(Quinze heures cinq minutes)
La
Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande, comme à l'habitude, à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
n° 88, Loi sur le développement de l'industrie des boissons alcooliques
artisanales.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Lelièvre (Gaspé) est remplacé par M. Villeneuve
(Berthier) et M. Therrien (Sanguinet) est remplacé par Mme Hivon
(Joliette).
Auditions (suite)
La
Présidente (Mme Hivon) : Merci. Alors, pour ce qui est de
l'ordre du jour cet après-midi, nous allons entendre d'abord
l'Association des détaillants en alimentation du Québec, par la suite
Éduc'alcool, association des distilleurs canadiens, et nous allons terminer
avec les Vignerons indépendants du Québec.
Alors, je souhaite
la bienvenue à nos premiers invités, l'Association des détaillants en
alimentation du Québec. Pour les fins
d'enregistrement, je vais vous demander d'entrée de jeu, lorsque je vais vous
céder la parole, de bien vous identifier
ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour faire votre
présentation, et par la suite nous allons procéder à la période d'échange avec
l'ensemble des formations politiques. Alors, la parole est à vous.
Association des détaillants
en alimentation du Québec (ADA)
M. Blouin (Pierre-Alexandre) :
Bonjour. Pierre-Alexandre Blouin, vice-président, Affaires publiques, pour l'Association des détaillants en alimentation du
Québec. Je suis accompagné de Jasen Gaouette, propriétaire d'un marché IGA
à Granby, et Éric Courtemanche, de
L'intermarché Saint-Roch dans Saint-Roch, ici même à Québec. Salutations à M.
le ministre, chers membres députés de la commission. Merci beaucoup de
l'opportunité de pouvoir vous présenter nos observations sur le projet
de loi n° 88.
Fondée en
1955, notre association représente les détaillants propriétaires de toutes
tailles, tous types d'affiliation. Pour
vous résumer ça très simplement, c'est certain qu'une grande partie de nos
membres, comme les deux gens qui sont présents
ici, représentent des marchands affiliés, des gens qui ont des ententes de
distribution avec un des grands groupes de distribution alimentaire, c'est beaucoup des questions de famille,
dans le commerce alimentaire — Metro Dépatie, Tradition Gosselin, Dépanneur Forget — mais aussi des grands commerces indépendants
ou plus petits — le plus
gros, Pasquier, certains des plus petits, Fromagerie Hamel, etc. — différents
types de commerce qui se retrouvent dans vos différents comtés.
En matière de produits alcooliques, l'ADA
collabore étroitement avec toutes les associations du secteur : les distributeurs autorisés, la SAQ, la RACJ, les
ministères concernés. Nous travaillons notamment depuis plusieurs années
en collaboration avec l'Association des
microbrasseries pour le développement d'un réseau accrédité de vente de bière
de microbrasseries québécoises. On milite
aussi depuis plus d'une quinzaine d'années pour la vente directe des alcools
artisanaux, on se sent très près du but dans
ce cas-ci. Et on veut également pouvoir développer des alliances pour avoir
un réseau diversifié de points de vente,
puis, dans le cas des microbrasseries, on a pu démontrer que notre réseau peut
être très efficace.
Notre
objectif, en ce qui concerne la commercialisation des alcools, ne relève pas
tant de l'allègement réglementaire mais
bien plus du développement du commerce dans un cadre réglementaire efficace et
crédible. En ce sens, lorsque nous avons salué le dépôt du projet de loi n° 88
sur le développement de l'industrie des boissons artisanales, c'était parce que
nous considérions qu'il allait nous
permettre de poursuivre notre vision de développement pérenne de la catégorie
des alcools, le tout basé sur une offre variée et de qualité de produit
et l'amélioration de l'expérience client.
Depuis sa
publication, on a entendu toutes sortes de choses sur le projet de loi, il a
été décrié, on l'a qualifié de déréglementation,
on l'a qualifié de danger pour la santé publique. On croit qu'une meilleure
utilisation du réseau en place, notamment
celui de l'épicerie, pour développer la production artisanale québécoise, devra
évidemment s'accompagner de normes de
mise en marché, comme par exemple l'imposition de prix minimums, mais cela
relève des règlements qui suivront les modifications législatives, du moins
c'était notre impression. Il y a des prix minimums sur la bière et le vin
déjà vendus en épicerie et également en
restauration, nous ne voyons pas pourquoi cela ne se ferait pas pour les
nouveaux produits qui pourraient
entrer dans notre réseau. Non seulement nous ne nous y opposons pas, mais nous
le souhaitons.
Les
abus liés aux prix minimums relèvent bien souvent d'autorisations de la RACJ.
Cette situation doit cesser. Le seul
commerçant qui peut brader l'alcool sans restriction ou sans devoir en demander
la permission dans le marché, à
l'heure actuelle, c'est la SAQ, puisqu'elle fixe elle-même ses pratiques
commerciales. Il faut être drôlement déconnecté pour penser qu'un vigneron, qui cultive des vignes dans un climat pour
le moins rigoureux, du Québec, pourrait viser à brader son dur labeur à
des prix inférieurs de ceux des importateurs-embouteilleurs industriels.
• (15 h 10) •
Avec l'élargissement de la variété des produits
disponibles dans notre réseau, la perception de la qualité des produits du réseau épicerie risque, bien entendu,
d'être sensiblement améliorée. Cette attention positive devrait rayonner
sur l'ensemble de la catégorie, pas seulement les produits artisanaux.
Rappelons, en
guise d'exemple, que les bières artisanales représentent 8,2 % de la bière
consommée au Québec, ceci malgré
qu'elles aient la faveur populaire et surtout des conditions de fabrication
plutôt favorables. Si dans 15 ou
20 ans les vignobles arrivaient
à produire et embouteiller suffisamment pour atteindre les mêmes niveaux de
production que nos artisans de la
bière, nous serions très heureux mais surtout extrêmement surpris. Autrement dit, les attentes doivent demeurer raisonnables dans l'atteinte du projet
de loi n° 88.
Nulle part
dans le projet de loi n° 88 on ne permet à n'importe qui de vendre
n'importe quoi. Au contraire, le projet balise plusieurs pratiques réclamées depuis longtemps tant par
l'industrie que par les consommateurs. Vendre de l'alcool, au Québec, est un privilège, seuls les détenteurs de permis
de vente d'alcool en règle pourront vendre des produits artisans en vente directe. Nous croyons que le
catastrophisme lié à la vente d'alcool n'a plus sa place en 2016. Le réseau
alimentaire est complémentaire à
celui de la SAQ et peut, de par sa variété de commerces et l'offre combinée
d'aliments, offrir des conditions
différentes, voire plus avantageuses pour les producteurs artisans en manque de
possibilités d'être commercialisés. Il est
également démontré que la consommation d'alcool dans un contexte d'expérience
gastronomique est l'antithèse de celle de la consommation à but unique
d'enivrer. Le réseau épicerie est le seul réseau de détail à pouvoir véhiculer
ce message et offrir des achats combinés.
Le
gouvernement du Québec a clairement énoncé que le développement de la
production artisanale d'alcool était une
priorité, et nous l'en félicitons. Le réseau alimentaire vend déjà une vaste
gamme de bières, de cidres et de vins,
seulement industriels importés à l'heure actuelle, et il
est temps d'en faire profiter plus d'artisans d'ici. Encadrer adéquatement la
vente des alcools nous apparaît évident,
mais, franchement, qui peut encore croire qu'ils ne peuvent être vendus que par
l'entremise de la SAQ?
Le projet de
loi n° 88 est, selon nous, un important outil pour le
développement du commerce de l'alcool au Québec, mais ce n'est pas pour
autant une finalité. La loi doit s'accompagner d'interventions conséquentes de
l'État pour s'assurer de préserver le
cadre réglementaire efficace et crédible où règne une saine concurrence. Nous
pensons au premier chef à l'importance de faire respecter les prix
minimums, les dispositions des détenteurs de permis, notamment le 51 % alimentaire pour un détenteur de permis CAD épicerie,
les heures de vente d'alcool et, finalement, encadrer la publicité pour interdire l'usage de l'alcool comme produit
d'appel, si vous préférez, «loss
leader», qui amène un développement
négatif de la catégorie alcool au détriment
de la qualité. Bref, l'ADA souhaite élargir les opportunités pour développer
les ventes d'alcools québécois mais tout en misant sur la qualité et non
seulement le prix.
Je vais
vous épargner tout l'aspect de l'historique, qu'on a tenté de faire le plus
exhaustif possible, pour vous résumer ça
de façon très simple. La vente directe des produits artisanaux québécois
a été permise en 1996. Ensuite, on va permettre la vente dans les marchés publics sans majoration. Des municipalités vont décréter des marchés publics dans les épiceries. La pratique va être interdite, des détaillants
vont contester; on sortira la carotte pour les producteurs à la SAQ et le bâton
pour les épiciers. Puis, le dossier va tomber dans les limbes jusqu'à l'arrivée
du projet n° 395. On trouve totalement anormal,
finalement, que les produits artisans se soient retrouvés en
vente directe dans le réseau CSP, de la restauration, dans les années 90, pour être finalement apportés au réseau de l'épicerie pour
la première fois de façon crédible en 2015.
Dans les
différents points qu'on tient à souligner, évidemment, la présence des cépages
et millésimes, on n'a pas besoin d'en
faire une très grande explication, à peu près tous les groupes qui nous ont
précédés ont demandé la même chose.
Évidemment, le seul produit, actuellement, qui est vendu dans notre réseau sans
avoir la liste des ingrédients, c'est le
vin. Tous les autres produits, on est tenus légalement d'appliquer la liste des
ingrédients. Dans le cas d'un vin, évidemment,
l'utilisation d'un cépage est plutôt importante sur le résultat du produit
fini. De la même façon, on ne peut pas
développer une catégorie à l'aveugle, il faut qu'on puisse faire connaître à
nos clients les cépages particuliers qui donnent des vins avec des goûts particuliers, parce que ce n'est pas les mêmes
cépages que les Québécois sont habitués de boire en grande quantité. Dans des conditions similaires, on ne voit pas
comment la filière brassicole que l'on connaît aujourd'hui, aussi
foisonnante et diversifiée, aurait pu émerger.
Un autre
élément très important, où on a entendu différentes choses dans le cadre des
consultations jusqu'à ce jour, c'est
toute la question de la vente directe qui est enchâssée dans le projet
n° 88. Nous croyons qu'une petite immersion dans le monde des microbrasseurs
ne ferait pas de tort.
La vente
directe est le modèle obligatoire dans le monde de la bière et des
microbrasseurs. Ils ne s'en tirent pas plus
mal, bien qu'ils aient leurs propres défis. Le MAPAQ définit la vente directe
comme faisant intervenir tout au plus un intermédiaire entre
l'entreprise de production ou de transformation et la clientèle — il
faut lire ici, dans le fond, le détaillant. Un petit brasseur en démarrage peut
approcher des points de vente de son choix, à son rythme, et convenir d'ententes de gré à gré qui peuvent varier d'un
commerce à l'autre. Le nombre dépend de l'ambition, des capacités de
production, de distribution et surtout de l'attractivité des produits dans le
marché.
Tant les microbrasseurs que les détaillants ne
traiteront pas tous leurs partenaires
de la même façon, c'est bien normal
puisqu'il s'agit de gré à gré, et, bien entendu, il n'y a pas de possibilité
d'avoir un modèle «one size fits all». Les marges, les produits disponibles, les exclusivités, les promotions, le
positionnement, les dégustations, les PLV, tout de la relation d'affaires est au bon vouloir des deux
parties. Cela fait nécessairement des jaloux, mais cela fait aussi innover
et pousse les détaillants tant que les microbrasseurs à tenter de se
différencier.
Le
brasseur est responsable de la conformité de ses produits, de la distribution
de ceux-ci mais aussi du contrôle, il
a beaucoup plus de contrôle sur ses marges et sur ses coûts. Il peut également
diriger ses inventaires là où il le souhaite, puisqu'il n'y a pas d'intermédiaire entre lui et le point de vente.
Certains microbrasseurs ont décidé de se regrouper en coopératives de
distribution pour amortir les coûts de représentation... Oui?
La Présidente (Mme
Hivon) : ...conclure.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Oui, je conclus tout de suite. Donc, ils
ont décidé d'avoir un modèle de distribution coopératif, et nous croyons que ce serait une bonne idée pour d'autres
secteurs d'activité. En comparaison, bien, il y a la distribution SAQ
alimentation qu'on étoffe de façon très, très, très claire.
Un autre élément que
l'on souhaite avoir, c'est la bière en fût pour emporter, également qui est
assez bien expliqué. On souhaite revenir sur
les produits permis en épicerie, l'intégrité et la qualité, malheureusement on
manque de temps pour en faire
l'explication, mais tout ça pour dire qu'il y a de nombreux détaillants, comme
les deux détaillants qui sont
présents ici, qui souhaitent une offre combinée alimentaire puis qui souhaitent
pouvoir offrir davantage à leurs clients
pour répondre à leurs besoins. Dès demain matin, les détaillants sont prêts à
adapter leur offre et le concept de leurs magasins pour faire une place toute particulière aux artisans d'ici.
N'hésitez pas à leur poser des questions, ils sont venus ici pour ça.
Merci.
La
Présidente (Mme Hivon) : Je vous remercie, M. Blouin.
Alors, nous allons débuter la période d'échange avec une période d'une
quinzaine de minutes pour la partie ministérielle. Donc, M. le ministre, la
parole est à vous.
M.
Leitão : Merci, Mme la Présidente. Alors, messieurs, bonjour. Merci
d'être venus et de partager avec nous votre mémoire et vos
préoccupations.
Peut-être
avant de commencer, juste pour qu'on puisse se situer, nous avons eu hier une
autre association qui était le Conseil canadien du commerce de détail.
Pouvez-vous nous situer, vous, par rapport à cette autre association?
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, en fait, c'est très simple, nous
sommes des détaillants uniquement. Nous représentons des propriétaires de magasin qui sont souvent affiliés à
une enseigne. Donc, dans le cas de Jasen, il est affilié, il a un contrat de distribution avec IGA, donc il
a le droit de porter la bannière IGA; l'intérêt corporatif de Sobeys Québec
est représenté par le Conseil canadien du commerce de détail. Donc, on est deux
maillons, si on veut, aussi différents peut-être que la production et la
transformation.
M.
Leitão : O.K. Très bien, merci. Vous avez aussi mentionné un peu
brièvement... — en
passant, je comprends que le temps
presse un peu — vous
avez mentionné la règle du 51 %. Pourriez-vous peut-être, pour le bénéfice
de tout le monde, élaborer un peu là-dessus?
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Oui. En fait, c'est que la principale obligation
d'un détenteur de permis épicerie, c'est
de pouvoir démontrer, lorsqu'il demande son permis, d'avoir... il doit
démontrer qu'il tient dans son commerce au moins 51 % de denrées alimentaires. C'est ce qui explique que
certains commerces de très grandes bannières connues, étrangères, qui font la demande d'avoir un permis
d'alcool aujourd'hui n'en ont toujours pas, parce qu'ils ne respectent pas cette disposition-là. On est prêts à vivre
avec des compétiteurs dans notre secteur d'activité, mais évidemment il faut
qu'ils jouent dans les mêmes règles que
nous. Il a été décidé qu'au Québec on n'aurait pas de «liquor store» en plus de
la SAQ, donc que ce seraient les commerçants
alimentaires qui pourraient avoir des permis de vente d'alcool. On croit
que cette prémisse-là est très bonne. On a quand même 8 000 points de
vente privés, donc on n'est pas en pénurie de points
de vente, mais il reste que, dans le marché, il y a un certain laxisme sur
l'application de cette disposition-là une fois que les permis sont délivrés. Pour délivrer le permis, on est très
serré sur les mesures, mais disons qu'on valide moins dans le temps à
savoir si les commerces sont toujours en respect de la disposition principale
de leurs permis.
• (15 h 20) •
M.
Leitão : Très bien, merci. Je vous ai bien entendus aussi sur la
question du cépage et du millésime. Et, comme vous avez suivi nos audiences depuis le début, donc, vous n'êtes pas les
premiers à le mentionner, et nous aussi, on a déjà mentionné que c'est
quelque chose qu'on est prêts à regarder. Donc, ça, on est sur la même longueur
d'onde.
Peut-être
une dernière question avant de passer la parole à mes collègues. Très bien.
Donc, avec le p.l. n° 88, on va
faciliter la distribution des produits de terroir dans le réseau des
détaillants, là, les 8 000 détaillants. Comment allez-vous... Qu'est-ce que vous allez apporter pour faciliter
la mise en marché des produits québécois? Nos amis de la SAQ nous ont dit qu'il y a toute une série de stratégies et de
mesures que la SAQ peut faire pour mettre en évidence les produits du terroir,
très bien. Vous, dans votre cas, comment vous pensez aborder ce sujet-là?
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Je céderais la parole à mes collègues, qui
sont dans les deux cas des commerçants spécialisés
en microbrasseries, donc ils pourront peut-être expliquer ce qu'ils entrevoient
pour la suite avec davantage de produits.
M.
Courtemanche Baril (Éric) : Bien, pour la mise en marché, c'est sûr
que chacun des détaillants fonctionne à sa manière, à sa façon, mais
rapidement le client, de plus en plus, nous demande cette diversité-là, que ce
soit au niveau des
microbrasseries, au niveau des fromages. L'ensemble des produits québécois, on
a une demande croissante chez nos
clients, alors on a un devoir, nous, comme commerçants, si on veut une
rentabilité, bien entendu, de leur offrir ce produit-là, sinon c'est le concurrent qui va leur offrir, et nous, on ne
sera plus là. Alors, notre volonté de survie est très forte à ce
niveau-là.
Et,
depuis les 20 dernières années, vous avez vu, vous allez dans les
épiceries comme tout le monde, vous voyez que l'échantillonnage des microbrasseries est là, l'offre est là. De
plus en plus, il y a des marchands qui ont même des employés spécialisés, c'est le cas chez nous, je
pense que c'est le cas chez vous aussi, en tout cas qui ont des employés
spécialisés, capables de conseiller le
client. On va faire la même chose au niveau des vins québécois. On le fait déjà
un peu au niveau des cidres, ce qu'on a.
Alors,
c'est sûr qu'on va faire la mise en marché pour mettre en valeur. C'est ce qui
va nous différencier les uns des
autres, c'est ce qui va nous permettre de répondre aux besoins de la clientèle.
Alors, c'est notre devoir, en tant que marchands
qui veulent une bonne rentabilité puis bien répondre à l'expérience client, son
client chez eux, de lui offrir le produit
puis de le mettre en valeur. On ne le cachera pas dans le «back-store», le vin
québécois, il va être en première place dans les vins d'ici, parce qu'on
est fiers de nos produits, entre autres.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Un petit ajout, si vous me permettez. Dans
le passé, les détaillants sont même allés
jusqu'à contrevenir à la réglementation pour pouvoir les mettre de l'avant; je
ne vois pas pourquoi, quand on va leur permettre
de le faire, ils cacheraient les produits. Donc, je pense que c'est évident
que, pour nous, ce que vous voyez pour les microbrasseries, c'est au
moins équivalent, ce qu'on peut faire pour les vins québécois, cidres, etc.
La Présidente (Mme
Hivon) : M. le député...
M.
Fortin (Pontiac) : Merci. Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs,
de votre présence, de votre mémoire aujourd'hui.
Il
y a quelques-unes des propositions que vous faites dans votre mémoire qui nous
sont venues à quelques reprises, entre
autres la question des cépages et des millésimes et la question de permettre
aux producteurs artisans de se regrouper, disons, pour faire la distribution de leurs produits. Il y a des gens
des associations de producteurs, que ce soit la bière ou le vin, qui nous ont dit que peut-être ils faisaient
déjà... ou peut-être ils utilisaient déjà des services d'un tiers pour le
faire, mais on ne les a pas
questionnés trop en ce sens-là pour s'assurer qu'ils ne s'incriminent pas,
disons. Mais vous, vous êtes en
mesure de le voir plus directement, comme détaillants. Est-ce que c'est quelque
chose que vous voyez à répétition ou
c'est quelque chose qui se produit simplement dans des cas ici et là? J'essaie
juste de comprendre l'ampleur du problème. Ce qu'eux nous disaient, c'est que, tu sais, disons qu'on est producteur
en Estrie puis qu'on a un détaillant en Mauricie qui veut avoir notre produit, bien c'est pas mal certain qu'on va
utiliser un tiers pour l'envoyer, parce qu'on n'envoie pas des grandes
quantités. Donc, qu'est-ce que vous voyez sur le terrain à ce niveau-là?
M. Gaouette (Jasen) : Bien, ce qu'on peut voir sur le terrain, c'est que, oui,
effectivement, il y a des personnes qui peuvent passer par des tiers. Il
y a aussi d'autres qui vont passer par des systèmes de coopérative, qui
passent, justement, dans le cadre légal.
Rendu là, il y a beaucoup de produits, quand on parle de... il y a des produits
qu'on ne peut pas vendre en magasin,
donc, rendu là, je ne peux pas répondre forcément à cette question-là, à moins
que P.-A. voudrait en rajouter.
M.
