(Seize heures onze minutes)
Le Président (M. Bernier) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et, bien sûr, je demande aux
personnes dans la salle d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 108, Loi
favorisant la surveillance des contrats des organismes publics et
instituant l'Autorité des marchés publics.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Girard (Trois-Rivières) est remplacé par M. Habel (Sainte-Rose); M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré); M. Reid (Orford) est remplacé par M. Morin (Côte-du-Sud); M. Bonnardel (Granby)
est remplacé par M. Caire (La Peltrie).
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, je souhaite la
bienvenue à nos collègues, au ministre, aux collègues de l'opposition
qui sont présents, avec qui nous aurons le plaisir de travailler cet
après-midi, ainsi qu'aux recherchistes et
aux gens de l'Assemblée nationale qui nous accompagnent ainsi que du
Secrétariat du Conseil du trésor et du ministère des Finances. Donc,
merci d'être là.
Mémoires déposés
Avant de
débuter avec les remarques préliminaires, je dépose les mémoires des groupes
que nous avons reçus depuis le 30
septembre dernier, c'est-à-dire depuis la fin des consultations particulières
sur ce projet de loi. Donc, ce sont des
mémoires que nous avons reçus depuis cette période. Ce sont de nouveaux
mémoires qui sont disponibles au secrétariat de la commission.
Remarques préliminaires
M. le
président du Conseil du trésor, M. le ministre, je vous cède la parole. Vous
disposez de 20 minutes pour vos remarques préliminaires.
M. Pierre Moreau
M. Moreau :
Alors, merci beaucoup, M. le Président. Permettez-moi d'abord, un, de vous
saluer et de saluer le secrétaire de
la commission de même que le personnel qui nous entoure et qui nous aide à
faciliter nos travaux. Je veux saluer
mes collègues de l'opposition officielle et du deuxième groupe d'opposition
porte-parole en matière de tout ce qui touche le Conseil du trésor.
Appelons ça comme ça. Le mandat s'élargit constamment. Je veux saluer également
les personnes qui les accompagnent et qui
vont, sans aucun doute nous, permettre de bien comprendre et, à la limite, améliorer
le projet de loi n° 108. C'est comme ça que nous devons aborder le
travail.
Vous me
permettrez de saluer de façon particulière le personnel du Secrétariat du
Conseil du trésor, en particulier Mme Blackburn,
qui est à mes côtés, qui nous accompagneront, et qui, elle, m'accompagnera,
tout au long de nos travaux. On sait
que l'étude article par article vise justement à bien saisir toutes les nuances
d'un projet de loi, éventuellement à l'améliorer. Donc, je sais qu'on
peut compter sur leurs talents et leurs compétences pour mener à bien nos
travaux.
Alors, ceci
étant dit, je sais qu'on a un horaire écourté, M. le Président, mais il est
important quand même de faire ce
préambule pour expliquer un peu à ceux qui nous écoutent quel est l'état du
projet de loi n° 108, pour lequel, vous l'avez indiqué, il y a déjà eu des consultations. Donc,
on est à l'étape de l'étude article par article dans un contexte où il y a déjà
eu des amendements qui ont été déposés, et je veux rassurer mes
collègues de l'opposition officielle, les prévenir qu'il y aura aussi d'autres amendements qui vont être déposés, mais on
va le faire en temps utile pour que vous ayez tout le temps nécessaire d'en prendre connaissance,
pour tenir compte justement non seulement des remarques qui ont été faites
lors des consultations en commission
parlementaire, mais aussi des remarques qui, au fil du temps, ont été faites
soit à la période de questions soit à
l'étude des crédits pour bien saisir et nous assurer de cerner... ou, à tout le
moins, de répondre à des
appréhensions qu'ont pu manifester soit l'opposition officielle ou le deuxième
groupe d'opposition sur l'étendue des pouvoirs que l'on veut donner à
l'Autorité des marchés financiers.
