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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 7 avril 2016 - Vol. 44 N° 95

Poursuite du débat sur le discours du budget


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Table des matières

Discussion générale (suite)

Intervenants

M. Raymond Bernier, président

M. Carlos J. Leitão

M. Alain Therrien

M. André Fortin

M. François Bonnardel

M. Saul Polo

M. Amir Khadir

Mme Véronyque Tremblay

M. Michel Matte

M. Nicolas Marceau

M. Jean Habel

Journal des débats

(Onze heures vingt-deux minutes)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, après avoir constaté le quorum, nous allons donc débuter nos travaux. Donc, bonjour à tous. Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et, bien sûr, je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget conformément à l'article 275 du règlement.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Girard (Trois-Rivières) est remplacé par M. Tanguay (LaFontaine) et M. Merlini (La Prairie) est remplacé par Mme Tremblay (Chauveau).

Le Président (M. Bernier) : Merci. Alors, bienvenue aux collègues présents. Merci de participer à ces échanges fort importants et fort intéressants. Bienvenue aux députés et représentants de l'opposition officielle et du deuxième groupe d'opposition, les recherchistes ainsi que les gens du ministère des Finances et le personnel de l'Assemblée nationale qui nous accompagnent.

Avant de poursuivre, je vous indique qu'il reste 4 h 24 min aux 10 heures de débat prévues au règlement. Le temps se répartit de la manière suivante : gouvernement, 2 h 21 min; l'opposition officielle, 1 h 8 min; deuxième groupe d'opposition, 35 minutes; députés indépendants de Québec solidaire, 20 minutes.

Discussion générale (suite)

Donc, compte tenu que nous en étions à l'opposition officielle et qu'il restait cinq minutes de disponibles, la parole est au député de Sanguinet pour cinq minutes.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je dois vous saluer, M. le Président, c'est le début de notre journée de travail. Je salue le ministre et son équipe, les députés de la partie gouvernementale, mon collègue de Rousseau et M. le député de Granby.

Écoutez, je vais poursuivre, là, il me reste quelques minutes. J'avais une question à vous poser par rapport à ce qui nous... Bien, ça me surprend un peu, oui ou non, là, mais je voudrais vous entendre là-dessus, le fait qu'on ait un déficit zéro en 2015-2016, mais que le ratio dette-PIB a monté. Je veux vous entendre là-dessus, c'est quoi, puis, tu sais, si on avait une explication de ce phénomène-là, qu'est-ce que vous expliqueriez, admettons que vous aviez à le faire devant nous, là. Je veux vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup. Alors, moi aussi, bonjour à tout le monde, tous les membres de la commission... Alors, c'est une question, en effet, une question intéressante. Le déficit, en effet, en 2015-2016 est de zéro, et le ratio dette-PIB, en effet, augmente légèrement. Pourquoi? C'est ça, la question. Essentiellement, parce que, comme vous savez, même si on est à l'équilibre budgétaire, la dette, elle, continue d'augmenter, la dette brute, elle, continue d'augmenter parce que nous avons d'autres éléments qui contribuent à l'augmentation de la dette. Principalement l'investissement en infrastructures, mais il y a aussi d'autres éléments comme les prêts, placements et avances.

D'ailleurs, dans notre document budgétaire, à la page E.8, nous avons un petit graphique qui explique bien les facteurs de changement de la dette en termes absolus pour l'année 2016-2017. Donc, voilà, ça explique pourquoi la dette, en termes absolus, augmente. Maintenant, le ratio dette-PIB augmente aussi légèrement. On a quelques décimales de PIB, dette sur PIB, une légère augmentation, essentiellement parce que, par définition — d'ailleurs, on en avait discuté avec le collègue de Rousseau, je pense, c'était hier — parce que la dette a augmenté plus vite que le PIB.

M. Marceau : Là, vous l'avez...

M. Leitão : Et c'est, par définition, évidemment, étant donné qu'il y a un ratio... Donc, la dette brute a augmenté...

Le Président (M. Bernier) : ...la réponse?

M. Therrien : Bien, c'est parce que tout le monde qui connaît le moindrement les mathématiques est capable de comprendre ça, là.

Le Président (M. Bernier) : O.K.

M. Therrien : Bien, non, mais j'apprécie, mais moi, je voudrais vous entendre sur le fait que... Évidemment, ça veut dire que ton endettement public augmente plus que le PIB nominal. Donc, l'endettement public calculé de cette façon-là, on voit que le PIB nominal a une responsabilité dans l'allègement de l'endettement public.

Moi, je voudrais juste savoir, M. le ministre... Je vais vous exprimer mon opinion, puis dites-moi ce que vous en pensez. Je vais exprimer mon opinion, puis je veux vous entendre là-dessus. Moi, quand je regarde ça, je me dis : Ils ont fait des efforts pour éliminer le déficit, ce qui est louable. On est tous pour la lutte au déficit, ça dépend comment on le fait, là. Mais le fait que vous l'ayez fait en coupant très drastiquement les dépenses, vous avez, tout simplement, érodé la croissance économique nominale. Donc, la croissance économique réelle, évidemment, c'est celle que vous contrôlez le plus, là. Alors, ce n'est pas, justement, l'image que votre politique économique est inappropriée pour le Québec? Ce ne serait pas ça, la raison pourquoi, la dette publique, le ratio augmente, parce que vous n'avez pas stimulé l'économie adéquatement?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oh que non! Là, nous sommes en désaccord. Pour revenir à la question de la dette, et donc la légère détérioration du ratio, une partie importante de cette détérioration du ratio, c'est que, comme on avait dit aussi hier, il y a eu des révisions historiques aux comptes nationaux, et donc le niveau de PIB, indépendamment de la croissance qu'on aurait pu espérer, mais le niveau de PIB est d'à peu près 3,5 milliards moins élevé que ce qui avait été estimé avant.

Comme vous savez, les calculs du PIB sont en continuelle révision, et, pour les années 2013-2014, il y a eu cette légère réduction à la baisse.

Le Président (M. Bernier) : Oui.

M. Therrien : ...pas grand temps.

M. Leitão : Allez-y, donc.

Le Président (M. Bernier) : Oui, mais je vais vous le laisser, le temps de... Allez-y.

M. Therrien : Je m'excuse, je n'aime pas ça vous interrompre, mais c'est juste que vous me parlez de 3 milliards, ça tombe bien parce que c'est le montant exactement que mentionnait Pierre Fortin quand il parlait de l'impact de l'austérité sur la croissance économique. Il disait que c'était une diminution de la richesse collective de 3 milliards, et vous venez de me le dire.

M. Leitão : Absolument, mais là on parle de deux choses différentes, là. Ça, c'est la baisse qui a été apportée au calcul du PIB. Il n'y a rien à voir avec la croissance, c'est historique. Les comptes nationaux pour 2013 et pour 2014 ont été révisés à la baisse. Donc, le niveau de PIB que nous, on pensait avoir en 2015 est plus bas à cause des révisions historiques. Et, comme vous le savez, c'est un processus qui est toujours en constant changement, et je peux aussi vous annoncer déjà que, rendu au mois de septembre, octobre, il y aura à nouveau des révisions de comptes nationaux, et le PIB pourrait être plus élevé ou plus bas.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons donc retourner du côté ministériel, et la parole est au député de Pontiac.

 (11 h 30)

M. Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. J'en profite, moi aussi, pour saluer les collègues, ce matin, qui sont ici, les gens du ministère qui sont avec nous. Hier, M. le Président, M. le ministre, j'ai eu l'occasion de parler, pendant un petit bout de bloc, là, comme celui que le député de Sanguinet vient de remplir, pendant quelques minutes seulement, sur un secteur qui m'est particulièrement important dans mon comté. Je pense que c'est important, dans ces exercices-là, justement, de parler de nos comtés. J'écoutais la députée de Chauveau hier qui nous parlait du sien et du fait que c'en est un où il y a beaucoup de jeunes familles ou c'est un comté en expansion, si on veut.

Ça me fait penser au mien, je pense qu'on a un petit peu la même dynamique de banlieue. Cependant, dans mon comté, il y a un secteur rural très important, un secteur où j'ai l'occasion de parler à plusieurs des citoyens, qui me parlent d'agriculture, de foresterie, de tourisme, des industries qui sont importantes au monde rural, au monde en région. Et hier, M. le Président, quand j'ai parlé de la foresterie, j'ai parlé un petit peu de ce qui s'était passé au cours des dernières années dans mon comté, c'est-à-dire des fermetures d'usines suite à la fermeture de papetières et des différentes scieries du coin, de ce que ça fait sur l'économie locale, de ce que ça peut avoir comme incidence sur l'âme d'une communauté, sur l'âme d'un village, et certainement ça a eu des incidences majeures chez nous. Il y a des signes positifs en foresterie, il y a des signes positifs par rapport à l'industrie aux États-Unis, à la construction résidentielle, mais l'industrie de la foresterie, c'est plus que simplement des deux-par-quatre maintenant, on ne fait plus le même type de foresterie qu'on a toujours faite.

Donc, on voit qu'il y a vraiment des possibilités pour l'industrie de reprendre. Mais, pour faire tous les projets qu'ils veulent entreprendre au Québec, ils ont besoin de l'aide du gouvernement, et, évidemment, le budget, c'est une des occasions de vraiment apporter une aide particulière à un secteur ou à un autre. Celui de la foresterie, on en parlait, a besoin de certaines choses afin de bien fonctionner. Ils ont besoin d'une main-d'oeuvre, d'une main-d'oeuvre qui est toujours en région. Et, quand une industrie vacille ou, dans plusieurs secteurs, ferme, comme chez moi, c'est difficile de se garder une main-d'oeuvre qualifiée longtemps, les gens migrent vers d'autres régions, migrent vers des milieux plus urbains, migrent vers d'autres industries, et donc il faut repartir une industrie tranquillement, pas vite. Une des façons qu'on peut le faire, c'est à travers la sylviculture, entre autres. Et on l'a vu au cours des derniers budgets, il y a eu de l'argent qui a été mis pour la sylviculture un peu partout en province, qui n'était pas négligeable et qui a permis à plusieurs de nos compagnies qui opèrent en foresterie de bien commencer à rembaucher des gens.

Mais il y a encore des problèmes qui se pointent peut-être à l'horizon. Entre autres, j'ai mentionné le manque de main-d'oeuvre dans certains secteurs et le fait que certains des entrepreneurs n'ont pas nécessairement la marge de manoeuvre toujours pour être capables de bien investir, de moderniser, de restructurer, d'avoir les outils à leur disposition pour être compétitifs avec l'industrie qui opère dans plusieurs juridictions, que ce soit aux États-Unis ou partout à travers le Canada.

À la lecture du budget de cette année, M. le Président, je me rends compte que certaines de ces préoccupations-là par rapport au monde rural, mais également par rapport au secteur spécifique de la foresterie, ont eu l'attention du ministre. Peut-être qu'il pourrait passer quelques minutes à nous expliquer exactement les problématiques qu'il tentait de régler, que ce soit par rapport à l'incertitude en approvisionnement, à s'assurer que, les gens de la forêt privée, qu'on peut également aller chercher tout ce qu'on a besoin de ce côté-là. Mais il y a plusieurs mesures qu'il a mises de l'avant, et j'aimerais qu'il nous en explique le bienfait.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Alors, en effet, le secteur de la foresterie est un secteur qui est encore très important pour l'économie québécoise, particulièrement en région, particulièrement dans certaines régions où c'est la base économique de la région. Or, depuis déjà un certain nombre d'années... Et là il faut vraiment faire quelques pas en arrière, cette industrie a été lourdement frappée, même avant la grande récession de 2008-2009, cette industrie avait déjà été frappée par plusieurs vagues de facteurs structurels importants, à commencer par un manque de compétitivité. Étant donné que les coûts de production au Québec étaient plus élevés qu'ailleurs, l'industrie était beaucoup trop disperse, donc les unités de production étaient relativement petites comparé à ce qui se passait ailleurs en Amérique du Nord.

Après ça, 2008-2009, la grande récession aux États-Unis, la chute dramatique de la construction résidentielle chez nos voisins. Rappelons-nous qu'au sommet de leur cycle économique ils étaient à un niveau de construction de 2 millions d'unités par année, et ils sont tombés assez rapidement à peu près à 500 000 unités par année. Donc, ça a eu un choc important dans toute l'industrie du bois de sciage, du deux-par-quatre. Et, étant donné que l'industrie de la forêt est très intégrée, quand une partie de l'industrie... comme, dans ce cas-ci, les producteurs de bois ont été frappés de façon énorme par ce changement-là cyclique, ça a déstabilisé tout le reste de l'industrie. Donc, l'industrie a passé par un moment très difficile, 2008, 2009, 2010, qui s'ajoutait déjà aux problèmes structurels que j'avais mentionnés avant.

Et aussi, à cette époque-là, il faut se rappeler qu'en plus le dollar canadien augmentait aussi. Alors là, maintenant, en 2016, là, l'industrie fait face à une situation qui est critique, particulièrement en certaines régions. On n'a qu'à penser à la Côte-Nord, par exemple, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, en Mauricie aussi, où c'était, en fin de compte, tout le tissu industriel qui était à risque. Alors là, nous, en tant que gouvernement, il nous fallait trouver une façon d'intervenir, mais toujours à l'intérieur d'un cadre qui est assez complexe parce qu'il y a des accords de commerce international, surtout avec nos voisins américains. Et nous connaissons tous l'appétit qu'il y a dans certains milieux aux États-Unis, certains milieux, de mettre en place des entraves au commerce, donc il fallait être prudent, mais, en même temps, il fallait intervenir, mais ayant comme enjeu, comme vision d'améliorer de façon structurelle les conditions d'opération de cette industrie-là, donc de favoriser une certaine restructuration vers des unités de production qui soient plus efficaces, plus compétitives en termes de volume, et autres, et donc des mesures à court terme pour passer à travers ce cycle difficile, mais aussi des mesures à plus long terme pour pouvoir améliorer leur coût de production.

Alors, pour cela, il faut mettre en place des moyens d'accélérer, de promouvoir l'investissement dans cette industrie-là. Nous avons un package de mesures d'à peu près 230 millions de dollars qui vont aider dans cette voie-là. Nous avons aussi un système très particulier au Québec, nous avons mis en place le système d'accès à la ressource, système d'accès au bois. Ce sont des terres publiques. Dans le passé, le Québec avait été accusé de subventions indirectes inéquitables, donc on a dû revoir aussi notre système.

Donc, c'est une industrie qui est complexe, mais qui demeure le coeur de plusieurs économies régionales, et donc il faut faire quelque chose. Il faut favoriser l'innovation, il faut favoriser le passage à des produits à plus haute valeur ajoutée. Et je vous donne un exemple qui n'est pas nécessairement relié au budget, mais qui inspire un peu notre réflexion dans cette industrie-là et où, récemment... C'était dans la région de la Mauricie, l'usine de la compagnie Kruger, donc, faisant face aussi à une conjoncture très complexe, était sur le point de... Bon, de sérieuses questions se posaient quant à l'avenir de cette usine-là. Eh bien, avec l'entreprise, le gouvernement a agi de façon à l'aider à passer à l'étape suivante, qui est la production du papier à plus haute valeur ajoutée, donc à se transformer, et donc c'est cette transformation-là qui va faire que l'industrie va être plus durable à long terme.

• (11 h 40) •

Dans le budget, aussi nous avons des mesures qui vont contribuer à baisser les coûts de production de l'industrie, que ce soit dans l'accès aux chemins forestiers, etc. Comme vous avez mentionné hier, aussi pour la forêt privée, nous avons mis en place des mesures qui vont favoriser l'accès à la ressource, et donc pour que cette ressource se retrouve sur le marché sans trop pénaliser les propriétaires de ces forêts privées, qui, d'un côté fiscal, se sentaient pénalisés s'ils devaient vendre leur produit trop rapidement sur le marché. Donc, c'est toute une série de mesures et d'étapes, mais qui visent essentiellement la modernisation de l'industrie, l'investissement dans de nouveaux équipements pour passer à l'étape suivante, pour être plus apte pas seulement à survivre, mais à bien performer.

Aussi, d'une façon très concrète, on a eu récemment — je pense que j'ai vu ça dans les... — suite au budget, une déclaration d'une importante compagnie forestière au Québec, la compagnie Résolu, de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, qui considère maintenant la possibilité d'investissements assez importants, de l'ordre de 1 milliard de dollars. Je ne suis pas en train de dire que ça va se faire demain matin, mais l'entreprise, maintenant, en partie suite aux changements que nous avons faits dans notre budget, considère la possibilité très réelle d'un investissement massif. Donc, c'est ce que nous voulons voir, c'est ce genre d'investissement, ce genre de passage à une industrie à plus haute valeur ajoutée et qui, par définition, donc, est plus durable et sera avec nous encore pendant de longues décennies.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Pontiac.

M. Fortin (Pontiac) : Oui. La dernière phrase qu'a prononcée le ministre est particulièrement importante. Je suis particulièrement heureux de l'entendre, une industrie qui va être avec nous pendant encore plusieurs décennies, parce que vous comprendrez, M. le Président, vous comprendrez, M. le ministre, qu'il y a beaucoup de gens chez moi, comme dans d'autres régions, qui comptent sur le fait qu'on a un gouvernement qui est à l'écoute des besoins de régions comme ça, qui est à l'écoute de ce que les gens, dans des régions qui ont été durement affectées, ont besoin, des gens qui veulent voir leur région renaître, qui veulent voir un essor économique dans leur région, et ça, ça dépend, en grande partie, de ce qu'on fait comme gouvernement en foresterie.

Alors, quand j'entends le ministre parler de ce que Résolu pense faire, quand j'entends le ministre parler d'investissements chez Kruger... Et je comprends que c'est important en Mauricie, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, mais ce sont deux industriels qui tiennent à eux une grande part du marché de l'industrie en Outaouais. Kruger a deux usines au centre-ville de Gatineau qui sont au coeur de notre industrie en Outaouais, et alors c'était important de l'entendre.

Alors, quand il me dit : Nous avons proposé un package de mesures, c'est là que ça devient intéressant. Et là il m'a parlé de la forêt privée, il nous a parlé de l'accès aux chemins multiusagers forestiers, ce qui était, M. le Président, vous en vous souviendrez, ce qui était un engagement du Parti libéral du Québec au cours de la dernière campagne électorale, cet accès aux chemins forestiers. Et je pense qu'il y avait beaucoup de gens qui comptaient sur cet investissement éventuel, investissement qui est venu à travers le budget de cette année, donc on remercie le ministre de ça.        Mais il y a une de ces mesures à l'intérieur du package de mesures — et là je vais peut-être entrer un petit peu plus dans le détail, M. le ministre — il y a une des mesures sur laquelle vous ne vous êtes pas arrêté spécifiquement, et c'est celle qu'on retrouve en page B.76 du budget, c'est-à-dire — et là je lis le titre pour simplifier la tâche à tout le monde — Utiliser l'électricité propre produite au Québec pour favoriser les investissements dans les secteurs manufacturier et de la transformation des ressources naturelles. La mesure nous dit essentiellement, là, que c'est un octroi à des projets d'un rabais d'électricité maximal de 20 % pour quatre ans afin de permettre un remboursement équivalant à 40 % des investissements admissibles effectués.

Je vais demander au ministre d'élaborer sur cette mesure-là, sur ce qu'il voulait faire avec cette mesure-là. Mais, avant de lui poser la question, je veux souligner le tableau qui est en bas de la page B.76 parce que ça, ça identifie les principaux secteurs qui sont visés par ce rabais tarifaire là. On parle d'élevage et d'aquaculture, M. le Président. Ça, c'est en plein dans ce que les régions comme la mienne ont besoin pour grandir, pour s'épanouir. On parle de foresterie, d'exploitation forestière, on en parle depuis tantôt. On parle d'extraction minière et exploitation en carrière. La fabrication d'aliments, c'est quelque chose qui se fait partout en région. Les usines de textile, on le sait, souvent c'est quelque chose qui a été fait en région. La fabrication de produits de bois, je comprends de mes collègues de Laval ici qu'il y en a beaucoup qui se fait sur l'île, mais ça se fait, naturellement, principalement en région. La fabrication du papier, on a parlé de Kruger, il y a quelques instants. La fabrication de produits de pétrole et de charbon, encore là, des choses qui se font partout au Québec. La transformation des métaux, ça, M. le Président, vous n'êtes pas sans savoir l'importance que ça peut avoir pour des régions comme celle du Saguenay—Lac-Saint-Jean, entre autres.

Alors, quand je lis l'ensemble des secteurs qui sont visés par la mesure, moi, ce que ça me dit, c'est que les régions sont importantes. Moi, ce que ça me dit, c'est qu'il y a des industries en région qui ont besoin d'investissements, et on veut les encourager, comme gouvernement, à rester en région, à investir en région. Alors, peut-être que le ministre peut expliquer, simplement pour que les gens, pour que les investisseurs, pour que les propriétaires d'entreprise ou simplement les citoyens en région qui veulent bien comprendre ce qu'il propose... les détails de la mesure, je pense que ça serait utile.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup. Avant de répondre à la question, je veux juste finir quelque chose qu'on était en train de parler avant sur la forêt et l'importance de la forêt privée. Parce que, globalement, la forêt privée, en fin de compte, bof! c'est 12 % seulement du total au Québec, mais, dans certaines régions, la forêt privée est très importante, particulièrement en Estrie, en Montérégie. Dans ces deux régions-là, surtout en Montérégie, c'est surtout de la forêt privée. Donc, de faciliter l'accès à la ressource dans la forêt privée est très important dans ces régions-là. Même chez vous, dans votre région de l'Outaouais, c'est quand même 10 %, ce n'est pas insignifiant. Bon, ça, c'est pour la forêt privée.

Maintenant, le programme pour faciliter l'utilisation de l'électricité au Québec, ce qu'on vise ici, c'est surtout le secteur manufacturier au sens large. Donc, ça inclut aussi la première transformation des métaux et aussi, bien sûr, les pâtes et papiers. Et on vise ici les 150 grands utilisateurs d'électricité au Québec, les 150 grandes industries qui, avant le budget, là, avaient déjà le tarif L pour leurs coûts d'électricité. Donc, il y a 150 de ces grandes entreprises qui, encore une fois, ont une importance disproportionnée dans leurs économies régionales. On a parlé de la forêt, mais c'est la même chose pour l'aluminium, etc.

Donc, dans les secteurs où ces entreprises opèrent, elles sont très importantes, et nous avons jugé opportun de mettre en place un programme qu'il ne s'agit pas d'une subvention, il ne s'agit pas de la charité de l'État, mais c'est un programme qui va lier, donc, une facture moins élevée d'électricité... Parce qu'en passant ces 150 entreprises-là ont comme caractéristique d'avoir une facture d'électricité très élevée dans leurs coûts totaux d'opération. Donc, ça, c'est un coût de production important. Alors, on va lier le... donc, un allégement de leurs coûts d'électricité en contrepartie d'un investissement. Donc, si ces entreprises-là investissent, décident d'investir pour moderniser leurs activités, pour devenir plus efficaces, plus productives pour augmenter leur capacité, là, elles vont être éligibles à ce rabais d'électricité sur toutes leurs factures électriques. Pas seulement la facture liée aux nouveaux investissements, mais sur toutes leurs factures.

Alors, de cette façon-là, nous pensons que c'est un moyen de stimuler et d'augmenter l'investissement dans le secteur manufacturier, d'ailleurs un secteur que je... J'en suis sûr, notre collègue de Granby porte un oeil intéressé au secteur manufacturier. Alors, ça, c'est une façon de supporter ce secteur, mais, en même temps, en donnant des incitatifs particuliers à l'investissement. Parce que notre secteur manufacturier, s'il aspire à non seulement survivre, mais à bien performer dans les cinq, 10, 15, 20 prochaines années, il faut qu'il soit efficace, il faut qu'il soit moderne, donc il faut qu'il investisse dans la nouvelle machinerie et équipement pour pouvoir améliorer ses coûts de production, pour pouvoir passer à des produits à plus haute valeur ajoutée.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, on aura l'occasion d'y revenir.

M. Leitão : Très bien.

Le Président (M. Bernier) : Vous parliez du collègue de Granby, bien, on va, justement, lui donner la parole comme porte-parole du deuxième groupe d'opposition. À vous la parole, M. le député de Granby.

M. Bonnardel : Avec plaisir, M. le Président. M. le Président, dans les dernières semaines, j'ai démontré, encore une fois, certains indicateurs qui, pour moi, ne démontrent pas une grosse vitalité économique au Québec. Et je m'explique, c'est la situation de l'insolvabilité des Québécois, des particuliers ou des entreprises. Et j'ai eu cette discussion avec le ministre de l'Emploi voilà quelques semaines parce que le ministre responsable des Finances n'était pas disponible, mais je veux l'entendre sur une situation qui, pour moi, est extrêmement inquiétante, à savoir que le Québec, pour les particuliers, pour les faillites des particuliers et les propositions, donc, de règlement...

Je veux bien que le ministre comprenne ces chiffres, là, en 2010, on est après la crise des papiers commerciaux, beaucoup de gens ont perdu des sous, même leur retraite en entier. Les chiffres démontraient qu'il y avait 37 000 Québécois qui ont fait faillite ou qui ont offert un règlement en proposition. 37 000 en 2010, et, à, ma grande surprise, cinq ans plus tard, il y a 43 700 Québécois qui ont fait faillite ou qui ont démontré une proposition de règlement. Donc, en augmentation, contrairement à l'Ontario, qui, lui, en 2010, en avait 56 600 et a baissé en bas de 40 000 cinq ans plus tard. Même chose pour le Canada. Le Canada, 135 000 faillites en 2010 pour les particuliers, on a baissé ça à 121 000 en 2015. Donc, 36 % des faillites des particuliers au Canada viennent du Québec. Est-ce que le ministre ne trouve pas... Puis je pense qu'un des facteurs est nécessairement le fardeau fiscal des Québécois, qui a continué d'augmenter de façon exponentielle, les salaires ne suivent pas. Comment le ministre explique ça? Est-ce qu'il est inquiet de voir que 36 % des faillites des particuliers du Canada viennent du Québec?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Écoutez, bien sûr que c'est une situation qui nous préoccupe, et c'est certainement quelque chose qu'on doit continuer à l'examiner et à l'analyser de près pour nous trouver des pistes de solution, des pistes de sortie. Ce n'est pas simple, ce n'est pas une situation qui est simple, l'aspect, donc... Si on examine pourquoi les personnes font faillite, c'est tout un chantier, hein? C'est un phénomène que je connais relativement bien, étant donné que j'opérais dans l'industrie financière pendant de longues années, et on voit que, la plupart du temps, ce qui mène à la faillite, c'est la précarité de l'emploi. Donc, souvent, ce sont des personnes qui ont des emplois qui sont précaires et, donc, qui sont vulnérables et qui n'ont aucun coussin financier. Et donc, quand il y a une interruption des revenus, manque de contrats, chômage temporaire, quoi que ce soit, ils sont dans un carcan financier qui est très serré. Donc, ça, c'est une question importante.

Au Québec aussi, contrairement, probablement, à la province voisine, il y a aussi un aspect régional qui est très important, encore une fois, lié à la précarité des revenus de plusieurs ménages. Donc, je pense qu'il faut adresser cette question. Il faut, comme ce que nous essayons de faire, agir sur le marché du travail, agir sur la formation de la main-d'oeuvre, mettre en place des programmes et des mesures qui vont favoriser la participation au marché du travail, donc d'augmenter les taux d'emploi, diminuer la précarité. Et, quand on regarde ce qui s'est accompli depuis mai 2014, donc depuis notre arrivée au pouvoir, quand on voit l'évolution de l'emploi, nous voyons que quand même, comme vous-même, vous avez mentionné hier, 70 000 emplois qui ont été créés, et ce qui est de particulièrement important pour nous, c'est que la plupart de ces emplois-là sont des emplois à temps plein et dans le secteur privé.

Le Président (M. Bernier) : On aura l'occasion de revenir.

M. Leitão : Oui.

Le Président (M. Bernier) : Je vais laisser la parole au député.

