(Douze
heures six minutes)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des finances publiques ouverte. Et je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
La
commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques dans le cadre de son mandat d'initiative
portant sur le phénomène du recours aux paradis fiscaux.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
Non, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Premièrement, nos excuses pour ce retard. Il y a
des travaux de la Chambre qui se sont
poursuivis, c'est la raison pour laquelle nous devons débuter nos travaux quelque...
une heure un petit peu plus
tard.
Consentement immédiatement
pour dépasser peut-être de cinq... sept minutes le temps requis, donc terminer
vers 13 h 7? Ça vous va? Consentement. Merci beaucoup.
Auditions (suite)
Donc, je désire vous
rappeler... premièrement, souhaiter la bienvenue aux représentants de Raymond
Chabot Grant Thornton. Merci de votre
participation, merci d'être ici ce matin. Je désire vous rappeler que
l'objectif premier, c'est de
connaître, justement... recueillir des informations. Ce n'est pas un tribunal,
ici, on n'est pas ici pour accuser personne, on n'est pas ici pour condamner personne. On est ici pour obtenir de
l'information, savoir de quelle façon on procède, de quelle façon... au niveau de l'évitement fiscal,
d'obtenir des informations et des recommandations par rapport à ce que
le gouvernement du Québec ou l'Agence du revenu opère actuellement, c'est
l'objectif premier que nous avons dans l'accomplissement de notre mandat, de notre
travail, auquel suivra un mémoire ou un rapport qui sera déposé à l'Assemblée
nationale sur le sujet. Donc, c'est l'objectif premier.
Je
veux remercier M. Thuot et M. Marion d'être là. Donc, simplement, au
moment où vous prenez la parole, de vous
identifier ainsi que vos responsabilités au sein de l'organisation, tout ça aux
fins d'enregistrement de nos échanges. Donc, vous avez une période de
15 minutes pour faire votre présentation, par la suite suivront des
échanges avec les députés : 22 minutes à la partie gouvernementale,
13 minutes à l'opposition, neuf minutes au deuxième groupe d'opposition.
Donc, sans plus tarder, je vous donne la parole. C'est M. Thuot qui va
débuter?
Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT)
M.
Thuot (Jean-François) : Oui.
Le Président (M.
Bernier) : Bon, allez-y. Merci beaucoup.
• (12 h 10) •
M. Thuot (Jean-François) : Bonjour. Merci, M. le Président et membres de la
commission, de nous avoir invités à participer
à vos travaux. Dans un premier temps, permettez-nous de nous présenter :
Jean-François Thuot, associé chez Raymond
Chabot Grant Thornton depuis 2003, leader du Service de fiscalité, membre du
comité exécutif de notre firme et membre
du Tax Advisory Committee de Grant Thornton International. Je suis également membre
du comité consultatif de la chaire en
fiscalité et en finances publiques. Je pratique la fiscalité depuis 1994, après
avoir complété une maîtrise en fiscalité
de l'Université de Sherbrooke. J'ai dirigé plusieurs colloques sur les
réorganisations corporatives. Je suis également membre du comité
technique sur la fiscalité de l'Ordre des CPA ainsi que chargé d'enseignement
au programme de maîtrise en fiscalité de
l'Université de Sherbrooke. Je suis accompagné de M. Daniel Marion, qui
est l'associé directeur de notre
groupe de fiscalité internationale. M. Marion est associé chez Raymond
Chabot Grant Thornton depuis 18 ans et pratique la fiscalité depuis
1984. Il est reconnu dans la communauté fiscale après avoir, entre autres,
donné plusieurs conférences traitant de fiscalité internationale.
Nous
sommes ici aujourd'hui afin de collaborer aux travaux de la commission en
rapport avec son mandat sur les paradis fiscaux, dont nous saluons
l'initiative. Nous résumerons donc notre approche face aux planifications
fiscales abusives et aux paradis fiscaux et nous conclurons avec cinq
recommandations.
Raymond
Chabot Grant Thornton est la firme comptable numéro un au Québec. De plus, elle
a son siège social au Québec. Raymond
Chabot Grant Thornton compte 198 associés et 2 325 employés à travers
ses 108 bureaux au Québec. Notre
organisation a été fondée en 1948 et fait partie intégrante de la création de
la richesse au Québec en collaborant avec les organisations québécoises
depuis bientôt 70 ans, qu'elles soient privées, publiques ou
gouvernementales.
Afin d'aider les PME québécoises
à prendre leur envol au niveau
international, notre organisation a adhéré au regroupement international
Grant Thornton. Ainsi, nous pouvons assister personnellement ou par le biais de
notre adhésion nos clients partout dans le
monde. Nous sommes reconnus pour être le bureau des PME, et nos clients, de
grands travailleurs et les grands piliers du Québec de demain, nous demandent
une fiscalité juste, efficace et responsable.
Or, alors que
nos régimes d'imposition ont 100 ans et qu'ils n'ont pas été pensés pour
le monde actuel, il est parfois difficile
d'offrir une fiscalité concurrentielle, efficace et responsable à nos clients.
Nos régimes d'imposition étaient efficaces au XXe siècle, mais, au XXIe siècle, alors qu'il est possible
d'opérer une entreprise dans les nuages, de dématérialiser la richesse
et de transiter des milliards de dollars en un clic, ils doivent être repensés.
Nous sommes
au début de la mondialisation, et ce phénomène d'abaisser les taux d'imposition
pour attirer du capital devient de
plus en plus important. La tentation pour certains pays de se transformer en
paradis fiscal est importante dans un monde mondialisé, et la tentation
d'en prendre avantage est également très importante pour les contribuables mobiles. Pour vaincre les crises des finances
publiques et retrouver l'équilibre fiscal dans un monde mondialisé, le
Québec, le Canada et l'ensemble des pays doivent être proactifs.
Comme vous
pourrez le constater, M. le Président, deux éléments importants se dégagent de
notre approche face aux planifications fiscales abusives et aux paradis
fiscaux.
Premièrement, zéro tolérance. Nous n'acceptons
aucunement d'engager nos clients dans ce qui peut nous sembler être une planification fiscale abusive. Chez Raymond Chabot
Grant Thornton, nous ne faisons aucune planification fiscale impliquant
des pays comme le Panama, l'île de Man et Jersey afin de réaliser de l'évasion
fiscale.
Le
département international de notre firme compte plus de 40 employés. C'est
un département en expansion, et c'est normal au XXIe siècle. Chez
nous, en 2015, les mandats de planification pour la mise en place de structures
internationales impliquant des pays pouvant
être considérés comme des paradis fiscaux sont très minimes, ils
représentent 0,1 % du chiffre d'affaires de la société, et ils sont
parfaitement légaux et impliquent principalement deux pays : l'Irlande et
le Luxembourg.
Avec la
mondialisation et le mouvement des peuples et des capitaux, les contribuables
internationaux continuent de se multiplier. Notre firme est proactive
pour desservir cette clientèle. Dans ce contexte, les entreprises
internationales nécessitent la mise en place de structures fiscales
internationales, et nous sommes également proactifs pour desservir cette
clientèle d'une manière efficace et responsable. L'évidence : il n'y
aurait pas de commission si les juridictions étaient harmonisées.
Avant d'aller
plus loin, il est crucial de distinguer la planification, l'évasion et
l'évitement fiscaux, car, à nos yeux, cela représente une étape
cruciale.
Premièrement,
la planification fiscale. Elle consiste en un arrangement visant à réduire les
impôts et est fondée sur
l'application technique de la loi. La planification fiscale est conforme à
l'esprit de la loi. Par exemple, un contribuable qui contribue dans un REER mais qui retarde sa déduction à une année où
son revenu sera plus élevé effectue ce qu'on appelle une planification
fiscale.
Deuxièmement,
l'évasion fiscale. Elle représente la suppression ou la falsification
d'information. Le fait d'utiliser les paradis fiscaux afin de réaliser
de l'évasion fiscale, par exemple cacher des revenus, peut être sanctionné par
des dispositions pénales et est du ressort
des instances criminelles. L'évasion fiscale représente une intention délibérée
de ne pas agir conformément aux lois,
exemple réclamer des fausses dépenses. Dans notre firme, la tolérance est zéro
quant à l'évasion fiscale, impliquant ou non des paradis fiscaux.
Finalement,
l'évitement fiscal. Comme la planification fiscale, l'évitement fiscal
représente un arrangement visant à réduire
les impôts, fondé sur l'application technique de la loi. Toutefois, dans le cas
de l'évitement, nous parlerons d'une transaction
ou d'un arrangement qui n'est pas conforme à l'esprit de la loi. Dans certains
cas, il sera difficile de distinguer la planification fiscale de
l'évitement fiscal, lorsque la politique fiscale sous-jacente à une disposition
est ambiguë.
La loi fiscale contient une disposition générale
antiévitement, la règle générale antiévitement qui vise à tracer une ligne de démarcation entre la réduction maximale
légitime de l'impôt et l'évitement fiscal abusif en permettant de
supprimer un avantage fiscal découlant d'une
opération contraire à l'esprit de la loi. Il s'agit d'une disposition puissante qui ne doit être utilisée qu'en dernier recours par les
administrations fiscales. Les politiques fiscales de la firme, de notre firme,
requièrent qu'une analyse de la règle générale
antiévitement soit effectuée lors de transactions pouvant être visées par cette
règle. À ce sujet, notre firme s'est dotée
d'un comité qui vise à évaluer l'application possible de cette règle à
certaines idées fiscales. Lorsqu'une planification est considérée comme
étant visée par cette règle, son exécution chez un client de la firme devient interdite. Encore une fois, la tolérance
de notre firme est zéro. Cet élément fait partie du processus
d'inspection interne que notre firme s'est dotée afin de respecter les plus
hauts standards d'intégrité.
Je tiens à
préciser que dans aucune circonstance nous n'accepterions de produire une
déclaration de revenus pour laquelle
nous serions d'avis que la règle générale antiévitement trouve application,
sans divulguer le traitement approprié. Évidemment, il peut arriver en
certaines circonstances, comme les tribunaux dans certaines décisions, que nous
ne partagions pas le même point de vue que
les autorités fiscales sur l'application possible de la règle générale
antiévitement à une transaction spécifique.
Il
est important de préciser que le type de fiscalité pour lequel nous utilisons
les pays à fiscalité avantageuse est la planification «outbound», c'est-à-dire la planification fiscale visant à
aider nos entreprises à payer le moins d'impôt dans leurs activités à l'extérieur du Canada,
conformément à la politique fiscale prévue à cet effet. Le régime fiscal
canadien repose sur deux principes
clairs : premièrement, les revenus de source canadienne doivent être
imposés au Canada, et, deuxièmement,
le cadre fiscal doit permettre aux sociétés canadiennes d'être compétitives à
l'étranger. Une société qui gagne du
revenu de nature passif dans une filiale étrangère devra s'imposer au Canada
annuellement, et ce, même si les revenus
ne sont pas versés à la société canadienne. À l'opposé, une société qui gagne
du revenu d'entreprise active dans une filiale qui
réside dans un pays avec lequel le Canada a conclu une convention fiscale ou
une entente d'échange d'information fiscale
ne sera pas imposé au Canada et aura le droit de recevoir des dividendes de ces
filiales sans impôt canadien. Le
Canada a donc choisi, comme la majorité des pays industrialisés, de céder la
responsabilité de l'imposition des profits d'entreprise active des
filiales étrangères à leur pays de résidence.
Prenons l'exemple
d'une société canadienne qui détient deux filiales étrangères. La
société A exploite une entreprise dans
un pays à fort taux d'impôt, et la société B réside dans un pays à faible
taux d'impôt. Si la société B finance les
opérations de la société A, la société A aura droit à une déduction
fiscale pour les intérêts à un taux d'impôt élevé, et la société B aura un revenu d'intérêt
imposable à faible taux dans son pays de résidence. Les règles fiscales
canadiennes permettent de rapatrier au Canada l'ensemble des profits des
sociétés étrangères A et B sans impôt canadien. Il est important de préciser
que ce genre de planification ne réduit en rien l'assiette fiscale canadienne.
Cela dit, abordons
maintenant nos cinq grandes recommandations.
Première grande
recommandation : une fiscalité juste et efficace pour les PME. Les pays et
les organisations mettent beaucoup d'efforts
pour s'assurer que la fiscalité des multinationales est concurrentielle
internationalement. Alors que le taux
d'imposition effectif des PME est maintenant plus élevé que celui de certaines
multinationales au Canada, il est
primordial d'examiner la fiscalité des PME en profondeur afin de s'assurer
qu'elle soit également concurrentielle et qu'elle permet aux PME d'aujourd'hui de devenir les grandes entreprises
de demain. Notre firme fait beaucoup d'efforts année après année pour s'assurer que les PME profitent d'un régime
d'imposition concurrentiel, juste et efficace. Nous avons fait campagne pour la diminution du fardeau
fiscal de la PME, et merci aux autorités fiscales de nous avoir écoutés.
Nous avons mis des pressions pour l'équité
fiscale en transfert d'entreprise, dans une entreprise de la même famille,
et merci au leadership des autorités fiscales québécoises, qui ont encore une
fois pris le temps de nous écouter.
• (12 h 20) •
Recommandation 2 : coopération, faire figure de leader en matière de coopération fiscale internationale et promouvoir la mise en place d'initiatives qui favorisent la coopération entre pays.
L'OCDE fait un bon boulot pour convaincre les pays de prendre le chemin d'une fiscalité moderne. Toutefois,
face à l'importance de la situation,
ce n'est pas suffisant, et chacun d'entre nous doit vérifier comment on
peut aider pour favoriser une meilleure coopération fiscale internationale. Raymond Chabot Grant Thornton est fier
commanditaire de la conférence internationale TaxCOOP dont la première
édition a eu lieu à Montréal en 2015, à
laquelle vous avez assisté, M. le Président, ainsi que plusieurs membres de la
commission.
Recommandation 3 :
revoir la fiscalité. Notre société salue les efforts de la Commission d'examen
sur la fiscalité québécoise et encourage les
autorités fiscales à penser à des solutions nouvelles qui soient mieux adaptées
à la réalité économique du
XXIe siècle. Il faut avoir l'esprit ouvert à la mise en place de nouvelles
taxes qui sont peut-être mieux adaptées
à la mondialisation que l'impôt traditionnel sur le revenu. Il peut s'agir de
taxes à la consommation ou encore de taxes sur le carbone ou le tabac,
qui permet un double bénéfice : des revenus publics pour la société et une
réduction des comportements néfastes des citoyens.
Recommandation
n° 4 : normalisation des comportements fiscaux. À cet égard, nous
croyons qu'il faut aussi avoir l'esprit
ouvert à la mise en place de solutions nouvelles, mieux adaptées à la
responsabilité sociale des entreprises. Pour agir en société, les
multinationales doivent être de bons citoyens corporatifs, et, pour inciter les
entreprises à se comporter en bons citoyens
corporatifs, plusieurs sont d'avis que le pouvoir des consommateurs est plus
efficace que les actions des
gouvernements et que le paiement des impôts, la protection de l'environnement
et les bonnes pratiques en matière
d'emploi sont maintenant des critères d'importance égale lorsque les
consommateurs évaluent une entreprise.