Donc, nous
débutons, M. le Président, l'étude détaillée du projet de loi n° 108, Loi
favorisant la surveillance des contrats
des organismes publics et instituant l'Autorité des marchés publics. Ce texte législatif donne suite à la première
recommandation de la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats
publics dans l'industrie de la construction, qui est connue sous le
nom de la commission Charbonneau. Alors, dans son rapport final, la commission
était d'avis que — et voici la citation — «la
création d'une instance nationale d'encadrement des marchés publics est la
réponse appropriée pour assurer l'intégrité
des processus. Elle propose donc de reconfigurer le secteur des
marchés publics au Québec en
centralisant une expertise d'analyse et de contrôle au sein [de l']Autorité des
marchés publics — l'AMP.
[...]Indépendant, cet organisme permettrait de regrouper en un seul
endroit les ressources déjà mobilisées au gouvernement en matière
d'analyse et de contrôle...» Fin de la citation. C'est précisément ce que le
projet de loi n° 108 fait.
Permettez-moi
donc d'expliquer ce qui serait la raison d'être de l'Autorité des marchés
publics et d'exposer les bénéfices
que nous prévoyons en retirer pour l'ensemble des Québécois. Fondamentalement,
l'autorité serait une instance centrale,
neutre et indépendante chargée de surveiller les processus contractuels des
organismes publics, ce qui correspond exactement
à la recommandation dont je viens de parler, mais l'autorité, tel que le
prévoit le projet de loi que je dépose aujourd'hui,
disposerait de plus de pouvoirs encore que ceux recommandés par la commission
Charbonneau. Nous allons plus loin,
illustrant là l'importance que nous lui accordons. La création de l'Autorité
des marchés publics constituerait un geste de plus et un geste
d'envergure pour renforcer l'intégrité et la transparence dans le processus
contractuel. Elle contribuerait également à
améliorer la concurrence dans les marchés publics et à permettre aux
entreprises qui souhaitent faire
affaire avec le gouvernement de le faire en toute confiance. Il y a là une
question de transparence mais aussi une question d'équilibre entre le
donneur d'ouvrage et celui qui sera appelé à contracter avec le secteur public.
Comme
je l'ai dit plus tôt, l'Autorité des marchés publics serait, d'abord et avant tout,
chargée de la surveillance de tous les contrats publics, tel que
souhaité par la commission Charbonneau dans son rapport final. Elle agirait en complémentarité avec l'Unité permanente
anticorruption, l'UPAC, et le Vérificateur général du Québec, qui continueront
à exercer pleinement leurs rôles respectifs.
L'autorité aurait plus précisément comme mandat de surveiller les processus
d'adjudication et d'attribution des contrats
publics, de veiller à ce que les organismes publics traitent avec intégrité et
équité les entreprises qui souhaitent
faire affaire avec le gouvernement, de déceler les problèmes spécifiques liés à
la gestion contractuelle de certains
organismes publics et aussi d'intervenir auprès de ces derniers en cas de
besoin. De plus, l'autorité bénéficierait
de pouvoirs d'enquête afin d'examiner les contrats en cours d'exécution dans
des organismes désignés par le gouvernement, ce qui, encore ici, va au-delà de
ce que recommandait la commission Charbonneau. Le premier de ces
organismes identifiés dans le projet de loi est le ministère des Transports, ce
qui n'étonnera personne, étant donné l'importance
du ministère à titre de donneur d'ouvrage pour le gouvernement du Québec. Les
enquêtes ainsi menées par l'Autorité des marchés publics pourraient même
mener à la résiliation d'un contrat.
Le
projet de loi introduit également un nouveau recours pour les entreprises qui
estiment qu'un appel d'offres public réduit indûment la concurrence. En
premier lieu, un processus de traitement des plaintes de premier niveau devrait être mis en place dans les organismes
publics. Ensuite, et suite à la décision de l'organisme public, donc du premier
niveau, quant à la plainte, l'Autorité des marchés publics pourrait réviser, en
cas d'insatisfaction du plaignant, cette décision.
L'Autorité des marchés publics aurait alors le pouvoir d'ordonner l'annulation
d'un appel d'offres ou encore d'apporter des modifications aux documents
en cause, ce qui nous amène à dire qu'elle pourrait intervenir en amont, pendant et après l'adjudication d'un contrat.
L'Autorité des marchés publics pourrait également examiner la conformité
des processus d'appel d'offres, que ce soit
à la suite d'une plainte, de sa propre initiative, à la demande du président du
Conseil du trésor ou à la demande du ministre des Affaires municipales.