M. Bonnardel : M. le Président, je pense que le ministre... En tout cas, si je peux lui émettre un commentaire, je pense qu'il y a une pédagogie économique aussi à faire. Je pousse pour que le cours d'économie revienne dans nos écoles. Et, si vous pouviez, dès l'an prochain, avec le ministre de l'Éducation, ramener ces cours, minimalement, je pense que nos jeunes en sortiraient grandis et comprendraient plus que le fait de décrocher... capable de faire un budget en sortant du secondaire V, bien, ça pourrait peut-être aider. Je vous dis ça respectueusement.

M. Leitão : Et moi, je vous dis que oui, je suis tout à fait d'accord avec vous, c'est quelque chose qu'on devrait y aller.

M. Bonnardel : Je vous amène un autre cas, des entreprises au Québec, M. le ministre... Je l'ai mentionné, après crise, 2008-2009, le Québec avait, pour les entreprises, 2 100 faillites en 2010. M. le Président, en 2015, on en a 2 237. Encore une fois, autant du côté de l'Ontario, les faillites sont passées de 1 800 à 1 100, et le Canada, de 5 200 à 4 100, est-ce que le ministre... Encore une fois, si on a 54 % de toutes les faillites des entreprises au Québec dans l'ensemble canadien, c'est encore, pour moi, encore plus inquiétant de voir que les entreprises ne sont pas capables de survivre. La FCEI me disait, voilà quelques années, que deux entreprises sur dix traversent leur dixième année d'existence sous le même nom. Alors, êtes-vous inquiet? Quelles sortes de mesures vous pensez prendre pour comprendre ce phénomène, cette problématique, qui, pour moi, est extrêmement grave, de voir une entreprise sur deux au Canada faire faillite puis qu'elle provienne du Québec?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui, en effet, c'est une question, encore une fois, très importante qui nous préoccupe, et c'est pour ça que nous avons en place un certain nombre de mesures. Peut-être, comme piste de réflexion à cet enjeu-là, je vous dirais qu'au Québec, contrairement à l'Ontario, nous avons un plus grand pourcentage de PME dans notre tissu industriel et économique. Donc, presque nécessairement, nous allons avoir un plus grand nombre de faillites parce que nous avons plus de PME qu'ailleurs. Ce n'est pas mauvais, loin de là, d'avoir plus de PME qu'ailleurs, mais il faut comprendre que les PME opèrent dans un contexte qui est différent des grandes entreprises, par définition. C'est ce constat qui nous a amenés à mettre le focus de notre action dans le support aux PME dans la réduction du fardeau fiscal, et particulièrement la réduction du FSS. On en a parlé hier, du FSS, donc cette taxe sur la masse salariale, qui est une taxe qui est un boulet important pour beaucoup de PME. Donc, si, en tant que gouvernement, nous réussissons à améliorer leur cash-flow, à améliorer leurs liquidités en baissant la PME, nous n'allons pas éviter toutes les faillites, bien sûr, mais c'est déjà, il me semble, un pas dans la bonne direction pour les aider à passer à travers.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : Merci, M. le ministre. Vous savez, les familles ont un fardeau fiscal qui a augmenté dans les dernières années. Le salaire n'a pas nécessairement augmenté aussi fortement que les taxes et les tarifs, je l'ai mentionné des centaines de fois ici depuis des années. Et les familles qui nous écoutent, malheureusement, à la fin du mois, ont énormément de misère à arriver, et ils vont demander ou aller chercher une ressource additionnelle qui est l'aide alimentaire.

Je l'ai mentionné aussi, j'ai vu des augmentations immensément tristes dans les derniers mois, sinon les dernières années. Tout le monde ici a certainement un organisme qui supporte les familles qui ont besoin d'aide en fin de mois pour aller chercher de la bouffe additionnelle, du linge. On a vu des augmentations de pourcentage, de 15 %, 30 % chez nous, à Granby, avec SOS Dépannage.

J'ai une question fort précise. Vous avez, en 2015-2016, majoré le crédit d'impôt pour les dons de denrées alimentaires de 50 %, pour les dons à des membres Moisson qui font partie du réseau. Cette année, vous avez ajouté 10 membres associés au réseau des banques alimentaires, mais, quand on regarde la carte du réseau dans l'ensemble québécois, il n'y a pas de banque alimentaire ou d'organisme spécifique qui bénéficie, donc, de ces avantages quand on regarde le Centre-du-Québec et la Montérégie. Pourquoi vous n'avez pas répondu à ces besoins dans ces régions qui sont importantes pour le Québec, là?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (12 heures) •

M. Leitão : En effet, Centre-du-Québec, Montérégie, oui, c'est loin d'être insignifiant, c'est une grande région. Écoutez, je n'ai pas de réponse directe à votre question, je ne sais pas pourquoi ces régions-là seraient exclues. Elles ne devraient pas être exclues parce que c'est... Enfin, à ce que je sache, il n'y aucune région qui est exclue. On va s'assurer que les organismes dans ces régions-là peuvent aussi bénéficier de ces crédits d'impôt parce qu'en effet c'est une mesure qui n'est pas particulièrement flamboyante en termes de coût fiscal pour le gouvernement, mais qui est très efficace. Ce que nous avons comme feed-back de la part des organismes, c'est que cette mesure a été très, très utile, et c'est pour ça que nous l'avons étendue, même, maintenant au secteur de la transformation. Mais je vais m'assurer que cela puisse être le cas aussi pour le Centre-du-Québec.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : Il y a un autre point, M. le Président, qui m'interpelle au plus haut point, on voit des sièges sociaux, des grandes entreprises vendues dans les dernières années, des sièges sociaux qui, nécessairement, dans un certain laps de temps, vont déménager, même si on nous laisse croire qu'il y a des ressources importantes, qu'on regarde RONA, qu'on regarde... peu importent les autres sociétés qui ont été vendues dans les dernières années.

Puis, quand on va à la page A.34 puis qu'on regarde votre plan financier, votre plan économique, je pense que notre grand défi... C'est cliché dire qu'on crée de la richesse. Comment? Bien, c'est d'avoir des entrepreneurs, des jeunes entrepreneurs qui auront cette curiosité de démarrer une entreprise dans un jeune âge, et ça amène nécessairement un gouvernement, selon moi, qui doit prendre en compte et prendre au sérieux cette situation pour qu'on puisse soutenir l'entrepreneurship fortement.

Je regarde le dernier point en bas où vous parlez de favoriser le démarrage et la croissance d'entreprises, puis je vois un 17 millions de dollars. Et je vois, à partir de 2019-2020, 600 000 $ pour deux ans. Vous soutenez, avec ce 600 000 $, l'Université de Sherbrooke. Vous ne trouvez pas que, dans le contexte économique difficile que nous avons, que de se donner le défi — vous êtes supposément le parti de l'économie — de stimuler dès le jeune âge des jeunes dans les écoles, mais d'amener aussi votre gouvernement à dire aux jeunes : On pense à vous, on veut favoriser le démarrage, on veut vous soutenir pour être capables d'avoir des entrepreneurs qui vont, oui, continuer d'acheter des entreprises étrangères, sinon de soutenir même la relève, d'assurer la relève avec les entreprises familiales... Donc, je suis surpris de voir que vous prenez si peu de considération, pour moi, de ce démarrage et de croissance d'entreprises. Alors, comment vous expliquez que partir de... en trois ans... même, on pourrait dire qu'à partir de la troisième année, là, vous ramenez seulement 5 millions de dollars et moins de 1 million de dollars pour un plan quinquennal qui, pour moi, est beaucoup trop peu si on croit vraiment en l'entrepreneurship, là.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Écoutez, ça, ce n'est pas seulement 600 000 $ qui sont dans l'aide à la création d'entreprises. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons contribué à trois fonds. C'est 100 millions de dollars, ce n'est pas 600 000 $.

Maintenant, dans la comptabilité gouvernementale, on prend un certain nombre de provisions au départ, et puis, par la suite, ce sont les coûts de financement de ces fonds-là. C'est ça qui est inscrit ici, les coûts de financement. Mais l'effet levier de ces 100 millions de dollars dans les fonds est beaucoup plus élevé que ça. Donc, non, le rôle du gouvernement ne se limite pas, loin de là, à 600 000 $, c'est beaucoup plus que ça. Et c'est un enjeu, bien sûr, un enjeu qui est important.

M. Bonnardel : Monsieur...

Le Président (M. Bernier) : Oui.

M. Bonnardel : Juste pour qu'on...

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y, M. le député.

M. Bonnardel : Je veux bien croire que, sur 100 millions... Est-ce que serait intéressant que le ministre nous dévoile... L'argent a été emprunté, mais ça...

Le Président (M. Bernier) : La ventilation du 100 millions, c'est ça?

M. Bonnardel : C'est ça.

Le Président (M. Bernier) : Est-ce qu'il y a des informations sur ça, M. le ministre, que vous...

M. Bonnardel : Oui, mais d'où elle vient aussi, d'où vient cette...

M. Leitão : La page B... Attendez, on vous donne la page, B.215. À la page B.215, c'est là où on parle des trois fonds, le Fonds d'amorçage en science de la vie Amorchem II, fonds d'amorçage d'InnovExport et le Fonds d'amorçage en technologies propres. Donc, voilà d'où viennent ces fonds, une partie vient du gouvernement, une partie vient du secteur privé. Et ces fonds, la partie gouvernementale, oui, ce sont des fonds empruntés.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : Je veux bien croire, M. le ministre, là, mais c'est des fonds spécifiques, là, à sciences de la vie, InnovExport, technologies propres. Écoutez, je crois à ça, là, sans problème, là, mais un jeune entrepreneur ne sera peut-être pas nécessairement sur ces trois principaux fonds d'amorçage technologique que vous avez. Moi, je vous parle d'un ensemble, là, je vous parle d'un ensemble où de jeunes entrepreneurs ont l'intention de démarrer dans la restauration, dans l'automobile ou, peu importe, le commerce de détail. Pour moi, là, c'est de soutenir l'entrepreneurship, ce n'est pas... Oui, c'est correct que vous ayez trois fonds spécifiques, mais je pense que vous devez pousser plus loin votre réflexion à savoir comment on va aider, comment on va amener nos jeunes...

Puis là je vous ramène peut-être encore à l'éducation, M. le ministre, mais je pense que c'est un autre point important, ce jeune où on va développer cette curiosité, ce n'est pas à la fin de son secondaire V, c'est souvent au secondaire III, formation professionnelle. On va définir si le jeune a le goût de démarrer une entreprise ou non, on va piquer sa curiosité, on va même amener dans le cursus académique peut-être des cours d'entrepreneurship. Donc, ce serait intéressant que vous ayez dans les futurs budgets, pas juste dans des fonds qui sont plus spécifiques, du capital qui va amener des jeunes à prendre le risque, à prendre le risque parce que, vous le savez très bien, avec — on en a parlé — le vieillissement de la population, on aura besoin de jeunes entrepreneurs dans les prochaines années qui voudront démarrer... Alors, voilà la question.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Écoutez, pour ce qui est de l'éducation économique, là, alors là, on est tout à fait d'accord, oui, je vais faire du lobbying, si on peut ainsi dire.

Le Président (M. Bernier) : Il s'agit de s'inscrire.

M. Leitão : Je vais m'enregistrer d'abord.

Le Président (M. Bernier) : Il faut s'inscrire.

M. Leitão : Mais je m'inscris et donc je vais utiliser de mes pouvoirs de persuasion auprès de mon collègue le ministre de l'Éducation parce qu'en effet c'est quelque chose qui est particulièrement sensible au Québec, et on doit tout à fait faire ça.

Pour ce qui est des fonds d'amorçage, écoutez, celui qui est basé à Québec, le fonds d'amorçage à Québec, InnovExport, c'est exactement ce que vous mentionnez, c'est pour des jeunes entrepreneurs dans toutes sortes de secteurs qui veulent créer leur entreprise et qui travaillent avec des partenaires du secteur privé qui sont prêts, eux aussi, à mettre 15 millions et à participer avec les jeunes entrepreneurs dans le développement de nouvelles entreprises.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : Vous devriez minimalement, l'an prochain, dans les différents secteurs du Québec, offrir ce même genre de fonds si vous considérez que c'est important. Je pense, qu'on soit en Abitibi... Pardon?

Une voix : Pas juste à Québec.

M. Bonnardel : Pas juste à Québec, qu'on soit en Abitibi, qu'on soit au Saguenay ou ailleurs. Bon, on ne veut pas revenir sur les FIER du temps, là, parce qu'on soutenait des entreprises déjà existantes, mais vous comprenez le but de mon intervention, c'est vraiment le démarrage comme tel et ce défi que les jeunes ont à aller chercher... Les CLD n'existent plus...

M. Leitão : ...

M. Bonnardel : Oui, mais, vous savez, c'est extrêmement difficile. Puis démarrer une entreprise avec un 1 500 $, on n'est pas tous des Steve Jobs, là, alors vous savez que c'est le défi du gouvernement, je crois, aussi, dans les prochaines années, de prendre en compte et de tenir cette question... un point qui sera important pour les jeunes entrepreneurs dans les 10, 15 prochaines années.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Granby. Nous allons donc retourner du côté ministériel avec M. le député de Laval-des-Rapides.

• (12 h 10) •

M. Polo : Merci beaucoup, M. le Président. Je tiens également à saluer mes collègues, là, des deux côtés de la table et vous-même à titre de président de la Commission des finances publiques.

M. le Président, c'est la première intervention que je fais, donc je vais quand même faire un petit préambule à ma question, ma question, qui va traiter d'éducation, mais, avant tout, de remettre un peu les choses en contexte. Je sais que le ministre a eu l'occasion de nous expliquer certains éléments de son argumentaire non seulement du budget, mais également de son argumentaire... Comme vous et comme tous les collègues ici ou la plupart, la grande majorité, il y a exactement deux ans, bien, ou vivait l'émotion d'une journée d'élection, et puis, dans mon cas à moi, c'était ma première expérience. Ceci dit, je vous replace dans ce contexte-là, M. le Président, parce qu'il y a des éléments de ce contexte dans lequel notre équipe du Parti libéral est arrivée au pouvoir et a formé le gouvernement dans lequel on se trouve aujourd'hui encore à expliquer la mise en contexte dans laquelle on s'est retrouvés.

Tout d'abord, rappelez-vous — et je pense que M. le ministre a eu l'occasion hier de l'expliquer — l'argument ou le point sur le déficit prévu, anticipé suite à la gestion irresponsable du gouvernement précédent des fonds publics, des finances et également, là, du budget, un déficit anticipé, là, de 7,3 milliards également. Je pense que c'est le député de Sanguinet, là, qui a posé la question, et le ministre a eu l'occasion d'y répondre amplement.

Deuxièmement, le contexte de la création d'emplois était également très différent de ce qu'il est aujourd'hui. Entre janvier et avril 2014, le Québec perdait 32 500 emplois. Nous venons de terminer une année, l'année 2015, où nous avons créé un peu moins de 71 000 emplois, principalement à temps plein et dans le secteur privé notamment.

On est arrivés, vous vous rappelez, en campagne il y a deux ans, le gouvernement de l'époque présentait un budget sans crédits avec une croissance assez importante au niveau, là, des différents programmes de dépenses et également une croissance anémique au niveau économique, effectivement. Vous conviendrez que la contribution du gouvernement au niveau du PIB est déjà très importante, et ce qu'il faut effectivement... et ce budget-là, je suis rassuré de voir... comporte tout près de 7 milliards de mesures pour stimuler le développement économique. Pourquoi c'est important? Parce que c'est quand même près de 26 % du PIB québécois, donc de notre économie, qui dépend d'interventions directes et indirectes de l'État.

Maintenant, est-ce qu'on souhaite, est-ce qu'on voudrait que ce pourcentage, ce ratio-là diminue dans le temps? Oui, c'est ce qu'on souhaite parce que c'est le rôle que doit jouer le secteur privé, nos entrepreneurs. Et, sur ce point-là, je soutiens l'intérêt du député de Granby de stimuler l'entrepreneuriat, de soutenir nos entrepreneurs, nos jeunes, de soutenir l'indice entrepreneurial et de le stimuler à ce niveau-là parce que notre autonomie non seulement personnelle, mais comme société passe grandement par, justement, notre capacité à créer de la richesse pour bien financer nos programmes également.

M. le Président, j'ai dit d'entrée de jeu que je souhaitais poser quelques questions au ministre sur le sujet de l'éducation. Pourquoi? Parce que, comme vous, je suis également parent, comme vous, je me suis également fait interpeler régulièrement au cours des 18, 24 derniers mois sur des inquiétudes de parents de nos circonscriptions respectives, inquiétudes, bien sûr, d'élus des commissions scolaires et de dirigeants de commission scolaire sur la place et la priorité qu'on donne à l'éducation au sein de notre gouvernement. J'attendais avec anticipation le budget, notamment sur ce point-là, mais je souhaite également démystifier un peu le travail qui a été fait non seulement par nos collègues ministres depuis deux ans, mais également par notre formation politique depuis les 10 dernières années, 10, 12 dernières années. Pourquoi? Parce qu'on l'a beaucoup entendu, et le discours alarmiste a eu beaucoup de place dans les médias. Et, tout d'abord, sur le discours soi-disant de la... nous, on appelle ça la rigueur, certains vont appeler ça de... C'est quoi, le terme qu'ils utilisent encore, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : ...

M. Polo : L'austérité. Nous, on appelle ça de la rigueur, de la responsabilité. O.K.? Le journaliste Francis Vailles a publié quelques chroniques à l'automne sur l'éducation qui sont très importantes pour, justement, faire la pédagogie sur ce que notre formation politique a fait, a mis ou investi en éducation non seulement depuis 2014, mais entre 2003 et 2012. Je vais vous en énumérer quelques-unes.

Tout d'abord, la croissance de la mission des fonds et des budgets associés au ministère de l'Éducation... ont crû de 41 % à partir de 2004. 41 %, qui égale essentiellement à un budget qui tourne autour... juste en dessous de 21 milliards. Vous le savez, c'est la deuxième mission de l'État, 30 %, 33 % de notre budget. Cette croissance est plus importante que l'inflation sur la même période, donc de 19,4 %, et également plus importante que la croissance économique, de 38 %. Donc, si on regarde ça sur une croissance annualisée, là, à partir de 2004, c'est une croissance moyenne de 5,3 % versus 3,3 % du PIB et versus 1,8 % de l'inflation.

Ce qu'il est quand même également important de noter, c'est que la fréquentation en éducation, que ce soit primaire, secondaire ou même postsecondaire, est loin d'expliquer uniquement, juste sur le principe de la fréquentation... est loin d'expliquer le souci, l'importance que notre gouvernement et notre formation politique a accordée à l'éducation au cours de ces années-là. On parle d'une fréquentation qui a diminué légèrement, diminué de 1 % sur la même période pour l'école primaire et secondaire, donc 65 000 élèves de moins. Et, par rapport à la formation postsecondaire, on parle d'une augmentation de 1 % pour les cégeps, donc 179 000 étudiants de plus, et de 2 % pour les universités, 229 000 étudiants de plus. Quand vous comparez de nouveau la statistique, la croissance des dépenses en éducation, de 5,3 % annualisée, versus une fréquentation qui a soit diminué de moins 1 % ou augmenté tout au plus de 2 %, vous voyez qu'on a surpassé grandement, bien sûr, la pression à ce niveau-là.

Maintenant, comment expliquer en partie la croissance de ces dépenses-là versus les services offerts sur le terrain? Bien, ça, il y a différentes explications. Une de ces explications-là, c'est la diminution des ratios. La diminution des ratios, par exemple, au niveau de cinquième et sixième année du primaire, qui sont passés de 27 à 24 élèves, et première et deuxième année du secondaire, qui sont passés de 30 à 26 élèves également.

Une autre explication, M. le Président, c'est tous les services offerts. O.K.? Il y a un rapport qui a été produit sur les commissions scolaires, le rapport Champoux-Lesage, qui a démontré que, sur cette période-là, donc de 2004 à 2013-2014, on pouvait, à ce moment-là, déterminer que la croissance des dépenses par élève dans l'école primaire et secondaire se situait, se chiffrait autour de 11 000 $. Sur cette croissance-là, si on retranche l'inflation, on parle d'une hausse annuelle récurrente de 2 161 $, donc un peu moins de 2 200 $. Donc, c'est une augmentation de 24 % d'argent frais associé à l'école primaire, secondaire. Sur ce 2 161 $, on explique dans le rapport Champoux-Lesage que 404 $ de cette hausse est dédié spécifiquement à absorber la croissance du nombre d'élèves handicapés ou d'élèves ayant des difficultés d'apprentissage, donc EHDAA. Sur ce ratio-là, sur le même 2 161 $, on attribue également, sur le même 2 161 $, on attribue également 395 $ associés uniquement à l'ajout de 90 minutes de formation en anglais. O.K.? J'ai d'ailleurs un de mes collègues de la région de la Beauce, et un collègue estimé, qui, à chaque fois qu'on a une rencontre et que le sujet de l'éducation est apporté, accorde une très grande importance et, de surcroît... parce qu'effectivement ça ouvre des portes.

Je fais tout ce préambule-là, M. le Président, pour inviter le ministre des Finances à nous expliquer, bien sûr, sa décision d'avoir ajouté, injecté à la fin de l'automne 80 millions de dollars au niveau du secteur de l'éducation puis également de nous expliquer les différentes mesures associées au secteur de l'éducation, et d'élaborer sur ce sujet-là notamment, un sujet d'intérêt pour moi comme parent, ayant un garçon de sept ans qui fréquente l'école primaire, mais pour beaucoup de parents au Québec également. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. M. le ministre.

• (12 h 20) •

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, collègue. Alors, oui, en effet, l'éducation est la priorité du gouvernement. Une fois qu'on a maintenant atteint, rétabli l'équilibre budgétaire, alors, à l'avenir, maintenant et à l'avenir, l'éducation est notre priorité pour toute une série de raisons que vous avez très bien mentionnées. Très concrètement, dans le budget 2016-2017, cela se traduit par 1,2 milliard de dollars sur trois ans, 500 millions dans des programmes, si vous voulez, et 700 millions dans l'infrastructure physique pour améliorer et moderniser nos installations.

En ce qui concerne la partie programmes, donc les 500 millions, il y en a surtout trois grands types de mesures dont l'objectif est d'améliorer la réussite scolaire pour qu'on réussisse à atteindre cet objectif de 80 % de nos jeunes qui obtiennent leur diplôme avant l'âge de 20 ans d'ici 2020. Et ça, c'est un objectif important. Nous sommes maintenant... je pense que nous sommes à à peu près 77 %. C'était 71 %, il y a cinq ans, et là nous voulons nous rendre à 80 %, donc, d'ici cinq ans, en 2020. Ça nous placerait dans un endroit qui se comparerait très, très, très favorablement aux autres sociétés développées des pays de l'OCDE. Et donc c'est qu'on serait parmi les leaders, et donc c'est ce que nous allons faire. Alors, pour cela, il y a un programme que nous avons appelé Agir tôt et au bon endroit, un programme qui va... Des 500 millions, il y a 300 millions sur trois ans qui s'en vont à ce programme-là. Donc, c'est très important pour pouvoir atteindre ces objectifs-là. Et puis on a aussi d'autres programmes financièrement moins importants, mais qui sont toujours importants, particulièrement de continuer d'innover aussi en éducation. Donc, l'éducation, dans les façons mêmes de transmettre la connaissance, elle-même aussi doit évoluer et doit s'adapter aux nouvelles technologies, aux nouveaux moyens du XXIe siècle. Alors, ça, de façon générale, c'est un peu ça, ce qu'on fait aussi.

Il y a une autre mesure, moi, que je trouve qui n'est, encore une fois, pas nécessairement très, très flamboyante en termes d'enjeux financiers, si vous voulez, mais qui est très, très utile et très nécessaire, c'est un nouveau partenariat — bon, le partenaire existe déjà — avec les cégeps, c'est les CCTT. Et là, maintenant, j'ai perdu ma page où j'avais ça. Excusez-moi, là, je vais retrouver la page ici où je parlais des CCTT. Ça m'apprendra à mettre — page 36 — des petits collants qui vont... Voilà, j'ai retrouvé ma page. Alors, les CCTT...

Le Président (M. Bernier) : On en est fort heureux.

M. Leitão : Merci beaucoup. Ça serait compliqué si je ne trouvais pas ma page. Alors, les CCTT, c'est les centres collégiaux de transfert de technologie. Ça s'insère un peu dans le cadre de promotion de l'innovation en région et de la création d'entreprises. Donc, ce sont des cégeps, particulièrement en région et qui ont des liens très directs avec des entreprises dans leur région, et donc c'est un modèle d'intervention qui fonctionne. Nous ajoutons 16 millions de dollars à ce programme sur les trois prochaines années. On vise des secteurs tels que l'aérospatiale. Bien sûr, c'est notre priorité, c'est un des plus grands secteurs industriels au Québec, et on pourrait en parler, d'avions, si ça vous tente. On aurait des choses à dire sur les avions. On parle aussi, évidemment, de technologie numérique. On parle aussi des objets connectés, enfin «Internet of things», que c'est un nouveau domaine. Mais surtout... et ça, c'est très important, et ce n'est pas très sexy du tout, mais c'est très important, c'est la transformation alimentaire. La transformation alimentaire, dans un très grand nombre de régions au Québec, est la plus grande industrie, le plus grand employeur, et c'est une industrie aussi qui a besoin de beaucoup d'innovation, de beaucoup de transformation, et les cégeps en région, à travers ces CCTT, peuvent et doivent jouer un rôle important dans ce processus-là.

Donc, voilà, c'est un plan d'action quand même assez détaillé. D'ailleurs, nous avons un autre bon fascicule qui a fait partie de documents du budget, qui explique très bien cette situation, et je ne pouvais pas oublier de mentionner qu'une partie importante de l'action du gouvernement dans ce cadre-là, donc, de modernisation, d'assister la transformation du secteur de l'éducation et de transformation de l'économie du XXIe siècle, c'est notre appui très important à la construction du Complexe des sciences de l'Université de Montréal, et on mentionne ça comme étant le campus Outremont. Le campus Outremont de l'Université de Montréal, donc le complexe des sciences, ça va se faire, encore une fois, à l'avant-garde de la technologie, c'est vraiment... on suit les meilleures pratiques de ce qui se passe au Royaume-Uni, de ce qui se passe en Israël, où il y a un très bon arrimage entre la recherche, et les institutions d'enseignement supérieur, et les entreprises privées. Alors, notre appui important à la progression, à l'avancement de ce projet très, très important pour l'Université de Montréal et pour l'économie de la métropole fait partie aussi de notre engagement dans le domaine de l'éducation et de la science.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Polo : Merci beaucoup, M. le Président et M. le ministre. Effectivement, je suis bien content que vous ayez pris, à la fin, là, de votre intervention, pris le temps de faire référence aux centres collégiaux de transfert technologique parce que, le 15 décembre dernier, j'ai eu l'occasion de faire une visite de presque trois heures du centre de transfert en aéronautique à Saint-Hubert et l'occasion de voir la panoplie de services, d'initiatives, de connaître leurs chiffres, à savoir combien d'étudiants passent à travers leurs portes. Et surtout ce qui m'a particulièrement plu, c'est que c'est également un écosystème entrepreneurial où il y a des nouvelles technologies qui sont testées, développées et même, si on peut dire en bon français, des «spin-offs» qui sortent ou qui émanent et qui naissent à partir du CTA à ce niveau-là.

Pour revenir, M. le Président, sur le sujet de l'éducation, un des grands points du budget, une des grandes missions du budget en lien avec l'éducation, c'est parmi les quatre points de notre plan économique, qui est de mieux former, innover, tirer profit de la transition vers une économie plus sobre en carbone et également attirer, développer, retenir les meilleurs talents. Et, à ce niveau-là, M. le Président, ce qu'il est important de souligner, au niveau entrepreneurial, on a une belle opportunité... en fait, on a un bel écosystème qui est en train de se développer au niveau des «start-ups».

