(Quinze
heures vingt-trois minutes)
Le
Président (M. Bernier) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des finances publiques ouverte. Bien
sûr, je demande à toutes les
personnes dans la salle d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est
réunie afin de procéder à l'étude du volet Finances des crédits budgétaires du portefeuille
Finances pour l'exercice financier 2017‑2018. M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Polo
(Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine).
Le
Président (M. Bernier) :
Merci beaucoup. Donc, bienvenue à tous les parlementaires. Bienvenue au personnel du ministère des Finances. Bienvenue au personnel de la Caisse de dépôt qui est ici présent, alors, M. Sabia, M. Tessier. Bienvenue également à la population
qui nous écoute, parce que, quand on fait cet exercice-là, on répond aux questions,
bien sûr, qui sont posées, mais il y a des gens qui nous écoutent. Donc, bienvenue à
l'auditoire qui nous écoute présentement.
Nous
allons débuter par les remarques
préliminaires, puis nous allons
procéder à une discussion d'ordre général par blocs d'environ 20 minutes, incluant les questions
et les réponses. Donc, je vais m'assurer, du côté de l'opposition, qu'on va balancer le temps entre les questions versus les réponses
qui sont données. La mise aux voix des crédits sera effectuée à la fin... qui est alloué à l'étude de ce volet. Je vous informe
qu'il y a eu une entente afin que le temps de parole de la députée de Vachon
soit pris à même l'enveloppe de l'opposition officielle.
Puisque
nous avons débuté nos travaux à 15 h 22, est-ce qu'il y a consentement pour qu'une
période additionnelle à l'étude des trois heures actuelles soit...
dépasser jusqu'à 18 h 22?
Une voix :
...
Le Président
(M. Bernier) : Pas 22? Quelle heure?
Une voix :
...
Le
Président (M. Bernier) :
18 h 10. Donc, nous allons
débuter... Comme nous débutons nos travaux à 15 h 22, nous allons
aller jusqu'à 18 h 10. Et j'aurai le plaisir de vous reposer la même
question ce soir parce que le temps doit être accompli tel que défini
par l'Assemblée et les ententes entre les leaders.
Finances
Remarques préliminaires
Nous
débutons donc avec les remarques préliminaires de M. le ministre. La parole est
à vous. Vous disposez de 17 minutes.
M. Carlos J. Leitão
M. Leitão :
Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour à tous, tous les
collègues de l'opposition officielle, de la deuxième opposition, députée
indépendante; bien sûr, les collègues de la partie gouvernementale, M. Sabia, M. Tessier, ainsi que M. Caudron, mon chef de cabinet, et
tous les autres membres soit de la Caisse
de dépôt et placement du Québec et du ministère des Finances.
Alors, nous entamons aujourd'hui
l'étude des crédits du ministère des Finances, et cela me permettra aussi de répondre aux questions des collègues.
Mais, avant de faire ça, avant d'aborder la question des crédits du ministère des Finances, je vais profiter de l'occasion pour faire un point rapide sur
la situation économique et financière du Québec, qui est très positive.
Je répète, la situation économique et financière du Québec est très positive.
C'est important, c'est important que les gens qui nous écoutent puissent avoir
l'heure juste.
Le
premier élément que je souhaite souligner, c'est qu'il s'agit d'un troisième
budget équilibré consécutif, et qu'il ne sera pas le dernier, puisque notre cadre financier prévoit de maintenir
cet équilibre pour les cinq prochaines années. Tout en restant prudent afin de pouvoir faire face aux
turbulences de notre environnement économique, le budget pose des gestes
concrets qui permettent à l'économie du Québec de poursuivre sur sa lancée et
amène des bénéfices pour tous les Québécois. Nous avons remis la maison en
ordre, et la bonne santé économique et financière du Québec nous permet d'investir davantage et de manière durable dans
les services directs à la population, notamment en éducation, en santé, mais également dans les transports collectifs. La
bonne tenue de notre économie permet également d'annoncer de nouvelles baisses d'impôt pour les particuliers qui, ajoutées
à l'abolition de la contribution santé, qui n'était ni plus ni moins qu'un
impôt sur le revenu, permettront de
bénéficier d'une baisse récurrente du fardeau fiscal de plus de 1 milliard
de dollars par année.
Avec
le plan, nous faisons exactement ce que nous avons dit que nous ferions pour
améliorer le niveau de vie et la qualité
de vie des Québécois. Nous agissons également sur les leviers pour positionner
le Québec parmi les économies les plus innovantes, entreprenantes et
ouvertes sur le monde. J'aurai l'occasion d'y revenir dans quelques instants.
Le Québec
s'est distingué, en 2016, par une croissance économique et une création
d'emplois soutenues qui se sont
traduites par une amélioration significative du revenu disponible des ménages.
D'ailleurs, une croissance de 4,5 %, ce que Desjardins, par exemple, soulignait dans son analyse, la semaine
dernière, sur l'épargne des Québécois. Le taux d'épargne des Québécois est maintenant à un de ses niveaux les plus
élevés de la dernière décennie. Grâce à l'augmentation du revenu
disponible, les Québécois consomment plus et, en même temps, épargnent plus, et
cela est une très bonne nouvelle. L'économie
a crû de 2 % en 2016, selon l'ISQ, une croissance d'ailleurs supérieure à
celle des États-Unis et du Canada. Il
s'agit d'ailleurs de notre meilleur résultat depuis 2010, et toutes les
principales composantes du PIB étaient en croissance, particulièrement
la consommation.
La vigueur de
l'économie a permis que le Québec s'établisse comme champion de la création
d'emplois parmi les provinces canadiennes. C'est plus de
91 000 emplois qui se sont ajoutés au cours de l'année 2016.
Donc, depuis mai 2014, plus de trois
ans, ce sont plus de 152 000 emplois qui ont été créés au Québec,
essentiellement à temps plein et dans le secteur privé. Dans ce
contexte, l'emploi des femmes a d'ailleurs été particulièrement bénéfique.
Nous avons un
plan, et un plan qui est prudent, équilibré, prévisible et soutenable. Et le
plan fonctionne, M. le Président. Il
nous permet maintenant d'investir davantage et de manière durable dans les
grandes priorités des Québécoises et
des Québécois, qui sont d'investir dans l'avenir de nos enfants. Et, pour
financer nos services publics, de le faire à crédit, comme ça a été fait
pendant de longues années, à notre avis, c'est une dangereuse illusion.
Les jeunes
sont l'avenir du Québec. Notre gouvernement a annoncé la mise en place d'un
plan sans précédent pour la réussite
éducative, de la petite enfance à l'enseignement supérieur. Et ce plan est doté
d'un financement additionnel de 3,4 milliards de dollars sur cinq
ans.
La santé est également au coeur de nos
priorités. Les actions prévues dans le plan économique reflètent cette importance. Nous poursuivons nos investissements
pour améliorer l'accès aux soins de santé et l'offre de services pour
tous les Québécois, que ce soit en CHSLD, dans les hôpitaux, dans les cliniques
ou les soins à domicile. Nous avons annoncé
des investissements totalisant près de 3 milliards de dollars au cours des
deux prochaines années, qui permettront d'ajouter des ressources là où les besoins sont les plus importants. De
nouvelles supercliniques continuent de voir le jour partout au Québec, et nous allons continuer
d'améliorer l'accès et la qualité des services pour toutes les familles du
Québec.
• (15 h 30) •
Toujours dans
la volonté d'offrir de meilleurs services aux Québécois, le plan économique annonce un appui concret et significatif au développement du transport collectif et de la mobilité durable. En
plus d'être un service essentiel pour de
nombreux citoyens, le transport collectif est bon pour l'économie et contribue
à la lutte aux changements climatiques. Voilà pourquoi nous donnons un élan significatif à ce secteur en
concrétisant notre engagement d'appuyer immédiatement la réalisation de grands projets tels le REM, le
Réseau électrique métropolitain, avec la Caisse de dépôt et placement, mais
aussi le prolongement de la ligne bleue du
métro de Montréal. Nous allons également apporter le soutien nécessaire à la
réalisation du projet de transport collectif souhaité par Québec lorsque
celui-ci sera défini.
Maintenant,
pour permettre la réalisation de ces projets et répondre à d'autres besoins en
matière d'infrastructures, le Plan
québécois des infrastructures, le PQI, sera rehaussé de 2,4 milliards de
dollars pour atteindre 40 milliards sur les quatre prochaines années et 91 milliards sur les 10 prochaines
années. Il s'agit, M. le Président, d'un effort substantiel, d'ailleurs
un effort quatre fois plus important que celui du gouvernement fédéral
proportionnellement à la taille des économies respectives. Donc, notre
gouvernement est pleinement investi dans la croissance économique et dans le développement du Québec avec des budgets qui sont
stimulatifs, qui sont expansionnistes. Alors, austérité, M. le Président,
non, il n'y a pas d'austérité. Cette même
soi-disant austérité qui devait mettre notre économie à terre, bon, nous avons
eu une croissance économique en 2016 parmi les plus élevées en Amérique
du Nord.
Alors, il est
de notre devoir d'assurer un meilleur avenir à nos enfants en répondant aux
défis liés à la main-d'oeuvre et la
transformation de notre économie. Afin de stimuler la recherche et l'innovation
dans plusieurs secteurs d'activité, autant
traditionnels que technologiques, nous avons annoncé des initiatives
additionnelles totalisant plus de 830 millions de dollars d'ici
2021‑2022. Cela porte à près de 2,5 milliards les investissements en
recherche et en innovation pour les prochaines
années. Nous sommes aussi, M. le Président, je dois dire, très contents du
travail que fait la Caisse de dépôt et placement
en termes d'investissements dans les entreprises québécoises aussi avec
l'objectif d'améliorer l'innovation et la productivité de l'économie
québécoise.
Nous devons aussi pouvoir compter davantage sur
la fibre entrepreneuriale de plus en plus présente chez les Québécois, particulièrement chez les jeunes et
chez les nouveaux arrivants. Il faut également appuyer les PME existantes
qui ont le potentiel de devenir les fleurons
de demain. Dans ce contexte, nous avons annoncé des mesures totalisant plus de
400 millions de dollars pour soutenir l'entrepreneuriat au cours des cinq
prochaines années.
Notre
plan prévoit également des mesures totalisant près de 290 millions sur
cinq ans pour favoriser le développement de la main-d'oeuvre faisant
suite au Rendez-vous national de la main-d'oeuvre de février dernier. Pour ce
qui est du développement... de
l'investissement dans les régions, les régions contribuent largement à la
vigueur et à l'essor de notre économie,
et, afin de stimuler davantage leur développement, c'est 1,2 milliard qui
seront investis au cours des cinq prochaines années.
Comme je l'ai mentionné au début, grâce à la
croissance économique, nous avons maintenant les moyens de poursuivre nos efforts de réduction du fardeau fiscal des Québécois. Cette
réduction passe par l'abolition de la contribution santé dès 2016, donc rétroactive au
1er janvier 2016, et cela pour près de 4,3 millions de contribuables.
Aussi, une baisse générale de l'impôt grâce à l'augmentation du montant
personnel de base.
Alors, une famille de la classe
moyenne bénéficiera, dès cette année, dès 2017, d'une réduction d'impôt
permanente de plus de 510 $,
510 $, M. le Président. Avec ces mesures, c'est plus de 1 milliard de
dollars par année que nous retournons dans
les poches des Québécois, et je souligne que nous faisons cela de façon
responsable. Nous investirons dans les services directs à la population, nous appuyons le développement économique, nous
réduisons le fardeau fiscal et tout ça en même temps et sans tomber dans les travers des déficits et sans aller piger
dans le compte d'épargne de nos enfants qui est le Fonds des
générations.
Par
ailleurs, en lien avec les valeurs de solidarité et de justice sociale animant
la société québécoise et qui sont au
coeur des valeurs libérales, le gouvernement accorde aussi un soutien aux
collectivités et plus particulièrement aux personnes les plus
vulnérables. Nous accordons à cela une très grande importance, M. le Président.
Voilà
maintenant qui m'amène un peu aussi à parler des crédits du ministère des
Finances pour l'exercice 2017‑2018
qui, en excluant le service de la dette, totalisent 200 millions de
dollars. En regardant d'un peu plus près
le budget des dépenses courantes du ministère qui comprend notamment la rémunération et les coûts de fonctionnement, c'est de 68 millions de dollars. Je tiens d'ailleurs à souligner que le
budget de fonctionnement du ministère a diminué de près de 19 % depuis 2009
grâce aux gestes qui ont été posés. Je suis sûr que nous aurons l'occasion d'y
revenir.
Maintenant,
en conclusion, M. le Président, nous confirmons la bonne santé économique et
financière du Québec, ce qui est une
bonne nouvelle pour le Québec et pour les Québécois. Notre plan s'inscrit dans
la continuité. Nous faisons exactement ce que nous avons dit que nous ferions
pour améliorer le niveau de vie et la qualité de vie des Québécois et nous allons continuer de le faire. Mais, M. le
Président, visiblement, les résultats de notre gouvernement dérangent. La santé économique et financière saluée d'ailleurs
par acteurs indépendants, les investissements majeurs et durables pour la
santé et pour l'éducation, les améliorations
significatives du niveau de vie et la qualité de vie des Québécois ne semblent
pas faire l'affaire de certains. Les
allégations répétées au cours des derniers jours ne sont pas le fruit du hasard
et, de toute évidence, des motivations, à mon avis, partisanes. Les Québécois
ne sont pas naïfs, ils ne seront pas dupes.
Vous
me direz, M. le Président : Bof, c'est de la politique, mais le plus
préoccupant dans tout ça, c'est que, dans le dessein de servir ces intérêts partisans, les auteurs et les
promoteurs de ces allégations nuisent fortement à la crédibilité de nos institutions et attisent le cynisme de la
population envers la classe politique tout entière et les principes
fondamentaux de notre démocratie, et ça, à mon avis, c'est très grave.
Nous serons tous, nous tous, perdants de tels stratagèmes. Regardons d'ailleurs
ce que cela a donné aux États-Unis, en Grande-Bretagne et...
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : Excusez-moi. M. le député.
M. Marceau :
Question de règlement. Je trouve que ça dérive un peu puis ça prête des
intentions.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, mais, en ce qui regarde le discours,
c'est quand même un discours qui est général. Vous savez, c'est l'étude des crédits, puis l'étude des crédits,
normalement, on va assez large. S'il y avait dans le discours du ministre des attaques directes à des personnes,
à ce moment-là, j'interviendrais immédiatement. Je ne peux pas l'empêcher
d'avoir son opinion, les journaux en sont remplis, que voulez-vous.
M.
Marceau : Je vais me permettre de dire, M. le Président, que le
ministre a mentionné les oppositions, là, il prétend que les...
Le
Président (M. Bernier) : Bien, écoutez, M. le ministre, il ne faut pas
prêter, si on veut, selon l'article 35, des éléments comme celui-là au niveau des parlementaires qui sont présents
ici. Donc, je vous invite à être prudent. Allez, poursuivez votre...
M. Marceau :
Ça allait bien.
M. Leitão :
Très bien. Moi, je parlais de la classe politique en général, nous tous.
Bon,
dans ces manoeuvres critiquables, je ne reconnais pas le Québec qui m'a
accueilli en 1975 et pour lequel je
me suis engagé en politique en 2014. Ces agissements, à mon avis, devraient
cesser. Personne, personne au Québec n'est
au-dessus des lois. Nous souhaitons tous que justice soit faite rapidement,
mais elle ne doit pas être bafouée. Ni les médias ni cette Assemblée ne
doivent se transformer en jury populaire médiatico-politique. Moi...
Le
Président (M. Bernier) : ...je vais m'assurer que ça ne se transforme
pas ici, à la Commission des finances publiques, soyez-en sûr.
M.
Leitão : Certainement. Moi, M. le Président, tout ce que je peux vous
dire, c'est que moi, je vais continuer de
faire mon travail avec détermination et intégrité au sein d'une équipe et
auprès d'un chef qui incarnent cette détermination et cette intégrité et dont toute l'énergie est
tournée, depuis sa formation, vers l'intérêt du Québec et des Québécois. Le
Québec a de grands défis à relever et aussi
de bonnes opportunités à saisir, et je vais mettre toute mon énergie à m'en
occuper. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Nous allons passer maintenant du côté
de l'opposition officielle. M. le député de Rousseau, vous avez
exactement 10 minutes pour votre présentation.
M.
Marceau : Mais, si je n'utilise pas ce temps, je le conserve?
Le
Président (M. Bernier) : Il est reporté sur vos périodes qui... sur
vos blocs, en bon français, selon notre jargon.
M. Marceau :
Parfait. Alors, je serai très bref.
Alors,
je vous salue. Je salue tous les collègues. Ça me fait plaisir d'être avec vous
aujourd'hui. Je salue d'avance tous nos invités, ceux qui sont là
présentement et ceux qui viendront.
Peut-être
un commentaire pour dire que j'ai peine à comprendre le sens de ce qui a été
dit par le ministre dans les dernières minutes. Je vais m'arrêter là, j'y
reviendrai s'il le faut. Je m'arrête là. Merci, M. le Président.
• (15 h 40) •
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. le député de Rousseau, de vos remarques.
Vous avez maintenant,
du côté de la deuxième opposition, M. le député de Granby, sept minutes.
M.
Bonnardel :
Ah! je ne prendrai pas mon temps, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Vous ne prendrez pas votre temps?
M.
Bonnardel :
Je vais l'utiliser dans mon bloc régulier.
Le Président (M.
Bernier) : Bon, bien, c'est bien, merci, donc, ce qui met fin
aux remarques préliminaires.
Discussion générale
Je
suis maintenant prêt à reconnaître une première intervention du côté de l'opposition officielle. Donc, vous avez un premier bloc
d'échange, M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui, merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Sabia, M. Tessier, M.
le ministre évidemment, M. Caudron. Je
vais aller tout de suite sur ce qui est sorti aujourd'hui, en fait, sur la question des paradis
fiscaux. Je pense que c'est assez...
M. Sabia
(Michael) : ...surprenant que vous souleviez la question.
M.
Marceau : C'est ça,
c'est très surprenant, d'autant qu'on a posé deux questions à la période de
questions. Alors, peut-être pour ceux qui nous écoutent, c'est important
de savoir que les chiffres qui ont été rendus publics aujourd'hui ont été bâtis à partir d'une compilation qui nous a été fournie par la Caisse de dépôt pour les pays qui ont été reconnus comme des paradis fiscaux par l'ensemble des parlementaires qui sont assis ici, à cette table, à la Commission des finances publiques. Donc,
pour la liste en question, vous nous avez fourni les chiffres, et nous vous en
remercions.
Bon,
maintenant, il y a un certain nombre de choses qui ont été
surprenantes quand on a constaté les chiffres. La première, c'est que ces investissements dans les paradis fiscaux ont augmenté de façon significative entre
2013 et 2016. Ils sont passés de 14,8 milliards à 26,2 milliards, une augmentation spectaculaire, là. On n'a pas doublé, mais on
n'est pas loin. Et, si on le regarde en termes de proportion de l'actif net de la caisse, là aussi, l'importance des investissements de la caisse dans les paradis fiscaux a augmenté.
Les investissements, en 2013, représentaient 7,4 % de l'actif net de la
caisse. Aujourd'hui, on est à 9,6 % et,
connaissant l'ampleur de l'actif net de la caisse, évidemment, ça représente
des montants importants.
Alors,
peut-être que la première question qui se pose, c'est : Pourquoi?
Pourquoi, alors que les débats sont à l'effet que les paradis fiscaux
sont un cancer pour l'économie mondiale, qui sont un cancer pour les
gouvernements qui ont à offrir des services,
qui doivent taxer les citoyens, qu'est-ce qui fait que la caisse, elle, a
trouvé à propos de faire croître de façon significative ses
investissements dans ces pays-là?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão :
Peut-être, avant de passer la parole à M. Sabia, j'aimerais juste
mentionner deux choses.
D'abord,
je pense que nous sommes tous, ici, autour de cette table, conscients de
dommages, bien sûr, que l'évitement
fiscal et l'évasion fiscale comportent. Et on voit d'ailleurs
de façon très concrète les conséquences de cela dans le débat public et politique,
dans les pays de l'OCDE, on le voit très clairement. Je veux aussi
saluer le travail de la Commission des finances publiques et de son
rapport et je veux aussi rassurer cette commission qu'au ministère des Finances
et au ministère du Revenu, Revenu
Québec, nous prenons tout cela très au sérieux et, oui, nous sommes en train
de faire une évaluation des 38 recommandations pour voir comment on
pourrait donner suite à cela.
Donc,
j'aimerais donc préciser ces questions-là et je suis aussi profondément
confiant et certain que la Caisse de dépôt
et placement du Québec ne fait pas de l'évasion fiscale. Je pense qu'il faut
que cela aussi soit dit clairement, la caisse ne fait pas de l'évasion fiscale. Et ça, bon, M. Sabia, je pense
que vous avez quelque chose à dire là-dessus, mais il faut que ce soit
clair aussi, ça.
Le Président (M.
Bernier) : Donc, il y a consentement que M. Sabia puisse
prendre la parole? Aviez-vous d'autre chose à ajouter, M. le ministre?
M. Leitão :
Non, pas pour l'instant.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député de Rousseau, vous?
M. Marceau : Oui, je veux
juste... Évidemment, si le ministre et puis M. Sabia répondent à chacune
de mes questions, ça va faire des longues réponses, là. Enfin, bon, juste dire quand
même, sur l'affirmation du ministre...
Le
Président (M. Bernier) : Sauf que, sur le plan... au
niveau parlementaire, je dois
m'adresser au ministre, par la suite qui, lui, donne la parole...
M. Marceau : Oui, oui, je
comprends. J'accepte ça, je comprends ça.
Le Président (M. Bernier) :
C'est comme ça que ça fonctionne.
M. Marceau : J'accepte ça et
je comprends ça.
Simplement
dire que je n'ai jamais dit que la caisse faisait de l'évasion fiscale, là. Par contre,
la caisse investit dans des entreprises
qui, elles, pratiquent... enfin, en
tout cas, ont la pratique d'être
présentes dans des paradis fiscaux. Il en
découle que ces entreprises, pour diverses raisons, évidemment,
sont plus concurrentielles parce
qu'elles paient moins d'impôt, et ça peut les rendre attrayantes pour
certains investisseurs. Je pense que c'est ce dont il s'agit ici.
Ce dont il
s'agit, c'est qu'il y a des... on a le choix entre investir dans des
entreprises qui ne sont pas présentes dans
les paradis fiscaux puis qui donc doivent payer plus d'impôt, puis d'autres qui
sont dans les paradis fiscaux et qui donc paient moins d'impôt. Puis
quand le «bottom line», c'est le rendement sur l'investissement, bien,
évidemment, quelqu'un qui paie moins d'impôt, il est plus rentable.
Alors, je
pense que c'est ce qui est en question ici, pas que la caisse fait de l'évasion
fiscale. Je pense que vous comprenez ça, vous aussi, M. le ministre.
Alors, je m'arrête là-dessus, mais je laisse M. Sabia répondre.
Le Président (M. Bernier) :
M. Sabia, bienvenue.
M. Sabia
(Michael) : M. le Président,
je pense que M. Marceau comprend très bien que je n'ai pas nécessairement
besoin de l'aide du ministre des Finances
pour vous donner une longue réponse, je suis bien capable moi-même de faire ça.
Donc, sur ce
sujet, ce sujet, évidemment, est un sujet important, très important que nous, à
la caisse, nous prenons très au
sérieux. Donc, d'abord et avant tout, je voudrais juste... Reculons un peu
juste pour mettre des choses... enfin, de mettre des choses en
perspective.
Comme toutes
les caisses de retraite canadiennes et, je pense, 100 % des caisses de
retraite dans le monde OCDE, nous
voulons éviter la double imposition de nos retraités. Ça, c'est l'objectif
fondamental et évidemment, dans notre cas, c'est d'éviter une situation de double imposition pour les Québécois.
Selon nous, et c'est une question du fonds, ça ne serait pas équitable ou juste du tout que les
Québécois soient imposés à deux reprises, deux fois sur le même dollar de
prestation. Et dans le fond, ça, c'est la
question du fonds. Évidemment, il est important que tout le monde paie leur
juste part, et c'est exactement, exactement ce qui se passe ici. Donc,
pour nous, ça, c'est l'objectif, d'être certains que les Québécois ne sont pas imposés deux fois, et
également d'être certains que tout le monde, la caisse ou d'autres
investisseurs, ils paient leur juste
part. Donc, ceci étant dit, et j'espère, j'espère que c'est clair, la caisse
respecte toutes les lois et toutes les
meilleures pratiques en matière d'impôt partout dans le monde, partout dans le
monde. Comme je disais, les rendements de
la caisse, comme les caisses de retraite de la plupart des pays G20, sont
imposés quand l'individu reçoit ses prestations. Donc, juste pour clarifier, si la caisse payait des impôts à l'étranger,
les Québécois, les Québécoises se retrouveraient avec une double imposition
pour chaque dollar de prestation, et ça, c'est le problème. Donc, qu'est-ce
qu'on fait? Trois choses.
Évidemment, nous travaillons actuellement avec
plusieurs gouvernements à travers le monde pour établir les ententes d'exonération de la même façon que la
caisse est exonérée et les caisses de retraite canadiennes sont exonérées ici,
au Canada, aux États-Unis, en France et
franchement dans plusieurs pays à travers le monde. Mais ça, c'est le
numéro un.
Numéro deux,
nous travaillons quotidiennement avec chacun de nos partenaires pour essayer de
les convaincre d'ajuster leurs activités et nous avons eu pas mal de
succès avec quelques fonds de couverture, quelques partenaires importants. Dans plusieurs transactions très
importantes, nous avons réussi à convaincre nos partenaires, dans plusieurs
cas, d'adopter et de choisir le Canada comme
le domicile pour une transaction. Donc, nous faisons des progrès. C'est étape
par étape, par étape.
Le
Président (M. Bernier) : Est-ce que vous pourriez couper un petit
peu votre temps de réponse, M. Sabia? Parce qu'il y a beaucoup de
questions.
M. Sabia (Michael) : J'ai juste
une autre chose. Soyez patient, juste une autre chose.
Le Président (M. Bernier) : Je
suis très patient, sauf que le temps est limité.
• (15 h 50) •
M. Sabia (Michael) : Oui, mais
ça, ça fait partie du sport de l'étude des crédits, oui, mais quand même...
Donc, ça,
c'est la deuxième chose, une détermination
de travailler avec nos partenaires. Et, comme je disais, nous avons eu
du succès.
Et finalement, et chose extrêmement importante, la vraie solution et franchement la seule
solution à toutes ces questions demande une perspective et un mécanisme global.
Et c'est la raison pour laquelle le G20 a confié le mandat à l'OCDE d'organiser, et de développer les
protocoles, et de chercher l'approbation de ces protocoles par tous les pays.
Et nous travaillons très fort quotidiennement et franchement on agit comme un
leader dans ce processus.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.
M.
Marceau : Bon, merci,
M. Sabia. Bon, quelques trucs. Premièrement, vous ne m'avez pas dit pourquoi la caisse
a augmenté ses investissements dans les paradis fiscaux. Vous n'avez pas eu cette réponse-là. Deuxièmement, vous me dites le motif de la
double imposition, mais à ce compte-là, vous le savez très bien,
vous n'investirez pas dans les entreprises québécoises qui n'ont pas de place
d'affaires dans les paradis fiscaux puis qui paient leurs impôts au Québec.
Tant qu'à faire, là, vous n'investirez pas
dans SNC, parce qu'ils paient des impôts puis... Je ne comprends pas l'argument
du tout, je suis désolé, là. Je comprends
bien que vous, vous êtes exonéré d'impôt, mais les entreprises
dans lesquelles vous investissez,
elles, paient des impôts, la plupart d'entre elles, sauf qu'il y en a un
certain nombre d'entre elles qui sont dans les paradis fiscaux, où elles ne paient pas d'impôt. Puis je veux bien
que vous respectiez les règlements puis les lois en vigueur aux îles Caïmans, puis que les entreprises dans
lesquelles vous investissez respectent les lois en vigueur aux îles Caïmans, mais il n'en demeure pas moins que
ces entreprises qui investissent là-bas ne paient pas d'impôt
ou, en tout cas, ne paient à
peu près rien en impôt.
Alors,
c'est ça qui est en question ici. Ce n'est pas que
vous ne respectiez pas les lois, ça, je suis entièrement certain de ça, mais votre argument de la double imposition
milite en défaveur de l'investissement au Québec. J'espère que vous vous en rendez compte.
J'espère que vous vous en rendez compte.
Alors, je reviens à
ma question, là. Là, on était dans la plaidoirie, là. Je reviens à ma question
très simple. Pourquoi est-ce que ça a augmenté de façon aussi spectaculaire
depuis 2013?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Fondamentalement grâce à deux choses — et j'ai dit «grâce à», pas «à cause de» : une très bonne performance de la caisse, un impact significatif qui vient juste
du rendement et de la croissance de notre portefeuille. Ça représente à
peu près, Maarika, disons... à peu près 50 %, 40 %, 50 % de
cette augmentation.
Deuxième
élément, c'est la question — et M. Marceau, vous êtes très au
courant de ça — de
l'importance de ce processus de
mondialisation de la caisse. Il faut faire des investissements partout dans le
monde pour chercher un autre niveau de croissance qui n'existe pas ici,
au Canada, ou franchement aux États-Unis, ou même en Europe. Donc, la mondialisation de la caisse est une priorité
extrêmement importante. Et, oui, avec des investissements qui sont de plus en
plus importants, qui représentent un
pourcentage de plus en plus important de notre portefeuille, il y a une
augmentation de ces chiffres, et c'est la raison pour laquelle... et
maintenant je me répète, mais c'est la raison pour laquelle nous mettons beaucoup d'accent sur le travail avec le
gouvernement pour chercher les ententes d'exonération. C'est la raison pour
laquelle nous travaillons
quotidiennement avec nos partenaires pour les convaincre d'ajuster leurs
pratiques. Et finalement, je me répète,
c'est la raison pour laquelle nous travaillons étroitement avec l'OCDE pour mettre
en vigueur une solution globale.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.
M.
Marceau : O.K. Voilà, en tout cas, une réponse que je trouve...
À défaut de me plaire complètement, au moins, elle me satisfait au plan
intellectuel.
Là,
la Commission des finances publiques, là, nous tous ici, on a voté une
recommandation demandant à la caisse de
réduire progressivement ses investissements. Vous avez certainement vu ça, la
recommandation 19 : «...réduire progressivement les investissements dans les entreprises qui font de
l'évitement fiscal abusif ou de l'évasion fiscale. Que la Caisse fasse
état de cette opération dans son rapport annuel.»
Deux
questions sous-jacentes. Donc, la première, c'est : Est-ce que vous êtes à
l'aise avec cette recommandation? Est-ce
que vous allez la mettre en oeuvre? Et puis, deuxièmement, est-ce que vous
allez, l'année prochaine, dans votre rapport annuel, nous faire état de
vos progrès en la matière?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
Mme Paul
(Maarika) : Oui. Alors...
Le Président (M.
Bernier) : En vous identifiant, s'il vous plaît, et votre
titre.
Mme Paul
(Maarika) : Oui. Je suis Maarika Paul, chef de la direction financière
à la caisse.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. La parole est à vous, madame...
Mme Paul (Maarika) : Alors, oui, on a bien pris connaissance, justement, du rapport de la
commission sur les paradis fiscaux et
on a analysé, justement, les recommandations. Il y en avait quatre qui avaient
trait à la caisse, justement. Certaines
sont déjà en continuité avec les politiques et les directives internes que la
caisse a mises en place en matière de fiscalité.
Alors,
comme M. Sabia a indiqué, on fait déjà des efforts, plusieurs efforts dans
le déploiement pour réduire, de faire
des changements, d'influencer nos partenaires de ce côté-là. Ce qu'on fait
également, c'est qu'on, et je rentre un peu dans le processus, mais je
pense que c'est important, on analyse le mérite de chaque...
M. Marceau : ...minutes, puis
j'aimerais simplement savoir : Est-ce que vous avez l'intention de réduire
vos investissements dans les paradis
fiscaux? Puis est-ce que vous allez... Bien, je ne veux pas savoir les
processus. Question très simple, là. Puis est-ce que vous allez en faire
état l'année prochaine dans votre rapport annuel?
Mme Paul (Maarika) : Ce qu'on va...
M. Sabia (Michael) : ...dans le
fond, franchement, ce n'est pas si simple, et vous le connaissez très bien.
M.
Marceau : Bien, moi, je vous demande : Est-ce que vous avez
l'intention d'aller dans cette direction-là? C'est ce que je vous
demande, tout simplement. Ça se répond par un oui ou par un non, là.
Mme Paul (Maarika) : Ce que je vous
dis tout le temps...
M. Sabia (Michael) : Ma réponse est : Par le biais d'une entente
mondiale sur le leadership de l'OCDE qui va changer des choses et simplifier la vie tout le monde... ma réponse
est : Absolument, oui. Mais la raison pour laquelle... Et, M. Marceau, vous êtes expert dans ce domaine,
donc vous comprenez très bien, ce n'est pas quelque chose que la caisse
elle-même... que nous pourrions changer. Il
faut travailler dans un contexte d'une institution mondiale pour trouver des
solutions qui comprennent tout le monde. Et ça, c'est, dans le fond, la seule solution à cette question. Mais, sur le
niveau de nos intentions, dans un contexte mondial, oui; indépendamment,
non.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Rousseau.
M.
Marceau : Je veux juste
prendre 10 secondes pour dire que je ne veux pas être impoli, quand je
vous interromps, c'est simplement
que le temps est très, très limité. Puis je veux que vous compreniez que
c'est... on ne peut pas parler de processus, là, il faut arriver droit à
la question.
Bien,
regardez, moi, je comprends bien que la caisse ne peut pas faire cavalier seul là-dedans.
Je comprends ça, mais, en même temps,
j'ai devant moi une tendance à la hausse. Je comprends que le processus dans la
caisse est engagé de se mondialiser, parce que,
bon, les rendements ne sont pas faciles à trouver de nos jours, là. Je
comprends tout ça, mais, en même
temps, il existe des opportunités d'investissement dans des entreprises qui sont présentes à l'international et qui
ne sont pas présentes dans les paradis fiscaux. Vous le savez comme moi, vous avez des investissements dans d'autres
pays que dans ceux dont il a été question ici.
Est-ce que
c'est envisageable que vous nous disiez : Oui, nous allons mettre l'accent
sur ces pays dans lesquels la fiscalité
ressemble à la nôtre? Est-ce qu'on peut vous entendre nous dire ça? Je pense que
c'est ce que les Québécois veulent entendre. C'est ce que les membres
de la commission veulent entendre ici.
Le Président (M. Bernier) : M.
Sabia.
M. Sabia
(Michael) : M. Marceau, nous
allons continuer ce que nous faisons quotidiennement à la caisse. Nous
allons continuer à chercher les meilleures occasions d'investissement dans le
monde.
Le
Président (M. Bernier) :
Nous aurons l'occasion de rediscuter du sujet, M. Sabia. Nous allons
passer du côté...
Une voix : ...
Le
Président (M. Bernier) :
Oui, mais vous allez avoir la chance de me répondre. C'est moi-même qui vais
débuter les questions sur le sujet.
Donc, en tant
que président à la Commission des
finances publiques, vous comprenez
qu'on a travaillé pendant deux ans
sur ce rapport au niveau de la lutte dans les paradis fiscaux. Effectivement, j'ai mentionné que c'est un cancer au niveau
des différentes sociétés
au niveau mondial. Pourquoi? Parce que, de plus en plus, les contribuables sont mis à pression par rapport aux différents programmes
qu'on... Puis on a travaillé très fort, le ministre l'a mentionné, on a
travaillé très fort, comme gouvernement, pour être capable de rétablir l'équilibre
budgétaire et de dégager une marge de manoeuvre. Dans les solutions, la lutte aux entreprises ou la lutte aux
personnes qui font de l'évasion ou de l'évitement fiscal est un élément qu'on considère très important. Ça a un impact sur les finances du
Québec, ça a un impact sur les finances canadiennes.
