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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 20 août 2020 - Vol. 45 N° 74

Conseil du trésor et Administration gouvernementale, volet Conseil du trésor


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Table des matières

Conseil du trésor

Discussion générale (suite)

Document déposé

Intervenants

M. Jean-François Simard, président

Mme Sonia LeBel

M. Gaétan Barrette

M. Vincent Marissal

M. Martin Ouellet

*          M. Yves Trudel, Autorité des marchés publics

*          M. Éric Ducharme, Secrétariat du Conseil du trésor

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix-neuf heures quarante-cinq minutes)

Le Président (M. Simard) : Chers amis, bonsoir à tous. Je constate que nous avons quorum. Je déclare donc cette séance de travaux ouverte. Comme vous le savez, nous entreprenons le dernier sprint ce soir, c'est la dernière séance de travail de la Commission des finances publiques. Et, comme vous le savez, nous sommes réunis afin de poursuivre l'étude du volet Conseil du trésor des crédits budgétaires du portefeuille Conseil du trésor et Administration gouvernementale pour l'exercice financier 2020‑2021. À cet effet, une période de 1 h 30 min est prévue pour l'étude de ces crédits.

Mme la secrétaire, bonsoir.

La Secrétaire : Bonsoir.

Le Président (M. Simard) : Y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Chassin (Saint-Jérôme) est remplacé par Mme Guillemette (Roberval); M. Émond (Richelieu) est remplacé par Mme Chassé (Châteauguay); et Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par M. Bélanger (Orford).

Conseil du trésor

Le Président (M. Simard) : Bienvenue à ces nouveaux collègues. Donc, comme le veut la tradition, nous allons alterner par bloc d'échange de 20 minutes au cours duquel l'opposition et le gouvernement pourront s'échanger la parole. Et je reconnais immédiatement le député de La Pinière pour une période de 20 minutes. Bienvenue, cher collègue.

Discussion générale (suite)

M. Barrette : Alors, merci, M. le Président. Alors, permettez-moi de resaluer, évidemment, Mme la présidente du Conseil du trésor ainsi que les gens qui l'accompagnent. Et, si je ne me trompe pas, aujourd'hui Mme la ministre est accompagnée des gens de l'Autorité des marchés publics. C'est le cas?

Mme LeBel : C'est exact.

M. Barrette : Très bien. Alors, je vais faire quelques interventions, M. le Président, sous cet angle-là, en commençant par poser une question bien simple.

Hier, la ministre nous a dit, évidemment, après avoir, et on le comprend, mis aux poubelles l'ancienne version du projet de loi n° 61, la ministre nous a dit qu'elle allait nous représenter une nouvelle mouture, qu'on a hâte... puis on a hâte non seulement de...

Le Président (M. Simard) : ...enlever votre masque, hein, si vous voulez.

M. Barrette : Ah! c'est vrai. Excusez-moi.

Le Président (M. Simard) : C'est comme vous voulez.

M. Barrette : Excusez-moi à tout le monde qui nous écoutez. Écoutez, c'était l'Halloween à l'avance, mais...

Le Président (M. Simard) : Non, mais j'ai tellement votre bien à coeur, vous le savez.

M. Barrette : Voilà. Alors... Bien, vous savez, pour moi, c'est une seconde nature d'avoir des masques. J'ai passé ma vie avec un masque dans le visage.

Alors, j'aimerais savoir de la ministre, qui nous a dit hier qu'elle était sensible, pour le moins, je ne pense pas que c'est le mot qui a été utilisé, mais certainement qu'elle a manifesté un certain intérêt aux amendements que nous avions, les oppositions, déposés, qu'elle allait les prendre en considération... Et un des amendements que j'avais déposés était la question des pouvoirs à octroyer dans le cadre de la loi n° 61.

Le Président (M. Simard) : Mme la ministre.

Mme LeBel : Excusez-moi. Vous voulez savoir si j'ai pris connaissance des amendements que vous avez octroyés?

M. Barrette : Non, ça, je suis sûr que vous avez pris connaissance. Mais est-ce que... Je voulais savoir votre opinion, là. Vous avez dit que vous étiez sensible aux amendements qu'on avait déposés, mais nous, on avait déposé des amendements qui étaient particuliers, là, dans le cadre de projet de loi n° 61, en ce qui a trait aux pouvoirs d'un inspecteur général à l'AMP, en fait, des pouvoirs additionnels à l'AMP.

Mme LeBel : Bien, premièrement, vous allez me permettre, peut-être, de souligner quand même un événement exceptionnel ce soir. Et je veux remercier le secrétaire au Conseil du trésor, qui passe sa soirée avec moi en son anniversaire de naissance. Alors, je voulais lui souhaiter bonne fête. Je pense que c'est encore... Je comprends qu'on est tous un cadeau pour lui. Alors, bonne soirée avec nous.

Non, effectivement, écoutez, je ne vous donnerai...

M. Barrette : Ce n'est pas mon masque qui est l'événement spécial?

Mme LeBel : Non, non, mais je suis contente que le président ait souligné que vous deviez... M. le Président, je suis contente que vous ayez souligné à mon collègue de La Pinière d'enlever son masque, ça va me permettre de voir son sourire, là, que j'ai découvert hier soir, lors de la dernière séance.

Donc, écoutez, je suis... De façon très générale, effectivement, on a pris connaissance. On pourra en discuter avec M. Trudel, qui est dirigeant de l'AMP, mais on a pris connaissance, effectivement, du fait que vous mentionnez qu'il devrait y avoir plus de pouvoirs pour l'AMP sur certains aspects. J'en ai pris connaissance.

Moi, mon souci dans tout ça... Puis naturellement je suis très prudente parce que je ne veux pas donner les conclusions qui vont se retrouver dans le projet de loi, la mouture de l'automne, mais je peux vous dire que mon souci est de faire en sorte, effectivement, non seulement de ne pas avoir de pouvoir habilitant du type article 50... Ça, je pense que je l'ai dit d'entrée de jeu, l'article 50 n'existera plus. D'ailleurs, nous avions déjà déposé un amendement qui prônait le retrait de l'article 50 dans les premières 48 heures, je pense, qui ont suivi le dépôt du projet de loi n° 61 par mon collègue le précédent président du Conseil du trésor.

Mais évidemment le souci que nous avons, dans les principes, est de faire en sorte qu'il y ait, pour l'AMP, à tout le moins dans une perspective de projet de loi qui accélère certaines mesures... de nous permettre de faire en sorte que l'AMP ait toute la latitude nécessaire pour pouvoir exercer une surveillance adéquate de ces projets particuliers et de rassurer ainsi la population.

Parce que l'objectif n'est certainement pas de contourner les principes d'intégrité qui sous-tendent les articles de la Loi sur les contrats des organismes publics, n'est certainement pas non plus de fragiliser la confiance de nos citoyens dans le fait que nous allons mettre en place ou que toute... que nous allons mettre en place, mais qu'il existe déjà plusieurs garde-fous. Je pense qu'il faut le comprendre. Il y a déjà des garde-fous en place. L'AMP a été mise en place, l'UPAC existe.

• (19 h 50) •

Le Président (M. Simard) : Merci.

Mme LeBel : Je pourrai compléter lors de votre prochaine question, cher collègue.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

M. Barrette : Bon, très bien. Merci, M. le Président. Merci pour la réponse, là. Je suis heureux de voir qu'il y a un intérêt. On en reparlera, évidemment, lorsque le projet de loi nouveau sera déposé.

Alors là, je vais continuer ce bloc-ci dans un esprit d'analyse et de comportement du gouvernement en matière de contrats. Et on constate, M. le Président, que, sous ce gouvernement, il y a une tendance à augmenter les contrats de gré à gré. Le 15 juillet dernier, d'ailleurs, le gouvernement du Québec, par la voix du ministre de l'Économie, a octroyé un contrat de gré à gré à la firme PetalMD, un contrat gré à gré à la firme PetalMD pour un produit que je connais, O.K., et la raison qui a été invoquée est le fait que, selon le ministre, seule cette compagnie-là était capable de fournir le service qui était visé. Bien, moi, je peux vous dire, là, qu'il y en a plein, de compagnies au Québec qui peuvent faire ça. Alors, il y en a plein, je peux vous en nommer. Une des choses qui avaient été évoquées est que cette compagnie-là, PetalMD, était la seule qui avait des autorisations de gestion de données, là, dans le réseau de la santé. Il y a plein de compagnies qui ont ça actuellement.

Alors, comment ça se fait, là, que de telles choses... Je comprends que le ministre de l'Économie a une certaine autorité et responsabilité dans son secteur, mais, à quelque part, ça, c'est une question qui relève, sur le plan de l'intégrité des marchés, de vous, Mme la présidente du Conseil du trésor.

Comment expliquer ça quand on sait... Je le sais, là, j'ai négocié avec toutes ces compagnies-là quand j'étais ministre de la Santé, je sais que cet élément-là, ce produit-là, cette finalité-là est faisable par d'autres.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Oui. Alors, peut-être pour situer nos auditeurs, nos... qui nous écoutent, qui ne connaissent peut-être pas la plateforme Petal ou la compagnie Petal autant que vous la connaissez, cher collègue, une telle plateforme va nous permettre l'harmonisation des processus, là, dans un contexte où différentes solutions de prise de rendez-vous sont utilisées par le réseau de la santé. Donc, plusieurs portes d'entrée sont utilisées par les citoyens pour être capables d'aller prendre un rendez-vous en ligne, peut-être que je simplifie à outrance, vous serez probablement plus à même de me corriger... mais n'ont pas nécessairement accès à tous les rendez-vous disponibles quand on entre par une plateforme ou par une autre. Donc, c'est un agrégateur de... cette plateforme-là, qui va permettre à un citoyen d'avoir un guichet unique et de dire : Je veux un rendez-vous dans une clinique quelconque, et... effectivement.

Naturellement, je vais vous répondre de façon très générale, c'est un dossier qui a été mené en très grande partie par mon collègue qui est le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, monsieur... c'est ça, et le ministre de la Santé ainsi que le ministre de l'Économie, vous l'avez dit, qui seront probablement plus à même de répondre en détail à vos questions, mais effectivement il existe, vous le savez, cher collègue, dans l'article 25 de la loi sur les contrats publics, la possibilité de le faire par décret ministériel.

Alors, cette compagnie-là, Petal, s'est vu octroyer ce contrat-là par décision du Conseil des ministres, effectivement. Donc, c'est une décision qui a été prise par l'ensemble du Conseil des ministres, et on... C'est un orchestrateur de rendez-vous. C'est le terme le plus approprié. Donc, cette décision a été prise, effectivement...

Le Président (M. Simard) : ...M. le député. Merci, Mme la ministre. M. le député.

Mme LeBel : J'allais continuer sur les motifs, mais...

Le Président (M. Simard) : On pourra le faire plus tard. M. le député.

M. Barrette : Bien, M. le Président, je ne souhaite pas avoir d'explication sur le produit. Je comprends très bien ce que le produit fait, je n'ai pas besoin d'explication de ça. Je sais exactement ce que va intégrer, agréger le produit en question. Je dis seulement que la programmation menant à un produit d'agrégation pouvait être faite par n'importe qui d'autre. C'est ce que je dis, je l'affirme haut et fort. Et je dis qu'il y a de plus en plus de contrats octroyés de gré à gré. Est-ce que c'est normal?

Et, ce soir, il y a l'Autorité des marchés publics, là. Je serais intéressé d'avoir leur opinion. Dans un fonctionnement sain de l'espace public, il me semble que la compétition est une valeur à défendre, à promouvoir, et, dans le cas présent, je peux vous le dire, là, les raisons invoquées pour le donner, ce contrat-là, ne tiennent tout simplement même pas un peu la route, même pas la gravelle sur le bord du chemin. On est dans le dalot, là. Alors, moi, je ne comprends pas.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Bien, de façon très générale, cher collège de La Pinière, vous avez tout à fait raison, il faut favoriser une saine concurrence, les appels d'offres. Mais, dans la loi sur les contrats publics, il existe les possibilités de donner des contrats de gré à gré, notamment en matière d'urgence, en matière... Il y a certaines spécificités, là, je ne les nommerai pas par coeur. Il y a l'article 25 de la loi sur les contrats publics, qui permet également au Conseil des ministres de le faire dans certaines circonstances.

Donc, on ne peut pas faire une affirmation à l'emporte-pièce. D'ailleurs, je ne suis pas d'accord avec vous sur le fait qu'on l'utilise de plus en plus souvent ou même trop souvent. Je pense qu'il faut le faire à la pièce, voir pourquoi on les justifie et si chaque contrat est justifié.

Maintenant, dans le cas de PetalMD, de façon très générale, l'urgence de la situation, la préparation en cas de deuxième vague, ce sont des motifs qui ont été évoqués. Je vous référerais à mes collègues qui ont mené le dossier pour expliquer... qu'ils puissent expliquer la raison pour laquelle on a procédé de cette façon-là. Mais un contrat de gré à gré, là, ça s'examine, et il peut y avoir des circonstances particulières où c'est justifié. La loi elle-même le permet.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

M. Barrette : Je comprends que, là, on invoque l'urgence. Alors là, là, c'est pousser le bouchon pas mal loin. Là, là, prendre des rendez-vous, là, avoir ce système d'agrégation là... Hein, ce n'est pas compliqué, là. Faire ça, d'abord, ça vient de nuire à la gestion gouvernementale, j'y reviendrai plus tard, mais de mettre un agrégateur en place, faire un contrat de gré à gré sur la base de la COVID? Franchement! Franchement, là! Là, là, ça dépasse l'entendement, là.

