(Quinze
heures cinq minutes)
Le
Président (M. Bernier) : Bonjour, bon après-midi. Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte et
je demanderais bien sûr, comme d'habitude, à toutes les personnes dans la salle
de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs téléphones cellulaires. Au nombre de personnes que nous sommes, donc, il
faut être capable de respecter cette consigne, je pense que c'est très
important.
La
commission est réunie afin de poursuivre le débat sur le
discours du budget, conformément à l'article 275 du règlement.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Matte (Portneuf) est remplacé par M. Merlini
(La Prairie).
Organisation des travaux
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Donc, je vous souhaite une bonne séance de
travail, un bon débat. On a un
travail d'environ une dizaine d'heures à faire ensemble. Donc, je souhaite des
débats intéressants, des échanges intéressants et dans le respect de
chacun d'entre nous.
Avant
d'entreprendre nos travaux, je vous informe des règles du débat que nous
amorçons aujourd'hui. La répartition
des temps de parole pour les 10 heures qui sont consacrées à la poursuite
du débat sur le discours du budget a
été faite conformément à l'entente relative au fonctionnement de l'Assemblée et
des commissions parlementaires, aux fonctions parlementaires ainsi qu'aux
aspects budgétaires pour la durée de la 41e législature. À cet égard, je vous informe des enveloppes du temps accordé à chaque
groupe parlementaire ainsi qu'aux députés indépendants. Au niveau de la partie gouvernementale,
4 h 45 min; l'opposition
officielle,
2 h 51 min; deuxième
groupe d'opposition, 1 h 54 min;
députés indépendants, 30 minutes. On
nous a informés que les députés indépendants seraient présents à cette séance
dans quelques… un petit peu plus tard.
Nous débuterons par
les remarques préliminaires du ministre, du porte-parole de l'opposition
officielle, du porte-parole du deuxième
groupe d'opposition, qui disposeront
chacun de 20 minutes. Le temps utilisé sera pris à même les enveloppes de temps respectives de chacun des
groupes parlementaires. Le temps inutilisé par un groupe parlementaire sera ajouté à son temps pour le débat. Nous
procéderons par blocs de 20 minutes, incluant les questions et les
réponses. J'appliquerai la règle de
l'alternance entre les députés du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés de l'opposition.
Enfin, selon la
pratique établie à ce jour, l'étape du débat débutera par une intervention du porte-parole
de l'opposition officielle une fois les discours d'ouverture faits. Je dois
vous dire également que, bien sûr, ces débats-là sont enregistrés, ils sont enregistrés, ils sont
chronométrés, donc on procédera aux ajustements des blocs au fur et à mesure
pour s'assurer du respect du temps de parole global qui est accordé à chacun
des groupes parlementaires. Ça va?
M. le ministre, vous
disposez d'un maximum de 20 minutes. Monsieur…
M. Marceau :
…
Le Président (M.
Bernier) : Oui.
M.
Marceau : …avant que
nous ne commencions. Pour la période de ce débat, pendant lequel il y aura des
blocs, là, de 20 minutes, est-ce
que vous nous donnerez une règle quant à la longueur des réponses en proportion
de la longueur des questions? Est-ce que ce genre de…
Le
Président (M. Bernier) : Oui. Ce que je souhaite, bien
sûr, c'est d'avoir le plus de
réponses possible au niveau des questions, donc que les réponses soient,
si on veut, correspondantes à la question.
M. Marceau :
…là, on s'entend, là.
Le
Président (M. Bernier) : C'est ça. Normalement, c'est comme… c'est de cette façon, normalement,
que je préside les commissions,
de façon à m'assurer que le temps de parole, surtout au niveau des groupes de
l'opposition, que le temps des questions soit respecté. Donc, en
fonction de la question, la réponse est en conséquence.
M. Marceau :
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Est-ce que ça vous va?
M. Marceau : …parfait.
Remarques
préliminaires
Le
Président (M. Bernier) : Ça vous va. M. le ministre, vous disposez d'un maximum de 20 minutes
pour vos remarques préliminaires.
M. Leitão : Très bien.
• (15 h 10) •
Le Président (M. Bernier) :
La parole est à vous.
M. Carlos J Leitão
M.
Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bon après-midi, tout le monde. Comme nous le savons tous, le
4 juin dernier, j'ai présenté le budget 2014‑2015. Ce plan budgétaire
repose essentiellement sur deux piliers : d'abord, la relance de l'économie et de l'emploi par des
actions que nous jugeons structurantes; et également par le redressement
des finances publiques, et ce
redressement-là se fait par une gestion rigoureuse des dépenses de l'ensemble
de l'appareil gouvernemental. Ce n'est pas une question de faire un ou l'autre, c'est une question de faire
un et l'autre parce que la relance de
l'économie passe nécessairement par le redressement des finances, et aussi le
redressement des finances ne peut pas se faire si l'économie n'est pas
en bon état.
Mais
peut-être, si on commence au début, si vous voulez, et pourquoi nous nous
trouvons ici. Nous nous trouvons ici
parce qu'en fin de compte, au 31 mars 2014, on aurait dû être à l'équilibre
budgétaire, c'était ça, le plan de Mme
Jérôme-Forget, M. Bachand, M. Marceau dans son premier budget. Donc, on allait
tous dans la même direction, et 2013‑2014 devait être une année
d'équilibre budgétaire. Or, évidemment, ce n'est pas ça qui est arrivé, et,
jusqu'à septembre 2014… pardon, 2013, mon
prédécesseur, ainsi que son gouvernement, maintenait que tout était en ligne et
que l'équilibre budgétaire serait
atteint. Or, ça n'a pas été le cas. On a appris, en novembre, qu'il y avait un
déficit de 2,5 milliards, puis par la suite nous avons confirmé que
c'est 3,1 milliards.
Maintenant,
pourquoi je soulève cette question? Parce qu'à mon avis — ça, c'est mon opinion — cela est arrivé parce qu'il y a eu une espèce… une perte de focus,
une perte d'intérêt de la part du gouvernement dans l'atteinte d'équilibre
budgétaire parce qu'il y avait d'autres
priorités, à cette période-là, à l'automne 2013, d'autres mesures, d'autres
sujets sont devenus prioritaires pour
le gouvernement, et donc la question des finances publiques a passé en deuxième
lieu, et aussi, je pense, une espèce
de… un manque de conviction, puisqu'on se disait : Bof, écoutez, un
déficit de 2,5 milliards, ce n'est quand même pas la fin du monde,
c'est très peu en pourcentage du PIB, donc on peut le rattraper plus tard. Évidemment, quand on pense qu'on peut le rattraper
plus tard, c'est que plus on attend, plus les problèmes deviennent complexes. Et c'est un peu ce que nous avons dû
faire, parce que, cette année, 2014‑2015, évidemment le déficit potentiel
aurait été beaucoup plus que
2,5 milliards, et donc nous avons dû prendre des mesures assez sérieuses,
assez rigoureuses en termes de contrôle des dépenses pour atteindre nos
cibles budgétaires.
Alors donc, si rien ne se faisait, on serait
avec un déficit d'au-delà de 5 milliards cette année, au-delà de 7 milliards l'année prochaine. Nous jugeons
que ce déficit-là est de nature structurelle, c'est-à-dire que l'augmentation…
le rythme de croissance des dépenses est
plus élevé que le rythme de croissance des revenus, donc il fallait remédier à
ça. Et nous allons remédier à ça par
des efforts substantiels, des efforts exigeants, bien sûr, mais presque entièrement
du côté des dépenses. Donc, cette
année, 2014‑2015, nous allons réduire le rythme de dépenses projetées de
3,8 milliards de dollars, et
puis, l'année prochaine, un autre 3,9… dollars pour arriver à l'équilibre
budgétaire en 2015‑2016. Parce qu'à notre avis l'équilibre budgétaire en 2015‑2016 est incontournable, il faut
absolument… On est déjà deux ans au-delà de ce qui avait été… ce qui était la cible du gouvernement du
Québec au départ. Donc, ça va faire six ans de retour à l'équilibre budgétaire,
je pense que c'est quand même… c'est assez.
Donc, il va falloir absolument qu'on soit
capables d'arriver à l'équilibre en 2015‑2016. C'est notre priorité et c'est ce à quoi nous allons nous engager. Alors,
comment on va y arriver? On va y arriver par un contrôle très, très serré
du rythme de croissance des dépenses de
programmes. Donc, cette année, en 2014‑2015, les dépenses de programmes devraient être augmentées de seulement 1,8 %,
et l'année prochaine, 2015‑2016, ça sera de 0,7 %. C'est très exigeant,
je ne me fais pas d'illusion, ça ne sera pas facile. Mais ça doit être fait,
et, à notre avis, ça va être fait.
Aussi, nous
avons diminué certaines dépenses fiscales. Et il est important de préciser que,
ce faisant, nous avons quand même laissé 80 % des crédits d'impôt,
nous avons éliminé 20 %. Et nous croyons qu'à moyen terme il faut
davantage réduire l'impôt général plutôt que d'y aller de mesures spécifiques à
certaines industries ou à certaines entreprises.
Donc, notre compétitivité, à notre avis, ne doit pas reposer uniquement sur les
crédits d'impôt, mais nous allons laisser
aussi à la commission qui sera annoncée demain, la commission de la réforme
fiscale, le soin d'examiner les crédits d'impôt individuellement pour voir lesquels sont pertinents et lesquels
maintenant ne sont plus tellement utiles. Nous allons aussi contrôler les dépenses des organismes et des
sociétés d'État. Et toutes les sociétés d'État, Hydro-Québec, Loto-Québec, SAQ et Investissement Québec, sont appelées à
contribuer, mais c'est clair aussi que la contribution va venir
principalement d'Hydro-Québec.
Mais il y a
aussi trois nouveaux outils que nous nous donnons pour nous donner l'armature
nécessaire pour réaliser nos objectifs
de contrôle des dépenses, parce qu'évidemment ce sera difficile, et, si on ne
se donnait pas ces outils additionnels là, je ne pense pas qu'on
pourrait y arriver. Alors, quels sont ces outils? Il y en a trois,
principalement. D'abord, les commissions
auxquelles on a déjà fait référence. Une a été annoncée aujourd'hui, la
commission de revue des programmes, ça a déjà été annoncé, sa
composition, son mandat, ses échéanciers, et une autre qui sera annoncée demain, la commission de revue de la fiscalité, la
réforme fiscale. Aussi, c'est déjà connu qu'elle devrait être présidée par M. Luc Godbout, et les autres membres de la commission
vont être divulgués, annoncés publiquement demain, ainsi que le mandat de cette commission-là. Cette commission-là ne sera
pas permanente; elle doit rendre un rapport final en décembre 2014. Ultimement, la décision sera
d'ordre politique. Donc, quelle réforme, quelles suggestions seront mises
en pratique ou pas, ce sera évidemment le
choix du gouvernement, mais ce choix-là va s'inspirer bien sûr des travaux de
cette commission-là pour nous donner une réponse éclairée à ce sujet-là.
Le deuxième outil, c'est qu'on se donne aussi un
cran d'arrêt. Un cran d'arrêt, ce que ça veut dire, c'est que, dorénavant, n'importe quelle autre mesure ou
programme qu'on décide d'introduire parce que ça pourrait être socialement
souhaitable de le faire ou quoi que ce soit,
très bien, on le fera, mais il faudrait qu'il soit financé à l'intérieur des
enveloppes existantes, donc il
faudrait que quelque chose d'autre soit éliminé pour faire place à ce nouveau
programme. Ça, c'est quelque chose
qui va être en place au moins jusqu'en 2016, et on verra par la suite si ça se
poursuit; fort probablement que ça va continuer d'une façon ou d'une
autre.
Dans les
documents du budget, il y avait un petit fascicule que moi, je trouve très
intéressant, où on regardait un petit
peu l'évolution des pressions sur les… — c'est ça, merci — donc, Le défi des finances publiques,
et sur les pressions qu'il y a sur
les dépenses de programmes. Et, en fin de compte, ces pressions viennent de
trois endroits : une question démographique,
donc l'augmentation des clientèles, qui explique à peu près 20 %, donc 1/5
des pressions sur les coûts. Donc, si
les dépenses de programmes augmentent, disons, de 5 % par année, un point
de pourcentage vient de la pression démographique,
augmentation de clientèles. Les deux autres facteurs qui sont très importants,
c'est l'augmentation des coûts et des
prix, donc les salaires, la rémunération ainsi que les prix des biens que
l'État achète, que ce soit en santé ou en éducation, et, troisièmement, l'ajout de nouveaux programmes au panier
de services. Donc, en mettant un cran d'arrêt, donc, tu n'en ajoutes plus. Ça, déjà, c'est 35 % de la pression sur
l'augmentation de programmes qu'on va diminuer. Et puis, en regardant de façon plus systématique les
possibles gains de productivité et d'efficacité à l'intérieur de l'appareil
étatique, là aussi on peut aller
chercher un autre 35 % de diminution de la pression sur l'augmentation des
dépenses de programmes.
• (15 h 20) •
Troisièmement,
le troisième élément important dans la... le troisième outil important dans
notre effort de contrôle des
dépenses, c'est le gel des effectifs. Donc, nous allons nous donner, je pense,
pour la première fois la capacité de geler les effectifs non seulement à l'intérieur des ministères — ce qui peut se faire déjà, et ça s'est déjà fait et se fait relativement facilement — mais aussi dans la fonction publique et
parapublique au sens large. Depuis cinq ans, en moyenne, les effectifs totaux de la fonction publique définie
largement, secteurs public et parapublic, augmentaient, bon an mal an, de
6 250 personnes par année, et ça, c'est après les départs à la retraite.
Donc, nous allons geler ça. Donc, il n'y aura pas d'augmentation de 6 250 effectifs. Et puis, en plus, on va utiliser
les départs à la retraite, c'est quand même 15 000 par année, et on
va se donner les pouvoirs d'employeur pour réallouer ces ressources humaines
dans les secteurs où nous pensons qu'ils
seront les plus utiles à la société et à la livraison de ces programmes-là.
Donc, ces trois outils vont nous aider
beaucoup à remplir… à atteindre nos cibles de contrôle de dépenses : les
deux commissions, le cran d'arrêt et le gel des effectifs.
Comme j'ai
dit au départ, la relance de l'économie, évidemment, constitue un pilier aussi
important que le contrôle des
dépenses publiques, et, en effet, l'endettement public devient vraiment,
vraiment problématique si l'économie stagne. S'il n'y a pas de croissance économique, alors là, la dette, aussi
élevée qu'elle est, elle est déjà très élevée, mais, si, en plus, l'économie est quasi stagnante, alors, là,
ça devient particulièrement préoccupant. Alors, il faut mettre en place des
moyens, des mécanismes qui vont contribuer à accélérer la croissance
économique.
Parce qu'en
2013 force est de constater que la croissance est tombée en panne. Un taux de
croissance d'à peine… du PIB réel, de
1,1 %, c'est très faible. C'était 1,5 % en 2012, qui n'était déjà pas
très fort, et puis ça a ralenti à 1,1 %. Ailleurs au Canada pendant la même période, la croissance est passée de
1,7 % à 2 %, une très modeste accélération, mais ici, de 1,5 % à 1,1 %, c'est quand même
pas bien, si on peut ainsi le dire. Et ce qui a contribué particulièrement à
cette performance économique très
lente, c'est le recul des investissements privés, investissements machinerie et
équipement, qui ont reculé de 6 %. Et c'est ça qui était l'élément
principal.
Les dépenses de consommation, les dépenses des
ménages n'étaient pas particulièrement robustes, mais je ne pense pas que c'était une surprise. D'ailleurs,
rendu à ce point-ci dans le cycle économique, je pense qu'on ne doit pas
s'attendre à de très fortes hausses des dépenses
des consommateurs. Donc, la croissance économique dans les années à venir passe inévitablement par une reprise
d'investissements et une reprise des exportations. Si on n'est pas capables de
faire ça, on n'arrivera pas à accélérer la croissance économique.
Alors, nous
mettons en place une série de mesures qui visent justement à promouvoir
l'investissement et à accélérer la croissance économique. Il y a cinq
axes d'action, si vous voulez, et ces cinq axes sont les suivants, qui avaient
été décrits dans le budget : d'abord,
une série de mesures pour les PME; deuxièmement, notre stratégie maritime;
troisièmement, le Plan Nord;
quatrièmement, les ressources naturelles au sens plus large, pas seulement dans
le Nord; et finalement, le PQI, donc les investissements publics.
Alors,
regardons un peu ces cinq mesures, ces cinq axes d'action. D'abord, pour ce qui
est des PME, nous allons donner ce
que je pense être un coup de pouce assez intéressant en réduisant de 8 % à
6 % et puis à 4 % le taux général d'imposition des PME manufacturières. Donc, à 4 %, ça deviendra un
taux d'imposition équivalent à la moyenne canadienne. Cet allégement fiscal va profiter à 7 500 PME
manufacturières au Québec. Donc, c'est un premier pas dans la bonne
direction.
Deuxièmement,
il y aura une déduction fiscale pour les coûts de transport des PME en région
éloignée qui pourront donc bénéficier d'une aide supplémentaire, pour
ceux qui sont éloignés des grands centres.
J'aurais dû mentionner aussi, avant les PME,
que, dès notre arrivée au pouvoir, nous avons mis en place un programme d'incitation à la rénovation
domiciliaire, le programme LogiRénov, que nous pensons que ça peut donner un
bon coup de pouce
justement au programme de construction résidentielle. Et d'ailleurs peut-être
qu'on le voit déjà un petit peu. Nous
avons remarqué que les mises en chantier pour le mois de mai étaient... pour le
mois d'avril étaient à la hausse.
Donc, ça peut être déjà un pas dans la bonne direction. Et aussi le Conference
Board a aussi publié ses indicateurs de
confiance des consommateurs. Il en va que la confiance revient et revient à
grands pas. Ça ne se traduit pas encore par une activité économique plus
accélérée, mais la première étape, c'est la confiance.
Donc, nous revenons aux PME. La réduction du
taux d'imposition, qui est très important. Aussi, il y a un 20 millions de dollars consacré à Export
Québec pour aider les PME à développer, consolider et diversifier les marchés
hors Québec. Comme j'ai dit tantôt, c'est
par l'exportation qu'on va devoir stimuler notre économie. Nos grandes
entreprises, les Alcan de ce monde,
exportent beaucoup et sont très efficaces à cet égard-là. Ce qu'il nous manque,
c'est que nos PME puissent aussi participer aux exportations.
La grande
récession qui a frappé l'économie mondiale nord-américaine, canadienne,
québécoise en 2008‑2009 a eu un effet
particulièrement sévère sur les PME, tant ici qu'ailleurs, qu'en Ontario, par
exemple. Beaucoup de ces PME ont
fermé boutique. Donc, notre capacité d'exporter a été affectée par la grande
récession. Et donc, pour qu'on puisse bénéficier
d'une reprise des exportations, il faut s'assurer que les PME qui sont encore
là soient capables de percer les marchés étrangers, particulièrement aux
États-Unis, qui sont notre marché traditionnel.
Nous avons
aussi des mesures pour favoriser l'innovation dans les PME, deux mesures
importantes à cet égard-là : le
programme Créativité Québec, qui sera doté de 150 millions sur trois ans
pour supporter les projets d'innovation; et aussi un congé de cotisation au Fonds de services de santé pour
l'embauche de nouveaux employés spécialisés dans des projets d'innovation. Ce
congé d'impôt... de cotisation, pardon, va bénéficier à 175 000 PME
québécoises.
Un autre
aspect de la problématique des PME, c'est le démarrage, la création
d'entreprises. Une chose à laquelle nous
avons constaté, c'est que la création d'entreprises au Québec, elle n'est pas
aussi vigoureuse qu'ailleurs au Canada, en Ontario surtout. Donc, il faut essayer de faciliter le démarrage
d'entreprises, parce que ce sont celles qui vont démarrer aujourd'hui qui vont devenir les Bombardier de ce
monde, on l'espère, dans quelques années. Il faut commencer quelque
part. Donc, les programmes pour le démarrage sont importants. Et, à cet égard-là,
là, il y a trois mesures. D'abord, la capitalisation
du fonds Anges Québec Capital est augmentée de 100 millions de dollars. Et
il y a aussi un nouveau fonds de capital de risque de 375 millions
de dollars en partenariat avec le secteur privé et le gouvernement fédéral.
Le
Président (M. Bernier) : Vous avez une minute pour conclure,
vous avez une minute pour conclure, monsieur.
M.
Leitão : Une minute pour conclure? Merci. Je pense que ma montre
marche plus lentement. Mais, très bien. Écoutez, alors donc, pour conclure, il
y a aussi le Plan Nord, la stratégie maritime, qui sont des axes de
développement très importants. On pourra y revenir, on pourra y revenir
plus tard.
Mais
j'aimerais juste finir — quelques secondes — avec un programme d'investissement public,
donc le PQI, les investissements en
infrastructures, qui sont une partie importante de la croissance économique. On
l'a vu encore hier... lundi à la
Conférence de Montréal, M. Larry Summers qui a beaucoup parlé de ces sujets-là.
Nous allons le faire de façon considérée,
de façon... en tenant compte de la capacité de payer de l'économie québécoise.
Mais, pour cette année, 2014‑2015, quand
même, 11,5 milliards, c'est à peu près 3 % du PIB, ce n'est pas
insignifiant, un tel niveau d'investissement public. J'arrêterais ici,
et donc on pourra poursuivre après. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Vous aurez l'occasion, dans les
prochaines heures, de donner d'autres informations. Merci, M. le
ministre.
Une voix : …
• (15 h 30) •
Le Président (M. Bernier) :
Oui, on a beaucoup de temps devant nous, effectivement. Merci, M. le ministre. M. le député de Rousseau, porte-parole officiel en
matière de finances, la parole est à vous pour un bloc de 20 minutes
pour votre présentation.
M. Nicolas Marceau
M. Marceau :
Parfait. Merci, M. le Président. Alors, je vous salue, donc. Je voudrais saluer
M. le ministre et mes collègues de
Bourassa-Sauvé, Sainte-Rose, Mégantic, Laval-des-Rapides; évidemment mes
propres collègues, le député de
Richelieu, le député de Sanguinet, le député de Marie-Victorin; et les gens de
la deuxième opposition, le député de Lévis puis le député de Groulx.
Alors, je voudrais vous saluer et j'espère que nous aurons de bons débats.
Je profite
aussi de cette occasion qui m'est donnée pour saluer les fonctionnaires, les
hauts fonctionnaires, toute l'équipe
du ministère des Finances qui est présente avec nous pour ce débat, qui, j'ai
pu le constater, fait un travail remarquable,
au service du Québec toujours. Et je sais la qualité du travail qui se fait
là-bas et je sais que le ministre a bénéficié
de cet excellent travail, ce qui n'empêche pas évidemment que le nouveau budget
qui a été présenté peut contenir des
choix politiques, des choix qui sont différents de ceux que j'aurais faits, que
ceux que nous aurions faits. Ces choix-là, c'est légitime, on peut avoir des visions différentes et… Donc, j'aurai
l'occasion, dans les prochaines 9 h 30 min qu'il nous reste, avec mes collègues, de critiquer ces
choix politiques qui ont été faits. Mais je sais que, quant à l'appui que le
ministre a reçu de la part de l'équipe qui
l'entoure, cet appui aura été, j'en suis certain, formidable. Et je
suis content de savoir que, pour la suite des choses, cet appui-là se
maintiendra. Donc, que mes collègues et les hauts fonctionnaires soient salués.
Alors,
effectivement, le nouveau budget incarne des nouveaux choix. J'aimerais quand
même dire d'entrée de jeu que le
cadre financier qu'il contient est très semblable, est très, très semblable à
celui que j'avais présenté le 20 février dernier, à bien des égards, que ce soit quant au profil des dépenses et
des revenus pour la suite des choses, que ce soit quant aux prévisions et surtout… et même aussi, à
certains égards, quant aux mesures. Il y a des mesures qui reviennent aussi, et
c'est tout à fait normal parce que les choix
qui ont été faits le 20 février puis les choix qui ont été faits en juin
s'appuient sur une même réalité, et ce n'est pas complètement surprenant
qu'il y ait des choses qui soient semblables.
Maintenant, je l'ai dit, il y a des choix
politiques qui ont été faits, qui sont très différents aussi. Et ces choix politiques, j'aurai l'occasion, là, d'en reparler
dans quelques minutes, dans une trentaine de secondes. Avant de le faire,
par contre, j'aimerais juste revenir sur une
remarque que le ministre nous a faite d'entrée de jeu en nous disant qu'il y
avait eu une perte de focus dans
notre gouvernement. Écoutez, ça m'a fait sourire. C'est comme de dire que
l'ancien gouvernement libéral avait
perdu le focus à cause de la corruption galopante au Québec et que c'est ce qui
expliquerait les cibles ratées aux
dépenses, les hausses de revenus auxquelles les Québécois ont été conviés par
l'ancien gouvernement. C'est un peu dire le même genre de phrase. Alors,
c'est à peu près n'importe quoi.
L'autre chose
que je voudrais dire, puis j'y reviendrai évidemment, c'est qu'il y a dans le
budget beaucoup de nouvelles
dépenses. Il n'y a pas… Le nouveau gouvernement fait beaucoup de nouvelles
dépenses. Il y en a pour 800 millions sur trois ans. Et j'ai entendu le ministre dire qu'on avait échappé… Alors,
regardez, il y avait des nouvelles dépenses que nous avions l'intention
de faire, d'intégrer à notre cadre financier de la même façon que vous intégrez
vos nouvelles dépenses. Il y en a pour 800 millions. On aura l'occasion
d'y revenir pendant le débat.
Maintenant, je vais revenir sur la facture plus
générale du budget, sur les éléments les plus importants. J'ai eu l'occasion de dire à plusieurs reprises que
c'était un budget de promesses brisées et je pense que c'est encore un
qualificatif qui s'applique
parfaitement à ce budget. Je vous rappellerai que le nouveau gouvernement a été
élu sur la base de promesses de
croissance économique plus forte. Or, le budget… On n'est pas dans le court
terme, là, on n'est pas dans l'attente d'un effet libéral, là. Le budget
incorpore des prévisions, on les voit en chiffres, noir sur blanc, dans le
budget, des prévisions qui sont du
même ordre que celles que nous avions présentées dans le budget de février
dernier, même type de croissance économique.
En fait, s'il
y a quelque chose qui change beaucoup, c'est les prévisions de croissance
économique dans le budget par rapport à ce qu'il y avait dans le cadre
financier du député de Robert-Baldwin alors qu'il était candidat du Parti libéral en campagne électorale. Là, il y a un
très, très grand écart. Mais, par rapport au budget de février dernier, il n'y
a pas d'effet libéral, aucunement.
Les écarts… d'ailleurs, il faudra bien qu'on nous explique pourquoi il y en
avait de si importants, là. Il y
avait un 2,1 % de croissance économique dans le cadre financier du Parti
libéral, alors qu'on voit dans le
budget qu'on est à 1,8 %. On aimerait bien savoir pourquoi le ministre des
Finances, à l'époque candidat libéral, a inscrit des nouveaux… une
croissance économique si forte.
Évidemment, ça a permis de faire des promesses
aux Québécois fort importantes. Cet écart de croissance économique, appliqué dès la première année, ça permet de générer des
revenus supplémentaires au fil du temps. Et on en arrive à tout près de 9 milliards de revenus
supplémentaires. Quand on compare le cadre financier qui a été déposé par le
ministre cette semaine… pas cette semaine,
la semaine dernière, et le cadre financier du Parti libéral, on voit qu'il y a
un écart de 9 milliards aux
revenus sur l'horizon, 9 millions qui évidemment ont été utilisés pendant
la campagne électorale pour promettre
bien des choses aux Québécois. Donc, il y a quelque chose de quand même assez
désagréable dans tout ça.
Sur l'emploi, l'effet libéral, non plus, n'est
pas très, très… Enfin, il ne va pas dans le bon sens, on va dire ça comme ça. Il va plutôt vers moins d'emplois. Le
chef du Parti libéral, le ministre des Finances nous ont dit bien des choses,
en campagne électorale, sur l'emploi. Or, on
a retrouvé le chiffre de 47 800 dans le plan budgétaire du nouveau gouvernement, 47 800 emplois qui ont été
créés en 2013. Et on sait que, pour 2014, on prévoit 31 300, M. le
Président. Alors, j'aimerais bien
savoir, si 47 800 ce n'était pas bon, comment il va qualifier 31 300
pour 2014. Et j'aimerais aussi ajouter
que ce… Vous savez, on a eu nos divergences, l'opposition… bien, enfin, le
Parti libéral et nous, sur la façon de mesurer
l'évolution de l'emploi. On peut utiliser aussi les données mensuelles, et,
là-dessus, je vous signale que ce n'est pas spectaculaire non plus, là. On parle de 50 000 emplois à temps
plein perdus en deux mois. Peut-être que ça se rétablira, puis moi, je le souhaite pour le Québec, je le
souhaite pour les Québécois, j'espère que l'emploi va progresser de façon
plus importante, mais, une chose est
certaine, c'est qu'à ce jour, s'il y a un effet libéral, il ne va pas dans le
bon sens, il est négatif. On parle
d'emplois perdus, d'emplois moindres, que l'on utilise la méthodologie que moi,
je préfère, qui est celle d'un
horizon plus long, ou bien qu'on utilise les données de court terme, là, qui
semblent être la préférence du chef du Parti libéral.
M. le
Président, donc, l'effet libéral sur la croissance économique, l'effet libéral
sur l'emploi, il n'est pas visible. En
tout cas… Puis je ne parle même pas de la réalité, hein? Je parle dans les
documents budgétaires. Dans les documents qui nous sont présentés, les prévisions du ministère des Finances, il y
a, de toute évidence, moins d'emplois pour cette année et l'an prochain et il y a une croissance économique tout à fait
conforme à celle qui était prévue. Il n'y a pas de différence là-dessus.
Maintenant, il y avait une promesse phare du
chef du Parti libéral en campagne électorale qui était celle d'augmenter les dépenses en infrastructures, les
investissements en infrastructures de 15 milliards, donc. Cette promesse,
on le sait maintenant, elle est passée à la trappe. C'est une promesse qui,
dans le fond, a été faite sans qu'on évalue correctement
ce qu'elle impliquait. Étant donné l'endettement du Québec, étant donné les
cibles de réduction de la dette en proportion du PIB que nous nous
devons de respecter, c'était une promesse tout simplement irresponsable.
Et je sais
très, très bien qu'arrivé au gouvernement le nouveau ministre des Finances
s'est fait taper sur les doigts puis
il s'est fait dire par les hauts fonctionnaires : Ça ne fonctionne pas, ce
n'est pas possible; si on fait ça, c'est la décote. Et je sais très bien
que c'est ce qui est arrivé. Et je sais très bien aussi que c'est quand même un
problème important parce
qu'à partir du moment où ce 15 milliards n'existe plus pour le Parti
libéral ils sont pris au dépourvu, ne sachant plus comment on peut faire pour faire croître
l'économie. Alors, c'est le drame, là, que le Parti libéral va vivre dans les
prochaines années parce qu'il a perdu le seul outil qu'il connaisse.
Autre
promesse brisée, autre promesse non respectée, celle de ne pas augmenter les
impôts des Québécois. Déjà, on sait
qu'il y a eu une hausse du prix de la bière et du vin, une hausse des taxes sur
le tabac. On va supposer que, quand le
ministre des Finances ou quand le premier ministre parlait en campagne
électorale, ils avaient en tête les impôts sur le revenu ou les taxes à la consommation, les taxes
générales plutôt que les taxes spécifiques. Alors, on peut mettre de côté les
taxes sur la bière et le vin, les taxes sur le tabac, s'il le désire, mais il
n'en demeure pas moins que, sur la question du fractionnement du revenu pour les retraités, il n'y avait rien de tel.
En tout cas, à ma connaissance, là, je n'ai pas entendu le ministre des Finances, en campagne électorale,
au moment d'un rallye libéral, dire aux gens : Vous, là, les gens qui
ont moins de 65 ans puis qui êtes à la retraite,
on va vous taxer, on va vous imposer plus fortement. Je n'ai pas entendu ça.
• (15 h 40) •
Maintenant,
autre hausse du fardeau fiscal, il y a évidemment la réduction des crédits
d'impôt de 20 %. Ça non plus, je
n'ai pas entendu le député de Robert-Baldwin ni le premier ministre annoncer à
nos entreprises qu'on allait réduire les
crédits d'impôt de 20 %. Je n'ai jamais entendu ça en campagne électorale.
En fait, ils se sont engagés formellement à ne pas augmenter le fardeau fiscal des contribuables. Les
contribuables, ça inclut à la fois les particuliers et les entreprises.
Les coupes
dans les crédits d'impôt — et on aura l'occasion d'y revenir pendant le débat — évidemment, ça a un impact sur les entreprises, ça a un impact sur la
compétitivité du Québec pour attirer des investissements. J'ai entendu le ministre des Finances, ce matin, tenter de
minimiser l'impact de cela. Je pense qu'il sous-estime grandement la fragilité
et la férocité aussi, la fragilité de notre
situation puis la férocité de nos compétiteurs, qui n'attendent que cela. Ils
n'attendent que cela. Les États qui
nous entourent en Amérique du Nord sont extrêmement agressifs. Ils le sont plus
que jamais au lendemain de cette récession qui a saigné bien des
économies, et je pense qu'il les sous-estime grandement.
Mais, si 370 millions, ça ne l'inquiète
pas, imaginons ce que ce sera quand on ajoutera le 650 millions supplémentaire. On parle de 1 milliard de
dollars, là, d'augmentation du fardeau fiscal de nos entreprises. Et là je le répète
puis je le réitère, là, quand, en campagne
électorale, a-t-il dit à nos entrepreneurs : Je vais augmenter votre
fardeau fiscal de 1 milliard de
dollars? Quand, en campagne électorale, avons-nous entendu ces gens-là nous
dire ça? Moi, je n'ai jamais entendu
ça, je ne crois pas que ça a été dit. En fait, on nous a dit qu'on
n'augmenterait pas le fardeau fiscal des Québécois, et moi, à ce que je sache, là, les entreprises
font partie des contribuables québécois. Alors, 1 milliard, ça représente,
là… si on prend le niveau de l'impôt
actuel des sociétés, ça représente une hausse du fardeau fiscal des sociétés de
30 %. 30 % de plus, regardez, c'est très important.
Ce matin, il
y a le mot «catastrophe» qui a été utilisé. Le ministre des Finances n'avait
pas l'air très à l'aise avec ce
mot-là; bon, il pourra trouver un synonyme s'il le désire. Mais moi, je peux
vous dire que 30 %, ça va avoir un impact. Ce n'est pas vrai qu'il n'y aura pas d'impact. Regardez, le fait que les
impôts des sociétés ont des impacts sur l'investissement, sur le
comportement des entreprises, c'est extrêmement bien documenté dans une très
vaste littérature. Et, on le sait nous-mêmes
par l'expérience, les crédits d'impôt ont permis d'attirer des
investissements, ont permis de maintenir des emplois au Québec. Vous
jouez avec le feu, M. le ministre des Finances, j'en suis complètement
convaincu.
Puis, on aura
l'occasion d'élaborer là-dessus, vous avez parlé de votre commission sur la
fiscalité. Moi, j'ai la désagréable
impression que les conclusions de cette commission sont déjà écrites et je
pense qu'il y a beaucoup de gens qui
sont comme moi. On sait donc, d'ores et déjà, que l'objectif, là, ça va être,
donc, de justifier le milliard de coupures dans les crédits d'impôt, dans les aides fiscales. Donc, il va falloir
avaliser ça, d'une part, puis trouver la meilleure manière d'aller chercher ce milliard du côté de l'impôt
des sociétés. Moi, je trouve que vous réduisez beaucoup, d'ores et déjà, le
mandat de cette commission, vous l'encadrez
beaucoup trop fortement. Si vous voulez les laisser réfléchir, laissez-les
réfléchir librement puis ne leur passez pas
vos commandes difficiles. Demandez-leur plutôt de réfléchir puis de trouver
des ajustements qui seraient intéressants.
En tout cas,
regardez, je suis très inquiet de ça, très inquiet de tout ça. Puis je vous
rappelle simplement… je l'ai fait déjà, mais je vais vous le
redire : En 2003, ça a été la même histoire. En 2003, nouveau gouvernement
libéral, ils arrivent et, sans réflexion,
sans étude, coupent de 20 % les crédits d'impôt. Et qu'est-ce qu'on a
fait? Bien, au bout d'un an, après
avoir constaté les dégâts, en particulier dans le secteur des biotechs,
là — le
secteur des biotechs qui avait commencé à s'implanter au Québec de façon importante puis, pendant l'année, il a
déménagé à Toronto, là, pendant cette année-là, a déménagé à Toronto — eh bien, au bout d'un an, on a dit :
Ah! bien là, zut! On s'est trompés puis on va rétablir les choses. Ils ont remis en place les crédits d'impôt au
niveau où ils se trouvaient pour plusieurs d'entre eux, mais il était trop
tard.
Je veux dire,
constituer une grappe d'entreprises, là, c'est précieux. Une fois qu'on l'a, il
faut la nourrir, il faut la garder,
il faut la conserver. Et l'effritement de ces grappes-là, ça va avoir des
conséquences à long terme. Et vous allez voir que de rebâtir ces grappes-là, ce n'est pas simple. Je pense que
vous… en tout cas, je vous invite à y réfléchir très fortement et j'aurai l'occasion de vous poser des
questions sur les éléments puis les études que vous avez utilisés pour
arriver à des conclusions comme celles-là.
Maintenant, je vois qu'il me reste moins de
temps. Sur la vision de développement économique du nouveau gouvernement, je l'ai dit déjà, là, donc, le fait que le 15 milliards de dépenses en infrastructures soit disparu, ça vous a un peu coupé les jambes, j'en suis bien conscient.
On va vous donner le temps de vous retourner de bord, mais, pour l'instant,
on voit bien qu'il n'y a pas grand-chose
dans votre budget. Quand on compare ce qu'il
y a dans le budget avec la politique
économique qu'on avait déposée, qui contenait à la fois des mesures pour
stimuler la recherche et l'innovation, qui contenait
tout ce qu'il fallait pour moderniser notre secteur manufacturier qui traîne de
la patte, qui a traîné de la patte depuis
10 ans, résultat, entre autres, de l'appréciation du dollar canadien, quand on
voit aussi que, dans notre politique économique, il y avait des mesures
pour le commerce extérieur, qu'il y avait des mesures pour l'électrification
des transports, tout
ça de manière intégrée puis intelligente, je ne peux pas… enfin, la
comparaison, disons, n'est pas agréable pour vous, je trouve, quand je regarde ce que j'ai trouvé dans votre
budget. Même s'il y a quelques mesures qui, prises isolément, peuvent
être intéressantes, la vision d'ensemble, là, disons, n'est pas convaincante.
Sur le
contrôle des dépenses, j'aurai l'occasion d'y revenir aussi, disons, je veux simplement
signaler l'opacité de votre plan budgétaire. Je trouve qu'il n'y a pas beaucoup
d'information, et, encore à ce jour, on ne sait pas trop grand-chose sur ce qui va se passer avec
l'étalement du salaire des médecins. Puis, sur la santé, on ne sait pas… enfin,
on sent une timide volonté d'aller vers le financement d'activités, mais j'aurais bien… je m'attendais que vous l'affirmiez
de façon très, très forte, mais on n'a
pas vu grand-chose dans votre plan budgétaire, sur le virage vers les soins à domicile
non plus. Or, c'est clairement la voie dans laquelle nous devons aller.
Je signale
d'autres reculs, entre autres sur les services de garde. En campagne électorale, je n'ai jamais entendu le Parti libéral nous dire qu'il allait freiner le développement des places en
CPE, je n'ai jamais entendu ça. On a entendu que vous ne toucheriez pas aux tarifs, que vous n'augmenteriez pas de 7 $ à 9 $ puis que vous allez vous
contenter d'indexer. Là-dessus, vous
livrez, mais on sait que la commission sur la fiscalité va servir à vous
dédouaner pour une augmentation plus
importante pour la suite des choses, et les Québécois vont se retrouver avec le
pire des deux mondes, là, donc, c'est, à la fois, plus de tarifs, mais
pas plus de places en garderie. Alors, ça va être très… C'est très curieux.
Et, sur le
pétrole, là aussi, il y a une volte-face assez intéressante. Alors que vous
parliez de loto-pétrole en campagne électorale,
bien il semble vous allez aller de l'avant parce que j'imagine que vous
comprenez qu'on ne veut pas ne pas saisir cette occasion qui est fort
importante pour le Québec.
Alors, regardez, un budget de promesses brisées,
je pense que ça résume bien ce que je pense. Les reculs sont nombreux. Évidemment, mes collègues et moi, nous
allons profiter de ce débat pour creuser chacun des problèmes, chacune
des promesses brisées qu'on a pu constater dans le budget. Merci, M. le
Président.
• (15 h 50) •
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Rousseau.
J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de finances publiques et député de Lévis
à ses remarques préliminaires pour une période de 20 minutes.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M.
le Président. Et je tiens à mon tour à saluer tout le monde de cette commission-là qui… nous le savons tous, elle est
très importante. Je reconnais des collègues qui étaient au gouvernement avant puis je les salue, là. Je pense que ça va
être intéressant de travailler dans ce rôle-la, dans ce rôle d'opposition là.
Je salue les nouveaux arrivants au niveau du
gouvernement. Je pense que tout le monde est d'accord qu'on a une tâche et que vous avez une tâche assez incroyable de
redresser les finances publiques, puis, je vais le redire, ça ne sera pas une
surprise pour personne, nous allons vous
donner, à la coalition, avec mon collègue ici de Groulx, le maximum de disponibilité et, je dirais, d'opposition
constructive pour vous aider dans cette lourde tâche là. Nous serons critiques,
mais nous serons là pour amener des idées et peut-être faire des
suggestions.
J'aimerais
dire aussi que je pense que c'est… l'importance pour moi de cette Commission
des finances publiques, M. le
Président, que vous avez la chance de présider. Il faut se remettre dans le
rôle, de la façon dont moi, je le vois, et vous me direz si je fais erreur plus tard, parce qu'on va avoir bien du
temps de s'en reparler. À mon sens, les 125 députés de l'Assemblée nationale nous donnent ce forum-là
pour poser des questions, pour avoir le temps de réfléchir à des éléments
qu'on n'a pas toujours le temps, au salon
bleu, de questionner, de prendre le temps. Alors, quand vous me donnez
aujourd'hui une dizaine d'heures qui
est répartie entre les deux groupes,
je pense qu'on doit profiter de ces moments-là importants pour faire le bon questionnement puis, je
dirais, de mettre la partisanerie de côté et d'en profiter pour poser les
bonnes questions, parce que je pense que c'est un exercice excessivement
sérieux.
