(Quinze heures une minute)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît!
Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Et bien
sûr, comme d'habitude, je demande aux gens qui y participent de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La
commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les
auditions publiques sur le projet de loi n° 38, Loi visant à
permettre la réalisation d'infrastructures par la Caisse de dépôt et placement
du Québec.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Habel (Sainte-Rose)
est remplacé par M. Fortin (Pontiac) et M. Polo
(Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Hardy (Saint-François).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, cet après-midi,
nous aurons l'occasion de recevoir l'Association des retraitées et retraités de l'éducation et des autres services publics
du Québec. Nous allons recevoir également Me Richard Laflamme et
les représentants d'Héritage Montréal
Donc, permettez-moi
de souhaiter la bienvenue à M. Pierre-Paul Côté, président, Michel A. Gagnon,
premier vice-président, et M. Dominic
Provost, conseiller. Merci d'être ici cet après-midi, c'est un plaisir de vous
recevoir. Donc, vous avez 10 minutes
pour votre présentation, et par la suite nous allons passer aux échanges avec
les parlementaires. La parole est à vous.
Association des retraitées et retraités de l'éducation et
des autres services publics du Québec (AREQ)
M. Côté (Pierre-Paul) : Alors, bonjour. Je suis accompagné... bien, il y
a M. Provost à ma gauche, qui est conseiller, et M. Gagnon, premier vice-président. Il
s'excuse, aujourd'hui il a un problème de voix, il est pratiquement aphone.
Alors, je ne sais pas si c'est bon pour vous autres ou pas, là, mais en
tout cas.
L'AREQ
est une association de retraités de l'éducation et des autres services publics
du Québec. Elle regroupe 57 000 membres
dont la moyenne d'âge est de 68 ans, les deux tiers de nos membres sont
des femmes. L'AREQ oeuvre sur tout le
territoire québécois. Au sein de notre association, on compte 88 secteurs,
qui sont dotés de nombreux comités de travail
touchant une multitude de sujets, par exemple les soins de santé, l'âgisme, les
régimes de retraite et l'environnement. L'AREQ constitue en outre la plus importante association de personnes
retraitées de l'État. Nous remercions la Commission des finances publiques de nous avoir invités à
présenter le point de vue des personnes retraitées dans le cadre de l'étude
du projet de loi n° 38.
L'AREQ
tient d'entrée de jeu à souligner qu'elle souscrit à la volonté de la Caisse de
dépôt et de placement de contribuer
au développement économique du Québec grâce à la réalisation d'infrastructures
publiques. Toutefois, nos membres sont inquiets. L'entente commerciale
et le projet de loi n° 38 qui en découle soulèvent plusieurs
questions.
Nos
membres portent deux chapeaux : d'abord celui d'épargnants dont les
cotisations autant à leurs régimes de retraite
qu'au Régime des rentes du Québec ont été confiées à la Caisse de dépôt pour
assurer leurs vieux jours. Ils portent aussi
le chapeau de citoyen. À ce titre, ils voient dans la caisse un formidable
outil de développement et d'affirmation collective.
Pour
cette raison, nous sommes souvent tiraillés quand il est question des
orientations de la caisse. La création de la CDPQ Infra n'y échappe pas. Selon nous, avec son nouveau modèle
d'affaires, la caisse sera aussi tiraillée entre les différents éléments de sa mission. Nos membres
craignent ultimement d'en payer les frais, que ce soit comme épargnants ou comme citoyens. Dans ce constat, nous proposons
certaines recommandations pour préciser la mission de la caisse,
renforcer son indépendance et assurer un maximum de transparence.
Pour
d'abord parler de la mission de la caisse, cette mission, c'est de faire
fructifier les fonds de ses clients, les déposants, tout en contribuant au
développement économique du Québec. Bien sûr, parmi les déposants de la caisse,
on retrouve le Régime de retraite des
employés du gouvernement et des organismes publics, le RREGOP, qui représente à
lui seul le quart des effectifs sous la gestion de la caisse.
Le rôle de la caisse
à l'égard de nos rentes est donc de la plus haute importance. Pourquoi? Parce
que la santé financière d'un régime de
retraite dépend en premier lieu des rendements que génèrent les cotisations. Des pertes colossales comme celles de 2008 peuvent avoir un impact
direct sur ce régime. Depuis 2008, le taux de cotisation des salariés au
RREGOP a augmenté d'une manière importante.
Aussi, l'espoir d'une bonification du régime, par exemple l'indexation
de notre rente — ça, vous
en avez entendu parler dans les années antérieures — s'est volatilisé à court terme. Voilà qui illustre
toute l'importance pour la caisse d'assurer une gestion prudente des actifs de
ses déposants.
C'est pourquoi nous
mettons la caisse en garde contre certains risques. En voici quelques-uns.
On a parlé
beaucoup de l'appât du gain entretenu sous l'ancienne direction. On a aussi
affirmé que le nouveau P.D.G. a fait
le ménage non seulement dans son équipe, mais aussi dans les portefeuilles de
la caisse. Tant mieux. Mais ces
nouvelles pratiques sont-elles implantées durablement? Nous l'espérons, car
certains observateurs se demandent si les récents succès de la caisse ne
lui feront pas pécher par excès de confiance.
Par ailleurs,
on observe actuellement un intérêt grandissant pour les infrastructures de la
part de nombreux fonds de retraite à
travers le monde. Cet engouement n'est pas sans rappeler celui suscité par les
PCAA. Nous sommes peut-être trop craintifs, mais c'est le passé qui nous
l'a enseigné.
Mais, au fait, en vertu de quel élément de la
mission de la caisse la réalisation d'infrastructures s'inscrit-elle? Sous l'angle du rendement ou sous celui du
développement économique? Le communiqué diffusé par la caisse le 13 janvier 2015 est clair : «Il est
entendu que la caisse [s'engage] uniquement dans [des] projets [présentant] un
potentiel de rendement commercial
servant les intérêts de ses déposants, autrement dit l'ensemble des épargnants
québécois.» Le projet de
loi n° 38, lui, n'est pas aussi catégorique, on parle plutôt, à
l'article 11, des projets qui doivent «offrir un potentiel de
rendement commercial pour ses déposants eu égard aux risques appréhendés».
À la lecture de l'entente et du projet de
loi n° 38, la crainte d'une privatisation des infrastructures publiques
existe, la caisse pourrait éventuellement
céder une infrastructure au privé. Nous sommes convaincus que l'objectif de la
caisse n'est pas de déposséder les Québécois
de leurs infrastructures. Toutefois, cela pourrait se produire si elle ne
regarde que ses objectifs financiers.
Enfin, si le modèle proposé à l'égard des infrastructures
de transport collectif se révèle efficace et rentable, est-ce que dans quelques
années la caisse souhaitera réaliser d'autres types d'infrastructure? Y a-t-il
d'autres types de projets d'infrastructure qui pourraient être
envisagés? Quelle est la vision du gouvernement sur cette question?
Parlons de l'indépendance de la caisse. Plusieurs se rappelleront que, dans le passé, la caisse a
parfois subi des pressions et pris
des décisions qui semblaient téléguidées par des pouvoirs politiques.
Ce fut notamment le cas dans les années 80 avec l'achat de Steinberg, puis avec l'achat de Vidéotron
en 2000. Sans comparer les situations, il n'en demeure pas moins que l'annonce sur les infrastructures amène des questionnements. Le fait que deux
projets aient été annoncés en même
temps que l'entente nous inquiète. La
caisse pourra-t-elle les écarter si dans quelques mois elle vient à la
conclusion qu'ils ne sont pas rentables? D'autres projets ont-ils été
soumis et analysés?
L'article 1 et l'article 11 du projet
de loi n° 38 font état de l'indépendance de la caisse. En outre, il est question d'une évaluation des
projets par un expert indépendant.
Or, cet
expert sera choisi par les parties, soit la caisse et le gouvernement. Il y a, selon nous, un risque d'apparence de conflit
d'intérêts.
Le projet de loi n° 38 ne propose pas d'autre rempart au chapitre de
la gouvernance. C'est toujours le gouvernement
qui nomme les membres du conseil d'administration, il peut donc influencer indirectement les orientations de la caisse.
Actuellement, on ne retrouve que deux représentants des déposants et aucun représentant des simples épargnants. Leurs
représentants pourraient apporter un éclairage intéressant et
assurer un processus de reddition auprès des épargnants. Ils pourraient
ainsi renforcer l'indépendance et la transparence de la caisse.
Quelques mots,
justement, à propos de la transparence. Le dévoilement de
l'entente commerciale liant le gouvernement et la caisse est un pas dans la bonne direction,
nous saluons ce geste qui permet de mieux comprendre le modèle proposé,
autrement la simple lecture du projet de loi n° 38, qui est relativement
court, aurait été insuffisante. Toutefois, ce n'est qu'un début. C'est dans la réalisation de chaque projet que le défi de transparence sera le plus important.
Enfin, nous souhaitons nous attarder brièvement
sur le rôle et la représentativité du Comité de retraite du RREGOP. Le Comité de retraite du RREGOP et les
autres comités de retraite ont notamment comme mandat d'établir conjointement avec la Caisse de dépôt et de
placement du Québec une politique
de placement à l'égard des fonds provenant des cotisations de leurs participants respectifs.
Bien qu'ils soient largement influencés par les orientations de la caisse,
les comités ont tout de même voix au chapitre. Or, force est de constater que la voix des personnes
retraitées, à l'heure actuelle,
est faible, sinon presque inexistante. Sur 25 membres du Comité de
retraite du RREGOP, seulement deux sont des retraités. Cette proportion
nous apparaît insuffisante.
• (15 h 10) •
En
conclusion, nous considérons que le nouveau modèle pour la réalisation d'infrastructures publiques présente un potentiel de rendement et de développement. Toutefois, nos membres ont plusieurs réserves, autant à
titre d'épargnants que de citoyens,
et nous proposons donc quelques recommandations destinées à les rassurer : que le gouvernement et la caisse précisent dans
les différents documents relatifs à la mise en oeuvre de leur entente, de
même qu'à l'article 11 du projet
de loi n° 38, que la caisse
s'engage uniquement dans les projets qui présentent un potentiel de rendement
commercial servant les intérêts de
ses déposants; que l'article 11 du projet n° 38 soit également
modifié afin que l'expert mandaté pour
l'évaluation des projets d'infrastructure soit choisi
uniquement par la caisse; que le gouvernement modifie la Loi de la Caisse de dépôt et de
placement du Québec
pour réserver un minimum de sièges aux épargnants; que le gouvernement et la caisse prennent des engagements de transparence réelle envers les
citoyens du Québec dans le cadre de la mise en oeuvre de leur entente commerciale qui les lie et
de même que dans le cadre de chaque projet d'infrastructure dont la
caisse assurera la réalisation et l'exploitation; que le gouvernement dévoile la liste de l'ensemble des projets qui
seront soumis à l'analyse de la
caisse; enfin, que le gouvernement modifie la Loi sur le RREGOP pour accorder deux
sièges supplémentaires aux personnes retraitées au sein du Comité de
retraite du RREGOP. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Côté, de votre présentation. Nous allons maintenant
passer aux échanges avec les membres
de la commission, nous allons aller du côté ministériel. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Leitão : Très bien,
M. le Président, merci
beaucoup. Alors, messieurs,
MM. Côté, Gagnon et Provost, merci, merci d'être là. Merci de nous faire part de vos préoccupations concernant ce projet de loi et donc concernant l'initiative que le gouvernement
a prise avec la Caisse de dépôt.
Peut-être
quelques remarques de ma part. Bien
sûr qu'il y a des risques, nous
sommes conscients, la caisse est consciente
qu'il y a beaucoup de risques dans ce nouveau modèle d'affaires,
mais, en fin de compte, les risques sont partout. Et un des grands risques qu'il y a,
c'est que justement le portefeuille actuel de titres à revenu fixe, d'obligations
gouvernementales, procure un rendement qui n'est pas satisfaisant, hein, étant donné le niveau actuel des taux d'intérêt, et probablement une situation qui va durer encore plusieurs
années. Donc, il y a aussi un risque que la caisse essaie de gérer qui est le risque de rendements beaucoup
trop bas, étant donné... d'une bonne partie de son portefeuille, du portefeuille de
titres à revenu fixe, et donc il fallait compenser ce risque-là en investissant dans une autre classe d'actif. Alors,
cette autre classe d'actif, les
investissements en infrastructures, leur procure un rendement régulier, un
rendement satisfaisant à très long
terme; comporte des risques, bien sûr, mais je pense que, le risque de ne pas
le faire, il faut aussi le prendre en considération.
L'autre
chose, peut-être quelques précisions que j'aimerais aussi apporter, c'est que
d'abord ce modèle d'affaires s'applique
seulement à des nouveaux projets, de nouvelles infrastructures. Donc, non, ce
n'est pas vrai que la caisse va prendre
une partie du métro de Montréal, non, non, il faut que ce soit une nouvelle
infrastructure qui puisse se classifier. Donc, ce n'est pas une
infrastructure existante.
Deuxièmement, de l'autre côté de la chose,
éventuellement, oui, la caisse a la possibilité de vendre cet actif à l'avenir, peut-être, mais c'est aussi balisé, et
le gouvernement aura toujours un droit de premier regard, si jamais on arrive
à une telle situation.
Pour ce qui
est du choix des projets, ça, c'est un choix, donc, de politique publique,
alors c'est le gouvernement qui
choisit, qui décide. Nous, étant donné nos objectifs de politique publique,
nous pensons que tel, et tel, et tel projet pourraient être intéressants. Là, on approche la caisse. Eux, ils vont
l'examiner, ils vont l'étudier. Et, à la fin de la journée, s'ils ne trouvent pas dans ces projets-là un
rendement commercial satisfaisant, étant donné le risque, ils sont entièrement
libres de dire : Non, non, ça ne nous
intéresse pas, et ça s'arrête là, ça
ne se fait pas. Donc, l'indépendance de la caisse, je pense
qu'elle est bien protégée, parce que nous aussi, évidemment, nous ne sommes pas
intéressés à ce que la caisse se lance dans des projets qui ne seraient
pas viables commercialement. Alors donc, à notre avis, c'est intéressant.
Maintenant, ce que j'ai trouvé d'intéressant
aussi dans plusieurs de vos propositions, c'est la notion, donc, de transparence. Vous souhaiteriez que ce processus
soit plus clair, plus transparent. Concrètement, qu'est-ce que vous avez
à nous suggérer pour améliorer la transparence du processus?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Alors,
premièrement, quand... Là, on sait qu'il y a deux projets qui avaient été
annoncés au mois de janvier. Est-ce
qu'il y en a eu d'autres, projets qui ont été suscités par le gouvernement
versus la caisse? Alors, ce serait
intéressant — ça, c'en
est une, partie de transparence — de voir s'il y a d'autres projets qui ont
été soumis ou qui vont être soumis et, quand ça va arriver dans la
réalisation, qu'on soit aussi plus informés comment ça se réalise, comment ça va se mettre en oeuvre, et aussi quand il
va y avoir l'exploitation, aussi, parce que, quand on fait un petit peu référence, là, à des sociétés d'État comme
Hydro-Québec, Loto-Québec — il me semble qu'il y en a une autre — en tout cas, ils ont toujours à dire que c'est dans leur sphère, ils ne peuvent
pas trop en parler. Alors, c'est pour ça que nous autres, on voudrait, au moins dans ce dossier-là, qu'on
n'agisse pas... parce qu'on voit souvent qu'Hydro-Québec... malheureusement
on les nomme souvent, mais souventefois
aussi ils ont à être nommés, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ne se
disent pas, il y a des non-dits mais
qu'on peut percevoir, et on ne voudrait pas que ce modèle-là se transporte à ce
dossier-là, là, avec la caisse Infra.
Le Président (M. Bernier) : ...public,
c'est la Société des alcools, M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Ah! O.K.
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. le ministre.
• (15 h 20) •
M.
Leitão : Très bien. Non, je comprends bien vos préoccupations, mais,
comme je vous ai dit, c'est une question de politique publique, donc c'est vraiment le gouvernement, donc le
Conseil des ministres, en tant que gouvernement, donc représentants élus de la population. Selon notre interprétation de
ce qui constitue l'intérêt public, nous allons suggérer ou proposer des
projets à la caisse.
Pour l'instant, puisque le projet de loi n'est
même pas encore approuvé, donc la caisse n'a même pas encore commencé, il y a seulement ces deux projets qui
sont dans le décor, il n'y en a pas d'autres qui sont considérés. Et, même
en partant du principe qu'on approuve ce
projet de loi et que la caisse commence ses travaux de planification autour de
ces deux projets-là, je ne pense pas qu'il y en aura beaucoup d'autres en même
temps. Mais ça serait ultimement la décision
gouvernementale, si on soumet d'autres projets ou pas, mais, encore une fois,
il faudrait que ce soient des nouveaux projets,
pas des projets existants, et d'intérêt public, et dans le transport en commun.
Donc, ce n'est pas d'autres infrastructures, ce n'est pas qu'on va faire d'autres types d'infrastructure qui
pourraient être aussi utiles, mais on parle ici vraiment de transport,
transport en commun, transport public au Québec.
Voilà. Les collègues, je ne sais pas si vous
avez des questions que vous aimeriez...
Le
Président (M. Bernier) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis :
Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Bon après-midi à vous...
Mme
de Santis : Bonjour et bienvenue. J'ai beaucoup
aimé lire votre mémoire parce que c'est une position que je peux comprendre. Et vous réfléchissez, vous
dites que, voilà, je suis épargnant, mais je suis aussi citoyen, et vous portez
deux chapeaux. Et je trouve que c'était intéressant comment après vous avez
fait un exposé de votre position.
Maintenant,
en tant qu'épargnants d'un côté et citoyens de l'autre, quelle est votre
opinion sur la tarification? À l'article 11
du projet de loi, on dit que c'est la caisse qui peut fixer des tarifs pour
l'utilisation de l'infrastructure de transport. Est-ce que vous avez une
opinion là-dessus?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Oui. Disons qu'on est un peu loin du moment où on
va établir la tarification, mais moi, je reste dans la région de Montréal,
je ne suis pas à Montréal, là, mais on voit que toutes les sociétés de
transport sont toujours déficitaires, et c'est le gouvernement qui supplée en
subventionnant. Je me souviens, là, au mois de janvier, quand il y avait eu
l'annonce, on parlait beaucoup de Vancouver, mais c'est après qu'on a vu dans
les journaux que Vancouver, oui, il était
payant pour la caisse, mais que le gouvernement avait investi aussi, c'était
dans le cadre aussi des Jeux olympiques, etc., là.
Alors,
ça, là-dessus, sur la tarification, il ne faudrait pas qu'au
bout de la ligne... Parce qu'on est toujours mal pris là-dedans. On est citoyens, mais on est épargnants. Si le
coût, le prix du billet, la tarification... Parce que, on le voit dans la région de Montréal, il y en a une
multitude, on essaie de mettre de l'ordre là-dedans. Je ne sais pas
qu'est-ce que ça va donner avec
l'autre partie, là, que la caisse, elle va faire avec le Train de l'Ouest puis
le SLR, mais, si ça monte trop, à ce moment-là,
bon, les gens, le citoyen ordinaire, il va dire : Bien là, c'est les
employés de l'État, là, parce que c'est leur argent aussi, là, hein, dans la Caisse
de dépôt, là, c'est l'argent des déposants,
c'est l'argent des épargnants, c'est l'argent des salariés actuels puis des salariés qui sont rendus retraités maintenant.
Alors, ça, ça m'inquiète un peu parce qu'il me semble que je vois, là, certains médias, comment ils peuvent lancer ça,
ou d'autres, là, que, là, voyez-vous, là, ils profitent, là, du
rendement pour se payer des grosses retraites.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. Côté. Mme la députée.
Mme
de Santis :
Il y a toujours le gouvernement fédéral qui peut donner des
subventions. J'aimerais apporter à votre
attention qu'aller du centre-ville de Montréal à l'aéroport de Montréal, en autobus, c'est
10 $. Aller du centre-ville de
Vancouver à l'aéroport de Vancouver, utilisant la ligne ferroviaire, c'est
8,75 $, je crois, oui, c'est 8,75 $. On a permis à la Caisse
de dépôt d'investir dans
l'infrastructure en Colombie-Britannique, et les citoyens de la Colombie-Britannique ont avantage de cet
investissement.
Je
crois que, quand je lis votre mémoire, vous n'êtes pas contre la participation
de la caisse dans les infrastructures pour
le transport collectif. Vous avez des inquiétudes. Vous voyez qu'il y a des
raisons pour le faire, des raisons de ne pas le faire, mais vous n'êtes pas contre. J'ai l'impression, quand je lis
votre mémoire, que vous dites : Faites attention, mais vous reconnaissez, je crois bien, qu'il y a un
grand besoin pour le transport en commun au Québec et que nos ressources
financières ne sont pas nécessairement
là, les ressources financières traditionnelles, et voici une autre façon de
réaliser du transport en commun, si
on est prudents — vous
nous demander d'être prudents, de faire attention — on pourrait peut-être réaliser des projets qu'autrement on ne pourrait pas.