Il y a deux
recommandations qui vous concernent dans le rapport, qui sont quand même assez
claires, assez simples, qui vous
concernent directement, qui disent ceci : «[Nous demandons] à la Caisse de
dépôt et placement du Québec de réduire
progressivement — progressivement — ses investissements dans les entreprises qui
font de l'évitement fiscal abusif ou de l'évasion fiscale. Que la Caisse
de dépôt et placement du Québec fasse état de cette opération dans son rapport
annuel.» Donc, c'est clair. C'est ce qu'on vous demande.
Quelle réaction avez-vous par rapport à cette
recommandation?
• (16 heures) •
M. Sabia (Michael) : Ma réponse est simple. On a deux tendances ici,
une intention, de notre part, de travailler avec nos partenaires pour continuer de réduire l'utilisation de ces opérations... Et je me répète, ces opérations, ce n'est pas une question d'évitement fiscal du tout, c'est une question
de juste utiliser un pays, une juridiction neutre. Pourquoi? Parce que,
dans la plupart des cas, un fonds avec des clients, leur objectif
est de créer une situation où chacun de leurs investisseurs paient leurs taxes, leurs impôts dans leur pays. Encore
une fois, je reviens à mon point de principe, qui est : Toute la
structure est d'éviter la double taxation des gens, des investisseurs ou, dans
notre cas, des retraités.
Donc, il y a, comme
je disais, deux tendances, une tendance, de notre part, de continuer à
travailler avec les partenaires, également
une autre tendance qui est la mondialisation et l'expansion dans le monde de la
caisse pour livrer aux Québécois et
aux Québécoises le meilleur rendement possible. Donc, on a une tendance à la
baisse et une tendance à la hausse.
Est-ce qu'à moyen terme, à court terme, la semaine... l'année prochaine, vous
allez voir un chiffre qui est plus bas? Je ne peux pas vous donner cette
garantie cet après-midi.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, M. Sabia, je suis d'accord. Je comprends
votre explication, là, sauf qu'il y a une autre tendance aussi, c'est que les Québécoises et les Québécois, quand
ils regardent l'augmentation de leur contribution au niveau fiscal, ça aussi, ça a un impact, puis
ils ne veulent pas que ça se poursuive dans ce sens-là, et c'est sur ça qu'on
travaille comme gouvernement quand on
rééquilibre les finances publiques, en leur donnant les meilleurs services. Ce
que je vous dis, là, ce qu'ils veulent avant
toute chose, c'est d'être capables de récupérer les argents et de faire les
pressions nécessaires en ce qui
regarde ces paradis fiscaux là pour qu'on cesse de les utiliser. Et ça, la commission,
lors des rencontres, nous sommes
allés à l'international rencontrer l'OCDE, nous avons discuté avec ces gens-là,
et ça, c'est une tendance mondiale,
d'être capable de mettre en place des mesures pour contrer, sauf que ça prend,
bien sûr, des décisions politiques puis
ça prend également des actions d'organismes comme le vôtre pour être capable de
mettre les pressions nécessaires pour
cesser d'utiliser ces paradis fiscaux là, O.K.? Donc, c'est ce qu'on vous
demande dans la recommandation puis, l'autre élément sur lequel porte la recommandation, que la Caisse de dépôt et
placement du Québec fasse état de cette opération dans son rapport
annuel. Donc, c'est ce qu'on vous demande au niveau de la recommandation.
La
deuxième, on demande à la Caisse de dépôt et placement du Québec d'exiger des
entreprises dans lesquelles ses placements sont significatifs, et lui
permettent en conséquence d'influer sur leur gouvernance, de cesser d'avoir recours aux paradis fiscaux. Vous avez commencé à
élaborer tout à l'heure, vous avez dit : On a certaines relations avec
ces organismes-là, ces entreprises-là. Ce
qu'on vous demande également, c'est d'influencer ces entreprises-là dans l'utilisation des paradis fiscaux pour qu'elles
puissent se conformer à l'ensemble des situations économiques mondiales.
Donc, c'est ce qu'on souhaite et c'est ce qu'on vous demande comme organisme.
M. Sabia (Michael) : Oui, mais, M. le Président, vous avez dit quelque chose d'extrêmement
important, avec lequel je suis
entièrement d'accord. Donc, si le gouvernement du Québec veut faire quelque
chose de constructif à cette question,
travailler avec les autres provinces, travailler avec le gouvernement du Canada
et augmenter la pression pour une
accélération par l'OCDE, ça, c'est une façon, et ça, c'est une chose efficace
parce que, comme je le disais, la seule façon de simplifier le monde des impôts est de travailler ensemble dans
une échelle internationale, donc dans un encadrement international.
Le
Président (M. Bernier) : ...M.
Sabia, il y a 36 autres recommandations qui concernent justement
le gouvernement du Québec et les recommandations qui concernent des ententes ou des négociations avec le gouvernement fédéral.
Donc, ce que vous mentionnez là, il y
en a 36 autres, et il y en a
deux qui vous concernent directement puis les 36 autres
concernent ces éléments-là, en ce qui
regarde la position politique,
que je peux appeler, de notre gouvernement
et du gouvernement fédéral.
M. Sabia (Michael) : M. le Président, donc, sur votre question de notre rapport annuel, je n'ai aucun problème de trouver une façon de présenter quelque chose... je
ne sais pas exactement quoi cet après-midi,
mais de trouver une façon de mettre un peu plus d'accent sur cette question
dans notre rapport annuel, peut-être pas mal aligné...
Et,
Maarika, je vais vous demander de juste leur donner quelques exemples du
travail que nous avons fait avec nos
partenaires parce que ça, c'est une façon d'envoyer un message, parce que
nous sommes bien conscients, M. le
Président, que nous avons une certaine influence, étant donné la taille de la caisse, la crédibilité
de la caisse et notre expertise qui est reconnue mondialement. Donc, si
nous mettons de la pression sur nos partenaires, c'est quelque chose qui va
mener d'autres fonds, peut-être, de faire la
même chose, et c'est la raison pour laquelle nous mettons tant d'accent sur
cette question.
Mais
est-ce que nous pourrions prendre juste deux, trois minutes pour partager
quelques exemples du travail que nous faisons?
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y.
Mme Paul (Maarika) : Parce que je pense que c'est justement important qu'on parle de
l'influence. Surtout dans les années
2016‑2017, on a eu certains succès à cet égard-là. On a réussi, dans le cas
d'une compagnie, justement, qui a investi... On a investi dans une
compagnie française. Au lieu de passer par le Luxembourg, on a convaincu nos partenaires, etc., de passer par ici. La même
chose pour un investissement qui a été fait par une compagnie asiatique, etc.,
c'est passé par le Canada plutôt que par les
Pays-Bas. On a également réussi, dans certains cas de gestionnaires de fonds,
d'établir leur juridiction aux États-Unis
plutôt qu'aux îles Caïmans. C'est la première fois, en 2017, qu'on a réussi à
faire changer la juridiction des fonds, mais, je pense, en travaillant
ensemble, justement, avec l'OCDE, avec tout le changement climatique, si
on veut, qui tourne autour de cette question-là, on réussit à influencer de
plus en plus.
L'autre chose qu'on a mise
en place... On fait d'habitude des revues opérationnelles, des revues
diligentes opérationnelles quand on investit
dans des nouveaux fonds avec des partenaires, des gestionnaires externes. On a
inclus cette année un aspect sur la
fiscalité dans ces revues diligentes là justement pour avoir des discussions
sur la localisation, sur le respect
des lois, c'est comment, conservateur ou non, et... justement, une entité.
Alors, toutes ces choses-là ont été mises en place depuis, je dirais,
les derniers 12 à 18 mois.
Également,
dans le cas des marchés boursiers, par exemple, où on investit dans des
sociétés publiques, on a des discussions
avec les gestionnaires, les administrateurs de ces entités-là justement sur la
question de la fiscalité, de respect des
lois, de l'utilisation des juridictions à fiscalité neutre. On évalue, on
regarde. S'il y a des cas, par exemple, où ça nous paraît que les taux d'imposition sont très bas,
les taux effectifs sont bas, mais à ce moment-là on a des discussions, et ça,
ça se fait régulièrement, continuellement
comme influence. Alors, ça répond à une de vos recommandations justement
dans votre rapport, qui demande qu'on influence. On le fait.
Et on le fait
aussi à l'interne avec nos propres gestionnaires. On a mis en place, en 2016
justement, une directive sur
l'utilisation des juridictions à fiscalité neutre. Ça requiert justement que
nos gestionnaires soient bien au courant des taux d'imposition, etc. Et également, quand on fait des analyses sur ces
investissements-là, on les regarde en incluant un taux d'imposition québécois normal, etc., ici qui
permet... qui requiert, finalement, que la décision se prenne sur la validité
de l'investissement et pas reliée au taux d'imposition.
Alors, ça,
c'est toutes des choses qu'on est en train de mettre en place pour répondre à
votre recommandation.
Le
Président (M. Bernier) : ...qu'on vous invite à poursuivre, puis on a
hâte de vous lire l'an prochain, dans le rapport annuel sur le sujet, et, pour nous, la Caisse de dépôt est un
élément extrêmement important dans les mesures pour combattre
l'utilisation des paradis fiscaux ou l'utilisation de la lutte à l'évasion et à
l'évitement fiscal.
Je vais
passer du côté... Je ne veux pas prendre tout le temps. Je sais que les
collègues du côté de l'opposition auront l'occasion de revenir et que mes collègues également peuvent y retourner.
Je vais laisser la parole au député de Trois-Rivières.
• (16 h 10) •
M. Girard : Merci beaucoup, M. le
Président. À mon tour de vous saluer, M. le Président, les collègues des deux côtés, ainsi que M. le ministre, M. Sabia. Et
permettez-moi de saluer M. Christian Dubé, notre ex-collègue qui est
maintenant à la Caisse de dépôt et placement.
On a eu la chance de travailler ensemble à l'époque où j'étais ministre délégué
aux PME. Donc, c'est toujours un plaisir de vous revoir.
Donc, j'ai
participé moi aussi à la rédaction du rapport de la Commission des finances
publiques sur les paradis fiscaux. Je suis arrivé un peu en retard dans
le processus. Le processus a débuté le 25 février 2015, je suis arrivé à
la commission, moi, en 2016. Mais vous
n'êtes pas sans savoir mon passé au niveau des institutions financières. J'ai
travaillé pour des grandes banques
canadiennes, le Mouvement Desjardins, et les paradis fiscaux m'intéressent
vraiment, de voir comment on peut
réduire ce phénomène, parce que, pour moi, ce qui est important, c'est la santé
financière des Québécois, et on sait
que, pour avoir un budget équilibré, que le ministre des Finances puisse
continuer à avoir un budget équilibré, on doit bien contrôler les
dépenses, mais on doit générer des revenus, et cette fiscalité-là, ce sont les
revenus de notre gouvernement. Donc, chaque
entreprise qui ne paie pas ses impôts, ce sont des revenus de moins, donc des
investissements de moins en éducation, en santé, etc.
Je veux
revenir sur ce qui a été dit tout à l'heure juste pour être certain qu'on se
comprenne bien parce qu'on peut faire
dire ce qu'on veut des fois à des mots, à certaines choses. Tantôt, mon
collègue de Rousseau a mentionné que la caisse est présente dans les paradis fiscaux. La caisse n'est pas présente, la
caisse investit dans des entreprises qui, elles, sont présentes dans des paradis fiscaux. Je pense qu'il
faut faire quand même... Et on a mentionné aussi : La caisse a augmenté
ses placements dans les paradis fiscaux. La
caisse investit dans des entreprises qui, elles, ont des liens avec les paradis
fiscaux.
Dans la
recommandation 19, on mentionne qu'on veut réduire progressivement les
investissements dans les entreprises qui
font de l'évitement fiscal abusif ou de l'évasion fiscale. Donc là, on fait un
petit peu un lien entre parce qu'une entreprise a un point de service ou a une usine dans un secteur du globe où la
fiscalité est différente, qu'automatiquement elle fait de l'évitement fiscal. Donc, il faut faire attention
aussi, s'assurer que les entreprises dans lesquelles on investit... pas parce
qu'ils ont nécessairement un point de
service ou parce qu'ils font affaire dans un coin du globe où la fiscalité est
neutre qu'ils font nécessairement de l'évitement fiscal.
L'autre point
aussi que je veux apporter, c'est que, pour moi, ce qui est important, c'est
les entreprises qui font affaire au Québec et ici, au Canada. Donc, si on
investit dans une entreprise à l'international qui n'a aucun lien avec le
Canada et qui peut donner un excellent
rendement à nos contribuables — parce qu'on parle du bas de laine des
Québécois — donc
je pense que c'est important pour vous, pour
avoir une bonne diversification du portefeuille, d'investir à l'international,
dans des entreprises qui peuvent être
n'importe où à travers le globe, incluant certains pays qui ont une fiscalité
neutre.
Donc, il faut
faire attention. C'est vraiment des entreprises qui font des affaires chez nous
et qui, indirectement, ne paieront
pas les impôts chez nous en raison d'un transfert qui va se faire dans un pays
qui a une fiscalité neutre. Donc, je
pense qu'il faut faire attention. Donc, si on prend la quantité de milliards
investis par la Caisse de dépôt et placement du Québec, ce n'est pas nécessairement toutes des entreprises qui font
affaire chez nous, mais ce n'est pas tout nécessairement des impôts du Québec ou du Canada qui... ça peut être des
impôts de partout à travers le monde. Donc, je pense qu'il faut quand
même, là, mettre en perspective...
Donc, moi, je
voulais vous amener au niveau de l'impact sur les rendements et sur la
diversification du portefeuille. Quand
vous faites un investissement, quand vous choisissez un type d'investissement
en fonction du portefeuille, quand on
parle de répartition d'actif, que ce soit en termes de secteur d'activité, en
termes de grosseur d'entreprise, en termes de région géographique, on parle de risque, de
devises, etc., donc, il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte
lorsqu'on choisit d'investir dans une entreprise. Et, bien sûr, on veut avoir
le meilleur rendement possible parce que, si, lors de la prochaine année, votre rendement est plus
bas que les comparables, vous allez être dans les médias, et on va vous
dire que vous n'avez pas fait un bon travail.
Donc, je ne
veux pas diminuer le rendement potentiel des Québécois parce que c'est le bas
de laine des Québécois, mais je ne
veux pas non plus encourager des entreprises qui font affaire chez nous à ne
pas payer des impôts parce que ce sont
également des revenus pour les Québécois. Donc, comment? En prenant des
décisions et en analysant un petit peu plus
loin sur les entreprises qui font des affaires chez nous, qui sont peut-être
dans des pays à juridiction neutre. On peut placer ça où dans vos décisions de placement? Est-ce que la
recommandation 19 pourrait avoir un impact sur le rendement, pourrait vraiment venir changer de façon
importante votre façon d'investir? Et quel serait l'impact de l'autre côté, sur
les rendements de la caisse et du bas de laine des Québécois?
Le Président (M. Bernier) :
Vous avez une minute, M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Donc, je ne peux pas quantifier ces impacts, mais
je voudrais vous dire tout simplement une
chose. Une société qui participe... ou qui pratique l'évasion fiscale, ce n'est
pas une société dans laquelle nous allons investir, point à la ligne. Et pourquoi? Parce que ça représente un
risque, franchement, financier, parce qu'il y aura des conséquences dans le temps. Également, ça
représente un gros risque réputationnel. Ce n'est pas bon pour la marque de la
caisse à travers le monde.
Donc, nous
faisons... Maarika a fait référence à notre processus de vérification
diligente. Et chaque fois que nous faisons un investissement soit dans
une société...
Le
Président (M. Bernier) : M. Sabia, je dois passer du côté
du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Merci, M. le
Président. M. Sabia, merci d'être là, tous ceux qui vous accompagnent, que
j'ai salués tantôt.
Je ne veux
pas passer mon bloc complet sur les paradis fiscaux. Deux questions, peut-être
une première au ministre, et après, M. Sabia, je vais vous parler
du REM par la suite, hein, un bon dossier qu'on suit de près.
Ma première
analyse avec le journal de ce matin... Bon, ce n'est pas la première fois qu'on
entend parler que la caisse a des
investissements x. Ma réflexion, c'est que la caisse s'assure que ses
déposants évitent d'être imposés à deux reprises. Est-ce normal? Oui. La caisse a le droit d'agir de
la sorte dans un souci de protection des droits de ses déposants. Mais
cependant la caisse doit avoir recours à l'utilisation de paradis fiscaux afin
d'arriver à ses fins. Est-ce normal? Non.
M. le
ministre, la question va être à vous. On a tous signé un rapport. Le président
l'a mentionné tantôt, c'était mon
collègue député de la Beauce, de Beauce-Nord, qui a signé ce document avec ceux...
de la Commission des finances publiques.
Quel est le plan du ministre pour qu'à court terme, oui, la caisse ne soit plus
obligée d'utiliser cette méthode pour
éviter que ses déposants soient injustement imposés à deux reprises? Tantôt,
vous avez dit, M. Sabia, qu'il faudrait que le gouvernement rapidement, peut-être, fasse le travail, se mette en
action, pas juste en réaction. Alors, une réponse peut-être rapide, M. le
ministre, sur ce cas particulier qui risque de nous toucher encore longuement
si le gouvernement ne prend pas action là-dessus.
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre.
M. Leitão : Une réponse rapide n'est
pas possible dans un tel contexte. Mais rapidement, là, bien sûr que le gouvernement du Québec doit prendre ses
responsabilités, et nous les prenons. M. Sabia l'a déjà mentionné plusieurs
fois, la clé, la solution de cet
enjeu, c'est au niveau international, c'est au niveau de la collaboration,
coopération internationale entre le
gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada, les gouvernements membres de
l'OCDE. Nous allons continuer à
travailler très fort avec nos partenaires fédéraux pour que la position du
Canada à l'intérieur de l'OCDE soit de plus en plus visible et de plus
en plus importante. Donc, nous allons continuer à faire ça de notre côté.
J'aimerais
aussi mentionner quelque chose que M. Sabia était en train d'expliquer, et je
pense que c'est vraiment extrêmement critique, c'est que la caisse
n'investit pas dans des entreprises qui font de l'évasion fiscale. L'évasion fiscale, c'est contre la loi, c'est une fraude,
c'est criminel, et la Caisse de dépôt et placement du Québec ne fait pas
affaire avec des entreprises qui pourraient être considérées comme
criminelles. Donc, ça, c'est extrêmement important.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Granby.
M.
Bonnardel :
Merci, M. le Président. M. Sabia, tantôt, vous avez répondu à mon collègue...
sur la portion de 2016 où, bon, il y
a des actifs de 26,2 milliards de dollars qui sont dans les paradis, vous
avez dit tantôt : Je ne peux pas vous
répondre en vous disant que, l'an prochain, le montant sera plus bas ou que la
proportion de l'actif sera plus basse, moyenne d'à peu près 10 %.
Est-ce que vous vous donnez minimalement une politique où vous dites :
Bon, ça, on ne peut pas aller plus bas que
ça ou on ne prévoit pas parce que je ne peux pas vous l'annoncer? Est-ce que,
pour vous, même si l'actif de la
caisse, on le souhaite, va continuer de grossir... Oui. Est-ce que, pour vous,
ce 10 %, là, excusez de le dire en anglais, c'est un «target», on se dit : On ne dépassera pas ça ou
on va essayer de ne pas dépasser ça? Parce que l'année prochaine, on va peut-être être à 12 %,
11 %, 13 %. Est-ce que, pour vous, c'est une proportion qui est
limite, ce 10 %?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia
(Michael) : Honnêtement, je
ne peux pas m'engager de positionner le 10 % comme un plafond. Ça serait
idéal, mais également, étant donné la
priorité et l'importance pour l'avenir de la caisse et l'avenir du système de
retraite québécois, il est important
que la caisse continue à chercher des transactions à travers le monde. Et donc
étant donné le rythme de notre
déploiement du capital dans plusieurs pays où on a la possibilité, la
probabilité de générer un rendement fort
intéressant, nous allons continuer à faire ces investissements parce que, dans
le fond, c'est quelque chose qui rend plus sécuritaires les retraites
des Québécois.
Ceci étant
dit, chaque fois, chaque fois que nous avons une occasion de convaincre un partenaire d'intensifier notre travail avec l'OCDE, de faire toutes sortes de...
de tout faire pour minimiser ce chiffre, nous allons le faire. Est-ce que nos
efforts vont se traduire dans un 10 %,
9 %, 11 %? Franchement, cet après-midi, je ne peux pas
m'engager à un chiffre.
• (16 h 20) •
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Granby.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. M. Sabia, je
veux vous parler du cadre financier ou... du cadre du REM.
M. Sabia (Michael) : Le REM?
M.
Bonnardel : Le REM. Les chiffres-clés, l'année passée on
s'est parlé, on était au salon rouge, puis vous m'aviez dit... On était à 5 milliards pour ce qui
était du projet. Là, on est à 6,04. Première question rapide, je veux vous
parler sur le quatrième bloc qui est ici,
le 300 millions, le 295 millions, Hydro-Québec,
électrification des transports,
entente commerciale avec un client
majeur. Avez-vous parlé à M. Martel, dans les dernières semaines, sur ce
300 millions? Où en êtes-vous?
Le Président (M. Bernier) :
M. Sabia.
M. Sabia
(Michael) : Mais est-ce que
je pourrais présenter mon collègue? Mon collègue, c'est M. Macky Tall. Il gère l'empire d'infrastructures à la caisse.
Il gère le projet de REM. Donc, Macky, évidemment, est un haut dirigeant très important chez
nous, donc, et c'est vraiment maintenant un empire, Macky.
Donc, pour
répondre à votre question, notre équipe... je vais passer la parole à Macky
dans quelques instants, mais cette question d'Hydro-Québec, nous sommes en train maintenant
de travailler avec Hydro-Québec pour finaliser une entente commerciale parce
qu'Hydro-Québec va agir en tant que fournisseur des choses dont nous avons
besoin sur l'électrification de notre système et Hydro-Québec est parfaitement
placée pour le faire. Donc, nous avons du travail à faire. Nous ne sommes pas très loin d'une entente, je pense. Nous
avons fait beaucoup de progrès dans le contexte du budget de
M. Leitão, mais également Macky et son équipe travaillent quotidiennement.
Voulez-vous ajouter des choses?
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Granby.
M.
Bonnardel : Je
comprends que vous dites : On n'a pas d'entente. La semaine passée, Éric
Martel était ici, à l'Assemblée nationale,
pour l'étude des crédits, il a dit : Nous n'avons pris aucun engagement
avec ce projet. Où on en est
spécifiquement? Est-ce que, pour vous, c'est normal que M. Martel ait dit ça ou...
Vous en êtes où dans ces étapes? Parce que, bon, il y a un échéancier,
on est conscients de tout...
M. Sabia (Michael) : Votre
réponse : Oui, très normal.
Le Président (M. Bernier) :
M. Macky Tall.
M. Tall
(Macky) : Oui, merci, M. le Président. C'est tout à fait normal comme
réponse puisque les travaux se poursuivent.
Les discussions progressent bien. Nous avons des discussions avec Hydro-Québec
et les spécialistes d'Hydro-Québec
depuis quelques mois. Et, comme Michael le mentionnait, au cours des dernières
semaines, les travaux se poursuivent jusqu'à ce que tous les paramètres
soient définis, et ils progressent bien.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député.
M.
Bonnardel : Oui, merci. La semaine passée, bien, après le
budget, M. le ministre, je vous ai posé des questions à savoir la part du gouvernement provincial. Bon,
il y a le 1 280 000 000 $, il y a le 300 millions
d'Hydro-Québec, il y a le 512 millions
qui est le paiement de l'ARTM. C'est le Québec, pour moi, qui paie ça, c'est
les impôts des Québécois, là, quoi
qu'on en dise. Mais le 300 millions d'Hydro-Québec, est-ce que vous nous
assurez aujourd'hui que c'est ce montant que vous négociez? Est-ce qu'on
pourrait avoir moins que ce 300 millions?
Le Président (M. Bernier) :
M. Macky Tall.
M. Tall
(Macky) : M. le Président, les travaux se font. Ce sont des travaux
qui doivent déterminer l'estimé de 295 millions.
C'est pour qu'Hydro-Québec connecte le REM, qui va être un client très
important pour Hydro-Québec. On parle donc de
toute l'infrastructure électrique, on parle des postes de haute tension, on
parle des transformateurs, on parle des caténaires.
Donc, il y a un travail rigoureux à faire avec le tracé pour justement établir
ce coût précis. Il est aujourd'hui
estimé à 295 millions, et le travail qui est en train d'être complété va
le préciser, et, oui, peut-être à la baisse, mais l'important, c'est de
le préciser de façon spécifique.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Bonnardel : Vous dites : Peut-être à la baisse. Est-ce
que ce montant inclut seulement du matériel? Est-ce qu'il y a des ingénieurs, de la main-d'oeuvre qui
va être fournie par Hydro-Québec dans tout ça? Parce que, là, peut-être
à la baisse, 300 millions, si on a 250,
c'est un 50 millions que, j'imagine, vous me répondrez peut-être par la
suite, c'est soit le gouvernement ou c'est encore peut-être la caisse
qui va le prendre, mais...
Le Président (M.
Bernier) : M. Macky Tall.
M.
Tall (Macky) : Nos équipes
ont déjà fait beaucoup de travail. Nous avons des experts de classe
mondiale qui ont regardé et qui
arrivent à un estimé rigoureux aujourd'hui de 295 millions, qui reste à préciser. Difficile pour moi de
spéculer, en fait, quel va être le chiffre final, mais il avance, et on est
confiants aujourd'hui avec cet estimé-là.
M. Bonnardel :
Est-ce que c'est seulement du matériel, pour vous, ce 295 millions?
M. Tall
(Macky) : Bien, c'est le coût pour installer cet équipement, incluant évidemment
les coûts, oui.
M. Bonnardel :
La main-d'oeuvre? O.K.
Le Président
(M. Bernier) : Allez-y, M. le député.
M. Bonnardel :
Merci, M. le Président. M. Sabia, je lisais voilà trois semaines que vous étiez
à Ottawa voilà trois semaines pour parler
avec le fédéral sur le 1,3 milliard que vous souhaitez avoir. Souvenez-vous, l'année
passée, vous m'aviez dit que le projet devait coûter 5 milliards, puis je vous avais posé la question
si ça coûtait 100 millions de plus. Il a dit : Pas
certain qu'on va être capables de le prendre nous-mêmes. Je croyais que le ministre des Finances était partie
prenante de ces négociations parce
que, pour moi, c'est assez important. Je vois la part que le provincial va... notre gouvernement va prendre. Où en êtes-vous avec
cette entente que vous souhaitez avoir avec le fédéral? Même si
on sait que la banque des infrastructures ne sera peut-être pas créée avant la fin de l'année, le fédéral
nous dit : Il faut que cette banque soit créée pour que, peut-être, après ça, cette banque donne ce montant. Est-ce que
vous pouvez m'éclairer, nous éclairer rapidement sur la portion d'Ottawa? Et vous étiez bien
seul à Ottawa, je
pense, c'est ça? Le ministre
n'était pas avec vous?
Le Président
(M. Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia
(Michael) : Non, c'était Macky et moi.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão : Peut-être, avant de répondre, je dois vous dire aussi que
nous aussi, au ministère des Finances, nous sommes aussi en contact constant
avec Infrastructure Canada.
M. Sabia (Michael) : Donc, je pense, le dossier avance maintenant, je pense, bien à Ottawa.
Ottawa, maintenant, il y a deux
semaines, a terminé leur travail pour mettre ensemble les éléments nécessaires
pour une équipe d'experts pour faire
la vérification diligente sur nos plans, les avocats, les experts
d'achalandage, les banquiers, et tout ça. Donc, ils ont leur équipe. Également, nous leur avons déjà donné
énormément de détails sur le projet. Maintenant, ça demande un peu de temps pour eux de travailler sur leur
vérification diligente du projet, également de poser à nos équipes les questions
les plus pertinentes et les plus
importantes. Ce processus se poursuit avec un objectif d'essayer de réaliser
une entente probablement — notre objectif est un objectif
important — pendant
l'été.
M. Bonnardel :
Vous vous êtes donné un échéancier d'ici au 1er juillet?
M. Sabia (Michael) : Non, pas nécessairement le 1er juillet, mais en été, au début de
l'été, pendant le mois de juillet,
parce qu'à un moment donné il faut que nous débutions le processus d'acquérir
les terrains. L'équipe de Macky va choisir le consortium gagnant, les
constructeurs, et, à un moment donné, cet été, ce consortium va dédier beaucoup
de travail et également beaucoup d'argent
pour entamer leur processus. Et donc nous avons besoin d'une réponse, une
décision d'ici juillet, mi-juillet, fin juillet, quelque chose comme ça.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Bonnardel :
C'est quand même important, le fédéral qui nous dit : Il faut que la
banque des infrastructures soit...
Puis je voudrais poser une petite question en même temps. Je veux juste vous
dire... Si vous considérez que ce n'est pas
obligatoire ou... que le montant vous sera donné, comme tel, petite question
que j'ai avec ça, c'est que, s'il y a un manque
à gagner... Là, vous me dites :
On est confiants. Mais, si ce montant est à 1,1 milliard, il y a
un manque à gagner de 200 millions, 300 millions, est-ce que
vous prenez ce 300 millions sous la Caisse de dépôt ou vous demanderez au gouvernement
d'augmenter sa part?
M. Sabia
(Michael) : La caisse ne va pas faire ça.
M. Bonnardel :
...répéter ça?
M. Sabia (Michael) : La caisse ne va pas faire ça si l'investissement du gouvernement du Canada n'est pas là.
M. Bonnardel :
Vous dites que, s'il n'y a pas 1,3 milliard mis par le fédéral, il n'y
aura pas de REM?
M. Sabia
(Michael) : Oui.
M. Leitão :
C'est aussi ce que je vous avais...
Le Président
(M. Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão :
J'avais dit exactement la même chose. Lors de notre discussion sur le débat sur
le budget, j'avais dit exactement la même chose.
M. Bonnardel :
Je suis content de l'entendre. Donc, ce n'est pas négociable, pour eux, ils
savent que c'est 1,3 ou pas du tout.
• (16 h 30) •
M. Sabia (Michael) : Bien, c'est une question d'établir, de créer un montage financier qui fonctionne pour tout le monde.
Selon notre logique, et la logique que nous avons guidé les négociations avec le gouvernement du
Québec, la caisse est là à 51 % en équité, et donc les deux gouvernements, les deux autres
niveaux de gouvernement prennent à peu près
24,5 %, donc c'est 51-49. Si le gouvernement du Canada décide de ne pas
embarquer, ça crée un gros enjeu, et donc ce n'est pas... je pense, le
projet ne serait pas faisable.
Mais, ceci étant dit,
et il est important, ce que je vais dire, je pense que c'est...
Le Président (M.
Bernier) : Juste... C'est parce qu'il reste peu de temps. M. le député
de Granby.
M.
Bonnardel : Oui, je comprends, vous pourrez élaborer. Qui
sont ces personnes avec qui vous négociez? Si le ministre des Finances parle directement à Bill Morneau, est-ce que vous
parlez à Bill Morneau, ou le sous-ministre, ou qui sont ces...
M. Sabia (Michael) : Non, pour l'instant, la responsabilité de ce dossier est la
responsabilité de M. Sohi,
le ministre des
Infrastructures, et nous travaillons avec M. Sohi, nous travaillons avec
son équipe. Et, la chose qui est importante, les choses avancent bien,
dans une très bonne atmosphère de coopération.
Et donc vous m'avez posé une question hautement
hypothétique. Ceci étant dit, selon moi, il y a une volonté de la part du
gouvernement du Canada. Ils n'ont pas encore... ils ne sont pas encore arrivés
à une décision, mais, selon toutes nos conversations,
l'atmosphère, l'environnement, la volonté, la détermination, selon nous, est
là. Donc, nous procédons de façon hautement, hautement coopérative.
Le
Président (M. Bernier) : M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : ...vous me dites
l'été. Est-ce que l'été, c'est le 30 août, c'est la date, c'est... Il doit
y avoir une date butoir.
Vous devez vous avoir dit, là : On laisse passer peut-être l'été, mais y
a-tu une date spécifique, pour vous, dire : Ça nous prend un
engagement ferme parce qu'on ne pourra pas se rendre à l'automne si...
M. Sabia (Michael) : Non, pas pour l'instant. Notre objectif
est d'éviter le processus de construction en automne. Et donc, pour réaliser cet objectif, nous avons
besoin d'un niveau de certitude sur le financement avant d'embarquer dans
un autre chapitre de ce projet. Donc, c'est
la raison pour laquelle, à un moment donné, d'ici quelques mois, nous aurons
besoin d'une décision qui vienne d'Ottawa. Mais je me répète: L'atmosphère est
très bonne.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Oui, merci. À part
les études, est-ce qu'il y a d'autres frais encourus là-dessus, sur le plan
d'affaires comme tel, là?
M.
Sabia (Michael) : Je n'ai pas compris votre
question.
M.
Bonnardel :
Les terrains, tout ça, est-ce que le cadre financier comme tel, là... est-ce
qu'il y a d'autres interrogations — je vais être plus précis, là — sur les montants qui sont définis? Bon, on sait que la portion du
provincial est à 1,3 milliard, le 512 millions,
pour vous, c'est attaché...
M. Sabia (Michael) : Interrogations qui viennent de notre part?
M.
Bonnardel :
Oui, oui.
M. Sabia (Michael) : Non.
M.
Bonnardel :
O.K. C'est attaché. Il me reste-tu encore du temps ?
Le Président (M.
Bernier) : Oui, il vous reste encore une minute.
M.
Bonnardel : Une minute. Autre sujet qui... champ droit, pour
ne pas dire champ gauche, George
Gantcheff, Société immobilière du
Québec, scandale. Vous avez décidé d'arrêter de faire affaire avec lui.
Pourquoi la caisse a décidé de ne plus faire affaire avec lui?
M. Sabia (Michael) : Nous avons
décidé de ne pas faire affaire.
M.
Bonnardel :
O.K. Est-ce que vous êtes capable de me donner... Est-ce qu'il y a encore...
Quelle est la valeur des prêts accordés à M. Gantcheff? Est-ce que
vous avez encore des ententes avec lui, des...
M. Sabia
(Michael) : Il faut que je
vous revienne avec les détails, parce que je n'ai pas les détails avec moi cet
après-midi.
M.
Bonnardel : O.K.,
si vous pouvez me revenir avec ça.
M. Sabia (Michael) : ...mais très à
l'aise de vous donner.
M.
Bonnardel :
Tout ce qui vous rattache encore à George Gantcheff, si vous pouvez informer la
commission, ce serait intéressant.
Le
Président (M. Bernier) : Vous ferez parvenir ces documents-là au
niveau de la commission. Nous allons nous assurer de les distribuer aux
membres de la commission. Merci. Il vous reste 25 secondes, M. le député.
M.
Bonnardel :
C'est parce que dans les renseignements additionnels, on avait cette réponse,
on avait ces engagements comme tels,
mais, si vous ne pouvez pas me les confirmer d'ici 18 heures, là, on
pourrait peut-être vous donner ces informations tout de suite après mon
intervention comme telle, là.
Le
Président (M. Bernier) : Donc, merci. Donc, on recevra vos documents.
À ce moment-là, nous nous assurerons de les distribuer. Nous allons
retourner du côté du gouvernement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Poëti : Exact. Il me reste
combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier) : Bien là,
vous avez 16 minutes, là.
M. Poëti : Bien, merci, vous
êtes bien gentil.
Le Président (M. Bernier) : Vous
débutez.
M. Poëti :
Alors, bien, je veux saluer, évidemment, M. Sabia et son équipe, ancien
collègue, que, je remarque, il s'est assis vraiment au centre.
Habituellement, il était sur un côté ou l'autre, mais c'est sage comme
décision.