Or, comment informer
le consommateur du profil fiscal des entreprises qui paient leur juste part
d'impôt? La question est importante, puisque
l'équilibre des systèmes passe peut-être par cette étape. Pourrait-il s'agir
d'une forme de normalisation? Notre
firme observe la tendance mondiale en ce sens, se penche également sur la
question et propose au Québec et au Canada d'encourager les études sur
ces questions.
Comme dernière
recommandation : mettre en place un programme de formation en fiscalité
internationale pour les vérificateurs de Revenu Québec. Enfin, nous estimons important
que les vérificateurs puissent parfaire leurs connaissances grâce à des
formations adaptées afin qu'ils soient davantage à l'affût des enjeux complexes
liés à la fiscalité internationale.
Merci beaucoup de
votre attention. Et nous sommes disposés pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup, M. Thuot.
Merci de vos commentaires, merci de vos recommandations. Nous allons donc débuter les échanges avec les
parlementaires sans plus tarder. Donc, M. le député de Pontiac, je vous
donne la parole.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci. Merci, M. le Président. Je vous remercie de
vos efforts, d'ailleurs, dans la dernière semaine, là, pour s'assurer
qu'on a toute l'information nécessaire disponible à nous. Et merci aux gens qui
sont avec nous aujourd'hui, M. Thuot,
M. Marion. Merci de votre disponibilité, et d'être ici, et, je l'espère,
là, de le faire dans un esprit d'ouverture, en partageant l'information
que vous avez.
Donc, permettez-moi
de commencer avec certains des faits que vous nous avez présentés à propos de
ce que Raymond Chabot Grant Thornton fait, et on arrivera aux recommandations
par la suite.
Donc, si j'ai bien
compris, ce que vous nous avez dit, c'est qu'il n'y a essentiellement, là,
aucune forme de planification abusive qui
est sanctionnée ou qui est opérée, là, par les gens chez Raymond Chabot Grant
Thornton et que vous avez des mécanismes assez sévères envers les
employés chez vous, des mécanismes de vérification aussi pour s'assurer que ça
ne se fait pas, si je comprends bien.
M. Thuot (Jean-François) : C'est ça.
Tout à fait.
M.
Fortin (Pontiac) : Donc, quand Revenu Québec nous dit qu'il y a
environ 800 millions d'évasion fiscale ou
de pertes pour des revenus fiscaux du gouvernement, vous me dites que zéro de
ce 800 millions là passe par Raymond Chabot Grant Thornton.
Le Président (M.
Bernier) : M. Thuot.
M. Thuot
(Jean-François) : Bien, ici, ce qu'il est important de préciser... Tout
à l'heure, j'ai voulu faire la distinction entre la planification, l'évitement
et l'évasion fiscale. Donc, si on parle du 800 millions qui représente de
l'évasion fiscale, effectivement, la tolérance, dans notre firme, c'est zéro.
M.
Fortin (Pontiac) : Qu'est-ce que ça veut dire? Expliquez-moi vos processus
internes, moi, je veux comprendre, là.
Si vous trouvez, à travers ces processus internes là, un employé, un associé,
quelqu'un chez Raymond Chabot Grant Thornton qui peut donner des
conseils ou qui même pourrait dire : Nous, on ne fait pas ça, mais va donc
voir cette personne-là ici, elle peut
t'aider, s'il y a quelque chose qui fait que, selon vos standards, ce ne serait
pas approprié, c'est quoi, les répercussions?
Le Président (M.
Bernier) : M. Thuot.
M. Thuot (Jean-François) : En fait, dans le fond... Dans nos standards, si
je comprends bien votre question, en fait, nous, ce que l'on fait,
lorsqu'un client veut réaliser un projet, on lui présente différents scénarios.
Il y a une analyse préalable qui a été faite
pour s'assurer que ces scénarios-là rencontrent les objectifs, rencontrent les
dispositions techniques de la loi,
comme je mentionnais tout à l'heure. À l'occasion, on peut se questionner si
c'est un évitement fiscal. Si c'est un évitement fiscal, on a un comité
interne qui regarde, on s'assure de respecter la politique fiscale, que ce
n'est pas un évitement abusif, et, à partir de là, c'est les idées qu'on
propose à nos clients.
M. Fortin
(Pontiac) : O.K. Merci. Merci de cette réponse-là.
Est-ce
qu'il y a des gens qui vous arrivent en... des clients, que ce soient des
individus ou des corporations, qui vous arrivent et qui disent : Nous, on aimerait utiliser un abri fiscal,
on aimerait utiliser un mécanisme d'évasion fiscale? Et qu'est-ce que vous faites dans ce cas-là, s'il y a
quelqu'un qui vous arrive en demandant d'utiliser une telle situation?
M. Thuot (Jean-François) : Il faut juste faire la distinction. Tout à
l'heure, lorsqu'on a parlé abri fiscal, il y a des abris fiscaux qui
sont légitimes, comme les actions accréditives, tout ça.
Mais,
si on met ça de côté, donc, à partir du moment où on a un client... Puis ça
arrive effectivement qu'ils viennent nous voir puis qu'ils disent :
Bon, bien, j'aimerais investir mon argent à l'étranger, connais-tu un pays?, ou
ainsi de suite. Bien, je vous assure que la réunion ne dure pas plus que cinq
minutes.
M. Fortin
(Pontiac) : Est-ce qu'il y a des situations où vous avez des clients
qui ont de l'argent dans des paradis fiscaux qui vous demandent conseil? Ils l'ont
déjà, cet argent-là est déjà placé dans ce qui peut être considéré un paradis
fiscal.
Et
est-ce que vous les conseillez, à ce moment-là, de ramener cet argent-là? Est-ce
que les clients choisissent de
le faire? Ou est-ce que vous êtes corrects
avec le fait que certains de vos clients continuent d'avoir des actifs, là,
qu'ils avaient déjà avant d'entreprendre des démarches chez vous?
M. Thuot (Jean-François) : O.K. Donc, au niveau de nos clients,
effectivement, il y a certains de nos clients qui ont des actifs à l'étranger pour lesquels, par
exemple, dans la déclaration de revenus fédérale, on a une question :
Est-ce que vous détenez des biens à l'étranger de plus 100 000 $? On
répond oui à la question, on s'assure que les revenus sont déclarés dans les
déclarations fiscales canadiennes et québécoises.
À
partir du moment où on a un client qui ne veut pas déclarer ses revenus, c'est
clair qu'on ne peut pas le servir, donc
on ne fait pas la déclaration fiscale de ce client-là. Si c'est un client, puis
on n'était pas au courant puis on l'apprend, on l'apprend aujourd'hui, c'est un client que ça fait quatre ans qu'on
s'occupe de lui, bien, ce qu'on va lui recommander... puis ne pas lui recommander, en fait, ce qu'on va
faire, on va faire une divulgation volontaire pour régulariser sa
situation, donc, autant au niveau fédéral
qu'au Québec. Puis un client qui refuserait de procéder à une divulgation
volontaire, bien, ne serait plus un client de Raymond Chabot Grant
Thornton.
M. Fortin
(Pontiac) : Je veux revenir aux 800 millions de pertes fiscales
que Revenu Québec considère. Si vous, en
tant qu'entreprise, il y en a zéro qui vient à travers vos conseils, d'où
viennent ces sommes-là? Qui encourage ces pertes fiscales là pour le gouvernement du Québec? Qui encourage les
clients à aller utiliser les paradis fiscaux? Est-ce qu'il y a des
joueurs au Québec en ce moment qui font ça?
M. Thuot
(Jean-François) : Écoutez, moi, je peux vous parler...
Le Président (M.
Bernier) : M. Thuot.
M. Thuot
(Jean-François) : Oui. Je
peux vous parler de ce qu'on fait chez Raymond Chabot Grant Thornton, je
ne peux malheureusement pas vous parler... Je ne sais pas ce que les autres
font.
M.
Fortin (Pontiac) : Mais vous nous avez expliqué votre expérience professionnelle,
là, avant, qui est quand même assez
extensive, dans le milieu de la planification fiscale. Et donc vous, en tant
que... si je vous enlève le chapeau de
Raymond Chabot, en ce moment vous n'êtes pas capable de me dire qui dans le
monde de la fiscalité québécoise pourrait aider à perpétuer cette perte
fiscale là pour le gouvernement?
M. Thuot (Jean-François) : Moi, je
ne suis pas capable de répondre. Puis je vais vous assurer que, comme
contribuable, c'est un sujet que je trouve important, parce qu'on fait tous les
frais de cette évasion fiscale là.
• (12 h 30) •
M. Fortin
(Pontiac) : Je vais prendre une vos recommandations et je vais laisser
du temps pour mes collègues également
qui voudront vous poser des questions. La
troisième recommandation que vous nous faites, là, sur la révision
de la fiscalité et même l'imposition de
nouvelles taxes ou la reformulation, là, de certaines taxations, si on veut,
pouvez-vous nous expliquer un petit peu ce que vous voulez dire par là, certaines des taxes qui sont mieux
adaptées, là, et qui pourraient avoir un impact, selon vous? Et quel
genre d'impact ça pourrait avoir pour diminuer ces pertes fiscales là?
M. Thuot
(Jean-François) : Bien, ici,
ce qu'on mentionne, effectivement, c'est qu'il
y a plusieurs études qui
démontrent qu'au niveau... On peut imposer de différentes façons, on peut
imposer le revenu, on peut imposer la consommation.
On a eu une récente étude, au Québec, la commission Godbout qui s'est penchée
sur ce sujet-là, où on constate que
l'impôt sur le revenu, bien souvent, c'est un impôt qui est plus nocif que
d'autres formes d'imposition, donc c'est
dans ce cadre-là, ici, qu'on vient illustrer... et que peut-être, avec les
contribuables qui sont plus mobiles, peut-être que l'impôt sur le revenu
a encore un rôle à jouer, mais peut-être moins important. Donc, c'était ça
qu'on voulait amener, de dire : Continuons nos réflexions puis essayons de
trouver des façons qui sont peut-être mieux adaptées à la réalité économique
d'aujourd'hui.
M. Fortin (Pontiac) : O.K. Dernière
question pour moi. Vous avez parlé de votre rôle à l'Université de Sherbrooke, du programme en fiscalité où vous êtes
très impliqué. Dans le cadre des programmes universitaires en fiscalité,
est-ce qu'on parle de planification fiscale
abusive? Est-ce qu'on parle d'évasion fiscale? Est-ce qu'on parle
d'évitement fiscal? Est-ce qu'il y a des
recommandations par rapport à l'éthique pour les planificateurs financiers?
Pouvez-vous nous dire, là, si ces sujets-là sont abordés et dans quelle
étendue ils le sont?
M. Thuot (Jean-François) : Ce n'est
pas moi qui donne ce sujet-là, donc je ne peux pas vous dire comment qu'il est donné, mais je suis convaincu, là, qu'il
y a un cours sur la règle générale antiévitement. En 1993, quand j'ai
fait ma maîtrise, il y en avait un, donc je suis, aujourd'hui, convaincu qu'il
y en a aussi.
Mais
malheureusement je ne suis pas impliqué dans la description des cours, et tout
ça, donc... Je donne certains sujets,
mais... Ça fait que je ne peux pas vous répondre exactement sur cette
question-là, mais je suis convaincu que c'est...
M. Fortin (Pontiac) : Ça va.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
M. le député de Trois-Rivières.
M. Girard : Merci, M. le Président.
M. Thuot, M. Marion, merci d'être ici avec nous.
J'ai une
connaissance quand même intéressante de la fiscalité, de la finance au Québec.
On parle depuis tout à l'heure de
planification fiscale, d'évasion fiscale, d'évitement fiscal. Pour les gens qui
nous écoutent, là, c'est un petit peu du chinois. On a parlé de
planification fiscale abusive, donc planification fiscale versus planification
fiscale abusive, évasion fiscale versus évitement fiscal.
Votre
travail, c'est de travailler avec les gens qui ont un certain niveau de
richesse ou qui ont des entreprises et de payer le moins d'impôt possible. Donc, si je comprends bien, quand c'est
légal, c'est qu'on a fait une bonne planification et qu'on a bien planifié pour aller trouver peut-être
certaines brèches et qu'on a réussi à faire sauver de l'impôt à notre
client, c'est un petit peu ça que je vois.
Est-ce que
votre travail, c'est un peu ça, c'est de trouver les meilleures façons dites
légales ou non abusives de faire sauver de l'impôt à votre client?
Le Président (M. Bernier) :
M. Thuot.
M. Thuot
(Jean-François) : Oui. O.K.,
tout à l'heure, j'ai tenté effectivement — puis je suis d'accord avec vous que
c'est des sujets qui sont complexes — de distinguer la planification
fiscale, l'évitement et l'évasion. Pour nous, c'est important.
Lorsqu'on
parle d'évasion, c'est quelqu'un qui ne suit pas la loi, O.K., donc qui cache
des revenus, réclame des fausses
dépenses, c'est une activité qui doit être traitée au niveau criminel, et ça,
on met ça de côté, je pense que c'est assez
clair. Qu'on utilise les paradis fiscaux ou pas, si on fait de l'évasion
fiscale, il y a des sanctions qui sont prévues.
La
planification fiscale, donc, ça, c'est faire quelque chose qui respecte
l'analyse technique de la loi de l'impôt, l'exemple que j'ai donné, contribuer dans son REER mais ne pas déduire
cette année, déduire juste l'année prochaine. Ça, c'est de la
planification fiscale.
Au niveau de
l'évitement fiscal, puis c'est là le coeur du débat, l'évitement fiscal, c'est
lorsqu'on se base sur l'analyse technique de la loi pour remplir un... — puis
je vais vous donner un exemple tout à l'heure — pour réaliser une transaction et que le
résultat qu'on obtient n'est peut-être pas nécessairement le résultat qui
serait souhaité au niveau de la
politique fiscale. Lorsque c'est clair qu'on va à l'encontre de la politique
fiscale, il y a la règle générale antiévitement. La problématique, c'est
de déterminer c'est quoi, la politique fiscale.
En 1972, quand il y a
eu la dernière réforme importante sur la fiscalité, la loi de l'impôt avait
600 pages. Aujourd'hui, cette même loi
de l'impôt a 3 000 pages, O.K., deux colonnes, on a enlevé les notes
historiques, tout ça. J'ai déjà fait
une conférence sur ce sujet-là puis j'ai dit : À ma retraite, la loi de
l'impôt, elle va être ça d'épais. Essayer de trouver la politique
fiscale dans un document aussi complexe que celui-là est difficile.
Puis
l'analyse de la règle générale antiévitement, l'exemple que je veux vous
donner, vous savez, j'ai parlé tout à l'heure de fiscalité, transfert
d'entreprise à l'intérieur d'une même famille : il y a une règle qui
empêche d'utiliser la déduction pour gain en
capital. Il y a à peu près sept, huit ans, dans le cadre d'un vrai transfert
d'entreprise, les autorités fiscales
acceptaient qu'on contourne cette disposition-là, parce qu'on venait
dire : Dans le fond, cette disposition-là, ça vise à contrer des faux transferts d'entreprise; si on
fait vraiment un transfert par enfant puis qu'on contourne la
disposition, on va permettre que la règle
générale antiévitement ne trouve pas application. Il y a eu une décision, il y
a à peu près un an, qui a été rendue,
qui ne parlait pas de ce sujet-là mais qui parlait de l'interprétation de cette
disposition-là, et les autorités fiscales ont changé leur point de vue,
ils ont dit : Dorénavant, pour ce même genre de planification, on va
appliquer la règle générale antiévitement.