Maintenant, dans le communiqué, O.K., dans... Ah oui! En passant, justement, dans le communiqué qui a été fait par le gouvernement, là, qui est daté du 5 août 2020, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, lui, il vient de parler d'un hub, qui est la fameuse patente, lui-même parle des compagnies qui font ça : KinLogix, Medesync, MYLE, Oscar Québec, Omnimed, entre autres. Puis il a bien raison d'«entre autres», parce que je peux vous en nommer d'autres qui sont actuellement totalement implantées dans le réseau qui font ça.

Mais, mieux que ça, Mme la Présidente... M. le Président, pardon, on dit, dans le comité, que le coût d'acquisition de la solution est de 2,9 millions de dollars pour un contrat de cinq ans avec possibilité de renouvellement qui pourrait aller jusqu'à 12 ans.

M. le Président, la question que j'ai à poser à Mme la présidente du Conseil du trésor, qui a une longue expérience dans l'avis public de contrats : C'est quand la dernière fois qu'elle a vu des contrats renouvelables jusqu'à 12 ans? On...

Le Président (M. Simard) : Je vous remercie.

M. Barrette : Je veux juste finir ma phrase.

Le Président (M. Simard) : Oui.

M. Barrette : Ça veut dire que, là, on vient de faire un contrat de gré à gré qui peut, de gré à gré, durer 17 ans ou, si on l'interprète différemment, 12 ans, en incluant les cinq ans. Ça, en français, là, c'est sortir tout le monde du marché.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Mme la ministre.

M. Barrette : Moi, j'aimerais entendre la présidente du Conseil du trésor et l'AMP là-dessus. Je n'ai jamais vu ça.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme LeBel : Bon, je n'ai pas la prétention d'avoir fait le recensement de tous les contrats publics qui se sont donnés. Je n'ai pas d'expertise particulière en matière de contrats particuliers du gouvernement, donc je n'ai pas fait de recensement. Je vous dis qu'il faut regarder les contrats dans leur individualité.

Dans le cas de PetalMD, il y a des justifications pour avoir procédé de la sorte, et je vous réfère à mes collègues du ministère de la Santé et de l'Économie qui ont mené ce dossier-là. Mais ils sont passés par un mécanisme qui est dûment autorisé par la loi et qui existe dans la loi, qui est l'article 27 de la loi sur les contrats publics. L'article 25, pardon.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Mme la Présidente... M. le Président, les lois sont ainsi faites qu'il y a toujours un article qui dit «ou toute autre raison déterminée par le gouvernement», puis ce n'est jamais précis. Les lois sont faites de même, on a toujours une porte de sortie. J'aimerais entendre l'Autorité des marchés publics, ils sont là, ici, pour ça ce soir.

Devant mon affirmation... je ne vous oblige même pas à y croire, mais, dans le communiqué, on fait référence à des compagnies qui peuvent le faire. Mais, sur le simple fait de pouvoir renouveler pendant 12 ans, quand est-ce la dernière fois que vous avez vu, dans un contrat de gré à gré, la possibilité de renouveler pendant 12 ans? Renouveler pendant un an, pendant deux ans, pendant trois ans... 12 ans, c'est anticompétition. C'est livrer, par décret, à une compagnie un produit, un marché.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la présidente du Conseil du trésor.

• (20 heures) •

Mme LeBel : Je vais réitérer ma réponse. Je n'ai pas la connaissance d'un recensement nécessaire des contrats publics de tout le gouvernement pour vous répondre. Ce que je vous dis, c'est qu'on ne fait pas l'analyse de la justification de l'usage d'un article de loi particulier par la comparaison avec d'autres contrats. Il faut regarder les justifications pour ce contrat-là particulier et il existe des justifications d'être passé par l'article 25 de la Loi sur les contrats publics.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : M. le Président, je suis un pas plus loin, là. J'ai établi les faits ainsi que les problèmes que ça soulève. La question que je pose, qui devrait être répondue par l'AMP, c'est pour ça que je pose cette question-là ici ce soir : Pour l'AMP, est-ce qu'il est normal de voir des contrats renouvelables jusqu'à 12 ans? C'est simple, ça. Moi, je vous le dis, M. le Président, pour moi, c'est un précédent, mais peut-être que je n'ai pas assez d'expérience.

Le Président (M. Simard) : D'accord. Mme la ministre.

Mme LeBel : Alors, peut-être M. Trudel, avec consentement?

Le Président (M. Simard) : Oui. Alors, y aurait-il consentement afin que M. Trudel puisse s'adresser à nous?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Simard) : Il y a consentement. M. Trudel, pour les fins de nos travaux, auriez-vous l'amabilité de vous présenter?

M. Trudel (Yves) : Bonsoir. Mon nom est Yves Trudel, je suis président-directeur général de l'Autorité des marchés publics.

Le Président (M. Simard) : Bienvenue, monsieur. On vous écoute.

M. Trudel (Yves) : Merci. Donc, M. le député de La Pinière, je n'ai évidemment pas vu le contrat dont vous faites mention, je ne peux donc pas me prononcer sur la nature du contrat, de quelle façon il a été accordé, le contrat, et quelles raisons qui sous-tendraient les renouvellements. Je ne suis pas en mesure d'en discuter puisque je ne l'ai pas vu.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci beaucoup, M. Trudel. M. le député.

M. Barrette : Je comprends que c'est malaisant, comme question, là. Je vais la répéter pour la, je pense, quatrième fois : Avez-vous déjà vu, soit, M. le Président, la présidente du Conseil du trésor, dans sa vie antérieure qui a été très floride sur le plan juridique, ou vous à l'AMP, là, avez-vous déjà vu, de façon régulière ou même une seule fois, un contrat renouvelable jusqu'à 12 ans? Avez-vous, oui ou non, déjà vu ça? Est-ce que ça vous apparaît comme étant un précédent? S'il vous plaît, ne me répondez pas sur : Je n'ai pas vu le contrat, voici ce que le contrat fait. J'ai établi ça, là. Là, je veux savoir de l'AMP si, pour vous, c'est usage commun de voir des contrats renouvelables pendant 12 ans.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. M. Trudel, à moins que Mme la ministre souhaite intervenir. M. Trudel.

Mme LeBel : ...répondu, non.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. Trudel.

M. Trudel (Yves) : Merci. Alors, je suis à l'autorité depuis peu, on se rappellera que c'est une nouvelle agence, en plus, moi, je n'ai jamais vu de contrat de gré à gré renouvelable sur une période de 12 ans. Par contre, il est possible de le faire. Mais je n'en ai pas vu.

Le Président (M. Simard) : Je vous remercie. M. le député.

M. Barrette : M. le président, merci. Moi non plus, je n'en ai jamais vu. Ayant été à la tête... (panne de son) ...là, je n'ai jamais fait ça, je n'ai jamais vu ça. Alors, la question est encore à l'AMP, M. le Président : Est-ce que c'est... Vous êtes l'AMP, là, vous êtes le gardien de l'éthique, et ainsi de suite. Est-ce que c'est recommandable, recommandé? Est-ce que c'est une façon de faire que vous recommandez?

Le Président (M. Simard) : Merci. Monsieur...

M. Barrette : Ou l'inverse ou l'inverse : Trouvez-vous, ça, que c'est une chose qu'on ne devrait pas faire?

Le Président (M. Simard) : Merci. M. Trudel.

M. Trudel (Yves) : La notion du contrat de gré à gré, c'est pour un besoin particulier...

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : On va le laisser finir.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : Non, mais... M. Trudel, veuillez poursuivre, je vous prie.

M. Trudel (Yves) : C'est donc pour un besoin particulier, et il est possible, dans certains cas, et je comprends que c'est le cas dans celui-là, que le donneur d'ouvrage ait besoin de renouveler sur une certaine période de temps. Je ne l'ai pas vu, le contrat, je sais que vous n'aimez pas ma réponse, mais il reste que je ne l'ai pas vu, et je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ça. Alors, il est possible, légalement parlant, d'accorder un contrat avec du renouvellement...

Le Président (M. Simard) : ...M. Trudel. M. le député.

M. Barrette : M. le Président, n'est-il pas vrai, et la question est encore à l'AMP, que la plupart des contrats ont des clauses de renouvellement? C'est normal. M. Trudel nous a dit, là... Et M. Trudel a été nommé, là, parce qu'il avait une grande expérience, je le sais, j'ai appuyé sa nomination. Il a une grande expérience et il nous a dit que, non, il n'avait jamais vu ça, il n'a jamais vu ça à l'AMP, mais il n'a jamais vu ça avant. Et il a une grande expérience. Je le sais, je l'ai appuyé comme candidature. Alors, tous les contrats ont des clauses de renouvellement. 12 ans, il n'en a jamais vu. Est-ce que M. Trudel... M. le Président, M. Trudel peut nous confirmer qu'il n'en a jamais vu non plus dans sa vie antérieure?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Écoutez, il se peut que ça existe, un contrat avec une clause de renouvellement... D'ailleurs, c'est 12 ans, en tout, avec les clauses de... puis c'était pour des entretiens puis des mises à niveau — j'allais dire «upgrades» — de la plateforme dont on fait l'acquisition. Mais, écoutez, vous pouvez jugez ici, dans l'absolu, sans contexte, sans détail, sans examen du besoin, que 12 ans pourrait apparaître trop élevé, et peut-être qu'on pourrait juger, dans l'absolu, que 12 ans est trop court. Alors, écoutez, moi, je n'ai pas de commentaire supplémentaire à faire sur ce contrat-là. Vous avez votre opinion, je suis en désaccord, mais je n'ai pas de commentaire supplémentaire.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Je le répète, un, c'est correct, un contrat de gré à gré, encore faut-il qu'il soit justifié, et, pour moi, il ne l'est pas. Deux, M. Trudel le confirme, il n'a pas vu ça, lui, des contrats, là, ni dans sa vie présente ni dans sa vie précédente, qui se renouvelaient jusqu'à 12 ans. Moi, rien que de lire ça, là, ça me surprend, je trouve ça surprenant. Je suis encore plus surpris quand je vois que, dans les investisseurs initiaux de PetalMD ainsi que le conseil d'administration, actuellement, il y a Charles Sirois. Mais je ne veux pas... M. le Président, je ne veux pas prêter des intentions à qui que ce soit, mais là il y a une accumulation de choses qui sont étonnantes. Dans les faits, c'est un produit qui est faisable par n'importe qui, qui est donné à quelqu'un qui a des liens très rapprochés avec la CAQ et qui a des clauses qui sont exceptionnelles dans la durée. Alors, si, moi, là, je faisais une plainte à l'Autorité des marchés publics, est-ce que la plainte serait recevable pour l'AMP?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre. En conclusion, parce qu'il reste 20 secondes.

Mme LeBel : Je ne pourrai pas répondre pour l'AMP, je veux dire, c'est un organisme indépendant.

M. Barrette : Justement, la question est dirigée vers l'AMP.

Le Président (M. Simard) : Non. S'il vous plaît! Mme la ministre.

Mme LeBel : Non, j'ai dit : Je ne peux pas répondre pour l'AMP. Alors, il y a consentement.

Le Président (M. Simard) : Alors, M. Trudel, très rapidement, s'il vous plaît.

M. Trudel (Yves) : Donc, au tout début... et, si vous vouliez porter plainte auprès de l'Autorité des marchés publics, il faudrait que vous le fassiez, dans un premier temps, au donneur d'ouvrage, dans un premier temps.

M. Barrette : Dans un premier temps...

M. Trudel (Yves) : Au donneur d'ouvrage, dans un premier temps.

Le Président (M. Simard) : Très bien...

M. Trudel (Yves) : Suivant...

M. Barrette : Alors, en 15 secondes...

Le Président (M. Simard) : Non, bien, c'est... Bien, vous pouvez terminer. Ça sera pris sur votre prochain temps.

M. Barrette : ...donc, en terminant : un contrat de gré à gré qui aurait pu être fait par quelqu'un d'autre, Charles Sirois, 17 ans, on sort tout le monde du marché. Alléluia! J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à mon collègue le député de Rosemont pour une période de 14 min 40 s.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Chers collègues, Mme la présidente du Conseil du trésor, monsieur de l'AMP, M. Trudel, bonjour, puis à votre personnel aussi, merci d'être là.

En ce qui me concerne, j'entame ma 26e heure de crédits en quatre jours. Ce n'est pas pour me plaindre, c'est juste pour... si je cherche mes mots, c'est un peu normal. Puis, si vous me voyez m'éclipser à un moment donné, dans la soirée, c'est normal aussi parce qu'il faudrait que je retourne chez moi à Montréal. Je dis ça pour ne pas être impoli de me lever et de partir tout à l'heure, surtout envers M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Vous allez nous manquer.