• (16 h 20) •
Quant à la portée du
projet de loi, plusieurs amendements ont déjà été déposés — c'est
ce que j'indiquais en ouverture — suite aux consultations particulières, à
l'automne dernier, afin d'assujettir le milieu municipal à l'Autorité des marchés publics. Par ces amendements,
l'Autorité des marchés publics surveillerait ainsi l'ensemble des appels
d'offres des ministères et des
organismes gouvernementaux, des réseaux de la santé et de l'éducation, des sociétés
d'État et des municipalités, d'où son titre d'«autorité».
Enfin, et tel que le
recommandait le rapport de la commission Charbonneau, l'Autorité des marchés
publics prendrait en charge les fonctions
relatives à l'émission des autorisations de contracter, actuellement assumées
par l'Autorité des marchés
financiers, et serait responsable de la tenue du Registre des entreprises non
admissibles aux contrats publics, fonction
présentement gérée par le Secrétariat au Conseil du trésor. En confiant ces
deux fonctions à l'Autorité des marchés publics, on s'assurera d'une
gestion plus centrale et plus efficiente des marchés publics.
Trois
autres recommandations de la commission Charbonneau ont enfin été prises en
compte dans le projet de loi
n° 108. Il s'agit de celles visant à protéger l'identité des entreprises
qui souhaitent soumissionner, à protéger l'identité des membres des
comités de sélection et à allonger le délai de prescription pénale.
Le
gouvernement mettra tout en oeuvre pour faire de l'Autorité des marchés publics
un organisme efficace partout au
Québec pour le bien des entreprises qui souhaitent conclure des contrats
publics pour le bien de l'État, des municipalités et pour celui de tous les Québécois. Nous
déposerons ainsi plusieurs amendements afin de lui permettre de jouer
pleinement son rôle de surveillance
et de répondre à la préoccupation de plusieurs intervenants quant à son
efficacité. Ces amendements seront,
comme je l'ai mentionné, déposés en temps utile, dans un souci de transparence,
et afin de permettre à mes collègues de l'opposition d'en prendre
connaissance.
La
création de l'Autorité des marchés publics, une recommandation-phare du rapport
de la commission Charbonneau, est en
droite ligne avec nos objectifs d'intégrité, de transparence et
d'assainissement des finances publiques, que nous partageons tous. Ce projet de loi s'ajoute aux nombreux gestes
posés par notre gouvernement afin que la gestion des contrats publics respecte les plus hauts standards en la matière.
J'entends travailler en étroite collaboration avec tous mes collègues pour que le Québec se dote d'une
véritable autorité des marchés publics efficace, intègre et indépendante
et pour que le gouvernement ouvre davantage
les marchés publics, stimule la concurrence et appuie les entreprises, en
particulier les petites et les moyennes
entreprises qui désirent obtenir des contrats publics dans la poursuite des
objectifs que nous nous sommes fixés dans le dossier du Passeport
Entreprises.
Je vous remercie et je suis disposé à
entreprendre nos travaux avec un esprit d'ouverture.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. Nous allons donc passer du côté de l'opposition
officielle. Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Nicole Léger
Mme Léger :
Merci, M. le Président. Évidemment, ce projet de loi là fait suite aux
recommandations de la commission
Charbonneau, qui prônait le regroupement, dans le fond, des ressources
d'analyse, de contrôle et de vérification qui étaient éparpillées au Conseil du trésor, au Secrétariat du Conseil
du trésor, au ministère des Transports, au ministère des Affaires municipales
et de l'Occupation du territoire. Grosso modo, c'est plus ces ministères-là qui
étaient davantage concernés.
Il
y avait quelques failles, donc j'en ai relevé quelques-unes, dans
l'administration publique. La commission nous a rappelé l'excès d'autonomie qui est accordé aux donneurs d'ouvrage
publics, l'absence, chez certains donneurs d'ouvrage, à une expertise interne suffisante, l'influence
politique dans l'octroi d'un contrat public, l'absence de véritable analyse
de marché permettant de repérer des indices
de malversation; des éléments, là, qui ont été relevés dans la gestion des
contrats publics particulièrement
dans les ministères ou organismes concernés plus particulièrement. Donc, la
création de l'AMF... de l'AMP, pardon, c'est ça — on va
se mêler souvent, on va dire «AMF» de temps en temps, là — de
l'AMP...