Courtemanche Baril (Éric) : C'est sûr que, pour les microbrasseries,
on le voit, qu'il y a des rassemblements, surtout des microbrasseries de région. Il faut permettre ça aussi aux
fournisseurs et vignobles pour qu'ils puissent avoir accès au marché,
que quelqu'un dans l'Estrie puisse vendre aussi au Saguenay, etc. Alors,
souvent, pour eux, être eux-mêmes
transporteurs, je pense que ce serait... ils ne le feront pas, alors il faut
permettre les deux, qu'ils puissent vendre direct et puis qu'ils
puissent vendre par une coop ou pour une association qui aurait un permis
délivré, comme tel.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : C'est sûr qu'il ne fait pas oublier non
plus que vendre de l'alcool, produire de l'alcool, au Québec, c'est un privilège, il y a tout en ensemble de
règles à respecter. Ça me ramènerait un petit peu au 51 %. Si on se fixe des règles puis que 90 % des
gens les respectent, à un moment donné, il faut voir jusqu'où on est prêt à
être permissif. Je pense qu'il a été mention, à un moment donné, de
vente par courrier. Je pense qu'on dépasse un peu la disposition d'être responsable
de ta distribution. Puis en plus, quand on parle ensuite du contrôle du produit
dans sa chaîne, je pense qu'on dépasse. Mais il y a sûrement une façon
de trouver un entre-deux qui serait valable.
M. Gravel
(Florent) : Et une chose est sûre, c'est que nos détaillants veulent
que la vente directe entre le fabricant puis le détaillant continue, on ne veut
pas d'intermédiaire entre les deux.
M.
Fortin (Pontiac) : O.K. Très bien. J'ai un autre point sur lequel vous
avez passé peut-être un petit peu vite, là, par manque de temps, dans votre présentation initiale, c'est la question
de pouvoir vendre de la bière en fût. C'est quelque chose qu'on n'avait pas nécessairement entendu,
donc je veux juste essayer de bien comprendre qu'est-ce que vous cherchez
par une telle proposition. Qu'est-ce que ça
amène de différent à votre commerce? Et comment vous voyez ça concrètement en
magasin, là? Est-ce que ça prend quelqu'un? Quel type de format on peut vendre?
À quoi vous pensez quand vous proposez quelque chose comme ça?
M. Gaouette (Jasen) : Oui, bien, dans le fond, ce qu'on
pense, pour ce qui est de la vente en fût en magasin, on va se fier un peu au modèle d'affaires qui est
fait soit un peu partout au Canada ou aux États-Unis, dans certains États
très près, exemple le Vermont, où est-ce que
tu vas avoir une personne dédiée avec des produits de fût, produits de microbrasserie, que ça peut être de
microbrasseries de la région, de l'extérieur, qui va amener un produit
généralement qu'ils ne
retrouvent pas en bouteille ou qu'ils n'ont pas la capacité de faire de la
bouteille vu leur grosseur d'échelle.
Ça
peut nous permettre d'avoir un contact direct avec le client aussi, vu que
c'est sûr que ce ne sera pas des fûts en vrac où est-ce que le monde
vont venir se servir, là, c'est sûr que ce n'est pas ça qu'on demande; d'avoir vraiment quelqu'un de dédié à la tâche qui
va le faire, qui va être capable d'informer le client par rapport au type
de produit.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) :
C'est un concept qui est très développé,
comme on le dit, aux États-Unis. Ce n'est plus juste des commerces spécialisés,
là, les grandes chaînes de supermarché, Kroger, Whole Foods, sont rendues
là-dedans, les stations-services. Peut-être
qu'il faut voir si ça peut être intéressant. C'est sûr qu'on ne vous parle pas
du Pérou, là, ce n'est pas un modèle
qui va révolutionner le secteur, c'est une offre additionnelle parce que le
client recherche ce genre de produit
là aujourd'hui. Puis on ne s'oppose pas, d'aucune façon, à ce que les
broue-pubs aient la possibilité de vendre pour emporter, mais on se
dit : S'ils peuvent le faire, pourquoi on ne pourrait pas le faire?
M.
Leitão : Peut-être juste une précision, je veux m'assurer que j'ai
bien entendu. Donc, vous, vous êtes en faveur de la vente directe,
directe, là, pas d'intermédiaire?
M. Gravel
(Florent) : Effectivement.
M. Leitão :
Donc, du producteur chez vous sans intermédiaire.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Comme le cas dans la bière, puisque les
permis l'obligent. Mais ce qu'on dit, c'est que, dans les autres filières, on
croit que ça devrait être calqué sur le modèle qui est développé avec succès
dans la microbrasserie.
M.
Gravel (Florent) : Puis ça ne devrait pas être modifié. Le détaillant
veut, encore aujourd'hui, faire affaire directement avec le brasseur.
M. Leitão :
O.K. Ça va.
La Présidente (Mme
Hivon) : Ça va? Oui, M. le député.
M. Girard :
Je voudrais revenir sur le prix minimum. On voit que, pour vous, ce n'est pas
vraiment un problème, au niveau du prix
minimum, autant de la bière que de l'alcool. Plusieurs, soit les
microbrasseries ou encore les
vignobles du Québec, nous ont mentionné qu'en raison de la qualité puis des
coûts de production, pour eux aussi, ce n'est vraiment pas une problématique, le coût minimum, le prix minimum,
parce qu'ils ne peuvent pas vendre à des prix aussi bas que le prix
minimum en raison de la qualité et de ce qu'ils ont à offrir. Donc, pour vous,
est-ce que le prix minimum, c'est un inconvénient...
• (15 h 30) •
M.
Gravel (Florent) : Bien, nous autres, c'est important d'avoir un prix
minimum en tout temps. On l'a dans la bière. D'ailleurs, vous avez vu la
publicité de bière, dans différentes circulaires, où on annonce toujours la
bière au prix minimum. Nous, on a fait des
demandes souvent, là, le prix de la bière ne devrait pas être affiché en
circulaire. Ça, c'est des demandes
qu'on a faites, on ne l'a jamais eu. Le lait n'est pas affiché, le pain n'est
pas affiché, on ne comprend pas pourquoi que la bière...
D'ailleurs,
on ne comprend pas non plus qu'une société d'État comme Loto-Québec va offrir...
On l'a vu durant le temps des fêtes.
Avec une entreprise, là, on offrait deux caisses de bières à un bon prix puis
on donnait un Célébration gratuitement. Est-ce que la RACJ met ses
culottes là-dedans? Je pense que non.
On
en a parlé hier, on va donner 25 $ de gratuité, si vous achetez deux
caisses de bière au prix minimum, pour acheter
des chips puis d'autres «goodies»? Est-ce que c'est correct? Si j'achète une
commande de 100 $, est-ce que je peux avoir une caisse de bière
gratuite? Non. Pourquoi l'inverse, c'est correct?
Moi,
je pense que vous devez regardez avec la RACJ pour ce genre de... parce que,
là, l'industrie rit de la RACJ, présentement, là. On offre toutes sortes
de promotions qui sont complètement ridicules, qui amènent... Je n'ai pas de Célébration gratuit si je n'achète pas deux
caisses de bière. Est-ce que c'est normal, dans notre société, qu'on se serve
de l'alcool pour faire des promotions croisées comme ça? Je pense que non.
Puis on pense que la
publicité en circulaire... Parce que ce n'est pas... Quand une circulaire sort,
c'est tous les détaillants qui sont pris
avec la circulaire, qui est à travers la province de Québec. Est-ce que tous
les détaillants ont besoin de cette
publicité-là? Non. Quand on sait que, le prix minimum de la bière, un
détaillant va perdre jusqu'à 8 $ la caisse, là, est-ce que c'est
correct pour certains dépanneurs? Non.
Ça fait qu'il
faut qu'on regarde comment on veut faire l'alcool, ça fait que la RACJ, ça va
être quelque chose à faire.
Loto-Québec qui fait des promotions croisées comme ça, bien je pense que vous
avez à regarder avec votre société d'État
si c'est normal de faire une telle promotion. Ça fait que je pense que, si à
l'inverse, comme je l'ai dit tantôt, on n'a pas le droit de le faire, de donner de la bière, bien
je pense qu'à l'inverse... On a vu la SAQ le faire pendant une couple d'années,
ils donnaient de la gratuité. Aujourd'hui, ils ne le font plus. Moi, je pense
qu'il faut vraiment regarder.
Ça
fait que, demain matin, s'il n'y a pas de prix minimum sur les vins artisanaux,
est-ce que ça va être correct, avec
un jambon, de donner une bouteille de vin de telle compagnie? Je pense que non.
Il faut protéger le marché. Il y a de la
compétition, il y a des gens qui font toutes sortes de promotions, puis je
pense qu'il faut protéger l'industrie. Puis le prix minimum est
important.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Mais vous avez raison, je ne crois pas
qu'une petite production va vouloir brader, mais il y a toujours deux interlocuteurs dans la transaction. De l'autre
côté, si le détaillant a envie de le faire... Je dirais, en général, ce n'est pas comme ça que ça se passe,
mais je pense qu'il ne faut pas éviter, dans la suite du processus... Comme
je vous dis, on n'est pas surpris de ne pas
le voir dans la loi, mais, dans la suite du processus, que ce soit dans les
règlements, etc., il va falloir adresser ces questions-là.
M. Gravel
(Florent) : Il ne faut pas que l'alcool soit une gratuité.
M.
Girard : Donc, la problématique proviendrait de certains détaillants
qui pourraient diminuer les prix pour faire des promotions, etc., sans
que ce soit vraiment le producteur qui en décide ainsi.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, ça peut venir des deux côtés, là.
Dans l'histoire, on en a eu des deux côtés. Mais je dirais que je serais surpris, comme on l'expliquait en
introduction, que quelqu'un qui cultive du raisin au Québec soit capable de faire un prix inférieur au prix
minimum d'un industriel, entre vous et moi, là, c'est peu probable. Mais
est-ce que c'est hypothétiquement possible? Oui.
M.
Gravel (Florent) : Mais il n'y a rien qui empêche un détaillant, pour
justement essayer de faire de la concurrence qui, à mon avis, est déloyale, d'offrir avec son jambon une pinte de
vin. Bien, je pense qu'il ne faut pas qu'on arrive jusque-là. Ça fait
qu'il faut protéger le marché.
La Présidente (Mme
Hivon) : M. le député de Sainte-Rose.
M.
Habel : Oui, merci, Mme la Présidente. Dans la page 15 de votre
mémoire, vous parlez du pourcentage, de taux d'alcoolémie des produits. Vous proposez qu'actuellement qui est
16 % il passe à 20 %. On a reçu la Santé publique qui nous a
expliqué qu'eux préféraient avoir le pourcentage de 16 %. J'aimerais avoir
votre point de vue sur le sujet.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : En fait, c'est très simple, actuellement,
sous les permis industriels, tant les vins que les cidres ont le droit de nous vendre des produits jusqu'à
20 %. Donc, ce que vous êtes en train de me dire, c'est qu'on va permettre à des industriels de nous vendre des
produits jusqu'à 20 %, mais qu'on va empêcher les artisans de nous en
faire, des produits équivalents. Alcool pour alcool, je ne vois pas de
différence en termes de problématique.
Au-delà
de ça, je pense qu'un des éléments que l'INSPQ est allé dire de très
intéressant, c'est que c'est beaucoup plus sur les alcools forts qu'il y a une problématique liée à la
consommation, le coût pour la même quantité d'alcool. Quand on vend une bière de microbrasserie à un jeune qui
commence à boire, je ne pense pas que c'est tout à fait le produit qu'il
va viser. Non seulement le goût va peut-être
être répulsif, mais en plus le prix risque d'être répulsif. Donc, je ne pense
pas que c'est les produits qu'ils vont viser pour faire de la consommation...
du «binge drinking», par exemple.
M.
Habel : Donc, vous n'avez aucune revendication à aller plus loin que
le 20 % qu'il y a actuellement au niveau du détail, comme par
exemple on pourrait recevoir l'association...
La Présidente (Mme
Hivon) : Une réponse rapide, car...
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : On a compris que le gouvernement ne
voulait pas aller au-delà. On aurait voulu pouvoir vendre n'importe quel produit artisanal, mais on comprend que le
gouvernement n'a pas voulu aller plus loin.
La
Présidente (Mme Hivon) : Merci. Alors, on va passer aux
échanges avec l'opposition officielle. Alors, la parole est au député de
Berthier.
M.
Villeneuve : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour,
messieurs. Bravo pour votre mémoire, entre autres pour l'historique,
alors ça nous permet de bien y retrouver les moments charnières de l'histoire.
Question
technique. Tantôt, M. le ministre abordait la règle du 51 %
d'alimentation. Dans votre mémoire, vous dites que vous représentez 8 000 détaillants. Est-ce qu'ils
sont tous... Selon cette règle-là, si je comprends, si c'est 51 % et
plus, donc, on peut tenir des boissons alcooliques. C'est ça?
M. Blouin
(Pierre-Alexandre) : Lorsqu'ils demandent leurs permis d'alcool, ils
doivent respecter...
M. Villeneuve :
O.K. Donc, les 8 000 détaillants que vous représentez sont dans cette
situation-là?
M. Blouin (Pierre-Alexandre) : ...donc
un jour dans l'histoire ils l'ont tous respecté.
M.
Villeneuve : Pardon?
M. Blouin
(Pierre-Alexandre) : Un jour, ils l'ont tous respecté.
M. Villeneuve :
Oui. Ah! D'accord. O.K.
J'aimerais aborder le
transport. On sait que le projet de loi, actuellement, ne permet pas à un
épicier d'aller directement chez le
producteur de vin chercher son vin, le projet de loi prévoit que c'est le
producteur lui-même qui doit faire les livraisons. Alors, j'aimerais
vous entendre peut-être là-dessus.
M. Gaouette (Jasen) : Bien, dans le fond, on le fait déjà sans le vin mais avec, justement,
la microbrasserie. Puis de la façon
que moi, je peux voir ça, puis la relation que j'ai avec les microbrasseurs,
c'est que, je vais donner un exemple, j'ai
un producteur dans le coin de Dunham, je suis dans le secteur de Granby,
dans le coin de Dunham, puis ça m'arrive d'aller chercher des produits là-bas, justement parce que
c'est des produits qui sont limités, c'est des produits qui vont être en plus petite quantité, puis c'est des
produits que je sais que mon client va rechercher. En même temps, moi, ça me permet d'avoir un
contact direct avec la personne qui le produit, donc ça me sensibilise au
produit que je vais vendre, je sais exactement
qu'est-ce que j'ai à faire, puis ça me donne une bonne relation
d'affaires, justement, gré à gré entre le producteur puis le
détaillant. Ça fait que c'est de la façon que je peux voir ça, ça fait que je
ne vois pas pourquoi est-ce
qu'on pourrait l'empêcher.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) :
En fait, si on va plus loin, les agences, tous les détaillants qui sont permis
de gérer un commerce à la place de la SAQ, là où la SAQ ne veut pas
exploiter de commerce, tous les détaillants vont s'approvisionner eux-mêmes à la succursale la plus près, c'est la façon
de se distribuer. Donc, on peut tirer les liens qu'on veut. C'est obligatoire via la SAQ, c'est encore
une vente directe entre un détaillant et un fournisseur. Je n'y vois pas de
problème, mais, en tout cas, c'est à vous de décider s'il y en a un.
M.
Gravel (Florent) : Puis,
comme Jasen l'a bien expliqué tantôt, c'est la relation qui va se créer, parce que,
si on veut travailler les produits
locaux, c'est surtout pour ça, là, pour la proximité entre le produit puis le
consommateur. Ça fait que, si on veut
travailler vraiment la chaîne directe... Parce que,
dans les autres produits, on passe par la SAQ, mais, si on veut aller en livraison directe, bien on a
cette possibilité-là. Parce qu'il ne faudrait pas que du vin, mettons, qui parte de
l'Abitibi vienne à Montréal
pour retourner en Abitibi. Ça fait
que c'est pour ça qu'on parle d'une
vente directe, pour que justement, ce produit-là, on va non seulement
développer un attachement entre le détaillant puis le producteur... Ça fait
que, ça, on crée des liens d'affaires puis on peut vraiment, là, améliorer le
positionnement du produit en magasin.
M.
Villeneuve : Oui, je comprends les très bons arguments, mais présentement ce n'est pas ce qui est prévu dans le projet
de loi, là, donc... Mais vous militez
pour justement pouvoir transiger de cette façon-là, pour les
raisons que vous venez de donner,
c'est ça que je comprends. Parce que d'autres sont venus nous dire qu'il y a
déjà un système de distribution, on
devrait peut-être passer par la SAQ, étant donné qu'ils ont déjà une
expertise dans le domaine, ils ont déjà toutes les infrastructures et évidemment ils vont dans plusieurs points de vente,
alors que d'autres nous disent, un peu comme vous : Non, non, non, laissons les gens, s'ils veulent...
Je parle toujours au
niveau du vin, là, juste ne pas
mélanger les choses, là, c'est déjà
compliqué comme ça à savoir si c'est microbrasserie, artisanal ou pas, là.
Mais, au niveau du vin, là, alors donc... Mais ce que je comprends de votre part,
c'est que, de la façon dont le projet
de loi est rédigé actuellement, il ne répondrait pas à vos aspirations?
M.
Gravel (Florent) : Bien,
nous autres, il y a une affaire qui est sûre, c'est qu'on veut
s'assurer de la qualité. La SAQ, elle a les installations pour le faire.
M. Villeneuve :
Exact.
M.
Gravel (Florent) : Mais, la
SAQ, ce qu'Alain Brunet a dit aussi, c'est que nous sommes le réseau pour justement développer
cette catégorie-là, et il ne voit pas d'opposition à la vente directe.
Ça fait que c'est bien important, justement, de
pouvoir créer cette proximité-là, parce
que ces personnes-là n'ont pas une
capacité de production énorme encore. Quand ils auront une plus grande production, bien peut-être
qu'ils vont retourner à la SAQ, mais on a la possibilité ici aujourd'hui de regarder le développement futur de cette catégorie-là, de ce produit-là,
puis justement la vente directe, connexion directe entre
le détaillant puis le producteur est la solution idéale.
M.
Villeneuve : Vous
parliez tantôt que chaque détaillant a la possibilité de faire... étant donné
qu'il est propriétaire, il n'est pas
comme la SAQ, société d'État régie par des ententes internationales, donc, il
peut installer, s'il veut, une étagère et
dire «produits du Québec», ça, j'ai bien compris ça, et chaque détaillant,
donc, n'a a pas... Il pourrait y avoir, évidemment, de la part des
détaillants, une opération, là, concertée pour le faire. Ce n'est pas le cas,
c'est ce que je comprends, tout le
monde y va un peu selon ce qu'il juge le mieux de faire.
Ça
m'amène à vous poser la question, on en a discuté ici lors des auditions, à savoir
les produits... Et je reste dans le
vin, là. Alors, les produits du vin, au
niveau des cépages, donc, de bien
identifier, présentement ce n'est pas prévu que ce soit comme ça, obligatoire, et je pense
qu'à lire votre mémoire vous seriez tout
à fait d'accord que ce soit prévu. De
façon volontaire ou obligatoire?
• (15 h 40) •
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) :
Obligatoire, en fait. Puis, je vous dirais, il n'y a pas un producteur qui
va refuser de le faire. J'irais plus
loin : même les viniculteurs négociants, le vin industriel qu'on vend dans
nos magasins, souhaitent le faire
pour apporter plus de transparence puis apporter plus de confiance pour le
consommateur. Donc, il n'y a personne qui
y perd, là. Tu sais, si les viniculteurs négociants veulent aller jusqu'à
faire du monocépage, tant mieux, tant mieux pour le consommateur.
On ne
comprend pas, nous, en fait, pourquoi on se bute à ça, je veux dire, c'est de l'information pertinente sur la composition
des produits. Puis, pour la consommation, par la suite, pour la fidélisation du
client, comment est-ce qu'on peut
fidéliser un client qui ne sait même pas ce qu'il a bu dans la bouteille? Je
veux dire, je veux bien que la marque de commerce a une force, mais, si vous savez que vous aimez les pinots puis
que vous cherchez des pinots, dans la vie, parce que vous aimez ces
vins-là, vous n'allez pas chercher du cabernet sauvignon, ce n'est pas du tout
le produit que vous recherchez. Ça fait que ce n'est pas par l'étiquette qu'on
achète un produit, c'est par la composition de ce produit-là.
M.
Villeneuve : Donc,
s'assurer que le consommateur, finalement, lorsqu'il fait un achat, il sache qu'est-ce
qu'il achète, d'où ça provient. Et ça
permettrait évidemment aussi, au
niveau des... Si jamais
il y avait des sections Produits
du Québec, ça permettrait justement de
rassurer le consommateur à savoir ce qu'il consomme, et ça sera indiqué sur la
bouteille.
Moi, à moins que vous ayez des commentaires, je
n'ai pas d'autre question.
M. Gravel
(Florent) : Bien, c'est vrai, ce que vous dites. Puis d'ailleurs c'est
le seul produit dans nos magasins qu'il
n'y a pas beaucoup d'information dessus. Dans n'importe quoi qu'on va faire,
même dans nos mets cuisinés, on nous oblige
à... C'est quoi, le sel? C'est quoi, le sucre? C'est quoi, le ci? C'est quoi,
le ça? Il faut tout, tout, tout donner. Ça fait qu'on pense que c'est
normal que le consommateur soit mieux informé.
Le Président (M. Habel) : Merci, M.
le député de Berthier. Je cède la parole au député de Granby.
M.
Bonnardel :
Merci, M. le Président. Je veux juste revenir — messieurs, bonjour — sur la question de mon collègue, là, sur la vente directe, là. Vous
disiez tantôt : Moi, je peux aller chercher ma bière de microbrasserie
spécifiquement chez un microbrasseur
à Dunham, l'exemple que vous donniez tantôt. La loi, présentement, ne permet
pas à un vignoble d'utiliser un
transporteur, un tiers, puis d'aller le livrer chez vous. Est-ce que, ça, vous
y voyez un problème? Parce que, là, c'est sûr que le vignoble va vous
porter sa caisse ou il vous la livre, mais...