M. Marissal : Je sais, mais je reviendrai, je reviendrai. M. Trudel, mon collègue de La Pinière a parlé d'un... Bien, je m'adresse à la présidente ou au président, mon collègue de La Pinière vient de faire état d'un contrat de gré à gré qui, il est vrai, avec ses rallonges, atteint une longueur inusitée. Il y en a eu un autre, contrat de gré à gré, entre autres, là, un dont je suis au courant, qui a été donné, je crois, par Santé, pour des masques N95. En soi, on ne sera pas contre le principe d'avoir des masques. Ce que je veux dire, c'est que ce contrat a été donné de gré à gré sur 10 ans. 10 ans, ça fait quand même un bail, ça. C'est facile, pour un entrepreneur, après ça, de prévoir sur 10 ans. Et je ne juge pas le produit, là, tout le monde conviendra ici que le produit est essentiel et que les péripéties des avions chinois qui se posaient ou qui ne se posaient pas à Montréal avec le matériel, on voudrait ne pas revivre ça, si d'aventure nous devions avoir besoin une fois de plus ces masques.

Cela dit, 10 ans, gré à gré, pour un produit essentiel, là, je suis en train de me demander s'il n'y a pas un risque... et puis j'adresserais ma question à M. Trudel, qu'il n'y ait pas un risque. Et je l'invite peut-être à être prudent là-dessus, avec son équipe, en toute modestie et en toute humilité, parce qu'il ne faudrait pas que la COVID devienne une carte Passez «Go» et réclamez un contrat gré à gré. Il y a un danger là, il y a un danger que des fournisseurs qui ont des lobbyistes, ici, fassent pression auprès du gouvernement puis disent : Tu en as besoin, tu en as besoin, là, regarde, tu en as manqué la dernière fois. Puis là tout le monde a la chienne à cause de la COVID, puis on comprend. Il ne faudrait pas que ce prétexte COVID devienne une façon de faire de l'exception une forme de règle.

Alors, je ne sais pas si M. Trudel peut commenter ça, s'il a envisagé ce scénario, puisque «money is no object», évidemment, on veut sauver notre monde puis avoir du matériel, et il y a une urgence sanitaire et, parfois, un manque de matériel.

• (20 h 10) •

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la ministre.

Mme LeBel : ...peut-être commenter avant de céder la parole à M. Trudel, peut-être faire quelques commentaires. Il est très difficile... puis, moi, je viens d'un monde où on doit examiner les dossiers, on ne doit pas en faire des affirmations à l'emporte-pièce, et on ne doit pas lancer des affirmations dans les airs de cette façon-là, et on doit... Et je ne parle pas de ce que vous venez de dire, je parle de dire... Non, non, je veux le préciser pour pas... Mais c'est parce que c'est... on ne peut pas dire : Contrat de gré à gré 10 ans ou contrat de gré à gré 12 ans. Effectivement, à sa face même, ça demande d'avoir des explications et des justifications supplémentaires. Ça, je le conçois. Ce que je vous dis, c'est que je ne suis pas à même de vous les donner. Elles existent, mais je ne suis pas à même de vous les donner.

Ceci étant dit, la COVID est quand même un fait que l'on vient de traverser, donc, qui est un fait brut. On parle de masques N95. Il y a un besoin criant d'avoir des approvisionnements, aussi, suffisants et, dans ce cas-là, il y avait besoin aussi d'avoir... d'être capables d'être autosuffisants et d'attirer une compagnie sur notre territoire, qui pourrait faire en sorte que les Québécois sont prêts pour une éventuelle seconde vaque qu'on espère tous éviter.

Ceci étant dit, je vais, avec consentement, si vous avez toujours l'intention de poser votre question à M. Trudel, lui permettre de prendre la parole.

Le Président (M. Simard) : Il y a consentement, M. le député de Rosemont?

M. Marissal : ...

Le Président (M. Simard) : Il y a consentement. M. Trudel, brièvement, je vous prie.

M. Trudel (Yves) : Oui. Merci. Donc, en ce moment et dans l'exemple que vous donnez, et je n'ai, encore une fois, pas vu le contrat dont il est question, mais c'est du décret sanitaire qu'il s'agit, et le décret sanitaire devient notre cadre normatif. Comme vous le savez, nous, c'est le respect du cadre normatif que nous suivons, donc que nous surveillons, et le décret sanitaire devient le cadre normatif. Il y a des mots-clés importants, dans le décret sanitaire, que nous regardons. Donc, je ne me prononcerai pas sur le contrat dont il est question, en ce moment, parce que je ne le connais pas. Mais, dans les mots-clés, le décret a été décrété pour, avant tout, protéger la santé de la population, et ce, sans aucune autre formalité, donc...

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

M. Marissal : Je comprends qu'il n'y avait peut-être pas de réponse à donner à ma question, alors considérez donc que ma question était une forme de mise en garde que je fais, encore une fois, je le répète, en toute humilité. Mais, dans l'urgence, parfois, on l'a vu, d'ailleurs, on s'est fait avoir avec des gens qui nous ont vendu des masques, si je comprends, qui n'existaient pas. Donc, prudence, je pense que ce sera le mot-clé ici.

Rapidement, parce que j'ai un autre sujet auquel je veux... duquel je veux absolument parler ce soir, dans la précédente étude du défunt projet de loi n° 61, l'AMP avait notamment dit aux parlementaires qu'elle n'avait pas, l'autorité, les mêmes pouvoirs que le BIG, à Montréal, et c'était quelque chose qui semblait problématique. Sans avoir vu la nouvelle mouture du projet de loi, hein, évidemment, est-ce que c'est toujours quelque chose qui est problématique pour l'AMP?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Un consentement, si M. Trudel est prêt à répondre.

Le Président (M. Simard) : Donc, M. Trudel.

M. Trudel (Yves) : Merci. Tout d'abord, je me permettrai, depuis quelques mois, il se véhicule qu'à l'Autorité des marchés publics on n'a pas de pouvoir. Je vais, ceci dit, vous dire qu'on a d'importants pouvoirs. Nos pouvoirs, on les retire de l'article 22 à 24, des pouvoirs importants, dans ce cas-là, puisqu'on peut pénétrer en tout lieu, dans un bureau d'organisme public et tout autre lieu, à toute heure raisonnable...

Le Président (M. Simard) : Excusez-moi, M. Trudel. M. le député.

M. Marissal : Juste parce qu'on... je n'ai vraiment pas beaucoup de temps puis je ne voudrais pas vous faire parler pour rien. Je n'ai pas dit que vous n'aviez pas de pouvoir. Je reprenais un commentaire à l'effet que vous disiez ne pas avoir les mêmes pouvoirs, notamment, que le BIG. Est-ce que c'est toujours le cas? Est-ce que c'est toujours un problème?

Le Président (M. Simard) : M. Trudel.

M. Trudel (Yves) : Donc, on a d'importants pouvoirs et, entre autres, on a le pouvoir, à l'article 26, qui est un pouvoir de commissaire enquêteur mais pour l'examen de gestion contractuelle uniquement. Ce qu'on a besoin ou ce qu'on demande, ce n'est pas un nouveau pouvoir, c'est d'étendre ce pouvoir-là, qui existe déjà dans notre loi, à toute vérification, enquête en adjudication, en attribution et en exécution de contrat. C'est la seule grande différence qu'on a entre les deux.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Trudel. M. le député.

M. Marissal : Donc, je présume que vous avez déjà fait vos représentations auprès de la ministre, de la présidente du Conseil du trésor, mais je serais quand même curieux de connaître la réponse préliminaire de la présidente du Conseil du trésor à cette demande.

Mme LeBel : ...on a effectivement eu une rencontre. Dans le fond, ce qu'on nous demande, c'est l'ajout de pouvoir de contraintes, là, qui pourraient permettre, là, de faire des vérifications de l'enquête que le Bureau de l'inspecteur général peut avoir, qu'il a souvent, dans la forme... inclus dans les contrats, là, qui sont signés.

Donc, on a considéré ça avec beaucoup de sérieux, on a discuté, effectivement, avec l'AMP, parce que, bien que l'AMP soit un organisme indépendant, je pense que c'est son expertise, effectivement, de savoir comment ils peuvent faire un contrepoids, non seulement des mesures à plus long terme. Mais, moi, ce qui m'intéressait, dans la première discussion, parce que les discussions vont se poursuivre, naturellement, avec l'AMP, c'était de savoir, par rapport... dans le cadre d'une mouture qui découlerait du projet de loi qui n'existe plus mais qui va être remplacé par une nouvelle version, comment on pourrait faire, justement, pour ajouter le contrepoids ou rassurer les Québécois, si on veut. Mon objectif est de rassurer les Québécois...

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député...

Mme LeBel : Donc, oui, cette conversation a eu lieu, mais je ne vous donnerai pas le résultat tout de suite. À suivre.

Le Président (M. Simard) : M. le député.

M. Marissal : Oui. Il y a un sujet que je veux absolument aborder parce que c'est un sujet qui me tient à coeur, comme ancien journaliste, mais comme parlementaire, point, puis, je pense, même, comme citoyen, puis j'y ai travaillé depuis deux ans ici, depuis que j'ai été élu, c'est les lanceurs d'alerte.

Mme LeBel : Les...

M. Marissal : Les lanceurs d'alerte.

Mme LeBel : Lanceurs d'alerte? O.K. Excusez-moi, je n'avais pas...

M. Marissal : Mon micro est-il trop faible ou je ne parle pas assez fort, peut-être?

Mme LeBel : Non, il n'y a pas de... excusez-moi, il n'y a comme pas de retour ou de...

M. Marissal : Non, bien, je n'ai pas une voix qui porte beaucoup, et puis, comme je vous ai dit, après 26 heures à parler, peut-être que mes cordes vocales sont un peu usées. Votre arrivée au Conseil du trésor a été généralement bien reçue, pour plein de raisons. Je vous ai aussi souhaité bonne chance et j'étais heureux de vous y voir, surtout pour la question des lanceurs d'alerte. Parce qu'en votre qualité d'ancienne procureure à la commission Charbonneau, j'imagine que, même si, au moment où ça s'est passé, vous étiez ministre du gouvernement actuel, votre coeur a dû saigner quand même en voyant le traitement qu'on a réservé à Louis Robert. Je ne sais pas si la ministre m'écoute, parce que, là, j'ai l'impression que je parle vraiment tout seul, là.

Mme LeBel : C'est parce que... Oui, je sais. Oui, allez-y, je vous écoute. On est sur les lanceurs d'alerte, et vous parlez de mon expérience dans ce domaine.

M. Marissal : C'est bon, c'est bon. C'est un petit test. Je disais donc que...

Mme LeBel : Compte tenu de la commission Charbonneau, surtout.

M. Marissal : Mais compte tenu de la commission Charbonneau... Mais c'est parce que je parlais de votre coeur. J'aimerais ça que vous m'écoutiez, quand même.

Mme LeBel : Ah! mais non, mais mon coeur bat toujours pour vous.

M. Marissal : Bien, j'espère.

Le Président (M. Simard) : On va suspendre nos travaux. Non...

M. Marissal : Je disais que votre coeur a dû saigner en voyant... — arrêtez, vous allez me faire rougir — en voyant le sort qui avait été réservé à ce lanceur d'alerte, Louis Robert. J'ai discuté avec votre prédécesseur d'une révision de la loi, une première loi qui a été déposée, qui était un bon pas dans la très bonne direction, mais qui, d'après moi, n'a pas complété le travail. J'ai déposé moi-même un projet de loi, on en a discuté avec votre prédécesseur. Et c'est facile pour moi de retourner voir ce qu'il y avait dans la commission Charbonneau, dans le rapport final, des choses qui ne sont pas dans la loi actuelle ou qui pourraient être renforcées dans la loi actuelle, c'est-à-dire, et c'étaient les recommandations de Charbonneau : la protection de l'identité de tous les lanceurs d'alerte, peu importe l'instance à laquelle ils s'adressent — peu importe à l'instance à laquelle ils s'adressent, ça, ça veut dire qu'un lanceur d'alerte pourrait aller voir un journaliste, pas nécessairement la police ou son supérieur; l'accompagnement des lanceurs d'alerte dans leur démarche, évidemment, parce que c'est une démarche difficile, qui a des répercussions, notamment, psychologiques, financières; un soutien financier requis... lorsque requis, pardon. C'était dans le rapport que vous avez rédigé et qui découlait de vos travaux à la commission Charbonneau. Êtes-vous d'accord avec ça? Est-ce qu'on peut espérer, avant longtemps, avoir un projet de loi complété, notamment, avec ça?

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme LeBel : Donc, je ne prendrai pas le crédit des 1 700 pages du rapport de la commission Charbonneau, je ne les ai pas rédigées, mais j'étais... effectivement, je faisais partie des travaux, donc je suis d'accord, naturellement, avec les conclusions, là — c'était simplement une petite boutade.