J'aimerais
aussi faire le lien avec le rôle qu'on aura en commission parlementaire. Parce que,
là, aujourd'hui, on parle
du budget pour une dizaine d'heures, mais, comme vous
savez, il y a un lien très important avec les crédits, hein?
On n'a pas eu la chance depuis longtemps
de regarder les crédits. Là, on va avoir la chance dans les prochaines semaines.
Et, M.
le Président, notre nouveau ministre des Finances, aujourd'hui, a donné une ligne très claire sur les dépenses,
mais il faut faire le lien avec les
crédits. Et j'y reviendrai un petit
peu tout à l'heure, parce qu'on a un besoin de documentation qui est important, puis je reviendrai
sur ce point-là tout à l'heure.
Donc, la Commission des finances publiques, pour
moi, dans un des rôles que je lui vois, c'est de faire le lien souvent entre les Finances et le Trésor, parce qu'on a à travailler sur les deux, et c'est un peu ce qu'on demande, de la
complicité entre notre ministre des Finances et le président
du Conseil du trésor, qui viendra à
la Commission des finances
publiques aussi. Alors, pour moi, ça, c'est un rôle important qu'il ne faut pas
oublier.
Si je vais un peu plus dans des éléments qui vont nous préoccuper au cours des prochaines semaines, je vous dirais que je commenterais sur trois blocs — puis ça ne sera pas une surprise, là — dans le budget du ministre des Finances,
c'est au niveau, c'est sûr, des revenus,
c'est sûr, des dépenses, mais aussi, je dirais, dans l'implication pour le
contribuable. Parce que, dans le
fond, une question de budget, c'est une question de garder l'équilibre entre
les revenus et les dépenses, mais on
a toujours le même contribuable qui, à la fin, si cet équilibre-là… pardon, si
cet équilibre-là n'est pas là, bien, on se retrouve toujours à soit
l'endetter ou à le taxer. Alors, je vais parler au niveau des revenus.
J'ai dit qu'on était peut-être moins satisfaits
de l'aspect économique du budget du ministre des Finances, pas parce que les intentions ne sont pas là. Je crois
que… Et j'en reparlerai, là, au cours de la présentation, un peu plus en
détail avec mon collègue, mais c'est sûr qu'il y a des éléments dont vous avez
parlé, les cinq axes, etc., on reconnaît qu'il
y a des éléments qui sont là, mais on a peut-être plus de difficultés à voir le
fil conducteur et des objectifs beaucoup plus précis. Vous allez m'entendre souvent, dans
les prochaines semaines, parler d'objectifs, et j'y reviendrai parce que,
pour moi, on sent peut-être moins cette
cohésion-là du côté revenus qu'on le sent du côté des dépenses, puis j'y
reviendrai, mais je pense que c'est un message important à passer.
Pour
ce qui est des dépenses, j'ai salué, et je le redis, qu'il y a eu un exercice
de courage au moins sur l'aspect… — et je
ne le dis pas négativement, là — sur l'aspect théorique d'attaquer, dans ce premier
budget là… Moi j'aurais voulu qu'on arrive
à un équilibre budgétaire encore plus rapidement, mais je pense que, dans
l'état où ce nouveau gouvernement là a pris
les finances publiques, je pense qu'à la lumière des vrais chiffres, là, qui
nous ont été révélés, je pense que c'était un exercice qui était beaucoup plus grand que tout le monde avait pu
penser. Et on reviendra sur l'importance d'un directeur de budget dans
une de nos discussions, je pense, M. le Président.
Mais
ce qu'il est important de dire, c'est que nous saluons, à la coalition,
l'effort qui est fait, et nous l'apprécions, de redresser le plus rapidement possible les dépenses. Maintenant, ce
que j'aimerais mentionner, et je vais le dire parce que j'ai tellement eu de difficultés dans mon… Et
je regarde en ce moment les gens qui nous écoutent, je vais demander d'avoir beaucoup de rigueur au cours de quatre
prochaines années, non seulement au ministre, mais à son équipe, aux
députés puis aussi à l'équipe du ministre des Finances qui…
Je
pense qu'on se targue, et à raison, d'avoir une très bonne équipe au ministère
des Finances. Mais, moi, il n'y a rien
qui m'insultait le plus — puis je vais le dire avec les mots les plus gentils et doux
possibles — de me
faire dire par l'ancien gouvernement
que ce gouvernement-là contrôlait les dépenses, alors qu'on sait très bien
maintenant que c'était archifaux. Et
ce que je ne voudrais pas, c'est qu'on se rembarque encore dans cette
guerre-là, de se faire dire que l'on contrôle les dépenses alors que ce
n'est pas vrai.
Alors,
pour moi, M. le Président, il va être absolument important, absolument
important qu'on s'entende clairement sur
la terminologie, sur la documentation et, lorsque l'on met des faits sur la
table à savoir que les dépenses sont sous ou hors contrôle, qu'il n'y ait pas de discussion sur la terminologie, mais
qu'on sache qu'une cible, c'est une cible puis elle ne peut pas changer avec la température en
fonction des gens qui veulent dire : Regardez, on contrôle bien les
dépenses, alors que tout le monde sait, peut-être à part eux, qu'on
contrôlait effectivement les dépenses. Et ça, pour moi, c'était important,
parce que, quand je vous disais que le rôle de la Commission des finances publiques, c'est de venir se dire les vraies choses
ici, supportées par des faits, pour ne pas que cette situation hors contrôle
que nous avons vécue pendant 18 mois puisse
continuer d'arriver. Pour moi, c'est excessivement important
et ça fait partie de notre rôle. Je pourrai y revenir en détail s'il y a
des gens qui ont des questions là-dessus, ça me fera plaisir.
Maintenant,
dans l'urgence d'agir, ce que je dirais au ministre des Finances aujourd'hui, M. le Président, c'est que nous, on débat un peu, chez nous, entre, je dirais, une grande joie incommensurable
sur le fait d'attaquer les dépenses versus
une certaine réserve. C'est qu'on met en place certains comités, puis je le
comprends, il y a un exercice qu'on veut rigoureux, on veut faire attention de faire
certains choix, mais, en même temps, le danger de la comitite est souvent un
gage de reporter en avant des décisions que l'on trouve douloureuses.
Alors,
je salue le comité qui a été mis en place ce matin. Il y en a
un autre qui va l'être demain. Mais il reste que, si je regarde le rapport du Vérificateur général qui nous a été déposé ce matin, ce que moi, j'appelle le musée des
horreurs, on fait juste changer la
version du musée des horreurs, il y a beaucoup de choses. Puis tout le monde l'a lu
rapidement ou a vu les grandes lignes
du rapport du VG qui a été déposé ce matin, Il y a des choses qu'on peut
adresser rapidement. Il y a des choses qu'on peut faire qui ne doivent pas
attendre un comité qui va être mis en place aujourd'hui, qui va faire
rapport à l'automne ou en décembre.
On
a, M. le Président, besoin,
et c'est ce qu'on s'attend de ce
gouvernement-là, s'il est sérieux dans le besoin de redresser les finances publiques, d'agir sur
certaines choses, autant dans les dépenses que dans les revenus, mais je fais
une emphase sur les dépenses. Et, on l'a vu,
ce matin, avec le rapport du VG, lorsqu'on parle de l'accessibilité aux livres d'Hydro-Québec, ça, c'est une chose, mais, ce matin, ce que le
VG nous a dit, c'est que dans, par
exemple, les partenariats privé-public qui ont été faits sur les aires de
services, sur le fait que la commission… pas la commission, mais le CSPQ, qui est le Centre des services partagés, qui a un rôle important
à bien faire les achats du gouvernement, qui ne fait pas du tout son rôle... Alors, il y a plusieurs
éléments qui ont été déposés par le VG, et on n'a pas besoin d'attendre un
rapport sur la fiscalité ou sur la
révision des programmes pour agir rapidement puis être capable
d'étancher ce déficit important là.
Alors, moi, ce que je
demande, pour être très clair, c'est au ministre de nous dire, et c'est là-dessus
qu'on va insister… Oui, vous avez un programme… différents programmes à termes,
sur la prochaine année, de préparer votre prochain
budget, mais, moi, ce que je voudrais sentir, dans votre contrôle des
dépenses, c'est qu'il y a des choses qu'on va faire beaucoup plus rapidement. Vous l'avez adressé dans
certaines choses en disant : Bien, on va aller à 20 % dans certaines dépenses, etc. Mais je pense qu'il faut aller plus loin dans
la gestion des finances publiques. Puis je vais aimer vous entendre sur des choses, là… Tout à l'heure,
j'ai donné l'exemple des achats au CSPQ, mais on peut parler des dossiers
informatiques. Alors, il y a plusieurs
choses que nous, nous avions soulevées dans notre programme puis qu'il nous
fera plaisir d'aller un petit peu plus en détail dans ça.
Donc,
j'ai parlé du côté des revenus, j'ai parlé du côté des dépenses. Sur les
revenus, avant d'aller au contribuable, j'aimerais dire que, philosophiquement, le fil conducteur que nous
cherchons… Puis d'ailleurs j'ai eu la chance d'en parler avec le ministre des Finances puis d'en toucher un
peu avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, moi, je crois qu'on n'a pas les moyens non plus d'attendre du côté des
revenus étant donné les chiffres d'emplois que nous avons obtenus depuis quelques semaines. Et je n'irai pas entrer
dans : Est-ce que c'est plus un problème du dernier gouvernement, du
nouveau? On a ce problème-là aujourd'hui. On
le sait, notre croissance des emplois, elle est anémique. Et je ne pense pas,
encore une fois, que c'est le temps de faire de la partisanerie. Ce qui est
important, c'est de trouver des solutions.
• (16 heures) •
Et j'aimerais vous dire… vous soulever, puis
d'ailleurs je l'ai mis sur les réseaux sociaux ce matin, je pense qu'il y a un consensus qu'un des éléments clés que
nous avions mis dans la campagne était les zones d'innovation, qui étaient, M. le Président,
dans le livre de M. Legault sur le Projet Saint-Laurent. Et autant j'apprécie
les cinq axes du ministre des
Finances, autant je crois que l'élément des zones d'innovation que nous avions
expliqué, pour moi et pour notre groupe, est excessivement important. Et, s'il y avait un message que j'aimerais
passer aujourd'hui, M. le Président, c'est qu'il y a de ces éléments-là qu'il nous ferait absolument
plaisir de continuer à partager avec les gens du gouvernement pour que certains de ces éléments-là soient repris dans
certaines régions du Québec parce qu'il y a un besoin de le faire. D'ailleurs, le
chef de la coalition en a parlé dans des endroits, comme par exemple dans son comté à L'Assomption, où on a une perte d'emploi de 1 300. On ne peut pas remplacer une entreprise qui
avait 1 300 employés en allant chercher une entreprise du jour
au lendemain. Mais est-ce qu'une
zone d'innovation qui viserait une dizaine, une vingtaine, une trentaine
d'entreprises, sur un axe d'un an ou
deux... ça, c'est possible de le faire. Et, je le redis, on a besoin de
soumettre certaines idées pour les revenus.
Maintenant,
où on est vraiment malheureux…
Et je pense qu'un ministre des Finances, ça a le droit de changer d'idée. Alors, je le dis avec beaucoup d'humour,
dans les rencontres prébudgétaires que nous avions eues, nous avons dit : O.K., nous reconnaissons le besoin de
faire le redressement des finances publiques, mais nous avons bien dit aussi
qu'il fallait penser au contribuable. Puis
moi, je ne peux pas m'empêcher… Puis j'ai la chance, avec mes collègues ici,
d'avoir plusieurs économistes alentour de la table. Le député de Rousseau est
quand même reconnu pour plusieurs de bonnes
idées qu'il a déjà eues en tant qu'économiste. Nous avons quelques économistes,
dont notre ministre des Finances. Mais
on sait une chose : qu'il y a 60 % du PIB qui vient de la
consommation. Alors, moi, j'ai un peu de problèmes à penser que, si on essaie de relancer l'économie puis
qu'on ne donne pas un petit peu d'argent au contribuable… je pense qu'on
s'enlève un outil, et encore plus lorsque non seulement on ne l'aide pas, mais
on continue de le taxer.
Moi, je suis
complètement renversé d'avoir la réponse du ministre de l'Éducation qui nous
dit que 500 millions d'augmentation
des taxes scolaires sur les prochaines années, c'est acceptable et c'est
raisonnable. On n'a pas... Je pense qu'il y avait eu un engagement, et
d'ailleurs le député de Rousseau l'a dit tout à l'heure, il y avait un
engagement du Parti libéral de ne pas
augmenter le fardeau fiscal, mais là on est en train de dire que non seulement
on ne le gèle pas, mais on
l'augmente. Et, sur ça, ce que nous avions demandé, puis, encore une fois, il
reste encore un peu de temps pour changer, peut-être pas dans le budget parce qu'on le votera demain, mais ça
serait bon que, peut-être durant l'été ou au cours des prochains mois, il y ait peut-être des
réaménagements, parce que ce contribuable-là, notre citoyen a besoin d'un petit
signal, n'a peut-être pas besoin, des fois, de... Il comprend, puis je
pense qu'on demande... j'ai bien compris le message, on demande à tout le monde de faire un effort, mais, dans le cas du
contribuable et particulièrement, je dirais, pour les familles puis la
classe moyenne, il y a besoin de faire quelque chose, et ce budget-là l'oublie.
J'ai dit tout
à l'heure qu'on allait avoir un rôle… et c'est ce que nous voyons, nous, comme
opposition, c'est d'être capables
d'avoir ce rôle-là de non seulement demander quels sont les objectifs, hein,
les objectifs en termes de revenus, les
objectifs en termes de dépenses, qu'est-ce qu'on fait avec le contribuable,
mais de nous donner aussi des indicateurs. Parce que, ça, je l'avais demandé au député de Rousseau quand il était
dans son rôle, il y a quelques mois de ça, j'avais demandé, au tout début, dans ma première
rencontre, j'avais dit : Faire un budget, ce n'est pas juste mettre des
chiffres ensemble, mais on peut avoir
un budget qui balance, mais, si on n'a pas comme objectif d'aller mettre des
indicateurs qui viennent montrer qu'on s'améliore...
Parce que
balancer un budget, c'est une chose, mais est-ce qu'en même temps on améliore
les temps d'attente dans nos
hôpitaux? Est-ce qu'on améliore le taux de décrochage scolaire? Est-ce qu'on
améliore nos entreprises? Il faut être
capable de regarder les deux. Et, je vais vous dire, vous allez nous trouver
tannants dans les prochaines semaines, mais
nous allons demander à questionner ces objectifs-là, ces indicateurs-là, pour
être capables de mesurer le gouvernement. Et je rappellerais, aujourd'hui, à tous ceux qui sont ici — parce qu'on va être excessivement tannants,
pour ne pas dire d'autres mots — qu'on n'invente rien, c'est déjà dans la Loi
de l'administration publique qui a été votée en 2001, qui dit que, lorsqu'on discute les budgets et les
crédits, il faut avoir les objectifs. Ces objectifs-là, qu'on retrouve de plus
en plus dans les rapports de gestion de nos différents gestionnaires,
mais il faut aussi les retrouver lorsqu'on discute des budgets. Et c'est ce que nous allons faire avec vous non seulement pour
monter la barre un peu puis de dire c'est quoi, votre objectif, mais pour être capables, M. le
Président, de mesurer notre ministre des Finances dans la réalisation de ses
chiffres et de ses objectifs.
Je dirais, en conclusion, que — je le
redis, encore une fois, avec beaucoup de positivisme — nous
avons une chance aujourd'hui d'avoir un
consensus, dans la population, qu'il faut faire un virage important. Il y a un
consensus, dans la population, de le
faire. Il y a un consensus, je pense, autour de la Commission des finances
publiques, que les faits sont là, on
est dans une situation financière difficile. Et je crois, M. le Président, qu'à
moins que je ne comprenne pas les différents
messages, du côté du gouvernement, là, vous avez six, presque sept
représentants qui ont cette volonté-là, je pense qu'on a une équipe très compétente, du côté du ministère des
Finances, qui est prête à vous supporter et à vous donner l'information, je le redis, du côté de notre
formation, on va être là pour supporter, mais questionner, mais, en même temps,
je veux penser aussi que, du côté de
l'opposition officielle, il y a ce devoir, il y a cet intérêt-là de le faire
correctement.
Alors, je
veux vous dire que j'espère que nous aurons des discussions constructives,
parce qu'on a tous le même objectif,
et c'est ça que les contribuables, c'est ça que les citoyens s'attendent de
nous, c'est qu'on vous pousse à faire un
petit peu mieux parce que la situation est difficile, puis, dans ce
contexte-là, on va être là pour ça. Merci beaucoup, M. le Président.
Discussion générale
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Lévis, de votre
présentation. Nous allons passer maintenant à l'étape du débat. Donc,
c'est l'opposition officielle qui va débuter ce premier bloc.
M. Marceau :
…
Le Président (M. Bernier) :
Oui, vous avez des questions?
M. Marceau :
Oui. Bien, effectivement, j'ai apporté des documents, des copies pour les
collègues, de manière à… enfin, au moins une copie pour le ministre, là,
de… Je peux donner ça au secrétariat?
Le Président (M. Bernier) :
Oui, pas de problème.
M. Marceau : Il y a trois
documents.
Le Président (M. Bernier) :
On les reçoit. Vous voulez qu'on…
M. Marceau : C'est pour
distribution.
Le Président (M. Bernier) :
Pour distribution?
M. Marceau : Déposer,
distribution. Enfin, ce sont des documents officiels, là.
Le Président (M. Bernier) :
Bon, c'est bien.
M. Marceau : Ça va?
Le
Président (M. Bernier) : Donc, un premier bloc de l'opposition
officielle en matière de finances. M. le député de Rousseau, la parole
est à vous, pour un bloc de 20 minutes.
M. Marceau :
Parfait. Merci, M. le Président. Alors, écoutez, moi, j'aimerais commencer par
des questions de croissance économique… Si on peut donner à M. le
ministre — oui,
parfait, impeccable — les
documents…
Alors, en fait, pour le bénéfice de ceux qui
nous écoutent, j'ai apporté essentiellement, du plan budgétaire qui vient
d'être déposé, les pages A.24 et A.25, là. C'est le cadre financier du
gouvernement. J'ai aussi apporté le cadre financier du mois de février, du
budget que nous avions déposé, les mêmes pages. À cette époque-là, c'étaient
les pages A.26 et A.27. Et j'ai apporté le
cadre financier du Parti libéral du 18 mars dernier, M. le Président, pour
rappeler à la mémoire du ministre les
prévisions qui étaient incorporées à ce cadre financier. Et j'inviterais le
ministre à prendre la page 5 du cadre financier du Parti libéral.
Le Président (M. Bernier) :
Je veux mentionner que les documents sont déposés pour fins…
M. Marceau : Sont déposés,
oui.
Le Président (M. Bernier) :
…pour fins d'information.
M. Marceau :
Bien, les budgets sont déjà déposés, les deux, là, il n'y a pas de problème.
C'est simplement pour aider la…
Le Président (M. Bernier) :
…pour la discussion ici, à la commission.
M. Marceau :
Le débat, voilà, oui. Mais, le cadre financier, j'imagine que les collègues
l'ont aussi, de l'autre côté, mais je
voulais simplement m'assurer que le ministre ait le cadre financier du Parti
libéral sous la main. C'est pour ça que
j'en ai apporté une copie. Donc, à la page 5, le ministre trouvera le cadre
financier, au tableau 2, du Parti libéral. Et je l'invite tout simplement à consulter maintenant la page A.24 de son
budget, la page A.24 de son plan budgétaire. Et je voudrais simplement
qu'il constate avec moi les écarts fort importants qu'on trouve quant aux
revenus dans le cadre financier du Parti
libéral, par rapport au budget qu'il a déposé. Les écarts, comme je le disais,
sont de l'ordre de… Vous avez, par
exemple… vous pouvez prendre la ligne «Total des revenus consolidés». Puis,
écoutez, on pourrait débattre sur le fait qu'on utilise avant ou après
mesures que vous aviez mis dans votre cadre financier.
Mais vous pouvez comparer avec moi, si vous le
voulez, la page A.24, les revenus consolidés dans le cadre financier du gouvernement déposé en juin et dans
le cadre financier du Parti libéral, vous allez constater que les écarts
sont fort importants. On parle d'un écart,
là, à l'année 2018‑2019, de 3,3 milliards de dollars et d'un écart, là,
sur cinq ans, de 8,8 milliards
de dollars. Je ne sais pas, peut-être… Sur les faits, est-ce que vous êtes
d'accord sur le fait qu'il y a un écart de 8,8 milliards? C'est une
question très simple.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : …c'est évident :
72,6; 69,3. Ça ne prend pas une…
• (16 h 10) •
M. Marceau : O.K.
Alors, là-dessus on est d'accord? Maintenant, je voudrais simplement vous
rappeler que la raison de base, là…
enfin, celle qu'on connaît bien… Parce qu'évidemment on ne connaît pas
l'ensemble des gestes que vous avez posés pour arriver à votre cadre financier.
Mais vous aviez reconnu, à l'époque de la campagne électorale, que le taux de croissance du PIB réel que vous
prévoyiez pour 2014, était de 2,1 %, alors que, dans votre budget, celui
que vous venez de déposer, vous prévoyez 1,8 % pour 2014.
Maintenant,
j'aimerais rappeler un certain nombre de chiffres à ceux qui nous écoutent.
Tout d'abord, le Mouvement Desjardins fait,
lui aussi, des prévisions de croissance économique, la Banque Laurentienne, la
Banque Royale, TD, enfin, plusieurs
personnes en font. Lorsque vous étiez économiste à la Banque Laurentienne, vous
aviez prévu 1,8 % avant
l'élection. Ça, c'était avant l'élection. Chez Desjardins, c'était 1,7 %
avant l'élection. Et simplement pour qu'on convienne, là, qu'il n'y a pas eu de changement dramatique, après
l'élection, Desjardins a refait une nouvelle prévision à 1,7 %. Donc, 1,7 % avant, 1,7 %
après, les prévisions n'ont pas changé. Chez la Laurentienne, je vous disais
que c'était 1,8 %. À la Banque
Nationale, à RBC, chez TD, on était à 1,9 % avant l'élection. 1,9 %.
Ce qui m'amène à vous demander : D'où avez-vous sorti le 2,1 %
en campagne électorale?
M. Leitão :
Est-ce que je réponds?
Le Président (M.
Bernier) : Oui. Allez-y, M. le ministre.
M. Leitão :
Je ne sais pas comment ça se passe dans la…
Le Président (M.
Bernier) : Oui. Allez-y.
15391
15391 M. Leitão : Très bien.
Le Président (M.
Bernier) : Ce que je fais, c'est que je vous donne environ la
même proportion de temps de réponse que le temps de la question.
M. Leitão :
D'accord.
Le Président (M.
Bernier) : Pour que soient balancées les choses.
M.
Leitão : D'accord. O.K. Alors, pour ce qui est des prévisions que nous
avions faites en campagne électorale, oui,
en effet, elles étaient plus agressives que celles qu'on retrouve dans le cadre
financier, il y a deux raisons essentiellement à ça — dans
le cadre financier, je veux dire, dans le budget — il y a deux raisons
essentiellement à ça.
D'abord,
quand on fait un budget, on doit être extrêmement prudent et extrêmement
conservateur. Donc, on a utilisé des
hypothèses que moi, je considère qui sont très conservatrices, qui sont très
prudentes. Je demeure convaincu que la croissance
économique, cette année, 2014, surtout au deuxième semestre… vont nous
surprendre par leur vigueur. Ça sera pas
mal, à mon avis, plus robuste que ce qu'on voit ici maintenant. Et, en 2015
surtout, la croissance va être plus rapide. Je demeure convaincu de ça.
Cependant,
pour faire un budget qui soit crédible, il faut que ce budget-là se base sur
des hypothèses hyperprudentes. Donc,
il y a beaucoup de prudence qui est bâtie dans le processus budgétaire pour
qu'on puisse arriver à nos cibles, pour que la même situation qui s'est avérée en 2013‑2014 ne se reproduise
plus. En 2013‑2014, on prévoyait une augmentation des revenus de 5,9 %. C'est comme ça qu'on
arrivait à l'équilibre. Évidemment, ce n'est pas ça qui s'est passé. Alors donc,
on commence par des hypothèses de croissance
économique qui sont plus prudentes que ce que je pense que ce sera le cas.
Deuxièmement,
l'autre raison qu'on voie une différence entre le cadre financier préélectoral
et ce qu'on a dans le budget, c'est
le point de départ. Le point de départ est très différent. Je vous ramène aux
conclusions du groupe d'experts Montmarquette-Godbout
sur la situation réelle au 7 avril, qui a été confirmée par la suite par le
Vérificateur général. Les dépenses,
ce que mon collègue d'en face a considéré le déficit potentiel, les dépenses
s'étaient emballées et auraient atteint un tel niveau si on ne mettait
pas en place des moyens, des mesures pour les contrôler.
Pour ce qui est de la
croissance économique, un peu la même chose, la première moitié de l'année 2014
a été marquée par une continuation — et mon collègue l'a bien remarqué dans ses
observations — par une
continuation de la détérioration de
l'emploi. Donc, l'emploi a été faible non seulement en 2013… et, encore là, on
ne va pas revenir sur nos histoires de comment on compte les emplois
créés ou pas, mais on sait très bien que, pour avoir une bonne idée de la tendance pendant l'année, sur ce qui se passe de
janvier à décembre, alors cette tendance, en 2013, était très faible, reflétée
dans la croissance du PIB de seulement
1,1 %, et s'est poursuivie en 2014, avec un premier semestre 2014, avec un
premier cinq mois 2014 avec encore des pertes de 30 000 ou
40 000 emplois. Donc, l'économie du Québec tourne au ralenti. Effet libéral : évidemment, ce n'est pas
instantané, mais, comme j'y ai fait un peu allusion dans mes remarques, je
pense qu'on commence à remarquer une
légère augmentation de la confiance et des mises en chantier. Ça devrait se
répercuter au deuxième semestre.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.
M.
Marceau : Merci. En tout respect, M. le Président, je conclus
que le ministre des Finances, alors qu'il était candidat libéral, n'était pas extrêmement prudent. Il nous a fait un
cadre financier qui n'était pas prudent, qui n'était pas conservateur.
Il a présenté, donc, quelque chose qui était…
Une voix :
Agressif.
M. Marceau : «Agressif», je
crois, que vous avez utilisé comme terme? Vos promesses, donc, étaient des
engagements électoraux agressifs.
Le Président (M. Bernier) :
Ça, c'est des termes d'économistes, ça.
M. Marceau : Oui, oui, oui! On s'entend. On s'entend, M. le Président. Je ne sais pas si c'est sage de se présenter devant les électeurs avec des engagements qui sont
agressifs, au sens économique du terme. Je ne sais pas si c'est sage de dire aux électeurs que… ou de leur promettre
des choses sur la base de revenus qui ont été gonflés. C'est le premier commentaire
que je ferais.
Puis, deuxièmement, vous avez dit que le point de départ n'était pas le même, et puis là,
encore une fois, en tout respect,
je regarde les revenus consolidés puis votre point de départ, il est plus
faible dans votre cadre financier de campagne, et donc vous ne pouvez pas plaider que c'est parce que
votre point de départ n'était pas bon, là. En fait, vous partez d'un point
de départ plus faible et puis vous avez gonflé pour arriver plus haut. Vous ne
partez pas de plus haut, là. En tout cas, je ne comprends pas votre argument, si je puis
m'exprimer comme ça. Par ailleurs, l'essentiel de l'action vient de votre 2,1 % plutôt que votre 1,8 % d'économiste à la Banque Laurentienne. C'est
là qu'est l'essentiel de l'action. Et, répercuté sur de nombreuses
années, ça donne ce que ça donne.
Alors,
écoutez, je vais laisser aux gens… Moi, évidemment, je pourrais porter un
jugement. Les mots que je pourrais utiliser
sont durs. Je ne le ferai pas parce qu'on est en situation de commission
parlementaire puis je veux demeurer courtois, mais je pense que les électeurs pourront tirer leurs conclusions quant
au gonflement des revenus dans votre cadre financier.
Maintenant,
je voudrais aller… je voudrais aborder la question d'emploi, et là très
rapidement. Si 47 800, ce n'est pas bon, comment qualifiez-vous
31 300 pour 2014?
M. Leitão : Est-ce que…
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien. Écoutez, on revient aux chiffres d'emploi. Vous
savez très bien que le 40 et quelques mille, c'est la moyenne annuelle. Le 30 et quelques mille, c'est la moyenne
annuelle. Comme j'ai déjà dit, on le disait en campagne électorale, je le répète encore ici : Pour
moi, la meilleure façon de voir la progression de l'emploi, c'est ce qui se
passe pendant l'année. L'année 2013
n'a pas été bonne, surtout au niveau de l'emploi à temps plein, et ça s'est
vérifié, ça s'est confirmé par les
chiffres de croissance du PIB qui sont très faibles. Mais, pour clarifier cette
situation-là, on va le dire ici tout
de suite, l'engagement que nous avions pris pendant la campagne électorale, les
250 000 emplois sur cinq ans, on tient…
on maintient cet engagement-là. Ce n'est pas une promesse. On ne va pas
promettre de créer des emplois. Ce n'est pas l'État qui crée des
emplois, c'est le secteur privé. Mais c'est notre objectif.
Nous avions donné comme objectif, en mars 2013,
pendant la campagne, que l'économie québécoise créerait 250 000 emplois sur cinq ans. Et cet objectif demeure,
c'est-à-dire — qu'est-ce
que ça veut dire concrètement? — que nous
avons pris le pouvoir, si vous voulez, le gouvernement, au mois de mai 2014, et
le niveau total d'emploi, en mai 2014, avec
les données de Statistique Canada, c'était 4 015 000 personnes au
travail. Donc, notre objectif, le petit baromètre que j'ai au bureau, chez moi, au ministère des
Finances, c'est que, mai 2019, donc d'ici cinq ans, le niveau total d'emploi
se situe à 4 265 000 personnes.
C'est ça, notre objectif. C'est vers ça que toutes les actions que nous allons
mettre en place vont se diriger. Tout
le monde doit avoir des objectifs dans la vie. Nous, le nôtre en tant que
gouvernement, c'est celui-là. Donc, nous maintenons le cap sur cet
engagement-là, cet objectif-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Donc, vous nous dites : Dans cinq ans, il faut qu'on soit à
4 millions… à 250 000 de plus au mois…
M. Leitão : De mai à mai 2014‑2019.
M. Marceau :
Regardez, donc vous me dites : On fait abstraction complètement, on ne
tient pas compte de tout ce qui va se
passer jusque-là. Le reste, hein, d'une certaine manière, ce n'est pas
important. Parce que c'est ça que ça revient à dire.
M. Leitão : …
M. Marceau :
Bien, regardez, si vous me dites que vous ne voulez pas tenir compte des
moyennes annuelles, vous ne voulez
pas savoir ce qui s'est passé avant… On pourrait très bien avoir
4 millions… on reste à 4 millions pendant les 59 prochains mois puis, au 60e, on monte de
250 000 puis votre objectif va être atteint, ce qui est complètement
absurde.
M. Leitão : Non…
M. Marceau : Je veux dire,
vous êtes d'accord avec moi que ce n'est pas ça que vous voulez.
M. Leitão : Ça
ne va jamais arriver. Ça ne va jamais arriver comme ça.
Le Président (M. Bernier) :
Un instant! Je vais juste vous rappeler les règles.
M. Marceau : Oui, je sais.
Donc, c'était…
Le Président (M. Bernier) :
Normalement…
M. Marceau : On s'est laissé
aller.
Le
Président (M. Bernier) : Si vous vous interpellez mutuellement,
là, on va peut-être avoir des problèmes. Il faudrait peut-être passer
par la présidence.
M. Marceau : Alors, ça
n'arrivera pas, M. le Président. On n'est pas…
Le Président (M. Bernier) :
Ça va être plus simple, et on s'assure de bonnes discussions.
M. Marceau :
On n'est pas partis pour avoir des problèmes. Je voulais juste montrer
l'absurdité du raisonnement, M. le Président. On ne peut pas faire
abstraction du niveau de...
Le Président (M. Bernier) :
...d'économistes.
M. Marceau : Oui, oui,
absolument.
Le Président (M. Bernier) :
O.K.
• (16 h 20) •
M. Marceau :
On ne peut pas faire abstraction du niveau de l'emploi au fil du temps puis de
cette évolution… C'est important de savoir, justement, si telle année a
été meilleure que l'autre. Puis, pour le mesurer, on ne peut pas se fier
simplement au point de départ, au point d'arrivée. Ce qui se passe entre les
deux, c'est fort important.
Si, aujourd'hui, on passait de 4 millions… demain, à 4 250 000, puis qu'on restait à 4 250 000 pendant les 60 prochains
mois, je serais très heureux, je serais très
heureux, pas mal plus que si on reste à 4 millions pendant 60 mois puis
qu'au bout de 60 mois on monte de
250 000. Dans les deux cas, votre objectif est atteint, mais, dans un cas,
il y a beaucoup, beaucoup de
Québécois, 250 000 personnes qui travaillent de plus; dans l'autre cas, il
n'y a personne qui travaille de plus. C'est très différent, M. le
Président. Et j'aimerais que le ministre oreconnaisse
que ça n'a pas de sens, ce qu'il vient de dire.
Le Président (M. Bernier) :
C'est beau. Est-ce que vous avez… C'est beau?
M. Marceau : C'est fini, ce
point-là.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Vous savez très bien que ça ne peut pas arriver comme ça, ça
ne va pas arriver comme ça. Au fil des cinq
prochaines années, il y aura des… Il y aura même des mois où ça sera négatif.
Wow! Oui, ça va arriver. Mais c'est seulement
pour vous indiquer… Comme j'ai dit tantôt, nous avons tous besoin d'objectifs,
de cibles réelles, concrètes, et
nous, la nôtre, c'est celle-là, de 4 265 000 en mai 2019. Évidemment
que, d'ici là, beaucoup d'eau va passer sous le pont et on va voir bien comment les choses vont évoluer. Mais tout ça
pour vous dire que, si on commence à faire des calculs comme : Bon, cette année, c'était 40 000, l'année
prochaine, c'est 30 000, vous n'allez jamais… En tout cas, ce n'est
pas de cette façon-là que moi, je regarde l'évolution d'une économie.
Le Président (M. Bernier) : Merci.
M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui. Juste, si je ne m'abuse, vous n'avez pas qualifié le 31 000. Je vous
demandais de le qualifier, le 31 000 emplois de cette année.
Le Président (M. Bernier) :
Oui.
M.
Leitão : Bien, écoutez, encore une fois on sait très bien que, si on
utilise des moyennes annuelles, la moyenne de 2013 était élevée parce qu'en début d'année c'était… Fin 2012, début
2013, c'était très fort, donc ça a fait monter la moyenne pour l'année 2013. Donc, nécessairement,
la moyenne annuelle pour 2014, même si tout va aller bien au deuxième semestre, la moyenne va être nécessairement moins
élevée que la moyenne de 2013. Mais, encore une fois, si on regarde les moyennes annuelles, on n'a pas le vrai portrait
de ce qui s'est passé pendant l'année, pendant l'année 2013 et pendant l'année 2014. Donc, moi, je n'aime pas regarder
l'évolution de l'emploi… et ça peut se retourner contre moi, regardez, c'est très clair. Mais je n'aime pas regarder
l'évolution de l'emploi en moyenne annuelle, je préfère regarder l'évolution
de l'emploi de la façon que ça se passe
pendant l'année, de janvier à décembre. C'est comme ça que je regarde
l'évolution de l'emploi. D'ici un an ou deux, qui sait,
ça pourrait me donner des mauvais résultats, mais je vais maintenir à la même
méthodologie.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Oui. On aura l'occasion d'évaluer votre performance sur la base de votre façon
de regarder les choses. Il n'en
demeure pas moins que, quelle que soit, de toute façon, la façon de mesurer
l'emploi, à ce jour ça ne se passe pas bien, mais on verra pour…
M. Leitão : …
M. Marceau :
…on verra pour la suite des choses. Sur le 15 milliards, là, sur lequel
vous avez dû reculer… un certain nombre de questions à poser. La
première, c'est : Lorsque vous étiez en campagne électorale et puis que
vous promettiez ce 15 milliards là,
vous n'aviez pas envisagé le fait que c'était incompatible avec la capacité de
payer des Québécois?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Excusez-moi.
Le
Président (M. Bernier) : Là, la question est : Est-ce que
vous avez envisagé, en ce qui regarde le 15 milliards, de…
M. Leitão : Est-ce qu'on avait,
pardon, exagéré?
M. Marceau :
Bien, pendant la campagne électorale, j'imagine que, lorsque vous avez… vous
avez dû vous dire : Il y a un…
Si on dépense 15 milliards de plus, c'est 15 milliards de plus à la
dette. On a des ratios dette-PIB à respecter. Qu'aviez-vous en tête pour qu'on maintienne notre crédibilité auprès de
nos agences de notation? Qu'est-ce que vous aviez prévu?
M. Leitão : Écoutez, c'était…
Le Président (M. Bernier) :
Ça va? Écoutez, allez-y.
M. Leitão : 15 milliards sur 10
ans, ce n'était pas 15 milliards d'un coup, hein? On se comprend que
c'était 1,5 milliard de plus par année
sur 10 ans. On pensait que c'était faisable. Encore une fois, on revient au
point de départ. À ce moment-là, on
était à 10 milliards de dollars, en termes d'investissements annuels. Et
donc nous pensions que nous pouvions relever ça.
Nous avons changé d'appréciation, oui, à court
terme, c'est vrai. Pourquoi? Parce que, encore une fois, pour l'année 2013‑2014, le déficit s'est avéré être
3,1 milliards. On aurait dû être à l'équilibre budgétaire, ça n'a pas été
le cas. On devait être, après ça, à 2,5 milliards, ça commençait
déjà à compliquer les choses. Mais, au bout du compte, on se retrouve avec
3,1 milliards de dollars de déficit en 2013‑2014. Donc, ça commençait à
être un peu plus risqué.
Et puis par la suite, étant donné l'effort, en
termes de contrôle des dépenses qui était nécessaire pour qu'on puisse
atteindre les cibles d'équilibre budgétaire, nous avons jugé prudent de
ralentir cette croissance
d'investissements publics en 2015‑2016
jusqu'à ce qu'on revienne à l'équilibre
budgétaire. Pour 2014‑2015,
l'année en cours, cette année, nous
avions quand même augmenté à 11,5 milliards, c'est quand même
3 % du PIB, c'est quand même
important. L'année suivante, oui, on
va ralentir la cadence étant donné notre capacité de payer. Mais je vous
rappelle aussi que le PQI, c'est un
plan sur 10 ans. L'année prochaine, on sera rendus au PQI 2015-2025; après ça,
2016-2026. Donc, je pense qu'il faut voir ça comme une cible mouvante.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau :
Oui, je vois qu'il me reste une trentaine de secondes. Je veux simplement faire
un commentaire.
Le
Président (M. Bernier) : Bien, je peux ajouter une partie…
deux minutes, là, par rapport au temps que vous n'avez pas pris.
M. Marceau : Non,
moi, je veux juste faire un petit commentaire, simplement pour dire qu'en
campagne électorale, votre chef, le
premier ministre, n'a pas eu cesse de dire que le véritable déficit n'était pas
de 2,5 milliards, mais bien de 3 milliards.
Il disait ça. Il dit : Ce n'est pas vrai que c'est 2,5 milliards,
c'est 3 milliards, le déficit. Il a dit ça à plusieurs reprises,
dans plusieurs rallyes libéraux et… Non, il avait raison, mais il n'en demeure
pas moins que la promesse de 15 milliards
était faite sachant, affirmant, connaissant et croyant que c'était
3 milliards. Et là vous me dites, aujourd'hui, que c'était 3… Ah! j'ai découvert que c'était
3 milliards et donc je ne peux pas le faire. Je veux dire, ça ne marche
pas très bien, là.
Ou bien le premier ministre ne disait
pas… Enfin, il a dit, en campagne électorale, à plusieurs reprises : Ça va
être 3 milliards, ça va être
3 milliards puis, en même temps, je vais vous en mettre 15 milliards
de dépenses en infrastructures de plus, 10 fois 1,5 milliard. Alors, cette raison-là ne
peut pas facilement être invoquée, pas plus le fait qu'il y a un contrôle
des dépenses à faire. Le contrôle des dépenses, évidemment il doit être fait,
et votre budget prévoit que vous allez contrôler
les dépenses puis que vous allez arriver à des cibles, à un équilibre
budgétaire l'an prochain. Et donc il n'y a rien qui a changé dans le
cadre financier, il n'y a rien qui a changé dans les informations que vous
aviez. La seule chose qu'il y a, je pense,
puis malheureusement… puis, encore une fois, je pourrais utiliser des mots très
durs, mais je pense que vous aviez
fait une promesse qui n'était pas raisonnable puis qui n'était pas compatible
avec la capacité de payer du Québec, puis vous l'avez découvert durement
à votre arrivée. C'est tout. C'est un commentaire. M. le ministre peut
répondre, évidemment.
Le Président (M. Bernier) :
Avez-vous des mots à ajouter?
M.
Leitão : Juste, très rapidement, pour dire qu'encore une fois c'est
15 milliards sur 10 ans, donc 1,5 milliard par année. Cette année, 2013‑2014, oui, on est à
11,5 milliards d'investissements publics, c'est substantiel. L'année
prochaine, oui, nous allons ralentir un peu la cadence. Quand on regarde
les ratios d'endettement, oui, nous regardons les ratios d'endettement, dette-PIB, ce n'est pas seulement
la dette, mais c'est aussi le dénominateur de PIB. Or, le PIB, la croissance
du PIB nominal est pas mal plus lente que ce
qui avait été pensé…ce qui avait été prévu avant. Donc, il faut que ce ratio-là
demeure atteignable.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Donc, nous allons passer du côté gouvernemental,
et je vais donner la parole à M. le… Lequel de… M. le député de Mégantic?
Qui prend la parole? M. le député de…
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Oui. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier) : M.
le député de Mégantic, la parole est à vous…
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Merci.
Le Président (M. Bernier) :
…pour un bloc de 20 minutes avec les échanges avec le ministre.
• (16 h 30) •
M.