Donc, ce n'est pas quelque chose qui est fixe. Et effectivement, notre rôle, un
client qui vient nous voir, qui veut transférer à son enfant, bien, on
va essayer de trouver c'est quoi, le meilleur scénario pour qu'il puisse
transférer l'entreprise à ses enfants, de façon fiscalement avantageuse.
M.
Girard : Est-ce que, pour une entreprise qui est chez vous, le
meilleur scénario, en toute légalité, quelque part pourrait être, bon,
avec des fiducies, avec une compagnie qui détient l'autre compagnie, etc., et
qui peut être basée ailleurs dans le monde? Est-ce que ça peut être une
stratégie fiscale, une planification fiscale — est-elle abusive ou
pas? — de
créer ce genre de spaghetti organisationnel avec plusieurs sociétés qui sont
des fois à 49 % votantes, non votantes,
etc., bon, vous voyez tout le pattern, et qu'on s'organise pour que ces
sociétés-là aient un pied-à-terre ailleurs qu'au Québec, dans des endroits où est-ce que c'est fiscalement
avantageux, pour transférer une portion des revenus ou tenter d'envoyer
des revenus là pour sauver de l'impôt?
On
se trouve dans une planification fiscale, on se trouve dans la loi de l'impôt,
on va chercher les quelques brèches qu'on peut trouver, et on va réussir
à faire sauver de l'impôt à un client, mais également on va réussir... on va malheureusement générer des pertes pour Revenu
Québec, pour le Québec, pour la société, donc, en bon citoyen, mais
c'est de l'argent qu'on devrait avoir au
gouvernement qui va s'en aller ailleurs ou qui va rester dans les poches de
l'entreprise.
Est-ce
que toute cette poutine-là... Et j'en ai vu, des structures organisationnelles
relativement complexes. Ça, pour vous, c'est une bonne planification
fiscale?
Le Président (M.
Bernier) : M. Thuot.
M. Thuot (Jean-François) : Oui, merci. Tout à l'heure, j'ai précisé. Les
mandats, chez nous, de planification fiscale entraînant des structures
internationales représentent 0,1 % de notre chiffre d'affaires puis ils
impliquent l'Irlande, le Luxembourg.
Quand
est-ce qu'on va mettre en place des structures fiscales internationales? C'est
lorsqu'on a une entreprise qui veut aller développer des marchés à
l'étranger, puis on va le faire de façon optimale pour rapatrier un maximum de
profits au Canada.
Donc,
on n'utilisera pas des fiducies non résidentes pour détenir des actions d'une
compagnie qui réside au Québec, ça irait à l'encontre de la politique
fiscale. Donc, le genre de planification à l'étranger, c'est celle que j'ai
précisée tout à l'heure.
M. Girard :
C'est des choses qui se font, que vous avez probablement déjà vues, et qui
viennent un petit peu expliquer le 800 millions que mon collègue disait
tout à l'heure.
J'ai
une dernière question pour vous, puis ensuite je vais passer la parole à mon
collègue. Est-ce que certaines réprimandes
ou une loi qui viendrait donner des dents pour être capable de pénaliser les
conseillers ou les auteurs de cette planification-là
qui font en sorte qu'ils ont déjoué la loi, en quelque sorte... Donc, est-ce
qu'une firme comptable, si on travaille à les impliquer au niveau des
pénalités possibles, et que ce ne soit pas seulement que le contribuable, mais que la firme soit tributaire de cette stratégie
dite peut-être, en quelque sorte, illégale... Est-ce que ça peut être une
solution pour réduire l'évasion fiscale, de
rendre la firme un peu responsable de cette planification-là? Parce qu'on sait
que ce n'est pas l'entrepreneur qui
fait la publication, c'est la firme qui va tout préparer ça. Souvent,
l'entrepreneur se perd lui-même dans
sa structure organisationnelle d'entreprise. Donc, est-ce qu'une des solutions
pourrait être de trouver une façon de rendre
les firmes responsables de leur planification et qu'ils doivent faire face à la
justice, s'il y a lieu, dans le cas d'une planification abusive?
Le Président (M.
Bernier) : M. Thuot.
• (12 h 40) •
M. Thuot (Jean-François) : Oui, c'est là que je veux nuancer, parce que vous
avez mélangé, dans votre question, l'évasion avec l'évitement, O.K.?
Donc,
au niveau de l'évasion, je suis d'accord avec vous, une firme professionnelle,
comptables, avocats, notaires, qui
encouragerait, qui inciterait un contribuable à faire de l'évasion fiscale au
Canada ou à l'étranger, c'est effectivement probablement une alternative
qui devrait être envisagée, si ce n'est pas déjà le cas.
Lorsqu'on parle
d'évitement fiscal, comme j'ai dit tout à l'heure, l'évitement fiscal, c'est un
sujet qui évolue. Je vous ai donné un exemple d'une transaction où, il y a cinq
ans, les autorités fiscales disaient : La règle générale antiévitement ne s'applique pas, compte tenu de
l'état du droit, et aujourd'hui elle s'applique. Est-ce qu'on mettrait
ces gens-là en prison, les gens des autorités fiscales qui nous disaient que la
règle générale antiévitement ne s'appliquait pas? Je ne crois pas.
Donc, c'est
pour ça qu'il faut être prudent. Quand on parle d'évitement, si elle est
abusive et c'est clair qu'elle va à l'encontre
de la politique fiscale, on est visé déjà par une règle générale antiévitement.
Ça fait que c'est pour ça que c'est important
de revenir sur c'est quoi, de l'évasion, c'est quoi, de la planification puis
de l'évitement, puis trancher clairement, de dire : Ça, c'est de l'évitement, c'est des choses qui évoluent,
étant donné que la politique fiscale est des fois ambiguë.
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Portneuf, je vous donne deux minutes puis je m'en garde deux.
M. Matte : Moi, je suis capable de
respecter le deux minutes. C'est la réponse de M. Thuot, là...
Regardez, on
parle toujours d'évasion, de planification et d'évitement fiscal. L'évasion
fiscale, c'est simple, c'est illégal
puis c'est qu'on prend un moyen détourné pour pouvoir payer moins d'impôt. On
est-u capable de pouvoir vulgariser la différence entre planification et
évitement fiscal?
Ce que j'ai
compris de ce que vous me dites, c'est que, planification, on respecte les
lois, mais l'objectif, c'est de pouvoir diminuer nos impôts, nos taxes.
L'évitement fiscal, bien, c'est une analyse technique. Moi, là, je vais vous voir puis je dis : Vous êtes un spécialiste.
Comment je vais faire pour payer moins d'impôt, moins... Parce que c'est
ça, l'objectif. Quand vous faites de la planification, de l'évitement,
l'objectif recherché, c'est de payer moins d'impôt. Est-ce que c'est légal? Vous allez me dire oui, parce qu'on respecte les
lois, mais c'est jusqu'où c'est légal, c'est ça, là.
Première
question : Êtes-vous capable de me faire la distinction entre
planification fiscale puis évitement fiscal puis jusqu'où que vous avez
une limite?
Le Président (M. Bernier) :
M. Thuot.
M. Thuot (Jean-François) : Donc, au
niveau de la planification fiscale, c'est lorsqu'on se base sur les règles techniques de la loi et qu'en plus on respecte la
politique fiscale, l'intention du législateur. Donc, exemple, le
législateur nous permet de contribuer une
année dans un REER puis de ne pas la déduire dans l'année, la loi ne nous force
pas de le déduire. Des fois, les gens
ne sont pas au courant puis ils le déduisent, même si leurs revenus sont plus
bas. La loi est claire, la politique : on peut reporter à une année
suivante.
L'évasion, on
en a parlé. Ça aussi, c'est clair. C'est que volontairement on ne suit pas la
loi puis qu'on ne la suit pas au Canada... on parle d'économie souterraine,
on est dans des paradis fiscaux. Ça aussi, c'est clair.
L'évitement,
encore là, on se base sur les règles techniques de la loi, d'accord, mais on
contrevient à la politique fiscale.
Puis la politique fiscale, dans un texte qui a 3 000 pages, elle n'est pas toujours, des fois, claire, et
c'est pour ça qu'on... Les tribunaux
ont de la difficulté. Il y a des décisions qui sont rendues en Cour canadienne
de l'impôt qui nous disent : C'est visé par la règle générale
antiévitement, puis en cour fédérale d'appel c'est renversé.
Donc, j'aimerais ça vous dire : C'est
toujours clair que c'est de l'évitement. Malheureusement, je ne suis pas capable. Pour certaines dispositions, je suis
capable, parce que la politique fiscale est clairement établie, mais, pour
d'autres, on n'est pas capables, et même les tribunaux ne s'entendent pas.
Le
Président (M. Bernier) : J'ai une courte question que je veux vous
parler, rapidement, moi, c'est... On a eu l'occasion, dans des rencontres en Europe, de voir les registres centraux
qui sont en place, O.K., de quelle façon il y a les croisements puis toutes ces... tous les
croisements d'information qui existent. Parce qu'on regarde dans le cas qui
nous préoccupe ces derniers jours, au niveau de Panama Papers, c'est d'identifier
ces entreprises-là, d'identifier qui sont réellement
ces gens-là ou ces entreprises-là qui sont reliées. Ici, au Québec, on a des
registres. J'ai une double question : Est-ce que ces registres-là
sont suffisants? Est-ce que ces registres-là devraient être davantage publics
pour qu'on puisse avoir une meilleure
information? Et de quelle façon pouvez-vous contribuer à fournir des
informations dans ces registres-là pour identifier les entreprises?
M. Thuot (Jean-François) : J'ai
manqué... Parce qu'il y a un peu de bruit à l'extérieur...
Le
Président (M. Bernier) : Oui, ce n'est pas les gens qui sont en colère
contre nous, là, faites-vous-en pas avec ça, c'est des travaux, là...
M. Thuot
(Jean-François) : Oui. Je
voulais juste être certain. Quand vous parliez des registres, vous parliez
de quels registres?
Le
Président (M. Bernier) : L'identification des entreprises, des PME,
l'identification des personnes qui sont...
M. Thuot (Jean-François) : Le
registre des entreprises du Québec.
Le
Président (M. Bernier) : C'est ça, registre des entreprises du Québec,
puis tout ça, la suffisance que nous avons. Nous, on se penche beaucoup,
bien sûr, sur nos outils au Québec, donc mes questions sont dans ce sens-là, M.
Thuot.
M. Thuot (Jean-François) :
D'accord. Donc, est-ce que ces outils-là vont être suffisants pour faire le
lien avec les entreprises...
Le
Président (M. Bernier) : Est-ce
qu'ils sont suffisants? Et est-ce que
vous pouvez nous aider à les alimenter?
M. Thuot (Jean-François) : Ça, c'est
toujours un débat au niveau de la transparence. Jusqu'où qu'on veut divulguer des informations, comme société,
par rapport à un contribuable? Il y a des pays où les déclarations de revenus sont publiques,
donc on peut voir, notre voisin, c'est quoi, sa déclaration de revenus. Même
chose pour les entreprises, qu'elles
soient privées ou publiques. Est-ce
qu'on veut aller jusque-là? Ça, c'est
plus une question qui est à déterminer par la législation.
Donc, là-dessus, c'est plus un débat de société sur jusqu'où on veut divulguer
des informations.
Le Président (M. Bernier) :
Donc, c'est au gouvernement à évaluer sa législation actuelle par rapport aux disponibilités d'information et voir de quelle
façon on peut l'alimenter davantage. Je me dépêche parce que je dois
passer la parole au député de Rousseau.
M. Marceau : Ah! C'est à moi?
O.K. Merci. Alors, MM. Thuot et Marion, bien, tout d'abord, merci, merci
d'être là.
Je vais
commencer par des questions sur l'organisation de votre entreprise. Vous nous disiez tout à l'heure que, quand vous
avez des entreprises qui veulent mettre un pied à l'international, vous passez par l'Irlande et le Luxembourg. C'est ça, il me semble. Puis, en fouillant un peu
sur Internet, bon, je me suis rendu compte que vous aviez des... je ne
sais pas si le mot «filiales» est bon, je ne
connais pas votre organisation parfaitement, là, mais par exemple aux îles Vierges britanniques,
où, par exemple, on nous dit qu'il y a des liens avec, bon,
un paquet d'«Eastern Caribbean firms», on y mentionne entre
autres les îles Caïmans. Ensuite de
ça, je suis allé voir... j'ai trouvé une autre page de Grant Thornton
dans laquelle on mentionne des bureaux à Jersey puis à Guernesey. On nous dit que Grant Thornton est un «leading accounting, tax, and business advisory firm». Puis par la suite — puis je vais revenir sur la Barbade tout à l'heure — j'ai trouvé que vous aviez un bureau à la
Barbade, à St. Michael à la Barbade.
Bon,
évidemment, ce n'est pas... vous avez le droit d'avoir des opérations. Vous en
avez dans 130 pays, si j'ai bien compris.
Je veux savoir à quoi servent... Parce
qu'évidemment il y a une clientèle locale, mais vous comprendrez que
l'idée que ces 130 bureaux, puis en
particulier des bureaux à Guernesey, à Jersey, à la Barbade, aux îles Caïmans,
c'est pour strict... Est-ce que vous
me dites que c'est strictement pour servir les entreprises locales ou la
population locale et que ça n'a... vous, vous n'avez pas de clients qui
ont des opérations qui passent à travers ces pays-là? Ça, c'est ce que vous
nous dites?
Le Président (M. Bernier) :
M. Thuot.
M. Thuot
(Jean-François) : Bien, en
fait, c'est ça, ce que j'ai mentionné tout à l'heure. Donc,
effectivement, on est membre du réseau Grant Thornton International, on a des cabinets un
peu partout. Si demain matin j'ai un client qui veut ouvrir un hôtel en France, on va utiliser nos
correspondants qui sont en France. S'il veut ouvrir un hôtel au Panama,
on va l'aider dans la réalisation de son projet.
J'ai parlé de
nos planifications, chez Raymond Chabot, fiscales internationales,
qui impliquent principalement l'Irlande,
le Luxembourg. Qu'est-ce qui se fait comme fiscalité dans ces cabinets-là, à
Jersey, au Panama ou tout ça, je ne peux
pas vous dire, là. Moi, je peux vous parler de ce qu'on utilise chez Raymond
Chabot, mais je ne peux pas vous dire quel genre de travail qui se fait
dans les cabinets partout à travers le monde, là.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
M. le député.
M. Marceau : Puis, si un client venait vous voir puis vous
disait : Moi, j'aimerais ouvrir une coquille à la Barbade, une société
coquille à la Barbade, pour des raisons d'impôt, vous diriez : Nous, on
n'est pas là-dedans, puis vous les laisseriez aller ailleurs, tout simplement?
M. Thuot
(Jean-François) : Au niveau
de la Barbade, il ne faut pas oublier qu'on a une convention fiscale
avec la Barbade. D'accord? Et je vais laisser mon collègue Daniel Marion
expliquer plus au niveau technique la fiscalité internationale, mais encore faut-il qu'on respecte, comme j'ai dit tout à l'heure, la politique fiscale qui est prévue, donc on n'ira pas, à cause qu'on a un bureau à la Barbade,
ouvrir... faire quelque chose qui est de l'évasion tout simplement à cause qu'on a un bureau là-bas.