Est-ce que je lis bien votre mémoire?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Oui, nous sommes, on l'a dit en partant... Même
notre communiqué de presse du mois de janvier, on allait dans ce sens-là aussi. On est en accord avec l'essor
économique du Québec mais d'être prudent avec l'argent.
Là,
on dit que, bon, le gouvernement n'a pas d'argent, on se tourne vers la Caisse de dépôt, mais la Caisse de dépôt... Et
là je vais faire un petit bout, là, qu'en même temps ça rejoint des choses.
Depuis plusieurs mois, ce qu'on entend, c'est que les employés de l'État, ils ont un régime de pension très riche,
quasiment d'or, et la moyenne des rentes de retraite du RREGOP, c'est 19 000 $ par année.
Alors, ça, c'est l'argent des salariés actuels puis l'argent surtout aussi des
gens qui ont contribué pendant 30,
35 ans, 40 ans dans leur fonds de pension. Ce que je remarque depuis
quelque temps, puis même ce que
j'entends puis ce que je lis, les mêmes personnes qui déblatéraient sur ces
régimes-là, je les vois saliver à l'esprit
d'avoir... on peut-u aller chercher de l'argent ailleurs, mais l'argent
ailleurs, c'est l'argent qu'ils dénonçaient parce qu'on disait qu'on l'utilisait pour notre
retraite. Ça, je vous dirais que je
l'entends beaucoup parce
que je suis en tournée comme président national dans la province actuellement, sur les dossiers de fin d'année, et les gens me le disent, ça. Il ne
faudrait pas se faire avoir que... Oui, on
est d'accord avec ces éléments-là, mais pas pour n'importe quoi. Parce que
j'ai même vu dans un rapport qu'on était rendu au stade de baseball à Montréal.
On est loin des infrastructures, là, hein?
Mme de Santis :
Bien, ce n'est pas l'intention.
Une voix : ...ça n'arrivera
pas.
M. Côté (Pierre-Paul) : Je sais que ce n'est pas votre intention, mais
c'est quand même dit par du monde influent.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre, avez-vous...
M. Leitão :
Je m'excuse d'avoir...
Le Président (M.
Bernier) : Non, non, mais allez-y, allez-y, vous pouvez... La
parole...
M.
Leitão : Non, non. Juste peut-être...
Non, mais je comprends exactement votre point de vue, et vous avez tout à
fait raison. Et c'est pour ça que
j'avais dit tantôt que ce nouveau modèle d'affaires s'applique entièrement,
exclusivement aux projets de transport en commun au Québec.
Le Président (M.
Bernier) : Mme la députée de...
M. Leitão :
Mais vous avez raison que toutes sortes de choses se disent, oui, en effet.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Pontiac.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Bienvenue. J'ai lu votre
mémoire avec intérêt et, comme ma
collègue de Bourassa-Sauvé, je trouve ça particulièrement intéressant.
Vous avez deux points de vue très distincts,
celui d'épargnant, celui de citoyen. Et je pense que vous ne remettez pas en question
l'utilité ou la nécessité de certains projets de transport en commun, au
contraire je pense que vous faites la réalisation comme nous tous, comme
utilisateurs, que ce soit du réseau de transport en commun ou du réseau de
transport de façon générale, qu'il y a des déficiences, qu'il y a des problèmes
de congestion, qu'il y a place à amélioration au niveau du transport en commun.
Mais
vous semblez avoir quelques inquiétudes, notamment par rapport à l'indépendance
de la caisse. Et donc je vais me
permettre d'aborder certaines des recommandations, là, que vous nous formulez
et j'aurai quelques petites questions pour vous là-dessus.
La toute première, la
première recommandation que vous nous faites, c'est que le gouvernement et la
caisse précisent, là, que ce soit à
l'intérieur du projet de loi n° 38 ou ailleurs, que la caisse s'engagera
uniquement dans les projets qui
présentent un potentiel de rendement commercial servant l'intérêt de ses
déposants. Quand vous entendez M. Sabia ou quand vous entendez le ministre, est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y
a déjà cette structure-là en place, que la caisse, que ce soit à travers les projets dont on parle
aujourd'hui ou ailleurs, ne s'investit que dans les projets où il y a un
rendement profitable pour eux?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Oui. Quand je les entends aujourd'hui dire ça, ça
ne veut pas nécessairement dire qu'ils vont
être là dans deux ans, trois ans. Est-ce que ça va se perpétuer? Parce qu'on
sait qu'une loi, ça se fait, puis ça s'amende, puis ça change. Alors,
même, exemple, la loi n° 38, elle modifie la loi de la caisse, bon, alors
c'est des possibilités.
C'est
pour ça que nous autres, on dit : Uniquement des projets de potentiel,
c'est de s'assurer... M. le ministre le
disait tout à l'heure, on a bien compris, c'est pour les transports collectifs,
mais moi, j'ai répété aussi que j'en voyais d'autres, là, qui en voulaient de toutes sortes, bon, les pressions,
etc., alors, tu sais, les pressions à tous les niveaux, là. Alors, c'est
pour ça, là, que nous autres, là-dessus, on veut être quand même prudents avec
cette partie-là.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci. Je vois également que certaines de vos
recommandations sont un peu plus larges que le cadre du projet de loi. Je regarde la recommandation que vous
formulez, là, sur des modifications possibles à la Loi sur la Caisse de dépôt pour réserver un
minimum de sièges aux épargnants. Est-ce que c'est une position que vous
avez depuis longtemps ou... C'est quelque
chose qui vraiment, à la lecture du projet de loi n° 38, vous vient en
tête comme nécessaire en ce moment ou c'est quelque chose, comme je disais, là,
que l'association a dans ses revendications depuis longtemps?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Historiquement, il y avait des représentants des
travailleurs qui étaient sur le conseil de la Caisse de dépôt et placement, ils ont été évacués aux alentours de 2004‑2005,
hein, aux alentours de ça, là. Alors, pour nous autres, on se dit : Ce n'est pas normal que les représentants
des gens qui mettent de l'argent hebdomadairement ou mensuellement à la Caisse de dépôt... qu'ils n'ont
pas de représentant à ce niveau-là. Oui, il y a deux épargnants, il y a la
question de la Commission de la construction
du Québec puis la Régie des rentes du Québec, mais c'est des cadres, là,
supérieurs, là, ce n'est pas des représentants des travailleurs.
• (15 h 30) •
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Fortin (Pontiac) : Merci. Dans ce cas-là, avez-vous des
recommandations spécifiques? Parce que c'est assez général, là, réserver un minimum de sièges aux épargnants.
Qu'est-ce que vous avez en tête spécifiquement? Puis, ces épargnants-là,
on les trouve où? Ça vient d'où, cette sélection-là?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté, oui, allez-y. Par la suite, le ministre va prendre la parole.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Oui. On
n'est pas allés jusqu'à voir comment ça pourrait se réaliser, mais il ne faut
pas non plus que le poisson soit noyé
dans la piscine, là, il faut qu'il y ait quand même un minimum de deux, trois
personnes qui ne se sentent pas isolées, là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci...
M. Côté
(Pierre-Paul) : Mais on n'a pas été jusqu'à déterminer ça. Nous
autres, ce qu'on dit : Mettez-en. Puis après ça, bien, probablement, quand vous allez modifier la loi, vous
allez faire une autre commission parlementaire, puis là on aura plus des
avis puis on viendra vous dire combien qu'il en faut.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, vous vouliez ajouter?
M. Leitão : Une dernière question.
Comme vous le savez aussi, la Caisse de dépôt a déjà une filiale qui est active dans un autre domaine, Ivanhoé Cambridge,
une filiale dans le domaine de l'immobilier. L'immobilier, ce n'est pas
les trains, ce n'est pas les transports, mais c'est quand même un autre type
d'activité.
Les questions que vous soulevez ici sont des
questions importantes et intéressantes en ce qui concerne cette potentielle nouvelle filiale, caisse Infra. Est-ce
que vous trouvez que maintenant le cadre réglementaire autour d'Ivanhoé
Cambridge... Est-ce qu'il vous satisfait ou est-ce que vous aimeriez que cela
se fasse autrement aussi?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Je ne suis
pas en mesure de vous dire par rapport... Je sais qu'Ivanhoé Cambridge, ça a
été un succès. Ça avait commencé un peu par
une défaite avec Steinberg, mais ça s'est perpétué après puis c'est comme
un peu un fleuron. Mais je ne peux pas... Je ne pourrais pas vous dire
exactement qu'est-ce que c'est, mais j'imagine qu'il y a des bonnes choses là,
puisque ça réussit.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Pontiac, est-ce que vous avez d'autres questions?
M. Fortin
(Pontiac) : Oui. Je veux revenir sur ce que le ministre avait touché
au tout début, là, et vous en avez parlé,
évidemment, pendant votre intervention initiale. Par rapport à la transparence,
les engagements en transparence que
la caisse ou que le gouvernement pourrait prendre pour vous réconforter, si on
peut dire, vous avez parlé de savoir quels
projets ont été soumis. Là, le ministre vous a expliqué un peu qu'il n'y avait
pas, comme tel, d'autre projet qui avait été mis sur la table, mais, par rapport aux engagements en transparence
de la caisse, qu'est-ce que vous voulez voir? Je vois votre recommandation, là, qui dit que la caisse prenne des
engagements formels de transparence, mais, au-delà de savoir quels
projets ont été analysés, qu'est-ce qu'il y a dans votre demande, dans votre
recommandation?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : On n'a pas
détaillé tous les éléments, mais je vous dirais... Bon, déjà, là, tout à
l'heure le ministre a dit : Il y en a juste deux pour le
moment. Bon, s'il y en avait eu d'autres, on aurait aimé le savoir. Il n'y en a pas d'autre.
Est-ce que...
Là, ce n'est pas juste aujourd'hui, là, peut-être que dans six mois, là, il y en a
qui vont vouloir aussi, là, parce que j'ai entendu quelques personnes en
commission, là, je n'ai pas tout écouté, là, mais il y en a qui ont beaucoup
d'appétit, là, alors ils vont peut-être
présenter des choses. Ce qu'on aimerait savoir, nous autres, c'est ça, la
transparence, là, c'est de dire les
projets qui ont été proposés puis qui ont été analysés, qui ont été acceptés ou
refusés mais... Puis, lors de la
réalisation aussi, on sait que M. Sabia a dit, bien, qu'il allait
s'adjoindre des partenaires, bon, voir un peu c'est quoi aussi, les compagnies ou, en tout cas, les
holdings qui vont aider dans la construction, parce que ce n'est pas un
spécialiste de tout, là. C'est beau,
dire que je finance, mais de là à dire que je construis puis qu'après ça je
gère le quotidien, là, il y a toute
une marge. En tout cas, il y a des choses là-dedans que ce n'est pas pour rien
que j'ai fait référence à Hydro-Québec
tout à l'heure.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Côté. Nous allons passer du côté de l'opposition officielle. M. le
député de Rousseau.
M. Marceau : Merci. Bonjour, messieurs. Bien, écoutez, merci
pour votre mémoire, merci aussi pour les réponses que vous avez déjà
fournies.
Je vais vous
poser, moi aussi, quelques questions. Peut-être vous demander... Parce que vous évoquiez, je
pense, à la page 10 le fait que donc la caisse devra obtenir un
certain rendement, devra obtenir un certain rendement pour ses investissements, et puis,
bien, on parle ici d'un projet de transport en commun, puis je pense que je ne
vous apprends rien en vous disant que
présentement, au Québec, cela n'existe pas, un système de transport en commun
qui permet de faire de l'argent, là,
c'est plutôt l'inverse. Je vais juste vous donner quelques chiffres. Je vous donne la proportion de revenus des
différentes sociétés de transport qui provient des clients, qui provient donc
de la tarification des usagers, le reste provenant
essentiellement des différents gouvernements, municipaux et régionaux.
Présentement, là, à la STM — bien ça, c'est les chiffres pour
2013 — les
clients, ça représentait 42 % des revenus, ce qui veut dire que 58 %
provenait des municipalités ou de
subventions gouvernementales. Pour Québec, la proportion de revenus provenant
des clients était de 32 %. Ça,
c'est en 2015, c'est les prévisions pour cette année. Sherbrooke, 2013,
31 % qui provenait des clients, donc 69 % qui provenait des municipalités, des gouvernements. Pour
Saguenay, 2013, 20 %. Alors, ça montre l'ampleur de ce qu'on doit
aller chercher commercialement, là, puis qu'on ne va pas chercher présentement,
avec les tarifs actuels.
Donc, avec les tarifs actuels, là, mettons le
métro de Montréal, 3 $, là, bien on va chercher 42 % des revenus,
puis là on voudrait arriver à une exploitation commerciale, alors, évidemment,
il va falloir trouver des sources de financement
autres. La caisse nous a dit, donc, une tarification mieux adaptée. On entend
par là, évidemment, une tarification un
peu plus lourde, là, parce que je pense qu'on ne peut pas imaginer que ça va
être les mêmes tarifs, puisque ça rapporte juste 42 %, là, dans ce
cas-ci. Il y a la captation de la plus-value foncière.
Et puis
j'aurais aimé vous entendre parler de ça un petit peu, si vous voulez bien. Je
vais peut-être commencer comme ça, puis je reviendrai avec d'autres
questions pour la suite, là.
La captation
de la plus-value foncière, ce serait une façon d'ajouter des revenus, pour la
caisse, qui permettrait peut-être de compenser le 60 % manquant.
Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez, s'il vous plaît?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : La
captation, ça, c'est la valeur qui va être sur le trajet, là, du transport?
M. Marceau :
En fait, c'est le fait, pour l'État... En fait, de la façon dont ça va
fonctionner, c'est que l'État va exproprier
ou... en tout cas acquérir ou exproprier à la valeur marchande avant la mise en
place de l'infrastructure, donc la
valeur marchande actuelle, avant la bonification qui viendra, là, puis donc l'espèce
de gain de valeur qui va découler de
la mise en place de l'infrastructure, ça, ça va être approprié par la Caisse de
dépôt. Vous comprenez? Donc, c'est la Caisse
de dépôt qui va faire le gain de capital, si on veut, là, qui va capturer la
plus-value, parce qu'on va lui céder les terrains, tout simplement,
l'État va céder les terrains à la Caisse de dépôt.
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Je ne suis
pas tellement versé, là, mais ce qu'il ne faudrait pas qu'il arrive, c'est qu'il y ait trop d'expropriations pour que, là, ça
monte beaucoup, O.K., au niveau de la caisse, mais qu'on fasse un Mirabel
avec les transports en commun; qu'on
exproprie beaucoup, mais après ça on ne sait plus quoi faire avec, là. Puis ce
n'est pas sûr que la valeur... C'est
vrai que c'est dans la région de Montréal, les terrains valent cher. Puis, la
population, on pense aussi qu'avec le
transport en commun, avec les nouvelles formules, il y aurait peut-être
beaucoup de monde qui irait se construire
ou habiter près, là, il y a toute cette valeur-là. Est-ce que... Là, écoutez,
là, je ne suis pas en mesure de dire le financement de ça, là, mais de
là à prendre 60%, là, en tout cas, là, j'ai des doutes, là, mais...
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M. Marceau : Je veux juste
être clair, je n'ai pas dit que ce serait 60 %. J'allais dire que...
M. Côté (Pierre-Paul) : Non, non.
• (15 h 40) •
M. Marceau :
Puis je veux être juste être parfaitement honnête, parce je ne veux pas faire
de la... je ne veux pas laisser
sous-entendre des choses. Évidemment, quand je dis que les clients, à la STM,
ça représente 40 % des revenus ou 42 %,
puis que ça laisse donc 58 % à trouver ailleurs, évidemment, ça, c'est
pour l'ensemble de l'exploitation de la STM, puis là-dessus il y a des lignes qui ne sont pas rentables, il y a des
lignes qui sont rentables. On comprend que la caisse va exploiter un bout d'infrastructure qui est plus
rentable, et donc on peut imaginer qu'il y a
plus d'espace pour des revenus provenant des clients.
Mais il n'en demeure pas moins que la probabilité
que la tarification permette d'aller chercher 100 %, en tout cas, d'après moi, c'est très... c'est peu probable. Et
donc il y avait cette idée de captation, mais je comprends que... C'est
correct, là, il n'y a pas... ce n'est pas nécessaire qu'on élabore
là-dessus plus.
Je voulais
vous demander... Vous avez abordé la question de l'indépendance de la caisse,
puis je pense que c'est une question
importante. Puis évidemment vous êtes au premier chef des gens qui suivez ça de
très près puis vous avez plusieurs commentaires fort pertinents. Moi, je
voulais vous demander simplement : Est-ce que vous suggéreriez que dans le projet de loi on en ajoute, qu'on soit
plus précis sur l'interface qu'il va y avoir entre le gouvernement puis la
caisse? Parce que, pour l'instant,
là, ça tient dans trois paragraphes dans l'article 11... Je ne suis pas
correct, c'est plus que trois, c'est
un, deux, trois, quatre, cinq paragraphes, pardon, c'est cinq petits
paragraphes dans l'article 11, là, 88.10, mais il n'y a pas de... Quand
on compare le contenu de l'article 88.10 avec l'ensemble des détails qui sont fournis
dans l'entente, on ne peut pas
s'empêcher de constater qu'il y a un très grand écart. Ici, il y a
quelques pages qui décrivent le processus; ici, il y a cinq
petits paragraphes. Peut-être nous dire... Je ne sais pas si, vous, ce que vous
avez lu dans l'entente, ça vous convenait. Simplement
vous entendre là-dessus. Est-ce que vous pensez que ce qui est présentement dans le projet de loi
est suffisant? Est-ce qu'il faut en ajouter? Est-ce qu'il faut laisser ça comme
ça?
M. Côté (Pierre-Paul) : Bien, ce
n'est pas pour rien...
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Excusez. Ce
n'est pas pour rien quand, par rapport à l'indépendance de la caisse, dans
le choix, par exemple, des projets, on disait : Nous autres, pour nous
autres, là, il ne faudrait pas que la caisse et le gouvernement soient ensemble pour voir si le projet, il est rentable ou
pas. Le gouvernement propose, puis la personne ou l'organisme qui doit voir si c'est rentable ou
pas, c'est l'organisme qui va financer, pour éviter qu'il y ait des pressions
politiques là-dessus, quel que soit le parti, là. Ça, là, on sait que ça tourne...
Et l'autre
dimension, bien là, tu sais, on vit dans une société où, c'est vrai, c'est
le... non, c'est le... oui, le gouvernement
qui nomme les gens à la Caisse de dépôt, hein, sur le conseil d'administration.
Bon, il y a peut-être une autre façon de faire, c'est peut-être
l'Assemblée nationale, on n'a pas élaboré plus que ça là-dessus, mais pour
éviter qu'il y ait trop de connexions
proches, à un moment donné, se donner des balises un peu. C'est dans cet
esprit-là. Puis là je ne voudrais pas
être mal interprété pour dire que les gens qui sont là sont de mauvaise foi,
là, ce n'est pas l'esprit, là, mais
regardez la couleur de nos cheveux, on en a vu dans notre carrière, hein, ça
fait qu'on aime mieux être plus prudents qu'autre chose.
Le Président (M. Bernier) :
Je croyais que c'était de la coloration que vous aviez. M. le député.
M. Marceau :
...les nôtres sont en train de devenir comme les vôtres. Surtout à rester ici,
je vous garantis que ça accélère le grisonnement.
Le Président (M. Bernier) :
Vous n'en avez pas beaucoup, M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Là, ça progresse
trop rapidement à mon goût, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) :
Allez-y, la parole est à vous.
M. Marceau :
O.K. Merci pour votre réponse. Puis je l'ai bien entendue, je la comprends
bien, puis on s'entend, ce n'est pas
les personnes en place, là. Puis je veux que le ministre me comprenne bien,
quand on parle d'indépendance, puis
M. Sabia aussi me comprenne bien, là. Je suis convaincu de ce que ce sont
des personnes qui ne veulent que le bien du Québec, là, je n'ai aucune hésitation là-dessus, ce n'est pas ce qui
est en cause, là. C'est que, malheureusement, même si on a confiance dans les gens qui sont là présentement,
il n'est pas assuré que, pour l'avenir, ce sera toujours le cas. Et donc
il faut pouvoir prévoir. Comme vous dites, on en a vu d'autres.
Sur la transparence, dans vos recommandations,
là, vous parlez donc que «la caisse prenne des engagements formels de
transparence réelle envers ses épargnants et envers les citoyens du Québec dans
le cadre de chaque projet d'infrastructure
dont elle assurera la réalisation et l'exploitation». Vous dites aussi que «le
gouvernement dévoile la liste [...] des projets qui seront analysés par
la caisse, qu'ils soient retenus ou non».
Ici, il y a
des gens qui sont venus nous proposer que donc le gouvernement dit : J'ai
tel besoin, la caisse formule un
certain nombre de solutions, puis il y a au moins un groupe qui a proposé que
ce soit soumis à la consultation publique. Est-ce que c'est le genre de
transparence que vous avez en tête?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Honnêtement,
là, non. Je pense que, dans notre système démocratique dans lequel on vit, on a élu des députés à l'Assemblée nationale, il y
a des responsabilités, il y a un devoir, puis, quand ça ne fera pas l'affaire,
bien aux prochaines élections on travaillera pour que ça change.