Mais, avant d'élaborer sur ce point-là, j'aimerais effectivement, comme M. le ministre m'a invité à peut-être aborder la question plus longuement au niveau du secteur aéronautique, qui est un secteur immensément important pour notre économie... C'est quand même le premier secteur exportateur de notre économie, c'est 42 000 emplois associés à ce secteur-là. Beaucoup de nos collègues de l'opposition, beaucoup de citoyens nous ont questionnés sur la décision de notre gouvernement d'avoir consacré un important soutien financier à la CSeries, mais ce qui est important de mentionner, c'est que c'est une grappe industrielle qui non seulement se distingue au Québec, mais qui permet au Québec de se distinguer au niveau mondial. O.K.? Et je l'aborde, quand même, parce que c'est quand même un financement important qui est accordé à ce projet-là, mais qui a des répercussions pas seulement sur l'ensemble de l'industrie, mais sur l'ensemble du territoire québécois.

Le Président (M. Bernier) : On va avoir l'occasion d'y revenir, M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Polo : Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Fort intéressant. Nous allons donc passer du côté du député de Mercier. Vous avez un bloc de 20 minutes qui vous est consacré. À vous la parole.

• (12 h 30) •

M. Khadir : Merci, M. le Président. Je veux remercier mes collègues aussi d'avoir fait preuve de patience et d'indulgence à mon égard pour réaménager le temps.

On est à la Commission des finances publiques avec des collègues qui, je suis certain, sont très préoccupés et inquiétés, tout comme moi, par les révélations qui ont été faites au cours des derniers jours sur l'existence, encore une fois, d'une autre... C'est un autre pan, si vous voulez, de toute la problématique des paradis fiscaux et des échappatoires fiscales. Je parle des Panama Papers. Je n'ai pas pu mettre la main sur les articles du Journal de Montréal de ce matin, on n'a pas eu le temps à cause des circonstances que vous savez, mais il y aurait déjà des informations sur un certain nombre de cabinets d'avocats ou de comptables qui sont impliqués ici. Mais le problème dépasse largement la question de quelques cabinets d'avocats ou quelques personnes, c'est un problème systémique. Plutôt que d'accabler des individus qui souvent, par négligence ou par culture générale qui existe dans des sociétés qui sont permissives, qui permettent à des riches, à des nantis des privilèges qu'on ne permet pas à des citoyens ordinaires, se sont adonné à ces pratiques fiscales, maintenant, plutôt, donc, d'accabler des individus, voyons voir comment, comme Assemblée nationale, comme gouvernement, comme société, on peut régler ces problèmes.

Les Panama Leaks nous parlent de quoi? De 11,5 millions, donc, de documents hautement confidentiels qui ont été rendus, disons, disponibles au regard d'un consortium de médias internationaux excessivement fiable. Je pense que personne ne devrait mettre en doute sur le sérieux du travail de ces médias, que ça soit l'émission Enquête, ici, que ça soit le Le Monde diplomatique ou la BBC... je m'excuse, le Guardian, je pense, en Angleterre. Ce que je dois rappeler et ce qui nous concerne, c'est que, malgré l'indignation que ça suscite lorsqu'on sait ce qui se passe et comment des milliards de dollars, à travers ces firmes-écrans, échappent à un impôt que, pourtant, tout le monde est convié à payer honnêtement à la fin de l'année, tout ça est parfaitement légal. Sauf exception, toutes ces sociétés-là, comme, d'ailleurs, se défend la firme Mossack Fonseca, c'est que c'est de l'escroquerie sur le plan de la morale, de la gestion des affaires publiques et de la vie en société — parce que c'est une escroquerie de ne pas payer sa juste part d'impôt — mais c'est parfaitement légal.

Pourquoi c'est légal? Parce qu'on a eu pendant des années des orientations économiques, parfois de bonne foi, peut-être parfois de mauvaise foi, mais peu importe, qui ont encouragé ou permis ça, et j'y reviendrai. C'est la complaisance législative, les échappatoires fiscales légales qu'on a permises, les traités de libre-échange qui ouvrent les vannes pour les transferts de capitaux qui ont facilité et fait exploser littéralement, au cours des 20 dernières années, les pratiques fiscales abusives, les transferts de capitaux à l'abri du regard du public et le problème énorme que ça cause pour nos sociétés, c'est-à-dire des milliards de dollars en revenus légitimes que les gouvernements auraient droit, mais qui leur échappent, aggravant les problèmes budgétaires, les problèmes de finances publiques, les problèmes de dette, qui, ensuite, permet de justifier des coupures dans nos services.

C'est d'autant plus important d'en parler, M. le Président, que les gens, actuellement, sont en train de remplir leur rapport d'impôt honnêtement, hein, avec honnêteté. Et heureusement, heureusement qu'une très, très vaste majorité de nos concitoyens, nos contribuables et aussi les entreprises sont honnêtes et font tous des efforts, conscients de l'importance de payer des impôts pour la vie en société.

Mais moi, je regarde depuis quelques années, depuis la fameuse fois où, pour la première fois, j'entendais un discours du budget, et l'ancienne présidente du Conseil du trésor, Mme Monique Jérôme-Forget, dans son discours, parlait de la lutte à l'évasion fiscale. Je me suis levé — pour ceux qui étaient là à cette époque-là, il n'y en a pas beaucoup ici — j'ai applaudi la ministre libérale, et là j'ai été saisi d'une certaine gêne parce que j'étais le seul parmi les 124 députés présents à applaudir, alors que c'était une ministre libérale qui parlait, et j'aurais souhaité que les ministres libéraux ou les députés... Bon, on m'a expliqué par la suite que j'étais un peu naïf. Parce qu'on parle de lutte à l'évasion fiscale, mais, à la fin, on se rend compte que la lutte à l'évasion fiscale au Québec, essentiellement, consiste à faire la traque aux petits commerçants, aux coiffeuses de salons de coiffure dans leur sous-sol — là, j'exagère à peine un peu — aux chauffeurs de taxi, aux restaurateurs. Je comprends qu'il n'y a aucun moyen à lésiner pour aller chercher la juste part d'impôt que tout le monde doit payer.

Mais, quand il y a un déséquilibre et qu'on voit tant de ressources, d'énergie investies à faire... Et je le vois d'ailleurs, hein, dans les... si on va à la page... Je vais le retrouver tout à l'heure, là, dans le discours, le plan du gouvernement, à la fin, les cibles identifiées touchent essentiellement le travail au noir. Ça touche qui, le travail au noir? Les petits entrepreneurs, là, justement la coiffeuse, je ne sais pas, moi, le chauffeur de taxi d'Uber à la limite, n'est-ce pas? La dissimulation de revenus, bon, ça, ça touche d'autres. Les réclamations injustifiées d'avantages fiscaux, notamment les demandes frauduleuses de remboursement de la taxe de vente du Québec, le non-versement de taxes perçues, les factures de complaisance et les activités illégales telles que le commerce illicite de tabac, de boissons, tout ça, c'est vrai qu'il faut s'en occuper, mais elle est où, la mesure énergique, d'abord, de faire le ménage dans nos lois?

Bon, je veux quand même vous parler des cinq paradis fiscaux qui étaient dans le rapport Godbout avant de poser ma question parce que ça nous permet d'avoir, avec les Panama Leaks, un portrait. À la page 172, Se tourner vers l'avenir du Québec — c'était le rapport demandé à M. Godbout, d'accord — on a les investissements directs à l'étranger, leur progression entre 2000 et 2013. Nous, on a fait le calcul, M. le Président. Dans l'évaluation totale, on part de, en 2000, 356 milliards de dollars à 780 milliards de dollars. Une partie de ça est aux États-Unis, au Royaume-Uni, et tout ça, mais une grande partie, c'est en Barbade, c'est aux îles Caïmans, c'est au Luxembourg, en Suisse et aux Bermudes. 140 milliards de dollars, d'accord? Ça, c'est pour 2013. Juste pour les paradis fiscaux, ça fait tout près, si on fait la moyenne, de 5 milliards de dollars par année, 5 milliards de dollars par année pour les paradis fiscaux. Sur 13 ans, ça fait beaucoup plus. Et la part du Québec dans le PIB du Canada étant à peu près le cinquième jusqu'à ce qu'on ait des chiffres plus exacts, plus transparents, c'est à peu près, donc, le cinquième de ça qui échappe au fisc du gouvernement.

Le Président (M. Bernier) : 800 millions à 1 milliard.

M. Khadir : Oui. C'est évalué à peu près à ça par année. Ça, c'est vraiment, au minimum, vraisemblablement ce qu'on connaît à date. Donc, ma question, c'est : Quels sont les moyens que le ministre et son gouvernement comptent prendre de manière énergique à mettre en oeuvre rapidement cette année pour aller au fond de ces choses-là et pour nettoyer tout ce qui, dans nos lois et dispositions fiscales, permet à ces gens-là d'oeuvrer? Et qu'est-ce qu'il entend faire, autrement dit?

Le Président (M. Bernier) : Merci. Alors, comme vous le savez, la Commission des finances publiques a levé un mandat d'initiative aussi.

M. Khadir : Je comprends. Il y a le mandat qu'on fait, mais il y a des mesures concrètes qui peuvent être prises, et je vais lui en donner quelques exemples.

M. Leitão : Très bien. Écoutez, bien sûr que l'évasion fiscale est un sujet pas seulement important, mais de plus en plus de nature stratégique pour tous les États, tous les États de la planète, parce qu'il y a une interconnexion entre l'évasion fiscale, l'utilisation de sociétés-écrans, le blanchissement d'argent, le monde criminel, les questions de sécurité, de terrorisme. Donc, tout ça est interconnecté. Alors, ça intéresse, bien sûr, tous les États, les pays de l'OCDE, à tel point que l'OCDE elle-même a émis toute une série de recommandations et d'actions qui sont en train d'être mises en oeuvre par les différents gouvernements.

Dans notre budget, nous avons un document qui est les renseignements additionnels. Et, dans ce document de renseignements additionnels, à la section C, nous avons tout un chapitre sur la lutte à l'évasion fiscale qui se fait au Québec, donc ce que Revenu Québec peut faire et fait dans cet ordre d'idée là. Mais, pour commencer, je vous dirais que le coeur de l'action, vraiment, doit suivre les principes et les actions de l'OCDE. Et il y en a qui sont déjà en train d'être mis en place parce que cette problématique-là, elle est internationale et donc elle demande une action concertée de la part des gouvernements.

Et on le voit, d'ailleurs, que des gouvernements dans l'Union européenne, le gouvernement de nos voisins, des États-Unis, sont extrêmement actifs dans ce domaine-là, et donc, dans les années qui vont suivre, les actions, il y en a à peu près, une quinzaine d'actions qui ont été fortement recommandées par l'OCDE. Ce sont des actions qui se suivent, donc il y a un certain ordre logique à aller à action 1, action 2, etc., et donc c'est une problématique qui est en train de changer de façon fondamentale dans nos économies.

• (12 h 40) •

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Mais il peut y avoir une manifestation de la volonté du gouvernement là-dedans si le gouvernement commence à poser des gestes. Par exemple, la ministre fédérale, immédiatement lorsque les Panama Papers sont apparus à notre attention à travers les médias, elle a réclamé d'avoir accès à toutes les listes. On n'a pas entendu le Québec faire cette réclamation.

Ensuite, il y a des législations en Europe qui, lorsqu'une entité est reconnue coupable de ce genre de chose, ou admet ses fautes, ou est accusée, ensuite contrevient et rentre en négociation avec le gouvernement pour payer des amendes, comme c'est le cas de plusieurs entreprises... Je peux vous en nommer quelques-unes qui oeuvrent au Québec : McKesson, fournitures pharmaceutiques, KPMG, qui a plusieurs contrats avec votre gouvernement. Continuer à faire affaire avec ces firmes envoie un très mauvais message à un moment où on veut envoyer un message d'action énergique contre l'évasion fiscale. Donc, un message que pourrait envoyer le gouvernement, c'est que le ministre des Finances, très honorablement, vienne dire : Écoutez, on respecte tout le monde qui est conforme à la loi, mais là il y a certaines firmes qui ont reconnu leur faute, et, pour que ça soit clair que nous avons une intention de lutter contre ça, pendant trois ans, cinq ans, nous allons exclure ces firmes-là de tout contrat public. Est-ce que vous avez l'intention de faire ça?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, nous avons aussi des procédures, nous ne pouvons pas agir de façon discriminatoire. Les allégations, il faut d'abord qu'elles soient prouvées, et c'est pour ça...

25 M. Khadir : ...

Le Président (M. Bernier) : On va juste laisser...

M. Khadir : ...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Mercier, oui, on va juste lui permettre de répondre, et je vous reviens par la suite. Allez-y, M. le ministre.

M. Leitão : Donc, on ne peut pas agir de façon arbitraire, et c'est pour ça, encore une fois, que nous suggérons fortement au gouvernement canadien — et c'est leur intention — de suivre le plan d'action des mesures de l'OCDE, et ça va régler en grande partie cette question.

En plus, en ce qui concerne plus directement les Panama Papers, bien sûr que le Québec aussi... L'information est le nerf de la guerre, alors bien sûr que nous sommes aussi déterminés à obtenir cette information-là. Et, d'ailleurs, il y a une entente-cadre entre l'Agence du revenu du Canada et Revenu Québec. Toute information qui serait obtenue par l'Agence du revenu du Canada, elle sera aussi obtenue par Revenu Québec. Et, une fois qu'on sera en possession de cette information-là, là nous pouvons agir et, bien sûr, nous avons l'intention d'agir.

Une façon très pratique, très concrète, c'est que nous avons mis en place une équipe spécialisée à Revenu Québec, spécialisée dans la lutte contre les planifications fiscales agressives. Alors, cette unité a les moyens adéquats, les moyens financiers nécessaires pour pouvoir procéder à des enquêtes poussées et qu'elle puisse, justement, être beaucoup plus efficace auprès de contribuables qui, pour toutes sortes de raisons, essaient d'évader le fisc. Et je dirais ici à tous ceux qui nous écoutent : C'est toujours une très mauvaise idée d'évader le fisc parce qu'on finit toujours par vous rattraper.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Mercier.

M. Khadir : Ça me gêne et ça m'attriste un peu quand même que l'équipe du ministère ne soit pas bien informée, que le ministre, ici, dise, par exemple, pour McKesson et KPMG : C'est des allégations. C'est prouvé, ils ont été condamnés par le fisc canadien à payer des amendes. Et je crois qu'il n'y a rien de discriminatoire pour le gouvernement de dire : Si vous avez fauté avec le fisc, on ne vous donnera pas de contrats. Il faut qu'il y ait une conséquence, M. le ministre. Il faut qu'il y ait une conséquence aussi bien pour les puissants que pour les gens, les citoyens ordinaires et...

Bon, au moins, est-ce que le gouvernement peut faire un effort pour dresser une liste? Est-ce qu'au ministère il y a quelqu'un qui, actuellement, est en train de dresser une liste de toutes les compagnies? Je parle surtout des grandes compagnies et des banques qui ont fraudé le fisc.

Ensuite, est-ce que le gouvernement... Parce que vous savez qu'on a un accord de libre-échange avec le Panama, là, où se passe ce genre de choses là, et avec le Liechtenstein, un autre paradis fiscal. Puis vous savez qu'en fait c'est un peu la voie royale, lorsqu'on a un traité de libre-échange, ça facilite beaucoup des échanges qui échappent ensuite à l'examen public. Est-ce que le gouvernement compte continuer ou pourrait agir, de dire : Bien non, on n'aura pas d'accord de libre-échange avec des entités étatiques qui permettent ce genre de pratique?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, encore une fois, je répète, là, à tous ceux qui nous écoutent que c'est une très mauvaise idée d'essayer d'évader le fisc, on finit toujours par vous rattraper. Le nerf de la guerre, c'est l'information. Quand on obtient l'information nécessaire...

M. Khadir : ...une liste des entreprises qui ont fauté pour les exclure des contrats publics?

Le Président (M. Bernier) : Allez-y, M. le ministre.

M. Leitão : Donc, nous n'avons pas besoin d'établir de telles listes parce qu'avec cette unité spécialisée de Revenu Québec on suit de très près la situation, et l'échange d'information entre les autorités fiscales, que ce soit à l'intérieur du Canada, que ce soit entre le Canada et les pays étrangers, cet échange d'information est de plus en plus efficace.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Mercier.

M. Khadir : Est-ce que KPMG va continuer à jouir de contrats venant de votre gouvernement?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, pour ce qui est de la situation très particulière de cette entreprise que vous citez, il y a eu, dans les bureaux de cette entreprise de la Colombie-Britannique, des comportements qui ont été décrits comme étant inappropriés, et je pense que l'entreprise elle-même est en train de faire son investigation sur comment cela s'est passé. Ça ne met pas en cause, à mon humble avis, les activités de cette firme au Québec. Les relations que nous avons avec cette firme au Québec datent de très longtemps et nous ont toujours bien servis. Donc, je ne vois pas...

M. Khadir : M. le ministre, vous...

Le Président (M. Bernier) : Je voulais juste vous dire, M. le député de Mercier, il y a encore des éléments en suspens au niveau de cette firme-là versus les accusations qui ont pu être posées contre elle.

M. Khadir : Non, je m'excuse, on est très mal informé si on dit ça. Cette firme, non seulement au Canada, mais aux États-Unis et ailleurs dans le monde, a été incriminée à plusieurs reprises. Sur leur site, il y a une division qui se fait une gloire de dire qu'ils ont les meilleurs, disons, conseils à donner pour l'optimisation fiscale des entreprises, et on connaît aujourd'hui ce que ça veut dire.

Et donc, là, le ministre est en train de dire qu'il n'y a pas cette volonté au sein du gouvernement d'envoyer un message clair. Parce que vous l'avez dit tout à l'heure, mais vous l'avez dit aux citoyens qui nous écoutent, que frauder le fisc a des conséquences. Alors, si frauder le fisc a des conséquences, comment ça se fait que, pour KPMG, au sein desquels il y a des bandits à cravates, au sein desquels il y a des bandits à cravates, peuvent jouir de la clémence du gouvernement du Québec...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Mercier...

M. Khadir : Pourquoi est-ce que vous êtes si indulgents?

Le Président (M. Bernier) : ...je vous demande de modérer vos paroles, s'il vous plaît.

M. Khadir : Mais non, mais on va me poursuivre, on va me... Je vais...

Le Président (M. Bernier) : Mais, vous savez, on va avoir l'occasion...

M. Khadir : Je l'ai déjà dit à l'extérieur, M. le Président, je n'ai aucune honte...

Le Président (M. Bernier) : Oui, mais vous avez le droit de dire où vous voulez, mais, ici, vous ne le direz pas. C'est aussi simple que ça, c'est ce que je vous dis, là.

M. Khadir : M. le Président, il existe, au sein de ces firmes... À moins qu'on veuille faire preuve d'aveuglement volontaire, on le sait aujourd'hui, les plus grandes banques, les plus grandes firmes comptables, que ce soit Price Waterhouse, que ce soit KPMG ou ses semblables, sont des parties prenantes de toute cette entreprise d'évasion fiscale à l'échelle internationale. En plus, au Canada, vous appartenez encore au Canada, nos appartenances... hein, vous insistez pour qu'on continue à... bon, au Canada, cette firme a été accusée et a reconnu sa culpabilité. Pourquoi est-ce que vous dites aux gens ordinaires que, eux, il y a des conséquences, mais, pour KPMG, il n'y a pas de conséquences? Pourquoi ces doubles standards?

• (12 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. Je vous remercie, M. le député de Mercier, c'est terminé. Donc, on aura l'occasion de reprendre, là, des discussions sur le sujet dans d'autres domaines. Nous allons donc passer du côté gouvernemental. Mme la députée de Chauveau.

Mme Tremblay : Merci beaucoup, M. le Président. Moi, j'aimerais poser des questions sur l'emploi parce qu'en campagne électorale notre gouvernement a annoncé qu'il souhaitait créer 250 000 emplois en cinq ans. En 2015, la création d'emplois de qualité a été robuste avec un gain de 48 600 emplois. Donc, près de 50 % des emplois créés en 2015 au Canada l'ont été au Québec, ce qui démontre quand même la confiance des entreprises. Sauf que 250 000, ça demeure un objectif ambitieux. Ma question est : Est-ce que le gouvernement maintient toujours sa cible de création de 250 000 emplois sur cinq ans?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Écoutez, ce n'est pas une cible, c'est un engagement, et, oui, nous le maintenons toujours. Comme on avait parlé un peu de ça avec notre collègue le député de Rousseau avant et le député de Sanguinet avant, l'engagement a toujours été de mettre en place les conditions propices à ce que le secteur privé puisse investir et, donc, créer des emplois.

Quand on regarde ce qui a été fait depuis notre arrivée au pouvoir — donc, cette semaine, ça fait deux ans — nous jugeons que nous avons accompli une bonne partie de notre engagement. Et on verra bien demain, vendredi, il y aura de nouveaux chiffres sur l'emploi, mais, en tout cas, de mai 2014 à février 2016, c'est quand même 70 000 emplois qui ont été créés. Pour la plupart, ce sont des emplois à temps plein et par le secteur privé. Donc, par définition, ce sont surtout des emplois à temps plein, qui donnent une rémunération plus élevée que les emplois à temps partiel, bien sûr. Donc, nous continuons d'agir dans la bonne direction.

Comment nous avons fait ça? Nous faisons ça en nous assurant... ou, en tous les cas, en mettant en place des mesures qui vont aider les PME. Nous croyons que ce sont surtout des PME qui vont créer le plus d'emplois. Et, comme on a discuté plus tôt ce matin, un des obstacles des PME, particulièrement au Québec, c'est que leur fardeau fiscal est très élevé. Et une partie de leur fardeau fiscal concerne les taxes sur la masse salariale, donc des taxes, des charges fixes qui contribuent beaucoup à affecter leurs liquidités et, donc, qui les empêchent d'investir et de créer de nouveaux emplois. Alors, nous diminuons de façon significative ces taxes sur la masse salariale, particulièrement pour les entreprises dans le secteur manufacturier et dans le secteur primaire, et cela, nous pensons, éventuellement, va mener à une création d'emplois plus vigoureuse.

Aussi, une partie importante de notre action était le retour à l'équilibre budgétaire. Là, on peut dire : Bon, c'est quoi, le lien entre l'équilibre budgétaire et la création d'emplois? C'est que c'est en assurant la stabilité financière de la province, donc en envoyant le message très clair que, maintenant, les finances publiques sont en ordre, qu'il n'y a plus de pression à l'avenir pour une hausse du fardeau fiscal des entreprises. Donc, quand les entreprises considèrent le processus d'investissement, elles savent qu'au Québec, comme, d'ailleurs, en Colombie-Britannique, les finances publiques sont en équilibre. Alors, oui, les perspectives d'une hausse d'imposition sont pratiquement nulles. Au contraire, ces deux provinces-là se sont engagées dans un processus d'allégement fiscal. Donc, cette stabilité financière là aussi contribue à améliorer la confiance des entreprises dans l'économie du Québec et, donc, à investir et créer des emplois.

Alors, évidemment, pour cet engagement initial, il y a encore trois ans. Donc, à deux tiers du chemin, nous sommes à 70 000 emplois. Bien sûr, on aurait aimé que ce soit plus que ça, mais il faut reconnaître aussi que l'année 2015 était une année assez particulière où toutes sortes d'événements complètement hors de notre contrôle ont eu lieu, particulièrement une forte incertitude et volatilité dans les marchés financiers, tous les marchés boursiers qui étaient fortement affectés par ça, les prix des matières premières qui continuaient de baisser. Et pas seulement l'énergie, pas seulement le pétrole, mais aussi les métaux et d'autres matières premières, ce qui a découragé plusieurs projets d'investissement dans le secteur minier, et au Québec on a encore un secteur minier qui est relativement important. Donc, la conjoncture internationale était défavorable, mais, malgré ça, l'économie a continué de progresser, et on a continué de créer des emplois. Pas nous, mais l'économie québécoise, et nous demeurons confiants qu'on pourra remplir notre engagement de 250 000 emplois sur cinq ans.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Tremblay : Quand on regarde le tableau des perspectives économiques au Québec, le tableau à la page C.26, on prévoit 30 000 emplois en 2016, un peu plus de 29 000 en 2017. Est-ce que c'est parce que, dans le budget, on a voulu être plus prudent que moins?

M. Leitão : C'est ça, tout à fait. Donc, nous, ce qu'on a mis dans le budget, donc, nous avons bâti notre cadre financier sur des hypothèses économiques qui sont, comme je l'ai dit hier, très conservatrices, donc un taux de croissance du PIB en 2016 de 1,5 % et, en 2017, de 1,6 %, quelque chose comme ça aussi. C'est qu'à mon avis ce sont des perspectives assez modestes, assez conservatrices pour... On veut surtout s'assurer qu'on bâtit notre cadre financier sur une base très solide et, donc, qu'on n'aura pas besoin d'ici six mois... Si on avait bâti ça sur des perspectives un peu plus optimistes... on n'aura pas besoin, d'ici six mois, si jamais ces perspectives plus optimistes ne se matérialisaient pas, de mettre en place des mesures d'urgence pour revenir à l'équilibre budgétaire. Nous voulons surtout éviter ça, alors on commence avec un cadre qui est conservateur.

Mais, comme on le voit, ces choses-là changent, et moi, j'ai l'impression qu'au fur et à mesure que l'année va se dérouler une bonne partie des analystes du secteur privé vont revoir leurs prévisions économiques. D'ailleurs, c'est la nature même des prévisions économiques. C'est ça aussi qu'il faudrait, un jour, peut-être démystifier un peu, ce n'est pas qu'on fait une prévision au mois de février 2016 pour faire le budget, ça veut dire qu'il n'y a plus rien qui change. Au contraire, le processus de prévision économique est un processus continu. Au fur et à mesure que la nouvelle information rentre, on raffine les prévisions, on les refait. Et ça se fait continuellement parce que c'est ce processus-là qui nous facilite la tâche de poser le bon diagnostic pour, après, mettre en place des politiques publiques qui vont dans la bonne direction. Alors, on a vu déjà cette semaine, plus tôt cette semaine, un groupe de prévisionnistes du secteur privé, les économistes de La Banque TD, qui, eux, ont publié les prévisions révisées pour 2016-2017. Il y en aura d'autres qui vont venir dans les semaines qui viennent, et j'ai l'impression que, comme La Banque TD, les autres prévisionnistes vont aussi commencer à revoir leurs prévisions à la hausse. Donc, moi, je suis confiant que ça puisse arriver.

Mais, encore une fois, on ne peut pas compter sur une embellie de l'économie avant qu'elle ne se matérialise. Donc, on ne doit pas compter sur une augmentation des revenus autonomes du gouvernement, par exemple, de 4 %, sachant que, bon, ça pourrait arriver, mais il faudrait que toutes les étoiles s'alignent dans la bonne direction. Donc, mieux vaut compter sur une augmentation des revenus autonomes de 3 % parce que c'est beaucoup plus probable. Alors, c'est comme ça que nous avons établi nos prévisions et c'est comme ça que nous allons maintenir notre équilibre budgétaire, toujours en espérant et en ayant l'ambition d'obtenir une croissance qui soit plus rapide que ça.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre, compte tenu de l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

M. Leitão : Compte tenu de l'heure? Très bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 1)

Le Président (M. Bernier) : Donc, nous reprenons nos travaux. Donc, la parole était à notre ami le député de Portneuf. M. le député, on vous en prie, mais...

M. Matte : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Après ces problèmes techniques, nous revenons à vous.

M. Matte : Merci, M. le Président. C'est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd'hui, et je voudrais en profiter également pour souligner... puis d'avoir une reconnaissance envers mes collègues de l'opposition ainsi que mes collègues du parti.

