(Quinze heures quarante-huit
minutes)
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Donc, bon après-midi à tous. Bienvenue à la Commission des finances publiques.
Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
finances publiques ouverte. Et je demande, bien sûr, à toutes les personnes
présentes d'éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie afin de procéder à des consultations
particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 87, Loi
facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Bonnardel (Granby) est remplacé par M. Caire
(La Peltrie).
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Donc, je souhaite la bienvenue à tous les parlementaires. Bienvenue, M. le ministre. On veut vous féliciter
pour votre nomination. Vous êtes maintenant avec nous à la Commission
des finances publiques, on est heureux de vous recevoir.
M.
Hamad : J'ai
compris qu'il y a un consentement pour le député de La Peltrie?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Il y a consentement.
M.
Hamad : ...remplacer
le député de...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Tout a été annoncé, tout est correct, il n'y a pas de problème.
M.
Hamad : Ah! O.K.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Avant de débuter les remarques préliminaires, j'ai
besoin également d'un consentement... j'ai besoin de deux consentements,
le premier pour permettre à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques de faire des remarques
préliminaires pour environ une minute. Consentement? Consentement. Et pour que
nos travaux se terminent vers 18 h 15, consentement? Consentement.
C'est bien.
Voici l'ordre du jour de cet après-midi. Nous allons débuter par les remarques préliminaires, et par
la suite nous entendrons la Protectrice du citoyen et le Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec. Ce soir, nous recevrons la Fédération
professionnelle des journalistes du Québec, la Fédération des cégeps et la
Confédération des syndicats nationaux.
Alors,
bienvenue aux gens du Protecteur du citoyen, Mme Raymonde Saint-Germain et
M. Jean-François Bernier, ainsi que les gens qui vous accompagnent.
Bienvenue à la commission, on est très heureux de vous accueillir.
Remarques préliminaires
Alors, sans plus tarder, M. le ministre, vous
avez environ six minutes pour vos remarques préliminaires.
M. Sam Hamad
M.
Hamad :
Merci, M. le Président. Très heureux de vous voir. J'ai entendu parler que vous
êtes un excellent président, neutre, pour faire avancer les dossiers.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Ah! On pourra juger ça à la fin.
• (15 h 50) •
M.
Hamad : Alors,
chers collègues, très heureux d'être ici. Je vais briser la glace aujourd'hui,
puisque ces consultations particulières sur le projet de loi n° 87 sont
les premières auxquelles je participe à titre de président du Conseil du
trésor. C'est dans un climat d'ouverture que j'entame ces consultations sur la
Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles
dans les organismes publics. Je souhaite que les échanges que nous aurons au
cours de ces consultations permettent de bonifier ce projet de loi, s'il
y a lieu.
L'objectif de
ce projet de loi est de permettre à toute personne de divulguer des actes
répréhensibles commis ou sur le point
d'être commis au sein d'un organisme public tout en assurant la protection des
divulgateurs. Une personne qui a le courage de dénoncer des actes
répréhensibles doit pouvoir bénéficier d'une protection contre toute mesure de représailles. Le projet de loi n° 87 répond à
l'une des recommandations de la commission sur l'octroi et la gestion
des contrats publics
dans l'industrie de la construction à l'effet que les lanceurs d'alerte
devraient compter sur une meilleure protection.
Les ministères et organismes, les universités, les sociétés d'État, les
établissements de santé et les commissions scolaires sont ciblés par ce projet de loi. Bref, toute personne témoin
d'un acte répréhensible commis ou sur le point d'être commis au sein
d'un organisme public pourrait le signaler sans crainte de représailles.
L'intention est de protéger ces personnes si
elles dénoncent un acte répréhensible. La définition de ce qu'est un acte
répréhensible implique une contravention à une loi du Québec, une loi fédérale
applicable au Québec ou un règlement applicable
au Québec, un manquement grave aux normes d'éthique et de déontologie, un usage
abusif des fonds ou des biens d'un
organisme public, un cas grave de mauvaise gestion au sein d'un organisme
public, le fait de porter gravement
atteinte ou de risquer de porter gravement atteinte à la santé ou à la sécurité
d'une personne ou à l'environnement soit par un acte ou une omission, le
fait d'ordonner ou de conseiller à une personne de commettre un acte
répréhensible. Pour élaborer ce projet de loi, nous nous sommes inspirés des
pratiques mises de l'avant dans plusieurs provinces canadiennes, au
gouvernement fédéral et dans d'autres pays.
La
responsabilité de recevoir et de traiter les divulgations provenant des
employés et non-employés serait confiée au Protecteur du citoyen. Celui-ci aurait le pouvoir — je devrais dire plutôt «celle-ci» — d'enquêter mais aussi de faire
rapport de tout acte répréhensible à
l'organisme concerné, sans, évidemment, dévoiler l'identité du divulgateur.
Soulignons qu'en plus de détenir une
expertise en matière d'enquête, le Protecteur du citoyen jouit de
l'indépendance et de la connaissance nécessaires de l'administration
publique pour appliquer ce projet de loi.
Je tiens à préciser que le rôle du Protecteur du
citoyen serait complémentaire à celui de l'Unité permanente anticorruption. Dès qu'il soupçonne qu'une
dénonciation touche le champ de compétence de l'UPAC, le Protecteur du citoyen lui transmettrait le dossier. Et, si c'est
le cas d'autres corps de police ou d'autres cas, alors le Protecteur du
citoyen aura le choix de diriger l'enquête.
Le projet de
loi prévoit aussi une autre voie de dénonciation pour des employés du secteur
public, qui pourraient plutôt choisir
de faire une divulgation au sein de leur organisme. Ainsi, la plus haute
autorité administrative de chaque organisme public devra établir une
procédure facilitant la divulgation par les employés d'actes répréhensibles.
Ce projet de loi interdit toutes représailles à
l'encontre d'une personne qui fait une divulgation ou collabore à une
vérification ou une enquête menée à la suite d'une divulgation. La Loi sur les
normes du travail serait modifiée afin de
prévoir un mécanisme de protection pour les salariés à l'origine d'une
divulgation. Le pouvoir de traiter ultimement les plaintes à l'encontre
des mesures de représailles serait accordé au Tribunal administratif du
travail.
Ce projet de loi prévoit également qu'une
personne pourrait, dans certaines conditions, si elle a, par exemple, des motifs raisonnables de croire qu'un acte
répréhensible qui présente un risque grave pour la santé ou la sécurité
d'une personne ou pour l'environnement, procéder à une divulgation publique.
Dans le cas d'une divulgation publique, les renseignements doivent d'abord être
transmis à un corps de police ou au Commissaire à la lutte contre la
corruption.
Ce projet de
loi démontre la volonté du gouvernement de rétablir la confiance des citoyens
envers leurs institutions. Je réitère
le fait que c'est dans un esprit d'ouverture que j'aborde ces consultations, je
suis ici pour entendre les différents groupes
exprimer leurs commentaires avant l'étude détaillée de ce projet de loi.
J'aimerais d'ailleurs remercier les groupes de leur présence ainsi que les membres de la Commission des finances
publiques. Je suis convaincu que nous pourrons échanger de façon
constructive et fructueuse. Merci.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. le ministre, de
vos remarques préliminaires. J'invite donc maintenant le député de Gaspé
à faire ses remarques préliminaires. Vous avez 3 min 30 s
environ.
M. Gaétan Lelièvre
M. Lelièvre : Merci, M. le
Président. Je tiens d'abord à féliciter le ministre pour sa récente nomination
puis l'assurer ma meilleure collaboration comme critique au Trésor. Je tiens
également à saluer les autres membres de la commission
puis, M. le Président, vous assurer de ma franche collaboration pour la bonne
poursuite de nos mandats, on va essayer de continuer dans cette
direction-là.
Le projet de
loi n° 87 est un projet extrêmement important. On peut le qualifier déjà,
à la première lecture, d'un pas dans
la bonne direction, mais c'est sûr que les travaux vont nous alimenter dans
l'appréciation de ce projet de loi, qui est un enjeu des plus majeurs
pour notre société actuellement.
D'emblée, on
a du questionnement, du côté de l'opposition officielle, en regard notamment de
la portée du projet de loi. Est-ce
que ça va assez loin? Est-ce que des organismes ne sont pas visés? On croit que
oui. Donc, ça va être important de
faire le tour vraiment de cette question-là pour s'assurer que l'ensemble des
parties, l'ensemble des organisations qui méritent d'être visées par ce
projet de loi là soit couvert. Donc, ça va être une de nos préoccupations.
L'ex-ministre
responsable du dossier avait déclaré vouloir aller très loin en termes
d'amélioration, il était ouvert à des
suggestions. On souhaite que le nouveau ministre soit également ouvert à cet
effet-là, parce que c'est clair que nous allons avoir des bonifications à proposer. Donc, il y a beaucoup
d'attentes face aux éléments que nous allons proposer puis qui vont
sûrement être dans l'objectif ultime de bonifier ce projet de loi.
À première
vue, il existe également beaucoup de restrictions, à notre avis, si on veut
placer le Québec en tête des États
qui, je dirais, font vraiment un pas en avant, un pas majeur pour permettre aux
employés, permettre aux organisations, aux administrateurs de dénoncer
des situations inacceptables, illégales. On croit qu'on doit faire un pas de
façon beaucoup plus marquée pour bien se positionner. On a la chance
aujourd'hui, comme société, de faire le débat sur cette importante question, il ne faut pas manquer ce rendez-vous-là,
puis on doit vraiment le faire avec toute, je dirais, la discipline et
la rigueur requises.
Mais en tout cas les travaux ne font
que commencer. Ce qu'on vous garantit, c'est qu'on va être au rendez-vous,
comme parti officiel de la première
opposition, pour bonifier les travaux, puis on espère que... on se souhaite le
meilleur des résultats. Merci.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Merci, M. le député de
Gaspé, de vos remarques préliminaires. Je
veux souhaiter la bienvenue au député de La Peltrie — bienvenue, M. le député — comme porte-parole de la deuxième
opposition. Vous avez 2 min 30 s pour faire vos remarques.
M. Éric Caire
M.
Caire :
Merci, M. le Président. Bien, à mon tour de saluer l'arrivée du député de
Louis-Hébert à titre de président du Conseil
du trésor et l'assurer de ma proverbiale collaboration. Je suis convaincu que
nous ferons de grandes choses ensemble.
M.
le Président, le projet de loi n° 87, je vais reprendre les propos de mon
collègue, c'est un pas dans la bonne direction.
Et, si tant est que le ministre est effectivement ouvert, on essaiera de lui en
faire faire quelques autres, parce que, si le projet de loi, effectivement, va dans la bonne direction, je pense
qu'il y a dans le projet de loi des éléments qui devront être améliorés
ou qui devraient être améliorés si on veut vraiment se doter d'une protection
suffisante pour les sonneurs d'alerte. Je pense, entre autres, au domaine
municipal. S'il y a des enseignements à tirer de la commission Charbonneau, c'est que ce milieu-là a été durement
touché par la corruption, la malversation, et que des sonneurs d'alerte auraient été extrêmement utiles. Le domaine privé
aussi, M. le Président, parce qu'on l'a vu, notamment dans le rapport du
commissaire Lafrenière en informatique, de la collusion, de la corruption; dans
le milieu des nouvelles technologies ou des
technologies de l'information, il y en a. Et, bon, est-ce qu'il y en a dans le
secteur public? Est-ce qu'il y en a dans les entreprises privées qui collaborent avec le public? Je pense que des
sonneurs d'alerte seraient importants là aussi et devraient pouvoir bénéficier de la protection. Ce
n'est pas parce qu'on travaille pour une entreprise privée, quand on est
témoin de malversations ou d'actes
répréhensibles qui sont commis dans le cadre d'un mandat avec le
gouvernement, qu'on devrait être exclu de la protection. Au contraire, moi, je
pense qu'on aurait tout intérêt à les inclure dans cette protection-là, M. le
Président. Donc, la portée du projet de loi m'apparaît, moi, être par trop
limitée.
Peut-être
aussi revoir les pouvoirs qu'on donne à la Protectrice du citoyen. On aura
l'occasion d'en discuter tout à l'heure, mais oui aux enquêtes, oui aux
rapports, mais après quoi? Et je
reprends les propos de la Vérificatrice
générale, qui disait, bon :
Bien, on dépose des rapports année
après année, on fait des recommandations, mais on n'a aucun mécanisme pour
contraindre les organismes qui ont été vérifiés à suivre les recommandations puis s'assurer que c'est fait. Alors, est-ce qu'on va mettre la Protectrice du citoyen dans la même situation de frustration en ne
lui donnant aucun mécanisme, là,
contraignant pour s'assurer que les organismes qui auront été enquêtés et qui
auront fait l'objet d'un rapport défavorable et de recommandations... Est-ce
qu'on va faire vivre à la Protectrice du citoyen les mêmes frustrations, à savoir, oui, on
a fait des recommandations, elles ne sont
pas suivies, le rapport meurt sur une tablette? Et puis quoi? Donc, il faut
répondre à ces questions-là. Et puis quoi?
Donc,
le projet de loi, là-dessus, m'apparaît aussi être un peu timide, et donc je
pense qu'il y aurait lieu, là, d'aller plus loin dans la réflexion qu'on
fait puis se donner... ou en tout cas donner à la Protectrice du citoyen non
seulement des responsabilités, mais les outils pour les assumer, ces responsabilités-là.
• (16 heures) •
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M.
le député de La Peltrie, de vos remarques préliminaires. Je vais donc demander à la députée
de Sainte-Marie—Saint-Jacques...
Vous avez environ une minute pour faire vos remarques préliminaires.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. En fait, je
pense qu'on a ici une belle opportunité de répondre à une des préoccupations
de la commission, qui est ressortie de la commission Charbonneau, à l'effet de favoriser une plus grande participation des citoyens
et citoyennes à l'assainissement des pratiques
contractuelles relatives aux infrastructures publiques et, de façon plus générale, à
l'ensemble des secteurs. Cette recommandation n° 8 du rapport nous rappelle que le projet de loi qui est sur la table, malheureusement, ne traite pas les citoyens de la même façon. Et,
dans ce sens-là, je suis heureuse
d'apprendre que mes collègues de la CAQ considèrent qu'il faudrait aussi
protéger le secteur privé, je pensais que le projet de loi que vous aviez
déposé n'incluait que le public. Et donc j'espère qu'il y aura de l'ouverture de la part du ministre jusqu'à considérer de pouvoir traiter
les citoyens de la même façon, l'ensemble des citoyens de la même façon.
Bien sûr, il y a bien
d'autres éléments, qu'on ne peut tous énumérer en l'espace d'une minute, mais
je pense notamment à la question du secteur
municipal, parce que, même si on aborde la question du secteur public, on ne
fait même pas état de la question municipale, alors que la commission
Charbonneau nous en a parlé. Et, bien sûr, que ce soit la protectrice qui en
ait le mandat, on pourra toujours en discuter, mais il faut s'assurer qu'elle a
la capacité d'agir dans ce mandat-là. Alors, on va être là.
Auditions
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme la députée, de
vos remarques. Donc, nous allons donc nous tourner vers Mme Saint-Germain.
Mme Saint-Germain, la parole est à vous pour vos commentaires et votre
présentation, vous avez une trentaine de minutes pour faire votre présentation.
Protecteur
du citoyen
Mme
Saint-Germain (Raymonde) :
Je ne les dépasserai pas. Merci, M. le Président. M. le ministre, Mme, MM. les
députés, membres de la commission, je vous
remercie d'entendre en premier lieu le Protecteur du citoyen dans le
cadre de vos travaux sur le projet de loi
n° 87 qui vise à faciliter la divulgation d'actes répréhensibles dans les
organismes publics. Le rôle que la
loi, une fois sanctionnée, confierait à cette institution de l'Assemblée
nationale qu'est le Protecteur du citoyen est déterminant dans
l'atteinte de ses finalités.
Avant de vous
faire part de certains enjeux qu'a fait ressortir notre analyse du projet de
loi, je veux insister sur l'importance
de cette législation. Elle est manifestement le résultat d'un exercice sérieux
qui a pris en considération les principales normes internationales
reconnues en matière de divulgation d'actes répréhensibles et de protection
contre les représailles. Elle tient
également compte des expériences en ces matières, principalement au Canada mais
aussi ailleurs dans le monde. En effet, plusieurs Parlements ont
légiféré sur la question parce qu'il s'agit d'un enjeu contemporain essentiel à
la bonne gouvernance et à la probité de l'administration publique.
La bonne administration et la bonne gouvernance
des organismes publics sont cruciales pour assurer des services de qualité au bénéfice des citoyens. La probité doit se
refléter au sein de toutes les composantes de l'État et chez tous ses
acteurs.
Il arrive
pourtant que des personnes mal intentionnées posent des actes qui vont à
l'encontre du bien commun. Les
personnes qui ont connaissance de ces actes répréhensibles et qui les
réprouvent ne savent pas toujours où et à qui s'adresser pour les faire connaître et réprimer. Elles craignent
notamment d'être ostracisées si elles dénoncent un collègue ou, pire encore, un patron, un donneur d'ouvrage
ou un travailleur dont elles dépendent pour des services ou pour des soins.
Pour ces
personnes, l'équilibre entre le devoir de loyauté envers leur employeur et leur
sentiment de justement devoir
divulguer au nom de l'intérêt public un acte répréhensible peut sembler très
difficile à atteindre. Par ailleurs, de bonne foi mais mal informées, certaines peuvent juger pertinent de
dénoncer publiquement une situation. Elles pourraient alors entacher, sinon détruire la réputation des
personnes qu'elles présument à tort être les auteurs d'actes
répréhensibles qu'elles allèguent. Elles peuvent aussi, non sans raison,
craindre les conséquences d'une telle divulgation.
C'est pourquoi il est essentiel qu'un mécanisme
efficace pour faciliter les divulgations soit prévu qui à la fois comporte des protections solides pour les
divulgateurs et dont la confidentialité est assurée, confidentialité. Et il ne
faut pas sous-estimer cette dimension également
importante pour préserver la présomption d'innocence et la
réputation des personnes objets d'allégations et ne pas nuire à un
éventuel recours judiciaire.
La divulgation d'actes répréhensibles faite de
bonne foi et à l'abri de représailles constituera une garantie additionnelle de qualité des services publics du Québec. Si l'éventuelle loi visera d'abord
à détecter et à réprimer les auteurs des
actes répréhensibles commis, elle permettra tout autant d'agir en temps
opportun pour prévenir la commission de tels actes,
dans le plus grand intérêt public. Le
respect de cette loi sera un autre pilier pour renforcer la confiance de la
population envers la probité de la gouvernance des organismes publics.
Mon équipe et
moi avons examiné la portée du projet de loi et de ses dispositions en ayant à
l'esprit l'importance d'atteindre ses
finalités, au fond faciliter la divulgation des actes répréhensibles et établir
un régime de protection contre les représailles.
Je vous présenterai maintenant le résultat de cet examen. Et j'aborderai
ensuite les enjeux qui sont liés à la mise en oeuvre de l'éventuelle loi par le Protecteur du citoyen, et
conséquemment j'aurai des recommandations à vous formuler.
La portée du projet de loi et de ses
dispositions. Nous avons examiné de façon particulière trois dimensions fondamentales : la première, les organismes
publics assujettis, dans le but de nous assurer qu'il n'y avait pas
d'exclusion injustifiée dans le contexte
spécifique du Québec; la deuxième, la nature et la portée des actes
répréhensibles visés, dans le but de
couvrir le plus grand nombre possible de situations où un acte répréhensible
pourrait être commis et d'assujettir les personnes qui pourraient être
impliquées; et la troisième dimension de notre examen, c'est la protection
contre les représailles, qui est un élément
crucial de l'efficacité d'un mécanisme de divulgation et qui malheureusement en
constitue souvent le maillon faible.
Alors, sur
les organismes publics assujettis, l'article 2 du projet de loi les
énumère en huit catégories. Selon nos estimations, en date du
1er janvier 2016, c'est plus de 500 organismes, instances et entités
qui seraient assujettis à l'éventuelle loi, au total ils comptent quelque
680 000 employés, et leur assujettissement est pertinent.
Nous avons
aussi comparé la liste de ces organismes assujettis avec celle de la Loi
concernant la lutte contre la corruption,
loi qui a pour principal objet de renforcer les actions de prévention et de
lutte en matière contractuelle dans le secteur
public, de lutte contre la corruption. Puisque ces textes de loi ont des visées
complémentaires, bien que distinctes, il me semble que leur portée devrait essentiellement être la même. J'attire
ainsi votre attention sur certaines entités qui sont absentes de l'énumération à l'article 2 du
projet de loi : les entités du domaine municipal, les établissements
privés agréés aux fins de subventions
en vertu de la Loi sur l'enseignement privé, les établissements privés
conventionnés, les résidences privées
pour aînés, les organismes communautaires et certaines autres instances du réseau
de la santé et des services sociaux qui
sont assujetties à la loi sur le protecteur des usagers en santé et en services
sociaux et pour lesquelles nous exerçons déjà une compétence, les services administratifs de l'Assemblée nationale et
les centres de la petite enfance, garderies et bureaux coordonnateurs.
Alors, il est important de s'assurer, maintenant, de la pertinence de ces
exclusions au projet de loi, je pense qu'on aura l'occasion d'échanger
là-dessus.
• (16 h 10) •
Les entités
du domaine municipal, déjà dans les remarques préliminaires, ça a été soulevé.
Ces entités, je le précise d'emblée, ne sont couvertes par aucune
administration canadienne en matière de divulgation d'actes répréhensibles. L'explication en est sans doute qu'elles sont distinctes
du gouvernement et qu'elles constituent même un autre ordre de gouvernement, mais leur exclusion, dans le contexte
québécois contemporain, notamment après les travaux de la Commission d'enquête sur
l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction
et aussi après les enquêtes de
l'UPAC, nous paraît difficile à justifier sans autre examen. La question
centrale est donc : Existe-t-il d'autres recours adéquats qui constituent des alternatives valables pour
d'éventuels divulgateurs d'actes répréhensibles présumés avoir été
commis ou susceptibles de l'être dans une municipalité?
La Loi sur
l'éthique et la déontologie en matière municipale prévoit déjà un mécanisme par
lequel toute personne qui a des
motifs raisonnables de croire qu'un membre du conseil d'une municipalité a
commis un manquement à une règle prévue
au code d'éthique et de déontologie qui lui est applicable peut en saisir le
ministre. Après un examen préalable, celui-ci peut transmettre la
divulgation à la Commission municipale du Québec pour enquête. Je souligne que
le ministère des Affaires municipales et de
l'Occupation du territoire et la Commission municipale sont évidemment
des instances indépendantes des
municipalités. Le principe d'indépendance est ici respecté, et je n'ai pas de
motif de douter de leur impartialité.
Cependant, ce mécanisme comporte des lacunes, puisque les divulgations qui
viseraient des employés municipaux ou
d'autres types d'actes répréhensibles que ceux identifiés au code d'éthique et de
déontologie ne sont pas prévus, donc
ni possibles dans le mécanisme en place ni protégés en matière de représailles.
Et même le mécanisme en vigueur pour
les élus n'assure pas la confidentialité des divulgateurs ni, non plus, leur
protection en cas de représailles.
Ce mécanisme
pourrait être renforcé de manière efficace et à peu de frais... ou encore il
pourrait être jugé plus opportun
d'assujettir les entités municipales au projet de loi n° 87. C'est
pourquoi nous suggérons deux avenues possibles.
La première,
la Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale est modifiée pour
permettre au ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du
territoire et à la Commission municipale du Québec de se saisir des divulgations concernant également les employés
municipaux. Il serait alors essentiel de prévoir à la loi toutes les
protections requises contre les représailles
envers les divulgateurs qui agiraient en vertu de cette loi de même que les
garanties relatives à la
confidentialité. Et j'ajoute, référant notamment à la commission Charbonneau,
qu'il a été établi que la Commission municipale n'avait pas des
ressources suffisantes pour exercer déjà le mandat qui lui est confié, donc il
ne faudrait pas sous-estimer l'importance de ressources qui seraient également
ajoutées au ministère et à la commission.
Un deuxième scénario possible pour
l'assujettissement des municipalités serait un amendement au projet de loi n° 87 pour y assujettir, donc, les
municipalités. Pour éviter un chevauchement entre le mécanisme qui existe déjà
à l'endroit des élus en matière d'éthique et de déontologie, il faudrait
toutefois prévoir, sans qu'il ne soit nécessaire de modifier la Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale,
que le Protecteur du citoyen mette fin au traitement d'une divulgation si l'acte répréhensible allégué
fait l'objet d'un examen préalable ou d'une enquête en vertu de cette
loi ou a fait l'objet, encore, d'une décision de la Commission municipale du
Québec.
Je veux aussi
vous parler des établissements privés conventionnés, des résidences privées
pour aînés, organismes communautaires
en santé et services sociaux et de certaines autres instances du réseau de la
santé et des services sociaux qui sont assujetties à la Loi sur le Protecteur
des usagers mais exclues du projet de loi n° 87. Cette exclusion restreint
la portée de l'éventuelle loi par rapport à
la loi, donc, sur le Protecteur des usagers. Cette dernière loi inclut en effet
tout établissement public ou privé
conventionné visé par la Loi sur les services de santé et les services sociaux,
et parce que les établissements privés conventionnés offrent à un tarif
réglementé des soins et des services de santé et des services sociaux subventionnés par le gouvernement, pour
l'essentiel ce sont des organismes privés qui opèrent avec des fonds publics, j'estime qu'ils devraient être assujettis
à la loi projetée, et je dis minimalement, dans le sens où il y a
d'autres organismes qui pourraient aussi l'être.
Services administratifs de l'Assemblée
nationale, alors, c'est probablement un oubli, ils sont déjà assujettis à la Loi sur le Protecteur du citoyen. Et vous
comprenez qu'on parle des services qui excluent les députés et le
personnel politique, mais les services, donc, qui sont administratifs.
Les
établissements privés agréés aux fins de subventions en vertu de la Loi sur
l'enseignement privé, donc les écoles
privées, pour l'essentiel, les centres de la petite enfance, garderies qui
bénéficient de places dont les services de garde sont subventionnés et
les bureaux coordonnateurs de la garde en milieu familial, je constate donc que
ces entités, sur lesquelles l'UPAC peut agir
lorsqu'il s'agit de contrats, donc en matière contractuelle, mais pas pour les
autres types d'actes répréhensibles,
ne sont pas incluses au projet de loi à l'article 2. Et, si le législateur
décidait de les assujettir, le Protecteur du citoyen pourrait en assumer
le mandat.
Les
divulgations à l'endroit du Protecteur du citoyen lui-même. Le Protecteur sera
assujetti à l'éventuelle loi, ce qui
va de soi, mais j'estime important qu'une instance distincte soit chargée de la
réception et du traitement des divulgations d'actes répréhensibles éventuellement commis au sein de l'institution et
à son égard. Et je reviendrai donc sur cet élément, à son égard, dans
quelques instants, mais, même avec une procédure interne qui existe déjà, le
recours à une instance indépendante est
essentiel pour conserver l'impartialité, réelle et perçue, nécessaire à
l'efficacité et à la crédibilité même du
processus de divulgation à notre endroit, c'est pourquoi je recommande que le
projet de loi soit amendé pour prévoir, en cette situation, que le divulgateur s'adresse à une autre institution de
l'Assemblée nationale, à savoir le Commissaire à l'éthique et à la
déontologie. Ce dernier aurait alors les mêmes pouvoirs que conférera
l'éventuelle loi au Protecteur du citoyen. Les divulgateurs et les auteurs présumés des actes
répréhensibles bénéficieront aussi des mêmes protections et des garanties, dont, bien
sûr, la confidentialité requise.
On en a parlé
un peu tout à l'heure, je veux insister, la nature et la portée de
l'acte répréhensible. Cette deuxième dimension
sur laquelle a porté notre examen du projet
de loi est très importante,
elle définit la nature des actes considérés répréhensibles et qui conséquemment
pourront être divulgués dans un cadre protégé. Nous avons voulu nous assurer
que des actes qui devraient être considérés comme répréhensibles n'ont pas été
omis.
À notre avis,
les articles 3 et 4 du projet de loi définissent avec clarté et
suffisamment de souplesse ce qui constitue ou non un acte répréhensible pouvant être divulgué. Nous pourrons en
faire une interprétation très large, en d'autres termes. Cette
définition donne une marge d'interprétation suffisante et facilitera la mise en
oeuvre de l'éventuelle loi.
J'ai cependant une
recommandation à formuler pour mieux assurer l'atteinte des finalités de la
loi. L'un des objets du projet de loi est de
«faciliter la divulgation [des actes] répréhensibles commis ou sur le point
d'être commis au sein des organismes
publics». Je suis d'avis que les actes visés devraient aussi comprendre ceux
qui sont commis à l'égard des
organismes publics, c'est d'ailleurs une telle portée qui lui est donnée dans
la grande majorité des législations ailleurs au Canada. L'avantage concret de cet ajout serait de pouvoir couvrir des
actes répréhensibles commis au détriment d'un organisme public par des personnes qui n'en sont pas des employés. Ces
actes qui ont un impact négatif sur ces organismes pourraient, par exemple, être commis par des
consultants, des mandataires, des fournisseurs, pensons au sous-traitant
qui prend avantage de sa relation avec un
organisme par un usage abusif de ses fonds ou de ses biens ou encore à
l'utilisation par un consultant de ressources matérielles ou informationnelles
de l'organisme public à des fins personnelles. Le divulgateur pourrait aussi
bien être un employé qu'un autre fournisseur ou un usager.
L'enjeu de la
divulgation au public en cas de risque grave et urgent. L'article 6 du
projet de loi permet à toute personne,
lorsque des conditions définies sont réunies, urgence de la situation, acte
répréhensible présentant un risque pour la santé ou la sécurité d'une personne ou pour l'environnement... permet
donc à une personne de «divulguer au public les renseignements qu'elle estime raisonnablement nécessaires pour parer à
ce risque». En pareille circonstance, le divulgateur bénéficiera de la même protection contre les
représailles que s'il s'était adressé au responsable interne de son
organisme ou au Protecteur du citoyen. Même
si certains pourraient souhaiter que la divulgation au public soit permise et
protégée en tout temps et pour tout acte répréhensible, je considère que
les balises prévues sont raisonnables et permettront de prévenir les atteintes
à la réputation des personnes visées à tort.
Je souligne
que l'article 6, inspiré de dispositions semblables dans d'autres
législations, prévoit aussi une divulgation préalable à celle faite au
public. Alors que ces législations réfèrent à un organisme d'application de la
loi compétent, le projet de loi mentionne
plutôt une divulgation préalable à un corps de police ou au Commissaire à la
lutte contre la corruption. J'estime que l'identification
précise de ces instances est restrictive, risquant de ne pas être à tout
coup la plus appropriée pour contrer le
danger anticipé, c'est pourquoi je recommande que soit amendé l'article 6
du projet de loi pour que la seule
référence, en plus du corps de police, soit à un organisme d'application de la
loi compétent. On peut penser, par exemple, au directeur de la santé
publique.
• (16 h 20) •
La protection contre les représailles. Cet enjeu
m'amène de manière incidente à en aborder un autre qui est également crucial à mes yeux parce qu'il est au
coeur même de l'efficacité concrète du mécanisme que propose le projet
de loi n° 87. Il s'agit de déterminer quelle protection apportera la loi
et à qui.
Bien que le
projet de loi prévoie que toute personne puisse faire une divulgation en vertu
de l'article 5, la protection contre
les représailles semble exclusivement liée à la notion d'emploi. Le projet de
loi est ainsi conçu d'abord et avant tout pour protéger les fonctionnaires divulgateurs et non les tiers contre
des pratiques interdites de l'employeur conformément à la Loi sur les normes du travail. Elles valent
donc pour les salariés, lesquels peuvent être des employés d'un
organisme public ou d'une entreprise privée.
Aucune protection particulière n'est cependant prévue pour des représailles non
liées à l'emploi. J'estime primordial
d'accorder à des tiers une protection équivalente, puisque le projet de loi
prévoit à juste titre qu'ils pourront
aussi divulguer des actes répréhensibles. On peut facilement trouver des
exemples où des tiers divulgateurs pourraient
subir les conséquences de leur divulgation. Qu'en serait-il, par exemple, d'un
parent impliqué au sein d'un comité
de parents qui dénonce un acte répréhensible de la commission scolaire et qui
se voit exclu du comité ou dont l'enfant est puni, ou encore d'un consultant qui, à la suite d'une divulgation, voit
son contrat résilié ou injustement ne se qualifie plus pour de nouveaux contrats? Aucune de ces
situations ne me paraît actuellement couverte par le projet de loi. C'est
pourquoi je recommande que toute personne
qui se croirait victime de représailles non liées à l'emploi de la part d'un
organisme public puisse s'adresser au
Protecteur du citoyen, qui mènerait alors une enquête en toute impartialité. Si
les allégations s'avéraient fondées, il en aviserait la plus haute
autorité de l'organisme en cause, voire le ministre ou l'Assemblée nationale,
et ferait toute recommandation jugée appropriée pour remédier à la situation.
Les
mécanismes de divulgation au sein des organismes publics. Dans un autre ordre
d'idées, le projet de loi accorde préséance au recours au Protecteur du
citoyen en matière de divulgation d'actes répréhensibles tout en offrant la possibilité à un employé de référer à son responsable
interne, c'est une possibilité et non une obligation pour l'employé, je le souligne. Pour susciter la confiance des
employés envers ce mécanisme et celle du public envers les organismes
visés, il faut qu'une cohérence et
uniformité de traitement prévale, et ce, malgré le fait que chacun d'entre eux
ait à se doter de sa propre procédure. Sur ce plan, le document de
référence que produira le Protecteur du citoyen devrait permettre de réduire
les disparités.
Je suis également d'avis que le projet de loi
doit inclure des balises pour les dirigeants d'organisme quant à la désignation du responsable interne du suivi des
divulgations. Des précisions à ce sujet dans le projet de loi de même
que des règles relatives à l'exercice
concurrent de cette responsabilité avec d'autres fonctions témoigneraient de la
considération accordée à cette responsabilité.
Je recommande
par ailleurs que les organismes assujettis aient l'obligation de rendre compte
dans leurs rapports annuels de l'application de la loi. Cette reddition
de comptes pourrait se faire de la même façon que celle qui porte sur les données concernant la protection des
renseignements personnels, l'accès à l'information et l'éthique, par
exemple. Une telle reddition de comptes me paraît essentielle pour favoriser la
confiance du public et aussi pour mieux évaluer le succès des mécanismes mis en
place dans les organismes, d'autre part.
Spécifiquement le mandat du Protecteur du
citoyen dans le mécanisme projeté. Comme vous le constatez, le Protecteur du
citoyen sera un acteur central du mécanisme de divulgation proposé. À ce titre,
il devra agir en toute confidentialité en s'assurant de préserver les droits de
toutes les personnes en cause. J'insiste pour réaffirmer que la procédure
appliquée devra protéger non seulement l'identité du divulgateur et celle des
témoins, mais aussi celle de l'auteur présumé de l'acte répréhensible. Le Protecteur du citoyen est
heureusement rompu au niveau élevé de confidentialité associé à ces enquêtes. Des mesures strictes lui
permettent déjà de préserver cette confidentialité, et l'ensemble de ces
mesures est incorporé au projet de loi.
Les pouvoirs du protecteur, maintenant. Cela
étant, pour remplir pleinement son rôle, je suis d'avis que le Protecteur du citoyen devrait disposer des
principaux pouvoirs qu'il détient déjà en vertu de la Loi sur le Protecteur
du citoyen et de la Loi sur le Protecteur
des usagers en matière de santé et services sociaux, donc, pour ses autres
enquêtes, en plus de celui du commissaire
enquêteur auquel réfère déjà le projet de loi. Ces pouvoirs permettent de jouer
un rôle en matière de prévention. Je fais ici notamment référence — et
notre mémoire les aborde chacun plus en détail — au pouvoir de la personne désignée
d'intervenir de sa propre initiative, de suggérer des réformes pour prévenir la
répétition des situations problématiques et de commenter publiquement ces
interventions.
