faire correctement,
mais en même temps, l'intérêt, c'est d'amener pas juste ceux qui sont disposés
à le faire ou intéressés à le faire, mais lancer un signal que tout le monde
doit aller par là. Et sur la lignée de qu'est ce qui marche ou faire les bonnes
choses, d'où l'intérêt de faire une évaluation à la fois des pratiques
d'achat., puis ça, c'est vraiment le ressort du Conseil du trésor qui peut
évaluer qu'est ce qui marche, qui ne marche pas, qu'est ce qui est bon, mais
aussi l'impact. Qu'est ce que ça donne de changer les pratiques? Pourquoi on le
fait? Et ça, c'est pourquoi on recommande que ce soit évalué par le Commissaire
au développement durable qui a toute l'expertise de voir pourquoi et quel
impact on fait sur notre tissu économique, social et environnemental.
Mme LeBel : O.K. Et
votre opinion, c'est qu'il aurait un regard à ce moment-là plus sur ces aspects-là
pour nous permettre de nous éclairer, savoir si, effectivement, ça remplit les
promesses, là, qu'on semble donner à ce type d'acquisitions là.
Mme Alain (Béatrice) : Est
ce qu'on bouge dans la bonne direction, oui ou non?
Mme LeBel : Direction.
O.K. Mais parfait. Mais, écoutez, si vous avez quoi que ce soit d'autre à
ajouter, je vous donne le bénéfice de mon temps, mais... Et si mes collègues
ont des questions, mais pour moi, c'est très clair, puis on avait déjà eu
l'occasion de l'explorer un peu précédemment. Donc, merci, merci de votre
présentation.
M. Blackburn (Karl) : Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous. M. le député de Mont-Royal-Outremont.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. Rebonjour, M. Blackburn, bonjour, Mme Alain. Est-ce que je
comprends, dans la lecture de votre mémoire, que la politique
d'approvisionnement responsable de la Ville de Montréal, c'est un peu le
critère que vous voudriez voir adopter, essentiellement au niveau du
gouvernement du Québec?
Mme Alain (Béatrice) : Je
pense que la politique est citée comme un exemple de ce qui est possible, donc
pour dire qu'on n'est pas ici à demander d'inventer des nouvelles choses
farfelues, mais montrer que plusieurs villes ou même ministères ou programmes
mettent en oeuvre des politiques d'achats responsables. On a plein d'exemples
au Québec, puis on a aussi des exemples à l'international pour nous inspirer.
M. Arcand : ...la
politique d'approvisionnement responsable de la Ville de Montréal vous apparaît
plus progressiste, si on veut, que ce qui existe actuellement au gouvernement
du Québec?
Mme Alain (Béatrice) : La
politique d'achats responsables de la Ville de Montréal a identifié certains
leviers qui m'apparaissent intéressants pour le gouvernement du... pour
inspirer la politique nationale du Québec.
M. Arcand : Vous seriez
bon en politique, je pense. J'aimerais qu'on parle d'économie sociale. D'une
part, actuellement, vous dites : Il devrait y avoir une marge
préférentielle dans les méthodes d'analyse au niveau de l'économie sociale.
Est-ce que vous pourriez me donner les exemples des... si je me permets
l'expression, des plus grands succès en matière d'économie sociale actuellement,
des contrats qui ont été très gagnants en matière d'économie sociale qui ont
été donnés par le passé par le gouvernement du Québec ou par d'autres
gouvernements également?
Mme Alain (Béatrice) : Et
je peux vous parler en long et en large d'économie sociale. À cet effet d'ailleurs,
le chantier va déposer un mémoire spécifique sur... en détail sur l'économie
sociale, puis...
Mme Alain (Béatrice) : ...on
est toujours prêt à collaborer. Je pense que les points, surtout du G15, sont
que, alors qu'on donne certaines... on identifie la possibilité de donner des
marges préférentielles à certains types d'entreprises, par exemple, qui sont
particulièrement dans une logique de développement local ou régional, c'est
absurde de ne pas nommer spécifiquement l'économie sociale comme un des
véhicules très possible. Parce qu'effectivement ce sont 11 200 entreprises qui
sont partout au Québec. Ça fait partie de notre histoire économique, de notre
tissu économique dans toutes les régions. Il faut valoriser ce levier de
développement régional. Pis les exemples... tu sais, il y a des exemples de
politiques préférentielles dans plusieurs municipalités, il y a des politiques
préférentielles dans plusieurs ministères et sous tous les gouvernements du
Québec depuis plusieurs, plusieurs années. C'est une chose dont on peut être
fier au Québec.
