(Neuf heures trente-six minutes)
Le Président (M. Hamad): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, bonjour, chers collègues, bonjour, mesdames et messieurs. Je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer leurs téléphones cellulaires.
Une voix: C'est une bonne idée, ça.
Le Président (M. Hamad): C'est ça que j'ai pensé. Alors, allez-y, cher collègue, vous avez une amende de 5 $.
Une voix: ...
Le Président (M. Hamad): Oui, c'est ça. Alors, le mandat de la commission est de procéder à des auditions publiques dans le cadre de sa consultation générale portant sur la protection des épargnants au Québec.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement, M. le Président.
Auditions (suite)
Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, nous procédons maintenant à l'accueil du groupe qui représente le Conseil des fonds d'investissement du Québec. Alors, bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vous demanderais de vous présenter et de présenter vos collègues aussi.
M. Hamel (Pierre): D'accord.
Le Président (M. Hamad): Vous avez 1 h 30 min, vous êtes chanceux. Alors donc, vous avez 30 minutes de présentation, et il y aura une heure de discussion des deux côtés.
Conseil des fonds
d'investissement du Québec (CFIQ)
M. Hamel (Pierre): Alors, c'est gentil. Alors, merci, M. le Président. Alors, chers membres distingués de la Commission des finances publiques, tout d'abord nous aimerions vous remercier pour nous avoir accordé cette opportunité de venir nous exprimer sur un sujet qui nous tient à coeur, qui est la protection des épargnants. On tient à féliciter également le ministre des Finances, M. Audet, pour avoir pris cette initiative.
Alors, mon nom est Pierre Hamel et je suis le président du conseil d'administration du Conseil des fonds d'investissement du Québec. Je suis également président de Optimum Placements, qui est un gérant de fonds et une firme de distribution de fonds communs de placement au Québec.
Je suis aujourd'hui accompagné de M. Éric Lapierre, qui est le vice-président du conseil du CFIQ également, et il est également directeur général et conseiller juridique des Services financiers Groupe Investors au Québec. Je suis accompagné également de Mme Martine Guimond, qui est la présidente de notre comité de vigie réglementaire au CFIQ. Elle est également avocate chez Gowling Lafleur Henderson.
Alors, le CFIQ est une association d'industries, une association libre qui regroupe la très grande majorité des gérants de fonds et des distributeurs de fonds communs de placement au Québec. L'ensemble de nos membres gèrent environ 80 milliards, un petit peu plus que 80 milliards des à peu près 100 milliards du Québec. Donc, quand même, c'est très représentatif. On est la division québécoise également de l'IFIC, l'Institut des fonds d'investissement du Canada.
Alors, dans votre dossier, je présume que vous avez notre rapport de l'année passée, d'avril 2006, qui est notre rapport. Par la suite, on a fait parvenir une annexe, qui s'est appelée le Répertoire des produits d'investissement collectifs, et aujourd'hui on a déposé une deuxième annexe qui est la Mise à jour réglementaire, en fait la mise à jour de notre rapport de l'année passée, avec l'évolution réglementaire, parce qu'il y a eu beaucoup d'évolution. Depuis la rédaction du rapport de l'année passée, ça a bougé quand même beaucoup.
Alors, je vous propose le déroulement de notre présentation comme suit. Je fais la petite introduction, ensuite Mme Guimond va nous parler de notre rapport et des principales recommandations qu'on a formulées l'année passée. M. Lapierre va survoler les réponses aux questions qu'on a fournies, l'année passée, aux questions que vous aviez posées dans le cadre de la commission. Et les deux vont faire parallèlement la mise à jour par rapport à l'évolution au cours de la dernière année. Ensuite, je reviendrai pour la conclusion et la période des questions.
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(9 h 40)
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Alors, l'industrie des fonds communs de placement, c'est une industrie qui a énormément progressé au cours des dernières années. On est rendu aujourd'hui... ça s'est multiplié par cinq en 10 ans. Il y en a pour 660 milliards au Canada, une centaine de milliards au Québec. C'est un produit sophistiqué. C'est un produit professionnel qui rejoint l'ensemble des Québécois. C'est un produit également qui s'est énormément démocratisé au cours des dernières années. C'est un produit où on offre aux détenteurs une gestion tout aussi professionnelle qu'une grande caisse de retraite, ou des grands fonds internationaux, ou des grands investisseurs, avec tout le professionnalisme derrière, de la gestion, de la diversification, des états financiers, de la vérification, et tout le reste, et tout ça par tranches de 100 $, tout ça par tranches de 25 $, au rythme que les gens veulent les acheter. Alors, c'est un produit qui est très populaire et qui a gagné énormément en popularité au cours des dernières années.
Alors, notre approche, lorsqu'il y a eu... Lorsque le ministre a lancé l'idée d'une commission des finances publiques, on s'est tout de suite sentis interpellés par le projet, alors on a formé un groupe de travail qui a analysé la question. C'est un groupe de travail qui a été formé, de sept personnes, sept experts, sept professionnels de l'industrie qui provenaient de sept compagnies différentes et à différents échelons au niveau de la hiérarchie de chacune des compagnies. C'est un groupe de travail très efficace, très diversifié, très représentatif et très professionnel. Et, eux, ils ont fait un travail qui a mené au rapport qu'on a déposé et ils ont décidé, pour aider, en partant de la feuille blanche, pour dire: Qu'est-ce qu'on doit recommander?, ils ont décidé de prendre l'approche d'analyser des scandales qui ont eu lieu en profondeur. Ils ont analysé neuf scandales. Et, à partir des points en commun qu'ils ont détectés et des mécanismes défaillants qu'ils ont trouvés, ils ont rédigé un rapport avec des recommandations, une dizaine, 11 recommandations.
Alors, peut-être, juste avant que je cède la parole à Martine pour la présentation, je tiens quand même à préciser une chose. Parce que, dans le mandat d'initiative, on vise les fonds communs de placement précisément et d'une manière délimitée. Et on a trouvé ça risqué. Ça a été une des premières choses que le groupe de travail a mentionnées en regardant le projet, c'est que c'est risqué. Aujourd'hui, il n'y a plus de produits séparés, il n'y a que des produits d'investissement, globalement. On vit dans un monde décloisonné où tout se concurrence, où tout était un à côté de l'autre dans les produits. Alors, de limiter le projet aux fonds communs de placement est risqué. Il y a eu des cas de fraude qu'on a observés où justement les fraudeurs utilisaient les zones grises entre les législations. Alors, isoler le problème dans le fonds commun de placement, c'est d'une certaine manière contribuer à l'erreur qu'il y avait dans les brèches, en fait. Alors, il faut faire attention. Je vous invite à réfléchir globalement et non pas uniquement aux fonds communs de placement.
Alors, ceci étant dit, je cède la parole à Martine Guimond qui va nous survoler le rapport que vous avez reçu en avril, l'année passée.
Mme Guimond (Martine): M. le Président, chers membres de la commission, bonjour. Permettez-moi maintenant de vous présenter les grandes lignes de notre rapport.
Suite aux différents scandales ayant frappé l'industrie des services financiers au Québec et au Canada, le CFIQ a pris l'initiative de mettre en place un comité d'experts de l'industrie afin d'analyser neuf de ces scandales. Le but était d'élaborer des recommandations afin de tenter de prévenir de tels scandales. Cette analyse a permis d'identifier les principaux signes avant-coureurs communs à la plupart des scandales. Et selon nous, si nous avions pris des mesures en réaction à ces signes avant-coureurs, cela aurait peut-être permis aux autorités réglementaires d'accélérer le processus d'intervention.
Dans la liste des 26 signes avant-coureurs ayant été identifiés, cinq sont communs à la plupart des scandales, soit: le premier, la concentration du pouvoir entre les mains d'un seul dirigeant; le deuxième signe avant-coureur, la complexité du produit financier offert aux investisseurs; le troisième signe, le manque de transparence dans la structure juridique des différents intervenants; le quatrième, une divulgation inadéquate de l'information financière; et le cinquième, le fait que certains dirigeants ayant été autorisés par les autorités réglementaires avaient parfois des antécédents réglementaires et voire même judiciaires.
Le comité d'experts du CFIQ a analysé chacun de ces signes avant-coureurs et a élaboré 10 recommandations. Le but des recommandations était notamment d'aider les autorités réglementaires à reconnaître plus rapidement les facteurs de risque et également à assurer la pérennité de l'industrie au bénéfice des investisseurs et des participants de l'industrie. Nos 10 recommandations sont donc les suivantes:
La première: mieux définir et rehausser le rôle du fiduciaire;
La deuxième: créer un répertoire où tous les produits financiers vendus au Québec seraient obligatoirement inscrits;
Notre troisième recommandation: s'assurer de bien vérifier les antécédents des dirigeants afin de voir s'ils ont des antécédents réglementaires ou judiciaires;
Notre quatrième recommandation: rendre obligatoire l'inscription des gérants de fonds auprès des autorités réglementaires;
Cinquième recommandation: établir un document de divulgation sommaire, un document d'environ deux pages qui décrirait le produit et qui devrait être remis aux investisseurs;
Comme sixième recommandation, le comité d'experts du CFIQ trouvait qu'il était important de considérer les questions de conflits d'intérêts possibles lorsque le dirigeant responsable est également l'actionnaire majoritaire;
Ensuite, important d'établir un cadre de conformité pour les gérants de fonds;
Exiger que le responsable de la conformité doive se rapporter directement au conseil d'administration;
Notre neuvième recommandation: reconsidérer les mécanismes de protection et d'indemnisation des investisseurs;
Et finalement notre 10e recommandation: adopter le règlement 81-107 sur la gouvernance des fonds.
Ces 10 recommandations élaborées par notre comité peuvent en fait être regroupées en trois grands thèmes. Le premier thème: apporter une attention vraiment particulière aux dirigeants lorsqu'ils ont des antécédents soit réglementaires ou judiciaires.
Notre deuxième thème concernant nos recommandations: établir des procédures qui devraient être adoptées par les cabinets afin d'éviter les questions de conflits d'intérêts. À ce sujet, selon nous, il serait nécessaire d'abord d'implanter des règles de gouvernance pour les fonds, ce qui inclut notamment l'obligation que chaque fonds ait un comité d'indépendants chargé d'étudier les questions de conflits d'intérêts; et le rôle de ce comité, pour bien le comprendre, peut s'apparenter au rôle d'un conseil d'administration dans une société. Deuxièmement, concernant les questions de conflits d'intérêts, il serait important d'introduire un régime d'inscription pour les gérants de fonds, c'est-à-dire un régime qui comporte d'abord des exigences en matière de conformité, ensuite des exigences de surveillance des autorités réglementaires et la désignation d'un chef de conformité qui, lui, aurait l'obligation de se rapporter directement à son conseil d'administration. Troisièmement, concernant toujours les questions de conflits d'intérêts, il était important selon nous que l'Assemblée nationale adopte le projet de loi n° 29, lequel octroie à l'Autorité des marchés financiers un droit de regard sur la sélection du fiduciaire, ce qui a été fait en décembre 2006. Et finalement notre troisième thème pour nos recommandations, c'était de s'assurer de fournir de l'information aux investisseurs afin qu'ils soient eux-mêmes en mesure de se protéger, et, à ce niveau, une des recommandations importantes était d'approuver le projet de règlement concernant l'information aux points de vente, c'est-à-dire, c'est un règlement qui prévoit la remise aux investisseurs d'un document d'information sommaire, précis et clair, de deux pages, qui décrit le produit que l'investisseur achète. Et, deuxièmement, concernant la protection de l'investisseur, c'est toujours important que le représentant connaisse bien son client, son produit et s'assure de la convenance entre le produit pour son client.
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(9 h 50)
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Depuis le dépôt de notre rapport ? M. Hamel en a parlé ? en avril 2006, nous sommes heureux de constater que plusieurs initiatives des Autorités canadiennes en valeurs mobilières, les ACVM, dont M. St-Gelais est président, ont été entreprises. Deux initiatives importantes sont d'abord le projet de réforme de l'inscription, dont la consultation publique est prévue pour la mi-février et dont le CFIQ entend participer activement. Ce projet inclut notamment le régime d'inscription pour les gérants de fonds et un cadre de conformité. La deuxième grande initiative concerne l'adoption du règlement 81-107 sur la gouvernance des fonds. Ces deux initiatives adressent la plupart des problèmes que nous avions identifiés.
Toutefois, malgré ces nombreuses initiatives, il reste deux recommandations spécifiques qui n'ont pas toujours été identifiées en ce moment, soit, la première: la création d'un répertoire où tous les produits vendus au Québec devraient obligatoirement être inscrits, et à ce sujet, au sujet de cette recommandation, Pierre Hamel abordera ce sujet dans sa conclusion. Et enfin l'autre recommandation qui n'a pas été adressée encore par les nouvelles initiatives des ACVM concerne le mécanisme de protection et d'indemnisation des investisseurs. Pour nous, il est surtout important de s'assurer d'avoir un mécanisme qui soit équitable, peu importe le canal de distribution utilisé par l'investisseur.
Donc, c'était le sommaire de notre rapport. Je cède maintenant la parole à mon collègue Éric Lapierre, lequel répondra aux questions nous ayant été soumises dans la documentation préparée par la commission. Merci de votre attention.
Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, M. Lapierre.
M. Lapierre (Éric): Merci. M. le Président, M. le vice-président, membres de la commission, je suis ici, comme le mentionnait Me Guimond, pour vous présenter nos réponses à vos questions que vous avez posées dans les documents de consultation publique.
D'emblée, je pense qu'il est important, et on l'a mentionné précédemment, et ce, afin d'éviter un débat stérile dans lequel on n'aurait pas pris en considération ce qui s'est passé depuis le mandat d'initiative, on a adapté nos réponses à ce qui s'est passé. Comme mentionnait Me Guimond, la norme canadienne 81-107 sur le comité d'examen indépendant des fonds et la future norme nationale 31-103, mieux connue actuellement sous le nom de projet de réforme de l'inscription, ces normes canadiennes, à elles seules, répondent à beaucoup des questions que vous avez posées, et ce qu'il est intéressant de voir, c'est qu'une des recommandations que l'on faisait à l'époque, c'était justement de mettre en vigueur la norme 81-107. Donc, on est bien contents de voir que ça s'est produit.
Question n° 1: Seriez-vous favorable à la séparation des rôles dans l'industrie des fonds communs de placement? Je pense que le CFIQ est confiant que les règles de gouvernance prévues dans la norme 81-107 permettront de se protéger contre d'éventuels conflits d'intérêts. C'est un peu le but de cette norme-là. Mais également l'inscription des gérants de fonds communs de placement pourra donner des pouvoirs de supervision aux autorités réglementaires pour s'assurer du travail qui est fait par ceux-ci. À l'heure actuelle, certains gérants de fonds ne sont pas inscrits auprès d'autorités réglementaires. Cette obligation-là va pouvoir régler le problème et donc donner le pouvoir aux autorités à travers le Canada de vérifier ce qui se fait dans ces entités-là.
Question n° 2: Quels sont, d'après vous, les avantages et les inconvénients d'une telle séparation? Il s'agit ici, je pense, d'augmenter les règles de bonne gouvernance afin d'éviter les risques de conflits d'intérêts. Comme je le disais précédemment, c'est exactement les... La raison de la création de la norme 81-107 justement, c'est de régler les questions de conflits d'intérêts entre les fonds communs de placement et les gestionnaires ou les gérants de fonds qui s'en occupent. Cette norme et les règles proposées d'inscription des personnes clés du projet de réforme de l'inscription, dans le projet, on prévoit à l'heure actuelle l'inscription de ce qu'on appelle la personne ultimement responsable ou le chef de la direction des entreprises et d'un chef de conformité... devrait être un mélange qui balancera bien les intérêts des gérants de fonds et des investisseurs. Il faut toutefois faire attention, et je pense que c'est toujours quelque chose qu'il faut garder en tête: chaque obligation entraîne habituellement des coûts. Donc, il faut faire attention à cette augmentation de coûts pour ne pas que ça rende les règles ou les mesures adoptées comme prohibitives.
Question n° 3: La mise en place d'un comité d'examen indépendant permettrait-elle de mieux protéger les investisseurs québécois? Oui. Par contre, ce qu'on regarde à l'heure actuelle, c'est l'implantation de la norme 81-107 pour voir comment ça va se terminer. Mais, à l'heure actuelle, tout semble dire que ce sera très bénéfique pour les investisseurs.
Question n° 4: Ce mécanisme peut-il nuire aux petites firmes qui veulent oeuvrer dans le marché québécois des fonds communs de placement et avantager, par conséquent, les grandes institutions? C'est certain qu'il est vrai que les grandes institutions ont toujours les moyens, des moyens financiers que les petites n'ont pas. Donc, elles ont plus de facilité à absorber des coûts qui pourraient être imposés, mais il ne faut surtout pas oublier que les coûts, qu'on voit à travers 81-107, du comité d'examen indépendant sont des coûts qui sont refilés ou qui doivent être absorbés par les détenteurs de parts, les investisseurs. C'est les coûts du fonds commun de placement qui doivent être payés par les investisseurs. Donc, à la base, normalement il ne devrait pas y avoir d'empêchement pour les petites firmes d'entrer dans le secteur. Mais on pense, même s'il y a certains coûts, on pense que c'est quand même raisonnable, afin de ne pas... ce n'est pas des coûts qui sont prohibitifs, qui devraient empêcher les petites firmes de rentrer dans le secteur.
Question n° 5: L'échange d'information et une meilleure concertation avec les services policiers contribueraient-ils à améliorer la protection des épargnants? Oui, évidemment. Une meilleure information, c'est toujours bien. Je pense qu'il n'y a pas personne qui peut prêcher contre la vertu. Plus il y a de l'information, plus on est capable de se protéger, et, dans ce cadre-là, on supporte... M. St-Gelais a annoncé, à Toronto, en octobre dernier des améliorations qui devraient être apportées à l'équipe intégrée de police des marchés financiers, de la GRC et des Autorités canadiennes en valeurs mobilières. Dès que ces changements-là seront apportés, évidemment on risque fort probablement de les supporter. Ça augmente l'information.
Question n° 6: Est-il nécessaire d'apporter des amendements aux lois en vigueur pour améliorer les échanges d'information entre les organismes de réglementation et les organismes responsables de la vérification? Oui. Je pense que c'est bien. On pense... À l'heure actuelle, ce qu'on croit, c'est qu'il y a des changements qui sont proposés à cet échange d'information, pour permettre cet échange d'information là. Par contre, je crois que le prochain groupe qui vient vous parler va peut-être être en désaccord avec moi. Ils viennent justement, je pense, vous parler sur ce point de vue là. 5 $, l'amende?
Une voix: ...
M. Lapierre (Éric): Ah! c'est 10 $.
Des voix: ...
M. Lapierre (Éric): Je n'oserai pas demander combien ça coûte au président, si c'est...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lapierre (Éric): Question n° 7: Doit-on procéder à des amendements législatifs...
Le Président (M. Hamad): ...intéresse, là, un petit peu!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lapierre (Éric): Toujours! Je pense que tout le monde. Ça intéresse tout le monde, hein?
Le Président (M. Hamad): Ah! Ça dépend des sondages. Allez-y.
M. Lapierre (Éric): Question n° 7: Doit-on procéder à des amendements législatifs pour permettre une utilisation efficace par les services de police des preuves recueillies par les organismes de réglementation, notamment en matière d'admissibilité de telles preuves devant les tribunaux? À cette question-là, on n'a pas vraiment de réponse. Il s'agit d'une question complexe. Je ne pense pas qu'on est dans la possibilité de répondre. Ça sort de notre cadre de compétence. Je suis sûr qu'il y a d'autres experts qui sont mieux en mesure que nous de vous répondre à cette question-là.
Question n° 8: Trouvez-vous que les investisseurs dans le marché des fonds communs de placement bénéficient d'une couverture suffisante en vertu des différents mécanismes en place au Québec et au Canada? On n'arrive pas à un consensus au sein même de notre industrie à cette question-là. On croit qu'il y a beaucoup de confusion relativement aux fonds d'indemnisation et aux protections qui sont offertes aux investisseurs. Ce qui est clair, c'est qu'il devrait y avoir une révision qui serait faite à l'échelle du Canada, avec des consultations publiques, pour les diverses façons de protéger les investisseurs, les divers fonds de protection, surtout dans le cadre du projet de réforme d'inscription, où il va y avoir justement des changements qui pourraient avoir peut-être un impact sur les fonds d'indemnisation. Et je pense qu'on peut en plus regarder ce qui est, je pense, de connaissance de... tout le monde le sait, la décision de l'AMF, la semaine dernière ou il y a 10 jours, concernant les investisseurs dans Norbourg, on voit clairement que, malgré la protection, ce n'est évidemment pas parfait, ce n'est pas tout le monde qui a été compensé. Donc, avant de parler, de dire: Est-ce que c'est suffisant?, je pense qu'il y a des choses à regarder pour savoir si c'est le bon moyen de le faire.
Question n° 9, qui se rapporte: Est-il nécessaire d'étendre la couverture du Fonds d'indemnisation des services financiers? Je pense qu'il faut vraiment regarder l'harmonisation des recours ou des régimes, à l'heure actuelle, à la grandeur du Canada avant de penser d'augmenter les couvertures. Puis il ne faut pas non plus oublier que des protections trop parfaites, ça déresponsabilise les investisseurs, puis il y a des coûts rattachés à cette protection-là. Une assurance parfaite, la plus belle preuve, c'est que tout le monde a une assurance voiture, mais il n'y a pas une assurance... c'est rare... je ne connais pas une assurance qui n'a pas de déductible. Donc, il y a un coût rattaché à ça. Donc, il faut s'assurer que ces coûts-là ne deviennent pas prohibitifs et qu'ils ne servent... dans le fond, qu'ils ne protègent plus l'investisseur à cause des coûts engendrés.
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(10 heures)
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Question 10: Est-il souhaitable d'implanter un régime de recours civils sur les marchés secondaires, à l'image de celui adopté en Ontario? On parle ici, malgré que le commentaire de Pierre... a fait par rapport à ce que vous regardez dans le modèle d'initiative par rapport aux fonds communs de placement, le recours civil de l'Ontario est un recours civil sur les marchés secondaires; les fonds communs de placement ne sont jamais ou à peu près jamais transigés sur les marchés secondaires. On est transigés sur les marchés primaires de façon continue, de là l'obligation de déposer un prospectus annuellement, de renouveler le prospectus annuellement. Donc, ce recours-là, pour les fonds communs de placement, aurait peu ou pas d'impact. Donc, il faut s'assurer de le regarder correctement avant de penser l'adopter. Surtout si c'est pour régler un problème avec fonds commun de placement, ce serait adopter un recours qui n'aurait probablement aucun impact. Donc, il faut faire très attention à ça.
Question 11: Les peines imposées pour punir les crimes financiers sont-elles assez sévères?
Premièrement, on croit que le mandat des autorités devrait être de prévenir plutôt que de guérir. Par contre, évidemment, on sait que des fois c'est impossible à faire. Il y a des changements qui ont été apportés à la Loi sur les valeurs mobilières, augmentant les peines imposées aux gens qui ne respectent pas la loi. On parle de 5 millions d'amende, cinq ans de prison, ce qui n'est pas méchant. Par contre, ce qu'il faut faire attention, et je pense qu'il faut regarder ça plus comme un débat de société. Il faut faire très attention en disant qu'on va augmenter les peines de prison ou les... les amendes, à la limite, je ne suis pas nécessairement contre, mais les peines de prison, dans un cadre... uniquement en regardant seulement le secteur des services financiers.
Les crimes contre la personne ne peuvent pas être oubliés, quand on regarde les crimes contre les biens. Je suis certain que, si on prend un exemple et que la personne qui tue se voit imposer une peine moins grande que quelqu'un qui vole de l'argent, ça ne fait pas de sens, probablement. Donc, il faut faire attention de ne pas regarder ça en vase clos et de regarder uniquement pour les crimes contre les biens, dire: il faut augmenter les peines, je pense que c'est un débat de société: Est-ce qu'on veut augmenter les peines de façon concurrente et de voir à ce que tous les crimes soient punis de façon plus sévère?
Le Président (M. Hamad): ...en passant, là.
M. Lapierre (Éric): Non, non, je sais. C'est ça.
Le Président (M. Hamad): On est loin, là.
M. Lapierre (Éric): Non, non, c'est exactement ça. Mais je pense qu'il faut le regarder... On ne peut pas le regarder en vase clos, regarder uniquement les peines contre les biens, il faut regarder ce qui est fait également contre les crimes contre la personne pour...
Le Président (M. Hamad): Mais les peines sont quasiment gratis actuellement, là. Elles ne sont pas sévères, là.
M. Lapierre (Éric): Ah non, non, non. C'est ça. Il faut le regarder: Est-ce qu'on veut l'amener... Parce que souvent les gens pointent vers les États-Unis et disent: Regardez ce qu'ils font aux États-Unis, 853 ans de prison. Est-ce que c'est à ça qu'on veut en venir ici?
Une voix: ...
M. Lapierre (Éric): Le fouet? Ah! Les crimes... Je pense que...
Une voix: ...
M. Lapierre (Éric): La lapidation, ces choses-là, à part à Hérouxville, c'est un sujet qui est...
Question n° 12: Quelles mesures favorisiez-vous pour obtenir un meilleur effet dissuasif?
Comme nous le mentionnions précédemment, les changements apportés à l'Équipe intégrée de la police des marchés financiers ainsi que les augmentations aux peines pénales prévues à la Loi sur les valeurs mobilières sont un pas quand même dans la bonne direction.
Question 13: Est-il opportun d'abolir, dans certains cas, les frais de sortie des marchés de fonds communs de placement?
Ici, on ne croit pas qu'il s'agit d'une question relative à la protection des épargnants; il s'agit d'une relation contractuelle entre un investisseur et son fournisseur de services. L'information est disponible aux investisseurs quand ceux-ci achètent un produit, l'information se trouve dans le prospectus, c'est de l'information qui est couverte par les représentants quand ils vendent le produit. Donc, de parler de ça en protection des épargnants, je pense, ce n'est pas le bon endroit.
Par contre, est-ce qu'on pourrait améliorer l'information qui est fournie? Me Guimond l'a mentionné, on parle d'un règlement qui pourrait être... Par rapport à l'information aux points de vente, si on était capable d'améliorer l'information qui était donnée, tant mieux, mais je ne pense pas que l'abolition, dans certains cas, ça relève de la protection des épargnants. C'est une information qui est disponible quand ils achètent le produit.
Question 14: L'Autorité des marchés financiers dispose-t-elle selon vous des ressources suffisantes pour accomplir sa mission?
Selon les états financiers que j'ai consultés, l'Autorité des marchés financiers a un excédent de 31 millions, 30 ou 31 millions, à son exercice 2005-2006. Donc, il est clair qu'ils ont les ressources financières disponibles pour rencontrer leur mandat. Il y a des choses qui vont les aider: la règle 81-107 et le projet de réforme de l'inscription sont des choses qui vont leur permettre d'atteindre leur mission, mais ce qu'on sait par contre, c'est que l'AMF évidemment bénéficierait grandement d'une relation plus étroite avec l'industrie pour bénéficier de nos connaissances.
Mais par contre ce que je dois dire ? on va souligner l'excellent travail de l'AMF à cet égard-là ? depuis un certain temps déjà, l'AMF travaille très étroitement avec le CFIQ pour justement mieux comprendre l'industrie et s'assurer que les projets ou les choses qu'ils veulent changer sont harmonieuses et respecteront la protection des investisseurs mais n'iront pas avoir un impact négatif sur l'industrie. Notamment, j'ai le privilège de présider un comité d'industrie sur le projet de réforme d'inscription, sur lequel siègent des membres de l'AMF et de la Chambre de la sécurité financière. Donc, il y a vraiment une belle collaboration qui s'est créée, et on les remercie à cet effet-là.
Question 15: Les pouvoirs de l'Autorité doivent-ils être révisés?
Évidemment, on supporte toujours une révision régulière des pouvoirs d'une autorité réglementaire. Je pense qu'il s'agit d'une règle de bonne gouvernance d'un organisme public de réviser ses pouvoirs de façon régulière. Je pense qu'entre autres ce que vous faites aujourd'hui, c'est un peu dans ce mandat-là, de voir à ce que l'AMF a les pouvoirs qu'elle a besoin pour rencontrer son mandat.
Question 16, la dernière: Que proposez-vous pour améliorer les connaissances des investisseurs en matière de choix de placements et des risques encourus?
Évidemment, le rôle d'éducation, on croit qu'il revient à l'AMF, c'est leur rôle à eux. Par contre, l'industrie a une certaine obligation à cet égard-là. Les représentants, les personnes qui vendent les produits ont une obligation de renseignement auprès de leurs clients. Évidemment, c'est large comme obligation, donc ça peut être un peu d'améliorer les connaissances des gens qui investissent. L'AMF a créé récemment huit brochures pour le bénéfice des investisseurs, avec des belles informations. C'est des très belles brochures, on leur lève notre chapeau de ce côté-là, ça a fait partie de ce travail-là.
Voilà, je pense, c'est la réponse à vos questions. Je vais recéder la parole à mon ami Pierre.
Le Président (M. Hamad): On vous a donné du temps parce que la qualité de votre mémoire le permettait, alors là on va compléter là-dessus, M. Hamel.
M. Hamel (Pierre): Oui, une conclusion rapide, d'une minute et demie, deux minutes, là.
Le Président (M. Hamad): Oui, oui, allez-y. Allez-y.
M. Hamel (Pierre): Deux choses. Premièrement, contrairement à ce que certains médias véhiculent, la confiance de l'investisseur pour le fonds commun de placement est au rendez-vous, les gens ont confiance au produit. Il y a un an, j'étais moins ferme dans l'affirmation, maintenant je suis ferme: les investisseurs ont confiance, contrairement à ce que les journaux disent parfois. Depuis l'affaire Norbourg, les fonds ont augmenté d'à peu près 100 milliards au Canada; au mois de décembre, il s'en est vendu pour 3,3 milliards. Les sondages montrent que le fonds commun de placement est le premier véhicule, après la maison, là, mais, en termes de retraite, c'est le premier véhicule financier, avec un taux de confiance de 85 %. Tout nous montre que la confiance est là.
Deuxième et dernier point que je voulais dire en conclusion, c'est attirer votre attention sur une de nos recommandations du rapport de l'année passée, qui pour l'instant n'a pas encore eu d'effet mais qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est ce qu'on a appelé, l'année passée, le répertoire des produits d'investissement collectif. Ce produit-là à nos yeux est très important. Le répertoire, le problème qu'il y a... Je veux juste, pour que vous comprenez bien... On est dans un monde totalement décloisonné, on est dans les secteurs financiers, c'est difficile d'isoler les produits les uns des autres, mais tout l'appareil législatif est isolé dans son cadre réglementaire. Puis on a des produits qui proviennent des banques, c'est légiféré à Ottawa; les produits d'assurance, c'est légiféré soit au Québec soit dans le Canada; puis les produits de valeurs mobilières, il y en a 13, réglementations, avec le modèle passeport maintenant, il y a 13 possibilités de réponse. Alors, quand on se met dans la peau de l'investisseur et on regarde un produit d'investissement, on se dit: C'est quoi et ça vient d'où? C'est la première question qu'on devrait avoir, la réponse instantanée, automatique.
Alors, nous, ce qu'on propose, c'est un système d'immatriculation, la même chose comme on fait avec les voitures: on met une immatriculation derrière la voiture, hein, on voit le numéro, il y a un numéro de plaque unique, et ça provient d'une juridiction, et on le voit, et c'est clair, et ça évite les zones grises. L'appareil législatif qui doit intervenir le sait, s'il y a une plainte, il y a un numéro unique de référence. Donc, si on joue sur les mots... Parce que, dans les cas de fraude qu'on a observés, les fraudeurs utilisaient les zones grises pour justement faire ça. On raconte une chanson à un, on dit une autre chanson à l'autre et on passe entre les deux tout le temps. Et là, derrière, quand on n'arrive pas à identifier le lien entre le terrain et l'autorité de contrôle, le problème qui se produit en pratique, c'est qu'il y a des délais, les montants augmentent et, le temps d'intervenir, ça crée de la confusion et ça crée des gros scandales à la fin.
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(10 h 10)
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Alors ça, je voulais attirer votre attention. Même plus que ça, sur ça d'ailleurs, j'ai vu, au niveau international... Et ça, là-dessus, j'attire votre attention, il y a une tendance internationale, et je pense qu'au niveau des produits on devra avoir une vision internationale. D'ailleurs, là-dessus, il y a un développement au niveau mondial qui s'appelle le code ISIN, I-S-I-N, et ce code ISIN là, qui est une forme de répertoire exactement comme on le proposait l'année passée, ce code-là a été adopté en Europe continentale par plusieurs pays, le Japon a adhéré à ce code-là également. Donc, c'est un système d'immatriculation qui relie un produit unique à un législateur unique. Et ça va dans le sens...
Alors, moi, je vous invite à le garder en mémoire. Il y a peut-être d'autres choses qu'on peut faire avant, mais c'est quelque chose qu'il faut revenir un jour là-dessus. Alors, le produit: vision internationale; la distribution du produit: vision locale. Alors, dans la pensée, la distribution, c'est local; la vision du produit, c'est international. Alors, voilà, peut-être qu'on peut vous céder la parole à vos questions.
Le Président (M. Hamad): Merci beaucoup. Nous allons passer juste à la période de questions, et juste une petite remarque en fait: le mandat d'initiative est venu des membres de la commission et pas du ministre. Alors, c'est juste pour le bénéfice des membres ici, des deux côtés, et c'était unanime, d'ailleurs. Alors, je veux juste... Évidemment, le ministre nous écoute attentivement et fait une bonne job, mais c'est ici que ça se passe actuellement. Alors, merci.
Donc, nous passons à la période de questions. Le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Même si je suis adjoint parlementaire au ministre des Finances effectivement, je suis comme député membre de la commission aujourd'hui. D'abord, M. Hamel, M. Lapierre, Me Guimond, merci pour votre présentation. Et, effectivement, comme l'a souligné le président, la qualité de votre mémoire est certainement de très haut niveau, je pense que c'est important de le souligner. C'est clair, vous y allez de façon très systématique, et ça permet de bien camper des questions et d'aller plus loin maintenant, de voir jusqu'où on peut aller, qu'est-ce qui est souhaitable, qu'est-ce qui ne l'est pas, mais il y a des éléments là qui sont très constructifs, là, pour nos travaux et nos réflexions. Alors, je vous en félicite et je vous en remercie en mon nom et au nom des membres de la commission.
Vous avez fait référence d'ailleurs tout à l'heure à la réglementation 81-107, qui était une de vos recommandations, qui effectivement, puis c'est important pour le bénéfice des gens qui nous écoutent... c'est quelque chose qui a été adopté par le gouvernement l'automne dernier et qui va dans le contexte de tout le processus de passeport et d'harmonisation entre... Vous faisiez allusion aux 13 juridictions, et ça peut avoir l'air de 13 affaires différentes, puis les gens ne s'y retrouvent plus. La volonté très claire du gouvernement et, je pense, de l'ensemble des partenaires, là, à quelques nuances près, canadiens, c'est d'aller vers effectivement où les gens se retrouvent. Quelqu'un qui distribue des produits ici, s'il était dans une autre province, bien c'est clair qu'on puisse faire la traçabilité et qu'ils soient réglementés. Et ça peut se faire tout en respectant, et c'est important, les juridictions des provinces.
Parce qu'un des grands dangers, c'est qu'on pourrait passer les cinq, six prochaines années à faire un débat de contenant, sur une agence unique très, très compliquée, etc., et on ne réglerait pas les enjeux de contenu, qui sont ceux qui préoccupent, je pense, les membres de la commission, qui vous préoccupent aussi, pour un fonctionnement efficace du marché financier et une saine protection des épargnants. Mais, là-dessus, je pense que la volonté des gens tout autour de la table est dans la même direction.
J'arrive maintenant à des éléments que vous avez suggérés, et un des éléments... Puis je vais commencer par le dernier que vous venez de mentionner: l'idée de l'immatriculation des produits d'investissement collectif. Si je comprends bien, juste pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, présentement l'investisseur qui veut savoir, celui qui propose un produit, est-ce qu'il satisfait l'encadrement réglementaire?, qui est l'émetteur de la valeur mobilière?, est-ce que ça satisfait aussi à l'encadrement, etc., au Québec?, ceci, ça existe déjà. Sur le site Web de l'AMF, il y a des informations qui sont là. Est-ce que je comprends bien que la valeur ajoutée, que vous dites, là, qui est l'élément qui d'après vous semble manquer, c'est l'immatriculation? Et donc d'une part j'aimerais peut-être que vous complétiez là-dessus, s'il y a lieu, et dire: est-ce que c'est la même chose donc qu'il faudrait faire donc pour l'ensemble... peut-être que le Québec pourrait être un leader aussi et pousser avec les autres partenaires pour l'étendre dans le processus d'harmonisation. C'est un peu ce que vous me dites?
M. Hamel (Pierre): Oui. En fait, il y a ce qu'on appelle des émetteurs assujettis et des émetteurs non assujettis, et il y a également ce qu'on appelle des valeurs mobilières, et le reste. Effectivement, il existe une liste d'émetteurs assujettis. Si vous allez sur le site de l'AMF, par exemple, vous allez trouver une liste d'émetteurs assujettis. Mais ce qui vous manque, c'est le reste, c'est les zones grise en fait, là. Ce n'est pas nécessairement facile, c'est un grand travail, un système d'immatriculation comme les voitures, mais quand même c'est quelque chose qui ferait que d'une façon automatique on est en mesure, du point de vue de l'investisseur qui a mis le premier 50 $ dans le produit, de voir automatiquement le produit, c'est quoi, de quelle origine législative et quelle supervision finalement réglementaire qu'il y a derrière. Donc, c'est identifier clairement, pour le petit investisseur qui l'achète, le produit à sa juridiction. C'est ça qui est l'idée derrière tout ça.
Et un numéro de matricule qui serait unique par produit ferait en sorte qu'on ne peut même pas jouer avec les mots: on montre un produit nova et on vous vend le supernova, mais le supernova, c'est d'autre chose. Avec des numéros de matricule uniques, ça n'enlève pas les noms commerciaux des produits, mais ça évite, en cas de référence ou en cas de plainte, de tout relier facilement derrière.
M. Paquet: Et vous dites qu'un genre de processus comme ça ça existe, en Europe notamment, là, le même processus. Donc, c'est quelque chose qu'on n'aurait pas à inventer de toutes pièces. Et vous pensez que la mise en place d'un tel système, c'est quelque chose qui est faisable sur un temps raisonnable, à beaucoup de frais? Comment vous évaluez ça?
M. Hamel (Pierre): Moi, je dis: C'est une nécessité de tout modèle passeport. En Europe, ils ont dû le regarder probablement à cause du modèle passeport, c'est-à-dire un produit luxembourgeois qui se vend en France ou... En fait, ils ont trouvé des formules pour ça. Évidemment, ça commence très rapidement par les valeurs mobilières, ça se transige tous les jours en Bourse, et là il y a des discussions sur les produits d'investissement, ils élargissent leurs discussions. Mais d'un autre côté, peu importe, si on veut avoir une vision d'ensemble d'un produit qui est créé à un endroit, il faut être en mesure de le relier à son appareil législatif, à son appareil de contrôle facilement.
M. Paquet: D'accord. Une autre question que j'aimerais approfondir avec vous: dans votre mémoire, vous parlez d'un système, un processus, dans le fond, de signaux d'alarme pour lever des drapeaux au moment où est-ce que ça pourrait amener certains gestes ou déclencher certaines enquêtes ou étapes d'enquête, appelons-les ainsi, là, de la part de l'Autorité des marchés financiers notamment. Pouvez-vous élaborer davantage là-dessus? Est-ce que vous croyez que... Bon, il y a peut-être des choses comme ça qui existent déjà. Dans quel sens est-ce qu'on pourrait et qu'on devrait aller plus loin à cet égard-là? Qu'est-ce qui se fait ailleurs par rapport à ceci, par exemple, au niveau des expériences ailleurs?
M. Hamel (Pierre): En fait, les signaux avant-coureurs, c'était un guide... Comment je dirais bien ça? En fait, quand les gens du groupe de travail ont travaillé là-dessus, c'est qu'ils ont dit: Peut-on donner un instrument soit aux organismes d'autoréglementation ou à l'AMF pour dire: Faites attention dans ces cas-là? En assurance, on appelle ça des facteurs de risque. Si vous fumez, vous avez plus de chances de mourir, bon, apparemment. Bon. Mais des facteurs de risque, c'est: Comment peut-on associer des activités d'un individu aux résultats par corrélation? C'est ça qui est l'idée.
Mais, quand on prend l'exemple... Je vous donne... Comme le cinquième, je m'en souviens de mémoire, les gens qui avaient des antécédents, sur les neuf cas de scandale, il y en a six sur les neuf dont les dirigeants avaient des antécédents judiciaires ou réglementaires. Donc, on devrait faire attention. Ce que je veux dire, ça ne veut pas dire de les empêcher d'oeuvrer, mais être plus, comment je dirais, plus pointus, d'être plus près de la situation, de le regarder plus attentivement. Et là ça aide peut-être à développer des outils puis à vérifier peut-être un petit peu plus souvent. Enfin, je ne sais pas exactement tout ce que ça veut dire.
Évidemment, on donne le droit aux gens de se tromper. Il ne faut pas qu'ils soient coupables avant d'avoir agi, évidemment, là, on donne droit à une erreur, mais, vous comprenez ce que je veux dire, c'est un facteur de risque qu'on a identifié par les signes avant-coureurs, qui devrait attirer l'attention des autorités. Est-ce que tu veux compléter?
Mme Guimond (Martine): Non, c'est exactement ça. C'est de voir, à chaque fois qu'un des signes avant-coureurs est présent dans un dossier, qu'il y ait peut-être une enquête ou un examen plus approfondi du dossier.
M. Paquet: D'accord. Une sous-question me revient sur la question du registre sur l'immatriculation: En quoi un tel processus... Et je comprends les... je pense que c'est quelque chose, en tout cas potentiellement, qui vaut la peine d'être considéré, mais, d'un point de vue pratique, prenons, par exemple, le cas d'un scandale, pour ne pas en nommer un qu'on a tous en tête, là, dans un cas comme celui-là, s'il y a un mécanisme de fraude qui est mis en place, en quoi le système de registre pourrait aider les investisseurs à ce moment-là? Peut-être, ça pourrait allumer d'avance... la traçabilité, mais est-ce qu'il y a autre chose en quoi ça pourrait aider? Parce que ça ne peut pas éviter toutes les fraudes non plus.
M. Hamel (Pierre): Ça ne peut pas éviter toutes les fraudes, non, ça, on est d'accord avec ça. Non, le répertoire Produits ou le système d'immatriculation aideraient toutes les situations où il y a des zones grises. Et, dans le cas, je pense, que vous faisiez référence, peut-être que celui-là, ça n'aurait rien changé. Mais, parmi les neuf autres, il y en a plusieurs autres qu'on pourrait identifier où on dit: C'est quoi, le produit que j'ai acheté?, et, dépendant de qui le regarde, trouver une réponse différente. Ça, ça aurait nettement aidé dans ce cas-là.
M. Paquet: Et ça aiderait le régulateur aussi peut-être à, lorsqu'il y a des drapeaux qui se lèvent, à pouvoir accélérer.
M. Hamel (Pierre): Bien oui, accélérer le processus et clarifier la relation entre l'investisseur et...
M. Paquet: D'accord. J'ai deux autres éléments de question. D'abord, par rapport au processus d'indemnisation, vous avez mentionné, je crois, à juste titre qu'il faut vérifier l'harmonisation, c'est quelque chose de totalement différent ici par rapport à ailleurs, qui a des conséquences. Sous l'hypothèse d'un fonds d'indemnisation, que certaines gens avancent, avez-vous évalué qu'est-ce que ça représenterait comme genre de capitalisation qu'il faudrait faire, quel genre de montants? Parce qu'évidemment un des problèmes, c'est: C'est quoi, les risques de fraude, tout l'aspect actuariel? Mais est-ce que vous avez un ordre de grandeur?
M. Hamel (Pierre): Bon. Déjà, quand on parle d'indemnisation, moi, je vous encourage à penser à deux volets: il y a la distribution et il y a le produit. Gardez ça séparé, s'il vous plaît, dans le raisonnement. En ce moment, il y a un système d'indemnisation de la fraude pour la distribution, il n'y a rien pour la fraude du produit, d'où la confusion dans l'annonce de Norbourg, derrière tout ça.
M. Paquet: Tout à fait.
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(10 h 20)
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M. Hamel (Pierre): Distribution, produit. On a écrit un assez long chapitre d'ailleurs là-dessus, et, à la fin, notre conclusion, c'est de vous donner une liste d'avantages et d'inconvénients sur chacune des options. Et la réponse n'est pas facile, parce qu'il faut peser les pour les et les contre, et, dans les pour et les contre, je ne peux pas vous dire lequel des deux qui ressort en premier, hein? Bon.
Sur la capitalisation, je crois que vous faisiez plus allusion aux produits. Si on voulait faire un fonds d'indemnisation Produits, quelle serait la capitalisation? Ça, on l'a regardé également. Ça ne fait pas partie du rapport, mais ce que je peux vous dire, c'est que, dans la réflexion autour de la table, il y a eu des idées innovatrices qui ont été avancées. Évidemment, s'il y a un discours d'industrie qui commence là-dedans, on va y participer, mais, dans les idées innovatrices qui ont été nommées, qui ont été dites autour de la table, c'est: Oui, il faut accumuler un fonds mais également il faut le juxtaposer à un mécanisme de mutualisation avec les autres fonds. Donc, il y a eu cette idée-là d'avancée.
Mais ça, si on veut aller dans ce sens-là, premièrement, il faut commencer par se poser la question: Veut-on un fonds d'indemnisation? Parce que, je vous le dis, les inconvénients sont lourds. On les a identifiés, il y a des avantages, il y a des inconvénients. Les inconvénients sont lourds, donc il faut vraiment peser. Si vous dites oui, c'est pour le meilleur et pour le pire, hein, parce que vous allez avoir le pire avec le meilleur. Mais vous allez avoir la collaboration de l'industrie, je peux vous dire.
M. Paquet: Une dernière question, pour laisser la chance à mes collègues aussi de poser des questions. Vous mentionnez dans votre mémoire que dans les autres provinces et, je crois, en Europe... Parce que, l'an dernier, j'avais eu la chance de vous rencontrer, et des gens aussi de niveau mondial, là, des fonds communs d'investissement, et un des éléments qu'on avait échangés dans ce contexte-là, on réfléchissait, voulait qu'un peu en Europe et au Canada il y ait des cautionnements, le «financial institutional bond», comme on dit, pour dire qu'un fonds commun de placement pourrait avoir un cautionnement à l'arrière dans des cas. Ça pourrait être une alternative à un fonds d'indemnisation. Est-ce que vous privilégieriez cela? Quels sont les avantages et les inconvénients dans ce contexte-là?
M. Hamel (Pierre): Là, on parle du produit et non pas du système de...
M. Paquet: Du produit, tout à fait.
M. Hamel (Pierre): Toujours du produit.
M. Paquet: Toujours du produit, oui.
M. Hamel (Pierre): Ce fonds de cautionnement là, en fait c'est un cautionnement en cas d'insolvabilité, c'est-à-dire, s'il n'y a pas insolvabilité, il n'y a pas indemnisation. C'est-à-dire, là, c'est à l'entreprise de discuter avec l'individu, de trouver une solution à l'amiable éventuellement. Et ça, ça joue uniquement dans le cas d'insolvabilité, c'est-à-dire, une fois qu'on constate que le fonds est insolvable, la partie manquante, ça vient le couvrir. C'est ça que ça fait en fait, ce qu'on appelle le FIB. Ça existe déjà, du côté des valeurs mobilières, pour les courtiers de plein exercice au Québec aussi, mais ça n'existe pas du côté des produits et ça n'existe pas du côté de la distribution des fonds communs de placement.
M. Paquet: Oui, mais, par exemple, un cas hypothétique où un gestionnaire aurait pris de ces fonds-là et donc que, là, le fonds devient insolvable pour cause de fraude, dans un contexte hypothétique que je mentionne, ça ne s'appliquerait pas non plus même dans ce cas-là?
M. Hamel (Pierre): Il faut qu'il y ait insolvabilité, il faut qu'il y ait...
M. Paquet: Il faut qu'il y ait fraude ou insolvabilité au sens strictement financier, là. C'est ça.
M. Hamel (Pierre): Donc, il faut qu'il y ait insolvabilité dans le système, oui.
M. Paquet: D'accord.
M. Hamel (Pierre): C'est ma compréhension.
M. Paquet: O.K. Merci beaucoup.
Le Président (M. Hamad): Merci. M. le député de Charlevoix.
M. Bertrand: Merci, M. le Président. MM. Hamel, Lapierre, merci. Mme Guimond, merci. Je suis, moi aussi, impressionné par votre mémoire et je dois vous dire qu'on a beaucoup d'éléments pour nos réflexions futures.
