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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 18 janvier 2018 - Vol. 44 N° 195

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 141, Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières


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Table des matières

Auditions (suite)

Groupe de recherche en droit des services financiers

Mouvement des caisses Desjardins

Fédération des chambres immobilières du Québec (FCIQ)

Option Consommateurs (OC)

Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM)

Association de l'industrie des guichets automatiques ATM (ATMIA)

Barreau du Québec

Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. (ACCAP)

Autorité des marchés financiers (AMF)

Mémoires déposés

Intervenants

M. Jean-Denis Girard, président suppléant

M. Carlos J. Leitão

M. Nicolas Marceau

M. François Bonnardel

Mme Rita Lc de Santis 

*          Mme Raymonde Crête, Groupe de recherche en droit des services financiers

*          Mme Cinthia Duclos, idem

*          M. Guy Cormier, Mouvement des caisses Desjardins

*          M. Hubert Thibault, idem

*          M. Alain Hade, idem

*          M. Yvan-Pierre Grimard, idem

*          Mme Pénéla Guy, FCIQ

*          M. Patrick Juanéda, idem

*          M. Martin Fortier, idem

*          M. Christian Corbeil, OC

*          Mme Annik Bélanger-Krams, idem

*          M. Alain Paquet, idem

*          M. Andrew J. Kriegler, OCRCVM

*          Mme Claudyne Bienvenu, idem

*          M. Chris Chandler, ATMIA

*          M. Nicolas Le Grand Alary, Barreau du Québec

*          Mme Annick Demers, idem

*          M. Paul M. Martel, idem

*          Mme Lyne Duhaime, ACCAP

*          M. Robert Dumas, idem

*          M. Jean St-Gelais, idem

*          M. Louis Morisset, AMF

*          M. Patrick Déry, idem

*          M. Philippe Lebel, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-cinq minutes)

Le Président (M. Girard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à toutes les personnes de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils mobiles, leurs appareils cellulaires.

La commission est réunie aujourd'hui afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 141, la Loi visant principalement à améliorer l'encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d'argent et le régime de fonctionnement des institutions financières.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Auditions (suite)

Le Président (M. Girard) : Donc, ce matin, nous entendrons les groupes suivants : dans un premier temps, le Groupe de recherche en droit des services financiers de l'Université Laval, le Mouvement Desjardins, la Fédération des chambres immobilières du Québec et le groupe Option Consommateurs.

Je veux rappeler à chacun des groupes que vous allez disposer chacun d'une période de 10 minutes pour votre exposé, et, par la suite, nous allons procéder, pendant une trentaine de minutes, à des échanges avec les différents groupes parlementaires, en commençant par le gouvernement, l'opposition officielle et la deuxième opposition.

Donc, sans plus tarder, je veux souhaiter ce matin la bienvenue à nos représentants du Groupe de recherche en droit des services financiers de l'Université Laval. Vous disposez donc de 10 minutes. Je vais vous demander de vous présenter et de nous présenter votre exposé.

Groupe de recherche en droit des services financiers

Mme Crête (Raymonde) : Bonjour à tous. Je me présente, Raymonde Crête, professeure associée et directrice du Groupe de recherche en droit des services financiers de la Faculté de droit de l'Université Laval. Je suis accompagnée de Me Cinthia Duclos, candidate au doctorat, professeure et membre de ce groupe de recherche à cette même faculté. On est très heureuses d'être parmi vous aujourd'hui et on vous remercie pour cette invitation.

Comme vous avez pu le lire dans notre mémoire, nos commentaires portent principalement sur l'encadrement déontologique et disciplinaire de trois groupes d'acteurs en épargne collective : premièrement, les courtiers en épargne collective ou entreprises de courtage; deuxièmement, les représentants de ces courtiers, c'est-à-dire les individus qualifiés qui agissent directement auprès des clients; et, troisièmement, les dirigeants de ces entreprises de courtage.

Dans ce secteur, les courtiers et leurs représentants offrent des services de conseil, d'achat et de vente de titres dans des fonds d'investissement que l'on désigne, dans le langage courant, par les termes «fonds mutuels». Ces services s'inscrivent dans le cadre plus général des services d'investissement qui couvrent les services suivants : les services de conseil, de gestion de portefeuille, de négociation de valeurs mobilières et de planification financière. Dans ce contexte, plusieurs de nos commentaires touchent, en fait, l'ensemble des services d'investissement.

Pour la présentation ce matin, mes commentaires porteront sur les deux aspects suivants de la réforme envisagée. Je traiterai premièrement de l'abolition éventuelle de la Chambre de la sécurité financière, la CSF, et du rapatriement des pouvoirs de celle-ci au sein de l'Autorité des marchés financiers, l'AMF, et du Tribunal administratif des marchés financiers, le TMF.

Le deuxième aspect de la réforme que j'aborderai a trait au processus d'instruction des affaires disciplinaires par le TMF. Mais avant de traiter de ces deux aspects, j'aimerais expliciter deux principes directeurs qui nous ont guidés dans nos travaux et qui permettent de mieux saisir et d'évaluer l'encadrement actuel et à venir des acteurs en épargne collective et plus généralement l'encadrement des services d'investissement.

Voici ces principes directeurs. Le premier principe directeur est le suivant : les services d'investissement sont des services de nature professionnelle. À l'instar des services rendus par les professionnels régis par le Code des professions du Québec, tels les avocats, notaires et comptables, les services d'investissement offerts par différents intermédiaires, tels les courtiers en épargne collective, sont en effet considérés comme étant de nature professionnelle. Ce caractère professionnel s'explique par la spécificité des relations entre les intermédiaires financiers et leurs clients. Ces relations se caractérisent notamment par le degré élevé de confiance des clients envers les intermédiaires et les risques importants d'atteinte aux intérêts des consommateurs dans ce secteur d'activité hautement complexe et diversifié. Les autorités régulatrices reconnaissent cette spécificité et, du même coup, la nature professionnelle de ces services en mettant en place un environnement juridique rigoureux de nature civile, administrative, déontologique, disciplinaire, pénale et criminelle.

Pour terminer sur ce premier principe directeur, il est important de souligner que, même si nous établissons un parallèle avec la réglementation applicable aux professionnels, aux membres des ordres professionnels régis par le Code des professions, cette réglementation professionnelle, qui découle du Code des professions, ne couvre en principe que les personnes physiques. En comparaison, le droit des services financiers a une portée plus large puisqu'il vise tant les personnes physiques, les entreprises et certains dirigeants, et que ce droit des services financiers impose à ces personnes-là une obligation d'inscription et des normes de conduite qu'on considère comme étant relativement rigoureuses.

• (9 h 40) •

Le deuxième principe directeur consiste à favoriser l'adoption d'une approche individuelle et organisationnelle dans l'encadrement des professionnels qui offrent des services d'investissement. Dans l'encadrement juridique de ces acteurs, que ce soit en matière déontologique, disciplinaire, civile ou pénale, il est important que l'autorité d'encadrement puisse intervenir de manière globale et cohérente, en tenant compte non seulement de la conduite individuelle des représentants, mais également de l'environnement organisationnel dans lequel ces représentants exercent leurs activités.

Par exemple, en cas de manquements professionnels d'un représentant, l'autorité de contrôle devrait pouvoir vérifier si ces manquements de nature individuelle font ressortir par la même occasion des manquements d'ordre organisationnel dans la surveillance exercée par les supérieurs au sein de l'entreprise où le représentant exerce ses activités. Dans ces circonstances, l'autorité de contrôle devrait pouvoir sanctionner l'entreprise de courtage et possiblement certains membres de la direction de celle-ci, si l'autorité constate l'existence de failles dans les mécanismes de conformité de l'entreprise.

En tenant compte de ces principes directeurs, voici quelques commentaires sur le premier aspect qui porte sur l'abolition de la CSF et le rapatriement de ses pouvoirs au sein de l'AMF et du TMF. Même si l'on reconnaît les avantages que peut offrir la CSF à titre d'organisme d'autoréglementation, notamment sur le plan de son expertise, de la participation des pairs et de son rôle actif en matière de discipline, nous sommes d'avis que l'encadrement actuel comporte deux faiblesses qui pourront être corrigées, du moins en partie, par les changements proposés dans le projet de loi. Ces deux faiblesses résultent, premièrement, de la compétence trop restreinte conférée à la CSF et, deuxièmement, de la multiplicité des autorités d'encadrement.

Qu'en est-il de cette première faiblesse, la compétence trop restreinte de la CSF? À la lumière de l'approche individuelle et organisationnelle préconisée, on constate que la CSF ne peut agir que sur le plan individuel dans le secteur de l'épargne collective. En effet, la CSF ne peut agir qu'à l'égard de représentants et non à l'égard des dirigeants et des entreprises de courtage au sein de laquelle les représentants exercent leurs activités. Or, conformément à l'approche préconisée, nous sommes d'avis que l'abolition éventuelle de la CSF et le rapatriement de pouvoirs au sein de l'AMF et du TMF permettront à l'AMF et au TMF d'agir de manière globale et cohérente à l'égard des trois groupes d'acteurs en épargne collective. Outre cet avantage, l'AMF et le TMF continueront de bénéficier d'une expertise et d'une compétence multidisciplinaire pour intervenir dans les différents secteurs des services financiers.

La deuxième faiblesse de l'encadrement actuel résulte de la multiplicité des autorités d'encadrement. Comme vous pouvez le constater à la lecture du schéma des autorités que nous vous avons remis ce matin, plusieurs autorités peuvent intervenir dans l'encadrement des services d'investissement. Or, cette multiplicité d'autorités nous apparaît problématique en raison notamment des risques de confusion, de chevauchements et de lourdeurs administratives et financières. Face à cette situation, l'abolition éventuelle de la CSF et le rapatriement de pouvoirs au sein de l'AMF et du TMF pourront s'avérer opportuns en minimisant ces risques. Par ailleurs, nous sommes conscientes que l'abolition de la CFS ne réglera pas tous les problèmes liés à la multiplicité des autorités.

Avant de conclure, voici maintenant un très bref commentaire sur le deuxième aspect de la réforme, à savoir le processus d'instruction des affaires disciplinaires par le TMF. Dans l'optique individuelle et organisationnelle préconisée, on recommande de modifier le projet de loi afin d'élargir la portée de la définition des termes «affaires disciplinaires» de manière à donner ouverture à la procédure spéciale d'instruction pour entendre les plaintes disciplinaires portées non seulement contre les représentants, tel que prévu dans le projet de loi, mais également contre les courtiers et leurs dirigeants.

En conclusion...

Le Président (M. Girard) : Je vous demanderais de conclure rapidement. Merci.

Mme Crête (Raymonde) : Oui. En conclusion, sous réserve des pistes de réflexion et d'action que l'on soumet dans notre mémoire, nous considérons que le projet de loi n° 141 propose des avenues prometteuses en vue d'améliorer l'encadrement du secteur financier de manière à ce que celui-ci contribue à assurer la protection du public et l'efficience des marchés. Sur ce, je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, Mme Crête. Donc, nous allons maintenant passer à la période d'échange. Nous allons débuter du côté du gouvernement. La parole est à vous, M. le ministre.

M. Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, mesdames, merci beaucoup d'être là. J'apprécie beaucoup votre présentation qui était très claire, et vraiment ça nous a donné, je pense, à nous tous ici, ainsi à ceux qui nous écoutent, une très bonne vue d'ensemble de ces questions qui sont complexes, mais en même temps, malgré la complexité, vous les avez ramenées à un niveau qui est très, très compréhensible pour tout le monde.

En effet, vous avez mentionné l'aspect, donc, de la confusion qui peut exister dans le marché étant donné le «setup» actuel de notre processus d'encadrement, AMF, chambre, CSF, etc. Peut-être vous pouvez commenter sur cette confusion-là. Qui est confus? Est-ce que ce sont les consommateurs qui sont confus? Est-ce que c'est l'industrie elle-même qui est un peu perdue dans ces choses-là? Est-ce que c'est les deux?

Mme Crête (Raymonde) : Alors, à ce sujet-là, les problèmes de confusion, dans le cadre des recherches que l'on a menées, on peut trouver plusieurs indices de confusion, tant auprès des consommateurs, mais aussi des personnes régulées, c'est-à-dire ceux que nous avons rencontrés, les représentants des courtiers. Et, à ce sujet-là, j'aimerais passer la parole à Me Duclos qui pourrait, en guise d'introduction à ce problème de confusion, expliquer le schéma et les tableaux que nous avons préparés pour vous.

Le Président (M. Girard) : Me Duclos.

M. Duclos (Cinthia) : Bonjour. Donc, pour mieux comprendre le risque de confusion, il est important de considérer l'ensemble des autorités d'encadrement et non seulement l'AMF, le TMF et la Chambre de la sécurité financière. On dit souvent : Une image vaut mille mots. C'est pourquoi nous vous avons transmis, là, les tableaux, notamment le schéma 1. Ces tableaux et le schéma illustrent de façon éloquente la multiplicité, la diversité et la complexité des différents intermédiaires financiers et des autorités responsables de leur encadrement. Le schéma 1 et le tableau 2 présentent les liens entre les différentes autorités d'encadrement, les responsabilités de chacune de ces autorités-là selon les différents prestataires de services d'investissement, les chevauchements, de même que les brèches potentielles dans la surveillance globale de ces prestataires de services d'investissement.

Il faut ajouter à ce portrait déjà complexe les observations que nous avons faites au regard des services d'investissement en tant que tels. Et donc je vous invite à regarder le tableau 1. Ce tableau 1 met en relief la similitude, voire, je dirais même, la convergence entre les services offerts par les prestataires de services d'investissement. Vous remarquerez que le conseil est un élément central de tous ces services et qui est commun à tous ces services.

Donc, devant ce portrait d'ensemble, on peut aisément comprendre qu'il y a une confusion dans l'esprit des consommateurs, tant à l'égard des produits offerts, que des prestataires de services d'investissement, que des autorités qui encadrent ces prestataires. Et on remarque également que cette confusion peut être présente pour les intervenants dans l'industrie. Je vous invite pour l'étude...

• (9 h 50) •

Mme Crête (Raymonde) : D'accord. Est-ce que vous me permettez de compléter sur la question de la confusion? Alors, en 2010, nous avons publié les résultats d'une étude empirique que nous avons menée auprès des acteurs qui interviennent dans le domaine des conseils en placement, plus particulièrement les courtiers en placement. À l'époque, on les appelait les courtiers de plein exercice.

Alors, cette étude empirique que nous avons menée, nous avons interrogé des représentants de courtiers en placement, de même que nous avons tenu deux groupes de discussion, des «focus groups» qui réunissaient, dans un premier temps, des dirigeants des firmes de courtage, à savoir des directeurs de succursales et des responsables de la conformité. Le deuxième groupe de discussion que l'on a formé était composé des enquêteurs de l'ACCOVAM. À l'époque, en 2008, quand on a tenu ces entrevues et les groupes de discussion, l'ACCOVAM, cet organisme qui régit les courtiers en placement, ce nom-là a été changé quelques mois plus tard. Nous, on a fait nos entrevues au printemps 2008, et, en juin 2008, l'ACCOVAM est devenue l'OCRCVM, c'est-à-dire l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières.

Donc, cette étude avait pour but de mieux connaître la profession de courtier en placement et du point de vue des conseillers en placement et d'essayer de voir quels sont les facteurs organisationnels, individuels ou juridiques, quels sont les facteurs qui peuvent influer sur leur comportement. On a mené donc des entrevues semi-dirigées, et l'objectif c'est de voir quels sont les facteurs qui peuvent influer sur le comportement de ces personnes-là en vue de déterminer si ces facteurs peuvent contribuer ou non au respect de la réglementation. Donc, dans le cadre de ces entrevues, on avait des thèmes de discussion, et un des thèmes portait sur l'appréciation du point de vue de ces conseillers, leur appréciation des autorités de contrôle et des mesures d'encadrement, et les résultats à ce sujet sont très... je dirais, les verbatim que l'on a reproduits dans cet ouvrage sont très parlants.

Concernant la multiplicité des autorités d'encadrement, les auteurs de l'ouvrage disent, écrivent ceci... On disait... au lieu d'utiliser le terme «multiplicité», on disait «diversité des autorités régulatrices». On disait : «Ça sème une confusion importante auprès des représentants.» Un représentant s'exprime comme suit, il dit : «Je vais vous avouer honnêtement, moi qui est très "compliant" — alors on est vraiment dans le verbatim, "compliant", il dit — je suis tout mêlé dans tous les AMF, ACCOVAM, IDA.» Il dit : «Je ne sais plus qui surveille qui puis qui fait quoi.»

C'est aussi ce que soulèvent les enquêteurs de l'ACCOVAM lors des rencontres de groupe, les «focus groups», et ici, encore une fois, c'est très parlant. On dit ceci, c'est le verbatim des enquêteurs, ils disent : «L'encadrement juridique pour un représentant — ils disent — je pense que c'est le plus beau casse-tête qu'on ne peut pas avoir au pays. Ils sont surveillés par tout le monde. Ils ne savent plus par qui ils sont encadrés : l'ACCOVAM, l'AMF, l'association des courtiers en fonds communs de placement, les ACVM, les commissions des 12 provinces, les corps policiers puis toutes sortes d'autres organisations, la Chambre de la sécurité financière.» Ils disent : «Je pense que l'encadrement juridique des représentants est un peu trop large pour le moment.»

Et je ne veux pas m'attarder trop longtemps, mais les enquêteurs nous parlaient des clients qu'ils recevaient, les clients victimes de manquements professionnels. Ils parlaient du travail plus difficile pour les enquêteurs et, à la fin, ils nous disent : Quant aux effets négatifs de la diversité des autorités, on nous dit ceci, que plusieurs des interlocuteurs favoriseraient une uniformisation des mesures de contrôle. Il dit : C'est certain que, si l'on mettait AMF, ACCOVAM, CSF, IQPFF tous dans le même panier, là, ça aurait de l'allure.

Alors, je termine là-dessus. On aurait d'autres commentaires à vous faire sur le chevauchement possible, parce qu'il y a confusion, mais aussi chevauchement, mais je crois que...

M. Leitão : C'est très bien. Merci. Merci beaucoup, c'est très clair. Et, en effet, ayant opéré dans cette industrie pendant un certain nombre d'années, oui, vos propos raisonnent. Ça m'amène des souvenirs.

Maintenant, une chose que... je ne sais pas si on va avoir le temps ou pas, mais en tout cas, moi, ça m'intéresse d'explorer un peu la complémentarité entre protection du consommateur, ce que nous faisons, et aussi protection du public, parce qu'à mon avis, c'est un peu plus large. Et, quand on parle d'encadrement de l'industrie des services financiers, je pense que l'aspect protection du public, donc pour s'assurer que l'industrie fonctionne comme il se faut, pour que le public, donc le contribuable, ne soit pas appelé éventuellement, comme ça a été le cas dans d'autres pays après 2008, à intervenir pour soutenir des entreprises qui étaient défaillantes...

Est-ce que vous pourriez élaborer un petit peu plus sur cette question de l'importance, vous l'avez soulevé d'ailleurs, de maintenir la confiance du public dans l'industrie pour que l'industrie puisse fonctionner bien et donc, dans ce sens-là, protéger le public d'éventuelles défaillances?

Mme Crête (Raymonde) : En vue de répondre à votre question, est-ce que vous voulez entendre, par la convergence entre protection des consommateurs ou protection des épargnants et protection du public, est-ce que vous pensez, par exemple, à l'inclusion de l'efficience des marchés?

M. Leitão : Oui.

Mme Crête (Raymonde) : D'accord. Est-ce que... En fait, c'est que la réglementation des services financiers entend, oui, protéger les consommateurs, d'une part, et, d'autre part aussi, favoriser l'efficience des marchés. Et quand on parle de l'efficience des marchés, c'est qu'on pense entre autres à l'efficience opérationnelle, on pense à l'efficience d'allocation, mais l'efficience opérationnelle, ça signifie aussi... ça signifie de mettre en place une réglementation qui, dans son application, n'aura pas pour effet d'entraîner des coûts qui vont dépasser les avantages qu'on pourrait retirer de la mise en place de cette réglementation.

Donc, si notre réglementation est devenue trop lourde et trop coûteuse pour les personnes assujetties, en l'occurrence les institutions financières, et que ces coûts dépassent les avantages qu'on en retire, c'est à ce moment-là qu'on doit tenir compte de ces deux volets de la réglementation.

Je demanderais à Me Duclos de compléter.

M. Duclos (Cinthia) : Oui. Bien, je voudrais...

Le Président (M. Girard) : Me Duclos.

M. Leitão : Brièvement, parce que je pense que...

M. Duclos (Cinthia) : Oui, certainement.

M. Leitão : ...notre président a des questions aussi à poser, il me semble.

Mme Duclos (Cinthia) : Je vais compléter brièvement sur la confiance, l'importance de la confiance dans les services d'investissement notamment. Il faut savoir que la confiance dans ces services-là, elle est centrale. Elle est au coeur de la relation entre l'entreprise, le représentant et l'épargnant.

Donc, si la réglementation en place ne permet pas de maintenir cette confiance, on peut craindre que les épargnants ne veulent plus retenir ces services d'investissement. Et donc, là, c'est important de donner tout ce qu'on peut pour que cette confiance-là puisse être maintenue dans le contexte, là, actuel. Voilà.

Le Président (M. Girard) : Vous me permettez, M. le ministre, de poser une question? Donc, à titre de député...

Une voix : ...

• (10 heures) •

Le Président (M. Girard) : Pardon? Oui, oui, c'est sur le temps du gouvernement.

À titre de député, notre priorité, c'est de travailler avec nos électeurs, nos citoyens dans chacun de nos comtés. Moi, je représente les gens de Trois-Rivières, et ma principale préoccupation, c'est la protection des épargnants. Hier, j'ai posé une question sur un épargnant qui se sent lésé, à savoir quel est le processus pour porter plainte, et tout ça. Et là, bien, ce qu'on se rend compte, c'est qu'on doit porter plainte à la CSF et à l'Autorité des marchés financiers. Hier, on me disait : Ça fait deux filets de sécurité, ça fait encore plus de protection, et on me disait : Bien, c'est mieux, ça protège encore mieux l'épargnant.

Moi, je trouve que c'est deux enquêtes, c'est deux endroits où on doit porter plainte. Vous en pensez quoi, pour la protection des épargnants, en fonction de ce que le projet de loi n° 141 propose, en raison principalement de votre schéma I, que je vois la grande complexité de tout le système? Le pauvre épargnant s'y perd dans tout ça. Donc, est-ce que le projet de loi n° 141 va amener l'épargnant à... ça va lui faciliter la vie lorsqu'il y aura une plainte, et est-ce que le règlement pourra être plus facile?

Mme Crête (Raymonde) : En ce sens-là, le rapatriement des pouvoirs, au sein de l'AMF et du TMF, vont simplifier la tâche de l'épargnant, qui va s'adresser en premier, en fait, à l'AMF pour déposer sa plainte. Et c'est l'AMF qui va analyser cette plainte-là, et il n'y aura pas, donc, deux organismes qui vont analyser la même plainte parce qu'il pourrait arriver que l'AMF, recevant une plainte, actuellement, recevant une plainte concernant un représentant de courtier en épargne collective, redirige la plainte à la CSF. Or, il pourrait y avoir un chevauchement, ici, et une difficulté dans les enquêtes qui vont être menées, peut-être, tant par l'AMF que par la CSF. Le fait de concentrer le dépôt de la plainte et la mise en marche d'une enquête sur cette plainte-là, à notre avis, va faciliter la tâche pour les enquêteurs, mais, en même temps, du point de vue du consommateur, de l'épargnant, va aussi le rassurer, en ce sens qu'il va s'adresser à cet interlocuteur-là uniquement.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup...

M. Duclos (Cinthia) : Si vous me permettez...

Le Président (M. Girard) : Ah! malheureusement, ça met fin à notre bloc au niveau du temps du gouvernement. Je vais maintenant passer la parole au groupe de l'opposition officielle avec le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, mesdames. Merci d'être là, merci pour votre mémoire, merci pour votre éclairage. Peut-être, première question... En fait, j'ai constaté, comme vous, que le schéma était complexe. Je peux concevoir aisément qu'en retirant une boîte de ce schéma ça va être moins complexe. Mais le jugement que je porterais, puis j'aimerais vous entendre, c'est que ça va demeurer un schéma complexe, hein? Est-ce que, donc, vous considérez que c'est un pas dans la bonne direction? Est-ce que vous considérez que c'est un pas suffisant?

Mme Crête (Raymonde) : À ce sujet-là, et on le reconnaît expressément dans notre mémoire, c'est une avenue qui va permettre de simplifier en partie l'ensemble des autorités d'encadrement, mais on reconnaît que ça ne règle pas toutes les questions liées à la multiplicité des encadrements. On va conserver d'autres autorités qui interviennent dans le domaine des services d'investissement, par exemple, le MFDA, qui va intervenir à l'égard des courtiers qui exercent des activités tant au Québec qu'à l'extérieur du Québec.

M. Duclos (Cinthia) : Dans les services d'épargne collective.

Mme Crête (Raymonde) : Oui. Oui.

M. Marceau : Donc, il y aura encore du travail à faire.

Mme Crête (Raymonde) : Mais, à ce sujet...

M. Marceau : O.K....

Mme Crête (Raymonde) : Pardon.

M. Marceau : Deuxième chose, vous avez, vers la fin de votre présentation ou, enfin, il y a quelques minutes, parlé de complexité, lourdeur, dans le fond, l'ensemble des règles qui doivent être respectées par une personne ou une entreprise qui voudrait agir dans ce secteur-là, donc cette complexité, cette lourdeur sont telles que ça crée de l'inefficacité, que ça... en tout cas, ça engendre des coûts pour les entreprises qui opèrent dans ce secteur-là. J'irais même jusqu'à dire possiblement que ça crée des barrières à l'entrée, hein, ça rend plus difficile, pour une entreprise, de rentrer dans ce marché.

Moi, ça, quant à moi, ce sont toutes les caractéristiques d'un marché qui va être moins concurrentiel. Autrement dit, encadrement déficient ou trop lourd, ça mène à un secteur qui est moins concurrentiel. Est-ce que vous considérez, pour bien connaître ce secteur-là, là, que les coûts, les frais de gestion, par exemple, là, dans le secteur financier, sont trop élevés ou y a-t-il des indications que ces frais sont trop élevés, puis qu'il y a moins de concurrence que ce qui serait désirable en raison possiblement de l'encadrement trop lourd et trop complexe?

Mme Crête (Raymonde) : En réponse à cette question, nous, en tant que juristes, ce ne sont pas des questions que l'on a documentées, c'est-à-dire qu'on n'a pas étudiées de façon spécifique, on n'a pas fait d'étude sur les coûts imposés aux institutions financières. Notre angle d'analyse était principalement de nature réglementaire ou de nature juridique. Les coûts dont on a pu avoir connaissance, ce sont les témoignages que l'on a eus de la part des institutions financières, des représentants des employés des institutions financières, qu'on a rencontrés dans des entrevues, qui nous ont parlé des coûts, par exemple, non pas seulement les coûts financiers directs, mais, par exemple, les questions de chevauchement au moment des inspections concomitantes entre, par exemple, l'AMF et la MFDA ou l'AMF avec la CSF. Donc, là-dessus, je dirais qu'on ne peut pas répondre à votre question de façon précise parce que ça sort de notre champ de compétence.

M. Marceau : O.K. Je comprends. Autre question : Bon, là, la représentation permet de... enfin, porte un jugement sur l'opportunité de faire disparaître la Chambre de la sécurité financière. Maintenant, vous n'êtes pas sans savoir que la même discussion porte aussi sur la Chambre de l'assurance de dommages. Je suis bien conscient que vous n'avez pas élaboré sur la Chambre de l'assurance de dommages dans votre présentation, mais est-ce qu'on peut comprendre que le raisonnement que vous nous avez donné s'applique également à la disparition de la Chambre de l'assurance de dommages? Est-ce qu'on pourrait dire que le niveau de complexité dans le secteur de l'assurance de dommages et équivalent et que, donc, de faire disparaître une boîte, dans le cas de l'encadrement en assurance de dommages, ça va aussi mener à des bienfaits?

Mme Crête (Raymonde) : On peut raisonnablement penser que les problèmes que l'on a soulevés sur la multiplicité des autorités s'appliqueraient, avec les adaptations nécessaires, à l'abolition de la Chambre de l'assurance de dommages. Mais, nous, notre mémoire n'en traite pas du tout.

M. Marceau : Je sais. O.K. Bon, puis pour revenir à la disparition de la Chambre de la sécurité financière, bon, il y a des partisans de l'autoréglementation qui disent que les bienfaits de cette autoréglementation-là sont plus grands que les coûts que vous avez décrits, bénéfices, par exemple, en termes d'adhésion des membres assujettis, disait hier une personne qui était ici, elle nous disait que, dans la mesure où les gens participent à l'élaboration des règles par un dialogue, il va y avoir une plus forte adhésion, et donc un plus grand respect des normes. Elle disait aussi que la justice par les pairs, en tout cas, qui crée une très forte pression sur les gens qui exercent un métier puis que... ça peut être plus efficace encore qu'une justice qui est exercée par un tribunal, là, qui part d'en haut puis qui distribue des sanctions aux fautifs. Comment mesurer l'importance des bienfaits de l'autoréglementation comme... Enfin, comment peser, là? Qu'est-ce qui vous permet de dire : Les bienfaits de l'autoréglementation que, j'imagine, vous allez reconnaître, sont moins grands que les coûts de cette autoréglementation que vous décrivez, là, dans votre mémoire?

• (10 h 10) •

Mme Crête (Raymonde) : Oui. D'accord. C'est vrai qu'on reconnaît les avantages de l'autoréglementation en termes d'expertise, en termes de participation des pairs, et aussi, on a vu pour la CSF en particulier, son rôle actif en matière de discipline. Un des avantages que vous avez soulevés, que vous avez mentionnés, est le fait que les pairs ou les membres de l'industrie participent à l'élaboration des règles, et que ça peut contribuer à leur adhésion pour l'application de ces règles. Ce que l'on peut souligner à ce sujet-là, c'est que les règles, les règlements, toute la réglementation applicable aux courtiers en épargne collective, aux représentants et à leurs dirigeants, le gros de cette réglementation-là n'est pas adopté par la CSF, mais plutôt par l'AMF, par exemple, le règlement le plus important, à ce sujet-là, c'est le règlement 31-103. Donc, en termes, je dirais, du rôle, d'un point de vue normatif, de l'élaboration des normes, ce rôle-là n'est pas tant, n'est pas si important de la part de la CSF comparativement à l'AMF.

Maintenant, comment on évalue ces avantages-là au regard de notre évaluation de la réforme qui est envisagée...

Le Président (M. Girard) : En 10 secondes.

Mme Crête (Raymonde) : Oui. Alors, en 10 secondes, c'est qu'il faut regarder le portrait d'ensemble. Le portrait d'ensemble, c'est que, d'un côté, on a les avantages, et, l'autre côté, on a les inconvénients, et, à notre avis, les inconvénients liés à la multiplicité des autorités d'encadrement, avec la compétence restreinte de la CSF en matière de discipline, nous portent à croire que le projet de loi va contribuer davantage à améliorer la réglementation du secteur financier.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Juste un petit point avant de passer... Votre bloc est terminé. Avant de passer la parole au deuxième groupe d'opposition, juste mentionner que les schémas et les tableaux que l'on a reçus ce matin sont dans le nouveau mémoire qui a été déposé, et va être mis en ligne, là, très prochainement. Donc, je passe la parole au député de Granby pour un bloc de six minutes.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Mesdames, bienvenue. Rapidement, je veux revenir aussi sur la portée de la fusion de la CSF et des chambres avec l'AMF avant... puis surtout la portée pour le consommateur. Le consommateur qui pouvait se sentir lésé dans une transaction avec un conseiller portait plainte à la CSF. Un syndic s'occupait de mener une enquête. Si le consommateur n'était pas satisfait, il pouvait y avoir un comité de révision. Là, tout d'un coup, le consommateur lésé va s'adresser directement à l'assureur — David, Goliath — le courtier, et va assumer lui-même ses représentations, puis, par la suite l'AMF va jouer un peu le rôle du médiateur, si je comprends bien. Vous ne trouvez pas que c'est un peu dangereux que le consommateur soit un peu seul ou ne fasse pas le poids face à cette fusion?

Le Président (M. Girard) : Me Duclos.

Mme Duclos (Cinthia) : Oui. Bien, notre compréhension, ce n'est pas tout à fait que l'épargnant va se retrouver seul. Il y aura un processus en place, là, qui va s'apparenter beaucoup, de notre compréhension, à ce qui est déjà disponible au sein de la Chambre de la sécurité financière. Ça ne s'appellera pas le syndic ni le comité de discipline, mais on retrouve les grandes lignes de ça dans le nouveau projet de loi. Évidemment, il y a des détails qu'on ne connaît pas par rapport à l'opérationnalité de ce projet-là, et, sur ça, je ne peux pas porter de commentaires.

Mais je voudrais compléter, pour le client, si vous me permettez, avec un extrait de l'enquête dont on vous a parlé précédemment. Un des enquêteurs de l'OCRCVM disait, au sujet de la confusion des clients qui étaient victimes des comportements fautifs, ce qui suit : La personne, c'est-à-dire le client, nous appelle : Moi, j'ai envoyé mon dossier à l'AMF. Pourquoi c'est l'ACCOVAM — donc l'OCRCVM — qui me répond? La même chose pour la Chambre de la sécurité financière. Soudainement, ce n'est plus la même personne à qui on a parlé il y a deux semaines pour notre dossier. Alors, ils ne veulent plus procéder. Donc, il faut prendre également cet aspect-là en considération dans les modifications qui sont proposées.

Le Président (M. Girard) : M. le député.

M. Bonnardel : Oui. Une petite question. À la page 22 de votre mémoire, vous faites l'état des points saillants des interventions disciplinaires. Vous dites, dans le deuxième paragraphe, à 1.2.5, bon : «Les interventions de l'AMF et du BDR étaient peu élevées. Plus particulièrement, ces autorités québécoises ont imposé, en proportion, un faible nombre de sanctions disciplinaires contre les courtiers et leurs dirigeants exerçant au Québec comparativement aux sanctions imposées par l'ACFM à l'égard des courtiers et leurs dirigeants oeuvrant à l'extérieur du Québec.» Je vais vous laisser juste répondre à ça pour aller à la CSF par la suite.

Le Président (M. Girard) : Me Duclos.

Mme Duclos (Cinthia) : ...sur cette affirmation-là?

M. Bonnardel : Bien, ce que vous dites par la suite, c'est que la CSF, elle, a rendu de plus fortes décisions à l'encontre des représentants, contrairement à l'AMF.

Mme Duclos (Cinthia) : Pas à l'AMF, là, par rapport à... parce que...

M. Bonnardel : Oui, excusez. Oui, c'est ça.

Mme Duclos (Cinthia) : ...par rapport à son équivalent pancanadien, là.

M. Bonnardel : Son équivalent, c'est ça.

Mme Duclos (Cinthia) : Bien, tout ce que je peux vous dire, c'est que ça fait partie d'une étude de plus d'une centaine de pages — on peut vous la fournir, là — et, quand on a comparé les décisions qui étaient rendues, c'est le portrait que nous avons fait. C'est une étude empirique, donc on a pris toutes les décisions qui avaient été rendues entre janvier 2005 et septembre 2011, et c'est le constat auquel on est arrivés, là, donc... je ne sais pas si vous voulez que j'élabore sur la méthodologie ou sur...

M. Bonnardel : C'est juste parce que là, à quelque part, cette fusion m'amène à penser peut-être que, bon... Est-ce que l'AMF va rendre des décisions aussi qui vont être moins sévères vis-à-vis ce que la CSF faisait avant? C'est un peu pour ça que je vous amenais sur cette question, là.

Mme Crête (Raymonde) : C'est la crainte, là, que vous exprimez, à savoir que si l'AMF et... à l'époque c'était le BDR, exerçait peut-être... avait un rôle apparemment moins actif que la CSF. Là-dessus, bon, il faut tout d'abord mettre un caveat. Le caveat est que notre étude date de 2012, a été publiée en 2012. Il s'est écoulé, donc, plus de six ans depuis la publication de cette étude-là. Ce que l'on ne sait pas, c'est comment... quel est le rôle de l'AMF et du TMF depuis 2012. Et, là-dessus, est-ce que c'est un rôle plus actif? Est-ce que c'est semblable à celui qu'on avait souligné à l'époque dans notre étude de 2012? Ça, c'est le caveat que l'on peut exprimer à ce sujet-là.

Ce que l'on peut souhaiter, dans l'hypothèse où le projet de loi est adopté, c'est que l'AMF et le TMF consacrent les ressources financières et humaines suffisantes pour encadrer de manière efficace les trois groupes d'acteurs.

M. Bonnardel : D'accord. Merci, M. le Président. Ça va.

Le Président (M. Girard) : C'est complété?

M. Bonnardel : Oui.

Le Président (M. Girard) : Donc, Mme Crête, Me Duclos, je vous remercie beaucoup de votre contribution à la commission.

Je vais suspendre les travaux quelques instants pour permettre aux représentants du Mouvement Desjardins de pouvoir s'installer.

(Suspension de la séance à 10 h 17)

(Reprise à 10 h 22)

Le Président (M. Girard) : Donc, nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant les représentants du Mouvement des caisses Desjardins. Donc, comme j'ai dit tout à l'heure, vous avez 10 minutes pour nous présenter votre mémoire, par la suite suivra des périodes d'échange, qui vont être un petit peu raccourcies parce qu'on a pris un petit peu de retard sur l'horaire. Donc, sans plus tarder, je vous laisse vous présenter et nous présenter votre mémoire.

Mouvement des caisses Desjardins

M. Cormier (Guy) : Bien, merci, M. le Président. Alors, je suis accompagné d'Hubert Thibault, à ma gauche, vice-président, Affaires institutionnelles au Mouvement Desjardins, Yvan-Pierre Grimard, directeur, Affaires gouvernementales, et Alain Hade, vice-président, assurances générales. Alors, écoutez, merci de nous accueillir ce matin, merci de nous permettre de soumettre ce mémoire-là et d'avoir ce moment d'échange, là, avec vous tous.

D'entrée de jeu, j'aimerais revenir sur une préoccupation que j'entends depuis les dernières semaines, voire même des publicités que je vois et je lis, depuis les dernières semaines, à l'effet que n'importe qui au Québec pourrait conseiller, voire même vendre n'importe quoi en produits financiers au Québec. Ce n'est pas du tout la lecture que j'ai et que nous avons du projet de loi n° 141. Et s'il y a des besoins de clarification sur des articles de loi pour régler ce supposé enjeu là, réglez-le, M. le ministre, puis mettez-les dans le projet de loi le plus rapidement possible pour qu'on arrête de parler de ça, tout simplement, comme tel.

Je vous dirais que, pour nous, c'est une étape qui est cruciale aujourd'hui parce que c'est l'aboutissement d'un long processus. Ça fait deux ministres qui déposent... qui discutent de ce dossier-là. Depuis 2013, il y a eu des dizaines, des dizaines, des dizaines de mémoires, des dizaines de consultations. Le Mouvement Desjardins appuie totalement le projet de loi n° 141, considère absolument nécessaire son adoption avant la fin du printemps de 2018, s'il vous plaît.

Le projet de loi, dans le fond, répond à plusieurs facteurs de changement, trois éléments spécifiques. Le premier, l'évolution des règles internationales. Le deuxième, l'évolution de l'environnement, c'est-à-dire, notamment, technologique. Le troisième, la protection du consommateur. Je vais y revenir, dans les trois, séparément.

Le premier, c'est l'aspect international. On en a peu parlé. J'en entends peu parler, mais la crise financière de 2008 a été un électrochoc, puis ici au Québec, au Canada, on a parfois été un peu épargnés par rapport à ça. Mais on oublie qu'en Europe, aux États-Unis il y a des institutions financières qui ont littéralement fermé, qui ont littéralement fait faillite. Et, depuis ce temps-là, bien, le Fonds monétaire international, le fonds de stabilité financière, le comité de supervision, Comité de Bâle, bien, ont mis des mécanismes, des règles internationales, et s'attendent à ce que tous les pays à travers le monde adoptent ces règles-là.

Il y a des choses qu'on a faites ici, au Québec, qui ne nécessitaient pas des amendements législatifs. Je pense à la définition du capital réglementaire, ce que c'est, le capital, du capital de qualité. Je pense à des niveaux minimums de capital et de liquidités que les institutions financières doivent avoir dorénavant. Je pense au fait de déclarer des institutions financières comme institutions financières d'importance systémique, ce que Desjardins a été déclaré en 2013, je vous le rappelle. Ça ne nécessitait pas des changements législatifs, mais il y en a d'autres, pour respecter les accords internationaux, qui nécessitent des amendements législatifs. Je pense, pour une coopérative comme le Mouvement Desjardins, au concept de capital consolidé, de capital de groupe, d'un mécanisme de solidarité financière, où les différentes entités d'un groupe coopératif sont solidairement et financièrement responsables entre elles. Le cadre législatif actuel ne l'écrit pas comme ça. Je pense aux pouvoirs accrus à donner aux régulateurs, notamment en cas de crise, et je pense surtout à des plans de résolution, à des plans de viabilité pour des institutions financières en cas de crise financière, genre 2008, voire même liquidation ou faillite.

Actuellement, les lois du Québec ne rencontrent pas ces exigences internationales là malgré que la crise ait eu lieu il y a plus de 10 ans. Donc, le G20, le fonds de stabilité financière, le Fonds monétaire international regarde ce qui se passe à travers le monde, et, d'ailleurs, le Fonds monétaire international est venu au Canada en 2014 inspecter l'encadrement législatif et du canada et du Québec, et a fait un rapport, et nous savons tous qu'au deuxième semestre de 2018 le Fonds monétaire international doit revenir au Canada pour inspecter les encadrements réglementaires du monde financier des provinces et du Canada.

La grande, grande majorité des pays ont adopté des changements législatifs pour respecter ces encadrements-là. Un rapport critique, voire même défavorable du Fonds monétaire international sur la façon que le Québec encadre son système financier aurait de lourdes, de très lourdes conséquences pour le secteur financier québécois, mais aussi pour le Mouvement Desjardins, parce qu'il impacterait nécessairement la confiance que les gens ont, l'impact sur les agences de notation et l'impact sur les investisseurs.

Sur 275 milliards d'actifs que gère le Mouvement Desjardins, 40 milliards sont financés sur les marchés financiers, en Asie, en Europe, aux États-Unis. Ça, c'est 40 milliards où les investisseurs posent des questions sur notre cadre législatif. Alors, il faut être en mesure de leur dire que nous avons les meilleurs standards internationaux, et je pense qu'on est fiers du Mouvement Desjardins au Québec. On est la première institution financière la plus sûre au monde selon Bloomberg... en Amérique du Nord, la cinquième au monde, et la 34e plus sûre au monde selon Global Finance. C'est une source de fierté pour les Québécois, pour le Québec. Il faut absolument, absolument qu'on ait un cadre législatif adapté dans les prochains mois pour respecter ces encadrements internationaux là.

Le deuxième élément sur lequel je veux revenir, c'est l'évolution de l'industrie. Plusieurs mémoires vont ont été déposés, plusieurs personnes vous ont parlé de l'évolution rapide de l'industrie. Aujourd'hui, on paie le prix, à mes yeux, d'avoir attendu 10, 15, 20 ans pour changer certaines lois. Et là, on se dit : La technologie va trop vite. Puis on se pose des questions de base. Il est trop tard pour se les poser, ces questions-là. Les consommateurs veulent consommer comme ça. On n'a pas adapté assez rapidement notre réglementation, alors il faut agir aujourd'hui.