Mais, juste pour vous mettre en contexte, je
vais quand même laisser Daniel peut-être, oui...
• (12 h 50) •
M. Marceau : ...si vous permettez, là, parce que
le temps est très, très limité, là. Il y a 71 milliards d'investissement canadien
à la Barbade. C'est légal, la loi a été rédigée ainsi, la réglementation a été rédigée ainsi. D'ailleurs, c'est un acte volontaire du gouvernement fédéral dans les années 90. Je ne m'explique
pas ça, puis je vais y revenir dans deux secondes.
Cela étant, ma question, ce n'est pas de
savoir votre intention. Ma question, c'est : Vous, là, y a-t-il des entreprises
qui sont venues vous voir puis vous ont
dit : Moi, je veux ouvrir...
Puis je ne vous demande pas de nom de client, là, je veux juste savoir. Il y a quelqu'un qui effectue ces
investissements-là, il y a des sociétés coquilles qui ont été mises en
place, il y en a des centaines à la Barbade.
Est-ce qu'il y en a qui passent à travers vous ou pas? C'est ça, ma question,
très simple.
Le Président (M.
Bernier) : M. Marion.
M. Marion
(Daniel) : Je dirais que,
dans l'histoire du bureau, probablement que oui, il
y a des sociétés
de nos clients qui ont utilisé la
Barbade pour faire des affaires à
l'extérieur du Canada,
mais c'est ça qui est la clé de la politique fiscale canadienne.
Comme on le disait tantôt, le cadre législatif canadien fait en sorte de
s'assurer que les revenus canadiens soient imposés au Canada, mais on donne aussi
aux entreprises canadiennes des outils pour être compétitives sur
le marché international, et dont l'utilisation de pays où le taux d'impôt est
plus bas. Et puis le Canada a signé des conventions.
Je vous dirais, par exemple, si j'ai un client
qui exploite une entreprise au Canada, puis il vient me voir puis il me dit : Je voudrais m'installer
physiquement en Europe parce que j'exploite le marché européen, dis-moi quel est
le meilleur endroit où je devrais aller,
bien, la première réaction, ça va être de lui dire : Bien, est-ce que
tu peux t'incorporer et avoir ta
place d'affaires en Irlande? Le taux d'impôt est 12,5 %. Si tu vas en France, c'est 34 %.
Est-ce que tu es capable d'opérer ton
marché européen à partir de l'Irlande? Il y a une convention entre le Canada
puis l'Irlande, l'Irlande a plein de conventions
avec le monde. Il y a une main-d'oeuvre qualifiée en Irlande, ils ont un régime
qui a fait en sorte d'améliorer les conditions économiques du pays et puis...
Oui, tout à fait. Et c'est pour ça qu'on va utiliser nos bureaux à travers le
monde aussi.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau : Vous allez me
permettre de revenir à la Barbade. On a adopté à l'Assemblée nationale, à l'unanimité, une motion qui demande au
gouvernement fédéral de modifier la loi de l'impôt, le règlement sur l'impôt
de façon à bloquer complètement l'accès à la
Barbade pour, dans le fond, éviter de payer des impôts, ce qui est
parfaitement légal présentement, là. C'est difficile de comprendre qu'on puisse
avoir fait ça au Canada, mais c'est comme ça.
M. Thuot (Jean-François) : ...pas
nécessairement légal aussi, il y a l'aspect...
M. Marceau : Oui, je
comprends, il peut y avoir des illégaux aussi...
M. Thuot (Jean-François) : Non, non,
mais au niveau de la...
M. Marceau :
...mais en pratique, vous savez, on sait que Loblaws, Petro-Canada, toutes les grandes
banques canadiennes sont toutes là, toute la gang, là. Tout le monde est là,
là, et tout le monde...
M. Thuot (Jean-François) : ...légal,
c'est que, la politique fiscale, ça respecte le... C'était dans ce sens-là.
M. Marceau :
On s'entend. Ma question, c'est plus : Vous, là, est-ce que vous êtes
d'accord avec cette opinion de l'Assemblée nationale? Est-ce que vous
trouvez que c'est une bonne idée de fermer l'espèce de trou béant qui existe
dans notre législation?
M. Thuot
(Jean-François) : Je vous
dirais que, dans le fond, il y a deux volets, hein? Il y a le volet... Nous,
on est du côté de la planification fiscale,
donc un client vient nous voir, il veut réaliser des projets, puis on l'aide à
réaliser ses projets de la façon la
plus avantageuse au niveau fiscal. Et il y a l'aspect politique fiscale. Donc,
c'est vous qui tenez le crayon, au niveau de la politique fiscale, ce
n'est pas nous. Donc, à partir du moment où il y a une règle de loi qui est
annoncée, bien, du côté de la planification, nous, on...
M. Marceau : ...tout
simplement.
M. Thuot (Jean-François) : Voilà.
M. Marceau :
Ça, je comprends ça. Ça n'empêche pas que... Vous parliez de l'ampleur de la
loi de l'impôt de nos jours. Bon,
moi, il me semble qu'il y a moyen de simplifier. Puis j'imagine que vous voyez
d'un bon oeil le fait que les règles soient égales pour tout le monde,
peut-être que ça... Enfin, il me semble que ce serait une chose simple à faire.
En tout cas,
vous n'avez pas d'opinion à formuler là-dessus, mais vous dites que vous allez
vous plier aux règles qui seront mises en place, tout simplement. C'est
ce que je comprends.
M. Thuot (Jean-François) : ...la
politique fiscale qui va être établie. Tout à fait.
M. Marceau :
O.K. Juste aller sur un autre sujet... bien, enfin, un sujet un peu lié. Vous,
est-ce que vous avez des clients avec qui vous avez parlé de prix de
transfert? Donc, vous avez des clients, dont des multinationales, donc, qui ont des filiales un peu partout à travers le
monde, et évidemment il faut qu'ils remplissent leurs rapports d'impôt, il
faut que... puis souvent dans plusieurs
juridictions. Puis les prix de transfert, bien, vous le savez comme moi, c'est
quelque chose qui doit être établi, fixé.
Est-ce que vous conseillez les entreprises dans l'établissement des prix de
transfert, sur la base des critères, évidemment, qui existent dans les
différentes fiscalités à travers le monde? Est-ce que vous faites ce genre de
travail là?
Le
Président (M. Bernier) : M. Marion.
M.
Marion (Daniel) : Tout à fait. On a un groupe... Tantôt, Jean-François
mentionnait qu'on était une quarantaine d'employés qui faisaient de la fiscalité internationale. Ça englobe un
paquet de spécialisations, dont le prix de transfert. On a un groupe qui ne fait que du prix de
transfert puis qui conseille et qui aide les entités, les sociétés canadiennes
à se conformer aux règles fiscales
canadiennes et aux règles fiscales étrangères aussi, parce qu'on sait que, le
prix de transfert, ça a été
d'actualité il y a une quinzaine d'années, mais maintenant c'est bien implanté
dans la plupart des grands pays industrialisés, on ne peut plus faire
affaire à l'étranger, maintenant, si on ne se penche pas sur les considérations
de prix de transfert.
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M.
Marceau : O.K. Et
puis de manière... Est-ce que vous considérez qu'il y a trop de latitude
dans l'établissement de ces prix de
transfert ou est-ce que vous êtes favorables à l'idée, là, par exemple, qui a été mise de l'avant par l'OCDE, entre autres, là, de
resserrer la manière de les déterminer?
• (13 heures) •
M. Marion
(Daniel) : C'est une bonne question puis c'est une question difficile
à répondre en trois minutes.
Historiquement,
le prix de transfert, ça a été développé... c'est une théorie économique. Quelles sont les fonctions, quels
sont les risques qui sont assumés par une entité? Et puis quelle devrait être
la rémunération rattachée à ces fonctions puis à ces
risques-là? C'est un mécanisme très connu par les conseillers, par les
autorités fiscales à travers la planète.
Je comprends qu'on commence à songer peut-être à changer la façon de l'établir, la profitabilité
ou la rémunération d'une entité, basé
sur le nombre d'employés qu'elle a, par
exemple. Ça se peut très bien
qu'on va arriver là. On n'est pas contre. Il faut s'ajuster, c'est la
suite des choses.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député...
M. Lisée :
Rosemont.
Le Président (M.
Bernier) : ...de Rosemont.
M. Lisée :
Merci, M. le Président. Merci d'être là. Je vais aller rapidement parce qu'on a
peu de temps.
Comme vous le savez,
il y a des bons citoyens corporatifs puis il y a des moins bons ou des mauvais
citoyens corporatifs. Alors, vous, vous nous
dites : Lorsqu'il y a quelqu'un qui vient chez nous puis qui nous
dit : Bon, bien, je voudrais
faire de l'évitement fiscal agressif, vous dites : Non, on ne veut pas de
vos affaires. Nous, on fait de l'évitement fiscal légal, par exemple avec la Barbade ou autrement, on respecte la
règle fiscale, mais, si vous, là, vous voulez aller au Panama, puis vous
avez entendu dire qu'il y a un de vos compétiteurs qui est allé là puis il a
enlevé 2 % sur ses coûts de production grâce à ça, puis que vous voulez le
backer, nous, on ne fait pas ça.
Alors, combien ça vous arrive de fois par année
qu'il y a un client qui s'en va ailleurs parce que vous avez dit non?
Le Président (M.
Bernier) : M. Thuot.
M. Thuot
(Jean-François) : Oui. Je vous dirais que le monde de la fiscalité a
changé un peu au niveau de l'agressivité par rapport aux planifications qui
sont proposées. Notre firme a toujours eu une approche conservatrice, et ce qui a été fait, d'accord... Il arrive qu'il
y ait d'autres firmes qui proposent à nos clients des planifications qui
sont agressives ou abusives. Ces mêmes
clients là nous demandent notre opinion, on leur émet une opinion, et bien
souvent ils vont suivre une approche qui va être plus conservatrice, qui est la
nôtre.
M.
Lisée : Mais je vous demande... Je comprends. Je vous
demande : Vous avez perdu combien clients en un an, là, en étant un
bon gestionnaire, respectueux des lois?
M. Thuot (Jean-François) : Il est arrivé qu'on ait effectivement perdu des
mandats de planification fiscale dans le passé, mais je n'ai pas de
chiffre à vous donner.
M. Lisée :
Pas suffisamment pour mettre en péril la rentabilité de l'entreprise.
M. Thuot
(Jean-François) : On est en expansion et on est fiers d'être en
croissance.
M.
Lisée : Évidemment,
l'entente fiscale avec la Barbade, c'est de l'évitement fiscal agressif légal,
je veux dire, c'est... non, je
m'excuse, c'est...
M. Thuot (Jean-François) : Quand on parle d'évitement fiscal, c'est lorsque c'est contraire à la politique
fiscale.
M. Lisée :
Bien oui, je sais. Alors, c'est contraire...
M. Thuot (Jean-François) : Ça peut...
M.
Lisée : Je vais finir ma question : C'est contraire à tout
ce qu'on dit qu'on devrait faire pour empêcher une entreprise de
camoufler des profits à l'étranger, sauf que le premier ministre Paul Martin a
décidé de légaliser avec la Barbade une entente qui n'est pas légale avec
d'autres paradis fiscaux mais qui crée une brèche.
S'il fallait fermer cette brèche et si, à la
demande unanime de l'Assemblée nationale de fermer cette brèche... Qu'est-ce que vous diriez à vos clients qui
l'utilisent maintenant de faire? Est-ce que ce ne serait pas une perte pour
eux, dans leur structure de coûts, par rapport à des concurrents qui ont accès
à ce genre de chose là?
Le Président (M. Bernier) :
M. Marion.
M. Marion (Daniel) : Ce que je
voudrais ajouter, c'est que, quand on parle d'utilisation de la Barbade, de l'Irlande, du Luxembourg, on parle de taxation de
revenus qui proviennent de l'étranger. Si une société canadienne était capable d'incorporer une société à la Barbade pour transférer des profits canadiens
dans la société de la Barbade, on parlerait effectivement
d'évitement fiscal agressif, puis on n'embarquerait pas dans ça. Quand on
conseille nos clients, nos entrepreneurs à
s'installer dans des paradis fiscaux, de façon légale, c'est toujours
pour exercer leurs entreprises à
l'extérieur du Canada.
M. Lisée : Mais ce que je
vous demande : Ce serait un gros changement dans la réalité fiscale de plusieurs
de vos clients?
M. Marion
(Daniel) : Pour nos clients
à nous, non. Je ne peux pas parler pour les autres bureaux, mais, pour
nos clients à nous, non.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. Bonjour, messieurs.
Vous êtes des spécialistes internationaux aussi. Vous le disiez tantôt, vous en avez une quarantaine qui travaillent avec
d'autres pays. Moi, je veux aller de l'autre côté de l'Atlantique,
la Cité de Londres. On dit de la Cité de Londres que c'est la toile d'araignée,
l'épicentre d'une grande partie des affaires douteuses dans ce monde. Êtes-vous
d'accord avec ça? Est-ce que vous connaissez un peu cette Cité? Êtes-vous déjà allés? Avez-vous déjà eu
des contacts avec... Je sais que vous avez un bureau de Grant Thornton,
là, qui est à côté, là, qui est même à la limite. Est-ce que, pour vous, c'est
véridique de penser, avec la sortie des Panama Papers... de dire que la Cité de
Londres est la toile d'araignée de l'évasion fiscale dans le monde?
Le Président (M. Bernier) :
M. Thuot.
M. Thuot
(Jean-François) : Bon, écoutez,
je n'ai pas d'opinion là-dessus. Je l'entends, là, de votre bouche. Moi,
je n'ai pas de commentaire.
Le Président (M. Bernier) :
M. Marion.
M. Marion
(Daniel) : Non, il y avait...
Puis je ne suis vraiment pas un spécialiste de ce domaine-là, malheureusement. Parce que je sais qu'à une époque il y avait une disposition qui faisait en sorte que, si un
individu — puis
habituellement c'est des gens très
riches — s'installait
à Londres, mais qu'ils n'étaient pas ce qu'on appelait domiciliés à Londres, ils n'étaient pas imposables sur leurs
revenus de source mondiale à Londres, puis, bien, il y avait comme une échappatoire, là. Je pense que ça a été refermé.
Ce que je vois surtout dans l'actualité aujourd'hui, c'est que
l'Angleterre, entre autres, est très,
très active avec l'OCDE, avec les
BEPS. On a vu des commissions semblables à celle-ci en Angleterre l'an passé, où ils ont invité Google puis Amazon
puis ces sociétés-là pour s'assurer que la juste part des profits
devrait être taxée en Angleterre. À l'heure actuelle, je ne pourrais pas dire
plus que ça.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M.
Bonnardel : Donc, vos bureaux de Grant Thornton qui sont à la
Cité, comme tel, vous ne faites pas affaire avec eux ou...
M. Marion
(Daniel) : On fait affaire
avec eux parce qu'on a beaucoup de
clients qui veulent aller s'installer en Angleterre, incorporer des
sociétés, opérer le marché anglais, mais ce n'est pas pour faire de l'évasion
fiscale.
M.
Bonnardel :
Donc, il y a pas mal de sociétés canadiennes quand même qui sont là, mais qui
n'utilisent pas nécessairement la Cité pour être une toile d'araignée
avec les compagnies...
M. Marion (Daniel) : Ça ne m'est
jamais arrivé.
M.