M. Marceau :
O.K. Ça fait que donc ce que vous voulez, c'est simplement que ce soit rendu
public. Ce n'est pas pour que ce soit discuté dans une consultation, on
s'entend.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Oui, puis on
voit aussi... C'est plus au niveau comme de la reddition de comptes, hein,
qu'on le dise après, parce que dans la
recommandation on dit «qui seront soumis à l'analyse», pas juste ceux qui
auront été analysés. Peut-être que...
Bien, analysés, j'espère qu'ils vont être tous analysés, mais peut-être qu'il y
en a que ça va prendre cinq minutes à analyser puis dire : On met
ça de côté. On aimerait ça, les savoir, ceux...
M. Marceau :
Je comprends. Donc, vous voulez a posteriori une reddition de comptes. Vous
voulez savoir ce qui a été envisagé, ce qui a été exclu, ce qui a été
retenu.
Est-ce que
vous voulez aussi savoir les résultats, par exemple les coûts des
investissements, le financement des investissements?
Est-ce que... Parce que, là, on va arriver, puis je peux le prévoir d'emblée,
dans une situation où on va nous dire : La caisse a des partenaires
privés, c'est commercial, puis on ne peut pas vous donner l'information sur un
paquet de choses, sur l'achalandage,
sur les résultats d'exploitation, les coûts de certaines opérations. Moi, je m'attends à ça, là. Je n'ai pas encore eu cette discussion-là avec le gouvernement, mais, quand... on arrive vite dans l'idée que c'est commercial puis qu'on ne peut pas avoir cette information-là parce que, s'il y
a des partenaires privés, on ne peut
pas, souvent, dévoiler ces informations. Est-ce que vous trouvez que c'est raisonnable? Est-ce que
vous voulez plus de transparence? Enfin, je vous laisse parler.
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : On en
voudrait plus, mais on est très conscients que, quand ça va arriver aussi, là,
on va nous parler de la concurrence commerciale, puis etc., hein? Mais,
tu sais, entre tout dire puis ne rien dire, il y a une marge, puis on en connaît, des sociétés, là, qui ne disent rien. Ça fait que je pense qu'il y aurait comme une marge à préciser certaines
choses.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député.
M. Marceau : O.K., oui. Peut-être... Êtes-vous capable de me faire la liste des
choses que vous aimeriez avoir comme informations? Puis je vous en ai
suggéré quelques-uns, j'ai fait une liste moi-même, mais peut-être, la vôtre,
j'aimerais entendre. Est-ce qu'il y a des choses particulièrement que vous
aimeriez savoir?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : On n'a pas
fait de liste, comme tel, là.
M. Marceau : O.K. En tout
cas, moi, je fournirai la mienne en temps et lieu, O.K.?
Qu'est-ce
qu'il me restait? Oui, la tarification. Je veux juste revenir là-dessus. Vous,
vous n'avez pas d'inquiétude quant à
la hauteur de la tarification pour ces infrastructures-là? Est-ce que vous
croyez que la tarification va être un enjeu? Je vous donne l'exemple, là, qui a été un peu... qui a été rendu public,
là, récemment, celui de la tarification pour le pont de la 25, où on a vu que le tarif avait augmenté
de façon assez costaude, là, récemment, et puis le ministre des Transports
nous disait qu'il n'avait pas vraiment le
choix, que le contrat signé à l'époque de la mise en place du PPP prévoyait que
la société de transport pouvait... pardon, que les autorités opérant le pont de
la 25 pouvaient augmenter le tarif. Est-ce que vous avez des inquiétudes
quant à la fixation des tarifs, que ce soit à court terme ou dans le plus long
terme?
M. Côté (Pierre-Paul) : Je pense...
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Excusez. Je
pense que je l'ai mentionné tout à l'heure, oui, ça peut être inquiétant. Puis
ce qui nous inquiète le plus, c'est que la population va dire, à ce
moment-là... ils ne parleront pas de la Caisse de dépôt, là, on sait
très bien qu'il y a certains médias qui vont se faire un plaisir de dire :
Voyez-vous, là, c'est les retraités qui ne veulent pas qu'on utilise leur
argent pour le bien de la société, puis c'est l'argent qu'ils ont mis.
Puis
d'ailleurs, voyez-vous, sur les coûts, bon, moi, je suis un citoyen de
Longueuil. Quand vous avez dit 3 $, tantôt, là, bien ça coûte
3,25 $ depuis que Laval a construit puis que ça a coûté plus cher que
prévu. Puis Longueuil, ça fait longtemps qu'il était construit, depuis 1966,
1967.
M. Marceau : Bien sûr.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Tu sais, là, ça fait que la tarification, hein, on
ne le sait pas, comment ça va... Ça a l'air assez bordélique
actuellement dans les transports en commun sur le grand territoire de Montréal.
M. Marceau : Bien, je lisais
qu'il y a 700 titres, 700 titres dans la région de Montréal, là.
Disons qu'on va en ajouter d'autres, là, ce n'est pas clair que ça va simplifier
les choses.
Mais je veux
juste... Avez-vous des suggestions quant à quelque
chose... quant à un mécanisme qui
permettrait de nous assurer que justement
les tarifs vont être fixés d'une façon intelligente dans le futur? Est-ce que
vous croyez qu'au moment de signer une entente de 20 ans ou de
50 ans on est capable de prévoir tout ce qui va se passer?
Le Président (M. Bernier) :
M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Nous ne
sommes pas allés jusque-là, mais on espère que ceux qui s'en occupent vont
regarder ça, parce qu'au niveau des tarifs on sait que... Avec tout ce qui se
passe dans la région de Montréal à l'heure actuelle, comment ça va débloquer
puis ce que ça va avoir de l'air après, là...
Mais,
concernant vraiment l'évaluation des tarifs, bien il y a toute la dimension
aussi, là... Puis ça, en tout cas, moi,
je ne suis pas capable de l'évaluer. Dans un cas comme ça, avec la Caisse de
dépôt, est-ce que le gouvernement peut subventionner?
Puis on a tous les millions puis milliards, à partir de l'année prochaine, sur
le transport en commun qui viennent du budget fédéral. Est-ce qu'il y a de l'argent qui peut être
transféré au Québec, vu que c'est la Caisse de dépôt? Là, on ne le sait
pas au juste, là, mais il devrait y en avoir, là, qui vienne de là, là.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Granby.
• (15 h 50) •
M.
Bonnardel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Côté,
M. Chagnon, M. Provost. Juste pour répondre à votre question, là, dans le dernier budget fédéral, là,
le milliard et le 750 millions subséquent qui ont été annoncés, c'est pour
des PPP. Le projet qu'on va avoir avec la
caisse et le gouvernement, c'est un projet public-public; logiquement, le
gouvernement fédéral ne devrait pas
donner. Moi, M. Sabia nous a dit : On va tout faire pour être capable
d'aller chercher de l'argent, mais le
fédéral a bien dit dans les ententes PPP, ce qui n'est pas le cas. Mais, bon,
ce n'est pas ça, ma question, c'était juste pour votre propre gouverne,
là.
Écoutez, peut-être une ou deux questions avant que mon
collègue vous en pose aussi, là. Vous dites à la page 16 de votre mémoire, dans les conclusions, là... vous
parlez de potentiel de rendement commercial qui serve les intérêts de ses déposants. On est tous conscients, quand on va
à l'article 11, là, du projet de
loi, que la caisse dit aussi, et je
le lis, là : «Un tel projet,
qu'examine la caisse en toute indépendance conformément à sa loi constitutive,
doit offrir un potentiel de rendement
commercial pour ses déposants eu égard aux risques appréhendés.» On est bien au
fait que le taux de rendement que la
caisse va souhaiter obtenir, hein, pour être capable de protéger les acquis des
répondants... On sait que, pour assurer la pérennité des régimes, il faut minimalement que la caisse fasse du
7 % par année, minimalement, puis on sait que, dans le dossier des infrastructures,
quand on regarde les indices des quatre dernières années, c'est près de
15 %.
Alors, vous, là,
quand vous dites, là, qu'on souhaite que la caisse s'engage dans des projets
qui vont offrir un potentiel de rendement
commercial, vous souhaiteriez avoir un pourcentage... Parce que, veux veux pas,
M. Sabia n'a jamais voulu nous le dire, puis on comprend bien qu'il
ne nous le dira pas tout de suite. Mais vous, là, vous dites : O.K.,
on veut que ce soit bon pour nous, puis on
veut protéger nos acquis, puis on veut revoir le capital... la capitalisation
de notre régime remonter au-dessus de 100 %. Alors, pour vous, ce
serait quoi, le chiffre idéal?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Je n'ose pas dire de chiffre parce que je ne suis
pas assez... je ne suis pas économiste, mais tout ce que je sais, par contre, c'est qu'il devrait y avoir un
pourcentage assez élevé pour ne pas être pénalisés. On est pénalisés à l'heure actuelle parce qu'il n'y a
pas assez de... bien, pas assez de rendement. La crise économique de 2008, elle nous est rentrée dedans. Et, avant 2008, notre régime, au niveau
des participants, était à 120 %. Là, il est à 98,4 %, depuis le 31 décembre 2014, mais là ça nous
fait le trou encore de 1982 à 1999, où c'est zéro augmentation. Ça, les gens
nous en parlent encore, là, d'indexation, de
protection du pouvoir d'achat. Et, avec ce qu'on parle actuellement, ce qui a
été déposé le 15 décembre par
M. Coiteux, quand il parle de la conditionnalité de l'indexation à partir
de l'évaluation au 31 décembre
2016 puis que, là, ça va chercher des gens que ça fait 15, 20 ans qu'ils
sont à la retraite, pensez que, pour nous autres, là, ça prend un
pourcentage pour garantir qu'on ne sera pas appauvris davantage.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Dernière question, M. Côté. Deuxième point,
vous dites : «...l'article 11 du projet de loi n° 38
soit également modifié afin que l'expert
mandaté pour l'évaluation des projets d'infrastructure soit choisi uniquement
par la caisse.» On sait que les ententes vont être qualifiées par l'Autorité
des marchés financiers, qui devrait avoir un vérificateur
qui va vérifier l'intégrité du processus d'appel d'offres, et dans le même
paragraphe du projet de loi on dit : «L'évaluation de ce potentiel et la comparaison avec les pratiques du
marché pour des situations similaires devront être validées par un expert indépendant choisi par les
parties à partir d'une liste préalablement dressée.» Donc, pour vous, vous
ne souhaitez pas ça, vous dites : Non, non, non, il faudrait que ce soit
juste la caisse. Pourquoi?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Pourquoi? Parce que le gouvernement, il
dit : Je ne peux pas le faire, je n'ai pas d'argent. Il dit à la caisse : Pouvez-vous le faire? La
caisse, elle, elle dit : Bien, moi, je vais le faire si c'est rentable
économiquement. Mais nous autres, on
veut éviter la pression que le gouvernement fait sur la caisse, de dire :
Bien là, même, tu sais, ça peut baisser
ton rendement un peu, mais tu pourrais... tu sais, là, c'est dans cet esprit-là
qu'on le dit, nous autres là, là, parce qu'il peut... bien, je ne veux pas prêter de mauvaises intentions, mais,
l'homme étant l'homme... on sait que dans le passé il y a eu des choses, il peut y en avoir dans
l'avenir, puis éviter qu'il y ait trop de pression puis à un moment donné on y
va avec une certaine rentabilité, mais pas la rentabilité que la caisse
aurait voulu avoir.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Bonnardel :
Mon collègue de Beauce-Nord va...
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Beauce-Nord, la parole est à vous.
M.
Spénard : Oui, merci, M. le Président. Alors, MM. Côté,
Gagnon et Provost, j'ai lu attentivement votre mémoire, et c'est la
première fois que nous avons réellement le côté humain de cet article de loi,
dans le sens que ce sont les bénéficiaires des rendements
de la Caisse de dépôt, ce sont les retraités qui tirent leur argent des
rendements de la Caisse de dépôt. Et je
pense que ça, on l'oublie souvent. On parle tout le temps, là, avec les
dirigeants, la Caisse de dépôt et
tout, mais, à un moment donné, il y a un côté humain là-dedans, puis ce sont
eux qui sont directement visés par ça. Je pense que ça, M. le ministre,
on l'oublie.
L'autre
chose que j'ai bien aimée, dans votre communiqué vous parlez de... vous avez un
engagement citoyen dans le sens de
dire : Oui, on est pour le développement des infrastructures à Montréal,
sauf que vous revenez à 2004, la Loi
sur la Caisse de dépôt en 2004 où c'est le rendement qui prime. Et ça, je
pense que mon collègue vous l'a
demandé. Vous ne pouvez pas fixer de pourcentage, mais vous demeurez encore avec la conviction que le rendement doit
primer avant l'implication citoyenne de la caisse. Est-ce que je me
trompe?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Bien, ce serait facile de dire... puis c'est
facile, j'en vois d'autres qui parlent ailleurs que c'est facile de dire que c'est surtout la situation
économique... pas la... en tout cas, le développement économique, mais c'est
facile à dire quand on fait ça avec l'argent des autres. Là, là, ce n'est pas l'argent
de tout le monde, ce n'est pas l'argent du gouvernement, là, c'est l'argent que les épargnants
retraités et que les salariés, à
l'heure actuelle, déposent à la Caisse de dépôt et de placement, alors,
quand on dépose là, on veut s'assurer que ce n'est pas pour s'appauvrir pour
l'avenir.
Puis,
en parlant d'association, on ne sera pas tout seuls. Je sais qu'on a une
association amie qui vient la semaine prochaine, de retraités, qui va
aussi parler pour les retraités, l'AQRP entre autres.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Spénard : Êtes-vous au courant... Je ne sais pas, peut-être
que... ce sera peut-être une réponse que le ministre nous donnera un peu plus tard. On parle
beaucoup... Mme la députée de Bourassa-Sauvé a parlé... ça fait deux fois
qu'elle en parle, puis ça me reste
dans l'idée, 8,75 $, le transport de l'aéroport de Vancouver,
comparativement à 10 $ pour... de l'aéroport
à Vancouver, par rapport à 10 $ du centre-ville de Montréal aller à
Dorval, à Pierre-Elliott-Trudeau. Maintenant, moi, j'aimerais savoir : Êtes-vous au courant du pourcentage de
subvention directe par rapport au coût total de l'infrastructure du
Canada Line?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté
(Pierre-Paul) : Là, vous me demandez...
M.
Spénard :
Peut-être que M. le ministre pourrait nous...
M. Côté (Pierre-Paul) : Vous me demandez des questions si j'étais à temps
plein là-dedans, mais moi, je suis un président bénévole d'une
association de retraités.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, on aura peut-être l'occasion, M.
le député de Beauce-Nord, de vous répondre tout à l'heure.
M.
Spénard : C'est parce que, là, c'était dans le cadre des
Olympiques. Il y a sûrement eu, écoute, de l'argent du gouvernement là-dedans, dans le cadre des
Olympiques. Moi, j'aimerais savoir : Si ce tronçon-là est rentable, est-ce
qu'il est comparable à qu'est-ce que la
caisse veut faire? Moi, j'aimerais comparer des pommes avec des pommes et non
pas des pommes avec des oranges. Si la
caisse prend 100 % du mandat, comme M. le ministre a semblé nous le dire
hier, qu'ils peuvent investir
100 % du capital-actions dans ce mandat-là, par rapport au Canada Line,
moi, j'aimerais savoir, parce que,
s'il y en a un qui est rentable, c'est peut-être à cause des subventions, du
pourcentage de subvention qu'il a reçu sur la totalité du rapport.
O.K.,
l'autre affaire, vous, vos retraites sont garanties par le gouvernement,
j'imagine. Est-ce que je me trompe?
Le Président (M.
Bernier) : M. Côté.
M. Côté (Pierre-Paul) : Ça dépend. Moi, je suis un vieux, là, moi, je ne
suis pas dans le RREGOP. C'est un ancien régime, le RRE, Régime de retraite des enseignants. Oui, lui est
garanti, mais tout l'argent que moi, j'ai mis à chaque paie, puis en
dernier, quand j'ai pris ma retraite, c'était 8,5 % de mon salaire, ça, ça
a été mis dans le fonds consolidé de la province,
ils ont construit des écoles, des routes, des palais de justice, puis
mettez-en. Mais aujourd'hui, quand je vais à la présentation du budget, quand je regarde l'affaire des retraités, le
RREGOP, je suis rendu... pas le RREGOP, le RRE, je suis rendu une dette
pour le gouvernement, mais, s'il avait mis l'argent, au moins, que nous autres,
on a déposé... C'est un régime à
impartition, puis il a dit : On met ça dans le fonds consolidé puis on
vous garantit qu'on va vous payer. Ça,
c'est le RRE. Le RREGOP, là, ce n'est pas garanti au total. Ça fait longtemps,
eux autres, là, que, le RREGOP, les gens,
ils paient... 50 % de leurs primes s'en va à la Caisse de dépôt. L'autre
50 %, c'est la partie de l'employeur, puis là il a créé, depuis 1993, le fonds d'amortissement, le
FARR, pour essayer d'avoir un montant, mais ce n'est pas vrai qu'on est
à la charge du gouvernement au total.
Le Président (M. Bernier) : ...30 secondes.
M.
Spénard : O.K. Donc, je ne me trompe pas en disant que
l'argent de vos fonds de retraite est rendu en majeure partie à la Caisse de dépôt, c'est le gouvernement
qui garantit les fonds de pension de ses employés. Et là on parle de la cote chez Moody's parce que ce projet-là est hors
bilan, donc ça ne touchera pas la cote de crédit du gouvernement, mais
ça peut toucher la cote de crédit de la Caisse de dépôt.
Alors, moi,
je vois ça comme un vase communiquant, je ne sais pas si j'ai raison, mais, si
c'est le gouvernement que la cote de
crédit est deux crans de moins que la Caisse de dépôt, si c'est le gouvernement
qui garantit vos fonds de pension,
mais l'argent est à la Caisse de dépôt, puis la Caisse de dépôt subit une
décote... Elle ne subira pas une décote à cause de ça, là, mais mettons
qu'elle subit une décote parce qu'il arrive un autre 2008. C'est quoi qui se
passe, là?
Le
Président (M. Bernier) : M. le député, merci de votre
présentation, mais malheureusement c'est maintenant terminé.
M.
Spénard : Ah! je
n'ai même pas de réponse? Peut-être que M. le ministre...
Le
Président (M. Bernier) : M. Côté, M. Provost,
M. Gagnon, merci de votre participation à la Commission des
finances publiques.
Je vais lever la séance quelques instants pour
permettre à Me Richard Laflamme de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 heures)
(Reprise à 16 h 4)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous
allons donc reprendre nos travaux. Alors, je vais souhaiter la bienvenue à Me Richard Laflamme. Merci de
participer à la Commission des finances publiques, ça nous fait plaisir de vous recevoir cet après-midi. Vous avez une
période de 10 minutes de présentation, par la suite vont suivre les
échanges avec les parlementaires. La parole est à vous,
Me Laflamme.
M. Richard Laflamme
M.
Laflamme (Richard) : Merci,
M. le Président. Alors, Mmes, MM. les membres de la commission, évidemment,
il y a 15 jours ou trois semaines, j'ai
reçu un avis de convocation, sans explication additionnelle, de la part du
secrétaire des commissions. J'ai
assumé, en prenant connaissance du projet de loi, que vous ne vouliez pas
m'entendre parler de l'opportunité ou non pour le gouvernement de donner
les pouvoirs que vous entendez donner à la Caisse de dépôt et placement du Québec mais bien plutôt,
probablement, pour les deux éléments à l'intérieur desquels j'ai toujours
oeuvré dans ma carrière, soit en
matière immobilière, et plus spécifiquement en matière de valeur d'immeuble.
Alors, vous avez quatre articles, là,
dans le projet de loi, qui traitent... deux de fiscalité municipale, deux
d'expropriation, alors j'ai assumé
par anticipation que c'est là-dessus
que mon humble apport pouvait porter, et, dans cette mesure, j'ai fait parvenir
un petit texte relativement à l'analyse que l'on pouvait faire sur le plan professionnel
de ces quatre articles. Allons-y dans le même ordre, si vous le voulez bien. Et ce sera redondant par
rapport au texte que vous avez déjà.
Vous avez, dans un premier temps, une modification à la Loi sur la fiscalité municipale
qui fera en sorte que les immobilisations anticipées par la Caisse de dépôt en matière d'infrastructures de transport urbain ne seront pas portées au rôle d'évaluation, donc ne contribueront pas à l'assiette fiscale
des municipalités locales sur le territoire desquelles elles vont être installées, et ce, sauf, évidemment,
l'article le prévoit, des bâtiments qui seraient destinés
spécifiquement à abriter des personnes, des animaux ou des choses. Et,
bon, effectivement, ce n'est pas nouveau, la Loi sur la fiscalité municipale
emporte deux régimes de traitements fiscaux distincts pour des éléments que
l'on ne veut pas voir affectés à la totalité de l'effort fiscal municipal.
Il s'agit soit de la méthode de ne pas porter au rôle certains actifs, les
éléments les plus connus sont en matière d'infrastructure routière, entre autres, ou en matière d'équipements qui servent à des
fins de production industrielle. En parallèle avec ça, il y a également, à l'intérieur
de la Loi sur la fiscalité municipale, des dispositions qui permettent
d'exempter de taxe certains immeubles qui sont listés spécifiquement, là, à
l'article 204 de la Loi sur la fiscalité municipale.