Chez Desjardins, juste en 2016, les transactions par Internet ont augmenté de 23 %. Alors que nous avons 4,5 millions de membres au particulier, ils ont fait 600 millions de transactions par Internet l'année passée, ces 4,5 millions de membres là. Alors, il ne faut pas se demander si on doit aller vers Internet. Ils veulent aller vers Internet. Vous consommez tous d'après moi par Internet. Ça doit être rare que vous mettez les pieds physiquement dans une caisse Internet, d'après moi. Alors, c'est la réalité d'aujourd'hui. Alors, il faut adapter ça. Et, si le Mouvement Desjardins est en affaires depuis 117 ans, c'est parce qu'il a toujours été en mesure de s'adapter, s'adapter à la réalité de son marché, s'adapter à la réalité de sa société. Et il a eu un cadre législatif qui lui a permis de pouvoir grandir en respectant les attentes de nos membres. C'est ce qu'on s'attend du projet de loi n° 141.

Je termine avec la protection du consommateur. J'entends plein de choses sur la protection du consommateur depuis le début de ces audiences. C'est une préoccupation qui est constante au Mouvement Desjardins. Mais, quand je vois l'arrivée d'un fonds d'indemnisation des services financiers qui va être parmi les plus complets et les plus généreux à travers le monde, quand je vois la mise en place d'un nouveau comité consultatif de consommateurs qui va pouvoir poser des questions puis alimenter les réflexions, quand je vois des nouvelles mesures antireprésailles pour des gens qui feraient des signalements ou qui pourraient exprimer, dénoncer des comportements et de la firme et de collègues, quand je vois qu'on confie à l'AMF finalement un guichet unique, un seul régulateur en intégrant les chambres financières, pas en mettant fin aux chambres, là, en intégrant les activités des chambres et les personnes, et continuant les activités, moi, il me semble qu'on pose les bons gestes dans ce projet de loi là pour protéger les consommateurs.

Et, en conclusion, ce n'est pas pour rien que le cadre législatif des services financiers au Québec nécessite une révision quinquennale. Pourquoi? Parce qu'on veut s'assurer qu'à chaque cinq ans, on se repose les questions sur notre environnement, au niveau des services financiers au Québec. Et il n'y a pas beaucoup d'autres industries ou d'autres projets de loi où on exige que le ministre revienne à chaque cinq ans. Ça démontre toute l'importance d'avoir des lois qui sont adaptées. Et le projet de loi, il est ambitieux, il est important, je le sais, on en convient. Mais le monde nous regarde, actuellement. Ça fait 10, 15, 20 ans qu'on attend, là. Il faut trouver le moyen d'adopter ce projet de loi là rapidement.

Et, au-delà des changements technologiques, au-delà des besoins des consommateurs, le projet de loi assure, à nos yeux, un respect entier sur les règles internationales. Il est impératif, il est impératif que le Québec soit capable de témoigner à très court terme, comme il l'a toujours fait par le passé, que nous rencontrons les plus hauts standards internationaux au niveau des services financiers. Rater cette échéance-là, à nos yeux, là, ça va mettre le secteur financier, et l'économie du Québec, et le Mouvement Desjardins... avec des conséquences qui vont être très lourdes. Merci, M. le Président.

• (10 h 30) •

Le Président (M. Girard) : M. Cormier, merci beaucoup de cette intervention. Nous avons maintenant un bloc de 14 minutes avec le groupe du gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs, M. Cormier, bonjour, bonjour, surtout, merci d'être là et d'apporter vos précisions sur le projet de loi n° 141.

On en a beaucoup parlé dans ces consultations, hier, un peu aujourd'hui, le matin, lors des premières sessions, en décembre, de consommateurs, protection du consommateur, d'assurances, produits d'assurance, et je vais y revenir. Mais j'aimerais surtout, avec vous, parler un peu plus de ce que vous aviez mentionné au début de votre présentation, donc, le reste du projet de loi n° 141, qui est quand même important, particulièrement pour Desjardins, et surtout, à votre avis, les conséquences très pratiques pour Desjardins, si jamais ce processus de projet de loi prenait beaucoup trop de temps et si on n'arrivait pas à un dénouement.

Qu'est-ce que ça veut dire pour Desjardins, par exemple, d'avoir... concrètement, d'avoir, disons, une mauvaise note de la part du FMI en 2018, quand ils vont venir? Pratiquement, dans vos opérations, comment est-ce que cela se traduirait pour le service que vous pouvez donner à la clientèle?

M. Cormier (Guy) : Écoutez, ça fait trois, quatre ans que les agences de notation, et les investisseurs qui investissent chez Desjardins, et les agences qui cotent Desjardins, les mêmes agences qui cotent la province du Québec, nous posent des questions sur notre encadrement législatif, et on est capables de leur répondre qu'il y a des ministres qui déposent des rapports, qu'il y a des consultations puis que ça s'en vient. C'est ça, la réalité. Et ils nous croient puis ils nous font confiance.

Mais là il faut que ça arrive. Parce que ce qui va arriver, à un moment donné, là, c'est que, si ces gens-là voient qu'il ne se passe rien, bien, ils vont dire : Bien, peut-être qu'on va mettre vos compétiteurs avec une cote de crédit AAA, puis vous, Desjardins, qui avez les meilleures cotes de crédit, bien, pour un investisseur international, on ne sait pas nécessairement si votre encadrement législatif a tous les paramètres internationaux, donc, oui, bien, écoutez, essentiellement, on va investir avec vous, mais on va demander un rendement plus élevé, parce qu'il y a peut-être une prime de risque, parce que vous n'avez pas nécessairement le même encadrement que certains de vos compétiteurs.

Alors, au lieu de se financer sur les marchés, exemple, à 4,25 %, on va se financer sur les marchés peut-être à 4,35 %, 4,40 %, 4,50 %. Alors, quand on va faire notre financement à nos emprunteurs, nous, on va savoir que notre coût d'approvisionnement en liquidités nous coûte 0,50 % de plus que certains de nos compétiteurs et, dans un enjeu de compétitivité, on va peut-être devoir se dire : O.K., bien, il faut ajuster nos taux. Alors, il se pourrait — il se pourrait, ce n'est pas le cas actuellement, en passant, les taux de Desjardins sont parmi les plus compétitifs, puis on a les meilleures cotes de crédit à travers le monde, là, vous le savez tous...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Cormier (Guy) : Mais moi, comme président, je ne veux pas me réveiller dans quelques années puis qu'une agence de notation dise : Bien, tu as une cote qui est peut-être moins pertinente que certaines autres entreprises à travers le monde parce que tu n'as pas le même encadrement législatif. Concrètement, un consommateur pourrait avoir à renouveler son hypothèque — au Québec, 60 % des Québécois font affaire avec Desjardins — à un taux qui pourrait ne pas être celui qu'il pourrait avoir ailleurs. C'est ça, la réalité.

M. Leitão : Donc, c'est ça, augmentation du coût... les coûts d'opération.

M. Cormier (Guy) : Augmentation de coûts pour les consommateurs, c'est ça.

M. Leitão : C'est ça. Un autre aspect que vous avez mentionné aussi et qu'il me semble que ce serait important peut-être d'élaborer un peu là-dessus, c'est ces questions de solidarité entre les différents membres. Parce que Desjardins n'est pas une banque.

M. Cormier (Guy) : On en est très fiers.

M. Leitão : Mais donc il y a quand même une problématique de s'assurer que le réseau, que le système puisse s'entraider pour continuer à bien performer. Et, dans le projet de loi, nous adressons un peu cette question-là. Est-ce que vous pourriez...

M. Cormier (Guy) : Exactement. Le Mouvement Desjardins, c'est plus de 273 caisses populaires qui ont des activités en mode autonome, qui sont des institutions par elles-mêmes. C'est plusieurs filiales d'assurance, de valeurs mobilières, de gestion de patrimoine. C'est un fonds de sécurité qui a plus de 1 milliard de dollars de cagnotte en cas d'enjeux. Alors, toutes ces entités-là sont des entités que j'appellerais indépendantes, avec leur propre vie.

Et, quand vous arrivez dans un mécanisme de résolution, admettons que vous êtes en 2008, et que vous avez une crise, et que, le vendredi soir, vous avez un enjeu de liquidité, et que le régulateur vous appelle et vous dit : Moi, je veux une solution lundi matin, pas dans deux semaines, lundi matin... Et c'est ce qui est arrivé à Lehman Brothers en 2008, aux États-Unis, là, c'est du cas concret, à travers plein de banques et d'institutions financières espagnoles et européennes — faites le tour de l'Italie — alors, ils avaient 24 heures, 48 heures pour trouver les solutions.

Vous pouvez imaginer que, pour un groupe coopératif qui vit avec une gouvernance, avec un mode de fonctionnement où — et on en est fiers — chaque personne a son identité et chaque personne est un coopérateur... Mais il y a des moments où il faut se dire : Il faut bouger vite. Il faut être capable de bouger le capital. Si on veut injecter du capital plus rapidement dans notre réseau des caisses, si on veut injecter du capital plus rapidement dans nos filiales, il faut avoir cette flexibilité-là, ce qui n'est pas le cas actuellement dans le cadre législatif actuel. Et le projet de loi n° 141 adresse cet élément-là. Je ne sais pas, M. Thibault, s'il y a des éléments additionnels...

M. Thibault (Hubert) : Peut-être un commentaire. Ce n'est pas quelque chose de totalement inédit, ce que vous avez dans le projet de loi n° 141, dans le sens où les mesures de solidarité entre les caisses, les institutions coopératives dans Desjardins, ça existe depuis longtemps, un certain temps. Vous ne faites, M. le ministre, que consacrer dans le texte législatif ce qui est déjà la réalité en pratique à l'intérieur du réseau coopératif de Desjardins. Alors, dans le fond, il n'y a pas une révolution, à cet égard-là, il y a une évolution pour nous permettre de se conformer aux règles internationales.

M. Leitão : Très bien. Merci. Maintenant, bien, revenons aux questions de protection du consommateur parce qu'en effet on en a beaucoup parlé ici, et j'ai l'impression qu'on va encore parler, plus tard aujourd'hui, de cet aspect-là. Vous aviez commencé, M. Cormier, en parlant de ce qui vous préoccupait un peu, de... qu'on entend ici et là que dorénavant, si le projet de loi est adopté, n'importe qui peut faire n'importe quoi.

Une voix : ...

M. Leitão : Bien, oui. Vous, Desjardins, évidemment, vous... Et, quand on parle de ça, on parle surtout dans le contexte de l'assurance. Vous vendez de l'assurance, vous vendez l'assurance par Internet, vous vendez l'assurance directement au public. Comment vous voyez ces questions d'encadrement de la protection du consommateur? Est-ce que vous constatez ça, qu'au Québec n'importe qui peut faire n'importe quoi? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Cormier (Guy) : Écoutez, je vais répondre rapidement, et M. Hade ici, là, qui travaille au niveau de l'assurance de dommages et qui travaille notamment sur la dimension offre de services de produits financiers par Internet, pourra compléter. Mais, à nos yeux, il est très clair que des services financiers devraient être offerts par quelqu'un qui est certifié, hein, qui a les compétences requises, qu'on a été capables d'homologuer ça, de valider ça. Et je ne pense pas que le projet de loi actuel... et qu'au Québec n'importe qui vend n'importe quoi ou conseille n'importe quoi. Le projet de loi adresse les enjeux qui doivent être adressés, pose les bonnes questions et régularise les bons enjeux.

Et, sur la dimension Internet, moi, je vais juste vous imager quelque chose, là, et Alain pourra conclure. On se pose beaucoup de questions. Est-ce que quelqu'un peut acheter une assurance auto par Internet, payer une prime de 600 $, 700 $? Est-ce qu'il sait ce qu'il achète? Une assurance habitation... Nous, chez Desjardins, c'est la même personne qui est capable de se lever le matin, s'en aller sur notre site Disnat, placer par elle-même 5 000 $, 1 000 $, 10 000 $, 15 000 $, 100 000 $, 1 million de dollars en achetant des actions, il n'y a personne qui lui a dit quoi acheter, il a fait ça par lui-même, et on va se questionner longtemps à savoir s'il est capable de choisir son assurance automobile, quand on tolère qu'il soit capable de placer 1 million de dollars ou 5 000 $, 10 000 $ de son patrimoine sans nécessairement avoir quelqu'un parce qu'il transige directement à travers Internet? Moi, je pense que de poser la question, c'est pas mal d'y répondre dans l'économie dans laquelle on est actuellement. Je ne sais pas, M. Hade, sur le volet Internet, là, comme tel...

Le Président (M. Girard) : M. Hade, allez-y.

M. Hade (Alain) : Oui. Bien, merci. Bonjour à vous tous. Bien, écoutez, quand même, il y a deux éléments dans ça, donc. Le représentant certifié, pour nous, ça demeure, de notre point de vue, puis ça paraît assez clair également, donc, que c'est la personne qui est autorisée dans le cadre d'une transaction d'assurance. Ça fait que, ça, ça ne change pas.

Quand on parle de la distribution, maintenant, par Internet, de notre point de vue... puis j'aimerais vraiment ça être en mesure de vous rassurer, tout le monde, à cet égard-là, mais la distribution par Internet, de notre point de vue, ne doit pas nécessiter, de façon obligatoire, un représentant certifié dans le processus. Et ça, c'est assez clair.

La façon que j'aimerais vous rassurer à cet égard-là : d'une part, référer à un rapport que l'AMF avait produit en 2015, donc, qui avait dégagé 11 orientations. Puis, si vous me permettez, j'aimerais vous en citer quelques-unes dans l'optique évidemment de vous rassurer. Ça, c'est un premier point.

Deuxième point, j'aimerais également prendre le temps avec vous pour vous décrire comment ça se passe, une transaction par Internet, actuellement. Parce que ça se fait, là, actuellement, on n'est pas dans le futur, là, on est dans le présent. Et troisièmement, si vous me permettez, on a des commentaires de consommateurs qui achètent des produits en ligne. Je pourrais vous en faire état de quelques-uns également, dans la vraie vie.

• (10 h 40) •

M. Leitão : Très bien, et j'aimerais vraiment que vous fassiez ça, mais vous avez à peu près quatre minutes.

M. Hade (Alain) : C'est très bien.

M. Leitão : Après ça, le président va nous dire qu'il faut passer de l'autre côté. Alors, allez-y. Allez-y.

M. Hade (Alain) : C'est très bien. Alors, écoutez, on va se rendre jusqu'où on pourra se rendre. Je réfère donc au rapport de l'AMF évidemment. À ce moment-là, l'ensemble des régulateurs canadiens avaient travaillé ensemble. Les gens de l'AMF pourront sans aucun doute vous en parler. L'AMF était revenue et avait décliné ses 11 orientations. Dans les principaux points, je veux vous citer certains éléments, certaines orientations.

L'orientation n° 2. On indique ici que les prestataires puissent conclure une transaction en ligne, mais seulement s'ils sont en mesure de fournir au consommateur des outils d'auto-évaluation qui permettent au consommateur de faire l'évaluation de son besoin d'assurance, de s'assurer de la convenance du produit qu'il sélectionne, de prendre une décision éclairée et de conclure une transaction valable, soit une transaction qui lui permettra de bénéficier de la protection souscrite.

Ce que je vous décris-là, c'est vrai chez Desjardins, c'est vrai également dans l'industrie de l'assurance au Québec. Ce sont les guides que nous utilisons quand on bâtit nos solutions sur Internet.

Toujours dans cette même orientation, on parle que les prestataires s'assurent que le consommateur peut avoir accès à un représentant, s'il en sent le besoin, à quelque étape de la souscription du produit d'assurance que ce soit. Puis on est tout à fait, encore une fois, harmonisés avec cette orientation-là.

Dans l'orientation n° 3, on parle que les renseignements suivants, donc, on donne une série de renseignements qui doivent être portés à la connaissance du consommateur en temps opportun, pendant le processus d'achat mais avant la conclusion du contrat, pour évidemment bien sécuriser le consommateur. On parle, entre autres choses... il y en a une liste assez longue, là, mais, entre autres, les caractéristiques principales, bien sûr, du produit, les options et les garanties offertes, mais également toutes les exclusions et les limitations qui sont afférentes au produit, le cas échéant.

Je vous en nomme une dernière, là, qui est relative à l'orientation n° 5, donc : que les renseignements soient mis à la disposition du consommateur avant, au moment et après l'achat d'un produit d'assurance par Internet, soient rédigés dans un langage clair et simple de façon à ne pas induire en erreur.

Ça fait que vous avez quelques éléments de ce rapport qui a été produit par l'AMF, qui évidemment inspirent le développement des solutions actuelles. Évidemment, ce qu'on souhaite, c'est que l'AMF puisse utiliser ces fameuses orientations-là pour la suite des choses.

Quelques éléments sur comment ça fonctionne essentiellement. Honnêtement, je pense qu'Internet, là, puis M. Cormier l'a mentionné tantôt, là, on est dedans aujourd'hui, donc le consommateur le demande, c'est une opportunité incroyable de venir simplifier l'assurance. Parce qu'on a entendu plein de cas de complexité dans le cadre de la commission actuelle.

Il faut se rappeler qu'on est dans un mode actuel... dans un mode où Internet n'est pas encore extrêmement populaire, ça fait que les éléments qui sont apportés comme étant complexes sont dans notre monde de représentants certifiés aujourd'hui. Est-ce qu'Internet ne devient pas une excellente solution pour venir simplifier effectivement plusieurs notions en matière d'assurance? Puis là je pense...

M. Leitão : ...de vous interrompre parce que le temps file, excusez-moi, mais j'aimerais vous entendre un peu aussi sur... et rapidement vous entendre sur l'intégration des deux chambres à l'AMF. Comment vous voyez ce processus-là? Est-ce que ça va simplifier la vie? Est-ce que ça va... Parce qu'on mentionne souvent que ça va affaiblir la protection des consommateurs, cette intégration-là. Comment vous, chez Desjardins, vous voyez ça?

M. Hade (Alain) : Bien, ce n'est pas notre point de vue. Là, honnêtement, on est très d'avis que l'intégration des chambres sera une excellente façon effectivement de simplifier la vie tant du côté des assureurs que du côté des consommateurs. Pour nous, ça ne fait pas de doute.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup.

M. Cormier (Guy) : ...

M. Leitão : Oui, allez-y.

Le Président (M. Girard) : 30 secondes.

M. Cormier (Guy) : 30 secondes. Il y a un élément important que j'aimerais porter à l'attention. Au Québec, je pense qu'on est fiers de voir qu'actuellement on développe un pôle d'intelligence artificielle. On est fiers de voir qu'on a des «fintech» à Québec. On est fiers de voir qu'on a des «fintech», des «insurtech» à Montréal, puis c'est un créneau, une grappe qu'on veut développer beaucoup, beaucoup. Ce serait dommage de voir que, d'un côté, on veut faire preuve d'innovation dans nos services financiers mais qu'en contrepartie on vient limiter législativement cette capacité-là d'innover dans nos services financiers comme tels.

Alors, je pense qu'il faut laisser la flexibilité à l'Autorité des marchés financiers d'adapter les lignes directrices et les normes qui encadrent les institutions financières dans ses fonctions et ne pas trop menotter, à travers le projet de loi, des paramètres qui vont faire que, si la loi est rechangée dans 10, 15 ans, on va toujours être en retard sur l'évolution de la société.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, M. Cormier.

M. Leitão : Merci, monsieur.

Le Président (M. Girard) : Je cède maintenant la parole au député de Rousseau pour un bloc de huit minutes.

M. Marceau : Huit? Oui. O.K. Merci. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Merci d'être là. Merci pour vos commentaires, votre éclairage. Juste un commentaire de ma part. J'entends très bien votre message sur la nécessité d'adopter le projet de loi et je suis entièrement conscient que le mieux est l'ennemi du bien et que, même s'il n'est pas parfait, il y aura des choses qui devront être améliorées, quant à moi. Mais, même s'il n'est pas parfait, je comprends, pour avoir redémarré le processus de révision de notre encadrement, qu'il est nécessaire de procéder.

M. Cormier (Guy) : Merci beaucoup.

M. Marceau : Puis, s'il y avait une raison pour laquelle c'est nécessaire, c'est évidemment tout le mécanisme qui est mis en place, là, en cas de crise, pour que Desjardins puisse se sortir de difficultés. Puis, juste là-dessus, parce que ça n'a pas été expliqué vraiment à la commission, pouvez-vous juste nous donner un peu plus de précisions sur le mécanisme, là, qui interviendrait dans le cas où il y aurait des difficultés? Par exemple, celles que vous évoquiez, vendredi soir, là, ça va mal, on vous dit : Ça nous prend un plan pour lundi matin. Comment ça se passe concrètement? Parce que beaucoup de Québécois, et j'en suis, sont membres d'une caisse populaire, ils aimeraient bien comprendre exactement ce qui va arriver dans ce cas-là.

M. Cormier (Guy) : Hubert... puis je compléterai?

M. Thibault (Hubert) : Parfait. Merci. Le mécanisme qui a été choisi puis qu'on a sollicité du gouvernement et de vous, M. le ministre, à l'époque, à mettre en place, c'est un mécanisme qui respecte ce qu'est déjà Desjardins. Alors, on ne parle pas d'une garantie croisée entre les caisses puis des choses comme ça, mais on a cherché à bâtir sur ce qui existe depuis le début des années 1980, c'est-à-dire le fonds de sécurité. Les caisses, elles-mêmes, avaient décidé de dire : Si une d'entre nous a un problème, ça n'a pas de bon sens de la laisser seule, peut-être mourir, même, alors que le problème pourrait se répandre comme une traînée de poudre à travers tout le réseau.

Vous l'avez entendu tantôt, la base de notre métier, c'est la confiance. Alors, ce qu'on a fait, on a créé, au début des années 80, le fonds de sécurité, qui peut intervenir dans une caisse en difficulté soit pour donner une subvention, soit pour la mettre sous administration provisoire, etc. Mais le fonds de sécurité, dans la loi actuelle, n'est pas obligé de le faire. Alors, les créanciers et autres investisseurs institutionnels, les agences de notation disent : Oui, c'est un mécanisme intéressant, mais il n'est pas obligatoire, il ne nous apporte pas les garanties suffisantes. Alors, essentiellement, ce que vous allez faire ou ce que vous pourrez faire, dans le projet de loi, c'est de rendre cette possibilité-là obligatoire.

Alors donc, le fonds, dès l'instant où il y a une difficulté ou une insolvabilité dans une caisse, aura l'obligation d'intervenir. Et évidemment, ayant l'obligation d'intervenir, il doit avoir du capital à sa disposition et reconduire ce qui existe déjà, la capacité de cotiser l'ensemble des caisses pour mobiliser le capital pour régler la solution. Mobiliser le capital, c'est une avenue. D'autre part, aussi, il peut être nécessaire d'avoir des moyens d'intervention un peu plus costauds, je dirais, permettant de solutionner le problème rapidement.

C'est sûr qu'une caisse qui a l'assurance de recevoir le capital sans problème pourrait se dire : Bien, ça va bien, je n'ai pas besoin de me corriger. Ça prend des pouvoirs au fonds pour dire : Non, non, tu vas te corriger, ou nous te corrigerons au besoin. Alors, ça, ça assure finalement la protection de l'ensemble des caisses, de l'ensemble du réseau, puis une capacité d'intervention rapide de telle sorte que les problèmes soient solutionnés de façon complète.

M. Cormier faisait référence en contexte de résolution aussi. Alors, ça, c'est très compliqué. On ne peut pas permettre qu'une institution financière, quelle qu'elle soit, une banque, nous, soit astreinte à une procédure de faillite classique comme la loi le prévoit pour l'ensemble des citoyens. C'est que la garantie que le... finalement, celui qui va essuyer tous les pots cassés, qui aura des sommes faramineuses à débourser, ce sera le ministre des Finances de la juridiction...

Alors, les règles internationales définissent une approche qui favorise une recapitalisation des fonctions centrales, je dirais, d'une banque ou d'une institution financière de dépôt en particulier pour permettre qu'elle puisse être relancée dans un contexte plus sain. C'est ça que le projet de loi propose.

M. Cormier (Guy) : Je pense que ce qui est important, très, très rapidement, c'est de sentir, tu sais... Comme président du Mouvement Desjardins, quand je me lève le matin, là, je me sens fiduciaire de centaines de millions de dollars que les Québécois, Québécoises investissent chez Desjardins pour leur retraite puis pour leur futur. Et, à la fin de la journée, ces gens-là, ils veulent avoir l'assurance, la garantie, et c'est ce qu'ils ont toujours eu, et c'est ce qu'ils ont, qu'en cas de crise financière à travers le monde le Mouvement Desjardins, comme il l'a fait en 2008 et comme il le fait depuis 117 ans, va passer à travers parce qu'il est bien encadré. Aujourd'hui, le projet de loi permet d'avoir cette assurance additionnelle là.

Le Président (M. Girard) : Merci. M. le député.

• (10 h 50) •

M. Marceau : Très bien. Et puis je comprends de votre intervention que, sans, évidemment, pouvoir nous donner des garanties, vous avez très, très confiance qu'une fois le projet de loi adopté le FMI va nous mettre une belle étoile sur notre bulletin puis qu'on va être à l'abri, là, des inquiétudes que vous souleviez, en particulier du côté des investisseurs, là, qui pourraient... Enfin, ils vont trouver que l'encadrement est adéquat.

M. Cormier (Guy) : Je ne peux pas donner cette garantie-là...

M. Marceau : Non, je comprends...

M. Cormier (Guy) : ...sur ce que le rapport du FMI donnera, mais je suis pas mal sûr que, si on ne fait pas de changement législatif avant l'été, que, ça, il va y avoir un rapport négatif.

M. Marceau : On s'entend, on s'entend. Puis je ne vous demanderai pas de commenter le fait que, dans cette espèce de lutte que se mènent le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral quant à l'encadrement du secteur financier, ce serait aussi une très bonne idée que nous puissions dire qu'on a fait nos devoirs. Mais je ne vous demande pas de commenter, je sais que ce n'est pas...

Le Président (M. Girard) : On va manquer de temps.

M. Marceau : Sur l'abolition des chambres, pouvez-vous nous décrire, puisque je comprends que vous y êtes favorables, les impacts que ça a en termes de coûts pour vous, le fait que les enquêtes puissent être menées à la fois simultanément par les chambres, actuellement, puis par l'autorité, les difficultés que ça implique puis le genre de coûts que ça implique pour vous?

Le Président (M. Girard) : M. Grimard.

M. Grimard (Yvan-Pierre) : En fait, M. le Président, effectivement, la question des coûts fait partie de ce qui nous fait prétendre que l'abolition des chambres, ça devrait être... que c'est une bonne idée. Ceci étant dit, ce n'est pas l'idée principale. D'avoir deux régulateurs qui interviennent quand il y a des plaintes en déontologie ou d'autres, effectivement, le processus est plus lourd, le processus est plus lent. Il faut répondre à la Chambre de la sécurité financière ou à la Chambre de l'assurance de dommages. Il faut répondre aussi à l'Autorité des marchés financiers. Donc, au niveau de l'efficacité, ce n'est pas optimal.

Par contre, là où la valeur ajoutée va arriver, c'est pour le consommateur, parce que le régulateur unique, en l'occurrence l'autorité, va avoir un dossier complet. Alors, quand va rentrer une plainte, l'autorité va savoir, va déjà savoir est-ce que c'est le représentant qui a mal agi au niveau déontologique, est-ce que c'est les pratiques du courtier ou du cabinet qui contiennent des lacunes. Et à ce moment-là ça va être plus efficient, ça va être plus rapide, le consommateur va en bénéficier et aussi les assujettis. Donc, ça va être moins compliqué pour nous. Le représentant qui va avoir une plainte en déontologie, sa situation va se régler plus vite. Donc, en fait, tout le monde va bénéficier du guichet unique à l'Autorité des marchés financiers.

M. Cormier (Guy) : ...par année, là, c'est des centaines de millions de dollars qui sont investis pour se conformer aux encadrements réglementaires, des centaines de millions, que ce soit pour nos systèmes informatiques, nos processus. Et évidemment que le coût de ces demandes-là en fait partie. Mais, à la fin de la journée, ce n'est pas ça qui devrait, excusez-moi le terme, mais mobiliser notre réflexion. C'est vraiment la protection du consommateur. On est convaincus que ça va être plus simple pour eux, tout simplement.

Le Président (M. Girard) : 30 secondes, M. le député.

M. Marceau : Bien, écoutez, dernière question, sur la vente par Internet. Là, il y a des produits plus standardisés que d'autres, et là on se pose la question, à la commission, de l'exigence ou pas d'un représentant certifié qui interviendrait dans la transaction. Est-ce que vous trouvez que c'est un compromis acceptable de dire que, pour certains produits, ça va de ne pas exiger qu'un représentant certifié intervienne, mais que, pour d'autres produits plus complexes, on impose cette exigence-là? Est-ce que c'est un compromis qui vous semblerait raisonnable?

Le Président (M. Girard) : En cinq secondes.

M. Cormier (Guy) : Moi, je pense, très rapidement, que ce compromis-là, vous devriez le laisser à l'Autorité des marchés financiers. Le projet de loi ne devrait pas inscrire trop rigoureusement des dimensions comme celles-là. Parce que la société va vite, la technologie va vite. Si on laissait à l'Autorité des marchés financiers la mise en application de l'esprit de la loi, parce qu'ils connaissent l'évolution de l'industrie, il me semble que ce sera une flexibilité qui rencontrerait l'évolution des besoins des membres et le besoin de bien encadrer la protection.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, M. Cormier. Nous allons passer du côté du député de Granby pour une période de 5 min 30 s.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Messieurs, vous avez six minutes pour me convaincre. La dernière question de mon collègue... Je suis en train de m'assurer chez vous, là, pour une possible maison.

M. Cormier (Guy) : Merci de faire affaire chez nous.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Cormier (Guy) : Merci beaucoup, merci beaucoup.

M. Bonnardel : C'est ça. Vous pouvez comprendre un peu la dynamique.

M. Cormier (Guy) : Merci beaucoup, vous avez la bonne personne.

M. Bonnardel : Mais la grande question, c'est de savoir, puis Nicolas l'a mentionné, mon collègue l'a mentionné : Est-ce qu'on doit laisser tous ces produits sans parler au 1 877 que vous me mentionnez en dessous? J'en aurais pour une heure, mais j'ai seulement six minutes. L'automobile, je peux comprendre. J'essaie de répondre à toutes les bonnes questions que vous me posez pour assurer ma maison. Différents avenants, je pense, qui ne sont peut-être pas là. L'assurance est là, le bien meuble et tout ça.

Combien de personnes chez vous commencent par ça — il faut parler à un conseiller nécessairement, là — versus ceux qui parlent directement, là, puis qui disent : Moi, je n'ai pas nécessairement confiance? Puis je persiste à croire que le gros achat d'une personne, dans sa vie, c'est sa maison. Qu'il soit capable de s'en payer une à 175 000 $ ou à 1 million, celle à 175 000 $, pour lui, là, c'est sa maison.

M. Cormier (Guy) : ...financière. Oui.

M. Bonnardel : C'est sa transaction, là, après l'automobile. Vous êtes certains, vous, qu'on peut faire ça sans se tromper puis sans parler à un conseiller?

M. Cormier (Guy) : Alain, veux-tu y aller...

M. Hade (Alain) : Oui, oui, tout à fait. Puis, premier élément que je peux vous dire, c'est... Évidemment, ce qu'on met en ligne, c'est parce qu'on va s'assurer que ça répond aux besoins du consommateur, qu'il est bien protégé pour le faire. D'ailleurs, dans l'exemple que vous donnez actuellement, si vous tentez de fermer en ligne votre soumission en habitation, vous ne pourrez pas au moment où on se parle. Alors que, si vous le faites en automobile maintenant, sur le site de Desjardins, depuis très peu, depuis décembre seulement, vous êtes en mesure de le faire à 100 %. Pourquoi? Simplement parce que... D'abord, on a commencé avec la plus importante demande, celle de l'assurance automobile, sans aucun doute le produit le plus simple également, a été mise en ligne. Et on est présentement... donc, il y a des ventes qui se font, au moment où on se parle, et on adapte constamment selon évidemment les commentaires des consommateurs.

Ce que je peux vous dire simplement sur... On vient de le mettre en ligne, là, ça fait quelques semaines, on n'a fait aucune publicité encore là-dessus. On fait toujours une mesure de satisfaction, là, sur une échelle de 1 à 10. Ce sont tous des 9 et des 10 que nous avons présentement. La raison pour laquelle on n'a pas toujours des 10, les clients nous disent : Quand est-ce qu'on va l'avoir en assurance habitation? Cette demande-là, elle est là.

Alors, tout ça pour vous dire, il y a une évolution qui se fait clairement. On débute avec l'assurance automobile. On le maîtrise bien. Je vous annonce tout de suite que la prochaine étape sera l'assurance locataire, l'assurance des copropriétaires et éventuellement l'assurance propriétaire occupant. Ceci étant, on le développe dans la même optique. Ce qu'on s'attend, c'est que vous ayez les mêmes exigences vis-à-vis les assureurs que lorsque la transaction se passe par un représentant certifié, que lorsqu'elle se passe du côté d'Internet.

Alors, c'est certain qu'au bout de la ligne ce qu'on fera, c'est qu'on mettra l'ensemble des informations et des questions, également en assurance habitation, pour nous assurer un langage qui soit clair et une pleine protection du consommateur.

M. Bonnardel : J'appelle au 1 877, là, pour ma maison. Je ne parle pas nécessairement à une personne certifiée?

Une voix : Absolument.

M. Hade (Alain) : Oui, tout à fait.

M. Bonnardel : O.K. Je suis persuadé que, dans 15 ans, Desjardins, je parlerai toujours à du monde au Québec. Il n'est pas dit qu'il n'y a pas une société un jour qui va s'installer ou qui est déjà installée, le représentant supposément certifié, puis je ne parlerai pas à quelqu'un à Dubaï, moi, là, là.

M. Cormier (Guy) : À nos yeux, notre position est très claire, là. Je fais abstraction des enjeux techniques, là — la personne a de la misère avec sa tablette, ou des choses comme ça. Si quelqu'un parle au téléphone chez Desjardins, puis ça devrait être partout dans l'industrie, la personne doit être certifiée, tout simplement.

M. Hade (Alain) : Et notre compréhension, c'est que c'est prévu comme ça également, là.

M. Cormier (Guy) : Et notre compréhension, c'est que c'est prévu comme ça. Et, s'il y a des éléments qui portent... ou des dispositions du projet de loi qui ne sont pas claires là-dessus, comme je le disais d'entrée de jeu, rendez-les plus claires. Mais, pour nous, il faut qu'une personne soit certifiée, au Québec, pour offrir des services financiers.

M. Bonnardel : Le pourcentage des gens chez Desjardins présentement qui commencent sur Internet, au-delà de parler à un conseiller direct, là, qui commencent leurs transactions, c'est-u un tiers? C'est-u un quart?

M. Hade (Alain) : C'est environ 25 %.

M. Bonnardel : 25 %?

M. Cormier (Guy) : 25 %, maintenant, de début de transaction par Internet, tout à fait.

M. Bonnardel : Une personne sur quatre commence là-dessus?

Une voix : Tout à fait.

M. Cormier (Guy) : Oui, une personne sur quatre commence là-dessus puis souvent commence là-dessus et, je porte à votre attention, peut le faire sur le site de Desjardins mais, de plus en plus, peut le faire à travers des sites internationaux où elle compare des produits d'assurance à travers le monde, tout ça. Alors, on n'encadre pas ça. Alors, je pense que c'est... Et c'est pour ça que je proposais, très humblement, qu'on n'enchâsse pas trop de choses dans la loi puis qu'on donne à l'Autorité des marchés financiers cette capacité-là d'avoir de la flexibilité. Si on change le projet de loi, dans huit, neuf ans, on va ravoir ce genre de discussion là parce que ça va avoir été trop vite pour le changement législatif.

M. Hade (Alain) : Et en ce sens-là, si je peux me permettre, là, évidemment, voilà 15 ans, on ne pensait pas, hein, de faire une transaction 100 % en ligne en automobile. Aujourd'hui, ça se fait. C'est facile. C'est apprécié. Alors, si on voulait restreindre des produits dans le cadre d'un projet de loi, visiblement qu'on souffrirait encore, dans quelques années, parce qu'au rythme de développement de la technologie... On parlait tantôt d'un pôle d'expertise qu'on se développe au Québec en matière d'intelligence artificielle. Ça va extrêmement vite. Donc, ne nous limitons pas par un corset trop étroit.

Le Président (M. Girard) : 15 secondes.

M. Bonnardel : C'est beau.

Le Président (M. Girard) : C'est beau. M. Cormier, M. Hade, M. Thibault, M. Grimard, merci beaucoup de votre contribution aux travaux de la commission.

Je vais suspendre la commission pour quelques instants pour laisser le temps à la Fédération des chambres immobilières du Québec de pouvoir s'installer.

(Suspension de la séance à 11 heures)

(Reprise à 11 h 3)

Le Président (M. Girard) : Donc, nous allons reprendre nos travaux. Nous recevons maintenant la Fédération des chambres immobilières du Québec. Donc, bienvenue. Je vais vous demander de vous présenter et présenter les gens qui vous accompagnent. Vous disposez de 10 minutes pour la présentation de votre mémoire. Par la suite, nous allons procéder aux échanges avec les différents groupes parlementaires. Donc, à vous la parole.

Fédération des chambres immobilières du Québec (FCIQ)

Mme Guy (Pénéla) : Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. les députés, Mme la députée, nous représentons la Fédération des chambres immobilières du Québec, un organisme à but non lucratif qui regroupe les 12 chambres immobilières de la province, dont la mission est d'offrir des services en matière d'affaires publiques, d'analyse de marché ainsi que de conciliation et d'arbitrage, tout ça dans le but de défendre et promouvoir les intérêts des quelque 13 000 courtiers qui en sont membres.

Je suis aujourd'hui accompagnée de M. Patrick Juanéda, président du conseil d'administration, Me Éric Vallières, spécialiste en droit de la concurrence et en pratique du courtage, de Me Martin Fortier, spécialiste du droit immobilier. Et je suis moi-même Pénéla Guy, chef de la direction de l'organisation. Nous sommes également accompagnés aujourd'hui de nombreux représentants des chambres immobilières, présents dans la salle, ainsi que de nombreux courtiers, qui suivent les audiences en direct et que je salue.

Avant de vous parler des amendements apportés par le projet de loi n° 141, je prends quelques instants pour vous parler des humains derrière les articles de loi, c'est-à-dire des courtiers immobiliers et de leurs clients. Les courtiers immobiliers sont des hommes et des femmes qui travaillent d'arrache-pied, de très longues heures, souvent les soirs, la fin de semaine, afin d'aider des dizaines de milliers de Québécois à concrétiser leur rêve de projet résidentiel à chaque année. Ces entrepreneurs, travailleurs autonomes, propriétaires d'agence, font, pour la plupart, partie de la classe moyenne. En effet, le revenu brut médian annuel d'un courtier immobilier est de 59 000 $. Ils sont rémunérés uniquement aux résultats. Pas de résultat? Pas de paie, et ce, peu importe les ressources investies et les heures travaillées.

Les courtiers immobiliers sont des acteurs incontournables de l'économie québécoise. En 2017, ils ont conclu près de 83 000 transactions immobilières, générant des retombées économiques de 3,8 milliards de dollars, selon une étude menée par Altus, le Groupe Altus, en 2017. Ils sont également des acteurs socioéconomiques importants pour leurs localités et les régions. Il n'y a qu'à penser aux espaces commerciaux qu'ils occupent, aux référencements à des professionnels et des fournisseurs locaux et à leur implication communautaire et philanthropique. Partout au Québec, ils sont de fiers ambassadeurs de vos régions.

Afin d'éviter que tout un chacun puisse s'improviser courtier immobilier, une personne aspirant à devenir courtier doit suivre un cours de quelque 500 heures, réussir un examen exigeant et suivre un nombre d'unités de formation continue comparable à celui des avocats. Les courtiers respectent un code de déontologie. Ils souscrivent à un fonds d'indemnisation ainsi qu'à un fonds d'assurance responsabilité professionnelle. Ces exigences, comme vous pouvez le constater, sont rigoureuses et elles sont nécessaires. Pourquoi? Parce que, lorsqu'un client décide de faire affaire avec un spécialiste ou un professionnel du courtage immobilier pour l'accompagner dans l'achat ou la vente de l'actif le plus important de sa vie, il s'attend à faire affaire avec quelqu'un qui est informé et bien formé, avec quelqu'un de compétent, en qui il puisse avoir confiance.

Le gouvernement a choisi, en 1991, d'adopter une législation, novatrice pour l'époque, qui assurait une protection du public et un encadrement strict des actes de courtage. En 2010, le gouvernement libéral a décidé de moderniser cette loi afin de s'adapter aux nouvelles réalités du marché tout en ayant en tête la protection du public. Parallèlement à cela, les courtiers immobiliers ont su se responsabiliser et se professionnaliser, ce qui a grandement contribué à la confiance du public envers cette profession.

Depuis 2015, nous demandons au ministère des Finances d'adapter une fois de plus l'application de la loi afin de s'assurer que toute personne se représentant ou agissant comme un professionnel du courtage immobilier soit assujettie aux mêmes règles et soumise aux mêmes obligations. Le ministère a malheureusement choisi d'effectuer un virage complet en proposant que l'application de la loi soit définie uniquement par la présence d'un contrat de courtage et d'un intermédiaire plutôt que par la présence d'une opération de courtage. Ce virage est, pour nous, très préoccupant, principalement pour les trois raisons suivantes.

Premièrement, en mettant l'accent sur la notion d'intermédiaire, le ministre des Finances fait preuve d'une vision réductrice du rôle de courtier. En effet, les 13 000 courtiers du Québec font beaucoup plus que de mettre en relation un vendeur et un acheteur. Ils conseillent, accompagnent, évaluent, publicisent dans le cadre d'une transaction qui peut parfois s'avérer fort complexe, comme dans le cas des copropriétés, par exemple. Les coachs immobiliers posent les mêmes gestes contre rémunération. Toutefois, la loi ne s'applique pas à eux. En acceptant cette situation, le gouvernement concède un avantage injustifié aux coachs par rapport aux courtiers. Le projet de loi n° 141 vient créer deux classes de spécialistes en revente immobilière, l'une qui est formée, encadrée, responsable de ses gestes et qui assume tous les frais relatifs au respect de la réglementation, et une autre classe qui, elle, n'a pas de formation, n'est pas encadrée, n'assume pas aucuns frais et surtout n'engage pas sa responsabilité quant à la protection du public.

Deuxièmement, le projet de loi ouvre la porte à ce que bon nombre de courtiers, ne voyant plus l'utilité ou la nécessité de détenir un permis, poursuivent leurs activités tout en délaissant leur certification. Ce regrettable retour en arrière aurait pour conséquence de grandement diminuer la protection du public.

• (11 h 10) •

Troisièmement, comment expliquer que ces entreprises d'assistance aux vendeurs se conforment aux lois de certaines autres provinces, mais pas à celles du Québec? Par exemple, en Ontario, DuProprio et ses coachs sont titulaires de permis. Je me permets de citer Randall Weese, directeur et porte-parole de DuProprio en Ontario, qui affirmait dans les médias que son entreprise se devait d'acquérir des permis de pratique du courtage immobilier en Ontario car ils se sont aperçus que les clients avaient besoin davantage d'aide et d'accompagnement. De toute évidence, ils ont fait le même constat au Québec. C'est pourquoi ils ont commencé à offrir les services de coach immobilier. Les différences entre le Québec et l'Ontario sont que se conformer à la réglementation en Ontario est beaucoup moins coûteux et qu'elle permet de limiter la responsabilité professionnelle en fonction des services spécifiquement offerts. Comment accepter que les citoyens du Québec soient moins protégés que ceux de l'Ontario, alors que leurs besoins sont les mêmes?