Par ailleurs, un pouvoir additionnel intimement lié à son pouvoir général d'enquête
m'apparaît nécessaire, compte tenu de
la nature particulière des interventions
du Protecteur du citoyen à la suite de divulgation d'actes
répréhensibles : celui d'avoir accès aux locaux de l'organisme qui fait
l'objet d'une enquête. Cette possibilité, que nous avons déjà en matière de santé et de services sociaux, n'est pas
incluse dans la Loi sur les commissions d'enquête et permettrait à nos
enquêteurs d'accéder aux locaux lorsqu'ils le jugent utile pour la conduite des
vérifications et des enquêtes.
Un autre rôle
sera confié au Protecteur du citoyen, c'est un rôle plus discret mais néanmoins
très important, c'est le rôle de conseil et d'accompagnement, pour
lequel ces pouvoirs additionnels me paraissent vraiment nécessaires. Le protecteur sera appelé à exercer d'autres
fonctions importantes, notamment rôle conseil auprès des organismes
assujettis, rôle d'information auprès des
éventuels divulgateurs, et ces fonctions nécessiteront de sa part des efforts
non négligeables. On voit en particulier, auprès des éventuels
divulgateurs, l'importance de conseiller et de supporter, dans certains cas d'accompagner et de les rassurer aussi sur la
nature de la confidentialité et des protections. Alors, c'est un rôle qui
sera vraiment important et, je dirais, encore plus important au début, avant
que le mécanisme ait fait ses preuves et ait pu gagner en crédibilité.
Ainsi, avant même de pouvoir commencer à traiter
les divulgations, nous devons rédiger puis diffuser une procédure de traitement
des divulgations. Nous serons également responsables de la rédaction et de la
publication, à l'intention des organismes
publics, d'un document de référence concernant la procédure devant être
établie, document qui devra être
présenté et expliqué aux responsables internes de ces organismes une fois
qu'ils seront nommés. Le Protecteur du citoyen sera en outre appelé à jouer un rôle de conseil
et d'accompagnement, principalement à l'endroit des hauts dirigeants de ces organismes et des responsables internes, et
aussi auprès de leurs employés et de leurs représentants, notamment
les syndicats.
De plus, lorsque le mécanisme de divulgation
sera fonctionnel, le Protecteur du citoyen devra répondre aux demandes de renseignements que toute
personne pourrait lui faire concernant la possibilité d'effectuer une
divulgation et aux demandes, comme je l'exprimais tout à l'heure, de conseils
sur la procédure à suivre.
La collaboration des organismes. Dans ce contexte, et considérant l'importance de ses multiples rôles, pour le bon fonctionnement du processus,
j'estime que la collaboration des organismes assujettis avec le Protecteur du
citoyen est essentielle, et ce, non seulement pour les vérifications et les enquêtes, mais aussi pour faire connaître
le mécanisme de divulgation et les
droits des personnes en cause. C'est pourquoi je recommande de prévoir au projet de loi une obligation générale, pour
les organismes assujettis, employés et dirigeants, de collaborer avec le Protecteur du citoyen dans le
cadre de l'application de la loi.
Certains
enjeux qui sont relatifs à la mise en
oeuvre de la loi. Le défi de mise en oeuvre qui incombera au Protecteur du
citoyen est motivant mais imposant,
comme vous êtes à même de le constater. En outre, et j'insiste, le Protecteur du citoyen ne saurait réaliser
ce mandat au détriment de sa mission actuelle, essentielle pour assurer le
respect des droits des citoyens
dans leurs relations avec les services publics. Dès la sanction de la loi, il
devra notamment entreprendre des actions en matière de dotation, de ressources informationnelles, de rédaction de la procédure de traitement et de suivi de
divulgation, de préparation du document de
référence, du corpus juridique, de communication à tous les intéressés.
Ces actions nécessiteront des efforts importants et soutenus avant même qu'une
première divulgation puisse être traitée.
Le Protecteur du citoyen, on le comprendra, ne pourrait réaliser ce mandat
avec toute la compétence et la rigueur requises
sans que les modalités et les ressources nécessaires ne soient réunies.
Conscients des enjeux budgétaires, nous avons
évalué de façon rigoureuse et conservatrice les ressources qui seraient
requises pour bien assumer nos responsabilités additionnelles liées à la
divulgation des actes répréhensibles et à la protection des divulgateurs. Mais,
cela étant, il est primordial que la planification et le démarrage des activités
liées à ce mandat ne fassent pas l'objet de démarrages conséquents à un manque
de ressources essentielles.
En
conclusion, certains dénonceront le fait que le projet de loi, s'il est adopté,
ne s'appliquera qu'au secteur public. Il
s'agit d'un pas important, et d'ailleurs le mandat qui serait confié au Protecteur du citoyen est en outre plus large par sa portée que
celui qui incombe à ce jour aux autres ombudsmans parlementaires au Canada. Le
mécanisme retenu dans le projet de loi est protecteur... est prometteur — protecteur et prometteur — d'autant
plus que des améliorations simples à intégrer peuvent lui être apportées, et il pourrait certainement servir d'inspiration à tout organisme ou entreprise privée qui souhaiteraient
s'autoréguler en matière de probité et de bonne gouvernance, et il pourrait aussi éventuellement
inspirer un projet de loi qui s'applique au secteur privé.
Je vous remercie de votre confiance et je vous
réitère la détermination du Protecteur du citoyen à mener cette éventuelle responsabilité
avec compétence et impartialité.
• (16 h 30) •
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Saint-Germain, pour votre présentation fort intéressante.
Nous allons donc procéder maintenant
aux échanges avec les parlementaires. M. le
ministre, la parole est à vous.
Allez-y.
M.
Hamad :
Oui, merci, M. le Président. Mme Saint-Germain, M. Bernier et les
deux personnes qui vous accompagnent,
bienvenue à l'Assemblée nationale et merci pour votre beau travail. C'est un mémoire
très intéressant, puis on sent que
vous avez fait le tour de la question, vous vous êtes mis, là, comme si vous le faisiez
demain matin, c'est quoi, les
éléments nécessaires pour améliorer le projet de loi. Et j'ai
constaté dans votre communiqué de
presse, je viens de le voir... «En effet, le mandat qui serait confié au
Protecteur du citoyen serait plus large que celui des sept autres ombudsmans parlementaires qui exercent cette
compétence au Canada.» Ça fait que je ne m'adresse pas à vous
directement, mais j'informe mes collègues
que vous-même, vous dites que le mandat que vous aurez, ça va être encore plus
large que les sept d'autres provinces.
Maintenant,
j'ai regardé votre rapport, et il y a plein de choses intéressantes, en fait on
sent comment... Et notre compréhension
commune, c'est qu'on a une volonté de permettre à quelqu'un qui travaille dans
la fonction publique ou à l'extérieur,
relativement à la fonction publique, les organismes et... d'aller divulguer une
information. La personne, elle a deux
choix : elle peut aller à l'organisme comme tel ou aller directement à
vous. Et vous, une fois que vous
recevez la demande, vous faites
l'analyse, voir le contenu, etc., puis là vous allez voir les critères. Par la
suite, si vous sentez, vous voyez,
vous constatez qu'il y a un acte criminel, évidemment, vous allez la
diriger vers l'UPAC ou les autres autorités policières concernées. Ça, on s'entend là-dessus, pour le bénéfice de
mes collègues, parce que les trois partis politiques ont déposé, dans l'opposition, des projets de loi, évidemment j'ai pris le temps de regarder c'est quoi qu'ils ont proposé.
Avec les deux partis de l'opposition, la première puis la deuxième opposition, on est pas mal dans la même
place. Il y a un peu de
cheminement différent, comme la CAQ demande d'aller directement à l'UPAC. Alors là, évidemment, ce n'est pas toutes les divulgations qui sont criminelles, il peut y avoir d'autres
divulgations de d'autres ordres. Pour ça, on a choisi la meilleure organisation gouvernementale qui peut faire ce jugement-là puis permettre
aussi de le traiter, parce que
vous le faites à la journée longue, c'est ce que vous faites, protéger le
citoyen, à la journée longue.
Je vais prendre quelques recommandations. J'ai
combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier, Montmorency)
:
Vous avez environ une vingtaine de minutes, M. le ministre.
M.
Hamad
:
Parfait. Excellent. Alors, évidemment, l'histoire des affaires municipales, on
va en discuter, voir comment. J'ai
compris que vous avez... dans votre esprit, c'est qu'on devrait couvrir les
affaires municipales, mais pas vous nécessairement, il faut trouver
l'autorité ou l'endroit nécessaire pour couvrir les affaires municipales. Ça,
j'ai compris ça. Et donc c'est important. Et on sait que déjà, je me souviens,
le ministère des Affaires municipales, il y a quelques années, ils ont mis en
place un processus de plainte vers les élus. Maintenant, on veut aller plus
loin dans le processus, ça, je comprends ça.
Puis je comprends aussi que vous avez demandé d'aller à d'autres organismes
aussi dans le domaine de la santé plus particulièrement, les privés
conventionnés, les publics, etc. Ça, c'est les recommandations jusqu'à 4.
Alors là, je
vais à la recommandation 5, d'ajouter, après l'article 5 ici... «...reçoit
une divulgation [...] pouvant démontrer qu'un acte a été commis [...]
est sur le point de l'être», le Commissaire à l'éthique. Ça, ici, peut-être me
l'expliquer davantage, la recommandation 5.
Le Président (M. Bernier, Montmorency)
:
Madame.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Très bien. Je tiens, M. le ministre, à vous
remercier de vos commentaires positifs
et à vous souligner que mes collaborateurs ont travaillé vraiment très fort et
avec beaucoup de motivation, donc, ces commentaires, ils les méritent
d'abord et avant tout. Alors, je vous en remercie.
La
recommandation 5, elle vise les divulgations qui pourraient être faites
pour des actes répréhensibles au sein ou à l'endroit du... à l'égard du Protecteur du citoyen, soit par les membres
du personnel ou par toute personne de l'extérieur. Et, pour que le processus soit impartial et
indépendant, je recommande que le Commissaire à l'éthique et à la
déontologie de l'Assemblée nationale puisse, à ce moment-là, être l'instance
qui reçoit les divulgations.
Je précise que j'en ai parlé avec le
commissaire, Me Saint-Laurent. Bien sûr, il se soumettra à la décision de l'Assemblée nationale, mais il m'a assurée qu'il
serait en mesure d'assumer cette responsabilité, si telle était la
volonté de l'Assemblée nationale. Et, bien
sûr, il n'y a pas ici un enjeu budgétaire, ce serait à l'intérieur... Pour une
seule instance, il n'y a pas un impact significatif. En fait, j'espère
qu'il n'y aurait pas beaucoup de divulgations. Je n'ai pas de raison de croire
qu'il y en aurait, mais soyons objectifs, on verra.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le ministre.
M.
Hamad
:
Je vais à la recommandation 7, et là vous parlez... non liées à son
emploi, les représailles non liées à son emploi. Vous avez donné
l'exemple d'une mère de famille qui est membre d'un comité de parents à
l'école, puis évidemment, les représailles,
mettons, de la mettre dehors, mettons, elle n'est plus membre du comité, puis
là il faut bien traiter son enfant,
etc. Alors là, dites-moi... Je comprends la volonté, là, on s'entend sur la
volonté. Moi, je veux qu'une loi soit
pratique, à la fin, puis qu'on soit clair, qu'on l'applique clairement, puis
qu'il n'y ait pas beaucoup d'interprétations. Et évidemment la volonté
ici, on s'entend, là, on veut permettre aux gens de divulguer, puis on veut
permettre aux gens de les protéger, puis on
veut, finalement, prendre les coupables, les pogner, là, en bon québécois, mais
évidemment... Puis on ne veut pas que les gens paient parce qu'ils ont
eu le courage de divulguer, on comprend ça.
Maintenant,
à un moment donné, c'est protéger quelqu'un de l'extérieur, dans le privé, qui
parle d'un contrat, sa compagnie est en train de faire affaire avec le
gouvernement, il trouve qu'ils ne sont pas corrects, puis là il fait une divulgation. Ça, il faut
le protéger, bien sûr. Mais, mettons,
comment on va finir par protéger la mère qui est, le comité, membre, du
parent, s'assurer que les professeurs dans la commission scolaire sont en train
de bien traiter son enfant? Comment vous
voyez ça, là? Comment on va... C'est parce que, là, on est dans la relativité un petit peu, là, relatif un peu. Ils sont-u bien traités? C'est-u bien
traité? Est-ce qu'il est traité... Comment on va mesurer ça?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Il y a, M. le Président, dans les enquêtes, l'enjeu de vérifier après s'il y a eu des
représailles, c'est une dimension très importante pour inspirer la confiance. Et, si on veut que
cette loi-là soit optimale pour non seulement
contrer, mais prévenir les actes répréhensibles, il faut s'assurer que les
tiers sont aussi protégés, et les tiers, donc, c'est ceux qui ne sont
pas des salariés.
J'ai
donné l'exemple de la mère. Pour
répondre précisément à votre question, dans une situation comme
celle-là, le Protecteur du citoyen, s'il
avait compétence, donc, ferait enquête sur les allégations de représailles, et,
à ce moment-là, irait voir la plus
haute autorité de la commission scolaire, et, constatant... si on constate que
c'est exact, demanderait des correctifs,
qu'elle soit réadmise au comité, ou, pire encore, si l'enfant a eu des
représailles, qu'il y ait, à ce moment-là, des types... des sanctions contre les professeurs ou qu'il y ait une
surveillance accrue pour s'assurer que cet enfant-là n'est pas victime
de représailles.
Un
autre tiers pourrait être, par exemple, un consultant qui travaille dans des
locaux d'un organisme public et qui se rend
compte qu'il y a un abus de fonds publics, qu'il y a une mauvaise
administration, que c'est de mauvaise foi. S'il ne peut divulguer... Et
là ce n'est pas sur la nature de son contrat, là, il est témoin de choses. S'il
ne peut divulguer au Protecteur du citoyen sans avoir l'assurance qu'il n'aura
pas de représailles, à ce moment-là, ce serait une faiblesse très importante.
Donc,
l'important, c'est que non seulement les salariés, dans le contexte de la
protection sur les normes du travail, soient protégés contre les
représailles, mais toute personne, parce que c'est la logique du projet de loi,
toute personne peut faire une divulgation, donc un tiers divulgateur qui n'est
pas un salarié doit bénéficier de la même protection.
M.
Hamad
: Pour le consultant qui voit qu'il y a une mauvaise
gestion dans l'organisation, moi, j'ai compris qu'il est couvert. Un consultant qui est au Trésor, il
voit qu'il y a des gestes, là, puis il trouve que ce n'est pas correct, il
peut divulguer puis il est protégé. Ça, pour moi...
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : Il est couvert, mais, contre les représailles, il faut
avoir des protections plus grandes que ce
qui est prévu à la loi, on recommande un renforcement pour s'assurer que...
C'est que le mécanisme de protection,
il est basé beaucoup sur la Loi sur les normes du travail, donc c'est la
protection des salariés. C'est certain qu'un salarié, dans le secteur privé, est couvert, mais une personne, un tiers
peut ne pas être un salarié et faire... C'est pour ça que j'ai donné l'exemple, il y en aurait d'autres à
donner, là, mais de la mère qui fait partie d'un comité de parents. Un
salarié... un non-salarié, pardon, un tiers
pourrait faire une divulgation et ne pas avoir présentement une protection
suffisante contre les représailles, parce que ce n'est pas à titre de
salarié ou d'employé qu'il subirait des représailles.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Vous voulez ajouter quelque chose, M. Bernier?
M. Bernier
(Jean-François) : Non, ça va.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Non, ça va? M. le ministre.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Est-ce que par contre je pourrais revenir
sur ce que vous disiez sur l'UPAC tout
à l'heure et sur les références, M. le ministre? Parce que, M. le Président,
c'est vraiment important. Et nous avons déjà des échanges sur des dossiers actuels, là, différents de ceux-là, l'UPAC
nous réfère des dossiers, et nous référons déjà, c'est exceptionnel, mais
des dossiers à l'UPAC. Nous avons déjà, donc, une voie de communication.
Et
il ne faut pas oublier que l'UPAC, c'est en matière de contrats et de
corruption en matière de contrat public. Donc, il y a des situations qui ne seraient pas présentement couvertes
par l'UPAC qui, par contre, seraient couvertes par un autre corps de
police, et c'est donc à ces corps-là que, dans ces situations-là, nous
pourrions référer.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci.
M.
Hamad
: On revient... Je vais aller avec vous dans le même
exemple. Je suis membre du conseil d'administration
à Retraite Québec, je ne suis pas un employé, je suis un bénévole au conseil
d'administration, je vois des actes répréhensibles, je veux divulguer.
On veut que cette personne-là soit protégée, puis, vous pensez, actuellement
elle ne l'est pas.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : Je pense que le projet de loi pourrait être renforcé pour
assurer une meilleure protection, parce que
la nature de la protection, actuellement, c'est celle qui est prévue en vertu
de la Loi sur les normes du travail,
donc c'est à titre d'employé, de salarié. Ça couvre un dirigeant qui est
salarié, ça couvre un gestionnaire qui
ferait une divulgation, mais ça ne couvre pas un membre bénévole du conseil
d'administration de Retraite Québec.
M.
Hamad
: Parfait, O.K. Je saisis votre...
R-8,
maintenant, vous voulez ajouter une obligation générale de collaboration.
Actuellement, vous avez... Vous avez actuellement un pouvoir d'enquête,
là, quand vous vérifiez, tout ça, donc vous le demandez et vous pouvez
contraindre, là, l'organisation à collaborer.
• (16 h 40) •
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
M.
Hamad :
Alors, juste comprendre. Est-ce que vous l'avez, ce pouvoir-là? Vous voulez
quoi...
Mme
Saint-Germain (Raymonde) :
Nous avons ce pouvoir en matière de santé et des services sociaux, qui
nous est conféré par la loi sur le
protecteur des usagers en santé et services sociaux. Dans le cas présent, la loi ne nous
confère pas, par exemple, le pouvoir
d'exiger d'un sous-ministre qu'il nous permette de rencontrer tous les employés
pour faire une séance d'information à
l'intérieur des locaux d'un ministère. Alors, c'est cette obligation générale
de collaboration qui nous serait très
facilitante. Là-dessus, nous n'avons pas un pouvoir exécutoire, ça ne nous est
pas donné par, notamment, le pouvoir des commissaires enquêteurs.
M.
Hamad
:
...R-9, par sa propre initiative, propre initiative, vous voyez un journal le
matin, vous voyez une situation, donc vous prenez l'initiative et vous allez
faire une enquête? C'est-u ça, propre initiative, R-9?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Proprio motu, les médias d'information,
effectivement, peuvent être une source.
Remarquez, ce n'est pas parce qu'on lit un article qu'on va faire une enquête,
mais dans certaines situations ça peut
nous amener à faire une veille, parfois une préenquête. Alors, les médias d'information,
dans ce sens-là, sont une source qui
peut déclencher chez nous une enquête à notre propre initiative, mais il y a
aussi d'autres situations. À partir, disons, d'une plainte ou deux, de deux ou trois divulgations sur, disons, deux
ou trois organismes qui se ressembleraient, on pourrait décider de faire une enquête sur l'application
erronée d'un règlement ou d'une loi à l'intérieur de certain type de
service... ou ça pourrait être à l'intérieur, par exemple, d'une instance
précise.
Je vais vous donner
un exemple précis. La Commission de la construction du Québec, si on voyait
certaines situations où on se dit : Il
y a deux ou trois événements qui sont portés à notre attention, soit parce
qu'on voit un article dans les médias
ou autrement, on pourrait aller faire une enquête sur les méthodes ou les
pratiques ou sur la qualité de la veille ou des systèmes, je dirais, de
surveillance de la Commission de la construction du Québec. C'est un exemple.
Alors,
le pouvoir d'initiative que nous avons déjà en vertu des deux lois que nous
administrons, ce serait utile de l'avoir pour prévenir.
M.
Hamad
: Oui, je veux bien comprendre votre exemple, là,
parce que je le connais un peu, la construction, là, la commission. Vous voyez quelque chose sur la Commission
de la construction, et là vous irez enquêter sur la Commission de la
construction?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : On pourrait aller enquêter sur, par
exemple, la qualité de certaines directives, de certaines formes de vérification ou l'absence de vérification de la
part de la Commission de la construction. J'ai pris cet exemple-là, il y
en a d'autres.
M. le Président,
Me Bernier voudrait... le vice-protecteur voudrait compléter.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Oui, Me Bernier, la parole est à vous.
M. Bernier (Jean-François) : Merci, M. le Président. En fait, il faut
distinguer le pouvoir actuel du Protecteur du citoyen en vertu de ses deux lois constitutives actuelles, notamment la
Loi sur le Protecteur du citoyen qui lui permet déjà de faire... un pouvoir d'initiative de cette
nature-là. Dans le cas de l'application du projet de loi n° 87,
évidemment, ce seraient des constats à l'égard de situations qui mènent
à des actes répréhensibles ou qui pourraient mener à des actes répréhensibles. Donc, c'est dans le rôle de
prévention que l'ombudsman a, auquel on est rompus depuis plusieurs
années. Donc, le double mandat, c'est de
réagir suite à des plaintes, mais c'est aussi d'être en prévention pour éviter
qu'il y ait des situations problématiques.
M.
Hamad
: O.K. Alors, je reprends ce que vous me dites. Dans
le fond, pour bien comprendre, c'est que, dans le cadre des définitions des actes
répréhensibles — ça,
c'est le champ d'application que vous avez — quand vous voyez quelque chose
là-dedans, vous voulez prendre la propre initiative là-dedans...
M. Bernier
(Jean-François) : Oui.
M.
Hamad
: ...pas, mettons, sur... Parce que j'ai compris, vous
regardez la Commission de la construction dans ses directives qu'elle
fait, mais, dans les actes répréhensibles...
M. Bernier (Jean-François) : Non, tout
à fait. Toujours
en lien avec la finalité de la loi, qui est l'article 3, les actes
répréhensibles.
M.
Hamad
: O.K. Là, on s'entend. O.K. Je comprends, là, O.K.,
je comprends.
12,
alors, j'ai compris ça... Oui, le 11, excusez-moi, 11. Évidemment,
vous faites une enquête, il faut rentrer dans les locaux. Alors, actuellement, vous n'avez pas
de pouvoir, dans votre enquête, de demander aux responsables de rentrer
dans les locaux? C'est-u ça?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Actuellement, nous l'avons en vertu de la loi sur le protecteur des usagers
en santé et services sociaux, mais...
M.
Hamad
:
Pas les autres.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : ...pour ce qui est des divulgations, ce n'est pas un
pouvoir qui nous est accordé par le projet de loi n° 87.
M.
Hamad
: O.K.
Donc, je comprends, là, vos pouvoirs d'enquête sont dans les services sociaux, santé, mais vous n'avez pas... Si on vous donne le même
pouvoir, vous voulez l'avoir dans l'autre côté pour pouvoir aller où vous
voulez enquêter.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : C'est ça, exactement.
M.
Hamad
:
Je comprends. O.K. Ça, c'est la même logique partout. O.K.
Ça, vous l'avez expliqué, R-13, ce n'est pas nécessairement l'UPAC, si on peut aller dans d'autres autorités, vous l'avez
bien expliqué.
14,
O.K., rapport annuel, en fait vous demandez aux ministères,
dans leurs rapports annuels : Bien, coudon, mettez combien de cas vous
avez eus, etc. Puis vous, vous allez faire votre rapport en plus.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) :
C'est ça, M. le Président. C'est de préciser, dans le rapport annuel que le ministre dépose à l'Assemblée nationale...
M.
Hamad :
Les nombres, là.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : ...le nombre de cas fondés, reçus, fondés, non fondés,
les mesures qui ont été prises.
M.
Hamad
: O.K.
15 : dans cinq ans, on présente le rapport à une commission parlementaire. Vous dites que... donner le pouvoir à la commission
parlementaire de dire : Bien, on va revoir la loi puis... Ça, ça
s'applique, d'ailleurs, mon expérience,
j'ai vu ça dans plusieurs organisations, on a le droit, à un moment donné, de
dire... bien là, on regarde si la loi est encore bonne, applicable, etc. O.K. Vous voulez le mettre dans la loi,
mais... peut se faire sans avoir la loi, mais c'est plus fort.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : Surtout, M. le Président, quand il s'agit de nouvelles
lois, de nouvelles législations, c'est d'intérêt de prévoir, après cinq ans, une
révision de la loi. Effectivement, ce n'est pas obligatoire de le mettre, l'Assemblée
nationale est souveraine, le gouvernement peut aussi décider de proposer à l'Assemblée nationale... mais c'est une bonne pratique.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : La commission parlementaire de qui relève votre organisme, à ce moment-là, peut, par mandat, procéder justement
à cette évaluation-là.
M.
Hamad
:
Oui, oui, oui, exactement.
Pour
terminer... C'est bien, là, on a fait le tour de toutes vos recommandations. Puis en passant c'est très
bon, ce que j'entends, puis c'est clair.
Là,
vous avez dit... J'ai bien compris que vous êtes en accord pour le fait
d'exclure le secteur privé comme toutes les autres lois canadiennes?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Le secteur privé, c'est une autre question,
un autre enjeu. Par cette loi-là, ce qui est visé, c'est
l'assujettissement des organismes publics et, je dirais, très largement des
organismes qui sans être publics, en ce qui
me concerne, sont des organismes privés qui fonctionnent avec un financement
public, mais on les appelle quand
même des organismes privés, souvent conventionnés. Ça, c'est le gouvernement
qui dit : Moi, je vais m'autoréguler, je prends des mesures pour
que les divulgations puissent être faites dans un cadre qui protège les
divulgateurs.
La pertinence
d'inclure le secteur privé, la question est d'un grand intérêt, elle se pose,
mais ce n'est pas au Protecteur du citoyen à
trancher cette question-là, c'est au législateur. Et, le cas échéant, si
c'était la volonté du législateur, il faudrait
qu'une loi particulière puisse être conçue. Il faut poursuivre les réflexions,
il y aurait plusieurs adaptations qui seraient nécessaires.
Est-ce
que cette éventuelle loi pourrait être aussi administrée par le Protecteur du
citoyen? Certainement que oui, avec
les ressources nécessaires, mais la première question à laquelle il faut
répondre, c'est : S'il est décidé d'assujettir le secteur privé,
quelles sont les meilleures dispositions législatives, les adaptations qui sont
requises? Parce que ça ne pourrait pas être
un article qui ajoute «et le secteur privé est assujetti selon les mêmes
modalités», c'est clair que non.
M.
Hamad
:
Exactement. Mais en fait, là, le principe de cette loi-là, c'est le fonds
public, là, c'est la gestion des fonds
publics, soit la gestion d'organisations où les gens sont subventionnés. Ce
qu'on veut, c'est vraiment permettre aux citoyens de s'assurer une
surveillance sur les fonds publics.
Mme Saint-Germain (Raymonde) :
Voilà.
• (16 h 50) •
M.
Hamad :
Maintenant, le privé, le privé, il y a deux types : le premier, c'est des
compagnies qui sont publiques, donc
il y a des actionnaires, et ces compagnies-là, en général, sont surveillées par
l'AMF, et il y a une compagnie privée purement
privée, qui ne fait pas affaire avec le gouvernement, une petite entreprise, un
propriétaire, je ne sais pas, moi, d'un dépanneur, un propriétaire d'une entreprise, ça, c'est une autre affaire
qui... Et là, actuellement, l'esprit de la loi, c'est qu'on ne va pas gérer le dépanneur puis la petite
compagnie privée qui est complètement privée, il n'y a aucun lien avec le
fonds public, l'argent du public.
Les
compagnies publiques, maintenant, il y a l'Autorité des marchés qui a
l'autorité de suivre, de s'assurer... Et d'ailleurs on l'a vu dans les journaux, peut-être il y a une réflexion
sur la divulgation pour une compagnie inscrite à la bourse, donc qui a des actionnaires. Donc, le
public en général, il est actionnaire de cette compagnie-là. C'est le rôle
de l'AMF de s'assurer de ces éléments-là.
Là, ici, j'ai
compris, là... Juste mettre ça en perspective, parce qu'on peut... on va
dire : Regarde, on va ouvrir, tout le monde, puis on y va là-dessus, mais évidemment, à un moment donné,
là, il faut savoir pourquoi qu'on fait ça. Le but, c'est la gestion du fonds public, c'est de
l'argent du peuple qu'on veut le protéger contre les actes répréhensibles,
contre une corruption, contre un usage
excessif, etc., et aussi on veut protéger, les actes publics qui causent un
danger sur la santé et sécurité ou l'environnement. Alors, c'est dans
cet esprit qu'on travaille, je pense, que la loi a été déposée.
Puis vous, ce que vous venez faire, vous prenez
ça, dites : Moi, demain matin, je fais ça, comment je peux opérer?
Donnez-moi aussi le pouvoir d'aller enquêter, donnez-moi le pouvoir d'avoir
accès. Donnez-moi le pouvoir aussi de moi-même,
si je sens... Même, pendant une enquête, si ça m'amène à d'autres enquêtes,
donnez-moi le pouvoir d'aller plus loin puis... Puis vous me dites que,
dans les pouvoirs qu'on donne ici, le modèle, comme ombudsman, dans votre
communiqué de presse, vous êtes... dans les sept, quand même, c'est une loi qui
donne plus de pouvoirs que les sept autres provinces.
Mme Saint-Germain (Raymonde) : En
général, oui. Certains pouvoirs, nous ne les avons pas et nous les demandons,
mais, en général, oui.
M. le Président, est-ce que je pourrais, sur le secteur privé, ajouter quelque chose mais qui va dans le sens de ce que
disait le ministre? D'une part, s'agissant de la... Il existe plusieurs
instances, hein, déjà qui ont une compétence sur le secteur privé. Et, quand on parle de l'UPAC, évidemment,
pour la corruption, l'UPAC déjà joue un rôle de coordination avec d'autres instances, notamment
Revenu Québec, notamment l'Autorité
des marchés financiers, la Commission de la construction. Il y a
différentes instances, y compris en emploi, je ne vais pas, quand même, toutes
les énumérer.
La question
qui se pose dans le privé, c'est — et ce projet de loi peut être
inspirant : Est-ce qu'un syndicat ne peut pas se doter — je
prends un syndicat, mais je pourrais prendre une grande entreprise privée de
télécommunications ou d'informatique — de son propre système interne, qui peut
s'inspirer, celui-là, de
divulgations, de lanceurs d'alerte? Est-ce qu'il faut aller, présentement,
dans le contexte où ce sont des fonds publics, ce sont des services publics
qu'on veut examiner, mélanger les deux genres? En tout cas, ça demande, je
dirais, une solide réflexion. Et rien n'empêche les organismes publics,
là-dessus, de s'autoréguler en plus, évidemment, des mesures, qu'il ne faut pas
sous-estimer, qui ont été mises en place
pendant la commission d'enquête sur la corruption et la collusion dans
l'industrie de la construction et
depuis. Alors, il faudrait aussi se mettre à niveau sur ce qui a été fait pour
éviter des dédoublements et, je dirais, quelque part des dépenses
inutiles.
Alors, c'est
une question sérieuse, il ne faut pas l'évacuer, mais en même temps il faut y
réfléchir correctement. Puis,
regardez, il y a des enjeux contemporains, mais il y a aussi des gestes qui ont
été posés, alors il faut en tenir compte.
M.
Hamad
:
En fait, on est à la même place, et je vous comprends, puis c'est bon que vous
l'expliquiez aussi à tout le monde
ici. Quand vous parlez... c'est ACCES Construction où on a le ministère du
Revenu, l'UPAC, l'Autorité des marchés, la Commission de la
construction, la Régie du bâtiment, qui échangent l'information, ce qui est
relatif à la construction, puis évidemment
ça amène à des enquêtes et après ça, évidemment, arrestation, s'il y a lieu.
Puis, si une entreprise triche au niveau de l'impôt, il y a le ministère
du Revenu qui va suivre. Ça, c'est l'argent qui va au public. Parce que je
reviens toujours avec la pensée, l'argent du public, l'argent... les impôts,
les taxes que les gens doivent pour donner à
l'État. Cet argent-là, on le contrôle. Si on triche au niveau impôt, on a le
ministère du Revenu, et donc, là, on a le
contrôle là. Puis, évidemment, ouvrir large, c'est sûr que c'est complètement
une autre réflexion, parce que ce n'est pas les mêmes mesures, ce n'est
pas la même structure en place qui va suivre et, évidemment, l'enquête, etc.
Maintenant...
Le Président (M. Bernier, Montmorency)
:
Merci, M. le ministre.
M.
Hamad
: C'est
terminé?
Le
Président (M. Bernier, Montmorency)
: C'est terminé, je vous
remercie. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M.
le député de Gaspé, la parole est à vous.
M. Lelièvre :
Pour une durée de?
Le Président (M. Bernier, Montmorency)
:
Une durée d'environ une quinzaine de minutes. Merci.
M. Lelièvre : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour vos informations, vos commentaires puis pour le
mémoire, qui va nous alimenter, j'en suis certain.
Bon, quelques
questions. C'est sûr que, dans 15 minutes, on va rester sur notre appétit, j'en
suis certain, là, mais je vais y
aller de façon plus générale dans un premier temps. Selon vous, est-ce que la
portée du projet de loi n° 87, tel qu'il est libellé actuellement, puis en fonction de votre expérience,
votre vécu comme organisation... Vous recevez quand même un grand nombre de plaintes depuis des
années, de différentes natures, et je suis convaincu qu'à partir de
l'expertise, des connaissances que vous avez au sein de votre organisation...
je suis convaincu qu'en rédigeant le mémoire, en travaillant, dans les dernières semaines, les derniers mois peut-être,
sur le dossier vous devez avoir en tête... vous devez vous dire, en fonction, là, du contenu, à date, du
projet de loi, là... Moi, je pense que le ministre fait souvent
référence à la notion gestion de fonds
publics, bien gérer les fonds publics. Je suis certain que vous devez vous
dire, là... Moi, avec le contenu de projet de loi qui est devant
moi, je pense qu'on atteint peut-être 30 %,
40 %, 50 %, 80 %
de la cible que le gouvernement
actuel vise. Est-ce que vous pouvez... Puis je ne veux pas un pourcentage
précis, mais, pour nous éclairer, là, vous
avez quand même une vaste expérience, des compétences dans le domaine, selon
vous, quelles sont les contraintes en termes
d'efficacité si on veut vraiment assainir les fonds publics puis épargner le
maximum de fonds pour nos citoyens et citoyennes?
Mme Saint-Germain (Raymonde) : M. le
Président, je vais commencer par dire que la portée, en termes législatifs, elle est quand même très large, ce
sont toutes les lois, tous les règlements du Québec, du Canada
applicables au Québec. Et, dans ce sens-là,
sous l'angle de la portée législative, c'est très large. Je suis entourée
d'avocats, alors j'essaie d'être prudente, là, je les regarde. Ça semble
aller.
Il faut
reconnaître aussi, et ça, c'est positif, que, sur le plan des organismes
publics assujettis, c'est vraiment très large, hein, plus de 500 organismes, qui comptent
680 000 employés, notamment, des ajouts majeurs, Hydro-Québec,
Investissement Québec, Loto-Québec, hein,
toutes les entreprises, au fond, du gouvernement, la Société Innovatech
du Grand Montréal, toutes les Innovatech du
Québec, la Société des alcools, les commissions scolaires, tous les cégeps,
toutes les universités du Québec, y inclus,
là, toutes les composantes de l'Université du Québec, et aussi
53 organismes distincts, donc
des organismes qui ne sont pas partie d'un réseau : l'Agence métropolitaine
de transport, la Caisse de dépôt et de placement
du Québec, la Commission de la construction du Québec. Alors, ça, c'est
vraiment positif, et je tiens vraiment à
le souligner. Et n'oublions pas que ce n'est pas tout employé mais toute
personne qui peut faire une divulgation. Alors, ça, c'est vraiment très
large.
