(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Bernier) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des finances publiques
ouverte et, bien sûr, je demande aux personnes présentes d'éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de procéder à l'interpellation
du député de Mercier au ministre des Finances sur le sujet
suivant : L'encadrement du commerce électronique pour assurer l'équité
fiscale envers le commerce traditionnel et local.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Marceau (Rousseau) est remplacé par Mme Maltais
(Taschereau).
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Je comprends qu'il y a une entente à l'effet que l'opposition officielle
interviendra lors de la deuxième et de la sixième série d'interventions et que
le deuxième groupe d'opposition interviendra lors de la quatrième série
d'interventions. D'accord?
Je vous
rappelle que le débat ne peut, à moins de consentement, dépasser midi. Comme la
séance a débuté à 10 h 2, il y a consentement pour poursuivre
nos travaux au-delà de midi, soit jusqu'à 12 h 2? Consentement?
Des voix : ...
Le
Président (M. Bernier) : Nous allons débuter l'interpellation par
la déclaration d'ouverture de M. le député Mercier. M. le député, vous
avez 10 minutes. La parole est à vous.
Exposé du sujet
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci beaucoup, M. le Président. Je
tiens à remercier mes collègues et leurs équipes d'avoir pris le
temps... je sais que nous avons beaucoup de responsabilités dans nos comtés,
mais d'avoir quand même pris le temps participer
à ce débat, je les remercie, à la fois les députés de l'opposition, mais aussi
le ministre. Si nous avons jugé bon retenir
le ministre ici alors qu'il a des fonctions importantes, c'est parce qu'il
s'agit d'un sujet qui est excessivement, disons, critique à l'heure actuelle par son impact dans les activités
économiques locales d'à peu près tous les secteurs d'activité économique
du Québec.
Le propos
concerne donc le commerce électronique et la nécessité d'encadrer ce commerce
et son activité, les géants de
l'Internet, de manière à ce que leurs activités commerciales sur notre
territoire soient équitables, respectent un minimum de règles d'équité pour ne pas mener une concurrence déloyale à
l'encontre de nos propres artisans économiques. Et donc c'est pour cette raison que vous m'avez vu, il y a plus d'une
semaine, présenter un projet de loi portant le n° 997, un projet de loi encadrant le commerce en ligne et
visant à assurer l'équité fiscale envers le commerce traditionnel et
local.
Je voudrais
rappeler au ministre que j'ai eu le bonheur de travailler, pendant à peu près
un an, un an et quelques mois, avec votre propre collègue, qui préside
aujourd'hui notre interpellation, soit le député de Montmorency, qui préside la Commission des finances publiques, et
c'est un rapport unanime qui a été soumis à nos collègues en mars
dernier, qui a découlé des travaux très
rigoureux, avec des consultations amples à divers experts de toutes les
activités, y compris des acteurs
économiques concernés. Et ce travail a été fait dans un tel esprit de
collaboration reposant sur les consensus internationaux, l'expertise
développée au cours des années par, notamment, l'OCDE, qui nous a grandement
facilité la tâche et conduits à une série de
recommandations, dont les trois premières, les trois premières, le hasard l'a
voulu ainsi, les trois premières
concernent ce qu'on appelle la «Google tax», c'est-à-dire exactement la manière
d'encadrer l'activité des géants du
commerce électronique, des géants, multinationales du commerce électronique
pour qu'il y ait un minimum d'équité avec les acteurs locaux. Alors,
ici, vous voyez, les points 1, 2 et 3, ça touche directement ce propos.
Alors, je
voudrais dire à M. le ministre que la première mouture de l'intervention qui
avait été préparée par mon équipe
était sur le ton de l'exaspération. Ce ton d'exaspération vient du sort subi
par les acteurs économiques de la société.
D'ailleurs, je voudrais en profiter pour
souligner la présence, dans les tribunes — je pense qu'ils font face au ministre — à la fois de M. Simons, qui représente,
donc, un type d'activité, le commerce au détail, d'une entreprise qui
est grandement appréciée par notre
population par la qualité de son commerce, mais également par la qualité de
l'intervention de ses dirigeants pour
commenter la chose sociale et l'importance d'avoir des entreprises qui ont une
conscience sociale et fiscale.
Ensuite,
M. Jean-Claude Lord, qui est venu, aujourd'hui, témoigner ce matin.
J'étais surpris d'apprendre que, malgré
50 ans de métier et la visibilité qu'il a eue, c'est la première fois que
M. Lord prend la parole dans un cadre politique, fait une intervention de nature politique. Je lui
ai demandé : M. Lord, j'aimerais bien croire que c'est à cause de
l'intérêt que nous présentons, nous, Québec
solidaire, on est bons. Non, ce n'est pas ça. La réalité, c'est que ce qui l'a
motivé, c'est la situation critique que vit son industrie et qui risque
pratiquement la disparition si les choses continuent ainsi.
Ensuite, il y a
M. Hicham Berouel, que nombre d'entre nous, on a vu. Depuis deux ans que
divers acteurs, comme lui, de l'industrie du
taxi local, du taxi viennent proposer des solutions au gouvernement pour,
disons, contrer les effets néfastes d'Uber.
Et il y a aussi toute
l'industrie hôtelière. Et je voudrais commencer par ça. Il y a M. Xavier
Gret, qui est de l'association hôtelière
Québec, que j'ai eu l'occasion de rencontrer, mais qui m'a rappelé, M. le
ministre, que, dans le fond, si je suis ici, c'est pour vous alerter de
l'appel que vous lance votre propre collègue la ministre du Tourisme, que j'ai rencontrée à peu près en avril dernier parce qu'on
avait des préoccupations. J'ai présenté un projet de loi sur Airbnb.
Elle a accueilli favorablement les
intentions de mon projet de loi et a dit : C'est la bonne solution, mais
elle m'a dit : Amir... Je peux me nommer moi-même, M. le Président?
Le Président
(M. Bernier) : ...
M. Khadir :
Non? Elle m'a dit : M. le député...
Le Président
(M. Bernier) : Je ne veux pas vous empêcher de parler, là...
• (10 h 10) •
M. Khadir :
...je ne peux pas faire ce que vous me demandez parce que les lois actuelles du
Québec ne me le permettent pas. Je pense que
c'est la bonne solution, sauf que, pour que je puisse imposer ma loi, il faut
que cette activité qui se déroule ici
soit une activité d'un établissement commercial, une entreprise établie au
Québec. Et, comme ces entreprises ne
sont pas établies au Québec, je ne peux pas taxer Airbnb, je ne peux pas lui
imposer. Airbnb n'aurait sans doute pas... comme Airbnb se plie dans les juridictions où il y a des lois qui le
forcent à le faire, n'aurait sans doute pas d'hésitation à le faire. Sauf qu'Airbnb comme d'autres géants du
commerce électronique disent : Bien, on ne fera pas ce qu'on n'est
pas tenus légalement de faire. On ne le fera pas pour les beaux yeux de la
population ou des gouvernements, etc. Nous, nous sommes en affaires, nous avons
des exigences d'affaires, on obéit par les règles d'affaires.
Alors,
toute la prémisse de mon intervention, M. le ministre, c'est qu'il faut
répondre à l'appel de votre ministre du Tourisme. Il faut répondre à l'appel de l'ensemble des secteurs
d'activité économique du Québec. Notre commerce de détail, notre industrie hôtelière, nos artisans et
nos professionnels de la culture, nos chauffeurs de taxi, et j'en passe,
vous demandent de corriger nos lois fiscales, qui sont archaïques parce que ces
lois fiscales ne sont pas adaptées à l'ère numérique, et donc ne sont pas
adaptées au XXIe siècle.
Vous plaidez de se
donner du temps. M. le ministre. Il faut se secouer collectivement. Ce n'est
pas possible. Ça fait déjà deux ans qu'on
travaille. Ça fait déjà six mois, six mois — M. le ministre le sait — qu'on a produit ce rapport. Ce n'est pas nécessaire d'attendre un six autres
mois. Notre projet de loi a été travaillé dans la plus grande rigueur en
se basant, justement, sur le travail
rigoureux de la Commission des finances publiques. Nous avons consulté les meilleurs fiscalistes. Mes collègues ne le savent peut-être pas, mais j'ai
appris, au cours de ce travail, que les fiscalistes en matière de
taxation du commerce, les meilleurs au Canada, par un hasard de circonstances,
sont concentrés au Québec. Nous en avons
consulté plusieurs. Tout le monde dit : C'est parfait. Le milieu des affaires
dit : C'est exactement ce qu'il faut faire.
Et
moi, je n'ai aucune hésitation, compte
tenu de l'urgence, de dire à mes
collègues : Si vous voulez, on le travaille ensemble, on établit un
petit comité de travail. En une semaine, on regarde ce qui achoppe, on apporte
les nuances nécessaires, et dès cette
session on l'appelle en commission
parlementaire, et rapidement
on fait ça. Pourquoi? Parce
que, depuis janvier de cette année, depuis
le début du mois de janvier jusqu'à la fin octobre, l'augmentation du commerce en ligne au Québec,
sur le territoire québécois, 46 %,
c'est 5 milliards. Ces 5 milliards là, là, c'est 5 milliards de
commerce fait déloyalement contre nos
entreprises. C'est 5 milliards qui, quelque part, fragilisent, sinon
ruinent les acteurs économiques québécois,
qui ne jouent pas avec les mêmes règles, qui jouent avec plus de contraintes
que des joueurs des multinationales internationales.
J'interpelle
donc le ministre des Finances sur ce sujet parce que je crois qu'il a une bonne
opportunité, en plus, en accélérant
le pas... Parce que j'ai eu une question du journaliste tout à l'heure,
exactement, qui posait : Est-ce que vous pensez que c'est à cause de la proximité du gouvernement libéral avec
certains gros noms du milieu de la finance? J'ai dit non. Moi, je pose sur la bonne foi du gouvernement
pour éviter que ce genre de suspicion, ce genre de doute soit entretenu
dans la population. Voilà une bonne occasion. Le ministre pourrait agir
rapidement pour dissiper ce doute-là. Et le ministre
ne peut pas se retrancher sur le fait que c'est compliqué. C'est vrai que c'est
compliqué, mais ça fait deux ans que
la Commission des finances publiques a travaillé, on s'est inspiré puis nous,
on a travaillé sérieusement, et il n'y a personne d'autre que le
ministre qui dit qu'il y a un problème avec ce projet de loi.
Je
reviendrai sur les détails techniques si vous voulez, mais j'aimerais que le
ministre me dise clairement... en fait, regarde la caméra et dise clairement, s'engage à ne pas se retrancher
derrière des explications et être sur le mode action et non pas une
action qui doit attendre encore six mois, qui doit attendre un autre rapport,
une autre évaluation, mais plutôt des solutions concrètes immédiatement
applicables parce que c'est urgent. C'est une inéquité fiscale qui a des
répercussions partout dans notre société, et on ne peut pas attendre plus
longtemps.
Pour ce qui est de la
TVQ et le commerce en ligne, je dis donc au ministre, là : soit qu'il
l'applique, soit qu'il regarde la caméra et il s'explique. Merci de votre
intervention.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Mercier. Donc, je veux saluer les personnes qui sont ici
présentes ce matin, à l'Assemblée nationale, qui assistent à cette
interpellation.
Nous
allons passer maintenant du côté du ministre. M. le ministre, vous avez
10 minutes pour votre présentation d'ouverture.
Réponse du ministre
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Très bien, merci beaucoup, M. le Président. Alors, chers collègues, bonjour,
merci d'être là. M. Lord, M. Simons, merci aussi d'être présents.
C'est en
effet un sujet très important. Alors, je remercie le député de Mercier de me
donner l'opportunité d'aborder les
enjeux liés à la fiscalité du commerce en ligne et, plus globalement, du fléau
qui constitue l'évasion fiscale pour notre société, à un grand nombre de juridictions à l'échelle mondiale. Tout
stratagème ou mécanisme, légal ou non, visant à éviter à des contribuables d'avoir une société de payer sa juste part de
taxes ou impôt est inacceptable. Cela doit cesser. Il en va du bon fonctionnement de notre société, notre
régime fiscal et de l'équité — et on est d'accord, M. le député — de
l'équité envers tous les contribuables et du
financement de nos services publics. C'est pourquoi notre gouvernement
est très actif dans la lutte à l'évasion fiscale, qu'il s'agisse du travail au
noir, de la contrebande, de la planification fiscale agressive des entreprises
et des particuliers ainsi que la récupération des profits dissimulés dans les
paradis fiscaux.
Rappelons que
c'est grâce à la collaboration entre les pays et au partage d'information que
nous pouvons lutter efficacement
contre l'évasion fiscale. C'est un problème complexe et global... pour être
complexe et global. Pour être efficaces,
les réponses aussi se doivent d'être globales. C'est d'ailleurs ce que
préconisent l'OCDE et, d'ailleurs, tous les experts dans ce domaine. C'est d'ailleurs à cet effet qu'en juin dernier
nous sommes allés au siège de l'OCDE à Paris rencontrer M. Pascal Saint-Amans, directeur des politiques
fiscales, qui dirige les travaux sur la lutte à l'évasion fiscale,
incluant le volet sur l'économie numérique, afin de nous enquérir de
l'avancement de leurs travaux et nous assurer que le Québec demeure un leader
en matière de lutte à l'évasion fiscale.
Alors, M. le Président, permettez-moi de, bon, prendre
au mot le député de Mercier. Et, pour démontrer notre volonté d'agir et en tout respect pour les membres de la Commission des finances publiques, j'ai le plaisir
de demander le consentement, M. le
Président, pour procéder au dépôt... et je tenais à le faire en tout premier
lieu ici devant les membres de la
Commission des finances publiques, donc, notre réponse au rapport de la
Commission des finances publiques dans le cadre de votre mandat
d'initiative portant sur le phénomène du recours aux paradis fiscaux.
Document déposé
Le
Président (M. Bernier) : ...m'assurer que l'ensemble des membres
de la Commission des finances publiques vont recevoir copie rapidement
du document.
M. Leitão : En passant, M. le
Président, j'aimerais aussi souligner la contribution de Mme Brigitte
Alepin au rapport que nous venons déposer, à ses commentaires précieux.
D'ailleurs, Mme Alepin avait aussi collaboré avec la commission dans l'élaboration du rapport de la
commission. Alors, c'est ce que nous nous étions engagés à faire dans la
motion du 6 avril dernier, déposer le
rapport, et c'est ce que nous faisons. Vous pourrez constater qu'il s'agit d'un
plan d'action concret et étoffé pour assurer l'équité fiscale, incluant les
enjeux liés à la fiscalité du commerce électronique pour lesquels nous sommes
ici réunis plus spécifiquement aujourd'hui.