Moi, M. le
Président et M. Sabia, je suis content que le collègue de Granby ait
abordé le REM parce que je veux qu'on
en parle. Je veux qu'on en parle, et qu'on éclaircisse, et qu'on dise aux
citoyens quel est ce projet
fantastique que le gouvernement du Québec et, évidemment, en collaboration avec la caisse
sont après créer. Et je veux vous entendre sur certains points, mais
principalement, aujourd'hui, je regardais un peu l'histoire, parce que c'est
important de voir ce qui s'est passé
déjà et savoir où on s'en va, et ça me faisait penser au métro de Montréal.
Alors, je veux vous rassurer, M. Sabia
et M. le Président, quand on parlait du métro de Montréal, en 1962, il me
semble que, lorsqu'on parle du REM, actuellement,
on a exactement les mêmes interrogations. En fait, on a ici dans Le Devoir,
le métro: M. Saulnier est confiant que les difficultés vont s'aplanir, en 1962. Il a eu raison parce que ça s'est
aplani, ça a été assez clair. On a eu quelque chose aussi d'intéressant dans Le Devoir et là je suis obligé de
mettre mes lunettes parce que c'est écrit en petit, mais c'est quand même assez clair, mercredi 12 avril 1961, Le
maire Drapeau et Saulnier iront en Europe pour le financement. Alors,
ça dit : «Au moment même où le maire de
Montréal, M. Jean Drapeau, annonçait son départ pour l'Europe afin de discuter le
financement d'un métro
avec d'éventuels bailleurs de fonds de France, de Suisse, d'Allemagne et
d'ailleurs, le premier ministre Jean
Lesage a annoncé à Québec la décision du gouvernement provincial de garantir
les obligations qui seront émises sur la cité de Montréal pour la
réalisation de ce projet.»
Alors, si on
regarde l'histoire, on est allés à travers le monde chercher de l'argent, M. le
Président, parce qu'on n'en avait pas
ici, parce qu'on n'avait pas la force de la Caisse de dépôt, parce qu'on
n'avait pas la capacité des Québécois qui
ont investi et qui investissent, évidemment, avec la Caisse de dépôt, qui nous
donnent ce pouvoir aujourd'hui pour réaliser un projet semblable, parce
qu'en kilomètres on est à peu près... on est très proches, là, 67 à 71, et je
trouve le parallèle vraiment intéressant.
Dans Le
Devoir, 21 octobre 1961 : Montréal aura le métro le plus moderne au
monde. Est-ce que Montréal aura le
réseau électrique métropolitain le plus moderne au monde? J'en suis convaincu,
M. le Président, avec ce que vous avez déjà annoncé.
Alors, moi,
honnêtement, jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu trop, évidemment, le
critique de l'opposition maltraiter
le projet, il pose des questions intéressantes et, je pense, nécessaires sur le
volet financier, mais j'ai entendu d'autres personnes dans d'autres
commissions, dont même ma collègue ici, mais qui a changé de place, qui avait évidemment de grandes questions négatives sur le
REM, comme si depuis 1966‑1967 on avait fait beaucoup de projets de transport collectif. La réponse, c'est non. Ça
sera le deuxième projet depuis 1967 qu'on va créer pour aider vraiment.
Et là, des
critiques, bien, on peut en avoir parce qu'évidemment il y a des gens qui se
posent des questions, et sur le côté de la vision, ça peut manquer un peu. Je
vous rassure, M. Sabia, en 1962 c'était la même chose, c'était exactement
ça. Ici, M. Mondor, à l'époque il
dit : «Toutes les améliorations de surface valent mieux que l'onéreuse
construction d'un métro.» Évidemment, il ne voudrait pas relire ça.
«"Toutes les améliorations de voies de surface sont préférables à la construction d'un métro dont le financement et le
coût d'exploitation sont trop onéreux", selon M. Raymond Mondor,
conseiller municipal au district n° 1.»
Combien ça coûterait aujourd'hui, construire le
métro de Montréal, M. Sabia, reconstruire 70 kilomètres, 71 kilomètres? Non, mais c'est quelque chose,
là. Alors, moi, je veux juste vous rassurer. Quand on entend des critiques,
des questions, moi, sur le financement,
elles sont nécessaires, mais, quand on entend encore des critiques sur est-ce
qu'on devrait faire cela, M. le Président, je suis sidéré.
Le Président (M. Bernier) : ...paradis
fiscal.
• (16 h 40) •
M. Poëti :
Bien, écoutez, là... Et l'autre chose aussi, puis c'est parce que je pense
qu'on a tous été patients — je parle des citoyens du
Québec — tous été
patients... Là, à un moment donné, il y a quelqu'un qui s'est choqué. Je
pensais que c'était moi, mais, non,
ça fait trop longtemps. 15 décembre 1961 : «Fini les discussions
publiques sur le métro, il faut maintenant
bâtir.» Il y bien quelqu'un qui a dit : Il faudrait aller de l'avant, là,
ça n'a pas de bon sens. Et c'est ce que vous êtes après faire, M. Sabia,
avec votre équipe, et ce pourquoi le gouvernement est si fier d'être partenaire
avec vous.
Il reste un
ou deux articles, je vais les passer rapidement. Je vais vous permettre de
pouvoir répondre, M. Sabia. Il est
temps qu'on adopte une solution radicale: le métro. Moi, c'est drôle, je vois ça, je vois le REM. Le
métro, la meilleure des solutions. Ah! il y a des gens qui
étaient d'accord avec ça.
Et là, bien,
on revient encore avec à l'occasion des oppositions. Parce que, vous savez,
leur travail, dans certains cas, et
pas ceux ici, pas... je ne pense pas à mon collègue de Granby du tout, là,
c'est critique, hein, tu ne veux pas valoriser quelque chose du parti au pouvoir, là, ta fonction, c'est critique. En
fait, en général, il faut qu'ils critiquent. Mais j'ai ici un conseiller
de Saint-Michel qui était critique. Évidemment, il s'oppose au métro puis à son
prolongement.
Alors, écoutez, c'est l'histoire. Ça nous rappelle où on était à ces années-là et ça
nous guide vers où on va, M. Sabia.
Et, lorsque
les gens mettent en doute la capacité de la Caisse de dépôt de gérer ce projet-là,
ça aussi, ça m'ébranle, M. le
Président, je suis un peu surpris.
Puis sans faire une grande recherche, puis ça, vous connaissez ça mieux que
moi, mais, pour ceux qui nous
écoutent, c'est qui, la Caisse de
dépôt, vraiment, qui n'ont pas, évidemment, la chance d'être avec nous?
Il ne faut pas aller loin, là. La Caisse
de dépôt et placement: un investisseur institutionnel gérant notamment
le Régime de rentes du Québec et plusieurs autres régimes de retraite et
d'assurance publics et parapublics. Elle a été créée par le gouvernement de M. Jean
Lesage, le même qui avait appuyé, évidemment, le financement du métro de l'époque, le 15 juillet 1965, par une loi du Parlement du Québec. À la fin de 2014, il s'agit du deuxième plus important fonds
de pension au Canada après le Régime
de pensions du Canada. Au
31 décembre 2016, la Caisse de
dépôt gère un actif de 270 milliards de dollars investi au Canada
et à l'étranger. Moi, je ne suis pas inquiet, M. Sabia, de travailler avec
vous. Les citoyens du Québec qui nous écoutent ne sont pas inquiets de
travailler avec vous, et j'ai confiance dans la réalisation du REM. Il est
essentiel, il est important et nécessaire pour les citoyens du Québec.
Et, lorsqu'on
parle d'environnement, je vois encore ma collègue, ça m'y fait penser, l'environnement
est si important, combien de voitures ça va enlever sur la
route, ça, M. le Président? Énormément.
Et, lorsqu'on
pense au métro, évidemment, les gens étaient sceptiques dans certains
cas : «Le métro de Montréal
est un réseau de transport en commun qui
dessert l'île de Montréal ainsi que les villes québécoises de Laval et de Longueuil.
Le métro sur pneumatiques souterrain est géré par la Société de transport de
Montréal.
«Inauguré le 14 octobre 1966 durant le mandat
du maire Jean Drapeau, il s'inspire du métro de Paris, autant dans l'architecture de ses stations que dans le
matériel roulant. À son inauguration, le réseau comprenait 26 stations
réparties sur trois lignes. En 2016 — ça,
c'est le mot important — il
dessert 68 stations sur quatre lignes pour un total de
71 kilomètres de voies.
«Le métro de Montréal
est le plus important au Canada en termes de fréquentation et le troisième en Amérique du
Nord après ceux de New York
et Mexico. En 2014, il est quotidiennement emprunté par 1,2 million de
personnes les jours
ouvrables. 357 millions de trajets ont été effectués cette même année.
Selon la STM, il cumule plus de 7 milliards d'entrées en 2010.»
On
n'était pas sûr que c'était une bonne idée de le faire. Alors, ce que je veux
juste vous dire, ce que l'on voit avec
le métro de Montréal, l'ajout du REM était une idée fantastique. Et je
veux savoir, M. le ministre, avez-vous des inquiétudes, vous, avec la création d'un REM au Québec?
Avez-vous une inquiétude financière pour les citoyens du Québec dans
la construction de ce REM-là? Parce qu'on se rappellera qu'ensemble on a
cosigné le projet de loi permettant une réalisation de cette nature
et je peux juste m'en enorgueillir. Alors, je vous écoute, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Merci, cher collègue. Non, évidemment, je n'ai pas
d'inquiétude. Et je n'ai pas d'inquiétude parce que nous travaillons sur ce projet depuis déjà un certain temps avec la
Caisse de dépôt, et la structure financière est très solide et la structure physique, donc, pour
compléter le projet aussi par la Caisse de dépôt est très solide elle aussi. Et
non seulement ça, mais c'est le genre
d'investissement dont on a besoin, dont la caisse a besoin. Nous sommes tous au
courant des rendements faméliques dans les marchés de revenus fixes, dans le
marché obligataire. Donc, il faut absolument que la caisse soit capable d'obtenir des rendements à
long terme qui soient supérieurs à ce qu'on peut avoir avec une obligation
gouvernementale. Et donc les investissements
en infrastructures sont de nature cruciale dans ce processus de diversification.
Peut-être, M. Sabia, vous pouvez nous
rassurer un peu sur la capacité technique de la caisse de compléter ce projet,
que je suis sûr que c'est le cas.
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Donc, merci de votre question. Évidemment, nous sommes entièrement d'accord. Nous sommes
convaincus de l'importance de ce projet, cette une façon pour nous, une autre
façon, une nouvelle façon pour nous
de contribuer au développement
économique du Québec
et dans ce cas de... par le biais de Montréal. Pourquoi je dis
ça? Parce que le REM va transformer Montréal, va rendre Montréal une ville beaucoup
plus attrayante dans le monde à
l'échelle internationale, et donc, grâce au REM, la ville sera beaucoup
plus en... sera en mesure d'attrayer à Montréal
les cerveaux les plus brillants au monde. Et
ça, c'est une chose qui compte sur le plan économique, parce que, dans
une nouvelle économie
de savoir, nous avons besoin de ces cerveaux, et le REM va contribuer à ce... va renforcer la revitalisation
qui est en cours actuellement à Montréal.
Donc,
il y a tant d'autres choses : une amélioration de fluidité dans la ville,
nous allons désengorger la ligne orange, beaucoup de connexions entre notre projet et le métro, pour la
première fois, un lien entre
l'aéroport et le centre-ville, pour la première fois, un lien efficace
entre la Rive-Nord et la Rive-Sud, donc plusieurs choses, les départs de haute
fréquence pendant l'heure de pointe, qui vont contribuer à une simplification
importante de la vie quotidienne des Montréalais
et des Montréalaises. Et c'est la raison pour laquelle le projet... Mais j'ai
été bien content de voir deux sondages faits
par Léger où 82 % des répondants
appuient, 82 % appuient le REM, un résultat qui a été renforcé ou vérifié
dans un CROP «poll», un sondage où
83 % des Montréalais appuient le projet, et même 75 % des Québécois à
travers le Québec. Donc, je pense que le projet est perçu comme un
projet qui va faire une contribution importante.
Ceci étant dit,
est-ce que nous avons les compétences financières pour gérer un tel projet? Ma
réponse est : Absolument, nous avons
fait plus ou moins la même chose dans d'autres circonstances. Est-ce que nous avons l'expertise nécessaire pour livrer le projet? Oui. Pourquoi?
Parce que nous avons deux consortiums de constructeurs,
avec une présence importante des sociétés québécoises avec une expertise
de calibre mondial, bien capables de construire ce réseau, et donc ils sont les leaders mondiaux, et donc nous
avons beaucoup de confiance. Nous avons, sous le leadership de
Macky maintenant, une équipe importante de gens qui gèrent des
projets. Donc, nous avons bâti une expertise dans la gestion du projet qui est un élément important. Donc, avec
notre expertise financière, maintenant une expertise opérationnelle, et également l'expertise de ces sociétés dans chacun des
consortiums, qui comprennent des sociétés québécoises, est-ce
que nous sommes confiants? Ma réponse est : Absolument oui, à la ligne.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M. Poëti :
Combien de temps?
Le Président (M.
Bernier) : 2 min 30 s.
M. Poëti :
Oui. Et peut-être pour souligner aussi un apport important, on a à peu près
tous oublié qu'il rentre 500 autobus
tous les matins de la Rive-Sud vers le centre-ville, et ils ne restent pas là,
hein, alors ils retournent. Mais on a 500 autobus,
aucun d'entre eux n'est électrique. Quel produit extraordinaire de penser à
l'électricité! Mais on oublie, sur ce volet environnemental là, ce que ça
va aider. J'arrive de Londres, M. le Président, où l'entièreté des autobus sont
électriques, et les citoyens de Londres
disent : On a senti la différence. On le voit dans la façon qu'on circule ici
puis la qualité de l'air. Alors, l'environnement, pour moi, c'est un élément important, ce l'est pour nous tous.
500 autobus à la retraite pour un train électrique, quelle
excellente nouvelle!
M. Sabia
(Michael) : Avez-vous pris le Heathrow Express?
M. Poëti : Oui.
M.
Sabia (Michael) : La caisse est là.
M.
Poëti : Je ne voulais
pas le dire, on aurait dit que je n'étais pas neutre. Alors, merci beaucoup, M. Sabia, merci à vous tous
de travailler à ce projet-là, et je pense que l'ensemble des citoyens du Québec
ne peuvent que se réjouir de ce projet-là. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Il reste 1 min 30 s. Est-ce que vous
avez...
M. Fortin
(Pontiac) : On peut-u le reporter, là?
Le
Président (M. Bernier) : On
va le reporter. C'est bien. Donc, je souhaite la bienvenue à la députée de
Vachon. La parole est à vous, Mme
la députée.
Mme Ouellet : Oui. Merci, M. le Président. Permettez-moi de saluer les collègues, de saluer
le ministre et les gens
de la Caisse de dépôt et de placement. Comme je ne suis pas la première à poser des
questions, on a déjà eu plusieurs
réponses, et c'est sûr que je vais vous
parler des paradis fiscaux. Vous savez, on a un rapport ici unanime de l'Assemblée nationale, c'est quand même
assez rare, tout un travail qui a été fait et qui qualifie les paradis fiscaux
de cancer de l'économie mondiale, de cancer
de la justice fiscale. Et j'ai écouté vos réponses et je dois vous avouer que
je trouve ça totalement inacceptable. Je trouve que ça fait dur comme réponses. Vous
avez le culot, dans votre jargon bureaucratique...
Le Président (M.
Bernier) : Oui?
M.
Poëti : M. le Président, je m'excuse. Je pense qu'il
y a des termes antiparlementaires. Je ne crois pas que ce ton-là est acceptable.
Le Président (M.
Bernier) : Effectivement, Mme la députée, je pense qu'il faut...
Mme Ouellet :
Oui, je vais faire attention.
Le
Président (M. Bernier) : On
peut poser des questions, je pense, dans un climat qui facilite l'échange. Vous
avez assez d'expérience, vous avez assez d'expérience.
• (16 h 50) •
Mme Ouellet : Qui va faciliter l'échange, qui
va faciliter l'échange. Mais ce que j'ai entendu comme réponses, c'est
extrêmement choquant, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, vous pouvez être insatisfaite. Ça, il
n'y a pas de trouble. Mais en faisant attention.
Mme Ouellet :
Et d'entendre que, dans le fond, la Caisse de dépôt et placement refuse de
s'engager sur des recommandations unanimes
des parlementaires, la recommandation n° 19, de réduire ses
investissements dans les entreprises qui
font de l'évitement fiscal abusif, de l'évasion fiscale, d'entendre la caisse
refuser de travailler à combattre les paradis fiscaux en fonction de
cette recommandation-là avec des arguments comme — puis je pense que
c'est important de le mentionner — une entente, on va attendre une entente au
niveau mondial, de l'OCDE, hein, c'est un beau prétexte pour ne rien faire. Puis on le sait, là. Je ne sais pas
si vous pensez que les parlementaires, on n'est pas au courant de ce qui se
passe. C'est tout dans le document, là. On
sait qu'il y a des discussions, hein? J'espère que vous ne nous prenez pas pour
des sans-génie quand vous nous donnez ce genre de réponse là.
M. Poëti :
M. le Président, question de règlement.
Le
Président (M. Bernier) : Mme la députée, je vous invite, là, en ce qui
regarde l'utilisation des termes... Vous le savez, au niveau
parlementaire, on essaie de soigner notre...
Mme Ouellet :
C'est un questionnement parce que... par rapport aux réponses.
M. Poëti :
Peut-être, oui. Ce n'est pas...
Une voix :
...
M. Poëti :
D'après moi, c'est le même qu'à Ottawa.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, mais c'est parce qu'en ce qui regarde le
questionnement il faut quand même être
assez prudent, là, par rapport à la façon de faire. Écoutez, il y a des gens
qui nous écoutent, là, puis ils vont certainement tirer bénéfice de
votre expérience pour poser des questions, mais peut-être pas de cette
façon-là.
Mme Ouellet : Et, quand vous avez
comme argument de dire : Bon, on travaille à convaincre nos partenaires de ne pas utiliser des paradis fiscaux, c'est bien
beau, mais vous êtes certainement un des bien placés pour savoir que... «money talks». Et, si vos
partenaires ne sont pas convaincus, vous avez juste à ne pas investir. Et c'est
ce qui vous est demandé, c'est de ne
pas investir dans des entreprises qui utilisent les paradis fiscaux. Et ce que
le rapport demande, c'est de ne pas
attendre toutes les ententes internationales, mais de dès maintenant commencer
à désinvestir. Et là non seulement vous
n'avez pas dit : On va essayer, vous avez dit que vous ne pouviez pas
donner aucune garantie. Vous avez même refusé à mon collègue ici, à côté, de dire que le 10 % était un plafond.
Ça pourrait même être plus que 10 %, vous pourriez donc continuer à
augmenter.
C'est déjà
26,2 milliards de dollars que la Caisse de dépôt et placement a d'argent
de placé dans des entreprises qui
utilisent les paradis fiscaux. Moi, ça, comme citoyenne, comme parlementaire,
je trouve que c'est honteux que l'argent des contribuables québécois soit utilisé pour favoriser des entreprises
qui utilisent des paradis fiscaux. Ça nourrit le cancer, le cancer dont
on parlait, ça, ça nourrit le cancer.
Et donc moi, je vous donne une autre chance de
nous dire ici, aux parlementaires, que vous avez l'intention d'arrêter de nourrir le cancer. Je pense que c'est
important. Parce que là, tout ce qu'on a entendu des réponses de mes deux collègues, c'est que vous ne pouviez rien
garantir puis que c'était au niveau mondial que ça se passait. On le sait.
Mais c'est votre responsabilité de trouver des entreprises au niveau mondial,
au niveau québécois, puis tant mieux s'il y a encore plus d'entreprises au
Québec, si elles sont au Québec, puis vous pouvez tout de suite valider qu'elles
n'utilisent pas les paradis fiscaux, dans
lesquelles vous pourriez investir, qui n'utilisent pas les paradis fiscaux,
pour arrêter de nourrir le cancer de l'économie mondiale.
Est-ce
que c'est possible que vous vous engagiez aujourd'hui — puis là je ne vous demande même pas
d'échéancier, parce que ça me
brûlerait de vous demander un échéancier, je ne vous demande même pas
d'échéancier — que vous
avez l'intention d'arrêter de nourrir
le cancer de l'économie mondiale en diminuant vos investissements dans les
entreprises qui utilisent les paradis fiscaux?
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre ou M. Sabia?
M. Leitão : M. Sabia.
Le Président (M. Bernier) :
M. Sabia.
M. Sabia
(Michael) : Juste pour
clarifier des choses. Donc, nous n'avons pas refusé de travailler sur le
dossier, du tout. Je pense que nous
avons bien expliqué, et nous avons bien présenté plusieurs exemples où nous
travaillons avec nos partenaires pour
changer des choses, pour rendre les choses... pour améliorer les choses, pour
diminuer leur tendance de profiter de ces opérations. Donc, ce n'est pas
un refus de notre part de travailler là-dessus, du tout.
Deuxième
chose, et franchement ma préférence est toujours de parler de façon ouverte,
directe et de livrer la marchandise
suite à un engagement, ma réticence de
dire aux députés que l'année prochaine il
y a aura un plafond de 10 %,
9,5 % ou 11 %, non, je ne suis pas à l'aise de vous donner cet
engagement parce que ce n'est pas évident à moi, étant donné la volatilité du monde, la compétition qui est... de la
concurrence qui est féroce pour des occasions d'investissement, je ne suis pas à l'aise. Ma préférence est d'agir
de façon très ouverte avec vous parce que le monde est imprévisible. Il y a
beaucoup de volatilité dans le monde. Et
donc, dans une telle circonstance, franchement, ce n'est pas responsable de ma
part de vous dire : Il y aura un
plafond mécanique de 9 %, 10 %, 11 % ou 12 %. La chose qui
compte, selon moi, M. le Président,
est l'intention de notre part de continuer de travailler, même de continuer
d'intensifier nos efforts. Ma collègue Maarika, elle a déjà dit que,
depuis 2014, 2015, 2016, nous avons beaucoup intensifié notre focus sur cette
question importante, et c'est ce que nous allons continuer à faire. Ce n'est
pas refus du tout.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Merci, M. Sabia. Mme la députée.
M. Sabia (Michael) : Parlons des
vraies affaires et pas de théâtre.
Mme
Ouellet : Oui, on va parler
des vraies affaires, je suis d'accord, et vous avez tellement intensifié vos
efforts depuis 2013, 2014, 2015 du côté des
investissements dans des entreprises qui utilisent des paradis fiscaux, vous les avez tellement intensifiés que vous les avez doublés. Donc, ce
qui n'est pas responsable, quant à
moi, c'est le fait qu'il n'y ait pas d'engagement clair à diminuer.
Est-ce que
vous pourriez minimalement... Là, je vais vous demander quelque chose qui devrait être assez simple pour
vous de dire oui ou non. Est-ce que vous pourriez minimalement prendre l'engagement ici, devant les parlementaires, que vous ne ferez plus, à partir d'aujourd'hui,
aucun investissement nouveau — je ne vous parle pas des anciens, on
regardera le ménage après — aucun
investissement nouveau dans une entreprise qui utilise les paradis fiscaux?
Le Président (M. Bernier) :
M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Non, nous ne
pouvons pas vous donner une telle garantie.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
Mme Ouellet : Donc, ce que j'entends aujourd'hui, c'est que vous refusez de prendre l'engagement de ne pas investir de l'argent futur dans des entreprises
qui utilisent des paradis fiscaux. Vous refusez de prendre l'engagement de diminuer vos investissements dans les entreprises
existantes qui utilisent les paradis fiscaux, ça fait que, dans le fond, vous
dites : La recommandation 19 que vous avez ici, moi, je n'en ai rien
à faire.
M. Sabia (Michael) : Pas du tout.
M. Poëti : M. le Président,
c'est imputer des motifs, des intentions, ce n'est pas ce que M. Sabia a
dit.
Le Président (M. Bernier) :
Non, je pense qu'il faut... on va écouter la réponse.
M. Poëti : Non, mais, tu
sais, je n'en rien à faire... Je ne pense pas que, M. Sabia, c'est un
propos qu'il tient.
Le Président (M. Bernier) :
Regardez, c'est... Oui, M. le député.
M. Marceau : Question
de règlement. Mme la députée de Vachon a le droit d'essayer de comprendre les intentions
de M. Sabia. Puis M. Sabia n'est pas un parlementaire ici. Puis ça a
été fait avec politesse.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Comme j'ai mentionné au moment...
Des voix : ...
Le
Président (M. Bernier) : Un instant! Comme j'ai mentionné, au moment où on vient imputer des
éléments négatifs par rapport à la personne, je réagis, et par
rapport à l'organisme. Donc, sur ça, je pense
que la question était claire. M. Sabia, je vous
invite à la réponse.
M. Sabia
(Michael) : Vous avez notre engagement
de continuer de travailler, continuer d'intensifier nos efforts, continuer de travailler à la chaire internationale, continuer de convaincre les
partenaires de changer quelques-unes de leurs pratiques. Vous avez tous ces engagements. Mais dans un monde
imprévisible, dans un monde où la compétition, pour les occasions d'investissement, est féroce, ce serait
irresponsable de ma part de vous donner un engagement parce que ce n'est pas évident, d'ici la fin de l'année ou
d'ici 12 mois, que nous pourrions respecter cet engagement. Et donc je ne
veux pas vous donner un engagement dans une circonstance où je ne suis
pas sûr que nous soyons en mesure de livrer la marchandise de et engagement,
mais notre intention est claire.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Merci, Mme la députée.
• (17 heures) •
Mme
Ouellet : Oui, merci, M. le Président. Donc, ce que je comprends... Puis l'engagement que je vous demandais, c'était
juste de dire que les argents futurs ne seront pas investis dans des entreprises
qui utilisent des paradis fiscaux. Et ça, vous avez refusé de prendre cet engagement-là.
Et ça, ça dépend de vos politiques.
Puis là je
vais demander encore quelque chose d'encore plus léger, je ne pourrai pas aller
plus léger que ça, là : Est-ce
que vous avez l'intention de mettre dans vos politiques internes de vos
gestionnaires... — laissez-moi
finir de poser ma question — de
vos gestionnaires de portefeuille qu'un des critères à analyser et qui sera, à ce moment-là, un point noir dans le dossier de l'entreprise... que c'est un
moins, le fait que l'entreprise investisse dans des paradis fiscaux? Est-ce que vous avez l'intention de pénaliser,
dans l'évaluation des entreprises pour lesquelles vous voulez investir, de
pénaliser le fait qu'ils utilisent des paradis fiscaux?
Le Président (M. Bernier) :
M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : C'est déjà
fait.
Mme
Ouellet : Et, malgré ça,
vous continuez à investir. Moi, je trouve ça assez dommage, comme parlementaire, d'entendre ça, qu'il n'y a
pas d'engagement de votre part à suivre la recommandation 19 et minimalement, minimalement de ne pas faire des
nouveaux investissements avec des entreprises qui utilisent les paradis fiscaux.
Mais maintenant
je vais poser la question au ministre des Finances. Toujours sur le dossier des paradis fiscaux mais qui ne touchent pas directement à la Caisse
de dépôt et de placement, j'ai fait sortir les contrats en cours avec KPMG et
le gouvernement du Québec. Il y en a sept,
contrats en cours, et il y en a d'ailleurs un avec l'Autorité des marchés
financiers, il y en a deux avec le Vérificateur général.
Vous savez,
KPMG, ça a été démontré, là, a incité ses clients à utiliser des stratégies
d'évitement fiscal abusives, donc ses
clients ultras riches à utiliser... Donc, en fonction de la
recommandation 21 et 23, de... toujours le rapport unanime que vous avez approuvé... non, pas 21 et 23, 21 et
22, d'éliminer les fournisseurs qui ont recours à l'évitement fiscal abusif et
de priver de contrats gouvernementaux les
cabinets professionnels qui utilisent... coupables d'avoir aidé l'évasion
fiscale ou l'évitement fiscal abusif. Puis, dans le cas de KPMG, ça peut
même être considéré comme de l'évasion fiscale.
Est-ce
que vous avez l'intention de mettre fin aux contrats qui concernent
directement, à tout le moins, votre ministère, les contrats avec KPMG?
Au total, là, il y en a pour 1,8 million de dollars.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Bon, écoutez, à ce que je sache, KPMG n'a pas été reconnue
coupable de quoi que ce soit. Il y a encore une investigation, une enquête en cours par l'Agence du revenu du
Canada. Ce cas-là suit son cours, et donc, pour l'instant, nous n'avons
pas de commentaire à faire à ce sujet-là. Je vous rappelle seulement que les
contrats que... tant au gouvernement que des
agences comme l'AMF ou des organismes comme le Vérificateur général, les
contrats qu'il y a ou les échanges
qu'il y a avec le bureau de KPMG à Montréal, ce sont des éléments qui n'ont
absolument rien à voir avec la planification fiscale.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Ouellet : Oui, je comprends
que c'est des choses différentes, puisque KPMG a très large, mais quand même,
c'est encourager une entreprise. Et, quand
vous dites qu'elle n'a pas été reconnue coupable, bien, en fait, elle s'est
quasiment elle-même reconnue coupable, puisqu'elle a pris une entente secrète
avec l'Agence du revenu du Canada pour faire en sorte d'enlever les pénalités à ses clients, et c'est
cette entente secrète là qui actuellement est complètement remise en cause.
Mais c'est assez clair qu'ils ont utilisé,
minimalement, de l'évitement abusif, et donc, dans la recommandation, c'est de
l'évitement abusif, et même de l'évasion fiscale.
Donc, ce que
j'entends de ce que vous me dites, c'est que, pour l'instant, vous n'avez pas
l'intention de mettre fin aux contrats concernant votre ministère avec KPMG.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Pour l'instant, non, et, comme je dis, encore une fois, les
liens que nous avons avec KPMG, tant au gouvernement qu'à l'AMF, que le
Vérificateur général, ce sont avec des experts comptables de KPMG Montréal, qui
n'ont aucun lien avec ces activités qui sont
alléguées et qui d'ailleurs sont toujours en cours... L'enquête est toujours en
cours, il n'y a pas encore de décision finale là-dessus.
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée de Vachon.
Mme
Ouellet : Oui. Si je regarde
les autres recommandations, j'aimerais savoir... Concernant la
recommandation 1 qu'il y ait une étude sur l'impact économique
d'une taxe sur les profits détournés, ce qu'on appelle la «Google tax», est-ce que cette étude-là est en cours? Est-ce
qu'elle est faite à l'interne ou s'il y a un contrat externe? Et, s'il y a un
contrat externe, c'est à qui?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão : Alors, comme on a dit lors de la présentation de la motion à l'Assemblée
nationale, nous, au ministère des
Finances et ministère du Revenu, Agence du revenu, nous prenons au
sérieux toutes les recommandations et nous sommes
en train de faire une analyse de ces recommandations-là. Ça va se faire par nous. Ça se fait à
l'interne. Ça, c'est le ministère des
Finances et l'Agence du revenu qui
est en train de faire ce travail-là et que cet automne ce
travail-là sera communiqué aux parlementaires et au public.
Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme
la députée.
Mme Ouellet : Juste savoir, il me
reste combien de temps.
Le Président (M. Bernier) :
4 min 50 s.
Mme
Ouellet :
4 min 50 s. Il ne me reste pas beaucoup de temps. Je voudrais
revenir sur un autre dossier complètement
différent qui est le dossier d'Uber, Uber avec Revenu Québec.
Donc, vous savez que Revenu Québec est allé
faire une perquisition, et que ça a été contesté par Uber, et que Revenu Québec avait gagné, dans un premier temps,
au niveau de la Cour supérieure avec le juge Guy Cournoyer. Il disait que c'est assez clair que... des motifs
raisonnables de croire qu'Uber pouvait enfreindre les lois fiscales, parce que
l'entreprise ne demande pas à ses
chauffeurs de lui fournir les numéros de TPS et de TVQ, parce qu'elle n'avait
pas payé les taxes ni les impôts
d'ailleurs au gouvernement du Québec. Et donc c'est l'enquête sur la fraude
fiscale, et ils ont apporté la cause, là, en appel jusqu'à la Cour
suprême qui a refusé de les entendre.
Et ce qu'on a
appris aussi dernièrement, c'est que, lorsqu'ils sont allés faire la
perquisition, il y a un certain nombre de données qui ont été effacées, hein,
pendant la perquisition. Et on a appris dernièrement que l'ancien expert en
sécurité, qui s'appelle Samuel Ward
Spangenberg, affirmait à la Cour supérieure de la Californie qu'il a travaillé
dans une équipe dont la mission était de couper à distance l'accès aux
ordinateurs quand les autorités, dans notre cas Revenu Québec, faisaient une rafle, perquisition — je fais juste de la traduction en simultané — et l'expert en question a dit être
intervenu lors de la saisie de Montréal.
Donc, je
trouve que c'est extrêmement troublant et j'aimerais avoir votre opinion de
qu'est-ce que vous pensez qu'une
entreprise comme ça, qui a des démêlés extrêmement importants, qui est sous
enquête actuellement pour fraude fiscale
avec tout ce qu'on sait, se retrouve à avoir les privilèges de faire un projet
pilote, d'ailleurs projet pilote pour lequel elle ne respecte même pas
les conditions. Il y a plusieurs infractions aux conditions du projet pilote.
J'aimerais avoir votre
opinion en tant que ministre des Finances. Qu'est-ce que vous pensez d'une
entreprise comme Uber qui est sous enquête pour fraude fiscale de la part de
Revenu Québec, mais qui, par la même occasion, bénéficie de privilèges pour faire un projet pilote et qui... ce projet
pilote là qui concurrence de façon totalement déloyale l'ensemble de l'industrie du taxi et des
chauffeurs de taxi qui, eux, ont respecté les lois, et les règlements, et la
fiscalité?
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre.
M. Leitão : Bon, plusieurs éléments
dans votre question. Le premier et le plus important, c'est que le cas qui concerne Revenu Québec et Uber, c'est toujours en
cour, et donc je ne peux pas commenter là-dessus. Demain, Revenu Québec va être ici aussi aux crédits. Vous
pourriez peut-être leur poser la question. Je pense que la réponse va être la
même parce que le procès est en cour. Donc, je ne pense pas qu'on puisse
commenter sur quelque chose qui est en cour.
Pour l'autre
question, écoutez, c'est à cela qu'un projet pilote répond. On fait un projet
pilote pour voir la pertinence d'un
tel modèle dans notre paysage de transport collectif, transport par taxi dans
la grande région de Montréal. À la fin du projet pilote, le gouvernement prendra sa décision, mais c'est pour ça
qu'on fait un projet pilote, qu'on puisse arriver à une conclusion. On
ne pouvait pas faire ça avant.
Le Président (M. Bernier) : Il vous
reste une minute, Mme la députée.
• (17 h 10) •
Mme
Ouellet : Oui. Donc, ce que
je comprends, c'est que, pour l'instant, comme ministre des Finances, vous
n'avez pas d'inconvénient à ce que les
chauffeurs de taxi se retrouvent à avoir une concurrence complètement déloyale,
20 000 chauffeurs de taxi d'une entreprise qui est sous enquête pour
fraude fiscale.
Est-ce que,
si Revenu Québec... puis là j'espère que, les délais judiciaires, là, on n'aura
pas les mêmes problèmes que ce qu'on
vit actuellement puis que ça ne tombera pas entre deux chaises, mais décide de
faire des poursuites, et que le DPCP décide de poursuivre, et qu'ils sont jugés
coupables, est-ce qu'à ce moment-là vous jugez qu'Uber, s'ils sont jugés
coupables, ne devraient plus du tout pouvoir avoir accès et faire des affaires
au Québec?
Le
Président (M. Bernier) :
Comme il reste seulement 10 secondes, je vais vous laisser répondre,
puis on ira sur le temps du gouvernement.
M.
Leitão : Beaucoup
de questions hypothétiques auxquelles on ne peut pas répondre. On verra bien si
c'est le cas quand ça arrive.