Cela étant,
est-ce qu'on doit aller plus loin? Je l'ai soulevé dans le mémoire, et ça fait
partie des recommandations, effectivement,
notamment les instances municipales. Ce sont des organismes publics. Il y a
deux scénarios possibles, mais ce sont des organismes publics, les
municipalités sont une créature du gouvernement du Québec. Et présentement le mécanisme de protection, il est insuffisant, on
l'a dit, en matière éthique et déontologique, seulement à l'endroit des
élus, les employés municipaux ne sont pas
protégés. Les citoyens des municipalités qui font... ne peuvent pas faire de
divulgation à l'endroit des employés
municipaux et donc ne peuvent pas non plus le faire de manière protégée. Alors,
ça, je pense que c'est vraiment important.
Je l'ai dit tout à l'heure, tout organisme privé
conventionné ou qui, au fond, vit de manière réglementée avec des fonds publics, nous le voyons, la capacité
d'avoir un chien de garde qui peut intervenir, c'est vraiment une source
d'autodiscipline. Dans le domaine de la santé et des services sociaux, nous
avons, dans certains cas, fait fermer des résidences
pour personnes âgées, nous avons obtenu parfois des changements de direction,
nous avons fait corriger des procédures, et je n'ai pas de raison de
croire qu'en matière d'actes répréhensibles et en matière de protection des
divulgateurs contre les représailles il n'y a pas du travail du travail à faire
là. Et c'est important, à mon avis. Donc, enseignement
privé, établissements d'enseignement privés conventionnés, établissements de
santé privés conventionnés, santé et services sociaux, les organismes
communautaires qui sont subventionnés pour rendre des services en santé et services sociaux, de plus en plus des organismes,
d'ailleurs, vers lesquels le régime se tourne pour rendre des services,
ce serait vraiment, à mon avis, important.
Tous les enjeux qui sont liés aussi aux bureaux coordonnateurs des services
de garde, qui sont subventionnés par le gouvernement,
ce sont des fonds publics; les places, les garderies qui ont des places,
dont les services sont subventionnés. Alors,
tout ça. Et ça fait l'objet de recommandations dans le rapport. À mon avis, ça
devrait être inclus et considéré du secteur public.
Le Président (M. Bernier, Montmorency)
:
Merci. M. le député.
• (17 heures) •
M.
Lelièvre : Merci. Je comprends bien votre réponse. Je vais aller un
peu plus loin cette fois-ci : Si l'objectif du gouvernement est
vraiment d'assainir de façon maximale la gestion des fonds publics, s'assurer
que les citoyens et les citoyennes du Québec
en aient le maximum pour leur argent, ne croyez-vous pas qu'on devrait aller
jusqu'à... bon, vous avez mentionné
inclure les municipalités, vous avez mentionné différentes instances, c'est
parfait, mais ne croyez-vous pas qu'on
devrait aller jusqu'à également inclure tout organisme, toute entité qui
directement ou indirectement ont un lien contractuel avec l'État moyennant une rémunération ou une contrepartie
monétaire? Parce que, par exemple, on peut avoir un organisme gouvernemental qui fait affaire avec une entreprise privée,
cette entreprise privée là peut
vendre des services, et il se peut
que, dans l'organisation privée, il
y ait, disons, des cas de gestion ou de pratiques douteuses qui se
fassent, et les employés
qui seraient au courant de ça ne pourraient pas bénéficier de la protection qui
est prévue à la loi. Donc, à mon avis, si
on regarde le fort pourcentage de services et de biens rendus par l'entreprise
privée, par les entreprises privées à l'État, il m'apparaît clair que, si on ne couvre pas le secteur privé notamment, on
va possiblement ou potentiellement manquer une grande partie des gains visés
par le projet de loi n° 87.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Bien, dans un premier temps, je dirais que
la définition large d'«organisme public» inclut des organismes privés
qui sont financés à même des fonds publics. Ça, c'est le premier élément.
Vous
allez plus loin en disant des organismes privés, des compagnies, au fond, qui
vivent beaucoup, pour beaucoup, de
contrats du gouvernement. Bon, il y a déjà une forme de protection, mais elle
est spécifique, c'est... enfin, que nous recommandons quand on dit
«protection à l'égard», pour les actes répréhensibles commis non seulement au
sein, mais à l'égard des services publics.
Alors, un contractant qui ferait en sorte de constater que quelque chose est un
acte répréhensible, dans un service public,
pourrait être un divulgateur. Vous souhaitez que ça aille plus loin et que,
dans le cadre possiblement du contrat
de cette entreprise privée avec un organisme public, si un divulgateur faisait
part d'actes répréhensibles dans
l'administration du contrat ou dans la prestation de l'entreprise privée, qui
donc peut entraîner soit un abus de fonds publics ou soit une mauvaise gestion... Dans un cas comme ça, si je me
rappelle bien, il y a une partie de la divulgation qui pourrait être faite à l'UPAC, si on est en matière
contractuelle. Ce serait l'UPAC, à ce moment-là, en matière
contractuelle, qui serait l'instance qui recevrait la divulgation, il y a déjà
cette forme de protection là.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député.
M.
Lelièvre : Oui, pour une partie, effectivement, pour une partie du...
disons, une partie du service rendu pourrait être couverte par soit l'UPAC ou d'autres organisations, mais... Je comprends
votre réponse, mais, bon, je pense qu'on n'aura peut-être pas le temps
d'aller aussi loin que je le voudrais.
Je
vais aborder un autre volet, un volet qui m'apparaît extrêmement important
parce que, comme objectif, l'objectif est
louable, on veut demander à la Protectrice du citoyen, bon, d'assumer, avec son
organisation, un rôle extrêmement important pour la mise en oeuvre puis
l'application de cette loi-là, mais on a parlé d'outils, on a parlé de
ressources, puis je me souviens, dans une autre commission, d'avoir entendu
effectivement les représentants de la Commission municipale du Québec, l'an
dernier ou peut-être il y a deux ans, venir nous dire que malheureusement on
n'a pas les ressources pour réaliser tout le
mandat que nous avons. D'ailleurs, vous l'avez soulevé, je pense, lors de votre
présentation, puis c'est effectivement pertinent.
Est-ce que vous avez
fait une évaluation? Êtes-vous en mesure de nous dire ici aujourd'hui à peu
près à quoi pourrait ressembler, par exemple, le niveau, l'augmentation du
volume de tâche relié à l'application de la loi n° 87 pour votre organisation? Je ne vous demande pas de
nous donner un chiffre en dollars ou en centaines de milliers de dollars
près aujourd'hui, mais, en termes de
pourcentage, là, de travail, de charge pour votre organisation, est-ce que
l'application de cette loi supplémentaire là
ferait en sorte que ça va augmenter, selon vos estimations, de 10 %, de
20 %, de 30 %, de 50 % votre travail, votre charge, donc
incidemment ça va avoir un impact direct sur vos ressources professionnelles,
et financières, et autres?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : En fait, M. le Président, nous avons eu des
échanges avec le Secrétariat du Conseil
du trésor lorsqu'il élaborait le projet de loi. C'est, bien sûr, le projet de
loi du gouvernement et non pas celui du Protecteur du citoyen, mais nous avons été consultés, nous avons eu
différents échanges, et avec le temps le projet a évolué, et notamment a évolué dans le sens où le
Protecteur du citoyen devient l'instance qui, la première, reçoit les
divulgations, et non pas l'inverse. En
d'autres termes, un employé n'est pas obligé d'abord de divulguer à son
responsable interne. Alors, ça a une incidence.
Oui, nous avons des
évaluations. Elles n'ont pas été faites sur la base d'un pourcentage de nos
effectifs mais plutôt sur la base d'un potentiel de divulgateurs en fonction du
nombre d'employés des instances assujetties et aussi d'une comparaison avec le
nombre de plaintes que reçoivent les autres institutions eu égard, eux aussi,
aux instances assujetties. Alors, nous avons des données relativement précises
qui incluent un scénario avec les municipalités et un scénario sans les municipalités. J'ai récemment, sans que ce soit une demande budgétaire... la loi n'est
pas adoptée, et on verra, la loi qui
sera sanctionnée, ce que le législateur... ce que vous aurez retenu, mais
j'ai très récemment informé le secrétaire du Conseil du trésor de notre
évaluation budgétaire.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député.
M.
Lelièvre : Est-ce que c'est une information de nature à être transmise
à la commission pour l'avancement de nos travaux? Ça a été déposé au
secrétaire du Conseil du trésor, donc...
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Ça a été déposé au secrétaire, M. le
Président. Vous savez, c'est judicieux, je dirais, administrativement et budgétairement aussi de confier ce mandat
à une instance existante parce qu'il y a tout un lot de services communs qui existent déjà qui vont
pouvoir être utilisés et mis à profit, il y a aussi une expertise. Je peux
vous dire que, sans le secteur municipal, notre évaluation est de l'ordre de
840 000 $.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. M. le député.
M.
Lelièvre : Il me reste quelques minutes. J'aimerais terminer avec le
monde municipal, qui est un des éléments qui, je suis certain, va
retenir beaucoup l'attention des membres de notre commission.
Notre
formation politique est effectivement d'accord avec votre recommandation à
l'effet qu'il nous apparaît quasi impossible d'exclure le monde
municipal, le secteur municipal de la portée de la loi n° 87, pour
différentes raisons. Je pense que toutes les...
je dirais, toutes les péripéties des dernières années au niveau de la gestion
municipale font en sorte que les
citoyens et les citoyennes du Québec seraient, à mon avis, extrêmement déçus
que la loi n° 87 ne soit pas applicable à ce secteur-là.
Ma
question serait : Est-ce que vous avez envisagé également que la loi
n° 87 s'applique aux organismes paramunicipaux
ou supramunicipaux? Je pense à un cas concret qu'on retrouve dans beaucoup de
municipalités, par exemple, au niveau
des offices municipaux d'habitation, qui sont des organismes paramunicipaux qui
gèrent souvent, là, plusieurs
centaines de milliers de dollars, voire même des millions de dollars. Les
municipalités, avec les nouvelles règles comptables, si je ne me trompe pas, sont obligées même d'inclure les
paramètres fiscaux, budgétaires dans leurs rapports financiers annuels, de plus en plus on est
imputable, au plan municipal, de ces instances-là. Il y en a beaucoup. Je
vous donne les offices municipaux
d'habitation, mais il y en a d'autres. Est-ce que vous croyez qu'on devrait
aller également jusque-là?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Bien, je pense que, si l'objectif que l'on
garde en tête, c'est de prévenir les actes
répréhensibles dans les municipalités, ça comprend les sociétés paramunicipales
et ça comprend aussi la protection contre les représailles de toute
personne qui fait des divulgations concernant ces instances.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Vous avez autre chose à
ajouter? Ça va? Il reste un petit peu de temps, M. le député, si vous
avez une autre question.
M. Lelièvre : Oui, bien, merci, je
pense que ça fait le tour pour le moment, là, de... Vous avez quelque chose à
ajouter?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : M. le Président, compte tenu que notamment
les juristes du Conseil du trésor vont examiner nos commentaires et que
je tiens à ce qu'ils soient d'accord avec nous, quand nous demandons que la portée de la loi soit la même que celle de l'UPAC,
en termes d'organisme public, l'UPAC a compétence en matière de corruption s'agissant aussi des municipalités et
des organismes paramunicipaux. Donc, cette recommandation-là que nous
faisons, elle inclut donc également les sociétés paramunicipales. Et, sur le
plan juridique, c'est comme ça qu'elle a été formulée.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci.
M. Lelièvre : Merci.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Ça va, M. le député?
M.
Lelièvre : En conclusion, rapidement, je reviendrais avec la demande...
Si on pouvait avoir accès aux données financières
qui ont été fournies par la Protectrice du citoyen quant aux besoins, aux
ressources financières nécessaires pour l'application des nouvelles
exigences, ce serait apprécié.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : D'accord. Donc, s'il y a un
document que vous pouvez déposer, Mme Saint-Germain, vous pouvez le
faire parvenir au secrétaire de la commission, qui verra à le distribuer aux
parlementaires présents.
M. le député de La Peltrie, la parole est à
vous.
M.
Caire : Pour
combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Environ une dizaine de minutes.
M.
Caire : Merci, M.
le Président. Bonjour à tout le monde.
Mme Saint-Germain, j'aimerais revenir
peut-être sur votre recommandation 6 parce que, puis là vous allez
peut-être pouvoir m'éclairer, vous avez dit : Je pense que, si on veut
donner une protection au secteur privé, ça devrait
faire l'objet d'une législation particulière; par contre, quand je lis votre
recommandation 6, donc modifier l'article 1 et 5 et remplacer par «à l'égard d'un organisme
public», moi, j'avais compris que ça incluait le secteur privé de facto.
Alors, peut-être que vous pourriez m'éclairer un peu, là, sur la portée que
vous donnez à cette modification-là.
• (17 h 10) •
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : En fait, ce que ça inclut, et c'est lié avec la
protection des divulgateurs, ça inclut une
divulgation qui serait faite pour un acte répréhensible commis effectivement à l'égard d'un service
public mais par une personne qui n'en est pas membre. Ça
peut être, la divulgation, enfin, fait par une personne qui n'en est pas
membre, ça peut être aussi... on dit... Excusez-moi, je vais juste relire le
deuxième considérant. C'est ça, c'est lié effectivement avec les représailles des tiers divulgateurs. Ça
veut donc dire que, dans le cadre d'un service rendu soit pas une compagnie privée soit par... un usager d'un service public, il constate qu'il y a un acte répréhensible qui est commis, il
pourrait venir divulguer et devra être protégé contre toute forme de
représailles. Et ce n'est pas, dans ce cas-là, un employé du service public.
Alors, c'est pour ça.
Je pense que
Me Bernier, M. le Président, souhaiterait compléter.
M.
Caire :
Juste pour ma... Peut-être juste pour ma compréhension...
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Juste... On va laisser M. le député poser sa question, puis je reviens à vous, M. Bernier.
M.
Caire :
Donner un cas totalement fictif, je suis, moi, un fournisseur de services informatiques,
donc une compagnie privée, je signe avec une
entité du gouvernement chargée de donner des services informatiques à
l'ensemble du gouvernement — vous comprendrez qu'on est toujours dans le
fictif — un
contrat de 25 millions, chiffre hypothétique, et je me rends compte
que d'autres entités du gouvernement, pour le même service informatique, qu'ils
pourraient utiliser parce qu'il est déjà
payé, signent des ententes avec d'autres fournisseurs ou même avec mon propre
fournisseur pour plusieurs millions de dollars. Je dis : Voyons donc! Ça
n'a pas d'allure! Vous avez déjà payé pour ça puis vous allez payer encore pour
le même service informatique? Je décide de dénoncer ça au Protecteur du
citoyen.
Suis-je
protégé ou est-ce que je pourrais donc faire l'objet de représailles, voir mon
contrat résilié ou faire en sorte que d'autres contrats ne seraient pas
octroyés à mon entreprise par mesure de représailles?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Alors, M. le Président, dans une situation
comme celle-là, vous faites une divulgation
pour une raison de mauvaise gestion, un exemple fictif, et vous êtes
effectivement protégé, théoriquement, par la recommandation que le
Protecteur du citoyen fait...
M.
Caire :
...pas par la loi actuelle.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : ...mais pas par la loi actuelle. Et c'est
ça qu'on a voulu prévoir, que, quand on parle d'un consultant qui soit perd son contrat... Mais ça, ce serait
très gros, dans le cas que vous illustrez, c'est plutôt : Ah!
tiens, ne se qualifie plus pour d'autres contrats. Alors, voici un enjeu très
particulier pour lequel il faut vraiment protéger les tiers.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci.
M.
Caire : Et donc, quand j'en arrive à la conclusion que votre
amendement protège le secteur privé, je ne suis pas complètement dans le
champ.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : C'est-à-dire protège un divulgateur du secteur privé,
effectivement...
M.
Caire :
Oui, c'est ça, c'est ça.
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : ...mais ne couvre pas le secteur privé en termes de
divulgation d'actes répréhensibles à
l'endroit du secteur privé. Il se pourrait, par exemple, que votre compagnie
informatique... Là, je veux faire attention
parce qu'il y a l'enjeu de l'UPAC, avec des contrats. Si vous êtes une
compagnie fraudeuse, ça, c'est autre chose.
M.
Caire :
...pas dans le criminel, là, restons dans le...
Mme Saint-Germain
(Raymonde) : C'est ça. Mais, c'est ça, si c'est un de vos employés, de
la compagnie d'informatique, qui constate qu'il y a des enjeux qui ne seraient
pas liés à un contrat public, mais il y a des enjeux de corruption et de
collusion au sein de votre compagnie, le projet de loi ne va pas couvrir cela,
la malversation.
M.
Caire :
Je vous donne un autre exemple, un autre exemple totalement au hasard. Mon
entreprise sollicite un contrat informatique
du gouvernement pour plusieurs millions. Dans le devis, je mets un certain
nombre d'experts en la matière, et ça s'adonne que ces experts-là ne
sont plus disponibles pour la réalisation du contrat, donc sont affectés à
d'autres tâches. Moi, je dis : Bien là, ça n'a pas de sens, on a vendu ces
ressources-là, puis finalement ce n'est pas les ressources qui font... Ce qui
n'est pas un dossier pour l'UPAC, on s'entend, on n'est pas dans la fraude,
mais on peut s'entendre qu'il y a là-dedans
peut-être... on est à la limite, là. Est-ce que moi, en dénonçant mon
entreprise, je suis protégé?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain.
M.
Caire : Je vous en
pose des pas pires, hein?
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Dans une situation... Celle-là, M. le
Président, je comprends que non, c'est...
M.
Caire : Et c'est
fictif, là.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Oui, oui, c'est tout à fait fictif. Mais
moi, par contre, si vous dénonciez cela, je vous protégerais par mon pouvoir d'initiative, si je l'avais, parce
que, là, je voudrais bien aller voir, le ministère qui a donné ce contrat-là, quelle garantie a-t-il exigée
pour qu'en matière informatique, par exemple, les chargés de projet, les
informateurs, les fameux architectes
d'entreprise qui coûtent si cher... quelle garantie a-t-il exigée que les noms
qui sont dans l'appel d'offres soient
les noms qui vont se retrouver sur le terrain dans ses locaux. Alors, il y
aurait, pour moi, une manière de faire, mais, encore une fois...
M.
Caire : ...votre
amendement pour les protéger ou dans le contexte...
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : C'est-à-dire que moi, je le lirais dans le sens de l'intérêt des fonds
publics. C'est sûr que je vous protégerais, mais la mesure de ma protection
pour vous, c'est que vous seriez traité en toute confidentialité et que je ne
dirais pas à l'organisme public qui vous êtes et qui m'a divulgué ça. Mais de
ma propre initiative je pourrais aller voir l'organisme public et faire une
enquête sur la qualité de sa gestion du contrat x d'informatique, alors, mais
ce ne serait pas... ça ne couvre pas, dans ce sens-là, l'entreprise privée,
c'est sous l'angle de l'intérêt du service public que je le...
M.
Caire :
Diriez-vous, à cet égard-là, que la recommandation 6 que vous faites
serait une mesure de sécurité supplémentaire qui serait souhaitable,
dans le contexte de l'exemple totalement fictif que je vous donne, là?
Mme Saint-Germain (Raymonde) : C'est
sûr que c'est une mesure de sécurité additionnelle pour attirer des
divulgations provenant du secteur privé, de simples citoyens, d'organismes
communautaires à l'endroit d'organismes publics
tout en protégeant le divulgateur de représailles, mais lesquelles représailles
normalement viendraient d'un service public à l'endroit du divulgateur.
M.
Caire : Donc, ce
serait une façon relativement simple de protéger le secteur public et le privé
dans les intérêts du secteur public.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) :
Absolument. Et d'ailleurs on l'a observé dans d'autres législations au Canada.
M.
Caire :
O.K. Et donc, dans ce contexte-là, avec cette couverture-là, on n'aurait pas
besoin d'une législation particulière. Dans le cadre de la loi actuelle,
sous la recommandation que vous faites, on serait capable de donner une
protection intéressante quand même au secteur public dans les meilleurs
intérêts du secteur public...
Mme Saint-Germain (Raymonde) : Oui.
Et d'ailleurs...
M.
Caire : ...du secteur
privé dans les meilleurs intérêts du secteur public.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Oui, et, encore une fois, la protection
contre des représailles en dehors d'un contexte d'emploi.
M.
Caire : On
s'entend, on s'entend.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député.
M.
Caire :
Pour le secteur municipal, là, mon collègue a fait un petit bout là-dessus
intéressant, je comprends que c'est
un peu la même logique. Donc, avec les recommandations que vous faites, on pourrait
de façon assez simple donner une protection supplémentaire au secteur
municipal.
Mais — j'imagine, si vous en faites
la recommandation, mais je voudrais vous l'entendre dire — est-ce
que vous trouvez que c'est souhaitable qu'on le fasse dans le contexte actuel?
Parce que, bon, je comprends, le
ministre nous dit... et vous l'avez dit aussi, puis je le reconnais, c'est une
loi qui pourrait faire école au Canada, mais, tant qu'à faire école, on
peut peut-être passer aux études supérieures puis s'assurer d'avoir une loi qui
va aussi loin que possible. Donc,
diriez-vous que ce serait souhaitable d'élargir la portée de la loi au secteur
municipal dans le sens de la recommandation que vous avez faite?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Ce qui est certain, c'est que le secteur
municipal et paramunicipal doit être couvert,
c'est certain. La modalité, moi, je laisse le soin au législateur, mais, si le
Protecteur du citoyen avait le mandat, je vous dis qu'on serait en mesure de l'assumer. Il y a là une expertise,
évidemment, qui se développerait, mais je vous dis aussi qu'il existe un régime à parfaire en matière
municipale et que, même si le choix était la R-2, donc
recommandation 2, Protecteur
du citoyen, il y aurait quand même des concordances à faire pour éviter des
dédoublements, que ce soit avec l'UPAC mais aussi avec ce qui existe...
notamment la Commission municipale.
Alors, le choix, il appartient au législateur,
les deux options sont possibles. Et, si je l'ai mis, c'est aussi que le
Protecteur du citoyen peut...
M.
Caire :
Mais d'où l'intérêt de donner la... Le non-chevauchement des responsabilités,
d'où l'intérêt de donner la responsabilité au Protecteur du citoyen,
j'imagine. C'est un des avantages.
Mme Saint-Germain (Raymonde) : C'est
sûr qu'il faudrait alors s'assurer, et dans la loi, qu'il n'y a pas de
chevauchement des municipalités. Donc, ce sont deux options qui s'offrent.
M.
Caire : J'ai
quelques petites questions sur les pouvoirs qui seraient...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Il vous reste environ une minute, M. le député.
M.
Caire :
Une minute. Très rapidement, bon, vous en avez discuté avec le ministre, sur le
pouvoir d'enquête, là, la façon dont
on pourrait donner peut-être un peu plus de punch à vos enquêtes, à vos
pouvoirs de contrainte. J'attribuerais la même logique... Une fois que vous avez fait un rapport défavorable à un
organisme et des recommandations, est-ce que... Parce que, là, ce que je comprends, c'est que vous faites des recommandations,
puis après ça c'est à la bonne grâce de l'organisme de les appliquer ou non. Vous pouvez l'accompagner, oui,
mais vous n'avez pas de pouvoir de contrainte, vous n'avez aucune façon d'amener cet organisme-là à
mettre en application les recommandations. Est-ce que ce ne serait pas souhaitable que l'organisme ait, par exemple, un
délai x pour mettre en place vos recommandations et qu'il ait
l'obligation de retourner devant le Protecteur du citoyen pour dire :
Bien, voilà, j'ai suivi tes recommandations, j'ai mis en place telle mesure,
est-ce que c'est à votre satisfaction? Est-ce que, ce genre de mesure là, vous
trouveriez ça intéressant?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Saint-Germain.
• (17 h 20) •
Mme Saint-Germain (Raymonde) : C'est
certain que toute mesure qui a un caractère plus contraignant est intéressante
pour un organisme qui fait des enquêtes et des recommandations.
Nos recommandations sont toujours assujetties d'un... ou assorties, plutôt, d'un
échéancier, parce que ce n'est
pas les calendes grecques, là, pour le suivi. Je veux souligner que j'ai quand
même... le Protecteur du citoyen a quand même
le pouvoir de revenir à la plus haute autorité, par exemple un ministre, si
dans un délai requis il n'y a pas eu de suivi ou de suivi satisfaisant
des recommandations. Alors, ça, c'est quand même ce qui est prévu.
Mais ce qui
est certain, c'est que le pouvoir d'informer l'Assemblée nationale dans le
rapport annuel, donc pouvoir de
diffusion publique, est toujours un pouvoir qui est positif, et c'est pourquoi
nous faisons une recommandation sur le pouvoir
de commentaire public, qui est celui qu'a déjà le Protecteur du citoyen, qu'il
l'utilise, je pense... enfin, je m'efforce, et mon équipe aussi, de
l'utiliser à bon escient. C'est un pouvoir souhaitable.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Merci,
Mme Saint-Germain. Nous allons passer maintenant à Mme la députée
de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Combien de temps?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Environ quatre minutes.
Mme Massé : Environ?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Quatre minutes.
Mme Massé : Quatre minutes. Merci.
Alors, bien, merci pour le travail extrêmement rigoureux.
Mes collègues
ont abordé déjà plusieurs préoccupations. J'aimerais peut-être porter notre
attention particulière... Parce que,
pour nous, une des grandes préoccupations, c'est le fait que ce n'est pas
l'ensemble des citoyens qui soient protégés,
mais que le focus soit mis sur le secteur public, quoique je pense que
l'amendement que vous proposez rajoute un élément de protection qu'on trouve fort intéressant si on devait s'en
tenir là, mais peut-être,
de façon plus pédagogique, si vous pouviez un peu nous expliquer qu'est-ce qu'il y a de si complexe de protéger aussi les gens du secteur privé
d'actes répréhensibles de la part de... Qu'est-ce qui rend ça... Vous semblez
dire que c'est plus complexe, qu'on ne peut pas simplement écrire une ligne, on
l'entend. Qu'est-ce que ça prendrait? On est très intéressés par ça.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Saint-Germain.
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : ...effectivement une question importante.
J'insiste pour dire qu'au départ l'intérêt
public, c'est le fondement de ce projet de loi là. Il crée même une exception
au devoir de loyauté. Le divulgateur, quel
qu'il soit, pourrait faire une divulgation au public, à certaines conditions,
lorsqu'il juge qu'il y a une situation d'urgence et d'intérêt public.
Alors, ça, c'est quand même important et à ne pas sous-estimer.
Le secteur privé, privé, privé, là, on n'est plus dans un contrat public, on n'est
plus dans... Bon, il existe déjà... Moi,
je ne dis pas : Il ne faut pas le faire, mais c'est qu'avant de le faire
il faut regarder très sérieusement ce qui existe déjà, ce qui a été mis en place notamment pendant la commission
Charbonneau, ce qui a été mis en place et sera mis en place depuis, pour
s'assurer qu'il n'y a pas de dédoublement, qu'on n'investit pas dans quelque chose,
là, qui va être vraiment un enchevêtrement
d'organismes et d'instances. Alors, ça mérite une réflexion avant d'aller vers
une législation.
Cela étant, il faut
aussi considérer que le secteur privé, c'est le secteur privé. Il y a un office
de protection du consommateur quand on... la
Loi sur la protection du consommateur peut s'appliquer, il y a différents
enjeux. Je reviens souvent avec, par
exemple, les syndicats, qui sont, au sens où on en parle, des instances
privées. Il y a déjà des lois qui régissent les syndicats. Est-ce qu'il
faut renforcer ces lois-là en termes de divulgation? Est-ce qu'il faut une
instance centrale, par exemple le Protecteur du citoyen, avec un mandat élargi
au privé? On a regardé ça. Il y a beaucoup de questions, beaucoup de questions
qui se posent et qui méritent une réponse avant de dire comme ça, là : Le
secteur privé est complètement assujetti. On a parlé de l'UPAC, évidemment,
tous les enjeux de corruption. Tous les enjeux d'évasion fiscale, avec toutes les possibilités qui existent déjà, je
voyais l'Autorité des marchés financiers, je voyais le... qui lance une ligne pour attirer ou pour faire en
sorte que les divulgations à l'endroit d'entreprises privées qui abusent
ou d'organismes de placement sur lesquels elle a compétence... puissent
divulguer en toute sécurité. Alors, c'est un peu l'inventaire de tout ça, de toutes les législations, qu'il faudrait
faire avant de statuer sur la pertinence d'une loi additionnelle et ses
modalités.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée.
Mme
Massé : Bien, justement, à cet effet-là, ce que je comprends dans
votre propos, c'est de dire : Ce n'est pas que c'est impossible, c'est infaisable, c'est juste de
dire : Il faudrait prendre le temps. Ma préoccupation est à l'effet...
Malgré la multiplication des éléments qu'on
a faits un peu pour, pardonnez-moi l'expression, patcher le bateau qui coulait,
hein, c'est comme : Oh! ce n'est pas
beau! on met un plasteur, on met un plasteur, on met un plasteur, au Québec,
dans la perspective de protéger l'ensemble des citoyens, leur assurer
une protection, il me semble qu'on aurait avantage à le prendre, ce temps-là, pour... Et je ne veux pas présager,
peut-être que tout est parfait, peut-être que tout est parfait. Le petit
secteur de recherche qu'on a nous laisse
entendre que tout n'est pas parfait, et, dans ce sens-là, ce que je comprends,
c'est que, si toutefois on réussissait
à convaincre le ministre que c'est important d'offrir à l'ensemble des
Québécois et Québécoises la protection
nécessaire, on pourrait s'asseoir et faire cette réflexion-là ensemble, puisque
vous l'avez déjà un peu entamée.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Saint-Germain, une courte...
Mme
Saint-Germain (Raymonde) : Effectivement, je souscris tout à fait. Et
je pense que l'enjeu de regarder quelles brèches ont justement
rapidement été colmatées et comment on pourrait, dans certains cas, peut-être
même intégrer des législations pour avoir
une protection qui soit plus cohérente, certainement complète... je pense que
c'est une réflexion qui doit être faite.
Mais
je n'ai pas la prétention de dire qu'elle a été faite chez nous. On y a réfléchi
mais, je dirais, sommairement, et je ne serais pas en mesure maintenant
de me prononcer.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Saint-Germain,
M. Bernier ainsi que les collègues qui vous accompagnent, de votre
participation à la Commission des finances publiques.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants afin de permettre au Syndicat de la fonction publique
et parapublique du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à
17 h 26)
(Reprise à 17 h 31)
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous
reprenons nos travaux. Donc, nous avons
le plaisir de recevoir les représentants du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, représenté par Mme Lucie Martineau,
Mme Nadia Lévesque et M. Louis-Joseph Saucier. Bienvenue à la Commission
des finances publiques. La parole est à vous pour une dizaine de minutes.
Allez-y, Mme Martineau.
Syndicat de la fonction publique et
parapublique du Québec inc. (SFPQ)
Mme Martineau (Lucie) :
Merci, M. le Président. Messieurs dames parlementaires. Évidemment, je dirais
d'emblée que ça fait 20 ans que j'attends cette commission parlementaire
là. Alors, je voulais vous dire que c'est une bonne nouvelle. Écoutez...
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : 20 ans.
Mme Martineau (Lucie) : Oui, oui,
20 ans minimum. Premièrement, ce projet de loi a deux bons
objectifs : premièrement, faciliter la divulgation d'actes répréhensibles,
et établir surtout un régime de protection contre les représailles. C'est une revendication de
20 ans pour vrai. On a coanimé un colloque en 1994, on en a fait des
demandes en négociation. Écoutez, il y a peut-être... je ne sais pas combien de
commissions parlementaires où on avait une recommandation, incluant celle à la commission
Charbonneau, de dire : Ça prendrait ça au Québec. Alors, nous en
sommes vraiment contents.
De plus en plus d'États adoptent des lois spécifiques pour encadrer la divulgation.
Alors, Louis-Joseph, qui est notre
conseiller à la recherche, a fait une recension, il y a beaucoup
d'organisations internationales également qui évaluent les différentes lois dans différents pays, en
Europe aussi. Au Canada, on en a parlé un petit peu avec la
protectrice tantôt. Alors, c'est sous
l'angle de vraiment comment les organisations internationales
ont qualifié les projets de loi que nous avons... que Louis-Joseph a
analysé le projet de loi n° 87. Donc, à partir des normes internationales,
des standards, on a fait ça. Juste vous dire
que le projet du Québec est beaucoup,
beaucoup... de beaucoup
supérieur à la loi fédérale, évidemment, vous avez vu comme nous tout ce
qui s'est passé avec cette loi-là.
Nous avons relevé cinq points forts, dans le projet
de loi n° 87, et nous allons vous exposer quatre pistes d'amélioration du projet
de loi.
Alors, tout d'abord, que toute personne puisse faire une divulgation, pas seulement
les employés des ministères et organismes, et qu'ils aient la protection
pour tous, c'est vraiment un point fort.
Le choix de
la protectrice... bien, du Protecteur
du citoyen comme institution, c'est
un choix judicieux pour assurer l'encadrement
et le suivi des divulgations, au lieu de créer un autre organisme comme il
s'est fait ailleurs également, donc... et aussi mener des enquêtes
relatives aux alertes.
Le choix également, pour les employés, de
pouvoir faire leur divulgation au sein de leur organisme ou directement envers le Protecteur du
citoyen, c'est, en fait, un choix
correct, qui inspire le plus confiance. La personne va aller où elle a
le plus confiance.
Qu'on donne au Protecteur du citoyen les pleins
pouvoirs d'enquête, qu'il ait le choix également d'aviser ou non la plus haute
autorité administrative des ministères qu'il y a une enquête, c'est vraiment un
bon point fort aussi du projet de loi.
Et également
qu'on en fasse l'évaluation cinq ans plus tard, de ce projet-là, c'est aussi un
bon point fort de ce projet de loi là. Puis j'en profiterais pour vous dire... Tantôt,
vous avez eu une discussion avec le privé, tout ça, mais je pense que... Faisons-le vivre, celui-là, qu'on attend depuis longtemps,
et après ça ajoutons les autres sujets où on doit approfondir.
En fin de compte, les pistes d'amélioration,
nous en avons quatre.
Le soutien
aux lanceurs d'alerte. Évidemment, les victimes de représailles, ça devrait inclure
le remboursement de frais juridiques, des dommages et intérêts ou la
possibilité de mutation dans un autre poste, si le besoin est.
Dans le même
soutien également, le soutien aux personnes qui n'ont pas
d'assistance juridique, peut-être que le Protecteur
du citoyen pourrait offrir, mettre à
la disposition des gens non syndiqués un accès à l'aide juridique... ou, qui n'ont pas accès à l'aide juridique, un montant maximal
pourrait être défini dans la loi pour qu'il y ait également une représentation.
Toujours
dans le soutien aux lanceurs d'alertes : le droit à la représentation
syndicale, le soutien de leur organisation syndicale durant tout le processus. Donc, on vous suggère l'ajout d'un article
qui existe dans la loi fédérale — en
fait on a pris ce qu'il y avait de bon. Alors, dans la loi fédérale, il y a l'article 21.6 qui réfère que, dans le
cadre des procédures, si vous
êtes syndiqué, votre organisation syndicale peut vous représenter tout le long
du processus.
Ensuite, bien, il y a également la deuxième
piste d'amélioration : renverser le fardeau de la preuve en cas de représailles. Là, ici, je tiens à dire que le fait
d'ajouter un paragraphe à l'article 122 de la Loi des normes du travail, bon, évidemment, on l'a fait regarder par des juristes
aussi. Oui, ça donne une présomption en faveur du ou de la salariée, sauf que,
pour être encore plus clair et transparent, on pourrait établir en toutes lettres
dans la loi qu'évidemment le fardeau de la preuve, il appartient à la personne qui est... pas la personne qui fait
la divulgation mais la personne qui est mise en cause, tiens, je dirais
ça comme ça, parce qu'on ne sait pas si... Alors, il y a une suggestion qu'on
vous fait pour ajouter un paragraphe plus clair dans le projet de loi, pour
être sûr que le fardeau de la preuve va incomber à l'employeur.