M. Blouin (Pierre-Alexandre) : En
fait...
M.
Bonnardel :
Alors donc, l'utilisation d'un tiers, est-ce que ça peut être un problème pour
vous? Parce que, là, c'est certain
que, pour nous, ce serait quand même... en tout cas la loi, selon moi, mérite
d'être amendée là-dessus, pour qu'on
soit capable d'avoir un tiers qui va livrer... Je ne sais pas, moi, vous êtes
au Saguenay, bien, le gars qui est à Dunham, ça va être difficile pour
lui, là.
M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien,
en fait, j'aurais une réponse en deux parties.
Premièrement,
combien de tiers? Ça peut avoir l'air niaiseux, mais, si on permet un tiers, il
peut y avoir combien de tiers entre les deux? Puis est-ce que c'est
encore de la vente directe? Première chose.
Deuxièmement,
quand on regarde l'évolution des microbrasseries, elles ont à peu près toutes
commencé comme broue-pubs, ensuite
elles sont devenues permis industriel, elles ont vendu un petit peu de
bouteilles autour, puis à un moment donné ils ont trouvé qu'ils
n'arrivaient plus à écouler leurs produits dans un rayon assez proche, ils se
sont acheté un camion, ce n'est pas si
compliqué dans l'opération. Puis, si ça se trouve, il y en a même qui étaient
dans la coopérative, sans la nommer,
de distribution, puis à un moment donné ils se sont dit : Bien, la
coopérative ne me permet pas assez de liberté de mouvement sur le
territoire, donc je vais moi-même avoir mon camion. Aujourd'hui, il y a des
dizaines d'entreprises de microbrasserie qui
ont leurs propres camions puis qui font la grandeur de la province. Puis je dis
«leurs camions», c'est «leurs» au pluriel, là, il y a plusieurs camions.
Donc, c'est sûr
que, dans un court délai de temps, les vignerons voient ça comme une grosse
problématique, mais, s'ils se mettent à avoir un réseau relativement
important, ils vont avoir besoin de capacité de livraison.
M.
Bonnardel : Ce qui
risque... À long terme, mais à court terme, là...
M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien,
assez...
M.
Bonnardel :
C'est sûr qu'on souhaite que cette loi amène les produits du terroir en grande
quantité. Puis ça, ça va être le
combat du «facing», qu'on appelle en anglais, là, chez vous, vous le savez
très, très bien, à savoir de quelle manière on va faire la promotion
versus ce que vous avez déjà en magasin comme bouteilles de vin.
Mais je vais
aller un petit peu plus sur... À la page 13, là, vous parlez... pas à la
page 13... vous parlez des bières en fût pour emporter. Là, j'ai
essayé de... j'ai lu au complet rapidement, là, non... Oui, rapidement, là,
vous parlez de problématique de «growler». Expliquez-moi un peu où vous avez vu
ça, cette façon de vendre de la bière en fût, là, que moi-même, le consommateur, je peux arriver, puis je choisis, les
trois, quatre bières qu'il y a sur le mur, puis je peux amener mon
«growler» ou je le prends chez vous puis je remplis...
M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Généralement, ça prend un intermédiaire qui va remplir pour
vous, là. Les lois vont varier d'un
État à l'autre, mais de façon générale vous pouvez arriver puis avoir de la
bière fraîche que vous faites remplir dans votre «growler», vous repartez à la
maison avec, donc... Puis, comme on l'expliquait tout à l'heure, comme Jasen a
essayé de l'expliquer, c'est souvent des bières qui sont en plus petits
volumes, des bières spéciales, des brassins
spéciaux, des recettes particulières qui ont été développées. Donc, par exemple, si on parlait de la microbrasserie à Dunham, bien c'est une microbrasserie qui va développer certains
produits pour le réseau restauration en fût puis qui va développer
d'autres produits pour le réseau de distribution au détail. Nous, on n'a pas
accès à ces produits-là qui vont uniquement en restauration, dans certains cas on aimerait ça
pouvoir les offrir à notre clientèle. Puis la clientèle va aller le chercher là où c'est disponible, puis ça
devient un autre facteur de différenciation, tant pour le point de vente que
pour la microbrasserie qui peut offrir le produit.
On
voit aussi... Aux États-Unis, ça dépasse la bière, là, il y en a qui vendent
du vin, il y en a qui vendent du kombucha. Il y a différents types de produits qui peuvent être
vendus en fût pour apporter à la maison, puis ça devient très intéressant comme avenue de développement. Actuellement, ce n'est pas permis au détail.
M.
Bonnardel :
Puis, dans vos demandes, un «growler» uniformisé, là, chaque microbrasserie
peut décider d'avoir... On en a vu deux,
hier, là, il peut y en avoir 10, 15, 20, ça risque d'être difficile pour vos
détaillants ou... Jusqu'à quel point, là, vous souhaitez que ce soit
uniformisé? Parce que la mise en marché va être différente pour chaque...
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) :
Bien, on est assez rassurés. Le mémoire était fini avant la présentation d'hier,
on l'a écoutée. Écoutez,
on est relativement satisfaits de ce qui a été présenté. Ils nous parlent de
deux formats qui pourraient varier, donc on ne risque pas de se
retrouver avec 700 formats différents sur le marché.
C'est
sûr qu'il y a toujours un risque que certains contenants ne reviennent
pas au site où ils ont été générés, il faut
y penser dans l'équation. Vous le savez, le verre, c'est une matière
problématique, il y en a qui trouvent qu'elle est encore plus problématique que d'autres. Il y en a
qui vont se retrouver dans le bac de recyclage, même si elle est à 5 $.
Donc, il faut y penser dans l'équation, donc.
M.
Bonnardel :
Dernière question, Mme la
Présidente. À la page 15, là, mon collègue vous a posé une question — je pense
que c'était le gouvernement — sur l'alcool entre le 16 % et le
20 %, là. Vous disiez donc que ceux qui ont des permis industriels
ont déjà la possibilité de vous vendre cet alcool, donc là on pourrait
restreindre nos cidres, là, qui sont digestifs, apéritifs, comme vous appelez.
Quelle
place ce genre d'alcool a en magasin dans vos «facings», je le dis en anglais, là,
mais dans votre mise en marché, là?
Est-ce qu'il a une place importante? Parce que je suis le plus grand promoteur
des produits québécois, puis ça, ça
m'intéresse dans une certaine mesure, mais présentement, dans vos marchés,
jusqu'à quel point ces produits sont invitants ou sont bons pour le... Y
a-tu un pourcentage important qui est vendu...
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, actuellement, il y en a peu, sauf
qu'il faut toujours voir le développement d'une catégorie à plus long terme. Je vous ramènerais à il y a quelques
années, on a redéfini la définition de la bière pour dire que finalement une bière ne pouvait plus
dépasser 12 % d'alcool. Ça, ça veut dire que toutes les bières qui se font
de style belge, là, qui dépassent facilement
les 12 % d'alcool, qui peuvent atteindre 15 %, 16 %, 17 %,
on n'a pas le droit d'en faire au Québec, parce qu'on a limité le
potentiel de développement de certains produits.
Quand
on parle de certaines productions, que ce soient les hydromels, les alcools de
petits fruits, c'est généralement des
produits au-delà de 15 %, 16 %, 17 %. Donc, avant de partir, ces
artisans-là qu'on veut inclure dans le processus de révision de la loi, c'est comme si on leur
disait : Bien, n'embarquez pas dans le bateau, là, vous autres,
l'épicerie, ce n'est pas pour vous.
On trouve ça malheureux, surtout qu'on pourrait vendre d'autres produits
industriels, puis peut-être qu'on va
les vendre dans cinq ans, dans 10 ans, je ne sais pas, peut-être l'année
prochaine. Ce n'est pas parce qu'un réseau n'est pas utilisé à l'heure
actuelle qu'il ne le sera pas dans quelques années parce que le marché va s'en
aller là.
M.
Bonnardel :
Une dernière... Non? Plus de temps?
Le Président (M. Habel) : Non, on n'a plus le temps. Merci beaucoup. Et, M.
le député de Granby, je ne vous tiendrai pas rigueur de m'avoir appelé
«Mme la Présidente». Je vous remercie...
M.
Bonnardel :
...je vous ai vu, M. le Président...
Le Président (M. Habel) : Je vous remercie pour votre présentation, je
remercie l'Association des détaillants en alimentation du Québec.
Je suspends quelques
instants.
(Suspension de la séance à
15 h 48)
(Reprise à 15 h 51)
Le
Président (M. Habel) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Je cède la
parole aux gens d'Éduc'alcool, qui auront un temps de 10 minutes
pour leur présentation. Je vous passe la parole.
Éduc'alcool
M. Sacy
(Hubert) : Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais remercier la commission
de nous avoir invités à faire valoir
le point de vue d'Éduc'alcool. Je veux signaler que nous
intervenons sur nos propres bases, à titre d'organisme de prévention et d'éducation,
et évidemment pas sur des bases commerciales.
Bien sûr,
il y a des intérêts financiers et économiques en jeu, c'est parfaitement légitime et c'est parfaitement normal. Et
ces enjeux ont cependant, jusqu'à il y a peu, pris pratiquement toute la place dans ce
débat, alors que la prévention et la santé publique en ont pris une pas
mal trop petite.
Heureusement, il y a des signes encourageants parce que,
depuis une semaine, on se sent un petit peu moins seuls, notamment
parce qu'on a constaté une certaine
écoute que vous aviez vis-à-vis des questions de santé publique notamment
lors de l'intervention de nos collègues de
l'Institut national de santé publique, dont les préoccupations rejoignent les
nôtres et, en toute honnêteté, dont nous pourrions signer 90 % des
propos qu'ils ont tenus devant vous hier.
Je vous signale
qu'Éduc'alcool n'est pas expert en législation, et on n'est pas non plus expert
en commercialisation. Notre
intervention est fondée sur les recherches scientifiques et sur les principes
de prévention. Nous ne sommes pas experts dans les moyens, notre contribution se fait au niveau des objectifs et
elle se fait au niveau des résultats que nous croyons que nous devrions
atteindre collectivement.
Je vous donne
trois énoncés fondamentaux. Vous savez, un politicien célèbre qui s'appelait
Réal Caouette avait coutume de
dire : «Mesdames et messieurs, avant de parler, j'aimerais dire quelque
chose», et j'ai presque le goût de dire la même chose. Avant de parler,
j'aurais trois choses à vous dire. Premièrement, Éduc'alcool est totalement
d'accord pour que les produits de nos
producteurs artisans soient vendus dans les épiceries et qu'ils soient
soutenus. Deuxièmement, il serait préférable qu'on leur facilite aussi l'accès
au réseau même de la SAQ, ce que d'aucuns ont qualifié de ligne nationale. Mais, dans l'un et l'autre des cas, et
c'est mon troisième point, cette démarche ne devrait pas être le prétexte
d'une déréglementation. Elle doit être
encadrée par des contrôles, des contenus et des prix comme ça doit être le cas
pour tous les produits alcooliques. Maintenant, il y a six raisons à
cela.
D'abord,
l'alcool n'est pas un produit banal, c'est un psychotrope. Chimiquement parlant, c'est une drogue. Ça n'empêche pas que c'est un produit convivial,
agréable qui, consommé avec modération et responsabilité, apporte des
bénéfices certains, mais sa
commercialisation doit être encadrée et contrôlée, et les recherches scientifiques, la littérature scientifique montrent que le meilleur moyen de
l'encadrer et de contrôler, c'est par une société d'État. C'est ce que dit l'Organisation
mondiale de la santé, c'est ce que
dit le conseil national sur la stratégie de l'alcool au Canada, c'est tout ce
que dit la littérature scientifique dans le domaine de la prévention.
Deuxièmement, il y a moyen de soutenir nos producteurs artisans tout
en leur facilitant l'accès à la SAQ. C'est le meilleur service à leur rendre et
à nous rendre à nous-mêmes. On l'a déjà
fait dans le passé, on peut continuer à le faire. De toute façon, toutes les autres provinces productrices le font,
et tous les pays producteurs du monde le font également.
Troisièmement,
il y a déjà du vin dans les épiceries, on devrait pouvoir faire la même chose
avec les producteurs artisans qu'on
le fait avec d'autres. Et il serait souhaitable d'adapter les règles en vigueur
à leur situation particulière, parce qu'épiceries
et SAQ ne sont pas mutuellement exclusifs. Si ce n'est pas possible de passer
par la SAQ pour aller en épicerie ou si ce n'est pas retenu, convenons
qu'il faudrait au moins deux contrôles majeurs.
Quand il n'y
a pas de contrôle efficace, l'alcool est banalisé, ça devient un produit comme
un autre. Son contenu n'est pas
assuré, son prix n'est pas encadré, et ça a des conséquences sur les jeunes,
sur les personnes les plus vulnérables, sur les personnes qui consomment
le plus et sur les personnes les plus dépendantes. Il a été démontré clairement
dans la littérature scientifique que des prix d'alcool plus contrôlés et
réglementés aident à réduire la consommation et les méfaits connexes, alors que des prix d'alcool réduits contribuent à
augmenter la consommation abusive et les méfaits connexes.
Le projet de
loi n° 88 ne semble pas prévoir, dans sa version actuelle — et je dis bien dans sa version actuelle,
telle que nous la lisons — des mécanismes de contrôle des contenus de
produit, et, pour nous, ce qui nous concerne plus particulièrement, le contenu d'alcool, le
pourcentage d'alcool, et toutes les dimensions qui ont trait aux questions de
santé.
Enfin, le
projet de loi n° 88 ne semble pas prévoir de prix minimum pour l'alcool,
ce qui ferait que les alcools dont la
vente serait libéralisée seraient moins contrôlés que la bière. À ce sujet, je
voudrais vous signaler que, même s'il y a en théorie un prix minimum de la bière au Québec, même si c'est le plus
bas au Canada, il est contourné systématiquement, quotidiennement et
régulièrement, et un peu partout dans les épiceries et chez les dépanneurs.
Bien sûr,
nous savons que les produits artisanaux coûtent plus cher que les autres à
produire, nous savons qu'il est
impossible pour un producteur d'aller en bas de ce que serait un prix minimum
raisonnable, mais ce ne sont pas les producteurs
qui sont en cause. Les producteurs ne sont nullement en cause, eux, ils se
désâment pour amener un produit de
qualité dans des contextes extrêmement difficiles, mais, sans prix minimum, il
n'y a rien qui empêcherait les détaillants de se servir de leurs produits comme produits d'appel. Et, comprenez
bien, le mot anglais pour produit d'appel est plus explicatif que le mot français, ça s'appelle «loss
leader». Et qu'est-ce que c'est qu'un «loss leader»? C'est un produit sur
lequel on est prêt à perdre de l'argent pour attirer les consommateurs et se
rattraper sur le restant des produits.
• (16 heures) •
Je répète
donc, les producteurs n'ont rien à voir là-dedans. Et ce qu'on dit, c'est que
peut-être qu'aujourd'hui c'est improbable,
mais nous sommes en train de discuter d'une loi, nous ne discutons pas d'un
règlement ponctuel. Et la loi doit prévoir, et la prévision, c'est
d'empêcher quelque chose que l'on ne veut pas.
La dernière
chose dont le Québec a besoin, c'est que l'on puisse étendre aux produits
artisanaux la jungle que nous voyons
aujourd'hui dans le domaine de la bière. Alors, nous recommandons de nous
assurer collectivement que le projet
de loi n° 88 tienne compte de ces fondements, c'est-à-dire qu'une société
d'État est le meilleur outil pour préserver la santé publique et qu'il serait préférable d'adapter les règles de
contrôle de la SAQ aux producteurs artisans. À ce sujet, je sais que M. Deltell pose des questions sur la Colombie-Britannique et l'Alberta, puis il me fera plaisir de lui donner quelques
renseignements là-dessus, s'il pose la question.
Deuxièmement, quand il est question de commercialisation de l'alcool, la prudence
élémentaire exige, dans l'intérêt de
la santé et de la prévention, qu'on instaure des contrôles sérieux sur les
contenus des produits, et particulièrement sur le pourcentage d'alcool et le respect des normes de santé, et je n'ai entendu personne
ici, depuis trois jours, dire qu'il était contre ça.
Enfin,
il faut un prix minimum sur les produits vendus aux consommateurs. Il faut
interdire son contournement par les détaillants, notamment par les
promotions croisées, pour éviter qu'ils ne servent de produits d'appel, qu'ils
ne banalisent l'alcool et qu'ils ne poussent
à la consommation excessive les jeunes, les gros consommateurs et les personnes
les plus vulnérables.
Mme la Présidente, en 1981, il y a 35 ans, du jour au lendemain le vin a été
accessible de 400 points de vente à 13 800 points de vente, du jour au lendemain. Certains avaient prédit l'apocalypse.
15 ans plus tard, toutes les recherches ont démontré que ça n'avait pas augmenté la consommation excessive
d'alcool. Le Québec est la province où les buveurs respectent le plus les niveaux de consommation
d'alcool à faible risque de tout le Canada, les connaissent le mieux, c'est
la seule province dont moins de 20 %
des buveurs ont dépassé les limites recommandées hebdomadairement et moins
de 14 % ont dépassé les limites
quotidiennes recommandées. S'il vous plaît, faisons preuve de prudence, ne
gâchons pas ça. Faisons bien les choses. Merci.
La
Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup, M. Sacy. Alors,
je vais maintenant céder la parole au ministre pour une période d'une
quinzaine de minutes.
M.
Leitão : Très bien. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors,
M. Sacy, merci beaucoup d'être là et de nous présenter votre mémoire et vos réflexions à ce
sujet. Moi aussi, je pense que l'alcool, ce n'est pas un produit banal. Il peut
être agréable si consommé de façon modérée.
Vous
avez mentionné, bon, plusieurs choses. Vous avez mentionné que vous considérez
toujours que... Puisque l'alcool, ce
n'est pas un produit banal, vous préférez que ce commerce-là, le commerce
d'alcool, soit maintenu par une société d'État, par un monopole d'État.
M.
Sacy (Hubert) : C'est ce que dit la littérature scientifique, c'est simplement... Je reprends la même chose que vous a
dite l'INSPQ hier. Ce sont les mêmes recherches que nous avons lues, ce sont
les mêmes recherches que nous partageons avec vous.
M.
Leitão : Très bien.
Mais il y a quand
même de la place pour une
distribution directe des produits locaux dans le réseau commercial des
épiceries?
M.
Sacy (Hubert) : Absolument.
Aujourd'hui, il faut savoir, tout l'alcool qui est... pas
l'alcool, tout le vin qui est vendu actuellement dans les épiceries, il passe techniquement
par la Société des alcools du Québec. Et donc il ne s'agit pas
d'empêcher...
Alors, on dit :
Si c'est possible d'adapter... Ceci dit, on sait que les règles de la SAQ ne
sont pas aujourd'hui, semble-t-il, faites
pour les petits producteurs. Est-ce qu'elles sont adaptables ou pas? Si elles
sont adaptables, c'est mieux, mais on
nous dit que ce serait très difficile aujourd'hui de le faire, que, si on
l'avait fait il y a 35 ans, ça aurait été possible, mais, si on le fait aujourd'hui... Nous ne sommes
pas experts là-dedans. Ce que nous vous disons, c'est ceci : La
littérature scientifique dit que
c'est mieux de passer par une société d'État. À l'impossible nul n'est tenu. Si
ce n'est pas possible dans les contextes d'aujourd'hui, au moins
assurons-nous qu'il y ait les contrôles minimaux dont on a parlé.
M.
Leitão : Très bien. Un autre sujet qui est très important, vous l'avez
bien mentionné, la notion de «loss leader» et donc de vente croisée. Hier, nous avons entendu un groupe qui
représente les détaillants, aussi aujourd'hui, ceux qui sont venus même avant vous, qui nous disaient
qu'eux aussi, ils ne pensent pas que ce soit une bonne idée de permettre
ça et qu'ils ne sont pas non plus intéressés
à faire ce genre de vente croisée. Alors, d'où vient, d'où viendrait cette
pression-là, si les détaillants individuels ne sont pas intéressés à
faire ça?
M.
Sacy (Hubert) : M. le ministre, il n'y a personne qui est intéressé à
faire ça. Les voici, elles sont toutes là. Si vous voulez, je vais vous les lire : 10 $ de rabais sur
votre panier d'épicerie; 20 $ de rabais sur votre panier d'épicerie
à l'achat de trois caisses — le 10 $, c'était sur deux caisses;
15 $ de rabais sur le panier d'épicerie à l'achat de caisses de... je ne vous donne pas les marques; ici, on vous
donne pour 13 $ d'ailes de poulet si vous achetez une caisse de bière;
ici, on vous donne un billet de
loterie; ici, on vous donne 7 $ de rabais d'essence, et là on vous donne
0,05 $ de rabais sur le litre.
Il n'y a personne qui est intéressé à ce que ça se fasse, mais prenez vos
circulaires à toutes les deux semaines et
vous allez voir que... Je ne sais pas si... Personne n'est intéressé à ce que
ça se fasse, et pourtant ça se fait, c'est bizarre. Mais je n'ai pas de
réponse et je ne connais pas la réponse à cette question.
M. Leitão :
En fait, c'est un bon paradoxe, on va l'éclaircir. Écoutez, moi, ça me va.
Prix minimum, bien sûr, aussi l'INSPQ nous avait
aussi parlé de cela, et c'est une constatation importante. Pensez-vous qu'il y a une distinction à faire,
quand on parle de prix minimum, entre le vin, surtout le vin artisanal, et la
bière? De ce que je semble avoir compris,
c'est que ces questions de prix minimum, et de contournement de prix minimum,
et de vente croisée semblent être un phénomène qui regarde surtout la bière et
pas nécessairement la bière artisanale.