Bonnardel : O.K. Question qui vous a sûrement déjà été posée
par d'autres, là, mais je prends l'exemple, là, comme mes collègues l'ont mentionné, de l'évasion d'une entreprise... ou
même moi, personnellement, j'ai 1 million, j'ai 1 million de dollars à placer puis je ne veux
pas payer trop d'impôt sur mes revenus. Je pense, la question, vous la
voyez venir grosse comme ça, là, mais comment vous
pourriez m'aider? Puis quelles sont les dispositions où vous allez me dire : François, tu as 1 million à
placer, tu ne veux pas payer trop d'impôt... Qu'est-ce que vous m'offrez? En
deux minutes.
M. Thuot
(Jean-François) : En deux minutes?
M.
Bonnardel :
Bien, sinon, il vous en reste cinq. Je peux vous les laisser, si les
dispositions sont bonnes à...
M. Thuot
(Jean-François) : Je m'en allais vous offrir une consultation après.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Thuot (Jean-François) :
Bien, écoutez...
Le Président (M.
Bernier) : Il n'y a pas de tarification, en passant.
M. Thuot
(Jean-François) : Il n'y a pas de tarification. O.K. Bien, d'abord, je
ne répondrai pas. Non, non.
En
fait, bien, écoutez, si on a quelqu'un qui est fortuné, on peut penser à des
planifications pour peut-être réduire les impôts au décès, hein, parce qu'on sait que, si j'ai 1 million
aujourd'hui puis j'investis dans des actions, puis ça prend de la valeur, bien, au moment au décès, je vais réaliser
un gain en capital puis je vais devoir m'imposer sur ce gain en capital
là. Ça fait qu'on va penser peut-être à des
planifications de gel successoral pour réduire les impôts au moment du décès.
On va peut-être penser à des stratégies de
fractionnement de revenu, on va penser à... C'est ça, je vous dirais, en deux
minutes, là, je penserais impôt au décès, fractionnement de revenu.
Le Président (M.
Bernier) : Est-ce qu'on va penser à aller à l'extérieur?
M. Thuot
(Jean-François) : Aller à l'extérieur?
Le Président (M.
Bernier) : Oui.
M. Thuot
(Jean-François) : Comme j'ai dit...
M.
Bonnardel :
Oui, bien, écoutez, une dernière question peut-être...
M. Thuot (Jean-François) : Non, bien, ce qui est clair, c'est qu'on ne peut
pas aller à l'extérieur. On l'a dit tantôt : La politique fiscale, les revenus passifs gagnés à
l'étranger doivent être imposés au Canada. Si quelqu'un va à l'extérieur
pour investir puis il ne veut pas le déclarer, c'est de l'évasion fiscale, et
notre tolérance est zéro. Puis je vous l'ai dit, il y a des clients qui
viennent nous voir, des fois, puis ça ne dure pas plus que cinq minutes, là.
M.
Bonnardel :
Quelles sont les règles fiscales qui sont, selon vous, les plus souvent
contournées?
M. Thuot (Jean-François) : Actuellement, celles qui sont le plus souvent
contournées, dans un cadre canadien, on sait que l'écart entre le taux d'imposition sur le dividende et le gain
en capital n'a jamais été aussi élevé depuis 1972, donc aujourd'hui, les
planifications, il y a beaucoup de gens qui essaient de créer du bien en
capital au lieu de sortir un dividende,
c'est ce qu'on voit beaucoup. Puis comme j'ai dit tantôt, les autorités
fiscales, la politique fiscale n'est pas claire.
M.
Bonnardel :
C'est beau. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Bernier) : Moi, je vais vous parler de l'OCDE.
Vous avez souligné tout à l'heure... En ce qui regarde le travail que l'OCDE fait présentement, vous avez reconnu que
plusieurs actions, plusieurs projets sont en discussion pour une application, mais vous avez dit également
que ce n'était pas nécessairement suffisant, par rapport au travail qui
est fait par l'OCDE. Vous recommandez quoi,
toujours dans le cadre des planifications abusives, là, qui pourrait être
mis de l'avant? On sait que le Canada en est
membre. Nous, on a quand même jeté un bon coup d'oeil là-dessus. Qu'est-ce
que vous recommandez en disant... en mentionnant que ce n'est pas suffisant?
M. Thuot
(Jean-François) : Bien, dans le fond, il faut encore plus de
coopération entre les juridictions afin d'éviter, justement, qu'il y ait un
débalancement puis que certains contribuables utilisent des juridictions à
fiscalité avantageuse, là.
Le
Président (M. Bernier) : Donc, somme toute, que les
gouvernements soient plus partenaires entre eux pour venir contrer l'évitement fiscal dans la mise en
application de leur fiscalité, c'est un peu ce que vous suggérez par
rapport aux actions posées.
M. Thuot
(Jean-François) : Exactement, oui.
Le
Président (M. Bernier) : Parce qu'on sait qu'aujourd'hui c'est
mondial, ce phénomène-là. Tout le monde met la main à la pâte, tout le
monde essaie de faire ce qu'il faut.
Juste une question d'information générale. On
sait qu'il y a beaucoup... en tout cas, il y a beaucoup... il y a beaucoup plus
de gens, aujourd'hui, qui font de la divulgation volontaire. Est-ce que c'est
un phénomène que vous retrouvez parmi vos clients?
M. Thuot (Jean-François) : Je vous
dirais qu'effectivement il y a beaucoup de divulgation volontaire qui
s'effectue actuellement, donc des gens, pas des clients de notre organisation,
qui viennent nous voir pour faire des divulgations volontaires pour eux. Donc,
effectivement que c'est une tendance lourde, là, oui, tout à fait.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Est-ce que vous avez d'autres
questions, messieurs? Ça vous va? Donc, je vous remercie de votre
participation à la Commission des finances publiques. Nous avons apprécié que
vous puissiez vous rendre disponibles ce matin.
Donc, je lève la commission jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 6)
(Reprise à 15 h 2)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux. Et nous prions,
bien sûr, ceux qui sont dans la salle d'éteindre la sonnerie de leurs
téléphones cellulaires.
Je souhaite
la bienvenue à nos invités de chez KPMG. Donc, pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien
vouloir vous présenter lorsque vous prenez la parole pour la première fois, avec
vos titres. Vous avez une présentation d'une
quinzaine de minutes, par la suite vont suivre des échanges avec les
parlementaires. Je vais essayer d'intervenir le moins possible pour laisser aux parlementaires le soin de vous
interroger, sans avoir à répéter votre nom, donc, à moins que vous changiez de personne. Donc... Welcome to this Commission, we
appreciate your collaboration. Thank you. La parole est à vous.
KPMG International
M. Langlois (Guy) : Je vous
remercie, M. le Président et membres de la commission, de nous avoir invités à
comparaître devant cette commission. Je suis l'associé directeur de KPMG au
Québec et j'oeuvre au sein de KPMG Canada
depuis plus de 29 ans. N'étant pas un spécialiste de la fiscalité, je suis
accompagné de Greg Wiebe, qui est chez KPMG
depuis plus de 30 ans et vient tout juste de terminer un mandat à titre de
chef mondial du groupe Fiscalité de KPMG International. Avant cela, Greg
a occupé le poste d'associé directeur canadien du groupe Fiscalité de KPMG
Canada. Certains d'entre vous reconnaissent
peut-être Greg, puisqu'il a comparu devant le Comité permanent des finances de
la Chambre des communes à Ottawa la semaine dernière.
Nous
apprécions l'occasion qui nous est donnée d'aider à clarifier et mieux
comprendre un certain nombre de questions
qui sont importantes pour nous tous, en tant que Québécois et Canadiens, ainsi
que pour la profession comptable et
KPMG. Nous sommes fiers de notre rôle dans la société et nous tenons très au
sérieux la confiance qu'accordent à KPMG nos clients, la communauté des affaires et la communauté financière dans
son ensemble, ainsi que, par-dessus tout, les collectivités où nous
vivons et travaillons.
Nous avons
des bureaux à Montréal et à Québec et comptons plus de 750 employés et
80 associés. Notre cabinet est au
service des Québécois et des Canadiens depuis près de 150 ans. KPMG compte
6 400 employés dans 40 bureaux, de Victoria à Saint John. À l'échelle mondiale, le réseau KPMG compte
175 000 professionnels dans 155 pays. Chaque jour, les membres de notre personnel viennent au travail
afin d'aider nos clients à surmonter les défis d'affaires auxquels ils
sont confrontés.
Plus de la
moitié de notre chiffre d'affaires au Québec provient de l'aide que nous
apportons aux entrepreneurs pour
faire croître leurs entreprises dans un environnement de plus en plus complexe.
Nous aidons nos clients à avoir du succès
localement et internationalement. Nous aidons à protéger les investisseurs à
travers nos services en audit. Nous aidons
également nos clients à se conformer à de nombreuses obligations
réglementaires, autant au Québec que dans le reste du Canada ou ailleurs dans le monde. Et finalement
nous sommes fiers de nos valeurs fondamentales et de la contribution à
la prospérité de nos communautés.
Les membres
de notre personnel accomplissent tout cela en harmonie avec les valeurs de
notre organisation. L'une de ces valeurs se démarque des autres :
par-dessus tout, nous agissons avec intégrité.
J'aimerais maintenant céder la parole à Greg.
Le Président (M. Bernier) : Mr.
Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : Thank you very much for this
opportunity. I wish to apologize upfront that I cannot
speak French appropriately, I apologize for
that. I hope we can still have a very good conversation. Bonjour et merci pour
l'invitation.
Before
I get into the topics of tax havens and give our perspective on this issue that
is of concern to Quebeckers and Canadians, I would like to say a few words about how our society and
attitude towards taxation have evolved. I would also like to address how KPMG has evolved over the
years, too. We not only meet our legal and professional obligations in
serving our clients, but also meet the needs of a broader group in society,
including the tax authorities and the communities in which we live.
All tax planning undertaken by
KPMG has always and continues to meet the technical requirements of the
Canadian and provincial tax laws. That we always comply with the law is a
given.
But,
today, the wold looks at tax planning through more than just a legal lens. As a
firm, we have modified our business practices to meet
these expectations. Today, we look at tax planning with three lenses. It must,
of course, be within the letter of the tax laws. It must be within the spirit
of the tax laws, that is supportable in light of the General Anti-Avoidance Rule, or GAAR, of the federal,
Québec, and other provincial tax laws. And finally, even if it is a
legal, lawful tax plan and does not offend
GAAR in our view, it must pass a third lens: it must be in the deemed
appropriate, considered in light of the risk tolerance of our clients,
including the risk to their reputation as well as the reputation of KPMG
itself.
We
have cemented these three lenses into our ever-evolving quality review
framework. For instance, by 2006, any significant tax plan required a review by an
independent partner, a committee considering the applicability of the
General Anti-Avoidance Rule, and a risk and reputation review committee and
other areas deemed appropriate by our professional standards.
In 2009, we developed and
deployed a global tax code of conduct, which we call Principles for a
Responsible Tax Practice, that sets forth
the commitments we make every day to our people, our clients, the tax
authorities, and our communities. It
spells out our responsibilities as individuals and as leaders and requires us
to act as role models, promoting ethical behaviour and ensuring that our
own actions serve to reflect our values.
There
has been a lot of media attention recently on tax havens, including some focus
on a particular tax plan created by our firm in 1999 involving a corporate
structure in the Isle of Man. While this was fully compliant with the tax
laws of the time, we decided to cease
offering it to clients almost a decade ago. The world, in 1999, was a much
different time and place than it is
today, a lot has changed in the last 17 years. What I can tell you is
that, using our current standards today, we would not offer such a plan
to our clients.
Like
every business, we have changed dramatically since 1999. One area where we have
not changed, however, is the importance that we place
on client confidentiality.
Client
confidentiality is not just a KPMG issue, it is a cornerstone of the accounting
profession. We have legal and professional obligations
to keep our client information confidential. As all of you can appreciate, if
Quebeckers and Canadians could not trust
their accountants to keep their private business affairs private, there would
be no accounting advice.
Moving
on to the broader topic in question, we are pleased to share our perspective
and thoughts on the topic of tax havens. Tax havens and
the related issues are relevant to all Quebeckers, Canadians, and, indeed, the
citizens of all countries around the world, and to the integrity, stability,
and proper functioning of our collective tax systems.
Let
me start by stating our conclusion. Simply put, our existing tax system does
not work well enough. The basic problem is that business is global, yet taxation systems are primarily
national — and in some cases
provincial — in their focus. Many steps have been taken over the years,
including, most recently, major initiatives by the OECD and the G20, to
make the system more fair, but significant gaps still exist.
The inappropriate use of tax
havens is clearly one of the problems with the tax system. We make specific
recommendations for change later in our submission.
• (15 h 10) •
So, what exactly is a tax haven? It can
certainly mean different things to different people. To give this discussion and our comments a
proper context, I'd like to cite the OECD's generally accepted definition.
Under the OECD model, there are three
key identifying badges of a tax haven jurisdiction. First of all, there is no
or nominal taxes in the jurisdiction. Second, there is a lack of
transparency in the jurisdiction, often involving bank secrecy. And, finally,
the laws or administrative practices of the
tax haven jurisdiction prevent the effective exchange of relevant information
with other governments and their tax authorities.
There
are two main streams in the tax haven debate, and we need to look at each
stream differently. First, we have individuals who pay personal tax on their incomes,
and secondly, we have businesses who pay taxes on their profits. In the
case of individuals, they are generally currently subject to income taxation on
their global income in their home country,
i.e. the jurisdiction in which they live. In general, business profit should be
taxed in those jurisdictions where the profit is earned.
Tax systems, however, have not
been able to keep up with the modern realities of today's digital world and our global marketplace. As an example, Canada's
income tax system was introduced in 1917, and the framework was amended in 1948. At that time, the movement of
people and capital was fairly limited. It was therefore natural that the
income tax system came to be structured around two concepts : the place of
residence and the source of their income. Although rapid changes in our
society, such as globalization and the digital economy, have brought about far
greater movement of people and capital, Québec and Canadian taxation continues to be based
on these two core concepts.
We believe that, in 2016, all
tax jurisdictions should fall in line with the emerging international norms and
expectations around the automatic exchange of financial account information
with governments of all jurisdictions. The
OECD has recently developed standards for automatic exchange of financial
information in tax matters, and the related common reporting standards are leading the way in this regard. Pressure
should be placed on those remaining tax haven jurisdictions to fully
comply with these global standards. We do believe that governments need to have
the right to determine their own policy around the taxation of their own
citizens, as long as it does not negatively affect another jurisdiction.
Given our highly competitive global marketplace, it is
not surprising that in their quest to attract foreign investment governments have been prompted to reduce their corporate tax
rates and tax burdens in general to provide an incentive for global players to invest and locate business activity in
their jurisdiction. Ireland and Barbados are two examples of countries with low corporate tax rates designed to
attract foreign investment. Not surprisingly, many governments struggle to strike the right balance between
expanding their tax revenue base and preserving their international
competitiveness.
This
tax rate competitiveness is not just defined to
country-to-country, it also applies to competition between subnational jurisdictions. In Canada, there is the same type of competition between
the provinces to provide incentives to business to locate in their province. You will
know that Québec, for example, with your income tax credit system, favours targeted industry
sectors. In fact, your latest budget just introduced
patent box legislation in order to support innovation in the Québec manufacturing sector by offering a low 4% tax rate for qualifying
income under this new regime. Until recently,
Alberta has been touting its low corporate tax rates as the «Alberta Advantage»
to attract business to their province. Seeking
to maximize their business operations and profits, global businesses compare
corporate rates, amongst other factors, in determining how to structure
their affairs.