Des mesures de
redressement provisoires, c'est très,
très important. Vous savez, nous, là,
on en a vu, des congédiements, là,
hein, depuis 20 ans, des mesures de représailles aussi, vraiment,
là, des cas assez pathétiques, je vous dirais,
et dans toutes les organisations internationales on fait référence à l'importance d'accorder des mesures de redressement provisoires, en particulier quand il
y a perte d'emploi, O.K.? On a
déjà vu des sanctions, on a déjà vu des mesures disciplinaires, mais j'ai déjà vu un congédiement sur-le-champ, O.K.?
Alors, dans ce cas-là, on s'entend qu'un grief de congédiement, ça passe à huit, neuf mois, et la
personne, elle n'a pas droit à l'assurance-emploi non plus. Donc, je pense peut-être à des mesures comme un relevé provisoire,
comme il y en a qui, en attente d'enquête, au moins retirent leur salaire. En fait, on pourrait également
faciliter le recours à une ordonnance provisoire de la Commission des relations du travail pour
entendre plus rapidement ces cas-là, en tout cas il y a des suggestions qu'on
vous fait, mais l'importance vraiment de... Parce
qu'il y a des gens qui, en pensant
aux conséquences qu'il pourrait y avoir, vont se taire, ne diront pas les... ne feront pas la divulgation. Donc, déjà là,
en ayant un encadrement puis une protection, bien là ça facilite, les gens, à aller de
l'avant.
• (17 h 40) •
La troisième
piste d'amélioration, c'est conserver les mêmes possibilités de divulgation publique. Dans le projet de loi actuellement, on permet la divulgation publique seulement s'il y a
un danger imminent pour la santé, la sécurité ou l'environnement. Au Québec, il y a de la jurisprudence quand même, là, avec
tous les cas qu'on a vus, puis on est allés en arbitrage souvent. Elle est claire, il y a des conditions qui
entourent la dénonciation, il y en a au moins quatre, là. La dénonciation, elle doit être le dernier recours,
c'est-à-dire il faut que tu aies été au moins dans ton ministère, ton
supérieur immédiat, ton supérieur hiérarchique, en fait il faut que tu aies
fait des démarches à l'intérieur de ton organisation administrativement avant d'aller à l'externe,
c'est-à-dire chez le journaliste, O.K.? Il faut qu'également ta
dénonciation, elle soit faite de bonne foi, pas par pure vengeance, c'est la
jurisprudence qui le fait aussi. Il faut que l'ampleur de ta divulgation, ce ne soit pas disproportionné non
plus à ce que tu veux dénoncer, et il faut que ce que tu dénonces, ce
soit la vérité également. Alors, ça, c'est
les quatre critères de la jurisprudence. On croit qu'elle devrait être ajoutée
au fait de... pas seulement un danger imminent pour la santé, la
sécurité ou l'environnement. Il y a également d'autres pays qui indiquent qu'on peut faire une divulgation rapide
si on croit vraiment que ça risque de demeurer secret ou que les preuves
peuvent être détruites. Donc, ça aussi, on
vous dit que ce serait une bonne disposition. Inclure également une
disposition sur la protection des sources
journalistiques. Et, bon, en fait, si on rajoute les quatre critères de la
jurisprudence à ce qui est déjà dans le projet de loi... Puis, en fait,
nous, on croit, que les gens puissent avoir un pouvoir de divulgation non
seulement à des journalistes, mais à vous également, les parlementaires. Donc,
je ne sais pas où on peut inclure ça, mais
c'est... Comme la protectrice, elle, elle peut le faire dans sa loi, de dire :
Bien, moi, après le sous-ministre, après le ministre, bien, je peux le dire
à l'Assemblée nationale, bien il y a des gens qui pourraient le dire à leur
député, à leur ministre, des choses comme ça.
Et la dernière piste d'amélioration, c'est
vraiment l'imputabilité du Protecteur du citoyen. On lui accorde un grand pouvoir discrétionnaire. D'ailleurs,
Mme Saint-Germain l'a indiqué tantôt, elle aura à établir une
jurisprudence sur ce qui constitue ou
pas un acte répréhensible. Elle aura également à décider sous quelles
conditions une divulgation mérite une
enquête ou pas. Et, cela dit, on l'a marqué dans notre mémoire parce que
Mme Saint-Germain, vraiment, elle a su veiller avec brio tout le temps aux droits des citoyennes et des citoyens au Québec,
mais souvent les personnes passent, mais
les institutions restent. Donc, ce qu'on souhaite, c'est vraiment
donner... c'est-à-dire de renforcer la reddition de comptes du Protecteur du citoyen et surtout dans
le suivi des divulgations et des enquêtes. Actuellement, ce qu'on a
vu, dans le projet de loi, c'est que le
Protecteur peut exposer des cas de divulgation dans un rapport mais dans un
troisième temps, en premier il va faire ses recommandations à la plus haute unité administrative, le sous-ministre en titre, ensuite le ministre, après ça l'Assemblée nationale, et
on croit que le Protecteur devrait nous exposer tout cas qu'il juge pour l'intérêt public, donc, et pas seulement
non plus des mesures... aussi des mesures réparatrices — vous voulez m'arrêter, là, hein? — lui
donner des mesures... non, lui donner...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
...je veux qu'on échange avec les parlementaires.
Mme
Martineau (Lucie) : ... — non, mais j'arrête — lui donner les ressources nécessaires pour
le faire, O.K...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Parfait.
Mme
Martineau (Lucie) : ...pas
5 millions. Là, elle a dit 840 000 $, là, mais 5 millions,
ça, c'est au Canada que ça a coûté ça, là, on peut diminuer un peu, mais
au moins qu'elle puisse faire sa job.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup, Mme Martineau, de votre présentation. M. le
ministre.
M.
Hamad : Merci,
Mme Martineau. Bienvenue. Et je veux saluer aussi vos collègues,
Mme Lévesque puis Louis-Joseph. Louis-Joseph, c'est le nom de mon garçon,
c'est pour ça que je vous appelle Louis-Joseph.
Alors,
écoutez, d'abord j'ai constaté que... j'aime votre approche, c'est vraiment
bien. Vous mentionnez les bons points
puis les points à améliorer, alors c'est très constructif, ce que vous avez
fait, Mme Martineau. Je vais juste mentionner pour le bénéfice de tout le monde ici, à la page 9 vous dites que
«voici sommairement les meilleurs aspects du p.l. n° 87, spécialement dignes de mention». Alors, c'est...
Donc, vous parlez que toute personne pourra faire une divulgation. Le
choix de Protectrice ou Protecteur du citoyen comme... vous trouvez que ça,
c'est un bon choix, offrir le choix aux employés
du secteur public, ça, c'est important, ce que vous dites là, d'aller à
l'organisme ou aller au Protecteur du citoyen, puis aura des pleins
pouvoirs d'enquête le Protecteur du citoyen. Alors, définitivement, c'est
exactement l'objectif qu'on vise.
Maintenant, dans vos points à améliorer ou à
discuter, le premier point, c'est les victimes de... le soutien aux personnes,
assistance juridique. Là, vous demandez qu'on paie des avocats, on soutient la
personne. Et, évidemment, avez-vous une idée à quelle limite qu'on va, là?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Bien,
nous autres, les employés, chez nous, ils l'ont, là, via leur syndicat, sauf
que...
M.
Hamad : Oui, mais
ils paient une cotisation.
Mme
Martineau (Lucie) : Oui,
mais, en fait, les gens qui subissent des mesures de représailles, il faut
qu'ils soient représentés. Il n'y a
pas tout le monde qui... Bon, quelqu'un qui a droit à l'aide juridique, au
moins qu'on l'aiguille vers l'aide juridique,
sauf que, les gens qui n'ont pas accès à l'aide juridique, qui n'ont pas accès
à un syndicat qui puisse... il devrait
y avoir un montant, oui, pour lui permettre de se défendre s'il y a des mesures
de représailles, là, ce n'est seulement que s'il y a des mesures de
représailles. Nous, on souhaite que, tous les actes, il n'y ait pas de mesure
de représailles.
M.
Hamad : O.K. Donc,
vous parlez des mesures de représailles.
Mme
Martineau (Lucie) : Oui.
M.
Hamad :
Vous ne parlez pas de l'accompagnement avant, O.K., c'est juste dans les
mesures...
Mme Martineau
(Lucie) : Non, non, c'est dans le cas qu'il y ait des mesures de
représailles, O.K., non, non.
M.
Hamad :
Je comprends. O.K. Puis évidemment, vos membres, vous, vous les accompagnez.
Mme Martineau
(Lucie) : Exact.
M.
Hamad :
O.K.
Mme Martineau
(Lucie) : Bien, on veut les accompagner. Ce n'est pas dans le projet
de loi encore.
M.
Hamad : Vous voulez les... Quand vous dites que vous voulez
les accompagner, vous voulez payer, là? Je veux juste savoir, là.
L'accompagner comment, là? Juste l'accompagner, puis nous, on paie...
Mme Martineau
(Lucie) : Non, non, non.
M.
Hamad :
Non? O.K.
Mme Martineau (Lucie) : Non, non, non. S'il va chez le protecteur, nous,
on veut accompagner. Parce qu'on vous
a dit que l'article de loi du projet fédéral, ça le prévoit, d'être représenté
syndicalement, mais là le vôtre, là, il ne le prévoit pas. Donc, on vous suggère de... c'est une piste d'amélioration.
Et puis inquiétez-vous pas, on ne vous demandera pas de payer.
M.
Hamad : Non, O.K., mais... Oui, je sais, mais vous pouvez...
O.K., vous voulez l'accompagner, puis en même temps vous mettez à côté vos revendications syndicales, en même temps
que vous protégez? Vous allez faire la différence entre vos
revendications syndicales et la protection de votre membre, vous allez faire la
différence, là?
Mme Martineau
(Lucie) : Bien, de toute façon, ce n'est pas la même chose, là.
M.
Hamad :
Je sais, mais des fois ça se chevauche, là.
Mme Martineau
(Lucie) : Non, pas dans ce cas-là. Moi, j'en ai vu, là, des gens qui
ont voulu faire des divulgations, là. Nous, on a déjà préparé des dossiers, on
est allés au Conseil du trésor, c'est nous-mêmes qui a fait la divulgation.
Alors, c'est de l'accompagner.
M.
Hamad :
Oui. Ça a bien été?
Mme Martineau
(Lucie) : Non.
M.
Hamad :
Non? O.K.
Mme Martineau
(Lucie) : Ils ont trouvé la personne puis ils l'ont sanctionnée. Ça
n'a vraiment pas bien été.
M.
Hamad :
Bon. Non, mais, je veux dire, ça a donné suite, là?
Mme Martineau
(Lucie) : Non.
M.
Hamad :
Non? O.K.
Mme Martineau
(Lucie) : Non. Et ce n'est pas réglé encore.
M.
Hamad :
Ah! O.K. Bon, bien, ne parlons pas de cas de... O.K. Là, on ne rentre pas là-dedans.
Mme Martineau
(Lucie) : Non, bien, ici j'ai l'immunité parlementaire, c'est bon, on
est dans le salon rouge.
M.
Hamad : Mais, des
fois, juste, là... Parce que je vous connais, Mme Martineau, vous êtes
très bonne, là. Vous n'êtes pas là pour rien, là, ça fait des années que
vous êtes dans ça.
Mme Martineau
(Lucie) : Vous êtes donc bien fin, vous, là, après-midi!
M.
Hamad : Bien, ça
fait des années qu'on travaille ensemble, ça fait que je vous connais. Mais des
fois ça peut être des... Tu sais, je veux
juste... j'essaie de voir, là. Des revendications syndicales pendant une négo, exemple, là.
Mme
Martineau (Lucie) : Non. Non.
M.
Hamad : C'est réglé, dans votre cas, là, ça a bien été, mais
mettons, là, mettons, là, tu sais, je vais aller dans le «mettons», là... Puis là on est en train de faire
une négociation, puis là, bien, on va mettre des mesures, on peut peut-être
amener un membre, on dit : Viens, on va
faire quelque chose, on va l'accompagner parce que ça va nous aider dans...
Ça, ça peut-u arriver, ça, ou je rêve, là? Ça n'arrive pas?
Mme Martineau
(Lucie) : Non. Les gens qui ont voulu divulguer des choses, là, ça n'a
rien à voir avec les revendications syndicales, là, hein? On a plein de
contrats informatiques, tous des cas fictifs, tiens, on va dire comme tantôt, hein, alors on a plein de contrats
informatiques qui prévoient des pénalités, mais on ne les réclame jamais
quand les informaticiens, ils ne le font
pas. Bien, ça, là, c'est de la mauvaise gestion gouvernementale. Ça n'a aucun
rapport de réclamer 2 % par année, là, tu sais, ce n'est pas la
même chose.
Nous,
on veut les accompagner sur les procédures à suivre : Alors, si vous allez
à votre ministère, bien vous pouvez faire
ça, ça, ça, si vous allez au Protecteur du citoyen... dans la procédure,
comment comprendre la procédure pour arriver à une divulgation. Les gens qui font ça, qui veulent divulguer des
choses comme ça, ça n'a aucun rapport avec ce qu'on demande en négo, là, absolument pas. C'est des
choses qui se passent dans les organismes publics, qu'ils se disent :
Ça n'a aucun bon sens, ce gaspillage d'argent là. C'est plus ça.
M.
Hamad :
Ce n'est pas des mesures de pression, mesures de négo, là, il n'y a absolument...
Mme Martineau
(Lucie) : Non. Ça, il y a la Commission des relations du travail pour
ça.
M.
Hamad : Ah! O.K.
Mme
Martineau (Lucie) : On fait des griefs dans ce temps-là.
M.
Hamad :
Là, c'est le Tribunal administratif du travail, là.
Mme Martineau
(Lucie) : Oui, c'est ça. Ce n'est pas...
M.
Hamad :
Il n'y en a plus, de CRT, là, on est rendu à TAT, là.
Mme Martineau (Lucie) :
Oui, oui, mais ce n'est pas grave, on passe là pareil.
M.
Hamad : L'article 27, là... Parce que vous parlez de
renverser le fardeau de preuve, là, et, l'article 27, dans le
projet de loi, en tout cas, les juristes ici pensent qu'on a quand même... pour
eux, c'est clair qu'évidemment il faut renverser...
tu sais, ça répond, là, parce qu'on regarde l'article 27 : «Sont
présumés être des représailles au sens de l'article 26 la rétrogradation, la suspension...» En fait, ils le
décrivent ici, là. Alors, pour eux, c'est clair que, les mesures, de
renverser le fardeau de preuve, il est clair dans ce qu'ils ont écrit.
Alors, vous, vous
dites non. Est-ce qu'il y a quelque chose...
Mme Martineau (Lucie) : Bien, en fait, ce n'est pas ça que j'ai dit. J'ai
dit : Oui, on peut penser, oui. Puis nos avocats également ont dit là-dessus que le fait de modifier la Loi des
normes du travail, ça faisait en sorte de favoriser le ou la salariée
qui fait la divulgation.
Sauf
que, pour être encore plus clair, dans le projet de loi, moi, je le marquerais.
Si ça l'inclut, pourquoi ne pas le marquer?
M.
Hamad :
Bien, c'est marqué, là, c'est marqué à l'article 27.
Mme Martineau
(Lucie) : Bien...
M.
Hamad :
En tout cas, vous allez me le...
Mme Martineau
(Lucie) : Bien, à l'article 27, là...
M.
Hamad : Regardez, ce n'est pas grave, Mme Martineau, ce
n'est pas grave. Juste après la commission, vous pouvez nous le dire
exactement. Peut-être...
Mme Martineau
(Lucie) : Bien, l'article 27 du projet de loi, ça dit c'est quoi
qui sont...
M.
Hamad :
Ça, là, c'est une affaire d'avocat, on va laisser faire.
Mme Martineau
(Lucie) : En tout cas, l'article 27, ça dit c'est quoi qui est
présumé être des représailles.
M.
Hamad : Oui, puis on réfère à l'article du Code du travail.
Mais, regardez, on va demander à nos avocats de consulter, avoir une
discussion là-dessus.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : ...des discussions, puis
vous pourrez poursuivre une discussion avec le ministre sur le sujet. Le
temps est assez serré, c'est pour ça.
M.
Hamad : Avec les
avocats, les avocats. Le ministre ne connaît rien là-dedans, c'est un touriste,
là, on va laisser les avocats travailler.
Les quatre
conditions pour une divulgation publique, là, ça, vous référez, vous avez dit,
à... Publique, là, vous, là, vous
voulez qu'on fasse une divulgation publique, on s'en va en public puis on
dit : Ça va mal, puis tout ça, là, mettons? C'est ça que vous
voulez faire?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
• (17 h 50) •
Mme
Martineau (Lucie) : Non,
c'est de la jurisprudence développée à partir de personnes qui sont allées à
des émissions comme Enquête, comme J.E.,
qui ont fait des dénonciations auprès de journalistes. Ça existe, là. Alors,
c'est sûr qu'ils ont eu des représailles,
hein? Et nous, on est allés les
défendre dans les congédiements ou les mesures de suspension, des choses
comme ça.
Alors, est
sorti de ça des sentences arbitrales qui déterminent un peu c'est quoi, la
matière qui... Avant d'arriver jusque,
mettons, au journaliste, il aurait fallu que l'employé utilise, premièrement, d'abord, à l'interne, le préambule à l'interne de son ministère, dire : Bien,
moi, j'ai averti mon patron. Mon patron, il n'a rien fait, donc ensuite je suis
allé monter à son patron, et puis là il n'a rien fait. Quand tu as fait deux,
trois affaires comme ça, là, habituellement la sentence est correcte, tu es
allé voir un journaliste. Donc, c'est ça, la jurisprudence qui est élaborée au Québec,
là.
M.
Hamad : Là, il n'y
avait pas la loi avant.
Mme Martineau (Lucie) : Non.
M.
Hamad : O.K. Là, il
y a une loi. Alors là, la loi...
Mme
Martineau (Lucie) : Il y a
une loi, mais la loi, le projet de
loi prévoit seulement
la divulgation publique s'il y a un danger imminent pour la santé et la...
C'est moins que la jurisprudence.
M.
Hamad : Oui, oui, je comprends. Non, mais je comprends, mais attendez, là. Il n'y
avait pas de loi. Là, il y a une
loi qui permet à la personne... Là, vous m'avez dit la situation : il l'a dit à son patron, l'autre patron, ça n'a pas répondu, il
n'y a rien qui s'est passé, puis là je comprends que la personne est frustrée, si elle croit à son affaire. Là, ce qu'on
fait, on permet à la personne d'aller voir
le Protecteur du citoyen pour faire la plainte, le Protecteur du citoyen va faire une enquête, donc il va faire le cheminement comme il faut,
puis, si vraiment le citoyen, il a raison ou l'employé a raison, bien là
ça va donner des résultats après. Donc, on
lui donne maintenant le moyen de le faire au lieu de sortir public. Ça
se peut qu'il a raison, ça se peut qu'il s'est trompé, mais là on y va...
puis ça peut causer des dommages pour les deux parties, mais là ce qu'on essaie
de faire, c'est de faire ça comme du monde.
La protectrice,
vous avez entendu, elle va avoir les pouvoirs nécessaires pour faire des
enquêtes, donc là on ne peut pas dire
n'importe quoi avec des peut-être, avec... On y croit, à ce qu'on dit, mais, dans le fond, des fois peut-être
qu'on n'a pas les preuves à 100 %, ou etc. Mais là, si on passe par la
protectrice, puis elle va cheminer... S'il y a une question criminelle,
tant pis, ça va aller encore vers le... tant mieux, c'est-à-dire, ça va aller
encore à l'UPAC, puis l'UPAC va exercer les...
Donc là, on va être dans le respect des droits
de tout le monde, dans un système démocratique avec le respect des droits de
tout le monde. Puis on ne peut pas présumer quelqu'un coupable avant vraiment
avoir les preuves puis aller en cour.
Mais, vous
savez, aller en public parce que je suis allé trois fois puis j'y crois, puis
là, bien, je ne sais pas, je peux aller
dire : Le député de Louis-Hébert... bien, pas le député, on parle,
mettons, de la fonction publique, on dit : Là, ils ont gaspillé 25 millions, parce que l'employé
pense puis croit fermement à ça, puis il dit : Le directeur, il a fait par
exprès de faire ça, puis là on accuse le directeur à tord ou à raison mais dans
le public, donc, on rend le procès public puis des accusations, des coupables publics. Là, ce qu'on fait avec cette loi-là,
la personne va aller voir la Protectrice du citoyen, il va être protégé, ils vont faire l'enquête, l'UPAC
va faire l'enquête. Si c'est vraiment coupable, bien on va tous le
savoir. Puis, si vraiment il manque des
éléments ou ce n'est pas coupable, bien là, finalement, la personne a fait ses
devoirs, puis la personne coupable, bien, on l'a mise en prison, hein?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
Mme Martineau (Lucie) : Oui, mais là
on est plus à l'UPAC, là.
M.
Hamad : Parce que
vous me parlez d'un cas dans vos... On ne va pas parler de vos cas, hein, O.K.,
on ne parle pas de vos cas.
Mme Martineau (Lucie) : Non, non. Mais, en fait, de toute façon, dans les
quatre conditions, il fallait que les actes, ils soient véridiques, là,
c'est sûr, sûr, sûr.
M.
Hamad :
Oui, je comprends. Mais là, avec la loi, là...
Mme Martineau (Lucie) : Bien oui, c'est sûr qu'en leur permettant de
faire une divulgation c'est déjà mieux.
M.
Hamad :
C'est ça.
Mme Martineau
(Lucie) : Mais, si on continue sur qu'est-ce qui va être public après,
en fait, la protectrice, elle, ce qu'elle va
faire... Nous, on pense qu'elle doit pouvoir exposer tout cas qu'elle juge dans
l'intérêt public, dans son rapport
annuel ou dans un rapport spécial, mais là ce n'est pas ça, là, on dit :
Seulement les cas... Bon, premièrement, elle a trois, quatre choses à faire avant, et après ça, dans un rapport
d'activité, on dit, elle va relater le nombre de divulgations ou d'enquêtes, bon, mais il y a aussi la nature
traitée. Nous, on souhaite que ce soit dissuasif pour d'autres, que ce
soit...
M.
Hamad :
...s'il y a une question criminelle là-dedans, là, quelqu'un...
Mme Martineau
(Lucie) : Oui, là, c'est l'UPAC, là.
M.
Hamad : Mais là on va le pogner, là, on va aller le
chercher, on va faire une enquête, la police va se mettre là. Puis on va
l'amener en cour, puis, s'il est coupable, il va être jugé. C'est ça,
l'objectif. L'objectif, c'est vraiment de permettre aux gens...
Mme Martineau
(Lucie) : Oui, si c'est criminel, là, actuellement c'est déjà couvert
par l'UPAC, O.K.?
M.
Hamad :
Bien oui.
Mme Martineau (Lucie) : Mais l'UPAC, elle ne couvre pas tout, parce que
nous, là, ce cas-là, là, des... On va le prendre, ce cas informatique
là, ça fait assez longtemps que je veux en parler.
M.
Hamad :
Vous avez le goût, là.
Mme Martineau (Lucie) : Écoutez, c'est 17 millions par année qui
n'est pas collecté parce qu'il y a des retards dans l'informatique, ils
ne fournissent pas ça dans les temps requis. Dans le contrat, là, tu as des
pénalités à la firme informatique; bien, le
gestionnaire décide qu'il ne les applique pas, il perd 17 millions par
année. Moi, mon employé, là, il est
allé voir son directeur, il est allé voir l'autre directeur, il est allé voir...
écoutez, il est allé voir du monde. On est venus au Conseil du trésor
avec ce cas-là, ils l'ont trouvé, ils l'ont sanctionné, et on ne récolte encore
pas les pénalités informatiques. Comprenez-vous? Il faut que ça se sache, ça.
M.
Hamad :
O.K., mais il faut que ça se sache...
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : On va avoir l'occasion d'en rediscuter,
chère Mme Martineau. On va maintenant aller du côté de l'opposition officielle,
le temps passe très vite. Donc, M. le député de Gaspé, la parole est à vous.
M. Lelièvre :
Merci, M. le Président. Bonjour. Merci à vous tous pour votre présence puis le
dépôt de votre mémoire.
Vous
avez parlé, dans votre document, d'autres pays, hein, qui ont des pratiques
semblables, on parle de 41 % des pays membres de l'OCDE qui ont une
loi spécifique un peu comme on s'apprête, au Québec, à se doter. Dans votre
recherche, avez-vous des éléments qui sont ressortis et qu'il pourrait être
intéressant qu'on entende, au niveau des membres de la commission, pour
bonifier éventuellement le p.l. n° 87?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Martineau, M. Saucier.
Mme Martineau (Lucie) : Oui, bien il me dit que toutes les... les quatre
pistes d'amélioration sont tirées de ces lois-là. C'est sûr que nous, on n'est pas allés à dire, bon, le
municipal, et tout ça, là, on n'est pas allés jusque-là, on s'est
vraiment concentrés sur le secteur d'activité qu'on couvre.
M.
Lelièvre : O.K., mais, dans votre recherche qui vous a conduit aux
quatre ou cinq recommandations positives, est-ce que, de mémoire, vous avez d'autres éléments qui mériteraient
d'être entendus ici? Même si ce n'était pas en détail, est-ce que vous
pouvez nous en informer?
Mme Martineau
(Lucie) : Écoutez, on se limite aux quatre.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Saucier.
M. Saucier
(Louis-Joseph) : C'est les plus prioritaires.
M. Lelièvre : C'est les plus
prioritaires.
Mme
Martineau (Lucie) : Mais
celles que j'ai fait en plus attention, là, c'est vraiment les mesures
temporaires, là, les mesures provisoires. Ça, là...
M. Lelièvre : Parfait. Je vais y
arriver.
Mme
Martineau (Lucie) : Parce
que les personnes, elles ne peuvent pas se priver de salaire pendant huit
mois, là. Ils n'iront pas. Même s'ils peuvent, ils n'iront pas.
M.
Lelièvre : Bien, abordons-le, c'est un des éléments que je voulais
traiter. Toute la question de la protection, là, puis d'un revenu minimal, là, pendant la période, là, où le dossier
suit son cours, est-ce que vous avez vraiment la ferme conviction que ça peut être vraiment un frein? Je
présume que oui, mais j'aimerais que vous nous réconfortiez dans votre
appréhension à l'effet que, s'il n'y a pas de mesure de soutien temporaire,
certains employés de l'État pourraient être carrément, là... pourraient décider
de ne pas aller de l'avant. C'est clair dans votre tête, ça, vous avez un vécu
à cet effet-là qui le démontre?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
Mme Martineau (Lucie) : Non
seulement j'ai un vécu, mais nous avons, nous, le syndicat, assuré le salaire jusqu'au grief. Bien, c'est ça. Alors,
imaginez-vous, on ne peut pas se priver de huit mois de salaire. Puis, huit
mois, on est pas pire dans nos griefs, là.
Alors, c'est
évident, c'est évident que les gens, s'ils disent : Moi, je risque d'être
congédié puis je n'aurai pas de salaire...
Parce que je n'ai pas droit à l'assurance-emploi, même pas d'une manière
conditionnelle, je viens d'être congédié. Alors, c'est sûr que... L'aide conditionnelle à l'aide sociale, là,
M. Hamad, il sait ça, là, comment ça donne. Ça ne donne pas
beaucoup, c'est ça.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le député.
M.
Lelièvre : Vous avez parlé aussi de se coller, du côté québécois, à la
loi canadienne, qui permet à un employé d'être assisté par son syndicat dans ses représentations. Pouvez-vous
nous parler un petit peu de... plus en détail, là, de qu'est-ce que ça
amène concrètement puis qu'est-ce que ça entraînerait de négatif pour l'employé
si jamais ce n'était pas le cas, là? Peut-être développer un peu là-dessus.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
Mme Martineau (Lucie) : Bien,
écoutez, d'emblée il y en a plein qui viennent nous voir, là, mais, avec tout
ce qu'on a vu, là, sur le devoir de loyauté, on est, nous-mêmes, assez frileux,
là, d'envoyer quelqu'un à... Alors, c'est au moins de l'aiguiller. Si la loi
est en force, bien on va l'aiguiller, dire : Bien, est-ce que tu préfères
aller dans ton ministère? Est-ce que tu veux être accompagné? Bon. C'est comme
accompagner quelqu'un dans son règlement de recours
avec l'employeur, on a des mécanismes. D'être accompagné à ta rencontre avec
ton employeur, bien c'en est un; ensuite
de ça, de t'expliquer au moins que tu as le droit autant dans ton ministère que
chez le Protecteur du citoyen. Donc, c'est juste de l'accompagnement,
là.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. Oui, Mme Lévesque.
• (18 heures) •
Mme
Lévesque (Nadia) :
J'ajouterais aussi, pour l'avoir fait deux fois, accompagner des dénonciateurs,
il y a un aspect psychologique aussi.
On demande quand même à des gens de se mettre de l'avant, de dénoncer des
actes, donc d'avoir besoin de
beaucoup de courage pour le faire. Et, bien honnêtement, de partir tout seul
avec ta petite valise un matin, te rendre au Protecteur du citoyen, ne
serait-ce que pour un peu de support moral, de pouvoir être accompagné... Puis évidemment,
bien, s'il est accompagné de son représentant syndical, il n'y a pas de doute pour
cette personne-là qu'elle est accompagnée par quelqu'un qui est amical
puis qui est favorable à sa cause.
Puis, en bout
de ligne, si on se ramasse à devoir départir des témoignages de «j'ai dit
ceci», «non, tu ne l'as pas tout à fait dit comme ça, tu l'as plutôt dit
comme cela», bien la personne, elle a un témoin qui peut corroborer ou infirmer aussi la manière dont les choses se sont
dites. Donc, ultimement, quand il y a des recours juridiques, d'avoir une
présence d'un témoin qui est un représentant syndical, ça devient vital parfois
pour faire la preuve en cour.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député.
Mme Martineau (Lucie) : Louis-Joseph?
Il veut rajouter.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Oui, vous voulez ajouter, M. Saucier?
M.
Saucier (Louis-Joseph) : C'est important, ce que ma collègue dit là, parce
que ce qui caractérise fondamentalement
un lanceur d'alerte, c'est justement le fait de faire un signalement mais qui
est d'intérêt public, alors que cette
personne-là ne le fait pas pour des motivations personnelles, et bien souvent,
pour ne pas dire trop souvent, elle le fait au risque de représailles
personnelles.
Alors, nous,
c'est justement notre rôle, comme organisation syndicale, que de soutenir et
d'appuyer nos membres. Puis, à cet
égard-là, nous, on considère important qu'il puisse y avoir la représentation
syndicale dans le cadre de toute procédure liée à la loi, notamment
parce qu'entre autres la Protectrice du citoyen va avoir elle-même à établir
une jurisprudence sur ce qui constitue ou
non un acte répréhensible. Donc, nous, on considère important que dans la loi
ce soit enchâssé qu'on puisse accompagner nos membres dans le cadre de ces
procédures-là.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. Oui?
Mme
Martineau (Lucie) : Je
pense, également, mais tu vas me le confirmer, ce n'est pas juste dans la loi
fédérale qu'il y a l'accompagnement syndical, là, il y en a beaucoup également
de l'autre côté, en Europe.
M. Saucier
(Louis-Joseph) : Parce que, pour reprendre le début de... votre
première question, oui, c'est bien à la lumière des standards internationaux d'excellence qu'on a passé en revue
le projet de loi n° 87, notamment les recommandations... en fait les pratiques exemplaires, qui ont été
identifiées par Transparency International, le Government Accountability
Project, l'OCDE et le Conseil de l'Europe.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député.
M.
Lelièvre : En l'absence de précision formelle dans la loi, vous
arrivez à la conclusion que l'accompagnement qui pourrait être fait par le syndicat auprès de son membre pourrait,
par exemple, se limiter à la partie qui précède, disons, le début des
discussions avec le Protecteur du citoyen. Donc, c'est clair que, les premières
journées ou les premiers moments, vous auriez quand même le droit ou le... puis
même c'est même, je pense, votre devoir, de conseiller votre membre, mais ce que vous voulez, c'est vraiment
que ce soit enchâssé dans la loi que vous avez le droit d'accompagner
votre membre jusqu'à l'audition devant le Protecteur du citoyen. C'est ça,
clairement, que vous demandez?
Mme Martineau (Lucie) : Oui.
M.
Lelièvre : Et est-ce que vous arrivez... vous êtes convaincus que le
fait de ne pas le préciser, ça exclut cette possibilité-là ou vous voulez
être certains, trop fort ne casse pas, vous voulez le faire inscrire?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Oui,
c'est notre vécu. C'est bon? Alors, c'est mieux que ce soit écrit parce que, si
ce n'est pas écrit, on se fait dire que ce n'est pas écrit.
M.
Lelièvre : Parfait. C'est ce que je me doutais, O.K., c'est beau. Ça
fait le tour, M. le Président, des questions. Merci.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Ça fait le tour? Bon, c'est
bien. Je vous remercie, M. le député de Gaspé. Nous allons donc passer
maintenant au député de La Peltrie. M. le député, la parole est à vous.
M.
Caire : Merci, M.
le Président. Bien, bonjour à tout le monde. Merci pour votre présentation.
Je retiens de vos commentaires qu'il y a
peut-être un... — je
vais faire attention à ce que je dis, là — pas un manque de confiance mais une interrogation quant
aux procédures d'enquête ou de dénonciation qui sont proposées par la loi. Parce que vous nous donnez les exemples de
cas qui se sont passés mais en dehors du contexte de la législation
actuelle. Puis là, d'ailleurs, si jamais
vous avez envie qu'on s'en parle, ça va me faire plaisir. Moi, j'aime bien ça,
les pénalités informatiques qui ne
sont pas payées. Mais, sinon, on comprend que la Protectrice du citoyen a quand
même un pouvoir d'enquête, elle a le
devoir et le pouvoir de protéger ses sources. Donc, qu'est-ce qui vous fait
craindre pour des représailles, là, dans ce que vous avez vu dans le
projet de loi?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Martineau.
Mme
Martineau (Lucie) : Bien,
écoutez, c'est dans tous les projets de loi de toute façon, il faut vraiment,
là, s'occuper qu'il n'y ait pas de représailles. Puis d'ailleurs le projet de
loi le fait, là, c'est parfait, là.
Nous, les cas
que je vous ai donnés, c'est dans l'optique où il n'y avait pas de loi, où on
n'avait pas le droit. Les fonctionnaires n'ont pas le droit, il y a un
devoir de loyauté assez strict. C'est drôle, en fait, je vais vous le dire,
tiens, comme je le pense, dans la Loi de la
fonction publique il y a le devoir de loyauté, mais il y a le devoir également
de faire de la bonne gestion des deniers publics, puis on ne l'a jamais
mis en contrepartie. Ça...
Une voix : ...
Mme
Martineau (Lucie) : 5 et 2,
c'est ça. En tout cas, je savais qu'il y avait deux articles, puis dans ma
tête, depuis une vingtaine d'années, ils se contredisent un petit peu.
Ça fait que, quand quelqu'un veut vraiment qu'il
y ait une bonne gestion des deniers publics et qu'il veut faire une
divulgation, bien sa sentence, c'est peut-être trois jours de suspension et
c'est peut-être le congédiement sur-le-champ aussi. Alors, c'est sûr que nous,
on accueille vraiment très favorablement ce projet de loi.
M.
Caire : ...dans le contexte du projet de loi, quelles lacunes vous avez identifiées qui vous font craindre
qu'il pourrait y avoir des représailles? Parce que,
dans le fond, si la Protectrice
du citoyen fait bien son travail, et
personnellement je n'ai aucune raison de
penser qu'elle ne le ferait pas, il
n'y a pas de raison qu'il y ait
de représailles. La dénonciation se doit
d'être confidentielle, l'enquête qui va être menée doit s'assurer de protéger
le dénonciateur, donc il y a un certain nombre de responsabilités qui sont données à la Protectrice du citoyen, justement, d'éviter ces cas-là. Donc, qu'est-ce qui vous fait craindre que malgré
tout ces cas-là pourraient arriver?