Le Président (M.
Bernier) : ...
Mme
Léger : ... — oui, j'imagine aussi que, dans le
secrétariat, à un moment donné, ça vient tout seul — la création de l'Autorité des marchés publics, qui est une recommandation qu'on
pourrait dire quand même pivot de la commission Charbonneau, dont le projet de loi semble conforme au principe, là,
bien, ça va être particulièrement dans les détails et dans qu'est-ce qu'on va étudier article par
article, parce qu'on a quand même beaucoup de clarifications à demander au
ministre.
La
mission elle-même, je pense que le principe, ça va. Entre autres, le monde
municipal, qui est exclu, qui n'est pas
là, c'est questionnable. Ça l'a été
dans le projet de loi n° 87, où j'ai questionné le ministre
lors des crédits. Mais pourquoi
le monde
municipal n'est pas là? C'est contre,
dans le fond, l'esprit de la commission Charbonneau, qui
touchait particulièrement le monde
municipal. Alors là, il n'est pas
dans le projet de loi. J'imagine que le ministre va m'expliquer le pourquoi.
Toute la complémentarité qu'il peut y
avoir avec le Protecteur du citoyen aussi. Le rôle du Protecteur du citoyen dans ça,
est-ce que ça va être
productif, contre-productif? Je ne
sais pas, là. Par rapport
au Protecteur du citoyen, est-ce
qu'il va y avoir un rôle complémentaire à la mission qu'il va y avoir?
Maintenant,
il y a le budget évidemment qui va être accordé, on va en parler, j'imagine,
le budget qui est accordé à l'AMP, le
nombre d'employés, les sommes. Elles
sont attribuées où? On va avoir le temps de discuter de tout ça. Parce que,
quand je parlais, tout à l'heure, du monde municipal particulièrement... Tous
les ministères et organismes sont inclus dans le projet de loi, il y a
les réseaux de l'éducation, de la santé. Le ministre le disait tout à l'heure.
Mais le monde municipal est exclu. Mais je
pense qu'on va avoir des amendements — on verra, là, à la suite des choses — qui devraient y être.
Alors,
M. le Président, je veux dire, je ne veux pas prendre le temps pour la suite
des choses, parce que je pense qu'on
est rendus vraiment à l'étape de voir article par article l'étude détaillée. On
a rencontré quand même beaucoup de gens au mois de septembre
dernier — ça
fait quand même un petit bout de temps, M. le Président — ...
Le Président
(M. Bernier) : Oui, il y a eu beaucoup de... oui.
Mme Léger :
...au mois de septembre dernier. Il y a eu une grève des juristes entre-temps.
Et il y a quand même beaucoup de...
c'est un projet de loi qui a été quand même suivi puis qu'il y a beaucoup
d'organisations qui sont venues : la
Commission de la construction du Québec, les ingénieurs, les firmes de
génie-conseil évidemment, les syndicats, le Barreau du Québec, le
Vérificateur général, le Protecteur du citoyen. Tout le monde est arrivé assez
d'accord dans l'ensemble, mais chacun avait
des points que je pourrais dire assez précis sur des aspects du projet de loi.
Probablement qu'on les aura. C'est peut-être déjà amendé. On prendra le
temps de les regarder l'un après l'autre.
Alors, M. le
Président, je vais être prête pour regarder l'étude détaillée du projet de loi.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles. M.
le député de La Peltrie...
M.
Caire :
Merci, M. le Président. Vous...
Le Président
(M. Bernier) : ...la parole est à vous.
M. Éric Caire
M.
Caire : Merci. Vous me permettrez d'abord de saluer le
président du Conseil du trésor, ceux qui l'accompagnent, les collègues
de la partie ministérielle, ma collègue de l'opposition officielle.
