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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 25 août 2020 - Vol. 45 N° 75

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 53, Loi sur les agents d’évaluation du crédit


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. Eric Girard

M. André Fortin

M. Vincent Marissal

M. Martin Ouellet

Auditions

Office de la protection du consommateur (OPC)

Option Consommateurs (OC)

TransUnion of Canada Inc.

Autorité des marchés financiers (AMF)

M. Benoit Dupont

Autres intervenants

M. Jean-François Simard, président

M. Youri Chassin

M. Louis-Charles Thouin

*          Mme Marie-Claude Champoux, OPC

*          M. André Allard, idem

*          M. Christian Corbeil, OC

*          M. Alexandre Plourde, idem

*          Mme Chantal Banfield, TransUnion of Canada Inc.

*          Mme Johanna Fitzpatrick, idem

*          M. Louis Morisset, AMF

*          M. Patrick Déry, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Simard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bienvenue à tous. Heureux de vous retrouver en ce beau mardi matin. Je constate que nous avons quorum et je déclare donc cette séance de travail ouverte.

Comme vous le savez, la commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 53, Loi sur les agents d'évaluation de crédit.

Mme la secrétaire, bonjour. Dites-nous, y a-t-il des remplacements ce matin?

La Secrétaire : Oui, M. Barrette (La Pinière) est remplacé par M. Fortin (Pontiac).

Le Président (M. Simard) : Très bien. Alors, bienvenue aux collègues. Ce matin, nous débuterons par les remarques préliminaires et nous entendrons à tour de rôle l'Office de la protection du consommateur, qui est déjà parmi nous, Option Consommateurs, et nous aurons, par visioconférence, TransUnion, avec une traduction simultanée.

Remarques préliminaires

Donc, nous commençons par nos remarques préliminaires, et, comme le veut la tradition, je cède la parole au ministre. Monsieur, vous disposez d'une période de six minutes, si tant est que vous souhaitiez l'utiliser totalement.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Alors, bonjour à tous, bienvenue aux invités. M. le Président, c'est toujours un plaisir d'être à la Commission des finances publiques, qui a la réputation d'être extrêmement efficace.

Ce projet de loi a été rédigé dans la foulée des fuites de renseignements personnels, notamment celle chez notre institution financière d'importance systémique, Desjardins. D'emblée, il faut rappeler que la stratégie du gouvernement entourant la protection des données personnelles ne repose pas exclusivement sur ce projet de loi. Le projet de loi n° 53, c'est l'un des éléments clés d'une action gouvernementale concertée en matière de cybersécurité et de protection des renseignements personnels. À cela, nous pouvons ajouter le projet de loi n° 64, déposé par ma collègue Mme Sonia LeBel le 12 juin dernier. Ce projet de loi prévoit notamment diverses dispositions afin de renforcer la notion de consentement et la confidentialité des données. Mon collègue M. Éric Caire a aussi déposé, le 17 mars dernier, sa politique gouvernementale en matière de cybersécurité, qui a plusieurs objectifs complémentaires à l'encadrement des agences de crédit, notamment en ce qui concerne la création d'une identité numérique à chaque citoyen.

Dans le projet de loi n° 53, dont nous discuterons aujourd'hui, nous ciblons spécifiquement l'encadrement des agences de crédit, que nous désignerons comme des agents d'évaluation de crédit. Jusqu'ici ceux-ci n'avaient pas d'encadrement spécifique. Ils étaient simplement considérés comme des agents de renseignements personnels au sens de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Or, les agents de renseignements personnels qui seront désignés par l'Autorité des marchés financiers comme étant des agents d'évaluation de crédit jouent un rôle crucial au coeur même du secteur financier en raison de leur commerce avec les institutions financières. Leurs actions peuvent donc avoir des effets importants sur les citoyens, mais aussi sur la réputation et ultimement la solvabilité des institutions financières. Le projet de loi n° 53 vient donc resserrer l'encadrement des agences de crédit en créant un régime qui leur sera spécifique, administré par l'Autorité des marchés financiers.

Par ailleurs, les agents d'évaluation de crédit resteront aussi assujettis à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Le projet de loi garantira l'accès pour les Québécois à trois mesures de protection, soit le gel de sécurité, qui permettra au consommateur qui le désire d'empêcher que les informations contenues à son dossier soient utilisées pour l'octroi de nouveaux crédits, la note explicative, qui devra apparaître au dossier du consommateur qui en fait la demande et qui permettra à ce dernier d'exposer sa version des faits lorsqu'il y a un désaccord concernant un élément de son dossier, et l'alerte de sécurité, qui, lorsqu'elle est en vigueur, obligera les utilisateurs des dossiers de crédit à prendre des mesures additionnelles pour vérifier l'identité du consommateur avec lequel ils font affaire.

Le projet aura aussi pour effet de garantir le droit pour les consommateurs d'avoir accès à une cote de crédit, d'introduire des exigences relatives aux pratiques commerciales des agents, notamment en les obligeant à établir un régime de traitement des plaintes et en permettant à l'AMF d'en faire le suivi, d'introduire des exigences relatives aux pratiques de gestion des agences, ce qui permettrait notamment de créer par règlement des exigences spécifiques à la capacité opérationnelle de respecter leurs obligations et de répondre efficacement à un grand volume de demandes lorsque requis, d'introduire un régime de sanctions administratives pécuniaires et de donner au gouvernement le pouvoir de limiter par règlement la tarification applicable aux services offerts par les agents.

M. le Président, j'ai bien hâte d'entendre nos invités et leurs suggestions dans les prochains jours. Le gouvernement est à l'écoute. Je tiens à réitérer que la stratégie gouvernementale en matière de renseignements personnels est un tout et que le projet de loi n° 53 est une partie de ce tout. J'entends collaborer avec les partis d'opposition et souhaite un débat constructif dans l'intérêt supérieur du Québec. Merci, M. le Président.

• (9 h 40) •

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le ministre. Y aurait-il d'autres remarques du côté ministériel? Sans quoi, je cède la parole au critique de l'opposition officielle et député de Pontiac. Cher collègue, à vous la parole pour quatre minutes.

M. André Fortin

M. Fortin : Oui, merci, M. le Président. Effectivement, comme le ministre le disait, là, je pense qu'il y a beaucoup de monde qui attendait avec impatience le début des travaux de cette commission parlementaire là. D'ailleurs, je note que probablement même le ministre était impatient face au début de ces travaux, lui qui avait dit initialement que c'était sa priorité, sa grande priorité, ce dossier-là. Malheureusement, là, disons qu'il a déposé le projet de loi en décembre, très bien, mais on est au mois d'août, alors on aurait souhaité procéder plus rapidement. Bien évidemment, là, il y a eu un certain délai dû à la pandémie, mais quand même.

M. le Président, on est ici aujourd'hui et, effectivement, comme le ministre l'a dit, entre autres suite à la fuite des renseignements personnels de Desjardins, qui nous a permis, entre autres, de prendre une prise de conscience collective par rapport à l'importance que peuvent avoir des incidents comme ceux-là sur notre sécurité, notre sécurité financière, sur la protection de nos renseignements personnels. Il y a beaucoup de Québécois qui ont eu peur à la fraude dans leurs propres dossiers, dans leurs propres finances.

Alors, maintenant que cette prise de conscience collective là a eu lieu, il y a lieu de passer à l'action. Et il y a certains enjeux dans le projet de loi n° 53, c'est vrai, mais, à la base, c'est un projet de loi qui est nécessaire. Maintenant, il faudra entendre, de la part des différents groupes et... Je suis content que les groupes de consommateurs soient ici et qu'on commence, entre autres, aujourd'hui, là, lors de la première journée d'audition, avec certains groupes de consommateurs parce que c'est pour eux qu'il faut travailler ensemble, mais les enjeux qu'on voudra mettre de l'avant sont justement des enjeux qui seront importants pour les consommateurs, c'est-à-dire la gratuité. À la base, ces données-là appartiennent aux Québécois, ce sont leurs données. Ils devraient pouvoir y avoir accès, ils devraient pouvoir savoir qui y a accès, ils devraient pouvoir en restreindre l'accès, ils devraient savoir qu'il y a un cadre, M. le Président, qui les protège à travers tout ça.

Alors, au cours des prochains jours, des prochaines semaines, on tentera, bien évidemment, de comprendre certaines des décisions que le gouvernement a prises par rapport aux mesures qu'il met de l'avant, certaines mesures qui sont, comme on le disait, M. le Président, positives. On va également tenter de comprendre certaines des décisions que le gouvernement n'a pas prises, c'est-à-dire... ou, en fait, les décisions qu'il a prises en n'allant pas au bout de sa pensée, en n'allant pas jusqu'au bout de certaines mesures qui pourraient permettre de protéger davantage les consommateurs.

Enfin, M. le Président, on voudra comprendre tout le suivi qui sera fait par rapport à ces dossiers-là, par rapport au traitement, entre autres, des plaintes, le ministre y faisait référence, pour permettre à l'AMF de faire un suivi sur le traitement des plaintes. On voudra savoir exactement comment ça se produira pour que les gens qui se sentiront lésés à travers tout ça aient accès aux recours nécessaires. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Je vous remercie, M. le député de Pontiac. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, M. le Président. Tellement peu de temps pour tant de choses à dire, mais on aura le temps d'en discuter beaucoup. La fuite chez Desjardins en 2019, ça a été comme un réveil collectif pour à peu près tout le monde, parce qu'à peu près tout le monde au Québec a été touché. 4,5 millions de dossiers, évidemment, ça fait beaucoup de monde.

Ce qu'on commence aujourd'hui, c'est un peu la prise deux de ce qu'on n'a pas été capable de faire il y a un an. Parce qu'on avait demandé, notamment, des mandats d'initiative, il y a eu beaucoup d'allers-retours entre le gouvernement et nous, mais assez peu d'avancées, finalement. Alors, je suis heureux de voir le projet de loi aujourd'hui. Je l'accueille de façon plutôt positive, M. le Président, mais surtout avec une approche constructive ici, parce que moi, je garde en tête, d'abord et avant tout, l'intégrité des données personnelles des citoyens et des citoyennes, parce que c'est dans nos bureaux qu'ils retontissent, ces gens-là, quand ils se font voler leur identité, et c'est des récits à briser le coeur, et ça brise des vies aussi. Et, mon collègue de Pontiac a raison, ce sont leurs données, il y a des institutions qui s'en servent. C'est probablement nécessaire, mais il ne faut jamais oublier que ce sont leurs données et que notre première et seule préoccupation ici, c'est la sécurité de nos concitoyens. Merci.

Le Président (M. Simard) : Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque. Soyez le bienvenu, cher collègue.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, rappelez-moi, un gros 50 secondes?

Le Président (M. Simard) : Une minute.

M. Ouellet : Une minute. Donc, merci aux gens de la commission. On se voit régulièrement depuis les derniers temps, mais c'est essentiel de se voir aujourd'hui, considérant tout ce qui a pu se passer dans le Québec en entier, le vol de données personnelles dans tous secteurs confondus, que ce soit dans le gouvernemental, que ce soit dans l'institutionnel et même dans le domaine de la finance. Les Québécois veulent des réponses de façon très prompte et assumée par le gouvernement et les oppositions. On doit trouver des solutions. Ce projet de loi là trace la ligne d'une première partie, c'est-à-dire de verrouiller le crédit, verrouiller son accès. Évidemment, c'est tout nouveau, on n'a pas de législation en cette matière ici, au Québec, et l'Autorité des marchés financiers sera le gardien de cette nouvelle législation. Donc, on entreprend ces travaux-là avec une certaine, je vous dirais, rigidité pour s'assurer qu'on fait les bonnes choses pour l'avenir du Québec.

Auditions

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, cher collègue. Comme nos remarques préliminaires sont terminées, nous allons procéder aux auditions. Nous avons parmi nous des représentants de l'Office de la protection du consommateur. Auriez-vous d'abord l'obligeance de vous présenter? Et vous savez que vous disposez d'une période de 10 minutes.

Office de la protection du consommateur (OPC)

Mme Champoux (Marie-Claude) : Merci, M. le Président. Alors, mon nom est Marie-Claude Champoux, je suis présidente de l'Office de la protection du consommateur et je suis accompagnée de Me André Allard, qui est directeur des affaires juridiques à l'office.

Le Président (M. Simard) : ...nous vous écoutons.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Alors, je vous remercie de cette invitation à venir présenter le mémoire et les positions de l'office sur le projet de loi n° 53. En tant que présidente de l'office, je peux vous affirmer que la protection des renseignements personnels est une préoccupation constante et je dirais même croissante de notre organisation.

Chaque année, près de 160 000 consommateurs se tournent vers l'office pour s'informer sur leurs droits et recours ou pour entreprendre une démarche. Ils s'expriment aussi sur différents enjeux relatifs à leur vie de consommateur, des enjeux qui ne relèvent pas nécessairement des lois que l'office applique. La protection des renseignements personnels en est un bon exemple. N'empêche, l'office n'hésite pas à participer aux efforts de sensibilisation des consommateurs et se sert de toutes les tribunes dont il dispose pour appeler à la vigilance au moment de communiquer des données personnelles.

Il va de soi qu'un dossier de crédit constitue un élément central de plusieurs transactions régies par la Loi sur la protection du consommateur, que je nommerai LPC. Les commerçants consultent régulièrement les renseignements contenus dans ces dossiers pour conclure des contrats avec des consommateurs. C'est dire toute l'importance du contenu de ce dossier. Les renseignements qu'il renferme peuvent entraîner des impacts néfastes dans la vie financière des consommateurs. Une mauvaise cote de crédit peut vite se traduire par le refus d'un prêt par une institution financière ou l'octroi d'un prêt sous réserve de conditions moins favorables, comme un taux de crédit plus élevé.

L'office s'est intéressé à la question du contenu des dossiers de crédit et à leurs répercussions sur les consommateurs lors de travaux de révision de la LPC portant sur le crédit à la consommation. Depuis, des changements législatifs interdisent, entre autres, d'informer un agent de renseignements personnels de l'exercice par un consommateur d'un droit de résiliation ou de résolution prévu par la LPC. Une telle trace dans un dossier peut nuire à l'obtention d'une carte de crédit ou d'un prêt. Plus encore, son effet peut se faire sentir dans différentes circonstances, par exemple au moment de souscrire une assurance ou de louer une voiture.

C'est donc à titre d'organisme bien au fait des appréhensions et des expériences vécues par les consommateurs que nous soumettons nos observations à propos du projet de loi n° 53. Dans l'ensemble, l'office salue les objectifs poursuivis par le projet de loi, sous réserve des commentaires qui suivent.

J'aimerais commencer par les mesures de protection. L'office souhaite soulever la portée de l'article 9 du projet de loi, qui instaure un gel de sécurité uniquement dans certaines situations. Nous nous questionnons sur les motifs à l'origine de ces limitations, considérant qu'un dossier de crédit est susceptible d'être consulté dans des circonstances multiples, comme, à titre d'exemple, à la conclusion d'un contrat de téléphonie mobile ou d'un bail de location.

Pour ce qui est de l'alerte de sécurité, le projet de loi est silencieux sur les mesures à mettre en place par un tiers pour s'assurer de l'identité de la personne ayant consenti à communiquer ses renseignements personnels. Il en va de même sur les conséquences à subir par un tiers qui conclurait un contrat avec un consommateur sans vérifier son identité. Ne serait-il pas opportun d'introduire un pouvoir réglementaire à la loi pour que le gouvernement prescrive les mesures à prendre? Dans la foulée, il pourrait être envisagé que l'article 10 soit ajusté de façon à obliger le tiers qui souhaite obtenir les renseignements contenus dans un dossier qui fait l'objet d'une alerte de sécurité à procéder à une vérification satisfaisante avant d'obtenir des renseignements sur la personne concernée. Cela permettrait de mieux protéger une personne qui aurait été victime d'un vol d'identité et qui n'aurait donc pas donné son consentement à la communication de ses renseignements personnels.

Un autre outil prévu est la note explicative qui apparaîtrait au dossier du consommateur à sa demande. Ce dernier pourrait donc exposer sa version des faits en cas de désaccord sur un élément de son dossier de crédit. Compte tenu des conséquences pour le consommateur, il pourrait être envisagé que la note explicative accompagne les renseignements communiqués par l'agent d'évaluation de crédit. Il faut rappeler que ces renseignements pourraient avoir servi à produire la cote de crédit sur laquelle un tiers pourrait fonder sa décision.

Nous savons qu'un commerçant peut procéder à une inscription dans un dossier de crédit sans en démontrer le bien-fondé et ainsi affecter la cote de crédit. Dans un tel cas, il revient au consommateur de faire des démarches pour contester une inscription relative à une dette qui est inexistante, mal fondée, prescrite ou erronée ou qui appartient à un autre individu ayant volé son identité. Ces démarches demeurent lourdes, fastidieuses et stressantes, vu les ressources limitées dont dispose un consommateur. Elles impliquent également des délais qui peuvent provoquer des effets préjudiciables. De ce point de vue, nous sommes d'avis que les travaux relatifs au projet de loi pourraient être l'occasion d'explorer des pistes de solution pour contrer ces difficultés. Pourrait également être examinée la possibilité qu'une inscription liée à une contestation par le consommateur n'affecte pas sa cote de crédit tant que le commerçant ne fait pas la démonstration de son exactitude.

• (9 h 50) •

Sur le plan de l'exercice des droits, nous voulons partager nos doutes quant à l'idée de laisser les deux seuls joueurs du marché fixer le montant à verser par le consommateur pour exercer ses droits. Il serait malheureux que le montant fixé freine la mise en oeuvre d'une démarche. Une approche facilitant la consultation des cotes de crédit et l'accès aux mesures de protection proposées devrait être privilégiée. Ainsi, le consommateur ne devrait-il pas être en mesure de se prévaloir gratuitement des droits prévus par le projet de loi?

Autre fait à considérer, la détection rapide d'une inscription à un dossier de crédit des suites d'un vol d'identité serait favorisée si le consommateur pouvait accéder à son dossier sans frais en tout temps, par exemple par Internet. De plus, la prise de connaissance en temps opportun d'une inscription anormale serait facilitée si les agents d'évaluation du crédit devaient aviser gratuitement les consommateurs dès qu'un événement se produit au dossier, par exemple la baisse de la cote de crédit ou une nouvelle créance inscrite. En somme, une plus grande transparence quant au contenu du dossier de crédit serait à l'avantage du consommateur.

Par ailleurs, selon l'article 16, le consommateur qui suspend ou révoque une mesure de protection doit justifier son identité. Or, le projet de loi n'indique pas la façon dont la personne pourrait satisfaire à cette exigence. Nous sommes d'avis que la mécanique de preuve d'identité devrait être précisée par règlement. En effet, il est fort probable qu'un consommateur ayant été confronté à une fuite de ses données personnelles ait recours à une mesure de protection. Il faut donc s'assurer qu'un tiers en possession de ses données personnelles ne puisse pas les utiliser pour justifier frauduleusement l'identité du consommateur afin de mettre fin à la mesure de protection. Nous proposons aussi l'obligation pour l'agent d'évaluation de transmettre au consommateur un préavis l'informant que la mesure de protection arrive à échéance.

Le volet des plaintes et recours des consommateurs a également attiré notre attention. Nous comprenons que le projet de loi permettrait au consommateur de porter plainte auprès de la Commission d'accès à l'information, de l'Autorité des marchés financiers et de l'agent d'évaluation du crédit. Cependant, les différentes options et les conditions offertes au consommateur pourraient être confondantes et lui faire perdre un temps précieux dans le processus visant à protéger l'intégrité de son dossier de crédit. Nous estimons que l'efficacité des droits à cet effet gagnerait à la mise en place d'un mécanisme pour permettre à une autorité de contraindre rapidement un agent à donner suite à la demande du consommateur.

En ce qui concerne les modifications à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, nous nous questionnons sur les raisons des orientations suivantes. L'article 19 ne vise que l'exploitant d'une entreprise ayant pour objet le crédit et la location à long terme, alors qu'un dossier de crédit est susceptible d'être consulté par différents types de commerçants. L'obligation d'information concerne uniquement la personne qui essuie un refus de la part du commerçant. La personne à qui on accorde un prêt à des conditions moins avantageuses ne devrait-elle pas être informée également? L'information au sujet du refus d'un prêt d'argent nécessite une demande. Ces informations ne devraient-elles pas être communiquées en tout état de cause? Il semble qu'il s'agit là d'une mesure simple pour favoriser la détection précoce de toute irrégularité au dossier du crédit.

En conclusion, je remercie, au nom de l'office, la commission de nous avoir donné l'occasion de faire valoir les intérêts des consommateurs en lien avec le projet de loi n° 53. Je souhaite que les idées et les pistes de réflexion formulées dans le mémoire déposé aujourd'hui contribuent à bonifier cette vaste démarche. Bien entendu, il est essentiel de resserrer l'encadrement des activités des agences d'évaluation du crédit, tout comme il est incontournable d'offrir au consommateur les leviers nécessaires pour qu'il soit bien au fait de l'état de son dossier et qu'il puisse agir afin d'éviter des fraudes potentielles avec ses données. Merci de votre écoute.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, Mme Champoux, pour votre belle présentation. Je cède maintenant la parole au ministre, qui dispose d'une période de 16 minutes.

(Consultation)

Le Président (M. Simard) : Le bloc de la partie ministérielle dispose de 16 minutes.

M. Girard (Groulx) : C'est ce que je croyais, puis, peut-être, d'entrée de jeu, puisque j'ai d'excellents collègues avec moi, nous allons partager cette... mais, puisque vous me l'offrez, je vais prendre la première question.

Le concept de gratuité, évidemment, à la base, est attrayant pour les consommateurs. Est-ce que vous êtes d'avis que... puisqu'on fait affaire avec deux multinationales privées, est-ce que vous croyez que le service, la qualité du service peut être fonction du prix?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je ne sais pas si la qualité du service peut être fonction du prix. Nous, on l'a pris sous l'angle de l'accessibilité et de la transparence pour les consommateurs. Si ceux qui ont moins de sous n'ont pas accès à une grande qualité, je trouve que ça ne répond pas à l'objectif d'une accessibilité de ces renseignements et de cette importante cote de crédit pour les consommateurs.

Le Président (M. Simard) : M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : O.K., mais la livraison de services, là, parce qu'on demande à des entreprises privées de fournir un service d'intermédiation dans des transactions financières... Et vous, vous êtes d'avis que le gel de crédit, l'accès à la cote de crédit, l'alerte de sécurité... Est-ce que vous demandez que l'alerte de sécurité soit gratuite aussi?

Le Président (M. Simard) : Mme Champoux? M. Blais?

M. Allard (André) : André Allard.

Le Président (M. Simard) : Allard, pardon. Excusez-moi, M. Allard, de vous avoir ainsi débaptisé.

M. Allard (André) : Écoutez, c'est une question, en fait, qu'on porte à l'attention des parlementaires justement pour faciliter l'accès des consommateurs aux données personnelles qui sont détenues par les agences de crédit. On a l'impression... D'abord, peut-être simplement vous dire que l'Office de la protection du consommateur est un organisme d'application des lois, mais pas de celles dont il est question ici. Donc, c'est un peu avec humilité qu'on propose certaines réflexions.

Le service dont il est question ici nous apparaît être essentiellement un service qui est fourni aux entreprises. Les entreprises ont besoin d'évaluer leurs risques lorsqu'un consommateur sollicite du crédit auprès d'une institution financière. Donc, ils s'en réfèrent donc au dossier de crédit que possèdent ou, enfin, que préparent les agences de crédit. Donc, c'est un service qui est d'abord et avant tout utile pour les entreprises. Le consommateur qui voit ses données personnelles détenues dans ces dossiers-là nous apparaît, disons, avoir un intérêt certain à consulter ce qu'on conserve dans ces dossiers-là et ce qui le concerne directement.

Actuellement, dans le contexte actuel, on constate que, lorsqu'un consommateur négocie, en quelque sorte, un contrat de consommation, ce qui est rarement le cas, mais, quand même, qui sollicite ou qui demande du crédit, la personne avec qui il transige, l'institution financière, possède beaucoup plus d'informations à son égard qu'il en possède lui-même. Tous les documents ou toutes les informations, tous les renseignements qui sont inscrits au dossier de crédit ne sont pas portés en temps réel à l'attention du consommateur. La cote de crédit en est un bon exemple. Alors donc, c'est vrai qu'il y a un volet de contrat de service qui pourrait impliquer le consommateur avec l'agence de crédit, mais ce n'est que pour satisfaire à ses droits d'avoir accès à ses données qui le concernent directement.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Allard. M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : Alors, O.K., parce que c'est important, là, est-ce que vous dites que le service devrait être payé par les entreprises ou qu'il n'y ait pas de tarif pour le service?

M. Allard (André) : On comprend très bien que tous les coûts d'opération d'une entreprise sont répercutés, ultimement, chez les consommateurs. Ça, on le conçoit très bien. Est-ce que c'est au consommateur de payer pour avoir accès à ses informations? Quant aux autres... C'est une question qu'on se pose. Et d'ailleurs les frais raisonnables qui pourraient être exigés pourraient l'être pour certains et non pas pour d'autres. Et, si ça ne l'est pas pour d'autres, c'est sans doute les personnes qui ont, sans doute, le plus besoin de savoir ce qui se passe dans leur dossier de crédit parce qu'ils sont sans doute dans une situation de difficultés financières ou même de détresse financière. Donc, si ces frais qui pourraient être raisonnables pour certains ne le sont pas pour eux, ils n'auront pas accès à cette information et ils ne sauront pas pourquoi le crédit leur est refusé. Et, lorsque le crédit leur est refusé, ces consommateurs se dirigent vers le marché secondaire du crédit à la consommation, et ce qui exige évidemment des conditions qui ne sont pas très favorables, et tout ça favorise donc à la spirale d'endettement et de surendettement des consommateurs.

L'accès, encore une fois, direct, fluide et régulier, constant, a été rendu nécessaire par les événements auxquels vous avez fait référence tout à l'heure et qui ont alerté beaucoup les citoyens, les consommateurs du besoin d'aller voir dans leur dossier de crédit ce qui s'y passe.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Allard. M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : Je passerais la parole à mes collègues, si vous le permettez.

• (10 heures) •

Le Président (M. Simard) : Oui, bien volontiers. M. le député de Saint-Jérôme, vous disposez d'une période de 10 minutes.

M. Chassin : Merci, M. le Président. Merci d'être là. Peut-être, pour continuer sur la même question, M. Allard, Mme Champoux, j'essaie de bien comprendre, parce que vous parlez que la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé prévoit, pour le prêt d'argent... vous êtes comme spécifiques là-dessus, là. Vous vous interrogez : Pourquoi seulement ça?, mais c'est quand même assez commun dans la vie des consommateurs. Dans le fond, dans cette loi-là, on prévoit que, si on consulte le dossier de crédit, on doit le communiquer avec le consommateur qui a fait la demande de prêt, on doit aussi l'indiquer, que le prêt lui est refusé pour cette raison-là. Donc, il y a quand même... est-ce que vous ne jugez pas qu'il y a quand même, dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, déjà un certain nombre d'outils, du moins pour le prêt d'argent? Puis, après ça, peut-être, dites-nous, pour ce qui est d'autres... comment dire, d'autres activités, comment vous jugez que ça pourrait être intéressant.

Mme Champoux (Marie-Claude) : C'est certain qu'on trouve que c'est intéressant que ça s'adresse aux prêts puis au crédit, ça, c'est indéniable. D'ailleurs, c'est comme ça qu'on a commencé notre présentation, mais, à l'Office de la protection du consommateur, on sait qu'il y a énormément de transactions qui sont plus larges que le prêt, puis c'est pour ça qu'on se posait la question : Pourquoi l'application n'est pas plus large?

