(Onze heures vingt-six minutes)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va débuter ses travaux. Donc, ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des finances publiques ouverte. Et, bien sûr, je demande à toutes
les personnes dans la salle d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
La commission
est réunie afin de procéder à des consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 88, Loi sur le développement de l'industrie
des boissons alcooliques artisanales.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Lelièvre (Gaspé) est remplacé par M. Villeneuve
(Berthier).
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Donc, bienvenue à tous les parlementaires pour cette
étude de projet de loi qui est fort important, qui est fort novateur.
Bienvenue, M. le ministre, les porte-parole officiels au niveau de l'opposition,
les collègues députés. Bienvenue également au personnel qui nous assiste, le
personnel du cabinet et le personnel des ministères et organismes qui sont ici présents ainsi que
tous les groupes qui vont participer à cette commission. Merci également
au personnel de l'Assemblée nationale qui nous accompagne dans nos travaux.
Voici l'ordre du jour de ce matin. Nous allons
débuter par les remarques préliminaires et, par la suite, nous entendrons l'Association des vignerons du Québec
et la Société des alcools du Québec. Cet après-midi, nous recevrons le Regroupement Le Québec
dans nos verres, l'Association des viniculteurs négociants du Québec,
l'Association des microdistilleries du Québec et l'Union des producteurs
agricoles du Québec.
Donc, comme
nous avons un délai dû aux travaux de la Chambre, nous allons demander le
consentement qu'on puisse dépasser 13 heures. Donc, on devrait terminer
aux alentours de 13 h 30. Consentement? Consentement.
Remarques préliminaires
M. le
ministre, je vous cède la parole. Vous disposez d'environ six minutes pour
vos remarques préliminaires.
M. Carlos J. Leitão
M.
Leitão : Très bien. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Bonjour,
tout le monde, M. le Président, chers collègues
des deux partis d'opposition, les collègues du côté ministériel. Merci d'être
tous là. Et, toutes les personnes qui sont intéressées et qui viendront
nous présenter leurs mémoires, bienvenue aussi.
Alors, nous
amorçons aujourd'hui une étape importante de l'étude du projet de loi
n° 88 sur le développement de l'industrie
des boissons alcooliques québécoises. Cette industrie est en pleine évolution.
Le Québec crée des produits qui se démarquent,
tant à l'intérieur de nos frontières qu'à l'échelle internationale. La variété
des produits offerts, tels que les bières et les vins artisanaux, est en
croissance, mais cette industrie n'exprime pas encore son plein potentiel. Afin
de poursuivre et de faciliter son
développement, l'encadrement législatif doit être revu afin qu'il soit mieux
adapté aux besoins des producteurs et des consommateurs. Le Québec
bénéficie du développement et des retombées économiques de ce secteur, pensons notamment aux nombreuses routes
des vins et des bières qui permettent de découvrir bon nombre de
producteurs de différentes régions.
Pour nous,
appuyer cette industrie en croissance est incontournable. Le terroir québécois
semble aussi prometteur que celui de
nos voisins. Nous devons donc profiter de cette richesse en assurant un
développement concerté et coordonné, en
facilitant l'accessibilité des produits et en favorisant leur qualité et leur
rayonnement. Une attention particulière a été portée aux consommateurs quant à l'ampleur de la gamme de produits qui
leur serait offerte et à la disponibilité de ceux-ci.
• (11 h 30) •
Permettez-moi
de rappeler que l'objectif du projet de loi n° 88 est de modifier les
principales lois encadrant la production
des boissons alcooliques au Québec, incluant la réglementation afférente. En
effet, ce projet de loi viserait à permettre la vente directe des
produits alcooliques artisanaux québécois autres que les alcools et spiritueux
dans les épiceries et dépanneurs du Québec.
Jusqu'ici, les titulaires de permis de production artisanale ne peuvent vendre
leurs produits que sur les lieux de
production et à la Société des alcools du Québec. En adoptant ce projet de loi,
le gouvernement permettrait aux producteurs de vins artisanaux québécois
d'avoir accès au réseau de 8 000 épiceries et dépanneurs du Québec détenant un permis d'alcool. Cette nouvelle
disposition permettrait aux consommateurs de se procurer les produits
artisanaux québécois à travers la province.
Parallèlement,
la Régie des alcools, des courses et des jeux établirait une nouvelle classe de
permis de production artisanale de
spiritueux afin de permettre aux titulaires de permis de production artisanale
d'opérer leurs propres installations de distillation. Ces derniers
pourraient diversifier leur production et améliorer leur compétitivité sur le
marché.
De
plus, le projet de loi n° 88 permettrait la création de coopératives de
producteurs artisans. Celles-ci seraient alors autorisées à fabriquer et
embouteiller des alcools et spiritueux pour leurs membres. Ces coopératives
seront avantageuses pour les producteurs
artisanaux qui souhaitent exploiter leurs résidus de production. Ceux-ci auront
alors la possibilité de mettre en commun leurs ressources et partager les coûts
des opérations de distillation.
Enfin, nous désirons nous assurer de protéger la
santé des consommateurs en exigeant que tous les alcools et spiritueux artisanaux qui seraient mis en vente
soient d'abord analysés par un laboratoire reconnu par la Société des
alcools du Québec afin de confirmer
l'innocuité et la qualité des produits. La Régie des alcools, des courses et
des jeux s'assurera à ce moment des normes visant à garantir la qualité
des boissons alcooliques aux consommateurs.
Par ailleurs,
grâce au projet de loi n° 88, les producteurs de bières artisanales
pourraient vendre leurs produits sur leurs lieux de fabrication pour
consommation dans un autre endroit.
L'adoption du
projet de loi permettrait d'avoir un impact économique positif dans plusieurs
régions du Québec où sont situés les
producteurs de boissons alcooliques artisanales. Il favoriserait la
compétitivité des producteurs artisanaux québécois tout en permettant la
valorisation de leurs résidus de matière première et en facilitant la
transformation de leurs produits.
En complément
au projet de loi n° 88, je vous confirme ma ferme intention d'assurer le
maintien du Programme d'appui au
positionnement des alcools québécois, le PAPAQ, et ce, selon ses conditions initiales.
En termes d'appui que le gouvernement peut offrir à l'industrie, ce
programme constitue un pilier important qu'il faut maintenir.
En terminant,
je tiens à remercier tous les groupes et toutes les personnes qui nous feront
part de leurs réflexions et de leurs
attentes ici, à la commission parlementaire, ou encore en transmettant un
mémoire au Secrétariat des commissions. Je veux les assurer que nous abordons cet exercice dans un esprit
d'ouverture et je souhaite que nos discussions et nos échanges soient
constructifs et porteurs pour l'avenir du Québec. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, de
vos remarques préliminaires. M. le député de Rousseau, vous avez
3 min 30 s environ.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau :
Oui, merci, M. le Président. Tout d'abord, je vous salue, je salue les
collègues, M. le ministre. Et puis
je me permets de remercier dès maintenant et à l'avance tous les groupes que
nous allons entendre aujourd'hui et puis dans les prochains jours parce que je sais qu'ils sauront nous éclairer
et nous permettre de mieux comprendre les enjeux de l'industrie et puis
les avantages et les inconvénients du projet de loi que nous avons sous nos
yeux.
De notre
côté, nous accueillons le projet de loi avec ouverture, je l'ai déjà dit, on a
eu l'occasion de le dire dans le passé,
mon collègue de Berthier et moi-même. Et nous avons bien sûr à coeur le
développement de l'industrie au Québec. Nous croyons qu'il s'agit d'une industrie qui a un potentiel de
croissance important. Et les Québécois sont aujourd'hui très friands des produits du Québec. Ça va dans le
sens, donc, des intérêts, à la fois des Québécois et puis dans le sens de
nos intérêts économiques. Alors, je le répète, nous accueillons le projet de
loi, donc, avec ouverture.
Cela étant,
il y a quand même un certain nombre de questions qui se posent, et je
profiterai de ces consultations pour
poser des questions pertinentes aux groupes qui défileront devant nous. Il y a
des questions quant à, par exemple, la définition
de ce que c'est qu'un produit québécois. De notre côté, nous voulons développer
l'industrie québécoise et non pas l'industrie d'ailleurs, et il faudra
donc nous assurer que le texte de la loi fait en sorte que c'est bel et bien
l'industrie québécoise qui est développée et non pas celle de l'extérieur.
Deuxième type
d'enjeu qui a toujours été au coeur du développement de cette industrie, c'est la question des accords commerciaux, et ça rejoint un peu aussi la
question de la définition de ce qui est québécois. Si on ouvre une
petite brèche dans nos accords commerciaux en ouvrant des chemins à nos
produits qui ne sont pas disponibles aux produits de l'extérieur, c'est très bien, mais encore, justement, faut-il que cette
brèche soit réservée à nos produits à nous. Si la brèche que nous ouvrons permet à des produits de
l'extérieur, par exemple des produits ontariens, de s'engouffrer, vous
pouvez être assurés qu'il pourrait y avoir
des contestations en vertu des dispositions de nos accords commerciaux. Alors,
nous serons également sensibles à cette question et nous poserons les
questions pertinentes aux personnes qui sauront nous répondre, je suis
certain.
Troisième
élément, bien sûr, la Société
des alcools du Québec est un acteur
majeur de notre secteur. Ce n'est pas un monopole, contrairement à ce que certains laissent croire, mais la Société des alcools a des segments du marché qui lui sont réservés, d'autres dans lesquels elle opère un partenariat avec le
secteur privé. Essentiellement, à peu
près la moitié de l'alcool au Québec est vendu à travers la Société des alcools, mais l'autre moitié est
vendue par le secteur privé. On ouvre un
certain segment réservé à la SAQ à d'autres distributeurs, et ça peut être une
chose heureuse, et, je le répète, nous accueillons
ça avec ouverture, mais il faudra voir quel impact ça aura sur la SAQ, et il
faudra mieux comprendre. Et j'aurai l'occasion d'en parler avec les
représentants de la SAQ plus tard.
Finalement,
élément pas moins important, mais qui a été moins abordé, en tout cas,
certainement dans les médias, mais
qui a fait quelques bruits récemment, c'est la question de la santé publique.
Je crois que la raison de base, la raison essentielle pour laquelle l'État a été impliqué dans à la fois la vente
de produits alcooliques puis dans l'encadrement de ce secteur-là, c'est beaucoup pour des raisons de
santé publique. Bien sûr, il y a des enjeux pécuniaires, mais il y a aussi
des enjeux de santé publique. Et, ces
enjeux-là, on doit les garder en tête, et j'aurai aussi l'occasion de poser des
questions là-dessus. Alors, M. le Président, je nous souhaite de bonnes
consultations. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Bons échanges. Merci. M. le député de Granby.
M. François Bonnardel
M. Bonnardel :
Oui, merci, M. le Président. Je serai bref et je me réjouis, là, de
l'annonce que le ministre vient de
faire. Je pense qu'il y pas mal de vignerons ici aujourd'hui qui ont le
sourire, parce que vous savez que le plafond qui a été abaissé par un de
vos collègues, qui avait été ramené à 100 000 $, bien, avait mis en
péril la pérennité de certains vignobles au
Québec. Donc, je me réjouis, surtout si c'est fait rétroactivement pour
rembourser les montants d'argent qui avaient été perdus par ces ententes
signées par le ministre de l'Agriculture. Je m'en réjouis, puis je pense que
tout le monde s'en réjouit.
Tout le monde
connaît ma position pour les produits québécois, j'en ai maintes et maintes
fois parlé depuis les dernières
années. Donc, pour moi, cette brèche, petite brèche dans l'ouverture d'un
marché important comme celui de l'alcool au Québec, bien, je m'en
réjouis.
M. le
ministre, vous allez m'entendre, nécessairement, sur le fait que ces cépages et
millésimes soient affichés sur les
produits québécois dans les dépanneurs, grandes surfaces, c'est extrêmement
important, que les vins vendus puissent avoir une traçabilité pour qu'on empêche les vitrines, et je
m'expliquerai plus longuement quand j'aurai la chance de vous poser des questions, que les vignobles soient
capables d'avoir leurs propres transporteurs, qu'on permette la vente
d'alcool à d'autres détenteurs de permis. Il est primordial, en 2016,
primordial, en 2016, qu'on puisse faire la promotion de nos produits québécois, nos produits du terroir. Et on
doit, M. le ministre, avec cette loi aujourd'hui, là, donner toute la
chance possible à ces entrepreneurs, à la
base, ces entrepreneurs, là, qui ont entrepris un défi énorme voilà déjà 25,
30, 35 ans, de faire du vin, de
faire des alcools au Québec. Je pense qu'il faut leur dire bravo, il faut leur
donner tous les outils possibles avec cette loi pour être capables de
mettre de l'avant leurs produits. Merci.
Auditions
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Granby. Nous
allons donc débuter avec nos premiers invités, l'Association des vignerons du Québec. M. Yvan Quirion et
M. Charles-Henri de Coussergues, bienvenue à la
Commission des finances publiques. Merci de votre participation. Vous avez
10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, suivront des
échanges avec les parlementaires. La parole est à vous, j'imagine,
M. Quirion.
Association des vignerons du Québec (AVQ)
M. Quirion (Yvan) : Merci. Je
veux remercier M. le ministre et toute son équipe pour l'annonce du PAPAQ.
C'était quelque chose qui était important. Donc, Yvan Quirion, du Domaine
St-Jacques, président de l'AVQ. Je suis accompagné de Charles-Henri
de Coussergues, de L'Orpailleur, qui est notre vieux président de l'AVQ,
qui est là depuis 35 ans.
• (11 h 40) •
Donc, en
gros, l'Association des vignerons regroupe 70 vignobles de cinq régions
principales du Québec, et on représente
près de 95 % de la production de vin au Québec. Je tiens à dire qu'on est
d'accord avec l'ensemble et l'esprit du projet de loi n° 88 et on le salue fortement. Par contre, on va
avoir des recommandations d'ajustements ou de précisions pour assurer le développement durable de
l'industrie à long terme, et surtout l'assurance qualité à long terme. On va
vous en parler souvent, de la qualité.
Donc, en
premier, le marché. Il faut comprendre que le vignoble québécois est un peu le
David et Goliath, c'est qu'on est
dans un marché de 220 millions de bouteilles de vin, qui s'est vendu
l'année passée au Québec, un marché qui augmente de 3 % à 4 %
par année. Donc, faites le calcul, c'est entre 6 et 8 millions de
bouteilles par année, détenu à plus de 99 % par les vins étrangers, donc
15 000 vins étrangers qui sont tous très qualitatifs, connaissant la
rigueur qualitative de la SAQ, les exigences
qualitatives de la SAQ. Donc, on est assurément le vignoble qui a le plus de
compétition chez nous, mais, en plus de ça, le plus de compétition qualitative
au monde. Donc, ça, c'est important de comprendre ça. Et le Québec produit à
peine 1,5 million de bouteilles de vin. Donc, on ne fera pas le débat du
passé pourquoi on ne produit que ça, mais on est probablement le plus petit
pays qui vend chez nous, au Québec.
Donc, depuis
35 ans, les vignerons entre eux ont beaucoup, beaucoup échangé et
travaillé ensemble pour améliorer les
méthodes de vitiviniculture, d'essayer des cépages pour arriver à offrir un vin
de qualité dans ce marché-là, dans cet environnement-là
de 15 000 vins étrangers aujourd'hui hyperqualitatifs. Donc, la
vision de l'AVQ, c'est : on veut penser grand, on veut voir grand. Mais il faut comprendre que voir grand dans
un marché si grand, il ne faut pas penser qu'on va produire 50 millions de bouteilles dans une
plage de 10, 20 ans, donc il va falloir que ça se fasse en plantant de la
vigne et il va falloir que ça se fasse bien, c'est surtout de bien le faire sur
la qualité.
Donc, la
vision de l'AVQ est assez simple, c'est : la vente en épicerie est
essentielle à notre plan de développement, mais ce n'est pas une fin en soi, c'est une partie de la solution. Donc,
c'est un pas en avant et ça demeure l'endroit privilégié, en SAQ, où
est-ce que 85 % des vins qui sont vendus, en dollars. Donc, l'objectif,
c'est vraiment de développer la notoriété en
SAQ. Donc, en termes un peu québécois de hockey, c'est que les épiceries vont
être un peu notre ligue junior majeur
du Québec, et la SAQ, la ligue nationale. Il y a plus de joueurs qui vont être
en épicerie. Donc, c'est pour ça que les épiceries sont si importantes. Nos plus petits vignerons, ou en
démarrage, ou ceux qui sont en phase de développement vont aller en épicerie. Je ne dis pas qu'il n'y en
a pas qui vont se développer en épicerie, mais le vignoble québécois est
beaucoup trop petit, même L'Orpailleur, qui
est assis à côté de moi. Je dis souvent que j'ai un peu honte de
L'Orpailleur, qui produit à peine
200 000 bouteilles dans un marché de 220 millions de bouteilles
de vin. La Nouvelle-Écosse, il y a de petits vignerons qui ont parti au début des années 2000 et qui sont plus
gros que L'Orpailleur. Donc, c'est juste pour démontrer ça.
Mais, pour que tout l'ensemble fonctionne,
ça prend la vente directe en épicerie, mais ça prend aussi le fameux PAPAQ dont, M. le ministre, vous venez de
parler. Il faut mettre ça permanent, en place une fois pour toutes parce
qu'on compétitionne des vins étrangers qui
sont hypersubventionnés et on compétitionne en permanence des vins
subventionnés à l'étranger à coup de
milliards. Les autres provinces canadiennes l'ont fait. À titre d'exemple,
l'Ontario l'a mis en place en 1990; la Colombie-Britannique, en 1994; la
petite Nouvelle-Écosse, qui est le petit vignoble canadien, qui était très petit, ils l'ont mis en 2009‑2010. Et un peu
honteux, mais avec une population de 984 000 en Nouvelle-Écosse, ils
ont dépassé le Québec en surface de vignes.
Ils se sont donné une école de vitiviniculture, et nous autres, on est ici à
parler encore de mise en marché puis de
points de vente. C'est un peu honteux. Donc, c'est vraiment une étape
importante, le projet de loi n° 88.
L'approche
de l'AVQ est simple : Ce n'est que la qualité, il n'y a rien d'autre que
la qualité. Donc, étant donné l'énorme compétition, les vignerons
québécois sont condamnés à être parfaits à tous les niveaux. Donc, c'est pour
ça qu'en 2009 on s'est pris en main
nous-mêmes, on a investi 130 000 $ pour se bâtir une certification Vin
du Québec certifié qui nous a donné un cahier de charges extrêmement
rigoureux basé sur les meilleures pratiques mondiales, dans les meilleures appellations. Et ça fait sept
millésimes qu'on rode et qu'on raffine notre certification, et là on est prêts à
l'amener en appellation IGP et de franchir
une autre étape au niveau de la notoriété. Donc, on espère avoir l'appellation
IGP en 2016. Donc, il y a trois critères essentiels, c'est la qualité,
la qualité et la qualité. Ce n'est que ça.
Et,
dans les trois secteurs de l'économie... On est chanceux, on est dans les trois
secteurs, donc dans le primaire, qui est
le raisin au niveau de de la viticulture; dans le secondaire, la vinification et la transformation
en vin; dans le tertiaire, qui est
l'embouteillage et la commercialisation de nos vins. Et, selon une étude économique
du CVA qui est sortie en 2013, chaque bouteille de vin produite au pays
rapporte 31 $ en retombées directes économiques — donc
on n'est pas des économistes, on est juste
des vignerons, mais on se sert de leurs chiffres — et chaque 5 000 bouteilles
produites au Québec créent un emploi
direct, et on produit 5 000 bouteilles par hectare. Donc, faites le
calcul, c'est un emploi par hectare dans la vigne. C'est probablement la
culture qui est la plus payante en emplois/surface.
Pour
revenir au projet de loi n° 88, les quatre ajustements ou précisions qu'on
demande, c'est, un, que le cépage et le
millésime soient affichés. C'est essentiel pour assurer la qualité et en même
temps assurer la traçabilité et l'origine des vins, mais surtout pour
l'image des vins du Québec. On a toujours affiché nos cépages sur nos vins. On
ne fait pas d'assemblage de différents vins,
c'est notre millésime avec nos cépages distincts, donc le consommateur s'attend
à ça et recherche ces produits-là avec le cépage et le millésime.
Que les vins vendus
en épicerie démontrent une traçabilité et une garantie de qualité, donc, à
laquelle le consommateur s'attend. Donc, ça
va prendre des mesures de contrôle pour s'assurer que le cépage, millésime soit
arrimé avec le plan parcellaire pour éviter
des dérapages et s'assurer, comme M. Marceau l'a dit, que ce soit bien un
développement au Québec avec de la
vigne qui se plante au Québec et assurer la pérennité et le développement de
l'industrie de façon durable sur la qualité.
Et que les vignerons
puissent, en troisième, choisir, un peu comme M. Bonnardel l'a dit, le
transporteur, un transporteur indépendant qui serait l'extension du vignoble,
pas nécessairement avec un agent ou un distributeur, mais vraiment un transporteur. Parce que nos vignerons, nos vigneronnes,
de mai à aller jusqu'en décembre, qui touchent les fermentations, sont occupés dans le champ huit jours par semaine,
donc il va y avoir des périodes où est-ce qu'ils ne pourront pas livrer
eux-mêmes. Donc, on voudrait pouvoir embaucher un transporteur indépendant.
Et la mesure
permanente en SAQ pour venir finaliser tout l'ensemble du plan de développement
et que le ministre des Finances fasse des suivis formels auprès de la SAQ pour
qu'elle prenne des engagements concrets de promouvoir
et de développer les vins du Québec et de mesurer ces résultats annuellement,
donc, en gros, c'est l'essentiel de notre vision, à l'AVQ.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Quirion. Merci de
votre présentation. Très bien fait. M. le ministre, la parole est à
vous, du côté gouvernemental.
M. Leitão :
Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Encore une fois, bienvenue. Je
dois vous avouer, M. le président, et
juste à vous et à personne d'autre, juste à vous, que j'ai peut-être un petit
parti pris, c'est que je connais très bien le produit du Domaine
St-Jacques et je le trouve très bon. Mais je vous le dis seulement à vous, mais
à personne d'autre.
Le Président
(M. Bernier) : On aura l'occasion de le déguster à un
moment donné.
M. Leitão :
Donc, ceci étant dit... Et aussi, M. Quirion, vous avez dit que vous
n'êtes pas des économistes, mais il y a un de vos voisins pas très loin
qui, lui, il est un bon économiste.
M. Quirion
(Yvan) : Un ancien banquier aussi.
M. Leitão :
En plus, en plus. Écoutez, merci beaucoup de votre présentation. Je répète
encore une fois, donc, notre engagement de rétablir le PAPAQ selon ses
conditions initiales. Voilà.
Maintenant, j'ai
quelques questions, pas beaucoup. Je veux aussi laisser du temps à mes
collègues pour qu'ils s'expriment là-dessus, mais j'ai quand même quelques
petites choses que j'aimerais clarifier un peu avec vous.
Vous avez parlé,
donc, de la question du cépage et millésime, pour, entre autres choses, mieux
assurer la traçabilité. Vous pensez que,
donc, la possibilité d'afficher cépage et millésime devrait être seulement pour
les produits artisanaux ou ça devrait être pour tous les produits vendus
en épicerie et aux dépanneurs au Québec?
M. Quirion
(Yvan) : Je vais être
chauvin. C'est que moi, j'aimerais que ce soit juste pour nos produits, pour
nous, pour se démarquer un peu de nos
collègues viniculteurs. Par contre, si je mets dans la peau du consommateur, je
ne le sais pas. Mais, pour nous,
j'aimerais avoir l'avantage du cépage et du millésime pour vraiment marquer, marquer le pas du cépage,
l'avantage du cépage et millésime en épicerie, oui.
• (11 h 50) •
M. Leitão : Je vous demanderais... je ne veux pas vous
insulter, mais si vous pouvez peut-être expliquer c'est quoi, le cépage et
millésime, parce que je pense que peut-être certaines des personnes qui nous
écoutent...
Le Président (M. Bernier) : Il
y a beaucoup de gens qui nous écoutent puis surtout dans le cadre de cette commission-là.
Il y a plusieurs des producteurs qui nous écoutent, donc d'être le plus...
M. Quirion
(Yvan) : Eux autres savent
c'est quoi, le cépage, mais je vais laisser parler Charles-Henri là-dessus.
M. de
Coussergues (Charles-Henri) : Je
vous dirais que, nous, en tant que vignerons, en tant que producteurs,
on a des vins qui sont marqués notamment
par le climat. D'une année à l'autre, il
y a des variantes sur la qualité du
vin en fonction entre autres du climat. Et c'est là que le critère de millésime est très important.
Les gens nous suivent d'année en année
justement pour déguster entre autres ces nuances qu'il y a
d'une année à l'autre. C'est ce qui fait la typicité d'un vin. La beauté du vin, c'est le terroir, le travail de
l'homme, mais c'est aussi le climat. Donc, le millésime est important,
parce qu'il est une référence pour le
consommateur. Quand on parle de grands vins, et tout, on parle toujours
de millésime : telle année est
une bonne année, une autre année est moins bonne. Donc, la notion de millésime
est vraiment très importante. On ne fait pas de vins
d'assemblage, on fait des vins qu'on embouteille annuellement, donc c'est très important.
Le cépage. On
est dans un contexte où la vigne est encore jeune au Québec,
même si ça fait 35 ans qu'on en fait, et les cépages qu'on cultive en général sont méconnus. Donc, ce n'est pas
du cabernet sauvignon, ce n'est pas du riesling, donc ce sont des cépages qui ont été connus mais qui sont peu connus au Québec,
et on a une éducation à faire. Et le cépage est important.
D'ailleurs, on en a été un peu complexés pendant des années, même la plupart
des vignerons ne les marquaient pas
sur les bouteilles pensant que c'était négatif, mais ça ne l'est pas. En fait,
c'est ce qui personnalise, encore une fois, un vin. Donc, on sort du placard aujourd'hui, si je puis dire, l'industrie, et on marque, on
affiche nos cépages sur nos bouteilles, et c'est un facteur éducatif important, les gens l'apprécient, c'est ce qui nous
démarque des vins du monde. Yvan l'a dit, il y a 15 000 vins
étrangers qui sont ici au Québec, il faut qu'on fasse connaître nos cépages.
C'est un outil important, c'est ce qui, encore une fois, nous caractérise et
nous différencie de cette compétition internationale.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão : Merci. Une autre question, avant de passer la
parole à mes collègues. Vous avez soulevé la question du transport.
Pouvez-vous élaborer un peu là-dessus? Quelle est, donc, la situation actuelle
et puis comment vous voyez ça évoluer?
Le Président (M. Bernier) :
M. de Coussergues.
M. de
Coussergues (Charles-Henri) :
Écoutez, on a vécu, dans les amendements à la loi ou changements à la loi... On a connu
la loi n° 44, qui a permis aux producteurs artisans de vendre en
restauration. Ça, c'est en 1996. Le gouvernement a adopté cette loi qui nous a permis, à l'époque,
aussi de sortir de chez nous, de nous faire connaître. Il s'est produit un phénomène qui est intéressant à analyser, c'est que ce n'est pas forcément les restaurants de la
région immédiate du vignoble qui ont
encouragé les vignerons ou les producteurs artisans. Ce sont souvent,
d'ailleurs, des restaurants dans des régions éloignées qui ont une
sensibilité aux produits locaux, et qui ont une appartenance aux produits
locaux, et qui deviennent nos ambassadeurs.
Donc, en restauration, par exemple, si je prends mon cas à moi, je vends en
Gaspésie, c'est loin de chez moi,
mais je vends en Gaspésie, je vends en Abitibi, je vends dans les régions
éloignées, et c'est souvent plus facile
de vendre dans les régions éloignées que dans les centres urbains. C'est comme
ça. On ne le devinait pas à l'avance, mais on le pratique aujourd'hui.
Donc, il est impossible pour le vigneron, cette notion de livraison d'aller
livrer en Gaspésie ou à Chicoutimi. Donc, c'est une confession que je fais
aujourd'hui, mais on fait souvent transporter par un transporteur, que ce soit
Dicom, Purolator ou autre, en sachant que ce n'est pas forcément autorisé.
Mais, quand le projet de loi est sorti, on a
appris le lendemain qu'on ne pouvait pas faire transporter, qu'il fallait que
ce soit le vigneron, mais c'était un
peu, à l'époque, un cadeau grec parce que le restaurant de Gaspésie, il ne
vient pas chercher le vin chez nous, et le vigneron ne va pas en
Gaspésie livrer. Donc, c'est un intermédiaire important.
Dans les
épiceries, le projet de loi, donc, maintenant il est connu. Il y a déjà des
épiciers qui nous ont approchés. Et je
prendrai, par exemple, une grosse épicerie qui est à Chicoutimi, où le gars, il
nous harcèle, il veut à tout pris avoir nos vins. Dès que la loi va être en application, il veut nos vins. Mais
c'est sûr qu'à Chicoutimi, encore une fois, il y a une notion de distance qui est très importante, et le
vigneron ne pourra pas aller tous les 15 jours à Chicoutimi. On va le
vivre, ça. Ce n'est pas forcément les
grandes, grandes épiceries qui vont être les meilleurs ambassadeurs, sans les
dénigrer, qui vont être les grands,
grands ambassadeurs. Ça va être souvent des petits épiciers qui, encore une
fois, sont très fiers de servir du produit
québécois, et ils ne sont pas toujours dans des régions immédiates des
vignerons. Il va y en avoir, mais il va y en avoir à travers le Québec, et on a besoin de faire transporter. Ce n'est
pas notre métier, transporteur, on est meilleurs dans le champ, on est meilleurs dans le chai, mais on
veut pouvoir, donc, servir ces épiciers-là. Et là il y a un
incontournable, il faut passer par des professionnels du transport.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Oui, M. Quirion.
M. Quirion
(Yvan) : C'est ça, il ne
faut pas sortir nos vignerons parce que les vignerons, vigneronnes
touchent à tout, là. Il ne faut pas les
sortir du vignoble quand il est le temps de défeuiller, dépamprer, ou dans les
vendanges, ou dans les vinifications
pour aller faire des livraisons en épicerie. C'est un non-sens. Donc, c'est
essentiel, on en a vraiment besoin.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão : Merci. Alors, les
collègues, si vous avez des questions.
Le
Président (M. Bernier) :
Lequel des collègues? Alors, M. le
député de Pontiac.
M. le député de Sainte-Rose?
M. Leitão : Le député de
Pontiac a un petit problème de voix.
M. Fortin (Pontiac) : Oui, je
suis désolé.
Le Président (M. Bernier) : Ah!
un problème de voix. Il va falloir vous fournir les Cépacol. M. le député
de Sainte-Rose.
M. Habel : Ah bien, merci. J'ai
peut-être juste une question concernant la disposition pour la directive... c'est-à-dire, il y a 50 %
de produits qui doivent être cultivés par le titulaire du permis, 35 % de
produits cultivés au Québec et
15 % pouvant provenir d'ailleurs. J'aimerais savoir comment vous jugez la
disposition des pourcentages cultivés. Est-ce que vous la trouvez adéquate? Est-ce que vous trouvez qu'on devrait
l'améliorer? J'aimerais un peu vous entendre là-dessus.
M. Quirion
(Yvan) : Il y a juste un ajustement
pour nous, vous l'aviez bien compris, c'est que la vigne se plante au Québec et qu'il y ait vraiment une assurance de
traçabilité avec ce qui se plante au Québec. Donc, nous, dans la
bouteille, honnêtement, on est confortables avec le 85 %-15 %. Par
contre, on veut s'assurer que le 85 % est bien du Québec. Et, ensuite de ça, dans la bouteille, que
quelqu'un ait 100 % du Québec dans la bouteille, mais qu'il ait plus de
50 % qui vient de l'extérieur de
chez eux, pourvu que ce soit à l'intérieur d'un cadre d'appellation ou de
certification où est-ce qu'il y a des
audits indépendants puis que c'est blindé au niveau de la traçabilité, qu'à la
limite un vigneron ait dans sa bouteille 100 % d'un vin d'un collègue viticulteur qui a fait pousser le
raisin, ça, on est pleinement — bonjour, M. Gendron, un bon
monsieur, M. Gendron — en
accord avec ça. Donc, nous, ce qui est important, c'est le 85 % québécois
et s'assurer qu'il y ait 15 %, pas plus, de l'extérieur, sur l'ensemble de
la production et non par bouteille.
Donc, je ne
sais pas si c'est clair. Je sais que c'est technique, là, mais, pour nous,
c'est important que ce soient des vignes
et des raisins poussés au Québec. Parce qu'il y en a plusieurs qui m'ont
entendu le dire, mais on a tout un potentiel qualitatif au Québec. Souvent, on considère le Québec comme un gros bloc
de glace, injustement. C'est de notre faute, on a mal fait notre job, dans les dernières années, à
le vulgariser, mais on a, au Québec, de l'Outaouais à aller jusque dans
le Bas-Saint-Laurent, le climat de la
France, qui est du nord de la Champagne à aller jusqu'à Côte-Rôtie, donc, en
degrés-jours, en période végétative, en
pluviométrie. Il y a des gens qui essaient de nous prendre : Oui, mais il
y a quelque chose... On a tout un potentiel qualitatif. Si on prend le
virage qualité avec l'appellation comme on pense et que la chaîne de décision de nos vignerons va vers prendre vraiment
le virage qualitatif, on risque de devenir le plus beau vignoble
canadien. Mais il faut bien le faire sur la qualité. Ça, c'est bien important.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, vous aviez une question additionnelle?