Trois questions. La première, c'est qu'on dit à un moment donné: «Encore plus attrayants sont les billets indexés sur la Bourse dont les ventes sont en explosion. Ce produit se vend sans aucune réglementation.» Et plus loin on dit: «La vente est libre pour les magasins à rayons mais interdite pour des cabinets d'experts...» Là, je peux vous dire que j'ai comme sursauté. Pourquoi? Pourquoi l'AMF l'a interdit?
M. Hamel (Pierre): L'AMF est en train de travailler là-dessus. Il y a eu un projet qui a sorti récemment là-dessus effectivement, qui s'inquiète de ça. Non, effectivement, les billets à capital protégé, les billets indexés, c'est un phénomène assez...
M. Bertrand: Est-ce que vous expliqueriez d'abord c'est quoi, les billets à capital protégé?
M. Hamel (Pierre): En fait, c'est un instrument financier dans lequel on investit, où on est assuré d'avoir le capital au bout de cinq ou sept ans. Mais il y a une formule d'indexation sur la Bourse ou sur un instrument qu'on indique... Il y a une formule, en fait vous participez à un marché en ayant un capital garanti, et il y a une société derrière qui garantit le capital. En fait, essentiellement c'est ça.
Et ça, bien il y a des déclinaisons de ces produits-là, et effectivement, quand il venait temps de regarder... un représentant en épargne collective n'a pas droit de vendre ça. Je veux dire, tel que la loi était rédigée, c'est qu'un représentant en épargne collective ne pouvait vendre que des produits d'épargne collective, c'est comme ça que la loi est rédigée, et ça, ça ne rentre pas dans la catégorie des épargnes collectives.
Et ensuite on regarde qui réglemente, mais la distribution, on dit bien «la distribution», attention, n'est pas réglementée. Pas le produit comme tel, là, la distribution n'est pas réglementée. Ça se vend, il y a certains produits qui se vendent aux caisses, qui se vendent bien un peu partout en fait, là, mais c'est dans ce sens-là qu'on dit: Puisque ce n'est pas réglementé, on pourrait le vendre chez Wal-Mart.
Mais ça, je peux vous dire que l'AMF s'est inquiétée de ça, puis ils ont déjà commencé à sortir des papiers là-dessus. Peut-être veux-tu préciser un peu plus là-dessus, toi?
M. Lapierre (Éric): J'allais dire... Je pense que je peux peut-être... Le commentaire que je peux faire, c'est que c'est... En, je vais dire, septembre dernier, l'AMF, pas pour tous les produits exemptés mais certains produits exemptés, a émis un communiqué en disant: On reconnaît que dans certains cas le représentant en épargne collective peut le distribuer. Mais, pour ce qui est de tous les autres qui ne tombaient pas dans ce que l'AMF a dit, le commentaire de Pierre tient encore.
M. Hamel (Pierre): Ça fait partie des zones grises entre les lois, les points de discontinuité.
M. Bertrand: C'est beau. Merci. On dit, la recommandation n° 6: Le dirigeant responsable du gérant de fonds devrait nécessairement être une autre personne que l'actionnaire majoritaire. Très intéressant. J'aimerais ça que vous développiez un petit peu plus.
M. Hamel (Pierre): Ça, le groupe de travail, sur cette question-là, est arrivé à la conclusion... Il disait: En réfléchissant à la concentration des pouvoirs sur un seul individu, comment on pourrait faire pour diluer les pouvoirs d'un individu? Ils se sont penchés sur cette question-là et ils se sont dit: Bien, pourquoi on ne lui imposerait pas d'avoir, au moins réglementairement, un complice, de sorte que le complice, il va mettre sa tête sur le billot lui aussi éventuellement, peu importe si... En faisant ça, c'est qu'il y a quelqu'un d'autre qui cautionne. Quand on a un seul individu qui a tous les pouvoirs, en pratique les autres, bien ils obéissent aux ordres. Alors, quand on en met deux qui sont au bâton juridique, il y a plus de chances qu'il y en ait un qui fasse comprendre raison à l'autre. C'était ça qui était le raisonnement.
Bon. Maintenant, avec le développement qu'il y a dans le projet de réforme de l'inscription, ce n'est pas tout à fait cette tangente-là qu'on prend, mais c'est équivalent, celle-là, puis ça, on l'analyse de très près. On regarde plus d'avoir un chef de conformité qui relève directement du conseil d'administration, et avec un dirigeant responsable qui est le dirigeant responsable ultime, là. C'est vers ça que le projet de réforme s'en va, et je pense que c'est une voie intéressante, là.
M. Bertrand: Merci. Votre mémoire est très explicite puis, comme je le disais tout à l'heure, très intéressant, mais il y a un élément cependant... Puis, j'imagine, vous allez me voir venir, je m'attendais à avoir un autre élément additionnel, que je ne retrouve pas, c'est le fameux débat sur la question des secrets professionnels. Vous étiez là hier, vous avez vu qu'il y a trois organismes qui sont venus discuter sur ce sujet-là. Pour nous, c'est un sujet majeur. Et, tout à l'heure, après vous, on aura un bureau d'avocats qui viendra, au nom de quatre clients qui, si j'ai bien compris, sont des gros bureaux de comptables, dire pourquoi, soit qu'on... ils ne diront pas qu'on a mal fait, mais qu'on devrait modifier. Mais, tout ce temps-là... et les trois puis probablement le quatrième, tout à l'heure, ne nous ont pas aidés vraiment dans ce qu'on va devoir trouver comme solution.
Vous autres, vous êtes totalement indépendants de tout ça, mais par contre vous avez une très grande ? aïe! là, je joue du violon, je suis très conscient ? compétence. Mais, par rapport à votre indépendance et votre compétence, je ne veux pas vous mettre dans l'eau chaude, mais j'aimerais que vous nous disiez, à partir de votre expérience, vers quoi, nous, on devrait aller pour s'assurer qu'on protège les investisseurs.
M. Hamel (Pierre): Bien, peut-être... D'emblée, ce n'est pas une question facile, O.K.?
M. Bertrand: Je suis bien conscient.
M. Hamel (Pierre): O.K. Ce n'est pas une question facile, et je pense que les gens qui s'y opposent craignent les risques de dérive, peu importe la réglementation qu'on mettrait autour de ça. Parce qu'évidemment, quand il vient le temps de travailler sur un projet pour un fournisseur externe, le projet prend différentes formes, différentes avenues sont analysées. Il y en a une de retenue ou, tu sais, il y en a des recommandées, et le client fait des choses, et ensuite ils ne voudraient pas, je pense, que ça se retourne contre eux. Ce n'est pas facile, cette question-là, c'est pour ça que... C'est vrai qu'on est muets dans notre rapport, vous avez raison, et on ne se sentait peut-être pas compétents...
M. Bertrand: Je dois comprendre que vous êtes muets volontairement?
M. Hamel (Pierre): Non, non, non. Ce n'est pas vrai. Non, non, non. Là-dessus, je vous rassure. C'est que la question n'est pas simple. Je ne sais pas, là... Je suis entouré de deux avocats, peut-être qu'il y en a... Moi, je ne suis pas avocat, je suis actuaire de formation, là, mais... Veux-tu dire un mot sur le secret? Parce que c'est difficile, là. Ce n'est pas une question facile, c'est tout ce que je vous dis.
M. Bertrand: Allez, risquez! Risquez!
Le Président (M. Hamad): Si les avocats ne veulent pas parler, ça ne va pas bien, là!
M. Bertrand: Sinon, moi, je vous le dis d'avance, quand on va arriver aux conclusions, nous autres, si tout le monde vient nous dire qu'ils ne veulent pas avancer, qu'ils ne veulent pas risquer, bien, nous autres, on va en risquer, des réponses, quand ça va être le temps.
Le Président (M. Hamad): Parle pour toi, là.
M. Bertrand: M. le Président, je n'ai jamais parlé en votre nom, je n'ai pas l'intention de commencer aujourd'hui. Vos remarques... Celle-ci n'est pas pertinente. Merci.
Le Président (M. Hamad): Alors, allez-y, M. Hamel.
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(10 h 30)
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M. Hamel (Pierre): Bon. Il y a quand même des obligations. Je vous rappelle qu'il y a des obligations professionnelles. Dans les normes professionnelles, ils doivent divulguer des cas de fraude. Chaque ordre de profession a ses... tu sais. Ils ont une obligation envers le public qui leur impose de faire des divulgations en cas de fraude évidente. Mais évidemment votre question va plus loin que le cas de fraude évidente, là. Je veux dire, c'est le cas de la zone grise, là, justement. Il faudrait que quelqu'un... Le premier à réagir, c'est celui qui a accès le premier à tous les livres. Puis je vois très bien la question, mais je comprends très bien qu'il y a un risque de dérive d'interprétation par la suite qui inquiète certains. C'est dangereux, cette... Moi, je la laisse aux experts, cette question-là, mais elle est dangereuse, cette piste de réflexion là. C'est mon opinion.
M. Bertrand: Dois-je comprendre que seuls les gens carrément impliqués sont des experts pour nous donner des réponses? Si on ne les a pas d'eux autres, on...
M. Hamel (Pierre): Bien, vous avez entendu plusieurs experts hier.
M. Bertrand: Les avocats ne veulent pas se risquer?
M. Lapierre (Éric): Je pense que Pierre a bien répondu. C'est quelque chose de très, très difficile. Je pense que, quand on parle du secret professionnel, on ne veut pas non plus rendre des obligations trop... Moi, ce que je peux prendre comme exemple, on ne voudrait pas se retrouver dans une situation où, l'avocat qui est lié par une obligation de divulgation, qui est un avocat senior dans une entreprise, on lui dise: Regarde, on a une rencontre de la haute direction qui commence à 3 heures. Viens donc nous rejoindre à 3 h 30, on va discuter des affaires, puis on ne te rentre pas la discussion, parce que justement, si on te dit des choses, tu vas être obligé d'aller te virer de bord puis de le dire à l'AMF ou le dire...
Il y a un aspect qui est dérangeant dans ça. Je ne pense pas que c'est facile. Je ne pense pas qu'on veut justement se mettre dans des situations où l'expertise de la personne serait bienvenue mais qu'on ne peut pas l'inclure parce qu'on ne peut pas lui donner de l'information parce qu'elle serait liée par une obligation d'informer un tiers de quelque chose qui se passe. La protection de l'investisseur... Tout dépend dans quel contexte on le met, je pense. Il faut faire très attention.
M. Bertrand: Merci.
Mme Guimond (Martine): Je pense qu'on s'attaque à la relation de confiance entre le professionnel et son client. C'est exactement ça qu'on vise, puis il faut faire très attention, en effet.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency. Après ça, je reconnais... On fait l'alternance.
M. Bernier: Merci, M. le Président. En complément de ce que le député vient de mentionner, le député de Charlevoix, vous savez, ce qu'on recherche, ce n'est pas d'arroser tout ça. Ce qu'on recherche, c'est réellement, là, d'essayer de trouver le chemin, de trouver... On comprend la relation d'affaires, on comprend la relation de confiance, on comprend ce qu'il doit y avoir comme lien entre le professionnel dans le domaine comptable et son client. Par contre, on essaie de voir, dans des cas qui se sont produits, que ce soit ici, au Québec, au Canada ou aux États-Unis... On a vu que, malgré les connaissances et les experts de divers clients, qui avaient toutes les ressources voulues pour suivre ces placements-là, pour être capables de voir des indicateurs, ou de voir des drapeaux, ou de voir tout ce que vous voulez, là, ça s'est produit quand même.
Donc, nous autres, ce qu'on essaie de trouver, là, ce n'est pas d'arriver puis de court-circuiter cette relation professionnelle qui existe, c'est d'essayer de trouver, si ça existe ? ça n'existe peut-être pas, mais on essaie de la trouver ? quel est exactement le segment sur lequel on pourrait travailler pour essayer d'éviter ce genre de chose?
M. Hamel (Pierre): Je pense que la loi est assez claire pour tous ceux qui participent à un montage frauduleux, qu'il soit interne ou externe à une société. Aller plus loin que ça, je ne sais pas comment faire, sincèrement. Je ne sais pas. Mais la loi est suffisamment claire. Un externe qui le voit et qui participe au montage, il est tout aussi coupable du montage.
Donc, vous, vous cherchez quelqu'un qui dénonce. Je comprends, mais...
M. Bernier: Bien, ce qu'on cherche, ce n'est pas nécessairement un dénonciateur. Parce qu'à ce moment-là il peut y avoir fraude, mais, à ce moment-là, s'il y a eu fraude, il est trop tard. Comprenez-vous, là? Ce qu'on veut, là, c'est d'essayer de prévenir cette chose-là, tu sais? Dans certains cas, on ne veut pas se ramasser avec une catastrophe puis avec une déconfiture qui fait que là, là, il est trop tard, là, tu sais? Le tube de pâte à dents, il est répandu partout, là, il n'y a plus rien à faire, on n'est plus capable de la remettre dans le tube, là. Comprenez-vous? Dans ces cas-là, là, ce qu'on essaie de trouver, c'est s'il existe ? il n'y en a peut-être pas; s'il existe ? une possibilité, avant qu'il soit totalement vide, de pouvoir freiner cette chose-là et d'allumer. Il y a peut-être fraude, il n'y a peut-être pas fraude, mais tout ce qu'on veut, c'est un signal qui pourrait réellement nous permettre d'intervenir et de protéger l'investisseur.
M. Lapierre (Éric): Je pense qu'il faut toujours garder en tête une chose. Puis c'est le fun, parce que vous parlez de fraude, il y a peut-être certaines situations où ce serait différent, mais le propre même d'une fraude, c'est de contourner les règles en place. Donc, essayer de mettre des barrières pour protéger contre la fraude, qui est justement... le but, c'est de contourner les barrières, on se bat contre quelque chose qu'on ne pourra jamais gagner. Donc, il faut faire attention de ne pas justement surréglementer pour essayer d'empêcher quelque chose qui... dans le fond, on ne pourra jamais, en bout de ligne, complètement l'empêcher. Il faut que ça reste dans les critères raisonnables, pour dire: Dans le fond, ça va arrêter la personne qui a une intention illégale ou une intention malveillante, sans complètement arrêter le tout puis empêcher que ça se produise. Parce qu'empêcher que ça se produise, on ne pourra jamais le faire, c'est le propre même de la fraude.
M. Bernier: C'est ça, on ne pourra jamais en faire un aquarium, là, tu sais, il y aura toujours des fuites. Sauf qu'il faut s'assurer que les fuites soient très petites, puis qu'on soit capable d'identifier c'est où, la fuite, puis, s'il y a lieu, qu'on puisse au moins la boucher.
M. Hamel (Pierre): Mais il y a probablement un coût non négligeable aussi à prendre en compte, parce qu'il y a des risques de dérive dans ces nouvelles règles là. Il y a des risques d'abus, il y a des risques de... et il y a un coût associé à ça qui va être inévitablement, je le dis, là, refilé aux investisseurs parce que c'est comme ça que ça fonctionne, la mécanique, hein? Alors, que ce soit...
M. Bernier: Ça, on en est conscient. C'est comme les fonds, tout ça. On sait très bien qu'à ce moment-là, si on met en place les barrières qu'il faut pour le protéger au maximum, le coût va lui être donné. Au niveau des fonds, c'est pareil. On sait très bien que le coût va lui être retourné par la suite. C'est pour ça qu'il faut essayer de voir, de notre côté, nous, de quelle façon on peut avancer là-dessus sans le pénaliser mais tout en assurant la sécurité des marchés.
M. Hamel (Pierre): Parce qu'on a un marché qui est à 99,9 % en santé, professionnel, bien fait. Et mettre un coût sur l'ensemble, il faut y penser.
M. Bernier: Merci.
Le Président (M. Hamad): Merci. M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Bonjour. Alors, j'ai écouté attentivement tout à l'heure vos réponses concernant les questions qu'on vous avait adressées. Au niveau du secret professionnel, je comprends qu'il y a des relations d'affaires. Il y a des éléments qui ne doivent pas être divulgués au public mais qui doivent rester dans l'entreprise.
Par ailleurs, au niveau de la protection des épargnants qui vont confier leur argent à des gestionnaires, moi, j'aimerais savoir: Lorsque, dans ces entreprises, on fait une vérification, est-ce qu'il y a des vérifications externes qui se font par surcroît? Parce qu'il y a un vérificateur interne, il y a des vérificateurs externes. Alors, comment déceler les fraudes, comment être en mesure de le faire? Norbourg, je ne sais pas s'il y avait eu des vérificateurs externes et qu'on n'a pas pu déceler dans le fond... Parce qu'un voleur, c'est un voleur, et il va s'organiser pour camoufler son vol, ça, c'est très clair.
Alors, comment on pourrait faire en sorte que l'investisseur obtienne l'ensemble de l'information, qu'il ait accès à son dossier en temps réel et qu'il puisse voir l'évolution, hein, de ses placements? C'est ça, là, dans le fond le problème qu'on a et que vous avez également. Alors, comment protéger les investisseurs?
Et ce serait quoi dans le monde idéal? Parce que vous parliez tout à l'heure de remettre un document de deux pages, entre deux pages et 50 pages. C'est comme le contrat de police d'assurance qu'on a de la misère à lire, ça nous prend une loupe parfois tellement que c'est écrit petit. Alors, il y a peut-être lieu, même s'il est un peu plus volumineux, qu'il soit écrit pour que les gens s'y intéressent puis qu'ils le lisent. Dans votre pratique, j'imagine que vous avez pu constater ça aussi, qu'il y a des gens qui ne lisent pas les contrats. Ils se fient à la personne avec laquelle ils discutent, qui leur inspire confiance, et après ça ils lui confient un patrimoine.
Alors, moi, j'aimerais vous entendre là-dessus. Comment procéder pour en arriver à avoir un cheminement complet qui fasse en sorte qu'en bout de piste la personne qui se sent lésée ait des recours à quelque part pour faire analyser son dossier dans un premier temps, pour déceler si effectivement il y a une fraude ou encore une mauvaise gestion? C'est différent, là, la fraude et la mauvaise gestion.
n
(10 h 40)
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M. Hamel (Pierre): Dans la documentation qu'on remet aux gens qui investissent dans les fonds communs de placement, il y a le prospectus. Le prospectus, en général c'est quelque chose qui a environ 100 pages. C'est ce qu'on donne en ce moment quand quelqu'un achète un fonds commun de placement. Dans nos sondages, on voit, quand on sonde les investisseurs, qu'il y a... C'est presque la totalité, c'est à peu près 97 %... enfin je ne souviens plus, à peu près la quasi-totalité ne lisent pas le prospectus. Par contre, dans un autre sondage, on trouve que 70 % des gens vont chercher au moins une information dans le prospectus. Donc...
Une voix: ...
M. Hamel (Pierre): Oui, bien c'était la question du sondage. C'était la question du sondage. Donc, au moins 70 % des gens vont chercher au moins une information dans le document, mais 97 % des gens ou 98 % disent ne pas le lire.
Comment on fait pour donner l'information pertinente et intéresser le lecteur à le lire? Et, dans les conclusions, justement on avait dit: Il faudrait trouver une manière de synthétiser cette information-là, qui est sur 100 pages, en deux pages, tout ce qui est pertinent, ce que l'investisseur veut le plus savoir. Et on se disait: Au moment de l'achat, c'est la meilleure manière de bien le protéger, c'est de lui dire ce qu'il achète en fait avec ce document-là simplifié. Et le prospectus, lui, peut exister mais ailleurs. Pas qu'on lui donne dans les mains, parce qu'il ne le lit pas. Alors, on lui dit, dans l'information des deux pages: Allez sur tel site Internet ou allez sur SEDAR, vous allez trouver le prospectus pour plus d'information. Il peut exister mais ailleurs. Mais, dans la relation avec le client, il faut lui simplifier ça au départ. Parce que, là, on lui donne de l'information, il signe tous les papiers qu'on lui met devant, parce que c'est comme ça, c'est comme ça, mais il y en a trop en fait, il est inondé. C'est dans ce sens-là où on disait: Il faudrait aller vers un deux pages. Alors ça, au point de départ, ça aide beaucoup. Bon, je sais qu'il y a des projets de réflexion là-dessus en ce moment.
M. Lelièvre: Entre deux pages et 100 pages, il doit y avoir une voie où on peut retrouver un document, hein, qui permette, là, au moins de comprendre, de comprendre la proposition qui est faite et de s'attendre à des résultats qui découlent de ce document-là, tu sais, avec l'information qui est transmise. Donc, deux pages, je trouve ça un peu résumé succinctement, sur 100 pages, parce qu'il y a des informations légales, hein, au niveau de la responsabilité, par exemple, de la personne qui fait ses placements et également la responsabilité aussi de l'entreprise qui va gérer ces placements-là. Donc, il faut trouver le moyen terme entre les deux, là, il faut en arriver à avoir une solution qui sécurise les gens et d'autre part qu'on ne se retrouve pas avec encore une fois, là, des: Bien, voyez, c'était marqué là. Vous ne l'avez pas vu? Oui?
M. Lapierre (Éric): Si je peux me permettre, la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, qui travaille avec les ACVM dans le cadre des informations aux points de vente, a engagé une personne spécialiste en communication, et l'information que la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario nous donne à travers les ACVM à cet égard-là, c'est que la personne qui est la spécialiste en communication dit que quelqu'un à qui on lui remet un document de plus deux ou trois pages ne le lira pas. Donc, il faut que ça tienne sur deux ou trois pages, sinon ils ne le liront pas. Donc, c'est un peu la prémisse que se sont donnée les ACVM dans leur cadre du travail, au niveau de l'information aux points de vente. C'est que ça doit tenir sur deux pages parce que sinon ça va faire comme un prospectus: on va le remettre, les gens vont le prendre, il va aller à la poubelle. Donc, on veut s'assurer que cette information-là est l'information pertinente mais que les gens en prennent connaissance.
M. Lelièvre: Une question rapidement, M. le Président.
Le Président (M. Hamad): ...on l'appelle le «two-pager», là, c'est connu, le «two-pager».
M. Lapierre (Éric): Non, mais ça, c'est... C'est ça, c'est le «two-pager». C'est ça, voilà.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre: Oui. Très rapidement, le profil des investisseurs, le niveau de scolarité, vous avez tout ça? Avez-vous les données là-dessus pour voir est-ce que ce sont des gens qui sont majoritairement universitaire ou collégial, formation professionnelle?
Mme Guimond (Martine): Vous parlez en général?
M. Lelièvre: Parce que dans le fond le 3 %, je ne sais pas c'est qui, mais le 97 % non plus.
M. Lapierre (Éric): Sur 660 milliards, il doit y avoir probablement un peu de tout le monde. Comme on disait, la démocratisation des fonds communs de placement... C'est un produit qui est vraiment disponible à peu près à tous les types d'investisseurs, donc je pense qu'on peut penser que pas mal tous les genres d'investisseurs...
Le Président (M. Hamad): ...niveau canadien, là.
M. Lapierre (Éric): Oui, oui, au niveau canadien. Oui, oui, oui.
Le Président (M. Hamad): Au Québec, c'est 91,4 milliards en 2006. Juste pour se mettre dans le contexte québécois.
M. Lapierre (Éric): Tout à fait, oui, c'est ça.
Mme Guimond (Martine): Le représentant reste là, par exemple, dans la relation, pour informer son client.
Le Président (M. Hamad): C'est ça.
Mme Guimond (Martine): Lui connaît bien son profil et lui doit s'assurer de la convenance du produit pour son client. Ça, ça reste là en plus du document de deux pages, là.
Le Président (M. Hamad): Mme la députée de Matane.
Mme Guimond (Martine): ...
Le Président (M. Hamad): Oui? Vous avez terminé?
Mme Guimond (Martine): Oui.
Le Président (M. Hamad): Oui? O.K. Mme la députée de Matane.
Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Ma question concerne les coûts relatifs à une protection des épargnants en regard avec les risques que vous avez soulevés tout à l'heure. Nous avons rencontré d'autres groupes qui nous ont parlé notamment d'indicateurs qui devraient être mentionnés soit dans une loi ou dans un règlement, d'indicateurs que le vérificateur devrait s'assurer du respect ou non lors de sa vérification et que la loi exigerait ? présumons que ce soit une loi qui l'établisse ? de sorte qu'en fin d'année chaque vérificateur de firme externe doit subir une vérification, par exemple de l'Ordre des comptables agréés, l'Ordre des CGA, et que, lors de ces vérifications, nous procéderions ou l'ordre procéderait à une assurance, là, à une vérification diligente leur permettant de s'assurer que les vérificateurs, au niveau des fonds communs de placement notamment, ont suivi et se sont assurés du respect de la vérification de ces indicateurs. Est-ce que vous croyez que cette formule, qui pourrait être reconnue dans la loi, serait une formule qui augmenterait de façon considérable les coûts reliés à la protection des épargnants? Et, si oui, pourquoi?
M. Hamel (Pierre): L'idée me plaît. Je n'y avais jamais pensé, mais instinctivement je vous dirais: L'idée est plaisante. Et c'est vrai que ça ne m'apparaît pas disproportionné, en plus d'instaurer... Ça répond peut-être un peu plus vers... Je trouve ça intéressant, conceptuellement. Ça ne devrait pas être très cher, et peut-être ça va ajouter un degré de confort intéressant. Ce n'est pas mauvais, cette idée-là. Je l'aime bien, je l'aime bien. Je ne sais pas, toi, si tu veux compléter ou pas, là?
M. Lapierre (Éric): Bien, je ne suis pas sûr que je comprends. Si j'ai bien compris...
M. Hamel (Pierre): C'est l'Ordre des comptables qui vérifierait les bureaux de vérification.
M. Lapierre (Éric): ...l'Ordre des comptables ferait une vérification.
Mme Charest (Matane): Lorsqu'un expert ? on parlera expert-comptable vérificateur, soit CA, CGA ou autre, là ? lorsque l'expert-comptable effectue une vérification chez un fonds de placement, par exemple, il devrait, dans le cadre de sa vérification, comme pour tous autres éléments, là, qui doivent faire l'objet d'une vérification diligente, s'assurer que certains indicateurs de fraude ont été vérifiés, de manière à ce que, si véritablement un de ces indicateurs existe, qu'il en avise soit l'Autorité des marchés financiers ou soit qu'il en avise les actionnaires et que, dans le cas d'un non-respect, de rechercher davantage si l'indicateur est valide ou non, que l'expert se récuse ou se retire du dossier, de manière à ce qu'on soit capable, de façon préventive, de réduire les risques de fraude. On ne les éliminera pas, bien entendu. Et une double vérification, parce que l'Ordre des comptables ou l'Ordre des CGA effectue à chaque année des vérifications auprès de la plupart de ses membres, et donc s'assurerait du respect de la vérification de ces indicateurs. Et il y a déjà un groupe d'étude qui a été mis en place. On a parlé qu'il y avait eu certains indicateurs d'identifiés.
Ma deuxième question serait: Est-ce que le marché serait prêt à travailler, ou à identifier, ou à corroborer ces indicateurs-là comme étant des indicateurs qui permettent véritablement de prévenir de la meilleure façon la fraude qui pourrait survenir?
M. Hamel (Pierre): Ça, je peux vous rassurer sur la pleine collaboration de l'industrie. C'est dans notre intérêt d'aider. On va être là pour répondre aux questions et aider.
Il y a déjà un questionnaire sur la fraude, que les vérificateurs font avec la direction des entreprises de fonds, mais, derrière... Moi, ce que j'aime de votre idée, c'est derrière la compagnie de vérification, avec l'Ordre des comptables. Et ça, ce lien-là, je le trouve intéressant. S'il vous plaît, testez-le avec les autres groupes qui passent ici. La question est très intéressante. Je la trouve séduisante, l'idée.
Mme Charest (Matane): Merci, mais l'idée...
M. Hamel (Pierre):
«Séduisante», est-ce que ce n'est pas un beau mot?
Mme Charest (Matane): L'idée n'est pas de... L'idée, ce sont des groupes qui nous ont fait des représentations au préalable...
M. Hamel (Pierre): Je la trouve...
Mme Charest (Matane): ...et je trouvais la formule intéressante.
M. Lapierre (Éric): Je trouve ça intéressant parce que je pense que le coût ne serait pas couvert par les investisseurs.
M. Hamel (Pierre): Et il y aurait en plus...
M. Lapierre (Éric): Ce serait un coût que les firmes de comptables devraient couvrir probablement par leurs cotisations à leur ordre professionnel.
M. Hamel (Pierre): Et d'autant plus aussi, si on pense à un scandale dont on parle souvent ici, au Québec, où le vérificateur a également acheté de la firme de fonds sa propre maison, où les bureaux étaient... Ce que je veux dire, c'est qu'avec un ordre professionnel qui passe derrière ça ressortirait, tout ça. J'aime beaucoup l'idée.
Mme Charest (Matane): Elle n'est pas de moi.
M. Hamel (Pierre): On ne l'a pas étudiée, en passant, votre idée, là, mais elle est... Pour moi, c'est une découverte aujourd'hui. Je l'aime.
Le Président (M. Hamad): La facture va aller chez vous?
M. Hamel (Pierre): Bien là, c'est sûr qu'il y a toujours des coûts.
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(10 h 50)
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Mme Charest (Matane): L'idée n'est pas de moi, M. le Président, elle est des gens qui nous ont...
Le Président (M. Hamad): Elle est fiscaliste de KPMG, ça fait qu'elle est habituée de «biller» après. Elle va envoyer le «bill» après.
M. Hamel (Pierre): Ah! Une fiscaliste de KPMG. C'est comme ça qu'elle a des bonnes idées.
Le Président (M. Hamad): O.K. Y a-t-il d'autres questions de ce côté-là? Non? On va aller à Mme la députée de Mirabel, puis on revient après à Marguerite-D'Youville. Mme la députée de Mirabel.
Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, merci pour la présentation de votre mémoire et félicitations pour le contenu. C'est très, très intéressant. À mon tour, j'aimerais vous parler du secret professionnel, tout comme mes collègues de l'opposition en ont parlé tantôt. Vous savez, l'Autorité des marchés financiers cherche à mettre en place surtout des solutions pertinentes pour que ce soit vraiment efficace. Le problème, c'est qu'à partir du moment qu'on cherche à protéger ces informations-là bien il y a un ralentissement, et tout ça empêche, dans un sens, l'Autorité d'intervenir.
Vous avez mentionné dans vos recommandations, là, également, la page 34, vous parlez comme suit: «Chaque profession possède des responsabilités et des obligations qui visent principalement l'encadrement de ses professionnels.» Moi, j'aimerais que ce soit clair, parce que, nous, on a des recommandations à formuler, et puis c'est pour la protection du public. Alors, est-ce que vous vous opposez à un meilleur échange d'information entre l'AMF et les firmes de vérification comptable? Est-ce que vous êtes d'accord à ce qu'il y ait vraiment la levée du secret professionnel pour permettre la protection du public? J'aimerais ça que ce soit clair, votre position.
Et ma deuxième question va concerner les peines d'emprisonnement.
M. Hamel (Pierre): On est pour l'échange d'information, mais, pour le secret professionnel, malheureusement c'est difficile de répondre. C'est ça qui était notre réponse. Ça reste notre réponse parce qu'il y a des conséquences positives et négatives à tout ce qu'on se dit, là. Mais on est pour l'échange d'information. Mais le secret professionnel a lieu probablement d'être, également. C'est ce qu'on dit.
Mme Beaudoin: Et, concernant les peines d'emprisonnement, vous marquez, à la page 37: «D'un point de vue légal, comme l'objectif est que les peines [et] les sanctions soient plus importantes que les profits possibles, il faudrait revoir le Code criminel et la Loi sur les valeurs mobilières [du] Québec.» Moi, je voudrais vous poser les questions concernant... Vous parlez de dommages punitifs, mais, quand vous parlez, là, de la peine d'emprisonnement ou dommages punitifs, qu'est-ce que vous entendez? Et aussi, est-ce que vous trouvez que c'est insuffisant, le nombre et les fréquences des inspections faites par les autorités concernées?
M. Hamel (Pierre): Est-ce que je peux vous demander de répéter la question?
Mme Beaudoin: Oui.
M. Hamel (Pierre): Qu'est-ce qu'on pense de quoi, finalement?
Mme Beaudoin: Des dommages punitifs.
M. Hamel (Pierre): Des dommages punitifs?
Mme Beaudoin: Oui, parce que vous soulevez ça. Est-ce que vous voulez que les peines d'emprisonnement soient plus élevées?
M. Lapierre (Éric): Dommages punitifs, il faut faire attention. La Cour suprême encadre les dommages punitifs qui peuvent être accordés par les tribunaux. Les balises sont là. Je ne suis pas sûr qu'on peut nécessairement les outrepasser de façon... En tout cas, on a facilement... À de nombreuses reprises, des demandeurs ont tenté de faire changer les balises de la Cour suprême, et à plusieurs reprises la Cour suprême a dit aux demandeurs: On a mis des balises, elles ne sont pas là pour être changées. Donc, dommages punitifs, il faut faire attention, là, comment on veut les approcher. Pour ce que c'est des peines pénales au niveau de la Loi sur les valeurs mobilières, ça, ça peut être ajusté, mais, dommages punitifs au sens légal du dommage punitif, il faut faire attention.
Mme Beaudoin: Et j'aimerais avoir vos commentaires concernant la fréquence des inspections faites par les autorités compétentes.
M. Hamel (Pierre): Aussi souvent que nécessaire, mais ça ne devrait pas dépasser aux quatre ans. Je sais que je vous lance une idée comme ça, là, mais, aux quatre ans, ça m'apparaît un minimum quand tout va bien. Évidemment, ça prend des rapports réguliers, hein? On envoie régulièrement des rapports à l'AMF, puis évidemment, en cas de défaillance ou si on rate les dates limites, là, évidemment peut-être que ça pourrait accélérer. Mais c'est «aussi souvent que nécessaire», la réponse, sans jamais excéder quatre ans. Moi, je vous dirais que ce serait une bonne réponse.
Mme Beaudoin: Est-ce que vous avez des données concernant d'autres pays, comme les États-Unis, à ce sujet?
M. Hamel (Pierre): Moi, j'ai travaillé sur des projets américains et français. Aux États-Unis, du côté de l'assurance ? parce que là, c'est le côté de l'assurance plus, là-bas ? c'est aux quatre ans, systématique, à des dates fixées d'avance, un peu comme les élections américaines, là. Là-bas, c'est comme ça. En France, il n'y a pas de contrôle. Il y a des contrôles, pardon, mais c'est discrétionnaire. Ils décident quand ils veulent et puis ils viennent à leur rythme. Donc, ils le font... Et ils n'ont pas de maximum ou de minimum. Ça, c'est ce que j'ai vu dans les deux autres pays. Ici, il n'y a pas de règle. À ma connaissance, il n'y a pas de règle. Ils viennent quand ils croient justifié de venir ? enfin ils ont droit ? puis je ne crois pas qu'il y ait de règle minimum ou maximum ici, au Québec.
Mme Beaudoin: Merci.
Le Président (M. Hamad): On va aller de l'autre côté. Le député de Marguerite-D'Youville, après ça Chutes-de-la-Chaudière.
M. Moreau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue. Merci pour votre mémoire. Il est extrêmement précis. Je pense qu'il a ravi plusieurs des membres de la commission, dont celui qui vous parle.
Je voudrais vous amener sur quelques questions. Bien, j'ai compris que vous ne vouliez pas vous avancer beaucoup sur la question du secret professionnel. Je vais vous poser une question de nature plus philosophique, disons, ou éthique parce que vous émettez des opinions qui relèvent beaucoup de l'éthique, dans le mémoire que vous présentez. Selon vous, lorsqu'un vérificateur comptable exerce son mandat de vérification, au bénéfice de qui remplit-il ce mandat-là et à qui doit aller sa loyauté? Est-ce que c'est à l'entreprise qui est soumise à la vérification, aux investisseurs, aux créanciers ou aux actionnaires?
M. Hamel (Pierre): Il est en conflit d'intérêts, c'est ce que vous voulez dire? Tu veux répondre à celle-là?
Le Président (M. Hamad): Mme Guimond.
Mme Guimond (Martine): La question, je pense, est toute là: Qui est son vrai client?
M. Moreau: Qui est son vrai client?
Mme Guimond (Martine): C'est ça. Son obligation est envers qui?
M. Moreau: Alors, envers qui?
M. Hamel (Pierre): Le payeur, c'est le client.
M. Moreau: Vous avez bien saisi la question. Est-ce que vous avez une réponse?
M. Hamel (Pierre): Bon, le payeur, c'est le client, mais, dans l'Ordre professionnel des comptables, c'est au nom du public qu'ils le font. C'est une question d'ordre public.
M. Moreau: Non, je comprends, l'Ordre des comptables, comme tout ordre professionnel, le Barreau ? vous me dites que vous êtes entouré de deux avocats ? ont une mission de protection du public. Ça va. Lorsqu'un membre de cet ordre-là, qui, dans ce cas-là, est un comptable, alors soit un CGA, soit un CA, soit un CMA, effectue un mandat de vérification, à qui doit aller sa loyauté? À celui qui le paie ou à celui au bénéfice de qui il fournit l'information sur la base de laquelle le créancier continuera de vouloir être créancier de l'entreprise ou exercer ses garanties, l'investisseur qui décidera de retirer ses billes ou d'en mettre d'autres, ou le public en général?
M. Hamel (Pierre): Il ne faut pas être dupe, je pense que c'est celui qui paie qui... Ce n'est peut-être pas ce que vous voulez entendre, là, mais...
M. Moreau: Non, non, non, je veux entendre votre opinion.
M. Hamel (Pierre): Évidemment, le client, c'est celui qui paie. Et puis effectivement ça crée un lien privilégié, dans ce sens-là, et ça crée un conflit d'intérêts.
M. Moreau: Alors donc, si, pour prendre une entreprise, exemple Norbourg...
M. Hamel (Pierre): C'est un exemple au hasard, ça?
M. Moreau: ... ? un exemple au hasard ? vu que Norbourg paie le vérificateur, la loyauté est au conseil d'administration de Norbourg et non pas aux actionnaires, ou encore ? bien, dans ce cas-là, on a une confusion, là, assez importante ? envers le public, ou envers les investisseurs, ou ceux qui font confiance à ce qui est dit. Alors donc, pour vous, là, le lien de loyauté existe strictement avec celui qui paie?
M. Hamel (Pierre):
«Strictement», attention, attention! Ils ont l'ordre professionnel et l'intérêt public à mettre en oeuvre. C'est leur rôle. Mais celui qui paie, c'est le client, et ça crée effectivement des liens de client à fournisseur.
M. Moreau: Bon. Mais est-ce que vous estimez qu'un comptable doit avoir, à l'égard de celui qui paie, un lien d'indépendance? Exemple, je prends...
M. Hamel (Pierre): Ils le sont...
M. Moreau: Vous avez deux avocats qui vous accompagnent. Lorsqu'un avocat accepte un mandat, il conserve ses obligations professionnelles en vertu de son code de déontologie, en vertu de la Loi sur le Barreau et il conserve une indépendance. La même chose lorsqu'un évaluateur agit pour une municipalité et qu'il donne la valeur d'un bien, c'est la municipalité qui le paie, mais il émet son opinion propre à titre de professionnel. Et, en termes de professionnel, est-ce qu'il ne doit pas avoir une loyauté qui le distance du strict lien pécuniaire qui le relie à celui qui donne le mandat?
M. Hamel (Pierre): Bon, là, attention! La firme de vérification est obligatoirement indépendante, ça, c'est dans la loi, là, indépendante du fonds ou du gestionnaire. Et puis c'est le fonds qui paie le vérificateur externe. Donc, le client dans ce cas-là, c'est le fonds, hein, ce n'est pas le gestionnaire de fonds. Mais c'est le gestionnaire de fonds qui décide qu'il vérifie, là. Alors, il y a le triangle qui est là, là. Mais il est nécessairement indépendant. C'est obligatoire par la loi. C'est d'ailleurs le seul des six parties qui doit être obligatoirement... Bien là, il y a le comité d'examen, indépendant également, là.
M. Moreau: Et la raison de cette indépendance, au-delà du texte de la loi, si on examine l'esprit de la loi, c'est dans une perspective de protection du public.
M. Hamel (Pierre): Oui.
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(11 heures)
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M. Moreau: Alors, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que le législateur, tant dans le texte que dans l'esprit de la loi, a d'abord voulu privilégier la protection du public plutôt que le secret ou le lien qui doit exister entre les confidences qu'il a reçues comme professionnel et celui qui le paie?
M. Lapierre (Éric): Je pense, c'est-à-dire que, moi, j'irais mettre... pas un bémol, mais j'irais qualifier ce que vous dites. Je crois que l'obligation du vérificateur, dans ce cadre-là, est de rendre ses lettres d'examen... de vérification... Son devoir par rapport au public, c'est dans ce qu'il va mettre dans cette lettre-là, à savoir: Est-ce que je crois que ça a été bien fait ou mal fait? Son client reste celui qui l'engage, mais, lui, il n'a pas... le seul élément sur lequel il peut jouer, c'est de dire: Regarde, moi, j'ai fait mon travail; tu m'as engagé, puis je ne crois pas que ton examen comptable est concluant, je te donne une lettre d'émission qui n'est pas favorable. Son client pourrait dire: Bien, je ne suis pas d'accord, je veux que tu m'en donnes une favorable. Moi, je ne peux pas, dans ma protection du public, t'en donner une, parce que là je mentirais, je ne respecterais pas mon code d'éthique. C'est dans cette lettre-là, dans sa lettre d'émission, qui devient à ce moment-là cette protection du public en ne disant pas des faussetés.
M. Moreau: Bon, maintenant, si, dans l'exemple que vous donnez, l'exemple factuel que vous donnez, il ne peut pas... dans sa vérification, il se rend compte d'éléments qui le perturbent en tant que professionnel, est-ce qu'il ne devrait pas ? pour faire un peu de millage sur ce que vous suggérait ma collègue la députée de Matane ? agir comme «whistle-blower» et dire de façon publique, que ce soit à l'Autorité ou que ce soit par une procédure qui devienne publique, qu'il a des réserves, qu'il a constaté des éléments qui font en sorte qu'il y a un doute professionnel?
M. Hamel (Pierre): Il faut faire attention aux divulgations publiques, hein? Moi, je peux vous donner un exemple où ça a tourné à la catastrophe très rapidement. Ça s'est passé au Missouri, aux États-Unis, une compagnie d'assurance ? ça se passait dans l'assurance ? où justement ils n'arrivaient pas à respecter un... il fallait qu'ils fassent une divulgation auprès du commissaire de l'assurance, qui, lui, avait obligation par la loi de le rendre public, et, en le rendant public, les sorties de fonds sont arrivées par milliards, et soudainement une compagnie qui est en pleine santé, AAA, est devenue en état de faillite parce qu'ils n'arrivaient plus à respecter le rythme des rachats des polices par divulgation publique. Il faut faire très attention aux divulgations publiques.
M. Moreau: Une dernière question, et je continue sur la réponse que vous venez de me donner, avec l'exemple américain où l'autorité à qui la divulgation est faite a une obligation de rendre public.
M. Hamel (Pierre): Oui.
M. Moreau: Très bien. Au Québec, l'Autorité des marchés est soumise à la loi sur l'accès à l'information et à la protection des renseignements. Elle a l'obligation de protéger les renseignements qui lui sont donnés. Est-ce que, dans ce contexte-là, la question du «whistle-blower» à l'Autorité, qui, elle, doit protéger les renseignements jusqu'à ce qu'une enquête soit concluante, n'est pas une protection suffisante pour éviter le type de catastrophe auquel vous référez?
M. Hamel (Pierre): Oui, effectivement. Si on arrête à l'Autorité, le raisonnement du public, là...
M. Moreau: Oui.
M. Hamel (Pierre): ...déjà, je trouve ça plus attrayant. Puis ensuite...
M. Moreau: Est-ce que vous trouvez ça rassurant?
M. Hamel (Pierre): Oui.
M. Moreau: O.K.
M. Hamel (Pierre): Mais ensuite le fait de divulguer, je pense qu'il faut qu'il y ait un échange d'information. Vous touchez à des points sensibles, mais ça va dans ce sens-là.
M. Moreau: O.K. Merci.
Le Président (M. Hamad): M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: M. le Président. M. Hamel, tout à l'heure, dans votre introduction, vous avez indiqué que le marché avait repris, on va dire, de la vigueur cette année, et, en décembre, il y a eu de très bonnes ventes. Hier, nous avons reçu le Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires. Ils nous disaient qu'il y avait eu un sondage en 2006, puis, les détenteurs de fonds communs, il y avait 63 % des gens qui voulaient changer de produits pour s'en aller vers des produits plus sécuritaires. Ma question est bien simple: Le chiffre que vous avez sorti en introduction, est-ce que c'étaient les ventes nettes? Est-ce que vous avez... Est-ce que vous pouvez me rassurer, s'il y a eu un déplacement? Le 63 %, est-ce que les gens ont agi ou non, selon vous?
M. Hamel (Pierre): C'est vrai que les gens veulent de la sécurité. C'est une tendance lourde du marché, on le voit. Mais, sécurité, ça veut dire soit capital garanti ou soit une certaine protection dans des mécanismes derrière, ça ne veut pas dire privilégier un produit plus qu'un autre. Évidemment, le fonds commun de placement est un produit qui fluctue, par sa définition, fluctue avec les marchés. Certaines personnes aiment ça, certaines personnes aiment moins ça. Alors, à chacun son produit. En ce moment, il y a une tendance lourde pour aller vers les produits parallèles, les produits similaires mais qui ne sont pas des fonds communs de placement. Ça, vous avez raison, il y a ça également. Donc, l'industrie est en santé. Donc, ça développe les concurrents, donc c'est en santé, c'est ce que ça veut dire.
M. Picard: Oui, puis aussi, chaque investisseur, on définit un profil: sécuritaire, moyen ou on y va à pleine vapeur, là. Merci beaucoup.
M. Hamel (Pierre): Je vous en prie.
M. Picard: M. le Président, j'ai terminé.
Le Président (M. Hamad): Oui. Alors, Mme la députée de Mirabel.
Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. On a parlé tantôt de la difficulté pour l'investisseur de comprendre le produit, on a parlé d'un maximum de deux pages pour essayer de comprendre. Est-ce que vous pensez que le règlement 81-403, qui vise à simplifier l'information divulguée par le fonds commun de placement, là, est-ce que c'est suffisant pour améliorer la compréhension finalement des produits?
M. Hamel (Pierre): Je ne l'ai pas vu personnellement. Je sais que ça existe, mais je ne l'ai pas vu, je ne l'ai pas... Mais je pense que ça va dans le sens de la simplification, alors il y a certainement quelque chose à analyser là-dessus. Mais on ne l'a pas vu, je ne crois pas. Est-ce que ça a été divulgué au marché? Je ne crois pas, hein ? tu ne l'as pas vu, toi non plus? Donc, vous avez de l'information privilégiée; on ne l'a pas, celui-là, nous.
M. Lapierre (Éric): Ce que je peux vous dire, dans un sondage qu'on a fait en 2006, 83 % des gens qu'on a sondés, on leur a demandé s'ils étaient confortables à comprendre le fonds commun de placement qu'ils possédaient. 83 % des gens nous ont dit qu'ils étaient soit très confortables, confortables ou relativement confortables avec la compréhension du produit qu'ils possédaient.
Quand même, l'information est divulguée, que ce soit à travers le prospectus, que ce soit à travers un «two-pager», comme on disait tantôt, ou que ce soit à travers surtout l'information que leurs conseillers leur donnent. Il ne faut pas oublier: dans notre industrie, la relation privilégiée est entre le représentant et son client. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup d'information qui est donnée à ce niveau-là. Puis, quand on fait un sondage qui nous dit que 83 % des gens disent comprendre le produit qu'ils possèdent, je pense que l'information se rend quand même à ces gens-là. Donc, d'une façon ou d'une autre, cette information, elle se rend jusqu'à l'investisseur.
Mme Beaudoin: Vous dites, à la page 14 de votre mémoire: «Une autre défaillance relevée est la facilité avec laquelle les dirigeants ont pu établir des activités offshore sans avoir de comptes à rendre à quiconque.» J'aimerais avoir plus d'information sur le sujet. Et puis vous parlez, là, d'une certaine compréhension de la part des investisseurs, mais est-ce que ça peut arriver que certains investisseurs ne soient pas au courant de la pratique de certains dirigeants?
M. Hamel (Pierre): C'est possible et ça fait partie de la nébulosité du stratagème. C'est possible, ce que vous dites, oui.
Comment contrôler les activités offshore? Ça, c'est plus complexe, hein, il faut laisser une certaine liberté d'action. Mais il y a déjà des mécanismes prévus dans le Règlement 81-102, sur la dispersion des placements, hein ? toute la grosse section ? mais évidemment c'est au gestionnaire à s'assurer qu'il le respecte. Il n'y a rien de systématique, pas à ma connaissance tout au moins, il n'y a rien de systématique. Je vais vous donner un exemple. Une règle dit: On n'a pas le droit d'avoir plus que 10 % dans un même titre. Ça, ça fait partie de la 81-102, mais il n'y a personne qui le... bien je veux dire, le gérant de fonds est obligé de le vérifier, mais il n'y a personne d'autre, à ma connaissance, qui le vérifie. Le dépositaire ne regarde pas ça. Le fiduciaire, il faudrait qu'il ait l'information. Enfin, je ne sais pas, il faudrait voir comment...