J'aimerais
juste préciser une chose: Le projet pilote rétablit l'équité. Oui, oui, le
projet pilote, maintenant, rétablit l'équité entre le taxi
traditionnel et Uber. Et c'est à quoi que ça sert, un projet pilote.
Le
Président (M. Bernier) :
Merci. Le temps est maintenant écoulé. Nous allons aller, M. le député d'Orford, du côté du
gouvernement.
M.
Reid : Merci, M.
le Président. Alors, je ne suis pas
un spécialiste de la finance, j'ai passé plutôt toutes mes années de politicien
à travailler à la Commission de l'administration publique ou à la Commission
des transports et de l'environnement. Mais je ne parlerai pas du REM. Je
voudrais plutôt faire profiter la population de ce dont je profite, moi-même, en étant à cette commission, d'apprendre
sur les questions financières, et tout ça, qui m'ont moins préoccupé par
le passé.
Et là-dessus il y a des concitoyens qui... Dans
mon comté, il y a beaucoup de retraités, comme vous le savez peut-être, qui ne sont pas tous millionnaires, contrairement
à ce que beaucoup de monde pense. Magog n'est pas qu'une ville de riches. Il y a des gens qui sont plus
pauvres et des gens qui vivent, en termes de pension, parfois seulement sur la
pension du RRQ, Retraite Québec. Je sais que
la société... Ils ne connaissent pas les chiffres nécessairement, mais ils
savent que la société gère ces
fonds-là, 62 milliards, je crois, pour Retraite Québec, et, en fait, ce
dont je me suis rendu compte depuis
un certain temps, c'est qu'il y a, dans cette population-là, une préoccupation,
une sensibilité assez grande à la situation économique mondiale.
On parle
beaucoup des éléments de la situation économique mondiale. Donc, ils sont en
mesure de voir, de suivre, de faire
le suivi de ça et ils ne sont pas fous, là, ils savent que ça, ça a un impact
sur les finances, sur l'effet. Et surtout, ce dont on entend parler beaucoup, c'est des éléments qui sont des
éléments d'instabilité. Ce qu'on dit, ce qu'on lit, c'est que ça va générer de l'instabilité. On ne sait pas
exactement ce qui s'en vient, alors, que ce soit Trump, Brexit, l'élection
française, etc. J'aimerais ça qu'on profite
de votre présence ici, vous et les membres de votre groupe, de votre direction,
pour regarder un petit peu en gros qu'est-ce
que ça veut dire pour la... comment c'est analysé par la caisse et comment la
caisse change ses stratégies en fonction de ça. Et pour que les gens puissent
suivre, j'aimerais ça qu'on le fasse de façon, disons, morceau par morceau, en prenant des cas particuliers et en regardant
un peu comment vous pouvez nous en parler plutôt que de faire un exposé général là-dessus. Moi, je n'ai pas de
misère avec les exposés universitaires, mais, enfin, si je pense à ma
population que je représente dans mon comté...
Alors, vous
savez, depuis déjà plusieurs années, on entend parfois des gens de la direction
de la caisse dire que les rendements que nous avons connus, des fois des
très bons rendements, 13, 12, etc., ne sont peut-être pas éternels. En fait, on
voit que les deux dernières années, en fait, avec 9,1 et 7,6, le rendement
global a diminué. On disait tantôt qu'il y a
une concurrence féroce. On disait tantôt que les rendements ou les obligations,
c'est parfois famélique, et donc on nous
prépare puis on se prépare, puis j'imagine la caisse se prépare aussi à être
capable de gérer cette espèce de difficulté de... et donc on nous prépare aussi en nous disant
que peut-être on peut espérer pour le mieux, mais parfois il faut se préparer
pour le pire.
Je pense
qu'on a connu le pire déjà il y a quelques années, et, depuis ce temps-là, les
choses vont beaucoup mieux et, d'une
façon générale, je pense qu'on ne nous prédit pas qu'on va redescendre là, mais
on nous mentionne que... et les gens
écoutent ça, ils comprennent ça. Et comme ils comprennent ça puis ils ont
absorbé ça, alors, ils regardent les éléments d'instabilité qui leur sont dits dans les médias, à la grandeur des
médias, pour ce qui se passe sur la planète, et donc, pour eux, ils voient qu'il y a un lien entre les deux.
Et, ce lien-là, bien, j'aimerais ça qu'on puisse peut-être avoir des
explications pour que... Ça nous génère...
Enfin, un des
éléments qu'il me semble que tout le monde veut savoir, c'est est-ce que la
caisse est en contrôle face à tous ces éléments-là. Évidemment, la
caisse ne contrôle pas Donald Trump, on comprend tous ça, là. O.K.? Cependant, les éléments qui sont à prévoir,
comment est-ce qu'on analyse le marché. Et j'aimerais ça qu'on le fasse en cinq
étapes, si vous voulez : Trump, je reviendrai, après ça, sur le Brexit,
mais... j'y reviendrai à chaque fois, si vous voulez,
je reviendrai, après ça, sur les élections françaises et je reviendrai ensuite
sur la Chine, peut-être, la Chine est devenue un élément aussi générateur d'instabilité, et par la suite peut-être des
grandes ententes internationales, qu'est-ce que ça veut dire pour la
caisse. Ce n'est pas nécessairement la même chose que ça veut dire pour le
gouvernement.
Alors,
commençons par Trump, qui est un gros morceau. Évidemment, on en entend parler
depuis déjà quelque temps, puis
Trump, il brasse beaucoup. Donc, on a l'impression que c'est des grosses
instabilités, là, qui s'en viennent. Comment la caisse s'y prend pour...
et je ne veux pas que vous nous donniez des secrets commerciaux ou des secrets concurrentiels, mais comment est-ce que la caisse
s'y prend pour analyser et se préparer ou préparer ses stratégies pour
ces instabilités-là qui pourraient venir?
M.
Leitão : Oui. Avant de commencer, moi, je suis très tenté, un moment,
de parler longuement sur ces sujets-là, mais je ne vais pas le faire, je vous rassurer. Juste mentionner que,
dans notre budget, qui est très prudent, nous avons pris en considération l'incertitude
internationale. Mais je vais laisser M. Sabia répondre, parce que sinon, moi,
je prendrais tout votre temps.
M. Sabia
(Michael) : Donc, je vais
essayer de répondre à votre question en deux volets, parce que la distinction
est importante entre l'état de l'économie,
et les risques, et surtout les risques géopolitiques. Donc, je vais décortiquer
les deux.
Donc, sur la
question de l'économie, encore une fois, il faut faire une distinction entre
les pays de l'OCDE et les marchés en
croissance. Donc, pour les sociétés OCDE, il est important de faire la
distinction, et j'arrive à M. Trump, il est important de faire la
distinction entre le signal et le bruit.
Le signal, je
pense, est assez clair. À long terme, dans les pays OCDE, nous avons un enjeu
d'une faible croissance de
main-d'oeuvre, une faible performance de la productivité et également une très
faible performance d'investissements qui
viennent des entreprises. Donc, mettre les choses ensemble, on a une
perspective pas désastreuse, juste un peu faible, avec un taux de
croissance à peu près, je ne sais pas, entre 1 % et 2 % par année.
M.
Reid : ...la
préoccupation de la caisse, c'est le rendement, évidemment.
M. Sabia
(Michael) : Ça, c'est...
1 % et 2 %, ça, c'est le taux de croissance économique dans la région
de l'OCDE, comme je disais, pas
désastreux, juste faible. Et, selon nous, ce n'est pas très probable qu'il y
aura une crise, un autre 2008. Donc, les choses, tout simplement,
restent faibles.
Maintenant,
le bruit, beaucoup de bruit vient de Washington et l'administration de
M. Trump. Donc, il parle d'une réduction
d'impôt importante, il parle d'une augmentation des dépenses en infrastructures
très importante, une augmentation des
dépenses militaires très importante, déréglementation. Donc, il parle de
beaucoup de choses. Jusqu'à date, honnêtement, il n'a pas fait beaucoup de choses. Donc, c'est la raison pour laquelle
je pense, oui, nous avons vu un rebond du niveau de confiance aux États-Unis, mais nous n'avons pas encore vu un rebond
du niveau d'investissements par les entreprises. Et ça, c'est la chose la
plus importante, parce que ça, c'est la chose qui va déclencher un autre niveau
de croissance économique. Donc, pour l'instant, je pense, dans cette catégorie,
oui, M. Trump, beaucoup de bruit, pas beaucoup de changements; plus de confiance, mais pas beaucoup d'augmentation
d'investissement, qui est la chose la plus importante.
• (17 h 20) •
Maintenant,
rapidement, aux marchés en croissance, honnêtement, je suis assez optimiste,
parce que ces pays, l'Inde, la Chine,
le Mexique, même aujourd'hui peut-être un peu le Brésil, ces pays vont agir
comme une source de croissance dans le monde, une locomotive puissante,
peut-être pas, mais quand même ils vont contribuer de façon positive à la
croissance économique dans le monde, disons, à peu près, 4,5 % à 5 %.
Donc, si on met les deux ensemble, les pays OCDE et les marchés en croissance,
peut-être un niveau de croissance économique dans le monde entre 3 % et
4 %.
Vous avez mis
l'accent sur la Chine, juste rapidement, quelques commentaires sur la Chine. On
voit maintenant, en Chine, une
augmentation, qui est très bienvenue, une augmentation de la demande domestique
qui est importante, parce que cette
économie est dans une grande transition, et donc cette augmentation est
importante. L'autre côté de la médaille est le risque qui vient de la Chine. C'est l'état de leur système
financier et, plus spécifiquement, la création de crédit, qui est
peut-être un peu excessif. Et je pense que le gouvernement est en train
d'essayer de prendre le contrôle de ces activités parce que ça risque pas mal d'instabilité. Pour
nous, selon nous, ce n'est pas quelque chose qui va arriver avec une très forte probabilité, mais c'est un
risque. Donc, ça, c'est une «picture», une photo de l'économie mondiale.
Maintenant,
les risques les plus importants. Le numéro un et franchement, selon moi, le
risque le plus important, c'est le
protectionnisme. Mais, encore une fois, nous n'avons pas encore vu beaucoup de
choses, quelque chose entre les États-Unis et le Canada, le bois d'oeuvre,
quelques commentaires sur le lait et, plus récemment, une opération lancée par
Boeing contre Bombardier, qui est une opération inquiétante...
M.
Reid :
Excusez, mon ignorance, mais je ne suis peut-être pas le seul, mais juste...
parce que c'est très intéressant quand
vous parlez des ententes, le protectionnisme d'échanges commerciaux. Comment
est-ce que, ça, ça se traduit par un rendement de la caisse? Juste pour
nous l'expliquer un tout petit peu?
M. Sabia
(Michael) : C'est indirect
parce que, si une vague de protectionnisme arrive dans le monde, mais «si»
majuscule, il y aura presque instantanément
une réduction du taux de croissance économique dans le monde, parce que
le libre-échange est un moteur important dans la croissance économique dans le
monde. Donc, si le protectionnisme, autrement dit, va agir comme un frein sur
la croissance économique dans un monde où la croissance économique est beaucoup
plus faible, pour simplifier les choses, il y aura un impact à la baisse de
notre rendement.
Une autre
catégorie de risque, ça, c'est tous les risques géopolitiques, Corée du Nord,
la Russie, la Turquie, la question de
Brexit et la stabilité de la Communauté européenne. Je pense, sur cette
question, la stabilité de cette communauté, honnêtement, je pense... Et, si M. Macron remporte les élections
dimanche, je pense que ça, c'est une bonne nouvelle, une importante et une bonne nouvelle, parce que
Macron est dédié à une vision d'une Europe qui fonctionne. Et également,
avec Mme Merkel, même avec l'opposition de Mme Merkel en Allemagne,
il y aura maintenant une possibilité de retrouver
cet axe franco-Allemagne qui est nécessaire pour stabiliser l'Europe et pour
renforcer l'Europe et simplifier le fonctionnement de l'Europe. Donc,
ça, c'est une bonne nouvelle.
M.
Reid :
...réciproque, ça veut dire que, si c'était le contraire, donc des
antieuropéens qui sont en France, Brexit,
etc., ça aurait comme impact évidemment que l'Europe s'affaiblit, et ça, vous
dites, ça a un impact inévitable sur le rendement de la caisse.
M. Sabia (Michael) : Oui. Et dans un
cas, dans une situation où on a une rupture en Europe avec un impact économique
qui est presque inévitable, étant donné nos investissements en Europe, oui, il
y aura un impact.
Mais
maintenant, et ça, c'est mon dernier commentaire, nous avons toute notre
stratégie d'investissement qui met l'accent sur les actifs, les actifs ancrés
dans l'économie réelle, les actifs de qualité, les actifs un peu moins
liquides, notre façon de gérer ces
actifs, dans notre jargon, en absolu, la mondialisation de la caisse qui nous
donnait accès à diverses sources du
rendement, l'importance des partenariats. Tout ça représente les éléments d'une
stratégie qui est plus robuste et plus résiliente, et ça, c'est, dans le
fond, notre objectif.
Donc, est-ce
que nous sommes en mesure d'immuniser notre portefeuille face à toutes ces
incertitudes et cette volatilité? La
réponse est non. Mais est-ce que nous sommes en mesure de mitiger ces impacts?
Et ça, c'est notre objectif, de mitiger.
M.
Reid : Combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier) : Il vous
reste 1 min 30 s.
M.
Reid :
M. le Président, si vous me permettez, j'aimerais ça... Je sens que notre
ministre grouille d'envie de nous
raconter un petit peu plus aussi... parce que le budget, effectivement, a été
fait dans la prudence face à toute cette incertitude-là. M. le ministre,
pouvez-vous nous compléter les réponses qui nous ont été données?
M.
Leitão : Oui, bien sûr, parce que dans notre cas, évidemment, c'est très important, l'environnement international, parce que
vous savez très bien que le Québec est une économie relativement petite et très ouverte au commerce mondial.
Donc, ce qui se passe à l'étranger, à l'extérieur, a un effet important, majeur
sur notre économie.
Alors, nous,
ce qui nous importe, bien sûr, c'est d'essayer de prévoir la croissance de nos
revenus, donc prévoir la croissance
économique, d'où viennent les revenus de l'État, et se donner des marges de
manoeuvre qui nous permettraient de passer à travers des moments plus
difficiles si, en effet, il y avait des accidents qui nous viendraient de
l'extérieur.
Alors, à cet
égard-là, j'aimerais juste rappeler que nous avons trois niveaux de prudence
qui sont incorporés dans notre budget.
La première, ce sont les réserves normales de provisions pour éventualité. Nous
avons aussi, du côté des dépenses,
des marges budgétaires considérables, mais c'est important de rappeler à tout
le monde que nous avons aussi une réserve de stabilisation de
2,5 milliards...
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous prenons
note de vos propos. Nous allons passer du côté de l'opposition
officielle. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui, merci, M. le Président. Je vais parler du REM. Peut-être... Si vous voulez
que M. Tall vienne s'asseoir avec nous. C'est comme vous voulez.
Alors, peut-être continuer une conversation que j'ai eue, en fait, avec M. le ministre des Finances à l'occasion du débat
sur le budget. Je voulais vous poser des questions un peu équivalentes à
celles que je lui avais posées, je suis certain que vous êtes bien préparé pour
ça déjà.
Peut-être, première question très simple, le
projet prévoit que la caisse va avoir un rendement de 8 % qui est prioritaire, c'est bien décrit dans le montage
financier qui a été présenté dans le cadre du budget. Maintenant, ça pose la
question de ce qui se passe s'il y a des
dépassements de coûts. M. le ministre, sur votre gauche, nous disait... Je sais
que c'est un
scénario que vous ne voulez pas envisager, mais je ne veux pas que vous me
convainquiez que ça ne peut pas arriver,
vous savez très bien que ça peut arriver. Et je sais que vous allez faire tout
en votre possible pour que ça n'arrive pas,
puis je souhaite que ça n'arrive pas, moi non plus, mais, la réalité étant ce
qu'elle est, ça arrive, bon, des fois. Alors, la question, c'est ce qui
se passe lorsqu'il y a des dépassements de coûts.
Deux scénarios de
dépassements de coûts possibles. Le premier, c'est dans la phase de
construction, puis le deuxième, c'est dans
la phase d'exploitation. Alors, ma question... et M. le ministre nous
disait : S'il y a des dépassements de coûts, ce qu'il y a de merveilleux avec cette entente-là, c'est que
nous n'avons aucun risque, tous les risques sont assumés par la caisse. Alors donc, reprenons, donc, au
plan financier, là. Vous avez 8 % de rendement garanti sur une équité de
2 670 000 000 $. Pour
avoir un 8 %, en tant que tel, comme vous avez 51 % de l'équité, ça
vous prend un 215 millions en dividendes, là, pour aller générer le
8 % en question.
Alors,
ma question, c'est : S'il s'avérait que le projet coûte plus cher, de
quelle manière le 215 millions qui est nécessaire est modifié? Est-ce que ça change quoi que ce soit, ça, 215?
Est-ce que ça va prendre plus? Disons que le projet, à la phase construction, coûte plus cher... ou bien,
si à la phase d'exploitation, il y a des dépassements, je voudrais savoir c'est
quoi qui se passe, donc, dans le cas où il y a des dépassements de coûts à la
construction ou à l'exploitation.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. Sabia ou M. Tall.
M.
Tall (Macky) : M. le Président, pour commencer, je comprends que, dans la question,
il y a un souhait de ne pas commenter
sur le risque de dépassement, mais je
pense que c'est un élément important,
puisque l'équipe de CDPQ Infra travaille
depuis une année, tous les spécialistes, pour s'assurer de bien identifier ces
coûts-là, de bien les circonscrire et développer
un projet pour qu'il n'y ait pas de dépassement de coûts. Et rappeler également
que, dans les derniers projets dans
lesquels nous avons été impliqués, qu'ils soient à Vancouver, à Melbourne en
Australie, à Londres en Angleterre, des
projets de plusieurs milliards de dollars avec des complexités comparables, il n'y a
pas eu de dépassement de coûts. Et rappeler
également, dans le processus d'appel
d'offres en cours, Michael
le mentionnait un peu plus tôt, que nous allons mettre en place avec des
consortiums de construction de classe mondiale, qui ont une expertise, des
contrats clés en main avec un prix fixe garanti et des pénalités de réalisation.
Donc,
la première réponse à la question, c'est que, s'il y a des dépassements de
coûts, normalement, en vertu des contrats en place, c'est
l'entrepreneur, le consortium de construction qui est responsable, et les
contrats incluent des pénalités justement à
ce niveau-là qui protègent la caisse et les autres investisseurs, donc, dont le
gouvernement du Québec, de ce risque-là.
• (17 h 30) •
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député.
M. Marceau :
Vous n'avez pas répondu à la... J'ai commencé en vous disant : J'aimerais
que vous ne me parliez pas du fait
que ça n'arrivera pas, des dépassements de coûts, puis c'est la seule chose à
laquelle vous avez répondu, là, puis
je le dis gentiment, là. Là, la question, c'était : Qu'arrive-t-il s'il y
en a? Et, vous savez, on nous a dit la même affaire avec le CHUM, là, puis on nous a dit : On
était protégés par des contrats. Puis, si ça se trouve, là, on est en cour à se
chicaner pour qui va assumer les factures en trop.
Alors,
je ne dis pas que vous n'allez pas faire de votre mieux pour que ça n'arrive pas,
mais, si ça arrive... Puis il y a deux étapes, il y a la construction... Et là
je comprends que vous pouvez vous protéger du mieux que vous le pouvez tout en... Puis vous et moi, nous savons
que, même quand on se protège, dans des contrats, il y a des contrats qui
sont contestés, il y a des cours qui
existent pour se débattre là-dessus. Et il arrive que, même si on est protégé,
on paie.
Donc, ça, c'est la
première chose. La deuxième, c'est... exploitation ou à la phase
d'exploitation, à la phase d'opération, il
se peut que ça coûte plus cher que ce que vous aviez prévu aussi.
Qu'arrive-t-il, dans ces deux cas-là, quant au rendement de la caisse,
quant au 8 %? Ça va être un 8 % sur quel montant?
Le Président
(M. Bernier) : M. Tall ou M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Je vais répondre à un élément de la question de
M. Marceau et ensuite je vais passer la parole à Macky.
Juste pour clarifier
des choses, c'est la caisse qui est responsable, ce n'est pas les autres
investisseurs, soit le gouvernement du Québec, soit le gouvernement du Canada.
Nous sommes responsables, donc, et c'est la raison pour laquelle il n'y aurait
pas des dépassements de coûts, parce que nous sommes responsables. Également,
sur le plan des opérations, même chose.
Mais
également, M. Marceau, je voudrais vous dire également : Dans la
planification que nous avons faite, et c'est tout à fait normal, évidemment, nous avons une marge de manoeuvre. C'est
la seule façon prudente pour planifier un projet de cette ampleur. Donc, est-ce que nous avons une marge de manoeuvre
prudente? Oui. Est-ce que nous sommes à l'aise, très à l'aise que nous
serons en mesure de livrer le projet dans les paramètres que nous avons créés
dans le montage financier et dans nos plans
d'affaires? Oui. La réponse est oui. Notre niveau de confiance est très élevé.
Et, franchement, étant donné le
travail maintenant excessivement détaillé... Il y a un an, ma réponse,
peut-être, aurait été un peu différente, mais maintenant, après une autre année de travail avec des plans
excessivement détaillés, notre niveau de confiance est très élevé à cet
égard.
Mais Macky...
Le Président (M. Bernier) :
M. Tall.
M. Tall
(Macky) : Oui, simplement rajouter sur cet élément, confirmer ce que
Michael mentionnait, c'est-à-dire
que la structure financière prévoit que c'est la caisse qui est responsable de
ce risque que nous avons pris.
M. Marceau :
Je vais vous donner un exemple, hypothétique de votre point de vue, mais, la
réalité étant ce qu'elle est...
Disons que le projet, au lieu de coûter 6,43 milliards, tel qu'écrit dans
le budget, il coûtait 7 milliards de dollars. Mettons qu'il coûte
7 milliards, O.K. on réfléchit ensemble...
Une voix : ...
M. Marceau :
Non, non, mais, regardez, il faut que les gens comprennent. Là, là, je ne fais
pas de blague, là. Regardez, si vous
voulez, on prendra des exemples de projets passés qui ont coûté très cher et
même à la Caisse de dépôt, là, qui...
Je ne vous rappellerai pas certains projets, là. Puis c'est normal, là, que les
parlementaires sachent ce qui va arriver puis c'est normal que la
population du Québec sache ce qui va arriver si le projet, au lieu de coûter
6 milliards, coûte 7 milliards.
Alors, je veux juste savoir c'est quoi, la réponse à cette question-là très
simple. Si ça coûte sept plutôt que six,
même si c'est une probabilité de 1 %, on a le droit de savoir, autour de
la table, qu'est-ce qui va arriver. Alors, je répète ma question. Si ça coûte six... pardon, si ça
coûte sept plutôt que six, qu'est-ce qui arrive? Le 8 %, là, ça va être
sur quoi, sur l'équité augmentée ou sur le...
Le Président (M. Bernier) :
M. Tall.
M. Tall
(Macky) : Oui, M. le Président. C'est une question hypothétique. Nous
n'avons, en infrastructures, connu aucun dépassement de coûts en plus de
15 ans de projets. Maintenant...
M. Marceau : M. le Président...
Le Président (M. Bernier) :
M. Tall, je vais juste permettre au député de préciser sa question.
M. Marceau :
Non, je ne veux pas préciser ma question, non, il y a un refus de répondre, il
y a refus de répondre. On dit qu'il n'y a pas de dépassement de coûts.
Ce n'est pas la question. La question, c'est...
Le Président (M. Bernier) : M.
le député...
M. Marceau : Moi, je veux comprendre le montage financier dans
le cas où il y a une hausse des coûts, et il faut que vous
répondiez à ça, là.
Le Président (M. Bernier) :
M. Tall.
M. Tall
(Macky) : M. le Président, donc, la réponse à la question, c'est que, s'il y a un dépassement de coûts,
comme nous le mentionnions un peu plus tôt, la caisse est à risque, et, à ce
moment-là, le 8 % prendra plus de temps à réaliser, évidemment.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Et est-ce que, dans ce cas-là, ça veut dire que
le gouvernement ne récupérera pas aussi lentement ses
billes?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão : Ça prendra plus de
temps.
M. Marceau : O.K. Puis, s'il
y a des dépassements dans les coûts
d'exploitation, s'il y a des dépassements à l'étape de
l'exploitation, si, au lieu de coûter ce qui est prévu que ça coûte, ça coûtait
plus cher, qu'est-ce qui arriverait?
Le Président (M. Bernier) : M. Tall.
M. Tall (Macky) : Alors, pour bien
répondre à cette question, M. le Président, ce serait peut-être de rappeler comment est-ce que le rendement est calculé sur le
projet du REM, comment il est réalisé, et ce n'est pas réalisé de façon différente de tous nos projets d'infrastructures que nous avons à travers le monde. Le rendement, il vient de nombreux
facteurs, et, parmi ces facteurs, il y a évidemment
les revenus que nous allons réaliser, en premier temps, les revenus qui
viennent, donc, des paiements qui vont être faits par l'agence régionale de
transport métropolitain, et les tarifs à ce niveau-là, pour le REM, 0,69 $
à 0,72 $ par kilomètre-passager, un tarif, d'ailleurs, j'aimerais le
rappeler, qui est très compétitif comparé
aux tarifs des réseaux de transport existants. Et, pour bien déterminer ces
chiffres-là, il y a l'achalandage que le REM va recevoir, pour lequel nous avons retenu une des meilleures
firmes dans le monde, la firme Steer Davies Gleave, pour bien préciser
ces niveaux-là.
À ces revenus se rajoutent également
les revenus additionnels, par exemple, de publicité, etc. À cela, il faut déduire
les dépenses d'exploitation — M. le député y faisait référence un peu plus tôt — et ces dépenses d'exploitation ont été également
optimisées avec le choix technologique
de trains légers électriques automatisés, qui permet un grand contrôle de coûts, une grande précision. Et encore une
fois, dans ce cas-ci, les coûts reliés à l'exploitation du REM vont être
transférés par un contrat avec des
performances de garantie du fournisseur du matériel roulant. C'est l'objet de
l'appel d'offres en cours. Et
également, donc, au niveau des coûts financiers, la structure financière qui
est proposée ici permet d'éliminer ces risques qui peuvent être reliés à des
fluctuations de taux d'intérêt puisque le capital va permettre un financement
à 100 % en fonds propres.
Ce
sont ces éléments qui vont dégager le bénéfice d'exploitation, qui, lui... et
incluant la valeur intrinsèque de l'actif
annuellement. Et cette valeur intrinsèque, elle est reliée également à
plusieurs facteurs : les niveaux de taux d'intérêt dans l'économie, la croissance, etc. Donc, tous
ces éléments-là amènent le rendement que nous allons réaliser. Donc, la réponse, c'est que, si les coûts d'exploitation
sont plus élevés, bien, ça va avoir un impact sur ces bénéfices d'exploitation,
et ça va avoir un impact à la baisse sur le
rendement en une année, et ça va donc amener un rendement à être réalisé sur
le plus long terme.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Marceau : Et donc, par exemple, il pourrait y avoir des années
où vous ne récupérez pas le 8 %, et donc des années où on ne récupère pas non plus la part que
le gouvernement voudrait récupérer pour payer les emprunts. On s'entend?
Mais ça va. Moi, je veux simplement vous entendre dire l'évidence, c'est tout.
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Oui, mais, M. Marceau, ça, c'est dans... Nous avons je ne sais pas
combien d'investissements en infrastructures à travers le monde, et ça,
c'est le cas dans chacun.
• (17 h 40) •
M.
Marceau : Je sais bien, je sais bien. La seule chose, c'est
que, nous, quand on nous a présenté le projet, au départ, on nous a dit: C'est la... je ne sais pas
laquelle, à combien de merveilles du monde on est rendus, en tout cas, disons
qu'on est rendus à 12, ça va être la 13e,
enfin, je ne sais pas à combien de merveilles du monde on est rendus, mais on
nous disait : Il n'y aura pas de subvention du gouvernement, la personne à
votre gauche nous a dit ça en commission parlementaire.
Or, M. Sabia, puis c'est simplement une question de transparence, il y a
pour 295 qui vient d'Hydro-Québec, une
compensation liée à la plus-value foncière de 512 millions, il y a toute
la question des responsabilités afférentes, pour lesquelles...
Une voix :
...
M. Marceau :
Non, non, mais là je veux juste... Je vais dire mon petit bout puis...
Le Président
(M. Bernier) : On va juste terminer. Le député va finaliser son...
et je vous donne la parole.
M. Marceau :
Tout ce que je vous dis, c'est... le projet...
Une voix :
...
M. Marceau :
Bien là, regardez, ce sont les chiffres du... je viens de dire les chiffres qui
sont dans les documents budgétaires.
M. Leitão :
Ce ne sont pas des subventions.
M. Marceau :
De toute façon, est-ce que je peux formuler une question, là?
Le Président
(M. Bernier) : Bien, formulez votre question, M. le député.
M. Marceau :
Là, c'est à moi à formuler les... Je le fais poliment, là, à ce que je sache.
Le
Président (M. Bernier) : C'est votre temps à vous. Au niveau de
l'opposition, vous avez le droit de formuler vos questions.
M. Marceau :
Tout ce que je dis, là, il y a l'équité de la caisse, il y a l'équité du
gouvernement du Québec, il y a l'équité d'Ottawa un jour et il y a des
subventions, hein? Il y a Hydro-Québec, 295...
M. Sabia (Michael) : Mais ce n'est pas une subvention. Une entente
commerciale pour acquérir des services d'un fournisseur pour électrifier
le réseau, de quelle façon ça représente une subvention?
M. Marceau :
O.K., regardez, la façon dont c'est présenté, là, il n'y a pas de contrepartie,
puis il y a une compensation liée à
la plus-value foncière de 512 millions. Vous ne me ferez pas croire que ce
n'est pas une subvention.
M. Sabia
(Michael) : Non.
M. Marceau :
Puis il y a un 295 qui vient... pardon, un 392 qui est en responsabilité
afférente du gouvernement. Écoutez,
tout ça, ça vient s'ajouter à l'équité puis ça permet de rendre le projet plus
rentable, c'est une évidence. En tout cas,
regardez, moi, tout ce que je vous dis, c'est que, quand ça nous a été présenté
au départ, il ne devait pas y avoir aucun dollar du gouvernement, ça devait s'autofinancer, il n'y avait pas de
risque. Regardez, tout ce que je dis, c'est que ce n'est pas exactement le cas. Ce n'est pas exactement le
cas. Je pense que... En tout cas, vous pouvez faire un commentaire d'une
minute si vous voulez sur ce que je viens de
dire, ça ne me dérange pas, parce qu'il faut que j'aille sur un autre sujet
ensuite.
M. Leitão :
Oui, mais je pense que ce serait important que M. Sabia précise que les
montants que vous avez mentionnés, ce ne sont pas des subventions.
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Non. Vous avez dit tant de choses,
M. Marceau, que je ne suis pas en mesure de prendre note de chacun.
Donc,
d'abord et avant tout, ça a été prévu dès le départ que nous allons structurer
et financer ce projet avec, oui, une
participation importante de la caisse, 51 %, mais également un
investissement en équité qui vient des deux paliers de gouvernement. Ça, ce n'est pas un changement.
Et nous n'avons jamais dit que nous allons financer 100 % de ce projet,
jamais. Ça, c'est numéro un.
Numéro
deux, la question du 512 millions, soyons très clairs ici, notre
proposition était de partager la plus-value foncière avec les municipalités et de prendre le risque, franchement,
parce qu'étant donné l'impact économique de notre réseau, nous, Macky et moi, nous étions convaincus
qu'on a un «upside» très intéressant de ce mécanisme. Maintenant, le gouvernement a pris une décision, et la
décision est leur décision, a décidé de financer les villes de Montréal et les
autres villes, les autres
municipalités dans le Grand Montréal. Ça, c'est une décision gouvernementale,
ce n'est pas quelque chose que nous avons demandé du tout, du tout.
Donc,
ce n'est pas une subvention de la caisse, ce n'est pas une subvention du
projet. C'est une décision de la part
du gouvernement de financer les municipalités, et donc de laisser tomber le
mécanisme que nous avons mis de l'avant. Parce que c'est un mécanisme, selon nous, franchement, beaucoup plus
intéressant pour nous, mais, dans le contexte d'une négociation, nous
avons accepté la décision du gouvernement. Mais dans aucun cas le
500 millions représente une subvention
de notre projet, ça, ce n'est juste pas le cas. Même chose avec le contrat avec
Hydro-Québec, c'est une entente commerciale.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau, je vous accorde
du temps pour poursuivre.
M. Marceau :
On poursuivra le débat là-dessus. Je comprends très bien ce que vous me dites
sur la question de la plus-value
foncière, là. Cela étant, l'argent va vous arriver à vous comme compensation,
vous avez entièrement raison, sans que vous ayez pu exploiter le mécanisme,
on s'entend. En tout cas, quoi qu'il en soit, ma question ne porte pas
là-dessus, elle ne porte plus là-dessus. J'aurais bien voulu vous en parler
pendant des heures, là.
Un
peu à la manière de ce qu'on a fait pour les paradis fiscaux, vous avez fait
vous-même une compilation des montants que... Enfin, je peux vous dire
la question, là. Les investissements directs ou indirects dans des compagnies exploitant des hydrocarbures ou leur transport,
vous avez dressé une liste de ça, vous avez fourni ça dans les réponses que... enfin, dans les réponses aux questions
qu'on vous a posées, puis ça s'élevait — d'après
votre compilation, là, ce n'est pas
la nôtre, là — à
15,6 milliards de dollars au 31 décembre 2016. Donc, 15,6 milliards de dollars dans les hydrocarbures, évidemment, c'est un montant qui est considérable,
qui est important, évidemment, quand on sait que... après les
accords de Paris, quand on pense...
Ma
question, donc, tout
simplement : Est-ce que...
Nous, on n'est pas en mesure de voir si ça a augmenté récemment ou si ça a diminué. J'aimerais savoir si ça a
augmenté récemment. Deuxièmement, est-ce
que vous ne croyez pas que, là
aussi, il serait avantageux puis nécessaire
même que la caisse réduise graduellement ses investissements dans le
secteur des hydrocarbures? Est-ce que ça ne va pas dans le sens de ce
qui se passe sur la planète Terre aujourd'hui?
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. Sabia.
M. Sabia
(Michael) : Oui?
Le Président (M.
Bernier) : Oui, oui, c'est à vous.
M. Sabia (Michael) : O.K. Donc, vous, M. Marceau, vous soulevez une
question importante parce
qu'indirectement c'est toute la
question de changements climatiques et qu'est-ce que la caisse va faire face à
cet enjeu social massif. Donc, quelques éléments.
Nous avons
déjà des investissements, qui totalisent à peu près 17 ou 18 milliards de
dollars, dans les actifs très sobres,
encore bons. Notre objectif est de continuer à faire grandir la taille de ces
investissements, et donc, d'ici quatre, cinq ans, d'essayer d'augmenter ces
investissements dans les actifs sobres, encore bons. Ça, c'est un élément
important de notre plan.
Également, pour répondre à votre question sur
les hydrocarbures, nous sommes, selon nous, un investisseur institutionnel le plus important en Amérique du
Nord comme investisseur dans les renouvelables, éolienne, solaire, etc. Et donc aujourd'hui ça représente à peu près un
tiers de nos investissements dans la production. Donc, l'objectif, encore
une fois, d'ici plusieurs années, est de
transformer ce un tiers à à peu près deux tiers, donc une augmentation très
importante.
L'autre côté de la médaille, évidemment, est une
réduction graduelle, en termes de pourcentage, de notre portefeuille investi dans les hydrocarbures, mais c'est quelque chose
qui va demander beaucoup de temps parce que le monde, c'est une transition et une transition longue. Donc, ce n'est pas
demain que le monde pourrait fonctionner avec zéro pétrole ou
hydrocarbure. Donc, nous avons lancé un processus de transition avec beaucoup
d'accent sur les renouvelables, et donc une
diminution, en termes des montants totaux, dans le temps, dans beaucoup de
temps, de nos actions sur les
hydrocarbures. Donc, ça, c'est une orientation importante, mais nous avons
beaucoup de travail à faire.