Écoutez, je vais, en toute humilité, vous dire que je suis au courant qu'il y a des travaux qui ont été faits par le Conseil du trésor, il y a eu le rapport de mise en oeuvre de la loi qui a été adopté en 2017, qui a été déposé. Entre autres, il y a des recommandations de la Protectrice du citoyen à l'intérieur de ce rapport-là. Je peux vous dire que mon collègue, mon prédécesseur, adhérait, comme moi, aux propositions de la Protectrice du citoyen. Ça fait partie... J'ai eu, sur les démarches actuelles, je dois vous avouer, un breffage qui était partiel parce que ça fait partie des enjeux que je veux qu'on examine avec beaucoup d'attention dans le cours de mon mandat.

Vous comprendrez que, dans les dernières semaines, et ceci n'est pas une excuse, c'est un fait brutal, là, je me suis consacrée au projet de loi n° 61, aux négociations et à prendre connaissance, le plus possible, de mes nouvelles activités. On a l'intention de déposer un projet de loi qui devrait... bon, la première intention, à l'époque, était à l'automne 2020. Je ne m'y attacherai pas, compte tenu que je viens de prendre le poste, mais, oui, ça fait partie des choses qui sont sur ma liste de choses que j'aimerais faire avec le Conseil du trésor pendant mon mandat.

M. Marissal : J'en profite, je ne l'ai peut-être pas dit, pour vous offrir mon entière collaboration dans l'éventuelle rédaction... ou débat menant à une rédaction de quelque chose de plus complet, pour protéger... Je ne le dirai jamais assez à quel point c'est important, dans une démocratie saine, que les gens qui voient des choses illicites, frauduleuses ou incorrectes puissent le dire sans en subir les foudres, comme M. Robert, malheureusement, a dû le constater.

• (20 h 20) •

Mme LeBel : Ma compréhension, vous me corrigerez, c'est que le rapport qu'on a déposé, sur le rapport de mise en oeuvre, va être débattu aussi en commission parlementaire. Donc, on aura l'occasion, entre autres, à ce moment-là, d'avoir des bons échanges en vue de l'élaboration d'un futur projet de loi.

Le Président (M. Simard) : M. le député, il vous reste une minute.

M. Marissal : Une minute? Le 31 mars 2020, le Secrétariat du Conseil du trésor a émis une directive qui demandait aux entités gouvernementales de limiter leurs dépenses à ce qui est jugé, puis ça, c'est... à ce qui est jugé essentiel à la réalisation de leur mission. Ça avait, d'ailleurs, coulé dans les médias. Est-ce que c'est toujours en cours, de même que la directive touchant le gel des embauches jusqu'à nouvel ordre?

Mme LeBel : Non, ce n'est pas toujours en cours. C'était vraiment ce que... Ma compréhension... parce que je n'étais pas là à l'époque, naturellement, mais ma compréhension, c'était pendant la période où l'Assemblée nationale ne siégeait pas, parce qu'on s'était fait voter une partie de crédit limitée. Par contre, là, vous savez que mon collègue, dans sa mise à jour économique, là, les mesures du budget de mars tiennent toujours. Il a fait, même, une mise à jour de l'ordre de 5 milliards pour tenir en compte les dépenses qui ont eu lieu par la COVID. Donc, ce n'était pas... c'était simplement de dire : Bon, pendant cette période-là, limitez-vous à l'essentiel...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

Mme LeBel : ...ne commencez pas tout de suite à dépenser le budget de mars. Mais ça ne tient plus.

Le Président (M. Simard) : Merci à vous. Merci, Mme la ministre. Merci, M. le député. Bon retour à Montréal. M. le député de La Pinière, vous disposez de 20 minutes.

M. Barrette : Merci. Donc, ça fait 42. Alors, M. le Président, j'ai exposé une situation qui était, à sa face même, questionnable. Je vais en déposer une autre et je vais commencer par poser une question à la présidente du Conseil du trésor et/ou — en fait, c'est «et» — à M. Trudel, si j'ai l'autorisation de lui poser cette question-là. Il me semble que, normalement, dans l'octroi d'un contrat gouvernemental, on veut éviter des conflits d'intérêts chez la personne qui reçoit le contrat, à qui on octroie le contrat, ainsi que l'apparence de conflit d'intérêts. Ça, je pense qu'on va être d'accord là-dessus?

Mme LeBel : Pour le principe que vous venez d'énoncer?

M. Barrette : Oui, le principe.

Mme LeBel : Les conflits d'intérêts et les apparences de conflit d'intérêts? C'est un principe général.

M. Barrette : Très bien.

Mme LeBel : Maintenant, s'applique-t-il?

M. Barrette : M. le Président, en général, quand on... Puis là c'est une opinion... une confirmation que je cherche. Quand on donne des contrats de gré à gré à une OSBL, on est moins stressé, c'est un OSBL. Est-ce que ça, c'est une affirmation avec laquelle on est d'accord? Moins stressé en termes de conflit d'intérêts, et ainsi de suite.

Mme LeBel : Écoutez. M. le député de La Pinière, je ne veux pas avoir l'air de ne pas vouloir converser avec vous, là, parce que c'est toujours très agréable, mais on ne peut pas débattre de ces principes-là dans un... hors contexte. Si on veut juger d'un conflit d'intérêts ou d'une apparence de conflit d'intérêts, ça nous prend une situation factuelle. Je peux toujours bien vous dire que, de façon générale, un OSBL n'a pas... mais ce n'est pas nécessairement vrai dans tous les cas de figure, comme ce n'est pas parce qu'un contrat de gré à gré donné pour une période maximale de 12 ans... ça ne vaut pas dire qu'il n'est pas justifié. Donc, je peux bien... je suis prêt à vous suivre...

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Allons-y main dans la main.

Mme LeBel : Bien oui.

M. Barrette : Allons-y main dans la main. M. Trudel nous a dit, il y a quelques instants, que le décret sanitaire était maintenant le nouveau cadre normatif, donc on peut faire ce qu'on veut parce que c'est l'urgence sanitaire. Le ministre de la Transformation numérique, récemment, il y a à peu près deux semaines, nous a annoncé le plus gros projet de l'histoire d'ETI du gouvernement, qui est celui de l'identité numérique. Et il y a une bonne chose, dans l'État, les ministres travaillent ensemble. C'est bien correct. Et le ministre de l'Économie, lui, a récemment conclu un contrat de gré à gré avec un OSBL qui est à Gatineau. Alors, pourquoi?

C'est un contrat pour faire un laboratoire d'identité numérique. En français, là, je l'explique, je n'ai pas besoin de réponse là-dessus, sur ce que ça fait, essentiellement, c'est un laboratoire qui va avoir comme mission de tester ce qui sera mis en place. Je prends une image : on va demander à ces gens-là de hacker le système pour voir s'il a des faiblesses. Ce qui est une bonne chose à faire, c'est bien correct. On dit à une organisation qui a une compétence en cybersécurité : Lâchez-vous lousse, là, puis vous allez tester qu'est-ce qu'on fait. Bon, on s'entend, là, que cet OSBL-là va avoir accès à toutes sortes de données des citoyens, là. Ils vont tester, là puis ils vont tester à Revenu Québec, ils vont tester à la RAMQ, ils vont tester à la SAAQ, ils vont le tester partout parce que le projet d'identité numérique, c'est pour tout l'État.

Bon, là, on regarde la patente, là, l'OSBL en question qui va être un laboratoire d'identité numérique, et on constate deux choses. On constate que le ministre de l'Économie, lui, a en même temps annoncé sa volonté de faire un hub de cybersécurité en Outaouais. Ça va?

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Barrette : Bon, l'OSBL est composé de deux personnes, là. Je ne sais pas si je dois les nommer, là.

Le Président (M. Simard) : Libre à vous.

M. Barrette : C'est de connaissance publique, là : M. Antoine Normand et un autre qui a moins d'intérêt. Mais ce monsieur Antoine Normand, il est là, il est tout seul avec son collègue, là, qui a son expertise, et il a une adresse, ce gars-là. L'OSBL, là, qui bénéficie d'un contrat de gré à gré de 500 000 $ a une adresse. On a creusé et, ô surprise, à la même adresse, à la même adresse, il y a une compagnie qui s'appelle BlueBear, l'ours bleu. Même compagnie... c'est-à-dire même adresse que l'OSBL. On vérifie là-bas et on constate que le P.D.G., le président-directeur général, le CEO de la compagnie BlueBear est la même personne. C'est étonnant. Alors là, on a un contrat de gré à gré donné à un OSBL, puis ça, c'est rassurant, c'est un OSBL, mais on voit que l'OSBL a l'adresse d'une compagnie, puis celui qui dirige l'OSBL est celui qui dirige la compagnie. Et le ministre nous dit qu'il veut faire un hub de cybersécurité en Outaouais. Wou! Il me semble que, là, des drapeaux devraient se lever, des enquêtes devraient être faites. N'est-ce pas là surprenant?

Il est de connaissance commune que le stratagème de passer par un OSBL pour faire affaire avec d'autres qui sont nos amis, c'est quelque chose à proscrire. Et ça, là, je pose la question à l'AMP : N'est-ce pas quelque chose à proscrire? Parce qu'on a vu, dans l'histoire, plein de travers qui sont passés par des stratagèmes d'OSBL qui avaient des connexions, des ententes avec des compagnies.

Alors, je résume : le plus gros projet de l'histoire du Québec, la volonté du ministre de faire un hub en Outaouais, un individu qui est le P.D.G., le CEO d'une compagnie qui est à la même adresse qu'un OSBL, 500 000 $ donnés à l'OSBL. Il me semble que, là... Je comprends que l'urgence... le décret sanitaire est le nouveau cadre normatif, mais là on pousse pas mal fort, là.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Bon. Et premièrement ce n'est pas un cadre normatif, ce n'est pas le décret sanitaire.

Une voix : ...

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît! La parole est à la ministre.

Mme LeBel : Merci, M. le Président. Ce que M. Trudel a répondu tantôt, c'est que, pour le contrat particulier que mon collègue mentionnait, dans ce cas-là, le cadre normatif à examiner, c'était le décret sanitaire. Dans le cas que vous mentionnez, je pense que vous parlez de la subvention qui a été octroyée par le MEI, ce n'est pas un contrat, donc c'est une subvention, ça ne passe pas du tout par nous. Là, ce n'est pas un contrat, il n'y a pas de cadre normatif, c'est une subvention de 500 000 $ qui a été octroyée à un OBNL, vous avez raison, dans le but de réaliser des activités de démarrage. Ça a été fait dans le respect des règles en vigueur. Mais c'est une subvention qui a été octroyée par mon collègue en collaboration avec mon autre collègue qui est le ministre du Virage... Transformation numérique. Et vous pourrez les questionner sur le pourquoi du comment, mais c'est une subvention, M. le député de La Pinière, ce n'est pas un contrat de gré à gré, là.

Le Président (M. Simard) : Mme la ministre. M. le député.

Mme LeBel : À moins qu'on ne parle pas du même dossier.

• (20 h 30) •

M. Barrette : Très bien. Alors, on va creuser. Est-ce que la ministre était au courant que M. Normand, non seulement est-il un donateur à la CAQ, pour la première fois de son histoire, à un parti politique, il y a moins d'un an? Est-ce qu'elle était au courant que, derrière, il y avait BlueBear?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Je ne suis pas au courant des détails outre le fait que c'est une subvention qui a été accordée par le ministère de l'Économie. Alors, vous parlerez avec mon collègue le ministre de l'Économie. Je veux dire, il pourra vous dire si, lui, il était au courant quand il a donné la subvention. Moi, ça n'a pas à faire avec mes fonctions, là.

Le Président (M. Simard) : Merci, madame. M. le député.

M. Barrette : M. le Président, la question que je pose est simple. Était-elle au courant? La réponse, c'est non. Est-ce qu'elle trouve ça raisonnable sur le plan éthique? Et c'est l'AMP qui devrait répondre de ça, mais la ministre peut répondre, c'est elle qui est ultimement la responsable. Pas un contrat de gré à gré, une subvention, ce n'est pas grave.

Un, est-ce que c'est normal qu'on donne une subvention — je vais utiliser le terme qui semble le plus approprié — à un OSBL qui a un lien clair, net et précis — mais il a fallu creuser pour le trouver — avec une compagnie qui est dirigée par la même personne?

Le Président (M. Simard) : Mme la ministre.

Mme LeBel : Écoutez, mon cher collègue de La Pinière, bien que j'aie une très haute estime pour votre opinion, que je suis convaincue que vous avez une très grande crédibilité, je ne donnerai pas d'opinion sur des faits que vous m'affirmez ce matin... ce soir. Je ne le sais pas. Je ne suis pas au courant de cette subvention-là. Je ne sais pas si ce que vous affirmez est même exact. Je ne connais pas les circonstances de l'octroi de la subvention. Alors, vous pourrez parler avec mon collègue, mais je ne donnerai pas d'opinion sur un dossier que je n'ai pas vu.

M. Barrette : Madame... M. le Président...

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Alors, j'aimerais qu'à l'AMP, qui ont une certaine indépendance... puissent exprimer leur opinion.

Mme LeBel : Mais l'AMP ne regarde pas les subventions.

M. Barrette : M. le Président, je n'ai pas fini ma question.

Le Président (M. Simard) : Alors, veuillez poursuivre, cher collègue.