Vous savez, M. le Président, que, pour moi, la PME, c'est très important. La petite et la moyenne entreprise, on prétend qu'au cours des 20 prochaines années c'est 80 % des emplois qui seront créés. En plus, on considère aussi que les emplois vont se créer beaucoup plus vers de petites entreprises de 25 à 30 emplois. On a déclaré lors de notre budget, et notre ministre des Finances nous dit qu'on veut avoir une aide accrue pour la PME, puis j'aimerais savoir de la part du ministre s'il est capable de me dire, concrètement, quelles sont les mesures qu'on a faites pour pouvoir appuyer concrètement la PME dans son développement pour les prochaines années.

Alors, je sais qu'on a fait des mesures. On nous parle aussi que les PME, au Québec, paient beaucoup moins d'impôt que si elles étaient en Ontario. Pour le bénéfice des auditeurs, j'aimerais ça qu'on puisse être en mesure de verbaliser, de démontrer concrètement, hein, comment ça se manifeste, est-ce vraiment vrai, pour faire en sorte que nos PME... ce sont les poumons économiques du Québec et de démontrer concrètement, là, qu'on a des gestes concrets qui les appuient.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Alors, écoutez, oui, en effet. D'ailleurs, on avait parlé un peu de ça ce matin aussi, les PME sont... D'ailleurs, c'est au Québec que nous avons une partie de notre économie où les PME ont une partie plus importante de notre économie comparativement à d'autres provinces. Donc, c'est important pour nous de continuer de soutenir les PME.

Alors, comment nous faisons cela? Quelle est notre approche pour le soutien aux PME? Nous avons choisi, depuis déjà notre tout premier budget en juin 2014, et puis on a bâti sur ça... nous avons identifié que l'élément principal, c'est le fardeau fiscal. Alors, notre action a été centrée pas exclusivement, mais a été centrée sur un allègement du fardeau fiscal des PME. Bien sûr qu'on aimerait — et c'est dans cette direction qu'on veut aller — améliorer le fardeau fiscal pour toutes les PME de toutes les régions et de toutes les industries, mais, bien sûr, on doit procéder par étapes et donc nous avons ciblé davantage les PME dans le secteur manufacturier et dans le secteur primaire, donc agriculture, pêche, activités minières.

Alors, comment nous faisons ça? Nous faisons ça en baissant surtout la taxe sur la masse salariale, le fameux FSS, et c'est là qu'on arrive, comme vous avez mentionné, c'est là qu'on arrive à la situation où une PME dans le secteur manufacturier, au Québec, maintenant, c'est-à-dire à partir de 2017, va avoir un taux d'imposition total, incluant les taxes sur la masse salariale, qui va déjà être comparable à celui qui se paie dans les autres provinces, surtout en Ontario. On était vraiment en retard, on avait un fardeau fiscal plus élevé, mais là, maintenant, nous allons pouvoir dire que c'est le cas.

Particulièrement, nous avons donc réduit aussi de 8 % à 4 % le taux d'imposition sur le profit des PME manufacturières. Nous avons aussi, dans notre premier budget, mis en place une déduction additionnelle pour les coûts de transport des PME dans les régions un peu plus éloignées et cette fameuse réduction des cotisations au FSS. Et tout ça s'est répercuté dans les budgets suivants, et, dans le budget de cette année, le budget 2016-2017, nous avons continué notre effort dans la baisse des contributions des PME au FSS.

Alors, ça, c'était notre première ligne d'action, si vous voulez, vers les PME, mais il y en a d'autres, choses. Il y en a d'autres, choses — on en a aussi discuté un peu ce matin — en termes de favoriser la création d'entreprises, donc des fonds d'amorçage pour que les PME puissent avoir non seulement accès au capital pour pouvoir démarrer, mais aussi accès à des mentors, des partenaires du secteur privé qui sont prêts non seulement à prodiguer des conseils, mais aussi à investir. Donc, des anges investisseurs, nous contribuons à cela aussi.

Dans le budget du mois de mars de 2016-2017, nous avons aussi identifié plusieurs secteurs d'activité que nous jugeons sont des secteurs importants pour l'économie du Québec et qui ont aussi une grande répercussion dans les économies régionales, et il nous vient à l'esprit surtout trois grands secteurs. Le secteur forestier, dont on a parlé avant avec le collègue de Pontiac, mais il y a aussi un secteur qui est très important, qui est le tourisme, où il y a beaucoup de PME qui opèrent dans ce secteur-là. Et, de concert avec l'industrie touristique, nous avons mis en place aussi une série de mesures qui vont aider cette industrie-là à améliorer son offre de produits pour qu'on puisse vraiment capitaliser sur ce que nous pensons, à très court terme, capitaliser sur une augmentation... On s'attend à une augmentation importante du nombre de visiteurs au Québec cet été, puisque le dollar canadien est là où il est. Et on voit que, chez nos voisins américains, les conditions économiques s'améliorent, donc ils vont être plus disposés à voyager, et on veut vraiment leur offrir un produit concurrentiel au niveau prix et aussi au niveau qualité. Et donc, de concert avec l'industrie du tourisme, il y a aussi un volet important de notre action qui va aider surtout beaucoup de PME qui opèrent dans le tourisme.

Et l'autre secteur où, je veux aussi mentionner en passant, c'est aussi important dans toutes les régions du Québec et où il y a aussi un nombre important de PME, c'est l'agroalimentaire. L'agroalimentaire, c'est notre plus grande industrie. On pourra la définir comme on voudra, en termes d'emplois, en termes de PIB. Quand on la définit de façon large, l'agroalimentaire, c'est notre plus grande industrie. Et, dans beaucoup de régions, ce sont aussi parmi nos plus grands employeurs. Alors, c'est une industrie aussi qui... On a besoin de les accompagner, particulièrement dans leur processus d'amélioration de qualité, donc d'investir dans la modernisation de leurs installations et de les accompagner vers l'exportation. Parce qu'on a tendance à penser que, dans le domaine agroalimentaire, des fois on peut être un petit peu protectionniste, mais aussi il y a un très grand potentiel d'exportation dans cette industrie-là. Certains segments de l'industrie le comprennent très bien, mais, si on peut aider les autres segments à le comprendre aussi, ça pourrait être gagnant pour toute l'économie du Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Portneuf.

• (15 h 10) •

M. Matte : Merci, M. le ministre. À vous écouter, on constate qu'il y a beaucoup de mesures qui sont mises de l'avant, là, pour aider et développer nos petites entreprises et... Votre intervention m'interpelle énormément parce que ça soulève beaucoup de questions. J'ai le communiqué de presse, là, que vous avez fait parvenir au mois de mars où qu'on dit qu'il y a un appui pour l'exportation des innovations québécoises. Et, dans ce communiqué-là, on dit que le plan économique du Québec prévoit un appui additionnel de 32,5 millions sur trois ans afin de soutenir la PME exportatrice.

J'aimerais savoir, là, pour accompagner des PME dans leurs démarches, une partie de l'enveloppe sera réservée à Export Québec, est-ce que c'est possible? Est-ce que les modalités sont déjà connues? Ça va relever de quel ministère si on désire creuser davantage, là, concrètement les gestes et les actions que notre gouvernement peut poser pour les petites et moyennes entreprises?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : En effet, je pense que l'exportation, c'est peut-être quelque chose qu'on devrait réaffirmer. Ce n'est pas seulement l'affaire des grandes entreprises, l'exportation, c'est aussi — et particulièrement aussi — aux PME, et même des petites entreprises, de participer au marché de l'exportation.

Alors, ces sommes additionnelles pour améliorer l'accompagnement des entreprises en exportation, ces sommes-là vont être administrées par le ministère de l'Économie. Donc, ça va être la ministre de l'Économie qui va peaufiner cette stratégie, mais le...

Le Président (M. Bernier) : ...député de Portneuf, on va avoir l'occasion d'y revenir.

M. Leitão : O.K.

Le Président (M. Bernier) : Nous allons du côté de l'opposition officielle, M. le député de Rousseau.

M. Marceau : O.K. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, tout le monde. Bon après-midi, bel après-midi. Je voudrais vous parler de sièges sociaux. Bon, le budget que vous avez déposé est assez silencieux sur cette question. Pourtant, les nouvelles récentes n'ont pas été de bonnes nouvelles. Tout le monde sait que RONA a été vendue. Il y a eu St-Hubert, le Cirque du Soleil. Dans tous les cas, pas de garanties formelles d'emplois ou de maintien des fournisseurs, ou quoi que ce soit du genre. Rio Tinto, même, récemment, a annoncé la coupure de 200 postes de cadres dans le siège social... enfin, dans ce qu'on appelle un siège social, mais qui n'en est pas véritablement un, malheureusement.

Alors, je trouvais important de revenir là-dessus pour vous demander quelles étaient vos intentions, M. le ministre, mais, avant, vous allez me permettre une petite introduction. Bon, vous savez fort bien que nos entreprises québécoises — puis c'est vrai aussi pour les entreprises du reste du Canada — n'ont pas à leur disposition des moyens de protection équivalents à ceux des entreprises résidant dans les États américains, par exemple. Dans ces États-là, la législation est telle qu'ils peuvent se protéger beaucoup mieux que les nôtres.

En plus de ça s'ajoute le fait que le dollar canadien a perdu de la valeur. Il y a des avantages, des inconvénients, mais, dans le cas des sièges sociaux, le fait que le dollar canadien ait perdu de la valeur, ça augmente la vulnérabilité de nos sièges sociaux. Ils étaient déjà mal protégés, mal équipés pour se protéger, avec un dollar canadien plus faible, ils sont encore plus vulnérables. Ce n'est pas une invention, c'est factuel. D'ailleurs, l'offre de Lowe's était beaucoup plus facile à faire pour Lowe's que la fois précédente parce que le dollar canadien avait baissé. Et puis, je vous dirais, je sais que vous allez me dire qu'il faut faire la différence entre les offres d'achat hostiles puis les offres d'achat amicales, mais, vous savez, quand on n'a aucun moyen pour se défendre, c'est très difficile d'avoir autre chose qu'une réaction amicale à une offre. Quand on ne peut pas, de toute manière, se défendre, on finit par plier sans se défendre.

Le résultat des courses actuellement... Bien là j'ai des chiffres qui datent de l'étude qui a été utilisée abondamment par votre collègue la ministre de l'Économie récemment, mais le nombre de sièges sociaux au Québec, entre 2001 et 2011, il est passé de 862 à 578. Le poids du Québec dans le total des sièges sociaux au Canada est passé de 24 % à 20 %. Tout ça, c'est entre 2001 et 2011. Et l'idée que des entreprises québécoises aient acheté autant à l'extérieur qu'elles ont été achetées ici, ça ne change pas le fait que le contrôle de notre économie commence à nous échapper. Ce n'est pas parce qu'on ramasse un peu de pouvoir sur ce qui se passe à l'extérieur du Québec que ça rend moins grave le fait que nous, nous perdions le contrôle sur notre économie.

Alors, dans le contexte que je vous décris, qui était un peu celui dans lequel je me trouvais lorsque j'étais dans votre poste, M. le ministre, moi, j'avais demandé à des gens de travailler sur cette question-là, et ils ont déposé un rapport, qui s'appelle Le maintien et le développement des sièges sociaux au Québec, en février 2014. Et j'imagine que vous l'avez déjà vu, c'est un rapport qui a été réalisé par — un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept — huit personnes. Je vais vous dire c'est qui, les personnes, parce que je voudrais qu'on réalise à quel point il ne s'agit pas de n'importe qui, il s'agit de gens qui ont fait un boulot sérieux. Alors, c'était présidé par Claude Séguin, de chez CGI. Il y avait une professeure de l'Université Laval à la Faculté de droit qui s'appelle Raymonde Crête. Il y avait Andrew Molson, vice-président chez Molson, André Dion, un ancien chef de la direction chez Rona puis Unibroue, Éric Morisset, de la Banque TD. Il y avait Monique Jérôme-Forget — je n'ai pas besoin de vous la présenter ici — ancienne ministre des Finances d'un gouvernement libéral qui était juste avant Raymond Bachand. Il y avait Robert Paré, de chez Fasken Martineau, puis il y avait Michel Leblanc, le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Donc, une brochette de personnalités, puis d'experts, puis de gens qui connaissent le milieu des affaires, et, effectivement, ils avaient fait le tour, puis, quand ils ont rendu leur rapport, ils n'ont jamais prétendu, ils n'ont jamais prétendu que c'était l'unanimité dans le monde des affaires. Ils n'ont jamais dit ça, mais ils ont quand même parlé à beaucoup de gens dans le monde des affaires, dans la communauté d'affaires, et il y avait, en tout cas, certainement un consensus à l'effet qu'il fallait agir.

Ça fait deux ans, M. le ministre, que le rapport est chez vous, et je n'ai pas vu de solutions qui ont été apportées au problème des sièges sociaux. Le groupe d'experts avait déposé plein de recommandations. Je vais utiliser une expression que j'utilise souvent, il s'agissait de leur recette. Puis vous pouvez peut-être être en désaccord avec la recette qu'ils proposaient, mais il n'en demeure pas moins qu'il y avait vraiment un effort là-dedans à la fois pour protéger puis développer les sièges sociaux.

Je vais vous poser deux, trois questions précises sur ça. La première, peut-être, j'aimerais que vous me disiez qu'est-ce que vous pensez, qu'est-ce que vous pensez de l'idée d'élargir le mandat des administrateurs de sociétés de manière à ce qu'ils doivent prendre en compte les intérêts non pas seulement des actionnaires, mais aussi de toutes les parties prenantes. Et je vous rappelle que la loi fédérale... puis la Cour suprême, même, qui s'est penchée sur la question a dit que c'était possible d'exiger d'une entreprise... Enfin, là, je ne le dis peut-être pas correctement, là, mais, en gros, là, qu'il était possible, donc, que des administrateurs soient, évidemment, à l'écoute des intérêts de leurs actionnaires, mais également des autres parties prenantes que sont les travailleurs, les retraités, les fournisseurs et même carrément la communauté d'accueil, la municipalité ou la région. Alors, qu'est-ce que vous pensez très simplement, là, de l'idée d'élargir le mandat des administrateurs d'une société pour qu'ils doivent prendre en compte, qu'ils aient à prendre en compte les autres parties prenantes dans leurs décisions?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (15 h 20) •

M. Leitão : Bien, M. le Président, pour répondre à la question spécifique, il y a d'autres choses aussi qu'il serait intéressant de mentionner, particulièrement en ce qui concerne le rapport Séguin, mais, à cette question très spécifique, est-ce que c'est à l'État à définir ou mieux définir, mieux préciser le rôle des conseils d'administration des entreprises privées?, écoutez, c'est un terrain, à mon avis, un peu préoccupant, je vous l'avoue, mais qu'on pourrait aller dans cette direction si on réussit à le faire à l'intérieur d'un consensus canadien.

Je verrais très mal qu'au Québec on ait une réglementation à ce sujet-là qui serait différente de ce qui se fait ailleurs au Canada. Mais, à l'intérieur d'un consensus canadien — et c'est quelque chose qu'on peut poursuivre, il y en a d'autres, personnes ailleurs au Canada, et d'autres groupes qui seraient intéressés aussi à aller dans cette direction — donc, si on réussit à le faire, donc à créer ce nouveau consensus canadien, bien sûr le Québec ferait partie de ce nouveau consensus. Mais que nous soyons, nous, les seuls à cet égard-là me semble un peu hasardeux.

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. le député.

M. Marceau : À la page 26 du rapport, là, je veux simplement vous rappeler que, pour les sociétés d'incorporation fédérale, le premier alinéa de l'article 122, là, de la loi prévoit que «les administrateurs et les dirigeants doivent, dans l'exercice de leurs fonctions, agir :

«a) avec intégrité et de bonne foi au mieux des intérêts de la société;

«b) avec le...»

Puis, dans la jurisprudence, par la suite, il a été convenu que ça pouvait vouloir dire de tenir compte de l'ensemble des parties prenantes. Alors, je dis juste que — pour la loi fédérale, en tout cas — ce que je vous demande, là, peut être vu comme étant déjà existant. Cela étant, je suis conscient aussi qu'il y a des lois sur les sociétés par actions dans les autres provinces, là, mais, en tout cas, je vous invite à aller voir, là, ce que dit le rapport à ce sujet-là.

Je vais juste changer pour aller vers une autre mesure... Puis j'aimerais juste que vous me disiez ce que vous pensez de l'idée de permettre — permettre, pas obliger, là, permettre — à une société de modifier ses statuts de façon à ce qu'elle puisse établir un droit de vote fonction de la durée de détention, permettre. Ce qui veut dire que les actionnaires décideront, dans le cadre d'une assemblée générale... Donc, vous, vous changez la loi, là, sur les sociétés par actions, puis vous dites : Il est possible désormais que, si, dans une entreprise, on pense que c'est une bonne idée — donc, c'est l'entreprise qui va décider, là, ce n'est pas l'État, là, l'État va simplement permettre que cela arrive — donc, permettre que les droits de vote dépendent de la durée de détention de façon à ce que les touristes, là, ceux qui sont là simplement pour spéculer puis qui ne sont pas intéressés dans la valeur de long terme d'une entreprise ou bien dans les intérêts des autres parties prenantes, que ces autres parties-là... pardon, donc, que les... On permet à cette société-là de le faire si elle le veut. Ce qui fait que, quand une entreprise fera ça, elle le fera en toute connaissance de cause. C'est juste d'ouvrir l'ensemble des possibilités pour l'entreprise. Je vous laisse...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, ça a l'air simple, mais c'est vraiment plus complexe que ça. Encore une fois, si on permet aux entreprises québécoises, aux conseils d'administration de faire ça pendant qu'ailleurs ça n'existe pas, il y a un risque que cela provoque la création de ce qu'on appelle un escompte pour toutes les entreprises publiques québécoises. Donc, nous, ce qu'on maintient dans cet enjeu-là de protection des sièges sociaux, c'est que la législation au Québec, c'est hasardeux qu'elle s'éloigne trop de ce qui se fait ailleurs au Canada pour ne pas provoquer un escompte à toutes les entreprises québécoises.

Je voulais juste souligner que, dans cette logique-là, dans cette approche-là, nous souhaitons plutôt encourager une action concertée de tous les organismes de réglementation et de supervision au Canada. Et là on doit admettre que, bon, depuis deux ans, sous le leadership de l'AMF du Québec, les ACVM canadiennes ont développé de nouveaux outils, donc, qui donnent un peu plus de temps aux conseils d'administration de s'organiser et de contrer une offre d'achat qui serait hostile. Et donc c'est dans cette direction-là que je vois qu'on doit évoluer, dans la direction de bâtir de nouveaux consensus canadiens parce que le même genre de question que vous vous posez, comme je vous ai dit, il y en a d'autres, commentateurs, partis politiques, opinions ailleurs au Canada qui vont un peu dans cette direction aussi. Donc, je pense qu'il y a lieu de créer un nouveau consensus canadien.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Je vous entends du côté de la loi des valeurs mobilières, là, je vais revenir à la Loi sur les sociétés par actions. Deux choses à dire. La première, c'est que, si le législateur québécois donne la possibilité puis que personne n'exerce la possibilité, il n'y a pas d'escompte. L'escompte, il vient si une entreprise décide, elle, de modifier ses statuts pour permettre, le droit de vote, qu'il soit variable en fonction de la durée de détention.

On va s'entendre sur le fait que... Par exemple, aux États-Unis, où il y a des mesures de protection pas mal plus importantes, hein, ils sont pas mal mieux équipés qu'ici, est-ce que vous croyez qu'il y a un escompte là-bas? Même si c'est plus difficile de faire des transactions puis c'est plus difficile de réaliser une offre d'achat hostile aux États-Unis qu'ici parce que, donc, il y a des moyens de protection pour les entreprises qui sont plus vigoureux, est-ce que vous croyez vraiment qu'il y a des escomptes là-bas puis qu'ils sont moins valorisés que nos entreprises le sont? Moi, je ne crois pas.

Mais, cela étant, je ne dis pas que c'est complètement impossible qu'une entreprise qui se protège complètement puis qui, donc, devient absolument impossible à acheter... je comprends très bien qu'il peut y avoir un impact sur la valeur des actions, mais moi, dans la mesure où ce sont les entreprises elles-mêmes qui décident de ce qu'elles vont faire... Là, vous, vous portez un jugement, mais, si une entreprise pense que c'est dans le meilleur intérêt d'elle-même de se doter de ces moyens-là, je veux dire, qui êtes-vous pour juger que l'escompte dont vous parlez, qui est toute théorique, là, en passant, va se réaliser? Moi, je ne vois pas que ce soit perdre du tout, là.

M. Leitão : Enfin, nous ne voyons pas la chose de la même façon et surtout... En fin de compte, il y a seulement à peu près huit entreprises publiques à charte du Québec où ça pourrait potentiellement s'appliquer. Et donc ce n'est pas qu'on va abandonner ces huit entreprises-là, ce n'est pas ça, mais il y a d'autres outils qui peuvent être utilisés dans ce cas-là spécifique si jamais cela était nécessaire. Donc, je pense que, dans notre cas, au Québec, c'est plus avantageux pour nous de nous garder toujours toute la meilleure flexibilité au monde pour agir au cas par cas parce qu'en fin de compte c'est un nombre limité de cas. Et vous avez mentionné au début de votre intervention des exemples comme St-Hubert ou le Cirque du Soleil, mais vous conviendrez bien que ça, ce sont des entreprises privées, il y aurait rien que quelques changements de lois que ce soit qui auraient...

M. Marceau : ...est en cause. Le débat des administrateurs...

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Marceau : Bon, regardez, moi, je pense que ce que je vous suggère, c'est flexible. Je ne suis pas convaincu de ce que vous me dites puis, surtout, je suis convaincu d'une chose, c'est que de ne rien faire, ce n'est pas la solution. Puis d'attendre que le consensus canadien se rende à ce que vous espérez, là... Puis vous pouvez l'espérer, je ne pense pas que ça va se faire rapidement. Puis les dégâts, on les voit maintenant. Vous avez été fortement critiqués, vous le savez, là. Puis je pense que, dans l'opinion publique, c'est assez clair, là, le jugement a été porté sur ce qui est arrivé. Moi, je vous invite à bouger, je vous invite à réagir. Je ne pense pas que tout le monde a tort, là. Et, quand on voit des fleurons, des entreprises-phares de l'économie québécoise qui nous quittent...

Vous savez, ça me fait un peu penser, ce que je vous dis, au débat sur le contrôle des armes à feu. Il y a des gens qui disent : Si on met le contrôle des armes à feu, si on fait un registre ou d'autres mesures... J'écoutais ce qu'Obama a fait aux États-Unis, c'est sûr que, quand tu introduis une mesure, ça ne peut pas empêcher tous les meurtres puis toutes les utilisations d'armes, puis que... Mais, si on passe de 20 000 morts à 19 000 morts aux États-Unis, c'est quand même un gain. C'est sûr que 19 000, c'est plate puis c'est poche, mais, si on en a sauvé 1 000, ce sera toujours ça. Et c'est un peu le sens de ce que j'essaie de vous dire ici, moi, je pense que vous avez le devoir de vous ouvrir à plein de façons de faire.

Puis c'est sûr que d'aller du côté d'un consensus canadien aux lois sur les valeurs mobilières, c'est une façon de procéder, mais on a une loi sur les sociétés par actions, puis je vous trouve un petit peu trop timide, un petit peu peureux, peut-être, de ne pas vouloir aller plus loin du côté de la Loi sur les sociétés par actions, encore une fois en offrant la possibilité à nos entreprises, pas en les obligeant, ce qui est une chose très distincte. Alors, écoutez, j'ai passé mon message, là, je constate que... En tout cas, je vous laisse reprendre la réflexion, et puis...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (15 h 30) •

M. Leitão : Ce n'est pas une question d'être timide. Au contraire, là, c'est une question de stratégie, et nous pensons que c'est une stratégie plus efficace, celle que nous avons, d'agir au cas par cas, parce qu'il s'agit d'un nombre relativement petit de cas qui pourraient surgir. Et, d'ailleurs, vous avez mentionné le rapport Séguin, bon, le président de ce groupe-là, M. Séguin lui-même, avait dit que, dans le dossier de RONA... il l'a dit au journal Les Affaires, il a dit que le gouvernement ne devrait pas intervenir. Donc, c'est M. Séguin lui-même qui avait dit ça. Donc, encore une fois, je pense qu'on est mieux servis en agissant au cas par cas, puisque c'est un nombre relativement petit de cas, que de se lancer dans des opérations unilatérales de changement législatif.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député, une minute.

M. Marceau : Bien, il me reste 30 secondes?

Le Président (M. Bernier) : Une minute.

M. Marceau : Une minute. Bien, regardez, je vais le mettre dans ma banque — c'est-u possible? — puis je le reprendrai... Je fais un dépôt.

Le Président (M. Bernier) : Le mettre dans votre banque? Les petits cochons vous appartiennent.

M. Marceau : Parfait, je reviendrai.

Le Président (M. Bernier) : C'est beau. Donc, nous allons retourner du côté du gouvernement. Donc, M. le député de Portneuf, vous n'aviez pas fini tout à l'heure, quand je vous ai interpelé.

M. Matte : Oui. M. le Président, je voudrais peut-être permettre au ministre de poursuivre sa réponse sur mon intervention. Ou j'enchaîne avec ma question? Je voulais juste m'assurer avec le ministre, est-ce que vous préférez poursuivre votre réponse ou j'enchaîne avec une nouvelle question?

M. Leitão : Allez-y avec une nouvelle question si ça vous plaît.

Le Président (M. Bernier) : Si ça vous plaît, allez-y.

M. Matte : O.K. C'est beau. Il y a une dimension qui est intéressante dans votre budget que vous avez annoncé, puis je me sens directement investi parce que vous avez permis puis vous avez même devancé l'allègement fiscal pour un transfert d'entreprise, là, dans un lien de sang. Vous le savez, pour un entrepreneur qui a une entreprise, qui voulait vendre son entreprise soit à son garçon ou à sa fille, il n'avait pas droit à l'allègement fiscal ou à l'exonération du gain en capital. Je me souviens d'avoir échangé depuis 2010 avec le ministre, à ce moment-là, pour dire : Pourquoi qu'on ne permet pas au propriétaire de petite entreprise de profiter de l'exonération du gain en capital, surtout dans un contexte où qu'on parle de plus en plus de transfert d'entreprise? J'aimerais que vous soyez en mesure de nous dire ça touche qui, ça concerne qui et, si possible, les montants.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Je vais faire ça, mais vous me permettrez, cher collègue, avant de répondre à votre question, peut-être un élément additionnel dans la discussion qu'on a eue précédemment avec notre collègue de Rousseau. Quand il s'agit d'intervenir pour protéger et soutenir les entreprises québécoises, n'oublions jamais que nous avons agi de façon décisive, je l'espère, et, en tout cas, très claire dans le cas de Bombardier, un fleuron de l'économie québécoise, s'il y en a un, et là nous n'avons pas été timides du tout dans notre support à Bombardier. 1 milliard de dollars US, ce n'est quand même pas de la timidité. Alors, ça, c'est pour ça.

Maintenant, revenons à la question de notre collègue, donc le transfert d'entreprise. Écoutez, oui, c'est quelque chose, et je me rappelle très bien que c'est aussi un sujet dont vous m'avez parlé souvent depuis 2014. Et notre réflexion a commencé surtout au niveau agricole, c'était, particulièrement en campagne électorale aussi, un sujet qui nous était rapporté assez fréquemment, la difficulté que plusieurs agriculteurs avaient quand il s'agissait de devoir transférer l'entreprise familiale, la ferme à la prochaine génération pour toutes sortes de raisons, et l'aspect fiscal était un des obstacles qui nous a été identifié.

Alors, nous avons réfléchi à ça, nous avons mis en place un groupe de travail, déjà, au budget dernier, qui avait regardé cette situation-là, et, après consultation avec les gens du secteur, de l'industrie, on est arrivés à un certain nombre de mesures qui visaient surtout à égaliser un petit peu le terrain en essayant de donner le même traitement fiscal si l'acheteur est une personne liée, membre de la famille, que si c'était un étranger. Donc, nous avons réfléchi là-dessus, et ce qu'on a remarqué dans cette période de consultation, c'est que, oui, il y avait un très grand consensus pour aller dans cette direction-là. Et donc ce que nous avons fait, nous avons même devancé ces mesures-là. Nous pensions les mettre en application le 1er janvier 2017, mais, avec le budget de cette année, nous avons devancé tout ça d'un an. Et donc c'est à partir de maintenant, à partir de 2016, que ces nouvelles mesures entrent en vigueur, et nous l'avons étendu un peu au-delà du secteur purement agricole, mais aussi au reste du secteur primaire, et surtout manufacturier aussi.