M. Chassin : Je pars peut-être d'une prémisse fausse, là, peut-être que le prêt d'argent n'est pas si commun, mais j'imagine que ça doit représenter quand même la vaste majorité des consultations de dossier de crédit, par exemple.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Ce n'est pas une prémisse fausse, c'est très commun, mais il y a d'autres consultations qui sont énormes, puis j'en ai signalé quelques-unes, ça peut aller jusqu'à téléphonie cellulaire, contrat de téléphonie cellulaire, un bail, un achat de meuble. C'est très, très large.

M. Chassin : Est-ce que... Puis donc vous jugez, par exemple, qu'un propriétaire d'un triplex devrait pouvoir informer, par exemple, un locataire, de dire : Bien, avec le dossier de crédit que j'ai vu, je ne peux pas, malheureusement, vous louer l'appartement. C'est ça que vous demandez? C'est quand même une charge en plus, là.

Mme Champoux (Marie-Claude) : On souhaiterait que l'application soit plus large ou, en fait, on se posait la question pourquoi l'application était uniquement concentrée sur ça alors que, chez nous, pour la protection des consommateurs, c'est... l'appliquait.

M. Chassin : O.K. Pour revenir sur les agents d'évaluation de crédit, vous parlez, puis là je vais essayer de retrouver la bonne page, dans votre mémoire, des recours et, dans le fond, du fait qu'il y a des recours devant la Commission d'accès à l'information ou des recours devant l'Autorité des marchés financiers, des politiques de plainte aussi que les agents eux-mêmes doivent mettre en place. Vous dites que ça pourrait être confondant pour le consommateur. Puis là, même si l'Office de la protection du consommateur n'a pas nécessairement un rôle dans la gestion de cette loi-là, est-ce que vous pourriez avoir un rôle d'information des consommateurs sur ce type de recours?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Certainement qu'on pourrait avoir un rôle d'information puis on l'assumera avec plaisir, le cas échéant, mais c'était, je pense, plus une question de délais qu'on trouvait préoccupants. C'est que, si on va à l'Autorité des marchés financiers puis que ça ne fonctionne pas, on peut se tourner vers la Commission d'accès à l'information ou la... Alors, c'était plus les allers-retours. Puis, étant donné que, souvent dans des dossiers de vol d'identité... disons que la rapidité puis les délais sont importants. C'était plus dans un souci de faciliter, je dirais, le parcours du consommateur.

M. Chassin : Oui. Que l'interface soit plus aisée puis que le délai soit raisonnable. Est-ce que — puis là vous parlez à un converti, là — est-ce qu'on veut, dans le fond, s'assurer que tant l'AMF que la Commission d'accès à l'information se parlent et, par exemple, si quelqu'un se trompait et référait son dossier à la mauvaise instance, que ça soit référé à la bonne instance automatiquement? Je pense qu'il y a comme une volonté que la main droite et la main gauche se parlent, en quelque sorte, là.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Disons qu'on va laisser au législateur le moyen, le choix du moyen. Chose certaine, ce qu'on souhaite, c'est que ça soit le plus accessible et le plus simple pour les consommateurs.

M. Chassin : D'accord. Bien, je vais peut-être revenir sur le premier point qu'a fait le ministre, parce qu'évidemment, en général, quand on ne paie pas cher, on n'a pas une grande valeur. J'ai un peu cette crainte par rapport à la gratuité, que, finalement, on se retrouve à avoir quelque chose de peu de valeur. Parce qu'effectivement c'est toujours une personne physique, vous parliez des clients, là, mais ça peut être les employés, ça peut être les fournisseurs, ça peut être... justement, c'est toujours une personne physique, hein? Une entreprise, comme toute organisation, c'est un réseau de collaboration d'abord et avant tout.

D'avoir des frais raisonnables... Puis là je veux vous amener quand même sur le mécanisme qui est prévu dans la loi... ou dans le projet de loi, pardon, c'est la possibilité que le gouvernement légifère ou, en tout cas, réglemente, par décret, je pense, les montants maximums. Il y a une espèce de principe, là, qu'on dit en anglais, pardonnez-moi, M. le Président, puis vous me corrigerez... trouvez le mot français, on parle, en anglais, de «deterrence». Donc, il y a une espèce d'épée de Damoclès qui garde ou qui discipline, en quelque sorte, les agents d'évaluation de crédit. Même si ce n'est pas ce que vous recommandez, est-ce que vous voyez quand même que cette épée de Damoclès peut avoir un impact?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Au risque de me répéter, je pense que ce qui nous a beaucoup préoccupés, c'est l'accessibilité, comme Me Allard disait, à partir du moment... Parce que ça devient toujours... des frais raisonnables peuvent l'être pour moi, mais pas nécessairement pour tous les consommateurs. Alors, est-ce qu'à ce moment-là quelqu'un dont la situation financière est plus difficile serait pénalisé? C'est le côté qui nous inquiète à l'Office de la protection du consommateur.

M. Chassin : Mais ce rôle de discipline, vous préférez ne pas vous prononcer là-dessus?

Mme Champoux (Marie-Claude) : On ne se prononce pas là-dessus.

M. Chassin : D'accord. M. le Président, moi, ça fait pas mal le tour de mes questions.

Le Président (M. Simard) : M. le député de Rousseau.

M. Thouin : Oui. D'abord, bien, bonjour.

Le Président (M. Simard) : Il vous reste quatre minutes, cher collègue.

M. Thouin : Merci. Heureux de vous recevoir ici ce matin. Peut-être une question rapide, là. Juste au niveau de la cote de crédit, je partage votre opinion en ce sens qu'à partir du moment où une cote de crédit a été endommagée pour x raison, c'est toujours difficile, hein, pour le consommateur de faire rectifier ça. C'est un combat, puis je comprends que c'est... bon, ils font face à des multinationales, là, tu essaies d'appeler Equifax ou TransUnion, pour ne pas les nommer, puis essaie de faire changer les choses, puis là t'obstiner avec l'entreprise qui a donné la mauvaise cote.

Vous dites, en fait, ce que vous souhaiteriez, c'est que le fardeau de la preuve soit viré de bord, que ça ne soit plus le consommateur qui doive prouver qu'il a bien agi mais plutôt l'entreprise qui a donné la cote qui confirme que c'est... qui doit faire la démonstration, en fait, que le consommateur n'a pas respecté ses engagements tels que prévus, disons.

O.K. Ma question, c'est : À partir du moment où moi, je suis... Parce qu'aussi, tu sais, le citoyen, M. et Mme Tout-le-monde, mais aussi les citoyens corporatifs... Moi, je suis une entreprise, je divulgue que quelqu'un m'a mal payé ou je ne suis pas satisfait, là, de la façon dont le contrat s'est passé avec un citoyen, vous informer, c'est une chose, mais de devoir faire la démonstration, puis tout ça, il n'y a pas un risque que l'entreprise dise : Regarde, on ne se bat pas, là, on envoie l'information, puis, si ça ne passe pas, ça ne passe pas, c'est tout? Ça fait que, là, bien, on se ramasse avec des citoyens qui, des fois, auraient dû avoir une mauvaise cote de crédit, mais est-ce que l'entreprise va faire la démarche, va mettre des énergies pour... Tu sais, à un moment donné, il n'est plus là, là, Paul, il n'est plus là, on passe-tu à d'autres choses ou bien on met de l'énergie, on met des ressources? C'est ce qui me titille un peu. Qu'est-ce que vous en pensez?

Le Président (M. Simard) : Mme Champoux.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je dirais, mon premier réflexe, je préfère que le consommateur n'ait pas à faire cette bataille-là plutôt que l'entreprise, parce que, si l'entreprise inscrit puis ça revient au consommateur à prouver que l'inscription est erronée, alors il peut se décourager puis il se retrouve avec un dossier de crédit entaché. Moi, je pense, que... en tout cas, à l'Office de la protection du consommateur, on considère que c'est à l'entreprise de faire cette preuve-là, puis, juste pendant ce temps-là, la cote de crédit n'est pas touchée.

M. Thouin : Mais, présentement, c'est comme ça. Est-ce que je me trompe, là? Présentement, c'est comme ça. C'est le consommateur qui doit faire des démarches pour essayer de prouver, là.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Qui doit faire.

M. Thouin : C'est ce qu'il se passe présentement. Puis ce que vous dites, c'est : Transférons le fardeau de la preuve du côté de l'entreprise qui a émis la cote.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Dans notre mémoire, on parle de... pas l'entreprise qui a émis la cote, l'entreprise qui inscrit un défaut, par exemple.

M. Thouin : Oui, c'est ça. C'est ce que je voulais dire. Je m'excuse, je me suis peut-être mal exprimé.

• (10 h 10) •

Mme Champoux (Marie-Claude) : D'accord.

M. Thouin : O.K., mais vous ne pensez pas qu'il pourrait y avoir, comme je vous dis, tu sais, un... Je comprends, je comprends l'avantage, là, pour le consommateur, je suis d'accord à 100 %, mais je me dis : De l'autre côté, est-ce qu'il n'y a pas un risque que l'entreprise qui a décoté le client, en tout cas, qui a transmis la décote, là, ne fasse pas la démarche nécessaire en disant : Écoute, nous autres, on te l'a dit, là, il nous a mal payés, maintenant, si tu veux que j'en fasse la preuve, bien, oublie ça, on tient ça comme ça, on ne se bat pas? Mais là ça va faire que, dans le système, il y a quelqu'un qui est un mauvais payeur qui ne sera pas tagué comme mauvais payeur. Ça ne va pas donner une mauvaise information? Je comprends qu'au niveau de... la démarche pour le consommateur, je comprends qu'elle est lourde, là, je le partage, comme je vous disais au départ, mais il n'y a pas un... il me semble qu'il y a quelque chose qu'il faudrait trouver, là, un mi-chemin entre les deux, là.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Bien, présentement il y a peut-être, dans les systèmes, des consommateurs qui devraient avoir un excellent dossier de crédit puis qui ont eu une fausse cote ou une fausse information.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Puis, à l'Office de la protection du consommateur, on aime mieux que le consommateur soit protégé.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député de Rousseau. Je cède maintenant la parole au critique de l'opposition officielle.

M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Champoux, M. Allard. Merci d'être avec nous.

D'entrée de jeu, j'aimerais ça qu'on parle... vous en avez parlé un peu, là, mais j'aimerais ça qu'on parle de gratuité parce que, pour nous, c'est un des principes quand même importants dans tout le débat qu'on a autour de ça, puis le ministre a amorcé la discussion justement en parlant de ça lui-même.

Je vous avoue, M. le Président, que j'étais un peu surpris d'entendre, sans leur prêter d'intentions, là, mais d'entendre la tendance dans les propos du gouvernement à l'effet que, bien, si on finit par ne pas payer, que probablement qu'il n'y aura pas une grande attention ou une grande qualité de la donnée ou de l'information qui serait partagée. Le scénario, là, le scénario, disons, normal, à travers tout ça, ou un scénario potentiel... il y a une fraude dans une institution bancaire, on l'a vu, ou il y a une fuite d'informations dans une institution bancaire, on l'a vu chez Desjardins, il y a un mécanisme qui est mis en place, c'est-à-dire le gel du dossier. Et là le consommateur se trouverait à payer pour, disons, le dégel de ce dossier-là. Est-ce que ce scénario-là, là, pour vous, c'est un de ceux qui devraient être gratuits? C'est ce que j'ai bien compris de votre présentation?

Le Président (M. Simard) : Mme Champoux.

Mme Champoux (Marie-Claude) : C'est ce qu'on préconise, effectivement.

M. Fortin : O.K. Alors, quand le gouvernement fait référence, et je pense que c'était le député de Saint-Jérôme qui y a fait référence, à des frais raisonnables, est-ce que vous avez une idée de ce que ça peut vouloir dire, ça, des frais raisonnables? Je comprends, pour quelqu'un, c'est très différent, mais, quand c'est le gouvernement qui en parle, c'est parce que, là, il y a probablement quelque chose, un chiffre ou quelque chose à mettre derrière ça. Est-ce que vous avez une idée de ce que ça pourrait coûter, disons, au consommateur aujourd'hui et de ce qui serait un frais raisonnable comme le décrit le gouvernement?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Franchement, on n'a pas d'opinion là-dessus, on n'a pas eu de réflexion sur qu'est-ce que pourrait être un frais raisonnable.

M. Fortin : O.K. Si vous prônez la gratuité aujourd'hui, pouvez-vous nous dire combien ça coûterait au consommateur aujourd'hui quelque chose comme ça?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je n'ai pas cette information-là.

M. Fortin : Non? O.K. Parfait. Bien, moi, je vous avoue, là, que le fait que le gouvernement parle de frais raisonnables et de le faire par voie réglementaire, ça, c'est inquiétant. C'est inquiétant pour le consommateur parce qu'honnêtement on peut discuter ici autant qu'on veut de la gratuité, tout ça, mais ça veut dire qu'on n'a aucune prise, aucune emprise, là, sur ce que le gouvernement pourrait décider s'il choisit même d'aller dans cette avenue-là. Alors, plus tard, c'est certain qu'on aura des questions pour TransUnion, peut-être certaines des questions que je vais déjà poser là-dessus, là, mais, à la base, je pense qu'il y a beaucoup de gens autour de la table qui sont d'accord que ça devrait être gratuit, que le consommateur, quand il y a une fraude à son dossier ou quand il y a une fuite, ce n'est pas lui qui devrait avoir à payer pour ça. Et j'ai trouvé votre propos intéressant, Mme Champoux, à l'effet que celui qui en a le plus besoin, c'est probablement celui qui ne peut pas se le payer, peu importe le frais.

Vous avez fait référence au processus pour contester. Vous nous avez dit que c'était un processus qui était long, qui était fastidieux, qui, financièrement, pouvait être difficile. Est-ce que vous avez quelque chose à suggérer pour améliorer, disons, ce processus-là?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Comme je disais, je pense qu'on va laisser aux législateurs le choix du moyen. Chose certaine, les options qui s'offrent, est-ce que ça pourrait être un guichet unique ou une meilleure communication entre les, je dirais, trois instances, là, si je peux m'exprimer, là, le mécanisme de plainte des agents évaluateurs, la Commission d'accès et l'autorité des marchés? Dans le fond, la préoccupation de l'office, ce n'est pas dans le moyen comme dans le résultat, pour que ça soit le plus accessible et le plus facile pour le consommateur.

M. Fortin : Ah! je peux comprendre ça. Je peux comprendre ça, que, vous, dans le fond, là, c'est plus une directive, ou une suggestion, ou une demande, c'est : Organisez-vous comme vous voulez, mais assurez-vous que ça soit plus simple pour le consommateur.

Alors, si je le prends de l'autre côté, on est dans le processus ici où les gens viennent témoigner pour essayer de convaincre le gouvernement de l'importance de le faire. Alors, qu'est-ce que vous avez vu comme impacts chez les consommateurs du fait que c'est long, c'est fastidieux, c'est difficile? Il y a des impacts financiers à tout ça? L'impact sur, peut-être, certains des citoyens que vous avez vus aux prises avec ce problème-là, ça peut ressembler à quoi?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je vais demander à Me Allard, là.

Le Président (M. Simard) : Me Allard.

M. Allard (André) : Bien, c'est une question intéressante, parce que toutes les modalités... Puis on salue, d'ailleurs, les mécanismes, entre autres, de résolution de différends auxquels le consommateur peut avoir accès lorsqu'il y a une inscription avec laquelle il est en désaccord, mais, intrinsèquement, ce système-là transfère le fardeau sur les épaules du consommateur, parce que les dettes qui sont inscrites, même si elles sont contestées, elles sont inscrites. Le consommateur souhaiterait, à la limite, être poursuivi devant le tribunal pour que l'entreprise fasse la démonstration de l'existence d'une dette qu'il conteste. Or, les dettes ou les montants ne sont généralement pas suffisamment élevés pour entreprendre de tels recours.

Donc, il y a un fardeau sur les épaules du consommateur, ultimement, au terme de tous ces processus de plainte, qui vont reposer essentiellement sur l'inscription par l'entreprise créancière de la dette dans le dossier pour démontrer l'inexistence de la dette. Et c'est ce que les consommateurs font lorsqu'ils en ont les moyens, et les tribunaux sont parfois saisis de recours en dommages et intérêts, et là ils doivent faire la démonstration que la dette n'est pas due. Faire la démonstration de l'inexistence d'une chose est beaucoup plus compliqué que d'en faire la démonstration lorsqu'elle existe.

Donc, c'est un fardeau excessivement important sur les épaules du consommateur, mais on ne voit pas, de toute façon, comment les choses pourraient être autrement, malheureusement, puisque c'est la nature même des dossiers de crédit et leur système. Les entreprises ont l'autorisation d'y inscrire ce qu'elles veulent, en quelque sorte, sans en faire la démonstration et sans démontrer. Et, lorsqu'on est victime, et je termine là-dessus...

Le Président (M. Simard) : Merci, M Allard.

M. Fortin : Non, non, ça va.

Le Président (M. Simard) : Ça va?

M. Fortin : Oui, oui, ça va, vous pouvez conclure.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Oui, veuillez poursuivre.

M. Allard (André) : ...d'un vol d'identité, on est dans une situation qui va ressembler beaucoup à celle-là, parce qu'il y a une personne qui a contracté en votre nom un contrat de téléphonie cellulaire de trois ans, et vous allez l'apprendre au bout de trois ans, que vous devez 5 000 $. Et là vous n'avez pas eu accès, vous ne savez pas ce qui s'est passé, et donc vous allez devoir saisir les tribunaux pour pouvoir contester une dette qui vous est exigée.

M. Fortin : Mais là vous touchez quelque chose d'intéressant, parce que la plupart des gens — c'est mon impression — n'ont probablement pas consulté souvent leur dossier de crédit, s'ils l'ont consulté, point. Peut-être qu'on l'a fait pour eux dans une demande d'hypothèque, peut-être qu'on l'a fait pour eux dans différents contrats, mais eux-mêmes n'ont jamais nécessairement fait cet exercice-là. Alors, souvent, il peut se passer — parce que ce n'est pas quelque chose qu'on fait régulièrement — un certain laps de temps, disons, et c'est là qu'il peut y avoir des enjeux comme le décrit Me Allard.

Vous avez, si je vous ai bien compris, Mme Champoux, vous avez suggéré qu'on avise le citoyen ou le consommateur dès qu'une activité se produit à son dossier de crédit. Est-ce qu'on a une idée de ce que ça peut représenter, un consommateur moyen, là? Je ne sais pas à quel point ça change, comment souvent ça arrive. Parce que, là, j'essaie de comprendre l'importance... Le mécanisme, là, il est important. Ce que vous proposez, je suis d'accord avec vous, mais est-ce que ça arrive régulièrement? Est-ce qu'on va recevoir des coups de fil aux deux semaines, aux mois ou aux deux mois? Comment ça se passe si on avise le client ou le consommateur, là, de quelque chose qui se produit à son dossier?

Le Président (M. Simard) : M. Allard.

M. Allard (André) : Bien, écoutez, le système fonctionne déjà à la faveur... Malheureusement, s'il n'y a qu'un seul élément positif des fuites de Desjardins, c'est qu'un grand nombre de personnes ont soudainement eu accès gratuitement à leur dossier de crédit, et ils reçoivent périodiquement des alertes ou des informations à l'effet qu'il y a eu des changements ou il n'y a pas eu de changement. Le système fonctionne, le système est déjà accessible. Donc, c'est possible.

Donc, évidemment, pour la très grande majorité des gens qui ont déjà accès à Internet, c'est bien. Reste la portion des gens qui pourraient ne pas y avoir accès. Je n'ai pas de réponse sur cette question-là précisément, mais, actuellement, ça fonctionne.

M. Fortin : O.K. Vous faites référence, dans votre mémoire, souvent, là, à l'enjeu de «en temps opportun». Je vous lis, rapidement, là : «La prise de connaissance en temps opportun d'une inscription anormale permettant de détecter des activités frauduleuses [...] serait [...] grandement favorisée si les agents d'évaluation...». Et là je continue, mais «en temps opportun», là, qu'est-ce que vous entendez dire par ça?

• (10 h 20) •

M. Allard (André) : Oui, sur cette question-là, écoutez, le régime actuel, là, il est sujet à des ajustements, qu'on salue, là, dont notamment un accès à nos informations détenues dans le dossier de crédit par un mécanisme technologique, là, dans le projet de loi n° 64, ce qui est très bien. Donc, ça accélère, mais, actuellement, vous le savez, si vous voulez avoir accès gratuitement à votre dossier de crédit, vous devez imprimer un document, le compléter par écrit, le plier, le mettre dans une enveloppe, l'envoyer et attendre. Ça, à notre avis, ça ne nous donne pas une information en temps opportun pour prendre l'extrémité du spectre de...

M. Fortin : Mais qu'est-ce que ça donne, ça? Combien de temps ça prend?

M. Allard (André) : Je ne peux pas vous répondre.

M. Fortin : Non? Vous ne savez pas? O.K., c'est correct.

M. Allard (André) : Mais, «en temps opportun»... Lorsqu'on apprend, tous et toutes, que l'institution avec laquelle on fait affaire, par exemple, a été victime d'une fuite, bien, on aurait le goût d'aller voir notre dossier de crédit pour voir si cette fuite-là n'a pas entraîné dans notre dossier une demande de crédit par une personne malintentionnée. La technologie actuelle permet une vitesse assez importante.

M. Fortin : O.K. Donc, utilisez-la. C'est ça que vous nous dites, là. La technologie permet une vitesse importante, utilisez-la.

Dernière chose. Sur l'aspect de gratuité, je vous ai entendue, Mme Champoux, en disant : Tu sais, nous, là, on pense aux consommateurs, là-dedans, là. Que TransUnion ou d'autres, là, aient les moyens ou pas, que ça leur tente ou pas, c'est une autre affaire. Est-ce que ça change quelque chose pour vous si c'est la multinationale étrangère, comme l'a dit le ministre, ou si c'est l'institution où il y a eu la fraude qui paie?

Le Président (M. Simard) : Très brièvement, s'il vous plaît, très, très brièvement.

Mme Champoux (Marie-Claude) : L'important, pour nous, c'est l'accessibilité pour le consommateur.

Le Président (M. Simard) : Merci. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont pour une période de 2 min 40 s.

M. Marissal : Merci. Mme Champoux, Me Allard, bienvenue. J'ai peu de temps, alors je vais y aller directement. Vous représentez l'Office de la protection du consommateur. Ça a le mérite d'être assez clair, comme titre, puis vous faites même le résumé de votre mandat. Ce projet de loi là, n° 53, il est présenté, évidemment, dans un but, on peut ne pas s'entendre sur tout, mais il est présenté dans un but de protéger les consommateurs. Dans son ensemble, selon votre évaluation, parce que vous faites de nombreuses suggestions, pour ne pas dire critiques, on fait le quart du chemin? La moitié du chemin? Plus?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je ne qualifierai pas le pourcentage. Chose certaine, on le reçoit positivement. C'est une très bonne réponse. Ce qu'on souhaite, c'est peut-être de l'élargir.

M. Marissal : D'accord.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je ne le qualifierai pas de pourcentage.

M. Marissal : Très bien. Notamment à l'article 9, dont vous parlez au tout début de votre mémoire... On va avoir de la pédagogie puis de la vulgarisation à faire, hein, tout le monde ici, parce que ce n'est pas si simple que ça. Puis c'est vrai que les gens ne consultent pas tous les jours, là, puis, des fois, des gens apprennent même qu'ils ont un dossier de crédit puis ils apprennent toutes sortes d'affaires bien, bien drôles. Moi, j'ai monté un dossier avec des citoyens dans Rosemont. C'est assez absurde, des fois, ce qui peut sortir des échanges avec les institutions bancaires et avec les Equifax de ce monde.

Quand vous dites, là, que «nous nous questionnons sur les motifs qui sont à l'origine de ces limitations» — là, je fais court volontairement parce que je n'ai pas beaucoup de temps — dans le quotidien, là, de quelqu'un, là, qu'est-ce que ça peut vouloir dire, les limitations à l'article 9, les effets, évidemment, négatifs ou contre-productifs?

Le Président (M. Simard) : M. Allard.

M. Allard (André) : Lorsqu'on fait une demande, par exemple, on parlait de téléphonie cellulaire, l'entreprise va vérifier votre dossier de crédit. Ce n'est pas un contrat de crédit, ce n'est pas un contrat de location à long terme. Il a accès et, si vous ne payez pas, il va y apposer des inscriptions. Alors donc, à notre avis, tous les contrats qui sont susceptibles d'amener l'entreprise créancière qui offre des services de vérifier votre dossier de crédit devraient être visés par cette mesure-là. Et voilà.

M. Marissal : Et ce n'est pas le cas dans le présent projet de loi. Vous pensez que le fait que ce ne soit pas là désavantage nécessairement le consommateur, qui peut se retrouver, sans même le savoir, avec une note à son dossier?

M. Allard (André) : Si on prend, par exemple, le contrat de téléphonie cellulaire, il n'y aura pas de gel de sécurité à l'égard de cette entreprise-là, donc...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Allard (André) : ...cette entreprise-là ne se verra pas refuser l'accès aux renseignements et à la cote de crédit et donc va prendre sa décision...

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Allard. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque pour une période de 2 min 40 s.

M. Ouellet : Merci beaucoup, madame, messieurs, de nous avoir produit votre mémoire. Évidemment, je le disais ce matin en point de presse, pour nous, il est fondamental que ce verrou de crédit soit gratuit pour les consommateurs. Vous en avez fait référence tout à l'heure, vous avez parlé d'accessibilité et, assurément, de transparence. Donc, je comprends que, pour vous, sans dire que c'est non négociable, ce ne serait pas juste l'avenue privilégiée, ce serait l'avenue primordiale qu'on devrait mettre de l'avant, là. Ne pas laisser les forces du marché s'installer pour dire : Bien, écoute, ça coûte 15 $ par mois, 30 $ par mois, on a un forfait sur trois mois, tu t'es fait voler, tu as un an gratuit. Tu sais, vous comprenez le genre de principe qu'on pourrait avoir, là?

Donc, ce que vous nous dites : Faites attention, si on veut le rendre accessible à tous, il ne devrait pas y avoir de coût, parce que c'est un frein. Et ce que vous nous dites aussi : Faites attention, parce que ceux qui en ont le plus de besoin sont probablement ceux qui, malheureusement, n'auront pas les moyens d'obtenir cette protection. C'est ça que j'ai bien compris.

Le Président (M. Simard) : Mme Champoux.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Vous comprenez notre préoccupation pour l'accessibilité aux consommateurs puis, effectivement, s'assurer que ceux qui en ont le plus besoin, qui sont les plus démunis, aient aussi accès aux mêmes informations.

M. Ouellet : O.K. Vous avez fait référence aussi tout à l'heure en disant : Peu importe le coût raisonnable, ça peut l'être pour un individu, peut-être pas pour d'autres. Donc, si je vous entends bien, si le gouvernement continue d'aller de l'avant en disant : Oui, oui, il y aura un tarif qui sera décrété ou réglementé par le gouvernement, selon vous, ça va causer préjudice, là. Je veux dire, ça ne serait pas l'alternative. C'est-à-dire qu'au-delà du fait qu'on a d'excellentes mesures et que vous proposez, au final, certaines modifications, dont l'article 9 et l'article 10, ce que vous nous dites : Faites attention, si on veut que ça ait un véritable champ d'application, assurons-nous que ça soit accessible, et donc gratuit à tous.

Mme Champoux (Marie-Claude) : Ce que l'Office de la protection du consommateur a exprimé, c'est sa préoccupation pour une accessibilité plus grande possible.

M. Ouellet : O.K. Donc, est-ce que ça mettrait à risque, si elles n'étaient pas accessibles à tous, les différentes dispositions pour une différente partie de la clientèle? Bref, en voulant bien faire, de dire : On va mettre des verrous, on va mieux protéger les données, parce qu'on y fixe un prix et que les gens ne seront pas capables de le payer, on se met encore à risque, alors qu'avant ça on n'avait même pas de loi? Là, on aurait une loi mais qui ne couvrira pas tous les consommateurs?