M. Barrette : M. Trudel, est-ce que c'est une bonne pratique de donner une subvention à un OSBL si on ne sait pas ou si on ne fait pas la recherche qu'il y a, derrière, une compagnie? Il y a un vase communiquant, là. Est-ce que ça, c'est une pratique éthiquement acceptable?

Le Président (M. Simard) : Merci.

M. Barrette : Monsieur...

Le Président (M. Simard) : Oui. Avez-vous...

M. Barrette : Une dernière phrase. M. Nadeau, là... M. Normand, pardon, là, il est président de la Chambre de commerce de Gatineau, c'est lui qui dirige l'OSBL, c'est lui qui dirige la compagnie, on lui donne une subvention. Ça ne lève pas un drapeau, ça, à l'AMP?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Avec consentement, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Pardon?

Mme LeBel : Consentement pour que M. Trudel réponde à la question, si...

Le Président (M. Simard) : Très bien. M. Trudel, à vous la parole.

M. Barrette : Et, juste pour que ce soit clair, pour ne pas que j'aie la réponse que je ne voudrai pas avoir, là, oubliez les noms, les compagnies, là. Le principe...

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Barrette : ...un individu reçoit de l'argent à titre d'OSBL, mais il y a une compagnie qu'il dirige en arrière.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. M. Trudel, à vous la réponse. M. Trudel, on vous écoute.

Des voix : ...

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît, à l'ordre!

M. Trudel (Yves) : Je vais revenir avec la même réponse, c'est-à-dire : Je n'ai pas vu le dossier, je ne sais pas de quoi vous...

M. Barrette : ...

Le Président (M. Simard) : Non. S'il vous plaît, monsieur...

M. Trudel (Yves) : Je ne peux pas parler d'un principe si je ne vois pas ce qu'il y a derrière. Et malheureusement je ne l'ai pas vu et je ne le connais pas, le dossier. Alors, j'ai de la difficulté à donner une réponse ou, en tout cas, la réponse que vous recherchez, puisque je n'ai pas vu, malheureusement, le dossier. Et chaque dossier est un cas.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. Trudel. M. le député.

M. Barrette : Alors là, M. le Président, ça va mal. L'autorité, O.K., «autorité» comme dans «gardien des principes», n'est pas capable de se prononcer sur une situation que je mets hypothétique : subvention gouvernementale arbitraire donnée à un OSBL puis qui donne une belle image mais qui, en arrière, a une compagnie, c'est la même personne qui dirige les deux, puis je vais en rajouter, M. le Président, pour une activité qui, en général, est faite gratuitement par tout le monde.

Allez voir en France, allez voir aux États-Unis, allez voir en Italie, allez voir n'importe où, toutes les compagnies qui ont une expertise en cybersécurité, là, faire ce genre de test là, ils le font gratuitement. Ça, c'est un fait, là. Je ne vous demande même pas d'accepter le fait, vous avez juste à le vérifier. Alors, ils le font.

Puis on a plein d'expertise là-dessus au Québec, mais non. Là, on a une subvention donnée à un organisme qui est affiché OSBL, qui est publiée, la subvention, comme étant donnée à un OSBL, et on apprend, en creusant, que c'est la même personne qui dirige la compagnie dans un contexte où le ministre dit lui-même : Je veux un hub dans l'Outaouais. Bien, coudon, là, sur ce principe-là, l'AMP n'est pas capable de se prononcer. Bien là, ça va mal.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la ministre.

Mme LeBel : Je ne suis pas d'accord avec mon collègue le député sur ses prémisses de base. Premièrement, ce n'est pas pour de la cybersécurité, c'est pour développer des identités numériques. Deuxièmement, c'est un programme normé du ministère de l'Économie et de l'Innovation avec des critères, des règles qui sont jugés par les fonctionnaires, qui donne des subventions pour des compagnies en démarrage. Et troisièmement l'AMP ne surveille pas les subventions, surveille les contrats publics en fonction de la loi sur les contrats publics. Alors, c'est un beau château de cartes que mon collègue nous bâtit, mais il part sur des prémisses qui sont inexactes.

Alors, maintenant, c'est un programme normé, c'est une subvention. Est-ce que, dans le cas de figure qu'il nous mentionne, il est exact... les faits qu'il nous rapporte sont exacts? Peut-être. Mais est-ce que ça veut dire que la subvention n'a pas été accordée selon les règles et cette compagnie ou cet OBNL là que vous décrivez n'y avait pas droit? J'en doute. Mais on n'est pas dans des bonnes prémisses, on n'est pas dans le bon carré de sable, là, du tout, du tout, si on parle de l'AMP, pas pantoute.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la présidente du Conseil du trésor. M. le député.

M. Barrette : M. le Président, je reconnais le talent juridique de la présidente du Conseil du trésor. Dans une plaidoirie, on se construit soi-même un château avec ses propres cartes, mais les miennes sont transparentes. Je ne me cache pas, je ne me cache pas derrière une plaidoirie, j'établis des faits. Ce que j'ai dit, ce sont des faits. Et je vous dirais, M. le Président, que la présidente du Conseil du trésor a remis ma parole en doute, a mis ma parole en doute. «Je ne sais pas si c'est vrai.» Bien oui, c'est vrai. C'est vrai. Vous vérifierez. Ceux qui nous écoutent vont sûrement vérifier. C'est une situation étonnante.

Et je le répète, n'importe quelle compagnie de cybersécurité va faire ça. C'est leur fun, c'est leur b.a.-ba, tester, trouver des failles. Nous, on donne 500 000 $, avec une intention avouée d'avoir un hub dans la région, pour un donateur de la CAQ qui est président de la chambre de commerce, qui se présente à la tête d'un OSBL sans que ce soit de connaissance commune qu'il est avec une compagnie de cybersécurité qui est à la même adresse. Bien là, là, je comprends, là.

Puis, en passant, M. le Président, c'est M. Trudel qui a dit que le décret sanitaire était le nouveau cadre normatif pour n'importe quoi.

Alors là, il y a une apparence au moins d'irrégularité. Et c'est de connaissance commune que les stratagèmes de passer par un OSBL pour aller ailleurs, c'est discutable, et je ne suis même pas capable d'avoir une opinion.

Je vais reposer ma question, et la seule personne qui peut répondre à ça, c'est le gardien actuel de ces principes-là, l'AMP. M. Trudel, des stratagèmes qui font qu'on passe par un OSBL pour aller vers une compagnie, c'est-tu quelque chose qui est au moins débattable?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Première des choses, M. Trudel n'a pas dit que le décret sanitaire était le nouveau cadre normatif pour tout. Il était le cadre normatif applicable dans le cas de figure que le député de la deuxième opposition nous a présenté.

Deuxième des choses, on ne parle pas de cybersécurité, on parle de développement d'une identité numérique, et les compagnies, ou les groupes, ou les organismes capables de le faire sont beaucoup plus restreints.

Troisième des choses, on parle d'une subvention, qui n'est pas sous la juridiction de l'AMP. Ceci étant dit, je suis prête quand même à consentir pour que M. Trudel puisse compléter sa réponse.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. Trudel.

M. Trudel (Yves) : Alors, effectivement, comme il s'agit d'une subvention, à la lumière de ce que vous nous rapportez, M. le député de La Pinière, l'AMP, on n'a pas de juridiction dans les subventions.

M. Barrette : ...

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît, M. le député, on va laisser M. Trudel compléter sa réponse. M. Trudel, nous vous écoutons.

M. Trudel (Yves) : Ça complétait ma réponse. Donc, l'AMP n'a pas juridiction dans ce type de dossier là tel que décrit par le député de La Pinière.

Le Président (M. Simard) : Merci beaucoup. M. le député.

M. Barrette : Ceux qui nous écoutent actuellement n'en reviennent pas, là. Ils n'en reviennent pas. Ils n'en reviennent pas. Le plus gros contrat de l'histoire du Québec, la volonté d'avoir un hub, une subvention donnée à un OSBL, qui est censé être un gage de non-collusion, non ci, non ça, la même adresse, le même individu, ça ne soulève rien.

Alors, je vais poser la question suivante à la présidente du Conseil du trésor : Est-ce qu'elle serait, ce soir, disposée à vérifier mes faits, et en faire un résumé, et demander à l'AMP son opinion sur cette situation-là, et nous donner... de nous faire parvenir la réponse écrite de l'AMP?

Le Président (M. Simard) : Je vous remercie. Mme la ministre.

Mme LeBel : Bien, la réponse va être très claire. La réponse, c'est non. Ce n'est pas un contrat, c'est une subvention, qui découle d'un programme normé d'un ministère avec des critères objectifs, de 500 000 $ pour permettre à une société d'innover et de démarrer en matière d'identité numérique. Alors, vous vous adresserez à mon collègue du ministère de l'Économie et de l'Innovation pour qu'il vous parle de son programme en innovation, ce programme particulier là. Ce n'est pas un contrat. Ce n'est pas un contrat, c'est une subvention, comme on en donne toujours, comme votre gouvernement en a donné, M. le député de La Pinière, et c'est de l'ordre de 500 000 $.

• (20 h 40) •

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Et, M. le Président, une subvention à un donateur pour faire quelque chose qu'au moins 10 autres compagnies de cybersécurité au Québec feraient gratuitement. Quand on met PetalMD avec le Laboratoire d'identité numérique, ça commence à en faire... C'est un bel été. Et vous vous... bien, M. le Président, on se cache ici — et évidemment «on» exclut la personne qui parle — derrière des règles pour ne pas avoir à s'adresser ce qui, à sa face même, pose des questions auxquelles on devrait avoir les réponses.

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : C'est parce qu'il s'agit, M. le député, d'un programme normé d'un ministère. Alors, vous parlerez avec mon collègue de l'Économie. J'allais dire de l'Éducation, c'est le e sur lequel j'ai buté, de l'Éducation. Une subvention de 500 000 $, M. le député de La Pinière. On ne parle pas d'un contrat, là. Donc, il y a... C'est un programme normé, et ces gens-là ont le droit à la subvention, ont rempli les critères du programme et ont obtenu la subvention, c'est tout. C'est aussi simple que ça. Je ne remettrai pas votre parole en doute, mais le château de cartes factuelles sur lequel vous bâtissez votre argumentaire est déficient.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre.

M. Barrette : Quelques secondes?

Le Président (M. Simard) : Ah! si vous voulez. Il vous restait à peu près 45 secondes, cher collègue.

M. Barrette : Très bien. Je laisse le soin à ceux qui nous écoutent de conclure quel château de cartes est le plus solide. Et moi, je connais la réponse à ça puis je pense que tout le monde ici la connaît. Le reste de mon temps, je vais le...

Le Président (M. Simard) : Merci. Alors, M. le député de René-Lévesque, vous avez une période de 14 min 40 s.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour, Mme la présidente du Conseil du trésor.

Au coeur de la crise de la COVID, les Québécois ont pu compter sur d'excellents journalistes pour exposer des situations problématiques. Et permettez-moi d'ailleurs de souligner l'excellent travail de M. Aaron Derfel, du Montreal Gazette. Grâce à lui, on a pu mettre au jour ce qui s'est passé au CHSLD de Herron. On a notamment découvert le passé criminel de son président.

M. Samir Chowieri, président du controversé CHSLD Herron, a été condamné, dans les années 80, pour complot pour trafic de drogue et complot pour fraude. M. Chowieri a été l'objet d'une enquête pour blanchiment d'argent dans les années 1990 sans mener à des accusations et a été reconnu coupable d'évasion fiscale en 2002.

Plusieurs personnes estiment qu'il y a des trous dans la loi. Actuellement, cinq ans après leur condamnation, les entreprises et les criminels peuvent généralement obtenir à nouveau les contrats du gouvernement. Certains croient que l'on devrait scruter le passé d'un individu d'une manière globale et ne pas se limiter au principe de cinq ans ni seulement aux antécédents judiciaires.

Alors, ma question à la ministre : Est-ce que vous êtes ouverts à procéder à de tels changements?

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la ministre.

Mme LeBel : Est-ce que... Vous allez peut-être me répondre, mais je pense qu'il y a une enquête sur ce cas-là particulier qui est menée présentement, si je ne me trompe pas. Mais je ne veux pas dire des choses que... Mais c'est une impression que j'ai, là, parce que je n'ai pas... bon.

Écoutez, c'est sûr que ce sont des choses qu'on va examiner, parce que ça peut être assez préoccupant d'entendre de telles choses. Encore une fois, je ne vais pas... Puis je ne remets pas votre parole, là. J'ai entendu comme vous les articles de journaux qui le relataient. Je n'ai pas de connaissance personnelle, mais c'est sûrement des choses qu'on va prendre en considération.

Et vous parlez du fait de pouvoir octroyer des contrats à des gens qui ont un passé criminel, là. J'imagine que c'est le fond de votre question.

M. Ouellet : ...

Mme LeBel : Je veux juste être sûre de la comprendre pour y répondre, mais je pense que c'est ce que j'ai cru comprendre de votre...