Abordons maintenant la délicate question du service-conseil. Vous avez sûrement reçu une correspondance l'automne dernier alors que des milliers de courtiers immobiliers se sont mobilisés afin de demander au gouvernement d'inclure le service-conseil dans la définition de l'acte de courtage. Nous nous expliquons très mal le refus du ministère de donner suite à cette demande. Quand une entreprise d'assistance s'aventure sur le terrain du conseil, elle prodigue des services qui sont au coeur des protections prévues à la loi. À partir du moment où il y a conseil, coaching ou accompagnement, on ne peut plus parler d'une vente purement par le particulier. Il n'existe donc pas de raison pour que la loi cesse de s'appliquer dans ces cas-là. Le concept d'intermédiaire retenu dans le projet de loi met donc l'accent au mauvais endroit, et, en conséquence, de nombreuses personnes qui se font accompagner, qui reçoivent des services propres au courtage immobilier, ne pourront pas bénéficier des protections offertes par la loi.

C'est d'autant plus étonnant que le ministère a pris une approche différente en matière d'assurance de dommages en affirmant que toute personne accompagnant un consommateur qui conclut une transaction par Internet soit certifiée. On s'explique mal cette absence de logique, surtout quand on pense qu'une assurance automobile coûte souvent moins de 1 000 $, alors qu'une maison, elle, coûte en moyenne, au Québec, 250 000 $. Ai-je besoin de vous rappeler que la transaction immobilière, pour la plupart des Québécois, est la transaction la plus importante de leur vie?

Par ailleurs, je me dois de revenir sur certains faits entendus lors de témoignages précédents. Nous avons entendu que, pour le gouvernement, les entreprises d'assistance aux vendeurs seraient des innovations technologiques spectaculaires et qu'il faudrait leur concéder un accommodement législatif. Sachez que les courtiers immobiliers ont pris le virage technologique depuis plus de 20 ans et qu'ils disposent d'outils performants et innovants. D'ailleurs, aujourd'hui, centris.ca est le site immobilier le plus visité au Québec à toute heure du jour, toutes plateformes confondues.

Bref, nous n'avons rien contre l'innovation technologique. Nous n'avons rien contre les entreprises d'assistance aux vendeurs. Nous n'avons rien contre le libre choix du consommateur de vendre ou d'acheter sa propriété par lui-même. Par contre, si ce consommateur choisit d'être accompagné par quelqu'un qui se présente comme un spécialiste, un professionnel du courtage immobilier, il se doit de le faire en toute connaissance de cause. Nous demandons que les mêmes lois, les mêmes obligations s'appliquent à tous. C'est une question d'équité et de protection du public.

En terminant, si vous décidez d'aller de l'avant avec le projet de loi dans sa forme actuelle, je réitère qu'il s'agirait pour nous d'un recul important en matière d'encadrement du courtage et de protection du public. Nous demeurons, M. le ministre, à votre disposition afin de trouver des amendements qui répondront aux besoins et à la réalité d'aujourd'hui pour la pratique du courtage dans le meilleur intérêt de la protection du public dans le cadre de l'étude article par article du projet de loi.

Merci. Nous répondrons maintenant à vos questions.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, Mme Guy. Donc, nous allons maintenant procéder aux échanges. Nous allons débuter par M. le ministre avec un bloc de 15 minutes.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, madame, messieurs, d'être venus nous présenter votre point de vue. Ça ne surprendra pas de constater que nous avons une opinion qui est différente de la vôtre, mais on va essayer de faire un peu de chemin ensemble.

Ce que nous avons fait avec le projet de loi n° 141... Dans le domaine qui vous concerne, dans l'immobilier, nous sommes tout à fait d'accord avec vous qu'il fallait mieux définir c'est quoi, un acte de courtage. En effet, il y avait une certaine ambiguïté, une certaine confusion. Il fallait essayer de mettre fin à ça ou, en tout cas, de clarifier les rôles. C'est pour ça que, dans le projet de loi n° 141, nous faisons ça. Nous définissons c'est quoi, l'acte de courtage, mais nous le limitons. En effet, oui, nous le limitons à un contrat d'intermédiation. Donc, ça veut dire que, précisément, dans ce qui vous concerne, la notion de conseil, à notre avis, ne devrait pas être un acte réservé. C'est-à-dire qu'on ne devrait pas obliger les consommateurs qui songent à conclure une transaction immobilière, acheter, vendre une maison... qu'ils soient nécessairement obligés de passer par un courtier quand ils pensent qu'ils peuvent le faire d'eux-mêmes. Et donc la notion de conseil... Et d'ailleurs hier on en a pas mal parlé de ça avec les comptables agréés. Ce serait problématique de réserver la notion de conseil seulement aux courtiers.

Par contre, c'est clair, comme vous l'avez mentionné très bien, je suis entièrement d'accord avec ça, que cette transaction-là, pour la plupart des personnes, c'est la plus grande transaction de leur vie. Et donc c'est tout à fait à leur avantage de faire affaire avec un professionnel, un professionnel certifié qui peut les accompagner le long du processus. Là, on est entièrement d'accord. Et je trouve que les courtiers immobiliers offrent une valeur ajoutée très importante, et là on n'a aucun problème là-dessus. Pour nous, par contre, pour ceux qui souhaitent le faire eux-mêmes, nous pensons que c'est utile qu'ils puissent faire affaire avec d'autres personnes, avec des... vous les appelez des compagnies de coaching, appelons-les ce qu'on voudra, qui peuvent les aider jusqu'à un certain point. Et puis, après ça, la transaction est réservée au courtier s'il y a, en effet, un acte de, donc, mettre ensemble un vendeur et un acheteur.

Alors, je pense que nous avons établi un juste équilibre entre ces deux notions là, d'acte de courtage et service de conseil, parce qu'au Québec, et contrairement à nos voisins de l'Ontario, au Québec, il y en a beaucoup, de citoyens qui sont tout à fait à l'aise et qui préfèrent même procéder eux-mêmes avec l'achat ou la vente d'une maison, pendant qu'en Ontario, culturellement, ça ne marche pas. Les personnes là-bas, une grande majorité veulent faire affaire avec un courtier. Ils ne veulent pas se lancer eux-mêmes dans cette activité-là.

Donc, nous, tout ce que nous faisons, à mon avis, c'est de, donc, ne pas imposer l'obligation au citoyen de faire affaire avec un courtier quand il ne le souhaite pas. C'était ça, notre motivation. Maintenant, s'il y a des choses que vous voulez nous conseiller, vous voulez nous souligner, qu'on devrait peut-être mieux préciser les rôles, on est ouverts à regarder ces choses-là. Mais, vraiment, nous souhaitons garder cette différence entre un acte de courtage et la notion de conseil. Comment vous voyez ça?

Le Président (M. Girard) : Mme Guy.

Mme Guy (Pénéla) : Je peux peut-être commencer avec quelques commentaires, pour ensuite céder la parole à d'autres intervenants, juste quelques points de précision en commençant.

D'abord, je veux réitérer que nous ne sommes absolument pas contre le libre choix du consommateur de vendre ou d'acheter sa résidence, sa propriété, par lui-même.

Deuxièmement, je veux être claire aussi qu'on ne demande pas l'exclusivité du conseil ici. D'ailleurs, dans la loi actuelle, l'exclusivité du conseil n'existe pas. La problématique que nous, on voit avec le projet de loi tel qu'il est rédigé actuellement, c'est qu'il crée deux classes ou, en tout cas, il permet l'existence de deux classes de spécialistes, alors les courtiers d'un côté et les coachs de l'autre, qui font sensiblement la même chose, mais qui... D'un côté, les courtiers, eux, sont tenus à toutes sortes d'obligations qu'on... Mais en fait on n'est pas contre ces obligations-là non plus, là. On est très, très à l'aise avec le fait que ça soit une profession qui est encadrée. On a toujours appuyé les mesures que le gouvernement a voulu prendre dans le sens de professionnaliser les courtiers et d'améliorer la protection du public. Par contre, là où il y a absolument un déséquilibre, c'est quand on permet à une autre classe de spécialistes en revente immobilière de faire la même chose sans être soumise aux mêmes obligations et de devoir respecter les mêmes règles.

Pour ce qui est spécifiquement aussi des enjeux, peut-être que mon collègue, Me Vallières, peut renchérir, là, en termes de comment... où cette ligne-là se doit d'être tracée de façon à ce que ça puisse respecter ce libre choix du consommateur, mais tout en faisant attention que quiconque se présente comme étant un spécialiste et accompagne le consommateur dans sa transaction immobilière, bien, qu'il soit soumis aux mêmes règles et aux mêmes obligations.

• (11 h 20) •

M. Leitão : Je pense qu'on n'est pas très loin... parce qu'en effet, si quelqu'un se présente devant un consommateur en prétendant être un courtier, en prétendant être capable de, donc, faire ce service d'intermédiation, de mettre un vendeur et un acheteur ensemble, oui, ça, c'est un acte réservé, c'est un acte de courtage. Et donc cette personne-là doit être certifiée et doit passer par toutes les étapes que vous avez mentionnées, et c'est très bien. La compréhension que nous avons, c'est que les coachs ne font pas ça. Les coachs n'amènent pas le propriétaire de la maison jusqu'à l'étape ultime de le mettre en contact avec le vendeur. Donc, à notre avis, c'est là la distinction. Et donc c'est là qu'il y a de la place, à notre avis, dans le marché pour ces deux types d'activité. D'ailleurs, la rémunération n'est pas du tout la même entre les deux types d'activité.

M. Juanéda (Patrick) : Oui, merci, M. le ministre. Oui, là où le problème se pose... Effectivement, ça, c'est ce qu'on dit qui ne se fait pas. Mais ce qui se passe dans la réalité peut être tout autre. Je m'explique. Les formulaires qui sont utilisés, c'est, pour la majorité, des formulaires qui sont déjà en ligne, qui sont proposés par l'OACIQ, qui sont d'excellents formulaires. Là où le problème se pose, c'est... Si on regarde ce qui se passe sur le terrain, ça demeure quand même relativement complexe de remplir ces formulaires-là, donc ce qui probablement peut arriver sur place avec des gens qui veulent coacher. Puis je vais vous rappeler qu'un des critères d'embauche pour les coachs, c'est d'avoir été courtier, entre autres. Donc, le soir, je ne pense pas que ce soit des notaires ou des avocats qui vont répondre à des questions sur place quand il y a une discussion avec le client. Alors, l'accompagnement peut aller bien au-delà de simplement conseiller, comme on le mentionnait, au niveau du «staging», ou autres. Puis c'est au niveau de l'accompagnement par rapport à la transaction comme telle qui pose le problème.

Et, du reste, si on regarde ce qui se passe en Ontario, c'est qu'on peut — puis pas juste en Ontario — délaisser certaines obligations de la loi pour se permettre d'accompagner un client jusqu'à une certaine limite. Puis, comme vous le disiez, ce qu'on recherche, c'est de déterminer à quel point on va déterminer que c'est du courtage ou ce n'en est pas, puis c'est là le flou qui est... actuellement, parce qu'on veut absolument prétendre que... On cherche à relier, oui... Mais il n'y a personne qui met en ligne des propriétés dans un but de ne pas les vendre. On veut trouver un acheteur. Après ça, est-ce qu'on va déterminer que c'est celui qui tient le crayon, qui est, à ce moment-là, le courtier ou celui qui conseille à côté... de comment écrire le document, comment le compléter, sans porter l'odieux de la responsabilité de ce qu'il va conseiller dans la divulgation, etc.? Puis il y a des cas, là, quand même, d'horreur qui se sont produits.

Le Président (M. Girard) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Tu veux poser...

Mme de Santis : Oui.

M. Leitão : Notre collègue veut poser une question.

Mme de Santis : Bonjour et bienvenue. Le projet de loi n° 141 propose une nouvelle gouvernance de l'OACIQ, et vous faites des recommandations. J'aimerais mieux comprendre vos recommandations et pourquoi vous les faites parce qu'hier l'OACIQ était devant nous et a aussi proposé des modifications. Alors, c'est quoi, votre opinion?

Mme Guy (Pénéla) : Merci pour votre question. Pour nous, les changements à la gouvernance sont probablement une bonne chose, étaient nécessaires. On comprend la volonté du gouvernement de vouloir accroître le nombre de représentants du public au sein du conseil d'administration. C'est d'ailleurs une tendance en gouvernance. Par contre, dans la mesure où le gouvernement a choisi de maintenir un système d'autoréglementation, on continue de croire qu'il devrait y avoir une majorité de représentants au sein du conseil qui sont des représentants de l'industrie, donc élus par les courtiers. C'est pourquoi on fait la recommandation de maintenir à 13 le nombre d'administrateurs et d'en avoir sept élus par les courtiers et six nommés par le ministre.

Ce qu'on, aussi, recommande, c'est de beaucoup insister sur un profil de compétence, une représentativité. Et un point très important pour nous, c'est celui à savoir que la personne élue comme président du conseil d'administration se doit d'être la personne la plus compétente autour de la table. Ça ne devrait pas être la personne qui, parmi un certain nombre d'administrateurs, est la plus compétente. Alors, c'est notre recommandation, que le président du conseil soit élu parmi l'ensemble des administrateurs de façon à ce que ce soit la personne la plus compétente qui soit en poste.

Mme de Santis : Merci.

Le Président (M. Girard) : Ça complète? Autres questions?

M. Leitão : O.K.

Le Président (M. Girard) : M. le ministre.

M. Leitão : Une autre question qui... J'aimerais avoir votre avis, votre opinion en ce qui concerne les courtiers en hypothèque. Comme vous le savez, dans le projet de loi, on propose aussi de transférer la responsabilité de l'encadrement des courtiers hypothécaires à l'AMF. Vous qui travaillez sur le terrain avec des courtiers hypothécaires, comment vous voyez cette proposition-là?

Le Président (M. Girard) : Mme Guy.

Mme Guy (Pénéla) : Bien, nous, on le dit dans notre mémoire également, là, on appuie ce transfert-là. C'est sûr, par contre, que, pour les courtiers immobiliers qui détiennent des permis qu'on appelle de plein exercice, bien, notre souhait, c'est qu'évidemment ces courtiers-là ne perdent pas leurs droits. Alors, on appuie la recommandation.

M. Leitão : Parfait. Merci. Moi, ça va. Merci.

Le Président (M. Girard) : Ça complète? Donc, nous allons maintenant passer du côté de l'opposition officielle pour un bloc de neuf minutes. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui, merci. Madame messieurs, au tout début de votre mémoire, vous avez une phrase qui m'a frappé. Vous dites : La LCI, là, la Loi sur le courtage immobilier, vise clairement à protéger le public qui s'engage dans une transaction immobilière et non uniquement à protéger le public contre les fautes ou les manquements d'un courtier immobilier. Et on a eu un son de cloche différent de d'autres personnes qui sont venues ici. Alors, moi, je voudrais juste que ce soit clarifié, ce bout-là. Est-ce que le fait de faire affaire avec un courtier, ça nous protège des manquements de ce courtier ou est-ce que ça nous protège aussi d'autres aspects de la transaction?

Le Président (M. Girard) : Mme Guy.

Mme Guy (Pénéla) : La protection du public, quand il y a un courtier immobilier d'impliqué dans la transaction immobilière, se situe à quatre niveaux.

D'abord, grâce à l'expertise du courtier immobilier puis des obligations auxquelles il doit répondre en vertu de la loi... On peut vous donner plein d'exemples de ça, ne serait-ce que le devoir de vérification de l'exactitude d'informations qui sont transmises, qui sont inscrites sur les fiches descriptives, le fait que le courtier va poser des questions, va challenger — excusez-moi l'expression — son client afin d'être sûr d'avoir toutes les informations qui sont nécessaires pour que l'acheteur puisse faire, prendre une décision la plus éclairée possible, la mieux informée possible. Il y a toutes les protections qui sont offertes évidemment par les outils qui sont fournis par l'OACIQ. Il y a un fonds d'indemnisation, hein, et puis, clairement, je pense qu'il y a une reconnaissance que ça a une utilité, ce fonds d'indemnisation là. Le gouvernement a d'ailleurs déposé un projet de règlement pour augmenter les contributions jusqu'à 100 000 $ récemment. Il y a le fonds d'assurance responsabilité professionnelle également. D'autre part, il y a certaines bannières qui offrent des protections additionnelles pour venir protéger d'autres aspects de la transaction immobilière.

Le Président (M. Girard) : M. le député.

M. Marceau : Très bien. Je comprends mieux le sens de ce qui était écrit dans ce cas-là. Une approche qui a été suggérée... Évidemment, il y a celle que vous recommandez dans votre mémoire, je la comprends, qui est de réécrire ce qu'est l'acte de courtage. Et puis, bon, j'ai vu la discussion que vous venez d'avoir. Une autre possibilité, ce serait de rendre plus transparentes, plus explicites les protections auxquelles on a droit quand on fait affaire avec vous et de rendre plus explicites les protections auxquelles on n'a pas droit quand on fait affaire avec d'autres acteurs. Est-ce que c'est une approche qui, sans être parfaite de votre point de vue, je le comprends, serait quand même mieux que ce qu'il y a actuellement dans le projet de loi?

• (11 h 30) •

Mme Guy (Pénéla) : Bien, vous l'avez dit, ça ne serait pas suffisant, à notre avis. Encore faudrait-il que cet avis-là, cet avertissement-là qui soit donné soit très détaillé, donc, d'une part, que ce soit... Bon, vous ne faites pas affaire avec un courtier. Vous ne recevez pas les protections qui sont offertes par la loi, une énumération de ces protections-là également. Et, ce qu'on a entendu également en commission, on faisait souvent référence à un avertissement sur le site, par exemple, de l'entreprise d'assistance aux vendeurs. Mais on voit plusieurs défis par rapport à ça. D'une part, je pense qu'on a tous eu des fois des avertissements comme ça sur un site où tu fais simplement dérouler le texte et puis tu dis que j'ai lu ou j'accepte les conditions sans vraiment les avoir lues, là. Alors, ça, c'est un des défis.

Un autre défi aussi, c'est, à notre avis, que ce n'est pas parce que tu dis que tu ne fais pas quelque chose que tu ne le fais pas. Et puis je pense que ça serait très important que, si le gouvernement décidait d'aller dans ce sens-là — deux choses, en fait — que ça soit combiné avec, encore là, une clarification de l'acte de courtage pour être certains qu'on puisse tracer la ligne et également que cet avertissement-là ne se retrouve pas juste sur le contrat ou pas juste sur le site parce qu'en fait je porte à votre attention que, même depuis quelques mois, certaines... en fait, DuProprio, pour ne pas le nommer, n'en font plus signer nécessairement de contrats. Alors, ça, ça n'aiderait pas la situation.

Ça fait qu'il faut vraiment prévoir. Il ne faut pas, comme l'OACIQ l'a dit hier, légiférer juste en fonction de ce qui existe aujourd'hui, mais aussi en fonction de tout ce qui pourrait exister. Alors, il faudrait que ce soit sur les contrats, sur le site, sur tous les outils promotionnels qu'ils utilisent, donc les dépliants qui sont distribués chez les personnes, les tableaux, les affiches publicitaires, les publicités à la télé, les publicités à la radio, etc., mais toujours également combinées avec une meilleure ligne, là, tracée entre ce qui est du courtage et ce qui n'en est pas.

M. Marceau : O.K. Merci. Troisième chose, vous disiez tout à l'heure qu'en Ontario, donc, DuProprio doit se procurer des permis, doit obtenir... Comment ça fonctionne plus particulièrement, là? Est-ce que ce sont strictement les coachs immobiliers ontariens qui se procurent des permis ou bien il y a plus que ça, là? Comment ça fonctionne plus précisément?

Mme Guy (Pénéla) : Bien, vas-y. M. Juanéda va répondre à la question.

M. Juanéda (Patrick) : Bien, en fait, ils se procurent le permis, ils rentrent dans les règles, sauf que les règles là-bas sont beaucoup moins astreignantes qu'elles le sont ici. Je peux par la suite faire ce qu'on pourrait appeler un contrat de courtage à portée limitée.

Ce qu'on ne voudrait pas faire ici, et on était d'accord avec l'équipe ministérielle là-dessus, c'est qu'eux peuvent se permettre de dire : Bien, voici, je vous offre un service, par contre je ne suis pas responsable d'au-delà de ce que je vous offre comme service, et c'est... Donc, je peux faire simplement de l'affichage sur le système, mais je ne m'occupe pas de prendre les mesures, je n'ai pas de responsabilité, je n'ai pas à vérifier, à quantifier, etc. Ils peuvent se détacher à leur gré du processus de la transaction, ce qu'on ne peut pas faire ici. Aussitôt qu'on met les doigts dans le courtage, c'est : tu prends tout... je ne peux pas.

M. Marceau : O.K. Puis là-bas ça semble fonctionner ou ce n'est pas...

M. Juanéda (Patrick) : Je ne pourrais pas dire.

M. Marceau : Si vous aviez à porter un jugement sur la façon, là.

M. Juanéda (Patrick) : Je ne pense pas que ça soit souhaitable. Puis sincèrement, là, on l'a envisagé, et ça a été discuté, mais on croit que ça serait très regrettable. Sincèrement, je suis probablement un des plus vieux ici, j'ai commencé en 1977, puis c'était du genre de courtage qu'on faisait, où on pouvait se permettre d'accompagner des gens, dire à peu près n'importe quoi. Il n'y avait jamais personne, c'étaient les agents dans le temps, puis ce n'est pas souhaitable. Je ne pense pas que ça soit souhaitable.

M. Marceau : O.K. Je vous amène sur un autre sujet, donc, qui n'a pas été abordé, la location d'immeubles puis... mais avant ça même, les maisons mobiles, et là je dois avouer que celles-là, je n'ai pas eu le temps d'en parler à mon collègue le ministre, mais j'essaie de comprendre la logique sous-jacente au fait que tout d'un coup, les maisons mobiles, ça ne serait pas... bien, enfin, ça ne serait pas assujetti aux principes, là, de la loi sur le courtage de maisons immobiles, on va les appeler de même. Pouvez-vous me dire comment vous voyez ça?

Des voix : ...

M. Marceau : Bien, il y en a des immobiles, il y en a des mobiles, n'est-ce pas? Alors, cette distinction-là, parlez-moi-z-en, s'il vous plaît.

M. Juanéda (Patrick) : Oui. Bien, en fait, effectivement, c'étaient des anciennes maisons mobiles qui sont devenues immobiles pour la plupart. C'est souvent des propriétés qui sont mises sur des solages, soit des blocs, soit carrément sur un solage et en plus... et on retrouve des propriétés... on en a, je pense, 8 000 ou plus de 3 000 au niveau du Québec, mais on en a même à vendre à 500 000 $. Puis où la complexité de la transaction, c'est que souvent ces propriétés-là reposent sur des terrains qui sont loués, donc il faut prévoir la location du terrain. La transaction ne change pas, il y a une hypothèque qui sort aussi.

Alors, nous aussi, on ne comprend pas à ce niveau-là. Du reste, je ne sais pas si vous aviez aussi remarqué, mais même tout ce qui touche le commercial au niveau des fonds de commerce, la vente d'actions de fonds de commerce, personne ne va s'en occuper. Et on trouve ça complètement aberrant de voir que ces gens-là vont être laissés à eux-mêmes, mais on ne pourra pas y toucher. Ça ne sera certainement pas les gens qui font du courtage mobilier qui vont en faire, là.

M. Marceau : Puis, sur la location...

Le Président (M. Girard) : 50 secondes, M. le député.

M. Marceau : Combien?

Le Président (M. Girard) : 50 secondes.

M. Marceau : Bien, en tout cas, un mot rapide peut-être sur la location d'immeubles, sur le commercial, les impacts que ça pourrait avoir, là, parce qu'on sait que c'est des grands, grands volumes.

M. Fortier (Martin) : Oui. Au niveau de la location commerciale, on est d'accord avec la position de l'OACIQ par rapport à ce sujet-là. Par contre, la location résidentielle, on ne parle pas ici de louer un logement, un trois et demie dans un édifice à logements. Il y avait déjà des exceptions. Le concierge pouvait le faire, le conjoint, conjointe de la propriétaire pouvait le faire. On parle plutôt de louer une maison, louer un condo. Parce qu'il y a possibilité de louer avec option d'achat, comment on va rédiger l'option d'achat? Si on loue notre maison avec l'intention de la vendre, comment on va s'entendre avec le locataire afin qu'il puisse quitter? Il y a un avis à donner. Qui doit donner l'avis? Alors, c'est complexe, la location. Qui va s'occuper du système d'entretien, le système de chauffage, la piscine, etc.? Donc, on comprend difficilement comment ce champ de pratique là soit retiré au courtier immobilier.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, M. Fortier. Maintenant, nous allons passer au deuxième groupe d'opposition avec M. le député de Granby pour un bloc de six minutes.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Messieurs dames, bienvenue. Juste revenir aussi sur ce que mon collègue a posé comme question, sur la vente de maisons mobiles, la location, et tout ça. Ailleurs au Canada, où on se situe? Est-ce qu'on sera les premiers à permettre à des gens, M. et Mme Tout-le-monde, qui pourraient vendre soudainement des maisons mobiles, comme on les appelle, là, est-ce qu'on va être les premiers à permettre ça ou ailleurs ça se fait?

M. Juanéda (Patrick) : Sincèrement, je n'ai aucune idée. On a discuté de beaucoup de choses, du reste, même les ventes en privé, qui sont, contrairement à ce qu'on peut croire, en augmentation, mais, à ce niveau-là, je n'ai jamais entendu parler mes confrères, parce qu'on a des rencontres annuelles avec les associations provinciales et nationales. Puis je ne pourrais pas sincèrement vous dire la réponse à ce sujet-là.

Mme Guy (Pénéla) : On peut vous revenir avec une réponse.

M. Bonnardel : Oui, ça serait bien. C'est quoi, le pourcentage de vente de ces maisons au Québec? Vous avez dit à peu près 8 000 tantôt, là?

Mme Guy (Pénéla) : Bien, il y en a...

Une voix : 3 000.

Mme Guy (Pénéla) : C'est ça, un peu plus de 3 000 inscrites, puis là évidemment je vous parle des ventes par les courtiers, donc inscrites sur notre système, puis, au total, 83 000 transactions, presque, cette année. Donc, ça vous donne un ordre de grandeur, là, mais ce n'est quand même pas un nombre négligeable. Puis c'est surtout aussi en termes de valeur et de complexité de la transaction qu'on...

M. Bonnardel : J'ai vu des chalets, des maisons mobiles vendues, là, au Memphrémagog à 400 000 $ puis à 500 000 $, là. Ça fait qu'à quelque part, je pense que ça demande une certaine protection, minimalement, ou une connaissance du produit, là. Bien, d'où vient l'idée? On l'a dit tantôt, là, y a-tu quelque chose... Il y a-tu quelqu'un chez vous qui a parlé à quelqu'un de l'autre bord puis...

Mme Guy (Pénéla) : ...oui, on leur a parlé, là. D'ailleurs, oui, tout à fait. Je ne veux pas dire qu'on ne leur a pas parlé, mais pas... Ce n'est pas nous qui leur avons demandé, en tout cas, ça, c'est clair. Puis on leur a fait part de nos préoccupations aussi par rapport à ça puis on n'a pas eu d'explication à savoir pourquoi est-ce que c'était retiré. Ils ont, d'un côté, par contre, assimilé à un immeuble. Ça, c'était quelque chose que nous, on avait demandé, mais, d'un autre côté, avec la disposition suivante, bien, on... c'est en fait retiré, le champ de pratique, alors c'est...

M. Fortier (Martin) : Si vous me permettez, dans le fond, ça ne cause pas problème, à l'heure actuelle, devant les tribunaux. Une maison mobile sur une fondation, c'est un immeuble.

M. Bonnardel : C'est une maison.

M. Fortier (Martin) : Alors, il n'y en a pas, de problème.

M. Bonnardel : Oui. Sur la gouvernance, vous avez répondu tantôt à une question de ma collègue, vous avez dit : On veut choisir la meilleure... vous parlez de mérite puis de compétence. Vous avez dit : La meilleure personne. Est-ce que cette personne pourrait ne pas être un courtier?

Mme Guy (Pénéla) : Bien, certainement qu'elle pourrait être un courtier.

M. Bonnardel : Mais vous n'avez pas de...

Mme Guy (Pénéla) : Bien non, c'est sûr que non. Bien sûr...

M. Bonnardel : ...c'est ça, compétence, mérite, «that's it», là, parce que, bon, que ce soit au Barreau, médecin, d'habitude, on a un médecin ou on a un avocat. Ça fait que là vous dites : Peu importe, si ce n'est pas un courtier, pour vous, la compétence...

Mme Guy (Pénéla) : Il faut que ce soit la meilleure personne pour le poste.

M. Bonnardel : D'accord. C'est beau. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Girard) : Ça complète?

M. Bonnardel : Mes questions ont été posées, oui.

Le Président (M. Girard) : Donc, Mme Guy, M. Fortier, M. Juanéda, M. Vallières, merci beaucoup d'avoir contribué aux travaux de la commission.

Donc, je vais maintenant suspendre les travaux pour permettre au groupe Option Consommateurs de prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 38)

(Reprise à 11 h 41)

Le Président (M. Girard) : Donc, nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le groupe Option Consommateurs. Donc, vous avez 10 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Par la suite, nous allons procéder aux échanges. Donc, je vous invite, M. Corbeil, à vous présenter, présenter les gens qui vous accompagnent et nous présenter votre mémoire durant 10 minutes. Merci.

Option Consommateurs (OC) 

M. Corbeil (Christian) : Bonjour. Je me présente, Christian Corbeil, directeur général d'Option Consommateurs. À ma gauche, nous avons Me Bélanger-Krams, avocate chez Option Consommateurs. Nous sommes aussi accompagnés, à ma droite, d'Alain Paquet, professeur titulaire de sciences économiques à l'ESG-UQAM, ex-ministre délégué aux Finances du Québec, ex-président de la Commission des finances publiques et ancien président de l'Association des consommateurs du Québec.

M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos observations aujourd'hui. A priori, nous savons qu'il est nécessaire de modifier l'encadrement législatif de ce secteur financier et de le moderniser. Nous avons lu et analysé avec grand intérêt le projet de loi n° 141. Néanmoins, force est de constater que globalement le projet de loi n° 141 représente un recul important en matière de protection des consommateurs, faisant passer celle-ci au second plan, et ce, dans un secteur où les consommateurs sont particulièrement vulnérables. Par contre, nous prenons acte de la volonté du ministre de raffermir l'encadrement des fournisseurs en matière de gestion du risque systémique et de stabilité du secteur financier, de l'élargissement des situations où un consommateur pourrait faire appel au Fonds d'indemnisation des services financiers et de la mise sur pied d'un comité des consommateurs. Par conséquent, Option Consommateurs est d'avis qu'on devrait adopter ces quelques éléments positifs, mais qu'il faut revoir en profondeur l'orientation du projet de loi.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : D'emblée, il faut se le dire, les consommateurs sont particulièrement vulnérables dans le secteur des produits et services financiers. Ils le sont pour plusieurs raisons. On peut penser à l'asymétrie informationnelle économique entre les parties. Ce sont des produits qui sont complexes, les consommateurs ne sont pas en mesure de les comparer adéquatement, les produits, et visent aussi à assurer les actifs les plus précieux des consommateurs, et les conséquences d'une erreur sont catastrophiques pour son patrimoine.

Je vais élaborer sur les principales lacunes du projet de loi n° 141. Donc, la première lacune est liée aux mécanismes de règlement de différends, particulièrement la médiation, prévue dans de nombreuses sections du projet de loi n° 141. Présentement, la médiation n'est pas obligatoire. Mais il y a pire, avec les modifications proposées, les frais doivent être partagés entre les parties. Ça fait complètement abstraction du rapport inéquitable entre les ressources des consommateurs et des entreprises.

Imaginez-vous cette situation : vous êtes malade, vous n'êtes plus capable de travailler, votre réclamation en assurance invalidité est refusée. Sans revenu, vous n'êtes plus capable de subvenir aux besoins de vos enfants et de payer vos factures. Mais, de la manière que le projet de loi, il est libellé présentement, c'est comme si on considérait que vous étiez sur le même pied d'égalité que la compagnie d'assurance. Autre situation aberrante, avec le projet de loi n° 141, en matière de médiation, il crée deux catégories de consommateurs québécois : ceux qui font affaire avec une coopérative de crédit comme Desjardins et ceux qui font affaire avec une banque. Donc, si un consommateur fait affaire avec Desjardins, il n'aura accès à la médiation que si Desjardins accepte, et les frais seront partagés entre les parties, alors que le consommateur qui fait affaire avec une banque, lui, va avoir accès à la médiation gratuite, et les banques vont devoir y participer.

C'est important de noter aussi que le projet de loi n° 141 ne semble pas suivre les lignes directrices du G20 et de l'OCDE en matière de traitement des plaintes des consommateurs. L'accès à la médiation gratuite et obligatoire pour les entreprises est chose commune dans de nombreux secteurs comme les télécommunications, les banques et l'énergie. C'est pour ça que nous recommandons d'étudier la possibilité de créer un organisme indépendant qui viserait à traiter les plaintes des consommateurs et de gérer les mécanismes de règlement des différends de façon similaire à la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision.

Une autre lacune du projet de loi, c'est qu'elle enlève l'expression «il agit à titre de conseiller» dans les articles définissant le rôle des professionnels certifiés. Cela semble faire disparaître le conseil comme un acte réservé, rattaché aux professionnels certifiés. C'est préoccupant que des vendeurs pourront faire du conseil.

Pourquoi est-ce grave? Bien, premièrement, les vendeurs n'ont pas les mêmes obligations que les représentants certifiés. Ces derniers ont de nombreuses obligations déontologiques qui sont mises en place pour protéger les consommateurs, alors que le vendeur, lui, n'a que la seule obligation de ne pas faire de fausse représentation. Il y a aussi les sanctions qui ne sont pas les mêmes. Donc, les sanctions pour le non-respect des obligations, le vendeur qui fait des fausses représentations, ça va être souvent l'entreprise qui va être sanctionnée, alors que pour le représentant certifié, s'il ne respecte pas ses obligations déontologiques, il sera personnellement responsable et peut se retrouver devant le comité de discipline.

Une autre lacune du projet de loi n° 141, c'est qu'il propose un recul quant aux obligations d'information et de conseil. L'acte de recueillir personnellement l'information n'est plus un acte réservé aux représentants. Alors, une personne qui n'a pas les mêmes obligations déontologiques et qui n'a pas les mêmes compétences pourrait le faire.

Il y a également l'allègement de l'obligation de conseil. Donc, le représentant devra s'enquérir de la situation de son client et lui proposer des produits en fonction de ses besoins. En allégeant l'obligation de conseil, on nuit à la protection des consommateurs.

Un autre enjeu, c'est la distribution de produits d'assurance en ligne. L'encadrement proposé par le projet de loi n° 141 est insuffisant pour protéger les consommateurs, puis il faut se rappeler, les consommateurs, ils sont vulnérables. Il faut aussi se rappeler que le consommateur, il a des obligations de divulgation d'information importante. Sans l'intervention du représentant certifié, il y a des risques que le consommateur ne divulgue pas toute l'information puis ça pourrait nuire à un refus de réclamation.

Il y a de nombreux autres problèmes avec l'encadrement. Il y a un manque de clarté entre les obligations de l'assureur et les obligations des cabinets. Ainsi, le cabinet a une obligation de conseil et d'analyse des besoins, alors qu'un assureur semble n'avoir qu'une obligation d'information. Le conseil pourra aussi être donné par des vendeurs. Dans le projet de loi, à plusieurs endroits, au lieu d'utiliser l'expression «représentant certifié», on parle de «personne physique» et c'est encore plus apparent lorsqu'on regarde les obligations du cabinet, où on dit qu'il suffit qu'il y ait un représentant d'inscrit. Est-ce que ça veut dire qu'un cabinet qui compte 50 employés pourrait avoir un représentant et 49 vendeurs?

Un autre problème aussi, c'est lié avec les sites de comparaison de prix. La définition est trop restrictive. Ça ouvre la porte à voir des problèmes apparaître, qui sont bien présents dans d'autres secteurs, notamment l'encadrement, les droits et les recours des consommateurs. Il ne règle pas non plus les problèmes inhérents et observés à l'étranger avec ces sites. Autre faiblesse, il n'y a aucune limitation sur les produits pouvant être distribués en ligne et il n'y a pas l'obligation de faire la souscription hybride.

Un autre problème avec le projet de loi n° 141, c'est l'abolition des chambres pour les intégrer, leurs fonctions, sous l'AMF. Il n'y a pas de double encadrement. Les chambres y jouent un rôle fondamental dans l'encadrement déontologique du professionnel certifié et sa responsabilité individuelle joue un rôle inestimable dans la protection des consommateurs. Il joue aussi un rôle prépondérant dans la présentation des infractions déontologiques en amont à raison de la formation continue des professionnels et des inspections.

L'intégration de toutes ces fonctions au sein de l'AMF pourrait conduire à l'affaiblissement de l'encadrement des représentants au profit de l'encadrement des cabinets. La concentration de nombreux mandats auprès de l'AMF est également préoccupante. Le souci d'harmoniser avec les autres provinces n'est jamais une solution si ça vise un nivellement par le bas pour la protection des consommateurs. Par ailleurs, nous, on aide des milliers de consommateurs à chaque année, puis cette confusion du public, ça ne nous a jamais été rapporté.

Une autre chose aussi, c'est la création du comité de consultation des consommateurs et utilisateurs de services financiers. D'emblée, c'est une bonne initiative, mais il y a certains problèmes, notamment au niveau de son nom, de sa mission et de sa composition. Et un dernier problème aussi, c'est en lien avec la définition de l'acte de courtage immobilier qui est tout simplement trop restrictive. Elle va créer deux régimes d'encadrement avec des recours différents pour les consommateurs.

• (11 h 50) •

M. Paquet (Alain) : Sur plusieurs plans, le projet de loi n° 141 est malavisé. Sur la base de mon expertise et de mon expérience, je ne peux que souscrire fortement aux inquiétudes mentionnées. Des pans entiers du projet de loi affaiblissent la protection des épargnants et des consommateurs de produits et services financiers. C'est le cas de l'abolition de la Chambre de l'assurance de dommages et celle de la sécurité financière avec leur absorption, pour la forme, au sein de l'AMF.

Les chambres contribuent significativement à protéger les consommateurs. Les gouvernements du Québec successifs ont combattu avec raison l'idée d'une commission unique fédérale pancanadienne des valeurs mobilières non seulement pour une question constitutionnelle, mais aussi parce que l'idée repose sur la volonté des banques et grandes institutions financières de disposer d'un mégaphone puissant pour influencer directement et de façon plus serrée le ministre fédéral des Finances. Il est donc étonnant que le projet de loi n° 141 prescrive la même médecine inadéquate à l'encadrement québécois du secteur financier tout en baissant la barre de la qualité de l'encadrement.

Il y a deux dimensions clés à l'encadrement des représentants : la déontologie et le droit pénal. Avec des ressources limitées, une culture institutionnelle développée autour de l'application du droit pénal, la centralisation de la réglementation à l'autorité risque de faire passer la dimension déontologique au second rang. Cela aurait des conséquences considérables. Certains, dont Desjardins, ont évoqué qu'un guichet unique leur simplifierait la vie et coûterait moins cher. Ce dernier élément était fort douteux.

Mais qu'en est-il des conséquences pour les consommateurs? Il n'est pas souhaitable que les personnes oeuvrant au sein de grands groupes ou cabinets et des professionnels indépendants soient régulés avec des exigences et des traitements différents ni qu'en même temps on abandonne la notion explicite de conseil par des professionnels certifiés, qu'on libéralise sans plus de précisions la distribution sans représentant, qui devrait être exceptionnelle, et la distribution par Internet.

Compte tenu des différentes problématiques soulevées par plusieurs, la chose responsable à faire de manière non partisane par l'Assemblée nationale est de surseoir aux articles et aux sections du projet de loi correspondant à ces questions sérieuses. Il est préférable de marquer un temps d'arrêt et d'approfondir la réflexion pour apporter des réponses. On ne doit pas mettre la charrue avant les boeufs. Il faut définir une stratégie dûment réfléchie pour le secteur financier québécois et les consommateurs préalablement et en lieu de réaménagements de structure et de changements de l'encadrement propices à la confusion, qui n'emballent surtout que les institutions financières de taille appréciable au prix de la protection des consommateurs.

À plusieurs égards, là-dessus, le projet de loi n° 141 nous ramène des décennies en arrière, en direction inverse de ce que les précédents gouvernements de toutes couleurs et différentes législatures avaient poursuivi jusqu'ici. Merci beaucoup.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Directement dans les temps pour le 10 minutes. Merci de votre présentation. Nous allons maintenant passer du côté du gouvernement pour la période d'échange avec M. le ministre pour une période de 16 minutes.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup. Alors, madame, messieurs, merci d'être là. Ça ne vous surprend pas, bien sûr, que je vous dise que je suis entièrement en désaccord avec votre position. Et d'ailleurs j'ai un peu de difficulté à comprendre comment vous arrivez à la conclusion que le projet de loi n° 141 affaiblit la protection des consommateurs.

Vous avez mentionné qu'en fin de compte, avec les changements qu'on propose, on finirait par permettre à n'importe qui de vendre n'importe quoi. Cependant, dans le coeur du projet de loi, l'article 12 de la loi sur la distribution mentionne très clairement, et cela ne change pas, que «nul ne peut agir comme représentant, ni se présenter comme tel, à moins d'être titulaire d'un certificat délivré à cette fin par l'Autorité» des marchés financiers. Donc, il n'y a pas d'affaiblissement, il n'y a pas de permission que quelqu'un puisse faire n'importe quoi. Alors, c'est pour ça que j'aimerais que vous m'aidiez à comprendre, là, votre point, parce que, vraiment...

Comment est-ce que vous arrivez à une telle conclusion que le projet de loi affaiblit la protection des consommateurs? La seule façon que je peux comprendre votre point, c'est si vous partez du principe que l'AMF est incapable de protéger les consommateurs. Parce que ce qu'on fait, en fin de compte, c'est de recentrer à l'AMF le mandat de réglementer l'industrie et de protéger les consommateurs. Alors, si vous croyez que l'AMF n'est pas capable de faire son travail, alors là, oui, mais, évidemment, moi, je ne le comprends pas comme ça.

M. Corbeil (Christian) : Bien, M. Leitão, en tout respect...

Le Président (M. Girard) : M. Corbeil, allez-y.

M. Corbeil (Christian) : M. le Président, excusez-moi. Pour répondre à un des commentaires, nous respectons énormément l'AMF. L'AMF est un partenaire crédible. Nous travaillons avec eux constamment et nous respectons l'organisation. À aucun moment on a signifié quelque opposition par rapport à l'AMF. Même que, dans notre mémoire, on fait référence à l'AMF. Merci.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : M. le Président, pour répondre aux nombreuses... parce qu'il y a de nombreuses choses à ajouter. Premièrement, au niveau du représentant certifié, c'est parce que le projet de loi, il ouvre la porte en utilisant un langage. Donc, au lieu d'utiliser l'expression «représentant certifié», on utilise l'expression «personne physique». Puis le législateur, il ne parle pas pour rien dire. Donc, si vous utilisez des expressions différentes à de nombreux articles, l'interprétation des lois va être interprétée de façon à ce que... ça veut dire des choses différentes.

Et il faut se rappeler qu'ils n'ont pas les mêmes obligations, donc... Puis ça, c'est apparent, on le voit partout. Donc, par exemple, en distribution de produits d'assurance en ligne, le cabinet n'a qu'à permettre à un consommateur de parler à une personne physique et non à un représentant certifié. Donc, le consommateur qui transige en ligne, il va appeler pour avoir de l'information ou du conseil, il va parler à quelqu'un qui ne sera pas un représentant certifié, et cette personne-là n'aura pas les mêmes obligations, elle n'aura pas non plus les mêmes compétences, la même formation et le même encadrement. Et ça, cette disposition, on la trouve là à de nombreux articles dans le projet de loi.

Également, toujours dans le contexte de la distribution de produits d'assurance en ligne, il y a également deux niveaux d'information et de conseil que les consommateurs vont recevoir. Donc, dépendamment s'il fait affaire avec un assureur ou s'il fait affaire avec un cabinet, ils n'ont pas les mêmes obligations. Donc, l'assureur a l'obligation d'information, alors que le cabinet a une obligation de conseil et de collecte de renseignements, et le consommateur ne le saura pas, ça. Donc, ça, c'est un enjeu également.