Mme Champoux (Marie-Claude) : Je réitère qu'on reçoit avec bonheur ce projet de loi mais qu'on exprime notre préoccupation pour une plus grande accessibilité.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Ouellet : Écoutez, je reçois avec bonheur votre mémoire et je partage vos préoccupations.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. le député de René-Lévesque. Ceci met donc fin à notre période d'échange. Mme Champoux, M. Allard, de l'Office de la protection des consommateurs, merci de votre contribution à nos travaux.

Sur ce, nous allons suspendre pour une période de 10 minutes afin de rencontrer les nouvelles règles sanitaires auxquelles nous sommes assujettis.

(Suspension de la séance à 10 h 28)

(Reprise à 10 h 39)

Le Président (M. Simard) : Alors, chers collègues, bienvenue. Nous allons reprendre nos travaux.

Option Consommateurs (OC)

Nous sommes en ce moment en présence de représentants de l'organisation Option Consommateurs. Messieurs, auriez-vous l'amabilité de vous présenter?

M. Corbeil (Christian) : Christian Corbeil, directeur général d'Option Consommateurs.

M. Plourde (Alexandre) : Alexandre Plourde, avocat et analyste.

Le Président (M. Simard) : Bienvenue parmi nous. Vous savez que vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre présentation. À vous la parole.

• (10 h 40) •

M. Corbeil (Christian) : Merci. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos observations aujourd'hui.

Créée en 1983, Option Consommateurs est une association à but non lucratif qui a pour mission d'aider les consommateurs et de défendre leurs droits. Option Consommateurs est en contact avec des consommateurs vivant des difficultés financières ou qui ont des questions sur leur dossier de crédit. Chaque année nous recevons des centaines de personnes en consultation budgétaire ou en atelier d'information sur l'endettement et le crédit.

Depuis longtemps, nous nous intéressons également aux enjeux de la protection de la vie privée des consommateurs. Nous sommes donc bien positionnés pour commenter le projet de loi n° 53. C'est sur la base de l'expertise acquise sur le terrain et lors de nos représentations que nous vous présentons nos commentaires devant cette commission.

D'emblée, nous recevons positivement ce projet de loi et nous saluons l'initiative du gouvernement. Cependant nous souhaitons proposer des modifications qui permettraient de l'améliorer afin qu'il soit à la hauteur de ce qui se fait de mieux ailleurs dans le monde, notamment aux États-Unis, et ainsi protéger davantage les consommateurs. Mon collègue, Me Alexandre Plourde, vous exposera ici les grandes lignes de nos observations. Merci.

M. Plourde (Alexandre) : Alors, comme l'a mentionné mon collègue Christian, le projet de loi n° 53 est positif pour les consommateurs. Toutefois, nous croyons que des améliorations doivent y être apportées pour qu'il puisse adéquatement protéger le public. Donc, je vais brièvement résumer quelques-unes de nos préoccupations en quatre points. Je vous rappelle aussi que nous avons produit un mémoire écrit qui détaille davantage nos positions sur ce projet de loi.

Donc, premier point, la gratuité et l'étendue des mesures de protection. Nous accueillons favorablement l'instauration des trois mesures de protection prévues au projet de loi n° 53, soit le gel de sécurité, l'alerte de sécurité et la note explicative. Plus particulièrement, nous croyons que le gel de sécurité va permettre de complexifier la tâche des fraudeurs. En bloquant l'accès au dossier de crédit, cette mesure fera en sorte que les fraudeurs auront plus de mal à détourner l'identité d'un consommateur et à conclure des contrats en son nom.

Cependant, nous soulevons deux problèmes quant à la façon dont ces mesures sont énoncées dans le projet de loi. Le premier problème concerne leurs coûts pour les consommateurs. En effet, l'article 16 du projet de loi laisse la possibilité aux agences de crédit d'imposer des frais aux consommateurs pour se prévaloir des mesures de protection. Il nous semble inconcevable que des citoyens victimes d'un bris de sécurité survenant dans une entreprise et qui n'ont strictement rien à se reprocher doivent engager eux-mêmes des frais pour se protéger. Cela est d'autant plus problématique pour les personnes à faible revenu qui pourraient ainsi renoncer à inscrire un gel de sécurité à leur dossier de crédit et qui s'exposeraient alors à davantage de risques de vol d'identité. Selon nous, les coûts liés à l'exercice des droits conférés dans le projet de loi n° 53 doivent être supportés par les agences de crédit.

Le second problème quant aux mesures de protection du projet de loi n° 53 concerne leur étendue. Selon nous, la portée du gel de sécurité devrait être élargie pour s'assurer que cette mesure puisse protéger adéquatement les consommateurs. En effet, l'article 9 du projet de loi énonce que le gel de sécurité ne s'appliquera uniquement qu'aux contrats de crédit. Cependant, cette approche ne tient pas compte du fait que d'autres entreprises que des prêteurs d'argent, par exemple des entreprises de télécommunication, peuvent faire des requêtes au dossier de crédit. Nous recommandons donc de reformuler cet article de façon à ce qu'il interdise à toute entreprise de recevoir communication des renseignements figurant au dossier de crédit, sous réserve d'exceptions qui pourraient être précisées dans la loi ou dans un règlement.

Je mentionne également que les lois aux États-Unis et même en Ontario prévoient que le gel de sécurité est gratuit pour les consommateurs et qu'il s'applique par défaut à tout type d'entreprise, sous réserve d'exceptions précises telles que la location d'un logement ou la souscription d'assurances. On voit mal ce qui justifierait que le Québec n'adopte pas minimalement des mesures aussi étendues que celles de ces juridictions.

Deuxième point, l'accès au dossier de crédit par les consommateurs. Avoir la possibilité de consulter le dossier de crédit est primordial pour les consommateurs qui cherchent à savoir s'ils ont été victimes d'un vol d'identité. Pourtant, malgré que la loi prévoie qu'une personne a le droit d'obtenir gratuitement ses renseignements personnels, les consommateurs font face à des barrières d'accès pour obtenir leur dossier de crédit. Jusqu'à tout récemment, Equifax exigeait encore des consommateurs qu'ils leur fassent parvenir un formulaire papier par la poste pour obtenir une copie gratuite de leur dossier de crédit. L'accès au dossier de crédit via Internet était payant et n'a été rendu gratuit qu'en raison de la pandémie de COVID-19. De plus, lorsqu'un consommateur visite le site Web d'Equifax ou de TransUnion pour obtenir son dossier de crédit, il se fait bombarder de publicités pour souscrire à leurs services destinés aux particuliers, comme le service de surveillance de la fraude ou des assurances contre le vol d'identité. Les procédures pour obtenir gratuitement le dossier de crédit, quant à elles, peuvent être très difficiles à repérer sur ces sites Internet. Ces représentations font en sorte que beaucoup de consommateurs pensent qu'ils doivent obligatoirement s'abonner à un forfait mensuel payant pour obtenir leur dossier de crédit.

À l'ère numérique, il est inacceptable que les agences de crédit puissent encore imposer de telles barrières d'accès aux consommateurs. Selon nous, ces pratiques commerciales n'ont que pour intérêt de permettre aux agences de crédit de favoriser la vente de leurs services aux particuliers, dont la valeur ajoutée est discutable. Nous demandons donc que le projet de loi n° 53 soit modifié pour donner au consommateur un droit d'accès au dossier de crédit par Internet sans frais via un mécanisme simple et facile à repérer pour le public.

Ce qui m'amène au troisième point, concernant les recours des consommateurs. Donc, compte tenu de la multitude des problèmes que peuvent rencontrer les consommateurs avec les agences de crédit, des mécanismes de plainte efficaces doivent être mis en oeuvre pour leur permettre de véritablement faire valoir leurs droits. La possibilité pour le consommateur d'aller en médiation avec l'agence de crédit instaurée par le projet de loi laisse entrevoir un mécanisme rapide et informel pour résoudre les différends entre les consommateurs et les agences de crédit. Nous proposons toutefois d'élargir le champ des tiers pouvant être impliqués dans cette médiation compte tenu que d'autres types d'entreprises que des institutions financières peuvent porter des inscriptions au dossier de crédit.

Par ailleurs, nous regrettons que le projet de loi n° 53 ne contribuera pas à faciliter les recours judiciaires des consommateurs contre les agences de crédit, qui se montrent souvent lourds et complexes. Nous aurions souhaité que le projet de loi étende les pouvoirs à la fois de la Commission d'accès à l'information et des tribunaux de droit commun pour éviter qu'un consommateur qui souhaite obtenir justice face à une agence de crédit doive entreprendre plusieurs procédures judiciaires différentes.

Quatrième point, les utilisations secondaires du dossier de crédit. Donc, nous accueillons favorablement les dispositions contraignant les agences de crédit à adopter de saines pratiques commerciales et à suivre des pratiques de gestion appropriées. Nous regrettons toutefois que le législateur n'ait pas cru bon aller plus loin en encadrant les utilisations secondaires du dossier de crédit dans les domaines de l'assurance, de l'emploi et de la location de logement.

Pourtant, l'utilisation du dossier de crédit dans ces domaines qui n'ont rien à voir avec l'octroi de crédit soulève plusieurs problèmes, notamment quant à ses effets préjudiciables sur des personnes en situation de précarité. Ces enjeux ont d'ailleurs amené d'autres juridictions, comme l'Ontario et Terre-Neuve-et-Labrador, à limiter l'utilisation des renseignements de crédit en matière d'assurance. À défaut d'un tel encadrement, nous recommandons minimalement de modifier l'article 19 de la Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé de façon à ce que les consommateurs puissent au moins être adéquatement informés lorsqu'on utilise leurs dossiers de crédit dans ces domaines inattendus.

Donc, en conclusion, nous estimons que le projet de loi n° 53 prévoit des mesures qui sont positives pour les consommateurs québécois. Nous considérons qu'il est dans l'intérêt public qu'il soit adopté, dans la mesure où des modifications y sont apportées.

Parallèlement à l'adoption de ces mesures législatives, nous croyons que d'autres initiatives devraient également être mises en oeuvre. D'abord, étant donné que l'exactitude des dossiers de crédit est remise en doute depuis fort longtemps, nous suggérons que le gouvernement du Québec supporte la tenue d'une vaste étude québécoise qui permettrait de documenter plus précisément la proportion d'erreurs qu'on y trouve. Ensuite, compte tenu que le public comprend souvent mal le fonctionnement du système d'évaluation du crédit, le gouvernement québécois devrait également consacrer des ressources pour soutenir les activités d'éducation en ce domaine. Merci.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci à vous deux. Nous allons maintenant entreprendre notre période d'échange. M. le ministre, vous disposez de 16 minutes.

M. Girard (Groulx) : Merci. Et merci pour votre présentation et l'intérêt que vous attachez à cette question. Vous demandez que le...

D'abord, une question rapide : Qui serait le mieux apte à faire cette étude que vous suggérez, là?

M. Plourde (Alexandre) : L'étude, en fait, là, ça pourrait être fait par des universitaires, ça pourrait être fait même par des organismes publics, notamment l'AMF. Puis, si je prends le cas des États-Unis, là, je m'inspire, en fait, de la situation américaine, la Federal Trade Commission, aux États-Unis, a fait une étude au début des années 2010 là-dessus, sur l'exactitude des dossiers de crédit, puis ils arrivaient à des résultats qui étaient vraiment préoccupants, de type... Par exemple, un dossier de crédit sur cinq pouvait comporter des erreurs, 5 % des consommateurs pouvaient avoir même des erreurs dans leur dossier de crédit qui avaient un impact négatif sur leur cote de crédit. Donc, si on reprenait la formule américaine, bien, ça serait un régulateur, là, public qui s'occuperait sans doute de ce genre d'étude là, potentiellement l'Autorité des marchés financiers ou la Commission d'accès à l'information.

• (10 h 50) •

M. Girard (Groulx) : O.K. Bon, j'aimerais revenir sur la gratuité parce que, pour moi... Et le député de Pontiac s'est étonné que je parle de cette question d'entrée de jeu, alors je vais lui donner l'occasion de relever les yeux, et de dire... On a... Prenons... Parce que le rôle du ministère des Finances du Québec, là, ici, là, c'est... on veut avoir une approche systémique. On a des marchés financiers. Les agences d'évaluation de crédit sont un intermédiaire reconnu dans le processus d'octroi de crédit. Ça existe ici, ça existe partout. C'est des milliers, des millions. Le nombre de transactions financières est extrêmement important, et le nombre de fois où on réfère à ces cotes de crédit est extrêmement élevé. C'est un service d'intermédiation utilisé dans le cadre de l'octroi du crédit qui est, pour les citoyens, souvent la transaction ou les transactions les plus importantes dans leur bilan financier.

Alors, s'il y a fuite de renseignements, l'alerte de sécurité est un mécanisme utile pour prévenir la fraude. Ce que nous n'avons pas, c'est, s'il y a fraude, le gel de sécurité... Et vous avez référé à l'Ontario, le gel de sécurité n'est pas effectif en Ontario. S'il y a fraude, le gel de sécurité est utile pour y mettre fin ou, à tout le moins, limiter la propagation de ce qui était amorcé.

Mais est-ce que vous demandez que le service soit gratuit ou vous demandez que le service soir payé par, par exemple, l'institution financière qui a été victime de la fraude? Parce que ce n'est pas la même chose. Ce qui m'inquiète dans la gratuité universelle, c'est la qualité du service. Alors, est-ce que vous prônez la gratuité complète ou vous recommandez que ce soit l'institution financière qui octroie le crédit ou l'institution financière qui aurait été victime d'un vol de données qui paie pour un service de qualité?

Le Président (M. Simard) : Merci. M. Plourde.

M. Plourde (Alexandre) : En fait, oui, on prône une gratuité totale, pour reprendre votre expression, là. Ce n'est pas... Indirectement, c'est les acteurs du système d'évaluation du crédit qui vont payer, là, que ça soit... Les clients des agences de crédit, évidemment, sont les institutions financières.

Vous mentionnez, bon, l'éventualité qu'une institution financière soit victime d'un bris de sécurité. Ça soulève plusieurs problèmes. Compter sur le fait que l'institution financière qui a été victime du bris... qui a été la cible du bris de sécurité paie à ses clients le gel de sécurité, ça soulève des enjeux. C'est se remettre un peu au hasard. Là, on a eu l'histoire avec Desjardins, évidemment. Desjardins a payé un abonnement à Equifax, par exemple, à beaucoup de consommateurs. Mais on pourrait présumer que, si on avait un gel de sécurité qui est effectif au Québec, probablement que Desjardins aurait effectivement payé aux consommateurs un gel de sécurité.

L'enjeu par rapport à ça, bien, première chose, des fois, il y a des bris de sécurité, puis on n'est pas au courant. Puis même la très large majorité des bris de sécurité, on n'est pas au courant. Donc, qu'est-ce qui arrive si l'institution financière ou si n'importe quelle autre entreprise est victime d'un bris de sécurité? On ne le sait pas, ou elle ne l'a pas divulgué, ou encore l'entreprise, elle décide tout simplement d'ignorer le problème, ou de minimiser le problème, ou elle choisit de ne pas payer les consommateurs. Est-ce qu'il va falloir attendre qu'il y ait un recours collectif pour dédommager les consommateurs pour qu'ils puissent se faire payer les frais qu'ils ont déboursés pour des gels de sécurité? Puis là ce n'est pas tout le monde qui va peut-être, au terme de ça, pouvoir obtenir un remboursement. Ça cause énormément de problèmes, se fonder sur l'idée qu'une institution financière victime d'un bris de sécurité, la cible d'un bris de sécurité, puisse payer ce service-là qui serait payant, autrement, auprès de l'agence de crédit. La meilleure formule, c'est la gratuité, la gratuité pour tout le monde. Puis ça...

Écoutez, il y a aussi une idée... Vous avez mentionné l'idée de service, là. Vous avez parlé... c'est un service qui est offert aux consommateurs. Mais ce qu'il faut bien comprendre, c'est que les consommateurs, ce ne sont pas les clients des agences de crédit. Les consommateurs subissent ce système-là. Les consommateurs, ils n'ont pas le choix de participer à ce système-là. Les clients des agences de crédit sont les institutions financières, ce sont les entreprises qui font des requêtes aux dossiers de crédit. Dans la mesure où les consommateurs ne sont pas nécessairement une partie contractuelle là-dedans, c'est n'est pas à eux d'assumer les défauts du système, les bris de sécurité, puis d'avoir à débourser des frais par rapport à tout ça, là.

M. Girard (Groulx) : O.K., mais...

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : Oui. Donc, dans le... Parce qu'encore là, là, moi, je suis dans le risque où la stabilité du système... Pour qu'il y ait un service, il y a quelqu'un qui va devoir payer pour. Donc, s'il n'y a pas de frais, implicitement, les agences de crédit vont charger des frais aux institutions financières pour cette intermédiation-là, et les institutions financières, pour avoir déjà travaillé dans une institution financière, je vais m'avancer, là, je ne veux pas prêter... je m'excuse à mes anciens collègues, là, je ne veux pas prêter aucune intention, mais on pourrait penser qu'ils vont imputer des frais à leurs clients.

Donc, avec cette proposition-là, est-ce qu'on ne s'en va pas vers, ultimement : le client paie, sauf qu'il ne saura pas combien il paie?

M. Plourde (Alexandre) : Bien, écoutez, ça mériterait d'être approfondi comme question, si, vraiment, tous ces coûts-là vont être ultimement refilés au consommateur ou ça va être intégré dans les dépenses des institutions financières.

Je vais simplement mentionner une chose, là, c'est que l'industrie du crédit, elle se porte bien au Québec. Les gens ont très facilement accès au crédit. C'est une industrie qui est très profitable, les institutions financières qui prêtent de l'argent aux consommateurs, puis je pense que c'est des coûts que les institutions peuvent supporter dans l'exercice de leurs activités. Puis je ne pense pas que ça serait déraisonnable, là, que ça fasse partie des coûts systémiques, à mon avis, là.

M. Girard (Groulx) : O.K. Parce que moi, je veux juste dire, là, en théorie, en théorie, l'alerte de sécurité, c'est extrêmement efficace pour prévenir la fraude, et, en théorie, le gel de sécurité, c'est extrêmement efficace si vous avez été victime de fraude. Mais, pour ça, il faut que le service soit de qualité. Si la livraison du service est sous-optimale, bien là on n'a pas les protections dont on a besoin.

Alors, dans le cas que nous avons vécu, l'institution financière a payé pour le service. Ce qu'on aurait voulu, c'est que le déploiement du service se fasse de façon optimale, efficace.

Maintenant, ces services-là avaient probablement été conçus pour faire un client à la fois et non des millions de clients en 24 heures. Ça a peut-être impacté le service, puis on va poser ces questions-là à ceux qui livrent les services, mais mon...

Je pense qu'il faut distinguer entre le droit au citoyen de se protéger, d'avoir accès à ses données et d'imposer à deux entreprises privées de nous offrir un service gratuitement. Et ça, ça risque malheureusement d'impacter le service.

Alors, on pourra en discuter à l'étude détaillée. On va arriver là. Mais je comprends de votre position que ce que vous recommandez, c'est aucuns frais pour tous les services.

M. Plourde (Alexandre) : Exactement. Ce qu'on a... On demande la gratuité pour toutes les mesures de protection.

Je fais juste mentionner qu'à mon sens la qualité du service, puis je dis «service» entre guillemets, là, ce n'est pas nécessairement lié à la gratuité ou pas. Je ne vois pas nécessairement un lien entre la gratuité ou non pour le consommateur pour la qualité du service. De toute façon, le projet de loi n° 53, il prévoit des balises là-dessus. Il prévoit que les agences de crédit sont tenues d'avoir de saines pratiques commerciales, des pratiques de gestion appropriées, puis que l'AMF va chapeauter tout ça. S'il y a un problème avec la qualité du service, bien, ça va être au tour de l'AMF de mettre son nez là-dedans puis vérifier si le service est de qualité. Le lien avec la gratuité, la qualité du service, il me semble ténu, personnellement.

Vous avez raison de mentionner aussi, je pense, que gel sécurité, alerte de sécurité sont des bonnes mesures. On propose aussi, chez Option Consommateurs, quand même de renforcer la méthode, la façon que l'alerte de sécurité est énoncée dans le projet de loi. On proposerait notamment que la personne qui fait une requête au dossier de crédit contacte obligatoirement le consommateur à toutes les fois qu'il y a une alerte de sécurité, qu'il y a une requête faite à son dossier de crédit pour un nouveau contrat, par exemple, pour s'assurer d'avoir bien identifié la personne.

• (11 heures) •

M. Girard (Groulx) : Bien, je vous remercie. Puis c'est très clair pour moi. Mais je dirais que, théoriquement, de demander à des entreprises privées de donner un bon service gratuitement, je n'ai pas vu ça souvent. Là, à ce moment-là, peut-être il faudrait... vous allez jusqu'à remplacer le service, l'offrir autrement. Alors, je passerais la parole à mon collègue.

Le Président (M. Simard) : M. le député de Saint-Jérôme, vous disposez d'une période de 4 min 15 s.

M. Chassin : Merci. Dans l'aspect, dans le fond, de gratuité, vous parlez aussi d'avoir un accès à sa cote en ligne et gratuitement. Là, je veux poser une question toute naïve, mais disons que je loue un logement, j'aimerais avoir la cote de crédit. Au lieu de payer un frais à l'agent d'évaluation, est-ce que je ne peux pas demander, dans le fond, à la personne à qui je viens de faire visiter le logement, dire : Bien, peux-tu aller en ligne me sortir ta cote de crédit, que je voie, là, puis ça va m'aider dans ma décision?

Le Président (M. Simard) : M. Corbeil.

M. Corbeil (Christian) : Je vais laisser mon collègue intervenir.

Le Président (M. Simard) : Très bien. M. Plourde.

M. Plourde (Alexandre) : Oui, bien, on recommande occasionnellement aux consommateurs, par exemple, qui veulent de, par exemple, fournir eux-mêmes leur dossier de crédit. Ça pourrait être ça, là. C'est le genre de solution qui peut être faite, mais, en fait, nous, ce qu'on demande chez Option Consommateurs, particulièrement, là, par rapport à la fois à la cote de crédit puis au dossier de crédit, ce qu'on demande, c'est un accès en ligne gratuit. C'est vraiment ça qu'on demande pour le consommateur.

Puis, ce qu'on a constaté au fil des ans, c'est, oui, la loi nous donne accès à notre dossier de crédit. J'ai le droit, légalement puis selon les lois sur la protection des renseignements personnels, j'ai le droit tout à fait d'avoir accès à mon dossier de crédit. Le problème, c'est, quand je veux l'avoir, mon dossier de crédit, c'est compliqué, j'ai des embûches, je m'en vais sur le site d'Equifax ou de TransUnion, ils essaient de me vendre des forfaits, des assurances contre le vol d'identité, ce genre de choses là. C'est vraiment ça, l'enjeu pour les consommateurs actuellement.

M. Chassin : Je comprends bien. Est-ce que vous avez évalué, dans le fond, la part de marché que les agents d'évaluation de crédit pourraient perdre avec une mesure comme celle-là?

M. Plourde (Alexandre) : Vous voulez dire...

M. Chassin : Parce que, dans le fond, il y a plusieurs petits... tu sais, ce n'est pas que les banques et les institutions financières d'importance qui demandent des dossiers de crédit. Et donc est-ce qu'il peut y avoir, finalement, une perte en termes de revenus pour eux?

M. Plourde (Alexandre) : Je ne suis pas très inquiet pour la profitabilité des agences de crédit.

M. Chassin : Bien, pas tant sur la profitabilité, mais est-ce que vous pensez qu'il va y avoir des pertes pour eux?

M. Plourde (Alexandre) : Bien, il va peut-être y avoir des coûts liés à ce genre d'exercice là. Ceci étant, moi, ce que je... Si, par exemple, je donne accès gratuitement au consommateur au dossier de crédit, ce qu'il faut comprendre, c'est que les agences de crédit vont avoir comme deux types de clients, là. Ils vont avoir le client consommateur puis ils vont avoir le client corporatif. Le client corporatif fait des accès au dossier de... va chercher... fait des requêtes au dossier de crédit. Ils ont beaucoup développé leurs services face au consommateur, ils veulent vendre aussi au consommateur toutes sortes de service d'accès, prévention de la fraude, tout ça. Potentiellement qu'ils pourraient perdre de l'argent à ce niveau-là.

M. Chassin : De ce côté-là aussi. Non, je comprends.

M. Plourde (Alexandre) : Dans les services au consommateur, mais, de toute façon, ce n'est pas ça, leur business principal, les agences de crédit, ça a tout le temps été un système d'évaluation qui est lié aux entreprises. Ça, c'est vraiment une utilisation secondaire du dossier de crédit pour maximiser leurs profits quant à l'utilisation de nos renseignements personnels.

M. Chassin : Je comprends. Pour la partie médiation, par exemple, avec la Commission d'accès à l'information ou encore le rôle qui est confié à l'Autorité des marchés financiers, l'intervenant précédent, l'Office de la protection du consommateur, nous parlait que ça pouvait peut-être être confondant pour certains consommateurs, à quelle, finalement, autorité je me réfère. Est-ce que vous le voyez confondant, d'une part, puis, d'autre part, si oui, est-ce que vous voyez un moyen d'expliquer, de diffuser, de publiciser la bonne information au consommateur?

M. Plourde (Alexandre) : Oui. La médiation est une bonne mesure, à mon avis. C'est vrai que, bon, il va y avoir plusieurs organismes mélangés là-dedans, là. Il va y avoir l'AMF, il va y avoir la Commission d'accès à l'information là-dedans. L'AMF va jouer un rôle, un peu un intermédiaire avant de se rendre à la Commission d'accès à l'information. Ça peut effectivement être un peu mélangeant pour les consommateurs. Ça va être, effectivement, à mon sens, la qualité de l'information qui va être donnée dans le processus au consommateur qui pourrait faire la différence là-dedans.

M. Chassin : Comment les renseigner, comment les...

M. Plourde (Alexandre) : Comment les gens sont aiguillés là-dedans.

M. Chassin : Vous avez peut-être un rôle aussi, mais...

M. Plourde (Alexandre) : C'est ça. On a un rôle, tout le monde a un rôle à jouer là-dedans. Ceci étant, qu'il y ait un organisme public qui cherche à faciliter les recours des consommateurs...

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Plourde. Merci beaucoup. Désolé, c'est le temps qui nous était imparti. Excusez-moi de vous couper comme ça. M. le député de Pontiac, vous disposez de 10 min 40 s.

M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui. C'est vrai que j'étais, disons, surpris, initialement, que le ministre fasse le lien entre la qualité du service et la gratuité. Je vois que le ministre a repris ce thème-là. Et une chose qui me surprend encore plus... je vais permettre au ministre et au député de lever les yeux aussi, là, mais une chose qui me surprend encore plus, c'est que l'angle de question du gouvernement semble plus préoccupé par la profitabilité de l'entreprise privée que par la protection des données puis ce qui est nécessaire pour protéger les Québécois par rapport à leur dossier de crédit, à l'accès à leur dossier de crédit.

Juste pour terminer sur ce point-là, je vois, dans votre mémoire, là, vous notez, et je vous cite : «Il est intéressant de noter qu'aux États-Unis le gel de crédit s'avère totalement gratuit pour les consommateurs.» Est-ce que le service est moindre?

M. Plourde (Alexandre) : Il y a eu certains politiciens qui ont critiqué l'accès à ces mesures-là à certains moments. Il faudrait vérifier, c'est assez récent aussi, l'instauration du gel de sécurité aux États-Unis, ça date de peut-être un an ou deux.