Une autre
chose, M. Marceau. Il faut faire attention, hein, parce que le montant en
absolu de nos investissements dans
les hydrocarbures, c'est quelque chose qui change comme ça, juste à cause du
prix du pétrole. Donc, si le prix du pétrole
est à la baisse, le chiffre tombe de façon importante, et, si le prix du
pétrole est à 70 $ ou 80 $... Donc, ce n'est pas quelque chose... Vous ne pouvez pas juste
examiner cette question quotidiennement ou tous les mois. Il faut prendre
une perspective à plus long terme.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
M. le député de Pontiac.
• (17 h 50) •
M. Fortin
(Pontiac) : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Bonjour,
M. Sabia. Bonjour à vous et votre équipe. Merci d'être avec nous
aujourd'hui.
Je veux
juste peut-être revenir sur l'avant-dernière ligne de questionnement du député
de Rousseau parce que l'échange qu'il
a eu avec vous, M. Macky, était un peu, disons, saccadé, peut-être parce
qu'il avait plusieurs sous-questions à sa question, là. M. le député de Rousseau a parlé de qu'est-ce qui arrive
s'il y a des dépassements de coûts d'exploitation. Vous avez donné une réponse en commençant en
parlant de vos années d'expérience et le fait que, si j'ai bien compris, là,
il n'y a jamais vraiment eu de dépassements de coûts d'exploitation, et vous
avez essentiellement dit le processus, et comment
ça fonctionnait si jamais il y en avait. Puisque, dans votre réponse, vous avez
dit qu'en 15 ans d'expérience vous n'avez jamais vraiment eu de dépassements de coûts d'exploitation, le
scénario inverse est peut-être plus probable, disons. Si jamais il y a
épargne sur le montant initialement prévu, qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce ça
veut dire pour vous?
Le Président (M. Chevarie) : M. le
ministre.
M. Leitão : M. Tall.
M. Tall (Macky) : Oui, M. le
Président. Donc, évidemment, comme vous l'avez précisé, dans chacun de nos investissements en infrastructures que nous faisons depuis une quinzaine d'années, nous
appliquons la même rigueur. Nous appliquons une revue diligente
exhaustive pour examiner prudemment les risques avant de prendre la décision justement
pour minimiser ce risque de dépassement
de coûts, avec le résultat que je
mentionnais un peu plus tôt au
niveau des projets, incluant un
risque de construction. Alors, en réponse à votre question, dans le scénario où
il y en aurait moins, eh bien, ça voudrait dire que le rendement serait
atteint plus vite et que, donc, par ricochet, le gouvernement récupérerait
son investissement plus rapidement et réaliserait également son rendement visé
plus rapidement.
M.
Leitão : Si je peux me permettre, un élément très important de ce
projet, dont on parle très peu... Parce que notre investissement, de la part du
gouvernement, le 1 280 000 000 $, dans le temps, nous
allons le récupérer entièrement. Je
ne pense pas qu'il y a beaucoup de
projets de transport collectif où un des investisseurs, dans le modèle
traditionnel, va récupérer son investissement avec des dividendes
additionnels. Donc, c'est une partie assez intéressante de tout ce montage
aussi.
Le Président (M. Chevarie) : M. le
député.
M. Fortin
(Pontiac) : Merci, M. le Président, le nouveau M. le Président. Je
veux parler de vos rendements, si vous le
permettez, parce qu'on y a peut-être touché, au rendement potentiel et au
risque, dans les questions de mon collègue d'Orford, par rapport au risque géopolitique de certains marchés. Je
sais, évidemment, là, que vous êtes de plus en plus dans certains marchés. Il y a des marchés pour
lesquels vous étiez moins présents auparavant, que vous avez commencé vraiment... Et on le voit à travers certains des
investissements que vous faites, que vous êtes plus présents, et c'est correct,
c'est très bien, même, parce que, quand on
pense à l'importance de la diversification de vos différents portefeuilles,
c'est un peu comme les portefeuilles
qu'on a dans nos budgets familiaux, c'est important de faire la diversification
qu'on a besoin de faire.
Alors, de
vouloir investir dans des marchés qui, disons, ne sont peut-être pas
traditionnels, c'est intéressant, mais également
je suis certain que, dans votre politique de placement, vous considérez tous
les risques associés à ces nouveaux marchés-là.
Quand je vous vois investir, disons, en Inde, quand vous investissez en
énergie, en logistique, dans le secteur financier, quand vous investissez dans différents marchés comme ça, je
sais que vous considérez qu'il y a un risque à investir dans un nouveau marché. Mais, quand je regarde vos
rendements, je regarde également le fait que... et là je suis simplement
à vos rendements de 2016, je vois que les
rendements, entre autres, dans vos mandats de qualité mondiale et les mandats
de marchés en croissance, sont quand même inférieurs aux
mandats Canada, disons, qu'il y a peut-être eu une année exceptionnelle en 2016, alors je veux bien comprendre.
Puisque vos rendements, dans le mandat qualité mondiale, se situent à environ 4 %, le mandat marchés en
croissance se situe à environ 5,9 %, qu'est-ce qui vous pousse réellement
à faire des investissements dans des
nouveaux marchés comme ça quand, disons, le taux de rendement est peut-être
plus élevé en ce moment — ce n'est peut-être pas éternel, ce n'est
peut-être pas à long terme — dans les marchés plus domestiques?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Vous avez répondu à votre propre question parce que vous avez
dit «en ce moment», et ça, c'est
la question, parce que nous sommes un investisseur du long terme, et notre
objectif, notre façon de gérer la caisse, il faut préparer pour demain, et, quand je parle de demain, je parle des prochains 10, 15, 20 ans. Donc, il y a
une tendance indéniable dans le monde où le centre de gravité économique
dans le monde passe un peu vers... ou passe de façon importante aux pays en plus
forte croissante, soit Inde, la Chine, le Brésil, le Mexique, d'autres pays, la
Colombie, pas mal d'autres. Et donc,
pour nous, il faut nous installer dans ces marchés. Parce que
vous avez fait une référence au mot «risque». Encore une fois, entièrement d'accord. La seule façon... «I mean», nous
avons toutes sortes d'analyses, toutes sortes de calculs, mais la meilleure façon de gérer nos risques, dans un marché
comme l'Inde ou comme la Chine, n'importe où dans le monde, est de sélectionner et de travailler avec les bons
partenaires locaux, mais ça demande du temps. Et c'est la raison pour laquelle nous avons débuté le
processus, parce que ça demande des années pour développer des bons
partenariats et des bons partenaires.
Donc, il faut... Oui, pendant un an, c'est très probable que les actions canadiennes vont
très bien performer, mais c'est également
bien possible qu'un an plus tard ou 24 mois plus tard la performance des
actions canadiennes serait fortement
à la baisse. Par exemple, la performance du TSX est tellement sensible au
prix des commodités... Et donc, pour
une institution comme la caisse, avec une stratégie qui mette
l'accent sur la résilience, robustesse, ce n'est pas une volatilité avec laquelle nous sommes très à
l'aise, et donc il faut diversifier, il faut chercher d'autres sources de
rendement, qui, selon nous, nous offre le potentiel d'une performance
plus stable.
Et
donc je pourrais vous citer juste quelques chiffres. En 2013, la performance des marchés
mondiaux, en dollars canadiens, s'élève à 31 %, en 2015, 17 %, et, en 2016, 4 %. Donc, c'est juste...
c'est une montagne russe sur les marchés, et donc il faut bâtir une
stratégie qui n'est pas capable d'immuniser, mais de résister, de mitiger cette
volatilité.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M. Fortin
(Pontiac) : Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Bernier) : 2 min 40 s.
M.
Fortin (Pontiac) : 2 min 40 s. Peut-être rapidement,
là, je veux juste m'assurer d'avoir bien compris ce que vous avez mis de l'avant, M. Sabia. Dans le
contexte où la majorité... Si j'ai bien compris, là, la majorité de vos actifs
sont maintenant investis à l'extérieur du
Canada, mais, quand même, en regardant les différents mandats ici, là, il y a
quand même un chiffre particulièrement
important associé au mandat Canada en termes de résultat de placement net, là, simplement pour l'année, disons, simplement pour
cette année, que vous avez raison, vous dites: C'est peut-être, je pourrais
dire, un «one-shot deal», là, cette année ça
a bien été, mais, dans les prochaines années, on verra, dépendamment,
justement, du prix des commodités,
comme vous dites. Donc, ce que vous dites, c'est que vous allez continuer à
établir des liens avec les différentes juridictions à travers la planète
pour pouvoir investir.
Dans
votre stratégie d'investissement, est-ce qu'il y en a qui sont rendus à un
point où vous commencez vraiment à
investir davantage que par les années passées? Là, j'ai fait référence à
l'Inde. Vous avez fait référence au Mexique, si je ne m'abuse, là. Est-ce qu'il y a des marchés très
spécifiques pour lesquels vous êtes capables d'établir davantage de liens,
de sécuriser ces liens-là et de vous sentir
confortables par rapport aux risques associés aux marchés, qui, quand vous
allez le nommer, pourraient
peut-être, pour certains d'entre nous, là, évoquer des risques potentiels, mais
avec lesquels vous êtes particulièrement confortables à cause des
stratégies que vous avez développées?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
• (18 heures) •
M. Sabia (Michael) : Je vais vous donner quatre exemples et un autre exemple à la fin,
peut-être, que vous allez trouver un peu surprenant.
Donc,
nous sommes de plus en plus à l'aise en Inde et nous avons maintenant débuté le
processus de déployer du capital substantiel en Inde. Pourquoi? Parce
que nous avons déjà identifié les bons partenaires. Même chose au Mexique. Malgré le bruit qui vient de Washington,
selon nous, à long terme, le Mexique est un pays plein de potentiel. Également, et nous sommes maintenant sous le
leadership de Macky, nous sommes en train d'augmenter le niveau de nos
investissements en Australie. Pourquoi Australie...
Le
Président (M. Bernier) : M. Sabia, je dois vous interrompre et
passer du côté du deuxième groupe d'opposition parce que nous sommes assez stricts au niveau du temps, nous devons
terminer à 18 h 10. Donc, M. le député de Granby.
M.
Bonnardel :
Merci, M. le Président. M. Sabia, on ne lâche pas, il reste
10 minutes.
Alors, je vous parlais tantôt
de George Gantcheff. Je vous disais que, dans les renseignements additionnels, vous aviez
supposément encore trois ententes de partenariat, de financement ou de prêts
avec M. Gantcheff, au 500, Willowdale, à Outremont, au 500, Grande
Allée, Québec, et au 500, René-Lévesque, à Montréal. Est-ce que c'est encore le
cas?
M. Sabia
(Michael) : Allez-y. Je suis en train d'essayer de chercher quelque
chose sur M. Gantcheff.
M.
Bonnardel :
O.K. Bien, écoutez, est-ce que c'est encore le cas?
M. Sabia (Michael) :
Pas beaucoup de succès.
M.
Bonnardel :
Est-ce que vous confirmez aussi que, depuis 2012, les informations que
certaines personnes avaient, vous auriez investi 370 millions de dollars
avec lui dans ces différentes entreprises?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Est-ce que nous pourrions répondre séparément? Parce que
nous ne sommes pas tout à fait
prêts de...
M.
Bonnardel :
Genre, vous allez m'appeler?
M. Sabia
(Michael) : Oui, oui, oui, certainement, mais nous...
Des voix :
Ha, ha, ha!
Le Président (M.
Bernier) : ...faire parvenir votre réponse ici, la commission
va la transmettre.
M.
Bonnardel :
Je vais vous laisser mon cellulaire, M. Sabia, vous m'appellerez.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Oui.
Bien, écoutez, c'est sûr que la question que j'ai pour vous
aussi, M. Sabia... Tantôt, vous avez
plus ou moins répondu, je vous ai demandé pourquoi la caisse...
Parce que, dans un article, une des représentantes, là, de chez les affaires juridiques, Mélanie
Charbonneau, a dit : S'il venait nous voir pour obtenir un nouveau prêt,
on passerait notre tour. On ferme la boucle avec lui pour quelle raison?
Le Président (M.
Bernier) : M. Sabia.
M. Sabia (Michael) : Vous parlez encore une fois de
M. Gantcheff? Donc, je m'excuse,
parce que c'est une question très
détaillée, donc peut-être nous aurons besoin d'un peu de temps juste pour
vérifier des choses. Et ensuite nous allons vous revenir avec une réponse. Nous
allons vous appeler demain.
Le
Président (M. Bernier) : Non, ce qu'on souhaiterait, c'est que
vous nous écriviez et que vous passiez par le secrétariat pour redonner...
au niveau des députés, que tout le monde puisse avoir copie.
M.
Bonnardel :
J'ai comme deux questions. J'en ai une troisième.
Le Président (M.
Bernier) : Oui, allez-y. Allez-y, M. le député.
M. Sabia
(Michael) : Donnez-moi votre question sur le fameux M. Gantcheff.
Le
Président (M. Bernier) : Non, regardez, vous aurez l'occasion, en dehors du temps, de lui dicter votre question.
Allez-y avec votre question au niveau des...
M.
Bonnardel : Bien,
est-ce que la caisse connaissait les baux que Gantcheff a signés avec le gouvernement? Exemple, au 500,
René-Lévesque, on sait très bien que M. Gantcheff a fait payer énormément
de rénovations — puis
je vais rester court, là, succinct — par
le gouvernement. Il y a eu un scandale, vous le savez, avec la SIQ.
Est-ce que vous étiez au courant avant
de signer... Exemple, une hypothèque,
le 16 décembre 2013, de 110 millions qui a été signée pour le 500,
René-Lévesque, la caisse a fait...
M. Sabia
(Michael) : L'adresse, c'est quoi?
M.
Bonnardel : C'est le 500, René-Lévesque à Montréal. Est-ce
que la caisse était au courant, donc, de ces baux que Gantcheff avait
signés avec le gouvernement?
M. Sabia (Michael) : Deuxième
question?
M.
Bonnardel : Deuxième question. Pourquoi vous avez décidé de ne
plus faire affaire avec lui? Est-ce que vous confirmez aussi, troisième question, qu'il y a 370 millions qui ont
été investis, la caisse, avec M. Gantcheff? Et est-ce que vous
confirmez aussi que ces trois prêts, ce financement immobilier, là, celui à Outremont,
le 500, Willowdale, le 500, Grande Allée,
Québec... le 50, Willowdale, pardon, et le 500, René-Lévesque, Montréal...
Est-ce que vous confirmez que ces trois prêts immobiliers sont encore
actifs avec la caisse? Il me reste cinq minutes, je crois.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. C'est ça.
M.
Bonnardel :
Cinq minutes. La cimenterie de Port-Daniel, le projet a été lancé, ça devait coûter 1,1 milliard...
Une voix : ...
M.
Bonnardel : Oui,
quand même, je ne voulais pas le laisser seul.
M. Sabia (Michael) : Notre expert de
béton arrive.
M.
Bonnardel : Oui. Le
projet a été lancé, il devait coûter 1,1 milliard. Le gouvernement a mis
250 millions, Investissement Québec a mis 100 millions, la caisse a mis 100 millions. Il y a eu un syndicat bancaire qui a été piloté par
la Banque Nationale. La facture a grimpé. Deux ans plus tard, on est rendus à 1 550 000 000 $.
Vous me corrigerez. La caisse a bonifié son
montant de 100 à 125 et BlackRock est arrivée aussi. Est-ce que
vous pouvez me donner, M. Dubé, le pourcentage
que ces... donc le pourcentage qui équivaut, donc, à la prise de participation que la caisse a présentement,
le gouvernement, BlackRock, et tout ça, parce que
c'est un peu difficile à évaluer nous-mêmes, là? Donc, avec les montants
additionnels qui ont été ajoutés, est-ce que
vous êtes capables de nous partager ça et nous expliquer un peu quel est le
pourcentage, là, le capital que ces sociétés possèdent maintenant dans la
cimenterie?
Le Président (M. Bernier) :
M. Dubé, votre titre, s'il vous plaît, juste pour fins d'enregistrement.
M. Dubé (Christian) : Christian
Dubé.
Le Président (M. Bernier) : Oui, ça
va, mais votre titre?
M. Dubé (Christian) : Premier vice-président
pour le Québec...
Le Président (M. Bernier) : Merci.
Allez-y.
M. Dubé (Christian) : ...et dans le
ciment. Et voilà.
M.
Bonnardel : ...le
niveau de participation, pour être plus clair, là.
M. Dubé
(Christian) : Oui. Alors, en
fait, pour garder ça très simple, là, depuis la... Il y a
eu une prise de contrôle par la Caisse de dépôt en mai dernier, donc il y a exactement un an, où avant on agissait comme actionnaire
minoritaire dans le projet, et, en
raison du dépassement des coûts en mai 2016, nous avons pris le contrôle du
projet. Donc, maintenant, la caisse, depuis sa participation
additionnelle, a maintenant plus de 50 % du projet. Numéro un.
Numéro deux.
Les montants auxquels vous faites référence, que ça soit de BlackRock ou de...
particulièrement de ces gens-là, sont venus en prêts et ne changent pas
le pourcentage, deuxièmement.
Troisièmement, je vous dirais que la bonne nouvelle, puis il y en a beaucoup, comparé à la situation où on était en situation minoritaire il y a un an, et où le
projet était arrêté, puis qu'il manquait de financement, puis qu'il y avait eu
un dépassement des coûts, depuis ce
moment-là, comme promis, nous avons livré la marchandise, c'est-à-dire que nous
avons respecté et les délais et les coûts de construction, qui étaient
les coûts que nous avons réévalués, à ce moment-là, en mai 2016, de l'ordre de
1 450 000 000 $; pas 1 550 000 000 $,
1 450 000 000 $.
Alors,
aujourd'hui, ce que je peux vous dire, en date du 2 mai, c'est que non seulement
les coûts de construction sont respectés, mais les délais de construction
ont été respectés, l'usine est construite à 100 %. Alors donc, pour répondre à votre question, c'est un projet maintenant qui est sous contrôle. La
caisse a le contrôle du projet et la gestion du projet, et nous sommes
maintenant en phase mise en service, qu'on appelle. Donc, la construction est
terminée. Il y a environ huit pièces d'équipement importantes, et c'est ce que
nous allons livrer, comme promis, dans le printemps.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député.
M.
Bonnardel :
Rapidement, il me reste peut-être deux, trois minutes, là. Investissement
Québec, le 100 millions qui a
été investi, est-ce qu'on l'a dévalué? Est-ce qu'Investissement Québec a une participation,
un niveau de participation x, là, dans le portefeuille ou dans le...
M. Dubé
(Christian) : C'est une
bonne question, M. Bonnardel. Il
y a deux... La participation d'Investissement
Québec se retrouve aussi... autant en actions qu'en prêts. Alors, Investissement
Québec, sur la partie capital-actions, a décidé de ne pas réinvestir. Donc, son
pourcentage, qui était initialement
de l'ordre d'à peu près... je vous dirais à peu près parce que je ne me
souviens pas exactement des chiffres, mais a été dilué parce que, lorsque nous,
on a remis du capital, Investissement
Québec a décidé de ne pas mettre de capital-actions. Ce qu'Investissement
Québec a continué de faire, c'est de débourser la partie de son prêt qui
n'était pas déboursée depuis que nous avons pris le contrôle.
M.
Bonnardel : Vous m'avez dit tantôt, M. Dubé, là :
La caisse a plus de 50 %. Quels sont
les niveaux de participation
des autres acteurs?
M.
Dubé (Christian) : Je
pourrais vous les donner en détail, mais je ne peux pas vous... Parce que
je ne voudrais vous donner un
pourcentage, pour Investissement
Québec, que je ne connais pas par
coeur. Ce que je trouvais important de
vous dire, puis je peux vous fournir
ces chiffres-là parce qu'on les a, mais c'était le... Le point qui était...
Pour nous, c'était de prendre le
contrôle du projet puis s'assurer qu'on était en mesure de faire les
changements qui étaient nécessaires soit dans la gestion du projet, soit
dans la partie de la construction.
M.
Bonnardel : Oui. Est-ce que l'investissement aussi de
Beaudier, là, ceux qui étaient le... initial, est-ce qu'il a été dilué,
celui-là aussi?
M. Dubé
(Christian) : Tout à fait.
M.
Bonnardel :
Tout à fait, là.
M.
Dubé (Christian) : Tout à fait parce qu'il y a des...
Lorsque... L'essentiel du montant additionnel qui a été mis a été mis soit par voie de prêt par BlackRock
ou en capital-actions par nous, puis, à ce moment-là, la famille n'a pas
suivi dans le même ordre. Donc, eux aussi ont été dilués du pourcentage qu'ils
avaient.
M.
Bonnardel :
Donc, vous pourrez nous répondre pour les niveaux de participation plus
spécifiquement?
M. Dubé
(Christian) : Oui, vous aurez le détail.
Le Président (M.
Bernier) : En le faisant parvenir ici, au secrétariat de la
commission, pour qu'on puisse le distribuer, M. Dubé.
M. Dubé
(Christian) : Avec plaisir.
• (18 h 10) •
M.
Bonnardel : Il y a
un D.G. qui a quitté, qui a été congédié quand vous vous êtes dit, là : Il
faut prendre acte de tout ça. Là,
vous avez nommé des représentants de la caisse sur le C.A. qui sont toujours
actifs. Qui sont ces personnes?
M.
Dubé (Christian) : Moi-même,
personnellement. Justin Méthot. On a
Marc Baillargeon. Il y a quatre personnes qui sont des représentants de
la caisse, qui sont très impliqués dans le...
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Sabia. Merci aux gens
de la Caisse de dépôt qui ont participé. Merci, M. le ministre.
Donc, compte tenu de
l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.
(Suspension de la séance à
18 h 11)
(Reprise à 19 h 32)
Le Président (M.
Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons reprendre nos
travaux.
Je
vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude du volet
Finances des crédits budgétaires
du portefeuille Finances pour l'exercice financier 2017‑2018.
Puisque nous avons un
peu de retard à rattraper, je vous demande le consentement pour terminer à
21 h 40. Consentement? Vous n'avez pas le choix. Si vous n'êtes pas
consentants, on va se... Vous acceptez volontairement?
Alors,
bienvenue aux parlementaires qui vont travailler avec nous ce soir. Bienvenue,
M. le ministre. Bienvenue aux gens de l'Autorité des
marchés financiers. M. Louis
Morisset, bienvenue. Donc, consentement que M. Louis Morisset puisse prendre la
parole occasionnellement au lieu d'avoir à vous le redemander? Consentement? Consentement. Merci
beaucoup.
Donc, il reste maintenant
du temps du côté de la deuxième opposition. Donc, nous allons commencer avec M.
le député de Granby. Il vous reste environ 13 minutes.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. Alors, salutations
encore aux collègues ministériels, mon collègue de l'opposition
officielle, M. le ministre, M. Morisset. Bienvenue à tous ceux qui
l'accompagnent aussi.
Question assez ouverte pour débuter nos travaux.
Dans le budget 2016‑2017, le gouvernement avait annoncé son intention de reformer, là, la distribution des produits et services
financiers, la LDPSF, et il n'y a pas de projet de loi qui a été encore déposé.
On a rencontré beaucoup, beaucoup d'organismes qui nous posent des questions, qui
croient que tout cela va être mis en place, croyaient que tout cela
allait être mis en place plus rapidement que prévu. Peut-être, M. le ministre, nous dire où on en est là-dessus? Est-ce qu'il y a une loi qui sera déposée d'ici
la fin de la session? Est-ce que vous prévoyez amener ça d'ici à
l'automne? Où on en est là-dessus? Parce que vous le savez mieux que moi, là,
il y a pas mal de monde qui attend ou qui se questionne encore.
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre.
M.
Leitão : En effet, c'est un projet de loi très important. Nous, on s'était engagés à l'automne à déposer
ce projet de loi
avant la fin de l'année, donc décembre 2016. Cependant, pour plusieurs
raisons, ça n'a pas été possible. Soyons clairs aussi, une des raisons
qui a contribué à ça, c'était la grève des juristes. Il ne faut pas se le
cacher, c'était un des facteurs, pas le
seul, mais un des facteurs. Maintenant, nous, notre objectif est de déposer ce projet de loi avant la fin de cette session, donc d'ici le 16 juin.
Le Président (M. Bernier) : Merci. M.
le député de Granby.
M.
Bonnardel : Donc, vous ne prévoyez pas l'adopter avant la fin
de cette session. Si vous me dites ça, c'est qu'on va aller à la limite, puis tout dépend des
consultations, j'imagine, que vous souhaiterez avoir, et tout ça. Le calendrier
que vous avez là-dessus, c'est...
M.
Leitão : Une fois que cette
loi sera déposée, ça va dépendre en bonne partie des partis d'opposition.
S'il y a la collaboration de tout
le monde, ça pourrait se faire rapidement.
Mais soyons clairs aussi, là, c'est un projet
de loi qui va contenir plusieurs
centaines d'articles. Donc, on comprend que ce n'est pas quelque chose qui va
pouvoir se faire en quelques jours, là. Il faut prendre le temps de bien
absorber tout ça.
M.
Bonnardel : Certaines rumeurs nous disent qu'il y aurait
intégration de la Chambre de la sécurité financière et la Chambre de
l'assurance de dommages, qui seraient intégrées à l'AMF. Est-ce que c'est ce
que vous souhaitez?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M.
Leitão : C'est quelque chose qu'on considère, oui, parce que notre objectif est toujours
de rendre l'Autorité des
marchés financiers la plus efficace possible dans son travail de régulateur de
marché financier, et donc ce serait souhaitable
que cela se fasse aussi. On ne sait pas encore... C'est pour ça qu'on n'a pas
encore déposé le projet de loi. Ça s'en vient, mais c'est souhaitable que
ça se fasse.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Bonnardel : Si je me fie à votre faciès, vous souhaitez que
ça arrive, ou vous pensez que ça va arriver, ou c'est déjà écrit dans
une loi. Non?
M.
Leitão : Non, non. Justement, pour renforcer le rôle de l'AMF, ce serait
souhaitable que cela se fasse, mais le projet de loi n'a pas encore été déposé.
Donc, il n'est pas encore complètement finalisé, mais ça va se faire dans les
semaines qui viennent, cette finalisation-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M.
Bonnardel :
O.K. Je vais... Une autre question: Quels seraient les irritants de la
situation actuelle pour l'AMF, selon vous? Avant d'aller à
M. Morisset, par la suite.
M. Leitão : Dans quel contexte?
M.
Bonnardel :
Bien, les irritants de savoir présentement que la Chambre de la sécurité
financière est séparée, la Chambre de
l'assurance de dommages est séparée, qu'elles ne soient pas intégrées à l'AMF.
Il y a certainement des irritants qui vous amènent à penser que ce
serait bien que cette intégration se fasse.
M.
Leitão : Oui, c'est dans le texte, de rendre, donc, le travail de
l'AMF plus cohérent et plus facile, donc, dans son rôle de régulateur.
Je pense que ça serait souhaitable que cela se fasse. Nous nous sommes donné,
au Québec, cet organisme, l'AMF, qui est
assez unique en Amérique du Nord, donc un régulateur intégré des marchés
financiers. Et donc, pour que ce
régulateur-là puisse mieux accomplir son travail, pas qu'il ne le fait pas bien
maintenant, il le fait déjà très bien,
pour que cela puisse être encore meilleur, ce serait utile qu'il puisse avoir
la responsabilité de tous les marchés financiers.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Leitão : Peut-être,
M. Morisset pourrait...
M.
Bonnardel :
Oui, bien, écoutez, j'ai une sous-question que vous devinez un peu, là. Est-ce
que l'AMF a déjà étudié ou regardé
des scénarios d'intégration présentement? J'imagine que vous avez été en
contact. Pour vous, ce n'est sûrement pas une surprise, là.
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset.
M. Morisset (Louis) : Évidemment, c'est des choses dont on entend parler également, puis,
évidemment, oui, si le gouvernement
voulait nous confier davantage de responsabilités, il faut y réfléchir, il faut
s'y préparer pour que cette transition-là,
si elle se fait, se fasse de manière la plus efficace et harmonieuse possible.
La CSF agit à l'égard évidemment de la déontologie des représentants.
Nous agissons à l'égard des cabinets. Il y a des synergies qui sont possibles.
Les consommateurs doivent, dans certains
cas, s'adresser à l'autorité, dans d'autres cas, s'adresser à la CSF. Donc, on
peut assurément voir qu'il y aurait
synergie possible dans l'intérêt de protéger adéquatement le consommateur.
Donc, oui, on envisage et on réfléchit si c'était l'orientation que
prendra le gouvernement.
M.
Bonnardel : Avez-vous déjà étudié des scénarios? Exemple, un
certain nombre d'employés x, est-ce que vous seriez capables d'intégrer tout le monde dans cette entité forte que
serait l'AMF ou c'est-u... Êtes-vous déjà là? Avez-vous poussé plus loin
la...
M. Morisset (Louis) : On n'est pas là. Je pense qu'on a démontré, au cours des dernières
années, notre capacité à prendre
rapidement à bras-le-corps de nouveaux mandats que le gouvernement voulait nous
confier, que ce soit au niveau des contrats publics ou au niveau des
entreprises de services monétaires. Donc, il y a un processus évidemment,
au niveau des parlementaires, qui va avoir
cours, mais, si, au final, c'était l'orientation, rapidement, l'autorité sera
en mesure de développer le scénario approprié.
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M.
Bonnardel : Est-ce qu'il y a une question d'économie
là-dedans, M. le ministre? Spécifiquement, là, quels sont les avantages précis, pour vous, qu'une
fusion pourrait... ou une intégration réussie de ces entités-là? Quels sont les
avantages de faire ça pour vous?
• (19 h 40) •
M.
Leitão : Écoutez, le projet de loi financier qu'on est en train de
finaliser, c'est très vaste, hein, et ça comprend beaucoup d'éléments. C'est quelque chose qui n'a
pas été fait au Québec depuis une trentaine d'années, même. Donc, il y a lieu de moderniser toute cette législation là.
C'est pour ça que ça prend du temps, c'est pour ça qu'on n'a pas encore déposé le projet de loi, mais on y est très proche.
Et ça va se faire dans le... L'objectif,
c'est de moderniser ce code réglementaire. Et en même temps le moderniser pourquoi? Pour
que l'industrie puisse mieux fonctionner, pour qu'elle puisse s'adapter aussi aux nouvelles technologies qu'il y a, et tout ça dans l'intérêt public, donc, de continuer d'assurer la protection du public. Donc, d'un point de vue économique, c'est très important qu'on puisse avancer
et qu'on puisse déposer ce projet de loi et éventuellement l'adopter, pour qu'on puisse continuer à avoir,
au Québec, des marchés financiers qui fonctionnent
bien et continuer à assurer la protection du public. Donc, ça va au-delà des
deux chambres, c'est beaucoup plus vaste que ça.
M.
Bonnardel :
Oui, allez-y.
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset, vous vouliez ajouter?
M. Morisset (Louis) : Bien, peut-être pour poursuivre, évidemment, sur ce propos du ministre,
il y a un élément important. Certaines lois au Québec, effectivement,
n'ont pas été revues en profondeur, la loi sur la distribution, là, depuis 1999. Évidemment, le monde
financier, les marchés financiers ont évolué. La révision en profondeur de ces
lois-là est importante à différents égards, mais un égard important est
aussi qu'éventuellement, pas plus tard que l'année prochaine, l'autorité va à nouveau devoir se prêter au jeu d'une
évaluation de son encadrement du secteur financier par le Fonds monétaire international. Le Canada, à
tous les cinq ans, soumet, finalement, ses régulateurs financiers à cette
évaluation du FMI, et cette évaluation-là se fait notamment sur la base de
principes d'encadrement internationaux.
Donc,
l'environnement... pas réglementaire, pardon, législatif au Québec se doit
d'évoluer et idéalement, évidemment,
avant ce passage du FMI. Vous avez parlé, évidemment, de l'aspect lié à la
Chambre de la sécurité financière, mais,
si on regarde de façon plus globale, tout l'encadrement du Mouvement Desjardins
comme entité systémique ici, au Québec,
que l'autorité puisse avoir les pouvoirs de résolution, d'autorité de
résolution, s'il fallait éventuellement résoudre le Mouvement Desjardins, c'est des pouvoirs dont nous
ne disposons pas aujourd'hui et, évidemment, dont nous devrons disposer
idéalement avant la venue du FMI.
Alors,
je pense que l'environnement législatif plus global doit évoluer. Puis
évidemment, comme... nous allons accueillir ce projet de loi lorsqu'il
sera déposé.
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M.
Bonnardel :
Donc, vous oseriez affirmer, même si les gens, là, nécessairement, là, du CSF,
là, la Chambre de la sécurité
financière, l'assurance-dommages qui nous écoutent... vous oseriez affirmer que
ce serait bon pour vous d'être capable d'intégrer tout le monde sous une même entité? Vous ne
m'avez pas répondu spécifiquement, M. le ministre, à savoir est-ce qu'il y a des économies monétaires
à faire avec ça. Peut-être, la question, vous allez la trouver peut-être
banale, mais, au-delà d'unifier tout le
monde sous le même chapeau, est-ce qu'il y a, monétairement, pour le
gouvernement, un avantage x
au-delà de dire : Bien, c'est une entité qui sera forte, qui sera
au-dessus de tout puis qui aura unifié tout le monde? Parce que j'imagine que ceux qui nous écoutent, s'il y a des gens
de la Chambre de la sécurité financière, plus l'assurance de dommages, ils se disent : Bon, O.K., le ministre, il
pense déjà... J'imagine que... Les rumeurs, vous le savez très bien, ça circule à gauche et à droite. Est-ce
qu'on rassure ces gens? Est-ce qu'on leur dit que, bien, écoutez, là, tout
sera sous le même chapeau, les économies,
pour nous, ce n'est pas ça qui est important, c'est d'avoir tout ça sous le
même chapeau puis d'être capables
d'avoir une AMF qui sera plus que forte, mais qui sera un joueur actif, un
joueur fort dans le Canada? Est-ce que c'est ça qui est la principale
raison d'en arriver peut-être à ça?
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre.
M.
Leitão : Tout à fait. L'objectif, ce n'est pas de procéder à tout ce
chambardement pour aller économiser x dollars en intégrant un organisme dans un autre organisme.
Ce n'est pas ça, l'objectif. L'objectif, c'est de mieux encadrer, de moderniser le cadre réglementaire, de mieux
encadrer l'industrie et de nous assurer que l'Autorité des marchés financiers,
en tant que régulateur intégré, puisse avoir
toute la latitude nécessaire pour continuer et même améliorer son action de
régulateur, non seulement parce que c'est
utile que cela se fasse, mais ce que M. Morisset a mentionné, c'est extrêmement
important, l'évaluation du Fonds monétaire
international. Comme vous le savez très bien, nous avons encore un enjeu avec
le gouvernement fédéral canadien et certaines des autres provinces voisines qui
veulent changer la réglementation, la régulation
du commerce des valeurs mobilières. Donc, c'est encore plus nécessaire pour
nous de nous assurer que l'AMF
peut continuer de fonctionner de la manière la plus efficace possible.
Le Président (M. Bernier) :
30 secondes.
M.
Bonnardel : Oui. Je prendrais une dernière question...
Bien, 30 secondes, est-ce que je peux le prendre sur l'autre bloc?
Le Président (M. Bernier) : Oui,
oui.
M.
Bonnardel : Bien,
oui, sur l'autre bloc tantôt. Pourquoi pas?
Le Président (M. Bernier) : C'est à
votre goût.
M.
Bonnardel : Parce
que j'ai d'autre chose à commencer, puis là je ne voudrais pas perdre le fil.
On va commencer tantôt.
Le
Président (M. Bernier) :
Donc, c'est bien. Nous allons passer du côté gouvernemental avec M. le député de Trois-Rivières.