M. Ouellet : Oui. C'est parce qu'après cinq ans, si, effectivement, on a obtenu un pardon et tout est O.K., on ne peut pas reculer. Donc, la grande question qu'on a, notamment avec ce qui s'est passé : Est-ce qu'on devrait aller un peu plus loin? Est-ce qu'on pourrait effectivement permettre...

Mme LeBel : La question d'examiner la probité des gens à qui on pourrait accorder un contrat ou, en tout cas, dans ce cas-là, la mécanique étant... Écoutez, ce sont des choses qu'on va très certainement examiner, là, mais je n'ai pas le... Cette situation-là, je pense qu'il va falloir la creuser. Puis je pense qu'il y a une enquête qui a cours là-dessus, mais je ne veux pas me...

M. Ouellet : Il y a une...

Mme LeBel : Hein?

Une voix : ...

Mme LeBel : Une enquête policière. Oui, c'est ça. Ça fait que je veux...

M. Ouellet : Oui, c'est ça, sur ce qui s'est passé.

Mme LeBel : Oui, c'est ça. C'est pour ça.

M. Ouellet : Je comprends que vous ne voulez pas commenter le cas en question, mais, si on se recule, cette personne-là s'est trouvée à la tête d'un organisme qui s'occupait de nos personnes âgées et, dans certains cas, des gens qui avaient besoin de soins. Ça ne s'est pas résulté comme étant un excellent succès. Et malheureusement on doit faire enquête pour savoir ce qui s'est véritablement passé.

Or, lorsqu'on a creusé, on s'est rendu compte qu'il y avait quand même un passé criminel à l'individu et on se dit : Est-ce que cette personne-là aurait dû être à la tête... Puis je dis «cette personne-là»... Je pose la question : Est-ce qu'il y en a d'autres à la tête de ce genre d'organisation là ou qui pourraient être là? Et donc est-ce que cette fameuse règle des cinq ans ne pourrait pas être revue pour s'assurer qu'effectivement on puisse aller plus loin puis avoir une meilleure information pour juger si, oui ou non, ces personnes-là peuvent recevoir des subsides de l'État pour opérer dans le secteur privé ou parapublic dans le domaine des services, entre autres, notamment pour des services directs aux citoyens?

Mme LeBel : Bien, je serais portée à vous dire que ce cas-là de figure, là, on va le prendre pour avéré pour des fins de discussion, sans conclure qu'il l'est ou non, là, parce que je veux être très prudente en matière d'enquête policière, mais c'est sûr que c'est assez préoccupant pour qu'on puisse se poser la question, là. Mais effectivement, là, de façon très... moi, je suis d'accord avec vous qu'il faut se poser la question.

Maintenant, on pourra voir, par la suite des événements, qu'est-ce qu'on va faire avec ça, surtout quand on aura les résultats de l'enquête policière. Ça va peut-être nous permettre encore d'avoir encore plus de détails pour voir s'il y a des pistes de solution ou des moyens d'action pour nous, le cas échéant, là, effectivement.

Mais je ne peux pas vous répondre de façon plus précise, là, mais effectivement c'est assez préoccupant, ce genre de situation là. On parle du droit de contracter avec le gouvernement, naturellement, là, je veux juste le préciser. Mais on va l'examiner, mais on verra bien avec ce cas de figure là pour nous aider à réfléchir.

M. Ouellet : Dans les médias, c'est l'ancien président-directeur général de l'Autorité des marchés publics qui a soulevé cette possibilité-là d'aller un peu plus loin que les cinq ans, M. Gallant.

Mme LeBel : ...je sais, je suis au courant, mais je vous dirais qu'à la lumière de ce cas de figure là c'est une question qui est très légitime de se poser puis on va l'examiner. Je ne suis pas en train de m'engager à la changer, mais ça vaut la peine d'y réfléchir, ça, c'est certain.

M. Ouellet : O.K. Est-ce que je peux demander si l'AMP est d'accord avec cette orientation-là possible?

Mme LeBel : ...de consentement...

M. Ouellet : Est-ce que ça serait utile que l'AMP ait cette possibilité-là pour le futur?

Le Président (M. Simard) : M. Trudel.

Mme LeBel : Consentement.

M. Trudel (Yves) : En fait, on va collaborer avec le Secrétariat du Conseil du trésor. S'il y avait un éventuel amendement législatif possible, je suppose que nous serons consultés, et nous allons prendre la voie utile, là, pour... Puis ça me rejoint un peu, ce que vous dites. Effectivement, ça mérite d'être regardé, et, si c'est fait de ce côté-là et on me consulte, je vais aller dans le même sens que mes collègues du Secrétariat du Conseil du trésor iront, tout à fait.

M. Ouellet : C'est-à-dire que, si elle dit que ce n'est pas une bonne chose, vous allez dire que ce n'est pas une bonne chose?

M. Trudel (Yves) : Ça mérite...

M. Ouellet : Ou, si vous dites que ça serait peut-être une chose à obtenir, vous allez essayer de la convaincre, je dis «essayer de la convaincre», vous allez essayer de plaider comme étant une chose peut-être à regarder et à obtenir? Parce qu'on cherche juste à bonifier le coffre à outils, là, on n'est pas en train de dire que le travail... Parce que l'organisation, elle est jeune. On apprend avec ce qui se passe puis malheureusement des fois on apprend avec des situations qui ont été dramatiques, pour lesquelles il y a effectivement une enquête.

Mais j'aimerais savoir si l'AMP serait un fervent défenseur de cette volonté d'avoir plus de pouvoirs ou plus d'outils pour aller encore un peu plus dans la protection des marchés publics et notamment dans la protection des individus qui ont à faire avec des gens qui, malheureusement, ont des antécédents criminels.

Malgré le fait qu'il a obtenu un pardon, les antécédents sont quand même questionnables dans le cas qui nous suit, là. C'était une maison pour personnes âgées, c'étaient des soins de santé à offrir à des personnes qui étaient... je ne veux pas dire en fin de vie, mais qui étaient dans les derniers chemins de leur vie. Et, quand on voit tout le scandale et tout ce qui s'est passé, l'enquête va nous dire tous les détails, on se rend bien compte que ce genre d'individu n'aurait jamais dû avoir ça entre les mains et d'avoir des sous de l'État pour être capable d'opérer ce genre d'organisation.

Le Président (M. Simard) : M. Trudel.

M. Trudel (Yves) : En fait, l'AMP, on aurait beaucoup d'intérêt à collaborer avec le SCT, par exemple, ou un comité quelconque pour voir et analyser ce qui s'est passé dans ce cas-là et voir les possibilités que ça ne se reproduise plus, le cas échéant, si c'est une décision qui serait prise à la lumière de l'analyse de ce type de cas là.

M. Ouellet : ...je me cherche des alliés.

Mme LeBel : Mais c'est vrai que, de façon générale, de dire qu'une personne qui a des antécédents criminels depuis x nombre d'années ou qui a bénéficié d'un pardon devrait être autorisée à contracter avec l'État, bien, c'est un principe très large, parce qu'il y a des cas de figure, quel est l'antécédent criminel aussi, c'est quoi qui est arrivé dans le passé. Est-ce que c'est une faculté affaiblie, qui est, théoriquement, un antécédent criminel pour lequel on pourrait avoir obtenu un pardon — là, vous tombez un peu dans mon ancienne vie, là — et qui pourrait faire en sorte de ne pas nécessairement faire en sorte que vous êtes un mauvais administrateur d'une société quelconque ou vous disqualifie automatiquement de contracter avec l'État?

Donc, comme règle générale, la règle des cinq ans nous met une certaine zone tampon. Mais, si on voudrait penser peut-être à l'éventualité d'élargir cette zone-là, bien, je pense qu'il y a plus de questions à se poser que de dire : C'est cinq ans, c'est 10 ans, c'est 15 ans. Il y a de la modulation à faire en fonction des antécédents criminels. Si quelqu'un a été condamné, a purgé sa sentence, a été pardonné, il est théoriquement pardonné par la société, donc il reprend... il a tous ses droits comme un citoyen ordinaire. Est-ce que ça tiendrait la route de la charte? Est-ce que ça tiendrait la route de la...

Là, ce que je vous dis, c'est que c'est une situation suffisamment préoccupante pour qu'effectivement on se pose la question, mais c'est quand même assez difficile, là, comme situation, ça peut apporter d'autres questionnements. Mais, si vous me parlez du fait qu'est-ce que ça vaut la peine de se poser la question, la réponse, c'est très certainement oui.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

M. Ouellet : Parfait. Merci beaucoup. Les analystes à l'Autorité des marchés publics doivent demander l'autorisation pour accéder aux bases de données policières. C'est vrai, ça?

M. Trudel (Yves) : ...

M. Ouellet : L'AMP, là, vous devez demander l'autorisation pour accéder aux bases de données policières si vous voulez avoir... accéder... Quand vous faites votre enquête, là, pour avoir accès aux données, vous devez demander une autorisation?

• (20 h 50) •

M. Trudel (Yves) : Non, on n'a pas accès aux bases de données policières.

M. Ouellet : O.K. Est-ce que ce serait une bonne chose de vous permettre d'avoir cet accès-là?

M. Trudel (Yves) : Présentement... En termes d'enquête, vous voulez dire?

M. Ouellet : Oui, oui, oui.

M. Trudel (Yves) : Présentement, au moment où on se parle, avec notre jeune histoire, je ne vois pas la pertinence d'obtenir des renseignements d'une base policière en ce moment, si ce n'est que je collabore avec des autorités policières, et, s'ils peuvent me partager le renseignement, ils me le partagent. Mais d'avoir accès aux bases de données policières...

M. Ouellet : Bien, c'est ça...

M. Trudel (Yves) : ...dans le contexte où ma mission est la surveillance des marchés publics, je n'en vois pas la pertinence au moment où on se parle.

M. Ouellet : Mais, si vous avez des interrogations sur des individus, vous demandez à la police s'il y a des informations existantes sur... puis eux, ils vous les transmettent, c'est ce que je comprends?

M. Trudel (Yves) : Non.

M. Ouellet : Non?

M. Trudel (Yves) : Non. Si j'avais des soupçons eu égard à un individu sur son comportement criminel, à ce moment-là, je transmettrais l'information à l'UPAC, et l'UPAC ferait le travail qu'ils ont à faire.

Mme LeBel : ...policier, maintenant l'UPAC a l'autorisation d'avoir accès à toutes les bases de données policières qu'elle a besoin pour faire son enquête au niveau criminel.

Il faut comprendre que l'AMP surveille les cadres normatifs contractuels, donc ne surveille pas les incidents criminels qu'un individu... Donc, par contre, dans une vérification de l'AMP, si elle en vient à trouver des éléments, parce que c'est quand même des enquêteurs, ça peut être des... pas «ça peut être», mais c'est des enquêteurs d'expérience qui peuvent détecter quelque chose, alors l'UPAC fera son travail. Et, l'UPAC, sa zone de surveillance, c'est la collusion, c'est la corruption surtout et... pas la collusion, parce que ça, c'est le...

Une voix : ...

Mme LeBel : ...Bureau de la concurrence, merci. C'est la corruption. Donc, c'est l'UPAC qui fera... Et l'UPAC, surtout maintenant qu'elle est une entité policière, qu'elle est un corps policier, a tous les outils nécessaires pour le faire.

Mais effectivement ma connaissance du mandat de l'AMP... Je vois mal, moi aussi, quel est le type de situation qui pourrait faire en sorte que l'AMP ait besoin d'une telle situation.

Présentement, quand on parle de la vérification dans le but de décerner une autorisation, c'est l'UPAC qui la mène, de toute manière, présentement et qui va chercher les renseignements. Si un tel renseignement pourrait faire en sorte qu'on dit : Cette personne-là ne devrait pas avoir l'autorisation de contracter, c'est l'UPAC qui y a accès, et l'UPAC a accès aux banques de données policières. Je veux juste être sûre qu'on se comprend, là.

M. Ouellet : Je suis juste raccord à ce que M. Gallant avait aussi énoncé dans les médias.

Mme LeBel : Mais mon... M. Gallant avait dit que l'AMP devrait avoir accès aux banques de données policières? Vous me surprenez, le connaissant.

M. Ouellet : Les banques de données policières pour vérifier sur les antécédents de cinq ans.

Mme LeBel : Pour?

M. Ouellet : Avoir accès aux données de base... les bases de données policières pour enquêter sur les données de cinq ans.

Le Président (M. Simard) : ...cher collègue, parce qu'on a de la difficulté à vous entendre.

Mme LeBel : Oui, je m'excuse. Le son...

M. Ouellet : Oui, excusez. Avoir accès aux bases de données policières pour étudier sur les antécédents sur cinq ans. Mais ce n'est pas grave, on...

Mme LeBel : Oui, mais ça, c'est un renseignement qu'ils pourraient demander, là, savoir est-ce qu'il y a des antécédents dans les cinq dernières années. Ça, c'est un renseignement qui est accessible, là, je veux dire...

M. Ouellet : Mais vous devez le demander, c'est ça?

Mme LeBel : Oui.