Mme
Martineau (Lucie) : Bien, en
fait — et tu
pourras rajouter — l'important,
pour nous, c'est qu'il y ait des mesures
de redressement provisoires. S'il y avait un congédiement ou un relevé
provisoire, bien, qu'il soit au moins avec solde, O.K., le temps que les gens fassent leur enquête, O.K.? On veut
juste s'assurer qu'on n'ait pas des cas pathétiques comme on a eus. Puis
Nadia, elle en a eu une couple dans son bureau, ça fait que je peux la laisser
parler là-dessus.
Mme Lévesque
(Nadia) : Bien, un des
problèmes avec lequel on a été pris, c'est que, par exemple, à l'UPAC, tout était prévu, mais évidemment
que, la journée où un travailleur a eu des représailles, dans la lettre de
représailles ce n'est pas
écrit : Parce que vous avez collaboré avec l'UPAC, nous vous
mettons en suspension, c'est écrit d'autre chose, on invoque d'autre chose, et là c'est de réussir... Et de
là notre suggestion aussi d'inverser le fardeau de la preuve. Pour nous,
ça devient la parole du travailleur contre la parole du gestionnaire, et là
c'est tout un travail de concomitance soit temporelle, la chronologie
des événements, quelle journée le travailleur a parlé à l'UPAC versus quelle
journée le gestionnaire a sévi, etc.
Donc, malgré
toute la, comment je dirais... la perfection législative d'un projet de loi, il arrive quand
même une zone où, dans l'application, sans être sceptique de la loi, il faut, on trouve — puis là je vais utiliser une image — y mettre des bretelles, une ceinture puis s'assurer que tout ça est bien attaché,
parce qu'il y a toujours des zones où les gens peuvent se faufiler pour
contourner l'esprit de la loi. Et ça, ça a été le vécu qu'on a eu,
malheureusement, dans le passé.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci.
M.
Caire :
Bien, je vais l'aborder peut-être sur un autre angle, parce que
l'article 28 mentionne quand même des amendes de 2 000 $ à 20 000 $ pour quelqu'un qui
aurait contrevenu à l'article 26, donc qui aurait exercé des
représailles. Vous ne pensez pas que ça peut avoir un effet dissuasif, d'une
part?
Puis, d'autre part, j'entends que vous
dites : Des mesures transitoires. Ceci étant dit, qu'est-ce qui arrive si
on allègue que c'étaient des représailles et
qu'on en arrive à la conclusion que ce n'étaient pas des représailles? Là, est-ce
qu'on n'a pas fait bénéficier quelqu'un d'un
salaire qu'il ne méritait pas, en plus qu'il n'a pas eu de prestation de
services pendant une période x?
Donc, c'est quoi, la contrepartie de ça? Parce
qu'il ne faut pas assumer que c'étaient des représailles, mais, je veux dire, il y a quand même... Donc, comment on
gère ça, les mesures transitoires, là? Moi, je dis : C'est des
représailles que vous avez faites là parce
qu'il a fait telle, telle, telle affaire. Vous dites : Des fois, le grief
prend huit mois avant de passer
devant l'arbitre, plus le temps de régler le grief, je suis, moi, je ne sais
pas, huit, neuf, 10 mois, 12 mois chez nous à me tourner les pouces, je reçois mon salaire,
finalement ce n'étaient pas des représailles, bien je viens de bénéficier
d'un an de salaire pour rien, là.
Mme Martineau (Lucie) : Non, mais là
ce n'est pas ça, là. Là, on parle d'un congédiement...
M.
Caire : Non, non,
mais...
Mme
Martineau (Lucie) : ...un congédiement
pour avoir fait une divulgation. Dans le temps de l'enquête, je ne dois
pas être sans salaire, sinon je ne la ferai pas, ma divulgation.
Le cas que
Nadia parle, là, ce n'est pas compliqué, la personne est allée à l'UPAC.
L'UPAC, c'est carrément bien correct,
là, hein, tout est correct, puis j'en connais plein qui sont allés, puis tout
est prévu. Mais la représaille qu'il a eue, ce n'était pas marqué ça, non, c'était marqué : Vous êtes suspendu
trois jours pour avoir divulgué des informations à votre syndicat. C'était ça. Alors, nous, on le sait, que
c'est relié, là, O.K., sauf que c'est toute une histoire de dire c'est
quand, quelle date ça s'est passé, qu'est-ce
qui est arrivé, qu'avons-nous fait. La personne, elle est allée, en plus, elle
a répondu à toute la loi, là, la personne est allée à l'interne de son
ministère avant de venir nous voir. Nous, on est même allés au Conseil du
trésor avant.
M.
Caire : Je le
comprends, mais, en tout respect, ça, ça s'est fait en dehors...
Mme Martineau (Lucie) : Pas de loi.
• (18 h 10) •
M.
Caire : Il y a
une loi maintenant, là, alors... Parce que vous transposez un exemple sans le
cadre législatif pour expliquer vos
revendications pour le cadre législatif. Moi, ce que je veux comprendre, c'est,
dans la présente loi... Puis là vous
dites : Ça me prend des mesures transitoires. Moi, je vois
l'article 28, qui m'apparaît dissuasif, personnellement, là. Tu sais, moi, comme gestionnaire, là, si j'exerce
des représailles, puis quelqu'un en arrive à la conclusion que j'ai
congédié un employé par mesure de
représailles, je m'expose à des pénalités, des amendes de 2 000 $ à 20 000 $.
Personnellement, là, ça ne me tenterait pas.
Je ne sais pas, là, mais je dis ça comme ça. Donc, il est possible que ce soit
dissuasif, puis vous, vous
dites : Oui, vous avez raison, puis en plus il y a des mesures de
protection qui sont proposées par la loi au niveau de la Protectrice du
citoyen, qui aura une obligation de faire, un, diligence et, deux, d'être très
discrète dans ses enquêtes.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci, M. le député de La Peltrie.
Merci. On doit passer à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
M.
Caire :
On s'en reparlera.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme la députée, la parole est à vous.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Alors, soyez rassurés, on ne va pas
faire que cette loi-là ne passe pas parce que le privé n'est pas inclus.
Ça, c'était une évidence. Mais on va répéter sur toutes les tribunes que tous
les citoyens mériteraient d'être protégés. Je pense que là-dessus on s'entend.
Je
pense que — et, moi,
ça tombe bien dans mon oreille, ça fait tellement de sens — vous avez bien démontré comment, lorsqu'on est dans une posture de mettre
à la face de l'opinion publique, soit à travers la protectrice, de
dénoncer quelque chose, ça nous
vulnérabilise énormément. Et c'est sûr que, là, on pense à nos enfants, on
pense à notre famille, à notre
revenu, on pense à beaucoup de choses, et je pense qu'en plus, depuis la
commission Charbonneau, on a peur, parce qu'on a vu, hein, que ce soit
avec différents intervenants, et tout ça... on a vu ce que ça voulait dire
comme impacts.
Vous soutenez
l'importance d'inclure la nécessité d'accompagnement, ce avec quoi... que je
comprends beaucoup. Est-ce que vous seriez
aussi... Et je comprends que vous avez regardé le projet de loi en fonction de
votre mandat, c'est-à-dire vos
membres, etc., mais est-ce qu'on comprendrait la même chose si je disais...
Parce que le projet de loi ne s'adresse
pas seulement aux employés mais plus largement à tout le monde, vous l'avez
même honoré comme étant un bon coup. Si on s'assurait que les gens qui
ne sont pas nécessairement des employés mais qui mettent de l'avant une dénonciation pourraient aussi avoir accès à un
soutien quelconque de la part, dans ce cas-là, de la Protectrice du
citoyen, est-ce que c'est quelque chose que vous sentez qui aurait du sens, ça,
suite à votre expérience?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Martineau.
Mme Martineau
(Lucie) : Oui.
Mme Massé :
Oui, hein?
Mme Martineau (Lucie) : Oui, oui. Bien là, nous autres, on avait plus
spécifiquement le soutien à l'assistance juridique...
Mme Massé :
Juridique.
Mme Martineau (Lucie) : ...mais en fait tous les ministères et
organismes, quand ils donnent un service, de toute façon, habituellement il faut qu'ils soutiennent
les personnes qui font affaire avec eux. C'est sûr qu'on manque de
moyens dans bien des endroits, mais ça devrait être implicite.
Mme
Massé : Bien, je pense qu'on a avantage à s'appuyer sur votre
expérience pour protéger aussi adéquatement les gens qui ne sont pas des employés, hein? Ce qu'on vise, c'est de
protéger les dénonciateurs, alors donc je pense que, dans ce sens-là,
peut-être que le ministre pourrait être ouvert à l'idée d'inclure un article
qui donnerait accès à une consultation
juridique ou à un soutien juridique à l'intérieur du service, je dirais même,
de la Protectrice du citoyen, pour soutenir. Mais c'est juste pour bien
saisir que je comprenais bien l'importance de ça. Et, si c'est bon, comme on le
dit historiquement, pour Paul, ça doit être bon pour Jacques.
La
question de l'inversement du fardeau de la preuve, je pense que je n'avais pas...
Je vois l'importance de ce que c'est
par rapport à la question des lois partout à travers le monde, mais aussi c'est
parce que c'est toujours David contre Goliath.
Et, même si tu as accès à un certain nombre de soutiens, il n'empêche que, si
ce n'est, en bout de ligne, pas clair que le fardeau de la preuve n'est
pas sur tes propres épaules, alors que tu rends service à la société... Je
pense que, là aussi, ce serait un incitatif, de...
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Mme la députée, je vous
remercie beaucoup de vos commentaires.
Mme Massé :
C'est ce que j'ai compris que vous nous disiez. Bien, merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci beaucoup de vos commentaires. Donc, Mme Martineau,
Mme Lévesque, M. Saucier, merci de votre participation à la
Commission des finances publiques.
Je vais suspendre les travaux jusqu'à
19 h 30, où nous aurons l'occasion de rencontrer la Fédération professionnelle des journalistes du Québec. Donc, je
suspends les travaux.
(Suspension de la séance à 18 h 15)
(Reprise à 19 h 32)
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous
reprenons nos travaux. Ce soir, nous
aurons l'occasion de recevoir la Fédération professionnelle des journalistes du
Québec, la Fédération des cégeps et la Confédération des syndicats
nationaux.
Donc, tout d'abord, nous allons recevoir la Fédération professionnelle des journalistes du
Québec. Bienvenue, Mme Millette.
Bienvenue, Mme Lise Millette, M. Félix Séguin et M. Vincent
Larouche, bienvenue à la Commission
des finances publiques. Heureux de vous recevoir et merci de votre
contribution. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, par la
suite vont suivre les échanges avec les groupes parlementaires. La parole est à
vous, Mme Millette.
Fédération
professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ)
Mme
Millette (Lise) : Merci, M. le Président. M. le
ministre, MM. et Mmes les députés, bonsoir.
Je me présente donc : Lise Millette, présidente de la Fédération
professionnelle des journalistes du Québec, également journaliste à l'Agence
QMI. Sont avec moi Félix Séguin, journaliste à TVA, journaliste d'enquête, également
membre du conseil d'administration, et Vincent Larouche, journaliste d'enquête également
au journal La Presse.
Je tiens d'abord
à vous remercier de nous avoir conviés à cette commission. Le projet de loi n° 87 facilitant la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics n'est
pas, à proprement dit, dédié au travail journalistique. Par
contre, il nous interpelle parce qu'il touche les fondements de l'intérêt public, à savoir l'éthique de nos
institutions et également notre santé démocratique.
Dans un instant, mes collègues pourront vous
donner des exemples concrets de l'importance de protéger les sources
journalistiques. De mon côté, je commencerai par vous expliquer pourquoi le projet
de loi n° 87 ne facilite en rien la
divulgation et comment il en balise plutôt la démarche sans offrir de nouvelle
protection ni incitatif pour les sonneurs d'alarme et les divulgateurs.
D'abord,
un parallèle, puisqu'on retrouve dans la loi fédérale également
une loi sur la protection des fonctionnaires qui sont des divulgateurs
d'actes répréhensibles, où on retrouve toutefois la notion d'intérêt public.
Dans le projet de loi n° 87, ce concept n'apparaît nulle part. La FPJQ
croit qu'il doit être inscrit comme principe fondamental pour protéger
ceux qui divulguent des actes répréhensibles. S'il ne l'est pas, alors toutes
les excuses sont bonnes pour écarter les remarques d'un divulgateur qui a agi
dans l'intérêt du public.
Notre fédération peut comprendre néanmoins
l'idée de fixer des balises à la divulgation d'informations confidentielles. Nous sommes aussi conscients
qu'il peut exister des contextes où la divulgation n'est pas justifiée,
si, par exemple, quelqu'un, par exemple, utilise ou agit dans son seul intérêt
ou encore pour nuire à une autre personne.
Ce qui nous
ramène donc à notre critère fondamental : déterminer le bien-fondé et donc
l'intérêt du public. On peut imaginer différentes
formes... différentes façons de déterminer si une révélation est effectivement d'intérêt
public, mais il nous paraît limité de
confier cette seule analyse à un seul organisme
ou encore à l'organisme même au sein duquel se fait la divulgation.
Autre
problématique, selon nous, du projet de loi n° 87 : il ne vient pas
protéger les divulgateurs qui parlent au public, et donc aux journalistes. En fait, il vient même freiner cette
démarche, et, loin de simplifier les choses, le texte de loi place un fardeau de la preuve sur leurs
épaules. Or, nous tenons à le rappeler, il faut du courage pour dénoncer, et
ce projet de loi n'apporte rien de plus pour
convaincre une personne de prendre le risque de dire tout haut ce que
plusieurs souhaitent garder caché.
Ce projet de
loi ouvre aussi la porte, selon nous, à l'arbitraire pour juger de la
pertinence d'une divulgation, par exemple
l'article 6 de ce projet de loi qui stipule que, pour divulguer au public
des actes répréhensibles, une personne devra
prouver que cet acte représente un risque grave pour la santé ou la sécurité
d'une personne ou encore pour l'environnement.
Toujours
selon l'article 6, avant de s'adresser au public, le sonneur d'alarme
devra communiquer avec la police ou
le Commissaire à la lutte contre la corruption. Selon nous, une telle démarche,
loin d'être une ouverture, constitue une forme de judiciarisation du processus de divulgation, un obstacle, donc,
de plus pour le dénonciateur. Elle apporte aussi un effet pervers qui est non négligeable, celui de
garantir pratiquement qu'aucune information ne sera rendue publique,
puisque nous savons très bien que, lorsqu'une enquête policière est en cours,
il n'y a généralement aucun commentaire qui est formulé.
Vous savez,
la collusion dans l'industrie de la construction ne représentait ni un risque
pour un environnement ni un risque
pour la santé publique. Pourtant, il s'agissait bien d'actes répréhensibles et
d'un tel niveau d'intérêt public que Québec a autorisé une commission
d'enquête publique de trois ans, qui s'est traduite également par un rapport de
1 741 pages. On y a exposé des
actes qui ne constituaient ni risque sanitaire ni risque environnemental mais
qui ont causé un tort énorme à la
santé de notre démocratie et à nos institutions également; un rapport qui a
engendré aussi, et toutes ces audiences,
un climat de méfiance dans la population et un scepticisme ambiant qui, vous en
conviendrez, n'étaient ni sains pour la démocratie ni sains pour la
confiance du public.
Nous en profitons pour rappeler
également que cette commission n'aurait jamais vu le jour sans les
nombreux scandales exposés par des
journalistes et avec l'aide de divulgateurs et n'aurait pas vu le jour non plus
sans l'insistance des citoyens et des
partis politiques qui ont réclamé des explications. Précisons aussi que, dans
bien des cas, ces sonneurs d'alarme
s'étaient déjà plaints à la police, s'étaient déjà plaints aux instances
officielles, mais, constatant que ce n'était pas suffisant pour changer les choses, ont décidé de se tourner vers les
médias. Les changements sont en effet survenus lorsque ceux-ci ont trouvé le courage de briser le silence. Et parmi ces
divulgateurs se trouvait un ancien conseiller du sous-ministre des
Transports, François Beaudry, qui s'est d'ailleurs exprimé publiquement sur le
projet de loi n° 87, le qualifiant de cosmétique.
Ce projet de loi nous
questionne aussi à savoir : Qu'en serait-il des divulgateurs qui
proviendraient du milieu policier? Au cours
des dernières années, la FPJQ est intervenue pour dénoncer ce que nous avons
appelé la chasse aux sources
journalistiques, une traque qui a été initiée notamment par le SPVM, le Service
de police de la ville de Montréal, dans
l'affaire de la vente de la liste de noms des informateurs, on peut l'appeler
l'affaire Davidson; par la suite, également la Sûreté du Québec dans
l'échec du volet 2 de l'opération Diligence sur l'infiltration du crime
organisé dans la FTQ-Construction.
Dans sa forme
actuelle, le projet de loi n° 87 pourrait aussi permettre des cas où
l'intérêt public pourrait être facilement
écarté... ou encore des divulgations qui seraient rejetées. L'article 11
de ce projet de loi permet au Protecteur du citoyen de ne pas considérer une demande jugée, entre guillemets,
frivole, c'est le terme utilisé, une appréciation qui est confiée au seul Protecteur du citoyen, qui
pourrait écarter aisément une plainte. Le Protecteur du citoyen peut
aussi mettre fin au traitement d'une
divulgation si celle-ci, et je cite, «met en cause le bien-fondé d'une
politique ou d'un objectif de
programme du gouvernement ou d'un organisme public». Est-ce donc à dire qu'il n'y
a aucune place pour la critique, aucune place, donc, pour la dissidence
ou aucune remise en question?
Il convient ici de
citer l'exemple de la fonctionnaire du gouvernement fédéral Sylvie Therrien,
une sonneuse d'alarme qui avait dénoncé,
dans un article de Guillaume Bourgault-Côté, du Devoir, un système
douteux de quotas exigés à l'assurance-emploi. Récemment, le bureau
d'enquête a révélé le même genre de quotas au sein de Revenu Québec. Mme Therrien, avec un projet comme celui-là,
n'aurait jamais été protégée. On peut se poser la question : Est-ce que
nos sonneurs d'alarme ici, au Québec, seraient protégés? Nous en doutons.
Avec le projet de
loi, donc, n° 87, nous notons également un grand absent : le secteur
municipal. Or, les plus grands scandales de
corruption au Québec, ces dernières années, proviennent des municipalités. Les
divulgateurs du secteur municipal
doivent aussi, selon nous, être protégés par la loi. À la ville de Montréal,
récemment, un fonctionnaire avait dénoncé
à La Presse, sous le couvert de l'anonymat, l'effritement
des mesures de lutte à la collusion sous l'administration de l'ancien maire Michael Applebaum. Ce
divulgateur a été traqué, a été identifié également, et encore une fois, dans
sa forme actuelle, le projet de loi n° 87 ne pourrait rien faire pour
empêcher de telles représailles envers celui qui sonne l'alarme et qui appelle,
finalement, l'intérêt du public.
Rien
non plus sur le secteur privé ou encore sur les liens que pourraient avoir les
fonctionnaires et le personnel des
organismes publics ou des entreprises privées qui pourraient transiger avec le
gouvernement. Là encore, en raison de la collusion qui a frappé nos
institutions ces dernières années et qui a gangrené de nombreux ministères, il
y a de quoi se questionner.
Dans
son rapport final, également, la commission Charbonneau, à la recommandation
n° 8, suggérait la création d'un
régime général de protection des lanceurs d'alerte, autant privé que public. Je
cite : «Les personnes qui oeuvrent au sein d'une organisation ou qui travaillent avec celle-ci sont souvent
les mieux placées pour devenir des "lanceurs d'alerte" et fournir aux organismes de surveillance et de
contrôle des informations dont ils ont besoin pour ouvrir une enquête.»
Ce projet de loi, selon nous, devrait en tenir compte.
Le
projet dit facilitant la divulgation des actes répréhensibles, malheureusement
il nous appert être un système interne
de gestion de la divulgation plutôt qu'un mécanisme de transparence. En 2014, au lendemain de son élection, le gouvernement nous avait promis d'être le plus transparent de l'histoire; la transparence va jusqu'à permettre une saine circulation de l'information.
Au lendemain de l'adoption de ce projet de loi, le personnel des organismes
publics sera fortement encouragé, selon nous, malheureusement à garder l'information
à l'interne. Peut-être se sentiront-ils même bâillonnés,
sachant qu'ils devront se plier, finalement, à un processus judiciaire. En conclusion, il ne laisse pas de
place à la divulgation publique et porte,
selon nous, faussement l'intention de vouloir la faciliter. Il tend plutôt à
vouloir garder entre les murs des organismes publics tous les actes répréhensibles. Et, selon nous, ce projet de loi pourrait bien couper les ailes aux
personnes les mieux placées pour dénoncer en raison des dédales démocratiques et bureaucratiques, de même
que les procédures, qui n'ont pour but, finalement, qu'éviter de faire trop de
bruit.
Aujourd'hui, les
sonneurs d'alerte ne sont pas protégés, et trop souvent ils sont traqués
lorsqu'ils osent briser le silence, lorsqu'ils osent fournir des informations
anonymes aux journalistes — et
nous aurons plein d'exemples pour vous — sous prétexte qu'ils ont contrevenu à leurs
obligations de loyauté en divulguant des informations souvent sensibles. Loin d'y remédier, ce projet de loi
passe à côté du problème et sert davantage, selon nous, à protéger
l'image des institutions qu'à servir véritablement l'intérêt du public. Je vous
remercie.
• (19 h 40) •
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. Merci, madame...
Mme Millette
(Lise) : Millette.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : ...Mme Millette, de
votre présentation. Nous allons donc procéder aux échanges avec les
parlementaires, et, bien sûr, nous débutons avec la partie gouvernementale. M.
le ministre, la parole est à vous.
M.
Hamad : Oui. Merci, Mme Millette, M. Séguin et
M. Larouche. Bienvenue. Merci. Évidemment, je n'ai pas le mémoire, donc je vais aller un petit peu... je
vais me fier à l'article qui est écrit dans le journal. Alors, j'espère que
le journaliste a bien rapporté vos paroles...
Mme Millette (Lise) : A bien cité
ses sources.
M.
Hamad : ...j'espère
que l'article est bien écrit puis reflète exactement ce que vous voulez dire.
Bon, là,
j'essaie de vous suivre. Normalement, je lirais le mémoire puis j'aurais... Si
je comprends, là, dans notre loi ou
la loi déposée... En passant, une loi, vous savez, par expérience, une loi
déposée, ce n'est pas ça qu'on va adopter, on va travailler ensemble pour l'améliorer. Mais là j'ai constaté que,
dans la loi déposée, il n'y a rien de bon, là. Alors, dites-moi, à part,
mettons, de vous confier la responsabilité d'aider les lanceurs d'alerte à
faire vos affaires, à part de ça, y a-tu une solution qu'on peut faire pour
protéger la santé démocratique?
Mme
Millette (Lise) : Bien,
d'abord, on peut s'inspirer quelque peu du même projet de loi qui existe au
fédéral, qui est la loi sur les
fonctionnaires et qui porte sensiblement le même nom, au fédéral, où on
retrouve par contre, dans cette
loi-là, cette notion de l'intérêt du public. L'intérêt du public, on ne le
retrouve pas dans le projet de loi n° 87. Ça pourrait déjà être une bonification importante que
de le préciser, donc déterminer qu'il peut y avoir des situations où
c'est ce qui doit primer; non pas uniquement
pousser, également, les lanceurs d'alerte vers un système de... ou un processus
de judiciarisation, mais leur permettre de
faire les divulgations qui s'imposent, et donc une libre circulation de
l'information.
On ne
retrouve pas, également, la même garantie qu'au niveau fédéral quant à
l'anonymat que pourrait obtenir un sonneur d'alerte à l'intérieur. On a
également plusieurs lacunes, dans ce projet de loi, qui pourraient être
corrigées, notamment sur le rôle du
Protecteur du citoyen, il n'est pas précisé, par exemple, si les enveloppes
supplémentaires seront données pour encadrer ou avaler, si on veut, ces
nouvelles responsabilités qui pourraient lui incomber, et également déterminer
de quelle façon les enquêtes seront faites et dans un délai de temps également.
Parce qu'on a, à la suite de l'entrevue que vous m'avez mentionnée et montrée,
reçu un courriel de la DPJ ou d'anciens experts qui peuvent en témoigner, comme quoi, lorsqu'il y a des enquêtes
internes, il est souvent impossible d'obtenir de l'information, même
après deux ans d'enquête. Donc, pour une personne qui dénonce une situation,
une personne qui veut obtenir des changements en raison d'actes répréhensibles,
en raison de collusion, ou de malversation, ou peu importe, ça peut être
excessivement long avant d'obtenir des résultats, et c'est peut-être ce qui
manque en partie à ce projet de loi.
Et j'ai également mon collègue qui pourrait
rebondir.
Une voix : Si je peux ajouter...
M.
Hamad : Oui. Est-ce
que vous allez me donner la chance de poser des questions?
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : ...M. le ministre poser
des questions, puis par la suite on regardera, là, s'il y a une
possibilité pour rajouter du temps.
M.
Hamad :
En fait, là, dans la loi, on ne met pas les budgets qui vont à la
responsabilité. Par expérience, là, c'est qu'on fait une loi. Si on
crée, on donne des responsabilités additionnelles à la Protectrice du citoyen,
c'est sûr que les budgets vont aller avec
pour appliquer la loi, sinon, à l'Assemblée nationale, ils vont poser des
questions : Avez-vous mis les budgets? Alors, on n'est pas obligé
de mettre un article dans la loi, c'est la pratique.
Maintenant,
je vais prendre votre article pour bien comprendre ce que vous voulez dire.
Alors, je lis dans... C'est l'article
que j'ai vu aujourd'hui, en tout cas à 6 h 36 ce matin, bon, Presse
canadienne. Alors, ici, là, je regarde ce que vous avez dit, je veux bien comprendre ce que vous
avez dit. Le titre, évidemment, vous allez dénoncer les torts du projet de loi n° 87. Évidemment, le titre puis
l'article, c'est toujours... pas les mêmes personnes, hein, vous me dites ça,
comme journalistes. Mais je vais aller là, voir, la première phrase,
j'ai vu ici, on dit — ça,
c'est votre citation, là : «"On veut un peu mettre une cloche de verre sur tous les
organismes publics pour être bien certain que, s'il y a une divulgation,
elle restera à l'intérieur de la machine et
elle ne traversera jamais la frontière de la publication ou de l'arène
publique", a-t-elle déploré.»
C'est vous. En fait, là, ce qu'on... Le projet de loi, ce n'est pas moi qui
l'ai préparé, alors j'arrive, j'ai un peu quand même la chance de dire : Ce n'est pas moi, mais ce n'est pas
pour longtemps. Et en fait, là, ce qu'on veut faire, dans ce projet de loi, ce qu'on dit, d'abord on
couvre... l'esprit, c'est couvrir tout ce qui est fonds publics partout.
Autrement dit, si je suis dans le privé, mais je travaille avec le gouvernement
comme consultant, etc., je travaille dans les fonds publics, tout ce qui touche les fonds publics, les organismes, on en a
nommé, la Protectrice a nommé 400 organisations à 500 organisations, donc là ce qu'on dit, je
suis un employé ou je suis dans le public, dans le privé, je vois une
situation alarmante, on dit à la
personne : Vous avez une porte d'entrée qui s'appelle la Protectrice du
citoyen, vous allez là, et là on protège
la confidentialité. Et là ce n'est pas dans... Et on te donne le choix. Si tu
veux, tu peux faire ça à l'intérieur de ton organisation, ça, c'est la machine, dans votre expression, mais il peut
aller voir la Protectrice du citoyen, qui est indépendante du gouvernement. Elle est nommée par l'Assemblée
nationale, elle est indépendante et elle est nommée à l'unanimité de tout le monde. Là, la personne veut aller voir la
protectrice, elle est protégée, c'est unanime. Puis la protectrice va
protéger l'identité de la personne, comme
vous le faites dans vos sources d'info, à peu près, et elle va prendre l'info,
elle va vérifier, elle va voir. Si,
mettons, il y a matière criminelle dans la question, la personne, elle va être
dirigée à l'UPAC, elle va être accompagnée pour aller à l'UPAC ou à
d'autres autorités policières pour prendre sa plainte ou sa divulgation et par
la suite prendre les mesures nécessaires.
Alors
là, on n'est pas à l'intérieur de la machine, là, on permet aux gens de sortir
en dehors de la machine, on permet à
des gens d'avoir la liberté d'aller divulguer les informations. Je comprends
que vous, vous préférez que j'aille vous voir, puis qu'on fasse l'article ensemble, puis on sort, puis tout ça, mais ça
va finir par arriver chez vous. M. Séguin, il va le trouver après
quand? M. Séguin, il va le trouver quand ça va être l'UPAC qui va faire
une arrestation. Là, vous allez être dans les nouvelles, vous allez suivre les
nouvelles, et s'il y a une condamnation, etc. Là, vous allez compléter votre enquête.
Là, ce qu'on
dit : Quand tu vas aller à la protectrice, c'est pour avoir une protection
aussi, puis personne ne va le savoir, c'est qui. Alors là, ce n'est pas
l'intérêt de la machine, là.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Millette ou monsieur...
Mme Millette (Lise) :
M. Larouche.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Larouche.
M.
Larouche (Vincent) : Pour
nous, on trouve que c'est très intéressant que les gens puissent aller au
Protecteur du citoyen, puissent aller à l'UPAC, mais, pour nous, ce n'est pas
suffisant, et on trouve que c'est restrictif de les diriger uniquement vers ces
endroits-là.
Un exemple
qui nous a beaucoup frappés puis qui est un triste exemple aussi : samedi
prochain, ça va faire deux ans qu'un
jeune garçon de cinq ans, Nicholas Thorne-Belance, est décédé à Saint-Hubert au
cours d'une poursuite policière. Et
toutes les procédures avaient été suivies, la machine, si on veut, s'en était
occupée, de ce dossier-là, et le dossier avait été classé, pas
d'accusation. Et justement le policier impliqué dans ça, c'était un policier de
l'UPAC, l'UPAC était au courant de cette histoire-là. Finalement, on a jugé
qu'on ne ferait rien avec ça, il n'y a aucune accusation qui a été déposée. Et c'est uniquement quand les
journalistes ont commencé à révéler des faits troublants qui avaient été
cachés vraiment à la population, soit que le
policier roulait à 120 kilomètres à l'heure dans une zone de 50 et qu'il
n'était pas sur un appel d'urgence,
mais il était seulement en train d'aller relayer un de ses collègues qui était
sur une filature pour une histoire de corruption qui impliquait des
personnes, qu'on aurait pu reprendre à d'autres moments aussi...
Et donc,
quand on a publié ces reportages-là, la ministre a été poussée à demander un
examen indépendant, on a tout rouvert le dossier, et finalement ça a
mené... il y a des accusations de conduite dangereuse qui ont été déposées contre le policier de l'UPAC qui était impliqué et
aussi des changements aux règles de... façons de faire des filatures des
corps policiers. Toute l'information était
déjà disponible à l'UPAC, dans les corps policiers ou au gouvernement, et
c'est uniquement quand les journalistes ont été alimentés par des informations
qui ont été révélées au public... On aurait pu
les révéler au public avant que ça se rende aux journalistes, là, ça n'a pas
été fait. Donc, pour nous, il faut garder cette possibilité-là, cette
porte-là ouverte, là.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le ministre.
• (19 h 50) •
M.
Hamad :
En fait, ça ne changera pas, là, il va y avoir du monde tout le temps qui vont
vous appeler, ils vont vous informer,
vous allez faire vos enquêtes, vous allez sortir les articles. Ça, la loi ne
vous empêche en rien de faire ça, rien, au contraire. Ce qu'on fait,
c'est que...
Parce que, là, vous nous donnez des exemples où la loi
n'était pas là, n'était pas applicable. On prend cet exemple-là, qui est
un excellent exemple. Là, ça peut arriver qu'un collègue du policier... — là,
on est dans la simulation — le
collègue du policier, il peut aller voir la Protectrice du citoyen, il dit : Moi, j'ai de l'information à vous donner dans cette enquête-là,
voici, voici, toutes les choses. Donc là, elle va le protéger. Puis par la
suite, évidemment, ça va être une matière d'enquête. Elle n'ira pas
voir l'UPAC pour un policier de l'UPAC, elle va aller voir une autre autorité
policière pour permettre d'ouvrir une enquête, puis faire le suivi de ce dossier-là,
puis mettre la lumière, alors... Et votre article peut arriver après pour
renforcer l'enquête.
Et en
passant, aujourd'hui, après-midi, la Protectrice
du citoyen, elle nous a dit : Si
moi, je juge, par exemple...
je vois des articles dans les journaux...
C'est vos articles qu'elle va voir, vos reportages, M. Séguin.
Quand elle va le voir, elle va dire : Moi, s'il m'attire
l'attention à quelque chose, je veux pouvoir faire... moi-même initier une
enquête.
Donc, l'objectif
de la loi, ce n'est pas de limiter votre travail, au contraire. L'objectif
de la loi, c'est de mettre des balises pour faire ça.
Maintenant, pour le
sonneur d'alerte, là... Parce qu'il y a deux choses, là. Il y a vraiment la
divulgation avec un système, et là il y a
quelqu'un qui s'en va en public, puis là il dit : Moi — en public, là — mon patron, il triche, mon patron, il est en train de faire telle affaire,
telle affaire, puis là il s'en va en public. Ce qu'on veut baliser, ça, c'est
pour justement le premier mot que vous avez
utilisé, Mme Millette, c'est la santé démocratique, parce que je peux aller en
public puis dire, comme employé : Je
pense 100 % j'ai raison, puis ça fait un petit bout que j'en parle, puis
personne ne m'écoute, je suis tanné,
je m'en vais en public, je dis : Là, là, mon patron, il s'appelle Sam
Hamad, il est gestionnaire dans des contrats d'informatique, il est en train de faire... il a eu des pots-de-vin, il
a fait ci, il a fait ça, puis là M. Séguin fait un beau reportage avec lui, on s'en va en public, puis là,
évidemment, Sam Hamad ou n'importe qui, sa réputation, elle vient de... Parce
que là, là, c'est des «il pense que», puis à
la fin ça arrive que, dans le fond, ce n'est pas vrai. Alors là, pour limiter
ça, dans la santé démocratique...
Parce que les gens ont des droits, dans la société. Puis ça n'empêche pas votre
travail, parce que vous faites partie de notre santé démocratique. Que
vous soyez libres puis que vous protégiez vos sources, c'est notre santé démocratique, il faut respecter ça.
Cependant, on ne peut pas aller dire à gauche, à droite des choses, il y a un
respect des... Alors
donc, on met les systèmes en place. Puis on a choisi la Protectrice du citoyen
parce qu'elle est indépendante du
système, de tout le monde, elle est indépendante de l'Assemblée nationale, elle
est nommée à l'unanimité. Alors là, il y a comme... Et on va évidemment
lui donner les moyens d'exercer son travail.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : M. Séguin.
M. Séguin (Félix) : Si je peux me permettre, M. le ministre, vos observations, nous les
remarquons, et je crois qu'il s'agit
peut-être même un peu plus de l'esprit du projet de loi qui tend à poser
problème dans ce que l'on avance, vous...
Et je vous cite, là, vous venez de nous dire que vous voulez encourager, donc,
les lanceurs d'alerte, ceux qui veulent qualifier des actes de
répréhensibles dans le gouvernement ou aller à des journalistes, c'est selon.
Ce que l'on veut souligner, c'est : Vont-ils le faire, premièrement? Mais
à quel prix vont-ils le faire?