M. Leitão :
Une question à cet égard-là, parce que, pendant, donc, qu'on réfléchissait à
comment on allait établir le projet de loi, cette question de
85 %-15 %, certaines représentations ont été faites qu'on devrait
aller plus loin que ça, c'est-à-dire qu'on devrait permettre 50 %-50 %,
par exemple, parce qu'on nous disait, bon, ça se peut que la position québécoise est encore un peu limitée, donc, si
jamais il y a quelque chose qui se passe, le vigneron ne serait pas
capable de produire ses bouteilles. Nous, on n'a pas retenu cette
suggestion-là, et il me semble que, bien sûr, vous aussi, vous ne l'appréciez pas beaucoup. Pourriez-vous peut-être
mentionner un peu plus qu'est-ce que ça ferait si on allait plus loin
que ça? Si c'était 50 %-50 %, par exemple, comment ça pourrait
affecter vos produits?
Le Président (M. Bernier) :
M. Quirion.
M. Quirion
(Yvan) : On est contre ça,
foncièrement, tout simplement pour les raisons qu'on vous a expliquées.
On est le vignoble qui a le plus de
compétition chez nous au monde, et de loin. Probablement que le deuxième
vignoble qui a le plus de
compétition, ça doit être l'Ontario, et c'est 4 000 vins. On est
condamnés à être parfaits. Donc, le client, il faut être transparents et honnêtes avec lui, il nous suit
depuis qu'on a mis la certification en place, qui est devenue 100 %
québécoise. On a commencé
85 %-15 % les cinq premiers millésimes, puis, à partir du
millésime 2014, c'est 100 % québécois. Les chroniqueurs en vins, les professionnels du vin ne
parlent que des vins du Québec certifiés. Pourquoi? Il n'y a aucun doute
sur l'origine du raisin qui est dans la bouteille. Et, à partir de là, ce n'est
pas pour rien, l'engouement, c'est vraiment là-dessus. Et Charles-Henri a
certainement quelque chose à ajouter là-dessus, là.
• (12 heures) •
Le
Président (M. Bernier) : Oui, allez-y.
M. de Coussergues (Charles-Henri) : Moi, je
pense, M. le ministre, que ça
serait catastrophique. En communication, il n'y a rien de pire que de
semer le doute. Et mélanger des vins québécois avec des vins étrangers à 50 %-50 %, par exemple, je pense que ça serait
une catastrophe, et ça viendrait nuire directement à la réputation sur
laquelle on travaille depuis des années sur les vins québécois. Je pense qu'il
est primordial d'être très transparents vis-à-vis du consommateur.
Il
y a des structures qui permettent, avec des permis industriels, de faire des
vins d'assemblage, et tout, mais ce sont
des permis... moi, j'appelle ça un permis... mais permis de vigneron. Le
vigneron doit mettre du produit québécois dans sa bouteille. 15 %, ça n'a jamais nui jusqu'à présent, c'est une
pratique qui se fait dans d'autres pays. Mais plus que ça, ça nuirait à
l'image, ça ternirait dangereusement l'image du vin québécois, qui est encore
fragile, certes, mais on se dote d'outils
pour promouvoir le vin québécois avec une certification, bientôt une
appellation. Mais de faire marche arrière et de permettre des
assemblages, ça va être une catastrophe pour l'image du vin québécois.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, M. de Coussergues.
M. Leitão :
Si je peux me permettre, d'ailleurs, je pense qu'un très grand pourcentage de
vos membres sont même rendus à 100 %. C'est quel pourcentage?
M. Quirion
(Yvan) : Bien, c'est une volonté... On a des assemblées générales
annuelles. On vous a dit qu'on représente
près de 95 % de la production de vin au Québec. Ça fait quatre fois qu'on
vote là-dessus, et c'est unanime. Le virage
qualité pour aller vers une appellation 100 % s'est voté à l'unanimité. Je
ne dis pas que tout le monde va prendre ce virage-là à court terme parce
que ça coûte beaucoup de sous, beaucoup d'investissements, et on ne demande pas
de subventions au gouvernement, on ne veut
aucune subvention de rien pour le moment. Tout ce qu'on veut, c'est ce
qu'on vous a expliqué ici, pour vraiment s'assurer que nous, les vignerons, on
prenne le virage qualité et forcer l'industrie à prendre le virage qualité. Un coup qu'on va l'avoir pris, le virage
qualité, avec l'appellation IGP, moi, je suis convaincu qu'on va être le
plus beau vignoble canadien. Je suis convaincu de ça.
Le Président
(M. Bernier) : M. le ministre, une dernière question?
M. Leitão :
Non. Les collègues, si vous avez...
Le Président
(M. Bernier) : Oui, M. le député de Trois-Rivières.
M. Girard :
Oui, concernant l'affichage des cépages. On sait qu'il y a beaucoup de cépages
qu'on qualifie d'indigènes. Si on met, sur une bouteille, du Sabrevois, du
Maréchal Foch ou du Seyval, les Québécois ne sont pas nécessairement connaisseurs de ces cépages-là. Est-ce que l'affichage
des cépages va être suffisant pour pouvoir bien orienter les
consommateurs? On a, à la SAQ, les pastilles de goût, qui aident les
consommateurs, et, bon, on ajoute à ça les
vins de glace et, bon, les différents cépages qu'on a au Québec. Comment vous
voyez la meilleure façon pour pouvoir bien orienter le consommateur pour
qu'on puisse s'y retrouver dans des qualificatifs de types de vin?
Le Président
(M. Bernier) : M. de Coussergues.
M. de Coussergues (Charles-Henri) : Bien, je pense, encore une fois, qu'effectivement
il y a beaucoup de travail à faire,
là, d'éducation. On le fait déjà depuis plusieurs années, mais il y a encore
beaucoup de travail à faire pour faire connaître,
encore une fois, nos cépages. Par exemple, quand on parle des vins portugais,
on est incapables de nommer un cépage.
On fait toujours référence à certains vins connus comme, encore une fois, le
chardonnay, le riesling, ainsi de suite, mais bien des pays vendent des vins ici, au Québec, et on est incapables
de référencer un cépage. Je prends l'exemple du Portugal, mais je peux
en prendre d'autres...
Une voix :
...
M. de Coussergues (Charles-Henri) : Ils sont très bons, les vins portugais, mais
c'est vrai qu'on a du mal... On pense toujours que c'est les cépages
québécois qui ne sont pas connus, mais en fait il y a bien des cépages, à
travers le monde, qui ne sont pas connus. Et
c'est une forte volonté, encore une fois, pour les vignerons que nous sommes,
de faire connaître le cépage, alors il faut
le mettre sur la bouteille. Ça ne réglera pas tout. Aux vignerons de continuer
à faire des efforts pour faire connaître ces cépages-là par d'autres
moyens. Mais le premier moyen, c'est déjà de le mettre sur l'étiquette, de ne pas avoir honte de cacher nos
cépages. Ils ont nos particularités. On arrive à démontrer aujourd'hui
qu'on a des standards internationaux avec
nos cépages. Donc, c'est au moins le premier affichage qu'il faut pouvoir
faire, mais ce n'est pas le seul. C'est sûr qu'il faut continuer à faire
des dégustations, à sortir de chez nous pour faire connaître nos cépages, mais
c'est un des outils incontournables, de l'avoir directement déjà sur la
bouteille.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui, merci. Bonjour, messieurs. Merci d'être là. Je veux revenir sur la
question de ce que c'est qu'un vin
québécois puis ce que ça n'est pas. Donc, présentement, nous avons au Québec
une certification qui date de 2009 qui s'appelle
Vin du Québec certifié. Quelles sont les exigences, donc, en termes de
proportion de vignes québécoises pour qu'on puisse obtenir la mention
Vin du Québec certifié?
Le Président
(M. Bernier) : M. Quirion.
M. Quirion (Yvan) : ...c'est 100 %. Initialement, les premiers
cinq millésimes, c'était 85 %-15 %. Pour envoyer le message
clair à nos vignerons, on a dit : En 2014, ça va être 100 %, donc
plantez de la vigne.
M. Marceau :
Donc, aujourd'hui, c'est 100 %.
M. Quirion
(Yvan) : 100 %.
M. Marceau :
C'est 100 %. Parfait.
M. de
Coussergues (Charles-Henri) : Excusez-moi. Quand on parle d'une
certification, d'une appellation, il y a une
notion de région, de terroir. Dans le monde entier, en général, c'est
habituellement 100 % de la région en question.
M. Marceau :
O.K. Parfait. Et votre compréhension du projet de loi, c'est que les avantages
qui sont consentis par le projet de loi, là, d'aller directement à
l'épicerie, c'est réservé aux vins certifiés du Québec? Est-ce que c'est votre
compréhension ou pas?
M. Quirion (Yvan) : Non, c'est qu'il faut laisser la chance à nos
plus petits vignerons et même certains plus grands de rentrer avec des vins 85 %-15 % et de
prendre le virage qualité avec la certification, mais on veut laisser le choix.
Nous autres, ce qu'on propose, c'est de laisser le choix au vigneron de rentrer
avec soit des vins certifiés ou non certifiés. Donc, le certifié, on sait qu'il est 100 % Québec
et le non-certifié, 85 %-15 %. Et on demande d'avoir une forme de
contrôle qui est assez blindée pour assurer
la traçabilité du 85 % et du
15 %. Tandis que, dans la certification, c'est des contrôles
indépendants qui sont faits là-dessus, et ça, c'est blindé.
M. Marceau :
O.K. Donc, présentement, ce qui est certifié, c'est 100 %-0 %, c'est
100 % puis zéro. Vous proposez de donner à ceux qui font du
85 %-15 % les avantages du projet de loi, mais en s'assurant que ce
soit clair pour le consommateur et que ce soit indiqué sur l'étiquette. Si on
le résume, c'est ça?
M. Quirion (Yvan) : On a des discussions à l'interne à l'effet...
Aliments Québec n'a pas de contrôle sur ceux qui affichent Aliments
Québec sur une bouteille de vin. Ça nous inquiète beaucoup. Donc, est-ce qu'on
pourrait utiliser éventuellement le logo
Aliments Québec à l'intérieur d'un outil de traçabilité? Il reste à parler de
ça parce que, dans la certification,
notre logo de Vin du Québec certifié va migrer vers l'appellation IGP quand on
va aller vers l'appellation. Donc, ça
va être le même logo, mais on va ajouter «indication géographique protégée».
Donc, peut-être qu'à un moment donné on devrait avoir un logo spécifique
pour le 85 %-15 %.
M. Marceau :
Mais juste pour être certain, parce que je n'ai jamais vu une telle chose, là,
dans le cas de vins qui seraient
85 %-15 %, 85 % du Québec, mettons 15 % de l'Ontario, il
serait écrit sur l'étiquette : 85 % provient de vignes qui ont
poussé ici, dans ma cour, et 15 % provient de l'extérieur, de l'Ontario?
M. Quirion
(Yvan) : Non, partout dans le monde, les vins de table, c'est
85 %-15 %. Il y a certaines régions où
est-ce qu'ils ont encadré ça de façon un peu plus contrôlée, mais, partout dans
le monde, il y a du 85 %-15 %. Mais c'est surtout que c'est difficile de démarrer avec le 100 %, tout
simplement parce que la vigne que tu commences, avoir l'idéation de
planter de la vigne aujourd'hui, tu n'auras pas l'usufruit vraiment avant huit,
neuf ans, au moment où est-ce que tu vas
vendre la bouteille du premier millésime que tu vas avoir. Donc, c'est un
non-sens, je vais dire comme un de
mes collègues, de se peinturer dans le coin à 100 % partout. Ça serait un
peu naïf. Et 85 %-15 %, c'est quand même très qualitatif, sauf
qu'il n'y a pas le sceau Vin du Québec certifié ou l'appellation IGP, qui est
100 %. Donc, on va être transparents pour le client, le client va le
savoir, ce qu'il achète.
Le Président
(M. Bernier) : M. le député.
M. Marceau :
O.K., puis présentement, donc, tel qu'il est rédigé, le projet de loi, vous
comprenez, comme moi, je comprends,
qu'il n'y a pas de 85 %-15 %, là, pour l'instant. Il n'y a pas de
règles, essentiellement, c'est les règles de la RACJQ, c'est le
50 %, on s'entend?
M. Quirion (Yvan) : Mais ce qu'on nous a assuré, parce qu'on est en
communication presque à tous les jours avec les Finances, c'est qu'actuellement c'est à l'intérieur d'une directive,
ce n'est même pas un règlement. Et là ils vont en profiter pour vraiment
mettre le règlement en place et bien structurer tout ça.
Donc, je ne
sais pas s'il y a quelqu'un de l'équipe du ministre Leitão qui peut nous le
confirmer, mais, moi, ça m'a été confirmé par les Finances, que le
règlement va le spécifier clairement.
Le
Président (M. Bernier) : On aura l'occasion d'entendre la
Société des alcools ultérieurement.
M. Marceau :
Oui, mais, bon, par ailleurs, rien n'interdit et rien n'empêche que ces
éléments-là soient inclus dans le
projet de loi, là. Je sais bien qu'il y a des gens qui aiment bien que ça se
fasse par règlement pour que ça ne soit pas débattu ici, mais je pense
que, de notre côté, on va certainement s'assurer que ça y apparaisse, alors que
ça soit clair.
Je vais revenir sur
la santé publique. Je ne sais pas combien de temps il me reste, M. le
Président?
Le Président
(M. Bernier) : Il reste environ trois minutes.
• (12 h 10) •
M. Marceau :
Trois minutes. Ah! c'est parfait. Je voulais juste aborder un autre sujet,
c'est la question de la santé publique.
À la Santé publique, il a été suggéré qu'un prix minimum soit mis en place pour
s'assurer qu'on ne fasse pas avec vous ce qui est fait à la bière,
c'est-à-dire que les grands distributeurs sont très puissants puis sont en
mesure de négocier des prix très, très bas
avec les brasseurs. Et les inquiétudes de la Santé publique sont que, dans le
fond, si vous n'êtes pas protégés par
un prix minimum, on va vous amener à des prix vraiment ridicules. Puis il y a
des enjeux de santé publique parce
que plus le prix de l'alcool est faible, évidemment, plus les gens peuvent boire. Alors, je voudrais juste vous
entendre là-dessus. Comment vous réagissez à cette idée qui vient entre autres
d'Éduc'alcool?
Le Président (M. Bernier) : M. de Coussergues.
M. de Coussergues (Charles-Henri) : Personnellement, moi, ça ne m'inquiète pas, dans
le sens que, si on s'assure que le
produit soit québécois, il est impossible qu'un vigneron vende à des prix
ridiculement bas, c'est impossible. On a quand même une réalité qui fait que ça va être même le défi du vigneron
en arrivant en épicerie, c'est qu'il va souvent être plus cher que les vins qui sont présentement en
épicerie. En autant qu'on s'assure que c'est des produits québécois, que
ce soit 85 %-15 % puis qu'il y ait au moins 85 % de vin
québécois, c'est impossible qu'on soit moins chers que les vins qui sont présentement en épicerie. On a des
réalités, encore une fois, qui sont ce qu'elles sont et qui font qu'on peut
avoir des coûts de production, on est à la
genèse de l'industrie, on est dans des périodes de gros investissements, et
tout, donc les réalités font que ça ne sera pas l'avenir de la
viticulture québécoise que de faire du volume, du volume à bas prix. Si on veut faire ça, il faut aller au Chili, en
Argentine. Mais faire du vin au Québec, c'est sûr, encore une fois, de par
la...
M. Marceau :
Ça ne sera pas votre marché.
M. de
Coussergues (Charles-Henri) : Ça ne sera pas notre marché.
M. Marceau :
Non, non, on s'entend.
M. de Coussergues (Charles-Henri) : On va laisser ça aux grandes entreprises, mais
c'est impossible de faire des vins peu chers en épicerie.
Le Président
(M. Bernier) : M. le député.
M. Quirion
(Yvan) : Ça ne nous inquiète pas, ça.
M. de Coussergues
(Charles-Henri) : En autant que c'est québécois.
M. Marceau :
Peut-être un dernier point, peut-être vous dire... Je vous ai entendus sur la
question de l'affichage des cépages
et des millésimes. C'est sûr que moi, je comprends votre point de vue, là, puis
en même temps je dois vous avouer que moi, j'ai l'impression que les
consommateurs veulent savoir. Je suis en faveur de plus d'information que moins
d'information. Et moi, j'ai l'impression,
enfin, qu'on aurait avantage à permettre l'affichage de tous les vins en
épicerie, d'inscrire partout les millésimes et les cépages. Et puis, de toute
manière, dans ce contexte-là, on saura que les vôtres sont là, on saura les reconnaître. Et les consommateurs québécois, qui
sont friands de produits québécois, je suis certain, vont être des
acheteurs rapides et convaincus de vos produits.
Je
voulais simplement vous partager le fait que je comprends votre... Tantôt, vous
me disiez : Ça serait peut-être intéressant que ça soit strictement
les vins du Québec qui soient identifiés. En même temps, je trouve que ça
serait, en tout cas, de mon point de vue,
là, une espèce de paradoxe que de donner cette possibilité-là aux vins du
Québec mais pas à ceux des autres
pays. En même temps, à partir du moment où on identifie les produits québécois,
je pense que, on va s'entendre, on va être avantagés puis ça va permettre
le développement de votre industrie.
Le Président
(M. Bernier) : M. Quirion.
M. Quirion (Yvan) : Je sais que mes collègues le veulent, le cépage
puis le millésime sur leurs bouteilles, et je les comprends, je
demanderais la même chose. Mais nous, on en a de besoin.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Granby.
M. Bonnardel :
Merci, M. le Président. Votre virage qualité, la traçabilité, ça
m'interpelle au plus haut point. Le principe
du 85 %-15 %, si je comprends bien, là, votre message, aujourd'hui,
c'est de dire : Nous, le 85 %-15 %, c'est important parce
que je veux empêcher le gars qui va se partir un vignoble, belle vitrine, qui a
un hectare — vous
me corrigerez, là — puis
avec cet hectare, soudainement, il vend 100 000 bouteilles.
M. Quirion (Yvan) :
...exactement ça.
M. Bonnardel : Est-ce
qu'il existe — question
fort simple — donc,
des tricheurs au Québec, des gens qui importent du vin d'ailleurs puis qui nous
font croire qu'on boit du vin québécois?
M. Quirion
(Yvan) : On ne peut pas
dire. Moi, je pense qu'il y a vraiment une exagération là-dessus. S'il y
en a qui le font, c'est plus une question de
survie, ce n'est pas une question organique. Mais, dans certains pays et dans
certaines provinces, oui, c'est de façon organique. Il ne faut pas être naïfs
et aveugles. C'est pour ça qu'on a pris la position, en 2009, de mettre notre certification en place, pour être transparents
et honnêtes. Ça, c'est unanime, à l'AVQ, tous nos membres, c'est d'être transparents et honnêtes. À
toutes les fois qu'on vote, s'il y en a qui ne sont pas d'accord avec
ça, ils votent quand même en faveur, c'est d'être transparents et honnêtes
vis-à-vis le client, et on est sûrs qu'on va toujours avoir le client avec
nous.
Et, essayez
d'imaginer, il y a des gens qui disent : Ah oui, mais il faut fournir au
marché. J'espère qu'on ne fournira jamais
au marché pendant 50 ans. Ça veut dire que nos vins vont être bons et ça
veut dire qu'on va avoir planté de la bonne vigne, on va avoir fait les bonnes choses. Donc, répondre au marché dans
un marché de 220 millions de bouteilles de vin, c'est parce que
l'origine va être douteuse.
M. Bonnardel :
O.K. Donc, j'imagine que ça va amener... Bon, vous dites que la majorité de vos
membres sont d'accord. Bon. Il y en a
certains peut-être qui ne font pas 85 %-15 % puis qui vont
dire : Là, il faut que je me prépare à ça. Ma question, là : Dans votre mémoire, à la page 6,
l'indication géographique protégée Vin du Québec, vous dites avoir
déposé votre demande en décembre 2014. Ça fait 14 mois. On en est où?
M. de
Coussergues (Charles-Henri) :
Il n'y a aucun échange, actuellement, avec notre ministre de
l'Agriculture.
M.
Bonnardel : Attendez,
vous dites quoi? Vous n'avez aucune...
M. de Coussergues (Charles-Henri) : Il
n'y a aucun échange avec le ministre de l'Agriculture depuis que le dossier a
été déposé. On n'a eu aucune réaction du ministre. On a arrêté la semaine
dernière, suite à un conseil d'administration
qu'on a eu, malheureusement, avec regret, on a arrêté la démarche
d'appellation, alors que tous les pays dans le domaine du vin se dotent
d'appellations. On a la chance d'avoir ici, au Québec, depuis 2006, le Conseil
des appellations réservées qui a été créé.
Aujourd'hui, il y a plusieurs secteurs agricoles qui sont en train de se doter
d'IGP, donc, au Québec. Et, nous, la demande
a été déposée, encore une fois, en décembre, effectivement, 2014, et depuis
c'est le silence total. Ça, moi, je n'en
reviens pas. J'en ai rêvé pendant 35 ans, d'en arriver à une appellation.
On a une structure qui nous le permet
au Québec. Et depuis, donc, c'est un silence, il n'y a aucun échange, il n'y a
aucune réaction du ministère. Le ministre devait nous répondre, il ne
répond pas.
M. Bonnardel : Vous avez
demandé des rencontres avec le ministre de l'Agriculture depuis le dépôt de
cette certification puis vous confirmez aujourd'hui que vous avez zéro réponse.
M. Quirion
(Yvan) : On n'a jamais eu de
rencontre ni de réponse à nos lettres. On a envoyé 11 lettres au
ministre Paradis depuis qu'il est en poste,
ça va faire près de deux ans. Il ne nous consulte pas, il ne nous parle pas. Il
a une vision pour nous autres qui est complètement différente de nos
membres, qui représentent près de 95 %, et on ne comprend pas cet entêtement-là. Et probablement la plupart
des pays imposent les appellations à leurs vignobles pour se prendre en
main, pour compétitionner les vins étrangers, et, nous, c'est notre ministre
qui ne va pas de l'avant avec nous.
M. Bonnardel :
Il n'y avait pas supposément une entente dans le PAPAQ entre le 3 millions
qui avait été mis pour vous versus une certification? Ce n'était pas ça
qui était prévu, en réalité, là, que, si on vous donne 3 millions, la certification va venir avec, puis là soudainement
on avait ramené ça à 1 million, et le ministre aujourd'hui dit : Moi,
je le ramène à 3 millions? La
certification, là, vous dites aujourd'hui : J'ai zéro réponse puis je ne
sais pas quand est-ce que le ministre va nous... Puis c'est aberrant,
là.
Le Président (M. Bernier) :
M. Quirion.
M. Quirion (Yvan) : Oui. On ne
sait pas quoi répondre. Honnêtement, on est sans mot de ça. Donc, une chance, on a le ministre des Finances avec son
équipe qui ont pris le relais avec nous. On a été extrêmement bien
encadrés comme on ne l'a jamais vécu, depuis
30 ans qu'on négocie avec le gouvernement. Ça a été lourd, négocier avec
notre gouvernement dans les 30 dernières années. C'est la première fois qu'on
sent... Même qu'on commence à sentir une pression
de dire : Un coup que tout ça va être en place, on a l'impression que le
ministre des Finances va nous regarder puis dire : Là, les boys,
vous m'avez fait des promesses, livrez les vignes.
M. Bonnardel :
Est-ce que votre IGP, votre indication géographique protégée, là, ça pourrait
amener un problème avec les autres
appellations, exemple, de l'Ontario ou ailleurs? Qu'est-ce qui cloche dans
votre tête, là? Qu'est-ce qui ne marche
pas? Pourquoi cette traçabilité, cette importance d'un vin certifié, ce
85%-15%, qu'est-ce qui bloque? C'est-u une appellation différente en
Ontario, une réglementation moins sévère? Éclairez-moi, là.
M. de Coussergues (Charles-Henri) : C'est d'autant plus curieux qu'on le vit au
Canada, donc les trois autres provinces
se sont dotées d'appellations avec un succès extraordinaire. Moi, j'ai
travaillé en Ontario il y a 35 ans. Les vins de l'Ontario, en
termes de qualité et de notoriété, c'était assez minable. Et en 1990, quand ils
se sont donc dotés d'une appellation, d'un encadrement, et tout, la qualité a
explosé. Aujourd'hui, les vins de l'Ontario ont quand même une renommée. En
Colombie-Britannique, on voit la même chose, en Nouvelle-Écosse, pareil. Et, au
Québec, on pensait que notre ministre allait
prendre ça les bras ouverts. On est même plus sévères que le reste des autres
provinces parce que tous les
contrôles sont obligatoirement externes. Dans le principe d'une IGP, ce n'est
pas nous qui l'avons écrit, mais le conseil
d'appellation réservée du Québec a donc une structure de fonctionner, et les
contrôles doivent être externes suite à ISO je ne sais plus combien. Donc, on est les plus sévères au Canada.
C'est un outil de communication indispensable, surtout si la viticulture
veut se développer. Il nous faut un outil de communication indispensable sur le
sérieux, la transparence de notre industrie. Et, je vous dis, c'est toute une
surprise de voir que le ministre ne nous suit pas, qu'il n'y a même pas d'échange, c'est un silence total
sur une démarche aussi importante que ça. C'est très, très, très
inquiétant.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Une dernière question que je vous
permets.
M. Bonnardel :
J'espère, M. le ministre des Finances, que vous avez bien compris ce qui
se passe présentement. Ce pour quoi
ce fut tellement, tellement long de déposer une loi aujourd'hui, si en plus on
travaille en silo puis qu'on n'est pas capables de travailler dans l'intérêt
de nos entrepreneurs, bien, ma foi, je suis abasourdi, ce midi, de voir qu'il y
a si peu d'ouverture.
Une
dernière question. Là, donc, vous parliez de transporteurs tantôt, là, que
c'était extrêmement difficile, donc c'est la SQ... pas la SQ, la SAQ,
pardon, qui est obligée... parce que la SQ, dans les valises, là, ça irait
vite, là, quand même, mais, bon. La SAQ...
Le Président
(M. Bernier) : Du moment qu'il n'y a pas de gyrophares,
c'est correct.
M. Bonnardel :
Non, ça serait quand même pas pire. On pourrait en mettre certains, mais, bon.
Sérieusement, c'est la SAQ qui est obligée de transporter le vin, si je ne me
trompe pas, c'est ça?
M. Quirion (Yvan) : Absolument. Mais en vente directe, ce n'est pas
la SAQ, donc on veut pouvoir engager un transporteur indépendant pour
pouvoir être l'extension du vignoble à les livrer.
M. Bonnardel :
C'est beau. Merci.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, M. Quirion, M. Charles-Henri
de Coussergues également. Merci de votre participation à la Commission des
finances publiques.
Je vais suspendre
quelques instants afin de permettre à la Société des alcools du Québec de
prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
(Reprise à 12 h 22)
Le
Président (M. Bernier) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Donc, nous avons le
plaisir de recevoir M. Alain Brunet, président-directeur général de la Société
des alcools du Québec. Bienvenue,
M. Brunet. On est contents de
vous recevoir à la Commission des
finances publiques. On a l'occasion
de se voir de temps à autre, mais c'est un plaisir ce matin, surtout sur ce projet de loi là. Donc, la
parole est à vous pour une dizaine de minutes, par la suite suivront des
échanges avec les parlementaires. Je vous laisse la parole.
Société des alcools du Québec (SAQ)
M. Brunet
(Alain) : Parfait, merci, M. le Président. M. le ministre,
Mme, MM. les députés, merci. Pour moi, c'est
un honneur de pouvoir parler des vins québécois. J'aime bien ça. On est
là-dedans depuis plusieurs années. Et je vais vous tracer un peu le parcours de la SAQ à travers les vins québécois,
mais surtout je vais vous parler un peu du projet de loi, de l'avenir
que ça représente. Je pense que la table a été bien mise avec l'association des
viticulteurs québécois, hein? D'emblée, je
dois vous dire que nous, à la SAQ, l'accès des produits québécois à un réseau
de distribution plus large, c'est positif. Pourquoi c'est positif? En
fait, c'est positif parce que l'ensemble de la filière québécoise va pouvoir en
profiter. Plus on expose les produits en
commerce, donc plus large est le réseau, mieux ça va pour ces produits. Puis
ensuite, bien, comme on a vu, si la qualité est là et le consommateur est au rendez-vous,
bien, c'est l'équation gagnante.
Mais, avant d'aller
plus loin sur l'avenir, je veux vous parler un peu d'où on vient, cette jeune industrie
et nous, la SAQ. En fait, nous, on a toujours
été, je dirais, depuis... je vais vous parler des 15 dernières années, les
années où j'ai été
plus présent dans ce genre dossier, on a toujours été des partenaires
des producteurs d'ici, puis on y croit beaucoup, puis on a travaillé fort pour propager cette passion à l'intérieur de la SAQ. Puis pourquoi
c'est important de faire ça? Parce que
plus nos employés connaissent les produits du Québec, bien, évidemment, plus ça
connecte avec les consommateurs québécois, parce que c'est nos employés
qui sont aux premières loges. Puis, quand on parle d'éducation puis de
connaissance du produit, bien, ça se passe dans le réseau, avec le public, sur
le terrain partout au Québec. Puis c'est à travers nos succursales qu'on peut
faire ça.
Donc, quand je parle
d'implication, c'est que, dès le début, on s'est positionné comme conseiller,
guide, ambassadeur, facilitateur, d'abord avec cette jeune industrie,
concrètement, avec les oenologues qu'on a, qu'on pouvait leur rendre disponible, que ce soit le laboratoire. Depuis le
début, on s'est impliqué beaucoup avec eux pour tout l'aspect du contrôle de la qualité, mais aussi de la
production de qualité. Ensuite, ça a été des conseils qui ont porté sur
la mise en marché, hein, quand la
distribution s'est mise en place, bien, au niveau du marketing, de comment bien
distribuer le produit, de la commercialisation, de la mise en marché,
éventuellement même des outils de communication. On est allés jusqu'à faire des voyages d'affaires avec les producteurs d'ici. À
chaque année, en alternance, on va avec des groupes, soit des cidriculteurs ou des viticulteurs, on est
allés un peu partout en Europe mais aussi en Amérique pour rencontrer
puis mettre en place le balisage puis l'échange des bonnes pratiques pour aider
à cette jeune industrie qui était croissante. Alors,
on s'est impliqués dans ce genre de projets pour encourager la mise en avant et
la mise en place des bonnes pratiques pour la production.
Donc
là, je vous parle du début, dans les premières années. On l'a répété beaucoup
depuis tantôt, c'est une jeune industrie, 25, 30 ans. Et nous, dans
les 15 dernières années, on a beaucoup accéléré du côté de la
commercialisation. C'était une industrie
naissante, et moi, je dirais, ça a tourné, là, à partir de 2008 avec,
justement, la mise en place de la certification. Parce qu'un des aspects
importants pour l'authenticité d'un produit, un produit qui est artisanal comme
les vins du Québec, bien, c'est de vraiment
être capables d'avoir une traçabilité puis de démontrer auprès du
consommateur que c'est vraiment un produit
local qui est issu de la production locale et qu'il y a des techniques autour
de ça qui sont vraiment issues du
terroir ou des bonnes pratiques qu'on a dû développer ici, au Québec, compte
tenu des circonstances. Et donc on
s'est offert, nous... Le leadership venait des producteurs de vin du Québec,
puis c'est tout à leur honneur, là, ils ont mis en place une
certification, mais on les a assistés là-dedans puis on continue de les
assister parce qu'on croit que le côté niche
très pointu du produit, la typicité du produit du Québec, bien, c'est ça, sa
valeur forte, puis ça, ça passe par la qualité, puis il fallait le
mettre en place rapidement aussitôt que la production a été un peu développée.
Et donc on s'est
impliqués là-dedans, et ce que ça donne, bien, c'est une industrie qui commence
à avoir un rayonnement à l'international.
Donc, on les a incités beaucoup à présenter leurs produits sur des concours
internationaux. Ils gagnent des médailles
parmi les meilleurs vins du monde, et ça, ça s'est accéléré au fil du temps.
Donc, la qualité, ça amène aussi ça,
ça amène de la reconnaissance. Puis, comme vous le savez, quand on est reconnus
à l'étranger parmi les meilleurs vins du monde, bien, ici, au Québec, on
peut en bénéficier, puis nous, on peut en faire la démonstration auprès du
consommateur dans notre réseau.
Donc,
dans les 10 dernières années, c'est une industrie qui s'est organisée, qui
a adopté les meilleures pratiques, qui a optimisé sa production puis là,
maintenant, qui est en place avec la qualité pour être capable d'aller à la
prochaine étape. La prochaine étape, on les
accompagne vraiment beaucoup là-dedans parce que, là, on parle d'élargir la
distribution. Quand on a une bonne capacité
de produire puis qu'on produit des produits de qualité, bien là, si on accélère
sur produire plus de produits, donc
plus grande quantité, toujours de qualité, bien, on peut avoir accès à un
réseau de distribution plus large, on peut accélérer la mise en contact
des producteurs avec le consommateur.
Et
là, ça, depuis 2013, on va dire, les planètes se sont alignées, la qualité
était là, le programme du gouvernement s'est
mis en place pour appuyer les producteurs au niveau financier puis investir
pour développer la capacité à produire plus. Et, nous, en parallèle avec
ça, bien, on a mis en place un programme sur trois ans pour élargir, accélérer
au niveau de la distribution, de la commercialisation, du marketing. Et ça,
c'est des programmes bien précis qui ont pris leur envol à partir de 2013.
Évidemment,
pour faire ça, ça prend de la quantité. Il faut que ce soit soutenu maintenant
parce que, quand on installe auprès du consommateur une image forte par
rapport à un produit, bien, il veut retrouver son produit. Si on recommence tout le temps à zéro parce que le
produit n'est pas présent sur les tablettes, il manque de quantité, il y a
une instabilité, bien, le client, il passe à autre chose. Alors, c'est bien
important pour vraiment développer l'attachement que le produit soit là en constance puis qu'on soit capables, dans cette
industrie-là, de produire des produits de qualité, mais à long terme sur des grandes quantités, d'où
l'importance de l'appui financier à long terme pour qu'on soit capables
de continuer à développer puis à structurer
cette jeune industrie-là mais sur une base de moyen, long terme puis que les
efforts qu'on fait puis qui réussissent très bien au niveau de la clientèle
continuent à porter leurs fruits puis à grandir dans la tête des consommateurs
québécois.