M. Trudel (Yves) : ...de l'UPAC, de la vérification de l'UPAC. Lorsque les gens font une demande d'autorisation de contracter avec l'État, bien, c'est l'UPAC qui fait la vérification utile, et ils vont nous envoyer un avis favorable ou défavorable. Défavorable, ça veut dire qu'il y a eu quelque chose à l'intérieur de cinq ans, des cinq dernières années en principe, et donc ils vont nous envoyer un avis à cet effet-là.

Mme LeBel : ...à l'aide des plumitifs criminels, qui sont disponibles dans tous les palais de justice, d'aller rechercher si un individu a été condamné dans les cinq dernières années. Vous n'aurez pas s'il a obtenu un pardon, par contre, là.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Je pense que le député de La Pinière va aller vérifier si le monsieur de Gatineau a été condamné.

En terminant, pas beaucoup de temps...

Mme LeBel : Les accès sont restreints dans les palais de justice présentement, par contre, en raison de la COVID. Elle a le dos large, dit-il.

M. Ouellet : Mme la présidente du Conseil du trésor, vous nous avez dit que le projet de loi n° 61 ne reviendrait pas tel qu'on l'a connu, vous avez fait mention que l'article 50 a été rejeté. Mais, lorsqu'on a rejeté l'article 50, votre prédécesseur a introduit l'article 50.1, qui donnait aussi l'opportunité aux municipalités de contourner les règles applicables en matière d'octroi de contrats. Vous faites non.

Mme LeBel : Personne n'aura l'opportunité de contourner quoi que ce soit.

M. Ouellet : Donc, je comprends bien...

Mme LeBel : C'est le plus précis que je serai.

M. Ouellet : Donc, cet amendement-là, qu'on a vu apparaître pour contrecarrer le 50...

Mme LeBel : Bien, je pense qu'en rejetant le projet de loi n° 61 au complet je rejette l'article 50.1 dans la foulée. Donc, je peux vous dire que, dans la prochaine mouture, personne n'aura l'autorisation de contourner quoi que ce soit.

M. Ouellet : Oh! donc aucune règle environnementale, aucune expropriation...

Mme LeBel : Non. J'ai dit : En matière d'intégrité... Non...

M. Ouellet : Ah! bien, c'est ça. Bien là...

Mme LeBel : Excusez-moi. Ah! vous avez... Merci de me permettre de préciser, de ne pas gazouiller que j'ai dit une ineptie.

M. Ouellet : J'étais déjà dessus.

Mme LeBel : Mais, non, non, je parle toujours en référence à l'article 50 et 50.1, qui parlait de la loi sur les contrats publics, on se comprend.

M. Ouellet : O.K. Parce que votre prédécesseur nous avait dit qu'il avait fait un bon bout de chemin en retirant l'article 50, mais, quand on a vu réapparaître l'article 50.1, on était déjà haut dans les airs, on a resté haut parce que, pour nous, ce qui était permis pour le gouvernement ne l'était plus, mais on permettait aux municipalités de le faire.

Donc, ce que je comprends, je ne l'ai pas vu encore, mais je sais qu'il existe toujours, le projet de loi n° 61, cette possibilité-là ne devrait pas se retrouver dans la nouvelle mouture qu'on devrait étudier ensemble au courant de l'automne et qu'on pourrait adopter avant Noël, tel que vous le désirez, ou, si...

Mme LeBel : On continue... Je vous dirais qu'on a terminé la session parlementaire, là, mais, si on avait continué en commission parlementaire, l'article 50.1, je pense que c'est quelque chose que je peux affirmer...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

Mme LeBel : ...l'article 50.1 aurait subi le même sort que l'article 50. C'est parce qu'on était en cheminement, là. Mais il n'y aura pas de pouvoir habilitant de contourner la loi sur les contrats publics, là. Je vais le dire de cette façon beaucoup plus précise là.

Le Président (M. Simard) : Très bien.

Mme LeBel : Et il n'y aura pas non plus de pouvoir de contourner les normes dans d'autres...

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. Merci. Je cède maintenant la parole au député de La Pinière. Vous disposez de 18 min 30 s, cher collègue.

M. Barrette : Très bien.

Mme LeBel : ...ensemble, cher collègue.

M. Barrette : C'est normal.

Mme LeBel : Oui. L'entrée et la sortie.

M. Barrette : Puis là je ne ferai pas de commentaire supplémentaire sur la fin de la soirée. Alors, M. le Président, puisqu'on termine l'étude des crédits là-dessus, je vais aller... je vais poser... je vais aborder, je dirais, un sujet à propos duquel... Quand on est ministre, on a des orientations. Et, quand on a un vécu comme la ministre, je suis sûr qu'elle a une approche qui lui est propre et elle a une expérience qui va probablement l'amener à vouloir laisser un héritage, une empreinte dans son ministère.

Introduction pour dire que la ministre, M. le Président, a un ministre délégué qui, avant qu'elle arrive en poste, a eu à faire adopter le projet de loi n° 14, O.K.? Le projet de loi n° 14, on l'a appuyé sur le fond, pas nécessairement sur la forme, mais sur le fond. Le projet de loi n° 14, c'est la transformation numérique.

Mme LeBel : ...numéro, moi, je m'excuse.

M. Barrette : Je comprends. C'est la transformation numérique. Je comprends très bien ça.

J'ai critiqué une chose, puis là j'aimerais... Et ça, ma question vise la globalité de la position que la ministre va prendre dans l'octroi des contrats, M. le Président. J'ai critiqué une chose, et c'est la chose suivante. Dans le projet de loi n° 14, le ministre délégué, qui est sous la responsabilité de la ministre, et son prédécesseur ont mis en place une affaire qui est critiquée par la Vérificatrice générale, à savoir l'augmentation croissante, et surprenante, et inquiétante du nombre de contrats de gré à gré. J'ai donné deux exemples, à date, très discutables. Alors, Mme la ministre, suivez-moi, vous allez voir, c'est bien simple.

Dans la loi n° 14, on a fait quelque chose de relativement nouveau, pas totalement nouveau, mais on l'a porté encore plus loin dans des secteurs nouveaux. Le président, notre président ce soir, je pense qu'il était au projet de loi n° 14, je pense, oui. Alors, ça va lui rappeler des souvenirs. Dans le projet de loi n° 14, ils ont fait quelque chose qui n'est pas inédit mais qui prend une grande ampleur, et c'est la chose suivante : on ne fait plus d'appel d'offres pour des budgets... pour des contrats de millions de dollars.

Dans le projet de loi n° 14, là, de mémoire, je le dis de mémoire, là, il y a plus de 150 millions de dollars de contrats qui vont être octroyés. Comment? On fait des appels de qualification et d'intérêt, intérêt, qualification en même temps. Ça, c'est unique, on ne fait pas ça normalement. On fait appel d'intérêt, voir s'il y a du monde qui serait intéressé à participer à ça, qualification après, appel d'offres. Là, on fait intérêt, qualification en même temps. Bingo! Et ceux qui sont intéressés et qualifiés... Ça, en français, ça veut dire : Je suis intéressé à le faire puis j'ai la capacité de le faire. C'est correct, ça, de faire ça, mais la suite est surprenante et elle est ample.

La suite, c'est que les entreprises qualifiées ont accès à ce que le ministre appelle un catalogue de projets. Il y en a pour à peu près 150 millions. Et là les ministères et organismes qui ont à oeuvrer dans le cadre de la transformation numérique peuvent faire des ententes gré à gré.

Là, j'aimerais bien ça savoir quelle est la vision de la ministre sur ça. J'aimerais bien ça le savoir, parce que la ministre a cette responsabilité-là. J'ai fait la démonstration, ce soir, de deux cas étonnants. Je ne demande pas à la ministre d'être étonnée. Tout le monde qui nous a écoutés ont été étonnés. Puis je ne lui demande pas de revenir là-dessus. Mais là on est dans une ère que je pourrais qualifier, pour certains entrepreneurs, d'agréable par le gré à gré. Est-ce que la ministre, elle, souhaite changer les critères d'octroi d'adjudication de contrats? Parce que, là, sous sa responsabilité, M. le Président — elle en hérite, ça a été mis de l'avant par son prédécesseur — là, on arrive dans une ère, là : Aïe! c'est le fun, là, on se qualifie puis on fait du gré à gré. Mais on sait que le gré à gré, parfois, ça peut mener à des dérives.

• (21 heures) •

Le Président (M. Simard) : Mme la ministre, à vous la parole.

Mme LeBel : Écoutez, le projet de loi n° 14 a 12 articles, cher collègue, je ne vois... hein, 12. Je ne vois pas à quel article de l'article... du projet de loi n° 14 on se donne le pouvoir de faire du gré à gré. Je voudrais bien discuter avec vous, mais, sans blague, là, je...

M. Barrette : ...

Le Président (M. Simard) : Non, M. le député, on va laisser la ministre terminer.

Mme LeBel : Oui, hein, et c'est un projet de loi que je comprends qui a été dûment débattu à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, et adopté, alors je pense qu'il est en toute transparence. Mais j'essaie de vous suivre, en toute honnêteté, mais je n'arrive pas à vous suivre et je ne vois pas où vous allez, là, dans vos affirmations, parce que...

Le Président (M. Simard) : Très bien.

M. Barrette : M. le Président...

Le Président (M. Simard) : Aviez-vous terminé, Mme la ministre?

Mme LeBel : Oui, absolument.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

Mme LeBel : Je veux juste comprendre, pour répondre...

M. Barrette : Oui. Et nous avons habilement consommé un bon deux minutes. Je vais le répéter. Ce n'est pas dans le projet de loi, c'est sûr, mais ça a été longuement débattu, c'est établi, c'est connu. Et c'est bien plate, mais, à un moment donné, il faut la prendre, ma parole, là. C'est connu, vous étiez là, M. le Président, vous pouvez le confirmer. Alors, le projet de loi n° 14 fait en sorte que, dans l'exercice de transformation numérique, il va être possible pour les entreprises de répondre à des appels d'intérêt, qualification, c'est de nature publique, à la suite desquels il y a un catalogue de contrats qui va être octroyé, et ça se fait de gré à gré.

Je me suis levé, peut-être que la présidente du Conseil du trésor n'a pas noté cette question-là, mais je l'ai posée, la question, au salon bleu, spécifiquement là-dessus, à propos d'une compagnie qui n'avait pas été, pour des raisons administratives, qualifiée, pour des raisons circonstancielles. Je me suis levé en Chambre, il y a eu des articles là-dessus, alors, ça, là, ça ne sert à rien de débattre de ça, c'est un fait. Alors, je pose une question, M. le Président, non pas sur ça, mais je demande à la ministre quelle est sa position sur le futur. A-t-elle l'intention de changer d'une façon significative l'adjudication des contrats, changer les critères d'adjudication? Parce que c'est actuellement... Puis elle va l'apprendre, si elle ne le sait pas encore, dans l'industrie, c'est une des choses les plus demandées, laisser de côté le plus bas soumissionnaire conforme.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la ministre.

Mme LeBel : Oh! là, vous amenez une autre notion, parce que vous n'étiez pas... Première des choses, je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites avec le projet de loi n° 14, là, il ne vient pas donner au gouvernement le pouvoir de faire des contrats de gré à gré. Je pense qu'on fait des amalgames qui ne sont pas le cas. Premièrement. Deuxième chose, est-ce que... vous me demandez si je dois, si je... C'est parce que vous faites des affirmations, M. le député de La Pinière, puis vous me demandez d'acquiescer à vos affirmations. Je n'acquiesce pas à vos affirmations, première chose.

Deuxième chose, si vous me demandez si j'ai l'intention de modifier la loi sur les contrats publics et de changer les critères d'octroi des contrats publics, de façon générale, la réponse est non. Par contre, si vous me parlez... si vous me dites que la règle du plus bas soumissionnaire, est-ce que c'est une règle qui mérite d'être réexaminée, la réponse est oui. Et c'est, d'ailleurs, une recommandation de la commission Charbonneau. Parce que la règle du plus bas soumissionnaire, dans certains cas de figure, dans certains cas de figure, est une règle qui permet, justement, d'avoir de la collusion, le marché peut s'organiser, on peut faire une rotation de soumissions. C'est facile pour les soumissionnaires de s'organiser pour avoir un prix, de mettre un prix plus haut, en disant : Les autres, vous serez au-dessus de moi. D'ailleurs, une des règles est de dire que, si une soumission est 20 % plus élevée ou 20 % plus basse qu'une estimation, ça peut... ça doit lever un drapeau rouge.

Donc, la règle du plus bas soumissionnaire, c'est une règle qu'il faut, je pense, à un moment donné, se donner la peine de réexaminer. Si vous me demandez si j'entends toucher à la loi sur les contrats publics, dans ses principes fondamentaux d'intégrité des marchés, la réponse est non. Maintenant, je n'acquiesce pas à vos affirmations sur le projet de loi n° 14.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Bien, j'invite la ministre à faire ses devoirs et de bien écouter quand je fais une intervention. Je n'ai pas dit que le ministère voulait faire des contrats de gré à gré à répétition. J'ai dit que le ministère, dans le dossier de la transformation numérique, donnait le loisir aux ministères et organismes de faire des contrats de gré à gré avec les organismes qualifiés. Point à la ligne. Je n'ai pas dit : Le ministère de... son ministre délégué allait faire ça. J'ai dit : Les entités qui sont dans le périmètre gouvernemental pouvaient faire des contrats de gré à gré avec les qualifiés. Si ça, ce n'est pas assez clair, ce n'est pas grave, M. le Président, on en reparlera plus tard. Je suis sûr que la ministre va prendre le temps de faire ses devoirs.