Alors en pratique ce qui se produit, c'est qu'on a des dispositions prévues, mais, dans la mise en application, disons, on responsabilise le marché, on laisse le marché aller. Alors, si quelqu'un a des idées malveillantes, bien peut-être qu'ils peuvent profiter de ces situations-là. Alors, comment fait-on... En Europe, on utilise les dépositaires là-dedans, pour votre information, l'Europe continentale, là, j'exclus l'Angleterre là-dessus. En Europe, c'est les dépositaires qui ont la responsabilité de s'assurer que les règles de dispersion de la 81-102, ici, sont respectées. Mais, ici, il n'y a rien là-dessus, un dépositaire n'a aucune règle là-dessus.
Mme Beaudoin: Est-ce que c'est la même chose aux États-Unis ou dans d'autres provinces canadiennes?
M. Hamel (Pierre): Bon, au Canada... Aux États-Unis, là-dessus, je le sais moins, mais, j'imagine, c'est comme au Canada, il n'y a aucune règle. Le dépositaire, c'est comme votre compte de banque, leur seule responsabilité, c'est de garder votre compte de banque séparé des autres comptes de banque. Si vous faites un chèque, ils le respectent. Si vous le signez, même si ça n'a pas de sens, ils ne vous appelleront pas pour vous dire: Pourquoi avez-vous signé ça? Non. Ils ne regardent pas ça. Un dépositaire a la responsabilité de conserver le portefeuille de placement séparé des autres portefeuilles, c'est tout, là s'arrête leur responsabilité. Alors, si on dit: Donne-moi le titre ou donne-moi 10 millions, le dépositaire obéit sans... Il n'y a pas de règle ou de fiduciaire là-dessus, pas à ma connaissance.
Mme Beaudoin: Vous ne pensez pas qu'il y a des lacunes à ce sujet-là?
M. Hamel (Pierre): On l'a soulevé... L'idée, c'est qu'on le soulève sous forme de questions. Là, je vois, à la page 14, comme vous mentionnez, là: «Par exemple, peut-on conférer la responsabilité au dépositaire de s'assurer que les actifs sont liquides au moment de l'achat dans le portefeuille?» Bon. On donne des idées comme ça, là, mais ce n'est pas simple; enfin, moi, je ne vois pas de réponse simple là-dessus. Et ça, il faudrait avoir une réponse harmonisée, en passant, si vous rentrez dans un... il ne faudrait pas avoir des règles ici qu'on n'a pas à côté, parce que ça ne marcherait pas. Il faut que le portefeuille soit localisé au Canada, quelque part où il y a une autorité de contrôle que l'on connaît, puis ensuite il y a des règles de dispersion qu'on doit respecter.
Mme Beaudoin: Merci.
Le Président (M. Hamad): Alors, ça complète les questions. Merci beaucoup de vous être présentés ici, à l'Assemblée.
Je suspends les travaux quelques secondes.
(Suspension de la séance à 11 h 10)
(Reprise à 11 h 16)
Le Président (M. Hamad): Nous allons reprendre les travaux. Maintenant, nous avons les représentants de la firme Ogilvy Renault. Alors, bienvenue, et je vous demanderais de vous présenter et ainsi que votre collègue.
Ogilvy Renault
Mme Lefebvre (Hélène): Parfait. Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, je me présente, je suis Hélène Lefebvre, du cabinet Ogilvy Renault. Je suis associée sénior du cabinet, et je suis accompagnée de mon collègue, à qui je vais demander de se présenter.
M. Sylvestre (Michel G.): Merci. Michel Sylvestre, évidemment du même cabinet.
Mme Lefebvre (Hélène): Alors, on désire tout d'abord vous remercier de nous avoir donné l'opportunité de nous présenter devant vous aujourd'hui afin de vous faire part de certaines préoccupations qu'entretiennent nos clients suivant l'adoption du projet de loi n° 7, dont vous avez abondamment parlé durant les dernières heures et derniers jours. Nos clients sont six grands cabinets de comptables agréés qui offrent des services professionnels au Québec. Par ordre alphabétique: Ernst & Young, KPMG, PricewaterhouseCoopers, Raymond, Chabot, Grant, Thornton, RSM Richter et Samson Bélair Deloitte & Touche. Alors, ces cabinets regroupent la vaste majorité des vérificateurs de sociétés ouvertes au Québec.
Avant d'attaquer le vif de notre propos, je pensais qu'une certaine mise en contexte serait nécessaire pour que vous compreniez pourquoi on est devant vous aujourd'hui et dans quel contexte. Nous avions reçu, à l'été 2006, un mandat de la part des mêmes six cabinets afin de soumettre des représentations concernant le projet de loi n° 7, et ce projet de loi n° 7, comme vous le savez, permet à l'Ordre des comptables agréés de conclure des ententes avec le CCRC et l'AMF visant l'échange de renseignements concernant l'inspection, la discipline ou toute enquête qui sera faite par l'Ordre des comptables agréés. Ces ententes, comme vous le savez, vont pouvoir, dans la mesure requise pour leur mise en oeuvre, déroger aux lois et règlements qui s'appliquaient jusqu'alors à l'Ordre des comptables, qui devait garder l'information recueillie confidentielle.
La loi autorise également le comptable agréé à fournir des renseignements relatifs à ses activités professionnelles ou à ses clients aux organismes en question, soit le CCRC ou l'AMF, malgré ses obligations au secret professionnel auquel il était tenu jusque-là ? alors c'est nouveau ? et ce, dans la mesure prévue par l'entente, en fait ce qui sera prévu dans ces ententes qui demeurent à être négociées. En fait, la négociation, comme vous le savez, n'est pas encore complétée. Quant à l'entente avec le CCRC et avec l'AMF, les ententes devront être publiées 45 jours avant qu'elles ne soient soumises à l'approbation du gouvernement. Et, dans notre mémoire, nous avons évoqué certains points qui selon nous pourront être réglés dans le cadre des ententes, et on n'a pas l'intention d'en traiter aujourd'hui.
En fait, l'objectif que nous poursuivons et celui qui était élaboré dans la lettre que nous vous adressions, en fait au ministre de la Justice et au ministre des Finances, le 12 décembre dernier, était de porter à leur attention la préoccupation de nos clients, qui est un peu une préoccupation résiduelle au projet de loi n° 7, concernant la question de la divulgation à des tiers de l'information qui est recueillie, aux termes des ententes, par l'AMF, et non pas l'information donnée à l'AMF, mais qu'est-ce qui arrive avec l'information une fois qu'elle est entre les mains de l'AMF. C'est une question que les ententes... ou l'entente, plutôt, entre l'ordre et l'AMF ne pourra régler, et ce sujet s'inscrit dans la foulée des problématiques que la commission ici doit examiner, soit la question d'échange d'information. De là notre présence devant vous aujourd'hui, et c'est dans ce contexte-là que nous voulons en fait vous adresser la parole.
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(11 h 20)
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En fait, pour vous expliquer un petit peu la mécanique et notre préoccupation, la Loi sur les comptables agréés, telle qu'amendée par le projet de loi n° 7, prévoit que les renseignements qui vont être transmis par l'ordre ou directement obtenus du bureau de comptables vont bénéficier de la même confidentialité, une fois transmis à l'AMF ou au CCRC, que celle dont l'information bénéficie entre les mains de l'ordre. Autrement dit, l'ordre peut aller chez un comptable chercher de l'information, le comptable ne peut pas lui opposer le secret professionnel. L'ordre fait ses inspections, fait ses enquêtes, mais en contrepartie, dans le Code des professions, ces gens-là doivent prêter un serment de discrétion et doivent garder l'information confidentielle. Or, par la passé, l'ordre ne pouvait pas donner d'information à des tiers, pas plus que le comptable, qui était lié par le secret professionnel. Avec le projet de loi n° 7, la situation change. Alors, l'ordre va pouvoir donner des informations concernant les dossiers qu'elle a, les dossiers d'enquête et d'inspection, et échanger des informations avec le CCRC et l'AMF, dans la mesure évidemment de ce qui sera prévu dans les ententes qui doivent être négociées.
La difficulté ou la problématique qui se pose est plutôt en rapport avec un certain libellé qui a été gardé dans l'article 22.1, alinéa quatre, de la Loi sur les comptables agréés telle qu'elle a été amendée par le projet de loi n° 7. En fait, jusque-là, ça allait bien, c'est-à-dire que dans la loi on prévoit que l'organisme qui va recevoir l'information de l'ordre ou du bureau de comptables va devoir garder l'information confidentielle. Ça va pour le CCRC, autrement dit le CCRC vient chercher de l'information mais ne peut la transmettre à des tiers. Pas de problème. La difficulté, c'est que, dans le cas de l'AMF, la loi prévoit qu'il n'y aura rien dans la loi ou dans les ententes qui va restreindre les pouvoirs conférés à l'AMF en matière de communication de renseignements par une loi du Québec. Et c'est là que la problématique se situe, parce que l'AMF va donc se retrouver un peu la seule juge à savoir si elle divulgue ou non l'information qu'elle a entre ses mains et à qui. Et, comme on le verra, l'AMF ? mon collègue Me Sylvestre vous adressera la parole à ce sujet-là ? dispose de très grands pouvoirs à l'égard de la communication à des tiers de l'information qu'elle recueille.
Or, actuellement... avant l'arrivée du projet de loi n° 7 et des ententes qui vont intervenir, l'AMF n'était pas en position d'obtenir de l'information qui était détenue par les comptables agréés et qui était protégée par le secret professionnel. Le pouvoir que le législateur... que vous avez donné à l'AMF et à l'ordre de conclure des ententes est donc un pouvoir de nature exceptionnelle qui va permettre à l'AMF d'obtenir des informations couvertes par le secret professionnel, dans la mesure des ententes à intervenir avec l'ordre. Alors, il nous semble que, compte tenu que c'est un pouvoir de nature exceptionnelle d'obtenir de l'information qu'elle n'aurait pas pu obtenir par le biais de ses pouvoirs d'enquête ou qu'aucun autre organisme pourrait obtenir dans l'exercice de ses pouvoirs d'enquête, bien il faudrait que l'information, une fois qu'elle est entre les mains de l'AMF, soit protégée de façon à ce que le public utilisateur des services des comptables agréés et le bon citoyen corporatif ne s'en trouvent pas lésés et qu'ils ne retrouvent pas en fait ces informations sur la place publique.
En fait, il y a eu beaucoup de questions, je crois comprendre, concernant le secret professionnel, et je voudrais peut-être juste vous expliquer un peu la mécanique, juste pour que ce soit bien clair comment ça fonctionne. C'est la charte québécoise des droits et libertés, donc c'est le législateur qui, dans sa sagesse, a édicté cette obligation pour le professionnel de protéger la confidentialité des informations qu'il reçoit de son client. C'est la charte québécoise, qui doit être lue en relation avec le Code des professions, avec la Loi sur les comptables agréés et le Code de déontologie des comptables agréés, qui impose aux comptables pratiquant au Québec l'obligation de respecter cette confidentialité des informations et confidences reçues du client.
Le secret professionnel du comptable agréé, là, ce n'est pas une invention des comptables pour se mettre à l'abri de l'oeil inquisiteur des autorités, comme certains se plaisent à le laisser entendre. C'est un principe qui a été élevé au rang de droit fondamental par le législateur dans la charte, avec lequel le comptable doit composer à tous les jours lorsqu'il reçoit des informations ou des confidences de ses clients. À l'heure actuelle, dans l'état des choses, si le comptable parle à un tiers, y incluant une autorité réglementaire, sans y être autorisé par la loi spécifiquement ou par son client, il lui transmet des informations qui sont couvertes par le secret, il viole son obligation et il est passible non seulement d'être poursuivi au civil par son client pour avoir violé son obligation au secret, mais il est passible de sanctions disciplinaires pour avoir violé ses obligations en vertu de son code de déontologie. Le secret, ce n'est pas celui du comptable, c'est celui de son client, et c'est lui qui est maître de décider si, oui ou non, il va relever son comptable de son obligation au secret.
Ça va même plus loin que ça. Le législateur avait prévu, dans sa sagesse, dans la charte, que la cour doit assurer d'office le respect du secret. Qu'est-ce que ça veut dire en pratique? Un comptable ou un autre professionnel va témoigner à la cour et s'apprête à révéler des choses qui sont confidentielles, la cour devrait arrêter le professionnel dans son témoignage et dire: Maître, avez-vous... ou, monsieur le comptable, avez-vous considéré que ces informations-là peuvent être protégées par le secret? Or, c'est le législateur qui a prévu ces obligations-là. Elles n'ont pas été demandées ni édictées par les comptables, mais ça se retrouve dans la charte, et on doit composer avec ces obligations. En fait, je pense que tous nos clients veulent que ce soit clair que personne parmi les personnes que nous représentons ne désire protéger les voleurs ou les fraudeurs. En fait, je pense que personne ne veut s'associer à de telles personnes, et, quand malheureusement cette chose-là arrive, c'est une problématique qui est très sérieuse.
Alors, ceci dit, ils sont soucieux de voir à la protection des informations confidentielles qui leur sont confiées par leurs clients, qui sont des bons citoyens corporatifs, et qui forment l'ensemble de la clientèle des bureaux de comptables, et qui s'acquittent de bonne foi de leurs obligations, et qui risquent de voir leurs informations circuler librement dans le public. Pour vous donner une idée, je pense que je vous référerai, pour plus de détails, aux pages 3 et 4 de notre mémoire qui a été circulé, mais on a tenté de dresser une liste du type d'information qu'on peut trouver dans les dossiers des comptables.
Il y a un principe qui doit être compris à cet égard-là, c'est que ces dossiers-là, ce ne sont pas des panacées, c'est des dossiers qui concernent des informations qui viennent du client. Ce n'est pas des informations qu'un comptable obtient à gauche et à droite, c'est des informations que le client donne et que le comptable vérifie. Alors, les autorités peuvent avoir accès chez le client, par le biais d'inspections ou d'enquêtes, à ces mêmes informations que le comptable détient. S'il y a une liste d'inventaire, bien c'est le client qui lui a donnée, le client doit l'avoir aussi. Et, quand l'autorité s'adresse directement au client, il n'y a pas de problème de secret professionnel évidemment, parce que le client, lui, il doit donner l'information à l'autorité. Alors, la chose la plus simple est toujours de s'adresser, comme dans le cas des sociétés ouvertes, à l'émetteur pour demander l'information, parce que l'émetteur doit la donner. Le dossier du comptable, lui, signale plutôt ce qu'il a vu, des documents qu'il a vus chez le client, par exemple, et ne conserve pas de copie de tous les documents qu'il a vus chez le client. Il ne conserve pas copie des chèques, des factures, de tous les détails. Il va avoir certains documents importants, mais la documentation se trouve chez le client.
Ceci dit, les informations qui sont contenues dans le dossier du vérificateur peuvent être sensibles et concerner, comme nous l'avons dit dans notre mémoire, des questions aussi délicates que les stratégies d'affaires de l'entreprise, des litiges potentiels, des brevets, des détails concernant les ventes, des listes de clients, l'état des démarches de recherche et développement, des informations concernant des stratégies de marketing, concernant des transactions d'affaires projetées, et il y a énormément d'informations sensibles, pas pour les fraudes, mais pour le client, et ce sont des informations, si elles devenaient publiques, qui pourraient être très importantes et qui pourraient même avoir un impact important sur le cours d'un titre, si elles étaient révélées avant que ce soit nécessaire de le faire. Alors, c'est pour ça, quand on dit: Ce n'est pas tout ce qu'il y a dans le dossier d'un comptable qui a une pertinence pour les fins d'examiner si on peut être en présence d'une fraude ou pas, et ces dossiers-là contiennent une multitude d'informations concernant le client que le client a transmises à ses vérificateurs.
Dans le cas d'individus, la situation actuelle est susceptible de s'appliquer à eux également, puisque l'AMF a des pouvoirs qui débordent les sociétés ouvertes aux termes de plusieurs autres lois que la Loi sur les valeurs mobilières. On peut penser aux intermédiaires de marché. Dans l'état actuel des choses, il n'y a rien qui empêcherait l'AMF d'obtenir des informations concernant des individus qui sont dans les dossiers des comptables. Alors, on peut penser que, dans ce cas-là, les informations des individus, si elles devaient circuler à l'extérieur de l'AMF, il pourrait y avoir certaines difficultés qui pourraient se poser.
À cet égard-là, je pense que vous devez vous interroger quant au droit d'accès de l'AMF et déterminer ce qu'on veut faire. Est-ce qu'on veut limiter des droits d'accès dans le cas des fonds communs de placement, dans le cas des sociétés ouvertes en général, dans le cas des sociétés privées ou dans le cas des individus? Je pense qu'ici ce qu'on est en train d'examiner, c'est qu'est-ce qu'on fait avec l'épargne des Québécois. Mais je crains qu'on veuille en fait donner un accès beaucoup plus large que la protection des épargnants par des dispositions de loi, de règlement ou même dans les ententes futures qui pourront permettre des accès à des dossiers concernant d'autres entités que des fonds communs de placement ou des sociétés ouvertes. Alors, il faut s'interroger à savoir quelle est l'ampleur de ces accès ou de ces... de ces accès qu'on veut donner.
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(11 h 30)
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Dans ce contexte que je viens de vous décrire, il faut s'assurer que le caveat qui a été inséré à l'article 22.1, alinéa quatre, de la Loi sur les comptables agréés, qui prévoit que rien dans l'entente ne pourra restreindre les pouvoirs conférés à l'AMF en matière de communication de renseignements par une loi du Québec ne puisse permettre à l'AMF de communiquer des informations qu'elle a recueillies, qui étaient couvertes par le secret professionnel, qui sont entre les mains de l'ordre ou des bureaux de comptables, et qu'elle puisse communiquer ça sans restriction à des tiers. Je pense qu'il faut se pencher sur cette question-là quand vous allez... si vous adoptez des réformes, à savoir que c'est beau de donner des droits d'accès à l'AMF, c'est beau de donner des informations à l'AMF, mais il faut s'assurer que ces informations-là ne se retrouveront pas dans le public éventuellement, au préjudice justement des mêmes investisseurs ou des épargnants que vous voulez protéger.
Pour ma part, je vais céder la parole à mon collègue Me Sylvestre, mais je vais vous laisser avec l'assurance que nos clients entendent collaborer avec l'AMF dans la mesure des ententes qui vont intervenir avec l'ordre. Leurs observations, aujourd'hui, visent à éviter tout dérapage futur dans l'éventualité où de l'information confidentielle qui leur aurait été confiée par des clients de bonne foi circulerait publiquement à l'extérieur de l'AMF. Ceci aurait pour effet de miner considérablement la confiance des clients envers la profession et risquerait d'avoir l'effet pervers de limiter la portée des échanges entre le client et le comptable agréé. Or, ceci n'est certes pas dans l'intérêt des épargnants que vous voulez protéger, qui doivent pouvoir se fier sur une vérification de qualité effectuée dans un climat de transparence et de confiance entre le comptable et son client.
Si nous ne sommes pas prudents en matière d'échange d'information, il existe un risque réel que les sociétés ouvertes, au Québec, décident simplement de s'assujettir à d'autres juridictions qui ne mettront pas en péril leurs informations, et ça, c'est une chose que je pense que tout le monde ici veut éviter. Alors, je vais céder la parole à mon collègue.
Le Président (M. Hamad): Là, vous avez... en fait, vous avez 15 minutes, vous venez de le prendre, mais on va vous permettre quand même... vous donner quelque temps, parce que c'était 15 minutes pour l'ensemble.
Mme Lefebvre (Hélène): Je n'ai pas réalisé le passage du temps, vous auriez dû me...
Le Président (M. Hamad): Oui, alors... et vous le savez, je pense, hein, dans le...
M. Sylvestre (Michel G.): Oui, oui, on avait...
Mme Lefebvre (Hélène): Oui, on le savait, mais ce sera bref.
Le Président (M. Hamad): O.K., on va vous donner quand même...
M. Sylvestre (Michel G.): O.K. En ce qui me concerne, je vais essayer de garder ça très court en raison des contraintes de temps. On a déjà exposé nos préoccupations dans notre mémoire. Je vais diviser ma présentation en trois parties. La première va concerner les restrictions au niveau de la vie privée et au niveau des fouilles et des perquisitions abusives. La deuxième, je vais entrer dans le vif du sujet qui nous préoccupe. Et la troisième, certaines observations ou peut-être suggestions ou recommandations.
Je n'ai pas l'intention de m'étendre beaucoup sur la première partie, c'est déjà dans notre mémoire, ça ne concerne pas vraiment...
Le Président (M. Hamad): Je vais vous interrompre, là, juste pour que vous compreniez bien, je vous donne cinq minutes.
M. Sylvestre (Michel G.): Très bien.
Le Président (M. Hamad): Et le truc, là, pour vous aider: ce que vous n'avez pas le temps de dire, pendant les questions, vous pouvez amener vos idées pareil. Parce qu'on a dit: 15 minutes.
M. Sylvestre (Michel G.): Écoutez, je vais laisser mes notes, là. La préoccupation n'est pas l'AMF. La préoccupation n'est pas davantage l'Ordre des comptables agréés, qui a toujours eu accès à ces informations-là. La seule préoccupation, c'est ce qui se passe après. Il n'y a pas de restrictions suffisamment contraignantes en ce moment dans les lois telles qu'elles sont pour que les clients puissent en toute confiance confier des informations de nature très sensible qui risquent et qui vont se retrouver dans les mains de l'AMF et qui pourront ensuite circuler sans contrôle suffisant. Notre position, c'est ça.
Le Président (M. Hamad): Continuez, continuez, vous avez cinq minutes.
M. Sylvestre (Michel G.): Non, non, je comprends, là, mais notre position, essentiellement c'est ça. Nos recommandations, c'est d'appliquer un mécanisme qui existe déjà dans un article de la Loi sur les valeurs mobilières, c'est que l'information ne devrait pas sortir de l'AMF sans la permission d'un juge de la Cour du Québec. C'est tout.
Mme Lefebvre (Hélène): Ou le consentement du client.
M. Sylvestre (Michel G.): Ou le consentement du client, évidemment, qui est obtenu dans 99 % des cas.
Le Président (M. Hamad): Je pense que votre message est clair dans les deux cas. O.K., on va aller à la période des questions. Il y avait le député de Marguerite-D'Youville. On fait l'alternance, O.K.? J'ai reconnu le député de Gaspé, la députée de Mirabel et la députée de Matane.
M. Moreau: Me Lefebvre, Me Sylvestre, bienvenue. Bon, on avait hâte de vous voir parce que... On a lu votre mémoire avec beaucoup d'attention. Et vous avez fait, Me Lefebvre, une mise en contexte qui est excellente, lorsque l'on considère l'approche que l'avocat doit avoir dans son mandat avec ses clients, c'est-à-dire, dans ce cas-là, les six cabinets que vous représentez et que vous représentez fort bien.
Je vais vous faire, moi aussi, une mise en état de situation, mais non pas de la part d'un avocat, mais de la part d'un législateur qui est membre d'une commission et qui est confronté à ce que l'opinion publique largement diffusée nous impose comme réalité. Dans le dossier Norbourg, hein, ça a été...
Mme Lefebvre (Hélène): Je dois vous faire une mise en garde relativement à ça: on ne veut pas discuter de spécificité dans aucun des dossiers...
M. Moreau: Non, non, non.
Mme Lefebvre (Hélène): ...vous allez comprendre, et je vais vous le dire, nous sommes procureurs dans le dossier Norbourg, et je suis ici pour représenter six cabinets de comptables. Alors, je n'irai pas commenter quoi que ce soit relativement à...
M. Moreau: Mais je ne vous demande pas de le commenter, je vous fais une mise en situation. Dans le dossier Norbourg, après que le scandale a éclaté, la firme de comptables KPMG, qui est une de celles qui est représentée, a fait apposer des scellés pour empêcher aux enquêteurs de l'Autorité d'avoir accès à trois boîtes de documents cruciaux concernant des informations sur les états financiers de 2003, 2004 et 2005 des fonds Évolution de Norbourg. KPMG invoquait le secret professionnel des comptables pour interdire l'accès à ces documents, alors qu'un administrateur provisoire avait été nommé pour la protection des investisseurs. Il en est de même de la firme PricewaterhouseCoopers concernant des dossiers de sociétés faisant partie du groupe Norbourg, même si ces dernières étaient en faillite, avec le résultat que l'on connaît, c'est-à-dire qu'il y a de nombreux investisseurs dans ces fonds-là qui ont, dans certains cas, mis toutes leurs épargnes en vue de leur retraite et qui se retrouvent devant zéro puis une barre.
Ça, c'est une mise en contexte social, que je ne vous demande pas de commenter mais qui interpelle grandement le législateur, qui, lui, a à se poser la question... puis d'ailleurs il y a une question sémantique, là, à savoir: Est-ce que le véritable problème, c'est le secret professionnel ou si ce n'est pas autre chose? Parce qu'en définitive ce qui nous intéresse ici, à la commission, c'est de voir, puis j'ai bien aimé la remarque finale de Me Sylvestre, là, je vais vous permettre d'élaborer parce que vous avez eu peu de temps pour le faire, qui est de dire: L'Autorité des marchés financiers, ce n'est pas le gouvernement, c'est un mécanisme régulateur qui a des pouvoirs considérables qui lui sont donnés par la loi, qui a pour mission de protéger le public et qui n'a certainement pas comme objectif d'exposer à des tiers en général, de diffuser largement une information qui lui est transmise dans le contexte de ses pouvoirs d'enquête. Et là il y a des gens qui nous écoutent. Parmi ceux-là, il y en a qui ont été floués largement et qui se disent: Écoutez, est-ce qu'on pourrait sortir ? et, vous savez, je vous le dis en toute amitié, je suis moi-même avocat; est-ce qu'on pourrait sortir ? les avocasseries du dossier et faire en sorte que l'information puisse circuler pour que le public soit protégé et que l'AMF puisse remplir le mandat qui lui est confié de façon efficace?
Vous avez indiqué que le secret professionnel prenait son origine dans la charte et que c'était la sagesse du législateur et non pas le caprice des comptables. Vous avez parfaitement raison. Mais, dans sa sagesse, le législateur, le secret professionnel, il l'a inséré à l'article 9. Mais, à l'article 9.1, il a mis une balise très importante que l'on doit considérer dans l'exercice de ce pouvoir-là, qui dit ceci... parce que le secret professionnel, c'est une liberté. L'article 9 dit:
«Chacun a droit au respect du secret professionnel.
«Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ? le client ? ou par une disposition expresse de la loi.
«Le tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel.» C'est ce que vous avez mentionné.
9.1 dit ceci: «Les libertés et droits fondamentaux ? dont le secret professionnel ? s'exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de l'ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec.»
Parmi les citoyens du Québec, on a des gens qui, parce que le secret professionnel a été invoqué ? à tort ou à raison, on ne fera pas le débat juridique, là, je ne vous demande pas ça ? se retrouvent dans une situation où ils disent: Écoutez, l'AMF a eu les deux mains attachées.
Mme Lefebvre (Hélène): Je ne veux pas vous interrompre...
M. Moreau: Je termine puis je vais vous laisser réagir là-dessus.
Mme Lefebvre (Hélène): Parfait.
n(11 h 40)nM. Moreau: Alors, nous, on recherche des solutions. Vous êtes des avocats d'un cabinet éminent et vous vous êtes penchés sur la question. Ce que l'on veut, c'est, un: quelles sont vos suggestions pour que les renseignements circulent rapidement entre les comptables, l'Ordre des comptables? Parce que l'article 22.1, là, la loi n° 7 a des limites importantes, là, elle ne couvre pas toutes les situations. Alors, quelles sont vos suggestions pour que l'information circule librement, d'une part, et, d'autre part, pour que l'AMF puisse agir rapidement?
J'ai compris des recommandations que vous aviez faites en dernier que vous n'aviez qu'une préoccupation, qu'une balise à insérer, qui serait l'étape subséquente, lorsque l'AMF estime, dans son enquête, qu'il y a eu un problème, et que là, avant d'aller à l'étape suivante et d'envoyer l'information à la Sûreté du Québec ou à n'importe quel autre corps policier ou autorité, on requière l'autorisation d'un juge de la Cour du Québec.
Alors, un, quelles sont vos suggestions? Deux, est-ce que ce recours-là ou cette balise-là que vous souhaitez voir imposé n'aura pas pour effet d'amener des délais qui vont rendre l'action de l'AMF obsolète?
Mme Lefebvre (Hélène): Il y a beaucoup de choses dans votre question. Je vais commencer par dire que la loi est la loi et qu'on doit vivre avec ce qui est dans la loi actuellement et que l'existence secrète...
M. Moreau: À moins qu'elle change.
Mme Lefebvre (Hélène): Exactement. Juste pour... Je ne veux pas revenir sur les dossiers spécifiques, comme je vous l'ai indiqué, mais, pour le passé, je pense qu'il faut comprendre que les obligations sont là et que les comptables sont passibles non seulement de recours civils, mais de sanctions disciplinaires, s'il y a une violation de leurs obligations, et que, dans la mesure où ils ne sont pas relevés, à tort ou à raison, par leurs clients ou que la loi ne leur permet pas de donner l'information, ils ont les mains liées. Alors, ceci est pour le passé.
Pour le futur, je pense sincèrement qu'avec le projet de loi n° 7 et la possibilité pour l'AMF d'aller chercher des informations soit directement à l'Ordre des comptables ou soit auprès des cabinets de comptables, je pense que la solution, vous l'avez déjà, elle est là. Il faudra voir dans les ententes les paramètres à l'intérieur desquels ces échanges-là vont pouvoir survenir, et vous aurez sûrement votre mot à dire au niveau des ententes. Mais déjà, par rapport à la situation qui existait avant l'été dernier, il y a une amélioration considérable. Et ce que vous recherchez... Ce que je crois comprendre ici, c'est que ce que vous recherchez, c'est une possibilité pour l'AMF d'aller chercher de l'information et c'est une possibilité pour l'AMF de savoir que, s'il y a un problème, elle en sera avisée. Bon.
Sur ce dernier sujet là, je dois vous dire qu'il faut trouver une balance entre le droit du public à la protection de ses informations et de ses confidences et la protection des épargnants. Et ça, c'est votre tâche, puis elle n'est pas facile. Puis, s'il y avait une solution idéale, on ne serait pas ici ou vous l'auriez déjà trouvée.
Or, je voudrais revenir... Moi, j'ai entendu des bouts, hier, de certaines représentations sur Internet, là, ce n'était pas... en fait je n'ai pas écouté l'entièreté de ce qui a été dit, mais il y a une question qui, je pense, mérite d'être clarifiée: Qu'est-ce qui arrive dans le cabinet d'un comptable lorsque le comptable regarde un dossier ou a une conversation avec un client et qui a des soupçons, il y a quelque chose qui n'est pas clair? Il faut comprendre que le comptable, c'est un vérificateur. Or, il n'a pas la possibilité de forcer son client à lui permettre de faire enquête. C'est simple. Par contre, c'est quoi, ses obligations?
Il y a le manuel de l'ICCA, la bible des comptables, qui prévoit que, dans des cas similaires... Et je ne suis pas comptable, là, je vais vous résumer ça dans des mots d'avocat. Le manuel de l'ICCA prévoit que, dans ces cas-là, le comptable doit aller au niveau de direction approprié. Si la fraude se situe au niveau de, bon, l'employé, bien on va aller au superviseur de l'employé puis on va monter dans l'échelle jusqu'à temps qu'on trouve quelqu'un qui comprend ou qui veut agir sur le problème. Dans le contexte des sociétés ouvertes et des comités de vérification indépendants du conseil d'administration et qui doivent être alertés en présence de situations où il y a potentiellement un risque de fraude... Parce qu'il faut bien comprendre, quand on parle d'obligation de «whistle-blowing», le comptable tout seul dans son bureau avec l'information, là, puis qui ne peut pas faire enquête puis forcer le client à faire des entrevues, tout le monde concerné, puis fouiller les documents dans le contexte de son mandat de vérification, lui, là, il ne peut pas se mettre juge et partie, à savoir s'il est réellement en face d'une situation où il existe une vraie fraude ou si c'est un problème, ou si c'est quelque chose qui est de la négligence. Alors, il est pris un peu tout seul avec ça. Alors, c'est quoi que le manuel lui dit? Bien, tu vas aller, dans la hiérarchie, soulever la question. Et normalement, dans la plupart des cas, ce qui va se passer, c'est qu'il y a quelqu'un qui va donner un mandat d'enquête, on va aller au fond des questions, on va congédier les gens qui sont aux prises avec la... à l'origine de la situation, puis le problème va se régler, et on va tenir compte des détournements éventuellement, quand les états financiers vont... le rapport au sujet des états financiers va être fait.
Qu'est-ce qui arrive dans une situation où, une fois qu'on a des doutes ? parce que ça ne peut qu'être des doutes quand on n'a pas fait d'enquête ? et puis qu'il n'y a personne qui réagit? Bien, à ce moment-là, ce que le manuel, encore une autre fois, dit, c'est que le vérificateur peut démissionner. Il peut choisir de démissionner. Puis, un vérificateur qui se respecte, dans une situation comme celle-là, ne voudra pas émettre un rapport sur des états financiers alors qu'il n'est pas allé au bout des problèmes qu'il soupçonne. Alors, qu'est-ce qui arrive en cas de démission? Puis ça, c'est quelque chose qu'il est important, je pense, pour la commission de comprendre, c'est que, dans le cas des sociétés ouvertes, y compris le cas des fonds communs de placement, l'émetteur doit aviser l'AMF du fait qu'il y a un changement de vérificateur et que son vérificateur s'est retiré. Qu'est-ce qui arrive si l'émetteur ne le fait pas ou le fonds ne le fait pas? À ce moment-là, dans le règlement, et je pourrais vous donner le numéro que...
M. Sylvestre (Michel G.): 51-102.
Mme Lefebvre (Hélène): C'est 51-102. Dans le règlement, il est prévu que le vérificateur peut aviser... bien en fait doit aviser l'AMF du fait que l'émetteur ne s'est pas acquitté de son obligation d'aviser l'AMF d'un changement de vérificateur.
Alors, quand on disait, hier, «le drapeau rouge», j'ai entendu quelqu'un parler d'un drapeau rouge... c'est vous?
Une voix: Oui.
Mme Lefebvre (Hélène): Parfait! Alors, je pense que le drapeau rouge, il est là, et sans que le comptable ait besoin de violer son secret professionnel pour des motifs qui, à ce moment-là... il n'est même pas allé au bout de son enquête, il ne sait même pas s'il y a vraiment une fraude, mais il n'est pas confortable. À ce moment-là, il démissionne, puis le fait qu'il y ait une démission, ça met le drapeau rouge, et là, à ce moment-là, l'AMF peut, aux termes du projet de loi n° 7 et des ententes à intervenir, pourra, ce qu'elle ne pouvait faire dans le passé, aller au bureau de comptables ou à l'Ordre des comptables et obtenir des informations et aller au bout en fait de l'histoire. Et c'est là à mon avis le point crucial. C'est qu'il y en a un, «whistle-blowing», qui met tout le monde à l'aise, c'est-à-dire que le comptable démissionne, il n'a pas besoin d'aller sur la place publique pour dire que... de révéler des confidences de son client, et l'AMF dispose de pouvoirs pour aller au fond des choses et poser des questions au comptable éventuellement. Alors...
Le Président (M. Hamad): Le temps d'échange...
Mme Lefebvre (Hélène): Parfait. C'est tout.
Le Président (M. Hamad): O.K. Puis je demanderais à mes collègues députés aussi d'être concis dans leurs questions. Alors, Mme la députée de Matane...
Une voix: ...
Le Président (M. Hamad): O.K. Mme la députée de Matane.
Mme Charest (Matane): Merci, M. le Président. Alors, Me Lefebvre, je suis consciente de l'importance du secret professionnel à l'égard du public, de l'intérêt du public, et également à l'égard des comptables et de la clientèle qu'ils desservent, mais actuellement nous avons... nous avons eu dans le passé des problématiques qui nous obligent aujourd'hui à tenter de trouver une façon de pouvoir prévenir des situations comme celles qui ont été vécues. Et, même si les mécanismes dont vous nous parlez existaient, il y a un fait qu'on doit constater, c'est que, malgré ces mécanismes-là, certaines situations se sont passées, et nous n'avons pas pu pallier à la problématique.
Une des propositions qui nous a été soumise par d'autres groupes et laquelle j'aimerais vous soumettre était celle de pouvoir, dans une loi, et ça, là, rien n'est arrêté actuellement, dans quelle loi ou sous quelle forme elle devrait prendre exactement... ce serait d'exiger ou de reconnaître certains indicateurs de fraude, que le vérificateur, dans le cadre de son mandat, devrait vérifier et s'assurer, analyser de manière à pouvoir identifier une problématique possible de fraude, et qu'à l'intérieur de cette loi-là ou de cette réglementation on exige que, dès que cet indicateur a été identifié, par la loi, le vérificateur se doit d'en informer le comité externe, et, dans le cas d'inertie du comité ou pour toute autre raison, il se doit de référer le dossier à l'AMF et à l'Ordre des comptables agréés, puisque, comme vous le dites ? par exemple, l'Ordre des comptables ou l'Ordre des CGA ? ils ont le pouvoir d'obtenir cette information.
À la problématique que vous releviez, de dire: L'AMF a ce pouvoir-là d'enquête... Vous comprenez, pratiquement parlant, si on demandait à l'AMF d'enquêter tous ces fonds communs de placement ou ces sociétés ouvertes, on n'en finirait plus avec... donc il faut avoir un mécanisme qui nous permet d'identifier les problématiques. Et, si on mettait en place cet élément pour permettre que systématiquement l'AMF est avisée et qu'elle puisse, elle, à ce moment-là, exercer son pouvoir d'enquête au lieu de faire une duplication d'enquête, qu'elle puisse rapidement exercer son pouvoir d'enquête avec tous les pouvoirs qu'elle a et qui ne toucherait aucunement le secret professionnel des vérificateurs, est-ce que vous croyez que cette solution-là pourrait être efficace et permettre d'arriver à identifier le plus rapidement possible les risques de fraude?
n(11 h 50)nMme Lefebvre (Hélène): Je vais vous faire part de mes commentaires personnels, parce qu'évidemment l'objet de notre mémoire ne couvrait pas cette question-là, et on n'a pas eu de discussion avec nos clients, donc je ne peux pas vous dire s'ils sont d'accord ou pas d'accord. Cependant, j'ai entendu effectivement cette suggestion-là et je trouve que c'est une suggestion qui fait du sens dans la mesure où les critères qui seront imposés ne seront pas des critères subjectifs mais seront des critères objectifs. On ne rencontre pas tel ratio, on ne... des choses qui font en sorte que le comptable tout seul dans son bureau ? moi, je reprends cette expression-là parce que j'en vois souvent dans ma pratique, des situations où est-ce qu'on doit prendre une décision, et on ne peut parler à personne, et on doit déterminer si, oui ou non, cette situation-là est présente ou pas ? ...que le comptable n'ait pas de question à se poser à savoir s'il... subjectivement, est-ce que, oui ou non, on est dans cette situation-là, est-ce que je peux sans crainte dire cette information-là?
Si c'est un critère objectif, il n'y a pas de difficulté, parce que le ratio n'est pas atteint, le ratio n'est pas atteint, le comptable va le dire. Et, dans la mesure où c'est prévu dans la législation ou dans la réglementation, il n'y a plus de problème de secret professionnel, parce que la loi le prévoira, l'émetteur ou le fonds sera au courant que son comptable ou son vérificateur doit donner l'information, et il n'y aura pas de mésentente avec personne.
La seule chose que je ne voudrais pas, c'est une série de critères du genre: Si on a des doutes concernant la présence d'une telle situation, là, qu'est-ce qu'on fait? On n'a pas de pouvoir d'enquête quand on est vérificateur, de forcer le client à faire des choses qu'il ne veut pas faire, puis là on serait mis dans une situation où le vérificateur devrait être juge et partie à savoir si la situation subjective qui est devant lui rencontre les critères en question. Donc, il faudrait que ce soient des critères objectifs. Et, moi, je pense qu'effectivement il y a déjà des informations qui doivent être données par les émetteurs, mais...
Le Président (M. Hamad): Critères objectifs.
Mme Lefebvre (Hélène): Parfait.
Le Président (M. Hamad): Ça va. On va aller de l'autre côté. C'est 15 minutes, malheureusement. On va respecter le temps pour... Alors, vous avez... C'est le député de?
Une voix: Gaspé.
Le Président (M. Hamad): Gaspé.
M. Lelièvre: Bonjour. Écoutez, cette commission a entrepris ses travaux depuis un certain temps, et on reçoit les commentaires, vous avez entendu les commentaires en ligne, vous avez lu les commentaires en ligne. Qu'est-ce qui intéresse les gens? C'est d'avoir des réponses claires, d'avoir des prospectus qui sont clairs ou de l'information qui est claire, avec du taux de rendement, etc., à quoi s'attendre.
Au niveau de la protection des investisseurs, les gens qui mettent leur argent dans un fonds s'attendent à ce que cet argent fructifie et qu'il leur assure des rendements intéressants en vue de leur retraite.
En ce qui a trait à l'accès à l'information, et vous faites la distinction dans votre mémoire, là, du secret professionnel et l'obligation de confidentialité ? je pense que ça, c'est bien compris ? comment on pourrait s'assurer, dans le cas d'une fraude découverte, parce il y a des avocats fiscalistes, il y a des comptables agréés qui sont là-dedans et qui travaillent... Parce qu'au niveau de la fiscalité il peut y avoir des comptables aussi qui sont avocats puis qui ne sont pas nécessairement fiscalistes, mais la spécialisation est là-dedans, et les gens, je pense, qui sont des professionnels sont en mesure de pouvoir détecter ces choses-là.
Maintenant, comment le mettre en application pour protéger les épargnants? C'est ça, la question. Lorsqu'il y a des vérifications qui sont faites, puis vous avez soulevé la question, vous avez arrêté là-dessus, des critères objectifs, et j'aimerais ça qu'on aille un petit peu plus loin, comment on s'y prend pour faire en sorte que... à partir des critères, qu'on puisse avoir accès à l'information? L'AMF peut avoir accès à l'information, le vérificateur, qui peut être un avocat, fiscaliste ou autre... transmettre à une autorité quelconque... Lorsqu'on est dans le cas des sociétés privées, c'est plus difficile, c'est très difficile même, parce que là, à ce moment-là, on l'a vu dans un autre... on le voit, comment l'information peut circuler lorsqu'on est en présence d'un crime qui est commis et qu'on ne peut pas le divulguer, et on sait que ça va entraîner des conséquences majeures sur la vie des personnes. Alors, ça m'amène aussi à la question des sanctions, éventuellement qu'on pourra rediscuter si on a le temps.
Mme Lefebvre (Hélène): La question en fait, c'est qu'on est dans un contexte différent, au moment où on se parle, de celui qui prévalait au moment des scandales auxquels vous faites référence. On a le projet de loi n° 7 qui a été adopté, on a la possibilité pour l'AMF d'aller chercher l'information. Ce à quoi vous faites référence, c'est encore ce qu'on appelle, en anglais, le «whistle-blowing», là, c'est dans la mesure où un comptable tout seul dans son bureau commence à entretenir des doutes sur quelque chose, qu'est-ce qu'il peut faire. C'est sûr que, dans ce contexte-là, c'est très délicat. Puis il y a une balance, comme on dit, que vous devez atteindre, à savoir: Dans quelle mesure est-ce que vous pouvez obliger quelqu'un à violer ses obligations sur de simples soupçons, avec les risques que ça peut comporter sur le cours d'un titre, par exemple, ou d'autres choses?
Par contre, ce que je vous ai expliqué tantôt, c'est que, dans le contexte des sociétés ouvertes et des fonds communs de placement, il y a le phénomène de la démission. Et quelqu'un a dit hier que ça devrait être suffisant quand un... Ça n'arrive pas souvent qu'un vérificateur d'une société ouverte démissionne et, s'il démissionne, c'est un gros drapeau rouge pour l'AMF, de se prévaloir des nouveaux pouvoirs qu'elle n'avait pas autrefois et qu'elle a en vertu du projet de loi n° 7, qui a été adopté, d'aller chercher l'information. Parce qu'elle sait qu'il y a un problème, ils ont démissionné. Il y a nécessairement quelque chose qui s'est passé. Alors, c'est une façon d'avoir un «whistle-blowing» et... qui en fait protège la chèvre et le chou, c'est-à-dire que ça n'oblige pas le comptable à violer son secret et ça a l'effet que vous souhaitez, c'est-à-dire d'alerter l'AMF à une situation potentiellement difficile.
M. Sylvestre (Michel G.): Une suggestion concrète qu'on pourrait peut-être faire à cet égard-là. Vous avez votre règlement 51-102 qui prévoit des délais un peu longs. Cette procédure-là pourrait être considérablement allégée et les délais dans lesquels l'AMF est avisée d'une telle démission pourraient être considérablement raccourcis. Ça se fait ailleurs. Ça, c'est une mesure qui serait simple, qui serait efficace et qui ménagerait les intérêts des parties en présence. Je crois qu'aux États-Unis le délai est de deux jours. Dans le règlement 51-102, le délai est de 30 jours, et c'est très compliqué.
Mme Lefebvre (Hélène): Et plus, plus.
M. Sylvestre (Michel G.): Et ça peut être plus, plus, plus, plus, plus. Alors, obliger un vérificateur d'aviser l'AMF de sa démission dans un délai de deux jours, vous allez régler une grosse partie de votre problème.
Mme Lefebvre (Hélène): Il faut dire aussi que le vérificateur, c'est que, quand l'information arrive, à savoir si on pourra prévenir les fraudes, c'est sûr que le vérificateur arrive après le fait...
M. Sylvestre (Michel G.): Il est trop tard.
Mme Lefebvre (Hélène): Il constate qu'il y a eu une fraude, il doit le dire à quelqu'un. Et je pense que c'est pour ça que les indicateurs dont vous parliez, ça, c'est quelque chose qui pourrait aider à prévenir les fraudes, mais, d'imposer des obligations au vérificateur de dénoncer des choses, ça arrive après le fait, malheureusement.
M. Sylvestre (Michel G.): Et sans que le vérificateur ait toute l'information, de toute façon, pour dresser un portrait complet de la situation.
Mme Lefebvre (Hélène): Et, s'il ne l'a pas vue, l'information, en faisant... s'il n'a pas eu... il ne l'a pas décelée, la fraude, en faisant sa vérification, on n'aura pas accompli grand-chose. Il n'aura rien à dire.
M. Lelièvre: Tout à l'heure, vous disiez que, lorsqu'un vérificateur est en présence, dans une société privée, d'informations qui sont douteuses ou questionnables... à ce moment-là, est-ce que ce serait une suggestion acceptable que ce vérificateur transmette de façon confidentielle l'information à l'Ordre des comptables, au syndic, et qu'on puisse au moins avoir... que ce vérificateur puisse avoir une opinion qui renforcerait ou dirait: Non, il n'y a pas de problème de ce côté-là?
Mme Lefebvre (Hélène): Dans le cas d'une société privée?
M. Lelièvre: Oui.
Mme Lefebvre (Hélène): Je pense que ça déborde un peu ce qu'on recherche à faire ici, dans la mesure où on veut protéger les épargnants, les investisseurs. On parle de sociétés ouvertes, on parle de fonds communs de placement.
M. Lelièvre: Oui, on en parle.
Mme Lefebvre (Hélène): Dans le cas d'une société privée, la dynamique est différente. Vous avez souvent un actionnaire majoritaire, et, s'il y a eu une situation de fraude, bien c'est probablement lui qui est aux prises avec la situation.
M. Lelièvre: Mais prenons le cas des filiales, prenons le cas des filiales. Ça peut être des sociétés quand même privées ? on l'a vu ? avec un seul investisseur. Ça pourrait se faire.
Mme Lefebvre (Hélène): Écoutez, je ne m'aventurerai pas... Je ne suis pas une avocate de droit corporatif, là. Je ne m'aventurerai pas sur un terrain que je connais mal. Mais il reste que, dans le cas des sociétés privées, la dynamique est nécessairement très différente parce que...
Une voix: Complètement différente.
Mme Lefebvre (Hélène): Parfait.
M. Lelièvre: Oui, je comprends, mais...
Le Président (M. Hamad): On va aller à d'autres questions. Y a-t-il d'autres questions?
M. Lelièvre: M. le Président, je comprends que la situation est différente, sauf qu'on est en présence d'une société qui est une filiale d'une société mère. Donc, à ce moment-là...
Mme Lefebvre (Hélène): Le vérificateur de la société mère qui est une société ouverte, à ce moment-là, va devoir examiner probablement ces questions-là éventuellement...
M. Lelièvre: Bien, voilà.
Mme Lefebvre (Hélène): ...mais ça va devenir dans le même processus que je vous décrivais tantôt, de démission, etc. Je ne sais pas si je réponds à votre question? Là, je ne sais pas si je peux répondre.