De réduire l'obligation de conseil, c'est non justifié, et, dans l'assurance en ligne, il y a de nombreux problèmes qui sont apparents. Et c'est évident que les tribunaux vont... c'est possible que les tribunaux interprètent, si on se fie aux interprétations précédentes, qu'une expression différente veut dire une chose différente, et ça, c'est inquiétant pour la protection des consommateurs.

M. Paquet (Alain) : En complément de réponse, M. le ministre, c'est important...

M. Leitão : Un instant. Un instant...

M. Paquet (Alain) : M. le Président, en complément de réponse...

Le Président (M. Girard) : M. le ministre.

M. Paquet (Alain) : ...parce que la question est importante. D'abord, j'ai le plus grand respect pour l'Autorité des marchés financiers...

Le Président (M. Girard) : M. le ministre avait demandé la parole.

M. Paquet (Alain) : ...j'ai eu l'occasion, au moment où j'occupais les fonctions...

M. Leitão : ...

Le Président (M. Girard) : M. le ministre, allez-y.

M. Paquet (Alain) : ...

Le Président (M. Girard) : M. Paquet, je vais vous demander...

M. Paquet (Alain) : ...

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams a déjà répondu. Je passe la parole à M. le ministre.

M. Paquet (Alain) : Ah! excusez-moi. Je compléterai plus tard la réponse.

M. Leitão : O.K. Alors, si on revient à notre discussion, madame, bien, je pense qu'il y a... nous ne comprenons pas le projet de loi de la même façon, parce que, pour ce qui est de la notion de conseil, la personne qui fournit un conseil, que ce soit pour l'assurance en ligne ou autre, cette personne-là doit être certifiée. Ça, il n'y a pas d'ambiguïté de notre côté. Peut-être vous le pensez autrement, mais, pour nous, c'est très clair, la dispensation d'un conseil doit être faite par un certifié, quelqu'un qui est certifié. D'ailleurs, je vous reviens avec l'article 12, c'est très clair là-dessus.

Là, où il y a une question, c'est que ça se peut, oui, très bien qu'un consommateur puisse avoir des questions de nature technique, puisse avoir des questions... où il n'arrive pas, je ne sais pas, moi, à se brancher ou quoi que ce soit, disons, qu'il ait besoin de conseils, mais des conseils qui ne regardent pas l'acte d'assurance lui-même, mais qui regardent quelque chose de technique, d'administratif. Alors là, oui, on n'a pas besoin d'avoir un agent certifié pour répondre à des questions pratiques, si l'ordinateur ne fonctionne pas ou quoi que ce soit.

Alors, je pense, c'est à ce niveau-là que peut-être il y a une certaine confusion, mais nous, nous sommes très... enfin, pour moi, c'est très clair que l'individu qui dispense un conseil doit être certifié, sinon oui... sinon, il y aurait un affaiblissement de la protection des consommateurs. Là, on est clair là-dessus.

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Oui, M. le Président, si je peux me permettre, il y a des deux choses. D'une part, le législateur, il ne parle pas pour ne rien dire, donc il y a des expressions qui sont différentes. Également, il y a d'autres obligations qui sont allégées aussi, donc, au niveau de recueillir les informations. Donc, le consommateur qui va donner l'information... la personne qui va les recueillir ou l'objet technologique qui va les recueillir, ça ne sera plus un acte certifié, donc il n'a peut-être pas les compétences et la formation pour le faire. Et là cette information-là, elle pourrait ne pas être bonne. Il y a de nombreux enjeux en distribution de produits d'assurance en ligne où le consommateur est vulnérable.

Ce qu'on remarque vraiment dans le projet de loi, c'est qu'on semble enlever les obligations aux entreprises, mais on n'enlève pas les obligations des consommateurs. Les consommateurs, ils ont des obligations excessivement élevées en assurance. Puis il faut se rappeler qu'il y a certaines de ces dispositions-là qui datent d'un moment où l'assureur n'était pas en mesure de réellement comprendre la situation de l'assuré, mais on n'en est plus là aujourd'hui, et c'est reconnu par la Cour supérieure, ça.

Donc, c'est des principes, et le consommateur, lui, il a une obligation de très haute bonne foi et il doit divulguer tout ce qui est pertinent relativement au risque qu'est l'établissement de la prime. Et, pour le consommateur moyen, ce n'est vraiment pas évident de savoir qu'est-ce qu'il doit divulguer et ne pas divulguer. Et, s'il transige en ligne et il n'y a pas un représentant certifié qui est là pour intervenir, et pour le guider, et poser les bonnes questions, il y a un risque véritable qu'un consommateur se retrouve à choisir un mauvais produit ou, pire, qu'il se retrouve à avoir fait une fausse déclaration et qu'il ne soit pas couvert en cas de sinistre. Et ça, c'est fondamental et ça peut être catastrophique pour les consommateurs, et c'est un vrai enjeu significatif. Ce n'est pas une question d'interprétation des lois, ça va se produire si vous modifiez le projet de loi de la façon que...

M. Leitão : Ce que nous disons, c'est que...

Le Président (M. Girard) : M. le ministre.

• (12 heures) •

M. Leitão : Ce que nous disons, c'est que le consommateur peut avoir l'option de souscrire à une police d'assurance par Internet. Il n'est pas obligé de le faire, mais je pense qu'en même temps, si on lui ferme cette possibilité-là, ça ne serait pas dans l'intérêt des consommateurs non plus. Donc, on n'oblige pas les consommateurs, bien sûr, à faire affaire seulement par Internet, mais on leur donne la possibilité de le faire. Certaines personnes ne le feront pas, d'autres vont choisir de le faire, mais c'est... Et donc il faut encadrer cette activité-là parce qu'aujourd'hui, même avant le projet de loi n° 141, cette activité, ça se passe aujourd'hui. Nous avons entendu plusieurs membres de différentes compagnies, ça se vend sur Internet aujourd'hui, donc il faut l'encadrer. Alors, nous, ce qu'on fait, c'est de fournir un encadrement à cette activité qui se fait déjà.

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Si vous me permettez de répondre? Écoutez, l'enjeu, ce n'est pas de ne pas encadrer l'assurance en ligne. L'enjeu, c'est de trouver un encadrement qui est adéquat pour protéger les consommateurs. Et présentement ce qui est proposé ne l'est pas et ce n'est pas une... Le consommateur moyen, il faut se rappeler que c'est un consommateur qui est vulnérable. La Cour suprême l'a reconnu, le consommateur moyen, c'est un consommateur qui est crédule et inexpérimenté. Ça, c'est en droit de la consommation. Mais, en assurance, c'est encore plus apparent que le consommateur ne comprend pas les différents produits, ne comprend pas les risques, et l'encadrement qui est proposé est insuffisant. Nous, on n'est pas contre la distribution de produits d'assurance en ligne. Ce qu'on est contre, c'est comment qu'il est balisé présentement parce que c'est dangereux pour les consommateurs. Il y a plein de mécanismes qui peuvent être mis en place pour protéger les consommateurs qui veulent transiger en ligne, comme par exemple le mécanisme de la souscription hybride.

Le Président (M. Girard) : M. le ministre.

M. Leitão : Vous avez raison jusqu'à un certain point, parce qu'en effet je ne pense pas que ça soit dans un projet de loi où on va inclure tous les détails de cet encadrement-là. Le projet de loi va permettre l'encadrement de façon générale, et ça sera par la suite à l'AMF d'émettre les règlements qui vont mettre en oeuvre, qui vont donner vie à cette activité-là. Et ça, bon, comme vous l'avez d'ailleurs mentionné dans votre mémoire et vous êtes certainement au courant, l'AMF a déjà émis certains indices, certaines règles, et, certainement, cela va être raffiné et ça va être complété une fois que, et si c'est ça, le souhait de l'Assemblée nationale, le projet de loi est adopté. Alors là, la prochaine étape, avant même de commencer à faire ça, ça sera à l'AMF d'émettre ces règlements-là. Et ça sera à ce moment-là où on aura une bonne possibilité de nous assurer, nous tous, vous et nous, que les nouvelles règles sont efficaces. Il y aura des périodes de consultation. Il y aura des périodes de réponses.

Donc, je pense que ça serait un peu prématuré ou, même, à mon avis, inutile de mettre dans un projet de loi... de figer tout ça dans le temps sans qu'on puisse s'adapter au fur et à mesure que le marché évolue. Alors, je pense qu'on n'est pas... On ne dit pas des choses tellement différentes, mais c'est une perception, à mon avis, de l'encadrement de cette activité.

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : En fait, il y a deux choses.

D'une part, les orientations de l'AMF de 2015, il y en a qui ne sont pas suivies dans le projet de loi en ce moment. On peut penser, par exemple, de l'accès à un représentant certifié en tout temps. Le libellé de l'article, comment il est proposé en ce moment dans le projet de loi, c'est assez clair que le consommateur, il y a des risques qu'il n'ait pas accès à un représentant certifié en tout temps.

Également, au niveau... Je comprends qu'il faut adapter le secteur aux innovations technologiques, mais, dans le projet de loi, il y a du langage qui est utilisé qui est un peu... qui pourrait être interprété figé dans le temps. Puis je vais vous donner un exemple. La définition que vous utilisez, dans le site, de comparaison de prix, elle est très restrictive puis elle n'est pas adaptée aux nouveaux modèles qui sont déjà dans d'autres secteurs et qui sont possibles d'émerger dans ce secteur-là. Et là, à ce moment-là, les sites de comparaison de prix pourraient se retrouver à être exclus de l'encadrement carrément, et c'est des produits et des services qui sont problématiques pour les consommateurs. Et ces produits, ils existent en Europe depuis très longtemps, et il y a de nombreuses études qui démontrent que les consommateurs sont vulnérables, et c'est ce qu'on... Il y a des risques qu'il y a certains sites de comparaison de prix qui ne soient pas assujettis. Donc, il y a certaines dispositions qui pourraient être figées dans le temps.

Le Président (M. Girard) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Moi, ça va. Je n'ai pas d'autre commentaire à faire. Je ne sais pas si, les collègues, vous en avez. Sinon, de mon côté, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Girard) : Merci. Donc, nous allons passer du côté de l'opposition officielle avec le député de Rousseau pour une période... Ah! M. Paquet, voulez-vous rajouter quelque chose? Oui.

M. Paquet (Alain) : ...des questions intéressantes qui ont été posées.

D'abord, l'AMF applique les lois et les règlements qui sont adoptés par l'Assemblée nationale ou promulgués par le ministre, le Conseil des ministres. C'est comme ça, et l'AMF fait très bien son travail. La question, c'est le travail justement de l'Assemblée nationale d'essayer de trouver l'encadrement et de définir les règles à partir desquelles elles seront appliquées par la suite. Mais la question, c'est que, par rapport justement au nouveau mode de distribution, évidemment, l'idée, ce n'est pas de revenir 30 ans en arrière là-dessus. Ce n'est pas là-dessus qu'est le problème. Il y a des nouvelles technologies qui sont là et qu'il faut utiliser. C'est utilisé ailleurs.

Mais on regarde en Europe, on parle, par exemple, de la notion de Figital, c'est-à-dire qu'on parle... ce qui se définit comme allier toute la puissance du Web avec la proximité du commerçant. On allie le digital, la relation client, la proximité, le conseil et l'accompagnement à long terme.

Alors, le conseil, ce n'est pas juste de dire : Bien, tiens, je vais cliquer à deux heures du matin, je vais me choisir un produit d'assurance. Un consommateur peut vouloir faire ça : Tiens, je vais prendre une assurance, par exemple, pour... Hier, on parlait, par exemple, de l'automobile. Mais savez-vous qu'en 2016 il y avait 42 avenants juste pour le produit d'assurance, là, en sachant qu'on parle juste de la question du bien matériel physique? Alors, c'est complexe.

Quand on regarde, par exemple, pour la protection de l'eau... L'an dernier, je me souviens, en mai 2016, en fait, il y avait une annonce que Desjardins faisait, puis d'autres pouvaient faire la même chose, disant... Il y avait une dame qui était dans l'annonce, qui disait : J'écoute un téléroman, ah! j'ai décidé de me faire couler un bain, et je me suis tellement prise dans l'histoire du téléroman que j'ai oublié que l'eau coulait, et ça a débordé, j'ai un dégât d'eau. Elle appelle son conjoint, elle dit : Désolée, chéri, il m'est arrivé telle chose. Heureusement, on était protégés parce qu'on a une assurance contre les dégâts d'eau. Mais c'est plus précis que ça. Les dégâts d'eau, si c'est un refoulement d'égout, si l'eau vient par le toit, si c'est une inondation ou autre, tout ça change la façon dont les règles sont écrites. Le problème, c'est que les consommateurs peuvent bien dire qu'ils vont choisir un produit qu'ils pensent qui leur convient, mais c'est par après qu'il y aura des dommages que là ils vont se rendre compte que leur réclamation ne s'appliquait pas.

C'est vrai aussi pour l'assurance de personnes et l'épargne collective. Lorsqu'on parle d'assurance temporaire, assurance permanente... entrer dans le détail, mais tout ça, c'est complexe. Et présentement, dans le cadre actuel, existant, législatif, ce qui est exigé, c'est que les représentants, hein, les distributeurs de produits et services financiers doivent tout faire pour donner le meilleur produit adéquat aux consommateurs. C'est explicite dans le projet de loi. Ça disparaît. En tout cas, c'est beaucoup plus implicite, c'est plus impressionniste dans la loi actuelle, où la notion de conseil est une chose. Mais, par après, lorsque quelqu'un va vouloir faire une planification financière...

Je vous conte un exemple. En 2012, un mois et demi après l'élection, je reçois un appel...

Le Président (M. Girard) : M. Paquet, est-ce que vous me permettez... J'ai Mme la députée de Bourassa-Sauvé qui voudrait poser une question.

M. Paquet (Alain) : D'accord, mais je... comme exemple. Ce serait un exemple qu'on prend pour illustrer le concept, oui.

Mme de Santis : Un commentaire, ensuite une question. Combien de personnes aujourd'hui se trouvent à avoir des assurances qui ne les couvrent pas adéquatement, O.K.? Alors, aucun système n'est parfait. Je ne crois pas que vous me parlez d'une situation aujourd'hui où les gens sont nécessairement couverts pour toutes les inondations. Mais ça, c'est simplement que vous croyez que...

Une voix : ...

Mme de Santis : O.K., mais la façon que vous le présentez... Mais ma question touche la Chambre de sécurité financière et le CHAD. Ce matin est venu devant nous des représentants de l'Université Laval, le Groupe de recherche en droit des services financiers, et ils nous ont présenté ce tableau, et c'est les autorités d'encadrement dans l'industrie des services d'investissement au Québec. Il y en a beaucoup.

Le Président (M. Girard) : ...Mme la députée, 15 secondes.

Mme de Santis : 15 secondes? Ils ont signalé qu'il y en a beaucoup, que le CSF n'a pas la compétence nécessaire pour faire tout le travail parce que les seules personnes qui sont assujetties sont des personnes, des individus, et qu'il y a du dédoublement. Je voudrais savoir à quel point vous avez vraiment fait une étude pour déterminer si, oui ou non, on soit d'accord avec...

Le Président (M. Girard) : Malheureusement, on aura la réponse lors d'un bloc subséquent. Ceci met fin au bloc de temps. Je dois respecter le temps. Le temps du gouvernement est écoulé. Donc, nous devons maintenant passer à la première opposition avec le député de Rousseau. Allez-y avec vos questions.

M. Marceau : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, madame, bonjour, messieurs. Merci d'être là. Puis moi, je veux souligner le fait que votre mémoire est un des rares mémoires qui ratissent aussi large, là, qui aborde de manière très approfondie plusieurs des sujets. Bon, il peut y avoir désaccord avec ce que vous dites, mais il y a quand même quelque chose d'impressionnant là-dedans. Puis je sais que vous n'êtes pas une organisation qui a des poches profondes avec des centaines d'employés. Alors, c'est d'autant plus méritoire, là, de voir que vous êtes parvenus à couvrir tant de sujets que ça.

Puis j'en aborde un qui n'a pas encore été abordé depuis... je pense, c'est la troisième journée de consultations qu'on a, c'est celui de mécanisme de règlement des différends que vous abordez. Puis je vais commencer par vous donner la parole puis je vous poserai des questions, mais peut-être juste nous dire ce que vous pensez du mécanisme de règlement des différends ou des changements qui sont apportés au mécanisme dans le projet de loi.

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

• (12 h 10) •

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Écoutez, les changements qui sont proposés, notamment au niveau des frais, c'est quelque chose qui est très problématique pour les consommateurs. Donc, ce qu'il faut se rappeler, c'est que les consommateurs, ils sont vulnérables, de façon générale, vis-à-vis l'entreprise tant au niveau des connaissances qu'au niveau des moyens financiers. Et là, quand il vient un différend avec un assureur, ou ça peut être une coopérative de crédit aussi, ils sont encore plus vulnérables. Ils pourraient être en situation économique difficile. Donc, ça ajoute une couche de plus à l'accès à la justice pour les consommateurs, de faire valoir leurs droits.

Puis pourtant il y a tellement d'exemples inspirants ailleurs. Donc, par exemple, dans des secteurs... Je pense aux télécommunications, par exemple téléphone, télévision, Internet, les consommateurs, ils ont accès à une médiation gratuite, et toute l'industrie y participe. Puis le système de financement fonctionne où c'est les industries qui paient pour le système puis c'est quand même un système qui fonctionne bien. Dans les chiffres de l'année passée, ils ont eu 90 % des consommateurs qui étaient satisfaits et 74 % des consommateurs qui ont reçu une compensation. Donc, il y a des exemples qui se font dans d'autres secteurs qui sont inspirants. Donc, ça pourrait facilement se faire ici.

Une autre chose également, c'est que l'OCDE et le G20 ont des lignes directrices en matière de traitement des consommateurs, et les mécanismes de règlement des différends, ça doit être gratuit. C'est syndiqué, là, c'est très clair. Donc, nous, on était surpris et déçus de voir ça parce que c'est un obstacle de plus à l'accès à la justice.

Le Président (M. Girard) : M. le député.

M. Marceau : Oui. Donc, cette idée-là d'introduire des frais, vous êtes opposés à ça puis vous pensez que la médiation doit être gratuite comme c'est le cas dans d'autres secteurs. Donc, on n'en a pas parlé encore, puis le ministre n'a pas réagi à ça, là. Peut-être qu'il aura refait son... il aura changé d'opinion là-dessus. Mais, moi, en tout cas, j'entends bien ce que vous dites, puis, en tout cas, de mon côté, je vais défendre ça. Allez-y, oui.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : M. le Président, si vous me permettez d'ajouter?

Le Président (M. Girard) : Allez-y.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Également, non seulement qu'elle soit gratuite, mais que ça soit obligatoire pour les entreprises de participer également.

M. Marceau : Oui, c'est ça. Ça ne doit pas être facultatif puis... Dépendant des circonstances, on s'entend, il faut que ce soit toujours possible.

M. Paquet (Alain) : M. le Président, j'aurais un élément aussi, par exemple.

Le Président (M. Girard) : Allez-y, M. Paquet.

M. Paquet (Alain) : On faisait référence au fait que supposément... Bien, en tout cas, Mme la députée, de l'autre côté, semblait voir qu'il y avait dédoublement. Quand on connaît comment fonctionne le système, effectivement, il n'y a pas de dédoublement. Il y a des missions, une division du travail que les cabinets... Présentement, l'aspect déontologique est supervisé par l'AMF et le côté de la supervision et l'encadrement des individus, des personnes physiques, est fait au niveau des individus eux-mêmes par la Chambre de la sécurité financière.

Un des enjeux qui se produit, par exemple, dans certains cas, les employés des grandes institutions financières, finalement, ont... Les grosses institutions agissent évidemment pour dire : Bien, écoutez, on va régler le problème, etc. Et donc c'est là qu'il y a un peu un deux poids, deux mesures que le projet de loi amplifie à cet égard-là au lieu de... Il y a déjà une clarification qui existe, mais au lieu... à la limite, de revoir la division du travail et permettre un meilleur encadrement des personnes physiques parce que, plus que jamais, l'ultraprofessionnalisation est essentielle dans un monde qui est plus complexe. Et, exemple, pour la question des règlements de différends, avec la disparition des chambres, la partie d'appel qui pouvait être faite auprès de la Chambre de la sécurité financière ou de la Chambre de l'assurance de dommages disparaît comme ça dans le projet de loi actuel.

Le Président (M. Girard) : M. le député.

M. Marceau : O.K., merci. Je vais aller sur un sujet qu'on a abordé ce matin aussi. Mais donc j'aimerais bien vous entendre là-dessus, sur le courtage immobilier. Vous avez une section là-dessus. Bien, décrivez-nous votre point de vue, là, pour que les gens sachent bien ce que vous pensez sur la question du courtage immobilier, et la définition de l'acte, et ainsi de suite, parce que, bon, l'approche intermédiation puis le fait d'exclure le conseil... Enfin, je vous écoute.

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : En fait, c'est au niveau de la modification de l'article 3.1. C'est parce qu'on définit l'intervention de façon très restrictive. Puis l'opération de courtage étant intimement liée au contrat de courtage, ça finit par être très restrictif, alors qu'il y a plein d'activités que les représentants certifiés vont faire qui pourraient ne pas être encadrées. Donc, on pourrait se retrouver, par exemple... C'est quelque chose qui nous inquiète beaucoup, c'est qu'il y ait, par exemple, des professionnels qui ont été radiés, qui peuvent faire de l'accompagnement, qui ne rentrent pas dans cette définition-là. Donc, ça, c'est dangereux pour le public. Mais il y a aussi des services d'accompagnement qui sont faits, qui offrent différents services qui ne rentrent pas dans cette définition restrictive là. C'est important de l'encadrer. C'est important de mettre des balises, mais les balises sont mises un petit peu trop restrictivement pour... On a peur qu'il y ait des dérapages pour la protection du public. Puis aussi les consommateurs, ils ne sont pas au courant, quand ils font affaire avec d'autres entreprises qui ne sont pas des représentants certifiés, qu'ils n'ont pas accès aux mêmes recours.

Le Président (M. Girard) : M. le député.

M. Marceau : O.K. Juste pour nous remettre dans le genre de discussion que notre ministre a eue avec d'autres intervenants, les activités de conseil, vous, qu'est-ce que vous conseillez de faire? Est-ce que ça doit être inclus ou pas dans les activités de courtage réservées aux courtiers?

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Il faudrait élargir la définition pour que ça soit plus large, effectivement, parce qu'il y a des risques pour les...

M. Marceau : Mais est-ce que vous proposez d'ajouter le conseil ou pas?

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Bien, c'est une solution qui est intéressante. Il faut définitivement élargir la définition de ce qui est proposé parce qu'en ce moment c'est très restrictif. Il y a aussi l'utilisation des mots, aussi, qu'il faut... est importante aussi. Mais, oui, il faut élargir pour protéger les consommateurs.

M. Marceau : O.K. Puis, dans le débat sur l'abolition des chambres, là, puis je vous ai bien entendus, vous, donc, vous croyez... Bon, si je résume bien, puis peut-être que ce n'est pas... Vous me corrigerez, là, mais, vous, l'idée qu'il y a des coûts supplémentaires qui découlent de ce que les gens appellent le double encadrement, vous croyez que, s'il y a de tels coûts, ils sont négligeables et puis qu'ils sont bien en deçà des bénéfices qui découlent de l'autoréglementation.

Le Président (M. Girard) : M. Paquet.

M. Paquet (Alain) : En complément à ce que j'ai dit auparavant, effectivement, parce que la division du travail, elle est déjà là. Elle existe déjà de facto, alors ou bien, au minimum, dans le meilleur des mondes, on change quatre trente-sous pour une piastre, comme on dit, on transfère le statu quo, mais on le met dans une autre structure, une autre boîte... On peut changer la boîte, mais il n'y a pas de... Je ne vois pas en quoi... Je n'ai pas vu d'argumentaire solide, malheureusement, qui me permet de dire : Bien, écoutez, voici les améliorations claires pour les consommateurs, parce que, dans certains cas, on dit : Est-ce que, finalement, tout ce que les chambres font va être fait à l'intérieur de l'AMF, et donc, finalement, c'est juste changer les boîtes?

Et ce que je trouve dommage, c'est qu'on a eu beaucoup l'avancée sur la question de changer la structure, mais, pour moi, la structure n'est pas... Pour nous, ce n'est pas essentiel. Elle est essentielle comme outil, mais, initialement, il faut penser à la finalité. Qu'est-ce qu'on essaie d'améliorer? De quelle façon est-ce qu'on protège mieux le public, qu'on l'accompagne davantage et que la confiance des gens est renforcée? C'est là-dessus que repose le fonctionnement des systèmes financiers, on l'a vu dans d'autres contextes plus larges, les systèmes financiers, depuis 2008, notamment, et à d'autres époques.

Alors, il est important, à cet égard-là, de penser en amont à la finalité. Et malheureusement ça n'a pas été clair depuis trois ans. Même avec le rapport qui avait été déposé, de consultations, en juin 2015, les éléments étaient plutôt flous. On disait : Ah! il y aura des économies. Mais il n'y a eu aucun chiffre. Je n'ai pas vu de chiffres, moi, concrètement, qui ont été mis là-dessus.

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : En fait, nous, notre position, c'est qu'il semble y avoir un problème ici, au niveau où on en enlève beaucoup aux entreprises, mais on n'en ajoute pas aux consommateurs. Donc, ça, c'est un enjeu important. Nous, on ne croit pas qu'il y a un double encadrement. On croit que c'est un encadrement... qu'il est complémentaire. Également, cette confusion du public, qui est abordée de façon fréquente, nous, on travaille avec les consommateurs, on ne le voit pas, ce problème-là.

Donc, ils ont des rôles uniques. On a vraiment des craintes qu'il y ait un affaiblissement de l'encadrement des représentants si ça arrive et on est... Nous, ce qu'on voyait vraiment au niveau de nos recommandations, c'était d'être proactif. On trouve qu'il est trop prématuré... les propositions. Plutôt, ce qu'on suggère, la deuxième recommandation, c'est : Option Consommateurs recommande la mise en place d'un comité indépendant pour étudier le modèle québécois actuel de protection du public et voir comment il pourrait être amélioré. Ce comité, il devrait être composé de plusieurs personnes, d'experts, d'universitaires, des régulateurs, des chambres.

Quand on regarde les mémoires qui ont été déposés dans le rapport de 2015, on regarde que, sur les nombreux mémoires, il y a environ 10 mémoires qui ont demandé l'abolition des chambres, et ça provient tous de l'industrie. Donc, il faut aussi penser aux consommateurs. Puis ce qui est problématique, c'est qu'on en enlève à l'industrie, on enlève des obligations à l'industrie, mais on n'en enlève pas aux consommateurs, qui sont déjà vulnérables dans un secteur où ils ont beaucoup à perdre. Puis ça, c'est inquiétant pour nous.

M. Paquet (Alain) : Et, en fait, c'est une capture réglementaire, en pratique — je pense, le terme a été employé hier — capture réglementaire où les grandes institutions vont avoir un mégaphone encore une fois pour... Et vous l'avez vécu probablement, comme ministre, à l'occasion, et c'est normal. Tout le monde a le droit de se faire entendre, là. Je ne prétends pas, même si c'est des gros joueurs ou des plus petits joueurs, qu'ils n'ont pas le droit de se faire entendre. C'est légitime. Mais ultimement le rôle du ministre, vous l'avez occupé, le ministre actuel l'occupe, je l'ai occupé, à cet égard-là, pour le secteur financier, on a à faire l'arbitrage de manière à ce que le premier élément, c'est d'avoir la meilleure protection possible du public, qui ne se mesure pas à la quantité de la réglementation, mais à la qualité de sa conception et à son application.

Le Président (M. Girard) : M. le député, il vous reste 30 secondes.

M. Marceau : Je vais donner le 30 secondes à mon collègue de Granby.

Le Président (M. Girard) : Alors donc, M. le député de Granby, vous disposez de 6 min 30 s.

• (12 h 20) •

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Messieurs dames, bienvenue.

Je veux revenir sur la fusion de la CSF, de la CHAD avec... et comment le consommateur qui a été lésé auparavant, et à partir de la loi qui sera adoptée dans les prochaines semaines, lésé dans une transaction avec un conseiller en assurance, fait sa plainte aussi à la CSF. Un syndic s'en occupe. Il y avait le comité de révision par la suite s'il y avait problématique. Vous avez dit tantôt, de façon correcte, qu'à l'AMF il n'y en aurait pas. Donc, la CSF me prenait en main, là, puis s'occupait de moi.

Puis j'ai lu un article qui était très intéressant, le 25 octobre 2017, une des premières fois où vous avez réagi quand la loi a été déposée, puis vous dites : Pensez-y, le consommateur qui vient de subir des pertes financières à cause d'un problème d'assurance devra payer pour tenter de régler le litige. Expliquez rapidement, là, à tout le monde qu'on comprenne bien l'avant, l'après, que le consommateur qui va avoir un problème avec son assureur, un conseiller, un courtier, pourrait être moins bien protégé. Vous dites : C'est David contre Goliath. Je vous laisse une ou deux minutes, avant qu'on aille plus loin, si vous voulez prendre la parole, M. Paquet, là.

Le Président (M. Girard) : M. Paquet.

M. Paquet (Alain) : La question, c'est que la déontologie est essentielle, tout comme le pénal est important. Et les différents Parlements, depuis, en tout cas, plusieurs années, mais notamment depuis 2003, tous gouvernements confondus, ont renforcé les pénalités, avec raison, et renforcé de manière à agir. Vaut mieux prévenir que guérir. Or, l'élément déontologique est un rôle essentiel à cet égard-là pour justement s'assurer du professionnalisme des gens, puis ces gens... Lorsqu'il n'y a pas nécessairement de dol, où là ça relève du pénal plus particulièrement, l'aspect déontologique est essentiel. Et les chambres ont un élément important. Il y a une proximité réglementaire dans ce sens qu'ils ne sont pas soumis aux mêmes lobbys. Le lobby va se faire auprès du ministre. Le lobby va se faire auprès de l'Autorité des marchés financiers. Puis encore une fois ils ont le droit. Il n'y a rien de mal à faire à faire du lobby, là, dans le sens de promouvoir des positions qu'ils jugent, eux, avantageuses pour elles.

La question maintenant : Est-ce que, pour le public, c'est une bonne chose, globalement? Malheureusement, ce qu'on voit, c'est qu'il y a un affaiblissement dans ce contexte-là, où l'intégration même... Encore une fois, au minimum, c'est quatre trente-sous pour une piastre. Donc, on ne change rien. On fait juste changer les boîtes. On change les structures. Mais on n'a pas réfléchi en amont à qu'est-ce qu'on doit améliorer à cet égard-là. Et l'histoire des dédoublements, c'est un faux-fuyant, là. Ce n'est pas ça qui est le problème, véritablement. Ceux qui disent qu'il y a dédoublement, finalement, c'est les grosses institutions qui voudraient bien que la loi soit... que les règlements... qu'il soit un peu moins fatigant d'avoir le souffle du coût des régulateurs.

Encore une fois, non pas que l'AMF ne fait pas son travail. Elle va le faire. Elle le fait avec ce qu'elle a comme moyens, comme ressources, et tout. Mais il y a une question aussi, dans les institutions, de culture institutionnelle qui est là, et le côté déontologique au niveau des représentants physiques, des personnes physiques. L'expertise, à l'heure actuelle, là, c'est la CSF et la CHAD qui l'ont. Peut-être, dans deux, trois, quatre ans, ou peut-être un peu avant, on aura développé cette expertise-là dans le meilleur des mondes, et là on reviendrait à une situation...

Mais, en fait, je discutais la semaine dernière, en fin de semaine, avec l'ancien vice-président de la Commission des finances publiques, M. Rosaire Bertrand, qui, vous vous rappelez, avait, avec moi, initié à la Commission des finances publiques un mandat d'initiative pour la naissance de l'AMF. Et il a été lui-même un assureur de personnes. Et, pour des enjeux de santé, malheureusement, il ne peut pas sortir publiquement. Mais il m'a autorisé de mentionner quand même son intérêt et ses grandes inquiétudes, qui sont non partisanes. C'est important de le mentionner, là. Ce n'est pas un enjeu partisan, l'encadrement du secteur financier. C'est pour ça qu'on appelle à votre compréhension, à votre travail, d'améliorer les choses. Je pense, c'est l'objectif de tout le monde. Mais les moyens présentement qui sont mis de l'avant dans le projet de loi malheureusement font fausse route à certains égards, à des égards importants.

Le Président (M. Girard) : M. le député.

M. Bonnardel : Donc, le consommateur est perdant. Rapidement, l'assurance en ligne, il y aurait beaucoup de choses à dire là. Quels sont, pour vous, les produits qu'on devrait retirer, à savoir on devrait parler à un représentant certifié obligatoirement? Puis vous dites un peu plus loin : Option Consommateurs recommande d'obliger tout site de comparaison de prix aussi à s'inscrire à titre de cabinet. Donc, les produits, comparaison de prix, site Internet...

Le Président (M. Girard) : Mme Bélanger-Krams.

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Pour répondre à la question, en fait, si vous faites référence à l'article qui libelle l'obligation du site de comparaison de prix de s'inscrire à titre de cabinet, l'enjeu, c'est que c'est rattaché... Puis, au niveau de la commission et de la rétribution, c'est qu'il y a de nombreux sites, puis on le voit dans d'autres secteurs, où ils ne sont pas payés de la façon traditionnelle. Donc, ils vont être payés, par exemple, avec la publicité ciblée comportementale ou les clics, et ceux-là risquent de ne pas être assujettis d'avoir l'obligation de s'inscrire comme cabinet. Puis ça, on le voit dans de nombreux secteurs chez nous quand on a une expertise en droit du commerce électronique, puis on le voit, ça, déjà apparaître. Et ce qui arrive, c'est que ces entreprises-là, on ne sait pas comment qu'elles vont se qualifier. Donc, est-ce qu'ils vont être soumis à la loi sur la... S'ils ne sont pas soumis à l'encadrement des assurances, est-ce qu'ils vont être soumis à la Loi sur la protection du consommateur? Est-ce qu'ils vont se retrouver à être considérés un intermédiaire numérique au sens de la loi sur le cadre des technologies de l'information? Si ça arrive à être qualifié comme ça, les obligations, c'est seulement en matière de fraude.

Donc, ils ont très peu d'obligations puis le consommateur va avoir très peu de recours, puis on le voit dans d'autres secteurs. Puis on voit aussi des contrats, les termes et les conditions de l'entente, ils vont limiter tous les recours. Ils limitent l'accès à la justice des consommateurs.

M. Bonnardel : Une sous-question. Vous dites que l'Europe a dû serrer la vis aussi, a eu des problématiques avec ces sites de comparaisons de prix?

Mme Bélanger-Krams (Annik) : Tout à fait. Il y a de nombreuses études en Europe qui révèlent des problèmes. Un des problèmes, c'est au niveau de la transparence. Donc, le consommateur qui fait affaire avec un site de comparaison de prix, par exemple, ne saura peut-être pas que le comparateur, il présente juste deux, ou trois, ou quatre produits.

Un autre enjeu aussi, c'est qu'ils mettent beaucoup de pression sur acheter rapidement. On va voir des gros logos «buy now», par exemple, au Royaume-Uni, et là ça clignote. Donc, ça amène toute cette notion de rapidité dans un domaine où les consommateurs, ils doivent prendre leur temps parce qu'ils ont des risques significatifs. Et il y a beaucoup d'emphase qui est mise sur le prix. Puis il y a plusieurs études britanniques qui démontrent que les consommateurs vont souvent acheter un produit le moins cher en pensant que c'est le meilleur pour eux indépendamment de la couverture parce qu'ils ne comprennent pas les subtilités. Et là on arrive... On connaît ça. On voit ce qui se passe à l'étranger, et on arrive ici, puis les mesures semblent insuffisantes pour adresser ces problèmes-là. Et ça, ça nous inquiète énormément, surtout au niveau des dérapages aussi de l'encadrement des sites de comparaison de prix.

Le Président (M. Girard) : 20 secondes.

M. Bonnardel : Donc, rapidement, les produits, on devrait laisser juste l'assurance automobile sans parler à un représentant ou même pas? Pour vous, c'est...

Mme Bélanger-Krams (Annik) : En fait, souscription hybride pour tous les produits. Il faudrait aussi s'assurer que l'encadrement soit adéquat. Et l'encadrement qui est proposé actuellement n'est pas adéquat même pour la souscription en automobile sans l'intervention d'un représentant. Si on modifie l'encadrement pour que ça soit adéquat et qu'on réduit les obligations des consommateurs, d'information, à ce moment-là, il pourrait être envisageable, en assurance automobile... Mais on n'est pas là ici aujourd'hui. Au contraire, on fait un recul en arrière.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Mme Bélanger-Krams, M. Corbeil, M. Paquet, merci de votre contribution aux travaux de la commission.

Et, étant donné l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 26)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Girard) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des finances publiques reprend ses travaux. Je voudrais demander à tous les gens dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils mobiles.

Nous poursuivons cet après-midi les consultations particulières concernant le projet de loi n° 141, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d'argent et le régime de fonctionnement des institutions financières.

Cet après-midi, nous allons entendre l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières, l'Association de l'industrie des guichets automatiques, le Barreau du Québec, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes ainsi que l'Autorité des marchés financiers.

Donc, sans plus tarder, nous allons débuter avec l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières. Je vais vous demander de vous présenter, présenter la personne qui vous accompagne, et vous possédez 10 minutes pour présenter votre mémoire. Par la suite, nous allons procéder aux échanges avec les différents groupes parlementaires.

Organisme canadien de réglementation du commerce
des valeurs mobilières (OCRCVM)

M. Kriegler (Andrew J.) : D'accord. Merci, M. le Président. M. le ministre des Finances, Mmes et MM. les députés et membres de la commission, je me présente, Andrew Kriegler, président et chef de la direction de l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières ou l'OCRCVM. Je suis accompagné aujourd'hui par notre vice-présidente pour le Québec et l'Atlantique, Mme Claudyne Bienvenu.

Je devrai commencer, M. le Président, en disant qu'évidemment ma langue maternelle n'est pas le français. Donc, s'il y a des questions techniques pour moi, c'est possible que ma réponse soit partiellement en anglais. Je m'excuse.

Le Président (M. Girard) : Aucun problème. Soyez assuré qu'on va comprendre quand même très, très bien vos interventions. Vous pourrez y aller en anglais. Si jamais il y a une incompréhension de la part de certains élus, là, on pourra peut-être procéder à une traduction, s'il y a besoin.

M. Kriegler (Andrew J.) : D'accord. Je continue. Il nous fait plaisir d'être ici aujourd'hui pour participer aux consultations particulières et auditions publiques de la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 141. Nous saluons la réflexion et toute la profondeur du travail qui a été accompli par le gouvernement dans sa réforme des lois encadrant le secteur financier.

Tout d'abord, M. le Président, nous sommes ici aujourd'hui parce qu'au Québec l'AMF est notre régulateur. Nous sommes reconnus par l'AMF au Québec et collaborons avec l'AMF pour protéger les investisseurs et veiller au bon fonctionnement des marchés. Nous faisons partie du système québécois de par notre assujettissement à l'AMF. Ceci dit, nous accueillons de manière favorable ce projet de loi qui modernise l'encadrement du système financier pour le rendre plus efficace et en lien avec les normes internationales. Nous soulignons notamment l'importance des mesures visant à protéger des personnes qui dénoncent un manquement à l'AMF, aussi appelées «whistleblowers», de même que l'institution, au sein de l'AMF, d'un comité consultatif des consommateurs des produits et utilisateurs des services financiers.

C'est un projet de loi qui est extrêmement important pour le Québec et pour l'économie du Québec. Les marchés financiers représentent un secteur qui contribue énormément à la création de richesses au Québec, soit des dizaines de milliers d'emplois. Des marchés financiers efficaces, c'est le meilleur moyen de permettre aux familles de réaliser leurs projets, de s'acheter une maison, de mener à bien leurs retraites. C'est également le meilleur moyen de s'assurer que les entreprises sont capables d'aller chercher les fonds nécessaires à la réalisation des projets qui permettent le développement économique du Québec. Donc, nous savons à quel point le projet de loi n° 141 est important.

Alors, sans plus tarder, je cède la parole à ma vice-présidente pour le Québec et l'Atlantique, qui vous présentera le rôle et la responsabilité de l'OCRCVM au Québec.

Mme Bienvenu (Claudyne) : Merci, M. le Président, merci, Andrew. Je ne sais pas si plusieurs d'entre vous connaissent notre organisme, mais j'aimerais faire un bref survol de ce que nous faisons.

Alors, l'OCRCVM est l'organisme d'autoréglementation nationale qui surveille l'ensemble des courtiers en placement et l'ensemble des opérations que ceux-ci effectuent sur les marchés des titres de capitaux propres, c'est-à-dire les actions, et les marchés de titre de créance, soit les obligations, au Québec et dans l'ensemble des autres provinces.

Au Québec, l'OCRCVM supervise des activités de 12 000 personnes inscrites, c'est-à-dire plus de 40 % des personnes inscrites au Canada, à travers 143 firmes qui sont inscrites au Québec et dont 29 ont leurs sièges sociaux ici. Nos activités au Québec sont exercées sous le contrôle de l'Autorité des marchés financiers, organisme auquel nous sommes assujettis. En effet, nous faisons partie du système québécois de par notre reconnaissance, par l'AMF, à titre d'organisme d'autoréglementation.

En vertu de la décision de reconnaissance de l'AMF, l'OCRCVM doit maintenir une présence au Québec. Nous devons être ici, ayant des responsabilités clairement définies en matière d'application des règles à l'égard des firmes, des marchés et des personnes autorisées. Ainsi, toute décision concernant la supervision des activités d'autoréglementation et des firmes, marchés et personnes autorisées du Québec est prise par des personnes présidant au Québec.

Pour répondre à cette exigence, l'OCRCVM Québec-Atlantique, dont je suis responsable, est passé de 29 employés en 2004, au moment de notre reconnaissance, à 59 employés aujourd'hui. Nos effectifs, dans nos bureaux, à Montréal, couvrent tous les secteurs d'activité de l'OCRCVM, tels l'établissement des compétences, l'inscription, l'inspection — on a trois secteurs d'inspection : l'inspection de la conduite des affaires, de la négociation, des finances et des opérations — la surveillance et l'analyse des marchés, le traitement des plaintes, les enquêtes et poursuites, et finalement la traduction se fait ici.

L'OCRCVM, c'est aussi l'organisme qui réglemente les activités de négociation en temps réel sur cinq bourses et huit systèmes de négociation parallèles, incluant notamment les bourses que vous connaissez, le TSX, la Bourse de Toronto, TSX Venture, la bourse de croissance TSX, la bourse Alpha, la Bourse des valeurs canadiennes, et la bourse Aequitas.

De par cette surveillance des opérations sur action, l'OCRCVM a assuré, en 2016‑2017, la surveillance de plus de quatre millions d'opérations, comptant plus de 240 milliards d'actions négociées, ayant une valeur totalisant 2 600 milliards de dollars. Avant de repasser la parole à Andrew, j'aimerais souligner, M. le Président, que, selon nous, la formule que le législateur a retenue au Québec pour réglementer l'industrie des valeurs mobilières, c'est-à-dire une combinaison de réglementations gouvernementales et d'autoréglementation supervisée constitue une forme de contrôle extrêmement sophistiquée qui constitue... qui contribue en grande partie à l'atteinte des objectifs de protection du public investisseur et d'intégrité des marchés.

Nous croyons qu'à l'heure actuelle, un équilibre a été atteint entre la protection des investisseurs et le contrôle des activités des intermédiaires financiers et des sociétés de courtage qui les emploient, et ce, grâce à la supervision du système d'autoréglementation qui est effectué par l'AMF.