Cependant, à partir du moment où certains de ces
immeubles sont exempts, le gouvernement peut, soit par règlement ou par les dispositions qu'on retrouve à l'article 255 de
la loi, donner aux municipalités certaines compensations, dépendamment
des immeubles, là, qui sont visés. En parallèle avec ça, pour certains de ces
immeubles également qui sont visés par 204,
les municipalités peuvent adopter un règlement spécifique par lequel elles vont
aller imposer uniquement pour le
quota de services, et ce, jusqu'à concurrence d'une fraction de leur taux de
taxation, là, qui ne peut pas déborder 1 $
du 100 $ d'évaluation. Alors donc, le choix ou l'opportunité ici, en
l'occurrence, le gouvernement a prévu que les immeubles ne seraient pas
portés au rôle, ce qui, potentiellement parlant, n'amènera jamais la deuxième
question, à savoir : Est-ce que,
techniquement parlant, ce seraient des immeubles qui auraient pu faire l'objet
de compensation par le ministère des
Affaires municipales? Soit dit en passant, l'autre impact de nature fiscale,
c'est lorsque ces immeubles-là seront
transigés. Comme ils n'apparaissent pas au rôle, évidemment, il y aura une
propension à éviter les droits de mutation immobilière, là, qui sont
versés aux municipalités au moment des transactions.
Au-delà de
ça, le deuxième article visé, en matière de fiscalité municipale, en est un
d'établissement d'un règlement, là,
qui vise uniquement à venir identifier sur le plan légal les immeubles qui
techniquement parlant ne seront pas portés au rôle. Le gouvernement a déjà cette
disposition-là en regard des quais, n'a jamais adopté de règlement, puisqu'il
se sert de l'identification de la réglementation fédérale, mais le
gouvernement s'est donné l'opportunité de pouvoir établir par règlement la nomenclature des immobilisations qui
seraient visées, ce qui est tout à fait conforme avec ce qu'on retrouve
dans le marché aujourd'hui.
Ce qui
m'amène, et ce qui est peut-être plus criant... Ce qui m'amène aux deux
dispositions qui visent, cette fois-ci, l'expropriation.
Alors, dans
un premier temps, le projet de loi va faire en sorte que le ministre des
Transports du Québec, au profit de la
Caisse de dépôt, pourra procéder à des procédures d'expropriation lorsque les
immeubles seront des immeubles qui seront
visés par ce que le projet de loi engendre. Encore une fois, ce pouvoir
d'expropriation est très bien libellé, il est conforme avec la doctrine
et la façon de faire en semblable matière. Il faut savoir que, depuis
l'abolition de l'ancien ministère des
Travaux publics, c'est le ministre des Transports du Québec qui, au profit tant
du gouvernement, ses ministères et
organismes, procède aux acquisitions par expropriation, et ce, à la grandeur du
territoire du Québec. Alors donc, dans ces
circonstances, il n'y a absolument rien à redire, c'est conforme avec la façon
avec laquelle les choses se déroulent, là, depuis le milieu des
années 80.
• (16 h 10) •
Là où notre analyse s'est peut-être
faite un peu plus... de façon criarde, c'est lorsque l'on a pris connaissance des dispositions par lesquelles, à l'article 10 ou 11, si je
ne m'abuse, on est venu déterminer le fait que, les immeubles qui seront
sujets à expropriation, l'indemnité qui en découlera sera tributaire de la
valeur réelle de l'immeuble. À prime abord,
ça peut paraître très magnanime et tout à fait correct. Maintenant, il faut
savoir ceci : la Loi sur l'expropriation utilise exactement, dans son article 58, les mêmes
termes. Alors, l'article 58 de la Loi sur l'expropriation nous dit que
«l'indemnité est fixée d'après la
valeur du bien exproprié». Aller jusque-là, il n'y a pas de problème, c'est mot
à mot. Cependant, l'article continue :
«...et du préjudice directement causé par l'expropriation.» Et c'est la
juxtaposition de ces deux membres qui font
en sorte qu'en matière d'expropriation, ce que l'on recherche, ce n'est non pas
une valeur mais une indemnité, et ce que
l'on recherche, ce n'est pas ni une valeur marchande ni une valeur vénale mais
ce qu'on appelle communément, dans notre jargon, une valeur au
propriétaire. Et cette notion de valeur au propriétaire, elle est enchâssée de
par le fait de l'application des
dispositions de l'article 952 de notre Code civil, 952 qui va venir nous
enseigner que «le propriétaire ne
peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est par voie d'expropriation
faite suivant la loi pour une cause d'utilité publique et moyennant une
juste et préalable indemnité».
Alors,
lorsqu'on oeuvre en matière d'expropriation, on doit comprendre que, le citoyen
dont l'immeuble est visé par le
processus, c'est un processus qui est totalement exorbitant du droit commun, il
n'a jamais l'opportunité de dire non. Alors,
dans le contexte d'une transaction normale, quelle que soit l'importance, la
grosseur de l'intervenant, que ce soit la plus grande compagnie immobilière du Québec ou peu importe, lorsqu'elle
cogne à la porte d'un simple citoyen prétextant qu'elle aurait besoin de son immeuble pour réaliser un projet, le
citoyen a toujours l'opportunité de dire non. En matière d'expropriation, il ne peut pas dire non. Dans la
mesure où l'expropriation est entamée pour une fin d'utilité publique, l'État a le droit, pour les fins de réalisation de
ses projets, de procéder par expropriation; ne lui reste maintenant qu'à
discuter d'indemnité.
Et c'est dans
cette mesure que, dans la perspective où le projet de loi serait adopté tel
quel, les tribunaux ne pourront faire
autrement que de réagir, et ce, de la façon suivante. Il y a un principe qui
dit que le législateur, lorsque vous légiférez, hein, vous êtes connaissants non seulement de l'ensemble du corpus
législatif qui est le vôtre, mais également de toutes les tendances
jurisprudentielles qui en découlent, vous êtes réputés connaissants de tous les
éléments, alors les juges qui seront appelés
à décider ne pourront faire autrement que de dire : Comme le législateur
ne parle pas pour rien dire, comme il
prenait le mot-à-mot de l'article 58 de la loi, comme dans le cadre d'une loi
spéciale il est venu éliminer la notion de dommage direct, donc, partant, les indemnités que l'on a à fixer ne
peuvent, ne peuvent être fixées sur la même base que celles qui prévalent en matière d'expropriation courante, et il y a
fort à parier, à ce moment-là, que les conséquences, là, seront des plus dramatiques pour les
propriétaires dont les immeubles pourraient être visés par une semblable
procédure.
Il en va de
même du dernier membre de phrase. Encore une fois, le corpus jurisprudentiel,
que l'on remonte aussi loin que l'on
puisse le faire, fait qu'en matière d'expropriation l'exproprié a droit à la
valeur au propriétaire, il n'a pas droit à la valeur à l'expropriant. Le
meilleur exemple, que l'on trouve souvent, souvent le ministre des Transports
va exproprier pour une route en plein milieu
d'un champ. Sous ce champ-là gît le plus beau gisement de gravier que l'on
ne peut espérer. Il est tellement beau, ce
gisement de gravier là, que le ministère des Transports, au moment où il va réaliser
sa route, il va concasser le gravier et il va s'en servir pour faire la
totalité de l'infrastructure de la route.
Le Président (M. Bernier) :
Je vous invite à conclure, Me Laflamme.
M.
Laflamme (Richard) :
L'exproprié n'aurait pas droit à ce bénéfice-là parce que, potentiellement
parlant, il n'a pas la capacité de l'opérer. Je ne comprends pas
pourquoi on est venu jouer dans ce principe parce qu'en légiférant le décideur va se demander, va chercher un sens
différent à ce que la jurisprudence a toujours reconnu. Alors, c'était le
message...
Le
Président (M. Bernier) : ...que vous vouliez soulever. Merci,
Me Laflamme. Nous allons donc passer aux échanges avec la partie
ministérielle. M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien, M. le Président. Merci, Me Laflamme. Et je prends bien note de votre présentation
et de vos commentaires au sujet de la notion de préjudice, je prends bien note de ça. Si j'ai bien compris, l'autre partie, là, la partie
A, donc, quand vous parlez de fiscalité municipale, de votre avis, les
dispositions dans le projet
de loi sont conformes?
M.
Laflamme (Richard) :
Courantes à ce que l'on retrouve dans le marché. Il y a des immeubles qui sont
non portés au rôle, il y a
d'autres immeubles qui jouissent d'exemptions, là, compte tenu des caractéristiques, et, bon, c'est un choix, de les placer
dans une case ou dans une autre.
M.
Leitão : Très bien.
Une autre question que j'ai, avant de passer la parole à des collègues
qui connaissent les lois beaucoup mieux que moi, mais une question
qui est déjà revenue ici plusieurs fois et, je trouve,
une question importante, et j'aimerais entendre votre opinion là-dessus, c'est que le projet de loi est relativement mince, O.K., à peine 12 articles, et donc plusieurs considérations,
comme par exemple l'établissement de tarifs, etc., bon, il n'y a pas de mention
directe dans le projet de loi. De
votre avis, étant donné votre grande expérience, est-ce que de telles
dispositions, extrêmement précises et
complexes en termes, donc, de tarifs opérationnels... Est-ce que ça a sa place
dans un projet de loi ou est-ce que c'est plutôt dans une entente faite
à côté, entre deux parties, que ça devrait se situer?
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
M. Laflamme (Richard) : On a
toujours, dans notre pratique... Et je vise particulièrement le domaine que je connais, mais il y a une espèce de règle
générale : plus la législation sera pointue, moins elle va donner de
latitude. Et, lorsqu'on aura à
l'interpréter, plus souvent qu'autrement le cas qui nous sera soumis ne sera
pas sur le clou de ce qui a été rédigé d'une façon très précise.
Normalement,
la loi est générale, de compréhension simple, elle donne ses grands objectifs.
Et, lorsque, normalement, le
Parlement décide ou le gouvernement décide de préciser, c'est par le biais de
règlements qu'il adopte, qui va venir dans la foulée de l'esprit de la loi, qui va venir compléter par des mesures
qui peuvent, celles-ci, être modifiées selon les aléas de l'économie, du
commerce ou des besoins.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão : Merci beaucoup. Si vous...
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée de Bourassa-Sauvé, des questions?
Mme de Santis :
Oui.
Le Président (M. Bernier) :
Allez-y.
Mme de Santis :
Merci, M. le Président. Bienvenue, Me Laflamme. Peut-être on peut prendre
l'occasion que vous présentiez les deux personnes qui vous accompagnent.
M.
Laflamme (Richard) : Alors,
mon associée Karine Dionne, du bureau Stein Monast, et ma jeune associée
Camille Roy, également du bureau de Stein
Monast. Ce sont mes collègues de travail, là, qui composent une partie de
l'équipe de droit immobilier chez Stein
Monast et avec lesquelles j'ai l'occasion de travailler sur une base régulière.
Elles m'ont aidé à faire les recherches et à colliger, là, les petits
documents que l'on vous a apportés.
Le Président (M. Bernier) : ...à
la Commission des finances publiques.
Une voix : Merci.
Mme de Santis :
Merci beaucoup. Vous êtes un expert en expropriation, en... pas en
expropriation mais dans le droit d'expropriation, vous avez attaché une
liste de jugements auxquels on pourrait référer pour avoir une meilleure compréhension de ce que vous avez dans votre
mémoire. J'aimerais que vous preniez quelques instants maintenant pour nous expliquer c'est quoi, comment est interprété
le préjudice directement causé par l'expropriation, pour qu'on comprenne,
que monsieur et madame qui nous écoutent comprennent qu'est-ce que c'est, à
quoi on fait référence.
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
• (16 h 20) •
M.
Laflamme (Richard) : La
notion de préjudice directement causé par l'expropriation va faire en sorte de
faire ressortir ce qu'on appelle la
valeur spéciale à l'exproprié. Alors, elle peut se retrouver à l'intérieur même
de la fixation de l'immeuble, d'une
façon intrinsèque, ou encore elle va se retrouver dans des indemnités
accessoires qui vont venir compléter cette valeur-là dans le but de
pallier à ce préjudice.
L'exemple que l'on donne aux gens sur une base
régulière est le suivant. Vous avez deux bungalows qui sont côte à côte. L'un a été aménagé par son
propriétaire, il y a cinq chambres, il y a cinq chambres parce qu'il y a quatre
enfants qui sont à l'université. Le
bungalow est à proximité des cégeps, des universités. Le propriétaire a eu la
chance d'acheter cet immeuble-là, il
est venu y loger sa famille, et le
but de l'exercice, pour lui, ce n'est pas tellement la détention de cette
résidence-là, mais c'est de mettre un toit
au-dessus de la tête des gens de sa famille mais de leur permettre d'avoir une
proximité avec les milieux scolaires pour
qu'ils puissent y arriver du mieux qu'ils peuvent. À côté, nous avons un
bungalow de semblables dimensions avec le tout-venant, deux chambres à
coucher, on en passe.
Les deux sont expropriés. Parce que
les buts et visées, ce que représente cet immeuble-là pour son propriétaire — de
là la notion de la valeur au propriétaire — et,
compte tenu de l'usage qu'il en fait puis de la dédicace à
laquelle il l'a mis, là il va être
placé, celui-ci, dans une position où probablement il va pouvoir dire : Écoutez,
moi, c'est important pour les membres
de ma famille d'être à proximité, sauver du temps. Je ne veux plus partir de
mon petit quartier de Sainte-Foy. Même
si ma résidence n'était pas aussi coquette puis aussi grosse que celles des
autres, j'avais réussi à trouver ça. Je ne veux pas m'en aller à
Duberger, je ne veux pas partir du centre-ville de Montréal pour me retrouver à
ville Laval, je voulais être à proximité.
Alors, dans ce cas-là, les tribunaux vont interpréter que, oui, il y aura matière, par exemple, à substituer sa propriété avec une qui est disponible
sur le marché, mais il y a fort à parier que sur le marché, à proximité...
D'abord, il n'est pas obligé de prendre plus
petit. Égal, il ne trouvera jamais. Alors, ce qu'on va trouver, on va trouver
une propriété de plus grande envergure que
la sienne, donc inexorablement d'une valeur plus élevée que la sienne, et on va
démontrer que c'était la seule disponible sur le marché, et règle générale le
tribunal va allouer à titre d'indemnité le coût d'achat de cette propriété-là qui sur une stricte base de valeur
marchande va avoir une valeur marchande beaucoup plus élevée que le bien
qu'il détenait. C'est un des exemples de cette notion de valeur au propriétaire
qui vient de la juxtaposition ou de la conjugaison de la juste valeur de
l'immeuble et du dommage direct qui est causé.
Et,
si vous faites... Ça a toujours été l'apanage, je pense, et la qualité de la
Loi de l'expropriation du Québec de laisser
le soin aux décideurs, cas par cas, d'évaluer la particularité du dossier qui
lui est présenté pour tenter de lui apporter la meilleure médecine. Il n'y a pas, comme on retrouve, par exemple,
dans la loi fédérale, puis c'est un peu... À l'instar de ce que M. Leitão me demandait tout à l'heure, dans
la loi fédérale vous avez toute une nomenclature de cas, d'événements, de circonstances, puis plus souvent qu'autrement,
lorsqu'on se retrouve à représenter un exproprié en vertu de la loi fédérale,
on n'est jamais sur le clou, on est toujours
à cheval entre les deux puis à se chicaner à savoir lequel des deux membres
de l'article s'applique parce qu'on a voulu
trop tout prévoir. La qualité de notre Loi sur l'expropriation, qui est
reconnue, je regarde, le
Pr Todd, de l'Université de la Colombie-Britannique, là, qui est la
sommité maintenant au Canada en matière d'expropriation, le reconnaît, la qualité de la loi québécoise, c'est
d'avoir laissé, à partir des principes qui sont généralement reconnus, la potentialité au décideur de pouvoir
rétablir cette valeur au propriétaire, qui se conjugue évidemment d'une valeur de base ajoutée de tous les dommages qui
peuvent en découler et qui peut donner lieu à des situations de la nature
de celle que je viens de vous indiquer.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la députée.
Mme de Santis :
Merci, M. le Président. Est-ce qu'il y a, au Canada ou aux États-Unis, une loi
qui touche l'expropriation où la seule
valeur qui est payée au propriétaire est ce que vous appelez la valeur vénale
de la propriété?
Le Président (M.
Bernier) : Me Laflamme.
M. Laflamme (Richard) : À ma connaissance, en vigueur au Canada au moment
où on se parle, non. Il y en a déjà eu.
Alors, on sait que, le Parlement étant souverain, le Parlement pourrait aller
jusqu'à déterminer qu'il pourrait y avoir expropriation sans indemnité, tous les auteurs sont clairs là-dessus. Il
suffit que l'article de loi qui le détermine soit clair; probablement,
dans les attendus de la loi, qu'on explique pourquoi. Et les cas que l'on a en
tête sont des cas qui sont survenus
particulièrement dans des conditions de mesures de guerre, où, là, le
gouvernement, l'État demandait un effort suprême à l'ensemble de ses citoyens, y incluant ceux qui devaient être
dépossédés de leur propriété dans le but de participer à l'effort de guerre, et ce, sans compensation. Il
y a déjà eu des cas de lois spécifiques, entre autres, de mémoire, une loi
spéciale qui avait été adoptée au moment des
Jeux olympiques de 1976 et qui visait Les Terrasses Zarolega, où on est venu circonscrire la nature de l'indemnité qui
devait être donnée au propriétaire de Terrasses Zarolega, compte tenu des
circonstances, là, qu'on n'est pas obligés de remémorer ici.
Le Président (M.
Bernier) : Merci.
M. Laflamme
(Richard) : Il n'y a pas de loi, cependant, standard où on voit une
telle disposition.
Le Président (M.
Bernier) : Mme la députée.
Mme
de Santis : J'aimerais regarder l'article 4 du
projet de loi et j'aimerais comprendre. D'après vous, quand on parle de l'assiette d'une infrastructure, de
quoi on parle? Parce que, dans le premier alinéa de l'article 68.0.1 qui
est proposé à la Loi sur la fiscalité, on parle de l'assiette des
infrastructures. C'est quoi, ça?
Le Président (M.
Bernier) : Me Laflamme.
M. Laflamme (Richard) : L'assiette va... Normalement, c'est l'emprise de
terrain, hein, qui sera nécessaire pour ériger une infrastructure. Alors, normalement, lorsqu'on parle de
l'assiette d'une servitude — c'est là où on va retrouver le plus souvent l'utilisation de ce terme — alors l'assiette d'une servitude de passage,
c'est l'endroit où s'exerce réellement la
servitude. Alors, vous pouvez avoir une servitude de passage, dans un acte, qui
a 15 mètres de large et à l'intérieur de laquelle le droit de passage pourra s'exercer sur une assiette de
10 mètres, laissant les cinq mètres à parts égales de chaque côté
pour des fins, par exemple, de fossé ou autres.
Alors donc,
ce qu'il faut comprendre, c'est que normalement, dans notre jargon, l'assiette,
c'est l'emprise de terrain qui est nécessaire à supporter
l'infrastructure, qui peut déborder le cadre du domaine bâti, parce qu'il faut
penser aux infrastructures, on peut avoir des
infrastructures qui vont être beaucoup plus larges pour pouvoir venir supporter
une structure qui, elle, hors sol, aurait un
gabarit qui est plus petit. Alors, l'assiette va emporter la totalité du
terrain qui est affecté à la construction.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la députée.
Mme
de Santis : Si on regarde le deuxième alinéa, on
dit que... parce que dans le premier on dit qu'est-ce qui n'est pas porté sur le rôle, O.K. : «N'est
pas visée [...] une construction — une construction — qui est destinée à loger ou à abriter
des personnes, des animaux ou des choses ainsi que l'assiette d'une telle
construction.» D'après vous... Comment vous interprétez ce paragraphe?
Le Président (M.
Bernier) : Me Laflamme.
M. Laflamme (Richard) : Il faut que je vous dise dans un premier temps
que ces termes-là, là, c'est les termes que l'on retrouve à plusieurs autres reprises dans la Loi sur la
fiscalité municipale, particulièrement aux articles qui visent les
immeubles qui ne sont pas portés au rôle en matière d'énergie et de transport
hydroélectrique. Alors donc, les bâtiments
qui sont destinés à loger ou à abriter des personnes, des animaux ou des
choses, alors un garage, une maison, un
entrepôt, et son infrastructure, parce qu'il va... dépendamment du type de
construction... Des fois, ce que l'oeil ne voit pas hors sol, c'est que, pour faire maintenir cette structure-là en
place, j'ai eu besoin d'excaver beaucoup plus large, d'avoir des
fondations qui débordent le gabarit du bâtiment lui-même, alors donc...
Mme de Santis :
...ça inclut des centres d'achats? Est-ce que ça inclut des immeubles à
bureaux?