M. Fortin : O.K.

M. Plourde (Alexandre) : Donc, il faudrait peut-être voir, là, des études peut-être plus poussées qui vérifieraient, là, comment ça s'est déroulé exactement. Ceci étant, les États-Unis, ce n'est pas une juridiction qui sont reconnus pour avoir une protection du consommateur qui est plus étendue que celle du Québec, puis, à mon sens, je crois qu'on est minimalement capables d'atteindre un seuil aussi élevé en matière de protection du consommateur que ce qui se fait aux États-Unis. Puis, si jamais il y a des problèmes aux États-Unis, bien, apprenons de leur expérience puis veillons à ce que l'AMF s'assure que les consommateurs soient bien desservis par ces entreprises-là, tout simplement.

Le Président (M. Simard) : ...M. le député.

M. Fortin : Juste comme ça, les politiciens auxquels vous faites référence, j'imagine qu'ils ont fait ce lien-là, là, entre la qualité de service puis la gratuité, qu'ils se sont inquiétés de la gratuité, c'étaient probablement des politiciens républicains, j'imagine.

M. Plourde (Alexandre) : Je ne pourrais pas commenter là-dessus.

M. Fortin : Non... O.K. Tantôt, vous nous avez dit que beaucoup... et ça, c'est inquiétant, et, en fait, vous êtes bien placé pour nous parler de ça, mais vous nous avez dit tantôt : Il y a beaucoup de consommateurs qui pensent qu'ils doivent souscrire à un service payant pour obtenir de l'information sur leur cote de crédit quand ils vont, par exemple, visiter des sites Internet des entreprises privées. Est-ce que vous avez des données là-dessus? Savez-vous combien de Québécois sont tombés dans ce panneau-là?

M. Plourde (Alexandre) : Non, je n'ai pas de données fiables, puis c'est aussi un des enjeux en matière d'agences de crédit. C'est que c'est un enjeu que... Nous, ça fait des décennies que ça perdure, les questions qui sont liées aux agences de crédit, puis il y a peu d'études qui se font là-dessus, on documente peu la question. J'ai parlé des erreurs, tantôt. On n'a pas de données fiables, au Québec, sur ce genre de choses là. C'est vraiment une lacune aussi qui rend difficile de faire des politiques publiques sur ces questions-là, mais, de manière empirique, ce qu'on voit, là, c'est... les consommateurs à qui on parle sur une base régulière, ils me disent : Bien, je me suis inscrit aux services d'Equifax pour avoir accès à mon dossier de crédit. On leur dit : Vous aviez accès gratuitement, puis les gens peuvent être surpris d'entendre ça, qu'ils peuvent avoir accès gratuitement à leur dossier de crédit.

M. Fortin : O.K. Vous parlez justement de vos liens avec les consommateurs puis des échanges que vous avez avec eux, hein? Vous dites, dans votre mémoire, qu'il y a des consommateurs qui aimeraient pouvoir inscrire à leur dossier de crédit les raisons, par exemple, pour lesquelles il y a eu une mésentente, ils n'ont pas pu faire un paiement ou peu importe, là. Est-ce que c'est quelque chose que vous voyez beaucoup? Ça arrive-tu souvent, ça, que les gens, ils disent : Oui, c'est vrai, là, ce qu'il y a dans mon dossier de crédit, mais j'aimerais ça être capable de l'expliquer, j'aimerais ça être capable de le faire? Puis peut-être sous-question, là : Ça se fait-u ailleurs? Il y a-tu un autre endroit dans le monde où on peut faire ça dans notre dossier de crédit?

M. Plourde (Alexandre) : Bon, pour ce qui est de la note de sécurité, en fait, toutes les mesures de sécurité, vous voyez qu'on propose de les élargir un peu plus, les rendre gratuites puis les élargir un peu plus. Ça existe, en fait, déjà au Québec. L'article 40 du Code civil du Québec nous dit que je peux déjà inscrire dans un dossier des commentaires, ce genre de choses là. Il y a déjà un principe général dans la loi.

Cependant, nous, ce qu'on proposerait, ce serait d'élargir la note explicative dans le projet de loi n° 53, en fait, pour permettre de notifier, c'est vraiment l'intérêt, c'est de notifier l'entreprise qu'il y a une note dans le dossier de crédit à ce moment-là. Je ne pourrais pas vous dire qu'est-ce qui se fait ailleurs dans le monde. C'est sûr que, là, c'est un aspect qui est peut-être plus marginal dans le projet de loi, mais ça peut être intéressant pour les consommateurs, parce qu'il y a des gens, effectivement, qui peuvent avoir des problèmes de jeu, ils ont une maladie, ce genre de choses là, qui aimeraient peut-être l'expliquer dans leur dossier de crédit. Mais, encore là, c'est bien peu de choses qu'on demande, parce que le commerçant, ou l'entreprise, ou l'institution financière n'est même pas obligé de prendre ça en compte, de toute façon, puis ce n'est pas pris en compte dans le score de crédit. L'algorithme, ça ne lui dérange pas, lui, qu'est-ce qui est écrit comme note dans le dossier de crédit, là.

• (11 h 10) •

M. Fortin : Ça se fait-u ailleurs? Savez-vous?

M. Plourde (Alexandre) : Je ne pourrais pas vous dire.

M. Fortin : Non, vous ne savez pas? O.K. Tantôt, le ministre a amené le concept, l'hypothèse, là, l'hypothèse, selon son expérience bancaire, qu'effectivement si c'est l'institution financière qui a subi une fraude qui doit payer, bien, peut-être qu'ils vont simplement refiler le prix aux consommateurs.

Une voix : Si c'est gratuit.

M. Fortin : Si c'est gratuit. Bien, si c'est eux qui doivent... en fait, si c'est gratuit pour le consommateur, si c'est eux qui doivent payer la note.

Est-ce que... Tu sais, si on prend le concept jusqu'au bout, là, de ce que le ministre avance, si c'est gratuit et c'est, je ne sais pas moi, Equifax ou quelqu'un d'autre qui doit payer, bien, il est bien possible qu'eux refilent le prix aux institutions bancaires, qui vont éventuellement le refiler aux consommateurs. Mais là où l'Office de la protection du consommateur nous a éclairés tantôt, et ils avaient totalement raison de le faire, c'est que, souvent, il faut trouver une façon pour que les gens qui ont besoin de cette information-là, qui ont besoin de poser des actions sur leur dossier de crédit, ce ne soit pas eux qui paient. Donc, au minimum, même si c'est les institutions bancaires, même si c'est refilé au consommateur à travers les institutions bancaires ou à travers les multinationales, bien, au moins, ce n'est pas le consommateur qui a un problème de crédit, qui est dans le trouble financièrement, sur lequel il y a potentiellement eu une fraude, qui est obligé de payer.

Est-ce que vous êtes d'accord avec l'affirmation de l'Office de la protection du consommateur qu'il faut trouver un moyen, là, peu importe ce que c'est, mais il faut trouver un moyen pour que ce consommateur-là qui a un enjeu présentement ne soit pas obligé de payer?

M. Plourde (Alexandre) : Bien, comme je disais tantôt, il faut que ça soit gratuit. Effectivement, vous avez raison. Ceci étant, la formule sur laquelle on compterait, par exemple, sur le fait que l'institution financière qui a subi un bris de sécurité paie pour le consommateur juste au moment où est-ce qu'on déclare le bris de sécurité, donc, on imagine, là, une institution financière qui annonce à tout le monde qu'elle a subi un bris de sécurité majeur puis elle dit : Je vais payer à tous les consommateurs, à tous mes clients le gel de sécurité, ce n'est pas une formule qui est efficiente au sens économique. Vous savez très bien que, dans l'histoire de Desjardins, par exemple, il y a très peu de gens qui se sont inscrits, une proportion qui est assez minime de gens qui se sont inscrits au service de surveillance de la fraude. Donc, qu'est-ce qu'on fait avec tous ces autres-là? Donc, ce n'est pas toujours simple, là, de compter sur une approche à la pièce plutôt que faire une approche qui serait universelle, là, qui fonctionnerait dans tous les cas, là.

Le Président (M. Simard) : ...

M. Fortin : Merci, M. le Président. Les consommateurs auxquels vous avez parlé... j'imagine que vous avez parlé avec des consommateurs qui avaient des problèmes pour rectifier leurs dossiers de crédit.

M. Plourde (Alexandre) : Oui.

M. Fortin : Combien de temps ça prend à rectifier son dossier de crédit en ce moment?

M. Plourde (Alexandre) : Bien, on espère que le projet de loi n° 53 va améliorer ça, justement, avec la médiation, puis c'est un bon point du projet de loi. L'enjeu, c'est que, si moi, je conteste une inscription à mon dossier de crédit, j'appelle l'agence de crédit, j'appelle Equifax, Equifax, qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont appeler le créancier, puis le créancier va leur dire : Ah oui, il me doit l'argent. Donc, ils vont prêter foi à ce que dit le créancier, mais moi, si je ne suis pas d'accord avec le créancier, qu'est-ce que je fais? Bien, je m'en vais devant les tribunaux de droit commun, je conteste la créance, donc là on va avoir... la Cour du Québec va se prononcer là-dessus. La Cour du Québec, par contre, elle n'a pas le pouvoir de faire rectifier mon dossier de crédit. Donc, pour faire rectifier mon dossier de crédit après avoir gagné à la Cour du Québec, si le créancier ne change pas l'inscription au dossier de crédit, je m'en vais à la Commission d'accès à l'information puis je demande une rectification de mon dossier de crédit, mais, après ça, la Commission d'accès à l'information, elle n'a pas le droit de m'octroyer les dommages et intérêts. S'ils ont commis une faute, ils ont fait une inscription fautive à mon dossier de crédit, ils ne peuvent pas m'en donner, de l'argent, par exemple, un dédommagement pour le temps que j'ai perdu ou pour le crédit que j'ai perdu. Donc, il faut que je retourne ensuite à la Cour du Québec.

Puis, traditionnellement... les choses changent actuellement, là, mais la Commission d'accès à l'information est un organisme qui a été beaucoup sous-financé au cours des dernières années, puis ça pouvait se compter en années, par exemple. Puis on sait aussi que les tribunaux judiciaires peuvent être très longs. Donc, un consommateur... puis c'est rare, ceux qui vont se battre jusqu'au bout, là, mais un consommateur qui veut se battre jusqu'au bout, ça peut prendre des années, là, devant les tribunaux.

M. Fortin : Puis, entre-temps, le consommateur n'a pas pu avoir son prêt, par exemple, parce que son dossier de crédit, il a un enjeu, soulève un enjeu potentiel, là, puis peut-être qu'il a eu accès à une autre source de financement avec des taux de crédit, des taux d'intérêt absolument dérisoires.

M. Plourde (Alexandre) : Ce n'est pas juste ça. Ce n'est pas juste ça, les impacts d'une inscription négative sur un dossier de crédit. Oui, le crédit est plus cher, donc des impacts sur le crédit, mais c'est utilisé à plein d'autres sauces, hein, le dossier de crédit. C'est utilisé en matière d'assurances. Donc, je vais payer plus cher mes assurances. C'est utilisé en matière de logement. Donc, je pourrais me faire refuser mon logement parce que j'ai une inscription défavorable dans mon dossier de crédit. C'est même utilisé en matière d'emploi. Donc, avant d'engager quelqu'un, on peut vérifier son dossier de crédit aussi. Donc, ça peut avoir des conséquences dans toutes sortes de sphères de la vie d'une personne pour une inscription que je conteste, que je ne suis pas d'accord, qui est erronée.

M. Fortin : Très bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. le député de Pontiac. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. On a entendu le ministre, tout à l'heure dire, que sa préoccupation, puis j'espère que je ne le cite pas mal, c'est de protéger le système tel qu'il est, Equifax, et autres, étant un rouage essentiel dans toute la machine de crédit. Moi, ma préoccupation, bien franchement, puis je l'ai annoncée, là, d'entrée de jeu, là, dans ma petite minute de préliminaires, c'est les consommateurs, ce sont les citoyens et les citoyennes.

Vous l'avez dit vous-mêmes, et j'ai eu des cas comme ça à mon bureau, de gens qui ne se sont pas fait engager comme caissière dans des petits commerces parce que sa cote de crédit n'était pas top. On ne parle pas de casier judiciaire, là, de quelqu'un qui avait volé ou fraudé, là. Sa cote de crédit n'était pas au top. L'employeur a dit : Bien, je ne t'engage pas parce que tu vas être à la caisse, puis tu vas manipuler de l'argent, puis tu n'es peut-être pas fiable vu que ta cote de crédit... Alors, ça a des implications insoupçonnées, cette affaire-là, insoupçonnées. Ce pour quoi c'est la responsabilité des gens qui manipulent nos données que de payer le service puis de s'assurer que ce soit un service de qualité. Puis moi, je ne vois pas trop pourquoi les banques n'auraient pas intérêt à avoir un service de qualité, même s'il est gratuit pour le consommateur. Ça ne m'inquiète pas trop.

Ma question, là-dessus : Pourquoi vous n'allez pas jusqu'à demander l'interdiction de l'élargissement de l'utilisation de la cote de crédit, comme ça se fait ailleurs, vous avez dit en Ontario, pour l'assurance? Là, c'est rendu que — en plus, c'est un autre frein au logement, on n'a pas besoin de plus de freins, là, au logement, surtout pas à Montréal — on ne se fait pas engager parce que notre cote n'est pas top. Pourquoi vous ne demandez pas carrément... Ça me rappelle un peu le numéro d'assurance sociale, hein, qui, au début, avait une fonction puis que, là, est rendu, là, à toutes les sauces, là. Si tu vas t'ouvrir un compte quelque part, tout le monde te demande ton NAS, là. Ça a de l'air que tout le monde a mon NAS ici, là. Pourquoi est-ce que vous ne demandez pas carrément l'interdiction ou la fermeture à deux, trois options, deux, trois utilisations?

M. Plourde (Alexandre) : On est favorables à une interdiction maintenant, là, ou, du moins, une très grande restriction du dossier de crédit dans ces domaines-là. Donc, que ce soit assurance, que ce soit emploi, que ce soit location de logement aussi, on est favorables à au moins une réduction très grande de l'utilisation du dossier de crédit dans ces domaines-là.

La difficulté pour nous aussi, c'est que les impacts de ces pratiques-là, on les voit sur le terrain, mais il n'y a pas d'étude tellement qui documente ça. Donc, c'est difficile de recommander des bonnes politiques publiques quand on ne sait pas exactement c'est quoi, les impacts concrets, là-dessus, mais, minimalement, ce qu'on recommande, c'est suivez l'exemple de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je vais fonctionner à l'inverse avec vous, messieurs. Le ministre disait tout à l'heure : Pour que ça fonctionne, le gel, il faut qu'on ait été fraudé pour dire qu'une fois que je mets le gel je vais éviter que ça se réplique dans le système, mais on peut fonctionner à l'inverse. Si moi, je décide de demander le gel tout de suite... Moi, là, mon hypothèque roule, je ne pense pas avoir des achats qui vont demander du crédit, est-ce que je pourrais, comme consommateur, décider d'appliquer le verrou tout de suite? Parce que, moi, ce qui me fait peur, là, c'est de voir les fuites de données partout. Il y a un risque de me faire frauder et d'être pogné au téléphone à essayer de régler ça. Est-ce que je pourrais, en amont, décider, comme consommateur, moi, là, je veux un gel tout de suite parce que je regarde mes finances, je ne devrais pas demander de crédit puis, si jamais j'en demande, je lèverai le verrou à ce moment-là?

M. Plourde (Alexandre) : Moi, ma lecture de l'article 9, c'est que je peux faire ça, c'est que c'est discrétionnaire. Moi, c'est ça, ma lecture du projet de loi. C'est ce que j'en ai compris. Si ça n'avait pas été ça qui avait été écrit, je veux dire, c'est exactement ce que vous dites que j'aurais proposé.

J'estime, de toute façon... Il y a un enjeu par rapport à ça, c'est que bien des gens ont été victimes d'un vol d'identité ou, du moins, d'un bris de sécurité, puis la plupart des gens l'ignorent complètement. Le Commissariat à la protection de la vie privée, l'an passé, a estimé qu'à peu près tous les Canadiens ont été victimes d'un bris de sécurité à un endroit ou à un autre. Donc, on est tous à risque. Puis attendre de subir une fraude, attendre de vivre un vol d'identité, c'est bien souvent inutile. Puis quelqu'un qui n'a aucune consultation à faire faire sur son dossier de crédit, qui ne se cherche pas de crédit, ne se cherche pas d'assurance, ne se cherche pas, bon, d'emploi ou de logement, peut très bien décider de mettre un verrou, là.

M. Ouellet : C'est pour ça qu'il faut que ça soit gratuit, parce que, si le consommateur ne veut pas avoir accès au crédit, il ne veut pas être victime de quelqu'un qui pourrait usurper son identité. Donc, à la base, je peux, comme consommateur, demander le verrou avant même que d'autres le demandent, et donc, à ce moment-là, je peux avoir une protection, et c'est pour ça que cette protection-là doit être gratuite. À la base, le consommateur qui ne veut pas faire affaire avec ces compagnies-là, ne cherche pas à avoir du crédit, doit avoir une protection minimale, et cette protection minimale de qualité, parce que ça existe ailleurs, aux États-Unis, les infrastructures sont déjà existantes, ça peut être répliqué au Québec.

Je regarde les chiffres d'Equifax. Écoutez, un bond phénoménal de l'action de 107 $ à 160 $ pendant la pandémie. Je veux dire, ces compagnies-là fonctionnent très bien. Donc, le coût d'implantation est déjà assumé, une partie aux États-Unis. On peut répliquer ça au Canada, et ça peut...

• (11 h 20) •

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Ouellet : ...rapidement se répercuter sur des taux, mais évidemment pas sur un long terme, et considérant qu'en pandémie il y aura plusieurs réquisitions en matière de crédit.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci. Merci à vous, cher collègue. Ceci, donc, met fin à notre temps que nous avions pour l'exposé. MM. Corbeil et Plourde, merci pour votre présence.

Sur ce, nous allons suspendre momentanément nos travaux.

(Suspension de la séance à 11 h 21)

(Reprise à 11 h 35)

Le Président (M. Simard) : À l'ordre, chers collègues! Nous allons maintenant poursuivre nos travaux.

TransUnion of Canada Inc.

Nous sommes en présence de représentants du groupe TransUnion. Comme vous le savez, nous sommes en visioconférence et nous bénéficions d'un système de traduction simultanée. Je remercie donc notre traductrice, qui est avec nous ici aujourd'hui.

Mesdames, bienvenue. Merci de vous joindre à nous. Auriez-vous d'abord l'amabilité de vous présenter, s'il vous plaît?

(Visioconférence)

Mme Banfield (Chantal) : Oui. Alors, bonjour, M. le Président. Je m'appelle Chantal Banfield et je suis la vice-présidente et avocate-conseil chez TransUnion du Canada. Et ma collègue ici, Johanna Fitzpatrick. Johanna?

Le Président (M. Simard) : Alors, je crois comprendre que nous n'entendons pas pour le moment Mme Fitzpatrick. Et, le temps d'arranger, donc, ce petit problème technique, Mme Banfield, nous vous cédons la parole.

Mme Banfield (Chantal) : D'accord. Alors, comme je disais, je suis accompagnée de ma collègue Johanna Fitzpatrick, qui est conseillère juridique. Je sais que vous avez eu de la difficulté à l'entendre. Alors, je voudrais brièvement présenter TransUnion du Canada avant d'aller dans le vif de notre sujet, c'est-à-dire nos recommandations au sujet de la Loi sur les agents d'évaluation du crédit, donc, le projet de loi n° 53.

Alors, depuis 1989, TransUnion est un des principaux fournisseurs de services de renseignement sur le crédit au Québec et dans le reste du Canada. Alors, au coeur de notre activité, bien sûr, nous conservons des renseignements sur le crédit des consommateurs pour aider les prêteurs à prendre des décisions en matière de crédit. Nous aidons également les consommateurs en facilitant la réalisation d'un certain nombre de leurs rêves financiers personnels, comme l'achat d'une maison, d'une voiture ou un investissement dans leur éducation. C'est ce que nous appelons l'information à bon escient.

Alors, avant de poursuivre, je voulais souligner que, bien que le Québec n'ait pas eu de loi autonome concernant les agences d'évaluation de crédit jusqu'à maintenant, nous avons veillé à ce que les Québécois aient accès aux mêmes droits et recours que leurs voisins des autres provinces qui disposent d'une telle loi, comme, par exemple, l'Ontario, le Nouveau-Brunswick ou la Nouvelle-Écosse. Alors, ainsi, les Québécois bénéficient, depuis de nombreuses années, de plusieurs droits que le projet de loi n° 53 cherche à codifier. Parmi ces avantages, par exemple, on a les notes explicatives qui peuvent être ajoutées aux fiches de crédit ainsi que les alertes de sécurité.

Alors, maintenant, si on passe au projet de loi n° 53, notre témoignage aujourd'hui portera sur nos suggestions pour améliorer le projet de loi. Et nous voulons explorer trois thèmes. Le premier est temporel. Nous voulons nous assurer que les agences d'évaluation du crédit disposent de suffisamment de temps pour ajuster et revoir la conception de leurs systèmes afin d'atteindre des objectifs de la législation, particulièrement là où il y a du nouveau, évidemment. Le deuxième thème, c'est la protection adéquate des consommateurs. Et enfin nous voulons nous assurer que le projet de loi n° 53 ne crée pas une complexité administrative qui entraînerait une augmentation des coûts de service au Québec.

Alors, on va commencer avec le temps pour s'adapter. Comme j'ai mentionné en introduction, depuis plus de 15 ans, TransUnion fournit déjà les deux premières mesures que j'ai déjà mentionnées, soit les alertes de sécurité et les notes explicatives, aux consommateurs québécois. En fait, le secteur de l'évaluation de crédit a été le premier à lancer les alertes de sécurité dans les années 1990. Donc, ça existe depuis longtemps. L'obligation, par contre, de donner aux consommateurs la possibilité d'appliquer un gel de crédit, ça, c'est une mesure qui est entièrement nouvelle au Canada, comme vous le savez déjà probablement.

Alors, nous comprenons l'intérêt d'offrir aux consommateurs la possibilité de geler l'accès à leurs renseignements. Tout à fois, il faut souligner que c'est une fonctionnalité qui est toute nouvelle pour le secteur du crédit au Canada, et nous voulons nous assurer que nous procéderons correctement. Alors, les agents d'évaluation de crédit ont besoin de temps pour mettre au point des nouvelles technologies, intégrer les capacités du gel de crédit dans les différents systèmes qui sont utilisés actuellement par les créanciers pour accéder aux renseignements de crédit.

• (11 h 40) •

Alors, l'effort ne... (panne de son) ...non pas uniquement sur nos épaules, mais également, à leur tour, tous les créanciers, tels que les caisses d'épargne, les banques, les autres institutions financières, devront également apporter des modifications importantes à leurs systèmes pour recevoir l'indication du gel de crédit et y répondre de manière appropriée. Il faudra faire des changements pour ne pas que le système faille quand il reçoit une alerte de gel. Alors, ils auront besoin également de temps pour se préparer, pour préparer les systèmes, les mettre à l'épreuve, faire les tests adéquats et, de plus, pour préparer les processus pour qu'en succursale les employés sachent quoi faire avec une alerte de gel de crédit.

Alors, nous avons noté que le projet de loi a prévu une date ultérieure pour la mise en oeuvre des dispositions relatives au gel de crédit, alors cela permettra d'allouer le temps nécessaire pour mettre en place la fonctionnalité du gel. Et TransUnion a toujours soutenu, dans toutes ses conversations sur la mise au point de ce projet de loi, qu'il faudra deux ans pour mettre au point correctement cette mesure selon les exigences du projet de loi tel qu'il est en ce moment.

Alors, outre le gel de crédit, maintenant, si je peux me tourner à la protection des consommateurs, alors, le projet de loi n° 53 permet aux consommateurs de placer des alertes de sécurité et des notes explicatives, et nous sommes préoccupés par la formulation de certains articles qui permettent à un consommateur de suspendre ces méthodes de protection. Nous pensons qu'une suspension d'une alerte de sécurité ou de notes explicatives ne fonctionne pas. Alors, laissez-moi vous expliquer pourquoi.

Si on prend, par exemple, les alertes de sécurité, actuellement, les consommateurs ajoutent une alerte de sécurité à leur dossier de crédit s'ils sont, par exemple, victimes de fraude ou s'ils ont des raisons de croire qu'ils pourraient être victimes de fraude. Disons, par exemple, que leurs renseignements faisaient partie des renseignements ayant été touchés par une faille de sécurité à leur institution financière, à leur détaillant, à leur société de télécommunication, etc. Alors, quand une alerte de sécurité est présente sur un dossier de crédit, elle est envoyée au prêteur, qui demande la fiche de ce consommateur pour les avertir que le consommateur en question a été victime de fraude. Alors, les prêteurs sont ainsi avisés de prendre les mesures appropriées pour vérifier l'identité du consommateur. Et d'ailleurs le projet de loi prévoit un amendement à cet effet à l'article 19.1 de la loi sur les renseignements personnels. Alors, par conséquent, l'idée d'une suspension va un peu à l'encontre de cet objectif et n'apporte pas d'avantage. Alors, c'est difficile d'imaginer l'avantage de suspendre cette mesure d'alerte pendant une période limitée. Cette suspension pourrait en fait servir à perpétrer d'autres fraudes dans le cas où le prêteur ne serait pas informé de la situation du consommateur.

Alors, de la même manière, les notes explicatives ne sont pas un obstacle à l'approbation de crédit. Ça fonctionne comme une alerte, donc ça n'empêche pas les transactions de continuer. Alors, les notes explicatives permettent aux consommateurs d'inscrire des remarques dans leur dossier de crédit, qui seront transmises aux prêteurs et qui pourront prendre cette information-là en considération quand ils doivent formuler une décision à propos du consommateur.

Donc, de suspendre temporairement les remarques placées dans le dossier du consommateur, on ne voit pas d'avantage. Alors, pour cette raison, nous recommandons donc que la suppression, le droit de supprimer les alertes de sécurité et les notes explicatives soit enlevé du projet de loi. Les consommateurs ont bien sûr le droit de révoquer les mesures, mais le concept de la suspension, nous croyons, n'est pas utile dans ce contexte.

Alors, en ce qui concerne les notes explicatives également, je voulais vous mentionner que les notes explicatives, de la façon dont elles sont décrites dans le projet de loi, sont très restrictives. Alors, ça fait... De la façon dont c'est décrit dans le projet de loi, on parle de notes explicatives seulement pour discuter une mésentente avec l'agent d'évaluation de crédit ou un litige avec l'agent d'évaluation du crédit. Comme nous l'avons mentionné, c'est une fonctionnalité qui existe aujourd'hui et c'est utilisé de façon beaucoup plus large en ce moment. Alors, par exemple, si les consommateurs ont des événements négatifs dans leur vie, comme la maladie ou le divorce, qui pourraient avoir des conséquences à court terme sur leur solvabilité, ils peuvent utiliser les notes explicatives, qui seront sur leur fiche de crédit, et, comme ça, quand elles sont envoyées, comme je disais plus tôt, aux prêteurs, ils peuvent les prendre en considération. Alors, pour ces raisons, nous recommandons que le projet de loi n° 53 soit modifié pour élargir la définition, si on veut, des notes explicatives.

Alors, finalement, relativement au fardeau administratif, nous estimons que certains processus pourraient être simplifiés pour éviter le dédoublement et la création de coûts additionnels de conformité supplémentaires au Québec. Alors, une de nos préoccupations concerne le processus de plainte. Alors, permettez-moi de vous expliquer comment les plaintes fonctionnent à l'heure actuelle. TransUnion dispose d'un processus de plaintes qui est très bien établi depuis plusieurs années, qui rencontre les normes législatives qui existent actuellement. Alors, une première étape serait, pour le consommateur, d'obtenir une copie de leur dossier de crédit...

Le Président (M. Simard) : En conclusion, chère madame.

Mme Banfield (Chantal) : ...ce qu'il peut faire gratuitement par courrier, en ligne, par exemple. Ensuite, après examen du dossier de crédit, si un consommateur estime avoir une plainte à formuler, généralement, la plupart des plaintes portent sur l'exactitude des renseignements, les consommateurs peuvent lancer une enquête qui peut être faite encore par courrier, en ligne, etc.