Mon
sous-ministre, M. Monty, vous avait écrit, le 29 septembre dernier,
que le gouvernement déposerait son retour sur les recommandations du rapport. Voilà, en novembre, nous y sommes,
le 10 novembre. Le plan d'action que nous déposons aujourd'hui s'inscrit dans une orientation et les actions
identifiées par l'OCDE dans la lutte contre l'érosion de bases
d'imposition, de transferts de bénéfices et encadrement de commerce en ligne,
le fameux rapport BEPS. Les 14 mesures de notre plan d'action visent cinq
grands objectifs : d'abord, percevoir la taxe de vente dans le contexte de
l'économie numérique; deuxièmement, récupérer les montants dus au titre de
l'impôt sur le revenu des sociétés; trois,
récupérer les montants dus au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers;
quatre, renforcer la transparence fiscale et corporative; et cinq,
bloquer l'accès aux contrats gouvernementaux aux entreprises et aux
particuliers participant à des stratégies d'évitement fiscal abusives, y
compris le recours à des paradis fiscaux.
Alors, le
sujet de l'interpellation d'aujourd'hui traduit la préoccupation commune que
nous partageons face aux enjeux que
soulève l'application de nos lois fiscales à l'économie numérique. La nécessité
de mieux encadrer le commerce électronique est indéniable. Le statu quo
n'est plus possible. La TVQ comme la TPS doivent s'adapter aux réalités du
XXIe siècle, il en va de l'équité et de la légitimité de nos régimes
fiscaux.
Ainsi, afin de percevoir la taxe de vente dans
le contexte d'économie numérique, le gouvernement agit selon trois axes en mettant en oeuvre autant de mesures
qui permettront d'abord de rendre obligatoire la perception de la taxe
de vente sur les services et biens incorporels vendus depuis l'étranger par des
entreprises n'ayant pas d'établissement au Québec
et de proposer au gouvernement fédéral une action coordonnée à cette fin;
deuxièmement, d'appuyer l'Agence des services frontaliers du Canada pour
améliorer la perception de la taxe de vente sur les biens corporels provenant
de l'étranger et vendus par des entreprises
n'ayant pas d'établissement au Québec; et troisièmement, de demander que
soit perçue la taxe de vente du Québec sur
les biens et services provenant du reste du Canada et vendus par des
fournisseurs n'ayant pas d'établissement au Québec.
Dans un autre
registre, afin de récupérer les montants dus au titre d'impôt sur les sociétés,
le gouvernement agit également sur trois directions. Dans un premier
temps, le Québec souscrit aux mesures proposées par l'OCDE et se coordonne avec le gouvernement fédéral pour obtenir les
informations, pays par pays, provenant du projet mentionné tantôt, le projet BEPS. Le Québec demande aussi au
gouvernement fédéral de lui transmettre les informations accessibles
dans le cadre des conventions fiscales signées avec d'autres pays. Enfin, une
troisième mesure stipule qu'afin de tirer pleinement
profit de ces informations, le Québec mettra en place une unité spéciale pour exploiter
les données financières et fiscales.
Par ailleurs, afin de récupérer les montants dus au titre de l'impôt sur le revenu
des particuliers, le plan d'action prévoit aussi des mesures
concrètes : s'entendre avec le gouvernement fédéral pour recevoir les informations
fiscales obtenues dans le cadre de la détention, et la prévention, et la
dissuasion du blanchiment d'argent et du financement d'activités terroristes, ainsi qu'une application de la norme d'échange
automatique de renseignements élaborée par l'OCDE; de mandater Revenu
Québec pour exploiter les données financières et fiscales afin que l'unité
spéciale dont j'ai fait allusion tantôt
agisse dans le domaine de l'impôt sur le revenu des particuliers. En
passant, les Paradise Papers, nous le savons
tous, vont être rendu publics, vont être mis en ligne par les journalistes le
14 novembre. C'est une mine d'informations que Revenu Québec va certainement
explorer.
Afin de
renforcer la transparence fiscale et corporative, le gouvernement intervient pour améliorer l'accessibilité aux informations
contenues dans le registre des entreprises du Québec, permettre une meilleure
identification des fiducies assujetties à l'impôt québécois et renforcer la
lutte contre les planifications fiscales agressives.
Alors, M. le Président, en conclusion, les mesures présentées constituent une première série,
une première série de réponses concrètes pour lutter contre l'évasion
fiscale et les difficultés de perception de l'impôt dans l'économie numérique. Un suivi de ces mesures sera assuré
dans le cadre du budget de 2018 ainsi que dans les rapports annuels
de gestion du ministère des Finances et de Revenu Québec. Avec cet ensemble de mesures, le gouvernement entend à la
fois renforcer la confiance de tous les citoyens
et assurer le bon financement des services publics. Dans un souci d'équité
et de justice sociale, les citoyens
doivent se conformer aux règles fiscales en vigueur et payer leur juste part de
taxes et impôt. Le plan d'action met
en place un cadre clair et réaliste dans lequel les règles sont applicables et
difficilement contournables. Tout le
monde doit payer sa juste part, nous
allons continuer de poser les gestes nécessaires en ce sens. Merci beaucoup, M. le Président.
• (10 h 20) •
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Soyez certain que les membres de la Commission
des finances publiques vont étudier
ce document avec tous les détails, et nous aurons certainement l'occasion de commenter celui-ci, donc merci pour son dépôt.
Argumentation
Nous allons maintenant
procéder aux échanges sur les blocs de cinq minutes, et c'est M. le député de Mercier qui... vous avez la parole pour un premier bloc de
cinq minutes.
M. Khadir : D'abord, je veux féliciter le ministre d'avoir produit ce plan, c'est-à-dire que c'est un formidable geste
dans la bonne direction. Mais, pour ceux qui nous écoutent... et je pense que
ça n'échappe à personne ici, parmi les législateurs, que c'est un plan, puis il n'y a pas de
mesure législative concrète qui puisse faire en sorte que ça
puisse se réaliser immédiatement.
Je remarque, par exemple, que vous dites que, dans
le fond, si on regarde à la page 42, pour donner suite aux recommandations de l'OCDE pour percevoir la taxe de vente du Québec,
il s'agit de simplifier le système
d'inscription pour le respect des obligations
fiscales. Je ne pense pas, M. le
ministre... personne, dans les
experts qu'on a consultés, qui nous
ont dit que... Dans le fond, ça se peut que, pour un commerçant, un petit
commerçant, le système d'inscription soit compliqué, mais vous comprenez que, pour Netflix, ou pour Google, ou
pour Uber, ils ont tous les moyens, puis ce n'est pas compliqué de
s'enregistrer. Ce n'est pas la complication, l'enregistrement, il faut
contraindre. Votre ministre du Tourisme a exactement
eu cette difficulté. Votre ministre du Tourisme s'est assise avec les représentants d'Airbnb, puis ils ont
dit : Bien, on n'a pas d'obligation, pourquoi on le ferait? Il n'y a pas de loi qui
nous contraint, nous, nous sommes localisés ailleurs.
C'est pour ça que mon projet de loi, qui
s'inspire d'ailleurs exactement de ce que vous dites, hein... J'attire l'attention du ministre à la page 43,
que le gouvernement utilisera tous les leviers. Bon, il y a
un levier qui s'appelle une loi, puis
c'est pour ça qu'on vous avance ça, on dit : Agissons rapidement,
il y a une loi. D'ailleurs, je veux dire au ministre, là, si on regarde son plan, ce plan et cette action
sont parfaitement compatibles. Ce que je dis au ministre,
c'est que ça, c'est juste un plan. Ça
pourrait prendre des mois et des mois avant que ça atterrisse par des moyens
concrets et législatifs qui contraignent les entreprises à le faire. Je
l'invite juste, donc... qu'on puisse secouer comme... ensemble, comme
institutions, qu'on agisse plus rapidement puis qu'on le mette en oeuvre
immédiatement. Il a l'occasion de le faire.
Ce que je lui
dis, autrement dit : Son plan qu'il nous présente, si on travaille
rigoureusement puis on part à partir des principes de ce plan, notamment le fait qu'il dit : Il sera
possible de s'inspirer des expériences provenant de l'étranger... C'est curieux, le premier pays à être nommé, c'est
l'Australie, ensuite la Norvège, la Suisse et les autres. On les a
étudiés, c'est dans le rapport, et c'est exactement en fonction du rapport qu'on a fait ce projet
de loi. Et j'implore le ministre de me dire maintenant, dans les minutes qu'il va avoir, où dans mon projet de loi, que sûrement son équipe a étudié, il y a une contradiction avec son plan. Tout ce qu'il y a là est parfaitement compatible avec ce que je vois ici pour la perception de la
taxe.
M. le ministre, il faut vraiment commencer par
le commencement. Et le commencement a été identifié par votre collègue du Tourisme. Elle nous l'a dit, elle s'est assise avec
les gens d'Airbnb, puis elle a dit : Bien, je ne peux pas les contraindre parce que,
dans la loi, ils ne sont pas obligés, ce n'est pas des établissements au Québec. Pour qu'ils paient des impôts et des taxes au Québec, il
faut que leur activité commerciale ici fasse en sorte que ces entreprises
sont automatiquement réputées avoir établissement au Québec. C'est ce
qu'offre comme outil législatif mon projet de loi. À partir de ce moment-là, il
n'y a plus d'inéquité, la loi impose
son équité à tout le monde de la
même façon. À partir d'un certain montant, soit 30 000 $, toute activité commerciale,
donc, d'importance qui est supérieure à ce montant fait en sorte que l'entreprise qui fait ça, qu'elle soit logée
en Antarctique ou ici, dans la Basse-Ville, à Saint-Roch, toutes les deux
sont réputées étant établies au Québec. Et, à partir de ce moment-là, donc, on
peut percevoir les taxes au titre à la fois de la taxe des entreprises, mais même on pourrait aller plus loin et
recueillir les montants dus à titre d'impôt sur le revenu des sociétés parce que ces sociétés sont réputées
avoir établissement au Québec, à partir de notre projet de loi. Donc, on
n'a pas besoin de vous répéter que les
géants du Web respectent actuellement la lettre de la loi, et nombre d'entre
elles nous disent : Bien, changez vos lois, on va s'y conformer.
Donc, je
répète, M. le Président, j'aimerais que vous m'expliquiez en quoi est-ce que
votre plan permettra, dans quelques
semaines, à Revenu Québec d'agir.
Sinon, expliquez-moi en quoi il y a une contradiction entre votre plan et mon projet de loi — vous
avez eu amplement le temps de l'étudier, là, ça fait plus de 10 jours
qu'on l'a déposé — parce que mon projet de loi pourrait nous permettre, dans les prochaines semaines, dès
janvier en fait, vraisemblablement, si on fait bien notre travail,
d'appliquer...
Le
Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Mercier. M. le
ministre, la parole est à vous pour
un bloc de cinq minutes.
• (10 h 30) •
M. Leitão : Très
bien. Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, je commencerais en disant que nous partageons les mêmes objectifs, là n'est pas le débat. Et d'ailleurs, dernièrement, dans les
derniers jours, dernières semaines, je pense que nous nous sommes exprimés longuement là-dessus, dans notre intention
de faire appliquer la TVQ à tous les services numériques en ligne sous un angle d'équité. Tout le monde doit opérer
avec les mêmes règles. Donc, nous avons la même intention, nous
partageons les mêmes intentions.
La question,
vraiment, est sur l'approche. Quelle est l'approche la plus efficace pour
arriver au même objectif, que nous partageons tous ici, là, dans cette
Chambre, j'en suppose? Là, il y a plusieurs éléments que je pense qui sont
importants à tenir en considération. Nous, notre approche... Nous, ce qui nous
intéresse, c'est le... C'est quoi, le plus efficace?
C'est quoi, la meilleure façon d'arriver à cet objectif-là? Et notre approche
s'insère dans un cadre multilatéral. Le Québec, bien sûr, nous avons notre propre agence de revenu, dont d'ailleurs
M. Éric Ducharme est ici, son P.D.G.,
une agence qui fait un très bon travail,
mais aussi une agence et une approche qui doivent opérer à l'intérieur d'un système harmonisé avec
le Canada. Et nous avons choisi ainsi. Nous avons choisi,
au Québec, en 2012, par exemple, de
signer un accord d'harmonisation pour nous assurer que le régime de taxe de
vente au Canada est le plus harmonisé possible.
Donc, plusieurs de vos suggestions, de vos
recommandations de votre projet de loi sont de nature unilatérale, et nous
pensons qu'une approche unilatérale serait contre-productive parce que ça
n'atteindrait pas les résultats souhaités. Le Québec s'éloignerait de sa politique
d'harmonisation, et donc ça nous amènerait beaucoup plus d'effets négatifs que
de potentiels gains. Donc, ça doit se faire à l'intérieur d'une approche collaborative
multilatérale non seulement à l'intérieur du Canada, mais aussi multilatérale,
de façon mondiale, parce que les enjeux soulevés par l'économie numérique
dépassent, et de loin, les frontières du Québec. Nous ne pouvons pas... Nos
actions ne seraient pas efficaces si elles ne sont pas coordonnées avec ce qui
se fait ailleurs. Sinon, tout ce qu'on ferait ce serait un déplacement
d'activités vers d'autres juridictions et on ne réglerait en rien les
problèmes. Donc, on doit agir de façon concertée et coordonnée avec nos
partenaires internationaux.
Depuis le
dépôt du rapport de la commission, qui est d'ailleurs un rapport que je salue,
et que j'ai salué, et que je trouve
qui est un rapport vraiment très très complet, plusieurs choses nouvelles se
sont matérialisées, dont la signature par le Canada, en juin ou juillet 2017, de la première partie du plan d'action BEPS de l'OCDE. Donc, ça, c'est déjà une
étape, un pas dans une nouvelle direction
qui va, à terme, porter fruit. Bien
sûr, la commission
n'avait pas pu, parce que c'est venu après, prendre ça en considération parce que c'est venu après.