Bolduc
(Mégantic) : Je
voudrais tout d'abord saluer mes collègues des deux oppositions,
mes collègues ici du gouvernement, M. le ministre. Le budget du 4 juin dernier a confirmé que l'équilibre budgétaire sera atteint en 2015‑2016. Dans les documents, il est indiqué que, pour
atteindre l'équilibre budgétaire, la cible de croissance des dépenses consolidées sera
fixée à un taux inférieur à celui des revenus. Ainsi, pour les deux prochaines
années, la croissance des dépenses consolidées
sera de 1,7 % en moyenne par
année, alors que celle des revenus s'établira en moyenne à 3,2 %. En
particulier, la croissance des dépenses de programmes s'établira à
1,8 % en 2014‑2015 et à 0,7 % en 2015‑2016.
Le 3 juin
dernier, dans son rapport spécial qui portait sur la vérification du solde
budgétaire pour l'année 2014‑2015, le
Vérificateur général du Québec a indiqué que les coûts de reconduction reconnus
des programmes totalisaient 68 115 000 000 $,
pour une croissance annuelle reconnue de 6,7 % par rapport au budget des
dépenses 2013‑2014. Selon le Vérificateur général, l'information
disponible lors de la préparation de la mise à jour économique et financière de
l'automne 2013 et du budget du 20 février
dernier permettait au gouvernement de reconnaître l'importance des efforts à fournir, soit plus de 3 milliards, pour atteindre l'objectif des dépenses de programmes. Cet objectif
était établi à 2 %, soit un taux de loin inférieur aux 6,7 %
nécessaires pour rencontrer la croissance des coûts de reconduction des
programmes reconnus par le Secrétariat du Conseil du trésor.
Ce constat, fait par le Vérificateur général le
3 juin dernier, avait aussi été soulevé par les deux experts en finances publiques, soit M. Claude Montmarquette
et Luc Godbout, mandatés par le gouvernement pour faire la lumière sur la situation financière du gouvernement. Les
experts ont constaté qu'au cours des dernières années un effort important
a été consacré au contrôle des dépenses. La
croissance annuelle moyenne des dépenses de programmes a significativement
fléchi ces dernières années. Malgré cet
effort, les experts indiquent qu'il existe une dynamique poussant à une
augmentation des dépenses supérieure au cadre financier prévu.
Je me suis
demandé ce qu'étaient les coûts de reconduction. J'ai trouvé la réponse dans
les documents budgétaires du 4 juin
dernier. En effet, j'ai appris que la croissance des dépenses publiques est
généralement influencée par trois grands facteurs. Premièrement, la croissance des dépenses publiques varie selon
l'évolution des clientèles qui bénéficient des services. Par exemple, les clientèles qui bénéficient des services
peuvent être les enfants en CPE, les étudiants et les usagers du système
de santé. Deuxièmement, la croissance des dépenses publiques varie avec la
variation des prix dans la prestation des
services publics, c'est-à-dire l'inflation touchant les achats d'équipements et
les médicaments ainsi que les hausses
salariales. Troisièmement, la croissance des dépenses publiques varie avec la
bonification ou l'intensification des
services, comme l'introduction d'un nouveau programme, la bonification des
services existants ou encore les rattrapages salariaux.
Selon le
Vérificateur général du Québec, pour 2014‑2015, l'écart entre les coûts de reconduction
reconnus des programmes par le Secrétariat du Conseil du trésor et
l'objectif de dépenses du programme établies au... février 2014 représente un effort de
3 248 000 000 $. Selon le Vérificateur général du Québec,
la forte croissance des coûts de reconduction
reconnus des programmes provient de plusieurs éléments. D'entrée de jeu, dans
son rapport, le Vérificateur général
du Québec a indiqué que les annonces du précédent gouvernement totalisent
605 millions. Ces éléments contribuent à eux seuls à hausser d'environ 1 % le taux de croissance des
dépenses de programmes. À ce titre figurent notamment la politique économique Priorité emploi, la
politique de solidarité ainsi que les promesses faites aux universités dans le
cadre du Sommet sur l'enseignement supérieur.
De plus, il
est indiqué dans le rapport du Vérificateur général du Québec que la
rémunération est l'élément le plus important
des dépenses de programmes puisqu'elle représente près de 60 % de
celles-ci. Selon le Vérificateur général du Québec, les dépenses de rémunération devraient augmenter, en 2014‑2015,
d'environ 4 % par rapport à l'année 2013‑2014. Cette hausse s'explique principalement par les
paramètres d'indexation salariale prévus aux ententes de rémunération, soit 2 % pour 2014‑2015, les progressions à
l'intérieur des échelles salariales, les ajouts d'effectifs. À cet égard, on
dénote une hausse moyenne de 6 250 effectifs dans les secteurs
public et parapublic depuis cinq ans.
Dans son
rapport, le Vérificateur général du Québec a indiqué que la rémunération est
l'élément qui contribuera le plus
fortement à la hausse du taux de croissance reconnu des dépenses de programmes
en 2014‑2015, soit environ 2,5 % de
l'ensemble de ces dépenses. Certains engagements majeurs pris par le gouvernement
dans le passé au chapitre de la rémunération
et qui impliquent une croissance de plus en plus importante des dépenses au fil
des ans expliquent une telle situation en 2014‑2015. À titre d'exemple,
les ententes que le gouvernement a signées avec les médecins spécialistes
prévoient des augmentations... croissance de la rémunération, près de 33 %
sur cinq ans.
Enfin, dans
ses explications, le Vérificateur général du Québec parle de la croissance
importante de la dépense relative aux
régimes de retraite comme le facteur de dépassement. La dépense relative aux
régimes de retraite représentera une
augmentation de 27 % par rapport au budget de 2013‑2014, et elle a
contribué pour près de 1 % à la hausse du taux de croissance
reconnu des dépenses de programmes.
Somme toute,
de l'avis du Vérificateur général du Québec, la présence d'engagements
contractés par les gouvernements
précédents s'échelonnant sur plusieurs années limite la marge de manoeuvre pour
réduire les dépenses. Le Vérificateur général du Québec indique qu'un
risque non négligeable est particulièrement présent lorsque les coûts découlant de ces engagements connaissent une
croissance supérieure à celle estimée pour les revenus. En effet, pour les
financer, le gouvernement devra trouver des nouvelles
sources de revenus ou encore réduire ses autres dépenses. M. le
Président, ma question est la suivante : J'aimerais savoir ce que fera le
gouvernement pour contrôler ses dépenses.
Le Président (M. Bernier) :
Et c'est la question. Allez-y, M. le ministre.
M.
Leitão : M. le Président, merci. Merci beaucoup pour la question. En
effet, le contrôle des dépenses, c'est la pierre angulaire de notre budget. Nous jugeons que le Québec se trouve
dans une situation de déficit structurel, c'est-à-dire où les dépenses augmentent plus rapidement que les
revenus de façon systématique, de façon régulière. Et donc, pour corriger la situation, il faut qu'on renverse les
tendances et il faut que la croissance des dépenses soit, comme vous avez
remarqué, inférieure à la croissance des revenus pendant une période soutenue.
Alors, comment
nous allons arriver à contrôler les dépenses? Premièrement, je dois vous dire
que nous allons — donc, c'est notre principal objectif — arriver à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016.
Pour nous, c'est incontournable, c'est
ce qui va arriver. Alors, pour contrôler la croissance des dépenses, il y a
d'abord un contrôle rigoureux pour cette année, l'année courante. Donc, les différents ministères ont reçu leurs
crédits. Donc, ils savent exactement à quoi s'attendre en termes de
dépenses pour cette année. Le point de départ, encore une fois, était
particulièrement difficile puisque la machine
s'était un peu emballée. N'oublions pas que la dernière fois qu'il y a eu un
budget, au Québec, qui a été voté, approuvé,
et tout ça, on remonte à novembre 2012. Donc, depuis, il n'y a pas eu vraiment
d'effort systématique de contrôle des dépenses. C'est ce que nous allons
faire maintenant.
Cet effort
est très exigeant et surtout pour 2015‑2016. Cet effort ne serait pas réaliste
si on ne mettait pas en place les trois outils dont j'ai fait allusion
tantôt, c'est-à-dire : les commissions, commission de révision de
programmes, commission d'examen sur la fiscalité; ainsi que le cran d'arrêt,
donc on n'ajoute plus de nouveaux programmes sans trouver d'économies ailleurs; et le gel des effectifs. Ces trois
mesures, ces trois outils vont nous permettre d'atteindre nos cibles de
contrôle de croissance des dépenses.
La révision
des programmes, à mon avis, c'est un élément crucial, important, significatif.
Tantôt, le député de Rousseau nous
disait que, ah, bof, c'était comme ça en 2003, vous allez refaire la même
chose. Justement, une des grandes différences
entre 2003 et aujourd'hui, c'est cette commission permanente de révision de
programmes qui va nous… De façon systématique,
on va regarder tous les programmes et on va voir… on va finir par éliminer des
programmes entiers s'ils ne sont plus
pertinents. Donc, ce n'est pas seulement une question de réduction de dépenses
ici et là de façon ponctuelle, ça va être de façon structurelle et de
façon permanente.
Pour ce qui
est de la fiscalité, l'examen de la fiscalité, celui-là, au contraire, cette
revue, elle est bien délimitée dans le
temps. Donc, pour revenir à la question du député de Lévis, ce n'est pas un
exercice… ce n'est pas une commissionnite
qui va durer éternellement. C'est d'ici la fin de l'année, décembre 2014, c'est
quand même relativement court, on
parle de six, sept mois où cette commission-là va nous donner des
recommandations très pratiques et très immédiates pour revoir la fiscalité au Québec, pour la rendre
plus simple, plus efficace, plus équitable et, donc, ouvrir la voie sur un
nouvel avenir pour la fiscalité au Québec.
Finalement, le gel des effectifs, c'est aussi un
moyen qui est très puissant. Parce que ce que j'ai appris en arrivant ici, c'est que le contrôle que l'État a
sur tout ce qui est système parapublic, ce contrôle-là est un peu… il n'est pas optimal. Donc, il faut se donner les outils nécessaires
pour pouvoir vraiment d'abord dénombrer… ne serait-ce que dénombrer combien de personnes travaillent dans le
système parapublic. Tous les réseaux, fonds, commissions, etc., on
va bien dénombrer tout ça et on va se donner les pouvoirs d'employeur, avec les
15 000 départs à la retraite, donc, de comment
réallouer ces ressources humaines pour qu'on puisse maintenir la livraison de
services aux citoyens et en même temps diminuer la rémunération totale
dans l'appareil parapublic surtout.
Donc, ces trois moyens-là, ces trois
outils-là vont nous permettre d'atteindre nos cibles. Et je dois vous dire que
nous demeurons particulièrement focussés à
atteindre ces cibles-là. Et, encore une fois, pour revenir aux suggestions du
député de Lévis, si, en cours d'année, on
voit qu'on s'éloigne de ces cibles-là, eh bien, on n'hésitera pas, on
n'hésitera pas à mettre en place des mesures additionnelles pour s'assurer que
ces cibles-là seront atteintes. Donc, on va suivre de très près
l'évolution des dépenses pour s'assurer qu'on atteint ces cibles-là.
• (16 h 40) •
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Alors, M. le
député de Mégantic, avez-vous des questions additionnelles en regard du
sujet?
M.
Bolduc
(Mégantic) : Non, merci.
Le
Président (M. Bernier) : Non? Donc, nous allons aller au député
de… M. le député de Sainte-Rose, la parole est à vous.
M.
Habel : Oui, merci, M. le Président. Premièrement, j'aimerais saluer
le ministre des Finances, le député de Baldwin,
j'aimerais saluer aussi les groupes formant l'opposition officielle, du
deuxième groupe d'opposition et de notre gouvernement. J'aimerais faire
un léger préambule.
Parce
qu'un budget, c'est une photo, ça prend en compte la situation antérieure et ça
donne la vision aussi qu'on veut avoir dans le futur. Donc, le député de
Lévis parlait tantôt d'un exercice de courage, de redresser les finances publiques. Je suis d'accord avec lui, il faut
qu'on redresse les finances publiques pour améliorer la vie de tous les
Québécois. On est là-dedans aussi. On
a proposé cinq axes : l'investissement privé des PME; la stratégie
maritime de l'est à l'ouest; la relance
du Plan Nord du nord au sud; mettre en valeur les ressources naturelles,
notamment avec Hydro-Québec; et aussi le financement en investissements
et en infrastructures. Et, dans le budget du 4 juin dernier, nous avons appris
que le gouvernement allait proposer, au cours des 10 prochaines années, une
enveloppe de 90,3 milliards pour renouveler et moderniser nos investissements en infrastructures. Et j'ai voulu
approfondir un peu le détail du budget, et vous me permettrez de donner quelques exemples, surtout
dans le secteur de la santé, parce que je suis aussi sur la Commission
de la santé et des services sociaux.
Donc,
tout d'abord, dans le secteur de la santé, le gouvernement va investir
17 milliards pour la rénovation et la modernisation du parc immobilier des établissements du réseau de la
santé et des services sociaux. En particulier, notre gouvernement va soutenir la réalisation de près
d'une dizaine de projets majeurs, dont le CHUM, l'Hôpital Sainte-Justine,
le CUSM, l'Hôpital Maisonneuve. Au niveau de
l'Hôpital Sainte-Justine, ça touche l'ensemble de la région métropolitaine,
dont mon comté, qui est Sainte-Rose, où les enfants de ma circonscription
peuvent aussi accéder à cet hôpital.
De plus, il y a
plusieurs projets, dans le secteur de la santé, qui sont en planification, en
mode étude, soit dans l'ensemble de la
région du Québec, par exemple, la construction d'un nouvel hôpital sur le site
de l'Hôpital Enfant-Jésus de Québec, la construction d'un nouvel hôpital
à Vaudreuil-Soulanges, le Centre intégré de traumatologie et l'Unité mère-enfant à l'Hôpital du Sacré-Coeur de
Montréal, et la nouvelle aile de l'hôpital de Verdun. C'est un plan pour la
région métropolitaine pour créer un
quartier de santé qui couvre l'horizon de l'est à l'ouest du Québec, ce qui va
favoriser la région métropolitaine, dont le comté de Sainte-Rose.
Lors
de la campagne électorale, j'ai été heureux d'apprendre que notre gouvernement
allait compter et mettre en place un
plan d'action pour la métropole pour la santé, notamment dans le développement
du Quartier de la santé. Situé autour
du centre hospitalier du CHUM et du Centre de recherche du CHUM, tirant aussi
bénéfice de la présence du Centre universitaire de santé McGill, le
Quartier de la santé permettra de consolider la place de Montréal au sein des
10 plus importants pôles de santé en Amérique
du Nord. Ce projet nécessitera le recouvrement d'une partie de l'autoroute
Ville-Marie et contribuera grandement au
développement de l'économie du Québec dans le domaine des sciences de la vie
en devenant un pôle d'attraction
d'entreprises de biotechnologie et de recherche biomédicale. Ce projet
confirmera l'avenir de Montréal parmi les grandes métropoles innovantes
de l'Amérique du Nord.
Et,
à ce sujet, M. le Président, je vais vous donner quelques exemples des
améliorations qu'on vise à faire dans le
gouvernement, notamment à l'hôpital de Verdun, qui est toujours dans la région
de Montréal. Notre gouvernement s'est engagé à améliorer l'accès des
soins avec la modernisation de l'hôpital de Verdun. On peut constater que, dans
le PQI 2014‑2024, notre gouvernement s'est
engagé à relancer le projet de modernisation de l'hôpital de Verdun en
inscrivant ce projet à l'étude. À
l'heure actuelle, la vétusté des installations de l'hôpital, des chambres,
hébergeant jusqu'à quatre patients, l'exiguïté
des places communes et les corridors encombrés peuvent compromettre la qualité
et la sécurité des soins. Ce projet va bénéficier aux patients de Verdun
et à tous les patients du sud-ouest de Montréal.
L'Hôpital du
Sacré-Coeur, qui, pour le bénéfice des gens de mon comté, est situé… qui est très
proche de la circonscription de Sainte-Rose,
qui est l'autre bord de la rivière des Mille Îles… Ce projet de notre
gouvernement, qui soutient l'Hôpital
du Sacré-Coeur de façon continue depuis des années, est un axe important pour
les gens de Laval parce qu'il donne
accès à l'Hôpital du Sacré-Coeur, mais il existe aussi la réalité que nous
avons un hôpital à la Cité de la santé de Laval et aussi l'hôpital de
Saint-Eustache qui peut contribuer au bénéfice de notre population.
Les
importants investissements consentis à l'établissement de Sacré-Coeur ont
d'ailleurs permis la création d'un nouveau
service d'urgence et d'une unité ultra-moderne de soins coronariens. Il est
aussi rendu possible le réaménagement des
services de réadaptation en ergothérapie et en physiothérapie, de même que des
unités de chirurgie, de médecine de jour
et d'endoscopie. Les soins ambulatoires de médecine interne, la clinique de
chirurgie et de chirurgie cardiaque et celle d'endocrinologie ont aussi
fait l'objet de travaux.
Lors de la
campagne électorale, mon collègue de Saint-Laurent, M. Jean-Marc Fournier,
indiquait que, pour sa circonscription, la circonscription de
Saint-Laurent, l'Hôpital de Sacré-Coeur était un projet qui était prioritaire.
Cet hôpital joue un
rôle central dans l'offre de soins hospitaliers non seulement à Saint-Laurent
et dans le nord de l'île de Montréal, mais
aussi à Laval et aussi pour les institutions universitaires de l'ensemble du
Québec. La modernisation et la mise à niveau des installations sont
essentielles.
Je constate
donc que le budget du 4 juin dernier a permis de réaffirmer l'importance de
procéder à des travaux de
modernisation dans l'Hôpital Sacré-Coeur de Montréal, un projet qui est à
l'étude, en plus de la modernisation des soins à l'Hôpital Sacré-Coeur, dont le Centre intégré de traumatologie
et l'Unité mère-enfant. Pour moi, la concrétisation de ce projet-là se traduira nécessairement par un
accès meilleur aux soins de la santé et aux services pour les patients. Ce
que souhaite entreprendre l'Hôpital
Sacré-Coeur se situe dans la jonction des deux priorités de notre budget, soit
la relance de l'économie du Québec avec des investissements substantiels
dans nos infrastructures et la modernisation de nos établissements en santé.
Au niveau de la santé, on a couvert un certain
horizon. On peut aussi parler du transport, M. le Président…
Le
Président (M. Bernier) : Vous avez environ une trentaine de
secondes pour conclure votre énoncé. Par la suite, au prochain bloc, le ministre aura l'occasion de
vous répondre sur le sujet. Mais je vous donne une trentaine de secondes
pour conclure votre bloc.
M.
Habel : Parfait, M. le Président. Donc, je vais résumer par le fait
qu'on aurait pu parler aussi du transport et vous dire qu'on a une
approche rigoureuse et transparente pour la gestion des projets.
Et ma
question, M. le Président, aussi, qui résume aussi l'analyse du PQI, qui répond
aux besoins et à la priorité des
Québécois, c'est que j'aimerais savoir si ces investissements seront suffisants
si on prend en compte aussi le respect de la capacité des Québécois…
Le
Président (M. Bernier) : M. le député de Sainte-Rose, on aura
l'occasion de revenir avec votre question dans le prochain bloc. Je vous
redonnerai la parole.
M. Habel : O.K., parfait.
Le
Président (M. Bernier) : Parce que, là, le bloc, en ce qui
concerne la partie gouvernementale, est maintenant épuisé. Donc, M. le
ministre, on revient avec le prochain bloc pour répondre à la question du
député de Sainte-Rose.
Nous allons donc passer au deuxième groupe
d'opposition. C'est M. le député de Lévis, vice-président de la commission, à
qui je donne la parole pour un bloc de 20 minutes.
• (16 h 50) •
M.
Dubé : Merci beaucoup. Alors, j'ai expliqué tout à l'heure que… Avant
peut-être de rentrer dans le détail de l'année,
j'aimerais qu'on puisse discuter votre vision de quatre ans, du ministre des
Finances, parce que je pense que c'est important de regarder vos grands
objectifs sur quatre ans et, après ça, ramener ça à la première année puis
avoir cette discussion-là autant sur les
revenus… sur les trois composantes, les revenus, les dépenses et l'impact sur
les contribuables.
Puis
j'aimerais peut-être, M. le Président, amener le ministre puis les gens qui
nous écoutent aujourd'hui… parce qu'il
y a tellement de temps qui est passé… Je regarde le sous-ministre des Finances,
ici, qui est rendu un expert à préparer ces documents-là ici. J'aimerais au moins lui rendre hommage en disant
qu'on devrait prendre quelques minutes pour regarder ces documents-là, parce qu'il y a tellement de temps qui est
passé dans ça que je suis certain que
les gens vont apprécier qu'on prenne quelques minutes pour regarder les
documents.
Je vous
amènerais à la page A.24 parce que je pense que, dans ça, pour ceux qui veulent
regarder à la maison… Lorsqu'on parle des revenus consolidés autant que
des dépenses consolidées, l'année 2013‑2014 montre des revenus consolidés du gouvernement de l'ordre de 93 milliards, presque 94 milliards, qui étaient en croissance sur l'an
dernier de 4,2 %. C'est beaucoup d'argent, ça, 4,2 %
de croissance des revenus. Puis, dans ça, il faut se rappeler qu'il y avait
quelques éléments non récurrents,
dont l'harmonisation de la TPS, des choses comme ça. Mais, dans cette année-là,
en 2013‑2014, donc l'année qui s'est
complétée il y a quelques mois, là, le 31 mars, on a eu des croissances des
dépenses consolidées de l'ordre de
5,7 %, là, qui est le meilleur estimé, puis ça, ça inclut la dette. Je le
mentionne parce que c'est là qu'on dit que
notre modèle d'affaires ne peut pas continuer comme ça. On ne peut pas
continuer à avoir des revenus, au moment où les gens, les entreprises sont surtaxés, qui croissent à une hauteur de
4,2 %, ce qui est énorme, mais en même temps avoir des dépenses — et c'est là que je disais que les dépenses
étaient hors contrôle, particulièrement dans la dernière année — à une hauteur de 5,7 %.
Alors, ce que
je note puis, je pense, qu'il est important de le noter pour tout le monde,
c'est que, sur votre vision de quatre
ans, cinq ans, lorsqu'on prend 2014‑2015, 2015‑2016, 2016‑2017, 2017‑2018 — puis là je vous rappellerai qu'on va
être en élections à quelque part en octobre 2018 — il faudrait voir votre
plan. Il est quand même... je ne dirais pas ambitieux,
mais je pense que c'est correct de le voir comme ça. Vous avez une croissance
des dépenses beaucoup plus basse, on
joue dans le 3 %, 3,1 % — les gens le voient bien, je pense, à la page
A.24 — mais on
voit aussi qu'au lieu d'être à 5,7 % de croissance des dépenses
vous êtes plus dans la zone de 2 %, alors. Puis je pense que, dans la
première année… je veux juste noter que,
bien que les gens peuvent penser que c'est ambitieux, il faut penser que, sur
deux ans, c'est 5,7 % plus
1,9 %. Je veux m'expliquer, là… Vous pensez à 1,9 % de croissance,
mais on a manqué la cible par 3 % l'année d'avant. Alors, je veux
juste mentionner que cet équilibre-là que vous essayez d'atteindre est
ambitieux.
Maintenant,
le point que je veux faire — puis tout à l'heure, quand je vais vous
poser ma question — c'est de
dire que, malgré tout ça, d'avoir une
croissance des revenus plus modeste, mais qui est quand même assez importante
à 3 %, de ramener les dépenses, ce que vous réussissez à dégager, c'est un
équilibre budgétaire avec un petit surplus pour la première fois en 2017‑2018, parce qu'il
faut dire que la Loi sur l'équilibre budgétaire, tout le monde le comprend
bien, tient compte des argents qu'on met au Fonds des générations.
Mais pourquoi
je le mentionne? Parce que notre premier ministre, votre premier ministre, qui
est notre premier ministre à tous, a
bien dit que ça serait seulement à ce moment-là qu'on pourrait avoir un répit
fiscal pour les contribuables. Alors
donc, je trouve que, même si c'est ambitieux, ce n'est qu'en 2017‑2018… C'est
pour ça, tout à l'heure, que je veux faire...
Je veux vous demander de bien répéter à tout le monde que c'est votre
compréhension que, malgré ces objectifs ambitieux là, de réduction des
revenus, qui ne tiennent pas compte — je le mentionne pour être
transparent — des
augmentations de taxes scolaires, etc., là,
on ne voit pas ça là-dedans, là, mais que ce n'est qu'en 2017‑2018 qu'il y
aurait une réduction possible, une
fois que vous aurez trouvé, par la commission d'examen sur la fiscalité, 650
millions à chaque année, que ce
serait seulement dans cette année-là qu'il y aurait une réduction du fardeau
fiscal des contribuables. C'est bien ça?
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Oui, M. le ministre.
M.
Leitão : Oui, on va commencer à donner, donc, un répit... non, on va
continuer — je vais
revenir — on va
continuer à donner un répit aux
consommateurs, aux contribuables québécois une fois qu'on va commencer à
dégager des surplus budgétaires. Dans le cadre que nous avons ici, donc
la page A.24, en effet, les surplus budgétaires vont commencer à se manifester en 2017‑2018. Mais, encore une fois, ça, c'est
ce que je considère, moi, un cadre financier, un cadre budgétaire extrêmement conservateur. Si, en effet, l'économie
performe mieux, comme je pense que ça va être le cas, ça se pourrait qu'on commence à dégager des surplus un an avant, ça
se pourrait très bien, si la croissance économique, vraiment, est plus élevée que le 2 % qui est
inclus ici. Donc, nous, ce que nous nous sommes engagés à faire, c'est que,
dès qu'il y aura des surplus budgétaires,
oui, la moitié de ces surplus-là vont être envoyés à la réduction de la dette
et l'autre moitié à l'allègement fiscal des contribuables. Peut-être, si
je peux juste compléter…
Le Président (M. Bernier) :
Oui, oui.
M. Leitão : J'avais dit aussi de
continuer l'allègement, parce que, quand même, dans ce budget, nous avons évité d'augmenter les frais de garde. C'était
quand même un choc tarifaire important pour les familles avec deux enfants
en garderie. Ce choc-là n'a pas eu lieu.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Dubé : Alors, je vais continuer. Puis j'apprécie, donc, ce que vous
dites. Puis je pense que c'est important pour les gens de comprendre. Vous, dans votre perception ou dans votre
philosophie, vous avez aimé mieux poser un… je dirais un jugement plus moyen. Ce n'est pas un budget, selon vous,
qui est très agressif, mais qui n'est pas non plus très optimiste, si je vous… Encore une fois, je ne
suis pas un économiste. Vous en êtes un très bon, à ce qu'on me dit, là,
mais… Mais je vous amène peut-être sur les facteurs…
M. Leitão : …budget conservateur.
M. Dubé :
Conservateur? O.K. Mais je vous amène sur un élément. Puis c'est parce que,
tout à l'heure, je vous ai dit :
Qu'est-ce qui peut, selon vous, faire que, même si c'est un budget modeste… qui
fait que ça pourrait déraper à quelque part? Parce que moi, je trouve
que c'est loin, donner le répit fiscal en 2017‑2018. On en a parlé, je trouve… Qu'est-ce qui fait que ça pourrait aller plus vite
ou même que ça pourrait… Les gens pourraient se dire : Bien, on nous
le promet, mais… Qu'est-ce qui pourrait aller mal?
Et je veux
juste poser le… vous amener à des éléments de réponse, s'il vous plaît, sur les
deux pages suivantes. Encore une
fois, là, je regarde les gens qui ont travaillé sur ce document-là. La page
A.28 parle beaucoup. Parce que, si on pouvait
avoir la chance de mettre ces tableaux-là… Mais on le fera peut-être plus tard.
Je pense que le député de Rousseau aimerait
bien ça, présenter ce tableau-là. C'est le tableau à la page A.28 où on voit
justement cette espèce de mont Everest qu'on
a eu en 2013‑2014, sur la croissance des dépenses consolidées. Et vous, vous
dites que la croissance va être limitée à 1,9 %, 1,3 %,
1,7 %. Comment vous voyez ça aujourd'hui, là? Ça, vous avez déjà fait ce
budget-là il y a quelques semaines. Est-ce
qu'aujourd'hui vous croyez encore, avec ce que vous entendez, que c'est encore
un budget qui… Parce que la
croissance des dépenses, on le voit, là… — on reviendra sur les revenus tout à
l'heure — c'est
quand même énorme de contrôler ces
dépenses-là à ce niveau-là, comparé à ce qu'on a vu dans les trois, quatre… Je
pense que les gens voient très bien, lorsqu'ils regardent la page A.28,
que c'est énorme, ce que vous voulez faire comme exercice, là.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Oui. Mais, regardez, si on continue à observer ce
graphique-là, la tendance était déjà là. Donc, en 2011‑2012, on avait réussi à ralentir un petit
peu. En 2012‑2013, on avait réussi à ralentir davantage à 2,5 %. En fin de
compte, 2014‑2015, on continue la même tendance. L'aberration, l'aberration,
c'était 2013‑2014. Oui.
M.
Dubé : Ce que je veux dire, je veux que les gens comprennent, puis
c'est important, M. le Président, pour le ministre des Finances, que chaque… 1 %, ça n'a pas l'air gros. Si
mon budget, c'est 100 $, puis je me trompe de 1 %, bon, je me trompe de
1 $. Mais, quand j'ai un budget de 90 milliards puis que je me trompe
de 1 %, bien, c'est 900 millions ou 1 milliard.
Ça fait que
je veux juste dire que vous avez raison, on jouait dans la zone de 3 %,
mais là on s'est trompé puis on est
allés à 5,4 %. Moi, je trouve que votre objectif est très ambitieux à
1,9 %. Je le respecte. Je dis : C'est ça qu'il faut faire. Mais vous tromper de 1 %, ça aurait
aussi un effet de 900 millions, un peu comme on a eu avec le dernier gouvernement. Moi, ce que je vous demande
aujourd'hui… Vous me dites que, même si vous trouvez que l'ensemble de vos revenus et dépenses, c'est un budget moyen,
c'est ni trop ambitieux ni pessimiste, vous me dites qu'aujourd'hui vous confirmez à tout le monde que c'est un
objectif normal d'être à une croissance de 1,6 % sur trois ans malgré ce
qui est arrivé dans les dernières années.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Je n'utilisais pas le mot «normal». C'est un objectif… Je ne
veux pas utiliser le mot que vous avez utilisé,
qui commence par un a, je ne veux pas utiliser ce mot-là. Mais je vais utiliser
le mot «sérieux», c'est un objectif sérieux.
Et c'est exigeant. C'est très exigeant. Ça, ce n'est pas… ce n'est pas… Je ne
me cache pas là-dessus. Non, non, non. Mais nous demeurons absolument
engagés à respecter cet engagement-là.
Deux choses
ici. D'abord, c'est quelque chose qui s'est déjà fait et qui se fait ailleurs
au Canada. Ça se fait en Ontario, ça
se fait en Colombie-Britannique. Le gouvernement fédéral l'a fait aussi. Je ne
comprends pas pourquoi on pense qu'au
Québec on ne peut pas le faire. On ne peut pas arriver à empêcher que les
dépenses de programme augmentent au-delà de 1,8 % pour une courte
période. Donc, ça s'est fait ailleurs et ça peut se faire ici. Je ne crois pas
que ce soit impossible.
Le Président (M. Bernier) :
…M. le député.
• (17 heures) •
M.
Dubé : …M. le Président, si
vous me permettez, parce que, comme j'ai à peu près… il me reste une
dizaine de minutes. Je veux avoir…
Que les gens comprennent bien la… Excusez l'image. C'est l'image globale, là,
la vision que vous avez sur quatre ans. Puis après ça on pourra aller un peu plus dans le détail. Moi, je vous amène tout de suite à la page E.4 du même document, toujours, parce
que…
Une voix : …
M. Dubé : … — E,
pardon, E.4 — parce
que, là, vous… Tout à l'heure, j'ai fait remarquer qu'il y avait des éléments de revenus qui étaient maintenant plus
modestes, on avait une croissance des dépenses… fait qu'on va avoir un équilibre budgétaire qui nous permet un jour
d'être à l'équilibre, c'est en 2015‑2016, et même peut-être un jour d'en
redonner aux pauvres contribuables qui sont
étouffés. Mais on a un effet sur la dette. Et ça, vous en avez parlé un peu
dans votre budget. Je sais que, si ce
n'est pas déjà fait, vous allez être dans un avion pour aller à New York
bientôt pour rencontrer quelques agences de crédit, je suis certain…
M. Leitão : …
M. Dubé : Oui, peut-être après la
commission…
M. Bernier : On fait la commission
pour commencer.
M.
Dubé : …vous pourrez nous en reparler. Mais ce que je voudrais que les
gens réalisent, puis je veux que vous l'expliquiez, c'est qu'à la page
E.4 on a, en fait, le résultat de tout cet exercice-là. Parce qu'on voit les
revenus, les dépenses dans la page que je vous parlais tout à l'heure, mais là,
malgré un équilibre budgétaire que vous souhaitez pour la première fois, enfin, en 2015‑2016, on va quand même continuer
de mettre des montants substantiels sur la dette, hein? Puis les gens comprennent ça. Parce qu'on a
beau avoir un équilibre budgétaire, on met encore de l'argent dans les infrastructures, puis plus élevé que
l'amortissement, donc ce qui veut dire qu'on remet 4, 5 milliards de plus
sur la dette à chaque année.
Pourquoi je
le montre? C'est qu'on est rendus… Puis ça, pour moi, j'aimerais que vous me
parliez de vos objectifs à terme, M.
le ministre, si vous me permettez, un peu comme on a parlé des croissances de
revenus puis de dépenses. Ce tableau-là montre très bien que, malgré les
promesses qu'on avait eues du précédent gouvernement, on a eu une croissance de
la dette sur le PIB, qui est un des objectifs que je vais vous demander, hein?
Votre
objectif à vous, si je comprends bien, c'est de ramener la dette sur le PIB à
50 %, on va dire 51,6 %, si je prends la même période de référence que, tout à l'heure, votre déficit,
là, de 2017‑2018. Moi, ce que je vous demanderais aujourd'hui… Parce que, là, je regarde 2014, c'est
54,3 %, ça n'a jamais été aussi haut, où là vous allez encore un peu
plus loin, on va à 54,9 %, avec un
budget que vous dites, bon, modeste, moyen, là, je ne sais plus lequel
utiliser. Mais moi, j'allais vous
demander : Quand vous allez rencontrer les agences, là, quelle est la
marge de manoeuvre que vous avez avec
ce chiffre-là? Parce que c'est beau leur dire : 50 % en 2018 puis
peut-être 45 % en 2025, qu'est-ce qui arrive si les revenus ne sont pas au rendez-vous, que l'emploi
n'est pas là, que la dépense… les croissances des dépenses ne sont pas à
1,9 % mais à 2,4 % ou à
2,6 %? Quel va être le signal d'alarme, là, sur ce chiffre-là, par rapport
aux agences de crédit, qui ont un impact important sur notre coût de la
dette, là?
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : En effet, la situation de la dette est sérieuse, le niveau
d'endettement, à 54,3 % du PIB, elle est très élevée. Elle a déjà été plus élevée que ça,
d'ailleurs. Le sommet a été atteint en 1998, sous un autre gouvernement, sous
un autre ministre des Finances à l'époque,
où c'était 57,7 %. Donc, nous avons déjà été capables de ramener ce ratio
à un niveau plus bas. Par la suite,
il a recommencé à accélérer avec la grande récession de 2008‑2009 et les
mesures qu'on avait mises en place pour faire face à cette récession-là.
Maintenant,
nous nous engageons dans une… Maintenant, il y a deux choses qui sont quand
même différentes des cycles précédents.
Nous nous engageons à contrôler l'évolution de ce déficit-là. Un facteur qui
alimente la croissance de la dette,
c'est, en effet, le programme d'investissement public en infrastructures. Nous
devons faire ces investissements-là parce
que notre infrastructure en a besoin, il y a des raisons de sécurité, de…
Beaucoup d'années avant, vous et moi, nous n'étions pas en politique à ce moment-là, mais on voyait que les budgets
de maintenance n'étaient pas là du tout, et donc les choses se sont
détériorées, et là, maintenant, on fait face à un déficit d'infrastructures
énorme. Donc, nous devons maintenir la cadence à cet égard-là.
Mais, pour revenir à votre point, un scénario,
disons, noir, un scénario qui, à mon avis, n'est pas probable, où il y aurait une autre récession très sévère ou,
enfin, quelque chose où les revenus commençaient à manquer et, à nouveau,
il y aurait des déficits, si jamais ça
arrivait… encore là, ce n'est pas ce qu'il y a dans les cartons mais, si jamais
ça arrivait, à ce moment-là, il faudrait être très, très prudents avec nos investissements en infrastructures. Il faudrait peut-être, à ce moment-là, se rendre compte que nous ne pourrions pas
maintenir cette cadence-là, si jamais on tombait dans un tel scénario.
Juste peut-être
une autre chose qui est très différente du passé, c'est que, cette fois-ci,
depuis déjà les années 2011, je pense, ou 2010, on a créé le Fonds des générations, et le Fonds
des générations, c'est quelque chose qui est extrêmement
utile. Et, quand on parle aux agences de
notation, c'est vraiment un facteur qui les rassure parce que
contrairement... Les autres provinces
n'ont pas de telles choses. Même l'Alberta n'a pas une telle chose. Donc, c'est
un fonds qui a des revenus maintenant qui lui sont dédiés et qui commencent à augmenter
assez rapidement. Il est déjà rendu... en 2019, par exemple, il va y avoir 16 milliards dans le Fonds des générations, donc c'est substantiel. C'est un outil qu'il n'y avait pas avant et qui maintenant est très puissant.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Lévis.
M. Dubé : Bien, pour continuer dans
la même ligne… Puis, encore une fois, mon objectif, c'est… Les gens comprennent bien que vous aussi vous avez des objectifs.
Donc, on se résume, vous avez des objectifs de croissance de revenus, vous avez
des objectifs de croissance de dépenses qui sont assez ambitieux. Vous avez mis
clairement des objectifs au niveau
de la dette. Donc, vous dites : 2014‑2015, ça sera la dernière année où on aura une
croissance de la dette.
Moi, ce que
je veux savoir : Quand vous allez voir les agences, si jamais, du côté... — puis
je pense que c'est là que vous aviez
l'erre d'aller — si
jamais les revenus ou les dépenses ne sont pas au rendez-vous, est-ce qu'il va y avoir un réajustement, par exemple, au niveau des infrastructures, pour que, si c'est le maximum qu'on vous laisse
aller, à 54,9 %... Parce
que ce n'est pas juste le montant de la dette qui est important, c'est est-ce
que le PIB sera là pour faire ce fameux ratio là.
Moi, ce que
j'aimerais vous demander : Comment proche on est, selon vous, de cet
élément-là qui fait que vous trouvez que vous êtes à la bonne place, là?
Vous avez des objectifs de revenus, de dépenses et de mesures de la dette. Comment proche vous pensez qu'on est? Et quelle
est votre marge de manoeuvre si vous aviez à prendre des décisions — qu'on
n'aimerait pas prendre aujourd'hui — soit sur les infrastructures
ou sur les dépenses?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão : Je pense que nous sommes
à la limite. Avec le profil que nous avons ici, de...
M. Dubé : ...plans sur la
croissance... sur le ratio de la dette?
M. Leitão : Ratio dette-PIB. Avec le
profil qu'il y a ici...
M. Dubé : Quel serait, selon vous,
un des ratios les plus importants, comme objectif à mesurer?
M. Leitão : 2015, on est presque à
55 %, 54,9 %. Je pense que c'est un pas à ne pas franchir. La...
M. Dubé : ...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, juste pour s'assurer qu'il donne les réponses à vos questions. Allez-y.
M. Leitão : Non, non, c'est...
Le Président (M. Bernier) :
C'est correct? Allez-y, M. le député de Lévis.
M.
Dubé : Parce que moi, je pense que vous avez... en tout cas, c'est
clair, vous l'aviez très bien indiqué dans les documents, je pense que les gens comprennent qu'on peut rester à ce
niveau-là. Mais, si vous étiez mal pris, là — parce qu'on l'a vu, des fois, ça peut déraper dans les
revenus, on l'a vu, écoutez, l'emploi n'a pas l'air d'être là, j'espère qu'on
aura des bonnes nouvelles dans les prochains
mois — avez-vous,
en langage de baseball, une «wild card», ou avez-vous quelque chose que vous pouvez sortir du chapeau?
Parce que, quand vous dites qu'on est si proches, on est à 54,9 %, on
est déjà dans l'année 2014‑2015, est-ce qu'il y a des choses, au niveau des
revenus, au niveau des dépenses, qui vous permettraient d'être sûr qu'on va
rencontrer cet objectif-là?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Cette «wild card» ou ce plan b, appelons-le ce qu'on
voudrait, n'inclut pas les augmentations de taxes ou impôt. Donc, si jamais on était mal pris, comme
vous le mentionnez, on ne va pas commencer à augmenter les taxes, ou les impôts, ou quoi que ce soit, pour fermer le
trou. Si jamais on retombait en déficit... ce n'est pas quelque chose qu'on
prévoit ou qu'on anticipe, mais, si jamais
ça arrivait, il faudrait qu'on regarde de façon très sérieuse, encore une fois,
les dépenses.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M. Dubé :
Merci. Excusez-moi, c'est parce que c'est une conversation que je trouve
intéressante. J'aimerais vous dire, puis je
le dis avec beaucoup de respect, que, lorsqu'il y a une augmentation des taxes
scolaires, c'est une façon indirecte
de passer... parce que ce 500 millions là qu'on passe aux consommateurs,
il n'est pas dans les dépenses qu'on a ici,
là. Alors, moi, je veux juste qu'on comprenne bien que l'objectif, selon ce que
vous nous dites, c'est un quatrième objectif,
c'est de retourner aux contribuables, quand on aura atteint l'équilibre. Mais,
lorsque j'entends ce que le ministre de
l'Éducation nous a dit dans les derniers jours, il y a quand même
500 millions d'augmentation des taxes scolaires et qu'on ne voit
pas dans ça, ici, là. Je veux qu'on se... Vous avez la même compréhension que
moi, là.
M. Leitão :
Oui.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
• (17 h 10) •
M.
Leitão : Oui, mais ça, c'est un problème qui ne vient pas
d'aujourd'hui, hein? Ça vient de l'année passée, des années précédentes.