Présentement,
dans sa forme actuelle, on voit que le projet de loi ne couvre pas, si je ne
m'abuse, les municipalités. Je vais
vous parler d'expérience d'un cas qui est assez simple, puis ce n'est pas une
nouvelle qui a fait une très grosse manchette,
ça n'a pas fait la une du Journal de Montréal, de La Presse,
ça n'a pas fait l'ouverture des bulletins de télé. Il y avait chez Stationnement de Montréal des cols
bleus qui travaillaient, qui étaient prêtés dans cet organisme-là afin
de recueillir les fonds des parcomètres de
la ville de Montréal. Il y a, parmi les cols bleus de la ville, d'autres qui
ont décidé de dénoncer un groupe de ces cols bleus là qui volaient les
recettes des parcomètres de Montréal, qui, au fil des années, totalisaient
plusieurs dizaines de milliers de dollars. Voulez-vous que je vous dise quel
traitement a reçu le col bleu dénonciateur? Une suspension. Il a fait sauver de
l'argent à la ville en stoppant le stratagème, la ville qui reçoit des
redevances de Stationnement de Montréal.
Et
vous voyez que ce n'est pas facile d'être un dénonciateur, ce n'est pas facile
de s'adresser aux journalistes sans avoir
peur d'en subir les conséquences. Et j'en veux à preuve — je termine là-dessus, M. le ministre, M. le Président — mes outils
de journalistes à moi, présentement, là : téléphone n° 1,
téléphone n° 2, pagette, et j'en passe. Pourquoi? Parce que les gens craignent de dénoncer maintenant aussi
aux journalistes en raison du traitement qu'ils sont susceptibles de
subir.
Tantôt, je vous parlerai d'une de nos sources qui
a été accusée devant le tribunal. Heureusement, les accusations sont tombées, mais il y a
un prix, il y a toujours un prix à dénoncer, et c'est ce prix-là que l'on
aimerait qu'elles ne paient pas.
M.
Hamad : Je suis d'accord
avec vous, ce n'est pas normal, ce qui arrive, si le cas est tel que vous me le
présentez, que la personne a dénoncé du vol puis a été accusée après. Justement,
on est là pour aider ces gens-là.
Vous
avez raison, le domaine municipal n'est pas clair, puis on devrait le couvrir,
vous avez tout à fait raison.
Ce qu'on a vu à la commission Charbonneau,
la majorité des allégations qu'on a vues, là, c'était dans les municipalités, puis on devrait agir et on va agir. Ça, je vous le donne.
L'objectif,
justement, dans le cas de votre personne, le col bleu, bien
là on va lui permettre d'aller divulguer, d'aller donner l'information,
le protéger, surtout le protéger dans sa divulgation, qui va permettre, dans ce
cas, prenons ce cas-là, d'aller voir la protectrice...
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, M. le ministre. Je
suis obligé de vous interrompre. Merci. M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre :
Merci, M. le Président. Bonsoir, Mme Millette. M. Séguin,
M. Larouche. Bon, il y a beaucoup d'éléments
qui ont été couverts, depuis le début de la présentation, mais j'aurais le goût
de revenir sur la question... Vous avez parlé beaucoup,
Mme Millette, durant votre présentation, de l'intérêt public, puis moi, je
trouve que c'est un des éléments qu'on doit
approfondir au niveau de la commission notamment. Vous avez parlé... Bon, au
fédéral, effectivement, cette notion-là est beaucoup plus présente dans
la loi au fédéral.
Est-ce
que vous avez de l'information à l'effet que, quand on inclut la notion
d'intérêt public, le projet de loi ou la loi est beaucoup plus efficace? Est-ce qu'il y a de la jurisprudence?
Est-ce qu'il y a des exemples concrets? Pouvez-vous nous entretenir un
peu là-dessus?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Millette.
Mme Millette (Lise) : En fait, il faut comprendre quel est exactement l'esprit de cette
loi-là. La loi est de faciliter la
divulgation d'actes répréhensibles, c'est donc une commission à la
transparence. Donc, si l'objectif est la transparence, il faut qu'on
sente qu'on est derrière l'importance que représentent les sonneurs d'alarme et
qu'on veut donc faciliter réellement la
divulgation. C'est un peu, là, l'importance de mettre en préséance... que
l'intérêt public ait préséance — et je reprends les mots qui ont été
cités — sur
l'objectif de vouloir mettre des balises. Vous savez, nous, dans notre travail journalistique, on répond également à un guide de déontologie,
guide de déontologie de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, du Conseil de presse
également, il y a des lois également contre la diffamation, donc ce n'est
pas vrai qu'on coule des informations à tout vent, sans se soucier des
conséquences pour les personnes, qui peuvent être victimes de divulgations qui
ne seraient pas dans l'intérêt public mais qui servent des intérêts personnels,
je l'ai d'ailleurs dit dans ma présentation.
Mais affirmer cet intérêt public là et faire sentir que, finalement, ce que
l'on souhaite, c'est un
assainissement de nos institutions et de nos organisations publiques, plutôt
que d'essayer de déterminer comment faire cheminer une divulgation, oui,
dans la machine et à l'intérieur de cette bulle de verre.
On nous dit également que, pour ce qui est de la
Protectrice du citoyen, oui, on peut référer à elle, mais, dans votre projet de loi, dans le projet de loi
n° 87, à l'article 11, on précise aussi qu'on peut mettre fin à un
examen si, par exemple,
l'objet de la divulgation vise une politique, vise un objectif de programme.
Alors, c'est donc qu'il n'y a aucune remise
en question possible. Si effectivement on voulait critiquer les quotas
confirmés à Revenu Québec, ça pourrait très bien faire l'objet d'une fin
de non-recevoir, la divulgation, et ça, ça nous préoccupe.
Également l'article que je mentionnais,
l'article 6, qui précise que, oui, on peut communiquer publiquement, mais
uniquement si ça porte sur des éléments de santé ou de l'environnement. Quand
on parle de construction, de ponts et de
routes, on s'entend, il n'y a pas de santé et d'environnement, à peu de chose
près, là, mais ça représente une incidence importante.
Et là on a
cette pression aussi de dire : Il faut d'abord aller à la police. Je crois
que la décision de plusieurs sonneurs d'alarme, de plusieurs
divulgateurs d'aller aux médias, c'est avant tout pour se soustraire de cette
judiciarisation, qui n'est pas toujours nécessaire. Parfois, pour faire bouger
les choses, on n'a pas nécessairement besoin de se soumettre à un processus
judiciaire.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le député.
M.
Lelièvre : Oui. Justement, j'arrivais à cet élément-là. Le fait que,
je présume, plusieurs des personnes qui vont rencontrer les médias vont
le faire par choix, au lieu d'aller rencontrer la police ou d'autres entités,
ils vont aller voir, finalement, un journaliste, d'après votre expérience,
votre vécu, est-ce que vraiment la crainte de toute la lourdeur de l'appareil
gouvernemental, incluant le système judiciaire, c'est vraiment un frein pour la
dénonciation?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Millette.
Mme Millette (Lise) : Je pense que
certaines personnes se sont heurtées non seulement à un frein, mais à des
délais, et surtout à des situations qui n'apportaient pas leurs fruits. Mon
collègue Vincent pourrait réagir avec un exemple concret.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Larouche.
• (20 heures) •
M.
Larouche (Vincent) : Bien,
un exemple aussi qu'on a trouvé très pertinent au cours des dernières années,
c'est M. Jacques Duchesneau. Tout le
monde s'en rappelle, on lui a confié le mandat de faire un rapport sur
l'industrie de la construction. Lui
estime avoir découvert un empire malfaisant vraiment qui tentait de prendre le
contrôle de l'industrie. Et ensuite, lui, sa tâche, vraiment, c'est de
remettre ça ensuite au ministre et ensuite de laisser ça entre les mains du ministre — M. le ministre, vous vous en rappelez certainement.
Et lui estime que ça ne suscitait pas
assez d'intérêt, à son avis,
que ça risquait de se retrouver sur les tablettes ou de ne pas être assez pris
au sérieux. Alors, il en a témoigné devant la commission Charbonneau déjà, il a dit : Moi, je jugeais que c'était
primordial que ça devienne public, que ça soit montré à la population
dans son intégralité, comme ça. Alors, il a pris la décision lui-même, sur lui,
d'aller dévoiler ça dans les médias. Et, en ce faisant, c'est clair qu'il
désobéissait, d'une certaine façon, et que normalement, lui, sa tâche, c'était seulement
de le remettre au ministre. Par
contre, si on avait dû le soumettre
ensuite à un test, évaluer : Est-ce
qu'il a agi dans l'intérêt public ou
seulement pour calomnier ou pour faire du tort à une personne?, pour nous,
c'est certain qu'il passait le test, à ce moment-là. Puis donc on peut
imaginer diverses modalités par lesquelles on pourrait faire ce test-là puis
soupeser la balance un peu, mais on pense que c'est un bel exemple où la
personne aurait passé le test.
Une voix : ...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le ministre, s'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le ministre! M. le député
de Gaspé.
M.
Lelièvre : Oui, merci, M. le Président. Il va de soi que le secteur
municipal, selon notre formation politique, aussi doit être inclus dans le projet de loi n° 87, c'est sûr qu'on
va travailler dans cette optique-là. Est-ce qu'il y a d'autres secteurs
qui, selon vous, seraient prioritaires également?
Mme
Millette (Lise) : Bien, on
pourrait... Comme on l'a mentionné, toute la question des entreprises privées
qui peuvent travailler au sein des différentes organisations et organismes
publics, on ne retrouve pas nécessairement de porte
ou de pont vers les organismes. Également, bien sûr, les municipalités et les
paramunicipales également, parce que ce sont des structures qui ne sont pas directement visées mais qui
englobent à la fois des fonds publics et qui constituent, dans
plusieurs, des repaires et des endroits où probablement il pourrait être
intéressant d'assainir également.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci.
M. Séguin (Félix) : Et je peux
répondre à votre...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Oui, allez-y, M. Séguin.
M. Séguin (Félix) : Et je peux
répondre à votre question précédente, si vous voulez. Vous vous demandiez pourquoi le sonneur d'alerte ou le sonneur
d'alarme, appelez-le comme vous voulez, mais va souvent aller voir le
journaliste plutôt que
s'adresser, exemple, à la police. Qu'en est-il quand le sonneur d'alerte se
fait arrêter par la police, hein? Ça arrive,
ça, parfois. Et c'est aussi pourquoi les sonneurs d'alerte ont une confiance
qu'évidemment nous jugeons méritée dans le travail des journalistes.
Laissez-moi vous parler d'Offices jeunesse
internationaux du Québec, LOJIQ, qui est paragouvernemental, si je ne m'abuse. Le Journal de Montréal
dévoilait, il y a quelques mois de ça, une faille informatique, dévoilée par
un candidat à un stage à l'international chez cet organisme-là, une faille
informatique qui exposait au grand public les données personnelles, numéros de
passeport, permis de conduire, et etc., de centaines de jeunes qui voulaient
aller à l'étranger faire des stages au sein
de cet organisme. Ce jeune homme là a décidé de dénoncer, c'est un
universitaire sans aucun casier
judiciaire, et le traitement qu'on lui a réservé, c'est de porter plainte à la
police, chez LOJIQ. Il a été rencontré et il a été accusé, ce jeune-là,
d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur, un universitaire, la vie devant lui,
sans aucun antécédent. Les accusations sont
finalement tombées, mais est-ce que ça vous donne un peu le portrait du lien de
confiance qu'il y a entre le journaliste...
et de tout ce qui peut le briser également? Ça se brise facilement, ce lien de
confiance là, avec ce genre d'agissement.
Et c'est pour
ça, M. le ministre, que je parlais tantôt de l'esprit du projet de loi, qui
devrait d'ailleurs peut-être en premier
lieu, en tout premier lieu encourager les gens à dénoncer, point barre, à la
ligne, sans autre retenue, sans système trop complexe et avec une
certaine garantie d'être protégé. Je comprends qu'il le fait un peu; peut-être
qu'il pourrait le faire plus maintenant.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député de La Peltrie.
M.
Caire :
Merci, M. le Président. Sur le fait de devoir élargir la loi au municipal et au
privé, je pense qu'on ne s'obstinera pas longtemps puis je pense que le
ministre a entendu les commentaires.
Je vais vous
avouer qu'il y a quelque chose qui me dérange, dans votre présentation, puis
j'aimerais ça peut-être avoir un
éclairage là-dessus. Vous semblez dire que ce n'est pas une bonne chose pour
l'intérêt public que les citoyens dénoncent
des situations problématiques, je vais le dire comme ça, à la police, qu'on
serait tellement mieux servis si on les
dénonçait aux journalistes. Là, j'aimerais ça vous entendre là-dessus parce
que, sérieux, moi, je reçois ça aujourd'hui puis je dis : Hein?
Qu'est-ce que c'est, ça?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Millette.
Mme
Millette (Lise) : C'est dans l'obligation. Le précédent dans l'article mentionné dans notre
présentation, c'est que, pour rendre public
ou pour aller vers un média, d'abord le sonneur d'alarme doit s'adresser à la
police, ou encore à l'UPAC, ou peu
importe. C'est à quel moment ça arrive. On n'a aucun problème s'il y en a qui
veulent se soumettre à un processus judiciaire et qu'il y a des
accusations.
M.
Caire : Ou au
Protecteur du citoyen.
Mme
Millette (Lise) :
Effectivement, il y a des situations qui méritent effectivement que des
accusations soient portées et que des coupables soient trouvés.
Et que ce
soit la personne, finalement, qui cause l'acte répréhensible qui soit accusée,
plutôt que le sonneur d'alarme qui porte sur lui la responsabilité.
Pourquoi est-ce que ce ne serait pas, par exemple, l'organisation qui porte
plainte? Pourquoi il faut que ce soit le sonneur d'alarme qui se plaint
directement à la police?
M.
Caire : Mais, quand
vous dites «l'organisation», vous pensez à quoi exactement?
Mme
Millette (Lise) : Si on
pense, par exemple, que quelqu'un constate dans son milieu ou dans son
organisation qu'il y a un problème ou qu'un acte répréhensible est causé,
pourquoi est-ce que ce n'est pas l'organisation qui, elle, prend des recours
contre l'individu? Pourquoi est-ce qu'il faut que ce soit le sonneur d'alarme?
En fait,
c'est que tout repose sur les épaules du sonneur d'alarme et que, dans
certaines situations, peut-être que ce n'est
pas l'obligation première, de s'adresser à la police, mais que parfois il peut
y avoir d'autres façons de faire cheminer une information qu'on trouve dérangeante ou qui mérite d'être corrigée.
Et principalement je dirais que, le divulgateur, ce qu'il veut avant tout, ce n'est pas tant qu'une
personne soit arrêtée ou peu importe, c'est que la situation cesse et que
tout soit démasqué. Je pense que c'est un peu
ce pourquoi les sources approchent mes collègues qui font de l'enquête
régulièrement.
M.
Caire :
Je l'entends. Bien, je vous dirais que c'est la même chose, la même raison pour
laquelle ils viennent voir les députés de l'opposition aussi, là...
Mme Millette (Lise) : Possiblement.
M.
Caire :
...ça fait qu'on pourrait étendre le projet de loi aux députés de l'opposition,
mais... Ce qui n'est pas une demande d'amendement.
Non, mais
c'est parce que j'écoute ce que vous me dites, je comprends, mais je prends
l'article 5, où on dit, bien : «Toute personne peut divulguer
au Protecteur du citoyen», qui n'est pas une entité judiciaire, ou il a le
choix aussi, il peut aussi aller à...
l'employé de l'organisme peut s'adresser au responsable du suivi de la
divulgation. C'est parce que ce que je vois là-dedans, c'est qu'on demande aux
sonneurs d'alarme de s'adresser à des entités qui sont neutres et qui
n'ont d'autre intérêt — qui
n'ont pas d'intérêts commerciaux, qui n'ont pas d'intérêt politique, qui n'ont
pas d'intérêt de concurrence — de simplement traiter l'information et de
processer l'information. Le Protecteur du citoyen nous a dit : On
peut référer des dossiers à l'UPAC. Le Protecteur du citoyen nous dit :
L'UPAC nous réfère des dossiers aussi, si ce n'est pas judiciaire.
Ça fait que
je comprends ce que vous me dites, mais en même temps vous ne pensez pas qu'il
faut s'assurer que l'information
initiale soit traitée par des entités qui sont neutres et libres de tout
intérêt, qu'il soit politique, commercial ou...
M. Séguin
(Félix) : Si toutefois cette
neutralité, elle est... Et je veux bien croire, sans aucun doute, à la
neutralité du Protecteur du citoyen,
évidemment, et de plusieurs organismes gouvernementaux. La question est très
bonne, en fait, parce que ce que l'on
vient vous dire par cette présentation-là, c'est qu'il semble y avoir chez le
lanceur d'alerte ou le sonneur d'alarme,
que nous côtoyons, avec mes collègues ici, au jour le jour, un manque de
confiance dans l'institution publique et quelle qu'elle soit, que ce
soit le Protecteur du citoyen, que ce soit le gouvernement lui-même, ou une
autre de ses branches, ou un autre de ses organismes, alors c'est un peu...
Je reviens à mon postulat de départ, à l'esprit
de la chose. On ne demande pas une divulgation exclusive à un journaliste,
évidemment, on ne demande pas de passer devant les gens qui devraient recevoir
ces plaintes-là ou ces divulgations-là,
selon ce que le projet de loi va déterminer. Par contre, ce qu'on dit, c'est
qu'on doit aussi les protéger pour
parler à un journaliste si toutefois ils décident de ne pas faire confiance à
ces organismes-là, pour des raisons qui leur sont propres et dont le
gouvernement et même le journaliste ne doivent pas juger, de ces raisons-là, à
mon avis.
Mme Millette (Lise) : En fait, ce
que l'on dit, c'est que...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le député, allez-y.
M.
Caire : Non, c'est
correct, allez-y, Mme Millette, je vous écoute.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
O.K. Allez-y, Mme Millette.
• (20 h 10) •
Mme
Millette (Lise) : En fait,
ce que l'on dit, c'est qu'on veut laisser le plus grand nombre de portes
possible et non pas tenter d'en fermer. Et
ce pourquoi on est sensibles : si les gens veulent aller à la police, à
l'UPAC, parfait, mais ils peuvent aussi avoir l'occasion d'en référer...
Et je veux
aussi souligner une incongruité de ce projet
de loi, parce qu'on
parle du Protecteur du citoyen, là. Dans son rapport 2014‑2015, le Protecteur
du citoyen questionnait ce qu'il a
qualifié de tendance croissante à la judiciarisation à outrance, c'est dans le rapport qui a été déposé
en décembre 2015. Donc, loin de se référer à ce que le Protecteur du citoyen disait, il y a une
tendance à judiciariser davantage, eh bien, le projet de loi vient en ajouter
aussi en obligeant, finalement, cette judiciarisation de tous ces cas qui, par exemple, représentent un danger pour la santé ou pour l'environnement.
Donc, oui, on
a entendu la réponse du ministre quant au financement, mais on espère aussi que,
si on veut relever, eh bien, il y aura donc, si le projet de loi est adopté,
davantage d'effectifs qui seront dévolus pour assurer que le Protecteur du citoyen
pourra avaler, absorber cette responsabilité supplémentaire là, et non pas encourager cette — et
je reprends les mots, là, du rapport — tendance croissante à la judiciarisation
à outrance.
M.
Caire : À ce
moment-là, ce que je comprends, c'est...
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Millette. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
M.
Caire : Ah! Ce que
je comprends, c'est qu'on a fini.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Alors, j'ai encore moins de minutes
que les autres. J'aimerais ça que vous me
parliez un peu plus de cette idée de l'article 11, que vous critiquez
assez sur... dans le fond, on ne peut pas critiquer les politiques, etc. Et, ce que je comprends, en bout
de ligne, c'est peut-être là où votre rôle pourrait prendre... c'est là
que vous pourriez jouer un rôle.
Mme
Millette (Lise) : En fait,
si on réfère aussi à la loi miroir au fédéral, on ne retrouve pas ces
échappatoires, si on peut dire, pour la
divulgation. En fait, dans le projet de loi qui est présenté, c'est là où on
retrouve effectivement qu'on peut
juger la divulgation «frivole», ce sont les mots. Une divulgation — ça, on en est, il n'y a pas de problème,
là — qui pourrait
être effectuée à des fins personnelles, je pense que ça ne sert pas l'intérêt
public, et c'est pourquoi on a cautionné dès le départ que l'intérêt public devrait servir de référence et
devrait établir, finalement, la crédibilité ou l'intérêt d'une
divulgation et la motivation de cette divulgation. Ça, ça pourrait très bien
entrer comme bonification importante à l'article 11, à la place de la
divulgation frivole.
Également,
cette mention, c'est l'alinéa 3° qui précise qu'on ne peut pas ou qu'il
peut être écarté quelque chose qui
traite sur le bien-fondé d'une politique ou d'un objectif du programme. Ça, ça
peut... ça ouvre une porte et ça laisse place à une énorme interprétation pour pouvoir détourner des
divulgations qui pourraient être pertinentes, que ce soit à l'aide sociale, que ce soit à l'assurance chômage comme
on a vu au fédéral, que ce soit encore aux quotas de Revenu... Et on a
également une superbe échappatoire, dans ce projet de loi, qui est la même que
pour la loi d'accès à l'information, là, l'article 33, qui fait en sorte que, le
Conseil exécutif, le Conseil du trésor ou encore un comité ministériel, si la
divulgation touche un de ces éléments-là, eh
bien, elle pourra être écartée également. Ça aussi, ça représente une trappe
importante.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme la députée de... Vous pouvez poser une autre question, Mme la députée,
allez-y.
Mme Massé : Merci. Est-ce qu'il y a
quelque chose qu'on peut faire pour mieux protéger votre capacité de soutenir
les divulgateurs?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Séguin, vous semblez vouloir répondre.
M. Séguin
(Félix) : Si j'en réfère à
mon collègue Vincent, je vous dirais : Écrire la loi, mais...
M. Hamad nous l'a proposé, mais je pense que ça ne se fera pas. Je
pense que M. Larouche a probablement une bonne idée là-dessus.
M.
Larouche (Vincent) : Bien,
nous, certainement, une chose, c'est d'abord de cesser de les persécuter,
quand il y a des cas, et d'ouvrir un maximum
de portes, comme Lise l'a dit, plutôt que de refermer des portes puis de faire
un entonnoir où il y a une seule voie de
dénonciation possible, et de valoriser aussi leur rôle, parce qu'il y a
beaucoup de ces personnes-là, quand
ils nous parlent, ils sont terrorisés, ils ont peur de subir des graves
conséquences, des conséquences sur leur
carrière, des représailles, alors que normalement ils devraient être considérés
comme des héros qui font un travail tout à fait sain pour la démocratie et pour notre société, et donc vraiment de
lancer le message qu'il y a plusieurs portes qui sont ouvertes à eux,
qu'ils peuvent s'adresser à plusieurs endroits, et qu'ils vont être écoutés, et
que c'est une attitude qui va être célébrée plutôt que réprimée.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci, Mme Millette, M. Séguin et M. Larouche, de votre
participation à la Commission des finances publiques. Merci.
Je vais suspendre quelques instants afin de
permettre à la Fédération des cégeps de prendre place.
(Suspension de la séance à 20 h 14)
(Reprise à 20 h 16)
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Nous avons donc le plaisir de recevoir la Fédération
des cégeps, représentée par M. Bernard Tremblay, Mme Marie-France
Bélanger et M. Henrik Ellefsen. Bienvenue à la Commission des finances
publiques, heureux de vous recevoir. Vous avez 10 minutes pour votre
présentation, je vous écoute.
Fédération des cégeps
M. Tremblay (Bernard) : Merci, M. le
Président, merci. Mmes, MM. les députés, bonsoir. Alors donc, à ma droite, Mme Bélanger; à ma gauche,
M. Ellefsen. M. Ellefsen est le directeur des affaires juridiques à
la Fédération des cégeps, et
Mme Bélanger est la présidente du conseil d'administration. Je suis le
président-directeur général de la Fédération des cégeps.
Évidemment,
la Fédération des cégeps est le porte-parole des 48 collèges publics
québécois qui offrent à près de 175 000 étudiants
des programmes techniques et préuniversitaires partout au Québec. Nous avons
pris connaissance du projet de loi n° 87 et nous remercions donc
les membres de la Commission des finances publiques pour nous donner
l'occasion, donc, de faire part des réactions du réseau public collégial à ce
sujet.
Le projet de
loi vise à faciliter la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes
publics et assurer que ceux qui
divulguent de tels actes soient protégés contre les représailles. Bien que nous
souscrivions à ces objectifs, nous croyons
que le modèle proposé dans le projet de loi n'est pas adapté à la réalité des
cégeps, qui constitue un grand réseau mais de petites organisations.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Oui, allez-y, Mme Bélanger.
Mme
Bélanger (Marie-France) : Alors, le projet de loi propose d'instaurer
un régime à deux options pour le traitement des dénonciations des actes
répréhensibles par les employés de l'État. D'une part, il confie le mandat au Protecteur du citoyen de recevoir les divulgations
de toute personne et d'en assurer le suivi et, d'autre part, il impose à
chaque organisme public l'obligation de
mettre en place un mécanisme pour traiter les dénonciations que ses
employés auront préféré lui soumettre plutôt que de les adresser au Protecteur
du citoyen.
Les cégeps
comprennent la volonté du gouvernement de mettre en place un mécanisme qui
permette aux employés de l'État qui
désirent dénoncer les actes répréhensibles dont ils sont témoins de le faire
sans crainte de représailles, bien sûr ils y adhèrent. Par contre,
instaurer deux processus concurrents nous apparaît redondant, particulièrement
dans un contexte où l'on tente d'optimiser l'utilisation des ressources de
l'État. Dans le but d'éviter ce dédoublement de bureaucratie, nous ne croyons
pas qu'il soit souhaitable d'imposer aux cégeps l'obligation de se doter d'une
structure additionnelle
afin de traiter ces éventuelles dénonciations alors que ce traitement peut déjà
être assuré par le Protecteur du citoyen, un organisme indépendant dont
le mandat est d'assurer le respect des droits des citoyens dans leurs relations
avec les services publics.
Au cours des
dernières années, le réseau collégial public a connu un resserrement important
de son encadrement administratif dans
plusieurs domaines, comme dans l'octroi de contrats, les ressources
informationnelles, le contrôle des effectifs
et les contrôles financiers. Les cégeps souscrivent aux objectifs de
transparence et d'imputabilité poursuivis par le gouvernement. Cependant, comparativement à la fonction publique ou à
d'autres organismes visés par ce projet de loi, les cégeps sont des organisations de taille relativement modeste, et les
ressources dont ils disposent sont assez limitées, surtout si l'on
considère les compressions totalisant 155 millions que le réseau collégial
a connues au cours des cinq dernières années.
• (20 h 20) •
En 2014‑2015,
la proportion de personnel d'encadrement dans le réseau collégial était d'à
peine 4,5 %, et, dans la majorité
des cégeps, le comité de direction est composé au plus de six personnes, même
dans un grand collège comme le nôtre. Ce nouveau mandat demanderait que
l'on y consacre des ressources. Or, celles dont disposent actuellement les
directions de cégep sont déjà utilisées au-delà de leur pleine capacité.
Au surplus, outre la direction générale
elle-même, il n'existe pas, dans un cégep, un poste ou une fonction de direction jouissant de l'indépendance et du
pouvoir nécessaires pour procéder à des enquêtes sur les autres services
de l'administration interne. Contrairement aux commissions scolaires et à
certaines universités, les cégeps n'ont pas de service de vérification interne
ni de protecteur de l'élève ou d'ombudsman, à part quelques rares exceptions.
La mise en oeuvre de ce mandat impliquerait donc
la création, dans chaque cégep, d'une nouvelle fonction pour recevoir les dénonciations et procéder aux
enquêtes. Cela ajouterait à la lourdeur administrative déjà
existante dans les cégeps et
risquerait d'éloigner une fois de plus des gestionnaires de leurs fonctions
principales pour traiter des dénonciations qui pourraient de toute façon
être déférées au Protecteur du citoyen, lequel dispose ou disposera des
ressources et des pouvoirs nécessaires pour mener ces enquêtes.
En conséquence, nous croyons que les cégeps
devraient être dispensés de l'obligation d'établir une procédure interne de
traitement et d'enquête des divulgations d'actes répréhensibles prévue au
chapitre IV du projet de loi. Les employés
des cégeps qui désirent dénoncer de tels actes devraient plutôt le faire en
s'adressant exclusivement au Protecteur du citoyen, conformément au
chapitre II du projet de loi. La Fédération des cégeps recommande donc que
les cégeps institués en vertu de la Loi sur
les collèges d'enseignement général et professionnel ne soient pas visés par le
chapitre IV du projet de loi et que les employés des cégeps qui désirent
dénoncer les actes répréhensibles dont ils sont témoins le fassent au Protecteur
du citoyen, conformément au chapitre II du projet de loi.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. Bélanger.
M.
Tremblay (Bernard) : Merci.
Par ailleurs, bien que la Fédération des cégeps reconnaisse l'importance de protéger les personnes qui divulguent des actes répréhensibles contre
les représailles de leur employeur, nous croyons cependant que l'on doit protéger aussi les organismes publics contre les
dénonciations sans fondement ou mensongères visant à attaquer la
réputation, l'intégrité ou l'honnêteté du personnel des services publics et
parapublics.
Nous avons vu par le passé des personnes ou des
organisations porter des accusations intempestives, sans fondement réel, visant
essentiellement à miner à confiance du public envers l'administration de
l'État. Le secteur de l'éducation a
d'ailleurs connu des situations semblables. De telles démarches peuvent avoir
des répercussions graves et occasionner
des dommages importants. Le simple fait de souligner que la dénonciation
pourrait être rejetée si elle frivole ou
effectuée à des fins personnelles comme il est prévu actuellement à
l'article 11 du projet de loi ne nous apparaît pas suffisant pour
permettre au dénonciateur de prendre conscience du sérieux de sa démarche.
Conséquemment,
nous recommandons qu'il soit précisé au projet de loi qu'un dénonciateur ne
sera protégé contre d'éventuelles
représailles que si sa démarche est effectuée de bonne foi, comme c'est le cas
dans plusieurs réglementations du même
type. Donc, la deuxième recommandation que nous formulons est à l'effet que
l'article 26 du projet de loi soit modifié en conséquence.
En conclusion, la Fédération des cégeps
reconnaît l'importance des objectifs poursuivis par ce projet de loi. Cependant, nous croyons que ces objectifs peuvent
très bien être atteints sans alourdir la structure administrative des
cégeps dans la mesure où les dénonciations
peuvent être traitées par une instance indépendante déjà mandatée pour le
faire. Dans un tel contexte, nous recommandons que le mécanisme de
dénonciation ne prévoie qu'une seule option, soit celle de s'adresser au
Protecteur du citoyen.
Ceci étant
dit, les cégeps sont prêts à collaborer pleinement aux initiatives mises en
place par le gouvernement afin que la
population québécoise puisse compter sur une fonction publique efficace,
intègre et transparente. Nous vous remercions de votre attention.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci, M. Tremblay. M. le ministre.
M.
Hamad : Merci, M.
le Président. M. Tremblay, Mme Bélanger et M. Ellefsen,
bienvenue. Merci.
En
fait, votre problème est réglé, c'est l'article 18 dans le projet de loi où le protecteur peut dispenser pour les petites organisations, parce
que justement notre but, ce n'est
pas de mettre des structures, c'est plutôt permettre aux gens de
divulguer. Donc, la protectrice va juger. En fait, elle va regarder l'organisation,
la grandeur, et vous, les cégeps, évidemment, il y a des grandes organisations, il y a
des petites. Alors donc, elle va pouvoir faire ça. L'objectif,
c'est de permettre
aux gens d'aller à la Protectrice ou le Protecteur du citoyen. Donc,
moi, je pense que, pour... l'article 18, le projet de loi, chapitre IV, je
pense, règle le problème.
À
part de ça, je comprends que vous n'avez pas d'autre problème.
Au contraire, vous trouvez que la loi est bonne.
M.
Tremblay (Bernard) : Vous
avez vu qu'on... Évidemment, on est tout
à fait sensibles à la préoccupation du gouvernement, on y adhère.
Mais je me permettrais de vous dire par
ailleurs que l'article 18 nous semble comporter une option
encore, hein, comporter une appréciation, comporter l'exigence de faire une
demande au Protecteur du
citoyen, ce qui fait que nous, on suggère, évidemment, que dès le départ le projet
de loi comporte automatiquement une
mécanique, je dirais, qui ferait en sorte
que dans tous les cas les cégeps, là, n'auraient qu'une seule voie à respecter.
Alors, on vous le soumet, évidemment.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : M. le ministre.
M.
Hamad :
Correct pour moi, ça fait le tour.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Les collègues, avez-vous d'autres
questions? Avez-vous des questions?
M. Merlini :
J'en aurais une, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Bien, allez-y, M. le député, allez-y.
M.
Merlini : Merci beaucoup. Dans le cas... Vous avez mentionné vers la
fin, puis je veux juste... bien sûr je veux bien comprendre vos propos, vous avez dit à la fin... Au niveau de la
protection du divulgateur, vous avez dit que seulement si la divulgation
n'est pas frivole qu'il devrait être protégé. Est-ce que j'ai bien compris ou
j'ai mal compris?
M.
Tremblay (Bernard) : En
fait, le projet de loi comporte déjà cette référence-là au caractère frivole d'une
plainte et le fait qu'elle puisse être
rejetée. Nous, on ajoute que le critère de la bonne foi aussi de la personne
devrait être ajouté, pour être sûr, évidemment, qu'on n'ait pas des personnes mal intentionnées, dans le fond, qui utilisent ce mécanisme-là. On est préoccupés donc de l'utilisation
de protections de ce type-là par des gens qui ont d'autres intentions, en fait.
M.
Merlini : N'avez-vous pas
crainte qu'ensuite de ça, si la personne... Puis, je pense,
le ministre, hein, y a fait référence
tantôt dans l'exemple, où quelqu'un croit vraiment que sa plainte, elle est justifiée, et qui veut
divulguer quelque chose. N'avez-vous pas crainte — et
on a eu la fédération des journalistes qui était juste avant vous — que
ces gens-là iraient publiquement,
après ça, faire une dénonciation, une divulgation qui est de mauvaise foi?
Pensez-vous que ça va pousser la personne, si les intentions sont si
mauvaises, si la bonne foi n'y est pas, parce que vous voulez rajouter ce
critère-là... ne pousserait pas cette personne-là à aller dans l'espace public?
M. Tremblay
(Bernard) : Bien, moi, je vous répondrais...
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.
M.
Tremblay (Bernard) : Merci.
Oui, je vous répondrais en fait qu'on est toujours, hein, sujet à ce
risque-là, les gens nous menacent effectivement de faire des plaintes aux journalistes. Et ça, je pense que, dans une société démocratique, dans une société où on reconnaît la liberté de presse, il faut
faire confiance au travail journalistique, et ça, donc, ça ne nous pose
pas de problème.
Par contre,
que la loi protège une personne contre des représailles et qu'il y a une
présomption, dans le fond, de protection,
je le dirais comme ça, à une personne qui fait une dénonciation alors qu'en
fait peut-être que le motif de la représaille, c'est tout
simplement qu'elle ne fait pas bien
son travail, et que ça devienne, dans
le fond, une façon de se protéger contre des sanctions légitimes de son
employeur, ça, ça nous préoccupe. Vous savez, il y a toutes sortes de
lois qui comportent des présomptions de ce
type-là, on ne peut pas imposer des représailles dans telle, telle, telle
circonstance, et on a des exemples de
situations où une personne devrait donc être sanctionnée pour un comportement
qui est inadéquat dans sa fonction de
travail mais qui utilise, dans le
fond, ce mécanisme-là pour différer
la mesure que son employeur est en
droit de lui imposer, en disant : Bien, en fait, je fais une plainte parce que
je prétends qu'il y a un événement
inadéquat qui se passe dans mon organisation, mais que, dans le fond, c'est simplement
pour différer une sanction légitime de l'employeur. Alors,
c'est là-dessus, effectivement, qu'on vous alerte en disant : Soyons
vraiment préoccupés d'avoir le bon
dosage pour, oui, protéger des gens qui sont en droit d'être protégés, on est
tout à fait d'accord avec ça, mais que ce ne soit pas utilisé à mauvais
escient.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. Autre question, M. le député de
La Prairie?