M. Laflamme (Richard) : De la façon dont le texte est écrit, un centre
commercial ne serait pas exempt, parce que
c'est clair que c'est un bâtiment qui est destiné à abriter des personnes et
des choses pour des fins commerciales. Mais, si vous pensez à une section d'une station de métro souterraine où j'ai une
portion hors sol, alors, qui me permet... j'ai un atrium quelconque qui
me permet d'accéder à des escaliers roulants, qui, eux autres, vont me mener
éventuellement jusqu'au quai où je vais
aller prendre le métro, cette construction-là est spécifique et, normalement,
jouirait de l'exemption, avec, évidemment, toute l'infrastructure qui
est la sienne.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis :
Et il reste combien de temps?
Le Président (M.
Bernier) : Il vous reste environ sept minutes.
Des voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y, M. le député de Pontiac.
• (16 h 30) •
M. Fortin
(Pontiac) : Oui, j'ai peut-être une seule question. Et vous allez
comprendre, maître, que, quand le ministre
fait référence à ses collègues qui connaissent bien plus la loi que lui, il ne
fait pas référence à moi, vous allez comprendre
ça à l'écoute de ma question. Mais je veux revenir sur le point de
l'expropriation de ma collègue de Bourassa-Sauvé,
parce que vous dites essentiellement, si je comprends bien, que le projet de
loi enlève une partie de la compensation,
là, qui est allouée à la personne qui est expropriée. La collègue de Bourassa-Sauvé vous a amené
dans une direction pour dire que, O.K.,
dans les autres juridictions c'est un peu similaire, il y a toujours
ces deux facettes-là de la compensation. Ça peut s'élever jusqu'à combien,
cette deuxième partie-là, habituellement? Est-ce qu'on parle d'une fraction ou
est-ce que ça varie vraiment de cas en cas?
M. Laflamme
(Richard) : ...de cas en cas. Et, dans certains cas, ça peut même
représenter le principal.
M. Fortin
(Pontiac) : Ah oui?
M. Laflamme (Richard) : Oui. Et la raison pour laquelle ça représente le
principal, c'est que, dans certains cas, on peut, par juste la façon avec laquelle on va manipuler, pas de
façon... de mauvaise foi, mais dont on va se servir de la procédure
d'expropriation... on peut cannibaliser un immeuble dans le temps de le dire.
Un
des dossiers sur lesquels on peut se fixer pour voir à quel point cette notion
de dommage direct a pu entraîner des
conséquences qui sont tout autres, il a existé un dossier ici, à Québec,
sur Pierre-Bertrand, où un exproprié qui était un marchand de matériaux de construction a vu arriver un avis
d'expropriation pour une petite bande de terrain, marginale, une servitude de construction qui allait jusqu'à
la semelle de sa construction et une servitude de non-accès. À prime abord,
bon, rien pour écrire chez nous, mais tout
ça a été fait dans le but de pouvoir construire un viaduc permettant à la voie
de chemin de fer de rester au niveau puis de
prendre la voie de roulement puis de l'abaisser pour la faire passer sous la
voie de chemin de fer. Je vous élimine les détails.
Il y a
un processus dans la Loi sur l'expropriation qui permet de
s'adresser au tribunal et de demander, ça fait partie de l'édification
de la structure d'indemnité, mais... qui tient toujours compte de la façon avec
laquelle on va venir compenser
le dommage direct. C'est clair que ce commerçant-là, dont la clientèle venait
acheter de petits effets, le compte moyen
était de l'ordre de 14 $ à 15 $ par client, mais qui était quand même prospère, là on faisait
en sorte que plus personne n'avait
accès à son terrain, il fallait aller passer par l'arrière pour avoir accès à
son terrain. Qui plus est, il perdait sa visibilité. D'une expropriation où l'offre d'indemnité de
départ, indistinctement de savoir si elle était bonne ou pas, était de
2 000 $, ça a fait un
dossier de 3 millions quelques cent mille parce que le tribunal a ordonné
l'expropriation totale de l'immeuble, ce qui a permis au commerçant
d'aller se réinstaller 200 mètres plus loin, au même niveau où il était
antérieurement, replacer l'exproprié dans la
position qui était la sienne avant expropriation, 952, de lui permettre... s'il
est tenu de céder sa propriété, de lui permettre d'obtenir une indemnité
juste et préalable, de là toute la structure.
Et toute la structure de notre droit, autant
enchâssé par le Code civil, notre jurisprudence que la Loi sur l'expropriation,
répond à ce principe-là. On a, à mon humble
avis, un des beaux champs d'exercice, où l'État, évidemment, n'a pas le choix,
hein, a ses obligations, alors des fois est
obligé d'imposer son choix, de venir dire à quelqu'un : Tu dois céder ta
propriété, mais au moins, au moins la
personne à qui on demande cet effort-là a l'opportunité d'avoir la compensation
à laquelle elle a droit.
En enlevant
le segment dans l'article, inexorablement on va plaider qu'il n'a juste droit
qu'à la valeur marchande de sa propriété. Ça ne peut pas faire
autrement.
Le Président (M. Bernier) :
O.K., merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Oui. Une autre question que je me pose, et je fais appel à
votre grande expérience dans le domaine... Évidemment, on considère ici, donc, une expropriation pour pouvoir
mettre une infrastructure de transport en commun, donc c'est relativement limité. Et je comprends
bien le point que vous avez fait sur le préjudice, valeur au propriétaire,
c'est clair.
Maintenant,
comment est-ce qu'on règle la question potentielle — ou est-ce qu'on peut la régler? — entre, donc, ce processus d'expropriation et la valeur des propriétés qui sont
au-delà de l'emprise qui va être expropriée et qui vont éventuellement aussi augmenter de valeur parce
qu'inévitablement il y aura un nouveau développement qui va se faire?
Est-ce que c'est quelque chose que le législateur peut prendre en considération
ou... Si oui, comment?
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
M.
Laflamme (Richard) : Je présume que vous faites référence à une
déclaration de votre collègue le ministre
des Transports qui a dit que peut-être on pourrait venir surtaxer l'accroissement de
valeur généré par... Je vous dis tout de suite de faire attention, des fois l'impact sur certains types de
propriété d'être à proximité d'une voie de communication de qualité,
surtout si on parle de trains ou de moyens de locomotion rapides qui vont
oeuvrer à l'intérieur d'un corridor où il va y avoir des non-accès de chaque côté, etc., des fois, ça peut
avoir l'effet inverse. Alors, dépendamment du type de propriété, vous
pouvez avoir des dévaluations fort importantes.
Mais il
pourrait survenir, parce qu'une
station de métro, par exemple, vient s'ouvrir face à un commerce, que, techniquement parlant, on donne un apport
d'achalandage additionnel à ce commerce-là faisant en sorte que ça va devenir
plus lucratif tant pour le détenteur de
l'immeuble que pour les opérants. Et, à mon humble avis, comme nos rôles sont
triennaux, l'évaluateur municipal va se
faire fort, trois ans plus tard, de venir sanctionner cette valeur-là et de
venir faire refléter dans son rôle d'évaluation
l'augmentation de valeur qui en découle, de sorte que la municipalité locale,
sur le plan de son assiette fiscale, va être gagnante.
Si vous me demandez maintenant : Est-ce que
le gouvernement, lui, ou la Caisse de dépôt qui aurait fait ces investissements-là... est-ce qu'elle peut se
l'approprier?, je ne connais pas de mécanisme existant qui permette à
quelqu'un... C'est ce que vous me
demandez, dans le fond. C'est la même chose que si demain matin moi, je suis
propriétaire d'une station d'essence
et que, sur le terrain voisin, on vient construire un édifice puis on m'amène
3 000 clients qui sont des travailleurs
qui vont travailler dans cet édifice-là, qui vont venir augmenter mon
achalandage. Merci beaucoup au propriétaire d'à côté qui est venu construire cet immeuble-là, mais, que voulez-vous,
ça fait partie des règles du marché, là. Et, comme je vous dis, des fois c'est l'inverse, parce que,
si je suis propriétaire d'une belle résidence puis qu'à côté c'était zoné pour
des fins de construction administrative,
puis que je me retrouve, ma belle résidence, à côté d'un immeuble de
15 étages, je ne suis pas sûr que ma résidence a pris de la valeur.
Alors, ça joue des deux côtés.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Bonjour. Merci d'être là, merci pour vos réponses. J'ai quelques questions. Je
ne suis pas non plus avocat, je vais
me servir un peu du gros bon sens. Je voulais être certain de bien comprendre
le sens du... Je suis à la dernière page,
en fait la dernière page avant les annexes, là, de votre document. Vous avez un
paragraphe qui commence par les mots : «Les
risques sont grands, encore une fois, que les expropriés se voient dépouillés
d'attribut et d'aménité que leurs propriétés pouvaient revêtir pour eux,
et ce, sous prétexte qu'ils n'auraient pas le droit à la valeur découlant de la
localisation de leur propriété», bon, ce
paragraphe-là. Est-ce que... Juste avant ça, évidemment, donc, ce n'est pas
souhaitable que des gens soient dépouillés
d'une façon ou d'une autre, là, de leurs biens. Est-ce que je dois comprendre
qu'étant donné ce risque ça pourrait
être contesté? Est-ce que vous êtes en train de nous dire que
l'article 10, tel que formulé présentement, pourrait faire l'objet de recours et que ça pourrait être battu? Alors,
bref, je veux simplement... Vous êtes en train de nous dire... Dans le
fond, on fait quelque chose qui est immoral et puis qui ne devrait pas être
fait?
• (16 h 40) •
M.
Laflamme (Richard) : Je
pense que votre article, les deux... l'article 10, tel qu'il est libellé,
se situe à l'intérieur des pouvoirs
du Parlement. Je dois vous dire que le droit de propriété n'est pas protégé par
les chartes. La charte canadienne, niet,
le mot «propriété» ne fait même pas partie du texte de loi. La charte
québécoise, on dit que, oui, j'ai droit à la libre jouissance de la propriété mais sujet aux lois
applicables. Alors, si la loi vient restreindre de la même façon, par exemple,
que la loi vient dire qu'en matière
municipale une municipalité peut zoner ma propriété de telle, telle façon,
venir dire que seulement qu'une
fraction de celle-ci va être constructible, venir dire que tels ou tels usages
sont proscrits, alors ce sont tous
des éléments qui font en sorte de venir, si vous voulez, miner le sacro-saint
droit à la jouissance pleine et entière de la propriété. Alors, c'est, oui, jouissance pleine et entière mais à
l'intérieur du corpus de droit qui y est dévolu. Alors, à mon humble avis, le texte de loi, tel qu'il est
là, s'il était adopté, je ne vois pas comment on pourrait valablement le
contester.
Ce que je vous dis en parallèle, c'est qu'il y a
une évidence que le sens, l'esprit du texte de loi va, a, à l'encontre de l'article 952 du Code civil qui nous régit tous et que, b, il est diamétralement,
mais alors là diamétralement différent de l'article qui est dans la Loi
sur l'expropriation et qui encadre le barème de fixation des indemnités, et ce,
à telle enseigne que quelqu'un
qui sera appelé sur le plan juridique à prendre une décision face à cet article
ne pourra pas faire autrement que de dire : Vous n'avez pas droit à
des dommages.
Alors, pourquoi une expropriation, dans ce
contexte-là, un exproprié n'aurait pas droit à des dommages? Qu'est-ce qui ferait en sorte que, sur le plan
social, on mettrait de côté tous nos beaux principes et toute notre façon de
faire pour que, dans le cadre d'un projet de
loi spécifique de cette nature-là, on vienne dire à quelqu'un : Non, on va
te payer la valeur marchande de ta propriété, sans plus? Pourquoi?
Le Président (M. Bernier) :
Merci, maître. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
C'est une excellente question, oui, c'est une excellente question. Mais ce que
vous nous dites, donc, c'est que ce
qui était inacceptable socialement avec le projet de loi serait rendu
acceptable, et que ça vous questionne, et que ça doit tous nous
questionner. C'est ce que vous dites.
M.
Laflamme (Richard) : Ce
serait légal. Est-ce que ce serait pour autant acceptable? Moi, je vous le dis,
en vertu des principes qui sont les
miens, pour avoir défendu et des expropriants et des expropriés, je suis tenant
du fait que les gens à qui l'État
demande de faire le sacrifice de leur propriété ont droit à une indemnisation,
et je ne dis pas une valeur, je ne dis pas un prix, mais bien une
indemnité telle que le Code civil le prévoit.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Marceau : Parfait, excellent. D'après vous, existe-t-il une
rédaction de l'article qui permettrait de compenser de la même
façon qu'on le fait présentement?
M.
Laflamme (Richard) : À mon avis,
l'article n'a pas sa raison d'être, vous êtes capables
d'arriver... Dans la mesure où
vous êtes d'accord à l'effet que les gens ont droit à une indemnité
pleine et entière, le premier article qui donne le pouvoir d'expropriation puis qui dit que l'expropriation... vous n'avez même pas
besoin de le dire, la Loi sur l'expropriation, à son premier article, dit que les expropriations, au Québec,
sont gouvernées en fonction de la Loi sur l'expropriation. On laisse
aller les choses de la même façon que toutes les expropriations se font au Québec
actuellement.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau : Parfait. Et donc disons que quelqu'un
a un terrain à Brossard, qu'il avait anticipé... parce que, bon, les
gens ne sont pas fous non plus, hein, il y a des gens qui sont capables de
réfléchir puis de voir un peu dans quelle direction
se fait le développement, puis qu'il a anticipé, là, une personne
intelligente a anticipé que, bien, il est probable que dans quelques années le terrain que j'ai acquis soit un
terrain de grande valeur parce qu'on
pourrait développer des infrastructures
de transport, il pourrait y avoir du développement commercial ou du
développement résidentiel, donc une personne
qui a anticipé ça, qu'est-ce qui arriverait, là, si donc la Caisse de dépôt
décide, là, qu'elle veut... Dans le contexte de la loi actuelle, là, oublions l'article 10, donc dans le
contexte de la loi actuelle, qu'est-ce qui arriverait si la Caisse de dépôt décidait, donc, de bâtir une infrastructure,
une gare avec un centre commercial au-dessus? De quelle manière on la
compenserait précisément, si cette personne-là avait anticipé qu'il y aurait du
développement?
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme, oui.
M. Laflamme (Richard) : Écoutez, il
peut survenir deux choses.
Dans un
premier temps, je serais fort étonné que la Caisse de dépôt va se lancer, tant
et si bien qu'elle aurait ces pouvoirs-là,
demain matin à corps perdu, là, dans toutes sortes de projets. Dans mon esprit
à moi, il faut savoir comment se
gouvernent ces projets-là. Règle générale, ces projets-là sont travaillés de
longue main, il y a deux, trois ou quatre tracés qui sont évalués, il y a une foule d'autres choses également qui sont
évaluées, et on arrive à un point où on dit : On y va. Et à ce
point-là où on dit : On y va, règle générale, il y a eu peu... peu a transpiré
sur l'évolution de ce projet-là.
La même Loi sur l'expropriation prévoit que
celui qui est autorisé à exproprier peut demander... — parce
qu'évidemment toujours l'autorisation doit
être obtenue de la part de l'Exécutif du gouvernement du Québec — alors donc celui qui est autorisé à exproprier peut s'adresser à l'Exécutif du
gouvernement du Québec et, dans un premier temps, demander qu'on lui permette d'imposer des avis de
réserve. Alors, j'anticipe que la caisse en est rendue maintenant... elle a deux
choix entre les mains, et là, maintenant, ça va devenir public, parce que
j'anticipe que, compte tenu de la grosseur du projet, il faut que le projet passe au Bureau des audiences
publiques, mais elle a deux tracés et elle sait que, sur le plan névralgique, là, il y a quatre terrains qui
potentiellement parlant sont visés, prend des avis de réserve sur les terrains,
de sorte qu'il n'y aura absolument rien qui va pouvoir en découler. Et ça fait
partie de notre corpus actuel. Ces avis de réserve là, qui sont bons pour deux ans, peuvent être
renouvelés pour deux autres années. Jamais je ne croirai qu'à l'intérieur d'une période de quatre ans, rendu à ce stade-là du projet, on
n'est pas capable de se gérer.
Et la journée
où elle décidera d'exproprier l'un ou l'autre des choix qu'elle aura réservés, évidemment, le terrain aura sa valeur intrinsèque à la date à laquelle
l'avis d'expropriation sera émis, mais le détenteur du terrain ne pourra pas
dire : Écoutez, ça fait trois ans qu'on
annonce au Bureau des audiences publiques qu'il va y avoir une gare sur mon
terrain, de sorte que c'était le terrain choisi, donc j'ai droit à une
plus-value parce que... Non, parce que ça, c'est la valeur à l'expropriant, et cette valeur-là n'est jamais
reconnue à l'exproprié. C'est ça, la nomenclature de toutes les causes que je
vous ai énoncées. Dans chacune de ces causes-là, on répète toujours la même
chose, et ce, depuis plus de 100 ans.
Alors, le
bien de l'État et le bien collectif sont préservés contre celui qui aurait voulu
d'une façon, entre guillemets, de
manoeuvre tenter de tirer un bénéfice éhonté de... Puis, en parallèle avec ça,
toutes choses étant légales, lui, il serait indemnisé sur la base de la valeur de ce que le bien pouvait représenter
pour lui. Alors, s'il n'avait pas d'autre projet que d'accueillir la gare, il va avoir une valeur en
vrac qui va correspondre grosso modo à ce qu'il pouvait faire avec, la gare
pas prise en compte.
Et ça, c'est l'état de notre droit actuel. Ces
mécanismes-là sont là, sont utilisés fréquemment.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Donc, ce que je comprends, c'est que ce qu'on peut appeler la plus-value, qui
découle de la mise en place de
l'infrastructure, déjà la caisse peut la saisir, peut se l'approprier sans
qu'on change quoi que ce soit. C'est ce que je comprends de ce que vous
dites.
M.
Laflamme (Richard) : En
fait, tant et si bien qu'il y aurait un phénomène de rareté qui aurait engendré
une augmentation de la valeur, dû à l'annonce par la caisse du fait
qu'elle veut implanter... je dis une station pour dire quelque chose, sur telle encoignure de rue, cet élément-là ne sera
jamais pris en considération pour des fins de fixation d'indemnité.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M. Marceau :
Je vais vous amener sur... Puis parfait, c'est très bien, c'est très clair. Une
autre question. Dans l'article 9, puis, pour moi, ce n'était pas
parfaitement clair, on nous dit que... je le lis avec vous, si vous voulez bien,
là : «Il peut aussi, avec
l'autorisation du gouvernement et aux conditions que celui-ci détermine dans
chaque cas, acquérir de gré à gré ou
par expropriation pour le compte de la Caisse de dépôt et placement[...], tout
bien requis — là, j'ai
passé un petit bout, là — pour la réalisation d'un projet
d'infrastructure du transport collectif visé par une entente conclue...»
Je veux juste... D'après vous, quand on
dit «tout bien requis pour la réalisation d'un projet d'infrastructure»,
ça désigne quoi précisément? Moi, ma
compréhension, puis peut-être que je me trompe, c'est que ça peut désigner,
évidemment, l'emprise qui est requise
pour l'infrastructure, ça peut désigner l'espace pour la gare, mais ça peut
même aussi désigner des espaces
adjacents à l'emprise, puisque peut-être ils seront requis pour que le projet
soit financièrement viable. Est-ce que mon interprétation est correcte
ou...
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
M.
Laflamme (Richard) : Si le
bien est requis en fonction de l'exploitation de l'équipement, oui, mais pas
pour le rendre viable. Autrement parlant, sous prétexte qu'on installe un métro
ou une bouche de métro à un endroit donné, on ne pourrait pas
dire : Bien, «by the way», là, on va monter un édifice par-dessus, là. Ça,
ça ne fonctionnera pas.
Mais par
contre, normalement, lorsqu'on parle de voie de communication, il y a toutes
sortes d'accès, de servitudes, que ce
soit pour des fins de drainage, d'entretien, de sécurité. Il y a des lieux où
on doit avoir des points de ravitaillement, où on doit avoir des espaces nécessaires pour entreposer des équipements
ou des accessoires qui sont inhérents à l'opération, qui font partie de
ce qu'on appelle normalement des biens requis.
Mais, en
vertu de la notion de bien requis, la Caisse de dépôt ne pourrait pas venir
dire : Écoutez, je vais exproprier également les cinq autres terrains plus loin parce que, comme il y aura
une station de métro là, moi, je vais faire un centre commercial à côté. Là, ça, ça ne fonctionne pas
parce que ce n'est pas dans les buts et visées de la loi. Vous ne donnez
pas un pouvoir d'expropriation pour
permettre à la caisse d'augmenter son portefeuille immobilier et commercial,
vous lui donnez un pouvoir d'expropriation pour lui permettre de faire
des infrastructures en matière de transport en commun.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
• (16 h 50) •
M. Marceau :
O.K. Bien, c'est important,
là, parce que c'est clair que la plus-value foncière, la
captation de la plus-value foncière,
c'est une source de financement, là, pour les projets que la caisse prévoit
mettre en oeuvre. Et, dans le
contexte québécois, à ce
stade-ci, on ne sait pas très bien
à quel point ça va être payant puis à
quel point il va falloir aller loin dans cette
direction-là. On nous a dit que, dans certains projets en Asie, c'est allé
jusqu'à 20 %, 30 % du financement du projet qui se faisait par
captation de la plus-value foncière. Ici, je ne sais pas quelle ampleur ça
aura.