Mais cette action-là du gouvernement canadien, et dont le Québec aussi s'en sert,
adresse en grande partie la question de la fameuse «Google tax», la fameuse «Google
tax» qui est un petit peu un raccourci pour pouvoir déterminer quelle est
la meilleure façon de mettre en place un impôt sur le revenu des grandes
entreprises du numérique. Cette approche-là ne peut pas être unilatérale. Cette
approche-là ne produit pas de résultats unilatéralement, mais de façon
multilatérale, ce qui se fait maintenant, par exemple, à l'intérieur même de l'Union européenne. C'est la meilleure façon de le
faire, et donc nous souscrivons entièrement à ce processus-là et nous
allons dans cette direction.
J'aimerais
juste finir avec une question au collègue de Mercier. Dans votre projet de loi, vous voulez
assujettir les fournisseurs de services de paiement. Comment est-ce que vous
feriez ça?
Le Président (M. Bernier) :
...sur le temps de... Laval-des-Rapides. Merci, M. le ministre. M. le député de
Laval-des-Rapides, la période est à vous.
M. Polo : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. Je tiens également à saluer, là, le ministre des Finances,
mais également les collègues des différentes oppositions, et notamment le collègue
de Mercier.
M. le Président, j'aimerais tout d'abord,
pour commencer, seconder les propos, là, du député de Mercier et souligner le travail qu'a effectué la Commission des finances publiques, dont vous êtes le président et un peu
l'instigateur également du mandat
d'initiative qu'a pris en charge la Commission des finances publiques au cours des dernières années. Pour moi, en tant que
membre de la Commission des finances
publiques, ça a été une très belle
expérience et aujourd'hui un aboutissement
ou presque, un aboutissement, là, de ce travail-là, un travail non partisan, un
travail vraiment à l'avancement de la fiscalité des entreprises.
Je dois dire,
pour le bénéfice, là, des citoyens
qui nous entendent, que ça n'a pas été un long fleuve tranquille, l'exercice qui a été effectué au sein de la
Commission des finances publiques. Je peux le dire à votre place, M. le
Président, parce que vous avez fait preuve
de leadership avec l'appui des différents collègues, notamment. Même vous avez
fait preuve de coercition, si je peux
utiliser le terme, à des moments très particuliers où nous avons convoqué,
invité différents participants,
différents experts à venir témoigner de leur expertise sur ce sujet-là. Je m'en
rappelle très bien, il y a de cela à peu
près un an, un an et demi, vous avez convoqué les différentes banques et
différents cabinets comptables, principaux cabinets comptables, qui, dès le départ, n'étaient pas entichés de
l'invitation à venir témoigner auprès de la Commission des finances publiques sur le mandat d'initiative en
question, et je pense que vous avez su user de votre expérience pour les
convaincre de participer à l'exercice et
également les différents collègues qui vous ont accompagné, notamment, en
mission, si je me rappelle bien, en Belgique
et au Luxembourg, également
pour venir, justement, bonifier, là, les différents arguments qui
ont été utilisés dans le rapport de la commission.
Je fais cette
introduction-là pour bien camper, là, le travail qui a été fait en amont, qui aujourd'hui aboutit par le dépôt du ministre
des Finances, là, d'un plan d'action pour assurer l'équité fiscale à
ce niveau-là. Nous parlons de
quoi exactement? Nous parlons de quels montants? Je vais suivre dans la lignée du député de Mercier. Nous
parlons d'évitements fiscaux qui sont
estimés... Et, si nous regardons ici, à la page 117, là, du document
qui a été déposé par le ministre des
Finances ce matin, nous parlons
d'estimations pour l'année 2017, là, d'à peu près 700 millions de dollars d'évitements fiscaux qui sont regroupés essentiellement à l'intérieur de trois catégories. Tout
d'abord, l'évitement fiscal abusif, l'exemple le plus probant, c'est la
manipulation des prix de transfert, c'est des pertes fiscales estimées à
159 millions de dollars. Nous parlons aussi... Une autre catégorie,
c'est la taxe de vente non perçue, donc la non-perception de la
TVQ sur les achats en ligne, on parle de
pertes fiscales de 270 millions
de dollars. Et on parle également
de l'évasion fiscale des particuliers,
les revenus étrangers non déclarés, on parle de 257 millions de dollars. Donc, c'est tout près de 700 millions
de dollars que le gouvernement du Québec, que le fisc ne perçoit pas. C'est de
l'argent important. Et, de là, le mandat d'initiative était un mandat
d'actualité où les gens, aujourd'hui, justement... et d'autant plus avec
l'actualité, là, que nous avons et les Paradise
Papers qui sont sur le point de sortir, c'est un enjeu d'une importance
capitale au moment même où nous
cherchons, comme société, à bien financer nos services, à non seulement bien assurer la pérennité de nos services, à bien assurer aussi la croissance de nos services.
Nous sommes très sensibles, moi, mes collègues, de l'équilibre fiscal à atteindre
entre la perception des revenus auprès des particuliers et des entreprises,
mais également l'offre
de services, l'offre des
services sociaux qui est offert aux différents Québécois.
Et donc, à
ce niveau-là, M. le Président, le plan d'action, selon moi, répond d'une belle façon, justement,
au mandat d'initiative et aux recommandations qui ont été formulées à
travers le mandat d'initiative, M. le Président. Donc, je vais avoir l'occasion
de poursuivre mes arguments au fur et à mesure des autres questions des collègues.
Le
Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Nous allons passer du côté de l'opposition officielle avec Mme
la députée de Taschereau. La parole est à vous, madame.
• (10 h 40) •
Mme Maltais : Merci,
M. le Président. Je salue le ministre,
les collègues, et je leur transporte les salutations de
mon collègue le
député de Rousseau,
qui malheureusement a dû s'absenter. Il en est désolé, il aurait aimé
être ici. Mais, comme je suis porte-parole culture, j'ai quand même un certain intérêt à ce dossier depuis longtemps.
Et je veux saluer aussi
M. Jean-Claude Lord, qui a une filmographie qui a marqué le Québec.
Je suis heureuse de le voir ici. C'est un homme qu'il faut saluer à
chaque fois qu'on le voit. Il nous a laissé de belles traces, dont bien des
films que j'aime beaucoup.
Je vais
féliciter le ministre des Finances parce
qu'effectivement il va taxer, dans des domaines culturels, certains biens en ligne comme Netflix, comme Spotify, mais
ça va arrêter là. Ça va arrêter là parce que je veux prendre ce cinq minutes pour lui faire clarifier sa position,
parce qu'il est clair que Québec n'imposera pas à tous les fournisseurs étrangers en ligne de percevoir la TVQ. Québec
n'imposera pas à tous les fournisseurs en ligne étrangers de percevoir la TVQ.
Il y a un gros titre ici du Soleil du 10
novembre qui dit : Commerce en ligne : le ministre des
Finances dit oui à Simons. La vérité, c'est que le ministre des Finances
dit non à Peter Simons. C'est ça, la vérité. Et voici comment je vais... Il y a
un titre ici qui dit : Commerce en ligne : Québec veut
imposer la TVQ dès 2018. Oui, mais est-ce qu'il imposera les fournisseurs étrangers de percevoir la TVQ? La réponse est
non. Et je tiens cette réponse de deux documents. Bien sûr, c'est écrit en toutes lettres en
pages 42 et 44 du document qu'il vient de déposer, mais j'en tiens pour
preuve aussi ce qu'il a eu la gentillesse de
donner à mon collègue de Rousseau, le député de l'opposition officielle, la
lettre qu'il a écrite au gouvernement
du Canada le 7 novembre, à l'honorable William Francis Morneau. Si on lit cette
lettre, on va voir ceci : «Comme ce type de fourniture — en
ligne — est
assujetti à nos taxes, je propose que nos gouvernements agissent de manière
coordonnée afin d'exiger des fournisseurs étrangers de services et de biens
incorporels — incorporels
seulement — qu'ils s'inscrivent aux régimes de la TPS/TVH
et de la TVQ et qu'ils perçoivent et remettent les taxes.»
Et il redit
ailleurs... il explique la différence entre «incorporels»... et ce qu'on va
faire avec les biens tangibles et intangibles.
Alors, c'est : «Le Québec propose donc une approche canadienne coordonnée
pour donner suite aux recommandations de l'OCDE en matière de taxes de
vente, ce qui implique — premier
picot de la lettre, on appelle ça des picots
maintenant : d'exiger des fournisseurs étrangers de services et de biens
incorporels qu'ils s'inscrivent aux régimes de la TPS [...] et de la TVQ
et qu'ils perçoivent et remettent les taxes.»
Et il dit
ensuite : «D'améliorer la perception des taxes sur les biens corporels aux
douanes.» D'améliorer seulement la
perception, mais il ne s'agit pas d'imposer aux fournisseurs de biens corporels
de percevoir la TVQ. Il s'agit — et même, M. le Président, vous allez être étonné — de dire à l'Agence des douanes :
Pourriez-vous, s'il vous plaît, un peu mieux percevoir les fournisseurs étrangers de biens tangibles? Pouvez-vous
mieux faire votre travail et mieux percevoir la TVQ? Et, comme ils ne sont pas très bons, aux douanes
canadiennes, parce qu'on perd à peu près 158 millions de dollars
par année d'après le document du ministre,
savez-vous jusqu'où il pousse l'odieux? Le ministre pousse l'odieux jusqu'à
dire qu'on va payer le fédéral pour qu'ils soient meilleurs, à l'Agence
des douanes. Donc, non seulement nous, au Québec, nous n'obligerons pas les fournisseurs étrangers de biens tangibles, les
compétiteurs de Peter Simons, à percevoir la TVQ, ce que pourtant tout le monde avait compris au
Québec, tout le monde avait compris ça au Québec... alors, non seulement
nous n'obligerons pas les fournisseurs, les
compétiteurs des Peter Simons de ce monde, les compétiteurs de nos petites
librairies de percevoir la taxe, mais en
plus on va renvoyer la TPS à Ottawa puis on va leur envoyer de l'argent
supplémentaire pour qu'ils fassent mieux le travail aux douanes. C'est
ça, la vérité.
Est-ce que le
ministre peut bien m'expliquer si ce que je viens de dire est bel et bien la
réalité? J'ai deux documents pour le
prouver. J'ai sa lettre du 7 novembre et j'ai le document entre les mains.
Il y a une différence entre dire qu'on va demander aux fournisseurs étrangers de percevoir la taxe et de
dire : Rien ne bouge, faites mieux votre travail, les douanes
canadiennes.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme la députée Taschereau. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Leitão :
Merci, M. le Président. Écoutez... O.K., par où commencer? La TVQ, bien sûr,
s'applique à tous les biens et
services. Nous avons maintenant deux sortes d'enjeux. Pour ce qui est des biens
physiques, les biens corporels, les
chaussures et les chemises qui traversent la frontière, ça, c'est une
problématique. L'autre problématique, ce sont les services surtout
incorporels, souvent numériques, qui sont consommés, qui sont achetés au
Québec, achetés en ligne, électroniquement, par des fournisseurs qui se trouvent
ailleurs. Les problématiques, les dynamiques sont différentes.
Pour ce qui
est des biens corporels, les chaussures et les chemises, ça, il y a un
Québécois à quelque part qui reçoit à la
maison, chez lui, un paquet, un colis avec le produit qu'il a acheté, alors la
question... et ça vient de partout. Bien sûr, il y a une très grande
entreprise, Amazon, mais il y en a des milliers, d'autres fournisseurs de ces
choses-là. Alors là, il y a une question
d'efficacité et une question de réalisme. Comment est-ce qu'on peut s'assurer
que ces chaussures et ces chemises,
que les Québécois qui achètent ces produits-là paient leurs taxes de vente
comme les autres qui vont dans le magasin
de M. Simons ici, à Québec, ou ailleurs? Alors, il faut que cela se
fasse — et c'est
ça, l'approche suggérée par l'OCDE — à la frontière. Donc, il faut
que ce soit l'organisme qui contrôle les frontières, dans ce cas-ci, l'agence canadienne, ou les fournisseurs... pardon, pas les
fournisseurs, les distributeurs comme Postes Canada, ou autres, ceux qui transportent les colis, il faut que ce soient
ces organismes-là, ces services-là
qui perçoivent la taxe. Comme ça, quand le citoyen va recevoir son colis à la maison, la taxe va lui
être perçue. Alors, le Québec, Revenu
Québec, le gouvernement du Québec,
nous n'avons pas la capacité physique de contrôler la frontière, de faire un
dédoublement du travail que... déjà l'agence
frontalière du Canada le fait. Donc, ce que nous disons, c'est ce que
les règles actuelles s'appliquent, doivent être appliquées, et l'agence canadienne doit, à la frontière, percevoir cette
taxe-là. Des fois, on nous dit qu'il
y a une question technologique,
qu'ils manquent d'équipements. Et, de façon un peu exaspérée, je dis :
Bien, si c'est ça, le problème, si c'est
l'équipement qui vous manque, bien, je vous achète l'équipement. Façon de dire
que : Bien, écoutez, vous avez votre
mandat, vous avez votre job à faire de contrôler la frontière et de percevoir
les taxes, donc faites-le. Pour les biens physiques, corporels, c'est à
la frontière que cela doit se faire, comme se fait, d'ailleurs, ailleurs.
Pour ce qui
est des services numériques en ligne, ça, c'est une approche complètement
différente qu'il faut qu'on applique.
Il faut que ce soit le fournisseur étranger qui perçoit la taxe. Comme nous
avons dit dans notre lettre, et donc ce que nous allons mettre en place, c'est un régime simplifié d'inscription
à la TVQ. Un régime simplifié d'inscription, ce n'est pas un tour de passe-passe, c'est un moyen pratique de nous
assurer de permettre à ces fournisseurs étrangers de s'inscrire à la TVQ et de pouvoir percevoir la
taxe. Comme vous le savez très bien, la taxe, la TVQ, TPS/TVQ, c'est une
taxe à valeur ajoutée, donc ce n'est pas une
simple affaire de s'enregistrer sur un formulaire parce qu'il y a toutes
sortes de déductions qui entrent en ligne de compte aussi. Donc, il faut
s'assurer que le régime simplifié qu'on applique aux fournisseurs étrangers
soit robuste et soit réalisable, soit pratique pour que cela puisse se faire
d'une façon pratique et efficace. C'est ce
que nous proposons de faire. Ça demande quelques changements législatifs qu'en
2018, tôt en 2018, nous allons commencer à mettre en place pour arriver
à cet objectif-là.
Mais, pour ce
qui... je reviens à l'enjeu des biens physiques, les chaussures et les
chemises, c'est à la frontière que la taxe doit être perçue.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous
allons passer du côté du député de Laval-des-Rapides. M. le député, vous
avez un bloc de cinq minutes.