M. Merlini :
Oui, j'en avais une complémentaire, comme on dit dans notre jargon.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Allez-y. Allez-y, monsieur...
Allez-y avec votre complémentaire, ça me fait plaisir.
M. Merlini : Merci, M. le
Président. Dans l'esprit de ne pas dédoubler la bureaucratie, la Fédération des
cégeps fait-elle confiance, à ce moment-là,
en l'institut de la Protectrice du citoyen, du Protecteur du citoyen comme
étant l'ultime endroit où on doit aller?
M.
Tremblay (Bernard) : Oui. Ah! tout à fait. Oui, c'est... En fait, vous
voyez, c'est vraiment ça, hein, le sens de notre mémoire, c'est de dire : Deux mécaniques nous semblent
inutiles pour des organisations du type de l'organisation des cégeps, nous sommes des petites organisations.
Donc, peut-être que, pour d'autres organisations, de plus grande taille,
c'est tout à fait adéquat, peut-être. Ce
qu'on dit c'est que, dans notre contexte à nous, d'avoir deux mécanismes, ce
qui risque d'arriver, selon nous, c'est que...
Présentement, les gens qui veulent faire des dénonciations, malgré l'absence
d'une loi, s'ils sont en confiance dans
l'organisation, ils trouvent le moyen de faire ces dénonciations-là sans
problème. Si on impose par la loi
donc un mécanisme, là, comme on mentionne, il y a des grandes chances que
naturellement les gens vont aller de
toute façon vers le Protecteur du citoyen. Donc, pourquoi alourdir notre
gestion interne, alors que, dans les faits,
la loi va avoir cette conséquence-là que les gens vont aller, je pense,
naturellement vers le Protecteur du citoyen?
C'est
pour ça qu'on dit : Bien, la loi devrait dès le départ clarifier le fait
qu'il n'y a qu'un seul processus, et ça évitera donc de faire une demande d'exemption au Protecteur du citoyen,
de devoir justifier cette demande-là, qu'il y ait des cégeps qui y aient droit, d'autres qui n'y aient
pas droit, sur quelle base, et que certains cégeps soient tenus de mettre
en place un processus qui, selon nous, risque de toute façon d'être peu
utilisé, parce que les gens vont dire : Bien, entre deux mécanismes, j'aime autant aller vers le
Protecteur du citoyen, qui a une reconnaissance au Québec, qui est perçu
comme étant indépendant, neutre, externe à l'organisation.
M. Merlini :
C'est ça. Donc, vous ne voyez pas...
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci.
M. Merlini :
Excusez, M. le Président, je vous ai coupé la parole.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Allez-y, M. le député de La Prairie.
M. Merlini :
Donc, vous ne voyez pas cette... ce que la fédération des journalistes disait
tantôt, une certaine perte de crédibilité
envers cette institution publique là. S'il y a bien une institution qui, comme
vous disiez, a ce respect-là de la
population, c'est bel et bien le Protecteur du citoyen. Vous ne voyez pas qu'il
y a une perte de crédibilité de ce côté-là.
M. Tremblay
(Bernard) : Tout à fait, tout à fait.
• (20 h 30) •
M.
Merlini : Peut-être que les
gens ont moins confiance aux députés. Le député de La Peltrie faisait référence tantôt que des fois il y a des gens qui
viennent dans les bureaux des députés de l'opposition pour venir présenter des situations,
des fois, oui.
Mais
vous ne voyez pas, là, peut-être cette érosion de confiance envers la Protectrice du citoyen, de son mandat, de sa nature elle-même?
M. Tremblay
(Bernard) : Bien franchement, non.
M. Merlini :
O.K. Merci, M. le Président. C'est tout pour moi.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Ça me fait plaisir. Questions?
Non? Ça va? M. le
député de Gaspé.
M. Lelièvre :
Bonjour. Merci d'être présents avec nous ce soir.
M. Tremblay
(Bernard) : Bonjour.
M. Lelièvre :
Écoutez, ce que je retiens, c'est que vous avez insisté sur deux éléments essentiellement,
le premier étant le fait que vous considérez
que vos organisations sont peut-être trop petites en termes de taille, de
ressources professionnelles pour gérer cette mesure-là du projet de loi
n° 87, puis l'autre élément, c'est toute la question que vous avez amenée, là, la question
des fausses alertes, là, ou de la notion de bonne foi, hein, vous avez amené ça
dans votre présentation, puis, bon,
c'est la première fois que c'est soumis, là, c'est notre première journée
d'auditions. Il y a également
la partie de... le pouvoir, ce que j'appelle, discrétionnaire, là, du Protecteur
du citoyen, l'article 18, à l'effet que le Protecteur du citoyen peut,
disons...
Une voix :
...
M. Lelièvre :
...dispenser — merci,
M. le ministre — peut
dispenser un organisme qui serait trop de petite taille, où ce ne serait pas
adéquat qu'il gère directement la loi.
Concernant la
dimension de vos organisations, moi, ça me surprend — je suis un gars de région — quand j'entends le directeur général
de l'association des cégeps dire : On est des petites organisations, tout
étant relatif, là, parce que, dans les autres séances
qu'on a tenues, on parle même de peut-être aller jusqu'à inclure des organisations
comme les municipalités, qui sont encore pas
mal plus petites que vos organisations. Donc, vous êtes vraiment convaincus,
là, que vous n'avez pas, dans...
c'est vraiment une réalité? Puis je vous crois, là, mais j'aimerais avoir des
exemples concrets, parce que, vous
savez, l'ensemble des cégeps du Québec, c'est quand même un réseau assez
important, il y a des budgets quand
même élevés qui se tiennent là, il y a des décisions importantes qui s'y
prennent. Donc, l'objectif du ministre étant ce qu'il nous mentionnait un peu plus tôt aujourd'hui, étant d'assurer
une saine gestion des deniers publics, etc., moi, ça m'apparaît... c'est une grosse demande, une grosse
proposition que vous nous amenez, ça fait que j'aimerais vous entendre
davantage là-dessus, là, pour bien comprendre... ou bien nous convaincre.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Tremblay.
M.
Tremblay (Bernard) : Merci. Je vais passer la parole à Mme Bélanger,
mais je vous rappelle la phrase que je vous
ai dite tout à l'heure, hein : Nous sommes un grand réseau mais de petites
organisations. Et effectivement je pense que Mme Bélanger, qui est
la directrice générale du cégep de Sherbrooke, peut témoigner de ce que ça veut
dire, là, dans son cégep.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Bélanger.
Mme
Bélanger (Marie-France) : En fait, pour illustrer, le cégep de
Sherbrooke, c'est le cégep de plus grande taille si on exclut la région
métropolitaine de Montréal et de Québec. Donc, on a un peu moins de
6 000 étudiants maintenant, 800...
bon, probablement qu'on est rendus à 800 membres du personnel maintenant,
après les coupes. On est 24 cadres pour gérer cette
organisation-là, on a 600 profs chez nous.
Alors, dans
les 24 cadres, en fait, on est six dans l'équipe de direction, je vous
disais tantôt... six dans une équipe de direction, donc six directeurs,
il y a des coordonnateurs, donc, de niveau intermédiaire. Les gens ont tous
plus qu'une responsabilité, en ce moment,
c'est assez difficile de penser qu'on aurait quelqu'un qui serait dédié... On
doit déjà gérer, bon, différentes
ressources de recours possibles dans les cas de la gestion de projets de
recherche, pour s'assurer de la conduite responsable de la recherche,
donc on a toutes sortes de mécanismes qu'il faut gérer. Et on a une personne qui s'occupe des communications, des affaires
corporatives, mais vous comprendrez que maintenir un haut niveau, je
dirais, de... un canal de communication très étanche, prévoir toutes sortes de
mécanismes pour s'assurer que les gens soient vraiment
à l'aise, qu'on puisse bien les protéger, lorsqu'ils veulent dénoncer des actes
répréhensibles, c'est extrêmement difficile à faire chez nous.
Et je ne suis
pas du tout convaincue non plus que les gens auraient le sentiment que c'est
complètement blindé. Même si on veut
le faire, la perception reste importante, dans un dossier comme celui-là.
Alors, M. Tremblay en faisait état tantôt, s'il y a des gens qui ont des inquiétudes, des préoccupations,
ils viennent nous voir. S'ils ne viennent pas nous voir, c'est parce qu'ils ont des inquiétudes encore plus
grandes. Je ne suis pas sûre, en les référant à la personne responsable
des affaires corporatives, que ça réglerait le problème.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député.
M.
Lelièvre : Merci. Vous avez
parlé de... bon, vous parlez de ressources dans votre intervention. On a un
projet de loi, qui s'appelle le projet de
loi n° 26, qui aussi, bon, est
un peu complémentaire à notre démarche ici aujourd'hui, où on prévoit un fonds, dans le projet de loi, on prévoit un fonds qui est relatif aux dépenses que va engendrer
l'organisation pour la récupération de sommes que différents ministères, organisations
publiques auraient versées de façon exagérée.
Est-ce que
vous croyez que, par exemple, pour que la Protectrice du citoyen, qui va
avoir une grosse, grosse job à faire,
beaucoup de responsabilités... Est-ce
que vous pensez qu'on devrait lui
assurer un revenu, des revenus minimaux garantis? Est-ce que ça devrait aller jusqu'à être inscrit dans le projet de loi? Parce que c'est inhabituel, ça, j'en conviens, mais il
y a quand même un précédent qui
est créé. Pour vous, la notion de ressources professionnelles, vous le
mentionnez, c'est une problématique dans vos organisations, mais, si on
pellette dans la cour d'une organisation qui existe déjà... C'est clair, on a rencontré cette personne-là
tantôt, la Protectrice du citoyen, puis elle nous disait qu'elle a même
estimé, là, à à peu près 800 000 $, là, les coûts pour appliquer
cette loi-là, et ça, c'est si on n'inclut pas le monde municipal. Si on
inclut le volet municipal, c'est quand même
beaucoup plus de travail. Donc, qu'est-ce que vous en pensez? Parce que, dans
le fond, vous dites : Nous autres, on
n'a pas le temps, on n'a pas les ressources, il faudrait que ça soit la
Protectrice du citoyen qui le fasse.
Mais avez-vous des préoccupations? Est-ce qu'elle va pouvoir tout faire ça?
Vous comprenez, vous connaissez le contexte, je dirais, de la rigueur budgétaire,
pour être poli, hein?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Tremblay.
M.
Tremblay (Bernard) : Je vais peut-être vous décevoir en vous disant
que malheureusement on n'est pas assez ou
je ne suis pas assez, je dirais... je ne suis pas à même de connaître, là,
l'organisation du Protecteur du citoyen pour être en mesure de porter un jugement sur les ressources
que cette organisation-là aura besoin pour remplir son mandat. C'est sûr
qu'à partir du moment où déjà on parle de se déployer sur tout le territoire
québécois, je peux comprendre que ça entraîne des coûts additionnels. Et
effectivement c'est difficile, à ce stade-ci, à mon avis, d'estimer le nombre
de dénonciations qui viendront. Moi, je fais le pari que, dans le réseau des cégeps,
il y aura peu de dénonciations, parce qu'encore une fois je pense qu'il existe
des mécanismes déjà, actuellement, et qu'à partir du moment où il y a un bon climat il y a de toute
façon des façons de dénoncer des situations qui sont inadéquates. Mais en même
temps, bon, s'il y a des situations,
donc, qui doivent justement être traitées autrement, c'est difficile, à ce
stade-ci, de les évaluer en nombre puis en termes de démarche d'enquête pour la Protectrice du citoyen. Alors,
porter un jugement sur les ressources que cette organisation-là devra
avoir, c'est difficile pour nous.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. Autre chose, M. le député?
M. Lelièvre : Mais ce que je veux...
Il faut être conscient que plus on va en transférer du côté de cette
organisation-là, plus les ressources vont être importantes.
M. Tremblay (Bernard) : Ah oui!
c'est sûr, c'est sûr. Tout à fait.
M.
Lelièvre : Vous avez parlé de la notion de bonne foi. C'est
intéressant. C'est la première fois que c'est soulevé, mais je suis
convaincu que c'est comme un élément incontournable dans nos discussions, nos
travaux ici.
Dans votre
expérience de professionnels, puis là je m'adresse aux trois personnes qui sont
là, est-ce que, selon votre vécu...
Les plaintes qui ne sont pas de bonne foi, est-ce que c'est répandu dans vos
organisations, là, au niveau de l'éducation,
dans votre vécu, dans d'autres domaines? Est-ce que vous pensez que c'est
vraiment quelque chose qui mérite qu'on s'y attarde et qu'on irait
jusqu'à spécifier cette notion-là ou vous amenez ça comme ça, au cas où, là?
C'est important parce que c'est un élément qu'on s'attendait que ça ressorte,
mais là vous avez cassé la glace, là.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Tremblay.
M.
Tremblay (Bernard) : Alors, je vous dirais, pour avoir oeuvré pendant
25 ans en relations de travail, il y a toutes sortes de lois, au Québec,
qui comportent des protections face au personnel, et on a des situations...
Quand on regarde l'ensemble du réseau, c'est
quand même beaucoup d'individus, là, qui travaillent dans le réseau de
l'éducation, alors on a eu des exemples dans
le passé. Alors, c'est sûr qu'on ne peut pas les chiffrer, on ne peut pas les
dénombrer en pourcentage, mais on peut constater que ces situations-là
existent.
Mon collègue, M. Ellefsen, peut aussi en
témoigner. Peut-être qu'il a des exemples en tête plus récents que les miens.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Ellefsen, on va vous écouter.
• (20 h 40) •
M. Ellefsen (Henrik) : Merci. Bien,
en fait, d'ailleurs, dans le mémoire qu'on a déposé, on a mis à titre d'illustration des références à une décision qui a
été rendue. En fait, ce n'est pas une décision dans le collégial. Je
pense que l'exemple le plus patent qu'on a
réussi à trouver, c'est une décision qui a été rendue dans les commissions
scolaires, où justement — je vous fais un portrait très, très
rapide — c'est un
officier syndical qui avait eu certaines allégations assez graves à
l'égard, là, de lacunes au niveau de l'administration de la commission
scolaire. Et, au fur et à mesure qu'on avançait,
cette personne-là ne collaborait pas et ne fournissait pas les preuves nécessaires,
et pourtant ses allégations étaient à caractère
public. En bout de course, la décision qui a été prise, ça a été de sanctionner
cette personne-là, elle en a même perdu son emploi. Évidemment, elle a
contesté cette décision-là, ça a donné lieu à une saga juridique qui est montée
jusqu'en Cour suprême, et finalement c'est
la Cour suprême qui a tranché comme de quoi la décision de la commission
scolaire était fondée et que cette personne-là, n'ayant pas fourni les preuves
des allégations qu'elle avait soulevées publiquement,
bien, malheureusement devait en subir les conséquences. C'était une
illustration de ce qu'on pourrait appeler, là, une dénonciation mais de
mauvaise foi, parce que justement...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député de La Peltrie.
M.
Caire :
Merci, M. le Président. Je regardais l'article 17 qui faisait obligation à
la plus haute autorité d'une institution de désigner quelqu'un
responsable du suivi des divulgations puis j'ai accroché un peu. Je pense,
c'est Mme Bélanger, tout à l'heure, qui
disait qu'on n'a pas les moyens d'avoir quelqu'un de dédié, mais je vois bien
dans la loi quelqu'un qui est
désigné, ce qui m'apparaît être relativement différent, parce qu'on peut
comprendre... en tout cas j'imagine,
suivant ce que vous avez dit, j'imagine qu'il n'y aurait pas tant de
divulgations que quelqu'un soit obligé de faire ça à temps plein,
j'imagine qu'il pourrait passer le reste de la semaine à faire d'autre chose.
Alors, par rapport au fait que vous semblez dire
que tout ça devrait revenir au Protecteur du citoyen, je vois peut-être deux gros désavantages à votre
proposition. La première, mon collègue la mentionnait, c'est qu'on
augmente significativement le volume de
travail du Protecteur du citoyen alors qu'on pourrait le répartir peut-être
entre les instances, puis ce qui
ferait que, dans des petites institutions, d'après moi, la personne désignée
n'aurait peut-être pas tant de travail que
ça, là. Mme Bélanger parlait d'un cégep de 800 employés, j'ose croire
qu'il n'y aurait pas des dénonciations à tous les jours. Puis, dans les cégeps d'encore plus petite taille, j'imagine
que ce serait un épiphénomène, donc pas une charge de travail excessive.
Et l'autre
aspect, c'était l'aspect de la bonne foi, j'aimerais ça aussi vous entendre
là-dessus. Vous allez à contresens de
ce que la fédération des journalistes nous proposait, dans le fond, parce
qu'eux disaient : Écoutez, là, il faudrait que tout le monde puisse dénoncer, dénoncer, dénoncer, puis
vous, vous dites : Attention, là! Si ce n'est pas fait en toute
bonne foi, il faudrait, à toutes fins utiles, que les personnes en subissent
les conséquences.
Alors,
je vais vous reposer la même question un peu que j'ai posée aux journalistes
puis je vous laisserai répondre dans
l'ordre que vous voulez, mais est-ce qu'il ne faut pas favoriser la
divulgation, d'une part? Et, dans la mesure où cette divulgation-là demeure anonyme et donc sans
conséquence, même si elle était faite de mauvaise foi, quel est l'avantage,
pour le législateur, de punir l'intention de quelqu'un qui n'aura causé aucun
dommage?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Tremblay.
M.
Tremblay (Bernard) : Je vous dirais sur ce point que je pense quand
même que c'est important de maintenir la
confiance de la population face à ses institutions, et donc que de permettre
des dénonciations à tout vent, non fondées, sur des perceptions, sur des ouï-dire, sur autre chose, c'est, à mon
avis, dangereux. Et je pense aussi que ça entraîne des coûts qu'il faut
évaluer, c'est-à-dire que, pour l'organisation, ça implique de faire des
vérifications. L'exemple que Me Ellefsen
vient de donner, pour en avoir été témoin, à la commission scolaire de Laval,
ça a impliqué beaucoup de travail, à l'époque, pour être capable de
valider est-ce que c'est fondé, qu'est-ce qui se passe réellement.
Alors, si les
plaintes sont fondées... Moi, je pense qu'il y a une question d'équilibre, en
fait. Si les plaintes sont fondées, protégeons les gens, assurons-nous
que le processus soit étanche et qu'on soit capable d'aller au fond des choses. Mais, si le processus n'est pas fondé
parce qu'il est fait de mauvaise foi, parce qu'il est frivole, il faut éviter
que des ressources publiques servent...
soient différées vers ce genre d'enquête là inutile ou que, finalement, on se
retrouve avec un sentiment dans la population à l'effet que les organisations
sont pourries, si ce n'est pas le cas.
Et
j'ajouterais donc que, par rapport à votre premier aspect de votre questionnement,
le fait que, oui, on puisse... On
comprend, là, qu'on ne serait pas obligés d'avoir une personne attitrée à temps
plein pour s'occuper des plaintes, mais il reste quand même que cette tâche-là, elle devrait être assumée par
quelqu'un qui a, aux yeux des employés du cégep, assez d'indépendance face à l'administration pour que les gens aient
confiance de s'adresser à cette personne-là. Et nous, on a le sentiment que présentement, si cette
confiance-là existe, les plaintes, elles sont livrées aux personnes en
autorité dans le cégep, et donc que, si on est dans une situation où une
personne n'a pas confiance, qu'il y ait loi ou pas, bien il y a peu de chances
qu'elle aille vers quelqu'un au sein du cégep, elle va aller ailleurs. Et c'est
pour ça que nous, on privilégie, évidemment, le Protecteur du citoyen, en se disant : Bien, à partir du moment où il y aurait
une alternative entre un mécanisme
interne et le Protecteur du citoyen, on pense que la plupart des gens iraient de toute façon vers le Protecteur du citoyen, et on a le sentiment qu'on aurait
mis en place une structure qui serait inutile. Même si elle est utilisée, je dirais...
Même si elle n'est, je dirais, pas à temps plein consacrée au traitement des
plaintes, il reste quand même
qu'il faut s'assurer d'avoir un processus, il faut assurer de le faire
connaître, il faut que la personne ait...
M.
Caire : En tout respect, M. Tremblay, c'est parce que
vous semblez dire : Ça va être inutile, donc ne la mettez pas en place, mais c'est parce que
votre prémisse de base, c'est une affirmation, là, ce n'est pas une
démonstration. Ce que la loi dit, c'est qu'on devrait mettre en place à
l'interne un processus de simplification de la divulgation et un responsable de ça. Vous ne pensez pas qu'au
contraire ça peut être une bonne chose, que les employés d'une
organisation puissent se dire : Bon,
bien je vais aller cogner au bureau d'Untel parce que moi, j'ai vu quelque
chose qui ne faisait pas mon affaire,
et c'est la voie la plus facile, plutôt que de dire... bon, bien, je ne sais
pas, moi, je suis n'importe où au Québec puis je dis : Je vais m'adresser au Protecteur du citoyen, O.K.,
comment je fais ça? Tu sais, M. Untel, je le connais, je travaille
avec, je le croise à tous les jours, on se voit, on va manger ensemble, on
prend un café. Je sais qui c'est, j'ai confiance
en lui, il va faire une bonne job. Le Protecteur du citoyen, oui, je connais
l'institution, le Vérificateur général, je connais, mais, tu sais, je n'ai pas ce lien-là que je suis capable de développer
avec quelqu'un qui est dans mon organisation.
Ceci étant dit, la loi permet aussi
l'alternative. Donc, si... Puis je pense que vous soulevez un cas qui est tout à fait possible, là, je ne le nie pas. Si le lien
de confiance n'est pas là, j'ai toujours l'opportunité d'aller voir le
Protecteur du citoyen pour faire la dénonciation. Mais vous ne pensez pas que
d'offrir l'alternative, c'est préférable?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Tremblay, Mme Bélanger.
Mme
Bélanger (Marie-France) : Écoutez, c'est sûr que, dans un monde idéal,
on pourrait avoir toutes sortes de moyens
pour que les gens puissent dénoncer, s'ils estiment qu'il y a des actes
répréhensibles qui sont commis. Moi, ce que je vous dis, c'est qu'il faut mettre en place des mécanismes et des
procédures puis il faut les actualiser, ces procédures-là.
Ce n'est pas tant... Je suis assez convaincue
qu'on n'en aurait pas beaucoup, de ça, dans la majorité de nos organisations, parce qu'on fait bien les choses de
manière générale. Maintenant, si on veut mettre en place un mécanisme sérieux et des procédures sérieuses qui vont
vraiment permettre à des gens de se sentir à l'aise de le faire dans ce
canal-là plutôt que dans un canal plus informel qui existe déjà puis qui
pourrait déjà être utilisé, parce que justement on se connaît bien, parce qu'on se voit à la cafétéria, parce qu'on se côtoie
de manière presque quotidienne, donc, il faut mettre en place des
mécanismes assez lourds pour vraiment avoir un canal très, très confidentiel,
s'assurer que les gens soient suffisamment à
l'aise. Dans une organisation comme la nôtre, ça demande du temps. Et il faut
faire connaître ça aux gens, il faut les actualiser régulièrement, les
refaire connaître. Nous, on estime que c'est beaucoup, beaucoup d'énergie.
Puis de toute
façon, dans la loi, il y a deux possibilités. Et moi, je pense que ça peut même
engendrer, d'une certaine manière,
une certaine confusion chez les gens. On se disait : Bien, si on est
capable de le concentrer à un endroit... Je ne suis pas du tout convaincue que ça va engendrer une
charge de travail si importante, additionnelle, au Protecteur du
citoyen.
• (20 h 50) •
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci, Mme Bélanger. Nous allons passer à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Merci, M. le
Président. En fait, je trouve ça intéressant que vous souleviez la dimension de
ce que ça veut dire, de vivre en
proximité. Je pense que ce qui est évident, chez les lanceurs d'alerte, c'est
la conviction, et vous l'avez bien
nommé, que, si je pose ce geste-là, je vais être assuré de la confidentialité.
Et je pense que c'est ça que vous voulez
démontrer puis je l'entends fortement. Mon parallèle à moi, c'est... La
Protectrice du citoyen est venue nous dire qu'il manquait probablement un certain nombre d'acteurs dans la loi,
dont notamment les municipalités et notamment les groupes communautaires
qui ont des liens contractuels, disons, avec le gouvernement du Québec, et là
je me dis : «Oh my God!», comment qu'on va faire ça, tu sais? Alors, je
pense que vous soulevez une réelle question et je vous remercie de l'avoir
fait.
Sur
la question de la bonne foi, je ne sais pas, moi, dans le projet de loi que
j'avais déposé je l'avais nommément écrit, puis le service juridique
m'avait dit, bon, tu sais : Par définition, une dénonciation, ça devrait
toujours être de bonne foi. Si ce n'est pas
de bonne foi... Pas «ça devrait», on s'entend. Si ce n'est pas de bonne foi, ça
ne devrait pas être reconnu comme
tel, donc la notion de frivole. Mais,
si vous sentez la nécessité de le mettre, c'est parce que vous croyez que c'est pédagogique, c'est pour dire aux
gens : Hé! attention! Faites-le de bonne foi, sinon... C'est dans cet
esprit-là, c'est plus pédagogique qu'autre chose?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.
M.
Tremblay (Bernard) : Tout à fait, oui, c'est vraiment dans cet esprit-là, pour renforcer effectivement, encore une fois, comme on le
dit dans le mémoire, le fait que le geste est important. Quand on dénonce,
il faut que les gens soient conscients
que ce n'est pas comme de dire quelque
chose à un collègue dans un corridor,
c'est un geste formel, et donc le caractère de bonne foi, pour nous,
c'est une façon, effectivement, de rappeler l'importance du geste.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci.
Mme
Massé : Et est-ce que
j'ai même compris... Parce que, dans l'article 11, on voit bien que la Protectrice
du citoyen notamment peut mettre fin à un
traitement d'une plainte si elle considère que c'est frivole, donc l'inverse
de... Est-ce que vous allez jusqu'à considérer qu'il devrait y avoir des
pénalités pour le geste frivole posé?
M. Tremblay (Bernard) :
Bien, en fait, c'est...
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : M. Tremblay.
M. Tremblay
(Bernard) : Pardon. C'est toujours, évidemment, la protection, hein,
que la loi accorde face à une dénonciation.
Pour nous, une plainte qui serait frivole peut être différente d'une plainte
qui est faite de mauvaise foi, alors c'est pour ça qu'on trouve quand
même utile... Oui, il y a le caractère pédagogique, comme je le disais, mais il
y a quand même, pour nous, une légère différence, et on pourrait imaginer des situations
où une plainte pourrait être considérée comme n'étant pas frivole mais étant
faite de mauvaise foi, par ailleurs, là, alors...
Mme Massé :
Et devrait-elle être sanctionnée?
M. Tremblay
(Bernard) : Bien, en fait, elle ne devrait pas recevoir le caractère
de protection qui est prévu dans la loi.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Je veux juste vous poser une question, M. Tremblay.
Mon secrétaire me fait part qu'on n'a pas reçu votre mémoire. Est-ce que vous
avez...
M.
Tremblay (Bernard) : Oh! Je
suis... Oui, c'est très étonnant parce
qu'on l'a transmis la semaine
dernière. Alors, écoutez...
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Bon, écoutez, je pense que... Si vous pouvez
nous en retourner une copie pour qu'on
puisse l'inscrire au niveau de la Commission
des finances publiques, le rendre
disponible sur le site.
M. Tremblay
(Bernard) : Oui, assurément. Désolé.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) : Donc, je vous remercie, je remercie
M. Tremblay, Mme Bélanger et M. Ellefsen de votre
participation à la Commission des finances publiques.
Je
vais suspendre quelques instants afin de permettre à la Confédération des syndicats nationaux de prendre place.
(Suspension de la séance à 20 h 52)
(Reprise à 20 h 55)
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Donc, nous reprenons nos travaux. Donc, nous
avons le plaisir de recevoir la
Confédération des syndicats nationaux, représentée par M. Jean Lortie,
secrétaire général, Mme Anne Pineau, adjointe du comité exécutif, et Me Benoit
Laurin du Service juridique. Merci de votre participation à la Commission
des finances publiques. La parole est à vous, M. Laurin.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
M. Lortie (Jean) : Alors, merci, M. le
Président. On remercie la commission de nous recevoir si tard ce soir
pour présenter le mémoire de la Confédération des syndicats nationaux sur le
projet de loi n° 87.
D'entrée de jeu, je
vous dirais qu'on remercie la commission de nous recevoir et on salue
l'initiative du gouvernement du Québec d'avoir déposé un projet de loi à
l'Assemblée nationale pour ouvrir un débat public sur la question de la transparence dans la foulée de la
commission Charbonneau, qui a livré son rapport cet automne et qui a
certainement marqué le Québec des dernières décennies. Je me rappelle à peine
le rapport de la CECO dans les années 70.
Un rapport de cet ordre-là marque certainement les esprits, et on souhaite que
le projet de loi n° 87 réponde bien à ce que le Québec, les citoyens et citoyennes du Québec souhaitent,
c'est renforcer cette démocratie-là en renforçant, évidemment, la
transparence.
Je
dirais d'entrée de jeu que la CSN se préoccupe beaucoup des questions de
transparence, notamment lorsqu'on a travaillé sur la Loi d'accès aux
documents, sur la commission d'enquête dans l'industrie de la construction,
dans l'industrie bioalimentaire. Curieusement, ici même, à l'Assemblée
nationale, on a déposé un projet qui s'appelait le droit et le devoir d'alerte, donc les «whistleblowers», pour les
travailleuses et travailleurs qui sont dans les industries du grain au
magasin, pour si jamais il y avait des situations problématiques pour la santé
publique. Alors donc, c'est ces questions-là de transparence qui nous préoccupent
beaucoup.
Évidemment,
on est favorables à un tel projet de loi, mais, pour nous, véritablement, 87 a
certainement des lacunes, des lacunes
d'abord dans son champ d'application. Vous allez sans doute dire que c'est une
redite, mais certainement le secteur municipal au Québec... Je rappelle
que les municipalités du Québec sont une créature du gouvernement du Québec et ne sont pas des institutions
indépendantes de l'État québécois. Il devrait être couvert, le secteur.
D'abord, la commission Charbonneau, l'ensemble des allégations, des
problèmes qu'on a identifiés au Québec ont beaucoup été dans le secteur des municipalités québécoises. Pour toutes sortes de
raisons, des contrepouvoirs n'existent pas : absence de média, absence de capacité d'avoir une meilleure
vision ou un regard critique apporté aux politiques municipales. Alors,
certainement, le secteur...
Le
secteur privé également. On considère que le secteur privé québécois, non
seulement le secteur privé qui a des contrats
avec l'État québécois, avec les organisations, mais le secteur privé aussi... — je donnais l'exemple, il y a quelques
secondes, du bioalimentaire — devrait être couvert par un projet de loi
pour protéger.
Également,
ça peut paraître curieux, mais on exclut, dans ce projet de loi là, toute
divulgation liée à l'application de
politiques gouvernementales, de compressions budgétaires, par exemple. Alors,
est-ce qu'on pourrait prévoir que cette loi-là couvrirait les salariés
ou des patients, des clients qui souhaiteraient dénoncer, compte tenu des
politiques gouvernementales qui sont mises en place?
Le
mandat de la Protectrice du citoyen, qui est venue cet après-midi présenter ses
perspectives sur cette question-là, mérite
un bon débat public. Est-ce que c'est le bon mandat? Est-ce que c'est la bonne
personne, le bon forum? Est-ce que ça ne
doit pas être le Vérificateur général ou tout autre guichet, commissaire ou...
À ce niveau-là, certainement, le projet de loi permet d'ouvrir la
discussion là-dessus, et pour nous aussi il faut le faire.
Je vous dirais qu'au
niveau du champ d'application, bien, je le disais tantôt, les contrats,
l'attribution, la gouvernance des municipalités québécoises ont fait en sorte
que ça a posé beaucoup de défis sur la transparence, et il faut certainement y revenir. Sur les politiques
gouvernementales, j'en parlais. Je donne l'exemple, il y a quelques mois...
ce qu'on appelle des poursuites-bâillons,
des gens qui ont des moyens de poursuivre des gens et à tout prix, à
n'importe quel prix. On l'a vu dans la
région de Montréal, à Saint-Lambert-sur-le-Golf, une famille qui a dénoncé la
situation dans un centre d'hébergement privé, et on a vu une poursuite
où ça a monté jusqu'à la Cour supérieure, vraiment un dérapage juridique.
Alors, certainement, le projet de loi devrait être plus fort à cet égard-là
pour prévoir.
Dans le secteur
privé, bien on n'a qu'à penser à ce qu'on a vu dernièrement, Volkswagen, le
scandale de Volkswagen. Est-ce qu'on ne
devrait pas avoir des sonneurs d'alerte, des détecteurs d'alerte, dans ces
secteurs-là, qui... Le secteur
financier, la grande récession de 2008. Je parlais tantôt du droit d'alerte
dans l'industrie du bioalimentaire. On nourrit les Québécoises et les
Québécois, et il n'y a aucun mécanisme — ou c'est très exceptionnel — où
les gens peuvent le faire.
Alors,
bref, c'est le tour du jardin de la question du projet de loi n° 87, mes
collègues, Me Pineau et Me Laurin, pourront compléter parmi les questions, là, que les membres de la
commission parlementaire feront, mais certainement nous souhaitons que le projet de loi soit
renforcé, le projet de loi vise davantage à un champ beaucoup plus large, on
ratisse beaucoup plus large, et ne pas oublier ce qui s'est passé au Québec
dans les dernières années sur la confiance que la population québécoise porte à
ses institutions publiques.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci beaucoup de votre
présentation, M. Lortie. M. le ministre, je vous donne la parole.
• (21 heures) •
M.
Hamad : Oui, merci. M. Lortie, Mme Pineau et
M. Laurin, bienvenue. Il me semble ça fait une semaine on s'est vus
dans une autre commission parlementaire.
Deux éléments
importants... même trois, là. On en a discuté ici un petit peu, c'est sûr qu'on
ne peut pas passer à côté des affaires municipales,
je ne pense pas, avec tout ce qu'on a vu, Charbonneau. Puis je pense qu'il y a de quoi à faire, il faut regarder
comment, et j'ai hâte de voir, mes collègues puis... écouter mes collègues. Ça,
c'est un.
Le
privé, on en a discuté avant que vous arriviez. Le principe du projet de loi, dans ma compréhension, c'est tout ce qui touche les fonds publics, l'argent du peuple, on veut que les
gens puissent divulguer sur des affaires, l'affaire du peuple. Pour le privé, moi, je le divise en trois.
Il y a des compagnies privées, tantôt mon collègue député de La Peltrie l'a bien exprimé, il peut y avoir des compagnies dans
le privé qui font affaire avec le gouvernement. Dans l'esprit, ce que j'ai compris, puis on va le clarifier si ce n'est pas
clair, ces gens-là peuvent divulguer. Ça, c'est la première partie du
privé. Deuxième partie du privé, pour moi,
c'est les compagnies publiques, c'est-à-dire les actionnaires sont le peuple, ça peut
être le peuple, la compagnie. Ça, c'est l'autorité du marché du travail... l'Autorité des
marchés financiers — je suis
encore au ministère du Travail. Le
troisième, c'est évidemment les compagnies publiques purement publiques, et là,
aujourd'hui, la Protectrice du citoyen nous a dit : C'est une longue
réflexion, compliquée, parce qu'on a plein de mesures partout, l'office du consommateur, l'Autorité des marchés,
il y a plein des joueurs là-dedans qui essaient de faire la surveillance
de ces éléments-là.
Ce que je ne
suis pas d'accord avec vous, pas du tout, c'est que vous demandez qu'on devrait
faire la divulgation sur les
politiques gouvernementales. Bon, on va s'expliquer. Une politique
gouvernementale reflète un programme électoral ou une philosophie d'un parti politique qui se présente en élection puis
dit : Moi, c'est ça que je vous propose comme programme, puis il met en application son
programme. Alors là, ce que vous voulez, vous voulez que les gens font
une divulgation sur les programmes
gouvernementaux qui reflètent la politique. Donc là, on est dans le domaine
politique, on est dans le domaine idéologique, on n'est pas dans le domaine de
fraude, de fonds publics.