M. Arcand : Je sais que le
gouvernement donne certains contrats en matière d'économie sociale, mais sur
l'ensemble des contrats que le gouvernement donne sur une base annuelle, l'économie
sociale doit représenter une très petite proportion, j'imagine.
Mme Alain (Béatrice) :
Malheureusement, ce n'est pas chiffré systématiquement, ça serait intéressant
de le faire, mais je peux vous dire qu'il y a des mesures spécifiques dans plusieurs
ministères qui font des ententes de services avec des entreprises d'économie
sociale. Mais je m'en voudrais de prendre trop de temps sur ce sujet, alors que
je suis ici pour représenter le G15. Mais je réitère que c'est toujours un
plaisir de parler en long et large de ces cas de réseaux et ententes. Ça fait
qu'à un autre moment, quand vous voulez.
• (18 h 40) •
M. Arcand : O.K., mais une
marge préférentielle, la question que je vous posais, est ce que vous voyez une
certaine quantité, une taille quelconque? Au niveau de... est-ce que vous
parlez de doubler ce qui existe actuellement? Est-ce que le tripler... qui
existe actuellement? Qu'est-ce que vous avez en tête au moment où on se parle?
Mme Alain (Béatrice) : Bien,
la marge... est un des leviers qui est identifié dans le projet de loi. On
parle aussi des fois de marchés réservés ou de d'autres mesures. Ce qu'on dit,
c'est qu'aux côtés d'autres entreprises, favoriser l'économie sociale devrait
être nommé. On parlait de jusqu'à 10% qui correspond à des marges qu'on donne,
par exemple, pour des pratiques environnementales dans certains cas. Mais je
pense que c'est un levier parmi plusieurs qu'on doit explorer en fonction du
ministère, de la taille du contrat, de la capacité des entreprises, etc. Donc,
je m'en voudrais de donner une balise pour l'ensemble des entreprises et
l'ensemble des ministères. Je pense que l'important, c'est de multiplier les
leviers pour que les instances gouvernementales puissent répondre à des besoins
économiques, sociaux et environnementaux, avec un même contrat.
M. Arcand : Et est ce que
vous pensez qu'il y a des, je dirais, des actions qui pourraient être prises
immédiatement pour qu'il y ait plus d'économie sociale dans les contrats?
Est-ce qu'il y a des besoins qui sont évidents et immédiats?
Mme Alain (Béatrice) : Oui,
puis j'ai plein de choses à dire là-dessus, mais c'est, je ne pense pas, le bon
contexte pour ça, mais n'importe quand. Bon, ça me ferait plaisir d'en
reparler. Mais dans le cadre du G15, je pense, c'est d'identifier très
clairement l'économie sociale. Malheureusement, on n'est pas assez connu du
commun du mortel ou acheteurs publics comme un levier intéressant aux côtés de
d'autres PME qui œuvrent au développement territorial.
M. Arcand : Et, M. Blackburn,
est-ce que les entreprises, de façon générale, adhèrent à 100% ou elles disent
qu'elles adhèrent, mais, dans la pratique, c'est plus difficile? Comment vous
évaluez, actuellement chez vos membres, je dirais, l'adhésion comme telle? Est-ce
qu'elle est sur papier ou si elle est vraiment très pratique?
M. Blackburn (Karl) : Quand
vous parlez d'adhésion, M. le député, par rapport à aux achats aux contrats
publics?
M. Arcand : Est-ce que...
oui. Est-ce qu'actuellement, la façon dont ils opèrent, de façon générale, est
ce qu'ils suivent les règles? Ils sont d'accord avec les règles
environnementales, mais est-ce que, dans les faits, on en arrive à avoir des
solutions innovantes, différentes, qui respectent encore davantage l'environnement?
C'est un peu ça, le sens de ma question.