• (12 h 30) •
Alors,
c'est dans ce contexte, là, en 2013, que l'association des vignerons québécois,
le gouvernement québécois puis la
SAQ, on a propulsé l'industrie, et là ça s'est accéléré. Vous savez, au cours
des dernières années, là, nous, on a connu une croissance des
ventes — je
parle juste de la dernière année, pour exemple — de 70 % avec les
vins du Québec. Donc, oui, ça a touché le
consommateur, et, oui, on peut dire qu'on a gagné avec le produit québécois sur
les tablettes parce que la qualité
était là, ça a été reconnu, puis on a été capables d'élargir le réseau à la
hauteur de la capacité de production. Donc là, on est rendus à
280 magasins, et ça, ça a permis de vraiment lancer les produits puis
changer la perception. Maintenant, il faut
construire là-dessus et il faut que ça reste. Et, pour que ça reste,
l'élargissement qui est prévu par le projet de loi n° 88, bien, il
peut amener de l'eau au moulin.
Le seul point, nous,
où on dit qu'il faut faire attention, bien, je pense qu'on en a pas mal
discuté, c'est que, si ça passe en direct,
il faut que les contrôles puis tout l'aspect de la sécuritéquant à l'authenticité
du produit, l'aspect de la traçabilité, la qualification des produits par rapport à la qualité,
donc le contrôle de la qualité, les aspects de santé publique, le contrôle organoleptique, etc., tout ça, ça doit
être assuré. Et ça prend un encadrement très clair, bien défini qui
permet de positionner ça puis que le consommateur puisse dire : Oui, ce
produit-là, quand je le retrouve en dehors de la SAQ, il est aussi de même
qualité, et c'est une garantie.
Et
ça, il faudra qu'on s'assure qu'au niveau de l'authenticité, au niveau du
contrôle de la qualité, puis du suivi, puis de la traçabilité qu'on apporte à cet égard, bien, qu'un produit
québécois, ce soit vraiment reconnu comme tel, peu importe dans quel réseau il est. S'il est livré en direct,
évidemment, on se comprend, il ne passera pas par la SAQ, on ne sera pas
là, comme laboratoire ou autres moyens de contrôle, pour faire les validations.
Il faut le prévoir. Ça prend donc un encadrement,
des normes puis un suivi rigoureux pour s'assurer que ce sceau-là de qualité,
il est maintenu, peu importe le réseau.
Donc, sans cette exigence, on peut ouvrir la porte à du vin en vrac qui est
importé d'un autre pays puis qui est mêlé aux vins québécois, et là on
déstabiliserait le Québécois, on en a parlé tantôt. Il faut se prémunir contre
ça.
D'ailleurs, une
anecdote, en Ontario, avant 1990, avant que la VQA, qui est la certification,
l'appellation en Ontario, arrive, bien,
c'est arrivé ce genre de chose. Et eux, ils s'en allaient sur une mauvaise
pente parce que, supposons, il pouvait
y avoir un vin qu'on disait ontarien, mais 80 % du jus dans la bouteille,
ça venait du Chili, par exemple. Et là le consommateur n'a pas suivi.
Alors, ils ont réagi rapidement. Avec VQA, c'est 100 %, puis on connaît
les résultats maintenant. C'est pourquoi la
certification puis éventuellement l'appellation contrôlée, c'est important puis
ça doit suivre jusqu'au consommateur final.
Donc,
il faut se donner les outils pour s'assurer que ces contrôles-là, que cet
encadrement-là est vraiment garanti, peu importe le réseau. En fait, à
la fin, ce qu'on veut, nous, c'est que le client, peu importe il est où, quand
il achète un produit du Québec, bien, il peut dire : C'est vraiment un
produit du Québec. Alors, ça, ce que ça veut dire, c'est que — on va prendre l'exemple d'un produit qui est
d'appellation contrôlée — il est 100 % constitué de vignes, de produits de vin issus de vignes qui ont été élevées au
Québec. C'est garanti, alors c'est sur l'étiquette. Puis ce qu'il y a sur
l'étiquette, c'est réel et ça représente le
terroir québécois, la production locale puis le savoir-faire du Québec, puis
c'est garanti à 100 %.
Finalement,
moi, ce que j'aimerais souligner, c'est que la SAQ, nous réitérons notre grande
fierté à travailler avec les
producteurs québécois, tous les producteurs. On parle beaucoup des vins en ce
moment, mais il y en a aussi, des producteurs
pour les petits fruits, les cidres, qui vont très bien aussi, qui ont une belle
reconnaissance, les spiritueux, etc. Donc,
nous, on va puis on veut continuer à avoir des plans solides qui seront
déterminants pour la croissance des produits d'ici puis nous souhaitons
que l'industrie puisse s'épanouir à son plein potentiel. Et, peu importe
l'élargissement du réseau, on pense que la
destination, la place où ça va se passer avec le plus d'expertise, le plus
d'éducation envers le client, bien, ça va être encore à la SAQ. C'est ce
sur quoi on va travailler.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, M. Brunet. Merci de votre
présentation fort intéressante. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Leitão :
Très bien. Merci, M. le Président. Alors, M. Brunet, merci — bonjour — d'être là et de partager votre point
de vue avec nous et l'expérience de la SAQ dans ce domaine. J'aimerais, avant
d'aller plus loin, quand même mentionner et
rassurer tous les collègues que le projet
de loi n° 88 a été élaboré avec
pleine collaboration du ministère de l'Agriculture. J'aimerais
que ce soit aussi clair.
Maintenant,
M. Quirion avait parlé tantôt que le réseau de la SAQ était comparable à
la LNH. Donc, je pense qu'il est satisfait du programme. Pourriez-vous peut-être
nous parler un peu, justement, de ce programme Origine Québec que vous avez à
la SAQ?
Le Président
(M. Bernier) : M. Brunet.
M. Brunet
(Alain) : Oui, bien, en
fait, nous, ce qu'on a fait à partir de 2013, c'est qu'on a lancé l'appellation
ou, dans notre jargon, nous, pour les catégories, là, donc les valences que
vous retrouvez en magasin, Origine Québec. Et,
à l'intérieur de ça, évidemment, il y a les cidres, qui ont la
grosse part du marché et qui étaient déjà bien installés, qui sont aussi bien reconnus. Alors, on a installé les
cidres, mais aussi on a fait une place puis on a commencé à installer
les vins du Québec. Et là, avec l'industrie, on travaille depuis longtemps avec
les viticulteurs québécois, on a fait des choix de positionnement qu'on a pensés les plus stratégiques. En fait, on s'est
dit : On va les mettre près d'une catégorie de vins qui est vraiment porteuse à la SAQ, mais qui est aussi
un signal, tu sais, qui est vraiment tendance et qui est en fait proche
de nos producteurs, parce que c'est des vins
d'Amérique, en fait, les vins californiens, et on en a positionné
éventuellement, la première année, dans 140 magasins puis ensuite, dans la
deuxième année, on en a ajouté 140.
Donc,
on a positionné, à l'intérieur de nos magasins, dans un endroit stratégique, à
côté des vins californiens, la nouvelle
catégorie Vins du Québec, rouges, et blancs, et rosés, et on a mis en
avant, donc, tout un programme de mise en valeur de la nouvelle catégorie Origine Québec, la grande famille, avec
des publicités, des promotions, et on a intégré dans notre plan
promotionnel, là, vraiment tout un volet d'Origine Québec, des produits québécois,
les vins, mais aussi les cidres, les petits
fruits. Alors, on a des promotions plusieurs fois par année. Dans nos circulaires, on leur
donne de la place. Dans nos revues
spécialisées, on leur donne de la place tout au long de l'année. Constamment,
dans les grandes fêtes, on arrive
avec des promotions. Exemple, avant le 24 juin, bien, on a un 10 % de rabais puis tout un week-end sur les
produits du Québec. Et donc il y a une stratégie commerciale qui s'est mise en
place. On a élargi, au rythme de la capacité de production, la distribution dans nos succursales puis aussi, à travers
ça, on a ciblé les cinq routes des vins et on a ciblé ces succursales-là
qui sont dans ces routes des vins pour aller encore plus loin.
Mais le plus
important dès le départ, ça a été de former les employés. Donc, il a fallu
vraiment faire un programme très spécifique,
adapté à nos employés. Puis on a demandé aux partenaires, aux producteurs de
venir rencontrer nos employés, puis on les a
exposés vraiment aux particularités de la production québécoise, puis on a fait
de nos conseillers en vin puis de nos gens, nos gens qui sont sur le plancher,
pas juste les conseillers, mais tout le monde... on a fait en sorte qu'ils
maîtrisent bien les vins du Québec, là où ils sont rendus maintenant, tu sais.
Les préjugés, c'est partout. On en avait aussi, nous autres, des gens qui
avaient les préjugés par rapport aux vins du Québec. On a fait tomber ça. Puis
on s'est dit : Si chacun est capable de trouver son vin puis de
dire : Oui, il y en a que j'aime moins, mais il y en a que j'aime bien,
puis là celui-là, il est bon pour telle raison, puis on est rendus là, etc.,
bien, ça va se communiquer à la clientèle. Puis c'est comme ça qu'on fait les
meilleures ventes. Quand la passion embarque puis que c'est l'authenticité, les
gens y croient.
Donc, on a développé
la formation puis finalement, évidemment, on a pris nos systèmes en place de
mise en marché, notamment les pastilles de goût, puis on s'est assurés que tous
les produits québécois étaient pastillés, là, dans notre jargon, c'est-à-dire
qu'il y avait une pastille de goût.
Alors,
c'est un peu, là, en gros, en résumé... Puis ça a donné des résultats, là, très
probants, hein? On est rendus maintenant
avec des ventes, là, de presque 10 millions de dollars, puis c'était à
peine 1 million il y a quelques années. Alors donc, les vins du
Québec ont été propulsés.
M. Leitão : ...une autre question avant de laisser les
collègues poser des questions aussi. Avec l'AVQ, on a parlé un peu de
cette question de cépages et millésimes pour les produits québécois. Comment est-ce
qu'à la SAQ vous voyez cette question?
• (12 h 40) •
M. Brunet
(Alain) : Très favorables.
Nous, on a toujours été très favorables à ce que le cépage soit
affiché sur les bouteilles. Là, il y
a des aspects un peu plus, je dirais, techniques, légaux, de réglementation qui
ne le permettent pas en alimentation.
Puis moi, je me permettrais de dire : Que ce soit pour les vins artisanaux
du Québec ou pour les vins produits ici,
au Québec, industriellement, je pense que c'est une ouverture qui peut se
faire. Puis nous, on voit ça d'un bon oeil, tout ce qui touche au vin qui nous permet de mettre en avant la qualité
des produits puis le côté de la traçabilité. Parce que, si je donne l'exemple des vins du Québec,
bien, on le sait, c'est des cépages autochtones, bien, ça va encore donner un
petit signal de plus pour dire au consommateur : Bien là, le cépage est
nommé, puis ça, c'est un cépage qui est produit ici, au Québec. Ça fait que ça
le rassure quant à l'authenticité puis à l'origine du produit.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Merci. Les collègues, si vous avez des questions.
Le Président
(M. Bernier) : M. le député de Sainte-Rose.
M. Habel :
Oui, merci, M. le Président. Vous avez parlé, dans votre allocution, de
contrôle de la qualité. Est-ce que vous avez des suggestions de contrôle
de la qualité qui serait nécessaire, qui n'est pas actuellement dans le projet
de loi n° 88, que vous aimeriez nous partager?
Le Président
(M. Bernier) : M. Brunet.
M. Brunet
(Alain) : En fait, nous, la suggestion, c'est qu'on puisse mettre en
place les mesures pour bien encadrer tout ce qui est suivi puis le contrôle de
la qualité. Parce que, là, là, il y a un système puis un processus qui fonctionnent très, très bien depuis longtemps au
niveau des produits qui passent à travers la SAQ. Puis les produits qui passent à travers la SAQ, ça peut être des
produits d'alimentation. On est grossiste là-dedans. Nous, on ne vend pas
en direct, mais on est grossiste, et là on
le passe dans le circuit. On transporte tous nos produits, on les rentre au lab
puis on fait l'évaluation. Essentiellement, il y a deux choses, là, le
côté contrôle de la qualité du produit intrinsèquement, mais aussi l'habillage, l'étiquette, les normes, les
réglementations, tout ce qui est prévu au sens de la loi, bien, on s'assure
d'une conformité. Et ça, c'est intégré à
même notre chaîne d'approvisionnement, et, bien, ça peut aller soit dans le
réseau des SAQ ou, comme on est
grossiste, bien, on livre ça aux entrepôts des détaillants en alimentation,
puis eux s'occupent du reste.
Alors,
là, là, s'il y a une livraison directe, c'est parfait, mais il faut prévoir le
remplacement, puis ça, ce n'est pas prévu.
Effectivement, il y a plusieurs options qui s'offrent, mais il faut les
prévoir. Là, pour l'instant, il n'y a rien de prévu, puis c'est le signal, nous, qu'on veut lancer.
C'est ultra-important. Je pense que le point a été fait, là, par tout le
monde, mais c'est ultra-important.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.
M. Habel :
Oui, merci, M. le Président. Dans votre allocution, vous avez mentionné,
en quelque sorte, une certaine perspective
de partenariat pour valoriser les vins québécois, alors que certains pourraient
peut-être dire que ça pourrait avoir
un impact marginal sur la vente de la SAQ. Vous, qu'est-ce que vous répondez,
pour les impacts positifs sur le projet de loi n° 88, qu'il pourrait
y avoir pour la SAQ mais aussi l'ensemble de l'industrie?
Le Président
(M. Bernier) : M. Brunet.
M. Brunet
(Alain) : En fait, moi, comme je disais d'entrée de jeu tantôt, quand
on parle d'un élargissement de réseau de
distribution, puis on prend un produit, puis on l'expose, bien, concrètement,
si le produit est de bonne qualité puis il plaît au consommateur, plus on l'expose,
plus ça accélère. Donc, c'est un effet d'entraînement pour l'ensemble de
la filière québécoise. Et là, même, par effet
d'entraînement, ça peut toucher les petits fruits, les spiritueux, les cidres.
Tu sais, il n'y a pas de compétition
là-dedans, c'est une grande famille, c'est les produits du Québec, artisanaux.
Et, tout ça, quand c'est bien
contrôlé, bien déterminé, comme on expliquait tantôt, avec des produits, une
production 100 % locale
ou 85 %, puis c'est bien suivi, c'est
rigoureux, bien, après c'est une question de développement de marché. Et là
nous, on a la grosse part du marché dans le vin, on est les experts puis
on est capables de faire le côté vraiment professionnel de l'éducation, de la mise en avant des produits.
Puis, oui, il y a une complexité qui vient avec le vin, mais ça, c'est
notre spécialité, puis, nous, ça nous
permet, après ça, d'entrer en action. Puis on va rester le joueur déterminant
de ce marché-là parce qu'on a la
capacité, on a l'expertise de nos employés, puis on a le savoir-faire, et en
plus on travaille en cohésion avec l'industrie
locale, alors ça ne peut pas faire autrement. Le reste après, on verra. Le seul
risque que je dirais, moi, c'est un risque d'encadrement. Mais ça, on va
le voir. Aussitôt que les choses vont être bien établies, on va pouvoir
avancer.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. D'autres questions, monsieur? Non, ça
va? Oui, M. le ministre.
M. Leitão :
Bon, je reviens. Le député de Rousseau avait soulevé la question du prix
minimum, surtout pour les vins en épicerie. Mais, puisque les règles sont telles que
ça doit passer par la SAQ, qui applique une certaine majoration, est-ce
qu'on peut dire que, de facto, il y a un prix minimum?
Le Président
(M. Bernier) : M. Brunet.
M. Brunet
(Alain) : Bien là, j'ai peut-être moins bien compris le projet de loi
parce que ça ne passera pas par la SAQ.
M. Leitão :
Non, non, pour les vins industriels, pas pour les...
M. Brunet
(Alain) : O.K.,
pour les vins industriels, pardon, O.K. Alors, pour les vins industriels,
évidemment, bien, on est grossistes, et puis
ça, bien, c'est la même structure de prix, c'est les mêmes
marges et c'est la même
fiscalité aussi, je dirais, là. Tout
l'aspect prix est pris en charge par les systèmes de la SAQ. Puis
après, bien, nous, on est grossistes, donc on revend. Oui, ça, c'est
assuré pour les vins industriels qui sont distribués à travers le système
actuel de grossiste SAQ.
Le Président
(M. Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão : Très
bien. O.K. Merci de cette
clarification. On a aussi parlé de contrôles de qualité, qui est aussi
un sujet qui revient occasionnellement. Pouvez-vous peut-être nous expliquer
comment la SAQ, aujourd'hui, s'assure que les produits vendus au Québec sont
des produits de qualité? Quelles sont vos procédures pour s'assurer de ça?
Le Président
(M. Bernier) : M. Brunet.
M. Brunet
(Alain) : O.K. En
fait, nous, on a une expertise qui est développée
depuis le début de la SAQ, donc depuis 1921. Dès le départ, de la
naissance de la SAQ, d'ailleurs, au début, c'était dans la loi même parce que
c'était vraiment un objet de contrôle qui
avait été mis en place, et le laboratoire était venu dès le départ, et on a
développé... Bon, là, ça a beaucoup
évolué, hein, vous comprendrez, en presque 100 ans. On a vraiment un
laboratoire de classe mondiale, hein, qui
est ISO, qui est reconnu. Parmi les laboratoires du Canada, on peut dire, il y
en a deux importants qui font la référence et qui sont de classe mondiale, c'est en Ontario, LCBO, puis au Québec.
D'ailleurs, on travaille beaucoup en collaboration, en partenariat les
uns avec les autres au niveau du contrôle de la qualité.
Comme
vous savez, tout ce qui est de santé publique, bon, c'est les normes de Santé
Canada qu'on doit appliquer pour tout
ce qui est alimentaire. Et donc nous, on s'assure de faire tous les tests, on a
des protocoles et on travaille vraiment sur une gestion, là, de
l'ensemble des arrivages. Dès le départ, on prélève des échantillons, on
contrôle la qualité du produit. Mais,
j'irais plus loin, même, pour les producteurs québécois, exemple, bien, en
cours de production, on les assiste aussi
en amont, avant même qu'ils nous présentent le produit. Éventuellement, quand
ils sont prêts à nous présenter le produit,
on peut même faire des tests pour être sûrs que, quand le produit est présenté
à la SAQ... Parce que vous savez que, pour
les produits québécois, l'entrée de produits est simplifiée, hein? Tous les
produits qui nous sont présentés par les producteurs québécois, s'ils
passent le test de qualité au niveau du contrôle de la qualité, ils sont
automatiquement acceptés et inscrits au
répertoire de la SAQ. Donc, ils peuvent dès lors être mis en distribution puis
être vendus. Donc, on a accéléré, on a assoupli beaucoup, beaucoup, puis
ça, ce n'est pas nouveau, là, ça fait plusieurs années.
Alors,
le contrôle de la qualité est dans toute la chaîne d'approvisionnement, donc,
dans leur cas, beaucoup en amont, on
peut aller les rencontrer dans leur place d'affaires. Mais sinon, au coeur de
la chaîne de distribution, là, nous, on
a des contrôles. Après ça, éventuellement, on a des contrôles aléatoires qui
peuvent être faits sur les produits qui sont distribués. Et évidemment
on gère quand il y a des remboursements, si on voit qu'il y a des écarts, bien,
on refait des contrôles. Puis on est en
interaction avec les producteurs pour les produits qui sont présentés, ou qui
vont être présentés, ou les
changements de lots. Quand il arrive des nouveaux lots, bien, on va reprendre
des contrôles. Ça fait que ça pourrait être plus détaillé, beaucoup plus
technique, là, mais, en gros, c'est le processus.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui, merci, M. le Président. Bonjour, M. Brunet, merci d'être là.
Merci pour vos réponses. Vous êtes de toute évidence un passionné, vous
connaissez très, très bien ce monde-là. J'ai des questions très simples. Je
vais commencer par une question sur laquelle
le ministre est allé, c'est la question des prix en épicerie des vins
industriels, là. Juste pour que je sois bien
au clair, les vins industriels, premièrement, il y a une majoration qui est
appliquée, la même marge que pour les autres vins.
Deuxièmement, est-ce que c'est correct de dire
qu'en épicerie ils ont l'interdiction de vendre en dessous d'un certain prix
que vous avez fixé? Est-ce que c'est correct de dire ça?
• (12 h 50) •
M. Brunet
(Alain) : En fait, quand on détermine le prix, il y a une structure de majoration qui est connue,
d'ailleurs qui est assez compliquée, qu'on
essaie de communiquer le plus possible, là. Et, quand cette structure de
majoration là, partant du coûtant, est appliquée, on arrive à un prix
vendant, hein? On met toutes les taxes — nous, on est «tax in», là — il y a des taxes plus spécifiques, il
y a plein de choses, là, donc j'évite
cette complication-là. On part du coûtant, on met toutes les majorations, les taxes, on arrive au prix vendant. Ça, ça
devient le prix, parce qu'il y a des produits qui sont vendus en épicerie, qui peuvent être aussi vendus
à la SAQ. Et ça, ça devient, je dirais, le prix minimum, et les
détaillants en alimentation ne peuvent jamais vendre plus bas que ce prix-là.
Le reste, après, ils peuvent se prendre des majorations commerciales puis vendre plus haut. Ça, ça appartient au marché. En plus, dans ce domaine-là, on est
grossistes, on n'a pas à interagir
là-dessus. Alors, ça, c'est leur domaine d'affaires, mais ils ne peuvent jamais
vendre en deçà du prix qu'on va dire
minimum, plancher, qui est le prix vendu à la SAQ quand le produit se retrouve
sur les tablettes de la SAQ. La seule exception à ça, c'est dans des
contextes particuliers de ventes à rabais sur certains lots, puis ça doit être
autorisé. Ça arrive à l'occasion, mais, tu sais, il n'y a pas de dérapage
là-dedans, là. C'est assez encadré.
M. Marceau :
Parfait. Merci. C'est très clair. Deuxièmement, je veux revenir aussi sur la
question des contrôles. Donc, le projet de loi prévoit que, pour les
produits québécois, ça ne passera pas par la SAQ, ça va passer par des laboratoires reconnus. Puis, juste pour être bien
clair quant à ce qui, donc, dorénavant ne passera pas par la SAQ, moi,
ma compréhension, puis peut-être que je suis
dans l'erreur, mais ma compréhension, c'est que, dans le fond, par
exemple, pour les produits artisanaux
québécois, pour les vins, il y a un cahier de charges dont le respect est
assuré par l'association. Donc, on
s'assure que les procédés puis les manières de faire sont adéquats et
correspondent au cahier de charges, puis ensuite de ça les produits vous
sont envoyés, vous vous assurez que la qualité est correcte.
M. Brunet (Alain) : Ça, c'est
dans le système actuel, là.
M. Marceau : C'est ça.
M. Brunet (Alain) : Oui, oui.
On fait ça.
M. Marceau : C'est ça,
dans le système actuel. Mais je veux juste voir quelle partie... Parce que la
partie contrôle, le cahier de charges va continuer et demeurer avec
l'association, puis la partie laboratoire, c'est celle-là qui, dorénavant, n'irait plus chez vous. Je voudrais
savoir exactement qu'est-ce que ça comporte. Puis juste une question
peut-être par-dessus, là. Donc, vous, vous assurez évidemment que c'est quelque
chose qui n'est pas dangereux pour la santé, j'imagine.
M. Brunet (Alain) : En plus,
oui.
M. Marceau :
Deuxièmement, j'imagine que vous devez mesurer le taux d'alcool?
M. Brunet (Alain) : Ah, oui,
oui, le taux d'alcool et bien d'autres. O.K.
M. Marceau :
Bon. Peut-être juste être plus précis sur le genre d'information qui, dans le
fond, va nous provenir dorénavant d'un autre laboratoire que du vôtre.
Le Président (M. Bernier) :
M. Brunet.
M. Brunet (Alain) : Parfait. Je
vais essayer de simplifier. Je vais aller du plus simple au plus compliqué, là.
Actuellement, là on parle de la certification,
il y a un contrôle qui est fait. Parce que c'est eux, hein, c'est leur cahier
de charges. Ils ont été vraiment très
professionnels, je dirais, de faire ça parce qu'ils se sont tous imposé ça,
puis c'est dans les règles de l'art, puis c'est audité, puis des
auditeurs externes.
Éventuellement, si ça migre vers une appellation
contrôlée, il y aura, pour l'appellation contrôlée, des vérifications aussi. Puis, ça aussi, c'est dans le cahier de charges qui
va être monté que tout ça va être inscrit. Ça, il faut faire la part des choses. Ça, c'est fait chez le
vigneron, on va dire, pour l'exemple précis, là. Et après, par exemple, là il y
a toute la question de la production. Un
coup que tu as ton appellation contrôlée puis que tu t'assures de faire les
bons contrôles pour maintenir ton
appellation contrôlée ou, dans ce cas-ci, en ce moment, ta certification, ça,
ça appartient au producteur, puis il
peut y avoir des vérifications pour venir auditer ça, puis là il peut perdre ou
maintenir sa certification ou son appellation.
Mais après on
rentre dans la vraie vie. La vraie vie, c'est la production. Des centaines de
milliers de bouteilles, ça roule.
Alors là, présentement, il y a un système, puis il y a un système qui est
colosse parce qu'il y a de la grosse production, il y a aussi les industriels, il y a plein de
choses, là, nous, qu'on a à gérer. Donc, dans notre chaîne, nous, on a
intégré, comme j'expliquais tantôt, le laboratoire. Le laboratoire, que ce soit
indépendamment, là, pour des produits qu'on vend
chez nous, qu'on rend disponibles aux détaillants en alimentation, quand on est
grossiste, on fait le même contrôle. Ça fait qu'aussitôt que ça rentre à la SAQ, là il y a une série de
contrôles qui sont deux choses : la qualité du produit au niveau de la santé publique, je vais dire, là, et de la
qualité intrinsèque de tout ce qui est lié au vin, je vais donner
l'exemple...
M. Marceau : Est-ce que
ça goûte bon?
M. Brunet (Alain) : Oui, c'est
ça. Alors là, santé publique, bon, le taux d'alcool, mais aussi, tu sais, il
n'y a pas de produit là-dedans
qui n'a pas d'affaire à être là, là. Plein de choses peuvent arriver. C'est un
produit alimentaire, donc il y a
des contrôles très précis, très pointus. Ça, c'est du contrôle de qualité qui
est vraiment, moi, je vais dire, lié à la santé
publique, tu sais. Après ça, il y a un contrôle de qualité du produit qui est par
rapport aux produits comme tels, bon, tu
sais. Et là, après ça, il y a un contrôle même qui va un peu plus loin,
qui est des règles d'affichage, d'identification, d'étiquette, etc.
Nous, hein, on est le commerce, mais la RACJ, elle, c'est le bras plus légal de
ça. Il y a une série des dispositions qui sont portées par la RACJ, mais nous,
on s'assure que c'est appliqué puis on valide ça.
Maintenant,
moi, je n'ai pas vu de façon très pointue, détaillée. Si on enlève ce
chemin-là, ça ne rentre plus par cette
porte-là, ça s'en va directement dans le marché, bien, il faut
s'assurer qu'il y a de quoi qui le remplace qui est aussi
spécifique. Parce qu'il faut éviter, justement, qu'il y ait... Parce que, là,
on est en grosse production, là, puis il peut arriver
bien des choses entre les deux, entre le producteur et... Parce que le détaillant,
finalement, c'est le marché final, c'est
le consommateur, il n'y a pas plus de chances après. Si on essaie de
contrôler ça dans les 8 000 points
de vente avec des milliers de
produits, je pense, ça peut être difficile, on s'entend là-dessus.
Là, je ne dis
pas que ce ne sera pas fait. Moi, ce que je dis, c'est qu'il faut
s'assurer que c'est au moins aussi efficace puis systématique, tout ce qui
touche le contrôle du produit comme tel dans ses qualités, mais aussi au niveau
de la santé publique, puis aussi dans le cas des produits québécois parce que les produits artisanaux qu'on va
dire : Aïe, c'est 100 % produits issus de la vigne du Québec, bien, il faut s'assurer aussi qu'on prend un recul
par rapport à ça puis qu'on le contrôle bien pour que le consommateur
final, il retrouve dans la bouteille ce qui est supposé d'avoir.
Le Président (M. Bernier) :
Continuez.
M. Marceau : Très bien. O.K. Parfait. Merci pour votre
réponse. Bien, en fait, dernier point peut-être... en fait, deux points, une remarque. On a déjà eu l'occasion de parler, vous et moi, dans le passé, dans
d'autres contextes, mais je pense que tout
le monde ici est conscient des défis
auxquels fait face la SAQ, en particulier avec le vieillissement de la population. Bon. C'est clair que les quantités d'alcool qui
vont se consommer dans le futur ne sont pas appelées à augmenter de façon
spectaculaire, mais, malgré tout, je
pense que vous êtes capables de tirer
votre épingle du jeu avec la montée en gamme,
mais aussi, je pense, puis ça, c'est la bonne nouvelle, avec les
produits du Québec, qui, de
toute évidence, ont des taux de croissance de vente qui sont bien
supérieurs à ceux que vous avez dans d'autres catégories, là. Alors, ça,
c'était simplement une remarque.
Puis la deuxième chose, deuxième remarque
peut-être, c'est simplement de vous féliciter pour l'ouverture que vous avez quant à l'affichage et à
l'étiquetage. Je pense que c'est une très bonne chose. Je n'ai pas senti de
réticence nulle part. Peut-être qu'il y en aura,
mais en tout cas, à ce stade-ci, je n'en ai pas vu nulle part autour de la
table, et le fait que vous soyez aussi en accord, je pense que ça va
nous permettre d'avancer simplement là-dessus. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Granby.
M. Bonnardel : Merci,
M. le Président. Moi aussi, je
veux vous dire bravo de dire oui au cépage, au millésime. Je pense que
vous êtes un acteur plus qu'important, puis vous devez être en collégialité
puis trouver des moyens pour amener les
produits du terroir québécois à être plus en évidence. On va essayer, pendant
mon petit sept minutes, là, de comprendre
plus la question du transport versus la certification possible que
l'association souhaite avoir un jour — ça,
c'est un autre débat — et
les timbres obligatoires.
Moi, je vais
vous mettre ça assez simple, là : le vignoble est prêt à embouteiller
l'année 2015; avant d'embouteiller avec sa certification, ce que
vous dites, c'est que le vin va devoir passer chez vous, c'est ça?
M. Brunet (Alain) : Bien là,
non. Dans le nouveau projet de loi?
M. Bonnardel : Dans le
nouveau projet de loi, c'est ça.
M. Brunet (Alain) : Non, quand
il va être... nous, on n'est plus là-dedans.
M. Bonnardel : Bon. O.K.
Alors, pour vous, ça, c'est un problème. Vous dites donc...
M. Brunet
(Alain) : Bien, je ne dis
pas que c'est un problème, je dis juste qu'il faut que ce soit bien
encadré parce que le point, ce n'est pas que ça passe chez nous, c'est
que ce soit garanti, à la fin, aux consommateurs.
M. Bonnardel : Donc,
vous n'avez pas nécessairement confiance que, si ce n'est pas vous qui le
faites...
M. Brunet
(Alain) : Je n'ai pas dit ça.
M. Bonnardel : Non? O.K.
Donc, pour vous, ce n'est pas grave...
M. Brunet
(Alain) : Non. Moi, j'ai
dit : Si c'est bien encadré, puis on a la bonne destination, des bons
contrôles, puis on fait les bons suivis, puis on fait confiance au monde, ça va
marcher.
M. Bonnardel : O.K. Bon.
Alors, si c'est aussi simple que ça, je mets un autre «check» oui là-dessus
Le
transport, êtes-vous pour le fait que le vignoble lui-même
puisse partir avec ses caisses, monter à Chicoutimi, monter en Gaspésie,
sans que...
• (13 heures) •
M. Brunet
(Alain) : Honnêtement, moi, j'ai vu ça tantôt, je n'ai pas vraiment de position là-dessus,
je n'ai pas eu à réfléchir là-dessus.
Mais moi, je vais vous dire, dans le
fond, à la fin, là, quand on... Là,
on est pour un projet de loi
qui va être développé. Au fur et à mesure qu'on voit les commentaires qui viennent,
on va le renforcer, hein? Ça fait que, moi, ce que je comprends du travail qu'il est en train de faire, c'est qu'à la
fin, là, on va renforcer puis augmenter un peu l'efficacité de ce projet de loi à travers des règles, des
dispositions ou je ne sais pas comment, là, vous appelez ça, là. Puis,
quand on verra le portrait final, moi, je
dis : Si ça fait le travail d'amener le produit aux consommateurs de façon
sécuritaire puis conforme à la réalité, qu'il n'y a pas de tricherie,
pour reprendre vos mots, puis qu'on peut continuer de travailler sur vendre ces
produits-là, bien, ça va avoir fait la job.
M.
Bonnardel :
On peut-u dire qu'il y a un aspect monétaire relié au transport vous-même ou
vous dites : Arrêtez, moi, là...
Si, à la fin de cette loi, là, l'association, bon, a demandé ça, le ministre
est ouvert, la certification, un jour, arrive, la traçabilité est là, et on a un produit qui est
certifié, qui est bu, qui a été testé en laboratoire puis que le vignoble le
puisse repartir avec ses caisses, vous dites oui.
M. Brunet
(Alain) : Bien, moi, je dis : À la fin, là, si on amène aux
consommateurs un produit de qualité, peu importe les détails puis toutes
les modalités, on n'a pas de trouble avec ça, nous autres.
M.
Bonnardel : Bon,
bien, j'ai fini. Je suis bien content.