Mais ce que
je comprends, là, c'est que, si... Donc, je vais vous le faire redire d'une
autre manière, là. Si la caisse disait,
après examen d'un projet, là : M. le gouvernement, moi, ça me prend deux
terrains de football, de grands terrains, là, un peu plus loin pour que je mette des centres commerciaux puis que je
fasse un peu d'argent, ce qui me permettrait de financer mon projet...
Vous me dites : Ils ne sont pas capables, en vertu de l'article 9, de
faire ça.
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
M.
Laflamme (Richard) : Non,
ils ne seront pas capables parce que, même s'ils tentaient de le faire, ça ne
fait pas partie des éléments ou des accessoires qui sont inhérents à
l'infrastructure elle-même. Je comprends que c'est quelque chose qui serait
inhérent à son financement, mais ce n'est pas ça que la loi dit.
M. Marceau : ...ça prendrait
un autre article ou... quelque part ailleurs, là, qui...
M. Laflamme (Richard) : Ça prendrait
un autre article.
M. Marceau : O.K., parfait.
Ça, c'est très clair. Excellent. Merci pour ça.
Dernier point
peut-être. Je ne sais pas si vous connaissez les lois qui sont en vigueur aux
États-Unis ou ailleurs sur l'expropriation dans les contextes de
captation de la plus-value foncière...
M.
Laflamme (Richard) : Comme
je vous ai dit tout à l'heure, je ne connais pas de législation canadienne, ça
n'a jamais été porté à ma connaissance, puis
pas plus du côté américain. Ce que j'ai cru comprendre de l'assertion, c'est
que, par le biais de la fiscalité
municipale, on voulait s'assurer que, si on donnait une plus-value à un secteur
donné... qu'on s'assure que l'État en
aurait une compensation, et, comme je le disais tout à l'heure, la logique des
choses, de la façon dont notre structure
est faite actuellement, c'est que cette plus-value-là, elle va se transposer
dans une augmentation de l'assiette fiscale de la municipalité sur le
territoire duquel les installations vont être faites.
M. Marceau : Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. Me Laflamme, mesdames, bienvenue.
Première question, Me Laflamme :
Avez-vous travaillé pour les expropriés de la rue May et Rushbrooke, à Verdun,
qui viennent d'être expropriés au nom de Sa Majesté la reine?
M. Laflamme (Richard) : Non.
M.
Bonnardel :
Non, O.K. Je veux comprendre donc quelque chose à l'article 10. L'article
se lit comme suit, là : «11.1.1.
Malgré toute disposition inconciliable d'une loi, l'indemnité d'expropriation
d'un bien visé à l'un des articles 11 et 11.1 est fixée d'après la valeur du bien à la date de
l'expropriation, mais sans tenir compte de la plus-value attribuable à l'annonce publique...» Je ne sais pas si vous avez
lu les articles concernant ceux qui viennent d'être expropriés à Verdun, là.
On dit que les prix obtenus représentent des
écarts variant de 10 % à plus de 60 % par rapport à l'évaluation
municipale. À titre de dédommagement,
les ex-propriétaires ont aussi eu droit à des indemnités allant de
109 000 $ à 230 000 $. Je veux que vous reveniez un petit peu sur peut-être les explications du
début, à savoir, là, ce que je crois comprendre, c'est que dans
l'article on dit : On va payer seulement la valeur du bien, pas question
de tenir compte de la plus-value attribuable. En quoi...
M. Laflamme (Richard) : Mais ce
n'est pas la même chose.
M.
Bonnardel :
Oui, mais c'est ça, expliquez-moi un petit peu. Puis en quoi ces gens à Verdun
ont pu obtenir, donc, des écarts entre 10 % et 60 % de
l'évaluation municipale et un dédommagement additionnel?
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
M.
Laflamme (Richard) : Oui.
L'évaluation foncière, dans un premier temps, c'est une évaluation de masse qui
est standardisée. Alors, non seulement on procède par unités de voisinage, mais
on procède avec des grandes moyennes, de
sorte que la valeur au rôle que vous avez, puis si vous avez eu l'occasion de
vendre votre propriété, jamais dans 100 ans, je pense, qu'il y a un Québécois, surtout dans les
bonnes années, qui va vendre sa propriété à la valeur qui est inscrite au rôle.
Il y a deux
raisons à ça. D'abord, plus souvent qu'autrement on est trois, quatre ans en
retard, parce qu'il faut savoir que
la valeur qui est sanctionnée sur un rôle d'évaluation, elle est évaluée ou
elle est analysée un an et demi avant le dépôt du rôle la première année, alors, comme on a un rôle de trois ans, des
fois je suis quatre ans et demi en arrière, et de un. Et de deux, c'est une valeur moyenne, c'est un
photo-finish d'un ensemble de prix d'échange qui se sont déroulés sur un
territoire donné.
En matière d'expropriation, ce que je recherche,
c'est une indemnité. Alors, l'indemnité, non seulement, comme je vous l'ai expliqué tout à l'heure, je ne me contenterai même pas de la vraie valeur marchande, qui
souvent est plus élevée que la valeur
au rôle, mais je vais tenter d'obtenir... Et l'exproprié souvent a droit à un
montant de loin supérieur pour rétablir
la position qui était la sienne. C'est ça qui est le principe. La notion de
valeur au propriétaire veut que je donne suffisamment de sous à cet
exproprié-là pour lui permettre de se réinstaller dans la position qui était la
sienne. Alors, je vais payer les
rideaux, les tentures, je vais payer les frais de déménagement; si c'était un
commerce, je vais payer des pertes de commerce, le changement de ses
adresses, les ci et les ça, de sorte que tout ça constitue l'indemnité.
Si vous me
prenez le résultat de ça puis vous venez me le comparer avec la valeur au rôle,
qui des fois est trois ans, puis
quatre ans postérieure à... on ne parle plus de la même chose. C'est pour ça
qu'il n'y a aucune commune mesure entre les valeurs au rôle, des valeurs pour fins de taxation municipale,
puis une indemnité d'expropriation, aucune commune mesure. Ça ne compare
pas.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Bonnardel : Est-ce qu'on peut considérer que ce qui a été
appliqué, donc, au nom de Sa Majesté aux citoyens, à ceux qui étaient
expropriés, c'est ce qui risque d'arriver aussi pour les futurs expropriés?
M. Laflamme (Richard) : Si l'article
est enlevé, oui.
M.
Bonnardel : Donc,
ce que vous dites aussi, c'est que l'article qui est là présentement, là...
M. Laflamme (Richard) : ...ne le
permettrait pas, ce que vous avez sous les yeux.
M.
Bonnardel : Voilà, voilà, voilà. Donc, ça devient caduc un
peu aussi. Vous, vous dites : «...il n'est donc pas souhaitable
d'inclure le texte de l'article 10 au projet de loi.»
M.
Laflamme (Richard) : Oui,
mais, au moment où je dis cette phrase-là, je fais référence à ce que l'article
semble vouloir éviter, c'est-à-dire, que quelqu'un, dans un contexte d'expropriation, bénéficie d'une valeur
de son immeuble qui proviendrait
exclusivement du fait que deux ans au préalable la caisse a annoncé qu'elle
était pour aller s'installer là, ce sur quoi je dis : Il n'y a pas
de danger de ça, la jurisprudence est claire à l'effet qu'on n'a pas droit à
cette valeur-là.
M.
Bonnardel : Ça veut-u dire que, si on laisse l'article qui
est là, le futur exproprié serait lésé comparativement à ceux qui ont
été dédommagés à Verdun, là, dans les derniers jours, là, dans les dernières
semaines, là?
M.
Laflamme (Richard) : Serait
lésé par rapport aux critères de droit que l'on connaît actuellement puis qui sont chapeautés par
les articles 952 du Code civil et 58 de la Loi sur l'expropriation,
comprenons-nous bien, lésé dans le sens qu'actuellement l'état du droit est à l'effet de payer des indemnités
sur la base, probablement, de ce que les gens de Verdun ont reçu. Et je le redis
encore : Lorsque l'État demande à un citoyen de souffrir le fait de ne pas
pouvoir dire non à l'appropriation de sa
propriété, au moins indemnisons-le, collectivement parlant, c'est parce qu'on a besoin de son bien. C'est
pour ça que c'est écrit comme ça.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
M.
Bonnardel : Ce
n'est pas banal, là, c'est des millions, c'est des millions de
dollars en jeu, là.
M.
Laflamme (Richard) : Non, ce
n'est pas banal. À mon humble avis... Écoutez, ça fait partie du processus.
Qu'est-ce qui ferait en sorte que, parce que
c'est la Caisse de dépôt, on ne respecterait pas les critères qui sont les
nôtres dans toutes les autres
matières? Que ce soit le ministre des Transports qui exproprie, que ce soit la
municipalité, que ce soit la commission
scolaire, quelque corps expropriant que ce soit, eux sont tenus de verser une
indemnité sur la base de la valeur au
propriétaire et des dommages directs qui en découlent. Pourquoi dans ce cas-là
on demanderait à ces citoyens-là qui seraient visés par le processus de
se contenter uniquement d'une valeur marchande?
M.
Bonnardel : J'ai
très bien compris.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, oui, c'est une bonne présentation.
M.
Bonnardel : Mon
collègue a une question avant de...
M.
Spénard : Oui.
Alors, c'est parce que...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. le député de Beauce-Nord.
• (17 heures) •
M.
Spénard :
Merci, M. le Président. M. Laflamme, merci. Merci beaucoup d'être venu
nous présenter ça.
C'est
parce que, j'ai envie de lancer... C'est parce qu'on est en train de donner les
derniers coups de pelle, mais il ne
faudrait pas que le gouvernement du Parti libéral en place passe pour faire un
autre Mirabel et ses expropriations avec le SLR du Train de l'Ouest.
Moi, c'est ça que je veux dire au ministre.
Par contre,
on a parlé de la plus-value foncière, mais, moi, il faut bien se dire qu'il n'y
a pas des arrêts à tous les 200 pieds,
là, sur un SLR, là, puis il n'y aura pas des... puis ça reste un train. Alors,
moi, je ne le sais pas, mais m'acheter... avoir une résidence sur le bord d'une ligne de chemin de fer où est-ce
que l'arrêt est à peu près à un kilomètre d'où que je reste, je vais
vous dire, moi, pour moi, ce n'est pas une plus-value, c'est une moins-value.
Alors, ça
peut-u jouer dans les deux sens, ça? Est-ce que ça peut... C'est parce
qu'il y a des terrains qui vont avoir une
moins-value nécessairement, parce qu'à côté d'un train, là, c'est qui qui va
aller se construire? O.K., à côté d'un arrêt de train, mais l'arrêt de train, là, quand même, a quand même ses
limites, là. Il y en a, un large espace, là, quand on sort de Champlain puis qu'on s'en va dans l'ouest, là,
vous le voyez, la largeur des trains qu'il y a là, là. Je vais vous dire une
affaire, là, que je n'irais rester à côté de
ça, moi là, là. Je ne sais pas, on parle de la plus-value foncière, mais, comme
vous disiez tantôt, il y a le bruit aussi. Alors, y a-tu des
moins-values foncières?
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme.
M. Laflamme (Richard) : Oui, évidemment.
M.
Spénard : Oui?
M. Laflamme (Richard) : Oui.
M.
Spénard : Puis ça...
M.
Laflamme (Richard) : Ça,
bon, on avait... À venir jusqu'à date, ce type de moins-value-là, on les
retrouvait en matière de transport terrestre, routes, autoroutes et
autres. Et, au moment où on se parle, à moins de voir sa propriété expropriée en partie et d'être capable, donc, de
venir demander comme dommage direct la dépréciation du résidu, parce qu'évidemment placé dans une
condition physique différente de ce qui prévalait antérieurement, les autres
qui sont à proximité mais qui ne sont pas touchés, malheureusement, il n'y a
pas...
M.
Spénard : À part
une demande de dévaluation à la municipalité, là...
M. Laflamme (Richard) : Il n'y a pas
de compensation, il n'y a pas...
M.
Spénard : ...il n'y
a pas de compensation possible de la part de...
M. Laflamme
(Richard) : Ça prend un
dommage qui serait particulier à quelqu'un pour pouvoir aller chercher une demande de compensation. Évidemment, si la
propriété souffre d'une dévaluation sur le plan marchand, c'est clair
que le rôle foncier, lui, va le refléter.
M.
Spénard : O.K.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Une cinquantaine de secondes.
M.
Spénard : C'est
beau.
Le Président (M. Bernier) :
C'est beau?
M.
Spénard : Oui.
Le Président (M. Bernier) :
Me Laflamme, merci de votre participation, merci de vos précisions.
M. Laflamme (Richard) : Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Je vais suspendre quelques instants afin de permettre à Héritage Montréal
de prendre place. Je suspends.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
(Reprise à 17 h 7)
Le
Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous avons le
plaisir de recevoir Héritage Montréal. Alors, M. Dinu Bumbaru,
directeur des politiques, bienvenue, ça fait grand plaisir de vous recevoir à la Commission des finances publiques. Sans plus tarder, vous avez 10 minutes pour
votre présentation, M. Bumbaru.
Héritage Montréal
M. Bumbaru (Dinu) : Merci. Merci, M. le Président. Membres de la commission, M. le ministre, c'est un grand privilège
pour nous de recevoir une convocation de la Commission des finances. Depuis 40 ans que nous existons cette
année, on est venus à quelques reprises à
l'Assemblée nationale, à la demande des commissions, pour traiter de culture,
pour traiter de démocratie locale et pour
traiter, bien entendu, de patrimoine, un sujet qui, il me semble, nous
rapproche, puisqu'il est de l'intérêt
des finances comme de l'identité, du territoire de s'intéresser non seulement à
la conservation, mais à l'enrichissement d'un patrimoine que nous jugeons
d'intérêt public. Alors, Héritage Montréal est bien heureux d'être ici.
Présenter
rapidement l'organisation. On est une organisation indépendante. On a été
fondés pour promouvoir et encourager
la protection du patrimoine historique, architectural, naturel et culturel des
communautés de la province de Québec,
on tient à le dire. On n'est pas, comme on dit dans notre jargon, Montréalais
des 872, même pas des 514, on est des communautés
du Québec, et on est très heureux de pouvoir collaborer, dans ce contexte,
autant avec les propriétaires, les citoyens et leurs associations
qu'avec les organismes municipaux et gouvernementaux.
Notre
présentation ici a été développée à partir de discussions au sein de notre
conseil d'administration et de notre comité Patrimoine et aménagement,
donc des comités de bénévoles, et une chose très importante dont on souhaite
informer la commission, c'est qu'Héritage Montréal, dans le cadre de ses
multiples partenariats, a un partenariat avec Ivanhoé
Cambridge, qui est, comme vous le savez, une filiale de la Caisse de dépôt et
de placement du Québec. C'est un
partenariat pour sensibiliser les décideurs et les citoyens à la qualité de
l'aménagement, notamment en contexte de centre-ville, il y a des programmes publics qui seront déployés dans le
cadre de ça. Alors, on souhaiterait que ce soit bien noté pour que les
choses soient bien transparentes.
• (17 h 10) •
Dans
le cadre de nos activités, on a développé des principes qui nous aident à
encourager et à commenter autant des
projets de loi que des projets immobiliers, et ces principes sont au nombre de
cinq : pertinence et recevabilité, prise en compte du patrimoine et de l'urbanité, qualité, exemplarité des
processus et des démarches, l'innovation est une valeur pour nous, et également la valeur de legs. Donc, c'est une durabilité qui ne repose pas
uniquement sur des composantes comme
des toits verts, des supports à vélo et puis des toilettes qui sont alimentées
à l'eau de pluie recueillie précieusement, mais une notion du plus 25,
et c'est là qu'on trouve un intérêt à discuter avec les gens qui s'intéressent
aux finances publiques, puisque leur échelle
est une échelle de temps qui est celle de l'histoire à venir et non seulement du moment présent.
En termes
d'innovation, nous avons apprécié les réflexions qui se sont manifestées à
travers ce projet de loi, c'est-à-dire la recherche d'outils nouveaux pour financer des
réponses à des besoins réels dans la société. On note... Au niveau des notes explicatives, qu'on prend un peu comme
étant l'esprit de loi — on
s'excuse d'être un petit peu XVIIIe siècle
comme ça, mais c'est le siècle de la fondation de l'Assemblée nationale et de la démocratie ici — cette
notion d'intérêt public nous apparaît
importante, et on souhaiterait, par exemple, que, dans ses travaux, la commission
considère l'inclusion nominale de qualité
d'aménagement parmi les dimensions de cet intérêt public. Bien sûr,
il y a devant nous une recherche de
solutions au financement, mais on doit être capable, à travers ça, pas juste de
fournir des états financiers corrects et des revenus aux investisseurs,
qui sont nous autres puisque la caisse fait partie à sa façon des institutions patrimoniales du Québec, mais on devrait également
être capable de construire du patrimoine, donc des choses qui dans 25 ans, lorsqu'elles seront remises à
la prochaine génération, seront chargées de sens et auront su créer de la
fierté aussi.
On
a trop souvent tendance à voir dans les infrastructures de transport notamment
mais les infrastructures en général des objets utilitaires qui n'ont pas cette capacité de porter la fierté.
Or, on voit à travers le monde... Pensons à l'Écosse, M. le Président, qui a convenu avec le Royaume-Uni d'un projet commun; malgré les
délibérations très puissantes autour du
référendum récent, que le pont du Forth serait proposé, peu importe l'issue du
référendum, au patrimoine mondial. C'est
en train de se faire maintenant. C'est un projet d'infrastructure qui a su bâtir
de la fierté. Et notre prétention devant vous, c'est d'inclure cette... de sensibiliser aux notions de qualité et
en termes d'aménagement, et on est très heureux de pouvoir témoigner du fait que la caisse, par sa
filiale Ivanhoé notamment, a su manifester une capacité de livrer de ce
côté-là. Le Quartier international, à
Montréal, est agréable quand on s'y promène, mais il est
réputé à travers le monde pour la qualité
de son aménagement. Est-ce qu'on peut imaginer des résultats semblables du côté
des infrastructures de transport?
C'est
une chose qu'il nous semblerait important d'inscrire dans les objectifs
et les mécaniques de cette loi, surtout... d'autant plus que le Québec figure parmi... À notre connaissance, et on n'a
pas une connaissance parfaite, M. le
Président et membres de la commission, mais ce serait la seule
législature au monde qui a inclus la culture et la protection du patrimoine dans le modèle de développement durable, c'est quand
même quelque chose dont on peut
être fiers et qui est tellement novateur. Et on tire des leçons là-dessus. C'est tellement
novateur que même les gens de l'Environnement ou les gens de la Culture ne l'ont pas réalisé. C'est l'article 6k de
la Loi sur le développement durable, qui est l'équivalent ou qui a le potentiel d'être l'équivalent de ce qu'on
appelle aux États-Unis un «section 106», qui est un article d'une loi de
1966 qui oblige tous les budgets des agences
du gouvernement fédéral à faire preuve d'une certaine précaution et d'une
obligation d'évaluation d'impacts patrimoniaux sur les biens reconnus par
l'État. Vous imaginez le nombre de zéros qu'il y a
au budget américain. Ça veut dire que, plutôt que de créer un budget de subvention, ils ont un
devoir de responsabilité. Et peut-être que cette loi qui est devant vous et devant
l'ensemble de la population pourrait être une façon d'incarner l'esprit
de ce principe de la Loi sur le
développement durable pour qu'on soit en train non seulement d'être prudents
et précautionneux, mais également
volontaires pour enrichir ce patrimoine. Alors, c'est quelque... c'est un
élément qu'on souhaiterait apporter à votre attention.
On
souhaite également manifester une certaine interrogation devant la
notion de planification dans cet exercice. On comprend que la caisse serait... il est proposé que la caisse ait la
liberté de mouvement pour assurer une réalisation des projets, avec le talent qu'on peut lui
reconnaître, mais il nous semble que... Et les efforts du gouvernement ces temps-ci pour
rationaliser la gouvernance en transport public sur la région métropolitaine en
particulier nous éveillent à cette chose-là : Comment donner de la cohérence? Comment donner de
la simplicité? Et est-ce qu'on peut faire ça en ajoutant des joueurs qui
auront en plus une autorité de tarification particulière?
Alors, peut-être
que là-dedans il y aurait lieu, à notre avis, de renforcer la
place des instances planificatrices en relation
avec la mission qui serait confiée à la caisse, et aussi les instances locales,
puisque les municipalités sont souvent... surtout dans le cas de la région métropolitaine, là, je ne veux pas
prétendre que cette règle est... les lieux de concertation peuvent être autres dans d'autres régions, mais
certaines municipalités ont nécessairement un rôle important en termes de planification des réseaux, notamment
pour le transport public. Donc, on parle de qualité d'aménagement, on parle
d'exemplarité, mais on parle aussi d'un cadre général à l'intérieur duquel des
projets particuliers ne seraient pas nécessairement uniquement le fruit d'une
décision gouvernementale, mais le fruit d'une décision concertée avec le territoire
et les instances qui l'administrent.