• (10 h 50) •
M. Polo :
Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Je vais revenir sur certains sujets qui
ont été abordés autant par le
ministre que par le député de Mercier sur, justement, l'une ou la
recommandation la plus importante, là, du rapport de la Commission des finances publiques en lien,
justement, avec ce qu'on a déterminé étant la «Google tax». Et la raison
pour laquelle je veux apporter un peu plus de lumière sur cette proposition-là,
c'est pour mettre en évidence, si on peut dire, les impacts collatéraux d'une
telle taxe qui serait appliquée au Québec, selon des estimations effectuées par
le ministère des Finances du Québec, M. le Président.
Tout
d'abord, on parle d'une introduction d'une taxe sur les profits détournés,
c'est le modèle même de la «Google tax», qui apporterait un fardeau
fiscal additionnel de 159 millions pour les multinationales. Selon les
estimations du ministère des Finances du Québec, les profits détournés par les
multinationales du Québec atteignent 1,4 milliard de dollars
en 2017. La mise en place d'une taxe sur les profits détournés ferait en sorte
d'imposer ces profits transférés à l'étranger
au taux général d'imposition des sociétés prévu par le régime fiscal québécois,
soit 11,8 %. Une telle mesure pourrait
donc représenter un fardeau supplémentaire à l'impôt des sociétés de
159 millions pour les sociétés visées. Les estimations déterminent que la mise en place de cette mesure unilatérale
d'une taxe sur les profits détournés représenterait donc une hausse de coûts pour les entreprises
visées. Si les entreprises optimisaient leurs structures fiscales en
déplaçant de l'activité économique hors du
Québec afin de maintenir leur fardeau fiscal constant, la mesure pourrait donc
entraîner, à terme, une perte d'autour de
68 000 emplois et une baisse du PIB de 7,5 milliards de dollars.
La majeure partie de ces pertes d'emploi
et de cette diminution de l'activité économique serait donc chez les
fournisseurs québécois. Une telle
perte de revenus occasionnerait une
perte de revenus fiscaux de 513 millions de dollars. Pour ce qui est
impacts fiscaux, l'introduction de
cette taxe unilatérale sur les profits détournés aurait donc cet impact de
513 millions pour le gouvernement
du Québec. Donc, dans le total, c'est
146 millions de dollars qui seraient liés aux pertes d'emploi directes
associées à la mise sur pied d'une version québécoise d'une «Google
tax». J'apporte ces clarifications, et c'est en fait basé sur les estimations
du ministère des Finances du Québec.
Par ailleurs, M. le Président, j'écoutais tantôt notre collègue de l'opposition officielle faire certains... ou présenter certains arguments
auprès du ministre. Je sais qu'aujourd'hui elle prend le relais de son collègue
de Rousseau. Ceci dit, je serais curieux
d'entendre la députée de l'opposition
officielle élaborer un peu plus sur ses positions, les positions du Parti québécois, les positions
de l'opposition officielle face à cet enjeu-là. Elle nous pose une série de
questions, elle pose une série de
questions au ministre. Le ministre a déposé aujourd'hui un plan d'action. Nous avons travaillé sur un
rapport de la Commission des finances publiques. Mais il serait intéressant de
mieux comprendre la position de l'opposition officielle. Nous avons déjà une idée de la
non-position de la deuxième opposition, disons-le comme ça, parce qu'elle
a été assez confuse, cette non-position de
la deuxième opposition cette semaine. Mais ce serait intéressant, à la fin de la motion d'interpellation
aujourd'hui, de l'entendre nous expliquer, dans le scénario
actuel, que ferait donc l'opposition
officielle face à l'enjeu de l'évitement fiscal. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. M. le
député de Mercier, la parole est à vous.
M. Khadir :
C'est parce que l'analyse que vient de présenter le député de
Laval-des-Rapides, je comprends qu'il le
tire, donc, du travail du ministère, mais j'ai de sérieux problèmes avec le
travail du ministère. M. le ministre, en tout respect, je vois, à la page 117, des chiffres, pertes fiscales
liées aux paradis fiscaux, vous dites qu'il existe une estimation des pertes pour le Québec, mais ces estimations
sont basées sur les chiffres de 2012. En cinq ans, là, on peut, si on
fait juste une estimation de 20 % de croissance...
Une voix :
...
M. Khadir :
Non, non, non. Bien, c'est erroné. Je veux savoir la source de ça. Nous, on a
consulté les experts des grands
médias, hein, l'émission de monsieur... comment il s'appelle... Filion, on a
consulté les fiscalistes, on a consulté les chiffres canadiens. Là, à un moment donné, là, il ne faut pas raconter
n'importe quoi. Je pense que, là... Je suis désolé de dire ça comme ça, mais je pense que le ministre
est très mal entouré. Ce n'est pas les chiffres d'aujourd'hui.
Aujourd'hui, c'est au-dessus de
700 millions de dollars juste au chapitre de la non-perception de la taxe
de vente, d'accord? Ça, c'est une évaluation
basée sur 20 % de croissance. Je vous ai dit que, depuis janvier, là,
jusqu'à octobre, c'est 46 % de croissance. Donc, on a un problème.
Vous m'avez posé une
question à savoir comment on procéderait pour... Et vous avez raison. Donc, je
prends ça, là — j'ai 3 min 30 s — comme une ouverture du ministre. Quand il
pose une question technique sur comment on ferait pour obliger les fournisseurs de services de
paiement à nous aider à percevoir les taxes, je prends ça comme une
ouverture. Je vois là un... On a espoir, M.
le Président, je sais que vous êtes très préoccupé par ça. Je prends cette
question du ministre comme une
ouverture. Alors, M. le ministre, notre projet de loi s'inspire directement du
Foreign Account Tax Compliance Act,
le FATCA, qui force déjà les banques canadiennes à transmettre de l'info aux
États-Unis pour contrer l'évasion fiscale, et cette obligation
fonctionne très bien.
Les
banques, les présidents... Je vais trouver son titre exact. Monsieur... C'est
ça, Visa Canada a donné un mandat au
lobbyiste Eric Lamoureux pour demander au gouvernement de changer le cadre
législatif et permettre l'imposition des transactions en ligne sur la
base des cartes de crédit utilisées. Visa Canada lui-même intervient parce
qu'ils sentent qu'il y a un problème d'inéquité, eux aussi. Autrement dit, si
vous voulez, là, dans notre projet de loi, on crée une obligation pour les
fournisseurs de services de paiement de communiquer à toute personne autorisée,
c'est-à-dire le gouvernement du Québec, l'Agence
du revenu du Québec — puis on n'a pas besoin du Canada,
là, on a totale autonomie là-dessus — donc,
toute information relative aux achats effectués au Canada
ou à l'étranger par une personne résidant au Québec.
Pour tester la chose,
là — parce
que c'est très compliqué, actuellement, si quelqu'un veut se conformer aux règles — moi, pour tester la chose, j'ai dit :
Je vais acheter quelque chose en ligne puis je vais voir comment ça
marche. J'ai regardé ce que j'ai besoin.
J'avais besoin d'un chandail pour jouer au hockey sur patins, là, avec une
équipe à Montréal. Et là je me
rappelais de la Série du siècle, Valeri Arlamov. J'ai regardé, au Canada, il
n'y en avait pas. Il y avait un site, dont
j'oublie le nom, qui m'en a trouvé un à Saint-Pétersbourg. Ça m'a été livré en
10 jours à peu près — hein, Valeri Arlamov, je
ne sais pas si vous vous rappelez, là, la star de l'équipe soviétique — et là après moi, je me suis
demandé : Comment je dois remplir mes
taxes? Bien, il a fallu 24 heures à votre ministère pour le trouver. Parce
que je ne l'ai pas trouvé sur Internet, on a fait une demande à votre
ministère, ça a pris 24 heures.
Donc, si M. le Président
le permet, je voudrais aujourd'hui, comme c'était compliqué de remplir ça, s'il
y a consentement, je voudrais payer, parce que j'ai acheté 57 $...
Le Président (M. Bernier) :
Vous avez juste à le faire à la fin de l'interpellation.
M. Khadir : Très bien. À la fin de
l'interprétation, je déposerai donc mon... à Revenu Québec parce que... Et
vous imaginez, là, vous demandez au citoyen
de remplir un formulaire pour payer 6 $ de taxes sur leur vente. Tout ça
pourrait être facilement réglé, exactement
comme on le fait avec les machines qu'on a posées dans les pizzérias, dans les
taxis. La technologie existe, et les
services de paiement par Internet, les Visa de ce monde sont prêts à
collaborer. Eux-mêmes font des représentations pour dire :
Autorisez-nous à le faire, il n'y a pas de problème. Alors, ne créons pas de
problème là où il n'y en a pas.
M. le ministre, je vous implore. Vous montrez de
l'ouverture, vos collègues sont d'accord, tout le monde est d'accord avec l'esprit de cette approche. Votre
plan est compatible. Je vous ai demandé la question, vous ne m'avez pas répondu, donc j'estime qu'il n'y a pas de
contradiction. Il y a juste des questionnements techniques. Bien, on
s'assoira ensemble, on travaillera. Acceptez ma proposition déposée au projet
de loi.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Mercier. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Leitão :
Très bien, merci beaucoup. Deux choses, parce qu'il y avait deux volets à votre
question. D'abord, vous mettez en doute
les estimés du ministère des Finances sur les pertes fiscales associées à
l'évasion fiscale internationale. Donc,
les 700 millions de dollars qui sont divisés, comme mon collègue de
Laval-des-Rapides avait mentionné, la fiscalité des entreprises, le commerce
en ligne, TVQ et la fiscalité des particuliers, ce sont des estimés pour
l'année 2017, basés sur les données 2017.
M. Khadir : ...
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Mercier, M. le député de Mercier, la parole est au ministre. Allez-y,
M. le ministre.
• (11 heures) •
M. Leitão :
Donc, après vérification, en utilisant les modèles de façon rigoureuse et
professionnelle, on arrive, comme mon
collègue a mentionné, que l'évitement fiscal résultant des profits détournés,
donc les entreprises, c'est à peu près
150 millions pour l'année 2017, le commerce électronique, c'est à peu
près 270 millions en 2017, et les particuliers, c'est à peu près presque 260 millions en 2017
aussi, pour un total d'à peu près 700 millions. Selon notre estimé,
notre meilleur estimé, c'est ça, le vrai montant en question.
C'est
considérable, bien sûr. 700 millions de dollars, ce n'est pas rien, c'est
un montant considérable. Et, bien sûr, avec
700 millions, on pourrait faire beaucoup de choses en termes de
financement des services publics. Mais ça nous donne un ordre de grandeur réaliste de la question. En
2018, est-ce que ça va être la même chose? Probablement que l'estimé serait un peu différent en 2018 parce qu'en effet,
du côté du commerce électronique, ça progresse. Mais ça nous donne à
nous tous... Après examen, analyse rigoureuse basée sur la réalité économique
du Québec, c'est ça qui nous donne les 700 millions.
Ça me fera grand plaisir, avec le député de Mercier, d'en discuter avec nos
membres de l'équipe au ministère des Finances, qu'ils expliquent d'où
viennent les chiffres, mais c'est ça, le chiffre.
Maintenant,
pour ce qui est de la deuxième partie de la question du collègue, vous avez
entièrement raison, parce que le
système actuel où ça serait au citoyen à s'autocotiser pour les taxes de vente,
clairement ça ne fonctionne pas. Je pense
que, partout au Québec... M. Ducharme, je pense qu'il y a eu quoi, sept
personnes qui ont fait ça? Ça ne marche pas. Clairement, ce n'est pas comme ça qu'on va adresser la question de la
taxation du commerce électronique. Il faut que la taxe pour les biens corporels, physiques, comme
votre chandail que vous avez acheté en Russie... la marche à suivre
aurait été à la frontière, donc, quand ça
arrive, que ce soit l'agence canadienne... frontalière du Canada qui perçoit la
taxe. Comme ça, quand vous recevez
votre colis à la maison, la taxe est incluse. C'est comme ça que le système
doit marcher. Et, de toute évidence, il fonctionne comme ci comme ça,
même plutôt comme ça. Ça veut dire que ça ne fonctionne pas très bien.
Et c'est ce
que nous demandons au gouvernement fédéral, d'assumer son mandat, sa
responsabilité. Le contrôle des frontières, c'est la responsabilité du
gouvernement fédéral. Et nous sommes prêts à collaborer avec eux, à trouver un
moyen technologique le plus efficace pour nous assurer que cela avance. Il y a
toutes sortes, maintenant, de scanners optiques
qui peuvent accélérer ce processus-là. Nous sommes prêts à collaborer et à
travailler ensemble pour trouver une solution pratique, réaliste, mais
c'est à la frontière que cela doit se faire.
Pour ce qui
est de l'autre volet qui est aussi extrêmement important et est au coeur de
votre projet de loi, c'est la question des fournisseurs de services de
paiement. Écoutez, ça, on a bien regardé cette question. Certains autres pays ont essayé d'adresser cette question-là, mais
réalistement, de façon pratique, ça ne fonctionne pas. Les fournisseurs
de services de paiement, les cartes de
crédit et autres, n'ont pas les moyens techniques et physiques de pouvoir
percevoir la taxe de vente, ils ne peuvent pas le faire. Si vous achetez...
S'il y a une transaction qui apparaît sur votre carte de crédit, vous ne...
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre.
M. Leitão : On y reviendra.
Le Président (M. Bernier) : Nous aurons l'occasion de reprendre tout à l'heure. M. le député de
Laval-des-Rapides, la parole est à vous.
M. Polo :
Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Je vais utiliser mon temps pour aborder
un sujet, en fait, en prévision de
l'intervention de notre collègue de Granby, puisqu'il nous accompagne ce matin
à la motion d'interpellation. Il nous
a également... Il est membre de la Commission des finances publiques et il a
participé aux travaux, là, du mandat d'interpellation au cours des
dernières années.
La raison
pour laquelle je souhaite aborder le sujet d'aujourd'hui en lien avec son
intervention, en anticipant son intervention,
c'est parce que, bien sûr, le sujet d'aujourd'hui, le sujet de ce matin a été
un sujet d'actualité non seulement à Québec,
mais à Ottawa au cours de la dernière semaine. Et hier matin, dans la revue de
presse que nous avons reçue, le journaliste du Journal de Montréal
ou Journal de Québec, Marc-André Gagnon, dans son article, relatait
justement certaines incohérences, en fait certaines cohérences sur les propos
du ministre, les propos du député de Rousseau. À ce titre-là, il faut saluer, effectivement, la cohérence des propos du
député de Mercier. On peut souvent ne pas être d'accord, mais on sait où il loge et on sait clairement à
quel endroit il loge sur les différents enjeux, notamment sur celui de ce
matin.