This
current system of country-based
taxation presents two potential areas for abuse: firstly, jurisdictions purposefully allow for their tax systems to be
used in a way that harms the revenue collection efforts of other
countries, without legitimate business
substance, and secondly, the disconnect between national taxation systems that allow some of the profit earned by a
multinational to not be subdued to taxation anywhere. This occurs because
national tax systems do not always fit seamlessly together, so some
income earned by today's global business model may eventually escape taxation
in anyone's jurisdiction.
In our view, the global taxation system applicable to business needs
to change in at least four ways: first, to stop the inappropriate allocation of
profit to those jurisdictions where the economic activity would not justify
such an allocation — in other words, realign the tax rules to better
track economic substance and value creation; second, to
better reflect the true nature of evolving business models, such as the digital
economy; third, to allow for the sharing of tax information, including tax rulings, amongst the tax
authorities; and, finally, to encourage jurisdictions to correct the known disconnects and mismatches that allow for profit to not be
subject to taxation anywhere.
Notwithstanding
these recommendations, a country's tax system needs to be flexible enough to
continue to allow for tax competition,
including reduced rates on corporate income where substance exists, patent box
incentives to encourage innovation
and tax subsidies to attract the investment of capital and the creation of
jobs, amongst other things.
The OECD's base erosion and profit
shifting — or BEPS — initiative could go a long way in achieving some of our recommendations. The action plan which has been endorsed by the G20 countries,
including Canada, focusses on 15 initiatives. We agree that these are the
right 15 key areas of focus in the international tax arena. The action
plan covers the waterfront, including
tackling the digital economy, tax transparency, and provides best practices to
limit the erosion of a country's tax
base by interest deductions, and other financial payments, and significant new
transfer pricing guidelines.
If the G20 countries take the lead
here and push hard to make the appropriate changes to their domestic tax laws and tax treaty networks, this can lay the foundation for a
much needed overhaul of our global tax system.
The
OECD recently developed the Standard for Automatic Exchange of Financial
Account Information in Tax Matters, which calls for the annual automatic
exchange of financial account information between
governments. To make this exchange of information possible, financial institutions, as broadly
defined under domestic and international law, must
report information according to
common reporting standards on accounts held by non-resident individuals and
entities such as certain corporations, trusts, and foundations.
Countries around the world have begun
enacting legislation to implement these common reporting standards in their jurisdictions. These measures are a significant step
towards a globally coordinated approach to disclosure of income earned by individuals and organizations and build on other
information-sharing legislations such as FATCA in the
U.S.
Every member of our KPMG team is
committed to and supportive of the continuing evolution of our world to a place where there is more
trust in the role of government, the role of the accounting profession, and
confidence by society in the fairness of the taxation system here in
Québec, Canada, and globally.
In conclusion, we thank the Québec
Committee on Public Finance for its work in this important matter and for inviting us here.
Mr.
President, I will now be happy to take your questions.
Le
Président (M. Bernier) : Thank you, Mr. Wiebe. Thank you
for your presentation.
M. le député de Pontiac, la parole est à vous. Nous allons maintenant
passer aux échanges avec les parlementaires, nous allons débuter par la
partie gouvernementale. M. le député de Pontiac.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Merci, M. Langlois,
Mr. Wiebe. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Et j'ai pu suivre votre présentation auprès du
comité des finances publiques du gouvernement fédéral la semaine
dernière et je vous en remercie également.
Donc, j'ai posé une
question ce matin aux gens de Raymond Chabot Grant Thornton qui étaient avec
nous et j'aimerais savoir votre perspective
sur la chose. S'il y a un client qui se présente dans les bureaux d'un de vos
associés ou d'un de vos conseillers
financiers et que lui, il dit : Moi, j'aimerais placer mon argent de
manière à faire de l'évasion fiscale ou j'aimerais placer mon argent
dans un paradis fiscal, vous allez faire quoi avec ce client-là?
M. Wiebe
(Greg) : First of all, before we deal with any
client, we make sure that we understand who the client is and go through a very
detailed approach to understand the reputation of the client, etc. If a client
comes to KPMG and
wants to get engaged in tax evasion, for instance, they're an individual and
they want to put money offshore, we don't deal with any clients like
that at all.
If
a business is looking to expand globally, the way the system works is they've
got options to expand. If they want to go into Europe, for instance, they might decide to invest through
Luxembourg or Ireland, etc. We help them with those types of expansion.
But,
if an individual is looking to try to figure out ways to avoid taxation in
Québec or Canada, that is something that we don't engage in. I mean, every individual
in Canada has a responsibility to pay, in Canada and Québec, tax on
their worldwide income, regardless of where it's earned.
• (15 h 20) •
M. Fortin
(Pontiac) : Ma question initiale, c'était sur l'évasion fiscale. S'il y a quelqu'un
qui vous arrive puis qui vous demande de faire de la planification
fiscale agressive, est-ce que vous le faites?
M. Wiebe (Greg) : Well, we do not get involved with that
at all. All of our planning starts... it goes through
the three lenses I described. It needs to be
legally effective, it needs to be lawful. It can't offend the General Anti-Avoidance
Rule in our perspective. And, you know, in the last decade, we brought this third
lens : Is it appropriate? Is it appropriate for
our client? Is it appropriate for society? Is it appropriate for us? Does it
fit in with our global tax code of conduct?
M. Fortin (Pontiac) : Revenu Québec tells
us there's $800 million that they lose every year in fiscal revenue because of tax evasion. Where is this money going?
Who in your opinion, because you're an expert in the field... In your opinion, who advises the people who are doing tax
evasion? Who tells them how to go about evading their tax responsibility?
M.
Wiebe (Greg) : I
don't know where the $800 million number comes from, but, just assume that
that's the right number,
Canada doesn't do a study of the tax gap, it
doesn't do a study of the taxes it thinks it should collect versus what it actually does. Other
countries that have done those studies would point to the fact that most of the
taxation that is lost in the system
is because of the underground economy. So, anytime that someone takes cash
payments, someone doesn't declare their income, someone who decides that
they want to save QST or GST because they'll pay someone cash instead or whatever, that, by far, is the biggest issue in
most countries around the world for that tax gap. And to combat that
takes a lot of effort on behalf of the tax
authorities, because it's hard to get at the underground economy, but I truly
believe that, in this country as well, that is the biggest issue we face
from a taxation perspective.
M. Fortin
(Pontiac) : Là, je vais vous
demander deux secondes, là, l'un ou l'autre, là, d'enlever votre chapeau
de KPMG, là. Vous êtes des experts en planification fiscale, si on veut. Si quelqu'un obtient une somme d'argent importante et veut éviter de payer les impôts qui sont dus sur
ces sommes-là... Puis là je ne vous demande pas ce que KPMG aimerait faire, là, je vous demande si vous... Mettons que
vous aviez cet argent-là et demain vous dites : Ça ne me tente pas
de payer des taxes, de payer des impôts là-dessus.
Qu'est-ce que vous feriez? Si vous n'avez pas aucun problème
d'éthique, là, à faire quoi que ce soit, là, toutes les possibilités
sont devant vous, qu'est-ce que vous faites?
M. Wiebe (Greg) : Well, I come from a very simple
premise that if you are a resident of Québec, a resident of Canada and you are an individual, you have an
obligation to pay tax on all your worldwide
income. I mean, we all just finished our tax returns within the last six weeks. You know, on the second page, you have to tick a
box : «Do you have any assets located offshore?» If the answer is yes, then you fill out a big
form, where is it, etc. If you don't follow into that, then you're
practising tax evasion and...
M.
Fortin (Pontiac) :
But, if you wanted to practice tax evasion, if you wanted not to declare that
properly, how would
you go about doing it? What jurisdiction would you use? What method would you
use to get the money there? And so what would be most effective in your
mind?
M.
Wiebe (Greg) :
Well, it's a hypothetical question, but let me answer the question a little bit differently.
There are still jurisdictions in the world
which aren't being proper citizens because they hide behind secrecy. Up until
2015, Switzerland was one of those countries
where they promised people that their affairs would be maintained privately
and not subject to any scrutiny by any tax authorities around the world. It was
just announced today and it was kind of rumored last week that Panama was going
to fall into line with the worldwide expectations about sharing income information with tax authorities around the
world, they're going to do that starting 2018.
I
don't think in society today there should be any jurisdiction that hides behind
that kind of information. There still are some locations around, thankfully they're
fewer and far between, but, in today's society, I don't think we should
accept that. As government-to-government, that should cease.
M.
Fortin (Pontiac) :
So, you addressed part of the question, you
talked about where you could put that money. How would you go about getting that money there?
Technically speaking, how does someone say, «I want to invest my money
into an account or into a country that is one of those tax havens that you just
talked about»?
M.
Wiebe (Greg) : I
don't mean to sound dismissive on this. I don't spend time thinking about that.
I mean, every individual has the right to invest their
money anywhere they want around the world, and that's fine, there might be
investment reasons or asset protection reasons to put your money in a picked
jurisdiction, but you still have a legal obligation to report that interest income on your return in Canada, and that's the issue. I don't
think there's an issue with people investing around the world. The issue is do you properly declare
the income, because that's what the law expects.
M.
Fortin (Pontiac) : I'm going to do the question in English, here,
because I'm going to read from an article in The Globe and Mail, one of your quotes from last weekend with our
federal colleagues. You were quoted saying : «It was a different time. We used to smoke in restaurants
in 2006. We used to text in our cars up until two years ago. Times change
and we change with it.»
So,
what you're basically getting at — my understanding it is — is that you're not doing anymore what you did back in 1999 as a company. But are you saying that it was widely
accepted and it was OK at the
time?
M.
Wiebe (Greg) : It
was a very different time. There was a whole industry that was developed around the time, and by and large that industry has changed.
But, from the profession
perspective, there was a different attitude around tax planning. Tax was seen
to be, you know, a cost to be managed. Up
until 1998, you know, the way... And the Supreme Court actually found this to
be correct. I mean, if you fit within the
technical rules of the Income Tax Act, it was all OK, so long as you fit the
technical rules.
In 1998, they brought in the
General Anti-Avoidance Rule, Québec followed shortly thereafter, and it wasn't until 2005 that the first GAAR cases hit the
Supreme Court. Then, all of a sudden, there is this whole concept of...
Even if it fits in the technical aspect of
the Income Tax Act, is it what Parliament intended? If it wasn't what
Parliament intended, then it could be undone.
And
so, by 2005, we already had this other notion. By the way, the plan that you're
referring to, we actually ceased deploying it in 2003.
And then there is this other
notion, there is a corporate social responsibility asset back to taxation today
that never existed before.
And
we add that third filter: Just because you can do it and just because it
doesn't offend the GAAR provisions, should you do it? And, you know, is it right for
our clients? Is it right for what they're trying to achieve from a
business objective? Is it right for my
reputation? Is it right for our reputation? Is it right for society? I mean, in
our global code of conduct, you know, we say specifically, you know, our...
M. Fortin (Pontiac) : Monsieur... Je
veux juste vous arrêter deux secondes...
Le Président (M. Bernier) : Mr. Wiebe, the Member has another question, OK? Thank
you.
M. Fortin
(Pontiac) : J'ai une
dernière question, parce
que je sais que mes collègues
ont également des questions pour vous. Donc, ce que vous avez discuté, le plan que vous offriez, que
vous avez offert à vos clients de 1999 à 2003 pour un investissement à l'île de Man, est-ce que c'était le seul que vous offriez à l'époque? Il y en avait-u
d'autres, des plans comme ça, dans
d'autres juridictions ou dans la même juridiction... ou c'était vraiment
le seul que vous offriez à l'époque?
Le Président (M. Bernier) :
Mr. Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : To my knowledge, that was the only one,
yes. At the time, there existed a couple of
opportunities to invest money lawfully offshore.
There
was the non-resident trust regime, there was legislation that allowed that
activity to happen. That legislation was amended in
2013, retroactive to January 1st, 2007. So, up until that point in time,
you know, people could utilize non-resident trusts to achieve tax savings.
And,
up until 2014, immigrants that come to this country were allowed to get a tax
holiday for the first five years that they were Canadian residents. By leaving their money
offshore, they had a tax holiday and didn't have to pay Canadian tax. That was eliminated in 2014.
I don't believe... With the
regime they brought in, in 2013, all that stuff is legislated out. It's
gone.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député de Pontiac, ça va?
M. Fortin (Pontiac) : C'est tout
pour moi, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député de Trois-Rivières.
• (15 h 30) •
M. Girard : Merci,
M. le Président. Donc, salutations à
mes collègues. M. Langlois, Mr. Wiebe, merci
d'être ici avec nous aujourd'hui.
Ce matin, on
a discuté avec les gens de Raymond Chabot Grant Thornton, on a parlé beaucoup
de planification fiscale, d'évasion fiscale, d'évitement fiscal. Donc, on disait : Si on fait une bonne planification, on peut faire payer moins d'impôt à un de nos clients tout en
étant légal.
On en parlait
tout à l'heure, la loi de l'impôt est la même depuis fort longtemps, mais la loi
de l'impôt était ça d'épaisse en 1948, et aujourd'hui c'est rendu ça
d'épais, il y a tellement d'ajouts qui se sont faits.
Vous êtes des
experts. Vous êtes probablement des experts pour réussir à trouver les failles, à
contourner ce qui se passe au niveau de l'impôt.
Donc,
on demeure légal, mais on sait qu'on a des entreprises qui ont des
structures financières qui sont des vrais spaghettis, qu'on a des entreprises qui possèdent d'autres entreprises
avec des fiducies, etc., ce qui nous permet d'avoir des entreprises offshores et de payer beaucoup
moins d'impôt. Les entrepreneurs ne sont même pas
conscients de ce qui se passe dans l'entreprise, tellement c'est
complexe. C'est des spécialistes, comme des firmes comme la vôtre, qui mettez
ça en place.
En tant que
spécialistes, vous êtes en mesure, excusez l'expression, mais de déjouer un
petit peu le système pour permettre à certains clients de payer moins d'impôt.
Est-ce que, dans votre vision, ce serait pertinent que des spécialistes comme vous contribuent avec Revenu Canada, avec Revenu Québec pour pouvoir colmater ces brèches-là qui font
en sorte qu'on a beaucoup
d'entreprises qui ont des tentacules ailleurs qu'au Canada
et qui sont capables de pouvoir payer beaucoup moins d'impôt? Est-ce que vous seriez prêts à mettre la main à
la pâte pour trouver ces brèches-là, pour qu'on évite... Parce qu'il faut se le dire, là, on a des entreprises
qui ne paient pas beaucoup d'impôt par cette espèce de mécanique là, qui
n'est pas nécessairement illégale, mais vous
passez dans certaines brèches pour être capables de bien conseiller nos
entreprises.
Le Président (M. Bernier) :
M. Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : I think that the way the system is
going to evolve will eliminate a lot of the issues that
trouble you and that trouble me. I mean, the fact of the matter is that there
are a lot of opportunities, very few for individuals, very few for individuals, but the way the global tax system works, it
doesn't work very well, there's inconsistencies between the various
jurisdictions. So, something might look like an apple in one jurisdiction, and
it looks like an orange in another jurisdiction, and you can... you know, a tax
advantage can fall out of that.