Pour cette année et l'année prochaine, notre focus est sur le retour à l'équilibre
budgétaire. Les commissions scolaires ont leur rôle, ont leurs sources de
revenus, on va les convaincre, on va les amener à limiter les augmentations.
Mais, pour l'instant, elles ont encore leurs sources propres de revenus.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Je vous invite à… Il vous reste environ une
minute.
M.
Dubé : Bien, c'est ça.
Alors, ce que j'aimerais dire dans la prochaine intervention… Là, on a parlé
d'un plan de quatre ans. Merci, je
pense que c'est clair. Je pense que, pour tout le monde, il y a
une compréhension où vous voulez aller.
Moi, j'aimerais qu'on revienne, après ça, dans la prochaine année, parce que
je pense qu'un des éléments où on a manqué
dans le dernier gouvernement, c'est : non seulement on avait des objectifs,
mais il n'y avait pas de mesure. Et, moi, cette mesure-là, surtout dans la première année,
quand tout le monde comprend comment il est critique de ne pas
dépasser le fameux 55 %, soit en atteignant les revenus, soit en
atteignant les dépenses, bien, il va falloir qu'on se dise… peut-être dans notre prochain bloc que je ferai avec le
député de Groulx, c'est de voir comment vous allez faire pour mesurer…
Parce que ce que j'ai souvent entendu comme argument, c'est que malheureusement
c'est très difficile à mesurer, la performance,
la machine est tellement lourde. Et ça, je sais que c'est peut-être plus la
préoccupation de votre collègue au
niveau du Trésor, mais là, aujourd'hui, vous me dites que vous allez le suivre
de près. Il va falloir voir puis expliquer aux gens comment vous allez faire pour suivre ça de près pour qu'on
n'ait pas besoin du plan B, là. Alors, ça sera pour la prochaine fois.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. le député de Lévis.
Donc, on aura l'occasion de revenir sur ce point dans un bloc suivant. Maintenant, nous allons revenir au député de
Sainte-Rose. Je ne veux pas me tromper de fleur. Allez-y.
M. Habel :
Oui. Merci beaucoup. Je vais tenter d'être plus concis et rapide, M. le
Président. J'avais parlé du secteur de la
santé en premier bloc. Je voulais aussi rappeler, pour le bénéfice des
téléspectateurs, qu'on allait investir en infrastructures 90,3 milliards sur 10 ans. Donc, le transport, on
avait 20,5 milliards sur les réseaux routiers, 7,6 milliards pour le transport en commun, dont l'axe du système
rapide par bus sur Pie-IX qui va toucher ma circonscription et l'ensemble
de Laval, de Montréal à Laval,
2,3 milliards pour les logements sociaux communautaires, dont 3 000
logements et 500 pour les itinérants.
Donc, juste pour vous rappeler, M. le Président, qu'on a une approche
rigoureuse et transparente pour la gestion
des projets, et je pense que c'est important de le mentionner, parce que, le
PQI 2014‑2024, c'est la première fois qu'on
va avoir la liste de tous les projets de 50 millions de dollars et plus.
Donc, ça va permettre aux contribuables et montrer aux contribuables
qu'on agit avec transparence, et on leur montre les projets.
Donc,
M. le Président, ma question, c'est que j'aimerais savoir si le niveau des
investissements en infrastructures présentés
dans le PQI 2014‑2024 répond aux besoins et aux priorités des Québécois.
J'aimerais savoir si ces investissements sont suffisants, si on prend en
compte la capacité de payer des Québécois.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Très bien.
Merci beaucoup, de… C'est une bonne question. Est-ce que ces investissements
sont suffisants? Évidemment, on aimerait toujours en avoir plus, et
plus, et plus, mais il faut prendre en considération deux facteurs. Le premier, évidemment, c'est la capacité de
payer, donc combien on ajoute à la dette. Et, deuxièmement, c'est la capacité
de… comment on dirait ça, la capacité de
livrer ces projets-là. Ça ne sert à rien d'annoncer toutes sortes de choses si
on n'a pas la capacité de concrétiser ces investissements-là, ce n'est
pas une bonne chose de le faire.
Alors, il y a eu
beaucoup de changements depuis quelques années. Certains ont été amenés par le
précédent gouvernement, et c'était très bien,
en ce qui concerne un contrôle, une gestion plus rigoureuse des investissements
publics en infrastructures. Alors,
90 milliards sur 10 ans, c'est beaucoup. En chiffre rond, c'est 20 %
du PIB. Donc, je pense que c'est, encore une fois, à la limite de ce
qu'on peut se payer en tant que société.
Est-ce
que ces investissements-là répondent aux objectifs des Québécois et aux besoins
des Québécois? Je pense que oui. Un
tiers de… pas tout à fait un tiers, mais, excusez-moi, mais, je vous dirais, un
cinquième, 20 %... 23 % de ces investissements-là sont dans le réseau routier, un réseau qui est pas
mal malmené dernièrement, les viaducs, les ponts, les autoroutes, les routes. Donc, je pense que
même de mettre 20 milliards de dollars en 10 ans dans le secteur routier,
c'est très significatif. Le deuxième poste,
tout de suite après, presque 17 milliards, ce qui est 19 % du total,
sur 10 ans, dans la santé et les
services sociaux. Donc, je pense que ça reflète aussi les besoins et les
valeurs de la société québécoise.
Pour
revenir à la question du montant total, pour cette année, cette année 2014‑2015,
encore une fois, là, 11,5 milliards
de dollars, c'est 3 % du PIB. Quand on regarde ce qui se passe ailleurs
dans le monde, c'est exigeant comme engagement de mettre
11 milliards en programmes d'infrastructure de façon à ce que ça soit
livrable. Donc, c'est un engagement très
fort. Et, encore une fois, ça représente les mêmes proportions en termes de
réseau routier, de santé et services
sociaux, éducation, etc. Donc, je pense que ça reflète les priorités des
Québécois et ça reflète notre capacité de payer.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose,
avez-vous d'autres questions en regard de ce sujet?
M. Habel :
Non. Non, ça va.
Le Président (M.
Bernier) : Ça va? Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
• (17 h 20) •
Mme
de Santis : Merci, M. le Président. Bonjour, tout
le monde. Il y a deux objectifs principaux avec ce budget. D'abord, il y a le redressement des finances
publiques et, deuxièmement, il y a la relance de l'économie, remettre
l'économie sur les rails. Ma question va toucher la relance de
l'économie.
Il
y a des enjeux économiques qui limitent les revenus de l'État. En 2013, la
croissance de l'économie du Québec a
ralenti, amenant même certains analystes à estimer qu'elle était en panne. Les
chiffres montrent que le Québec n'a pas pu profiter de la reprise en
cours chez nos principaux partenaires. En effet, en 2013, la croissance de l'économie
s'est ralentie. La croissance du PIB réel,
qui s'élevait à 1,5 % en 2012, n'était que 1,1 % en 2013. En
comparaison, au Canada dans son ensemble, la croissance du PIB est
passée de 1,7 % en 2012 à 2 % en 2013. Pourquoi cette faiblesse dans
la croissance du Québec? Un, c'est le
ralentissement de la demande intérieure. Deux, il y a un recul marqué des
investissements des entreprises.
Après deux années
consécutives de forte croissance, les entreprises québécoises ont fortement
réduit leurs investissements en 2013.
Pourrons-nous parler de l'effet du Parti québécois? En 2013, la confiance des
entreprises comme des consommateurs n'était pas au rendez-vous. Ceci a
eu pour conséquence que le marché du travail a stagné depuis janvier 2013. À ce moment, le niveau d'emploi au
Québec atteignait 4 048 200, alors qu'un an plus tard il était à un
niveau comparable, de 4 058 000, moins de 10 000 de
différence. Ces défis économiques impactent directement les finances publiques
en limitant la croissance des revenus de l'État.
Nous
avons des enjeux pour les prochaines années. L'économie québécoise commence,
par ailleurs, à ressentir les effets
des changements démographiques sur la capacité de travail et la création de la
richesse. En 2014, la population des 15
à 64 ans, soit celle en âge de travailler, reculera pour la première fois.
Après avoir atteint un sommet à 5 427 200 personnes en juillet 2013, la population des 15 à 64 ans au
Québec a commencé à diminuer au cours des derniers mois. Dans 17 ans, 25 % de la population du Québec aura 65 ans
et plus. La diminution du bassin des travailleurs potentiels pourrait avoir
des effets négatifs sur la croissance
économique au Québec. Ces conséquences peuvent être atténuées par une baisse du
taux de chômage et par une meilleure utilisation de la main-d'oeuvre
disponible.
Le
gouvernement s'est donné comme objectif de rétablir l'équilibre budgétaire en
2015‑2016. Des mesures ont déjà été
annoncées pour améliorer l'efficacité de l'action gouvernementale, dont, un,
une gestion rigoureuse des dépenses de
l'ensemble de l'appareil gouvernemental et, deux, la création d'une commission
sur la révision permanente des programmes.
L'assainissement
des finances publiques est une condition essentielle à la stabilité de
l'économie. Toutefois, le gouvernement
doit également agir pour relancer l'économie et l'emploi. Le gouvernement fait,
d'ailleurs, de l'économie sa
priorité. À cet égard, dès les premiers jours de son mandat, le gouvernement a
agi rapidement en ce sens et a annoncé deux mesures pour favoriser la
relance et la création d'emplois.
Première
mesure, l'instauration du crédit d'impôt pour la rénovation résidentielle
LogiRénov, annoncé le 24 avril dernier.
Grâce à ce nouveau crédit d'impôt, environ 220 000 ménages bénéficieront
d'un allègement fiscal, atteignant un
peu plus de 333 millions pour les années 2014‑2015 à 2015‑2016. Il
permettra également de soutenir 20 000 emplois dans l'industrie. Deuxième mesure, c'est l'augmentation de
42 millions du budget affecté aux travaux sylvicoles, annoncée le 29 avril dernier, portant ainsi l'enveloppe
totale à 225 millions. Cette bonification permettra de maintenir et de
créer des emplois dans les régions.
Toutefois, le gouvernement doit aller encore
plus loin pour favoriser la croissance de façon structurante et à court terme. Agir sur la productivité sera un des
leviers importants de la croissance économique. Dans ce contexte, que fait le gouvernement pour relancer l'activité économique et
créer des emplois tout en construisant les bases d'une croissance à la fois
solide et durable?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Merci beaucoup. Écoutez, la croissance économique, comme nous savons tous, passe ultimement par une reprise de l'investissement. C'est l'investissement qui va amener une croissance plus rapide, ce ne
sont pas les... une accélération des
dépenses de consommation qui va être le déclencheur, c'est l'investissement, et la clé de l'investissement, c'est
la confiance. Donc, il faut rétablir la confiance, la confiance surtout des PME
pour qu'elles puissent investir, pour qu'elles
puissent se moderniser, pour qu'elles puissent devenir plus innovantes, plus
efficaces, plus productives et donc profiter des opportunités dans les
marchés étrangers, particulièrement aux États-Unis.
Alors,
qu'est-ce que nous allons faire? Nous avons mis en place une
série de mesures qui vont aider les PME, d'une réduction de l'impôt
général à des mesures qui vont favoriser l'innovation, le capital de risque qui
est plus disponible, donc des mesures, d'ailleurs, qui ont été très bien
accueillies par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, donc le groupe qui représente les
PME. Ils étaient très, très encouragés, très contents de ces mesures-là.
Mais
ultimement il y a aussi une question, si vous voulez, de philosophie et d'approche. Moi, je pense que le rôle de l'État, qui est très important dans l'économie,
n'est pas un rôle dirigiste. Ce n'est pas l'État qui va diriger l'économie,
ce n'est pas l'État qui va identifier les entreprises
ou les secteurs gagnants, c'est à l'entreprise privée de jouer ce rôle-là. C'est à l'État de fournir les moyens qui sont structurants et
qui donnent une vision de long terme. Alors, nous, à cet égard-là, au-delà des PME, il y a deux mesures ou deux axes d'action qui
sont, à mon avis, très, très importants, et on n'a pas beaucoup parlé de ça, on
ne semble pas trop faire attention, mais je pense que c'est particulièrement important.
D'abord,
c'est la stratégie maritime, la mise en oeuvre de la stratégie maritime. La
stratégie maritime, en fin de compte,
c'est une stratégie qui tourne autour du transport. Nous voulons améliorer les
moyens de transport pour que nos entreprises puissent justement profiter
des nouvelles opportunités d'affaires, surtout celles qui vont se manifester en
Europe avec l'accord de libre-échange Canada-Europe. Donc, c'est une stratégie qui regarde
vers l'avenir et qui regarde vers l'extérieur du Québec et, donc, de
mettre en place des mesures plus efficaces, de bien coordonner les moyens de transport pour qu'on soit capables de profiter de
ces opportunités-là. Et l'industrie
du tourisme fait aussi partie de cette chose.
L'autre axe, l'autre
grand axe de développement et de croissance économique future, ce sont les
ressources naturelles. Au Québec, nous avons
des ressources naturelles considérables, des ressources minières, et pas
seulement dans le Nord, dans le Sud
aussi, des ressources minières, des ressources énergétiques, des hydrocarbures.
Donc, nous sommes riches en
ressources naturelles. Beaucoup d'autres juridictions aimeraient bien avoir les
ressources que nous avons. Et nous avons l'intention d'utiliser ces
ressources-là comme levier de développement.
Je
trouve quand même un peu étrange de voir que les PME québécoises, par exemple,
sont très intégrées dans le processus, dans le «supply chain»
d'entreprises énergétiques en Alberta, par exemple. Donc, on fournit, on est
des fournisseurs de l'industrie énergétique
en Alberta, et pourtant ici, au Québec, nous avons aussi une industrie minière,
et je pense que les liens de l'industrie minière avec les fournisseurs
locaux, ces liens-là peuvent et doivent être améliorés.
Et
donc ça aussi, ça va faire partie de notre plan de relance économique, les
ressources naturelles, la stratégie maritime
ainsi que, comme vous avez mentionné, de mettre en place des conditions
propices à ce que les PME se modernisent,
deviennent plus efficaces, l'accès au capital, capital de risque, à l'investissement.
Ce sont toutes des mesures que nous pensons comme être un levier
important dans la croissance économique future.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la députée, autre élément, autre
question?
Mme de Santis :
Non.
Le Président (M.
Bernier) : Non? Donc, je vois le député de Mégantic. Vous avez
une question, allez-y.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Merci, M. le Président.
J'aimerais aborder la question de la dette. La dette constitue un enjeu important pour tous ceux et celles qui ont à
coeur l'avenir du Québec, comme en a fait mention tout à l'heure le député de Lévis qui questionnait le ministre
là-dessus. Pourquoi est-ce important? Parce que l'endettement a un impact
direct sur la capacité du Québec à financer
les services publics. Le service de la dette représente en effet une proportion
importante de l'ensemble des dépenses du gouvernement.
En
2013‑2014, le gouvernement a consacré 10,6 milliards au service de la
dette, ce qui représente plus de 11 % de ses dépenses. Ce montant est plus élevé que les dépenses du ministère
de l'Éducation, du Loisir et du Sport, qui représentent
10,4 milliards en 2013‑2014. Cela dépasse également l'ensemble du soutien
financier direct offert par le gouvernement aux personnes et aux familles, soit
le total des allocations familiales, de l'aide de dernier recours et de l'aide financière aux études. Plus les coûts
relatifs à la dette sont élevés, moins il y a de ressources financières
disponibles pour le financement des services à la population ou pour
améliorer la compétitivité fiscale du Québec.
Dans
le cadre du budget 2014‑2015, le ministre des Finances a publié un fascicule
fort intéressant, intitulé Le défi des finances publiques du Québec. À la page 6, on y voit un graphique qui montre l'évolution du poids de
la dette par rapport à la taille de
l'économie, soit la dette brute en pourcentage du PIB. Le graphique nous montre
que, jusqu'en 2009, le niveau de la
dette a augmenté à un rythme moins rapide que le PIB. Il en est résulté une
diminution importante de la dette par rapport à la taille de l'économie,
le ratio dette-PIB a diminué.
Depuis 2009, toutefois, la dette a augmenté plus
rapidement que le PIB. Comment faut-il expliquer cette augmentation? Tout d'abord, les déficits budgétaires qui ont été
encourus en raison de la récession économique, ensuite l'augmentation importante
des investissements en immobilisations que le gouvernement a dû réaliser pour
remettre en état les infrastructures
publiques, routes, viaducs, écoles, hôpitaux, etc. Le ratio de la dette brute
sur le PIB est passé de 50,3 %
au 30 mars 2009 à 54,3 % au 31 mars 2014. Ma question, M. le Président,
est : Quelles actions le ministre des Finances prend-il pour
réduire le poids de la dette?
• (17 h 30) •
Le
Président (M. Bernier) : Vous avez environ deux minutes que je
vous accorde sur le sujet. Vous pourrez revenir par la suite, mais là je
vous accorde deux minutes.
M.
Leitão : D'accord. C'est une question, d'ailleurs, très importante, un
sujet particulièrement névralgique, au Québec.
Parce qu'on nous avait mentionné, nous sommes à 54,3 % du PIB; l'année
prochaine, 2015, on va être à 54,9 %. Nous sommes, et de loin, la province canadienne la plus endettée. Cette
dette vient de loin, des gouvernements précédents, au pluriel. Ça reflète aussi la situation très
particulière qui s'est développée depuis 2008-2009 en termes de grande
récession mondiale et d'accélération marquée des investissements en
infrastructures, ce qui était nécessaire.
Alors,
quels moyens nous prenons pour maîtriser cette croissance de la dette? En fin
de compte, ce dont on parle ici,
c'est le ratio dette-PIB. Donc, oui, nous allons faire attention au numérateur,
donc à la croissance de la dette — et, comme
on a échangé avec le député de Lévis, il va falloir faire attention à cet
aspect-là — mais
ensuite le dénominateur. Donc, si
nous arrivons à accélérer la croissance du PIB, le poids relatif de la dette va
être beaucoup plus gérable que si on ne
le fait pas. Donc, à mon avis, la question de la dette est importante, et elle
est particulièrement néfaste ou particulièrement difficile à gérer si l'économie stagne, si le PIB n'augmente pas. Si le
dénominateur est très faible, ce ratio-là, oui, risque d'exploser, et là ce serait un problème majeur.
Mais, si nous arrivons à ce que le dénominateur continue de croître plus
rapidement que le numérateur, alors là ce ratio va graduellement diminuer.
Juste
une dernière chose, rapidement. Comme j'ai mentionné aussi, un changement
majeur qui a eu lieu depuis les
années 2000, c'est que nous avons maintenant le Fonds des générations. Le Fonds
des générations est unique au Canada. Les
autres provinces ne l'ont pas, même la riche Alberta a quelque chose de
différent, n'a pas ça. Et le but du Fonds des générations, c'est justement de diminuer ou d'«offsetter», en bon latin,
le poids de la dette. Et le Fonds des générations, c'est un fonds qui maintenant a des sources de
revenus qui lui sont dédiées. Donc, c'est un fonds qui va continuer à croître.
En 2019, on va être à 16 milliards de dollars, et ça va s'accélérer dans
les années suivantes.
Le
Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Merci, M. le ministre.
Nous allons donc passer à un nouveau bloc, du côté de l'opposition
officielle. M. le député de Rousseau?
Mme
Zakaïb :
En fait, ce sera moi, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Oh! Quel plaisir. Mme la députée…
Mme
Zakaïb :
…de Richelieu.
Le Président (M.
Bernier) : …de Richelieu. Allez-y, Mme la députée de Richelieu.
La parole est à vous.
Mme
Zakaïb : Tout d'abord, je désire vous saluer, saluer le
ministre, saluer l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale et
aussi les gens du ministère des Finances et de l'Économie, avec lesquels j'ai
eu le plaisir de travailler durant les 18 mois qui ont précédé la dernière
élection.
Ma
première question, M. le ministre, est relativement simple. En tout cas, la
question est simple, je ne sais pas si
la réponse est simple : Combien est prévu dans votre budget pour
l'augmentation de rémunération des médecins pour la prochaine année?
Le Président (M.
Bernier) : Alors, une question courte. M. le ministre.
M. Leitão : Et une réponse courte. Notre collègue le ministre de la Santé continue
de négocier avec la fédération des
médecins, donc je suis confiant qu'il réussira à atteindre un accord, un
arrangement. Mais sinon, sinon, le budget total de dépenses en santé et services sociaux est clairement établi dans les
documents et ce budget-là va être atteint. S'il n'y a pas d'accord avec
les médecins, il faudra trouver les montants requis ailleurs…
Le Président (M.
Bernier) : Merci…
M. Leitão :
…ailleurs dans le ministère.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : M. le ministre, la page A… Pardon, c'est vrai, je
dois attendre que vous me nommiez, je m'excuse.
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y, Mme la députée.
Mme
Zakaïb :
À la page A.32 de votre budget, il y a une variation en millions de dollars,
pour l'année 2014‑2015, de
973 millions. J'imagine que c'est l'argent neuf qu'il y a de prévu pour
l'ensemble du ministère, donc, 973 millions. Est-ce que l'augmentation salariale des médecins
sera puisée à même cette variation dans les dépenses de programmes pour
le ministère de la Santé?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão :
Oui, oui. Tout à fait. Absolument.
Mme
Zakaïb : Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que l'enjeu
est d'à peu près 700 millions de dollars de plus par année qui serait… Si
la négociation ne porte pas fruit et qu'on doive donner aux
médecins ce qui était prévu dans l'entente qui avait été signée au
préalable, est-ce qu'on parle d'un montant approximatif de 700 millions?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Bien, écoutez,
comme je vous ai dit tantôt, des négociations se poursuivent entre le collègue
de la Santé et les fédérations
des médecins. Il n'y a pas de chiffre final, il n'y a
pas de résultat final de cette négociation-là. Mais le
budget total des dépenses totales en santé et services sociaux sont très bien
décrites ici, elles ne vont pas dépasser ce montant-là. Donc, quelque
réallouement qui se fasse doit se faire à l'intérieur de ce budget total qui a
été décrit ici.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : Si je
comprends bien, le 973 millions, ça équivaut à 3 % de variation aux programmes, donc une augmentation de 3 % pour l'ensemble du
ministère de la Santé, de laquelle on devra déduire un montant substantiel si
aucune entente n'est conclue avec les médecins,
en fait, pratiquement tout l'argent neuf ou 70 % de l'argent neuf en
santé. Là, vous me dites que, peu
importe… En fait, si on n'arrive pas à une entente, on va puiser à même ce
3 % d'augmentation des dépenses
de programmes en santé l'augmentation salariale des médecins. Il n'y aura pas
de cran d'arrêt ailleurs, ça va se prendre dans cette enveloppe-là.
C'est ça?
M. Leitão :
Bien, il y a un cran d'arrêt, c'est-à-dire…
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Marceau :
Bien, c'est ça, le cran d'arrêt.
M. Leitão :
Excusez-moi. Je devrais attendre aussi qu'on…
Le Président (M.
Bernier) : C'est parce qu'il faut faire les enregistrements. Si
vous allez trop rapidement…
M. Leitão :
Je comprends.
Le
Président (M. Bernier) : …ça devient compliqué pour ceux qui
doivent faire les enregistrements. Ce n'est pas pour vous imposer un règlement pour un règlement, c'est simplement
pour permettre aux gens de suivre vos débats… suivre nos débats.
M. Leitão :
Je comprends…
Le Président (M.
Bernier) : Donc, allez-y.
M. Leitão :
Je comprends. Je ne suis pas habitué à ça, alors je vais…
Le Président (M.
Bernier) : C'est mon travail de vous aider.
M.
Leitão : Je vais m'ajuster. Donc, le chiffre global est là, et il y a
les crans d'arrêt, donc, si… Et d'ailleurs les fédérations des médecins sont conscientes de l'enjeu. Ils ont dit qu'ils
sont prêts à collaborer, prêts à négocier, c'est ce qu'ils font. Et donc, écoutez, je ne présume pas
de dénouement de ces négociations-là, je pense qu'on arrivera à un accord.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Mme la députée de Richelieu.
Mme
Zakaïb :
Merci, M. le Président. Si je comprends bien, donc, le cran d'arrêt s'applique
à cette même enveloppe de 973 millions,
ça ne s'appliquera pas ailleurs avec d'autres ministères, avec… donc, c'est
l'ensemble des établissements, c'est
les soins aux patients qui vont être touchés, parce que les dépenses en santé,
les dépenses de programmes en santé
de 3 %, c'est déjà une bonne compression par rapport à ce que le ministère
vous demandait. Dans la liste d'épicerie, là, des ministères, celle que le Vérificateur général a qualifiée
d'équivalent à 4 milliards, là, dans cette liste d'épicerie, il y a toujours un gros montant qui provient de la
Santé. Donc, si je comprends bien, on alloue à l'ensemble du ministère
de la Santé une augmentation de
973 millions, de laquelle on devra soustraire l'augmentation salariale qui
sera consentie aux médecins pour l'année 2014‑2015, et ainsi de suite.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : L'augmentation salariale des médecins est comprise dans ce
montant-là. Donc, si, par malheur, ils n'arrivaient
pas à une entente… Encore là, c'est un scénario que je n'anticipe pas, on
arrivera à une entente. Mais, si, par un accident de… «Act of God», ça n'arrivait pas, il faudrait trouver les
montants équivalents ailleurs dans le budget de la Santé.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb :
Donc, vous êtes d'accord avec moi quand on dit que chaque dollar qui va être
alloué à l'augmentation salariale des médecins, c'est 1 $ de moins
en soins aux patients.
M. Leitão : Si on n'arrive pas à… si
on…
Mme
Zakaïb :
…pas d'entente, chaque dollar de plus qui sera versé aux médecins, dans la
prochaine année, par augmentation salariale, ce sera 1 $ de moins
dans les soins.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre, allez-y.
M.
Leitão : Mais les médecins fournissent des soins à la population.
Donc, je ne serais pas d'accord avec vous pour dire qu'on va fournir moins de services. Et les médecins sont là,
ils travaillent, ils travaillent très fort. Donc, je ne vois pas ça
comme étant une diminution des services de santé.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Allez-y, Mme la députée.
• (17 h 40) •
Mme
Zakaïb : Là-dessus, M. le
Président, je dois dire à l'ensemble
du peuple du Québec et au ministre que je suis
consciente que les médecins travaillent fort, et loin de moi l'idée de
prétendre le contraire. Et je pense que, tous les Québécois, on aimerait que nos
médecins gagnent plus cher, comme on aimerait que nos enseignants gagnent plus
cher, comme on aimerait que les gens qui gardent nos enfants dans les
CPE gagnent plus cher.
Maintenant,
le premier ministre l'a dit lors d'une de ses réponses au budget, ce
droit-là est toujours limité par la capacité de payer des Québécois.
Et, dans ce cas-là, on sait que
l'ensemble des augmentations qui seront prévues en santé l'année prochaine, c'est 973 millions, et c'est
très peu comparativement à ce que le ministère de la Santé avait
demandé. Et, à chaque fois qu'il y aura
une augmentation consentie aux médecins, naturellement on devra trouver cet argent-là à même cette même enveloppe de
973 millions. On est d'accord là-dessus.
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão : On est d'accord là-dessus, et les détails, les détails de ces chiffres-là
seront fournis par le ministre
de la Santé quand il va nous expliquer... quand il va faire le point sur les
crédits de son ministère.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : M. le
ministre, est-ce qu'il y a une date fixée ou un échéancier pour cette entente avec les
médecins? Parce qu'on a déjà une portion de l'année de faite et, vous
savez, on a tous eu à vivre des compressions
budgétaires en cours d'année, on sait
comment ça fait mal quand on a déjà six mois de faits, imaginez si on arrive à
neuf, 10 mois afin d'atteindre cette cible. Est-ce qu'il y a un
échéancier qui est fixé pour l'entente avec les médecins pour permettre au ministère
d'atteindre la cible de 973 millions, uniquement de 973 millions d'augmentation?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M.
Leitão : Il n'y a
pas d'échéancier fixe. Donc, on ne donne pas de date butoir. Je pense qu'on est
capables de fonctionner sans de
telles choses. Mais évidemment il faut que ça se fasse dans les plus brefs
délais. Et, encore une fois, je ne
suis pas impliqué directement dans ces négociations-là, mais, de ce que j'entends de mon collègue de
la Santé, ça ne va pas prendre six mois ni six semaines, ça va se faire relativement
rapidement.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : Merci,
M. le Président. On l'espère tous. On
aurait tous aimé que ce soit avant, j'imagine. Nous partageons des buts communs, en fait, des objectifs
communs, nous voulons atteindre l'équilibre
budgétaire, nous voulons le faire en coupant le moins de services possible. Vous comme nous, nous pensons que la
création de richesse au Québec provient
des entreprises, que c'est les entreprises qui créent des emplois, qu'un des
grands enjeux de nos entreprises au Québec,
c'est leur compétitivité. En fait, c'est leur capacité à concurrencer les
entreprises un peu partout dans le monde.
Dans le budget, quand on prend les politiques de
développement économique de votre gouvernement… Et Mme la députée de Bourassa-Sauvé vous a posé une question tantôt, vous
nous avez dit : Bon, pour stimuler l'emploi, premièrement il y a la réduction d'impôt, qu'on
trouve à la page B.23 du document. Et, à la page B.23, on nous dit qu'en
baissant le taux
d'imposition pour l'année… là, je ne prends pas l'année 2014-2015, mais
bien l'année prochaine, 2015-2016,
parce que là ce sera une année complète, ça représente à peu près
34 millions par année et ça touche 7 500 entreprises. Un petit calcul rapide : ça, ça fait
4 500 $ par entreprise. On ne peut pas penser vraiment que c'est ça
qui va faire que nos entreprises
soient concurrentielles puis soient capables de se battre contre les champions
mondiaux, là. 4 500 $ par
entreprise, c'est la grande… Et, à chaque fois qu'on vous pose des questions,
la grande mesure économique, là, c'est
la réduction d'impôt. Vous croyez vraiment que cette réduction d'impôt là va
amener nos entreprises à être compétitives?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : C'est un premier pas
dans cette direction-là. C'est quelque chose que les PME québécoises nous
mentionnaient depuis déjà un certain temps que leur taux d'imposition était
plus élevé que la moyenne canadienne. Donc,
c'est un premier pas dans cette direction. C'est quand même… Où on était avant,
c'était un régime d'imposition… comparativement
à nos voisins dans les autres provinces, n'était pas compétitif. Donc, de cette
façon-là, je pense qu'on répond partiellement aux anticipations et aux
demandes des PME, surtout dans le secteur manufacturier. Mais nous avons aussi d'autres mesures d'action capital,
d'action capital de risque pour favoriser le démarrage d'entreprise. Je pense
que c'est très important, l'accès aux
marchés extérieurs. Donc, il y a toute une série de mesures. Celle-là, la
réduction d'impôt, elle est
importante, surtout pour le message qu'elle envoie que nous sommes déterminés à
promouvoir ce secteur de l'économie.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : M. le
Président, il me reste combien de temps à peu près?
Le Président (M. Bernier) :
Il vous reste environ huit minutes.
Mme
Zakaïb : Parfait. Rapidement, je vais vous… on va en
parler, du fonds de capital de risque. Vous savez, j'ai passé 20 ans de ma vie en capital de risque.
Ce qui est prévu au budget, c'est la recapitalisation de Teralys, un fonds
de fonds, comme on appelle dans le métier,
donc un fonds qui existe déjà, qui est en recapitalisation parce qu'il a
investi ses sommes, et ce fonds investit dans d'autres fonds qui, eux,
investissent dans des entreprises en démarrage.
Maintenant,
des entreprises en démarrage, ce ne sont généralement pas celles-là qui sont
les plus compétitives, hein, on
comprend bien, au début. Et ça prend un certain temps avant de créer ce fonds
de fonds qui, lui, va créer des fonds qui vont finalement trouver des
entreprises ou, en tout cas, investir dans des entreprises.
Selon vous, quel est l'impact de la création de
Teralys ou de la capitalisation de Teralys — qui était, de toute façon, prévue dans les cartons du ministère, on en
conviendra vous et moi — quel
est cet impact-là, l'impact de la création de Teralys sur la
compétitivité des entreprises du Québec?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Bon, écoutez, en
faisant ça, nous allons aussi… ce n'est pas tout à fait la même chose. Il y a
de l'argent fédéral qui est aussi
injecté dans ce fonds-là. Il y aussi, bon, la Caisse de dépôt et Investissement
Québec qui participent. Donc, l'effet levier est très important.
Quel va être
l'effet réel, immédiat sur l'économie? Évidemment, la disponibilité du capital
est le nerf de la guerre dans le
processus d'investissement. Nous savons tous qu'en ce qui concerne le capital
de risque, les banques commerciales, ce
n'est pas tout à fait leur créneau d'expertise. Donc, c'est très nécessaire…
c'est très utile d'avoir de tels véhicules au Québec, et d'ailleurs ces véhicules-là que nous avons ici sont quand
même plus performants que ce qui existe ailleurs au Canada.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : M. le
Président, je suis parfaitement d'accord
avec le ministre que des fonds comme Teralys sont pertinents.
Maintenant, leur impact, selon moi, sur la compétitivité des entreprises est à
très, très, très long terme.
Maintenant, à
la page B.13, nous parlons d'un programme, Créativité Québec, avec une
enveloppe de 150 millions
gérée par Investissement Québec sous forme
de prêts et de garanties de prêt. Investissement Québec fait déjà des prêts
et des garanties de prêt. Je dirais à la
blague : Le fonds s'appelle Créativité Québec, mais, disons, on n'a pas
utilisé beaucoup de créativité pour
trouver une façon de rendre nos entreprises plus créatives parce qu'on va faire
ce qu'on a toujours fait, c'est-à-dire des prêts et des garanties de
prêt par Investissement Québec.
En quoi
est-ce que ce nouveau programme amène de l'eau au moulin à la créativité ou à
la compétitivité de nos entreprises
par rapport à ce qui s'est fait par le passé par Investissement Québec sous
forme de prêts et de garanties de prêt depuis qu'Investissement Québec
existe?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M.
Leitão : Bon, cela s'adresse
maintenant à des entreprises de taille un peu plus grande. Je ne présumerais
pas de ce qu'Investissement Québec…
enfin, je ne présumerais pas s'ils vont réussir ou échouer. Je pense qu'il y a
aussi un nouveau
leadership à ce ministère-là, à cette institution-là et je pense qu'ils vont
réussir à rendre ce programme plus efficace et plus performant.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Mme la députée.
Mme
Zakaïb : Merci,
M. le Président. M. le ministre, quand vous êtes arrivés au pouvoir, il y avait, au ministère des
Finances, qui, à ce moment-là,
regroupait aussi l'Économie, une politique industrielle que je connais assez
bien et un programme de gazelles, un
programme de gazelles qui recevait l'assentiment de tous les acteurs. En fait,
ce matin, dans La Presse, M. Jean-Philippe Décarie a dit : On a coupé les jambes aux «Gazelles».
Les gazelles, pour ceux qui nous écoutent, ce sont les entreprises qui
présentement sont en croissance.
Le ministère, avec Investissement Québec et les
CLD, était arrivé à trouver des critères objectifs pour déceler quelles sont les 300 entreprises au Québec qui
connaissent présentement la meilleure croissance. Et vous allez être d'accord
avec moi qu'il faut qu'il y ait plus de
moyennes entreprises au Québec. On ne peut pas avoir que de petites
entreprises, il faut qu'il y ait des
moyennes entreprises. Vous êtes d'accord avec moi que c'est celles qui créent
de la richesse, qui exportent, qui
font de la formation de travailleurs. C'est celles qui font en sorte que, dans
chacune des régions, il y a des petites entreprises autour d'elles.
Pourquoi
avoir tassé la Politique industrielle et le Programme des gazelles pour les
remplacer par des mesures qui
finalement ont peu d'impact sur la compétitivité des entreprises et sur le fait
que nos entreprises innovent, qu'elles soient
en mesure d'être créatives, mais également de devenir nos fleurons de demain? Pourquoi
avoir tassé des politiques structurantes pour les remplacer par des
politiques qui n'auront aucun impact à court terme?
• (17 h 50) •
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M.
Leitão : Oui, aucun impact à
court terme, on verra bien. Maintenant, pour ce qui est du Programme
des gazelles et de la Politique
industrielle, vous avez raison que ce n'est pas quelque chose qui… tant à mon collègue
de l'Économie que moi-même,
une approche que nous privilégions, en termes, si vous voulez, philosophiques.
De plus,
cette politique que vous aviez annoncée à l'automne 2013, elle n'était pas
financée, il n'y avait pas de crédits,
il n'y avait pas de montants qui pouvaient la… Donc, même si maintenant nous
étions très enthousiastes et nous voudrions
continuer ce processus-là, cette démarche-là, il aurait fallu trouver les
moyens financiers pour poursuivre ça. Mais ce n'est pas quelque chose
que nous jugions, à l'époque et maintenant, quelque chose de très utile.
Vous avez
raison, vous avez raison qu'il faut que les entreprises québécoises, les PME
passent de P à M, donc qu'elles
grandissent, qu'elles puissent devenir plus efficaces. Et c'est ce
qu'Investissement Québec va faire. C'est ce que le ministère du
Développement économique… c'est son mandat. Et ça ne va pas se limiter à 300
entreprises.
Donc, ce que
nous trouvions de discutable dans cette approche-là, c'était que, bon, très
bien, on va en identifier 300 et puis
les autres… C'est une entreprise qui est toujours, à mon avis, très périlleuse
quand c'est l'État qui se met à identifier
les entreprises qui sont gagnantes, et puis les autres doivent attendre une
autre politique industrielle qui verrait le jour peut-être dans un
avenir pas très lointain de chez nous.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Petite conclusion?
Mme
Zakaïb :
M. le Président, effectivement, Investissement Québec continue, pour toutes les
autres entreprises, de faire ce qu'il
a toujours fait, des prêts et des garanties de prêt. Investissement Québec et
tout ce qui est offert par le ministère
peut être offert à toutes les autres entreprises. Maintenant, quand on va aux
Olympiques, on n'y va pas avec tous
nos coureurs, on y va avec les meilleurs. Et, si on avait 300 entreprises, au
Québec, qui sont des moyennes entreprises, imaginez ce que serait notre
économie. On a…
Et accélérer
la croissance… Et, encore une fois, l'État ne choisit pas les meilleures,
l'État a trouvé une façon de les identifier à partir de critères
objectifs puis sur la croissance passée des entreprises. Et là il y a 500
entreprises qui attendent la réponse, 500
entreprises qui ont passé à travers le filtre très serré des résultats
financiers et 500 entreprises qui
pourraient croître. Et vous savez qu'à même nos petites entreprises du P de
PME, là, il y en a très peu qui se rendent à M. Et, si on pouvait aider
celles qui sont dans une lancée pour se rendre à M, d'y aller encore plus vite
avec de la formation, avec des mentors, avec
des chargés de projet qui font arriver leurs projets, avec Investissement
Québec qui leur trouve des occasions
d'affaires partout à travers le monde, un programme qui a été réfléchi par les
gens du ministère, avec
Investissement Québec, avec les CLD… Je vous invite, M. le ministre, à y
réfléchir à deux fois parce que vous êtes en train d'enlever au Québec la meilleure idée qui est arrivée depuis
deux décennies pour développer l'économie du Québec. Parce que les programmes, comme vous parlez, puis
Investissement Québec, ça fait longtemps que ça existe, mais des
moyennes entreprises, on n'en a toujours pas ou presque pas.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme la députée.
Mme
Zakaïb : Merci.
Le Président (M. Bernier) : Merci
de votre enthousiasme et de votre participation. Nous allons maintenant passer, pour un nouveau bloc, avec la partie
gouvernementale. Nous sommes limités un peu dans le temps, mais nous allons
entamer cette partie-là. C'est M. le député de Laval-des-Rapides qui va prendre
la parole…
M.
Polo : Merci…
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y, M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Polo :
Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je tiens à féliciter puis à
remercier le ministre des Finances, avec qui
j'ai eu l'occasion de travailler dans le passé. Et, dans le budget qu'il a
présenté et déposé la semaine dernière,
je reconnais la même rigueur et la même assiduité qu'il a toujours eues,
notamment dans ses anciennes fonctions comme
économiste en chef à la Banque Laurentienne. Donc, lorsque le député de Lévis
fait mention, effectivement, que nous
comptons, au gouvernement, parmi l'un des meilleurs économistes au monde, bien
je dois également peut-être lui rappeler
et lui clarifier que le ministre des Finances… le ministre des Finances a été
reconnu par une institution internationale,
Bloomberg, comme étant l'un des tops trois parmi ses prédictions économiques
sur une période de 18 mois, trimestrielles.
Et c'est là l'importance du travail et de l'analyse que le ministre des
Finances a effectuée, justement, lorsqu'il parle de prévisions, si on peut dire, modérées et même conservatrices
dans ses prédictions de la croissance des revenus, justement, pour ajuster la croissance des dépenses
en fonction, justement, d'une croissance de revenus modérée. Et, si jamais, en cours de route, l'économie nous donne
des surprises et des rebonds économiques, et c'est ce qu'on va s'atteler
à faire au cours des prochains mois, entre
autres avec le ministre des Finances et le ministre de l'Économie, bien, tant
mieux, ce sera au bénéfice de nos
concitoyens, ce sera au bénéfice de notre économie et ce sera aussi au bénéfice
des services que notre gouvernement non seulement compte offrir, mais
compte justement bien financer.
M.
le ministre, le budget du 4 juin dernier a montré l'ampleur des défis que
le gouvernement doit relever pour atteindre l'équilibre budgétaire en
2015 et 2016. Le déficit budgétaire de l'année 2013‑2014 s'élève à
3,1 milliards, soit 600 millions
de plus que prévu par le gouvernement précédent il y a à peine trois mois. Pour
2014 et 2015, si rien n'était fait,
le Québec serait confronté à des déficits respectifs de 5,9 milliards et
de 7,6 milliards, ce qui éloignerait de nouveau le Québec du retour
à l'équilibre budgétaire. J'ai été heureux de voir que le gouvernement a fait
des choix responsables et nécessaires pour ramener
le déficit budgétaire à 2,3 milliards en 2014‑2015 puis complètement
l'effacer en 2015‑2016, qui était
d'ailleurs notre engagement, pendant la dernière campagne électorale, de
respecter cette cible du retour à l'équilibre budgétaire.