M. Sacy (Hubert) : C'est
vrai que jusqu'ici le contournement des prix minimums, les promotions croisées
se sont faits à l'aide de la bière,
c'est vrai que ça va être plus difficile de le faire dans le domaine du vin. La
question, c'est : S'il vous
plaît, soyons prévoyants, ce n'est pas parce que ça ne se fait pas qu'il faut
permettre que ça se fasse. Ce que nous vous
demandons, c'est : S'il vous plaît, interdisez-le, comme ça... au cas où
ce soit possible, que ça ne fasse pas. Parce que, vous le savez, on ne refait pas les lois sur l'alcool à toutes les
10 minutes, ça prend du temps, changer des législations. Si tout le monde est d'accord pour dire que ça n'a
pas de sens, interdisons-les et assurons-nous que les lois ne seront pas
contournées. Après, tant mieux si personne
ne veut le faire, c'est parfait, mais de toute évidence il y a des intérêts
importants. Il y a des gens qui
considèrent que c'est possible de le faire, puisqu'ils le font, et, même quand
c'est interdit, ils trouvent des
moyens de le contourner. Assurons-nous qu'on empêche la chose d'avoir lieu.
Même si elle ne nous attend pas au coin
de la rue, ce serait vraiment regrettable que dans six mois on se dise :
Ah! si on y avait pensé... On y pense, on le sait, ça se fait.
Et
je vais même vous dire une chose. On dit des fois, là : C'est juste les
gros qui font ça, les autres sont trop petits. J'ai ici un tout petit dépanneur dans une toute petite région — je ne vous les apporte pas tous, là — qui a dit qu'à l'achat de 36 cannettes de Coors Light tu peux obtenir une
pizza 9 pouces et deux litres d'une boisson gazeuse que je ne nommerai
pas, d'une valeur de 14 $, à l'achat
d'une caisse de... Ils viennent de baisser le prix de la caisse de bière de
14 $. Ça ne prend pas...
Écoutez, n'importe qui peut le faire. S'il vous plaît, interdisez-le, et ça va
être plus simple pour tout le monde.
M. Leitão :
Très bien. Merci.
La Présidente (Mme
Hivon) : M. le député de Pontiac.
• (16 h 10) •
M.
Fortin (Pontiac) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Sacy. C'est
un plaisir de vous retrouver. On se connaît d'une vie précédente, de ma
part, mais ça faisait longtemps qu'on s'était vus. Donc, c'est un plaisir de
vous revoir.
Je
veux revenir sur la première question que le ministre vous a posée par rapport
aux affirmations que vous avez faites avant de nous dire quelque chose,
si vous voulez, là. Donc, vous nous avez dit que vous êtes en faveur que les producteurs artisanaux puissent avoir accès aux
épiceries au Québec et, en réponse à la question du ministre, vous nous
avez même dit qu'il y a de la place pour la vente du vin en épicerie au Québec.
Mais vous, vous êtes un expert en consommation
responsable, si on veut. Donc, je veux bien comprendre, là, parce que vous nous
avez cité de la littérature qui dit
que c'est quand même mieux, même si c'est vendu en épicerie, que ça passe par
la SAQ. Au point de vue de la surconsommation, ça change quoi pour le client,
que ça passe par la SAQ? Lui, la seule interface qu'il voit, quand même, c'est l'épicerie. Donc, expliquez-moi exactement d'où vous venez
avec cette réponse-là et ce que la littérature nous dit.
M.
Sacy (Hubert) : J'ai peu de
temps, je vais essayer de vous résumer ce qui sous-tend la littérature
scientifique. Donc, ce n'est
pas une invention d'Éduc'alcool.
En
règle générale, ce qui est dit, c'est que les sociétés d'État sont davantage
scrutées dans leurs comportements. Elles
sont de propriété publique, elles sont moins sensibles à la recherche des
profits, elles subiraient donc moins de pression pour la rentabilité à
tout prix que pour autre chose.
Si
je veux prendre simplement un léger, léger, léger... comme toute comparaison
était très, très boiteuse, mais prenez l'exemple de la Caisse de dépôt — on est à la commission des Finances, je
vais parler de quelque chose qui est familier. Vous
dites à la Caisse de dépôt : Oui, il faut des rendements, mais vous dites
à la Caisse de dépôt aussi : Oui, mais
arrangez-vous aussi pour soutenir l'économie québécoise, et donc des fois vous acceptez que les
rendements soient un peu moins bons
parce que ça sert l'autre volet de la mission. Les sociétés
d'État ne sont pas que des machines commerciales, elles sont aussi des sociétés
publiques et donc sont scrutées par des sociétés publiques. Et, lorsqu'une société
d'État... — et je ne parle pas de la nôtre, on parle en
général, encore une fois — lorsqu'une société d'État qui vend de l'alcool a des comportements qui sont irresponsables ou qui poussent
trop à la consommation excessive, autour de la table du Conseil des ministres il y a un ministre de la Santé qui va
donner des coups de coude au ministre des Finances pour lui dire : Tu es en train de me créer
des problèmes, puis le peu d'argent que tu fais aujourd'hui, il va me coûter
10 fois plus cher la semaine
prochaine. Cette pression-là, ça existe moins dans le privé. Puis je ne dis pas
que le privé n'est pas responsable, je dis juste qu'il est moins sujet à
ce type de pression.
Deuxième
élément, vous le savez, c'est infiniment plus scruté, le public, que le privé.
Tu fais une erreur, tu es davantage sous les feux de la rampe, et tu
pousses davantage.
Troisième
élément qui est important : dans certaines sociétés — et là je vais me faire gronder par le
ministre des Finances — les sociétés d'État responsables de la vente
d'alcool relèvent du ministre de la Santé et non pas du ministre des Finances, ce n'est pas le cas au Canada, où
les sociétés d'État relèvent soit du ministre de l'Industrie et du Commerce
soit du ministre... mais relèvent du
ministre de la Santé. Et il y a des pays, en Europe du Nord, où le rapport
annuel de la société d'État
responsable de vendre de l'alcool commence par les mots : «La société est
heureuse d'annoncer qu'elle a vendu
moins d'alcool cette année et qu'elle a donné moins de dividendes au
gouvernement», parce que son objectif est plus de contrôler l'alcool que
quoi que ce soit d'autre, elle est jugée là-dessus.
Alors, la raison...
Alors, la combinaison de tous ces éléments-là fait en sorte qu'on... la
littérature scientifique démontre que c'est préférable, qu'on a de meilleurs
résultats via une société d'État que...
Ceci
dit, je ne suis pas en train de dire que, quand le privé vend de l'alcool, le
sang va se mettre à couler dans les rues,
là, puis que tout le monde va mourir, ce n'est pas ça du tout, du tout, du
tout, ce que je dis. Il y a des pays qui ont une très saine relation à
l'alcool et qui n'ont pas de société d'État.
M. Fortin
(Pontiac) : Je veux vous entendre sur un autre sujet. Avez-vous suivi l'ensemble
des travaux de la commission jusqu'ici?
M. Sacy (Hubert) : Le plus possible.
M. Fortin
(Pontiac) : Très bien.
Avez-vous entendu le Conseil canadien du commerce de détail? Parce que...
Ça va, je vais vous résumer certains de
leurs points très rapidement. Ils ont suggéré qu'on ouvre la dégustation en
magasin sans que le producteur soit
présent et ils ont demandé pour des marques maison. Donc, je vous demande votre
avis sur leurs propositions.
M. Sacy
(Hubert) : D'abord,
on n'a pas étudié cette question. Pardonnez-moi mon hésitation, parce que je ne
veux pas dire quelque chose de...
M. Fortin (Pontiac) : Non, ça va.
M. Sacy
(Hubert) : On n'a pas étudié
cette question, je ne suis pas en mesure suffisamment rapidement de me retourner
pour vous donner un avis éclairé, fondé sur des données scientifiques là-dessus. En conséquence, en tout respect, permettez-moi de ne pas répondre à la question,
pas parce que je ne suis pas en présence de mon avocat mais
parce que je ne connais pas la réponse.
M. Fortin (Pontiac) : Je crois que
mon collègue de Sainte-Rose a des questions également.
La Présidente (Mme Hivon) :
M. le député de Sainte-Rose.
M. Habel : Combien de temps il nous
reste, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Hivon) :
Il reste 2 min 30 s.
M.
Habel : parfait. Merci beaucoup. J'ai une question concernant le prix minimum. J'aimerais savoir...
que vous élaboriez un peu sur
d'autres juridictions canadiennes qui auraient eu le prix minimum sur le vin et
quels ont été les résultats obtenus par ce prix minimum.
M. Sacy (Hubert) : D'abord, entendons-nous,
aujourd'hui au Québec, les prix de l'alcool sont réglementés, aujourd'hui, au moment où nous nous parlons, et
c'est l'État qui les fixe. Dans un cas, c'est la Société des alcools du Québec
qui les fixe, donc c'est l'État puisque, la
Société des alcools, son actionnaire est ici présent, et, dans le cas de la
bière, c'est la Régie des alcools,
des courses et des jeux, qui est aussi un organisme d'État. Aujourd'hui, au
Québec, de toute façon c'est l'État qui décide du prix de l'alcool.
Après, il y en a qui le contournent, mais ça, c'est une autre histoire.
Il y a un
autre débat, à savoir : Est-il suffisamment haut ou pas? Nos collègues de
l'INSPQ ont fait valoir cette dimension-là en disant : Bien, dans
certains cas, ils le sont; dans certains cas, ils ne le sont pas.
Vous savez
que la succursale de la LCBO qui marche le mieux, c'est celle de Hawkesbury, et
pas parce qu'il y a beaucoup
d'habitants à Hawkesbury — simplement parce que, si tous les habitants de Hawkesbury devaient
boire tout le vin qui se vend à
Hawkesbury, tous les habitants de Hawkesbury seraient saouls morts du jour de
leur naissance jusqu'à 250 ans
après leur mort — parce
que c'est du commerce transfrontalier des Québécois, qui veulent acheter des
prix et qui disent : Là-bas
c'est moins cher, ici c'est plus cher. On assiste à ce phénomène-là partout. Au
Luxembourg, c'est la même chose,
si tous les Luxembourgeois devaient
boire le vin vendu au Luxembourg, ce serait une catastrophe épouvantable,
parce que leurs taxes sont plus basses.
Donc, ce qui
est connu, c'est que les gens ne vont pas faire 5 000 kilomètres
pour aller s'acheter de l'alcool. Par
contre, il y a un prix minimum qui sert à protéger pas les gens
qui ont beaucoup d'argent mais les jeunes, extrêmement sensibles au prix
minimum, les personnes qui boivent beaucoup,
beaucoup, beaucoup
et les personnes les plus vulnérables, c'est
ceux-là que l'on veut protéger. Et, ceux-là, c'est vrai qu'ils ne sont pas la
majorité, vous avez parfaitement raison, les jeunes sont minoritaires, les
personnes les plus vulnérables sont minoritaires, et les consommateurs
excessifs sont minoritaires, et des fois on
peut être les trois à la fois, mais il reste qu'on a un devoir de protéger les
plus vulnérables et les plus jeunes.
Il y a une loi qui interdit aux jeunes d'acheter de l'alcool, et un autre des
moyens qui est très efficace pour les empêcher de trop en acheter, c'est
de fixer des prix qui soient suffisamment élevés.
Par ailleurs, c'est vrai qu'il y a un effet pervers. Si les prix sont trop hauts...
On a vécu ça au Québec il y a quelques années, dans le domaine des spiritueux, on a encouragé la contrebande,
ce n'est pas vraiment mieux. En Suède, à un moment donné, les taxes sur l'alcool étaient tellement
hautes qu'il s'est développé une industrie des traversiers où les gens
partaient de Stockholm pour aller à
Helsinki, en Finlande, acheter de la «booze» à tout casser et revenir
24 heures et une minute plus
tard, parce qu'il fallait qu'ils soient sortis 24 heures du pays, et le système
de traversiers était tout organisé pour ça. Et, d'après vous, pendant ces 24 heures et une minute, sur un
traversier où il n'y a rien d'autre à faire que de s'en aller acheter de la bière et revenir, qu'est-ce que vous
pensez que les gens faisaient sur le bateau? Et je dois vous dire que, quand
les traversiers revenaient d'Helsinki, ce n'était pas très, très beau à voir.
Tout ceci pour vous dire que...
La
Présidente (Mme Hivon) : M. Sacy, nous devons passer... Je suis certaine que vous allez
pouvoir continuer.
M.
Sacy (Hubert) : Avec
plaisir. Écoutez, je résume en une phrase : Il n'y a pas de
solution miracle, il faut un prix minimum suffisamment élevé pour
empêcher les problèmes mais pas trop élevé pour en créer d'autres.
La Présidente (Mme Hivon) :
Alors, nous allons céder la parole à l'opposition pour une période d'environ
neuf minutes. M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Oui, merci, Mme
la Présidente. Bonjour, M. Sacy. Merci pour votre mémoire.
Sur le prix
minimum, hier, on a eu une discussion avec l'Institut national de santé
publique sur, entre autres, le prix minimum même en SAQ pour les
spiritueux. Je ne sais pas si vous avez entendu cette discussion que...
M. Sacy (Hubert) : Oui, oui,
absolument.
• (16 h 20) •
M. Marceau : O.K. Puis c'est
quoi, votre opinion là-dessus?
M. Sacy
(Hubert) : Écoutez, d'abord, nous n'avons pas de prise de position
spécifique là-dessus. Comme je l'ai dit
tout à l'heure, au début de ma présentation, nous ne sommes pas un organisme de
législation, de réglementation, de... nous
nous tenons vraiment au niveau des grandes orientations. Et effectivement, je
viens de le dire et je vais le répéter, c'est important qu'on ait un
prix minimum qui soit correct sur la plupart des produits. Au moment où je vous
parle, il commence à se dessiner des
consensus ici et là sur ce que devrait être un prix minimum par verre standard,
autrement dit 12 onces de bière,
cinq onces de vin à 12 %, 1,5 once de spiritueux. Et il est possible qu'en Ontario
les prix des spiritueux soient plus
élevés que le prix minimum, et les prix des vins, un peu moins, et qu'au Québec
la situation soit différente, il n'y a aucune raison de douter des chiffres qu'ont
donnés nos collègues de l'INSPQ à ce sujet-là. Je vous soumettrais
que c'est véritablement une décision gouvernementale à savoir où tracer la ligne pour précisément éviter ce dont nous
parlions tout à l'heure :
suffisamment haut pour éviter les abus, suffisamment bas pour éviter la
contrebande et les achats transfrontaliers.
C'est un sujet qui est aussi complexe parce
qu'il faut adapter aussi aux sociétés
un certain nombre de règles. Vous
savez, en règle générale, lorsque vous augmentez l'accessibilité, lorsque
vous augmentez, lorsque vous baissez les prix, ça produit des effets.
Il y a
aussi des stratégies commerciales dont les sociétés tiennent compte. Et,
je vous répète, malheureusement
nous ne sommes pas experts là-dedans,
mais ce ne serait pas inutile de se pencher davantage sur cette
question-là de manière plus précise, effectivement.
M. Marceau : O.K. parfait. Puis évidemment il y a
un lien entre ça puis les promotions croisées, puis, pendant votre
présentation, vous avez présenté ce qu'il en était.
M. Sacy (Hubert) : Oui, j'ai...
J'espère que vous étiez là. Si vous n'étiez pas là, je vous avoue que je vais...
M. Marceau : J'étais avec
vous en pensée.
M. Sacy
(Hubert) : Bien, ça faisait
deux jours que vous posiez des questions là-dessus, ça fait que j'ai
décidé de vous apporter quelques illustrations.
M. Marceau : J'étais au salon bleu. Mais je veux simplement
savoir qui est le responsable de... qui ne fait pas le boulot qu'il doit
faire pour que cela ne soit pas possible, parce qu'en principe, donc, on ne
peut pas contourner le prix. Est-ce que
c'est parce que la loi n'est pas suffisamment claire ou les règlements ne sont
pas suffisamment clairs ou parce que
l'organisme responsable n'a pas les moyens de ses ambitions et n'est pas en
mesure d'appliquer correctement les règles? Qu'est-ce qui fait que ça
continue d'exister, ce que vous nous avez présenté?
M. Sacy
(Hubert) : Je vais vous demander de m'épargner de désigner des
coupables, parce que je n'en ai ni le pouvoir, ni les moyens, ni même la
capacité.
Il est possible
que la loi ou les règlements ne soient pas assez clairs, il est possible que
les interprétations qui sont faites
ici et là ne soient pas les bonnes. Je vous avais dit au début que j'allais
m'attarder aux objectifs et aux résultats et non pas aux moyens. Ce
qu'Éduc'alcool vous a invités à faire, c'est : Écrivez la loi clairement
pour qu'on ne puisse plus jamais se poser
cette question-là. C'est non, ça ne se fait pas et ça ne pourra pas se faire.
Comme ça, tout le monde sera sur la
même longueur d'onde, et on n'aura même plus besoin de se poser la question de
pourquoi. Il faudrait que la chose n'existe pas.
M. Marceau : O.K., parfait.
Excellent. Merci.
Autre sujet, plusieurs intervenants se sont
prononcés de manière favorable à ce qu'on puisse inscrire sur les bouteilles, sur l'étiquette les cépages et les
millésimes. Peut-être nous dire ce que vous en pensez. Est-ce que vous croyez
que c'est souhaitable?
M. Sacy
(Hubert) : Là, je vais essayer de ne pas répondre en répondant, parce
qu'on n'a pas de position très, très précise
là-dessus, mais on a des grandes orientations. À Éduc'alcool, notre slogan,
c'est — merci de
me donner l'occasion de le
placer — La
modération a bien meilleur goût. Et, dans La modération a bien meilleur
goût, il y a le mot «goût». Nous nous inscrivons et nous voulons inscrire la
culture québécoise dans une culture de la dégustation et donc dans une culture où les gens consomment de l'alcool pour le
plaisir du goût et non pas pour l'effet de l'alcool. Par conséquent, j'aurais
tendance à vous dire que tout ce qui peut
contribuer au développement de la culture du goût serait une bonne chose, et
sans me prononcer spécifiquement sur cette mesure-là, parce qu'il y a
peut-être des contingents derrière ça qu'on ne connaît pas, mais, s'il n'y a
pas d'objection majeure, ce qui pousse, ce qui permet la culture du goût, ma
foi, on peut difficilement s'y objecter.
M. Marceau :
O.K. Donc, vous préférez que les Québécois choisissent la qualité plutôt que la
quantité. Et puis, la qualité, ils pourront la mesurer... enfin, ils
pourront l'anticiper, en tout cas, si...
M. Sacy
(Hubert) : En fait, ce que
nous souhaitons, c'est qu'ils boivent deux verres par jour pour les femmes,
trois pour les hommes...
M. Marceau : Oui, on est au
courant.
M. Sacy
(Hubert) : ...de temps en
temps trois pour les femmes, quatre pour les hommes, avec un maximum
de 10 par semaine pour les femmes et 15 pour les hommes, et on ne boit
pas tous les jours.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Hivon) : M.
le député de Rousseau.
M. Marceau : Vous serez
parvenu à placer deux choses grâce à moi.
M. Sacy (Hubert) : Ah! bien, merci,
écoutez...
M. Marceau : C'est encore à moi?
La Présidente (Mme Hivon) :
Bien, vous ou M. le député de Berthier.
M. Villeneuve : Non, c'est
bon...
M.
Marceau : Oui? Bien, j'ai peut-être
une dernière question. Transport, plusieurs intervenants veulent pouvoir transporter eux-mêmes leurs produits, plusieurs
producteurs, producteurs artisans. Avez-vous des objections, des... Voyez-vous
un avantage à cela?
M. Sacy (Hubert) : Je vais rester
dans la même logique...
La Présidente (Mme Hivon) :
Je vous invite à répondre en une minute.
M. Sacy
(Hubert) : Oui. Je vais
rester dans la même logique. Les considérations commerciales, techniques, on ne
les connaît pas. J'ai entendu des gens
dire : Écoute, on ne peut pas être en même temps dans le champ
puis être en même temps en
train de livrer. Ce que je vous dis, c'est que, si on peut contrôler la
livraison, si le processus de livraison ne permet pas d'échapper à des contrôles, normalement ça ne devrait pas poser trop de problèmes. Mais, encore une fois, pardonnez notre ignorance
dans cet univers-là. Mais, sur le grand principe, si ça n'empêche pas des
contrôles, s'il ne peut pas se passer de fligne-flagne en cours de
route, ma foi, pourquoi pas?
La
Présidente (Mme Hivon) : Je vais maintenant céder la parole au député de Granby, pour la
deuxième opposition, pour une
période de six minutes.
M.
Bonnardel : Merci,
Mme la Présidente. M. Sacy,
bonjour. On va aller se promener dans l'Ouest canadien, M. Sacy. J'ai posé des questions
hier sur la santé publique. La Colombie-Britannique a libéralisé son marché, ouvert son marché un peu comme on va peut-être
le faire, ils ont un prix minimum garanti. L'Alberta n'a pas de prix minimum
garanti. Le marché, pour eux, est beaucoup
plus ouvert que partout ailleurs au Canada. La question, vous la savez, ma question, ça va
être sur ce que j'ai posé hier, à savoir, d'un côté, marché ouvert un peu comme
celui du Québec, prix minimum garanti, l'Alberta ouvert au complet, quel impact sur les
deux provinces a eu cette libéralisation, sur la santé publique? Est-ce qu'on a vu une exposition encore plus grande ou des problèmes encore plus
grands, d'avoir ouvert ces marchés comme on souhaite et on risque de le
faire dans les prochaines semaines, prochaines années au Québec?