Je ne sais pas si on a encore un peu de temps...

• (14 h 10) •

Le Président (M. Girard) : Trois minutes.

Mme Bienvenu (Claudyne) : Alors, je passerais la parole à Andrew.

M. Kriegler (Andrew J.) : Rapidement. L'OCRCVM joue un rôle semblable, M. le Président, dans chacune des autres provinces du Canada, à celui que nous jouons au Québec. Nous travaillons pour chaque autorité provinciale des valeurs mobilières et ensemble, pour toutes les provinces, afin d'assurer un niveau de réglementation élevé et harmonisé partout au pays.

Les investisseurs québécois et, en fait, tous les investisseurs au Canada méritent le même niveau élevé de protection. Des clients de Valeurs mobilières Desjardins, de Financière Banque Nationale ou d'Industrielle Alliance Valeurs mobilières, par exemple, ont tous des mêmes protections, qu'ils soient au Québec, en Ontario ou en Alberta. De plus, les firmes et les investisseurs méritent un système de réglementation élevé et harmonisé à travers tout le pays.

Alors, M. le Président, il est important de rappeler qu'au Québec, l'AMF est notre régulateur. Nous sommes reconnus par l'AMF au Québec et collaborons avec l'AMF pour protéger les investisseurs et veiller au bon fonctionnement des marchés. Nous faisons partie du système québécois de par notre assujettissement à l'AMF. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Bravo pour votre français! Donc, nous allons maintenant passer aux échanges entre les différents groupes parlementaires. Nous allons débuter du côté du gouvernement avec M. le ministre des Finances.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, Mme Bienvenu, M. Kriegler, merci beaucoup d'être là. Merci beaucoup de nous parler un petit peu de votre organisme et de la façon dont vous vous intégrez dans le paysage réglementaire financier au Québec. Vous avez bien fait, Mme Bienvenu, de nous donner un peu un aperçu général, parce que probablement que certaines personnes qui peut-être suivent nos travaux n'étaient pas tout à fait au courant du rôle que vous jouez. Et j'aimerais justement poursuivre à ce niveau-là en vous demandant de commenter un peu le...

Bon, vous êtes un véritable organisme d'autoréglementation. Je veux dire par ça que c'est l'industrie, donc les différents cabinets qui se sont volontairement concertés et créent cet organisme-là. Donc, vous n'avez pas été créé par décision gouvernementale, vous avez été créé par association volontaire des entreprises, et puis, par la suite, les différentes autorités réglementaires vous délèguent certains pouvoirs. Donc, c'est un peu différent de l'autre type d'organismes que nous avons au Québec.

Pouvez-vous nous préciser un peu quel est votre rôle en ce qui concerne la supervision, la réglementation des firmes, mais aussi des représentants, des individus qui travaillent pour ces firmes-là. Comment vous faites ce travail-là?

Le Président (M. Girard) : Mme Bienvenu.

Mme Bienvenu (Claudyne) : En fait, c'est intéressant, ce que vous nous... vous m'ouvrez une porte. N'oubliez pas que l'OCRCVM, auparavant l'ACCOVAM, est né ici, au Québec, au début du siècle, en 1916.

Depuis ce temps, cet organisme, c'est d'abord une volonté et c'est né d'une volonté des individus, des représentants, enfin de l'industrie à s'autoréglementer, à se donner des valeurs et des normes élevées. En 2004, nous avons... l'autorité des marchés financiers a été créée, et la Loi sur l'Autorité des marchés financiers a été créée, et les membres de l'OCRCVM, de l'ACCOVAM à ce temps, ont demandé, ont même quasiment exigé de notre part que nous procédions à une demande de reconnaissance en vertu de la loi, de la nouvelle loi et du nouveau régime applicable au Québec.

Et c'est aidés, et à la demande des firmes, les firmes québécoises qui étaient extrêmement présentes, et des individus, que nous avons fait cette démarche de demande de reconnaissance auprès de l'AMF, qui a été reconnue. On avait un délai assez restreint pour pouvoir le faire. Il faut rencontrer, en vertu de la loi, des conditions très spécifiques. Entre autres, et c'est une condition, je vous dirais... naturellement, j'en bénéficie et mon personnel en bénéficie, c'est... on demande à ce que l'ensemble des décisions soient faites au Québec. Et c'est quelque chose avec lequel, je dois dire, je n'ai pas de problème avec Andrew et avec mes collègues de Toronto, et d'ailleurs c'est quelque chose qui est assimilé par tous.

Donc, essentiellement, nous réglementons... je pense que je l'ai dit tout à l'heure, mais je pense que c'est important aussi de le rappeler, nous réglementons non seulement des individus, nous réglementons aussi des firmes et des marchés. Il y a, je vous dirais... on n'a pas une homogénéité, mais on est capable de superviser et de réglementer un secteur complet, ce qui, je pense, donne une synergie significative.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup. C'est très, très important, oui, de faire cette précision-là parce que c'est particulier.

J'aimerais aussi... je ne vais pas vous demander quelle est votre position en ce qui concerne la création d'un régulateur national, «I won't go there», mais en ce qui concerne vos relations avec l'AMF, j'aimerais que vous nous parliez un petit peu de comment ça se passe entre vous et l'AMF, c'est-à-dire, si jamais il y a des... est-ce qu'il y a des zones d'ambiguïté ou non et, s'il y en a, des endroits où il pourrait peut-être avoir un peu de confusion, comment est-ce que vous réglez ça avec l'AMF?

M. Kriegler (Andrew J.) : Commence.

Mme Bienvenu (Claudyne) : O.K. Alors, écoutez, on parle d'un organisme d'autoréglementation. Donc, je vous dirais, puis peut-être que je l'exprime mal, mais il y a, d'un côté, les firmes et les individus que nous réglementons. Ces firmes et ces individus nous aident, par leur savoir-faire, à établir des règles qui répondent à des questions souvent très complexes et qui permettent aussi de rapidement intervenir sur des aspects... d'avoir une flexibilité parce que ça change très vite dans notre domaine. Parallèlement à ça, on est assujettis à l'AMF et pas seulement à l'AMF, on est assujettis à l'ensemble des autorités de réglementation au niveau canadien. Donc, on travaille avec eux. On n'est pas des partenaires, on est des collaborateurs parce que l'objectif est l'efficience.

Je vous donnerais un exemple, récemment... et on cherche les efficiences et on cherche à s'assurer que et les individus et les firmes travaillent avec nous et avec l'AMF. Je vous donne un exemple très, très rapide. Il y a la loi sur les dérivés, on a des participants agréés — des fois, je me trompe dans les termes, je suis désolée — mais il y a la notion de participants agréés. Et, dans le cadre de ces participants agréés, on s'est aperçu, en discutant avec l'AMF, parce qu'on a une collaboration, on les rencontre périodiquement... Comment faire pour que ce soit plus efficient? Comment utiliser mieux notre personnel et le personnel de l'AMF?

L'AMF devait faire des inspections auprès de ces participants qui sont non seulement au Québec, mais qui sont aussi à l'extérieur du Québec. Nous faisons des inspections. Nous faisons des inspections en fonction du risque sur une période d'un à quatre ans maximum, et on s'est questionné avec l'AMF, on a discuté de ça et on s'est questionné : Est-ce qu'il n'y aurait pas une meilleure manière de faire, plutôt que, vous, vous y alliez et que nous, on y aille? Et, d'un commun accord, on a établi des modules d'inspection. Donc, mon personnel a été formé avec l'AMF, par l'entremise de l'AMF aussi en discutant avec eux. On a établir des modules très complémentaires à ce qu'on fait, parce que souvent il y a des dédoublements. Alors, on a évité ça, et, actuellement, on procède à ces inspections chez nos membres.

Alors, si on va chez un membre qui est aussi un participant agréé, on va utiliser ce module pour valider s'il répond aux exigences, non pas de nos règles, mais des règles de l'AMF. Le rapport, par la suite, ne nous appartient pas. On le transmet à l'AMF qui pourra, par la suite, décider qu'est-ce qu'ils veulent faire. Donc, on a une collaboration et on a une discussion, je vous dirais, dans le but de s'assurer de l'efficience, d'une meilleure efficience.

M. Leitão : Très bien. Merci. Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Girard) : Huit minutes encore.

• (14 h 20) •

M. Leitão : O.K. «Good». Maintenant, j'aimerais vous amener dans un autre ordre d'idées. On a beaucoup parlé ici, dans cette commission, quand on parle surtout du domaine de l'assurance, des nouveaux modèles d'affaires et surtout la distribution par Internet. Vous, l'industrie a passé un peu par ce même genre d'enjeux, de discussions il y a quelques années, quand on avait commencé les «discount brokage», le... C'est ça. Le terme m'échappe aussi.

Comment est-ce que ça s'est passé dans votre industrie? Parce que bien sûr que... et, je me rappelle, il y avait les mêmes enjeux, c'est-à-dire : comment est-ce qu'un pauvre consommateur va se retrouver à prendre des décisions sans l'apport d'un professionnel? Et, pourtant, je pense qu'aujourd'hui ça se passe quand même assez bien.

Comment est-ce que votre groupe a adressé cette question de courtage à escompte — c'est ça, le terme que je cherchais — dans votre industrie pour arriver à un modèle qui aujourd'hui fonctionne quand même très bien?

M. Kriegler (Andrew J.) : Donc, merci, M. le ministre. Je vais commencer, et ma réponse va être augmentée et améliorée, peut-être, par ma collègue. Comme vous avez déjà dit, l'Internet est déjà une partie du modèle des affaires pour tous les courtiers ou presque tous les courtiers. Donc, nos règles, nos normes devaient s'adapter pour cette expérience-là. Et je dirais que nos règles sont désignées afin que les investisseurs puissent être protégés s'ils choisissent de poursuivre un investissement à travers d'un courtier plein ou par Internet.

Donc, nous sommes certains que le modèle réglementaire peut s'adapter pour le monde d'aujourd'hui et pour le monde de l'avenir.

M. Leitão : Peut-être, mais... Oui, et je comprends. Merci. Mais là où je voulais arriver, c'était au fait qu'avant, quand un investisseur individuel voulait investir, acheter des actions, il fallait absolument passer par un courtier. Avec le développement du courtage à escompte, les investisseurs individuels, maintenant, peuvent le faire directement. Dans le domaine de l'assurance, on parle beaucoup qu'il faut aussi trouver un moyen pour que les investisseurs individuels, les consommateurs soient quand même avisés ou conseillés par un représentant enregistré.

Dans le domaine du courtage à escompte, vous ne le faites pas comme ça. Comment vous avez adressé cette question?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Je vous dirais qu'il y a différents modèles. On n'ira pas dans le détail, mais certains peuvent offrir justement l'opportunité de parler avec un individu, mais le régime est différent. On a deux régimes dans nos règles : un régime qui s'applique aux «full brokers», courtage de plein exercice, et donc, à ce moment-là, il y a véritablement des mécanismes qui sont mis en place au niveau du formulaire d'ouverture de compte, au niveau de la convenance, au niveau du suivi des obligations. Lorsqu'arrivent certains événements, le représentant doit téléphoner, doit prendre... Il y a de la supervision aussi qui se fait.

Au niveau du courtage à escompte, c'est différent, on en est conscients. On a vu... Et je vous dirais que c'est intéressant, parce qu'on a... Quand j'ai commencé dans cette industrie, il y a quelques années, on nous disait que ce serait phénoménal. C'est Investor Economics qui nous disait qu'en 2020 près de 35 % à 45 % des investisseurs iraient vers ce régime-là. On voit actuellement que ça plafonne. Il y a des gens qui sont intéressés à y aller. Il n'y a pas de convenance à faire, mais il y a quand même des obligations qu'ont les firmes et les individus, qu'ils doivent remplir pour pouvoir s'organiser. Et on voit aussi qu'à l'intérieur de l'industrie il y a une volonté aussi de s'assurer qu'on ne laisse pas les individus ou les investisseurs seuls là-dedans. Donc, on voit des structures, on voit de la formation, on voit de l'information qui sont disponibles sur ces plateformes. Ce n'est pas pour tout le monde, là. Je pense qu'on est tous d'accord pour dire que ce n'est pas pour tout le monde, mais c'est pour certaines personnes.

Et je vous dirais aussi que ça change. Il y a une période où c'était pour les «traders», les vrais «traders» de jour, là, quasiment les «day traders». Aujourd'hui, on voit beaucoup plus de personnes, des jeunes personnes qui s'adressent à... qui vont plutôt sur cette plateforme qui est disponible facilement, peu importe où on est, et on n'a pas besoin de parler à un représentant. Il y a plusieurs... on le sait, on a fait des sondages et des validations avec certains investisseurs, et ces investisseurs nous l'ont dit : On veut ça, mais on est aussi conscients de certains risques dans les plaintes, et je vous dirais que, dans les plaintes, à ce moment-ci, on ne peut pas dire que c'est ce secteur-là qui engendre le plus de plaintes.

M. Leitão : ...ça où je voulais arriver aussi, à votre processus de gestion des plaintes. Donc, quand un investisseur, un consommateur a un problème avec un de vos membres, que ce soit un représentant ou que ce soit une firme, comment vous, vous gérez ce processus-là? D'abord, est-ce qu'un investisseur, un consommateur s'adresse à vous directement ou est-ce qu'il doit passer par un autre intermédiaire?

Mme Bienvenu (Claudyne) : C'est un système qui est complexe. On parle toujours de systèmes sophistiqués. Je pense qu'on est vieux, comme organisation, comme régime. Donc, il y a eu des aménagements. Donc, on a des obligations qui incombent aux firmes. Alors, lorsqu'une firme reçoit une plainte d'un individu, ils doivent le rentrer dans notre système ComSet. Donc, à ce moment-là, nous, on prend en charge et on valide avec eux, on les suit à la trace. Et parallèlement à ça, on a un département qui reçoit les plaintes des consommateurs, des investisseurs — nous, on les appelle des investisseurs — et qui va prendre les plaintes si c'est requis. On va les retransmettre aux préenquêtes, ce qu'on appelle, nous, les préenquêtes, aux enquêtes, et, si c'est requis, ça ira aussi en disciplinaire.

On a aussi, naturellement, il faut bien le voir... on peut aussi transmettre la plainte à qui de droit, là, si jamais c'est mal adressé, mais il y a là un système aussi d'information et d'éducation que l'on fait par cette entremise-là.

M. Leitão : Très bien. Si j'ai encore le temps...

Le Président (M. Girard) : 20 secondes.

M. Leitão : 20 secondes, bon. J'aurais aimé vous poser une question sur la différence, comment vous adressez cette question d'organisme d'autoréglementation et un ordre professionnel. Ce n'est pas, bien sûr, la même chose, là. In 20 seconds or less.

M. Kriegler (Andrew J.) : Généralement, M. le ministre, je dirais que la différence est simplement qu'en général un ordre professionnel s'occupe avec les individus. Par contre, nous sommes responsables pour les firmes et les individus, les personnes autorisées. Et l'autre chose importante est que nous... ne se portent pas à la défense des personnes autorisées. Nous sommes agence de réglementation seulement.

Mme Bienvenu (Claudyne) : S'il me reste une minute, on est...

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Malheureusement, le bloc avec le gouvernement est terminé. On doit respecter l'horaire. Donc, nous allons passer du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Rousseau pour 9 min 30 s.

M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Merci d'être là.

Peut-être juste des questions de clarification, parce que, bon, c'est complexe, le système d'encadrement. Donc, tout d'abord, vous vous occupez spécifiquement des courtiers en valeurs mobilières, en tout cas de la vente de valeurs mobilières, puis vous partagez l'univers, si on peut dire, de la sécurité financière avec la Chambre de la sécurité financière qui, elle, s'occupe de l'épargne collective, produits d'assurance vie, ainsi de suite. Donc, c'est deux... La séparation, là, est assez étanche entre la Chambre de la sécurité financière puis vos activités. On peut dire ça sans problème?

• (14 h 30) •

Mme Bienvenu (Claudyne) : Écoutez, on s'occupe des courtiers en valeurs mobilières. Comme vous le savez, les courtiers en valeurs mobilières peuvent vendre plusieurs produits. On travaille avec aussi les firmes... pas les firmes, mais les organismes aussi qui sont autour, incluant les chambres. On est un organisme d'autoréglementation supervisé par l'AMF et, à ce titre, on est différents. On n'est pas reconnus, on n'est pas constitués en vertu d'une loi. Donc, oui, on travaille avec des investisseurs qui peuvent acheter tous les produits chez nous, et je pense que c'est peut-être la différence. Ils peuvent acheter tous les produits chez nous, alors que... ou que les chambres vont être vraiment liées à un produit, en tout cas, en ce qui regarde les fonds mutuels dans notre secteur, je ne dirais pas dans le domaine des assurances parce que ce n'est pas mon expertise, mais dans le domaine...

M. Marceau : Puis je ne veux pas vous mettre en boîte, là, ce n'est pas ça le... C'est vraiment dans l'objectif de bien comprendre ce qui se passe. Mais moi, si j'avais à résumer : vous, vous faites de l'autoréglementation — entreprises, individus, pouvoirs délégués par l'Autorité des marchés financiers — et là on a un projet de loi devant nous qui prévoit de l'autoréglementation... bien, enfin, qui prévoit la disparition de l'autoréglementation, par exemple, par l'abolition de la Chambre de la sécurité financière qui, elle, ne s'occupe que de représentants, mais pas d'entreprises. Et la conclusion, que je pense peut-être fausse, mais elle peut être vraie, qu'on pourrait dire, c'est que ce qui cloche, dans le système actuel, pour la Chambre de la sécurité financière, c'est qu'elle n'a pas elle aussi les entreprises.

Parce que, dans le fond, autoréglementation, quand on a autoréglementé des entreprises et des personnes, ça semble aller pour le gouvernement, mais autoréglementation, quand on ne réglemente que les représentants, là, ça ne marche pas. Et là la conclusion que... enfin, la décision que le gouvernement semble vouloir prendre, c'est de faire disparaître l'autoréglementation puis la Chambre de la sécurité financière. Mais l'alternative à ça, ça aurait été de dire : On va demander à la Chambre de la sécurité financière d'autoréglementer aussi les entreprises. L'alternative au choix qui a été fait, ça aurait été de dire, en toute logique : Si ça marche pour vous, pour les valeurs mobilières, pourquoi ça ne marcherait pas pour les autres, là, pour l'épargne collective, pour l'assurance vie et autres produits du genre?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Le modèle québécois, pour nous, le modèle québécois auquel on appartient, c'est le modèle d'autoréglementation, donc, de reconnaissance, de décisions de reconnaissance qui nous ont été données. Et c'est un modèle qui existe encore et c'est le modèle qu'on retrouve depuis 2004 dans la loi. Alors, pour moi, le modèle est encore là. Nous, on est liés à un modèle qui est présent actuellement dans la Loi sur l'Autorité des marchés financiers. Il y a des conditions qui s'appliquent, il y a des possibilités d'avoir des délégations de pouvoirs, mais ça veut dire aussi qu'on est assujettis, on est assujettis à l'AMF. Mais on n'est pas juste assujettis à l'AMF, on est assujettis aux ACVM. Donc, le modèle est là. Pour moi, le modèle québécois et le modèle canadien est toujours là.

M. Marceau : Puis je comprends. Mais ce que vous dites, dans le fond, c'est que, pour vous, ça fonctionne bien, et là nous, on a une autre partie du monde qui est réglementée d'une autre manière, on nous dit : Ça ne marche pas. Et la solution qui a été trouvée, ça a été de faire disparaître la chambre. L'alternative, ça aurait été de renforcer la chambre en lui confiant aussi, comme vous le faites, la supervision des entreprises. Enfin, de toute façon, c'est un... Je raisonne avec vous, là, mais...

Je veux vous amener sur un autre sujet, assez rapidement, c'est le cas des banques. Parmi les entreprises qui sont autoréglementées par vous, il y a les banques ou pas?

Mme Bienvenu (Claudyne) : C'est-à-dire qu'il y a des affiliés de banques. C'est les courtiers en valeurs mobilières qui peuvent être affiliés à une banque. Je pense, entre autres, je vais vous donner un exemple, Financière Banque Nationale est affiliée à la Banque Nationale.

M. Marceau : ...pouvoir délégué vous est-il délégué par l'Autorité des marchés financiers ou par... Oui?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Oui.

M. Marceau : O.K. Même si les banques elles-mêmes sont supervisées par... puis d'autres organisations?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Mais on ne supervise pas les banques.

M. Marceau : Non, non. Je comprends.

Mme Bienvenu (Claudyne) : On ne réglemente pas les banques. On réglemente le courtier en valeurs mobilières.

M. Marceau : Je comprends très bien.

Mme Bienvenu (Claudyne) : Et c'est dans une...

M. Marceau : Mais vous savez comme moi qu'à l'intérieur d'une... il y a des gens qui sont des employés d'une banque... Puis, bon, je ne vous apprends rien en disant qu'il y a des conflits de juridiction, là, entre le fédéral puis le Québec. Dans le cas d'un employé qui travaille pour une banque puis qui vend des valeurs mobilières, est-ce que la banque va agir pour réprimander ses employés? Bon, c'est...

• (14 h 40) •

Mme Bienvenu (Claudyne) : Je sais que c'est vrai. Dans le reste du Canada, on en discute énormément. Mais, au Québec, ils ne peuvent pas être employés. Ils ne peuvent pas être employés, c'est la loi qui le prévoit. Ils ne peuvent pas être employés par la banque et par... C'est ma compréhension, en tout cas. Peut-être que mon interprétation est restreinte, là, mais c'est ce qu'on dit, en tout cas, à nos courtiers : Vous ne pouvez pas... la banque ne peut pas payer le représentant. Il ne peut pas le superviser.

M. Marceau : ...valeurs mobilières de la banque qui le fait, vous avez raison.

Mme Bienvenu (Claudyne) : Oui, donc c'est une...

M. Marceau : Oui, oui, ça, je comprends. Mais là on est dans des structures juridiques, tout simplement, là, mais...

Mme Bienvenu (Claudyne) : Oui. O.K.

M. Marceau : O.K. On se comprend. Juste pour la suite, je veux revenir à l'autoréglementation. Vous avez dit que les problèmes complexes pouvaient trouver réponse grâce à... parce que les acteurs de l'industrie sont présents, puis ils contribuent à définir les normes. Y a-t-il d'autres avantages à l'autoréglementation, qu'on devrait avoir à l'esprit, là, au moment où on va faire disparaître deux chambres qui, elles aussi, font de l'autoréglementation? Y a-t-il des avantages que vous n'avez pas entendus puis qui mériteraient que nous sachions?

M. Kriegler (Andrew J.) : Donc, M. le député, je dirai que c'est important, pour le bon fonctionnement de l'OCRCVM, d'avoir les représentants du secteur dans les processus de création ou de modification des normes, des règles. Mais je voudrais souligner encore que nous sommes un organisme d'autoréglementation supervisé par l'Autorité des marchés financiers. Ça veut dire, dans ces circonstances, que l'autorité doit approuver toutes les règles, et les homologues de l'autorité à travers le pays doivent faire la même chose. Donc, c'est important pour nous, certainement, mais il y a un équilibre, une balance entre les contributions du secteur, et notre gouvernance, et la supervision de l'AMF.

M. Marceau : O.K. Mais ma question, c'est : Y a-t-il d'autres avantages?

Mme Bienvenu (Claudyne) : ...on en a déjà parlé, certains en ont déjà parlé : flexibilité...

M. Marceau : ...la justice exercée par les pairs est plus efficace, plus redoutable, plus dissuasive que la justice exercée par un tribunal?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Je vous dirais que...

M. Marceau : Bien, écoutez, j'ai entendu ça ou à peu près ici, là. C'est pour ça que je vous le demande.

Mme Bienvenu (Claudyne) : Nous croyons, oui. Nous, nous avons des formations d'instruction, et ces formations d'instruction sont présidées par des membres indépendants, donc, des membres du Barreau et deux personnes de l'industrie. Naturellement, s'il y a quelque chose... s'il y a une révision qui doit se faire, ça se fera à l'AMF ou au tribunal des marchés financiers. On pense donc que, oui, nous, on y croit que cette justice rendue par les pairs est bonne, oui, a des avantages significatifs.

M. Marceau : Elle est meilleure, d'après vous?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Meilleure? Est-ce que c'est meilleur ou pas? J'ai travaillé au Tribunal des droits de la personne, et on avait des assesseurs. Est-ce que c'est meilleur d'avoir des assesseurs ou d'avoir... comme ce sera dans le projet, comme le propose le projet, versus d'avoir une justice par les pairs, une justice disciplinaire? Je ne peux pas vous dire. Mais je pense qu'il peut y avoir un certain équilibre et une certaine équivalence aussi là-dedans.

Le Président (M. Girard) : Malheureusement, ceci met fin à votre bloc de temps, M. le député. Nous allons maintenant passer du côté de la deuxième opposition, et je cède la parole au député de Granby pour une période de 6 min 30 s.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Monsieur dame, bienvenue. Excusez-moi de vous parler de la fusion, mais je n'ai pas le choix moi aussi, un peu comme mon collègue, là, puis j'essaie un peu de mesurer et de comprendre tout ça.

Sous l'égide de l'AMF, il y a quatre entités, il y avait la Bourse de Montréal, il y a la Chambre de la sécurité financière et la CHAD, puis il y a vous. Il y en a quatre. On en fusionne deux. Vous allez continuer d'agir indépendamment mais assujettis à l'AMF, comme vous l'avez mentionné. Puis là je voudrais vous poser la question, à savoir : Pourquoi on a décidé de fusionner les deux, autrement que vous intégrer, vous aussi, tout comme on le fait avec la chambre? Quel avantage on a à vous garder indépendants?

Je ne sais pas si vous saisissez un petit peu, là. C'est un peu délicat, peut-être, que vous allez me dire, pour vous, de répondre à la question, là. Mais, à quelque part, tu te dis : O.K., il y en a quatre qui sont assujettis, l'AMF est en haut, vous faites partie de ces quatre, on en fusionne deux autres, puis vous, bien, vous gardez votre indépendance, si je peux le dire ainsi, dans une certaine mesure.

Mme Bienvenu (Claudyne) : Enfin, on reste dans le régime actuel qui est celui de la décision de reconnaissance. En fait, je vous dirais, j'ai de la difficulté quelquefois à répondre à ça parce qu'on fait partie du régime québécois. C'est le régime actuel pour nous. Nous, quand on est arrivés, en 2004, c'était le régime applicable, on n'avait pas le choix. Il y a eu d'autres mécanismes qui ont été mis en place, donc, deux chambres qui ont été constituées en vertu de la loi, mais nous ne l'étions pas.

Le régime que nous, on a connu, c'est un régime où on doit répondre au chapitre... au titre III, chapitre I, qui touche à l'autoréglementation, avec des exigences, avec des obligations. Alors, pour nous, quand vous nous posez la question... Et on est deux, comme vous dites, il y en a deux qui restent, et les deux sont sous ce régime. Donc, la loi est là, le régime m'apparaît encore présent. Et il y a le régime qui peut toujours s'appliquer... en tout cas, à nous, il s'applique avec... Je vous dirais que c'est avec... Il faut aussi accepter, de notre côté et avec l'ensemble des commissions de valeurs mobilières, d'avoir des discussions, une collaboration. Nos règles ne sont pas approuvées... elles ne sont pas approuvées par nous. Elles doivent être approuvées par l'AMF.

M. Bonnardel : Est-ce qu'on aurait pu vous intégrer, vous aussi?

Mme Bienvenu (Claudyne) : Bien, je vais vous dire qu'il revient à l'AMF de déterminer si on continue ou pas. On ne serait pas ici, mais... Il appartient à l'AMF.

M. Bonnardel : Donc, pour vous, c'est un avantage de rester, comme vous l'êtes présentement, assujettis à l'AMF puis de continuer comme vous êtes. C'est une plus-value.

M. Kriegler (Andrew J.) : ...par exemple, M. le député. Je voudrais citer l'exemple de notre job pour la surveillance des marchés. Nous sommes responsables pour la surveillance en temps réel de cinq bourses et huit systèmes de négociation parallèles. En temps réel. Donc, c'est presque... C'est très difficile, pour une commission de valeurs mobilières, de faire ça indépendamment. Mais, parce que nous sommes assujettis de l'AMF et de l'autre, Commission des valeurs mobilières, nous pouvons faire ce rôle pour tous nos... Donc, c'est très efficace, très efficient, donc.

M. Bonnardel : Dernière petite question. Avez-vous eu des discussions avec l'AMF ou le ministère pour une possible intégration ou ça n'a pas fait partie d'aucune... jamais, jamais, vous n'avez jamais eu de discussions avec... Puis je vous pose la question respectueusement, là, parce que, bon, vous comprenez la situation, puis on essaie de se faire une tête puis de comprendre. Au-delà de ça, je vous pose juste la question. Si vous me dites...

Une voix : ...

M. Bonnardel : Non? Parfait. Ça va, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Girard) : M. Kriegler, Mme Bienvenu, merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux au niveau de la Commission des finances publiques.

Donc, je vais suspendre les travaux quelques instants pour permettre à l'Association de l'industrie des guichets automatiques de pouvoir prendre place.

(Suspension à 14 h 43)

(Reprise à 14 h 46)

Le Président (M. Girard) : Donc, nous reprenons nos travaux. Nous recevons cet après-midi l'Association de l'industrie des guichets automatiques ATM. Bienvenue parmi nous. Vous avez 10 minutes pour nous présenter votre mémoire. Par la suite, il y aura des échanges avec des parlementaires. Donc, je vous invite, en débutant, à vous présenter, présenter la personne qui vous accompagne et nous présenter votre mémoire. Allez-y.

Association de l'industrie des guichets
automatiques ATM (ATMIA)

M. Chandler (Chris) : Parfait. Merci. Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés et Mme la secrétaire. Je veux vous remercier pour nous avoir invités à partager notre point de vue sur le projet de loi n° 141.

Mon nom est Chris Chandler. J'ai devenu «Quebecker» en 2005 et j'ai commencé mon français plus ou moins en 2005. Et j'apprécie votre patience avec mon français aujourd'hui. Je suis président de l'Association de l'industrie des guichets automatiques l'ATMIA, en plus d'être président de chef de direction d'une entreprise établie de ville Saint-Laurent qui exploite les guichets automatiques privés. Je suis accompagné de Curt Binns, directeur exécutif pour le Canada pour l'ATMIA.

L'ATMIA est une organisation sans but lucratif créée en 1997 qui réunit plus de 5 500 membres dans 65 pays. Elle a pour mission d'encourager la commodité, la croissance et l'utilisation des guichets automatiques et oeuvre également à protéger les actifs, les intérêts, la bonne réputation et de maintenir la confiance du public envers notre industrie

 Nos guichets automatiques sont, pour la plupart, situés dans les centaines de PME québécoises qui opèrent un ou deux guichets automatiques et, par le fait même, fournissent des services dans chaque communauté du Québec.

Les guichets automatiques sont, depuis 2011, régis par la Loi sur les entreprises de services monétaires. Les articles 607 à 610 du projet de loi n° 141 apportent des modifications de cette loi que nous accueillons positivement puisqu'elles assouplissent l'exigence en matière de vérification d'entreprises de services monétaires comme celle opérée par nos membres.

Alors que cette loi est modifiée, nous demandons le législateur d'aller plus loin et de retirer les guichets automatiques privés du champ d'application de la Loi sur les entreprises de services monétaires. Nous croyons que l'inclusion des guichets automatiques dans cette loi a été un succès et que les mesures mises en place ont joué leur rôle alors que l'Interac mettait en oeuvre ces processus «regular».

Aujourd'hui, ces assujettissements à cette loi représentent un dédoublement inutile car la réglementation d'Interac a fait ses preuves et couvre effectivement tous les guichets automatiques au Canada comme du Québec. Après cinq ans d'application de la Loi sur les entreprises de services monétaires combinée à l'entrée en vigueur, au cours de cette période, de la réglementation d'Interac, il n'y a plus de raison pour que les guichets automatiques privés y soient assujettis.

• (14 h 50) •

La coexistence, dans la réglementation d'Interac et de celle découlant de la loi, représente le dédoublement d'efforts, un fardeau administratif pour les plus de 5 000 PME du Québec et une lourde charge administrative pour nos membres, qui ne correspond pas aux orientations gouvernementales en matière d'allègement réglementaire et bureaucratique des entreprises.

Sur la base de 5 000 guichets automatiques privés au Québec, nous estimons que nos membres paient des coûts annuels de 1 million de dollars liés à des permis et 500 000 $ pour les examens de SQ. Cet allègement fera une différence pour les PME du Québec et nos membres. Il contribuera également à diminuer la charge de travail de l'AMF puis, possiblement, de Revenu Québec, ce qui permettra d'employer leurs ressources à des activités plus importantes que de s'assurer de l'application d'une réglementation déjà existante et appliquée efficacement par une autre entité.

En plus d'être complète et axée sur la lutte contre le blanchiment d'argent, la réglementation d'Interac a fait ses preuves en matière de conformité. Contrairement de l'AMF, elle dépose une liste complète et mise à jour de tous les guichets automatiques en opération. De plus, la réglementation d'Interac prévoit la vérification annuelle de tous les guichets automatiques au Canada, et elle a le pouvoir de désactiver les appareils non conformes.

La Loi sur les entreprises de services monétaires part d'une bonne volonté, que nous partageons, bien évidemment, soit celle de lutter contre les activités de blanchiment d'argent du Québec.

Le processus qui a mené à l'adoption de cette loi en 2011 s'est enclenché en 2007, alors qu'un rapport du Groupe d'action financière, le GAFI, a révélé qu'aucune réglementation n'interdisait les guichets automatiques d'être utilisés dans une fin de blanchiment d'argent. Après des concertations et des concertations avec des experts, inclus notamment le milieu financier et policier, cette loi est entrée en vigueur. Elle était à l'époque la seule législation du genre au Canada. Aujourd'hui, le Québec demeure le seul endroit au monde assujettissant les guichets automatiques privés dans la définition sur les entreprises de services monétaires.

Or, entre 2009 et 2012, l'Association Interac a mis en oeuvre le règlement antiblanchiment d'argent dans les guichets automatiques élaboré par le groupe de travail du ministre fédéral des Finances, composé de plusieurs intervenants et basé sur le rapport du GAFI, qui a donné le coup d'envoi des réflexions ayant mené à la Loi sur les entreprises de services monétaires.

La réglementation d'Interac contient des dispositions précises qui exigent notamment que les membres de l'Association Interac vérifient l'identité de tout propriétaire d'espèces de guichets automatiques et obtiennent un document établissant la provenance des fonds de tous les guichets privés. La réglementation rend également obligatoire la vérification d'antécédents pour tous les acquéreurs de guichets considérés à haut risque en fonction d'un ensemble de critères.

Depuis 1996, les guichets automatiques privés sont autorisés au Canada. En plus de 20 ans, la seule accusation de blanchiment d'argent par le biais des guichets automatiques identifiée au Canada... Une seule accusation. À notre connaissance, l'expérience des 20 dernières années n'a pas permis de démontrer que les criminels ont eu souvent recours aux guichets automatiques privés pour blanchir de l'argent et pour faire de la fraude fiscale. Ils ne semblent pas être d'une utilité intéressante pour des activités criminelles de grande échelle, en raison de la tenue de registres par des tierces parties et des dépôts dans un compte bancaire canadien... que nous.

Nous sommes en contact avec les autorités d'Interac, qui sont prêtes à collaborer avec le gouvernement du Québec. Elles sont convaincues que la réglementation est robuste et mature. L'Association Interac appuie d'ailleurs notre démarche aujourd'hui.

À notre avis, la réglementation d'Interac, qui est maintenant appliquée depuis cinq ans, a fait ses preuves. À ne pas en douter, la réglementation d'Interac fait de ses priorités la lutte contre les activités criminelles.

Ce n'est pas n'importe qui qui peut opérer les guichets automatiques privés, puisque les aspirants propriétaires doivent subir une multitude de vérifications, dont une vérification des antécédents judiciaires. De plus, la provenance de fonds est documentée. La réglementation s'assure que les informations liées à chaque dollar qui se trouve dans un guichet automatique privé soient enregistrées et conservées par une tierce autorité et entièrement indépendante des propriétaires.

Alors qu'il est clair que l'argent qui circule dans les guichets automatiques est probablement propre et non lié à des activités criminelles, la requête d'ATMIA de retirer les guichets automatiques privés du champ d'application de la Loi sur les entreprises de services monétaires par l'entremise du projet de la loi n° 141 est d'autant plus pertinente. Il est également fondamental de garder en tête que les guichets automatiques privés sont un service de proximité, pour les consommateurs, qui peut se révéler essentiel sur toutes les régions du Québec.

Le Président (M. Girard) : Je vous demanderais de conclure rapidement. Le temps est écoulé.

M. Chandler (Chris) : J'ai deux paragraphes plus.

Le Président (M. Girard) : O.K., pas de problème.

M. Chandler (Chris) : Bon. À la lumière de tous ces arguments, l'ATMIA considère que le retrait des guichets automatiques du champ d'application de la Loi sur les entreprises de services monétaires, par le biais du projet de loi n° 141, aura les impacts positifs à la fois sur les petites entreprises du Québec, sur l'AMF, et contribuera à protéger la population des risques associés avec le blanchiment d'argent.

Alors que la réglementation d'Interac a maintenant fait ses preuves, le moment est venu à mettre fin de ces doubles réglementations et d'éliminer le double fardeau pour des milliers de PME à travers le Québec.

Notre association est persuadée que la réglementation d'Interac assure pleinement la sécurité des Québécois et les protège contre les activités criminelles dans les guichets automatiques.

Au nom de nos membres québécois, merci de votre écoute.

Le Président (M. Girard) : Merci, M. Chandler. Maintenant, nous allons passer aux échanges entre les groupes...

Une voix : ...

Le Président (M. Girard) : Pardon me?

Une voix : ...

Le Président (M. Girard) : Ah! Merci beaucoup. Et nous allons maintenant procéder aux échanges avec les groupes parlementaires. Je cède la parole à M. le ministre pour un échange de 16 minutes.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, merci beaucoup d'être là et de nous parler de votre organisation et, donc, du projet de loi n° 141.

Dans ce projet de loi, nous apportons certains assouplissements en matière de vérification. Mais, si j'ai bien compris, et je pense que oui, vous nous demandez d'aller plus loin. Alors, j'aimerais que vous nous expliquiez quel serait l'avantage pour nous, donc, pour le gouvernement et donc pour la société québécoise, d'aller plus loin et de retirer du champ d'application de la Loi sur les entreprises de services financiers... services monétaires, pardon, de retirer cet encadrement et de le laisser seulement encadré par Interac. So what's the benefit for us, for society or...

• (15 heures) •

M. Chandler (Chris) : La première chose, c'est... Les guichets automatiques privés existent depuis 1996. C'était 2007 que le GAFI a fait son rapport, mais il n'a pas dit : Les criminels utilisent les guichets. Qu'est-ce qu'il a dit? Il a dit qu'il n'y a aucune régulation qui dit : Tu ne peux pas. Mais on a la loi contre le blanchiment d'argent, etc. C'était la réalisation, en ce temps-là, qu'on n'a pas écrit la «policy» explicite pour faire ça, qui a fait une grande panique, si je peux dire, avec le gouvernement fédéral et avec le groupe qui était ici en 2007, 2008 aussi. À cause de... beaucoup de monde a fait la présomption : si on n'a pas une loi comme ça, beaucoup de monde l'utilise pour ça. Mais ce n'était pas l'«evidence» devant ça. On n'a pas eu le problème, on n'a pas eu la police qui fait le «charge» de ça, devant ça.

Donc, depuis ce temps-là, le gouvernement fédéral a fait un conseil qui, au début, était avec tous les groupes, la GRC, la SQ, l'OPP, Visa, MasterCard, American Express, FINTRAC, Interac et Industry. Mais après quelques rendez-vous, on a diminué le groupe, juste la GRC, FINTRAC, Interac, Industry et le «Federal Finance Department», mais c'est eux qui écrivent la régulation pour Canada, qui à la fin de ça, le «Department» fédéral a donné la responsabilité pour administration à Interac. À ce temps-là, le Québec est déjà mis, est devenu le premier au monde qui a mis les guichets automatiques dans la définition de «money services business», mais a déjà mis, pour la protection des «Quebecers», les guichets dans le «Act».

O.K., bon. Pendant cinq ans, moi, je travaille personnellement avec l'AMF, avec tout, pour essayer d'implémenter ça le plus facilement possible, mais c'est tellement difficile. C'est difficile de faire ça à cause de... par rapport à l'Interac. Interac, chaque guichet est connecté par Interac. Interac est toute la visibilité de tous les guichets du Canada. Avec l'AMF, on a besoin de demander tout le monde si tu as un guichet, etc. C'est plus difficile, mais elle a fait un bon job pour implémenter pendant cinq ans. Mais maintenant on est cinq ans plus tard, et Interac a commencé plus ou moins un an après le Money-Services Business Act, mais maintenant, on a la preuve et l'«evidence» qu'Interac marche super bien. Interac a toute la visibilité, Interac a un processus d'audit chaque année qu'il fait, Interac a la capacité d'arrêter les guichets automatiques s'il ne pas «comply», et tout ça a déjà fait.

Et, au Québec, on continue l'application de la loi, mais c'est cher. C'est plus qu'un million chaque année par 5 000 petites PME de Québec qui va payer pour ça. C'est une duplication, presque 100 % duplication des «forms», des «check» criminels et tout ça, mais ce n'est pas le même, si ça va être exactement le même, ça va être plus facile, mais c'est similaire. Tu fais ça... tu redoubles tout l'effort. Depuis tout ce temps, on a eu une «charge» du Canada. C'était une fille qui a essayé de blanchir 100 000 $ à Winnipeg. Et elle était attrapée après six mois, et on utilise la documentation d'Interac pour aider la police pour faire le «charge», et tout.

Mais c'est comme ça. Pour moi, c'est, un, ce n'est pas un gros problème. C'est un problème de ne pas avoir la réglementation. Maintenant, on a deux fois la réglementation.

Troisième chose, c'est Interac qui a la visibilité des guichets, et qui peut faire, juste à cause de ses connexions, la réglementation plus efficace que l'AMF. Et c'est pour tout le pays en même temps. Et c'est comme ça, le dédoublement, pour moi, ce n'était pas une mauvaise idée à ce temps-là qu'on l'a fait, à cause de... ne pas une autre option, mais maintenant, on a quelques années de preuves, c'est dédoublement, et ça fait un «burden» pour les 5 000 PME de Québec. Pour plus ou moins pour rien, dans mon livre.

M. Leitão : O.K., merci. Maintenant, vous parlez de 5 000 PME au Québec. Donc, la structure ici, au Québec, c'est que chaque entreprise qui exploite des guichets automatiques a probablement, quoi, une, deux machines max?

M. Chandler (Chris) : Oui.

M. Leitão : Est-ce qu'il s'agit de la même structure dans les autres provinces? Est-ce que l'Ontario, par exemple, vous avez des membres de votre organisation qui, eux, ils possèdent 20, 30, 40, 50 machines, ou c'est encore la même chose que d'avoir des petites entreprises, chacune avec quelques machines?

M. Chandler (Chris) : C'est... Pour moi, le profil partout du Canada, c'est similaire. Au Québec, on est le plus grand, et dans mon business, j'ai comme 100 Shell «gas stations», deux Sobeys et, au Canada, j'ai tous les Walmart, mais, au Québec, avec la loi, elle enlève les guichets automatiques, et beaucoup, beaucoup de petites entreprises. Mais c'est ça, c'est similaire partout du Canada. On a les «chains», comme Cage aux Sports, c'est un client de moi, 40 bars de Québec et 40 guichets. Mais c'est plus de «onesie, twosie», bars et restaurants.

M. Leitão : Donc, des opérateurs comme vous, donc, qui détiennent un grand nombre de machines, il n'y en a pas beaucoup. La plupart, ce sont des petits opérateurs, c'est ça?

M. Chandler (Chris) : Oui, au Québec, on a deux grands opérateurs, je pense que deux, trois moyens, et beaucoup de petits.