Le Président (M. Hamad): Non, non, c'est correct. Vous pouvez répondre, vous dites ce que vous voulez, mais on va rester dans le fonds commun, c'est important. Y a-t-il d'autres questions? M. le député de Gaspé?
M. Lelièvre: J'ai terminé.
Le Président (M. Hamad): Vous avez terminé. Mme la députée de Mirabel.
n(12 heures)nMme Beaudoin: Merci, M. le Président. Me Lefebvre, Me Sylvestre, merci pour la présentation de votre mémoire. Moi, je vais vous poser une question en tant que porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite. Mon collègue d'en face a mentionné tantôt que plusieurs personnes avaient perdu beaucoup d'argent. Vous savez qu'il y a beaucoup de retraités qui ont perdu toute leur fortune, qui doivent retourner au travail à 65 ans, 70 ans, parce qu'ils ont tout perdu à cause des fraudeurs. Vous dites tantôt, là, que, bon, vous vous basez sur plusieurs arguments, mais vous savez que l'intérêt public, là, c'est important. Nous, on est ici pour formuler des recommandations, et l'Autorité des marchés nous dit: L'intérêt public exige que la recherche de la vérité par un régulateur l'emporte sur la nécessité de protéger de manière absolue les confidences faites aux membres de la profession comptable.
Alors, eux, ils nous disent, l'Autorité, là, qu'ils ont des problèmes parce qu'ils n'arrivent pas à effectuer leur travail dans un délai respectable. Il y a des retards. Puis vous savez que des retards, dans toute la question des renseignements, bien finalement ils arrivent avec des résultats qui sont... ils se trouvent inefficaces à cause de ça.
Alors, moi, j'aimerais vous entendre parce que vous parlez au nom de plusieurs clients des comptables. Qu'est-ce que vous répondez à ces retraités-là? Et qu'est-ce que vous répondez à l'Autorité également qui dit qu'ils ne peuvent pas agir en conséquence pour protéger le public? Nous, on doit faire des recommandations.
Mme Lefebvre (Hélène): Écoutez, je pense qu'on peut seulement sympathiser avec tous ces gens-là. Je ne peux pas vous dire autre chose. Évidemment, ce que j'essaie de vous expliquer, c'est qu'on a déjà un pas de fait avec le projet de loi n° 7, qui n'existait pas à l'époque et qui va permettre des échanges entre les comptables, l'ordre et l'AMF. Et votre souci, je comprends, autour de la table, c'est de donner à l'AMF des pouvoirs d'aller chercher l'information. Or, vous avez déjà le mécanisme, là, qui est là, devant vous, qui n'était pas là avant et qui est là maintenant, et il s'agit de voir, dans les ententes, comment cet échange-là va s'exercer, et vous aurez votre mot à dire sur des ententes.
L'intérêt public, c'est une question qui va dans deux sens. Il faut balancer ça, l'intérêt des épargnants et l'intérêt du public à garder la confidentialité de ses informations stratégiques, et c'est ça que vous devez balancer, et je pense que c'est cet exercice-là que vous devez faire. Mais, dans le contexte actuel, la préoccupation de l'AMF, à mon avis elle est adressée par la possibilité de conclure ces ententes en vertu du projet de loi n° 7, possibilité qu'elle n'avait pas au moment d'écrire ? probablement ? ces lignes dans son premier mémoire. Alors, je pense que vous avez déjà devant vous le mécanisme.
Mme Beaudoin: Alors, si je comprends bien, vous considérez que l'Autorité a tous les pouvoirs pour protéger le public?
Mme Lefebvre (Hélène): Selon l'entente qui va intervenir entre l'Autorité et l'ordre, on verra les paramètres qu'on pourra insérer dans ces ententes-là pour justement arriver à assurer cette balance entre les intérêts des épargnants et du public utilisateur de services des bureaux de comptables agréés. Alors, je pense que le mécanisme est là.
M. Sylvestre (Michel G.): La difficulté qui existait précédemment, c'est que le secret professionnel était opposable à l'AMF. Alors, évidemment, ça restreignait considérablement sa capacité d'action. Avec le projet de loi n° 7, il y a des nuances, là, mais ce n'est plus le cas.
Nous, ce qu'on dit, c'est qu'à l'instar de l'Ordre des comptables agréés, qui a toujours eu accès aux renseignements confidentiels et privilégiés entre les mains des comptables, ça n'a jamais posé de problème parce que ça restait là. L'OCAQ n'avait aucun pouvoir de diffuser ça dans un cercle plus large. On dit, en ce qui concerne l'AMF: Vous avez accès à ces renseignements-là, on n'a pas de problème avec ça. Si vous les obtenez, agissez immédiatement, perquisitionnez, envoyez la police, faites ce que vous voulez, mais on ne veut pas que l'information circule au-delà de ça. On pense que ça, c'est une balance parfaite entre les intérêts de tous les intervenants.
Si vous permettez le même accès ? et c'est le cas avec le projet de loi n° 7 ? aux renseignements des comptables que l'OCAQ a en ce moment, vous ouvrez complètement la porte: les comptables ne pourront plus... ou ne devront plus en fait, parce que ce n'est pas un droit, c'est une obligation, là, ne devront plus invoquer le secret professionnel, parce qu'ils n'ont pas le choix que de le faire, mais l'AMF, en échange, gardera cette information-là pour elle, à moins d'avoir la permission d'un juge. C'est ce qu'on préconise. Et l'AMF, dans un contexte comme celui-là, si on parle des dossiers récents, aurait pu agir immédiatement, il n'y aurait pas eu de mise sous scellés de documents, et ainsi de suite.
Mme Lefebvre (Hélène): C'est ça.
M. Sylvestre (Michel G.): Mais il faut que l'information reste là parce que c'est de l'information qui est trop sensible pour circuler en dehors d'un cercle restreint.
Mme Lefebvre (Hélène): Sans que quelqu'un se mette le nez dedans pour voir: Est-ce que c'est nécessaire pour cet organisme d'avoir accès à l'information ou non? Parce que, sans ça, on laisse ça entre les mains de l'arbitraire d'une personne qui va décider: Bien, oui, je veux le donner à la SEC, aux États-Unis, je voudrais le donner à quelqu'un qui est à l'extérieur du pays, ou est dans une autre province, ou à une autre agence, à une autre société. Et c'est un gruyère, la possibilité de transmettre des informations, et ce n'est pas de nature à rassurer le public qui est utilisateur des services des comptables.
M. Sylvestre (Michel G.): Et non seulement ça, mais réfléchissez à ce qui suit. Imaginez un dérapage, imaginez que l'information sort, et que le titre de la Banque Royale ? j'invente ? est affecté, et qu'il y a des gens qui perdent des centaines de millions de dollars suite à ça. C'est une perspective qui est peu... On n'a pas de problème avec l'AMF, mais il faut que ça reste là. Parce que ça, c'est également dans l'intérêt du public, là, de ne pas perturber le cours des marchés.
Mme Beaudoin: Vous parlez de pertes, là, mais il y a des retraités qui ont perdu beaucoup d'argent...
M. Sylvestre (Michel G.): Absolument.
Mme Lefebvre (Hélène): Tout à fait.
Mme Beaudoin: Parce que, pour eux, peut-être, 10 000 $, 20 000 $, là, c'est peut-être 1 million pour un autre, là.
M. Sylvestre (Michel G.): Non, non, mais, quand je dis ça, je ne parle pas pour une personne individuelle, là, je parle pour le marché en général. Si vous influencez le cours d'un titre, vous allez faire perdre de l'argent à des petits épargnants parce que le titre va augmenter ou fluctuer différemment de ce qu'il aurait dû faire et vous courez des risques considérables. Si l'information reste là où elle doit être, ce risque-là n'existe pas, et ça concilie, je pense, les intérêts de tout le monde.
Le Président (M. Hamad): Est-ce que c'est complété?
M. Sylvestre (Michel G.): Oui.
Le Président (M. Hamad): Alors...
Une voix: ...
Le Président (M. Hamad): Oui, mais il ne veut pas le donner, là. Bon. Alors, merci beaucoup, merci pour votre présence.
J'inviterais immédiatement M. Viel, s'il est présent dans la salle, de prendre place, M. Gilles Viel.
Nous suspendons quelques minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 6)
(Reprise à 12 h 8)
Le Président (M. Hamad): ...les travaux. Alors, M. Viel, bienvenue, M. Gilles Viel. Alors, comme je vous ai dit, nous avons 15 minutes: donc, cinq minutes pour votre présentation et 10 minutes s'il y a des questions des collègues. Alors, c'est à vous la parole, M. Viel, et merci de prendre le temps de venir ici. Vous faites partie de ceux qui ont répondu par Internet au questionnaire et vous avez manifesté aussi votre intérêt de venir présenter votre opinion. Alors, bienvenue et merci.
M. Gilles Viel
M. Viel (Gilles): Je vous remercie, M. le Président. Mesdames messieurs, bonjour. Alors, j'ai un document que j'ai préparé, qui est mon point de vue, qui va vous être livré dans cinq minutes, sauf que le document que vous avez, ça en prendrait 20 pour le lire. Je l'ai fait exprès pour que vous l'ayez entre les mains. Vous pourrez le lire à tête reposée et faire les liens également avec Internet, puisqu'il y a... à cet effet-là. Alors, je vous remercie beaucoup pour cette invitation.
Je vous dirais d'emblée que, si je viens vous voir, j'ai deux chapeaux: j'ai le chapeau d'un épargnant touché par ce que vous savez et j'ai le chapeau également d'un représentant en épargne collective inscrit officiellement à l'Autorité des marchés financiers et qui a des clients qui ne moururent pas tous mais qui furent tous touchés par ce qui est arrivé également, puisque mes clients ont des morceaux dans ce pour quoi on est ici.
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(12 h 10)
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Les motivations communes, vous savez, qui relient les clients, c'est: autonomie financière à la retraite, crainte de ne pas avoir assez de sous à 65 ans et volonté de ne pas être un fardeau ni pour leurs familles ni pour leur société. Vous devez savoir qu'en tant qu'épargnants nous ne sommes pas des spéculateurs et qu'en toute connaissance de cause nous avons choisi d'investir dans des fonds communs de placement après y avoir bien sûr analysé ce qu'il faut avant. En réalité, je vous dirais qu'en tant que porteurs de fonds commun de placement nous savons très bien ce dans quoi nous investissons en termes de risques de marché, mais nous étions à croire également que nous pouvions dormir sur nos deux oreilles en sachant, entre autres, que nos actifs étaient protégés contre la fraude.
Alors, mon point de vue porte sur un élément fort important, et cet élément-là, c'est le ciment qu'il y a entre vous autres, nous autres, entre ce que vous représentez et le peuple qui est en arrière: la confiance.
J'ai parcouru non seulement le document de consultation, mais j'ai également parcouru les divers mémoires présents au site. Tout est là, tout est là pour établir un régime assurant une bonne et une meilleure gouvernance dans le domaine des fonds communs de placement. Ces mémoires tracent la voie pour une meilleure gouvernance, pour une plus grande confiance envers l'industrie des fonds communs. Je n'en ajoute pas plus, mais je retiens principalement un élément omniprésent dans tous ces mémoires, et encore plus dans une économie de marché, un élément qui doit guider la réforme que vous entendez mettre de l'avant: la confiance.
Votre ministre, le ministre Audet, a dit dernièrement: «La question de confiance s'est retrouvée au coeur de toutes nos discussions», 30 mai 2006. Alan Greenspan avait dit aussi la même chose: On peut fonctionner avec un ensemble de règles formelles, mais ces règles ne doivent en aucun cas se substituer à la confiance qu'il faut accorder à ceux avec qui on fait affaire. Il n'est donc pas du tout exagéré de mettre en évidence l'importance de cet élément qu'est la confiance.
Dans la plupart des mémoires déposés devant vous depuis février 2006 par les organismes dits de confiance, ces derniers font presque tous référence à cette notion: Option Consommateurs: «Une confiance qui doit être rétablie»; la Caisse de dépôt: «Toute mesure susceptible de renforcer la confiance des épargnants sera à l'avantage du bon fonctionnement.» Le mot «confiance» est partout. Il y a un seul endroit où je ne l'ai pas vu, c'est dans le rapport de l'Institut des fonds d'investissement du Canada.
Je dois vous avouer, cette confiance, base de bonnes relations, a été sévèrement amochée au cours des deux dernières années, et ce, à l'égard de tous les niveaux opérationnels reliés aux fonds communs de placement.
S'il y a un domaine que personnellement, les épargnants et moi, on ne s'occupait pas, c'étaient les affaires internes et administratives des manufacturiers de fonds de placement au Canada. Mais, depuis que nous fûmes tous frappés, j'ai découvert, et maintenant nous savons, je sais, je sais que mon niveau de confiance n'est plus du tout le même.
Je porte quand même à votre attention qu'au Canada il y a déjà eu des pas de faits pour assurer un climat de confiance chez les épargnants. Je vous rappellerai qu'en 1994 le rapport Stromberg, commandé par la CVMO, en disait long sur ça; en 1998, par le Bureau de la consommation, Industrie Canada, Les fonds d'investissement et la protection du consommateur au Canada; puis, en juin 2000 ? je pense qu'on pourrait s'y rapporter ? le rapport fort étoffé de Me Stephen Erlichman pour le compte des autorités canadiennes sur la gouvernance.
Cette commission dont vous faites partie est également un bon pas pour établir des règles de gouvernance claires au profit des épargnants, avec un objectif principal: ramener la confiance à la base même des relations d'affaires dans le domaine des fonds communs de placement.
Ma deuxième partie ? et je terminerai avec ça: il y a une solution. Oui, il y en a une, solution, une solution digne d'une meilleure confiance, et je vous la livre. Je n'ai pas la prétention ici de vous apporter la solution par excellence, mais en préambule je vous citerai les mots d'un épargnant de la région de Lanoraie qui a dit ceci: «Je recommanderais au ministre qu'on oblige à avoir un fonds d'indemnisation au niveau de l'industrie des fonds communs de placement. D'ailleurs, ce serait un avantage parce que les gens investiraient beaucoup plus.» Pierre Grenier, que vous pourrez retrouver sur un site Internet.
Et, à travers mes nouvelles lectures forcées, post août 2005, je suis tombé sur un propos en ce sens ? et, le propos, je vous l'ai mis dans votre dossier ? qui vient de Steven G. Kelman. Et M. Kelman avait dit, en août 2005: Un fonds de protection des investisseurs pour les porteurs de parts? Il portait en préambule ceci: Il est certain que les porteurs de parts de placement nécessitent une plus grande protection. Malheureusement, le désir, en juillet de l'an 2000, d'établir un fonds de prévoyance ne s'est pas concrétisé. Conséquemment, les détenteurs de parts des fonds de firmes dites de gestion d'actifs en fonds d'investissement sont toujours à la merci d'activités, et, bien que l'on soit porté à faire confiance aux dirigeants financiers de ce pays, on ne sait plus, en 2007, laquelle va nous exploser maintenant.
Il existe des différences majeures entre les millions investis à la Bourse sur des achats d'actions et les gens qui investissent dans des fonds communs de placement. La solution, la solution de rechange par l'industrie des fonds est d'établir un fonds de protection ou de prévoyance dès que possible et de faire en sorte ? je pèse le mot ? qu'il soit rétroactif pour compenser les pertes occasionnées par des porteurs de parts touchés bien malgré eux en leurs épargnes. Il me semble que l'industrie des fonds de placement au Canada en retirerait une cote d'appréciation et de confiance non négligeable. Sans cela, certains investisseurs pourraient hésiter à investir leurs économies dans les fonds communs ou pourraient investir dans un plus grand nombre de gammes de fonds qu'ils ne le feraient autrement.
C'est bien important, ce que je vais vous livrer dans ce qui suit. Un fonds de prévoyance destiné à protéger contre les méfaits d'une société de fonds n'est pas une idée née d'hier. Il y a sept ans exactement, en juin 2000, les Autorités canadiennes des valeurs mobilières ont publié un rapport avec l'avocat Stephen Erlichman, et, dans ce rapport, quelques semaines plus tard, après le dépôt, Tom Hockin, le président de l'IFIC, affirmait dans un communiqué de presse, 27 juillet 2000, et je cite: «Me Erlichman avançait dans ce rapport [...] qu'un fonds de prévoyance doit être mis sur pied afin de protéger les investisseurs contre les pertes potentiellement dues à l'insolvabilité ou à la fraude d'un gestionnaire de fonds, même si toutes les précautions ont été prises pour décourager ce genre d'activités. Le conseil des directeurs de l'IFIC se préoccupe activement de cette demande depuis le début de 1999 et plus formellement depuis le printemps 2000. L'IFIC désire s'assurer que les investisseurs sont aussi bien protégés en cette ère de l'électronique qu'ils ne l'étaient par le passé.» M. Hockin fait également remarquer que «certains de nos membres, qu'ils soient petits ou grands, ont déjà adopté» des mesures en ce sens.
L'auteur ajoutera, en juin 2006: «C'est dommage que l'industrie des fonds de placement n'ait pas adopté la recommandation [...] stipulant l'établissement d'un fonds d'urgence pour pallier à de telles situations.» Je constate, dans le rapport de la Caisse de dépôt et de placement, en page 20, que c'est une recommandation qu'ils souhaitent.
Au site de l'IFIC, à ce jour, je note que les actifs sous gestion pour les membres de l'IFIC sont de l'ordre de 660 milliards. Il faut savoir que les revenus annuels estimatifs de ces membres, à raison de 2,5 % de moyenne de frais de gestion, sont de l'ordre d'entre 10 et 15 milliards. N'y aurait-il pas lieu de faire en sorte que l'industrie s'organise pour qu'une partie de ces revenus soit justement mise en fiducie pour la création d'un fonds de prévoyance?
Que souhaiter de plus, mesdames messieurs de cette commission et dirigeants en autorité de l'industrie des fonds communs de placement, de faire en sorte que la confiance soit justement le principal élément au coeur de toutes nos discussions et de toutes nos réflexions? Je vous remercie.
Le Président (M. Hamad): Merci, M. Viel. M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci beaucoup, M. Viel, pour votre présentation. Et effectivement je pense que le mot clé, que vous avez utilisé abondamment mais qui n'était pas de trop, c'est le mot «confiance». C'est un élément extrêmement important pour un fonctionnement efficace des marchés financiers, qui est à l'avantage bien sûr des épargnants puis qui n'est pas à l'avantage de ceux qui ont besoin de fonds pour investir dans l'économie. C'est un élément qui est crucial, et tout élément qu'on peut amener à améliorer la confiance, c'est que tout le monde est gagnant de cela, puis d'abord et bien sûr les investisseurs, les épargnants, comme il se doit.
Évidemment, on n'a pas beaucoup de temps, mais je vais parler d'un élément que vous avez mentionné. Vous notez qu'un des éléments importants que vous suggérez et qui devrait être considéré, c'est l'idée d'un fonds de prévoyance ou d'indemnisation, peu importe le vocable. Et je ne veux pas être trop technique, parce qu'évidemment on peut vite tomber dans les techniques, là, mais je veux rester au niveau peut-être de certains éléments du principe de cela. Je comprends l'objectif qui est poursuivi, qui est bien intentionné.
Plusieurs nous soulignent, nous suggèrent aussi... Parce qu'il y a comme deux écoles de pensée ou deux façons d'aborder le problème là-dessus, et on n'a pas fait notre tête à ce moment-ci. On essaie de comprendre, de voir, parce que parfois l'enfer peut être pavé de bonnes intentions, puis une mesure bien intentionnée peut avoir des effets pervers importants, et c'est évident qu'on ne veut pas tomber là-dedans. Je ne vous dis pas que c'est le cas avec la mesure que vous présentez, mais on se questionne.
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(12 h 20)
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Alors, dans la mesure où est-ce qu'on parle parfois que ce fonds-là pourrait avoir comme impact de déresponsabiliser les investisseurs, et donc comme impact, un premier impact, d'augmenter le risque pour les épargnants, et donc, avec la meilleure intention du monde, certains suggèrent que ça pourrait avoir comme impact d'augmenter le risque de fraude justement, et donc en bout de piste qu'on arriverait avec un plus gros problème. Autre élément direct qu'il y aurait aussi serait sur le risque qui est associé aux fonds des épargnants eux-mêmes, de l'argent qui est placé, et, deuxièmement, étant donné l'élément de frais de gestion que ça pourrait entraîner, et je ne vous demande pas de dire ce serait quoi, d'après vous, les frais ou le montant qui devraient être capitalisés, mais les frais auraient un impact de réduire le rendement même des épargnants. Et donc le coût va être refilé ultimement aux consommateurs, aux épargnants.
Comment balancez-vous ça? Parce que c'est une question d'équilibrage finalement, là. Est-ce que le risque en vaut la chandelle? Est-ce que le jeu en vaut la chandelle? Est-ce qu'il y autre chose qui pourrait être fait? Est-ce qu'il y aurait d'autres alternatives aussi? Mettons que ce ne serait pas le meilleur moyen privilégié, avez-vous d'autres alternatives?
Le Président (M. Hamad): M. Viel.
M. Viel (Gilles): Je vais répondre à votre question effectivement sur le fonds de prévoyance. Le fonds de prévoyance, c'est un peu comme le pneu de secours de votre automobile. Il y a des gens qui ont des autos depuis très longtemps, puis le pneu de secours n'a pas toujours servi parce que l'état des pneus est en bon état. Les gens voient à leurs affaires.
Vous seriez surpris, dans le domaine du public, comment les gens regardent le lieu où ils vont investir. Les gens n'investissent pas à l'aveuglette. La plupart des gens, sur les 660 milliards d'investis au Canada, ont tous des conseillers financiers. Attachez-le avec qui vous voulez, ils ont tous une personne qu'ils vont voir pour faire confiance. Les gens n'achètent pas ça sur eBay, des fonds de placement, je regrette, ils n'achètent pas ça au téléphone, ils achètent ça effectivement en présence d'un conseiller financier avec lequel ils s'assoient et avec lequel ils discutent. Et le conseiller financier, lui, il est où? Il est inscrit, lui, il est inscrit à quelque part puis il a des règles à suivre.
Première règle que j'ai à suivre en face d'une personne comme vous, c'est de vous poser des questions, c'est d'avoir votre profil d'investisseur. Et, comme je suis une personne responsable qui n'a pas envie de changer de trottoir quand je vais vous rencontrer, je vais vous poser les bonnes questions pour être bien certain que vous compreniez très bien ce dans quoi vous allez investir. Et, si vous m'amenez sur du Bre-X ou du Nortel à des prix de fou, je vais vous ramener à la réalité, et vous allez me signer un document me dégageant de ça. Et, quand vous allez me signer ce document-là me dégageant de vos aventures spéculatives, le fonds d'indemnisation ou le fonds de prévoyance, il n'embarquera pas. C'est ça qu'il faut faire.
On ne peut pas tout prévoir, c'est impossible de tout prévoir, mais je pense que l'industrie a les moyens financiers de se doter... Puis, vous savez, une des règles premières effectivement quand on s'assure, c'est qu'on a la visite d'un inspecteur qui vient voir dans quel état est notre maison, si on a un foyer ou un poêle à combustion lente. Je pense que l'IFIC a son mot à dire avant d'accepter n'importe qui comme membre. Ils ont le droit d'être parrains des gens qui embarquent. On a le droit de vérifier. Ça n'empêche pas...
Quand Desjardins est venue au monde, il y a de nombreuses années, M. Desjardins, pour s'assurer que les épargnes étaient à la bonne place, s'est assuré de quoi? Chez nous, mon père était un inspecteur de caisses populaires, puis je peux vous dire une chose, on ne savait jamais où il allait, mais il vérifiait pour s'assurer que dans chaque caisse effectivement les sous allaient à la bonne place. La même chose pour nous autres, la même chose. Je pense qu'un fonds de prévoyance a sa place et servirait l'industrie.
Le Président (M. Hamad): Alors, pour terminer, M. le député de Charlevoix.
M. Bertrand: M. le Président, j'ai l'avantage de connaître M. Viel, j'ai l'avantage aussi de connaître son histoire. Je veux le remercier puis le féliciter parce que je sais très bien toutes les émotions qu'il y a en dedans de cet homme-là aujourd'hui, puis il a réussi à faire ça très, très correctement.
J'aimerais ça, dans tout ce contrôle d'émotions, que vous parveniez à nous dire quand même, au moment où vous êtes toujours demeuré quand même dans la profession, vous avez quand même rencontré tous vos clients, à l'heure actuelle, ces clients-là, est-ce qu'on parle, en très grande majorité ? vous y avez fait allusion, mais j'aimerais le faire spécifier ? est-ce que la très grande majorité de vos clients à vous et ceux et celles qui font aussi de la représentation pour les fonds sont ce qu'on peut qualifier de clients plus petits, moyens ? même si je n'aime pas cette expression-là ? mais en termes d'investissement? Autrement dit, la personne qui vaut 20 millions puis qui investit 1 million, je ne pense pas qu'elle ait les mêmes préoccupations que la personne qui investit 50 000 $ et que c'est une grosse partie de ses épargnes. Est-ce que la très grande majorité de votre clientèle est considérée comme les clients qui ont investi dans ce qu'on peut appeler, là, leur épargne nécessaire pour la retraite et autres choses?
M. Viel (Gilles): En tant que conseiller financier, je n'ai pas tout mis mes clients, toutes leurs épargnes au même endroit, sauf que je vous dirais que ce que les clients ont perdu, c'est une partie de leur épargne-retraite, c'était pour leur épargne-retraite. Et j'ai dans la tête cette personne... J'ai fait une transmission d'entreprise pour une très grosse ferme agricole, et il y avait dans cette ferme-là un vacher qui gagnait un salaire de 30 000 $ par année. Et, quand j'ai fait ça, en 1982, il m'a confié une partie de ses épargnes, et, dans ces épargnes que j'ai faites au fil des ans, il y en a 40 %, 40 % qui s'est ramassé dans un fonds que je qualifierais d'évolution, et, dans ce fonds-là, effectivement, pour l'instant, c'est parti. Alors, ce client-là est inquiet parce qu'il y a un manque à gagner pour sa retraite.
On va se débrouiller pareil. Je l'ai dit tantôt: Ils ne moururent pas tous, mais ils furent tous frappés. Et alors il n'y a pas de petits clients, il n'y a pas de gros clients, il y a juste une insulte qui a été faite à des épargnants en prenant quelque chose qui leur appartenait. Alors, c'est tout ce que j'ai à dire. Et je continue, je vais continuer. Je ne me retirerai pas devant ma clientèle, je ne changerai pas de trottoir. La seule chose, c'est une déception que nous avons. En tout cas...
M. Bertrand: Est-ce que je comprends bien que la majorité de gens comme vous, à la fois représentant et investisseur, est-ce que je comprends bien, vous avez tous la certitude d'avoir eu les compétences nécessaires, d'avoir eu les précautions nécessaires, mais vous vous êtes tous fait flouer? Si j'ai bien compris, là, le sens de votre intervention.
M. Viel (Gilles): Je vais citer un contribuable de Lanoraie qui a dit ceci: Quand mon assureur est sur ma résidence et que je passe au feu, je pense que je suis couvert, je pense que ma maison est protégée. Mais là j'ai fait application pour être indemnisé dans le fonds d'indemnisation, et on m'a refusé. Alors, il a répondu ceci: Pendant que la personne qui rentre par la porte d'en avant pourrait me frauder, là, je suis indemnisé, mais, si la même personne passe par la porte d'en arrière, je ne suis pas indemnisé.
Ce qu'il voulait dire, c'est qu'en face d'un courtier fraudeur on l'indemnise, mais, quand un manufacturier devient fraudeur, il ne se passe plus rien. On se ramasse Gros-Jean comme devant. Alors, vous comprendrez effectivement que, tous les gens que nous sommes dans notre domaine ou les épargnants, on est ébahis de voir une situation qu'on pensait, nous autres, à l'épreuve...
M. Bertrand: Dernière question très rapide, avec une réponse rapide.
Le Président (M. Hamad): Rosaire, c'est fini, là.
M. Bertrand: Est-ce que j'ai bien compris que votre création de fonds n'a rien à voir avec ce qui existe déjà à l'AMF? L'argent serait payé par les producteurs de fonds et non par les représentants, contrairement à ce qui existe dans le moment, ce ne serait pas réparti?
M. Viel (Gilles): Ce que je dis est très clair. Dans le rapport de Fasken, Martineau de juillet 2000, tout est là. La recommandation... Il y a six raisons de faire du ménage dans les fonds d'investissement au Canada, elles sont marquées là, et il y a sept recommandations, puis les sept recommandations sont assez claires, c'est: L'autorité «should encourage the development of a mutual fund investor compensation...» C'est clair, clair, clair. Et l'IFIC a dit: Oui, on se penche sur ça, mais ils se penchent encore dessus sept ans plus tard. Il est temps que les autorités... que le peuple décide effectivement de mettre un peu de pression.
M. Bertrand: Merci, M. Viel.
Le Président (M. Hamad): Alors, M. Viel, merci pour votre présentation et votre présence. Je veux inviter immédiatement M. Pierre Béland à aller à l'avant.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Hamad): Alors, M. Béland, bienvenue, et c'est à vous la parole. Allez-y, M. Béland.
M. Pierre Béland
M. Béland (Pierre): C'est sûr que passer après Gilles Viel, ce n'est pas évident. Gilles, merci! Excellent orateur, j'apprécie. Je ne suis pas habitué au décorum, je m'en excuse.
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(12 h 30)
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Le Président (M. Hamad): Ce n'est pas grave.
M. Béland (Pierre): Mon nom est Pierre Béland. Je travaille dans le secteur financier depuis 1992. En 1997, j'ai quitté une carrière dans une grande banque canadienne pour fonder des fonds d'investissement québécois. Je pense qu'il y a quelqu'un ici qui était tout à fait d'accord à ce que les fonds d'investissement aient leur place au Québec. En 1997, je fondais, avec SSQ, les Fonds d'investissement Valorem, qui a été fondé, soit dit en passant, sans aucun crédit d'impôt, sans aucune subvention, sans rien.
Bon, par la suite, notre gouvernement a décidé de s'impliquer dans la distribution et dans la gestion des fonds d'investissement québécois. Ce que mes profs d'économie appelaient dans le temps «la main grise de l'État» bien avait décidé de s'impliquer dans notre domaine. Capital Teraxis, un gouffre à argent qui appartenait à 80 % à la Caisse de dépôt, compétitionnait déjà différentes entreprises privées. Teraxis a acheté les fonds Valorem et plus tard achète les fonds Évolution ? soit dit en passant, les fonds Évolution étaient également un gouffre à argent ? qui avaient été fondés et qui étaient fortement appuyés par la Caisse de dépôt et placement du Québec. Valorem devient les fonds Évolution.
J'ai été vice-président aux ventes des fonds Évolution lorsque, bon, Teraxis ou la Caisse de dépôt, peu importe, a vendu les fonds Évolution à Norbourg, en décembre 2003. Le 25 août 2005, j'ai tout perdu. J'ai perdu ma job, j'ai perdu mes REER au grand complet, j'ai perdu mon fonds d'urgence. La seule chose qu'il me restait, c'était la confiance que j'avais dans mes institutions. Après 18 mois, je peux vous dire que la confiance que j'avais dans mes institutions, elle s'est envolée pas mal.
Je n'oublierai jamais la première discussion que j'ai eue avec Vincent Lacroix lorsqu'il a acheté les fonds Évolution. Je demande à Vincent Lacroix... Puis c'était au restaurant le Michelangelo, ici, à 9 heures du soir. Je revenais de Val-d'Or. Je lui pose la question, je lui dis: Écoute, Vincent, demain matin, qu'est-ce que je dis aux conseillers financiers qui vont me demander: C'est-u vrai, les rumeurs sur Norbourg? Batinsse! on parle en 2003, fin 2003. Je lui pose la question, puis Vincent Lacroix me répond: En 2003, quand j'ai acheté le Groupe Futur, j'ai été enquêté par la Commission des valeurs mobilières du Québec. En 2003, quand j'ai acheté BBA, j'ai été enquêté par la CVMQ. Quand j'ai acheté Évolution, récemment, j'ai été enquêté à la fois par la CVMQ et par la Caisse de dépôt. Lorsque j'ai acheté l'édifice, le 55 Saint-Jacques, sur la rue Saint-Jacques, à Montréal, j'ai également été enquêté par la Caisse de dépôt parce qu'ils ne vendraient pas un édifice à n'importe qui. Ça, c'étaient les paroles de ce qui était devenu mon président. Il dit: Lorsque je vais acheter Teraxis, dans quelques mois, encore une fois l'AMF ? parce qu'on venait de changer de nom; l'AMF ? va m'enquêter ? je parle-tu trop fort?
Le Président (M. Hamad): Non, vous parlez parfait, parfait. Continuez, continuez.
M. Béland (Pierre): ...excusez-moi; l'AMF va m'enquêter ? et la Caisse de dépôt et placement du Québec va également m'enquêter. Pour ce qui est de la provenance de mon argent ? j'ai adoré sa réponse dans ce temps-là ? Norbourg est une entreprise privée, je ne suis pas obligé de le dévoiler. Par contre, sois sûr d'une chose: la Caisse de dépôt sait d'où vient mon argent, l'AMF sait d'où ça vient, Revenu Québec, Revenu Canada.
Moi, à partir de ce moment-là jusqu'en septembre 2005, j'ai cru en l'honnêteté de Vincent Lacroix. Je peux vous certifier que, le 25 août, quand j'étais en vacances et que j'ai appris qu'est-ce qui s'était passé, je me suis dit: Non, non, il y a quelque chose d'autre qui s'est passé. Tu sais, c'est trois... Une semaine après, on m'a expliqué comment il avait fraudé, et j'ai compris qu'il y avait eu une vraie fraude. Bon. Mais, tout ce temps-là, j'y ai cru, à son honnêteté. En plus de toutes les acquisitions que j'ai nommées, rappelez-vous que Vincent, il a aussi acheté SPA par la suite, il a acheté MCA en partie par la suite, puis il a acheté une partie d'Investpro. Puis tout ça, ça a été approuvé sans problème.
C'est drôle, quand on lit des vieux articles de journaux, 2001, la CVMQ avait questionné la provenance...
Le Président (M. Hamad): M. Béland, juste pour vous, pour votre intérêt à vous...
M. Béland (Pierre): Oui, allez-y.
Le Président (M. Hamad): Évidemment, vous n'êtes pas protégé par l'immunité parlementaire ici, là. Alors, c'est pour vous, là. Juste...
M. Béland (Pierre): Parfait.
Le Président (M. Hamad): Puis vous avez la liberté de dire ce que vous voulez, mais, juste...
M. Béland (Pierre): Merci.
Le Président (M. Hamad): Soyez prudent pour vous.
M. Béland (Pierre: Parfait, j'apprécie.
Le Président (M. Hamad): Pas pour nous autres. Nous autres, on est heureux d'entendre ce que vous dites. Mais, juste pour votre intérêt...
M. Béland (Pierre): Ah, mais, compte tenu que j'ai tout perdu là-dedans...
Le Président (M. Hamad): Non, non, mais...
M. Béland (Pierre): Puis ce que je disais de Vincent, c'était ce qu'il me disait. Lorsque je vais parler de Maxima Capital, c'est selon un article du Devoir de 2001. L'article du Devoir de 2001 disait que, lorsque M. Lacroix a voulu acheter Maxima Capital, la CVMQ l'a questionné sur la provenance de son argent. Puis là, bien, la transaction ne s'est pas faite. Puis ça, c'est dans Le Devoir, en 2001, que ça avait été mentionné. Puis Michel Vastel avait écrit un article assez le fun à ce sujet-là, également.
Je peux peut-être rappeler aussi que Norbourg a eu des crédits d'impôt pour lancer ses fonds mutuels, qu'il a eu des subventions, qu'ils venaient de la Caisse de dépôt. Je pense que tout était là pour donner confiance.
Excusez, je viens de perdre le fil, là, c'est de ma faute. Depuis août 2005, des milliers d'investisseurs et d'intervenants ont perdu confiance dans l'industrie des fonds d'investissement, et je ne vois pas, à date, ce qui a été fait pour indemniser les 9 200 investisseurs. Compte tenu que plusieurs entités solvables ont gravité autour de la transaction...
Puis là, regarde, je ne veux pas dire que KPMG est fautif, ou quoi que ce soit, O.K., je ne dis pas ça. Ce que je pense par contre, c'est que, lorsque, moi personnellement, j'ai acheté des fonds Évolution, quand je regarde le prospectus que j'avais quand j'ai acheté ces fonds-là, j'avais un gardien de valeurs qui était indépendant, j'avais un fiduciaire indépendant, qui s'appelle Concentra Trust, j'avais également un registraire et un agent de transfert indépendant, qui s'appelle maintenant Felcon Canada, j'avais un vérificateur comptable indépendant, qui s'appelle KPMG, et, bon, c'était supervisé par la CVMQ à l'époque puis maintenant à l'AMF. Puis, en plus de ça, les fonds Évolution appartenaient à 100 % à Teraxis, qui appartenait à 80 % à la Caisse de dépôt et placement. Je pense que le prospectus que j'avais dans les mains lorsque j'ai acheté ces fonds-là était correct, et tous les intervenants que j'ai nommés ont toujours été sur les fonds Évolution en question. Depuis la transaction, il n'y a pas eu de modification. Donc, j'ai la chance d'avoir un bureau de vérificateurs comptables solide, qui a fait, je suis persuadé, une excellente job de vérification. Je ne sais pas comment ils ont fait pour ne pas voir ce qui s'était passé chez Northern Trust, mais ça, c'est autre chose.
Je fais également référence à un article de journal qui a été écrit ? pour ne pas dire que c'est moi qui ai dit ça ici ? par un M. Jean-François Parent, dans Finance et Investissement, où il faisait référence à un courriel interne de KPMG. Le courriel interne ? puis c'est dans l'article, vous pouvez le retrouver, sinon je peux vous lire les paragraphes, c'est assez intéressant ? en gros demande: Compte tenu des rumeurs qu'on a sur la provenance de l'argent de Norbourg, est-ce qu'on devrait faire plus d'affaires avec? Et la réponse a été: On a investigué ci, ça, ça, mais, compte tenu des rumeurs, on vous conseillerait de ne pas entretenir plus de relations avec. Ça, pour moi, ça aurait peut-être été un drapeau rouge. Peut-être que, moi, si j'avais été comptable agréé, je me serais dit: On va aller checker les livres parce qu'on ne sait pas d'où vient leur argent. Mais ça, comme je vous dis, ça ne vient pas de moi, ça vient d'un excellent article de Finance et Investissement.
Ce que je n'aime pas dans notre chose... Puis, quand je parle régulièrement à des gens de Toronto, ils disent: Pierre, le scandale Norbourg, là, c'est un scandale québécois, hein? Moi, je suis désolé, ce n'est pas un scandale québécois. Il y a énormément d'intervenants que j'ai nommés tout à l'heure qui sont basés au Canada, qui sont Canadiens, sauf un qui est de Chicago, Northern Trust. C'est vraiment un scandale canadien mais qui a affecté grandement notre industrie.
Je vais sauter certains bouts. Depuis le 25 août, j'ai rencontré personnellement ou j'ai discuté personnellement avec plus d'une centaine de Québécois dont la vie a basculé. Puis, j'apprécie, tout à l'heure, j'ai entendu des députés le mentionner, que c'est des vrais êtres humains qui sont là-dessus. Écoute, j'ai rencontré des investisseurs qui ont tout perdu. J'ai rencontré des retraités qui ont recommencé à travailler, des divorcés qui cachent à leur ex qu'ils n'ont plus une cenne puis qui s'arrangent pour remettre une pension à tous les mois ? je m'excuse, je trouve ça courageux ? des grands-parents qui n'ont pas eu de beaux Noëls depuis des années, des jeunes investisseurs qui ne veulent plus préparer leur retraite ? ça, c'est grave ? des conseillers financiers qui ont vu leurs revenus diminuer, naturellement, des conseillers financiers qui ont dû changer d'emploi. Puis la liste, elle serait longue. Je ne sais pas individuellement combien vous en avez rencontrés. C'est inimaginable.
Dans mon nouvel emploi ? ça, je trouve ça le fun ? je rencontre beaucoup de conseillers financiers qui, quand vient le temps de parler des certificats de placement garanti, disent: Pierre, si c'est une entreprise québécoise, je n'en offre pas. Puis leur raisonnement est très simple: une entreprise québécoise qui offre des certificats de placement garanti, la Société d'assurance-dépôts, ce n'est pas elle qui s'en occupe, c'est l'Autorité des marchés financiers. Puis malheureusement ces représentants-là financiers, ils disent: Regarde, Pierre, non, non, je vais préférer offrir des CPG d'une banque canadienne, qui, au moins, c'est la SADC, ce n'est pas l'Autorité des marchés financiers, qui protège le 100 000 $. C'est fou, c'est farfelu, mais c'est humain, et je les comprends personnellement de douter.
Oui, il y a des entités, un jour, qui vont indemniser l'investisseur qui a perdu son argent. Ça, j'en suis sûr, j'en suis sûr. Ce que j'aurais demandé à mon gouvernement, mes élus, c'est: Bon, est-ce qu'on peut prêter, là, le 115 millions qui a disparu? Est-ce qu'on peut l'avancer et que mon gouvernement, que mes élus, qui vous voulez, prennent le recours collectif à leur charge? Il y a des investisseurs que ça fait 18 mois qu'ils n'ont pas eu leur argent. On le sait, qu'un recours collectif, ça peut prendre des années. Est-ce que le stress que vivent ces investisseurs-là, c'est à eux à le supporter? Moi, je ne le crois pas. Tu sais, on serait capable de faire ce que j'appelle: À mesure exceptionnelle, une circonstance exceptionnelle.
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(12 h 40)
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Puis, je le sais très bien, que ça a déjà été fait. Puis, le plus bel exemple, qui est complètement en dehors d'ici puis que j'avais trouvé extraordinaire, Action de grâces 2002, terrorisme à Bali, il y a une Québécoise qui a été brûlée. Moi, à ce que je sache, au Québec, quand tu ne restes pas au Québec depuis plus de six mois, la Régie de l'assurance maladie ne couvre pas tes soins. Je pense que vous êtes tous d'accord. Et c'est une excellente mesure. Dans son cas spécifique, elle restait au Brésil depuis des années; je me souviens très bien d'un ministre qui a dit une chose extraordinaire, c'est: À circonstance exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Nous avons assumé les frais de cette brûlée-là. Ça, j'ai trouvé ça extraordinaire. Ça se fait.
Ça se ferait, prêter l'argent pour indemniser ceux qui se sont fait flouer. Puis, oui, faites le recours collectif, oui, allez voir les entités qui l'ont échappé, qui n'ont pas couvert peut-être tout ce qui aurait dû être fait. Moi, c'est ma vision des choses. J'espère ne pas m'être mis dans le trouble en en parlant. C'est ce que je pense en mon âme et conscience.
Le Président (M. Hamad): Merci, M. Béland. Merci beaucoup. Merci d'être là et avoir le courage de dire ce que vous avez à dire. Alors, j'invite mes collègues, ici. Est-ce qu'il y a des collègues qui veulent poser des questions? M. le député de Marguerite-D'Youville.
M. Moreau: Ce n'est pas une question. M. Béland, je veux vous remercier d'avoir pris le temps de nous rencontrer. D'une part, votre présence et le récit que vous nous faites, la mésaventure importante qui vous est arrivée... Vous avez utilisé l'expression, pas tellement pour vous, mais pour les autres, ce qui indique votre générosité, que vous aviez rencontré des gens pour qui la vie avait basculé. Je comprends que c'est aussi votre expérience personnelle.
Et le seul commentaire que je veux vous faire, c'est que, d'une part, ça souligne l'importance du mandat d'initiative que nous avons amené, l'importance des recommandations que nous ferons, mais, d'autre part, ça nous permet, à nous comme députés, et aux gens qui assistent aux auditions et à ceux qui nous écoutent de constater que notre action vise la situation de personnes. Vous les incarnez notamment, ces personnes qui ont vécu des situations difficiles, et je pense que, pour nous les députés, c'est un témoignage qui est très important et qui va nous recentrer sur notre obligation de trouver des solutions pour que plus jamais ce type de situation là ne se produise. Merci d'avoir été là.
Le Président (M. Hamad): Est-ce qu'il y a d'autres collègues? Qui? Mme la députée de Mirabel.
Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, merci pour la présentation de votre mémoire. Et, quand vous avez parlé des retraités, ça me touche beaucoup puisque je suis porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite. Et ces gens-là souffrent encore. Et je pense que votre témoignage va sûrement peut-être pas les sécuriser, mais au moins, en prenant la parole aujourd'hui ? c'est télévisé ? ils vont entendre ce que vous avez à dire. Vous parlez au nom de plusieurs personnes, et je sais que ça prend beaucoup de courage pour venir ici, en commission parlementaire. Alors, au nom de tous ces retraités-là et des autres aussi, je vous dis merci et je vous félicite pour la présentation de votre mémoire.
Le Président (M. Hamad): Alors, merci encore une fois, M. Béland. Merci beaucoup. Merci, M. Viel. Et je suspends les travaux jusqu'à 2 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 43)
(Reprise à 14 h 8)
Le Président (M. Hamad): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, bon après-midi. Nous allons reprendre les travaux de la Commission des finances publiques. Donc, nous avons au programme la Fédération québécoise des coopératives en animation et en formation financière l'Actif. Alors, bienvenue. Je demanderai de se présenter et présenter votre collègue. Merci.
Fédération québécoise des coopératives en
animation et en formation financière l'Actif
M. Soublière (Jean R.): Jean Soublière. Je suis président-directeur général de la fédération et je suis accompagné de Mme Nicole Gadbois-Lavigne, qui est présidente de notre conseil d'administration.
Le Président (M. Hamad): Juste pour vous dire, vous avez, total, 45 minutes. Ça veut dire que vous avez 15 minutes, les deux ensemble, de présentation et, période de questions, 15 minutes chaque côté.
M. Soublière (Jean R.): Oui, on n'abusera pas de notre temps de parole parce qu'on veut consacrer le plus de temps possible aussi aux questions des membres de la commission afin d'éclairer les différents aspects de notre mémoire.
Sans plus tarder, je vais céder la parole à Mme Lavigne, qui va présenter la première partie de notre mémoire et notre fédération.
Mme Gadbois-Lavigne (Nicole): Alors, tout d'abord, nous remercions M. Sam Hamad, président de la commission, M. Rosaire Bertrand, son vice-président, ainsi que tous ses membres pour l'occasion qui nous est donnée de participer aux auditions et d'exposer nos préoccupations sur l'importante question de la protection des épargnants.
Depuis 1999, la Fédération québécoise des coopératives en animation et en formation financière l'Actif oeuvre au déploiement des compétences en finances personnelles des individus par l'organisation d'activités d'information et de formation théorique et pratique. Notre expérience coopérative unique nous a permis de bien comprendre les contraintes et défis auxquels sont confrontées toutes les personnes qui veulent apprendre comment faire fructifier leurs épargnes tout en protégeant leur patrimoine.
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(14 h 10)
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L'Actif compte aujourd'hui sept coopératives affiliées couvrant presque toutes les régions du Québec, un réseau qui grandit grâce aux apports de bénévoles qui sont généreux, d'hommes et de femmes d'action qui ont en commun des valeurs fondamentales telles que l'entraide, le partage de l'information et de la connaissance financières, la responsabilité sociale, personnelle et mutuelle, la démocratie, l'égalité, l'équité et la solidarité. Notre réseau coopératif a pour mission de fournir aux particuliers les moyens d'acquérir et d'améliorer leurs connaissances financières, d'encourager les particuliers à bien préparer leur retraite et à réaliser une saine gestion de leur patrimoine, de briser l'isolement des épargnants et des investisseurs, de mettre à leur disposition des ressources matérielles et humaines indépendantes d'animation et de formation dans les domaines du placement, de la gestion du risque et de la bonne gouvernance d'entreprise. Notre mission comporte également un volet d'intervention afin de représenter au besoin l'opinion et les intérêts de nos membres.
C'est ainsi que, préoccupés par les graves préjudices subis par un grand nombre d'épargnants, nous avons répondu avec grand intérêt, par le biais de notre mémoire, aux questions soumises à la consultation. Une réflexion collective sur la problématique s'imposait. Il est heureux que la commission en ait pris l'initiative.
Certains problèmes proviennent de pratiques qui vont à l'encontre d'une bonne gouvernance d'entreprise. En voulant favoriser le développement de l'entrepreneurship québécois en matière de fonds de placement, les petits émetteurs ont bénéficié de règles moins contraignantes et de moins de contrôle. La petite taille des petits émetteurs, leur peu de ressources financières et la concentration des tâches et du contrôle de l'entreprise dans les mains d'un seul ou d'une poignée de propriétaires auraient dû au contraire faire l'objet d'un encadrement plus serré des autorités réglementaires et d'un appel à une vigilance accrue de la part des épargnants. Car il s'agit ici, nous le rappelons, de la gestion de l'avoir des épargnants, l'engagement des avoirs des propriétaires étant ainsi bien mince.