Ceci dit, je vais citer quelques éléments,
passages de l'article en question, M. le Président, parce que l'article mentionne notamment que le ministre des Finances a
remercié ou souligné le député de Rousseau, puisqu'il a dit... le député
de Rousseau a commencé par dire : «Il y
a plusieurs positions sur la table. Il y a la nôtre, il y a celle de la CAQ
d'hier matin, [il y a] celle de la
CAQ d'hier après-midi et [il y a] celle de la CAQ d'hier soir», en parlant de
la journée du mercredi. M. le ministre
des Finances a salué, effectivement, le député de Rousseau de par sa cohérence
et, en fait, souligné également l'incohérence
de la position de la deuxième opposition, puisque, tel que le journaliste
Marc-André Gagnon le soulève dans son
article, au cours de la journée, le chef caquiste a précisé que l'exemption des
taxes pourrait s'appliquer seulement à certains
produits comme le livre, mais il a toutefois refusé de s'avancer sur les autres
catégories de produits et services qu'un gouvernement de la CAQ
cesserait de taxer.
Moi, je suis
très curieux, en fait, d'entendre ce que le député de Granby va proposer, ou va
poser comme questions, ou va
peut-être clarifier, parce qu'en fait la personne de sa formation politique qui
a pris la parole sur cet enjeu-là avant le chef de la deuxième
opposition, c'était le député de Borduas, le député de Borduas, que j'estime
énormément, que j'apprécie énormément, mais qui n'est pas membre de la
Commission des finances publiques, et donc, selon moi, a peut-être manqué de
perspective sur tout le travail qui a été fait au cours des dernières années à
ce niveau-là.
Donc, il sera
intéressant de savoir un peu quelle est la position de la deuxième
opposition sur cet enjeu-là, parce qu'effectivement entre ce qu'ils ont dit le matin,
l'après-midi, le soir, il y a eu des incohérences totales, et je pense que
ça a été facile, à ce moment-là, de le
souligner, notamment ici, en Chambre, mais également au niveau des médias,
l'incohérence de la deuxième opposition sur cet enjeu-là.
Donc,
j'aimerais également, M. le Président, revenir sur... et je reviendrai sûrement,
sur ma prochaine intervention, sur
les mesures, quelles sont les mesures prévues, justement, dans le plan d'action
afin de percevoir la taxe de vente dans le contexte d'économie numérique
parce que c'est vraiment l'enjeu de la motion d'interpellation de ce matin.
C'est un enjeu qui, aujourd'hui, en 2017,
représente près de 12 milliards de dollars pour l'année 2017 en
termes de pertes fiscales ou, en
fait, de valeur des achats en ligne, et juste pour le Québec, c'est à peu près
270 millions de dollars. Et je vais souligner en revenant, lors de mon prochain bloc, M. le
Président, vraiment, quatre mesures, la mesure 4, la mesure 5 et la
mesure 6, de quelle façon, justement, le ministre des Finances propose,
justement, de s'attaquer à ce contexte-là.
Je veux peut-être commencer par la première des
trois mesures, la mesure n° 4 : «...le gouvernement veut rendre — justement — obligatoire la perception de la taxe de
vente sur les services et les biens incorporels vendus depuis l'étranger
par des entreprises n'ayant pas [établissement stable] au Québec. [À cette fin,
justement,] le gouvernement propose au gouvernement fédéral une action
coordonnée[...].
«[...]Les
fournisseurs étrangers sans [établissement stable] au Québec auront
l'obligation de s'enregistrer auprès de Revenu Québec et de lui verser
les taxes de vente perçues, taxe de vente du Québec et TPS/TVH.
«Un système
simplifié d'inscription facilitera le respect des obligations fiscales tout en
assurant l'intégrité des régimes [de taxation].»
Malgré ce qu'a dit notre collègue de
l'opposition officielle, c'est...
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député. Nous aurons
l'occasion de revenir tout à l'heure. Nous allons aller du côté du
deuxième groupe d'opposition avec M. le député de Granby. La parole est à vous.
M. Bonnardel :
Merci, M. le Président. Je suis très content que le gouvernement souhaite
m'entendre ce matin.
On va mettre
quelque chose au clair, M. le Président. Hier matin, j'ai déposé une motion à
l'Assemblée nationale pour demander
qu'on puisse débattre, minimalement... suite à ce que le ministre nous a dit
hier de taxer tous les produits vendus
sur les plateformes numériques, de minimalement discuter, discuter pour qu'on
soit capables peut-être d'amener à détaxer
certains produits pour en arriver que... si un jour le ministre met en place sa
proposition de taxer tous les produits sur le numérique, sur les plateformes numériques, bien, qu'on en arrive à un
coût nul. Alors, tout le monde ici est pour taxer plus les Québécois,
rendre la TVQ payable par les consommateurs. Mais, de l'autre côté, on se
dit : Si on va chercher 270 millions, 300 millions de plus,
additionnels, bien, on ne pensera minimalement pas aux consommateurs.
Et qu'on me comprenne
bien, là, on vit une crise. Nos commerces de détail vivent une crise au Québec.
On n'a qu'à penser à Sears. Il y en
aura d'autres dans les prochaines années. L'équité fiscale pour nous tous,
c'est important. On s'attend à ce que
les Québécois... puis je pense que la grande majorité des gens qui nous
écoutent vont se dire : Je suis prêt à payer ma taxe. Mais, de
l'autre côté, le gouvernement se dit : Moi, si je vais chercher cet argent
additionnel, j'augmente les revenus, mais, minimalement,
je n'aurai même pas le loisir, minimalement, de penser à détaxer certains
produits. Le ministre a dit : C'est
rigolo, c'est impossible, ça ne s'applique pas. Pourtant, pourtant, au Québec,
il y a déjà des produits détaxés :
les médicaments sur ordonnance, les couches, les livres, certains produits
alimentaires. J'ai huit pays ici où déjà on détaxe, exonère certains produits : en France, certains services
médicaux; en Espagne, des événements culturels. On en consomme, des événements culturels, des shows, des
spectacles d'humour. Alors, vous n'osez même pas vous pencher sur ce que
la Suède, le Royaume-Uni, la Californie fait.
• (11 h 10) •
M. le
Président, j'écoute le ministre depuis tantôt. Il nous dit : Voici notre
réponse. Mon collègue de Mercier a écrit une loi. Moi, demain matin, je suis prêt à ce qu'on en discute, de sa
loi. Tout le monde est conscient que, si on laisse cette situation durer
encore cinq ans, 10 ans, la crise va s'accentuer. Et là j'écoute le
ministre, et il nous dit : Les achats numériques,
on aura une déclaration non obligatoire où les sociétés, les Spotify de ce
monde, auront une déclaration non obligatoire à signer. C'est bien ça
que j'ai compris. Donc, aucune mesure coercitive.
De l'autre
côté, on lance la balle à l'agence
frontalière, à Postes Canada, en nous disant que les produits... Puis qu'on se comprenne, là, tout le monde a déjà acheté des produits, ici, à l'extérieur, qu'on... eBay, Amazon, AliExpress. Tout le monde l'a déjà fait.
Tout le monde a déjà vu que la taxe ne s'appliquait pas.
Alors, moi, je veux comprendre comment le ministre...
si on lance la balle du côté du fédéral, comment on va répondre à Peter Simons puis à tous ces commerçants ailleurs
au Québec qui se disent : Le ministre
nous dit, première page du journal,
«on va tout taxer», s'il n'y a aucune coercitive que le ministre
va mettre en place. Est-ce que le ministre
va déposer un projet de loi,
début 2018, pour répondre à la loi que mon collègue de Mercier
a déposée? Est-ce qu'il entend
adopter cette loi avant la prochaine
élection? Va-t-il minimalement se pencher sur le fait que, s'il va chercher... Parce qu'on parle de 270 millions dans ce document, l'Institut de la
statistique disait 350 millions de pertes fiscales, peu importe, on
est dans ces eaux. Mais au final, M. le
Président, moi, je veux que le ministre m'explique, là. À la page 55 de
son document, on a l'approche
retenue : «...exiger des fournisseurs étrangers qu'ils perçoivent la taxe
de vente du Québec pour ce qui est des
biens incorporels[...] — il nous a dit tantôt que c'est une déclaration non
obligatoire — améliorer
l'efficacité de la perception de la taxe de vente...» Améliorer
l'efficacité, comment il entend mettre ça en place?
Je veux poser
une question fort simple, là : Est-ce qu'il va déposer une loi
début 2018? Est-ce qu'il souhaite adopter cette loi avant la fin de la session du printemps prochain, donc avant
la prochaine élection? Est-ce qu'il entend de le mettre en oeuvre et appliquer ça le plus rapidement
possible? Est-ce qu'il va se pencher minimalement sur le fait aussi de
détaxer certains produits pour rendre cette augmentation à coût nul?
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Granby. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Leitão :
Merci, M. le Président. Là, il y a, O.K., beaucoup de choses, là. Si on veut
parler de fardeau fiscal, parlons-en,
de fardeau fiscal. Ça, c'est une chose. On va réduire les taxes et impôts. On
peut en discuter longuement de quelle
serait la meilleure approche. Nous, nous avons déjà dit que nous allons
continuer d'alléger le fardeau fiscal des Québécois. Nous jugeons que la meilleure façon de le faire, c'est d'y
aller par un allègement de l'impôt sur le revenu. Là, on pourrait se rapporter aux discussions que nous
avons eues ici et ailleurs dans le cadre du rapport de la commission
Godbout entre l'efficacité de taxes de vente
versus impôt sur le revenu. Et je pense que c'était assez clair, les experts
indépendants, massivement, recommandent que
la meilleure façon, la façon la plus efficace de soutenir l'économie et de
donner un peu d'oxygène aux familles
québécoises, c'est d'y aller par l'impôt sur le revenu, en le réduisant, bien
sûr. Ça, c'est l'approche qui est la plus équitable, la plus pratique,
la plus efficace. Donc, ça, c'est une discussion qu'on peut en avoir.
Est-ce qu'on
veut détaxer certains produits, certains biens essentiels? On le fait déjà,
bien sûr. Les loyers ne sont pas taxés,
le livre, il y en a d'autres, l'alimentation, les produits... Quand on a mis en
place la taxe de vente, on s'était mis d'accord,
nous tous, au Canada, sur les éléments qu'on ne voulait pas taxer au Canada.
Vous savez aussi très bien que, dans certains
autres pays, il y a une taxe, une TVA, une taxe à valeur ajoutée. Ils ont des
différents taux d'imposition selon des produits
qui sont de luxe, ou pas de luxe, ou quoi. Nous, au Canada, dans les
années 90, on s'était dit : Mais non, nous, on veut une approche simple et efficace, on veut une
taxe à valeur ajoutée, oui, mais on veut que ce soit le même taux pour
tous les produits et services, à l'exception d'un certain nombre de biens
essentiels. Et ça évolue aussi avec le temps. Et tout dernièrement — c'est peut-être un détail, mais c'est un détail important — on avait aussi décidé, au Québec et
au Canada, de détaxer les produits d'hygiène
féminine. Donc, ces choses-là peuvent évoluer, et on est toujours ouverts à
ce genre de discussion. Il n'y a aucun problème.
Là où j'ai un
énorme problème avec la proposition de la CAQ, c'est qu'en fin de compte vous
revenez à la même... c'est-à-dire
vous partagez le point de vue du gouvernement fédéral. Donc, vous, vous voyez
la taxe Netflix, pour utiliser le nom...
nous savons tous que ce n'est pas ça, là, c'est plus vaste que ça, mais vous
voyez ça comme étant un alourdissement du
fardeau fiscal. Ce n'est pas ça, c'est une question
d'équité. C'est-à-dire c'est un fournisseur qui fournit un service
qui est taxable. Et un fournisseur local,
lui, il doit percevoir la taxe de vente, et un fournisseur étranger, lui, il ne
la perçoit pas. Donc, c'est une question
d'équité. Ce n'est pas une nouvelle taxe, ce n'est pas un moyen d'alourdir le fardeau fiscal. C'est un moyen d'assurer
l'équité, parce que certains paient la taxe et d'autres ne la paient
pas. Donc, c'est ça, l'enjeu. Si vous voulez parler d'allègement fiscal,
on pourra le faire aussi certainement.
Maintenant, pour ce qui est de notre proposition
en ce qui concerne la taxation des services numériques en ligne, oui, ça a
besoin de certains changements législatifs, des changements administratifs et
aussi des changements législatifs. Nous
avons signé... et c'est important, là, c'est important de constater que nous
avons signé, en 2012, un accord d'harmonisation
avec le gouvernement fédéral. Donc, la taxe de vente du Québec, elle est
indépendante de la TPS mais elle est
harmonisée. Si on veut se désharmoniser, si on veut avoir quelque chose de
complètement différent, il faut faire très attention, ce n'est pas simple. Nous avons
certaines marges de manoeuvre, nous pouvons faire certaines choses.
Nous, nous avons l'assurance que ce que nous
proposons est faisable, est réaliste et ça peut se faire. Mais pour cela nous
avons besoin de ce régime simplifié
d'inscription. Et encore, comme j'avais dit au député de Mercier tantôt, ce
régime simplifié d'inscription à la
TVQ, ce n'est pas quelque chose de donner un passe-passe à qui que ce soit.
C'est que, encore une fois, la taxe à valeur ajoutée, l'entreprise doit
s'enregistrer auprès des autorités fiscales.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons
passer du côté du député de Laval-des-Rapides. La parole est à vous, M.
le député.
M. Polo :
Merci, M. le Président. Je salue l'intervention du député de Granby parce qu'en
fait il a juste réitéré l'incohérence
de la position de cette semaine en parlant, justement, de... en accentuant
l'inéquité actuelle, l'inéquité au niveau, justement, de certains
produits qu'on peut acheter physiquement au Québec, taxables, où le
consommateur s'attend à payer, justement, la
TVQ et la TPS alors qu'il peut retrouver un produit similaire en ligne à
travers différentes plateformes, Amazon et compagnie, sur Internet et
éviter à ce moment-là avoir à payer la taxe de vente du Québec et la TPS
également.