Le Président (M. Simard) : Merci, madame.

Mme Banfield (Chantal) : À chacune de ces interventions...

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield?

Mme Banfield (Chantal) : ...nous fournissons aux consommateurs des informations sur leurs droits...

Le Président (M. Simard) : Pardon, Mme Banfield.

Mme Banfield (Chantal) : ...que ce soit encore en ligne, par courrier, etc.

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield?

Mme Banfield (Chantal) : Donc, dans les conditions normales...

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield?

Mme Banfield (Chantal) : ...nos enquêteurs règlent les différends dans les 30 jours, et, dans la plupart des cas, il s'agit de vérifier l'information auprès des institutions financières. Alors, à la fin du processus, nous informons le consommateur des résultats et lui fournissons un résumé de ses droits. Par exemple, ils peuvent ajouter une note explicative ou faire part des préoccupations au comité d'accès à l'information.

Le projet de loi semble introduire un processus supplémentaire qui pousserait les consommateurs vers l'Autorité des marchés financiers...

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield.

Mme Banfield (Chantal) : ...je pense, plus tôt que nécessaire, alors qu'ils pourraient autrement avoir recours au processus de plaintes qui existe à la satisfaction du consommateur.

Alors, par conséquent, nous recommandons de clarifier le processus de règlement des différends pour qu'il s'entame après que le processus de base de plaintes que les agents d'évaluation de crédit ont ait été épuisé.

Alors, en conclusion, au nom de TransUnion, je tiens à féliciter le gouvernement pour ce que nous estimons être un bon texte de loi de façon générale, et nous vous encourageons à prendre en considération les modifications que nous avons proposées pour améliorer son application et son efficacité.

Le Président (M. Simard) : Alors, merci beaucoup, madame, pour votre présentation. Nous allons maintenant passer à la période d'échange, et je cède immédiatement la parole au ministre des Finances.

M. Girard (Groulx) : Merci pour votre présentation. J'aimerais revenir, en fait, sur les deux... Votre présentation était quand même assez exhaustive sur la note, alors je vais me concentrer sur l'alerte de sécurité et le gel de crédit. J'aimerais que vous nous donniez une description fonctionnelle de l'alerte de sécurité. En quoi l'alerte de sécurité protège un client, un individu? Comment ça fonctionne? Vous avez mentionné qu'il y a un signal au prêteur de faire des vérifications supplémentaires sur l'identité. Est-ce que le consommateur reçoit aussi un signal qu'il y a activité sur son dossier? Et une autre sous-question : Combien ce service pour cinq ans... Quelle est la tarification actuelle de ce service?

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield.

Mme Banfield (Chantal) : Alors, l'alerte de sécurité, comme je disais, n'empêche pas qu'une transaction ait eu lieu. C'est un système d'alerte. Donc, s'il y a une alerte sur le fichier de crédit, le prêteur va recevoir l'alerte et va devoir, évidemment, prendre les précautions nécessaires afin de vérifier l'identité du consommateur.

Le consommateur, lui, ne reçoit pas... De la façon dont le système est conçu aujourd'hui, le consommateur ne reçoit pas d'alerte en même temps, quoique l'accès du prêteur serait noté à leur fiche de crédit.

Et je pense que l'autre question... parce que j'entends les questions qui sont traduites, mais je pense que la question était relative au prix. Ce service, qui existe depuis les années 90, est gratuit. Donc, le consommateur n'a pas besoin de payer pour ajouter des alertes de sécurité.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup. M. le ministre.

• (11 h 50) •

M. Girard (Groulx) : O.K. Nous avons évoqué le gel de crédit, d'être la première juridiction... Notre objectif, c'est de donner un outil supplémentaire au consommateur, d'avoir accès au gel de crédit.

J'aimerais que vous nous décriviez l'impact du gel de crédit. Avec quelle flexibilité un consommateur peut demander le gel de crédit, le retirer? Quelle est l'implication pour un consommateur d'avoir demandé le gel de crédit sur son dossier?

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield.

Mme Banfield (Chantal) : Alors, bon, le processus, évidemment, n'a pas été encore... parce que ça n'existe pas aujourd'hui, donc on n'a pas écrit notre processus et pensé, là, à notre processus pour mettre ça en oeuvre. Toutefois, on peut penser que ça va être fait de la même façon, une façon très similaire aux alertes de sécurité. Alors, il s'agirait, par exemple, que le consommateur soit nous écrive ou soit qu'il utilise notre portail pour demander le gel. Évidemment, il va falloir identifier le consommateur pour s'assurer qu'effectivement c'est la bonne personne et que c'est la bonne fiche qui va être gelée. Et, dans la mesure où la fiche a été gelée, tant qu'elle n'est pas révoquée ou tant qu'elle n'expire pas, là, d'après les règlements, dépendamment de ce que les règlements vont prescrire, quand il y aurait une transaction relativement au crédit, comme c'est spécifié dans la loi, il y aurait un message qui irait au prêteur disant : La fiche de crédit de la personne concernée est gelée.

Donc, il faut demander aux consommateurs de dégeler leur fiche de crédit pendant un certain temps. Et j'imagine que ce sont des choses qui vont être prescrites par le règlement, justement. Normalement, je pense, dans les autres juridictions où ça existe, c'est pour une période, je pense, de 24 heures ou de 48 heures. Peut-être ma collègue Johanna aurait plus de détails là-dessus. Je sais qu'elle a plus d'informations au niveau du fonctionnement dans les autres juridictions.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme Fitzpatrick, à vous la parole.

Mme Fitzpatrick (Johanna) : Yes. Good morning. So, the other jurisdiction that has a lock is within the United States. It was developed quite differently because primarily related to the distinction in laws. In the U.S., they were able to pass legislation that impacted not just the three credit reporting agencies, but they also regulated the financial institutions, the major institutions like banks and the credit unions. So, they could develop the system much more fluently for the entire industry where, as Canada, we don't have that type of legal setup where we have this distinction between the regulation by the provinces versus the regulation by the federal Government.

The legislation in the U.S. actually created an independent company and required that the banks pay substantial amounts of money into this new independent company. That was used to develop a very complex credit-free system which took about five years to develop even with creating a new company to manage it.

Understandably, in Canada, we don't have that capability at any level to pass laws across the entire financial industry entirely. So, I'd say that's been the barrier to why the U.S. system is not able to transition to the Canadian marketplace.

Le Président (M. Simard) : Merci, madame. M. le député. Ah! pardon. M. le ministre. Bien oui. Excusez-moi. Il vous reste encore sept minutes. Je pensais que votre temps était révolu.

M. Girard (Groulx) : Je passerais la parole à mon collègue.

Le Président (M. Simard) : Oui, voilà. M. le député de Saint-Jérôme. Merci beaucoup.

M. Chassin : Merci. Merci, mesdames, de votre présentation. J'ai peut-être une question un peu primaire, mais j'aimerais que vous nous expliquiez peut-être le fonctionnement ou, en tout cas, la difficulté à instaurer le gel de crédit puisque, vous le disiez dans votre présentation, il y a une similitude avec les alertes. Autrement dit, de l'extérieur, d'un point de vue, là, tout à fait non-expert dans votre industrie, on se dit que le demandeur, par exemple, une institution financière ou n'importe quel prêteur qui fait une demande auprès de vous pour un dossier de crédit, va simplement recevoir l'information : Ce dossier fait l'objet d'un gel, nous ne pouvons vous communiquer l'information. En quoi est-ce que c'est complexe pour vous de vous adapter et d'adapter vos systèmes à ce type de message là?

Le Président (M. Simard) : Mme Banfield?

Mme Banfield (Chantal) : Oui, alors, comme j'expliquais, il y a une grosse différence entre les deux, et la différence entre les deux, c'est que, relativement à l'alerte de sécurité, ça n'empêche pas les transactions. Donc, il y a une note, une alerte qui est retournée aux institutions financières qui dit tout simplement que le consommateur a été potentiellement victime de fraude et dont il faut vérifier l'identité. La transaction continue à procéder. Toutes les informations qui sont requises, la décision, la cote de crédit, les indications de fraude, toute l'information est envoyée. Il n'y a aucune transaction qui est arrêtée.

Alors, la différence avec le gel, c'est qu'il faudra, pour certains types de transactions, geler ou arrêter la transaction. Alors, il faut que... pour tous les systèmes qui sont utilisés, il faut bâtir ce système pour justement arrêter toutes les transactions et ensuite il faut avoir un système avec lequel le consommateur, donc un portail ou quoi que ce soit... que le consommateur peut utiliser pour être capable d'enlever le gel pour qu'il puisse, par exemple, obtenir une copie de leurs informations pour avoir un prêt automobile, un prêt hypothécaire, etc.

M. Chassin : Mais est-ce que c'est de la responsabilité...

Mme Banfield (Chantal) : Et donc il faut non seulement...

M. Chassin : Excusez-moi.

Mme Banfield (Chantal) : ...avoir un système, il faut non seulement avoir un système que les consommateurs puissent utiliser, mais on doit aussi modifier nos systèmes internes pour que nos agents puissent manipuler et s'assurer que, si un consommateur demande que le gel soit enlevé, qu'ils soient capables eux-mêmes de le faire de l'interne, de nos systèmes.

Le Président (M. Simard) : D'accord. Merci, madame.

Mme Banfield (Chantal) : Parce qu'évidemment on a un système que nos agents utilisent qui parle à toutes nos banques de données.

Alors, il y a plusieurs aspects de ce projet...

M. Chassin : Je veux juste poser une question peut-être un peu plus précise, si vous me permettez.

Mme Banfield (Chantal) : ...plusieurs modifications au point de vue de la technologie qui doivent être... faire à plusieurs systèmes différents...

M. Chassin : Je pense que vous ne nous entendez pas.

Mme Banfield (Chantal) : ...en plus de la coordination, évidemment, avec, comme je disais, les créanciers, qui doivent aussi être capables de développer leurs systèmes et parler au nôtre...

M. Chassin : Un petit instant, s'il vous plaît.

Mme Banfield (Chantal) : ...parce que toutes nos transactions, en ce moment...

Le Président (M. Simard) : M. le député, je crois qu'elle ne vous entend pas.

M. Chassin : Non, c'est ça. C'est pour ça que je fais un signe. Juste...

Mme Banfield (Chantal) : ...sont électroniques, évidemment.

M. Chassin : Excusez-moi, je fais des signes parce que j'ai l'impression...

Mme Banfield (Chantal) : Pardon?

M. Chassin : ...que vous ne nous entendez pas.

Le Président (M. Simard) : Oui, madame... Excusez-moi, M. le député. Mme Banfield, nous tentons parfois d'entrer en communication avec vous, et, visiblement, je pense que votre micro ne fonctionne pas. Enfin, c'est ce qu'on m'indique.

M. Chassin : Ou, quand vous parlez, vous ne nous entendez pas, peut-être.

Mme Banfield (Chantal) : Avec la traduction, c'est très difficile, en fait, de savoir si on traduit ce que je dis ou est-ce... si on traduit ce que vous dites.

M. Chassin : Ah! d'accord.

Mme Banfield (Chantal) : Alors, c'est un petit peu difficile, l'échange, à cause de ça parce que j'entends la traduction.

M. Chassin : Bon, écoutez, je vais essayer de poser une question un peu plus précise. Parce que vous parliez, dans le fond, du fait qu'il s'agit, donc, dans le cas du gel par rapport à l'alerte, de bloquer la transaction. Est-ce que vous êtes en train de me dire que, selon vous, c'est la responsabilité, donc, de l'agent d'évaluation de crédit de bloquer la transaction de prêt? J'essaie juste de clarifier le point que vous faites.

Mme Banfield (Chantal) : De la façon dont le projet de loi est écrit, oui, c'est notre obligation, mais, évidemment, l'obligation des créanciers, c'est d'être capable de recevoir cette information-là. Donc, il y a des modifications à leurs systèmes qui est nécessaire également.

Si je vous donne un exemple, quand l'Ontario, en 2008, a adopté le projet de loi relativement aux alertes de sécurité, c'était quelque chose qu'on offrait depuis les années 90, mais certains...

Est-ce que vous m'entendez toujours?

Le Président (M. Simard) : Très bien, madame, très bien.

• (12 heures) •

Mme Banfield (Chantal) : J'ai perdu l'image. Oui?

Le Président (M. Simard) : Très bien.

Mme Banfield (Chantal) : D'accord. Je ne vous vois plus. Il y avait certaines institutions qui n'avaient pas fait le changement, alors ils ont dû faire le changement à ce moment-là, et ça a pris environ 18 mois pour juste l'alerte de sécurité. Alors, le gel, c'est plus complexe. Alors, c'est pour ça qu'on demande deux ans.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup, madame. M. le député de Rousseau, il vous resterait 1 min 30 s si vous souhaitez intervenir. Ça va pour vous? Merci beaucoup. Alors, M. le député de Pontiac.

M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Banfield, Mme Fitzpatrick. Merci d'être avec nous. Une bonne partie de nos discussions ce matin ont porté sur la gratuité des différents services. Le projet de loi en tant que tel, là, pour plusieurs items, ne fait pas référence à la gratuité, mais il y a quand même beaucoup de voix qui s'élèvent, des groupes de consommateurs, ici, certains d'entre nous, dans les différentes formations politiques, dont la mienne, qui proposent la gratuité de ces mesures-là parce qu'on croit fondamentalement que ces données-là appartiennent aux Québécois. Alors, le ministre, d'entrée de jeu, a émis la possibilité que, si ces services-là, par exemple l'obtention de la cote de crédit, par exemple des mises à jour de la fiche, par exemple le dégel, si ces services-là sont gratuits, que le service serait peut-être moindre. Comment vous réagissez à ça?

Mme Banfield (Chantal) : Sorry. Maybe... I don't think I understand the question. Maybe... What would be left?

M. Fortin : Well, there's no... nowhere in this bill is there any indication that the services would be free for Quebeckers. And that's a bit of a problem for us and...

Mme Banfield (Chantal) : The quality of the credit freeze?

M. Fortin : ...yes, and that's... the question that the Minister is raising is: If the service is free, then what would the quality looks like? Would the quality change if it's mandated that the service is free to Quebeckers?

Mme Banfield (Chantal) : Alors, écoutez, d'une façon ou d'une autre, les services vont être développés de façon à rencontrer les exigences du projet de loi ou de la loi au moment où ça va être adopté. Donc, il n'y a aucun doute que le coût pour développer un système comme ça, non seulement les changements que les agents de crédit doivent faire à leurs systèmes, mais également tout le marché financier, si on veut... c'est sûr que les coûts, c'est dans les millions de dollars. Alors, je ne sais pas exactement combien, parce que c'est difficile à prévoir, là, dépendamment des critères. Donc, c'est un coût substantiel. Alors, c'est la raison pour laquelle avoir des frais... Et d'ailleurs, dans nos voisins, aux États-Unis, il y a des frais dans plusieurs des États pour justement être capable de défrayer les coûts pour obtenir ce genre de service là.

C'est sûr qu'on offre déjà plusieurs services, relativement à la fraude, qui sont gratuits, comme, par exemple, notre service d'enquête relativement à la fraude, les services d'aide aux victimes de fraude, et qui peuvent enquêter les renseignements de crédit, là, dans l'éventualité où quelqu'un est victime de fraude. Nous offrons également les alertes de sécurité de façon gratuite, mais le gel, c'est une fonctionnalité qui est toute nouvelle et qui va requérir un investissement de beaucoup d'argent. Alors, je pense que, d'une façon ou d'une autre, les services vont rencontrer les normes de la loi, évidemment.

M. Fortin : Très bien. Je vous entends, je vous entends, vous nous dites : S'il est mandaté dans la loi un certain niveau de service, une certaine qualité de service, on va respecter ça. S'il est mandaté dans la loi que ce service-là doit être gratuit, bien, on n'aura pas le choix de le respecter, mais à un certain... Je vous entends et j'ai entendu votre préoccupation initiale qui dit : Bien, s'il y a une complexité administrative, ça peut entraîner une augmentation des coûts qui, peut-être, vont être refilés à d'autres, mais, si c'est mandaté dans la loi que c'est gratuit, si c'est mandaté dans la loi que le service doit être offert, vous allez respecter la loi.

Mme Banfield (Chantal) : Bien sûr, il va falloir se conformer à la loi, mais, d'une façon ou d'une autre, si les coûts sont plus élevés, le prix de nos services au Québec vont être plus élevés par rapport à nos clients. Et ça pourrait évidemment résulter dans des augmentations de coûts relativement aux services que nous offrons au Québec et relativement aux frais qui sont chargés aux consommateurs par nos clients.

M. Fortin : Oui, je vous entends bien là-dessus, la préoccupation qui...

Mme Banfield (Chantal) : Mais, de façon directe, si la législation nous dit que c'est gratuit, bien, de toute évidence, il va falloir que ce soit gratuit.

M. Fortin : Très bien. Je vous remercie. Je n'avais aucun doute que vous vous plieriez aux exigences législatives.

Mme Banfield (Chantal) : Exact.

M. Fortin : J'ai peut-être une question rapide. Comme consommateurs, souvent, on se tourne vers vous. Et moi-même, j'ai appelé chez vous, il n'y a pas très longtemps, et, je dois vous dire, je me posais une question en appelant, en disant : Bien, si je choisis l'option en français, est-ce que ça va être beaucoup plus long? Alors, est-ce que vous avez des données par rapport à votre service en français aux citoyens qui auraient besoin de vous contacter? Est-ce que le temps d'attente est plus long en français? Est-ce que le service est disponible au citoyen francophone qui vous appelle au même niveau de service qu'en anglais?

Mme Banfield (Chantal) : Alors, si on met COVID de côté, parce qu'il y a eu, évidemment, certaines complexités, là, relativement à la COVID, ça a créé, comme vous savez, beaucoup de volume dans les centres d'appels, bien, dans les circonstances normales, nos niveaux de service sont les mêmes en français ou en anglais.

M. Fortin : O.K. Très bien. Quand je pense à quand les citoyens peuvent vous contacter... et, en ce moment, là, il y a des citoyens, bien évidemment, là, qui ne sont pas d'accord avec leur dossier de crédit, qui ont des enjeux, qui se posent des questions à savoir, bien, pourquoi un tel enjeu ou qu'est-ce qui s'est passé exactement, des citoyens qui veulent corriger les erreurs, et les groupes de consommateurs qui étaient ici ce matin nous en ont fait part. Est-ce qu'il y a un délai moyen pour corriger les erreurs chez vous? Est-ce que vous savez combien de temps ça peut prendre pour corriger les erreurs?

Mme Banfield (Chantal) : Alors, comme j'ai mentionné durant mes remarques, au tout début, normalement, le service d'enquête, quand il y a des inaptitudes au dossier de crédit et que le consommateur nous formule une demande d'enquête ou une plainte, nous complétons l'enquête à l'intérieur de 30 jours. Alors, il faut comprendre que, dans ce temps-là, il faut recevoir la plainte, regarder la fiche de crédit. Ensuite, la plupart du temps, ça nous demande d'envoyer l'information à l'institution financière qui a rapporté l'information au bureau de crédit, et donc il y a un certain délai, mais, normalement, c'est à l'intérieur de 30 jours, comme j'ai mentionné.

M. Fortin : Quelqu'un qui voudrait... Il me reste un peu de temps, M. le Président?

Le Président (M. Simard) : ...cher collègue.

M. Fortin : O.K. Très bien. Quelqu'un qui voudrait procéder au gel ou au dégel de son dossier aujourd'hui, là, si... et je mets de côté tout l'aspect gratuité du service qu'on a discuté, vous et moi, qui est encore théorique parce que le ministre n'a pas accepté cette demande-là, mais, si on veut procéder au gel ou au dégel de son dossier de crédit, combien ça coûterait?

Mme Banfield (Chantal) : Ce n'est vraiment pas une question que je suis prête à répondre aujourd'hui, je n'ai pas les informations pour ça. Ça va dépendre évidemment des exigences de la loi. Et, basé là-dessus, il faudrait faire comme... regarder le coût, c'est quoi l'intervention manuelle, c'est quoi... si c'est fait par l'intranet... par l'Internet, si c'est fait par courrier, etc. Donc, je ne peux vraiment pas répondre à cette question-là en ce moment. Je n'ai pas vraiment les informations.

M. Fortin : Combien ça coûte en ce moment, avoir accès à sa cote de crédit?

Mme Banfield (Chantal) : Il n'y a pas, en ce moment, de service permettant l'accès à la cote de crédit en tant que tel chez TransUnion. Alors, il y a quelques façons pour les consommateurs d'obtenir leur cote de crédit. Il y a des produits de surveillance qui donnent plusieurs services, y compris la cote de crédit, et il y a également certaines institutions financières qui offrent aujourd'hui ce service-là par l'entremise de leurs services bancaires qui sont gratuits pour le consommateur.

M. Fortin : O.K., mais vous me dites que, chez vous, là, il n'y a pas personne qui... Un consommateur aujourd'hui, là, avant le projet de loi, là, mais aujourd'hui, ne peut pas appeler, ne peut pas dire : J'aimerais savoir ma cote de crédit. Ce service-là n'est pas fourni, à moins qu'on achète un package plus global qui, selon ce que mon collègue avance, là, et selon ce que je vois sur votre site Internet, coûte 19,95 $ par mois. Donc, 20 $ par mois, 240 $ par année, c'est la seule façon d'obtenir directement de TransUnion notre cote de crédit.

Mme Banfield (Chantal) : Non, comme je vous ai dit, il y a certaines institutions financières qui offrent également l'information gratuitement par l'entremise de leurs services bancaires.

• (12 h 10) •

M. Fortin : Oui, mais, chez TransUnion, c'est la seule façon. C'est le seul package que vous avez, là. La seule façon de contacter TransUnion et d'avoir notre cote de crédit, si on fait outre l'institution bancaire, c'est un package qui coûte 240 $ par mois... par année, pardon.

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Banfield (Chantal) : Pour le service de surveillance, oui, exact, qui inclut la cote de crédit. Exact.

M. Fortin : D'accord, merci.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci beaucoup, cher collègue.

Mme Banfield (Chantal) : Et vous me dites que c'est 19,99 $, je ne sais pas exactement le montant, mais c'est exact, il y a des frais pour le service de surveillance.

Le Président (M. Simard) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de...

M. Marissal : Bonjour, Mme Banfield, Mme Fitzpatrick. Mme Banfield, je fais court dans les mondanités, j'ai moins de trois minutes et j'ai trois questions. Alors, pouvez-vous les prendre en note et y répondre de façon ordonnée? Première question : Quel est le taux d'exactitude de vos dossiers?, puisque c'est une préoccupation qui nous a été mentionnée par certains groupes de protection de consommateurs, selon lesquels il y a un gros taux, fort taux d'inexactitude dans les dossiers, ce qui peut avoir évidemment des répercussions.

Vous me parlez d'un processus de contestation et de différend qui est bien en place et qui est efficace. Deuxième question : Combien de plaintes ou de contestations avez-vous par année?

Troisième question : Nonobstant les défis techniques que vous mentionnez pour le gel, qui semble être une affaire bien, bien, compliquée, est-ce que c'est néanmoins une mesure efficace pour la protection des consommateurs?

Le Président (M. Simard) : Il vous reste 1 min 40 s, Mme Banfield.

M. Marissal : 35, 30...

Mme Banfield (Chantal) : Relativement à la dernière question, je ne suis pas certaine que j'ai bien compris la dernière question.

M. Marissal : Bien là, on brûle mon temps, madame, là. Nonobstant les défis techniques pour appliquer le gel, est-ce que c'est une mesure efficace telle qu'elle est écrite dans le projet de loi n° 53?

Mme Banfield (Chantal) : Alors, je peux commencer avec celui-là. Est-ce que ça serait efficace? Je veux dire, dans la mesure où les systèmes sont développés, ça permettrait de geler, donc que l'information ne soit pas envoyée à des tiers, à moins que le consommateur, de façon active, enlève le gel pour que, justement, leurs informations soient partagées avec une institution financière. Alors, dans la mesure où ce développement-là, au niveau des systèmes, est fait, ça serait efficace d'empêcher l'information d'aller à des tierces parties, effectivement.

Relativement au nombre de plaintes, je n'ai pas cette information-là avec moi aujourd'hui, mais on peut fournir cette information-là après l'audience. Il va falloir que je réfère cela aux gens qui s'occupent de nos opérations. Et le nombre de plaintes vis-à-vis le nombre de fichiers qui sont livrés à des tierces parties, ça, c'est un bon indicateur, là, du taux d'exactitude, si vous voulez.

Ce qu'il faut comprendre... ce que j'allais dire, c'est que ce qu'il faut comprendre, c'est qu'une plainte...

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

Mme Banfield (Chantal) : ...ça peut être d'ajouter un numéro de téléphone ou une adresse, ce n'est pas nécessairement : Il y a une carte de crédit, sur ma fiche de crédit qui ne m'appartient pas. Alors, il faut comprendre qu'il y a différentes sortes de plaintes qui sont plus ou moins matérielles, mais je peux vous revenir avec les chiffres là-dessus.

Le Président (M. Simard) : Merci, madame. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, madame. J'aimerais savoir, lorsque le gouvernement américain a décidé d'imposer le gel de sécurité gratuit, TransUnion a dû, effectivement, mettre ça gratuit. À qui elle a refilé la facture du coût d'implantation de cette nouvelle infrastructure informatique?

Le Président (M. Simard) : Madame, à vous la parole.

Mme Banfield (Chantal) : Je vais demander à ma collègue Johanna de répondre à cette question-là.

Mme Fitzpatrick (Johanna) : Yes. Well, again, because of the structure in the United States, they have an institution, they created a company that manages that. Banks are required to pay into that and they also have... it's called the FACT Act surcharge, so, for every transaction in the US, with regards to customers. So, for example, a bank accessing credit information, there are charges on top of that, that is used to fund the access to information request and the credit freeze program.

M. Ouellet : Donc, en résumé, c'est les compagnies comme TransUnion et les banques qui agissent sur le territoire américain qui paient pour le développement et la mise en application du système.

Une autre question pour vous. Considérant que... Si le Québec allait de l'avant et rendait obligatoire la gratuité, est-ce que ça remettrait en question votre modèle d'affaires et votre présence au Québec?

Mme Banfield (Chantal) : On va revoir les coûts, évidemment, relativement à ça. Et ce que je voulais mentionner, c'est, au niveau des États-Unis, je pense que vous avez conclu qu'il n'y a pas de charge au consommateur, mais je crois que, dans certains États, il y en a. Donc, peut-être que c'est quelque chose que... on peut vous revenir là-dessus, là, pour confirmer.

M. Ouellet : Moi, dans mes informations, il n'y a pas de charge dans d'autres États. Il y en avait eu par le passé, mais la loi qui a été adoptée semblait rendre... proscrire, pardon, les charges.

Donc, si je comprends bien, vous seriez d'accord à ce que le Québec aille de l'avant avec la gratuité. Cependant, vous nous avez manifesté que ça représentait des coûts de quelques millions. Est-ce que vous seriez prêts à les assumer, considérant que le gouvernement du Québec pourrait aller dans cette avenue-là?

Le Président (M. Simard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Banfield (Chantal) : Comme on a mentionné plus tôt, évidemment, si la législation nous demande d'approvisionner les consommateurs gratuitement, nous devrons le faire et nous allons réviser nos structures de coûts vis-à-vis nos clients en conséquence, toutefois.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme Banfield, Mme Fitzpatrick, merci d'avoir été présentes avec nous aujourd'hui. Nous avions deux gros handicaps, la distance et, bien sûr, la traduction. Donc, merci d'avoir été avec nous aujourd'hui.

Sur ce, je mets fin à nos travaux pour cet avant-midi. Nous allons reprendre à 14 heures dans la même salle. À plus tard.