Nous croyons que la protection du patrimoine des épargnants passe par la séparation des rôles d'émetteur, de celui de fiduciaire et de gardien de valeurs. Ces derniers doivent être nommés afin d'appliquer les conventions et règles liant les émetteurs aux investisseurs. Ce n'est rendre service ni à l'émetteur ni aux épargnants que de permettre d'altérer ces rôles alors même que les petits investisseurs ont le plus besoin de soutien des gens aguerris pour pallier au manque d'expérience et de ressources et que, de leur côté, les épargnants requièrent ces mêmes experts pour surveiller l'application des mandats qui sont donnés aux émetteurs à qui ils confient leurs avoirs.
Il faut certainement encourager une participation plus active des détenteurs de titres au processus de gouvernance des émetteurs par leur intégration dans les unités de CEI. Alors que le marché se complexifie, une participation efficace ne saurait être possible que moyennant la formation adéquate d'un nombre suffisant d'individus pouvant représenter les détenteurs et assurer la relève. Un soutien approprié par les autorités réglementaires au développement des compétences des particuliers est essentiel au succès d'un tel changement.
Une des embûches à la propagation de la connaissance financière réside dans l'isolement des épargnants. Il faut donc leur donner le moyen de se regrouper, de s'outiller de manière à ce qu'ils acquièrent, individuellement et collectivement, tous les éléments requis à une prise de décision de placement éclairé et conforme à leur intérêt.
M. Soublière (Jean R.): Pour comprendre les marchés et ses rouages, les épargnants cherchent de plus en plus à briser leur isolement par l'échange de points de vue sur différents aspects du placement, l'organisation de vigies des marchés, l'expérimentation en groupe de différentes approches conformes à leurs valeurs personnelles. C'est quelque chose qui est à la base de la création de notre réseau coopératif.
Dans ce contexte, l'animation financière se présente comme un vecteur de formation essentiel. Améliorer les connaissances et accroître l'information n'est pas suffisant. Il faut apprendre comment mettre concrètement les choses en pratique. C'est en encourageant le regroupement et la libre association des épargnants, soutenus par une structure apte à les orienter dans leurs apprentissages, que nous aurons plus de chances de parvenir à un environnement plus sécuritaire pour les investisseurs.
La façon la plus rapide et la plus efficace, à notre point de vue, de former le plus grand nombre possible d'individus serait de promouvoir activement le développement de clubs d'investisseurs et d'encourager l'épargne pédagogique. Les clubs sont des organisations propices à l'éducation financière et à la mutualisation de l'épargne pédagogique. Par l'entraide coopérative et la mise en commun d'apports modestes et périodiques, les clubs réduisent ainsi les risques d'apprentissage et facilitent la mise en pratique des connaissances théoriques.
Cette approche est éprouvée et reconnue un peu partout dans le monde. À titre d'exemple, les clubs sont, en France, encadrés par une loi et encouragés par des mesures fiscales. Au Québec, le cadre réglementaire actuel, à notre point de vue, freine la participation des intermédiaires et nous empêche d'en faire une promotion plus active. Nous avons besoin d'une loi ? et ici nous vous interpellons tout particulièrement en tant que parlementaires; donc nous avons besoin d'une loi ? complémentaire au cadre réglementaire existant, qui soit adaptée aux objectifs que nous proposons, des objectifs pédagogiques, il va s'en dire, via les clubs d'investisseurs. Ladite loi devrait par ailleurs prévoir l'encadrement des clubs par l'affiliation obligatoire de ceux-ci à une fédération reconnue par les autorités réglementaires afin d'en soutenir la gestion, d'assurer la qualité de la formation offerte par le biais d'un mécanisme d'accréditation des ressources qui seront habilitées à fournir des prestations de services.
L'aide financière indépendante est indispensable pour préserver la neutralité et l'objectivité des formations offertes dans toute organisation comme la nôtre. Nous profitons d'ailleurs de l'occasion pour souligner la contribution de l'AMF au développement de nos activités et la remercions publiquement de l'aide qu'elle nous a à ce jour consentie. Les efforts nécessaires pour lancer un véritable chantier d'éducation financière au Québec supposent une mobilisation d'envergure, alors que les ressources financières dédiées au développement des cours et à leur diffusion sont rares et insuffisantes. Pour ce qui est des fonds disponibles aux structures organisationnelles, administratives et de représentation, ils sont, à toutes fins utiles, inexistants.
Donc, pour assurer l'émergence de projets porteurs et représentatifs des besoins des épargnants, le gouvernement devrait mettre en place un programme d'aide financière récurrent dédié exclusivement aux organismes fédératifs reconnus en vertu de la nouvelle loi sur les clubs d'investisseurs que nous proposons. Le gouvernement devrait également prévoir des mesures incitatives susceptibles d'encourager les particuliers à constituer des clubs et à poursuivre des activités de formation continue, l'objectif ici étant de mettre en commun les épargnants, leur permettre de partager ensemble leurs expériences et de se former dans le temps, pas seulement de façon ponctuelle. Donc, de telles mesures pourraient prendre la forme éventuellement de crédit d'impôt pour la formation ou de déduction fiscale pour l'épargne pédagogique. Notre objectif ici, c'est de susciter une mobilisation des intervenants et des particuliers pour qu'ils s'investissent dans le processus de formation.
Le mandat d'initiative que la commission s'est donné témoigne de l'urgence de la situation et invite les intervenants à jouer un rôle utile dans la protection des épargnants, dans la recherche de solutions comme dans leur mise en oeuvre. Nous privilégions évidemment une place prépondérante à la participation éclairée de l'épargnant. Depuis sept ans déjà, nous pensons avoir prouvé par nos réalisations que nous étions en mesure d'agir comme un intervenant engagé et responsable. Nous souhaitons maintenant poursuivre et étendre avec les autorités gouvernementales un partenariat qui nous permettra de nous acquitter encore mieux de notre mission éducative.
Nous fondons beaucoup d'espoir sur les conclusions et recommandations de la commission. Nous comptons sur l'appui favorable de ses membres pour faire en sorte que le gouvernement mette en oeuvre une politique qui encourage l'épargne pédagogique et que l'Assemblée nationale adopte rapidement un cadre juridique qui facilite la création et le développement de clubs sur tout le territoire du Québec. Nous sommes d'ailleurs disposés à explorer plus amplement avec vous les pistes de solution proposées à ce chapitre.
Alors, je vous remercie de votre écoute et de l'intérêt que vous manifestez envers notre mouvement coopératif d'éducation financière ainsi que sa vision du problème de la protection des épargnants.
Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, nous allons passer à la période de questions, chers collègues. Il y avait le député de Laval-des-Rapides, M. le député de Montmorency après. Allez-y rapidement.
M. Paquet: Merci beaucoup. Alors d'abord je vous souhaite la bienvenue. Merci de votre participation à nos travaux. Et un élément que vous touchez, je crois, qui est important effectivement, quand on parle d'information, d'éducation des épargnants, qu'ils sachent... D'abord, c'est important qu'ils soient bien informés quelles sont les possibilités qu'ils ont devant elles ou devant eux pour prendre des décisions éclairées et puis qu'ils aient aussi... Pas juste avoir de l'information, parce qu'il y a une question de la qualité d'information, de séparer l'ivraie du bon grain dans toute la documentation, parfois, qui peut être technique. Il y a peut-être des éléments, dans ces cas-là, peut-être... J'aimerais savoir si vous avez des suggestions particulières à cet égard. On a parlé des deux pages un peu plus tôt ce matin, là. Est-ce qu'il y a des choses que vous dites: Bien, il serait important d'avoir ceci en plus d'avoir des choses plus techniques? Et il y a la question bien sûr de formation, de comment digérer cette information pour pouvoir mieux l'utiliser.
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(14 h 20)
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Vous suggérez... Bon, vous parlez beaucoup de la gouvernance, et effectivement, notamment, la question d'avoir soit des séparations de pouvoirs ou des séparations de rôles, et aussi la question des comités d'examen indépendants. D'ailleurs, c'est pour ça qu'en novembre dernier il y a un décret qui a été adopté par le gouvernement à cet égard, disant qu'il fallait que soit mis en place tel comité indépendant. Je pense qu'on parle de saine gouvernance dans des éléments... des enjeux importants.
Quand vous parlez de club d'investisseurs et d'éducation financière, j'aimerais en savoir un petit peu plus là-dessus. En France, vous parlez qu'il y a une loi qui a été adoptée. Peut-être, vous pourriez nous mettre un peu en contexte de la loi: Combien de gens on peut toucher là-bas, en France? Est-ce que vous avez un peu de statistiques, là, où vous avez pu examiner est-ce que... Quel avait été le point de départ? Je comprends que ce n'est pas tout le monde qui va être couvert, mais qu'on voit une progression importante, quelle est la... Et est-ce qu'il y a d'autres expériences ici, ailleurs au Canada ou en Amérique du Nord, et comment un peu ça fonctionne?
M. Soublière (Jean R.): Je vais commencer par la dernière question, puis je vais remonter par en haut, c'est la plus fraîche à ma mémoire, aussi. La question des clubs de placement, en France, ça fait déjà près de 30 ans qu'ils ont une loi, en France, sur les clubs d'investissement. Ils ont encadré de façon spécifique sur le plan juridique, il n'y a qu'un seul statut juridique admissible pour un club de placement, contrairement à ce qu'on vit ici, au Québec, où on peut démarrer un club d'investissement en fait avec à peu près toutes les formules juridiques, à l'exclusion du statut coopératif. Le statut juridique, en France, est accompagné également d'une exemption d'impôt sur les gains en capital pendant la durée du club, durée de vie qui est établie, en France, à 10 ans, après quoi, en principe, le club étant un véhicule d'initiation au marché financier, le législateur a prévu, en France, que les gens devraient être initiés au bout de 10 ans, donc ils ont prévu la dissolution du club à ce moment-là, ou à tout le moins la fin des avantages fiscaux.
Quant aux statistiques sur le nombre de clubs, il y en a plusieurs tant aux États-Unis qu'au Canada, qu'en France. À titre d'exemple, à l'occasion, en 2000, il y a eu un concours qui a été organisé, et il y a plus de 1 800 clubs d'investissement en milieu scolaire qui se sont impliqués dans ce concours-là. L'AMF, en France, publie beaucoup d'information là-dessus, est responsable de la mise en application évidemment de cette loi, ce qui favorise beaucoup l'accès et l'information à ce chapitre-là. Aux États-Unis, on estime qu'il y a peut-être 30 000 clubs en opération. Au Canada, les statistiques sont beaucoup plus diffuses, en l'absence notamment d'associations au Québec. Il y a un organisme canadien, à Toronto, qui en regroupe quelques-uns, on parle de peut-être 1 500, 2 000, les chiffres ne sont pas clairs. C'est une information, là, que l'association en question ne dévoile pas.
M. Paquet: Vous parlez... Une idée qui me vient à l'esprit, il existe, au niveau des... Dans beaucoup de cégeps notamment, beaucoup de collèges et universités, il y a des clubs jeunes entrepreneurs, et a priori je ne pense pas... Un des rôles que pourrait prendre un club d'entrepreneurs, dans certains cas, pourrait être de former de tels clubs... une base qui serait là. Je ne dis pas que ce serait suffisant, mais il y a déjà des possibilités.
Mais en quoi la loi actuelle... Je comprends qu'il n'y a pas d'incitatif financier particulier. Il y en a pour les jeunes, clubs de jeunes entrepreneurs, il y a un peu de soutien financier, là, même il y en a de façon assez significative qui est là. Mais est-ce que la loi actuelle empêche la formation de tels clubs? Je comprends qu'il n'y ait peut-être pas d'incitation particulière, mais il n'y a rien... Est-ce qu'il y a des embûches actuelles qui empêchent ça, d'une part? Et j'aimerais que vous les précisiez.
Et l'autre question ? pour laisser la chance à d'autres personnes de poser des questions, je la pose tout de suite: La question d'exemption de gain en capital sur 10 ans, en France, les clubs d'entrepreneurs, est-ce que ça ne pose pas un problème? Et là je n'ai pas en tête toute la fiscalité française, je ne prétends pas que vous l'avez nécessairement et je n'exige pas que vous l'ayez, mais est-ce qu'il n'y a pas un peu de problèmes, dans le sens que, si, mettons... supposez qu'on annonçait ça, il y ait d'autres véhicules d'épargne où est-ce que, là, on... ou d'investissement auxquels il faut faire attention de ne pas créer une iniquité fonctionnelle? Puis je ne parle pas du débat sur l'avantage économique ou non d'avoir des... de gains en capital. Mais quelles sont les problématiques? Quelle est l'expérience ailleurs quant à cela?
M. Soublière (Jean R.): Par rapport au gain en capital, il faut réaliser que d'une part on parle d'épargne modeste et périodique, on parle de petits montants. Évidemment, on suppose que, dans un club de placement, éventuellement le montant d'argent va s'apprécier avec le temps, mais initialement donc on parle... La compréhension qui en est faite là-bas, c'est que c'est un avantage qui est donné vraiment à des fins d'éducation, strictement. Donc, c'est pour sensibiliser au niveau de cet aspect-là plus spécifiquement.
Maintenant, l'aspect fiscal est relativement... C'est sûr que ça peut être intéressant d'avoir l'avantage, mais ce qui est plus important encore, je crois, pour atteindre les objectifs d'éducation financière, c'est de permettre le regroupement des épargnants et des investisseurs dans un statut juridique reconnu et balisé. Bon. Quelles sont les embûches présentement? On sait que des gens qui vont constituer un club de placement vont éprouver certaines difficultés lorsqu'ils vont se présenter pour l'ouverture d'un compte de courtage en prenant, ce qu'on appelle communément, là, les sociétés en nom collectif. Vu qu'il n'y a pas de statut défini, les gens peuvent prendre différents statuts juridiques, donc il y a des contraintes administratives et juridiques. Généralement, les gens qui partent des clubs, c'est des gens qui veulent apprendre, donc ce n'est pas des gens qui mettent des sommes énormes là-dedans. On parle d'épargne pédagogique ici. C'est important de comprendre cet aspect-là. Donc, essentiellement, ce qui arrive, c'est que, s'il faut rentrer dans des processus où il faut consulter des avocats pour créer le club puis s'assurer que tout fonctionne au niveau du cadre réglementaire, le fait que ce ne soit pas balisé, ça entraîne des coûts qui découragent plusieurs personnes à constituer des clubs. Du côté de l'industrie, les intermédiaires d'un marché aussi... parce que ce n'est pas suffisamment balisé, il y a beaucoup d'intermédiaires qui sont inconfortables pour soutenir le développement de clubs. C'est les commentaires que, dans notre pratique, là, de tous les jours, là, on reçoit.
Donc, ces trois éléments-là sont importants à notre point de vue et justifient qu'on développe un environnement juridique propice pour des clubs d'investisseurs qui vont favoriser leur regroupement puis qui vont leur permettre d'assurer de façon continue la formation.
Mme Gadbois-Lavigne (Nicole): Il y a aussi le fait qu'il y a déjà eu, au Québec, une association de clubs de placement, dont le siège social était à la Bourse de Montréal, qui a été dissoute après le crash de 1987 à cause... bon, on comprend qu'il y avait moins d'engouement, mais qui n'a pas été remise en vigueur. Mais aussi les conditions de marché ont changé depuis ce temps-là, parce que, bon, la rémunération des représentants, des intermédiaires de marché a changé depuis ce temps-là, et il y a des normes et il y a des minimums que les représentants doivent absolument faire lorsqu'ils font des transactions, et ce que ça a créé, c'est que ça a créé un vide. Alors, ces représentants-là qui soutenaient, au niveau formation, ces clubs de placement là n'existent plus parce que... En fait, à cause des objectifs et des quotas qui leur sont donnés, ils ne peuvent plus se permettre de faire ça. Alors, il y a un trou, il n'y a plus vraiment de façon pour les gens de se regrouper, un, parce qu'ils ne savent pas où aller pour monter toute la structure de façon facile et efficace, et, de l'autre côté, ils n'ont pas vraiment, non plus, nulle part où se tourner pour avoir une formation qui est indépendante et bien structurée.
Alors, c'est pour ça que, quand on parlait que ça devrait être... il devrait y avoir un encadrement avec une affiliation du club à une ou des fédérations ? là, on s'entend, parce qu'il y a le libre choix des gens ? bien c'était pour encadrer toute cette partie-là et s'assurer que le but ultime était respecté et que ce n'étaient pas des gens qui voulaient faire de la spéculation ou qui voulaient mettre des gros montants d'argent à l'abri de l'impôt qui seraient là-dedans. Alors, il faudrait effectivement que les clubs de placement aient un maximum d'investissement aussi, là.
M. Paquet: Peut-être juste un élément ? peut-être que vous n'avez pas la réponse aujourd'hui ? mais qui pourrait être intéressant. C'est que, dans la pratique, un des éléments, je comprends que vous parlez d'épargne pédagogique, mais comment faire la distinction, à un moment donné, entre... mettons qu'ici, autour de la table, avec vous, on part un club... aussi, peut-être qu'on est un peu plus familiers avec des expériences en finance, et comment distinguer à quel moment... qu'est-ce qui est un club, un club pédagogique, et un qui est vraiment un club qui pourrait profiter davantage...
M. Soublière (Jean R.): C'est là l'importance d'avoir un statut juridique qui balise ces choses-là.
Un des objectifs qu'on a ? et on avait fait des représentations à l'époque, dans le cadre de la politique de développement coopératif, Industrie, Commerce, lorsque le gouvernement a modifié la Loi sur les coopératives; un des objectifs qu'on a ? c'est de donner aux clubs un ensemble de règles qui font en sorte qu'on oriente vraiment la fonction du club vers l'éducation. La règle un membre-un vote, par exemple, ce n'est pas quelque chose qu'on va retrouver à l'intérieur de sociétés par actions ou des fonds communs. Je veux dire, quelqu'un, par exemple, qui voudrait détourner la mission éducative d'un club n'a pas d'intérêt, dans un cadre juridique comme celui-là, à le faire. Alors donc il y a un ensemble de balises comme ça, structurelles, qui sont importantes d'imbriquer dans une loi qui va préserver le caractère éducatif.
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(14 h 30)
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Maintenant ? et là, si vous me permettez, je vais me raccrocher à une question par rapport à la qualité de l'éducation et de la formation et le processus, aussi, cognitif d'un individu qui veut apprendre dans les marchés financiers ? ce qu'on constate, c'est que les gens commencent avec des besoins de base, et ils évoluent dans le temps en fonction de leur profil d'investissement. Leur besoin éducatif suit, dans le fond, leur profil d'investissement. Plus la personne va être habile, va s'approprier les différents produits et services, plus son besoin de formation, aussi, est continu dans le temps, parce qu'il y a des nouveautés, il y a des nouvelles caractéristiques, il y a des nouveaux produits. Et c'est dans ce sens-là que ce qu'on privilégie à l'Actif, dans notre réseau, c'est une formation continue. Et le club d'investisseurs devient un véhicule d'éducation important, à ce moment-là, parce que la mise en commun des gens, ça devient un groupe d'appartenance qui évolue dans son processus d'apprentissage et qui assure certains liens de continuation, certains liens d'usage dans le groupe, une certaine cohésion qui permet de baliser aussi l'activité de formation.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Merci. Bienvenue, on est heureux que vous soyez ici, cet après-midi, pour nous présenter un autre volet. Et mes questions vont peut-être vous sembler un peu à l'encontre de votre mission, mais le seul but, c'est de pouvoir éclairer un peu par rapport à notre travail qu'on fait, nous, comme commission.
On insiste beaucoup pour que les courtiers, pour que les maisons qui ont ces produits disponibles aux consommateurs, puis on comprend que, dans votre cas, c'est surtout au niveau du petit et moyen consommateur.... Au Québec, on parle de personnes qui vont acheter des REER, dans bien des cas, qui vont passer par... parce que, veux veux pas, à ce moment-là, ils sont à l'abri au niveau de la fiscalité, hein, et, pour d'autres, ce sont des investissements qui sont quand même relativement petits par rapport à ça. Donc, on parle du petit et moyen, là.
De plus en plus, on insiste, nous, pour que ceux qui vendent ces produits-là informent et développent des moyens pour bien faire comprendre et bien faire saisir à ces gens-là, aux consommateurs, qu'est-ce qu'ils achètent. Parce que, prenez, par exemple, quand vous recevez, une fois par trois mois, votre relevé sur vos fonds de placement, hein, il y a bien des cas que, bon, dans le brouhaha des activités quotidiennes des gens ? famille, enfants, dodo, travail ? ils ne commenceront pas à s'asseoir puis lire l'ensemble de la documentation, ils vont aller à l'essentiel: combien ça valait voilà trois mois, puis combien ça vaut aujourd'hui, puis combien j'ai augmenté ou combien j'ai diminué par rapport à ces fonds-là. Puis, dans bien des cas, s'il s'aperçoit que ça diminue trop, bien là il va appeler chez Desjardins ou il va appeler chez quelqu'un d'autre puis il va demander: Bien, qu'est-ce qui s'est passé, comment ça se fait que mes fonds, enfin, ont diminué, tu sais? En gros, là, dans le moment, c'est à peu près ce qu'on a.
Ça fait que, nous, notre alignement, c'est d'avoir le plus d'information et de transparence de la part de ceux qui mettent en marché ces produits-là. Donc, vous me répondez quoi par rapport à ça, versus le rôle que vous avez à jouer, nous, en disant: Bien, vous devez mettre en place des mesures, par l'entremise de l'AMF, pour être capable de donner toute l'information facile, accessible, compréhensible pour les consommateurs?
Mme Gadbois-Lavigne (Nicole): En fait, dans le mémoire, on avait deux volets. Ce qu'on a dit, c'est que ce qui s'est passé dans les dernières années, il y avait une partie qui était... Je ne parlerais pas... en fait je parlerais puis je ne parlerais pas de responsabilité des épargnants, parce qu'il y a quand même des règles de base en investissement qui disent: Tu ne mets pas tous tes oeufs dans le même panier, et: où il y a gros rendement, il y a gros risques, et aussi, bon: plus l'entreprise est petite, plus on a de chances d'avoir des... plus cette entreprise-là risque de ne pas être capable de passer le cap, pour une raison ou pour une autre. Alors, une bonne règle de placement, de gestion financière personnelle ferait en sorte qu'on n'aurait pas mis tout notre argent dans un seul fonds ou chez un seul émetteur. Ça, c'est un. Mais, même si l'émetteur aurait voulu, on s'entend, vouloir faire l'exercice de vérifier son émetteur, dans certains cas il n'aurait pas pu parce qu'en fait il ne recevait même pas les bons états de compte.
Alors, ce qu'on disait dans notre mémoire, c'est qu'il y a des règles de gouvernance qui sont là et dans lesquelles il y a eu des assouplissements faits parce que c'étaient des petits émetteurs.
Et je pense que c'était louable de dire: Bon, on veut essayer de favoriser l'émergence de petits émetteurs au niveau du Québec, mais je pense qu'on aurait pu le faire autrement, en gardant les règles qu'on avait déjà, qui étaient des règles de contrôle et des règles de séparation des rôles et dans lesquelles on avait des fiduciaires qui normalement font le rôle de s'assurer que l'application des conventions et des règles de placement est bien appropriée.
Mais, quand on dit... quand on laisse un petit investisseur... un petit émetteur, je m'excuse, faire à la fois le rôle de: je me surveille puis c'est moi qui prends les décisions, en fait on enlève justement ces contrôles-là aux émetteurs qui en ont le plus besoin. Parce que ce sont des petits émetteurs, on s'entend, c'est normalement des petites boîtes qui n'ont pas beaucoup de ressources, et on leur demande de jouer à la fois le rôle de gardien, de promoteur, parce que, bon, ils sont là parce que c'est une entreprise privée qui veut faire des bénéfices, et on leur dit: Bien, il faut à la fois que tu fasses des bénéfices, fasses croître ton entreprise, mais qu'en plus tu te contrôles. Je pense que c'est un peu dangereux. Et ce qu'on avait suggéré, c'est de dire: Bon, bien, ces règles-là devraient demeurer là, et on devrait garder le partage des responsabilités autant au niveau des petits émetteurs que des gros. Mais, si on voulait favoriser, on aurait dû plutôt rembourser ces frais de fiduciaire là pour les encourager et s'assurer que justement, cette bonne gouvernance là, ils acquerraient eux autres mêmes ses propres...
Le Président (M. Hamad): Alors, on va aller à l'autre côté. Est-ce que... Y a-tu... Le député de Charlevoix.
M. Bertrand: Merci. À la page 7 de votre mémoire: «Il a été également soulevé que les pouvoirs du fiduciaire externe étaient illusoires de par la menace de résiliation de son contrat par le gérant ou l'entité qu'il est supposé surveiller.» Et là vous faites quatre recommandations, quatre mesures.
Je voudrais savoir: Les mesures que vous proposez pour pallier à la problématique des pouvoirs illusoires du fiduciaire ne risquent-elles pas de causer des délais et des coûts supplémentaires, qui seraient assumés par les investisseurs, j'imagine?
Mme Gadbois-Lavigne (Nicole): Non, parce qu'en fait, si vous étiez un... si vous aviez une fiducie personnelle, vous aviez décidé de faire un testament en fidéicommis, personnellement, celui que vous auriez nommé comme fiduciaire ferait ce genre de travail là. Et je ne vois pas pourquoi faire qu'un émetteur, alors que les grosses boîtes, c'est déjà... En fait, les grosses boîtes d'émetteurs sont soumises à ça. Ce n'est pas plus complexe que ce que les grosses boîtes font. Oui, je suis d'accord qu'il y a un coût, mais en fait est-ce que ça ne coûte pas plus cher de ramasser les pots cassés une fois qu'un propriétaire... parce que ce n'est pas la majorité, mais, au moment où un propriétaire transgresse ces contrôles-là, que de lui rembourser le 1 % ou 1,5 % que ça pourrait coûter ou en fait que les fiduciaires chargent généralement? Je pense que le différentiel est très bas entre les deux.
M. Bertrand: À la page 8, vous dites: «Nous sommes en faveur d'une peine pénale minimum plus élevée sans possibilité de réduction de peine.» Puis là vous continuez votre paragraphe et vous parlez d'une surveillance accrue par l'AMF. J'aimerais que vous élaboriez davantage là-dessus.
Mme Gadbois-Lavigne (Nicole): Pouvez-vous répéter? Parce que je ne suis pas certaine que...
M. Bertrand: Vous dites, à la page 8: «Nous sommes en faveur d'une peine pénale minimum plus élevée sans possibilité de réduction de peine. Le fait d'accroître la peine pénale maximale n'aurait pas d'effet, puisqu'[elles sont rarement appliquées] ? ce qui est vrai. Nous estimons d'autre part que l'Autorité des marchés doit sanctionner avec rigueur toutes les infractions qui tombent sous sa juridiction, même celles qui sont de moins grande importance, et qu'elle continue de publiciser ces actions comme elle le fait présentement. Une surveillance accrue, accompagnée d'une médiatisation subséquente et continue des sanctions, aura à la longue un effet dissuasif.» Alors, ma question, c'est: Quelle pourrait être la surveillance accrue exercée par l'AMF dont vous mentionnez ici?
n(14 h 40)nMme Gadbois-Lavigne (Nicole): Au niveau des... En fait, il y a des règles présentement qui existent dans lesquelles il y a ce qu'on appelle le «buy-side», qui est l'émetteur, et il y a le «sell-side», qui est le courtier, et il y a toujours le gardien des titres et le fiduciaire, et généralement, quand on a une convention de fiducie, l'émetteur doit... celui qui achète les titres va faire en sorte que le courtier en valeurs mobilières avec lequel il passe les transactions va envoyer à son trust directement la transaction qu'il a faite, et le trust ne va pas faire le règlement de la transaction, à moins que cette transaction-là soit dans la politique de placement et que l'argent qui rentre... en fait les titres qui rentrent soient des titres qui sont admissibles et que c'est pour le bon montant. Et ça, si le rôle de fiduciaire...
En fait, dans les cas où le fiduciaire transgresserait ça ou ne voudrait pas le faire, généralement, de la façon dont ça se passe, c'est que le fiduciaire dit qu'il ne veut pas renouveler son mandat ou il casse le mandat et il demande au courtier... à l'émetteur de changer de fiduciaire. Nous, on dit: S'il y a changement de fiduciaire, il y a peut-être... justement à cause de la confidentialité dans laquelle le fiduciaire peut être pris, il devrait y avoir de façon systématique une enquête, en fait une vérification de l'Autorité des marchés financiers chez cet ancien fiduciaire là de façon à s'assurer qu'effectivement il n'y a pas de problématique, comme ça se fait quand une petite boîte de courtage entre en poste. Moi, je me souviens, parce que j'ai déjà travaillé... J'ai déjà fondé des boîtes de courtage, et la Commission des valeurs mobilières venait nous voir à tous les six mois parce qu'on était nouveaux. Puis c'était normal, ils voulaient s'assurer qu'on faisait les choses correctement. Je ne vois pas pourquoi qu'un émetteur de fonds de placement ne serait pas régi par les mêmes règles.
M. Bertrand: À la page 18: «Sur la question de la couverture, nous croyons que la problématique provient du manque d'encadrement et d'indépendance des fonctions de contrôle des petits gestionnaires en cours de mandat. La supervision des activités par des organismes externes [...] non liés autrement que par un contrat de gestion, devrait pouvoir protéger adéquatement l'avoir des épargnants.» Alors, j'aimerais savoir: Est-ce à dire que vous ne jugez pas nécessaire d'étendre la couverture du Fonds d'indemnisation des services...
Mme Gadbois-Lavigne (Nicole): Non. Je pense que présentement... En fait, la problématique qu'on a rencontrée était strictement une problématique procédurale, dans laquelle les contrôles n'ont pas été mis en place. Je pense que ce n'est pas... c'est une mauvaise gestion d'entreprise et je pense qu'on a fait confiance... Je peux comprendre que les gens aient fait confiance à une petite boîte d'émetteurs pour essayer de les aider, mais je pense que de mettre une pratique sur laquelle on va demander aux épargnants, soit avec un frais sur des transactions, qu'on a déjà vus en Bourse, ou en demandant au distributeur de payer une... je pense que ça ne règle pas le problème. Le problème est un problème vraiment opérationnel, à ce niveau-là.
M. Bertrand: Merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, je vous remercie de vous présenter à l'Assemblée nationale, présenter votre mémoire.
Je suspends les travaux pour quelques secondes pour permettre à l'autre groupe de se présenter.
(Suspension de la séance à 14 h 42)
(Reprise à 14 h 44)
Le Président (M. Paquet): ...s'il vous plaît! La Commission des finances publiques reprend ses travaux. Nous entendrons maintenant, et je souhaite la bienvenue aux représentants de la Chambre des notaires du Québec, le président, Me Denis Marsolais, ainsi que Me Denis Lapointe. Alors, bienvenue à la commission. Nous vous écoutons.
Chambre des notaires du Québec (CNQ)
M. Marsolais (Denis): Alors, merci, M. le Président. D'abord, permettez-moi de présenter davantage mon collègue, Me Denis Lapointe. Me Lapointe est évidemment notaire et un spécialiste en services financiers, auteur de plusieurs volumes concernant toute la panoplie des services financiers.
C'est avec grand intérêt que nous participons aujourd'hui, évidemment, aux travaux de la commission consacrés à la protection des épargnants du Québec. L'initiative de la Commission des finances publiques est sans contredit, à notre avis, à louanger, puisqu'elle a choisi d'accorder à tous et à chacun le droit de parole. Nous vous remercions de nous accueillir et de nous autoriser à nous exprimer sur cette question qui touche de près la mission première de la Chambre des notaires du Québec, comme tout autre ordre professionnel, soit d'assurer le public et d'assurer la protection du public. La Chambre des notaires du Québec se sent vivement interpellée par le sujet de la protection des épargnants. En effet, elle a mis sur pied, il y a deux ans déjà, un nouveau champ d'intervention pour les notaires québécois: celui de la protection du patrimoine. Nous sommes donc heureux de participer à cette consultation qui a été enclenchée suite à la découverte de risques majeurs pour la sécurité des patrimoines québécois.
Dans le mémoire que nous vous avons soumis, nous avons proposé quelques pistes de solution. Celles-ci ont pour objectif de restaurer la confiance des épargnants dans les piliers de notre système financier. Les drames humains ? et c'est ça qu'on essaie de solutionner aujourd'hui; les drames humains ? qu'ont vécus les petits investisseurs victimes des récents scandales financiers n'ont pas ou peu été rapportés. Or, certains ont perdu la presque totalité de leurs REER ou de leurs actifs financiers pouvant être investis. Plusieurs ne seront plus en mesure de travailler pour récupérer leurs épargnes. Il importe donc que nous puissions redonner confiance à ces investisseurs, que nous puissions même leur garantir, tout en étant prudents, que ce type d'événement ne pourra jamais plus causer des dommages comme ceux qu'ont subis les épargnants impliqués dans de tels scandales.
Il importe maintenant d'envisager des solutions qui permettraient ? je dis bien «qui permettraient» ? de réduire substantiellement le risque que prennent les épargnants du Québec. Dans un premier temps, il nous apparaît important de garder à l'esprit que les problèmes soulevés par les récents scandales financiers ne sont nullement liés à la distribution des produits et services financiers. Cette mise au point est importante, puisque certains ont tenté d'en faire porter l'odieux aux conseillers impliqués dans la distribution des produits concernés. Or, l'histoire nous démontre qu'il est impossible, par exemple, pour des représentants en épargne collective de mettre en garde leurs clients, alors que les informations qu'ils reçoivent des fonds sont à la base viciées en raison de certaines données financières tronquées. La protection des investisseurs exige donc que l'on comble le vide en ce qui concerne les émetteurs ou les fabricants de produits qui auraient fait preuve de manoeuvres dolosives ou d'opérations de détournement de fonds.
Par ailleurs, bien que le scandale le plus important relève du secteur des fonds d'investissement, il faudrait éviter de penser qu'il peut à lui seul engendrer des situations comme celles que l'on a connues. Nous croyons que toute nouvelle mesure de contrôle, de surveillance ou d'indemnisation devrait s'adresser à tous les types de produits d'investissement, tels que le fonds mutuel ou les fonds mutuels, les fonds distincts, les fonds de couverture, les fonds des travailleurs, les fonds en gestion commune ou en gestion privée ainsi que les fonds transigés en bourse ou autres produits d'investissement d'appellation imaginative. Tous ces types de produits ont un point en commun: ils sont gérés par des êtres humains qui à l'occasion, malheureusement, peuvent connaître des moments d'égarement ? et je pèse mes mots ? entraînant de fâcheuses conséquences. Il faudrait donc éviter de ne viser, par des mesures correctrices, que les fonds communs de placement, au risque de devoir plus tard refaire le même exercice pour les autres... concernant une autre série d'émetteurs.
À cet égard, nous souhaitons réitérer notre position en ce qui a trait à la protection de l'épargne-retraite. Les autorités législatives québécoises sont intervenues récemment pour préserver le droit à l'insaisissabilité de certains véhicules de retraite, notamment les REER ainsi que les rentes offertes par les assureurs et les sociétés en fiducie. Comme nous l'avions proposé dans les commentaires que nous avions transmis dans le cadre des travaux portant sur le projet de loi n° 136, soit Loi modifiant la Loi sur les assurances et Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne, nous espérons que les autorités législatives que vous représentez amenderont le Code de procédure civile afin de permettre que tous les actifs de retraite soient entièrement insaisissables et protégés, puisque l'objectif de la présente commission est de voir à mettre des mesures pour protéger adéquatement les épargnants du Québec.
n(14 h 50)n Abordons maintenant les mesures de contrôle et de surveillance. Nous avons pu constater qu'au cours des dernières années l'emphase a été mise sur le respect des règles d'éthique et de conformité applicables aux courtiers et aux intermédiaires. Il en résulte que le nombre de poursuites disciplinaires, et c'est tant mieux, a tendance de diminuer de manière efficace au fil des ans. Le régime réglementaire qui encadre l'exercice des activités des représentants est fort complexe, vous en conviendrez. Ces derniers sont soumis à une quantité impressionnante de règles et de règlements. Nous pensons qu'en ajoutant davantage ça aurait pour effet selon nous un effet pervers, soit celui de disperser les règles de conformité au point de les rendre inefficaces. Nous pensons que les règles actuelles qui prévoient les activités des représentants sont suffisantes. N'oublions pas que le conseiller en services financiers est bien souvent le premier rempart de protection des épargnants. Il y a donc lieu de les outiller davantage de manière à ce qu'il soit plus facile pour eux de détecter les fraudes. Il ne faut pas les accuser de torts dont ils sont eux-mêmes victimes.
Nous sommes cependant en faveur de l'obligation d'adhésion des gérants d'organismes de placement collectif à l'Autorité des marchés financiers. Il est très important selon nous que les autorités réglementaires puissent bien connaître les antécédents de ceux qui se verront confier des millions, voire même des milliards de dollars par des épargnants bien souvent peu informés en matière de finance.
Nous approuvons également l'établissement d'un droit prépondérant en faveur de l'AMF, de l'Autorité des marchés financiers. Celui-ci prendrait en charge l'administration provisoire d'un fonds d'investissement lorsqu'une situation problématique a été identifiée. Encore faudrait-il cependant que l'AMF puisse exercer un contrôle serré sur les activités des émetteurs. En ce sens, elle pourrait tirer profit de l'expérience de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, qui intervient précocement auprès de ses membres en difficulté.
Parlons maintenant des pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers. D'abord, nous estimons qu'à l'instar de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières il y aurait lieu de distinguer ses pouvoirs d'encadrement des principaux acteurs financiers des pouvoirs qui lui sont attribués en ce qui concerne les autres intermédiaires. Il serait souhaitable à notre avis que l'AMF consacre toute son énergie à la surveillance et au contrôle des émetteurs de titres et des fabricants de produits. En ce qui a trait à l'encadrement de la distribution, qui est actuellement sous sa responsabilité, nous suggérons que l'AMF, en vertu de son pouvoir de délégation, puisse en attribuer les responsabilités, par exemple, à la Chambre de la sécurité financière ou à l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. Nous croyons cependant qu'il serait souhaitable qu'un seul de ces organismes puisse être responsable de toutes les opérations de détail ? valeurs mobilières en plein exercice ou d'exercice restreint, assurances, planification financière, etc., ? de telle sorte qu'il y ait un contrôle sur les émetteurs et qu'il y ait un contrôle sur les distributeurs.
Nous estimons de plus que la discipline de la planification financière devrait être intégrée à toutes les formations de base ? assurances de personnes, courtage en valeurs mobilières ou en fonds mutuels seulement. En effet, il s'agit d'une approche qui devrait être utilisée par tous les intermédiaires, sans exception. Nous croyons qu'il devrait n'y avoir que trois titres réglementaires dans le domaine de la distribution: celui de conseiller en placement, celui de représentant en épargne collective et celui de conseiller en sécurité financière. Tous devraient disposer de connaissances mises à jour en planification financière, et les programmes de formation continue pour chacun des permis d'exercice devraient relever d'une même entité.
En ce qui a trait au cumul des fonctions, nous estimons que la fonction de fiduciaire est incompatible avec celle de la gestion des fonds. Les rôles de fiduciaire et de gérant sont à notre avis bien définis: le fiduciaire doit, quant à lui, avoir pour principale préoccupation de protéger des porteurs de parts; le gérant se voit, lui, confier la tâche de gérer adéquatement les fonds qui lui sont confiés. Le premier doit être en mesure de remplacer le second lorsqu'il faillit à sa tâche. Il va donc de soi que, pour assurer ce rôle de surveillance, on ne peut envisager de confier les deux fonctions à la même personne. On a également soulevé la question de la constitution d'un comité indépendant chargé de surveiller les activités des différents intervenants. Il s'agirait à notre sens d'une bonne initiative.
Nous voulons maintenant parler des mesures d'indemnisation. À notre avis, il serait pertinent qu'à l'instar de certains pays européens nos mesures d'indemnisation couvrent toutes les situations d'insolvabilité, et ce, peu importent les faits qui ont pu mener à une telle situation. Il serait donc important de remettre en question les programmes d'indemnisation, qui ne couvrent qu'une infime ? vous en conviendrez, là ? partie des demandes de dédommagement adressées par les épargnants.
Des mesures d'indemnisation efficaces couvrant les cas de fraude seraient de nature à restaurer à notre avis, et même assurément, la confiance du public dans le système financier québécois. Elles sont indispensables, car, malgré tous les efforts que peut déployer l'AMF, elle ne pourra à elle seule éviter l'arrivée de nouveaux problèmes, de nouveaux scandales. En effet, au moment où cet organisme dispose de preuves irréfutables pour intervenir pour l'administration des affaires d'un organisme de placement collectif, il est possible que cela soit trop tard: les dommages subis par les épargnants sont déjà, bien souvent, hors de proportion.
Nous proposons donc que le rôle du Fonds d'indemnisation des services financiers soit élargi. Dans un premier temps, il pourrait combler le vide de la couverture des cas d'insolvabilité des cabinets en épargne collective. Actuellement, le Québec ne dispose pas d'une telle mesure de protection. De plus, on pourrait élargir le mandat de ce fonds afin qu'il couvre dorénavant tous les cas de fraude pouvant provenir des gestionnaires de fonds communs qui distribuent leurs produits sur le territoire québécois. Le fonds pourrait ainsi être rebaptisé: Fonds d'indemnisation en matière de produits et services financiers.
L'État n'a pas à assurer le financement de ce fonds, c'est à l'industrie qu'incombe la responsabilité de s'autoréglementer pour éviter la commission de nouvelles fraudes. L'industrie pourrait ainsi financer un tel fonds sans un impact financier majeur ? évidemment, tout est relatif. À cet égard, un fonds qui disposerait d'une somme de 500 millions de dollars représente 1/10 de 1 % de la valeur des actifs sous gestion dans les organismes de placement collectif au Canada. 1/10 de 1 %.
D'autres intervenants ont exprimé des craintes sur l'impact des frais de financement d'un tel fonds sur les sociétés de fonds mutuels les plus modestes au Québec. Nous sommes d'avis que l'absence de mesures d'indemnisation acceptables aura un effet plus pernicieux pour ces petits fonds: celui de favoriser les sociétés les plus importantes. En effet, les investisseurs ne voudront plus accepter le type de risque auquel les sociétés d'investissement québécoises les ont exposés jusqu'à présent, ce qui a été largement mis en évidence par les derniers scandales. Ce qui fait en sorte que les fonds importants, majoritairement non québécois, seraient favorisés dans un tel contexte. On constate d'ailleurs depuis quelques mois qu'un climat de méfiance est en train de s'installer au plan de la distribution. De nombreux conseillers ont pris la décision d'écarter, à tort ou à raison, les fonds de petite taille de leurs listes de produits financiers.
Contrairement à l'AMF, nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire d'attendre encore cinq ou 10 ans afin de constituer un tel fonds. Les effets néfastes pour l'ensemble de l'économie québécoise doivent amener à agir, à notre avis, plus rapidement.
Notre dernier commentaire porte sur la protection des épargnants à travers les communications qu'ils reçoivent des acteurs de l'industrie. Les prospectus dits simplifiés ne sont pas consultés par la très vaste majorité des épargnants. Ils ont beau être simplifiés, là, mais ce n'est pas assez. Il s'agit d'un outil de divulgation d'information peu utile, puisque peu d'investisseurs en prennent connaissance. Les économies que réaliserait l'industrie en n'offrant ce document que sur demande permettraient de financer le fonds d'indemnisation proposé.
Il serait selon nous davantage approprié d'imposer aux courtiers en valeurs mobilières, cabinets de services financiers ou autres distributeurs la remise à chaque client de documents d'information. Ce dernier aura pour but d'expliquer sommairement, et non pas de façon simplifiée, les risques associés à chaque type d'investissement et ferait état des différents mécanismes de protection à sa disposition.
En ce qui concerne les obligations de divulgation, il nous semble approprié de maintenir les exigences actuelles en ce qui a trait à la production de prospectus, d'états financiers ou autres ? il me reste 20 secondes, M. le Président. Il faut cependant s'assurer d'informer les investisseurs qu'ils peuvent en tout temps obtenir copie des documents produits.
Il me reste, M. le Président, Mme la députée et Mmes... les députés, de vous remercier. Et j'espère que, nos recommandations... ou nos suggestions, on soit en mesure d'en discuter ensemble dans les 30 minutes qu'il nous reste. Et je me permettrai de céder la parole à M. Lapointe pour les réponses aux questions. Voilà.
n(15 heures)nLe Président (M. Paquet): Alors, merci beaucoup. Merci beaucoup, Me Marsolais. Alors, je vais peut-être commencer par une question, ensuite je vais céder la parole à mes collègues.
Vous mentionnez d'abord des chiffres par rapport au... vous dites que c'est une évidence que vous avez une réduction de référencement des courtiers à des fonds de petite taille. Est-ce que vous avez des sources là-dessus? Parce que ce serait intéressant, parce que l'évidence semble être un peu mixte, là, à cet égard.
M. Lapointe (Denis): Je n'ai pas de source officielle, je ne peux pas vous fournir de chiffres. Moi, je le vois à l'interne parce que j'exerce dans ce milieu-là. C'est sûr que, quand on a vu les problèmes qu'on a rencontrés récemment, ça visait surtout des compagnies de petite taille. Alors, c'est sûr qu'à ce moment-là on a tendance de plus en plus à multiplier le nombre de sociétés qu'on va retrouver dans les portefeuilles de clients, en se disant: Bon, bien, là... à ce moment-là, on répartit le risque. Évidemment, bien on a vu dans le passé aussi qu'il y a eu certaines fraudes qui ont été couvertes par des grands fonds mutuels parce qu'il y avait les ressources, à ce moment-là, pour effacer les pertes encourues par des investisseurs. Alors donc, on a le réflexe un petit peu de se dire que, si jamais il y a un autre problème, si c'est une société majeure, bien, évidemment, elle va trouver le moyen d'indemniser les pertes, parce qu'il n'y a pas d'autre mécanique pour l'instant. Alors, je pense que c'est la réflexion que beaucoup de conseillers ont faite dans...
Le Président (M. Paquet): Parce que l'évidence était un peu mixte, ce n'était pas tout à fait clair. Je ne dis pas qu'il n'y avait pas ce réflexe-là, mais en bout de piste on n'a pas les chiffres qui permettent de dire: C'est clairement... C'est possible qu'il y ait une tendance comme celle-là, mais ce n'est pas complètement clair.
La question que je veux poser maintenant, c'est la question du fonds d'indemnisation, que vous suggérez d'élargir en termes de couverture pour tous les faits qui pourraient amener à un problème, incluant la fraude qui pourrait venir de gestionnaires de fonds, par exemple. Un des éléments que vous n'abordez pas, ou je ne l'ai pas entendu dans votre présentation... Vous parlez d'un fonds de 500 millions, par exemple... pour l'ensemble du Canada ou juste pour le Québec? Vous disiez que ça représente 1/10 de 1 % pour tous les fonds sous gestion au Canada. Mais, bon, il y a une question de la taille. Ce chiffre-là, est-ce que c'est un chiffre qui est raisonnable? Est-ce que c'est pour couvrir les différents risques? Comment vous évaluez les risques pour arriver à un chiffre comme celui-là ou autre chiffre, s'il y a lieu?
Et une des problématiques, il y a la question de la déresponsabilisation, que certaines gens nous ont soulevée, que ça peut créer, que, malgré l'objectif très louable qu'on pourrait vouloir rechercher par cette mesure, il pourrait y avoir un effet qui pourrait contrebalancer, dans une certaine mesure, ou on ne sait pas dans quelle mesure, l'aspect déresponsabilisation.
Et finalement l'aspect d'harmonisation. Si le Québec était le seul à faire cela, mettons, dans l'année qui vient ou d'ici deux ans, et mettons qu'on n'ait pas encore convaincu le reste du Canada à y arriver, quel est l'impact par la suite? Avez-vous évalué l'impact de cela? Et est-ce que, s'il n'y avait pas harmonisation ? vous suggérez quand même que le Québec le fasse ? ...il fasse bande à part, avec les conséquences que ça pourrait avoir?
M. Marsolais (Denis): Dans le cas de déresponsabiliser les auteurs, les acteurs du système, je sers toujours l'argument à l'effet de l'assurance automobile au Québec. À partir du moment où on a décidé qu'il n'y avait plus de responsabilité en matière automobile et qu'il y avait indemnisation par l'État, ça n'a pas fait en sorte que les citoyens ont fait exprès pour avoir un accident parce que de toute façon ils étaient indemnisés. C'est la même chose que... Lorsqu'un professionnel dans ce milieu-là, même s'il y a un fonds d'indemnisation qui va couvrir, en cas de problème majeur, son client, ne fera pas exprès pour se mettre dans une... pardon, dans une situation qui va... Ce n'est pas parce qu'il n'est pas responsable qu'il va... La réputation, des fois, ça a beaucoup plus de valeur que la responsabilité, et la confiance, dans ce milieu-là, est une donne importante, et je ne pense pas qu'on va déresponsabiliser les acteurs du système parce qu'il y a un fonds d'indemnisation.
Concernant l'évaluation du fonds...