C'est ce qui
a été fait, par exemple, pour l'adoption d'un plan métropolitain d'aménagement et de développement, et nous sommes heureux... Comme organisme, Héritage Montréal,
en 2010, il y a cinq ans, nous avons coorganisé une première agora citoyenne à l'échelle de la
métropole. Les gens ne se parlaient pas, tellement les frontières entre les régions administratives étaient puissantes, que le fleuve
était devenu un océan. Les gens pensaient quartier, ils pensaient arrondissement, mais ils ne pensaient pas région
métropolitaine. Or, plusieurs des enjeux, comme on le sait, notamment en transport, sont des enjeux qui ont une
certaine, je veux dire, distribution sur le territoire qui peut-être n'est pas
toujours limitée aux limites... aux frontières administratives.
Alors, on
souhaiterait, dans cet esprit aussi, suggérer que les processus consultatifs
soient présents à quelque part là-dedans.
Il ne faut pas qu'il y ait des consultations tout le temps, nous sommes bien
heureux... mais, M. le Président — et je
terminerais là-dessus — planification, est-ce que le ministre, le gouvernement pourrait
être responsabilisé de développer un
plan intégré de transport collectif pour la région métropolitaine, du moins? Il
y a déjà le PMAD qui offre une base à cet égard, ça pourrait proposer un alignement des planètes qu'il serait
assez raisonnable de demander et d'espérer. Et, par ailleurs, au niveau de la qualité, est-ce que la
réalisation des projets pourrait être accompagnée d'une instance permanente
consultative et compétente qui permette à la
caisse de réaliser des projets avec l'expertise de gens qui sont dans le
domaine, capables de nous fournir les conseils pour faire du patrimoine
à travers ça? Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. Bumbaru, merci beaucoup. M. le ministre, la parole est à vous.
• (17 h 20) •
M.
Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. M. Bumbaru,
merci d'être venu nous apporter un point de vue un peu différent de
celui que nous avons entendu jusqu'ici.
Avant de vous
poser des questions spécifiquement, je veux juste aborder deux sujets qui ont
été traités ici aujourd'hui, avant.
Le premier sujet, c'est que, les projets considérés par la Caisse de dépôt et
le gouvernement, ces projets-là doivent
être rentables ou ils ne seront pas. Donc, ce n'est pas une question que la
Caisse de dépôt va être forcée de se lancer dans quelque opération que ce soit qui ne serait pas une opération qui
serait viable commercialement. Ça, c'est la première chose.
La deuxième chose
que j'aimerais aussi mentionner ici, comme d'ailleurs notre collègue député de
Rousseau a bien capté dans sa
discussion avec l'interlocuteur précédent, c'est que l'expropriation qui sera
éventuellement faite se limite exclusivement
à l'emprise de cette infrastructure publique, il n'est pas question de faire un
nouveau Mirabel ou quoi que ce soit, là, on est loin, très loin de ces
choses-là. Bon, ça, c'étaient les deux mises au point que j'aimerais faire.
Maintenant,
avec vous, M. Bumbaru — merci de votre présence — comme j'ai dit tantôt, c'est un aspect un
peu différent. Comme vous le savez
très bien, un des projets qui est considéré, c'est le train vers l'aéroport,
donc vers l'ouest. Inévitablement, ce
lien ferroviaire qui va relier l'aéroport et l'ouest de la ville au
centre-ville doit passer par un territoire, une partie de la ville où justement l'aspect patrimonial est extrêmement
intéressant, toute la partie, disons, à l'ouest du centre-ville, avant d'arriver au territoire perdu des... où il y a toutes les gares de
train, les gares de triage, déjà, pas loin de l'aéroport, mais quand on
parle de Montréal-Ouest, NDG, etc.
Comment
est-ce que vous voyez donc l'aspect patrimonial si on commence à mettre des
gares de train dans cette partie très spécifique de Montréal? Comment
vous voyez l'intégration de ça?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
M. Bumbaru
(Dinu) : M. le Président. Merci de cette question, M. le
ministre. Je n'ai pas un crayon. Vous
savez, tout le monde ici a des talents
oratoires remarquables, que j'apprécie; moi, c'est plutôt avec le crayon que je
peux m'exprimer. Mais je vais essayer de faire mon possible.
Le corridor dont on parle, d'abord, il est important
d'imaginer que les infrastructures de transport ne sont pas ponctuelles, donc on ne crée pas des places
Saint-Pierre avec ça, on crée des chemins de Compostelle, hein? Donc, c'est
des images, ça veut dire que c'est du
linéaire sur lequel chacun des éléments doit être intéressant. Et trop souvent on a pensé beaucoup
les étagements avec une capacité portante, mais l'aménagement autour des
points, les noeuds de ces trucs, ce
n'est pas très heureux. Et même les pensées actuelles, vous savez, qui disent
de faire des TOD, on fait une gare qui est de qualité architecturale tolérable dans une mer de stationnements
incitatifs, qui rend l'endroit un peu infect. Et je m'excuse d'employer des termes forts comme ça dans cette
noble, auguste Assemblée, mais il faut dire qu'on n'a pas une sensibilité
au territoire.
On est tellement dans le Je me souviens, c'est ce qu'on
disait lors des Prix du Québec il y a quelques années ici
même, dans ce salon, le Je me souviens nous impressionne au point qu'on
oublie où est-ce que nous sommes, le où, la géographie.
Dans le corridor
qui est là, il existe des bâtiments importants. On peut penser, le long de l'autoroute, par exemple, les anciens ateliers qui ont construit les locomotives et le
matériel roulant du Canadien National, le Canadian Car and Foundry, qui est un immense bâtiment. Alors,
pourquoi ne pas déjà envisager la réaffectation de ce bâtiment dans
une opération où le transport, les liens ferroviaires soient aussi
jumelés à des opérations de requalification, pas juste de distribution du service, de mobilité? Dans ce sens-là,
les opérations de transport sont des opérations qui soutiennent la
revitalisation.
On a un grand
défi, à Montréal, de requalification des ensembles, notamment le
domaine institutionnel. On pense aux
hôpitaux qu'on vide sans trop avoir d'idée de qu'est-ce qu'on va faire avec,
c'est des centaines de millions d'actifs qui sont traités comme des actifs au livre au lieu d'être des actifs
géographiques et urbanistiques. Dans le cas du patrimoine industriel également, ce sont des grands
ensembles. Les corridors vers l'aéroport ont le potentiel, à cause de la
proximité avec l'ancien berceau de l'industrialisation du Canada, d'une
disponibilité de terrains. Il y a des efforts importants, le gouvernement du Québec a reconnu ça par le passé, de décontamination. Donc, on ne parle pas juste
de linéaire, là, on a une opération sur une bande de terrain importante. Est-ce
que tout ça peut être assumé par le projet de loi sur lequel vous travaillez? Peut-être que ça prend un plan
d'ensemble un petit peu plus large dans lequel ceci serait une composante de
nature plus catalytique, là, mais vous voyez.
Et, au niveau
architectural, bien, comment installer une gare en dessous de l'échangeur de
Saint-Pierre? Vous savez, les
architectes ont beaucoup de talent, mais, si le béton leur tombe sur la tête,
et les ingénieurs aussi, des fois peut-être qu'il faut qu'il y ait un peu d'ordre, qui est-ce qui va faire
l'aménagement, et peut-être que l'aménagement, ce n'est pas la décoration après le choix du projet, il y a
peut-être des choix qui doivent être faits. Même le gouvernement du Québec,
lors de la construction de l'autoroute
Ville-Marie, avait des équipes d'urbanistes qui ont aidé au moins à placer le
tablier à une hauteur qui permette
une entrée un petit peu plus intéressante vers le centre-ville. C'est modeste
comme geste, c'étaient les années 70. 40 ans après, on peut
faire beaucoup mieux.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien, merci.
Oui, en effet, je pense qu'on pourrait faire beaucoup mieux. Et donc, dans le
processus d'entente qu'il y a entre
le gouvernement et la caisse, c'est prévu aussi, un processus de consultation
avec les autorités locales, les intervenants, et je pense que ce serait
utile qu'Héritage Montréal fasse partie de ces consultations-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. Bumbaru.
M. Bumbaru
(Dinu) : Si je peux me
permettre, comme on dit d'une manière très vernaculaire, on est dans le bottin
depuis 40 ans. C'est avec grand
plaisir... On a été fondé par des citoyens pour servir la société, alors ça
nous fait plaisir.
Par contre,
il faut que le mécanisme soit crédible, M. le Président, c'est très important.
On a vu... En juin 2005, le
gouvernement annonçait, par exemple, la nomination d'un directeur exécutif pour
les CHU de Montréal, des gigantesques projets
d'investissement publics. Un des
critères d'excellence qui est nommé là-dedans, c'est l'urbanisme. Je ne sais pas si vous avez vu les résultats. On pourrait en
parler dans un café, c'est peut-être mieux que dans cette Assemblée, mais on se
demande si vraiment ça a été considéré.
Alors, il
faut... On demande aux petites municipalités de se doter d'un CCU, plusieurs
connaissent ce mécanisme, les quartiers ont ça, et ils passent des
journées, des heures à discuter de barreaux de galerie, puis des grands enjeux d'aménagement qui touchent le domaine public sont
souvent oubliés. Alors, peut-être qu'à travers ce processus on pourrait
créer une instance qui ne soit pas des moments de consultation mais une
instance qui accompagne vraiment et qui puisse...
On ne peut pas parler pour la caisse, évidemment, ce n'est pas... les gens ici réfléchiront
là-dessus, mais il nous semble que...
l'expérience que la caisse a démontrée par plusieurs de ses projets en
milieu urbain nous laisse croire que ce
serait un plus qui serait bien reçu; que ce ne serait pas vu comme un corps
étranger qui aurait de la misère à vivre dans un processus à venir, mais
qu'au contraire ce serait un mécanisme aidant.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Oui, merci. Vous
avez mentionné au début, bien sûr, que vous travaillez beaucoup
avec... que vous travaillez avec
Ivanhoé Cambridge, donc vous connaissez un peu la caisse, vous connaissez... ne
serait-ce qu'indirectement. Pouvez-vous nous dire comment sont vos
relations avec cet organisme-là?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
M. Bumbaru
(Dinu) : M. le Président, ces relations sont de deux ordres. Il y a des projets éducatifs sur
lesquels on travaille ensemble, mais il y a des tables rondes.
Par exemple, la caisse... pas la caisse mais
Ivanhoé Cambridge, comme tant d'entreprises au Québec, ont des activités d'engagement communautaire de leurs employés, alors souvent, c'est d'aller planter des arbres ou
de nettoyer des cours d'école,
d'aider des cuisines, des soupes populaires, c'est excellent. Dans le cas
d'Ivanhoé Cambridge, nous, on a
dit : Écoutez, on sait que vous avez des bras, mais on sait
surtout que vous avez des têtes et on voudrait que l'expertise en immobilier que vous
avez puisse aider à définir une réflexion, alimenter ce que la société
civile... Et ça, c'est un exemple d'activité
qui a pu être développée avec eux sous forme de table ronde pour réfléchir sur
l'avenir des ensembles hospitaliers, par exemple, pour réfléchir sur des
formules nouvelles de propriété, pour réfléchir aussi sur des mesures de
fiscalité incitative, parce qu'on a un gros
déficit de ce côté-là, là. Je m'excuse de parler de déficit, je ne veux pas
confondre les gens, là, mais on a
beaucoup de fiscalité... de contrôle ou d'incitatifs dans certains secteurs,
mais comment est-ce qu'on va attirer
des investissements pour requalifier des ensembles comme le Royal Vic, ou comme
le Children's, qui est à vendre maintenant,
ou la Providence... la Miséricorde, là, qui est déjà vide depuis un an ou deux?
Bien, c'est par, peut-être, une fiscalité
incitative, mais ça, il faut commencer à réfléchir là-dessus, ça fait des
décennies qu'on le suggère. Mais ces gens-là ont pu nous apporter un
point de vue opérationnel de tout ça, et ça, c'est extrêmement précieux.
Et par ailleurs ils sont des gestionnaires de
grands monuments du patrimoine national. Je veux dire, la Place Ville-Marie, là, c'est exceptionnel, ça, à
l'échelle de la planète. On n'a pas pu vérifier dans d'autres planètes, mais
sur la planète Terre c'est très
important, c'est un repère reconnu. Et ça nous permet également de réaliser que
le patrimoine, qui a souvent été
longtemps cantonné aux résidences très anciennes, aux églises ou à certains
lieux très précieux de l'histoire, aujourd'hui
embrasse un champ beaucoup plus large qui comprend notamment le commercial. Et
on a réalisé des grandes choses. Et
témoigner de l'aventure humaine, c'est aussi administrer correctement des
ensembles très significatifs commerciaux.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Merci beaucoup. Alors, si, les collègues, vous avez quelque chose que vous voulez faire... Moi, j'ai d'autres questions, mais je...
Une voix : Allez-y, allez-y.
Le Président (M. Bernier) :
Allez-y, M. le ministre.
M.
Leitão : O.K. Parce que,
là, vous avez ouvert une porte, et je sais que ça déborde un petit peu de notre commission, mais ça m'intéresse beaucoup, cette question de
fiscalité incitative, je pense qu'on peut le relier un peu à notre projet de
loi. Mais pouvez-vous nous parler un
petit peu plus... plus concrètement qu'est-ce que vous voulez dire par
«fiscalité incitative»?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
• (17 h 30) •
M. Bumbaru
(Dinu) : Je vais essayer de
le faire, mais il y a des gens chez nous, ils sont passionnés, vous savez,
de ça, puis j'ai du mal à les contrôler, je
ne voulais pas les amener avec moi, là, parce que ça aurait distrait du sujet,
mais...
Par exemple,
aux États-Unis, il y a cette «section 106». Ça a généré des investissements qui
sont encadrés par un système de
normes de conservation du patrimoine, donc des types d'intervention qui sont
encadrés, définis comme étant corrects ou recevables. C'est fait à
l'avance, il y a un mécanisme de vérification et d'autorisation. Et ce sont des
multiples des investissements qui sont
reconnus au niveau fiscal, ce qui fait qu'on met, je ne sais pas,
1 000 $ ou peut-être plus 100 000 $ et on obtient
des déductions pour 200 000 $ ou 300 000 $. Mais il faut
vraiment que ça réponde à des objectifs qui
définissent ce qu'est l'intérêt public dans cette nature d'investissement. Ce n'est
pas des échappatoires, c'est vraiment un investissement qualifié et
ciblé.
On a regardé
aussi dans des ensembles plus métropolitains, par exemple à Chicago, ce qu'on
appelle le Loop, hein, qui est le
coeur historique. C'est là où les gratte-ciel sont nés, hein, je veux dire, si
les gens haïssent les gratte-ciel, ils sont mieux de ne pas aller là, mais c'est un endroit qui est d'une richesse
extraordinaire au niveau de l'histoire de l'architecture contemporaine, les sources sont là. Ils ont fait
des leviers d'investissement en identifiant les revenus à venir à partir de
l'augmentation des valeurs foncières, par les investissements ils ont pu capter
et encaisser à l'avance ça pour s'en servir de subvention. C'est des mécanismes qui ne sont pas dissemblables de ce
qu'on a ici mais qui pourraient peut-être être raffinés.
Vous avez au
Canada des efforts qui ont été menés, par exemple, par le gouvernement fédéral.
Parcs Canada, dans toute sa modestie,
qui est de plus en plus grande avec les coupures, Parcs Canada avait réussi à
obtenir de la part de tous les gouvernements provinciaux et territoriaux
une entente sur un principe d'un registre des biens culturels, donc une base commune, et c'est les provinces qui
inscrivent les biens sur le registre, sur des standards de conservation. Mais
le régime fiscal a été
malheureusement transformé au niveau fédéral, ce qui était l'outil principal de
ce pacte, et vous allez admettre
qu'il n'y a quand même pas beaucoup de situations dans l'histoire canadienne où
l'ensemble de ces autorités légitimes
s'entendent, mais le coeur qui était le régime fiscal a été converti,
malheureusement, dans une enveloppe de subvention,
qui est un autre genre de chose, vous savez, parce que, les enveloppes de
subvention, l'enveloppe peut rester puis
elle peut être vide, alors qu'un régime fiscal, c'est vraiment de travailler au
niveau de l'écologie du bâti. Et, pour nous,
c'est très important. Dans le cas du Canada, c'est même remarquable à l'échelle
internationale que ce registre qui avait
été développé avec les provinces avec quatre catégories : le patrimoine
bâti, le patrimoine technologique, le génie civil...
Je vous donne
un cas. Par exemple, au Japon, le gouvernement de Shinzo Abe a formé un comité
d'experts sur l'avenir du patrimoine industriel, c'est au niveau du
cabinet du premier ministre que ça se situe. Au Québec, on a un patrimoine immense par Hydro-Québec, des sociétés
nationales, mais aussi les grandes entreprises, et c'est très aléatoire,
ce qu'on fait, on n'a pas une stratégie organisée. Mais au Japon ils ont mis ça
au niveau du PM, ce n'est pas rien.
Et nous, on
est partie prenante de ce comité d'experts, mais vous avez donc patrimoine
bâti, technologique, les sites
archéologiques, notamment en relation avec les peuples autochtones — c'est une dimension réelle du territoire, ce
n'est pas abstrait ou légendaire — et la question des paysages culturels.
Alors, vous voyez, avec des définitions comme ça, je sais que ça peut en effrayer certains,
parce qu'ils vont se dire, un peu comme l'avocat de l'armée américaine nous a
dit, à un moment donné, il dit :
Bien là, si vous voulez... «If
you want to outlaw war by declaring the planet heritage, we see you coming», mais c'est... On lui a répondu que ce n'était
pas notre objectif, mais on appréciait sa capacité de lire la réalité, voilà. Mais il nous semble qu'un système
comme ça... Il y a beaucoup de travail qui a été fait. Et il y a même des
études qui avaient été faites à l'époque par
la firme Secor, dans le cas du patrimoine religieux, qui est un cas très
particulier au Québec. Il y a des
expériences qui ont été... qui ont 20 ans, là, c'est la ministre Beaudoin,
à l'époque, qui avait amené ça pour
le gouvernement du Québec. C'est reconnu à l'échelle planétaire,
interconfessionnel et dynamique, et maintenant très ouvert sur les stratégies de réaffectation. Mais on ne peut pas
juste compter sur du financement direct, il faut penser à une écologie
économique qui travaille là-dessus aussi.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Ça va pour moi.
Le Président (M. Bernier) :
Mme la députée de Bourassa-Sauvé, oui.
Mme de Santis :
Oui, une très courte question. Vous avez dit que vous avez une relation, un
partenariat, entre guillemets, avec Ivanhoé
Cambridge. Est-ce que vous avez eu l'occasion, à date, de parler des deux
projets de transport collectif avec soit eux ou d'autres membres de la
caisse?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
M. Bumbaru (Dinu) : Non, madame...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, allez-y.
M. Bumbaru (Dinu) : Mme la députée,
nous avons informé notre partenaire que nous étions convoqués à la commission, mais nous n'avons pas discuté de
projets avec eux parce que ça aurait été comme... C'est des partenaires,
ce n'est pas des administrateurs d'Héritage
Montréal, là. Nous, notre fonds de commerce, c'est la liberté. C'est la liberté
d'être partenaires mais aussi la liberté d'avoir des opinions. Alors,
nous, ici, on vient ici...
Mais, par
courtoisie, parce que nous pensons dans l'importance d'une porosité au niveau
de la... Vous savez, quand les gens font un paquet de choses en secret,
ça ne donne pas grand-chose pour le progrès de la cité.
Par contre,
ce qu'on vous présente ici, ils en auront l'information comme tout le monde
après la conversation, l'échange que
nous aurons aujourd'hui. Et, M. le Président, on s'excuse de ne pas avoir
transmis des documents écrits, mais on pourra coucher sur papier les
notes qu'on vous communique.
Le
Président (M. Bernier) : Oui. Si vous voulez transmettre des
documents écrits additionnels, vous avez simplement à les adresser ici, à la commission, en tout
temps, ça va nous faire plaisir de les recevoir et de les rendre disponibles
comme information aux membres de la commission et au public également.
Merci. Mme la députée, deux minutes.
Mme de Santis :
Je ne voulais absolument pas attaquer l'intégrité de qui que ce soit, je
voulais simplement savoir si
peut-être vous aviez déjà discuté de certaines idées que vous pourriez partager
avec nous. C'était ça, le but de ma question.
J'approuve
énormément votre notion de transparence. La transparence, c'est très, très
important dans tout ce qu'on fait. La transparence et la gouvernance
vont s'assurer qu'on peut bien vivre, alors...
M. Bumbaru (Dinu) : Un petit peu
d'intelligence aussi, ça aide. Ça rime aussi.
Le Président (M. Bernier) :
Merci.
Mme de Santis :
Je ne sais pas si mon collègue a une question.
Le Président (M. Bernier) :
Une dernière question, M. le député de Pontiac?
M. Fortin
(Pontiac) : Oui, peut-être rapidement, là. Je veux d'abord vous
remercier d'être ici. Puis si vous pourriez transmettre nos remerciements à vos bénévoles aussi qui ont travaillé
avec vous pour vous... en préparation de cette rencontre.