On aimerait, bien sûr, aller plus loin que ça, on aimerait aller aussi dans le secteur des services. C'est très vaste, le secteur des services. Pour l'instant, nous n'avons pas la marge de manoeuvre pour faire ça, mais, éventuellement, on veut bouger dans cette direction aussi. Et aussi, maintenant, cette année, 2016, on va voir quel va être l'impact réel de cette mesure dans l'agriculture et le manufacturier, et donc, s'il y a des ajustements à faire, on pourra les faire. Et donc, plus tard, on pourra l'étendre à un plus grand nombre de secteurs.

Mais je pense que ça va être bien reçu. On parle ici d'une exonération de gain en capital de l'ordre de 800 000 $ pour les PME, les PME manufacturières, et d'une exonération de gain en capital de 1 million de dollars dans le secteur agricole. Donc, là, on pense que, particulièrement dans le secteur agricole, ça commence à être vraiment une mesure qui est très intéressante et, nous jugeons, qui sera assez efficace dans ce processus de transfert d'entreprise à la génération future.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Matte : Bien, je me réjouis au nom, là, des propriétaires de PME. Je trouve ça très intéressant. Puis ce que j'apprécie, c'est que vous me dites que vous êtes en train d'étudier aussi si on peut l'élargir, là, aux entreprises de services, donc pas nécessairement uniquement le primaire puis le manufacturier, mais ça fait partie, là, des préoccupations que vous avez de pouvoir l'extensionner.

Lors d'une des questions que je vous ai posées ce matin, vous m'avez dit qu'il y avait trois secteurs très importants. Il y avait la forêt, le tourisme et l'agroalimentaire. Dans mon comté, vous le savez que 74 % de l'économie, c'est la forêt, c'est l'agroalimentaire. Je me permets toujours de dire que le comté de Portneuf, c'est le terrain de jeu de la ville de Québec, mais c'est aussi le jardin. J'ai une entreprise agroalimentaire qui s'appelle Patates Dolbec. C'est vraiment un fleuron qui a le vent dans les voiles. Ils sont innovateurs, ils sont en train, là, de faire des investissements. Or, j'aimerais savoir qu'est-ce que vous avez indiqué dans le budget qui touche directement l'agroalimentaire parce que c'est une préoccupation, là, vraiment pour mes PME dans mon comté.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (15 h 40) •

M. Leitão : Écoutez, il y a des mesures d'importance, à mon avis, dans le support à l'exportation. Donc, comme on s'était dit tantôt, le secteur agroalimentaire est très important. Il y a certains segments de l'agroalimentaire qui sont très orientés vers l'exportation, et c'est très bien, mais il y a un plus grand nombre de segments qui ne pensent pas beaucoup aux marchés extérieurs pour leurs produits. Donc, nous avons à peu près 5 millions de dollars pour permettre à tout le secteur de mieux saisir les opportunités dans les marchés d'exportation. On est tous au courant que c'est dans le secteur du porc qu'il y a beaucoup d'exportation déjà, et tant mieux, mais c'est ça, il y a beaucoup d'autres segments dans l'agroalimentaire.

Il y a aussi 5 millions de dollars pour soutenir la recherche en transformation alimentaire. Et ça, à bien y penser, la transformation alimentaire, écoutez, avec tout ce qu'on voit, on entend, on lit de nos jours sur les bienfaits d'une alimentation saine, par exemple, je pense qu'il y a beaucoup de gains potentiels à réaliser en orientant notre production agricole vers des créneaux qui peuvent avoir une connotation santé un peu plus visible que c'est le cas maintenant.

Un exemple très, très concret, vous aimez votre comté, Portneuf, et ça se voit. Moi, j'aime aussi ma région de Montréal, et il y a, par exemple, à Montréal un groupe lié à l'Université McGill qui ont développé vraiment une nouvelle approche en ce qui concerne l'agriculture urbaine, donc de planter, là, des fruits et des légumes sur les toits des immeubles, et ça marche, et ça marche. Donc, c'est dans ce sens-là, quand je parle de soutenir la recherche, c'est de soutenir des idées comme ça, complètement ailleurs, qui sont utiles.

Vous êtes au courant, j'en suis sûr, aussi de nos efforts au gouvernement pour mieux appuyer le secteur viticole au Québec, les alcools québécois. Nous avons eu un autre projet de loi, le projet de loi n° 88, dont on a déjà eu des consultations particulières là-dessus, et, je pense, ça a été assez bien reçu, notre ouverture à soutenir cette industrie qui, encore une fois, est très importante dans certaines régions du Québec. Et c'est aussi un engagement important, à peu près 25 millions de dollars sur cinq ans d'appui en meilleur positionnement des boissons alcooliques québécoises.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Portneuf.

M. Matte : Alors, oui, j'ai parlé que Portneuf est caractérisé par l'agroalimentaire, par le tourisme aussi avec... Vous savez que la forêt, elle a un impact important dans Portneuf. Puis il y a une forêt qui appartient au privé, mais il y a aussi le public. Or, vous avez annoncé, de mémoire, je pense, c'est 230 millions dans le budget, là, qui touchent la forêt privée et la publique aussi. Est-ce qu'on est en mesure de dire ça s'étend sur combien d'années? Puis est-ce qu'il y a une répartition qui est déjà faite entre le privé et le public ou c'est à parts égales? Ce que je trouve intéressant, de mémoire, je pense que c'est la première fois où qu'un budget touche la forêt, mais aussi la forêt privée, là, par rapport à ça. Donc, pour le bénéfice des producteurs forestiers de Portneuf, est-ce que vous êtes en mesure, là, de nous vulgariser un peu, là, qu'est-ce qui est dans le budget concernant le 230 millions?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Alors, en partant, oui, c'est sur cinq ans. Donc, c'est des mesures structurantes sur cinq ans, donc dans un cadre financier de cinq ans.

Pour ce qui est de la forêt privée, ce qui, particulièrement, nous était mentionné par l'industrie, c'est qu'ils souhaiteraient avoir un traitement fiscal un peu plus attrayant parce que, les règles qui existaient jusqu'à maintenant, donc, s'il y avait une très forte, donc, cueillette de produits, là, s'ils abattaient beaucoup d'arbres et, donc, que le matériel devenait disponible dans le marché, le producteur devrait payer de l'impôt immédiatement sur tout ça. On sait tous, ça prend des années pour que les arbres poussent, et puis, bon, tu les coupes, et, bang! la facture fiscale est immédiate et élevée. Alors, on a changé les règles pour que ça se fasse de façon plus... aussi plus étalée dans le temps, ce qui va aider beaucoup les producteurs de la forêt privée à rendre leurs produits disponibles dans le marché d'une façon plus immédiate, ce qui est toujours, bien sûr, qui est toujours bienvenu.

Alors, il y a plusieurs autres programmes. Comme, par exemple, on a haussé à 65 000 $ maintenant le seuil d'exemption de la taxe sur les opérations forestières. On a aussi bonificié le remboursement de taxe foncière accordé aux producteurs forestiers, comme je viens de mentionner, l'étalement du revenu des produits forestiers et aussi la bonification du programme d'aide à la mise en valeur de la forêt privée dans le but d'accroître la récolte du bois parce que c'est important d'accroître la récolte du bois pour rendre le plus de produits disponibles pour l'industrie de la transformation.

Alors, pour répondre à votre question de départ, donc, sur les 230 millions de dollars sur cinq ans, il y a à peu près 200 millions dans le secteur de l'industrie forestière et il y a à peu près 20 et quelques millions pour des mesures, donc, dirigées concrètement à la forêt privée.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Portneuf.

M. Matte : Eh bien, merci, M. le Président. M. le ministre, vous êtes en train de faire ma journée parce que j'ai beaucoup de producteurs privés que, lorsque je vais leur dire ça, ils vont être agréablement surpris, puis je trouve ça intéressant, là, qu'on puisse les supporter.

Juste avant qu'on termine cet avant-midi, je vous avais interrogé concernant Export Québec, O.K., puis, malheureusement, le temps ne nous a pas permis de pouvoir vous entendre là-dessus, puis je trouve que c'est une dimension importante, dans le contexte actuel, de faciliter l'exportation de nos entreprises. Compte tenu aussi que le dollar est facilitant, compte tenu de la stratégie économique aussi, j'aimerais ça que vous puissiez être en mesure... puis, si vous avez d'aussi bonnes nouvelles avec Export que vous en avez eu dans la forêt, je vais être comblé aujourd'hui.

Le Président (M. Bernier) : Ce n'est pas Noël aujourd'hui, là.

M. Matte : Mais il y a le Noël du campeur.

M. Leitão : Ce n'est pas rien, ça, on va...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, tâchez de le combler.

M. Leitão : On ne m'avait pas dit que c'était dans ma description de tâches de combler les...

Le Président (M. Bernier) : Combler le député de Portneuf, c'est en annexe.

M. Leitão : Bien, c'est ça. Écoutez, comme vous avez mentionné, bon, l'exportation, évidemment, c'est le nerf de la guerre, c'est ce que nous voulons promouvoir. Alors, nous avons cet organisme, Export Québec. Et donc ce que ça veut dire très concrètement dans notre budget ici, c'est un appui additionnel de 32,5 millions de dollars sur trois ans afin de soutenir directement les PME exportatrices. Donc, ça, ce n'est pas un programme pour les grandes entreprises, c'est un programme pour les PME exportatrices, 32 millions de dollars sur trois ans. Et, encore une fois, c'est le ministère du Développement économique qui va administrer... Bon, Export Québec est relié à ce ministère-là.

Donc, c'est quelque 250 projets très concrets qui sont identifiés et qui visent à améliorer l'innovation dans les situations réelles d'opération. Nous pensons que cela va se traduire par une bonne création d'emplois, et générer des investissements additionnels, et aussi d'accompagner les entreprises dans les marchés d'exportation. On avait dit ça hier, que, nous au Québec, nous connaissons très bien le marché américain. Mais, en fin de compte, le marché américain, certaines régions comme l'Est des États-Unis, le Midwest, on nous connaît très bien, et les PME québécoises sont habituées à exporter dans ces marchés-là. Mais il y en a d'autres, régions des États-Unis où l'économie va très bien et qui nous sont moins familières. On avait mentionné hier le Texas, par exemple, et d'autres États du Sud-Ouest des États-Unis, et la Californie. Donc, nous avons un travail à faire aussi pour mieux accompagner les PME québécoises qui veulent se lancer à la conquête de la Californie ou du Texas, et donc ça aussi fait partie de la tâche d'Export Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Matte : Comment qu'il reste de temps, monsieur?

Le Président (M. Bernier) : Deux minutes.

M. Matte : Est-ce qu'on peut le reporter sur l'autre bloc?

Le Président (M. Bernier) : Bien, il y a peut-être un de vos collègues qui a une question.

Mme Tremblay : Bien, je peux peut-être amorcer sur...

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée de Chauveau, oui.

Mme Tremblay : ...les autochtones, mais peut-être qu'il va falloir qu'on poursuive la discussion sur les autochtones dans l'autre bloc.

Le Président (M. Bernier) : Non, mais vous pouvez toujours faire une entrée en matière, puis on continuera par la suite.

Mme Tremblay : O.K. Parfait. Bien, on sait que les besoins sont énormes en milieu autochtone. On a tous entendu parler des événements regrettables de l'an dernier à Val-d'Or, mais il y a aussi d'autres problèmes ailleurs, en matière de santé psychosociale, sociojudiciaires, persévérance scolaire, compétence parentale. Donc, les problèmes sont multiples. Dans mon comté, j'ai d'ailleurs une communauté autochtone, Wendake, un très bel endroit, d'ailleurs...

Le Président (M. Bernier) : Très bien connu...

Mme Tremblay : ...à visiter, oui, et très axé sur le tourisme.

Le Président (M. Bernier) : Effectivement, et à visiter, on invite la population à le faire.

• (15 h 50) •

Mme Tremblay : Oui, certainement. Un bel hôtel aussi. J'ai la nation huronne Wendat, mais aussi plusieurs autochtones de partout au Québec qui vivent en milieu urbain. Il y en a plusieurs installés un peu partout dans la région de Québec, dont dans mon comté. Et la population autochtone qui vit à l'extérieur des communautés est en constante augmentation, et ça crée aussi certains problèmes d'inclusion, notamment. Il faut adapter notre approche à cet effet.

J'aimerais savoir, M. le ministre, qu'est-ce qu'on a prévu pour aider, justement, ces autochtones.

Le Président (M. Bernier) : Une amorce, allez-y.

M. Leitão : Très bien. Alors, écoutez, il y a plusieurs mesures dans le budget qui vont dans cette direction-là. J'ai bien l'impression qu'on continuera ça dans notre prochain bloc, je ne pense pas qu'on a beaucoup de temps. Mais j'aimerais juste souligner, dans le peu de temps qu'il nous reste maintenant, M. le Président, juste souligner que la problématique autochtone, vraiment, est très importante, et ce qu'il y a dans le budget, ce n'est qu'un départ. Nous sommes conscients qu'il faut aller beaucoup plus loin que ça et mieux coordonner, encore une fois, nos actions avec celles du gouvernement fédéral, qui a, lui aussi, identifié ces enjeux-là de façon prioritaire.

Donc, moi, ce que je vais surtout dire, c'est de ne pas prendre ce qu'il y a dans le budget comme étant le dernier mot. C'est loin d'être le dernier mot, c'est le premier mot, si vous voulez, et on va certainement aller beaucoup plus loin que ça.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Et nous aurons l'occasion d'y revenir dans le prochain bloc. M. le député de Rousseau, la parole est à vous.

M. Marceau : Oui. Parfait, M. le Président. O.K. Alors, je vais commencer par une question... En fait, c'est un suivi de ce que j'ai déjà posé comme question dans un événement semblable à celui que nous vivons présentement. Je pense que c'était lors de l'étude d'un projet de loi, le projet de loi fiscale découlant du dernier budget, et puis je vais vous parler des crédits d'impôt pour nos aînés et pour les travailleurs expérimentés. Vous vous rappellerez que, dans le dernier budget — pas celui-ci, dans celui de 2015 — vous aviez resserré le crédit d'impôt en raison de l'âge et vous avez fait ça en augmentant l'âge d'admissibilité, ce qui a fait en sorte que tous ceux qui sont nés après 1950 n'y ont plus accès avant l'âge de 70 ans. Ils y avaient accès avant à 65 ans, mais là l'âge augmente d'un an par année, puis, donc, les gens qui sont nés après 1950 n'y ont pas accès.

En contrepartie, vous avez bonifié le crédit d'impôt pour les travailleurs expérimentés. Vous aviez fait ça, en fait, en mars 2015, puis vous l'avez refait cette fois-ci en mars 2016. O.K.? Donc, deux choses. D'une part, un resserrement. En fait, vous avez augmenté l'âge d'admissibilité au crédit d'impôt en raison de l'âge, qui, lui, était inconditionnel au comportement, là, ne changeait pas en fonction du comportement, mais vous avez bonifié celui pour les travailleurs expérimentés.

Au plan philosophique, ça se discute. C'est sûr que l'idée d'encourager les travailleurs expérimentés à demeurer sur le marché du travail ou à s'y joindre, c'est quelque chose au sujet duquel je suis favorable, il n'y a pas d'enjeu là. Cependant, comme je vous l'avais dit lorsqu'on a regardé ça dans l'étude détaillée du projet de loi... Je ne me rappelle plus du numéro, là, ça se peut-u que ce soit 74, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Il me semble que c'est 74.

M. Marceau : Il me semble que c'est 74.

Le Président (M. Bernier) : C'est sur le budget de l'an passé, 2015-2016.

M. Marceau : C'est ça, c'est le fiscal de celui de l'an passé. Il y a un problème avec ça quand même, c'est qu'il y a des gens qui, toute leur vie, travaillent dans des conditions qui sont difficiles, pénibles. Il y a des gens qui plantent des clous à longueur de journée, puis, pour eux, la perspective de demeurer sur le marché du travail, elle n'est pas véritablement quelque chose qui est possible. Je dirais même qu'il y a même des secteurs de notre économie dans lesquels, lorsqu'on arrive à un certain âge, bon, c'est difficile de garder le boulot. Alors, moi, je vous disais à l'époque puis je le redis aujourd'hui, il y aurait moyen, il me semble, de tenir compte du métier exercé par une personne avant de dire : On vous enlève le crédit d'impôt en raison de l'âge. D'ailleurs, je vous citais l'exemple français. La France, à certains égards, est un exemple; à d'autres, peut-être pas. Mais disons qu'eux, en tout cas, lorsqu'ils ont fait leur législation, ils ont tenu compte de la pénibilité des métiers.

Alors, je vous ai posé la question lors de l'étude du projet de loi n° 74, et ce que je vous ai dit, c'est : Il y a donc des gens pour qui ce n'est pas une option, là, que de poursuivre le travail et puis qui vont être pénalisés par l'espèce de substitution que vous faisiez dans votre budget de mars 2015 puis que vous maintenez dans ce budget-ci. Alors, voilà, c'est la question que je vous pose, est-ce que vous avez réfléchi à l'idée de tenir compte de la pénibilité du travail de façon à ne pas pénaliser, là, les gens, par exemple les travailleurs de la construction ou travailleurs dans des métiers difficiles pour qui ce n'est pas une option de demeurer sur le marché du travail?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Bien, écoutez, nous n'avons pas pris ces particularités-là en considération parce qu'en fin de compte il n'y a personne qui perd quoi que ce soit avec les changements que nous proposons de faire. Ce qu'il y a, c'est qu'il y a des personnes qui vont gagner en étant admissibles au crédit d'impôt un peu plus tôt, donc 63 ans à 62 ans. Étant éligibles à ce crédit d'impôt, ils vont gagner. Mais il n'y a pas vraiment de perdant dans ce changement que nous faisons, il y en a...

M. Marceau : ...je pense qu'on ne s'est pas compris, là. Ça, ce bout-là, je le comprends, là. Ce que je vous dis, c'est qu'il y a des gens qui ne vont jamais utiliser votre crédit d'impôt pour travailleurs d'expérience parce qu'ils sont dans des métiers difficiles. Puis, pour eux autres, le seul changement qui est véritablement pertinent pour eux, c'est celui de l'augmentation de l'âge pour être admissible au crédit d'impôt en raison de l'âge. Puis je vous ajoute un élément que je vous avais signalé la dernière fois, il y a beaucoup de gens qui épargnent tout au long de leur vie en prévision de la retraite puis qui avaient anticipé que, de 65 à 70 ans, ils auraient ce crédit d'impôt là.

Puis je pense que vous savez qu'il y a 2 millions de contribuables qui gagnent moins que 18 000 $ au Québec, là. Ça fait qu'il y a des gens qui ont des revenus très modestes, puis de leur enlever ce crédit d'impôt là en raison de l'âge, entre guillemets, à la dernière minute, là... Je ne dis pas que vous le faites de façon malicieuse, mais vous le faites quand même à la dernière minute du point de vue de la planification de quelqu'un qui s'en va vers ses 65 ans. Je vous réitère, là, moi, je comprends très bien que quelqu'un qui a oeuvré dans le secteur des services toute sa vie, bon, il n'a pas vraiment le côté pénible. Mais quelqu'un qui est dans le secteur manufacturier, en usine, sur une chaîne de montage ou bien qui est sur la construction... il y a des gens pour qui, à 65 ans, ça devient difficile. Voilà. Je ne voulais juste pas que vous alliez dans la mauvaise direction, c'est pour ça que... Je comprends que votre crédit d'impôt pour travailleurs d'expérience, il est bonifié. Ça, je le comprends, là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : O.K. Donc, cet aspect en particulier, ça fait partie des recommandations de la commission Godbout, qui nous recommandait de faire ça. Et nous le faisons d'une façon très graduelle, donc c'est sur cinq ans que ça va se passer. Donc, je comprends bien votre point, mais nous avons choisi d'agir comme ça.

M. Marceau : C'est juste d'arrêter. Ce n'est pas graduel, M. le ministre.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Rousseau.

M. Marceau : C'est à partir du moment... Pour quelqu'un qui est né après 1950, il n'y a aucune gradualité, là, il n'y a aucune gradation, là. Si tu es 1951, c'est fini, là, tu ne l'auras pas avant 70 ans parce que l'âge augmente... à partir de 2015, 65; 2016, 66; 2017, 67. Alors, il n'y a pas de gradation, là. Pour quelqu'un qui est né en 1951, qui travaillait dans la construction, qui a mal dans le dos, lui, là, qui ne peut plus travailler, là, même, là, lui, il vient de perdre cinq ans de crédit d'impôt, et donc... Regardez, là, je n'ai pas le goût de faire un débat là-dessus, là, je vous invite vraiment à demander à tous les fonctionnaires qui vous entourent — au premier chef, celui qui est à votre droite, là — de regarder ça.

M. Leitão : O.K. O.K.

Le Président (M. Bernier) : C'est bien?

M. Leitão : C'est bien.

M. Marceau : Ça se fait ailleurs, c'est faisable. C'est peut-être compliqué, mais c'est faisable, puis je pense vraiment que ça pourrait aider. O.K.

Je vais vous poser des questions peut-être un peu plus... Là, là, c'est des choses que je ne vous ai jamais demandées. B.82, dans le plan budgétaire, vous avez déductions pour sociétés innovantes. Juste une question là-dessus. Là, vous savez c'est quoi, le problème des coûts communs en économie, vous avez une machine qui sert à fabriquer trois produits, et là la question, c'est de savoir quelle partie de la machine quand on arrive au bout, là... Disons que vous avez une machine qui sert à fabriquer trois produits, puis, une fois que les produits sortent de la machine, ils sont mis sur trois chaînes de production différentes, puis là il y a d'autres transformations qui sont effectuées aux produits, aux intrants, puis, à la fin, il y a trois produits différents qui sortent.

La première machine, elle coûte quelque chose à opérer, à faire fonctionner, puis il y a une question difficile à laquelle il y a plein de réponses possibles, c'est : Les coûts de la machine elle-même, là, quelle partie on va attribuer à chacun des trois produits au bout de la chaîne? Puis là, là, la raison pour laquelle je vous parle de ça, c'est que, là, si vous avez une déduction pour société innovante, puis que, là, quelqu'un... Il y a plein de situations possibles, là, mais je me demandais comment vous allez calculer la contribution d'un brevet pour chacun des biens. Puis vous pouvez imaginer même le cas où il y aurait deux brevets. Donc, vous avez, bon, vous avez une machine initiale, trois chaînes de production...

M. Leitão : A, B, C.

M. Marceau : ...A, B, C, puis là il y a deux brevets qui sont inventés : un qui affecte la machine initiale puis un autre, mettons, au milieu de la chaîne A. Là, là, il y a quelqu'un, un smatte, en quelque part dans l'entreprise, il a trouvé ça, là. Là, la question, c'est : Comment ça va s'appliquer dans un cas comme celui-là? Là, simplement, là, je ne vous demande pas les détails très, très techniques, mais juste, conceptuellement, comment ça va fonctionner.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Leitão : Conceptuellement, bon, d'abord, ça, comme on a déjà dit avant, ça existe ailleurs. On le voit particulièrement en Europe, ce genre de mécanisme qui est lié essentiellement à la volonté des gouvernements de faciliter la commercialisation des brevets.

Alors, comment ça va se passer dans, exemple, le concret, l'entreprise en question va devoir établir une comptabilité séparée qui va devoir être aussi confirmée par un vérificateur externe et présentée à Revenu Québec. Ça va être au cas par cas, ça va être Revenu Québec qui va déterminer si le procédé qui lui est soumis est éligible à ces congés fiscaux ou pas.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Marceau : O.K. Mais là vous me dites le processus, là, mais le raisonnement sous-jacent, c'est ce que je vous demande, là. Parce que déterminer la contribution d'un brevet, je peux peut-être vous le lire, là...

M. Leitão : Le brevet, si je peux m'exprimer ainsi, c'est donc qu'il y a un brevet qui est donc lié à un produit, et ce qu'on trouve qui manque, c'est un moyen pour aider le passage de cette idée — c'est le brevet qui a été enregistré — à la transformation, à la transformer en produit fini.

 (16 heures)

M. Marceau : Regardez, là, ce que vous suggérez de faire, là, c'est que le taux d'imposition des revenus attribuables à un brevet, qui aurait dû être de 11,8 %, va être réduit à 4 %. O.K.? Je vous répète, là, mettons que j'ai trois produits, produits A, B, C, puis j'ai un brevet sur la machine... simultanément, que je mets en place, là, un brevet sur la machine A, j'invente un nouvel écrou qui change quelque chose dans le mécanisme, là, puis, après ça, j'ai un deuxième écrou que je trouve dans une machine qui est au milieu de la chaîne A, comment vous allez faire pour établir les parts de revenus qui sont attribuables à chacun des brevets pour A, B et C?

M. Leitão : Mais oui, tout à fait, c'est là qu'est l'enjeu. Comme, par exemple, disons, ce micro, il a plusieurs composantes, et disons qu'il y a un brevet qui donne la tête du micro comme quelque chose de révolutionnaire, et donc on va commercialiser ça. Là, il va falloir que l'entreprise en question, avec l'aide de vérificateurs externes, qu'ils attachent une comptabilité séparée juste sur ce produit-là, et puis Revenu Québec va examiner le cas et va l'accepter ou pas.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Marceau : Bon...

M. Leitão : C'est un peu ce genre de mécanisme, si vous voulez, qui s'applique au congé fiscal pour projets majeurs. C'est aussi comptabilité distincte et au cas par cas.

M. Marceau : Oui, mais là c'est des projets distincts aussi, là. Ce que je vous dis, c'est que le problème, c'est que les biens d'une entreprise proviennent souvent d'infrastructures, de machines, de chaînes qui sont communes à plusieurs produits. C'est ça que je vous dis. Puis cette difficulté-là, elle existe à bien des endroits, là, puis même la comptabilité de ça est complexe. Alors, regardez, si jamais vous êtes capable de fournir, peut-être, quelque chose, un document qui permettrait de l'éclairer... En tout cas, moi, je me suis posé la question.

M. Leitão : Et, peut-être, je peux juste ajouter que, bien sûr, c'est nouveau. D'ailleurs, en Amérique du Nord, ça ne se fait pas du tout, et on va voir l'évolution de ça au cas par cas au cours des prochains mois, des prochains trimestres. Et, s'il y a des ajustements à amener pour le rendre plus efficace, bien sûr qu'on le fera.

M. Marceau : O.K. Bon.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : Je vous amène à la page B.176, et c'est une... Au bas complètement de la page, en fait, on nous dit qu'on va restaurer les sites miniers. Il y a 498 sites miniers à réhabiliter qui représentent des travaux d'environ 775 millions de dollars. Ça, ça va, je comprends très bien. Et là, au dernier paragraphe, on nous dit qu'on va faire des investissements totaux de 620 millions pendant les six prochaines années en plus d'améliorer la qualité de l'environnement. Bon... Et là la question, c'est : Comment? Qui va payer? Qui va faire la restauration? Il n'y a aucun détail. Je dois vous avouer que je me demandais... C'est bien fin, là, mais qui va payer? Quelle est la part de l'État là-dedans? Y a-t-il une part de l'État? Qui va réaliser les travaux?

M. Leitão : C'est l'État. Les 600 et quelques millions, c'est l'État, donc. Et ça, bon, ça va être géré par le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles. Et l'objectif ici, c'est d'essayer de faire ça, donc, par appel d'offres, bien sûr, mais que ça se fasse le plus rapidement possible pour mettre des personnes au travail. C'est...