M. Leitão : Très bien. Merci. (Interruption) Pardon. Une chose qu'on entend souvent de la part des consommateurs, c'est que les frais chargés sont élevés parce qu'il y a les frais, bon, de propriétaires de machine, mais aussi Interac charge un frais additionnel. Donc, quand vous faites un retrait de 20 $, la charge totale peut être assez importante. Comment est-ce que vous justifiez l'existence de ces frais assez élevés?

M. Chandler (Chris) : Les deux, M. le Président, c'est deux frais, c'est le frais que le consommateur paie au guichet, et souvent c'est... presque tout ça va à l'entrepreneur, le bar, le restaurant. Ça, c'est une forme d'argent pour la PME qui fait ça. Ça, c'est une importante chose, c'est comme vendre les chips et le Coke, et tout, tout. Mais ensuite le coût d'opération monte un peu chaque année, et les frais d'Interac, pour l'opérateur, c'était 0,75 $ depuis 1996. Il n'a pas changé pendant 20 ans, mais, chaque année, on a 2 %, 3 % d'augmentation de coûts. C'est comme ça, c'est «squeezy» un peu, mais le frais que le consommateur paie à la porte, ça suit la banque d'habitude. On est, plus ou moins, 3 $ maintenant, c'est comme la grande Banque du Canada, mais les autres, comme Desjardins, chargeaient 4 $, ça, c'est un peu «outlier», mais c'est ça, c'est une réflexion du coût, mais c'est une opportunité, pour le propriétaire, de charger.

M. Leitão : Donc, une bonne partie de l'attrait de ces machines, c'est pour les petites entreprises, les dépanneurs. Donc, c'est une source additionnelle de revenus parce qu'ils chargent un montant important.

M. Chandler (Chris) : Oui, c'est ça.

M. Leitão : O.K. Très bien. Écoutez, moi, je n'ai pas vraiment d'autre question. Je pense que ma collègue a une question. Alors, allez-y.

Le Président (M. Girard) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, allez-y avec votre question.

Mme de Santis : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Girard) : Il reste 16 min 50 s.

Mme de Santis : Merci. Vous demandez, à la loi, que les guichets automatiques privés ne soient pas assujettis à la loi parce que la réglementation d'Interac existe. Maintenant, Interac, c'est quoi, c'est une association d'institutions privées?

M. Chandler (Chris) : Non...

Le Président (M. Girard) : ...

M. Chandler (Chris) : Pardon, c'est moi. O.K. Désolé. M. le Président, la réglementation d'Interac est faite par le grand comité qui a commencé avec le département des finances fédéral. Quand la régulation est faite, elle est donnée à Interac pour faire l'implémentation et pour faire le support pendant les années. Interac est une «self-regulating organization» qui a été établie en 1996. C'est un organisme financier qui est très connu par tout le monde, avec une excellente réputation pour la sécurité et le leadership en finance. Même dans les autres pays, comme en Inde, la Reserve Bank of India a copié exactement l'Interac, le système, le «system payment», le «multiparty payment» tellement efficace et sécure, et c'est ça, Interac.

Mme de Santis : Parfait. Mais, la mise en application des règlements, ça, c'est Interac qui le fait, est-ce qu'Interac est assujetti à la réglementation gouvernementale ou d'une agence gouvernementale?

M. Chandler (Chris) : Je pense qu'elle n'est pas directement une agence du gouvernement, mais c'est le gouvernement qui donne les responsabilités pour l'implémentation de cette régulation.

• (15 h 10) •

Mme de Santis : Parce que, quand vous dites qu'il y a seulement une personne qui a été mise en accusation, ça m'amène à me questionner : Qu'est-ce qu'ils font vraiment pour s'assurer qu'il n'y a pas de blanchissage d'argent? C'est quoi, les démarches qui sont prises? Parce que vous me demandez de ne pas faire appliquer une loi aux guichets automatiques privés, mais vous n'expliquez pas comment la réglementation qui est en place est suffisante pour faire ce que nous faisons ou voulons faire au Québec.

Cet été... En 2016 — c'était 2016? — on a eu beaucoup de questionnements sur les guichets privés ici, au Québec, peut-être mon collègue va vous poser des questions là-dessus, et il y a eu même deux hommes et cinq entreprises qui ont été trouvés... contre qui on a dit qu'il y avait des renseignements faux qui ont été faits pour obtenir leur permis.

Alors, moi, je veux connaître de vous pourquoi vous croyez que mettre notre foi dans Interac va suffire, parce que je n'ai pas un sentiment, à ce moment-ci, qu'il y a là suffisamment soit de réglementation ou de vraiment mettre en vigueur la réglementation existante, s'il y en a, qui protégerait le consommateur et aussi la société.

M. Chandler (Chris) : Bon. M. le Président, moi, je pense que vous parlez de deux choses différentes. La réglementation d'Interac et la réglementation sous le «Act» pour les guichets automatiques sont presque pareilles. Hein? Si on fait la même chose, c'est pour l'identification du propriétaire de guichet, identification de la provenance de l'argent qui est dans le guichet. Et tout ça, les documents, sont gardés et sont accessibles, sous la «circumstance» appropriée, à la police.

Mais ce n'est pas la job d'Interac ni le «Act» Money-Services Businesses Act pour faire la job de la police, c'est pour aider la police, pas pour remplacer la police, O.K.? Si c'est des activités criminelles, dans tous les secteurs de notre société, c'est la police qui fait ça. Le problème, si on n'a pas la documentation d'Interac ni la documentation collectée par l'AMF, c'est vraiment difficile pour suivre l'accusation.

Mais la situation maintenant avec Interac et avec la collection de «data» de l'AMF, c'est pareil, dans mon avis, O.K.? C'est la police qui fait l'investigation. Comme à Winnipeg, le seul incident que je connais, la police fait cet épisode, il pense que c'est un guichet qui est impliqué, il demande tous les documents qui est «on file» avec Interac pour supporter le «case» contre le criminel. Ce n'est pas différent entre... Le Money-Services Businesses Act n'est pas une activité de police non plus.

Mme de Santis : Donc, il n'y a aucune obligation de supervision qu'en effet la réglementation est respectée?

M. Chandler (Chris) : Non. C'est l'inverse. C'est Interac. Il faut «comply» avec la réglementation qui donne tout le «paperwork». C'est le même que... C'est tellement similaire, qu'on ouvre le compte de banque à une «bank» ou Desjardins. O.K.? C'est exactement pareil. Si tu ouvres un compte de «bank», tu fais tout le «paperwork», tu expliques comment tu as l'argent et tu fais tout, tu laisses ça avec la banque. O.K.? Ça...

Le Président (M. Girard) : Malheureusement, ceci met fin au bloc de temps avec le gouvernement. Nous devons passer de l'autre côté, avec l'opposition officielle, avec M. le député de Rousseau, pour un bloc de 9 min 30 s.

M. Marceau : O.K. Merci. Bonjour, messieurs. Merci d'être là. Bon, tout d'abord, cela n'existe pas, un guichet automatique qui n'est pas...

Une voix : ...

M. Marceau : Je dis : Cela n'existe pas, un guichet automatique qui n'est pas lié à Interac. Ça n'existe pas, ça.

M. Chandler (Chris) : Au Canada, je pense que non à cause que 95 % dans la transaction de guichets automatiques privés sont par Interac. Si tu es un guichet sans Interac, tu peux faire la transaction de MasterCard et Visa, c'est tout. Peut-être que ça existe, mais je ne comprends pas, s'il existe.

M. Marceau : O.K. Puis deuxième chose, donc, pour que ce soit bien clair, la réglementation Interac, c'est une réglementation que l'industrie s'est imposée elle-même, là. C'est une forme d'autoréglementation.

M. Chandler (Chris) : C'est une réglementation qui est faite par le gouvernement de... le département des Finances du Canada avec la GRC, très impliquée, avec les consultations avec nous, et le «payment network». C'est tout.

M. Marceau : Je comprends. Mais la vérification, le stockage de l'information, c'est Interac qui ne fait que ça.

M. Chandler (Chris) : C'est Interac qui fait ça, et on fait un audit de ça chaque année.

M. Marceau : Est-ce qu'il arrive, à l'occasion, fréquemment, très, très fréquemment, que des guichets automatiques soient retirés de la liste, qu'on dise : Ces gens-là ne respectent pas les règles, et donc on les débranche. Ils n'ont plus le droit de faire affaire avec Interac? Est-ce que ça arrive souvent?

M. Chandler (Chris) : Je ne sais pas si... Mais c'est impossible d'allumer le guichet si tu n'es pas «comply» avec la règle.

M. Marceau : O.K. Puis si quelqu'un satisfaisait aux règles?

M. Chandler (Chris) : ...les autres «triggers»... Si le propriétaire du guichet change, si tu es le bar et tu vends à la madame, là, j'ai besoin de faire la nouvelle documentation complètement. Je ne peux pas faire un nouveau contrat avec elle sans changer la documentation Interac. C'est impossible. Ça va fermer le guichet encore.

M. Marceau : O.K. Mais, à votre connaissance, les informations que vous récoltez, qui sont récoltées par Interac, sont utilisées pour fermer des guichets automatiques? Il y a des guichets automatiques qui ferment en conséquence du non-respect des règles Interac? On peut dire ça?

M. Chandler (Chris) : Oui. Moi, je ne sais pas exactement. Tu peux avoir le guichet qui marche bien et ce n'est pas respecte les règles Interac. Et ça, je ne comprends pas. Tu ne peux pas allumer le guichet.

M. Marceau : O.K. Mais, s'il était déjà allumé puis qu'on arrête de respecter les règles? Ou une fausse déclaration, tu sais, disons que quelqu'un fait une fausse déclaration.

M. Chandler (Chris) : Oui, c'est... Si quelqu'un fait une fausse déclaration qui a l'air le vrai, on peut faire la soumission. C'est exactement pareil sous l'AMF et Interac. Ce n'est aucune différence, mais c'est comme ça. S'il y a investigation de lui, ça va être un autre truc pour la «prosecution». C'est comme un suspect criminel, et maintenant quelqu'un qui fait la fraude aussi. C'est ça.

M. Marceau : Puis, en tout cas, moi, j'ai bien compris ce que vous disiez quant au fait que vous, vous récoltez de l'information, puis c'est cette information-là qui est par la suite utilisée par la police pour porter des accusations, le cas échéant. Puis dans le fond, c'est la même chose que pour la Loi sur les entreprises de services monétaires et les deux...

M. Chandler (Chris) : C'est ça.

M. Marceau : Mais il me semble... puis est-ce que... Vous nous dites : La Loi sur les entreprises de services monétaires n'a pas permis de porter des accusations à ce jour. C'est ce que vous avez dit, si j'ai bien compris? Non? Ce n'est pas ça? Excusez-moi, je ne veux pas déformer vos...

M. Chandler (Chris) : I'm not sure I... Je n'ai pas compris, désolé.

M. Marceau : J'ai dit : Est-ce que vous nous dites que la Loi sur les entreprises de services monétaires n'a pas permis à la police de porter des accusations à ce jour? Est-ce que c'est ça que vous nous dites?

M. Chandler (Chris) : Non. Je n'ai pas dit ça...

M. Marceau : O.K. Je n'ai pas bien compris dans ce cas-là.

M. Chandler (Chris) : C'est clair que la loi a la possibilité de... La police fait plus d'investigations. C'est ça dans le Money-Services Businesses Act. Mais je ne sais pas si j'ai bien compris ta question.

M. Marceau : Oui. Je parle de ce qui s'est produit, pas de ce qui est possible.

M. Chandler (Chris) : Non, désolé.

M. Marceau : O.K.

M. Chandler (Chris) : Je sais, mais désolé.

M. Marceau : Parce que moi, j'avais compris que vous nous disiez que la Loi sur les entreprises de services monétaires était inutile et pas bonne, parce qu'elle n'avait pas mené à des accusations. J'avais compris ça. Ce n'est pas ce que vous nous dites?

M. Chandler (Chris) : O.K. J'ai dit : c'est de doublement des activités dans un secteur qui... aucune histoire de gros problème qui a... plus qu'un million sur les 5 000 PME de Québec chaque année. Et, dans mon avis, c'est mieux pour les PME du Québec et pour les l'AMF, pour faire les ressources sur les autres choses, si on n'a fait le dédoublement de cette activité. C'est ça, mon point. Ce n'est pas complètement inutile, mais c'est comme «belt» et «suspenders». Tu n'as pas besoin des deux.

• (15 h 20) •

M. Marceau : Regardez, je vais prendre votre document. Vous dites, là : «Finalement, depuis que la LESM est en vigueur, les corps policiers n'ont jamais porté d'accusations en lien avec le blanchiment d'argent par le biais de guichets automatiques.» C'est votre document qui dit ça, là.

M. Chandler (Chris) : O.K.?

M. Marceau : Moi, ce que j'essayais de vous faire dire, puis c'est ce que j'essayais de comprendre, c'est : Est-ce qu'on peut porter le même jugement sur le règlement Interac? Vous nous dites, parce qu'il n'y a pas eu d'accusations, la LESM a un problème. Est-ce qu'on ne peut pas dire la même chose avec le règlement Interac? Est-ce qu'on peut dire que le règlement Interac a permis de porter des accusations en lien avec le blanchiment d'argent? C'est ça, ma question très simple.

M. Chandler (Chris) : ...

M. Marceau : Parce que si c'est un argument pour dire que la LESM n'est pas bonne, il faut savoir si le même argument peut être appliqué au règlement Interac.

M. Chandler (Chris) : Oui. Je pense que les deux règles fait la même chose. C'est ça, je dis. Mais Interac est meilleur à cause de... c'est Interac qui a la visibilité de tout, c'est Interac qui a le pouvoir d'arrêter les guichets automatiques, et c'est ça. Et c'est Interac qui fait tout le pays en même temps. Je ne sais pas si j'ai bien compris, désolé.

M. Marceau : O.K. Bien, je pense que non, mais ce n'est pas grave, ce n'est pas grave. C'est beau, monsieur. Merci, merci.

M. Chandler (Chris) : Désolé.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup.

M. Chandler (Chris) : ...

M. Marceau : Oui, oui.

Le Président (M. Girard) : Merci. Nous allons maintenant passer au deuxième groupe d'opposition avec le député de Granby pour une période de 6 min 30 s.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. Moi aussi, je veux revenir un peu sur Interac, l'AMF, les appareils privés, ATM privés. Vous dites, puis je vous cite, là : «Nous croyons fermement que le retrait des guichets automatiques du champ d'application de la LESM aura des impacts positifs à la fois sur les petites entreprises du Québec ainsi que sur l'AMF qui protégera la population du Québec des risques associés au blanchiment d'argent.»

Ma collègue ministérielle vous a posé une question tantôt, à savoir que...

Une voix : ...

M. Bonnardel : Ma collègue vous a posé une question tantôt, à savoir... Vous dites, Interac fait les vérifications. Les vérifications des entreprises.

M. Chandler (Chris) : Toute la documentation et un audit chaque année, oui.

M. Bonnardel : L'AMF doit vérifier ces entreprises, donner une vignette. Cette vignette doit être installée sur l'appareil, le guichet automatique. En 2013, Enquête, à Radio-Canada, a sorti en disant : Il y a une problématique. Il y a encore du blanchiment d'argent avec ces appareils. La GRC a dit — ça, c'est ce qu'Enquête a dit — 5 % des appareils privés servent à blanchir de l'argent. Ça, c'est ce qu'Enquête...

M. Chandler (Chris) : ...

M. Bonnardel : Laissez-moi juste terminer. Et le bureau d'enquête TVA, trois ans plus tard, a ressorti, encore une fois, le fait que l'AMF — là, on ne fait pas le procès de l'AMF — mais l'AMF ne l'a pas fait, le travail, pour être capable de vérifier en bonne et due forme tous ces appareils. Alors, comment, aujourd'hui, vous pouvez me dire que si on retire tous ces appareils de la LESM, le blanchiment d'argent, soudainement, il n'y en aura plus au Québec? Je ne saisis pas, là.

M. Chandler (Chris) : Mais je pense que les nouvelles tu parles c'était... On a eu beaucoup de «headlines» qui dit : Les guichets sont illégaux. C'était à cause de... n'ai pas le permis. Ce n'est pas à cause de... il fait le blanchissement d'argent. Dans mon connaissance, c'est «zero charge» par la police pour le blanchissement d'argent dans les guichets du Québec. Zéro, pendant 20 ans. Lesquels problèmes tu parles? C'est quoi, le grand blanchissement d'argent qui est là, O.K.? Zéro. Même avec cinq ans d'accès de «Money-Services Businesses Act», SQ et tout, tout, tout. Zéro. C'est ça. On a une grande perception pour cause de... on n'a pas eu la réglementation en 2007, qui était explicite pour ça. On a mis deux fois la réglementation, un à Québec et un d'Interac, O.K.? On a eu le programme, on a eu quelques fois le média qui fait la grande affaire de publicité avec aucune preuve, aucune «charge», aucune «evidence» de quelqu'un actuellement fait ça.

M. Bonnardel : En tout respect, là, je lis ce qui est indiqué, là. En 2013, là, deux proches des Hell's Angels ont possédé des entreprises de guichets au cours des dernières années. Il y a toujours une cause devant la cour à Montréal depuis 2008. En Nouvelle-Écosse, même chose. Alors, écoutez, je ne partirai pas un débat là-dessus, là, mais je fais juste vous dire, comment nous, comme législateurs, on doit comprendre que si l'AMF ne peut pas aller faire ses vérifications de ces appareils en bonne et due forme, comment on peut s'imaginer... Interac ne fera pas de plainte à la police, ce n'est pas son travail. Interac fait des vérifications en bonne et due forme si, moi, je n'ai pas d'antécédents criminels, et je peux posséder 10 appareils. C'est un peu ça. Vous dites, c'est la police qui fait le travail. Mais la police doit obtenir une plainte où, minimalement, on suspecte quelque chose pour que la police puisse aller enquêter. Et ça, c'est l'AMF qui va faire le travail, non?

M. Chandler (Chris) : Non. Je ne pense pas.

M. Bonnardel : Non? Mais si l'AMF fait ses vérifications en bonne et due forme, blanchiment d'argent et tout ça, et que les vignettes ne sont pas apposées comme telles, c'est l'AMF qui va nécessairement s'assurer, en bonne et due forme, que le propriétaire qui possède ces appareils est légal.

M. Chandler (Chris) : Moi, peut-être je ne comprends pas bien comment l'AMF marche, mais, dans mon avis, l'AMF, elle fait presque toutes les mêmes choses que l'Interac, sauf qu'elle trouve quelqu'un qui n'est pas «complying with the law». Mais Interac, si tu ne «comply» pas, on ferme le guichet automatique. Le pouvoir de l'AMF, dans ma connaissance, c'est : s'ils trouvent que tu ne «comply» pas, elle fait une «fine» de 15 000 $ ou quelque chose comme ça. Mais les deux ont le pouvoir de faire quelque chose. Un est : arrêter les guichets complètement, immédiatement; l'autre, faire une charge pour 15 000 $ qui va dans... Je ne sais pas si c'est plus efficace et plus important.

M. Bonnardel : O.K., merci. Ça va.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, messieurs, merci pour votre contribution à la Commission des finances publiques.

Donc, je vais suspendre quelques minutes pour permettre, par la suite, au Barreau du Québec de pouvoir prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 27)

(Reprise à 15 h 31)

Le Président (M. Girard) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, nous recevons cet après-midi le Barreau du Québec. Je vais demander aux gens de se présenter et de nous présenter leur mémoire. Vous avez une période de 10 minutes à votre disposition. Par la suite, nous aurons les échanges avec chacun des groupes parlementaires. La parole est à vous.

Barreau du Québec 

M. Le Grand Alary (Nicolas) : Oui. Alors, bonjour, M. le ministre, M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission. Je suis Me Nicolas Le Grand Alary, avocat au Secrétariat de l'ordre et affaires juridiques du Barreau du Québec. Je suis accompagné de Me Paul Martel, président du Comité sur les sociétés et les personnes morales, et de Me Annick Demers, membre du Comité sur la protection du consommateur.

C'est avec intérêt que le Barreau du Québec témoigne devant vous relativement au projet de loi n° 141 intitulé Loi visant principalement à améliorer l'encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d'argent et le régime de fonctionnement des institutions financières. Le Barreau du Québec est un ordre professionnel et a pour mission la protection du public. C'est dans cette optique que nous vous formulons nos commentaires. De prime abord, le Barreau du Québec tient à souligner l'énorme travail accompli lors de l'élaboration de ce projet de loi. De manière générale, le Barreau est satisfait des modifications apportées notamment en ce qui a trait à la révision globale de la Loi sur les assurances et de la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne, ainsi que des modifications à la Loi sur l'assurance-dépôts. Cependant, le Barreau du Québec tient à formuler certains commentaires particuliers dans l'optique de bonifier le projet de loi et de le rendre plus cohérent.

Le projet de loi propose notamment de nombreuses modifications à la gouvernance des sociétés assujetties à la loi sur les assureurs, notamment aux articles 94 à 97, en imposant aux administrateurs de nouvelles obligations de dénoncer au conseil d'administration toute situation qui entraîne une détérioration de la situation financière de la société ou qui est contraire aux pratiques de gestion saine et prudente ou aux saines pratiques commerciales.

De manière générale, la notion, mentionnée à l'article 95, de situation qui entraîne une détérioration de la situation financière de la société ne correspond à aucun concept comptable reconnu et va bien au-delà des saines pratiques commerciales. Ce critère est flou et difficile à appliquer. Il devient donc impossible pour un administrateur d'évaluer a priori l'étendue de son obligation. Nous invitons le législateur à préciser cette notion. De plus, le Barreau du Québec constate que la diversité n'est pas définie à l'article 99 de la loi sur les assureurs. Il n'est pas possible de savoir si ce terme englobe la parité entre les femmes et les hommes, la diversité culturelle ou les deux.

Nous proposons donc que les sociétés qui doivent obtenir un permis pour exercer leurs activités soient obligées d'avoir un conseil d'administration tendant vers une parité entre les hommes et les femmes en s'inspirant du libellé de l'article 78.1 du Code des professions, qui vise les membres nommés par l'Office des professions au conseil d'administration d'un ordre professionnel.

De plus, la LSFSE exige que les délégations de pouvoir soient prises par résolution spéciale du conseil d'administration. De plus, un comité formé par le conseil d'administration ne peut être délégataire que s'il est composé à majorité de résidents canadiens, et seuls les résidents canadiens peuvent être délégataires.

Le Barreau constate que ces articles ne se retrouvent pas dans la nouvelle mouture de la loi sur les assureurs et de la LIDPD. Nous comprenons que l'intention du législateur est d'harmoniser et d'uniformiser les règles applicables aux différentes sociétés assujetties. Cela est évident vu la présence de nombreux libellés identiques dans ces trois lois. Nous comprenons donc mal pourquoi l'effort d'harmonisation n'a pas été poussé jusqu'à supprimer cette exigence qui est présente dans la version actuelle de la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne.

Au niveau de la distribution de produits d'assurance, le principal changement apporté au régime de distribution d'assurance avec représentant consiste à encadrer la distribution de produits d'assurance par Internet. Le Barreau accueille favorablement l'initiative de proposer un encadrement spécifique à la vente de produits d'assurance en ligne. D'ailleurs, le Québec est la seule province à le faire.

L'article 67 de la loi sur les assureurs prévoit qu'une personne qui souhaite souscrire à une assurance par le biais d'Internet doit pouvoir, si elle le souhaite, communiquer avec une personne physique. Afin de conseiller adéquatement le consommateur, le Barreau du Québec considère que l'article 67 de la loi sur les assureurs devrait être modifié afin de prévoir que le consommateur doit pouvoir communiquer avec une personne physique détentrice d'une autorisation de l'AMF. Les détenteurs d'un permis de l'AMF sont en effet les personnes les plus aptes à conseiller adéquatement les consommateurs.

De plus, le Barreau du Québec propose qu'un pouvoir réglementaire soit inscrit dans la loi afin de permettre à l'AMF d'identifier certains produits d'assurance qui ne pourront être souscrits en ligne sans l'intermédiaire d'une personne physique ou d'un cabinet. Cette façon de faire permettrait de mieux assurer la protection du consommateur face à des produits trop complexes pour être offerts en ligne.

Au niveau du régime de distribution d'assurance sans représentant, le Barreau du Québec accueille favorablement la proposition selon laquelle les exigences liées au guide de distribution sont éliminées. Dans les faits, le guide est un document pour lequel le consommateur avait très peu d'intérêt et qui était très peu lu ou consulté. Le Barreau du Québec tient à préciser toutefois que l'élimination des exigences liées au guide de distribution devrait être remplacée par une obligation du distributeur de fournir un résumé écrit dans un langage clair.

Le projet de loi propose également, à l'article 523, d'abroger les articles 240 à 243 de la LDPSF, qui autorisent l'AMF à tenir un registre des assurances individuelles sur la vie. Le Barreau du Québec se questionne sur l'objectif de cette abrogation et est d'avis que la possibilité pour l'AMF de tenir un tel registre doit être maintenue. Ce registre, qui n'existe pas actuellement, permettrait de centraliser l'information concernant l'existence de polices d'assurance et serait d'une grande utilité pour les proches d'une personne décédée.

Le projet de loi modifie aussi le Code civil du Québec pour permettre la conclusion de contrats d'assurance de frais funéraires. Compte tenu de la particularité du domaine des services funéraires et de la vulnérabilité particulière des personnes qui souscriraient à ce type d'assurance, le Barreau du Québec est préoccupé par l'ajout de cette possibilité dont le fonctionnement, à première vue, n'est pas clair. D'emblée, le Barreau du Québec n'est pas favorable à cette mesure telle que proposée.

Nous avons également certains commentaires relativement au fonds d'assurance d'un ordre professionnel.

Le Barreau du Québec a mis sur pied un fonds d'assurance responsabilité professionnelle en 1988. Le Barreau du Québec est fier du travail accompli par son fonds depuis toutes ces années. Le Barreau a également participé à de nombreux groupes de travail pour discuter de diverses pistes de solution à des problématiques qui ont été identifiées au fil des ans. Le Barreau du Québec estime que les modifications proposées tant à la loi sur les assureurs qu'au Code des professions, sous réserve de certains commentaires particuliers mentionnés dans notre mémoire, répondent aux préoccupations relatives à la transparence, la reddition de comptes ainsi qu'à l'échange d'information entre l'ordre et le comité de décision.

Nous avons, à titre d'exemple, des préoccupations relativement à l'échange d'information en ce qui concerne le respect du secret professionnel et le privilège relatif aux litiges. Il faut s'assurer que ces informations sont protégées et le comité de décision ne soit pas tenu de les divulguer au conseil d'administration. En conséquence, nous croyons qu'il serait davantage approprié de circonscrire les cas où la protection du public pourrait être compromise en s'inspirant du libellé de l'article 108.10 du Code des professions.

De plus, pour assurer une transition aisée et de prévoir suffisamment de temps pour permettre aux ordres professionnels et aux fonds d'assurance de mettre en oeuvre les nouvelles dispositions, le Barreau du Québec juge que la période transitoire d'un an prévue à l'article 741 du projet de loi est trop courte et devrait plutôt être de trois ans.

En terminant, nous remarquons que la version française de l'article 476 de la loi sur les assureurs prévoit que la suspension ou l'annulation d'un contrat ne peut être demandée après la fin de la 10e année suivant la prise d'effet de ce contrat. La version anglaise du même article, quant à elle, prévoit que la suspension ou l'annulation du contrat ne peut être demandée qu'après l'expiration de ce délai de 10 ans. Ces deux libellés sont complètement opposés. Nous invitons le législateur à corriger la version anglaise de cet article.

Nous tenons, par le fait même, à rappeler et à saisir l'occasion qu'en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867 et la Charte de la langue française les versions anglaise et française des lois au Québec ont la même valeur. Ainsi, le choix d'une langue pour la lecture du texte de la loi par un justiciable ou un juriste peut mener à des résultats très différents. La prévisibilité juridique en est directement affectée. Cette problématique est exacerbée par le fait que de nombreux litiges peuvent alors survenir.

Finalement, les articles 29 et 186 de la loi sur les assureurs font des renvois à plusieurs différentes dispositions de la loi et à des chapitres ou sections entières. La lecture combinée de ces deux articles n'est pas claire. Ces deux articles ne sont que deux exemples du style de rédaction de ce projet de loi. Nous reconnaissons que le domaine financier est, en lui-même, complexe, et qu'il peut être difficile de rédiger des dispositions dans ce type de projet de loi. Cependant, le Barreau du Québec tient à souligner son attachement pour la rédaction législative et réglementaire en langage clair. En effet, la clarté de la loi, la constance d'une version à l'autre et la justesse linguistique sont essentielles à un meilleur accès à la justice.

Merci. Et nous sommes disponibles pour répondre aux questions que vous pourriez avoir.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, M. Le Grand Alary, pour votre contribution, pour la présentation de votre mémoire.

Maintenant, nous allons passer aux échanges. Et je cède la parole à M. le ministre pour un bloc de 16 minutes.

• (15 h 40) •

M. Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, madame messieurs, merci. Merci d'être là et surtout merci d'avoir analysé le projet de loi en détail. Et, en effet, ce n'est pas simple, hein? C'est un peu «significant». Et aussi, surtout d'avoir relevé certains aspects qu'il faut qu'on corrige... La justesse linguistique, en effet, c'est très important. Alors, l'équipe qui a travaillé à la préparation du projet de loi va certainement prendre vos commentaires techniques ou de nature rédactionnelle très au sérieux, et on apportera des papillons, des amendements pour corriger cette situation. En effet, que la version anglaise et la version française ne soient pas identiques, oui, ça pose problème, donc on va régler ça. Et on vous remercie de l'attention que vous avez portée à ce projet de loi.

Écoutez, donc, généralement, on a constaté que vous êtes à l'aise avec le projet de loi après les commentaires que vous avez émis, et tant mieux. Maintenant, j'aimerais peut-être discuter un peu avec vous une question qui a été soulevée ici plusieurs fois, c'est la notion de conseil et le fait que certains groupes de courtiers de différente nature souhaiteraient que, dans la définition d'un acte de courtage, donc, la notion de conseil soit réservée et incluse dans l'acte de courtage, ce qui, il me semble, causerait certains problèmes à beaucoup de professionnels. Hier, on a parlé aux comptables agréés, et, en effet, ils étaient très mal à l'aise avec cette possibilité demandée par certains que la notion de conseil soit réservée aux courtiers, ce qui mettrait les comptables dans une situation très problématique. Vous, de votre côté, du côté des avocats, du côté du Barreau, quelle est votre opinion en ce qui concerne la notion de conseil et la possibilité que, bon, certains demandent que cela devienne un acte réservé?

M. Le Grand Alary (Nicolas) : Je vais laisser répondre Me Demers.

M. Leitão : Certainement.

Mme Demers (Annick) : Bonjour. Pour ce qui est de la notion de conseil, je comprends que la notion de conseil a été essentiellement prise de toutes les définitions des différents représentants et a été incluse à l'article 27 de la loi sur la distribution. Donc, en ce sens-là, nous avions compris, là, que la notion de conseil était quand même encore un acte réservé pour les individus, là, qui étaient certifiés par l'AMF. Donc, disons qu'on ne partageait pas nécessairement les préoccupations, là, à ce niveau-là.

M. Leitão : C'est ça. Merci. Maintenant, vous avez aussi mentionné un peu la distribution par Internet. Et, d'une façon générale, j'aimerais savoir quelle est votre opinion sur les changements technologiques en général parce que ça va très vite dans le domaine financier, comme dans d'autres domaines, et c'est clair qu'en tant que législateurs nous essayons de nous garder un peu au courant, et d'accompagner ce changement technologique là, et l'encadrer du mieux qu'on peut. Comment vous regardez ça?

Mme Demers (Annick) : Comme mentionné dans le mémoire, je pense qu'on salue le fait que le gouvernement a pris la peine, là, d'encadrer la pratique ou ce nouveau phénomène là, contrairement à d'autres juridictions où la question n'est pas adressée. Comme vous l'avez vu dans notre mémoire, un des points qui nous préoccupait peut-être un petit peu plus, c'était le fait que... l'exigence que ce soit une personne physique qui soit disponible au bout du fil au lieu d'une personne qui détient son certificat, parce qu'à ce moment-là, disons, quand le consommateur prend la peine de prendre un téléphone et d'appeler, généralement, c'est pour poser des questions qui sont peut-être un petit peu plus poussées. Donc, à ce moment-là, il y aurait possiblement lieu, là, d'avoir quelqu'un qui a les connaissances, et puis qui est plus à même de pouvoir bien aligner le consommateur dans son choix, et puis pour que le consommateur puisse mieux évaluer le produit qu'il s'apprête à acheter.

M. Leitão : Très bien. Merci. Peut-être une dernière question de mon côté. Tu as une question? O.K., vas-y.

Mme de Santis : Non, non...

M. Leitão : Mais parce que j'ai une question dont on parlé aussi hier, et vous abordez ça dans votre mémoire. Mais j'aimerais avoir un peu plus d'informations sur la dénonciation. Et donc la levée du secret professionnel ne s'applique pas aux avocats. On comprend bien pourquoi il faut le faire comme ça. Mais, dans d'autres professions, comme par exemple les comptables, quelle est votre opinion?

Mme de Santis : J'aimerais ajouter à ça parce qu'exactement ma question allait être là-dessus. Vous y faites référence dans votre mémoire et vous êtes d'accord qu'il y a cet arrimage avec les dispositions existantes ailleurs. Mais nous avons eu, au moins, hier l'Ordre des comptables professionnels agréés qui se pose des questions parce qu'il trouve qu'il y a un problème avec le secret professionnel et comment tout ça pourrait être traité. Et eux, ils proposent que le processus de dénonciation soit beaucoup plus encadré, que le processus devrait favoriser la dénonciation préalable par des circuits internes, que la dénonciation à l'externe ne doit pas être autorisée, que dans des situations graves, et que le CPA devrait être protégé contre toute plainte disciplinaire privée auprès de l'ordre. J'aimerais avoir, comme le ministre, votre opinion là-dessus parce que, vous, je ne crois pas que vous l'avez vraiment regardé dans ce contexte-là.

M. Le Grand Alary (Nicolas) : Oui, effectivement, les dispositions qui sont présentées dans le projet de loi, on les a étudiées sous l'angle où le secret professionnel de l'avocat et du notaire, le secret professionnel du juriste, de manière générale, est souvent exclu de ces dispositions-là. Donc, on n'a pas procédé à l'analyse. Puis il faut comprendre qu'on a quand même un projet de loi de 480 pages. Ça peut être difficile d'analyser chaque disposition.

Mais, au niveau du secret professionnel, si on peut rappeler les principes juridiques, c'est qu'effectivement, selon la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, il y a un statut particulier à titre de principe de justice fondamentale, au sens de l'article 7 de la charte canadienne, pour le secret professionnel du juriste. Donc, c'est pour ça qu'on voit les exceptions, là, dans la plupart des cas, où on peut passer outre le secret, même si c'est présenté dans la charte québécoise, même si, dans le Code des professions, c'est... Les exceptions au secret professionnel de l'avocat sont assez limitées, là, au niveau de la jurisprudence. Donc, on ne l'a pas analysé au-delà de cette question-là. Je ne pourrais pas donner vraiment plus de détails, là, en réponse à ça.

Le Président (M. Girard) : Mme la députée.

Mme de Santis : J'ai une autre question. Ça m'intéresse que la diversité vous préoccupe, mais vous avez une idée très limitée de la diversité si vous pensez uniquement à femmes, hommes. Alors, pourquoi vous soulevez uniquement femmes, hommes quand la diversité, particulièrement ici, dans notre société québécoise, on la recherche à tous les niveaux de la société, et ça ne se retrouve pas nécessairement partout?

Une voix : Amen!

Mme de Santis : Amen? O.K.!

M. Le Grand Alary (Nicolas) : Oui. Je dirais qu'on mentionne l'article 78.1, je pense, du Code des professions, et je ne sais pas si c'est à cet article-là ou à un autre, là, un peu plus loin, mais il y a également une nécessité d'avoir une représentativité des communautés culturelles du Québec, là, dans la même loi. Donc, on va de soi avec ces modifications-là aussi, là, si jamais ça inclut... L'exemple qu'on a mentionné, c'est l'égalité en... Oui?

Mme de Santis : Dans votre mémoire, vous mentionnez uniquement les femmes.

M. Le Grand Alary (Nicolas) : Oui. Puis je laisserais peut-être Me Martel compléter.

Le Président (M. Girard) : M. Martel, allez-y.

M. Martel (Paul M.) : Oui, l'idée, c'est de dire : On va commencer par parler des femmes. On est en 2017, là, c'est le temps de dire : Ça, cette parité-là, on en a besoin. Le reste de la diversité, ça fait partie aussi... Il y a une politique de diversité qui va...

Mme de Santis : Mais on n'en a pas besoin.

M. Martel (Paul M.) : Non, on en a besoin, ça va faire partie de ça. Mais il faudrait au moins que cet aspect-là soit abordé et pas juste adopter une politique de diversité puis, après ça, on ne dit rien de plus. On n'avance pas plus au niveau de la parité hommes-femmes au niveau des conseils, puis ça, c'est quelque chose qui est important.

Mme de Santis : Je crois qu'on avance assez bien. Si on regarde... À cause de la loi sur les conseils d'administration des sociétés d'État, on a une très belle parité entre hommes, femmes.

Mais, dans tous les cas, j'aimerais maintenant parler du comité consultatif des consommateurs. À la page 13 de votre mémoire, vous êtes tout à fait d'accord que ce comité soit créé, mais vous ne parlez pas du tout de la gouvernance de ce comité. Et je me demande si vous avez regardé comment le comité va être constitué, et qui fait le choix des membres et du président du comité, et si vous trouvez que tout ça, c'est une bonne gouvernance. Je ne sais pas si vous êtes allés aussi loin pour regarder ce détail.

Le Président (M. Girard) : Me Demers.

• (15 h 50) •

Mme Demers (Annick) : Non, en fait, on n'a pas eu la chance de regarder tous les détails. Mais ma compréhension, de mémoire, je pense que la plupart de ces détails-là étaient prévus par règlement, donc.

Mme de Santis : C'est prévu dans le projet de loi.

Mme Demers (Annick) : Oui, mais il y a également beaucoup de détails qui vont être prévus dans le règlement. Mais malheureusement on n'a pas eu la chance de se pencher, là, sur le détail de ce comité-là.

Mme de Santis : Je n'ai plus de question. Si mes collègues ont d'autres questions... Merci.

Le Président (M. Girard) : D'autres questions? Ça va. Donc, nous allons maintenant aller du côté de l'opposition officielle, avec un bloc de 9 min 30 s, avec M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui, merci, M. le Président. Bonjour, madame, bonjour, messieurs.

Je vais commencer par un sujet que vous... Enfin, je ne suis pas au clair quant au fait que vous l'abordiez ou pas. En 3.1, page 12, vous parlez du processus de traitement de plainte des consommateurs. Puis en fait je voulais vous amener plus précisément sur la question de la médiation en cas de plainte ou en cas de différend qu'il peut y avoir entre un assureur et des clients. Là, ce qui est prévu à l'article 55 de la loi, c'est qu'il puisse y avoir des frais, ça puisse être coûteux, puis la médiation n'est pas obligatoire. La médiation dans le cas de différend entre un assureur puis des consommateurs n'est pas obligatoire. Or, vous, en tant que Barreau, je pense que vous favorisez le règlement des différends en dehors des tribunaux autant que possible. Moi, j'aimerais juste vous entendre là-dessus, là, sur cette opportunité qu'il y aurait d'amender le projet de loi pour y inscrire la médiation obligatoire et même gratuite.

Mme Demers (Annick) : En fait, on n'est pas entrés dans les détails de cette question-là, donc, dans le cadre de notre étude, là, qui a été quand même sommaire, là, du... Bon, on a tenté d'examiner pas mal toutes les questions, mais on n'est pas entrés dans ces détails-là, là, dans le cadre de notre étude.

M. Marceau : Puis, au plan philosophique, l'idée d'obliger la médiation, est-ce que ça vous convient ou pas?

M. Le Grand Alary (Nicolas) : La médiation, c'est un des modes, là, privés de règlement. Ça peut être intéressant. Par contre, ça peut être difficile logistiquement des fois d'imposer des médiations dans certaines circonstances. Si on a un consommateur qui se sent lésé puis on n'a pas de collaboration entre les parties, on ne peut pas... Ça peut être difficile de forcer des situations. Mais normalement il y a des mécanismes. On a appuyé notamment le projet pilote de médiation obligatoire devant les petites créances en matière de contrats de consommation. Donc, il y a une idéologie derrière ça. Le Barreau appuie des mesures comme ça. Mais on ne s'est pas prononcés sur le détail puis on n'a pas évalué les conséquences que ça pourrait avoir dans un domaine, le différend, là. Le domaine qu'on avait évalué, c'étaient les petites créances en matière de contrats de consommation. Là, on est dans le domaine de l'assurance. Est-ce que tout est équivalent? Moi, je n'ai pas la réponse à ça aujourd'hui. Par contre, on va toujours supporter, là, les modes privés de règlement, effectivement.

M. Marceau : O.K. En fait, si je peux me permettre de vous inviter à vous pencher là-dessus... Puis, étant donné l'expertise que vous avez sur ces questions-là, ce serait vraiment très apprécié d'avoir votre point de vue, peut-être. Puis on a quand même quelques semaines devant nous, je dirais, étant donné l'ampleur du projet de loi, donc ça vous donne le temps. En tout cas, je répète, étant donné l'expertise que vous avez sur ces questions-là, ce serait fort apprécié.

Je veux aller maintenant sur le rôle des conseils d'administration. Ma collègue de Bourassa-Sauvé a abordé la question du secret professionnel pour les auditeurs, pour les comptables. Mais, sur les gestes qui sont posés par les administrateurs, les membres des conseils d'administration, pas nécessairement des comptables agréés, bon, vous dites beaucoup de choses qui... puis j'aimerais que vous développiez un peu sur ces questions-là, si vous voulez bien. Entre autres, là, vous mentionnez le fait... Bien, enfin, je reprends, là, des grands bouts de la page 3 de votre mémoire, mais vous dites, entre autres, que, dans le cas... Il y a des comités qui sont formés par le conseil d'administration, qui vont avoir un pouvoir, disons, anormalement grand dans un contexte de gouvernance où on s'attendrait à ce que les comités relèvent du conseil d'administration, aient un pouvoir de recommandation, mais pas un pouvoir de décision. Enfin, c'est, en gros, ce que ça dit, là, dans le paragraphe qui est au milieu de la page 3. Pouvez-vous juste élaborer là-dessus, nous dire pourquoi il faut éviter le genre de situation qui est discutée dans ce paragraphe-là?

M. Martel (Paul M.) : Oui. Bien, en fait, le pattern de gouvernance qui est proposé ici déroge un petit peu avec celui auquel on est habitués en vertu de la LSA, qui est la loi normalement qui s'appliquerait à une croissance supplétive, où tout part du conseil. Le conseil peut déléguer certains pouvoirs à des comités composés d'administrateurs. Ici, le processus de délégation est un peu plus souple et est un peu différent parce qu'il y a une délégation qui est possible à des administrateurs individuels. Ça, c'est nouveau. La délégation à des comités, moi, je n'ai pas de problème avec ça. À partir du moment où c'est un comité du conseil, tu peux lui donner des pouvoirs si tu veux. Initialement, dans la Loi des compagnies, tu pouvais déléguer des pouvoirs seulement au comité exécutif puis, après ça, ça arrêtait là. Mais maintenant on peut créer des comités du conseil puis leur déléguer des pouvoirs. Là, on en a une couple qu'on mentionne puis on donne les pouvoirs qu'on veut leur donner. On ne voit rien d'extravagant à ça. C'est des compagnies particulières, ça, c'est des compagnies qui ont des permis et qui ont des comptes à rendre à l'État sur certaines obligations très spéciales. Alors, c'est peut-être normal aussi d'avoir une gouvernance un peu plus ciblée, un peu différente.