Le
Président (M. Bernier) : Vous n'avez pas d'autres questions, M.
le député de Granby? Vous m'aviez dit que vous n'aviez pas assez de temps.
M.
Bonnardel : Oui,
mais on a d'autres sujets, mais je ne veux pas parler de ces sujets-là
aujourd'hui.
Le
Président (M. Bernier) : Moi, j'étais prêt à vous en donner.
Écoutez, merci, M. Brunet, de votre participation, merci de vos
informations.
Donc, je vais
suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures. Et vous pouvez laisser vos choses
ici, là, la salle va être fermée, il n'y a pas d'activité. Donc, je
suspends les travaux. Merci à vous tous. Merci de votre participation.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
(Reprise à 15 h 5)
Le Président (M. Bernier) :
À l'ordre, s'il vous plaît!Nous reprenons nos travaux, et bien sûr je
demande à toutes les personnes dans la salle de fermer leurs téléphones
cellulaires.
Donc, nous
sommes présentement à l'étude du projet de loi n° 88, Loi sur le
développement de l'industrie des boissons
alcooliques artisanales, et nous aurons le plaisir de recevoir cet après-midi
le Regroupement Le Québec dans nos verres, l'Association des
viniculteurs négociants du Québec, l'Association des microdistilleries du
Québec et l'Union des producteurs agricoles du Québec.
Donc, nous débutons avec M. Léon Courville,
du Regroupement Le Québec dans nos verres. Bon après-midi, M. Courville.
Merci d'être là. On est heureux de vous recevoir.
Regroupement Le Québec
dans nos verres
M. Courville (Léon) : Merci
beaucoup de m'avoir donné l'occasion de venir vous...
Le
Président (M. Bernier) : Vous avez 10 minutes pour
faire votre présentation. Par la suite, on va suivre les échanges avec
les parlementaires.
M. Courville (Léon) : Merci.
Mon nom est Léon Courville, je suis économiste de formation, professeur aux HEC, banquier, président de la Banque Nationale,
vigneron et aussi, incidemment, j'ai été président du conseil de Global
Wine & Spirits, qui est une filiale de Mediagrif et de la SAQ, ce
qui m'a donc permis d'aller un peu en dessous de la jupe
de la SAQ pendant un bout de temps. Je suis vigneron depuis 1998 à peu près et
j'aimerais vous faire un peu l'historique
des interventions et des pourparlers que j'ai eus à travers tout ce temps, un
peu un historique des contraintes auxquelles
font face les vignerons du Québec, les obstacles que nous rencontrons, tout
simplement pour que ça devienne public
parce que c'est des choses qui sont souvent peu mentionnées. Je parlerai de
quelques suggestions au projet de loi, qui, dans le fond, viennent
répéter ce qui a peut-être été dit, mais je m'attarderai aussi un petit peu à
certains aspects économiques de la viticulture, de la vinification au Québec.
Le projet de loi n° 88 est le petit-fils de
la loi n° 395 déposée par M. Stéphane Billette alors qu'il était dans
l'opposition à ce moment-là, et les différents
objectifs, c'était de moderniser la loi des alcools, d'amenuiser certains
obstacles réglementaires à la distribution
d'alcool, mais surtout offrir aux consommateurs un choix qui était
difficilement possible à ce moment-là et de contribuer à l'essor du Québec et
de ses régions.
Les alcools
québécois rencontrent deux gros types d'obstacles, selon moi. D'abord, la loi,
qui n'a pas été modifiée depuis 1994,
dans le fond, est une loi qui a été passée avant même qu'il y ait des vignobles
au Québec. Donc, c'est comme si on
essayait de voyager dans un milieu qui n'a pas été pensé pour nous. Le cadre
réglementaire est à géométrie variable. Les interventions du MAPAQ, du
ministère des Finances, de la SAQ ont toujours été changeantes dans le temps de
façon souvent non anticipée. Puis vous
comprenez que, quand on met une vigne dans le sol, c'est pour 40 ans. On
ne peut pas l'arracher une année puis la remettre l'année suivante.
Comme ancien président de banque aussi puis comme j'ai eu beaucoup d'anciens
étudiants, de collègues qui ont été plus courageux que moi, qui sont venus en
politique... Il y a beaucoup de ministères
impliqués. Et, à la banque, quand il y avait cinq départements impliqués, il y
en a toujours un qui... de telle
sorte que l'inertie s'installe et le statu quo prend le dessus sur le
changement. Donc, bienvenue au ministère des Finances. C'est un ministère transversal, et je pense que c'est ça qu'on
avait de besoin, et je salue d'ailleurs l'initiative du dépôt de la loi
n° 88, qui était très attendue.
L'autre
obstacle, c'est la commercialisation. La SAQ a eu comme modèle d'affaires, puis
ça, c'est correct, ça, de faire la
promotion des vins et alcools étrangers, il n'y en avait pas au Québec. Mais
ils ont fait ça parce que c'est payant, c'est des gros dividendes qui sont payés. Mais, par des promotions, par
des voyages, par les médias, les sommeliers, la promotion des vins, ils ont encouragé les vins étrangers de telle sorte
qu'on est devenus un peu sous le radar lorsqu'on s'est installés.
J'appelle ça un peu l'espèce d'aplaventrisme. On a créé toute une communauté
d'intérêts pour le vin étranger, puis le vin
québécois a été mis un peu de côté. Il y a eu un grand virage qui a été fait en
2014 avec le nouveau président de la SAQ, M. Alain Brunet, et même
là, la SAQ, c'est encore un gros organisme et peut-être que, pour beaucoup de
producteurs, c'est difficilement accessible.
• (15 h 10) •
Cet
aplaventrisme-là va très loin parce
qu'il est très difficile de voir chez nous des gens reliés au milieu du
vin qui viennent dans nos vignobles. Je dis
souvent, en boutade, que Montréal-Bordeaux, c'est moins loin que Montréal-Bromont.
C'est bête à dire, mais il y a beaucoup de
gens... j'en ai vu beaucoup, lorsque j'étais chez Global Wine, en Europe,
mais très peu chez moi.
Une grande
différence par rapport à ce qui se passe partout dans le monde depuis une
vingtaine d'années au niveau de
l'achat local, où que vous alliez... quand vous allez en Suisse, dans le
Vallet, ce n'est pas des vins suisses qu'il y a sur la carte, c'est des
vins du Vallet. Nous, ça prend du temps à en arriver là.
Le deuxième
gros obstacle, c'est peut-être le pire, et tous les collègues que j'ai
rencontrés qui étaient ministres ont
tous essayé puis ils se sont tous fait dire la même chose par les
fonctionnaires — probablement,
M. Leitão, vous êtes familier :
les accords internationaux. Les juristes du gouvernement, depuis 15 ans,
20 ans, interprètent de façon exégétique les accords internationaux, accord du commerce mondial, accord Canada-Europe,
pour nous dire : Ce n'est pas possible. On est capables de les
lire, là, ces accords-là. C'est vrai qu'il y a des petites dérogations, mais
c'est devenu une légende urbaine. Et,
lorsque je rencontrais des attachés politiques ou des ministres, ils me
disaient tous : Ah! on m'a dit que ce n'était pas possible. Puis
j'ai dit : Qu'est-ce qu'ils ont dit? Bien là, je peux te les faire
rencontrer si tu veux. Je la connais, la chanson. Pourtant, au Canada, ce sont
des accords canadiens et non québécois. L'Ontario y déroge, la
Colombie-Britannique y déroge et la Nouvelle-Écosse le fait même par loi.
Qu'est-ce qui fait que, chez nous, c'est si puissant, cet argument-là, alors que dans les autres provinces, sans qu'il y ait
eu de mesures de contestation — il n'y en a pas eu, puis il n'y en a
pas encore — ils
peuvent faire ce que nous, on dit qu'on ne peut pas faire?
Entre
parenthèses, l'industrie québécoise est une larme dans l'océan : 1 %
des bouteilles vendues, 6,6 % de la valeur. Donc, on ne devrait pas être si menaçants que ça. La croissance
des vins en épicerie en une année — je ne parle pas des vins de la SAQ — ça représente 20 ans de viticulture
québécoise, tu sais, écoute bien, là. Ça fait que quand même qu'on
couperait juste un petit peu dans leur croissance, pas les faire rétrograder,
on ne fait pas une grosse...
N'oublions pas, là, que les accords
internationaux, c'est des règles du commerce puis il y a des dérogations partout. On en fait, nous autres, on en fait avec
les crédits d'impôt, on en fait avec les subventions aux entreprises. Ils
en font, eux autres, en Europe :
850 millions d'euros en 2015 — je pourrai envoyer la citation — en promotion de la viticulture en Europe, la promotion de la vigne, tout ça, des
choses qui dérogent légèrement. Ce n'est pas un code de la route, ce
n'est pas un code criminel, ça, là, tu sais, il y a un petit peu d'élastique
là-dedans.
Comme ça ne débloquait pas, on a commandé une
étude, que je pourrai rendre disponible au ministère s'il le veut, de Me Bernard Colas, un expert en
commerce international, qui a conclu ceci : «L'élargissement à certains
marchés peut, quant à lui, soulever des
questions de discrimination à l'égard des producteurs étrangers[...].
Cependant, et compte tenu des
éléments évoqués dans notre avis, il nous apparaît peu probable que ces mesures
fassent l'objet d'un arbitrage en vertu d'un accord commercial.»
J'aime
beaucoup utiliser l'exemple de ce qui s'est passé en Ontario dans un autre
domaine. L'Hydro Ontario avait dit :
Moi, j'achèterai de l'électricité des éoliennes si les éoliennes sont faites en
Ontario, qui est une violation, là, pas juste Canada-Europe, de gros accords de commerce. Ça a
pris quatre ans avant que la contestation se fasse, mais ils ont réussi
à faire partir deux producteurs qui existent
encore aujourd'hui. Donc, il y a l'attitude légale, l'attitude, comment je
dirais, théorique, philosophique d'être
conforme, mais il y a l'attitude pratique aussi de faire quelque chose, même si
on prend quelques risques.
Loi
n° 88, quelques suggestions. Je n'irai pas dans les détails, je pense que
ça a été fait ce matin. Dans la loi, on dit que la loi entrera en vigueur quand le gouvernement le décidera. Ça,
ça veut dire quand tout le monde aura organisé ses flûtes. J'aimerais ça qu'on mette une date butoir
pour que les gens de la Régie des alcools, des autres ministères
impliqués puissent se mobiliser en fonction d'un objectif.
Je veux
réitérer aussi la traçabilité du produit, c'est bien important. Quoi que vous
choisissiez, plus de pourcentage de raisins québécois, le mieux ça sera.
Il faut s'assurer qu'il y a une conformité.
Dans la loi
n° 395, il y avait un marché qui était incontestable, qui était les
restaurants «apportez votre vin». Ce n'est
pas beaucoup, mais c'est une belle fenêtre. Elle a été sortie du projet,
soi-disant parce qu'à la Régie des alcools on trouvait compliqué avoir
deux sortes de bouteilles dans les restaurants «apportez votre vin». Bon,
j'aimerais ça que vous regrattiez ça, là, parce que je trouverais ça
déplorable.
Parlons développement économique brièvement.
Actuellement, il y a plus de 500 emplois directs dans les vignobles, dans les régions, là. La masse
salariale, là, c'est autour de 20 millions de dollars. Je fais une
comparaison entre ma terre,
20 hectares de vignes, puis quand j'avais du foin. Aujourd'hui,
20 hectares de vignes, c'est 120 000 bouteilles, 2 millions de revenus, 13 emplois à
temps plein. Quand je faisais du foin, c'était 270 balles de foin,
9 450 $ de revenus, versus
2 millions, et un emploi trois jours par année. Sur la même terre, là.
J'allais dire : Ne riez pas, c'est ça que j'avais marqué sur ma
feuille, mais on ne peut pas faire autrement, hein?
Deuxième élément, la majoration. Actuellement,
au Québec, du vin à 5 $ la bouteille qu'on va vendre à la SAQ, ça ne sera pas payant. On ne peut pas
arriver. D'ailleurs, bien des Européens qui n'arrivent pas, c'est à cause
des subventions à la commercialisation
qu'ils peuvent baisser ça. Et, en majorant le prix sur le vin importé comme la
SAQ le fait, la même chose pour les vins du
Québec, on nie l'effet économique que nous, on induit et qu'eux ne font pas, tu
sais. Quand j'engage du monde, je paie des
salaires ici, ils paient des taxes ici, ils paient des impôts ici, CSST,
«whatever». Château Lafite Rothschild, il
n'en donne pas gros ici. En fait, on est traités comme des entreprises
étrangères, au même niveau qu'elles,
qui, elles, sont subventionnées alors que nous, nous ne le sommes pas ou peu.
Donc, je pense que c'est un traitement inéquitable, inconcevable compte
tenu des emplois qu'on crée et c'est un frein à l'industrie.
J'aurais
tendance à vous suggérer, M. le ministre, vous êtes en période de
négociations prébudgétaires, si vous aviez un programme de développement économique pour sept ans pour l'industrie
vinicole avec une forme de crédit d'impôt basé sur le nombre de bouteilles qu'on vend, on aurait des effets induits qui
ne sont pas négligeables. Moi, je pense qu'un rabais de la majoration du tiers ou l'équivalent du tiers
équivaut à ce qui serait rentable pour nous et qui viendrait nous
compenser l'inéquité par rapport aux vins étrangers. Puis ça ne représente pas
des gros montants, mais les retombées de doubler la viticulture dans les sept prochaines années, c'est 600 emplois
directs — je pourrai
vous fournir comment j'ai calculé ça,
quoique je sais qu'il y a des gens encore mieux que moi chez vous — 400 emplois indirects puis peut-être un
impact économique de 50 millions. Ce n'est pas petit, mais vous savez
comme moi, vous êtes un professionnel comme moi, la vie, le développement économique, ce n'est pas des baguettes
magiques, c'est des petites initiatives qui se multiplient, qui font
qu'à un moment donné l'essor est partout, en particulier en région.
Le Président (M. Bernier) :
M. Courville, on va avoir l'occasion de...
M. Courville
(Léon) : Oui. Je termine
avec cette belle citation de Michel de Montaigne : «Servez-leur de
bons vins, ils vous feront de bonnes lois.» Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. Courville, c'est de bon aloi. M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Leitão : Très bien. Merci,
M. le Président. Alors, merci beaucoup, M. Courville, et bienvenue à
cette commission. Très appréciés, votre
présence, et votre mémoire, et, donc, la présentation que vous nous avez faite.
J'aimerais peut-être venir parler un peu de
la question dont on a parlé un peu aussi ce matin, du contrôle de qualité.
Évidemment, pour pouvoir maintenir la
confiance des consommateurs et donc pour que l'industrie puisse continuer de se
développer, l'aspect du contrôle de
la qualité est essentiel. Comment voyez-vous ça, le rôle de la SAQ? Qui devrait
s'occuper du contrôle de qualité?
Le Président (M. Bernier) :
M. Courville.
M. Courville
(Léon) : Bien, moi, je pense
qu'on a un des meilleurs laboratoires au monde, là, puis des gens très
expérimentés. Je ne vois aucune objection à ce que le contrôle de la qualité
soit fait par la SAQ. Il devrait peut-être même
être fait par là. Maintenant, est-ce que c'est une fois par année qu'il
faudrait faire goûter les bouteilles, là? Je pense que ce n'est pas le cas pour les Européens, ça pourrait être la
même chose pour nous. Ce qui est vendu par les vignerons du Québec à la SAQ présentement, ils doivent passer
par le processus habituel puis même, je dirais même, des fois un petit
peu plus rigoureux parce qu'on nous singularise à certains moments. Mais je
n'ai aucune objection à ce que la SAQ le fasse,
et d'ailleurs c'est peut-être la meilleure façon, la meilleure garantie pour
nous, effectivement. Je ne sais pas si ça répond à votre question.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão :
Très bien. Vous avez mentionné, tout à fait à propos, la question des accords
internationaux, et ce qu'on dit et la
réalité, c'est une autre chose. Peut-être pour nous donner un peu plus de
couleurs à vos propos... Vous avez mentionné
l'Ontario, la Colombie-Britannique, où des choses se font déjà, et aussi la
Nouvelle-Écosse. Peut-être vous pouvez nous dire un peu comment nos amis
en Nouvelle-Écosse ont agi...
M. Courville
(Léon) : ...la
Nouvelle-Écosse est même allée plus loin que tous les autres. En Colombie-Britannique,
c'est plus insidieux, pendant un bout de temps, LCBO, c'était fait en
détournement, maintenant ils le font sous trois vocables différents. La Nouvelle-Écosse l'a mis dans une loi, a annoncé
dans une loi en 2009 qu'elle aurait un statut de majoration différent pour les vins produits en Nouvelle-Écosse par
rapport aux vins importés. Et je pense que vos adjoints ont accès à
cette loi-là, sinon je pourrai vous l'envoyer. C'est très simple, et c'est très
clair, et ça n'a pas donné lieu à des contestations.
• (15 h 20) •
M. Leitão : C'est ça, ma
question, c'est ça où je voulais aller. Donc, malgré cette volonté très
clairement expriméee, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, jusqu'à maintenant, on n'a pas eu d'échos. Et, si j'ai bien compris aussi ce qu'on disait
ce matin, la production en Nouvelle-Écosse augmente rapidement.
M. Courville (Léon) : Ils ont
même une école de viticulture, imaginez-vous, 900 000 habitants, tu
sais. On est en retard un peu.
M. Leitão : Très bien. Je ne sais
pas si, les collègues, vous avez des questions à poser. Sinon, moi, je peux
continuer, ça ne me dérange pas du tout.
Le Président (M. Bernier) :
Continuez, M. le ministre, on vous écoute.
M. Leitão : On a parlé aussi un
peu ce matin la question du millésime et du cépage, donc de la difficulté qu'il y a, donc les vins vendus dans le réseau des
épiceries ne peuvent pas être identifiés, et donc la SAQ nous a informés
qu'elle ne voyait pas d'obstacle à ce que cela change. À votre avis, quel serait
l'impact d'un tel changement si on pouvait dorénavant...
M. Courville
(Léon) : Bien, d'abord, il y
a trois choses, hein? N'oubliez pas, la loi, je pense que c'est dans le
but de rendre accessibles les vins. Il faut
que les gens les reconnaissent. Si on enlève le millésime pour certains d'entre
nous puis si on enlève le cépage, on devient quoi, là?
Deuxièmement,
si vous voulez avoir un programme de traçabilité, il faut que vous partiez du
plan de développement, du plan
terrestre au cépage, puis il faut que ça se traduise dans la bouteille. Ça va
être très difficile de contrôler autrement.
Troisièmement,
j'ai une boutade, moi, pour l'histoire. Vous avez ouvert la porte toute grande.
Tu sais, c'est un peu comme le pape,
qui, après 200 ans contre la contraception, dit : Oui, vous pouvez
porter un condom, mais à condition de faire un trou dedans, tu sais.
Écoutez, vous l'ouvrez, la porte, là, ça fait qu'allez-y. C'est tout, là.
Le Président (M. Bernier) :
C'est fort intéressant. Je vous écoute.
M. Courville (Léon) : Non,
mais, tu sais, vous comprenez.
M. Leitão :
Un autre enjeu qui a été soulevé ce matin, et je pense qu'il est important,
c'est toute la question du transport, transport de produits, donc, aux
épiceries, réseau de la SAQ ou pas, comment vous voyez cet enjeu-là?
M. Courville
(Léon) : Je sais qu'il y a
des contraintes là-dedans, mais, en théorie, là, le type qui achète le
vin chez nous, il fait une transaction au
téléphone, donc à la propriété. Le vin lui appartient, donc il est transporté
pour lui, pas par nous. Moi, c'est un
peu de même que je vois ça. Je ne sais pas si ça résout les obstacles
réglementaires et légaux, mais c'est un
peu ça, l'histoire. Les gens font la commande au téléphone, on fait la
transaction MasterCard. Là, le vin lui appartient, là. Il faut bien qu'il le fasse venir, ce gars-là.
Bien, on trouve le transporteur pour lui pour qu'il vienne chez nous. Il
peut bien l'appeler lui-même, là, je ne sais pas.
Je sais qu'il
y a des histoires dans le transport, c'est complexe, là. Mais, tu sais, on ne
fait pas de livraison, là, on fait juste permettre à la personne qui a
acheté son vin de l'avoir chez lui. Il ne nous appartient pas, ça fait qu'on
n'a pas d'affaire à le livrer, nous autres, là.
Le Président (M. Bernier) : M. le
ministre.
M. Leitão :
Très bien. Écoutez, moi, c'est à peu près tout. J'aimerais terminer en vous
disant que moi aussi, je partage votre enthousiasme et l'utilité de
cette industrie comme un outil de développement économique. Donc, les retombées d'une telle industrie sont souvent
peut-être sous-estimées de la part du grand public. On pense que,
puisque c'est une industrie artisanale, ça a
peu d'impact sur l'économie, mais, non, l'impact est significatif, surtout en
région. Donc, je partage votre opinion là-dessus. Merci.
M. Courville (Léon) : Je vous
remercie.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le
député de Rousseau.
M. Marceau : Oui, merci,
M. le Président. Bonjour, M. Courville. Merci d'être là. Des
questions qui vont ressembler, mais avec un
angle peut-être un peu différent. Je vais commencer par la question des accords
internationaux. Vous nous suggérez, à la
page 7 : Suggestions pour un gouvernement voué au développement, un crédit
d'impôt à la masse salariale ou bien
de 0,75 $ la bouteille, puis ça, c'est équivalent à la majoration qui
serait un tiers de celle présentement en place. D'après votre réponse à la question sur la Nouvelle-Écosse,
qu'est-ce que vous préféreriez, l'approche directe de la majoration ou
l'approche... appelons-la indirecte, un peu plus souterraine du crédit d'impôt?
Le Président (M. Bernier) :
M. Courville.
M. Courville
(Léon) : Bien, moi, dans le
cadre d'un programme de développement économique où on mentionne ça, il y a
90 sortes de crédits d'impôt différents, là ça fait 91, tu sais, c'est noyé
dans la masse. Moi, qu'on l'ait d'une façon ou de l'autre, ça ne me dérange pas, mais il y aurait un caractère de
permanence à ça. Tout ce qu'on a vécu depuis 2000, c'est la SAQ qui le paie, qui ne le paie plus,
convaincre un ministre, ne pas convaincre, on vous a convaincu, vous,
avec le 2 $ qui a été ajouté au 18 %, ça a été retiré, tu sais.
L'idéal, pour moi, puis ça, je ne suis pas le technicien de ça, là, vous
connaissez ça mieux que moi, c'est d'avoir une mesure qui a un caractère un peu
permanent.
M. Marceau : Stable et
permanent.
M. Courville
(Léon) : Stable et
permanent. Moi, j'aurais 25 000 plants de vigne de plus si ça n'avait
pas été si difficile de 2005 à 2009, là. Tu sais, tu te dis, là, c'est
toffe, se battre. On a déjà tous le préjugé défavorable d'être Québécois. Les
agents commerciaux à la SAQ font un travail exceptionnel. Tu sais, nous autres,
on est tout petits, on est un par un. Quand
je vais dans les restaurants, j'ai une bouteille, moi, là, ou deux, tu sais,
lui, il arrive avec 30 bouteilles différentes,
ça fait qu'ils vont gagner tout le temps, tu sais. Alors, donnez-nous quelque
chose qui va nous permettre de faciliter notre commercialisation sur une
base prévisible. Nous, on est prêts à engager des ressources quand on le sait
que ça va aboutir.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Marceau :
O.K., O.K. Puis vous avez mentionné, sur la question du contrôle, que le fait
de passer par la SAQ, ça pourrait vous convenir. Puis là ma question,
dans le fond, c'est qu'évidemment il y a du vin que vous produisez qui est destiné à la SAQ de toute manière et puis
qui passe par là, il y a le vin, donc, qui va aller en épicerie. Là, c'est
de ça dont on parle, là, c'est du vin qui
irait en épicerie. Et puis, dans le fond, vous dites : Si ça passait par
la SAQ, où il y a un excellent laboratoire puis ils sont habitués à
faire ce boulot-là, ça pourrait par la suite s'en aller en épicerie. Mais ma question, dans le fond, c'est : Si on allait
dans cette avenue-là, puisque la SAQ joue le rôle de grossiste déjà pour les
vins... appelons-les industriels, le transport pourrait partir de toute façon
de l'entrepôt de la SAQ?
M. Courville
(Léon) : Peut-être,
c'est à voir avec la SAQ. Effectivement, je
pense que la SAQ a, dans son
plan d'affaires, de devenir de plus en plus un pourvoyeur, d'abord un «warehousing», elle crée une expertise en
logistique. Moi, écoutez,
s'ils font ça à bon prix, c'est évident que ça pourrait passer comme ça. Pour moi, ça
devient des questions...
M. Marceau : O.K. En
tout cas, vous n'avez pas d'objection à ça, là, vous êtes...
M. Courville (Léon) : Pantoute,
pas du tout. D'ailleurs, autre chose qui milite en faveur du millésime puis du
cépage, c'est qu'on aimerait que la bouteille vendue à la SAQ ou vendue à la
propriété puisse être reconnue par le consommateur
en épicerie. Tu sais, on ne veut pas avoir un troisième... Vous comprenez ce
que je dis? Donc, l'analyse est déjà faite à la SAQ, le client l'a déjà vue
à la boutique, il l'a déjà vue à la SAQ, il la voit en épicerie. Tu sais, il
ne faut pas avoir... Vous comprendrez ce que je veux dire, là? C'est
comme nous diluer.
M. Marceau : O.K. Puis,
sur la question de ce que c'est justement qu'un vin du Québec, là on sait que
les vins certifiés Québec,
c'est 100 % de raisins québécois et puis que, bon, là, on a dicté
85 %-15 %, en tout cas c'était la proposition de l'Association
des vignerons, 85 % de raisins provenant du Québec, 15 % pouvant
provenir d'ailleurs, comment vous voyez ça, vous, dans le fond? Est-ce que vous
croyez que, pour le consommateur québécois qui voit «Produit du Québec», d'avoir 15 % de raisins qui viennent de l'Ontario,
ça vous semble adéquat, pas adéquat, correct?
M. Courville
(Léon) : Moi, tous mes vins
sont certifiés. Moi, personnellement, le plus c'est Québec,
le mieux c'est, mais je peux
comprendre que ça peut présenter des problèmes selon certaines années. 85 %-15 % est
devenu une tradition par un édit
administratif de la Régie des alcools il
y a déjà très longtemps,
puis c'est comme devenu un peu dans les paramètres. Bien, écoutez,
85 %, c'est déjà beaucoup, là, mais je suis relativement indifférent ou
agnostique sur cette question-là.
M. Marceau : O.K., vous
êtes indifférent parce que vous, vous faites du 100 %-0 %, vous
faites du 100 %?
M. Courville (Léon) : Oui.
M. Marceau :
O.K., c'est juste du point de vue du consommateur, en tout cas, on s'entend, il
faut que ce soit très, très clair.
M. Courville
(Léon) : Il faut
que ce soit bien clair, ça, c'est sûr, tu sais, traçabilité puis, comment
est-ce qu'on dit ça, transparence, hein?
M. Marceau :
Transparence, oui.
M. Courville (Léon) : Remarquez
que, juste comme... en Oregon, moi, je suis allé visiter, et c'est marqué pinot noir sur la bouteille, mais ils ont le droit
de 14 % qui n'est pas du pinot noir, puis ils ne le marquent pas. Quand
je leur ai dit que je faisais du Foch, j'ai
dit : Vous ne connaissez pas ce que je fais. Bien, ils ont dit : Ah!
on sait bien, allez en bas dans la
vallée, quand notre pinot noir est un peu faible, on met un peu de Foch dedans.
Puis c'est vrai, mais ils ne le mettent pas sur la bouteille. Ça fait que, tu sais, les règles, dans le monde du
vin, elles sont réinterprétées selon les circonstances. Il faudrait
peut-être penser à nos circonstances aussi.
• (15 h 30) •
M. Marceau :
O.K. Et puis, oui, c'est ça, je voulais vous parler de santé publique. Bon,
vous avez peut-être entendu les questions qui ont été posées à ce sujet.
Bon, vous savez que, si le vin passe par... parce que je reviens au modèle laboratoire SAQ, distribution... bien, enfin, SAQ
agit en tant que grossiste, ça s'en va dans les épiceries du Québec.
Vous avez entendu M. Brunet, peut-être,
plus tôt, qui nous disait puis qui confirmait que, dans ce cas-là, il y a un
prix plancher et que le distributeur
ne peut pas vendre le produit en dessous d'un prix plancher. Cette approche-là
correspond à, je pense, la vision des
gens de chez Éduc'alcool en particulier. Est-ce que vous croyez que c'est
approprié, utile, nécessaire dans le cas des vins québécois?
M. Courville
(Léon) : Bien, j'ai voulu
l'appeler ce matin pour savoir ce qu'il voulait dire. Moi, je ne
comprends pas. Ça, c'est Éduc'alcool, ce
n'est pas Anti'alcool, hein, ce n'est pas ça, leur mandat. Je ne comprends pas.
D'autant plus que je lui avais parlé
avant puis je n'ai rien compris, parce qu'il m'a dit : Non, non, on
dit : Ça aurait été mieux si ça avait été SAQ. Mais il y a déjà du vin étranger dans les épiceries. Il y a du vin
à 15 % d'alcool dans les épiceries. Je ne l'ai jamais entendu se...
Je ne sais pas ce qui s'est passé pantoute. Je ne comprends pas. C'est
Éduc'alcool, bien, qu'il éduque.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau :
Bien, si je peux me permettre, puis là les gens d'Éduc'alcool auront l'occasion
de s'exprimer ici, mais je pense que
l'idée, c'est de dire : Est-ce que... Dans le fond, la question, que je
peux vous poser autrement : Est-ce que vous croyez que, pour un
certain contenu en alcool, ça prend un prix minimum?
M. Courville
(Léon) : Bien, en tout cas,
moi, je ne me vois pas vendre mes vins en bas du prix que je vends à la
boutique parce que je vais aller dans une épicerie, là, tu sais.
M. Marceau :
Non, non, c'est ça, exactement. Dans le fond, vous me donnez la même réponse
que l'Association des vignerons. Vous
dites, dans le fond : Nous, nos produits sont assez dispendieux à produire
de toute façon, et donc il n'y a pas d'enjeu que les prix vont se
retrouver...
M. Courville (Léon) : Mais il
n'y a pas de prix minimum à la SAQ, hein?
M. Marceau : Pardon?
M. Courville (Léon) : Il n'y a
pas de prix minimum à la SAQ, ils font des ventes à 8,90 $. Il n'y a pas
de prix minimum à la SAQ. Pourquoi est-ce qu'il y en aurait du vin québécois?
M. Marceau : Bien, c'est
parce qu'il y en a un dans la bière, il y en a un dans la bière.
M. Courville (Léon) : Je ne
connais pas la bière.
M. Marceau : Écoutez, de
toute façon, regardez, moi, je vais juste...
M. Courville (Léon) : Mais il
n'y a pas de prix minimum de vin à la SAQ. Pourquoi il y en aurait du vin du
Québec en épicerie? Je ne comprends pas.
M. Marceau : Mais je
veux juste être clair, ce n'est pas ma recommandation, c'est une question que
je pose parce que... enfin, je vais la poser
à tout le monde parce que ces enjeux de santé publique sont quand même
importants.
M. Courville (Léon) : Bien,
vous poserez ça à M. Sacy, tu sais, quand il viendra.
M. Marceau : Je voulais
entendre votre point de vue aussi. Merci.
M. Courville
(Léon) : Je ne le comprends pas, je ne le comprends pas.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député. M. le député de Granby.
M. Bonnardel : Merci,
M. le Président. M. Courville, bonjour.
M. Courville (Léon) : Bonjour,
François.
M. Bonnardel :
J'ai bien lu votre mémoire. J'ai une première question puis je pense que je
sais ce que vous allez répondre, mais je veux vous entendre quand même.
Est-ce que vous considérez que le projet de loi va assez loin pour libéraliser
la vente d'alcool?
M. Courville (Léon) : Avec les
amendements qu'on propose ou sans?
M. Bonnardel : Bien,
premièrement, avec ce qu'il y a dans la loi, présentement, là.
M. Courville (Léon) : Non, non,
mais ça prend les cépages puis les millésimes, certain, puis il faut avoir une
traçabilité, il faut permettre le transport, puis moi, je mettrais une date
butoir, pas quand le gouvernement le décidera, mettons pour le 30 septembre ou le 31 octobre, pour qu'on
puisse, avec les détaillants, faire quelque chose pour les fêtes, là.
Autrement, j'ai peur que monsieur, madame des différents ministères... Je sais
que, dans la construction, il y a des lois qui sont passées qui ne sont pas
encore appliquées parce que ça n'a pas passé, alors je ne voudrais pas qu'il
nous arrive la même chose.
M. Bonnardel : Est-ce
qu'il y a d'autres lieux qui devraient être accessibles aux alcools du Québec?
M. Courville
(Léon) : Moi, là, les
histoires de restaurants «apportez votre vin», je ne comprends pas
pourquoi ça n'a pas passé, honnêtement, là,
parce que ça serait un lieu de vente. Un des problèmes qu'on a là, c'est qu'il
n'y a personne qui vend notre vin.
Les restaurants, avant, là... Ça a été passé en 1994, ça, par Bernard Landry,
appuyé par Pierre Paradis le 19 juin, première lecture, deuxième
lecture, troisième lecture. Pourquoi ils ont fait ça comme ça? Pour ne pas que
ça bloque dans la machine. Ils le savaient.
La machine est là depuis 1994. Mais là, là, c'est rendu que les restaurants,
ils ont leur propre agence et c'est rendu plus difficile pour nous. Ils
ont même des importations privées, ils vendent du vin en importation privée.