M. Marceau : Puis est-ce que les garanties qui ont été déposées permettent de compenser pour le 620 ou pas?

M. Leitão : Les garanties...

M. Marceau : Les garanties qui ont été déposées par les entreprises minières?

M. Leitão : Oui, ça, ce sont... Donc, les sites qui sont éligibles à ces travaux-là, c'est des sites qui avaient déjà été identifiés et qui avaient déjà été passés à la dette. Donc, on ne va pas encourir de nouvelles dettes pour financer ça, c'était déjà dans nos... dans le passé...

M. Marceau : Oui, c'est des sites qui précèdent, c'est ça, qui précèdent la mise en place des garanties.

M. Leitão : Oui, c'est ça.

M. Marceau : Et donc, entre guillemets, l'argent existe déjà, là, bon, on va dire ça de même. Puis là vous allez simplement décaisser puis ramener le capital environnemental au niveau où il était, mais le capital financier, lui, il va se déprécier.

M. Leitão : Par appel d'offres, on... Vraiment, l'objectif, c'est de faire ça relativement rapidement parce que c'est une mesure qu'on trouve une bonne mesure contrecyclique, étant donné que le cycle... en termes d'investissement nouveau dans l'industrie minière, bon, c'est une façon de garder la main-d'oeuvre occupée dans des choses utiles.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Marceau : O.K. Bon, je vais me permettre de dire que je ne trouvais pas que c'était clair dans le budget. Il y eût eu moyen d'être plus clair.

163, maintenant, toujours dans le B, la valeur des investissements qui ont permis d'établir la dotation du Fonds du Plan Nord en 2016-2017 — enfin, parce qu'il n'y a pas... le chiffre n'est pas là, en tout cas à ma connaissance, là — savez-vous c'est quoi?

Je repose ma question : La valeur des investissements qui ont permis d'établir la dotation du Fonds du Plan Nord pour cette année, elle s'élève à combien, cette valeur?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : On va vérifier, je n'ai pas cette information sous la main.

M. Marceau : Je peux vous dire que, l'an dernier, ça s'élevait à 16,3 milliards. L'année précédente, 2 milliards de plus, en juin 2014. Grossièrement, là, parce que je n'ai pas le chiffre non plus, mais on disait que ça avait baissé de 2 milliards l'année passée. Et je soupçonne que, cette année, la valeur des investissements n'a pas diminué, mais je n'en suis pas certain. Mais j'aimerais bien savoir. Je dis ça parce que la dotation en tant que telle n'a pas changé.

Une voix :

• (16 h 10) •

M. Marceau : O.K. Je vais revenir. À la page 180, il est question de Caisse de dépôt Infra puis il est question d'ententes de partenariat entre la caisse et des municipalités, donc que les municipalités pourraient contribuer. Est-ce qu'il y a quelque chose qui s'est produit entre... Parce que ça ne fait quand même pas longtemps, là, qu'on a adopté la loi, pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Il n'y a pas de changement, il n'y a rien de...

M. Marceau : Bien, le dernier paragraphe, je vais vous le lire si vous voulez, là : «Le gouvernement entend donc permettre aux municipalités, dans le cadre d'ententes, de participer aux projets d'infrastructures publiques amorcés par la caisse. Des modifications législatives seront nécessaires à cette fin.»

Alors, ma question, c'est : Que s'est-il passé entre le moment d'adoption de la loi puis aujourd'hui qui nous oblige à faire ça?

M. Leitão : Je ne pense pas que ça soit une question de «qui nous oblige à faire quoi que ce soit», mais c'est dans le processus qu'on a commencé. Donc, la caisse a commencé à faire ses études pour les deux projets en question, et, bon, là aussi, dans ce processus-là, des municipalités ont aussi souhaité participer à ces projets-là, donc on leur offre la possibilité de le faire. Ce n'est pas nécessairement le cas, que ça va se faire, parce que nous, en tant que gouvernement, on n'a pas de projets concrets sur la table. La caisse est toujours à l'étape de l'analyse et de l'étude, donc on n'a pas encore de projets concrets à...

M. Marceau : ...que la caisse vous a... Parce que, là, ce n'est pas le Saint-Esprit qui, tout d'un coup, est tombé sur vous pour vous dire : Ça prendrait une modification législative pour permettre aux municipalités... Là, il y a quelqu'un qui vous a dit qu'il fallait que ça se fasse. Donc, j'imagine que c'est la caisse qui vous a dit : Il faudrait que...

M. Leitão : Non, c'est que des municipalités avaient déjà des projets. Que ce soit dans le train du pont Champlain, là, donc, pour arriver au centre-ville, le SLR, ou que ce soit vers l'ouest, vers l'aéroport, il y avait déjà des municipalités qui étaient intéressées à aussi participer à ça, et donc ça, ça ouvre la porte à cette possibilité-là. Ce n'est pas nécessairement le cas que les municipalités vont nécessairement devoir participer, ce n'est pas ça du tout, mais on va le prévoir. Et, si elles souhaitent le faire, elles pourront le faire sans qu'on les force à encourir des dépenses ou des investissements qu'elles ne souhaiteraient pas faire. Au contraire, c'est tout le contraire.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Nous allons maintenant passer du côté gouvernemental. Mme la députée de Chauveau, on revient avec nos amis les autochtones.

Mme Tremblay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Oui, on revient sur la question autochtone. On sait qu'il y a 11 nations distinctes au Québec, 10 nations amérindiennes, une nation inuite réparties dans 55 communautés au Québec, et elles ont toutes des besoins différents. Je vous mentionnais tout à l'heure que la population autochtone qui vit dans les villes est en hausse constante, avec des besoins particuliers, notamment en intégration. Concrètement, M. le ministre, qu'est-ce qu'on a prévu dans le budget pour aider les autochtones en milieu urbain?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Alors, vous avez bien fait de mentionner les autochtones en milieu urbain. Comme vous le savez, tout le dossier autochtone est particulièrement complexe, surtout problématique, là, il y avait des situations très sérieuses, et puis c'est complexe aussi en termes de juridiction fédérale, juridiction provinciale, etc. Pour nous, ce qui est clairement dans notre cour, si vous voulez, notre juridiction, c'est les autochtones en milieu urbain. Ça, c'est clairement le gouvernement provincial. Alors, dans le budget, nous avons mis une mesure de... que j'en conviens bien, ce n'est pas nécessairement un montant très significatif, mais, comme j'ai dit avant, dans notre discussion précédente, ce n'est qu'un début, une première partie. Donc, c'est 5 millions de dollars pour, surtout, les centres d'amitié autochtones.

On s'était rendu compte, avec la situation très problématique et tragique à Val-d'Or, que ces centres d'amitié autochtones jouent un rôle très important dans l'accueil des autochtones quand ils viennent en milieu urbain et que, vraiment, ils avaient peu de ressources, de ressources financières, pour pouvoir jouer pleinement le rôle qu'ils peuvent jouer. Alors, c'est dans ce contexte-là que nous avons prévu cette contribution financière de 5 millions de dollars.

Nous avons aussi prévu un autre 3,9 millions de dollars pour des infrastructures physiques, là, pour les immeubles, pour s'assurer que d'autres municipalités aussi, bien sûr, puissent jouer un meilleur rôle dans l'accueil et l'aide aux autochtones en milieu urbain.

Donc, ça, comme je l'ai dit tantôt, c'est un premier pas. Il faut aller, nous sommes conscients, il faut aller beaucoup plus loin que ça. C'est pour ça aussi que nous accueillons favorablement l'attitude du nouveau gouvernement fédéral de vouloir investir massivement dans cette filière-là. Et donc, évidemment, les paramètres plus précis de cet investissement massif, on parle de plusieurs milliards de dollars qui vont venir du gouvernement fédéral. La totalité des paramètres ne sont pas connus, mais nous allons travailler de concert avec le gouvernement fédéral pour nous assurer que les autochtones, au Québec, vont pouvoir bénéficier pleinement de cette nouvelle aide fédérale.

Mais ce n'est pas seulement les nouveaux fonds fédéraux, nous aussi, de notre côté, en tant que gouvernement provincial et, encore une fois, particulièrement en ce qui concerne les autochtones en milieu urbain, nous voulons aller plus loin que ce que nous avons identifié dans ce budget et donc, pendant les mois qui vont suivre, en concert avec notre collègue du ministère des Affaires autochtones, ainsi que le ministère des Affaires municipales, et nous, aux Finances, nous allons créer un comité interministériel pour améliorer notre contribution à l'aide aux autochtones en milieu urbain.

Mme Tremblay : Il y a certaines problématiques sociales en milieu autochtone aussi qui ont été soulevées par le Protecteur du citoyen dans son rapport intitulé Les conditions de détention, l'administration de la justice et la prévention de la criminalité au Nunavik, déposé en février dernier, et un des problèmes qui a été soulevé par le Protecteur du citoyen, c'est la surpopulation carcérale dans les communautés inuites, causée principalement, là, par la distance qui sépare les services judiciaires de ces dossiers, et est-ce qu'on a prévu en faire plus de ce côté-là pour améliorer l'accessibilité à la justice en milieu autochtone? Parce qu'évidemment ça cause des problèmes, cet éloignement-là, ça ralentit aussi la résolution des dossiers judiciaires.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (16 h 20) •

M. Leitão : Oui. Tout à fait. C'est aussi une problématique très, très importante, et, de concert avec notre collègue la ministre de la Justice, nous allons mettre en place de nouvelles procédures pour éviter ces surpeuplements dans les institutions carcérales. Donc, les déplacements de la cour itinérante, il va falloir qu'on revoie ce processus-là parce qu'il mène souvent à des situations qui sont difficiles à justifier, et, d'ailleurs, le Protecteur du citoyen l'a bien identifié.

Alors, de façon très concrète, dans le budget, aussi nous avons prévu un investissement additionnel de 5 millions, un autre 5 millions, pour améliorer l'accessibilité à la justice et, surtout, pour accroître ou augmenter la fréquence de la cour itinérante en milieu surtout cri et inuit. Parce qu'un des problèmes, c'est que ce déplacement de la cour itinérante, s'il se fait seulement deux ou trois fois par année, donc il y a beaucoup de personnes qui doivent attendre longtemps pour avoir accès à la justice, et c'est là qu'on se retrouve dans des situations de surpeuplement. Alors, si on le fait, ça, plus souvent, si la cour se déplace plus souvent, on va, d'une certaine façon, pas régler le problème, mais on va certainement beaucoup l'améliorer. Donc, les fonds additionnels qui sont prévus, c'est pour accélérer la fréquence des déplacements de la cour.

Mme Tremblay : Maintenant, concernant le développement économique, parce qu'évidemment les communautés autochtones souhaitent également participer à l'économie, avoir des emplois à travers tout ça, je sais qu'il y a le Plan Nord, notamment, quelles sont les initiatives dans le budget pour l'économie, faire avancer davantage, là, les communautés autochtones?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon, là — et, tantôt, on en a parlé avec le député de Rousseau — dans le contexte, donc, des activités minières et de réclamation de sites miniers et sur tous les autres projets dans le Plan Nord, il va falloir toujours tenir en considération les populations locales et les prendre en considération quand on engage des personnes. Donc, en termes de développement économique, le grand enjeu pour les communautés autochtones, c'est l'accès à l'emploi. Alors, quand il y a des projets, que ce soient des nouveaux projets miniers ou autres ou que ce soient des activités de réclamation, donc, de nettoyage de sites miniers contaminés, etc., où le gouvernement va injecter des fonds publics dans ces activités-là, c'est de nous assurer que les populations locales sont bien représentées dans les activités d'engagement. Donc, on va engager aussi des personnes de ces communautés-là parce que c'est par l'emploi qu'on va le mieux contribuer à améliorer le niveau de vie de ces communautés-là.

Mme Tremblay : J'ai vu dans le budget qu'il y avait également une étude de faisabilité en vue du déploiement d'un réseau de télécommunications permanent au Nunavik. Donc, j'imagine que ça aussi pourra y contribuer, et ça va donner un bon coup de main.

M. Leitão : C'est ça. C'est ça. Mais oui, absolument, ça, c'est pour les nouvelles initiatives économiques. Mais je reviens à l'emploi, ça, c'est vraiment le nerf de la guerre, et donc il va falloir qu'on s'assure que les personnes locales sont engagées dans ces projets-là.

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée.

Mme Tremblay : Il y a aussi Kitcisakik, qui est une petite communauté autochtone de 430 habitants située en Abitibi-Témiscamingue, sur des terres publiques, et sans statut de réserve, et cette communauté algonquine est aux prises avec des problématiques de logement importantes, notamment un surpeuplement, une détérioration des habitations existantes. Je sais qu'il y avait déjà eu des changements, mais on va aller plus loin dans ce budget-ci?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : C'est ça, c'est une petite communauté, comme vous avez mentionné, et qui était toujours un peu entre deux chaises. Et, dans le passé, tout le monde se renvoyait un petit peu la balle : Bon, c'est provincial. Non, c'est fédéral. Oui, c'est une réserve. Non, elle n'a pas de statut de réserve. Bien, écoutez, ce qu'on fait, c'est que, quel que soit le statut, dans le budget, on prévoit un investissement de 1 million de dollars pour régler les questions de logement, de rénovation des maisons dans cette communauté-là.

Justement, c'est une petite communauté, donc il n'y a pas de raison qu'on laisse traîner ces choses-là comme ça. Nous sommes tous conscients des conditions de vie dans beaucoup de communautés autochtones. Et, si on peut régler le cas de celle-ci, bon, réglons-le, et c'est ce que nous faisons avec ce budget.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée, ça va?

Mme Tremblay : Oui, merci.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Pontiac.

M. Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Je félicite ma collègue pour la question. Souvent, on oublie, dans le cadre d'un budget, les questions qui sont plus locales. Et je sais qu'elle défend bien sa communauté, qui est composée d'autochtones, alors je la félicite pour ça.

Mais moi, je veux parler de quelque chose de complètement différent, M. le Président, je veux parler des agences de notation. Parce qu'on le sait, dans un budget, il y a toujours toutes sortes de gens qui réagissent. J'en ai rencontré au huis clos, et le ministre en a rencontré dans le huis clos budgétaire. Les députés de l'opposition réagissent négativement au budget. Nous, on a réagi de façon plus positive de notre côté. Mais les agences de notation également réagissent aux différents budgets, et elles ont réagi aux budgets passés du ministre des Finances.

J'aimerais simplement, pour une question de contexte, peut-être rappeler ce que certaines des agences ont pu dire par le passé. Et, quand je parle des agences, là, pour les gens qui s'y connaissent un peu moins, je pense à Moody's, à Standard & Poor's, à Fitch, à des agences comme ça, et voici ce que Moody's a dit à propos des budgets passés du ministre des Finances. Et je vais le dire en anglais simplement parce que la citation qui vient de Moody's est en anglais : «While we note that Québec has less fiscal flexibility than other provinces due to its relatively high tax burden — ça, on le sait — which limits its ability to raise taxes in the event of negative revenue shocks, the government has indicated that it intends to lower taxes over a period of four years, beginning in 2016-2017. This will be achieved primarily through the gradual elimination of the health contribution.» Et, M. le Président, ils ajoutent : «If achieved, this plan should provide the province with greater fiscal flexibility than currently exhibited.»

Il y a d'autres groupes également, d'autres agences qui se sont prononcées. Si je pense à Standard & Poor's, eux, ils nous avaient dit : «The ratings reflect what we view as the province's very strong and well-diversified economy, and very predictable, and well-balanced institutional framework, and the province's strong fiscal management.»

Ils en ont rajouté, M. le Président, et j'ai une traduction pour vous, ça va peut-être être plus facile pour tout le monde : Le Québec bénéficie d'une forte gestion financière selon eux, une forte gestion financière. La gestion des revenus et des dépenses est, depuis longtemps, une caractéristique forte de la province. Le gouvernement dispose des processus et des mécanismes pour produire des prévisions solides. Félicitations, M. le sous-ministre.

Enfin, il y en a une dernière que j'aimerais... enfin, peut-être deux autres que j'aimerais exposer, hein, c'est important : «...Fitch — qu'on connaît bien — views the wide range of planned actions, both to maximize revenues — maximiser les revenus — and [to] curb spending growth, to be achievable if economic and revenue gains match or exceed present forecasts.»

 Et DBRS, M. le Président, qui nous dit : «All trends remain stable, supported by the province's prudent fiscal management, which is helping to restore fiscal balance and debt burden that appears to have peaked.»

M. le Président, je pense que ça démontre quelque chose d'assez clair, une indication qui est partagée par plusieurs des agences de notation. Mais, pour plusieurs des gens qui ne savent pas nécessairement ce qu'une agence est, ce que ça veut dire, ce qu'ils nous relatent aujourd'hui, ils se disent peut-être : Bien, félicitations, M. le ministre, vous avez réussi à plaire à des gens à New York, à des gens sur Wall Street, mais qu'est-ce que ça change dans ma vie? Qu'est-ce que ça donne à la province du Québec, aux citoyens de la province du Québec d'avoir des citations comme ça qui nous viennent d'agences de crédit réputées? Et peut-être que le ministre peut nous éclairer là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : Donc, M. le ministre, sur l'impact des cotes de notation.

M. Leitão : Très bien. Bien, écoutez...

Des voix : ...

• (16 h 30) •

M. Leitão : On ne compare pas à la Grèce, non, non, non, parce que, justement, la Grèce n'a pas de cote de crédit, les pauvres. Écoutez, comme — je pense, c'était hier — nous avons parlé un peu de dette, nous avions mentionné que, même si on est à l'équilibre budgétaire — et on est à l'équilibre budgétaire — et même si on décidait que, demain matin, on fermait tout et on ne faisait aucun autre investissement en infrastructures, donc on mettait tout ça à zéro, on devrait quand même aller sur les marchés financiers et, pour les trois prochaines années, on devrait quand même y aller pour trouver, pour chercher 40 milliards de dollars sur les trois ans juste pour rouler la dette qui vient à échéance. Donc, nous devons — et nous le faisons très bien — demeurer très actifs, très présents dans les marchés financiers pour aller chercher du financement pour nos infrastructures et pour le refinancement de la dette.

Bon, qu'est-ce que ça fait dans la vie quotidienne des Québécois, les conclusions des agences de notation? C'est que, quand on doit aller emprunter ces sommes considérables, les investisseurs, donc ceux qui achètent notre dette, ceux qui achètent nos obligations, eux, ils les achètent basés en partie sur le travail d'analyse qu'ils font, mais aussi et surtout par les cotes de crédit que des agences indépendantes comme S&P, Moody's... les cotes de crédit que ces agences-là donnent à notre dette. Et, dans beaucoup de portefeuilles, d'investisseurs, que ce soient des fonds de pension, des grandes compagnies d'assurance internationales, etc., eux, dans leur portefeuille, en termes de dette publique, ils peuvent avoir seulement la dette qui a une certaine cote de crédit, ils ne peuvent pas ajouter n'importe quoi. Alors, c'est très important pour nous, d'abord, de maintenir et d'améliorer éventuellement nos cotes de crédit pour pouvoir continuer à avoir un vaste syndicat d'acheteurs potentiels pour notre dette, pour faciliter nos opérations et pour garder les coûts de financement de notre dette à des niveaux qui sont raisonnables, et ce qui est le cas présentement.

Et n'oublions pas que nous avons donc un niveau de dette qui est très élevé, donc nos paiements en intérêt, même avec la cote de crédit que nous avons, qui est une cote de crédit raisonnable, s'élèvent à 10,5 milliards de dollars. Alors, un changement, ne serait-ce que de quelques centièmes de point de pourcentage, dépendamment d'une appréciation plus ou moins négative ou positive d'une agence de notation, peut avoir comme conséquence des centaines, des millions de dollars de plus ou de moins dans nos paiements d'intérêt. Alors, si nous pouvons, avec une appréciation positive des agences de notation, grâce à ça, nous pouvons économiser quelques centaines de millions de dollars en paiement d'intérêt, bon, c'est quelques centaines de millions de dollars que nous avons de plus pour pouvoir investir en santé, en éducation, dans nos priorités.

Donc, c'est très important pour nous de maintenir et, éventuellement, d'améliorer nos cotes de crédit pour pouvoir dépenser des sommes additionnelles ailleurs si nous le jugeons, ou réduire le fardeau fiscal, ou enfin décider nous-mêmes de ce que nous allons faire. Parce que n'oublions pas ça, n'oublions pas que nous avons à chaque année 10,5 milliards de dollars en paiement d'intérêt, et donc un changement, ne serait-ce que minime du taux d'intérêt qu'on paie, a un effet très important sur ces sorties de fonds là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. 30 secondes.

M. Fortin (Pontiac) : 30 secondes? 30 secondes, peut-être que...

Le Président (M. Bernier) : Est-ce que ça vous renseigne en tant que...

M. Fortin (Pontiac) : Ça me renseigne.

Le Président (M. Bernier) : ...sur l'impact...

M. Fortin (Pontiac) : Après l'intervention d'un des députés de l'opposition, peut-être qu'on pourra revenir sur le sujet un peu plus tard, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Nous allons donc passer au deuxième groupe d'opposition avec M. le député de Granby pour un dernier bloc de 16 minutes.

M. Bonnardel : Fantastique! Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Ça a passé très vite.

M. Bonnardel : Oui. Tout à fait. Je vais amener le ministre cette fois-ci à la page F.12, je veux lui parler des transferts en santé. On sait que l'avant-dernier gouvernement, le Parti conservateur, avait décidé de revoir les façons de calculer les modalités de transfert en...

M. Leitão : Excusez-moi, juste pour dire c'est quelle page...

M. Bonnardel : F.12, pardon.

M. Leitão : Excusez-moi, pardon.

M. Bonnardel : F.12. On sait que le gouvernement conservateur a décidé de changer la méthode de calcul, et les libéraux de M. Trudeau ont dit : Bien, nous reverrons cette méthode de calcul, qui était basée sur un pourcentage annuel d'à peu près 6 %. Là, on l'avait revue, donc, à celle du PIB nominal canadien sous réserve d'un plancher de 3 %. Et vous dites donc que, si ça continuait comme on le connaît présentement qu'il y aura un manque à gagner assez important, de 13,7 milliards de dollars sur une période d'à peu près 10 ans. On sait que les coûts du système de santé, au Québec, ont coûté pas mal plus que le 3 % quand on regarde la situation des 15 dernières années.

Première question fort simple... Parce que vous avez été un peu difficiles à suivre depuis les deux dernières années, que ce soit notre premier ministre, qui a dit : Bien, on abandonne les transferts en santé... Après ça, on a revu des sorties, qu'il nous disait : Non, on va se battre pour aller en chercher un peu plus. Question simple, là, à savoir où vous en êtes présentement dans vos négociations pour, j'imagine, le prochain budget. Est-ce que vous pensez que, dans les deux prochaines années, on aura, donc, encore une fois la même méthode de calcul ou on reverra, donc, selon le vieillissement de la population, comme vous le souhaitiez?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, non, non, on n'a rien abandonné. Et, d'ailleurs, c'est une discussion où le Québec, de concert avec les autres provinces au sein du conseil de la confédération, joue un rôle de leadership dans le processus de changement de la formule de transfert en santé. C'est clair que le gouvernement précédent avait déjà indiqué qu'à partir de 2017 il changeait unilatéralement la formule de transfert et il la limitait, donc, à 3 % ou la croissance du PIB nominal. Il n'y a aucune province au Canada qui est d'accord avec un tel changement unilatéral, et donc le nouveau gouvernement fédéral s'est déjà engagé à revoir ce ralentissement majeur potentiel des transferts en santé et s'est engagé à travailler avec les provinces pour trouver une nouvelle formule de transfert.

Et ces négociations se poursuivent, il y a eu une première rencontre fédérale-provinciale des ministres de la Santé où tout le monde s'est mis d'accord qu'on va poursuivre ces négociations-là. Et ce que je trouve très important dans ces négociations qui vont se poursuivre, les différents ministères des Finances, le fédéral et celui des provinces, vont être impliqués directement dans le processus pour pouvoir amener le bateau à bon port.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : Alors, si je comprends bien, vous dites que, la première rencontre, les ministres des provinces étaient ceux de la Santé, puis les prochaines rencontres pour 2016, vous serez inclus dans ces négociations.

M. Leitão : Exact.

M. Bonnardel : Ces prochaines rencontres sont prévues?

M. Leitão : Pour l'instant, je ne pense pas qu'il y a des dates précises, mais nous savons déjà que ça va se faire en juin 2016 et en décembre 2016. Je ne peux pas vous dire le jour, là, mais juin et décembre de cette année.

M. Bonnardel : O.K. Si on revient chez nous puis on regarde les coûts en santé des dernières années, bien, j'ai une question fort simple : Quelle est l'évaluation que vous faites pour les coûts de système de notre système de santé? Donc, quels sont les coûts de système au Québec en santé?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Les coûts de système, les fameux coûts de système, écoutez, les coûts de système doivent être pris en considérant que le système lui-même change. Ça veut dire que le système n'est pas constant. Et, depuis deux ans, c'est le moins qu'on puisse le dire, nous avons eu déjà le projet de loi n° 10, le projet de loi n° 20, et il y a une autre réforme majeure qui s'en vient ce printemps ou probablement cet automne concernant le financement à l'activité. Alors, dans ce contexte-là, les coûts de système, c'est... Parce que vous voulez nous amener à vous dire que c'est x % par année d'augmentation pour les coûts de système. Je ne peux pas vous donner cette réponse si claire que ça parce que le système lui-même change, le système lui-même est en train de changer et il va continuer à changer.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : Oui. M. le ministre, vous avez assez d'expérience pour être capable d'évaluer les coûts de système, à savoir les salaires, augmentations, coûts, coûts directs, frais d'exploitation. Je ne peux pas m'imaginer qu'avec toute la compétence qui vous entoure que vous ne soyez pas capable de me dire minimalement... Quand on regarde les coûts, l'augmentation des coûts en santé dans les 15 dernières années, on n'a presque jamais été en bas de 4,5 %. C'est ce que vous souhaitiez, si je ne me trompe... Oui, c'était une promesse, de 4,5 %, que vous aviez dit à la campagne de 2014. Donc, est-ce que vous avez un chiffre? Ou si vous n'en avez pas, je vais aller sur d'autre chose. Mais vous n'êtes pas capable de me l'évaluer ou vous ne voulez pas me le dire, c'est ça?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Merci, M. le Président. Je ne peux pas vous le dire de façon si directe que ça parce que, justement, le système, lui, il est en train de changer. C'est vrai que, pour cette année, l'année 2016-2017, nous sommes à 2,4 % d'augmentation du budget de la santé. Dans les années qui vont suivre, on va s'ajuster. On demeure encore dans un scénario de base, un autre prévu de 2,4 % en 2017-2018 et 2,8 % en 2018-2019. S'il faut faire plus les années suivantes, on fera plus.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

• (16 h 40) •

M. Bonnardel : Si on a été capable de retrouver l'équilibre budgétaire puis qu'on a été capable, dans les deux dernières années, de contenir les coûts de système ou l'augmentation des coûts en santé en bas de 3 %, et là, cette année, vous avez une augmentation à 2,4 %, de 774 millions, puis, sur ces 774 millions, vous en avez 454 qui sont directement reliés aux hausses de salaire, comment le fédéral va voir cette négociation? Si on regarde le bilan, on regarde les deux dernières années, puis vous dites... Bien, écoutez, moi, je regarde ça, je suis au fédéral, là, puis vous êtes capable de fonctionner avec des coûts en santé en bas de 3 %, écoutez, là, je ne vous dis pas que c'est impossible, vous démontrez, dans une certaine manière, que vous pouvez le faire. Personnellement, quand on regarde en santé même, on est proche du chaos. Mais on est proche du chaos dans une certaine mesure, là. On comprend très bien que les délais d'attente, médecins de famille, chirurgie au bout de six mois, il y a des retards immenses, et ce n'est pas avec les mesures — même si vous l'avez mentionné — que votre collègue a mises en place que, présentement, on voit un énorme changement, un énorme changement pour la population québécoise.