M. Blackburn (Karl) : Bien,
tout à fait. D'abord, la science étant, la technologie étant au rendez-vous, il
est clair que, de plus en plus d'organisations font référence, entre autres, à
des éléments d'équité, de diversité, inclusion, mais à des éléments aussi en
lien avec le développement durable. Ça fait partie maintenant de notre réalité,
je dirais, économique et sociale. Et les entreprises adhèrent à ces
concepts-là, qui ne sont pas dépourvus de tout sens, au contraire...
M. Blackburn (Karl) : ...et
qui suivent le courant de la population de notre société. Et malheureusement,
si une entreprise devait faire abstraction de ces éléments qui sont maintenant
partie quotidienne de nos réflexions, ces entreprises risqueraient d'être,
malheureusement, au banc des pénalités parce que les citoyens, les clients, les
consommateurs, c'est eux, ultimement, qui décident d'investir là où ils le
veulent, et elles choisissent davantage des entreprises qui ont des
sensibilités par rapport à ces réalités qui sont extrêmement importantes pour
le commun des mortels et pour l'ensemble des sociétés. Alors, je vous dirais,
oui, les entreprises y adhèrent, y adhèrent fortement.
On a eu l'occasion, il y a quelques
semaines, de rendre public notre livre vert, au CPQ, qui parle vraiment de
développement durable, et d'adhésion au développement durable, et de priorité
en termes de société, mais en termes d'organisation pour faire de ce développement
durable là non un défi de société, mais une opportunité pour nous propulser
dans le 21e siècle comme société québécoise. Et les éléments qui
ressortaient, par contre, en lien avec cette volonté des entreprises de
participer davantage à tout ce qui concerne le développement durable et ces
nouvelles orientations, c'était soit les méconnaissances des programmes qui
existent, par exemple, pour venir supporter des entreprises, soit la
méconnaissance des gens en général d'être capables d'avoir accès aux programmes
qui nous permettent d'aller plus loin, mais également d'avoir la formation qui
vont également permettre aux gestionnaires de faire cette transition, dans
certains cas qui est un peu moins amorcée que dans d'autres. Mais ça fait
partie maintenant de la réalité, je dirais, au quotidien.
M. Arcand : J'ai une
question, un peu, qui va peut-être vous apparaître un peu bizarre, mais qui est
la suivante, c'est que l'impression que ça donne, c'est que les grandes
entreprises, d'une part, on plus les moyens de respecter les critères
environnementaux. Et, d'autre part, en matière d'économie sociale, l'économie
sociale a plus de possibilités, probablement, de respecter le plus bas prix.
Est-ce que je me trompe en disant ça?
M. Blackburn (Karl) : Je
peux amorcer un début de réponse et je suis convaincu que Béatrice saura
certainement la compléter. Vous avez raison en partie par rapport aux grandes
entreprises avec les moyens qu'elles ont en lien avec le développement durable.
Ceci étant dit, il est clair que le gouvernement, les gouvernements ont des
outils disponibles, mais, malheureusement, par méconnaissance, ils ne sont pas
utilisés à leur pleine valeur. Et c'est pour ça qu'on s'est engagé, comme
organisation, entre autres avec le dévoilement de notre livre vert, de faire en
sorte d'accompagner de meilleure façon et les entreprises en lien avec le
développement durable tout spécialement, mais également de faire en sorte que
les programmes gouvernementaux puissent venir, justement, aider les plus petites
organisations qui n'ont pas nécessairement les mêmes moyens que les plus
grandes de pouvoir grandir à l'intérieur de ces concepts, à l'intérieur de ces
réalités, avec les outils nécessaires pour leur permettre d'atteindre les
objectifs qu'on souhaite comme société, mais qu'elles souhaitent également
comme organisations. Et je suis convaincu, Béatrice, que tu peux ajouter des
éléments concrets à la question qui vient d'être posée.
Mme Alain (Béatrice) : Je
veux juste revenir sur la... Tu sais, je pense que les marchés publics
constituent une occasion d'affaires pour les entreprises. Alors, avoir des
marchés publics qui s'affichent comme ayant une volonté d'être responsables
sont une occasion d'affaires pour les entreprises du Québec et vont être un incitatif
à faire ce pas de plus, avoir confiance et intérêt de faire ce pas de plus, que
ce soit une entreprise familiale, une entreprise privée ou une entreprise
d'économie sociale. Et je pense que c'est un des rôles du gouvernement de nous
tirer tous vers là, d'amener, de soutenir ce mouvement, notre économie vers ça.