(Suspension de la séance à 12 h 18)

(Reprise à 14 h 03)

Le Président (M. Simard) : Alors, à l'ordre, chers collègues! À l'ordre! Nous voici de retour pour la reprise de nos travaux.

Comme vous le savez, la commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 53, Loi sur les agents d'évaluation du crédit.

Alors, avant de reprendre nos travaux, il y a eu consentement de la part du ministre, et donc de la partie ministérielle, afin de concéder trois minutes du temps qui leur était dévolu sur les 16 initialement attribuées afin que ces trois minutes soient réparties équitablement entre QS et le Parti québécois, donc, qui, en plus de leur 2 min 40 s, auront donc 1 min 30 s chacun. Tout ça se fait de manière consensuelle, bien sûr, avec l'appui de l'opposition officielle. Donc, merci à toutes les parties prenantes pour la courtoisie et la collaboration dont vous faites preuve.

Autorité des marchés financiers (AMF)

Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de l'Autorité des marchés financiers. Messieurs, auriez-vous l'amabilité, pour les fins de nos travaux, de vous présenter?

M. Morisset (Louis) : Oui, bien sûr. Merci, M. le Président. Alors, Louis Morisset, président-directeur général de l'Autorité des marchés financiers, et je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue Patrick Déry, qui est surintendant de l'encadrement de la solvabilité.

Le Président (M. Simard) : Vous disposez d'une période de 10 minutes.

M. Morisset (Louis) : Merci encore une fois, M. le Président. Bonjour, chers membres de la commission. Alors, tout d'abord, merci de cette invitation à vous rencontrer aujourd'hui afin de vous offrir la perspective de l'autorité relativement au projet de loi sur les agents d'évaluation du crédit, le projet de loi n° 53, un projet de loi qui vise à répondre à plusieurs enjeux d'importance touchant la protection des consommateurs québécois, notamment en ce qui a trait à leurs dossiers de crédit et leurs données personnelles.

La fuite de renseignements personnels rendue publique le 20 juin 2019 par le Mouvement Desjardins de même que celles ayant touché d'autres entreprises et institutions financières, dont Capital One, au cours de la dernière année ont conscientisé les Québécois quant à leurs renseignements détenus par les divers assujettis du secteur financier et au rôle des agents d'évaluation du crédit. Ces événements ont notamment mis en lumière la nécessité de mettre en oeuvre pour les consommateurs québécois un encadrement normatif approprié en matière de protection de leur dossier de crédit.

En ce sens, l'autorité se réjouit des solutions proposées dans le projet de loi et l'appuie avec enthousiasme. En effet, l'autorité estime que ce projet de loi accroît de façon marquée la protection des consommateurs et renforce l'encadrement du secteur financier au Québec en y assujettissant des acteurs importants que sont les agents d'évaluation du crédit, en l'occurrence Equifax et TransUnion. De plus, l'autorité accueille favorablement le mandat qui lui est confié, soit d'encadrer et de surveiller les agents d'évaluation du crédit. En effet, les activités de ces agents sont étroitement liées aux activités des institutions financières que l'autorité encadre et surveille conformément à sa mission. Nous sommes d'avis que ce nouveau mandat s'intègre ainsi naturellement à la mission de l'autorité.

Cela dit, nous croyons que certains ajustements au projet de loi permettraient à l'autorité de réaliser plus efficacement ce nouveau mandat et d'atteindre plus aisément les objectifs visés. J'aurai l'occasion d'y revenir un petit peu plus loin.

En vertu du projet de loi, l'autorité sera mandatée pour encadrer et surveiller les agents d'évaluation du crédit qu'elle aura désignés. Pour ce faire, elle bénéficiera d'outils similaires à ceux dont elle dispose présentement pour exercer ce même rôle auprès des institutions financières, notamment divers pouvoirs qui lui permettent d'émettre une instruction écrite, une ordonnance ou d'imposer des sanctions administratives pécuniaires. L'autorité pourra également faire appel aux tribunaux, notamment le Tribunal administratif des marchés financiers, pour faire cesser ou sanctionner une conduite non conforme.

L'autorité entend ainsi mettre à profit la vaste expérience qu'elle s'est forgée auprès des institutions financières en matière de surveillance et de contrôle, de même que celle acquise depuis sa création en matière de traitement des plaintes, de règlement de différend et d'éducation financière. Rappelons qu'à titre de régulateur intégré du secteur financier et en raison des diverses lois que l'autorité administre, elle bénéficie d'une vue globale sur les institutions financières et autres assujettis qu'elle encadre. L'autorité possède déjà une infrastructure technologique sécuritaire lui permettant de recevoir et de traiter les divulgations en provenance des institutions financières de même que celles de leurs groupements affiliés.

La surveillance qu'elle exerce auprès de ses assujettis lui permet d'intervenir en amont afin de rehausser les mécanismes visant notamment la protection des consommateurs et la résilience des institutions et ainsi faire en sorte que le secteur financier soit suffisamment robuste pour affronter des crises importantes. L'autorité possède de plus une solide expérience dans la conception et la diffusion de publications touchant la protection des consommateurs, ce qui lui permettra... de développer, pardon, plus aisément, donc, de nouveaux contenus relativement au rôle que jouent les agents d'évaluation du crédit auprès des consommateurs. En matière de protection des renseignements personnels, l'autorité joue un rôle complémentaire à celui que joue la Commission d'accès à l'information du Québec, qui administre les lois consacrées spécifiquement à la protection de ces renseignements.

Le projet de loi prévoit la possibilité pour le consommateur de soumettre une plainte à l'agent d'évaluation du crédit qui a refusé sa demande d'exercice d'un des droits prévus. Le processus de traitement de cette plainte est encadré par l'autorité, et, à cette occasion, l'autorité peut également offrir des services de conciliation ou de médiation pour tenter de régler le différend. Selon le projet de loi, cette même plainte peut également faire l'objet d'une demande d'examen de mésentente auprès de la Commission d'accès à l'information. Cela fait en sorte qu'en raison de cette situation et possiblement bien d'autres un consommateur pourrait s'adresser aussi bien à l'autorité qu'à la Commission d'accès à l'information. Il existe là, selon nous, un risque de confusion pour le consommateur, et nous croyons qu'une clarification des rôles respectifs de la Commission d'accès à l'information et de l'autorité serait appropriée.

Afin de faciliter la coordination avec la Commission d'accès à l'information et d'assurer le partage d'informations liées aux plaintes des consommateurs, l'autorité entend proposer à la Commission d'accès à l'information des mécanismes de coordination, notamment par voie d'ententes, afin de spécifier leurs interventions respectives, le moment de mener celles-ci et l'assistance qui devra être apportée aux consommateurs québécois au meilleur de leurs intérêts. Nous croyons qu'il serait approprié de prévoir ces mécanismes dans la loi.

• (14 h 10) •

Par ailleurs, nous tenons à rappeler que les entités qui exercent présentement au Québec l'activité d'agent d'évaluation du crédit sont d'importantes multinationales. Elles devront suivre de saines pratiques commerciales et des pratiques de gestion appropriées lorsqu'elles seront désignées. L'autorité croit nécessaire que le législateur précise son intention à cet égard, notamment quant à l'obligation pour ces entités d'allouer les ressources nécessaires à l'exercice de leurs activités au Québec et d'offrir aux consommateurs québécois des services qui répondent pleinement à leurs besoins.

Nous exprimons enfin certaines préoccupations en ce qui concerne le régime de sanctions proposé par le projet de loi. Nous constatons, en effet, une évolution marquée en matière de sanctions dans le projet de loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels, soit le projet de loi n° 64, déposé par le gouvernement du Québec le 12 juin dernier, qui contraste avec le régime de sanctions proposé au projet de loi n° 53 de même qu'avec celui qui prévaut dans toutes les autres lois administrées par l'autorité par un quantum substantiellement plus élevé et résolument plus dissuasif. Dans un souci de cohérence, si telle est la volonté du législateur de concrétiser cette évolution, un régime de sanctions aussi dissuasif serait recommandé pour niveler à la hausse celui prévu au projet de loi n° 53 et, incidemment, ceux des autres lois administrées par l'autorité.

En conclusion, l'autorité appuie avec enthousiasme le dépôt du projet de loi n° 53 par le gouvernement du Québec et lui réitère sa volonté de participer à la mise en place d'un encadrement adapté à la réalité des agents d'évaluation du crédit et d'assurer la surveillance de leurs activités au Québec. L'autorité entend travailler en étroite collaboration avec la Commission d'accès à l'information, l'Office de la protection du consommateur et toute autre partie prenante qui s'intéresse à la protection des consommateurs et aux enjeux que soulève la protection des renseignements personnels.

Sous réserve des ajustements évoqués plus tôt, l'autorité s'estime en mesure d'assujettir les agents d'évaluation du crédit qu'elle aura désignés aux normes qui seront prescrites et entend les enjoindre à suivre les meilleures pratiques commerciales et les meilleures pratiques de gestion en vigueur.

La protection des consommateurs est un pilier important de la mission de l'autorité. Les mesures de protection proposées par le projet de loi n° 53 serviront certainement les intérêts des consommateurs et permettront aux institutions financières et aux agents d'évaluation du crédit de continuer de développer de meilleures pratiques, notamment en matière d'identification du client et de prévention d'une utilisation frauduleuse ou erronée des données personnelles. Les intérêts des consommateurs seront mieux protégés, et leur confiance dans l'écosystème financier québécois sera renforcée par la même occasion.

Nous saluons donc la volonté du gouvernement du Québec de protéger davantage les consommateurs québécois et nous offrons notre pleine collaboration afin d'apporter les ajustements nécessaires à certaines dispositions du projet de loi, tel qu'évoqué précédemment. Nous demeurons disponibles pour répondre à vos questions, bien sûr, aujourd'hui et durant tout le processus qui doit mener à l'adoption de ce projet de loi. Alors, merci de votre attention.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. Morisset. Je cède immédiatement la parole au ministre des Finances.

M. Girard (Groulx) : Merci pour la présentation, et c'est un plaisir de vous voir — on se parle souvent par Zoom — aujourd'hui, et notre régulateur intégré des marchés financiers, l'AMF, fait un excellent travail. Et l'épisode de la fuite de données que nous avons connu était évidemment un épisode extrêmement sérieux.

Alors, le projet de loi vise à vous donner le pouvoir d'émettre des lignes directrices sur les pratiques commerciales et les pratiques de gestion. En quoi votre intervention aurait amélioré la situation que nous avons vécue? Clairement, le projet de loi n'aurait pas pu prévenir la fuite de données, mais, une fois qu'il y a eu fuite, il y a eu gestion de l'incident par l'institution financière, et les agences d'évaluation de crédit ont... l'institution financière, les Québécois ont demandé de l'aide aux agents d'évaluation de crédit pour protéger leurs renseignements, leur crédit, leurs dossiers avec les services d'alerte, la note, le gel n'étant pas disponible. Mais en quoi l'émission de lignes directrices pour des meilleures pratiques de gestion, des meilleures pratiques commerciales aurait amélioré la situation difficile que nous avons vécue?

Le Président (M. Simard) : M. Morisset.

M. Morisset (Louis) : Merci, M. le ministre. Bien, d'abord, les droits que confère le projet de loi, comme vous l'avez dit, sont des droits qui n'existent pas en ce moment. Donc, il est clair que les mesures de protection que le projet de loi offre, le gel de sécurité, l'alerte de sécurité, la note explicative, sont des droits qui n'existent pas et qui auraient bénéficié au consommateur s'ils avaient été en vigueur, évidemment, à la suite de ces événements-là.

Par ailleurs, en termes d'encadrement de ces agences-là puis à l'égard de ce qui s'est produit, bon, on a tous entendu parler de certaines difficultés qu'ont pu connaître les deux agences, mais notamment Equifax, on pense que d'avoir un encadrement par voie de lignes directrices qui dicteraient les attentes de l'autorité, notamment en matière de pratiques de gestion saine et prudente, de pratiques de gestion appropriées, de traitement équitable du consommateur, aurait fait en sorte que la qualité du service qui aurait été rendu aurait été supérieure. Donc, on pense que notre capacité, par voie de lignes directrices, notamment, et/ou par voie de règlements, parce que le projet de loi prévoit que, dans certaines matières, on pourrait prendre des règlements, je pense au traitement des plaintes, c'est certainement un sujet sur lequel... on pense que, par voie réglementaire, il serait approprié d'intervenir. Bien, ces règlements ou ces lignes directrices vont édicter, un peu à l'instar de ce qu'on fait pour les institutions financières, nos attentes, qui ne sont pas prescriptives, mais qui sont fortement suggérées et qui vont amener ces entités-là, je dirais, encore une fois, à se conformer et se comporter d'une manière encore plus à l'avantage des consommateurs. C'est ça, l'idée.

Quand je pense, justement, au corpus de lignes directrices qui existent aujourd'hui pour les institutions financières, elles visent une panoplie de sujets : la gouvernance, la probité, la conformité, la gestion intégrée des risques, par exemple, le risque opérationnel. En tout cas, il y en a une panoplie. Puis, pour avoir vécu votre ancienne vie, vous savez que le BSIF en a aussi tout autant à l'égard des institutions financières.

Donc, l'idée serait, pour nous, de développer une ligne directrice qui viserait chacun de ces sujets-là, par ailleurs, et qui serait, en quelque sorte, là, unique ou spécifique aux agents d'évaluation du crédit. Alors, pour répondre à votre question, que ces agences-là, qui ne sont pas encadrées au Québec en ce moment, pas ailleurs, véritablement, non plus, au Canada... bien, permettrait de s'assurer, je dirais, d'une qualité de services ou d'une acuité à rendre des services qui sont attendus en vertu de la loi.

M. Girard (Groulx) : Est-ce que c'est aussi simple que de dire que... C'est beau, parler de l'alerte, puis du gel, puis de la note, mais est-ce que c'est de mettre le niveau de standards de qualité du service que la personne qui est en difficulté... est-ce que c'est d'émettre un niveau d'exigences dans la livraison du service ou vous vous référez uniquement aux règles de saine gouvernance d'une entreprise?

M. Morisset (Louis) : Merci, M. le Président. En fait, c'est plus vaste que la qualité du service. C'est un des aspects qui sera touché par l'ensemble des... en fait, par le corpus de lignes directrices qu'on mettra en place. Je pense que la qualité du service... on parle d'une loi qui propose de donner des droits à des consommateurs qui n'existent pas aujourd'hui. La préoccupation qu'on aura, c'est que ces droits-là puissent être mis en oeuvre de façon efficace, rapide. Donc, oui, il va y avoir un aspect, clairement, qui va toucher la qualité du service, la capacité de ces deux agences-là de livrer la marchandise, mais l'encadrement va être plus vaste que ça.

Tu sais, les aspects qu'on va toucher, notamment dans les lignes directrices, je pense aux technologies de l'information, aux saines pratiques commerciales de façon générale, les risques liés à l'impartition... bref, on va regarder comment ces entités-là opèrent puis on va s'assurer qu'on développe un ensemble de sujets dans la ligne directrice qui vont s'assurer d'une saine gestion. C'est ça, l'objectif également. Ça fait qu'il y a un aspect, au niveau des saines pratiques commerciales puis du traitement équitable du consommateur, qui va être très important, mais ce qu'on a à l'esprit aujourd'hui, ce sera plus vaste, ce sera de s'assurer que ces entreprises-là sont bien gérées et opèrent de manière efficace au Québec.

M. Girard (Groulx) : O.K. Puis un exemple concret, là... on a parlé de permettre au citoyen d'avoir accès à sa cote de crédit, et le concept a été évoqué, là, que ça soit facilement accessible sur le Web, là, qu'on ne soit pas obligé de remplir un formulaire, de le poster, d'attendre des semaines, d'espérer une réponse. Est-ce que, par exemple, l'exigence d'avoir accès à une cote standard aisément via un outil Web serait dans les lignes directrices?

• (14 h 20) •

M. Morisset (Louis) : C'est un des sujets qui en ferait probablement partie. Je pense qu'à ce stade-ci il y a une réalité, ce sont des agences que l'on n'encadre pas, puis on ne sait pas parfaitement, en ce moment, comment elles opèrent et comment elles se comportent, qu'est-ce qui est mis en place ailleurs. On sait qu'aux États-Unis il y a certains droits qui existent, et donc comment ils les opérationnalisent.

Alors, oui, je pense qu'en comprenant mieux comment ces entités-là opèrent, comment elles envisagent mettre en oeuvre ces nouveaux droits pour que ça soit efficace, clairement, dans notre réflexion qui sera conduite en parallèle, bien, on verra à établir ce qui nous apparaît des normes acceptables. Alors, oui, ça fait partie des sujets qui pourraient être touchés par la ligne directrice.

M. Girard (Groulx) : O.K. Alors, je comprends que des normes acceptables, là, c'est une cote de crédit standard, compréhensible par les citoyens, accessible et que, malheureusement, ce n'est pas la situation actuelle, bien que vous ne les réglementez pas présentement. Je m'arrête ici, M. le Président. Je passe la parole, dans la mesure où il nous reste du temps, que vous allez nous...

Le Président (M. Simard) : Oui, vous avez 4 min 45 s à votre disposition, cher collègue de Saint-Jérôme.

M. Chassin : Merci, M. le Président. Merci à vous, messieurs, d'être là. En fait, le modèle d'affaires des agents d'évaluation de crédit, pour faire un peu du pouce sur ce que le ministre disait, est aussi fonction... finalement, c'est des courtiers d'information, en quelque sorte. Ils agrègent l'information par les algorithmes. J'imagine qu'il y a une certaine mesure où on peut leur demander de rendre facilement accessible au détenteur ou, enfin, au titulaire du dossier, hein, la personne qui est concernée, moi, par exemple, une information. Évidemment, est-ce que les prêteurs doivent payer ces agences-là pour avoir accès à cette information-là? Je pense que c'est un petit peu leur modèle d'affaires, mais vous aurez certainement l'occasion de creuser davantage cette question-là.

Peut-être, j'aurais une salutation, d'abord, à faire, parce que vous dites, en conclusion de votre mémoire, que «l'autorité entend proposer à la Commission d'accès à l'information des mécanismes de coordination, notamment par voie d'ententes, afin que les deux organismes puissent spécifier les modalités de leurs interventions», question, justement, que ce ne soit pas trop confus. Je trouve ça intéressant, je veux le saluer. L'Office de la protection du consommateur, ce matin, nous disait aussi la même chose : Est-ce qu'il peut y avoir confusion dans les rôles?

Maintenant, peut-être plus précisément, est-ce qu'il est possible de conclure de telles ententes sans nécessairement le préciser ou l'intégrer dans la loi par amendement? Parce que, dans le fond, on rajoute une petite mesure de rigidité. Est-ce que ça apporte des grands bénéfices de l'intégrer dans la loi d'une façon formelle?

M. Morisset (Louis) : Merci. Bien, de notre point de vue, ce serait utile de le faire. Je n'ai aucun doute qu'on peut, en s'assoyant puis en poursuivant nos échanges avec la commission, établir par voie d'entente les mécanismes dont on a besoin, considérant le rôle de tribunal que joue la commission, notamment, qui est un rôle différent du rôle que joue l'autorité, considérant la réalité, clairement, où il y a plusieurs dossiers qui vont être mixtes. Puis, nous, ce qu'on veut, puis j'assume que c'est la même chose pour... je suis convaincu, en fait, que c'est la même chose pour la commission, on veut que le concitoyen ne se perde pas dans des dédales administratifs, ait une réponse efficace. Je pense que que la loi mette une assise législative au mécanisme serait utile. Donc, je ne pense pas que c'est impossible, mais on verrait d'un bon oeil que ce soit fait.

Si je peux me permettre, juste pour revenir un peu à la question aussi précédente du ministre, je pense que c'est important, puis c'est ce qu'on suggère, c'est que l'intention législative soit bien clarifiée quant à l'attente que l'on devrait avoir et qu'on mettra en oeuvre par voie de lignes directrices ou règlements à l'égard de ces entités-là. Ce sont, comme j'ai dit, des multinationales, une ayant son siège social à Atlanta, l'autre à Chicago. Je présume qu'elles veulent bien faire le travail au Québec, mais la réalité... Quelle sera leur présence, quelle sera leur empreinte, quelle sera leur capacité de rendre des services que l'on veut?

Je pense qu'il serait utile, là aussi, que l'intention du législateur soit plus précise, ça nous donnera une meilleure assise pour venir développer ces lignes directrices si l'intention est plus claire. Et je pense que l'intention, elle est là, dans le règlement, notamment à l'article 38 et suivants, mais ça vaudrait vraiment, je pense, la peine et ça nous aiderait à faire le travail si l'intention était encore plus cristallisée.

M. Chassin : D'accord. Et, sur un tout autre sujet, vous parlez, dans le fond, que vous allez vous baser sur l'expérience que vous avez en surveillance d'institution financière, puis là j'ai quand même un petit sourcil qui se lève. J'imagine que la réglementation, elle est lourde, avec raison, des institutions financières. J'imagine qu'il n'y aura pas de «stress test» d'un niveau aussi élevé de surveillance des agents d'évaluation de crédit. Est-ce que vous vous fondez sur votre expérience, mais ce ne sera pas nécessairement la même chose, ou est-ce que vous laissez entendre que ça va être effectivement un régime très, très similaire?

Le Président (M. Simard) : En conclusion...

M. Morisset (Louis) : Bien sûr. Bien, écoutez, je céderais la parole à mon collègue Patrick Déry, dont le rôle est justement d'encadrer au quotidien les institutions financières. Peut-être juste, d'entrée de jeu, avant de lui passer la parole, je pense qu'il y a tout un volet de nos lignes directrices qui s'applique aux institutions financières, notamment celles qui touchent la capitale, qui ne serait pas applicable, et tout le reste, pour nous, aurait vraisemblablement une pertinence. Alors, peut-être, si vous me le permettez, Patrick compléterait.

Le Président (M. Simard) : M. Déry, s'il vous plaît.

M. Déry (Patrick) : Ce ne sera pas un copier-coller intégral. Il va falloir comprendre comme il faut les réalités d'affaires, les risques de ces entreprises-là, et on va retenir ce qui est pertinent dans l'encadrement qui existe déjà.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Déry. Je dois maintenant céder la parole à mon collègue de Pontiac, mais, avant, nous avons pris un léger retard dans notre programmation, y aurait-il consentement afin que nous puissions poursuivre au-delà du temps initialement prévu? Consentement. Très bien. M. le député de Pontiac.

M. Fortin : Oui, juste... aviez-vous terminé votre réponse, M. Déry? Je sais que vous avez été pressé dans le temps un peu. Ça va?

M. Déry (Patrick) : Ça va. Merci beaucoup.

M. Fortin : O.K. Merci à vous deux d'être avec nous aujourd'hui. L'autorité a effectivement un rôle important à jouer, déjà, mais une fois... sans en présumer l'adoption, mais une fois le projet de loi n° 53 adopté. Il y a une journaliste, ce matin, qui se questionne, quant à l'appétit de l'autorité de faire appliquer ce qui est dans la loi présentement ou ce qui sera dans la loi à sa conclusion. On espère, de notre côté, quelques changements significatifs, mais, quand même, je vous donne l'occasion de lui répondre : Est-ce qu'il y a un appétit, du côté de l'autorité, à justement faire appliquer la loi telle qu'elle est écrite en ce moment?

M. Morisset (Louis) : Merci pour votre question. Nous avons l'appétit pour faire appliquer toutes les lois dont on nous confie l'administration. Il est clair que, dans la mesure, évidemment, où on nous confiera ce rôle-là, nous allons faire appliquer la loi intégralement, scrupuleusement. Je pense que ce dont il faut garder à l'esprit, c'est qu'on mettrait en oeuvre une nouvelle réalité au Québec, puis, à certains égards, quand on fait appliquer des lois, parfois, il faut, souvent dans les premiers temps, être plus indulgents, aiguiller pour s'assurer qu'on la respecte scrupuleusement, mais aucun doute que nous allons la faire appliquer si on nous confie ce mandat-là, comme toutes les autres lois, d'ailleurs.

M. Fortin : Ce matin, on a entendu, je pense que c'était TransUnion qui nous disait : On aimerait une période de mise en place de deux ans pour nous permettre d'adapter à l'interne, là, chez la compagnie, ce dont ils ont besoin de faire. Vous, vous n'avez pas besoin d'un temps d'adaptation très long, j'imagine, pour être capable de faire appliquer cette loi-là?

M. Morisset (Louis) : Non. Sur le plan opérationnel, je pense qu'on peut s'organiser rapidement. Sur le plan normatif, les lignes directrices dont on a parlé, les règlements, il va falloir s'assurer simplement qu'on suive un processus robuste, usuel, des consultations, tu sais, les règlements émis pour consultation publique, si on veut, ou commentaire. Donc, il va simplement falloir suivre ce processus-là. Ce n'est pas un processus... à moins de faire de l'outrage au Parlement, là, ce n'est pas un processus qu'on peut démarrer avant l'adoption, la sanction du projet de loi, mais c'est un processus qui peut s'échelonner sur un horizon de quelques mois. Donc, de notre côté, il n'y a pas d'enjeu, sous réserve de suivre correctement le processus normatif.

• (14 h 30) •

M. Fortin : Je veux revenir un peu à ce qu'avançait le député de Saint-Jérôme, là, parce que, dans votre mémoire, vous dites que la plupart des plaintes qui pourraient être soumises pourraient être des plaintes hybrides, c'est-à-dire avec des gens qui pourraient être inquiets, d'un côté, du contenu de leur dossier de crédit, de l'autre côté, peut-être une insatisfaction par rapport à l'agence d'évaluation.

Et je peux comprendre votre logique derrière cette affirmation-là, mais le mécanisme que vous voulez proposer... Si, effectivement, là, vous vous entendez avec la commission puis vous dites : Bien voici les paramètres de ce que l'un fera et ce que l'autre fera, c'est une chose. Quand vous proposez de le mettre dans la loi, moi, je suis d'accord avec vous. Je pense que ça clarifie des choses, je pense que ça simplifie des choses tant pour vous, que pour eux, que pour le consommateur, que pour les autres intervenants qui pourraient être affectés par le dossier, mais il faudrait faire ça rapidement. Donc, si vous voulez que ce soit dans la loi, on a besoin de recommandations plus précises, à savoir qui fait quoi. Avez-vous un enlignement de départ que vous souhaitez, à ce niveau-là?

M. Morisset (Louis) : Écoutez, je pense qu'on peut... on a des idées puis on peut assurément, suite à ces consultations-là, travailler avec les représentants du ministère des Finances, avec le ministre, son entourage, et tout ça, pour élaborer de façon plus précise ce qu'on aurait à l'esprit. Pour nous, ce n'est pas un enjeu, mais, oui, on verrait un avantage à clarifier ça davantage.

Encore une fois, je pense que l'objectif, c'est qu'on confère des droits importants au citoyen, puis on veut que le citoyen s'y retrouve. Sachant que certains dossiers peuvent prendre toujours un certain temps... quand il s'agit de plaintes, il y a un processus à suivre, mais, à la fin, il ne faut pas qu'on se perde entre l'autorité et la commission, ne pas savoir à quelle organisation se vouer puis qu'à la fin les citoyens soient non seulement déçus, mais frustrés.

M. Fortin : Je le sais, qu'en théorie, là, vous relevez du ministère des Finances. Vous étiez à l'étude des crédits la semaine dernière. En même temps, je vous encouragerais à faire vos recommandations à la commission ici, parce que, là, on a un début de présentation. Je vois le problème que vous soulignez. Le ministre a fait le choix de ne pas le mettre dans la loi. Ça, ça lui appartient. Le gouvernement a fait ce choix-là. Mais, à partir du moment où vous nous dites : Bien, il y a un enjeu, il y a un enjeu de coordination, il y a un enjeu pour le consommateur, je pense que nous, comme commission, qui allons étudier dans le détail le projet de loi et des meilleures façons de l'adapter à la réalité que vous mettez de l'avant, on serait très intéressés à voir comment vous suggérez de le faire. Le travail, il peut être fait en amont avec le ministre, mais je pense que ça nous serait utile, si vous avez des recommandations plus précises, qu'elles soient déposées à la commission.