Vous avez
parlé d'un plan intégré de transport à Montréal. D'ailleurs, le maire était ici
hier, il nous parlait des 82 priorités
qu'ils ont, là, pour la communauté métropolitaine. Est-ce que vous considérez qu'ils
ont un plan bien détaillé, un plan acceptable, un plan intégré, en
matière de transport en commun?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
M. Bumbaru
(Dinu) : Au niveau de la
CMM, nous, je dois divulguer une autre chose ici, là. C'est que, suite à
l'agora citoyenne de 2010, il y a eu l'agora
métropolitaine en 2013, et on accompagne la CMM. Et un des thèmes, c'est
toujours le transport.
Est-ce
qu'il y a un plan de transport intégré? Bien, il y a des grandes orientations
puis il y a des projets particuliers. Est-ce
que la jonction va bien se faire? Vous savez, c'est un univers qui est assez
fluide. Un plan intégré, ça prend peut-être 20 ans pour le réaliser. Et ce n'est pas par cynisme que je dis ça,
c'est tout simplement... pour faire bien les choses, des fois, ça prend
du temps, puis à l'échelle d'un territoire c'est aussi complexe.
On sent qu'il
y en a un, on sent qu'on est en train de passer au-delà de simplement des
revendications financières. Il y a
des aspects financiers importants, mais peut-être qu'on pourrait parler un peu
de géographie et de services aux usagers. On voit qu'on a eu des stratégies assez volontaristes sur le transport
public, nous en sommes. Moi, je n'ai pas de char. D'ailleurs, je n'ai même pas eu besoin de demander
un stationnement pour venir ici, là, je suis venu en autobus. Et je suis
très heureux de ça. Moi, mon grand monument,
c'est la 80. Mais on a l'impression que le discours est un peu stratosphérique, et il a besoin aussi de s'ancrer
dans des réalités quotidiennes des usagers. Et peut-être que ça, ça peut être
un élément complémentaire à la notion des grands outils de financement.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. Bumbaru. Nous allons
passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. Bumbaru. Vous avez évoqué la nécessité de
consultation. Peut-être... Pourriez-vous
élaborer un peu plus sur ce que vous... Connaissant, là, un peu le contexte
dans lequel le projet de loi a été rédigé, l'entente de la Caisse de
dépôt, qu'est-ce que vous avez en tête? Pourriez-vous élaborer, là, sur le
processus de consultation que vous avez en tête?
M. Bumbaru (Dinu) : Bien...
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
• (17 h 40) •
M. Bumbaru
(Dinu) : Oui, M. le
Président. Les consultations, il y a plusieurs modèles, il y a toutes sortes
de... mais, pour nous, on aime bien
des consultations qui arrivent tôt puis qui établissent un peu le cadastre, et
ensuite qu'il y ait une confiance qui
puisse être accordée aux gens qui vont faire les projets, surtout dans ce
temps-là. Et on pense à un modèle où
il y a une consultation publique indépendante, donc que le processus soit assez
puissant pour pouvoir interroger les citoyens
et les promoteurs, l'ensemble des parties. C'est, par exemple, le modèle de
l'OCPM, l'Office de consultation publique de Montréal, qui est une
instance statutaire indépendante mais qui est limitée, passez-moi l'expression,
au 872 — les 872, c'est les numéros de téléphone de
la ville de Montréal — alors que peut-être que... Ce n'est même pas le 514, d'accord, tu sais, c'est juste une partie
de... Alors, peut-être qu'il y aurait une notion... Est-ce qu'il peut y avoir des mécanismes indépendants de
consultation à l'échelle du territoire qui nous intéresse — pour notre part, c'est notamment la région métropolitaine? C'est à discuter. Les
consultations qui sont menées par les commissions d'élus n'ont pas toujours
cette capacité d'interpeller des citoyens.
Est-ce que les élus interpellent les citoyens de la même façon que des
commissaires indépendants?
Et il faut
choisir le bon moment. Quand vous envoyez des consultations à un moment où la
perception est que beaucoup de
décisions ont été prises, bien tout le monde est fâché, les promoteurs, les
citoyens, les élus, les fonctionnaires, les professionnels.
Et la
question de la place de ces mécanismes est importante, et on a pu voir...
Tantôt, j'entendais des références au
projet du pont Champlain, il y a eu des exercices d'assemblée ou de séance
d'information. Il y a un glossaire à respecter dans ça. Une séance d'information, ce n'est pas
nécessairement de la consultation, mais des fois c'est tout ce qu'on a le temps de faire parce qu'on arrive trop tard dans
le processus. Ce sont des projets qui ont des moments, des fenêtres, pour
faire ce genre de chose là, qui sont assez bien délimités.
C'est le
modèle qu'on favoriserait mais sans
exclure... Et c'est peut-être plus la proposition qu'on fait ici. Est-ce qu'il y aura une place pour une instance
d'accompagnement? Parce que, du moment que les grands principes sont établis,
suite à une consultation publique, d'abord
il faut les rappeler d'une manière annuelle. Par exemple, est-ce qu'il y a un
rapport de suivi public qui est rendu pour voir comment ça marche? Ce n'est pas
parce qu'il y a eu une consultation il y a
cinq ans sur laquelle une décision a été prise qu'aujourd'hui la population se
sent obligée de garder des archives, là,
il faut avoir... Il y a une reddition qui doit être incluse là-dedans mais
peut-être un mécanisme d'accompagnement, parce que beaucoup
d'ajustements fins se font au fil du projet.
C'est, par
exemple, la proposition qu'on a également faite au gouvernement fédéral pour le
pont Champlain. On a obtenu, à défaut
d'un concours d'architecture, un comité d'architecture, qui n'a pas produit des
évocations floues, qui a donné un
design obligatoire, ce qui est encore plus puissant qu'un concours, à la
limite. Et on a accepté l'invitation du ministre à participer à cette démarche et on a également proposé, et
c'est connu publiquement, qu'il y ait une poursuite d'une telle démarche pour que l'accompagnement du
projet permette de véhiculer les principes originaux. La même chose pour la rue Sainte-Catherine, dont on annonce
d'importants investissements. Plus petite échelle, mais, vous savez, le diable,
il n'est pas toujours dans
l'atmosphère, il est souvent dans les détails. Si on n'a pas un mécanisme
d'arbitrage au niveau fin, c'est
comme dans les tableaux de chiffres, que vous connaissez sans doute mieux que
moi, là, on peut... Une virgule qui est mal placée, ça peut contaminer
tout un état financier.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Rousseau, vous devez connaître ça.
M. Marceau :
Et même huit chiffres après la virgule, quand on multiplie plusieurs fois, ça
fait de gros montants.
Quand vous dites «suffisamment tôt
dans le processus», pour y aller de façon concrète... Puis je comprends très
bien ce que vous dites quand vous dites qu'il
faut que ça soit suffisamment tôt pour qu'évidemment les gens qui participent
à la consultation puissent avoir un impact
sur les choix qui seront faits. Donc, dans le cas... Si on reprend le sujet qui
nous préoccupe, on a donc le
gouvernement qui identifie un besoin, mettons que le gouvernement nous
dit : J'ai besoin d'un système
de transport sur le pont Champlain qui va se rendre à quelque part sur la
Rive-Sud. La caisse, de son côté, en toute indépendance, formule un certain nombre de propositions, mettons cinq
propositions. Vous, vous verriez la consultation... À la suite de ces cinq propositions, par exemple,
vous verriez le public et différents experts intervenir à cette étape-là ou...
Le Président (M.
Bernier) : Oui, allez-y, monsieur...
M. Bumbaru (Dinu) : Si vous permettez, ça peut être déployé en deux temps. Il peut y avoir
une consultation plus générale sur
les critères qui vont ensuite guider l'identification des scénarios, et
peut-être un an après... C'est ce qui a été fait, par exemple, dans le cas du Vieux-Port de Montréal, là, on
parle des expériences des années 80, là, il y a beaucoup d'expériences supplémentaires qui ont été menées
là-dessus, mais des critères et ensuite des pistes de solution, puis après
ça le navire peut partir. Et ça permet, en
fait, peut-être d'équilibrer les choses afin que la mission soit bien définie,
puis ensuite ça peut être la
question... Quels critères doivent guider? Bon, il y en a peut-être des
généraux, qui sont tellement vagues
que ça ne donne pas grand-chose d'avoir... C'est coûteux aussi, ces exercices,
parce qu'on travaille sur des territoires qui sont complexes, donc il faut plusieurs séances, là, ce n'est pas si
simple que ça. Mais je pense
qu'il y a peut-être l'idée de
ce déploiement en deux temps mais avec une période qui soit assez rapprochée
entre les deux, parce que, si on a cinq ans entre les deux, là, ça
ne donne rien, là, c'est futile.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Rousseau...
M. Bumbaru (Dinu) : Donc, ça va demander, M. le député, une capacité, et
c'est peut-être là aussi l'intérêt de mettre la caisse et son indépendance dans la
balance, un détachement par rapport à certains cycles de prise de décision qui permette d'avoir une attention concentrée sur
un temps assez long pour faire des bons projets, là, pas juste pour négocier
des choses à la pièce, là.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député.
M.
Marceau : Oui. Non, très bien.
Merci. Sur l'instance d'accompagnement, vous disiez qu'il y a
un modèle, dans le cas du pont Champlain, qui a été convenu ou qui est
en voie d'être convenu avec le gouvernement fédéral?
Le Président (M.
Bernier) : M. Bumbaru.
M. Bumbaru (Dinu) : Bien, nous ne sommes pas en négociation avec le gouvernement fédéral, là. Je sais bien que la pièce est
rouge ici, mais c'est...
M. Marceau :
Vous aimeriez avoir un processus d'accompagnement, O.K.
M. Bumbaru (Dinu) : Nous, on a proposé ça parce qu'on
est conscients qu'un projet de cette envergure va prendre du temps et
qu'il y aura des adaptations inévitables. Voilà.
M.
Marceau : Parfait. Non, c'est beau. Je me demandais s'il
existait, ce modèle-là, présentement, c'est tout. Je voulais avoir un
exemple à utiliser.
M. Bumbaru (Dinu) : On peut faire une recherche. Si on en trouve aisé, on le communiquera à
la commission, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Oui, M. Bumbaru.
M.
Marceau : Aussi, vous avez parlé de concours d'architecte. Je
trouve ça intéressant parce que, bon, je pense qu'on sait qu'au Québec ce n'est pas une exigence, que ce n'est pas...
Ce n'est pas suffisamment imposé, quant à moi, quant à nous.
Croyez-vous
qu'on devrait, pour les infrastructures qui seront mises en place par la
caisse, de manière à s'assurer qu'effectivement il y ait un patrimoine à
léguer, exiger que des concours d'architecte soient tenus?
Le Président (M.
Bernier) : M. Bumbaru.
M. Bumbaru (Dinu) : Bien, écoutez, c'est une piste. On sait que les concours, si c'est bien
tenu, ça peut être dans un horizon de
temps qui est pratique pour une échéance de livraison au service de la
population, donc c'est une solution, mais,
pour Héritage Montréal, on constate, par exemple, que le Palais des congrès de
Montréal a été réalisé à l'origine à partir d'un concours. J'hésite,
j'hésite à dire que... Vous comprenez? C'est qu'il faut mettre la barre haute...
M. Marceau : Ça dépend des
concurrents.
M.
Bumbaru (Dinu) : Ça dépend
des jurys, ça dépend de bien des choses. Et c'est comme les PPP, hein? Par
exemple, la salle symphonique, c'est un bel
exemple. Elle est formidable au point de vue de l'acoustique, mais c'était
l'élément qui avait été exclu du PPP. Donc,
on s'est dit : On veut avoir la meilleure acoustique puis, pour ça, on ne
va pas le laisser en ballottage dans le processus.
Alors,
peut-être que le concours... Possiblement mais pas nécessairement un concours.
Et, je pense, il y a des gens qui ont
travaillé au gouvernement du Québec, au ministère de la Culture, également à la
ville de Montréal et probablement dans
d'autres forums, les universités, pour réfléchir à cette question, il y a des
écoles de pensée. Nous, on est plus pragmatiques,
on s'excuse de ça, mais je pense qu'il faut mettre la barre haute et trouver
une façon. Si le projet de loi ne parle...
n'emploie même pas le mot «architecture et aménagement», après ça, bien, ce ne
sera toujours pas vu comme un élément important de ce qu'on cherche à
obtenir ici.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau :
Le projet de loi, non plus, ne parle pas d'intégration de la nouvelle
infrastructure qui sera bâtie par la
caisse, que ce soit au patrimoine existant, que ce soit au système de transport
déjà en place, que ce soit au schéma d'aménagement
de la région, il n'y a rien de cela qui est présent. Croyez-vous que ces
éléments-là devraient être ajoutés au projet de loi? Est-ce que vous
souhaitez ça?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
• (17 h 50) •
M. Bumbaru
(Dinu) : Nous, on
souhaiterait qu'il y ait au moins la notion de certains... la notion de qualité
soit présente là-dedans, qu'elle soit
déployée peut-être en certains critères : qualité architecturale, qualité
d'intégration. Tantôt, l'intervenant
précédent vous a fait un exposé, et il y a eu un échange fort édifiant sur la
notion d'expropriation, expropriation, pouvoir
important qui devrait n'être pas uniquement compensé envers les propriétaires,
mais compensé responsable en termes
d'urbanisme. Et, encore là, il y a peut-être plusieurs écoles de pensée, mais
au moins si ces notions sont parties des objectifs souhaités...
Je lis au
deuxième paragraphe de la note explicative, là... C'est un texte modeste, mais,
vous savez, le Québec est en train
d'introduire dans sa rédaction législative des articles, hein, qui donnent
l'esprit de la loi. C'est peut-être
quelque chose
qu'il serait utile d'introduire, parce
qu'il y a un bel acte de confiance qui est fait à travers cette proposition qui
est devant vous, de l'Assemblée, et
il nous semble que c'est une belle occasion d'exprimer cet esprit et de
l'enrichir d'un objectif qui n'est
pas juste fonctionnel et financier mais aussi de construction du patrimoine,
donc qualité d'aménagement, qualité
d'architecture puis une préoccupation pour l'intégration au territoire. Enfin,
on comprend que c'est une loi qui est
peut-être, pour l'instant, ciblée sur certains projets, mais on imagine qu'elle
pourrait être fort utile à l'avenir pour d'autres.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Granby.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. Merci, M. Bumbaru, d'être là. On parle depuis le début de
qualité d'aménagement, de patrimoine à
léguer. Vous avez évoqué certaines gares et stationnements infects, on n'en
nommera pas, au début de votre introduction.
Une voix : ...
M.
Bonnardel :
Oui, mais ça, regardez, on souhaite avoir un patrimoine ou des infrastructures
qui seront bien aménagés et qui nécessairement seront encore là dans 30,
40 ou sinon les 50 prochaines années, au Québec. Est-ce qu'il y a des exemples ailleurs dans le monde
qu'on devrait, comme législateurs, se pencher, étudier, à savoir qu'est-ce
qui s'est fait de bien à l'extérieur,
nécessairement, du Canada, de l'Amérique du Nord, pour être capable de se
dire : Écoutez, là, ce que vous
allez faire là avec 5 milliards d'investissement, un SLR sur un futur
pont, flambant neuf, et, de l'autre côté, un Train de l'Ouest qui nécessairement passera sur des servitudes et des
emplacements qui sont nécessairement déjà en place... Comment on pourrait évaluer ça en termes de
qualité d'aménagement ou de ce qui se fait de mieux ailleurs dans le monde?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
M. Bumbaru (Dinu) : Bien, pour
commencer, on n'irait pas très loin dans le monde, vous avez juste à voir ville Mont-Royal. C'est un développement autour
d'une gare, essentiellement, puis en plus c'était un développement pour
financer un tunnel, financer le tunnel, le deuxième tunnel le plus grand au
Canada à l'époque, quand ça a été ouvert, en
1918, puis on a mis la gare au milieu puis on a confié au meilleur architecte
paysagiste de son époque, Frederick Todd, qui était un disciple d'Olmsted, celui qui a fait le Central Park à New
York... ils lui ont confié de dessiner cette ville-là. Alors, c'est un exemple ancien, 1912, le plan,
1918, commencer les travaux, mais c'est des exemples qui nous semblent
intéressants.
Qu'est-ce qui
se passe en banlieue de Barcelone? Qu'est-ce qui se passe en banlieue, par
exemple, de Berlin? Berlin, il y a eu
énormément d'investissement. Vous allez me dire : Ils ne savent pas quoi
faire de leur argent. Ils sont capables aussi d'essayer de ne pas le gaspiller. Et en général ces opérations commencent... Moi, je
prends note de votre question, M. le
député, puis j'essaierais de
solliciter des cas plus concrets qui puissent être intéressants et les méthodes
qui ont été employées pour s'assurer
du succès de ça. Il y en a... Dans l'agora citoyenne, on a eu des cas de Boston,
de Lyon, de Vancouver qui ont été intéressants aussi parce
qu'ils n'amenaient pas juste le
principe général mais des incarnations dans des quartiers, comment ça s'est bien fait, qui est-ce qui avait
le contrôle puis comment est-ce qu'on naviguait à travers les épreuves. Je procéderais avec ça, là, parce que
présentement ça ne me vient pas à la... tu sais, le détail, là, parce qu'en plus il y a des articles de loi souvent... Vous voyez, en France, il
y a une notion législative qui est que le territoire constitue le patrimoine
commun de tous les Français. Ce n'est pas
rien, ça. Au Brésil, la consultation de la population pour l'aménagement du
territoire est dans la constitution du pays.
On n'a pas encore ça, mais c'est peut-être des mécanismes généraux comme
ça qui forcent à trouver des... Nous, on
considère qu'on a tous les talents pour inventer des solutions ici, on est très
fiers d'être là, mais qu'on ne se
donne pas le devoir de le faire. Et il y a des exemples qui peuvent nous aider,
mais peut-être que... Nous, on voit tellement plus d'opportunités ici,
avec cette loi-là, là, que ça nous encourage.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M.
Bonnardel : Mais ça
pourrait être intéressant, si vous avez des avenues à nous apporter ou des...
M. Bumbaru (Dinu) : Oui.
Le
Président (M. Bernier) : Vous pouvez nous les faire parvenir,
M. Bumbaru, ça nous fera plaisir de les distribuer aux membres.
M.
Bonnardel :
J'ai vu sur votre site Internet qu'Ivanhoé, comme M. le ministre des Finances
l'a mentionné, là, est soit un
partenaire financier avec Héritage Montréal... Est-ce que vous avez déjà eu des
mandats d'Ivanhoé Cambridge ou est-ce
que vous souhaiteriez peut-être, avec la Caisse de dépôt, qu'on vous donne un
mandat, dans un contexte d'étude, et d'utiliser votre expertise,
nécessairement, là?
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru.
M. Bumbaru
(Dinu) : Bien, écoutez, M.
le Président, Héritage Montréal est une organisation qui n'est même pas subventionnée au fonctionnement, parce qu'on
est considérés comme un organisme local par le Québec, mais on a aussi... Il faut trouver une formule, mais on a
été fondés pour contribuer à ce genre d'exercice. Alors, ce serait intéressant. En général... Et je pense que le BAPE, à une
certaine époque, avait des budgets qui permettaient à des organismes de la
société civile de participer aux exercices sans contraindre leurs capacités,
leur intégrité. Il y a peut-être une formule à imaginer. Ce n'est pas nécessairement juste pour Héritage Montréal,
mais il y a les réseaux universitaires, il y a peut-être
une... Enfin, nous, on est
disponibles, là, mais on... faire un mandat, puis ensuite il faut qu'il y ait une confiance dans la population sur tout ça. Alors, c'est très important,
cette notion de crédibilité puis de confiance, mais il y a peut-être
des mécanismes...
Le Président (M. Bernier) : M.
le député.
M.
Bonnardel :
Ivanhoé, est-ce que c'est seulement un partenaire financier...
M. Bumbaru (Dinu) : Bien, par
exemple...
M.
Bonnardel : ...ou
vous avez eu des mandats spécifiques d'eux une fois de temps en temps, là?
M. Bumbaru
(Dinu) : Ce n'est pas des
mandats, c'est qu'on organise, par exemple, des visites du centre-ville pour les employés. Il y a 250 000 travailleurs au centre-ville, puis
ils ne connaissent pas le centre-ville. Ça n'a pas de bon sens! Tu sais, les Patriotes sont enterrés sous la
rue Peel, les gens ne le savent pas. L'architecture est magnifique; ils ne
l'ont pas regardée. Alors, c'est ce genre de
programme là qu'on fait avec Ivanhoé Cambridge ou des conférences publiques.
M.
Bonnardel : Merci,
M. le Président. Terminé.
Le Président (M. Bernier) :
M. Bumbaru... Oui, M. le député de Beauce-Nord.
M.
Spénard : Non,
c'est beau. Je remercie monsieur, fort intéressant.
Le
Président (M. Bernier) : M. Bumbaru, merci de votre
participation à la Commission des finances publiques. Très, très
intéressant.
Donc, compte
tenu de l'heure, je lève la séance de la commission et ajourne ses travaux à
demain, 10 heures, pour une audition... une interpellation sur le
secteur informatique. Je lève la séance.
(Fin de la séance à 17 h 57)