M.
Girard : Merci beaucoup. Donc, salutation à mes collègues, M. le
ministre, les gens qui sont présents
avec nous aujourd'hui, l'Autorité des marchés financiers.
Vous savez,
j'ai travaillé pendant plusieurs années dans des institutions financières. J'ai
été planificateur financier, j'ai été
dans la gestion des investissements dans plusieurs institutions financières. Je
veux continuer un petit peu sur ce qui s'est
dit d'entrée de jeu par mon collègue. Je veux faire une petite nomenclature de
ce qui existe parce que, quand on est planificateur
financier ou qu'on travaille dans une institution financière, on a besoin des
permis d'opération. On a des UFC,
donc des unités de formation continue, à faire au fil des années. On doit se
tenir à jour, et tout, et on a différents organismes qui nous donnent
soit des formations ou qui nous donnent des permis, etc.
Donc, on peut
travailler, entre autres, pour différents permis avec l'Ordre des
administrateurs agréés du Québec, l'Autorité
des marchés financiers, bien sûr, le Fonds canadien de protection des
épargnants, le FCPE, l'Institut des fonds d'investissement du Canada, l'IFIC, qui nous donne des formations,
l'Institut québécois de planification financière, l'IQPF, la Chambre de
la sécurité financière, l'Association canadienne des courtiers en valeurs
mobilières, l'ACCOVAM, l'Inspecteur général
des institutions financières, l'IGIF, l'Institut canadien des valeurs
mobilières, l'ICVM, la Commission des
valeurs mobilières de l'Ontario si on traite en Ontario, parce que, si on
travaille pour une banque canadienne, on risque d'avoir à travailler en
Ontario, au Québec, donc on doit avoir les deux licences, bon, etc., j'en saute
quelques-unes.
Bref, pour
des gens, vous parliez de Desjardins tout à l'heure... des gens qui sont dans
le domaine financier, qui ont à travailler
au quotidien avec des produits financiers, si on a à offrir des... — j'allais dire des «stocks» — des actions, si on a à offrir des
fonds communs de placement, si par le fait même on fait de l'assurance de
personnes, si on est dans un cabinet qui
offre également de l'assurance de dommages, si on veut faire des fonds négociés
en bourse, bref, ça prend une liste
de licences, et, pour garder les licences en fonction, on doit faire des unités
de formation continue année après année avec différents organismes qui vont
nous donner nos unités de formation continue, et, dans bien des cas, on a le
permis qui est délivré par une institution
et on a nos UFC qui sont d'une autre institution, on doit garder les registres,
les «records» de tout ça. Pour
quelqu'un qui travaille au niveau de la finance, c'est beaucoup de temps passé
dans une année juste à gérer les permis, les unités de formation
continue, etc.
Donc, je veux vous
entendre sur votre vision de tout ça. Et, sans nécessairement savoir quel est
l'organisme, est-ce qu'il y a des organismes...
qu'il y en a trop? Est-ce qu'on pourrait travailler mieux? Est-ce qu'on
pourrait travailler différemment?
Quel est l'organisme qui devrait gérer le tout? Comment on pourrait améliorer...
Moi, ce que je pense, c'est dans un
but, un, de simplification, de simplification pour les professionnels du
domaine de la finance. J'ai travaillé pendant
quelques années, comme ministre, au niveau de l'allègement réglementaire. On
veut alléger la réglementation.
Par contre,
de l'autre côté, il y a toujours deux côtés à une médaille, on simplifie, mais
la sécurité du public est importante,
de s'assurer que les gens ont les compétences, que les gens ont les bonnes
licences pour offrir les différents produits,
et qu'un consommateur qui a une problématique avec un conseiller financier,
avec un représentant d'assurance de
dommages ou d'assurance de personnes... à quel endroit on appelle. Où on
s'informe si on croit avoir été lésé pour une police d'assurance, pour
un contrat de fonds communs de placement, pour une répartition d'actifs dans
notre portefeuille? On croit que c'est trop
agressif par rapport à ce qu'on a, on a perdu une portion de notre portefeuille
et, bon, on veut savoir où porter
plainte ou à quel endroit s'adresser pour avoir des informations, versus toute
la réglementation et le suivi des professionnels. Une chatte en perdrait
ses chats à savoir où on s'en va dans tout ça.
• (19 h 50) •
Pour un
professionnel, ce n'est pas toujours évident de s'y retrouver et de faire la
gestion des différents permis et des différentes formations disponibles,
et, pour le public, c'est également extrêmement compliqué de savoir à qui s'adresser et comment gérer tout ça. On évolue
avec le temps, le système avance. On voit... Dans notre technologie, on est rendus tous avec nos appareils électroniques.
On est rendus en 2017. Est-ce qu'il n'y a pas lieu au Québec de faire un pas de recul et dire où est-ce que l'on est
rendus, dans l'offre de produits et services financiers, en termes de
réglementation au niveau de la vente et de l'offre de produits et
services, où on est rendus également en termes de protection de nos épargnants,
de protection de nos gens qui sont assurés dans le marché?
Et comment
vous voyez l'avenir du Québec? Comment on pourrait simplifier en regardant
toujours les deux côtés, faciliter, oui, la gestion pour les
professionnels tout en s'assurant... Parce qu'on sait que... On a vu dans le
passé des poursuites, on a vu des fraudes.
On a vu des gens qui se sont affichés dans différents titres, que ce soit
courtier, planificateur financier,
sans vraiment l'être, on a vu des gens qui ont abusé. On pense à l'affaire
Norbourg, à l'époque, et tout ça. Donc, il faut s'assurer d'avoir les bonnes personnes au bon endroit. On doit
vraiment s'assurer que le public est bien protégé. De plus en plus, les gens ont des actifs à investir.
Les gens ne sont pas nécessairement connaissants du marché, vont vraiment
se baser sur ce qui leur est dit par leur conseiller, par leur institution
financière.
Donc,
aujourd'hui, en 2017, l'AMF voit ça comment, la réglementation et la protection
du public? Et comment on pourrait mieux amalgamer tous ces organismes-là
au bénéfice... oui, peut-être une économie de coûts, comme le disait mon collègue, mais, principalement, une
économie en termes de temps, de facilité de gestion pour les professionnels,
et une facilité de recours pour les
Québécois qui ont à faire des recours, qui veulent être protégés, qui ne
veulent pas être lésés dans leurs
droits tant au niveau de l'assurance qu'au niveau du placement? C'est large
comme question, mais on va pouvoir en discuter, là, voir où on s'en va
avec ça.
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre? M. Morisset.
M.
Morisset (Louis) : Merci
pour votre question. Bien, d'abord, peut-être, commençons par le début.
L'Autorité des marchés financiers se
veut un régulateur intégré du secteur financier. Je pense qu'au Québec, lorsque
cinq organismes antérieurs, incluant
évidemment la Commission des valeurs mobilières, le Bureau des services
financiers et d'autres, ont été
fusionnés en 2004 pour former l'autorité, la volonté à l'époque, c'était de
créer ce régulateur intégré qui finalement surveille et encadre l'ensemble du secteur financier. Il en est résulté
une intégration, au départ, imparfaite, avec évidemment d'autres organismes dont vous avez mentionné, qui
n'ont pas fait partie, si on veut, de l'idée de créer ce guichet unique ici, au Québec. Maintenant, il y a plusieurs
associations auxquelles vous avez fait référence également qui sont aussi des
associations de l'industrie. Donc, il n'est
pas nécessairement pensable de voir disparaître ces associations-là parce
qu'elles ont évidemment un rôle qui est très différent de celui d'un
rôle de régulateur.
Mais peut-être pour reprendre certains des
thèmes que vous avez abordés, le rôle de l'autorité, il est vaste. Évidemment, il vise chacune des sphères du secteur
financier québécois. Mais nous avons un rôle en éducation. Vous avez parlé aussi de cette réalité ici, au Québec,
et ailleurs dans le monde, où la littératie financière n'est pas à point. Donc,
l'autorité joue un rôle important en matière
d'éducation. Nous avons, à titre d'exemple, dans la dernière année, déployé
une vaste campagne de sensibilisation
multiplateforme dans les journaux, à la radio, notamment, en anglais et en
français, pour rejoindre le plus de
consommateurs de produits et services financiers sur des thématiques évidemment
qui sont des thématiques qui visent
tout le monde. Nous sommes tous des consommateurs de produits et services
financiers. Nous avons aussi, au-delà
de l'éducation, évidemment, des services d'assistance, un centre d'information
évidemment, des équipes de traitement des plaintes, un programme
d'indemnisation.
Bref, on a un
rôle qui est multidisciplinaire, et, oui, je pense que nous sommes certainement
tête de file au Canada parmi le
groupe de régulateurs financiers. D'ailleurs, c'est pour ça aussi qu'on se
démarque, je crois, sur la scène nationale, dans différents
regroupements de régulateurs, que ce soit en valeurs mobilières ou en
assurance, auprès de nos pairs canadiens.
Alors, le rôle de
l'autorité, il est vaste. Il pourrait être plus vaste si l'intention du
gouvernement... sans jamais compromettre la
protection du consommateur. Ça, c'est l'élément central. Notre rôle, aujourd'hui,
c'est d'assurer cette protection du
consommateur, c'est de favoriser aussi le bon fonctionnement des marchés, c'est
une mission qui n'est pas toujours
simple à arbitrer, mais sans jamais
compromettre la protection du consommateur. Si le gouvernement voulait simplifier,
nous pourrions assurément prendre charge d'autres activités, qui serait, je
pense, aussi, évidemment, dans l'intérêt du public et de l'industrie, parce qu'il y a une
certaine confusion des rôles et des genres. Il y a des dédoublements qui ne
sont pas nécessairement positifs pour les intervenants du secteur financier
lorsque deux régulateurs, à des moments différents,
doivent débarquer dans leurs rôles qui diffèrent l'un, l'autre. Alors, encore
une fois, je pense que, si c'est la volonté
du gouvernement de compléter ce modèle intégré, ce guichet unique, encore une
fois, je réitère que l'autorité sera là pour servir le gouvernement.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député.
M. Girard :
Merci. Le principe de mon intervention, ce n'est vraiment pas de mettre en
boîte l'autorité ou de mettre en doute certains organismes qui existent,
mais mon objectif est vraiment de simplifier. Et force est de constater, statistiquement, au Québec, le Québécois moyen, la
moyenne si on regarde au Québec, si on prend les gens qui vont avoir fait dans leur vie une planification financière,
une planification de retraite ou une planification successorale, la quantité
de Québécois, au prorata de la population,
qui font ce genre de planification est plus faible que dans d'autres
juridictions. On regarde dans
d'autres provinces canadiennes ou on regarde ailleurs dans le monde et, selon
les dernières statistiques que j'ai
vues, on est moins portés à faire des planifications. On est également des
gens, au Québec, qui épargnent un peu moins en fonction de nos revenus
par rapport à d'autres juridictions.
Est-ce
que ce genre, je dirais, d'ambiguïté ou de difficulté à s'y retrouver... Et
chacun parle de son secteur, alors que,
quand on pense à la planification financière, quand on fait une planification
financière complète... Lorsqu'on prend l'IQPF,
qui est un des organismes que j'ai mentionnés tout à l'heure, et qu'on parle de
planification financière complète, on
parle de planification de retraite, on parle de gestion de crédit, on parle de
planification successorale également; si on a une entreprise, gel successoral, etc. C'est une planification qui
englobe plusieurs choses. On parle d'assurance, assurances générales, on parle d'assurance vie. On parle des
enfants, de voir comment on va léguer une succession aux enfants, aux
petits-enfants, un régime d'épargne-études. Bref, une planification financière
complète englobe beaucoup de secteurs financiers,
et qui sont sous la juridiction de plusieurs organismes, d'où... Moi, je crois,
c'est une problématique ou c'est une
complexité qui fait en sorte qu'on s'y perd dans tout ça. Et, au Québec, on a
tendance à avoir une personne pour l'assurance générale, une personne pour l'assurance vie, une personne pour le
crédit, une personne pour certains placements, un pour nos fonds de
placement, un pour nos actions. Bref, on travaille avec plusieurs individus, et
c'est difficile de mettre ça ensemble et d'avoir une planification financière
complète pour les Québécois.
Donc, moi, mon
objectif, c'est vraiment d'améliorer la prestation de services, d'améliorer la
protection des Québécois face aux services
financiers parce qu'on sait que ce n'est pas évident pour le Québécois de
dire : Bon, est-ce qu'on est
trop assurés ou est-ce qu'on ne l'est pas assez? Est-ce que je mets
suffisamment d'argent de côté pour la retraite? Est-ce que j'en mets trop ou pas assez pour les enfants, etc.? Mon
conjoint ou ma conjointe décède demain matin, il se passe quoi? Il se passe quoi pour mes enfants? On
est mariés, on n'est pas mariés... Une autre problématique que l'on vit.
Les gens pensent, parce qu'ils sont en couple depuis 10 ans, 15 ans,
qu'ils ont les mêmes droits que des gens mariés. Donc, il y a plusieurs choses. Moi, j'en ai vu, des cas dramatiques de
successions où madame vivait avec son conjoint depuis 30 ans et n'a rien eu parce que c'est les parents ou les
enfants du monsieur qui ont hérité, ou de la madame, ou vice versa,
parce que les gens avaient mal planifié, ils n'avaient pas fait de testament,
etc.
• (20 heures) •
Donc,
moi, ce que je veux, c'est d'être capable d'améliorer la planification des gens
au Québec, d'être sûr qu'on est en
voiture, qu'on est capable de bien orienter nos gens sur le terrain, que notre
population puisse mieux planifier leur futur,
leur avenir dans tous les sens, dans toutes les sphères d'activité économique
et financière qui regroupent la famille, qui regroupent les placements,
la retraite, la protection, etc. Et c'est de là que je me demande comment on
doit faire, comme société, comme
gouvernement. Par où on commence? À
quoi on doit s'attaquer pour s'assurer que la réglementation soit
vraiment bien faite, que nos gens soient bien protégés et qu'on soit capable
facilement, rapidement de bien les orienter,
que nos gens au Québec n'aient pas besoin de frapper à 12 portes différentes
quand vient le temps de planifier leur avenir financier, économique, et
d'être capable d'avoir une façon de...
Et
je crois que ça commence par la réglementation. C'est certain que ce n'est pas
demain matin qu'on va pouvoir... On
sait qu'il y a du côté légal, il y a du côté financier, il y a plein de choses.
Au niveau de l'assurance, c'est différent. Ce n'est pas demain matin qu'on va pouvoir mettre tout ça ensemble. On ne
voit pas beaucoup de cabinets intégrés où on peut trouver de l'assurance
générale, l'assurance vie, des placements, qu'on peut planifier la succession.
L'IQPF travaille à avoir des planifications financières complètes et intégrées,
et on sait qu'il n'y a pas beaucoup d'institutions financières qui le
font. Souvent, c'est une planification de la retraite seulement, juste
planifier la retraite, planifier les études
des enfants, mais la planification vraiment complète, surtout si on a un
entrepreneur qui a une entreprise, qu'on parle de gel successoral, de transmission de l'entreprise aux enfants et
tout, c'est vraiment complexe comme travail. Et, si on veut se créer de
la richesse, au Québec, si on veut améliorer le futur de nos jeunes, on parle
beaucoup d'équité intergénérationnelle,
c'est extrêmement important de se mettre en place des façons de procéder qui
vont nous permettre de mieux orienter
nos Québécois, peu importe que ce soit une situation relativement simple ou une
situation complexe, qu'on ait les
bons professionnels, qu'on les gère, qu'on s'assure que nos professionnels
aient les bonnes formations puis sont capables
de faire le travail, mais qu'on s'assure de bien protéger nos gens. Et de là je
me demande comment on doit faire demain matin. On procède comment pour
améliorer ça? Et est-ce que l'AMF pourrait être le maître d'oeuvre?
On
ne pourra peut-être pas tout mettre au même endroit, mais comment on peut
mieux, sans fusionner les organismes,
sans tout mettre ça ensemble, mais, je ne sais pas, avoir un maître d'oeuvre
qui va pouvoir gérer ça ou avoir un
numéro unique, un guichet unique? Est-ce que c'est faisable? Est-ce que ça peut
être l'AMF ou est-ce qu'on n'est pas mieux de travailler avec une autre
instance? Je ne veux pas créer une instance pour en créer une nouvelle, mais
qu'on pourrait mettre des instances ensemble pour essayer de trouver la façon
la plus simple de fonctionner au Québec?
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. Morisset, allez-y.
M. Morisset (Louis) : Merci. Bien, écoutez, il y a beaucoup d'éléments dans votre question.
Encore une fois, je vais essayer d'y répondre le mieux possible.
Une
des difficultés peut-être que je vois, c'est qu'on ne peut pas, je pense,
forcer nécessairement tout intervenant du secteur financier à offrir
toute la gamme des services. On parlait de planification financière, c'est
certain qu'on a certainement une gamme très étendue de services puis souvent,
bien, on a des gens qui ne sont des planificateurs financiers, d'autres vont être planificateurs financiers, vont aussi
offrir des services financiers. Il y en a qui veulent se concentrer sur
les fonds d'investissement, d'autres veulent avoir, dans leur portefeuille,
l'assurance.
Difficile,
je pense, de forcer, disons, un curriculum unique pour les services financiers
au Québec qui soit le plus étendu possible. Je ne pense pas personnellement que
ce serait nécessairement sain de le faire, mais ça me ramène au rôle que l'on peut jouer et que j'estime que
l'on joue bien, c'est en matière d'éducation financière. Puis on a, j'en ai
parlé un petit peu tout à l'heure, à l'égard
de la campagne que nous avons menée, on a développé aussi un outil, au cours
des dernières années, qu'on appelle l'indice
autorité. C'est essentiellement un sondage que l'on mène à peu près à tous
les 18 mois à l'égard de 1 000
ménages au Québec pour comprendre leurs habitudes financières, pour comprendre
s'ils adoptent des comportements
financiers avisés, pour nous aider aussi à mieux cibler, dans le fond, nos
campagnes et nos interventions en matière d'éducation et de
sensibilisation.
Notre rôle, je crois
que c'est d'amener une information neutre et objective pour permettre aux gens
de voir, comprendre leurs besoins financiers
et évidemment d'éviter aussi de se faire piéger. On sait qu'il y a
malheureusement, dans le secteur
financier, des gens, comme dans tous les autres secteurs peut-être, mais des
gens malhonnêtes. Alors, de les aiguiller à l'égard de la fraude, et
ainsi de suite.
Alors, je pense que
comme régulateur, un rôle important, c'est de continuer de marteler ces
messages-là et de s'assurer que les gens
deviennent de plus en plus vigilants financièrement. Par ailleurs, est-ce qu'on
peut contribuer à une réflexion sur
la simplification de l'environnement réglementaire? La réponse à ça, c'est oui.
Je pense qu'on a vu, au Québec et
ailleurs dans le monde, notamment depuis la crise de 2007‑2008, évidemment une
certaine inflation réglementaire pour toutes
sortes de bonnes raisons. Il ne faut pas les oublier, ces bonnes raisons là. Il
y a quand même eu plusieurs juridictions à travers le monde qui ont été sévèrement touchées par la crise, mais la
réalité, c'est que l'environnement réglementaire s'est complexifié et se complexifie, et, comme régulateur, je pense
qu'il faut s'arrêter et réfléchir à l'impact réel et positif de cette
réglementation-là.
Alors, oui, il y a
une simplification qui peut se faire et qui doit se faire, mais certainement
une simplification à laquelle nous voulons contribuer.
M. Leitão :
Peut-être j'ajouterais, si je peux...
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y, M. le ministre.
M.
Leitão : ...que même, au Québec, nous sommes quand même pas mal
quelques pas en avance sur nos voisins, parce que le modèle de l'AMF...
M. Girard :
...savoir comment on se positionne par rapport aux autres.
M.
Leitão : Parce que le modèle de l'AMF, c'est le modèle d'un régulateur
intégré. Ce n'est pas comme ça aux États-Unis,
ce n'est pas comme ça au Canada. Donc, nous sommes déjà vraiment dans cette
direction de créer ce guichet unique
et, avec la réforme des lois, parce qu'il y a plusieurs lois qui encadrent le
secteur financier, on va rendre le travail de l'AMF encore plus
efficace.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M. Girard :
Combien de temps il reste?
Le Président (M.
Bernier) : 1 min 10 s.
M.
Girard : 1 min 10 s. Donc, j'espère qu'on va pouvoir
ensemble, collectivement, avec les organismes existants, trouver les solutions puis qu'on puisse tous
ensemble se pencher. Et l'objectif n'est pas d'éliminer des organismes qui
sont là, autant de réglementation, de suivi, etc., mais de faire en sorte que
l'on puisse comme société arriver à une conclusion qui va faciliter la vie de
nos citoyens lorsque va venir le temps de trouver des services financiers de planification, etc., de bien les protéger, nos
gens, lorsqu'ils auront des services, ou ils vont avoir à faire des plaintes,
ou il y aura des problématiques, pour
qu'ils puissent s'adresser rapidement et qu'on puisse surtout bien gérer, bien
réglementer et bien avoir la mainmise
sur les différents fournisseurs de services, pour s'assurer que les services
qui sont offerts sont en lien avec
les besoins des gens, avec les besoins de la population. Et on pourra arriver
aussi sur la rémunération également des
différents conseillers, les types de rémunérations qui font en sorte que, des
fois, il y a différents produits plus que d'autres qui sont offerts. C'est une autre bataille qu'on
pourrait livrer, mais moi, mon objectif, c'est vraiment qu'on puisse simplifier
et qu'on soit à l'affût de ce que nos gens ont besoin sur le terrain. Merci, M.
le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député. Nous allons donc
passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Rousseau.
M.
Marceau : Oui, merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous,
merci d'être là. Resalut à tous les collègues.
Je
vais vous parler, profiter de votre présence, là, pour vous parler de la Loi
sur l'intégrité en matière de contrats publics,
la loi n° 1 de l'époque. Bon, vous savez que la loi a été adoptée dans la
foulée du déclenchement de la commission Charbonneau, là, pour vérifier... pour qu'enfin l'Autorité des marchés
financiers, conjointement avec l'UPAC, évalue le niveau de probité des gens qui sont appelés à faire des contrats, à
signer les contrats avec le gouvernement du Québec. À l'époque, le seuil
avait été établi à un niveau élevé, mais graduellement le seuil devait être
ramené à 100 000 $. Aujourd'hui,
il se situe à 5 millions. Il est à 5 millions, en fait, le seuil
depuis 2014, septembre 2014, mais à l'origine ça devait diminuer jusqu'à 100 000 $. Et je voudrais savoir si le
fait d'abaisser à 100 000 $, donc, ultimement, est-ce que ça
poserait problème.
Alors,
je vais commencer par une première question peut-être plus... tu sais,
peut-être qui devrait précéder celle-là. Est-ce que, d'après vous, là, dans le contexte actuel, vous êtes en
mesure de gérer plus de demandes que celles que vous avez présentement, que le volume de demandes que
vous avez, de demandes... le volume d'autorisation que vous avez à
accorder présentement? Est-ce que présentement il y a un goulot d'étranglement
ou les choses se passent bien?
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset.
M. Morisset (Louis) : Merci, M. le Président. Actuellement, les choses se passent bien.
Évidemment, nous gérons des demandes
d'autorisation et également des renouvellements. Nous avons actuellement
l'équipe en place qui est suffisante pour
gérer le flot de demandes ainsi que de renouvellements au seuil actuel. Vous
savez évidemment que c'est un travail que
l'on fait en collaboration avec l'UPAC et d'autres partenaires. Donc, nous
sommes aussi tributaires de ce travail collectif, mais actuellement, pour répondre à votre question,
au seuil actuel, il n'y a pas d'enjeu du côté de l'Autorité des marchés
financiers.
M. Leitão :
Peut-être je pourrais ajouter, M. le Président...
Le Président (M.
Bernier) : Oui, M. le ministre.
• (20 h 10) •
M.
Leitão : ...que, bon, évidemment, nous avons déposé le projet
de loi n° 108 créant l'Autorité des marchés publics, et cette fonction, qui est présentement exercée
par l'AMF, une fois que ce projet de
loi sera en vigueur, évidemment,
ça va transiter vers l'AMP, vers l'Autorité des marchés publics.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Marceau : Oui, sauf que
l'examen ne sera pas systématique avec l'AMP, alors qu'avec l'Autorité des marchés financiers,
tous les contrats sont systématiquement analysés par l'autorité et par l'UPAC.
Enfin, tous les contractants sont analysés de façon systématique, et
donc ce n'est pas la même chose.
M. Leitão :
L'AMP pourra le faire.
M. Marceau :
Pourra. Dans le cas de...
M. Leitão :
Il faudrait que la loi soit...
M.
Marceau : Dans le cas
actuel, c'est systématique. Il n'y a pas de «pouvoir», ça a un caractère systématique.
C'est différent pour cette raison-là. Et là, peut-être, question pour M. Morisset :
Si on augmentait le volume, par exemple, en diminuant le seuil à 100 000 $, est-ce qu'il serait
possible pour vous, avec un ajustement dans les ressources, de prendre
ce volume supplémentaire?
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset.
M. Morisset
(Louis) : Évidemment, il faudrait analyser de façon plus fine le
nombre de... enfin, le nombre d'entreprises
additionnelles qui devraient faire une demande d'autorisation, si le seuil
était abaissé à 100 000 $, mais la réponse est oui, avec des ressources additionnelles. De la perspective
de l'autorité, encore une fois, si je mets de côté le rôle important,
même essentiel, que jouent l'UPAC et les autres partenaires, mais de la
perspective de l'AMF, nous pourrions, en
évaluant, évidemment, correctement les ressources nécessaires, assumer plus de
dossiers sans problème.
M.
Marceau : Donc, il n'y a pas de goulot, il n'y a pas... Enfin, dans la
mesure où les processus en place sont des bons processus, il suffira
d'augmenter les ressources... suffirait, en tout cas, d'augmenter les
ressources. Malheureusement, ce
n'est pas la volonté gouvernementale, là, mais il suffira d'augmenter les
ressources. O.K., bien là, écoutez, ça, ce bout-là, moi, je voulais le
clarifier, parce que ça fait quelque temps que j'entends autre chose. Donc,
merci pour ça.
Peut-être
vous demander aussi... Dans le document que l'autorité a envoyé pour ces
crédits-ci, il est question de 300 entreprises
qui se sont désistées du processus d'autorisation en cours de traitement. Ça,
c'est à la page 5. Pouvez-vous nous expliquer les motifs pour
lesquels des désistements ont eu lieu?
Le Président (M. Bernier) :
M. Morisset.
M.
Morisset (Louis) : Je ne peux malheureusement pas vous expliquer ces
motifs parce que ce n'est pas des motifs qui nous sont communiqués. Donc, ce sont des situations où une
entreprise fait une demande d'autorisation et, en cours de processus, pour des raisons souvent qui lui... en
fait, tout le temps, qui lui appartiennent, décide de retirer sa demande
et donc de se désister de sa demande. Dans
certains cas, ces demandes sont survenues... pardon, ces désistements sont
survenus suite à un envoi d'un préavis de refus par l'autorité dans une
certaine fraction de ces cas. Mais sinon, sans explication, les entreprises nous signifient qu'elles se retirent du
processus, alors nous n'avons pas ces raisons, malheureusement.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député.
M. Marceau : O.K., très bien. Très
bien pour ça.
Maintenant,
je veux revenir à la question des lois qui encadrent les marchés financiers.
Vous avez mentionné tout à l'heure,
lorsque mon collègue de Granby vous posait une question, que le FMI s'en venait
bientôt, En fait, il sera sur nos terres prochainement. Est-ce qu'à
l'autorité vous considérez que les lois... Puis je vais aller spécifiquement
sur le Mouvement Desjardins, qui est... bon,
comme vous l'avez dit, qui a été déclaré d'ampleur systémique, là, qui pourrait
poser des problèmes importants au Québec,
là, si... Enfin, s'il y avait un problème avec le Mouvement Desjardins, il y
aurait des conséquences qui ne se
confineraient pas au simple Mouvement Desjardins mais à l'ensemble de
l'économie québécoise, là. Est-ce que
vous considérez, de votre point de vue, à l'autorité, que les lois qui
encadrent nos coopératives de services financiers, puis le Mouvement
Desjardins en particulier, sont désuètes?
Le Président (M. Bernier) : M.
Morisset.
M. Morisset (Louis) : Merci, M. le
Président. Je dirais que les lois et en particulier celles qui touchent les
coopératives de services financiers doivent évoluer. Dans l'environnement post-crise
financière dans lequel nous sommes aujourd'hui, la réalité, c'est que
l'autorité a un rôle, si on veut, historique d'assureur-dépôts, mais dans un environnement, encore une fois, post-crise financière, le rôle que l'autorité
peut devoir jouer, c'est le rôle d'autorité de résolution pour une entreprise
de l'envergure systémique de Desjardins.
Alors, oui,
l'autorité doit disposer de certains pouvoirs dont elle ne dispose pas aujourd'hui. Évidemment, on touche tous du bois qu'on n'aura jamais
à vivre la résolution du Mouvement Desjardins ici, au Québec, mais la réalité,
c'est qu'aujourd'hui il y a certains pouvoirs qui nous manquent et dont nous
devrons évidemment obtenir dans le cadre d'une révision législative.
La visite du FMI est évidemment une occasion
pour nous de faire montre de l'environnement législatif, et évidemment, si le FMI jugeait que des pouvoirs sont manquants, bien, ils vont évidemment
nous le faire savoir. Alors, je pense que c'est peut-être là l'impératif
d'y arriver avant une éventuelle visite du FMI en 2018.
Le Président (M. Bernier) : Merci. M.
le député.
M. Marceau : Oui. Si le FMI nous
attribuait une mauvaise note parce que les lois n'ont pas été correctement modernisées, n'ont pas été suffisamment modernisées, quelles seraient les conséquences, outre le fait, évidemment, que les consommateurs du Québec
puis les gens qui sont chez Desjardins sont à risque, dans un monde dans lequel
l'encadrement de Desjardins
n'est pas à la hauteur? Mais quelles seraient les conséquences d'un avis
défavorable du FMI?
Le Président (M. Bernier) :
M. Morisset.
M. Morisset
(Louis) : Bien, difficile de
spéculer vraiment sur cette question-là, mais je pense qu'une des conséquences
possibles, c'est qu'on puisse inférer que le Mouvement Desjardins n'est pas
aussi bien encadré ici, au Québec, que
peuvent l'être les banques par le BSIF. Alors, c'est une des conséquences
possibles s'il s'avérait que, comme régulateurs, on n'avait pas nécessairement
les moyens d'action dont disposent d'autres régulateurs prudentiels.
M.
Leitão : Si je peux ajouter, dans ce genre d'évaluation, si jamais tel
était le cas, et c'est extrêmement hypothétique,
il y aurait aussi une série de mesures ou de recommandations qui seraient
proposées par le superrégulateur, le FMI. Il proposerait... Il faudrait
faire a, b, c, d, e. Donc, la conséquence ne serait pas une conséquence
immédiate existentielle, ce serait après. Si le gouvernement n'est pas capable
d'appliquer les recommandations du FMI, alors là il y aurait un véritable problème, mais je pense qu'on aurait le temps
de s'ajuster. C'est beaucoup mieux, bien sûr, de ne pas arriver à cette
situation-là.
M. Marceau : Bien, regardez,
toutes ces questions que je pose n'ont qu'une seule... Enfin, quant à moi, la conséquence que M. Morisset a la gentillesse
de ne pas évoquer pour... — je comprends le contexte — c'est que la volonté fédérale de
mettre la main sur l'encadrement du Mouvement Desjardins trouverait sa
justification. C'est la probable conséquence. Vous savez comme moi que le gouvernement fédéral n'hésite
pas à vouloir mettre la main sur l'encadrement des valeurs mobilières. Et moi, je vous le dis, M. le ministre, je ne
comprends pas la lenteur qui vous afflige, qui afflige le gouvernement dans ce dossier-là. Je ne
comprends pas. Tout le monde sait, ça fait longtemps que ça traîne, là, le
dossier du Mouvement Desjardins. Ça
traîne depuis trop longtemps. Il est temps d'agir, et c'est le sens des
questions que je pose.
M. Morisset nous
rappelle que le FMI va venir et il a raison. Moi, je vous invite à réagir
rapidement. Et c'est la même chose pour la
Loi sur les valeurs mobilières, comme le disait mon collègue de Granby, quand
il vous a posé ses questions. Là, on
a une volonté fédérale de mettre en place ce qu'ils appellent une commission
coopérative, mais disons que, d'une
certaine manière, ils sont justifiés dans ce qu'ils font de par la lenteur avec
laquelle on modernise nos lois sur les
valeurs mobilières. Alors, en tout cas, au moins dans ces deux cas-là, là, je
trouve que ce n'est pas M. Morisset qu'il faut blâmer. Lui, il est
responsable de l'encadrement que vous lui confiez.
Alors, je voudrais simplement, donc, réitérer
l'importance d'agir rapidement dans le cas, en tout cas, du Mouvement Desjardins
et dans le cas des lois sur les valeurs mobilières.
• (20 h 20) •
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Oui. Écoutez, bien, pour ce qui est, donc, de la Loi sur les
coopératives de services financiers, la LCSF, c'est clair que, je suis d'accord avec vous, c'est quelque chose où nous
devons procéder le plus rapidement possible. Nous voulions l'intégrer dans notre révision générale
de plusieurs lois qui encadrent les services financiers. Mais c'est clair
aussi... je ne pense pas que ce soit une
surprise pour personne quand je dis qu'à un moment donné il va falloir, nous,
qu'on tire nos conclusions. Et si on voit que, pour une raison ou une autre, la
réforme globale qu'on veut mettre en place, il y a encore quelques obstacles, on ne va pas... on est
d'accord que, la partie sur les coopératives, cette partie-là doit avancer
le plus rapidement possible, donc on ne va pas trop tarder pour cela.
Pour ce qui est des
valeurs mobilières, je ne pense pas que l'enjeu soit la lenteur du Québec à
moderniser la législation des valeurs
mobilières. C'est vraiment le souhait que, nous, nous trouvons toujours non
fondé de la part du gouvernement
fédéral et de certaines provinces de créer un régulateur national. Nous avons
déjà un système coopératif. Nous ne
voyons pas la nécessité d'en avoir un autre. Le système qu'on a maintenant
fonctionne bien dans la réglementation des
valeurs mobilières, et c'est toujours notre position. D'ailleurs, on est devant
la Cour d'appel, et notre position n'a pas changé. Donc, l'enjeu, à mon avis, ce n'est pas la lenteur du
gouvernement à moderniser la Loi des valeurs mobilières.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M. Marceau :
Oui. Disons...
M.
Leitão : D'ailleurs, M. Morisset préside maintenant l'organisme
canadien de valeurs mobilières, qui fonctionne très bien.
M.
Marceau : Je vous dirai simplement, sur ce que vous venez de
dire, qu'évidemment la raison invoquée par le fédéral pour créer une commission nationale n'est pas la lenteur du
Québec, là, j'en conviens, mais vous conviendrez aussi avec moi, puis je
suis certain que vous utilisez ces arguments-là lorsque vous défendez le modèle
québécois, vous conviendrez avec moi que des lois modernes, des lois récentes,
des lois qui sont à l'avant-garde sont une protection supplémentaire puis enlèvent des arguments au gouvernement fédéral, et
je suis certain que vous utilisez ces arguments-là vous-même. Cela étant, vous
avez raison que ça ne se base sur absolument rien. Vous savez que c'est une
volonté fédérale qui date des années
40. Alors, ce n'est pas comme si ça datait d'hier, là. Alors, il y a quelque
chose d'autre que les lois sur l'encadrement des valeurs mobilières qui
explique la volonté fédérale, on va s'entendre rapidement là-dessus.