Les
Québécois se réjouissent certainement dans le cadre financier que le
gouvernement présente pour le retour à l'équilibre
budgétaire, qui ne comporte aucune augmentation d'impôt ou de taxe, donc aucune
augmentation du fardeau fiscal pour
les contribuables, à l'exception des mesures auxquelles une majorité de
citoyens adhère. En effet, l'essentiel de l'effort sera réalisé par le gouvernement grâce à une compression
importante de ses dépenses — et j'en suis convaincu que les citoyens s'en réjouissent parce que c'est
également au gouvernement de faire sa part — et plusieurs mesures mises en place
dès maintenant, notamment : des mesures de contrôle des dépenses, pour
l'ensemble des ministères et des organismes,
de plus de 2,7 milliards en 2014‑2015 et plus de 2,4 milliards en
2015 et 2016; un effort des sociétés d'État, des organismes autres que budgétaires non subventionnés et des fonds
spéciaux de plus de 400 millions pour la période 2014‑2015 et de plus de 170 millions pour la
période de 2015 et 2016; le gel global de l'enveloppe d'effectif en 2014‑2015
et en 2015 et 2016; et ainsi qu'une
réduction des dépenses fiscales de plus de 250 millions de dollars en 2014‑2015
et de près de 1 milliard en 2015‑2016
sera également nécessaire pour réduire les déficits. Pour l'avenir, la mise en
place dès cet automne, et annoncée également aujourd'hui, de la
commission sur la révision permanente des programmes et la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise
dont les recommandations guideront le gouvernement dans ses efforts pour
contrôler ses dépenses…
Avant
de poser ma question, permettez-moi de vous présenter quelques exemples, M. le
ministre. Au sujet de la lutte contre
l'évasion fiscale, malgré de nombreuses initiatives mises en place par les
gouvernements successifs, l'évasion fiscale,
le blanchiment d'argent, la collusion et la corruption sont des phénomènes
toujours présents au Québec. Les efforts de lutte contre l'évasion fiscale permettent notamment d'améliorer
l'équité pour les contribuables qui acquittent la totalité de leur impôt et d'assainir les pratiques
commerciales dans certains secteurs, notamment le secteur de la cigarette et du
tabac au Québec. Les données que j'ai
prises directement sur le site Internet de Revenu Québec montrent que les
initiatives récentes de lutte contre
l'évasion fiscale sont payantes et ont permis au gouvernement d'accroître de
façon substantielle ses revenus.
La
récupération fiscale dans le secteur des planifications fiscales abusives est
un autre sujet important à aborder. Les
données de Revenu Québec indiquent qu'entre la période de 2008‑2009 jusqu'à
2012 et 2013 le gouvernement a pu récupérer près 400 millions de dollars
grâce aux règles antiévitement…
Le Président (M. Bernier) : M. le député, je dois vous
interrompre, et vous aurez l'occasion de reposer votre question à notre retour, parce que, compte tenu de
l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 19 h 30.
Merci de votre participation.
Est-ce que la salle
demeure fermée pour que les gens puissent laisser leur matériel?
Une voix :
...
Le Président (M. Bernier) : Il n'y a pas d'autre
activité. Normalement, on devrait... Pardon?
Une voix :
...
Le Président (M.
Bernier) : Donc, je suspends les travaux jusqu'à
19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 19 h 32)
Le Président (M. Bernier) :
Alors, bonsoir. La Commission des finances reprend ses travaux. Alors, je vous
souhaite bonne soirée à tous, de bons échanges.
Je vous rappelle que la commission est réunie
afin de poursuivre le débat sur le discours du budget. Et nous allons poursuivre nos échanges avec le député de
Laval-des-Rapides. Il vous reste environ 12 minutes, M. le député de
Laval-des-Rapides, à votre bloc du côté gouvernemental. Allez-y.
M.
Polo : Merci beaucoup, merci beaucoup, M. le Président. Comme je le
mentionnais avant qu'on termine notre session précédente, selon mes
recherches, les données de Revenu Québec indiquent qu'entre 2008… la période de
2008‑2009 et 2012‑2013, le gouvernement a pu
récupérer près de 400 millions grâce aux règles antiévitement
particulières mises en place par le
gouvernement précédent, le gouvernement du Parti libéral, et à l'action d'une
unité spécialisée dans la lutte contre les planifications fiscales
agressives, PFA, de Revenu Québec.
Les données
de votre budget, M. le ministre, révèlent que les pertes fiscales dans le
secteur de la construction sont estimées
à 1,5 million annuellement. Or, les données de Revenu Québec font
apparaître que, de 2009‑2010 à 2012‑2013, les différentes actions de lutte contre le travail au noir et la
non-déclaration des heures travaillées dans ce secteur ont permis de récupérer 1 milliard de dollars, ce qui
représente près de 300 millions de plus de récupération fiscale par année,
et, en 2012‑2013, soit la dernière année pour laquelle les données sont
disponibles sur le site Internet de Revenu Québec, la récupération fiscale dans la construction s'est élevée à plus de
400 millions. Ainsi, malgré de nombreuses initiatives mises en place depuis le milieu des années 90,
l'évasion fiscale, le blanchiment d'argent, la collusion et la corruption sont
des phénomènes toujours présents dans
ce secteur. Il resterait un peu plus de 1 milliard de pertes fiscales par
année à récupérer dans ce secteur.
Certains
réseaux de travail au noir s'organisent parfois sous la forme d'agences de
placement. Un tel stratagème leur
permet de détourner les retenues à la source et les cotisations sociales des
travailleurs. Les données de Revenu Québec indiquent, de plus, que plus de 20 millions sont annuellement
récupérés par les actions entreprises par le gouvernement, et la politique de divulgation volontaire permet
aux citoyens de régulariser leur situation fiscale en divulguant de façon
spontanée et complète les omissions ou les
fausses déclarations qui leur ont permis d'éviter de payer des impôts et des
taxes. Si la divulgation répond aux
conditions applicables, Revenu Québec n'impose pas les pénalités prévues par
les lois fiscales et n'intente pas de
poursuite judiciaire de nature
pénale. Or, on apprend, sur le site de Revenu
Québec, que ce programme a
permis de récupérer plus de 300 millions entre les périodes de 2008‑2009
et 2012‑2013.
Question, M.
le Président : J'aimerais savoir
quelles sont les initiatives que le gouvernement compte mettre en oeuvre pour augmenter ses revenus tout en respectant sont engagement de
ne pas augmenter le fardeau fiscal, les impôts, les taxes qui ne font
pas consensus dans la population. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. M. le ministre.
M.
Leitão : Merci, M. le
Président. Chers collègues, bien, en effet, c'est une question
importante. Nous avons toujours à coeur de rendre le système
fiscal le plus équitable possible. Donc, dans le budget que nous avons déposé
le 4 juin dernier, il y a une série de mesures qui vont augmenter les
revenus de l'État.
Pour l'année 2014‑2015,
c'est à peu près 300 millions au total et, pour 2015‑2016, c'est à peu près
350 millions au total. De ces efforts-là, probablement qu'un des principaux, c'est justement la lutte à l'évasion fiscale.
Alors, depuis déjà plusieurs années, le gouvernement… Et cette lutte à
l'évasion fiscale, pour cette année, 2014‑2015, devrait nous rapporter 111 millions
additionnels et, 2015‑2016, 133 millions additionnels. Donc, nous
intensifions la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir et dans
toutes les sphères de l'économie où ces risques-là sont importants.
Qu'est-ce que nous allons faire concrètement?
Nous allons améliorer le contrôle fiscal dans le secteur de la construction, nous allons assurer une présence
accrue dans certains secteurs à risque, nous allons implanter des modules
d'enregistrement des ventes, les fameux MEV,
le MEV, dans le secteur des bars et des restos-bars et nous allons aussi
accélérer le traitement des dossiers
judiciaires en matière pénale. Toutes ces nouvelles initiatives, donc, comme
j'ai dit tantôt, devraient nous rapporter 110 millions de plus.
Nous avons
aussi mis en place quelques mesures qui, à notre avis, améliorent l'équité du
régime fiscal. Et une des mesures
importantes à cet égard-là, c'est la révision de l'âge d'admissibilité au fractionnement des revenus de retraite
entre conjoints. Depuis 2007, le régime d'imposition des particuliers comporte
ces mécanismes-là qui permettent aux couples touchant un certain revenu de
retraite de fractionner et donc réduire le fardeau fiscal. Grâce à ce
mécanisme, un particulier peut ainsi
transférer à son conjoint jusqu'à 50 %
de ses revenus de retraite admissibles. Or, les revenus de retraite qui sont admissibles sont ceux qui
viennent de régimes de pension agréés. Et nous pensons que ça provoque une iniquité avec d'autres contribuables qui, eux, par
exemple, utilisent un REER et ne peuvent pas fractionner leurs revenus avant l'âge de 65 ans. Donc, ce que nous avons
fait pour corriger cette iniquité, c'est que dorénavant l'âge d'admissibilité
à cette mesure sera établi à 65 ans, sans égard aux sources de revenus de
retraite.
D'autres
mesures de revenus, c'est évidemment les taxes spécifiques sur le tabac et sur
les boissons alcooliques. Nous
pensons que le tabagisme est toujours un phénomène à combattre. Ça nous coûte,
à la longue, à long terme, en termes de
dépenses accrues de santé, quand même des sommes importantes. Alors, si on peut
diminuer ce fléau-là, nous avons tous
à gagner à long terme. Et une légère hausse de la taxe sur le tabac peut aller
dans cette direction-là. Évidemment, quand
on fait ça, il faut aussi qu'on soit conscients que ça peut aussi avoir un
effet sur la contrebande. Donc, nous avons aussi pris en considération cet aspect-là. Donc, il y a 1 million
de dollars de plus qui va être utilisé à la lutte contre le...
Une voix :
…lutte à la contrebande de tabac.
• (19 h 40) •
M.
Leitão : Merci beaucoup. Après 7 heures du soir, je commence à
perdre mes mots. Pour ce qui est des boissons alcooliques, il y avait aussi une iniquité entre les taxes qui
s'appliquaient aux produits d'alcool vendus dans les points de vente, donc les magasins, les dépanneurs, la
SAQ, et ceux consommés dans les
restaurants. Donc, nous allons uniformiser cette taxe-là pour mettre fin à cette iniquité et, ce faisant, nous
allons aussi quand même aller chercher des revenus additionnels.
Donc, en tout
et pour tout, 300 millions de
dollars en 2014‑2015,
à peu près 350 millions
de dollars en 2015‑2016,
c'est l'effort qu'on demande aux
contribuables québécois. Comparé à ce qu'on fait du côté du contrôle des
dépenses, vous comprendrez bien que c'est minime, mais c'est quand même
considérable.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. le ministre. M. le député de Laval-des-Rapides ou…
M.
Polo : Bien, à titre de question
complémentaire, parce que je
pense qu'il nous reste du temps au niveau de ce…
Le Président (M. Bernier) :
Environ quatre minutes, quatre, cinq minutes.
M.
Polo : M. le ministre, j'aimerais vous interroger sur la révision de l'âge d'admissibilité au
fractionnement des revenus de
retraite entre conjoints. C'est une mesure que vous avez annoncée la semaine
dernière et qui a soulevé quelques questions au
niveau de la population.
Je pense que certaines personnes… Et je pense
que la tribune est parfaite pour que vous
puissiez expliquer un peu plus en détail à qui s'applique-t-elle. Donc,
j'aurais des questions sur cette annonce-là en particulier.
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M. Leitão : O.K. Ça s'applique
surtout aux personnes qui ont pris des retraites anticipées, des personnes qui avaient des régimes de pension agréés et qui
avaient la possibilité de prendre leur retraite avant l'âge de 65 ans.
Et donc, depuis 2007, ces
personnes-là, en faisant ça, pouvaient fractionner leurs revenus avec leur
conjoint, si le conjoint avait un revenu inférieur, bien sûr, et, en
même temps, ces personnes-là avaient aussi la possibilité, le droit évidemment
de continuer à travailler dans d'autres
domaines, et donc nous… pendant que d'autres contribuables, ceux qui avaient surtout des REER, évidemment, ne
peuvent pas toucher leur REER avant l'âge de 65 ans.
Alors, en
faisant ça, nous… donc, en arrangeant… en amenant l'âge d'admissibilité à ce
programme-là, pour tout le monde, à
65 ans, nous pensons qu'en faisant ça nous allons être plus équitables pour toute
la société. C'est vrai aussi, on ne
se cache pas, qu'en faisant ça nous allons chercher des revenus additionnels.
Mais je pense que l'objectif principal de cette mesure était de rétablir
une iniquité qui existait depuis déjà un certain temps.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M. Polo : C'est tout, M. le
Président. Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Vous avez terminé. M. le député de Mégantic, est-ce que c'est…
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Est-ce qu'on a le temps de commencer une autre question?
Le Président (M. Bernier) :
Oui, vous avez le temps. Vous avez un trois, quatre minutes, oui.
M.
Bolduc
(Mégantic) : O.K. Le Québec fait face à un déficit
budgétaire se prolongeant depuis la récession de 2009. Les dépenses croissent toujours plus vite que les revenus, ce qui
est la définition même d'un déficit structurel. Le gouvernement a
déployé toujours plus vite que les revenus… Excusez-moi. Le gouvernement a
déployé un plan de redressement qui a réduit
graduellement le déficit depuis les trois dernières années. Toutefois, les
finances publiques se sont détériorées
à nouveau en 2013‑2014, notamment en raison de la conjoncture économique moins
favorable à ce qui avait été prévu. Or, les déficits contribuent à l'alourdissement
continu de la dette et de la croissance du poids des intérêts à acquitter par
rapport à l'ensemble des dépenses gouvernementales.
Le rapport
remis au gouvernement, il y a quelques semaines, par deux éminents experts des
finances publiques, M. Luc Godbout et
M. Claude Montmarquette, a permis de disposer d'un portrait réaliste des
finances publiques. Le déficit budgétaire
de l'année 2013‑2014 s'élève à 3,1 milliards, soit 600 millions de
plus que ce qui était prévu par le précédent gouvernement il y a à peine trois mois. Pour 2014‑2015 et 2015‑2016, si
rien n'est fait, le Québec sera confronté à des déficits respectifs de 5,9 milliards et de 7,6 milliards, ce
qui l'éloignerait de nouveau du retour à l'équilibre budgétaire. Donc,
on voit un accroissement du poids de la dette. Cette situation serait
inacceptable.
Le Québec
doit donc retrouver l'équilibre budgétaire dès 2015‑2016. Déjà, en 2014‑2015,
le service de la dette représentera
10,8 milliards, soit 11 % de l'ensemble des dépenses consolidées et
plus que les dépenses pour le soutien aux
personnes et aux familles. Si rien n'est fait, le poids de la dette augmentera,
continuera d'augmenter, transférant ainsi un fardeau important aux générations futures. Or, comme vous le savez,
il est d'autant plus urgent d'agir que la population en âge de travailler commence à diminuer au
Québec. Il y aura moins de travailleurs, dans les prochaines années, pour
supporter la dette.
Selon
les données de l'enquête sur la population active de Statistique Canada, la
population de 15 à 64 ans, soit celle
qui participe le plus au marché du travail, a progressé de seulement
0,1 %, en 2013, au Québec et de 0,6 % au Canada. En raison du vieillissement de la population, le
bassin de travailleurs potentiels devrait diminuer au cours des prochaines
années au Québec, contrairement au Canada,
où il continuera de progresser. De 2014 à 2024, la population de 15 à 64 ans
devrait décroître en moyenne de 0,2 %
par année au Québec; au Canada, on anticipe une croissance moyenne de 0,3 %
par année. En 2013, on recensait, au Québec,
393 237 personnes âgées de 10 à 14 ans alors que la population de 60 à 64
ans comptait 521 769 personnes.
Donc, au cours des prochaines années, le départ massif anticipé de travailleurs
à la retraite entraînera une diminution du bassin potentiel de
main-d'oeuvre.
Le Président (M. Bernier) :
Votre bloc est maintenant terminé.
M.
Bolduc
(Mégantic) :
Je terminerai plus tard, M. le Président. Merci.
Le
Président (M. Bernier) : Vous aurez l'occasion de vous
reprendre, il y a encore plusieurs blocs auxquels vous pourrez poser vos questions sans problème. Nous
allons donc retourner au deuxième groupe d'opposition pour un bloc de
20 minutes. M. le député de Lévis.
M.
Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. En fait, avant de
passer la parole à mon collègue le député de Groulx, j'aimerais revenir
maintenant un petit peu plus spécifiquement sur une des trois composantes que
nous avons adressées en fin d'après-midi, à
savoir les revenus. Le ministre des Finances nous a bien expliqué, là, qu'il y
avait cinq axes de développement,
là — je les
répète pour nos auditeurs, là — au niveau des PME, au niveau des mines, des
hydrocarbures, le Plan Nord, la stratégie maritime puis les
infrastructures. Bon.
On a bien vu,
un petit peu plus tôt, que la croissance des dépenses, bien que… j'allais dire
modeste ou pas trop ambitieuse pour
rester prudent dans les prévisions — c'est ce que le ministre des Finances nous a
dit — on avait
quand même une croissance à la
hauteur de 3,9 % en 2014‑2015. Alors, moi, ce que j'aimerais lui demander…
Puis je verrai tout à l'heure… on
verra avec mon collègue, on ira un petit peu plus pointu dans certains éléments
comme la PME. Mais, si je vous
demandais… si je demandais au ministre des Finances aujourd'hui… Sur un
objectif de quatre ans, on a entendu, par
exemple, qu'une des mesures, c'était les mesures d'emplois, hein? On dit :
On veut augmenter nos revenus de tant, mais
on a aussi des mesures de… où on serait satisfait de notre programme sur quatre
ans, c'est que si on avait une création d'emplois de, par exemple,
250 000 emplois.
Moi, ce que
j'aimerais lui demander, c'est : Est-ce qu'il est capable de nous dire,
par exemple, quand on regarde les
cinq axes de développement, lesquels, vous pensez, qui vont être les plus
rentables en termes d'emplois? C'est-u au niveau des PME? Est-ce que c'est au niveau, par exemple, des mines et
hydrocarbures? Est-ce que c'est au niveau des… J'aimerais ça que vous nous en parliez un petit peu, ce qui va faire
que, lorsqu'on aura la chance de discuter un peu les crédits, on verra si l'argent est mis dans les
bonnes choses pour être capables justement d'avoir l'impact sur ces revenus-là.
J'aimerais
vous entendre sur les priorités et surtout les objectifs que vous avez en
termes d'emplois et si vous en avez
en… d'autres indicateurs. Parce que je pense qu'on s'entend tous que ce que les
Québécois s'entendent, c'est qu'ils ne veulent
pas payer plus d'impôts, ils veulent que plus de gens travaillent pour que plus
de gens puissent payer de l'impôt. Et
ça, on le respecte très bien. Mais j'aimerais que vous nous mettiez, à travers
vos cinq axes, lesquels sont prioritaires puis en… question d'emplois, je pense, c'en est un, à moins qu'il y ait
d'autres indicateurs qui pourront nous aider à mesurer votre performance
dans les prochaines années.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Oui, en effet, c'est une
bonne question. Écoutez, il y a des mesures qui vont vous rapporter des dividendes à court terme et d'autres qui vont
porter des dividendes, à cet égard-là, à plus moyen et long terme. Les mesures
qui sont les plus efficaces à court terme sont celles qui concernent le crédit
d'impôt LogiRénov, pour la rénovation domiciliaire,
qui, à notre avis, devront générer presque 3 milliards d'investissements,
donc de dépenses, suivi des mesures qui
favorisent les PME. Donc, les emplois futurs vont venir surtout de la reprise
économique, de la croissance, qui, elle, vient de l'investissement. Et, pour redémarrer l'investissement à court
terme, les mesures sur les PME sont les plus efficaces.
Les
autres, stratégie maritime, Plan Nord, ressources naturelles, sont aussi très
efficaces, très utiles, mais évidemment leur répercussion sur
l'économie, ça va prendre un peu plus de temps. Ce n'est pas immédiatement que
l'exploration minière va résulter dans une
ouverture d'une nouvelle mine, etc. Donc, ces choses-là prennent du temps. À
court terme, PME, rénovation domiciliaire, c'est là qu'on va trouver le
plus...
• (19 h 50) •
M. Dubé : Est-ce que je peux
peut-être...
Le Président (M. Bernier) :
Oui. Allez-y, M. le député de Lévis.
M. Dubé : Si vous me permettez, M.
le Président. Bon, j'apprécie ça, mais, si je restais sur quatre ans, avant d'aller dans cette différence-là, de court terme,
long terme, si on regardait ça globalement sur le quatre ans, est-ce que...
Par exemple, vous me dites : Les
infrastructures, en termes de dollars, ça vaut peut-être 3 milliards
d'investissements, que si vous
n'aviez pas fait le crédit rénove, par exemple, LogiRénov… Est-ce que... Mais
de combien de personnes vous pensez
qu'on crée des emplois sur quatre ans? Je reviens toujours à votre objectif de
250 000 emplois. L'argent que vous mettez dans ces crédits-là pour générer de... Le
3 milliards qui va être investi, vous pensez qu'il y a combien d'emplois
sur quatre ans qui vont être créés par ce programme d'investissement ou de
crédit à la rénovation?
M. Leitão :
Nous pensons que...
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Excusez-moi. En ce qui concerne le crédit LogiRénov, le
crédit à la rénovation domiciliaire, ça devrait soutenir 20 000
emplois.
M. Dubé :
...de quatre ans.
M. Leitão :
Non, c'est plus court que ça, parce que ce programme-là, c'est seulement deux
ans.
M. Dubé :
Effectivement. C'est seulement sur deux ans.
M. Leitão :
C'est ça. Et c'est pour ça que c'est un programme à très court terme et qui va
avoir un effet sur l'économie à court terme.
Ça va soutenir 20 000 emplois dans cette industrie-là. Par la suite, sur
trois ans, les mesures qui concernent
les PME, la réduction d'impôt, le congé de cotisation, enfin, toute une série
pour les PME dont nous avons parlé tantôt, ça, ça serait la deuxième mesure
qui, à notre avis, va générer à peu près 2 milliards de dollars
d'investissement privé.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Dubé : D'investissement privé. Puis est-ce que je peux vous demander
d'être assez gentil pour dire, le même 2 milliards,
vous voyez que ça peut faire combien d'emplois pour la PME, d'emplois
supplémentaires, on parle toujours, là, qui se positionnent dans ce
250 000 emplois là.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : 2 milliards de dollars d'investissement privé, ça, c'est
un peu difficile à calculer que les crédits pour la rénovation
domiciliaire, mais ça devrait soutenir au moins... à peu près 10 000 à
15 000 emplois. Et ça, c'est...
M. Dubé :
10 000 à 15 000 emplois pour les PME.
M. Leitão :
Oui. Par les PME, oui.
M.
Dubé : Par les PME, pour... Qui n'auraient pas été fait, par ailleurs,
s'il n'y avait pas eu, par exemple, ces baisses d'impôt là ou de crédits
supplémentaires pour la PME. Puis, si vous me permettez, M. le Président, parce
que ça...
Le Président (M.
Bernier) : ...M. le député de Lévis. Je vous écoute.
M. Dubé :
Ça me permet de préciser l'ensemble du plan de quatre ans. Donc, les trois
autres domaines ou les trois autres axes,
pardon, qui sont au niveau du plan maritime, vous les voyez un peu plus à long
terme. Pouvez-vous me les passer, si vous preniez le Plan Nord ou les
trois qui restent? En termes d'emplois, je parle.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : En termes d'emplois, ça devient extrêmement complexe, à ce
moment-ci, vous donner des chiffres précis en ce qui concerne la
création d'emplois par ces moyens-là. La stratégie maritime, le Plan Nord, les
ressources naturelles, les hydrocarbures, ce
sont des investissements qui sont à très haute teneur en capital. Donc,
l'impact direct de ces investissements-là
sur la création d'emplois n'est probablement pas très élevé. Cependant,
l'impact indirect de cette accélération
d'activité économique, minière, énergétique, etc., c'est difficile à
quantifier, mais l'ensemble de ces mesures, sur une période de cinq ans, devrait contribuer à créer les 250 000
emplois dont nous parlons depuis la campagne électorale.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Lévis.
M.
Dubé : Je vais continuer dans cette voie-là, parce que ce qui me
préoccupe un petit peu, c'est de... Bon, vous m'avez dit : On parle peut-être de 10 000,
15 000 emplois du côté des PME, on parle de peut-être une vingtaine de
mille emplois du côté du programme, mais
il en reste beaucoup pour atteindre le 250 000. Parce que, là, on a
peut-être touché 35 000, 40 000
emplois. Puis on le voit, là, que c'est sur un programme sur quatre ans. Est-ce
que votre chiffre de 250 000, c'est quelque chose que vous avez mis
de façon arbitraire ou vous avez vraiment des chiffres qui vous viennent du
côté…
Je
répète ma question : Même si c'est sur quatre ans, même si c'est à long
terme, est-ce que vous avez une idée, là…
les mines, le Plan Nord, la stratégie maritime, qui vienne appuyer le
250 000 que vous avez? Parce que moi, j'ai hâte de vous mesurer sur
une base annuelle pour regarder… puis là, en ce moment, je n'ai pas vraiment de
réponse sur les trois autres axes, là.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Malheureusement, M. le député, M. le
Président, la science économique n'est pas une science exacte, on ne peut pas prévoir, prédire ces choses-là avec
ce degré de précision là. L'emploi va venir de la croissance économique qui, elle, va venir de la confiance des
consommateurs et des investisseurs qui vont investir, ça va venir aussi de
l'exportation. Donc, c'est l'évolution de l'économie qui va nous donner
cette création d'emplois là.
Et, si vous
voulez, je vous réfère à la page C.21 de notre document budgétaire, où nous
avons détaillé certains indicateurs
économiques, la prévision de ces indicateurs économiques là. Et donc on voit
qu'avec la création… avec la croissance
du produit intérieur brut de 1,8 % cette année, 2 % l'année
prochaine, donc, c'est ça qui va donner lieu à la création d'emplois.
Aussi, si
vous regardez les choses d'une façon historique, au cours des 10 dernières
années, en moyenne, emplois créés au
Québec, à peu près entre 35 000 et 40 000 emplois. C'est ça, notre
rythme moyen de croissance de l'emploi en excluant les récessions, bien sûr. Alors, nous, en moyenne, 50 000,
ce n'est pas un chiffre qui est particulièrement hors du normal, ça
suggère seulement une accélération de la croissance relativement mineure par
rapport à notre moyenne historique pour pouvoir atteindre ces chiffres-là. Où
exactement ces emplois vont se situer? Est-ce que c'est cette industrie, ou l'autre, ou l'autre? Ça, c'est
quelque chose que… La science économique n'est pas encore parfaite à ce
point-là pour qu'on puisse aujourd'hui arriver à une telle conclusion.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Lévis.
M.
Dubé : La raison pour laquelle je me permets de… Avant de passer la
parole à mon collègue, de vous dire que
c'est important d'aller un petit peu plus loin, je pense, M. le ministre, parce
que, lorsqu'on décide qu'on favorise un axe versus un autre, c'est parce qu'on va y mettre plus ou moins de fonds
pour générer la croissance. Ce que je veux comprendre, c'est que… Vous me dites, si je lis entre les
lignes, là — puis
vous préciserez si je n'ai pas bien compris : Il se crée peut-être,
de toute façon, 150 000 emplois sur
quatre, cinq ans. Nous, on va en créer 250 000, donc on va essayer de
créer plus d'emplois en ayant une stratégie spécifique, soit maritime ou
sur le Plan Nord.
Moi, ce que
je veux comprendre, c'est que, si vous n'avez pas fait encore une analyse pour
aller chercher plus d'emplois qui
sont générés du côté du Plan Nord, ou peu importe, est-ce que vous allez mettre
l'argent au bon endroit pour générer,
justement, le 100 000 emplois supplémentaires dont vous parlez? Parce
qu'on a bien vu, là, vous avez dit, par
exemple : 50 000 emplois pour la première année. On voit que le début
de l'année est anémique, hein? Ce n'est pas de votre faute, vous venez d'arriver, là. Mais on veut quand même vous
évaluer sur votre première année aussi. Alors, je veux vous entendre là-dessus parce qu'il faut être
sûr que ce n'est pas juste un voeu de 250 000 emplois. Il va falloir, à un
moment donné, commencer à mesurer puis
dire : Bien, on réajuste comment le tir si le Plan Nord ne fonctionne pas
parce que les gens ne viennent pas
investir, ou la stratégie maritime, on met combien d'argent dedans? Vous me
suivez, là? Je veux juste être sûr
que les gens comprennent bien que ce n'est pas un voeu pieux d'aller chercher
100 000 emplois, là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
• (20 heures) •
M.
Leitão : Écoutez, là, je pense que… L'économie, encore une fois, n'est
pas une science aussi exacte que ça. C'est quelque chose qu'on ne peut
pas vous dire aujourd'hui comment ça va évoluer à ce degré-là de précision. Les
mesures qu'on met en place sont basées aussi
sur les atouts, sur la richesse, sur la composition de l'économie du Québec.
Or, nous avons, au Québec, des ressources
naturelles, elles sont là, elles sont importantes, et donc c'est un levier très
important pour la croissance
économique à l'avenir. Et ce n'est pas vraiment l'État qui va investir dans les
ressources naturelles. Il y a une
partie, oui, ou il y a le Fonds du Plan Nord où on peut, jusqu'à
1 milliard de dollars, prendre des participations. Mais c'est surtout l'investissement privé, local
et étranger qui va donner lieu à
cette croissance-là et puis ce sont les effets multiplicateurs de cet investissement-là qui vont créer l'activité économique et qui
vont ultimement générer la croissance d'emplois.
Alors, nous
pensons que c'est tout à fait dans l'ordre du normal, du concevable qu'avec les
atouts que nous avons, avec les
leviers qu'on va utiliser on puisse générer les investissements privés nécessaires
qui vont nous mener à cette création d'emplois là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député. M. le député de Groulx.
M. Surprenant : Oui, M. le
Président.
Le Président (M. Bernier) :
Bonsoir.
M.
Surprenant : Le ministre des Finances a présenté un discours sur le
budget en deux volets, et je voudrais, donc,
parler du volet budget de la relance et de l'économie, qui comportait cinq
axes, mais le premier axe concerne l'appui aux PME, parce que je suis
particulièrement préoccupé par l'emploi.
Alors, une
mise en contexte. On a actuellement un écart de richesse, par rapport au reste
du Canada, le Québec, un revenu moyen
qui est de 24 % inférieur à la moyenne canadienne et de nos voisins de
l'Ontario, ce qui impacte, au niveau
des recettes fiscales, 8 milliards de manque à gagner à l'heure actuelle.
Alors, c'est énorme. Puis évidemment que, si on avait un revenu moyen équivalent aux autres... à la moyenne
canadienne, on aurait un excédent et non pas un déficit, actuellement, budgétaire.
Alors, les nouvelles récentes concernant l'emploi parlent d'un 26 700 de
pertes à temps plein. Malgré qu'il y
a une création mais à temps partiel, on a quand même un écart négatif. Alors,
je réitère, là, que le ministre des Finances a parlé d'une promesse de
créer 250 000 emplois et je suis inquiet.
Alors, à la
page 8 de son document, il y mentionne — le document-ci — que «les PME sont le coeur de l'économie
québécoise» et il en est très fier. «À elles
seules, les PME représentent la moitié des emplois totaux et 70 % des
nouveaux emplois.» Par ailleurs, à la
page 38, il mentionne qu'il annonce la réduction de 20 % des taux de
crédits d'impôt. Alors, ça me
préoccupe beaucoup. Ce sont quand même... lorsqu'on parle de crédits d'impôt,
on parle bien souvent d'entreprises qui
créent des emplois à valeur ajoutée, donc à revenus moyens plus élevés. On en a
perdu beaucoup, de ce genre d'emplois là, au profit de d'autres régions
du monde au cours des dernières années.
Alors, ma
question est celle-ci : Actuellement, est-ce qu'il a... Ces réductions de
crédits d'impôt de 20 % «across the
board», comme on dit, d'un bout à l'autre, il me semble qu'elles auraient pu
être faites avec plus de discernement que cela. Alors, nous, on prônait effectivement aussi la réduction des
crédits d'impôt, mais on voulait réduire au niveau des grandes entreprises, qui, selon nous, ces crédits
d'impôt là vont directement au niveau des profits. Alors, on croit qu'il est
important de supporter les PME, qui sont créatrices d'emplois. Et j'ai
l'impression que le gazon est arraché en même temps
que les mauvaises herbes, avec cette mesure-là. Alors déjà, également, des
entreprises annoncent revoir leur plan d'embauche,
et ça m'inquiète beaucoup. Alors, je demande au ministre des Finances :
Comment a-t-il fait ses calculs et comment évalue-t-il le risque, au
niveau de l'emploi, par cette mesure?
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Groulx. M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien. Merci, M. le Président. Alors, pour préciser, les
250 000 emplois, ce n'est pas une promesse. Il n'y a personne qui peut promettre de créer des emplois à cette hauteur-là.
C'est un objectif, c'est une cible, c'est ce sur quoi nous allons
ultimement être jugés par la population. Ce n'est pas l'État qui crée
250 000 emplois.
Maintenant,
PME et crédits d'impôt. O.K. Donc, la situation fiscale est sérieuse. Comme vous
avez mentionné et que ça a été dit
plusieurs fois ici, le déficit potentiel, si rien n'était fait, aurait été très
élevé, ce qui était inacceptable. Donc,
nous avons mis en place des mesures importantes pour contenir la croissance des
dépenses. Tous les secteurs de la société doivent participer à cet
effort-là. Pour nous, les crédits d'impôt, c'est une dépense, c'est une dépense
fiscale. Donc, ça fait partie de l'échiquier total. On ne pouvait pas passer à
côté de cette partie-là. Donc, oui, on va limiter la croissance des dépenses de programmes en santé, en éducation, les autres
missions de l'État et aussi dans les dépenses fiscales. On ne pouvait
pas laisser ça à l'extérieur.
Pour ce
qui est d'une analyse plus fine de l'impact de ces choses-là, bien sûr ça va se
faire dans les deux commissions qu'on
met en place maintenant. On va passer à travers les différents crédits d'impôt
un par un. On va voir s'il y a lieu
de réduire encore davantage
ou s'il y a lieu de les laisser là où ils sont. Je vous rappelle aussi qu'on a
diminué ça de 20 %, donc il y a encore 80 % des crédits d'impôt
qui sont là. Ces crédits d'impôt, soyons clairs aussi, ça bénéficie surtout les
grandes entreprises. C'est surtout les grands
gagnants. Les grands bénéficiaires de ce régime-là, ce sont de grandes entreprises informatiques et autres. Les PME,
oui, certaines PME aussi, c'était important pour elles, mais les grands, grands
bénéficiaires, ce n'étaient pas les PME.
D'ailleurs, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, donc le
groupe qui représente les PME, était très contente, très satisfaite du
budget, parce que justement, depuis longtemps qu'ils prônaient, et qu'ils
prônent toujours une réduction des crédits d'impôt et ils préféraient surtout
une réduction du taux d'imposition, ce que
nous avons fait. Alors, je pense que les mesures qu'on a mises en place pour
les PME sont des mesures structurantes
et importantes et qu'elles vont mener à une augmentation de l'investissement
par ces entreprises-là, ce qui est très important pour l'avenir du
Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. Un court commentaire, M. le député de Groulx?
M.
Surprenant : Je crois comprendre par vos propos qu'au niveau des
crédits il y aura peut-être possibilité, là, effectivement, d'en discuter, mais peut-être de réévaluer peut-être un
petit peu la mesure. Est-ce que je comprends bien?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : On va les analyser un à un, et certains pourraient être
éliminés au complet, d'autres pourraient rester là où ils sont. On va faire l'étude au mérite de
chacun. Mais je vous dis aussi, puisque nous sommes en période de transparence, je vous dis aussi que notre
préférence, en ce qui concerne l'aide aux entreprises, notre préférence est que
cette aide-là soit de façon générale et pas
ciblée à certaines industries ou secteurs en particulier. Si on veut faire ça,
si on juge qu'un certain secteur
mérite une attention particulière à cause de compétition internationale ou quoi,
il y a d'autres outils que l'État a pour accomplir cet objectif-là.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons
donc revenir du côté du gouvernement. Donc, M. le député de Mégantic,
vous aviez…
Une voix : …
Le Président
(M. Bernier) : Non, vous n'êtes pas supposé dire ça,
effectivement. M. le député… Levez la main. Lequel? M. le député de
Mégantic, allez-y.
M.
Bolduc
(Mégantic) : Merci, M. le Président. J'en
étais au point au point où on parlait d'un déficit d'emploi créé par le… ou l'augmentation des retraites des
gens âgés et une diminution, si on veut, des jeunes qui entrent sur le marché
du travail. Donc, l'arrivée des jeunes sera
insuffisante pour remplacer cette génération. On parle ici d'un déficit, là, de
l'ordre de 130 000 emplois.
Donc, des efforts importants à réaliser
maintenant dans ce contexte, les efforts à réaliser pour retourner à l'équilibre budgétaire se chiffrent à
3,8 milliards en 2014‑2015 et 3,9 milliards additionnels en 2015‑2016.
D'ici 2015‑2016, ce sont donc des efforts de 7,7 milliards qui
devraient être réalisés. De façon générale, le gouvernement peut agir sur deux leviers pour retrouver l'équilibre
budgétaire, soit stimuler l'économie pour accroître les revenus et mieux
contrôler les dépenses.
Ma question,
M. le Président, est la suivante : Dans ce contexte, pouvez-vous
m'indiquer pourquoi vous avez décidé de réduire les dépenses fiscales?
Et cela nuira-t-il à l'économie?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
• (20 h 10) •
M.
Leitão : Merci. Merci, cher collègue. Comme on l'avait dit tantôt au
député de la deuxième opposition, nous avons
décidé d'aller dans cette direction pour plusieurs raisons, d'abord, parce que
tout le monde, tous les secteurs de la société doivent contribuer à cet
effort important de redressement et de retour à l'équilibre budgétaire.
L'équilibre budgétaire, à notre avis, est
une condition sine qua non d'un développement économique futur. Pour restaurer
complètement la confiance des investisseurs,
des particuliers, tout le monde, il faut qu'on démontre qu'on est capables de
contrôler nos finances publiques, et
donc tout le monde doit participer à l'effort, et ça aurait été inapproprié de
ne pas regarder du côté de ces dépenses fiscales aussi. Ça, c'est la
première raison que nous l'avons fait.
Deuxièmement,
nous l'avons fait aussi parce que nous pensons que ce système-là a ses limites.
Ça fait au moins une bonne vingtaine
d'années qu'on a ces outils-là, crédits d'impôt, qui étaient utilisés et très
utiles à attirer les entreprises à
s'installer chez nous. Mais éventuellement il va falloir penser à mettre fin à
ce type d'intervention là parce que, si une entreprise opère ici seulement parce qu'elle est habituée à l'aide de
l'État, je ne pense pas que ce soit une solution durable et à long
terme.
Donc,
nous ne sommes pas sûrs… moi, je ne suis pas sûr de l'efficacité du programme
de crédits d'impôt en général. C'est
pour ça que ça va être examiné de façon exhaustive par la commission de réforme
fiscale et d'évaluation de programmes pour voir si, en effet, il s'agit
d'un outil, d'un système qui soit si efficace que ça. Je pense que, si c'était tellement efficace, la croissance économique au
Québec aurait été beaucoup plus élevée au cours des dernières années.
Le Président (M. Bernier) :
Ça va, M. le député de Mégantic? Oui. M. le député de La Prairie, bonsoir.
M. Merlini : Oui, bonsoir, M. le
Président.
Le Président (M. Bernier) :
Bienvenue. Donc, je vous donne la parole.
M.
Merlini : Merci beaucoup. M. le ministre, certains analystes, certains
commentateurs et même certains députés de
la 41e législature accusent le gouvernement de reculer sur les prévisions
économiques avancées dans le cadre budgétaire du Parti libéral du Québec, notamment en ce qui a trait à la croissance
économique et à la création d'emplois. Or, il est important de rappeler qu'avec le budget 2014‑2015
le gouvernement engage la première étape de ce passage nécessaire que nous devons emprunter pour rétablir
l'équilibre budgétaire. Il s'agit d'un virage important pour la prospérité du
Québec et pour les générations futures.
Ce budget
s'inscrit toutefois dans un contexte difficile, alors nous devons composer avec
une situation de départ qui n'est
malheureusement pas idéale, et le Vérificateur général nous en a fait
l'illustre démonstration cette semaine avec son rapport qu'il a déposé à
l'Assemblée nationale. C'est le moins qu'on puisse dire.
En 2013, la croissance de l'économie du Québec a
ralenti, amenant même certains analystes, par exemple le Mouvement Desjardins, à estimer que la croissance
était effectivement en panne. Les chiffres montrent clairement que le Québec n'a pas su profiter de la reprise en
cours chez nos principaux partenaires commerciaux. Alors, le PIB réel n'a crû
que de 1,1 % en 2013, l'investissement
non résidentiel a reculé de 6 % en 2013, l'investissement en machine et
matériel a chuté de 6,6 % en
2013 après avoir progressé de 13,5 % en 2012, et l'investissement en
construction non résidentielle a diminué
de 5,5 % en 2013. L'emploi a également stagné en 2013, les niveaux entre
janvier 2013 et 2014 sont pratiquement identiques,
à 10 000 emplois près, et cette stagnation de l'emploi se poursuit. Alors,
en mai 2014, soit 17 mois plus tard, le nombre d'emplois est encore… est plus bas qu'il n'était. Il était à un
niveau inférieur que celui qui avait été observé à la fin de l'année
2012.
Alors, ainsi,
M. le ministre, au moment de prendre le pouvoir, on ne peut que constater que
les revenus de l'État sont affectés
par la faiblesse de la croissance économique. Alors, ma question est la
suivante : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il est important de baser sur des prévisions économiques
prudentes… Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il est important d'avoir
des prévisions économiques prudentes dans le cadre de votre planification
budgétaire?
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de La Prairie. M. le ministre.
M.
Leitão : Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, c'est très
important, mais je vous dirais même qu'avant de faire ça ce que nous avons aussi fait cette année et ce qu'on va
faire dorénavant, c'est que nous allons commencer le processus budgétaire de l'autre côté, c'est-à-dire
nous allons commencer par les prévisions de revenus, donc qu'est-ce qu'on peut, de façon prudente et conservatrice,
s'attendre en terme de croissance économique, croissance de revenus. Puis,
une fois qu'on a établi ce chiffre-là, là on
va dire : O.K., très bien, alors qu'est-ce qu'on peut se payer comme
dépenses? Ça, c'est une fois qu'on a
atteint l'équilibre budgétaire. C'est comme ça qu'on va opérer pour s'assurer,
justement, qu'il n'y a pas de surprise.