Ils vendent donc du vin qui n'est pas disponible à la SAQ — c'est
rendu loin, là — du
vin pas disponible à la SAQ. Il est
disponible parce qu'il faut que tu ailles le chercher là si tu veux en avoir
toi aussi, mais, tu sais, c'est une
boîte à malle, là, ce n'est pas eux autres qui le vendent. Moi, j'aimerais ça
avoir un vendeur de vin, quelqu'un qui va
dire : Essayez ça. Puis la seule place où on n'est pas en concurrence, ça
serait dans les restaurants «apportez votre vin», qui, eux, aimeraient ça. Allez demander à
Mme Ellefsen pourquoi elle s'est opposée à ça. Je ne le sais pas.
Apparemment, les inspecteurs seraient confondus quand il y a deux sortes de
bouteilles, mais je ne comprends pas.
M. Bonnardel : Mais ça,
c'est une question de permis aussi, là, dans les restaurants, entre ceux qui...
M. Courville
(Léon) : Non. Oui, on peut
amender le permis du restaurant «apportez votre vin» pour qu'il ne vende
des vins québécois qu'avec le timbre de la Régie des alcools dessus. J'aimerais
ça, moi.
M. Bonnardel : Voilà,
voilà, voilà. Mais ça, c'est un autre défi, ça.
M. Courville (Léon) : Je ne
sais pas ce qui s'est passé.
Le
Président (M. Bernier) : C'est une autre étude de loi, M. le
député de Granby. C'est une autre étude de loi.
M. Bonnardel : C'est une
autre étude, mais je travaille là-dessus, là.
M. Courville
(Léon) : C'est un peu comme
si la Sûreté du Québec disait au ministère des Transports : Ne
faites plus de routes, on ne pourra pas
aller dessus, tu sais, on ne pourra pas les superviser. Je pense que c'est ça
qui est arrivé.
M. Bonnardel : Vous avez
dit tantôt, M. Courville : Entre 2005 et 2009, j'aurais
25 000 vignes de plus pour exploiter
ma terre. Vous avez le point 3, «Les obstacles aux alcools
québécois» : «Trop de ministères impliqués.» Tantôt, j'ai dit en commençant mes remarques
préliminaires : Enfin, enfin, parce qu'il y a un ministre des Finances qui
a dit : On va ouvrir une brèche.
Il y a le ministre de l'Agriculture qui ne souhaitait pas, peut-être, une traçabilité,
puis là on va peut-être avoir de
l'ouverture de la part de ce ministre dans les prochains jours, prochaines
semaines. Vous avez la RACJ. Selon vous, quel devrait être le «fast track» idéal pour que, demain matin, un
entrepreneur se dise : Moi, après le projet de loi n° 88, là,
tiens, je vais faire comme ces hommes puis ces femmes qui, depuis 25, 30,
35 ans, ont décidé de labourer la terre, de changer le foin pour en faire du vin? Vous avez vécu toutes ces
contraintes, vous le dites avec l'expérience que vous avez, là, depuis 1994, là. Quel devrait être le
ministère responsable ou quel «fast track» idéal on devrait donner à ces... Je
le souhaite, là. Il y a peut-être des gens qui nous écouteraient...
M. Courville
(Léon) : Je pense que c'est le ministère...
M. Bonnardel :
...qui diraient : Moi, là, peut-être à la retraite, moi avec, je voudrais
démarrer ça. Mais combien de témoignages
j'ai eus puis, j'imagine, que vous avez eus, de gens, là, qui aujourd'hui se
disent : Moi, là, j'ai une petite ferme, des petits fruits, je veux
distiller, je veux ci, puis ils s'arrachent la tête?
M. Courville (Léon) : Bien, c'est ça, j'ai dit bienvenue au ministère des Finances parce
que c'est un ministère transversal. Tu sais, j'ai enseigné aux HEC, j'ai
bien des étudiants qui sont venus ici, moi, là. J'en ai eu qui sont allés
au MDEIE, qui est d'ailleurs
la source de l'obstacle. Les accords internationaux, c'est eux, là, qui
répètent la même chanson depuis 20 ans. Puis ils ne la changeront
pas demain, là. Quand tu dis une affaire pendant 20 ans puis tu la répètes
à tous les ans... C'est comme à la banque
quand quelqu'un me disait : Mais, quand tu es président
d'une banque, c'est peut-être plus facile être politicien. M. Leitão, tu peux peut-être... Tu sais, à force
de répéter quelque chose, ça devient une vérité même si ce n'est pas
vrai.
Et
je pense que le «fast track» a besoin d'un ministère transversal, puis je pense
que ça devrait rester là, d'autant plus
qu'il y a une question fiscale, dans le fond, derrière ça, là, tu sais. Quand
on parle de majoration et d'accès direct dans les épiceries sans majoration, l'arbitrage économique de ça, ça vaut-u
la peine de faire ça puis avec quel quantum? Les gens les mieux placés,
là, c'est au ministère des Finances, pour faire ça. C'est eux autres qui savent
calculer à la cent, à la huitième décimale près, hein?
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Vous devez être heureux tous les deux.
M. Bonnardel :
Dernière petite question, peut-être, M. le Président. Vous avez dit, M. Courville,
là, dans les obstacles internationaux, l'accord, les accords commerciaux, et
tout ça... Vous avez dévoilé une partie, là, d'un...
M. Courville
(Léon) : D'une étude.
M. Bonnardel : ...d'une étude, oui, la conclusion de Me Bernard Colas sur le projet de loi
n° 395, là. J'imagine, dans cette étude, là... Je ne l'ai pas lue
au complet, là, je ne l'ai pas vue, là, mais...
M. Courville
(Léon) : Je vous l'enverrai.
M. Bonnardel :
Oui? Ça serait bien pour la commission, là.
Le
Président (M. Bernier) : Si vous l'envoyez, à ce
moment-là, envoyez-la ici au secrétaire de la commission.
M. Courville
(Léon) : Oui, je vais vous l'envoyer à vous, à votre commission.
Le
Président (M. Bernier) : Ça va permettre à tous les
participants, tous les membres de cette commission d'en prendre
connaissance.
M. Courville
(Léon) : J'en prends bonne note. Merci.
M. Bonnardel :
Vous dites donc que, dans cet avis, là, c'est un mythe, c'est un mythe de penser
qu'on pourrait brimer, on pourrait violer ces accords, parce que
l'Ontario l'a déjà fait. Vous avez dit, je pense, tantôt, qu'une autre province
l'a même légiféré...
M. Courville
(Léon) : La Nouvelle-Écosse, dans sa loi, oui.
M. Bonnardel : Donc, je ne vois pas pourquoi,
aujourd'hui, en 2016, on ne pourrait pas ouvrir puis avancer
tout comme les autres l'ont fait sans craindre un jour ou l'autre qu'on soit
poursuivis, si je peux le dire ainsi, là.
M. Courville (Léon) : Tu
sais, toute l'énergie qu'on a mise à se prémunir contre des petites dérogations
a fait que notre intervention a pris,
sur la place publique, une force plus grande, de telle sorte que le risque est
plus grand parce qu'on est visibles, là, tu sais. La Colombie-Britannique, elle, a été plus subtile. Il
y a des moments où le Mouton Cadet,
il ne sortait pas trois jours avant
Noël. Bien là, écoute bien, si quelqu'un veut s'opposer, là : On s'excuse, ce n'est
pas allé en entrepôt au bon moment,
puis tout ça. Bien, écoute bien, le gars qui les vend, les Mouton Cadet à Noël,
là, bien, il dit : Écoutez donc, arrangez-vous donc avec vos chums
pour qu'ils arrêtent, là.
Tu sais, il y a la
façon, moi, je dirais, philosophique, théorique, mais il y a aussi la question
administrative de ça. Et je pense que Me Colas a dit, justement : On
représente tellement peu, on est si petits que ça serait difficile de
croire qu'on irait en dérogation. Et il ajoute plus loin : Même si on y
allait, ça prendrait sept, huit ans avant que cette contestation-là soit
déposée et documentée.
M. Bonnardel :
O.K. Dernière question.
Le Président (M. Bernier) :
Oui, oui.
M. Bonnardel :
Seriez-vous prêt de jouer d'égal à égal avec... On souhaite le cépage et
millésime dans les dépanneurs et grandes surfaces.
On sait déjà qu'il y a des vins qui sont là qui ne sont pas identifiés, donc
moins transparents pour le consommateur. Si on ouvrait ça également aux
vins qui sont là, ou vous souhaitez, comme l'association...
• (15 h 40) •
M. Courville
(Léon) : Ça, c'est leur
affaire, ça ne me regarde pas. Ils le font déjà en partie. J'ai des photos
dans mon iPhone, là, ce n'est pas sur la
bouteille, mais ils mettent ça dans des caisses de carton, puis c'est marqué le
millésime puis le cépage, tu sais, dans la boîte
de carton, ça fait que... Tu sais, ils mettent ça en «stacks» de boîtes de
carton dans les supermarchés, puis... En
tout cas, moi, je pense
que, pour nous, c'est important parce
que, pour l'accès au
consommateur qui vient à notre boutique, qui
voit ça à la SAQ puis qui verrait une autre bébelle dans l'épicerie, là, ça
serait confusion totale, alors qu'on est si petits, tu sais.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. Courville. Merci de votre participation à la Commission des
finances publiques. Vos informations sont très intéressantes.
Je vais
suspendre quelques instants afin de permettre à l'Association des viniculteurs négociants du Québec
de prendre place. Je suspends.
(Suspension de la séance à 15 h 41)
(Reprise à 15 h 45)
Le Président (M. Bernier) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.
Donc, nous avons le plaisir de recevoir l'Association
des viniculteurs négociants du Québec, représentée par M. Robert Champagne, Sébastien Nadeau, Jean Gattuso, Sylvain Fontaine,
Pascal Lepitre et Jocelyn Robert. M. Nadeau, c'est vous qui allez prendre la parole pour
débuter. Donc, vous avez 10 minutes pour votre présentation. S'il y a
d'autres intervenants, simplement vous identifier. Merci.
Association des
viniculteurs négociants du Québec (AVNQ)
M. Nadeau (Sébastien) :
Excellent. Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames messieurs membres de
la Commission des finances publiques. Je
vous présente Jocelyn Robert, Robert Champagne, moi-même, Sébastien
Nadeau, Sylvain Fontaine, Pascal Lepitre et
M. Jean Gattuso. Au nom de l'Association
des viniculteurs négociants du Québec, l'AVNQ, j'aimerais vous remercier
de prendre le temps de nous écouter par rapport à notre position face au projet
de loi n° 88, déposé en décembre dernier.
Les membres
de l'AVNQ représentent 37 % des parts de marché du vin au Québec avec près
de 77 millions de bouteilles de
vin vendues et représentent 99 % des parts de marché du vin en
alimentation, soit 515 millions de ventes. La mission de l'association
est de promouvoir le développement de l'industrie du vin conditionné dans la
province, de valoriser la qualité de ces
vins, de faire reconnaître les bénéfices environnementaux de cette industrie
ainsi que de contribuer à l'essor économique du Québec.
Dans le but
de mettre à jour les statistiques concernant notre industrie, l'AVNQ a mandaté
la firme KPMG afin d'actualiser les dernières données datant de 2007.
Les résultats nous ont été divulgués en août dernier, et les données parlent d'elles-mêmes. Vous pourrez d'ailleurs le
constater vous-mêmes, puisque l'étude a été ajoutée en annexe à la fin
de notre mémoire. En bref, l'AVNQ, c'est
900 emplois qualifiés et des recettes de plus de 236 millions de
dollars pour le gouvernement du
Québec. Les vins embouteillés au Québec, en comparaison aux vins embouteillés à
l'origine, génèrent 2,15 fois
plus de valeur ajoutée par caisse. Finalement, l'importation et l'embouteillage
au Québec de vin en vrac amènent une réduction significative de l'impact
environnemental.
Tout d'abord,
il est important de comprendre que les négociants embouteilleurs de vin
supportent le développement de la
viticulture québécoise et désirent s'assurer que le développement amène une
valeur ajoutée à la catégorie. L'AVNQ comprend
et regroupe les différents objectifs du projet de loi sous trois principaux
éléments, le premier étant l'intégrité des produits, qui est l'aspect crucial de ce projet. En effet, le succès de
l'industrie des vins du Québec passe par l'intégrité du produit. Comme le stipule le Règlement sur le vin
et les autres boissons alcooliques fabriqués ou embouteillés par un titulaire de permis de fabricant de vin, un
produit du Québec est un vin fabriqué à partir de raisins récoltés au
Québec.
Le projet de loi doit contenir des mesures de
contrôle de l'origine des matières premières. Un non-respect de l'intégrité des produits plongerait toute
l'industrie de la viticulture québécoise dans une impasse, et ce, pour
plusieurs années. On n'a qu'à penser à ce
qu'ont dû faire les producteurs de cidre pendant des dizaines d'années pour
sortir péniblement leur industrie de cette image négative attribuée au
manque de qualité de plusieurs produits vendus dans les années 70, car il n'y avait aucun contrôle à la sortie. Ne pas
respecter l'intégrité des produits, soit 100 % de matière première
du Québec, rendrait plus facile pour des gens mal intentionnés d'inonder le
marché avec des produits non authentiques et
d'ainsi être en mesure de profiter de la vente en épicerie à des conditions
avantageuses avec des produits qui ne
devraient pas bénéficier de telles faveurs, et qui vont à l'encontre des
attentes des consommateurs, et qui laissent trop de place à la grande
tricherie, un risque que l'industrie ne peut se permettre de prendre, soit
jeter une ombre sur tout le marché alimentaire.
Il
est donc primordial que le projet de loi contienne des mesures de contrôle
visant l'origine des matières premières. L'AVNQ propose donc que les
produits visés par ce projet de loi soient d'authenticité pure, en d'autres
termes que le contenu
soit 100 % québécois, et que cette notion soit imbriquée dans le projet de
loi. La mise en place d'une certification de type VQA contribuera à
assurer un gage de qualité aux yeux des consommateurs qui souhaitent
principalement encourager les producteurs locaux ainsi qu'éviter tout
contournement potentiel de loi. Un produit composé de moins de 100 % de matière première du Québec
devrait naturellement être assujetti aux règles de détenteurs de permis de
fabricant de vins industriels. Le
gouvernement doit nommer qui sera responsable d'assurer l'intégrité des
produits, de savoir comment et à quelle fréquence ce contrôle sera
effectué.
• (15 h 50) •
Aux yeux de l'AVNQ,
le gouvernement devrait appointer la SAQ comme unique point de contrôle de la
qualité des vins destinés au réseau de l'alimentation, considérant la
réputation mondiale de leur laboratoire, tel que mentionné par M. Brunet ce matin. De plus, la mention des cépages
et des millésimes sur les produits est une condition essentielle dans le contrôle de l'intégrité des
vins du Québec. En effet, les cépages devraient être présents non
seulement sur les produits du Québec, mais
sur l'ensemble des produits vendus dans le réseau de l'alimentation. C'est une
question de transparence exigée de la part du consommateur. Des opinions
juridiques en annexe au mémoire démontrent que les ententes internationales
n'empêchent en rien l'interdiction de l'affichage des cépages. Dans un souci
d'équité, les millésimes disponibles pour les vins embouteillés au Québec
devraient aussi l'être pour les vins du Québec.
Un
autre enjeu important du projet de loi est l'accessibilité des produits à
proximité du lieu de production. À ce stade,
il est important de se demander si la livraison directe des vins artisans
québécois aux épiceries est vraiment la bonne solution pour valoriser et
aider le développement de l'industrie des vins d'ici. La livraison directe pose
un problème complexe de contrôle d'origine
et de volume de produits vendus. Même un plan de mesures de contrôle basé sur
la superficie totale disponible d'un
vignoble, un plan parcellaire, ne peut être fiable à 100 % et ne contrôle que les produits à l'entrée. L'expédition directe du vin ne permet
pas d'assurer un contrôle à la sortie de la qualité du vin ni des
volumes disponibles sur le marché. Cette absence de contrôle pourrait facilement
contribuer à l'apparition sur les tablettes des épiceries du Québec de vins qui
ne proviennent pas nécessairement de l'agriculture québécoise, mais qui seraient
étiquetés comme tels.
Je vais juste vous
donner un petit exemple de contournement de loi possible. Le vignoble XYZ
remplit les conditions pour offrir ses
produits en épicerie. Selon sa superficie totale disponible, le vignoble est en
mesure de distribuer annuellement 5 000 bouteilles de vin.
Après une entente avec un épicier, le vignoble distribue ses
5 000 bouteilles, mais offre une
gratuité équivalente à un deux pour
un, par exemple. Ce dernier distribue donc 10 000 bouteilles de
vin, mais il n'y a officiellement que
5 000 bouteilles enregistrées. Le vignoble peut donc continuer
d'importer des vins d'ailleurs, de les distribuer et de profiter de la
vente en direct, et ce, au détriment de l'intégrité du produit.
Des
mesures visant à contrôler la distribution du vin existent actuellement au
Québec et s'appliquent aux vins d'importation
mis en bouteille au Québec avec des mentions d'origine. Les volumes de vin
importés ainsi que les volumes embouteillés sont donc contrôlés par la
RACJ, qui constitue un contrôle à l'entrée, alors que la distribution, elle,
est assurée par la SAQ, ce qui constitue un
contrôle à la sortie. Tout ça rend donc impossible le contournement de la loi.
Bref, nous suggérons, tout comme pour les
vins importés embouteillés par l'AVNQ, qu'il y ait un mécanisme de contrôle
à l'entrée et à la sortie qui s'applique aux
vins du terroir québécois, et ce, afin d'éviter des contournements de lois
potentiels.
Le
Québec a déjà sous la main une société d'État qui peut assurer tous ces
contrôles. En effet, la SAQ est déjà en mesure, tel qu'expliqué par M. Brunet, d'assurer un contrôle
qualité, d'assurer une traçabilité et d'assurer une distribution. Pourquoi tenter d'instaurer de nouvelles façons de
faire quand les pratiques actuelles fonctionnent très bien en plus
d'avoir prouvé leur efficacité? Est-ce qu'on veut vraiment revivre les
années 70?
Finalement, le
dernier enjeu soulevé dans le projet de loi est la profitabilité de la
viticulture québécoise. Nous sommes en
faveur de certaines mesures d'allègement fiscal pour ce qui est des produits du
terroir vendus pourvu que ceux-ci soient
issus à 100 % d'agriculture du Québec. Cet allègement fiscal serait ainsi
directement lié à la création de richesse au Québec. Par contre, et ce,
par souci d'équité, si un producteur artisan ne produit pas du vin issu à
100 % de matières premières du Québec,
il devrait être assujetti aux mêmes règles que les détenteurs de permis
industriels, soit la taxation, la majoration, etc. Dans le cas
contraire, l'AVNQ devra bénéficier des mêmes allègements fiscaux que les
détenteurs de permis artisanaux.
Prenons
en exemple le cas où les produits ne sont pas issus à 100 % d'agriculture
du Québec. Dans le cas où un vin
comporte 85 % de raisins québécois et 15 % de vin hors Québec,
l'allègement fiscal auquel les artisans auraient droit devra également s'appliquer à l'ensemble des
embouteilleurs desservant le réseau de l'alimentation et des dépanneurs.
Pour les membres de l'AVNQ, cela
représenterait un allègement fiscal sur l'équivalent de 1 million de
caisses, soit un manque à gagner d'environ 35 millions de dollars
par année pour le gouvernement. En résumé et par souci d'équité, il faudra donc
consentir un avantage fiscal à tous les produits contenant des matières
premières hors Québec.
En conclusion,
l'intégrité des produits du Québec est la pierre angulaire du développement de
la viticulture québécoise, et nous avons tout intérêt à voir grandir cette
industrie. Actuellement, le sens que le gouvernement veut donner au projet de loi n° 88 est tout à fait
louable, et c'est pourquoi l'AVNQ souhaite participer à sa mise en place.
Par contre, son application telle que
proposée comporte des risques qui auraient des conséquences négatives à une
industrie de 900 emplois générant des recettes de plus de
236 millions de dollars pour le gouvernement.
Il
est primordial que le gouvernement apporte des modifications au projet de loi
afin de garantir l'intégrité des produits.
L'unique façon de pouvoir garantir cette intégrité est d'avoir des moyens de
contrôle des produits à l'entrée ainsi qu'un point de contrôle à la
sortie de ces produits, telle la SAQ, avant qu'ils n'atteignent les tablettes
des marchés d'alimentation et des
dépanneurs. La livraison directe,
quant à elle, oblige des mesures de contrôle à chacun des milliers de
points de vente du Québec.
Si le gouvernement ne peut
assurer lui-même le contrôle d'authenticité des produits qui seront vendus sur
les tablettes des marchés d'alimentation, nous considérons essentiel
d'utiliser le système de contrôle actuel, qui est équitable et efficace.
Pourquoi créer des systèmes parallèles quand nous en avons déjà un qui
fonctionne?
Les
consommateurs sont renseignés et exigent de la transparence, que ce soit du
côté de l'authenticité du produit ou bien
de l'affichage des cépages et des millésimes. Le moindre faux pas quant à
l'intégrité des produits leur ferait perdre confiance aux vins du Québec et aux vins embouteillés au Québec, et cela
aurait des impacts financiers directs et indirects des plus importants.
Si une telle situation se présentait, les expériences passées démontrent que
beaucoup de temps et d'efforts sont nécessaires pour regagner la confiance des
consommateurs.
Nous devons donner des outils aux producteurs
locaux afin qu'ils se développent et qu'ils soient fiers de leur industrie. Respectons les consommateurs et les
détaillants en garantissant à 100 % l'authenticité des produits vendus
au Québec. L'intégrité et la qualité de ces produits sont l'affaire de tous. Ne
répétons pas les erreurs du passé. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Nadeau, de votre
présentation. M. le ministre, la parole est à vous. Vous avez un
panel assez complet pour répondre à vos questions.
M. Leitão :
Très bien, merci. Je vous remercie, M. Nadeau, messieurs. Merci d'avoir
pris le temps de venir nous parler de
votre industrie et, bien sûr, du projet de loi n° 88. Pour commencer et
pour le bénéfice de tous ceux qui nous écoutent, vous pourriez peut-être
décrire votre activité, parce que, enfin, je pense que ce n'est peut-être pas
très clair pour beaucoup de personnes, qu'est-ce que vous faites exactement.
Vous parlez de vins conditionnés. Comment ça se passe, concrètement?
M. Nadeau (Sébastien) : ...la
parole à Jocelyn Robert.
Le Président (M. Bernier) :
À M. Robert, donc, pour que la population qui nous regarde puisse être
mieux informée. Allez-y.
M. Robert
(Jocelyn) : En fait, ce que
l'on fait, c'est de l'importation de vin en vrac pour faire
l'embouteillage ici, au Québec, donc plus
près du lieu de consommation. C'est des tendances mondiales, là. Il y a à peu
près, je dirais, entre 40 % et 50 % des exportations mondiales
qui se font en vrac, et puis c'est notre secteur d'activité, là.
M. Leitão : Donc, vous importez
le vin directement?
M. Robert (Jocelyn) : Oui.
M. Leitão :
Et puis, dans vos installations, vous l'embouteillez, et puis il est vendu à la
SAQ et dans le réseau des épiceries?
M. Robert (Jocelyn) :
Absolument. Dans les deux réseaux, oui.
M. Leitão :
Très bien. C'était juste pour que ce soit clair pour tout le monde, merci. Et
vous avez, vous l'avez mentionné,
bon, des grands volumes, une part de marché, je pense que vous avez dit
37 % de parts de marché, donc c'est substantiel, ce que vous faites. Et je comprends très bien votre point
de vue, votre insistance sur l'intégrité des produits.
On a beaucoup parlé ce matin, et avec
M. Courville aussi, de toute la question du cépage et millésime. Donc, je présume — enfin, vous l'avez dit — que vous êtes en faveur, bien sûr, que cette
différence qu'il y a présentement entre la distribution à la SAQ, où, évidemment, tout est bien indiqué, et dans le
réseau des épiceries, où cépages et millésimes ne sont pas indiqués...
vous préférez, bien sûr, avoir la possibilité d'indiquer aussi cépages et
millésimes dans le réseau des épiceries.
M. Gattuso
(Jean) : Absolument,
M. Leitão. Et de plus, je veux dire, c'est le consommateur qui nous le
demande.
Le Président (M. Bernier) :
Donc, vous êtes M. Gattuso.
M. Gattuso (Jean) : Oui, c'est
ça.
Le Président (M. Bernier) :
C'est M. Gattuso.
M. Leitão : Donc, bien sûr,
vous voulez ça.
M. Lepitre (Pascal) :
Excusez-moi, si je peux me permettre de rajouter un point. Pascal Lepitre.
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. Lepitre.
M. Lepitre
(Pascal) : Concernant les
millésimes, il faut savoir que l'industrie des vins embouteillés au
Québec bénéficie déjà du droit d'utiliser les millésimes. Donc, c'est déjà
quelque chose qui est disponible pour nous.
Le
Président (M. Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão :
Très bien. Donc, là où j'aimerais maintenant vous amener un petit peu, c'était
cette question, donc, de la livraison
directe que les producteurs artisanaux pourraient faire et donc la possibilité
de manque de contrôle de qualité. Pourriez-vous
aller un peu plus loin dans vos explications? Pourquoi est-ce que ça serait
nécessairement problématique?
M. Nadeau
(Sébastien) : Bien, en fait, mon collègue M. Sylvain Fontaine va
être en mesure d'expliquer le mécanisme de tout ça.
Le Président
(M. Bernier) : M. Fontaine, la parole est à vous.
• (16 heures) •
M. Fontaine (Sylvain) : Merci, M. le Président. En fait, c'est que,
quand on parle de transport ou de livraison en direct, on est intimement liés avec l'histoire de qualité parce qu'il y
a un contrôle à travers ça. Et, comme on le mentionne dans le mémoire,
il y a un lien à faire entre les produits à l'entrée et un lien à faire avec
les produits à la sortie.
Présentement,
de la façon dont on fonctionne, c'est qu'on envoie tous nos produits à la SAQ,
et eux en font la distribution auprès des distributeurs autorisés, comme
le mentionnait M. Brunet ce matin. L'avantage de ça, c'est qu'il y a un contrôle parfait parce que tout est
envoyé là, il y a un point de chute, et on fait le contrôle à un point, et c'est ça qui est capital dans ce
dossier-là, alors que, si on autorise la livraison en direct, on va avoir à
faire le contrôle en magasin. Et là le
contrôle en magasin, bien là on parle de 8 000 points de vente, multiplions ça par, exemple, je ne
sais pas, moi, 1 million de bouteilles,
c'est un contrôle qui est assez fastidieux et difficile à faire, voire même
impossible à faire.
Donc,
l'enjeu de la livraison en direct est quand même assez important dans ça. Ça
semble être un petit mot facile, dire : On va livrer en direct,
mais c'est plus complexe que ça au niveau du contrôle de qualité. Puis, avec la
SAQ, présentement, ça va très bien. Je veux
dire, ça se fait très, très facilement. L'avantage qu'on a aussi, c'est que,
dès qu'on expédie, tout le monde est
payé immédiatement. Après 30 jours, en fait, là, les gens sont payés.
Donc, ça, ça amène un point de
contrôle qui est sûr, et qui est efficace, et qui est rapide, donc. Tantôt,
j'entendais, ce matin, plus tôt, là, au niveau de l'AVQ, où ils parlaient de, bon, pas le temps pour
faire du transport, c'est tout à fait normal, ils sont sur la vigne, et
tout, ils travaillent la vigne, et tout, la
SAQ se charge de tout ça, alors que la livraison en direct, il faut quand même
s'en charger.
Et, peut-être,
j'aimerais apporter une nuance sur la livraison en direct. Ce n'est pas si
simple que ça. Les gens pensent que la
livraison en direct, on prend une caisse et on va la porter au magasin
d'alimentation du coin, je ressors de là avec mon argent, c'est terminé. Ce n'est pas tout à fait comme ça que ça
se passe. Je veux dire, les gens de l'alimentation savent qu'il faut aller faire référencer nos
produits chez les distributeurs autorisés, exemple, les Sobeys, les Metro,
les Provigo de ce monde, les Couche-Tard, et
tout ça, et il y a un processus à faire avant d'avoir l'autorisation de livrer
dans les magasins. Donc, ça prend quand même
assez de temps à passer à travers tout ce processus-là, alors que, quand on le
fait à la SAQ, on le fait une fois, et c'est la SAQ qui redistribue à tous ces
points de vente là.
L'autre
chose aussi, quand on parle de livraison en direct, que je crois qu'il est
important de tenir en compte, c'est toute l'histoire environnementale.
Quand on parle de livraison directe, il va y avoir autant de camions qu'il y a
de viticulteurs artisans qui vont se
ramasser au même magasin pour faire des livraisons, alors que, là, bien, la SAQ
l'envoie chez un distributeur autorisé qui, lui, va grouper les commandes pour
l'envoyer à un seul endroit. Ça fait que, donc, question environnementale
aussi, c'est nettement plus avantageux de passer par la SAQ.
Ça fait que, tout
compte fait, quand on regarde le processus actuel, on trouve qu'on ne sera pas
capables de contrôler, si on va livrer en direct, les 8 000 points de
vente, c'est impossible, ce qui laisse place plus à une grande tricherie dans
le système comme tel versus un contrôle parfait de la SAQ.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Très bien. L'autre question dans ce contexte, là aussi, de contrôle de qualité
pour les producteurs artisanaux, c'est la
question du contenu local. Est-ce que c'est 100 % ou, comme nous le
prévoyons dans notre proposition du projet de loi, 85 %-15 %?
Vous insistez sur le 100 %. Pourquoi? Pouvez-vous aller un peu plus loin
dans votre...
Le Président
(M. Bernier) : M. Nadeau.
M. Nadeau
(Sébastien) : En fait, oui, on insiste sur le 100 %, puis mon
collègue Jocelyn va pouvoir débattre plus longtemps sur ce sujet.
Le Président
(M. Bernier) : M. Robert.
M. Robert (Jocelyn) : Peu importe où on va dans le monde, le 100 %
est applicable quand on veut revendiquer un pays d'origine. On a entendu des 85 %-15 %, ça, c'est appliqué
pour les cépages. Quand on veut revendiquer un cépage, la plupart des
pays disent : O.K., vous voulez étiqueter un merlot sur votre bouteille,
bien, pour le revendiquer, il faut qu'il y
ait 85 % de merlot dans la bouteille. Le reste, le 15 %, peut être un
peu n'importe quoi d'autre, là, ce qu'on a sous la main, là, pour pouvoir revendiquer le cépage.
Mais, quand il est question de revendiquer un pays d'origine ou une
région, le vin vient à 100 % de cette
région spécifique là, c'est la raison pour laquelle on préconise, là, le
100 %. Même le VQA, en Ontario et en Colombie-Britannique, applique
le 100 % aussi pour cette appellation-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Si je comprends bien, c'est 100 % produit québécois.
M. Robert
(Jocelyn) : Oui, exactement, du terroir québécois. On ne se limite pas
à un producteur, c'est vraiment le terroir québécois, là.
M. Leitão :
C'est ça. O.K. Très bien.
Le Président
(M. Bernier) : Oui, M. Fontaine, vous voulez ajouter?
M. Fontaine (Sylvain) : Oui. Autrement, il faut penser aussi que, quand
ce n'est pas le cas, c'est déjà prévu à la loi. Ça ne s'appelle pas un
produit du Québec, ça s'appelle un produit élaboré au Québec dès que ce n'est
pas 100 %.
M. Champagne
(Robert) : Juste peut-être ajouter à ce point-là, c'est
qu'actuellement... Robert Champagne.
Le Président
(M. Bernier) : M. Champagne, oui.
M. Champagne
(Robert) : Merci, M. le Président. Actuellement, les vins
élaborés au Québec, il y en a 4,5 millions en épicerie, donc la raison
pourquoi on persiste à dire que ce soit 100 % Québec.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Très bien. Les collègues, si vous avez des...
Le Président
(M. Bernier) : M. le député de Trois-Rivières.
M. Girard :
Merci, messieurs, pour la présentation. On a parlé, avec d'autres intervenants
ce matin, beaucoup de développement économique au niveau de la région,
au niveau du Québec. Moi, je suis un consommateur et je veux savoir l'impact de l'achat d'une bouteille de vin
québécois versus une bouteille de vin importée en vrac. Quelles sont les
retombées au Québec pour une bouteille qui
est faite 100 % Québec versus un vin importé en vrac qui est
embouteillé chez nous?
Le Président
(M. Bernier) : M. Nadeau.
M. Nadeau (Sébastien) : Oui. En fait, comme je l'ai dit tantôt, dans le
mémoire qu'on a déposé, on a déposé aussi l'étude, en annexe, qu'on a fait faire cet été, donc les données sont à
jour. Il faut comprendre que, si on ramène la majorité des dépenses à une caisse, nos dépenses se
chiffrent à 13 $ par caisse de vin conditionné au Québec contre
6,90 $ pour le vin embouteillé à
l'origine. Donc, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'au Québec les
embouteilleurs de vin, c'est 900 emplois, environ 400 directs et 500 indirects. Donc, c'est une
multitude de retombées qui font en sorte que le produit embouteillé au Québec va générer beaucoup plus de retombées pour
le Québec, finalement. Je ne sais pas si, Sylvain, tu veux compléter.
Le Président
(M. Bernier) : M. Fontaine, vous voulez ajouter?
Allez-y, M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Non, c'est bon.
Le Président
(M. Bernier) : C'est bon? O.K. M. le député de
Trois-Rivières.
M. Girard :
Mais vous n'avez pas une donnée par bouteille, combien, si on achète une
bouteille de vin québécois, les
retombées directes et indirectes, là? On parle du cultivateur, on parle autant
du transport, on parle des emplois au niveau du vignoble, etc. Donc,
quel est l'impact pour l'économie québécoise vraiment d'un vin fait au Québec
versus un vin importé en vrac? L'impact doit être beaucoup plus grand d'un vin
fait au Québec.
Le Président
(M. Bernier) : M. Nadeau.