M.
le Président, un projet de loi attendu, je dirais, un projet de loi extrêmement
nécessaire que nous recevons... je le
dis d'entrée de jeu, et je l'ai déjà dit, mais je le réitère, que nous recevons
favorablement. Oui, une recommandation de
la commission Charbonneau, mais je pense aussi que la société québécoise,
compte tenu de ce que nous avons vécu collectivement
dans les dernières années, qui a été mis au jour, notamment, par la commission
d'enquête sur l'industrie de la construction, appelait une mesure comme
celle-là.
Par
contre, M. le Président, ça amène évidemment son lot de responsabilités. Je
dirais, un peu comme avec le projet de
loi sur les sonneurs d'alerte, notre marge de manoeuvre est mince. Je pense
qu'on ne peut pas manquer notre coup. Vous
allez me dire qu'il y aura toujours moyen de faire des modifications
législatives. C'est vrai, M. le Président. Mais, pour un projet de loi comme celui-là, pour s'assurer que cette
institution-là à créer acquiert rapidement la confiance non seulement du milieu, mais de la population
québécoise, il va être extrêmement important que nous prenions les meilleures
décisions possible. Donc, un bon projet de
loi, un projet de loi absolument nécessaire, mais un projet de loi qui amène
son lot de questionnements de notre côté,
surtout suite aux consultations particulières. Puis je pense que, compte tenu
du délai entre les consultations
particulières et le moment de l'étude article par article, ça vaudrait la
peine, collectivement, là, d'aller relire quelques mémoires qui vont
porter leur nom d'ailleurs, puisqu'on a tendance à oublier.
• (16 h 30) •
Notamment, la
préoccupation, en tout cas, que nous avons, du côté de la deuxième opposition... et le président du Conseil du trésor disait qu'on arrive à cette
étape-là en toute ouverture, la préoccupation importante que nous avons,
c'est la portée d'application de ce projet de loi là et, je dirais, le champ
d'activité de l'Autorité des marchés publics, notamment, sur le fait qu'on restreint un peu au ministère
des Transports du Québec ou tout organisme qui sera désigné par le gouvernement...
Je pense que cet aspect-là devra être travaillé pour s'assurer qu'il n'y a pas
de «ou», que le champ d'application, ou le terrain de jeux, de l'Autorité des
marchés publics soit aussi large qu'il est raisonnable de le faire et j'insiste
sur le mot «raisonnable», parce qu'évidemment on peut aussi tomber dans l'excès
dans l'autre sens.
L'autre préoccupation qu'on a, c'est son indépendance. Il est clair, il est clair, M. le Président, qu'on doit s'assurer que l'Autorité des marchés publics jouit
d'une totale indépendance, parce que, bien sûr, comme cette autorité-là sera appelée à poser son regard sur des contrats donnés
par le gouvernement... et comprenez
bien que je ne prête aucune intention, mais,
au nom de la transparence et de la crédibilité de l'institution, il faudra
s'assurer que l'Autorité des marchés publics puisse agir sans qu'on ait
l'impression que le démon de la tentation n'est jamais trop loin. D'ailleurs,
il y a plusieurs personnes qui sont venues nous rencontrer qui nous ont parlé
de cet aspect-là, sur la désignation des officiers. Aussi, M. le Président, je disais : Il faut élargir
le terrain de jeux, mais il faut aussi élargir la capacité de l'AMP à
intervenir dans l'ensemble du processus qui amène à l'octroi d'un contrat.
Plusieurs personnes qui sont venues nous rencontrer nous ont dit : Écoutez, une phase qui est
fondamentale, c'est aussi quand on prépare une soumission, toute l'information
qui va être donnée avant, tout ce qui
va être reçu, tout ce qui pourrait être éventuellement demande de changement.
Alors, ce n'est pas simplement
l'adjudication du contrat qui devrait faire l'objet de la surveillance de
l'AMP, mais l'ensemble du processus.
On commence peut-être un peu tard... c'est-à-dire, l'autorité de l'AMP arrive
peut-être un peu tard dans l'ensemble du processus. Ça pourrait être
intéressant que l'AMP puisse intervenir avant. Et là-dessus je pense qu'on pourra avoir des discussions intéressantes, parce
que, souvent, il faut agir avant que le mal soit fait, il vaut mieux prévenir
que guérir, et c'est souvent dans la
préparation des contrats et des appels d'offres que se cachent les problèmes.