M. Marceau : O.K. Mais est-ce qu'il vous apparaît raisonnable, par exemple, que le code d'éthique des administrateurs soit adopté par le comité d'éthique puis ne soit pas adopté par l'ensemble des membres du conseil d'administration?

M. Martel (Paul M.) : Oui, ça peut très bien se faire. On peut très bien donner ce pouvoir-là à un comité, puis il peut l'adopter. C'est ça qui est proposé ici. Alors, on n'a rien vu de surprenant.

M. Marceau : Correct. Mais en tout cas j'entends... Moi, je suis content de vous entendre. D'autres ne pensent pas comme vous.

M. Martel (Paul M.) : Oui, on est au courant de ça.

M. Marceau : Alors, c'est pour ça que... Puis, comme vous abordiez ces questions-là... Puis d'autres aussi pensent qu'un membre du conseil d'administration, avant de dénoncer une situation à l'Autorité des marchés financiers, devrait avoir épuisé tous les recours prévus à l'interne. Est-ce que vous êtes de cet avis?

M. Martel (Paul M.) : Bien non. Là, on lui demande, l'administrateur, d'abord de veiller à ce que le conseil respecte ses devoirs. Puis, s'il ne le fait pas, bien, une fois qu'il ne le fait pas, là, on n'a pas de temps à perdre. C'est le temps d'aller voir l'AMF s'il le faut parce que, là, l'AMF a à veiller pour la protection du public. Ça, c'est différent avec n'importe quelle compagnie, là. C'est pour ça qu'on est obligés de créer, d'après moi, ce devoir particulier des administrateurs qui semble déroger à la solidarité entre les administrateurs. Mais là ce n'est plus une question de solidarité entre administrateurs, c'est une question de protéger le public, et c'est l'outil qui est proposé ici. Nous, on trouve ça très original et très efficace.

M. Marceau : O.K. Puis, quant à la notion de — je suis à la page suivante, là, à la page 4 — situation qui entraîne une détérioration de la situation financière de la société, que vous qualifiez de floue et difficile à appliquer, qu'est-ce que vous suggérez à la place?

M. Martel (Paul M.) : Bien, c'est juste que de dire : Quelque chose qui déroge aux règles de saines pratiques, c'est facile à appliquer. On comprend de quoi ils parlent. Mais, quand on parle de détérioration de la situation financière, c'est très, très vague, ça. À partir de quand ça commence un petit peu à détériorer, ah! il faut tout de suite qu'on intervienne puis qu'on avertisse l'AMF. On n'est pas sûrs jusqu'où ça va, puis les administrateurs non plus ne le seront pas.

M. Marceau : Mais qu'est-ce que vous suggérez qui soit fait, que ça soit complètement éliminé ou plutôt qu'on précise ce qu'on entend par une détérioration de la situation financière, le niveau de gravité, par exemple? Qu'est-ce que vous proposez?

M. Martel (Paul M.) : Bien là, écoutez, on n'est pas arrivés avec une autre proposition. On a juste fait remarquer que ça, là, c'était flou et c'était difficile d'application. Si on avait une préférence, on dirait : Laissez tomber ce bout-là. Puis on a déjà beaucoup de protection juste avec toutes les autres choses qu'il faut qu'ils divulguent.

M. Marceau : O.K. Donc, vous préféreriez tout simplement que ça disparaisse?

M. Martel (Paul M.) : Oui.

M. Marceau : Très bien. C'est bon pour moi, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Girard) : Ça va? Donc, nous allons passer avec le deuxième groupe d'opposition avec le député de Granby pour un bloc de 6 min 30 s.

M. Bonnardel : M. le Président, peut-être deux, trois questions.

La première, la règle du 10 jours. On donnerait la possibilité au consommateur qui achète un produit en ligne de résilier son contrat après 10 jours. L'Office de la protection du consommateur... pas flou, là, mais elle ne dit pas qu'il y a spécifiquement une règle du 10 jours. Pour vous, est-ce que vous l'avez étudié? Est-ce que c'est assez? Est-ce qu'on devrait... Quand on retourne un produit dans un commerce de détail, on a des fois presque 30 jours.

Mme Demers (Annick) : Cette règle est applicable dans un contexte où on achète un produit pas hors ligne, là. Donc, si on achète un produit auprès d'un représentant, un produit d'assurance, il y a également l'avis de 10 jours qui doit être donné. Donc, c'est le même standard.

• (16 heures) •

M. Bonnardel : O.K. Vous trouvez aussi qu'il est ridicule de retirer à l'AMF le droit, le pouvoir de ternir un registre des assurances individuelles sur la vie.

Mme Demers (Annick) : On n'a pas... En fait, on se questionnait à savoir quelle était la raison de ce retrait, parce qu'on a remarqué qu'il y a eu retrait. Essentiellement, c'est le commentaire qu'on a fait.

M. Bonnardel : Pour vous, ce serait important qu'il y ait un registre qui puisse exister pour être capable de définir un peu les polices ou ceux qui... les personnes qui...

Mme Demers (Annick) : Bien, en fait, ça bénéficierait à l'ensemble des consommateurs et du public, donc ce serait une mesure bénéfique.

M. Bonnardel : Et pourquoi vous êtes contre le fait que les assurances de frais funéraires... Vous dites : «Compte tenu de la particularité du domaine des services funéraires et de la vulnérabilité particulière des personnes qui souscriraient à ce type d'assurance [...] est préoccupé par l'ajout de cette possibilité dans la loi.»

Mme Demers (Annick) : Bien, en fait, ce qui nous préoccupait avec le produit d'assurances funéraires, c'est que c'est présenté comme un produit d'assurance, alors que, dans les faits, ça semble plutôt être un produit de financement des préarrangements funéraires. Donc, le consommateur a l'impression d'acheter un produit d'assurance et a l'impression qu'il va être couvert en toutes circonstances et que, bon, il a une certaine paix d'esprit, ses préarrangements vont être payés, ses services funéraires vont être payés. Mais il y a quand même des circonstances où le paiement complet ne sera pas fait. Une de ces circonstances-là, c'est lorsqu'il y a décès à l'intérieur de la période de deux ans.

Donc, notre préoccupation, c'est qu'au niveau juridique la qualification du produit, on voyait... la nature nous semblait plus être un produit de financement qu'un produit d'assurance.

M. Bonnardel : D'accord, ça va. J'avais trois questions.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Donc, Me Demers, Me Martel, Me Le Grand Alary, merci beaucoup pour votre contribution à la commission, aux travaux de la commission.

Je vais suspendre quelques minutes pour permettre à l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes de pouvoir prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 2)

(Reprise à 16 h 7)

Le Président (M. Girard) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, nous avons cet après-midi avec nous l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Donc, pour les 10 prochaines minutes, Mme Duhaime, je vais vous inviter à nous présenter les gens qui vous accompagnent, nous présenter votre mémoire, et, par la suite, nous aurons la période d'échange avec les différents groupes parlementaires.

Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. (ACCAP)

Mme Duhaime (Lyne) : Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. membres de la commission, merci de nous donner l'occasion de vous faire part de nos commentaires concernant le projet de loi n° 141.

Mon nom est Lyne Duhaime, je suis présidente de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes pour le Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui par MM. Robert Dumas, président de la Financière Sun Life pour le Québec, qui est à ma droite; et Jean St-Gelais, président du conseil et chef de la direction de La Capitale.

Merci de nous avoir invités pour commenter ce projet de loi majeur à la fois pour notre industrie mais surtout pour les consommateurs. La révision de la Loi sur les assurances et de la Loi sur la distribution des produits et services financiers était fort attendue, ces deux lois n'ayant pas été revues respectivement depuis 1974 et 1998.

D'entrée de jeu, nous désirons exprimer notre satisfaction quant au contenu qui nous est proposé et souligner l'ampleur du travail réalisé par les autorités du ministère des Finances. Tout au long du processus menant à l'adoption de ce projet de loi, vous pouvez compter sur notre entière collaboration pour vous aider à comprendre comment les modifications proposées se traduiront concrètement pour les 31 000 travailleurs de notre secteur ainsi que pour les 7,4 millions d'assurés au Québec.

Lors des premières journées d'audition et dans les médias récemment, certains éléments du projet de loi ont suscité des questions ou ont fait l'objet de préoccupations. Permettez-nous de nous y attarder plus particulièrement. D'abord, la protection du consommateur. Nous aimerions vous rassurer quant à l'importance accordée par notre industrie à cette dimension. La relation entre l'assureur et son client en est une à long terme, et la confiance qui s'établit est donc primordiale. La notion de traitement équitable des consommateurs est donc au coeur de nos préoccupations et de nos opérations.

Vous remarquerez, à l'annexe de notre mémoire, que nous n'avons pas attendu l'adoption des lois ou des règlements pour agir et pour améliorer nos façons de faire. À preuve, l'ACCAP élabore des lignes directrices qui visent à promouvoir des standards élevés au sein de l'industrie des assurances de personnes et à servir les intérêts des consommateurs. En décembre dernier, nous adoptions d'ailleurs une nouvelle ligne directrice portant sur la divulgation de la rémunération en assurance collective et services de retraite collectifs. Celle-ci établit des normes de divulgation de la rémunération des intermédiaires d'assurance collective et de services de retraite. Ce n'est là qu'un exemple des mesures volontaires mises en place pour accroître la protection et la confiance des consommateurs et qui va bien au-delà des lois et des règlements.

• (16 h 10) •

M. Dumas (Robert) : Merci, Lyne. Alors, notre industrie estime que le projet de loi offre une protection supplémentaire pour le public. En fait, plusieurs dispositions du projet de loi s'ajoutent à ce que l'on fait actuellement avec nos clients. Soulignons d'abord le nouveau chapitre IV de la page 27 portant sur les pratiques commerciales qui précisent les attentes du législateur envers les assureurs afin qu'ils démontrent à l'Autorité des marchés financiers les pratiques axées sur le traitement équitable des consommateurs. De plus, on prévoit un ensemble de responsabilités nouvelles envers ceux-ci. Alors, je profite de l'occasion pour rassurer les parlementaires quant au sérieux et au sens des responsabilités avec lequel les assureurs et les cabinets s'engagent dans la vente d'assurances par Internet.

De nouvelles mesures sont proposées dans le projet de loi afin de permettre une plus grande protection et plus de flexibilité au client lors d'achat en ligne. À titre d'exemple, il sera possible de bénéficier d'une assurance provisoire après l'achat en ligne et de résilier un contrat dans les 10 jours suivant l'achat. Pour nous, ce sont des améliorations notables. Si un problème survenait, peu importe le produit et la façon dont il a été distribué, une plainte pourra dorénavant être déposée à un seul endroit, à l'autorité. On pourra également compter sur un service de conciliation et de médiation. En plus, le législateur propose l'élargissement du champ d'intervention du fonds d'indemnisation. Alors, ce sont là quelques exemples qui illustrent à quel point les recours des consommateurs sont plus grands qu'ils ne l'étaient.

Rappelons également que, jusqu'à présent, aucune règle ne régissait la vente d'assurance par Internet. Le projet de loi n° 141 encadrera donc la distribution d'assurance en ligne sans intervention obligatoire d'un représentant. Un client qui en sent le besoin pourra toutefois, et c'est très important, demander du conseil à tout moment durant la transaction, et c'est très bien ainsi. Pour les assureurs et les clients, le conseiller, et c'est important, le conseiller conserve un rôle très important dans la vente et l'offre de produits d'assurance. L'Internet est simplement une option de plus pour les consommateurs. Ce mode de distribution ne remplace pas les modes de distribution existants, il s'y ajoute.

Les assureurs vont vouloir que la loi soit respectée, évidemment, et que le consommateur qui a besoin de conseils obtienne le meilleur conseil possible, parce qu'ultimement l'assureur a tout intérêt à ce que la personne ait tous les conseils dont elle a besoin, si elle en a besoin. En fait, en 2016, Claude Montmarquette et Nathalie Viennot-Briot, des chercheurs du CIRANO, ont publié une analyse qui démontrait une corrélation entre le fait d'avoir un conseiller et les sommes investies.

Alors, les assureurs peuvent compter sur un réseau de distribution qui peut être lié à l'assureur ou être indépendant, et, peu importe le modèle, ces professionnels des services financiers offrent un service précieux aux millions de consommateurs qui nous font confiance chaque jour. Leur pratique est régie par des règles déontologiques, des lois et des règlements, et à ça s'ajoutent les normes contractuelles imposées par les assureurs eux-mêmes pour encourager les meilleures pratiques, des pratiques qui sont irréprochables de la part de leurs conseillers.

Alors, ces standards imposent des normes pour la sélection, le contrôle et la déclaration des irrégularités, et ça déjà depuis plusieurs années. Alors, de plus, on prône que les produits soient élaborés, commercialisés, distribués de façon à répondre aux besoins à long terme du client. C'est d'ailleurs pourquoi l'industrie a adopté trois principes. Le premier, les intérêts du client ont priorité sur les intérêts du conseiller. Le deuxième, les conflits d'intérêts réels ou potentiels doivent être déclarés. Le troisième, le produit recommandé doit répondre aux besoins spécifiques du client.

Mme Duhaime (Lyne) : Merci, Robert. Comme vous pouvez le constater, nous appuyons l'adoption du projet de loi puisqu'il contribue à maintenir la confiance des consommateurs tout en tenant compte de leurs nouvelles habitudes de consommation. De plus, il contribue à la modernisation du cadre législatif qui en avait bien besoin. Nous vous remercions de nous permettre de contribuer à cette réflexion aujourd'hui et nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, Mme Duhaime. Donc, nous allons passer immédiatement du côté du gouvernement avec un bloc d'échange de 16 minutes. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Très bien, merci, M. le Président. Alors, Mme Duhaime, M. Dumas, M. St-Gelais, bonjour. Merci d'être là, merci de venir apporter votre éclairage sur cet important projet de loi.

On a entendu beaucoup de choses hier, aujourd'hui aussi, dans les consultations que nous avions eues en décembre, et je vais y aller droit au but. On nous a dit qu'avec les changements qu'on apporte, dorénavant, ça serait un peu une situation où n'importe qui pourrait vendre n'importe quoi. Bien sûr, moi, je ne suis pas d'accord avec cette interprétation-là, mais j'aimerais voir, de votre côté, comment vous voyez ça. Est-ce que les changements que nous amenons, que ce soit l'intégration des deux chambres à l'AMF, que ce soit la vente par Internet, est-ce que cela, à votre avis, constitue une espèce de relâchement où n'importe qui ferait n'importe quoi ou est-ce que vous voyez ça comme étant... Enfin, comment vous voyez ça? C'est un peu ça, ma question.

Mme Duhaime (Lyne) : Bien, en fait, nous sommes heureux que vous posiez la question, et on a suivi attentivement les consultations, et, pour être honnêtes, nous sommes un peu étonnés de ces positions. À notre avis, en grande partie, là, pour les raisons qui ont été énoncées par M. Dumas, mais, en fait, le consommateur va être... il y a beaucoup de mesures qui sont prises afin que le consommateur soit mieux protégé qu'il ne l'est aujourd'hui. Et, bon, on a parlé de la bonification des dispositions sur le traitement des plaintes, le nouveau comité consultatif des consommateurs, l'élargissement du fonds d'indemnisation et l'encadrement de la vente par Internet. Ce sont tous des éléments qui visent à mieux protéger le consommateur et qui ne se retrouvent pas dans le cadre législatif et réglementaire actuel.

M. Dumas (Robert) : Pour ce qui est de la vente par Internet, évidemment, on en a entendu parler beaucoup. En fait, il faut voir ça comme un choix additionnel aux choix qui existent actuellement. Nos statistiques, chez nous, c'est que 75 % des clients potentiels veulent faire affaire avec un représentant, ce qui laisse quand même une place pour d'autres formes de distribution comme l'Internet. Il faut voir que les produits qui sont offerts actuellement par Internet, et vraisemblablement pour le futur immédiat et à moyen terme, sont des produits très simples. On a fait référence dans certaines discussions à des assurances vie participatives. Ce ne sera pas, jusqu'à preuve du contraire, disponible par Internet étant donné la complexité. Alors, il va falloir...

Évidemment, on a aussi à coeur que le produit qui sera acheté va correspondre aux besoins de l'individu, et pour ça, dans certains cas, il faut vraiment avoir un représentant. Alors, il va falloir diriger les produits qui sont disponibles vers l'Internet vers les plus simples. Ceci étant dit, à tout moment durant la session ou après la session d'achat, le consommateur potentiel aura accès à un représentant. J'ai entendu, dans les minutes qui ont précédé : Quel type de représentant? Notre expérience : dans les questions qui sont posées, sont souvent pas sur les produits, mais plutôt sur des détails, sur l'utilisation de l'outil.

Alors, il faut voir qu'il y a deux besoins d'information, l'un qui n'est pas relié aux produits, mais l'un qui est plutôt l'outil. Alors, dans ce cas-là, il y aura deux formules ou deux types de représentation qui seront disponibles, celle qui sera très générale et une représentation qui va être plus spécifique aux besoins du participant et qui va être offert par un représentant certifié.

• (16 h 20) •

M. Leitão : C'est ça aussi... Et je pense que c'est aussi important de noter que les compagnies qui vont pouvoir offrir des produits sur Internet doivent d'abord être enregistrées au Québec, donc d'être présentes ici et d'être autorisées par l'autorité pour le faire, et les personnes qui travaillent doivent aussi être certifiées par l'Internet. Donc, ce n'est pas une question où n'importe qui viendrait de n'importe quel pays, pourrait offrir quelque chose et puis disparaître dans la brume. Ce n'est pas ça.

M. Dumas (Robert) : Et c'est le bon côté d'encadrer cette possibilité-là actuellement, parce qu'elle existe actuellement sans être encadrée. Alors, il y a un réel besoin pour un encadrement.

M. Leitão : Merci. J'aimerais aussi vous entendre un peu sur... Vous avez, Mme Duhaime, vous avez abordé ça, mais très brièvement. Et je pense qu'au Québec, ceux qui suivent nos travaux, peut-être que ce serait intéressant de constater l'ampleur de l'industrie de l'assurance. Vous avez mentionné que vous employez un certain nombre... quelques milliers de personnes, mais peut-être vous pourriez me parler un peu plus du fait que l'industrie au Québec est quand même très présente, relativement grande, surtout ici, même à Québec. C'est une grappe économique de grande importance. Vous utilisez beaucoup de technologies, donc l'effet positif sur l'économie d'une telle industrie, je pense que ce serait intéressant d'y voir un peu, parce que des fois, malheureusement, il me semble, quand on parle d'assurance, on a tendance à penser que c'est quelque chose de loin. Les compagnies d'assurance, c'est des êtres qui flottent un petit peu loin de nous, mais en fin de compte, au Québec, nous avons une industrie qui est très bien développée et qui a des effets multiplicateurs très importants.

Mme Duhaime (Lyne) : Oui, effectivement. En fait, je vous réfère aux pages 6 et 7, en fait, de notre mémoire, où on fait bien état de l'apport financier des sociétés d'assurance de personnes au Québec. Comme je vous l'ai indiqué, on emploie près de 31 000 personnes, Québécois et Québécoises, et nous avons versé... Les membres ont versé 1,7 milliard de dollars en contributions fiscales en 2016. Et, dans la région de Québec, évidemment, toutes les régions sont importantes, mais dans la région de Québec, on réfère souvent à un hub, comme on retrouve à l'extérieur du Québec et dans la région de Waterloo, principalement en raison, là, de l'Université Laval, qui est une pépinière d'actuaires, et donc nous avons plusieurs sociétés d'assurance d'importance dans la région de Québec même, et ça, sans compter évidemment la présence partout au Québec des assureurs.

M. Leitão : Merci. Oui, c'est important de remarquer ça. Une autre question qu'on a aussi un peu abordée ici dans nos échanges, mais peut-être que ce serait intéressant de parler un peu plus sur ça, c'est la distribution ou la vente directe. Parce que souvent, on a tendance à mentionner que les produits d'assurance sont tellement, tellement complexes que la seule façon de s'assurer que le public est bien protégé, c'est si on passe par un intermédiaire, un courtier, qui lui est là pour veiller à la protection du consommateur, pour bien expliquer les produits et tout ça étant donné leur complexité. Et pourtant, on voit que la vente directe, c'est quelque chose qui croît rapidement.

Alors, vous, votre industrie, vos membres, vous faites les deux, bien sûr. Comment vous réussissez à conjuguer ces deux modèles d'affaires là?

Mme Duhaime (Lyne) : Bien, en fait, il y a deux éléments. Il y a la vente directe, il y a la vente sans représentant, qui sont deux formes de vente sans un intermédiaire, enfin, certifié.

Pour ce qui est de la vente directe, de notre compréhension du projet de loi est que c'est... finalement, que les obligations sont les mêmes. Et que ce soit une vente qui se fasse directement de l'assureur au client ou que ce soit une vente qui se fasse par le biais d'un conseiller, les obligations demeurent les mêmes. Donc, la personne qui veut acheter directement de l'assureur et qui a besoin de conseils devra avoir les mêmes conseils ou le même niveau de conseils que si elle procédait à l'achat par le biais d'un conseiller. Ça, c'est la première forme de vente directe.

La deuxième, c'est la vente sans représentant, donc la distribution sans représentant, qu'on retrouve... généralement, ce sont des produits d'assurance afférents à des biens ou à des services. Et je sais que certains groupes ont mentionné le fait que le guide de distribution n'apparaissait plus dans la nouvelle mouture de la loi. Je dois vous dire que ça nous a un peu surpris, parce que tout le monde a toujours prétendu que le guide de distribution n'atteignait pas ses objectifs. Alors, c'était un guide qui était long, qui était prescriptif, et finalement le consommateur, souvent, avait de la difficulté à s'y retrouver.

De notre côté, on préfère beaucoup ce que nous retrouvons dans la loi, c'est-à-dire une obligation de résultat, donc, en termes beaucoup plus larges. Donc, la responsabilité, elle est sur l'assureur de s'assurer que la personne a l'information nécessaire. Évidemment, ceci pourra être complété par voie de règlement ou par... de règlement du gouvernement ou de l'AMF, mais on pense qu'on va atteindre beaucoup plus les objectifs de protection du consommateur avec un... finalement, une obligation de résultat et une obligation basée sur le principe, plutôt que d'avoir un guide de distribution très long, très détaillé, très prescriptif, qui souvent ne protège pas mieux le consommateur.

M. Leitão : Très bien, merci beaucoup. Peut-être une dernière question de ma part, parce qu'on en a aussi beaucoup parlé de l'intégration de deux chambres à l'AMF et qui a été décrite par certains comme étant un affaiblissement intolérable de la protection du consommateur. Comment est-ce que vous voyez cet aspect-là du projet de loi?

Le Président (M. Girard) : M. St-Gelais.

M. St-Gelais (Jean) : M. le Président... Oui, cette question-là est pour moi, apparemment.

Alors, écoutez, le projet de loi dans son ensemble est vraiment un projet de loi qui, d'abord et avant tout, le volet le plus important, c'est la protection des consommateurs, c'est clair. Pour le reste, c'est beaucoup de s'adapter aux nouvelles technologies, aux règles internationales, de rendre agile plus notre réglementation globale, qu'elle soit plus fluide. Mais il n'y a rien là-dedans qui facilite beaucoup, beaucoup la vie de l'industrie. Pour nous, là, on va oeuvrer comme avant, mais avec les nouvelles technologies, ça va être plus clair, ça va être simple.

Pour ce qui est des chambres, je vous dirai, les chambres, à mon avis, c'est également, si vous voulez, le statu quo pour ce qui est des consommateurs. Les chambres vont être intégrées à l'AMF, et le même travail qui se fait maintenant chez les chambres va se faire à l'AMF dorénavant. Et l'existence des chambres, leur création, en 2004, faisait l'objet d'un compromis, parce qu'à l'époque, à l'origine, il ne devait pas y avoir de chambres. Il y a eu des discussions avec l'industrie, le gouvernement, à l'époque, a décidé de créer les chambres, puis les chambres ont fait un bon travail pendant cette période-là.

Maintenant, on est sûrement rendus à une autre étape, où c'est plus simple d'avoir un organisme qui regroupe les fonctions de protection du consommateur à un endroit. Actuellement, il peut y avoir du dédoublement de travaux par les chambres, par l'AMF. Ça peut créer de la confusion, des dépenses en double, etc. Les campagnes de publicité qu'on a vues, bien des choses, on voit qu'on n'est pas toujours sur la même longueur d'onde. On le voit bien, et moi, je pense que c'est juste une évolution normale vers une meilleure protection du consommateur, où, à un endroit, l'AMF va avoir un outil de plus que ce qu'il a pour bien protéger les consommateurs. Ça se fait déjà très bien puis ça va être encore mieux dans le futur, et puis ma compréhension également, c'est que le personnel des chambres va être intégré. Il n'y a pas de pertes d'emploi de ce côté-là, il n'y a pas de difficulté, bien que l'objectif du projet de loi n'est pas de protéger les emplois, à mon avis. Si on peut faire mieux puis ça coûte moins cher, tant mieux pour tout le monde.

Mais voilà, vous savez, on a dit, peut-être, je ne veux pas trop m'égarer là-dessus aussi, qu'il y avait... sur la protection du consommateur, c'était épouvantable, parce que le ministre ferait payer peut-être les consommateurs. Moi, je vous dis, vis-à-vis l'industrie, ce serait retiré, l'aspect que les consommateurs ont à payer, puis il n'y a personne qui se plaindrait dans l'industrie. Je pense que l'AMF est capable de mettre des tarifs très bas pour les consommateurs, charger plus cher pour l'industrie, puis, si c'était zéro pour le consommateur, on ne s'en porterait pas plus mal qu'aujourd'hui.

De la même chose, je vous dirais, du côté de l'autre disposition, on a dit : Ce n'est pas écrit, le mot «certifié», là, pour un conseiller certifié, là, quand on a à parler à quelqu'un, vis-à-vis Internet. Puis, si on ajoutait le mot «certifié», il n'y a pas personne qui tomberait en bas de sa chaise non plus, là, de notre côté.

Alors, on veut faire les choses comme on les fait maintenant. On les fait bien, on veut continuer à bien les faire pour les consommateurs. L'intégration des chambres, à mon avis, s'inscrit parfaitement dans le créneau protection du consommateur.

M. Leitão : Très bien.

Mme Duhaime (Lyne) : J'ajouterais que notre... Si je peux me permettre, M. le ministre...

M. Leitão : Certainement.

• (16 h 30) •

Mme Duhaime (Lyne) : ...que mon organisation est une organisation canadienne, et on a tenté... certaines personnes ont tenté de convaincre les parlementaires que l'AMF n'était peut-être pas un régulateur de haut niveau. Et je peux vous assurer que, dans le reste du Canada, on considère l'Autorité des marchés financiers comme étant un régulateur de très, très haut niveau. En fait, les yeux sont souvent tournés vers l'autorité, qui est précurseure. Et donc il n'y a aucune crainte, lorsqu'on parle de nivellement par le bas, et tout ça. Ça ne reflète pas du tout la réalité. On sait que le Canada a déjà un cadre réglementaire du secteur financier, un des meilleurs au monde, et nous avons au Québec un régulateur qui est considéré au Canada comme étant de très haut niveau. Donc, nous n'avons pas d'inquiétude à ce que les activités soient regroupées au sein de l'Autorité des marchés financiers.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant aller du côté de l'opposition officielle, avec le député de Rousseau, pour un bloc de 9 min 30 s.

M. Marceau : O.K. Merci, M. le Président. Madame, messieurs, merci d'être là. Merci pour le mémoire et l'éclairage que vous nous donnez. Sur les produits vendus par Internet, certains ont émis l'hypothèse que des restrictions, disons, plus importantes puissent s'appliquer pour certains produits qui sont plus complexes puis que le pouvoir d'imposer des restrictions soit donné à l'AMF qui pourrait faire ça par règlement, donc qui pourrait dire, mettons : Pour l'assurance voiture, qui est un produit plus standardisé, bien, il y a des règles plus souples, et puis pour des produits plus complexes, ça va être des règles plus sévères. Le fait, donc, de confier ça à l'AMF puis de procéder par règlement, est-ce que ça, c'est quelque chose qui vous convient, que vous trouvez raisonnable?

M. Dumas (Robert) : En fait, les produits sont déjà disponibles par Internet, certains produits. Et, en tant qu'assureur, moi, je serais très heureux d'avoir un organisme qui définisse les paramètres disant : Voici comment les choses doivent être faites pour s'assurer, en tant qu'industrie, que le consommateur est bien traité. Je pense qu'on fait tout ce qui est en notre mesure actuellement pour y arriver, mais, s'il y a des normes plus élevées qu'on juge raisonnables, nous, on est tout à fait d'accord avec ça.

Enfin, encore une fois, quand on fait ces ventes-là, la pire chose qui puisse arriver, c'est que, six mois, deux ans, trois ans ou quatre ans plus tard, le consommateur revienne et dise : Ce n'est pas ça dont j'avais besoin ou ce n'est pas ça que j'avais compris. Alors, s'il y a un mécanisme ou des règlements qui définissent certains paramètres, nous, on serait très heureux, là, de travailler et de les appliquer.

M. Marceau : O.K. Parfait. Et puis, parlant de situation où, par exemple, un produit pourrait ne pas donner satisfaction au client, vous abordez, à la page 16 de votre mémoire, la question... Puis je vous pose cette question parce que vous êtes les mieux placés pour répondre. Le processus, là, de règlement des différends puis l'introduction de la médiation, vous dites ça, à la page 16, que vous accueillez favorablement les dispositions concernant le traitement des plaintes améliorées pour les consommateurs. Est-ce que vous auriez le même accueil favorable, si la médiation prévue, là, dans les articles pertinents, entre autres à 55 de la loi sur les assureurs, si cette médiation était obligatoire et gratuite?

Mme Duhaime (Lyne) : En fait, je vais laisser M. Dumas vous expliquer les processus de gestion des plaintes qui existent déjà à l'heure actuelle. Et, pour cette raison, en raison de tout ce qui existe présentement, nous ne pensons pas que la médiation doit être obligatoire. Comme M. St-Gelais a mentionné, on peut être d'accord avec le fait que, pour le consommateur qui porte plainte, qu'il n'y ait pas de frais. Ça, on n'a pas de problème avec ça. Et on accueille favorablement les nouvelles dispositions sur la médiation. Mais je vais laisser M. Dumas...

M. Marceau : ...

Mme Duhaime (Lyne) : Oui, que ce soit obligatoire...

M. Marceau : C'est l'obligatoire qui porte... O.K.

Mme Duhaime (Lyne) : Oui. Peut-être, M. Dumas...

M. Dumas (Robert) : Juste vous donner le point de départ, où est-ce qu'on en est actuellement quand ces circonstances-là se produisent. Il y a un processus actuellement qui est bien établi. La première chose qu'un consommateur ou un client va faire, c'est qu'il peut aller sur notre site Internet — et là je parle de quelque assureur que ce soit — sur le site Internet, il y a une manière de loger une demande ou une plainte. Cette plainte-là est reçue officiellement, et une copie de la plainte est même envoyée à l'AMF, il y a un registre, alors, il y a un registre de toutes ces plaintes-là.

Assez souvent, ce sont nos gens d'opération qui vont revoir le bien-fondé. Mais il y a surtout un niveau supérieur qui est un ombudsman des compagnies d'assurance qui va regarder de manière gratuite et impartiale la qualité de la plainte et va mener ou suggérer des éléments de solution, s'il y a lieu. Alors, ce processus-là existe déjà et il est gratuit. Et là on parle d'un processus additionnel.

Alors, nous, on est tout à fait à l'aise avec ça. On a déjà, dans nos cadres de résolution de plaintes, un processus, je ne dirai pas de médiation, mais de résolution de problèmes à travers un ombudsman impartial et qui est gratuit. Alors, je pense que, si on décide d'aller à un niveau supérieur, on pourrait avoir un frais minimum.

M. Marceau : O.K. Merci pour votre réponse. O.K. Il y a un nouveau... enfin, un nouveau produit... une nouvelle possibilité d'assurance pair à pair, là, les unions réciproques, que... Ça a été introduit dans... c'est dans le projet de loi. Certains, pas hier, mais en décembre, lorsqu'on avait eu la première journée de consultations, avaient qualifié l'encadrement prévu dans la loi d'insuffisant. On avait dit : Ça pourrait créer des produits, ça pourrait créer des mécanismes d'assurance qui ne sont pas aussi... qui n'offrent pas la même protection que ce qui est donné par les grands assureurs, là, que vous êtes. Juste pour me dire c'est quoi, votre opinion.

Mme Duhaime (Lyne) : En fait, l'association qui a fait ces représentations, le BAC, est notre association soeur et, donc, qui représente les assureurs de dommages, alors que l'ACCAP représente les assureurs de personnes. Et, dans le projet de loi actuel, les unions réciproques ne s'appliquent qu'aux assureurs de dommages. Donc, nous ne sommes pas concernés pour le moment par ces dispositions.

M. Marceau : O.K. Puis il n'y a pas de monde prévisible dans lequel ce genre de produit là va exister ou bien... Parce que, là...

Mme Duhaime (Lyne) : Oui. Bien, quand on a vu la disposition, quand on a vu «union réciproque» en feuilletant le projet de loi, lorsqu'il était encore tout chaud, ça a suscité un peu d'inquiétude parce que c'est un sujet qui se discute beaucoup, le «peer-to-peer insurance», donc c'est-à-dire des groupes qui se forment, généralement par le biais de plateformes technologiques, pour s'autoassurer. Dans le domaine de l'assurance de personnes, c'est certain que, si cela devait être permis, il faudrait que ce soit très, très bien encadré.

Vous savez, les assureurs doivent satisfaire des exigences de solvabilité qui sont supervisées par l'Autorité des marchés financiers, des exigences très, très élevées. Donc, on peut penser que... les problèmes que pourraient soulever les gens qui s'autoassurent pour leur vie, leur invalidité, comment vont-ils faire pour avoir les fonds nécessaires... Donc, c'est certain que, si, un jour, on en arrivait à vouloir permettre ce type d'assurance dans le domaine de l'assurance de personnes, à ce moment-là, nous aurions évidemment des points à faire valoir.

M. Dumas (Robert) : Il y a des exemples, si je peux me permettre, actuellement, aux États-Unis, de situations comme ça, des groupes qui se sont créés, et, aussitôt qu'il y a une réclamation importante, les groupes se dissolvent. Alors, ça prend vraiment des normes de solvabilité comme celles auxquelles nous sommes assujettis pour pouvoir justement assurer la pérennité de la protection.

M. Marceau : O.K. Peut-être une dernière question dans mon... Merci de la réponse. Dernière question, sur l'abolition des chambres. Est-ce que vous avez une mesure des coûts que ça impose, le système actuel, avec la chambre puis l'autorité? Est-ce que vous avez tenté de mesurer à quel point ça vous imposait des coûts? Parce qu'on entend, là, qu'il y a des coûts, puis on peut imaginer que ce soit le cas. Mais est-ce que vous avez tenté de mesurer ça?

Le Président (M. Girard) : M. St-Gelais.

M. St-Gelais (Jean) : M. le Président, oui. La réponse à ça, c'est non. On n'a pas tenté de le mesurer. L'objectif, je pense, du projet de loi n'est pas de... Là, je pense que vous dites : Le fait qu'il y ait des coûts et le fait qu'on en ait deux, avec un, ce serait moins cher?

M. Marceau : Oui, c'est ça parce que... C'est ça.

M. St-Gelais (Jean) : Exactement. Mais je ne pense pas que c'est l'objectif du projet de loi de réduire les coûts. Je pense qu'on intègre le personnel de la chambre. Sur le plan de l'efficacité...

M. Marceau : ...à l'interne, excusez-moi.

M. St-Gelais (Jean) : À l'interne?

M. Marceau : À l'interne, pour vous, là, le fait qu'il y ait deux personnes avec... deux intervenants à qui vous...

M. St-Gelais (Jean) : Pour nous? Ah! pour nos organisations?

M. Marceau : Oui, c'est ça.

M. St-Gelais (Jean) : Ah! on n'a pas ces évaluations-là. C'est sûr que pour nous, quand il faut qu'on s'adresse à la chambre ou à l'AMF, on a deux portes à aller cogner. Des fois, on se demande : Est-ce que c'est à la chambre?, est-ce que c'est à l'AMF? Mais je ne dis pas que... Ce n'est pas un fardeau, là, énorme, là, qu'il y ait les deux chambres, là. On ne veut pas non plus monter un bateau avec ça, là, puis dire : C'est épouvantable, il faut que les chambres disparaissent à cause de ça. Mais ce serait beaucoup plus simple de savoir que c'est à un endroit, c'est là que ça se passe, que ce soit un cabinet, que ce soit un représentant, c'est au même endroit. Le même dossier peut être traité à deux endroits actuellement. C'est sûr que, sur le plan de la simplicité, ce serait plus simple, et on s'adresse à un endroit, un centre de décision, donc on ne peut pas attendre deux réponses différentes, des fois, sur le même dossier.

Le Président (M. Girard) : Ça va?

M. Marceau : Parfait. C'est bon. Merci, M. le Président. Merci à vous.

• (16 h 40) •

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer au deuxième groupe d'opposition, avec le député de Granby, pour une période d'échange de 6 min 30 s.

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Messieurs dames, bienvenue. Je veux juste revenir... M. St-Gelais, vous avez dit tantôt, puis c'est un débat qu'on a eu dans les dernières journées, sur la personne physique, vous avez dit : On n'aurait pas de problème à ce qu'on mette le libellé «certifié». Je pense que tout le monde est... vous êtes tous un peu d'accord avec ça. Parce que celui ou celle qui parle à une... pas parle, mais qui va souscrire à un contrat par Internet, souhaiterait parler par la suite à un représentant certifié. On s'entend là-dessus. C'est ce que vous avez dit tantôt. Tout le monde est à l'aise?

M. St-Gelais (Jean) : Moi, je n'ai pas de difficulté avec ça. Écoutez, on n'a pas fait un grand débat à l'ACCAP là-dessus, mais, la prochaine fois, ils ne m'inviteront plus s'ils ne sont pas d'accord. Mais je pense que...

M. Bonnardel : Non, non, mais c'est quand même... O.K. Vous êtes tous d'accord. Parce que c'est quand même important, là, qu'on... Parce que vous marquez quand même «personne physique», ici, à la page 13 de votre mémoire, là. C'est pour ça.

Mme Duhaime (Lyne) : Oui. Mais pourquoi la personne physique? Nous, on comprend pourquoi c'est dans le projet de loi. Parce que, si la personne, elle demande pour savoir... elle dit : J'essaie de me loguer, ça ne fonctionne pas, j'ai oublié mon mot de passe, ça se peut que cette personne-là n'ait pas besoin d'être certifiée. Donc, c'est pour ça que, dans la façon qu'ils l'ont libellé, ils ont mis «personne physique». À partir du moment où la personne est sur l'Internet, elle veut des conseils, cette personne doit être un représentant certifié.

M. Bonnardel : On s'entend.

M. Dumas (Robert) : C'est ça, exactement. Il y a deux situations, puis c'est pour ça, tout à l'heure, là, que j'ai voulu vraiment faire la différence entre c'est quoi, mon mot de passe, et c'est quoi, une garantie 10 ans.

M. Bonnardel : O.K. Je veux parler des produits en ligne que vous pouvez offrir. Vous avez dit tantôt, M. Dumas : 75 % de nos gens veulent absolument parler à un conseiller. Il y a des gens qui nous disaient hier : Une assurance vie, la plus facile, un temporaire 10 ans, c'est à peu près 35 pages. Est-ce qu'il y a des produits présentement que vous offrez en ligne, où un consommateur pourrait se dire, en bonne et due forme : Je suis capable de passer toutes les pages puis je m'assure pour un temporaire, 10 ans, sans avoir parlé à un conseiller? Est-ce que c'est possible de faire ça présentement chez vous?

M. Dumas (Robert) : Oui, c'est possible actuellement d'aller sur des sites... je vais parler du nôtre, là, par exemple, où on offre ce produit-là auquel vous faites référence. Alors, avec une série de questions minimes — habituellement, c'est trois, quatre, cinq questions, à part votre adresse, là, et ces choses-là, là — vous pouvez faire une soumission, demander une soumission pour une police d'assurance garantie 10 ans. Vous avez la possibilité évidemment de parler à un représentant certifié, pendant l'exercice, et vous soumettez votre demande, et, à l'intérieur d'un délai qui est prescrit, là, je ne me souviens pas, c'est un nombre de jours, vous recevez une réponse, et à ce moment-là vous recevez un contrat.

Alors, évidemment, les contrats, il y a des normes légales qu'on doit rencontrer, et à ce moment-là, encore, la personne peut décider d'aller voir un représentant certifié. Alors, si elle n'est pas à l'aise avec le contrat, nous, on va faciliter le transfert vers un représentant certifié.

M. Bonnardel : Est-ce que c'est vrai que c'est pas mal le seul contrat, temporaire, 10 ans, qu'on pourrait obtenir sans parler à un représentant certifié ou il y a d'autres choses qui...

M. Dumas (Robert) : Non, non, il y en a d'autres. Il y a des maladies graves, il y a décès et mort accidentelle. Vous pouvez avoir accès à un représentant certifié, mais vous pouvez aller sur l'Internet et l'acheter sans avoir à parler à un représentant certifié, ça, c'est certain.

Je vais prendre... l'analogie n'est pas parfaite, là, loin de là, mais il y a des gens qui décident d'acheter des autos par Internet, il y en a d'autres qui veulent parler au concessionnaire. Alors, c'est un peu... C'est une possibilité additionnelle. Je ne dis pas qu'on la favorise, mais elle est là, elle est disponible.

M. Bonnardel : Dans la distribution sans représentant, à la page 14. J'achète une voiture, je suis chez un concessionnaire, j'achète une assurance vie, ma dernière voiture, mettons, puis là la loi propose l'abandon du guide de distribution mais impose plutôt à l'assureur l'obligation de fournir au consommateur, en temps opportun, toute l'information nécessaire. Ça va être défini avec l'AMF, ça, le temps opportun, ou c'est... C'est quoi, le temps opportun, pour vous? C'est une question peut-être banale, là, mais...

M. Dumas (Robert) : Non, non, ce n'est pas banal. Mais je pense que l'AMF serait une bonne place pour commencer, qui peut définir ces barèmes-là, ces paramètres-là.

Ce qui est réconfortant aussi, dans ce projet de loi là, c'est les comités consultatifs des consommateurs, où ce type de question là pourrait être soulevée, et par la suite, à l'intérieur de la réglementation, on pourra ajuster le tir.

M. Bonnardel : Une dernière... Oui?

M. St-Gelais (Jean) : Si vous me permettez, M. le Président. Moi, je vous dis, la distribution sans représentant, l'abolition des guides, son remplacement par toute l'information pertinente au moment opportun, c'est un plus pour les consommateurs, c'est certain. Parce qu'en réglementation financière on n'arrête pas de dire à tout le monde : Vous devez communiquer avec les consommateurs en langage simple, langage clair, langage simple. Les contrats sont complexes, tout est complexe.

Là, ce que l'AMF dit : Donnez l'information essentielle en temps opportun aux consommateurs. Il va falloir aller montrer aux consommateurs les trois, ou quatre, ou cinq grands éléments qui sont importants dans le contrat, puis ce n'est que ça qui va être exigible par l'AMF. Et puis, en discussion avec eux, je présume, en consultation, les règlements qui vont suivre vont préciser c'est quoi. Mais c'est exactement en lien à présenter au consommateur ce qui est le plus important, simplement, clairement pour lui.

Les guides de distribution, quand je suis arrivé à l'AMF, il y a je ne sais plus combien d'années, il y avait, excusez l'expression, un «backlog» tellement important de vérifications, on n'arrivait jamais à toutes les vérifier. Il fallait tous les vérifier un par un. On a arrêté de les vérifier un par un, on a mis le fardeau sur l'assureur. Maintenant, l'assureur a le fardeau. L'AMF peut faire corriger le tir s'ils ne sont pas bons. Mais une information plus simple, plus claire, à mon avis, ça peut juste être un plus pour le consommateur.