M. Nadeau (Sébastien) : ...je n'ai pas ces données-là actuellement, mais
je m'assurerai de trouver l'information et de vous la faire parvenir,
là.
Le Président
(M. Bernier) : M. Lepitre.
M. Lepitre (Pascal) : L'étude de Secor a surtout été faite dans la
comparaison des vins importés embouteillés à l'extérieur et les vins embouteillés au Québec. C'est juste une question
aussi de taille de business, parce qu'on s'entend que, quand on parle des vins embouteillés au Québec,
c'est plus de 70 millions de bouteilles embouteillées au Québec par
rapport à l'industrie du vin québécois, qui,
aujourd'hui, est de l'ordre de 1 million, quoi. Donc, c'est sûr que, nous,
le «benchmark» était plus sur les vins importés déjà embouteillés à
l'extérieur du Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Champagne
(Robert) : Peut-être, si vous le permettez, M. le Président.
Le Président
(M. Bernier) : Oui, allez-y, M. Champagne.
M. Champagne (Robert) : Juste, également, dans l'étude Secor, vous allez
retrouver aussi l'impact au niveau des emplois. La rémunération de ces
emplois-là dans le secteur industriel, là, est très élevée en retombées
économiques également. Je n'ai pas la
moyenne des salaires au niveau des vins embouteillés au Québec, mais je peux
vous dire qu'au niveau industriel, là, on est en haut de la moyenne, à
ce moment-là.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Trois-Rivières.
C'est beau? M. le ministre.
M. Leitão :
Peut-être juste une question si on a encore le temps, M. le Président.
Le Président
(M. Bernier) : Oui. Allez-y, M. le ministre.
M. Leitão :
On a parlé avant, ce matin, et avant avec M. Courville, la question des
accords de commerce international. Quelle est votre opinion là-dessus,
sur la vulnérabilité ou pas?
Le Président
(M. Bernier) : M. Nadeau.
M. Nadeau (Sébastien) : Oui. M. Nadeau. En fait, on a joint au
présent mémoire une opinion juridique qu'on a eue, et tous les détails sont reliés à ça. S'il y a des points plus
précis, je pense que mon collègue Jocelyn peut compléter, mais, dans l'ensemble, on comprenait qu'il n'y
avait pas d'enjeu ou qu'il n'y avait pas d'interdiction comme telle qui
était écrite, là, dans ces fameux accords
là. Donc, de notre côté, la compréhension que notre opinion juridique nous
représentait ça, il n'y avait aucun enjeu par rapport à ça dans les accords
internationaux.
Le Président
(M. Bernier) : M. Robert, vous voulez...
M. Champagne, oui.
M. Champagne
(Robert) : Juste pour ajouter, pour soutenir le discours de Sébastien.
Actuellement, on a fait des recherches, ça
fait quelques années qu'on travaille ardemment à remonter en arrière dans le
temps, et puis on a demandé à une
firme légale de regarder, et puis tout ce qu'ils nous ont sorti nous donne une
direction, une orientation qui dit qu'il n'y a aucun enjeu majeur de
permettre les cépages en alimentation. Donc, pour nous, c'est très qualitatif.
On en a parlé ce matin. Je pense qu'autant
M. Brunet supporte cette cause-là, les vignerons également. Donc, je pense
qu'on est rendus, en 2015, à une ère
de transparence. Je pense que le consommateur a le droit de savoir le contenu
d'une bouteille de vin, le nom du
raisin. Et également, pour ajouter à ce point-là, je fais un parallèle avec une
ancienne vie, il a été longtemps où
est-ce que la margarine, au Québec, était non colorée. Je pense qu'on est à peu
près au même diapason avec le vin, aujourd'hui, en épicerie versus la
SAQ.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, M. Champagne. M. le
ministre.
• (16 h 10) •
M. Leitão :
Peut-être une précision. Ça, en ce qui concerne le cépage, je comprends bien.
Mais en ce qui concerne, donc, le traitement qu'on pourrait considérer préférentiel
donné aux producteurs artisanaux québécois, comment vous voyez comment ils s'en
servent dans le commerce international?
M. Champagne
(Robert) : On préconise...
Le Président
(M. Bernier) : M. Champagne.
M. Champagne
(Robert) : Excusez.
Le Président
(M. Bernier) : Non, allez-y, M. Champagne.
M. Champagne (Robert) : On préconise que les cépages soient autorisés
pour l'ensemble des produits qui vont se retrouver en alimentation. On ne ferait pas de
discrimination entre les produits du terroir et les produits industriels. Donc,
pour nous, le consommateur doit savoir ce qui est le contenu d'une bouteille de
vin pour l'ensemble des produits qui sont disponibles en alimentation.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Merci. Alors, bonjour, messieurs. Je ne vous
salue pas tous un par un, mais tous collectivement. Peut-être
commencer par... parce que j'ai appris, dans la réponse, tout à l'heure, qui a été donnée, que la règle du 85%-15%, ça a été accepté pour les cépages, mais que, pour
les pays, c'était 100 %-0 %,
c'est bien ça? Donc, vous me
confirmez que c'est bel et bien comme ça que ça fonctionne, par exemple, en
France, ou au Chili, ou ailleurs?
Le
Président (M. Bernier) : M. Nadeau, M. Robert, il
faut le dire et non pas seulement brasser la tête.
M. Nadeau (Sébastien) : Absolument,
on confirme. On confirme que c'est la façon de faire.
M. Marceau : O.K. C'est très important parce que... enfin,
moi, je n'avais pas compris ça jusqu'à votre intervention, là.
M. Champagne (Robert) : Vous
permettez, M. le Président?
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. Champagne.
M. Champagne (Robert) : Juste peut-être
préciser, je vais donner un exemple concret, je pense que M. Robert l'a donné tantôt,
mais un vin d'Australie qui veut afficher un cépage, 100 % du vin doit venir de l'Australie, puis, pour afficher le nom du cépage, il doit
avoir 85 % de son contenu qui doit être le cépage. Donc, 85 % de
shiraz avec un complément de vin
australien va donner un vin d'Australie qui a la possibilité de mettre le
shiraz sur l'étiquette, mais c'est toujours 100 % de vin
australien. Donc, l'origine est protégée à ce moment-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Marceau : Comment ça
fonctionne quand il y a deux cépages qui sont assemblés? Comment on fait pour
avoir un assemblage de deux?
M. Champagne (Robert) : Je vais
céder la parole à M. Robert.
Le Président (M. Bernier) :
M. Robert.
M. Marceau : Oui, allez-y.
M. Robert
(Jocelyn) : O.K., bon,
Jocelyn Robert. Quand il y a plus d'un cépage, le cépage qui est
majoritaire doit apparaître en premier sur
la liste des cépages qui font partie de l'assemblage. Et puis, de toute façon,
dans la réglementation de la RACJ,
c'est assez clair : si on veut revendiquer un cépage, on doit revendiquer
un pays d'origine. Donc, on ne peut pas revendiquer deux pays pour un
cépage, là, c'est interdit. On applique la réglementation internationale de
chacun des pays d'origine.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau : O.K. Donc, vous,
est-ce que vous seriez à l'aise avec l'idée de ces deux règles-là, c'est-à-dire
85 %-15 % pour le cépage puis 100 % et 0 % pour
l'appellation Québec? Est-ce que ça, ça vous irait?
Le Président (M. Bernier) :
M. Nadeau.
M. Nadeau (Sébastien) :
Absolument.
M. Marceau : O.K. C'est ça que
vous plaidez. Parce que vous avez parlé du 100 %-0 %...
M. Fontaine (Sylvain) :
...c'est 100 % québécois, donc, au total.
M. Marceau :
Oui, oui, on s'entend, 100 %-0 %, puis, par ailleurs, pour le cépage,
ça pourrait être 85 %-15 %. Est-ce que ça, c'est...
M. Fontaine (Sylvain) : C'est
ça, mais il faut que ça vienne 100 % du Québec.
M. Marceau : 100 % du
Québec puis 85 %-15 % pour les cépages, ça vous conviendrait, ça?
Une voix : Oui, exactement.
M. Marceau :
O.K. Bon, parfait. En tout cas, ça clarifie, en tout cas, dans ma tête à moi,
en tout cas. Puis d'autres ont
proposé que ça soit 85 %-15 % pour le pays plus tôt aujourd'hui, mais
vous, vous dites que c'est un mauvais pari parce que, si ça vient qu'à
être su et connu par les consommateurs québécois, il pourrait y avoir un
phénomène de rejet des produits du Québec qui n'en seraient pas véritablement,
puis que l'idée d'aller vers 85 %-15 % pour favoriser le développement, donc, c'est un pari risqué puis ça
pourrait se retourner contre les produits québécois. C'est ce que vous
nous dites, si je comprends bien.
Le Président (M. Bernier) :
M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Oui, en fait, c'est ce qu'on dit, parce que le
85 %-15 % reste important au niveau du Québec parce que, pour le consommateur québécois qui va lire sur une
étiquette qu'on lui donne un vin que c'est indiqué un produit du Québec,
il s'attend à ce que ça soit vraiment 100 % du Québec. Ça ne peut pas être
chose.
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. Lepitre.
M. Lepitre
(Pascal) : Si je peux me
permettre, le marché du vin en alimentaire, on a déjà pas mal de
restrictions sur la communication de ce
qu'est le vin que l'on vend, et il y a beaucoup de communications dans la
presse, qui n'est pas toujours
favorable à, justement, ce manque de clarté. Alors, c'est sûr que, si, au
niveau des vins du Québec, venait à sortir au niveau des médias le fait
que, finalement, on n'a pas tout dit puis qu'il y a 15 % de vin étranger,
en fait, donc ce n'est pas clair, bien là on
craint le pire sur cette industrie qui a fait beaucoup d'efforts pour apporter
de la qualité au niveau des vins en
alimentaire. D'ailleurs, il y a de la croissance dans notre business, donc ça
commence à aller dans le bon sens. Et puis,
une fois encore, bien, il y a plus de 500 millions de dollars de chiffre
d'affaires qui est là par an, généré dans ce réseau de distribution
qu'on ne veut pas compromettre par rapport à une mauvaise presse, quoi.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Oui, M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Si je peux me
permettre, oui, c'est qu'en plus, quand on parle de ça, on veut vraiment
bâtir cette viticulture-là québécoise, les
artisans, mais, quand on regarde le modèle ontarien, ça a quand même pris 20 ans
avant que les VQA en arrivent où ils sont
aujourd'hui puis d'être reconnus. Ça fait que je pense qu'il faut faire
attention à l'appât du gain et
vraiment se concentrer pour aller chercher un produit de haute qualité
100 % québécois. Et puis, à long terme, c'est sûr que ça va aider
les artisans du Québec beaucoup plus que de faire, exemple, un 15 % qui
pourrait arriver de n'importe où puis que le consommateur pourrait se sentir
trompé.
M. Marceau :
Donc, l'argument du 15 % pour donner un petit coup pour aider au départ,
vous trouvez que c'est une erreur puis que ce n'est pas la voie à
suivre.
M. Fontaine (Sylvain) : Pour
moi, ça devient une vision à très, très court terme.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Marceau : Je
comprends. Très clair. Puis je vais revenir sur la question du laboratoire de
la SAQ puis du transport. Là, dans le fond,
ce que le projet de loi permet, c'est que les analyses soient faites par un
laboratoire reconnu. Et puis ce n'est
pas précisé que ça doit être celui de la SAQ. Si un laboratoire reconnu se
dotait par ailleurs d'un système... appelons
ça un système de transport reconnu, là, donc il y aurait à la fois, dans la
même entité, des laboratoires puis un réseau
de livraison, est-ce que, ça, c'est un modèle alternatif qui pourrait vous
convenir? C'est-à-dire qu'on prévoit que le producteur artisan envoie
ses produits soit à la SAQ, soit à un laboratoire reconnu, mais avec l'idée que
le laboratoire reconnu serait également le
grossiste, c'est-à-dire celui qui fournirait, par ailleurs, les distributeurs.
Est-ce que ça pourrait aller ou ça ne marche pas, ça?
Le Président (M. Bernier) :
M. Gattuso? M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Merci, M. le Président. En fait, c'est que je trouve
ça un petit peu inefficace de reproduire un autre système qui existe déjà. Je veux dire, ça ne donne rien, ça n'a aucune valeur ajoutée. Ça se fait déjà
avec la SAQ. Pourquoi recréer un
autre système? Puis qui va en assurer le contrôle? Qui va amener
les paramètres de contrôle, etc., alors que ça existe déjà avec la SAQ
et ça fonctionne très bien, c'est efficace, c'est éprouvé?
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. Gattuso.
M. Gattuso
(Jean) : Jean Gattuso. Si le système était encadré comme ça... Souvenez-vous, je veux dire, nous, là, on a tous connu l'époque, là, je veux dire, des
années 70. La SAQ a fait un gros travail au niveau contrôle, et leur laboratoire, comme celui du LCBO, est reconnu
comme un des deux tops. Ça prend beaucoup d'expérience. Puis, je veux dire, écoute, on doit se servir de
qu'est-ce qu'il y a déjà dans le système. Ça fait que faisons passer ces
produits-là par le système.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau : Si bien que, donc, votre recommandation, c'est que, dans le projet de
loi, on modifie, là, puis
qu'on inscrive de manière claire que ça doit
passer par la SAQ, et puis que le travail de grossiste doit aussi être fait par
la SAQ. Maintenant, si on fait ça, là la SAQ va devoir se payer, et
puis, ça, ça pourrait impliquer une majoration, ce qui n'est pas le cas présentement.
Ce qui est prévu, si j'ai bien compris, c'est que, présentement, le producteur artisan envoie directement
ses produits après une vérification dans un laboratoire, mais il n'y a pas de
majoration de la SAQ. Là, si on prend le chemin
laboratoire SAQ, bien, l'entrepôt puis la livraison, évidemment,
la SAQ va devoir se repayer. Mais ce que vous allez me dire, puis c'est
la question que je vais vous poser, vous, vous estimez que la majoration qui
permettrait de couvrir ça, j'imagine, est inférieure aux
coûts qui vont être de toute manière assumés si on va dans le privé. Est-ce que
c'est votre raisonnement?
Le Président (M. Bernier) :
M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Bien, sûrement.
Puis, de toute façon, quand on parle majoration, ce qu'on parlait ou
ce que les gens, précédemment, avant nous
parlaient, c'était d'avoir un retour sur, comme tel, la majoration, un crédit
qui leur est remis. Ça fait que, donc, le système, comme je vous dis,
coûte probablement le même montant.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Oui, M. Champagne.
• (16 h 20) •
M. Champagne
(Robert) : Il faut
juste faire la distinction entre le système de distribution de la SAQ aujourd'hui qui existe pour l'alimentation qui cohabite
avec celui des succursales. La SAQ reçoit les produits, analyse tous les
lots. On ne parle pas d'une fréquence de
validation ponctuelle, ou mensuelle, ou annuelle, on parle de tous les lots
inspectés. Donc, en partant, la qualité est garantie, O.K.?
Ensuite de ça, ils ont un système, ils ont une
division qui s'appelle SAQ Alimentation, où est-ce qu'il y a les répertoires de
produits qui sont disponibles pour les grossistes en alimentation. Il n'y a rien
qui empêche la SAQ de créer un répertoire
pour les produits artisanaux. Donc là, on rend disponibles les produits, là, on
facilite l'entrée des produits et la
sortie. Parce que, lorsque nos produits s'en vont chez Metro — je vais prendre Metro comme exemple — ils peuvent facilement ajouter des produits artisanaux dans le transport. Après ça,
le détaillant, lui, il s'approvisionne... ou le marchand, d'un détaillant, un grossiste comme Metro, donc on
facilite tout le contrôle. Tout le processus est facilité par ce modèle
d'affaires là, exactement.
S'il y a des allègements fiscaux qui doivent
être redonnés, ce n'est pas nécessairement parce qu'il y a une livraison directe ou via la SAQ que c'est empêché.
Je vais vous prendre un exemple : en Nouvelle-Écosse — je pense qu'il y a des gens qui en ont parlé aujourd'hui — je travaille avec la compagnie en
Nouvelle-Écosse, ce que la Nouvelle-Écosse a décidé de faire, ils ont donné un allègement de taxation, autant pour
les artisans que pour les industriels, puis c'est publié, là, c'est légal, tout est publié. Donc, tout le monde
y a droit, mais tous les produits transigent par le monopole, le «liquor
board» de la Nouvelle-Écosse, il n'y a pas de système parallèle. Donc, tout est
fait là, puis l'allègement est donné et déjà publié. Donc, c'est des retombées
économiques que ces gens-là recherchent, autant du côté artisan, qui crée de l'emploi, que du côté industriel. Donc, pour moi,
ces décisions-là ne sont pas interreliées, à savoir qu'une livraison
directe va permettre des allègements puis
une livraison qui provient d'un monopole n'en permet pas. Je pense qu'il y a
deux choses distinctives à préciser.
M. Marceau : Je comprends. Et
puis, ça... Ah!
Le Président (M. Bernier) : M. le
député de Granby.
M. Bonnardel : Merci,
M. le Président. Bonjour,
messieurs. Messieurs, vous contrôlez la vente d'alcool, de vin en vrac dans les grandes surfaces, les dépanneurs
depuis très, très, très longtemps. Et, quand cette loi sera adoptée, vous
allez avoir, pour la première fois, de la
compétition, les vins québécois qui pourraient être sur les tablettes. Vous
demandez, dans votre mémoire, 100 % produits québécois. Vous le savez que
ça peut être difficile pour certains, vous le savez que la certification, l'Association des vignerons la
souhaitent. Comment, de votre côté, si on veut jouer ça égal, là... Pour
moi, là, je me mets dans la tête du
consommateur, j'arrive puis je vois un vin certifié québécois. Je pourrais en
voir un pas certifié, là, qui ne pourrait pas supposément rencontrer le
100 %.
Vous donnez un exemple, là, de celui qui
pourrait contourner la loi, vous dites respectueusement «contourner la loi», donc un nombre d'hectares x peut
faire tant de bouteilles, mais soudainement le gars qui a un hectare, qui est
supposé en produire 8 000 en fait
20 000. Donc, il importe du vin, donc il n'aura pas sa certification, donc
il pourrait très bien vous compétitionner aussi. Alors, jouons le jeu de
la transparence, on va marquer aussi «vin qui n'est pas embouteillé au
vignoble», «vin qui est vendu en vrac». Je l'ai déjà dit pour la SAQ, vous
m'avez sûrement entendu. Ce n'est pas transparent
de dire, à la SAQ, qu'un vin a été reçu en vrac. Vous me suivez? Alors, si on
demande une certification 100 % Québec, de quelle façon vous allez
certifier votre vin vendu en épicerie?
Le Président (M. Bernier) :
M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Merci, M. le Président. En fait, le vin qui est
marqué «produit du Québec», il est marqué «produit du Québec». Le vin qui vient
du Chili est marqué «produit du Chili». Il n'y a pas de deux poids, deux mesures, là, dans ça. On identifie puis on
appelle les produits selon leur origine, ce n'est pas selon
l'embouteillage. L'embouteillage ne change
en rien le goût du produit. C'est des procédures mondiales qui se font partout
dans le monde, c'est des pratiques
qui se font partout dans le monde. Et chaque usine ici, là, elles sont toutes
certifiées, là, comme au plus haut
point qu'il peut exister. Ça fait que le lieu d'embouteillage ne change rien,
mais on appelle un produit comme il est. Un produit du Québec, c'est un
produit 100 % du Québec, un produit du Chili, comme M. Jocelyn Robert
l'a expliqué tantôt, il faut qu'il soit
100 % du Chili, et c'est ce qu'on vend. Et nous, on n'a pas d'objection à
ce que ces gens-là entrent dans le
marché. Quand on parle de compétition, on n'a pas d'objection à ce qu'ils
rentrent dans le marché. Ce qu'on dit, c'est
qu'il y a de la place pour tout le monde, puis il faut jouer un peu aussi,
comme on parlait, à armes égales. Quand on parle de cépages, quand on parle de millésimes, ça
peut juste créer un momentum pour le consommateur puis rendre ça plus
intéressant, comme tel, avec un souci de transparence.
Le Président
(M. Bernier) : M. le député.
M. Bonnardel :
Mais, O.K., je me suis peut-être mal expliqué. Si on dit «100 %
québécois», le produit, vous le savez, il peut être acheté... Bon, je
pense que 85%-15%, là, ça sera une norme qui est internationale. Vous ne pouvez
pas non plus garantir un 85%-15% de vos
produits qui viennent du Chili ou qui viennent... Vous pouvez le garantir
aussi?
Des voix : Bien
oui, il y a de la traçabilité.
M. Bonnardel :
Non, mais, vos vins, là, on ne peut pas nécessairement avoir un vin qu'on
appelle d'appellation contrôlée.
Le Président
(M. Bernier) : Un à la fois.
M. Fontaine
(Sylvain) : Oui, très bien.
M. Bonnardel :
Aussi?
M. Fontaine
(Sylvain) : Oui. Tout est certifié. Puis on peut demander à Robert.
M. Bonnardel :
O.K. Alors, pourquoi il faut absolument, si vous dites 85%-15% pour vous, que
le vin québécois soit à 100 %?
Le Président
(M. Bernier) : M. Robert.
M. Robert (Jocelyn) : Je vais répondre à votre question. 85%-15%
n'existe pas pour les produits importés. On parle de cépages uniquement et non d'origine du produit, de pays
d'origine. La RACJ, à chaque fois qu'un conteneur de vin en vrac arrive, vient prendre le relevé des
scellés, prend les certificats d'origine, valide les volumes. Ensuite de ça, à
toutes les fois qu'on fait un embouteillage, on doit envoyer un rapport, savoir
de quel conteneur a été prélevé le vin qu'on a embouteillé. Ensuite de ça, les quantités sont envoyées à la SAQ, et là
il y a une validation des quantités. Et, si ce n'est pas 100 % du
vin du pays d'origine qui est dans la bouteille, c'est rejeté.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député.
M. Bonnardel :
Je comprends ça, O.K. Oui, c'est un petit peu plus clair. Mais sauf que ça
reste un vin en vrac, messieurs. Ça reste un vin reçu en vrac, comme la
SAQ aussi en vend, versus un vin... Où mon collègue, tantôt, du gouvernement posait une question, à savoir quelles
retombées on va chercher chez vous, entre le vin que vous vendez, que vous recevez en vrac, vous disiez tantôt :
Des bons salaires dans les usines, il y en a 500. Je sais que l'Association
des vignerons a dit aussi : Oui, on a 500 emplois directs.
Moi,
je veux comprendre, là. Si vous êtes très sévères avec l'Association des
vignerons ou des vins québécois, moi,
je vais être très sévère avec vous aussi pour qu'on joue égal. C'est ça, mon
but. Alors, tu sais, je ne dis pas, demain matin, qu'il faut absolument
mettre «vin en vrac» versus «vin embouteillé» pour le produit québécois, mais
il reste que, pour le consommateur, moi, je
veux y voir une différence. Donc, les gens, je pense, qui vont se chercher un
vin en dépanneur ou en grande surface savent bien que ce n'est pas un
produit... qui passe par la SAQ, mais qui n'est pas d'un vignoble chilien ou
d'un vignoble italien, tu sais, qui a été embouteillé au vignoble.
Le Président
(M. Bernier) : M. Fontaine.
M. Fontaine
(Sylvain) : Merci, M. le Président. En fait, le vin, là, quand il
vient du Chili, là, le fait qu'il soit embouteillé ici, là, il ne perd pas son
origine, là. On ne touche rien au vin, là. Le vin, il arrive du Chili. Comme
Jocelyn Robert l'a bien expliqué, ce vin-là arrive ici, on ne peut rien faire
avec, sinon que de le mettre en bouteille. Ça
fait que, donc, c'est de dire : Est-ce que l'embouteillage au Québec vient
changer l'origine? Pas du tout. Et vient changer la qualité? Non plus.
Ça fait que, donc, on parle de même qualité, on parle de mêmes trucs.
L'embouteillage,
c'est un discours qui amène ailleurs. C'est de savoir : On veut choisir un
vin du Chili, puis ce n'est pas
indiqué sur la bouteille, là je comprendrais l'enjeu. Mais tout est indiqué
clairement, et on suit les normes internationales.
On n'est pas à part parce qu'on embouteille un vin au Québec, on n'est pas
assujettis à d'autres lois. On embouteille
le vin de la même façon qu'ailleurs puis selon les mêmes règles
internationales. On est aussi sévères envers nous qu'on l'est envers les
viticulteurs. Peut-être le point qui fait qu'on est si sévères que ça envers
les viticulteurs, c'est peut-être aussi parce qu'on y croit beaucoup.
Mais
l'idée, c'est qu'on sait que ça se passe par, justement, une intégrité au
niveau du produit qui va permettre, à long
terme... parce que, dans ça, il faut voir le long terme, en fait, on est mariés
là-dedans pour les 20 prochaines années, là, puis dire qu'à long terme on va arriver avec des
produits très intéressants — parce qu'il y en a déjà, là — des artisans du Québec, et puis qu'on
va en être fiers, de cette industrie-là aussi.
Le
Président (M. Bernier) : ...question, M. le député de
Granby.
M. Bonnardel :
Si vous me permettez...
Le Président
(M. Bernier) : M. Gattuso.
M. Gattuso (Jean) : Mais j'ajouterais à votre point, quand vous
parlez d'impact sur l'industrie, justement, je veux dire, en amenant du vin en vrac, on encourage...
je veux dire, au niveau de l'environnement, on crée de l'emploi, on a
des répercussions importantes, économiques
en créant, je veux dire, des jobs ici puis aussi des emplois indirects, à
travers que ce soient caisses de carton, bouteilles, etc. Donc, je veux dire,
il faut regarder le modèle global.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Monsieur... Oui, bien...
Une voix :
...
M. Bonnardel :
Ah! si vous permettez...
Le Président
(M. Bernier) : Écoutez, le député veut poser une dernière
question. Allez-y, M. le député.
M. Bonnardel :
Oui, c'est ça, si vous permettez, juste vite, vite, là. Pour la livraison, vous
dites aussi que c'est un problème
entre le produit qui sort du vignoble, — vous étiez là ce matin — où, après ça, le vignoble peut dire :
Bon, moi, j'aimerais ça avoir mon
propre transporteur pour être capable de livrer à Chicoutimi, de livrer en
Beauce, ou tout ça, puis que le
produit, nécessairement, quand il va être prêt à embouteiller, il va avoir
passé les tests de laboratoire, soit de la SAQ ou de celui choisi dans la loi. Pour vous, ça, ce n'est pas correct de
faire ça. Vous dites : Les entrées et sorties, le vin ne sera pas
de qualité ou il ne sera pas... Ça, c'est un problème, ça?
Le Président
(M. Bernier) : Une réponse. M. Fontaine.
M. Fontaine (Sylvain) : Ce n'est pas qu'il ne soit pas de qualité. Ce
qu'on dit, c'est : Pourquoi créer un autre système en parallèle,
alors qu'il y en a un qui fonctionne très bien puis qui garantit l'authenticité
des produits?
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Champagne,
M. Nadeau, M. Gattuso, M. Fontaine, M. Lepitre et
M. Robert, d'avoir participé à la Commission des finances publiques.
Je vais suspendre
quelques instants. Je suspends afin de permettre à l'Association des
microdistilleries du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 29)
(Reprise à 16 h 31)
Le
Président (M. Bernier) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux et nous avons
le plaisir de recevoir l'Association des microdistilleries du Québec,
représentée par M. Stéphan Ruffo, bienvenue, M. Ruffo, et M. Jean-Patrick Laflamme. Vous avez
10 minutes pour votre présentation et, si vous avez des documents
additionnels, vous pouvez également les déposer à la commission. Donc, la
parole est à vous, vous avez 10 minutes.
Association des microdistilleries du Québec (AMDQ)
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Merci, M. le Président. M. le Président,
c'est un plaisir de vous voir dans le contexte
de cette commission parlementaire. M. le ministre, M. le directeur de
cabinet, MM. les députés et membres de l'opposition ainsi que vos équipes respectives, bonjour. J'aimerais
souligner la présence dans la salle d'autres microdistillateurs ici
présents derrière nous et les saluer également.
Donc,
comme vous le savez certainement, les projets de microdistilleries se
multiplient au Québec et, à l'image des
microbrasseries qui ont connu un véritable engouement au cours des dernières
années, notamment dans les années 90, les entreprises de création
de spiritueux sont en constante progression. Le milieu des distilleries, qui
produisent des spiritueux dont la matière première provient généralement du
Québec et du Canada, est en pleine expansion comme le prouve le nombre toujours
plus grand de permis délivrés par la RACJ.
L'Association
des microdistilleries du Québec, que l'on nomme affectueusement l'AMDQ, croit à
juste titre que le gouvernement,
principalement le ministère des Finances et les ministères concernés, doit
adapter le projet de loi n° 88 à tous
les acteurs de l'industrie des spiritueux afin de dynamiser le secteur et
offrir les outils de développement nécessaires au déploiement de ces
produits au Québec.
L'Association des
microdistilleries a été créée en 2012 suite à la volonté de ses membres à
consolider leur position et encourager le
développement d'une industrie québécoise de microdistillerie, de valoriser la
fabrication et le commerce de produits distillés à la propriété,
notamment l'alcool et les liqueurs, et assurer une promotion adéquate de ces
spiritueux au Québec, au Canada et dans le monde.
L'industrie
de la microdistillerie est jeune, effectivement, et évolue à une vitesse
surprenante. Plusieurs permis de production
industrielle ont été délivrés, et ce, partout au Québec. Également, le portrait
de la microdistillerie au Québec est varié,
en constante évolution, comme nous l'avons mentionné, et mérite une attention
particulière de l'État quand vient le temps
de légiférer. En effet, les défis sont multiples et résident principalement au
fait que les microdistillateurs n'ont pas tous les mêmes réalités. Certains d'entre eux opèrent en milieu rural et
distillent des produits cultivés sur place, d'autres se concentrent sur
la distillation en milieu urbain où les produits peuvent provenir de plusieurs
sources, notamment du Québec. De plus, le
contexte législatif actuel n'est pas adapté à l'ensemble des spiritueux et
ralentit le développement des microdistillateurs non agricoles. Cela
étant dit, nous tenons à souligner l'effort du gouvernement à vouloir légiférer
et à ouvrir la porte pour une plus grande cohésion dans le domaine des
spiritueux.
Nous sommes
donc heureux de constater que le gouvernement, tel que précédemment dit, ait
présenté ce projet de loi favorisant
l'aspect agricole de la microdistillerie, car en effet il y a à l'AMDQ des
membres qui bénéficieront de ces avantages que leur procurera ce projet
de loi. Et cette volonté gouvernementale, par ailleurs, doit se décliner à
l'ensemble des microdistillateurs. Avec le p.l. n° 88, le Québec est en
mesure de rattraper le retard législatif qui prive les microdistillateurs non propriétaires de terres d'un marché
prometteur. Outre le Québec, le reste du Canada emboîte présentement le
pas, chacun à leur façon. Et, à titre d'exemple, la Colombie-Britannique
possède maintenant plus de 20 microdistilleries
grâce à l'assouplissement de sa législation, l'Ontario également permet
désormais la vente sur place aux microdistillateurs
et le Nouveau-Brunswick a opté pour une majoration pondérée selon le type de
production. Également, dans les
15 dernières années, les États-Unis ont vu l'industrie de la
microdistillation se développer à tel point que plusieurs nouveaux
produits de nos voisins du Sud se retrouvent sur les tablettes de la Société
des alcools du Québec.
L'assouplissement
de la législation n'est pas une idée nouvelle et a déjà fait ses preuves. En
1970, par exemple, le gouvernement
légalise le cidre, qui avait frôlé la disparition au Québec. Maintenant, on
compte une industrie en santé de plus de
50 cidreries, et de nouveaux produits comme le cidre de glace font
maintenant la renommée du Québec ici et ailleurs.
En 1986, la
création des permis de microbrasseurs a permis à cette industrie de fleurir au
Québec, et on compte maintenant plus de 130 microbrasseries dans
toutes les régions, et ce nombre ne cesse d'augmenter chaque année. Le Québec
aujourd'hui a une occasion en or de devenir un leader dans le domaine des
spiritueux au même titre que dans les autres types et modes de production dans
le domaine des alcools.
En 1986, la
création des permis de microbrasseurs a donc permis à cette industrie de
fleurir... Ah! excusez-moi, je répète le paragraphe que j'avais
précédemment lu, peut-être pour remettre un petit peu d'emphase.
Le Président (M. Bernier) : Il
n'y a pas de faute, M. Laflamme.
M. Laflamme (Jean-Patrick) : Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : Ça
arrive souvent.
M. Marceau : C'est pédagogique.
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Oui, exactement,
merci beaucoup. Donc, l'AMDQ est arrivée à la conclusion
que des propositions crédibles et
viables s'imposent pour ce secteur dans le but de donner l'opportunité à tous
les acteurs de l'industrie québécoise des spiritueux de se développer, de maximiser
leur potentiel d'affaires, et de créer des emplois en région, et, à
terme, développer un attrait touristique autant en milieu urbain qu'en
périphérie.
J'aimerais,
si vous le permettez, M. le
Président, passer la parole à
M. Stéphan Ruffo pour préciser la nature des propositions de
l'AMDQ.
Le Président (M. Bernier) :
M. Ruffo.
M. Ruffo (Stéphan) : M. le
ministre, MM. les députés, alors là je vais vous parler de la proposition
que l'association souhaite présenter. À la
suite de la sortie du rapport Robillard et de ses recommandations concernant le
rôle de la Société des alcools du Québec, de
la présente commission suivant le dépôt du projet de loi n° 88 à
l'Assemblée nationale ainsi qu'à la volonté du gouvernement à valoriser
les produits québécois, l'AMDQ tient à informer ses partenaires gouvernementaux des propositions qu'elle croit
nécessaires pour le développement de l'industrie des microdistilleries au
Québec.