Ensuite, sur la question du plus bas prix,
non, l'économie sociale, elle est dans tous les secteurs, pour tous les
publics, à tous les points de prix, je pense que la distinction entre... enfin,
la valeur ajoutée et la redevabilité à ses membres ou à la communauté. Mais, de
toute façon, je dirais qu'aucun individu ou même entreprise ne gouverne
l'ensemble de ces activités, selon l'achat, sur le plus bas prix. Il y a des
choses qu'on est prêts à payer plus parce qu'on veut une qualité sur le long
terme...
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci. Merci beaucoup. C'est fort intéressant, mais, malheureusement,
j'ai la tâche ingrate de devoir vous couper, madame Alain. Je cède maintenant
la parole à la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Oui. Merci,
M. le Président. Alors, rebonjour, monsieur Blackburn. Bonjour, Madame Alain.
Vous parlez... vous dites que, dans le fond, l'économie sociale, puis c'est
vrai, c'est le cas, ne se trouve pas dans le projet de loi, que ce soit à
l'article 14.1 ou 14.2. Vous dites que le G15+, le collectif s'étonne
qu'on ne fasse pas mention des entreprises d'économie sociale. Comment est-ce
que vous expliquez cette absence? Est-ce que c'est un simple oubli de la part
du gouvernement? Est-ce que c'est parce qu'on pense que les entreprises
d'économie sociale ne seraient pas capables de répondre à tout ça? Comment
est-ce que vous...
Mme Ghazal : ...expliquez
qu'il n'y ait pas ce réflexe du gouvernement d'inclure des entreprises
d'économie sociale quand on parle d'environnement, d'impacts sociaux, etc.?
Mme Alain (Béatrice) : Bien,
encore une fois, c'est toujours un plaisir de parler en détail d'économie
sociale, mais, je dirais, la position ou la vision du G15 que j'appuie, c'est
de dire l'intention de ce projet de loi d'accroître l'achat qui soutient un
développement régional, qui soutient un développement économique, oui, mais
social et environnemental, doit avoir les moyens de ses ambitions puis doit
être capable de juger la pertinence de ses moyens. Et l'économie sociale est un
levier formidable dont on dispose au Québec, parce que c'est une réalité dans
notre économie puis dans toutes les régions. Pourquoi ne pas le nommer puis le
mettre en valeur? Parce qu'effectivement certains acheteurs manquent de
connaissances sur quels leviers utiliser, comment y aller, ça fait que pourquoi
ne pas mentionner ça?
• (18 h 50) •
Mme Ghazal : Il y en a qui
vont faire appel à l'économie sociale, aux entreprises d'économie sociale, mais
il faut le mentionner pour que ce ne soit pas oublié. Et donc je vois que vous
devez faire du travail, peut-être pas le G15 plus, mais, en tout cas, le
chantier d'économie sociale, auprès du gouvernement, pour ne pas que ce soit
oublié.
Par rapport aux critères, on parle des
critères environnementaux, sociaux, etc., je vais en nommer quelques-uns. Que
pensez-vous, par exemple, d'ajouter des critères pour faire le choix, là, des
contrats, des critères de réparabilité, par exemple, pour les biens qui sont
achetés par le gouvernement? On sait qu'il y a le projet de loi sur
l'obsolescence programmée, on a adopté le principe ici, à l'Assemblée
nationale, mais malheureusement on ne s'est pas rendu plus loin, et ça, c'est
regrettable. Il y a aussi un autre critère, le critère de participation des
travailleurs à la gouvernance. Que pensez-vous de ces deux critères que je
viens d'ajouter? Est-ce qu'ils sont pertinents pour donner les contrats
publics?
Mme Alain (Béatrice) : Je me
lance, Karl, puis tu complètes?
M. Blackburn (Karl) : Lance-toi,
puis je compléterai.
Le Président (M. Simard) : ...15
secondes.
Mme Alain (Béatrice) : Je
pense que la position du G15 est qu'il faut innover puis il faut se donner des
façons de mesurer ces innovations pour dire: Celle-là, elle marche, celle-là,
elle marche moins bien, au regard des pratiques d'achat, mais aussi à l'impact
qu'elles ont. Et je pense qu'on a plein d'exemples, ici et ailleurs, sur
lesquels se baser.