That's
why we are very supportive of the work of the OECD, because I strongly believe
that, if there's $100 of business profit earned by a multinational corporation, it should be
taxed somewhere, and right now there's opportunities for some of that
income to be taxed nowhere. I don't think that it's appropriate today.
Now,
some of that income gets taxed in Ireland at 12.5% tax rate, versus France at
33% tax rate, and Ireland needs to do that to attract business activity. I don't see anything wrong with
that, just like I don't see anything wrong with the Québec patent box incentive. But where the income is
subject to tax nowhere, I don't think, as a citizen, that that should be acceptable when we expect every citizen to pay tax
somewhere on their income.
M.
Girard : Est-ce que c'est
possible que l'on ait des entreprises qui font des revenus et des profits au Québec
mais qui, par un système plus ou moins complexe, soient en mesure de se taxer ailleurs, où ils vont payer beaucoup
moins de taxes... ou encore qui ne
paieront pas de taxe du tout, mais est-ce que c'est possible, à l'heure actuelle — moi,
je crois que oui, mais je veux vous
entendre sur ça — que des entreprises qui font des profits,
qui font des bénéfices au Québec, par une structure financière bien organisée, sont capables d'imposer ces
profits-là ailleurs dans le monde à un taux beaucoup plus bas, et on
perd des impôts à ce moment-là?
Le Président (M. Bernier) :
Mr. Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : And I'm glad you asked this question.
And it's complex, and I will try to answer it as best I
can. And, if I don't, please ask me to clarify.
The Canadian tax system for all
domestic companies works very well at making sure that their profit earned
within Canada and Québec is taxed within Canada and Québec, it works extremely
well.
There
were situations many years ago, and, you know, whether it's the Minister of
Finance here or the Minister of Finance in Ottawa, they've been working to clean up the system. What
hasn't gotten cleaned up is the global tax system. So, if there's multinational corporations that are
operating within the world, not within Canada or Québec but within the
world, there are lots of opportunities for
them to save taxes by either going through low-tax rate jurisdictions, like
Barbados, or by using other multilateral instruments.
I
believe that, for homegrown companies, the Canadian and Québec tax system is
incredibly effective at making sure that the profit
earned is taxed here.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M. Girard : Est-ce que c'est
possible que nous ayons des entreprises québécoises qui ont peut-être jusqu'à 80 %,
90 % de leurs profits, de leurs bénéfices au Québec, et qui volontairement
vont ouvrir une filiale à l'international qui ne fait presque pas de business, et soient en mesure de transférer des
sommes là? On parle d'entreprises mondiales qui sont dans plusieurs pays. Est-ce qu'on peut voir des
entreprises québécoises qui vont volontairement ouvrir une filiale dans
un pays X, Y, Z qui ne fera presque pas de business et qui vont être en mesure
de transférer une portion des profits à ce niveau-là? Est-ce qu'on échappe à
cela?
Vous me dites que ce qui est gagné au Canada, au
Québec doit être imposé ici. Je ne suis pas convaincu que nos entreprises, par certains systèmes plus ou
moins sophistiqués, ne réussissent pas à transférer des profits
drôlement importants gagnés au Canada vers
d'autres juridictions. Et souvent ils n'ont pas beaucoup de business à l'autre
juridiction, mais ils font de très gros
profits pour une très petite filiale et presque pas de profits ici, au Canada,
avec la majeure partie de leurs opérations.
Le Président (M. Bernier) :
Mr. Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : Yes. There are
two answers for that.
The first part of the answer is that I
do believe that the Canadian and Québec systems are effective in making sure that all profits earned
here are taxed here. 25 years ago, you could take Canadian profits and you
could zip them offshore and come
back, and that was deemed to be inappropriate, and all that stuff has been
legislated away. Where there still is an opportunity is, if a Québec
company is going to expend globally, then its global profits, not Canadian
profits, but its global profits, you know,
they look for ways to make sure that they take advantage of the various
jurisdictions around the world, and, you know, they can move operations
here as long as there's substance.
Now, are there Canadian companies
today that are deciding, when they're looking to build a plant somewhere... that they decide to
build a plant somewhere in a jurisdiction where there's a lower tax rate? I'm
sure they think about that all the
time. And that's why it's important that our tax system be competitive. The
patent box legislation that was just enacted here in Québec is designed to... If a multinational is looking to put
its innovation center somewhere around the world, we want it to come here to Québec. Well, Luxembourg,
or Ireland, or... you know, there's a lot of jurisdictions that are also
competing. And so, if our corporate tax rate
gets too high compared to the average, you will find multinational
corporations will make business decisions around where to locate their
operations, and tax is one big, huge factor, it just is.
We
have a national advantage because our corporate tax rate system here in Canada,
in Québec, is at 27%, U.S. is at 40%, but
around the world we're at the high end. And so, thank goodness we have U.S. as
a neighbor. If we were sitting in Europe, we would be at the high end
and probably not competitive.
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M.
Girard : Thank you.
Le
Président (M. Bernier) : Thank you. Le député de
Sainte-Rose.
M. Habel :
Oui. Merci, M. le Président. À mon tour de saluer M. Langlois et
M. Wiebe.
Alors,
il y a des personnes qui parlent beaucoup du «reporting» pays par pays pour un
peu colmater les paradis fiscaux. J'aimerais
avoir votre avis d'expert, là, sur le fait qu'une entreprise internationale
devrait faire apparaître dans ses comptes
le pays dans lequel ils opèrent, le nom sous lequel ils exercent dans chaque
pays et aussi inclure dans les états financiers le montant des ventes
intragroupe et extérieures du groupe, les achats ventilés, les coûts de
financement ventilés, les charges sociales
et le nombre d'employés, les résultats aussi avant impôt. Donc, j'aimerais un
peu vous entendre sur le «reporting» pays par pays. Pensez-vous que
c'est une option à privilégier pour colmater les problématiques de l'évasion
fiscale? Et seriez-vous à l'aise dans ce type de «reporting» international?
Le Président (M.
Bernier) : Mr. Wiebe.
• (15 h 40) •
M.
Wiebe (Greg) : Yes, well, I worry about the
cost to comply, because it is complex to gather some of that information. I think it's absolutely the way we
have to go. If you're a multinational corporation, you should be
expected to provide to the tax authorities a
list of where you're doing business, how much profit you're leaving behind in
the country in which you're doing
business, how much substance you have there, and how much tax you leave behind.
I think that that is the way for the international tax system to work
more effectively, that all tax authorities can look at the value chain created by a global business and say, «OK, well,
they've got operations in Canada, they've got operations in the States, they've got operations... Oh! Why are there some
operations there, and why are there no people there, if there's a bunch
of profit there?» I think that that is a healthy thing.
I
predict that within five years that information will be made public, so it
won't just go to the tax authorities. If you're a multinational corporation, it
will also be published in your annual report, available to the public.
I know that the European Union is looking at that
right now, there's a study that they just started within the last month to see how practical
it is to make that public. I just think that, if you are a public company, and
this information is already available
to the tax authorities... You can just see that there's going to be pressures
to make that information public.
Le
Président (M. Bernier) : Est-ce que vous seriez prêts à contribuer pour alimenter en information ces registres? Est-ce que vous seriez prêts à contribuer au niveau
information pour alimenter ces registres-là? Parce que,
pour les agences de revenu, que ce soit du Québec, du Canada, aux États-Unis ou partout dans le monde, ça devient réellement
la source difficile, c'est de
connaître et d'identifier ces entreprises-là, les ramifications. Est-ce que
vous seriez prêts à travailler avec ces... de fournir les informations
que vous avez par rapport à l'identification, par rapport à ce que vous
possédez?
M. Wiebe (Greg) : Yes, we're
helping our clients comply with that now. The last budget, federal budget, confirmed
that, for multinational companies that have turned over over €750 million — because it's a global
standard, it's in euros — by 2016, companies are going to have to start
reporting that information. So, multinational companies that are public, right now, are
having to get ready for it, and we're scrambling to help them comply with those
particular rules.
It's
always hard to comply the first year out, but I think that's one of the nice
changes to the international tax system that
will bring more transparency. The only way a tax system works is it needs to be
transparent, and there has to be a
perception of fairness. And the multinational having to allocate out its
income, substance, and tax is something... and it's coming to our
multinationals, the large ones, next year.
Le Président (M. Bernier) : Thank you very
much. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui. Bonjour, M. Langlois, M. Wiebe. Merci d'être là.
Je vais
commencer par la question des investissements étrangers des Canadiens à l'extérieur du Canada. Vous savez probablement que les investissements
canadiens à l'étranger s'élèvent à 80 milliards dans le cas de la Barbade,
50 milliards aux îles Caïmans, 22 milliards aux Bermudes. Ça, ce sont
les chiffres qui sont parus il y a un mois, à peu près, là, c'est très récent.
Ma question est très simple, c'est : Vous, c'est quoi,
votre explication pour des sommes aussi considérables dans ces pays-là?
M. Wiebe
(Greg) : Yes, I saw that list, too. Barbados
was number one on that list, I think...
M. Marceau : Three.
M.
Wiebe (Greg) :
Yes. And, if a Canadian company is looking to expand its business operations
globally, they'll go
to one of three places. If they want to expand into Europe, they'll go to
Luxembourg or they'll go to Ireland, or, if they want to expand to other
places around the world, they'll go to Barbados.
And
let me explain why Barbados is... I'll just use it as an example. It has a 2.5% corporate tax rate, so any activity that a multinational
corporation, a Canadian-based one, can put there as it expands globally, not
for its Canadian operations but as it
expands globally, all the income is subject to a tax rate of only 2.5% instead
of whatever the rate would be for the appropriate country around the
world.
Why
do we have that policy? That's government policy. Well, it allows Canadian
companies to be competitive as they expand globally. It
has nothing to do with Canadian income, because that's subject to tax.
And why does Barbados allow
itself to have a 2.5% rate? I love Barbados and I have been there nine or 10 times, but they can't attract jobs or
capital for their people because they have no natural resources, they're a very
small country, and they need to provide that
incentive so that the livelihood for their people is enhanced. And that's...
And so, it's government policy, to allow that to happen.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui. Il y a quand même des entreprises canadiennes qui ont des filiales à la
Barbade dont on se demande bien ce
qu'elles y font, des marchés d'alimentation, par exemple, je peux nommer Loblaw
et je pourrais nommer Petro-Canada. À ma connaissance, Petro-Canada
n'est pas... Enfin. En tout cas, Loblaw, on va dire, là, comme je l'ai déjà dit dans le passé, ne vend pas beaucoup de
brocoli à la Barbade, et, à ma connaissance, les seules raisons que je
peux entrevoir pour Loblaw d'être présente
là-bas, c'est pour éviter de payer de l'impôt. Alors, peut-être existe-t-il
effectivement des entreprises qui, dans la
perspective de prendre de l'expansion à l'échelle mondiale, vont passer par là,
mais je pense qu'il existe aussi des entreprises qui ont des coquilles
là-bas strictement pour éviter de payer de l'impôt.
Cela étant,
il y a aussi la question des Bermudes, des îles Caïmans. Est-ce que vous avez
la même explication pour l'ampleur des montants qu'on retrouve là-bas?
M. Wiebe (Greg) : It's a different explanation. So, in
the case of Bermuda and the Cayman Islands, they have
tax treaties with the U.S. So, if it's a U.S. company that's looking to expand,
or a Canadian company that might have U.S. operations, those are the favorite
jurisdictions there.
Barbados
is the typical jurisdiction that Canadian multinationals would use, because we
have a tax treaty, and it's been government policy to allow Canadian multinationals to use that
jurisdiction for their international expansion. Most of those other islands have a relationship with another one of our
large trading partners, whether that's the U.S. or whether that's the
U.K., they all do it, and it comes from a time... And this will sound funny,
but it's like from 40 or 50 years ago.
Whenever it came into play, our corporate tax rates were 50%. Our companies,
multinationals could never compete on
the global stage unless they could finance their international operations through a jurisdiction which had a really nice low rate. We have
that, U.K. has that, Australia has that, U.S. has that. Every one of the major...
And it's 40 years ago. If it's deemed
to be inappropriate today by policy makers, that's why the work with the OECD
is so important. The G20 said
there's stuff that we all have in our domestic tax system which gave an
advantage to our multinationals... I'm sorry.
M. Marceau : Oui. Juste être au clair, je comprends ce que
vous dites, là, et je comprends que certains ont voulu passer par là,
mais est-ce que vous êtes en train de me dire que c'est strictement pour des
raisons de croissance à l'international et
aucunement pour des raisons d'évitement fiscal ou des raisons fiscales qu'on
retrouve des sommes aussi considérables dans ces pays-là?
Écoutez,
je suis prêt à en prendre un petit bout, là, mais je ne prendrai pas tout ce
que vous dites, je suis désolé. Moi, je
suis convaincu qu'il y a énormément, là-dedans, de planification fiscale très agressive qui n'a aucune autre...
Enfin, les raisons pour lesquelles les
sommes sont si considérables, c'est pour des raisons d'éviter de payer de
l'impôt. Peut-être que c'est à la frontière de la légalité, mais on ne me
fera pas accroire que c'est strictement parce que les gens veulent
prendre de l'expansion à l'international.
Moi, je m'attendais à ce que vous me disiez : Il y a une partie de ça qui
n'a pas de bon sens.
Le Président (M. Bernier) :
M. Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : Why a Canadian multinational expanding globally will pick Barbados? Primarily for tax reasons.
M.
Marceau : ...qui ne veut pas faire de croissance à
l'international? Est-ce que ça existe, d'après vous, une entreprise canadienne qui n'a pas
l'intention de croître à l'international puis qui utilise la Barbade? Si vous
me dites non, là, on va diverger
d'opinion. Moi, je pense qu'il existe des entreprises canadiennes
qui ont des filiales, des coquilles vides à la Barbade ou ailleurs
strictement pour réduire leur impôt. Est-ce que vous êtes d'accord avec ce que
je dis ou pas?
Le Président (M.
Bernier) : Mr. Wiebe.
M.
Wiebe (Greg) : I
don't, because, as I say, I think
the Canadian tax system is very effective at making
sure that profits earned in Canada or taxed
in Canada... I don't know why you would use a jurisdiction like that, unless
you were trying to finance international operations.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Rosemont.
M.
Lisée : Merci.
Bienvenue à tous les deux. Écoutez, on vit dans des univers parallèles, hein? Tout à l'heure, on a eu KPMG, on vous a,
Raymond Chabot ce matin, et je peux vous prévoir que, quand on va avoir Price
Waterhouse, Deloitte et Ernst & Young, ils vont tous nous dire
qu'ils ne font jamais de planification fiscale agressive et, comme j'ai demandé
aux prédécesseurs, que, s'il y a un client qui insiste pour en faire, ils leur
disent non.
Et
là vous venez de nous donner l'autre aspect de cet univers parallèle en
disant : Je ne pense pas que ça existe maintenant. Donc, vous qui
êtes là-dedans, vous êtes en train de nous dire que, d'après
vous, ça n'existe pas, de l'évitement fiscal
clairement agressif ou de l'évasion fiscale qui
expliqueraient une somme d'investissement canadien à l'étranger de 50 milliards
aux îles Caïmans en 2015, pour lesquelles nous n'avons pas un accord
international?