M. Morisset (Louis) : Parfait. Bien, je pense que, lors de l'étude article par article, on pourra certainement faire ces suggestions-là avec plaisir.

M. Fortin : Très bien. Vous avez fait référence... et, encore là, on parle peut-être, là, des dents du projet de loi, c'est-à-dire le niveau de mordant du projet de loi, pour ne pas utiliser un anglicisme, mais vous avez fait référence aux dispositions législatives dans le projet de loi n° 64, qui, jusqu'à un certain niveau, là, sont plus strictes que ce qui est avancé dans le projet de loi n° 53. Est-ce que vous avez quelque chose en tête de bien précis que vous aimeriez voir, que vous aimeriez... Est-ce qu'il y a une mesure? Est-ce qu'il y a une disposition, là, que vous aimeriez vous assurer qui est vraiment «on par», là, qui est vraiment équivalente dans un projet de loi comme dans l'autre?

M. Morisset (Louis) : Non, je ne peux pas dire qu'on a une mesure spécifique en tête. Ce qui est notre préoccupation, c'est qu'on ait, encore une fois, dans le projet de loi n° 53, également dans les autres lois que l'autorité administre, un régime de sanctions qui est résolument dissuasif. Les sanctions...

Puis, encore une fois, ça détonne. Lorsqu'on voit le projet de loi n° 64, on voit qu'il y a une évolution, on voit qu'on... et on salue cette évolution-là, mais ça ne peut pas... le régime de sanctions ne peut pas être... faire partie du coût de faire des affaires au Québec. Il faut que le régime de sanctions potentiel...

Puis ça va au-delà aussi juste du quantum, ça va aussi au niveau des infractions, de notre point de vue. Il faudrait y réfléchir, au niveau des infractions, parce que la façon dont le régime est constitué, si on constate une mauvaise conduite, on se doit ultimement de... Nous, on peut rendre une ordonnance leur édictant quoi faire, comment bien le faire. Et, si on ne respecte pas notre ordonnance, bien là on pourra aller vers une sanction.

Alors, il y a une étape ici, dans notre corpus de loi, qui fait en sorte que de sanctionner une conduite déficiente est plus ardu. Puis le quantum peut apparaître, encore une fois, insuffisant puis peut être vu par des entreprises — je ne dis pas qu'il est vu, mais peut être vu par des entreprises — comme simplement un coût de faire affaire au Québec. Alors, on est d'avis qu'il y aurait lieu...

En tout cas, si c'est l'intention du législateur, des parlementaires, en bout de piste, de faire évoluer un régime de sanction, on pense qu'il faudrait s'en inspirer. Mais loin de nous l'idée de dire un chiffre précis, mais dans une philosophie d'avoir des sanctions réalistes, circonscrites mais dissuasives.

M. Fortin : O.K. Dernière question de ma part. Bien honnêtement, M. le président, quand vous dites dans votre mémoire que vous aimeriez que le législateur précise son intention par rapport à c'est quoi, une saine pratique commerciale, des pratiques de gestion appropriées, s'il n'y a pas de modifications qui sont faites au projet de loi, là, comment vous allez interpréter ça? Parce qu'on demande essentiellement que les agents d'évaluation du crédit qui sont désignés par l'autorité suivent des saines pratiques commerciales, des pratiques de gestion appropriées. C'est vrai que c'est flou, ça mérite précision, je suis d'accord avec vous, mais, si on ne fait pas ce travail-là, si ça reste comme ça, comment est-ce que vous allez faire appliquer ça?

M. Morisset (Louis) : Bien, dans le projet de loi, notamment à l'article 31, il y a une assise, déjà, là, qui nous permet notamment de réfléchir à ce qui devrait être mis en place en termes de lignes directrices pour assurer, donc, les saines pratiques commerciales.

Un des défis, puis, encore une fois, je l'ai dit, c'est qu'on a affaire à des joueurs qui sont basés aux États-Unis, dont la vaste, très vaste majorité des employés sont à l'extérieur du Canada, dont on sait peu encore de leurs activités réelles au Québec. Puis je mets ça en relief avec des difficultés qu'on a vécues il n'y a pas si longtemps au Québec suite à cette fuite de données chez Desjardins, le fait que plusieurs individus, au Québec, ont voulu avoir recours à leurs services et ont été soit frustrés ou insatisfaits.

Alors, il y a une réalité, c'est que c'est beau de mettre en place des lignes directrices, mais, à la fin, encore une fois, si on nous perçoit comme étant, bien... il y a un coût à faire des affaires au Québec, puis sanctionnez-nous, au besoin, et l'intention n'est pas cristallisée sur les attentes que l'on a quant à la qualité du service ou quant à la faculté de rendre des services au Québec, puis je pense, notamment, en français, alors c'est des aspects qui, pour nous... s'il y a une meilleure assise législative ou une assise plus solide, ça va faciliter notre travail, un jour, de les forcer à obtempérer et à agir.

Alors, aujourd'hui, il y en a une, base...

Le Président (M. Simard) : En conclusion, s'il vous plaît.

M. Morisset (Louis) : ...mais on verrait cette base-là accrue.

Le Président (M. Simard) : Merci. Merci, M. Morisset. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont pour une période de 4 min 10 s.

M. Marissal : Merci, M. le Président. MM. Morisset et Déry, rebienvenue. On s'est vus, il me semble, il n'y a pas très longtemps dans une autre salle, mais ici.

C'est vraiment intéressant, ce que vous nous dites là, mais c'est un peu inquiétant aussi, parce que ça sonne dans mes oreilles, puis je ne suis probablement pas le seul, on a l'impression que vous dites que vous n'avez peut-être pas un marteau suffisamment grand pour enfoncer le clou quand c'est le temps de le faire.

Je prends une autre image. Un chien de garde, nécessairement, ça a des dents. Les vôtres, de votre organisme, j'entends, l'autorité, ne sont peut-être pas assez longues ou assez acérées. Puis vous réclamez, ce n'est pas la première fois qu'on vous entend dire ça ici, quelque chose d'un peu plus costaud. C'est inquiétant, parce qu'à quoi bon voter toutes les plus belles lois du monde, les mieux intentionnées, si l'autorité chargée de les faire appliquer juge ne pas avoir les moyens nécessaires pour réellement avoir une opération dissuasive?

Et vous dites, là, d'entrée de jeu, dans votre mémoire : «En vertu du projet de loi, l'autorité sera mandatée pour encadrer et surveiller les agents d'évaluation [de] crédit qu'elle aura désignés. Pour ce faire, elle bénéficiera d'outils similaires à ceux à sa disposition lorsqu'elle exerce ce même rôle auprès des institutions financières.» Ça m'amène à une question. Ces outils, visiblement, ne sont pas suffisants ou devraient être revus, améliorés?

M. Morisset (Louis) : Bien, écoutez, d'abord, il y a certainement une réflexion qui peut être conduite à l'égard des outils actuels dont on dispose. Aujourd'hui, on s'exprime à l'égard d'un nouveau projet de loi qui nous donne des outils, oui, qui sont similaires à ceux dont on dispose et qui font en sorte, en effet, qu'il ne nous est pas toujours possible, sinon rarement possible de sanctionner une conduite problématique autrement que d'imposer une ordonnance qui, si celle-ci n'est pas respectée, pourra être sanctionnée. Alors, on invite certainement à une réflexion plus large, qui pourrait se faire dans un autre contexte, et on verrait d'un bon oeil qu'on nous donne des outils plus dissuasifs.

Maintenant, on se permet de faire cette recommandation-là dans le contexte aussi où on constate, dans un autre projet de loi, une philosophie peut-être différente, puis c'est dans ce sens-là qu'on se dit : Où vous atterrirez, où le gouvernement atterrira à cet égard-là, ça serait certainement utile de s'en inspirer pour le projet de loi n° 53 et dans cette réflexion plus globale sur les outils dont dispose actuellement l'autorité. Alors, c'est certainement qu'on verrait donc d'un bon oeil une réflexion plus large que le projet de loi n° 53, assurément.

M. Marissal : Ça vous aiderait à jouer votre rôle de police, parce que vous avez un rôle de police, en fait, là. C'est un peu cru, là, dit comme ça, mais vous avez un rôle de discipline dans le marché. Ça vous aiderait.

• (14 h 40) •

M. Morisset (Louis) : Ça nous aiderait.

M. Marissal : D'accord. Les disparités entre 64 et 53... Je m'excuse du jargon, mais on n'a pas beaucoup de temps, malgré le cadeau du ministre, que j'apprécie, d'ailleurs, un cadeau de temps. Le danger, donc, si je comprends bien, c'est que, 53 n'ayant pas la même force que 64, il y a un danger de dilution de ce que 53 représente réellement comme nouveau... comme nouvelle loi éventuellement.

M. Morisset (Louis) : Bien, je ne dirais pas un danger de dilution. D'abord, le projet de loi n° 53 a été déposé six mois avant le projet de loi n° 64. Il y a des choses qui ont évolué entre-temps. Donc, on constate cette évolution, du moins peut-être dans la réflexion.

Mais, en bout de piste, une des préoccupations qu'on a, c'est... puis, si je donne un exemple, il pourrait y avoir une situation, si les choses cheminaient telles qu'elles sont proposées, une situation où la conduite, par exemple, d'une de ces agences d'encadrement là pourrait entraîner... Parce qu'il y a eu des enjeux que la Commission d'accès à l'information peut sanctionner d'une manière plus dissuasive, mais qui seraient tributaires d'une même problématique, par exemple au niveau des pratiques de gestion ou des pratiques commerciales puis qui nous amèneraient, nous, avec ce regard-là, à une peine ou, en tout cas, une amende, une sanction beaucoup, beaucoup moins dissuasive.

Le Président (M. Simard) : ...

M. Morisset (Louis) : Alors, c'est là qu'on peut voir s'il n'y a pas un arrimage, qu'il pourrait y avoir un décalage important puis qui pourrait affecter la crédibilité.

Le Président (M. Simard) : Merci. Merci, M. Morisset. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque pour une période de quatre minutes.

M. Ouellet : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de remercier le ministre de nous avoir fait don de son temps. Vous faites mention, tout à l'heure, que c'est un nouveau droit qu'on va créer. On va donner à des citoyens, à des consommateurs une nouvelle protection. Croyez-vous que de ne pas mettre la gratuité vient brimer un peu l'accès à ce nouveau droit des consommateurs et consommatrices?

M. Morisset (Louis) : Bien, écoutez, c'est une question... c'est une très bonne question. Il nous apparaît que, dans le cas, bien sûr, où il y a eu perte de données, ça s'est fait, évidemment, à l'insu des consommateurs, que de les amener à devoir défrayer les coûts pour se protéger peut apparaître, à sa face même, injuste. Donc, quand on regarde juste les faits, ce qui s'est passé, notamment au Québec, la réalité, c'est que les consommateurs n'ont pas eu à payer pour se protéger. En tout cas, si je prends le cas de Desjardins, Desjardins a défrayé ce coût-là pour l'ensemble de ses clients et membres.

Alors, oui, je pense que que ce soit gratuit pour le consommateur serait certainement approprié dans les circonstances.

Cela étant dit, il n'y a jamais rien de gratuit dans la vie. Il faut que quelqu'un paie. Puis, nous, la préoccupation qu'on a, c'est la qualité du service, la capacité, encore une fois, de satisfaire le consommateur lorsqu'il veut exercer un de ses droits. Puis ça, c'est l'aspect qui va nous interpeler davantage, bien sûr, là, dans l'élaboration des lignes directrices de la réglementation à venir.

M. Ouellet : L'article 10 mentionne que l'alerte de sécurité oblige l'agent d'évaluation du crédit qui détient le dossier qui en fait l'objet à aviser le tiers auquel il communique l'un des renseignements personnels contenus dans ce dossier ou l'un de ceux qu'il produit à partir de ceux-ci de l'obligation qui incombe à ce tiers en vertu de l'article 19.1 de la loi sur la protection des renseignements personnels. Et cette loi fait référence à des moyens raisonnables d'informer. Ça serait quoi, pour vous, des moyens raisonnables? Parce que notre crainte, c'est que les gens qui seront informés, est-ce que ça sera simplement un coup de téléphone? J'ai fait sonner deux coups et je n'ai pas eu de réponse. Je l'ai informé et je raccroche. La personne n'a pas de boîte vocale. Ça serait quoi, pour vous, à titre de régulateur, les moyens raisonnables qu'on devrait utiliser pour s'assurer que la personne qui veut utiliser, je vous dirais, cette disposition-là puisse en avoir pour, entre parenthèses, son argent?

M. Morisset (Louis) : Son argent. C'est une bonne question. Je n'ai pas de bonne réponse à offrir à votre bonne question aujourd'hui. Peut-être que mon collègue Patrick Déry en aurait, lui, mais ça fait partie des réflexions qu'on va devoir mener. Puis, encore une fois, par voie de lignes directrices, on pourra édicter nos attentes à cet égard-là, qu'est-ce que sont des moyens raisonnables dans un contexte notamment technologique dans lequel on oeuvre, et tout ça.

C'est une excellente question. Je ne sais pas si je peux céder la parole à Patrick. Peut-être aurait-il un meilleur réflexe que moi, mais on va certainement porter attention à ça en temps et lieu.

Le Président (M. Simard) : M. Déry.

M. Déry (Patrick) : Malheureusement, je ne pense pas avoir la réponse géniale à la question, si ce n'est qu'on suit les travaux. On voit déjà... On est au début des travaux sur 53. On entend déjà cette préoccupation-là de simplifier la vie aux consommateurs, de rendre le service accessible. Cette intention-là, on va en tenir compte le plus possible. Et plus qu'elle sera claire dans la loi, plus ça va nous aider à arriver à des solutions qui vont rendre le service facilement accessible.

Puis on a vu aussi ailleurs, aux États-Unis, par exemple, il y a des solutions technologiques qui existent, des sites Internet simplifiés. On a un volet, on l'explique dans notre mémoire, où on va faire nous-mêmes de l'éducation. On va rendre de l'information disponible pour expliquer ces nouveaux droits là, comment ça fonctionne.

Donc, on comprend bien le message de se mettre dans les souliers du consommateur ici puis de faire en sorte qu'à la fin le service soit de bonne qualité, facilement accessible, et on comprend qu'il y a une préoccupation sur qui va payer.

M. Ouellet : 53, 64, de grandes nuances par rapport aux amendes.

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Ouellet : Ce que j'ai entendu, 64, il est dissuasif pour ceux qui auront malheureusement mal protégé nos données. Il faut qu'il soit aussi dissuasif pour les agences de crédit, parce qu'ils ont aussi nos données entre les mains, et s'assurer qu'il soit en accord avec les obligations.

Donc, je suis en accord avec votre proposition. J'espère qu'on aura l'occasion d'en jaser pour...

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Merci, cher collègue. Alors, MM. Morisset et Déry, merci pour votre exposé.

Sur ce, je suspends momentanément nos travaux.

(Suspension de la séance à 14 h 46)

(Reprise à 14 h 56)

Le Président (M. Simard) : Alors, à l'ordre, chers collègues! Nous allons reprendre nos travaux.

M. Benoit Dupont

Nous sommes en compagnie, par le biais de la visioconférence, du professeur Benoit Dupont, directeur scientifique du Réseau intégré sur la cybersécurité à Université de Montréal. Cher collègue, bienvenue.

(Visioconférence)

M. Dupont (Benoit) : Bonjour, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre exposé.

M. Dupont (Benoit) : Merci beaucoup de cette invitation, Mmes et MM. les députés. Donc, dans ces 10 minutes, j'aimerais peut-être commencer par rappeler quel est le problème, la prévalence que constitue le vol d'identité au Québec.

Les statistiques, qui est en fait la raison pour laquelle aussi ce projet de loi est considéré, en 2018, les plus récentes statistiques de Statistique Canada laissaient penser qu'au Québec 3,3 % de la population adulte s'est fait voler son identité, ce qui représente à peu près 230 000 personnes chaque année. En parallèle, en 2017, on estimait qu'au Canada 4,8 % des entreprises canadiennes s'étaient fait dérober les données personnelles de leurs clients et de leurs employés, ce qui représente, à l'échelle de tout le Canada, à peu près 58 000 entreprises. Et, si on en croit les statistiques du bureau... pardon, du Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, ce seraient, en 2019, plus de 28 millions de Canadiens dont les données personnelles auraient été compromises à l'occasion de plus de 680 brèches de données déclarées. Donc, on voit qu'il y a un préjudice à l'échelle nationale, à l'échelle du Québec, pour les victimes qui est probablement considérable à la suite de ces statistiques.

Ce préjudice est évidemment financier, mais il est également psychologique. Il peut être aussi physiologique, relationnel, professionnel. Et je pense que c'est important d'essayer de se doter d'un arsenal juridique qui permette de protéger les victimes de vol d'identité et particulièrement dans ses modalités les plus préjudiciables, c'est-à-dire quand les données personnelles volées sont utilisées pour obtenir de nouveaux services de crédit ou pour obtenir des services en utilisant les... en ouvrant de nouveaux comptes et en se faisant passer pour la personne dont on a volé les identifiants personnels. Ça, c'est le premier point pour contextualiser.

Un deuxième point que j'aimerais également soulever, c'est celui du rôle des agences de crédit dans le vol d'identité. On sait que les agences de crédit elles-mêmes ne sont pas à l'abri de brèches massives de données. J'aimerais, à ce titre, rappeler qu'Equifax, évidemment, en septembre 2017, s'est fait voler les données personnelles de 148 millions d'Américains et d'au moins 20 000 Canadiens et que des amendes de près de 1 milliard de dollars US ont été imposées à l'entreprise aux États-Unis, de 500 000 £ au Royaume-Uni, mais, au Canada, aucune amende, aucune pénalité parce qu'on ne dispose justement pas de cadre législatif qui permettrait de sanctionner les manquements de ces agences de crédit dans ce type de situation.

Et d'ailleurs ce n'est pas le seul ni le premier incident de cette nature puisque, depuis le début des années 2010, on a recensé une demi-douzaine d'incidents de vol ou de perte de données lors desquels des agences de crédit étaient impliquées, principalement aux États-Unis, et qui allaient de la perte de plusieurs centaines de milliers de dossiers à la compromission de près de 200 millions de dossiers. Et toutes les agences de crédit ont été impliquées. Donc, ça, je pense que c'est important aussi de s'en souvenir, parce que ça, quelque part, justifie pourquoi on a besoin de réglementer l'activité de ces entreprises-là.

• (15 heures) •

Alors, si on s'intéresse plus particulièrement au projet de loi n° 53 que vous examinez, je pense qu'on peut tirer un certain nombre de leçons des États-Unis, où ce type de législation, sur le gel des dossiers de crédit, sur les alertes de sécurité, les notes explicatives, a été implanté d'abord au niveau des divers États puis au niveau fédéral en 2018, mais les États avaient commencé à se doter de ce type de législation dès le début des années 2000. La première législation que j'ai retrouvée, c'est en Californie en 2003, qui prévoyait le type de dispositions incluses dans le projet de loi n° 53. Donc, à travers cette expérience, cet historique législatif américain, qui implique d'ailleurs les mêmes entreprises que celles qui opèrent au Canada, ce qui est très intéressant parce que certains des arguments qu'elles soulèvent sur leur capacité à livrer certains services peuvent être justement vérifiés à la lumière de ce qu'elles font déjà aux États-Unis, on peut identifier environ huit problèmes principaux, je pense, huit défis dans l'implantation de ce type de législation.

Le premier, c'est celui du coût du service. Jusqu'en 2018 aux États-Unis, où la législation a été harmonisée au niveau national, les nombreux... certains États prévoyaient de faire payer le gel des dossiers de crédit, et, en septembre 2018, ces dispositions ont été annulées, ont été remplacées par une disposition nationale fédérale qui a unifié le dispositif et qui a établi la gratuité du service pour tous les consommateurs. Et je pense que ça, c'est le résultat d'une quinzaine d'années d'observation sur ce qui se passait, sur le fait que les victimes les plus fragiles peuvent être dissuadées de demander le gel de leurs dossiers de crédit même quand les coûts afférents peuvent sembler très modestes, de l'ordre d'une dizaine ou une quinzaine de dollars. Donc, je pense que le législateur américain a établi qu'il était nécessaire que ce service-là soit offert gratuitement.

Le deuxième défi ou la deuxième question qui se posait dans de nombreux États, c'est la question de la période du dégel. C'est-à-dire que, si on fait geler son dossier de crédit, ce n'est pas pour ça qu'on n'a plus, parfois, besoin d'accéder à des services de crédit, donc on doit pouvoir aussi être capable de faire dégeler son dossier de façon temporaire et de façon extrêmement rapide. Donc, l'autorité réglementaire aux États-Unis, la FTC, qui encadre le processus de gel, fixe des critères de dégel avec des délais qui sont d'une heure quand le dégel est demandé par téléphone ou en ligne et qui est de trois jours ouvrables quand le dégel est demandé par courrier postal. Et je pense que ce serait intéressant, justement, d'harmoniser également nos propres exigences réglementaires et de s'assurer que ces exigences-là figurent dans la loi ou dans les règlements qui vont être adoptés pour faire appliquer la loi.

Le troisième problème, c'est celui du dégel temporaire versus la révocation permanente du service. Il me semble important d'offrir au consommateur une diversité d'options, en termes de gestion du gel de leur dossier de crédit, qui aillent de la suspension temporaire du gel à la résiliation permanente du gel de leur dossier de crédit et que ces changements de statut ne soient pas, eux non plus, payants pour les consommateurs, mais qu'ils soient également gratuits.

Quatrième problème que j'ai identifié est peut-être celui du gel de dossier de crédit versus le verrouillage du dossier de crédit. C'est-à-dire que de nombreuses agences de crédit offrent une alternative qui est payante, qu'elles appellent le verrouillage, le «credit lock», et qui est un abonnement qu'elles proposent au consommateur de souscrire. Dans leur marketing, elles leur indiquent que c'est beaucoup plus flexible et beaucoup plus efficace, mais c'est beaucoup moins réglementé, évidemment, et donc je pense que ce serait important que la loi prévoie également ce que les agences de crédit pourront faire en termes d'offre de services alternatifs.

En termes de durée des mesures de protection, un cinquième problème aux États-Unis : le gel peut être permanent. Donc, tant qu'il n'est pas révoqué par le consommateur, on considère que le gel peut s'appliquer jusqu'à la fin de la vie de la personne qui a demandé ce service-là. Et, en termes d'alerte de sécurité, celle-ci est valide pour un an. Et je pense que c'est important de prévoir des délais relativement longs, parce que les fraudeurs peuvent exploiter des identifiants volés parfois plusieurs mois, voire plusieurs années après que la brèche de sécurité ou que le vol de données ait eu lieu, et on ne veut pas faire peser sur les consommateurs un fardeau excessif de devoir faire renouveler, en fait, tous les trois mois, tous les six mois, une alerte de sécurité ou le gel de leur dossier de crédit.

Sixième problème qui a été identifié, c'est celui de la résistance à l'adoption des mesures de protection. Je suis certain que vous entendrez devant cette commission de nombreux représentants de diverses industries qui vont vous expliquer à quel point ça va peut-être créer des obstacles à l'accès au crédit ou ça va nuire à la fluidité du crédit, et donc nuire à l'économie. Mais ce qu'on a pu observer avec l'implantation de la législation américaine depuis 2018, c'est qu'il ne semble pas y avoir eu de conséquence négative sur les secteurs économiques qui offrent des services de crédit. Et donc les arguments en ce sens, peut-être, manquent probablement de données probantes.

Septième problème, c'est l'indifférence face à l'adoption des mesures de protection. C'est-à-dire que ce n'est pas parce qu'on aura instauré ce régime réglementaire et législatif que les gens, les victimes, les consommateurs vont forcément s'en prévaloir. Il y a de nombreuses raisons d'économie comportementale qui expliquent pourquoi les gens vont sous-estimer le risque, et je pense que c'est important de demander à l'autorité réglementaire qui va gérer ce dossier-là de mener également de grandes campagnes d'information et de sensibilisation du public, régulières et de grande échelle, pour expliquer aux consommateurs les droits qu'ils ont dans ce domaine-là.

Et je vais terminer avec le huitième et dernier problème, qui est celui que l'utilité de la possibilité de geler son dossier de crédit ne peut être efficace que si on dispose également de dispositifs plus rigoureux d'encadrement des incidents de vols et de pertes de données par les entreprises et les services publics. C'est-à-dire qu'on ne peut... les consommateurs ne peuvent utiliser la disposition de gel de crédit que s'ils savent que les entreprises avec qui ils font affaire se sont fait subtiliser des données. Et, au Québec jusqu'à présent, il n'y a pas d'obligation de divulgation. Je sais que le projet de loi n° 64 le prévoit et je pense que ça serait très intéressant d'harmoniser les deux dispositifs.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Dupont. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au ministre des Finances.

M. Girard (Groulx) : Merci pour cette présentation très structurée. Et j'ai pris huit notes, alors je pense qu'il y avait huit messages. Merci.

Je voulais vous demander pourquoi le gel n'est pas disponible au Canada, à votre connaissance, pourquoi l'Ontario... Bien sûr, il y a eu un changement de gouvernement, mais, normalement, les nouveaux gouvernements mettent en place les règlements associés aux lois des gouvernements précédents. Pourquoi le gel de crédit n'existe pas au Canada?

Le Président (M. Simard) : M. Dupont.

M. Dupont (Benoit) : C'est difficile pour moi de répondre à votre question. Je pense qu'il y a probablement, historiquement, une certaine réticence à trop réglementer les activités de ce type d'entreprise parce qu'à tort ou à raison on estime que ça peut justement nuire à l'activité économique, ralentir un certain nombre de transactions commerciales.

Et je pense, la deuxième raison, probablement, mais, encore une fois, c'est une pure hypothèse, et je ne pourrais pas l'affirmer avec certitude, c'est le fait que, jusqu'à assez récemment, le vol d'identité et les impacts négatifs du vol d'identité sur les victimes mais aussi sur les consommateurs en général n'a pas nécessairement été considéré comme une priorité législative et que c'est, y compris au Québec récemment avec les incidents chez Desjardins mais aussi dans le reste du Canada, chez Capital One, qu'il y a eu, je pense, un vrai réveil, une vraie prise de conscience du côté désastreux de ce type d'incident et de la nécessité de se doter de mesures législatives et réglementaires beaucoup plus robustes.

• (15 h 10) •

M. Girard (Groulx) : D'accord. Ma deuxième question. Ce matin, on a eu des discussions sur le service de base, là, l'alerte qui vise à mettre une note au dossier pour que l'entreprise financière qui fait de l'octroi de crédit soit... qu'on lui demande de faire des vérifications additionnelles parce que le sujet aurait été victime ou certaines de ses données seraient en circulation ou à risque. Et puis on a parlé de gratuité, et puis on avait une agence ce matin, elle nous a dit : Mais c'est déjà gratuit. Évidemment, ici, on parle seulement de cette note-là, mais l'autre flux d'information, qui est le consommateur qui veut connaître l'activité sur son dossier de crédit, qui veut savoir qu'une institution financière est dans l'exercice de peut-être répondre à une demande de crédit sur son dossier, quelle est l'importance de ce flux d'information là? Parce que celui-là, il n'est pas gratuit, là. Il y a eu une certaine, je dirais, confusion dans le message, ce matin, qu'on a reçu. On nous a dit : Bien, le service, c'est déjà gratuit, mais le service qui est gratuit, il est incomplet. C'est quoi l'importance que le client lui-même soit conscient de ce qui se passe sur son dossier?