• (16 h 30) •
M. Sacy
(Hubert) : Je vais essayer de
vous donner quelques statistiques, qui, je préviens tout de suite, ne représentent pas la vérité absolue, totale et ne
couvrent pas nécessairement tout, c'est simplement les données qu'on a
été capables de ramasser rapidement.
Hier, l'INSPQ
a invoqué les études de Tim Stockwell, de l'Université de Colombie-Britannique, effectivement, et,
lui, ce qu'il a déterminé dans ses recherches, c'est que l'introduction du
secteur privé dans la vente d'alcool a mené à une augmentation de 3,25 %
des décès liés à l'alcool pour chaque tranche de 20 % d'augmentation de la
densité des points de vente.
Maintenant,
faisons attention. Une augmentation de 3,25 % des décès, s'il y avait un
décès ou trois décès, ce n'est pas la
même chose que s'il y en avait 10 000. Et donc une augmentation en
pourcentage dépend toujours d'où on part, et donc, la
Colombie-Britannique, c'est un peu ambigu, mettons.
En Alberta, c'est
beaucoup plus clair. En Alberta, je vais vous donner des données extrêmement
précises, et permettez-moi de vous les lire,
je vais essayer de les traduire en même temps que je les lis. Au cours de la
dernière décennie, il y a eu une
augmentation de la consommation d'alcool, une augmentation de la consommation
excessive et une augmentation de la
dépendance à l'alcool en Alberta. Ceci inclut une augmentation de la
consommation dans les écoles secondaires
et dans les collèges d'Alberta. Basée sur les ventes annuelles, la tendance,
depuis les années 90, indique que les Albertains continuent à boire
plus per capita et à dépenser plus sur l'alcool que le niveau national.
Et
là je vais vous donner des statistiques très, très précises sur les ventes et
sur les consommateurs. Au Canada, selon
les dernières données, les consommateurs qui buvaient de l'alcool ont bu
10,54 litres, 10,5 litres d'alcool pur par année, 10,5 litres d'alcool pur par année,
moyenne canadienne. Les plus petits consommateurs, c'est le Nouveau-Brunswick,
avec huit litres, suivi, dans un mouchoir de
poche, Ontario, Nouvelle-Écosse, Québec avec autour de 10 litres. Donc,
10,5, Canada; huit, Nouveau-Brunswick; 10, Québec, Ontario,
Nouvelle-Écosse. La Colombie-Britannique est à 11,6, et l'Alberta, à 12,5. Alors, si
ce n'est pas plus nuancé pour la Colombie-Britannique, disons qu'il semblerait, à première vue,
que l'Alberta ne soit pas exactement le modèle à suivre.
M.
Bonnardel : Alors,
si je comprends bien, là, votre prix minimum garanti, c'est votre
plus grand combat. Parce que,
bon, l'Association des vignerons disait, hier ou avant-hier : On produit,
on embouteille 1,5 million de bouteilles sur 220 millions, puis on est
bien conscients, demain matin, la loi est adoptée, là, on ne va pas augmenter
ça de 1 million, là, du jour au
lendemain. Pour vous, donc, la seule solution ou la meilleure des solutions
pour contrer peut-être l'effet que les Québécois, du jour au lendemain, ils se
disent : Oh! il y a plus d'alcool de disponible, l'offre est plus grande,
c'est d'amener un prix minimum.
M. Sacy
(Hubert) : Non, honnêtement, il n'y aura pas plus d'alcool...
M.
Bonnardel :
Non?
M. Sacy
(Hubert) : ...parce que l'espace tablette, là, il va être le même, là.
M.
Bonnardel :
C'est ce que je pense aussi.
M. Sacy (Hubert) :
Entre vous et moi, là, on le sait, là. Dans la vraie vie, là...
Ce
qu'il ne faut pas, c'est établir dans un principe de loi, dans une loi qu'il n'y a pas de contrôle de prix. Le prix minimum, c'est parce que ça ne passe pas par la SAQ. L'important,
c'est qu'il y ait quelque part où on dise... Parce que, vous savez, aujourd'hui ce n'est peut-être pas au coin de la rue, mais vous ne savez jamais qu'est-ce qui va se passer dans x temps, qui va découvrir quoi, comment, qui
va essayer de faire quoi. Ce qu'on dit, c'est juste un principe de prudence
et de précaution. Et je peux vous dire une
chose : En toute honnêteté, pour être moi-même un client de nos
producteurs, le prix minimum qui va
être fixé, il n'y a aucun producteur qui va même être capable de l'atteindre,
tellement leurs coûts de production
sont plus élevés. Je dis juste : Donnons-nous une garantie. Ce n'est pas
parce qu'il y a 99 % des conducteurs qui ne font pas d'accident qu'on ne dit pas qu'il faut mettre la
ceinture de sécurité, c'est juste au cas où. Et donnons-nous ce au cas où, d'autant plus, je vous le répète, je
suis absolument convaincu que ça ne va pas les heurter d'aucune manière,
ce ne serait même pas un problème pour eux.
Ce qu'ils vous disent, c'est : Ce n'est pas notre objectif, ce n'est pas
ce qu'on veut, on n'est même pas
capables, mais, je vous répète, ce n'est pas eux, c'est les détaillants qui
pourraient le faire. Les producteurs ne sont pas du tout en cause, du
tout, du tout, du tout.
M.
Bonnardel :
Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Hivon) : Bon, bien, je vous remercie. Alors,
merci beaucoup de votre présentation, M. Sacy.
M.
Sacy (Hubert) : Je vous remercie. Et je vous rappelle encore une fois
que la modération a bien meilleur goût.
La
Présidente (Mme Hivon) : On a compris. Ça vous évite beaucoup
de frais de publicité, là, parce qu'on a de très grosses cotes d'écoute
ici. Alors, j'espère que vous réalisez ça.
Alors, nous allons
suspendre nos travaux quelques instants, le temps que le prochain groupe prenne
place.
(Suspension de la séance à
16 h 33)
(Reprise à 16 h 34)
La
Présidente (Mme Hivon) : Alors, nous allons accueillir maintenant l'Association des distillateurs canadiens.
Je vous souhaite la bienvenue parmi nous. Je
vous rappelle que vous disposez d'une période d'une dizaine de minutes pour faire votre
présentation, qui va être suivie par une période d'échange, en vous demandant
aussi de vous présenter d'entrée de jeu. Alors, la parole est à vous.
Association des
distillateurs canadiens (ADC)
M. Bolduc (Alain) : J'enlève ma
montre, qui ne veut plus s'enlever.
La Présidente (Mme Hivon) :
Je vais vous faire signe à une minute de la fin.
M. Bolduc
(Alain) : Ah! Parfait.
Alors, bonjour. Mon nom est Alain Bolduc, je suis le conseiller pour le Québec pour l'Association des distillateurs
canadiens, Spiritueux Canada. J'ai avec moi mon collègue C.J. Helie, qui
est le vice-président exécutif de la même association.
Alors, d'abord,
merci, Mme la Présidente, MM. les membres de la commission,
de nous recevoir. Je suis conscient que
le document qu'on vous a fait parvenir allait bien au-delà
des enjeux de la commission ici, mais on croyait important
de profiter... de créer un contexte pour nos interventions parce que, d'une
part, notre industrie n'a peut-être pas autant de rayonnement que certains
autres types d'industrie, et aussi c'est une industrie qui subit encore beaucoup
de préjugés et qui s'est transformée beaucoup
dans les dernières années. Alors, on voulait juste s'assurer que vous puissiez
mettre ça en contexte lorsque vous allez faire vos analyses, vos recommandations.
D'entrée de jeu, je veux qu'on soit clairs, nous n'avons aucun problème,
aucune objection à ce que les
gouvernements aident des sociétés en
démarrage, des sociétés, des industries qui veulent s'établir puis se
développer. Cependant, on croit que
ça doit être fait à certaines conditions, qui respectent, entre autres, nos
obligations en tant que partenaires de commerce international.
L'autre
chose, c'est que, comme je vous disais précédemment brièvement, les spiritueux
ont subi, au cours des années, un
traitement qu'on qualifie clairement d'inéquitable par rapport à tous les
autres types de boisson alcoolique, que
ce soit au niveau de la distribution, que ce soit au niveau du traitement
fiscal, que ce soit au niveau des majorations ou d'autres privilèges qui
sont accordés à d'autres types de producteur, et on pense qu'il n'y a plus de
raison valable aujourd'hui pour que cette
situation-là perdure. Alors, très clairement, toute mesure additionnelle qui
viendrait accentuer ou même perpétuer cette situation-là, pour nous, n'est
pas acceptable parce que, comme je vous disais, le marché a beaucoup changé, on est bien loin de l'époque de
la tempérance où nos parents prenaient du fort — mais moi, je ne me rappelle pas trop, trop de ça — et on regarde aujourd'hui ce qui s'est passé,
particulièrement dans les 15 dernières années, non seulement
l'industrie des spiritueux, mais l'industrie des boissons alcooliques elle-même
a beaucoup évolué.
Il y a
beaucoup de nouveaux produits qui se sont développés. Je peux donner l'exemple
des «coolers» qui sont apparus sur le
marché dans les dernières années d'abord par les fabricants de spiritueux,
puis, «by the way», qui titrent à
4 % d'alcool et non pas à 40 %. Et sont apparus, dans les dernières
années, des fabricants qui ont commencé à faire des «coolers» mais à base de malt qui vont jusqu'à
11,9 %. Et pourquoi à base de malt? Parce que ça peut être vendu en
épicerie et dépanneur puis c'est
traité comme de la bière en termes fiscaux. Par contre, ça a un taux d'alcool
plus élevé que les «coolers» à base de spiritueux.
Il y a
aussi des nouvelles méthodes de production qui se sont développées pour
produire l'alcool. Alors qu'auparavant c'était seulement par le procédé
de distillation ou par le brassage, maintenant il y a beaucoup d'autres méthodes
qui permettent de produire toutes sortes de produits.
La façon de
consommer aussi est bien différente. Les jeunes, aujourd'hui, ils consomment
les boissons alcooliques de façon
différente. Les jeunes consomment beaucoup plus de spiritueux et ils les consomment
de façon très différente, avec les
cocktails. Vous allez à la SAQ, la SAQ a développé d'ailleurs l'Espace
Cocktail, qu'ils appellent, où ils mettent en évidence justement toutes
les combinaisons qu'on peut faire avec les spiritueux.
Les jeunes aussi
ont compris la notion dont Hubert vous a parlé tantôt, du verre standard, hein,
le 12 onces de bière, le cinq onces de vin et l'once et demie de
spiritueux qui sont la même chose, alors... Et d'ailleurs, pour ajouter à ça, Éduc'alcool comme beaucoup d'autres organismes qui
traitent de consommation d'alcool et de santé s'entendent pour dire que toutes les boissons alcooliques,
consommées avec modération, ont les mêmes bénéfices et, consommées avec abus, ont le même désavantage. Tout ça pour dire,
en conséquence, que, pour nous, il n'y a plus de raison de considérer
que les boissons alcooliques spiritueux doivent recevoir un traitement
différent.
• (16 h 40) •
Ceci étant
dit, pour revenir au cadre de certaines préoccupations de votre commission, la
question de producteur artisanal et de microdistillateur, je pense qu'il est
extrêmement crucial que l'on s'entende sur une définition de qu'est-ce qu'un
producteur artisanal, qu'est-ce qu'un produit artisanal. Au minimum, en ce qui
nous concerne, si on veut s'appeler un
microdistillateur, il faut distiller, sinon on ne peut pas s'appeler un
microdistillateur. Alors, il faut distiller, puis après ça traiter les produits, puis l'embouteiller.
Parce que, si on regarde aujourd'hui ceux qui utilisent l'expression «boisson
artisanale» ou «microdistillateur», écoutez,
il y a des microdistillateurs américains qui font fabriquer leurs spiritueux
par certaines de nos compagnies
membres au Canada, et leurs produits sont positionnés comme des
microdistillateurs. On a de nos membres ici, au Canada,
qui fabriquent des produits de niche d'excellente qualité, en très petite
quantité, dont un qui justement,
dans la bible 2016 du whisky, a remporté le premier prix. Il est fabriqué à
ville LaSalle, chez Diageo, puis c'est un produit de niche, c'est un
produit fabriqué avec la méthode artisanale, en petite quantité, et qui est...
Alors, qu'est-ce que c'est, un produit artisanal?
Et ça me
permet de toucher à la question d'Origine Québec qu'on voit maintenant
dans les succursales de la SAQ. Alors,
saviez-vous que toute la vodka Smirnoff vendue à travers le Canada, y
incluant au Québec, est fabriquée à Salaberry-de-Valleyfield avec des grains de
producteurs québécois? Est-ce
que c'est Origine Québec? Est-ce qu'on ne pourrait pas, ces produits-là...
Alors, il y a plein de ces petites choses là qui sont faites à la pièce, et qui ont
été tricotées au fil des années, et qui, pour nous, quand on le regarde dans leur entièreté... Puis c'est pour ça
qu'on a tenté de vous donner ce portrait-là. Ça n'a plus beaucoup de logique. Puis on pense que c'est l'opportunité
que vous avez, d'aller plus loin que juste regarder certains petits fils
du tricot mais l'ensemble du produit.
L'autre
facteur, l'autre point qu'on aimerait toucher, c'est la question
du prix minimum. Pour nous, toute expansion...
On le sait, le prix minimum est seulement sur la bière, au Québec, alors que dans les
autres provinces canadiennes, excepté
une province, il est sur l'ensemble des produits alcooliques. En Alberta, il ne l'est
pas sur les produits vendus pour consommation à domicile, mais il l'est
sur les produits vendus pour consommation sur place.
Alors,
pour revenir à ce qu'Hubert disait, pour nous, le prix minimum doit s'établir à
l'ensemble des boissons alcooliques. Hubert n'en a peut-être
pas fait allusion, mais le groupe de travail sur les substances... sur les
drogues et l'alcool du Canada a
déterminé qu'un prix minimum, un «range» de prix minimum susceptible d'être un
bon élément de contrôle de la
consommation, ça devrait se situer entre 1,50 $ et 2 $. Si on regarde la bière, aujourd'hui, qui est vendue
au prix minimum, c'est à peu près 1,15 $ le verre, donc en bas de la
recommandation du groupe de travail. Il y a des spiritueux vendus à la SAQ qui reviennent à 0,96 $, 0,97 $ le
verre, on est loin du 1,50 $, 2 $. Puis, si on va les acheter à la SAQ Dépôt, c'est encore pire, parce qu'il y a
un escompte additionnel. Alors, pour nous, il est clair que la question
du prix minimum doit s'appliquer à tous les
types de produit alcoolique, quels qu'ils soient. D'ailleurs, on se posait la
question en regardant le texte de loi :
Est-ce que la bière qui va être vendue possiblement par les petits
microbrasseurs pour consommation à
domicile... Je crois comprendre qu'elle n'aura pas de prix minimum, en tout cas
je n'ai rien vu à cet effet-là.
Alors, pour nous, si c'est le cas, c'est une incongruité, parce que toute la
bière qui est vendue en épicerie doit avoir un prix minimum.
L'autre
point qu'on aimerait couvrir, il est extrêmement important, c'est le respect de
nos obligations à l'égard des
partenaires économiques. Il faut bien comprendre que toutes les dérogations que
des provinces et des gouvernements font,
et ont faites, et se préparent à faire sont scrutées à la loupe par les
partenaires commerciaux étrangers. Et on le sait, on est en contact avec eux
autres, puis ils sont probablement en contact avec certains... avec le
ministère des Finances et autres, et
on entend souvent dire : Ah! bien l'Ontario a fait ci, ah! la
Colombie-Britannique a fait ça. La Colombie-Britannique et l'Ontario, ce qu'ils ont fait,
fondamentalement, ça a été de négocier avec les partenaires avec lesquels ils
ont des ententes de commerce
international. Alors, oui, il y a d'autres provinces comme la Nouvelle-Écosse
et peut-être d'autres qui ont fait
des choses qui sont... Cependant, quand on regarde leur taille, l'enjeu n'est
pas très grand. Mais, si des pays étrangers veulent prendre des mesures de rétorsion contre des provinces ou des pays
qui ont posé des gestes qui sont en contravention avec les règles de commerce international, ils
n'iront pas frapper les petits, ils vont venir frapper nous qui sommes de
grands producteurs, de grands
exportateurs de spiritueux. Et moi, j'ai vécu l'époque de la bière où le marché
avec les États-Unis s'est fermé,
j'étais chez Labatt dans le temps, ce n'est pas très, très, très intéressant,
et surtout que, nous autres, notre marché canadien dépend beaucoup, beaucoup des exportations. Et, juste pour
votre information, du whisky canadien, ça ne peut pas être fait aux États-Unis, il faut que ce soit
fait au Canada, puis la réputation du whisky canadien est extraordinaire.
Et, si demain matin des pays veulent prendre
des mesures de rétorsion contre certaines pratiques qui ont été prises par des provinces, bien, nous, c'est notre
industrie qui est en danger. Je pense qu'il faut que les législateurs soient
très, très, très conscients de ça.
La
Présidente (Mme Hivon) : On vous remercie. Alors, c'est la fin
de la période pour votre exposé. Je vais céder la parole au ministre
pour une période d'échange d'une quinzaine de minutes.
M.
Leitão : Très bien. Merci, Mme la Présidente. Alors, MM. Bolduc
et Helie, bonjour. Merci d'être là, de nous avoir présenté votre mémoire
et vos préoccupations.
Peut-être
avant de vous poser quelques questions, en ce qui concerne le... Donc, vous
avez vous-mêmes posé la question.
C'est quoi, un producteur artisanal? Où est-ce qu'on trace la ligne? Dans notre
cas, je pense, c'est assez clair qu'un
producteur artisanal de spiritueux ou de vin, c'est quelqu'un qui produit la
boisson alcoolique à base de matières premières
qu'il a cultivées lui-même et donc qui la fermente sur place. Alors, ça, c'est
une chose. La microdistillerie, ça, c'est
un peu différent, bien sûr. La microdistillerie, en fin de compte, ils ont un
permis similaire aux grands distillateurs, c'est un permis industriel.
Donc, c'est ça, c'est le volume qui est différent, mais c'est le même type de
permis.
Maintenant,
pour venir aux sujets que vous avez soulevés et qui sont certainement des
questions importantes, le prix
minimum, donc, vous, vous seriez d'avis à ce qu'un prix minimum soit établi et
donc qu'il soit mis en application parmi
tous les produits alcooliques et dans tous les canaux de distribution, que ce
soit SAQ ou que ce soient les autres.
M.
Bolduc (Alain) : Tout à fait. On supporte la position qui a été mise
de l'avant l'été dernier par le groupe de travail sur les substances...
M. Leitão :
Donc, ce serait, donc, une certaine graduation, dépendamment du niveau...
M. Bolduc
(Alain) : D'alcool.
M. Leitão :
...d'alcool, et ce serait supervisé ou ce serait, oui, vérifié de façon plus
efficace.
M. Helie (C.J.) : ...juste
ajouter, de plus, que, sur le réseau de détail, on supporte aussi un prix
minimum sur la consommation sur place.
M.
Leitão : Très bien. Merci. Vous avez fait allusion aux accords de
commerce international. Bien sûr, c'est quelque chose qu'on doit tenir en considération. Et vous semblez... Donc, pour
vous, le risque, c'est, si jamais il y a des contestations, des poursuites, que ce soient vos produits qui
seraient visés par une éventuelle «retaliation». Mais pensez-vous vraiment
que les... Dans le cas des vins, par
exemple, les vins québécois, on parle de 1,5 million de bouteilles dans un
marché de 200 et quelques millions. Est-ce que ça peut vraiment causer
un préjudice?
M. Bolduc
(Alain) : C'est l'effet de cumulation qui devient le problème. Je vais
laisser...
M. Helie
(C.J.) : Exactement. Et l'autre question qui a été soulevée dans les
discussions, en Europe, dans notre accord,
c'était qu'ils pensent que, dans le contrat de 2004 avec l'Union européenne sur les spiritueux et les vins, toutes les majorations qui s'appliquent
sur les vins qui se vendent à la SAQ devraient aussi se faire appliquer dans
tous les réseaux. Alors, si vous avez une
extension du type du produit dans les chaînes de dépanneur et d'épicerie, ça va
soulever leur intérêt, de plus.
M. Leitão :
O.K. Très bien. Merci.
M.
Bolduc (Alain) : Autrement dit, chaque mesure, prise indépendamment, est souvent anodine, mais il y a
un effet de cumulation, effectivement. Puis, quand il commence à y en
avoir trop, bon, c'est le temps qu'on tire.
M. Leitão :
Très bien. Merci. Je ne sais pas, les collègues, si vous avez des questions.
La Présidente (Mme
Hivon) : M. le député de Pontiac.
• (16 h 50) •
M. Fortin
(Pontiac) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Ça fait
plaisir de vous voir parmi nous aujourd'hui.
Je
veux revenir sur certains des points que vous faites dans votre mémoire,
mais peut-être avant, là, tantôt, quand les gens
Éduc'alcool étaient ici, le député de Rousseau leur a donné l'opportunité vraiment
de faire leur propre publicité, je vais peut-être vous donner une opportunité
similaire mais à l'intérieur de quelques balises. Vous parlez qu'il y a peut-être des préjugés par rapport à votre industrie, que c'est une industrie qui s'est
transformée beaucoup au cours des
dernières années, qu'il y a des produits artisanaux qui ne sont peut-être pas
considérés produits artisanaux et il
y a des produits qui le sont moins et qui sont peut-être considérés... Donc, je
veux essayer de mieux comprendre votre industrie.