Donc, comment vous voyez ces négos si, à quelque part, le fédéral vous dit : Aïe! Tu es capable de fonctionner depuis deux budgets en bas de 3 %, puis tu m'en demandes beaucoup plus? Puis je suis conscient, là, je suis conscient que, le vieillissement de la population, on... je le dis depuis tellement longtemps qu'on est une nation au monde qui est la plus vieillissante et puis que j'imagine qu'il faut être capable de jauger aussi cette situation face à d'autres provinces qui vivent cette situation moins fortement que la nôtre. Comment vous allez travailler ces négos, à savoir qu'on fonctionne, dans une certaine mesure, de façon extrêmement serrée, puis on garde les coûts de système extrêmement bas, puis, de l'autre côté, bien, on va demander des montants puis des pourcentages additionnels au fédéral?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, quand on voit l'évolution des croissances des coûts de santé dans d'autres provinces, surtout une province aussi populeuse que... Bon, les grandes provinces canadiennes, c'est avec celles-là qu'on peut se comparer, ce n'est pas pertinent de comparer les coûts de santé au Québec avec l'Île-du-Prince-Édouard. On comprend qu'il y a des économies d'échelle, bien sûr. Mais, avec l'Ontario, par exemple, on voit qu'en Ontario les coûts de santé sont aux alentours de 1,6 %, donc moins de 2 % par année. Ça, c'est une problématique qui concerne toutes les provinces canadiennes, et donc on doit tous travailler dans la même direction.

C'est pour ça que les provinces veulent amener le gouvernement fédéral, qui n'a pas dit non, qui a aussi dit qu'il veut travailler dans la même direction... d'amener la participation du gouvernement fédéral au financement du système de santé dans les provinces à 25 %. Ils ne sont pas à 25 % maintenant, mais tant le fédéral que les provinces veulent que la participation fédérale vienne à 25 %. Et puis, en plus, nous voulons aussi que cette nouvelle formule prenne en considération les éléments démographiques, donc que ce ne soit pas strictement sur une base per capita. Donc, nous jugeons qu'on va avoir des ressources financières additionnelles provenant du gouvernement fédéral, mais ça ne nous libère pas de notre obligation d'avoir un système efficace et fonctionnel selon notre propre juridiction. Donc, de ralentir la croissance des coûts, des fameux coûts de système, comme vous avez mentionné, ce que nous avons fait au cours des deux dernières années, ça fait partie aussi de l'équation.

Et vous avez dépeint un portrait assez sombre du secteur de la santé au Québec, moi, j'ai un portrait qui est bien différent, surtout en ce qui concerne l'accès aux médecins. Avec les changements dans la loi n° 10 et la loi n° 20, je pense que l'accès des Québécois à un médecin de famille s'est beaucoup amélioré au cours des deux dernières années.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Bonnardel : M. le Président, la vérité, c'est que, quand on regarde les coûts de système, notre système de santé comme tel, il y a encore 375 000 personnes qui quittent les urgences sans avoir vu un médecin. Il y a encore 15,30 heures d'attente moyenne dans les urgences au Québec. Si ça, c'est un système de santé moderne, bien, je ne comprends plus rien. Et, M. le ministre, si notre système de santé était le meilleur au monde, il serait copié. Il ne l'est pas. Les chirurgies, on est au-delà de l'attente moyenne, qui est de... Attendez un petit instant, je vais vous le dire, monsieur le... il y a 21 000 personnes, M. le ministre, qui attendent depuis plus de six mois pour une chirurgie qui est hors délai. Pas besoin de vous mentionner aussi les crises répétitives dans les CHSLD.

Or, je veux bien croire que, soudainement, on est capable de fonctionner à 2,4 %. Moi, je vous dis, dans le système de santé, à 2,4 %, on presse le citron énormément, énormément. Et ce que je souhaite puis, je pense, ce que tout le monde souhaite, c'est que, demain matin, on soit capable de réduire les délais d'attente parce que c'était une vieille promesse de Jean Charest en 2003, et, presque 15 ans plus tard, on est au même constat ou presque. Il y a encore des centaines de milliers de personnes au Québec qui n'ont pas de médecin de famille et qui n'ont pas accès rapidement à un médecin de famille.

Donc, si je regarde le budget pour cette année, je me dis que 774 millions de dollars d'argent neuf, il y en a 58 % qui est... précisément aux hausses de salaire, puis il y a 88 millions de dollars uniquement pour de nouveaux services à la population. Je veux juste comprendre. Si vous me dites : En Ontario, eux, fonctionnent à 1,6 %, je veux comprendre comment vos négociations vont aller, comment le ministre de la Santé et vous-mêmes allez dire au fédéral : Bien, nous, on est capables, depuis deux ans, de fonctionner avec un pourcentage qu'on considère très bas face aux coûts de système et même aux coûts du système de santé des dernières années? Parce que vous pouvez vérifier, là, je ne me trompe pas, on n'était pas en bas de 4,5 %, on était même au-dessus de 5 % de 2003 à 2012 ou presque. Comment vous considérez qu'on va être capable de protéger notre système de santé dans ces conditions, avec des augmentations qui amènent le système de santé et, nécessairement, la plupart des... dans un équilibre qui est extrêmement précaire?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Écoutez, non, je ne partage pas du tout votre appréciation, votre évaluation du système de santé au Québec. Je pense qu'il y a eu des progrès importants qui ont été accomplis au cours des dernières années. Écoutez, il y a plusieurs indicateurs en termes de services rendus à la population qui montrent qu'on va dans la bonne direction.

Et, pour revenir à l'accès aux médecins de famille, n'oubliez pas que, dans la législation qu'on a déjà mise en place, surtout le projet de loi n° 20, qui a des pénalités très concrètes s'il n'y a pas d'amélioration de l'accès, donc l'accès aux médecins de famille, c'est réel, et c'est important, et il est en train de se matérialiser. Donc, si vous voulez nous juger sur l'accès...

M. Bonnardel : 30 secondes.

M. Leitão : ...sur l'accès, je suis prêt à...

M. Bonnardel : M. le ministre, je n'ai pas beaucoup de... j'ai trois minutes.

Le Président (M. Bernier) : M. le député, il vous reste une minute.

M. Bonnardel : Une minute. M. le ministre, soyons sérieux, là, cassez-vous une jambe en descendant l'escalier ici, là, puis dites-moi que vous allez passer en deux heures à l'hôpital. Ou une blessure ou une ouverture, vous avez besoin de points de suture, dites-moi sérieusement que vous n'allez pas attendre 15 heures, 12 heures, 13 heures.

M. Leitão : Absolument pas. Mais non, voyons donc!

M. Bonnardel : Ah! O.K. Non, c'est ça. Ça fait que, là, donc, les délais d'attente dans les urgences au Québec, ça n'existe pas, il n'y en a plus, là.

M. Leitão : Vous savez très bien que les délais d'attente sont selon le niveau d'urgence.

M. Bonnardel : Bien oui. Mais je vous dis, M. le ministre, vous comprenez bien...

M. Leitão : Si je me casse une jambe à la sortie d'ici, c'est clair que je vais être admis rapidement à l'hôpital.

M. Bonnardel : Oui. O.K. Vous avez une blessure, donc, qui est moindre, qui est moindre...

Le Président (M. Bernier) : Arrêtons de se souhaiter des malheurs. Arrêtons de se souhaiter des malheurs.

M. Leitão : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : M. le député, il vous reste 30 secondes si voulez faire des commentaires.

M. Bonnardel : Oui. Donc, bien, le constat que je fais, c'est que notre système de santé, M. le Président, que le ministre puisse en penser, il y a d'énormes choses à améliorer. Puis ce que je constate, c'est qu'avec l'argent qu'on va y mettre présentement on est à amener le système de santé près du chaos, puis j'essaie de comprendre les négociations que le ministre, avec son collègue, va avoir avec le fédéral pour être capable d'aller en chercher plus, pour être capable de compenser les besoins que nous aurons avec une population extrêmement vieillissante dans les prochaines années. Voilà.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Granby, de votre participation. Et faites attention, mais on va prendre une pause de cinq minutes. Attention aux escaliers, attention en sortant. Et nous allons revenir...

Donc, une pause santé avant de retourner à la partie gouvernementale, je suspends.

(Suspension de la séance à 16 h 50)

(Reprise à 16 h 56)

Le Président (M. Bernier) : Nous reprenons nos travaux. Donc, nous étions du côté de la partie gouvernementale, et c'est le très sympathique député de Sainte-Rose qui va prendre la parole.

M. Habel : Merci, M. le Président. Je vous renvoie cet honneur, vous êtes aussi sympathique.

Alors, j'ai parlé un peu du niveau de la croissance des dépenses dans un de mes premiers blocs, puis je mentionnais que le Québec avait un taux de croissance très appréciable par rapport aux autres juridictions qui voulaient atteindre l'équilibre budgétaire. On était à 2,7 % en 2016-2017, alors que, par exemple, l'Ontario, qui voulait aussi atteindre l'équilibre budgétaire, lui, en 2017-2018, prévoyait un taux de croissance de seulement 0,1 % en 2016-2017, et la Colombie-Britannique, qui avait, elle, déjà atteint l'équilibre budgétaire, voulait avoir une croissance des dépenses de 1,3 %.

Alors, si on regarde... Parce que j'aimerais, moi aussi, parler d'un peu la santé et aussi l'aspect des sciences de la vie, on voit qu'il y a un taux de croissance des dépenses qui va être de 2,4 % en 2016-2017. Puis, étant donné que ça fait aujourd'hui deux ans qu'on a été élus au gouvernement, je pense que c'est important de faire un peu une genèse de ce qui s'est passé en santé.

J'ai eu le plaisir de siéger près de deux ans à la Commission de la santé et des services sociaux, puis, quand on regarde le chemin parcouru avec le projet de loi n° 10, où on est passé de trois paliers à deux paliers, puis on a coupé un palier hiérarchique, passant de 182 structures à une trentaine, dont des CISSS, des centres intégrés de santé et de services sociaux, et des CIUSSS, des centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux...

On a eu aussi le projet de loi n° 20 pour favoriser l'accès au réseau en optimisant les ressources avec l'augmentation de la prise en charge. Parce qu'au 31 décembre 2017, M. le Président, 85 % des patients qui voudront avoir un médecin de famille pourront en avoir un. Et la beauté de la chose, c'est que le projet de loi n° 20 est un peu comme un chien de garde, c'est-à-dire qu'il n'est pas adopté parce qu'il y a déjà eu une entente entre la FMOQ et le ministre de la Santé qui prévoit qu'eux vont atteindre l'objectif avant le 31 décembre 2017. Donc, le projet de loi est un chien de garde pour nous assurer d'avoir une augmentation de la prise en charge de patients.

Donc, dans le 2,4 % de la croissance des dépenses, on inclut aussi une portion de 88 millions additionnels dans le budget pour les clientèles vulnérables, et je pense que, pour le comté de Sainte-Rose, le secteur de Fabreville-Est, l'ensemble de Laval puis l'ensemble des régions du Québec, c'est quelque chose qui est très important. 60 millions pour accroître le service à domicile, on sait que la population est vieillissante, et je pense que c'est une mesure qui était très importante et très appréciée des gens avec qui j'ai discuté du budget dans ma circonscription. Un 5 millions aussi pour les gens et les familles qui sont atteints du trouble du spectre de l'autisme, et c'était en lien avec l'entente qu'on avait eue le 11 février et le 12 février 2016, la rencontre qu'on avait eue. On a eu, dans le comté de Laval-des-Rapides, près du comté de Sainte-Rose, dans la région de Laval, un forum sur le spectre de l'autisme, et je pense que ça a été très apprécié et très bien reçu, ce 5 millions de dollars additionnel. 15 millions de dollars pour les chirurgies afin d'augmenter l'accès, 6 millions pour le centre de désintoxication et 2 millions pour favoriser les saines habitudes de vie. Et j'ai à côté de moi l'adjointe parlementaire de la ministre pour les saines habitudes de vie, donc je suis sûr que c'était un montant très apprécié.

Alors, on a eu des augmentations de dépenses au niveau de la santé. On a eu aussi pour les particuliers — ça, je pense que c'est très important de le mentionner, M. le Président — la réduction immédiate de la contribution santé. Parce que, dès la fin de l'année 2017, 4,5 millions de contribuables soumis à la contribution santé en seront totalement exemptés, ce qui va, à terme, représenter une baisse du fardeau fiscal de 759 millions par année. À terme.

Donc, M. le Président, il y a aussi des investissements qui sont faits dans les sciences de la vie. Et, dans mon comté, j'ai beaucoup d'entreprises, dont l'entreprise Pharmetics, qui est dans les sciences de la vie. On a aussi la Cité de la Biotech à Laval. Et actuellement il y a des investissements dans les secteurs clés, dont les sciences de la vie, un montant de 34 millions pour renforcer la compétitivité.

Et ma question au ministre des Finances au sujet des sciences de la vie, j'aimerais qu'il me parle du 34 millions d'investissement.

• (17 heures) •

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. Alors, cher collègue, merci beaucoup de votre mise en contexte et, surtout, du rappel de ce qui se fait déjà en santé, et donc l'amélioration significative qu'on a dans l'accès aux médecins de famille.

Maintenant, si on revient à votre question, donc, sur les annonces que nous avons faites dans le budget, oui, on a, donc, ces sommes presque 34 millions de dollars sur trois ans. Mais, comme ce qu'on avait mentionné plus tôt ce matin, ça, c'est les coûts financiers. En fin de compte, on parle ici de 100 millions de dollars de fonds pour favoriser surtout la commercialisation des découvertes québécoises. Donc, il y a plusieurs fonds d'investissement. On a aussi l'appui à des projets d'études cliniques précoces. On a un soutien accru à l'Institut de recherches cliniques de Montréal ainsi que l'accélération de l'évaluation des nouveaux médicaments par l'INESSS. Alors, ça, donc, c'est ces mesures-là.

Pour ce qui est des fonds, écoutez, nous, un fonds qui est très important dans le domaine des sciences de la vie, c'est le fonds d'amorçage Amorchem II, donc un fonds du capital de risque, parce que, dans cette industrie-là, la disponibilité du capital de risque est très importante. On a assisté, au cours de la dernière décennie à peu près, à un changement structurel majeur dans la façon dont la recherche et le développement se fait dans l'industrie pharmaceutique, où les grandes compagnies, ce qu'on appelle en anglais les «brand names», les grandes compagnies pharmaceutiques, maintenant, délèguent beaucoup de leurs recherches à des partenaires locaux, des petites et des moyennes entreprises. Donc, c'est important pour nous au Québec d'avoir... et nous l'avons déjà, mais de continuer de promouvoir tout cet écosystème de petites et moyennes entreprises de recherche pour leur permettre de bénéficier des fonds significatifs mis à la disposition par les grandes compagnies pharmaceutiques. Ça, c'est une chose.

On a aussi le Fonds Teralys. Teralys, c'est un fonds de fonds. C'est vraiment le meilleur au Canada dans ce domaine-là. Et, dans, donc, la dernière mouture de ce Fonds Teralys Capital Innovation, une bonne partie, sinon la plus grande partie, est dédiée aux sciences de la vie. Et c'est la particularité des fonds de fonds, c'est qu'ils vont chercher des partenaires externes qui, eux, ont beaucoup d'expertise dans ces secteurs-là de pointe. Donc, on met non seulement à la disposition des entreprises québécoises innovatrices le capital suffisant nécessaire pour alimenter leurs recherches, mais on les met aussi en contact avec des partenaires qui ont une expertise très pointue dans ce domaine-là. Donc, ce sont les deux côtés qui sont particulièrement importants.

Dans ce Fonds Teralys là, c'est donc de l'argent public, mais aussi avec des partenaires privés, des partenaires québécois privés tels la Caisse de dépôt, le Fonds de solidarité FTQ, Fondaction, la Banque Nationale, le Mouvement Desjardins et d'autres entreprises aussi. Il ne faut pas non plus oublier la Banque de développement du Canada, la BDC. Donc, il y a vraiment une mobilisation du capital de risque québécois au profit, surtout, du secteur de la science et vie. Écoutez, les sciences de la vie, c'est 450 entreprises au Québec, et on peut calculer le nombre d'emplois à peu près à 25 000, et des emplois, surtout, bien rémunérés. Donc, c'est un secteur qui est très important, et je crois que l'aide de l'État a un très bon effet de levier parce qu'avec l'aide de l'État on réussit aussi à mobiliser de l'investissement privé dans ce secteur-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Merci, M. le ministre. Donc, je crois que, pour les entreprises dans mon secteur, parce que Laval est un important acteur du milieu des sciences de la vie, ce 34 millions est très apprécié.

Au niveau aussi... J'aimerais aborder l'aspect de l'aérospatiale parce que, ayant un grand centre comme Héroux-Devtek et aussi M1 Technology, qui est une entreprise dans mon comté qui est dans le programme PerforME, qui est dans la première cohorte du programme PerforME, donc j'ai eu la chance de la visiter avec le député de Trois-Rivières. C'est vraiment, le secteur de l'aérospatiale, en constante croissance dans mon comté puis dans le secteur de Laval. J'aimerais, M. le ministre, que vous nous parliez de la nouvelle stratégie québécoise en aérospatiale et le montant de 70 millions qui s'y rattache.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Leitão : Oui. Alors, là aussi, c'est un 70 millions sur une période de cinq ans. Mais, avant d'aller un peu plus dans les détails de ce programme-là, on ne peut pas, évidemment, ne pas mentionner Bombardier. Quand on parle d'aérospatiale au Québec, le coeur de l'industrie aérospatiale, c'est Bombardier, et particulièrement la série C, qui est le plus gros projet de recherche et développement au Québec de toute notre histoire, et même un des plus importants au Canada, de toute l'histoire canadienne. Donc, c'était clair que l'État québécois ne pouvait pas ne pas intervenir dans ce secteur-là pour nous assurer non pas de la fortune personnelle des actionnaires de Bombardier, ce n'est pas ça, la question... La question, c'est la commercialisation de la série C, donc d'amener ce projet-là, qui est à deux pas de la réussite, à deux pas de la commercialisation... ne pas l'interrompre maintenant et de l'aider à franchir cette dernière étape pour qu'il puisse non seulement continuer de fournir des emplois bien rémunérés dans la région de Montréal, mais qu'il puisse aussi devenir le grand «success story» que nous pensons tous qu'il pourra être.

Donc, l'aérospatiale, au Québec, on ne peut pas, même, concevoir l'aérospatiale sans la série C et sans Bombardier. Mais, bien sûr, c'est beaucoup plus que ça. Vous avez aussi mentionné les entreprises dans votre secteur, Héroux-Devtek, et il y en a d'autres. Donc, l'aérospatiale, c'est un grand secteur qui a comme centre cette grande entreprise aussi.

Alors, dans notre budget, nous nous engageons par divers programmes à peu près à 250 millions de dollars pour le secteur, dont 70... C'est une enveloppe additionnelle de 70 millions, divisée en plusieurs programmes. Nous voulons d'abord continuer de soutenir la croissance de cette industrie. Comme vous le savez, un bon défi auquel l'industrie fait face, c'est la main-d'oeuvre, c'est de trouver des travailleurs bien formés pour qu'ils puissent continuer d'alimenter les entreprises.

Nous voulons aussi diversifier la filière industrielle, c'est-à-dire nous assurer que les différents fournisseurs de pièces et d'équipement dans cette industrie au Québec puissent mieux s'intégrer avec les grandes compagnies d'assemblage. Ça aussi passe par la consolidation et l'essor des PME. Beaucoup d'entreprises dans cette industrie-là sont des PME, et, évidemment, nous sommes toujours intéressés à favoriser la création, le développement d'un nouveau Bombardier, d'un nouveau Héroux-Devtek, et autres.

Et l'innovation, cette industrie-là, sa survie et sa croissance vont dépendre de sa capacité d'innover. La série C, c'est un exemple parfait d'innovation, mais il faut aller un peu au-delà de la série C, continuer à promouvoir l'innovation. Et n'oublions pas que Montréal est le troisième centre aérospatial dans le monde. Nous avons certainement Seattle, Toulouse, et Montréal fait partie de ce trio d'élite aérospatiale. Pas au même niveau que Seattle ou Toulouse, mais quand même à un niveau important. Alors, quand on parle de fleurons de l'économie québécoise, bon, nous avons ici un secteur tout entier qui est un fleuron, et donc l'État se doit de continuer d'accompagner ce secteur-là.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.

M. Habel : Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Environ 3 min 30 s.

M. Habel : Parfait. Merci beaucoup, M. le ministre. On a, entre autres, parlé des secteurs comme l'aérospatiale, à 70 millions, puis les sciences de la vie, à 34 millions. Si j'avais eu plus de temps, j'aurais pu vous poser des questions sur l'industrie touristique, à 67 millions, l'aspect agroalimentaire, à 47 millions, mais plusieurs de mes collègues l'ont fait.

J'aimerais qu'on parle d'infrastructures parce qu'il y a des montants qui sont substantiels, 4 milliards de dollars pour les deux prochaines années, dont 700 millions — j'en avais fait mention, M. le Président, dans un de mes blocs antérieurs — pour les infrastructures en éducation et en enseignement supérieur. Je l'avais décliné, pour le maintien d'actifs, à 250 millions; la résorption du déficit de maintien d'actifs, à 250 millions; rendre les établissements écoresponsables, à 100 millions; l'ajout de gymnases dans les écoles, à 50 millions; et les installations sportives et récréatives, à 50 millions.

Il y a aussi le plan quinquennal en investissement, le PQI 2016-2026, et Laval tire son épingle du jeu, M. le Président, dont la Place Bell, qui est en réalisation et en construction, M. le Président, puis aussi, dans mon comté, la réfection majeure du pont Gédéon-Ouimet sur l'autoroute 15 entre Laval et Boisbriand. Donc, beaucoup d'investissements en infrastructures, M. le Président, alors j'aimerais que le ministre nous parle un peu de tout le plan, le PQI 2016-2026 en infrastructures.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Très bien. M. le Président, écoutez, comme vous avez mentionné, c'est 88,7, donc presque 90 milliards de dollars sur 10 ans, donc 2016 à 2026. Nous avons déjà, précédemment, parlé beaucoup de ces investissements-là en éducation. J'aimerais juste souligner qu'en 2014-2015 les investissements en infrastructures étaient de 9,2 milliards de dollars, ce qui était déjà un effort substantiel. On l'avait augmenté considérablement de leur niveau en 2013-2014. Donc, 2013-2014, c'était 8,9; 2014-2015, 9,2. Après ça, en 2015-2016, nous l'avons encore augmenté à 9,6; puis 2016-2017, 2017-2018, nous le maintenons à 9,6 milliards de dollars. Donc, c'est un effort substantiel, nous... Encore une fois, il y a des limites à ce que nous pouvons faire parce qu'une bonne partie de ces investissements-là doivent être financés par des emprunts. Donc, nous avons une période de quatre ans où nous avons devancé plusieurs de ces activités d'infrastructures et nous le maintenons à des niveaux qui sont très élevés. Écoutez, en termes d'effort par rapport au PIB du Québec et si on le compare au PIB canadien, même après le réinvestissement important du nouveau gouvernement fédéral en infrastructures, notre effort à nous, au Québec, c'est quatre fois plus élevé que l'effort amélioré du gouvernement fédéral. Donc, notre engagement à continuer d'investir dans les infrastructures est majeur, et je dirais qu'il est même à la limite de ce qu'il est possible de faire, et nous le maintenons à un niveau qui est très élevé.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, de vos commentaires. Nous allons donc passer maintenant du côté de l'opposition officielle pour un dernier bloc de 20 minutes. M. le député de Rousseau ou Sanguinet.

M. Marceau : Ça va être le député de Sanguinet, mais, juste pour être clair, est-ce que, pour la question de la valeur des investissements qui ont servi à établir la dotation du Plan Nord, est-ce que ça va être quelque chose que vous allez nous remettre plus tard?

M. Leitão : Je peux vous le dire maintenant, si vous voulez, on a trouvé l'information. Donc, l'année précédente, 2015-2016, c'était de 16,3 milliards, et cette année, 2016-2017, c'est de 15,5 milliards. Donc, il y a une légère baisse qui reflète, bon, qui reflète le cycle économique, donc la baisse de projets.

M. Marceau : O.K. En fait, donc, en 2014 on était à 18,3 milliards, en 2015 on était à 16,3 milliards, puis là on est rendu à 15,5 milliards.

M. Leitão : C'est ça.

M. Marceau : O.K. Comme quoi il n'y a pas de miracle.

M. Leitão : Les prix étant ce qu'ils sont. Sérieusement, surtout, comme vous le savez certainement très bien, c'est le secteur du fer qui est le plus affecté par la conjoncture.

M. Marceau : Arrêtons là. Arrêtons là, je vais laisser la parole à mon collègue.

M. Leitão : Très bien.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je commencerais par une demande d'éclaircissement par rapport à un sujet qui préoccupe bien des Québécois, surtout ceux qui suivent la politique, là, est-ce qu'il existe un déséquilibre fiscal au Canada? Bien, je vous pose la question avec un beau sourire, M. le ministre, parce que je vous donne l'occasion de clarifier ça. Parce que, des fois, on a des sons de cloche qui diffèrent d'un moment à l'autre, alors j'aimerais ça, profiter de cette occasion pour vous entendre sur le déséquilibre fiscal. Alors, je vous écoute, M. le ministre.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Déséquilibre fiscal...

M. Therrien : J'imagine que vous êtes content de ma question.

M. Leitão : Déséquilibre fiscal, vous faites allusion, donc, aux relations fédérales-provinciales. Pas le déséquilibre fiscal à l'intérieur du Québec, mais à l'intérieur du Canada.

M. Therrien : Non, non. Exactement, oui, oui, c'est dans la fédération canadienne. Vous avez raison, oui, absolument.

M. Leitão : D'accord. Écoutez, ce que j'ai déjà dit, et je le répète, c'est qu'aujourd'hui, au moment où le gouvernement fédéral est en déficit de presque 30 milliards de dollars cette année, 30 milliards de dollars l'année prochaine et, sur une certaine période de temps, il prévoit avoir des déficits cumulatifs au-delà de 100 milliards de dollars, donc, dans ce contexte-là, je pense que c'est un peu hasardeux de parler de déséquilibre fiscal. Déséquilibre fiscal, dans le sens où les ressources financières se trouvent au niveau du gouvernement fédéral, et les besoins de dépenses se trouvent au niveau des gouvernements provinciaux, je pense que, dans ce sens-là... Et on a encore du chemin à faire, bien sûr, surtout que les provinces canadiennes, toutes les provinces, incluant le Québec, bien sûr, sont responsables du financement des services publics de proximité comme la santé et comme l'éducation. Alors, à cet égard-là, nous sommes toujours d'avis qu'on doit faire très attention aux formules de transfert fédérales-provinciales pour nous assurer que les provinces canadiennes, incluant le Québec, continuent de recevoir les ressources financières suffisantes pour continuer de fournir ces services-là. Mais, à très court terme, donc maintenant, quand le gouvernement fédéral est lui-même en déficit, je pense que c'est un peu difficile de parler de déséquilibre fiscal à court terme.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

• (17 h 20) •

M. Therrien : Je comprends très bien quand vous dites à court terme. Mais, quand on parle de déséquilibre fiscal, c'est dans la structure de l'économie. On peut arriver dans des moments, une conjoncture quelconque d'une impulsion de décisions prises par le gouvernement fédéral actuellement qui fasse en sorte qu'on ait un déficit qui est très temporaire, puis vous l'avez mentionné vous-même que la situation des finances publiques est beaucoup plus sympathique au fédéral qu'au provincial à cause de la dette publique. Vous l'avez mentionné hier, je pense, puis avec justesse, je veux dire, ils sont moins endettés, donc ils peuvent se permettre d'emprunter, c'est moins grave que nous. Ça veut dire que nous, on a un problème structurel au niveau de nos dépenses publiques. Puis vous le mentionnez à plusieurs reprises, ce n'est pas le cas du fédéral. Puis, en plus, le fédéral, ses dépenses en infrastructures sont directement dans son budget, alors que, nous, il y a le PQI. Il faut prendre ça en considération aussi, là. Ça veut dire que, si on calculait comme le fédéral, on aurait un déficit de 8,5 milliards. Vous comprenez ce que je veux dire? Bon.