En fait, ça
ne répond pas au cri du coeur qu'on a entendu, auquel on a pris connaissance,
de différents détaillants. Comme vous l'avez mentionné, M. Simons
nous accompagne aujourd'hui. Il est accompagné du P.D.G. du Conseil québécois du commerce de détail, M. Léopold
Turgeon, que j'ai rencontré à plusieurs reprises, auprès de qui j'ai
également participé à plusieurs événements au cours des dernières années, en
tant que porte-parole, justement, de l'industrie du commerce de détail, une industrie qui représente plus de
35 000 détaillants, presque 480 000 emplois directs
associés, justement, à cette industrie, un
cri du coeur de cette industrie qu'on entend depuis des années. Je me rappelle
très bien, en 2014, la première fois que M. Turgeon est venu me
voir à titre d'adjoint parlementaire au ministre de l'Économie à l'époque pour
nous expliquer, justement, un peu ce que nous tous ici...
Et le seul
point sur lequel je suis d'accord avec le député de Granby, c'est
qu'effectivement le commerce de détail traverse
un point névralgique, actuellement. Comment s'adapter? Comment se moderniser?
Comment, si on peut dire, mettre à
jour leurs façons de faire face aux changements de comportement des
consommateurs d'aujourd'hui, aux besoins des consommateurs
d'aujourd'hui? Pourquoi je fais référence à ça, M. le Président? Parce qu'il y
a une mesure que la ministre de l'Économie a
mise sur pied lors du dernier budget, qui est un investissement d'un peu moins
de 5 millions de dollars, d'un
projet pilote, projet PME 2.0, développé, justement, avec le CQCD,
justement, afin d'aider ou d'accompagner 1 325 détaillants dans leur virage numérique. On parle de
commerce de détail, on parle de virage numérique aujourd'hui.
• (11 h 20) •
Pourquoi je
fais référence à ça? Parce que ce que le commerce de détail a de besoin, ce
n'est pas plus d'inéquité. Ce que le
commerce de détail a de besoin, c'est des mesures qui vont, justement,
accompagner nos détaillants de chez nous, un, à rester compétitifs face à la compétition internationale, face aux produits qui peuvent s'acheter en
ligne sans avoir à payer, justement,
la même TVQ et la même TPS que nos commerçants du Québec
ont à facturer auprès des consommateurs, et deuxièmement — et
ce qui est encore plus important — c'est
de prendre ce virage numérique, en 2017, du XXIe siècle et, justement,
adapter leurs pratiques en fonction, justement, des nouvelles habitudes de
consommation.
Qu'est-ce qu'on veut dire par là, M. le Président?
On parle, justement, d'adapter leur environnement technologique, leur vitrine technologique afin d'être capables
non seulement d'offrir le meilleur produit physiquement ici, au Québec, mais également de l'offrir sur Internet même à
partir du Québec. Ce que je veux dire par là, c'est que, malgré que
90 % des entreprises du Québec ont un site Web fonctionnel, en fait il est
principalement informationnel, seulement 14 % des entreprises au Québec ont un site Web transactionnel. Donc, quand on
parle d'inéquité, O.K., c'est plutôt, entre autres, à ce point-là, M. le
député de Granby, qu'il faut travailler également, comme gouvernement, de
s'assurer qu'on outille correctement nos PME
et nos entreprises afin qu'elles soient non seulement compétitives face à leurs
compétiteurs ici même, au Québec, mais également face à leurs
compétiteurs internationaux et d'être capables d'offrir les produits québécois
dans le plus grand nombre de marchés à l'international.
Et c'est là
où fait défaut la position de la deuxième opposition. C'est là où fait défaut
la position, justement, du député de
Granby lorsqu'il dit : Bien, écoutez, puisque certains produits n'ont pas
à payer... les consommateurs n'ont pas à payer de TPS, TVQ sur Internet, bien, détaxons ces mêmes produits-là au
Québec. Ayons la cohérence dans l'incohérence, c'est essentiellement ça,
la position de la CAQ, M. le Président, et c'est là où la CAQ, bien souvent,
elle répète la même erreur.
Document déposé
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de
Laval-des-Rapides. Nous allons passer du côté du député de Mercier. M.
le député de Mercier, vous déposez un document, que je reçois et que je...
M. Khadir : Merci. Oui,
c'est la page 179.
Le
Président (M. Bernier) : Et je me suis assuré d'en faire la
distribution aux membres, aux gens participant à cette interpellation de
ce matin. La parole est à vous.
M. Khadir : Je vous suis très reconnaissant. En
fait, c'est la page 179 du rapport Godbout, qui date de 2015, qui souligne la difficulté d'évaluer, justement, les
pertes fiscales liées au commerce électronique. Mais déjà, en 2013,
Revenu Québec... 2012,
je veux dire, Revenu Québec offrait une estimation de 300 millions, entre
165 et 300 millions. Considérant l'ampleur
de la croissance du commerce électronique, je pense qu'il est assez aisé de
comprendre que ce qui est dans le rapport
actuel qu'a déposé aujourd'hui le ministre, c'est-à-dire 270 millions, est
vraisemblablement bien en deçà de la réalité.
Je ne dis pas ça pour accabler le ministère. Que ça soit 700 millions,
comme nous avons pu l'évaluer avec nos experts
et avec le recours aux experts de l'émission de M. Fillion, que ça soit
300 millions ou 270 millions, comme disent les gens du
ministère, c'est qu'au moins ça nous emmène à une certaine humilité, M. le
ministre, de reconnaître que, probablement, même au ministère des Finances, il
est impossible vraiment d'évaluer l'ampleur du phénomène. Mais il y a une
certitude chez tout le monde : il faut agir.
Ce qui me permet d'attirer votre attention,
avant de passer au concret, sur le fait que, vraiment, nous nous sommes attelés
à ce travail avec tout le sérieux que ça requiert. Nous avons consulté
plusieurs experts, notamment Mme Marwah
Rizqy, que la Commission des finances publiques a eu l'occasion d'écouter, que
la commission présidée par M. Godbout a eu l'occasion de consulter.
Déjà, entre 2013 et 2014, Mme Rizqy proposait des pistes de solution qui reviennent un peu à ce qu'on vous propose
aujourd'hui dans notre projet de loi. Je pense, on a juste trop tardé, on a
juste trop tardé. Et il n'est plus permis d'étirer la sauce, ce n'est pas
nécessaire, on a tout ce qu'il faut.
Le ministre
s'inquiète des banques, les cartes Visa, il dit que c'est impossible. C'est
juste, je pense, qu'il est mal entouré. Je ne veux pas accabler... Je ne
sais pas, M. le ministre, comment dire ça, mais ça ne tient pas la route. Le
Courrier parlementaire, de nous-mêmes, ici, à Québec, si vos gens l'avaient
lu, là, Le Courrier parlementaire du 3
octobre nous informe que Visa Canada a donné mandat à un lobbyiste pour
demander au gouvernement de changer le cadre
législatif et permettre l'imposition des transactions en ligne sur la base des
cartes de crédit utilisées pour payer les achats en ligne. Visa Canada veut aussi démontrer ses capacités
technologiques en ce sens. Visa Canada a donc déjà les outils
nécessaires, M. le ministre, pour remplir pleinement le mandat que mon projet
de loi veut lui confier.
Ensuite, est-ce
qu'il y a des logiciels? Est-ce qu'on peut... Tu sais, à quoi on recourt pour
faire ça? Est-ce que c'est trop
complexe et trop onéreux? Souvent, on entend ça de la part de gens qui ne
veulent pas bouger. Ce type de logiciel n'est pas coûteux, et surtout je veux rappeler au ministre qu'il se
rembourse rapidement avec les pertes fiscales qu'on va récupérer. Le
meilleur exemple, c'est certainement l'implantation des modules
d'enregistrement des ventes que le gouvernement
du Québec a instauré dans des restaurants et qui a permis au gouvernement de
récupérer 1,5 milliard de dollars en sept ans, dont près de
300 millions l'an dernier.
Alors,
M. Leitão, vous utilisez d'ailleurs ce logiciel, vous devez être au
courant, pour lutter contre la compétition déloyale, autant dans les milieux de l'industrie du taxi que dans la
restauration. Alors, lorsque Revenu Québec... En fait, il faut se rappeler que Revenu Québec estime à
72 millions les pertes fiscales encourues dans l'industrie du taxi chaque
année par divers stratagèmes, dont
l'omission de payer la TVQ et la non-déclaration de certains revenus. Donc, on
a déjà un logiciel qui le fait, et
d'ailleurs, pour ce qui est d'Uber, qui a accepté de payer les TPS et TVQ,
bien, Uber utilise les services fournis par les fournisseurs de cartes.
Donc, je vous implore, M. Leitão, j'entends
de votre part, de la part de votre ministère, de l'ouverture...
Le Président (M. Bernier) : ...
M. Khadir : Il me reste
54...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, mais évitez d'appeler le ministre par son nom. Merci.
M. Khadir : Ah! excusez-moi. M. le Président,
j'implore le ministre... excusez-moi. J'implore le ministre et son équipe de... Parce que mon collègue de Granby est
prêt à ce qu'on appelle et à travailler le projet de loi que j'ai
déposé. Il suffirait pour le ministre d'avoir cette amabilité, cette modestie
de dire : Bien, il y a un projet de loi qui a de l'allure, on va
l'appeler, on va l'examiner puis on va y apporter des modifications nécessaires
ensemble pour que ça se fasse rapidement.
Moi, en contrepartie, je suis prêt à envisager, avec le député de Granby et
aussi le Parti québécois... Oui, on peut
détaxer certains produits. On pourrait revoir la part de nos revenus liés aux
taxes par rapport aux impôts. Et je l'ai même dit en point de presse, je pense que des gens comme moi, médecin,
des gens comme le chef de la CAQ, qui est riche, nous autres, on
pourrait mieux contribuer pour diminuer la charge fiscale...
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Mercier. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Leitão :
Très bien, M. le Président. Écoutez, plusieurs choses dans le propos du
collègue. Je comprends, on a juste cinq minutes, là, donc il faut
beaucoup expliquer. Moi aussi, j'arrive à la fin des cinq minutes et je
n'arrive pas à compléter.
Mais
j'aimerais aborder d'abord, parce que c'est important, la question des estimés,
les estimés des pertes fiscales. Dans le mémoire que le ministère des
Finances a déposé à la Commission des finances publiques, on avait déjà, à ce moment-là, mentionné que les estimés précédentes
faites par Revenu Québec, en 2012‑2013, de ces pertes fiscales, étaient importantes, mais donc le mémoire, ici, du
ministère des Finances avait déjà ajusté ces montants-là. Et puis
maintenant, dans le rapport que nous
déposons aujourd'hui, ces estimés font suite à une analyse beaucoup plus
exhaustive de toute cette situation-là,
parce qu'il fallait vraiment avoir l'heure juste pour qu'on sache de quoi on
parle. Donc, on parle, en tout et pour tout,
d'à peu près 700 millions de dollars, en 2017, comme revenu fiscal qui
nous échappe dû à l'évasion fiscale et au commerce en ligne. Ce n'est pas insignifiant, c'est un montant qui est
très important. Mais c'est vraiment, là, l'estimé la plus récente et la
plus à jour, la plus robuste de cela. L'année prochaine, ça va probablement
être quelque chose d'un peu différent parce que ça
évolue. Mais, je pense, aujourd'hui, nous pouvons avoir un certain confort, si
c'est le mot, une certaine certitude — certaine certitude, c'est
vendredi, on commence à manquer de mots — qu'on parle de
700 millions.
• (11 h 30) •
Bon, maintenant, pour revenir aux moyens
technologiques et aux cartes de crédit, écoutez, là je ne suis pas du tout le député de Mercier. En effet, il y a des
experts, des représentants de Visa qui sont venus au ministère des
Finances, enfin, mais on n'a pas la même
interprétation de ces choses-là. En fin de compte, notre interprétation de la
discussion, c'est que, justement, ils nous
faisaient part de la grande difficulté qu'il y avait à percevoir les taxes de
vente à travers les fournisseurs de
services de paiement, et ils n'ont pas les moyens techniques, les moyens technologiques de le faire. Quand vous avez acheté votre chandail Valeri Kharlamov,
la carte de crédit n'a aucun moyen de savoir si vous l'avez acheté ici
ou si vous l'avez acheté dans une visite à
Saint-Pétersbourg. L'intermédiaire ne peut pas détecter que vous êtes ici ou
que vous êtes ailleurs. Tout ce qu'il voit passer,
c'est une facture provenant de Kharlamov inc., mais il ne sait pas où
l'acheteur se situe quand il a fait cet achat-là. Donc, c'est une chose.
Vous avez
mentionné aussi les développements technologiques dans les restaurants, dans
les taxis. Oui, en effet, mais voilà, mais c'est ça, «that's the point»,
comme on dit en chinois, c'est que tant les chauffeurs de taxi que les restaurants, bien, ils sont ici. Donc, quand il y a
un fournisseur d'un bien ou d'un service qui est situé ici, qui est au Québec,
là on a les moyens. Et, si on n'a pas les
moyens, on va les développer, comme
c'était le cas avec les MEV, les modules d'enregistrement de ventes, pour nous assurer qu'on élimine ou qu'on
combat l'économie souterraine, l'évasion fiscale, et on peut le faire très bien. Le cas d'Uber est très
révélateur, parce qu'en fin de compte ce n'est pas Uber, ce n'est pas la
compagnie Uber qui perçoit la taxe de vente,
ce sont les chauffeurs d'Uber qui sont obligés de percevoir la taxe de
vente. Ce que la compagnie Uber fait, après
discussion et accord, négociation avec Revenu Québec, c'est : la compagnie
Uber, elle, remet au gouvernement le montant de la TVQ au nom des chauffeurs.
Ce sont les chauffeurs d'Uber qui ont la responsabilité de percevoir la taxe.
Pourquoi? Ils sont ici. Même chose pour les restaurants, les restaurants sont
ici. Donc, ils peuvent, et nous, on les force à percevoir cette taxe-là. La
question d'Airbnb que vous avez soulevée tantôt, ce n'est pas Airbnb qui doit percevoir la taxe, ce sont les locateurs de
maisons qui doivent le faire. Maintenant, ce que nous avons comme
information suite à une entente aussi avec...
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. le ministre. C'est déjà écoulé. M. le député de Laval-des-Rapides, ce
bloc-là vous appartient, vous avez cinq minutes.