Donc, que l'AMP puisse intervenir le
plus tôt possible, M. le Président. C'est vrai dans toutes sortes de sphères de
la société. Plus on agit tôt, meilleurs sont les résultats.
On a aussi,
et il faudra en discuter, parlé du bureau des soumissions du Québec comme
donneur d'ouvrage, comme point de
chute de l'ensemble de la sous-traitance du Québec qui a été pointé du doigt,
il faut bien le dire, M. le Président, qui
a été pointé du doigt, et on ne peut pas regarder à côté. Il faut s'assurer
que, si tant est... puis là je ne sais pas où est-ce que le président du Conseil du trésor loge à cet
effet-là, mais, si tant est qu'il considère que le BSDQ est toujours une entité
nécessaire — ça, ça sera sa décision — comment fait-on pour s'assurer que tout ça
se fait dans la totale transparence? Le
BSDQ a fait des suggestions, à savoir peut-être qu'il devrait y avoir quelqu'un
de l'AMP au conseil d'administration. Est-ce
que c'est la meilleure solution? Je ne suis pas convaincu, M. le Président. Je
pense qu'il faut s'assurer que l'AMP garde
un pas de recul. Mais, ceci étant dit, je suis aussi ouvert aux suggestions qui
pourront être faites par le président du
Conseil du trésor. Personnellement, je pense que, quand on ne fait pas partie
de la décision ou du processus de décision, bien, c'est plus facile d'en assurer le suivi et le bon fonctionnement,
mais c'est certainement un élément pour lequel on devra se pencher... sur lequel on devra se pencher, pardon, parce que le BSDQ demeure un
pivot important dans l'octroi de
contrat dans l'industrie de la construction. On parle d'à peu près tout ce qui
fait en sous-traitance, là, notamment, chez les électriciens et, bon,
dans différents corps de métier. Donc, à regarder.
Il y a la
CCQ, la Commission de la construction
du Québec, qui a fait des
représentations auxquelles personnellement je n'ai pas été insensible, sur le fait que, bon,
la CCQ dit : Pourquoi serions-nous sous l'autorité de l'AMP, puisque
nous ne donnons pas de contrat? Écoutez, comme je dis, je ne suis pas insensible à
l'argument. Ceci étant dit, je pense qu'il
faut quand même s'assurer que l'AMP
sera l'autorité avec la plus grande latitude possible. Et ce qu'il restera
à déterminer, c'est : Est-ce que
ça est de nature à entraver le travail de la CCQ? Je ne suis pas convaincu,
mais je ne suis pas fermé à l'idée d'en discuter, au contraire.
Finalement, M. le Président, personnellement, je
pense, puis c'est un peu le même débat — je pense que ma collègue va s'en souvenir — qu'on a eu sur le projet de loi sur les
sonneurs d'alerte, le monde municipal, de la même façon que pour les sonneurs d'alerte, on attend
toujours la réponse du gouvernement. On l'a pour les entités gouvernementales,
mais on nous avait dit : Le ministre
des Affaires municipales, pour des raisons légales, devra déposer un projet de
loi à part. Ce projet de loi là, on
l'attend toujours. Si ma mémoire est exacte, on devait l'avoir l'automne
dernier. Ça n'a pas été fait. C'est
décevant, parce que le monde municipal n'a pas été exempt de son lot de
problèmes qui ont été mis au jour, et je pense qu'il y a, dans le monde
municipal, des sonneurs d'alerte potentiels qui ne sont toujours pas protégés.
Et là je nous
ramène au projet de loi n° 108 et je me dis : Bien, on est un peu
dans la même dynamique, là. Le monde
municipal est un monde où il se donne beaucoup de contrats. Le monde municipal
est un monde qui a fait l'objet, lui
aussi, de beaucoup d'inquiétudes, de questionnements, d'arrestations pour des
contrats qui ont été donnés avec des irrégularités,
de la malversation. Donc, j'espère qu'à travers ce projet de loi là, et non pas
un projet de loi futur, à travers ce projet de loi là... je pense qu'on doit, en
fait, à travers ce projet de loi là, adresser immédiatement cette question-là.