L'AMDQ souhaite, par ses propositions, stimuler
la croissance de cette nouvelle industrie, développer le potentiel naturel pour
toutes les régions du Québec, favoriser le développement des microdistilleries
du Québec et des produits régionaux en
matière de spiritueux, transformer la matière première du Québec en valeur
ajoutée. Également, ces propositions
permettront de s'assurer que les règles établies favoriseront le déploiement et
la valorisation des produits québécois afin de faire face à la
concurrence internationale.
À cet égard, nous
nous réjouissons que le gouvernement ait déposé le projet de loi n° 88,
qui favorise les producteurs de vin, de
cidre, d'hydromel et de bière. Par ailleurs, et pour que le portrait soit
complet, le gouvernement doit inclure
l'ensemble des microdistilleries dans le processus législatif. C'est pourquoi
nous demandons que soit également incluse,
dans le cadre du projet de loi n° 88, la création d'un permis de
microdistillerie qui engloberait tous les microdistillateurs selon les caractéristiques suivantes : un permis
de microdistillateur doit avoir un alambic ou une unité de distillation, tous les produits doivent être
passés dans cet alambic-là pour avoir la notion «microdistillés»; doit être
propriété québécoise; doit distiller sur
place, dans son alambic, des spiritueux de qualité à partir d'un moût fermenté
sur place à la microdistillerie, d'un macérat de
matières naturelles dans un alcool neutre, d'un moût fabriqué par un tiers ou
d'un moût fabriqué et fermenté par un tiers,
donc on aimerait sous-traiter les fermentations des permis artisanaux; doit
avoir une capacité de production maximale de
300 000 litres en alcool absolu; permet la vente à la propriété;
permet la vente dans une exposition
agricole ou agroalimentaire, dans un marché, un événement public. Il prévoit
aussi que la vente de ces produits peut être effectuée directement à un
titulaire de permis de restaurant.
• (16 h 40) •
Également,
et dans un souci d'équité, l'AMDQ propose que soit mise de l'avant une
majoration évolutive des produits du
Québec. Ce principe permettrait de valoriser au maximum les producteurs
agricoles, tout en permettant de soutenir les microdistillateurs dans
leur ensemble.
La majoration
évolutive. Afin de favoriser l'établissement d'une nouvelle industrie sur des
bases équitables, nous suggérons une
majoration évolutive et compétitive en
fonction des éléments décrits au
tableau 1. Les majorations devront
être établies en collaboration avec la SAQ et tenir compte de la valeur ajoutée
de cette nouvelle industrie en
matière de transformation agricole, et de création d'emplois, et de promotion des
produits du Québec. Des frais minimums reliés à l'analyse des produits par la SAQ devront être
appliqués. Le producteur devra faire parvenir des échantillons de chaque
lot produit à des fins d'analyse. Cette
classification a pour but de valoriser les produits du Québec
et leur transformation en favorisant le producteur-exploitant en premier
lieu, sans toutefois défavoriser les distillateurs urbains ou qui n'ont pas
accès à un champ de culture et qui s'approvisionnent chez des producteurs québécois.
Nous suggérons donc
qu'outre les frais minimums de base qui seraient versés à la SAQ pour les
services de laboratoire il n'y ait
pas de majoration sur les produits cultivés et qu'une évolution
des pourcentages de majoration soit appliquée
selon l'origine des produits distillés. Donc, le produit qui aurait le plus
gros avantage serait un produit qui serait distillé à la microdistillerie mais fait à partir de la culture du
producteur. Au bout de la ligne, on rejoint le permis artisanal, là.
Également,
chaque produit et étiquette devra préalablement avoir été soumis et autorisé
par la SAQ. Un produit doit refléter
le nom de la microdistillerie, sa région, le type de produit, la matière
première et les origines, une classification selon l'origine et le type de production émise en fonction du concept de produit distillé au Québec, produit distillé du Québec. Donc, en DI-1, on aurait : produit distillé à partir de matière première cultivée directement par la microdistillerie; DI-2, on aurait un produit distillé à partir de matière première cultivée au Québec; en DI-3, on aurait un produit distillé à partir de matière première cultivée au Canada,
ce qui ferait — on
en reparlera peut-être dans la période des questions — que
la problématique de l'alcool neutre serait intégrée en DI-3...
Le Président
(M. Bernier) : On est rendus à ça, la période des
échanges.
M. Ruffo (Stéphan) : ...oui, et DI-4, le produit distillé à partir de matière première cultivée à
l'extérieur du Canada, ce qui
donnerait la possibilité de faire d'autres spiritueux aussi.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, messieurs, de votre présentation.
Nous allons maintenant procéder aux échanges. M. le ministre.
M. Leitão :
Merci, M. le Président. Alors, MM. Crawford et Ruffo, bonjour. Merci
d'être là.
Des voix :
...
M. Leitão :
Pardon?
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Laflamme, M. le ministre.
M. Leitão : Laflamme, je m'excuse. Merci d'être là, d'être
venus nous présenter votre mémoire et votre opinion. Pour qu'on se replace, parce
qu'on change de registre, on a parlé beaucoup
de vin, on est maintenant dans la distillerie, donc, la situation actuelle, avant de rentrer dans le projet de loi n° 88, c'est que vous avez, à toutes fins pratiques, un permis industriel, un permis de
distillateur industriel qui vous permet de vendre vos produits à la SAQ. Aujourd'hui,
c'est comme ça.
Vous
avez utilisé le parallèle des microbrasseries. Donc, vous, en fin de compte, ce qui vous distingue des Seagram et autres comme ça, c'est une
question de volume, évidemment.
M. Ruffo
(Stéphan) : Oui. En premier lieu, volume, matière première, oui, c'est
ça, et petites quantités, petits lots, oui.
M. Leitão : C'est ça. Alors, ce que nous on propose de faire
avec le projet de loi n° 88, c'est de créer une autre catégorie
de permis, le permis artisanal, de production artisanale, qui devrait être lié
à la production agricole, donc, au Québec. Et, si j'ai bien compris votre problématique, c'est que vous jugez que c'est une distinction un petit peu trop rigide parce que ça peut laisser certains de vos membres un
petit peu entre les deux.
Le Président
(M. Bernier) : M. Ruffo.
M. Ruffo (Stéphan) : Il faut
comprendre la particularité des spiritueux. Il est clair qu'il y a des
spiritueux qui peuvent être faits en
verticale : on cultive notre grain, on cultive nos pommes, on distille. Par contre,
les microdistilleries travaillent beaucoup avec de la matière première qui vient d'un petit peu partout, au même titre que les microbrasseries. Donc, nous autres, on trouve qu'il est important
de ne pas limiter la matière première à seulement ce qui est cultivé
et d'aller plus loin. Une microdistillerie
devrait être basée sur les principes de la microbrasserie, c'est les recettes,
c'est la créativité.
C'est sûr aussi qu'on trouve légitime... Un
agriculteur qui fait de tout de A à Z, c'est clair que c'est lui qui a le meilleur rapport qualité-prix puis c'est lui
qui a le plus d'efforts en tant que
tels. Mais, encore là, un maître
distillateur, c'est une profession, c'est un
art, et c'est autre chose que l'agriculture. On parle de distiller, on parle après ça de
faire vieillir, on parle de
fermenter, on parle de faire des recettes, de l'alchimie, donc c'est pour être
capables de vraiment exprimer
le potentiel créatif qui est possible dans
la distillerie. Mais, si on limite ça seulement aux choses qui sont cultivées par le
producteur, on se coupe vraiment beaucoup, beaucoup de marchés.
Il faut bien comprendre aussi que c'est là, là. En
ce moment, sur les tablettes de la SAQ, il y a des produits microdistillés du Vermont, des États-Unis,
d'un petit peu partout. Donc, c'est vraiment
une question aussi, là, de survie. En ce moment,
la vague est partie, et ils s'en viennent sur nos tablettes, donc il faut s'activer. Et on a fait
des analyses, là, tous les États ont
des états et des arrangements différents par rapport aux spiritueux, les
provinces aussi, mais on voit que tout le monde est en train de chercher
une solution partout parce que... Oui, vas-y.
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : M. le ministre, j'aimerais peut-être ajouter un
petit peu sur le principe artisanal. Si je peux faire un parallèle, un boulanger artisan ne cultive pas
nécessairement son blé pour faire sa farine, par ailleurs son produit est un produit artisanal. Donc, dans ce
contexte-là, est-ce qu'on peut absolument demander à ce que le produit
final soit cultivé à la base ou ne peut pas
être cultivé par un tiers et distillé par un artisan qui aurait également le
même titre?
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
D'accord. Mais alors, donc, un microdistilleur qui maintenant vend son produit
à la SAQ, très bien, on se comprend, mais quel avantage additionnel ça
vous donnerait de faire ce que vous... Ça veut dire que le producteur artisanal, si le projet de loi va de l'avant,
pourrait faire ça et puis il aurait le choix de vendre à la SAQ ou de le
vendre sur place. Donc, vous, en fin de
compte, ce que vous aimeriez avoir, ça serait aussi la capacité de vendre sur
place, c'est ça?
M. Ruffo
(Stéphan) : Oui, pour être
capables de faire une première promotion. C'est sûr que, sur place, on
est capables de parler de notre produit, mais c'est sûr aussi qu'aller à la
SAQ, c'est le but ultime.
M. Leitão :
Et, justement, parlons de la SAQ. Comment pensez-vous que la SAQ peut vous
aider? Ou quel serait le rôle que la SAQ devrait jouer pour contribuer à
améliorer le développement de votre industrie?
Le Président (M. Bernier) :
M. Ruffo.
M. Ruffo (Stéphan) : C'est des
choses qu'on est en train de regarder, mais, vite fait comme ça, on pourrait tout de suite appliquer le système des commandes
privées. Donc, on envoie nos spiritueux à la SAQ, ils nous les ramènent,
à la rigueur ils pourraient être timbrés et
ils sont dans la boutique. C'est des options possibles et c'est ce que
l'association, là, veut regarder par rapport
à la SAQ et la faisabilité de tout ça, mais en fonction de... Si on applique la
commande privée, là, ça pourrait marcher demain matin.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão : Très bien. Je ne
sais pas si les collègues ont des questions. Non? O.K.
Le Président (M. Bernier) :
Non, ça va. M. le ministre.
M. Leitão : Très bien. Est-ce
que...
Le Président (M. Bernier) :
Vous continuez.
M. Leitão :
O.K. Une autre question que j'aimerais vous poser : Dans le projet de loi,
nous proposons de créer un permis de coopérative de producteurs
artisans. Comment vous voyez ça? Est-ce que ce serait là une piste qui pourrait
s'appliquer à vous?
Le Président (M. Bernier) :
M. Ruffo.
• (16 h 50) •
M. Ruffo
(Stéphan) : Nous aimerions
sous-traiter, c'est sûr. On est des spécialistes, on a nos équipements,
notre matériel, donc, définitivement, on
pourrait sous-traiter à la place d'une coop. Par contre, une coop, il y a des
avantages. On pourrait avoir une coop de grains pour faire de l'alcool neutre.
C'est toutes des choses qu'on regarde aussi à travers l'association parce que, dans les spiritueux, il y a des spiritueux qui
sont distillés à partir d'un macérat. Donc, on prend un alcool neutre, on macère et on redistille. La
problématique, c'est qu'il n'y a pas de producteur de cet alcool neutre en
ce moment encore au Québec. Et, avec une coop, on pourrait peut-être créer un
producteur d'alcool neutre qui pourrait approvisionner
les microdistilleries. Parce qu'il y a plusieurs liqueurs que ça ne vaut pas la
peine de faire la base, la soupe, quand on parle d'absinthe, gin, pastis et même des
eaux-de-vie avec des petits fruits. D'ailleurs, un permis artisanal
permet l'ajout d'alcool neutre dans les
mistelles, et ça, on l'a relevé dans nos questions. On ne vous en parle pas,
mais c'est une problématique, ça,
qu'il va falloir que vous regardiez avec la loi n° 88, c'est tout
le temps l'ajout d'alcool neutre.
Mais, dans notre association, quand il y a utilisation d'alcool neutre, il faut
automatiquement que ça passe dans l'alambic, que ça soit redistillé parce qu'on
peut faire des spiritueux juste en mélangeant de l'eau puis de l'alcool, et ça,
par contre, ça reste plus industriel.
Avec un permis de microdistillateur, bien, ça serait 100 % distillé, puis
à côté on pourrait avoir l'artisanal aussi, là. Mais on pense qu'il
devrait y avoir un permis dans le milieu de microdistillateur.
Le Président (M. Bernier) :
M. Laflamme.
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Également, au sens structurel des termes, si on
regarde, mettons, une coopérative qui
distillerait, à ce moment-là elle devrait distiller le produit de ses membres
agriculteurs, si je peux me permettre, ou cultivateurs, et il y aurait nécessairement un goulot d'étranglement à
un certain moment donné, c'est-à-dire que ceux qui ne produisent, comme on vit au Québec, seulement
qu'une partie de l'année, à la fin de l'année ce que les... pas les microdistillateurs, mais les coopératives doivent
organiser leur temps en fonction des produits qu'ils reçoivent et de les
renvoyer au producteur initial. À ce
moment-là, s'il y avait un permis microdistillateur qui engloberait et les
coopératives et les microdistillateurs, on pourrait libérer un petit peu la
charge des coopératives et également ventiler un petit peu la diffusion des
produits.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Oui, M. Ruffo.
M. Ruffo
(Stéphan) : Si je peux juste
rajouter aussi, c'est qu'en ce moment les microdistilleries, c'est le
whisky qui est notre Graal. Par contre, si
on regarde en ce moment avec le permis artisanal, on va se retrouver avec
beaucoup de spiritueux qu'on appelle
brandy, c'est-à-dire brandy de raisin, brandy de pomme. Mais les spiritueux qui
se vendent à la Société des alcools,
les gros vendeurs, on parle de whisky, gin, vodka et rhum. Bon, dans ce cas-là,
le whisky, oui, c'est ce qu'on veut, entièrement vertical avec notre
grain Québécois. Mais, dans le cas du rhum, une distillerie pourrait avoir
avantage à prendre une mélasse, un sucre brun. Ici, au Canada, le sucre, vous
savez, est déréglementé, on a des bons prix
dans le sucre, on a d'excellents approvisionnements, donc on pourrait décider
de faire un rhum, puis un rhum artisanal en petite quantité et de
qualité, vieilli dans des fûts d'érable ou de bouleau. C'est toutes des choses
qui arrivent, là. La créativité québécoise est partie dans le monde des
spiritueux, et, si on est aussi bons que dans le reste, bien, on va briser des... On en brise déjà, des portes, on a
des produits avec des panais, de l'algue, des herbes. La créativité
québécoise est partie dans les spiritueux, puis on va prendre le leadership.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Peut-être une
dernière question. Vous avez mentionné au début que la Colombie-Britannique et
l'Ontario ont déjà amené certains assouplissements. Est-ce que c'est dans ce
vent d'idées là d'avoir créé un permis de microdistillerie?
M. Ruffo
(Stéphan) : Oui, mais la
majoration évolutive, c'est une création de nous, là. À date, on ne l'a pas
vue nulle part, là. Par contre, oui, bon, en
Ontario, ils ont le droit de vendre à la distillerie, mais c'est plein de
majorations, mais au moins ça leur fait une vitrine. Ça fait que c'est toutes
des choses qu'on est prêts à regarder et à discuter.
Et
d'ailleurs, justement, je voudrais le mentionner, on a eu beaucoup de
rencontres avec vos équipes, M. Leitão, et vraiment on a eu un bon
support, et je voudrais féliciter vos équipes.
M. Leitão : Très bien, merci.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, ça va?
M. Leitão : Ça va, merci.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui, merci. Bonjour, messieurs. Merci pour vos réponses jusqu'à maintenant,
puis j'ai quelques questions encore. Peut-être, tout d'abord, juste pour
clarifier, dans le fond, ce que vous dites, c'est qu'il y a des alambics, évidemment, qui sont utilisés dans les
procédés de distillation. Puis ce que vous appelez la zone du milieu, là...
Parce que vous nous disiez : Il y a les artisans, il y a vous autres,
mettons, puis il y a les industriels. Vous, tout ce que vous faites est
distillé, n'est-ce pas, c'est ce que j'ai bien compris, puis dans un alambic,
là?
Le Président (M. Bernier) :
M. Ruffo.
M. Ruffo (Stéphan) : Bien, on macère. Il y a de nos membres qui
cultivent aussi. Comme nous, on cultive pour notre whisky, mais, pour notre gin, on ne cultive pas. Il y a des gens
qui sont hybrides. Puis en réalité aussi, on passe par les gins puis ces alcools-là pour avoir le temps de
faire notre whisky. Disons, s'il y avait des encouragements ou des
avantages, peut-être qu'on pourrait sauter directement au
whisky sans passer par la vodka et le gin, qui, eux, ne sont que des macérations. Donc, on prend un alcool neutre, on
macère nos botaniques. Une fois que les botaniques sont macérées, on
redistille, O.K.? Donc, à l'association, tout doit passer dans l'alambic.
M. Marceau :
Et puis des alambics, présentement, est-ce qu'il y en a suffisamment au Québec
pour assurer le développement de votre industrie ou bien ça va en
prendre plus?
M. Ruffo
(Stéphan) : Bien, l'industrie est en explosion. Je pense que, d'ici la
fin de l'année, on va avoir pas loin d'une
quinzaine de nouveaux permis, là, au total, tout ça sur le mode micro. Mais
définitivement qu'il y a de la place parce
qu'il se vend énormément de spiritueux en importation. Si on fait juste gruger
un petit peu ces spiritueux-là... Puis là on parle de spiritueux commerciaux, industriels. Là où est l'urgence,
c'est que, là, il y a des spiritueux micros qui s'en viennent sur nos
tablettes, et c'est là, là, qu'il faut que nous, là, on se dépêche, là, puis
qu'on active.
Le Président
(M. Bernier) : M. le député.
M. Marceau :
Puis pour revenir à ce dont parlait le ministre tout à l'heure, là, moi,
j'avais compris, puis peut-être vous pouvez
me le clarifier, que l'idée des coopératives, c'était pour que plusieurs
producteurs se mettent en commun pour
se procurer un alambic de manière à pouvoir... Est-ce que c'est ça qu'il faut
comprendre, là, et qui pourrait être un avantage pour votre
développement?
Le Président
(M. Bernier) : M. Ruffo.
M. Ruffo (Stéphan) : Ce qu'on dit, c'est que, bon, ces coops-là sont
intéressantes pour les agriculteurs, mais, d'un autre côté, un
agriculteur pourrait venir sous-traiter à une microdistillerie s'il ne veut pas
avoir tout le trouble de se partir un
alambic. Encore là, aussi, bon, les coops, ce n'est pas évident, là, en ce
moment, les «business cases» alentour de ces coops-là, parce que ces coops-là vont se créer pour faire de
l'alcool de raisin ou de l'alcool de pomme, puis on sait très bien que les gros vendeurs, c'est du whisky, c'est
le gin puis le whisky. Des brandys... Ces permis artisanaux là et ces
coops-là vont faire, en majeure partie, de la pomme et du raisin. Et l'alcool
qui se vend dans le monde, ça vient du grain.
Le Président
(M. Bernier) : M. Laflamme.
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : En même temps, on ne voit pas pourquoi est-ce que les
deux principes ne pourraient pas être complémentaires.
M. Ruffo (Stéphan) : Oui, parce que, nous autres, on dit :
Microdistillateur artisanal, microdistillateur pas artisanal, en fin de compte, il y a un microdistillateur qui
cultive sa matière première puis il y a un microdistillateur qui ne
cultive pas, ce n'est pas plus compliqué que
ça. Puis, sur le modèle des microbrasseries, les microbrasseries n'ont jamais
acheté de la matière première qui
venait du Québec parce qu'il n'y en avait pas, ça n'existait pas. Maintenant,
on commence à avoir des champs de
houblon, on commence à avoir des malteries. Mais il faut commencer par quelque
chose pour faire développer, en arrière, la machine.
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Puis tu te dis qu'à un moment donné aussi on ne peut
pas produire nos propres alcools neutres puis avoir l'ensemble du
processus, de la chaîne de valeur, dans le fond.
M. Ruffo (Stéphan) : Et c'est là, votre question, de dire : Oui,
il pourrait y avoir une coop de producteurs de grains pour faire de
l'alcool neutre pour approvisionner les microdistilleries. Parce qu'il y a une
polémique en arrière de cet alcool neutre là, il vient de l'Ontario.
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Ou un particulier qui décide de faire juste de l'alcool
de grains également, pour faire de l'alcool de grains.
M. Marceau :
Puis pour revenir sur l'alcool neutre de l'Ontario... Puis en fait, si je
prends votre tableau 1, est-ce que vous
avez une volonté d'avoir une appellation Québec ou une espèce de... Est-ce que
vous avez cette volonté-là ou est-ce que...
M. Ruffo (Stéphan) : Bien, l'appellation, elle est dans le geste,
c'est de distiller. Microbrasserie Québec, distillé Québec. Mais, oui,
dans la matière...
• (17 heures) •
M. Marceau :
...de ce qui est distillé, fond, c'est de la matière première. C'est ce que
vous dites.
M. Ruffo (Stéphan) : Bien, en
fin de compte, c'est la profession en
premier. Mais c'est clair que 100 %
produit du Québec devrait être plus valorisé
que quelqu'un qui veut distiller de la mélasse pour faire un rhum, c'est
évident. Mais on ne veut pas limiter,
on veut ouvrir. Il ne faut pas limiter. Une microdistillerie a le droit de
faire un rhum comme elle a le doit de faire
un brandy, puis tout ça. Mais donnez la chance aux créateurs de s'exprimer puis
vous allez voir. Bien, déjà, là, on est en train de faire parler de
nous, là, même si on est des Gaulois puis des pionniers.
M. Marceau :
Juste question d'avoir une petite idée, un petit portrait de la situation
présentement au Québec, si je prends
votre tableau 1, là, vous avez quatre catégories, 1, 2, 3, 4, dans le
fond, combien qu'il y a d'entreprises dans chacune des catégories
présentement au Québec?
M. Ruffo
(Stéphan) : Bien, je
parlerais de produits, là, dans le cas... Pas beaucoup, pas beaucoup. On parle
de distiller, O.K., on ne parle pas
d'assemblage parce que ça, c'est l'autre... Il y a des produits qui sont
assemblés, mais là je n'en parle pas. Mais je ne veux pas nommer de...
Admettons nous, là, Les Subversifs, parce qu'on fait un whisky, on cultive notre maïs, mais il n'est pas 100 %
maïs, il y a du malt, O.K., c'est un bourbon, donc, en théorie, il serait
dans DI-2, produits distillés à partir de
matière... C'est parce qu'on fait notre maïs, il est à nous, mais il n'est pas
à 100 % maïs. Ça fait que nous,
on dit que notre whisky serait en DI-2 et notre gin serait en DI-3. On prend de
l'alcool neutre, on fait macérer des
botaniques, puis après on infuse notre panais, une fois distillé. Donc, à date,
là, nous, Les Subversifs, on n'en aurait pas un en DI-1 parce qu'on
prend du malt du Québec, mais qui ne vient pas de chez nous, donc on ne serait
pas en DI-1.
Par contre,
oui, en ce moment, on parle ici d'alcool distillé, puis c'est une industrie qui
est nouvelle, puis il faut comprendre
qu'on s'adapte. Mais, et depuis plusieurs années, il y a des produits qui sont
sortis sur le marché qui sont des assemblages et, définitivement, ces
produits ne se retrouveraient pas là.
M. Marceau : ...pas là.
M. Ruffo (Stéphan) : Non.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau : Ça va. Bien,
écoutez, parfait. Merci beaucoup, ça clarifie. Merci.
Le Président (M. Bernier) : Ça
va? M. le député de Granby.
M. Bonnardel :
Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue. Moi, là, pour le commun des
mortels, ceux qui nous écoutent, là,
la certification que vous demandez, eau-de-vie du Québec, 100 % du Québec,
vous allez me l'expliquer. Moi, ce
que je comprends, là, c'est : ça part de la terre, on transforme, on
embouteille. Ça veut-u dire que tous les gins qu'on voit sur les tablettes de la SAQ, les whiskys qui sont
faits puis qu'on dit «Produit du Québec», c'est produit au Québec ou on
devrait dire «Embouteillé au Québec»? Moi, là, je veux que vous m'expliquiez,
est-ce que...
Le Président (M. Bernier) :
M. Ruffo.
M. Ruffo (Stéphan) : Bien, ça
dépend des produits. Puis ce qu'on veut, c'est, de plus en plus, amener ça, là,
100 % Québec, matières premières, puis
tout ça. Mais, dans le monde des spiritueux, il y a eu beaucoup
d'assemblages. Admettons, quelqu'un qui
mélange un spiritueux acheté ailleurs puis qu'il mélange ça avec du sirop
d'érable. Bon, il y a une spécificité
québécoise, mais la matière première, elle n'est pas toute du Québec. C'est des
mélanges, des assemblages. C'est ça.
L'alcool neutre, en ce moment, on n'a pas
d'alcool neutre. Et l'alcool neutre est à la base de plusieurs spiritueux. Pour faire de l'alcool neutre, ça veut
dire qu'il faut distiller un alcool à 95 %. Ça ne goûte plus rien, un
alcool neutre. Et ça, ça prend des
techniques, ça prend beaucoup de volume, beaucoup d'électricité, des grosses
tanks, et tout ça. C'est pour ça que,
dans le monde, pour de l'alcool neutre, c'est des raffineries plus que des
distilleries. Et là ils prennent cet alcool
neutre là, c'est de la matière première, puis ils l'envoient aux distilleries
pour faire des liqueurs, des gins, pastis, toutes les liqueurs infusées et redistillées, oui. Tandis que whisky,
bien ça, on part d'une bière, on fait notre «mash» puis on le distille. Le brandy de pomme, on fait un cidre, on
le met dans l'alambic. Un brandy de raisin, cognac, pour vous expliquer,
un brandy de raisin, bien, lui aussi, on
fait le vin puis on le fout dans l'alambic, on le distille puis ça devient un
brandy.
M. Bonnardel :
Donc, je vais m'acheter un gin à la SAQ, je ne nommerai pas de nom, c'est un
gin du Québec, il n'est pas
nécessairement produit au Québec 100 %. Il va y avoir un alcool... Vous
avez dit tantôt : Assemblage, je ne veux pas trop en parler, là.
Donc, le gars, il va acheter de l'alcool de l'extérieur puis il va le mixer,
vous l'avez dit tantôt.
M. Ruffo (Stéphan) : Et il va
faire infuser ses herbes. Après, il va le distiller, par exemple.
M. Bonnardel :
Il va faire infuser puis il dit au consommateur : Produit du Québec. Ça
fait que, donc, ces gens en question,
là, est-ce qu'ils ne sont pas fâchés par le fait que vous dites : Attends
une minute, là, on va essayer, comme on va le faire avec les vins, d'avoir une eau-de-vie qui part de la terre puis
qui finit dans le petit «shooter», un produit qui est embouteillé au
Québec et non produit au Québec. Il n'y a pas une bataille, là, dans votre...
Le Président (M. Bernier) :
M. Ruffo.
M. Ruffo
(Stéphan) : Non, non, non,
mais il y a des batailles, mais il faut bien comprendre, là, on est sur le
modèle des microbrasseries. Les
microbrasseries ne cultivent pas leurs grains, ce sont des artisans qui
maîtrisent les techniques de brassage.
C'est moins lié à la terre. Ce n'est pas : Le raisin, cette année le
soleil est merveilleux. Non. C'est plutôt nos recettes, nos techniques, nos barils, notre
alambic, notre vieillissement. C'est autre chose que... C'est sur le même
modèle que les brasseries. Les brasseries ne sont pas liées à la terre. Par
contre, on trouve légitime, puis on en a dans notre association qui sont liés à la terre. Merveilleux. Bravo! Et il en faut
aussi. Mais ce que je vous dis, c'est que whisky, gin, vodka et rhum
sont les plus gros vendeurs. Ce qu'on peut faire, nous, 100 % Québec,
c'est du whisky.
M. Bonnardel :
O.K. Vous voulez valoriser, vous dites : Ceux qui partent de la terre,
bravo! Puis, je veux dire, il y a vous autres.
M. Ruffo (Stéphan) : Oui. Puis
il y a ceux qui mélangent.
M. Bonnardel :
O.K. Donc, vous voulez donner la même certification 100 % Québec à tout le
monde, là, qu'à celui qui part de la terre, qu'à celui qui mélange.
C'est-u ça que je comprends?
M. Ruffo (Stéphan) : Celui qui
part de la terre va avoir un DI-1.
M. Bonnardel : O.K. Il
va avoir le code différent, là.
M. Laflamme (Jean-Patrick) : En
fait, c'est ça, la...
M. Bonnardel : Mais,
pour le consommateur, on ne le verra pas, là, le DI-1. C'est ça, là. Moi,
j'arrive puis je vois un gin. Ah! Il
dit : Il vient-u de DI-1, lui, ou il vient-u de DI-2? Pff! Aucune espèce
d'idée. Ce n'est pas ça, non, qui est un peu mélangeant?
M. Ruffo (Stéphan) : Peut-être,
mais...
M. Laflamme
(Jean-Patrick) : Tu sais, rien n'empêche de travailler sur un
étiquetage aussi, là. À ce moment-là, tu
sais, là on parle du projet de loi n° 88. Puis, quand on parle du projet
de loi n° 88, les demandes qui sont faites, c'est nécessairement
pour assouplir certaines mesures pour permettre aux microdistilleries de
pouvoir avoir les mêmes capacités
d'affaires, que ce soit dans le monde agricole, que ce soit dans le monde
urbain. On s'entend là-dessus, le principe est le même. Le principe de base reste le même pour l'ensemble des
microdistillateurs, c'est de distiller. Que ce soit un produit
100 % Québec, que ce soit un produit, je ne sais pas, moi,
80 %-15 %, ou 85 %-15 %, ou peu importe, l'idée derrière tout ça, c'est de donner les mêmes outils
à tout le monde de pouvoir travailler en fonction de se rapprocher au maximum
d'un produit à 100 % du Québec.
Un
distillateur qui ne cultive pas pourrait acheter son alcool neutre d'un
distillateur qui fait un alcool neutre ou une coopérative qui fait un
alcool neutre. À ce moment-là, l'alcool vient du Québec. Ensuite de ça, il y
aurait une possibilité d'acheter, je ne sais pas, moi, un moût de raisin, ou
des herbes, ou tout ça, puis le passer dans l'alambic. Ultimement, ça deviendrait un produit 100 % du Québec. L'objectif
avec les demandes de l'association présentement, c'est d'assouplir la législation pour permettre à chacune des
entreprises de développer son propre terreau puis favoriser les produits
du Québec, ultimement.
M. Ruffo (Stéphan) : Mais aussi
on veut se doter d'outils, là, pour aller faire le contrôle en arrière aussi,
là.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. Ruffo,
M. Laflamme, merci de votre participation. Merci de ces précisions.
Donc, je vais
suspendre quelques instants afin de permettre à l'Union des producteurs
agricoles de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 9)
(Reprise à 17 h 14)
Le Président (M. Bernier) :
Alors, merci. À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.
Donc, nous avons le plaisir de recevoir l'Union
des producteurs agricoles, bienvenue, représentée, bien sûr, par son président, le très connu
M. Marcel Groleau, M. le président, ainsi que par
Mme Catherine St-Georges. Bienvenue à la Commission des finances
publiques. Vous avez 10 minutes pour votre présentation.
Quelques
secondes cependant, j'ai reçu un document de l'association des distilleries, un
document additionnel qui est distribué au niveau des membres de la
commission. Donc, on en fait la distribution.
La parole est à vous, M. Groleau.
Union des producteurs agricoles du Québec (UPA)
M. Groleau
(Marcel) : Alors, merci beaucoup. MM. les députés membres de la
commission, ça nous fait plaisir de vous
présenter nos observations sur le projet de loi qui est à l'étude. Alors,
l'Union des producteurs agricoles accompagne
différemment, selon le secteur, les fabricants de boissons artisanales du
Québec. Naturellement, nous, ici, on parle
uniquement et spécifiquement des producteurs qui fabriquent une boisson à
partir de leur production agricole, donc les vignerons,
les cidriculteurs, les producteurs de petits fruits également ou d'érable, miel
qui fabriquent des boissons artisanales.
Alors, depuis 2007, nous accompagnons la CAQ, qui, dans notre cas, sont Les
Cidriculteurs artisans du Québec. Alors, je ne veux pas qu'il y ait de
confusion.
Le Président
(M. Bernier) : Je vous écoutais, mais je me posais des questions.
M. Groleau (Marcel) : Alors, voilà, aussi l'Association des vignerons, qui est, oui, officiellement représentée par le CTAQ, mais dont les producteurs agricoles
travaillent avec nous, l'Association des distilleries artisanales, mais également qui regroupe des producteurs agricoles
qui font de la distillerie et les producteurs d'alcool de petits fruits.
Puis également on a une table horticole où les producteurs de vignes et pommes
sont présents.
Alors,
je suis accompagné de Mme Catherine St-Georges, qui, à l'UPA,
accompagne ces groupes-là, et c'est elle qui va donc vous présenter le
mémoire. Et après, ensemble, on pourra répondre aux questions que vous aurez.
Merci.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. Mme St-Georges.
Mme St-Georges (Catherine) : Peut-être vous dire aussi qu'on a consulté les
producteurs de boissons d'érable et de miel aussi qui sont aussi dans
l'organisation, qui sont des producteurs agricoles.
Donc, de façon
consensuelle, l'ensemble des producteurs de boissons alcoolisées a accueilli
avec beaucoup d'enthousiasme le projet de
loi. C'était réclamé depuis longtemps, l'accès aux épiceries, donc ça a été
bien reçu. Par contre, on va vous présenter quelques propositions de
bonification sur le projet de loi. Ces bonifications-là, elles viennent de
plusieurs consultations qu'on a faites avec les groupes de producteurs.