Vous dites que vous avez de plus en plus de produits à faible teneur en alcool.
Ça représente quoi, maintenant, à l'intérieur
de votre industrie, des produits comme ça? Parce que, quand on pense aux
spiritueux, ce n'est évidemment pas le premier produit qui vient en
tête, là. Donc, je veux savoir. Vous nous dites que ça représente quelque chose
de significatif. Qu'est-ce que ça représente à l'intérieur de votre industrie?
M.
Helie (C.J.) : Comme exemple, nos exportations de spiritueux du Canada
valent 600 millions de dollars par année. 100 millions du 600 millions sont des liqueurs, alors
des spiritueux avec un taux d'alcool entre 15 % et 21 %, alors ça
vous donne une idée de l'importance de ce segment de notre industrie.
M.
Bolduc (Alain) : Puis les «coolers», qui est un segment en croissance,
évidemment, c'est peut-être 1 % ou 2 % actuellement, mais je vais vous donner un exemple de ce qui
s'est passé avec les «coolers». Les deux grands manufacturiers canadiens
qui font des «coolers» à base de spiritueux, à 4 % d'alcool, quand ils ont
vu la compétition qui s'est faite contre eux
avec des «coolers» à base de malt vendus en épicerie et dépanneur, à
11,9 % d'alcool, bien, à ce moment-là,
ils font faire sous licence leurs mêmes «coolers» à base de malt pour être
capables de compétitionner à l'intérieur des épiceries et dépanneurs. Alors, ça déforme, finalement. Tout ça pour
une question de façon par laquelle on a créé l'alcool.
M. Helie
(C.J.) : Et puis pas vraiment créé l'alcool, juste...
M. Bolduc
(Alain) : Distillé.
M.
Helie (C.J.) : Tout l'alcool que nous autres, nous vendons sont le
résultat de la fermentation, c'est juste après que l'alcool est fait que
nous distillons. Et la même chose se fait à des produits à base de malt, ou de
cidre, ou de vin, il y a beaucoup de
processus secondaires que ces produits ont subis pour enlever tous les vestiges
de la fermentation, tout le goût de
la fermentation. Alors, ils ont créé un alcool neutre, auquel ils ont ajouté
des saveurs, juste pour avoir les avantages qui sont là pour les
boissons à base de malt ou de vin.
M.
Fortin (Pontiac) : Peut-être que je peux vous demander une précision
additionnelle à l'intérieur d'un peu le même sujet, là. Quand le
ministre parle de vos produits, spiritueux, qui sont faits au Québec,
transformés au Québec à partir de produits du même endroit, ça représente quoi,
ça, pour vous, à l'intérieur de votre industrie?
M. Helie (C.J.) :
Je n'ai pas le montant exact, mais je dirais que c'est 15 %.
M. Bolduc
(Alain) : Puis, comme chiffre additionnel, l'an passé, le Québec a
exporté pour 160 millions de dollars de boissons alcooliques produites au Québec, ce qui était plus que
toutes les autres boissons alcooliques ensemble, bière, vin, cidre, etc.
Alors, c'est une industrie qui est importante.
M. Leitão : Peut-être...
M. Fortin (Pontiac) : Oui, vas-y.
M.
Leitão : Excusez-moi. Peut-être une chose. Pour adresser un peu cette
question des nouveaux produits à base de
malt et donc toute cette problématique, et qui avance assez rapidement,
croyez-vous qu'à ce moment-là un prix minimum bien établi pourrait faire
partie de la solution?
M. Helie (C.J.) : Certainement c'est
une question très importante, d'avoir un prix minimum pour tous ces produits-là, mais l'autre chose qui est aussi
importante, c'est un plus grand contrôle sur les étiquetages de ces produits,
qui ne sont pas clairs de leur provenance,
de leurs méthodes de production, de leurs ingrédients ou de leurs
caractéristiques.
M. Bolduc
(Alain) : Oui, on a retrouvé sur les tablettes régulièrement toutes
sortes de produits avec des noms, là,
presque copiés de noms de marque de nos spiritueux, c'est incroyable. Quand on
les soumet à... Et on les soumet à la RACJ, dans ce temps-là, qui
s'organise pour régler le problème, mais c'est quand même incroyable.
Mais, pour
revenir effectivement, M. Leitão, à la question du prix minimum sur les
boissons à base de malt, de la bière,
c'est une boisson à base de malt. Pourquoi que les autres boissons à base de
malt n'ont pas le prix minimum de la bière?
La Présidente (Mme Hivon) :
M. le député de Pontiac.
M. Fortin
(Pontiac) : Merci, Mme la Présidente. Parce qu'on parle peut-être de
certaines de vos préoccupations traditionnelles,
là, peut-être que je peux vous pousser à préciser votre pensée sur l'une
d'entre elles. Vous avez parlé, dans vos
remarques d'ouverture, M. Bolduc, disons, du fossé entre votre industrie
et celles des producteurs de vin ou des producteurs
de bière, et vous ne voulez pas voir le fossé s'agrandir, évidemment.
Une des choses que vous avez notées par
rapport à ça, c'est le traitement que
votre industrie reçoit par rapport à la distribution. Peut-être que j'aimerais ça
que vous précisiez votre pensée, j'aimerais ça mieux comprendre ce à
quoi vous faites référence quand vous parlez de ça.
M. Bolduc
(Alain) : La bière et le vin
est accessible à au-delà de 6 000 épiceries et dépanneurs au Québec,
les spiritueux sont accessibles à un maximum de 400 succursales de
la SAQ et un maximum de 400 agences SAQ, alors 1 600 contre 6 000, 7 000. Alors, quand on sait que la
distribution est un facteur extrêmement important pour pouvoir offrir et vendre ton produit, c'est évident qu'à travers les années...
Et vous avez, à la fin du document qu'on vous a soumis, un tableau qui démontre clairement la diminution
des spiritueux. Et regardez ça au moment où a été introduite la bière en épicerie, puis après ça le vin en
épicerie, ça a accentué la montée des uns et la descente de l'autre, alors...
M. Fortin
(Pontiac) : Je comprends bien la situation actuelle que vous me décrivez, mais c'est quoi,
la proposition que vous faites à ce niveau-là? Est-ce qu'il y en a encore une ou c'est simplement pour parler du contexte actuel que vous y
avez fait référence?
M. Bolduc (Alain) : C.J.
M. Helie (C.J.) : Ne faire plus de
dommages. Alors, ça, c'est vraiment la demande. S'il y a une extension de
distribution pour des boissons alcooliques, ça devrait inclure les spiritueux.
M.
Fortin (Pontiac) : O.K., je comprends. Ce que vous dites, c'est : Ne faites pas plus de dommages à notre
industrie. Parce que,
quand je vois, là... Un petit peu
plus loin dans votre mémoire, vous
nous parlez, et là je vous cite,
là : «Et pendant ce temps les
producteurs de spiritueux voient leur rentabilité affectée constamment...»
Comment se porte votre industrie? Ça va-tu bien? Il y en a-tu plus, de
producteurs, au cours des dernières années?
M. Bolduc
(Alain) : L'industrie des spiritueux au Québec est la moins rentable
au Canada et la moins rentable à peu près à travers le monde.
M. Fortin
(Pontiac) : Comment elle se porte? Est-ce que c'est une industrie
grandissante? Est-ce que c'est une industrie
où vous voyez plus de joueurs s'impliquer? Par rapport à certains segments,
peut-être les segments des producteurs artisanaux, est-ce que ça
grandit? C'est un petit peu ce que je vous demande.
M. Helie
(C.J.) : Le secteur artisanal, certainement il a grandi, on va de
cinq, il y a cinq ans, à 50 aujourd'hui.
Le grand défi
de l'industrie des spiritueux au Canada est d'attraper notre part de
l'investissement global dans nos usines
ici, au Québec, et au reste du Canada et d'investir sur la catégorie... le
whisky canadien contre le whisky américain, le whisky écossais et le whisky irlandais. Il y a
deux ans, dans les ventes globales, les ventes irlandaises de whisky ont
surpassé le whisky canadien simplement parce
qu'ils ont plus investi dans leurs marques que nous autres, parce que nous
n'avons pas les besoins.
M.
Fortin (Pontiac) : Donc, je comprends que vos... Quand vous nous
dites, là, que la rentabilité de l'industrie est problématique, vous parlez vraiment de ce segment-là, vous ne parlez
pas des producteurs artisanaux, donc, dans le cas des producteurs
artisanaux, peut-être ça va bien...
La Présidente (Mme
Hivon) : Je m'excuse, on va devoir suspendre, c'est l'heure
d'un vote, de l'autre côté.
Donc,
on suspend les travaux et on va revenir pour la poursuite des échanges. C'est
que nous sommes appelés à aller voter au salon bleu. Ça devrait prendre
10, 15 minutes, donc.
(Suspension de la séance à
16 h 59)
(Reprise à 17 h 17)
La
Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous allons reprendre nos travaux où nous
les avons laissés. Lorsque nous avons suspendu, il restait
1 min 30 s environ à la partie ministérielle, donc nous pouvons
poursuivre les échanges avec M. le député de Pontiac.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci, Mme la Présidente. Je vais tenter de retrouver où j'en étais, mais
je crois qu'on parlait, M. Bolduc, M.
Helie, là, de ce que vous voyez dans votre industrie à l'intérieur soit du segment plus whisky, que vous aviez adressé, mais également du segment artisanal, parce que
le projet de loi porte beaucoup sur le segment artisanal, que ce soit
auprès des vins, des spiritueux ou même de la bière, à un certain niveau.
Donc,
à l'intérieur de ce segment artisanal, je veux juste bien
comprendre, là, dans la dernière minute, ça va bien, c'est ce que vous
me dites? Donc, comparativement à d'autres endroits au Québec, ça va
bien?
M.
Helie (C.J.) : Quand j'ai
dit qu'il y avait cinq, il y a cinq ans, et 50 aujourd'hui, ça, c'est à
travers le Canada, hein,
alors... Et il y a des microdistillateurs qui distillent et
d'autres, des assembleurs et des mélangeurs. Alors, ça, c'est tous
ensemble dans les 50.
Alors,
comme une industrie, les microdistillateurs, au Canada
et au Québec, c'est vraiment les premières années. Alors, nous sommes
10 années en arrière des États-Unis, par exemple.
La Présidente (Mme
Hivon) : Je vous remercie. Donc, le temps de la partie
ministérielle est terminé. Je vais maintenant céder la parole, pour l'opposition
officielle, au député de Rousseau pour une période de neuf minutes.
M.
Marceau : Parfait. Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Merci pour votre
intervention et pour votre mémoire.
Je vais aller tout de
suite sur les questions de commerce international. À l'époque où j'occupais le
poste de ministre des Finances et de l'Économie, effectivement, on était en négociation sur l'accord de libre-échange avec l'Europe, et puis effectivement j'ai eu souvent des
discussions à la fois avec la SAQ, avec notre négociateur puis avec d'autres
sur les enjeux de commerce et puis
d'alcool. Peut-être vous demander peut-être de nous rappeler plus clairement ce
qui... Vous avez parlé de fermeture
des marchés dans le passé ou de danger de fermeture. Pouvez-vous peut-être
élaborer un peu plus là-dessus? Je pense que c'est important qu'on soit
tous bien conscients de ce dont il est question ici.
• (17 h 20) •
M. Helie
(C.J.) : Dans les années 80, l'Union européenne a commencé le
dialogue, des consultations avec le Canada,
avec les pratiques des régies des alcools, et clairement le Canada ne faisait
pas beaucoup pour répondre à leurs demandes.
On n'exportait pas beaucoup à l'Europe, et l'Europe exportait beaucoup ici. C'est juste quand l'Europe a eu une conversation avec Washington, et ils ont dit que
vous avez quelque chose sur la table aussi, et très vite les États-Unis
ont appelé au Canada, ils disent : Si vous ne négociez pas clairement et honnêtement, nous allons fermer la frontière entre nos deux pays pour le whisky. Alors, ça, ça a eu l'attention du gouvernement du Canada. Et quelques années plus tard, dans les années 90, la frontière entre l'Ontario et le Québec
et les États-Unis a été, en fait, fermée pour la bière à cause des
disputes sur l'accès au réseau de TBS, The Beer Store, en Ontario, et l'accès
aux dépanneurs au Québec.
M. Marceau :
O.K. Je ne me rappelais pas de ça. Puis, pour revenir aux risques qui découlent
du projet de loi n° 88, est-ce que
c'est une interprétation correcte que de dire que, dans la mesure où, disons,
la brèche qui est prévue dans
le projet de loi est contenue, est clairement identifiée et identifiable, donc
que, par exemple, on s'assure que ce qui est
un produit québécois est bel et bien québécois à 100 %, puis on ne permet
pas à des produits de l'Ontario, par exemple,
de passer à travers la définition qui est retenue... Donc, est-ce que c'est
correct de dire qu'à partir du moment où
la brèche est contenue il y a moins de risques que si on ouvre un peu plus
large la brèche? Est-ce que c'est correct de dire ça, tout simplement?
M. Helie
(C.J.) : Je dirais que c'est une période à un très grand risque parce
que la ratification de l'accord avec l'Europe est assez contentieux, à
Bruxelles aujourd'hui, avec les quelques membres, particulièrement la France, l'Italie et l'Espagne.
Alors, ce sont eux qui vont réagir possiblement avec la loi n° 88. Alors,
ça, c'est un risque d'aujourd'hui parce que les démarches qui sont en
train aujourd'hui.
M. Marceau :
O.K. Donc, si je vous disais que, pour ce qu'on appelle les produits du Québec,
là, les produits qui vont pouvoir
aller... enfin, les vins qui vont pouvoir aller en épicerie directement, de nos
artisans, et puis, pour le cas des alcools de distillateur, si on restreignait
aux cas de produits qui sont véritablement distillés ici, puis que donc on
évitait les alcools neutres qui
proviennent de l'Ontario, puis qu'on évitait les raisins qui proviennent de
l'Ontario, dans le cas du vin, est-ce
que vous croyez qu'on aurait une chance de passer un peu inaperçu? Est-ce que
vous pensez que ça pourrait être correct?
M. Helie
(C.J.) : Il y a
deux choses. Il y a aussi un accord de commerce à l'intérieur du
pays, alors il faut traiter les
produits de l'Ontario comme les produits du Québec
sur l'accord à l'intérieur. L'autre chose, il y a deux politiques qui sont vraiment en jeu ici,
dans la loi n° 88 : un, c'est l'accès au réseau, l'autre, c'est la
majoration, quelle sorte de majoration serait appliquée sur ces produits.
Alors, les deux choses vont ensemble.
M. Marceau :
O.K. Effectivement, là, dans ce cas-ci, il n'y a pas de majoration puis il y a
un accès privilégié...
M. Helie (C.J.) : Ça, ça ôte le
risque...
M.
Marceau : ...sauf que je pense que l'idée derrière le projet de
loi n° 88, c'est de restreindre ça à un sous-ensemble de ce qui est produit, là, très, très étroit. Ça
fait qu'en tout cas, écoutez... Bien, excusez-moi. Vous voulez rajouter quelque
chose? Allez-y.
M. Bolduc (Alain) : Oui, si vous me
permettez, M. Marceau.
M. Marceau : Bien sûr, bien
sûr.
M. Bolduc
(Alain) : Il demeure la règle fondamentale que tu dois donner à tous
les produits le traitement de la nation
la plus favorisée. Alors, même si vous le contenez, dans la mesure où c'est le
meilleur traitement, automatiquement ils peuvent lever la main pour dire
que c'est...
M. Marceau :
Je suis entièrement d'accord, je suis entièrement d'accord avec ce que vous
dites. Simplement, si les quantités
en cause sont marginales ou en tout cas ne sont pas trop importantes, j'ai
l'impression que ça pourrait passer mieux,
alors que, si on ouvre une petite porte, puis que tout d'un coup s'engouffrent
là-dedans quantités de produits de l'Ontario, par exemple, là, qui
contournent un peu puis qui sont vendus dans nos épiceries comme étant des
produits québécois, là je pense que, là, on s'achète des gros problèmes. En
tout cas, c'est mon impression. Peut-être que vous êtes d'accord avec ça.
Peut-être pour revenir sur une question
du député de Pontiac, il y a des gens qui sont venus nous voir ici puis qui
suggéraient que les spiritueux puissent être
vendus en épicerie. Est-ce que c'est une demande que vous avez déjà
formulée ou à laquelle vous avez déjà réfléchi? Je m'attendais, par
exemple, à voir ça dans vos demandes, et ça n'y est pas.
M. Bolduc
(Alain) : Ce n'est pas quelque chose qui est actuellement sur notre radar. On est très, très, très... on est contents du travail
qui se fait avec la SAQ, et pour l'instant, pour nous, ça va comme ça. On ne
veut simplement pas que d'autres
produits additionnels envahissent les réseaux de distribution les plus
accessibles, qui vont accentuer le phénomène
qu'on a souligné tout à l'heure, mais autrement ça va.
M. Helie (C.J.) : Toute nouvelle
route au marché devrait inclure les spiritueux.
M.
Marceau : O.K. Peut-être... Sur l'étiquetage, on a eu une discussion assez... enfin, à chacun des
intervenants on a demandé ce qu'ils
en pensaient. Je pense que vous avez dit tout à l'heure que vous êtes favorables à un étiquetage qui explique bien clairement ce dont il s'agit.
Pour vous, un produit du Québec, c'est un produit qui est 100 % québécois,
c'est ce que j'ai compris, c'est-à-dire que
100 % des ingrédients qui entrent dans le produit doivent être québécois.
Puis à ce titre-là vous nous
rappeliez que la Smirnoff, c'est québécois, et qu'il y a d'autres produits pour
lesquels on écrit «Québec» qui ne sont pas véritablement québécois.
Donc, vous
appelez à un meilleur étiquetage pour tous les produits, pas simplement pour
les spiritueux; pour le vin, pour la bière, pour tout ce qui existe,
pour tout ce qu'on...
M. Bolduc (Alain) : Et un meilleur
contrôle, bien sûr.
M.
Marceau : O.K. Puis, le meilleur contrôle par la RACJ, est-ce que vous
croyez que la RACJ a les ressources nécessaires pour accomplir son
mandat?
M. Bolduc (Alain) :
Je ne pense pas, nous ne pensons pas que la régie a toutes les ressources
suffisantes. Je pense qu'elle a les
compétences pour le faire, mais nos expériences par le passé nous démontrent
qu'il n'y a pas suffisamment de ressources pour être capable de veiller non pas
seulement... c'est-à-dire à l'application, justement, de toute la
réglementation.
M. Marceau :
Puis croyez-vous que le projet de loi n° 88 va, entre guillemets, alourdir
la tâche de la RACJ puis qu'en conséquence il devient d'autant plus
urgent de mettre des ressources supplémentaires à la RACJ?
M. Bolduc (Alain) : Définitivement.
M. Marceau : Définitivement. Très
bien. Moi, ça va pour moi, Mme la Présidente. Merci.
La
Présidente (Mme Hivon) : Je vous remercie. Alors, bien, merci
beaucoup d'être venus nous présenter votre point de vue, nous éclairer à
votre tour.
Alors, je
vais maintenant suspendre les travaux le temps que le prochain groupe, donc les
Vignerons indépendants du Québec, prenne place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 28)
(Reprise à 17 h 29)
La
Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors,
nous allons reprendre nos travaux pour entendre maintenant les Vignerons indépendants du Québec. Alors, je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation. Et je vous demanderais, d'entrée de jeu, de vous
présenter ainsi que la personne qui vous accompagne.
Vignerons indépendants
du Québec (VIQ)
Mme Reason
(Charlotte) : Parfait. Mme la Présidente, M. le ministre, MM. les
députés ainsi que tout le personnel entourant
cette commission, on vous dit merci de nous recevoir. On se présente :
Charlotte Reason, présidente des Vignerons indépendants du Québec,
copropriétaire du vignoble La Charloise, et Rémi Martel, qui est
administrateur, Vignerons indépendants du Québec, propriétaire du vignoble Les
Entreprises Riparia.
En tout
premier lieu, j'aimerais vous présenter les Vignerons indépendants du Québec.
Les Vignerons indépendants du Québec,
avant ça, c'était l'ADVVQ. L'Association des viticulteurs et viniculteurs fut
fondée en 2006 par un groupe de
viticulteurs vignerons dans le but de regrouper des producteurs et de favoriser
le partage du savoir-faire, et cette production est en émergence.
En 2010,
l'ADVVQ changeait de nom pour les Vignerons indépendants du Québec, appelés les
VIQ. Alors, ce changement de nom était en conformité avec la philosophie
adoptée par de nombreux vignobles en Europe, celle de vigneron indépendant.
• (17 h 30) •
En 2011, les
VIQ ont rejoint la Confédération européenne des vignerons indépendants. C'est
un partenariat des plus fructueux et enrichissant. La CEVI regroupe
11 pays producteurs de vin, incluant le Québec.
Nous sommes
aussi membres de l'Association des vignerons du Canada, le CVA. VIQ est le seul
groupe au Québec à être admis au sein
de cette association qui chapeaute la certification VQA établie dans l'Ontario
et le B.C. L'association avec le CVA a pour but de nous développer à
travers le Canada et dans le monde entier. En effet, le VQA est la seule
certification canadienne acceptée dans les accords internationaux.