M. Lapointe (Denis): J'ajouterais peut-être, au niveau de la déresponsabilisation, qu'au fond le fonds d'indemnisation, on le voit comme un recours ultime, c'est-à-dire qu'avant d'en arriver à une indemnisation on a passé d'abord par des mesures de contrôle, on a passé par des mesures de coercition pour les entreprises qui ne se comportent pas convenablement, et arrive en bout de piste, bien, le fonds d'indemnisation, parce que l'individu ou la société en question a réussi à passer à travers tout le filet de sécurité qu'on s'était donné auparavant. Alors donc, c'est sûr que le fonds d'indemnisation en soi, s'il y a juste ça, ça ne mène pas à grand-chose. Il faut d'abord qu'il y ait aussi... il faut que ce soit accompagné d'autres mesures.
Quant au chiffre de 500 millions par rapport à 660 milliards ? 600 milliards au moment où j'ai écrit le mémoire, maintenant on est rendu à 660 milliards ? ça, c'est l'industrie des fonds d'investissement au Canada, c'est des chiffres que je laisse à la commission ou éventuellement à un comité de travail à apprécier. Moi, je suis parti des cas connus qui représentent des détournements de fonds présumés de l'ordre de 100 millions, alors je me dis: Bon, une fois qu'on en a... trois, quatre fois ces quantités-là en réserve, peut-être que c'est suffisant.
Est-ce que ça devrait s'appliquer seulement au Québec? Je pense qu'il y a urgence de le faire pour le Québec, parce qu'au fond c'est toute l'industrie des fonds communs de placement au Québec qui a encaissé beaucoup avec ce qui est arrivé, et je pense qu'on se doit de prendre l'initiative. Les fonds communs de placement, au Canada, sont distribués à travers le Canada, et je ne pense pas que ça va constituer un frein pour une société, le fait qu'il y aurait une cotisation quelconque à payer pour distribuer au Québec, du moins je ne le pense pas. Au niveau de... Je ne sais pas si ça répond à votre question? Peut-être...
Le Président (M. Paquet): Ça donne des éléments. Une question d'applicabilité: Par exemple, un fonds sous gestion d'origine canadienne qui serait distribué au Québec, est-ce qu'il serait couvert par le fonds ou il ne le serait pas? Quel pourcentage? Il peut y avoir des questions d'applicabilité, mais c'est un autre enjeu.
M. le député de... vice-président de la commission, M. le député de Charlevoix.
M. Bertrand: Merci. MM. Marsolais et Lapointe, bonjour. Vous aviez déjà... vous nous aviez déjà fait une recommandation et vous revenez, à la page 9 et 21... «Comme nous l'avions proposé dans les commentaires que nous avions transmis dans le cadre des travaux portant sur le projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur les assurances et la Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne, nous espérons que les autorités législatives amenderont le Code de procédure civile afin de permettre que tous les actifs de retraite soient entièrement insaisissables et protégés.» Puis ça, c'est page 9. Vous continuez: «Nous désirons également souligner l'importance de rendre tous les REER insaisissables et protégés.» À ma connaissance, les REER, on a réglé ça, il me semble. Sinon, j'aimerais savoir c'est quoi de plus qu'il faut faire, parce qu'on a travaillé là-dessus. Et, quand vous dites: Leurs actifs de retraite à l'abri ? autres que les REER, j'imagine ? c'est quoi? C'est quels autres actifs? Est-ce que ce sont, exemple, les fonds communs non enregistrés ou...
M. Lapointe (Denis): En fait, la question d'insaisissabilité des régimes d'épargne-retraite, elle est loin d'être résolue. On s'est attaqué uniquement à un dossier, c'est celui des régimes d'épargne-retraite qui sont commercialisés via les assureurs, alors produits qu'on associe à des rentes. Alors, la législation qui a été adoptée ici, à Québec, visait uniquement ces produits-là. Donc, au moment où on se parle, on pense que les REER qui sont distribués par les assureurs pourraient être insaisissables. Je dis «on pense», parce qu'il y a toujours une décision de la Cour suprême qui invalidait certains types de REER. Puis on ne sait pas si, bon, cette législation-là passerait le test. Mais, maintenant, il y a toutes sortes de REER. Il y a des REER autogérés. Par exemple, tous les REER qui sont commercialisés par les courtiers en valeurs mobilières au Québec, et ça, ça représente une grosse partie des épargnes, ces REER là, il n'y en a aucun d'entre eux qui sont insaisissables pour l'instant; ils le sont tous, saisissables. Alors, on pense que la meilleure façon de régulariser la situation et de protéger l'ensemble des épargnants, c'est de modifier le Code de procédure civile pour tout simplement dire que tout ce qui est capital d'épargne-retraite, qui est à l'intérieur d'un régime d'épargne-retraite, est totalement insaisissable. À ma connaissance, il y aurait deux ou trois provinces canadiennes qui auraient légiféré dans ce sens-là au moment où on se parle. Alors donc, le dossier est loin d'être réglé à ce niveau-là.
M. Bertrand: Rappelez-moi donc, pour fins de mémoire, qui s'opposait à ce qu'on aille plus loin?
M. Marsolais (Denis): On oublie ça rapidement, hein?
M. Lapointe (Denis): Qui s'opposait à ce que vous alliez plus loin?
M. Bertrand: Quand vous dites: On a réglé uniquement ceux des compagnies d'assurance.
M. Lapointe (Denis): Bien, c'est dans le sens que cette législation-là parle de fonds distincts. Alors, c'est des fonds qui son vendus uniquement par des assureurs.
n(15 h 10)nM. Bertrand: Mais, si ma mémoire... et ça allait un petit peu plus loin que ça... si ma mémoire est bonne, là. Mais on vieillit, puis ça nous fait défaut des fois, hein?
À la page 14, vous m'avez fait sursauter: «Dans la mesure où l'Autorité des marchés financiers recentre ses activités sur le contrôle et la surveillance des émetteurs et des fabricants, nous ne croyons pas qu'il faille en augmenter les effectifs. En effet, il faut reconnaître que l'Autorité des marchés financiers compte actuellement environ 500 employés, soit 1/6 des effectifs de la Securities Exchange Commission des États-Unis, qui a pourtant à surveiller un marché 100 fois plus imposant que celui qui relève de l'Autorité des marchés financiers.» Est-ce qu'en bon français ça veut dire qu'il y a trop de monde à l'Autorité des marchés?
M. Marsolais (Denis): Non, il y a des nuances à apporter à ces propos-là. L'Autorité des marchés financiers est une nouvelle entité, en restructuration, et je pense que la période des cinq dernières années était une période de structuration. Là, on est ici aujourd'hui pour regarder quels sont les moyens les plus efficients pour assurer une plus grande protection aux épargnants. On pense qu'avec les dossiers qui ont fait l'objet des médias l'effort dans les prochaines années est surtout à mettre au niveau de la surveillance et qu'il y a plein d'organismes, là, qui sont déjà là pour vérifier concernant la distribution. Alors, pourquoi pas, dans les prochaines années, sous l'autorité de l'AMF, qui a un pouvoir de délégation... que l'AMF puisse se consacrer particulièrement au niveau du volet de la surveillance et que, sous l'autorité de son pouvoir de délégation, d'autres entités puissent prendre en charge toute la responsabilité des distributeurs des produits et services financiers?
M. Bertrand: Donc, je ne me trompe pas en disant que ce n'est pas totalement vrai, cette affirmation-là.
M. Marsolais (Denis): Ça dépend de quel point de vue vous l'analysez.
M. Bertrand: Bien, c'est parce que publiquement... ça s'en va publiquement. L'Autorité, vous le dites vous-mêmes, c'est un nouvel organisme qui travaille, à ma connaissance, très fort, tout le monde. Mais, si je laisse entendre, dans un paragraphe d'un mémoire aussi important que le vôtre... Quelqu'un regarde ça, puis, si on ne corrige pas cette affirmation-là, moi, je pense que ce n'est pas tout à fait exact, c'est le moins qu'on puisse dire.
Ceci dit, je ne veux pas faire de débat là-dessus, là, c'est vous-même qui venez dire qu'il faut faire un bémol... Ceci dit, à la page 21, puis je veux garder un petit peu de temps pour mon collègue, là...
Le Président (M. Paquet): Il reste six minutes... 5 min 40 s, ça fait qu'on va pouvoir combiner par la suite.
M. Bertrand: Bon, rapidement. À la page 21, vous dites: «Nous proposons enfin l'établissement avec effet rétroactif d'un fonds d'indemnisation pour les victimes de fraude qui serait financé par toutes les sociétés qui conçoivent des produits d'épargne collective distribués sur le territoire québécois.» Et, ce matin, on a eu une proposition qui était proche, faite par quelqu'un qui justement a subi des préjudices dans ce qu'on sait maintenant. Alors, pouvez-vous élaborer un petit peu plus?
M. Lapointe (Denis): Bien, c'est-à-dire que...
M. Bertrand: Si on peut faire ça rapidement pour permettre une autre question.
M. Lapointe (Denis): Oui. C'est-à-dire qu'il y a déjà des... Je pense que l'Autorité des marchés financiers s'est prononcée, la semaine dernière ou la semaine précédente, à l'effet qu'il y a un certain nombre d'investisseurs qui vont être probablement couverts par le fonds d'indemnisation. Ça représente 25, 30 millions, par rapport aux 130 millions, si on parle de l'affaire Norbourg. Alors, bon, il reste à couvrir le 100 millions entre les deux. Et je pense qu'il y a plusieurs recours qui ont été... plusieurs recours collectifs qui sont en cours, on ne sait pas exactement les sommes qu'on va réussir à récupérer. Toujours est-il que peut-être que... le manquement en fait pour indemniser les investisseurs correctement, on ne le connaît pas pour l'instant, mais ce n'est peut-être pas si élevé que ça. Alors, je me dis: Bon, on pourrait peut-être faire un effort pour essayer de couvrir cette situation-là qu'on connaît, c'est un montant dont on connaît les limites déjà, pour dire: Bien, on repart sur des nouvelles bases et, à ce moment-là...
M. Bertrand: Merci.
Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. M. le député de Marguerite-D'Youville...
M. Moreau: Ah bien, je sais qu'il ne nous reste...
Le Président (M. Paquet): ...et Mme la députée de Matane aussi, s'il y a lieu.
M. Moreau: Bien, je sais qu'il ne nous reste que quatre minutes.
Le Président (M. Paquet): Quatre minutes environ.
M. Moreau: Je vais laisser ma collègue de Matane poser sa question.
Moi, j'aurais voulu vous entendre, parce que vous êtes le président d'un ordre professionnel, et je salue votre collègue qui vous accompagne, sur la question du secret professionnel dans l'angle où elle a été abordée par les représentants du cabinet Ogilvy Renault ce matin ? je sais que vous étiez présents dans la salle ? à savoir qu'en définitive le secret professionnel ne devrait pas être un obstacle à l'égard de l'Autorité des marchés financiers lorsqu'elle décide d'aller chercher les informations chez un professionnel, notamment le comptable, quel qu'il soit, le comptable agréé, CMA, CGA, mais qu'une fois rendu à l'Autorité il y ait une espèce de sceau qui empêche d'aller plus loin vers des tiers mais qui permettrait à l'Autorité d'avoir une autonomie totale pour prendre des mesures conservatoires pour sécuriser les fonds qui feraient l'objet de... en fait qui feraient l'objet de l'enquête, là. Mais ne répondez pas tout de suite à cette question-là, profitez des questions de ma collègue la députée de Matane peut-être pour revenir là-dessus, parce que malheureusement on a quatre minutes, et je sais que c'est assez difficile de tout faire ça en peu de temps.
Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Matane.
Mme Charest (Matane): Merci, M. le député. Bonjour, messieurs. Ma question a trait au fonds d'indemnisation, à l'argumentation que vous avez soulevée à l'effet qu'on n'augmenterait pas nécessairement le taux de déresponsabilisation de la part des différents intervenants. Est-ce que vous avez, dans un premier temps, des comparables, ce qui s'est fait ailleurs, dans d'autres pays relativement à des situations d'épargnants notamment, puisque les exemples que vous nous avez donnés référaient soit à la Société de l'assurance automobile ou au fonds d'indemnisation de, par exemple, plusieurs corporations professionnelles, où on sait très bien que les règles du marché exigent qu'il faut que ces ordres professionnels là soient compétitifs donc avec d'autres qui existent? C'est que le fonds d'indemnisation, comme vous le disiez si bien, n'amène pas les professionnels à être moins compétents ou moins rigoureux dans leur travail, puisque les règles du marché commandent aussi qu'ils puissent garder des honoraires qui sont compétitifs. Est-ce que vous croyez que ce même comparable là pourrait se faire dans le cas des gestionnaires de fonds, justement qui devraient contribuer ou participer à ce fonds d'indemnisation, puisqu'eux aussi sont gouvernés par les règles du marché?
Le Président (M. Paquet): En deux minutes.
M. Marsolais (Denis): Merci pour la question, elle va me permettre de préciser davantage ma pensée sur l'incidence d'une indemnisation versus la responsabilisation d'un professionnel. J'ai parlé de l'assurance automobile parce que la comparaison est facile à faire, et tout le monde connaît le principe de l'assurance automobile. Prenons juste l'exemple du fonds d'indemnisation qui existe à la Chambre des notaires. Donc, si un client subit malheureusement, suite à une appropriation de fonds d'un notaire, et qui... un montant qui ne lui est pas remis, peut s'adresser au fonds d'indemnisation pour être compensé jusqu'à une limite de 100 000 $, peu importe le montant. Ça, c'est une chose. Donc, on vient pallier pour un citoyen, pour un client, un montant qu'il a perdu suite à avoir contracté avec un professionnel.
Pour le professionnel comme tel, et c'est là que ça nous préoccupe, est-ce que le professionnel est déresponsabilisé parce qu'il sait qu'il existe un fonds d'indemnisation et que, si jamais de toute façon, malheureusement, il fraude, bien le client va être payé... pas fraude, mais utilise des fonds à d'autres fins qui lui ont été confiées? Il faut savoir que le professionnel, par ailleurs, lui, il est soumis à un code de déontologie, et là c'est le syndic qui va interagir auprès du professionnel. Il y a risque de radiation, provisoire, permanente, etc., il y a la réputation qui est en jeu, du professionnel, parce que ces cas-là, c'est public, là, ce n'est pas fait en catimini lorsqu'il y a un cas au comité de discipline, vous l'avez vu dans les médias récemment. Donc, je ne pense pas, honnêtement ? puis le comparable est plus facile à faire avec un professionnel dans le milieu des services financiers ? qu'un fonds d'indemnisation va avoir pour effet de déresponsabiliser le professionnel qui aura à conseiller pour des produits financiers. Je ne sais pas si je réponds bien à votre question?
Mme Charest (Matane): Oui.
M. Marsolais (Denis): Je me dépêche, là.
Mme Charest (Matane): Peut-être juste un dernier point.
Le Président (M. Paquet): Il ne reste plus de temps, puis je veux donner le temps aussi au député de Gaspé. Alors donc, M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre: Merci, M. le Président. À la page 14 de votre mémoire, vous abordez la question des planificateurs financiers, et on doit comprendre que vous avez une certaine réticence ou que vous vous opposez à la création d'un ordre professionnel pour les planificateurs financiers. Pourriez-vous nous donner les raisons pour lesquelles vous vous opposez à ça?
M. Marsolais (Denis): D'abord, l'opinion qui a été émise dans le mémoire, c'est dans le cadre de cette commission-ci, donc c'est dans le cadre... On a comme objectif, au terme de cette commission, de voir, de mettre les moyens nécessaires pour maximiser la protection des épargnants au Québec. Nous ne pensons pas que le fait que les planificateurs financiers se retrouvent en ordre professionnel ait une influence pour maximiser la protection des épargnants. Ce n'est que dans ce cadre-là.
M. Lelièvre: Mais par ailleurs, au niveau des planificateurs, reconnaissez-vous qu'ils sont en mesure de pouvoir offrir des services financiers?
M. Marsolais (Denis): Ça, c'est une autre question.
M. Lelièvre: Parce que, là, si vous dites: Non, on va...
M. Marsolais (Denis): Je dis que non, mais regardez. Dans le contexte de... vous proposez des solutions ou des alternatives pour protéger davantage les épargnants au Québec, et je répète ce que je vous ai dit, nous ne considérons pas que le fait que les planificateurs financiers se retrouvent dans un ordre professionnel va maximiser la protection des épargnants, parce que ces mêmes planificateurs financiers sont soumis au contrôle de surveillance de l'AMF, la Chambre de la sécurité financière, etc. Donc, ce ne sera pas une plus-value, à notre avis, pour que la protection soit supérieure. Je ne sais pas si je suis clair dans ma réponse?
n(15 h 20)nM. Lelièvre: Oui, oui, oui, je comprends. Mais, à la Chambre des notaires, il y a des notaires qui font de la planification financière?
M. Marsolais (Denis): Tout à fait. Tout à fait.
M. Lelièvre: Donc, est-ce qu'ils sont membres de l'Institut de planification financière ou ils sont indépendants totalement?
M. Lapointe (Denis): L'Institut québécois de planification financière décerne les permis d'exercice. Une fois que le notaire est admis comme planificateur financier, à ce moment-là il relève de la Chambre des notaires, sauf si concurremment il procède à la vente de produits et services financiers, auquel cas, à ce moment-là, il tombe sous la gouverne de l'Autorité des marchés financiers.
M. Marsolais (Denis): Tout à fait. Tout à fait.
M. Lapointe (Denis): J'ajouterais, par rapport à votre question, peut-être que de créer un ordre au niveau de la planification financière, il pourrait y avoir un risque de confusion additionnel dans l'esprit du public, parce que, comme on le suggère un peu, on pense que la formation de planification financière devait être intégrée à toutes les autres formations de base en matière de services financiers. Or, c'est important que le consommateur sache que la personne à qui il s'adresse connaît la planification financière, c'est-à-dire qu'elle s'intéresse à l'ensemble de ses besoins, et... même si elle peut lui vendre des produits financiers, mais que, si jamais il y a un recours quelconque, il sache où s'adresser et qu'il y ait un seul organisme, à ce moment-là, où il puisse exercer ses recours, que ce soit l'Autorité, la Chambre, ou peu importe, là. Alors, plus on va avoir d'entités, plus on risque de créer de la confusion dans l'esprit du public, je pense.
Le Président (M. Paquet): Avec consentement, Mme la députée de Matane.
Mme Charest (Matane): Oui, merci, M. le Président. Toujours pour continuer sur la même question du fonds d'indemnisation, on a regardé l'aspect de déresponsabilisation du professionnel ou de... du professionnel en épargne, là, ou du gestionnaire de fonds. En ce qui a trait à la déresponsabilisation de l'épargnant, est-ce que vous croyez, puis vous aviez bien mentionné, que des conditions préalables pour justement une qualification à l'indemnisation du fonds, avec une certaine rigueur d'analyse préalable, permettraient aussi de pallier à cette problématique de déresponsabilisation des épargnants et en fait, là, régleraient en grande partie la déresponsabilisation des deux côtés de...
M. Marsolais (Denis): Tout à fait, parce que... et, encore là, je vais vous parler de notre expérience, à la chambre, eu égard à notre fonds d'indemnisation. Évidemment, c'est un fonds d'indemnisation qui a une limite, là, il y a des montants limites qu'on peut verser, et je présume que ce serait la même chose dans le cadre d'un fonds d'indemnisation que l'on parle. Ce n'est jamais agréable pour un épargnant d'aller à ce recours-là et de voir... il n'est jamais remboursé en totalité, ou il risque de ne pas être remboursé en totalité. Juste à voir ce risque-là, ça le responsabilise pour être plus alerte encore davantage lorsqu'il effectue des placements.
Mme Charest (Matane): Et le dernier point, peut-être?
Le Président (M. Paquet): Oui, rapidement.
Mme Charest (Matane): Le fait que le fonds d'indemnisation serait finalement créé par les gestionnaires de fonds par une contribution qu'ils y feraient ne... Est-ce que, si on ajoutait au fait que, par exemple, un gestionnaire de fonds ayant agi de façon incorrecte serait en plus pénalisé, puisque le fonds a dû débourser, que, là encore, on diminuerait les risques de déresponsabilisation, puisqu'il y aurait derrière ça des mesures coercitives qui les inciteraient à être plus prudents que moins prudents?
M. Lapointe (Denis): Il garde toujours sa possibilité de recourir... de prendre des recours...
Mme Charest (Matane): De prendre des recours.
M. Lapointe (Denis): ...contre le gestionnaire de fonds, là.
M. Marsolais (Denis): Le recours civil est toujours là, là.
Mme Charest (Matane): Mais le fardeau financier de la poursuite reposerait non pas sur l'épargnant, mais sur le fonds qui s'assurerait de la protection de l'intérêt public.
Le Président (M. Paquet): O.K. Merci beaucoup...
M. Marsolais (Denis): Dans le fond, le fonds pourrait réclamer au professionnel... si le fonds débourse un montant, réclamer en... Si vous me... répondre à M. Moreau, peut-être?
Le Président (M. Paquet): 10 secondes. Je ne peux pas vous donner plus que ça.
M. Marsolais (Denis): 10 secondes?
Le Président (M. Paquet): Oui.
M. Marsolais (Denis): Bon, en 10 secondes, je ne peux pas dire grand-chose, sinon que globalement, ce que disent les personnes représentant, là... concernant le secret professionnel, globalement on est d'accord avec ce qui est dit. Le secret professionnel, pour un professionnel, c'est important. Pour un client, c'est important, lorsqu'il fait affaire avec un professionnel, de s'assurer du secret professionnel de ce conseiller. L'importance de ce secret-là doit avoir des limites dans le cadre de la protection du public, on convient. Pour qu'on puisse créer une brèche au secret professionnel, et vous l'aviez bien noté, aux termes de la charte, ce matin, il y a des exceptions sur une base législative qui peuvent être faites. Dans tout cas d'exception, on doit très bien baliser les circonstances qui vont permettre à l'AMF de bénéficier de la levée du secret professionnel et dans quelles circonstances surtout le professionnel doit lever son secret professionnel sans l'autorisation de son client, et ça, il ne faut pas que ce soient des considérations subjectives, il faut vraiment que ce soient des considérations claires. Ça peut être une équation, une équation comptable, que, si tu arrives à ça, il faut que tu dévoiles, et là, après, il faut te gérer avec le détenteur de l'information.
Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Me Marsolais, Me Lapointe, merci beaucoup de votre présentation. Je suspends les travaux de la commission pendant quelques instants pour permettre au prochain intervenant de se joindre à nous.
(Suspension de la séance à 15 h 25)
(Reprise à 15 h 27)
Le Président (M. Hamad): Alors, nous reprenons les travaux. Nous reprenons les travaux. Nous avons le groupe Fonds d'investissement FMOQ inc. Alors, Mme Payette, M. Tremblay, je vous laisse la parole. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Après ça, il y a une période des questions.
Les Fonds d'investissement FMOQ inc.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Hamad): Je vous demanderais de présenter votre collègue.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui. Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, permettez-moi tout d'abord de vous présenter Mme Martine Payette, qui est directrice, Communication et marketing, auprès de notre société. Je suis le vice-président exécutif de la Société de services financiers Fonds FMOQ, qui est une filiale à part entière de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Donc, pour les gens qui se questionnaient: Qu'est-ce que FMOQ?, c'est vraiment la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.
Notre société chapeaute deux autres sociétés, soit Les Fonds d'investissement FMOQ inc., qui a déposé le mémoire ici, et la Société de gérance des Fonds FMOQ. Nous sommes en quelque sorte le bras de distribution de services financiers de la fédération des médecins.
Dès le départ, je vais vous dire qu'il n'est pas de mon intention de vous faire une lecture exhaustive de notre mémoire, mais juste d'aborder certains points qui pour nous sont... qui nous tiennent un peu plus à coeur.
Un peu pour vous situer, la société Les Fonds d'investissement FMOQ inc. détient un permis de courtier en épargne collective et elle distribue les Fonds FMOQ et d'autres fonds qui sont disponibles sur le marché aux membres de la fédération et à leurs proches. On est également le placeur principal des Fonds FMOQ, compte tenu qu'ils sont distribués pour... sont bâtis pour une clientèle restreinte. On offre aussi un service de planification financière qui se caractérise par son volet neutre et indépendant, et tout à fait indépendant, séparé de l'activité vente de fonds.
De l'autre côté, la Société de gérance des Fonds FMOQ, c'est elle qui structure les fonds qui sont distribués. Elle adopte les politiques de placement, choisit les gestionnaires, fiduciaires et tout autre fournisseur. Elle surveille l'administration, les résultats et effectue la tenue des dossiers des participants.
Au départ, en 1979, lors de la création du premier fonds FMOQ, à la fin de l'année, il y avait 203 participants, pour une valeur de 1,5 million d'actif. Au 31 décembre dernier, après 26 ans, on distribuait sept fonds FMOQ à 5 000 participants et on regroupait 617 millions d'actif.
Ceci étant dit, je vais aborder un petit peu plus... de façon précise maintenant au sujet de la commission parlementaire. Dans votre appel de mémoires, il y avait beaucoup de questions relatives aux rôles des différents intervenants, à l'étanchéité actuelle ou souhaitée entre les différents rôles et fonctions, changements qui devraient être apportés. Donc, sur ces points-là, je vais résumer notre considération, notre point de vue de la façon suivante.
n(15 h 30)n D'ailleurs, actuellement, effectivement nous constatons une confusion énorme entre les rôles de fiduciaire et de gardien de valeurs ? ce n'est pas clair dans la tête de personne actuellement, et c'est deux rôles qui sont quand même ambigus ? et également entre le gérant et le placeur des parts. On a vu dans le scandale Norbourg récemment que les gens qui étaient non indemnisés avaient de la difficulté à faire la distinction entre le placeur des parts et le gérant du fonds comme tel. Mais, tout ça étant dit, on croit effectivement qu'il est nécessaire que les rôles soient clarifiés mais pas qu'ils soient segmentés de façon rigide. C'est une question d'augmentation de coûts, duplication de tâches et de position concurrentielle des maisons québécoises, là, sur le marché. Rappelons que les fonds mutuels avec siège social... émis par des institutions québécoises sont quand même une minorité dans le marché canadien.
Je m'excuse de ma voix. Ce n'est pas seulement pour sympathiser avec votre vice-président, mais, moi aussi, je suis attaqué par une grippe d'homme actuellement.
Une voix: ...combat fortement.
M. Tremblay (Jean-Pierre): On la combat fortement.
Le Président (M. Hamad): ...pris soin de vous?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Ah bien, ils ont...
Une voix: ...
M. Tremblay (Jean-Pierre): Cordonnier mal chaussé ou mal servi, effectivement.
Le Président (M. Hamad): Pourtant, là, ils doivent être heureux, ce temps-ci, là.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui, oui, oui.
Effectivement, on a parlé beaucoup du renforcement du rôle de fiduciaire. Actuellement, en pratique, les fiduciaires de fonds mutuels ne font en grande majorité que les tâches de gardien de valeurs, de conservation des portefeuilles en fiducie et règlent les transactions, préparent des états financiers puis divers rapports. Mais, si on voulait vraiment, vraiment un réel contrôle fiduciaire, il faudrait qu'ils exercent un contrôle sur toutes les entrées et sorties de fonds, les chèques que les participants font pour acheter des fonds, etc., ce qui amènerait, là, à l'heure des transactions électroniques, un manque d'efficience puis d'efficacité qui ne serait vraiment pas souhaitable, d'autant plus qu'au Québec on a une notion: les Québécois considèrent le mot «fiducie», «fiduciaire» comme un gage de sécurité, de fiabilité et souvent même de garantie, ce qui n'est pas nécessairement le cas parce que c'est une institution comme d'autres qui offrent des produits et des services financiers. Donc, il faut faire attention quand on utilise ce mot-là, «fiduciaire», parce que souvent les gens, là, le considèrent comme un gage de sécurité.
Deuxièmement, quant à l'organisation des fonds communs, un joueur important qui ne fait pas présentement, actuellement, là, l'objet d'aucune réglementation ou d'aucun contrôle, c'est le gérant d'un fonds. Je pense qu'il y a beaucoup d'intervenants qui vous l'ont déjà dit, le gérant... N'importe qui aujourd'hui, en autant qu'il peut se trouver un gestionnaire de portefeuille, un fiduciaire, il peut se lancer dans la business de fonds mutuels sans avoir à aller chercher de permis, sans avoir à être contrôlé au niveau de son capital, etc. On croit vraiment qu'il s'agit d'une lacune très, très, très importante puis on serait tout à fait favorables à ce que des obligations soient exigées aux gérants des fonds.
Sur la question du comité d'examen indépendant, on a une position un peu différente des gens qui se sont présentés ici. On croit que la définition des pouvoirs qui sont attribués actuellement par le règlement à ce comité d'examen indépendant là était tout à fait bien contrôlée auparavant par l'Autorité des marchés financiers et par des assemblées d'actionnaires, là, extraordinaires, pour faire ces choses qui maintenant tombent sur... Donc, c'est pour nous, là, un organisme qui n'a pas sa raison d'être. Il n'ajoutera rien dans le processus de sécurité des investissements, il va juste ajouter des coûts pour les détenteurs de fonds, ultimement.
Nous souhaitons profiter de l'occasion qui nous est offerte pour vous parler de deux points qui nous tiennent vraiment à coeur et que nous croyons qu'ils pourraient contribuer à la protection du public.
Premièrement, à l'heure actuelle, les fonds communs de placement doivent publier un ratio des frais de gestion. Ce ratio-là, c'est l'ensemble des dépenses d'une année divisé par l'actif moyen de l'année en cours. Évidemment, c'est un ratio qui représente une situation passée. Il est souvent confondu avec les frais de gestion, qui sont les honoraires que le gérant perçoit à même les fonds. Mais beaucoup d'autres charges viennent souvent s'ajouter aux honoraires du gestionnaire, comme le vérificateur, la préparation des états financiers, les frais légaux pour le prospectus, ce qui fait qu'un détenteur ne sait jamais de façon précise les frais qui vont lui être chargés à même ces fonds dans l'année qui suit.
Nous, aux Fonds FMOQ, depuis maintenant près de 10 ans, on a une politique: nous chargeons un frais unique dans les fonds et nous payons toutes, toutes, toutes les dépenses qui se rapportent aux fonds. Donc, le participant, quand il adhère à notre fonds, il sait combien ça va lui coûter l'an prochain, l'année d'après. Et, si on veut changer le taux qu'on charge à nos participants, il faut envoyer un avis de 60 jours, etc., et le participant a la possibilité, à ce moment-là, de se retirer. On pense qu'une telle pratique devrait être établie dans l'industrie afin que, sur une même base de comparaison, l'investisseur sache combien ça va lui coûter en réalité dans le futur, son fonds mutuel, et également qu'il ait la possibilité de sortir de son fonds mutuel si jamais il reçoit un fameux avis de 60 jours annonçant une augmentation de frais, et ce, sans frais de sortie.
Deuxièmement, on a beaucoup parlé également du contrôle de l'Autorité des marchés financiers. Nous, on pense que, oui, l'Autorité des marchés financiers a exercé des bons contrôles, a bien travaillé, et tout ça, mais on suggère une approche un peu différente, à savoir de mettre un chargé de compte pour chacune des familles de fonds mutuels qui sont basés au Québec, qui sont sous l'Autorité des marchés financiers ? il y en a 24, ce n'est pas la fin du monde ? et qu'il y ait un contact régulier entre le promoteur et son chargé de compte à l'Autorité des marchés financiers. Ainsi, ce n'est pas seulement la solidité financière de l'émetteur, du gérant qui sera évaluée, mais également la qualité professionnelle, ce qui pourrait amener un cote de surveillance, une cote confidentielle à l'Autorité des marchés financiers évidemment, qui pourrait pondérer le volume, le niveau de surveillance ainsi qu'éventuellement peut-être les frais exigés. Je crois qu'il existe actuellement une approche un peu similaire dans le domaine des assurances. Pourquoi ne pas l'appliquer dans le domaine des fonds communs de placement?
Juste faire un petit aparté à ce sujet-là. Actuellement, les meilleurs gestionnaires de portefeuille en actions canadiennes ne se contentent pas d'examiner des états financiers, mais vont voir vraiment l'entreprise, discutent avec le management, visitent les usines, discutent avec les clients, avec les employés, et tout ça. Ça leur donne vraiment le portrait complet pour savoir s'ils doivent ou non investir dans une telle autre compagnie. On pense qu'effectivement juste examiner des bilans financiers ou des rapports, ce n'est pas suffisant pour vraiment donner une bonne opinion de l'émetteur de fonds mutuels.
Mais évidemment toutes les mesures qui devraient être prises dans notre avis devraient avoir un souci de flexibilité et rapidité d'exécution parce qu'on est dans une industrie hautement concurrentielle puis, au Québec, on est des joueurs minoritaires dans cette industrie-là. On reconnaît qu'il y a besoin d'une augmentation de la protection des épargnants, mais attention évidemment aussi à l'augmentation des coûts qui peut aller en conséquence.
En terminant, bien je voudrais simplement, au nom de notre conseil d'administration et de nos employés, vous remercier de nous avoir permis de vous adresser la parole aujourd'hui. Merci.
Le Président (M. Hamad): Merci. Merci beaucoup. Alors, est-ce qu'il y a des collègues qui veulent poser des questions? M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, merci beaucoup de votre présentation. Concernant le fonds d'indemnisation ? puis c'est un point que vous avez soulevé aussi ? étant donné que ça n'existe pas ailleurs en Amérique du Nord à ce moment-ci, ça ne veut pas dire qu'on ne pourrait pas le faire, là. Mais un des éléments ? j'ai touché cette question-là tout à l'heure avec d'autres intervenants: Avez-vous pensé à l'aspect de l'applicabilité? Si le Québec était le seul à le faire... Peut-être qu'idéalement tout le monde devrait le faire, là ? fais-le donc ? mais la question est de... Ce n'est pas la plus simple à mettre en place, mais c'est une possibilité. Est-ce que vous pouvez le faire à ce niveau-là?
Ensuite, sur quelle base... ou qui financerait ce fonds-là? Est-ce que ce seraient les courtiers... et les courtiers gestionnaires de fonds bien sûr, puisqu'on l'étendrait? Et, à ce moment-là aussi, quel est l'impact que vous anticipez soit au niveau du rendement net des frais de commission ou des frais de gestion, qui seraient plus élevés, l'impact sur le risque qui pourrait se produire et l'impact qu'il pourrait y avoir, s'il y a lieu, sur l'offre de placement, l'offre de fonds communs de placement? Avez-vous réfléchi à ces enjeux-là? Avez-vous des opinions là-dessus?
M. Tremblay (Jean-Pierre): D'accord. Bien, premièrement, on est tout à fait d'accord à l'élargissement de la couverture du fonds d'indemnisation mais à une condition: c'est qu'on soit convaincus que toutes les mesures ont été prises pour qu'il ne serve jamais. C'est un peu frustrant actuellement, dans le dossier qu'on connaît tous, de voir qu'on va être obligé de cotiser, puis on n'a pas l'impression que toute la surveillance, toutes les démarches, tout ça a été fait afin que ça ne se produise pas. Donc, on est d'accord, mais en parallèle tout doit être contrôlé de façon efficace.
Qui devrait payer? Évidemment, peu importe la formule qui va être établie, au bout de la ligne c'est l'investisseur qui paie toujours. Parce que les sociétés vont augmenter leurs frais de gestion en conséquence, et tout ça, au bout de la ligne c'est toujours l'investisseur qui paie, que se soit sous forme de rendement, que ce soit sous forme de frais directs. Donc, il faut faire attention aussi, faire attention. Il peut être constitué, ce fonds-là, sur plusieurs années, surtout s'il ne perd pas dans les premières années. Donc, ça peut être efficace de cette façon-là, sans trop non plus pénaliser le rendement du fonds.
n(15 h 40)nM. Paquet: Dans votre mémoire, vous parlez que... relativement à la question de séparation des rôles des gestionnaires versus distributeurs, etc., et vous mentionnez qu'il ne serait peut-être pas opportun de procéder à une séparation qui serait plus étanche des rôles mais qu'il devrait y avoir des mesures particulières qui s'imposent. Quels sont les genres de mesures particulières que vous avez en tête à cet égard?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Je ne me souviens pas exactement, là, à quel point vous faites référence.
M. Paquet: Je n'ai pas la page avec moi, mais vous disiez: Il y aurait lieu de «clarifier les rôles des intervenants de l'industrie des fonds communs de placement».
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui. Bien, c'est surtout le rôle de fiduciaire versus gardien des valeurs. Actuellement, il y a un nom de fiduciaire qui est affiché sur tous les prospectus, et ce fiduciaire-là ne fait que garder les valeurs. Donc, qu'on l'appelle tout simplement «gardien de valeurs» puis qu'on arrête de confondre la population en disant qu'il y a un fiduciaire, puis qu'il contrôle, puis qu'il surveille. En réalité, le fiduciaire ne contrôle rien, absolument, de l'opération des fonds mutuels.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.
M. Paquet: Non, j'avais une dernière question.
Le Président (M. Hamad): Ah, vous en avez une autre? O.K.
M. Paquet: Merci. Vous dites que «l'AMF possède présentement les outils requis pour exécuter convenablement sa mission. [Elle] possède d'importants pouvoirs d'inspection et d'enquête et il serait opportun qu'elle commence par les exercer». Par rapport à ces pouvoirs-là, quels sont ceux qu'elle n'exerce pas selon vous ou pas suffisamment, ou comment vous corrigeriez ça?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui. En 10 ans d'opération, on a été inspectés une seule fois par l'Autorité des marchés financiers, physiquement, là. C'est sûr qu'ils nous demandent beaucoup de papiers, de rapports financiers, mais physiquement, sur place, ils sont venus une seule fois, c'est quand ils ont fait un blitz pour inspecter toutes les maisons de fonds québécoises suite au délit de «day timing», de transactions, là, quotidiennes qu'il y avait eu en Ontario. On n'a jamais eu un autre contrôle financier. On est ouverts à ce qu'ils viennent n'importe quand. Puis, comme je vous dis, c'est avec des contacts physiques, voir si je fais ça dans mon sous-sol, chez nous, ou si c'est organisé, on est structuré, tout ça, parler avec les gens, voir vraiment qu'ils peuvent voir... Puis d'ailleurs c'est à la suite de cette inspection-là que le doute a commencé à germer sur Norbourg, donc je pense que c'est la preuve qu'ils devraient exercer de façon différente leur rôle.
M. Paquet: Et, dans le cas de l'Ontario, vous faisiez référence au problème qu'il y a de «market timing»...
M. Tremblay (Jean-Pierre):«Market timing», c'est ça, exact.
M. Paquet: ...et là qui a eu un impact. Si je ne m'abuse, dans ce cas-là, les firmes qui étaient prises là-dedans, là, les gestionnaires de fonds, enfin les fonds ont déboursé eux-mêmes pour compenser, parce que ça n'avait pas été jugé comme étant de même nature, là, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas de fonds d'indemnisation qui étaient analogues, parce qu'ils n'existaient pas d'une part, mais les firmes ont elles-mêmes pris la responsabilité, si je ne me trompe pas.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui, de mémoire aussi, mais c'était exclusivement en Ontario, et je crois que c'étaient des grandes firmes, aussi, qui étaient souvent rattachées à des banques, là.
M. Paquet: O.K. Merci.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Merci, M. le Président. Est-ce que vous avez terminé, M. le député?
Une voix: Oui.
M. Bernier: O.K. On a parlé beaucoup de formation et d'information au niveau des acheteurs ou des clients. Bon, vous, ça semble quand même assez fermé, vos clients, là. Est-ce que vous procédez... De quelle façon vous informez...
M. Tremblay (Jean-Pierre): Bien, on a un volet justement formation, éducation qui est important dans notre entreprise. Je n'en ai pas parlé, malheureusement, mais on publie de nombreuses brochures d'excellente qualité, on publie des articles dans les magazines qui s'adressent à notre clientèle spécifique, on organise un programme de conférences, et nos représentants sont exclusivement rémunérés à salaire et non pas à commission. Donc, peu importe le client qui se présente chez nous, qui fait partie de notre communauté, il est traité de la même façon, qu'il ait un petit pécule ou un gros montant à investir. Donc, on a un grand souci d'information, de formation de notre clientèle à ce niveau-là, effectivement.
M. Bernier: Donc, à ce moment-là, ça vous permet de voir... Parce qu'on sait que... Bon, dans le cadre de vos clients, à ce moment-là, il y a une évolution par rapport à sa situation personnelle, par rapport à ses disponibilités financières aussi, au niveau investissement. Est-ce qu'à ce moment-là il y a des rencontres qui sont faites en fonction de l'évolution, ou suivi de son portefeuille, ou suivi de...
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui, oui, oui. Effectivement, chaque client chez nous a un chargé de compte attitré qui le rencontre de façon régulière pour faire l'évolution de son portefeuille. D'ailleurs, aussi on envoie non pas seulement des bulletins trimestriels, mais également un relevé de placement. Mais on est une des seules boîtes à peu près au Québec qui calcule le rendement personnel de l'individu, chez nous, et qu'on publie, sur une base d'un an, trois ans, cinq ans sur son relevé, à tous les trimestres. Donc, il y a beaucoup de contacts. Évidemment, on privilégie le contact, là, personnel avec notre clientèle.
M. Bernier: Au niveau justement de votre client qui reçoit vos... ? vous parlez justement d'un relevé que vous lui faites parvenir ? qui suit ça, il constate des éléments qui sont très, très différents d'un trimestre à l'autre, soit en augmentation, mais normalement ça va être en diminution...
M. Tremblay (Jean-Pierre): C'est toujours en augmentation.
M. Bernier: ...qui va avoir des questions importantes à poser, à ce moment-là, au moment où il vous pose des questions sur un fonds bien précis ou sur un titre bien précis, est-ce que vous allez chercher toute son information? Ou il vous soulève... il vous dit: Regarde, qu'est-ce qui se passe là-dedans, là? Il y a quelque chose qui ne va pas, il n'y a pas... Il ne met en doute votre gestion, mais il met en doute un élément à l'intérieur de ses placements. Qu'est-ce que vous faites à ce moment-là?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Bien, pour nos fonds, nos fonds maison, qu'on appelle, les sept fonds FMOQ, on publie évidemment beaucoup plus d'information sur la... bien sur son... Il y a une partie réglementaire puis il y a une partie facultative qu'on fait. Donc, on publie les portefeuilles, on publie la stratégie de placement, on publie tout ça évidemment sur les fonds autres qui sont rachetés via notre intermédiaire, parce qu'on distribue également tous les fonds mutuels disponibles au Canada, en fonction de son profil de risque, en fonction de son horizon de placement, sa stratégie de placement, tout ça. On va chercher pour lui l'information et on lui consolide ça, là, dans le fond pour l'informer de façon adéquate.
M. Bernier: Merci.
Le Président (M. Paquet): Vous avez terminé, M. le député de Montmorency?
M. Bernier: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre: Oui. À la page 2 de votre mémoire, vous parliez que, «pour des raisons de flexibilité, de coûts et de rapidité d'exécution», qu'il serait préférable «de procéder à une séparation plus étanche des rôles [des] intervenants». Pourriez-vous nous dire pourquoi vous nous suggérez ça?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Bien, une définition surtout plus étanche. Parce que la séparation des rôles... Actuellement, il est de pratique courante que la distribution est souvent reliée à la gérance de fonds, tout ça. Nous, on le fait dans deux boîtes séparées, de façon à ce que ce soit distinct, les opérations de distribution de fonds et de gérance de fonds mutuels. Mais c'est surtout ce que je mentionnais tout à l'heure, là, le fameux fiduciaire. Un vrai contrôle fiduciaire, ce serait quelqu'un qui contrôlerait toutes les entrées et sorties de fonds, là, il devrait vérifier toutes les instructions de placement du participant avant d'exécuter. Ça fait que, nous, pour nous, dans le monde où on vit, avec l'électronique, la rapidité d'exécution qui est requise, bien on ne peut pas supporter un tel contrôle fiduciaire, là, étanche.
M. Lelièvre: Donc, ça vous facilite aussi la tâche dans la gestion pour éviter les conflits d'intérêts, là?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui. J'ai parlé un petit peu rapidement de notre comité d'examen indépendant. La réglementation est passée, donc on pourrait en discuter longtemps, mais, nous, on n'était pas très favorables à ça parce qu'on ne trouvait pas que ça ajoutait quelque chose. Et on est en train de le mettre sur le pied puis on se tire aux cartes pour savoir qu'est-ce qu'on va leur donner à examiner, parce qu'on n'en a pas, de conflits d'intérêts.
M. Lelièvre: Pardon? Excusez-moi, je n'ai pas bien compris parce que j'entendais d'autres sons.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Ce n'est pas grave. D'autres sons! Ce que je disais ? on parlait du comité d'examen indépendant ? la réglementation est passée, on est en train de le mettre sur pied, notre fameux comité d'examen indépendant, et on regarde quelles tâches qu'on pourrait leur donner, et on n'en trouve pas, parce qu'on n'en a pas, de situation de conflit d'intérêts, chez nous. On perçoit un honoraire, on paie tout le monde, puis les définitions qui sont dans le règlement, de conflit d'intérêts, ne s'appliquent pas à nous. Donc, on va les alimenter, mais je ne sais pas avec quoi, là.
M. Lelièvre: Mais, à ce moment-là, l'Autorité des marchés financiers peut vous donner une dispense, j'imagine.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Ah oui, mais ça, les dispenses, maintenant ça n'existe presque plus, hein?
M. Lelièvre: D'autre part, à la page 12... page 5, plutôt, de votre sommaire, vous dites: «À la moindre apparence de fraude, tout élément de preuve pertinent devrait pouvoir être présenté conformément à des règles pragmatiques, claires, non équivoques, justes, équitables et surtout imperméables aux avocasseries qui deviennent de véritables moyens dilatoires.»M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui. Bien, on a vu, dans le dossier qu'on connaît tous, là, toutes les procédures qu'il y a eu, puis tout ça. Je pense que, si l'Autorité des marchés financiers avait pu arriver puis prendre possession des documents, faire les procès, les mises en accusation, qui attendent encore, dans le fond, certaines attendent encore... C'est ça, nous, en termes de transparence, de confiance du public, il faut que ce soient des mécanismes... Quand qu'il y a apparence de fraude, là, ou fraude, il faut que ça aille vite. Et c'est l'argent de la population qui est en danger, des investisseurs. Il faut vraiment que les mécanismes, là, aillent vite puis éviter, là, des procédures de retardement à ne plus finir. C'est ce qu'on dit.
n(15 h 50)nM. Lelièvre: Ce matin, il y a quelqu'un qui nous disait que c'est 30 jours d'avis, là, puis pour donner, en fin de compte, au niveau des informations... et à l'extérieur ? je pense que c'est en Ontario qu'on parlait, là ? c'était deux jours, deux jours pour se rendre puis faire enquête, là.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Moi, pour moi, ce seraient les délais les plus courts possible. Nous, d'ailleurs, dans nos contrats avec nos gestionnaires de portefeuille, quand on veut les changer, là, c'est 30 jours d'avis, mais c'est exécutoire maintenant. On paie les honoraires pour les 30 jours qui suivent pour les tranquilliser, là, mais, dès qu'on décide qu'on change de gestionnaire, c'est maintenant. Ils ne touchent plus au portefeuille la journée qu'on leur dit qu'ils changent de portefeuille. Puis ce n'est pas nécessairement pour des raisons de fraude, là, c'est pour des raisons qu'on n'est plus satisfaits avec la gestion qu'ils exécutaient dans les portefeuilles ou leur performance. Ça devrait être la même chose, aussi rapide, là... que l'Autorité prend possession, là, prend le contrôle du fonds mutuel dès qu'il y a apparence de fraude ou...
M. Lelièvre: Mais il n'y a pas un danger d'effrayer les gens avec ça?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Bien, ça fait partie de la game aussi, hein? Ça fait partie de la sécurité. La police, elle peut effrayer des gens aussi.
M. Lelièvre: Oui, oui, c'est vrai. Mais là on s'en va faire enquête, là, à ce moment-là. C'est que dans le fond l'Autorité s'en va faire enquête...
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui, oui. Bien, c'est ça. Ça dépend, là. Il faut exercer du jugement. Si c'est juste une enquête, bien je pense que, là... L'Autorité est venue faire enquête chez nous dans le temps du «market timing», puis elle ne l'a pas affiché partout, puis elle n'a pas mis personne en cause, là. S'il y avait eu des conflits, si elle serait arrivée chez nous puis elle aurait vu des questions de fraude, tout ça, bien je pense que c'est: Dehors, puis on prend le contrôle de la boîte, là.
M. Lelièvre: Donc, la saisine de toute l'administration?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui.
M. Lelièvre: Vous parlez, à la page 7, également, là, qu'il serait opportun d'abolir les frais de sortie dans certains cas prévus au règlement, là. Pouvez-vous élaborer un petit peu plus là-dessus? Parce qu'on sait qu'il y en a qui négocient leur droit de sortie, là.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui. Mais, nous, nos fonds, nos fonds maison, on n'a pas de frais d'entrée ni de sortie. C'est des frais qui sont ouverts, là. Mais, dans le marché, il existe des frais avec frais d'entrée, ou frais de sortie, ou frais d'entrée différés, qui descendent en fonction du nombre d'années où le participant reste dans le fonds. Mais pour moi ce qu'on dit là, c'est: Dès qu'il y a un changement fondamental dans la vocation du fonds, la personne devrait avoir l'opportunité de sortir du fonds sans payer les frais de sortie. C'est ce qu'on dit.