Alors, dans
ce contexte-là, pour qu'il n'y ait pas de surprise, comme ça a été le cas,
d'ailleurs, en 2013, on va utiliser des
hypothèses de croissance économique et, donc, de croissance de revenus qui sont
hyperprudentes, hyperconservatrices. D'ailleurs,
c'est un peu ce qui se passe dans d'autres juridictions. Si nous regardons les
budgets, surtout du gouvernement fédéral,
en ce qui concerne leur croissance de revenus, c'est vraiment hyperblindé en
termes de prudence. Ils utilisent les consensus
du secteur privé, ils diminuent de 10 milliards de dollars pour le PIB
nominal et puis, en plus de ça, ils mettent une réserve de prudence. Donc, c'est une façon très, très conservatrice
de construire un budget et c'est dans cette direction que j'aimerais
bien qu'on y aille, nous aussi.
On ne peut
pas y aller tout de suite parce que nous sommes encore en territoire
déficitaire relativement important, mais,
une fois qu'on aura retrouvé l'équilibre budgétaire, donc pour la suite des
choses, c'est comme ça qu'on va opérer, avec des hypothèses de
croissance de revenus extrêmement prudentes pour que justement on n'ait plus de
mauvaises surprises, dans le sens :
Oups! Nos revenus n'étaient pas au rendez-vous et donc, là, on a un problème
déficitaire, et il faut réduire les dépenses davantage. Donc, il faut
partir d'une base qui soit très solide au niveau des revenus.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.
M.
Merlini : Oui, en complémentaire. La croissance économique que vous
aviez prévue pendant la campagne électorale,
à ce moment-là, en réponse à ceux qui vous accusent d'avoir maintenant
supposément reculé, vous l'avez basée, en
fait, sur quoi, sur les données que vous aviez. Parce qu'on savait qu'il y
avait eu un budget qu'il manquait les crédits. Mais qu'est-ce qui vous a
permis, là… Là, on comprend la situation, que vous avez été obligé de reculer.
Mais là qu'est-ce que vous répondez à ça?
M. Leitão : On a eu besoin de…
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Excusez, M. le
Président. On a eu besoin, oui, d'ajuster notre tir parce qu'en effet la
croissance économique, pour la première
moitié de cette année, a été extrêmement faible, comme c'était le cas en 2013
aussi. Encore une fois, je demeure
convaincu que la croissance économique réelle, pour le deuxième semestre de
cette année et pour l'année
prochaine, 2015, va être supérieure à ce que nous avons indiqué dans nos
documents budgétaires. Mais, comme j'ai
mentionné tantôt, ce n'est pas prudent de bâtir un cadre budgétaire avec de
telles prévisions de croissance économique. Donc, si, à la fin du processus, on a une belle surprise, on ne demande
pas mieux, ça sera beaucoup plus facile à gérer que le contraire, si on doit s'ajuster parce qu'on
avait été trop agressifs au départ avec la croissance économique et les choses
ne se passent pas comme ce qu'on avait prévu.
Alors, pendant la campagne électorale, nous
avions prévu un taux de croissance de 2,1 % pour cette année et quelque chose de similaire pour 2015. Cette année,
étant donné un très mauvais premier semestre, une telle croissance n'arrivera pas. Mais, pour le deuxième semestre et
pour 2015, je suis encore convaincu qu'on va être capables d'avoir
quelque chose de plus robuste que ce qui est indiqué dans notre budget.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de
La Prairie, avez-vous d'autres questions?
M. Merlini : Non, merci. Ça va pour
moi, merci.
Le Président (M. Bernier) :
Ça va pour vous. M. le député de Chapleau.
M.
Carrière : Merci beaucoup, M. le Président. Ça fait plaisir
d'être à mon tour de pouvoir intervenir et saluer le ministre, mes collègues de l'opposition,
deuxième opposition, et mes collègues, ainsi que tout le personnel du ministère
qui est ici, là, que, depuis plusieurs
années, on a la chance de le croiser, que ce soit pour l'étude des budgets, là,
annuels.
Moi, ma
question se tournerait, à ce moment-ci, sur toutes les cotes de crédit du
Québec puis versus un peu ce qu'on
voit ailleurs au Canada. Et on a pu voir, là… Je prends juste Moody's comme
exemple, là, qui, jusqu'à l'année 2000, avait une cote A-2, ici, pour le Québec; en 2005, A-1; et maintenant le
AA-2. Depuis 2006, Standard & Poor's qui est assez… qui est stable depuis de nombreuses années.
Mais, quand on se compare avec les autres provinces, où l'Alberta a eu AAA, la Colombie-Britannique aussi, l'Ontario
qui est comme nous… Et je me plais souvent, de par le député… le comté que je représente tout près de l'Ontario,
donc je me plais souvent à comparer le Québec à l'Ontario, où on a la même
cote de crédit.
On a vu,
depuis 18 mois, comment l'économie a pu descendre, a pu connaître un
soubresaut, là, dans la mauvaise direction, devait revenir à l'équilibre
budgétaire en 2013‑2014, et l'ancien gouvernement, le ministre des Finances, la
première ministre qui disaient, jusqu'à la
dernière minute avant la mise à jour,
là, qu'on a eue en novembre 2013, qu'ils s'enlignaient toujours vers un déficit zéro quand les chiffres
montraient clairement, là, que c'est un déficit budgétaire qui attendait le Québec, pour finalement arriver à
quelques jours de l'élection, où on nous disait ou on disait aux Québécois
que le déficit serait
de 2,5 milliards de dollars. On voit aujourd'hui, là, avec ce que le Vérificateur général a fait, ce que le ministère a
fait, également le comité, là, avec M. Godbout et M. Montmarquette, c'est 3,1 milliards de dollars, Fitch qui a mis sous surveillance le
Québec.
Vous
avez travaillé de nombreuses années, M.
le ministre, comme économiste.
Premièrement, j'aimerais savoir quelles
sont les conséquences qui pourraient arriver s'il y avait une décote du Québec.
Le fait d'être sous surveillance par
certaines agences de cotation, qu'est-ce que ça donne ou qu'est-ce que ça amène
comme conséquence au Québec? S'il vous plaît.
• (20 h 20) •
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. le député de Chapleau. M. le ministre.
M. Leitão :
Merci, M. le Président. Alors, les conséquences d'une décote, évidemment, c'est
quelque chose qu'on… on ne veut pas y aller.
On a vu qu'est-ce que ça peut causer quand d'autres pays subissent une telle
décote. Ce qu'il faut comprendre,
c'est que le Québec, aujourd'hui, maintient encore, a encore un accès
privilégié, un accès facile aux
marchés financiers. Nous avons une dette qui est très élevée, et donc, à chaque
année, même si on ne faisait absolument rien, même s'il y avait zéro déficit, on n'investissait rien du tout en
infrastructures, nous avons quand même plusieurs milliards de dollars
que nous devons emprunter à chaque année juste pour rouler la dette existante.
Donc, c'est… Et notre facilité et notre
capacité à rouler cette dette-là, donc à réemprunter, dépend de la cote de
crédit que la dette du Québec a.
Or,
si cette cote de crédit diminue pour quelque raison que ce soit — et
on pourra voir quelles sont les raisons qui pourraient amener à une
telle diminution — ça
devient beaucoup plus difficile pour le Québec d'avoir accès aux marchés financiers. Et, si ça devient plus
difficile pour nous d'avoir accès aux marchés financiers, ça veut dire qu'il va
falloir qu'on paie plus, il va falloir qu'on
donne, donc, une prime de risque aux investisseurs qui achètent nos obligations.
Donc, les paiements d'intérêt qui sont déjà
très élevés — on
avait dit tantôt que ça équivalait au budget de l'Éducation, par exemple — et, si on devait payer encore plus en termes
d'intérêt parce qu'il y a une prime de risque parce qu'il y a eu une décote, il faudrait, à ce moment-là, générer
un surplus primaire, c'est-à-dire qu'il faudrait que nos dépenses courantes soient encore moins élevées par rapport aux
revenus courants pour qu'on puisse payer ce service de la dette plus élevé.
Donc,
ce serait une situation extrêmement complexe à gérer. Ça forcerait le
gouvernement, quel qu'il soit, qui subirait
une telle décote à poser des gestes qui seraient vraiment dramatiques. Et c'est
quelque chose qu'on veut absolument éviter,
tant nous que nos prédécesseurs, tous. Il n'y a personne qui souhaite un tel
événement. Donc, si jamais ça arrivait, oui, ça serait particulièrement
néfaste pour l'économie du Québec.
Maintenant, qu'est-ce
qui pourrait provoquer une telle chose, une décote? En fin de compte, il faut
regarder deux choses. Ce que les agences de
notation essaient de déterminer, c'est la capacité d'une juridiction à
rembourser ses dettes, et cette
capacité-là dépend de deux choses : d'abord, donc, du niveau d'endettement
et de la situation fiscale, déficit, surplus,
etc., mais ça dépend aussi de l'économie, ça dépend aussi de la vigueur, de la
croissance de l'économie. Vous pouvez
avoir un niveau d'endettement qui est relativement modeste, qui est très bas,
mais, si votre économie est stagnante ou
même en décroissance, vous allez avoir aussi un sérieux problème vis-à-vis les
agences de notation parce qu'elles vont vous dire : Oui, la dette n'est pas très élevée, mais même cette
dette qui n'est pas élevée ne pourra pas être remboursée parce que votre économie est en déclin. Donc,
c'est aussi important… c'est pour ça que c'est important de travailler sur les
deux axes, sur le redressement des finances
publiques, pour qu'on puisse dégager une marge de manoeuvre, qu'on puisse
fonctionner plus à l'aise, mais aussi sur la
croissance économique, pour qu'on puisse diminuer la pression sur les finances
publiques. Donc, c'est essentiel qu'on fasse les deux.
Les
agences de notation, dernièrement... par exemple, la dernière à agir, c'était
Fitch, ils avaient mis le Québec sous
surveillance essentiellement parce que... Bon, le niveau de la dette, il n'y
avait pas grand-chose de nouveau là-dessus, mais ce qui les préoccupait, c'était la performance économique, donc le
fait que la croissance déjà en 2012 n'était pas très forte, en 2013 était encore moins forte. Donc, ce qui les
préoccupait davantage, c'était cette descente vers une espèce de stagnation économique. C'était ça qui
préoccupait davantage les agences de notation et c'est ça que nous, on devra
leur prouver, on devra leur démontrer que nous sommes capables d'accélérer la
croissance économique.
Je
pense que c'était un de nos collègues qui avait aussi mentionné qu'en plus de
toutes les questions auxquelles nous
faisons face il y a aussi la question du vieillissement de la population, le
fait que la population active, donc le nombre de ceux en âge de travailler, va commencer à diminuer en termes absolus,
là, cette année, 2014. Ce n'est pas de la fiction, de la
science-fiction, c'est que d'ores et déjà il y a une diminution de la
population active. Et on sait très bien que la croissance économique… un des déterminants de la croissance économique
et de la création d'emplois, c'est justement la taille de la population.
Et, si ça diminue, ça va aussi provoquer un frein important à la croissance
future.
Donc,
ce sont toutes ces choses-là que les agences de notation surveillent quand
elles élaborent leur cote de crédit ou leur opinion sur la dette d'une
juridiction. Et, généralement, la façon dont ça fonctionne, c'est qu'ils
mettent cette juridiction sous observation,
donc un «credit watch», et puis, si le gouvernement pose les bons gestes, bon,
ils reviennent à neutre, et, si les
gestes ne sont pas jugés comme étant efficaces, de ce «credit watch», là on
passe à négatif et il y a une décote.
Le Président (M.
Bernier) : Il reste environ 30 secondes, M. le député de
Chapleau.
M.
Carrière : 30 secondes? O.K. Bien, je reviendrai parce que j'ai
d'autres questions sur toute la question de la décote de crédit puis...
Le Président (M.
Bernier) : Oui, vous aurez l'occasion, dans un bloc...
M. Carrière : Donc, je
pourrai revenir au prochain bloc.
Le
Président (M. Bernier) : À votre prochain bloc, vous aurez
l'occasion de revenir pour poser toutes vos questions. Merci. Nous revenons du
côté de l'opposition officielle. M. le député de...
M. Drainville :
De Marie-Victorin.
Le
Président (M. Bernier) : …Marie-Victorin, quel plaisir de vous
recevoir en tant que vice-président de cette commission.
M. Drainville :
Bien oui. Je suis content de vous voir, M. le Président.
Une voix :
Par une belle soirée d'été.
M. Drainville :
Bien oui. Je salue tous les collègues, dont certains m'ont accompagné dans
d'autres commissions, notamment la
députée de Bourassa-Sauvé, que je retrouve avec grande joie. Je salue M. le
ministre. Vous savez, M. le Président, j'ai fait quelques entrevues avec
M. le ministre par le passé.
Le Président (M.
Bernier) : ...dans votre ancienne vie.
M. Drainville :
Dans mon ancienne vie.
M. Leitão :
Et dans mon ancienne vie aussi.
M. Drainville :
Et dans votre ancienne vie aussi. Alors, je vais essayer de retrouver, M. le
Président, le climat très respectueux et cordial même qui était le nôtre
lorsque nous faisions des entrevues, lui et moi.
J'aimerais
ça qu'on parle un peu des dossiers Québec-Ottawa. Et, dans le fond, j'ai
plusieurs courtes questions à vous
poser, M. le ministre des Finances et, si vous n'avez pas d'objection, je vais
essayer de les faire les plus courtes possible
pour que vous ayez une bonne raison de me donner une réponse qui soit la plus
courte possible pour qu'on puisse couvrir le plus de terrain possible.
D'abord,
je voulais vous demander : Est-ce que les surplus financiers très
importants qui s'annoncent à Ottawa, là, dès l'an prochain, est-ce
qu'ils sont, à votre avis, révélateurs de l'existence d'un déséquilibre fiscal?
M. Leitão :
Une réponse très courte...
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M. Leitão :
Une réponse très courte : Non.
M. Drainville :
Donc, vous, vous ne reconnaissez pas l'existence d'un déséquilibre fiscal, à
partir du moment où il y aura des surplus à Ottawa, là, dès l'an
prochain.
M. Leitão :
Aujourd'hui, là, 2014, 2015, 2016, non, je ne reconnais pas l'existence d'un
déséquilibre fiscal, certainement pas de la même nature qu'on a eu dans les
années 90.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M. Drainville :
Donc, il y en avait un auparavant, selon vous?
M. Leitão :
Il y en avait un auparavant.
Le
Président (M. Bernier) : Je veux juste simplement vous
dire : C'est qu'il y a des gens qui enregistrent nos travaux, et, si vous allez trop rapidement, ces
gens-là n'ont pas le temps... Si je n'ai pas le temps de vous identifier… Ce
n'est pas de vous imposer un rythme ou quoi
que ce soit, c'est pour faciliter les enregistrements aux galées. Si on fait ça
comme ça, ça devient une discussion, et on...
M. Marceau :
On pourrait confondre qui parle.
Le Président (M.
Bernier) : Pardon?
M. Marceau :
On pourrait confondre…
Le Président (M.
Bernier) : On pourrait facilement confondre qui parle, qui pose
la question.
M. Marceau :
On pourrait attribuer des paroles au ministre qui sont celles...
Le
Président (M. Bernier) : Les paroles du ministre, vous les
attribuer, et vos paroles, les attribuer au ministre.
M.
Marceau : Ce serait dramatique.
• (20 h 30) •
Le
Président (M. Bernier) : Donc, ça devient difficile. Donc, je
vous demanderais d'avoir une certaine
pensée aux enregistrements parce que ce n'est pas facile, à ce
moment-là.
M. Drainville : Très bien, merci, M. le Président. Donc, il y en avait un auparavant, mais maintenant il n'y
en a plus. Et pourquoi donc?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Oui. Je ne pense
pas qu'il y en ait un maintenant. Et pourquoi? Parce que, dans les
années 90, à ce moment-là, le gouvernement fédéral avait mis en
place une politique fiscale très… — quel est le nom? — agressive,
disons — c'était déjà utilisé, ce terme-là — pour
revenir à l'équilibre budgétaire à ce moment-là, et une partie importante
de cet effort-là, c'était une réduction
unilatérale des transferts aux provinces. Donc, ça, ça a causé un déséquilibre.
Les provinces, toutes les provinces — ce n'était pas dirigé
spécifiquement contre le Québec, c'est toutes les provinces canadiennes — ont subi cette réduction rapide des transferts
fédéraux à laquelle ils ont eu beaucoup de difficultés à s'adapter, donc de là le
déséquilibre fiscal.
Cette fois-ci, le gouvernement
fédéral a rétabli ses livres, a rétabli son équilibre budgétaire sans réduire
les transferts aux provinces et sans réduire
les transferts aux individus. Ça a
été fait essentiellement par un
contrôle serré des dépenses fédérales, des dépenses du gouvernement dans leurs
propres opérations, leur masse salariale, etc. Donc, à cet égard-là, la
situation aujourd'hui est tout à fait différente de celle des années 90.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M. Drainville :
Mais, dans vos propres documents budgétaires, M. le ministre des Finances, dans
le plan budgétaire, vous déplorez le
plafond unilatéral qui a été imposé sur les paiements de péréquation et vous
déplorez également, dans vos propres
documents budgétaires, le nouveau plafond qui a été imposé pour le Transfert
canadien en matière de santé, qui a
été remplacé par un taux de croissance proportionnel au PIB alors qu'il était…
il est encore de 6 %, mais ça achève. Donc, dans les faits, si vous dites que le problème auparavant, c'était
l'imposition de diminution dans les transferts, dans les faits, on va vivre la même chose. On vit… La
raison pour laquelle Ottawa va être… la première raison pour laquelle
Ottawa va être en mesure d'engranger des importants surplus dans les prochaines
années, c'est à cause des nouveaux plafonds
qu'il a imposé aux provinces, et ce, de façon unilatérale, que ce soit pour la
péréquation ou pour le Transfert canadien en matière de santé.
Donc,
si votre logique, c'est l'imposition de diminution, elle devrait valoir pour
les surplus à venir. Si c'est ça, votre
logique, si la distinction que vous faites entre le déséquilibre d'avant et la
situation d'aujourd'hui, c'est l'imposition
unilatérale de diminution aux provinces, on
va vivre ça, on est en train de vivre ça, et donc, selon votre propre
définition, on devrait être en
déséquilibre fiscal, vous devriez reconnaître que c'est une situation de
déséquilibre fiscal parce que c'est la même chose.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Non, respectueusement, ce n'est pas la même chose. Ce dont on
parlait dans les années 90, c'était une
réduction en termes absolus. Le gouvernement fédéral a réduit ses transferts en
termes absolus aux provinces, à toutes les provinces. Ce que le gouvernement fédéral fait maintenant, c'est que les
transferts fédéraux continuent d'augmenter, en 2012‑2013 et 2013‑2014, 2014‑2015, les augmentations sont toujours là,
ce que le gouvernement fédéral fait, c'est que dorénavant il va… Il a changé sa formule de calcul des transferts pour
limiter la croissance, mais les transferts fédéraux vont augmenter toujours. Le Transfert canadien en
santé dont vous avez fait allusion tantôt, il ne va pas diminuer, il va passer d'une croissance de 6 % et quelques par
année, depuis déjà un certain nombre d'années, à partir de 2017 — ce n'est même pas encore aujourd'hui — cette croissance-là va être limitée à la
croissance du PIB. Donc, il n'y a pas de réduction de transferts
fédéraux, il va y avoir une diminution du rythme de croissance de ces
transferts-là.
Nous,
dans nos documents, nous faisons état qu'en effet cette décision d'Ottawa de
changer sa formule plus ou moins
unilatéralement ne nous convient pas et donc nous souhaitons convaincre, avec
nos collègues des autres provinces, convaincre le gouvernement fédéral à
revoir sa position et à changer la formule d'augmentation des transferts. Mais il
y a toujours augmentation, alors il n'y a pas de diminution des transferts.
M. Drainville :
O.K., mais là je… M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville : Oui. Moi, je ne veux pas faire une bataille, là, de
terminologie, là. Dans le fond, ce que je vous dis, et on s'entend là-dessus, c'est que, dans les années qui vont… à venir,
qui s'en viennent, Ottawa va accumuler de très importants surplus qui s'expliquent par le fait qu'Ottawa
collecte beaucoup trop d'argent pour les besoins qu'il a. Trop
de revenus, pas assez de dépenses. Je simplifie à outrance, là, mais c'est ça
pareil.
Vous, comme
fédéralistes, là, ça doit vous embêter un peu de voir ce déséquilibre, vous
êtes obligés de faire toutes sortes de
sacrifices. Vous allez être obligés d'imposer à la population
québécoise toutes
sortes de sacrifices. Vous allez être obligés de nous
serrer la ceinture collectivement. Ça va vous obliger à prendre des décisions extrêmement difficiles. Et, pendant ce
temps, ils s'apprêtent à accumuler littéralement, là, des dizaines de milliards
de dollars de surplus dans, grosso
modo, les 10 prochaines années. Vous, comme fédéralistes, là, quand vous
voyez ça, vous n'avez pas le goût de dire :
Bien là, visiblement, il y a un problème dans la fédération canadienne, il y a
trop d'argent à Ottawa pour les besoins qu'ils ont, et donc ils devraient collecter moins d'argent, et nous qui
avons plus de besoins on devrait en avoir plus? Il me semble que ça
devrait être ça, la logique, là. Non? Ce n'est pas raisonnable, ça?
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre.
M.
Leitão : Non. Non, et parce que,
si, en effet, le gouvernement fédéral dégage des surplus importants, il le fait parce qu'il a très bien contrôlé ses dépenses d'opération, ses dépenses
opérationnelles. Ce qu'il dépense dans ses ministères, ce n'est
pas... Le gouvernement fédéral n'a pas mis la hache dans ses transferts aux
individus et aux provinces.
Et, en plus,
en tant que fédéraliste, moi, je suis très content de voir notre gouvernement fédéral avoir de larges surplus parce que, fort probablement... enfin je
présume, mais c'est fort probable que le gouvernement fédéral, dans les années à venir, passe justement à des réductions
de taxes et impôts de façon significative, et nous, en tant que contribuables
canadiens, nous allons bénéficier de ces
réductions de taxes et impôts que le gouvernement fédéral va se donner. Vous
avez raison, il aurait pu choisir
d'augmenter ses dépenses, mais j'ai l'impression qu'il va plutôt choisir de
réduire ce qu'il retire de l'économie, donc réduire ses taxes et impôts,
et nous allons tous bénéficier d'une telle décision.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : Merci,
M. le Président. Si c'était le cas — et effectivement je suis d'accord avec vous,
je pense qu'il y aura des baisses
d'impôt, d'autant plus que les surplus vont survenir dans l'année électorale,
donc ça tomberait bien, disons, sur
le plan électoral, que le gouvernement fédéral annonce des baisses
d'impôt — est-ce
que ça pourrait, dans votre esprit, créer un espace fiscal pour vous
permettre d'augmenter vos revenus, à ce moment-là?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Théoriquement, oui. En effet, si le gouvernement fédéral
diminue ses taxes et impôts, ça, on pourrait occuper cet espace-là — «on pourrait» au conditionnel. Mais ce
ministre des Finances ne ferait pas ça parce que nous jugeons que les
contribuables québécois — et
je pense que le député de Lévis serait plus ou moins d'accord avec ça — les
contribuables québécois sont déjà assez taxés globalement. Et donc, s'ils
peuvent avoir un petit répit qui proviendrait
du côté fédéral, ce n'est pas le gouvernement provincial qui irait chercher des
revenus additionnels. Même si l'espace serait créé par cette
réduction-là, je n'ai pas du tout l'intention de l'occuper.
M. Drainville : Donc, il
n'est pas question pour vous...
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M.
Drainville : Merci.
Il n'est pas question pour vous de tirer profit d'un éventuel espace fiscal qui
pourrait vous être libéré par des
baisses d'impôt, c'est très clair. Vous ne souhaitez pas non plus mener de
bataille pour augmenter les transferts
fédéraux vers le Québec parce que vous jugez que ce n'est pas... vous n'avez
pas de cause, dans le fond. Vous jugez
que le fédéral dégage des surplus grâce à sa bonne gestion, grâce aux choix
budgétaires et vous dites : Comme il n'y a pas de déséquilibre fiscal, il n'y aurait pas de fondement à ce
que nous, Québécois, demandions une augmentation des transferts
fédéraux. Exact?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
• (20 h 40) •
M. Leitão : Non, non, pas exact
parce que, comme on a dit tantôt, et c'est bien élaboré dans notre budget, certaines décisions par le gouvernement fédéral
quant à la suite des choses, donc quant à l'évolution du rythme de croissance
des transferts fédéraux, nous sommes en
désaccord avec ces décisions-là et, avec nos collègues des autres provinces,
nous allons essayer de convaincre le
gouvernement fédéral à revoir ses formules
de calcul des transferts. On ne va pas… On ne va pas…
M. Drainville : …TCS, là.
M.
Leitão : On va commencer par
le TCS, par le Transfert canadien en santé sociale, qui lui changerait en 2017.
On commencerait par essayer de convaincre
nos collègues fédéraux que peut-être la formule n'est pas adéquate. Mais non, on ne va pas partir une guerre. Et ça, on va
les faire, ces représentations-là avec nos collègues des autres provinces
parce que c'est un sujet qui préoccupe tout le monde. Pas seulement le Québec,
mais l'Ontario, toutes les provinces canadiennes
souhaitent que le gouvernement fédéral revienne sur sa décision, donc on va
travailler conjointement pour changer un peu les choses.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : Mais, si
ce n'est pas au nom du déséquilibre fiscal que vous allez demander une
correction du montant de transferts
que vous recevez, si ce n'est pas au nom du déséquilibre fiscal, ce sera au nom
de quoi? C'est quoi, le principe que vous allez défendre?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Le principe que nous allons défendre, c'est le principe d'une
fédération qui fonctionne bien. Un des facteurs
qui nous distingue, au Canada, qui nous a distingués dans tout ce triste épisode
de la grande récession et l'effet que
ça a eu sur beaucoup d'autres endroits au monde, c'est que justement nous
avons, au Canada, une union monétaire et une union fiscale qui
fonctionnent bien. Et donc, dans l'intérêt de la préservation d'une union fiscale
et une union monétaire efficaces qui peuvent
même servir de modèle à nos cousins européens, c'est dans cet esprit-là que
nous allons approcher le gouvernement fédéral avec nos collègues des
autres provinces pour qu'il maintienne ce système-là de transferts. C'est une particularité canadienne qui est très… je dirais,
unique au monde. On ne trouve pas ça aux États-Unis, on ne trouve pas ça en Australie ni en Allemagne,
ce système de péréquation et ce système de transferts fédéraux. Ça nous a très bien servi, au Canada, surtout au cours des
30 dernières années, et donc nous allons essayer de convaincre nos amis
fédéraux à revoir leur position.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M.
Drainville : Donc, ce
n'est pas au nom du déséquilibre fiscal que vous allez mener la bataille, c'est
au nom du bon fonctionnement de la fédération. C'est ça? C'est ça que
vous m'avez dit en gros?
M. Leitão : Oui.
M.
Drainville : O.K.
Mais, en tout respect, M. le ministre des Finances, là, si vous voulez obtenir
gain de cause, vous allez devoir avoir un rapport de force. Vous dites :
Je vais le bâtir avec les autres provinces. Hein, vous revenez constamment là-dessus : On va travailler avec
les autres provinces. Vous pensez que… Je ne sais pas, moi, je vous écoute
parler puis je vous trouve… je vous trouve trop bon, trop bon gars. En fait, je
vous trouve trop bon gars. Non, mais je regarde… je regarde…
Des voix : …
M. Drainville : C'est parce qu'Ottawa ne va pas
vous faire de cadeau, hein? L'histoire du Québec, que ce soit… peu importe qui est au pouvoir, hein? Puis là
c'est… Je vous dirais, Robert Bourassa avait compris ça, ça prend un rapport
de force, si tu veux aller faire des gains,
ça prend un rapport de force. Jean Charest, quand il est allé chercher un
montant d'argent justement pour
corriger le déséquilibre fiscal, il avait bâti son rapport de force,
c'est-à-dire qu'il avait l'opinion publique
québécoise derrière lui. Vous, vous dites : Dans le fond, Ottawa, ils font
tout bien, je n'ai rien à leur reprocher, j'ai juste un petit problème de fonctionnement, je vais m'asseoir avec
les autres provinces, puis on va s'entendre. Moi, je ne vois pas tellement comment vous allez
construire votre rapport de force avec Ottawa dans l'attitude que vous avez
présentement.
Par exemple,
dans votre plan budgétaire, vous reconnaissez que le Québec va recevoir
seulement 18 % du volet Infrastructures
provinciales-territoriales du nouveau Fonds Chantiers Canada, hein? Ils vont
mettre 10 milliards dans le volet
Infrastructures provinciales-territoriales. Le Québec reçoit seulement
18 % de l'enveloppe. Vous saviez ça? Comment vous allez faire pour aller chercher notre juste
part? Normalement, on devrait avoir 23 %, ce qui est notre poids
démographique.
On s'entend
que, je pense, dans le cas du Fonds Chantiers Canada, on ne va pas s'appuyer
sur le poids du PIB, je pense qu'il faut y aller avec le poids
démographique parce qu'on ne veut pas justement que ces fonds-là servent à renforcer le statu quo, on veut que ces fonds-là
servent justement à assurer une répartition qui soit la plus équitable et qui
permette, disons, une certaine égalité des
chances. Alors, comment vous allez faire pour aller chercher la juste part du
Québec, qui ne reçoit que 18 % alors
qu'il faudrait recevoir 23 %? Est-ce que vous êtes d'accord qu'il faudrait
recevoir 23 % de l'enveloppe?
Le
Président (M. Bernier) : M. le ministre, «trop bon gars» n'est
pas un terme antiparlementaire, c'est correct.
M. Leitão : Merci.
Le Président (M. Bernier) :
Donc, allez-y, M. le ministre, vous pouvez répondre.
M.
Leitão : Écoutez, les relations
fédérales-provinciales, ce n'est pas facile, mais je dois vous avouer que,
depuis une trentaine d'années quand
même, au Canada, on a réussi à bâtir une bonne relation avec nos
amis fédéraux. Ce n'est pas idéal, bien sûr que non, il y a toujours des choses
qu'on aimerait et qu'on va renégocier, qu'on va essayer d'obtenir plus. Mais je pense que ce que vous mentionnez, ce
que vous faites allusion au rapport de force, je pense que ce n'est pas la
seule façon de négocier. Je pense que, quand
nous avons une attitude de collaboration, quand nous avons une attitude où on cherche à trouver des solutions plutôt qu'à
créer des conflits, je pense qu'à la longue on va sortir gagnant d'une telle
attitude. C'est ce que nous allons mettre en
place, c'est ce que ce gouvernement va mettre en place, et je pense qu'on va
avoir des résultats
beaucoup plus intéressants que si on adoptait une attitude beaucoup plus
belliqueuse avec nos collègues du gouvernement fédéral.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de… il vous
reste environ deux minutes.
M. Drainville : Mais, M.
le ministre des Finances, en tout respect, là, vous dites vous-même, dans vos
documents budgétaires, qu'on n'a pas
notre juste part du Fonds Chantiers Canada puis, dans le fond, vous me
dites : On va leur demander gentiment de nous donner notre juste
part. Puis, s'ils disent non, vous allez faire quoi?
M. Leitão :
On va leur demander encore avec nos amis des autres provinces. Le Fonds
Chantiers Canada…
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Encore une fois, je m'excuse, M. le Président. On recommence.
On va leur demander encore et on va négocier
encore. À ce chapitre-là, les relations que nous avons maintenant avec le
ministre fédéral en charge de ce programme-là
sont des relations très cordiales. Je pense que nous sommes assez proches de
retrouver… de renégocier une entente
avec le gouvernement fédéral. Donc, je serais un peu prudent quant à sauter aux
conclusions trop rapides de ce qui pourrait être le cas.
Vous
êtes aussi certainement au courant que pas seulement au Québec, mais beaucoup
d'autres provinces, enfin toutes les autres provinces jugent que l'effort
fédéral en termes de dépenses en infrastructures, donc Chantiers Canada,
cet effort-là est bien sûr trop modeste, et donc il va y avoir de la pression
pour que ce bloc de dépenses fédérales là augmente, lui aussi.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Marie-Victorin, je vous laisse le
mot de la fin.
M. Drainville :
Il nous reste très peu de temps, effectivement. Je veux juste, M. le Président,
dire : En 2008, lors de la
campagne électorale fédérale, Jean Charest a déclaré que la question du
déséquilibre fiscal n'était toujours pas réglée. On ne peut pas dire que
M. Charest n'était pas un fédéraliste. Il a déclaré que ce n'était pas réglé,
et…
Le Président (M.
Bernier) : Attendez un petit peu, on va laisser finir le
député.
M. Drainville :
…après l'avoir dit, il y a eu des coupures. Le nouveau cap, le nouveau plafond
sur les paiements de péréquation et
le nouveau plafond sur le TCS, ils ont été posés après. Donc, Jean Charest a
dit, en 2008 : Ce n'est pas réglé,
le déséquilibre fiscal, et le gouvernement fédéral en a rajouté, a accru encore
plus le problème en coupant et dans les
paiements de péréquation… en fait, dans le taux de croissance, et même chose
avec le Transfert canadien en matière de
santé. Si, pour Jean Charest, il y avait un déséquilibre fiscal en 2008, avant
les nouveaux plafonnements du TCS puis de la péréquation, s'il était
aujourd'hui ici, je pense qu'il dirait : Le déséquilibre est encore pire
qu'il était en 2008. Et je ne comprends pas
comment vous, comme ministre des Finances, vous ne pouvez pas dire :
Écoutez, il y en a un, déséquilibre, puis je vais me battre pour le
corriger.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. Une courte réponse.
M. Leitão : Une
courte réponse. Vraiment, je ne saisis pas du tout parce que les dépenses
fédérales, tant la péréquation que le Transfert
canadien en santé, depuis 2008, ne font qu'augmenter. Alors, où est la
réduction? C'est un peu loufoque. 8 milliards en 2008, on est
rendus à 9,5 milliards en 2014. C'est étrange…
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. le ministre. Vous aurez l'occasion de revenir sur le sujet
dans un bloc subséquent. Nous allons
passer immédiatement au député de Mercier. Donc, je vais laisser la parole, pour un bloc
de 15 minutes, au député de Mercier.
Par la suite, nous reviendrons à la partie gouvernementale suite à une entente.
Donc, M. le député de Mercier, la parole est à vous.
• (20 h 50) •
M.
Khadir : Merci, M. le Président. Merci aux députés de la partie gouvernementale pour me céder cet
échange de temps de parole. D'abord, je veux souligner que j'ai eu
l'occasion de rencontrer M. le ministre à l'occasion des consultations
prébudgétaires avec ma collègue Françoise David, de Gouin. Nous avons formulé
un certain nombre de propositions. Je vais
revenir, donc, sur une partie de ces propositions là parce que le gouvernement
insiste beaucoup sur les problèmes des finances publiques, problème
de la dette, la nécessité de
l'équilibrer, nous estimons qu'il y a d'autres solutions que couper. On peut aussi éviter de gaspiller de l'argent là
où il y a eu des gaspillages et on peut aussi rechercher une plus grande équité entre les contribuables à
revenus modestes, les particuliers, et de grandes entreprises, et de grandes
fortunes qui paient relativement de moins en
moins d'impôt depuis de nombreuses années, tout le monde le reconnaît. Et donc, s'il existe une… s'il peut y avoir une
dispute alentour du déséquilibre fiscal entre le Québec et le fédéral auquel
ont fait allusion mes collègues du Parti
québécois, il est incontestable qu'il y a un déséquilibre fiscal qui s'accroît
depuis une trentaine d'années entre
les particuliers et les entreprises, d'une part, puis entre la classe moyenne,
les faibles revenus, les modestes revenus et les très fortunés.
D'ailleurs, à cet égard-là, j'aimerais attirer
l'attention du ministre sur le rapport de la fiscalité des entreprises. Le dernier que j'ai pu consulter date… est paru en
2013 et concerne l'année 2008. Est-ce qu'on va avoir un rapport plus récent sur la fiscalité des entreprises au Québec pour avoir
un portrait plus juste, pour savoir qu'est-ce qu'eux paient comme impôt, quelle
est leur part par rapport aux efforts consentis par les contribuables
ordinaires?
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le député de Mercier. M. le ministre, une courte réponse.
M.
Leitão : O.K. Pour ce qui est de la fiscalité des entreprises, bon, il
va y avoir la commission sur la réforme fiscale, donc ils vont regarder ces questions-là de la lourdeur ou
absence de lourdeur du fardeau fiscal des particuliers et des entreprises.
Donc, ça va être regardé maintenant.
Mais, d'une
façon un peu plus, si vous voulez, philosophique, je ne vous cache pas que je
pense qu'on sortirait perdants
collectivement si on augmentait le fardeau fiscal des entreprises. Je pense que
les entreprises sont la source de croissance
économique, et donc elles doivent aussi jouer un rôle dans l'effort. Et
d'ailleurs vous avez remarqué qu'on a joué avec… ou qu'on a changé les
crédits d'impôt, par exemple. Mais, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des
entreprises, je pense que ce serait
contre-productif d'augmenter l'impôt du revenu sur les entreprises, ça nous
donnerait probablement quelques
revenus de plus, mais ça serait de courte durée et ça provoquerait toutes
sortes d'autres conséquences qui seraient beaucoup plus dommageables
pour l'économie.
Le Président (M. Bernier) :
M. le député de Mercier.
M. Khadir : Mais je signale au ministre des
Finances que ce discours-là, cette réponse qu'il vient de nous donner, c'est essentiellement l'argument invoqué depuis à
peu près 25 ans pour consentir de plus en plus de baisses. Si ça devait avoir des résultats positifs, on en saurait
quelque chose. Ce qu'aujourd'hui nous constatons, c'est que, depuis 25 ans, il
y a une perte de la productivité de
plusieurs sociétés qui l'ont appliqué et surtout il y a une baisse de la
vitalité économique de nos économies
partout en Occident. Il y a eu la crise financière de 2007‑2008 de laquelle les
économies occidentales ont peine à se
relever et il y a un fossé croissant entre les classes moyennes, les classes avec des revenus plus modestes et ceux qui sont les plus fortunés, au sommet de
la hiérarchie, qui contrôlent souvent ces entreprises qui sont de moins en
moins taxées. Il y a
un déséquilibre profond. Et les économistes réputés, dont, je suis sûr, le ministre actuel doit avoir
entendu parler, des économistes des prix Nobel, je parle de Joseph Stiglitz, je
parle de Paul Krugman, reviennent… et des milliardaires comme — là, le nom m'échappe pour bien faire, mais…
le millionnaire américain — Warren Buffett rappelle qu'il
y a un déséquilibre quand des milliardaires paient moins d'impôt que leurs
secrétaires, en termes relatifs. D'accord?
Je signale que, par exemple, dans le dernier
rapport, qui date de 2008, dernier rapport disponible, même entre entreprises, les grandes entreprises paient deux
fois moins d'impôt que l'entreprise moyenne qui, elle, produit des richesses.
Il y a déséquilibre là. Il faudrait que les
gens soient au courant de ça. Il y a 27 milliards de dollars de crédits
d'impôt octroyés pour les dividendes.
Parce que vous savez que des dividendes sont imposés la moitié… Quand vous avez
un revenu en dividendes, vous êtes
imposés à moitié. Quand vous avez un revenu de votre salaire, de votre travail,
vous êtes imposés à 100 %. Il y
a déséquilibre là aussi. Ça a coûté... En fait, il y a 27 milliards de
dividendes qui ont été payés sans impôt, libre d'impôt. Il y a énormément, donc, de… il y a un vaste réservoir
dans lequel il y a une marge de manoeuvre que le ministre pourrait
appeler à la tâche.
Mais je laisse ça de côté, je signale simplement
que le citoyen moyen pour lequel vous comptez couper des services — parce qu'il va y avoir des coupures de
services, tout le monde s'entend pour dire ça — aimerait savoir pourquoi est-ce qu'on ne met pas à la tâche les plus
fortunés, bien que Warren Buffett, un milliardaire américain, dit : Ils
devraient, ceux-là, faire un effort supplémentaire.
Maintenant,
M. le ministre, vous avez, à la page 55 de votre plan budgétaire... vous parlez
d'un certain nombre d'actions que
vous allez mettre en oeuvre en 2014‑2015 pour des contrôles de dépenses,
notamment la révision du régime public
d'assurance médicaments pour la signature d'ententes particulières avec des fabricants
pour la réduction des prix pour les médicaments génériques. J'aimerais
signaler à mon collègue et ministre des Finances que, Québec solidaire, depuis 2006, nous avons présenté à quatre
ministres de la Santé différents… Parce que c'était M. Couillard qui, ici même,
nous entendait, moi et Françoise David, le
présenter, le projet de Pharma-Québec, qui consiste essentiellement à mieux
négocier le prix de nos médicaments. Il a
dit que c'était un projet excessivement intéressant, mais le lobby pharmaceutique
était trop puissant à l'époque. Ensuite, j'en ai parlé au ministre Bolduc. Je
m'excuse si... bien, en fait, au député de...
Le Président (M. Bernier) :
Au député de Jean-Talon.
M. Khadir : ...Jean-Talon d'aujourd'hui. Très
bien. J'en ai parlé également au ministre Réjean Hébert et à l'actuel ministre de la Santé, qui était à l'époque
président de Fédération des médecins spécialistes. Tous ces ministres m'ont dit
que c'est une idée intéressante, on devrait
l'explorer. J'en ai parlé aussi à quatre ministres des Finances. Je vous
épargne les noms. Il s'agit, si on
applique le modèle de Pharma-Québec du modèle néo-zélandais, qui permettrait de
faire exactement ce que le
Vérificateur général aujourd'hui dit que nos établissements de santé font à une
plus petite échelle… D'accord? Ils le
font pour les médicaments qu'on utilise dans les hôpitaux. C'est une facture de
610 millions, puis le vérificateur trouve que les écarts de
10 % sont sujets d'inquiétude.