Par
contre, dans le cas de Desjardins, je dois dire que là je commence à trouver ça
fort inquiétant et je pense que vous
avez raison de dire que, si la bouchée est trop grosse, bien, regardez,
commençons par l'entrée et puis peut-être qu'on arrivera à quelque chose rapidement. Si vous mettez tout ça dans un même
projet de loi de plusieurs centaines d'articles, bien, je pense que vous vous rendez bien compte que ça va être peut-être
plus difficile d'arriver à un résultat rapide. Alors, de toute façon, je
vous laisse ça à vous.
Peut-être quand même
vous reposer une question sur ce fameux projet de loi que vous voulez très
grand pour l'instant, là, très gros, avec
plusieurs centaines d'articles. Vous m'avez déjà dit, à une certaine époque,
qu'il allait y avoir des
consultations. Je ne sais pas c'était quand, mais je voudrais juste que vous
reconfirmiez qu'il va y avoir des consultations sur le projet de loi
quand vous allez le déposer, s'il vous plaît.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão :
Le projet de loi des... Excusez-moi, je n'ai pas compris.
M. Marceau :
Bien, l'omnibus financier, appelons-le comme ça, là.
M.
Leitão : Ah! O.K. Bien, écoutez, il y a déjà eu beaucoup de consultations
avec les intervenants. Nous avons déjà
reçu plusieurs mémoires. Je pense que les positions des différents groupes de
l'industrie sont bien connues. Écoutez, une fois qu'on aura déposé le projet de loi, on verra bien, mais, à ce
moment-ci, je pense que l'industrie, le secteur a été consulté amplement. Il n'y a pas, à mon avis, de
grande surprise dans ce projet de loi. Alors, on verra quand on déposera
le projet de loi.
M. Marceau : Bien
là, M. le Président, le 28 avril 2016, le ministre nous a dit, quand on parlait
du même omnibus financier, qu'il
allait y en avoir. Alors, lequel me dit la bonne chose, là? C'est celui du 28
avril 2016 ou c'est celui du...
M.
Leitão : Non, ce qu'on avait
dit en 2016, c'était tout à fait exact et c'est ce qu'on a fait. Nous avons fait
des consultations privées avec les différents intervenants dans l'industrie. Donc, c'est pour ça que je vous dis qu'il n'y a pas de surprise. L'industrie a été amplement consultée, et c'est pour ça d'ailleurs
que le processus a pris le temps que ça a pris.
M. Marceau : Je suis désolé, mais ce n'est pas ça que vous
disiez le 28 avril 2016 : «[Il] s'agit d'un projet de loi majeur, un projet de loi omnibus financier, donc on prendra le temps qu'il
faut pour [consulter].» Alors, vous nous disiez, là, que vous alliez consulter
sur le projet de loi... Parce
qu'entendons-nous bien, là, je veux bien croire que vous avez consulté plein de monde depuis quelque temps, là,
en fait, depuis deux ans et demi, quasiment, maintenant, trois ans, mais
il n'en demeure pas moins que la... Vous avez consulté sur différents
scénarios, sur différentes possibilités, et là le gouvernement fait son choix, mais c'est sur la solution retenue puis sur
les détails aussi de l'encadrement que vous allez proposer que doit se
tenir la consultation.
Ce
n'est pas nécessairement non plus simplement ceux que vous avez choisi de
consulter qui doivent être consultés. Ça concerne l'ensemble des
Québécois. Des marchés financiers efficients, qui fonctionnent bien, qui
protègent les consommateurs puis permettent
le développement de l'industrie, ce n'est pas simplement vous puis les gens
autour de vous qui ont la recette pour ça, là. Ça se peut que des
groupes aient des choses à dire là-dessus.
Moi, j'ai de la misère à comprendre que le
28 avril 2016 vous nous ayez dit qu'il fallait avoir des... que vous
alliez tenir des consultations, et que tout d'un coup, aujourd'hui... Moi, je
ne pense pas que ça va aller plus vite, en passant, sans consultations. Je veux que ça soit bien clair, là, je ne pense
pas que ça va aller plus vite, là. Alors, je vous invite vraiment à revoir
votre position, là.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Donc, on verra bien, mais je peux vous assurer... C'est que, depuis avril 2016,
oui, nous avons procédé à des consultations
assez exhaustives avec tous les intervenants dans l'industrie. Donc, il n'y a
pas de... tous les mémoires ont été
déposés, ont été analysés, le dialogue a été établi. Mais le projet de loi sera
déposé le plus rapidement possible,
et, bon, à ce moment-là, on verra si on fait des consultations particulières en
commission parlementaire ou pas. Ça va dépendre des...
M.
Marceau : Êtes-vous en train de dire sérieusement que vous allez
procéder à une refonte, comme on n'en a pas vu depuis 10 ans, du
système d'encadrement financier au Québec sans tenir des consultations? Est-ce
que vous êtes vraiment en train de dire ça, là? Est-ce que vous êtes vraiment
en train de dire ça sous prétexte que vous avez fait des consultations en privé? Je ne peux pas croire, là.
Je pense... Je vous redonne une chance de vous reprendre, là. Êtes-vous vraiment en train de dire ça, là? Il y a des lois
qui n'ont pas été réformées depuis 1999, vous allez les changer, utiliser
votre majorité puis le fait que vous êtes un gouvernement majoritaire pour ne
pas tenir de consultation? Êtes-vous vraiment en train de dire ça?
M. Leitão :
Écoutez, nous allons avoir...
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Le moment venu, quand on déposera le projet de loi, je pense
qu'on aura cette discussion-là à savoir si on a des consultations particulières ou pas. C'est une discussion
qu'on aura à ce moment-là. On n'a pas encore déposé le projet de loi.
M.
Marceau : Bien, je sais bien, mais vous êtes capable de vous engager...
Vous le connaissez, vous, le projet de
loi, vous connaissez l'ampleur. Vous avez parlé d'un projet de loi de plusieurs
centaines d'articles qui va toucher plusieurs lois... en fait, toutes les lois. Est-ce que vous êtes en train de...
Écoutez, moi, je n'en reviens pas, là. Vous avez déjà dit que vous vous
engagiez à consulter. Vous n'allez pas consulter les Québécois sur cette
question-là? Vraiment, là?
M.
Leitão : Quand on va déposer ce projet de loi, on aura des discussions
avec vous, avec le deuxième groupe d'opposition,
pour voir quelle sera la meilleure façon, la façon la plus efficace de procéder
à ces consultations-là dans l'esprit de pouvoir l'adopter, de pouvoir
l'analyser le plus rapidement possible, et nous aurons cette discussion-là.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député, 10 secondes.
M. Marceau :
On va les garder, on va les garder.
Le
Président (M. Bernier) : Vous parlerez à votre leader, vous parlerez à
votre leader. Donc, nous allons retourner du côté du gouvernement avec
M. le député de Pontiac.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Bonsoir, M. le Président.
Bonsoir, M. Morisset, à vous, à votre équipe. Merci d'être avec nous comme
à chaque année, évidemment, c'est apprécié. Je pense qu'on a toujours des
bonnes discussions, des discussions productives.
Je tiens d'entrée de jeu... J'ai quelques questions sur quelques sujets
différents, mais d'entrée de jeu je veux revenir sur peut-être certains des
propos de mon collègue de Marceau. Et d'ailleurs le sujet qui a été abordé, là,
par les deux collègues de la...
Une voix :
...
• (20 h 30) •
M. Fortin
(Pontiac) : Pardon?
M. Marceau :
Je n'ai pas encore de comté à mon nom, cher ami.
M.
Fortin (Pontiac) : Ah!
Excusez-moi. Un jour, peut-être bien. Le collègue de Rousseau, évidemment, auquel je faisais référence.
Mais,
sur le sujet des valeurs mobilières, de la commission unique, il a
mentionné le souhait par le gouvernement
fédéral depuis les années quarante. Il me l'apprend. Je ne le savais pas. Moi,
j'ai travaillé au gouvernement
fédéral. Je suis arrivé là en 2004. Je travaillais pour le
lieutenant québécois du premier
ministre à l'époque. Et c'était un
dossier déjà sur lequel... Bien, déjà... Bien, encore sur
lequel on travaillait, au gouvernement
fédéral. Et à chaque fois que je
parlais avec les collègues des Finances, ils ne comprenaient pas
l'obstination, disons, du Québec à s'opposer à un tel projet. Et, de toute évidence, le Québec
ne comprenait pas plus l'obstination, disons, du gouvernement fédéral à
continuer dans cette voie-là. Et ça,
au fil des ans, là, probablement depuis les années quarante, mais certainement depuis 2004, peu importe les gouvernements au fédéral, peu importe les gouvernements au provincial, les deux parties ont maintenu,
disons, leurs positions traditionnelles
dans ce dossier-là. Je ne sais pas, je ne me souviens pas, disons de l'époque
de mon passage au fédéral, que la
lenteur à modifier certaines lois, que ce soit du Québec ou d'autres provinces,
faisait partie de l'argument du gouvernement fédéral à l'époque. Mais je
respecte quand même la position du député d'en face.
Mais
parlons d'où on est aujourd'hui, disons, là. Après toutes ces années-là, après
le revers subi en Cour suprême, si je
ne m'abuse, en 2011, par le gouvernement fédéral, par rapport à la question de
la commission unique, ils ont quand même
trouvé moyen, ils ont trouvé une certaine brèche, là, disons, dans le jugement,
afin d'avoir un organisme coopératif, je le mets entre guillemets de
façon délibérée, mais d'avoir une ouverture pour la création possible d'un
organisme coopératif de règlement des... de
réglementation des marchés des capitaux. Et là on sait qu'évidemment ils
veulent aller de l'avant et, c'est
drôle, ont toujours voulu aller de l'avant. Simplement en m'informant sur la question,
je regardais à la droite de l'écran,
quand je sortais des articles, il y avait des articles de 2008, de 2010, de
2012, qui disent : La commission va
de l'avant. Et, peu importe la date, les articles se ressemblaient eux aussi.
Mais là on sait que, disons, que c'est reporté dans le temps un peu, ce qu'ils veulent faire. Ils parlent maintenant de
tard en 2018 pour vraiment procéder de l'avant, là, avec l'organisme, mais ils commencent quand même à
s'activer. On voit, là, qu'au cours de la dernière année ils mettent en
place les bases dont ils ont besoin pour avoir un organisme fonctionnel.
Alors,
comme je pourrais le dire, ils sont persistants dans leur approche. Ils
poursuivent dans la voie qu'ils proposent avec l'appui de certaines provinces, là, depuis plusieurs années. À
l'époque, si je me souviens bien, l'Ontario... L'Ontario ne s'est jamais vraiment opposée. En fait,
l'Ontario a toujours été avec eux ainsi que plusieurs provinces. Je pense qu'il
y avait la Colombie-Britannique, la
Saskatchewan et quelques autres, peut-être certaines provinces des maritimes
aussi qui étaient favorables, disons...
aussi le Nouveau-Brunswick, si je me souviens bien, qui étaient favorables à
l'établissement d'une commission
unique. Puis, de l'autre côté, là, il y avait évidemment le Québec, l'Alberta
qui a toujours été plutôt farouchement opposée. Et, si je me souviens
bien, le Manitoba également s'est opposé pendant un bon moment.
Ici,
à l'Assemblée nationale, on s'est prononcés à plusieurs reprises, tant quand le
Parti libéral était au pouvoir que quand le Parti québécois était,
également, au pouvoir. On s'est prononcés à cinq reprises, d'ailleurs, au cours
des 10 dernières années, pour dire que... pour dénoncer cette tentative
d'intrusion dans nos champs de compétence.
Mais,
en 2015, si je ne m'abuse, tout juste avant l'arrivée du gouvernement fédéral
actuel, le Québec avait choisi, et
vous y avez fait référence, là, M. le ministre, de faire un renvoi
constitutionnel en Cour d'appel pour le projet de régime coopératif,
coopératif encore entre guillemets. Pouvez-vous nous dire, M. le ministre, là,
où exactement on en est rendu dans ce processus-là du côté légal? Parce que,
quand vous aviez, avec l'aide de votre collègue de la Justice, le collègue, si je me souviens bien, des Affaires intergouvernementales, quand vous aviez fait cette sortie-là, pour dire qu'on renvoyait en Cour d'appel, le gouvernement fédéral avait continué dans sa voie, son désir de procéder. Alors,
pouvez-vous nous informer, là où vous en êtes rendu dans ce
processus-là?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Bon, oui, donc, ça
a été renvoyé à la Cour d'appel, et les arguments ont été entendus. Et on
s'attend à une décision de la Cour
d'appel bientôt, bientôt, ça veut dire probablement d'ici le mois de
juin. Le mois de juin, c'est le mois
prochain. Donc, relativement bientôt, la Cour d'appel devrait rendre sa décision. Nous
sommes toujours... bon, ça
va dépendre, bien sûr, de quelle serait la décision de la Cour d'appel.
Mais je vous rappelle seulement que nous avons déjà été jusqu'à la Cour
suprême, et, s'il le faut, c'est ce qu'on fera, mais il va falloir bien sûr
attendre la décision de la Cour d'appel qui devrait arriver bientôt.
Le Président (M.
Bernier) : Très bien. M. le député.
M. Fortin (Pontiac) : Oui, merci, M.
le Président. Bien, très bien, je suis content d'entendre le ministre faire référence aux prochaines étapes, disons, dans ce
processus-là, dépendamment de la décision qui surviendra au niveau
de la Cour d'appel.
Vous
avez également fait référence tantôt, là, dans votre... en
réponse à l'une des questions, au rôle que vous jouez, M. Morisset, à titre de président des
Autorités canadiennes en valeurs mobilières. Félicitations pour votre renouvellement de mandat, si je peux dire ainsi. Vous avez dit, en répondant ou en
touchant à ce sujet-là, que ça fonctionne très bien, disons, les Autorités
canadiennes en valeurs mobilières. Pouvez-vous nous dire exactement comment
vous considérez que ça fonctionne bien en ce moment, et pourquoi le système
actuel n'était pas préconisé?
Le Président (M. Bernier) :
M. Morisset.
M.
Morisset (Louis) : Merci.
Mais le ministre tantôt l'a dit clairement, nous avons en place, au Canada,
depuis des décennies, sous l'égide
des Autorités canadiennes en valeurs
mobilières, un système
coopératif. Alors, le fédéral veut créer
ce qu'il appelle un système coopératif et, en ce faisant, il veut détruire le
système coopératif qui existe aujourd'hui
au Canada, qui est vraiment un système qui repose sur, d'abord, l'autonomie de chacun
des régulateurs, mais assis dans une volonté de coopérer, de travailler à l'harmonisation aussi de l'environnement réglementaire
au Canada. On s'est doté, au cours
des années, de façons de faire qui sont communes, de moyens d'échanger de
l'information qui sont efficaces. Donc,
évidemment, tout ça repose aussi sur le système de passeport que vous
connaissez bien, qui est mis en oeuvre par les ACVM. Donc, une décision qui est rendue ici, au Québec, fait foi
dans toutes les juridictions au passeport, à l'exception évidemment de
l'Ontario, qui n'a jamais voulu adhérer au régime de passeport, comme vous le
savez.
Alors, on a,
je dirais, un système coopératif qui fonctionne très efficacement et qui
fait interagir toutes les juridictions.
Il est certain que, dans les quatre provinces où les marchés sont les plus importants,
soit évidemment le Québec, l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique, le poids
de ces joueurs-là, autour de la table des ACVM, est plus important. Le développement réglementaire se fait avec l'apport de
participants à chacune de ces juridictions de façon, évidemment, régulière. Mais, bref, le système en place est efficace et permet aussi, ce qui est important,
tout en travaillant à l'harmonisation puis à la coopération, de prendre, parce que
nous sommes tous des régulateurs autonomes, des décisions aussi qui
peuvent aller en sens contraire dans l'intérêt de notre propre juridiction.
Alors, on l'a
vu, au fil des années, dans différents projets, que ce soit le projet sur les
mesures défensives qu'a mené, je
dirais, à bout de bras, l'Autorité
des marchés financiers ou que ce soit
sur d'autres projets qu'a pu mener davantage
nos collègues de l'Ouest, on a un système
qui permet à chacun de bien comprendre et connaître son marché et d'apporter
à la table des ACVM la perspective de son
marché, dans une perspective aussi de faire consensus sur un environnement réglementaire qui est optimal
pour le Canada.
Alors, oui,
c'est un privilège pour moi de présider les ACVM. J'avais obtenu un mandat de
deux ans qui s'est terminé le 31 mars et j'ai été renouvelé, donc, pour
deux années, dans ce contexte qui n'est, évidemment, pas toujours
facile, alors que certains des membres des
ACVM contribuent également tant aux ACVM qu'à la mise sur pied éventuelle
de ce régulateur coopératif fédéral.
• (20 h 40) •
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Pontiac.
M. Fortin
(Pontiac) : Oui, merci. Je
trouve ça intéressant d'entendre M. Morisset sur cette
question-là. Il parle de système qui est déjà coopératif, il parle de façons de faire communes,
donc vous échangez, évidemment, là, à travers vos instances, avec les différences juridictions. Il parle de communications, de communications assez directes que vous avez, le
régime passeport, et d'une... ce qui me
semble une évidente coopération entre
les différentes juridictions canadiennes.
La seule chose qui semble rester, disons, ou qui semble vraiment unique, c'est
le fait que les juridictions ne sont pas harmonisées
complètement dans leurs façons de faire, dans leurs réglementations, parce que
vous dites que différentes juridictions
peuvent avoir différentes avenues de procéder et que certaines des actions que
vous avez faites peuvent être plus
bénéfiques pour le Québec que certaines des actions que la Colombie-Britannique peut avoir préconisées au fil des ans.
Vous avez
fait référence à un exemple précis. J'aimerais que vous me l'expliquiez, que
vous me dites exactement comment le Québec peut bénéficier de
certaines non-harmonisations, disons, là, au niveau des valeurs
mobilières, peut-être en
utilisant, là, justement, l'exemple auquel vous avez fait référence, d'une
décision passée.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. Morisset.
M. Morisset (Louis) : Bien, peut-être
juste avant, pour faire une précision, l'environnement pancanadien est hautement harmonisé, parce que la volonté partagée
par tous les membres des ACVM, c'est de créer un environnement réglementaire
qui permette aux entreprises d'évoluer sur une base également
nationale. Donc, je dirais, la norme, c'est d'avoir... de faire consensus
sur une réglementation qui va être pancanadienne. Maintenant, une des forces
importantes, à mon avis, du régime
actuel, c'est qu'il permet effectivement à chaque régulateur de réfléchir, je
dirais, face à sa propre réalité et
d'amener à la table des ACVM ses préoccupations, évidemment dans une
perspective de discussion, et ultimement de faire consensus.
Puis j'ai
utilisé tout à l'heure l'exemple de ce projet sur les OPA hostiles, les offres
publiques d'achat hostiles, les
mesures défensives qui a été et demeure sans aucun doute une préoccupation tant
du régulateur mais de vous, parlementaires, évidemment, et de la population
québécoise. Le fait qu'on a vécu au Québec, au cours des années, des situations
où des entreprises publiques ont fait l'objet d'une offre publique
d'achat et se sont retrouvées en 35 jours ou à peu près à être vendues, dans un contexte où parfois même ces
entreprises-là ont été tout simplement mises aux enchères par une première offre,
toujours en tête souvent, là, le cas d'Alcan à une autre époque, mais la
réalité, c'est qu'au Québec, ça fait
partie des préoccupations du régulateur. Et ce que l'on a défendu, au cours des
dernières années, c'est un régime qui permet aux entreprises qui sont sujettes à une offre publique
hostile ou, à tout le moins, non sollicitée, d'avoir plus de temps pour analyser la situation et
évidemment regarder aux alternatives potentielles. Donc, le régime des OPA a toujours été, au Québec et au Canada, qu'une
offre devait être ouverte pour 35 jours, depuis la fin des années 90, et
nous avons travaillé très fort à convaincre nos collègues des autres
provinces, notamment nos collègues en Ontario, qui ne voyaient pas nécessairement les choses du même oeil, à prolonger de
façon importante ces offres-là lorsqu'il s'agit d'offres hostiles,
évidemment non sollicitées.
Donc, le régime aujourd'hui, qui est en vigueur
depuis mai 2016, fait en sorte qu'une entreprise qui fait l'objet d'une offre non sollicitée doit, à tout le moins, laisser son
offre ouverte 105 jours. Et il y
a d'autres modifications un peu plus techniques qui ont été apportées, mais qui
viennent renforcer, si on veut, la capacité des conseils d'administration à se défendre dans le cas d'offres non
sollicitées.
Alors, ça, c'est un
projet extrêmement important qui a amené, finalement, un consensus pancanadien.
Mais pourquoi on y est arrivés? Parce que l'autorité a défendu âprement ses idées, et ce,
dès 2013. Alors qu'on avait une consultation
pancanadienne sur un projet lié aux mesures
défensives, nous, nous avons publié un document de consultation avec des idées qui étaient certainement
plus progressives. Et notre consultation a fait écho à travers le Canada, évidemment
au Québec mais à travers le Canada, on a eu des appuis à travers le Canada.
Et ça a créé le contexte où, à la fin, nos collègues de l'Ontario puis les collègues des autres provinces ont dû se rendre à
l'évidence que certaines des idées qui étaient mises de l'avant par
l'autorité étaient tout à fait valables.
Alors, c'est ça, un
peu, la force des ACVM. C'est ça aussi, je pense, la crainte qu'inspire une commission
coopérative fédérale avec un certain nombre de provinces. Si cette coopérative, si ce régulateur-là finissait par
voir le jour, au terme, évidemment
d'un processus judiciaire, comment allons-nous interagir et comment allons-nous
garder cette capacité d'influence
dans un environnement canadien qui sera changeant, capacité d'influence que l'on
a aujourd'hui et qui nous sert bien?
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M. Fortin
(Pontiac) : Merci. Qu'est-ce qu'il me reste, M. le Président?
Le Président (M.
Bernier) : Ah! il vous reste 4 min 40 s.
M. Fortin
(Pontiac) : Très bien, très bien.
Le Président (M.
Bernier) : Vous avez le temps de poser de très bonnes questions.
M.
Fortin (Pontiac) : Oui, absolument.
D'ailleurs, je veux juste remercier M. Morisset pour sa
réponse parce que je pense
que c'est important de savoir justement à quel point la préoccupation est plus grande, disons, au gouvernement
du Québec par rapport aux mesures défensives sur les offres hostiles, qu'elle
l'a été traditionnellement dans d'autres provinces, et donc que les actions certainement
vont en ce sens-là.
Sur un autre sujet,
messieurs. M. Morisset, vous avez fait référence à votre programme Mes
finances en tête, tantôt, je pense que
c'était en réponse aux questions du député de Trois-Rivières, qui parlait de
l'importance que les gens soient bien
préparés, disons, quand vient le temps de prendre des décisions financières,
quand ils se font approcher pour justement
protéger les citoyens qui peuvent être vulnérables par rapport aux décisions
financières qu'ils ont à prendre et aux
personnes avec qui ils font affaire. Vous avez fait référence à un sondage que
vous faites à tous les 12 mois, si j'ai bien compris, environ, 12 ou 10 mois, O.K., que vous faites
régulièrement pour comprendre les différents comportements que les Québécois ont par rapport aux finances,
les besoins, si je comprends bien. J'aimerais ça que vous nous parliez un peu de ce que vous avez trouvé dans ce
sondage-là, à savoir : Est-ce que les Québécois comprennent bien le
système financier? Est-ce que les
Québécois comprennent bien les opportunités, les risques? Et en même temps, je
vais vous poser une question comme ça : Qu'est-ce que vous pensez
de la possibilité d'un cours d'éducation financière?
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset.
• (20 h 50) •
M. Morisset (Louis) : Merci beaucoup. Bien, d'abord, pour... l'Indice Autorité qu'on a développé s'avère pour nous un outil qui
est précieux parce qu'effectivement ce que l'on a fait, au départ, c'est de
cibler 40 comportements financiers avisés que tout un chacun devrait
normalement mettre en oeuvre, posséder. Et évidemment, en procédant à ce
sondage-là périodiquement, bien, on voit là où les Québécois ont peut-être plus
de vulnérabilité. Évidemment, la planification
de la retraite est un enjeu, la prévention de la fraude aussi. Dans un
environnement comme celui dans lequel on
évolue, avec des taux d'intérêt, évidemment, anémiques, il y a des gens qui
sont en quête de toute façon, évidemment, de revenus et qui sont sans doute plus vulnérables dans cette période
économique que l'on vit, avec des taux d'intérêt très faibles, qu'à une autre époque. Alors,
malheureusement, il y en a, et malheureusement tous les jours, des gens qui se
font piéger par des gens malhonnêtes.
Alors, ce sondage-là nous permet évidemment d'identifier certaines lacunes et
nous permet aussi, donc, de mieux cibler nos activités de
sensibilisation.
La
campagne que l'on a lancée, puis il me ferait plaisir de vous en remettre...
J'avais apporté quelques affiches, si on
veut, de cette campagne-là. On a, pendant 30 semaines, passé, je pense,
aux Québécois des messages forts pour les aider à prendre leur santé financière en main, pour bien se connaître
avant d'investir, bref, une panoplie de messages dans une perspective qui est celle de l'autorité, donc
de l'information qui est neutre, qui est objective. On n'a rien à vendre. Notre
rôle, c'est de contribuer à l'éducation. Et je pense que cette campagne-là
multiplateforme a marqué des points.
Au-delà de cela, je vous donne un
exemple, mais, lors de la dernière année, nous avons fait une équipe
d'éducation financière, et l'autorité
a fait la tournée des cégeps, plus de 3 000 jeunes ont été rencontrés
l'année dernière, dans le cadre de
cette tournée, pour contribuer à inculquer aux jeunes des notions financières.
Alors, bref, nous, on prend sérieusement ce rôle de sensibilisation et
d'éducation à coeur.
Et
pour répondre à votre dernière question, oui, un cours d'éducation financière
sera profitable aux Québécois et
permettra à la prochaine génération d'être mieux outillée. Mais, entre temps,
nous et d'autres, évidemment, contribuons à notre manière, et je pense
que ce que l'autorité a fait avec sa dernière campagne a été très utile.
Le
Président (M. Bernier) : Alors, merci, M. Morisset, de vos
bons mots, de votre campagne. Nous allons passer du côté de la deuxième
opposition, avec M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Merci, M. le Président. M. Morisset, dans
les documents Réponses aux questions particulières des oppositions, je suis en train d'éplucher les
questions 53, 54 et 55, là. La question 53, c'est que, pour chaque mois
depuis l'adoption de la
loi n° 1, Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics, adoptée
en 2012, nombre d'entreprises ayant fait
une demande d'autorisation à l'AMF, question simple puis sûrement facile pour
vous, là : Comment on explique qu'à partir de 2015, fin de l'année,
septembre, octobre, on a commencé à avoir au-dessus de 120 demandes
d'autorisation jusqu'à la fin de l'année 2016. C'est quand même... je
regarde les chiffres, là, de 2013, 2014, 2015, comment vous expliquez ça? Est-ce qu'il y a une raison, à
savoir qu'on soit passé près d'une moyenne de 120, 125 demandes,
contrairement aux années antérieures, où on dépassait rarement... jamais
le 100, là? Est-ce qu'il y a une raison reliée à ça ou...
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset.
M. Morisset
(Louis) : En fait, la raison, oui, la raison est simple, c'est qu'à
cette époque-là on a procédé à l'abaissement
des seuils. Donc, on est partis de 40 millions, à 10 millions, à
5 millions, puis, évidemment, à ce moment-là, plus d'entreprises se
sont manifestées, oui.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Bonnardel : Je regarde, à la question 55, là, les
entreprises qui se sont vu refuser une autorisation par l'AMF, c'est quand même surprenant, là, dans les... 2013
à 2017, à peine neuf sociétés se sont vu refuser une autorisation par l'AMF.
Il faut croire que nos entreprises, au
Québec, sont plus... mieux outillées, si je devais dire, ou prêtes à
entreprendre des contrats avec les sociétés.
Comment
vous expliquez... Bien, quand on arrive... On vous a demandé la typologie des
motifs de refus, là, je vois quand
même que vous avez été assez transparent, là, vous marquez, bon, même une, là,
le lien avec le crime organisé, collusion
ou corruption, d'autres avec des problèmes de fausse facturation. Comment vous
fonctionnez, comme enquête ou... Le
plumitif fait partie, j'imagine, oui, de vos vérifications. Est-ce que vous
parlez aussi à la police, si vous considérez qu'il y a matière à...
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset.
M. Morisset (Louis) : Oui. Merci. Bien, en fait, le processus, puis je l'ai mentionné brièvement tout à
l'heure, est intrinsèquement lié au travail que fait l'UPAC. Donc, la
demande nous parvient, évidemment, à l'autorité, on en fait l'analyse et on transfère à l'UPAC le dossier pour
des fins de vérification de l'intégrité. Et nous obtenons, de la part de l'UPAC, un avis sur la situation,
sur l'entreprise, sur ses dirigeants et ainsi de suite, alors...
Et, à travers ce processus-là, il y
a par la suite un processus
qui s'engage avec l'entreprise. Si l'intention évidemment est de refuser l'autorisation, nous envoyons un préavis de refus qui engage un dialogue avec
l'entreprise, un échange d'information, des informations additionnelles, bien souvent, ou encore une
démonstration que l'entreprise a changé, a évolué, s'est assainie, si on veut.
Mais je faisais la remarque tout à l'heure, suite à un préavis de refus, il y a
une soixantaine d'entreprises qui se sont désistées.
Alors donc, il y a des entreprises qui, en cours de route, face, évidemment, au régulateur, face peut-être aussi au
travail que fait l'UPAC, décident, là, d'abandonner, d'abandonner le processus.
Mais essentiellement le processus est fait
en collaboration avec l'UPAC, qui, elle, collabore avec d'autres
partenaires, Revenu Québec, la RBQ, et ainsi de suite, et au final on nous achemine un avis quant à la situation,
là, de l'entreprise.
M. Bonnardel : Vous avez dit une soixantaine, là, mais juste à
la page 5, en haut, on marque : «À noter que plus de
300 entreprises se sont désistées.» 300 depuis le début?
M. Morisset (Louis) : Oui, oui, exact. Il y en a une soixantaine après
l'envoi d'un préavis de refus.
D'autres se sont désistées avant même qu'on se rendre là ou pour d'autres motifs. Mais,
oui, il y a plus de 300 entreprises qui ont fait
une demande et qui, en cours de route, nous ont avisés qu'ils ne poursuivaient
pas.
M. Bonnardel : La plupart de ces entreprises, par la suite, est-ce qu'elles continuent d'opérer? Vous ne continuez pas... vous n'allez pas plus loin dans... Vous
dites : Vous, vous ne pouvez pas faire affaire avec le gouvernement. Mais ça se peut que ces entreprises aient encore pignon sur rue au
Québec.
M. Morisset
(Louis) : C'est possible.
Parce que ces entreprises-là, encore une fois, font une demande à l'égard
des contrats en fonction des seuils, donc
c'est des entreprises qui visent, lorsqu'elles nous contactent pour une
autorisation de contracter, au-dessus
de ces seuils-là. Maintenant, si elles se désistent par la suite, on ignore,
là, qu'est-ce qu'il advient de ces entreprises-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Bonnardel :
O.K. Je vous ai posé, l'année passée, une question sur la valeur des services
professionnels, vous m'aviez... c'est
une demande d'accès à l'information que... non, je pense que vous aviez répondu
directement par la suite à une
question que je vous avais posée. Et je regarde les montants qui sont facturés
depuis 2010‑2011, services professionnels, immobilisations corporelles, l'année passée, ce que j'ai, c'est
9 062 000 $, immobilisations corporelles, 2,4 millions,
pour un total de 11,4, 11,5. Ça varie
ou ça reste le même montant depuis les trois, quatre dernières années. Est-ce
que... ma question... c'est un... bien,
écoutez, je considère quand même que c'est un montant élevé. Vous considérez
toujours que ces services
professionnels, vous ne pouvez pas les avoir directement avec les ressources
internes? Vous considérez que c'est
toujours important d'aller les chercher à l'extérieur? Et est-ce qu'on serait
capables d'avoir la ventilation de ces services professionnels comme
tels, au-delà du montant du montant que vous nous donnez dans le rapport année
après année?
Le Président (M. Bernier) :
M. Morisset.
M. Morisset
(Louis) : Merci, M. le
Président. Est-ce que vous faites référence à l'information qu'on vous avait
soumise l'année dernière suite à la commission?
M. Bonnardel :
Oui.
M. Morisset (Louis) : O.K. Je
vais juste consulter l'information. Mais, pour répondre à votre question, oui,
à chaque année nous avons recours à des services professionnels dans différents
secteurs pour des besoins ponctuels d'expertise,
pour des appuis à différents niveaux. Maintenant, notre volonté, évidemment,
c'est, si c'est possible... Puis j'ai
un exemple à l'esprit au niveau des services juridiques. Nous avons réduit,
depuis cinq ans, si je ne m'abuse, de, quoi, 17 %, 16 % nos honoraires juridiques externes dans une
perspective évidemment de créer, et de garder et de nourrir cette expertise à l'interne au niveau des services
juridiques. Alors, lorsque possible, clairement notre volonté, c'est de faire
tout ce travail à l'interne. Mais comme
régulateur nous avons besoin d'expertises particulières, pointues dans certains
domaines, et c'est dans ces cas-là qu'on a recours évidemment à des cabinets de
services professionnels.
M. Bonnardel :
Quels sont les principaux besoins que vous ne pouvez pas avoir en termes de
ressources à l'interne? Parce que,
bon, si je prends juste la portion services professionnels, on est partis, 2011‑2012,
à 6,8 millions de dollars, sept,
six, huit, et là on est à 9 millions de dollars. Quoi spécifiquement que
vous avez... Parce que c'est pour ça... Si possible, me donner la
ventilation de ce 9 millions de dollars dans une réponse que vous pourriez
nous donner...
Le Président (M. Bernier) : À
faire parvenir à ici, au secrétariat de la commission.
M. Bonnardel :
...à faire parvenir à la commission, si possible, cette ventilation que vous
donnez, comme tel, là. Allez-y.
Mme Soucy (Marie-Claude) :
Juste pour répondre...
Le Président (M. Bernier) :
Tout simplement vous identifier, s'il vous plaît, madame.
• (21 heures) •
Mme Soucy
(Marie-Claude) : Marie-Claude
Soucy, vice-présidente des services administratifs à l'Autorité des
marchés financiers.
Donc, pour répondre un peu à votre demande, ces
services-là se traduisent par des services-conseils en informatique, des services juridiques — et c'est en ordre d'importance — certains
services de recherche et d'autres services de juricomptabilité et de traduction aussi. Donc, en gros, c'est ces
services-là, et des services aussi en termes de conseils en ressources humaines. Donc, c'est l'ensemble de
ces services-là. Et la portion capitalisable que vous avez eue, là, c'est
des services d'honoraires professionnels au niveau des technologies de
l'information.
M.
Bonnardel : O.K.
Donc, il y a eu...
Mme Soucy
(Marie-Claude) : Donc, tous ces services-là, surtout au niveau
capitalisable, c'est des grands projets que l'autorité a. On a entamé une réforme complète des systèmes
technologiques de l'organisation. Et il est difficile, en effet, de faire l'ensemble de ces services-là à
l'interne. Vous comprendrez que ça crée une demande, et, après ça, bien sûr,
la demande diminue. Donc, c'est ces services-là, là, que vous voyez au niveau
de la capitalisation.
M.
Bonnardel :
C'est ce qui explique le 8,6 millions en 2012‑2013, après ça, cinq, puis
là on est tombés à un chiffre de 514 000 $ en 2014‑2015 et
2,4 millions en 2015‑2016.
Mme
Soucy (Marie-Claude) : Capitalisable, là, oui.
M.
Bonnardel :
C'est ça?
Mme Soucy
(Marie-Claude) : Oui. Pour ces services-là, oui.
M.
Bonnardel : O.K. On a fait une petite vérification des
contrats gré à gré et... Bien, une question fort simple en premier. Derek West, c'était un directeur que
vous aviez, qui a été à l'emploi de l'AMF pendant les 12 dernières années,
si je ne me trompe pas, ou qui... Son contrat, mandat ou son emploi s'est
terminé. Pouvez-vous confirmer ça?