On n'a pas intérêt, à mon avis, à avoir une
hydre à plusieurs têtes. Je pense que, si on peut concentrer l'expertise en
matière de gestion contractuelle
entre les mains de l'Autorité des marchés publics, on aura une organisation
plus forte, on aura une organisation plus efficace et plus efficiente
aussi, on aura les deux. Je salue le fait qu'on veuille regrouper des entités, ma collègue en a parlé tout à l'heure,
des entités qui ont été un peu dispersées, qui au Conseil du trésor, qui au
MTQ, qui à l'AMF. De mettre ça sous un seul
chapeau, je pense que c'est une bonne idée. Et ça va un peu dans le sens
de ce que je viens de dire. Si on peut créer avec l'AMP un centre d'expertise,
tout le Québec en sera gagnant.
Je conclurai,
M. le Président, en disant : Beaucoup des gens qui sont venus nous voir
disent : L'AMP ne doit pas avoir
qu'un rôle de surveillance, elle doit avoir un rôle de formation aussi un peu
comme... Puis, au départ, je n'étais pas chaud à l'idée, je l'avoue, parce que je me dis : Oui, mais, tu
sais, si je te donne un conseil puis après ça je suis obligé de t'enquêter, est-ce que je ne me mets pas dans une
situation difficile? Puis pourtant, le meilleur exemple, on l'a, c'est le
Directeur général des élections du Québec,
qui, oui, effectivement, peut former les gens sur l'application de la loi, ce
qui ne l'empêche pas, par ailleurs,
d'être capable de procéder à des enquêtes, des vérifications et de s'assurer en
aval et en amont qu'on respecte les lois et qu'on respecte les façons de
faire.
Donc,
j'espère qu'on pourra aussi peut-être adresser cette question-là dans le projet
de loi dans la création de l'AMP, parce
que, si effectivement on crée ce pôle d'expertise, bien, encore serait-il
souhaitable que, cette expertise-là, les entités publiques qui ont à gérer les processus d'appel d'offres et l'octroi de
contrat puissent en bénéficier, que ça devienne aussi un centre de
référence, toujours dans l'optique, M. le Président, qu'on est mieux de
travailler en prévention.
Et ça fait en
sorte que des gens qui auront cette capacité-là de formation, de conseil, bien, seront plus efficaces, et on aura moins besoin de l'AMP en répression si
les gens sont plus conscients de ce qu'ils ont à faire et de la façon dont
ils doivent le faire, M. le Président.
• (16 h 40) •
Le
Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de La Peltrie. Je veux simplement rappeler aux gens qui nous écoutent, aux auditeurs et aux collègues
qui participent que les auditions ont eu lieu en septembre 2016. Il y avait
eu une deuxième convocation pour
novembre 2016, mais les gens ne se sont pas présentés. Ils ont plutôt
fait parvenir des mémoires. Et, tout à l'heure, j'ai déposé des mémoires
additionnels qu'on avait reçus au niveau d'organismes ou de groupes qui voulaient se faire entendre ou porter leur voix.
Le secrétariat de la commission est toujours disponible pour vous aider
ou vous supporter dans votre travail lors de
l'étude de ce projet de loi, parce qu'il y a quand même un petit moment qui
s'est passé depuis ce temps-là. Ça
fait que c'est important qu'on puisse avoir les bonnes informations pour bien
renseigner les députés et renseigner la population qui nous écoute,
compte tenu de l'importance du sujet.
Organisation des
travaux
M. Moreau : ...
Le Président (M. Bernier) : Oui.
M. Moreau :
...avec votre permission, simplement rappeler, puisque mes collègues l'ont
invoquée, puis je ne veux pas en faire un argument, là, mais toute la
question du secteur municipal.
Il y a des
amendements qui ont déjà été déposés. C'est vrai que, dans le projet de loi, à
l'origine, ce secteur-là n'était pas
visé. Maintenant, il l'est. Et les amendements ont été déposés en octobre 2016.
Il va y en avoir d'autres, mais qui
vont venir préciser des éléments qui ont été soulevés de façon postérieure, là,
soit à la période de questions ou à l'étude des crédits, sur ça. Mais
essentiellement l'intention est claire, là, de viser ça.