M. Lelièvre: Ça va, M. le Président.
Le Président (M. Paquet): Ça va? M. le député de Louis-Hébert. Non? M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Vous ne l'avez pas nécessairement abordé, mais plusieurs des groupes précédents l'ont abordé, dans le cadre de mesures dissuasives, versus ce qu'on a connu dans les marchés, d'augmenter, si on veut, les sanctions, avoir des sanctions plus sévères. On sait qu'aux États-Unis on a vu plusieurs circonstances où on a imposé des sanctions financières importantes et des sanctions pénales, aussi, importantes, au niveau de la prison et... Bon, est-ce que vous croyez qu'ici ce serait un des moyens, que plusieurs l'ont mentionné, qui permettrait de dissuader, là, ce genre d'événement qu'on connaît?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Moi, j'ai deux commentaires là-dessus. Le premier, quand on touche à l'épargne des individus qui ont économisé année après année, à force de gratter, tout ça, je pense qu'il n'y a pas de punition assez forte. Puis il faudrait qu'elles soient exécutées, tu sais, ces punitions-là, qu'elles soient mises en application. Ce n'est pas le cas qu'on voit actuellement au Québec.
M. Bernier: Donc, à ce moment-là, vous êtes partisans qu'il puisse y avoir une révision des mesures pénales et punitives?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Mais surtout les appliquer.
M. Bernier: Surtout les appliquer. O.K. En ce qui regarde le rôle de l'AMF, vous, est-ce que vous êtes satisfaits du rôle de l'AMF par rapport à...
M. Tremblay (Jean-Pierre): Bien, comme je vous dis, actuellement c'est plus une surveillance des marchés à distance, par rapports papier. On a vu que des rapports papier, ça se falsifie. Aujourd'hui, il y a des fraudeurs qui falsifient des cartes de crédit. Imaginez, des états financiers, il n'y a rien de plus facile à falsifier. Donc, c'est un contrôle qui est nécessaire, requis. Mais je pense qu'il faut qu'il y ait une confiance plus élevée que ça, une démarche qui soit faite de visu, physiquement, rencontrer les gens, évaluer leurs qualités professionnelles, évaluer leur organisation, pour vraiment suivre le marché, exercer une autorité dans le marché.
M. Bernier: Vous avez parlé de la rapidité d'intervention.
Le Président (M. Paquet): ...secondes.
M. Bernier: Oui. Vous avez parlé de la rapidité d'intervention. L'AMF, justement, plusieurs ont mentionné la nécessité qu'elle puisse avoir justement cette information le plus rapidement possible pour que finalement la police des finances puisse agir rapidement, et pour ça il y a des mesures qui doivent être prises. Est-ce que vous avez un commentaire sur ça?
M. Tremblay (Jean-Pierre): Tout à fait d'accord. Tout à fait d'accord. Quand ils nous demandent une information, nous, on l'envoie, là, dans les... bien souvent moins que les délais. Et, je veux dire, quand ils sont venus chez nous, ils ont eu accès à toutes les données sur place.
M. Bernier: Donc, on doit s'assurer de donner à l'AMF l'accès le plus rapidement possible à toute l'information nécessaire.
M. Tremblay (Jean-Pierre): Oui, à toutes les informations. Oui, oui, en tout temps.
M. Bernier: Merci.
Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Tremblay, Mme Payette, pour votre présentation.
Alors, je suspends les travaux de la commission quelques instants pour permettre à M. Michel Marcoux de se joindre à nous.
(Suspension de la séance à 15 h 56)
(Reprise à 15 h 58)
Le Président (M. Hamad): Nous reprenons les travaux. Nous reprenons les travaux et nous avons maintenant M. Michel Marcoux, président, Avantages Services financiers, et chroniqueur au journal Le Devoir. M. Marcoux, vous avez 15 minutes pour la présentation. Il y aura 15 minutes chaque côté.
M. Michel Marcoux
M. Marcoux (Michel): Parfait. Alors d'abord je voudrais vous dire bravo pour votre initiative qui est devenue publique. Je pense que c'est une bonne nouvelle. Et merci de m'avoir réinvité. En fait, je ne reprendrai pas textuellement ce que j'avais écrit. J'ai constaté l'an passé qu'il n'y avait pas d'illettré ici puis que vous étiez bien entourés. Alors, vous avez déjà des bons résumés, puis je vais garder plus de temps peut-être pour vos périodes de questions.
n(16 heures)n En fait, je pense que le débat se promène beaucoup. Évidemment, le mandat est aussi assez large. La protection des épargnants, c'est grand. Par contre, ce qu'on oublie peut-être dans les dossiers, ce qui a peut-être amené cette initiative-là, c'est qu'il y a eu des scandales dans l'industrie des fonds mutuels, et ça, je pense qu'on ne peut pas oublier ça. Mais actuellement je constate dans mon quotidien qu'on s'attaque à beaucoup de problèmes mais que, dans les cas qu'on connaît, il y a eu un problème, un gestionnaire qui annonçait gérer une certaine somme et un gardien de valeurs qui, lui, n'avait pas la même somme. Le problème est juste là. Alors, je pense qu'il faut arrêter de charrier, un petit peu, parce que je trouve qu'on a des avocasseries, des comptables, et tout ça. C'est fantastique, tout ça, mais pour moi le débat, il est là.
Pourquoi il n'y a personne qui s'est aperçu, dans le système actuellement, que quelqu'un pouvait prétendre gérer un montant x et qu'à l'autre bout il en manquait 130 millions? Et ça, bien on se rend compte aujourd'hui que ça n'a pas duré pendant un mois, six mois, ça a été plusieurs... pendant une longue période. D'ailleurs, à ce niveau-là, actuellement on a des débats. On parle beaucoup, mais on ne sait pas grand-chose de plus que l'année passée et même du lendemain où ça s'est passé. On ne sait pas... Est-ce que c'est un vérificateur qui aurait mal fait son travail? Est-ce qu'il y a eu de la fraude? On ne sait pas grand-chose. Alors, on émet... Moi, j'ai écrit mon mémoire l'année passée pour janvier dernier. J'avais apporté quelques petites modifications au mois d'août, je crois, quand je l'ai remis. Depuis, on a appris des choses, mais on n'apprend pas beaucoup de choses. Alors, je pense que c'est quand il va y avoir des procès, quand il va y avoir... qu'on va peut-être en savoir un petit peu plus, et vous allez peut-être pouvoir apporter des correctifs importants.
Mais ce qu'on peut par contre aujourd'hui dire, c'est qu'avoir un gestionnaire qui est fiduciaire, la même personne, la même entité morale, ce n'était peut-être pas une bonne idée, et je pense que, si on a à apporter des correctifs là, je pense que ce serait important. Le problème que ça cause... Je sais qu'il y a une famille de fonds, entre autres, qui vient vous voir demain matin. Il y a des petites familles de fonds qui ne pourront peut-être pas survivre si on augmente les exigences financièrement ? ça coûte très cher ? et je pense que, si on veut ravoir un jour des TAL, par exemple, qu'on a eu des Talvest ou des Jarislowski Fraser, qui ont été des petites firmes à l'origine, il faut faire attention pour ne pas alourdir ce processus-là. Mais il est clair actuellement qu'il y a beaucoup de travail qui a été mis actuellement sur l'inspection des cabinets, alors que dans les faits, à ce que je sache, il n'y a pas de cabinets qui ont fait de fraude depuis... enfin je n'ai rien retrouvé.
L'AMF a engagé... on sait, l'année passée, avait annoncé qu'ils engageaient plus d'inspecteurs, plus de vérificateurs. C'est fantastique, personne n'est contre ça. Mais est-ce qu'il était là, le problème? Le problème, c'est que c'était au niveau d'un gestionnaire, pas au niveau d'un cabinet. Ce n'est pas pareil. Et on sait que les conseillers financiers n'ont pas d'ordre professionnel comme les ordres des comptables, et tout ça, mais il y a une étude qui est sortie, l'an dernier, de la Chambre de la sécurité financière, qui disait que finalement il y avait moins de plaintes que, par exemple, l'Ordre des ingénieurs, ou les avocats, ou des choses comme ça. Donc, il n'y a pas un problème, là, important. Et actuellement ce qu'on est en train de faire, c'est à mon avis, au niveau des cabinets, augmenter les coûts de fonctionnement, et déjà, dans les fonds mutuels, on n'arrête pas... en tout cas on lit souvent ça... Le problème, c'est les frais de gestion qui sont trop élevés.
Alors, il faut trouver la juste mesure d'un équilibre où l'investisseur va faire des sous et où on va avoir un bon contrôle. Mais actuellement, je vous le dis, au quotidien, et je le vis parce que j'ai une firme de courtage, le rôle, les inspections ont été augmentées. Il y a eu un comité de normes comptables qui a été mis sur pied au niveau de l'AMF, mais il n'y en avait pas, de problème, pour ces cabinets. En fait, je ne suis pas contre la vertu, je ne suis pas contre qu'on améliore nos pratiques, mais je ne pense pas qu'il y avait un problème là nécessairement. Je ne pense pas que des normes comptables, ça se discute; il y a des normes comptables, point.
Au niveau de la vérification, il semblerait qu'il pourrait y avoir eu un problème. Encore là, on dit «semblerait» parce qu'on ne sait pas tout ce qui s'est passé dans les dossiers. Mais je ne crois pas que... J'entendais, ce matin, les firmes d'avocats: protéger leurs clients, le secret professionnel, et tout ça. Je ne pense pas que c'est un problème de secret professionnel. Quand on est inspectés, nous, par nos vérificateurs externes, ils ont obligation de signer nos états financiers. Ils n'ont pas besoin de dénoncer, ils ont juste à ne pas les signer, et en même temps ils doivent écrire une lettre comme quoi qu'ils disent qu'on a respecté les normes comptables, que tout est... semble bien beau dans notre firme.
Alors, je pense que l'Autorité des marchés financiers, qui font, je pense, dans l'ensemble un excellent travail... On envoie des rapports mensuellement, on envoie des états vérifiés annuellement, il y a des inspections qu'il fait... Les intervenants avant moi avaient l'air à dire qu'ils n'ont pas eu beaucoup d'inspections. Je peux vous dire que règle générale, quand il y a un nouveau permis d'émis, je crois qu'ils font une inspection six mois après, et, après, c'est au minimum aux cinq ans. C'est peut-être un oubli qu'il y a eu dans ce cas-là. Mais, moi, dans la pratique, là, ça semble se passer comme ça, et je vous dirais que les gens qui viennent nous inspecter, c'est des gens excessivement compétents. Je n'ai pas à faire de reproches à ce niveau-là et je ne pense pas que plus d'inspections va nécessairement améliorer nos pratiques.
Par contre, je vous dirais que, quand il y a eu la création de l'AMF, il y avait eu aussi une commission, il avait été question que... on trouvait que c'était un gros mandat. Vous savez que l'AMF... Une journée, un M. St-Gelais s'est retrouvé à la tête de cinq organismes. Il serait tout à fait impensable, dans l'entreprise privée, de fusionner cinq compagnies du jour au lendemain à minuit et une. Ça ne se fait pas. On sait que d'absorber même une compagnie, c'est très difficile. Là, on a demandé cinq. Alors, je pense que c'est un mandat qui était énorme. Et les scandales qui se sont passés sont arrivés peut-être dans un mauvais timing, en tout cas dans un moment où il y avait à l'interne beaucoup de travail à faire, puis ceux qui ont déjà travaillé dans l'industrie... Juste de rencontrer à la même table des gens de l'ancienne Commission des valeurs mobilières et du Bureau des services financiers, je vous dis que j'aurais aimé ça être une mouche pour entendre les discussions qu'il devait y avoir. C'étaient des philosophies totalement différentes, des façons de fonctionner différentes. En tout cas, je vous le dis, ça devait être assez spécial. Et ça, pour avoir fait affaire avec les deux organismes, je peux vous dire que c'était excessivement différent.
L'autre chose. Je pense que, dans le cas de Norbourg, il y a eu des alarmes qui ont été lancées, en tout cas que ce soit même dans des quotidiens, dans les journaux, Finance et Investissement, dans le cas de Norshield, Mount Real, il y avait eu des articles que j'avais annexés l'année passée à vos documents. Écoutez, j'ose croire qu'il y a quelque chose qui a été fait après ça au niveau de l'AMF, mais je pense que le problème, c'est peut-être la capacité de prendre la relève rapidement. C'est-à-dire, c'est que je ne pense pas que l'AMF, qu'elle ait un doute sur un cabinet ou un gestionnaire, devrait annoncer dans les journaux qu'il y a un problème, là; je pense qu'il faut faire attention, quand même. L'objectif, c'est de travailler... on est dans la même industrie, puis on a tous avantage de protéger l'argent des épargnants, mais d'avoir une relève qui pourrait rapidement prendre... pas possession d'un cabinet ou d'un gestionnaire, mais d'être là au moins pour assumer un certain rôle, pour s'assurer que, woups!, il y a peut-être eu un petit dérapage, qu'on peut le ramener, et je pense que ça aurait diminué beaucoup les délais.
Évidemment, il y a toujours le côté d'enquête policière, criminelle que... je ne veux pas rentrer dans les détails, que je ne connais pas non plus, qui peuvent retarder ce genre de chose là. Mais l'objectif, ce n'est pas d'attendre qu'il y ait une catastrophe, c'est d'essayer d'intervenir dès qu'on sait qu'il y a une sonnette en quelque part qui s'allume. Et actuellement je vous dirais qu'au niveau des cabinets et au niveau de la Chambre de la Sécurité financière, dès qu'ils ont une plainte d'un client, d'un investisseur, ils font rapidement une enquête, ils viennent et ils ferment le dossier ou ils vont le mener au comité de discipline. C'est des choses en tout cas qu'au quotidien je vois, moi, que ça semble bien se passer.
On a parlé tantôt des frais de sortie. Ça, c'est un problème dans l'industrie, puis on en avait parlé l'année passée. Vous savez, un investisseur qui était... Norbourg était, avant, les fonds Évolution ou Teraxis, c'était quelque chose qui appartenait finalement à la Caisse de dépôt, qui avait une gamme de gestionnaires absolument formidables, autant c'était la Caisse de dépôt, autant c'était Jarislowsky Fraser, autant c'était Addenda Capital. Donc, si, vous et moi, on avait acquis ces fonds-là, on avait acheté une expertise incroyable. Du jour au lendemain, ces gens-là se sont retrouvés avec un M. Vincent Lacroix et son équipe comme gestionnaires, et ces gens-là ne pouvaient pas sortir de ces fonds-là sans payer une pénalité. Et l'exemple que j'avais donné l'année passée, c'est: Vous pouvez acheter une Mercedes, parce que je pense d'avoir acheté... Les trois gestionnaires que je vous ai nommés, on est en Mercedes. Vous vous retrouvez une journée avec une Lada, puis, si vous voulez vous en aller, vous débarrasser de votre Lada, vous devez payer une pénalité, et ça, c'est une réalité, au Canada, qui est un problème. Donc, j'appelle ça, moi, de la fausse représentation, comment on peut vendre un produit.
Puis, un fonds, vous savez, on a beau appeler un fonds le fonds ABC, XYZ, ça ne veut rien dire. Un fonds, c'est le gestionnaire qui gère l'argent en arrière, exactement comme quand vous achetez un titre d'une entreprise, c'est le président, c'est le gestionnaire qu'on achète, ce n'est pas qu'elle vend un produit XYZ, c'est la personne qui a la capacité de générer avec son équipe quelque chose qui a de l'allure. M. Lacroix, évidemment on n'avait pas grand historique dessus. Donc, moi, en tout cas comme quelqu'un qui... j'ai écrit 10 livres sur l'évaluation des fonds mutuels, je vous dirais que je n'aurais pas recommandé à personne... pas parce qu'il était bon ou pas bon, on ne le connaissait pas, c'était un nouveau venu, il avait déjà travaillé à la caisse, mais, bon, qu'est-ce qu'il faisait à la caisse? Il avait-u un «tract record» intéressant? On n'avait rien de public. Donc, c'est une situation évidemment... toutes les familles de fonds qui vont venir ici vont vous dire: Écoutez, ce n'est pas une bonne idée parce que financièrement ça cause des problèmes, là. Mais je laisse ce problème-là aux familles de fonds à le régler, mais je pense que c'est un problème actuellement.
n(16 h 10)n Au niveau des investisseurs, qu'on oublie trop souvent, oui, ça a changé de quoi dans l'industrie, parce que, moi, dans mon quotidien, on s'est rendu compte que des investisseurs ont posé plus de questions, et ils en posent plus encore aujourd'hui. Je vous dirais que, dans les petites firmes comme chez nous, on a perdu quelques clients, pas en grand nombre, mais je peux vous dire que perdre un client parce qu'il dit: Bien, tu sais, Michel, je t'aime bien, ça fait 10 ans que je fais affaire avec toi, mais l'histoire de Norbourg, ça m'a ébranlé, j'aime mieux aller à la banque XYZ... C'est assez tough sur l'égo, c'est assez tough pour la confiance. Et je comprends ces gens-là, je ne peux pas...
Par contre, on a vu, cette semaine, que ces gens-là, quand il y a eu une possibilité de fraude au niveau du cabinet, en tout cas ils ont été indemnisés, on a vu que l'AMF a décidé d'indemniser ces gens-là... Mais par contre, pour ce qui est des ventes, bien vous avez vu que depuis Norbourg, depuis l'année passée, de mois en mois on vogue de record en record. Comment expliquer ça? C'est-u juste finalement quelques personnes que ça a ébranlé la confiance? En tout cas, à grande échelle au Canada, ce n'est pas un problème, et, je devrais dire, au Québec aussi, ce n'est pas un problème. Les ventes ont augmenté et continuent à augmenter. Par contre, je vous dirais que c'est quelque chose qui est anormal aussi, parce qu'on sait que les gens actuellement achètent des fonds canadiens... Les fonds canadiens, le marché canadien a très bien fait. On devrait voir les ventes baisser, pas parce qu'il y a eu des Norbourg, mais parce qu'actuellement le marché est plus à risque qu'il l'a été il y a quelques années.
Alors, c'est peut-être une question d'éducation, d'information. Mais je vous dirais, d'un autre côté, on parlait de mieux éduquer les clients. J'écris dans Le Devoir, dans différentes revues, des livres, parce que je veux éduquer les clients, mes clients à moi, mais, d'un autre côté, vous savez, quand je vais chez le concessionnaire automobile, je ne comprends toujours pas ce qu'il m'explique et je ne pense pas que j'aie besoin de devenir un mécanicien, un spécialiste. L'important, c'est que j'aie quelqu'un en qui j'ai confiance et que je pense qu'il fait un bon travail. Et je pense que c'est ça qui doit exister, la relation entre un conseiller et son client.
On a reproché, moi le premier, beaucoup de choses à l'AMF, mais je pense qu'il faut faire attention. Je vous disais: On a créé quelque chose d'assez gros rapidement, en 24 heures. M. St-Gelais, je pense qu'il doit avoir passé des nuits blanches. Au niveau des compétences, il y a des gens très compétents là-bas. Moi, je fais affaire... j'ai eu beaucoup de rencontres avec des gens, il y a des gens très compétents. Ce que je vous dirais par contre... L'année passée, si vous vous souvenez, je vous avais dit de vérifier les petites annonces. J'ai toujours reproché à l'AMF d'être loin de son industrie. Et, «loin», ce que ça veut dire: l'année passée, quand je vous ai parlé de ça, dans le journal La Presse, un quotidien, depuis six mois, ils annonçaient des condos à vendre, avec des abris, des avantages fiscaux, garantie de location. Ça s'appelle, dans le langage, un appel à l'épargne public. Et cette annonce-là a été là deux fois par semaine jusqu'au mois de septembre. Parce qu'un journaliste a écrit quelque chose là-dessus ? puis je vais garder confidentiel qui a appelé le journaliste ? mais, trois mois après, l'annonce a disparu. Je ne vous dis pas que c'est quelqu'un qui faisait de la fraude, je vous dis juste que, quand quelqu'un met dans les petites annonces de La Presse, à tous les mercredis et samedis, une annonce de condos à vendre, garantie de location, c'est un appel à l'épargne public. Et je pense que des fois tu n'as pas besoin d'avocat, tu as juste besoin de quelqu'un qui appelle cette personne-là et dire: Écoute, est-ce que tu sais que ça s'appelle un appel à l'épargne public? Est-ce qu'il y a un prospectus qui a été fait? Ce n'est pas grand-chose, mais je pense que ça, c'est ça, s'intéresser à l'industrie.
Moi, je lis les quotidiens, les petites annonces; tout ce qui touche l'affaire, le placement, ça m'intéresse. Et je pense que, même après Norbourg, je vous dis, le nom, c'est resté là un an, deux fois par semaine, assez grosse, là. Il n'y a personne qui en a parlé, il n'y a personne qui a vu ça, et c'est ça qui est terrible. C'est peut-être la passion qui manque, de cette industrie-là. Peut-être que je l'ai trop, mais je pense que c'est des petits détails comme ça. Et Mount Real annonçait, dans le journal Les Affaires, à l'époque des rendements garantis de 15 %, et l'annonce a été là pendant très longtemps. Alors, il n'y a personne qui a allumé. Quand les taux d'intérêt sont à 5 %, les rendements de garantis de 15 %, je veux dire... L'investisseur, c'est sûr qu'il n'a pas toujours cette éducation-là, il n'a pas toujours toute l'information, mais je pense qu'on a des gens... Ce n'est pas des enquêteurs que ça prend dans les cabinets, c'est juste d'éplucher les petites annonces dans les journaux des fois. Ce n'est pas grand-chose. Et je pense que ça, c'est une chose que je vous avais parlé l'année passée, et ça a perduré encore six, sept mois après, et ça, je trouve ça dommage.
Alors, je vais terminer là mon intervention. Je vais vous laisser pour les questions. J'imagine, si vous finissez plus tôt, que personne ne va être choqué. Alors...
Le Président (M. Hamad): Alors, le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci. Merci, M. Marcoux, pour votre... Je vois d'ailleurs... nous voyons que vous avez suivi avec beaucoup d'intérêt les travaux de la commission, tout ce qui touche les épargnants et même le mandat qu'il y avait eu sur la mise en place de l'AMF, et je pense que votre expérience et les propos que vous tenez aujourd'hui, que vous avez tenus démontrent une connaissance pratique du terrain qui est indéniable.
Dans votre mémoire... J'ai trois questions assez brèves. Une première question. Vous touchez l'enjeu de la question de: Est-ce qu'on devrait ou non élargir un fonds... le rôle d'un fonds d'indemnisation pour couvrir l'ensemble du secteur financier, qu'il soit gestionnaire inclusivement? Et, si je ne m'abuse, dans votre mémoire, vous semblez avoir des réticences à cet égard-là, vous avez l'air à... Je crois que vous trouvez que c'est une couverture, là, je dirais, plutôt inefficace. Pourriez-vous élaborer là-dessus?
M. Marcoux (Michel): Bien, en fait, c'est que je n'ai pas personne encore qui m'a proposé quelque chose, à mon avis, d'intéressant, c'est-à-dire... C'est que tout ce qu'on propose, c'est encore l'investisseur qui va payer. Alors, je ne suis pas contre, mais on ne peut pas, d'un côté, dire aux compagnies de fonds: Arrêtez de charger des frais de gestion si élevés ? de toute façon, je ne suis pas d'accord qu'ils sont si élevés, en passant, là ? mais, d'un autre côté, on sait que l'investisseur, il ne lui reste pas beaucoup d'argent.
Puis un des problèmes actuellement chez l'investisseur, c'est qu'il fait à peine 25 % des rendements des indices boursiers à travers les... chez les Nord-Américains, et ça, c'est un drame, parce que, vous savez, quand vous faites des rendements de 3,8 %, 3,9 % après impôt, après inflation, vous ne gardez pas votre pouvoir d'achat. Il ne faut pas oublier qu'ensemble, collectivement... quand l'investisseur ne fait pas d'argent, c'est la société qui va le soutenir au moment de sa retraite, et ça coûte très cher.
Alors, je pense qu'il y a des... Je ne veux pas minimiser ce qui s'est passé chez Norbourg; au contraire, il y a des drames incroyables dans ce cas-là, mais il faut faire attention, de dire que tout va mal puis essayer de recommencer le modèle. L'AMF actuellement, c'est un jeune organisme, et je vous dirais qu'elle vit des choses à tous les jours qu'elle n'a jamais vécues. Prenez juste le fonds d'indemnisation. Je peux vous dire que l'industrie, la semaine passée, quand ils ont vu que ça coûtait 31 millions, il y en a qui ont sauté, et c'est normal. Mais on se pose plein de questions puis on n'a pas de réponse. Si, par exemple, on retrouve l'argent, est-ce qu'on va remettre dans le fonds l'argent puis on va être remboursé? S'il y a des gens qui sont reconnus coupables de négligence, est-ce qu'ils vont rembourser? En fait, c'est toutes des questions qu'on ne sait pas encore.
Donc, on a un organisme qui est là, il y a des lois qui ont été votées, il y a des règles, mais on ne connaît pas encore toutes les portées. Donc, il ne faudrait pas recommencer le processus. Et ceux qui étaient dans l'industrie quand il y a eu le rapport Martineau, et tout ça, c'est quand même un processus qui a été très long. Je pense qu'il faut faire attention.
M. Paquet: Sur les frais de gestion, évidemment ce serait intéressant d'avoir un peu votre opinion sur le fait que certaines... Un article récent dans Protégez-Vous disait que les frais de gestion sont plus élevés au Québec qu'ailleurs, mais c'est un peu une question, là, en marge que je pose.
M. Marcoux (Michel): ...répondre rapidement.
M. Paquet: Oui.
M. Marcoux (Michel): Ils ont confondu... Ils ont englobé les frais de gestion qui englobent et les frais de gestion et la rémunération du conseiller. Dans le 2,66 %, je reçois 1 % par année. Donc, il en reste seulement 1,66 % à Fidelity, ou Mackenzie, ou la Banque Nationale de ce monde. Alors, ce n'est pas... Il n'y a pas de drame encore.
M. Paquet: Mais il est plus élevé ici qu'ailleurs au Canada, même... Est-ce qu'ils ont comparé des pommes avec des pommes ou...
M. Marcoux (Michel): Bien, ils sont à peu près 2/10 de 1 % plus élevés au Canada.
M. Paquet: O.K.
M. Marcoux (Michel): Mais, si vous prenez le marché américain, qui est tellement gros, ils ont des fonds de 100 milliards d'actif. Ici, quand vous avez un fonds de 5 milliards, là, c'est... La Banque de Montréal, je pense qu'ils ont trois fonds de 5 milliards. Donc, le marché n'est pas le même. Donc, je pense que...
M. Paquet: D'accord. Vous dites que l'AMF effectivement a... Bien, un des éléments: Vous ne croyez pas qu'elle a des... Parce que certaines gens ont dit: Peut-être qu'ils n'ont pas assez de ressources pour faire leur travail. Vous exprimez l'opinion contraire. J'aimerais que vous élaboriez là-dessus dans votre réponse.
Et, par rapport à un processus... Parce que, comme vous dites, c'est important d'agir au moment opportun. Évidemment, il y a des nouvelles situations à tous les jours, il y a des choses... Vous dites qu'il faut être plus près des marchés, dans le fond, pour être capable d'agir assez rapidement. Et, ce matin, par exemple ? je crois que vous étiez présent ? le CFIQ a parlé d'avoir un genre de processus avec une série de signaux d'alarme qui peuvent s'allumer puis qui enclenchent un processus à des étapes différentes selon le cas. Avez-vous réfléchi un peu à ce genre de processus là?
M. Marcoux (Michel): Oui, bien je pense que le processus, il existe déjà. Vous savez, on envoie nos états financiers, on envoie des rapports mensuellement, mais les gestionnaires ne font pas ça. Alors là, actuellement, l'effort est fait au niveau du cabinet, mais il ne semble pas y avoir de problème, et l'information est mensuelle. Alors, je ne peux pas penser qu'on va faire maintenant de l'information hebdomadaire, là. Par contre, au niveau des gestionnaires, il n'y a rien. Alors, ils fournissent des rapports annuellement par leurs vérificateurs externes, point final, c'est tout. Alors, je pense qu'il pourrait y avoir un petit peu d'efforts là, oui, mais à condition qu'on juge qu'il y a un problème assez grave aussi, ce qui n'est peut-être pas le cas.
M. Paquet: Mais, selon vous, vous pensez donc que toute l'information, la paperasse mensuelle qu'elle reçoit... D'après vous, là, et on posera la question à l'AMF, est-ce qu'il y a lieu d'améliorer l'utilisation de l'information qu'elle reçoit déjà en abondance?
M. Marcoux (Michel): Je ne crois pas. Je ne crois pas. Puis je pense qu'actuellement ils ont déjà des mécanismes de prévus. Vous envoyez des rapports de liquidités; dès que ça touche une certaine norme, une période tampon...
M. Paquet: Ça réagit.
M. Marcoux (Michel): ...ils vérifient, ils demandent des informations supplémentaires. Et je ne pense pas que l'industrie, règle générale, ne collabore pas à ça, au contraire, puis ils ont des gens compétents. En tout cas, moi, les gens que j'ai rencontrés à date pour les inspections, c'est des gens très compétents, et je pense que, comme les vérificateurs externes... Le vérificateur externe finit toujours par trouver la petite dépense de 100 $ qui monte la facture, et je vous dirais que l'AMF à mon avis a le même genre d'expertise.
n(16 h 20)nM. Paquet: Une dernière question. Vous avez touché tout à l'heure la question du mandat de l'AMF, qui était quand même très lourd, puis c'est relié en partie... que c'était un organisme qui devait intégrer justement quatre organisations... cinq, pardon, même, avec des cultures institutionnelles différentes, fort différentes. Et je faisais le parallèle ce matin, que, s'il y a des gens qui proposent d'avoir une agence unique canadienne, je ne vois pas beaucoup l'avantage, là, et quand on pense... On parle de 13 juridictions avec, chacune, leurs organismes dans chaque cas; vous pouvez imaginer le monstre que ça créerait, je veux dire, le processus monstrueux, c'est ça que je veux dire, pour arriver à quelque chose qui n'avantagerait pas nécessairement les épargnants. Est-ce que vous croyez ? donc revenons au mandat de l'AMF ? qu'il est trop lourd, parce que c'est nouveau, ou il y a des choses qui devraient être ajoutées à cet égard-là?
M. Marcoux (Michel): Bien, je ne pense pas qu'il est trop lourd. C'est que, comme je vous dis, c'est comme si, demain matin, on fusionne cinq entreprises dans le privé, du jour au lendemain. Je pense que c'est un mandat... Je ne vous dis pas que ça ne se fait pas, je vous dis que c'était un gros mandat. Et, M. St-Gelais, je pense qu'il a une expertise, comme haut fonctionnaire, qui est irréprochable, mais il est arrivé aussi dans un milieu, un milieu de valeurs mobilières qui a aussi ses spécifications, qui a ses... Vous savez, quand vous arrivez ici, la première fois que vous êtes élu député, vous ne connaissez pas tout le monde. À un moment donné, on s'en vient meilleur. Alors, lui est arrivé dans un milieu où peut-être il y a des gens à l'interne qui auraient voulu avoir sa job, aussi. Enfin, on ne sait pas, on peut penser. Mais la collaboration... En fait, ça ne devait pas être facile, c'est ce que je veux dire, ça ne devait pas être facile. Est-ce qu'aujourd'hui on devrait démembrer cet organisme-là? Peut-être pas. Mais je vous dirais qu'au niveau des gestionnaires il n'y a pas grand-chose, je pense, qui se fait, et on pourrait améliorer au niveau de la gestion.
Le Président (M. Hamad): Je ne pense pas que la commission est à un niveau de démembrer l'AMF, en tout cas on n'est pas là.
M. Paquet: Ce n'était pas ma question.
Le Président (M. Hamad): Alors, ce n'était pas ça, aussi. Alors donc, on s'en va à la question de la députée de Matane, après ça Montmorency.
Mme Charest (Matane): Oui, merci, M. le Président. M. Marcoux, nous avons rencontré plusieurs groupes qui nous ont fait part de différentes problématiques, notamment celle où il y aurait un vide au niveau de la prévention des problèmes qu'on a connus, quels qu'ils soient, au niveau financier, et de leur avis l'intervention du vérificateur ou de l'expert-comptable est importante pour donner le signal d'alarme, et après coup l'intervention des institutions d'État et autres pour faire des enquêtes appropriées.
Je comprends très bien que vous dites que la vigilance des épargnants et puis le fait de consulter de bons conseillers financiers vont les aider ou vont aider à réduire sensiblement les risques qu'on a connus et les bévues qui ont été commises dans le passé, mais il demeure toutefois que certains de ces dossiers qui ont été problématiques avaient comme contributeurs également des institutionnels, des sociétés diverses qui ont une grande expertise dans le domaine financier et qui ont été aussi victimes de certaines fraudes.
Alors, est-ce que vous croyez, très sincèrement, et vous mettez beaucoup l'emphase sur le fait que les vérificateurs font déjà un travail important... Ne croyez-vous pas qu'il devrait y avoir un ajout au niveau de la rigueur de leur vérification à l'égard de la fraude comme telle et des indicateurs qui pourraient exister, pour que dès la première occasion il y ait, si on a identifié un indicateur, un avertissement qui soit fait, par exemple à l'AMF ou aux ordres des différents vérificateurs existants?
M. Marcoux (Michel): En fait, je pense que le processus actuel d'un cabinet, par exemple... On a le rapport de liquidités nettes, qu'on doit remettre à tous les mois. Si, après 24, 48 heures, ils ne l'ont pas reçu, tout de suite on reçoit un fax ou un appel: Vous n'avez pas... vous avez omis de donner votre rapport. Donc, il y a tout de suite une sonnette d'alarme, puis là on dit... Au fond, on peut leur dire: Bon, bien, écoutez, on pensait l'avoir envoyé, c'est une erreur. Ça se règle rapidement, là, ce n'est pas un problème. Mais déjà il y a une sonnette d'alarme. Et là, quand on fait des vérifications de nos états financiers, on a 90 jours après notre fin d'année financière ? pas un an, là, c'est 90 jours ? et, règle générale, deux semaines avant, on a un téléphone qui dit: N'oubliez pas, vous avez jusqu'à telle date pour nous envoyer vos états financiers, et tout ça, qui sont des fois faits mais qu'on n'envoie pas, parce qu'on les envoie à la dernière minute. Mais il y a déjà quelque chose. Et, si je n'envoyais pas mes états financiers la journée que c'est prévu, je ne pense pas qu'ils attendraient six mois avant d'envoyer quelqu'un, ce serait très rapide.
Donc, si j'ai mes vérificateurs qui ne signent pas mes états financiers parce qu'ils voient quelque chose d'anormal, ils n'ont pas besoin d'appeler, de dénoncer, parce qu'il semblerait que leur secret professionnel les empêche, là ? je ne voudrais pas embarquer dans un champ que je n'ai pas la compétence et les connaissances... Mais, à partir du moment que mon vérificateur déciderait de ne pas signer mes états financiers, j'ai un problème parce que je ne pourrai pas les envoyer. Et je vous dis que l'AMF, actuellement ils font une bonne vérification là-dessus, au niveau des cabinets, ce que je ne sais pas au niveau des gestionnaires. Mais il semblerait qu'à part envoyer les états annuels il n'y a pas d'inspection comme telle, je pense qu'ils n'ont pas le pouvoir, de toute façon, au niveau du gestionnaire.
Mme Charest (Matane): Du gestionnaire de fonds.
M. Marcoux (Michel): Oui.
Mme Charest (Matane): Merci.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Merci. Merci de votre présence, encore une fois, M. Marcoux. Je vous écoute depuis tout à l'heure puis... Bon, vous parlez des cabinets, bon, vous parlez également des gestionnaires. Je ne sais pas si c'est un message que vous voulez nous passer... Vous avez également mentionné l'évolution de la cause actuellement pendante et les résultats de ça, qu'est-ce qui va arriver, ces choses-là. Je ne sais pas, j'ai l'impression que vous voulez nous passer le message de dire: Bien, attention avant de poser des gestes ou de prendre des décisions, attendez de voir des résultats, attendez de voir ce qui va se passer. Sauf que, nous, on se doit de protéger le petit investisseur, on se doit de s'assurer sa confiance. Une entreprise comme la vôtre, si on... on sait que, bon, la réalité est, oui, que les... il y a encore une très bonne croissance en ce qui regarde les fonds, sauf qu'il y a peut-être une petite problématique par rapport à la grosseur des firmes avec qui ils font affaire, mais on se doit, nous, de trouver une solution à ça, parce que, quand les personnes qui ont économisé toute leur vie, qui ont tout perdu par rapport à des situations et des contextes, des investissements... on ne peut pas ne pas rien faire face à ça, on se doit de faire quelque chose.
M. Marcoux (Michel): Vous avez tout à fait raison, et je vous dirais que ce que je reproche, puis ce n'est pas à vous, c'est au système, c'est de voir la lenteur avec laquelle on a des informations. On n'en a pas, d'information. En tout cas, si, vous, vous en avez, là... Il n'y a pas d'information: Est-ce que c'est... qui a mal fait son travail? Parce qu'il y a quelqu'un qui a mal fait un travail en quelque part, ça, c'est clair.
L'autre chose que je vous dis, c'est qu'actuellement, au quotidien, les efforts de l'AMF sont au niveau des cabinets. Les fraudes qu'il y a eu, il n'y a pas de cabinets qui ont fait de fraude, c'est au niveau des gestionnaires, point. Alors, je vous dis qu'actuellement... Et évidemment c'est une bonne situation pour augmenter les budgets, peu importe l'entreprise, on veut toujours profiter de situation d'augmenter les budgets des départements; là, on augmente, on augmente le nombre d'inspecteurs, on augmente... je ne suis pas contre, mais je me dis: Si ces inspecteurs-là sont pour inspecter des cabinets qui étaient déjà inspectés, où il ne semble pas y avoir de problème, mais qu'on ne fait rien au niveau des gestionnaires, ça ne donne rien.
M. Bernier: O.K. Vous mentionnez également qu'«il est absolument nécessaire de faire les modifications législatives pour permettre à l'Ordre des comptables agréés ? ou tout autre ordre de comptables ? de dénoncer à l'Autorité des marchés financiers les pratiques déficientes d'un membre [ou] pour permettre les échanges d'informations entre l'AMF et l'ordre des comptables» en question. Vous avez sûrement suivi nos travaux, vous savez qu'on a reçu plusieurs groupements, vous avez vu également de quelle façon on... Les gens étaient davantage réticents, au moment où on veut creuser par rapport à l'obtention d'information vers l'AMF, quand on sait qu'il y a des organismes actuellement, que ce soit Revenu Québec ou toute autre organisation, qui en reçoivent, de l'information, mais on vient baliser les lois, ce qui fait que ces informations-là, une fois qu'ils les ont reçues, ils ne peuvent pas les transmettre n'importe comment à n'importe qui, sauf que là on parle de fraude.
M. Marcoux (Michel): En fait, j'aimerais ça pouvoir vous dire: Oui, j'aimerais qu'il y ait un pouvoir de dénonciation. Puis je pense que ce ne serait pas de la dénonciation, mais de la collaboration; je pense que, pour moi, c'est différent. Mais, comme je vous dis, actuellement je pense que, parce qu'il semblerait que légalement ça pose des problèmes, la dénonciation... Alors, moi, je dis que ce n'est pas de la dénonciation, c'est juste le fait de ne pas les signer, les états financiers, de dire: Moi, je refuse de signer ça, ça met... à un cabinet, en tout cas, c'est une problématique, faire vérifier... on ne peut changer le vérificateur du jour au lendemain, ça cause un problème, je pense, qui allume une lumière. Dans le cas qu'on a vu, les cas de fraude, je ne peux pas vous dire: Est-ce que c'est le vérificateur qui a mal fait son travail? Y a-tu été berné, lui aussi? On ne le sait pas, je ne peux pas vous le... On manque d'information, et je trouve ça dommage.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Montmorency.
M. Bernier: Merci.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Gaspé.
M. Lelièvre: Sur le même sujet. Si le vérificateur interne, par exemple, est complice d'une fraude et que le vérificateur externe, lui, qui se présente là pour signer les états financiers, bien là il faut qu'il fasse une vérification, et il faut voir comment... c'est la responsabilité du vérificateur externe d'aller chercher les preuves. À ce moment-là, moi, je pense que ce sont les deux qui ont une responsabilité s'il arrive un pépin.
M. Marcoux (Michel): Effectivement.
M. Lelièvre: Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais...
n(16 h 30)nM. Marcoux (Michel): Oui, oui. Moi, je pense qu'il y a effectivement deux niveaux de la responsabilité. Mais, dans le cas qui nous concerne, ce que je ne comprends pas dans le mécanisme puis que je me pose beaucoup de questions, quand un vérificateur va dans une entreprise, chez nous ou ailleurs, la première chose qu'ils font, ils font signer par un officier des lettres dans lesquelles il autorise le vérificateur à aller voir les fournisseurs, les comptes à recevoir, la banque directement, et poser la question, par exemple, à l'institution financière. Elle dit: Pourriez-vous me justifier effectivement il y avait combien de sous dans le compte bancaire au 31 décembre? Même si, moi, j'ai un état de compte de ma banque qui dit que j'avais x montant, ils vont vérifier, et la lettre va être envoyée de l'institution financière directement au vérificateur.
Dans le cas qu'on a vu, c'est-à-dire qu'il n'y a personne qui a demandé au gardien de valeurs, pendant trois ans: Pourriez-vous nous envoyer une lettre directement, à moi, vérificateur, dites-moi combien vous avez dans votre compte de banque pour les investisseurs? Pourtant, je suis un homme d'affaires, je n'ai que fait ça dans ma vie. Les vérificateurs comptables, la première journée qu'ils rentrent dans une boîte, c'est ce qu'ils font. Donc, ils vont aller chercher, ils vont écrire aux gens qui ont des comptes payables, dire: Est-ce que vous devez effectivement tant d'argent à l'entreprise? Ils vont faire ça. Alors là, dans le cas, il n'y a personne qui aurait vérifié ça? Ça me dépasse un peu.
M. Lelièvre: Et, par rapport au secret professionnel, vous l'avez abordé tout à l'heure, on sait que l'Autorité des marchés financiers peut aller chercher de l'information, mais cette information-là, il faudrait qu'elle demeure à l'intérieur. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Parce qu'on a eu ce matin des professionnels qui sont venus nous dire: Il faut limiter, quoi.
M. Marcoux (Michel): En fait, j'ai de la misère un petit peu à comprendre cette attitude-là. Moi, je peux juste vous dire que, si l'AMF me pose une question, la plupart du temps comptable ? parce que je ne suis pas un comptable de formation, je commence à savoir lire des états financiers ? mais je vais, la majorité du temps, soit les référer à la personne à l'interne, aux gens qui s'occupent de ça ou à nos vérificateurs externes pour qu'ils travaillent ensemble. Tu sais, c'est un travail de collaboration, à mon avis. Point final. Et des fois l'AMF va me dire: Bien, on pourrait utiliser telle pratique, parce qu'ils sont là aussi pour nous aider à améliorer nos pratiques, que ce soient comptables, de vérification. Alors, moi, je ne vois pas le problème. Je ne l'ai pas vécu.
En tout cas, je pense qu'à partir du moment qu'on veut de l'information... que l'AMF veut de l'information d'une firme puis que la firme dit: Wo! Wo! Wo!, secret professionnel, je pense que ça allume des lumières. En tout cas, je ne sais pas si c'est ce qui est arrivé, mais je peux vous dire que je ne pense pas que ça se passe comme ça habituellement. On est tous là pour l'investisseur. Moi, l'investisseur, c'est mon gagne-pain, c'est mon client, puis l'AMF, bien c'est ceux à qui je dois rendre des comptes, puis mes vérificateurs aussi. Donc, on est tous dans le même bain, si on peut dire, puis on a à collaborer ensemble. Alors, je ne vois pas le problème. Mais, comme je vous dis, il semblerait que juridiquement il y en a, mais je ne suis pas un spécialiste en secret professionnel.
M. Lelièvre: Aujourd'hui, on a reçu des gens qui nous ont dit que l'AMF aurait avantage à assigner un chargé de compte à chacune des 24 familles de fonds qui sont actuellement sous sa juridiction, de sorte que ces fonds-là puissent prendre rapidement contact avec des personnes clairement identifiées qui suivent leurs dossiers de près et au besoin se déplacer.
M. Marcoux (Michel): Bien, je vous dirais qu'ils le font déjà avec les cabinets. Nous, quand on a une question de fonctionnement ? à tous les jours, on peut vivre des situations où on ne sait pas trop comment réagir ? on a quelqu'un d'identifié à l'AMF, qui est un peu un chargé de compte, si on peut appeler, et la personne qui est responsable chez nous de la déontologie, de tout ce qui concerne les règles de l'AMF, que ce soient toutes les règles de conformité, va appeler cette personne-là, dire: Écoutez, dans telle, telle situation, on fait quoi? Et c'est cette personne-là habituellement, aussi, qui va nous appeler et dire: Bien, écoutez, il y a telle ou telle chose qui s'en vient, il ne faut pas oublier vos rapports financiers. Alors, ça se fait déjà dans les cabinets, mais il ne semble pas que c'est le cas au niveau des gestionnaires.
M. Lelièvre: Donc, le problème se situe toujours au niveau des gestionnaires, vous l'avez mentionné tout à l'heure.
M. Marcoux (Michel): Bien, c'est là qu'il y a eu trois problèmes. Alors, c'est pour ça que je vous dis qu'actuellement il y a des sous dépensés, mais je ne suis pas sûr s'ils sont bien dépensés.
M. Lelièvre: Mais, au niveau des chargés de compte, à l'heure actuelle, est-ce qu'ils ont des pouvoirs d'inspection et d'enquête?
M. Marcoux (Michel): Non. Je vous dirais que c'est des personnes de référence, et ces personnes-là... Si, par exemple, il reçoit mon rapport de liquidités, qui est mensuel, et que ça ne semble pas être correct, il va donner ça, règle générale, à un département d'inspection, de la façon que j'ai cru comprendre, et il va envoyer quelqu'un, soit un comptable qui va demander des informations supplémentaires, ou il va venir au niveau du cabinet et, à ce moment-là, tout simplement il appelle puis il dit: Moi, je m'en viens pour faire tel travail et préparer les documents d'avance. Puis ils ont accès à tout, là. Je ne me suis jamais battu contre ces gens-là pour dire: Non, non, je ne veux pas que vous regardiez là. Mais je pense qu'ils ont accès à tout. Je ne pense pas que les firmes, règle générale, vont se battre contre ça. Je ne crois pas à ça.
M. Lelièvre: Et une autre recommandation, c'est qu'ils suggéraient que l'AMF crée une cote de fiabilité confidentielle.
M. Marcoux (Michel): Une cote de?
M. Lelièvre: Une cote de fiabilité confidentielle.
M. Marcoux (Michel): Bien, je sais qu'il existe, en Europe, un organisme qui essaie de s'implanter au Canada, et leurs timings sont assez bons, parce qu'ils sont arrivés un mois après Norbourg. Alors, qu'ils essaient de...
Mais, vous savez, moi, je regarde à l'interne. Il y a des gens au quotidien qui travaillent. On a une CGA qui vient hebdomadairement s'assurer que toutes les opérations comptables sont conformes. J'ai mes vérificateurs externes qui sont là aussi pour ça. J'ai les inspecteurs de l'AMF qui sont là, et là ils ont un comité de normes comptables qui vient d'être créé. Ça fait bien du monde, mais là on parle de peut-être avoir un vérificateur par-dessus le vérificateur qui... Je pense qu'à un moment donné, quand il y a des gens de mauvaise foi, peu importe où, il va y en avoir, mais je pense qu'à un moment donné il faut s'arrêter à quelque part, en tout cas.
Le Président (M. Hamad): Ça va? Alors, merci beaucoup, M. Marcoux, pour la présentation et présence.
Et je suspends les travaux pour quelques minutes pour permettre à l'autre groupe de s'installer.
(Suspension de la séance à 16 h 36)
(Reprise à 16 h 39)
Le Président (M. Hamad): Nous reprenons les travaux. Nous avons maintenant le Fonds d'investissement Diamant, M. Savard, M. Diamant. Alors, je vous demande de vous présenter et présenter votre collègue, et par la suite vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire. Il y aura 30 minutes de période de questions.
Les Fonds Diamant inc.
M. Savard (Denis): M. le Président Hamad, M. le vice-président Bertrand, madame, messieurs les distingués membres de la Commission des finances publiques, tout d'abord je vous remercie de nous entendre à cette commission, et, comme il se doit, je me présente.