Vous savez que les revenus d'un gouvernement provincial — je n'aime pas le mot, mais bon — ça vient en partie des transferts du gouvernement fédéral. On veut que ces transferts-là soient suffisants, soient prévisibles et ne soient pas conditionnels. Savez-vous, la première rencontre entre les différentes provinces canadiennes qui parlaient, justement, des transferts insuffisants au niveau de la prévisibilité, au niveau de la suffisance puis au niveau de la non-conditionnalité... savez-vous en quelle année qu'il y a eu la première conférence entre cinq provinces canadiennes qui discutaient de cette situation-là?

M. Leitão : Il y a peut-être un certain temps. Je ne pense pas que c'était hier.

M. Therrien : Bien, si vous ne le savez pas, ce n'est pas grave, là. Je vous le dis honnêtement, je vous pose la question en toute amitié parce qu'il n'y a pas grand monde qui le sait, mais il me semble que c'était en 1887, cinq provinces canadiennes s'étaient réunies à l'époque...

Le Président (M. Bernier) : Vous étiez jeune.

M. Therrien : Non. Bien, j'avais 20 ans à l'époque, je me rappelle très bien, et... Non, mais ça m'avait marqué. Et le fédéral n'était pas présent, puis il y avait deux provinces qui n'étaient pas présentes parce qu'elles considéraient que le fédéral, c'était leur ami. Et, en 1902, il y a eu une autre conférence, mais là toutes les provinces étaient présentes, sauf le gouvernement fédéral. À l'époque, on n'a pas utilisé le terme «déséquilibre fiscal» parce que ça n'existait pas, le terme. Or, le déséquilibre fiscal, là, il y a un bon livre là-dessus, il y a un très bon livre là-dessus, ça s'appelle...

Une voix : ...

M. Therrien : Non, mais il y en a un très bon, ça s'appelle Le prédateur et l'imposteur  La politique économique selon Jean Chrétien et Paul Martin, de deux économistes très, très brillants qui parlent du déséquilibre fiscal. Et le début du déséquilibre fiscal, M. le ministre, c'est en 1867, à la construction du Canada qu'on connaît actuellement. Voilà. Et donc on peut avoir des moments où est-ce que c'est moins présent dans l'actualité, mais, structurellement, c'est toujours là, toujours, toujours là. C'est dans l'ADN de la Constitution canadienne de par les responsabilités fiscales puis les dépenses. Voilà. Bien, en tout cas, écoutez, vous le lirez, puis vous me ferez vos commentaires.

M. Leitão : Oui, oui.

Le Président (M. Bernier) : Avez-vous l'intention de l'autographier?

M. Therrien : Oui, absolument, oui. Je vais commencer par «En toute amitié».

M. Leitão : Oui, mais je vous mentionnerais aussi en toute amitié que c'est même la caractéristique propre d'une fédération comme la fédération canadienne, continuellement, d'évoluer, de raffiner ces processus-là de transfert. Et, quand on regarde, par exemple, bon, l'année 2014 — c'est la dernière année pour laquelle nous avons des données vérifiées par Statistique Canada, donc les comptes économiques provinciaux, là — on voit que le Québec envoie, si vous voulez, en termes de taxes et d'impôts au gouvernement fédéral, 47,7 milliards de dollars, pendant que le gouvernement fédéral dépense au Québec, en termes de transferts et de dépenses directes, 61,3 milliards. Donc, il y a un déséquilibre, pour prendre votre terme, mais un déséquilibre de l'autre côté de l'ordre de 13,6 milliards de dollars. Donc, au Québec, on a 13 milliards de dollars de plus du gouvernement fédéral que ce que nous payons en taxes et impôts.

Maintenant, c'est clair qu'une fédération, il y a toujours des tensions à l'intérieur de cette fédération-là, et nous continuons de travailler à amoindrir ces tensions-là. Et, comme ce qu'on a déjà discuté avant, c'est en santé où, ces jours-ci, nous jugeons qu'il est nécessaire d'avancer dans une nouvelle formule de transfert qui soit plus acceptable aux provinces.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : En toute amitié, ça fait presque 150 ans que les provinces essaient, puis il n'y a pas encore de solution finale. La seule solution finale, c'est la souveraineté du Québec, c'est la seule. Puis, quand vous parlez des chiffres de l'institut, les chiffres sont erronés. Même l'institut a mentionné que les chiffres étaient erronés, puis ils ont retiré ça. Juste en dédoublements, c'est 7,5 milliards.

Le rêve de votre gouvernement, là, c'est de diminuer les dépenses publiques sans diminuer les services. Moi, j'en ai un, truc, d'éliminer des dédoublements de 7,5 milliards, puis vous n'enlèverez pas un service. Vous penserez à ça. Là, vous avez parlé de péréquation, mais juste le malaise hollandais a coûté à peu près, minimum, 10 milliards à l'économie québécoise par année, avec une destruction du tissu industriel qui représente 75 000 emplois directs, sans compter les emplois indirects. La péréquation, c'est une compensation pour le mal que la politique économique canadienne nous fait année après année, puis on pourrait en faire un discours. De toute façon, on va parler de souveraineté, puis on va en faire, un discours là-dessus, où mon collègue... Il est encore plus chevronné que moi, il en fera un, discours sur la souveraineté du Québec, puis on regardera, puis les gens sauront apprécier la vérité. Alors donc...

M. Leitão : Et les 13 milliards, on va les chercher où?

M. Therrien : Je vous en ai donné 17,5 juste comme ça, sans compter le fait que les investissements canadiens, là, il y en a 13 % qui viennent au Québec, puis on est 22 % de la population. Puis vous le savez comme moi, vous êtes économiste, que des investissements, au Québec, là, c'est extrêmement important pour créer un tissu industriel puis créer une croissance économique, vous ne parlez à peu près que de ça dans votre document. Ça fait que, quand le gouvernement fédéral va donner 13 % d'investissements au lieu de 22 %, ce qui représente la population du Québec au Canada ou l'économie du Québec au Canada, ça, là, c'est un trou récurrent, 9 % par année, depuis des années. De toute façon, je ne veux pas revenir là-dessus parce que j'ai d'autres questions à vous poser.

M. Leitão : Mais vous admettez donc, pour éviter cette soi-disant maladie hollandaise, un dollar québécois aurait dû être beaucoup plus faible que ça a été le cas du dollar canadien.

M. Therrien : Non, le dollar québécois...

M. Leitão : Bien oui.

M. Therrien : Non, non, ce n'est pas ça. Non, le dollar québécois ne fluctue pas ou ne fluctuerait pas avec la valeur des matières premières. Voyons donc! Ce n'est pas la force d'un dollar, d'une monnaie, non, ce n'est pas...

M. Leitão : Donc, il serait beaucoup plus faible.

M. Therrien : Ce n'est pas la...

M. Leitão : Donc, il serait beaucoup plus faible. En tout cas... O.K.

Le Président (M. Bernier) : M. le député, il serait intéressant qu'on finalise nos questions sur le budget.

M. Therrien : Merci. Mais c'est les variations d'une monnaie qui est une monnaie qui est branchée sur la valeur des matières premières parce que le Canada, c'est un pays de matières premières. Puis la politique économique canadienne, c'est «drill, baby, drill», puis vous êtes là-dedans, dans cette économie-là, vous. Les provinces qui paient la péréquation, c'est les provinces qui vont produire du pétrole. Puis ceux qui reçoivent de la péréquation, c'est ceux qui vont, tout simplement, ne pas avoir de pétrole parce que le pétrole, au Canada, va nuire aux provinces qui ne produisent pas de pétrole. On est en train de se faire évacuer plein de ressources humaines parce qu'elles s'en vont en Alberta, parce que tu as un dynamisme économique qui est créé par la production pétrolière de l'Ouest puis qui fait en sorte qu'on perd des éléments intéressants puis des payeurs de taxes chez nous. Ça fait que c'est ça, la péréquation, mon cher ami.

Le Président (M. Bernier) : On poursuit, M. le député de Sanguinet?

M. Therrien : Oui, c'est correct. Je vais parler maintenant, A.17...

M. Leitão : Celui qui contribue le plus à la péréquation en termes absolus, c'est l'Ontario. Mais ça, c'est une autre chose. En tout cas, continuons.

M. Therrien : A.17. A.17. Il y a des gens qui disent qu'on paie plus d'impôts qu'avant, que le fardeau fiscal est plus élevé, et on a un peu de difficultés, de votre côté, à l'accepter, puis c'est correct, là, tu sais, c'est ça, la politique, tu sais. Tout est beau chez vous, mais, tu sais, c'est parce que les faits sont têtus.

A.17, vous avez un record de revenus que vous avez été chercher dans la poche des contribuables par rapport au PIB à 26,1. Vous détenez le record, c'est ce qu'on voit, là. Ça veut dire que vous avez éliminé le déficit en coupant dans les dépenses de façon importante et en allant chercher davantage de l'argent dans les poches des Québécois. Je vais vous dire, là, je vais réfléchir puis je veux vous entendre là-dessus. Le fait que vous ayez été chercher plus d'argent dans les poches des Québécois, c'est parce que la tarte, ton assiette fiscale, elle s'est rétrécie ou elle n'a pas augmenté parce que la croissance économique était à peu près absente au Québec. Ça veut dire que ça vous a poussés à aller chercher davantage d'argent dans un pot qui ne grossit pas. Ça a-tu de l'allure, ce que je dis ou... Tu sais, autrement dit, là, si vous aviez une politique, une vraie politique économique, bien, peut-être que vous n'auriez pas besoin d'aller en chercher davantage dans les poches des gens.

Moi, j'aimerais ça, sérieusement, là... Au-delà des principes et au-delà du discours puis du vocabulaire, là, qu'on entend, là, puis qu'on a de la misère à cerner les effets de ces politiques-là ,concrètement, là, moi, j'aimerais ça, là, M. le ministre, là, en une minute... Sympathiquement, je vous donne une minute pour dire... Essayez de me vendre votre politique économique, me convaincre que vous allez faire quelque chose pour stimuler l'économie. Là, parlez-moi pas de stratégie maritime, à Rimouski, ils me disent : La stratégie maritime, ça n'a jamais été dur de même de dépenser de l'argent puis de trouver de l'argent à dépenser depuis qu'on a fait la stratégie maritime. Parlez-moi pas du Plan Nord. Parlez-moi concrètement, ce que vous allez faire concrètement. Je veux vous entendre, je vous donne une minute parce que... On va jouer ce jeu-là, tu sais, une minute...

M. Leitão : On a une minute, M. le Président?

M. Therrien : Une minute ou deux.

Le Président (M. Bernier) : Oui. Bien, je veux juste vous dire, M. le député de Sanguinet, que c'est moi qui contrôle la joute. Je veux juste vous le dire, je veux vous le rappeler.

M. Therrien : Vous, là, je vous trouve très dur, de toute façon, je...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Bon. Mais, d'une façon...

M. Therrien : Non, non. Bien, on joue le jeu, là.

M. Leitão : Donc, d'une façon rapide...

M. Therrien : Mais vous pouvez prendre plus de temps si vous voulez.

M. Leitão : ...d'une façon rapide...

M. Therrien : Oui, oui, allez-y.

M. Leitão : ...écoutez, le...

M. Therrien : Concrètement, là.

• (17 h 30) •

M. Leitão : ...concrètement, très, très concrètement, la croissance économique du Québec passe par la stabilité financière. S'il n'y a pas de stabilité financière, on ne peut pas avoir de croissance économique. Et la stabilité financière passe par l'atteinte de l'équilibre budgétaire, ce que nous avons fait. Dès notre arrivée, nous avions dit, en juin 2014, que nous nous donnions deux ans pour revenir à l'équilibre budgétaire, et c'est ce que nous avons fait. Donc, c'est cette crédibilité-là qui a été renforcée par nos agissements très concrets de rétablissement de l'équilibre budgétaire, comme mon collègue le député de Pontiac a mentionné dans sa présentation précédente, les commentaires que nous avons eus des agences de notation, qui ont noté l'effort qui avait été fait au Québec de retour à l'équilibre, et donc c'est cette stabilité-là qui nous permet maintenant de pouvoir aspirer à avoir une croissance économique bien plus soutenable et rapide à moyen terme.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : J'aime ça parce qu'il est concis puis il répond à mes questions. Je trouve ça bien. On apprend, évidemment, que la croissance économique, c'est poussé par les investissements, entre autres les investissements privés. Vous me dites : Oui, il y a une stabilité financière, un déficit zéro. Pourquoi vous prévoyez 0 % de croissance des investissements à ce moment-là?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Leitão : Comme on a déjà parlé un peu là-dessus...

M. Therrien : Oui, vous l'avez sûrement expliqué, je vous écoute, oui.

M. Leitão : ...en ce qui concerne les investissements, quand on regarde la progression de l'investissement pendant l'année 2016, on a atteint le creux cyclique au quatrième trimestre de 2015. Et les indications qu'on a, préliminaires, pour le premier trimestre et puis pour les autres qui vont suivre, c'est une accélération. Donc, de janvier à décembre, si vous voulez, c'est une croissance de 3 % en termes réels des investissements des entreprises. Et, quand on regarde l'investissement particulièrement en machinerie et équipement, il est bien plus vigoureux que l'investissement total parce que force est de constater qu'en construction non résidentielle il y a encore un peu de faiblesse. Mais, en machinerie et équipement, on remarque déjà une accélération.

Et, pour ce qui est du ralentissement ou du déclin, même, de l'investissement en 2014 et en 2015, on a passé par une situation, une conjoncture internationale particulièrement sévère, beaucoup de volatilité financière dans les marchés internationaux, une forte chute des prix des matières premières qui ont retardé plusieurs projets d'investissement.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : Oui. Je pense que mon collègue a déjà parlé de ça, là, mais, en 2014, vous aviez prévu 4,1 % d'augmentation, on a eu moins 11 % dans l'investissement. Vous avez prévu l'année passée 2,8 %, on a eu moins 4,7 %. Là, vous prévoyez 0 %. Honnêtement, on est nerveux, là, parce que 4,1 %, moins 11 %, 2,8 %, moins 4,7 %, puis là c'est 0 %. Ça fait qu'on est nerveux un peu. On espère, parce qu'on veut toujours le mieux pour le Québec... Moi, je suis très fier d'être Québécois, puis je suis un nationaliste vraiment convaincu, ça fait que j'espère qu'on...

Une voix : ...

M. Therrien : Bien, absolument.

Une voix : ...

M. Therrien : Oui, je suis très fier d'être Québécois, soyez certain de ça, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Ça, j'en suis certain.

M. Therrien : Et donc...

Une voix : ...

M. Therrien : Oui, oui. Oui, c'est bien. C'est bien, sauf que je vais vous expliquer certaines choses. Mais on en reparlera devant une bière quand on ne sera plus en politique, M. le ministre. Alors donc, l'important, c'est que je vous parle avant le référendum parce que tous les votes comptent, hein? Alors...

M. Leitão : ...

M. Therrien : On travaille là-dessus. Non, mais, écoutez, ça m'inquiète un peu, puis j'espère qu'on aura une croissance des investissements. Mais moi, là, je veux vous entendre là-dessus. Écoutez, on a parlé d'austérité, là vous avez... La première question que je vous avais posée, c'était de qualifier, puis vous avez parlé de rigueur budgétaire. Alors, on ne s'obstinera pas sur le terme, là, mettons que vous parlez de rigueur, je parle d'austérité, puis on se fait un clin d'oeil, puis on trouve ça bien le fun. Mais, quand le FMI ou quand des économistes comme Stiglitz puis d'autres, Krugman, des grands économistes, des prix Nobel, qui nous disent... et qui disent : Bien, la meilleure façon d'éliminer un déficit, c'est par la croissance des revenus d'un État, par, justement, la prospérité, par un plan économique qui permette de remettre l'économie sur ses rails, c'est quoi que vous répondriez à ces gens-là, à ces économistes-là, qui sont des économistes chevronnés? Vous les connaissez, d'ailleurs, je ne vous apprends rien, là. Mettons... Combien qu'il me reste de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Une minute.

M. Therrien : Ah! bien, je vais le laisser terminer avec ça, avec Stiglitz puis avec Krugman. Non, non, mais allez-y, allez-y.

M. Leitão : Oui, en effet, Krugman, Larry Summers, je leur dirais : Bravo! Vous avez raison. En effet, l'austérité, l'austérité...

M. Therrien : ...

M. Leitão : Vous pouvez l'écrire. Vous pouvez l'écrire, l'austérité est très mauvaise pour l'économie, là, c'est clair. Mais c'est justement pour ça, ce que nous faisons au Québec, ce n'est pas de l'austérité. N'oublions pas, on a parlé tantôt de PQI, d'investissement en infrastructures, nous avons équilibré les budgets d'opération. Et puis n'oubliez pas que nous avons ajouté par-dessus ça 9,9 milliards de dollars d'investissement.

Donc, nous faisons exactement ce que Larry Summers suggère que tout le monde fasse pour combattre cette stagnation structurelle, comme il l'appelle, d'investir massivement en infrastructures. C'est ce que nous faisons, et c'est ce que, par exemple, votre formation politique... Je ne pensais pas que c'était votre cas à vous...

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, vous pouvez continuer. Il reste un dernier bloc de 10 minutes, donc allez-y.

M. Leitão : Donc, je continuerais juste dans cet ordre d'idée, que nous avions augmenté nos dépenses en infrastructures. Le député de Saint-Jérôme, qui allait devenir votre chef, avait dit à ce moment-là : Bof! L'asphalte et le béton, ça ne sert à rien. Mais non, dans un cycle très bas, c'est comme ça qu'on va promouvoir la croissance.

Vous avez pas parlé de Stiglitz, Krugman, etc., je vais aussi vous mentionner une citation récente d'un autre économiste que je suis sûr que vous connaissez très bien, Olivier Blanchard, l'économiste en chef du FMI jusqu'à très récemment et qui a écrit, dans les derniers mois, un nouveau papier qui est assez intéressant. Et une des choses qu'il mentionnait — et, il me semble, très justement — c'est que — ici, je fais une traduction simultanée dans ma tête, là — à force de prétendre que l'économie va mal, là on risque vraiment que le pire nous arrive. Donc, ça, c'est une petite mise en garde parce que votre formation politique avec le deuxième groupe d'opposition ne font que soulever le fait que l'économie va très mal. Alors, ça risque de devenir ce qu'on appelle en bon latin «self-fulfilling prophecy». Donc, il faut faire un peu attention à ces propos, à mon avis, trop pessimistes. Voilà.

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Pontiac.

M. Fortin (Pontiac) : Oui. Merci, M. le Président. Un dernier bloc. Il me reste environ huit minutes, j'imagine?

Le Président (M. Bernier) : Environ huit minutes, oui. Huit minutes.

M. Fortin (Pontiac) : Très bien. C'est toujours plaisant de suivre le député de Sanguinet. Puisqu'il nous a amenés dans l'hypothétique en parlant de dollar québécois et de référendum, je vais rester dans l'hypothétique, M. le Président, et vous parler de ce qui se passerait dans la situation budgétaire actuelle, demander au ministre, qui connaît bien la situation budgétaire à laquelle il faisait face quand il a écrit le budget cette année, et lui parler d'un parti politique hypothétique qui... Disons que, dans ce parti politique là, il y aurait un porte-parole à la stratégie numérique qui nous dirait après le dépôt du budget du ministre des Finances— pour utiliser ses mots — que 12 millions, ce n'est pas assez pour une année 1 d'un plan pour une stratégie numérique. Donc, s'il nous dit que ce n'est pas assez, j'en comprends qu'un tel porte-parole voudrait voir un investissement supplémentaire. Si tel parti politique avait un porte-parole aux affaires municipales qui dirait : «Vous comprendrez que notre parti va voter contre ce budget-là, car je suis d'autant plus déçu pour les villes qui ont eu à passer à la caisse l'an passé — souvenez-vous du 300 millions — qui, depuis deux ans, ont donc des pressions à la hausse sur leurs taxes municipales», donc j'en comprends qu'un porte-parole aux affaires municipales d'un tel parti hypothétique voudrait augmenter le budget des Affaires municipales.

Un porte-parole à l'éducation qui nous parlerait très négativement de ce qu'il perçoit comme étant des coupes de 600 millions dans le budget de l'Éducation... Et donc, si on dénonce en politique, habituellement c'est parce qu'on n'est pas d'accord, M. le Président. Donc, j'en conclus qu'il y aurait une augmentation du budget de 600 millions selon le porte-parole en éducation d'un tel parti.

Un parti avec un porte-parole en matière de santé qui parlerait du coût de système de 4 % en santé — et donc, imaginez, là, on est à 2,4 % — qui voudrait 4 % en santé, donc qui augmenterait les dépenses en santé, qui nous dirait aussi que, pour les soins à domicile, 60 millions, ce n'est même pas proche d'être assez, qu'on est en deçà des besoins, pour utiliser les mots de cet hypothétique porte-parole à la santé, donc il voudrait un investissement supérieur là-dedans, et qui nous dirait, encore une fois, que 1,8 million pour la première année d'un programme pour les gicleurs dans les résidences, ce n'est pas proche d'être assez...

• (17 h 40) •

Dans ce parti hypothétique que vous aurez reconnu comme étant la deuxième opposition maintenant, il y a également le porte-parole aux finances qui nous dit, depuis quelque temps maintenant, qui nous dit qu'il aurait, lui, dépensé 1,7 milliard de dollars pour alléger le fardeau fiscal, qu'il aurait un plan de relance économique de 5 milliards de dollars sur cinq ans, qu'il aurait d'autres dépenses parce qu'il dénonce que, depuis 2010, M. le Président, le carburant... les contribuables québécois paient 200 millions de plus par année en taxes sur le carburant, et ça, malgré la réduction que le ministre a donnée à la région de l'Outaouais l'an dernier, et qui nous dit que l'impôt foncier scolaire a augmenté de 500 millions au cours des dernières années. Donc, quand on dénonce, c'est parce qu'on n'est pas d'accord puis c'est parce qu'on ferait quelque chose de différent.

Donc, si je résume, M. le Président, et que je prends un parti où ils veulent mettre plus d'argent dans la stratégie numérique, qu'ils veulent redonner aux municipalités, qu'ils veulent un investissement supérieur de 600 millions en éducation, qu'ils veulent un coût de système de 4 % en santé, qui dénoncent, qui dénoncent des dépenses faites par les contribuables et, donc, qui dénoncent les augmentations de taxes scolaires, de taxes municipales, entre autres... Et, si on met toutes ces mesures-là dans un budget, dans le cadre financier dans lequel vous opériez, M. le ministre, est-ce que c'est possible d'arriver à un budget équilibré? Parce que le même parti nous dit que c'est un must d'arriver à l'équilibre budgétaire, est-ce que c'est possible? Est-ce que vivre dans un monde théorique... Est-ce que ce parti théorique vit dans un monde théorique, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, la parole est à vous.

M. Leitão : Oui. Je pense que c'est vraiment un monde théorique parce que, dans la vraie vie, ici, sur la planète Terre, un tel dénouement, c'est tout à fait impossible. Le premier effet d'une accélération des dépenses de cette nature-là serait un trou budgétaire considérable. Donc, on se retrouverait en déficit très rapidement, de l'ordre de 2 milliards, 3 milliards de dollars — ça dépend où ils voudraient tracer la ligne — et donc on reviendrait là où on était quand nous sommes arrivés, on reviendrait à la situation de 2013-2014, où il y avait tout d'un coup un déficit de presque 3 milliards de dollars.

Et, si le déficit était des méthodes ou des moyens si extraordinaires que ça pour stimuler l'économie, bon, dans ce cas-là, l'année 2013 aurait dû être une très bonne année parce qu'on avait un déficit cette année-là. Eh bien, non, ce n'est pas ça qui est arrivé, l'année 2013 était une année qui était aussi particulièrement faible.

Donc, le premier résultat d'une telle accélération des dépenses, surtout venant d'un parti qui se targue d'être le parti qui allait avoir le courage de mettre la maison en ordre, bon, un déficit... Et puis je présume qu'ils financeraient ce déficit-là en allant piger dans le Fonds des générations, comme ils ont déjà souligné qu'ils le feraient. Bon, écoutez, si on va chercher 2 milliards de dollars dans le Fonds des générations à... quelque autre événement qui puisse se passer, c'est à peu près, disons, 170 millions, 180 millions de dollars en revenus d'intérêt par année, chaque année, qu'on ne va pas obtenir. Donc, oui, on va piger 2 milliards pour une année seulement, peut-être. Et, en faisant ça, on va se priver de 180 millions à 200 millions par année pour toujours. C'est un méchant deal, comme on dit.

Et en plus il y aurait, bien sûr, toute la difficulté et les critiques qui viendraient de la part des marchés financiers s'ils voyaient que le seul outil important que nous avons... ou le plus important que nous avons au Québec pour le contrôle de la dette serait, comme ça, pigé allègrement.

Et j'aimerais revenir sur une chose qui a été mentionnée dans cette commission, M. le Président, précédemment, et là je vais faire référence au député de Rousseau, une chose qu'il a très bien faite quand il occupait cette place, c'est que, justement en 2013-2014, puisqu'il y avait un déficit, une des choses qu'il a faites, c'était de réserver 500 millions de la taxe sur les boissons alcooliques, donc, pour réinjecter ces fonds-là dans le Fonds des générations, pour compenser une partie de ce déficit-là. Donc, ces choses, évidemment, prouvent que nos collègues de l'opposition officielle, eux aussi, considèrent que le Fonds des générations est quelque chose de très important et qu'il faut maintenir. Et d'ailleurs ils l'ont fait, ils l'ont maintenu.

Mais, malheureusement, on doit constater que la deuxième opposition, elle, ne semble pas du tout intéressée ou ne comprend pas vraiment l'utilité du Fonds des générations. Donc, il va falloir qu'on ait cette discussion-là avec eux dans les semaines et les mois à venir, M. le Président.

Le Président (M. Bernier) : Donc, merci. Je vais me réserver la minute qu'il reste pour remercier les gens qui nous ont permis de procéder à cette activité qui est très importante. Je pense que, dans le cadre de la Commission des finances publiques, l'analyse et l'étude du budget, à chaque année, apporte — on l'espère, en tout cas — le plus d'éclairage possible à la population qui nous écoute. Et les échanges entre parlementaires en sont, bien sûr, le but premier, donc merci aux parlementaires qui ont participé à cette activité.

Je me permets de les nommer : bien sûr, M. le ministre des Finances, le porte-parole du premier groupe d'opposition, M. le député de Rousseau, M. le député de Sanguinet, porte-parole du deuxième groupe d'opposition, M. le député de... de Granby, excusez, M. le député de Granby. Après 10 heures, on en oublie un peu. Et je veux remercier également M. le député de Pontiac, adjoint parlementaire au ministre des Finances, M. le député de LaFontaine, M. le député de Sainte-Rose, M. le député de Portneuf ainsi que Mme la députée de Chauveau — merci, Mme la députée — M. le député de Laval-des-Rapides, qui a également participé à ces travaux.

Je veux remercier, bien sûr, les recherchistes qui ont participé à ces travaux. Merci de votre travail. Remercier de la patience et de la présence de tous les personnels du ministère des Finances. Je ne sais pas s'il y a d'autres ministères que le ministère des Finances, mais merci beaucoup. À chaque fois que je sortais, je vous voyais en ligne pour aller chercher vos manteaux. Donc, vous êtes très patients. Vous êtes très patients, je vous remercie infiniment.

Je veux remercier également le personnel de l'Assemblée nationale qui nous accompagne, mon secrétaire, M. Mathew Lagacé, et le personnel de l'enregistrement, ainsi que les pages qui nous font l'honneur d'être là, dont notre collègue également qui est maître du temps. Donc, merci à tous d'avoir participé à cette importante activité parlementaire.

Je lève la séance, et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 47)

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