Mme Ghazal : Le G15 plus, je
veux que la ministre entende, est-ce que vous êtes d'accord, par exemple, avec
des critères de réparabilité, là, des biens? Peut-être pas les crayons, là,
mais d'autres...
Le Président (M. Simard) : Très
succinctement, s'il vous plaît.
Mme Alain (Béatrice) : C'est
à dire que le G15 n'a pas nommé une série de mesures spécifiques, mais appelle
à une prise en charge de celles-ci.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Nous
sommes vraiment dans une autre ère, par rapport à il y a quelques années, parce
que, ce matin, on a eu la Chambre de commerce de Montréal avec Propulsions
Québec, là, on a le Conseil du patronat avec l'économie sociale. Moi, je veux
saluer ça, c'est vraiment... J'espère que le gouvernement entend ce message,
quand même, qui est très, très clair.
J'ai juste 2 minutes 45, c'est tellement
ingrat. Parce que, quand je vois votre mémoire, dans le fond, vous partez...
vous prenez le gouvernement au mot en disant: Il y a trois volets: la stratégie
gouvernementale des marchés publics, le projet de loi no 12, l'engagement de
prendre des mesures au-delà de la LCOP. Et là vous dites: Nous, en plus, on
ajoute 51 critères, 51 indicateurs pour aller au-delà du PIB. Ce que je trouve
génial.
Bon, et là comment on mélange tout ça pour
avoir quelque chose de cohérent? Là, vous nous dites: Le commissaire au
développement durable doit faire une reddition de compte. Je suis entièrement
d'accord avec ça. Mais comment bien intégrer... puis il y a votre tableau, là,
à la page 7 et 8, que je trouve génial aussi, qui fait la concordance entre la
Loi sur les contrats des organismes publics et les 16 principes de la Loi sur
le développement durable? Là, je veux dire, ça nous prendrait plus que ce
projet de loi là. Comment on est capable d'ordonnancer ça pour que ça aille
bien? Grosse question. Vous avez une minute pour répondre.
M. Blackburn (Karl) : Bien,
je vais commencer, et, Béatrice, tu compléteras, si je te laisse du temps,
parce que tu ne m'en as pas laissé à la question précédente. Non, non, je te
taquine. Mais, M. le député, ça fait partie du dialogue social. C'est la
réponse vraiment la plus spontanée qui me vient en tête. Depuis maintenant deux
ans, 15 organisations de tous niveaux, vous l'avez très bien mentionné, tant du
côté environnemental que social, qu'économique, que syndicaux, avec des
discussions, on a réussi à dégager des consensus qui, selon nous, selon nos
milieux respectifs, nous permettent de relancer notre société postpandémie dans
une meilleure situation, avec des meilleurs paramètres.
Le projet de loi qui est déposé par la
ministre est un bon projet de loi qui va dans la bonne direction. Bien
humblement, on y apporte des recommandations qui... selon la vision du G15,
mais qui a fait un large consensus de nos organisations, peut permettre
d'améliorer ce projet de loi, en fonction de ce qu'on souhaite avoir comme
société...
M. Blackburn (Karl) : ...et
le reflet de la société. On n'est pas désincarnés de nos organisations ou de
nos voisins ou du milieu dans lequel on est. Tout à l'heure, le député faisait
référence à des entreprises qui ne respecteraient pas certains critères, par
exemple. Bien, si elles ne respectent pas, malheureusement, elles seront
pénalisées. Alors, nous sommes d'avis que nous sommes rendus là. Et le dialogue
social nous a amenés jusqu'ici, puis le dialogue social va nous permettre de
continuer d'avancer. Et je laisse les dernières secondes à Béatrice.
Mme Alain (Béatrice) : C'est
très bien dit. Je pense qu'on a des forces, au Québec, sur lesquelles miser,
que ce soit la loi du développement durable, comme des organisations sur le
terrain qui veulent mettre main à la pâte.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, à vous deux, merci énormément pour votre contribution à nos
travaux. Ce fut fort enrichissant.
Et sur ce, nous allons ajourner. Nous nous
retrouvons demain, le 16 mars, après les affaires courantes. Alors, belle
fin de soirée et merci à nouveau à vous pour votre précieuse collaboration.
Merci en particulier à vous deux.
(Fin de la séance à 18 h 54)