Le Président (M.
Bernier) : Mr. Wiebe.
M.
Wiebe (Greg) :
Right. Yes, I don't know why taxpayers would necessarily go there, they must
have business reasons to go there. I can't
speculate on that front, but...
M. Lisée :
L'évasion fiscale n'existe pas en ce moment au Canada pour les îles Caïmans?
• (15 h 50) •
M. Wiebe (Greg) : Oh, tax evasion does exist in Canada. As I say, a lot of it is the underground
economy. I think a lot
of it is the fact that individuals aren't declaring their worldwide income in Canada like they're supposed to do because they're hiding behind
bank secrecy. I don't think it's appropriate that any of that stuff should
happen, because all this...
M.
Lisée : D'accord,
on est d'accord là-dessus, mais
maintenant je vous demande : À
part la mafia, à part les gens qui
ont mis leur argent en Suisse puis au Luxembourg, là, les années dernières...
Puis il y a des gens qui les ont aidés, là, oui, puis peut-être dans votre entreprise, et vous ne le
faites plus. Mais là, cette année, 2015, il y a eu — ce
n'est pas de l'«underground economy», parce que la mafia ne rapporte pas
ça, tu sais — 50 millions
au Luxembourg, 50 millions aux îles Caïmans...
Une voix :
Milliards
Le Président (M.
Bernier) : 50 milliards.
M.
Lisée : Milliards, milliards, excusez-moi, les sommes sont
tellement énormes. Et,
selon vous, ça, c'est tout «legit»? Every cent of this
$50 billion invested in the Cayman Islands last
year is legit?
M.
Wiebe (Greg) : Oh, I can't say that. No, I'm
not saying that at all. If I suggested that I'm saying
that, that's not true.
I know what our clients are doing with
their business affairs around the world. You know, if people are investing in Panama, do I
suspect that some of them aren't declaring their income? I absolutely suspect
that they're not declaring their income, but they're not my clients.
M. Lisée :
Bon. Alors, ça prend quand même des spécialistes pour faire ça, puis des gens
qui sont payés, là, 400 $, 500 $,
600 $ de l'heure. Et là toutes les grandes firmes vont nous dire qu'ils ne
font pas ça. Alors, ça veut dire qu'il y a un groupe de spécialistes en
quelque part à Montréal puis à Toronto qui ne sont pas dans les grandes firmes
puis qui font ça.
Est-ce que vous
pourriez nous donner la liste pour qu'on aille les arrêter? Vous devez les
connaître.
Le Président (M.
Bernier) : Pour qu'on puisse les convoquer.
M.
Wiebe (Greg) :
Yes. You know, I can speak for myself, and I think I can speak a little bit for
KPMG and a little bit for the profession. You know, CPAs, that's just not an area of
economy that we deal with, and I wouldn't even know
were to look, I'm sorry, I don't. No, I can't be helpful there at all.
M. Lisée : Écoutez,
vous êtes un spécialiste de ces questions-là dans une des plus grandes firmes comptables
au Canada et vous êtes assis là, on ne vous a pas demandé de prêter serment, mais
vous nous dites que vous ne savez pas comment fonctionnent, chez des
comptables spécialisés autour de vous, ceux qui font en sorte qu'il y a des
milliards de dollars canadiens qui sont
investis. Soit... Si je vous croyais, là, il faudrait que je vous pense
incompétent. Parce que vous avez l'air compétent, vous savez que ça se
passe tous les jours. Vous nous dites que, quand il y a des clients qui vous demandent de le faire, vous dites non, donc vous
savez qu'ils vont ailleurs. Et je m'excuse de vous dire que ce n'est pas
crédible que vous nous disiez aujourd'hui que vous ne savez pas comment ça
fonctionne.
Le Président (M.
Bernier) : M. Wiebe.
M.
Wiebe (Greg) :
Well, yes, you know, as I explained, when businesses are expanding around the
world, they often use those jurisdictions, and we help
them with that all the time.
M. Lisée :
Mais on ne parle pas du «legit», on parle du non «legit».
M. Wiebe (Greg) : But, from an
individual perspective... And the Panama Papers thing just gave us another
example to remind all of our people that we don't work for clients that don't
report all their taxes, we don't work for individuals that aren't prepared to
declare their worldwide income, and...
M.
Lisée : Je comprends, je vous donne le bénéfice du doute
là-dessus, mais je sais que, pour aller dans les Panama Papers, ça prenait des spécialistes au Canada,
puis on a des millionnaires à Toronto puis à Montréal qui ont fait ça.
Et vous me dites aujourd'hui, vous dites à
cette commission puis au président, qui vous écoutent, que vous n'avez pas la
moindre idée de comment les millionnaires ont fait ça, et donc vous ne pouvez
pas nous aider à arrêter que ça se fasse.
M.
Wiebe (Greg) :
Well, if an individual... An individual can set up a bank account anywhere they
want around the world. And there's now a test that, if
there's a wire transfer above $10,000, it gets a flag to the tax authorities.
There's
nothing wrong with setting up a bank account in any jurisdiction around the
world, the question is whether you declare
that income. And, if you had a bank account in Switzerland 10 years ago
and you weren't declaring that income in Canada, that's tax evasion.
And what's changing in the system, and
I think it needs to change, because there is a lack of transparency and there is a problem with
perception of fairness: by 2018, almost every jurisdiction in the world is
going to share with the tax authorities around the world income
information on the residents that exists. So, 2018, Panama is going to send to Revenu Canada and Revenu Québec information to
say, «Here is all the Canadians we have that have bank accounts, here is
the interest income they earned.» 2018.
M. Lisée :
Ça, c'est très bien, c'est très bien, on est tous d'accord.
M. Wiebe (Greg) : Why it didn't
happen 10 years ago? I don't know. But it's going to happen by 2018.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député... Oui, allez-y, M. le député.
M.
Lisée : On est tous d'accord. Mais, puisque vous dites que ça
n'existe pas chez vous et puisque nous savons qu'il y a plein de monde au Canada qui sont allés aux Panama Papers,
vous avez dû perdre beaucoup de clients, qui étaient très déçus que vous ne le fassiez pas, qui sont
allés là. Alors, je vous pose la question : L'an dernier, combien de
clients avez-vous perdus parce que vous ne procuriez pas ce service que
d'autres voulaient procurer?
Le Président (M.
Bernier) : Mr. Wiebe.
M.
Wiebe (Greg) : I
would hope that anyone that thought that they would engage in that kind of
activity wouldn't even come to enter through our door.
That is just not part of the business we're involved with at all.
And I would suggest to you that the
profession doesn't get itself involved with that as well, that's just not an area we're prepared to deal
with. We're very proud of the role we play in society and we're not going to
let our reputation get damaged by associating ourselves with people that
aren't above the law.
M. Lisée :
Mais normalement ce qui se passe...
Le
Président (M. Bernier) : M. le député, allez-y, oui. Je vais juste
ajouter... M. Wiebe, les banques sont venues ici puis nous ont dit la même chose que vous, qu'eux ne le faisaient
pas, qu'il n'était pas question de toucher à ça, et que vous, vous ne le faites pas non plus. Donc, qui le
fait? Qui le fait? Les banques sont venues ici, les cinq grandes banques
sont venues ici, nous ont tout expliqué;
même s'ils ont des succursales dans les paradis fiscaux, ils ne le font pas.
Puis là vous me dites... vous venez nous
dire qu'en ce qui vous concerne, bien, vous ne le faites pas non plus. Donc,
comment se fait-il qu'il y ait autant
d'argent dans les paradis fiscaux? Comment se fait-il qu'il y ait des
transferts qui se font dans les paradis fiscaux?
Nos
questions aujourd'hui, ce qu'on veut savoir, c'est quelles sont les mesures
qu'on doit mettre en place pour contrer ce phénomène de transfert dans
les paradis fiscaux, que ça passe par les banques ou ça passe par vous. C'est ça qu'on a besoin comme
information, c'est ça qu'on veut recommander à Revenu Québec puis on veut
recommander au gouvernement du Québec. C'est l'objectif qu'on
a.
Allez-y,
M. le député.
M.
Lisée : Oui, bien, écoutez, je vais vous lire ceci, O.K., dans
CBC.ca : «In 2005, the U.S. Internal Revenue Service charged KPMG and several senior executives in the case, alleging
they helped hide billions of dollars in taxable income. Three KPMG
executives were later convicted. As part of a plea bargain, the firm itself
admitted to "criminal wrongdoing" and agreed to pay $456 million
U.S. in penalties.»
So, this did happen recently, in 2005,
in the U.S., so it means that some of the people who were clients of KPMG had access to these kinds of schemes. And now you're going to
tell me that it's no longer the case, so they must have gone elsewhere.
M. Wiebe (Greg) : Well, it was never the case with KPMG
Canada, that was an issue that happened with our U.S.
member firm. That member firm is very different today than it was then,
everything's changed within that firm, because
that was not a proud moment for that particular member firm. But that was not
something that occurred with other member firms within the KPMG network.
M. Lisée :
C'est tout pour moi, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : M. Wiebe, est-ce que, selon vous, des sociétés-écrans
existent?
M.
Wiebe (Greg) : Oh
yes, shell companies exist. Delaware probably has the biggest number of them in
the States. There are shell companies that exist all
over. Delaware, as I say, is probably the biggest one.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Les initiatives de l'OCDE dans le
moment... Parce qu'on peut voir tout le travail qui se fait à l'international. Et j'ai eu l'occasion de
rencontrer les gens de l'OCDE dernièrement avec des collègues qui sont ici présents, et il se fait beaucoup de
travail à l'international pour être capable, justement, de venir fermer la
porte à l'évitement fiscal.
Selon
vous, on le fait... l'OCDE, ils travaillent pour qui? Ils travaillent pour
quoi? Qui doit-on viser, là, par rapport aux processus, aux
planifications qui sont faites pour être capable d'utiliser ces paradis
fiscaux?
• (16 heures)
•
M. Wiebe (Greg) : I like what the G20 has done, what the
OECD is doing, because they're focusing on tax havens that are hiding behind bank secrecy, to stop that
particular process. Panama was the last one that just announced that
it's going to fall in line with international
expectations. There still are some other jurisdictions around the world that
exist, and they have to be snuffed out.
So, the work that the G20 and the OECD are doing
around eliminating those tax preferences, I think, is important. So, that's for individuals.
And, with the automatic exchange of information that is coming in 2018, then
tax authorities around the world will get information about residents of
their country and the income earned offshore. I think that's long overdue.
From a business perspective, the
digital economy piece is something that the OECD needs to continue to work on, because right now our tax systems were developed at a time
when the digital economy didn't exist, and it sounds like silly stuff, but, I mean, you can rent a movie,
download a movie from a Québec provider and you have to pay sales tax,
and, if you rent a movie from someone that doesn't have a presence here, you
don't have to pay sales tax. Is that fair to Québec
business? I don't think that's fair to Québec business. So, there's a whole
bunch of work that needs to be done on the digital economy to make the
system work for the realities of business today.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau, avez-vous une autre
question?
M.
Marceau : Écoutez, je veux simplifier un peu la situation quant
à moi. Il y a de l'évasion fiscale, je pense qu'on va s'entendre sur le fait que cela existe,
j'espère. Il y a des paradis fiscaux, j'espère qu'on va s'entendre sur le fait
que cela existe. Et là, les acteurs qui sont en cause, il y en a quatre. Il y a
les pays ou, si vous voulez, les autorités fiscales. Deuxièmement, il y a les contribuables. Puis là il y a deux types
d'acteurs qui, à mon sens, jouent aussi un rôle, on va arriver à
quatre : troisièmement, donc, les banques, puis, quatrièmement, les firmes
comptables.
À
ce jour, l'OCDE puis la plupart des gens se sont attardés beaucoup à ce que les
pays pouvaient faire puis à ce qu'on
pouvait donner comme incitation aux contribuables. Et là la question de notre
président, elle est très simple, puis moi, je vous la repose. Puis on peut bien rester dans la langue de bois puis
ne rien dire, mais, vous, est-ce que vous avez une responsabilité? Les banques sont venues ici nous
dire qu'elles n'avaient aucune responsabilité. Est-ce que vous avez une responsabilité? Et surtout est-ce qu'il y a
quelque chose qu'on peut faire pour vous encadrer, pour empêcher... Parce
que de toute évidence vous avez joué un
rôle, peut-être pas vous individuellement, je ne vous accuse pas vous
personnellement, bien sûr, mais il y a un
système qui est en place avec au moins deux acteurs qui ont joué un rôle, puis
ça s'appelle les firmes comptables et
les banques. Tout le monde nous dit : On n'a jamais rien fait. Ça, c'est
spontané. Ça part du contribuable, ça
s'en va dans le paradis fiscal, puis il n'y a personne qui est intervenu nulle
part. On sait très bien ici, tout le monde, que ce n'est pas vrai, on
sait très bien que ce n'est pas vrai, que vous avez joué un rôle d'une façon ou
d'une autre. Mais la question de notre
président, qui était tout à fait légitime, je pense, c'est : Y a-t-il
quelque chose que vous nous suggérez qu'on fasse pour vous encadrer
mieux puis pour encadrer mieux le système bancaire? C'est ça, la question.
Le Président (M.
Bernier) : Mr. Wiebe.
M. Wiebe (Greg) : Yes, I think we absolutely do have a
responsibility as the profession. I think one of the
most groundbreaking things that I had seen
done was the legislation that Québec passed in 2009 on aggressive tax
planning, and at that time they passed rules that said : If you've got a
tax plan that involves a confidentiality agreement or a contingent fee, it needs to be reported. If it's not reported, the
statute... period doesn't start. And, if you're an advisor and you've
helped do one of these things, and it's found to be ineffective, there were
hefty fines.
And
I have to tell you that overnight... Now, we, at KPMG, had eliminated those
things years before, because you could see it wasn't
appropriate, but, overnight, the practice of using confidentiality agreements
or contingency fees disappeared. The feds,
the federal Government, followed Québec's lead and implemented that legislation
shortly thereafter.
There
are tools that governments can do to stamp out the behavior of tax payers that
they deem to be inappropriate, and I think they need to use those tools. I think it's incredibly
important, when we spend time with the tax authorities, to understand what they like and what they don't
like. If there's a particular plan that they think... they don't like, I
want to know about it, because the last
thing that I want to do is have a soured relationship with a client because I
entered into some planning that, all
of a sudden, they had nothing but a fight with the tax authorities. That
doesn't help our business model.
So,
by us, you know, living by our code of conduct, by the tax authorities being
open as to the things that they don't like, that they see out there, and by policy
makers being diligent to ensure that, if they see anything that they don't
like, they shut it down as quickly as they
can... I think that's all important, because, as I say, if you can't trust the
Government, if you can't trust the tax
system, then my big fear is that the underground economy just grows. There are
studies that say that, if you believe
that your neighbor pays their fair share of tax, you will, too. There is too much leakage and not
enough trust in the system right now. I don't think
that's healthy.
Le Président (M. Bernier) : Thank you,
Mr. Wiebe, thank you. Merci,
M. Langlois, de votre participation à la
Commission des finances publiques, merci de votre collaboration. Donc, je vais,
sur ce plan, remercier mes collègues qui ont participé, les gens de l'Assemblée
nationale, la traduction également, merci de nous avoir aidés.
Donc, je lève la séance de la commission, et la commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 16 h 6)