Notre organisation compte 22 vignobles. À
ce stade-ci de la présentation, nous avons une mise au point très importante à faire. L'AVQ, l'Association des
vignerons du Québec, a déclaré devant cette Chambre qu'elle représentait
95 % des bouteilles produites au
Québec. Nous vous présentons quelques chiffres très importants pour bien
analyser la portée de votre décision
que vous aurez à prendre dans quelques semaines. Il y a présentement
127 permis émis de producteurs
artisanaux du vin. Sur les 127, 60 sont membres de l'AVQ. Or, on en déduit
qu'il y a 60 vignobles qui ne sont pas membres de l'AVQ. Cela
signifie, selon cette déclaration, que 60 autres vignobles qui ne sont pas AVQ
ne produisent que 5 % des bouteilles. C'est impossible.
En résumé, la
répartition : AVQ, 53 %, les VIQ, 17 %, et les autres qui ne
font partie d'aucune association, 30 %. Conclusion : Ne pas
oublier les 47 % des autres vignobles dans vos décisions.
Alors, la
définition d'un vigneron indépendant du Québec, si on parle de philosophie,
c'est qu'il cultive sa vigne, vinifie son propre raisin, dont 100 %
Québec, et il s'occupe de la mise en marché de son vin. Parce qu'il cultive ses
vignes, vinifie son vin et signe sa
bouteille de son savoir-faire, le vigneron indépendant garantit la continuité
du lien entre le terroir et le produit.
Alors, on va présenter notre exposé concernant
le projet de loi n° 88.
Le
gouvernement du Québec, par la présentation du projet de loi n° 88,
apporte aux vignerons un nouveau souffle par les opportunités qu'on y
trouve. Il a tenu sa promesse, et nous en sommes reconnaissants.
Nous sommes à
établir la base de notre industrie en adaptant les méthodes de culture et de
vinification à notre réalité climatique. Une nette amélioration est déjà
notée au niveau de la qualité du vin au Québec. Nous avons étudié le projet de loi en profondeur et nous avons sondé
l'opinion de nos membres ainsi que des personnes gravitant autour de l'industrie du vin au Québec. Tous sont unanimes,
le projet de loi n° 88 peut aider de différentes façons les vignerons qui
désirent agrandir leur marché. Que ce soit par la
présence de ses vins en épicerie ou par l'opportunité d'ajouter une nouvelle
gamme de produits par l'entremise de la distillation, il pourra y trouver un
éventail de possibilités.
Une étude
réalisée en 2012 par le Dr Frédéric Laurin, qui est Ph. D. en économie et
professeur titulaire, qui est intitulée Impact de la
libéralisation partielle, a évoqué le marché du vin en
épicerie. Il déplore que de nombreux producteurs
québécois choisissent de ne pas distribuer leurs produits à la SAQ. Les
procédures et la logistique y sont tout simplement trop complexes et coûteuses, mais c'est surtout parce que la
SAQ implique indifféremment une marge de 145 % sur
tous ses produits. Ceci a pour effet d'augmenter le prix de vente des produits québécois à un
niveau tel qu'il décourage les clients. Il affirme d'une
façon très conservatrice qu'en libéralisant l'industrie du vin québécois cela
générerait une production supplémentaire de
63 millions de dollars par année, apportant ainsi une augmentation de
recettes et de taxes du gouvernement.
On a
ajouté en annexe à votre document le rapport final de l'industrie du vin fait
en 2014 par le MDEIE. Rédigé en concertation avec les deux associations, ce rapport vous révèle
plusieurs points soulevés dans le projet de loi n° 88.
Alors,
nos suggestions pour le projet de loi, c'est quelques éléments qu'on aimerait
peut-être que vous apportiez des changements, à savoir, premièrement, la limite établie à 16 % comme taux d'alcool maximum pourrait être
haussée à 20 %, pour les vins
fortifiés, mais être idéalement haussée à 22,9 %. Deuxièmement, la
livraison pourrait être effectuée par
un service de messagerie ou un distributeur comme la SAQ, les distributeurs
associés ou tout simplement un système parallèle
de distributeur, plutôt que d'être seulement faite par des personnes
travaillant dans le vignoble. Troisièmement, les vignerons aimeraient que l'identité de leurs produits demeure dans
son intégralité, soit avec les cépages et le millésime. C'est le patrimoine de la bouteille. La
réglementation permet présentement d'indiquer «Produit du Québec» sur
l'étiquette d'une bouteille de vin si au moins 85 % des raisins
utilisés proviennent du Québec. Afin que le consommateur puisse distinguer entre les produits 100 % Québec
et les autres, on suggère deux solutions : changer la réglementation pour que la désignation Produit du Québec ne s'applique qu'aux
produits faits exclusivement à partir des raisins cultivés au Québec
ou obliger les producteurs utilisant du raisin acheté à l'extérieur du Québec,
comme en Ontario ou ailleurs, de mentionner
sur leurs bouteilles le pourcentage de raisins qui proviennent de l'extérieur
ainsi que d'où il vient, ce raisin-là.
Afin de
garder le caractère du produit tel que présenté dans le projet, nous sommes
conscients qu'il est important
d'implanter des contrôles pour établir la véracité du produit 100 % Québec
et de bonne qualité, ceci dans le but de se prémunir
contre les tromperies qui pourraient être utilisées, comme les raisins de l'Ontario,
Californie, des concentrés de vin qui
viennent d'ailleurs au monde. Il faudrait exiger des analyses chimiques,
requises en cours d'élaboration du vin.
Il faut aussi prendre en compte le faible
pourcentage des vignerons qui ont la certification vins du Québec, soit 17 %. On vous a joint le tableau en
annexe. Si l'obligation est imposée, à savoir Vins certifiés du Québec, dans
les épiceries, seulement
21 vignobles sur les 127 vignobles profiteront de ce marché.
Conclusion : une loi n° 88 qui va profiter à 17 % des
vignobles.
Comparaison
avec l'Ontario et le VQA. En Ontario, il y a 150 vignobles. Sur les 150,
il y en a 120 qui ont des produits
certifiés, soit 80 % des vignobles ontariens ont des produits certifiés.
Pourquoi que le VQA, ça fonctionne? Parce que c'est une organisation indépendante. C'est des bonnes expertises de
certification, ils ont des points de contrôle bien réglementés et
appropriés à la traçabilité, et l'étiquette reflète vraiment le contenu de la
bouteille.
Alors, les
formes de contrôle qu'on peut vous suggérer, une première forme de contrôle
existe déjà via les rapports mensuels soumis par les vignerons à la RACJ. Ces
rapports indiquent le vin en vrac, les produits embouteillés, les récoltes et les ventes. Les informations qui
devraient être ajoutées à ce rapport sont les quantités de raisins achetés
et la provenance des raisins. La formule vous est démontrée dans le
tableau 3 du présent document, que vous avez dans le mémoire.
L'Université Cornell a conçu des tables de
conversion pour établir le poids des raisins récoltés versus le nombre de bouteilles. On établit, selon ce document,
qu'un plant peut produire 2,5 bouteilles, mais qu'au Québec
il faudrait penser plus à 1,75 à deux bouteilles.
Les vignerons
devraient être obligés de fournir les pièces justificatives des achats et de
leurs plans parcellaires dans un
rapport. Celles-ci constitueraient un excellent point de contrôle fiscal. De
plus, si le vigneron ne fait que vinifier les raisins d'autrui, il n'est plus un artisan mais un transformateur
et, de ce fait, il devrait perdre ses droits de producteur artisan.
Nous vous
recommandons de ne pas vous laisser tenter de nous greffer d'une obligation que
nos vins soient certifiés vins du Québec, car 83 % des vignobles
seront absents des tablettes de la SAQ et des épiceries. Auraient-ils la même exigence auprès des cidriculteurs et autres
producteurs de boissons alcooliques de fruits certifiés en épicerie? Sûrement
non. Il serait discriminatoire de nous l'exiger.
Nous ne
sommes pas contre le fait de produire des vins certifiés. Au contraire, en
collaboration avec le CVA, nous travaillons à développer un VQA Québec.
Cette certification apportera une valeur ajoutée aux vins et permettra le développement d'appellations plus spécifiques,
accroissant davantage la valeur de la bouteille de vin produite. En
grande partie, nos membres sont accompagnés
dans leur production par des consultants chevronnés en oenologie et peuvent
présenter leurs vins avec des analyses chimiques sérieuses et de haut
niveau.
Fait à noter, plusieurs de nos vignerons sont
médaillés dans différents concours internationaux. Nous avons 12 vignobles ayant rapporté des médailles sur
un total de 22 vignobles, soit 55 % des VIQ ont rapporté des prix par
la qualité de leurs vins. Pourquoi?
Parce qu'on a mis la qualité des vins en premier plan pour changer l'opinion
des consommateurs face aux vins québécois et avec des produits
100 % québécois.
En mot de la
fin, au risque de se répéter, nous désirons de tout coeur l'adoption de ce
projet de loi, il en va de la croissance de l'industrie du vin au
Québec. Et on vous dit merci.
• (17 h 40) •
Et
finalement, en guise de conclusion, nous aimerions que le projet de loi n° 88
amène des ramifications dans un prochain
tome qui comporterait d'autres demandes qui nous tiennent à coeur telles que la
vente interprovinces, la vente en
vrac; avec le programme PAPAQ, de ne pas nous greffer l'obligation des vins
certifiés pour le paiement additionnel de
2 $ la bouteille; permettre la vente en ligne; on vous demande d'interdire
toute forme de concentré dans les vins 100 % Québec;
de redéfinir le terme «producteur artisan», parce que présentement ce sont des industriels portant le nom d'artisans qui déterminent les règles du marché du producteur
artisan; le nombre de bouteilles serait déterminant; rendre
aussi la directive permanente en ce
qui concerne les extensions de vente pour nos produits dans les marchés
publics, expositions agricoles; et,
huitièmement, développer le VQA Québec; et, neuf, permettre la sous-traitance pour
certaines opérations au vignoble.
La table est
donc mise pour une prochaine rencontre. Il n'en tient qu'à vous d'en faire la
promesse aujourd'hui, surtout que maintenant nous savons que
vous êtes en mesure de tenir vos
promesses. Merci encore pour le projet n° 88. Il faut surtout
penser à l'ensemble des producteurs. Merci.
La
Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup, Mme Reason.
J'allais vous féliciter parce que vous étiez rentrée exactement dans le 10 minutes, juste avant
que vous nous disiez tous les autres sujets que vous aimeriez aborder dans
l'avenir. Mais je vais mettre ça sur le compte d'un excès d'enthousiasme.
Donc, sur ce, je vais céder la parole au
ministre pour une période de 15 minutes environ.
M.
Leitão : Très bien.
Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Reason, M. Martel, bonjour.
Merci d'être là, de nous présenter votre mémoire, vos préoccupations,
vos priorités. On a bien pris note de vos propos.
J'aimerais peut-être
vous amener sur une question qui a été discutée ici par plusieurs
des intervenants, la question
du prix minimum. Donc, qu'est-ce que vous pensez de cela? Est-ce
que vous pensez que c'est nécessaire,
que ce serait utile d'avoir un prix
minimum pour toutes les boissons alcooliques à travers tout le réseau, SAQ mais
aussi le réseau des épiceries?
Mme Reason
(Charlotte) : Prix minimum,
si je vous donne l'expérience, qu'est-ce
qui se passe en Europe, parce que,
voilà deux ans, j'ai eu l'opportunité d'assister à des conférences concernant
le vin en épicerie, ce qui était très actuel, et prix minimum ainsi que la tenue des vins en épicerie apportaient
certains problèmes de gros, surtout quand les vignerons indépendants en
France occupent 65 % du territoire, dont ses 7 000 membres.
Alors, qu'est-ce qui cause le plus de problèmes, c'est le prix minimum et la
conduite aussi des détaillants.
Donc, prix minimum, je pense, de toute façon,
déjà là, nous autres, on est à déficit minimum. On ne peut pas accepter qu'un prix minimum soit placé, parce que
les rendements d'un plus gros vignoble, quelqu'un qui utilise du vin... du
raisin de l'Ontario, qui n'a pas besoin de renchausser ni de tailler, donc,
n'ont pas le même coût de revient, alors, si on corrobore les coûts versus le revenu, avec un prix minimum, ce sera
beaucoup moins intéressant pour nous en épicerie.
M.
Leitão : Très bien. Maintenant, pour ce qui est de, donc, la
commercialisation de vos produits, on voit que la SAQ fait un effort, il y a déjà un programme de
valorisation de produits québécois à la SAQ. Comment vous voyez ça maintenant que... Si le projet de loi est adopté,
vous auriez aussi la possibilité de le vendre, votre produit, dans les
épiceries. Comment voyez-vous la valorisation du produit québécois?
Mme Reason
(Charlotte) : Bien, c'est, disons, une façon de valoriser notre
produit aussi. Parce que, pour mettre nos produits à la SAQ, quand on
est des plus petits vignerons, c'est vraiment très difficile. Je sais qu'on a
parlé de la logistique, et c'est très
complexe. Alors, je vous invite de voir les politiques du B2B de la SAQ, et
vous allez voir que c'est très
complexe. Alors, ça veut dire, pour nous, achat de codes-barres, maintenance de
codes-barres, d'acheter des palettes
qui se situent là. Ça veut dire le transport aussi, qui est très difficile.
Aussi, nos vignobles, les plus petits vignobles sont fermés l'hiver. Bien souvent, la SAQ va passer l'hiver pour venir
chercher nos produits, donc des produits... Logistique épouvantable.
Bien, je ne
vous en nomme seulement quelques-uns. Alors, si on y pense, en France, les
rosés, O.K., au mois d'août on
vinifie tout ça; nous, c'est au début d'octobre, on perd déjà deux mois. Alors,
la SAQ veut avoir ses rosés pour le mois de février. C'est seulement
quatre mois de fabrication du rosé, ce n'est pas beaucoup pour se préparer.
Donc, c'est
toute cette logistique-là qu'il est assez difficile, pour des moyens et petits
vignobles, de transiger avec la SAQ.
On n'a pas les moyens non plus de faire une majoration de 145 %, c'est
beaucoup trop cher. Alors, on ne peut pas se permettre ça, c'est
impossible.
En épicerie,
vous nous faites un projet de loi où est-ce qu'on ne parle pas de majoration.
C'est sûr qu'on va avoir à négocier
avec le détaillant, mais il reste une chose certaine, c'est que j'espère que ce
n'est pas 145 %. Donc, ça nous rouvre une porte très grande, très
grande pour grandir aussi puis peut-être y aller, à la SAQ, sur certains
produits.
M.
Leitão : Très bien, merci. Maintenant, il y a la question du
transport, bon, la logistique mais la question du transport. Pour
tirer profit pleinement de la capacité de vendre directement à l'épicerie,
comment voyez-vous la réglementation autour du transport?
Mme Reason
(Charlotte) : Le transport,
c'est quand même pas mal vague à l'intérieur du projet de loi n° 88. Là,
présentement, c'est interdit, O.K., alors on ne transporte pas, ça nous prend une
façon de transmettre cette marchandise-là.
Que ce soit nous ou que ce soit un transporteur, je ne sais pas en quoi le
transporteur peut commettre des délits à transporter notre alcool, O.K.?
Alors, on ne lui demande pas de le boire, on lui demande de le livrer. Donc, je
ne comprends pas cette loi-là, que ça
n'a pas été modifié avant, parce que, les restaurants, si on est conforme à la loi qui
est là présentement, c'est que, le
restaurant, il faut qu'il vienne acheter le vin chez nous. C'est
difficile à vendre, ce procédé-là. Donc,
on va être beaucoup plus alléchant pour le marché d'aller en épicerie
nous autres mêmes, à livrer, à... Même pour les restaurants, j'espère
que vous allez aussi niveler ça pour dire qu'on peut livrer, les restaurants.
Non, le
transport, il faut que ce soit vraiment permis, là, par un
transporteur. Je crois qu'il est passé ici des personnes qui ont parlé de la distribution de la SAQ,
comment c'était bien fait. Il y a les distributeurs associés aussi, il peut y avoir
un service de messagerie. Mais vous savez
qu'une bonne partie des vignobles au Québec sont en région, alors c'est beaucoup aussi
les épiceries qui sont à la proximité qui vont acheter nos produits, donc...
Mais toutefois il faut prévoir, si ce n'est pas modifié avant 50 ans, au moins de le
modifier là, que, si, le transport, vous ne voyez pas d'inconvénient, il soit
permis.
M. Leitão : Merci beaucoup. Collègues...
La Présidente (Mme Hivon) : M.
le député de Sainte-Rose.
M.
Habel : Oui, merci, Mme la Présidente. Premièrement, je vous remercie d'être venus à la commission
pour nous faire valoir vos points de vue.
J'ai une
première question. Dans votre rapport, dans votre mémoire, vous parlez
de la limite du pourcentage du taux
d'alcoolémie que vous souhaiteriez hausser à 20 % et même, idéalement, à
22,9 %. J'aimerais connaître un peu la quantité puis la proportion,
part de marché de produits qui sont au-dessus de 16 %.
Mme Reason (Charlotte) : Question de
technicalité comme ça, on va... Rémi.
M. Martel
(Rémi) : On n'a pas les
chiffres exacts en termes de taille par
rapport aux membres. Ça, c'est de
voir... Probablement que la... Déjà, la SAQ, ils doivent avoir une bonne idée, là, de la
proportion de produits entre 16 % et 20 %. Il y a plusieurs
artisans qui vont faire des vins fortifiés, donc c'est vraiment
cette catégorie-là qui est visée lorsqu'on veut passer de 16 % à 20 %, là.
M.
Habel : Parfait, merci. Un
autre élément que vous mentionnez, c'est au niveau de l'étiquetage, vous
souhaitez avoir l'aspect du cépage et du millésime. Beaucoup d'autres
intervenants ont présenté cette demande aussi.
Vous
expliquez qu'il y a un irritant par rapport à la double
création d'une étiquette. Pouvez-vous élaborer sur la double création
d'étiquette?
Mme Reason
(Charlotte) : Oui, parce que,
si vous demandez quand même... Le double étiquetage, de toute façon, ce serait un irritant pour tout le monde. Parce que, là, on a
parlé de l'autocollant, ce serait difficile, et tout ça. Quand il restera seulement
cet irritant-là, on va s'en occuper. C'est beaucoup plus vite, vendre des
caisses, que de vendre deux bouteilles par
deux bouteilles. Donc, c'est sûr que le double étiquetage est difficile pour
nous autres pour une certaine façon,
c'est que ça prend la machine pour les apposer, les deux étiquettes, parce qu'il faut qu'elles soient à la même hauteur, tout ça.
Donc, il va
nous la falloir, la double étiquette, pour justement amener le
code-barres que les détaillants vont avoir besoin, etc., donc, et puis la description de nos cépages, puis les
douceurs que ça peut amener aussi dans la vie, dans l'accord mets et vin. Donc, c'est sûr que ça va nous le
prendre, le double étiquetage. Mais qu'est-ce
qu'on parle, dans notre mémoire,
c'est qu'il y a un étiquetage
différent en épicerie et un étiquetage différent chez nous, au vignoble. Alors,
ça, ça va causer des irritants, parce que
seulement pour faire les plaques en imprimerie c'est assez
coûteux, et ce n'est vraiment pas facile à gérer. Pour un plus petit
vignoble, c'est plus facile, mais, pour les moyens et les plus gros, avoir
double étiquetage... Ah! on n'a pas amené le bon étiquetage, peu
importe. Alors, oui, c'est un irritant.
Mais, s'il ne reste seulement que cet
irritant-là, on va s'accoutumer. On veut faire de la business en épicerie.
M. Habel : Parfait, merci. Est-ce
que vous vouliez ajouter quelque chose?
• (17 h 50) •
M. Martel
(Rémi) : Bien, juste clarifier. Quand on parle de double étiquetage,
présentement il y a une étiquette. Puis,
avec le projet de loi comme il a été présenté, si on ne permet pas le
millésime et les cépages, là, à ce moment-là, il y aurait création, là, en fait, d'une
double étiquette, une avec millésime puis une sans millésime.
Le fait
d'accepter le millésime et le cépage, ça ne causera pas de problème. À ce moment-là, ça va être la même étiquette.
M.
Habel : Merci. Vous parlez
du pourcentage des raisins utilisés qui proviennent du Québec,
vous voulez que le consommateur
distingue les vins qui sont 100 %
issus des raisins du Québec et d'autres qui sont à 85 % et plus, d'avoir
une distinction entre les deux. L'une de vos
solutions, c'est de changer la réglementation pour que la désignation Produit
du Québec ne s'applique qu'aux produits
faits exclusivement à partir de raisins cultivés au Québec, et votre deuxième
option est d'obliger les producteurs
utilisant du raisin acheté à l'extérieur du Québec de spécifier sur l'étiquette
le pourcentage des raisins. Est-ce que vous avez une préférence d'une
option à l'autre ou vous trouvez que les deux sont adéquates?
Mme Reason (Charlotte) : Ma
préférence, c'est 100 % Québec, c'est sûr. C'est ça, c'est notre mission.
Et je pense que, le consommateur
aussi, on a le reflet du consommateur dans nos vignobles. C'est que lui, il
fait la relation d'une vigne et d'une
bouteille de vin. Alors, la première chose qu'il demande, quand on s'est serré
la main, c'est : Le vignoble est
où?, O.K., ils veulent voir l'espace, et tout ça, donc... Puis c'est tout fait
à Québec, là? On a beau leur
dire : C'est simplement la bouteille qui est faite en Chine, puis certains
accessoires, oui, c'est tout fait à Québec, ah! ça, j'achète. Ça, c'est
sûr.
À
Noël, c'était la même chose, c'était le point d'entrée. Est-ce que c'est un
produit 100 % Québec, là, vous n'avez pas mis rien dans... Non.