M. Dupont (Benoit) : ...je pense que ce critère-là est essentiel et central, c'est-à-dire que ces agences de crédit, leur modèle d'affaires repose sur la commercialisation de données personnelles qui appartiennent aux citoyens du Québec, et d'autres provinces, et d'autres pays. Donc, à quelque part, c'est la monétisation d'informations personnelles, et je pense que ça pourrait être quand même la moindre des choses que les personnes dont on monétise les informations soient mieux informées de la façon dont on les utilise, de la manière dont elles sont utilisées. J'ai vu que certains groupes vont jusqu'à réclamer la transparence des algorithmes qui sont utilisés par ces agences pour calculer les cotes de crédit. Donc, je pense qu'il y a toute une palette de transparence ou de dévoilement des usages et des flux d'information qui permettent au crédit de couler et à l'économie de fonctionner.

Mais je pense que, pour en revenir au projet de loi, le blocage me semble être la solution qui est probablement la plus efficace par rapport à l'alerte de sécurité, parce qu'à partir du moment où on a un blocage il est difficile pour des tierces organisations de surmonter, quand même, l'alerte de sécurité pour se laisser persuader d'octroyer du crédit à un fraudeur. Donc, le dossier est bloqué, on ne peut rien faire avec, et il n'y aura aucune agence de prêt ou de commerce qui va octroyer un crédit ou un service s'il n'a pas accès à un dossier de crédit.

M. Girard (Groulx) : Est-ce qu'en pratique le blocage, ou le gel, ou, jusqu'à un certain point, le verrou, cet outil-là peut être utilisé fréquemment? Ce matin, on a évoqué la possibilité d'un client satisfait de sa situation — j'imagine, son hypothèque est payée, il a déjà sa carte de crédit, tout va bien dans sa famille — et puis qui voudrait utiliser ce service comme outil de prévention, alors que ce service est généralement vu comme vous avez été victime d'une fraude, vous êtes face à une situation de détresse, vous voulez mettre fin à une situation qui est insoutenable, désagréable, et donc c'est un service d'urgence. Est-ce que la migration vers un service à haute fréquence ou à usage plus commun, est-ce que c'est réaliste? Est-ce qu'on peut verrouiller, déverrouiller son crédit au gré de ses activités?

M. Dupont (Benoit) : Oui, je pense que c'est un service qui est tout à fait réaliste parce que, quelque part, c'est un petit peu ce que font... enfin, je veux dire, cette fréquence de transactions auxquelles vous faites référence, c'est déjà ce que font les agences de crédit au quotidien à chaque fois qu'elles reçoivent des demandes sur le dossier de crédit d'un client potentiel par une entreprise. Donc, les systèmes, les bases de données qui permettent d'accéder rapidement à un dossier, de le verrouiller, de le déverrouiller, existent déjà.

Et ce qu'il suffirait de rajouter, c'est une couche logicielle qui permettrait d'octroyer à chaque personne qui demande ce service-là un code secret — c'est ce qui se passe aux États-Unis — et, à partir de ce code secret là, elle peut appeler l'agence de crédit, et, en donnant ce code secret à la personne qui reçoit son appel ou sur le site Internet, on valide son identité et on verrouille ou on déverrouille le crédit.

Et je vous répondrais même qu'il y a certains de mes collègues juristes beaucoup plus extrémistes que moi, aux États-Unis, qui préconisent que tous les dossiers de crédit de tous les consommateurs devraient, par défaut, être gelés et qu'on devrait avoir un modèle inverse, c'est-à-dire que c'est uniquement les gens qui voudraient déverrouiller leur dossier de crédit qui devraient faire une demande pour que l'accès à leur dossier soit plus fluide, mais que, par défaut, la législation prévoirait que l'ensemble des dossiers de crédit de l'ensemble de la population serait verrouillé à chaque fois qu'on crée un nouveau dossier de crédit.

Donc, je pense que c'est peut-être un peu extrême, parce que probablement que les agences de crédit auraient beaucoup de mal à prospérer et puis à offrir leurs services, mais je pense que c'est tout à fait réaliste d'imaginer des procédures où le gel et le dégel des dossiers de crédit se fait à haute fréquence sans que ça pénalise en quoi que ce soit les agences de crédit, qui pourront, de toute façon, répercuter ces coûts-là sur les entreprises qui font appel à leurs services.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le ministre.

M. Girard (Groulx) : Je passerais la parole à mes collègues.

Le Président (M. Simard) : Oui. M. le député de Saint-Jérôme, vous disposez de quatre...

M. Chassin : Merci, M. le Président. Merci, M. Dupont. Je souligne que votre septième point, je suis plutôt en accord avec vous, là, en matière de risque pour les données personnelles et quant à la capacité de prendre des assurances pour se protéger de ces risques-là. Il y a parfois des biais, effectivement, d'où les besoins d'information. On en a parlé avec l'Office de la protection du consommateur, avec Option Consommateurs ce matin, encore cet après-midi avec l'Autorité des marchés financiers. Donc, je le souligne, je trouve que c'est un point important.

Je voudrais peut-être une précision, parce que vous avez parlé de l'expérience des Américains, puis là je vous entendais dire : Certains pensent que ça peut, par exemple, causer des problèmes en termes de fluidité ou des impacts économiques, mais ils n'ont pas de donnée. Ça fait que, là, je veux juste être sûr. Est-ce que, dans le fond, ces opposants n'ont pas réussi à prouver leur point de vue ou est-ce que vous, vous disposez d'études qui, depuis 2018, montrent l'absence d'effet ou une évaluation quelconque de ce qui s'est passé aux États-Unis, ce qui nous intéresserait grandement?

M. Dupont (Benoit) : Non, je ne dispose d'aucune donnée particulière, mais ce qui s'est passé, c'est qu'en 2017 la loi a été adoptée, donc la loi de... mise en oeuvre en septembre 2018. Et notamment les agences de crédit, mais aussi, par exemple, les concessionnaires automobiles ont fait de nombreuses représentations auprès de la Chambre des représentants, lors de l'adoption de la loi, à l'effet que cette loi-là allait les empêcher de conclure des transactions avec la vitesse habituelle et allait bloquer l'accès au crédit d'un certain nombre de consommateurs. Et on voit bien que, jusqu'à la crise de la pandémie du coronavirus, l'économie américaine, par exemple, était sur une phase ascendante de croissance extrêmement rapide. Et donc je ne pense pas qu'on puisse affirmer, finalement, que ça a été le cas.

M. Chassin : Donc, c'est ça, on a des arguments qui ont peut-être été invalidés, mais c'est trop récent encore, on n'a pas d'évaluation, là. C'est bien dommage.

M. Dupont (Benoit) : Absolument, absolument.

M. Chassin : Puis, dans le fond, peut-être une autre question, mais est-ce que vous considérez que, dans les pratiques actuelles des agents d'évaluation de crédit, puis là je ne veux pas nécessairement rentrer dans les algorithmes et les différentes cotes de crédit, mais est-ce que le besoin d'information pour le consommateur peut être défini par, par exemple, une cote généralement transmise à des prêteurs d'argent? Est-ce que cette définition-là, puis M. le ministre a posé une question un peu similaire, là, ce matin, mais est-ce que ça permet de bien identifier quel type d'information est en droit de s'attendre le consommateur ou est-ce que vous, vous iriez, par exemple, vers une définition beaucoup plus large de : On devrait avoir accès à la variété entière des cotes, même si on n'a pas nécessairement la capacité de les interpréter?

M. Dupont (Benoit) : Je ne suis pas certain de bien comprendre votre question. Est-ce qu'en termes... Votre question porte sur score de crédit et comment l'interpréter pour les consommateurs?

M. Chassin : Donc, sur les scores de crédit au pluriel, parce que chaque agent d'évaluation peut calculer une série de différents scores, là. On n'a pas chacun un score de crédit, on en a toute une panoplie, selon ce qui est pris en considération ou pas, puis, dans le fond, on cherche à avoir, en termes d'information et de qualité d'information, un score généralement transmis à des prêteurs d'argent. Ça m'apparaît un...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Dupont (Benoit) : Bien, disons qu'il y a quand même deux principales agences de crédit avec lesquelles la majorité des prêteurs sont familiers et pour lesquelles les scores et les échecs de score sont bien connus des prêteurs. Et donc je pense que déjà de familiariser le public avec ces deux scores-là et de rendre l'accès du public beaucoup plus facile, ce serait déjà un progrès notable.

• (15 h 20) •

M. Chassin : Merci.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Dupont. Je cède maintenant la parole au député de Pontiac.

M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Dupont. Merci d'être parmi nous et de partager votre expertise aujourd'hui. D'entrée de jeu, avant même d'entrer dans les détails du projet de loi n° 53, vous avez mentionné les amendes qui ont été mises de l'avant aux États-Unis, en Europe aussi, si je ne m'abuse, pour les agences de crédit qui, elles-mêmes, ont été victimes, disons, de fuite de données personnelles, là. Est-ce qu'en disant qu'ici au Québec, au Canada, il n'y a eu aucune amende, est-ce que vous êtes en train de nous dire, là : Dans le projet de loi n° 53, soyez beaucoup plus stricts puis mettez des amendes pour les agences de crédit aussi? Vous avez fait le point, alors j'imagine que c'est pour ça.

M. Dupont (Benoit) : Exactement. Je pense que, si on se dote d'un arsenal réglementaire, il me semble que la moindre des choses, c'est qu'il soit suffisamment dissuasif et qu'il soit capable justement de faire en sorte que les agences de crédit appliquent de façon rigoureuse l'esprit de la loi et que, si elles ne le font pas, il y a des sanctions qui puissent être dispensées de manière extrêmement crédible.

M. Fortin : Qu'est-ce que vous aimeriez voir? Qu'est-ce que vous considérez assez rigoureux?

M. Dupont (Benoit) : Bien, je pense que les dispositions qui figurent dans le projet de loi n° 64, qui sont elles-mêmes inspirées du RGPD européen, où on fixe un pourcentage des revenus annuels mondiaux de 2 % à 4 %, je pense, sont suffisamment dissuasives à la fois pour les hauts gestionnaires et pour les actionnaires des entreprises concernées pour faire prendre très au sérieux ce type de législation là.

M. Fortin : Est-ce qu'elles sont trop dissuasives dans le sens où est-ce que ces entreprises-là pourraient abandonner le Québec si on va trop loin?

M. Dupont (Benoit) : Non, je ne pense pas, parce qu'elles savent très bien que les autorités réglementaires sont quand même un petit peu plus sophistiquées que ça et que l'application des amendes n'est pas systématique. Il y a des négociations, il y a des discussions. Donc, je pense qu'elles ne vont pas du tout quitter le Québec, de la même façon qu'Equifax n'a pas quitté les États-Unis quand elle a reçu ses amendes de plus de 700 millions de dollars. D'ailleurs, elle les a acceptées, elle a amélioré ses services, elle a licencié son P.D.G. et elle a amélioré un petit peu la qualité de ce système. Mais je pense que ces entreprises-là sont tout à fait capables de reconnaître leurs fautes aussi.

M. Fortin : Fantastique! Très bien. Si je passe à un autre sujet, au sujet de la gratuité, je vous ai lu dans le journal ce matin, j'ai entendu vos propos initiaux. Je ne sais pas si vous nous avez suivis ce matin, mais on a eu une longue conversation sur la gratuité des services, et le ministre s'inquiétait de la qualité du service en lien avec les services qui sont gratuits. Est-ce que c'est une préoccupation qui vous habite également?

M. Dupont (Benoit) : Disons que, dans la mesure où j'ai remarqué que, dans le projet de loi, la qualité du service, justement, retombe sous la responsabilité de l'autorité régulatrice, donc l'AMF, et qu'il y a déjà un certain nombre de critères qui ont été énoncés dans le projet de loi, donc, avec des niveaux de performance qui vont pouvoir être fixés de façon très explicite par l'autorité régulatrice, moi, je n'ai pas d'inquiétude particulière. On voit que ces entreprises-là peuvent le faire à l'échelle d'un pays qui a plus de 350 millions de consommateurs, donc j'aurais de la difficulté à comprendre pourquoi les mêmes entreprises, avec les mêmes systèmes, n'arriveraient pas à offrir le même type de service au Québec pour 8 millions de consommateurs.

M. Fortin : C'est pas mal la même question qu'on se pose. D'un côté, là, il y a des groupes de consommateurs qui disent : C'est essentiel que ce soit gratuit. Les gens qui en ont le plus besoin ne sont pas capables de se le payer, parfois. D'un autre côté, on a TransUnion qui dit : Bien, si c'est mandaté comme ça, on va le faire. Et vous-même, vous nous rappelez que, dans la législation qui est proposée par le ministre, c'est mandaté que le niveau de service soit surveillé par l'AMF. Alors, est-ce que vous voyez une raison quelconque pour laquelle ça ne serait pas gratuit?

M. Dupont (Benoit) : Je n'en vois pas du tout, non.

M. Fortin : Très bien. Sur un autre dossier, vous avez parlé du gel du dossier de crédit versus le verrouillage du dossier de crédit. Je pense que c'est une nuance que vous apportez qui, de toute évidence, beaucoup de citoyens ne comprennent pas, puisqu'il y en a beaucoup qui, justement, achètent des services comme ceux-là, alors qu'ils n'en ont peut-être pas besoin. Qu'est-ce que vous proposez pour s'assurer que ça ne se fasse pas?

M. Dupont (Benoit) : Je pense, c'est toujours très difficile d'empêcher les entreprises d'offrir un certain nombre de services. Ceci dit, je crois que — et encore une fois on en revient à la section du projet de loi concernant la réglementation et puis la qualité du service — il serait bon que l'autorité réglementaire s'assure ou que le projet de loi lui permette de s'assurer qu'il n'y ait pas de confusion possible entre l'option de faire geler son dossier de crédit, qui est un droit de tous les citoyens, et des services payants qui pourraient être acquis en sus de cette option gratuite offerte à tous les citoyens québécois. Donc, qu'on soit capables de distinguer ce qui est un service volontaire offert par l'entreprise, payant, avec peut-être un certain niveau, une certaine régularité, une certaine rapidité, et le gel de crédit, qui est un droit avec un autre niveau de service qui est, lui aussi, suffisamment satisfaisant pour pouvoir convenir à toutes les victimes et à tous les consommateurs.

M. Fortin : Dans ce que vous connaissez de ces différents produits-là, le service, qui est le gel, et le produit, qui est le verrouillage, c'est quoi la différence? Techniquement, là, c'est quoi la différence? Qu'est-ce que le verrouillage donne de plus?

M. Dupont (Benoit) : Pas grand-chose, sincèrement. Ce qu'il propose, en théorie, de plus, c'est une beaucoup plus grande régularité dans le suivi du dossier de crédit, mais on sait très bien que les usagers ont très, très peu de temps disponible pour s'en prévaloir. Donc, je pense qu'avec le gel du dossier de crédit c'est amplement suffisant pour correspondre aux besoins des victimes et des consommateurs.

M. Fortin : O.K. Alors, c'est une question d'éducation, j'imagine, de s'assurer que les Québécois sachent qu'est-ce qui leur est disponible et, on l'espère, gratuit, là, mais sachent ce qui leur est disponible versus ce qui est un produit vendu par la compagnie au-delà de ce qu'ils devraient nécessairement avoir?

M. Dupont (Benoit) : Absolument, question d'éducation et question d'éducation des groupes les plus vulnérables aussi, qui peuvent être exposés au vol d'identité. Donc, ça peut être dans des langues autres que le français et l'anglais, ça peut être dans des groupes qui, par exemple, n'ont pas forcément accès aux grands médias majoritaires au Québec, etc.

M. Fortin : O.K. Vous vous êtes aventuré avec le ministre sur la possibilité que tous les dossiers soient gelés par défaut. Vous avez dit : Ce n'est pas nécessairement une bonne idée, là. Il y a des collègues qui sont peut-être plus radicaux que vous à ce niveau-là, mais la raison que vous avez évoquée, pour laquelle ça ne serait peut-être pas la chose à faire, c'est une question de viabilité de l'entreprise. Et là on ne parle pas de la profitabilité, là, les députés du gouvernement en ont parlé tantôt, mais là, vraiment, la viabilité ou la survie même de l'entreprise. Est-ce que ça veut dire que ce que les États-Unis ont amené, par exemple, la possibilité de dégeler rapidement son dossier de crédit, il y a très peu de gens qui le font?

M. Dupont (Benoit) : On estime que, dans les... Pas dégeler, de geler le dossier de crédit, là. La moitié des gens qui sont victimes de vol d'identité seulement se prévalent de la possibilité de geler leur dossier de crédit. C'est-à-dire que l'autre moitié pense que, même si ses identifiants personnels ont été volés lors d'une grosse brèche de données, leur dossier à eux ne va pas être utilisé, ou ils ne vont pas être victimes de fraude, ou leur institution financière va suffisamment les protéger. Donc, il y a tout un tas d'erreurs de jugement, parfois, qui sont commises par des gens qui sont victimes. Et uniquement la moitié, aux États-Unis, des victimes de vol d'identité dans les grandes brèches de données demandent le gel de leur dossier de crédit.

M. Fortin : Le dégel, et ce sera ma dernière question, mais le dégel, quand les États-Unis... Quand la loi américaine a été adoptée, là, légiférant le dégel en moins d'une heure du dossier du consommateur, est-ce qu'il y a des enjeux qui sont apparus initialement, des raisons pour lesquelles ça ne pourrait pas fonctionner ici, ça?

M. Dupont (Benoit) : Non, pas à ma connaissance. Et d'ailleurs le délai d'une heure était un compromis, parce qu'il y avait certains États dans lesquels le délai imposé était de 15 minutes. Donc, le une heure était une espèce d'entre-deux entre la position de 15 minutes de certains États et d'autres États qui allaient jusqu'à trois jours. Et donc on a estimé que, pour une demande de dégel par moyen électronique, une heure était un délai tout à fait raisonnable avec les bases de données et puis les outils technologiques dont disposent les grandes entreprises d'agences de crédit.

M. Fortin : Et vous êtes d'accord avec ça? Une heure, ce serait raisonnable ici aussi?

M. Dupont (Benoit) : Bien, écoutez, moi, je pense que ce serait tout à fait des délais raisonnables. J'ai une banque, que je ne nommerai pas, mais qui m'offre un accès instantané à mon dossier de crédit, à mon score de crédit, en moins de deux secondes. Donc, je ne vois pas pourquoi une heure serait déraisonnable pour une procédure dans laquelle les gens pourraient rentrer leur code secret sur un portail en ligne.

M. Fortin : Très bien. J'ai vu que le ministre prenait des notes. J'apprécie, M. le ministre. Très bien, merci beaucoup.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous, M. le député. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

• (15 h 30) •

M. Marissal : Merci, M. le Président. M. Dupont, merci d'être là par la magie des ondes. Votre présentation était très intéressante, effectivement, très structurée, très riche, surtout.

On a fait le débat, de ce côté-ci de la table, de la gratuité du service partant du principe que ça ne devrait pas être aux citoyens à payer parce que des gens ne prennent pas nécessairement bien soin de leurs données ou parce qu'ils veulent protéger tout simplement leurs données ou leur dossier de crédit. Moi, ça me paraît être une évidence. Du côté ministériel en particulier, le ministre des Finances prétend ou, en tout cas, il avance qu'il y aurait peut-être des problèmes de qualité de service à ce moment-là, puisque ça serait gratuit. Aux États-Unis, vous nous dites que c'est gratuit. Est-ce qu'il y a quelque indication que ce soit que le service s'est détérioré par la gratuité?

M. Dupont (Benoit) : Pas à ma connaissance, mais je n'ai pas lu d'études non plus qui ont été menées depuis l'adoption nationale de cette disposition, puisque ça date de septembre 2018. Mais, en même temps, on parle de qualité de service. La qualité de service, elle concerne beaucoup plus l'alerte de sécurité ou la note explicative.

Le gel d'un dossier de crédit, c'est relativement simple, comme service à offrir. C'est-à-dire que vous avez un usager qui appelle une agence de crédit — il doit en appeler deux au Québec — qui indique son nom, son identifiant, qui essaie de démontrer son identité et qui demande un gel, l'employé de l'agence de crédit enregistre la donnée, lui donne un code secret pour pouvoir dégeler ultérieurement son dossier. Ça s'arrête là. C'est terminé. À partir de là, il n'y a plus aucun autre service à offrir jusqu'à ce que le consommateur demande un dégel de son dossier de crédit, donc. Et ça peut se faire de façon automatisée. Donc, dans les cas les plus rudimentaires, ça peut aller très vite, et il n'y a même pas forcément besoin d'avoir un service très, très développé pour que, néanmoins, l'utilité du gel s'exerce.

M. Marissal : Bien. Vous avez parlé tout à l'heure de l'obligation de divulgation, ce qui n'est pas le cas encore ici. Donc, vous souhaiteriez... Bien, d'abord, est-ce que ça se fait ailleurs? Il y a des juridictions où ça se fait?

M. Dupont (Benoit) : Oui, bien, ça se fait dans tout le reste du Canada et pour les entreprises québécoises qui ont des places d'affaires ailleurs qu'au Québec, donc, depuis novembre 2018. C'est pour ça qu'on a ces statistiques sur les 700 brèches de données et les 28 millions de Canadiens dont les données personnelles ont été compromises en 2019. Et donc, comme... (panne de son) ...ne s'applique pas au Québec, puisqu'on dispose d'une loi équivalente au Québec mais qui n'a pas inclus cette disposition de la divulgation obligatoire, on est un petit peu dans une situation de léger retard qui, je l'espère, sera comblée par le projet de loi n° 64.

M. Marissal : D'accord, mais, puisque 64 couvrirait, on peut penser que les agences de crédit seraient aussi couvertes par 64, là, ça va de soi.

M. Dupont (Benoit) : Ça va de soi.

M. Marissal : Ça va de soi. Il y a une question, là, qui me taraude depuis ce matin, puis peut-être que j'aurais dû commencer par celle-là. Est-ce qu'il y a d'autres options pour les consommateurs du Québec qu'Equifax ou TransUnion? Bien, c'est peut-être la première question. On a l'impression, finalement, qu'on est un peu condamnés avec ces deux-là. Il n'y en a pas d'autres, puis, évidemment, bien, nécessairement, ça entraîne une situation quasi monopolistique. On a vu que Desjardins a essayé quand même d'en redonner un peu plus à TransUnion parce que ça devenait gênant d'avoir tous les oeufs dans le même panier qu'Equifax. Il y a une solution à ça? Parce qu'évidemment, s'il n'y a pas d'offre, on est pognés avec les deux, là, qui nous ont donné un service de bouette, là, on va le dire, là, surtout Equifax, là, particulièrement en français. Est-ce qu'il y a une solution pour les consommateurs?

Le Président (M. Simard) : ...s'il vous plaît.

M. Dupont (Benoit) : À ma connaissance, c'est à peu près les deux qui s'offrent. Aux États-Unis, qui a un marché énorme...

Le Président (M. Simard) : En conclusion, M. Dupont.

M. Dupont (Benoit) : Oui, aux États-Unis, qui est un marché énorme, bien, ils sont trois agences. Et ce qui est assez frappant, c'est que, quand Equifax s'est fait pirater, il a été obligé lui-même de donner le contrat pour le suivi de ses victimes à son concurrent, Experian.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Dupont, vous êtes bien aimable. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci, M. Dupont. Un plaisir de vous revoir dans la même commission sur un autre sujet, cette fois-ci.

Il y a quelque chose qui a attiré mon attention dans votre présentation, vous avez parlé du droit des citoyens d'avoir cette protection-là, et ça vient un peu renforcer votre proposition et ce qu'on a pu lire dans les médias ce matin, à savoir qu'il faut que ça soit gratuit. On donne un nouveau droit aux citoyens et citoyennes du Québec, et, pour avoir accès à ce droit-là, selon votre prémisse de base, il faut que ça soit gratuit. Donc, la notion de droit, pour vous, elle est fondamentale.

M. Dupont (Benoit) : Oui, elle est fondamentale, parce que, dans le monde numérisé dans lequel on vit, le droit de pouvoir exercer un contrôle un petit peu plus rigoureux sur nos données personnelles découle notamment de ce type de dispositif.

M. Ouellet : Tout à l'heure, à la question du ministre des Finances, à savoir est-ce que c'était pensable ou la chose à faire si un client voulait, par prévention, avoir le verrou de crédit, vous avez répondu que ça se fait déjà ailleurs et qu'on est capables de le faire rapidement. Donc, technologiquement, ce n'est pas quelque chose qui est un frein à l'implantation ici, au Québec, puisqu'on le fait déjà ailleurs, aux États-Unis, entre autres.

M. Dupont (Benoit) : Effectivement, je ne vois aucun obstacle technologique à ce que l'implantation soit très rapide ici, au Québec.

M. Ouellet : On sait qu'ailleurs dans le monde, notamment en France, il existe un fichier national des incidents de remboursement de crédit aux particuliers. Donc, on a mis ça ensemble. Est-ce que vous pensez que cette avenue-là pourrait être pertinente pour le Québec et pour le Canada? Est-ce qu'on pourrait effectivement avoir un registre national pour s'assurer d'avoir à un seul endroit ces informations-là qui permettraient au consommateur de cogner à la porte d'un seul organisme ou d'une seule entreprise pour obtenir les informations et avoir un certain contrôle?

M. Dupont (Benoit) : C'est toujours une possibilité, d'autant plus que ça simplifie un petit peu les procédures pour les victimes et les consommateurs. Ceci dit, en France, ce fichier-là est opéré par la Banque de France, donc, qui est l'autorité qui émet et gère la monnaie et réglemente toutes les institutions bancaires, financières et de crédit. Donc, son équivalent au Canada serait la Banque du Canada.

M. Ouellet : O.K. Ce matin...

M. Dupont (Benoit) : Et ça me... Excusez-moi, je veux juste terminer. Ça me semblerait risqué qu'on confie la gestion de ce fichier-là à une entreprise.

M. Ouellet : O.K. TransUnion, ce matin, nous a expliqué que, du côté des États-Unis, la mise en application des nouvelles dispositions législatives a été faite en mettant en contact les institutions financières et les agences de crédit ensemble. Ils ont mis de l'argent et ont créé ce fameux portail qui permet effectivement de colliger toutes ces informations-là. Est-ce que ce serait le genre de chose qu'on devrait faire au Canada? Considérant que, bon, le Québec est en avant... les autres provinces du Canada ne sont pas à cet endroit-là, mais, tôt ou tard, s'ils suivaient le pas du Québec, ce serait le genre de chose, d'infrastructure qui permettrait d'aplanir les coûts sur l'ensemble du Canada au complet pour l'implantation de ce genre de registre?

M. Dupont (Benoit) : Probablement que ça pourrait être une solution à considérer, mais je pense que les deux... parce qu'au Canada les agences de crédit sont deux, donc elles seront vraiment dans un duopole. Donc, je pense qu'à deux elles ont certainement — également seules — la capacité de mettre en place un portail qui leur est propre, mais probablement qu'on pourrait très bien envisager aussi que les institutions financières collaborent à ce type d'initiative et facilitent... Justement, l'avantage que ça aurait, c'est que ça permettrait probablement de faire en sorte que les consommateurs soient mieux informés parce qu'ils seraient les relais plus directs auprès des usagers.

Le Président (M. Simard) : Merci. En conclusion, cher collègue. Il vous reste 15 secondes.

M. Ouellet : Évidemment, vous êtes d'accord pour qu'on relève les pénalités, c'est ce que l'Autorité des marchés financiers nous a dit tout à l'heure, pour avoir un effet beaucoup plus dissuasif par rapport aux agences de crédit s'il y avait effectivement faute de leur part d'avoir mal protégé les données des Québécois et des Québécoises.

M. Dupont (Benoit) : Effectivement, je pense que des pénalités sévères seront probablement souhaitables dans ce domaine.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. Dupont.

Le Président (M. Simard) : Alors, Pr Dupont, merci pour votre contribution très précieuse, du reste, à nos travaux.

Sur ce, j'ajourne notre séance à demain, 9 heures. Bonne soirée à toutes et à tous.

(Fin de la séance à 15 h 39)

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