Je vous
signale que, la moyenne de ces corporations, sur le 610 millions, là, les
acquisitions qu'ils font… ont des prix
inférieurs de 30 % à la facture que paie la RAMQ, c'est-à-dire ce que paie
la RAMQ aux compagnies pharmaceutiques pour
les 3,4 milliards de dollars de médicaments d'ordonnance remboursés par la
RAMQ. Vous voyez, c'est un énorme... On
a 610 millions, sujet d'inquiétude pour 10 % de différence, mais il y
a 30 % de différence pour 3,4 milliards qu'est la facture de
la RAMQ pour les assurés du régime public. Est-ce que vous comptez faire
quelque chose là-dessus? L'Ontario l'a fait. Sans aller aussi loin que Pharma-Québec, de Québec
solidaire ou la Nouvelle-Zélande, l'Ontario a des réductions de l'ordre
de 500 millions à 800 millions par année depuis 2006. C'est beaucoup
d'argent, M. le ministre. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : O.K. Merci, M. le Président. Plusieurs choses. Pour ce qui
est du taux d'imposition des riches et des super-riches, j'aimerais juste qu'on évite, si on peut, de faire un
amalgame avec ce qui se passe à l'extérieur. La situation américaine est très différente de la situation
canadienne, de la situation québécoise. Nous n'avons pas les mêmes taux d'imposition qu'aux États-Unis ou les mêmes
échappatoires fiscales qui existent aux États-Unis et qui n'existent pas ici.
Donc, ce dont M. Buffett se plaint, et avec
raison, c'est une situation qui ne pourrait pas vraiment se matérialiser ici.
Donc, ça, c'est une chose.
Pour ce qui
est des dividendes, évidemment, n'oublions pas que les dividendes sont des
paiements qui se font, donc, aux
actionnaires d'une entreprise après que l'entreprise ait payé des impôts. Donc,
des impôts ont déjà été payés, donc c'est un peu différent.
Mais, pour
revenir au coeur de votre question, et on a déjà parlé de ça avant, en effet,
les prix des médicaments, c'est un
poste de dépenses très important, et j'en suis sûr, oui, qu'il y a des moyens
d'aller trouver des économies. On n'a pas
besoin de faire des grandes révolutions. Nos voisins ontariens l'ont fait.
Ailleurs, dans les pays de l'OCDE, ça s'est fait aussi. Donc, oui, je pense que c'est quelque chose qu'on peut et
qu'on doit regarder. Je vous avais déjà dit même, dans nos consultations prébudgétaires, que c'est un sujet qu'une fois la période de
préparation budgétaire derrière nous, donc cet été, c'est quelque
chose que, moi, personnellement, ça m'intéresse beaucoup d'explorer cette
avenue-là.
• (21 heures) •
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Mercier.
M. Khadir : …allez-vous le limiter aux médicaments génériques? Parce que
je comprends que le lobby des produits brevetés est très puissant. Il y a
un ancien ministre libéral… enfin, un ancien adjoint ministériel libéral qui est maintenant
P.D.G. du lobby des pharmaceutiques. Mais ce n'est pas une raison. Je pense
que, collectivement, on est rendus là. Il
y a eu une commission d'enquête royale au Canada, en 2002 — vous êtes fédéraliste —commission royale instituée par le gouvernement libéral de M.
Chrétien, présidée par Roy Romanow, qui disait qu'on paie de trois à six fois
trop cher nos médicaments à l'échelle… Trois
à six fois, imaginez, c'est énorme. Donc, je vous prie de considérer aussi les
médicaments brevetés.
M. Leitão : On va considérer.
M. Khadir : J'ai d'autres
propositions…
Le Président (M. Bernier) :
M. le député.
M. Khadir : …qui vont dans le
même sens. Je pense… Il me reste, M. le Président…
Le Président (M. Bernier) : Il
vous reste environ 3 min 30 s.
M. Khadir : Très bien. Le Québec est en surplus
d'électricité, M. le ministre. Dans le plan budgétaire, vous dites qu'Hydro-Québec Distribution en a pour
75 térawattheures en surplus pour les 10 prochaines années. Ces térawattheures,
on les produit actuellement à perte par des
chantiers comme la Romaine et par des minicentrales électriques. Il y a un
comité d'experts formé par l'ancien
gouvernement qui, indépendamment de quiconque, a étudié le projet de la Romaine
et nous dit que, dans le contexte
actuel, on devrait abandonner les phases III et IV. Ça permettrait d'économiser
4 milliards de dollars aux
deniers publics. Finalement, c'est quand même dans le giron des deniers
publics, même si c'est Hydro-Québec qui fait des investissements. Et puis, les minicentrales, tout le monde
s'entend pour dire que c'est à perte qu'on donne ces contrats-là.
Pourquoi?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Bon, pour ce qui est de la Romaine, écoutez, on ne va pas
commencer maintenant à faire marche arrière, le projet va se terminer.
Pour ce qui est des surplus d'électricité, oui, ils sont imposants,
75 térawattheures, mais c'est l'équivalent
d'une grosse aluminerie et d'une mine de fer, par exemple. Donc, ils sont
imposants, ces surplus-là, mais ils ne sont pas de nature telle qu'ils
vont être avec nous pendant des décennies. Ça va se résorber quand même assez rapidement, surtout ceux… Avec la façon dont nous
comptons utiliser ces surplus-là pour attirer l'investissement, ces surplus-là ne vont pas durer beaucoup. D'ailleurs,
à très court terme, pour l'année 2014, il y a une belle fenêtre d'opportunité
pour qu'Hydro-Québec augmente ses
exportations aux États-Unis. Donc, je pense que, d'ici un an, ces surplus-là
vont déjà être pas mal moins élevés,
mais il y a encore de la place qu'on puisse les utiliser comme levier pour
promouvoir le développement de l'économie québécoise.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Khadir : La ministre des Finances, en 2009,
Mme Jérôme-Forget, la ministre libérale, disait exactement la même chose, que bientôt on va écouler ces surplus.
2009, 2014, ça fait déjà cinq ans, il n'en est rien. Puis les projections
qui sont faites par le comité d'experts nous
montrent qu'on va être en surplus longtemps. Les alumineries produisent quelque
chose. Ces surplus-là, actuellement, nous
coûtent… coûtent aux contribuables… on les paie de nos poches pour rien, ça
ajoute à la dette. Pourquoi on fait ça?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Bien, écoutez, les exportations d'aluminium sont un moyen
important et utile pour réduire notre déficit commercial. Donc, je n'ai pas la même opinion que le député de Mercier
de ces activités-là. Pour ce qui est des surplus d'électricité qui étaient déjà là avant et qui sont toujours là,
n'oublions pas non plus, n'oublions pas non plus qu'il y a eu une récession en 2008-2009, l'activité économique
industrielle, aux États-Unis, a beaucoup baissé en 2008-2009 et qu'elle peine à se relever. Donc, la capacité d'exporter a
été sévèrement affectée par cet événement cyclique là, un cycle vraiment
très fort. Maintenant, on commence à voir que
l'économie américaine se replace, et donc la consommation totale d'électricité, en Amérique du Nord, est maintenant
sur une pente ascendante, et ces surplus-là vont se résorber assez…
relativement rapidement.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre, merci. Votre
temps est maintenant écoulé, nous allons donc retourner du côté gouvernemental. Et c'est M. le député de Chapleau qui
me demande la parole. Je vous l'accorde, allez-y.
M. Carrière :
Merci beaucoup, M. le Président. Je veux revenir, là, sur le sujet sur lequel
j'étais, là, au bloc précédent, toute la
question de la cote de crédit du Québec et quelle influence ça peut avoir sur
le budget du Québec et sur les pourcentages, là, d'intérêt, etc. Je veux
juste répondre un petit peu… ou faire un peu de pouce sur ce que le député
de Mercier disait, là. Il disait que tout le monde
s'entendait que les minicentrales, ce n'était pas voulu. Je pense que, si on
va dans chacune des régions où sont prévues
les minicentrales, il y a des ententes avec les communautés autochtones,
c'est du développement économique pour ces
communautés-là où le taux de chômage est souvent beaucoup plus élevé que partout ailleurs au Québec. Donc, je pense que
cet engagement-là de reprendre la construction de ces minicentrales-là va faire en sorte que ces communautés-là… les
ententes qu'il y a eu avec les autochtones, ce n'est, pour ces régions-là,
que du positif.
J'aimerais
savoir de la part du ministre… J'ai très bien compris, là, qu'il y a
deux axes, comment, là, c'est analysé au
niveau des cotes de crédit, là, que
le redressement des finances publiques et la croissance économique sont deux
axes… ou les deux axes sur lesquels
les agences, là, de cotation évaluent le Québec, ou toutes les
provinces, ou tous les gouvernements. J'aimerais
savoir, là, dans le budget… comment ces agences de cotation là, là, vont
évaluer, ou ont évalué, ou peuvent évaluer
le budget du 4 juin, par rapport aux cotes de
crédit, comment les agences de cotation vont prendre ça et quels seront
les résultats, vous pensez.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Leitão : Très bien.
Merci. Alors, ce que les agences font maintenant, surtout Moody's, S&P et DBRS… surtout Moody's
et DBRS, c'est qu'après chaque budget provincial ainsi que fédéral ils émettent
une courte opinion de ce qu'ils pensent
de ce budget-là, de l'exercice, mais c'est une opinion qui ne comporte pas une
appréciation de la dette, c'est juste leur
opinion. Et par la suite ils vont faire un examen plus approfondi, ils vont
venir parler, donc, au ministère des Finances, poser des questions pour
mieux évaluer l'exercice qui a été fait.
Or,
ces deux agences-là, surtout Moody's et DBRS, suite au dépôt de notre budget,
ont souligné que la tâche qui est devant
nous est exigeante, je pense même qu'ils ont utilisé le mot «ambitieuse». Mais
ce n'est pas une nouvelle pour nous, nous savons très bien que c'était
une tâche exigeante. Donc, ils vont nous juger, si vous voulez, sur notre
capacité de contrôler, en effet, le rythme
de croissance des dépenses. C'est pour ça que c'est absolument essentiel, c'est
primordial qu'on soit capables de
livrer les cibles que nous nous sommes données en termes de contrôle des
dépenses. Nous allons être jugés sur
ça, c'est ça qui a été dit. Donc, nous avons encore, si vous voulez, le
bénéfice du doute, mais c'est sur ça qu'ultimement
nous serons jugés, sur notre capacité de livrer ces cibles-là de croissance des
dépenses de 1,8 % cette année, 0,7 % l'année suivante.
Cela
serait extrêmement difficile d'atteindre si on n'avait pas… si on ne s'était
pas donné les outils que nous nous sommes
donnés, les deux commissions, le gel des effectifs, les crans d'arrêt. Si on
n'avait pas fait ça, oui, ça aurait été très, très difficile d'atteindre ces
objectifs-là. Mais, avec ces outils qu'on s'est donnés, je pense que ces
objectifs sont réalisables, sont atteignables, mais ils ne sont pas
faciles, ça va être exigeant. Et c'est pour ça que tout le monde doit contribuer. C'est pour ça que nous avons fait ce
que nous avons fait. Nous avons été chercher des revenus additionnels de
l'ordre de 300 et quelques millions. Nous avons procédé à des réductions de
crédits d'impôt. Donc, c'est un effort généralisé
pour s'assurer que cette cible-là de retour à l'équilibre budgétaire soit
atteinte. Et, si tel est le cas, nous allons non seulement maintenir notre code de crédit, mais, je suis vraiment
confiant, nous allons même être capables d'améliorer notre cote de
crédit.
D'ailleurs,
dans La Presse canadienne, si on lit un peu ce qui se passe
à l'extérieur, c'est quand même encourageant de voir certains analystes canadiens bien reconnus, comme ceux du Globe
and Mail, dire à leurs politiciens ontariens : Hé! Regardez un petit peu ce qui se passe au
Québec, vous devriez peut-être vous inspirer de ce qui se passe là-bas. Donc, ça fait quand même chaud au coeur
de voir que les tendances se renversent à ce niveau-là.
• (21 h 10) •
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Chapleau.
M.
Carrière : Oui.
Merci, M. le Président. Écoutez, à toutes les fois que quelqu'un
peut dire : Regardez ce qui se
fait au Québec… On a quelques preuves dans le passé. Qu'on regarde
toute la question du plan d'investissements dans les infrastructures pendant la pire crise économique depuis les 70 dernières années, c'était 42 milliards que nous avions décidé
d'investir pour, premièrement, remettre à niveau nos infrastructures, deuxièmement, garder les Québécois à l'emploi. Il y a l'Ontario puis il y a
d'autres provinces qui ont copié sur le Québec. Donc, ce n'est pas une première
fois.
Puis je vais
me permettre encore une fois de parler du Plan Nord, où le Parti québécois a lamentablement échoué. Maintenant, tout
le monde s'entend pour dire que
c'était un «plan mort». Les investisseurs qui disaient : «Québec :
Never Again». Et l'Ontario,
pendant qu'au Québec on perdait des emplois, l'Ontario
a fait son «Circle of Fire». Comme je disais tantôt, je me compare souvent à l'Ontario parce
que j'habite à côté et j'y vais régulièrement. Et c'est un succès, là, tout le développement minier qui se
fait dans le Nord de l'Ontario. Donc, c'est deux exemples, comme celui que vous
donnez aussi, où souvent les idées qu'on a sont facilement exportables.
Je regarde
les différentes, là, depuis… les différentes cotes de crédit des provinces canadiennes
et je note, là, dans Moody's, dans
Standard & Poor's et dans DBRS, les seules provinces qui ont des moins
bonnes cotes de… — excusez-moi — des
moins bonnes cotes de crédit que nous sont le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse,
les territoires…
Le Président (M. Bernier) :
Pas de cellulaires.
M. Carrière : …Terre-Neuve-Labrador et l'Île-du-Prince-Édouard. Quand on regarde Standard & Poor's, là, où
le Québec est à A plus, nos voisins, l'Ontario,
qui est à AA moins, donc une meilleure cote que nous, comment le Québec pourrait
faire pour améliorer sa cote de crédit? Et quelles conséquences ça aurait — un
exemple, là — si
le Québec, là, selon
Standard & Poor's, là, passait de A plus à AA moins? Quels seraient les
bénéfices financiers, économiques, ou
peu importe, d'un tel résultat?
Le Président (M. Bernier) :
Alors, M. le ministre.
M.
Leitão : O.K. En effet, écoutez, je vous réponds d'abord par la
négative. C'est-à-dire, nous sommes rendus à une cote telle que, si jamais, si jamais on était décotés de là où on
est, donc, S&P, nous sommes à A plus et, si jamais on baissait d'un cran pour quelque raison que ce
soit, on tomberait au même niveau que l'Île-du-Prince-Édouard. Donc, nous sommes déjà à un niveau qui, vraiment… c'est
le plancher. Moins que ça, on serait vraiment dans de très, très, très
mauvais draps.
Maintenant, pour répondre à votre
question : Qu'est-ce qui arriverait si on monte d'un cran, donc si on
passe de A plus à AA moins dans l'échelle de
S&P?, sur les coûts d'emprunt que le Québec paie maintenant, probablement
que la différence ne serait pas très
grande parce que maintenant les taux d'intérêt sont très bas. Donc, le Québec
continue d'avoir un accès privilégié
aux marchés, même avec la cote de crédit actuelle. Et donc, si cette cote
s'améliorait, oui, il y aurait… on
paierait un petit peu moins, mais ce n'est pas énorme. La valeur d'une
amélioration de notre cote de crédit, maintenant, dans les circonstances actuelles des marchés
financiers, serait surtout au niveau du message que ça envoie à la communauté
d'investissement en général. Donc, les
investisseurs étrangers privés se sentiraient beaucoup plus à l'aise à venir
investir ici parce qu'ils verraient
que, contrairement à… Il y a très peu de juridictions où il y a une
amélioration. Si ça se passait, ça
serait vraiment une excellente nouvelle au niveau de notre réputation
internationale, ce qui aurait un effet très important en termes
d'attirer des investissements étrangers.
À terme, une
fois que les taux d'intérêt reviendraient à des niveaux plus normaux — parce que, là, c'est extrêmement bas — oui, une meilleure cote se traduirait aussi
par des coûts d'emprunt qui seraient plus favorables. Mais je pense que l'effet
plus immédiat serait un effet sur la réputation du Québec et aussi, et aussi
sur les emprunteurs privés. Parce
qu'en fin de compte les grandes entreprises québécoises qui empruntent sur les
marchés, leur cote de crédit, d'une certaine
façon, est aussi influencée par la cote de crédit du souverain, donc par la
cote de crédit du gouvernement qui est derrière
eux. Si la cote de crédit du gouvernement s'améliore, nécessairement ça va
avoir aussi un effet positif sur tous les emprunteurs privés qui
émettent des obligations dans les marchés.
L'inverse est
aussi vrai. Si la cote de crédit du souverain, donc de l'emprunteur public,
diminue, ça aussi, ça a un effet en
cascade sur les grands emprunteurs privés, qui verraient leurs coûts d'emprunt
augmenter aussi un peu partout. Donc,
c'est extrêmement important non seulement de maintenir la cote, mais d'éventuellement
mettre en place des mesures qui contribueraient à une amélioration de
cette cote de crédit là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Chapleau.
M.
Carrière : Merci beaucoup, M. le Président. Comment, au niveau
de... le fait que le Fonds des générations… Tantôt, vous parliez, si j'ai bien compris, qu'il serait à
16 milliards, là, éventuellement. Comment ce Fonds des générations là... Et je sais que les cotes de
crédit ou les grandes firmes de cotation de crédit, là, en tiennent compte.
Mais comment... quel effet positif ou négatif, là, dans un sens... ou,
s'il n'y en avait pas, ça aurait sur les cotes de crédit du Québec? Et comment, plus il y aura d'argent dedans
ou plus il sera élevé, comment ça peut avoir une influence positive sur
les cotes de crédit?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : En
effet, c'est un outil vraiment extraordinaire. Je pense que je n'exagère pas en
disant que c'est vraiment crucial. C'est ça
qui fait la différence. C'est un outil qui n'existe pas dans les autres
provinces. Même la richissime Alberta...
bon, ils ont très peu de dettes, mais le fonds souverain qu'ils se sont donné,
le fonds d'investissement, ce n'est pas
grand-chose. Donc, ce que nous avons, ce que nous avons établi, au Québec,
depuis déjà un certain nombre d'années est
vraiment extraordinaire. Et d'ailleurs je salue mon prédécesseur, qui a su
résister à beaucoup de pression et a maintenu le Fonds des générations
pendant le temps qu'ils étaient au pouvoir. C'est vraiment crucial.
C'est un
outil qu'on s'est donné justement pour démontrer aux investisseurs étrangers,
aux agences de notation que nous
sommes sérieux en ce qui concerne le contrôle de notre endettement public.
Puisque ce fonds-là a maintenant... bon,
a toujours eu depuis le début, mais a des sources de revenus qui lui sont
propres, donc c'est un fonds qui va croître avec le temps. Plus le temps va passer, plus ce fonds-là va croître.
Comme on a dit tantôt, on sera rendus à 16,5 milliards, à peu près, en 2018‑2019. On va commencer à
contribuer... donc, ce fonds va recevoir les redevances et ses revenus, arrivé
à 2018‑2019, de 3 et quelques milliards de
dollars par année. Donc, on commence à approcher presque 1 % du PIB qui va
être mis dans ce fonds-là.
Donc, c'est
un outil extraordinaire pour démontrer aux agences et aux étrangers que le
Québec est sérieux en ce qui concerne
le contrôle de sa dette. Nous nous sommes donné un outil qui facilite cette
tâche-là. C'est exigeant, c'est très
exigeant, parce que, s'il n'y avait pas ça, on aurait atteint l'équilibre
budgétaire beaucoup plus tôt. Mais c'est une discipline que nous nous imposons pour nous assurer que non seulement
nous arriverons à l'équilibre budgétaire, mais que nous allons continuer à ralentir l'augmentation de la dette avec ces
actifs financiers qui s'accumulent. Donc, c'est vraiment une mesure
cruciale, dans notre politique de retour à des finances publiques, beaucoup
plus simple.
M. Carrière : Merci.
Le Président (M. Bernier) :
O.K.? Merci. M. le député de Chapleau.
M.
Carrière : J'aurai fini ensuite avec toute la question de la
cote de crédit. L'objectif de diminuer la taille de la dette par rapport au PIB, là, qui est à
54 %... 54 % point quelques maintenant, d'ici 2025 la ramener à
45 %, qu'est-ce que ce 10 %
là, au niveau de la cote de... voyons! de l'endettement, viendrait donner sur
les agences de cotation de crédit? Est-ce
que ça ferait en sorte que les «prime rates» — excusez le terme, là — ou tout ça, seraient encore meilleures
puisque le taux d'endettement est plus bas?
• (21 h 20) •
M.
Leitão : Ce que les agences de crédit vont examiner... Ils ne vont pas
attendre jusqu'en 2025, quand on sera rendus
à 40 % du… dette-PIB, pour, à ce moment-là, améliorer la cote de crédit,
ils ne vont pas attendre si longtemps que
ça. S'ils voient que la tendance va dans la bonne direction et que, donc, le
ratio dette-PIB commence à diminuer, comme ce que nous pensons qui va être le cas à partir de 2016, donc, quand la
tendance va s'inverser, ça, en soi, va être déjà un signal très clair. Et, si, en plus, on est
capables de livrer nos cibles de contrôle des dépenses, ça va être un signal
très puissant pour nous mener à une
éventuelle amélioration de notre cote de crédit. Donc, on n'a pas besoin
d'attendre jusqu'à 2025 pour avoir
une amélioration de notre cote de crédit. La cible de 40 % dette-PIB,
c'est une cible que nous jugeons… et d'ailleurs
mon prédécesseur aussi, que nous jugeons être une cible raisonnable. En tout
cas, notre économie peut bien digérer… peut vivre avec un niveau
d'endettement de l'ordre de 40 % du PIB.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Chapleau.
M.
Carrière : Parce qu'à la page E.55 — là encore je reviens sur les cotes de
crédit, là — ça
dit : «La cote de crédit d'un emprunteur mesure sa capacité de payer
les intérêts sur sa dette et d'en rembourser le principal à échéance. Pour établir la cote de crédit d'un emprunteur
comme le gouvernement du Québec, les agences [...] analysent un ensemble
de facteurs économiques, fiscaux et
financiers.» Pourriez-vous me donner quelques exemples, là, de facteurs
économiques et financiers, mis à part de ceux que vous m'avez donnés
depuis...
M. Leitão : Ultimement...
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre, allez-y.
M.
Leitão : Ultimement,
l'indicateur économique principal qui est regardé, qui est observé, c'est la
croissance du PIB. La croissance du
PIB nominal, c'est ça qui ultimement est important. Évidemment, pour arriver à la
croissance du PIB, les agences et les
prévisionnistes, un peu tout le monde va regarder toute une série d'autres indicateurs
qui nous mènent à être capables de
prévoir la croissance économique. Donc, tout ce qui est évolution des
exportations, évolution de l'investissement privé et surtout aussi
quelle est la compétitivité fiscale du Québec vis-à-vis ses voisins, vis-à-vis
ses compétiteurs, tous ces éléments-là vont
être analysés dans le but d'être capables de bien cerner quelle va être la
croissance économique du PIB qui, lui, va déterminer le ratio dette-PIB.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Chapleau? Non? M.
le député de Laval-des-Rapides? Lequel? Levez la main. Levez la main, je vais vous donner la
parole.
M. Polo : Merci beaucoup...
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Laval-des-Rapides, allez-y.
M.
Polo : Merci beaucoup, M. le Président. Il y a quelques minutes, lorsque notre collègue de l'opposition officielle a pris la parole, vous l'avez corrigé sur son
choix de mots, qui était de dire que notre ministre des Finances était peut-être «trop bon». Moi, je préfère dire
«très bon». Cependant...
Le Président (M. Bernier) :
...commentaire, je l'ai mentionné, c'est bon.
M.
Polo : Oui, effectivement. Cependant, j'aimerais également revenir sur... Parce que
notre collègue de l'opposition
mentionnait que c'était peut-être
une caractéristique de notre ministre
des Finances. Il faut également
mentionner que peut-être une caractéristique de l'ancien ministre des Finances, c'était peut-être qu'il était peut-être trop candide. Ce que
je veux dire par là, c'est qu'il a reconnu,
dans le passé, qu'il s'était trompé, O.K.?
Et, ce que je veux dire par là, il
avait même annoncé et justifié qu'une
partie du déficit à l'époque était... si on peut dire, on pouvait le blâmer sur
le dos des consommateurs québécois
qui auraient trop économisé. Ensuite, il a blâmé l'inflation, et pourtant
l'inflation n'explique qu'environ 600
millions sur une augmentation du déficit de 3,1 milliards. Malheureusement, son explication de l'époque n'excuse
pas cette différence importante entre l'impact de l'inflation et les mauvaises
estimations et mauvais calculs, et peut-être même, l'information qui n'a
pas toujours été divulguée au grand public telle que le Vérificateur général
l'a divulguée dans son plus récent rapport.
Donc, ma question
s'adresse au ministre des Finances sur la question de l'inflation et juste une mise en contexte. Parce que la plupart des économies avancées ont
connu un contexte de faible inflation en 2013, au Québec. La croissance de l'indice des prix à la consommation a fortement
ralenti. L'IPC, comme c'est appelé dans le langage économique que M. le ministre connaît très bien, n'a progressé
que de 0,7 % en 2013, après une hausse de 2,1 % en 2012. Par
ailleurs, la décélération des prix a
été plus accentuée au Québec qu'au Canada, où la croissance de l'inflation
s'est élevée à 0,9 % en 2013.
L'inflation
devrait s'accélérer graduellement cette année et l'année prochaine, donc, cette
année, autour de 1,3%, et de
2,1 % pour 2015, car ces facteurs exerceront une pression accrue sur les
prix, notamment le renforcement attendu de la demande intérieure et des exportations, qu'on compte stimuler avec
notre collègue le ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations, et devra entraîner, donc, une hausse
du taux d'utilisation de la capacité de production. La dépréciation du dollar canadien devrait exercer
aussi une pression à la hausse sur les prix par l'entremise des produits
importés. Et donc, pour les quatre premiers mois de 2014, par
rapport à la période correspondante
de 2013, l'inflation a atteint seulement 0,9 % au Québec et
1,6 % au Canada.
Donc, M. le ministre des Finances, quelles sont vos perspectives concernant l'inflation et
de quelle façon justement ça a
dirigé vos prévisions pour le budget que vous avez présenté le 4 juin
dernier? Et, de façon également plus large, comment
cela va se traduire également sur les prochaines prévisions que vous faites,
notamment, là, du point de vue très conservateur, très prudent
également? Merci.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : En effet, l'inflation est un sujet très important. Les
revenus de l'État, les revenus fiscaux évidemment sont influencés par l'évolution du PIB nominal, et
le PIB nominal, lui, évidemment est influencé directement par l'évolution
de l'inflation. Comme vous avez mentionné,
l'inflation, au Québec, en 2013, a été plus faible qu'ailleurs. Elle a été très
faible partout en Occident, mais, ici, elle
était un peu plus faible qu'ailleurs et, même cette année, elle va demeurer encore légèrement plus faible
que la moyenne canadienne. Ça reflète un certain nombre de choses, mais
ultimement ça reflète le fait que la demande intérieure, au Québec, n'est pas
aussi vigoureuse qu'elle l'est ailleurs chez nos voisins.
C'est très
important, cette question de l'inflation, parce que, comme on a dit tantôt, nos
revenus, les revenus des gouvernements dépendent en grande partie de
l'évolution de cela. Il y a des choses que nous pouvons faire ici pour essayer d'accélérer ça. Donc, une économie plus
vigoureuse va nous donner un peu plus d'inflation. Mais il y a aussi des
éléments, des phénomènes qui dépassent un peu
le cadre du Québec et même du Canada et qu'il faut prendre en considération. Parce que, comme vous avez mentionné,
et d'autres collègues l'ont mentionné aussi, nous avons adopté des prévisions de croissance de revenus, moi, j'ai
dit, hyperprudentes parce qu'il y a un élément derrière tout ça qui est un peu… un peu troublant du point de vue global,
et cet élément-là, c'est ce que certains économistes classifient maintenant
de peut-être une période de stagnation
structurelle dans les économies avancées, les économies de l'OCDE. Surtout, le
grand économiste américain, Larry Summers,
qui était, d'ailleurs, à Montréal lundi et a donné une très bonne «lecture», une
très bonne leçon à ce sujet-là, je ne suis pas sûr que moi, je partage
entièrement son analyse, mais force est de constater
qu'il y a certaines questions qu'il pose et qui sont très pertinentes à cet égard-là.
Et, pour nous, c'est important, ça,
ici, ce n'est pas seulement quelque chose de théorique, dans les nuages, parce
que ça va influencer directement la croissance de nos revenus, et c'est pour ça
que nous devons être prudents.
Ce à quoi on fait allusion, c'est que
probablement le choc financier de 2008‑2009 était tellement sévère que l'économie mondiale, surtout dans les grands blocs
de l'OCDE — l'Amérique
du Nord, l'Europe, le Japon — a un écart de production qui est tellement grand, donc la différence entre la
capacité de produire et ce qui est en effet produit est tellement grande
que ça amène des pressions désinflationnistes qui sont très, très, très…
Le Président (M. Bernier) :
Merci, M. le ministre.
M. Leitão : O.K.
Le
Président (M. Bernier) : Merci. Vous aurez l'occasion d'y
revenir. Nous allons donc donner la parole au deuxième groupe d'opposition.
C'est le député de Lévis ou le député de Groulx?
M. Dubé :
Je vais y aller pour commencer, si vous voulez bien, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Mais ça me fait plaisir, M. le député de Lévis.
Allez-y.
• (21 h 30) •
M.
Dubé : Tout à l'heure, pour
continuer dans les indicateurs qui permettront de tirer des conclusions que
nous allons à la bonne place, vous
avez indiqué, M. le ministre, là, à la page C.21, qu'il y avait plusieurs
éléments qui nous permettent de
vérifier comment on avance en perspective économique. On a parlé du
nombre d'emplois, là. Je suis
toujours à la page C.21, pour les
gens qui nous suivent, et on voit très bien le nombre d'emplois qui est créé,
par exemple, en 2014, c'est-à-dire que l'année… ça, c'est une année
civile, et d'un 45 000 emplois dans l'année 2015.
J'aimerais
vous entendre un peu, M. le ministre, si c'est possible, de parler d'un autre
indicateur dont vous avez parlé
plusieurs fois dans votre discours budgétaire, c'est, par exemple, le PIB par
habitant, qui est un petit peu… qui est presque à la fin de cette page-là, qui, en fait, est une mesure très
simple, mais, je pense, qui est assez reconnue, où on prend le PIB puis
on le divise par la population du Québec. Et je voudrais vous entendre un petit
peu sur deux questions.
Premièrement,
on sait très bien qu'avec les chiffres qui sont ici pour l'année 2013 le Québec
fait piètre figure si on le compare
aux autres provinces canadiennes puis à nos voisins, où, à 44 000 $
par habitant, on est au neuvième rang, si ce n'est pas très proche du 10e rang. Ici, on voit que vous avez une
amélioration quand même, je dirais, importante pour 2015, qui vient… La mathématique est assez facile, c'est
de prendre le PIB qui aura une croissance assez importante en 2015 et
qui expliquerait cette augmentation-là…
Ma
question est très simple. Dans votre plan global de quatre ans, comment
voyez-vous le PIB par habitant? En termes
de dollars absolus, c'est une chose, mais, moi, ce qui me préoccupe,
c'est : Est-ce qu'on est capables, sur un horizon de quatre ans, de voir déjà une amélioration de
cette neuvième ou dernière position que nous avons et de commencer à
rétrécir l'écart de richesse que nos citoyens, un jour, pourront profiter en
termes d'avoir des meilleurs revenus?
Alors, si
aujourd'hui, en termes très simples, on est au neuvième, dixième rang dans plus
ou moins quelques facteurs, vous nous voyez
une amélioration en 2015, mais, sur quatre ans, est-ce que vous voyez qu'on
pourrait gagner quelques points par
rapport à nos voisins en améliorant le PIB, etc.? Je veux vous entendre
là-dessus parce que, pour moi, à
moins que vous me disiez le contraire, c'est un élément important de mesure au
cours non seulement des prochains mois, mais sûrement des prochaines
années, là.
Le Président (M.
Bernier) : Merci, M. le député de Lévis. M. le ministre.
M.
Leitão : Oui, bien sûr, le PIB per capita, ce n'est pas une mesure
idéale, mais c'est la meilleure qu'on dispose pour pouvoir vraiment comparer différentes juridictions dans l'évolution
de l'économie et voir une évolution du niveau de vie. Donc, encore là,
ce n'est pas idéal, mais les alternatives ne sont pas meilleures, donc c'est
très utile.
PIB
per capita, donc, ça dépend du PIB et ça dépend de la population. Or, en ce qui
concerne la croissance du PIB global,
nous, évidemment, notre objectif, c'est que cette croissance-là commence à
atteindre au moins la moyenne canadienne.
Donc, on se situe aux alentours de 2 % et quelques par année en
termes de croissance réelle. En termes de croissance nominale avec un peu d'inflation, on se trouve dans les zones
de 4,5 %, même un peu plus optimiste, 5 % de croissance du PIB
nominal. On rentrerait, alors là, sur un horizon de quatre ans, dans la moyenne
canadienne.
Pour
ce qui est de l'autre, du dénominateur de la croissance de la population,
écoutez, la croissance de la population au Québec est très faible. Donc, le PIB per capita va nécessairement
s'améliorer parce que le dénominateur va être de moins en moins fort. Et donc, oui, on va gagner quelques places dans ce
classement-là, mais cette amélioration va venir des deux côtés, va venir du fait qu'on va produire plus de PIB avec
moins de personnes, relativement. Ça veut nécessairement dire, quand on fait ça, quand on produit plus de
PIB avec moins de personnes, que, par définition, la productivité s'améliore.
Donc, la clé de l'amélioration de notre
«ranking» canadien passe nécessairement par une amélioration de la
productivité. Si on n'est pas capables de produire plus par personne, là
on ne sera pas capables d'améliorer notre position.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Lévis.
M. Dubé :
Si vous me permettez, M. le Président, c'est là que je veux en venir un peu.
Moi, si j'avais à vous demander à l'avance — je
suis certain que vous l'avez, que vous pouvez nous dire ça — ce
serait quoi, votre beau bulletin, dans
quatre ans, du PIB par habitant en termes de… ce n'est pas tellement
de dollars absolus, si vous l'avez, mais est-ce que vous avez une idée qu'on aurait pu gagner un point, deux points dans
le classement, qu'on pourrait avoir par
rapport au reste du Canada
si on est à peu près au dernier rang aujourd'hui? Parce qu'on ne le voit pas sur cette page-là, on
ne voit pas ce que vous visez dans
votre plan de quatre ans. On le voit très bien pour 2015, mais on ne le voit
pas sur quatre ans. Je reviens
toujours à mon plan de quatre ans, là, que vous avez bien décrit. Vous voyez
avoir gagné combien de points dans ce…
M. Leitão :
Ça, c'est…
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Je m'excuse, M. le Président. Ça, écoutez, ce n'est pas facile de voir ça parce que
ça va dépendre aussi de ce qui se passe ailleurs. Nous, ce que nous
contrôlons, c'est ce que nous faisons.
M.
Dubé : …votre objectif,
c'est… Je veux juste… Si vous me permettez, M. le Président, là. Ce que je
demande : Est-ce que vous avez un objectif d'améliorer notre
position par rapport au PIB par habitant? En ce moment, on est le
dernier ou à peu près le dernier. Voyez-vous nous améliorer au niveau de
ce «ranking» là dans les quatre prochaines années, c'est-à-dire d'arrêter
d'être le dernier lorsqu'on compare aux autres provinces?
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M. Leitão : Écoutez, ce que nous
souhaitons, c'est de revenir à la moyenne canadienne, donc d'être capables d'accélérer la croissance du PIB per capita avec
la moyenne canadienne. Où est-ce que ça
va nous situer? En cinquième position, quatrième, sixième? Ça, ce n'est pas
possible de le chiffrer parce que je ne sais pas qu'est-ce que l'Ontario
va faire, je ne sais pas qu'est-ce
que l'Île-du-Prince-Édouard va faire. Donc, je préfère me concentrer sur ce
que nous allons faire ici, et ce que nous allons faire ici, c'est avoir
une croissance du PIB per capita qui soit au moins la même que la moyenne
canadienne.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Lévis.
M. Dubé : Si je vous comprends bien…
Le
Président (M. Bernier) : M. le député de Lévis, c'est la même règle, il faut
que je sois capable de permettre aux gens de prendre…
M. Dubé : Vous avez raison, c'est parce que
la conversation est tellement intéressante que, des fois, j'oublie…
Le Président (M. Bernier) :
Oui, ça, je vous comprends…
M. Dubé : …et vous faites bien de me
le rappeler, M. le Président. C'est très bien.
Le Président (M. Bernier) :
C'est bien. Allez-y.
M.
Dubé : Mais je veux juste
bien comprendre le point qui est là, là, pour qu'on s'entende bien parce qu'on va avoir plusieurs années à travailler ensemble. Moi, ce que je veux bien
comprendre, je veux dire : Votre objectif, je dirais, dans quatre
ans, est-ce qu'on serait revenu à la moyenne canadienne du PIB par habitant?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : À la moyenne de la croissance du PIB par habitant. En
chiffres absolus, comme vous avez mentionné tantôt, le PIB par habitant,
au Québec, est pas mal inférieur à la moyenne canadienne.
M. Dubé : On est au neuvième, si ce
n'est pas le 10e rang, alors…
M. Leitão : C'est ça, c'est ça…
M.
Dubé : Puis je ne fais pas
une grosse différence entre neuf et 10, on est pas mal à la queue. Je veux
juste bien comprendre votre point. C'est que, qu'on soit cinquième ou
sixième, je n'en fais pas une grande différence non plus, mais ça serait, d'ailleurs, une amélioration très importante, M. le
Président. Alors, ma question,
c'est : L'objectif général, est-ce
qu'il serait d'être à la moyenne canadienne à l'année 2018, lorsque… vous
pourriez dire, à mi-chemin, vous avez fait
un premier mandat, vous avez réussi à obtenir la moyenne canadienne du PIB par
habitant? Que ça soit le quatrième, le
sixième ou le cinquième, je ne vous en tiendrai pas rigueur. Mais est-ce qu'on
aurait eu une amélioration importante par rapport à notre dernier rang aujourd'hui?
Clairement, c'est ça, ma question.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. Donc, allez-y, M. le ministre, là, je vous laisse la parole.
M.
Leitão : Merci. Oui, je
souhaite vraiment qu'on soit capables d'avoir une bonne
amélioration, mais, encore une fois,
c'est en termes de croissance, donc la croissance du PIB per capita,
au Québec, qui a été, dans les années précédentes, inférieures à la moyenne canadienne. Déjà, en
deux ans, déjà rendu en 2015, nous voulons que cette croissance
soit la même. Donc, on devrait commencer à être capables de
fermer l'écart. Par définition, la moyenne canadienne, il y a
un nombre de provinces qui sont sous
la moyenne. Alors, nous allons avoir une croissance du PIB per capita qui va
être plus rapide que la moitié des provinces.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Lévis.
• (21 h 40) •
M.
Dubé : Alors, pour continuer
dans la même ligne… Parce
que je veux faire vraiment
la différence entre les souhaits et
les cibles. Vous avez dit, tout à
l'heure, que 250 000, ce n'était pas un engagement, ce
n'était pas une promesse, c'était… Je veux juste faire attention qu'on
se comprend bien lorsque vous parlez de cible.
Je
reviens toujours sur la question des revenus, parce qu'on pourra, plus tard,
aller dans la question des dépenses. Si
tout le monde doit faire un effort… Je retourne à la page A.24, dans les
revenus. Si vous me permettez, M. le Président, ce que je veux demander au ministre, c'est… On vient de dire qu'on veut avoir des meilleurs revenus, on veut avoir un
meilleur PIB. Et, si je prends l'ensemble des
revenus autonomes — je
suis toujours à la page A.24 — où
on est à 74 milliards en 2013‑2014, donc, ça, c'est le meilleur estimé des comptes
publics qui vont sortir bientôt cette année, il est intéressant de
voir que… Je vais toujours sur votre bloc de quatre ans. Regardez, en 2017‑2018,
une progression de 14 milliards de revenus, on passe de 74 milliards dans les revenus autonomes — ça va? — pour aller à 86 milliards. Il est
quand même intéressant qu'un des seuls
groupes qui n'augmente pas ses revenus, c'est les entreprises du gouvernement.
Parce que, si on regarde la croissance des
impôts qui sont chargés aux individus, au niveau des cotisations de la santé,
les impôts des sociétés, taxes à la
consommation, etc., à peu près tout augmente sauf l'impôt… sauf les entreprises
du gouvernement. Et j'aimerais
beaucoup que vous nous expliquiez, parce que, quand on dit : Tout le monde
doit faire un effort…
Puis est-ce
que c'est un problème de revenus au niveau des entreprises de l'État? Est-ce
que c'est un problème de dépenses?
Parce que, là, il faut regarder… C'est, en fait, le net qu'on vise. Alors, je
voudrais vous entendre là-dessus. Parce
que, quand les citoyens disent : Il faut faire un effort pour tout le
monde, bien je vois les sociétés d'État… Est-ce que c'est parce que les revenus sont en baisse puis on ne baisse pas
assez les dépenses? Alors, je veux vous entendre un petit peu là-dessus,
parce que, ça, c'est quelque chose qu'il va falloir creuser un petit peu plus,
mais je vois que c'est peut-être… besoin de creuser un petit peu là-dessus.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Merci. Oui, alors, la réponse
est oui. Qu'est-ce que ça…
M. Dubé : Oui à revenus ou oui à
dépenses?
M.
Leitão : La réponse est oui. Écoutez, d'abord, l'effort qu'on demande
aux sociétés d'État, cette année… pardon, 2014‑2015, c'est un effort
substantiel. Cette diminution qu'on voit surtout en 2015‑2016 provient de deux
facteurs. D'abord, Hydro-Québec, qui est la
plus importante des sociétés d'État, sa contribution est de loin supérieure aux
autres, Hydro-Québec, étant donné les
contrats qui ont été signés avec les alumineries, étant donné, donc,
l'utilisation des surplus d'électricité,
Hydro-Québec va, sur quelques années, donc, rapporter un peu moins que ce
qu'elle rapporte en 2013 et en 2014. Donc, une partie de la diminution
provient d'Hydro-Québec.