M. Morisset
(Louis) : Exact. Derek West a été consultant auprès de l'autorité
pendant une bonne période. Derek West a
contribué de façon importante au développement, d'abord, de la Loi sur les
instruments dérivés qu'a adoptée le
Québec en 2009, et nous avions... Vous êtes tous bien au fait qu'au Québec,
évidemment, l'expertise en dérivés... On a la Bourse de Montréal. On a eu besoin de développer une expertise de
pointe en dérivés. Derek West est le consultant qu'on a retenu, qui avait cette expertise-là tant aux États-Unis qu'au
niveau international. Donc, on a travaillé avec Derek pendant plusieurs
années, et effectivement, en mai, en fait...
Le Président (M.
Bernier) : Oui, allez-y, M. le député.
M.
Bonnardel : Vous dites «consultant», mais est-ce que ce
n'était pas un directeur principal de l'encadrement? Il ne signait pas
ça, «directeur principal»?
M. Morisset
(Louis) : Bien, il avait un titre chez nous, en effet, oui, mais il
agissait comme consultant.
M.
Bonnardel :
Il était salarié?
M. Morisset
(Louis) : Non, il était consultant.
M.
Bonnardel :
Il a été consultant pendant ces 12 ans?
M. Morisset
(Louis) : Pendant cette période, pendant cette période.
Mme Soucy
(Marie-Claude) : Non, non, non, de mai 2013 à mai 2017.
M.
Bonnardel :
Il a été consultant de mai 2013 à mai 2017?
Mme Soucy (Marie-Claude) :
Exact.
M.
Bonnardel :
O.K. Donc, pendant ces quatre années, c'est là qu'il a obtenu des contrats
annuels...
Mme Soucy
(Marie-Claude) : ...je vais juste... Excusez-moi.
M.
Bonnardel :
O.K. On recommence à zéro.
Mme Soucy
(Marie-Claude) : On recommence.
Le Président (M.
Bernier) : On repart.
M.
Bonnardel :
Oui. Il était salarié?
Mme Soucy
(Marie-Claude) : Non, il n'était pas salarié, il était consultant.
Une voix :
...
M. Morisset
(Louis) : Exact.
M.
Bonnardel :
Il était juste consultant, il signait «directeur des produits dérivés»?
M. Morisset
(Louis) : Effectivement, il avait un rôle au sein de notre
organisation mais à titre de consultant. Derek
est un Américain... un Canadien, mais qui résidait à Chicago, qui avait cette
expertise pointue dont l'autorité avait besoin pour développer cet environnement en dérivés dans les années
2000, qui nous a amenés à la loi, évidemment, de 2009, et il a continué de nous accompagner et de jouer un rôle auprès de
l'autorité comme consultant, mais avec, comment je dirais, un rôle de
représentation de l'autorité dans ce contexte.
M.
Bonnardel : O.K. Mais je veux juste comprendre. Vous
dites : C'est un consultant, mais lui signait «directeur principal des produits dérivés». C'est normal,
pour vous? Puis, dans les quatre... Bien, écoutez, je ne le connais pas, le
monsieur. C'est juste que j'ai fouillé dans
les contrats gré à gré, puis le monsieur en question a obtenu quatre contrats
annuels de 246 000 $,
1 million de dollars et plus, là, pour les quatre exercices. Je veux juste
comprendre la dynamique. Vous me
dites qu'il n'est pas salarié, il est consultant. Il a toujours été consultant
pendant ces 12 ans. Est-ce que c'est normal que le monsieur ait
reçu... Et vous aviez à signer un contrat de gré à gré quand même d'un montant
assez substantiel, là, et que, ce montant,
bien, vous l'avez bonifié aussi trois des quatre années, si je ne me trompe
pas, là. Je veux juste comprendre la dynamique, là.
M.
Morisset (Louis) : C'est une
situation particulière. Derek West,
encore une fois, a été cet expert francophone dont l'autorité avait
besoin pour nous aider à développer, donc, la Loi sur les instruments dérivés
et pour nous aider à prendre cette place importante
que l'on a aujourd'hui sur l'échiquier canadien en dérivés également.
Donc, Derek a été un consultant à
l'emploi, si on veut, unique de l'autorité, et, oui, pendant cette période-là,
à titre de consultant, il avait un
rôle chez nous de directeur principal de l'encadrement des dérivés, et, oui,
c'est une situation particulière, parce que l'expertise en dérivés, elle est rare. Elle est rare au
Québec, elle est rare ailleurs au Canada. Elle est surtout rare pour des gens qui ont une expérience, aux États-Unis, sur l'environnement réglementaire existant aux États-Unis. Derek West
a travaillé pour la National Futures Association pendant plusieurs années avant
de travailler pour l'autorité à titre de consultant,
et c'est une expérience qui est encore plus rare lorsqu'il s'agit de comprendre
les environnements réglementaires internationaux en matière de dérivés.
Alors, voilà pourquoi Derek West a agi pour l'autorité sur cette base-là
pendant cette période.
Le Président (M. Bernier) : Merci. M.
le député.
M.
Bonnardel : Est-ce qu'il
y avait des... Là, c'est parce que
j'ai les quatre dernières années. J'imagine que vous l'avez payé de la
même manière pour les huit premières années où il a été à votre emploi, ce que
je n'ai pas comme chiffres encore, là. Quel
avantage il y avait à ne pas l'avoir comme salarié? Parce que, bon, au-delà de
ça, vous aviez signé quatre ententes,
année après année, de 246 400 $. C'était peut-être un salaire de base
défini, je ne sais pas, là, mais... puis que par la suite, bien, ça
s'est...
M. Morisset (Louis) : Non, c'est...
Je m'excuse.
M.
Bonnardel : Oui,
allez-y.
M.
Morisset (Louis) : Bien, ce
montant-là comprend l'ensemble, évidemment, de ses honoraires professionnels
et de ses frais de déplacement pour venir,
évidemment, périodiquement à l'autorité. Il travaillait en partie de Chicago
et, au sein de l'autorité, là, il a
eu un bureau chez nous pendant cette période-là également. Mais n'étant pas
présent sur les lieux pendant toute
cette période-là, je ne peux pas vous dire exactement... On pourrait vous
partager cette information-là pour
les années qui ont précédé. Possiblement que les montants étaient moindres dans
les années qui ont précédé. Comme tout
consultant, annuellement, il y a sans doute des hausses d'honoraires. Mais
c'est la situation avec Derek West. Et il nous a quittés comme consultant vers la fin de l'année dernière pour
aller relever un défi, et là j'ignore si c'est à titre de consultant, mais pour une chambre de compensation
à Londres, et nous avons pu bénéficier de son expertise, au cours des années, notamment pour former la relève. Nous avons
en place une nouvelle directrice d'encadrement des dérivés, Lise Estelle Brault, qui a pu bénéficier
évidemment de l'expertise de Derek pendant quelque temps et qui est dorénavant
la personne en charge en dérivés chez nous.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
M. le député.
M.
Bonnardel :
J'imagine qu'elle est salariée?
M. Morisset (Louis) : Oui, elle est
salariée.
M.
Bonnardel :
Est-ce qu'il y a d'autres employés comme ça qui sont embauchés par des contrats
de gré à gré, à l'AMF? Est-ce que vous en avez d'autres?
M. Morisset (Louis) : Il n'y en a
pas d'autre.
M.
Bonnardel : Il n'y
en a pas du tout?
M.
Morisset (Louis) : Non, puis
c'est vraiment, je tiens à le dire, une situation particulière. Si nous avions
pu embaucher Derek West comme employé
puis qu'il déménage ici, à Montréal ou à Québec, on l'aurait fait volontiers, mais
sa volonté a toujours été de travailler
comme consultant. Et, encore une fois, cette expertise-là particulière en
dérivés étant aussi rare au Québec,
c'est la meilleure personne qu'on a pu trouver pour nous aider à nous
développer dans le secteur important des dérivés et nous permettre
aujourd'hui de jouer le rôle important qu'on joue également.
• (21 h 10) •
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Bonnardel : O.K. Bien répondu. Merci. Question peut-être au
ministre des Finances. J'ai terminé avec l'AMF pour ce soir, là, mais, dans mon dernier cinq minutes... M. le ministre,
on vous a posé une question. À la question 56... Vous avez souvent répondu aux questions en Chambre, à savoir, bon, les
agences de notation demandaient ci, il fallait faire ça pour les agences de notation, on avait une dette élevée, tout
ça, puis... Je ne sais pas si vous avez le document ou... Demandes de renseignements particuliers aux deux
oppositions, là, c'est la question 56, je peux vous laisser 30 secondes pour y avoir accès, là. Ce qu'on demandait... En
réalité, on demandait quand même un certain nombre de questions, des précisions d'information qu'ont demandées les
agences quant au budget, et, selon les années, les précisions d'information
qu'ont demandées les agences de notation quant à la mise à jour économique.
En
réalité, quelles étaient les interventions que vous aviez avec eux ou eux
avaient avec vous suite, nécessairement, à la situation économique particulièrement difficile que nous avions,
que nous avons encore en termes de dette, mais le redressement que le gouvernement a dû amener en
termes de dépenses, et tout ça, pour s'assurer
d'un retour à l'équilibre budgétaire?
Vous comprendrez qu'il y avait sept, huit questions que vous n'avez pas
voulu répondre. Et première question
facile pour vous, c'est de savoir pourquoi
vous avez juste répondu : Bien, le gouvernement reçoit une cote
de crédit de la part de cinq agences. Tout
le monde ici, à la commission,
on le sait très bien, que ça soit Moody's, Standard & Poor's,
la Japan Credit Agency, Fitch... ça, on sait
tout ça, mais quelles sont les interventions que vous avez avec ces agences à chaque mise à jour ou budget? Est-ce que
vous rencontrez... C'est pour ça qu'on voulait spécifiquement avoir les informations, pour faire un topo des interventions et des relations que vous
avez avec ces agences.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Le processus
est le suivant. Suite au dépôt du budget à chaque année, donc à chaque budget,
les agences de notation émettent un commentaire rapide, une espèce de «flash comment», juste quelques
paragraphes. Par la suite, généralement au printemps,
donc maintenant, le mois de mai-juin, quand le budget est déposé
en mars, c'est à peu près ça, là, les différentes agences viennent au ministère des Finances, où il y
a des discussions assez détaillées,
où le gouvernement, le ministère présente le budget aux agences, explique les
différentes mesures et les différentes prévisions, et puis, par la suite, il
y a un dialogue, il y a
un échange d'information. Ils posent des questions, nous répondons.
C'est un processus qui peut durer quelques heures comme, des
fois, il peut durer un peu plus, ça peut durer quelques jours. Et puis, par
la suite, ils publient leurs rapports.
Donc, notre
interaction avec les agences se limite à ça et... pas se limite à ça, parce que...
C'est une période où il y a
un bon échange avec eux, et nous répondons à leurs questions.
Ils ne nous disent pas quoi faire. Ce n'est pas leur rôle. Leur rôle, c'est de comprendre qu'est-ce qu'on a fait, et puis une fois qu'ils ont compris ce qu'on a fait, là, ils
émettent une opinion sur la viabilité
de nos prévisions et sur la viabilité de notre cadre financier, et c'est cette
opinion qui se reflète dans la cote de crédit.
M.
Bonnardel : Rapidement,
peut-être une question. Les trois, quatre principales recommandations, si je peux dire ça ainsi,
qui reviennent de la part de ces agences pour qu'on vous dise : Bien,
vous, là, le gouvernement du Québec, vous
devez faire attention à ça, ça, ça, que ce soit le choc démographique, que ce
soient les exportations, puis je
pense qu'ils vous font un topo
global, vous le savez très bien, là, qu'est-ce
qui ressort de tout ça, là? J'imagine que vous êtes capable de me...
M.
Leitão : Ils ne font pas de recommandation. Dans la discussion qu'on a
avec eux, bien sûr, on comprend leurs enjeux, on comprend leurs
inquiétudes, et souvent c'est autour de deux éléments.
D'abord,
ils veulent s'assurer que nos prévisions économiques, et donc nos prévisions de
revenus et nos prévisions de
dépenses, ces prévisions-là soient réalistes, et que... Ils veulent aussi
essayer de juger quelle est la détermination du gouvernement à atteindre
ces cibles. Donc, une bonne partie de la discussion est autour de cela.
Deuxièmement,
ils sont aussi, bien sûr, très intéressés, c'est leur rôle et c'est pour ça
qu'ils existent... c'est au niveau de
la dette, donc d'émettre des opinions quant à la gestion de la dette, à la
capacité de l'État de gérer la dette, et quel est le plan que le
gouvernement a ou n'a pas pour contrôler la dette.
Donc,
c'est vraiment sur les prévisions de revenus et dépenses, prévisions
économiques, et contrôle et gestion de la dette. Ce sont les deux enjeux
principaux qu'on discute avec les agences de notation.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Nous passons... et nous étions déjà
sur le temps du gouvernement, et c'est M. le député d'Orford.
M.
Reid : Merci, M. le Président. M. Morisset, j'aimerais aborder un sujet important
de par son amplitude, dans ses impacts et la vitesse avec laquelle il se
produit, c'est l'émergence des «fintech», ces innovations technologiques appliquées au secteur financier, que ça touche le
paiement, l'investissement, le financement, l'assurance, etc. Et je pense
que les «fintech» sont présentement un des
sujets de l'heure dans votre secteur et que ça va très vite, et, en
particulier, je crois, c'est en
Amérique du Nord où ça se développe le plus vite. Alors, c'est compréhensible.
Le secteur financier est incontournable,
et beaucoup d'assujettis, que vous encadrez déjà, ainsi que de nouveaux joueurs
voient un terrain fertile pour y développer notamment leurs produits
innovateurs.
Il faut cependant s'assurer que ces nouveaux
intervenants qui joignent le secteur financier ou qui y gravitent déjà
respectent la réglementation. Je pense que c'est vraiment votre rôle.
L'information que j'ai, c'est qu'il y aurait, à
Montréal, dans l'écosystème «fintech», environ 100 000 emplois et qui touchent plus de
3 000 entreprises. C'est ce qu'on trouve sur Internet, en tout cas, sur le sujet. Les «fintech», de toute évidence, créent un environnement de rupture technologique.
Ce n'est pas moi qui le dis, mais ça me paraît
assez évident que c'est le cas. Ça veut dire qu'il y a des menaces pour
certaines entreprises. Ça veut dire aussi qu'il y a des opportunités
pour d'autres entreprises. Ça veut très certainement dire qu'il y a des
nouveaux défis de réglementation pour assurer la sécurité et la qualité de
service des clientèles.
Là-dessus,
j'aimerais peut-être juste, avant de vous poser la question, vous lire, ce
qu'on trouve sur Internet pour une conférence sur les «fintech» qui aura
lieu le 31 mai 2017, donc bientôt, à Montréal, centre-ville. On dit, entre
autres, quand... On écrit cinq bonnes
raisons pour participer et s'inscrire à la conférence. La quatrième est la
suivante, je vous la lis en toutes
lettres, là : «Apprendre
comment les "fintech" ont su manier agilement la réglementation et la
transformer en occasions.»
Évidemment, occasions d'affaires, je suppose. Alors, moi, ma première question,
c'est : Comment voyez-vous votre rôle face à ce maniement agile de
la réglementation financière?
Le Président (M. Bernier) :
M. Morisset.
M.
Morisset (Louis) :
Oui, merci. Bien, c'est un environnement, effectivement, qui est en mouvance,
dont on parle de plus en
plus, puis la réalité, c'est que la réglementation qui existe aujourd'hui n'a
pas été conçue lors d'une ère très technologique. Alors, il est clair que la réglementation actuelle
pose certains défis, et d'entendre qu'on peut manier à travers la
réglementation me surprend un peu, en ce sens que la réglementation
d'aujourd'hui n'est peut-être pas toujours
adaptée à cet environnement technologique qui se développe. On a des exigences
réglementaires qui reposent encore
aujourd'hui sur du papier, sur des signatures manuelles, et ainsi de suite.
Alors, il faut que, vraisemblablement, la
réglementation puisse évoluer, et, au fil du temps, il faudra, si elle évolue,
qu'elle évolue toujours dans cette perspective de protéger adéquatement
le consommateur, l'investisseur.
Alors, aujourd'hui, puis
j'ai parlé de ça un petit peu plus tôt, le rôle du régulateur, c'est toujours
d'arbitrer la protection du consommateur
avec l'efficience des marchés et de favoriser le bon fonctionnement des
marchés. Je pense, dans un
environnement «fintech», nous, notre rôle aujourd'hui, c'est de s'assurer
d'abord que l'on comprend ce qui se développe.
Parce qu'on parle beaucoup de robots conseillers, on parle beaucoup de chaîne
de blocs, le «blockchain», mais, toutes ces notions, ces technologies, dans
quelle mesure vont-elles véritablement venir impacter la vie des gens
positivement ou encore négativement? C'est ce qui peut nous interpeller
davantage comme régulateurs.
Alors, le rôle que joue l'autorité aujourd'hui
et de la façon dont on entend continuer de jouer ce rôle dans les prochaines années, c'est d'abord de se
familiariser et d'être près de la communauté «fintech» ici, au Québec, dans un
premier temps, pour pouvoir voir ce
qui se développe, s'assurer aussi que ces jeunes entreprises souvent qui
veulent émerger vont pouvoir
développer des applications technologiques qui ne se heurteront pas au cadre
réglementaire, de voir aussi de quelle manière
ces applications-là, si elles se heurtent au cadre réglementaire... comment
nous croyons que ce cadre réglementaire pourrait évoluer ou devrait évoluer, et, pour ce faire, on a créé à
l'autorité d'abord un groupe de travail dédié aux «fintech».
M.
Reid : ...par la
suite.
M. Morneau (Louis) :
Vous allez revenir là-dessus? D'accord.
• (21 h 20) •
M.
Reid : Oui, parce que j'aimerais creuser un petit peu la
notion ici d'innovation, de rupture. C'est un professeur de Harvard, Clayton Christensen, en 1997, qui a
écrit un livre là-dessus, Innovator's
Dilemma, puis il a appelé ça, en anglais... c'était «disruptive innovation», et ce qu'il disait un peu dans son livre, c'est
qu'en général — en tout cas, à ce
moment-là, il n'y avait pas les genres d'innovation qui se produisent
maintenant, là — l'innovation de rupture, elle doit d'abord trouver son marché, qui,
initialement, n'est pas un gros marché en général, quand on regardait cette
époque-là en tout cas, parce
qu'aujourd'hui on peut aller
chercher un marché de millions immédiatement souvent avec l'Internet, et qu'à ce moment-là, bien, ça donne un certain
temps à des entreprises existantes qui ont les marchés majeurs existants
de pouvoir soit s'adapter ou... sinon,
évidemment, il y en a qui ne s'adaptent pas et qui meurent. Et donc il y avait
une espèce de vision des choses qui a
changé depuis quelques années, et, en fait, ce qu'on voit depuis un certain
temps, c'est des entreprises qui font
ces changements-là, de rupture, qui vont effectivement, très rapidement,
possiblement causer des ravages dans des industries existantes.
Mais, par
exemple, si on regarde... Ça peut être dans le respect des lois et des
réglementations, vous l'avez dit tantôt. Je pense qu'on est exactement
dans la question ici. Si on regarde, par exemple, Amazon, eBay, etc., c'est des
entreprises qui ont réussi à faire des
changements majeurs qui ont mis à mal certaines entreprises existantes, de
toute façon, de toute évidence, mais
qui l'ont fait à l'intérieur des cadres. On voit aussi... Parce qu'on a vu
toute l'aventure ici d'Uber avec nos
règlements, nos lois, etc., on était plusieurs à être impliqués là-dedans, où
on a effectivement une entreprise ici qui
ne respectait pas tout à fait les lois et les règlements, mais aussi des
règlements qui souvent étaient dépassés par le temps, un peu ce que vous
avez mentionné tantôt.
Donc, avec ce que vous avez dit puis ce que
j'essaie de dire ici, c'est qu'on met la table pour... Une des problématiques qu'il y a, c'est d'ajuster
rapidement nos réglementations en fonction de ces nouveaux éléments, sinon
on est en retard contre des entreprises qui
ne respectent pas les règlements ou encore on empêche des entreprises de
pouvoir fonctionner ou de pouvoir
évoluer. Et donc, dans ce sens-là, à mon avis, là, le rôle du législateur — comme, pour Uber, on a fait de la législation — pour l'organisme réglementaire est crucial
et complexe, parce qu'en gros, évidemment, il faut favoriser l'innovation, on veut que notre société québécoise,
mondialement, évolue, mais il faut s'assurer aussi qu'on protège le
service à la clientèle, qu'on protège la qualité, qu'on protège aussi de
certaines nouvelles menaces qui n'existaient pas avant : le piratage, l'extorsion par blocage des
ordinateurs, etc. C'est des choses qui sont nouvelles et le monde
financier est susceptible d'en être victime également.
Donc, dans ce contexte-là,
moi, j'aimerais justement maintenant revenir... Vous étiez en train de
commencer à répondre à ma question, ma
deuxième question. Je voudrais revenir à ce que M. le ministre a mentionné et
aussi à ce que vous faites dans votre
organisation, qui est essentiellement le fait... Et je pense que le ministre
pourrait intervenir, mais on a parlé
de création dans le budget de pôle d'excellence en «fintech», et, de votre
côté, vous prenez le relais avec un groupe de travail. Alors, j'aimerais ça
que — peut-être
M. le ministre aussi voudra compléter — vous nous parliez un petit peu, vous expliquiez un petit peu où on s'en
va dans le contexte qu'il y a des innovations de rupture dans plusieurs sujets du monde financier. Il y a des jeunes qui
les font et qui peuvent peut-être être étouffés, mais en même temps il y en a
qui vont peut-être, au contraire, passer à
côté des règlements, manipuler les choses et créer des situations où nous, on
va être pris, dans quelques années, à faire des nouvelles lois parce
qu'on aura pris du retard.
Le Président (M.
Bernier) : M. Morisset ou M. le ministre? Lequel? Tirez à la courte
paille.
M. Morisset (Louis) : Bien, encore une fois, le défi que vous identifiez, c'est le défi de
l'heure, c'est d'avoir un environnement
réglementaire, évidemment, législatif également, mais réglementaire qui est
celui sur lequel le régulateur travaille,
qui permette à ces entreprises-là d'émerger, d'évoluer, mais dans un contexte
qui ne préjudicie pas le consommateur. Et,
comme je le disais tout à l'heure, l'environnement réglementaire ici, au
Québec, pour sûr, mais partout dans le monde... On fait tous face à cette réalité des «fintech». On en parle ici, mais
je peux vous assurer qu'on en parle bien davantage dans d'autres
juridictions à travers le monde, notamment parce que la crise financière de
2007‑2008 est venue, dans certains pays,
éroder complètement la confiance dans les institutions financières
traditionnelles, ce qui n'a pas été le cas, Dieu merci, ici, au Québec
ou au Canada. Mais, dans certains pays, clairement, la confiance envers les
institutions traditionnelles a été fortement
ébranlée, et c'est ce qui a donné, si on veut, davantage d'impulsion à ces
entreprises qui offrent des facilités
au niveau du paiement, au niveau du conseil, bref, différentes façons de
rejoindre les consommateurs qui y voient des avantages.
Alors,
le défi pour tout régulateur aujourd'hui, c'est d'arbitrer ces deux pôles de
nos missions, de s'assurer que les entreprises qui mettent de l'avant
des nouveaux modèles d'affaires... Parce qu'il y a une réalité aujourd'hui. Les
entreprises tentent toujours de se
réinventer. On essaie de proposer des nouvelles façons de faire, de nouveaux
modèles d'affaires, de nouvelles façons, comment je dirais, d'aider, si on veut, le consommateur, et
l'environnement réglementaire, effectivement, ne suit pas toujours.
Dans le domaine des
valeurs mobilières, si je prends cet exemple-là, nous avons, comme régulateurs,
certains pouvoirs de dispense qui nous permettent, au cas par cas, dans le
domaine des valeurs mobilières encore une fois, d'analyser les situations et de voir dans quelle mesure nous pouvons
donner certaines dispenses, certains allègements, toujours dans une
perspective évidemment de ne pas préjudicier le consommateur.
Et
je me permets de dire qu'au niveau pancanadien, au niveau des ACVM, nous avons
lancé une initiative qui est une
initiative que d'autres juridictions à travers le monde ont mise en place,
qu'on appelle un bac à sable réglementaire, un «regulatory sandbox», qui permet d'analyser des modèles d'affaires
innovants et de voir dans quelle mesure on peut accommoder, du moins, temporairement, l'émergence de ces modèles
d'affaires là. Alors, ça fait partie des défis, je dirais, qui sont
quotidiens.
Et,
quand je regarde ici, au Québec, vous avez parlé de 100 000 emplois,
tant mieux si c'est déjà autant que ça, mais l'objectif, je pense, du
régulateur, qui au coeur de l'écosystème financier, c'est d'aussi favoriser le
dynamisme du secteur financier par un
environnement réglementaire qui permet aux entreprises de se développer et
évidemment qui protège le consommateur.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Oui, M. le ministre.
M.
Leitão : J'ajouterais à ça que, oui, l'aspect «disrupted technology»
est très présent dans le secteur financier, mais, dans le secteur financier, c'est particulier. C'est particulier
parce que le secteur financier dépend en grande partie de la confiance, la
confiance que les intervenants puissent avoir entre eux et avec le public.
C'est pour ça que c'est très important,
ce que M. Morisset a mentionné, que le régulateur — et ça, on ne le voit pas dans d'autres
industries — soit
impliqué au départ dans le «sandbox» pour
qu'on puisse avoir de l'information et partager l'information avec ces
nouvelles entreprises qui font de la «creative disruption», parce que
l'aspect de la confiance est crucial parce que l'industrie financière a une caractéristique que les autres
industries n'ont pas. L'industrie financière crée de l'argent, et cette
capacité de créer de l'argent, il
faut qu'elle soit encadrée de façon très forte, très stricte pour éviter des
désastres, et, au cours de l'histoire,
on a vu des désastres financiers, à commencer par les tueries polonaises
jusqu'au XXIe siècle. Donc, l'industrie financière, oui, il y a beaucoup d'innovation, beaucoup de «disruptive
technology», beaucoup de «fintech», mais, étant donné sa capacité de
créer de l'argent, il faut qu'elle soit toujours très bien encadrée.
M. Reid : Est-ce
que juste... Il reste encore un peu de temps, hein?
Le Président (M.
Bernier) : Oui, oui, il reste un peu de temps, M. le député
d'Orford. Allez-y.
M.
Reid : Bien, juste une petite question parce que je pense
que mon collègue avait une autre question à poser.
Mais ce que vous me
dites, là, ça me donne l'impression que — et j'espère que c'est ça,
là — le
fait que ce soit réglementé de plus près et
de l'intérieur, ça va permettre de faire un équilibre aussi entre les
entreprises nouvelles, qui sont
«disruptive», des entreprises existantes, qui, elles, font une progression
d'innovation plus lente, en quelque sorte.
Par
exemple, on a vu qu'entre Uber et les taxis, là, le traditionnel taxi n'était
pas très, très protégé. Et qui aurait pensé
que Kodak disparaîtrait un jour parce qu'à un moment donné il y a des
entreprises qui ont créé des appareils photo numériques? Bien, c'est ce
qui est arrivé malgré tout.
Donc, on ne
veut pas que nos banques disparaissent, c'est ça que je veux dire, ou nos
compagnies d'assurance disparaissent. Donc, ce que vous nous dites, c'est qu'on
n'a pas besoin d'avoir peur parce qu'en fait il y a un système de normalisation, de réglementation qui est déjà en
place et qui est déjà très efficace, qui a peut-être besoin d'être renouvelé,
là, d'être rénové, mais qui est déjà en place. C'est ça que je comprends?
Le Président (M. Bernier) : Monsieur...
Une voix : ...
M.
Reid : Merci
beaucoup. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Oui. Ça veut dire oui.
M.
Reid : Oui. Il y a
un oui non verbal.
Le
Président (M. Bernier) : C'est parce que ça me prend un son
pour l'enregistrer. C'est bien. Alors, M. le député de Trois-Rivières,
oui, c'est ça? Allez-y.
• (21 h 30) •
M.
Girard : Merci, M. le Président. Je veux revenir un peu sur les
programmes de dénonciation et sur les poursuites qui sont faites au niveau de l'AMF. J'ai sorti quelques articles, entre autres,
à Trois-Rivières, dans notre coin, chez nous, un ici qui date de mars dernier, qui mentionne que l'Autorité des
marchés financiers... une nouvelle plainte contre... Bon, je ne nommerai pas les gens. Ensuite, j'en ai un autre ici qu'on mentionne que
quelqu'un a détourné des fonds. Par contre, ici on parle de la Chambre de sécurité financière qui suspend les
permis. Donc, de ce que je comprends, la CSF suspend les permis et
l'autorité fait les poursuites et, bon, charge des amendes, etc.
Donc, on en a
vu quand même plusieurs dans les derniers mois, donc je voudrais vous entendre...
dans les derniers mois, dernière
année. Je voudrais vous entendre sur la façon... Est-ce que ça va bien au
niveau de l'AMF? Est-ce qu'il y a des
dénonciations? Est-ce que ça va rapidement? Est-ce que ça va rondement? Est-ce
qu'il y a des hausses, des baisses au
niveau des cas? Et est-ce qu'on réussit à vraiment faire les poursuites, à
charger des amendes, à suspendre les permis et tout? Et est-ce qu'on est dans la bonne direction à ce niveau-là pour
faire un petit peu le ménage, là, par rapport aux gens qui abusent de nos citoyens dans différents
secteurs financiers? Puis je veux vous entendre un petit peu, là, où on en est
rendus, le type d'infraction, la gravité des infractions, puis comment ça va à
ce niveau-là.
Le Président (M. Bernier) :
M. Morisset.
M.
Morisset (Louis) : Merci.
Écoutez, je vous dirais que ça va bien. Je vous dirais qu'on... D'abord,
si je recule un petit peu en arrière,
au cours des années, on a ajouté des forces vives importantes aux effectifs de
l'autorité. Si on se remémore, peut-être, à une autre époque, on avait,
grosso modo, 40, 45, 47 employés ou membres du personnel qui oeuvraient en inspections, en enquêtes, en poursuites. On en a près de 175 aujourd'hui. Donc, au cours des 10 dernières années, on a ajouté beaucoup de forces vives. On a ajouté aussi beaucoup
de moyens technologiques pour nous aider dans la détection, disons, de la criminalité financière. Nous sommes, et je
le dis avec fierté, le régulateur le plus actif au Canada en
matière de répression ou d'application des lois, notamment du côté valeurs mobilières, et je ne pense que
c'est parce qu'on a plus de
bandits à cravate au Québec, mais certainement parce que l'autorité déploie des
efforts extrêmement importants. On a eu
quelques exemples notoires, dans la dernière année, de poursuites que l'on a
lancées, notamment en
matière de délits d'initiés, des poursuites majeures, même sans précédent, je
dirais, au Canada, dans un cas, à l'égard de David
Baazov. Bref, on déploie des efforts importants et on se distingue par nos
façons de faire.
Le programme de dénonciation... Puis peut-être
juste avant, le type d'infraction, quand je regarde la dernière année, nous avons, suite à des poursuites ou des interventions de l'autorité, eu plus de 9 millions
de dollars d'amendes, de pénalités administratives. Si je ne m'abuse, nous avions fait condamner des
individus à, au total, plus de 142 mois de prison. Donc, il s'agit ici, là, disons, de comportements très
répréhensibles, évidemment, et de sanctions très sévères, très
dissuasives que nous réussissons à obtenir par la voie des tribunaux.
Vous avez parlé du programme de dénonciation.
C'est un nouvel outil dont on s'est doté l'été dernier. En juin dernier, on a lancé ce programme de
dénonciation, qui est un programme qui, nous croyons, va nous permettre
d'obtenir des dénonciations qui vont nous amener de l'information dont
il serait difficile pour le régulateur d'obtenir autrement, un programme qui offre un guichet sécurisé aux
dénonciateurs, qui assure évidemment l'anonymat, si on veut, des dénonciateurs, la confidentialité de la
documentation qui nous est acheminée. Et je peux vous dire qu'après un petit
peu plus de six mois maintenant nous
avons reçu plus d'une cinquantaine de dénonciations, dont environ un tiers nous
a permis directement d'ouvrir des dossiers d'enquête ou encore nous a amené de
l'information pertinente à des dossiers d'enquête qui étaient déjà en
cours. Alors, c'est un moyen additionnel, je pense, dont on s'est doté.
Un élément
important. Nous avons décidé, contrairement à d'autres organismes de
réglementation à travers le monde, de ne pas offrir de récompense
financière, monétaire parce que nous n'étions pas convaincus que l'incitatif financier serait déterminant pour amener les gens
à nous offrir cette information sous forme de dénonciation, et, jusqu'à présent, basé sur
l'expérience que nous avons, nous croyons que notre programme fonctionne bien
et nous permettra d'être encore plus efficaces en matière de répression
des crimes financiers.
M.
Girard : Est-ce que les cas de fraude, les cas de poursuite, est-ce qu'on en a plus? Est-ce qu'ils sont
en hausse? Est-ce que les valeurs des différents cas sont portées à augmenter?
Je fais le lien avec un petit peu la démographie que l'on vit. Je travaille, chez nous, à Trois-Rivières, avec la table
Abus contre les aînés, parce qu'on sait que souvent c'est des personnes aînées qui ont des actifs, et
sont moins méfiantes, et vont se faire arnaquer par... Justement,
on parlait des taux d'intérêt tout à l'heure. Les taux sont tellement
faibles, ils se font offrir des taux faramineux, et croient en la proposition, et vont se faire arnaquer. Donc, bon, suite à la démographie, tout ça,
est-ce qu'on a plus de cas? Et est-ce que les montants ont tendance à
être à la hausse ou si c'est assez stable depuis les dernières années?
M.
Morisset (Louis) : Bien,
c'est certain que c'est un environnement qui est propice à la fraude financière. Les
investisseurs sont à la recherche de gains,
puis les taux d'intérêt sont anémiques, comme je le disais tout à l'heure. Donc, c'est un environnement qui nous amène à être évidemment à l'affût. Les cas que l'on voit souvent évidemment
sont des stratagèmes à la Ponzi, des situations aussi où, par ailleurs, il
y a de la manipulation de marchés ou des situations de placement illégal. Ce sont des cas que l'on voit très fréquemment et qui
font partie de notre, disons, quotidien à l'autorité. Difficile, statistiquement parlant,
d'affirmer qu'il y en a plus
aujourd'hui qu'il y en avait par le passé, mais une chose est sûre, c'est que l'environnement actuel est
propice, et c'est pour ça que j'ai insisté aussi, ce soir, à travers,
évidemment, des réponses à d'autres
questions, sur le volet d'éducation, de sensibilisation. Je pense que nous
avons un rôle à jouer tant sur le
plan de l'application des lois que sur le plan de l'éducation. Ce sont, à mon
avis, deux pôles qui sont complémentaires et qui nous permettent, là, de passer des messages qui amènent les gens
à se prémunir eux-mêmes contre la fraude et contre les malversations
financières.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Morisset, d'avoir participé à la Commission des finances publiques. Je
veux remercier également M. le
ministre, remercier tous les
collègues qui ont passé la journée ici à travailler sur ces crédits. Merci à vos recherchistes, les gens et le
personnel de l'Autorité des marchés
financiers, le personnel de l'Assemblée nationale qui m'accompagne,
mon secrétaire, son adjoint, le page, ainsi que les gens à l'enregistrement, qui nous permettent de conserver les galées. Je salue également
les gens qui nous ont écoutés aujourd'hui.
Donc, je lève la séance, et la commission
ajourne ses travaux à demain, après les affaires courantes, où nous
poursuivrons l'étude des crédits du volet Finances. Merci.
(Fin de la séance à 21 h 38)