Alors, c'était le point d'entrée pour la vente.
Donc,
je pense qu'il est préférable d'y aller à 100 % Québec. Et je pense que
vous travaillez pour le Québec, le gouvernement québécois. Ça va dans
votre vision aussi, faire du 100 % Québec.
M.
Habel : Actuellement, il y a certains vignobles qui sont à 85 %.
Est-ce que vous pensez qu'on devrait leur donner un certain temps pour
atteindre le 100 %, compte tenu que, par exemple, ça peut prendre quatre
ou cinq ans à produire une première vigne?
Mme
Reason (Charlotte) : Bon, je vais vous donner un exemple. La
certification des vins, bien, les vins certifiés du Québec, ils ont commencé en 2009 de dire : Bien, on va donner un
certain temps avant que tout le monde ait atteint le 100 %, alors ils ont mis ça deux ans
après, trois ans après. Il a fallu qu'ils... Puis ils remontent toujours un
petit peu.
C'est
sûr que ce n'est pas facile. Quand on a une petite porte d'entrée, c'est facile
de s'y glisser puis de dire : Bien, ouf! je vais faire encore une autre année, je vais demander encore une
autre année. Il faut qu'on vienne à arriver pour un 100 % Québec,
et ça presse, je pense. Et donner...
O.K.,
c'est sûr qu'il y a des mauvaises productions, alors, des mauvaises récoltes.
Nous, on donne à notre organisation... dire :
O.K., tu as une mauvaise récolte — et puis ça, c'est pris en considération dans
les autres pays aussi — tu as une mauvaise récolte, ça n'a pas bien été, tu as été
malade, O.K., on te donne deux chances, mais il faut que tu demandes l'autorisation. Puis on le sait, que, dans la
région, Untel, il a eu des dégâts, n'importe, on est capables de comprendre,
on va lui donner deux chances pour que ce soit autorisé. Mais après ça il n'en
a plus, de chance, parce qu'on les connaît, maintenant,
les problèmes, en viticulture québécoise, on a des bons spécialistes sur le
terrain qui amènent des solutions, O.K.?
Alors, il y en a qui s'exposent... Puis je peux vous dire qu'il y a des cas
extrêmes qui vont dire : Bien, moi, j'aime mieux vinifier avec les raisins des l'Ontario. Ça m'arrive, c'est déjà
tout pressé, je mets ça dans ma cuve de levure, et c'est parti. Mon vin québécois, je vais le vendre.
Ça, c'est difficile à gober, tu sais, c'est... On se dit : Bien là, ce
n'est pas la façon qu'on veut faire du vin au Québec, je pense.
La Présidente (Mme
Hivon) : Merci beaucoup. Alors, on va maintenant passer aux
échanges avec le groupe formant l'opposition officielle, au député de Berthier,
pour une période d'environ neuf minutes.
M.
Villeneuve : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, madame.
Bonjour, monsieur. Merci pour votre mémoire drôlement étoffé.
Je
vais vous lire... Parce que, dans le projet de loi... Puis je veux aller dans
le même sens que le collègue de Sainte-Rose,
au niveau de qu'est-ce qu'on retrouve dans la bouteille exactement.
Présentement, on comprend que les vins
certifiés, c'est 100 % Québec.
Et là on parle de 85 %-15 %, ça pourrait être 90 %-10 %,
peu importe, là. D'ailleurs, comme vous
le savez, dans le projet de loi, on s'en tient, je pense, à ce qui est
présentement permis. Et je vais juste le lire pour les gens qui nous écoutent aussi, qu'ils puissent
suivre, là : «Dans ce contexte, la régie autorise qu'un titulaire de
permis de production artisanale de vin puisse fabriquer son produit
avec :
«a) au minimum
50 % de ses propres raisins, frais ou transformés;
«b)
au maximum 15 % de raisins frais ou déjà transformés, de jus ou de moûts
concentrés pouvant provenir de l'extérieur du Québec;
«c)
le solde pouvant être constitué de produits d'un autre producteur agricole du
Québec sous forme de raisins frais ou transformés.»
Tout est dans
l'interprétation de cette règle-là, parce que, moi, de la façon dont je
l'interprète, puis vous me corrigerez si je
me trompe, ce serait sur le volume. Donc, je pourrais produire
100 litres — puis on
va en ajouter un peu, on va dire
1 000 litres — 1 000 litres au volume, mais je pourrais très bien
prendre une bouteille, ne prendre que du raisin et... m'approvisionner de 50 % ailleurs, en Ontario, exemple, pour
doubler ma production, et je pourrais très bien retrouver dans une bouteille sur les tablettes où ce serait
100 % ontarien, mais ce serait marqué Produit du Québec. Est-ce que je me
trompe si je pousse la limite à l'interprétation de ça?
Mme
Reason (Charlotte) : Bien, si vous voyez qu'est-ce qui est appliqué en
Ontario, sur le VQA, il n'y a pas à
s'y méprendre, c'est 100 %, O.K., du raisin ontarien. Tout qu'est-ce qui
est en dehors de ça, on appelle ça, en termes de métier... c'est du «blend», O.K., c'est du mélange, alors, à ce
moment-là, c'est va être Produit du Canada. O.K.? Il y a beaucoup de
termes puis... le «cellar blend» aussi, il y en a plusieurs.
Mais
une chose est certaine : si on veut que ce soit un vin ontarien, là-bas,
c'est 100 %, il n'y a pas de pourcentage... D'accord? Et ici ça amène de la confusion, les pourcentages, parce que
c'est dit, dans la directive du 50 %, 50 % de sa production.
S'il a fait une production de 1 000 livres, est-ce que c'est
1 000 livres qu'il a le droit d'acheter, de raisins québécois, quand
on parle de 50 % de sa production?
M.
Villeneuve : Restons au Québec. Est-ce que je peux aller
aujourd'hui dans un vignoble acheter une bouteille de rosé, et que ce soit écrit Produit du Québec,
et qu'il pourrait y avoir dans cette bouteille-là zéro raisin du Québec? Parce
que la directive que
je viens de vous lire ne parle pas de volume ou de bouteille. Est-ce que c'est
possible que je puisse retrouver au
Québec, dans un vignoble, une bouteille où c'est marqué Produit du Québec, mais
que la bouteille contienne zéro
raisin du Québec? Est-ce que c'est possible, selon vous? Selon l'interprétation
que j'en fais, moi, ce serait possible.
M.
Martel (Rémi) : Dépendamment du vigneron, s'il y a un vigneron qui
décide de faire... c'est possible que vous
retrouviez ça, mais ça veut dire que le vigneron... L'interprétation qu'on en
voit, c'est que, le vignoble, 50 % de sa bouteille doit être de sa production, puis on a le maximum de 15 %.
Donc, il reste le 50 %. Au maximum, par bouteille, il faut qu'il y
ait un 15 % de l'extérieur pour pouvoir... Produit du Québec.
M. Villeneuve :
Oui. Ne pensez-vous pas que cette directive-là devrait être plus précise pour
qu'on s'assure, justement, que les Québécois
achètent, lorsqu'ils achètent Produit du Québec... Parce que, là, on s'en va
vers une libéralisation du marché au niveau des vins du Québec dans les
épiceries, mais, quand je regarde cette directive-là, moi, comme consommateur, je me dis : Je ne suis pas sûr
que ce que je vais acheter à l'épicerie va être... Même si c'est marqué dans
la... Parce qu'on disait tantôt que les
détaillants pourraient faire une petite section vins du Québec, mais je
pourrais très bien me retrouver à
acheter quelque chose qui a zéro raisin du Québec dedans, si je regarde cette...
Alors, ne pensez-vous pas qu'il y
aurait lieu d'apporter des précisions et de recadrer davantage, plus serrément,
si je peux dire ça comme ça, la directive?
Mme Reason
(Charlotte) : De beaucoup, O.K., le resserrement, de beaucoup.
M. Villeneuve :
De beaucoup. Bon, d'accord.
M. Martel
(Rémi) : En fait, c'est une question de contrôle, quel niveau de
contrôle qu'on veut avoir, est-ce qu'il y a une question de bonne foi du
vignoble qui est remise en doute ou pas.
Le
vigneron qui part un vignoble monte son plan, il a un nombre de plants précis
qui est vérifié par un agronome du MAPAQ lorsqu'il fait sa demande de
permis de producteur artisanal. Donc, déjà, au niveau de la RACJ, on a l'information du nombre de plants que le vignoble
a. Le vignoble va produire, donc le suivi de ses récoltes, combien il y a de kilos il récolte chaque année, le suivi des
transformations, donc le raisin est transformé, et on va suivre les quantités
de litres produits. Et, lors des embouteillages, on va suivre également le
nombre de bouteilles produites.
Donc,
sans vouloir diriger vers certification, le danger avec ça, c'est qu'une
certification — on n'est
pas contre les certifications — en fait, c'est un système de bonification de
la bouteille. Les certifications, c'est principalement un système de bonification de la bouteille, donc on rajoute
une valeur à la bouteille, puis il ne faut pas le voir un système de
dévalorisation d'un produit qui n'est pas certifié. À quel niveau
veut-on...
• (18 heures) •
M.
Villeneuve : Vous
savez, on a une seule chance de faire une bonne impression, paraît-il, c'est la
première fois, et là on va ouvrir le
marché et... Mais en tout cas je retiens que vous seriez tout à fait d'avis qu'on resserre cette directive-là pour protéger le consommateur et s'assurer, si les épiciers mettent des
vins sur les étagères en disant «section Québec», qu'on se retrouve minimalement à savoir exactement ce
qui est dans la bouteille, je retiens ça.
Puis je veux vous
entendre sur... Parce que tantôt, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme
Hivon) : Je m'excuse, M. le député de Berthier, deux secondes.
Puisque nous allons dépasser 18 heures,
j'aimerais juste m'assurer que nous avons le consentement des députés.
Merci. Désolée. On continue.
M.
Villeneuve : Oui. Tantôt,
vous disiez : Vivement qu'on arrive à 100 % du contenu de la bouteille, produit du Québec. C'est ce que vous avez dit tantôt, on
pourra vérifier les galées, là. Et, par contre, quand je lis dans votre
mémoire, à la page 7, vous dites...
Parce que, les vins certifiés, c'est ça dont on parle. Alors, quand... Bien, en
tout cas, moi, c'est ce que j'ai
entendu, et vous me direz si je me trompe ou si les gens qui nous ont dit ça se
trompent, mais vous dites : «Nous vous recommandons de ne pas vous
laisser tenter de nous greffer d'une obligation que nos vins soient certifiés
vins certifiés du Québec», et là vous
rajoutez que «83 % des vignobles seront absents des tablettes de la SAQ».
J'essaie juste de comprendre, là. Sans dire qu'il y a contradiction dans
vos propos, là, j'essaie de comprendre.
Mme
Reason (Charlotte) : O.K. Alors, au Québec, il y a 17 vignobles
qui ont des produits certifiés vins du Québec, O.K., avec la certification, donc seulement 17 vignobles...
17 %, 21 vignobles. Donc, ça veut dire que le 83 % qui n'ont
pas de vin certifié vin certifié du Québec,
bien, si vous mettez dans la clause de la loi qu'il faut que le vin soit vin
certifié du Québec, 83 % des
vignobles que vous avez au Québec ne pourront pas être sur les tablettes de
l'épicerie, si vous greffez cette
condition-là. Parce que, dans le programme PAPAQ, la première année, il était
dit que vous allez avoir 2 $ de plus la bouteille si vos vins sont certifiés à partir de telle date. C'était
discriminatoire parce que, les vins certifiés du Québec, ils ne
l'ont pas demandé aux cidriculteurs, ils ne l'ont pas demandé aux autres
boissons alcooliques ni aux autres produits qui se retrouvent sur les
tablettes. Donc, c'est pour ça qu'on essaie de vous faire penser que, si vous
greffez la condition vin certifié du
Québec... Avec les méthodes de contrôle qu'on vous a suggérées, puis avec
surtout l'approbation de la SAQ, qui va passer plusieurs heures à
analyser nos vins, je pense qu'on va pouvoir arriver à quelque chose.
M. Villeneuve :
...aussi que le consommateur puisse s'y retrouver un jour, là, sinon...
Mme Reason (Charlotte) : Oui.
M. Villeneuve :
Bien, écoutez, je vous remercie, je vous remercie. Moi, ce que je retiens, à
tout le moins, de votre intervention,
et là-dessus je trouve ça extraordinaire, moi, personnellement, c'est que
l'ensemble des vignerons du Québec s'entendent
pour dire que vivement qu'on arrive à un produit 100 % du Québec. Mais
c'est fantastique! Et je pense que c'est
un objectif qui est atteignable et qui est... je m'aperçois qu'il est même
pratiquement unanime chez les producteurs de vin du Québec, alors c'est fantastique. Maintenant, il faut s'assurer
que ce qu'on met en place va effectivement livrer la marchandise et ne
pas flouer le consommateur dans diverses appellations différentes.
Alors, si vous
voulez, il reste du temps, vous pouvez compléter avec un commentaire.
La
Présidente (Mme Hivon) : Il ne reste malheureusement pas de temps, c'était une conclusion du député de
Berthier.
M. Villeneuve :
Bien, je vous remercie. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Hivon) : Et je vais maintenant passer au député de Granby pour
les échanges avec le deuxième groupe d'opposition.
M.
Bonnardel : Merci, Mme la Présidente. Messieurs dames, bonjour. Je sens un petit
combat de chiffres entre vous et l'AVQ quand je commence à lire votre
mémoire : Tu en as tant, j'en ai tant; ça, c'est vrai, pas vrai. Ma seule question,
la première, très simple : Vous dites avoir 22 vignobles. Combien de
bouteilles ces 22 vignobles mettent sur le marché dans une année?
Savez-vous?
Mme
Reason (Charlotte) : De
nombre de bouteilles... Nous autres, les vignobles qui sont à l'intérieur, qui
sont avec nous autres, ils n'ont pas tellement d'âge, O.K., c'est
environ de six à huit ans, O.K., de vignoble, alors c'est relativement jeune. Plusieurs qui ont pris des
envols, qui sont maintenant à 15 000 bouteilles, et ça continue à
monter, parce qu'on commence avec 5 000, et puis ça monte.
Alors,
je n'ai pas le nombre exact de bouteilles, là, qu'on peut produire, mais on
peut quand même dire qu'il y en a pas
mal à l'intérieur de notre groupe, comme le vignoble Garonne, Château Taillefer
Lafon, des choses comme ça. Alors, c'est quand même du monde qui vendent
pas mal de bouteilles.
Dans
les 30 % qui restent, qui ne sont ni avec les VIQ ni avec l'AVQ, il y en a
quand même des très gros qui sont là-dedans.
M.
Bonnardel : Pour notre bénéfice, si vous êtes capables, au
retour à la maison, là, de nous donner le chiffre... Ce serait bien que
vous soyez capables de nous dire combien votre association produit en
bouteilles.
Mme
Reason (Charlotte) : Oui, on va essayer de vous obtenir... À
l'intérieur du document du MDEIE, vous avez des données récentes que ça n'a jamais été sorti beaucoup à savoir
qu'est-ce qui se vend à la SAQ, qu'est-ce qui se vend dans nos vignobles, O.K., et qu'est-ce qui se vend
ailleurs, dans les événements spéciaux. Vous avez quand même une bonne
proportion. Des chiffres qui datent de 2014, mais, quand même, c'est quand même
quelque chose.
M.
Bonnardel : O.K. Je n'ai pas le choix de revenir, moi non
plus, sur ce que mon collègue vous a dit tantôt, dans votre mémoire à la page 7, là, de nous
recommander de «ne pas vous laisser tenter de nous greffer d'une obligation» de
vins certifiés du Québec. Vous dites, deux
paragraphes plus bas : «L'IGP qui est présentée au CARTV n'est pas, à
notre avis, une solution car elle n'est pas représentative de
l'industrie du vin du Québec.» Moi...
Mme Reason
(Charlotte) : ...
M.
Bonnardel : Attendez. Juste avant, moi, j'ai relu le mémoire
de l'Association des vignerons. Moi, dans ma tête, il faut que vous passiez à un niveau supérieur en
termes de qualité, en termes de traçabilité, en termes de certification.
Eux me disent... bien, pas «me disent», eux
disent : Notre certification, là, on l'a déposée au MAPAQ, on souhaite
qu'elle soit autorisée dans les
prochains mois. Vous avez peut-être écouté... Je pense que c'étaient les
premiers à passer. Donc, pour vous, ce vin certifié ou vin du Québec, ce
n'est pas une solution, c'est ça?
M.
Martel (Rémi) : Non. Ce qu'on dit : C'est bien, de certifier un
vin, mais une certification, c'est une bonification. Donc, quand on parle d'un vin... Présentement, un
vin d'un vignoble du Québec, un vin qui n'est pas certifié, est-ce que ça
vient à dire que, ce vin-là, on ne peut plus marquer «Produit du Québec»
dessus?
M.
Bonnardel :
Oui, mais...
Mme Reason
(Charlotte) : Non, mais, au niveau...
M.
Bonnardel :
Attendez, attendez.
M. Martel
(Rémi) : Puis... Excusez-moi.
M.
Bonnardel :
Moi, si je vais m'acheter un vin, produit du terroir, bien je pense que mon
collègue l'a bien mentionné, si c'est marqué «vin du Québec», puis
on a le principe du 85-15, là, puis qu'on en arrive un jour au 100 %,
bien c'est parce que c'est parti de deux
hectares, puis avec deux hectares je fais 18 000 bouteilles puis je
n'en fais pas 40. Ça veut dire que
mon produit, il est logiquement 100 % Québec, là, je n'ai pas
nécessairement acheté du vin de l'extérieur du Québec pour faire
semblant que c'était un produit vin du Québec.
Donc, je veux juste comprendre. Vous avez une
association qui dit : Bien, nous autres, on souhaite que cette appellation soit adoptée, que les Québécois
sachent que, si c'est un vin du Québec, c'est vraiment un vin du Québec. Puis,
de l'autre côté, vous, vous dites :
Bien, il faut s'attacher à ce que les Canadiens font, à ce que l'Ontario fait,
mais à quelque part on ne sera jamais...
Moi, je souhaite que le Québécois sache ce qu'il va boire. Puis, qu'il boive
100 % du Québec, tant mieux. Mais là vous, vous ne semblez pas
d'accord avec ça. C'est ça?
Mme Reason
(Charlotte) : Alors, on a
parlé de l'IGP. On ne parle pas de la certification mais l'IGP. C'est une autre
coche, O.K., où tu...
L'IGP,
pourquoi qu'on n'est pas favorables pour l'instant? Parce que la carte a été
dessinée. Et, quand on parle des fraises de l'île d'Orléans ou de...
M.
Bonnardel : ...carte
a été dessinée?
Mme Reason
(Charlotte) : Oui, de l'IGP, O.K., c'est déjà dessiné. Alors, c'est
sûr qu'il y a des régions qui sont omises dans l'IGP. Alors, il y a déjà
des vignobles qui sont installés là et ils sont omis, présentement, parce qu'on
a dessiné que...
Une IGP,
c'est une identification géographique. La terre au Saguenay et la terre dans
l'Estrie, je ne crois pas qu'elle a la même texture et la même richesse, et
elle va porter des vins tout à fait différents. On a passé une IGP dans le
vin de glace du Québec, et justement on a un
membre qui, lui, il est dans le Saguenay. Son vin de glace, lui, vu qu'il est
dans le Saguenay, c'est plus facile pour lui de faire du vin de glace
parce qu'il peut cueillir à la fin de novembre, début de décembre, sans neige,
mais il est exclu des vins de glace du Québec, il est obligé de l'appeler «vin
d'hiver».
Donc, dans
l'IGP qu'on est en train de dessiner, ça veut dire que l'Estrie est la même
chose que dans le Saguenay, même
chose que dans le Bas-du-Fleuve, donc ce n'est pas correct. Ça veut dire que, là,
tous les petits vignobles qui sont en dehors de cette carte-là, il va
falloir qu'ils ferment leurs portes, d'une certaine façon...
M.
Bonnardel : Ça fait
combien de vignobles, ça? Excusez...
Mme Reason (Charlotte) : ...parce
qu'ils ne pourront pas appeler ça «vin du Québec».
M.
Bonnardel : Ça fait
combien de vignobles, ça, qui sont exclus de ce territoire? Le savez-vous?
Mme Reason
(Charlotte) : C'est parce que, la carte, je vous l'aurais compté,
parce que la carte, elle est pas mal vague,
et je n'ai pas les noms des municipalités qui sont là. Mais il y a beaucoup de
places qui sont omises. Donc, ça veut dire qu'on va...
La Présidente (Mme Hivon) :
Il vous reste environ 20 secondes, juste pour...
Mme Reason
(Charlotte) : O.K. On va exclure beaucoup de vignobles avec l'IGP
formulée comme qu'elle est là présentement. On ne peut pas dire que les
fraises de l'île d'Orléans, c'est les mêmes que les fraises du Richelieu.
La Présidente (Mme Hivon) :
Merci. Merci beaucoup. Alors, cela met fin à nos échanges.
Mémoires déposés
Peut-être,
juste avant de terminer, puisque nous sommes à la fin de nos auditions
publiques — elles
furent courtes dans mon cas, mais, pour vous, elles furent un peu plus
longues — je
dépose donc les mémoires des personnes et des organismes
qui ont déposé mais qui n'ont pas fait leurs représentations ici, devant nous.
Alors, sur ce, je vous remercie.
Je lève la séance de la commission, et, ayant accompli son mandat, nous levons la séance de manière sine die.
(Fin de la séance à 18 h 10)