Le
Président (M. Bernier) :
Juste comme remarque également : nous, les amendements qui ont été
déposés, est-ce qu'on les a, M. le secrétaire?
M. Moreau : On va les
redéposer.
Le Président (M. Bernier) : Il faut
les redéposer au niveau de la commission, O.K.?
M. Moreau : On va faire ça.
On va vous suivre religieusement là-dessus, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. Donc, je vous remercie pour ces remarques préliminaires. S'il n'y a pas de
motion préliminaire, nous allons... Oui, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.
Mme Léger :
Je ne sais pas si elle est entamée comme... Vous allez commencer sûrement par
l'article 1, qui vient dans
quelques instants. J'aimerais bien que l'étude se fasse article par article et
alinéa par alinéa. Alors, est-ce que je peux avoir...
Le
Président (M. Bernier) : C'est notre marque de commerce, à la
Commission des finances publiques, où nous agissons toujours article par article et alinéa par alinéa, à moins
qu'il y ait une entente entre les parties sur le sujet, dans la façon de faire
l'étude...
M. Moreau : ...par chapitre,
mais je pense que je ne réussirai pas.
Le
Président (M. Bernier) : Non, ça, ça se fait surtout au niveau du...
quand on a à toucher sur les projets de loi de Revenu Québec et, à ce
moment-là, ça devient un peu plus complexe, là, de les faire article par
article. Mais, non, on va y aller
article par article et alinéa par alinéa, de façon à ce que vous puissiez
apporter tous les éléments nécessaires au niveau de nos discussions.
Étude détaillée
Je vais
appeler l'article 1. Vous savez qu'on est limités dans le temps, il reste
très peu de temps. Vous pouvez faire la lecture de l'article 1. Au
moins, on aura entamé le début.
M. Moreau :
Bien, oui, surtout qu'on disait tantôt qu'on entamait l'étude article par
article. Il faudrait bien le faire pour ne pas avoir l'air de ne pas
tenir nos promesses. Alors, l'article 1 est simple, M. le Président.
Article 1 : «Est instituée
l'"Autorité des marchés publics".
«L'autorité est une personne morale, mandataire
de l'État.»
Alors, l'article 1
du projet de loi crée un nouvel organisme dénommé Autorité des marchés publics et confirme sa qualification comme
personne morale mandataire de l'État.
Le Président (M. Bernier) : ...députée
de Pointe-aux-Trembles?
Mme Léger : Pas vraiment
celui-là, non.
Le
Président (M. Bernier) : Pas
vraiment. Vous êtes d'accord. M. le député de La Peltrie, ça va? Donc, est-ce que l'article 1 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Bernier) : Adopté. L'article 2.
M. Moreau : Article 2 : «Les biens de l'autorité font partie du
domaine de l'État mais l'exécution de ses obligations peut être
poursuivie sur ces biens.
«L'autorité n'engage qu'elle-même lorsqu'elle
agit en son nom.»
L'article 2
prévoit que les biens possédés par l'Autorité
des marchés publics font partie du domaine de l'État, mais il précise
toutefois que l'exécution de ses obligations peut être poursuivie sur ces
biens. Ainsi, les biens que le nouvel organisme
détient aux fins de la réalisation de sa mission pourront être donnés en
garantie de l'exécution de ses obligations. Il s'agit d'une disposition
usuelle dans les lois constitutives des organismes publics et des sociétés
d'État.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
Commentaires, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles?
Mme Léger :
Il y avait des interrogations avec quelques groupes, là, qui nous parlaient des
ressources financières et humaines
particulièrement que l'autorité devrait avoir. J'imagine qu'on va le voir un
petit peu plus loin, mais je peux questionner...
Le
Président (M. Bernier) : Juste pour éviter que vous... Vous allez
devoir répéter, demain, ces commentaires, donc pour vous éviter
d'entamer...
Malheureusement,
compte tenu de l'heure, la commission doit ajourner ses travaux à demain. Donc,
merci de votre participation,
merci de votre collaboration. Et j'ajourne les travaux à demain, jeudi 11 mai
2017.
(Fin de la séance à 16 h 45)