Mon nom est Denis Savard. Je suis président de la firme Les Fonds Diamant inc., une petite firme de fonds québécoise qui a été mise sur pied en 2001. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Robert Diamant, l'un des membres indépendants du conseil d'administration de Fonds Diamant.
n(16 h 40)nM. Diamant (Robert): M. le Président, si vous permettez, pour dissiper toute équivoque, alors c'est le fruit du hasard que Fonds Diamant porte le même nom que moi, puis on ne pouvait pas, ni l'un ni l'autre, en changer.
Le Président (M. Hamad): ...il y a du diamant dans votre fonds.
M. Savard (Denis): C'est-à-dire que ce n'est pas un fonds aurifère, pas du tout. Il n'y en a pas du tout. C'est plus conservateur que ça.
Le Président (M. Hamad): Plus conservateur, c'est plus riche ou moins...
M. Savard (Denis): Vous allez être à même d'en déduire à la fin de mes propos, je présume. Donc, notre petite famille de fonds a été mise en place, grâce au support accordé par le gouvernement du Québec, lors de la création de Fonds Diamant Stratégie Contre-courant, en 2001. Nous avons été, semble-t-il, à ce moment-là, le dernier fonds à bénéficier de cette aide, car le programme prenait fin au lendemain de notre création. Deux ans plus tard, en 2003, nous avons ajouté un deuxième fonds, le Fonds Diamant Valeur mondiale, dans le but d'offrir aux épargnants une alternative de placement dans un marché financier différent.
Nous avons abordé cette activité de services financiers avec la conviction de pouvoir répondre adéquatement aux besoins des épargnants avec un produit québécois géré par des gens de chez nous. Nous nous inscrivons toujours dans cette perspective et nous sommes déterminés à faire la démonstration que nos services financiers, sans être des géants de l'industrie, peuvent occuper la place qui leur revient dans le marché québécois et canadien de l'épargne collective. Pour y arriver, nous sommes disposés à gérer notre entreprise avec rigueur et compétence en nous appuyant sur une réglementation adaptée et en développant des mécanismes et des pratiques de gestion transparents, offrant toutes les garanties de sécurité et de rendement nécessaires aux épargnants.
Et voici le scandale Norbourg. Le scandale Norbourg et, dans une moindre mesure, ceux impliquant Norshield, Mount Real, Argentum et Zénith ont provoqué la chute libre des petits fonds québécois, réaction de méfiance fort compréhensible des épargnants. Comme les autres fonds, Fonds Diamant a amorcé une glissade que nous avons tenté d'endiguer en offrant un produit de qualité et en appliquant des règles de gestion irréprochables. Malgré cela, nos deux fonds, maintenant fusionnés en un seul appelé Fonds Diamant Valeur nord-américaine, sont passés de 24 millions d'actif à plus ou moins 9 millions. Nous sommes une autre victime de ce scandale.
Les données colligées par le Conseil des fonds d'investissement du Québec, que vous avez entendu ce matin, et celles de l'IFIC, de l'Institut des fonds d'investissement du Canada, montrent clairement l'ampleur de l'industrie de l'épargne collective au Canada et au Québec. Globalement, on parle de plus de 630 milliards de dollars d'actif sous gestion dans les différents fonds communs au Canada, et, au Québec, il s'agirait d'environ 80 à 90 milliards de dollars de fonds sous gestion, gérés en grande partie par des institutions financières situées hors Québec.
Des données récentes suggèrent que l'effet Norbourg n'a pas du tout affecté l'ampleur du marché et sa croissance. Ce sont plutôt les épargnants floués et les petites familles de fonds qui en ont fait les frais et qui en subissent les conséquences. De toute évidence, les épargnants québécois continuent, même après Norbourg, à compter sur leurs épargnes pour assurer leur qualité de vie et préparer leur retraite, comme cela est souhaitable. Les fonds communs de placement constituent toujours leur premier choix pour ce faire. Toutefois, ils se méfient des institutions québécoises, surtout des petites.
Par ailleurs, le scandale Norbourg a jeté du discrédit sur l'organisme de surveillance des marchés financiers. Tout le monde se demande comment celui-ci a pu ignorer aussi longtemps les abus et irrégularités commis par ce gestionnaire en toute impunité et aussi comment se fait-il que les réactions soient aussi lentes à se manifester. C'est un dossier à suivre et une question prioritaire. Si les citoyens du Québec peuvent comprendre que l'AMF est un organisme nouvellement créé occupé à digérer et intégrer ses nouvelles responsabilités, ils ne peuvent admettre que certaines situations, comme le scandale Norbourg, aient pu échapper à l'organisme et que celui-ci ait pris autant de temps à réagir.
Enfin, ultimement, le gouvernement lui-même, comme premier et dernier responsable du bon fonctionnement de ce système, est lui aussi discrédité. Les ajustements législatifs ou réglementaires et les mises au point administratives ont acquis un caractère d'urgence. Il en va de même pour l'information du public.
Voulons-nous redonner confiance aux épargnants? Voulons-nous toujours que les institutions québécoises occupent, dans ce marché national et même international, une place importante pour le bien de notre économie collective? Est-on prêt, comme société, à faire les efforts pour y arriver? Et quel rôle pouvons-nous assumer comme épargnants, comme gestionnaires de fonds communs de placement, comme organisme de surveillance ou comme gouvernement?
Les questions que nous avons retenues au premier chef, parmi celles qui nous sont posées par la Commission des finances publiques, sont les suivantes. Premièrement: Comment assurer l'imputabilité des acteurs du marché et éliminer les conflits d'intérêts et les occasions de fraude et de mauvaise gestion? Deuxième question: Comment protéger les épargnants et leur redonner confiance envers les entreprises québécoises, particulièrement les petites, et envers les fonds communs de placement gérés chez nous?
Six fonctions sont identifiées dans la gestion d'un fonds commun de placement: le gérant promoteur, le gestionnaire, le fiduciaire, le gardien de valeurs et le dépositaire ? qui sont souvent les mêmes personnes ? le vérificateur et le registraire ? qu'on oublie souvent parce que le promoteur fait souvent lui-même la fonction de registraire. De toute évidence, il est souhaitable que ces différentes fonctions soient séparées, particulièrement celles de gestionnaire de fonds, de fiduciaire, de gardien de valeurs et de vérificateur. Toutefois, dans la perspective de la mise sur pied d'un comité d'examen indépendant, dans le cas où ce serait pertinent, la possibilité de fusionner certaines fonctions devrait être évaluée. À l'instar d'autres structures, la nôtre pourrait permettre la fusion des rôles de dépositaire et de gardien de valeurs, tout en imposant de nouvelles règles de gouvernance au gérant promoteur.
Dans le cas des petites familles de fonds, soit celles de 50 millions ou moins sous gestion, au lieu de faire appel à un comité d'examen indépendant, il serait moins lourd et certainement plus efficace d'avoir un conseil d'administration formé de personnes indépendantes ou expertes à qui on fournirait les outils nécessaires pour qu'elles puissent bien encadrer et contrôler la bonne marche des activités de gestion et de distribution de fonds.
n(16 h 50)n Depuis plus de deux ans, donc avant même les scandales, Fonds Diamant a misé sur cette approche avec un conseil d'administration formé du président promoteur et de quatre administrateurs indépendants. Cette courte expérience nous apparaît prometteuse, même si plusieurs outils de gestion favorisant l'exercice de l'imputabilité restent à développer. À ce sujet, l'aide de l'AMF serait certes souhaitable et bien reçue. Par ailleurs, la mise sur pied éventuelle d'un comité d'examen indépendant est perçue comme très lourde pour notre petite organisation. Nous préférons miser sur l'amélioration de la gouvernance.
Nous sollicitons donc que cette question soit revue avant l'échéance de l'obligation de créer le comité d'examen indépendant, soit avant le 1er mai 2007. La section 8.0 du règlement 81-107 qui a été adopté permet à l'AMF d'accorder des dispenses dans certaines circonstances. Nous proposons que les petites familles de fonds gérant moins de 50 millions soient dispensées de cette obligation, à condition de mettre sur pied un conseil d'administration indépendant.
Le scandale de Norbourg a mis en lumière l'extrême vulnérabilité des investisseurs en cas de fraude des gestionnaires de fonds. L'annonce récente de l'AMF d'utiliser le Fonds d'indemnisation des services financiers pour indemniser les victimes de la fraude de Norbourg soulève bien des questions. Ainsi, il est clair que le dispositif de protection des épargnants des fonds communs de placement est inadéquat et qu'il est bizarre que ce soit le fonds chargé d'indemniser les victimes de fraudes commises par des représentants vendeurs qui soit utilisé pour compenser les épargnants des fraudes commises par Norbourg. Sans jeu de mots, nous pensons qu'il s'agit d'un détournement de fonds.
Nous souhaitons donc la constitution d'un fonds d'indemnisation chargé de compenser les victimes des fraudes des gestionnaires et promoteurs de fonds communs de placement. Ce fonds d'indemnisation serait financé par les promoteurs et gestionnaires proportionnellement au montant des actifs sous gestion des fonds de placement qu'ils administrent. Une autre formule d'indemnisation, celle que nous privilégions, serait d'adopter celle développée par les assureurs de personnes, et ça aurait avantage à être examiné, pour créer ce qu'on a appelé, aux assureurs de personnes, la SIAP, la Société d'indemnisation des assureurs de personnes.
En rapport avec le scandale Norbourg, nous nous demandons toutefois ce qu'il adviendra des victimes non compensées par le Fonds d'indemnisation des services financiers. Si les actifs récupérés ne suffisent pas, il faudra bien trouver un moyen de les compenser quand même en évitant de refiler la facture à d'autres acteurs qui n'ont rien à voir avec cette fraude.
Il semble bien toutefois que la confiance des épargnants ne saurait être restaurée par la seule mise sur pied d'un fonds d'indemnisation. La situation générée par le scandale Norbourg requiert une stratégie concertée, énergique et dynamique pour redonner confiance au milieu et supporter les entreprises de chez nous. Nous comptons au premier chef sur le leadership du gouvernement, à qui il appartient de clarifier et de développer les éléments d'une politique québécoise visant à encadrer les activités d'épargne au Québec. De même, nous croyons qu'il appartient au gouvernement de prendre le leadership d'une campagne d'information du public visant à restaurer l'image des institutions québécoises et rassurer les épargnants d'ici et d'ailleurs. Si on ne fait rien, on laisse croire que l'encadrement est plus rigoureux hors Québec, ce qui n'est pas le cas.
Enfin, nous soutenons le point de vue que l'AMF doit s'orienter prioritairement dans une approche proactive et développer des mécanismes de surveillance dynamiques et préventifs auprès des promoteurs et gestionnaires de fonds communs de placement.
Avant de conclure, nous nous permettons d'insister sur l'idée que la bonne gouvernance fiduciaire doit inspirer tous les acteurs de l'industrie des fonds communs de placement. Si cela pouvait signifier qu'un processus ou un organisme indépendant évalue et cote les gestionnaires et fiduciaires, il faudrait voir comment réaliser une telle démarche de sécurité dite active.
En conclusion, dans les limites des moyens d'une petite famille de fonds communs de placement, Fonds Diamant désire réitérer, en terminant cette brève présentation, sa détermination à participer activement au développement de l'industrie de l'épargne collective au Québec. C'est dans cette dynamique que nous voulons que les investisseurs épargnants reprennent confiance en nos services financiers, que les épargnants bénéficient d'une protection adéquate et qu'ils participent eux-mêmes à leur sécurité, que les entreprises québécoises occupent leur place dans ce marché, que ces entreprises rendent des comptes et qu'elles développent des pratiques de bonne gouvernance, ouvertes et transparentes, que ces entreprises puissent jouir d'un support de l'AMF sous forme de conseils en matière de gouvernance. Merci.
Le Président (M. Hamad): Merci, M. Savard. M. le député de Marguerite-D'Youville.
M. Moreau: Merci. Merci, M. Savard, M. Diamant, d'être là. Je vous remercie pour votre mémoire. J'ai suivi bien attentivement ce que vous avez dit. J'ai été étonné de constater l'ampleur de l'impact sur... Là, vous passez de 24 millions d'actif à plus ou moins 9 millions. C'est...
M. Savard (Denis): Catastrophique.
M. Moreau: Oui, c'est le mot qui me venait à l'esprit, là, «catastrophique». Je pense que vous avez tout à fait raison.
Mais j'ai deux questions peut-être qui relèvent de la précision. Je vais vous demander de préciser votre pensée. La première, ça m'apparaît assez technique, là. À la page 6 de votre mémoire, vous suggérez que... attendez un peu, vous dites: Depuis plus de deux ans, avant le scandale... a misé sur cette approche avec un conseil d'administration, le conseil d'administration indépendant. Puis là vous dites: C'est une expérience prometteuse. «Par ailleurs, la mise sur pied éventuelle d'un comité d'examen indépendant est perçue comme très lourde pour [une] petite organisation.» Vous dites: N'alourdissez pas les structures, parce que, nous, on a de la difficulté à faire face à ces obligations-là. Et vous suggérez qu'il y ait, dans le règlement 81-107... en fait qu'il y ait une exception pour que vous soyez relevés de l'obligation d'avoir ce comité d'examen indépendant.
Ma question est la suivante ? et peut-être que ça demande une précision: Ne craignez-vous pas ? parce que vous confirmez, au début, qu'il y a un glissement en fait des petits organismes comme le vôtre vers les grands, vers les banques, vers les plus grandes organisations; ne craignez-vous pas ? qu'en demandant une mesure d'exception comme celle-là ça ne fasse qu'accroître les craintes que peuvent avoir les investisseurs et que ça ait l'effet pervers d'amplifier le glissement vers les grandes entreprises, si vous bénéficiez d'une exception?
M. Savard (Denis): Non. Je ne...
M. Moreau: Comprenez-vous ma...
M. Savard (Denis): Oui, je comprends très bien votre question. Ce n'est pas pernicieux comme question, là. Et évidemment le fait d'offrir au public, selon moi, une mesure de protection qui est de beaucoup supérieure à la mesure imposée par 81-107, par le comité d'examen indépendant... Si vous référez au comité d'examen indépendant, son obligation est de se réunir une fois par année et d'examiner les questions de conflit d'intérêts qui peuvent lui être soumises. Sachez qu'un conseil d'administration de gouvernance se réunit beaucoup plus souvent, un minimum de quatre fois par année, et peut-être plus, et ces personnes n'ont pas seulement accès aux questions que lui soumet le conseil d'administration sur les problématiques de conflit d'intérêts, ils ont accès à tout ce qui se passe à l'intérieur de la famille de fonds: ils peuvent contrôler l'ensemble des contrats qui sont signés avec le fiduciaire, avec le gestionnaire, avec le registraire, ils ont accès à toute l'information. Et, comme mesure de protection des épargnants, au contraire, c'est supérieur à ce que peut faire un comité d'examen indépendant qui se réunit une fois par année pour examiner des questions.
Et je reprends ce que vous disait tantôt M. Marcoux: il n'y aura pas de questions qui peuvent provenir de notre conseil d'administration à ce comité-là, parce que, des questions potentielles de conflit d'intérêts, on n'en voit pas. C'est propice pour une compagnie qui est inscrite à la Bourse.
Le Président (M. Hamad): Mais, si c'est plus... Parce que vous disiez que vous voulez réduire, là, la paperasse puis la complication...
M. Savard (Denis): Effectivement.
Le Président (M. Hamad): ...et là vous venez de dire que, le comité d'examen indépendant, un examen par année, c'est fini, et là vous expliquez que votre conseil, c'est tout le temps, tout le temps, tout le temps. Alors là je ne vous suis pas, là.
n(17 heures)nM. Savard (Denis): Ce que je vous dis, c'est que...
Le Président (M. Hamad): Si c'est simple, pourquoi vous ne le prenez pas? S'ils étaient à votre place... Mettons, on dit: Il y a un comité, la loi demande ça, puis on est conformes, puis on va le dire à tout le monde: on est conformes. Alors, pourquoi...
M. Savard (Denis): Il y a une différence importante.
M. Moreau: Ça, c'est pernicieux comme question. Non, non, c'est une blague!
M. Savard (Denis): Oui. Oui. Il y a une différence importante. C'est que le comité d'examen indépendant, pour sa mise en place, nécessite, là, d'abord la nomination de personnes qui ne siègent pas au conseil d'administration. C'est des personnes extérieures. On doit rédiger une charte, et tout un processus, une mécanique pour la mise en place. Et les estimés les plus favorables, là, disent que ça va coûter entre 50 000 $ et 250 000 $ pour mettre ça en place, O.K.? Ça, un conseil d'administration, sur cinq ans, ne coûte pas ça. O.K.? Les questions à lui soumettre, on n'en a pas. On crée ça pour répondre à une exigence réglementaire. Selon moi, ce n'est pas de la bonne gestion que d'aller vers ça. Au contraire, un conseil d'administration indépendant, de gouvernance, comme nous avons, où 80 % des membres, quatre sur cinq, sont des personnes totalement indépendantes de l'organisation, est beaucoup plus en mesure d'apporter de la sécurité aux épargnants que n'importe quel comité d'examen indépendant, dans une petite famille de fonds. Dans une grosse, je ne dis pas que ce ne serait pas pertinent. Au contraire, parce que là il y a possibilité d'avoir des achats de stocks, d'actions d'une compagnie apparentée, et là c'est important de soumettre ces situations-là à un comité d'examen indépendant.
M. Moreau: À l'évidence, vous seriez confortables, avec cette mesure, à faire des représentations aux investisseurs pour les amener vers une petite famille.
M. Savard (Denis): Tout à fait.
M. Moreau: O.K. Deuxième question ? je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps ? page 8 de votre mémoire, j'ai un peu sursauté quand j'ai lu ça. En fait, je comprends l'objectif, là, mais je ne sais pas comment on va faire ça. Alors, vous dites: «En rapport avec le scandale Norbourg, nous nous demandons toutefois ce qu'il adviendra des victimes non compensées par [le fonds,] le FISF. Si les actifs récupérés ne suffisent pas, il faudra bien trouver un moyen de les compenser quand même en évitant de ? et c'est la partie où je vous demande comment on va faire ça ? refiler la facture à d'autres acteurs qui n'ont rien à voir avec cette fraude.» Alors, précisez ça. Qui sont les acteurs qui ont à voir avec cette fraude et qui devraient être visés par une mesure que je comprends que vous souhaitez être rétroactive, si le législateur choisissait d'intervenir?
M. Savard (Denis): Les seules personnes visées par la fraude, à l'intérieur des différents scandales, on parle toujours des personnes qui ont été les gestionnaires. C'est à titre de gestionnaires des épargnes des Québécois qu'ils ont commis ces fraudes-là. Ce n'est pas les représentants vendeurs. Il n'y a aucun d'entre eux qui a été reconnu coupable de quelque malversation que ce soit jusqu'à maintenant, et on se sert du seul fonds qui existe, qui a été constitué par ces personnes-là, pour compenser la fraude des gestionnaires. Donc, s'il y avait des personnes qui devraient contribuer, ce sont les gestionnaires de fonds.
Le Président (M. Hamad): Si les gestionnaires n'ont plus d'argent puis les gestionnaires vont déclarer faillite, vous allez faire quoi?
M. Savard (Denis): Je ne pense pas que les gestionnaires d'AGF, Mackenzie de ce monde nous...
Une voix: ...
M. Savard (Denis): Bien, ce sont les firmes qui font la gestion. De qui vous pensez dont on parle? Parce que je sais que des fois ça peut être confondant. Parce que tantôt vous aviez une personne ici qui est un propriétaire d'un cabinet de distribution de fonds mutuels. Il n'a pas la même vision nécessairement qu'un promoteur de fonds comme nous sommes, nous. Et il est clair que, si les gestionnaires étaient sollicités pour contribuer à une caisse, bien il faudrait que ce soit un ordre qui vienne des autorités politiques pour qu'ils le fassent. Ça a été le cas dans le cadre des compagnies d'assurance de personnes quand il y a eu différentes faillites, il y a plusieurs années, de compagnies d'assurance; les gouvernements ont imposé la mise sur pied de ce qu'on a appelé la Société d'indemnisation. Il n'y a pas de contribution annuelle. Ce qu'ils font, c'est, lorsqu'il y a des réclamations, ils cotisent leurs membres au prorata des actifs qu'ils gèrent.
M. Moreau: O.K. Alors donc, pour préciser ce que vous dites à la page 8, ceux que vous visez, ce seraient les gestionnaires de fonds, dans le cas particulier de Norbourg?
M. Savard (Denis): Oui. C'est là d'où vient le problème.
Le Président (M. Hamad): Mais avec le même exemple que les compagnies d'assurance.
M. Savard (Denis): Oui.
Le Président (M. Hamad): Mais, les compagnies d'assurance, si ma mémoire est bonne, ils couvrent les faillites. Là, on est dans la fraude.
M. Savard (Denis): Ils couvrent les faillites, en fait les pertes qui peuvent être...
Le Président (M. Hamad): Oui. Ils ne couvrent pas...
M. Savard (Denis): Il s'agit de déterminer les règles. Les règles ont été déterminées par les compagnies d'assurance pour elles.
Le Président (M. Hamad): Non, non. On se comprend qu'on est dans la faillite.
M. Savard (Denis): Ça pourrait être autre chose.
Le Président (M. Hamad): Ici, on est dans la fraude.
M. Savard (Denis): C'est ça.
Le Président (M. Hamad): Ce n'est pas pareil.
M. Savard (Denis): Ce n'est pas pareil.
Le Président (M. Hamad): O.K.
M. Moreau: Et comment vous détermineriez le niveau de cotisation?
M. Savard (Denis): Ce que je vous disais tantôt, c'est qu'a priori je ne mettrais pas de cotisation. Je mettrais des réclamations aux événements, lorsqu'il y a une situation de fraude, en prorata des actifs gérés par chacune des familles. Quand une famille de fonds gère 50 milliards, elle est capable d'y aller en proportion de ce qu'elle gère versus... Ça, il n'y a pas de familles de fonds qui vont venir ici, sauf une petite comme la mienne, pour vous suggérer ça.
M. Moreau: Pour dire ça? Oui, je comprends.
M. Savard (Denis): Vous comprenez?
M. Moreau: Oui, oui. Alors, vous iriez au prorata...
M. Savard (Denis): Des actifs gérés.
M. Moreau: ...des actifs gérés. O.K., ça va. Merci.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Laval-des-Rapides.
M. Paquet: Merci beaucoup, M. Savard, M. Diamant. Tout à l'heure, vous parliez effectivement que c'est assez catastrophique, pour employer les mots que vous avez utilisés, là, de voir les actifs sous gestion passer de... comme on disait tout à l'heure en tout cas, à autour de 9 millions, là. Vous étiez au départ à...
M. Savard (Denis): À 24.
M. Paquet: ...à 24, c'est ça. De 24 à 9 millions. Le 9 millions, est-ce que c'est le bas que vous avez atteint ou si ça a remonté au cours des derniers mois?
M. Savard (Denis): C'est le bas que nous avons atteint.
M. Paquet: C'est ça, O.K., le bas que vous avez atteint. Un des éléments peut-être, parce que c'est quelque chose qui a été mentionné par d'autres aussi, c'est la question des frais de sortie. Dans votre cas, vous n'avez aucuns frais de sortie?
M. Savard (Denis): Ça n'existe pas chez nous.
M. Paquet: Ce qui peut apparaître un avantage à l'investisseur, dans un sens, je le vois très bien. Mais est-ce que le fait d'avoir une absence de frais de sortie n'a pas pu aussi faire en sorte que ça a accéléré... Et peut-être pour de bonnes raisons. Ultimement, c'est l'épargnant qui doit décider où est-ce qu'il met son argent. Mais, dans certains cas, on pourrait peut-être dire: Il devrait peut-être y en avoir, ou ne pas y en avoir. Mais le fait de ne pas en avoir eu, est-ce que ça n'a pas pu accélérer les mouvements, là, de sortie, ce que vous avez connu, à court terme? Et est-ce que récemment, sans vous demander de chiffres privés, là, mais est-ce que c'est en train de prendre une direction autre, là, que ça commence à s'améliorer? Et j'aimerais avoir votre opinion sur dans quel cas ne devrait-il pas y avoir de frais de sortie. Ou est-ce que, dans tous les cas, d'après vous il ne devrait jamais y en avoir?
M. Savard (Denis): Notre firme a été fondée justement avec l'esprit que l'épargnant, le consommateur devrait avoir accès à son argent quand il en a besoin. Donc, quand nous avons fondé la firme, nous l'avons fondée sans frais d'entrée et sans frais de sortie. Effectivement, ce que vous déduisez, ça a pu nous rendre plus vulnérables dans une situation... mais on était loin de fonder notre firme en pensant qu'une telle situation allait se produire. Et je ne regrette pas. Je pense que, si les consommateurs québécois ont accès à des familles de fonds où il n'y a pas de frais d'entrée, pas de frais de sortie, c'est à leur avantage. Ce qu'il faut, c'est trouver des moyens pour leur redonner confiance. Ce n'est pas vrai que l'ensemble des firmes québécoises sont des firmes qui sont malhonnêtes. Et ça, je pense que vous avez une responsabilité à cet égard-là.
M. Paquet: Une autre question, une dernière question, relativement à l'encadrement des gestionnaires de fonds. Dans votre mémoire, vous faites l'argumentation que l'octroi du permis d'exercice de gestionnaire et l'accord donné pour procéder à certaines transactions devraient être assortis d'une enquête plus approfondie de la provenance des sommes utilisées. J'aimerais que vous élaboriez davantage à cet égard-là. Peut-être, pour le bénéfice de notre connaissance à nous, là, qu'est-ce qui se fait présentement et jusqu'où ça devrait aller d'après vous? Et, ce matin, je ne sais pas s'il y a un lien à faire, mais je crois que c'est CFIQ, peut-être que je me trompe, qui proposait l'idée d'une immatriculation propre à chacun des produits financiers ou fonds de gestion. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.
M. Savard (Denis): Je vais commencer par la seconde partie de votre question, à savoir l'immatriculation. Je considère que, quand on parle des fonds communs de placement, nous sommes déjà immatriculés, parce que chacun des fonds communs de placement doit soumettre un prospectus à l'AMF avant de pouvoir le distribuer. Quand on parle d'enregistrement, on parle pour des produits qui ne sont pas des fonds communs de placement, on se comprend?
M. Paquet: C'est ça. C'est ça. Oui, tout à fait.
M. Savard (Denis): Et, par exemple, dans la situation de Mount Real, c'était une situation où ce n'étaient pas des produits qui étaient reconnus comme tels par l'AMF.
M. Paquet: Tout à fait.
M. Savard (Denis): La première partie de votre question, que je viens de perdre, vous allez me la répéter, s'il vous plaît?
M. Paquet: Il n'y a pas de problème. Vous suggérez qu'il devrait y avoir une enquête plus approfondie et des règles plus strictes relativement à l'octroi d'un permis d'exercice de gestionnaire.
n(17 h 10)nM. Savard (Denis): Oui, et vous aviez complété votre question avec un élément que j'avais trouvé assez intéressant, à savoir le questionnement qu'il devrait y avoir lorsqu'il y a des transactions. Si n'importe quel consommateur québécois s'adresse à une institution financière pour faire l'acquisition d'une propriété, une des premières questions qu'on va lui demander: Ton comptant, il provient de quel endroit et il est de quelle nature? Il ne rentrera peut-être pas nécessairement dans les détails de combien d'années tu as épargné pour réaliser ce comptant-là, mais on va te demander au moins, hein... si tu arrives pour acheter quelque chose d'aussi important que d'acheter une famille de fonds, on va t'interroger à savoir d'où provient ton argent, ce qui n'a pas été fait dans le cas de l'acquisition, je pense, par Norbourg des fonds Évolution.
M. Paquet: Une dernière question. Vous proposez de créer un guide de produits agréés qui serait... Je crois que c'est l'AMF qui pourrait être responsable de le tenir, à cet égard. Avez-vous évalué la question de mise à jour de tels produits lorsqu'il y a des changements, etc.? Et est-ce que ça devrait être sous la responsabilité nécessairement de l'AMF? Ou l'AMF devrait peut-être demander que de tels prospectus soient faits?
M. Savard (Denis): Je vous dirais, pour la très large majorité des produits... On a déjà des prospectus...
M. Paquet: C'est ça, oui.
M. Savard (Denis): ...pour l'ensemble des produits de fonds communs. C'est toujours marginal, ces produits-là, et c'est répandu par les journaux avec des petites annonces, là. C'est là-dessus qu'on devrait regarder qu'est-ce qui se passe. Mais ce n'est pas le cas des principales situations. La majorité des produits de fonds communs de placement, au Canada, sont très bien encadrés et sont aussi bien surveillés au Québec qu'ailleurs.
Puis, moi, je trouve ça dommage qu'on laisse entendre que les... Actuellement, il se vend beaucoup plus de fonds gérés ailleurs qu'au Québec. 70 % des fonds achetés par des Québécois sont gérés ailleurs qu'au Québec. Les Québécois gèrent à peine 5 % de l'ensemble du portefeuille, moins de 5 %. C'est 4,7 % de l'ensemble des épargnes au Canada. Je pense qu'on représente une plus grosse part de marché que ça. Ça fait que c'est important.
Je pense que l'effort qui a été mis, je vous dirais, en 2000-2001 pour supporter, pour voir à la création des familles de fonds québécoises... Ça a arrêté en 2001, mais je pense que c'est des efforts qui étaient bienvenus quand on voulait rétablir un équilibre dans cette économie-là, au Québec. Je pense que c'est encore pertinent. Mais, s'il ne se fait rien, il reste très peu de familles de fonds comme la nôtre, et ça va être la mort lente, à plus ou moins brève échéance, s'il n'y a pas un rétablissement de la confiance des Québécois envers ces familles-là et aussi un support pour faire en sorte qu'une réglementation comme... Le comité d'examen indépendant, financièrement je ne peux pas mettre ça sur pied. C'est clair, c'est établi dans la réglementation qu'on doit charger ça aux fiducies de placement. Ce n'est pas le gestionnaire qui paie ça, là, ce sont les fiducies. Donc, l'épargne des Québécois, ce sont vraiment les porteurs de parts qui vont supporter ça. Et, si j'allais faire une ponction dans le portefeuille de porteurs de parts, ça signifierait, chez nous, actuellement un coût entre 0,05 % à 3 % que j'irais charger en plus de leurs frais de gestion. Ça n'a aucun bon sens.
Le Président (M. Hamad): M. le député de Charlevoix.
M. Bertrand: Merci. M. Savard, si je comprends bien, vous aviez, à un moment donné, deux fonds, Fonds Diamant Stratégie Contre-courant et Fonds Diamant Valeur mondiale, et vous avez tout fusionné ça en un, j'imagine, là, suite à la descente aux enfers, oui.
M. Savard (Denis): ...mesure de réduire les coûts.
M. Bertrand: À ce moment-là, il y avait combien ? si je recule, c'est vers 2002-2003; il y avait combien ? de fonds de familles québécoises, et aujourd'hui il y en a combien à peu près?
M. Savard (Denis): Le nombre de familles de fonds québécois, ça n'a jamais été très, très nombreux. Il y avait eu la création de, je vous dirais, peut-être une dizaine de familles suite à l'effort des années 2000, mais, depuis ce temps-là, bien vous savez, toutes celles où il y a eu des scandales, elles ont toutes disparu, et il n'y a pas eu tellement de consolidations ou de fusions de différentes familles par la suite, parce qu'il n'y a pas de famille de fonds qui veut, dans un contexte actuel, partir, parce que, bon...
M. Bertrand: Il y en a combien aujourd'hui, québécoises, à part la vôtre?
M. Savard (Denis): Il en reste 27 ou 28, là.
M. Bertrand: Il reste 27 ou 28...
M. Savard (Denis): Oui, mais ça, ça inclut les fonds de Desjardins, de la Banque Nationale, ça inclut...
M. Bertrand: Les gros.
M. Savard (Denis): ...l'ensemble des familles de fonds opérant au Québec. Dans les petites familles de fonds, je pense qu'il en reste six.
M. Bertrand: Juste pour nous donner une idée, pour qu'on voie encore plus les conséquences, votre famille de fonds, si vous reculez dans les meilleures années, employait combien de personnes, si ce n'est pas indiscret de vous demander ça, comparé à aujourd'hui?
M. Savard (Denis): Chez nous, tout est donné en impartition. Alors, c'est pour ça qu'il n'est pas possibilité de collusion ou il n'est pas possibilité de fraude. Parce que le fiduciaire, donc Trust Banque Nationale, est notre gardien de valeurs, et c'est lui qui est notre dépositaire. Il est complètement un organisme indépendant. Notre registraire est un autre organisme indépendant. Celui qui est notre fiduciaire pour les REER, c'est une autre société de fiducie. Tout est donné en impartition, de sorte que, le promoteur, la seule chose que nous avons, nous avons besoin d'un employé, et puis actuellement il y en a un quart de un, et essentiellement c'est pour faire la promotion de nos produits auprès des distributeurs. Tout est séparé au niveau des différentes fonctions. Donc, c'est pour ça que ça, c'est une protection pour le consommateur. Il ne peut pas y avoir de collusion avec notre vérificateur, puis notre gestionnaire, puis... c'est toutes des personnes indépendantes les unes des autres.
M. Bertrand: Par contre, pour maintenir votre... Vous avez descendu de 24 à 9 millions. Il y a un nombre de clients, là, j'imagine, que... Je ne sais pas, en nombre, comment on peut les évaluer, mais vous avez sûrement quand même des personnes... Je sais que vous avez une autre entreprise. Probablement que ces fonds-là sont vendus par des gens qui détiennent des permis...
M. Savard (Denis): Dans d'autres entreprises.
M. Bertrand: ...ou par des courtiers indépendants.
M. Savard (Denis): Par des courtiers indépendants, tout à fait, oui.
M. Bertrand: C'est ça. Ah, O.K. Donc, c'est pour ça que vous dites que, pour l'administration du fonds, vous avez seulement une personne.
M. Savard (Denis): Exactement.
M. Bertrand: Et est-ce qu'on peut chiffrer à peu près combien ça veut dire de clients perdus, juste pour nous montrer jusqu'à quel point ça affecte l'entreprise? Je ne veux pas vous faire dire des choses, là, que vous ne voulez pas dire parce que c'est confidentiel, puis compétition, puis tout ça, là.
M. Savard (Denis): Mais je vais être plus honnête que ça: je n'ai pas quantifié en termes de nombre de porteurs de parts. Les actifs ne sont pas identifiés comme à chaque... C'est le registraire qui tient ça. C'est-à-dire, le nombre de porteurs de parts sur base quotidienne, les entrants et les sortants, ça ne passe pas par notre société. On n'a pas de...
M. Bertrand: Quand on part de 24 millions puis on s'en va à 9 millions, pas de frais d'entrée, pas de frais de sortie ? je veux juste comprendre, là ? est-ce que ça veut dire que vos clients à vous, comparé à ceux qui ont perdu de l'argent dans d'autres circonstances, est-ce que ça veut dire que vos clients à vous n'ont pas perdu d'argent?
M. Savard (Denis): C'est bien évident...
M. Bertrand: Autrement dit, ils ont retiré l'argent de la valeur de leur compte au moment où ils l'ont retiré?
M. Savard (Denis): Exactement.
M. Bertrand: Si c'était un plus, c'est un plus, mais...
M. Savard (Denis): Nos porteurs de parts, c'est justement pourquoi nous avons autant perdu d'actifs, parce que chez nous ils faisaient de l'argent. C'est bizarre, mais c'est ça. Ils étaient à profit, dans notre fonds, et ils n'avaient pas de frais de sortie. Quand la confiance à l'égard de l'ensemble des familles québécoises s'est dissipée, la place où je fais de l'argent puis je peux sortir de là sans frais, nous étions tout désignés.
M. Bertrand: On sort au plus vite.
M. Savard (Denis): Oui.
M. Bertrand: On sort au plus vite.
M. Savard (Denis): Et, s'ils étaient restés, ils feraient encore plus d'argent.
M. Bertrand: D'où la conséquence directe que vous mentionnez.
M. Savard (Denis): Pardon?
M. Bertrand: D'où la conséquence directe des circonstances.
M. Savard (Denis): Tout à fait.
M. Bertrand: Une question très naïve, je vous avertis d'avance. Quand vous dites que, sur cinq administrateurs, il y en a quatre indépendants, évidemment le cinquième, c'est le patron. Est-ce que les quatre indépendants exercent vraiment leur rôle d'indépendant et ne subissent pas l'influence du majoritaire, là?
M. Savard (Denis): Je pense que je vais laisser M. Diamant répondre à cette question. Parce qu'en passant tantôt je vous disais que l'expérience était là depuis deux ans, donc avant l'affaire Norbourg, mais M. Diamant était sur notre conseil d'administration depuis le premier jour de l'existence de Fonds Diamant, et il représentait le public. Et je pense qu'il veut vous parler des autres administrateurs qui se sont joints à lui maintenant aussi.
Une voix: Vous ne dites pas ça pour le vieillir.
M. Savard (Denis): Non. Ça fait cinq ans.
n(17 h 20)nM. Diamant (Robert): Écoutez, je pense que l'expérience qui est représentée par les quatre administrateurs externes, là, experts, entre guillemets, est là pour... Parce que ces gens-là croient finalement qu'ils peuvent exercer une responsabilité de façon adéquate. Et, surtout avec le scandale de Norbourg, il est clair que, si on n'avait pas eu l'assurance qu'on pouvait composer avec le gérant promoteur pour vraiment exercer, on serait tous partis. Alors, les quatre en question seraient partis, parce qu'on ne fait pas ça pour gagner notre vie. On ne fait pas ça bénévolement non plus, mais on ne fait pas ça pour gagner notre vie. Donc, c'est clair qu'on a quand même, avec le temps, développé une relation, avec le gérant promoteur, qui est une relation de confiance. Mais elle a ses limites, dans la mesure où les questions posées par les administrateurs doivent trouver réponse.
Et peut-être, si on avait un souhait à formuler, c'est que les expériences en matière de gouvernance d'entreprises de cette nature ne sont pas multiples. Il y a beaucoup de monde qui font des discours sur la gouvernance maintenant. C'est un mouvement qui est très bien fondé, qui se développe beaucoup dans tous les types d'entreprise, mais l'expérience de la gouvernance dans un milieu donné, par rapport à un autre, c'est à construire. Et je dois vous avouer que, quand on réfère dans le mémoire à la collaboration ou à l'aide de l'AMF pour développer des outils en matière de gouvernance, je pense qu'on voit ça d'un oeil extrêmement positif et qu'on se retrouverait bien si on avait ce type de support là.
M. Bertrand: J'imagine que vous comprenez pourquoi je vous pose la question. Parce qu'il y a des sceptiques, quand on parle de conseils d'administration qui comprennent un majoritaire et des indépendants, il y a bien des sceptiques qui disent: Il y a bien beau y avoir des indépendants, le majoritaire, comme c'est l'habitude, il mène, il influence, etc. Vous, ce que vous confirmez, puis je suis heureux de vous l'entendre, c'est que, dans le Fonds Diamant, ce que vous confirmez, c'est que vous, les administrateurs, remplissez votre rôle au meilleur de votre connaissance sans que le majoritaire vous influence nécessairement. Ça ne veut pas dire, là, que...
M. Diamant (Robert): Oui. Vous savez, M. le député, que la gouvernance, ça a des exigences. On ne s'improvise pas comme un administrateur de conseil d'administration dans une perspective de gouvernance. On ne s'improvise pas. C'est carrément... Et le choix des personnes par le gérant promoteur va certainement influencer le résultat au bout de la ligne. Il y a des exigences, et on sait actuellement, on en parle beaucoup dans tous les milieux de gestion, dans l'entreprise, il y a beaucoup de réflexions qui se font, il y a beaucoup de démarches qui se font pour définir la manière d'exercer pour un administrateur qui se retrouve dans une perspective de gouvernance. Et le premier critère, c'est vraiment le choix des administrateurs. Les administrateurs qui ont fait la démonstration au fil des ans non seulement de leur intégrité, mais aussi de leurs connaissances et de leur expertise dans un milieu constituent pour le gestionnaire, l'administrateur, une garantie. Et c'est vrai dans tous les types d'entreprise. Actuellement, les grandes entreprises se dirigent, et c'est la voie d'avenir, dans cette perspective-là et modifient leurs chartes administratives pour permettre cette approche-là.
M. Bertrand: J'ai bien compris qu'aucun des quatre ne travaille dans l'entreprise. C'est totalement indépendant.
M. Diamant (Robert): Aucun des quatre ne travaille dans l'entreprise.
M. Bertrand: Je vais changer de sujet, MM. Savard et Diamant. À la page 7, l'article 5: Le scandale de Norbourg a mis en lumière l'extrême vulnérabilité des investisseurs en cas de fraude. L'annonce récente d'utiliser des fonds d'indemnisation soulève bien des questions. Et là vous n'y allez pas de main morte, là. J'aimerais ça que vous nous expliquiez. Moi, si j'ai bien compris, votre prétention est que l'argent qui est dans le fonds d'indemnisation de l'AMF est pour des erreurs commises par des représentants et non par des gestionnaires. Ce que vous dites, vous autres, la décision que l'AMF a prise, c'est pour compenser pour des erreurs de gestionnaire, au lieu de la raison d'être du fonds. Est-ce que je comprends bien ça?
M. Savard (Denis): Vous comprenez très bien. C'est exactement ça.
M. Bertrand: Je ne veux pas comprendre juste ce que je veux bien comprendre.
M. Savard (Denis): Non, non, c'est exactement ça qui s'est passé. Le fonds d'indemnisation a été construit à partir des cotisations annuelles versées par l'ensemble des représentants d'assurance, et, depuis le début de la mise en place de l'AMF, il s'est ajouté les représentants en épargne collective, qui contribuent, à chaque année... C'est 128 $ par personne, à chaque année, qui est versé pour d'éventuelles fraudes d'un de leurs pairs.
M. Bertrand: Assurance de personnes, dommages et fonds.
M. Savard (Denis): En assurance... Non, pas...
M. Bertrand: Pas dommages?
M. Savard (Denis): Dommages, c'est autre chose.
Une voix: ...
M. Savard (Denis): C'est le même fonds en dommages?
Une voix: Oui.
M. Savard (Denis): Le même fonds en dommages. Donc, c'est l'ensemble des représentants distributeurs qui collaborent à cet... Donc, quand je dis «représentants d'assurance», là, c'est vie et dommages et en épargne collective. Donc, ce sont ces personnes-là qui ont constitué le fonds. Je ne dis pas que c'est illégal, le geste de l'AMF, dans ce cas-là, parce qu'il a la prérogative de le faire s'il a des... nous permet de croire que des représentants en épargne collective ont pu participer de quelque façon. Cependant...
M. Bertrand: Est-ce que ça n'a pas été ça, la prétention pour payer?
M. Diamant (Robert): De ce qu'on sait par les journaux, c'est un certain nombre de représentants qui auraient bénéficié d'avantages de la part du promoteur pour amener leurs clients chez le promoteur. C'est possiblement...
M. Bertrand: D'où l'interprétation, j'imagine.
M. Diamant (Robert): D'où une interprétation d'une participation à une fraude.
M. Savard (Denis): Mais je me permets d'ajouter là-dessus que, toujours par ce qu'on apprend par les journaux, les personnes qui étaient des représentants qui ont été invités à transférer leurs clients de différentes familles de fonds dans la famille de fonds Norbourg, le promoteur les invitait en même temps à déposer les sommes qu'ils leur versaient dans les fonds Norbourg. De sorte que, s'il avait été complice de la fraude, je pense qu'il aurait eu au moins l'intelligence de déposer leur argent ailleurs que dans le fonds lui-même, s'il avait été au courant que cet argent-là était détourné.
M. Bertrand: Vous êtes le troisième ou le quatrième qui, depuis hier, suggère la création d'un fonds totalement indépendant, administré indépendamment des représentants. Parce qu'on sait la différence maintenant. Représentant, c'est pour des fautes commises par des représentants, et personne n'avait vu venir ça, là, des fautes commises par les supérieurs, appelons ça comme ça pour le moment. Mais vous êtes le quatrième ou le troisième, là, qui nous suggère fortement la création d'un fonds totalement indépendant pour les promoteurs ou les...
M. Savard (Denis): Les gestionnaires.
M. Bertrand: ...gestionnaires, et payé par les gestionnaires et non par les représentants, c'est ça?
M. Savard (Denis): Tout à fait. C'est logique, là, que... Le fonds a été mis sur pied pour prévenir des fraudes. Parce qu'ils sont tous assurés erreurs et omissions, mais, la fraude, tu ne peux pas t'assurer pour ta propre turpitude. Ça fait que...
M. Bertrand: Si les mêmes fabricants de produits, incluant assurance de personnes, de dommages et de produits financiers, créaient ce fonds-là, est-ce qu'on ne débalance pas l'autre? Parce que l'autre, si ma mémoire est bonne, il n'est pas payé uniquement par les représentants, non?
M. Savard (Denis): Oui.
M. Bertrand: Il est payé uniquement par les représentants?
M. Savard (Denis): Oui. Seuls les représentants en assurance de personnes, de dommages et d'épargne collective contribuent à ce fonds-là.
M. Bertrand: Merci.
Le Président (M. Hamad): O.K. Allez-y rapidement, rapidement.
M. Bernier: Juste en complément sur l'élément que vous avez mentionné au niveau de l'utilisation du fonds par l'AMF. J'ai ici le document sur lequel l'AMF s'est basée pour prendre sa décision. Je vais vous en faire lecture de façon à ce que... étant donné l'élément que... Je comprends ce que vous mentionnez, là, par rapport à votre vision versus l'information que vous aviez. L'information que je veux vous donner, c'est une information qui a été émise par l'AMF: Il a été déterminé «toutefois que, dans certains cas, le stratagème du gestionnaire de fonds s'étendait jusqu'à la distribution puisqu'il comportait des manoeuvres dolosives commises au sein des cabinets d'épargne collective Norbourg Capital inc. et Groupe Futur inc. par le biais d'une vingtaine de représentants, et ce, pour la vente de fonds Norbourg seulement.
«En effet, l'analyse a démontré que Vincent Lacroix [des] cabinets Norbourg Capital inc. et [du] Groupe Futur inc. ont mis en place des incitatifs financiers afin de recruter des représentants et favoriser la vente des fonds Norbourg par ceux-ci. Une vingtaine d'entre eux ont ainsi vendu de façon importante ces fonds moyennant certains incitatifs financiers injustifiés. Il appert que la mise en place de ces incitatifs faisait partie du vaste stratagème de Vincent Lacroix afin d'alimenter les fonds Norbourg et ainsi s'approprier les sommes.» C'est la base du travail fait par l'AMF et de sa décision. C'est pour ça que je désirais vous en faire lecture, pour que vous puissiez avoir l'information.
n(17 h 30)nM. Savard (Denis): Non, mais j'étais au courant de cette information-là.
M. Moreau: Dans votre mémoire, là... Parce que, sur la question posée par mon collègue le député de Charlevoix...
Une voix: Et néanmoins ami.
M. Moreau: ... ? et néanmoins ami, et néanmoins ami ? vous dites, à la page 7, donc sur la décision de l'AMF d'utiliser le fonds chargé d'indemniser les victimes, vous dites: «Sans jeux de mots, nous pensons qu'il s'agit d'un détournement de fonds.» Lorsque vous utilisez l'expression «détournement de fonds», vous l'utilisez au sens littéraire du terme et non pas au sens légal du terme?
M. Savard (Denis): Tout à fait.
M. Moreau: O.K., ça va. Merci. Bien, c'est pour vous et pour l'AMF, là.
Le Président (M. Hamad): O.K., rapidement, et c'est la dernière, là.
M. Paquet: Juste une petite précision peut-être, parce qu'on a fait référence à la décision, la semaine dernière, de l'AMF, la partie sur le fonds d'indemnisation. Lorsqu'un fonds d'indemnisation a été mis en place pour les représentants, c'était à la même époque que le Bureau des services financiers, le BSF, avait été mis en place. Mais, en 2002, il y a une modification technique qui s'est ajoutée où, là, on incluait l'élément de cabinet. Et, si je comprends bien, c'est que, lorsqu'il y a une chaîne d'événements qui impliquent un cabinet et donc... ? et là on peut dire le manufacturier d'un fonds, comme dans le cas qui nous implique ? avec un représentant, c'est là, je crois, qu'est le lien logique qui peut servir de justification à la décision de l'AMF. C'était technique, là, mais je pense que c'est une petite précision peut-être, là, pour les fins de l'enregistrement.
M. Savard (Denis): C'est technique et ténu comme fil. Je ne conteste pas la décision, cependant vous n'arriverez pas à indemniser l'ensemble des épargnants floués avec un fonds de cette nature-là.
M. Paquet: Non, certainement. Vous avez raison. Tout à fait.
M. Savard (Denis): Et il était d'une dimension pour répondre aux besoins pour lesquels il avait été créé. Et là, il va se retrouver avec 26 millions de déficit.
Le Président (M. Hamad): Merci. Alors, M. Savard et M. Diamant, merci pour...
M. Savard (Denis): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Hamad): J'ajourne les travaux au mardi 6 février, à 9 h 30.
(Fin de la séance à 17 h 32)