Donc, tout d'abord,
concernant la vente aux titulaires d'épiceries, je vais vous soulever trois
premiers enjeux qui consistent à harmoniser
un peu ce que les producteurs ont le droit de faire avec leur permis, avec ce
qu'il leur serait permis de vendre
dans le réseau des épiceries. Donc, actuellement, le permis artisan, il permet
la fabrication d'alcool jusqu'à 22,9 %.
Et, dans le projet de loi, on limite à 16 % ce qui peut être vendu dans
les épiceries. Donc, la plupart des produits à base d'érable, de miel ou de petits fruits, ils se situent entre
16 % et 20 %, donc c'est une classe de produits qui se sent
exclue de ce projet de loi, et ça serait important que cette catégorie-là de
produits de spécialité soit inclue dans le projet
de loi. D'ailleurs, dans le cas des petits fruits, ça fait ressortir le fruit,
le fait que ces produits-là sont souvent en haut de 16 %. Donc, ça
fait partie des demandes, de pouvoir harmoniser à ce qu'il est possible de
faire dans les conditions de permis, la vente d'alcool à plus de 16 %.
On demande aussi à ce
que la fortification à l'aide d'alcool neutre soit permise. Actuellement, dans
le projet de loi, on parle de produits
fermentés seulement. Encore là, dans le cas des alcools de petits fruits,
d'érable et de miel, les produits sont souvent fortifiés. On me dit que
c'est pour conserver le caractère fin de ces alcools et de faire ressortir le fruit ou le goût de l'érable. Donc, ça serait
important que, pour assurer que toute la gamme des produits artisans
soit disponible en épicerie, on permette la fortification de ces produits-là.
Il
y a aussi l'ajout de produits fermentescibles qui a été identifié. On a
identifié des produits qui étaient déjà sur le marché produits par des titulaires de permis artisan qui utilisent des
végétaux tels que la rhubarbe ou des moûts de céréales. Et, dans le projet de loi, on identifie les
fruits, l'érable et le miel, donc il semble qu'il y a des produits qui ont été
oubliés et qui sont actuellement disponibles sur les marchés. Donc, il ne
faudrait pas que la loi restreigne l'innovation de ces artisans-là, qui sont
créatifs puis qui ont déjà des marchés pour ces produits-là.
C'est sûr, comme
plusieurs groupes l'ont mentionné ce matin, on souhaite aussi que l'inscription
du cépage ou du millésime soit permise. C'est vraiment une réelle valeur
ajoutée. Puis parfois, même en ayant l'indication du cépage ou du millésime, on peut avoir une indication sur les caractères
organoleptiques du produit, donc c'est quelque chose qui est important. Puis on se demande aussi pourquoi les
producteurs devraient tenir deux étiquettes distinctes pour un même produit, dépendamment s'il est vendu à
l'épicerie ou à la ferme. Donc, le consommateur, il est curieux, il est
de plus en plus informé, donc on doit lui donner l'information qu'il demande.
Ensuite, ça aussi, ça
a été discuté, de pouvoir accéder au réseau des épiceries pour les entreprises
de plus petite taille ou en région éloignée.
Ça peut être un enjeu de pouvoir regrouper certains volumes ou certaines
commandes avec d'autres producteurs. Donc,
ce qu'on propose, c'est de permettre le regroupement en coopérative des
activités de distribution pour le
réseau des épiceries ou en coopérative. C'est le cas actuellement dans les microbrasseries,
il y a des coopératives qui existent
pour distribuer dans le réseau des épiceries. Donc, c'est un modèle qui
pourrait être étudié. Puis d'ailleurs,
pour les spiritueux, on permet la possibilité de regrouper en coopérative pour
la fabrication et l'embouteillage. Bien, c'est quelque chose qui a été
demandé par les autres producteurs d'alcool aussi. Donc, si on le permet pour
les spiritueux, ça serait peut-être
intéressant de voir si on peut l'élargir aux autres boissons alcooliques, que
ça soit la mise en commun de matériel
d'embouteillage, de filtration et même de distribution, de mise en marché des
produits. C'est quelque chose de commun en agriculture, là, la
coopérative d'utilisation, de mettre en commun certains équipements, donc c'est
quelque chose qu'il pourrait être intéressant d'étudier.
• (17 h 20) •
On demande aussi,
actuellement, pour les permis pour tous les produits qui sont artisans, qu'ils
soient vendus au restaurant ou à la ferme,
qu'il faut qu'il y ait
un autocollant qui est numéroté sur chaque bouteille. Les autocollants
sont fournis par la RACJ. Et je peux vous dire que ça demande beaucoup de
manutention pour les producteurs parce que, vu
que c'est des autocollants numérotés qui se suivent, il faut qu'ils soient mis manuellement.
Donc, vous imaginez, demain, si on
ouvre la porte à 8 000 points de vente, ça serait intéressant de trouver une façon de contrôler la traçabilité. On n'est pas
contre le contrôle de ces produits-là, mais de trouver peut-être une façon plus
adéquate, plus efficace de contrôler le suivi des produits.
Au niveau de la distillerie
artisanale, c'est sûr qu'on a identifié que c'était une nouvelle avenue intéressante pour mettre en valeur les
produits agricoles, de permettre leur distillation. On salue cette
possibilité-là. Par contre, on voit que, dans la vente des spiritueux, il n'a pas été prévu la vente directe aux
restaurants et aux bars, alors que tous les produits artisans ont accès à ça depuis quelques
années. Donc, c'est des partenaires qui sont privilégiés déjà des
produits artisans. Donc, d'ajouter les spiritueux à la liste des
produits qui pourraient être en vente directe, ce serait une piste à retenir.
Aussi, pour
encourager la production d'alcool qui serait de provenance québécoise, je vous
ai parlé tantôt de fortification. Donc, les
produits qui sont fortifiés ont accès à des alcools neutres, puis en ce moment
les producteurs doivent l'acheter via
la SAQ, puis on n'a pas toujours l'information sur la provenance ou c'est souvent de l'alcool
qui vient de l'extérieur du Québec.
Donc, ça serait intéressant de permettre à ce qu'un artisan qui distille
puisse vendre à un artisan qui a besoin d'alcool pour fortifier son
produit, donc avoir un produit qui est encore plus 100 % québécois, de
permettre la fabrication d'alcool fortifié à partir d'alcool distillé au Québec
par des distillateurs artisans.
Peut-être d'autres
éléments qui touchent un peu plus la RACJ, mais qui vont probablement découler
de vos recommandations suite au projet de loi. C'est sûr qu'il y a
une directive qui permet l'extension du lieu de vente dans les foires,
les expositions et les marchés publics, et cette directive-là, elle est
renouvelée à chaque année de façon un peu éphémère.
C'est quelques jours avant que les producteurs savent, donc ça
rend la planification un peu difficile des ventes. Donc, ce
qu'on demanderait, c'est d'assouplir et de reconduire de façon permanente cette
directive-là, par exemple pour plusieurs années, pour au moins planifier un peu
mieux les ventes de ces produits.
Il y a
aussi le transport des produits lors d'une vente en ligne. Je pense que ça a
été aussi mentionné. Actuellement, la
RACJ permet la vente en ligne, mais le transport n'est pas permis, donc le
consommateur doit venir lui-même chercher les produits à la ferme — ce
qui correspond, finalement, à une vente à la ferme — ou
le producteur ne peut pas livrer en utilisant
un service de messagerie. Donc, on aimerait ça, faciliter ces ventes-là qui
sont déjà populaires, de façon logique. La SAQ
l'utilise, elle fait même du service à domicile maintenant, depuis quelque
temps, avec son service.
Ensuite,
bon, il y avait une demande aussi de pouvoir élargir la gamme
de produits offerts à la propriété pour un producteur qui ne fabrique pas du vin, par exemple, mais qui a un
permis artisan de cidre, mais qui pourrait vendre les produits de son
voisin pour compléter sa gamme de produits, donc de permettre la vente
complémentaire de produits artisans par un autre titulaire de permis artisan.
Ensuite, pour la
Régie des alcools, comme je vous disais, c'est ça, les producteurs sont tenus
de transmettre mensuellement à la RACJ des rapports sur les données, sur l'inventaire de
leurs produits. Ces données-là n'ont jamais été compilées jusqu'à ce
jour, donc c'est difficile d'avoir des retombées économiques sur les produits
artisans. Donc, on souhaiterait que le gouvernement demande à la RACJ de
compiler puis de rendre publiques ces données-là pour au moins avoir une mesure
de ce qui se passe au niveau des ventes de boissons alcoolisées artisanales.
Et
finalement la RACJ, aussi, c'est l'organisme qui encadre, surveille et applique
tout ce qui est avec la production et
la vente des alcools, les permis. Par contre, on sait qu'elle a des ressources
humaines limitées. Donc, ce qu'on souhaiterait,
c'est que ces ressources humaines et financières soient allouées pour qu'elle
puisse jouer son rôle de gardien du contrôle
de la conformité et de la traçabilité des produits. Dans les conditions de
permis artisan, c'est mentionné, la RACJ doit recevoir des échantillons pour analyser la qualité des produits.
Donc, si la RACJ a les ressources pour le faire, elle a déjà le mandat
de le faire, c'est dans sa mission.
Puis
on terminerait en vous disant un petit mot sur la SAQ. La SAQ, ça doit demeurer
le pivot central dans la mise en marché des alcools. Elle a une
expertise commerciale, on l'a su tout à l'heure avec M. Brunet, qui a fait
une belle démonstration de toutes les
activités que la SAQ fait pour les produits artisans. Par contre, pour assurer
un accès privilégié puis que la SAQ
poursuive dans le même sens, on souhaite que ça soit inscrit dans sa mission de
faire la promotion des alcools du
Québec, un peu comme c'est inscrit dans la mission de la LCBO chez nos voisins
ontariens et qui a fait ses preuves aussi dans les ventes de vins
ontariens. Donc, voulez-vous faire la conclusion?
M. Groleau
(Marcel) : Non, vas-y.
Mme
St-Georges (Catherine) : Oui. Alors, bien, c'est ça,
comme je vous disais, le projet de loi, il présente toutes sortes d'opportunités de diversification, d'élargissement aussi des canaux
de mise en marché pour les
producteurs. Je pense que les
producteurs attendaient ce projet-là depuis longtemps. Le gouvernement a
répondu aux attentes. C'est un projet de loi qui est pertinent, mais nécessite peut-être quelques petits
ajustements, quelques mesures transitoires aussi pour que les
producteurs puissent saisir toutes ces opportunités-là de marché. Merci.
Le Président
(M. Bernier) : Merci, Mme St-Georges.
M. Groleau, ça va?
M. Groleau
(Marcel) : Ça va. C'est complet.
Le Président
(M. Bernier) : M. le ministre, la parole est à vous.
M. Leitão :
Très bien. Merci, M. le Président. Mme St-Georges, M. Groleau,
merci beaucoup d'être là. Quelques questions.
Vous avez parlé, un peu vers la fin de votre présentation, madame, sur les
ventes en ligne. Pouvez-vous élaborer un peu plus là-dessus?
Le Président
(M. Bernier) : Mme St-Georges.
Mme St-Georges (Catherine) : Bien, on a déjà eu des avis d'interprétation à la
RACJ, qui permet la vente en ligne parce que c'est une transaction
directe entre un consommateur et un producteur. Par contre, c'est vraiment au
niveau du transport que ce n'est pas permis.
Puis je pense qu'il y en a qui l'ont dit ce matin, qu'ils utilisent quand même
les services de messagerie. Donc, ça
se fait, ce n'est pas mis sur la place publique, mais à la limite, si le
consommateur envoie lui-même le transporteur... Des fois, il faut savoir
interpréter aussi, là. Si la vente, elle est conclue, elle est directe
entre le consommateur et le producteur, bien, il faut pouvoir permettre que le
produit se rende d'une façon ou d'une autre.
M. Leitão :
Très bien, mais, dans un contexte, donc, de contrôle de qualité, pour s'assurer
qu'on continue de bien contrôler la qualité, est-ce que vous pensez que
la multiplication ou l'augmentation des ventes en ligne, ça pourrait
compromettre la qualité ou pas nécessairement?
M. Groleau (Marcel) : Moi, en tant que consommateur, le consommateur
qui achète en ligne habituellement achète un produit qu'il connaît déjà,
qu'il a déjà dégusté auparavant, donc il connaît aussi l'artisan qui fabrique
ce produit-là. Donc, oui, c'est un achat en
ligne, mais ce n'est pas un achat à l'aveugle. Et le vigneron a intérêt aussi à
livrer la qualité du produit qui est attendue par le client. Donc, je ne crois
pas que de faciliter le transport du produit vers le client puisse entraîner quelque enjeu que ce soit de qualité, là, si
c'est bien fait, naturellement. Puis c'est dans l'intérêt des deux que
ce soit bien fait.
Mme St-Georges (Catherine) : Puis, comme je disais aussi tout à l'heure, dans
les conditions qui sont édictées par la
RACJ, les conditions qui viennent avec le permis artisan, que ce soient les
vins, le cidre, les petits fruits, les producteurs sont tenus d'envoyer des échantillons. Ils le font
en cours de production, ils le font une fois que le produit est prêt à
être commercialisé aussi puis ils subissent des analyses de qualité. Puis ces
renseignements-là sont censés être envoyés à la
RACJ sur le produit prêt à être commercialisé. L'étiquette doit avoir aussi
passé par le laboratoire. Donc, c'est déjà une exigence des permis.
Le Président
(M. Bernier) : O.K. M. le ministre.
M. Leitão :
Il semble y avoir une certaine unanimité, et vous l'avez mentionné aussi, en
termes, donc, de traçabilité, les règles concernant le cépage et les
millésimes, les règles actuelles ne semblent pas être très utiles.
Le Président
(M. Bernier) : M. Groleau.
M. Groleau
(Marcel) : En fait, comme vous le savez, pour ces produits-là, le
millésime, le cépage, c'est des informations recherchées par les consommateurs,
et c'est important pour développer aussi chez le consommateur des aptitudes à bien reconnaître les produits qu'il
consomme. Alors, nous, on croit que c'est important que ce soit possible
d'afficher ces informations-là sur le produit et de pouvoir valoriser le produit
avec ces informations-là.
Le Président
(M. Bernier) : Merci.
M. Leitão :
Bien. On a aussi parlé, ce matin et cet après-midi, donc, de qu'est-ce qui
définit un produit québécois 100 %,
85 %-15 %. Comment est-ce que vous voyez, donc, la possibilité qu'on
inclue dans le projet de loi la possibilité qu'un producteur artisanal
puisse avoir un 15 %, disons, de marge de manoeuvre, qu'il puisse emmener
le produit de l'extérieur? Donc, votre définition de...
Le Président
(M. Bernier) : M. Groleau.
• (17 h 30) •
M. Groleau
(Marcel) : Oui. Tout d'abord, je ne suis pas un spécialiste des
assemblages, mais, pour moi, ce qui est important, et Mme St-Georges
pourra compléter, mais c'est que l'information qui apparaît sur l'étiquette
soit conforme à ce que le produit annonce. Alors, si l'origine du produit... et
sa traçabilité est essentielle, donc, si c'est un produit 100 % québécois
et que c'est indiqué, et c'est nécessaire que ce soit le cas... Quant aux
assemblages, j'ai compris en écoutant
les mémoires précédents qu'on parle d'assemblage de cépages et non pas de
provenance de différents pays. Et, en
ce sens-là, il m'apparaît tout à fait logique que ce soit le cas. Maintenant,
est-ce que ça doit être 100 % québécois? Moi, les consommateurs québécois souhaitent avoir des
produits 100 % québécois, je pense que ça peut être une marque de
commerce intéressante pour nos artisans et aussi une façon de valoriser le
produit ou de le distinguer par rapport à ce qui est offert. Donc, peut-être
Catherine peut compléter.
Le Président
(M. Bernier) : Mme St-Georges.
Mme St-Georges (Catherine) : Oui, en fait, je vais revenir aux conditions de
permis. Normalement, la condition de
permis artisan, c'est : 100 % de la ferme, cultivé par le producteur.
Il y a eu des exceptions, dans le temps, de faites, notamment pour le
secteur des vins pour des questions de disponibilité de raisin à ce moment-là.
Moi, je suis d'accord
avec ce que M. Groleau dit sur l'information qui est transmise au
consommateur. Puis la preuve aussi, c'est
que la plupart des associations de producteurs se sont lancées dans des
certifications aussi pour amener une traçabilité de plus, une tierce
partie qui vient garantir ce qui est écrit sur l'étiquette aussi. Moi, je crois
beaucoup aux certifications aussi pour venir appuyer sur des éléments comme la
provenance des produits.
Le Président
(M. Bernier) : Merci.
M. Leitão :
Un point qui nous a été amené par certaines des personnes que nous avons
rencontrées, c'est, surtout pour les
artisans les plus petits ou ceux qui commencent, d'avoir cette possibilité
d'aller chercher 15 % à l'extérieur, du moins initialement, ça
pourrait être une façon de leur donner un petit coup de main.
M. Groleau (Marcel) : 15 %
à l'extérieur de la ferme ou 15 % à l'extérieur du Québec?
M. Leitão : À l'extérieur du
Québec.
M. Groleau
(Marcel) : À l'extérieur du
Québec, bon. Alors, en tout cas, moi, personnellement, j'aimerais mieux laisser les vignerons et les artisans se prononcer
sur cette question-là, mais une chose qui est certaine, ce que
j'entends, c'est que le 15 %, nécessairement, ça ne doit pas être
15 % de la production du vignoble qui se retrouve 100 % dans une
bouteille qui est commercialisée. Si on parle de 15 %, il faut que ce soit
vraiment 15 % dans chaque bouteille. Maintenant,
si c'est possible d'avoir 100 % de... Nous, ce qu'on propose, c'est
100 % du produit de la ferme en question, et je crois que c'est ce
que les vignerons aussi souhaitent pouvoir offrir au consommateur.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Très bien. Oui, peut-être une dernière question avant de passer la parole à mon
collègue. Je vous amène dans un autre
ordre d'idées complètement. Puisqu'on parle, dans le projet de loi n° 88,
bien sûr, de promotion de boissons alcooliques,
produits québécois, produits du terroir, etc., on entend aussi un son de cloche
de l'autre côté qu'il faudrait qu'on fasse attention de ne pas faire une
très grande promotion des boissons alcooliques pour des raisons de santé publique.
Où est-ce que vous vous situez dans ce débat-là?
Le Président (M. Bernier) :
M. Groleau.
M. Groleau (Marcel) : Moi, je
pense qu'on peut faire la promotion des produits, des boissons artisanales québécoises tout en faisant la promotion d'une
consommation intelligente d'alcool. Je pense que la relation des
Québécois avec les boissons alcoolisées a
évolué beaucoup depuis 20, 25 ans, et on consomme beaucoup plus de vin
maintenant qu'on en consommait il y a
25 ans, mais on le consomme mieux, puis on le déguste, puis on a appris à
connaître davantage de produits.
Donc, moi, je ne vois pas de conflit à faire à la fois la promotion des vins du
Québec ou des alcools du Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Trois-Rivières.
M. Girard : Je vais vous amener
complètement dans un autre registre. On voit de plus en plus un défi de transfert intergénérationnel au niveau agricole.
On a des agriculteurs âgés qui quittent. Le projet de loi, en amenant
plus de culture de vignes, de petits fruits
et en facilitant la production de ce genre de produits, est-ce que ça peut
avoir un impact sur la facilité d'attirer des jeunes vers l'agriculture
ou de faire de l'agriculture différemment, de faire différents produits? Est-ce
qu'au Québec ça peut avoir un impact à long terme à ce niveau-là?
M. Groleau
(Marcel) : Absolument, parce
qu'actuellement la façon dont la vente est permise est très restrictive.
Puis, bien que je félicite le règlement qui
a permis, là, d'accompagner la promotion des vins québécois dans la SAQ,
il reste que c'est peu par rapport aux
besoins du secteur. Et, si on regarde l'Ontario, qui a accompagné son secteur
de façon beaucoup plus importante que le Québec, le secteur et
l'industrie se sont développés. Et, plus on va permettre la commercialisation et plus on va réussir à mieux
rentabiliser les entreprises agricoles, plus on va faciliter leur
transfert aux générations suivantes et même le démarrage de nouvelles
entreprises.
Alors, nous, ce qu'on croit, c'est qu'on est au
début d'une nouvelle industrie, d'un nouveau secteur qui va nécessairement prendre de l'expansion dans les
prochaines années si on lui permet d'accéder plus facilement aux
marchés.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Girard :
Parce qu'on avait M. Courville, tout à l'heure, qui nous mentionnait,
justement, en cultivant du foin versus de la vigne, la quantité
d'emplois, la quantité de revenus, etc., générés par cette même terre agricole.
Donc, il y a un potentiel intéressant, là, pour l'agriculture au Québec.
Le Président (M. Bernier) : C'est
beau, M. le député?
M. Groleau (Marcel) : Moi, je dirais qu'on fait plus de foin à cultiver
la vigne, mais qu'on doit aussi cultiver du foin.
Le Président (M. Bernier) :
Ça prend les deux au Québec.
M. Groleau (Marcel) : Oui, ça
prend les deux, mais c'est sûr qu'à l'acre ou à l'hectare, le rendement à l'hectare en revenus bruts, et en revenus nets, et
en impact dans l'économie est beaucoup plus grand dans un vignoble que dans une prairie. Et en plus ce n'est souvent pas dans les
terres les plus fertiles, nécessairement, qu'on retrouve ces vignobles-là. Alors, c'est intéressant aussi parce
que ça développe une partie de notre ruralité qui autrement ne serait
pas occupée par des productions avec des rendements aussi élevés.
Mme St-Georges (Catherine) : Puis
c'est des entreprises qui sont toutes actives en agrotourisme aussi, qui
reçoivent des gens à la ferme, qui éduquent le consommateur sur la culture
aussi de ces produits-là.
Le Président (M. Bernier) :
Et c'est très attractif sur le plan touristique.
Mme St-Georges
(Catherine) : Oui.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão :
Peut-être une dernière question, M. le Président. Dans la question de la
définition — là, vous
allez être un peu étourdi, là, je vous amène ailleurs complètement, encore une
fois, on revient à la distillation — toute cette question qu'il y a autour de la définition de
distillation artisanale, les distillateurs urbains versus ruraux, quelle est
votre opinion là-dessus?
Le Président (M. Bernier) :
M. Groleau.
M. Groleau
(Marcel) : Bien, moi, je
crois que c'est deux catégories de distillateurs parce que le distillateur
qui utilise ses produits agricoles pour
produire un alcool a des coûts, a des charges beaucoup plus importantes et il
ne peut pas nécessairement profiter des fluctuations des prix sur le
marché des différents produits offerts pour arriver à fabriquer de l'alcool. Lui, il est contraint à utiliser son
produit qu'il doit produire dans des conditions quand même assez
difficiles au Québec, avec les hivers qu'on
a. Donc, je pense qu'il y a lieu de maintenir une considération et de faire une
distinction pour les producteurs agricoles qui distillent leurs produits pour
fabriquer des alcools.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Ça va?
M. Leitão : Merci.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Berthier.
M. Villeneuve : Merci,
M. le Président. Bonjour, bonjour à vous deux. Écoutez, disons que le
casse-tête commence à bien se compléter, en
tout cas pour ma part. Mais je vais quand même revenir sur certaines
discussions que vous venez d'avoir et
je parle entre autres du 85 %-15 %. Et là on a compris tantôt, par
l'Association des viniculteurs négociants
du Québec, que, pour eux, 85 %-15 %, ça veut dire des produits du
Québec, uniquement des produits du Québec. On a eu ce matin
l'Association des vignerons du Québec, qui nous ont dit que — puis
vous avez échangé là-dessus tantôt — pour démarrer ou pour une entreprise
émergente, question de disponibilité de cépages, de raisin, est-ce qu'il
n'y a pas lieu de pouvoir permettre un 15 % d'un produit qui serait de
l'extérieur du Québec? En tout cas, c'est ce que j'ai cru comprendre.
Par ailleurs,
par ailleurs, il faut aussi tenir compte du fait que nous avons un produit de
signature présentement, produit du
Québec, et effectivement comment le consommateur réagirait s'il s'apercevait
finalement que, dans sa bouteille, ce n'est pas entièrement produit du
Québec.
Je sais que
vous avez consulté beaucoup. Et bravo pour votre mémoire, il y a une mine de
propositions là-dedans assez intéressantes, et on aura l'occasion de s'y
pencher. Mais, dans vos consultations, vous avez abordé ce point-là, j'imagine
bien, avec les gens. Et comment...
Le Président (M. Bernier) :
Mme St-Georges.
• (17 h 40) •
Mme St-Georges (Catherine) : Bien,
c'est un enjeu qui touche vraiment les vignerons, donc on a laissé les vignerons définir leurs éléments. Puis, comme je
disais tout à l'heure, les conditions de permis édictent quand même qu'il faut que ça soit la matière première qui est cultivée entièrement par le
producteur sur ses terres. Les vignerons ont fait la démonstration qu'il y avait des problèmes de
disponibilité. Ça peut être une directive qui permet, pour les premières années
d'une installation, par exemple, d'avoir accès à des raisins à l'extérieur, puis, une fois que l'entreprise est bien établie, bien, que ça
devienne 100 % de sa ferme.
On n'a pas vraiment évalué avec les vignerons,
là, la notion de provenance du 85 %-15 %. Mais c'est sûr que je pense que le consommateur est en droit d'avoir
l'information. Quand on dit un produit du Québec, quand on pense à un
cidre, un alcool de petits fruits, un alcool d'érable, bien, c'est 100 %
cultivé par le producteur.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Villeneuve :
Merci, M. le Président. Parce qu'il faut comprendre que, dans le projet de
loi que l'on a devant nous, on ne parle même
pas de 85 %-15 %, là, alors c'est pour ça que je pense que la
question est éminemment importante et il va falloir y répondre. Évidemment, c'est un projet de
loi, donc assurément qu'il y aura une présentation ultérieure d'un projet de loi bonifié, comme on
dit, et on verra les bonifications qui seront proposées par le
gouvernement.
Le transport,
certains nous disent qu'il serait préférable que tout passe par la SAQ,
question d'un contrôle. On parle aussi,
évidemment, des différentes analyses qui pourraient être faites, et là, dans le
projet de loi, on parle ici plus d'une analyse qui pourrait être faite
par un laboratoire indépendant, alors que la SAQ dispose déjà de tout cela.
Je voudrais savoir
peut-être de votre part... Parce que j'ai compris un peu ce que vous disiez
tantôt, les gens, par messagerie maintenant,
même la SAQ le fait, livrent à domicile. Question de contrôle, dans vos
consultations, est-ce que vous avez
abordé cet aspect-là de contrôle, justement, des quantités d'un vignoble? Parce
que, tantôt, certains nous disaient
qu'il pourrait y avoir un deux pour un et se retrouver avec une double quantité
potentielle. C'est une hypothèse, bien
sûr, mais faisable, j'imagine. Alors, question de contrôle, est-ce que ça a été
abordé au niveau de la sécurité du contrôle?
Le Président
(M. Bernier) : Mme St-Georges.
Mme St-Georges (Catherine) : Bien, c'est sûr qu'on a fait la proposition
d'allouer les ressources financières à la RACJ, qui est le gardien du contrôle de la traçabilité et de la qualité
des produits. Il y a des timbres qui existent, qui sont numérotés, il y
a des registres mensuels qui sont envoyés par tous les artisans sur
l'inventaire, l'embouteillage, les produits
qu'ils ont encore en stock. Il y a eu plusieurs modèles qui ont été proposés.
Je vous ai fait référence tout à l'heure à la coopérative qui est utilisée pour les microbrasseries. Il y a la SAQ,
qui est distributeur autorisé, qui pourrait jouer ce rôle-là s'il y a des artisans qui sont intéressés.
Je pense aussi, dans le cas des cidres, les producteurs artisans ont
accès à un permis qui est le permis de
fabricant pour la livraison directe en épicerie. Bien, eux, ils font
directement la livraison, ils font faire leurs analyses de qualité par
le laboratoire SAQ de façon volontaire, puis il n'y a jamais eu de problèmes de contrôle, là. Je pense qu'il faut aussi faire
confiance aux artisans sur la qualité des produits qui vont être sur les
marchés.
M. Villeneuve :
Donc, ils livrent directement, c'est ça que vous me dites, aux points de vente,
c'est ça?
Mme
St-Georges (Catherine) : Oui. Avec un permis de
fabricant, par contre, qui est le permis industriel. Mais la plupart des cidriculteurs qui ont été chercher
ce permis-là, ils le font avec leurs propres pommes, selon les mêmes
normes qu'un produit artisan. C'est juste qu'ils élargissaient leurs
possibilités de mise en marché en vente à l'épicerie avec ce permis-là.
M. Villeneuve :
Ça va être tout pour moi, M. le Président. Merci.
Le Président
(M. Bernier) : Merci. M. le député de Granby.
M. Bonnardel :
Merci, M. le Président. J'ai un point dans vos demandes, le point 9,
de permettre la vente d'alcool neutre distillé par un artisan à un autre
artisan. Donnez-moi le portrait un petit peu, là. Bon, j'ai cru comprendre, là,
qu'il y a de l'achat, à l'extérieur du Québec, d'alcool neutre pour faire des
gins...
Mme St-Georges
(Catherine) : Mais ça passe par la SAQ, par exemple.
M. Bonnardel :
O.K. Donc, ma question : Est-ce qu'il y a des alcools neutres qui sont
produits au Québec présentement? Il y en a?
Mme St-Georges
(Catherine) : Oui. Bien, alcools neutres... eaux-de-vie.
M. Bonnardel :
Eaux-de-vie? O.K.
Mme St-Georges
(Catherine) : Oui, qui peuvent être utilisées dans la fortification
d'un produit artisan.
M. Bonnardel :
O.K., mais qui passent nécessairement par la SAQ?
Mme St-Georges (Catherine) : Oui.
M. Bonnardel :
O.K., O.K. Quand vous dites, à votre point 5, «permettre le regroupement
en coopérative des activités de
fabrication et de distribution», pouvez-vous me donner un exemple ou nous
donner un exemple, qu'est-ce qui pourrait être ajouté puis
complémentaire à la loi là-dessus?
M. Groleau
(Marcel) : Quand on a rencontré les gens, c'est que, bon, plusieurs
artisans sont quand même de petite taille
et, s'ils peuvent se regrouper ensemble, former une coopérative pour distiller
et permettre à cette coopérative-là de
distribuer leurs produits, bon, on diminue leurs coûts d'opération et on
améliore les possibilités de rentabilité. Donc, le principe, c'est celui-là,
simplement, donc. Et ça, c'est très commun dans le milieu agricole, là, la mise
en commun de machinerie ou de main-d'oeuvre pour, justement, diminuer les coûts d'opération et augmenter la rentabilité des entreprises.
M. Bonnardel : Donc, ces coopératives ne pourraient seulement
distribuer, embouteiller puis mettre en marché que les alcools qu'elles
transforment?
Mme
St-Georges (Catherine) :
Oui, mais on aimerait ça, l'élargir pas juste aux spiritueux. C'est une
demande qui vient des producteurs artisans
de, par exemple, mettre en commun un système
de cannage, là. Les cannes de cidre sont très populaires. C'est un équipement qui est très coûteux. Bien, si on
pouvait créer en coopérative un système
d'embouteillage, par exemple, ou de créer une coopérative de distribution des
produits qui va développer les ventes pour plusieurs producteurs qui pourraient être dans la même région, d'avoir une
ressource qui est sur la route, puis qui distribue, puis qui représente
un certain nombre de producteurs qui seraient tous membres de la coopérative...
Un peu le même principe que ce qui est
proposé actuellement dans le projet de loi, c'est des permis artisans qui se
regroupent dans une coop de producteurs qui ont tous un permis artisan,
mais qui jouent un peu le même rôle, là.
M. Bonnardel :
O.K. À la page 5, là, quand vous parlez d'exemples... Bien, je vous
demande des exemples de boissons fermentées ou fortifiées, là.
Pouvez-vous me donner des exemples de ces boissons que vous...
Mme
St-Georges (Catherine) :
Bien, les vins de fraise, les vins d'érable, il y a des produits de miel. Je n'ai pas de noms officiels en tête, là, mais ce qu'on me dit,
c'est que la plupart des produits d'érable, de petits fruits et de miel
sont en haut de 16 %, puis c'est sûr qu'il y a ajout d'alcool, là, pour
obtenir ces produits-là.
M. Bonnardel : Est-ce
qu'on devrait permettre ces alcools au-dessus de 16 %?
Mme St-Georges (Catherine) : Oui,
c'est ce qu'on demande. Puis, même en analysant les projets de loi, actuellement, ce qu'on remarque, c'est qu'un
permis d'épicerie peut s'approvisionner auprès d'un fabricant en vins,
donc le permis de fabricant, des boissons de
petits fruits jusqu'à 20 %. On n'en a pas identifié sur le marché. Il n'y
a peut-être pas de demande actuellement, mais ce privilège-là serait
peut-être déjà possible pour les fabricants, donc on aimerait que les artisans
aient accès pour ce qui est de 16 % à 20 %, minimalement.
M. Bonnardel : O.K., bon
point. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) :
Ça vous va, M. le député de Granby?
M. Bonnardel : Oui.
Le
Président (M. Bernier) : M. Groleau, Mme St-Georges, merci infiniment de votre participation à la Commission des finances publiques.
Donc, avant de lever les travaux, je remercie
tous les groupes qui se sont présentés à la commission cet après-midi,
les parlementaires qui ont participé, M. le ministre, les membres des deux oppositions, le personnel de l'Assemblée
nationale qui nous accompagne dans nos travaux, le personnel du ministère également
et le personnel des cabinets respectifs.
Je lève la
séance, et la commission ajourne ses travaux au lundi 15 février 2016, à
14 heures, où elle poursuivra les consultations particulières et
auditions publiques sur le projet de loi n° 87, Loi facilitant la
divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics. Je lève la
séance.
(Fin de la séance à 17 h 48)