M. Bonnardel : Dernière question. Dans la...

Le Président (M. Girard) : 50 secondes.

M. Bonnardel : Bon, la gestion des plaintes. Le différend ou les différends qu'il pourrait y avoir entre un assureur, mettons, et moi, la médiation, et tout ça, il y aura des coûts. L'Option Consommateurs nous disait que peut-être on pourrait prendre le modèle télécom, où les assureurs pourraient mettre... je pose la question, pourraient mettre dans un «pot», excusez de le dire ainsi, le fait que le... David contre Goliath, on va se le dire, là, un François contre une Sun Life, ou peu importe, là, ce ne serait pas nécessairement simple. Comment vous voyez ça? C'est-u quelque chose que...

M. Dumas (Robert) : Bien, il y a déjà moyen actuellement, à l'intérieur des procédures actuelles, d'avoir accès à un ombudsman. Et cet accès-là est gratuit. Et c'est une aide impartiale qui va suggérer une résolution. Alors, c'est déjà disponible, là, actuellement, dans nos procédures. Là, ce qu'on parle, c'est une nouvelle procédure au-delà de ce qu'on offre déjà. Nous, on pense qu'il y a déjà une procédure gratuite qui est disponible actuellement. Évidemment, la crainte que l'on a, quand il y a quelque chose de gratuit, c'est que les gens s'en prévalent plus qu'il ne le faut. Pourquoi ne pas tenter ma chance? C'est ça, le danger, un danger d'excès.

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup. Donc, M. St-Gelais, M. Dumas, Mme Duhaime, merci pour votre contribution à nos travaux de la Commission des finances publiques.

Je suspends quelques minutes pour permettre à l'Autorité des marchés financiers de pouvoir prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 47)

(Reprise à 16 h 52)

Le Président (M. Girard) : Donc, nous allons reprendre nos travaux pour le dernier groupe de cette audition. Nous recevons l'Autorité des marchés financiers. Donc, M. Morisset, je vous invite à présenter les gens qui vous accompagnent et nous faire la présentation de 10 minutes de votre mémoire. Par la suite suivront les échanges avec les différents groupes parlementaires.

Autorité des marchés financiers (AMF) 

M. Morisset (Louis) : Parfait. Bien, merci, M. le Président. Donc, mesdames messieurs, membres de la commission, bonjour. Alors, merci de nous accueillir aujourd'hui, évidemment, à cette consultation particulière. Et c'est un plaisir pour nous d'être avec vous aujourd'hui et d'échanger au sujet de cet important projet de loi, et notamment, évidemment, sur ses impacts sur l'Autorité des marchés financiers.

Donc, j'ai avec moi aujourd'hui deux de mes collègues : à ma droite, Patrick Déry, surintendant de l'encadrement de la solvabilité, et, à ma gauche, mon collègue Philippe Lebel, qui est directeur général des affaires juridique.

Le projet de loi n° 141 propose une mise à niveau de plusieurs des lois administrées par l'autorité afin de permettre aux individus et aux entreprises oeuvrant au sein du secteur financier québécois d'évoluer dans un environnement législatif et réglementaire actualisé, moderne et amélioré, en plus d'offrir une protection accrue aux consommateurs de produits et services financiers.

Un projet de loi qui optimise notamment le rôle que joue l'autorité au coeur de l'écosystème financier québécois fait en sorte que ce qui fonctionne bien aujourd'hui continuera de bien fonctionner et mieux encore, car il élimine la confusion qui règne depuis longtemps auprès des consommateurs. Ceux-ci auront dorénavant un interlocuteur unique auprès duquel ils pourront obtenir les réponses à leurs questions et l'ensemble des services auxquels ils ont droit en appelant à un seul numéro et en se présentant à une seule adresse.

Les rôles seront dorénavant clairs, les structures simplifiées, la cohérence des actions beaucoup plus grandes, tout comme l'efficacité des mécanismes de protection et d'assistance. Des gains importants sont également envisagés en matière d'efficacité administrative et de communication, tant avec les consommateurs qu'avec les représentants de l'industrie. Il sera entre autres dorénavant possible de consolider les moyens de sensibilisation, au lieu qu'ils soient divisés entre trois organisations, comme c'est le cas actuellement, et qu'ils alimentent la confusion auprès des consommateurs. Cela renforcera, d'ailleurs, la mission plus large de protection du public qui est dévolue à l'autorité depuis sa création en 2004.

La création d'un comité consultatif des consommateurs et utilisateurs de produits et services financiers est un autre ajout important que propose le projet de loi. Ce comité sera composé de personnes avisées qui auront pour mandat de faire valoir leurs opinions auprès de l'autorité. Ils auront notamment à commenter la réglementation et à faire des recommandations sur tout sujet qui interpelle les consommateurs et utilisateurs de produits et services financiers.

L'élargissement du champ d'application du Fonds d'indemnisation des services financiers aux victimes d'un représentant certifié, sans égard à la nature du produit financier offert, constitue aussi une avancée majeure. Les voeux des groupes de défense des consommateurs, de même que ceux de l'autorité, sont ainsi exaucés. Avec les modifications au Fonds d'indemnisation ainsi prévues, le Québec sera l'une des juridictions où le consommateur sera le mieux protégé en cas de fraude, de manoeuvre dolosive ou de détournement de fonds.

Le projet de loi prévoit également des mesures antireprésailles qui viennent compléter un volet crucial du programme de dénonciation mis en place par l'autorité en juin 2016. Ces nouvelles mesures offriront une protection accrue aux dénonciateurs, en plus de renforcer l'efficacité des mesures déjà mises en place.

Des appréhensions légitimes ont été soulevées concernant l'ouverture à la distribution de produits d'assurance par Internet. Il importe toutefois de rappeler ici que cette réalité est déjà à nos portes, sans encadrement spécifique, et que le projet de loi prévoit être complété par une réglementation développée par l'autorité et approuvée par le ministre des Finances. Un cadre de protection robuste et des balises claires seront donc bien mis en place.

Les consommateurs qui feront le choix d'utiliser le canal numérique devront être aussi bien protégés lors de l'achat d'un produit d'assurance par Internet que par le biais d'un représentant en chair et en os. Rappelons par ailleurs que les consommateurs ne seront jamais forcés de se procurer une assurance par Internet. C'est une option qui s'ajoute à leurs choix, sans plus. Les consommateurs d'aujourd'hui, et encore davantage les consommateurs de demain, souhaitent ce genre d'accès pour se procurer des produits et services financiers. Il faudra faire en sorte que cet accès offre une protection équivalente à celle offerte via les moyens de distribution traditionnels.

Le projet de loi prévoit clairement le maintien des activités de la Chambre de la sécurité financière et de la Chambre d'assurance de dommages au sein de l'autorité. Ainsi, les obligations des représentants envers les consommateurs ne seraient d'aucune manière diminuées. L'autorité possède déjà les pouvoirs d'agir à l'égard des représentants. L'intégration des volets déontologie et formation continue sont donc en continuité directe avec nos activités d'enquête et de formation à l'entrée en carrière. Le principe de justice par les pairs sera également maintenu, et la gouvernance sera même renforcée. Les fonctions des comités de discipline actuels seront assumées par le Tribunal administratif des marchés financiers, assisté d'assesseurs qui seront tous des représentants certifiés pour le conseiller sur des questions de nature professionnelle.

Rappelons qu'actuellement la conformité des représentants ne repose pas uniquement sur le système disciplinaire des chambres. L'autorité exerce déjà des pouvoirs de sanction et d'intervention à l'égard des cabinets et des représentants. Quant au Tribunal administratif des marchés financiers, il est déjà compétent et spécialisé en cette matière.

Un autre élément non négligeable du projet de loi est son impact très positif sur la capacité de l'autorité de se mesurer, au niveau de son encadrement, à ses pairs nationaux et internationaux. Les modifications législatives proposées nous permettront en effet d'exercer de nouveaux pouvoirs de surveillance et de résolution à l'endroit du Mouvement Desjardins, une institution financière d'importance systémique intérieure, à l'instar des six grandes banques canadiennes. L'encadrement québécois sera ainsi davantage conforme aux meilleures pratiques internationales développées par le Comité de Bâle pour les institutions bancaires traditionnelles, adapté toutefois au modèle coopératif que présente le Mouvement Desjardins.

De ce point de vue, l'autorité fait d'ailleurs figure de pionnier dans l'encadrement de coopératives financières, et de nombreuses juridictions dans le monde s'intéressent aux outils et aux approches que nous avons développés pour encadrer de telles entreprises.

Dans le contexte où le Fonds monétaire international évaluera à nouveau la qualité de l'encadrement du secteur financier canadien en 2018 et que, dans un tel exercice d'évaluation, l'autorité est comparée aux organismes fédéraux que sont le Bureau du surintendant des institutions financières et la Société d'assurance-dépôts du Canada, qui font le même travail que nous à l'égard des banques à charte fédérales, il est très important que nous puissions disposer des nouveaux outils et des nouveaux moyens que propose le projet de loi et ainsi continuer de contribuer à la confiance des consommateurs et à la stabilité économique et financière du Québec.

Donc, en conclusion, l'industrie a beaucoup évolué depuis la création du modèle d'encadrement existant au Québec. Internet a changé drastiquement nos attentes et nos habitudes de consommation. Et que dire des «fintech», ces innovations technologiques liées à la finance, qui émergent à vitesse grand V? Les défis d'aujourd'hui et de demain nécessitent qu'on optimise et qu'on renforce les structures en place et qu'on élimine les chevauchements et la confusion, nuisibles aux consommateurs de produits et services financiers.

L'industrie et ses intervenants veulent améliorer leur compétitivité, pouvoir bénéficier des diverses facettes de l'évolution des modèles d'affaires et offrir de nouvelles possibilités aux consommateurs. Ces mêmes consommateurs veulent, en revanche, une plus grande diversité de l'offre, une concurrence accrue et un environnement réglementaire assurant une protection équivalente à celle offerte dans le cadre de l'utilisation de modes de distribution traditionnels.

 Quant à nous, qui avons pour mission première la protection du public et qui jouons un rôle central au coeur de l'écosystème financier québécois, nous pourrons, notamment par la consolidation de notre modèle de régulateur intégré, remplir notre mission encore plus efficacement, tout en stimulant la confiance dans un secteur financier sain et dynamique au bénéfice de tous les Québécois.

Alors, nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions et pour vous accompagner dans votre important travail législatif, évidemment, aujourd'hui, mais de même que lors des étapes ultérieures menant à l'étude et à l'adoption de ce projet de loi. Alors, merci de votre attention.

• (17 heures) •

Le Président (M. Girard) : Merci beaucoup, M. Morisset. Merci aux représentants de l'Autorité des marchés financiers.

Maintenant, nous allons procéder à la période d'échange en débutant par le côté du gouvernement, avec M. le ministre, pour une période de 16 minutes.

M. Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, messieurs, merci beaucoup d'être là. Les derniers, mais certainement pas les moindres. Et je pense que ça va être très utile pour nous de terminer nos consultations avec l'AMF. On a beaucoup parlé de vous — en bien, je vous rassure — mais c'est important d'avoir la possibilité maintenant d'échanger un peu avec vous.

J'aimerais aussi, avant vraiment de commencer... de saluer le fait que vous avez mentionné dans vos propos la surveillance de Desjardins et le rôle que l'AMF joue dans la surveillance d'une coopérative financière d'une telle ampleur. Et donc le modèle québécois qui est utilisé, et qui est regardé de loin comme étant un modèle à suivre, le rôle de l'AMF est très important dans ce domaine-là. Et une des parties vraiment très importantes du projet de loi n° 141, c'est l'encadrement des coopératives financières, Desjardins en particulier. Donc, c'est important de parler de ça.

Mais, avec vous, j'aimerais commencer par parler de ce qui a été discuté longuement ici, en commission, aujourd'hui, hier, en décembre aussi, c'est la question de l'intégration des chambres à l'AMF. Je dis bien intégration parce qu'on a eu des questions sémantiques : abolition, pas abolition. Vraiment, on parle d'intégration de cette mission-là à l'AMF, et ça a été dit que cette intégration-là allait affaiblir de façon importante la protection du public. Je pense que vous n'êtes pas d'accord avec ça. J'aimerais avoir votre vue là-dessus.

M. Morisset (Louis) : Bien, merci, M. le ministre. Évidemment, non, nous ne sommes pas d'accord avec ces affirmations. En fait, de notre perspective, clairement, le transfert ou le maintien, si on veut... l'intégration des activités des chambres au sein du régulateur qu'est l'Autorité des marchés financiers va plutôt largement renforcer la protection du public au Québec plutôt que de la diminuer. Je pense qu'il y a une réalité qui se doit d'être mentionnée, d'être dite. On a, au Québec, de longue date... Évidemment, on a trois organismes qui sont créés par la loi, l'autorité et les deux chambres, qui sont donc des organismes d'autoréglementation créés par la loi, ce qui est un modèle, en soi, incongru. Je pense, vous avez eu les gens de l'OCRCVM aujourd'hui, un peu plus tôt, qui ont expliqué quel est le modèle usuel d'autoréglementation lorsque l'industrie s'organise et demande au régulateur, ultimement, le mandat d'agir à certains égards et d'être l'extension du régulateur dans certaines sphères.

Donc, on a, au Québec, trois organismes qui ont des missions qui se veulent complémentaires, mais qui, en réalité, créent du dédoublement, créent du chevauchement de rôles qui, nous estimons, est parfois nuisible et crée beaucoup de confusion. Et je pense que la confusion ne peut pas être plus exacerbée qu'elle ne l'est en ce moment, par ailleurs, notamment en raison des campagnes de publicité à grand déploiement, là, que déploie la CSF. Mais de réunir les missions de ces trois organismes-là au sein de l'autorité va évidemment renforcer le rôle de régulateur intégré, ce qui est très positif. Je pense que le régulateur intégré est un modèle efficace qui s'est bien développé au Québec, qui a pris du temps à se développer, là. On oublie que l'autorité parfois vient de la création... donc, de la fusion de cinq organismes en 2004. Ça a pris du temps avant que ce modèle-là se déploie de façon efficace, mais il l'est aujourd'hui. Et donc de renforcer le modèle de l'autorité et de réunir ces missions-là au sein d'un seul et même organisme vont permettre de mieux protéger le consommateur, de notre perspective, et de mieux assister également le consommateur. Et là-dessus je peux peut-être vous donner cinq illustrations qui m'apparaissent assez éloquentes.

D'abord, je pense que d'avoir un interlocuteur unique est très important. Aujourd'hui, il est vrai que des consommateurs ne savent pas toujours à quel saint se vouer. Et la réalité, c'est que souvent ils vont s'adresser à nous, et parfois, évidemment, leurs plaintes ou leurs doléances s'adressent davantage ou devraient être traitées davantage par les chambres. Mais d'avoir un seul endroit où obtenir réponse à ses questions, d'avoir un seul endroit où loger des plaintes est, je pense, de façon importante, dans l'intérêt du consommateur. Ça va permettre évidemment d'uniformiser les mécanismes d'assistance puis d'avoir une meilleure cohérence d'action et ça va éviter de se renvoyer l'ascenseur lorsque le consommateur s'est adressé aux chambres et aurait dû s'adresser à l'AMF et inversement.

Deuxièmement, je pense que ça va générer des efficacités dans les services que l'on offre aux consommateurs. Et je pense, par exemple, aux demandes au Fonds d'indemnisation des services financiers. On le sait, j'étais ici avec des collègues en novembre pour discuter, dans un autre contexte, du fonds d'indemnisation, il y a des délais souvent longs pour traiter des demandes au fonds d'indemnisation. Il y a des délais qui sont inhérents au fait qu'on a besoin d'information souvent d'institutions financières, mais même des chambres, également des chambres. Alors, il y a de l'échange d'information. Lorsqu'un consommateur s'adresse au fonds d'indemnisation, on a souvent besoin d'information, et cette information-là, bien, elle nous est acheminée, dans plusieurs cas, par les chambres. Les chambres agissent avec célérité, de la meilleure façon possible. Ce n'est pas une critique. Mais la réalité, c'est que ça entraîne des délais inhérents qui ralentissent le processus. Alors, d'avoir ces activités-là au sein de l'autorité va permettre d'accélérer, je pense, certains de ces processus et d'offrir des services plus efficaces.

Le troisième élément qui m'apparaît très important, c'est le fait qu'il n'y aura que l'autorité qui va mener les enquêtes va permettre d'éviter d'astreindre les consommateurs à deux processus qui sont souvent en parallèle, des processus qui sont évidemment difficiles pour les consommateurs. Les consommateurs ont à fournir des informations, à déballer leur histoire bien souvent à l'autorité, qui a juridiction en matière... évidemment, là, à l'égard des cabinets, des dirigeants et des représentants. Mais, quand il y a des enjeux de nature purement disciplinaire, bien, le syndic de la chambre a également juridiction. Alors, il y a des consommateurs qui se retrouvent à subir, en quelque sorte, deux processus qui sont, pour ceux qui ont pu le vivre, pénibles. Donc, la réalité d'aller témoigner devant le tribunal, d'aller témoigner dans le cadre d'une audition du comité de discipline sont des processus éprouvants pour les consommateurs. Alors, le fait de réunir ces processus-là, je pense, va engendrer, pour les consommateurs, énormément de bénéfices.

Le quatrième point que je me permettrais d'ajouter, c'est que, dans les cas où il y a des consommateurs qui sont victimes de fraude ou de détournement de fonds, on va pouvoir mieux sécuriser qu'on ne peut le faire aujourd'hui, en tout cas, de façon plus efficace et plus rapide, les avoirs des consommateurs qui sont malheureusement victimes. La réalité, c'est que, dans l'exercice — encore une fois de bonne foi — du mandat des chambres, qui se retrouvent parfois en concurrence avec le mandat de l'autorité ou dans les gestes que peut poser l'autorité, bien, malheureusement, des fois, les gestes des chambres vont interférer dans la capacité de l'autorité d'interagir elle-même et de sécuriser de façon efficace et rapide des actifs. On a vécu ces situations-là. Évidemment, on les a adressées avec les chambres. Mais de réunir ces processus-là au sein d'un seul organisme va permettre de protéger davantage les consommateurs.

Puis le dernier point que je me permettrais d'ajouter, c'est la consolidation des activités de sensibilisation des consommateurs. Je pense qu'il est extrêmement important de sensibiliser, d'éduquer les consommateurs. Mais aujourd'hui on a trois organismes qui tentent de jouer le rôle, et on le voit encore une fois comment la chambre le fait depuis un certain temps, la Chambre de la sécurité financière, j'entends. Je pense que de consolider cette capacité au sein d'un seul organisme, d'avoir des messages qui sont puissants, qui informent, qui éduquent le consommateur, mais qui sont cohérents, va entraîner des bénéfices importants.

Alors, de notre perspective, et ça, c'est basé sur notre expérience qui est personnelle, si on veut, à l'autorité, dans les interactions qui existent aujourd'hui avec les chambres, je pense qu'il y a beaucoup de gains à générer pour le consommateur.

• (17 h 10) •

M. Leitão : Très bien. Merci. Oui, en effet, je partage, bien sûr, votre opinion parce que ce que j'avais trouvé un peu difficile à comprendre, c'était la critique que certains amenaient en disant que... bon, ceux qui parlaient d'un affaiblissement de la protection du consommateur, parce que, bon, avant la CSF s'occupait de moi, et puis maintenant, voilà, c'est le néant, il n'y a personne qui s'occupe de moi. C'est comme si l'AMF n'était pas capable et n'était pas habituée à faire ce travail-là. Donc, je pense, c'est important qu'on rappelle à tout le monde que l'AMF fait ça déjà depuis longtemps.

M. Morisset (Louis) : Bien, tout à fait. Puis je pense que ce qui est important, peut-être, de mentionner, c'est que les activités qui sont, donc, conduites au sein de la CSN... Donc, l'encadrement rigoureux des représentants va être intégré, va être maintenu au sein de l'AMF, évidemment, avec toute sa célérité. Je pense qu'on a entendu, au cours des derniers jours, le fait que cet encadrement-là était célère. Il va être maintenu. Je pense qu'il est important de dire que l'autorité réglemente, à bien des égards, déjà les représentants. Ce n'est pas comme si les activités que conduisent les chambres sont inconnues de l'autorité. Au contraire, non seulement ces activités-là, nous les connaissons bien, mais nous encadrons et nous supervisons, à bien des égards, les chambres également.

Alors, comme vous le dites, ces activités-là vont s'intégrer dans les activités de l'autorité de façon plus efficace. Vous avez entièrement raison de dire que l'autorité, dont la mission première est la protection du public, va toujours être en place, avec des activités additionnelles qui s'imbriquent dans celles qu'on conduit déjà.

M. Leitão : Merci. Peut-être une autre question qui n'est pas banale. Vous avez mentionné que l'AMF, c'est un régulateur intégré. Et moi, je suis convaincu que ce modèle-là d'avoir un régulateur intégré, c'est un modèle qui... On est en train de prouver que c'est un modèle qui fonctionne bien et qui... D'ailleurs, je pense, de l'extérieur, on regarde ça, on dit : Tiens, peut-être qu'il y a là quelque chose qu'on pourrait s'inspirer, de ces travaux-là. On nous avait dit qu'au contraire, avec les récents développements dans les marchés financiers, le modèle de régulateur intégré, ce n'est pas bon, et on s'éloigne de ça. Je trouve ça surprenant parce qu'au contraire... Et, vous, dans les contacts que vous avez avec d'autres régulateurs ailleurs... Moi, je pense que les autres regardent l'AMF avec une certaine approbation.

M. Morisset (Louis) : Vous avez raison, M. le ministre. Je pense, si on regarde simplement au Canada, en ce moment, en Ontario, il y a des travaux qui sont menés à l'initiative du ministère des Finances là-bas pour créer un régulateur intégré. Et, dépendant ce qui se passera avec le projet de régulateur coopératif, je ne serais vraiment pas surpris que la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario et les autres régulateurs du secteur financier adoptent le modèle de régulateur intégré de l'autorité. Mais la tendance en Ontario est clairement de s'inspirer de ce qui s'est fait au Québec il y a maintenant plus d'une décennie.

Maintenant, je dirais que le modèle de régulateur intégré est un modèle éprouvé qui n'est pas, évidemment, unanimement adopté à travers le monde. J'ai le privilège de représenter l'autorité au sein du conseil... l'Organisation internationale des commissions de valeurs. On est 34 membres autour de la table, et il y a, autour de la table, un certain nombre, donc, de régulateurs intégrés, en Allemagne, par exemple, en Suisse. Donc, le modèle de régulateur intégré existe bien. Dans d'autres juridictions, on a le modèle qu'on appelle «Twin Peaks», le modèle du régulateur prudentiel et du régulateur de marché. Et il faut dire que, dans certains pays, comme en Angleterre, nous avions, avant la crise financière de 2007‑2008, un modèle de régulateur intégré. Évidemment, la crise a frappé fort du côté de la Grande-Bretagne. Ce modèle-là a été modifié, changé suite à la crise.

Donc, des fois, il y a des événements qui font en sorte que, politiquement, aussi on doit amener des réponses à des problèmes, et c'est ce qui est arrivé en Angleterre. Mais je vous dirais que le modèle est un modèle efficace. Clairement, au Canada... En ce moment, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick l'ont adopté suite à l'adoption, par ailleurs, par le Québec, en 2004... Donc, ce sont des modèles beaucoup plus récents, et, clairement, l'Ontario veut migrer vers ce modèle-là. Alors, vous avez tout à fait raison. Mais ce n'est pas un modèle qui est unanimement accepté, par ailleurs. Je pense qu'il y a des vertus à ce modèle, mais certaines juridictions agissent autrement.

M. Leitão : Très bien. Merci. Combien de temps?

Le Président (M. Girard) : 2 min 10 s.

M. Leitão : Bien, ça ne donne pas beaucoup de temps. Je vous regarde, mais non... Une dernière chose...

Des voix : ...

M. Leitão : Non, ça va, ça va. Écoutez, une dernière chose dont on a aussi beaucoup parlé pendant nos travaux, c'est la distribution, pour les assurances, par Internet. Déjà, l'AMF a déjà regardé ça. Vous avez déjà émis certaines lignes directrices. Peut-être si vous pourriez nous parler brièvement de cet aspect-là, surtout l'approche que nous avons choisie avec notre projet de loi. C'est, dans le projet de loi, d'encadrer ça d'une façon générale. Mais, par la suite, ça va être à l'AMF d'émettre les règlements qui vont opérationnaliser tout ça. Alors, vous pouvez nous parler un peu de ce processus-là, des règlements que vous allez émettre?

Le Président (M. Girard) : En 1 min 15 s.

M. Morisset (Louis) : Oui, parfait. Bien, écoutez, je vais peut-être nous ramener à ce moment-là au travail qui a été exécuté par l'AMF au cours des dernières années. On a lancé une consultation sur le sujet en 2012. Il y a eu beaucoup d'échanges. C'est une consultation aussi qui a été menée à l'échelle nationale. Et, en 2015, on a émis publiquement des orientations sur la façon dont cet encadrement devrait être mis sur place. Et ces orientations-là, vous les connaissez, mais essentiellement ce sont les orientations qui devraient nous guider en grande partie dans le développement de la réglementation qui va suivre. Et le projet de loi prévoit qu'avant que tout ça soit mis en branle on aura une année pour développer cette réglementation-là. On sera en mesure de la soumettre à la consultation, si le projet de loi est adopté, bien sûr, relativement rapidement. Et je me permets de souligner le fait que le comité des consommateurs que le projet de loi crée va nous donner un moyen utile évidemment d'aller solliciter les consommateurs dans leurs besoins dans un tel contexte.

Mais la réglementation qu'on envisage aujourd'hui est une réglementation qui va faire en sorte que le consommateur va avoir en main, à travers des outils d'évaluation qu'on va devoir lui rendre disponibles, à travers l'information qu'on va lui acheminer sur, évidemment, les caractéristiques du produit, mais les exclusions, bref, tous les éléments importants dans le cadre d'un processus où l'information va lui être acheminée par étapes, en langage clair... de faire en sorte que le consommateur soit dans la même situation que s'il avait obtenu ces informations-là directement d'un représentant. Donc, l'objectif qui est poursuivi, c'est que l'on utilise la voie du représentant en chair et en os ou la voie de l'Internet, pour ceux, encore une fois, qui se sentiront interpelés par ça.

Le Président (M. Girard) : Malheureusement, je dois vous arrêter. Le temps est écoulé. Donc, je dois passer du côté de l'opposition officielle, avec le député de Rousseau, pour une période d'échange de 9 min 30 s.

M. Marceau : Parfait. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Merci d'être là.

Sur les changements à la Loi sur les coopératives de services financiers, donc un encadrement de Desjardins, à la suite, là, des difficultés qu'on a connues avec la crise et puis de l'éventualité de nouvelles crises... Et donc des changements sont apportés à la façon dont va fonctionner Desjardins, et il y a un mécanisme de solidarité qui est mis en place. Il y a aussi des changements qui sont apportés à vos pouvoirs en conséquence. Pouvez-vous juste nous en parler, essentiellement, ce que vous avez de plus ou ce que vous aurez de plus à la suite de l'adoption du projet de loi, et puis peut-être nous confirmer que vous aussi, vous estimez que le FMI va nous mettre une belle étoile sur notre bulletin une fois qu'on va avoir adopté ces changements-là?

M. Morisset (Louis) : Parfait. Bien, écoutez, si vous me le permettez, je vais répondre à cette deuxième question-là puis je vais céder la parole à mon collègue Patrick Déry sur la première.

Il est clair que, pour nous, pour le Québec, c'est important que le FMI ne dénote pas de carence majeure dans l'environnement législatif et réglementaire au Québec. Et, de notre perspective, avec les changements qui sont proposés dans le cadre de ce projet de loi là, il n'y a aucune raison de croire que le FMI verrait l'encadrement législatif québécois étant inférieur à l'encadrement législatif fédéral. Alors, à cet égard-là, moi, je suis confiant que les changements que les parlementaires décideront d'adopter en ce sens vont nous amener dans la bonne direction.

Le volet, après ça, qui appartient à l'autorité, c'est comment mettre en oeuvre cet encadrement pour que cet encadrement soit jugé aussi robuste, aussi efficace que celui du BSIF, du Bureau du surintendant des institutions financières, à l'égard des banques. Et, là aussi, je pense qu'on a fait des pas de géant dans les dernières années pour nous permettre d'être confiants que, dans le cadre de cet exercice-là, on va se comparer, je dirais, avantageusement à nos homologues fédéraux.

Maintenant, quant aux pouvoirs exactement, je cède la parole à Patrick Déry.

Le Président (M. Girard) : M. Déry.

• (17 h 20) •

M. Déry (Patrick) : Oui, bonjour, tout le monde. Il y a sept institutions financières systémiques au Canada. Il y a en a six, ce sont des banques à capital-actions encadrées par le gouvernement fédéral, et il y a le Mouvement Desjardins, qui est une coopérative. Et un des défis que nous avons comme autorité responsable du mouvement coopératif, c'est de démontrer que, s'il arrive des tensions, une institution coopérative qui est composée d'à peu près 300 caisses, qui a au-dessus de ou tout près de 5 000 administrateurs, que cette institution-là va avoir l'agilité, la capacité de se redresser, de se retourner, de se reprendre en main équivalente ou convaincante pour éviter que la situation ne se détériore.

Dans le projet de loi, il y a plusieurs éléments qui concernent Desjardins, les pouvoirs internes dans Desjardins pour rehausser cette agilité-là à l'interne tout en préservant la réalité du modèle coopératif. Et il y a aussi, du côté... si jamais ça ne fonctionnait pas, bien, comment qu'on arrive, nous, comme agence de résolution, ultimement, pour être capables de faire en sorte que l'institution, les fonctions essentielles de l'institution puissent rapidement continuer de fonctionner, parce qu'imaginez l'impact sur l'économie si les citoyens n'ont plus accès à leur compte chèque ou à leur... les entreprises ne sont plus capables de faire des transactions financières parce qu'elles sont chez Desjardins. Ça peut avoir des impacts majeurs dans l'économie réelle. Donc, il faut être capable d'être très agile, très, très, très rapide dans le sauvetage, si on veut, de l'institution, et avec tout un ensemble, je dirais, de principes qui concernent la gestion aussi de l'aléa moral. On ne veut pas que les institutions financières prennent des risques indus en exposant les contribuables à ces risques-là.

Donc, c'est une façon que le projet de loi ici amène, qui permet d'appliquer à un groupe coopératif ce qui est, par ailleurs, développé à l'international, en ayant en tête le modèle des banques traditionnelles avec du capital-actions. Et donc ça nous amène à certaines solutions qui sont un peu différentes, mais qui reflètent justement la capacité puis le besoin, pour nous, au Québec, d'adapter à ce modèle-là les mêmes finalités, les mêmes objectifs qui sont poursuivis à l'égard des institutions qui ont une importance systémique, donc, à haut niveau, ça va de soi.

À la question, j'aimerais bien être certain qu'on va avoir une belle étoile du FMI. Ça, c'est comme quand nous, on fait une inspection dans une institution financière ou quand le Vérificateur général vient nous voir, les gens aimeraient bien qu'on leur donne des belles étoiles aussi. Mais ça, on ne peut pas décider à leur place. Mais certainement qu'avec l'adoption de ce qu'il y a là nous, on pense qu'on va être capables d'expliquer, oui, qu'on a fait d'énormes progrès puis qu'on est capables de démontrer que l'encadrement au Québec... nos pouvoirs vont être équivalents puis adéquats pour faire le travail.

M. Marceau : Très bien. Merci pour vos réponses. Sur la disparition des chambres et puis de l'intégration de leurs responsabilités et fonctions à l'autorité, il y a donc de l'autoréglementation, présentement, qui se fait par les chambres, qui va disparaître, mais on maintient, simultanément et parallèlement, l'OCRCVM. Qu'est-ce qui explique qu'on maintienne l'OCRCVM, mais qu'on fasse disparaître les deux chambres?

M. Morisset (Louis) : Bien, quelques éléments pour répondre à cette question-là.

D'abord, je pense qu'ici, de la perspective de l'autorité, il n'y a pas de désaveu du modèle d'autoréglementation. Ce n'est pas ça, l'enjeu. Au Québec, on a trois régulateurs dans un secteur puis on a un véritable autorégulateur qui est l'OCRCVM, qui, à un moment donné, s'est adressé à l'autorité, puis, par ailleurs, dans un contexte pancanadien où ils ont fait la même chose, là, où on a une industrie qui s'est organisée pour dire : On va s'autoréglementer, donc, le support de cette industrie-là, puis voici les services qu'on peut offrir, pouvez-vous nous reconnaître comme tel et définir notre mandat? Donc, je pense qu'il y a un élément bien important, c'est qu'il n'y a pas de chevauchement entre le rôle qu'exerce l'OCRCVM par rapport à celui de l'autorité parce qu'on a défini le mandat puis on leur a confié... Puis, par ailleurs, puis, je pense, ça a été mentionné, le jour où on n'est pas satisfaits, bien, on peut leur retirer. On est satisfaits, par ailleurs, mais ça, c'est la prérogative évidemment du régulateur qui a reconnu un autorégulateur et qui lui a confié un mandat.

Donc, ça, c'est l'élément, avec l'OCRCVM, je vous dirais... Tout à l'heure, j'ai exposé les chevauchements, les dédoublements que l'on vit. Ils n'existent pas, avec l'OCRCVM, en grande partie parce qu'on leur a défini leur mandat.

Puis, par ailleurs, je vous dirais, il y a même des éléments qui débordent un petit peu... Aujourd'hui, il y a trois régulateurs qui ont des mandats législatifs, qui veulent tous bien faire leur travail, autant à l'autorité qu'au sein des chambres, et qui tentent le mieux qu'ils le peuvent de réaliser le mandat qu'on leur a confié. Et, dans le cadre d'un autorégulateur comme l'OCRCVM, c'est la même réalité. Ils veulent bien faire le travail qu'on leur a confié. Mais le jour, puis c'est déjà arrivé, où on décide de leur retirer une partie de mandat ou on décide de s'intéresser ou de jouer un rôle...

Je pense, par exemple, quand on a vécu la crise du papier commercial au Québec, on a repris, dans le cadre de ce processus-là, le mandat en matière d'application des lois puis «d'enforcement» de l'OCRCVM. On s'est entendus avec eux puis on a dit : Nous, on s'occupe de ce mandat-là. Il n'y a pas eu d'enjeu. Alors que, quand le mandat de l'autorégulateur, encore une fois, qui est une incongruité, là, un autorégulateur n'est pas normalement créé par loi... bien, ce régulateur-là a autant le droit que nous d'exécuter son propre mandat.

Alors, je pense, c'est un élément qui est assez fondamental dans la distinction entre le mandat qu'on a confié à l'OCRCVM du mandat que le législateur a confié à trois organisations au Québec.

Je pense que Patrick voudrait ajouter quelque chose.

M. Déry (Patrick) : Un très petit point, peut-être, pour rendre plus concret un petit peu l'idée de chevauchement entre les chambres versus OCRCVM. Dans notre rapport annuel qu'on a déposé l'été dernier, 2016‑2017, à la page 4, on fait état des plaintes et déclarations de pratiques douteuses et frauduleuses qu'on a traitées l'an dernier, tout près de 2 000. Bien, il y en a environ 450 qui ont été transférées à la CHAD ou à la CSF et seulement 28 à l'OCRCVM. Donc, la notion de chevauchement de mandats ou de gains qu'on va avoir en faisant le bout au niveau des chambres n'est pas présente autant au niveau de l'OCRCVM.

Une voix : Si possible, on aurait une autre petite précision.

M. Lebel (Philippe) : Bien, c'est pour finir, parce que j'écoutais une question que vous posiez ce matin, M. Marceau, une excellente question à l'égard de l'OCRCVM, en fait cet après-midi. Pourquoi est-ce que, si le modèle est bon, on ne pourrait pas confier la responsabilité des cabinets en assurance aux chambres, particulièrement à la Chambre de la sécurité financière? Et la question que vous posez est la suivante : Est-ce que le législateur veut retirer cette responsabilité-là au régulateur? Et toute la question est là : Dans l'autoréglementation, qu'est-ce que le législateur veut par l'autoréglementation? Le système de l'autoréglementation dans le secteur financier, qui est reconnu, vous l'avez créé, vous l'avez reconnu dans la Loi sur l'Autorité des marchés financiers. Il y a un processus aux articles 59 et suivants. Quand on se pose la question maintenant, pourquoi le législateur crée ces mandats-là, arrive la question : Bien, le législateur demande à un organisme de s'occuper d'une partie, retire cette partie-là au régulateur. Dans le système de...

Le Président (M. Girard) : Malheureusement, je dois vous arrêter. Ceci met fin au bloc avec l'opposition officielle, à moins que la deuxième opposition veuille continuer sur le même thème. Je cède la parole au député de Granby.

M. Bonnardel : Allez-y rapidement, là.

M. Lebel (Philippe) : Bien, non, c'est simplement... Dans le système de l'autoréglementation du secteur financier, toutes les responsabilités continuent toujours à appartenir au régulateur, et c'est ce qui est évalué dans les principes internationaux. On a entendu parler des principes internationaux, et c'est ça, les principes internationaux. L'autoréglementation normalement vient de l'industrie, demandée au régulateur. Voilà, je pense, j'ai répondu à la question.

M. Bonnardel : O.K. Rapidement, je veux revenir sur la dernière question du ministre, à savoir, bon, les produits qui seront disponibles sur Internet, vendus par les assureurs. Vous avez dit tantôt : On a commencé un travail en 2012 là-dessus. Donc, vous dites : Le législateur n'aura pas à définir quels seront les produits, nous, on va le faire par règlement. Vous dites : On se donne un an pour préparer tout ça. Quel sera le processus par la suite pour qu'il y ait une sorte de consultation, vous ayez défini : Bon, voici les produits qui pourront être disponibles par Internet? Vous pourriez me répondre aussi... Est-ce que les sites de comparaison vont être définis, comme... Et ces sites de comparaison qu'on a parlé dans les derniers jours, est-ce qu'ils sont définis comme courtiers? Est-ce que c'est tout ça que vous allez mettre dans un document où on pourra prendre connaissance... puis, nécessairement, l'évaluer, puis, par la suite, peut-être l'améliorer?

M. Morisset (Louis) : Exactement. On va développer un règlement spécifique qui va viser à encadrer la façon dont ça, ça doit se faire. Et ce document-là, comme tous nos règlements, va être soumis à la consultation. Je vous dirais, on va tout faire pour aller chercher le pouls et bien s'assurer que ce règlement, qui va, par ailleurs, être approuvé par le ministre des Finances par la suite, fait le travail. Donc, c'est dans un processus qui est transparent, où l'industrie et les consommateurs vont être sollicités pour nous donner leur perspective là-dessus. Absolument.

• (17 h 30) •

M. Bonnardel : Question fusion, intégration de la CSF, de la CHAD, ça fait quand même quelques mois ou semaines que le projet de loi est déposé. J'imagine que vous êtes déjà en mode intégration, comment la fusion, si je peux le dire ainsi, puis tout ça va se faire en même temps. Est-ce que vous allez intégrer tous les employés de ces deux chambres? Êtes-vous en mode, là, de vous dire : O.K., comment on va fonctionner? J'imagine que oui, là, parce que, bon, vous êtes conscients qu'on est dans un contexte majoritaire. Je ne pense pas qu'il y aura de bâillon là-dessus. Mais êtes-vous déjà dans ce mode et pouvez-vous... capables d'élaborer pour peut-être rassurer certaines personnes et nous dire comment vous allez procéder? J'imagine que vous n'êtes pas en discussion avec eux présentement. Vous attendiez sûrement que la loi soit adoptée.

M. Morisset (Louis) : On ne fera pas d'outrage au Parlement.

M. Bonnardel : C'est ça. Donc, me mettre un peu ou nous mettre un peu dans le contexte où vous êtes, en mode fusion, en mode intégration. Comment vous allez procéder? Est-ce que vous gardez tous les employés des deux chambres?

M. Morisset (Louis) : Bien, c'est sûr qu'on est en mode réflexion. Dans un contexte comme celui-ci, on se doit d'y réfléchir. Mais évidemment il n'y a pas d'approche qui est faite auprès des chambres. Vous comprendrez que je ne pense pas qu'elles souhaiteraient non plus qu'on démarre des discussions en ce sens-là. Le projet de loi prévoit qu'il y aura une période d'administration provisoire qui va nous permettre...

D'abord, les chambres vont continuer, là, d'exister pendant un certain temps, pendant cette administration provisoire là, le temps que les chambres finissent, en quelque sorte, le travail qu'elles ont commencé. C'est une période qui va nous permettre évidemment de mieux comprendre, là... On les connaît, les gens, dans leurs grandes lignes, évidemment, puis leurs activités, on les connaît bien. Mais ces organismes-là ont des systèmes informatiques, ces organismes-là ont des locaux, ont des baux. Alors, il va falloir mieux comprendre, là, la réalité de l'intégration. Mais l'objectif qu'on poursuit, c'est clairement d'intégrer au sein de l'autorité ces expertises, ces gens. On a beaucoup de respect pour le travail qui est fait au sein des chambres... et d'intégrer les gens au sein de l'AMF, dans nos activités.

Alors, il n'y a pas d'ambiguïté dans notre esprit. Mais, dans un contexte, évidemment, où on aura à voir quels sont les éléments d'intégration, les systèmes informatiques et tout ça, ça, on aura un temps qui est prévu par la loi pour le faire puis pour bien évaluer...

M. Bonnardel : Vous vous donnez combien de temps pour une intégration totale, réussie de ces deux chambres?

M. Morisset (Louis) : Bien, on verra. Je ne sais pas si, Philippe, tu veux ajouter là-dessus, mais j'allais dire... On verra le temps nécessaire, là, pour bien évaluer la situation puis voir comment on peut intégrer, à terme, évidemment, ces gens-là, même physiquement, dans nos propres locaux. Ces gens-là vont devenir des employés à part entière de l'autorité au même titre que tous les autres.

M. Lebel (Philippe) : Une des choses qu'il faut mentionner, également, pendant cette période-là, il faudra regarder précisément les gens qui seront intégrés à l'autorité versus ceux qui seront intégrés au tribunal parce que... et je ne pense pas qu'on a besoin de le répéter, mais, le processus disciplinaire, la loi veut le conserver au tribunal. Et donc il y a des employés qui y contribuent. Il y a des assesseurs, qui sont actuellement, probablement, les membres du comité de discipline, qui sont là.

Et ça m'amène à répondre aussi en partie à votre question, qui est... La loi, de la façon dont elle va fonctionner pour la transition, c'est qu'on veut aussi que les décisions qui sont commencées actuellement, avant la sanction de ce projet de loi là, par les comités de discipline puissent être terminées, les délibérés, les auditions qui ont été commencées. Alors, cette transition-là, elle va se faire en fonction aussi des décisions déjà commencées par le comité de discipline pour ne pas que le dossier soit recommencé au tribunal des marchés financiers avec les assesseurs, puis que, là, on redemande encore aux consommateurs de venir témoigner devant une autre instance ou la même instance, en tout cas, de recommencer le processus.

M. Bonnardel : Ça va.

Le Président (M. Girard) : Ça va comme ça? Donc, M. Lebel, M. Déry, M. Morisset, merci beaucoup de votre contribution à la commission.

Mémoires déposés

Avant de conclure, je dois déposer les 14 mémoires qui ont été remis à la commission, dont les organismes n'ont pas été entendus en audition. Donc, je dépose les mémoires.

Je veux remercier tous les groupes, les membres de la commission, le personnel, les gens du ministère qui ont participé et je lève la séance.

La commission ajourne ses travaux au mardi 30 janvier 2018, à 9 h 15, où elle entendra un nouveau mandat.

(Fin de la séance à 17 h 34)

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