S'il y a un gouvernement qui est élu puis il
dit : Demain matin — j'exagère — je
coupe la fonction publique en deux, la
moitié de la fonction publique, moi, dans mon programme électoral, il n'y en
aura plus, et là, bien, là il y a quelqu'un
dans vos membres, il va sortir puis il va aller faire la divulgation, il
dit : Ce programme-là, il n'est pas bien fait, puis là il faut
faire une enquête... Ça ne marche pas.
Un autre, un autre parti politique qui est élu
au niveau fédéral, qui représente... il est pour la loi C-377, la divulgation de vos états financiers. Alors, ça,
c'est un programme politique. Et là je m'en vais divulguer l'information
que cette politique-là n'est pas bonne. On
est dans le domaine politique, on n'est pas dans le domaine de gestion des
fonds publics, gestion des fonds publics qui est reliée à une politique
gouvernementale.
Ça fait que
ce n'est pas l'objectif ici. Ici, c'est si quelqu'un, il a... Évidemment, on a
dit c'est quoi, les critères des actes
répréhensibles. Donc, la politique qui reflète un programme, une politique...
Exemple, le Parti québécois est élu, il va faire la séparation, là ils
vont mettre des programmes partout dans les ministères pour faire la
séparation. Là, on va aller divulguer... Je
veux dire, c'est une politique, ils sont élus sur ça puis ils représentent...
c'est un programme politique qui va
dans cette direction-là. On a vu, exemple, le plan zéro de M. Parizeau,
c'était un plan gouvernemental qui était, dans le temps, pour faire la
séparation après. Alors, ça, c'était un programme qui reflète une philosophie
politique qu'ils sont élus là-dessus, s'ils sont au gouvernement, alors ça ne
fait pas l'objet du projet de loi.
Donc, le
privé, je l'ai expliqué, il y a des parties qui vont être là-dedans. On
regarde, les municipalités, comment. Les
programmes politiques... Puis là vous avez parlé aussi de relations de travail.
Vous le savez très bien, vous êtes un expert en relations de travail
plus que moi, on a les normes du travail qui sont protégées, sont suivies.
Évidemment, à votre place, comme syndicat,
c'est sûr que je veux accompagner mon monde dans toutes les poursuites, c'est
tout à fait normal, et je ne suis pas surpris de voir la CSN faire ça,
c'est tout à fait normal pour un syndicat, mais, pour nous les relations de
travail, elles sont bien cadrées au Québec. Il y a la Commission des normes
pour les non-syndiqués. Les syndiqués, vous
vous en occupez pas mal, de vos syndiqués, et vous vous occupez bien de votre
monde. Donc, ça, pour moi, ça ne fait
pas partie des... Là, je ne peux pas aller divulguer les conditions de travail.
Si je suis maltraité comme employé, j'ai
deux façons : si je suis syndiqué, les griefs; si je ne suis pas syndiqué,
je m'en vais aux Normes du travail. Puis, en passant, aux Normes du
travail il y a des avocats qui accompagnent les gens qui plaident pour faire
leur processus.
Donc, l'objectif du projet
de loi, c'est vraiment
encadrer la gestion des fonds publics, la décision, la collusion, la corruption, et de divulguer des choses que je vois
qui, il me semble, pour moi, comme citoyen ou comme employé, ne sont pas correctes, c'est du gaspillage de fonds
publics, la corruption, la collusion, et là on donne le pouvoir au citoyen d'aller le faire en le protégeant. On a fait un choix, il y a
plein de choix qu'on peut faire, on peut aller vers le Vérificateur général, mais
n'oubliez pas que la Protectrice du
citoyen, elle fait ces enquêtes-là déjà,
elle protège les droits des citoyens. Puis divulguer une information, c'est un
droit qui appartient au citoyen, on lui donne le droit puis on va l'aider à le
faire en le protégeant.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Lortie.
Une voix : Oui, Anne.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Mme Pineau.
Mme Pineau
(Anne) : Oui, merci. Merci, M. le ministre. Il y a plusieurs points que vous avez identifiés. Bon, on salue le fait que vous indiquez avoir l'intention
de couvrir le secteur municipal, en
tout cas, qui, pour nous, est un
enjeu qui est quand même essentiel.
Maintenant,
la question du privé, très honnêtement... Je pense que
vous avez bien décliné, là, les différents aspects qui concernent le privé. Un des aspects, c'est le
cas où un organisme public a un contrat avec une entreprise privée,
et, dans l'état actuel du projet de loi, nous, notre compréhension, c'est que
la personne qui est dans le privé, elle n'est pas protégée par ce projet de loi
là. Et vous avez indiqué à la Protectrice du citoyen que ce n'était pas le cas,
que vous estimiez que c'est couvert. Malgré
tout, en tout cas, on vous invite à retenir la suggestion
de la protectrice qui est d'ajouter, après «au sein de l'organisme», aussi «à l'égard
d'un organisme public», parce que, tel que libellé, tout se passe comme si on voulait s'assurer que les fraudes qui sont
commises à l'intérieur de l'organisme sont divulguées, mais pas celles
qui seraient commises par le privé à l'endroit des organismes publics. Or, ça, effectivement,
si à tout le moins on peut clarifier ce point-là, ça fait déjà quand même une
bonification au projet de loi.
Évidemment, nous, on va beaucoup plus loin que
ça. Nous, on profite, au fond, de l'occasion qu'offre la commission
Charbonneau, qui a étudié tout le problème des lanceurs d'alerte et qui indique
la problématique. La problématique des
lanceurs d'alerte, au Québec, quand on est employé, c'est qu'on a, comme
employé, une obligation de loyauté
envers l'employeur, mais on a aussi une liberté d'expression comme citoyen
et on a comme une espèce de conflit entre
les deux. Et, dans l'état actuel du droit, c'est presque toujours
l'obligation de loyauté qui l'emporte sur la liberté
d'expression et le droit de divulguer, finalement, une question d'intérêt
public. Donc, c'est pour ça que nous, on voit beaucoup plus large au niveau de la portée du projet de loi, ça devrait couvrir l'ensemble du secteur privé qui viole des lois... Parce que vous parlez de la fraude, M. le ministre, mais le projet de loi, quand
même, au niveau des actes répréhensibles, est beaucoup plus large que la simple collusion, corruption ou fraude,
on parle de toute violation d'une loi. Donc, pour nous, on profite, dans
le fond, de cette occasion-là pour indiquer notre souhait qu'on protège les
gens dans le secteur privé qui connaissent des informations qui sont d'intérêt
public, et qui de bonne foi veulent faire une divulgation, et qui sont, à
l'heure actuelle, sans protection. Donc, c'est un peu notre façon de voir au
niveau du secteur privé.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci, Mme Pineau. M. le ministre, voulez-vous...
M.
Hamad : Bien,
j'aurais aimé avoir des commentaires sur la politique gouvernementale. Je
reviens à un élément que vous tenez beaucoup à coeur : la sous-traitance.
Alors, un gouvernement qui arrive, dans un programme politique il dit : Moi, je veux favoriser, comme parti politique,
la sous-traitance, exemple, je suis élu par la population, je suis au gouvernement et je mets des programmes de
sous-traitance, exemple, là, évidemment, vous allez dire... bien je suis convaincu que le lendemain il y en a plein,
de vos membres, et vous, personnellement, vous allez dire : Bien là,
on est contre ce programme-là parce que,
regardez, il fait perdre des jobs, il fait ci, il fait ça, mais c'est parce que
ça, ce n'est pas contre une loi,
c'est une politique gouvernementale qui a été identifiée par le gouvernement,
et on n'est pas là. Alors, j'aimerais ça avoir votre opinion là-dessus.
En passant, pour les municipalités, les autres
points à l'égard de... ça, je vous le dis, on le regarde. Le privé, j'y
reviendrai.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Lortie.
• (21 h 10) •
M. Lortie
(Jean) : Oui. Bien, effectivement, c'est un débat important, la question
des... l'impact des politiques
gouvernementales sur des institutions publiques. Évidemment, il faut baliser,
hein, ce n'est pas, évidemment, je me lève
de mauvaise humeur ce matin parce que le directeur du service dans lequel je
suis m'a annoncé que... et j'ai décidé de
poser des gestes, là, on n'est pas là, on est véritablement... des impacts où
la santé, la sécurité de la population est mise en danger. On pense souvent
aux centres d'hébergement, hein, c'est un bon exemple, où on pourrait avoir des
populations beaucoup plus vulnérables, des... Ce genre d'exemple là,
nous, on souhaite que les gens puissent, comme employés, avec ce devoir de loyauté contradictoire avec ce droit
constitutionnel de liberté d'expression... de pouvoir dénoncer l'impact
de ces compressions-là ou ces politiques
gouvernementales qui feraient en sorte de mettre en danger un
service public. Oui, c'est vrai que ça affronte la politique, le politique,
parce qu'évidemment c'est des processus législatifs, mais, comme citoyen, le citoyen peut avoir ce droit-là de dire : Écoutez, moi, je travaille dans
une organisation publique, je m'aperçois des impacts
catastrophiques et je veux dénoncer la situation dans laquelle ils se passent.
La frontière
est mince, vous avez tout à fait raison. Vous posez une bonne question. Moi, je
pense qu'on doit la creuser, cette
question-là, et certainement nous, on profitait de ce projet de loi là, qui permet... Et, je vous répète, M. Hamad, on salue l'initiative
du gouvernement de lancer ce débat public là. Je pense qu'on est dus, au Québec,
de faire cette discussion-là. On veut aller
plus loin sur certains égards, comme sur les questions d'impact de politiques
gouvernementales. Sur le secteur privé, moi, j'en suis un. Dans le
bioalimentaire, en commission parlementaire, nous dénoncions... évidemment on ne donnait pas des exemples d'entreprises, mais on dénonçait la vulnérabilité des salariés ou des
inspecteurs même gouvernementaux de pouvoir dénoncer des situations qui se passaient, et on avait créé un concept de
droit et devoir d'alerte où le salarié a un droit de le faire mais un
devoir aussi, il nourrit la population. Alors, on pourrait le mettre dans plusieurs
secteurs, dans le transport, etc. Alors, profitons de ce projet de loi là pour
au moins poser la question : Pourquoi ne pas l'extensionner beaucoup plus
large que seulement la question de la gestion des fonds publics?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le ministre.
M.
Hamad : En fait, là, quand on met la santé, sécurité, l'environnement en cause, c'est couvert par la loi. Si le gestionnaire pose des
gestes, le gestionnaire ou une loi, qui mettent en cause... sont dans les actes
répréhensibles... Je ne pense pas, là, peu
importe quel gouvernement... Un gouvernement de Québec
solidaire n'ira pas mettre en danger la vie des gens, là, tu sais, on n'est pas... tu sais, quand même, un
gouvernement n'est pas si fou que ça, là, je ne pense pas, moi, ou un gouvernement libéral va faire ça, ou
n'importe quel gouvernement des quatre partis politiques à l'Assemblée
nationale. La politique gouvernementale ne met pas le monde en danger de mourir
La politique
gouvernementale, c'est, exemple, la définition entre «austérité» puis
«rigueur», là. Là, vous allez arriver,
vous allez voir, divulguer que c'est l'austérité puis c'est... Là, on est
vraiment dans l'idéologie politique, puis ça, ce n'est pas ça qu'on veut, là. Ce qu'on veut, en
fait ce que j'ai cru comprendre, moi, c'est que le peuple veut que son argent soit bien géré; les décisions, ceux qui décident,
les gestionnaires, à travers le gouvernement, qu'ils prennent les bonnes décisions, puis qu'il n'y ait pas des actes
répréhensibles au niveau de la gestion des finances publiques, finances
publiques puis l'argent du public. Pour ça, on va aller au privé. À l'égard
d'eux, on va regarder ça pour dire que ceux qui sont là...
Alors, là-dessus,
je pense, on ne s'entendra pas. Il y
a une action politique
de votre part, je comprends, mais... C'est
correct, vous faites ça aussi... J'ai compris que, dans votre loi sur les
syndicats, vous avez le droit de faire la politique, alors c'est
correct.
Alors, on continue sur l'aspect privé, maintenant.
Le privé, aujourd'hui la Protectrice du citoyen nous a dit clairement
que, écoutez, là... Je comprends. Puis même elle, tu sais, elle veut bien
travailler, puis elle veut prendre les mandats,
puis elle veut bien réaliser. Elle nous a dit : Écoutez, là, le privé, là,
il faut regarder ça, ce n'est pas dans une loi comme ça qu'on va le
couvrir. Et donc il y a beaucoup d'éléments.
Et, vous
savez, dans la santé... Vous parlez de santé parce que vous êtes dans le
domaine alimentaire, et souvent c'est
la santé, santé animale et santé des personnes qui travaillent. Vous savez, les
amendes, dans la CSST, la CNESST aujourd'hui, sont très élevées quand il
y a un propriétaire qui ne répond pas aux critères, et même au niveau de l'environnement
il y a une peine d'emprisonnement, là. Alors, il y a quand même des amendes,
elles sont là. En construction, on a augmenté énormément les amendes pour qu'on
respecte les lois, les règlements; le ministère du Revenu, etc. Alors, il y a des processus qui sont là qui ne sont pas
nécessairement à l'intérieur d'une organisation publique, ce qu'il y a
une grosse différence.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Courte réaction? Il reste environ une trentaine de secondes. Oui, allez-y,
Mme Pineau.
Mme Pineau (Anne) : Oui, merci. Effectivement,
il y a différents mécanismes, par exemple, à l'Autorité des marchés financiers, mais il n'y a
pas de protection en cas de divulgation, c'est-à-dire qu'il y a
une protection civile mais pas une
protection contre des mesures de représailles si l'employé se plaint d'une
pratique de son entreprise en
matière de marchés financiers. Ça, il y a ça pour la loi sur la lutte à la
corruption, là il y a effectivement une protection pour la divulgation, mais autrement il y a
des protections mais des protections qui ne s'attaquent pas à la question
des représailles en lien avec le lien
d'emploi. Donc, le champ demeure complètement
à découvert pour cette question-là. Les employés qui se plaignent
relativement à l'ensemble de ces lois-là, protection du consommateur, marchés
financiers, revenu, peu importe, oui, il y a
des protections, mais pas des protections qui concernent le lien d'emploi et
l'absence de représailles. Donc, ça,
c'est un élément qui, pour nous, mérite d'être étudié. Il faut qu'on avance sur
ces questions-là si on veut vraiment s'attaquer aux problèmes de fraude
et de violation de la loi et à toutes les questions qui concernent l'intérêt
public.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci, Mme Pineau.
Nous allons passer du côté du député de Gaspé.
M. Lelièvre : Merci, M. le
Président. Bonjour. Bonsoir, plutôt, à cette heure-ci. Merci d'être présents
pour nous alimenter.
D'emblée,
moi, je salue l'ouverture du ministre par rapport à, je pense... sa forte
préoccupation concernant le secteur municipal. Je crois que ça a sorti à
peu près de façon unanime de par tous les groupes qui sont présents puis je
crois que, s'il y a quelque chose sur lequel
on peut faire un consensus au niveau de l'ensemble des partis politiques, ça
devrait être cette dimension-là.
Donc, on va
passer à d'autres éléments. Toute la notion, ce que j'appellerais, d'intérêt
public, là, ça se traduit de façons différentes, dépendamment des
groupes qui viennent nous rencontrer, mais ce que je comprends, c'est que vous, vous voudriez aller plus loin dans les
éléments qui seraient couverts par le projet de loi. Vous n'êtes pas les
seuls à l'avoir mentionné, d'autres groupes
l'ont mentionné aussi. Par contre, il y a aussi d'autres personnes qui ont
mentionné des réserves à cet effet-là.
Écoutez, moi, j'aimerais vous entendre sur
l'article 6, notamment, du projet de loi, où on vient spécifier des éléments très précis, par exemple, devant faire
l'objet d'une préoccupation de par la Protectrice du citoyen qui
seraient des éléments tels la santé, la
sécurité des personnes, l'environnement, le caractère d'urgence également.
Donc, il y a une limitation qui est
prévue au projet de loi. À défaut, je dirais, d'être large, d'être vraiment
élargi à l'ensemble des possibilités, ce qui demanderait une approche
différente qui serait basée un peu plus sur le modèle de la loi canadienne,
qui, elle, tient davantage compte de
l'intérêt public dans sa loi, contrairement à notre projet de loi qui est plus
restrictif... Est-ce que vous croyez
qu'à défaut d'aller de façon très large on devrait élargir à d'autres
dimensions que celles qui sont mentionnées à l'article 6?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Lortie, Mme Pineau? Mme Pineau.
• (21 h 20) •
Mme Pineau (Anne) : Oui, merci.
Merci de la question. Effectivement, on aborde la question du droit de
divulgation publique dans notre mémoire, et nous sommes très inquiets de cette
disposition-là dans la mesure où, finalement, qu'est-ce qu'on nous dit, à
l'article 6, on nous dit qu'au fond je ne peux pas divulguer publiquement
une information, sauf si je suis dans un cas
d'atteinte à la sécurité, un risque grave pour la santé ou la sécurité d'une
personne; je peux, dans ce cas-là, faire une
divulgation publique, mais, a contrario, hormis ces cas-là, je ne peux pas
m'adresser aux médias. Donc, une loi qui est censée favoriser la
transparence et la divulgation finit par conduire à un quasi-bâillon, pour nous, là, parce que,
finalement, si on n'est pas dans ces cas de figure là, on ne peut plus décider
que, pour alerter la population, on
va procéder par le canal des médias. Donc, c'est, pour nous, un problème et que
nous dénonçons, parce que, je veux dire, une loi qui est pour la
divulgation de l'information ne devrait pas être une loi qui porte atteinte à
la liberté d'expression. Les gens ont le
droit de s'adresser aux médias pour faire état de certaines situations. Or,
ici, on vient nous dire : Bien, vous savez, si vous allez vers les
médias, bien vous en paierez les conséquences.
On peut très
bien, selon nous, multiplier les canaux, c'est un peu ce que la fédération des
journalistes est venue vous dire tout
à l'heure, on peut tout à fait mettre en place une procédure de divulgation
soit à l'interne de l'organisme soit via
le Protecteur du citoyen, avec des garanties, mais on ne devrait pas pour
autant forcer les gens dans ce seul canal-là et évacuer toute
possibilité de s'adresser aux médias. Et on n'exclut pas par là, là, la possibilité
qu'on mette certaines balises, là, pour les
cas où on pourrait s'adresser aux médias, d'avoir au moins d'abord
amorcé la procédure à l'interne, mais l'idée qu'on ne puisse pas
utiliser les médias, pour nous, c'est un grave problème.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. le député de Gaspé.
M.
Lelièvre : Je voudrais vous
entendre aussi sur la question de la bonne foi qui doit être démontrée de la
part de quelqu'un qui, bon, lance une alerte, ça a été mentionné par un des
groupes qui est venu nous rencontrer également. Dans votre vécu comme organisation professionnelle qui défendez, bon, les travailleurs, est-ce que vous croyez que le nombre dénonciations ou
de situations où des employés ont fait preuve de mauvaise foi à l'égard d'actes
dénoncés... Est-ce que c'est très répandu?
Est-ce que c'est une minime exception? Parce que
c'est quand même un élément qui a été soulevé puis qui mérite, je pense, qu'on s'y
attarde, là. C'est qu'on a fait valoir à l'encontre de ça, par exemple, que toute la question
de la diffamation, de l'atteinte à la réputation... Souvent, on dira peut-être : Ça arrive très rarement, ça arrive dans 1 %, dans 2 %, dans 3 %
des cas, mais, quand ça arrive, il y a des gens qui paient cher le prix. Donc,
j'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Me Laurin.
M. Laurin
(Benoit) : O.K. Alors, oui,
donc, sur la question de la bonne foi, évidemment, en vertu du Code
civil, la bonne foi se présume, mais on
n'est jamais trop vertueux. Si effectivement la question de la bonne foi mérite
d'être soulignée dans cette loi-là, on n'aurait aucun problème à ce qu'il y ait
une mention de la bonne foi.
En fait, il y
a deux critères principaux, à notre avis, qui pourraient mériter d'être
soulignés dans cette loi-là, c'est la
bonne foi et l'intérêt public. Je pense qu'une fois que ces... si ces deux
balises-là sont bien exprimées dans la loi, les gens vont tendre à, à
tout le moins, avoir un objectif déclaré de bonne foi et dans l'intérêt du
public.
Évidemment, celui qui n'est pas de bonne foi et
qui ne dénonce pas dans l'intérêt du public devra assumer jusqu'à un certain
point les conséquences de ses gestes. Alors, évidemment, dans nos organisations
à nous, on est habitués de faire de
l'éducation. S'il faut en faire, on en fera. On n'encouragera pas les recours
frivoles, ce n'est pas vrai, on va
expliquer aux gens qu'est-ce que la bonne foi, qu'est-ce que des notions
d'intérêt public. Et, le cas échéant, s'il y a des personnes qui, pour
toutes sortes de raisons, par vengeance personnelle, par... ou la diffamation,
de toute façon, qui est déjà prévue, là...
Je veux dire, on a beau avoir une garantie de la liberté d'expression, sa
limite, c'est la diffamation, on ne réinvente pas la roue. Alors, que
ces choses-là soient possibles, dans le cadre d'une loi sur la divulgation des
actes répréhensibles, oui, c'est tout à fait
possible, mais vraisemblablement, sur une période de quatre, cinq, peut-être
10 ans, les gens auront bien compris
que, les gens qui font des divulgations, enfin, seuls les gens véritablement
sérieux, de bonne foi et dans
l'intérêt du public recevront une oreille, alors... Et la jurisprudence saura
faire la différence entre des divulgations faites de bonne foi, ou de
façon frivole ou téméraire, ou par vengeance personnelle.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre : Combien de temps?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Environ une minute, mais posez votre question.
M. Lelièvre : Rapidement. La notion
de loyauté qui, selon vous puis selon d'autres organisations qui sont venues ici nous rencontrer, aurait préséance la
plupart du temps sur, par exemple, la notion d'intérêt public, pourriez-vous
nous parler brièvement, là, de votre
perception de la chose, là. C'est un élément qui ressort souvent puis c'est
important.
M. Laurin
(Benoit) : O.K. Alors, enfin, la jurisprudence nous démontre...
Et on n'est pas les seuls à le penser, là, il y a le Pr Brunelle qui
est devenu maintenant juge à la Cour du Québec, je pense, qui a fait
une excellente étude sur cette question-là en 2004, qui... En recensant
l'ensemble de la jurisprudence, quand on analyse l'approche des tribunaux d'arbitrage, c'est qu'effectivement la prise de
parole n'a pas le pas sur l'obligation de loyauté, autrement dit on
accorde un poids beaucoup plus important à
l'obligation de loyauté qu'à la liberté d'expression, et ça, ça pose
véritablement un problème parce que...
Et là tout ça est une question d'équilibre, et je pense peut-être que cette
loi-là gagnerait aussi, dans un attendu ou dans un préambule, à faire en
sorte qu'il y ait une recherche d'équilibre entre la liberté d'expression et l'obligation de loyauté. Alors, en tendant à
favoriser... Évidemment,
il ne faut pas oublier que la liberté d'expression, c'est
quand même garanti par les chartes québécoise et canadienne et que divulguer
est un acte qui relève de la liberté d'expression. Évidemment, la liberté
d'expression a été balisée, je l'ai dit un petit peu plus tôt, sur la question
de la diffamation,
etc., mais je pense qu'il doit y avoir une recherche d'équilibre, parce que dans ce qui est recensé, de façon générale, je ne dis pas que la prise de parole est
réprimée, mais elle gagne rarement sur l'obligation de loyauté. Alors, voilà.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Merci. M. le député de La Peltrie.
M.
Caire : Merci,
M. le Président. Je vais faire un peu
de millage sur ce que vous venez de dire parce que d'entrée de jeu je dois vous dire que j'ai été un peu surpris,
là, d'entendre que vous souhaitiez donner une certaine protection aux
fonctionnaires qui dénonceraient les impacts d'un programme gouvernemental.
Moi, je pense qu'au Québec, dans les dernières
décennies, on a travaillé très fort à dépolitiser notre fonction publique, à la
professionnaliser, puis vous, dans le fond, vous nous
proposez de la repolitiser, là. Ça, j'ai bien de la misère à vous suivre là-dessus.
Et, sur le fait de dénoncer les impacts d'un programme,
bien je pense que les partis d'opposition... Puis, si le système
britannique a un avantage, c'est d'organiser les oppositions en temps de
parole, en budgets de recherche justement pour faire ce travail-là de
surveillance du gouvernement. Donc là, je vous avoue que je ne suis pas sûr
que je peux vous suivre sur ce terrain-là, très sincèrement.
Même chose
quand vous parlez de la liberté d'expression. Moi, j'en suis, je pense qu'il faut
protéger cette liberté d'expression
là, mais est-ce que dénoncer les politiques d'un gouvernement, ça devient de la liberté d'expression? Dans le cas où on veut une fonction publique professionnelle,
il me semble que moi, je vois un conflit là-dedans,
là, puis je trouve que ça nous éloigne de l'essentiel. L'essentiel du
projet de loi, c'est de dire : On veut une loi qui permet
à des gens qui sont témoins d'un acte répréhensible, défini à l'article 3...
Puis là-dessus j'aimerais vous entendre. Est-ce
que vous trouvez que la définition d'un acte répréhensible à l'article 3 est
correcte? Si oui, bien c'est ça qui est le coeur du projet de loi, c'est-à-dire
vous avez la possibilité de le dénoncer dans l'intérêt public, effectivement, et
l'intérêt public est servi par le fait qu'on peut dénoncer ces actes
répréhensibles là — en
tout cas, je voudrais vous entendre là-dessus — et on va protéger ceux qui le
font. Et là il me semble, là, que, pour le reste, là, on sort du projet de loi. On parle de politiser la fonction
publique, on parle de
permettre à tout le monde de dénoncer ce qui n'est pas un acte
répréhensible, ce qui relève effectivement d'un programme
politique pour lequel il y a des élections démocratiques, pour lesquelles il y
a des gens qui se prononcent, qui cautionnent, qui sanctionnent, pour
lesquelles il y a un parti qui est au pouvoir, pour lesquelles il y a des
partis qui sont à l'opposition, qui vont surveiller ce que le parti...
Ça fait qu'il
y a une remise en question du système démocratique, là, que j'ai de la
difficulté à arrimer avec le projet de loi, là, je vous avoue. Ça fait
que j'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Oui, allez-y, M. Lortie.
M. Lortie
(Jean) : Oui. Alors, je vous dirais... Bien, je veux préciser. Quand
on regarde l'article 3 de la loi, bon, les
contraventions à une loi du Québec, loi fédérale, manquement grave aux normes
d'éthique, de déontologie, cas grave de
mauvaise gestion au sein d'un organisme public, alors, si vous êtes
fonctionnaire de l'État, ou d'une commission scolaire, ou même d'une municipalité et que vous constatez
que l'impact de mesures publiques font en sorte que ça constitue une mauvaise gestion, les choix qui sont... Oui, c'est
vrai que la frontière est mince entre politiser... Nous, ce qu'on vise,
c'est, par exemple, une situation qui serait
véritablement... qui met la santé des enfants en jeu parce que l'école est
sale, l'école est abîmée, c'est un
lieu dangereux, pour les enfants, d'y être. C'est comment réconcilier, là, ce
que Benoit disait plus tôt, sur la question de la loyauté, sur le devoir
de loyauté et le devoir...
M.
Caire :
Mais je vous... Ça, théoriquement, là, c'est couvert par l'article 3, ce
que vous dénoncez là, là. Quand on dit : Bon, bien, écoutez, il y a
un cas d'insalubrité qui porte atteinte à la santé, moi, je pense que c'est...
En tout cas, peut-être que je me trompe, là.
Un cas grave de mauvaise gestion au sein d'un organisme public, c'est couvert,
ce que vous amenez là, donc la personne qui ferait cette dénonciation-là
serait protégée par la loi, non?
C'est parce
que moi, je l'ai le sentiment que vous nous amenez vers la dénonciation
idéologique, puis je ne suis pas sûr que j'ai envie de vous suivre
là-dessus, là.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Lortie.
M. Lortie (Jean) : Non, on n'est pas
là. Me Pineau...
M.
Caire : Mais
corrigez-moi si je me trompe, là, je suis tout à fait prêt à vous écouter, là.
M. Lortie (Jean) : Oui, oui, bien
sûr.
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
Me Pineau.
• (21 h 30) •
Mme Pineau
(Anne) : Écoutez, on en fait
état, là, dans le mémoire, là, nous, là, il y a des programmes, il y a
des orientations politiques qui consistent,
par exemple, à faire de nombreuses coupures de budget, et ça a des
conséquences sur les services. Qu'on le veuille ou non, ça a des conséquences.
Même la Protectrice du citoyen le répète régulièrement.
Donc, des compressions qui ont des conséquences
sur le soutien aux élèves, la décrépitude des bâtiments scolaires, le seuil d'admissibilité à des services, fermeture
de lits, fermeture de services, des coupures qui entraînent un manque au
niveau de l'entretien et qui peuvent être l'occasion
de développer des maladies nosocomiales en milieu... en établissement de
santé, c'est de ça dont on parle. Alors, nous, on estime que les employés
peuvent faire état de ces situations-là...
M.
Caire :
...par rapport à ce que vous dites, en quoi l'alinéa 4° de l'article 3
ne couvre pas ce que vous venez de dire?
Mme Pineau
(Anne) : Bien...
M.
Lortie (Jean) : On préférait
le préciser dans notre mémoire, les cas d'exemple, pour faire en sorte
de renforcer...
M.
Caire :
O.K., mais...
Mme Pineau
(Anne) : Parce que, pour nous, c'est en lien aussi avec des programmes...
avec une politique gouvernementale.
M.
Caire :
Mais là vous politisez la fonction publique, là...
Mme Pineau
(Anne) : Bien non, mais ce dont on vient de parler...
M.
Caire :
...ce qu'on s'est attablés à ne pas faire dans les dernières décennies.
Mme Pineau (Anne) : Mais ce dont on vient de faire état, les coupures à répétition qui entraînent des
coupures au niveau des services, on ne peut pas exclure ça. Si on laisse les
choses en l'état...
M.
Caire :
O.K., moi, mettons, là, je dis... un de mes membres dans la fonction publique
veut dénoncer l'augmentation d'une taxe en disant : Ça n'a pas d'allure,
il serait protégé, là? Parce que, là, le gouvernement dit : Bon, bien, je vais augmenter la taxe x, y sur l'essence,
tiens, allons-y — vous
allez l'aimer, celle-là — j'augmente
la taxe sur l'essence pour alimenter le Fonds vert, est-ce que quelqu'un
qui voudrait dénoncer ça en disant : Ça n'a pas d'allure, vous
appauvrissez le Québec, vous allez contre l'intérêt public... Est-ce qu'on
devrait protéger cette personne-là?
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Mme Pineau.
Mme Pineau
(Anne) : Bien, écoutez, nous, là, ce qu'on lit à l'article 4, c'est
qu'on ne protégera pas les «divulgations
dont l'objet est de mettre en cause le bien-fondé des politiques
et objectifs de programme du gouvernement». Alors, je vous renvoie la question. Si je dénonce une politique de coupure systématique dans les services publics qui
affecte la santé publique, est-ce que j'ai le droit de me plaindre de cette
situation-là et de la dénoncer? Moi, j'estime qu'on doit pouvoir le faire.
M.
Caire :
Non.
Mme Pineau
(Anne) : Bon. Voilà.
Le Président (M.
Bernier, Montmorency) : Merci. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : En fait, je pense
que ce que vous réussissez à mettre le doigt dessus, c'est l'enjeu de... parce que mes
collègues parlent beaucoup de politisation, etc., c'est beaucoup
quand on se retrouve dans des gouvernements qui, dans
le fond, n'ont pas dit un mot de ce
qu'ils allaient faire puis que, quand ils se retrouvent au pouvoir, ils se
mettent à agir, et là vous dites : On aimerait ça pouvoir interagir pour
dire : Il me semble que l'intérêt public, là, est touché. C'est différent que si tu dis, l'exemple de M.
Hamad : Je vais couper la moitié de la fonction publique puis je vais
le faire en arrivant au pouvoir, puis tu le fais.
Une voix :
...
Mme
Massé : Oui. Oui, oui, bien,
je... Mais c'est là où je pense que vous essayez de nous mettre en lumière
la nuance entre l'intérêt du public et les
fonds publics, hein, parce qu'ici on
parle beaucoup de fonds publics, mais, quand il est l'heure de tenter d'amener la question de l'intérêt du public, comme
les journalistes l'ont fait et comme vous semblez bien le faire, on
semble remettre en question la possibilité de pouvoir le faire.
On parle beaucoup des
fonctionnaires, mais cette loi-là protège tout le monde qui veulent divulguer,
O.K.? Et, dans ce sens-là, moi, ce que je
saisis de votre intervention, c'est : Est-il possible d'imaginer une loi
qui ne fait pas que défendre la
question des fonds publics mais aussi l'intérêt du public? Et votre exemple
alimentaire est fort intéressant : Comment pouvons-nous, quand on
est quelqu'un qui nourrit le Québec, sentir qu'on peut être protégé, face à une
industrie agroalimentaire qui est pas mal
grosse, si, parce que c'est une entreprise privée, on ne peut pas lever le
doigt et dire : Je veux dénoncer? Est-ce que j'ai bien, moi, saisi ce que
vous vouliez dire?
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Laurin.
M. Lortie (Jean) :
Alors, la question des... dans l'entreprise privée...
Le Président (M. Bernier, Montmorency) :
M. Lortie, excusez.
M. Lortie
(Jean) : Oui, M. Laurin
est à ma droite. Alors, dans la question de l'industrie agroalimentaire, quand on a commencé à vouloir négocier avec des géants
de l'alimentation au Québec, bien, évidemment, certains y trouvaient un intérêt
mercantile, parce qu'ils disaient : Je vais pouvoir même annoncer à mes
clients que je suis tellement fiable comme
produit que même mes employés ont le droit de dénoncer si jamais
ce n'est pas bien fait, mais en général on courait tous aux abris antiaériens,
là, personne ne voulait embarquer là-dedans. Et on leur disait : Vous
devez... Et c'était toujours la question du devoir de loyauté qui revenait, la
contradiction fondamentale entre un travailleur qui voit passer un produit alimentaire qui met en danger la santé du
public et dire : Si je dénonce ça, je suis congédié, donc, les
conséquences, je ne me retrouverai plus
jamais de job dans la région où je suis. Donc, on avait cette préoccupation-là
de l'intérêt du public par une législation à l'époque, c'était la Commission
permanente de l'agriculture qui siégeait sur ces enjeux de sécurité et salubrité alimentaires. Alors, on tentait ça. Et
on a réussi à négocier à quelques endroits, et ça a marché. Les gens ont
le droit de l'appliquer, évidemment
sans abus. Et, ce que Me Laurin disait un
peu plus tôt, il y a
des balises aussi, puis c'est écrit, d'ailleurs, l'employeur et le
syndicat ont convenu...
Cette
question-là nous préoccupe dans le sens de ce projet de loi. Et je le disais
d'entrée de jeu, on salue le dépôt du projet n° 87 parce
que ça permet d'ouvrir un débat
public sur l'ensemble de cette question-là de la transparence,
de la protection des «whistleblowers», ça
permet un certain nombre... ça rouvre, au moins, et c'est dans la foulée de Charbonneau.
C'est notre devoir de le faire.
Le
Président (M. Bernier, Montmorency) : Merci. Donc, merci à M. Jean Lortie, secrétaire général, Mme Anne Pineau et M. Benoit Laurin. Merci de votre
participation à la Commission des finances publiques.
Donc, je lève
la séance, et la commission ajourne ses travaux à demain, 15 heures, où
nous poursuivrons alors les consultations publiques sur le projet de loi
n° 87. Donc, j'ajourne les travaux.
(Fin de la séance à 21 h 37)