La deuxième
raison derrière cette diminution-là se trouve à moindre mesure… mais les autres
sociétés d'État. Mais force est de
constater, comme on l'a vu d'ailleurs récemment, que, dans le cas de
Loto-Québec, ce n'est pas nécessairement
une industrie en forte croissance. Les jeux de hasard, c'est une industrie,
disons, mature, et la croissance des revenus de ce secteur-là aussi a
atteint, à mon avis, a atteint son apogée, et ça va être assez difficile de
l'accélérer davantage. Pour que l'État
génère plus de revenus de cette ligne d'affaires là, disons-le comme ça, il va
falloir que les dépenses, donc la
rentabilité de Loto-Québec s'améliore, ce qui, d'ailleurs, va être le cas. On a
déjà vu qu'ils ont un plan d'affaires qui réduit les dépenses pour
qu'ils puissent maintenir…
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. le député de Lévis.
M.
Dubé : Peut-être pour vous aider à répondre ou, peut-être mieux, pour
être plus clair dans ma question, prenez-les une par une, parce que vous avez
bien dit… En fait, quand vous prenez les trois grandes composantes, l'Hydro-Québec, Loto-Québec, la SAQ… Moi, ce qui
me préoccupe, c'est quand vous me dites : L'Hydro… O.K., il y a des
baisses de revenus parce que peut-être les revenus d'électricité sont… mais il
y a une question de coûts.
J'aimerais,
si c'est possible, M. le Président, que vous preniez une par une. Hydro-Québec,
par exemple, est-ce que c'est elle
qui explique principalement la baisse des revenus qu'on voit là? Parce que, si
on n'est pas capables de travailler sur
l'aspect des revenus, est-ce que ça veut dire qu'Hydro-Québec on laisse aller
les dépenses, puis il n'y a pas un contrôle des dépenses? J'aimerais mieux qu'on les prenne société par société, si
vous me permettez, parce que, pour moi, c'est un élément… Je le redis, là, c'est le seul groupe qui n'a pas de croissance
de ses revenus sur les quatre prochaines années. Alors…
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M. Leitão : Oui. N'oublions pas que
le point de départ est très élevé. La contribution d'Hydro-Québec, cette année et surtout l'année passée, était très forte.
Donc, ce n'est pas raisonnable de pouvoir penser qu'Hydro-Québec pouvait
continuer à ce rythme-là, surtout étant
donné les changements structurels qu'il y a
dans cette industrie-là. Il
y a une fenêtre d'opportunité, cette année, d'augmenter les
exportations d'électricité aux États-Unis, mais cette fenêtre-là va se fermer relativement vite dans les années subséquentes, pendant que la production
d'électricité aux États-Unis, elle, augmente aussi beaucoup. Avec la production de gaz de schiste, il y a beaucoup de conversion qui se fait, et donc leurs coûts de
production d'électricité baissent.
Mais, encore
une fois, l'effort qu'on demande à Hydro-Québec cette année, 2014‑2015, c'est un effort
considérable, c'est de l'ordre de
150 millions. Pour vous comparer... pour vous situer avec les autres sociétés d'État, cette année, on demande 150 millions de plus à Hydro-Québec;
Loto-Québec, c'est 10 millions de plus; et, à la SAQ, c'est
10 millions de plus. Donc, vous
voyez l'ordre de grandeur où nous nous situons. C'est vraiment Hydro-Québec qui
contribue beaucoup à cette augmentation, à cet effort substantiel.
Nous avons aussi, en demandant cet
effort substantiel, nous avons aussi demandé à Hydro-Québec, d'abord, de
s'assurer que ça ne se transforme pas en
augmentation de tarifs aux consommateurs et aussi qu'ils réduisent leur masse
salariale pour qu'ils soient capables de maintenir leurs dividendes, maintenir
leur rentabilité à un niveau acceptable.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Dubé : En fait, ce que j'aimerais savoir, c'est : Étant donné
cette baisse de revenus là au niveau des quatre prochaines années, est-ce que les efforts du côté des dépenses
vont être plus importants pour essayer de compenser cette baisse-là? Et je pense entre autres à la
question du gel des effectifs, à... Est-ce que, étant donné qu'on n'a pas
encore… comme gouvernement, que nous
n'avons pas encore toute l'information sur le nombre d'employés dans tout le
réseau de l'État, etc., allez-vous
être en mesure de demander un effort raisonnable, important sur le contrôle des
dépenses? Si les revenus ne sont pas
au rendez-vous, comme vous dites, avec Hydro-Québec, est-ce qu'il va y avoir un
effort important sur le contrôle des dépenses, dont le nombre d'employés
dans ces différentes sociétés d'État là?
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M. Leitão :
Nous avons demandé à Hydro-Québec et aux autres sociétés d'État, et ils se sont
évidemment engagés à le faire, un gel de la
masse salariale pour deux ans. Donc, pour les deux prochaines années, 2014‑2015,
2015‑2016, il va y avoir un gel de la
masse salariale des sociétés d'État : Hydro-Québec, Loto-Québec, SAQ et
Investissement Québec.
M. Dubé :
Je veux juste bien comprendre votre point, si vous permettez, M. le Président.
Le Président (M.
Bernier) : Allez-y, allez-y.
M.
Dubé : On parlait d'un gel des effectifs, et vous dites :
Quand... pour la fonction publique, puis, dans le cas des sociétés
d'État, pour être très clair, pour ces trois sociétés d'État là, il y aurait un
gel de la masse salariale pour…
M. Leitão :
Deux ans.
M.
Dubé : Pour deux ans. Et ça, vous trouvez que c'est suffisant, du côté
du contrôle des dépenses, pour compenser la baisse des revenus que nous
avons dans ces trois sociétés d'État là?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : C'est un moyen très fort. D'ailleurs, en chiffres absolus,
donc cette année, 2014‑2015, au total, effort additionnel ou pas, le total qu'Hydro-Québec va contribuer aux coffres
de l'État, c'est de 3 050 000 000 $. C'est ce à quoi nous nous attendons d'Hydro-Québec. L'année prochaine, 2015‑2016, c'est 2 745 000 000 $; et, en 2016‑2017, 2 830 000 000 $; et, en 2018‑2019,
3,1 milliards. Donc, on voit qu'à court terme oui, il y a une légère
baisse. C'est conjoncturel. Par la
suite, plus tard, 2017‑2018, 2018‑2019, les contributions d'Hydro-Québec
recommencent à nouveau à augmenter.
Juste
à titre d'exemple, par exemple, en 2012‑2013, la contribution réelle, en
chiffres absolus, d'Hydro-Québec aux
coffres de l'État, c'était 2 760 000 000 $; cette année,
c'est 3 050 000 000 $; l'année prochaine,
2 740 000 000 $. Donc, c'est quand même un effort
soutenu de la part de cette grande société d'État aux coffres de l'État.
M. Dubé :
Et ma dernière question, si vous me permettez…
Le Président (M.
Bernier) : Oui, allez-y.
• (21 h 50) •
M. Dubé :
…pour finir sur ce point-là, puis on reviendra dans... On ira dans les dépenses
demain, pour notre part. Est-ce que vous trouvez qu'il est raisonnable,
lorsqu'un contribuable regarde le portrait des revenus pour les quatre prochaines
années, que c'est les sociétés d'État seulement qui ont une baisse de
contribution, alors qu'à tous les autres
groupes, que ça soit les sociétés, les contribuables, on ait des augmentations
de revenus, alors que les sociétés d'État, elles, peu importe pour les raisons, au niveau des revenus comme dans le
contrôle des dépenses, on voit une détérioration de leur contribution?
Comment pouvons-nous expliquer ça aux contribuables, M. le ministre?
Le
Président (M. Bernier) : Une courte réponse, M. le ministre,
parce que le bloc est déjà terminé. Une courte réponse.
M. Leitão :
C'est essentiellement conjoncturel. L'effort d'Hydro-Québec était très élevé en
2013‑2014, c'est vraiment une contribution record aux coffres de l'État. C'est
un niveau qui n'est pas soutenable pour une entreprise commerciale. Hydro s'en sert quand même, des activités commerciales. Ce
niveau-là n'est pas soutenable dans le contexte actuel. Donc, il y aura
une légère baisse, mais, plus tard, 2017‑2018, 2018‑2019, ça va recommencer à
augmenter.
Le
Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons
donc passer du côté gouvernemental. Donc, la parole est au député de
Sainte-Rose. Allez-y, M. le député.
M. Habel : Merci, M. le
Président. J'ai une courte question, étant donné la précédente séance, où nous
avons vu le député de Rousseau
brandir le cadre financier actuel du gouvernement. Suite à la réception du
rapport du Vérificateur général, nous
avons vu la réalité réelle du Québec des derniers mois, du moins la nouvelle
réalité. Moi, ce que je voudrais savoir, c'est : Suite à la
réception de ce rapport, M. le ministre, qui n'était pas disponible, je tiens à
le rappeler aux téléspectateurs, avant
l'élection du 7 avril, en quoi ce rapport du Vérificateur général a influencé
vos perspectives des finances publiques?
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Merci. Ce rapport a une grande influence parce qu'il a, en
fin de compte, confirmé ce que le groupe d'experts Godbout-Montmarquette avait soulevé tout de suite après
l'élection, donc le 7 avril. Les experts, qui avaient regardé les finances publiques du Québec,
s'étaient rendu compte qu'il y avait vraiment une problématique importante
au niveau de l'évolution des dépenses.
Ça a été plus ou
moins bien reçu. Moi, j'avais très bien reçu ce rapport-là et j'avais compris
l'enjeu, mais je pense, pour ce qui est de
la population en générale, il y avait peut-être certains doutes quant à l'importance
de ce qui avait été découvert par les experts. Mais le Vérificateur
général a confirmé qu'en effet, si rien ne se passait, les dépenses publiques auraient accéléré de façon importante,
et on se trouverait, à ce moment-là, avec un déficit qui pourrait atteindre
presque 6 milliards de dollars.
Évidemment,
notre collègue a mentionné que c'était un déficit potentiel, et, oui, une telle
chose, on n'allait pas laisser ça se
matérialiser. Et c'est ce que nous avons fait avec le budget du 4 juin,
nous avons mis en place une série de mesures pour contenir le rythme de
croissance des dépenses.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Sainte-Rose.
M.
Habel : En quoi pensez-vous que nos cinq axes pour relancer le Québec
vont bénéficier à tous les citoyens?
M. Leitão :
O.K.
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Je m'excuse encore une fois, M. le Président. Alors, ces cinq
axes de développement, je pense qu'il faut
les voir sur une base du moyen et du long terme. Donc, il y a des mesures, là,
qui sont très court terme, comme le programme
LogiRénov pour l'amélioration des dépenses de rénovation domiciliaire. Ça,
c'est à très court terme. Il y a les questions
des PME, la réduction de l'impôt sur le revenu des PME et toute l'autre série
de mesures qu'il y a pour les PME, qui sont aussi plus ou moins à court
terme et qui vont contribuer, à notre avis, à une relance rapide.
Après
ça, il y a les mesures un peu plus structurantes, à moyen et à long terme, de
la stratégie maritime, la relance du
Plan Nord, les ressources naturelles au sens plus large, incluant les
hydrocarbures, et pas seulement dans le Nord-du-Québec, mais sur tout le territoire québécois. Ces
politiques-là, cette direction dans laquelle nous voulons aller, il me semble
qu'elle va porter des fruits, des fruits très importants, très
intéressants.
Nous
avions vu, avant 2012, à quel point les investisseurs étrangers étaient prêts,
disposés à investir au Québec, surtout
dans le Plan Nord, dans les ressources naturelles du Québec. Ces
investissements-là se sont refroidis considérablement. Et maintenant, avec cette relance du Plan Nord,
là, on va être capables, là, à nouveau, j'ai bien confiance, de repartir
cette machine-là. Encore une fois, ces
choses-là prennent du temps, les résultats ne sont pas immédiats, mais c'est un
pas important dans la bonne direction.
On
a quand même très peu parlé de la stratégie maritime. Il me semble que c'est
quelque chose qui est très important aussi.
La stratégie maritime comprend toute une série de mesures qui vont favoriser le
transport de marchandises et qui vont
bien nous positionner ici, au Québec, pour une augmentation, encore là, à
terme des échanges internationaux entre le Canada et l'Europe et même aussi pour l'Amérique du Nord, avec
l'élargissement du canal de Panamá. Ça va aussi amener une augmentation
du trafic de marchandises, globalement.
Et
le Québec, historiquement, est très bien situé géographiquement pour être une
porte d'entrée importante pour le centre
de l'Amérique du Nord, et vers l'Europe et les autres marchés internationaux,
donc. Ça a été, d'ailleurs, la clé, si on veut, du développement surtout de Montréal. La grande région de
Montréal, historiquement, était devenue la capitale économique du Canada — il y a déjà quelques années de ça, n'est-ce
pas? — en
grande partie basé sur le transport, sur son industrie du transport. C'est le pôle de transport par
excellence en Amérique du Nord. Donc, ce n'est pas nouveau de vouloir à nouveau utiliser cet avantage
comparatif, cette situation géographique comme levier de croissance économique.
C'est ce que nous allons faire d'une façon très pratique, très pragmatique.
Comme
première étape, nous allons établir dans la Montérégie un axe transmodal de
transport. Donc là, là, il y a l'autoroute
30, il y a la voie maritime, toutes les voies ferroviaires. Tout ça se croise à
cet endroit-là. Donc, je pense que c'est
très important de développer ça. Et, en tous les cas, on voit déjà que nos
voisins de l'autre côté, du côté de l'Ontario, nos voisins, à Cornwall, pensent aussi déjà d'aller dans cette
direction-là. Donc, c'est important que nous, on le fasse pour qu'on
reprenne l'avantage qu'on avait et qui était en train de se dissiper
graduellement.
Nous
sommes tous au courant, par exemple, que l'entreprise Target avait préféré…
avait choisi d'établir son grand centre
de distribution du côté de l'Ontario parce que c'était pas mal plus difficile,
plus complexe, plus bureaucratique de faire
ça du côté de la frontière québécoise. Donc, nous ne voulons pas laisser
échapper d'autres grands projets comme celui-là. Et ça passe par le
développement d'un pôle logistique dans la région de la Montérégie.
Aussi,
dans cette stratégie maritime là, le tourisme, c'est une industrie importante.
Le tourisme va bénéficier d'une approche
nouvelle à cet égard-là. Par exemple, ici même, dans la région de Québec, dans
le budget, nous avons mis une somme
considérable pour le renouvellement du site Dalhousie pas seulement pour faire
un parc, ce n'est pas seulement ça, mais
c'est aussi le lieu où les grandes croisières internationales arrivent, et donc
c'est un atout très important pour le Québec et pour la ville de Québec pour être capables d'attirer d'autres grandes
croisières et qui ne vont pas seulement rester quelques heures à Québec et puis repartir à nouveau, mais
qui vont rester ici un peu plus de temps et puis, d'ici, peuvent faire d'autres
excursions dans la région ou même aller
jusqu'à Montréal. Donc, c'est important que ce site-là soit efficace, soit
moderne et soit attrayant pour que
ces grandes entreprises touristiques internationales choisissent davantage
Québec comme port d'attache, si
vous voulez, en Amérique du Nord.
• (22 heures) •
Le Président (M. Bernier) : M.
le ministre. M. le député de Sainte-Rose.
M.
Habel : On a parlé de la
relance économique. Il y a aussi l'aspect du redressement des finances publiques qui a été apporté, dont deux commissions, la commission de la révision des programmes et aussi la commission
de la fiscalité. Au sujet de la commission
de la fiscalité, étant donné que je suis un comptable, je connais bien les
lois fiscales, puis on voit souvent
des aberrations qui se produisent, où une personne pourrait refuser une augmentation de salaire parce qu'elle s'avère
moins bénéfique de l'accepter à cause des crédits d'impôt, à cause de
tous les aléas de… qui peuvent survenir. Donc, c'est moins payant. Ce que je voudrais savoir, M. le ministre des Finances, c'est : Est-ce que ce type de sujet là
pourrait être évalué dans cette commission, cette commission des fiscalités?
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Oui, oui, absolument.
La commission de révision de la fiscalité va avoir comme mandat
non seulement de revoir la fiscalité des entreprises,
et ça, c'est important — on
a beaucoup parlé avant de toute la problématique autour des crédits d'impôt, et c'est certainement un sujet qui va être abordé par cette commission-là — mais
aussi de ce qui est la fiscalité des particuliers, des individus, des
familles, des ménages. La commission va regarder toute cette question-là.
Nous voulons rendre le système fiscal d'abord
plus simple. Ce n'est pas normal que des citoyens aient besoin d'engager des
fiscalistes pour produire un rapport d'impôt tout à fait normal, tout à fait
routinier. Donc, il faut que le système soit
plus simple pour qu'il soit plus juste, plus équitable et pour qu'on élimine
des aberrations comme celle que vous
venez de mentionner, où, à un moment donné, c'est fort probable que des
personnes choisissent de travailler moins parce qu'au net le chèque de paie ne va pas compenser l'effort
additionnel qui va être mis. Donc, on veut surtout encourager le travail, encourager l'investissement, réduire
la complexité et la bureaucratie du système, donc simplement une réforme
structurelle de la fiscalité québécoise qu'on va aborder tant du côté des
particuliers que du côté des entreprises. Et l'objectif
ultime de tout cela, c'est d'avoir une économie qui est plus performante, une
économie qui est plus efficace et qui est plus productive.
Comme on
avait mentionné tantôt avec le député de Lévis quand on parlait de croissance
économique, on parlait de
productivité ultimement. Et donc, nous, notre avenir économique, en fin de
compte, au Québec, va dépendre de notre capacité d'améliorer la productivité. Et l'amélioration de la
productivité, en grande partie, va être le résultat d'une réforme fiscale structurelle importante. Donc, c'est
vraiment un pas dans cette direction-là, c'est très important. Nous allons
aussi… cette commission va aussi
regarder ce qu'on appelle en bon latin le «tax mix», c'est-à-dire les
différentes mesures qu'il y a entre
impôt sur le revenu, impôt sur la taxe sur la consommation, quel est le mixte
idéal, quelle est la meilleure façon de maximiser les revenus de l'État d'une façon équitable et d'une façon
durable à long terme tout en stimulant l'activité, le travail,
l'investissement. Donc, c'est quelque chose de très important.
Et aussi
cette commission-là ne va pas s'embrouiller dans une «commissionarite» qui va
durer une éternité. C'est un mandat
qui est quand même relativement court, donc c'est-à-dire qu'en décembre 2014 il
va déjà y avoir un rapport final qui
va être livré au gouvernement. Et puis, suite à ce rapport-là, ça va être à
nous, gouvernement, de prendre des décisions.
Donc, non, on
n'abdique pas de notre responsabilité, on demande des avis éclairés de la part
de cette commission d'experts, bien
sûr, mais ultimement la décision nous appartient. Ça sera le gouvernement qui
va décider quels types de changements,
quels types de mesures on mettra en place pour que l'État soit… En fin de
compte, l'objectif de tout cet exercice-là,
c'est tout simplement de s'assurer que
nous sommes capables de livrer les services publics auxquels nous tenons
tellement, éducation, santé, aide aux personnes plus vulnérables, que cela se
fasse de façon durable, de façon soutenable.
Parce que d'avoir des services publics à crédit, donc en ayant
toujours des déficits après déficits, ça, c'est une
illusion. On ne va jamais être capables de
maintenir un rythme de services publics qui soit durable si, à chaque année, on
doit avoir des déficits, on va emprunter
continuellement. Donc, il faut qu'on soit capables de faire ça à l'intérieur de nos moyens. Et, à cet égard-là, une réforme structurelle de
la fiscalité est un outil très important.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. le ministre. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme de Santis : M. le
Président, j'aimerais demander au ministre
comment répondre aux gens de mon comté. Moi, je représente Bourassa-Sauvé, et, Bourassa-Sauvé, nous avons au moins 18 % de la population qui est vieillissante,
qui a plus que 65 ans, plus que la moyenne
de Montréal. Nous avons beaucoup plus de familles monoparentales que la moyenne de Montréal. Nous avons beaucoup plus de
personnes qui vivent au seuil de la pauvreté ou avec des moyens moins importants. Et, quand ils nous entendent
parler du budget, ces gens ont peur et veulent savoir comment ce budget renforce le tissu social et qu'est-ce qu'il y a pour eux. On
aimerait qu'on parle à eux. Alors, je demande au ministre d'adresser ces
citoyens-là, qui ne se retrouvent pas seulement dans mon comté, mais ailleurs
au Québec.
Le Président (M. Bernier) :
Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M.
Leitão : Alors, M. le Président, collègues, comme je viens juste de
dire, les services sociaux, les services publics à crédit, ce n'est pas une façon de faire les choses. Donc, c'est une
illusion de penser que nous pouvons continuer à livrer des services publics toujours en utilisant la
carte de crédit, ça ne marche pas. Donc, l'objectif que nous nous donnons,
dans toute cette réforme structurelle, toutes
ces choses-là, qui sont peut-être un petit peu trop théoriques pour beaucoup
de personnes qui sont très préoccupées par le quotidien, comment payer
l'épicerie demain, la semaine prochaine…
Ce que
j'allais dire, c'est que la façon dont nous voyons les choses, c'est que nous
voulons renforcer les fonctions primaires
de l'État, ce que nous jugeons être le rôle principal de l'État, qui sont la
santé, l'éducation et l'aide aux personnes vulnérables. Selon nous, dans
les temps modernes, c'est ça que l'État doit faire, c'est ça que l'État doit
être capable de livrer. Et, pour que l'État soit capable de faire ça d'une
façon durable, d'une façon cohérente pour pas seulement une année ou deux, mais pour toujours, il faut qu'on soit capables de
changer la façon dont nous faisons les choses. Et donc il faut cibler, il faut cibler l'aide de l'État aux clientèles qui
sont plus vulnérables. Et ça, ça va prendre aussi, à mon avis, un
changement important dans la façon dont nous abordons les services sociaux au
Québec.
Nous avons
toujours eu tendance à penser que la meilleure façon de livrer des programmes
sociaux, c'est d'avoir des programmes
universels, où c'est égal pour tout le monde. Donc, tout le monde a accès, par
exemple, aux CPE, aux garderies à
coût réduit, tout est égal pour tout le monde. Peut-être qu'on devrait
commencer à regarder ces choses-là dans une façon beaucoup plus ciblée, que l'aide de l'État soit vraiment,
vraiment ciblée aux personnes qui en ont vraiment besoin. Vous avez mentionné les citoyens de votre comté.
Oui, il y en a dans la grande région de Montréal, il y a des clientèles très vulnérables, très fragiles. Et il me semble
qu'avant d'avoir des programmes universels pour tout le monde, ce serait
beaucoup plus utile et beaucoup plus équitable que ces programmes-là soient
ciblés à cette clientèle-là.
Dans notre budget, je vous avoue, nous n'avons pas été
capables de faire ça tout de suite, mais c'est dans cette direction que je pense qu'on devrait aller. Nous
avons quand même fait certains changements en termes de programmes
de services de garde. Nous n'avons pas mis
en pratique la suggestion du gouvernement
précédent d'augmenter les tarifs
de 7 $
à 9 $, on ne l'a pas fait. Ils vont passer 7 $ à 7,30 $, donc ça
va déjà éviter un choc tarifaire pour un bon nombre… Oh! C'est tout?
• (22 h 10) •
Le Président (M. Bernier) :
C'est tout.
M. Leitão : O.K.
Le Président (M. Bernier) : Merci,
M. le ministre. M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Oui, merci,
M. le Président. Vous avez parlé, tout d'abord, des crédits d'impôt qui ont été coupés de 20 %. Est-ce que vous
pouvez nous dire l'impact, avez-vous un tableau qui mesure l'impact, pour
chacun des crédits d'impôt, de chacune des coupes sur l'emploi, sur les
investissements?
M.
Leitão : Il y a un tableau dans le budget — je ne me rappelle pas maintenant exactement,
là, à quelle page — où
on voit l'impact par crédit d'impôt, donc
qu'est-ce que ça veut dire pour le multimédia, ce que ça veut dire pour le…
Donc, les 30 et quelques crédits
d'impôt — voilà, à
la page A.89, c'est ça — donc, on voit les montants, ce que ça veut dire.
Maintenant,
est-ce que ça va avoir un effet, un impact sur l'emploi, combien d'emplois vont
être perdus ou pas à cause de ces
changements-là, c'est quelque chose qui… Puisque le changement était… C'est une
première étape, on va procéder, dans
les mois qui vont venir, à d'autres changements. On verra à ce moment-là, une
fois qu'on aura un portrait global de
toute la situation, quel va être l'impact total. Mais nous pensons que l'aide
fiscale aux entreprises, de 2,2 milliards en 2014‑2015 et qui va passer à 2 milliards en 2015‑2016 et 1,9 en
2016‑2017, je pense que ce n'est pas ça qui va avoir un effet très
significatif sur le nombre d'emplois.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau : Oui, O.K. Mais
c'est combien, l'effet? Combien, l'effet sur l'emploi et l'investissement?
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : Je ne pense pas qu'à court terme on puisse chiffrer cet
impact-là, parce que les crédits d'impôt, c'est une chose, mais, comme on l'a aussi répété plusieurs fois, il y a
d'autres moyens dont l'État peut aider les entreprises si cela est
nécessaire.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Rousseau.
M. Marceau :
Donc, vous supposez que l'impact… Enfin, si j'ai bien compris, vous n'avez pas
l'impact par secteur des coupes de
20 % dans les crédits d'impôt. Donc, c'est ce que vous avez dit de toute
façon, là. Donc, vous n'avez pas été guidés par
cette idée, par exemple, d'avoir un impact à peu près équivalent dans chacun
des secteurs. Vous avez simplement dit : 20 %, puis on ne sait pas
trop qu'est-ce que ça va donner.
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : C'est une façon de voir les choses. Ce n'est pas la façon
dont nous la voyons. Le but de l'exercice, c'est de s'assurer que tout le monde collabore, tout le monde participe
à l'effort de redressement des finances publiques. Les dépenses fiscales, à notre avis, sont une
dépense. Et donc, si on regarde toutes les dépenses de l'État, on ne pouvait
pas faire autrement que de regarder aussi ces dépenses-là. Comme on a déjà dit
plusieurs fois, on n'a rien éliminé au complet.
On a réduit de 20 %, il y a encore 80 % qui reste en termes d'aide
aux entreprises, et c'est quelque chose que… C'était une première étape. Il va y avoir, dans les mois qui vont venir,
une analyse beaucoup plus approfondie de toute cette filière-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau :
Donc, pour l'instant, on a fait ça un peu à l'aveugle, et, dans le futur, on
aura plus d'information, puis on sera
mieux en mesure d'établir les impacts. Parce que, regardez, ou bien ça sert à
quelque chose ou bien ça ne sert à
rien, les crédits d'impôt. Ils ont rendu de fiers services dans le passé. Vous,
j'imagine, êtes conscient que la fiscalité, plus elle est lourde, plus elle décourage l'emploi, plus elle décourage
l'investissement. Et la réciproque de cet argument, c'est que moins la fiscalité est lourde,
meilleures sont les chances que, dans les faits, des emplois soient créés,
meilleures seront les chances que les investissements se réalisent.
Alors, si
vous croyez qu'il y a plus… que la fiscalité joue un rôle — j'ose croire que vous y croyez en tant que
ministre des Finances — alors
vous allez convenir avec moi que de réduire l'aide et donc augmenter le fardeau
des entreprises, ça a un impact. Et vous me dites :
On croit qu'il y a un impact, on croit que la fiscalité, ça opère, ça joue un
rôle, mais on a coupé de 20 %
sans avoir une mesure très claire. Ou bien, si vous en avez une, écoutez,
déposez-nous un beau tableau qui nous
dise, par secteur, les emplois, les investissements qui vont être mis en péril
puis qui vont être réduits par cette coupe de 20 %. Ou bien vous me
dites : Ça ne joue aucun rôle, puis, dans ce cas-là, bien, regardez, je ne
sais pas qu'est-ce qu'on fait ici.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : Les mesures d'aide aux entreprises demeurent très généreuses,
elles l'étaient avant la réduction de 20 % et elles le sont encore, surtout quand on se compare à nos voisins, que
ce soit en Ontario, que ce soit dans les États voisins américains. Donc, je ne pense pas que ça soit…
que, tout d'un coup, on se soit désarmés complètement et que ça va être la
catastrophe, et la fuite, et tout va
disparaître. Ce sont encore des programmes qui sont très généreux. Et,
franchement, je ne pense pas que
cette réduction de 20 % puisse avoir un effet si dramatique que ça à très
court terme. Comme j'ai dit tantôt,
si jamais c'était une problématique, il y a d'autres moyens que l'État peut
utiliser pour soutenir ces emplois-là. Et, ultimement, ultimement, si ces emplois-là existent seulement parce qu'il
y a des crédits d'impôt, ce n'est pas une situation qui soit soutenable
à moyen et à long terme.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député.
M. Marceau :
Oui. En tout cas, en attendant, vous n'avez pas d'étude pour nous montrer
l'impact de cela. Ça ne semble pas avoir été mesuré. Vous avez coupé
sans vous appuyer sur du solide et vous allez, plus tard, voir quel est l'impact de cela. C'est très bien de le voir plus
tard, ça, je suis entièrement favorable, mais je dois avouer que c'est surprenant, là, de penser que ça n'a pas d'impact.
Moi, je ne parle pas de catastrophe, là. Simplement, si on coupe de 20 %,
à moins qu'on soit bête, là… On ne
les avait pas amenés à ces niveaux-là parce qu'on pensait que ça n'avait pas
d'impact. On pensait que ça aidait
puis ça avait été utile. Maintenant, à partir du moment où on révise, je veux
bien, là, mais au moins qu'on s'appuie sur du solide.
En tout cas,
peut-être que, ce soir, vous n'avez pas un beau tableau à nous fournir. Vous
aurez l'occasion demain, vous aurez
l'occasion dans les prochaines semaines de nous donner un tableau qui nous
explique qu'est-ce que vous avez envisagé
comme impact pour chacune de ces coupures-là. Je ne peux pas croire que vous
avez fait ça à l'aveugle sans savoir
qu'est-ce que vous faisiez. Je ne
peux même pas concevoir que vous ayez pu faire ça. Alors,
je me dis, vous avez encore la chance
de rétablir les faits. Et vous aurez l'occasion de déposer un beau tableau de ce genre-là qui nous dit un peu qu'est-ce qui vous a
guidé.
M. Leitão : Donc, au contraire,
monsieur…
Le Président (M. Bernier) :
M. le ministre.
M.
Leitão : M. le Président, au contraire, justement, parce qu'en cinq
semaines c'était impossible de faire une analyse très fine de toutes ces questions-là. Nous avons délibérément
choisi de faire une réduction «across the board» de 20 % parce que
ça n'aurait pas été sérieux, ça n'aurait pas été crédible qu'en si peu de temps
on puisse être capables d'identifier exactement quel crédit d'impôt était plus
performant que l'autre.
Mais je reviens, je reviens à ce que
j'avais dit tantôt. Vous parlez de tableau. Je n'ai pas vu de tableau non plus
de combien d'emplois ces crédits d'impôt là ont contribué à créer. C'est une
mesure qui est utile au début pour attirer certaines industries. Une fois qu'on
a déjà atteint une bonne masse critique dans ces industries-là, il doit y avoir
éventuellement… on doit être capable de mettre un terme à ce type
d'intervention là.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.
M.
Marceau : O.K. Merci. Je reviendrai plus en détail demain sur
ces questions-là. Je voudrais changer de sujet rapidement. Je voudrais parler d'agences de notation. Je sais que le
député de Chapleau a abordé la question tout à l'heure. Premièrement, avez-vous rencontré, depuis le
budget, des représentants des agences de notation? Êtes-vous allé en voyage
à New York ou à Toronto pour rencontrer des agences?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre, est-ce que vous avez voyagé?
• (22 h 20) •
M.
Leitão : Vous m'avez vu ici tous les jours. Non, je n'ai pas eu
l'opportunité de le faire. Mais, comme vous le savez très bien, c'est
quelque chose qui est important pour un ministre des Finances du Québec, qui
que ce soit. Et évidemment nous avons dû
préparer tout ça en période… en session intensive de l'Assemblée nationale, la préparation
du budget, cette commission-ci. C'est fort probable que très bientôt cela se
fasse.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M.
Marceau : Oui. Est-ce que toutes les agences ont confirmé le
maintien de la cote, est-ce que… de leur cote? Ou est-ce que le
ministère a reçu un avis comme quoi la cote ou la perspective pourrait être
modifiée?
Le Président (M.
Bernier) : M. le ministre.
M.
Leitão : Je n'ai vu aucun avis à cet égard-là. Comme vous le savez
très bien, les agences de notation, après chaque budget, émettent un commentaire sur le budget. Ce commentaire-là,
comme Moody's et DBRS l'ont bien mentionné, ne constitue pas une «rating action», ce n'est pas une activité de
changement potentiel de cote. Ils vont procéder maintenant à une analyse
plus détaillée, plus profonde de la situation.
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le député.
M. Marceau :
C'est parfait.
Le Président (M.
Bernier) : M. le député de Marie-Victorin.
M. Drainville :
Il reste combien de temps, M. le Président?
Le
Président (M. Bernier) : Il vous reste environ… Bien, si on regarde à l'horloge, il reste
environ neuf minutes.
M. Drainville : Très bien. Alors, je voulais juste d'abord
préciser… Tout à l'heure, j'ai attribué à M. Charest le rapport de force qui a permis d'obtenir une
certaine correction au déséquilibre fiscal. J'aurais dû préciser, M. le Président, que ce rapport de force, il
avait été bâti par le gouvernement de Bernard Landry, notamment lorsqu'il a
créé la Commission sur le
déséquilibre fiscal, la commission Séguin, sur laquelle siégeait notamment
l'actuel député de Rousseau. Et ce rapport de force, donc, a été par la suite utilisé par M. Charest pour aller
chercher effectivement une augmentation des transferts qui a permis de
corriger à court terme une partie, du moins, du déséquilibre fiscal.
Dans
le plan budgétaire, toujours dans la section F, il est question de plusieurs dossiers
qui ne sont toujours pas réglés, des
dossiers Québec-Ottawa, notamment la reconstruction du centre-ville de
Lac-Mégantic. Le Québec attend du gouvernement
fédéral qu'il contribue à sa juste part des coûts de la décontamination et de
la reconstruction du centre-ville.
Il
est également question des dividendes d'Hydro-Québec, le fait que les
dividendes d'Hydro-Québec n'ont pas droit au même traitement fiscal que les dividendes versés par Hydro One,
ce qui fait perdre 330 millions
de dollars par année à Hydro-Québec.
C'est
quoi, votre… Quel est le sentiment du ministre
des Finances sur ces deux
dossiers-là? Qu'est-ce que vous allez
faire pour permettre au Québec d'obtenir la part, une juste part des… la juste
part du fédéral dans l'ensemble des dépenses
qui ont découlé de la catastrophe de Lac-Mégantic? Puis qu'est-ce que vous
allez faire dans le dossier d'Hydro-Québec
et des dividendes d'Hydro-Québec?
Le Président (M.
Bernier) : Merci. M. le ministre.
M.
Leitão : O.K. Je suis nouveau
en politique. L'approche que j'ai en termes de relations fédérales-provinciales
est de toute évidence très différente de la
vôtre. Je ne pense que ça soit une question de rapport de force. Je ne vois pas
ça de façon adversairielle. Ce n'est
pas : Il faut obtenir ce que nous voulons, sinon on est en train de se
faire avoir par l'autre partie. Je pense que le fédéralisme canadien,
c'est un fédéralisme coopératif, et on sort toujours gagnant en ayant une
attitude beaucoup plus constructive quand on négocie ces choses avec nos
partenaires fédéraux.
Ces
négociations, ces conversations sont continuelles. C'est aujourd'hui, c'est
demain, c'est la semaine prochaine, c'est
le mois prochain. Ça continue tout le temps, Lac-Mégantic étant un exemple très
clair. Nous allons continuer nos pourparlers
avec nos partenaires fédéraux là-dessus. Je suis absolument confiant qu'au bout
de la ligne la participation fédérale
à ces efforts de reconstruction va être là. C'est inconcevable que le
gouvernement fédéral, après ce qui a été fait, par exemple, en Alberta suite aux inondations… ça serait inconcevable
que le gouvernement fédéral ne participe pas aussi à la reconstruction
de Lac-Mégantic. Ça viendra. Ça prendra des négociations, ça prendra des
discussions avec nos partenaires fédéraux.
Et, si on a une attitude beaucoup plus coopérative, je pense qu'on va
certainement sortir gagnant de ces négociations-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : Oui. Est-ce que vous avez des priorités dans les
batailles, même si le mot ne s'applique visiblement pas dans votre philosophie des relations fédérales-provinciales? Disons, est-ce que vous avez une
priorité dans la liste des dossiers
que vous voulez régler? Puis est-ce
que vous vous donnez un échéancier
pour en régler un ou deux, là, je ne sais pas, là, d'ici la fin de
l'été, genre, ou...
M. Leitão : ...
M. Drainville : Pardon?
M. Leitão : Ou trois, ou quatre.
M. Drainville : Oui? Alors...
Le Président (M. Bernier) :
Oui, mais un instant. Oui. Finissez votre question, M. le député, là.
M.
Drainville : Bien, c'est
ça. C'est quoi, les priorités du ministre?
Puis il se donne combien de temps pour les régler?
Le Président (M. Bernier) : O.K.
C'est bien. M. le ministre.
M.
Leitão : Très bien.
Très clairement, la première priorité… la priorité — on ne peut pas avoir plusieurs, une priorité — plus
immédiatement, c'est le dossier Chantiers Canada.
Je pense que nous sommes proches d'arriver à une entente, et donc c'est de ce côté-là que nous allons commencer. Il y a aussi d'autres dossiers
qui demandent une plus grande
concertation avec nos partenaires des autres provinces. Mais ça va se
faire aussi au cours de cet été. Alors, il y a plusieurs
dossiers qui sont en cours de discussion. Il y en a un que vous allez certainement soulever probablement demain, donc
je profite pour le soulever tout de
suite, la commission nationale des
valeurs mobilières. C'est aussi quelque
chose qui est en train de se
négocier. On ne va certainement pas abdiquer de notre position. Notre position
reste inchangée. Et, encore là, on va aussi avoir de la coopération et
de la concertation avec d'autres provinces pour arriver à trouver une meilleure
entente.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : Quand vous dites : C'est en train de se
régler, vous voulez dire… c'est en train de se régler comment?
M. Leitão : Chantiers Canada,
Chantiers Canada.
M. Drainville : Non, mais sur
la commission des valeurs mobilières, vous dites…
M.
Leitão : Je dis que c'est un
dossier qui va certainement… Vous allez certainement le soulever bientôt.
Je n'ai pas dit que c'était en train
de se régler, j'ai dit que c'est en train de revenir à l'avant-scène. Et c'est quelque chose que le Québec, avec
d'autres provinces, maintient la position. C'est d'ailleurs un exemple très
clair. Même si nous sommes très amis, très coopératifs
avec nos amis fédéraux, on ne va certainement pas céder de ce côté-là.
Le Président (M. Bernier) :
Merci. M. le député de Marie-Victorin.
M.
Drainville : Mais vous n'allez pas céder parce que
ce n'est pas dans l'intérêt du Québec de céder. Donc, dans ce dossier-là, il y a
un intérêt clairement québécois.
M. Leitão : Dans la commission
nationale des valeurs mobilières, oui.
M.
Drainville : O.K. Donc, il
y a des dossiers, dans votre esprit,
où il y a clairement un intérêt québécois qui n'est pas
nécessairement celui de l'intérêt du gouvernement fédéral.
M. Leitão : Bien sûr.
M. Merlini : M.
le Président, question de règlement.
Le Président (M. Bernier) :
Oui, M. le député de…
M.
Merlini : Question de règlement, article 211, que… Le sujet de discussion, c'est le
budget, c'est le discours du budget, pas la prochaine chicane avec Ottawa.
Alors, le député de Marie-Victorin a bien commencé sa première intervention,
mais là on est rendu…
Le Président (M. Bernier) : S'il
vous plaît! M. le député, là…
M. Merlini : …dans d'autres
dossiers.
Le
Président (M. Bernier) : M. le député, je vous en prie. Vous savez, les discussions sur
le budget sont très,
très
larges, O.K., et peuvent emmener divers sujets à ce moment-là, et les interventions des membres peuvent être d'ordre, effectivement, très général et peuvent porter sur divers sujets. Donc, il n'est pas nécessaire
que ces interventions prennent la
forme de questions au ministre des
Finances. On peut avoir des énoncés
au niveau des finances publiques, au
niveau de sujets qui concernent en
général… C'est la tradition ici en ce qui regarde l'étude au niveau
du budget. Donc, sur ce, je comprends votre position, sauf que…
M. Drainville : C'est mon
temps qu'il prend surtout, là.
Le
Président (M. Bernier) : Oui, mais là c'est moi qui le prends comme président. Comme président,
je peux prendre le temps que je veux pour gérer la commission. Donc,
c'est dans cette perspective-là. Et j'invite le député de Marie-Victorin, il
vous reste environ une minute, à faire les conclusions.
M.
Drainville : Alors, j'invite le député de La Prairie à lire la section F du plan budgétaire. Vous allez voir, toutes les questions que
je pose ou la plupart viennent de là. Maintenant…
Le Président (M. Bernier) :
Non. S'il vous plaît, pas d'échange. Finissez, M. le député.
M.
Drainville : Mais non, mais je pense que c'est intéressant. La dernière réponse que le ministre
des Finances nous a donnée, c'est
qu'il souhaite la collaboration, la bonne entente, mais il reconnaît que, dans
certains dossiers, il y a un intérêt
québécois qui n'est pas nécessairement celui de
l'intérêt qui est défendu par le gouvernement canadien. Je trouve ça intéressant. Je
trouve ça intéressant. Donc…
M.
Leitão : Tous les dossiers
sont d'intérêt québécois, tous les dossiers. Ce n'est pas seulement
un dossier, tous les dossiers sont d'intérêt québécois. Dans certains
dossiers, on peut arriver à une…
Le
Président (M. Bernier) : Je vous remercie. Nous aurons l'occasion demain de
poursuivre ces travaux. À venir jusqu'à
présent, dans cette première portion, ça
va assez bien avec les députés jusqu'à
la toute dernière minute. Donc, souhaitons que ces discussions se
poursuivent dans la même cordialité demain.
Donc, compte
tenu de l'heure, je lève la séance de la commission et ajourne ses
travaux à demain, après les affaires
courantes. Donc, bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 22 h 30)