M. Polo :
Merci, M. le Président. Il y a quelques instants, je mettais l'emphase sur
trois des 14 mesures qui sont dans
le plan d'action, là, qui a été déposé par le ministre aujourd'hui, qui sont
liées directement à l'économie numérique, et je commençais par la mesure 4, qui était que «le Québec veut rendre obligatoire la perception de la taxe de vente sur les services et les biens incorporels vendus depuis
l'étranger par des entreprises n'ayant pas [établissement] au Québec et
propose au gouvernement fédéral une action coordonnée à cette fin».
La
mesure 5 est également intéressante, M. le Président, puisque la
mesure 5 prévoit que «le Québec appuiera l'Agence des services frontaliers du Canada pour [améliorer] la perception
de la taxe de vente [...] sur les biens corporels provenant de
l'étranger et vendus par des entreprises n'ayant pas [d'établissement] au
Québec». Une entente prévoit déjà, M. le
Président, que, justement, cette agence
perçoit pour le compte du gouvernement
du Québec la TVQ applicable aux importations non commerciales des biens au Québec, c'est-à-dire des biens importés par les
particuliers y résidant. Toutefois,
ce que le Revenu du Québec, l'Agence de revenu du Québec nous donne comme
information, c'est qu'elle estime que
la TVQ non perçue sur des colis aux frontières atteint 120 millions de
dollars par année. Conséquemment, le gouvernement
du Québec a informé le gouvernement fédéral qu'il était prêt à contribuer,
justement, financièrement afin d'améliorer
la perception des taxes aux frontières par l'Agence des services frontaliers du
Canada, et des travaux exploratoires sont en cours à cet égard.
La
mesure 6 est également intéressante, parce qu'elle vise principalement...
elle se lit comme suit : «Pour ce qui est des biens et des services provenant du reste du Canada et vendus par des
fournisseurs n'ayant pas de présence physique ou significative au Québec — comme vous savez, il n'y a pas
d'harmonisation entre les différentes provinces à ce niveau-là — le Québec entend donc exiger de ces
fournisseurs qu'ils s'inscrivent au régime de la taxe de vente du Québec, qu'ils
perçoivent la taxe et qu'ils la remettent selon des règles particulières.»
Une autre
mesure importante, c'est la mesure 7, où est stipulé que «Québec
s'entend avec le gouvernement
fédéral pour recevoir les informations fiscales obtenues dans le cadre de la
détection, de la prévention et de la dissuasion du blanchiment d'argent et du
financement des activités terroristes[...], ainsi [qu'en] application de la
Norme d'échange automatique de renseignements instaurée par l'OCDE».
Toutes ces mesures-là, tel que mentionné
précédemment, M. le Président, sont directement en lien avec les 270 millions de pertes fiscales estimées face, justement,
au contexte de l'économie numérique, principalement, justement, au commerce électronique, en fonction
des chiffres de 2017.
Les autres
mesures qui sont également intéressantes en fonction de l'actualité, M. le Président, c'est justement la mesure 11 :
«Le Québec permet une meilleure identification des fiducies
assujetties à l'impôt québécois ainsi que celles pouvant avoir un lien d'importance
avec le Québec.» On rend également plus accessibles les informations contenues
dans le registre des entreprises du Québec, et le Québec renforce également la
lutte contre la planification fiscale agressive.
Donc, une
série de 14 mesures qui, en bout de ligne, diffèrent de la proposition du
député de Mercier dans la mesure où
c'est un plan d'action, effectivement, et non pas un projet de loi, tel que
proposé par le député de Mercier, mais qui, dans son ensemble... et, en tant que membre de la Commission des
finances publiques... mais, dans son ensemble, reprend l'essentiel des travaux,
là, et des recommandations de la Commission des finances publiques et s'attaque
de front à cette problématique, à
l'argent qui est laissé sur la table, une partie de l'argent ou des sommes
d'argent que la CAQ est disposée à laisser
sur la table également, en fonction de sa position, mais de l'argent qui est
laissé sur la table actuellement et que...
Vous le
savez, le contexte non seulement de précarité de l'équilibre fiscal est
important ou l'équilibre budgétaire est important pour le Québec, mais surtout l'importance d'assurer la
pérennité et le financement de la croissance des services pour le bienfait des Québécois en 2017 et pour les
années à venir. Donc, de s'assurer que ces différentes échappatoires
sont fermées, qu'il y a de la cohérence à
travers les différentes façons de consommer, que ce soit physiquement au
Québec ou sur l'Internet, de nos jours,
également, et de s'assurer, justement, que le contribuable québécois comprend
que le gouvernement s'attaque, justement, à ces différentes
échappatoires et qu'il n'y a pas d'inéquité entre le payeur de taxes et d'impôt
commun et ceux qui peuvent se payer d'autres échappatoires.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Nous en sommes au dernier bloc. Mme
la députée de Taschereau, la parole est à vous.
• (11 h 40) •
Mme Maltais :
Merci, M. le Président. Alors, je vais revenir sur les spécifications qu'on a
apportées tout à l'heure au dossier.
J'ai fait valoir qu'il y a comme une incompréhension de la part des Québécois
et des Québécoises, des titreurs, des journalistes sur les intentions
gouvernementales.
Je reprends
le texte du Soleil du 10 novembre, Jean-Marc Salvet : Commerce
en ligne : le ministre des Finances dit oui à Simons, à Peter
Simons. J'en ai d'autres comme ça, des titres, partout. Les citations du
ministre sont exactes. Après ça, on
va lire puis on dit : O.K., là il fait des nuances. Vraiment, ça,
là-dessus, le ministre a été correct, mais il n'a pas corrigé
l'impression générale qui était très claire, qui était les titres. Je suis
curieuse de savoir s'il a appelé Peter Simons pour
lui dire : Ce titre est erroné, je vous dis non. Je vous dis non, car je
ne taxerai pas les fournisseurs étrangers, je vais simplement demander à
Ottawa de mieux contrôler les douanes. Alors, c'est ça, la différence. Elle est
là, la nuance.
Et c'est extrêmement important de bien
comprendre. Regardez, quand on va en page 45 du document qui est déposé aujourd'hui — plein d'enseignements, ce document — on voit que, quand il s'agit du Canada, du
ROC, du «rest of Canada», on y
apprend que, là, «l'inscription au régime de la taxe de vente du Québec des
fournisseurs du reste du Canada [est]
la seule solution envisageable». Donc, c'est possible. Pour le Canada, on va
imposer aux fournisseurs d'être inscrits au régime de taxe de vente, mais pour les États-Unis, pour les biens...
puis ça, je parle des biens tangibles, là, on n'est pas dans l'incorporel, on est dans le corporel, dans
le tangible, mais, quand il s'agit des États-Unis, c'est non. Quand il
s'agit des États-Unis, c'est non, quand il
s'agit de l'Europe, c'est non. Dans l'intérieur du Canada, on dit : C'est
ça qu'il faut faire, mais, pour le
reste, on s'en remet aux Douanes Canada pour ce qui est des États-Unis et de
l'Europe. C'est là que ça ne fonctionne pas. C'est là que vous n'avez
pas compris ce que tout le monde avait compris. Ça n'a pas de bon sens.
Pire, puis là ça me jette à terre, le Québec, et
c'est bien, va imposer, va taxer les Netflix, Spotify — c'est
à peu près tout, là, c'est à peu près les
deux seules organisations — peut-être un peu Amazon pour les livres en ligne, mais le Québec va aller augmenter les revenus d'Ottawa
en lui envoyant de la TPS que nous allons percevoir à l'encontre de la volonté fédérale. C'est assez extraordinaire,
là. On va envoyer un chèque de TPS à Ottawa, mais de l'autre main on va prendre la TVQ ou des impôts, ce que les Québécois...
ce à quoi on contribue puis on va aller payer le fédéral ses dépenses
des douanes. On va aller contribuer financièrement en ajoutant de l'argent à Ottawa.
Alors, on va envoyer de l'argent à Ottawa en
double. Il ne veut pas percevoir la TPS, on va la percevoir. Et là-dessus,
cette partie-là, je suis d'accord pour seulement les produits intangibles. Mais
en plus l'argent des Québécois et des Québécoises va servir à mieux travailler à Douanes Canada. On
paie en double à Ottawa. C'est vraiment sympathique comme stratégie.
Je ne l'aurais jamais vu venir, celle-là. Écoutez, c'est page 44 : «Le
Québec a informé le gouvernement fédéral — ils savent déjà — qu'il était prêt à contribuer financièrement
afin d'améliorer la perception des taxes
aux frontières par l'Agence des services frontaliers du Canada.» Je n'en
reviens pas. Ce n'est pas ça, la stratégie qu'on avait comprise.
Alors,
j'espère que le ministre va faire une tournée des entrepreneurs au Québec pour
leur expliquer que tout ce qu'on va
faire, c'est envoyer de l'argent en double à Ottawa en espérant qu'ils
augmentent la perception — il y a seulement à peu
près un produit sur 10, actuellement, qui est tangible qui passe, qui est
accroché par les frontières — et que ça va être, encore une fois, vers les Québécois, vers Postes
Canada qu'on va se tourner et non pas vers les fournisseurs étrangers.
C'est ça qu'il fallait faire. C'était notre proposition.
Conclusions
Le
Président (M. Bernier) : Merci, Mme la députée de Taschereau.
Nous en sommes aux dernières interventions, interventions de conclusion.
Vous avez 10 minutes, M. le ministre.
M. Leitão : Ah! on est déjà
rendus à la conclusion?
Le Président (M. Bernier) :
Oui, vous êtes rendu à la conclusion. Vous avez 10 minutes.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Ah! O.K., mais j'aimerais quand même revenir avant d'avoir ma conclusion, parce
que ce que la députée de Taschereau vient de dire démontre que, vraiment, je
m'excuse, là, mais vous ne comprenez pas comment ça
fonctionne. Il y a des milliers, des dizaines de milliers de fournisseurs
étrangers qui envoient des biens. C'est physiquement
impossible pour un gouvernement de forcer l'inscription de tous ces milliers de
fournisseurs étrangers de biens sur toute la planète. Voyons donc. C'est
à la frontière que le travail doit se faire. C'est à la frontière qu'on doit contrôler. C'est à la frontière qu'on doit
percevoir la taxe de vente. C'est comme ça que ça se fait dans les pays
développés. En tout cas, ça, c'est... Donc,
je vous invite vraiment à bien lire le rapport que nous venons de déposer,
parce qu'on adresse cette situation
de façon très claire. Et je vous invite aussi à lire et à discuter avec le
collègue de Rousseau parce qu'il est bien au courant de ça, des implications, des conséquences de l'accord
d'harmonisation 2012 Québec-Canada. On a fait un accord
d'harmonisation, donc on ne peut pas non plus maintenant jeter ça à la
poubelle.
Alors,
M. le Président, après deux heures de discussions, je crois que nous pouvons
conclure que nous sommes d'accord sur
l'importance d'agir. Ça, je pense que, oui, nous sommes d'accord sur
l'importance d'agir pour lutter contre l'évasion
fiscale, qu'il s'agisse de paradis fiscaux ou de mieux encadrer le commerce
électronique, pour faire en sorte que l'État
québécois puisse récolter les taxes et les impôts qui lui sont dus. Pas
d'ajouter de nouvelles taxes, mais de récolter les taxes et impôts qui sont dus. Nos points de vue
sur les façons d'y arriver peuvent diverger, et ils divergent, en effet,
mais nous nous entendons tous sur la finalité et sur l'objectif final.
Donc,
le commerce électronique a évolué de façon très rapide, et nous n'avons pas su
adapter et moderniser notre législation au même rythme pour faire face à
cette nouvelle réalité, c'est vrai. Mais il faut reconnaître qu'il s'agit de
questions complexes qui impliquent plusieurs niveaux de juridiction et que nous
constatons actuellement une volonté, à
l'échelle mondiale, de travailler en concertation pour contrer l'évasion
fiscale, ce qui inclut les enjeux touchant le commerce électronique. Nous apportons aujourd'hui une réponse concrète à
ces enjeux, qui démontre notre volonté de s'inscrire dans cette démarche
collective multilatérale, mais qui ne freine pas les gestes que nous pouvons
poser dès aujourd'hui dans notre champ de compétence. Nous donnons aujourd'hui
suite au rapport déposé en avril dernier par la
Commission des finances publiques sur le phénomène du recours aux paradis
fiscaux en déposant un plan d'action étoffé et contenant 14 mesures concrètes.
Certains aspects ont nécessité des discussions sur différents enjeux avec le gouvernement fédéral. Je tiens d'ailleurs à souligner l'excellente collaboration
démontrée par les représentants du ministère des Finances du Canada et de l'Agence du revenu du Canada au
cours des derniers mois, ce qui devrait faciliter la mise en oeuvre,
dans les meilleurs délais, des solutions que nous avons identifiées.
Je
vous rappelle que le plan d'action que nous déposons aujourd'hui respecte — et c'est important pour nous, pour nous assurer de l'efficacité de nos mesures — les orientations et les actions identifiées
par l'OCDE dans la lutte contre l'érosion
de la base d'imposition et les transferts de bénéfices, les BEPS. Les
14 mesures annoncées ici visent cinq grands objectifs, soit
percevoir la taxe de vente dans le contexte d'économie numérique, récupérer les
montants dus au titre de l'impôt sur le
revenu des sociétés, récupérer les montants dus au titre de l'impôt sur le
revenu des particuliers, et renforcer la transparence fiscale et
corporative, et finalement, le cinquième, bloquer l'accès aux contrats
gouvernementaux aux entreprises et
particuliers participant à des stratégies d'évitement fiscal abusives, y
compris le recours à des paradis fiscaux.
En
lien avec le projet de loi présenté par notre collègue, il est clair que le
développement de l'économie numérique amène
des changements importants dans la façon d'effectuer les transactions. Ces
changements se présentent principalement sous deux formes
particulières : le commerce électronique qui permet de vendre ou acheter
des biens et services avec un paiement et
une livraison physique ou numérique. C'est important aussi de noter que ça nous
permet aussi de vendre des biens ailleurs.
L'économie numérique
s'accélère ou s'est accélérée au cours des dernières années, et cela entraîne
des pertes fiscales. Et ces pertes fiscales
proviennent de la présence d'entreprises étrangères agissant comme
intermédiaires en ligne qui n'ont
aucune place d'affaires au Québec, l'anonymat des utilisateurs, puisqu'il est
difficile pour les autorités fiscales de les identifier afin de s'assurer qu'ils respectent leurs obligations
fiscales, la méconnaissance ou le non-respect des lois fiscales par ceux qui participent à cette
économie. Ces pertes fiscales représentent les recettes fiscales additionnelles
dont bénéficierait le gouvernement du Québec
si tous les participants de l'économie numérique s'acquittaient de leurs
obligations.