Mme LeBel : Vous faites référence, cher collègue...

M. Barrette : Je n'ai pas terminé, je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Simard) : ...M. le député, oui.

M. Barrette : Alors là, sur la question de l'octroi, la ministre nous a dit qu'elle n'a pas l'intention d'attaquer... pas d'attaquer, mais de s'adresser aux principes de la LCOP. Je comprends ça, je comprends très bien ça. Au moment où on se parle, on a un gouvernement qui permet de passer un petit peu à côté, dans l'exemple que j'ai donné. Maintenant, il y a beaucoup de pression, actuellement, du milieu économique pour changer cette règle-là. J'aimerais savoir quelle est la position de la ministre là-dessus.

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la Présidente du Conseil du trésor.

Mme LeBel : Parfait. Alors, vous faites un amalgame avec le projet de loi n° 14, alors que l'article auquel vous faites référence, M. le député de La Pinière, dans la loi sur les contrats publics, c'est l'article 48, qui permet qu'un contrat pour l'acquisition de biens ou de services infonuagiques pourrait être conclu de gré à gré. Mais, chose assez étonnante et intéressante, c'est un article qui a été adopté en 2016. Si je ne m'abuse, en 2016, c'est votre gouvernement qui était au pouvoir.

Ceci étant dit, quand on parle de la règle du plus bas soumissionnaire, je l'ai mentionné, c'est une règle qu'on a examinée, à la commission Charbonneau, puis effectivement cette règle-là, qui peut être très appropriée dans des contrats de biens, peut... est quelque chose qu'il ne faut pas mettre en compte. Mais c'est une règle, et ça a été dit... On a même eu la règle du prix médian, qui est une règle qui a été étudiée comme étant une règle peut-être encore plus facile, plus... pas facile, mais plus sécuritaire pour être capable de protéger les marchés publics.

Le problème, avec la règle du plus bas soumissionnaire, bien qu'elle semble logique, tout le monde veut payer le meilleur prix possible, le plus bas possible pour un bien ou un service... peut entraîner, justement, des facilités d'organisation pour le marché, des facilités de collusion. Et on l'a vu, on a étudié la ville de Montréal, pour les 15 dernières... pour les 15 années qui précédaient le mandat de la commission, et... dans les 15 ans, les prix ont été poussés à la hausse justement parce que la règle du plus bas soumissionnaire permettait à ces gens-là de faire des soumissions de complaisance, des soumissions de rotation, de passer un après l'autre et d'augmenter très sensiblement les prix, ce qui faisait en sorte que la ville, dans ses facteurs d'évaluation de ses propres estimés, prenait les valeurs du marché et était poussée tranquillement vers le haut.

Donc, oui, il y a une problématique en matière de collusion et de marchés pour la règle du plus bas soumissionnaire. Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, mais il faut se poser sérieusement la question : Est-ce que cette règle-là est appropriée dans tous les types de contrat? Est-ce qu'il ne faut pas avoir des outils plus diversifiés pour être capable de faire... de prendre des règles d'octroi de contrat différentes pour ne pas faire en sorte que le marché s'organise, entre autres je vous disais la règle du prix médian, qui a été étudiée dans d'autres juridictions, qui pourrait être appropriée? Est-ce que c'est dans tous les cas de figure? La réponse est non. Est-ce que la règle du plus bas soumissionnaire est une règle absolue qui nous permet d'avoir dans tous les cas le plus bas prix? On l'a vu dans le passé, en l'étudiant, que ce n'est pas toujours le cas. Donc, la question se pose.

Mais la question fondamentale : Est-ce que j'ai l'intention de toucher aux principes fondamentaux de la Loi sur les contrats d'organismes publics pour mettre en jeu l'intégrité des marchés? La réponse est non.

Le Président (M. Simard) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Barrette : Bien, moi, je suis très heureux de constater que la ministre, M. le Président, est capable de se poser des questions elle-même et d'y répondre. Ça me fait plaisir, ça montre une certaine lucidité et introspection. Je n'ai pas posé cette question-là. Ça fait que la ministre peut bien s'autoposer la question puis s'autorépondre, c'est parfait, je lui ai demandé quelle était son opinion et sa vision sur ce qu'elle allait avoir à faire avec les adjudications de contrat, changer ou non les règles. Elle m'a répondu, et c'est parfait. Je comprends donc qu'elle a l'intention de s'y adresser. Et s'y adresser n'implique pas qu'on va altérer, modifier, attaquer les principes fondamentaux de la LCOP. Alors, j'ai ma réponse, et c'est parfait comme ça.

Mme LeBel : Je vais y réfléchir...

M. Barrette : Bon, maintenant, M. le Président...

Le Président (M. Simard) : Excusez. Vous souhaitiez réagir, Mme la ministre?

Mme LeBel : Oui. Bien, j'ai l'intention d'y réfléchir parce que c'est quelque chose qu'effectivement j'ai étudié, dans mon passage pendant la commission Charbonneau, qui a été soulevé par la commission, puis, si je ne m'abuse, ça fait partie des recommandations du rapport. Alors, c'est quelque chose sur lequel je vais certainement réfléchir.

• (21 h 10) •

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

M. Barrette : Excellent! Alors, je vais revenir sur le projet de loi n° 61, O.K., pour, d'abord et avant tout, rectifier un fait. Puis je ne sais pas si le secrétaire du Conseil du trésor peut lui aussi rectifier ce qui a été dit hier. Hier, quand j'ai parlé du centre mère-enfant du CHUS Estrie, hein, j'ai dit : Le Trésor va arrêter. Et j'ai posé une question bien simple puis je répéterai la question tantôt, mais la réponse qui m'a été faite par la ministre, sur la suggestion évidente de son secrétaire, c'est que les plans avaient changé. Bien, j'ai vérifié aujourd'hui, puis les plans n'ont pas changé.

Mme LeBel : ...mètres carrés de plus.

M. Barrette : Mme la ministre...

Mme LeBel : La portée.

M. Barrette : Oui, mais la...

Le Président (M. Simard) : Attendez. Mme la ministre, est-ce que vous souhaitez que M. Ducharme...

Mme LeBel : Oui, on peut laisser M. Ducharme... Mais effectivement il y a eu des changements.

Le Président (M. Simard) : Est-ce qu'il y aurait consentement afin que M. Ducharme puisse s'adresser à nous?

M. Barrette : Bien sûr, avec plaisir.

Le Président (M. Simard) : M. Ducharme, pour les fins de nos travaux, auriez-vous l'amabilité de vous présenter, s'il vous plaît?

M. Ducharme (Éric) : Éric Ducharme, secrétaire du Conseil du trésor. Il y a 93 mètres carrés de plus, ce n'est pas beaucoup. Par ailleurs, on a réduit la grandeur des stationnements pour permettre des espaces de soins plus grands, donc, à des coûts plus élevés.

M. Barrette : Oui. Alors, essentiellement, c'est le même projet...

M. Ducharme (Éric) : Donc, la portée a changé.

M. Barrette : ...c'est le même nombre de lits. Vous avez raison que 93 mètres carrés, ce n'est rien, ce n'est absolument rien, là, 93 mètres carrés...

Le Président (M. Simard) : On va y aller en ordre, il y a des gens qui doivent retranscrire nos travaux...

M. Ducharme (Éric) : Non, non, mais il y a 93 mètres carrés de plus, mais...

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît, M. Ducharme, on va y aller dans l'ordre. On a tout le temps qu'il faut. M. Ducharme, à vous la parole.

M. Ducharme (Éric) : Il y a seulement 93 mètres carrés de plus. Par ailleurs, il y a des espaces stationnement qui ont été modifiés en espaces-soins. Ça fait qu'au global il y a plus d'espaces soins plus coûteux.

Le Président (M. Simard) : Merci. M. le député.

M. Barrette : Les espaces soins, M. le Président, c'est les espaces... les espaces soins, ce sont les lits, des lits de soins intensifs, et ainsi de suite, il n'y en a pas plus, il n'y en a pas moins.

Alors, j'ai posé une question bien simple, j'aimerais bien avoir la réponse aujourd'hui. Vous avez... Le projet a été arrêté, M. le Président, parce que, supposément, il coûtait trop cher. Puis c'est vrai qu'il coûtait plus cher que ce qui avait été estimé, parce qu'il y a eu un seul soumissionnaire. Tout a été arrêté. On a mis un frein à un projet dans... pour lequel la pépine était littéralement dans la cour, là, on avait commencé à creuser. Bon, ça, là, c'était, là, dans la première partie du dernier mandat. Imaginez le retard qu'on a pris, hein, par le Conseil du trésor. Et j'ai posé une question simple, j'aimerais bien ça avoir la réponse. Je comprends qu'on ne divulguera pas des prix, là, je pense qu'on... vous ne voudrez pas le faire. Mais, en proportion, combien plus cher le contrat d'aujourd'hui a-t-il été octroyé par rapport au premier qui était déjà trop cher?

Le Président (M. Simard) : Merci. Mme la ministre.

Mme LeBel : Je ne suis pas à même de faire le calcul. Je peux...

M. Barrette : Bien, c'est pour ça que je pose la question à...

Le Président (M. Simard) : S'il vous plaît!

Mme LeBel : Je peux confirmer que le contrat d'aujourd'hui revient plus cher que le contrat qui a été annulé... pas annulé, parce qu'il n'y a jamais été octroyé, là, ça, je peux le confirmer. À l'époque, il y avait un seul soumissionnaire, qui était de beaucoup plus élevé que 20 % que l'estimé qu'il y en avait, ça, c'est clair. Donc, premier drapeau rouge qui se lève : un seul soumissionnaire, 20 % au-dessus. Mais, oui, puis hier peut-être que je me suis mal exprimée, effectivement, ce n'est pas le projet... pas les plans qui ont changé, mais il y a eu certaines modifications, qu'on vient d'expliquer, aussi les délais. Mais peut-être que mon... le Secrétaire du Conseil du trésor peut donner le pourcentage. Vous disiez, à peu près, de plus...

M. Barrette : M. le Président...

Le Président (M. Simard) : Oui.

M. Barrette : M. le Président, que l'un ou l'autre qui connaît les chiffres prenne son téléphone, il y a une calculatrice dans le téléphone : on met le chiffre d'aujourd'hui divisé par le chiffre d'en bas moins un, ça donne le pourcentage. Alors, vous avez un projet qui coûtait 20 % trop cher, que vous avez arrêté lorsque la pépine était là...

Mme LeBel : ...

M. Barrette : Là, c'est à moi, là. Plus de 20 %, c'est correct, mais je le sais que c'est pour ça que vous l'avez arrêté. Le projet actuel n'est pas 20 % plus lourd que le prochain... que le précédent. Et le projet actuel, il est marginalement différent par rapport à celui qui a été arrêté et — bien là, c'est parce que... là, laissez-moi mon expertise, là — et ce projet-là est plus cher que le trop cher. Je ne vous demande pas les chiffres, je ne vous demande pas de révéler quoi que ce soit, je vous demande de me donner les ratios. Comment plus cher est-il que le plus cher, précédent?

Le Président (M. Simard) : Merci, M. le député. Mme la ministre, à moins que M. Ducharme ne souhaite y répondre.

M. Barrette : Ait calculé?

Le Président (M. Simard) : M. Ducharme, je vous vois en train de calculer, mais comme on est loin, là...

M. Ducharme (Éric) : 75 %.

M. Barrette : Le contrat actuel...

Le Président (M. Simard) : 73 %. M. le député.

M. Barrette : ...est 75 % plus cher que le contrat qui était trop cher de plus de... 20 %, 30 %?

Mme LeBel : Ah! J'ai dit plus de 20 %, mais c'est un «ball park», là. C'est un «ball park».

M. Barrette : Plus de 20 %. Il est 75 % plus cher que celui qui était...

Le Président (M. Simard) : En conclusion.

M. Barrette : Vous allez me laisser finir, M. le Président.

Le Président (M. Simard) : Bien, il reste... il vous reste 10 secondes.

M. Barrette : Parfait. Quand je vous ai dit hier que ce projet-là, toute cette situation-là de 61, était impressionniste, vous en avez un fichu de bon exemple. Et on s'en vient en récession et on a un PQI qui n'est pas budgété au complet.

Le Président (M. Simard) : Très bien. Merci beaucoup. Alors, cela met fin, M. le député, à nos travaux pour ce soir. Je vous remercie vraiment pour votre précieuse collaboration tout le long de nos travaux.

Document déposé

En terminant, je dépose les réponses aux demandes de renseignements généraux et particuliers.

Et compte tenu de l'heure, comme notre commission a accompli son mandat, j'ajourne nos travaux jusqu'au 25 août, où nous entreprendrons un nouveau mandat. Merci à tous ceux qui nous ont écoutés. Belle fin de soirée à tous et à toutes.

(Fin de la séance à 21 h 16)

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