L'augmentation
fulgurante du nombre de transactions en ligne au cours des dernières années
pose un défi important à tous les pays qui
imposent une taxe sur la valeur ajoutée, une TVA. En plus de perdre
d'importants revenus, les gouvernements
doivent composer avec un enjeu d'équité avec les entreprises domestiques, qui
doivent, elles, percevoir et remettre les taxes applicables sur les
fournitures qu'elles effectuent. L'OCDE s'est penchée sur cette question et
elle recommande d'exiger des fournisseurs
étrangers qu'ils s'inscrivent au régime de TVA du pays de destination des
biens ou des services et qu'ils perçoivent
et remettent la taxe de ce pays. Elle recommande également la mise en oeuvre
d'un système simplifié d'inscription
suffisamment clair et accessible pour que les fournisseurs étrangers soient en
mesure de respecter leurs obligations fiscales.
Dans
ce contexte, puisque les règles de la TVQ et de la TPS dans ce domaine sont
harmonisées, nous proposons une
approche canadienne coordonnée pour donner suite à ces recommandations. Cela
implique d'exiger des fournisseurs étrangers
de services et de biens incorporels qu'ils s'inscrivent au régime de la TPS/TVH
et de la TVQ et qu'ils perçoivent et remettent les taxes, d'exiger des
fournisseurs canadiens sans présence physique ou significative au Québec qu'ils
s'inscrivent au régime de la TVQ et qu'ils perçoivent et remettent la taxe, de
mettre en place un système simplifié d'inscription qui facilitera le respect
des obligations fiscales tout en assurant l'intégrité du régime et d'améliorer
la perception des taxes sur les biens corporels aux douanes. Nous allons
poursuivre nos échanges avec le ministre des Finances
du Canada et mes homologues des provinces sur ces enjeux afin notamment
d'assurer la perception de la TVQ par les
fournisseurs canadiens qui vendent des biens ou des services pour usage ou
consommation au Québec sans y avoir une présence physique significative.
• (11 h 50) •
En conclusion, M. le Président, nous envoyons
aujourd'hui un message clair de notre volonté d'enrayer les pertes liées au phénomène d'évasion fiscale, des
paradis fiscaux jusqu'au commerce électronique afin que les entreprises internationales avec
lesquelles transigent les Québécois perçoivent et versent au gouvernement les
taxes prévues par nos lois. La
Commission des finances publiques a fait un travail remarquable et nous a
présenté un rapport très étoffé sur le phénomène
du recours aux paradis fiscaux soulevant des enjeux très importants pour le
Québec. Nous y répondons par un plan d'action tout aussi étoffé misant
sur des mesures concrètes.
Nous sommes
conscients qu'il s'agit d'un dossier complexe qui interpelle plusieurs
niveaux de juridiction. Les discussions
devront donc se poursuivre entre le gouvernement
fédéral et les gouvernements des provinces et des territoires ainsi qu'avec l'OCDE. Je veux vous assurer que le Québec
sera un acteur de premier plan dans ces échanges afin que nos préoccupations
soient bien entendues et que nos réflexions et nos travaux trouvent écho dans
les solutions qui seront retenues à l'échelle
canadienne. Le Québec est prêt à convenir de modalités d'application harmonisées pour atteindre les objectifs de l'OCDE, mais, si nous ne pouvons pas en venir
à une entente, nous sommes déterminés à agir seuls et nous le ferons, M.
le Président. Merci.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. le ministre, pour vos propos. Nous allons aller maintenant du côté du député
de Mercier. Vous avez un bloc de 10 minutes, M. le député.
M. Amir Khadir
M. Khadir : Merci, M. le
Président. J'aimerais d'abord remercier tous les participants à cette
discussion de deux heures qu'on a eue, le
président de la commission, qui, je suis sûr, aurait eu maintes choses à dire,
étant donné le travail qu'il a dirigé
pendant un an et demi, deux ans. Mais je veux aussi remercier mes collègues de
la CAQ et du PQ, qui n'ont pas eu
autant de temps de parole que moi — une fois n'est pas coutume, n'est-ce
pas? — mais qui
ont patiemment, disons, écouté les échanges. D'ailleurs, je...
Une voix : ...
M. Khadir : Ah! je sais,
mais je comprends. Moi, j'aurais mis ça égal, tout le monde.
Je voudrais aussi en profiter, j'aurais pu le
faire dès le début, mais souligner le travail remarquable de mon équipe, tous
ceux qui ont... Et je crois que le ministre, en ne rejetant pas...
J'attends d'avoir son attention parfaitement,
là, parce que son équipe le sollicite. C'est bon.
Je voulais
dire que, M. le ministre... je lui ai posé la question à plusieurs reprises de
me dire en quoi mon projet de loi est
en contradiction avec le rapport. Le rapport qu'il a déposé aujourd'hui sous la
pression de tout ce qu'on a fait depuis quelques mois, quelques années
et des interventions des acteurs sociaux recommande un certain nombre de
choses, et il n'y a rien dans mon projet de
loi qui est l'action. Ça, c'est comme le plasteur sur une plaie qui est
ouverte; ça, c'est un traitement, un médicament efficace pour la même
plaie. Mais l'un et l'autre n'ont pas de contradiction, là. Un pansement, c'est
bon, mais ensuite il faut un traitement, il faut une chirurgie. Mon projet de
loi est une chirurgie.
Si je suis
aussi catégorique et aussi fier de ce projet de loi, c'est qu'il y a une équipe
qui a travaillé très fort. Je pourrais
remercier un tas de gens, mais je dois d'abord remercier Émilie Laliberté, qui
est attachée politique à mon bureau et qui été alertée et, en fait,
secouée par les témoignages qu'on a reçus à Montréal il y a un an, lorsqu'on a
réuni les commerçants pour savoir c'est
quoi, leurs problèmes par l'ampleur du dégât que cause le commerce
électronique; ensuite, responsable à
la recherche, Jean-François Hughes, à ma gauche, qui a donc collaboré à réunir
de l'information, à consulter les
experts, à consulter la documentation, le rapport Godbout, le rapport de la
Commission des finances publiques, dont vous avez parlé; et, bon, bien sûr, tout le monde aura reconnu celle qui se
passe maintenant de présentations, Josée Larouche, qui dirige nos
travaux parlementaires et qui nous a proposé, donc, d'en débattre avec vous
aujourd'hui.
Je voudrais rassurer le ministre d'abord sur les
questions de nature technique. Vous savez, M. le ministre, il n'y a pas juste que nos lois qui sont archaïques.
La loi, là, sur la perception de la TVQ, de la TPS sont vraiment
archaïques par rapport à la réalité du
commerce électronique. Nos lois datent d'à peu près je ne sais plus combien
d'années, plusieurs décennies, alors
que le commerce électronique est le reflet d'une dynamique économique qui
change parfois de six mois en six
mois. Et je vois dans les réponses ou dans les réticences de M. le ministre, je
reconnais, là, la sagesse et la prudence du banquier, mais — mais, il y a un gros mais — cette prudence-là n'est pas de mise lorsque
votre propre porte-parole, votre propre porte-parole, dans La Presse
du 29 juin, dit que les modules d'enregistrement de ventes pourraient être
applicables au commerce électronique. Votre
prudence ou votre réticence... Vous êtes en train de m'expliquer, les
cartes VISA, il n'y a rien de prévu
actuellement. Bien, vous avez raison, actuellement. Mais, actuellement, ça ne
veut pas dire de ce qui est possible si on veut bien le changer.
D'ailleurs,
l'éditeur du Courrier parlementaire...ça, je vais le déposer
encore à la fin, là, de mon intervention si tout le monde le permet, j'ai fait une copie, on l'a tous reçu dans nos
courriels, le Courrier parlementaire du 3 octobre : «Pour freiner le recours aux paradis fiscaux, la
Commission des finances publiques proposait au gouvernement de changer le cadre législatif pour permettre l'imposition des transactions en ligne sur la base
des cartes de crédit — sur la base des cartes
de crédit — utilisées
pour payer des achats.» La Commission des finances publiques n'a pas inventé ça
d'elle-même. Nous, on a consulté les meilleures pratiques. On était au
courant qu'en Australie ça bougeait, et c'est là qu'on allait, d'accord? On s'inspirait des recommandations de
l'OCDE sur lesquelles se propose de reposer l'action du gouvernement. Parfait, mais c'est exactement ça que ça veut
dire, M. le ministre, c'est-à-dire utiliser les cartes de crédit pour payer
les achats, là, de recourir aux cartes de crédit.
Mais regardez, M. le ministre, écoutez-moi bien,
c'est le paragraphe qui suit qui est important : «Cette recommandation suscite l'intérêt de Visa Canada,
qui souhaite présenter au gouvernement ses capacités technologiques en ce sens.» Alors, vous
n'avez pas besoin de vous soucier, M. le ministre. Nous, d'ailleurs, on les a
consultés, et c'est parfaitement
réalisable, c'est banal, même, au point de vue technologique avec les capacités
des cartes Visa. Je vous prie de faire
preuve d'un peu de modestie. On a démontré que, malgré la capacité de vos
ministères, combien leurs chiffres et leurs réalisations sont sujets à
discussion et sont en contradiction avec d'autres commissions.
Donc, il faut au minimum reconnaître que — pour
toutes sortes de raisons, vous êtes occupés à toutes sortes de choses — votre gouvernement, votre ministère est en
retard par rapport à certaines informations. Et c'est humblement que je vous le propose. Pas besoin de s'étaler
là-dessus, juste montrer une bienveillance à l'égard de ce problème qui
est si criant que... Comme je vous l'ai dit,
M. Lord nous témoignait tout à l'heure à quel point, disons, il avait de
l'anxiété par rapport à intervenir au
Parlement sur un sujet politique parce que, depuis 50 ans qu'il est dans
son domaine, il n'a jamais fait ça. Pourquoi aujourd'hui il est venu le
faire? Parce que c'est critique.
Alors, je pense que je voudrais encore vous
rappeler, je le sens partout, il n'y a rien qu'on a proposé à date, à Québec solidaire, qui a suscité autant d'adhésion
et d'unanimité. Et je veux remercier, là-dessus, pour sa contribution, Marwah Rizqy, une fiscaliste de Sherbrooke, que
vous connaissez bien, qui ne nous a pas privés de son expertise pour que ça soit au-dessus de toute critique. Il
y a de place à l'amélioration, mais sur les fondamentaux, sur le fait que c'est
technologiquement faisable, sur le fait que les géants du numérique n'ont pas
d'opposition, sauf quelques-uns qui sont
particulièrement... je dirais, qui ont un comportement hooligan en matière de
pratiques économiques, comme Uber. Mais la plupart des Netflix, Amazon,
tout ça, sont prêts, ils disent : Changez vos juridictions, nous nous
soumettrons à vos lois.
Donc, c'est
en vertu de ça, M. le ministre, que je voudrais vous dire que tous les
dispositifs, à la fois techniques, à la fois juridiques... je vous ai parlé de FATCA, du Foreign Account Tax
Compliance Act, ils sont même prêts et ils vont être obligés de le faire. Donc, en vertu de tous ces
éléments qui sont déjà réunis, je voudrais vous appeler à saisir
l'opportunité que nous vous offrons, toute l'opposition, même de signer... Si
vous le voulez, je vous offre le projet de loi. Vous le mettez un peu à votre
main et vous le déposez au nom du gouvernement, pourvu que ça soit fait
rapidement, qu'on n'attende pas un autre six
mois avant que ça soit applicable. En 2012, l'estimation des pertes fiscales,
je vous l'ai dit, était de 300 millions, déjà en 2012. Aujourd'hui,
c'est beaucoup plus grand, là.
On a
clairement besoin d'un courage politique. Je suis sûr que vous êtes capable de
le faire. Si vous êtes capable de faire
preuve de courage politique pour pratiquement briser les régions pour assurer
l'équilibre budgétaire... Je ne voulais pas dire que vous vouliez briser les régions, mais vous avez fait des choses
qui ont fait beaucoup mal aux petites gens. Là, je vous demande de faire quelque chose qui va juste
faire mal aux multinationales. Le Québec a besoin, donc, d'un
leadership. Ça serait un bon legs que vous
pourriez apporter, en plus de contribuer à repousser toutes ces suspicions
entretenues que, si le gouvernement
ne bouge pas, c'est à cause des lobbyistes, à cause de son accointance avec tel
et tel milliardaire. On n'en serait
plus là. D'un seul geste, vous rejetteriez tous ces blâmes et toutes ces
suspicions. Vous dites : Il faut se concerter avec les pays de l'OCDE, les autres pays membres de
l'OCDE. On est parfaitement là. Ce que la commission proposait, que je vous ai cité tout à l'heure dans Le Courrier
parlementaire, là, ça vient de l'OCDE, d'utiliser les cartes de paiement
comme moyen pour aller chercher techniquement les taxes qu'on doit percevoir
sur la vente.
• (12 heures) •
Donc, le
projet de loi n° 997 que j'ai déposé, je vous le rappelle, M. le ministre,
c'est appelé à devenir pour que le Québec
devienne un précurseur en ces matières, puis l'harmonisation va être assurée.
Toutes les autres provinces cherchent des manières de faire, elles ne
s'opposeront pas à nous. Donc, on pourra ensemble passer de nos lois du
XXe siècle enfin au XXIe siècle.
J'aimerais
qu'on se refuse, là-dessus, de se replier sur des explications du genre : C'est trop compliqué, c'est trop complexe, on n'est pas capables de faire ça. Je
vous ai dit, je vous ai répété, les acteurs eux-mêmes disent : On est
capables de le faire. Ce que je vous propose
est simple, ce que je vous propose est pragmatique. Soyez pragmatique, soyez
opportuniste, dans le bon sens du
terme, saisissez l'opportunité. C'est une main tendue de toute l'opposition, saisissez-là, cette main tendue,
M. le ministre, on a besoin de vous. Autrement, si vous ne
l'appliquez pas, vous aurez besoin de grosses explications à donner à tout
le monde des affaires, qui attend ça.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. le député de Mercier. Donc, merci à tous ceux qui ont participé à nos
travaux de ce matin.
Compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la
commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci à
vous tous.
(Fin de la séance à 12 h 1)